WHITNEY LIBRARY, HARVARD UNIVERSITY. THE GIFT OF D. D. ONNERIMINNIENS Stur ais Hoope r Professor IN THE MUSEUM OF COMPARATIVE ZOOLOGY = NA > » ) Y ) | A SE, ne à #4 \ \ N LU MÉMOIRES SOCIÉTÉ GÉOLOGIQUE DE FRANCE. Overtjhement La Société déclare qu'elle laisse aux Auteurs la responsabilité des faits et des opinions contenus dans leurs Mémoires. PARIS. — IMPRIMERIE DE L. MARTINET, Imprimeur de lu Société géologique de France, RUE MIGNON, 2. MÉMOIRES SOCIÈTÉE GEOLOGIQUE ‘4 DE FRANCE DEUXIÈME SERIE VY , A1 22 GA / = ONE LAINE, TT 7 TENUETE arte. PARIS GIDE ET J, BAUDRY, ÉDITEURS ‘ RUE BONAPARTE, D 1856 + DA 4 ph | ET A 4 » 4 : | , ON 4 4 Le (] : ‘ ‘ nr SA : M. é ÉTUDES SUR LA STRUCTURE OROGRAPHIQUE ET LA CONSTITUTION GÉOLOGIQUE DE LA NORWÈGE, DE LA SUÈDE ET DE LA FINLANDE, PAR J. DUROCHER, Ingénieur des mines, Professeur de minéralogie et de géologie à la Faculté des sciences de Rennes, INTRODUCTION. Dans plusieurs mémoires déjà publiés (1), j'ai exposé une partie des observa- tions que j'ai recueillies pendant le cours de deux voyages dans le nord de l'Europe, sur diverses questions de géologie et de physique terrestre. Le travail actuel est consacré à l'étude générale de la structure orographique ét de la con- stitution géologique de la Norwége, de la Suède et de la Finlande. J'exposerai d’abord la configuration des inégalités du sol de la Scandinavie : la Finlande, ainsi que les parties orientale et méridionale de la Suède, ont un relief à peu près uniforme, mais la structure des diverses parties de la Norwége nous offrira des caractères assez variés. Je décrirai ensuite les terrains primitifs ou schistes cris- tallins, les terrains de transition dépourvus de fossiles, ou schistes semi-cris- tallins, puis les roches massives qui y sont interposées et les dislocations que ces (1) 1° Plusieurs mémoires sur les phénomènes erratiques du nord de l’Europe (voy. les Voyages de la commission scientifique du Nord et le Bulletin de la Société géologique, 2° série, t. III et IV); 2° un Mémoire sur la limite des neiges perpétuelles (Annales de physique et de chimie , 3° série, t. XIX); 3° un Mémoire sur les glaciers dunord et du centre de l'Europe ( Annales des mines, h° série, t. XII); 4° un Mémoire sur les gîtes métallifères de la Suède , Norwége et Fin- lande (Annales des mines, L° série, t. XV). _ Soc. GÉOL. — 2° SÉRIE. T. VI. — Mém. n° 1. 1 9 CONSTITUTION GÉOLOGIQUE . (Y2 1, p. 2) terrains ont subies. Ensuite je ferai connaître les divers bassins paléozoïques de la Scandinavie, ou les dépôts distincts que constituent les formations siluriennes et dévoniennes, dont on trouve des lambeaux épars à la surface des terrains pri- mitifs. J'indiquerai alors les roches massives contenues dans chaque groupe, et les soulèvements dont ils ont conservé la trace; il est des régions où les couches sont restées horizontales et d'autres où elles ont été redressées. Je terminerai ce travail en jetant un coup d'œil sur de petits lambeaux Rues et crétacés que l’on rencontre dans le midi de la Suède. Dans ces études, j'ai dù combiner mes observations avec celles publiées par divers géologues, dont je vais mentionner les travaux: un de ceux qui ont le plus contribué à la connaissance de la Suède, est M. Hisinger, en publiant sa Géogra- phie minéralogique de la Suède (1); il y a indiqué les minéraux et les roches observés dans les diverses provinces de ce pays. Un travail analegue, mais beau- coup plus imparfait, avait déjà été exécuté par Hermelin; M. Hisinger y a joint une carte géologique du midi et du centre de la Suède. Dans un autre ouvrage, intitulé Lethea suecica, le même auteur à fait connaître Îles principaux fossiles des terrains paléozoïques; je citerai ensuite la Gea norvegica ou Description séologique de la Norwége, publiée par M. Keilhau, de 1838 à 1853, de concert avec quelques autres savants. Cet ouvrage, illustré par des cartes géologiques et par plusieurs planches, présente les résultats des explorations faites dans cette contrée par le savant géolague de Christianta. IT y a encore le grand et bel ou- vrage de MM. Murchison, de Verneuil et de Keyserling (The Russia and Oural mountains ), publié en 1846, et renfermant un chapitre sur les terrains paléo- zoïques de la Scandinavie; ce pays est d’ailleurs compris dans leur carte géolo- gique de la Russie. Ces savants ont eu le mérite de fixer l'âge des dépôts paléo- zoïques du nord de l'Europe. Trois éminents géologues de l'Allemagne ont fait séparément des voyages d’ex- ploration en Scandinavie : M. de Buch, de 1806 à 1808; M. Hausman, en 4806 et 1807; M. Nauman, en 1821 et 4822. Les récits qu'ils en ont publiés Ê ) offrent beaucoup d'observations intéressantes ; c'est celui de M. Nauman qui renferme le plus de détails sur la géologie de la partie méridionale et centrale de la Norwége. Dans le voyage de Vargas Bedemar en Norwége et en Laponie (3), on trouve aussi quelques faits concernant la géologie et les mines de ces contrées. A la suite de excursion qu'il fiten Suède en 4824, Ad. Brongniart a publié dans les Annales des sciences naturelles (t. XIV) des remarques importantes sur les dépôts erra- (1) Hisinger's Versuch einer mineralogischen Geographie von Schuweden, publié à Leipzig en 1826. (2) De Buch, Voyage en Norwége et en Laponie. — Mausman, Aeise durch Scandinavien. — Nauman, Beitræge zur Kenniniss Norwegens. (3) Vargas Bedemar, Aeise nach den hohen Norden, 1819. (@:1p.5) DE LA NORWÉGE, DE LA SUÈDE ET DE LA FINLANDE. 3 tiques et les traces d'anciens niveaux de la mer. Des observations sur le même sujet ont aussi été publiées par divers savants, tels que MM. Sefstrôm, Lyell, etc. M. Nilson, professeur à Lund, a décrit en 1827 (1) les fossiles contenus dans les dépôts crétacés de la Scanie. Plusieurs savants ont aussi écrit des Mémoires sur les mines de la Nor- wége ou de la Suède; je citerai d'abord Esmarck, j'habile minéralogiste de Christiania, qui a découvert les gîtes de fer chromé de la province de Drontheim (voir là brochure intitulée : Reise von Christiania nach Drontheim, 1829); je men- tionnerai ensuite une notice de M. Suckow (Die bedeutendsten Erz und Gestein- lager in Schweden, 1831), des notes de M. Russeger ( Karsten’s Archiv, t. XV), des observations de M. Bübert sur les mines de cobalt de la Norwége (voy. Gea norvegica), lintéressant Mémoire publié par M. Daubrée, en 1843, dans les Annales des mines (t. IV), et enfin les recherches minéralogiques de M. Scheerer, qui a découvert plusieurs nouvelles espèces de minéraux (+0y. les Annales de -Poggendorf, de 1840 à 1850). D'ailleurs, des publications en langues suédoise et norwégienne, principalement les Mémoires de l’Académie de Stockholm, renferment divers articles sur la Scandinavie, mais plutôt minéralogiques que géologiques. En terminant cette note historique, je dois remercier, pour leur bienveillant accueil et pour les renseignements qu'ils ont bien voulu me communiquer, les divers savants et ingénieurs dont j'ai fait la connaissance dans le nord de l'Europe, et parmi lesquels je citerai spécialement MM. Berzelius, Mosander, Sefstrôom, Erdman à Stockholm; Ackerman, Bagge, Walman et Bergsten à Falun ; Sewen et OEngrenn à Sala; Keilhau, Scheerer et Langberg à Christiania; Bôbert à Kongsberg ; Lammers à Skutterud ; Thomas à Kaafiord ; Nordenskiôld et Albrecht à Helsing- fors, en Finlande. Pour faciliter l'intelligence de mon Mémoire, j'y ai joint une carte géologique de la Scandinavie, que j'ai tracée au moyen des meilleures cartes géographiques actuellement existantes (celles de Forsell pour la Suède et de Munch pour la Norwége), et à l'aide des indications fournies par les cartes de MM. Hisinger, Keiïlhau, Murchison, de Verneuil et de Keyserling, conjointement avec mes propres observations. J'ai dù modifier en diverses parties les contours attribués par ces habiles géologues aux différentes formations; quelquefois même jy ai apporté de grands changements. En outre, j'ai ajouté des indications particulières concernant les mines, les usines et les principaux systèmes de soulèvement qui ont marqué leur empreinte sur Le sol du nord de l’Europe. (1) Nilson, Pefrificata suecana formationis cretacec. l CONSTITUTION GÉOLOGIQUE (N. 1, p. 4.) OROGRAPHIE DE LA SCANDINAVIE ET DE LA FINLANDE, La Scandinavie consiste en une grande presqu'île qui, dans sa partie septen- trionale, est allongée du N.-N.-E. au S.-S.-0., depuis le 71° jusqu’au 63° degré de latitude; puis elle se dirige vers le sud, dans le sens du méridien, et se par-- tage en deux branches, séparées par le golfe de Christiania ou Skagerrack, dans lequel s'avance la pointe du Jutland. La Finlande n’est point regardée en général comme dépendant de la Scandinavie, quoiqu'il n’y ait pas, au point de vue phy- sique, de séparation marquée par des différences importantes dans les caractères orographiques, géologiques et ontologiques. La dépression du golfe de Botnie, qui existe entre la Suède et la Finlande, ne détermine aucun changement dans la configuration, ni dans la nature du sol. Cette baie profonde, dont l'archipel d'Aland,composé de plusieurs centaines de petites îles, obstrue l'entrée, est com- parable à un vaste lac. Sur ses deux rives s'étend un sol ondulé, accidenté par une multitude de collines et de monticules à surface moutonnée, qui presque toujours sont formés de granite et de gneiss, associés dans des proportions diverses. Orographie de la Finlande. -— Toutefois il y a cette différence, que la Pénin- sule scandinave est parcourue, dans toute sa longueur, par une série de hautes protubérances, qui bordent la côte occidentale, tandis que le sol de la Finlande n'est point hérissé de semblables montagnes. Il consiste en un plateau dont la surface générale est à peu près horizontale, bien que présentant de fréquentes ondulations ou des collines mamelonnées, qui ne s'élèvent pas ordinairement à plus de 200 ou 300 mètres au-dessus du niveau de la mer. La plupart de ces col- lines, malgré leur juxtaposition, semblent indépendantes les unes des autres et n'offrent point d’alignement en forme de chaîne; elles ont l'apparence de dômes aplatis ou de dos d'âne, à contours arrondis et à pentes douces; c’est seulement en un petit nombre de localités, sur les rives de quelques lacs, notamment sur le bord N.-E. du Ladoga, que l'on remarque des rochers abruptes. Le plateau finlandais s'élève, d'une manière presque insensible, du bord de la mer vers la partie centrale, dont le niveau moyen ne surpasse pas d’une centaine de mètres la zone littorale. Néanmoins, c'est dans cette région médiane que prennent naissance les rivières qui se rendent, en divergeant, à la mer Blanche, aux lacs Onéga et Ladoga , au golfe de Finlande et au golfe de Botnie. Entre les collines ou ondulations du sol on voit un très grand nombre de lacs, dont le contour est un peu sinueux, à cause de la disposition variée des accidents orographiques; mais ils sont généralement allongés suivant une direction qui varie du nord au nord-ouest. Beaucoup de lacs de l’intérieur du pays sont liés les uns aux autres et constituent un réseau très étendu, dont la Vuotça forme l'unique débouché. Cet immense bassin offre une magnifique voie de uaviga- tion , qui esl parcourue par beaucoup de petits navires et par des bateaux à 1,5) DE LA NORWÉGE, DE LA SUÉDE ET DE LA FINLANDE. 5 vapeur. Il s'étend de la partie sud-est de la Finlande jusqu’au 63° degré 1/2 de latitude, à plusieurs myriamètres au nord de Kuopio; et il serait facile de le meltre en communication avec les lacs de la partie septentrionale, ainsi qu'avec le golfe de Botnie. Quoique l’intérieur de la Finlande soit très peu élevé au-dessus de la mer, les fleuves ont le cours accidenté et ne sont pas navigables naturellement, si ce n’est d'une manière discontinue; car ils offrent de fréquentes cataractes, produites par des roches basses de granite et de gneiss, qui encombrent leur lit. Lorsque ces obstacles sont un peu considérables, la barrière qu’ils opposent au mouvement des eaux a déterminé leur accumulation sous forme de lac. A l'issue de ces réservoirs, on rencontre souvent une scierie, un moulin, ou bien une petite forge, qui tirent part de la chute d’eau; toutefois l’industrie, encore peu développée dans ce pays, n'utilise qu’une fraction bien minime des forces motrices que la nature y a fait naître à profusion. . Je dois encore mentionner un caractère topographique important : la plupart des collines ont leur base ensevelie sous un immense dépôt de sable, de gravier, de cailloux roulés et de blocs plus ou moins volumineux, qui ont été amenés parfois d’une grande distance. C’est à un même ensemble de phénomènes qu’il faut attribuer le transport de ces énormes masses de matériaux, l'érosion et le polissage des protubérances granitiques, dont les aspérités et les contours anguleux ont été remplacés par des formes arrondies. Dans les régions où le sol ne présen- tait que de faibles inégalités, le comblement des dépressions par des dépôts de sable et de gravier a produit un nivellement de la surface et a donné lieu à des plaines unies, d'une grande étendue. À cause du manque de fertilité, on y trouve peu d'habitations, et ces espaces déserts sont couverts de sombres forêts de pins et de sapins, dont beaucoup tombent de vétusté, lorsqu'ils ne sont pas dévorés par les flammes. Mais le penchant des coteaux qui s’abaissent doucement vers le bord des lacs, ainsi que le fond des vallées, sont couverts d’une agréable verdure et entremêlés de champs de céréales; leur aspect est animé par de nombreux villages. - Orographie de la Suède orientale. — La partie orientale de la Suède présente dans sa configuration une grande ressemblance avec la Finlande; la description que-je viens de faire lui est également applicable : on y trouve en effet les mêmes collines de granite et de gneiss, à surface moutonnée, arrondie et striée; il y a aussi de vastes plaines de sable, un grand nombre de lacs et de rivières dont le cours est fréquemment accidenté par des cataractes. Les différences qui ont lieu dans la physionomie de la Suède tiennent, en grande partie, à l'existence d'une population plus nombreuse, à une plus grande activité commerciale et industrielle, en un mot au développement d'une civilisation plus avancée. Toutefois les prin- cipaux traits orographiques semblent offrir un caractère d’homogénéité un peu plus grand qu’en Finlande; ainsi, la ligne de montagnes qui s'étend le long de 6 CONSTITUTION GÉOLOGIQUE CN: 1, p. 6.) la frontière occidentale, donne naissance à la plupart des rivières, qui coulent vers le golfe de Botnie, en suivant une direction généralement uniforme, du N.-0. au S.-E. ; les lacs qui interrompent leur cours sont aussi généralement allongés dans le même sens. L Les terrains de transition, qui manquent en Finlande (1), et que l’on voit affleurer sur les bords des grands lacs de la Suède, leur donnent une physionomie particulière : dans la Vestrogothie, sur les bords du Wénern, le plus grand lac de la Scandinavie, ce sont des collines séparées, mais n'ayant point de formes moutonnées, comme celles composées de roches primitives; elles présentent sur leurs flancs une série de gradins et se terminent en dessus par un petit plateau. Sur les rives du lac Siljan, du lac d'Ostersund, et dans le midi de la Norwége, les roches siluriennes présentent une configuration un peu différente : ce sont des coteaux verdoyants, formant des massifs plus élevés que les monticules de gneiss situés à l'est; ils ont comme eux des formes arrondies, mais ils offrent,en général, un allongement plus prononcé et se distinguent par une fertilité beau- coup plus grande. La succession de roches schisteuses. quartzeuses et calcaires, que l’on y voit affieurer, donne lieu à des caractères d’accidentation plus variés et à un aspect plus pittoresque. Les cultures, qui y sont plus étendues, et les habi- tations plus multipliées, ont fait assimiler ces Lerrains à des oasis, où se repose avec plaisir le voyageur qui traverse les immenses et monotones forêts de la partie septentrionale et orientale de la Suède (2). Lex terrains de transition du midi de la Norwége, des bords du lac Miôsen et des environs de Christiania, offrent à peu près le même aspect que ceux de la Dalécarlie et du Jemtland, si ce n'est que l’on voit, au milieu du terrain paléozoïque de Christiania, des protubé- rances granitiques s’éiever jusqu'à 850 mètres au-dessus de la mer (3): ils’"y trouve aussi des plateaux de porphyre feldspathique ou eurite, qui se terminent par des escarpements élevés, ainsi sur les rives du Tyrifiord et au bord de la mer, près d’Holmestrand. Néanmoins les formations paléozoïques occupent en Scandinavie une petite étendue, comparativement à la superficie totale de la contrée. Orographie de la Norwége et du N.-0. de la Suède. — Le terrain de granite et de gneiss, qui affleure dans la région littorale du midi de la Norwége, offre la (1) Outre le granite et le gneiss, qui sont les roches dominantes en Finlande, on y trouve des schistes micacés, des roches cristallines de nature amphibolique ou calcaire, et quelquefois des quartzites. Les porphyres autres que les diorites y sont rares, et l’on n’y observe point de terrains fossilifères. (2) Le sol des régions paléozoïques consiste en un mélange de détritus sableux, argilo-schis - teux et calcaires, mélange qui, par ses propriétés physiques et chimiques, est très favorable à la culture , tandis que le sable qui couvre la plupart des régions primitives, ne se décomposant qu'avec une excessive lenteur, ne cède aux plantes presque aucun principe nutritif, et forme un sol aride, dont la majeure partie est couverte de forêts de conifères (Pinus sylvestris et Pinus abies de Linné ). (3) Telie est la hauteur du Skrimsfield, situé un peu au S. de Kongsberg. LT) DE LA NORWÉGE, DE LA SUÈDE ET DE LA FINLANDE. 7 même configuration que celui qui constitue le Suède orientale et la Finlande ; mais au nord du 59° degré de latitude, la Norwége et la région limitrophe de la Suède présentent une longue série de montagnes, dont le bord occidental est découpé en divers sens par de longues et profondes crevasses. Ainsi se trouvent séparées du continent une foule de masses rocheuses, qui forment desiles à pentes abruptes et d’une élévation plus ou moins considérable (1). Très souvent aussi le déchirement du sol, suivant des directions croisées, a été incomplet ou inégale- ment profond, de sorte qu’il en est résulté de nombreuses presqu'iles, d’étendues très diverses et d’une forme plus ou moins allongée. L'espace par où elles se rat- tachent à la terre ferme est souvent très déprimé et forme un isthme bas, qui sert de voie de communication, et que l’on nomme eide en Norwége. Caractères propres aux montagnes de la Scandinavie. — La plupart des cartes géographiques ne peuvent donner une idée exacte de la configuration des mon- tagnes de la Scandinavie; elle ne forment point de véritable chaîne, assimilable à ces séries rectilignes et continues de rochers liés entre eux, dont nous offrent des types la chaîne des Pyrénées et celle des Alpes. Dans le nord de l'Europe on a un ensemble de plateaux, à surfaces ondulées, un peu inégales et situées à diverses altitudes ; au-dessus s'élèvent, çà et là, des cimes séparées ou formant des groupes irréguliers (2). Les plus hautes plates-formes longent la côte occiden- tale de la Norwége, et leurs flancs escarpés plongent dans la mer du Nord, tandis que du côté oriental, leur élévation diminue d'une manière progressive ; là elles offrent une succession de gradins, dont l'abaissement vers les rivages de la Bal- tique a lieu par des pentes très douces, comme le montrent les profils figure 1 et 2, pl. EE. Cette bande montagneuse se distingue en général par l'absence de crêtes recti- lignes, d’axe ou de ligne de faîte; les vallées, considérées sous un point de vue (4) Le long des rivages de la Suède, dans le golfe de Botnie, on voit aussi beaucoup d'îles : mais elles diffèrent par leurs pentes douces et leur faible élévation, de celles qui bordent la côte occidentale del Norwége. (2) Dans une notice jointe à la troisième livraison de la Gea norvegica, p. 503, M. Münch, pro- fesseur de géographie et d’histoire à l’Université de Christiania, a présenté, sur l’orographie de la Norwége, des vues analogues à celles que j'avais déjà exposées plusieurs années auparavant [voir mon Mémoire sur les glaciers du nord et du centre de l Europe (Annales des mines, h° série, t. XXIT, p. 23 (1847)); voir aussi les Comptes rendus de l’Académie, t. XXX, p. 738, et le Bulletin de la Société géologique, 2° série, t. VII, p. 283]. M. Münch considère la Norwége comme un seul plateau ; mais on voit, par les coupes jointes à mon mémoire (pl. IT, fig. 4 et 2), qu’elle consiste, non dans un plateau unique, mais dans un ensemble de plates-formes. Contrairement à l'opinion du géographe norwégien, la disposition en plates-formes n’est pas exclusivement propre aux montagnes de la Scandinavie ; on l’observe, à des degrés plus ou moins marqués, dans d’autres régions montagneuses de l’Europe, ainsi dans le massif central de la France, dans les Vosges, en Bretagne et dans d’autres régions montagneuses, dont le soulèvement remonte, en général, à des époques géologiques un peu anciennes. $ CONSTITUTION GÉOLOGIQUE (N.1,p.8) purement orographique, ne peuvent être appelées longitudinales, ni transver- sales, car elles sont dirigées en divers sens; mais, sous le rapport géologique, beaucoup peuvent être considérées comme longitudinales, en ce sens qu'elles sont disposées à peu près parallèlement à la stratification ou à la schistosité des roches. Parmi les plates-formes de l'intérieur du pays, qui ont une altitude infé- rieure à 1000 mètres, on n'observe point habituellement de vallées de déchire- ment, à parois escarpées; elles ne sont interrompues que par de simples dépres- sions, à pentes faibles et de formes arrondies; mais les plateaux élevés de 1000 à 1500 mètres et plus, qui longent le littoral, depuis Christiansand jusqu'au cap Nord, sont découpés par des tranchées abruptes et profondes; là se trouvent ces fiords, ou golfes particuliers à la Norwége, si étonnants par leur petitesse en largeur, comparativement aux proportions gigantesques de leur longueur et de leur profondeur. Ainsi, on peut citer l'étroite déchirure du Sognefiord, qui à une étendue de 46 myriamètres, dont les parois abruptes s'élèvent souvent à plus de 1000 mètres, et le long de laquelle la mer pénètre jusqu'au pied des plus hautes sommités du nord de notre continent. Néanmoins ces grandes crevasses ne divisent pas les plateaux élevés de la Norwége dans toute leur largeur, et il est rare qu'elles communiquent entre elles par des cols, comme les vallées des deux versants d’une chaîne proprement dite : aussi, lorsqu'on veut passer d’une vallée à l’autre, on est généralement obligé de marcher pendant plusieurs heures à la surface d'un plateau désert, dépourvu de végétation et souvent couvert de neige ou de glace. Au contraire, dans les Alpes et les Pyrénées, les crêtes des montagnes, loin de constituer des plates- formes, présentent des arêtes plus ou moins aiguës, dentelées et fortement dépri- mées, dans les points où se trouvent les cols, qui servent de communication entre les vallées opposées. Aucun des plateaux de la Norwége n'a une élévation supérieure à 2000 mètres, mais à leur surface se dressent des pics, dont la hauteur surpasse quelquefois de plus de 1000 mètres le niveau moyen des plates-formes environnantes : ce sont des pyramides ou des cônes, dont les flancs ont une inclinaison variable, quelquefois supérieure à 15 degrés; on leur donne fréquemment la dénomination de tind, cor - respondant à l'expression de horn (corne), employée dans la Suisse allemande, ou à celles de dent ou pic, employées dans les Alpes françaises. Ces pics sont habituellement séparés les uns des autres, de même que les cônes volcaniques dont sont hérissés les plateaux élevés des Cordillières. Division des montagnes de la Scandinavie en deux groupes. — Les plus hautes montagnes de la Scandinavie se trouvent dans la Norwége méridionale, entre le 63° et le 59° degré de latitude, dans l’espace triangulaire qui sépare les trois villes de Drontheim, Bergen et Skeen. Elles forment un vaste massif qui, considéré dans son ensemble, est un peu plus allongé du nord au sud que de l’est à l’ouest, sans offrir cependant de caractère d'orientation bien saillant. Mais, du (AU ES) DE LA NORWÉGE, DE LA SUEDE ET DE LA FINLANDE. 9 65° au 71° degré de latitude, s'étend une zone de protubérances, qui offre un allongement bien marqué du S.-S.-0. au N.-N.-E., et qui tend ainsi à se rap- procher des véritables chaînes de montagnes, quoiqu'elle ne puisse pas léur être assimilée. Cependant il y a lieu de distinguer dans les montagnes de la Scandi- navie deux groupes différents, l’un méridional, l’autre septentrional. Groupe méridional. — Décrivons d’abord le groupe méridional. On peut lui assigner pour limites approximatives : à l’ouest et au sud, la côte norwégienne qui est recourbée en are d’ellipse ; au nord, le 63° degré de latitude ; à l’est, le méridien de Christiania, qui se trouve à environ 8 degrés 1/2 de longitude à l'est du méridien de Paris. Cette zone, large de 26 à 27 myriamètres, offre de vastes plateaux élevés de 1400 à 2000 mètres, et des pics plus ou moins aigus, dont la hauteur varie de 1500 à 2600 mètres. C'est dans la partie centrale de ce groupe que se trouvent les cimes les plus aiguës et les plus gigantesques; mais il est remarquable qu'elles ne surgissent point de dessus les plateaux les plus élevés. En effet, le massif situé à l'ouest de la vallée du Justedal offre les plus hautes plates-formes de la Norwége (1800 à 2000 mètres); leur surface est couverte des plus vastes tapis de neige, et donne naissance aux glaciers les plus considérables de la Scandinavie: cependant, la cime principale des Lodalskaabe, qui saillit à leur surface, a seulement une altitude de 2050 mètres au-dessus de la mer. Au contraire, le sol qui forme la base des Galdhôépiggen (1), les plus hautes sommités de la Norwége (2605 mètres), est comparativement peu élevé: ainsi le lac Gjendin, qui en baigne le pied, se trouve seulement à 989 mètres au-dessus de la mer. Immédiatement à l'ouest de l'Iôtunfield, on voit le groupe de pics des Hurungerne ou Skagstôlstinden, qui s’y rattache et que l’on peut même considérer comme en faisant partie, l'égaler presque en hauteur, et présenter un ensemble d’aiguilles comparables à celles qui environnent le Mont-Blanc dans les Alpes; or il s’abaisse par une série de pentes rapides vers l'extrémité du fiord de Lyster, de façon que sa base semble plonger dans la mer, comme celle des montagnes du Spitzherg. Groupe de pics de l'Iotunfield. — Les pics les plus aigus de l’Iétunfield et des Skagstôülstinden sont en grande partie dépourvus de neige, mais il y en a une (1) Le massif de l’Iôtunfield, qui renferme les cimes les plus hautes de la Norwége, est situé sous le 61° degré 1/2 de latitude, sur les bords du lac Gjendin, entre le Bever-Elv (un des affluents du lac Ota) et les diverses branches des Sjôa et Vinstra-Elv, deux affluents du fleuve Eougen. L'Ymes- field , autrement dit Store-Galdhôüpiggen, paraît en être la sommité culminante ; les mesures trigo- nométriques des ingénieurs norwégiens lui assignent une élévation de 8300 pieds du Rhin ou 2605 mètres ; aux alentours sont plusieurs groupes de cimes (les Nautgardstinden et Glittertinden à l'est), dont l'élévation ne le cède que de 100 à 150 mètres à l'Ymesfeld ; et les plus hautes aiguilles du groupe des Hurungerne ou Skagstôlstinden , qui est immédiatement à l’est de l’Iôtunfield , ont aussi une élévation de près de 2500 mètres au-dessus de la mer. Du haut de l’une des cimes du Fillefield, qui est situé un peu au sud , on jouit d’une vue admirable sur tout l’ensemble de ces pics gigantesques. SOC. GÉOL. — 2° SÉRIE. T. VI. — Mém. n° 1. 2 10 CONSTITUTION GÉOLOGIQUE (N« 1, pe 40.) épaisseur considérable dans les dépressions qui séparent ces montagnes, et sur les parties de leurs flancs qui ne sont pas trop escarpées; la transformation qu'éprouvent ces neiges produit des glaciers, à la vérité beaucoup moins consi- dérables que ceux du Justedal. Les torrents qui en sortent coulent vers la grande vallée de l'Ota-Elv, ou vers le fiord de Lyster, une des branches du Sogneford; ou bien ils se rendent, soit au lac de Tyen (1102 mètres), dont le"trop-plein se déverse dans le fiord d'Aardal, soit aux lacs Bygdin (1092 mètres) et Gjendin (992 mètres), dont les eaux vont grossir le fleuve Lougen qui débouche dans le golfe de Christiania, après avoir suivi la grande vallée du Guldbrandsdal et traversé le lac Miüsen. Le groupe de montagnes que nous venons de décrire est remarquable par l'élévation et la forme élancée de ses pics, qui ressemblent aux aiguilles d'une cathédrale gothique; du côté nord-ouest, il se lie aux montagnes du Sognefeld qui bordent à l'est la vallée du Justedal , et qui atteignent une hauteur de plus de 2000 mètres (1). Au sud de l’Tôtunfieldse trouveune montagne un peu élevée, le Mugnafield ou Kalvaahôg (2200 mètres), et à peu de distance, on voit encore la cime isolée du Bitihorn (1626 mètres). Mais à l'est de l'Iütunfield s’étend un plateau ondulé et désert, dont l'altitude est de 1000 à 1200 mètres, et sur lequel sont les lacs de Vinstera et de Heimdal, au niveau de 1063 et 1080 mètres au- dessus de la mer. Le premier de ces lacs se trouve sur le prolongement d’une longue dépression, dirigée de l’est à l’ouest, qui limite nettement du côté méri- dional les massifs de l'Iôtunfield et des Hurungerne ; au fond de la même ornière se trouvent les lacs de Bygdin et Tyen, dontl’altitude moyenne est de 1100 mètres, et dont les eaux s’'écoulent dans des sens opposés, vers l’ouest et vers l’est, vers le golfe de Christiania d’une part, vers le golfe de Bergen de l'autre; la ligne qui les sépare est élevée seulement de 1130 mètres au-dessus de la mer. Montagnes situées au sud de l'Iotunfield.—Les plates-formes situées au sud du massif culminant de la Norwége, sont comparativement peu élevées, et con- stituent le Fillefield , dont l’altitude moyenne est de 1000 à 1200 mètres, pas plus grande que celle du plateau où se trouvent les lacs Vinstera et Heimdal. Cette plate-forme est trop haute pour être couverte de végétation, sauf sur les parties les plus basses; mais elle ne présente que de petites taches de neige, situées sur les sommités les plus élevées, comme le Suletind (1772 mètres). Le Fillefield est notablement plus bas que les massifs de montagnes placés au nord, à l’ouest et au sud-ouest; il forme comme une large dépression au mi- lieu de ces montagnes. Si l'on monte en effet sur l’une des principales cimes de (1) Les plus hautes cimes du Sognefeld sont appelées Tveraadals-Kirche (église de Tveraadal) et Lomseggen ; leur altitude est de 2101 et 2063 mètres. Un peu plus à l’ouest, dans le Justedal, on voit la Lodaiskaabe s’élever à une hauteur semblable ; ces trois sommités formées de roches gneis- siques constituent une série dirigée à peu près de l'E. à l’'O.— On ne donne, en général, le nom de Fiell en Suède et de Field en Norwége, qu'aux montagnes qui s'élèvent an-dessus de la limite de la végétation arborescente, c’est-à-dire à 1000 mètres ou plus dans la Scandinavie méridionale. CN. 4, p.41.) DE LA NORWÉGE, DE LA SUÉDE ET DE LA FINLANDE. 11 cette région, sur le Suletind ou le Myrgloppen, on voit s'élever vers le sud des plates-formes qui dépassent en hauteur le Fillefield, car elles présentent des masses de neige d’une assez grande étendue; elles forment une zone montagneuse qui s'étend depuis le fiord d’Urland vers le Nummedal, jusqu'à la région des lacs Uste et Halne (1), qui sont situés entre le 60° 1/2 et le 60° degré de latitude, à l’origine des principaux affluents du Snarum-Elv et du Lauven-Elv. L’éleva- tion moyenne de ces hautes plates-formes, auxquelles on peut donner la dési- gnation générale de Hallingfield , est d'environ 1600 mètres, et les parties culminantes atteignent en quelques points 2000 mètres au-dessus de la mer (2). C'est à l'existence de ces larges protubérances qu’il faut attribuer la courbe demi-circulaire que décrit la route de Christiania à Bergen, en se portant vers le nord à plus de 8 myriamètires au-dessus de la latitude de Bergen, pour atteindre la partie basse du Fillefield, qui forme, comme je l'ai déjà indiqué, une dépres- sion comparativement aux montagnes situées au nord et au sud. Près du littoral, sous le 60° degré de latitude, se trouve la presqu'île monta- gneuse du Folgefonden, enlacée par les bras recourbés du long golfe de Hardan- ger; elle est remarquable en ce qu’elle forme un plateau couvert de neige sur une grande étendue, et allonsé du N.-N.-E. au S.-S.-0 ; son élévation moyenne est de 1500 à 1600 mètres; elle égale celle des fields situés plus à l’est. La cime culminante parvient seulement à une altitude de 1664 mètres, et ne présente qu'un léger relèvement par rapport à la surface environnante. Le Sürfiord isole la presqu'île de Folgefonden d’un autre groupe de montagnes, le Hardangerfield, qui, du côté nord, se trouve séparé du Hallingfield par une série de dépressions occupées par des lacs, et dirigées les unes au N.-0., lesautres au N.-E. La cime principale du plateau de Hardanger est le mont Harloug ou Haarteig, qui ne s'élève pas à plus de 1700 mètres. Les plates-formes environ- nantes n’ont aussi qu'une médiocre élévation; et même , en se prolongeant vers le S.-E., elles s’abaissent à la zone de la végétation arborescente, c'est-à-dire au- dessous de 1000 mètres. Le Folgefonden (3) est, en allant du nord vers le sud, la dernière plate-forme qui atteigne la zone des neiges perpétuelles ; il est vrai qu’en dehors de ces groupes de montagnes, on voit surgir, comme des îles, quelques cimes élevées, ne se rattachant à aucun massif d’une étendue un peu considérable. L'exemple le plus curieux de cette manière d’être nous est offert par le Goustafield, qui se trouve un peu à l’ouest de Kongsberg, et dont la cime dentelée en forme de peigne s'élève à 1884 mètres, et constitue la plus haute sommité que l’on trouve en (4) Les hauteurs de ces lacs au-dessus de la mer sont les suivantes : Le lac Uste, 1020" ; le lac Halne , 1168". (2) Les parties culminantes de ces plates-formes portent les noms de Hallingskarven, Jükeln, Vosseskav] ; elles s’élèvent à 1963, 2004 et 2057 mètres au-dessus de la mer. (3) En Norwége, on donne souvent le nom de Æonden aux plates-formes couvertes de Névé. 12 CONSTITUTION GÉOLOGIQUE (N. 4, p. 12.) Scandinavie, au sud du 60° 1/2 degré de latitude. Néanmoins elle est entière- ment isolée et bordée à l'est par le lac Tin, dont l'altitude est sculement de 188 mètres au-dessus de la mer. En descendant du lac Miôs (4) situé à l’ouest, au niveau de 867 mètres, le fleuve Maan, avant de déboucher dans le lac Tin, forme la célèbre cascade de Riukanfoss (2). Entre le 59° et le 60° degré de latitude, il y a encore des massifs rocheux élevés de 1200 à 1500 mètres, tels que le Blaafield, le Vattindalsfield et autres mon- tagnes où prennent leur source l'Otteren-Elv, le Nid-Elv et les principales ri- vières qui coulent en divergeant vers le littoral de la presqu'île de Christiansand. Mais à partir du 59° degré, les plates-formes vont en s'abaissant de plus en plus vers l'extrémité méridionale de la Norwége ; elles se couvrent de forêts, perdent les caractères de hautes montagnes, et ne diffèrent pas notablement des collines ondulées que l’on voit en Finlande et dans l’est de la Suède. Montagnes situées à l'est et au nord de l’Ictunfield. — Remontons maintenant au delà du 61° degré de latitude, pour faire connaître les hautes plates-formes dont nous n'avons point encore parlé. Du côté nord-est, l’Iôtunfield, groupe de cimes culminantes de la Norwége, communique avec le massif du Sognefield, qui est allongé de l’0.-S.-0. à l'E.-N.-E. et borné dans toutes les directions par des val- lées profondes, par celle du Justedal à l'ouest, par celle du Bœver-Elv à l’est, et au nord par la grande vallée de l’Ota-Elv, à laquelle se réunit la précédente au- près du bourg de Lomm. Le Sognefield semble se rattacher du côté N.-0. aux montagnes du Langfield, maisil en est séparé par l’échancrure qui forme (à 1387 mètres d'altitude) la passe entre la vallée du Brœkke-Elv et celle du Justedal. Cette dernière consiste en une crevasse profonde, résultant d’une dislocation qui a écarté le Sognefield du massif du Justedal, de ce vaste plateau de glace, qui se prolonge vers le N.-N.-E. en se recourbant légèrement, depuis le Sognefiord , sous le 60° degré, jusqu’au Rom- sdalfiord, sous le 62° 1/2 degré de latitude. Mais on ne désigne ordinairement par l'expression de montagnes du Justedal que la portion située à l'est de la vallée (1) Il ne faut pas confondre le Hi6s, l’un des principaux lacs du Tellemark, avec le Miôsen qui se trouve au N. de Christiania, ni avec le Vangmios situé dans le Valders, à l'E. du Sognefñord. (2) Les lacs Kalhüvd (à 1068 mètres d'altitude), Totak (à 720 mètres), et plusieurs autres moins étendus, occupent , comme le Mis, les plates-formes élevées de l’intérieur de la presqu'île, à peu près à égale distance entre le golfe de Christiania et la côte de Bergen. Mais 6 ou 700 mètres plus bas, à une petite distance, se trouvent d’autres grands lacs sur des terrasses inférieures ; ainsi les lacs Tin (à 188 mètres), Bandag (à 68 mètres), Nisser (à 242 mètres), Fyrris (à 270 mètres). On conçoit que le passage des eaux d’un de ces systèmes de lacs à l’autre ne peut avoir lieu que par des cascades. Les rivières qui versent leurs eaux sur la côte occidentale de la Norwége offrent souvent aussi de hautes cascades, non en descendant à des lacs inférieurs, mais en approchant de la mer : on en voit beaucoup d'exemples, principalement autour des différentes branches du fiord de Hardanger ; je citerai seulement la cascade de Vüringfoss, haute de près de 300 mètres, et formée par le torrent qu’alimentent les neiges du mont Jükeln. (ND) DE LA NORWÉGE, DE LA SUÈDE ET DE LA FINLANDE. 13 du même nom; on appelle Langfield la partie située plus au nord, dans laquelle prennent naissance le Brœkke-Elv , le Raudals-Elv et autres affluents du fleuve Ota, ainsi que les rivières qui se jettent dans lIndvigfiord et le Storfiord, deux golfes de la côte située entre Bergen et Drontheim. Le Langfield m'a paru être moins élevé que les montagnes du Justedal situées au sud : cepen- dant il est couvert de neige dans une grande partie de son étendue; les cimes qui s'y trouvent (i)ne dépassent pas beaucoup la crête du plateau, qui est plus étroit que celui du Justedal et découpé par un grand nombre de déchi- rures, au fond desquelles coulent des torrents, les uns vers l’est, les autres vers l’ouest. Les montagnes que nous venons de décrire sont limitées d’une manière très nette par la grande vallée du Romsdal, des lacs Lessüe et du Guldbrandsdal, vallée qui s'étend sans interruption depuis le fiord de Romsdal jusqu'au golfe de Christiania. Le lac de Lessôe-Werk, qui en occupe le point le plus élevé (620 mètres), est remarquable en ce qu'il envoie ses eaux à deux mers (2). Cette grande ligne de communication entre les deux côtes opposées de la Norwége forme, dans la partie qu’occupe ce lac, et jusqu à plus d'un myriamètre à l’ouest, une dépression un peu large, ou une espèce de bassin à fond plat, dont les pentes latérales sont assez douces, et les fields adjacents n'ont pas une très grande élé- vation. Mais un peu plus à l’ouest, à partir de la jonction du Rauma-Elv avec le torrent d'Ulve, qui vient du Langfield, la vallée change de physionomie et prend les caractères d’une étroite déchirure. Des deux côtés les montagnes ont été disloquées presque jusqu'à leur base; des crevassements dirigés en divers sens ont produit, avec le concours des agents atmosphériques et principalement de la gelée, des pics de formes variées, ressemblant soit à des piliers prismatiques, soit à des obélisques ou des pyramides, soit à des aiguilles ou des cornes. Aussi, la contrée du Romsdal est justement renommée, comme une des parties les plus pittoresques de la Norwége, quoique les sommets des montagnes y atteignent à peine la zone des neiges perpétuelles. Plateau du Dovrefiell. — À quelque distance au N.-N.-E. du Langfield s'élève Le plateau du Dovre ou Dovrefield ; mais, entre ces deux massifs de mon- tagnes, se trouvent la vallée du lac Ota et celle des lacs Lessôe, toutes deux diri- gées de l'est à l’ouest, et n'ayant, dans la partie occupée par ces lacs, qu’une altitude de 360 et 600 mètres au-dessus de la mer ; l'espace qui les sépare con- (1) Les plus hautes de ces cimes ont 18 à 1900 mètres d'altitude ; ainsi la montagne de Skalstind, l’une des principales sommités, située entre Lessô et Lomm, s'élève à 1884 mètres. (2) 11 y a en Norwége plusieurs exemples de cours d’eau qui coulent dans des sens opposés, et ont leur origine dans un même lac ou un même marais ; ainsi, dans la contrée de Rôraas, on voit le Guul-Elv (ou Gulu-Elv), le Thya-Elv, affluent du Nea-Elv, et la Glommen, qui se rendent, les deux premiers au fiord de Drontheim , la dernière au golfe de Christiania, sortir d’un marais situé entre le lac Vigel et le lac Stue, un peu au midi du 63° degré de latitude. 14 CONSTITUTION GÉOLOGIQUE 4, p. 4) siste en un plateau élevé seulement de 1100 à 1200 mètres. Ainsi le Dovre constitue un massif indépendant, qui termine du côté nord la série des hautes plates-formes de la Norwége méridionale; la partie culminante est celle qui constitue le Sneehättan et le massif de Skrimkolle qui en est très rap- proché. Le Snechättan, haut de 2295 mètres, a été pendant fort longtemps consi- déré comme le roi des montagnes de la Scandinavie; mais aujourd'hui il est déchu du premier rang et ne vient qu'après les pics des Galdhôpiggen et des Skagstôlstinden. Toutefois son isolement, sa forme majestueuse et les caractères particuliers de sa structure le rendent aussi remarquable que les cimes qui le dépassent en hauteur :il est moins aigu, et il a la forme d’un cône surbaissé, dont j'évalue l’inclinaison moyenne, du côté oriental, à 18 ou 20 degrés. Il est évidé par une entaille profonde ; et, bien qu'étant formé de gneiss, il offre des traces de dislocations analogues à celles que l’on observe dans les massifs de roches vol- caniques : en effet, du côté sud-ouest, il y a un vaste effondrement autour duquel se dresse une enceinte de murailles à pic, couronnée par la crête aiguë et légè- rement arquée du Snechättan. Il en résulte un cirque ayant quelque analogie avec ceux des Pyrénées : son aspect n’est pas moins grandiose, mais il est beau- coup plus sombre et plus propre à inspirer un sentiment de terreur que d'admi- ralion; ici on ne voit que des masses de glace et de neige, des roches à pic, décharnées et divisées par une multitude de fractures ; aux alentours, il n'ya aucune trace de végétalion, aucune apparence de la nature animée, rien qui fasse contraste à ces sauvages horreurs. Les anfractuosités des roches sont remplies de neige; et au fond de la dépression qu'entoure la muraille abrupte du Sneehältan git un glacier formé par un entassement d’avalanches et divisé par de nombreuses crevasses. Cette montagne présente une analogie remarquable avec les cônes de soulè- vement : l'entaille profonde que l’on y remarque résulte sans doute de l'affaisse- ment qu'a dû éprouver une portion de la masse rocheuse, lorsqu'elle a été sou- levée à une grande hauteur au-dessus du plateau environnant: la surface affectée par l’action des forces souterraines, en cessant d’être plane et prenant une forme conique, n’a pu s'étendre assez pour que cet agrandissement eût lieu sans solution de continuité; alors desruptures se sont produites et ont été accompagnées d'affaissements plus ou moins considérables. Indépendamment du gouffre dont le glacier du Snechättan occupe le fond , des crevasses moins étendues se manifestent sur les pentes du cône et paraissent offrir une disposition rayon- nante. Ainsi j'en ai remarqué deux un peu au nord de l'endroit par où l'on gravit la pente du Sneehättan : l'une d'elles a une assez grande largeur près de la base du cône ; elle n’est pas entièrement remplie par l'amas de blocs et de glace qui en cache le fond et dont la surface supérieure se trouve à une profondeur de quelques mètres au-dessous du sol environnant. Immédiatement au nord du Sneehättan se dresse un rocher moins élevé qui, W.1b.1) DE LA NORWÉGE, DE LA SUÈDE ET DE LA FINLANDE. 15 au dire de mon guide, s'appelle Druck-Sua : il appartient au même massif et n’en est séparé que par une grande crevasse ; 1l présente du côté sud-ouest un mur escarpé comme celui du Sneehättan et l’on y remarque des fentes nom- breuses. Du côté opposé, se relie encore au Sneehättan la montagne de Skrea- hôg, qui est presque aussi élevée, et ily à un autre pic intermédiaire, d’une forme un peu aiguë. Cette série de cimes forme une crête dentelée, interrompue par de fortes échancrures : sur le flanc oriental de la montagne de Skreahüg, on remarque une dépression, moins profonde que celle du Sneehättan, mais qui néanmoins est occupée par un glacier. À 2 ou 3 kilomètres au N.-E. du Snechättan s'élève un groupe de cimes, qui en est entièrement séparé, et dont les flancs sont escarpés; la principale d’entre elles, qu’on nomme Skrimkolle, a une hauteur d’environ 2100 mètres au-dessus de la mer. La portion voisine du plateau situé à l’est offre des plaques de neige un peu étendues ; et, d'après mes observations hypsométriques, son niveau moyen m'a paru varier de 1500 à 1800 mètres. La Driva, dont les principales branches tirent leur origine des glaces du Sneehättan, est d'abord dirigée du sud au nord et coule à travers le défilé que suit, au-dessous de Kongswold, la route de Christiania à Drontheim; puis à partir d’Opdal, au lieu de continuer à couler vers le nord , elle se porte vers le N.-0. et va déboucher dans le golfe de Tinvold : ainsi elle isole de Ia portion culmi- nante du Dovrefield des plates-formes dont la crête est couverte de neige et qui peuvent être considérées comme appartenant au même massif, bien qu’en étant séparées par cette vallée. Un peu plus au nord, ces plates-formes s’abaissent peu à peu au-dessous du niveau supérieur de la végétation arborescente, qui est ici à environ 1000 mètres au-dessus de la mer, et le 63° degré de latitude peut être considéré comme limitant du côté nord la zone des hautes montagnes de la Norwége méridionale. Déjà nous avons signalé dansle Nammedal et le Tellemark l'existence de som- mités isolées, qui s'élèvent à une grande hauteur au milieu de contrées relative- ment basses. A l’est du Dovre, dans le Guldbrandsdal et l'Osterdal on peut citer une foule d'exemples semblables : ainsi le groupe de pyramides qu'on nomme les Rundene, groupe situé un peu au sud du 62° degré de latitude, entre les vallées du Lougen et de la Glommen, s'élève à 2113 mètres. Le Sôlenfield est une cime encore plus isolée, qui surgit à l'est de la Glommen jusqu’à environ 1800 mètres de hauteur. Un peu plus au nord, le Tronfield s'élève par une pente rapide depuis le bord de la Glommen , de 496 mètres jusqu'à 1725 au-dessus du niveau de la mer. On ne remarque pas de liaison entre ces diverses sommités; elles semblent être indépendantes les unes des autres, comme si ellés résultaient de soulève- ments produits par des causes volcaniques sur des points isolés. Remarques sur le yroupe méridional des montagnes de la Scandinavie. — La région de hautes montagnes que nous venons de décrire est comprise entre le 16 CONSTITUTION GÉOLOGIQUE CN. 1, p. 46) 59° et le 63° degré de latitude ; elle est plus étendue dans le sens du méridien que parallèlement à l'équateur. Toutefois il est impossible d'attribuer à cet en- semble de plateaux et de pics un axe ayant une direction précise ; et même, si l'on considère isolément les diverses parties de ce vaste pâté de montagnes , tantôt leur orientation paraîtra voisine de la ligne EO, tantôt elle se rapprochera d’être parallèle au méridien : ainsi les pics de l'Iütunfield forment une série disposée dans le sens de l'E.-N.-E., de même quele massif du Sognefield. Les montagnes qui séparent le Nummedal du golfe de Hardanger paraissent être allongées de l’est à l’ouest, mais au contraire les hautes plates-formes du littoral, du Folgefon- den et du Justedal offrent une disposition générale dans le sens du N.-N.-E. Quant au Dovrefield, il est bien difficile de lui assigner une orientation déter- minée. Cependant, si l'on trace une ligne servant de contour à l'ensemble de ces massifs rocheux, qui atteignent à la hauteur des neiges permanentes, l'axe longitudinal de cette courbe sera orienté à peu près du N.-N.-E.auS.-S..0, c’est-à-dire dans un sens parallèle à la zone montagneuse qui s'étend le long du littoral, au nord du 63° degré de latitude. Le groupe de montagnes du midi de la Norwége me paraît avoir dans sa struc- ture une certaine analogie avec le Spitzherg : les terres ainsi appelées constituent un groupe de trois grandes îles, entourées d’autres plus petites, lequel groupe s'étend du 76° 1/2 degré au 81° degré de latitude, et du 8° au 22° degré de longi- tude. L'île principale consiste en un immense pâté de rochers, dont le nom de Spitzherg (montagne pointue), dérive de l'aspect des pics aigus qui bordent le rivage, et s’élèvent du sein des flots jusqu'à une hauteur de 600 à 1200 mètres. Mais, au lieu de se rattacher à un système rectiligne, offrant les caractères ordi- naires des chaînes de montagnes, ces pics ne sont, pour ainsi dire, que les dente- lures de larête terminale du haut plateau qui constitue l'intérieur de l'île, et qui s'abaisse vers l'Océan arctique par des pentes abruptes, de même que les flancs des plateaux de la Norwége occcidentale, dont le pied est baigné par les eaux des fiords de Hardanger, de Sogne, d’Indvig et de Stor. Dans la partie nord-ouest duSpitzherg, que nous avons visitée en 1839, il n'y a point de fiords aussi longs ni aussi profonds qu'en Norwége, mais de petits golfes, bordés sur leurs côtés et à leur extrémité par des rochers escarpés d’une grande élévation; souvent même le rivage offre l'aspect d’une barrière infran- chissable. Toutefois dans les parties septentrionale et orientale du Spitzberg il y à quelques déchirures, golfes ou détroits, dont l'étendue en longueur est de plusieurs myriamètres, et s'approche alors de celle des fiords de la Norwége. Ces grandes découpures paraissent, en général, affecter une orientation voisine du N. ou du N.-N.-0. C’est aussi du N.-N.-0. au S.-S.-E. qu'est dirigée dans son ensemble et dans beaucoup de ses parties la côte occidentale du Spitzberg, ainsi que l'île du prince Charles, étroite lanière qui la borde sur une distance d'environ 10 myriamètres. (1,47) DE LA NORWÉGE, DE LA SUÈDE ET DE LA FINLANDE. 17 Contraste entre les pentes orientales et occidentales. —V.e voyageur qui explore les hautes montagnes de la Norwége est frappé de la différence que présentent leurs pentes opposées, vers l'E. et vers l'O. : du côté oriental, elles s’abaissent graduellement et en s'arrondissant, tandis que les plates-formes couvertes de peige qui avoisinent la côte occidentale de la Norwége, se terminent par des flancs escarpés. Le Folgefonden et les fields qui touchent le Sogneford sont, pour ainsi dire, coupés à pic par des tranchées profondes , le long desquelles la mer pénètre à des distances de trente à quarante lieues de la côte, jusqu’au sein des plus hautes montagnes de la Scandinavie. Aucun pays ne me paraît fournir des témoignages plus convaincants de la formation des vallées de montagnes par voie de déechirement ou de dislocation violente, que les plateaux découpés par ces crevasses à parois abruptes, élevées souvent de plus de 1000 mètres, qui con- stituentles différentes branches du Sognefiord, du Hardangerfiord et de beaucoup d'autres fiords de la côte norwégienne. Ces golfes si étendus aboutissent ordi- nairement à des vallées disposées dans le même sens et formant le prolongement des déchirures qui leur ont donné naissance. Il est impossible de représenter l'aspect sévère et grandiose de ces passages étroits, où le soleil pénètre à peine, et où un vaisseau peut naviguer, sans trouver de fond pour jeter l'ancre, entre deux murailles élevées parfois de plus d'un millier de mètres et si escarpées que la végétation ne peut s’y établir. Les crevasses multipliées qui ont, pour ainsi dire, haché la zone littorale et qui ont donné naissance à des milliers d'îles de différentes grandeurs, appartiennent, comme nous le verrons, à de nombreux systèmes de dislocations. Fausses idées des géographes concernant le Dovrefield. — La plupart des géo- graphes ont considéré le Dovrefield comme formant une chaîne, qui réunit les montagnes du sud de Ja Norwége à celles du nord, ou bien comme consistant en une déviation présentée par la chaîne scandinave que l’on suppose se reporter à l'est, entre le 62° et le 63° degré de latitude, pour reprendre ensuite sa direction vers le nord. La description que j'ai donnée du Dovrefeld a dû montrer com- bien cette manière de voir est peu exacte. Un peu à l’est du massif du Sneehä- ttan, le plateau ondulé du Dovrefield s'abaisse considérablement ; et, à l'exception de quelques cimes isolées, les montagnes aplaties qui environnent le cours supé- rieur de la Glommen, et forment les environs de Rôüraas, dépassent à peine la limite des bouleaux, qui est ici à moins de 1000 mètres au-dessus de la mer. Loin qu’il y aitaucune chaîne à servir de trait d'union entre les montagnes situées en deçà et au delà du 65° degré de latitude, la contrée dans laquelle on place cette jonction sapposée constitue une véritable dépression relativement aux espaces environnants ; c'est là que gisent le lac d'Oresund d’où sort la Glommen (à un niveau de 705 mètres), le lac Ferager (à 677 mètres), le grand lac Fœmund (à 671 mètres), lequel donne naissance au Fœmund-Elv ou Klar-Elv (1). I est vrai (1) Il est remarquable que plusieurs des principaux fleuves de la Scandinavie tirent leur origine Soc. GÉOL. — 2° SÉRIE. T. VI. — Mém. n° 1. 3 18 CONSTITUTION GÉOLOGIQUE (N1, pe 18.) que dans la même contrée on voit surgir çà et là quelques cimes élevées , telles que le Tronfield , le Sülenfield ; mais nous avons vu qu'elles sont indépendantes les unes des autres , et ces protubérances isolées n'ôtent point au pays qui les entoure le caractère d’une dépression. Caractère de la ligne de hauteurs situées à l'est du lac Femund. — Immédia- tement à l’est du lac Fœmund , qui est allongé du N. au S., s'élève une série de cimes hautes de 1200 à 1500 mètres, et disposées en file parallèlement au lac Fœmund, dans le sens du méridien; ce sont les cimes de Salfield, haute de 19265 mètres; Svukufield, haute de 1431 mètres ; Skebro, etc. Cette série se prolonge encore un peu au midi du lac Fœmund ; mais au delà du mont Herje- hägna, situé un peu au sud du 62° degré de latitude et s'élevant à 1184 mètres, cette bande montagneuse tend à s’effacer peu à peu, et ne constitue plus qu'une plate-forme ondulée, exhaussée en quelques points, et s'élevant à une faible hauteur au-dessus des pays situés à l'E. et à l'O. Il est évident que les causes qui ont produit ces protubérances se sont affaiblies de plus en plus vers le S. C’est le contraire qui a lieu au nord du lac Fœmund : la ligne de sommités qui longe la rive orientale se prolonge vers le N., en suivant presque le9e 1/2 degré de longitude; ainsi à l'est du lac Ferager s'élève le Vigelnfield (haut de 1577 mé- tres) ; plus loin c’est le Rutefield (1115 mètres); puis le Svukufield (1431 mètres); et le Syltfield ou Syltoppen, qui vient après, parvient à une élévation de 1789 mètres : il forme le point culminant de toute la contrée, et comme le nœud de cette bande montagneuse. Plus loin au N., cette série de sommités séparées les unes des autres , mais alignées en file, commence à perdre sa direction pre- mière et à se porter vers le N.-N.-E. : en même temps leur disposition devient plus irrégulière. D'ailleurs il faut observer qu'en dehors de la ligne qui forme la séparation de la Norwége et de la Suède, se trouvent des sommités égalant ou sur- passant même parfois les cimes limitrophes : ainsi, du côté norwégien, je rappel- lerai le Sülenfield, situé à l'ouest du lae Fœmund, et du côté suédois je citerai la montagne d’Areskutan (haute de 4454"), qui surgit à l’est de la frontière. D'ailleurs les sommités principales du Finmark, au nord du 69° degré de latitude, se trouvent près du bord de la mer, et quelquefois même sur des îles. Orographie de la zone limitrophe suédo-norwégienne.— La ligne limitrophe de la Suède et de la Norwèége ne constitue point un axe jouant le même rôle que celui des chaînes proprement dites ; elle n'influe, en effet, que d’une manière peu prononcée sur l'orientation des traits orographiques. La limite des deux pays a été établie en joignant les principales sommités, qui paraissent être placées les unes à la suite des autres. À partir du 63° degré de latitude, cette limite, tout en présentant de nombreuses déviations , se dirige moyennement du S.-S.-0. au de lacs qui gisent au fond de cette dépression ; ainsi la Glommen, le Fœmund-Elv ou Klar-Elv, qui prend à son embouchure le nom de Gütha-Elv, le Dal-Elf et le Ljusne-Elv, le Guul et le Nid-Elv. (N-1,p.19) DE LA NORWÉGE, DE LA SUÉDE ET DE LA FINLANDE. 19 N.-N.-E., et constitue plutôt le bord oriental que la ligne médiane de la série des plates-formes montagneuses à laquelle les géographes ont donné le nom de chaîne des Kiœlen ou des Kiæl (1). Cette zone, considérée dans son ensemble, est allongée dans un sens déterminé, et par là elle se rapproche plus des chaînes proprement dites que le groupe de montagnes du midi de la Norwége. Toutefois elle en diffère sous plusieurs rapports, et notamment en ce que les caractères d’accidentation ne sont pas subordonnés à un axe de soulèvement continu et occupant une posi- tion médiane, comme l'axe de la chaîne des Pyrénées ou de celle des Alpes. Les massifs rocheux sont allongés dans des sens divers, et la plupart des vallées cou- rent obliquement par rapport à la frontière. Les rivières qui coulent vers la côte de Norwége suivent des directions variées; celles qui se rendent vers le golfe de Botnie sont, en général, dirigées du N.-0. au S.-E. ou de l’O.-N.-0. à l’'E.-S.-E, La plupart de ces cours d’eau sortent de lacs situés au pied des montagnes ou dans les intervalles qu'elles laissent entre elles ; assez souvent les lacs qui don- nent naissance aux fleuves suédois se trouvent sur le territoire norwégien , et réciproquement. Les dépressions qui séparent les sommités de la partie centrale et qui servent de passages entre la Norwége et la Suède, se trouvent à un niveau qui varie gé- néralement de 600 à 800 mètres, et les sommités atteignent rarement à une hau- teur de plus de 1300 à 1400 mètres (2), dans toute la longueur de la zone monta- gneuse qui s'étend du 62° au 71° degré de latitude. Les deux plus hautes montagnes (1) M. Münch a fait observer (Gea norvegica, p. 505, 508 et 509) que les géographes avaient commis une grande erreur, en attribuant à l'expression 426/ (ou mieux kjül, kjüler au pluriel } le même sens qu’au mot allemand ie! , qui signifie carêne. Suivant M. Münch, kiôl n’exprime point une crête de montagne, mais, au contraire, une dépression transversale de la zone montagneuse, dépression qui sert de communication entre les vallées opposées, situées du côté suédois et du côté norwégien. D’après celte interprétation, le mot 16! équivaudrait à notre expression col. (2) Voici les principales sommités que l’on trouve entre le Syltfeld et le Sulitelma, et dont l'altitude est supérieure à 1300 mètres : sous 64° 40’ de latitude, le Jævsofeld, haut de 1319 mètres ; sous 65° 5’, le Sibmekfield (4400 mètres) ; sous 65° 45/, le Gedetind (1385 mètres) ; sous 67 degrés, le Hüitind (1365 mètres) ; sous 67° 10’ sont les cimes d’Almajalos et de Nordre-Sule, qui font partie du groupe du Sulitelma et qui atteignent 1700 mètres. Plus au nord, on ne connaît aucune protu- bérance dont la hauteur au-dessus du niveau de la mer excède 1300 mètres. Dans les montagnes du groupe méridional de la Norwége, telles que le Dovrefeld, l’Iôtunfeld, etc.., il n’y a pas de rapports uniformes entre la hauteur des cimes culminantes et l'altitude des plates- formes qui les supportent ou des dépressions qui les bordent : ainsi le plateau du Justedal, le plus élevé de la Norwége, est à peine dominé de 150 à 200 mètres par la cime culminante de Lodalskaabe : tandis que les pics de l’Iütunfeld s'élèvent deux fois et demie plus haut que les plates-formes situées à l'est et au sud. Mais dans la bande montagneuse qui s'étend du 62° au 68° degré de latitude, les traits généraux présentent des indices d’alignement , et s’éloignent moins des caractères propres aux chaînes de montagnes : aussi j'ai cru y reconnaître un rapport général entre l’élévation des cimes culminantes, voisines de la ligne de partage des eaux, et la hauteur des dépressions limitrophes adja- centes, dépressions où se trouvent habituellement de petits lacs donnant naissance aux fleuves qui 20 CONSTITUTION GÉOLOGIQUE (N: 1, p. 20.) que l'on trouve sont le Sylifield où Syltoppen déjà cité (1789 mètres), et le Suli- telma situé sous le 67e degré, qui atteint 1883 mètres : la plate-forme qui le supporte est à environ 1400 à 1500 mètres au- dessus de la mer ; presque toutes les cimes qui sont séparées de ces deux massifs ont une altitude plus petite d'au moins 500 mètres. On voit que le groupe de montagnes situé au dela du 63° degré de latitude est notablement inférieur en élévation au groupe méridional, qui offre des plates- formes hautes de plus de 1800 mètres et des pics élevés de 2500 à 2600 mètres. Il à aussi une largeur beaucoup moindre ; car les hautes plates-formes ne se pro- longent pas beaucoup à l'est de la frontière, excepté dans le Finmark, et leur ensemble occupe, dans le sens transversal, de l'O.-N.-0. à l'E.-S.-E,, une étendue qui varie de 10 à 14 myriamètres. Néanmoins la structure générale de ces mon- tagnes est la même : ce sont des plates-formes ondulées, au-dessus desquelles surgissent des cimes de formes diverses, quelquefois présentant une crête dentelée et des pics aigus, ou ressemblant à des dômes, à des cônes surbaissés, ou bien à des pyramides tronquées. Dans cette longue série de sommités il est rare de voir, si ce n’est dans les îles du Nordland , des aiguilles aussi élancées que les Tind du massif des Skagstôlstinden, de l’Iütunfield et du Romsdal. Grand système de vallées. — Quoique généralement dépourvue de crêtes ou d’axes rectilignes, la zone montagneuse des Kiôlen offre souvent des vallées coulent vers l'Atlantique et vers le golfe de Botnie. C’est ce qui ressort du tableau ci-après, dans le- quel j'ai fait figurer quelques-unes des cimes principales de cette région. G È ë > . Hauteur Rapport CIMES SITUÉES PRÈS DE LA FRONTIÈRE SUÉDO-NORWÉGIENNE. do de. As a pressions [les hauteurs LATE. | | ini Aetones trophes et des adjacentes! dépressions. A ———— | ——— DÉNOMINATION. 3 SITUATION. ALTITUDE. Svukufeld. . , . . . | A l’est du lac Fæmund 1432° 800" Vigelnfield. . . . . A l’est des lacs Üresund et Ferager. 1577 880 Syltfield ou Syltoppen. | A l’origine de la vallée de Selbo. . 1789 985 Kiôlhaug . | A l’est du fiord de Drontheim .. 4277 700 Hatfield A l’est du lac Rôs, 1152 600 Sulitelma . . . . . . | A l’est du Saltenfiord. . . . . . . 1884 950 ? Rapport moyen. On voit qu'entre les hauteurs des cimes de la zon e limitrophe il existe un rapport qui varie entre 1,78 : 1 et 1,98 : 1, et qui, pour les exemples cités ici, est en moyenne de 41,85 : 1. Mais au delà de 68 degrés de latitude, la frontière suédo-norwégienne, ainsi que la ligne de partage des eaux, for- ment des courbes sinueuses et irrégulières : en même temps, les cimes culminantes n’offrent plus d'indices d’alignement ; elles se montrent au bord de la mer, parfois sur des îles. Alors il n’y a plus lieu de rechercher, comme tout à l'heure, une relation entre les niveaux des cimes et des dépressions adjacentes. (N.1,p.21) DE LA NORWÉGE, DE LA SUÈDE ET DE LA FINLANDE. 21 dirigées dans le sens de sa longueur, parallèlement à la côte (1). Ainsi, depuis le Halsfiord sous le 63° degré de latitude , jusqu'au Ranenfiord, un peu au nord du 66° degré, il y a un remarquable système de dépressions parallèles au bord de la mer et formant une grande vallée presque continue, dont on admire la belle végétation. En effet, la vallée de Rindal, celle d’Orkedal, le ford de Dron- theim, la vallée de Snaasen, celle du Namsen ou Nauma-Elv, celle de Fiplingdal et celle de Rôüsaa, sont placées à peu près sur une même ligne, dans le prolonge- ment les unes des autres ; les intervalles qui les séparent sont d'ailleurs très courts et d’une petite élévation. Ce système, auquel sont parallèles beaucoup de branches secondaires , ou de vallées séparées, n'offre pas, de même que le rivage de la mer, une direction tout à fait uniforme ; mais dans la plus grande partie de son éten- due et surtout dans la portion médiane, il court de l'E. 40° N. à l'O. 40°S. ; la partie septentrionale se rapproche beaucoup plus de la direction du méridien. Dans les dépressions situées un peu à l'est de cette grande vallée, à 509 mètres au-dessus de la mer, on observe une série de vastes lacs qui envoient leurs eaux, les uns vers l’Atlantique, les autres vers le golfe de Botnie; on peut citer parmi les premiers : le Tunsôe, le Nams-Vand, le Rôs- Vand (le plus grand lac de la Norwége septentrionale); parmi les seconds le Torrün,le Langlingen, Limingen, Qvernberg, etc. Nous avons déjà signalé la différence qui a lieu dans la manière dont s'abaissent vers l’est et vers l'ouest les plateaux du groupe méridional de la Norwége ; un contraste semblable nous est offert, et d’une manière encore plus frappante, par la série de montagnes qui s'étend du 63° au 71° degré de latitude. Les plates- formes ondulées, sur lesquelles se trouve la frontière de la Suède, s'abaissent gra- duellement vers l'est par des pentes très douces et souvent presque insensibles, de sorte qu'en partant du golfe de Botnie, on arrive sur la frontière norwé- gienne, pour ainsi dire, sans s'en douter (2). Pentes vers l'est et vers l’ouest. — IL est facile de calculer la pente générale du sol : si l’on prend 700 mètres pour l'élévation moyenne des parties basses de la frontière, qui correspondent aux cols des Alpes ou aux ports des Pyrénées, comme elles sont séparées du golfe de Botnie par une distance d'au moins 30 myriamètres et souvent plus, on obtient pour l’inclinaison moyenne du sol vers l'est 2, 3 millimètres par mètre ou 8 minutes. Cette pente serait encore plus faible si, au lieu de prendre pour base de ce plan incliné la distance la plus (1) Il est remarquable de voir que les vallées dirigées du N.-N.-E. ou du N.-E. au S.-0. et celles du S. au N. sont beaucoup plus fréquentes, entre le 63° et le 68° degré de latitude, que celles qui courent du N.-O. au S.-E., et qui néanmoins sont des vallées transversales relativement à la direction générale de la côte et de la zone montagneuse. (2) Les montagnes de l’Oural paraissent avoir de l’analogie avec celles de la Norwége : elles présentent aussi de vastes plates-formes, sur lesquelles s'élèvent çà et là des sommités ; leur pente est très faible du côté occidental, et il paraît que l’on passe, presque sans le savoir, de l’Europe dans l'Asie boréale. 22 CONSTITUTION GÉOLOGIQUE (N: 4, p. 22.) courte de la frontière norwégienne au golfe de Botnie, on avait considéré la ligne que suivent les principales rivières, qui sont dirigées du N.-0. au S.-E. L'allitude moyenne des sommités limitrophes pouvant être estimée à 1200 mètres, la pente moyenne du plan s'étendant de ces éminences vers le golfe de Botnie, serait de 0,004, ou 44 minutes. On peut faire des calculs analogues pour connaître la pente du sol norwégien vers l'Atlantique, de l’est à l’ouest, ou plus exactement de l'E.-S.-E. à l'O.-N.-0. La distance qui sépare de la côte la frontière suédo-norwégienne ou la ligne de parlage des eaux, est seulement de 10 myriamètres ; l'inclinaison moyenne du plan joignant la frontière au bord de lAtlantique serait par conséquent de 0,007, ou 24 minutes, à partir des portions déprimées de la ligne limitrophe et de 0,019, ou 41 minutes, à partir des sommités. Mais il faut observer que les fiords, qui pénètrent à l’intérieur du pays, abrégent considérablement le chemin que les torrents ont à parcourir pour arriver à la mer du Nord. D'un autre côté, l'éléva- tion des plates-formes norwégiennes n’est pas ordinairement plus considérable sur la lisière de la Suède; parfois même elle est moindre qu’au bord de l'Océan, où elles se terminent par des pentes très fortes et souvent supérieures à 45 degrés. Inégalité dans le mouvement des eaux. — Cette différence dans la configura- tion du solde la Scandinavie, à l’ouest et à l'est de la frontière suédo-norwégienne, détermine une inégalité correspondante dans le mouvement des eaux. Les fleuves qui coulent vers le golfe de Botnie acquièrent un plus grand volume (1), ils ont un cours plus vasle el moins rapide; ordinairement ils traversent des lacs très étendus en longueur (2). Les torrents qui versent leurs eaux dans l'Atlantique ont le cours beaucoup plus accidenté et présentent des chutes considérables, quelquefois de près de 300 mètres, comme celle de Vôringfoss dans le Hardan- ger, ou comme celle de Riukanfoss, offerte dans le Tellemark, par le Maan-Elv qui unit le lac Miôs au lac Tin. Sur le trajet de ces rivières se trouvent presque (1) A égale étendue de bassin hydrographique, les fleuves de la Norwége ont un volume plus considérable que ceux de la Suède, car il tombe une quantité de pluie beaucoup plus grande sur le côté occidental des montagnes de la Scandavie que sur les plates-formes situées à l’est de la frontière suédo-norwégienne : c’est que les courants atmosphériques chargés d'humidité, qui viennent de l’ouest et du sud-ouest, sont arrêtés par les escarpements que forme le bord occidental de la zone monta- gneuse, et comme ils se refroidissent notablement au contact des surfaces neigeuses, ils donnent lieu à une abondante précipitation d’eau : c’est le même effet que celui qui a lieu sur le versant méridional des Alpes. : (2) Souvent les habitants du pays ont donné le même nom au lac situé au pied des montagnes et formant le berceau du fleuve, au fleuve lui-même et à la ville qui se trouve à son embouchure dans le golfe de Botnie; alors la même expression résume toute l’histoire du fleuve, sa naissance, son cours et son embouchure; ainsi les noms de Tornea, Calix, Lulea et Umea s'appliquent à la fois à un lac, à un fleuve et à une ville. Les grands lacs de la Laponie suédoise se trouvent au pied des protubérances limitrophes, à une distance de 20 à 30 myriamètres du golfe de Botnie et à une altitude de 200 à 300 mètres au-dessus de la mer. W.1»2%) DE LA NORWÉGE, DE LA SUÉDE ET DE LA FINLANDE. 23 toujours des lacs disposés par étages et formant souvent de longues files : les eaux se précipitent en cascades de l’un dans l’autre ; il y a aussi des torrents qui tombent du haut des rochers dans la mer. Grand nombre d'îles et presqu'iles. — Au nord comme au sud du 63° degré de latitude, la côte de l'Atlantique est découpée par des crevasses profondes et entrecroisées, qui s'étendent parfois jusqu’à une petite distance de la frontière de la Suède et qui séparent du continent une multitude d'îles. Depuis le fiord de Drontheim jusqu'au 68° degré de latitude, on voit peu d'îles d'une grande étendue ; mais plus au nord, sur la côte de la province de Nordland , les iles s'a- grandissent et manifestent entre elles une liaison évidente. Ainsi les masses rocheuses de l'archipel de Loffoden et de Tromsen forment comme une petite chaine, qui s’étend parallèlement à la zone de montagnes situées sur le continent ; c’est là que sont les plus grandes îles de la Norwége, et beaucoup ne sont séparées les unes des autres que par des canaux fort étroits : à leur surface s’élèvent des cimes neigeuses présentant des formes variées et pittoresques. Le Finmark offre, comme le Nordland, un certain nombre de grandesîles, mais il est principalement remarquable par ses vastes presquîles; on y voit des fiords, celui de Porsanger , par exemple, qui pénètrent jusqu'à 14 ou 15 myriamètres à l'intérieur du pays. Dans le Nordland et dans le nord de la province de Dron- theim, s'étendent des plates-formes dont l'altitude est aussi grande sur la fron- tière de la Suède que sur le littoral; mais, dans le Nordland septentrional et dans le Finmarck, les sommités culminantes ne touchent plus, en général, à la frontière suédo-norwégienne ou à la ligne de partage des eaux : elles se trouvent au bord même de la mer, soit sur la côte du continent, soit sur des îles. Elles s'élèvent dans la zone des neiges permanentes, jusqu'à une altitude de 4100 à 1200 mètres : ainsi on voit à l'ile Seyland des champs de névé d'une assez grande étendue, tandis que les plates-formes de l'intérieur de la Laponie, dans la région où se trouve la frontière de la Suède, n'ont qu'une élévation de 300 à 400 mètres et restent, en général, au-dessous de la limite de Ia végétation arbo- rescente. La cime principale de l’île Seyland, haute de 1080 mètres, domine, sans rivale, toutes les montagnes situées sous le même parallèle ou à des lati- tudes plus élevées. Elle n’estégalée que par le Noonskarsfield, situé près de Talvig, au bord de PAltenfiord, sous 70 degrés de latitude. C'est seulement sous 69 1/2 degrés de latitude que lon trouve deux cimes qui lui soient supérieures , savoir : Golzevarre et Bensjordtind, situées, la première à l'O. du Lyngenfiord, la deuxième à l'O. de l’entrée du Balsfiord. Prolongement de la zone montagneuse. -— La zone montagneuse de la Scan- dinavie semble se prolonger un peu au delà de l'extrémité septentrionale du continent européen ; elle offre encore à l’île Magerôe une élévation de 360 mètres et se termine du côté septentrional par le rocher du cap Nord, qui est élevé de 307 mètres, et dont le flanc escarpé plonge dans l'Océan glacial. La partie du 24 CONSTITUTION GÉOLOGIQUE (N. 1, p.24) continent située à l’est se montre encore découpée par des fiords très étendus, et d'une grande profondeur : les montagnes se prolongent le long du littoral, en s'abaissant peu à peu (1), jusqu'au golfe de Varanger, où le terrain quartzo- schisteux de l'est du Finmark vient s'appuyer sur la formation granito-gneissique qui constitue la Finlande et la Suède orientale; alors la côte a perdu son éléva- tion et les accidents orographiques ne forment plus que de simples collines à pentes douces. Sur beaucoup de cartes de la Scandinavie on voit encore figurer une chaîne de montagnes s'étendant de l'est à l’ouest à travers la Laponie, au sud du 69° degré de latitude, quoique M. deBuch ait démontré, il y a un demi-siècle, que cette préten- due chaîne n'existe pas ailleurs que dans l'imagination des faiseurs de cartes : l'er- reur qu'ils commettent provient de ce quele fleuve Alten, qui coule vers le nord, est censé lirer son origine d’une chaîne située au midi du 69° degré; mais il est alimenté par de petits lacs, placés sur la pente méridionale du plateau qui borde la zone littorale et qu'il traverse le long d’une dépression, pour aller se jeter dans le golfe d'Alten. D'ailleurs les plates-formes de la Laponie, de même que celles situées plus au midi, offrent çà et là quelques protubérances isolées ; mais elles ne s'élèvent qu'à une médiocre hauteur au-dessus de la région environnante. Changement de direction de la zone montagneuse. — Au nord du 68: degré de latitude, la ligne de montagnes qui borde la côte tend à perdre la direction N.-N.-E. qu’elle suivait auparavant, pour se porter vers le N.-E., puis vers l'E. Cette déviation ne se manifeste pas seulement par un changement dans la dispo- sition générale de la zone montagneuse, mais aussi par une modification corres- pondante dans l'orientation de la côte. Rappelons-nous d’ailleurs que la portion de la même ligne de sommités qui s'étend au sud du 64€ degré de latitude, le long de la rive orientale du lac Fœmund, est dirigée parallèlement au méridien. La direction N.-N.-E. n'est donc rigoureusement propre qu’à la partie moyenne de Ja zone montagneuse, à celle comprise entre le 64° et le 68° degré de latitude. Néanmoins cette direction me paraît être la plus importante : elle concorde avec l'orientation de la côte située entre les mêmes parallèles ; de plus, il est remar- quable que, si l'on trace sur une carte la ligne formant la prolongation de cette côte vers le midi, elle coupe Ie Dovrefield un peu à l'ouest du massif du Sneehät- tan, traverse le groupe de hautes cimes dit Jôtunfield et passe ensuite par le massif des Hallingfield ; en un mot, elle ne s’écarte pas beaucoup de la ligne (4) Une des plus hautes cimes qui s'élèvent sur le plateau du Finmark, à l’est du 21° degré de longitude, est celle de Aaste-Gaise, située au sud du fiord de Porsanger, sous 70 degrés de latitude ; elle a 879 mètres de hauteur. Parmi les principales éminences de la portion la plus orientale du Fin- mark, on peut citer les montagnes de Maddevara (haute de 449 mètres) et de Gorre-Njunès (haute de 400 mètres), situées l’une au N., l’autre au S. du fiord de Varanger ; mais elles sont dominées par la montagne de Domen, qui s'élève à 520 mètres, sur la côte de Vardôüe, près du 29° degré de longitude, à l'extrémité nord-est de la Scandinavie. (W.1D.2%) DE LA NORWÉGE, DE LA SUEDE ET DE LA FINLANDE. 25 médiane de l’ensemble des hautes montagnes dont est hérissé le sud-ouest de la Norwége. Vaste étendue de la zone inhabitable et des champs de neige. — Je vais encore ajouter quelques remarques pour compléter cette esquisse de la structure des montagnes de la Scandinavie ; leur disposition en forme de plateaux nous explique pourquoi une partie considérable de la Norwége est inhabitable (1), et pourquoi il s'y trouve des champs de glace et de neige d'une plus grande étendue que dans le reste du continent européen (2). La population norwégienne, qui est très peu nombreuse , eu égard à la superficie de la contrée, serait encore plus restreinte, si elle n'avait d'autre moyen de subsistance que la culture du sol ; mais elle pour- voit en partie à son alimentation au moyen de la pêche abondante qui a lieu sur les côtes et dans les lacs de l’intérieur du pays, même dans ceux situés à une hauteur où disparaît la végétation arborescente. En outre, le commerce des bois provenant des épaisses forêts qui couvrent la pente des montagnes, et l’exploita- (1) D’après l'étendue des terres qui sont cultivées en Norwêége et qui se trouvent en grande partie dans des fonds de vallées, M. Munch estime la superficie totale des vallées à un centième seulement de la surface de la Norwége : mais les bases de son évaluation me paraissent peu exactes et le résultat est certainement trop faible, car M. Munch ne tient pas compte de l’espace occupé par les lacs. Néanmoins il est hors de doute que l’étendue des vallées norwégiennes ne forme qu’une fraction peu considérable de la surface totale du pays; comme, d’ailleurs, il n’y a d’habitable que les vallées et de petites plaines littorales ou quelques plates-formes ondulées et d’une faible élévation, telles que celles qui entourent le lac Miôsen ou qui bordent certaines parties du rivage de la mer, on conçoit combien doit être faible le rapport entre la population et la superficie de la Norwége : il n’est en effet que de trois habitants par kilomètre carré. (2) Les plus grands champs de névé de la Scandinavie sont ceux du Justedal, qui ont une étendue superficielle de plus de 20 myriamètres carrés ; un autre plateau de neige assez considérable est celui de Folgefonden, qui forme une presqu'île entrele Hardangerford etle Sürford. Les autres champs de neige sont bien moins vastes ; et beaucoup, au lieu de recouvrir des plateaux, remplissent des dépressions que laissent entre elles les cimes contiguës, ou qui se trouvent sur leurs pentes. Parmi les fields offrant de grandes masses de neige, on peut citer ceux compris entre la vallée de Hallingdal et les branches orientales du Hardangerfiord, ainsi les Hallingskarven, Jükeln, etc.; plus au nord il y a l’Iôtunfield (principalement la partie comprise entre le massif des Skagstôlstinden et celui des Galdhèppiggen) : puis, il y a le Langfeld, le groupe des Rundene, les parties élevées du Dovrefield et les sommités qui s’y rattachent. Dans la zone septentrionale des montagnes de la Scandinavie, il y a deux grands plateaux de névé, comparables à ceux du Justedal et du Folgefonden, bien que d’une moindre étendue : le principal est compris entre la côte et les deux vallées de Ranen et de Bejern , qui aboutissent aux fiords de Ranen et de Salten (entre 66° et 67° degrés de latitude). Il donne naissance à des glaciers qui s’abaissent jusqu’au bord de la mer, dans les fiords de Mel et de Holand. Un autre grand plateau de ncige est celui de Bürgenfield , situé un peu au nord du 65° degré de latitude, entre la dépression du lac Namsen et la vallée de Vefsen. D'ailleurs plusieurs autres massifs présentent des surfaces neigeuses d’une certaine étendue ; ainsi le Sulitelma, sur les pentes duquel se trouvent d'importants glaciers, le Syl- toppen ou Sylilield, qui est si remarquable par ses formes abruptes et découpées, et aussi l’île mon- tagneuse de Seyland, où se trouve le glacier le plus boréal de l’Europe. SOG. GÉOL. — 2° SÉRIE. T. VI. — Mém. n° 1. n 26 CONSTITUTION GÉOLOGIQUE (N.1, p. 26.) tion des richesses métallifères contenues au sein de la terre fournissent d’im- portantes ressources à celte nation industrieuse. Remarques sur la multiplicité des lacs en Scandinavie. — Un des caractères particuliers de la Scandinavie consiste dans l'énorme quantité de lacs qui se trouvent dans toutes les parties de cette contrée. Le rapport entre la surface de ces lacs et la superficie totale du pays est d'environ 1/20: en Norwége, 1/8 en Suède ; le rapport moyen pour la Suède et la Norwége est presque de 1/10°, et en Finlande ce rapport est beaucoup plus grand. L'existence de cette multitude de réservoirs naturels, dont quelques-uns sont comparables à de petites mers inté- rieures, tient à plusieurs causes, dont la principale me paraît consister en ce que les accidents de la surface du sol, au lieu d'être subordonnés à un système rectiligne unique ou tout à fait prédominant, sont le résultat de soulèvements nombreux etembrassant des espaces plus ou moins circonscrits. Ainsi la chaîne des Pyrénées, où le caractère de rectilignité est très prononcé, offre peu de lacs, etils y sont d’une très pelite étendue, S'il y en a plusieurs et de très vastes en Suisse, cela provient principalement de ce que la partie centrale de la Suisse forme une espèce de bassin, bordé de plusieurs systèmes de montagnes ; et dans le milieu même de ce bassin s'élèvent des massifs rocheux séparés de la zone centrale. Les traits orographiques de la Scandinavie sont le résultat de soulèvements encore plus nombreux que ceux qui ont produit les montagnes de la Suisse; ils ont donné lieu à des protubérances discontinues, à des milliers de collines, de. formes arrondies, dont l'origine peut être attribuée en grande partie à l’éruption de masses graniliques et amphiboliques, au milieu du gneiss et autres roches. Ces protubérances orientées dans des sens divers laissent entre elles des dé- pressions plus où moins étendues, qui servent de réservoirs aux eaux. Les autres contrées qui, comme la Scandinavie et la Finlande, sont formées de roches anciennes, de gneiss et de terrains paléozoïques, ne présentent pas de caractères de configuration tout à fait semblables ; de plus la dureté des roches cristallines de la Scandinavie doit être signalée parmi les causes auxquelles il faut attribuer la multiplicité des lacs en cette contrée. On sait que, dans les pays accidentés, on rencontre fréquemment des vallées plates ou des plaines entourées de hauteurs, qui paraissent avoir servi autrefois de réservoirs aux eaux. Indé- pendamment des cataclysmes qui ont soulevé le fond d’anciens bassins , il y a deux causes qui ont pu faire disparaître les lacs : 1° la destruction des obstacles qui arrêtent le mouvement des eaux ; 2 le comblement des dépressions par le dépôt de détritus qui s’y produit constamment. Les roches situées à l'extrémité des lacs du côté d'aval, et formant chaussée, sont soumises à des influences qui tendent à les démolir, savoir : la pression de la masse d’eau qu'elles retiennent, la désagrégation résultant des infilirations qui ont lieu dans les fissures, l'in- fluence érosive de l'eau qui coule par-dessus la digue, l'affouillement qu'elle (1h27) DE LA NORWÉGE, DE LA SUÉDE ET DE LA FINLANDE. 21 produit sur sa base, et enfin l'action destructive des causes atmosphériques : c’est ainsi que la barrière rocheuse qui retient les eaux du lac Erié, et qui produit la chute du Niagara, est minée peu à peu et finira par disparaître à la longue. Cette destruction des roches qui servent de barrages à dû se produire autrefois d’une manière plus rapide, lorsque les vallées ont été parcourues par des courants d’eau beaucoup plus considérables qu'aujourd'hui : c'est ce qui devait avoir lieu avant l'époque humaine , alors que d'énormes quantités de détritus ont été charriées à la surface de la Scandinavie et en d'autres parties de l'Europe. On conçoit que dans beaucoup de vallées et de dépressions où les eaux auraient pu être retenues, la dénudation ou l'abaissement des parties saillantes du terrain leur a ouvert un libre cours. Ces effetsse produisentd'une manière très inégale dans les diverses contrées, suivant Ja nature et la dureté des roches. Ainsi, aux États-Unis , la chute da Niagara, qui a lieu sur des roches de pierre calcaire et de schiste tendre, a déjà été reportée en arrière d'environ 7 milles ou 11263 mètres; mais, en Scandinavie, la grande dureté et la solidité des roches (1) ont dû empêcher ou du moins retarder beaucoup la prodaction de ces effets ; on voit encore sur le fond du lit d’un grand nombre de torrents les marques d’érosion, les stries et les canne- lures qui ont été burinées à leur surface par les agents erratiques, il y a bien des siècles, et que n’a encore pu effacer le frottement des eaux qui coulent dessus. Les courants qui traversent les lacs tendent à les combler par les dépôts de détritus qu'ils y produisent (2) : cette tendance est d'autant plus efficace que la proportion de détritus charriés par les eaux est plus considérable ; mais la dureté et la cohésion des roches, qui paralysent l’action de la cause précédente, doivent aussi diminuer les effets de celle-ci, car les caux qui s'écoulent des hauteurs entraînent avec elles d'autant moins de détritus que les roches sont moins friables. En Scandinavie les fleuves traversent ordinairement plusieurs lacs; et, quand ils se sont purifiés dans celui qui est en amont, ils n’entraînent plus avec eux qu'une quantité insignifiante de détritus, le peu de limon qui est resté en suspension dans leurs eaux; mais lorsqu'ils coulent à travers un dépôt de trans- (1) La facile désagrégation des roches primitives et de transition de la Bretagne est probable- ment l’une des principales causes pour lesquelles on n’y voit presque nulle part des lacs propre- ment dits ; cependant la surface du pays présente une multitude de dépressions qui deviendraient des lacs, s’il y avait la plus légère saillie pour retenir les eaux. L'industrie humaine, qui y a formé un si grand nombre d’étangs, n’a fait, dans beaucoup de cas, autre chose que de rétablir d'anciens lacs, en reconstruisant par des barrages les obstacles qu'opposaient au mouvement des eaux des saillies de roches friables, qui ont été peu à peu détruites. (2) Il est évident que la conservation des lacs dépend beaucoup aussi de la profondeur des bassins servant de réceptacle aux eaux, ou de la hauteur des barrières qui s'opposent à leur écoulement. Dans les phénomènes qui modifient le relief de la surface terrestre, il est presque impossible que certaines parties du sol soient soulevées, sans que des parties voisines ne s’affaissent ; aussi la formation de presque tous les groupes de montagnes a dû donner naissance à des lacs ; mais beaucoup ont dis- paru plus tard, par les causes que je viens d’exposer. 28 CONSTITUTION GÉOLOGIQUE (Ne 1, p. 28.) port, ils détachent de nouveau des débris pulvérulents des parois de leur lit. Quoique le cours des rivières de la Suède et de la Finlande soit très accidenté, et présente de fréquentes cataractes, dans beaucoup de parties ce cours est moins rapide que celui de plusieurs de nos fleuves, parce que les roches qui forment saillie dans leur lit, de distance en distance, jouent le rôle de barrages qui ralentissent le mouvement des eaux. Aussi la plupart de ces rivières, qui ne peuvent être parcourues par des bateaux dans toute leur étendue, sont navi- gables dans les intervalles qui séparent les cataractes; c'est ce qui a lieu aussi pour les rivières de l'Amérique du Nord. Indépendamment des lacs, on trouve en Scandinavie de nombreux maré- cages, principalement en Norwége et en Laponie, où le sol est moins sableux et plus argileux qu'en Suède et en Finlande ; aussi les eaux y sont retenues plus fa- cilement. D'ailleurs la forme aplatie des accidents du sol rend leur écoulement difficile; les étés sont trop courts pour produire une évaporation suffisante, sur- tout sur les parties élevées, où la fonte des neiges ne devient complète qu'après l'époque du solstice. En outre, les brumes, qui obscurcissent si souvent l'atmos- phère sur toute la région montagneuse voisine de l'Océan, empêchent les rayons du soleil de pénétrer jusqu'à la surface de la terre. D'ailleurs, la couche supé- rieure du sol, qui est fréquemment tourbeuse, retient l’eau au moyen des végé- taux spongieux qu'elle renferme, et cette circonstance facilite la formation des marécages dans le nord de l'Europe, de même que dans les régions tempérées. CLASSEMENT DES TERRAINS DE LA SCANDINAVIE, Cinq groupes de terrains en Scandinavie. — Les terrains qui composent le sol de la Scandinavie peuvent être divisés en cinq groupes qui sont, d’après leur ordre d'ancienneté : 1° Les terrains primitifs, ou schistes cristallins ; 2 Les terrains de transition inférieurs, ou schistes semi-cristallins ; 8° Les terrains paléozoïques (silurien et dévonien) ; ke Les Lerrains secondaires (jurassique et crétacé) ; 5° Les terrains quaternaires (erratiques ou diluviens) et terrains modernes, qui forment des dépôts superficiels. Dans ce travail nous nous étendrons peu sur le dernier groupe , dont l'étude a été l’objet de mémoires particuliers (1). Nous allons décrire successivement les divers groupes, dans l'ordre où ils vien- nent d'être énumérés : les deux premiers peuvent être désignés, du moins d’une manière provisoire, sous le titre commun de terrains azoïques, car jusqu'à ce jour on n'y a rencontré aucun reste d’être organisé. (1) Voyez les Voyages en Scandinavie, etc., Géologie, par J. Durocher, et le Bulletin de la Société géologique, 2° série, t. III, p. 65, et t. IV, p. 29. G1,p.%) DE LA NORWÉGE, DE LA SUÈDE ET DE LA FINLANDE. 29 Le groupe des terrains primitifs comprend, avec le gneiss, les schistes cristal- lins qui lui sont associés, les schistes micacés, talqueux , amphiboliques , etc. Le second groupe, qui paraît former la base des terrains de transition, se com- pose de dépôts intermédiaires entre les terrains primitifs et les terrains de tran- sition fossilifères. Ces dépôts participent des caractères des formations schis- teuses les plus anciennes, par la présence de schistes tout à fait cristallins, par leur apparence généralement subcristalline et enfin par l'absence complète de fossiles : d’un autre côté, ils se rapprochent des terrains de transition fossilifères par l’intercalation de dépôts de sédiment amorphes ou faiblement cristallins, et en outre par certains caractères straligraphiques. PREMIER GROUPE DE FORMATIONS AZOÏQUES : SCHISTES CRISTALLINS. Gneiss primitif, fréquemment mélangé de granite et accompagné de schistes micacés, quartzeux, ampbhiboliques, ainsi que de calcaires cristallins. Caractères généraux du premier groupe. — Les terrains primitifs sont les plus développés à la surface de la Scandinavie; ils constituent une portion considé- rable de la Norwége, la plus grande partie de la Suède et toute ou presque toute la Finlande. [ls se montrent depuis l'extrémité sud-ouest de la Norwége jusqu'au lac Onéga, du 2° au 33° degré de longitude à l’est du méridien de Paris; dans le sens perpendiculaire, ils s'étendent sur 25 degrés de latitude , d'une extrémité à l'autre de la presqu'île scandinave , du nord-est de la Laponie jusqu’à Christian- sand et aux environs d’Helsinborg en Scanie. Sur cet espace immense, j'ai vu le terrain de gneiss présenter des caractères uniformes sous le rapport pétro- graphique et stratigraphique : partout il se compose des mêmes éléments; il offre les mêmes variations de texture et de composition; partout les mêmes roches lui sont subordonnées. Je crois donc pouvoir affirmer qu'il y a identité d'âge, de composition et de stratification dans les terrains cristallins de la Fin- lande et de la Scandinavie. Dans les lieux où le gneiss est caché par des dépôts siluriens, ceux-ci le recouvrent constamment à stratification discordante ; et dans plusieurs régions, ainsi aux environs de Brévig, dans le midi de la Norwége, et dans la Vestrogo- thie, les couches inférieures du terrain silurien s'étendent horizontalement, ou en présentant une faible inclinaison, à la surface des strates redressés du gneiss. Cette disposition, conjointement avec la différence de caractères litholo- giques, montre que le gneiss a revêlu son aspect cristallin et a été redressé avant le commencement de la période paléozoïque. Très souvent aussi le terrain de gneiss est recouvert transgressivement par les schistes du groupe semi-cristal- lin; mais dans beaucoup de localités la succession des couches est régulière- ment concordante, circonstance que ne présente en aucun point de la Scandina- vie la superposition des roches de transition fossilifères aux terrains primitifs. 30 CONSTITUTION GÉOLOGIQUE CN: 4, p. 30.) Le gneiss proprement dit est la roche fondamentale et prédominante du groupe que nous décrivons maintenant, et qui est représenté par les lettres G et r sur ma carte de la Scandinavie, Je ferai connaître plas loin une espèce de gneiss (g) qui est probablement un peu moins ancienne, et qui se lie par la concordance de stratification avec des roches dont l'origine sédimentaire est évidente, et dont les caractères pétrographiques sont analogues à ceux des roches de transition. Caractères pétrographiques du gneiss primitif. — Le gneiss primitif de la Scandinavie consiste en un mélange, à grains moyens ou à petits grains, de feld- spath gris blanc, parfois d’un gris rougeâtre, de quartz gris clair et de mica qui est habituellement d’une teinte foncée, noire, brune ou verdâtre. L'élément feld- spathique de cette roche est principalement de l'orthose ; mais souvent on y voit aussi des lames bien caractérisées d’oligoclase, surtout dans les points où le gneiss est mélangé de granite à gros grains; et souvent alors la présence de l'oli- goclase paraît dépendre du contact ou du voisinage de cette roche. Les feuillets contenus dans le gneiss sont habituellement rassemblés sous forme de lits ou bandes rubanées, qui alternent avec des strates grenus, lantôl consistant en un mélange de feldspath et de quartz, tantôt composés plus spécia- lement de l'un de ces minéraux. La succession de ces bandes plus ou moins ondulées se dessine nettement par leurs différences de texture, par la diversité des teintes et des reflets ; ainsi les rubans de mica se reconnaissent à leur struc- ture feuilletée et leur couleur foncée , noire ou verdâtre ; les lits quartzeux et feldspathiques à leur teinte plus claire, à leur texture grenue et cristalline. Lorsque le gneiss n’est point mélangé de granite, la disposition des feuillets de mica lui communique fréquemment la propriété de se diviser en plaques régulières et peu épaisses; mais dans les parties qui renferment des veines gra- nitiques, il est plus ondulé et plus difficile à cliver. En général , le gneiss de a Scandinavie paraît être peu altérable et présente une assez grande solidité, comme si les éléments qui le forment avaient été agrégés par la fusion ou par une cristallisation simultanée et développée à un très haut degré. Dans les montagnes de la Norwége le gneiss se montre souvent sur des éten- dues un peu considérables, sans être accompagné de granite ; mais en Suède et en Finlande il est rare que l'on parcoure quelques kilomètres, sans xoir du granite mélangé avec le gneiss (4). L'association de ces deux roches est souvent si intime qu'il est difficile de discerner les éléments qui appartiennent à chacune d'elles, et il y a des passages graduels de lune à l'autre. La liaison est d'autant plus parfaite, que le granite associé au gneiss présente souvent lui-même une (1) En Suède et surtout en Finlande le granite se montre plus fréquemment que le gneiss en masses homogènes et d’une étendue notable ; on y trouve quelquefois des groupes de protubérances granitiques, à peu près dépourvues de gneiss : on peut citer comme telles les collines de Rapakivi qui occupent une grande partie de la région située entre Frédérickshamn, Wilmapstrand et Viborg, dans le sud-est de la Finlande. 11 ÿ en à aussi aux environs d’Uleaborg, dans le N.-E. du golfe de Bounie ; au S.-E. de Kautokeino, en Laponie , ainsi que dans diverses parties de la Suède et de la Norwége. W11.5) DE LA NORWÉGE, DE LA SUÉDE ET DE LA FINLANDE. 31 structure veinée ou schistoïde, qui le rapproche du gneiss ; c'est pour exprimer ces analogies et ces passages entre les deux roches que les géologues du nord donnent fréquemment au granite la dénomination de granite gneissique (gneiss- granite), qui correspond à notre expression de granite veiné ou schistoïde, et qu'ils qualifient le gneiss passant au granite, en l'appelant gneiss granitique (granit -gneiss). Un peu plus loin j'exposerai les contournements que présentent habituelle- ment les strates de gneiss, quand ils sont mélangés de granite; mais auparavant décrivons les principales variétés de gneiss et les roches qui lui sont subordon- nées. Quelquefois on observe dans le gneiss du nord de l'Europe des lames feld- spathiques , plus grosses que les éléments de la masse environnante, et alors son aspect est porphyroïde : il y a, principalement en Norwége (1), de très beaux types de cette roche, qui contiennent des noyaux lenticulaires ou sphéroïdaux, larges de 2 à 10 et 15 centimètres, formés tantôt d'un seul, tantôt de plusieurs cristaux de feldspath blanc ou d’un rouge clair, agrégés ensemble, fréquemment mélangés de grains de quartz et parfois aussi de paillettes micacées (2). Roches cristallino-schisteuses dérivant du qneiss. — Les trois éléments du gneiss présentent de fréquentes modifications dans leur texture et leurs propor- tions relatives ; souvent aussi ils sont remplacés par des substances d’une nature analogue et de là résultent de nombreuses variétés. Lorsque les grains de la roche deviennent assez fins pour être indistincets, elle passe à du hornstein, sorte de pétrosilex stratifié ou schisteux. Les exemples de cette manière d’être sont assez communs parmi les schistes qui encaissent les gîtes métallifères de la Suède, ainsi il yen a aux alentours des mines de fer de Philipstad, Danemora, Ut, etc. Cette roche qui, d'après Hisinger, se rencontre assez fréquemment dans la pro- vince de Smälande, est appelée Halleflinta par les Suédois. Lorsque le gneiss perd son feldspath, il prend les caractères d’un schiste mi- cacé, si les deux autres éléments s'y trouvent dans des proportions moyennes. Parmi les roches qui dérivent du gneiss, celle-ci est l'une des principales et la plus répandue ; elle forme en Scandinavie des couches et des bandes plus ou moins vasies, qui sont interposées au milieu du gneiss primitif, en présentant la même stratification. Elles se montrent principalement dans la région centrale de (4) J'ai observé ces variétés de gneiss porphyroïde sur beaucoup de points de la Norwége, ainsi au sud du fiord de Drontheim, dans les montagnes du Dovrefeld, du Romsdal, du Justedal (vallée de Berset), et aux environs du fiord d’Urland. J'ai recueilli aussi près de la mine de Skotwäng, en Sudermanie, de beaux échantillons d’une variété analogue, où les noyaux feldspathiques sont formés d’oligoclase. Ges schistes cristallins, caractérisés par des noyaux de feldspath autour desquels se contournent les feuillets de mica, forment le pendant de certaines variétés orbiculaires de roches granitiques 6u amphiboliques, telles que celles de la Corse. (2) Il y a aussi des micaschistes, qui présentent un aspect porphyroïde, parfois même poudingi- forme, dû aux noyaux arrondis de pegmatite qui y sont enchâssés. Nous aurons l’occasion de décrire quelques-unes de ces roches d’une manière détailiée. 32 CONSTITUTION GÉOLOGIQUE (N. 1, p. 52.) la Suède, celle qui est la plus riche en mines, et c'est au milieu même du micaschiste que se trouvent une partie des mines de fer et la plupart des gîtes de sulfures métalliques. Les proportions de quartz et de mica que renferme cette roche sont suscep- tibles de grandes variations, et là où le mica devient peu abondant, elle passe au quartzschiste où quartz schisteux, subcompacte, fortement translucide. Cette manière d'être du micaschiste se rencontre assez souvent, mais elle ne forme pas de masses très considérables, comme celles que nous verrons dans les terrains semi-cristallins. Il y a aussi des jaspes ou schistes siliceux, compactes et translu- cides, ornés de teintes diverses. Les roches quartzo-schisteuses et calcaires, qui enclavent l’'amas de minerai de fer de l'île d'Utÿ, présentent des veines de jaspe discontinues, rubanées et contournées, qui sont enveloppées par la masse d'oxyde de fer. Dans le terrain de gneiss primitif de la Scandinavie on trouve quelquefois des couches interstratifiées qui se distinguent par l'absence de cristallinité, et qui offrent l'aspect d’un schiste argileux ou phyllade (Urthonschiefer) ; ce schiste, ordinairement un peu brillant, forme des masses peu étendues, qui deviennent graduellement feuilletées, et passent au micaschite. On en observe en divers endroits, ainsi dans Ja région située au nord du lac Ladoga, en Finlande ; dans les paroisses de Grythytta et Hellefors en Westmanie. Très souvent dans le gneiss et le micaschiste du nord de l’Europe le mica est remplacé en partie ou en totalité par de l'amphibole-hornblende, d'un vert noi- râtre ; alors la roche devient un gneiss amphibolique, si elle contient encore des grains de feldspath , ou bien du schiste amphibolique , si ce minéral a dis- paru avec le mica, ou ne s’y trouve qu'en petite quantité. De même on a du schiste talqueux ou chloriteux (1), si le mica est remplacé par du tale ou de la chlorite ; quelquefois aussi on observe, principalement en Norwége, de la pierre ollaire (2), qui dérive du schiste talqueux ou chloriteux. Mais les diverses variétés de ces roches sont beaucoup moins fréquentes dans le terrain de gneiss que le schiste amphibolique ; et, de même que l’on a des passages du gneiss au granite, on en à d'analogues entre les schistes amphiboliques , le diorite et la syénite. Minéraux contenus dans le gneiss. — Le grenat almandin est un minéral extrêmement commun dans le gneiss, le schiste micacé et le schiste amphibo- lique du nord de l'Europe : tantôt il forme une multitude de grains ou de noyaux cristallins, disséminés irrégulièrement dans la masse; tantôt il est concentré dans certaines couches, auxquelles on peut alors donner le nom de schiste grenatifère. (1) Comme exemple de schiste talqueux faisant partie du terrain primitif de la Scandinavie, je puis citer cette belle variété verdâtre et d’un jaune de cire, qui se trouve près de la mine de plomb et argent de Sala en Westmanie ; il y en a aussi à Garpenberg et Falun en Dalécarlie. (2) La pierre ollaire forme près du lac Raudal, dans le terrain gneissique du Langfeld, une bande un peu considérable. (N:1,p.55) DE LA NORWÉGE, DE LA SUÉDE ET DE LA FINLANDE. 33 Plusieurs autres silicates assez fréquents dans les mines de fer oxydulé de la Scandinavie forment autour de ces gîtes de petites bandes, qui sont parallèles à Ja stratification et semblent remplacer le gneiss. Cette disposition est claire- ment marquée sur les mines voisines d'Arendal; on y observe des lits chargés de mica, d’amphibole, de pyroxène, de grenat, d'épidote, etc.; ils forment comme les épontes des amas de fer oxydulé. Le gneiss du nord de l'Europe est très riche en minéraux ; mais les substances qui s’y (rouvent contenues n’en dépendent pas toujours essentiellement, et beau- coup d’entre elles sont liées aux veines de granite ou d'amphibolite que renferme le gneiss. Néanmoins parmi les minéraux qui sont enchâssés dans le gneiss même ou dans le micaschiste et qui paraissent se rattacher à la cristallisation de ces roches, je citerai, outre les éléments essentiels du gneiss : l’oligoclase, l’albite, l'amphibole, le pyroxène, le grenat, l'épidote, le disthène, l'antophyllite, la dichroïte, la falunite, l’aspasiolite ou dichroïte hydratée, la tourmaline, l'éme- raude, la topaze, la staurotide, l’apatite, le sphène, le Litane rutile et le gra- phite (1). Quelquefois ces minéraux sont enchâssés dans la masse même du gneiss, mais c’est ordinairement dans des druses qu’ils se montrent avec des formes cristallines bien nettes ; ainsi l’oligoclase se trouve fréquemment en lames dans le gneiss, mais les plus beaux cristaux proviennent de druses situées dans le terrain gneissique de l'île Tromôe, près d'Arendal; ils sont accompagnés de fer oxydulé, d'épidote , grenats et chaux carbonatée. C'est aussi sous forme de nids, dans le gneiss, que se trouvent l'achmite et l'idocrase des environs de Kongsberg en Norwége. Calcaires cristallins de la Scandinavie. — Les terrains primitifs du nord de l'Europe renferment un assez grand nombre de gîtes de calcaires cristallins, formant des couches ou masses lenticulaires intercalées dans les schistes : leur texture est tantôt grenue ou saccharoïde, tantôt lamelleuse; ou bien elle offre ces deux caractères à la fois. Des essais chimiques exécutés sur beaucoup d'échantillons m'ont démontré que les calcaires primitifs de la Scandinavie contiennent ordinairement quelques centièmes de magnésie, et sont dolomitiques à divers degrés ; mais ils consistent rarement en véritable dolomie. Des carbo- nates de fer et de manganèse leur sont quelquefois aussi associés, et l'on trouve fort souvent dans ces roches du mica, de l’amphibole trémolite, des grenats et de la serpentine. Voici d’autres minéraux qui s’y rencontrent aussi, mais d'une (1) La sordawalite ou bisilicate d’alumine, de fer et magnésie (As2+-Ms?), que l’on cite quelque- fois comme se trouvant dans le gneiss, n’en fait réellement pas partie; elle est contenue dans un filon épais de 40 à 50 centimètres, qui coupe le gneiss près de l’église de Sordawala, suivant la direc- tion N.-S., avec une forte pente à l’est. Ce filon présente deux couches superposées : la supérieure, épaisse de quelques centimètres seulement, est formée de sordawalite, en masse compacte et brillante, d’un beau noir; la couche inférieure consiste en une matière amorphe, d’un noir brunâtre, qui paraît être du phosphate de fer. | SOC. GÉOL — 2° SÉRIE. T. VI. — Mém. n° 1. 5 34 CONSTITUTION GÉOLOGIQUE (N: 1, pe 54) manière moins fréquente (4) : Le tale, la chlorite, la pikrophylle, les trois sous- espèces trémolite, actinote et hornblende, l’asbeste, le pyroxène, l'orthose, l'oligo- clase et l'albite, l'idocrase, la wollastonite, la chaux trisilicatée ou œdelforsite, le pyrallolite, la paranthine, la scolexérose ou wernérite blanche, la préhnite, la rosite, la chondrodite, la sphène, le spinelle, le corindon, la chaux fluatée et phosphatée, la tourmaline et le disthène. La présence de ces minéraux paraît due au développe- ment-d’actions métamorphiques, produites vraisemblablement sous l'influence de roches granitiques, car j'ai observé qu'il y en a presque toujours au voisinage ou au contact même de ces masses calcaires. Les calcaires cristallins de la Scandinavie et de la Finlande sont interposés, soit dans le gneiss proprement dit, soit dans le schiste micacé, plus rarement dans le schiste amphibolique ; quelquefois ils se montrent à la séparation de ces roches et du granite : on en voit fréquemment aussi au contact des amas d’oxyde de fer, ainsi à Danemora, Norberg, Utô, etc. Souvent il y en a des masses considérables, dont l'épaisseur est de plusieurs centaines de mètres : quelquefois on observe une série de grosses lentilles calcaires, placées à la suite les nnes des autres, suivant des plans de stratification peu éloignés ; ainsi elles forment des bandes allongées dans un sens parallèle à la schistosité ou à la stratification générale du terrain. Une pareille disposition est assez fréquente chez les masses calcaires des terrains paléozoïques, surtout dans l’ouest de la France ; bien sou- vent, d’ailleurs, ces dernières ne présentent pas plus de régularité dans leur con- figuration que celles contenues dans les terrains primitifs du nord de l'Europe : ainsi les irrégularités locales de ces dernières ne doivent pas empêcher de les considérer comme ayant pu être formées originairement par voie aqueuse ou sédimentaire. Calcaire d'Aker riche en minéraux. — Je vais signaler deux de ces bandes, qui se montrent sur une longue surface, l’une dans la Sudermanie, l’autre sur la lisière de cette province et de l'Ostrogothie. La première s'étend de l'ouest quelques degrés nord à lest quelques degrés sud, entre le lac Hjelmar et la partie méridionale du Mälar : elle est exploitée en plusieurs points, notam- ment dans les paroisses d’Husby et d’Âker, soitcomme pierre à chaux, soit comme fondant pour Îles hauts-fourneaux des environs. L'une des carrières les plus remarquables est celle qui alimente l'usine d'Âker et qui est située à 4 ou 5 kilomètres à l’ouest de cet établissement ; la pierre calcaire que l'on y exploite renferme environ 20 pour 100 de magnésie. Elle est en contact du côté méridional avec du granite à gros grains; et même elle est traversée par un filon de ce granite, dans lequel on voit de gros cristaux d’orthose rouge de chair, des lames d’oligoclase gris blanc, avec du quartz hyalin et de larges feuillets de (1) Dans cette énumération, je fais abstraction des minéraux métalliques proprement dits, qui se trouvent en assez grand nombre dans les calcaires primitifs de la Scandinavie. (N.1,p.55) DE LA NORWÉGE, DE LA SUÉDE ET DE LA FINLANDE. 35 mica gris blanc et noirâtre, parsemés çà et là : c'est probablement au voisinage de ce granite, qu’il faut attribuer la présence de nids de feldspath, quartz et mica, que j'ai observés dans la pierre calcaire. La même cause a dû aussi contribuer au développement des deux minéraux remarquables qui s’y trouvent abondamment, le spinelle et la chondrodite : en effet, c’est dans le voisinage du granite qu'ils m'ont paru être le plus multipliés ; ils semblent former des bandes parallèles aux plans de stratification ou de divi- sion de la masse calcaire, plans qui sont à peu près verticaux et dirigés dans le sens de l'O.-N.-0., en présentant de légères ondulations. La chondrodite est abondamment disséminée au milieu de Ja pierre calcaire, sous forme de noyaux cristallins d’un jaune brunâtre, dont la largeur varie de quelques millimètres à 2 ou 3 centimètres. Il y a une proportion un peu moindre de spinelle : il est translucide, bleuâtre, ou d’un bleu violacé, rarement cristallisé d’une manière {out à fait nette; mais beaucoup de noyaux ont la forme parfaitement reconnaissable d’un octaèdre régulier. Dans certaines parties de cette pierre calcaire, on trouve une assez grande quantité de grains cristallins, d'un beau rose, dont on à fait une nouvelle espèce silicatée (1), qui a reçu le nom de ro- site, d'après sa couleur. La paranthine se rencontre quelquefois , mais plus rarement dans ce calcaire ; la trémolite blanche ou d’un blanc verdâtre y est plus commune. La serpentine y est encore plus développée : elle constitue des filets et veines discontinues, vertes ou d’un vert jaunâtre, qui se ramifient au milieu de la masse calcaire, le plus souvent dans un sens parallèle à la stratification, quelquefois dans un sens oblique. Il y a aussi des noyaux dont le volume varie de la grosseur d’un pois à celle d’une noix et qui ont parfois une faible apparence de cristallinité. Leur teinte est un peu variable, d'un vert clair et d’un vert foncé, vert brunâtre ou jaunâtre ; leur cassure inégale offre l'éclat gras de la serpentine : ces noyaux sont réunis en files suivant certaines directions, ils forment comme des cha- pelets à peu près parallèles à la stratification. De tels noyaux, d'apparence serpentineuse, sont fréquents dans les calcaires cristallins et métallifères de la Suède; ainsi il y en a une grande quantité dans le calcaire cuprifère de Falun. Bande calcaire du golfe de Norrkôping. — Une autre bande calcaire, d’une étendue un peu considérable, se voit le long de la rive septentrionale du golfe de Norrküping; il y existe, à Kalmorden, plusieurs carrières d'où l'on extrait du marbre employé comme objet de décoration. La roche est moins riche en miné- raux particuliers que celle d’Aker; néanmoins jy ai remarqué dans quelques couches des grains de chondrodite : il s'y trouve une grande quantité de trémo- lite d’un vert clair et du mica en petits feuillets gris blancs et d’un gris verdâtre. La serpentine verdâtre et d’un jaune brunâtre y forme de nombreuses veines et (1) C’est un silicate alumineux et alcalimagnésifère. 36 CONSTITUTION GÉOLOGIQUE CN 4, p. 56.) donne à ce calcaire quelque analogie avec les marbres veinés et serpentineux des Alpes, qui sont beaucoup moins anciens. À Kälmorden les veines sont générale- ment disposées dans le sens de la stratification, c'est-à-dire de l'O. 5° à l'O. & N., avec une inclinaison voisine de la verticale et plus ordinairement au S. qu’au N. Le marbre de cette localité présente dans la cassure un mélange de parties lamel- leuses et de parties grenues, saccharoïdes ; il est associé à dés couches de gneiss, de schiste micacé et de schiste amphibolique, dans lesquelles on remarque des filons et masses irrégulières de granite. C'est à la même zone calcarifère que paraît se rattacher, quoique se trouvant un peu plus au nord-est, la bande de calcaire cobaltifère de Tunaberg, qui est associée à des schistes cristallins de la même nature et suivant à peu près la mème direction; mais ici le granite qui se montre en contact immédiat avec les couches calcaires, leur à imprimé de fortes ondulations. Masses calcaires dans le terrain primitif de la Norwége. — Le terrain primitif renferme en Norwége , comme en Suède, des masses calcaires d’une grande éten- due ; il y en a plus dans les formations cristallines de ces deux pays que dans le terrain silurien de certaines contrées , de la Bretagne par exemple. De toutes les régions de la Norwége, celle où le calcaire primitif se montre le plus abondam- mentestla partie méridionale du Nordland ; on y voit une vaste bande calcaire se prolonger depuis Solstad, sous 65° 19" de latitude, jusqu’au Ranenfiord ; dans le Prugledal , il y a encore une grande masse calcaire située sur le prolongement de la précédente et disposée, d’après M. Keilhau (Voyez Gea norwegica, p. 345), en furme de demi-lune. Ce calcaire cristallin est souvent magnésifère : en certaines parties il est accompagné de micaschiste grenatifère. Un peu plus au nord, dans Ie Beïerfiord, sous 67° de latitude, il y a encore une bande calcaire un peu étendue, qui est interposée dans le terrain de gneiss. Ces masses calcaires du Nordland ne renferment pas de minéraux remar- quables, comme celles de la Suède, de la Finlande et du midi de la Norwége. Les nombreux silicates que l’on trouve dans celles-ci me paraissent s'être déve- loppés principalement sous l'influence métamorphique du granite; car cette roche plutonique se montre habituellement dans le voisinage, ou au contact même des calcaires les plus riches en minéraux silicatés. Les phénomènes qui ont donné naissance aux amas de minerai de fer enclavés dans le terrain gneissique ont aussi contribué à produire les cristallisations va- riées que l’on observe soit dans les schistes, soit dans les calcaires adjacents. En effet, beaucoup de mines de fer, celles d'Arendal et de Philipstad, par exemple, sont des gisements très riches de minéraux. Je citerai ici un exemple de contact remarquable que j'ai observé près de la mine de Fôrola en Sudermanie : on voit une petite masse de fer oxydulé à larges lames, interposée entre du gra- nile à gros grains et du calcaire lamelleux, translucide, qui contient beaucoup de nodules serpentineux d’un vert foncé , de grandes lames d’hornblende noire GHPp.57) DE LA NORWÉGE, DE LA SUËDE ET DE LA FINLANDE. 37 et des grains cristallins de chondrodite jaunâtre ; j’y ai remarqué aussi de rares cristaux de spinelle bleu, semblable à celui d’Aker. L'association de ce dernier minéral avec la chondrodite n’a pas lieu seulement dans la Sudermanie : on l’ob- serve encore dans des gîtes calcaires en Finlande, et en Norwége aux environs de Christiansand ; elle a encore été signalée dernièrement par M. Delesse , dans les calcaires cristallins associés au gneiss des Vosges. Le porphyre quartzifère et l’eurite, qui ne sont que des roches granitiques dans un état de cristallisation incomplet, se voient quelquefois, de même que le granite, en contact avec des masses calcaires du terrain primitif; ainsi, dans mon mémoire sur les gîtes métallifères de la Suède, Norwége et Finlande, j'en ai cité des exemples à Danemora et à Klackberg (paroisse de Norberg). Dans ces deux localités, le calcaire grenu et lamelleux est mélangé de divers minéraux, de mica, d'amphibole, d’asbeste et de grenats. De plus, il est traversé par des skôlar, c’est-à-dire par des veines de chlorite, de talc ou de serpentine, qui sont ondulées, présentent un aspect lisse et strié. Quelques-unes sont disposées dans le sens des couches, mais la plupart coupent obliquement et en divers sens les amas de fer oxydulé et les roches qui les encaissent. Abondance de minéraux dans les calcaires cristallins de la Finlande.—Parmi les gites de calcaires primitifs les plus riches en minéraux silicatés, on doit citer celui de Pargas, une des îles situées à l’entrée du golfe de Botnie, près d’Abo. On y trouve de l’amphibole hornblende, de l’actinote ou pargassite, du pyroxène blanc et vert, du mica noir et jaune, du pyrallolite (variété de tale), de la stéatite, du grenat essonite, de la wollastonite, de la chondrodite jaune et brune, de la préhnite, de la paranthine, de la sphène brune et jaune, du pléonaste ou spinelle noir, de la chaux phosphatée verte et bleue de ciel, de la chaux fluatée de di- verses couleurs. Ces minéraux, inégalement répandus dans les couches calcaires, leur donnent des teintes diverses, grises, brunes, jaunes, vertes et bleuâtres. Les masses de calcaire lamelleux contenues dans les terrains primitifs de la Finlande présentent les mêmes caractères géologiques qu’en Suède; les minéraux qui s’y trouvent le plus habituellement sont le mica, lamphibole, le grenat et la serpentine. Je signalerai ici l’une des masses les plus remarquables par les cir- _constances de son gisement : elle est située à Oppivara, près du village de Pitkä- ranla, aux environs d'Imbelax, sur le côté nord-est du lac Ladoga : ici le calcaire est à larges lames, accompagné de micaschiste dirigé du N.-E. au S.-0., et _il est en contact avec du granite. Dans la masse calcaire se ramifient et se fondent des veines et nodules serpentineux de diverses couleurs, tantôt d'un jaune clair ou d’un jaune foncé, tantôt verts. On y voit aussi (fig. 26) de nombreux filons de fer oxydulé, mélangé d’une matière verte, grenue, qui est probablement pyroxénique. Autour et à l'intérieur même des filons de fer oxy- dulé, serpentent des filets et mouches d’idocrase, en petits cristaux jaunes, demi-transparents, et l’on y trouve aussi de la chaux fluatée bleuâtre. La dispo- 38 CONSTITUTION GÉOLOGIQUE (21, p.58.) sition branchue et ondulée des filons de fer oxydulé montre que cette matière s'est injectée dans un état de mollesse pâteuse ; les veines de serpentine doivent être antérieures au fer oxydulé, car elles sont coupées par lui. Roches cristallino-schisteuses sur le côté nord-est du lac Ladogo. — La région qui borde la rive nord-est du lac Ladoga et où se trouve la carrière d'Op- pivara est une des parties les plus intéressantes de la Finlande : elle diffère un peu du reste de la contrée, en ce que le gneiss proprement dit y est peu abon- dant ; il est en partie remplacé par des couches de schiste micacé, de schiste am- phibolique et de pierre calcaire, qui font probablement partie des assises supé- rieures du terrain gneissique, et qui certainement sont antérieures au terrain silurien des environs de Saint-Pétershbourg ; car elles sont redressées verticale- ment, tandis que les couches siluriennes qui affleurent à l'extrémité orientale du golfe de Finlande sont horizontales. Les schistes cristallins de la partie nord -est du Ladoga, dirigés en général du N. 5° à 10° O. au S. 5° à 10° E., forment sur le bord de ce bassin des rochers escarpés et d’un aspect pittoresque, qui ont valu à cette contrée la dénomination de petite Suisse finlandaise. Sur la presqu'ile montagneuse de Haukka-Selka, située proche du village de Kiddila, on a une succession alternante de bancs de schiste micacé noir et d’am- phibolite schisteuse, composée principalement de lames d'hornblende verdâtre, couchées dans le même sens et entremêlées de feuillets de mica noir. La partie centrale de la montagne est composée de granite à gros grains, se rapprochant de la pegmatite, contenant beaucoup de feldspath rouge (orthose et oligoclase) et quelques larges lames de mica. Cette roche plutonique paraît s’être injectée entre les couches de schiste micacé et amphibolique, et les avoir inclinées, partie à l’est, partie à l’ouest, suivant le sens de la pression qu’elle a exercée sur elles (voy. les fig. 23, 24 et 25). Leur inclinaison est de 70 à 75° degrés ; sur le côté occidental de la montagne, elles plongent vers l’ouest, et sur le côté oriental vers l'est. Le granite ne paraît pas s'être élevé jusque sur la partie La plus haute de la montagne, il s’est épanché un peu au-dessous du sommet; à la pointe de la presqu'ile le sol s’abaisse peu à peu, et l'on voit le granite s'étendre jusqu’au bord du lac. Auprès affleure du micaschiste, dont les couches sont ici très ondu- lées et peu éloignées de l’horizontalité, en conservant néanmoins la même direc- tion générale, au N. quelques degrés ©. Dedans est intercalée une multitude de lentilles disposées en manière de chapelet et consistant en un mélange de chaux carbonatée lamelleuse et translucide, avec des lames d’amphibole blanche et verte. En certaines parties il y a des faisceaux radiés, où les fibres entrecroisées d'amphibole sont accompagnées de paillettes de mica blanc : le carbonate calcaire semble servir de ciment à ces minéraux silicatés; mais dans les parties superfi- cielles les eaux pluviales l'ont dissous à la faveur de l'acide carbonique, et les faisceaux de trémolite sont restés en saillie. Dans la même région se trouve l’île de Passa-Saari, remarquable par la dispo- Wi,p.%) DE LA NORWÉGE, DE LA SUÉDE ET DE LA FINLANDE. 39 sition des roches qui la constituent : ici les schistes cristallins ne présentent point une direction rectiligne, comme à Haukka-Selka, mais ils se recourbent circulairement autour de la partie centrale de l'île, qui consiste en une masse de granite à grains moyens, traversée par des filons de granite à gros grains. Comme les schistes qui forment la partie périphérique de l’île sont inelinés vers le lac, il est clair que c’est le granite qui a soulevé cette île et a relevé autour de lui le terrain schisteux, primitivement horizontal (4). M. Albrecht, ingénieur saxon au service du gouvernement finlandais, qui a eu l’obligeance de me montrer cette localité et avec lequel j'ai parcouru une grande partie de la Finlande, m'a assuré qu’étant arrivé en ce pays avec les idées neptuniennes que l’on professait jadis à l’école de Freyberg, il avait été conduit à adopter le système plutonien par l'étude des terrains eristallins de la Finlande, et que la vue de l'île de Passa-Saari avait été une des causes déterminantes de sa con- version. Il s’y trouve (voyez les figures 20 et 21), une série de couches de schiste micacé et de schiste amphibolique, qui décrivent des lignes courbes, à peu près concentriques et sont inclinées régulièrement vers le dehors : dans le micaschiste est interposé un banc de graphiteépais d'environ 4 mètres. En certaines parties ce minéral est presque pur ; ailleurs il est mélangé de feuillets de mica et passe même à un schiste micacé graphiteux. Dans les couches adjacentes se trouvent de petits lits de calcaire lamelleux ; et, si l’on s’avance un peu vers l'intérieur de l'île, on y voit ces lits augmenter d'épaisseur : alors s’y entremêlent des faisceaux de trémolite blanche et légèrement colorée en vert. Il y a une succession de couches dans lesquelles prédominent, tantôt la trémolite, tantôt le carbonate calcaire. À côté de Passa-Saari se trouve l’ilot de Kandasaari, formé de granite rouge à grandes parties : les cristaux d’orthose y atteignent jusqu’à 80 centimètres de largeur ; ils sont entrecoupés par des veines ou filets de quartz ; le mica est peu abondant et semble disposé par nids. Le graphite, dont je viens de signaler la présence à l'île de Passa-Saari, se rencontre en plusieurs endroits dans les terrains primitifs de la Finlande, de la Suède et de la Norwége ; il est même exploité dans la paroisse de Norberg en Westmanie. La province de Nordland est une des parties de la Norwége où il se montre le plus abondamment; il y en a dans le Ranenfiord, et l’on en trouve en plusieurs endroits à l'île Hindôe, dans des roches granito-pneissiques; mais là il paraît former en certains points des veines, sur l’origine desquelles il peut y avoir de l'incertitude. (4) On pourrait objecter que le soulèvement circulaire des roches schisteuses, autour de ce dôme granitique, n'aurait pu avoir lieu-sans qu’il en résultât des déchirures : effectivement il a dû se produire des ruptures dans deux sens différents, les unes dans un sens parallèle à Ja direction des schistes , les autres orientées dans un sens perpendiculaire et offrant une disposition divergente, Les premières ne peuvent être contestées ; quant aux secondes, elles doivent exister aussi, mais il est difficile de les apercevoir, car le sol de cette île est en grande partie couvert de forêts et de marais. a CONSTITUTION GÉOLOGIQUE (N. 4, p.40) Dans les gîtes de fer oxydulé de Danemora, qui font partie du terrain pri- mitif de la Scandinavie, on a trouvé des fragments d’un combustible minéral se rapprochant de l’anthracite ou de la houille sèche : il semblerait donc que, dès celte époque ancienne, des végétaux commençaient à croître à la surface du globe. On est ainsi conduit à supposer que les roches schisteuses dans lesquelles on trouve ces matières ont été formées d’abord par voie de sédimentation et ont pris ensuite un aspect cristallin. Cette manière de voir est encore appuyée par la présence dans le gneiss du nord de l'Europe de nombreuses masses calcaires interstratifiées , de bancs de thonschiefer ou schistes argileux, analogues à des schistes de transition, de schistes siliceux, de quartzites où quartzschistes, et enfin de couches régulières, alternativement feldspathiques, quartzeuses et mi- cacées qui, par leur structure et la régularité de leur stratification, ressemblent quelquefois à des grès modifiés et devenus cristallins. Origine probable du qneiss de la Scandinavie. — Je présume qu'une grande par- tie du gneiss de la Scandinavie, avant de revêtir son aspect cristallin, a formé un grès feldspathique , quartzeux et micacé, analogue aux grès arkoses ou aux psammites. Les éléments du dépôt, au lieu d'être mélangés irrégulièrement, présentaient vraisemblablement, comme aujourd'hui, une succession de bandes micacées et de bandes quartzo-feldspathiques. Ce mode de distribution des élé- ments est facile à concevoir, si l'on considère que le mica étant feuilleté reste plus facilement en suspension dans l’eau que le quartz et le feldspath. D'ailleurs les dépôts d’atterrissement actuels nous en offrent des exemples; j’en ai observé sur divers points, en Laponie, en Norwége et en Suède, au bord des fleuves qui charrient des détritus granitiques. J'ai aussi remarqué sur les plages de la Bretagne des sédiments analogues, qui me paraissent éclaircir l’origine d’une circonstance que l’on pouvait croire parti- culière au gneiss : on sait que les lits de mica qui s’y trouvent ne forment pas des couches régulières et continues, mais des bandes plus ou moins étendues, variables en épaisseur, et offrant un aspect rubané, Or, à la surface des plages où les détritus granitiques livrés aux eaux de la mer viennent former des dépôts d’alluvions, on voit des bandes rubanées de mica, dont le contour est ondulé, et qui sont allongées parallèlement au littoral. Cette substance est soulevée par les eaux du flux ou de la vague montante, puis déposée en forme de larges rubans, dont l'épaisseur varie d’un point à l'autre. Si l’on suppose que des dépôts de cette nature soient soumis à l’influence modifiante du granite, ils seront changés facilement en gneiss, car il suffira que le feldspath , le quartz et le mica dont ils sont composés , s'agrégent de manière à prendre une‘ texture cristalline (1). Beaucoup de gneiss provenant de la (1) J'ai souvent observé en étudiant des dépôts arénacés que les grains de feldspath conservent en partie leur forme cristalline ou lamelleuse dans le transport et dans l’acte de la sédimentation ; ils s’ar- (owp #4) DE LA NORWÉGE, DE LA SUÉDE ET DE LA FINLANDE. hA sédimentation de détritus arrachés au granite, leur liaison avec cette roche est très naturelle; on comprend aussi que le gneiss se montre le plus souvent en strates inclinés, au lieu de reposer horizontalement sur le granite : dans les contrées où le granite est très développé, comme en Scandinavie, il à fait plu- sieurs éruptions, et le gneiss déposé sur le littoral, autour des premières masses, aura été redressé par de nouveaux soulèvements, ou pénétré par de nouvelles injections de granite. Cependant les éléments du gneiss n'ont probablement pas toujours préexisté dans la roche au moment de son dépôt ; alors, pour se constituer , le gneiss aura dù former de nouvelles combinaisons, et souvent emprunter quelque chose au granite: ainsi se seront produits ces phénomènes de contact propres aux roches pyrogènes, et dont le résultat est de faire naître dans la partie adjacente des terrains stratifiés des minéraux semblables à ceux dont elles sont composées. Si l'on considère que le feldspath et le mica ont de la tendance à se décomposer sous l'influence des agents atmosphériques, et que, après avoir été altérés, ils renferment moins d’alcalis que les minéraux intacts, il est aisé de comprendre que souvent, dans la formation du gneiss, l'influence du granite ne se sera pas bornée à un échauffement de la roche, mais aussi qu'il aura dù céder les principes alcalins nécessaires à la régénération du feldspath. Minéraux métalliques contenus dans le gneiss de la Scandinavie. — Nous avons cité précédemment les minéraux silicatés que renferment le gneiss, le mica- schiste et les masses calcaires qui les accompagnent : ces roches sont aussi fré- quemment mélangées de pyrites et d'oxyde de fer. Les minerais de fer oxydulé et oligiste y forment des amas considérables par leur puissance et leur étendue; d’ailleurs les sulfures de zinc, de cuivre, de plomb et d'argent, les sulfarsé- niures de fer et de cobalt s’y trouvent en assez grande abondance pour donner lieu à d'importantes exploitations (voyez mon mémoire sur les gîtes métallifères, Annales des mines, l° série, t. XV). D'autres substances métalliques, du chrôme, du nickel, du bismuth, de l’anti- moine, du molybdène, etc., s’y trouvent aussi, mais plus rarement. Quelquefois les minerais forment de véritables filons, qui coupent les couches ou feuillets du terrain primitif; il en est ainsi des filons d'argent natif et sulfuré de Kongs- berg et de plusieurs veines aurifères. Mais généralement les sulfures métalliques imprègnent les roches schisteuses ; et, comme cette disposition est la plus déve- loppée dans les mines du nord de l’Europe, j'ai proposé de généraliser la déno- mination de fahlbande attribuée par les mineurs de Kongsberg aux assises pyri- tifères que traversent les veines d'argent natif, en l’appliquant à toutes les bandes de roches schisteuses (1) qui sont imprégnées de sulfures métalliques, de fer, de rondissent plus difficilement que les grains de quartz, circonstance qui dépend peut-être de la facilité de leurs clivages. (4) Il y a sur plusieurs points du Nordland (Voyez Gœa Norvegica , p. 34h et 349) des schistes SOC. GÉOL. —: 2° SÉRIE. T. VI. — Mém. n° 1. 6 s 42 CONSTITUTION GÉOLOGIQUE (N: 4, p. 42.) zinc, de cuivre, elc.; on peul dire alors gisement en fahlbande, comme on dit gisement en filon ou en amas. Je ne m'arrêterai point à décrire ici les dépôts métallifères du nord de l'Europe; je renvoie le lecteur au mémoire spécial que j'ai publié sur ce sujet dans les Annales des mines, l° série, t. XV. Ordre de succession des diverses roches cristallino-schisteuses. — Dans l’est et le midi de la Suède, de même qu’en Finlande, les différentes sortes de roches cristallino-schisteuses ne paraissent pas offrir d'ordre de succession bien marqué : c'est le gneiss qui est la roche prédominante ; souvent il alterne avec des assises de micaschiste, et renferme des masses interstratifiées de calcaire cristallin. Mais, dans la région occidentale de la Suède et dans certaines parties de la Norwége, les assises supérieures du terrain gneissique, celles qui supportent le groupe semi-cristallin, affectent spécialement les caractères d'un micaschiste plus ou moins quartzeux, sur des étendues et des épaisseurs considérables : ainsi c'est ce qui a lieu dans le massif d’Areskutan et sur le Dovrefield. D'ailleurs la suc- cession des deux sortes de roches, gneiss et micaschiste, a lieu sans apparente discordance de stratification; on observe même un passage pétrographique de l'une à l’autre. Puissance du terrain de gneiss en Scandinavie. — Dans les régions basses de la Scandinavie, le gneiss est trop souvent pénétré de granite, et il offre des chan- gements d'inclinaison trop fréquents pour qu’il soit possible d’en apprécier la puissance; mais l'étude stratigraphique de la Norwége et de la portion adjacente de la Suède permet d’en obtenir une appréciation approximative. En effet, du 64° au 64° degré de latitude, les feuillets de gneiss qui supportent le terrain de schistes semi-cristallins s'enfoncent sous ces schistes, et leur pendage se main- tient souvent dans le même sens, c'est-à-dire vers l’est ou le sud-est, jusqu’à une distance de plusieurs kilomètres : ainsi c’est ce qui a lieu sur une étendue de plus de 8 000 mètres entre les vallées de Fortun et de Justedal, et de plus de 30 000 mètres dans la vallée de Lessôe, à l’ouest du terrain de schistes semi- cristallins. Cette permanence dans le sens du pendage a lieu souvent sans que la direction varie beaucoup, et dans de telles conditions, que l’on peut considérer les couches qui plongent de la même manière comme représentant un même ensemble de lits superposés : on est ainsi conduit à attribuer au terrain primitif du nord de l'Europe une épaisseur comprise entre 5 et 10 000 mètres. Cette esti- mation est vraisemblablement plutôt en dessous qu'en dessus de la réalité; car les couches qui s’enfoncent sous les schistes semi-cristallins doivent représenter la partie supérieure du terrain de gneiss. Directions générales du terrain de gneiss dans les diverses régions du nord de cristallins, analogues à ceux de Kongsberg, et qui, d’après M. Keiïlhau, sont également imprégnés de pyrites, de manière à former des fahlbandes comparables à celles du midi de la Norwége: c’est ce que l’on voit à l’île Rodôe, et dans le Ranenford, vers le Rôdfeld, où les fahblandes renferment, avec la pyrite de fer, de la blende, de la galène et de la pyrite cuivreuse. (N.4,p.45) DE LA NORWÉGE, DE LA SUÉDE ET DE LA FINLANDE.’ 43 l'Europe. — Les directions des schistes cristallins du nord de l’Europe varient fréquemment : en quelques parties elles semblent même dépourvues de régularité; et, au premier abord, on pourrait croire qu’elles ne sont assujetties à aucune loi : mais, si l’on fait des observations stratigraphiques multipliées , on reconnaît dans chaque région une ou plusieurs directions dominantes. Déjà nous avons vu que, sur la côte N. E. du lac Ladoga, les schistes cristal- lins sont généralement dirigés entre le N. 5° et le N. 10° 0. Dans les autres parties de la Finlande, les directions du gneiss les plus fréquentes, indépendamment de celle-là, sont voisines de l'E, 25° à 30° N.; il y en a aussi un certain nombre entre le N.-0. et l'O. 100 N. Dans la partie centrale de la Suède, entre le 59° et le 61° degré de latitude, les directions les plus habituelles sont comprises entre le N. et l'E. N. E. Mais dans la Sudermanie, qui se trouve un peu plus au sud, et dans le nord de l'Os- trogothie, le gneiss et les roches qui lui sont associées courent plus ordinairement de l'O. quelques degrés N. à l'E. quelques degrés S. Dans la région sud-ouest de la Suède, dans le voisinage du littoral et de la frontière norwégienne, on remarque de très fréquentes directions entre le N. etle N. N. 0. De même dans le gneiss de la Norwégeil y a des directions dominantes, qui varient d'une région à l’autre : ainsi, aux environs d’Arendal, la ligne N. E. re- présente à peu près l'orientation moyenne du gneiss et des amas de fer oxydulé qui y sont enchâssés. Mais un peu plus au nord , aux environs de Kongsberg, dans le pays où coalent le Lauven-Elv et le Snarum-Elv, les schistes cristallins ont une direction tout à fait différente, et qui varie en général du N. au N. N.0. Dans la partie méridionale de la Norwége , du 58° au 59° degré de latitude, et sous les longitudes de 4 à 5° à l’est de Paris, les directions du gneiss, de même que celles des rivières qui arrosent cette contrée, s’écartent peu de la ligne N.S. Près de Bergen, les schistes cristallins décrivent une courbe parabolique, d’abord observée par M. Nauman (Beyträge zur Kenntniss Norwegen's, 1. 1, p- 171). Au nord de cette ville, la direction N.-0. est prédominante, Le gneiss qui forme le Langfield et la partie septentrionale du Justedal court de FE. à l'O., à peu près parallèlement aux schistes cristallins de la Sudermanie et du nord del'Ostrogothie. Un peu plus au nord, sur le Dovrefield et sur la côte située au nord-ouest, l’E. N. E. est la direction dominante (1). D'ailleurs, dans toute la région littorale qui s'étend depuis le Sognefield, sous le 61° degré de latitude, jusqu’au 65° degré, les directions du terrain de gneiss sont presque tou - (4) Je suis heureux de voir que les résultats dont j'ai exposé l’ensemble dès l’année 1850 (Bulle- tin de la Société géologique, 2° série, t. VII, p. 683) se trouvent confirmés par les observations stratigraphiques relatives à la Norwége, que M. Keilhau a publiées à Christiania peu de temps après moi. Bien qu’il ne pût pas y avoir de communication entre nous et que nos idées théoriques fussent différentes, il y a, entre l'énoncé général de mes observations et le résumé des faits qu'a présenté M. Keiïlhau, un accord aussi parfait qu’on peut le désirer. bh (CONSTITUTION GÉOLOGIQUE (N.4, p. 44.) jours comprises entre le N. 35°E. et l'E. Mais du 65 au 66° degré de latitude, dans le nord de la province de Drontheim et le midi du Nordland , entre le Vefs- fiord et le lac Rôs, il y a, suivant M. Keiïlhau (voir Gœa Norwegica, p. 373), une zone de gneiss qui offre une constance de direction remarquable, et court du N. au S. Quant aux schistes cristallins situés plus au nord , jusqu’à l'extrémité septentrionale de la Scandinavie , leur disposition stratigraphique est un peu variable ; néanmoins, les directions les plus fréquentes sont comprises entre le N. 15° 0. etle N. 40° E,; il y en a aussi dans le voisinage de la ligne E.-0. D'ailleurs on peut dire, d’une manière générale, que les roches schisteuses de la Scandinavie offrent plus fréquemment des directions comprises entre le nord et l’est qu'entre le nord et l'ouest ; plus loin nous tâcherons de déterminer d’une manière précise les axes des principaux groupes de directions, et nous en dédui- rons l'orientation des systèmes de soulèvement. Toutefois j'ai observé qu’en Finlande, en Suède et dans la zone limitrophe de la Norwéce, les roches schis- teuses sont généralement dirigées dans un sens à peu près parallèle à l’axe lon- gitudinal des inégalités de la surface du sol. Mais dans la partie de la Norwége qui borde le littoral, partie où la plupart des vallées ont été. produites par déchirement, l'orientation des roches est souvent transversale par rapport à celle des accidents orographiques. Inclinaisons du terrain de gneiss dans les diverses régions du nord de l’Europe. — Malgré ses ondulations, le gneiss de la Scandinavie présente souvent dans son allure générale autant de régularité que beaucoup de formations schisteuses dont l'origine sédimentaire est démontrée par la présence de restes organiques; quelquefois, en effet, il conserve des directions et inclinaisons presque constantes sur des étendues de plus de 10 myriamètres. Dans la plus grande partie de la Suède et de la Finlande, l’inclinaison du terrain gneissique est forte et presque toujours supérieure à 45°; elle varie ordinairement entre 60 et 90°. Mais, dans les régions élevées de la Norwége et dans les parties contiguës de la Suède, il est fréquent de voir la pente des couches de gneiss s’abaisser au-dessous de 40 et même de 30°: ce fait a lieu dans des massifs d’une assez grande élévation ; ainsi le gneiss passant au micaschiste et le micaschiste qui constituent la mon- tagne d’Âreskutan, élevée de 1454 mètres, offrent une inclinaison qui est habi- tuellement au-dessous de 45° et qui s’abaisse parfois à 15°. Le gneiss du Dovrefield, même celui qui borde le Snechättan, présente de très fréquents exemples de pendage compris entre 25 et 45° ; il en est de même dans les montagnes du Langfield, du Justedal, et dans les autres massifs d’une grande élévation qui dominent le Sognefiord. Mais il est remarquable de voir les schistes cristallins des régions montagneuses de la Scandinavie passer promptement d'une inclinaison faible à une pente voisine de la verticale. Examinons maintenant dans quel sens à lieu le plus habituellement l'incli- naison de ces roches en Finlande et dans les diverses régions de la Scandinavie. 1,8) DE LA NORWÉGE, DE LA SUÈDE ET DE LA FINLANDE. h5 En Finlande, le terrain de gneiss (y compris les roches cristallino-schisteuses qui accompagnent le gneiss proprement dit, comme les schistes micacés, tal- queux, amphiboliques ou le calcaire lamelleux) m'a paru incliner plus ordinai- rement vers le sud que vers le nord; c’est ce que j'ai remarqué notamment dans la zone occidentale de cette contrée, et aussi dans la région qui avoisine la partie septentrionale du lac Ladoga. En Suède, dans les provinces de Sudermanie et d'Ostrogothie, le pendage du gneiss, qui est presque toujours peu écarté de la verticale, m’a offert bien des variations, sous le rapport du sens où il a lieu; mais plus au nord, dans la région qui s'étend du lac Mälar au lac Silzan , la pente m'a paru être plus souvent vers l’est que vers l’ouest, surtout dans la Dalécarlie. Dans la partie du S. 0. de la Suède qui s'étend de l'embouchure de la Glommen au Gôta-Elv, le gneiss incline aussi habituellement vers l’est; mais de Güteborg à la rivière de Falkenberg, il plonge à l’ouest d’une manière presque constante. Dans la partie de la Norwège qui s’étend le long de la côte, des environs de Christiania à l'embouchure de la Glommen, la pente générale du gneïss est vers l’ouest; mais le terrain primitif qui s'étend en Norwége, au nord du 60° degré de latitude, et à l’est des terrains paléozoïques de Christiania et du lac Miôsen, offre un pendage habituel vers l’est. Plus au nord, entre le 68° et le 64° degré de latitude, le gneiss et le mica- schiste qui constituent le massif d'Areskutan, dans le Jemtland, près de la fron- tière norwégienne, incline plus ordinairement vers l’ouest que vers l’est. Dans la partie septentrionale de la province de Drontheim, on voit fréquem- ment les couches de gneiss du littoral plonger vers l’est, et former un fond de bateau avec celles qui se trouvent un peu plus à l’est, et qui inclinent vers l'ouest : ainsi c’est ce qui a lieu entre le 65° et le 66° degré de latitude, pour les couches de la zone littorale, par rapport à celles de la vallée du Vefsen- Elv et de ses affluents. Plus au nord, on observe encore une disposition analogue d ansle Ranenfiord et le Beierfiord. Néanmoins, dans la province de Drontheim, le gneiss qui longe la zone de schistes semi-cristallins située à l’est s'enfonce habituellement sous cette bande, qui lui est superposée et qui est évidemment plus moderne; mais il forme la selle par rapport aux bancs gneissiques situés un peu plus à l’ouest. Cette disposition stratigraphique, qui est générale au nord du fiord de Drontheim, se montre également au sud, et d’une manière presque constante jusqu’au Sognefiord, sous le 61° degré de latitude. Ainsi le terrain primitif qui constitue les plateaux élevés du Dovrefield, du Langfield et du Justedal, offre un pendage général vers l'E., ou vers le S.-E., jusqu’à une assez grande distance à l’O. de la zone de schistes semi-cristallins ; plus à l'O. la pente a lieu dans des sens divers, mais avec moins de régularité. Dans la vallée de Romsdal, c’est seulement aux environs de Stokke, à 5 ou 6 myriamètres de la zone semi-cristalline, que commence le pendage du gneiss vers l’ouest. 46 CONSTITUTION GÉOLOGIQUE (NX: 4, p. 465) Entre les fiords de Sogne et de Hardanger, aux environs de Bergen, l’incli- naison habituelle du gneiss est encore vers l’est, et elle reste généralement la même au midi du fiord de Hardanger, le long de la zone méridienne qui s'étend du Folgefonden (un peu au nord du 60° degré), jusqu'auprès du Flekkefiord, à l'extrémité méridionale de la Norwége, sous le 58° degré de latitude. Ainsi, d’après les observations de M. Keilhau, le gneiss de la vallée de Siredal penche ordinairement vers l'est. Il en est ainsi de celui qui affleure aux environs du lac Miüs, dans le Tellemark, et qui s'enfonce sous la formation semi-cristalline du Goustafield. Du côté opposé de cette formation, à l'est, le gneiss plonge aussi en dessous, et par conséquent vers l’ouest. Mais, dans la région littorale qui s'étend au S.-0. du terrain de transition de Christiania, depuis le fiord de Langesund jusqu’à Chrisliansand, la pente du gneiss est presque constamment vers le S.-E.; c'est seulement sur quelques points de la côte située entre Kragerôe et le fiord de Langesund que j'ai vu cette roche ineliner dans le sens opposé. Cependant il est remarquable de voir les feuillets généralement redressés du eneiss et des schistes cristallins qui l'accompagnent constituer, sur d'immenses surfaces, ces plates-formes que nous offre le sol de la Scandinavie et de la Finlande. IL est vrai que, excepté dans certaines parties de la Norwége, le gneiss est rare- ment isolé :en Suède et en Finlande, presque toujours il est accompagné de roches granitiques, au milieu desquelles il ne forme souvent que des lambeaux. Dans ces deux pays, le granite est en général plus abondant que le gneiss, et il y a quelques régions où il se rencontre à peu près seul. Caractères du gneiss mélangé de granite. — Au contact du granite, le gneiss perd habituellement sa rectilignité, et s’ondule d’une manière plus ou moins pro- noncée. Tantôt le granite se montre intercalé sous forme de bancs ou de veines dans le gneiss ; tantôt c'est le gneiss qui se montre associé au granite en diverses proportions, et qui forme dedans des couches interposées et ordinairement peu écartées du parallélisme. Souvent il y a de grandes masses de granite et de gneiss juxtaposées ; ou bien, au contraire, les deux roches se mélangent ensemble de la manière la plus intime, et, dans ce cas, elles offrent une multitude d’inflexions et de contournements. Les figures 16, 17, 18 et 19 offrent des exemples des divers cas que je viens d'indiquer : la coupe (fig. 22) que j'ai dessinée entre Nuchars et Kafvabôle montre des veines de granite qui se sont introduites entre les strates du gneiss et leur ont fait subir une légère inflexion. Sur le monticule que j'ai observé entre Kuttila et Lappayärvi (fig. 19), on voit que le gneiss a été en grande partie recouvert par la masse granitique. Les figures que j'ai dessinées en Finlande, à Abbors (fig. 18), entre Kafvabôle et Helsinge (fig. 16 et 17), peuvent donner une idée des contournements que prennent les feuillets de gneiss, quand ils sont inti- mement mélangés de granite (1). La figure 17 montre des plaques de gneiss dont (1) Il est remarquable que le mélange intime des schistes cristallins avec le granite, et les con- (.1,p.47) DE LA NORWÉGE, DE LA SUËDE ET DE LA FINLANDE. 47 le contour est très sinueux; ellessont empâtées au milieu du granite, et cependant elles se rapprochent au point d’être parallèles à la bande de gneiss située auprès et dontelles semblent être des lambeaux. Au sein de cette bande, on voit se dessiner de larges nodules de granite, dont le contour est sinueux comme celui des plaques de gneiss enchâssées dans la roche massive. On ne peut méconnaître que, si le gneiss a été primitivement un dépôt sédimentaire, du moins il a dû être fortement ramolli au moment où le granite est venu s’y injecter ; ses particules ont dù pos- séder une assez grande mobilité, et cristalliser à peu près dans les mêmes con- ditions que les molécules du magma granitique. Deux espèces de granite associées au gneiss en Scandinavie. — Parmi les granites associés au terrain de gneiss primitif, j'en ai distingué deux espèces, différentes par leurs caractères pétrographiques et par leur âge, appartenant à deux époques séparées par la première apparition des diorites. Il est vraisem- blable qu'il y a eu plus de deux époques d’éruptions granitiques avant le com- mencement de la période paléozoïque, mais les granites de divers âges ne pré- sentent pas toujours dans leurs caractères minéralogiques des différences assez tranchées pour qu'il soit facile d’en faire la distinction. La plus ancienne des deux sortes de granites que j'ai reconnues est à grains moyens ou petits, assez homogène, sans mélange de gros cristaux: elle renferme le feldspath, le quartz et le mica dans les proportions ordinaires ; cependant le quartz s'y trouve géné- ralement en quantité un peu grande, et 1l y forme parfois des nœuds entourés de mica ; il est incolore ou d’un gris clair. Le feldspath est ordinairement d’un gris blanchâtre ou gris bleuâtre ; les faces de clivage y sont moins netles et moins brillantes que dans l’autre sorte de granite. Les petits feuillets de mica noir ou verdâtre sont entrelacés autour des grains quartzeux et feldspathiques ; fréquem- ment ils sontalignés dans une même direction, ou couchés en assez grand nombre dans un même sens, de façon à donner à la roche cet aspect veiné ou schistoide que les Allemands expriment par la dénomination de Gneiss-granit. Toutefois, on ne peut douter que ce soit du granite véritable, car on y voit disparaître gra- duellement cette disposition, qui est remplacée par une structure enchevêtrée et tout à fait granitoïde, les autres caractères pétrographiques restant les mêmes. La teinte générale de ce granite est un peu sombre, de même que celle du gneiss ; elle est d’un gris plus ou moins foncé, suivant l’abondance du mica ; rarement elle est d’un gris rougeâtre. Le granite le plus récent, que l’on peut appeler granite moderne, par oppo- sition au plus ancien, est presque toujours à gros grains (4) et d’une distinction tournements qui en résultent, sont offerts plutôt par le gneiss proprement dit que par le schiste micacé ou les autres espèces de schistes primilifs. (1) Dans de larges filons que forme en Finlande le granite moderne à travers l’ancien (voyez fig. 13), j'ai observé quelquefois une bande de granite rose, à petits grains, qui en occupe le milieu et est bordée des deux côtés par du granite à gros grains, de la même couleur, et paraissant formé us CONSTITUTION GÉOLOGIQUE (N.14, p. 48. ) facile : il se rapproche de la pegmatite, et il est fréquemment porphyroïde. Le mica y est peu abondant, en larges feuillets verdâtres et blancs, quelquefois mélangés de feuillets plus petits. Le feldspath est le principal élément de la roche ; il y forme des lames larges et brillantes, d’une couleur blanche, rosée, ou rouge de chair. Il y en a deux espèces, de l’orthose et de l'oligoclase; ce der- nier se reconnaît par ses stries hémitropiques, par son éclat particulier et par l'absence ou l'extrême difficulté du troisième clivage, qui existe dans l'orthose parallèlement à l’un des pans du prisme rhomboïdal. Dans le granite ancien, dont nous parlions tout à l'heure, il ÿ à aussi une espèce feldspathique du sixième système cristallin, présentant une facette étroite siriée dans le sens de sa longueur : ce doit être de l'albite ou de l'oligoclase; il est difficile d’en déterminer positivement la nature, car elle est à petites lames, eu, dans ce cas, les différences entre l’albite et loligoclase sont difficiles à apprécier. Dans le granite à gros grains, il paraît ÿ avoir quelquefois plus de deux espèces feldspathiques, mais il n’est possible de les distinguer sûrement qu’à l’aide d'essais chimiques : ce sont des masses lamelleuses, dépourvues de caractères distinctifs; cependant on y reconnaît en certains points de l’albite : ainsi Hans le granite à gadolinite de Brodbo; il y en a aussi de beaux cristaux à Kimitto, en Finlande. Le labrador de la même contrée se trouve dans des blocs erratiques, qui paraissent avoir été détachés du granite à grandes parties. Minéraux contenus dans le granite le plus moderne. — Les deux sortes de granites que nous venons de décrire renferment assez souvent des lames d'amphi- bole, surtout en Finlande, et alors elles tendent à passer à la syénite; on y trouve aussi des grains ou noyaux de fer oxydulé. Le granite le plus ancien ne paraît pas renfermer de minéraux particuliers, tandis qu’on en trouve fré- quemment dans le plus moderne; ils sont peu apparents au milieu des grandes masses, et ne se manifestent ordinairement que dans les filons qui sont inter- posés dans le gneiss, ou qui le traversent. Ces minéraux sont : Ja gadolinite , l'orthite, la pyrorthite, la tantalite, l'yttrotantale, l'allanite, l'yttrocérite, l'yttria phosphatée, le fluorure double d'yttrium et de cérium, le fluorure de cérium hydraté, le fer titané, l'étain oxydé, l’albite, l'émeraude, la {opaze, le zircon, Le malacon et le polycrase (deux nouveaux minéraux découverts par M. Scheerer, le premier presque identique avec le zircon, le deuxième voisin de la polymignite), l'esmarkite, la praséolite (très voisine de l'esmarkite), le grenat, la tourmaline, la chaux fluatée, la gahnite, le pétalite, le triphane et le lépidolite ; ces trois dernières substances n’ont encore été trouvées en Suède qu’à l’île d'Utô. C'est des mêmes éléments. La différence dans la grosseur du grain peut bien n'être qu’un simple effet de cristallisation ; peut-être aussi résulte-t-elle d’une injection produite au milieu du granite à gros grains, pendant son refroidissement, et avant qu’il fût complétement solidifié, car les deux masses sont soudées ensemble. Dans tous les cas, le granite rose à grains fins paraît n’être qu’un appendice de celui à gros grains et ne forme pas de masses considérables. (N-1,p.4) DE LA NORWÉGE, DE LA SUÉDE ET DE LA FINLANDE. 19 à Ytterby, près de Stockholm, et à Finbo, près de Falun, que l’on a trouvé réunis la plupart de ces minéraux; dans le bloc erratique de Brodbo, qui gisait à peu de distance de Falun, on a aussi recueilli une grande partie des minéraux observés à Finbo, tels que la topaze, l'émeraude, la gadolinite, la tantalite , l'yttrotantale , l'yttrocérite, etc., et en outre du bismuth natif et du bitume. On peut encore joindre aux minéraux ci-dessus la pyrargillite, substance d'un noir foncé, à cassure résineuse , dont la composition représente à peu près celle de la dichroïte, à laquelle on aurait ajouté deux atomes d’eau ; elle forme près d'Helsingfor des veines ramifiées et des nids au milieu du même’granite. Phénomènes de contact des deux granites. — Les caractères que je viens d’ex- poser permettent de distinguer les deux espèces de granites que renferme le terrain primitif de la Scandinavie ; car la grandeur des éléments et la couleur sont différentes, de même que l'aspect et la nature des principes feldspathiques. Les relations géologiques viennent confirmer cette distinction; en effet, lorsque ces deux granites se trouvent en contact, celui qui est rouge et à gros grains (le plus moderne) lance des veines à travers l'autre , qui est à petits grains et d’une couleur grise. En beaucoup d’endroits de la Finlande, particulièrement entre Brahestad et Carleby, entre Lappayärvi et Tammerfors, j'ai observé de ces filons de granite à gros grains, qui coupent. celui à petits grains; il y en a égalementen Suède, à la porte même de Stockholm, dans le beau parc de Djurgarden; j'en ai aussi remarqué en Norwége, notamment dans la vallée de Justedal, où j'ai dessiné (voy. fig. 12) un plexus remarquable de filons granitiques, à grosgrains, au milieu d’une masse de granite ancien, à grains moyens. Comme ces filons n'offrent pas toujours une parfaite rectilignité, qu’ils s'ondu- lent et se ramifient à travers le granite qui les encaisse, leur présence pourrait ne pas être considérée comme une preuve certaine de la postériorité du granite à gros grains ; quelques personnes pourraient les envisager comme des effets de sécrétion. Mais, dans l'intervalle de temps qui a séparé la cristallisation de ces deux sortes de granites, se sont produits des diorites et amas de fer oxydulé qui, dans une foule d’endroits de la Finlande, de la Suède et de la Norwége, sont coupés par des filons du même granite à larges lames de feldspath. J'en ai cité et figuré plusieurs exemples dans mon mémoire sur les gîtes métallifères. Je me borne à en rapporter trois, qui sont représentés par les figures 5, 7 et 11. Le granite ancien, à peüts grains, n'offre pas de pénétration semblable; c’est lui, au contraire, qui est traversé par les roches amphiboliques ct ferrifères. Ces deux granites se montrent associés au gneiss d’une manière intime ; ils y forment des masses interstratifiées et s’y sont injectés de mille manières, en suivant des lignes ordinairement parallèles, quelquefois obliques à la stratifica- tion. Ce dernier cas m'a paru être moins fréquent pour le granite à petits grains que pour celui à gros grains; d’ailleurs l’un et l'autre constituent des collines, des monticules, où ils ne se sont point mélangés à d’autres roches. Celui à petits SOG. GÉOL, — 2° SÉRIE. T. VI. — Ném. n° 1. 7 50 CONSTITUTION GÉOLOGIQUE {N.4, p. 50.) grains est très développé en Laponie, dans la région qui sépare les eaux de l'Alten-Elv et du Mounio-Elv. Toutefois le granite moderne, ou à gros grains, est peut-être plus répandu en Scandinavie ; d’ailleurs il est le plus remarquable à cause des minéraux curieux qu'il renferme. Rapakivi ou granite pourri des Finlandais. — C'est à une variété de granite moderne que l'ondonneen Finlande le nom de Rapakiviou granite pourri : elle se distingue par la présencedenoyaux feldspathiques sphéroïdaux, de 3 à 4 centimètres dediamètre, se rapportant en général au feldspath orthose, de forme glanduleuse. Tantôt ces noyaux sont formés d’un cristal unique de feldspath, à contour arrondi, présentant dans toute sa masse des plans de clivage dirigés de la même manière ; tantôt ce sont des nœuds cristallins, à l’intérieur desquels il y a, avec le feldspath, des grains quartzeux et des feuillets micacés, affectant quelquefois une disposition concentrique à la surface extérieure des noyaux. Ce granite s’altère facilement, et tombe en sable; cependant sa désagrégation me paraît ne pas résulter uniquement d’une décomposition chimique, mais provenir en partie d’un effet de contraction, qui s’est produit au moment de la solidification de la roche, et qui est en rapport avec sa structure glanduleuse. L’altération de la masse n’est pas assez avancée pour qu'elle forme du kaolin ; elle se change en arène, et non en argile. Il paraît singulier au voyageur qui parcourt le sud-est de Ja Finlande de voir des rochers d’une assez grande étendue, de petites montagnes, s’écrouler peu à peu, comme si elles consistaient en une masse sableuse, dépourvue de cohésion. Il se produit d’abord des fissures presque imperceptibles, mais les causes at- mosphériques et surtout la congélation de l’eau qui imbibe la roche accélèrent la décomposition physique et chimique ; les parties constituantes se désagrégent peu à peu, les flancs de la montagne s’affaissent et forment des talus de gravier que dégrade de plus en plus l’action des eaux pluviales. Dans la région située entre Lovisa, Willmanstrand et Viborg, on rencontre beaucoup de monticules qui conservent encore une partie de leur forme première, mais dont les éléments dé- liaisonnés sont prêts à s’écrouler sous le plus léger effort. Les gros blocs de Rapakivi, que l’on trouve épars à la surface des plaines de sable du sud-est de la Finlande, offrent très souvent la forme représentée par la figure ci-contre. Les lichens qui se dévelop- pent à la partie supérieure tendent à la pré- server de l’action destructive des causes atmo- sphériques (1); la désagrégation sé produit alors beaucoup plus rapidement sur les côtés, qui s’éboulent peu à peu, en laissant au-dessus d'eux une calotte surplombante (1) Il est ici évident que le lichen, loin de ronger la pierre, comme on le dit vulgairement, tend au contraire à la protéger. Ge1p.5.) DE LA NORWÉGE, DE LA SUÈDE ET DE LA FINLANDE. 51 en forme de champignon. Malgré sa tendance à la décomposition, le Rapakivi forme une belle pierre de taille dans les parties qui ne sont pas altérées; sa couleur rouge et la disposition porphyroïde, produite par ses gros noyaux feld- -spathiques, lui donnent un aspect fort agréable à l'œil. Aussi on en a extrait la colonne Alexandrine, celles de l'église Cazan, de l’église d’Isaac, et la plupart des superbes monolithes qui font partie des monuments de Saint-Pétersbourg (14). Observations sur le granite à gros grains. — Dans le nord de la Finlande et en Scandinavie, le granite moderne, ou à gros grains, constitue un très grand nombre d'accidents de terrain, de collines et de montagnes d’une petite éléva - tion, sans présenter l'aspect glanduleux qui est propre au Rapakivi; alors sa solidité est plus considérable. Il offre un assez grand développement dans la partie méridionale de la Laponie, dans la région que traversent le Mounio et le Tornea Elv ; ainsi les collines qui bordent les rives du fleuve Torneà, et sur lesquelles les académiciens français plantèrent, vers la fin du siècle dernier, leurs signaux de triangulation pour la mesure d'un arc de méridien, sont composées principalement de cette espèce de granite, dans lequel on trouve quelques lam- beaux de gneiss peu étendus. Là il affecte les caractères de la pegmatite, et souvent il forme du granite graphique bien caractérisé : ainsi sur les montagnes de Pullinghi et de Kynsivara. IL présente aussi dans cette région un système de plans de division horizon- taux, et par suite il semble offrir une succession de bancs ou d'assises compara- bles à des assises basaltiques. On en voit un exemple à la cascade de Youxenghi dans le lit du Tornea Elv ; mais cette disposition remarquable se voit sur une beaucoup plus grande échelle à la montagne de Luppiovara représentée par la figure 4. Le pied de cette montagne renferme quelques lambeaux de gneiss, et présente une plate-forme très légèrement inclinée, qui supporte une suite de bancs horizontaux, épais de 1 à 2 et 3 mètres. Dans ce granite, le mica et Le quartz sont comparativement peu abondants ; le feldspath blanc et d’un rouge clair en est l'élément prédominant. Les assises sont divisées par deux systèmes de fentes rectangulaires et à peu près verticales, dirigées à l'E. 37 N. et au N. 57 O0. Quelquefois la masse comprise entre ces plans de division s'est détachée, et il en est résulté des espèces de chambres, à contour rectangulaire. Roches amphiboliques, diallagiques, hypersthéniques et serpentineuses, interposées dans le terrain * primitif de la Scandinavie. Roches amphiboliques. — Après avoir décrit les différentes sortes de granites interposés dans le terrain primitif, passons aux roches amphiboliques, diallagi- (4) Si l’on considère la structure particulière du Rapakivi et le climat rigoureux de la Russie, il est présumable que les magnifiques monolithes, qui excitent l’admiration des étrangers à Saint- Pétersbourg, n'auront pas une bien longue durée, du moins ceux placés à l'extérieur : on voit même déjà des fissures se manifester dans la colonne Alexandrine. 52 CONSTITUTION GÉOLOGIQUE (N.1, p.52.) ques, hypersthéniques et serpentineuses. Les schistes cristallins du Nord de l'Europe renferment beaucoup de masses amphiboliques, offrant les caractères des diorites ; on en observe dans une foule de localités de la Suède et de la Finlande, surtout dans les zones métallifères; elles m'ont paru être un peu moins communes en Norwége, où souvent elles semblent être remplacées par des syénites et des roches diallagiques ou hypersthéniques. Les diorites constituent des filons, des amas ou des masses irrégulières, intercalées dans le gneïss ou dansles roches qui l'accompagnent, et généralement disposées dans le sens de la schistosité; il est rare qu'elles forment de véritables filons transversaux. Ces roches sont composées essentiellement de lames d'hornblende d’un vert foncé, vert noirâtre, et de grains feldspathiques gris-blancs, tirant sur le vert : beaucoup de ces grains présentent sur une face étroite et allongée des stries ou hémitropies concaves, propres aux espèces de feldspath du sixième système cristallin; par suite, ils doivent appartenir à l’albite ou à l’oligoclase : peut-être yen a-t-il de ces deux espèces, qui sont très voisines l’une de l’autre; en outre, il paraît s’y trouver ordinairement un peu d'orthose. Souvent encore on y observe de petits feuillets de mica, des particules quartzeuses, et d’ailleurs le grenat rouge almandin y est assez commun. Ces diorites sont à grains moyens, ou à petits grains; souvent ils offrent un aspect porphyrique dû à la présence de lames un peu plus larges que la masse environnante. Lorsque, par suite de la finesse du grain, on n’y reconnaît plus de parties distinctes, les Suédois leur donnent le nom de irapp. Ainsi à Falun, Sala, etc., j'ai reconnu que la plupart de ces trapps du terrain gneissique de la Scandinavie ne sont pas autre chose que des diorites à grains indistincts. La texture de ces roches amphiboliques est ordinairement grenue, mais, près de leur contact avec les schistes cristallins, elles deviennent souvent schisteuses et passent au schiste ou gneiss amphibolique. Les diorites du Nord de l'Europe ont une grande importance, car ils servent de réceptacle à des gîtes considérables de fer oxydulé ; presque toujours ce minéral s'y trouve disséminé en petite quantité , et parfois il est assez abondant pour donner lieu à de vastes exploitations. Ainsi la célèbre montagne de Taberg, dans la province de Smalande, consiste en une masse dioritique, imprégnée d'une assez grande quantité de fer oxydulé pour être exploitée comme minerai de fer, et les produits alimentent un grand nombre de hauts-fourneaux. Les roches amphiboliques de la Scandinavie renferment quelquefois aussi des minerais de cuivre, de cobalt, de plomb argentifère, etc.; et, à la mine de Pitkäranta , située sur le bord nord-est du lac Ladoga, en Finlande, on trouve dans une roche de ce genre de l’oxyde d’étain, avec du fer oxydulé et de la pyrite cuivreuse (voir mon mémoire sur les gîtes métallifères, loc. cit.;, p. 316). Syénites en Scandinavie. — Dans les granites qui accompagnent le terrain gneissique du nord de l'Europe, on rencontre fréquemment des lames amphibo- liques, qui leur donnent la composition et l’aspect de la syénite ; mais l’amphibole (4p.%) DE LA NORWÉGE, DE LA SUÈDE ÉT DE LA FINLANDE. . 53 ne s’y est produite que d’une manière accessoire, probablement à cause de la présence d’un peu de chaux dans le magma granitique. En Suède et en Finlande, je n’ai pas observé de syénite qui occupât une étendue un peu considérable et offrit les caractères d'une formation indépendante. Il n’en est pas de même en Norwége; on y trouve des roches amphiboliques d’une nature variée, et aux- quelles l’ensemble de leurs caractères pétrographiques doit faire donner le nom de syénite. Ainsi, malgré de nombreuses variations d’aspect, de structure et de composition, on peut considérer comme de la syénite la roche qui constitue le gigantesque massif de l'Iütunfield (1), et qui s'élève jusqu’au haut des cimes culminantes de l’Europe septentrionale. Syénite de l’'Ictunfield. — L'époque de sa consolidation est sans doute posté- rieure à la période où s’est produit le gneiss, car cette roche à relevé les schistes feuilletés, semi-cristallins, qui sont plus modernes que le terrain primitif. Cependant, comme cette syénite se montre aussi en contact avec le gneiss, qu'elle a influé sur ses caractères pétrographiques et stratigraphiques, je crois devoir en placer ici la description. Elle est habituellement à grains moyens, souvent à petits grains, mais il y en a aussi une variété à gros grains. Le feldspath gris ou gris blanc y est abondant; rarement il paraît pur et nettement cristallisé ; ses faces ont en général peu d'éclat, et l'on y voit des parties compactes, pétro- siliceuses. Outre l’orthose, on y distingue des lames striées, appartenant au sixième système cristallin et ressemblant à de l'oliglocase. On y voit aussi des grains de quartz, moins communs que les lames feldspathiques : le mélange est quelquefois si intime, que les particules deviennent indistinctes, et alors la roche tend à devenir compacte ou porphyrique. Dans la masse.sont répandues des lames moyennes d'hornblende d'un vert foncé ou vert noirâtre, qui est généra- lement accompagnée de quelques feuillets de mica d’une teinte foncée, noire, brune ou verdâtre : parfois aussi on y voit des grenats rougeûtres. Très souvent le mica semble remplacer l’amphibole , et alors la syénite passe ” au granite. D'autres fois, au contraire, le quartz devient rare, en même temps que l'hornblende se montre plus abondante, et alors la roche ressemble à du diorite ou de l’amphibolite , dans lequel sont disséminés des grains de fer oxydulé. En certaines parties, la roche offre une texture schisteuse et se rapproche alors du gneiss et du schiste amphibolique : c’est ce que l’on observe principalement au contact de la syénite avec les roches schisteuses adjacentes. D'ailleurs il est certaines parties de la masse amphibolique, où l'on rencontre des bandes schis- teuses, de forme lenticulaire , entourées de parties à structure massive. La syénite de l’'Iôtunfield s'étend vers le S.-0. sur les montagnes qui bordent (1) L’Iôtunfeld comprend les groupes de cimes qui portent les noms de Hurungerne ou Skagstüls- tinden, d’Ymesfield ou Galdhôpiggen, et Nautgardstinden. 5 CONSTITUTION GÉOLOGIQUE (Ne 4, pe 54.) le ford d'Urland et plusieurs autres bras de la partie orientale du Sognefiord (1). A la vérité, elle n'y forme point une zone continue, mais des masses de formes irrégulières, généralement interposées entre les schistes cristallins et y lançant des veines SeATT RS Dans cette zone, l’amphibole est fréquemment accompa- gnée de lames diallagiques vertes ou brunâtres ; elles sont ordinairement peu abondantes, et ne forment qu'un élément accessoire de la roche. Néanmoins leur présence établit une liaison entre cette syénite et la norite d'Esmarck, que nous allons décrire un peu plus loin. Roches amphiboliques et diallagifères du Sognefiord. — Dans les masses de syénite (2) que l’on voit affleurer sur les escarpements qui bordent le Sognefiord, souvent l'amphibole hornblende , au lieu d'être répandue uniformément dans la roche , présente des agglomérations d'apparences diverses, tantôt allongées en forme de lanières ou de veines discontinues, tantôt disposées en forme de nids ou de rognons. Le feldspath gris blanc, et parfois d'un gris violacé, y abonde , et est accompagné de quartz; il est souvent aussi concentré en certaines parties, qui renferment peu d’amphibole. Les deux éléments principaux de la syénite semblent alors s'être isolés et avoir pris la disposition de noyaux réniformes et de veines irrégulières, qui se mélangent et s’entrecroisent, en se coupant alterna- tivement ; néanmoins ce sont les veines de feldspath qui paraissent couper le plus fréquemment celles d’amphibole. Il y a aussi une grande quantité de grenats rouges almandins; une portion est disséminée dans la roche, mais ils sont prin- cipalement accumulés dans certaines parties ,qui ont la forme de rognons ou de masses noduleuses , aplaties et souvent géodiques, larges de 10 à 30 centimètres. On y voit des anneaux sphéroïdaux, concentriques, formés principalement d’horn- blende et de grenats; ces minéraux sont fréquemment cristallisés sur les parois des cavités situées à la partie centrale des rognons. C’est aussi à l’intérieur de ces nids que l’on trouve souvent les lames diallagiques, accompagnant l'hornblende et le grenat. Cette roche syénitique, si variée dans sa composition minéralo- gique , dans son aspect et sa texture, s'étend de l’ôtunfield aux fiords d’'Urland et de Närôen, suivant la direction E. N. E. O. $. O. Roches amphiboliques et diallagifères des environs de Bergen. — Dans la presqu'île de Bergen, à quelques lieues à l'est du chef-lieu de la province, se trouve une autre zone de roche amphibolique , comprise entre le fiord de Sam- (1) J'ai reconnu dans mes explorations que la syénite occupe soit à l’est, soit à l’ouest de l’Iôtun- field, une étendue plus grande que celle qui lui a été donnée sur la carte de M. Keilhau. (2) J'ai représenté par des taches ponctiformes les petites masses de syénite que l’on trouve, en une multitude de points, sur les escarpements qui bordent les branches les plus profondes du Sogneford; je leur ai donné la même teinte qu’à la syénite de l'Iôtunfeld, quoique, sous le rapport pétrogra- phique, elles en diffèrent par l'abondance des grenats et par la présence fréquente de lames dialla- giques. Néanmoins cette roche se rapproche beaucoup plus de la syénite que de l’euphotide, et d’ailleurs elle ne joue pas un rôle assez important pour mériter une teinte spéciale. 2 (N.1,p%) DE LA NORWÉGE, DE LA SUÈDE ET DE LA FINLANDE. 55 nanger et la petite baie de Fane ; elle s'étend vers le N:-N.-0. en traversant la partie occidentale de l'île d'Osterôe, et formant une grande portion de la presqu'île qui borde à l’est le golfe de Mas. Cette longue bande, que M. Nauman a fait con- naître, offre de l’analogie avec la zone de syénite que nous venons de décrire tout à l'heure. Elle présente aussi des variations nombreuses dans la texture et l’aspect de ses éléments. On y voit des bancs formés de parties grenues et enchevêtrées alterner avec d’autres, dont la texture est rendue schisteuse ou veinée par la disposition des lames d'hornblende couchées dans un même plan, ou orientées suivant la même direction. Les parties schisteuses sont ordinairement à petits grains, et celles dont la texture est enchevêtrée sont fort souvent à gros grains, et . offrent alors les caractères d'une syénite composée principalement d’hornblende verdâtre, et de feldspath blanc ou d’un blanc jaunâtre , avec un peu de quartz. Il y a une variété qui offre des noyaux d'hornblende disséminés au milieu d’une masse feldspathique ; et parfois le feldspath s'isole, formant des nids ou des druses à la surface desquelles s'étend une pellicule de chlorite. Souvent on voit dans la roche des lames vertes, diallagiques ; et cette variété, que M. de Buch a signalée le premier, ressemble à du gabbro. Néanmoins elle n’est qu’ac- cessoire, car l’amphibole prédomine, et la roche offre des passages entre la syénite, le diorite et l’amphibolite grenu ou schisteux. Les parties schisteuses, bien qu’alternant avec les parties grenues, se trouvent plutôt sur les bords de la masse, et passent insensiblement au gneiss amphibolique, puis au gneiss ordinaire, et au schiste micacé, contenant çà et là quelques lames d’horn blende ; il n'y a pas de démarcation tranchée entre ces divers types. Dans les couches de schistes cristallins qui bordent la roche amphibolique du côté occidental, se trouve interposé un banc épais d’une variété particulière de syénite schistoïde, que M. Nauman à nommée roche feldspathique (feldspath gestein). En effet, elle se compose, en majeure partie , d'une masse feldspathique blanchâtre, qui est pénétrée de lames d’hornblende noire, et où l'on voit aussi de petits feuillets de mica blanc-argentin et des grains rouges de grenat, parfois a gglomérés et accompagnés de fames brunes d'un silicate magnésifère, qui est probablement de l'hypersthène. Tantôt ce minéral forme des noyaux enveloppés par les autres éléments ; tantôt , au contraire , il est groupé autour du grenat. Norite d'Esmarck. — Cette roche, qui forme un banc parallèle à la zone amphibolique décrite tout à l'heure, se rapproche par ses caractères lithologiques du type qu'Esmark a désigné par l'expression de norite. Il a attribué cette déno- mination à tout un groupe de roches qui ont des caractères variés, mais qui se distinguent par la présence du diallage ou de l'hypersthène. Toutefois ces silicates magnésifères ne forment point la partie principale de la masse: fort souvent ils ne s'y trouvent qu’en petite quantité, et ils disparaissent fréquemment , sans que la roche perde les autres caractères qui lui sont propres. Le feldspath en est l'élément principal, et forme une masse grenue, qui sert, pour ainsi dire, de 56 CONSTITUTION GÉOLOGIQUE (X:1, p. 56.) gangue aux autres substances. Il s’y trouve plusieurs espèces de feldspath ; on y distingue habituellement de l'orthose et du labrador qui se manifeste par son aspect strié et son éclat particulier. Les autres minéraux se trouvent dans des proportions très diverses ; ce sont le quartz » le mica, l’hornblende, le diallage et l'hypersthène ; le grenat rougeâtre y est aussi très fréquent. Il est rare que tous ces minéraux de la norite se trouvent réunis sur le même point; ils semblent se remplacer les uns les autres, et leur mélange est tantôt à grains moyens ou à petits grains, lantôt à gros grains : c'est dans ce dernier cas que les caractères distinctifs de la roche sont le plusmarqués. Fort souvent, au contact du gneiss ou d’autres schistes cristallins, la norite devient schis- teuse, comme nous avons vu que cela à lieu pour les syénites décrites précédemment. Alors il y à des passages gracluels, et souvent sur une grande épaisseur, entre la norite, le schiste amphibolique, le gneiss et le mi- caschiste. Indépendamment des localités déjà mentionnées, la norite a été signalée en beaucoup d'endroits de la Norwége ; elle est très développée sur la côte du Flek- keford (sous 58° 1/2 de latitude), où elle forme le long du littoral, entre Fiekke- ford et Ekersund une bande étendue dans le sens du N.-0. au S.-E. La même roche constitue le dos d'une colline entre Herland et Trôgstad , un peu au sud- est de Christiania, près de la frontière suédo-norwégieune. On en cite aussi des gites sur les îles de Mosserôe et Bümmelüe, qui se trouvent à l'entrée du long golfe de Hardanger. Il y en a encore dans les montagnes du littoral , entre le Romsdal et le lac de Horningdal, et aussi dans la vallée de Sundal qui dérive du Dovrefield. La même roche se rencontre en plusieurs lieux dans le Finmarck, où elle a été signalée d’abord par M. de Buch, puis par M. Keilhau, principalement entre le fiord de Bals et celui d’Alten. Plus loin, après avoir exposé les observations relatives à la province de Dron- theim, je ferai connaître des roches diallagiques, analogues à la norite, et qui se trouvent dans des formations de schistes semi-cristallins, principalement aux environs de Rôraas; mais dès à présent, je vais donner des détails particuliers sur la norite de la côte de Flekkefiord (1), qui est associée au gneiss primitif, et qui offre un des types les mieux caractérisés de celte espèce de roche. Norite de la côte de Flekkefiord.— Le feldspath en forme l'élément principal ; il appartient à deux espèces, au labrador et à l’orthose : La couleur en est tantôt grise, tantôt d'un jaune brunâtre, passant au vert; il est accompagné de quartz d'un gris clair, de diallage d’un vert olive, en petites écailles, d’hornblende verte et quelquefois noirâtre. On y trouve aussi du fer titané (2) en grains cristallins ; (4) Je n’ai pas visité moi-même cette localité, mais j'ai vu à Christiania des échantillons qui en proviennent; d’ailleurs une partie des détails qui vont suivre est tirée de l'excellente description donnée par MM. Scheerer et Keiïlbau, dans la Gœa Norvegica, p. 313 et 377. (2) M. Scheerer, d’après des essais qu’il a faits, regarde ce fer titané comme étant, non un titanate (N. 1, p. 57.) DE LA NORWEGE , DE LA SUEDE ET DE LA FINLANDE. 57 il abonde en certains points, où il forme des nids, de petits amas, ou des bandes irrégulières. Le mica noir se montre comme élément accessoire, et il en est de même de l'hypersthène brun ou d’un gris foncé. M. Keïlhau cite (Gæa, p.377) une variété de cette roche, qui est remarquable par son aspect porphyroïde : au milieu d’une masse de labrador brun, à grains fins, on voit briller des lames larges de 2 à 3 centimètres, d'un autre labrador, de couleur grise, mais brillant de reflets bleus. Il s’y trouve, comme éléments accessoires, de petits feuillets de talc et de petits zircons. On observe aussi des grenats rouges sur le pourtour de la zone noritique, au voisinage du gneiss. Semblable aux roches amphiboliques décrites précédemment, la norite de la côte de Flekkefiord présente ordinairement une texture schisteuse, près de son contact avec le gneiss; et il y a entre ces deux roches des passages tels que ceux déjà indiqués plusieurs fois : des bandes amphiboliques rubanées se montrent à la fois dans le gneiss et dans la norite; elles établissent une transition entre ces roches. La norite de l'île d'Hitterüe, qui est à une certaine distance de la limite du gneiss, ne présente aucune apparence de schistosité : sur le pourtour de l’île elle est à gros grains; dans la partie centrale, qui présente des rochers élevés de 200 à 300 mètres, elle est à grains fins. Il est possible que ces deux états, à gros grains et à grains fins, ne soient que des effets de cristallisation : cependant M. Scheerer a signalé une circonstance d’après laquelle il semblerait que ces deux variétés ne se sont pas produites tout à fait en même temps : en effet, la norite à gros grains de la côte d'Hitterôe est traversée par des filons de norite à grains fins, semblable à celle qui constitue l’intérieur de l'île. Sur la côte de Flekkefiord, et aux environs de Bergen, la norite est enclavée dans le terrain de gneiss primitif; mais dans la province de Drontheim, et à l'île Magerÿ, dans le Finmark, il y a, comme nous le verrons, des roches diallagifères analogues, au milieu de schistes semi-cristallins, argilo-micacés et chloriteux, qui sont dépourvus de fossiles, et postérieurs au terrain primitif. La norite paraîtrait donc remonter à une époque plus récente ; ou bien, et c'est ce qui me paraît probable, il y a eu plusieurs époques de cristallisation de roches diallagiques, de même que de roches granitiques et amphiboliques. La norite à gros grains de l'île d'Hitterôe, sur la côte de Flekkefiord, est traver- sée par beaucoup de filons de granite à grandes parties, qu'a étudiés avec soin M. Scheerer; cet habile minéralogiste y a trouvé plusieurs des minéraux rares qui caractérisent le granite à gros grains, dépendant du terrain primitif de l’Europe septentrionale; ce sont la gadolinite, l'orthite et l'yttria phos- phatée (1). D'ailleurs l’aspect et la composition de ces filons granitiques sont de fer, mais une association d'oxyde de fer et d’oxyde de titane ; il pense d’ailleurs qu'il en est ainsi pour les fers titanés d’autres gisements. (1) M. Scheerer à aussi découvert dans ces filons deux nouvelles espèces minérales, le #alacon et le polycrase; on y trouve en outre de l’hornblende, du diallage, du fer oxydulé et oligiste. SOG. GÉOL. — 2° SÉRIE. T. VI. — Mém. n° 1. 8 58 CONSTITUTION GEOLOGIQUE (N. 4, p. 58.) les mêmes qu'en Suède et en Finlande; ils ont aussi une couleur rouge de chair, : et renferment de larges lames d'orthose et d'oligoclase, avec du quartz gris et du mica noir (1):en un mot, ils ont tousles caractères de l'espèce de granite à grandes parties, qui estle plus moderne des graniles associés au terrain gneissique de la Scandinavie. La norite de Flekkefiord est donc antérieure à cette sorte de granite; probablement elle est contemporaine des diorites interposés dans le terrain pri- mitil. Ce groupe de roches s’est produit dans l'intervalle de temps qui a séparé la cristallisation des deux espèces de granites, à petits grains et à gros grains. Bientôt nous décrirons des roches diallagifères interposées dans les schistes argilo-micacés ou chloriteux des environs de Rôraas, et qui doivent être plus modernes que celles enclavées dans le terrain primitif. Roches serpentineuses. — On peut rattacher aux roches diallagiques, et consi- dérer comme faisant partie du groupe des roches magnésifères, des masses de serpentine, qui sont rarement très considérables, mais qui se rencontrent assez fréquemment dans le terrain primitif du nord de l’Europe. J'en ai déjà décrit un gisement remarquable à Oppivara en Finlande; j'ai montré aussi dans mon mé- moire sur les mines de la Scandinavie (loc. cit.) qu'une partie des skülar qui traversent diverses roches est formée de serpentine; d'ailleurs, comme nous l'avons vu, les calcaires métallifères de la Suède contiennent souvent une grande quantité de veines et de nodules serpentineux. En Norwége, il y a un gîte assez considérable de Serpentine à l'O. du Tyrifiord, près de Snarum (2) ; d'après M.Keil- hau, à l'ile Rodôe, dans le Nordland, il y en a aussi des masses, tantôt irrégulières, tantôt stratiformes. Il en cite également un peu au sud de Bergen, à l'ile Salthelle, où la serpentine est accompagnée de diallage et forme une masse intercalée entre des couches de gneiss et de calcaire marbre. DEUXIÈME GROUPE DE FORMATIONS AZOÏQUES : SCHISTES SEMI-CRISTALLINS. Formations schisteuses et semi-cristallines (uréhonschiefer des Allemands), consistant principalement en schistes argileux et schistes luisants, feuilletés, argilo-micacés ou argilo-chloriteux, associés avec des schistes micacés, amphiboliques et gneissiques, renfermant en outre des bandes ou assises de quarziles grenus, subcompactes et schisteux, de grès, de grauwackes, de poudingues, brèches ou conglomérats , et de pierres calcaires. Les terrains que nous allons décrire maintenant sont remarquables en ce que, par l’ensemble de leurs caractères, ils forment une transition entre les terrains (1) On trouve en outre dans ces filons granitiques du fer oxydulé et oligiste, de l’hornblende et du diallage. (2) La masse serpentineuse de la forêt d'Uhlen, près de Snaru m, est entourée de quartzite faisant partie du terrain de gneiss : on y trouve, outre le quartz, de la dolomie grenue, parfois fibreuse et passant à l’asbeste, du fer oxydulé, en nodules composés de grains octaédriques, du fer titané, en masses compactes et cristallines, du felds:ath, du mica, de la chlorite, du talc et de la stéatite. Ge aîte, que M. Bôbert a très bien décrit (Gæa, p. 127), et où il a signalé des phénomènes d’épigénie est remarquable en ce que la serpentine s’y montre parfois en cristaux prismatiques, et semble offrir des passages graduels aux divers minéraux qui lui sont associés, comme le mica, la dolomie, etc. (W:1,».59) DE LA NORWÉGE, DE LA SUÉDE ET DE LA FINLANDE. 59 primitifs proprement dits (gneiss primitif ét schistes cristallins qui l’accompa- gnent) et les terrains paléozoïques. À cause de cette association remarquable de deux sortes de roches stratifiées, différentes par leur aspect et leur nature, les unes amorphes, les autres cristaliines, je proposerai de les appeler schistes semi- cristallins. Cette dénomination, tirée de caractères pétrographiques incontes- tables, est indépendante de toute hypothèse chronologique, circonstance impor- tante, car, dans l’état actuel de la science, l’âge de ces terrains ne peut être fixé d’une manière précise (4). Quant à la qualification d’azoïque donnée à ce groupe, comme à celui des schistes cristallins, il ne faut lui attribuer qu'un sens relatif ; on ne doil pas en conclure que tous les dépôts réunis dans cette division soient absolument antérieurs à la création de tout être vivant, mais que jusqu’à ce jour on n’a point encore pu y découvrir de reste organique. Existence de plusieurs étages dans ce groupe. — D'ailleurs il est présumable que les divers membres de ce groupe pourront être classés par la suite ; et même, en lisant la description des dépôts qui en font partie, on verra que plusieurs d’entre eux paraissent appartenir à des étages différents (2). A la vérité, l'absence de fos- siles et de fréquents changements dans l’état cristallin, ainsi que dans la stratifi- cation des roches, ne permettent pas d'établir avec une complète certitude la cor- respondance entre les étages qui composent la série dans les diverses régions. Néanmoins l'existence de plusieurs étages résulte de la différence de composition des séries d'assises que l’on voit se succéder dans une même contrée; elle paraît ressortir aussi de la multiplicité des dislocations qui ont eu lieu entre l’époque du gneiss primitif et le commencement de l’époque silurienne. Composition générale de ces dépôts. — La composition de ces dépôts présente des variations notables d’une extrémité à l’autre de la Norwége, en conservant néanmoins des caractères communs : ils sont formés essentiellement de roches schisteuses, intermédiaires par leur texture et leur aspect entre le schiste argileux proprement dit et les schistes feuilletés, micacés ou chloriteux. Ces roches offrent des changements d'état fréquents, et passent de l’état amorphe à l’état feuilleté ou cristallin, généralement par degrés insensibles, mais quelquefois d'une manière subite. Souvent ces schistes deviennent siliceux, et dans certaines (1) Si l’on admet que ces terrains sont antérieurs à la période silurienne, l'expression d’urfhon- schiefer ou schiste argileux primitif, qui leur a été appliquée par des géologues du nord, exprimera que ce sont les premières masses de schiste argileux qui constituent une formation indé- pendante. (2) Dans la vaste série des roches stratifiées et dépourvues de fossiles que l’on trouve en Scandi- navie, il en est peut-être qui appartiennent à la période des terrains paléozoïques, à l’époque silurienne ou dévonienne; mais comme , jusqu’à présent, on n’y a trouvé aucune trace de fossiles, ce ne serait qu'au moyen d’hypothèses très hasardées que l’on chercherait à rattacher à l’une de ces époques telle ou telle portion des terrains que nous réunissons sous le titre général de schistes semi-cristallins. Du reste, je mentionnerai en leur lieu les formations qui, par leurs caractères , offrent le plus d’analogie avec certains dépôts paléozoïques. : 60 CONSTITUTION GÉOLOGIQUE (N: 1, p. 60.) régions ils sont accompagnés de masses quartzeuses puissantes, qui varient par leur texture du quartz compacte au quartz grenu. Le grain de ces quartzites est fin et serré; les variétés subcompactes sont translucides et ont la cassure con- choïde, caractères qu’elles partagent avec les quartz compactes, d'origine méta- morphique, de la chaîne des Alpes, de la Bretagne et d’autres contrées. Outre les schistes argilo-feuilletés et les quartzites (1), qui sont les roches dominantes, on trouve associées aux terrains que nous décrivons des couches concordantes de grauwacke, ordinairement très quartzeuze, et même des masses de poudingue, brèche ou conglomérat, composées de fragments, tantôt arrondis, tantôt anguleux, de quartz et de roches cristallines (granite, porphyre, gneiss). Dans ce groupe, la pierre calcaire est ordinairement peu développée, et ne forme en général que des bancs su bordonnés ; elle est tantôt grenue où à petites lames, tantôt compacte, et alors elle ressemble entièrement à des calcaires paléo- z0ïques, surtout lorsqu'elle présente une teinte d’un gris foncé ou noirâtre. Comparaison pétrographique avec les roches siluriennes. — À défaut de restes organiques, l'origine sédimentaire des schistes semi-cristallins résulte de l'exis- tence bien constatée de roches arénacées, de grès, de grauwackes et poudingues, qui se lient avec eux par des dégradations insensibles et par l'uniformité de stra- tification. L'analogie pétrographique avec les roches siluriennes est encore aug- mentée par la présence accidentelle de schistes ampéliteux et alunifères. Néanmoins on ne saurait méconnaître le caractère généralement cristallin qui distingue l’ensemble de ce deuxième groupe de formations azoïques. Si l'on compare les schistes argileux, et les grauwackes schisteuses qui en font partie, avec les roches analogues du système silurien, on reconnaît presque toujours dans les schistes azoïques un éclat particulier, un aspect plus luisant, une texture moins amorphe, une tendance plus marquée à la structure feuilletée et cristalline, Vue sous un verre grossissant, la pâte des schistes argileux paraît con- sister en un agrégat de grains microscopiques des minéraux qui composent les roches granitiques. Du reste, beaucoup de schistes des terrains paléozoïques présentent le même caractère, si l’on en regarde la pâte au microscope. Dans une série un peu épaisse de schistes argileux azoïques de la Norwége, il y a souvent des lits où l'on distingue, même à l'œil nu, des feuillets de mica, de chlorite ou de tale ; et les schistes argileux, devenant peu à peu feuilletés, passent insensiblement, soil au micaschiste, soit au schiste chloriteux ou talqueux. Quel- quefois on y voit des aiguilles entrecroisées d’hornblende, qui traversent la pâte en divers sens. D'ailleurs, des bancs de schiste amphibolique et de gneiss, c’est- àa-dire des types de roches qui semblent propres aux formations primitives, s’y (1) Comme ce sont les roches quartzeuses qui résistent le mieux à l’action destructive des causes atmosphériques, elles forment ordinairement la partie convexe des accidents de terrain ; c’est ce qui a lieu aussi en Bretagne et en d’autres pays. @.1,p.61) DE LA NORWÉGE, DE LA SUEDE ET DE LA FINLANDE. 61 montrent aussi, à la vérité d’une manière accidentelle. Souvent ces bancs sont interstratifiés dans des couches argilo-micacées, parfois même ils semblent les recouvrir, ou s'appuyer dessus à stratification concordante. Ce gneiss est ordi- pairement un peu moins cristallin, et à grains plus fins que le gneiss primitif ; les éléments en sont moins distincts, moins bien caractérisés; on y observe des passages graduels aux schistes argilo-feuilletés, par l'intermédiaire du mica- schiste. f Remarques sur l'aspect cristallin des roches de ce groupe. — C'est fréquemment dans le voisinage de diorites, de syénites ou de granites, que du schiste amphibo- lique et du gneiss se montrent associés aux schistes semi-cristallins; par suite, on est conduit à en attribuer le développement à ces roches massives : mais il n’en est pas toujours ainsi, et, dans certains cas, on ne voit affleurer aucune roche pyrogène que l’on puisse envisager comme ayant fait naître la cristalli- sation dans les schistes argileux azoïques. D'ailleurs, il est incontestable que l'aspect généralement cristallin des forma- tions de ce groupe ne peut être attribué entièrement à l'influence des îlots de roches plutoniques qui s’y rencontrent en diverses localités : il ne peut résulter que d’une cause générale, qui a affecté l'ensemble des dépôts, bien que d'une manière inégale. Cette circonstance me paraît fort importante, et vient à l’appui des autres considérations qui me portent à regarder ces formations comme antérieures, pour la plupart du moins, à la période silurienne. Elles doivent correspondre en partie au système cambrien où cumbrien de M. Sedewick, et aux terrains de transition inférieurs de MM. Dufrénoy et Elie de Beaumont. Diversité dans les relations de contact des schistes semi-cristallins et du gneiss primitif. — La superposition des schistes semi-cristallins au gneiss primitif est évidente pour le géologue qui explore la ligne de contact des deux groupes de roches, mais nous verrons que le mode de succession n’est pas toujours le même. Dans certaines régions, les schistes azoïques les plus modernes sont superposés d'une manière clairement transgressive, tandis que sur d'autres points la strati- fication paraît être concordante. Ce fait, anormal en apparence, n’a au fond rien d’extraordinaire, car il est facile de concevoir qu'à l’époque où le schiste argileux azoïque s’est formé, le gneiss primitif se trouvât redressé sur des surfaces plus ou moins étendues, mais fût resté horizontal en certaines parties. Une disposition stratigraphique de ce genre nous est offerte actuellement par les couches silurien- nes de la Scandinavie : elles sont en effet restées horizontales sur les rives du lac Wenern, tandis qu'à peu de distance, soit à l'est, sur le bord oriental du Wet- tern , soit à l’ouest, aux environs de Christiania, les mêmes couches ont été relevées et ont pris même, en certaines parties, une position presque verticale. Or, suivant que les sédiments qui ont produit le groupe des schistes semi-cristal- lins se sont déposés sur des feuillets de gneiss inclinés, ou sur des lits horizon- taux, il y aura eu discordance ou concordance de stratification. 62 CONSTITUTION GÉOLOGIQUE CN: 1: p. 62) Les schistes semi-cristallins ne se montrent en contact avec les couches silu- riennes que dans une seule région , dans celle qui environne la partie septen- trionale du lac Miôsen; or là elles sont, en général, faiblement inclinées , et il est difficile d'y apercevoir une discordance de stratification ; mais il ne me semble pas moins nécessaire de distinguer ces deux groupes de terrains, qui diffèrent si manifestement par leurs caractères essentiels, et dont l’un con- tient une grande abondance de débris organiques, tandis que l'autre en est dépourvu. Disposition géographique des terrains semi-cristallins. — Les terrains semi- cristallins, de même que les terrains paléozoïques, ne forment pas en Scandinavie unezone continue, mais des dépôts distincts, ou bien des lambeaux séparés les uns des autres par des roches du système granito-gneissique, lequel, dans le nord de l'Europe, sert de support général aux formations plus récentes : les dépôts posté- rieurs au gneiss ne se montrent point superposés dans un même bassin, mais ils ont rempli les dépressions circonscrites que présentait, à diverses époques géolo- giques, la surface du gneiss et du granite. En jetant un coup d'œil sur la carte géologique jointe à mon mémoire, on y verra dans la partie centrale de la Scandinavie une vaste zone de schistes argilo- feuilletés, accompagnés de quartzite, de roches calcaires et arénacées, d’une origine évidemment sédimentaire. Ce dépôt s'étend sur une grande portion de la province de Drontheim et du Hedemark, sur le Guldbrandsdal, le Valders, et la région située au sud-ouest; il forme une grande bande allongée du N. N. E. au S.S. O. Un peu plus au midi se trouve une autre zone, appartenant au même groupe de formations azoïques, probablement un peu plus ancienne que la pré- cédente, mais beaucoup moins vaste; elle est allongée dans le même sens, et offre la forme d'un triangle obtus. Elle consiste principalement en quartzite ac- compagné de schistes plus ou moins cristallins : on la voit s'étendre sur une partie du Nummed2l et du haut Tellemark. Sur la côte située au nord et au sud de Bergen, on observe une foule de lambeaux d’un terrain consistant en schistes feuilletés, argilo-micacés ou chloriteux, qui recouvrent le gneiss, et paraissent appartenir au même système que les schistes azoïques, semi-cristallins, de la Scandinavie centrale. Entre le golfe de Drontheim et le Sognefiord, sur plusieurs îles, et sur divers points du littoral, on observe des dépôts de grès et de conglo- mérat, superposés ou associés à des schistes feuilletés qui recouvrent le gneiss. Ils appartiennent sans doute au même ensemble de terrains. Dans le Finmarck, à l'extrémité septentrionale du continent européen, et dans le nord de la Laponie, il y a encore des dépôts très étendus de schistes argilo-micacés, de calcaire, de grès ou quartzile, et de conglomérat. A l’ouest et au sud-ouest, se trouvent des schistes cristailins, gneiss et micaschiste, accompagnés de calcaires grenus ou lanelleux ; la séparation des deux sortes de terrains présente des:circonstances - remarquables. 41.6) DE LA NORWÉGE, DE LA SUËÈDE ET DE LA FINLANDE. 63 Nous allons décrire dans l’ordre suivant ces différentes zones de terrains azoïques semi-cristallins : 4° La formation quartzeuse du Nummedal et du Haut-Tellemark ; 2 La formation quartzo-schisteuse de la Scandinavie centrale ; 3° Les lambeaux deschistes semi-cristallins qui recouvrentle gneiss, en beaucoup de points de la portion sud-ouest de la côte norwégienne ; h° Les dépôts de grès et de conglomérat situés sur le littoral entre le golfe de Drontheim et le Sognefiord ; 5° Les formations calcaréo-quartzo-schisteuses et poudingifères du Finmarck; 6° Les petits dépôts quartzeux et calcaréo-schisteux situés aux environs de Tornea, au fond du golfe de Botnie. Formation de quarzite, accompagné de schistes semi-cristallins, du Nummedal et du haut Tellemark. C’est par la formation quartzeuse du Nummedal et du Haut Tellemark, que je commencerai la description des terrains semi-cristallins. Elle occupe une étendue beaucoup moins vaste que la formation quartzo-schisteuse du centre de la Scan- dinavie; mais, par l’ensemble de ses caractères stratigraphiques et pétrographi- ques, elle se lie d'une manière plus intime avec le gneiss, et, dans la série des dépôts azoïques superposés aux schistes primitifs de la Scandinavie, il n’en est pas qui paraisse remonter à une plus haute antiquité. Cette formation quartzeuse s'étend du N. N. E. au S. S. O., sur la partie occidentale du Nummedal et du Tellemark (1), depuis Nœs, dans la vallée de Hallingdal, jusqu'aux environs de Valle et Moland, dans les vallées de l'Otra Elv et du Nid Elv. Composition pétrographique.-—Dans cette zone, qui est compriseentre 59 degrés et 60 1/2 degrés de latitude , et dont le point culminant est le Goustafield (2), la plus haute montagne qu'il y ait en Norwége, au sud du 60° 1/2 degré de latitude, la roche dominante consiste en un quartzite translucide, à éclat vitreux. dont la couleur varie du gris clair au gris verdâtre et bleuâtre ; quelquefois il à une teinte rouge ou rosée, due à un peu d'oxyde de fer. Ce quartzite est tantôt grenu, tantôt compacte, fendillé dans la cassure. Il est généralement schisteux, ou il présente un système de plans de division parallèles, qui permettent de le fendre en plaques régulières. Cette tendance à la fissilité est surtout favorisée par la présence (1) J'ai conservé sur ma carte le contour que M. Keilhau à donné à cette formation ; en la décri- vant, j'ai profité aussi des observations intéressantes que M. Nauman et le savant géologue de Chris- tiania ont publiées dans les ouvrages déjà cités. Beitræge, t. 1, p. 62, et Gæa, p. 425. (2) Le Goustafield est formé de quartzite en couches peu inclinées el coupées abruptement : il y en a deux variétés, dont l’une est dure ct résistante, tandis que l’autre renferme des parties feldspa- thiques et se décompose facilement, de manière à produire des entailles ou sillons , qui donnent à cette montagne son aspect crénelé et qui la font apercevoir de loin , par l’éclat de la neige ‘entassée dans les dentelures de sa crête. TA CONSTITUTION GÉOLOGIQUE (1, p.64) fréquente de feuillets de mica, de chlorite ou de talc : on y voit souvent aussi de petits grains feldspathiques; et quand, par suite de leur altération, la roche commence à se désagréger , elle offre l'aspect d’un grès ordinaire. On rencontre aussi certaines variétés qui ressemblent à un schiste siliceux jaspé. Cependant le quartzite n'est pas la seule roche de cette région ; lorsque les feuillets de mica, de chlorite ou de talc deviennent très abondants, et sont ras- semblés par lits, la roche se change en un schiste micacé, chloriteux ou talqueux, parfois amphibolique. Ces schistes acquièrent souvent une épaisseur un peu considérable; il s’y trouve quelquefois aussi du schiste argileux (urthonschiefer), mais la pierre calcaire y est très rare. IL faut encore mentionner une sorte de roche suberistalline, qui est assez développée en certains points, et qui se trouve principalement dans Ja partie périphérique de la formation quartzeuse; elle renferme les trois éléments du gneiss et semble s'identifier avec lui par la composition, mais elle est formée de grains beaucoup plus fins et moins nets qu'ils ne le sont dans le gneiss ordi- paire. Ils ont aussi un aspect un peu moins cristallin, et il y a d’ailleurs de grandes variations dans les proportions des parties quartzeuses et feldspathiques. Parfois la présence de cristaux ou de noyaux de feldspath un peu plus gros que les autres éléments communique à la masse un aspect porphyrique. Souvent, dans le micaschiste et autres schistes de cette formation, les éléments deviennent d’une ténuité extrême, et finissent par être indistincts; ces roches passent alors à une sorte de hornstein ou d'aphanite siliceuse, très dure. Quel- quefois ces masses compactes prennent un aspect amygdaloïde ; on voit s'y déve- lopper de petites amandes blanches et vertes, formées de quartz et d'actinote. Enfin aux types que nous venons de faire connaître se joignent des roches d’une apparence poudingiforme et bréchiforme, qui, près de Hjerdal, se montrent subordonnées au quartzite. Ces roches, qu'a déjà décrites M. Keilhau (Gæa, p. 430), sont de nature quartzeuse, argileuse, chloriteuse, ou amphibolique, et formées par la réunion d’une multitude de fragments, tantôt anguleux, tantôt arrondis. Souvent ce sont des roches schisteuses, qui semblent avoir été brisées et reconso- lidées sur place, de même que cela paraît avoir eu lieu pour beaucoup de pierres calcaires bréchiformes, qui font partie de divers terrains. D'autres fois les frag- ments ou noyaux diffèrent par leur nature de la masse où ils sont enchässés, comme dans une pâte ; souvent ce sont des nodules feldspathiques ou quartzeux, que M. Keïlhau a qualifiés de concrétions. Ils se présentent en saillie, lorsque le ciment argilo-talqueux ou chloriteux qui les enveloppe a été entraîné par l'eau, à cause de son inconsistance. Comme roches massives, faisant partie de la formation quartzeuse du Nummedal et du haut Tellemark, on peut citer des bancs de porphyre interposés dans le hornstein, des amphibolites ou diorites, qui se montrent sous forme de filons, et de bancs parallèles à la stratification des schistes adjacents. Ces amphibolites W.1,r.6) DE LA NORWÉGE, DE LA SUËDE ET DE LA FINLANDE. 65 constituent en certains points des masses rocheuses un peu considérables ; ainsi M. Keilhau en cite une (Gæa, p. A3) qui atteint à une hauteur de 2,500 pieds à l'O. du lac Bandag, sur le chemin de l’église de Mo. Quant au granite, il est rare, et ne se montre guère en masses un peu étendues que dans le sud de cette zone. La majeure partie des roches composant cette formation offre un aspect plus cristallin que celui des autres dépôts azoïques qui seront décrits plus loin; ainsi le schiste argileux y est peu développé; les schistes qui accompagnent le quartzite sont le plus souvent des schistes micacés, chloriteux, talqueux ou amphi- boliques, et souvent même des schistes semblables au gneiss par leur composi- tion. Aussi cette analogie avec les terrains primitifs rend difficile à tracer la limite entre le système gneissique et la formation quartzo-schisteuse, d'autant plus que nulle part on n’observe de discordance de stratification. Caractères stratigraphiques. — Néanmoins le quartzite, et les schistes qui l’accompagnent, se montrent partout superposés au gneiss, mais sans qu'il paraisse y avoir d'interruption dans la succession des couches. Aux environs de Rolloug , dans le Nummedal , et de Sillejord , dans le Tellemark, les couches situées au contact des deux terrains, sur le bord oriental de la formation quart- zeuse, ont en général une médiocre inclinaison. Sur le bord opposé, aux environs de Mo et de Vinje, il y a des roches de granite et de gneiss qui n'ont pas de caractères bien définis, et semblent établir un passage entre les deux terrains. En général, la pente des couches appartenant à l’une ou à l’autre des deux formations a lieu vers l’ouest, du côté oriental, et vers l’est, du côté occidental. D'ailleurs, les parties latérales offrent, en général, une inclinaison moins forte que la zone médiane ; ainsi le quartzite, et les schistes semi-cristallins qui l’accom- pagnent , présentent une disposition en éventail, et sont évidemment superposés au gneiss. Mais en quelques parties, ainsi à l'E. du lac Tin, et aux environs du lac Bandag, la limite des deux terrains suit une ligne oblique relativement à la direc- tion des couches du terrain de gneiss et de la formation quartzeuse : il semble que les mêmes couches soient dans une partie de leur fongueur à l’état de gneiss, et qu’en se prolongeant à une certaine distance , elles se changent en quartzite. De là M. Keïlhau conclut qu'on ne peut considérer le dépôt quartzo-schisteux du Tellemark comme ayant été formé par le remplissage d'un bassin. Mais cette apparence n’est qu'un accident local, et la différence évidente qui a lieu entre la composition chimique des couches de gneiss et des couches de quartzite paraît difficile à expliquer, si l’on refuse de lattribuer à un changement dans la nature du dépôt. Au reste, la superposition de la roche quartzeuse au gneiss est incontestable, et ses caractères généraux tendent à la faire considérer comme un système particulier, qui se trouve placé à la partie supérieure du terrain gneis- sique. Les directions que l’on y observe le plus fréquemment sont concentrées dans le voisinage de la ligne N. S. ; c'est dans la partie N. E. que cette orienta- tion est le plus nettement marquée. Soc. GÉOL. — 2° SÉRIE. T. VI. — Mém. n° 1. 9 66 CONSTITUTION GEOLOGIQUE (N. 1, p. 66.) Gîtes métallifères contenus dans la formation quartzeuse du Nummedal et du Tellemark. — La formation quartzeuse du Nummedal et du Tellemark présente une multitude d'indices de gîtes métallifères. Il y en a quelques-uns de fer oligiste ou oxydulé; mais la plupart renferment du minerai de cuivre : en une foule d'endroits, le terrain se montre imprégné de sulfures ferro-cuprifères. Néanmoins ces gîtes paraissent être en général peu riches, ou avoir peu de con- tinuité, car beaucoup d'entre eux, après avoir été l’objet d'exploitations plus ou moins importantes, ont fini par être abandonnés, J'ai déjà parlé de ces mines dans mon mémoire sur les gîtes métallifères de la Scandinavie (1); je vais exposer succinctement leurs caractères essentiels, en empruntant quelques détails donnés sur le même sujet par M. Keilhau (Gæa, p. Lh1). On distingue quatre principaux groupes de mines de cuivre, qui sont, en allant du nord au sud : 4° Le groupe de la vallée du Llauven, situé au N, E. de Rolloug, dans le Nummedal, et comprenant les mines de Friedricksminde et Stockenbroksminde, dans la paroisse de Nore, et des gîtes de pyrite cuivreuse situés dans la paroisse de Veglid et sur le versant septentrional du Blefeld; 2 Je groupe d'Hovynbigden, situé dans la paroisse de Tin, près du lac de ce nom, et comprenant les mines de Rodsüe, Daarudbérg et Vastved ; 3° les mines de Gulduess, situées près du lac Sundbarm, dans la vallée de Sillejord ; 4° le groupe d'Omdal, situé dans la paroisse de Moland, sur les montagnes qui bor- dent plusieurs affluents du Nid-Elr ; il renferme les mines de Mosnap, Moberg et Grusen. La plupart de ces gîtes sont disposés en manière de fahlbandes, de même que le sont en général les gîtes cuprifères de la Norwége : ce sont des couches quartzeuses et micacées, imprégnées de cuivre pyriteux et panaché. Outre ces minerais, dans les gîtes de la paroisse de Nore (vallée de Lauven), il y a un peu d'or natif, disséminé dans du quartz; et, dans la région d'Omdal, se trouve un peu de galène. M. Keiïlhau cite aussi dans le Nummedal, près du village de Rüstigen, une couche de quartz, qui contient un peu de pyrite cuivreuse, avec du molyb- dène sulfuré, du fer oxydulé, du grenat almandin et du disthène. A la mine de Daarudberg (paroisse de Tin), c’est du cuivre sulfuré qui est répandu dans des couches quartzeuses. Le gîte de Vastved, situé dans la même paroisse, offre un banc de quartzite dirigé N. S., dans lequel se trouve du cuivre panaché ; la couche caprifère est intercalée entre des bancs mélangés de fer oxydulé, en cristaux octaédriques. On peut citer comme un des gîtes les plus importants de cette région, celui de Guldness, dans le Sillejord : les minerais de cuivre pyriteux et panaché y sont argentifères, et le cuivre qu'ils fournissent renferme environ un centième d’ar- gent. Les sulfures sont disséminés, sur une largeur de 35 à 40 mètres, dans une (1) Annales des mines, 3° série, t. XV, p. 189 et 290. (10.67) DE LA NORWÉGE, DE LA SUËDE ET DE LA FINLANDE. 67 masse de quartz feldspathique et talcifère, associée à des couches quartzeuses. et argilo-schisteuses. Il y a des concentrations par places sous forme de nids; d’ailleurs on observe aussi, mais en quantité moindre, des pyrites cuivreuses dans des veines de quartz et des filons de diorite qui traversent le gîte. Cette dissémination du minerai de cuivre dans des roches différentes par leur nature, par leur disposition et leur origine, est un fait dont on trouve de nombreux exemples en Scandinavie, et que j'ai déjà signalé dans mon mémoire sur les mines du nord de l'Europe; il est très manifeste à Falun. Le groupe d'Omdal se trouve vers l'extrémité méridionale de la formation quartzeuse du Tellemark, près de l'endroit où elle se termine au milieu du gneiss. Les masses quartzeuses qui contiennent principalement le minerai de cuivre (pyriteux et panaché) sont accompagnées de diverses roches cristallines, de micaschistes, de gneiss et de roches granitiques. M. Keïlhau à fait observer (Gæa, p. khh) qu’à la mine de Mosnap, où, avec le cuivre pyriteux et panaché, il y a un peu de molybdène sulfuré, le gîte présente une étendue au moins trois fois plus grande dans le sens de la pente que dans celui de la direction, de façon qu’il a la forme d'un cylindre aplati dont l'axe longitudinal serait incliné. J'ai signalé précédemment (Mémoire sur les mines, déjà cité, p. 281) beau- coup d'exemples d'une telle manière d’être, ainsi dans les mines de Tunaberg, dans celles des environs de Rüraas, etc. Les gites où l’on remarque ce caractère ne peuvent pas être considérés comme de véritables couches; leur disposition est intermédiaire entre celle des amas et des couches métallifères. Le gîte de Moberg, qui fait partie du groupe d'Omdal, ne consiste pas en une fahlbande, mais en un filon épais de 1 à 4 mètres, qui coupe verticalement des couches de schiste amphibolique faiblement incliné. D'après M. Keilhau, un des côtés du filon est formé de granite, la partie médiane consiste en quartz pur, et l'autre côté en un mélange de quartz et de mica, qui contient le cuivre pyri- teux et panaché, ainsi que du bismuth telluré-sélénifère. Suivant le même géologue, il y a aussi dans la vallée de Tudal, près de Raun- dal, une roche de quartz micacé, que traverse un système de fissures colorées en vert par de loxyde de chrôme; cela forme comme une bande chromifère, que on peut suivre sur une étendue de plus de 1000 mètres. La formation quartzeuse du Tellemark est remarquable, non-seulement par ses minerais métalliques, mais encore par la présence de substances intéressantes, telles que la cyprine, ou idocrase bleue, qui est associée à de la sodalite dans une couche quartzeuse, subordonnée à du schiste amphibolique; auprès est un autre banc de quartz contenant du cuivre panaché. On à aussi trouvé de l’idocrase verte avec du tale, de lachlorite et de la dolomie, dans du quartz, près de Raundal. 68 CONSTITUTION GÉOLOGIQUE (N- 1, p. 68.) Formations quartzoschisteuses de la Scandinavie centrale. Disposition géographique. — Ces formations occupent dans la partie centrale de la Scandinavie une longue zone de terrain, dirigée du S. S. 0. au N. N. E, et se prolongeant du 60° au 66° degré de latitude. On ne voit pas cette bande sur la côte même de l'Océan Atlantique, mais elle s’étend d’une manière continue, depuis Le fond des principaux fiords jusqu’à 1 degré environ de longitude à l’est de la frontière Suédo-Norwégienne, dont elle suit à peu près la direction, de ma- nière à constituer la partie occidentale de la province Suédoise du Jemtland. Du lac Umea situé sous le 66° degré de latitude, au bord de la frontière norwégienne, la limite occidentale du terrain quartzo-schisteux se dirige vers le fiord de Drontheim, en suivant la vallée du Nams Elv, et présentant une disposi- tion parallèle à celle da littoral. Un peu au midi du fiord de Drontheim, elle s'éloigne davantage de la côte, et se porte vers le sud jusqu’au massif du Sneehättan ; après avoir décrit à l'entour un arc de cercle, elle se dirige vers le groupe de pics de l’Iütunfield, le long duquel on la voit former comme une lanière. Plus au sud, la limite du terrain quartzo-schisteux se dessine d'une manière beaucoup moins nette que dans la province de Drontheim ; elle présente des in- flexions un peu irrégulières, qui sont généralement en rapport avec la forme des diverses branches du Sognefiord et des vallées qui y aboutissent. Les schistes semi-cristallins occupent généralement la partie supérieure des hautes plates- formes qui bordent ce golfe remarquable, tandis que les flancs et le pied sont composés de gneiss et de ces roches amphibolico-diallagiques et grenatifères, que nous avons décrites précédemment (p. 54). La même relation a lieu encore plus au sud ; le gneiss primitif affleure au fond des vallées, tandis que la crête des plateaux est habituellement formée de schistes argilo-feuilletés plus modernes. Cependant ces schistes se prolongent à l'ouest dans la vallée de Voss et de Vinje, entre les golfes de Sogne et de Hardanger : on observe aussi, au sud-est du Hardangerfiord, une petite région schisteuse, qui paraît appartenir au même terrain; elle s'étend vers le sud jusqu'auprès du 59° 1/2 degré de latitude, et offre comme point culminant la montagne de Haarteig. Si nous remontons vers le nord-est, nous voyons le terrain quartzo-schisteux former le massif des Hallingskarven, où prennent naissance les principales bran- ches du Haïlingdal. Dans plusieurs de ces vallées, et au fond de celles qui diver- gent du Fillefield, on voit affleurer en divers endroits du gneiss primitif, ou les schistes cristallins qui en dérivent, et sur lesquels s'appuient transgressivement les roches quartzo-schisteuses du groupesemi-cristallin, Du côté sud-est, ce groupe est limité par le terrain silurien du lac Miôüsen, qui s'étend de la vallée de l’Etna Elv jusqu'à celle du Klar Elv. Un peu plus au nord-est, il est borné par la for- mation de grès rougcâtre de la Dalécarlie occidentale, formation que M. Murchi- G.1,r.@) DE LA NORWÉGE, DE LA SUÈDE ET DE LA FINLANDE. 69 son considère comme représentant le vieux grès rouge. La limite orientale de la zone semi-cristalline que je décris s’élève de Rà vers le nord, en traversant l’ouest du Herjedal et du Jemtland, dans un sens à peu près parallèle à la frontière Suédo-Norwégienne ; elle passe immédiatement à l'ouest de la montagne d’Âres- kutan, se recourbe un peu autour de ce massif, et se porte ensuite vers le N. N.E,, jusqu’un peu au delà du 66° degré de latitude; c’est là que paraît se terminer le terrain quartzo-schisteux, à peu de distance du Nasafield. Configuration orographique. — Dans une grande partie de son étendue, la zone semi-cristalline, dont je viens de tracer les limites, se distingue nettement par sa configuration orographique de la région de gneiss située à l’ouest : le con- traste est surtout très marqué entre le 63° et le 62° degré de latitude. Le gneiss du Dovrefeld occidental, du Romsdal, et du nord de la province de Bergen, pré- sente des formes bien plus hardies et un aspect plus imposant que les schistes feuilletés qui composent le Dovrefield oriental et les environs de Rôraas. Les plateaux formés de terrain primitifs’élèvent assez, dans quelques parties, pour être couverts de neige permanente, et l’on y voit surgir des pics dont la hauteur sur- passe 2,000 mètres, et atteint 2,295 mètres au Sneehättan. Mais, dans la région de schistes semi-cristallins située entre 62 et 63, on voit à peine quelques cimes isolées, dont la crête soit blanchie par la neige; les plates-formes environnantes ne s'élèvent au-dessus de la limite de la végétation arborescente (ici à 900 mètres au-dessus de la mer), que dans leurs parties les plus hautes; aussi l'on y voit de vastes surfaces garnies de pins et de bouleaux. D'ailleurs, si l'on monte sur un des sommets situés à la séparation des deux zones, gneissique et semi-cristalline, on reconnaît une différence frappante dans la forme des montagnes que l'on voit s'élever à l’est et à l’ouest: celles qui se trouvent du côté oriental ont des formes beaucoup plus douces, si l’on excepte quelques cimes isolées; les flancs de ces protubérances sont arrondis, et en partie couverts de végétation : à l'entour sont de larges vallées, à pentes faibles, ou de vastes dépressions. Mais dans la région gneissique on voit se dresser un grand nombre de pics élancés, de cimes bordées d'escarpements qu'il est impossible de gravir. Les vallées ne sont, pour la plu- part, que de profondes crevasses, encaissées entre des murs de rochers déchar- nés, à la crête desquels semblent suspendues des masses de glace et de neige. La nature revêt une physionomie plus sauvage, un caractère à la fois plus sévère et plus grandiose. On se demande si la cause de ce contraste ne tient pas à l’inégale résistance qu'opposent aux agents atmosphériques les roches siliceuses du terrain gneis- sique et les couches friables, en partie argileuses, des schistes semi-cristal- lins. Cette circonstance a évidemment contribué à produire les effets que nous venons de signaler : ilest incontestable que les roches argilo-schisteuses ont subi une dénudation beaucoup plus profonde, qui a dû adoucir l’äpreté de leurs for- mes. Cependant l'inégalité de consistance des roches me paraît être insuffisante 70 CONSTITUTION GEOLOGIQUE (N: 4, p. 70.) pour expliquer un contraste aussi marqué : au midi du 63° degré de latitude, c'est dans la zone médiane et occidentale de la Norwége que les causes de soulè- vement et de dislocation ont agi avec le plus d'intensité. Entre le 63° etle 62° degré, les principaux centres d'action de ces forces ont été placés dans la zone gneissique, à peu de distance de sa lisière orientale; aussi les schistes semi-eris- tallins ont été relevés sur les flancs des montagnes de gneiss. Plus à l'est, ces schistes ont éprouvé des soulèvements remarquables en ce qu'ils semblent avoir eu lieu sur des points isolés, comme des soulèvements d'origine volcanique. Mais il n’y a point eu de déchirures rectilignes, longnes et profondes, comme dans le terrain primitif; et les montagnes de la contrée de Rôüraas n'offrent point ce ca- ractère de crevassement qui semble particulier à la zone littorale. Au midi du 62: degré de latitude, le contraste que je viens de faire connaître est moins marqué: alors les roches du groupe azoïque supérieur sont plus sili- ceuses; elles ont été moins fortement dénudées par les agents atmosphériques. D'ailleurs, en s’avançant vers le sud-est, le Lerrain semi-cristallin s'étend en partie sur la zone qui a été le plus fortement affectée par les causes de dislocation ; et même la syénite qui constitue l’Iôtunfield, c’est-à-dire le massif culminant de la Scandinavie, se trouve placée à peu près à la séparation des deux groupes, et est elle-même bordée par une ceinture de schistes feuilletés, semi-cristallins. Constitution géologique du Jemtland. — Décrivons maintenant les caractères géologiques du terrain quartzo-schisteux de la Scandinavie centrale, en commen- çant par la portion orientale, par celle qui affleure dans l'ouest du Jemtland. Cette province suédoise offre beaucoup d'intérêt au géologue, d’abord à cause de ses mines de cuivre, et puis parce que l’on y trouve trois sortes de formations, appartenant aux trois principaux groupes de terrains anciens, au terrain primitif (gneiss et autres schistes cristallins), au terrain semi-cristallin (schistes argilo- feuilletés azoïques), et au terrain silurien. Lorsqu'on s'avance d'Ostersund vers l'ouest, après avoir dépassé l'extrémité occidentale du Storsjün (ou lac d'Ostersund), on longe le lac Liten, qui occupe le prolongement de la même dépression ; là continuent à affleurer des roches de schiste argileux, de grauwacke et de calcaire à Orthocères, qui représentent l'étage inférieur du terrain silurien. Ces couches se prolongent jusqu'au point où l’on atteint le lac Kalln, si l'on s’avance vers le nord-ouest, et jusqu’au village de Stammgärde, si l'on suit la route de Drontheim, qui longe le bord du fleuve Âre, en se déviant un peu vers le sud-ouest, parallèlement au contour du massif primitif d’Âreskutan, Ce massif renferme la cime culminante du Jemtland et de la portion adjacente de la Norwége ; il domine les montagnes de la zone limitrophe, dont il est nettement séparé par la dépression où gît le lac Tengsjôn. Il s’en dis- tingue d'ailleurs par sa composition : sur ses pentes viennent s’appuyer, du côté oriental, le terrain silurien, et du côté occidental, le terrain de schistes argilo- feuilletés azoïques. La partie médiane et la plus élevée du massif est composée de (N.4,p. 74) DE LA NORWÉÈGE, DE LA SUÈDE ET DE LA FINLANDE. 71 schistes cristallins, qui dépendent du terrain primitif et qui ont tantôt les carac- tères du gneiss, tantôt ceux d'un micaschiste passant fréquemment à du quartz schisteux et micacé. On y trouve aussi des bancs de schiste amphibolique ou d'amphibolite schisteux et de calcaire lamelleux; dans ces roches sont quelque- fois intercalées des veines granitiques d'une petite épaisseur. Les couches quartzeuses et micacées sont imprégnées en beaucoup de points de pyrite cui- vreuse ; à Bielke et à Gustafsberg, sur le versant septentrional d’Areskutan, ce minerai de cuivre donne lieu à d'importantes exploitations. Dans la partie méridionale du massif d’Areskntan, les schistes cristallins suivent des directions comprises entre le N, O. et l'O. N. O., directions à peu près parallèles à l'axe longitudinal de cette montagne, qui est disposée en dos d'âne; mais, sur les bords, les directions tendent à se rapprocher du méridien, surtout du côté oriental. Ainsi aux environs d'Hjerpen, à l’extrémité S. E. du lac Kalin, les couches de schiste quarizeux, micacé et amphibolique, s’ondulent des deux côtés de la ligne N. S. Aux environs de Stamgärde, elles courent moyennement du N. N. E. au S.S. 0., avec pente de 45° au N. O. Les couches siluriennes voisines de ce village sont un peu ondulées ; néanmoins leur stratifi- cation diffère de celle des schistes cristallins, car leur direction varie du N. à l'O. N. O., et leur pendage est faible; il paraît y avoir discordance, à la fois sous le rapport de la direction, et sous celui de l'inclinaison. Près de Hjerpen, la relation de contact des deux terrains est moins évidente, car les couches silu- riennes, de même que les schistes primitifs, sont très ondulées ; les unes et les autres ont une forte inclinaison. Terrain semi-cristallin entre la région d’Areskutan et le golfe de Drontheim. — À 20 et quelques kilomètres à l'O. N. 0. de la limite du terrain silurien, près de l'extrémité occidentale de la montagne d'Areskutan, on voit succéder au gneiss des couches de schistes feuilletés, qui par ici sont rarement quartzeux, et qui offrent beaucoup d’analogie avec les schistes luisants et feuilletés prove- nant de la transformation éprouvée par les schistes paléozoïques, à l'approche des grandes masses de granite dans l’ouest de la France et dans les Pyrénées. La couleur des schistes du Jemtland varie du gris blanc au gris foncé, gris bleuâtre el verdâtre. Ils ont tantôt l'aspect micacé, tantôt l'aspect chloriteux. Souvent il ya des feuillets de mica ou de chlorite, répandus au milieu d'une pâte grise, qui paraît amorphe ou argileuse au premier coup d'œil; mais, en l'examinant à la loupe, on y reconnaît une multitude de grains cristallins. Néanmoins nous don- nerons à cette roche le nom de schiste argilo-feuilleté, argilo-micacé ou argilo- chloriteux, suivant que les feuillets qui y brillent se rapprochent davantage du mica ou de la chlorite. Ces divers états du schiste se succèdent les uns aux autres d'une manière graduelle, et tout à l'heure nous allons voir ces roches passer à un véritable schiste argileux et à de la grauwacke, accompagnés de couches offrant les caractères incontestables d’un dépôt de sédiment. 72 CONSTITUTION GÉOLOGIQUE (N. 1, p.72.) Mais d’abord indiquons les rapports de position du terrain primitif et du ter- rain semi-cristallin. Quand on suit la route de Sundswall à Drontheim, c’est près de Forssa que l’on voit disparaître les roches primitives; à l'est de ce village affleure un ensemble de couches de gneiss, de micaschiste et de schiste amphi- bolique, contenant quelques bancs de calcaire lamelleux, micacé; on y voit aussi interposées quelques veines feldspathiques. Dans le village même, et à l’ouest, affleurent des schistes gris, luisants, feuilletés, analogues à du schiste argileux modifié, et courant à peu près du nord au sud. [ci et plus loin ils plongent con- stamment vers l'ouest ; ainsi il est clair qu'ils recouvrent le terrain gneissique, mais le contact immédiat n'est pas visible, et les ondulations des schistes cristallins primitifs ne permettent pas de constater si la stralification est ou n’est pas con- cordante; néanmoins elle m’a paru être plutôt concordante. C'est à environ 5 myriamètres après avoir dépassé la ligne de contact du gneiss el du terrain semi-cristallin, que le voyageur marchant vers l'ouest arrive à la frontière norwégienne, qui coïncide avec la ligne de partage des eaux entre le golfe de Bothnieet l'Atlantique. Là est une plate-forme élevée d'environ 650 mètres au-dessus de la mer, en partie couverte de bouleaux, et présentant de petites dépressions occupées par des lacs. A la surface s'élèvent quelques cimes dont l'altitude est notablement inférieure à celle d’Areskutan. On arrive insensible- ment à cette zone limitrophe; et, si l’on n'est pas encore familiarisé avee la dispo- sition en plateaux des montagnes de la Scandinavie, on cherche vainement de l'œil la crête que l’on croit avoir à franchir pour entrer en Norwége. Après avoir marché pendant quelque temps sur cette plate-forme, on descend dans la vallée de Suul, appelée aussi vallée d'Indal, par des pentes un peu rapides, et qui con- trastent avec l’inclinaison à peine sensible du plan incliné que l'on a suivi pour arriver à la frontière de Norwége. On continue d’ailleurs à voir affleurer le ter- rain de schistes feuilletés, présentant les caractères exposés précédemment : on y observe quelquefois des variétés remarquables ; ainsi je ne puis passer sous si- lence le beau type de schiste qui affleure un peu à l’est de la maison de poste de Stallstiernstuga ; c'est un schiste blanc, feuilleté, micacé, dont les lits sont traver- sés par de grandes aiguilles d’amphibole verdâtre, qui s'y entrecroisent, et affec- tent la même manière d'être que les cristaux de staurotide et de disthène dans le schiste talqueux du Saint-Gothard. Dans certaines parties de la vallée de Suul, les schistes se montrent peu cris- tallins et semblables à du schiste argileux proprement dit; quelquefois ils sont noirs et imprégnés d'ampélite, comme on le voit un peu à l’est du relai de Suul. Leur stratification générale n'offre pas de variation bien considérable; ils con- tinuent à plonger vers l'O. N. O., et leur direction moyenne est voisine du N. N.E., c'est-à-dire à peu près parallèle à la ligne médiane de la zone montagneuse qui s'étend d'ici vers le Nordländ et la Laponie. Entre les hameaux de Suul et de Garnæs on observe des couches de schistes (N.4,p.753) DE LA NORWÉGE, DE LA SUÉDE ET DE LA FINLANDE. 73 feuilletés , micacés, entremêlés de veines d'une espèce de granite à gros grains, qui à peut-être contribué à faire naître cel aspect un peu plus cristallin que dans les parties adjacentes. Un peu avant d'arriver à Garnœæs , on voit affleurer du quartzite schisteux, gris bleuâtre, et une grauwacke schisteuse, grise , chargée de particules siliceuses. Le pendage qui, depuis le commence- ment de la formation semi-cristalline, était vers l'O. N. O., a lieu maintenant vers le S. E. Un peu après Garneæs, le schiste feuilleté renferme des couches de calcaire gris , compacte, n'ayant aucune apparence de cristallinité, et ne parais- sant pas différer des calcaires paléozoïques autrement que par l'absence de fossiles. La cassure en est inégale , un peu schisteuse; la couleur est grise et d'un gris bleuâtre : des schistes argileux un peu luisants et des schistes feuilletés l'accompagnent. La direction des couches, qui précédemment variait du N. N.E. à VE. N. E., tend à passer ici à l'O. N. 0. et à l'O., mais sans qu'il y ait discor- dance de stratification, car on voit le calcaire compacte courir dans une partie au N. E., et tout auprès s'infléchir pour prendre la direction 0. N. O. On arrive ensuite dans la plaine de Verdalsüren, remarquable par ses belles et nombreuses terrasses, que les eaux de la mer ont façonnées régulièrement à une époque récente. J'ai exploré les coteaux qui bordent cette ancienne baie : du côté septentrional, aux environs de Syckestad, j'ai vu les roches schisteuses offrir un aspect cristallin tout à fait inattendu; on y distingue des lamelles feldspathiques, mélangées de grains de quartz et de paillettes micacées. Le schiste feuilleté passe alors au gneiïss et est accompagné de schiste amphibolique verdâtre : je n'ai pu reconnaître aucune cause qui ait déterminé cette modifi- cation ; peut-être tient-elle à quelque roche massive de granite ou de syénite, qui n’est pas visible à la surface, où qui se trouve à quelque distance de là. Au midi de Verdalsüren, entre ce petit port et le village de Tunæs, affleu- rent des schistes feuilletés, gris et d'un gris noirâtre, tendant à devenir micacés ; ils renferment des bancs de calcaire gris, compacte, semblable à celui déjà observé à l'ouest de Garnæs , et c'est probablement la prolongation du même groupe de strates ; la direction n’est pas ici très différente; les couches courent à l’est quelques degrés nord, et plongent de 30 à 40 au sud. Plus loin, en suivant la route de Drontheim , qui passe par Levanger et Hove, on voit se continuer les schistes feuilletés, gris et noirâtres; leur direction repasse de l'E. à l'E. N. E. et au N. E. Près de Hove, ils offrent accidentelle- ment un aspect cristallin: ils renferment beaucoup de feuillets de mica noir, associés à des grains de quartz: on y voit même quelques grains feldspathiques, dont la présence détermine un passage vers le gneiss. Mais un peu plus loin, vers Hammer, la roche reprend les caractères d’une masse feuilletée, chlori- teuse, grise et verdâtre , dont les directions un peu ondulées sont généralement comprises entre le N. N.E. et l'E. 35 N. ; la pente qui, depuis Garnœæs dans la vallée de Suul, était au S. E., repasse au N. O0. SOC. GÉOL. — 2° SÉRIE. T. VI. — Mém. n° 1. 10 74 CONSTITUTION GÉOLOGIQUE N.1,p.74) Au delà, sur la route de Levanger à Drontheim, les schistes feuilletés offrent de temps en temps l'apparence d’un schiste argileux , un peu luisant, faiblement modifié, se continuant jusqu’à la petite baie de Storfiord, où vient se jeter une rivière un peu considérable , et là se trouve le bourg de Vernæs, appelé aussi Stordal, du nom de la vallée environnante. Avant d'y arriver, on remarque en plusieurs endroits, principalement entre Vordal et Forbord , une roche amphi- bolique verte, lamelleuse, interposée au milieu des schistes; el, à 1 kilomètre au sud du re de Forbord, on voit affleurer des couches d’un calcaire gris, un peu schisteux, à texture compacte ou sublamelleuse ; il est accompagné de schiste argileux, gris et gris bleuâtre:, dépourvu d’aspect cristallin. Poudingue de Heel. — Sur le bord gauche de la rivière de Sterdal, près du village de Heel , affleure un poudingue ou conglomérat, renfermant une mul- titude de gros cailloux roulés, qui ont jusqu'à 50 centimètres de longueur. Ils sont en général bien arrondis; quelques-uns cependant sont simplement émoussés sur les angles : j’en ai observé aussi qui ont une de leurs extrémités un peu aiguë , et parfois il y en a d'une apparence réniforme; néanmoins il est impossible de douter que ce soient des fragments détachés de roches plus anciennes. Beaucoup sont formés d’une espèce de leptinite à grains fins, gris blanchâtre, très quartzeux, et d’un granite à petits grains ; d’autres consistent en schiste micacé et en schiste feuilleté verdâtre. Ces cailloux sont entassés irrégu- lièrement, et cimentés par une pâle de schiste argileux d’un gris foncé. On voit de nombreuses veines blanches et translucides de gypse grenu, de chaux car- bonatée lamelleuse, et de quartz, serpenter entre les cailloux de ce poudingue, et les couper quelquefois La masse n'est pas très clairement stratifiée ; ce- pendant elle paraît courir à l’O. N. 0. Elle est bordée de couches de schiste argileux gris bleuâtre, un peu luisant, qui est très ondulé et varie en direc- tion du nord à l'est. Un peu plus loin au sud-est, ce schiste est accom- pagné de quartzite grenu, d'un gris bleuûtre; puis on voit reparaître le pou- dingue bien caractérisé, contenant ici, avec le granite, des galets de quartzite et de calcaire gris, faiblement cristallin; la pâte qui les enveloppe est argileuse. Ce conglomérat est accompagné de schiste argileux, et ne diffère pas notable- ment de certains poudimgues, à pâte de grauwacke, que l'on trouve dans les terrains de transition de la France occidentale : les calets sont entassés dans certaines couches; dans d’autres , ils sont parsemés au milieu de schistes argi- leux, et la roche forme alors un schiste poudingiforme ; comme il y en a beaucoup en Bretagne. Un peu plus loin vers l’est , on voit affleurer du schiste gris verdâtre et gris bleuâtre, avec de la pierre calcaire grise. subcompacte, et à petites lames, dont la direction varie du N. N. O. au N. E.; les couches sont ondulées, et leur inclinaison est généralement forte. On a donc ici un en- semble de roches évidemment sédimentaires, poudingue, schiste, grès el cal- caire compacte. (N.1p.%) DE LA NORWÉGE, DE LA SUÉDE ET DE LA FINLANDE. 15 Bande poudingifère. — Ce poudingue ne paraît pas former une petite masse isolée, mais une bande dirigée du N. E. au S. O., car je l'ai encore vu affleurer à 5 myriamètres au S. O., en masses considérables, dans la vallée de Guul. entre les bourgs de Melhuus et de Stôren, principalement aux alentours du villige de Voiland. Ici les galets de quartz blanc abondent, et sont mélangés de galets de gra- nite à grains moyens et de pétro-silex gris. Tantôt ils sont entassés confusément, tantôt ils sont couchés dans le sens de la stratification ; la pâte qui les entoure est grenue et subschisteuse, offrant un mélange de détritus argileux, quart- zeux et feldspathiques ; c'est comme un ciment de grauwacke à petits grains. La direction moyenne des couches est le N. 40° E.; elles plongent fortement au S. E.; si l’on suppose que ce poudingue se prolonge vers Le N. O., suivant la même direction , il ira passer à l'embouchure de la rivière de Stordal , à l'endroit même où se trouve le conglomérat de Heel, que nous avons décrit tout à l'heure. Cette roche forme donc une bande qui doit traverser la vallée du Nid-Elv, près de l'extrémité occidentale du lac Sœlbo. Elle est accompagnée, dans la vallée de Guul, de grauwacke schisteuse, grise, parsemée de points brillants, de schiste argileux, de schiste ampéliteux, noirâtre, et de calcaire gris, subcom- pacte, offrant aussi quelques lamelles. En diverses parties, les schistes sont assez fissiles pour être exploités comme pierre à ardoise. Cet ensemble de cou- ches est redressé verticalement et régulièrement stratifié ; cependant on y remarque un eurite contenant de petites lames d’un feldspath qui a l'apparence de l’albite, et de petits cristaux de quartz disséminés au milieu d’une pâte grise, pétro-siliceuse. Les couches de poudingue, de calcaire compacte, de schiste argileux, de grau- wacke et de grès que je viens de décrire, sont interstratifiées, d'une manière concordante, au milieu de la zone de schistes feuilletés que nous avons vue com- mencer à affleurer immédiatement à l'ouest du massif d’Areskutan. Cependant je ferai observer que, dans cette bande de schiste argileux, de calcaire compacte et de conglomérat, les couches de la partie orientale plongent au N. O., et celles de la partie occidentale inclinent généralement au S. E. Leur ensemble forme donc une sorte de fond de bateau, ou de bassin , dont les parois sont redressées et s'appuient sur le vaste dépôt schisteux qui recouvre le gneiss primitif. Néan- moins il n'y a pas de séparation bien marquée entre les couches de la bande poudingifère et les schistes feuilletés situés au-dessous; on observe même entre ces deux séries des passages pétrographiques insensibles. Dans le système supé- rieur 1l y a des schistes micacés et chloriteux, et l’on y rencontre même, comme dans le système inférieur, du schiste amphibolique et des couches qui rappellent le gneiss par la présence de grains feldspathiques ; on y trouve aussi quelquefois des bancs d’une roche euritique, schisteuse et gneissiforme. Néanmoins cette assise supérieure du terrain argilo-feuilleté se distingue par son aspect généralement moins cristallin que celui des schistes sous-jacents, et 76 CONSTITUTION GÉOLOGIQUE “(N: 1, p.76.) par la présence de roches dont l'origine sédimentaire est incontestable. Elle se prolonge vers le N. E. jusqu'au 65< 1/2 degré de latitude, en suivant une disposi- tion parallèle à Ja limite occidentale du terrain semi-cristallin. Sur les rives du lac Snaasen, un peu au nord du 64° degré de latitude, on voit affleurer une série très étendue de couches calcaires à grains fins, accompagnées de schistes argilo- feuilletés. On observe encore au N. E. de ce lac du schiste argileux, noir, ampéliteux et alunifère ; il y a aussi du quartzite dans la même région. Plus au N.. dans le Susendal, une des branches de la vallée de Vefsen, située près du 65° 1/2 degré de latitude, M. Keïlhau a observé (Gæa, p. 412) un conglomérat contenant des galets de quartz entourés d’une masse sableuse. Ce poudingue, qui est associé à des couches calcaires et schisteuses, se trouve sur la direction de la bande calcaréo-poudingifère des environs de Drontheim ; aussi j'ai prolongé cette bande jusque là; peut-être s’étend-elle encore plus loin vers le N. N. E., au delà du 66° degré de latitude, jusqu’au point où se termine la zone des schistés semi-cristallins; mais je n’ai pas de données suffisantes pour motiver une pareille extension. | Au bord oriental de cette zone poudingifère, sur la montagne de Portfield, et aux alentours (sous 64° 1/2 de latitude), se trouvent des roches feuilletées, des schistes micacés et amphiboliques, dont une variété décrite par Tilas et par M. Keilhau (Gæa, p. 100) présente l'aspect d’un pseudo-conglomérat. On y voit au milieu du micaschiste des sortes de concrétions quartzeuses, dont quelques- unes ressemblent à des cailloux roulés ; mais plusieurs sont recourbées et allon- gées suivant la schistosité de la roche : elles prennent même la forme de plaques lenticulaires, épaisses de quelques centimètres, sur 4 à 5 décimètres de longueur. Du côté méridional, la bande calcaréo-poudingifère doit s'étendre jusqu’à Opdat, car on trouve près de ce bourg des blocs d'un poudingue analogue à celui de Voiland; ils ont sans doute été détachés de rochers peu éloignés, et ils appar- tiennent au même groupe de couches que le conglomérat de Heel et de la vallée de Guul. Mais, plus au midi, je n’ai point observé de roches semblables; la bande que nous venons de décrire paraît donc se terminer près d'Opdal ; ou du moins, si elle se prolonge plus au sud, elle perd les caractères pétrographiques qui ser- vent à la différencier des schistes sous-jacents. Ainsi que M. Keïilhau l'a indiqué sur sa carte géologique, le fiord de Dron- theim forme, dans une partie de son étendue, la séparation entre le terrain argilo- micacé et le terrain gneissique situé à l’ouest : quant à l’assise calcaréo-poudingi- fère, sa limite occidentale passe à l’est de Drontheim ; les schistes gris verdâtres, feuilletés, qui affleurent aux alentours de cette ville, sont un peu cristallins ; ils ont l'aspect de schistes chloriteux. En beaucoup d'endroits, aux alentours de cette ville, j'ai vu interposée dans ces schistes une roche amphibolique, verdâtre, offrant un mélange de lames d'hornblende verdâtre et de grains feldspathiques, gris. blancs : elle présente souvent une légère indication de schistosité. Des veines de (N: 1, p.77.) DE LA NORWÉGE, DE LA SUEDE ET DE LA FINLANDE. fit chlorite la traversent en divers sens, présentant les mêmes ondulations et entre- croisements que les skolar de la Suède. Un peu à l’ouest de Drontheim, on ob- serve aussi une roche granilique à grains moyens, avec des feuillets de mica noir et verdâtre, disposés de façon à en rendre la texture veinée. J'y ai remarqué des lames de feldspath, qui m'ont paru être de l'oligoclase. Les roches qui affleurent à quelques myriamètres à l'est et au sud-est de Drontheim, et qui supportent du côté oriental la série calcaréo-poudingifère, con- sistent en une masse de schistes feuilletés, argilo-micacés ou chloriteux, analo- gues à ceux que nous avons observés sur la zone limitrophe de la Norwége et du Jemtland, en allant d’Areskutan à Verdalsüren. Ils en forment sans doute le pro- longement, car ils courent entre le N. et le N. N. E.; leur pendage habituel est à l'O. N. O. Ces schistes contiennent souvent des grenats, et l'on y trouve aussi des bancs amphiboliques ; le quartzite schisteux ne s’y trouve qu'en lits minces, tandis que nous le verrons former des masses considérables dans le Guldbrands- dal, au midi du Dovrefield. Région de Roraas. Les couches qui renferment les gîtes cuivreux des environs de Rôraas (Storvartz, Kongens, Mygg, etc.) offrent des passages du schiste argileux au schiste chloriteux et micacé : on y voit de larges feuillets de chlorite verdâtre, courbes et ondulés, mélangés çà et là de feuillets blancs, talqueux, qui donnent à la roche un reflet argenté. Quelquefois la chlorite ou le talc s'y montrent en cristaux tabulaires, hexagonaux, disposés obliquement par rapport au plan de stratification. Les roches qui affleurent aux alentours des mines ressemblent, tantôt au schiste micacé, tantôt au schiste chloriteux, mais c’est dans ce dernier que la pyrite cuivreuse paraît déposée de préférence : dans le gîte principal, celui de Storvartz, elle est disséminée au milieu de la masse schisteuse ; mais, aux mines de Kongens et de Foldal, elle est associée en petite quantité à la pyrite de fer jaune, qui forme des bancs intercalés dans les couches chloriteuses. Les schistes des environs de Rôraas sont faiblement inclinés, et dirigés en di- vers sens : les montagnes qu’ils forment n’ont pas une très grande élévation ; la plupart ne dépassent pas le niveau de 1000 mètres au-dessus de la mer : elles présentent des pentes très douces et des surfaces plates à leur sommet. On ne voit aucune cime aiguë, ce qui paraît tenir, d’abord à ce que le sol a été ridé de manière à prendre une forme ondulée, sans offrir de profondes déchirures, et ensuite à ce que les couches sont peu inclinées et d’une facile désagrégation. Entre les plates-formes à bords arrondis, se trouvent de larges dépressions, occu- pées par de très grands lacs, tels que le Fœmund et l’Oresund , d'où sort la Glommen; c’est seulement un peu au-dessous de Rüraas que ce fleuve entre dans une vallée nettement dessinée, bordée par des parois régulières et continues. Les plateaux ondulés des environs de Rôraas présentent un caractère de déso- lation et de solitude qui m'a rappelé la physionomie des landes de la Bretagne, malgré certaines différences tenant principalement à la plus grande élévation des 18 CONSTITUTION GÉOLOGIQUE (24, pe 78) montagnes. Dans les parties basses, le climat n’est pas encore assez rigoureux pour empêcher la végétation de se développer ; néanmoins à Rôraas, à 657 mè- tres (1) au-dessus de la mer, les céréales ne peuvent pas arriver à une complète maturité : les alentours de la ville sont presque dépourvus de verdure ; on y voit çà et là des bouleaux chétifs ou des pins rabougris, dont la croissance est arrêtée par la violence des vents. La surface nue du terrain montre d'immenses dépôts de transport, de sable et de gravier, mélangés de cailloux et de blocs erratiques : on n’aperçoit même pas de rochers pittoresques ; de tous côtés, le pays offre un aspect triste et monotone. La région de Rôraas est remarquable par ses mines : outre sesgîtes de minerais de cuivre, qui sont les plus importants de la Norwége, on y exploite de nombreux amas de fer chrômé, dont l'existence a été signalée pour la première fois par Le professeur Esmarck : le chrôme et le cuivre ne se trouvent pas associés dans les mêmes mines, mais leurs gîtes se trouvent dans la même zone, et sont quelque- fois très rapprochés. Les principales mines sont situées à l’est de Rôraas, à Rôhammer, sur la rive occidentale du lac Ferager, et dans la vallée de la Glommen, à la montagne de Faastenen près de Tünset. Les mines de Rôhammer et de Ferager paraissent faire partie d'une même zone chrômifère, dirigée de l'O. N. O. à l'E.S,. E. et longue de plus d’un myriamètre. La direction générale des couches encaissant les gîtes de chrôme est de l'E. à l'O., ou de l'E. S.E. à l'O. N. O.; et c'est dans le même sens que les gîtes sont allongés. Habituelle- ment le fer chrômé ne se trouve pas en contact immédiat avec les schistes ; il est enchässé dans de la serpentine verte ou d’un vert jaunâtre, souvent translucide, affectant parfois un aspect fibreux, et passant à l’asbeste. Sur les cimes de Rühammer et Ferager, qui contiennent les principales mines de chrôme, on observe une roche lamelleuse, diallagique, qui est analogue à la norite d'Esmarck; elle offre des couleurs variées, d’un vert clair ou d’un vert foncé, et d’un jaune brunâtre dans les parties superficielles, qui sont altérées, et qui présentent comme une écorce épaisse de quelques millimètres. Cette roche est pénétrée de serpentine, et constitue des buttes arrondies, qui ont été polies et striées par les agents erratiques : l'empreinte des sulcatures s’est conservée, mal- gré l'altération de la roche, sur de vastes surfaces, qui sont nues et privées de végétation. Vu la disposition ramifiée de la serpentine, on peut considérer la roche diallagique, où elle est contenue, comme s'étant étoilée, fendue en divers sens; et alors un mélange de serpentine et de fer chrômé s'est introduit entre les fissures de la roche, qui pouvait se trouver encore dans un état pâteux. Région limitrophe à l'est de Roraas. — Pendant mon séjour à Rôraas, j'ai fait. une excursion sur les montagnes qui s'élèvent à l'est des lacs d'Oresund (ou Aur- (1) La hauteur que j’attribue à la ville de Rôraas est le résultat moyen de quatorze observations : barométriques. (N.1, p.79.) DE LA NORWÉGE, DE LA SUEDE ET DE LA FINLANDE. 79 sund) et de Ferager, sur la zone limitrophe de la Suède, afin de me former une idée exacte de la configuration orographique de cette région, où beaucoup de géographes supposent qu'a lieu la jonction des montagnes du nord et du sud de la Norwége. Mais, si l’on monte sur l’une des principales cimes qui se trouvent aux environs de Rôraas, on reconnaît que cette contrée, loin de former un nœud de jonction entre deux chaînes de montagnes, consiste en une véritable dépres- sion, séparaut les hautes plates-formes du Dovrelield de la série de sommités limitrophes qui commence à l'est du lac Fœmund, et s'étend vers le N.N. E. jusqu'au cap Nord. L'Hummelfield, le Tronenfield et le Sélenfield, qui s'élèvent à des hauteurs de 1800 à 1500 mètres, entre le Dovrefield et la frontière suédoise, sont des sommités isolées, n'ayant aucune connexion entre elles. Le Svukufield, le Vigelnfield, le Rutefield, etc., qui se trouvent sur la frontière suédo-norwé- gienne, sont aussi des sommités détachées les unes des autres; mais elles forment un groupe à peu près rectiligne, qui est ici dirigé dans le sens du méridien. Sur cette zone limitrophe, le terrain schisteux, semi-cristallin, est entrecoupé par du granite, de la syénite et du porphyre quartzifère ; telles sont les roches que j'ai observées sur le massif du Vigelnfield, et sur les montagnes voisines. Sur leurs flancs affleurent des schistes gris blanchâtres, quartzeux et pétro-siliceux ; au pied s'étend, du côté de la Suède, Ia même formation de schistes feuilletés, argilo-micacés et chloriteux, qui constitue les environs de Rôraas. Le granite du Vigelnfield est à grains moyens , renfermant des cristaux un peu gros de feld- spath rose et du mica verdâtre; il passe à un porphyre quartzifère, dont la pâte grise et pétro-siliceuse contient quelques lames feldspathiques et des cristaux de quartz hyalin. C’est ce porphyre qui forme le sommet principal du Vigelnfield ; sur la montagne aplatie qui se trouve immédiatement au N. N. O., et qui fait partie du même massif, affleure de la syénite à petits grains, offrant un mélange de lames verdâtres d’amphibole, de petits cristaux gris blanchâtres d’orthose et d’albite, ou d’oliglocase, avec un peu de quartz. Cette roche est en contact avec le granite, sans que l’on puisse voir de démarcation ; un peu plus loin, sur le Dovrefield, nous verrons aussi des passages du granite à la syénite ; aussi j'ai cru devoir représenter ces deux roches par la même teinte conventionnelle. Sur les bords du lac de Malmagen, situé au pied de ces montagnes, du côté oriental, dans le Herjedal, affleurent des schistes feuilletés, chloriteux, gris ver- dâtres, analogues à ceux de Rôraas; mais entre l'extrémité occidentale de ce lac et le village de Voidalen, près de la frontière des deux pays, qui est ici très basse, j'ai observé une variété de schiste singulière : les feuillets chloriteux y sont contournés autour de noyaux d'une forme généralement arrondie, ayant de h à 12 centimètres de largeur, et consistant en un granite à grains moyens, avec orthose rouge clair et mica verdâtre. Quelques-uns de ces noyaux sont un peu anguleux; il en est qui sont composés de quartz blanc. Nous verrons une roche analogue, et d’une origine également problématique, dans la partie septentrionale du Gulbrandsdal. 80 CONSTITUTION GÉOLOGIQUE (N 4, p. 80) MM. Hisinger, Hausmann, Esmarck et Keilhau ont cité, sur la rive orientale du lac Fœmund, etau sud de ce lac, des roches bréchiformes et poudingiformes, qui présentent quelquefois un aspect étrange : il y a une sorte de conglomérat, qui, au milieu d'une masse grenue, quartzo-feldspathique, contient des noyaux arrondis de quartz et des fragments d’un schiste rougeûtre. Il y a aussi, princi- palement au sud du lac Fæmund, une roche bréchiforme, qu'Esmarck a nommée sparamigte : elle est talco ou chlorito-schisteuse, d'un gris rougeâtre et gris jaunâtre, translucide sur les angles ; elle renferme souvent des fragments angu- leux d’une roche semblable à elle-même, mais d’une teinte tantôt plus claire et tantôt plus foncée. On y voit souvent des parties feldspathiques, du tale ou de la chlorite. Ces roches me paraissent appartenir plutôt au terrain semi-cristallin qu’à la formation paléozoïque située un peu plus au sud, d'autant plus que l'on voit à peu de distance affleurer des schistes feuilletés, auxquels paraissent se relier les roches bréchiformes ou poudingiformes. La formation de schistes argilo-micacés et chloriteux s'étend depuis la partie occidentale du Herjedal jusqu'aux environs de Jerkind, à l'origine du Folda-Elv. au pied oriental du Sneehättan, qui forme le point culminant du Do-refeld (2,295 mètres). Sur quelques-unes des montagnes qui avoisinent la vallée de la Glommen, ce terrain schisteux renferme des gîtes de fer chrômé, ainsi à Faaste- nen, près de Tünset. Il contient aussi plusieurs dépôts de minerai de cuivre, dont le plus important est exploité sur le flanc septentrional de la vallée de Foldal, au-dessus de l'église de ce nom. Il consiste en une couche de pyrite cuprifère, massive, intercalée dans les schistes chloriteux et micacés, auxquels sont associées ici des roches amphiboliques et grenatifères. À peu de distance de là, entre Lillelvedal et Grimsboe, le schiste offre l'aspect d’un thonschiefer un peu luisant, plutôt fissile que feuilleté, renfermant des bancs calcaires d'un gris foncé, peu cristallin. Extension des schistes argilo-feuilletés sur le Dovrefield. — La formation de schistes argilo-feuilletés vient se terminer au pied de la partie la plus élevée du Dovrefield ; sa limite est donc liée aux traits orographiques du pays (1). Les schistes semi-cristallins s'appuient sur le gneiss du Sneehättan , et alors leur inclinaison devient beaucoup plus considérable qu’elle ne l’est aux environs de Rôraas. Les couches semblent se redresser à l’approche de ce cône de soulève- ment, autour duquel on les voit décrire un arc de cercle ; ainsi, aux environs de Lie, au pied méridional du Dovrefield, elles courent à l'E. N. E.; près de Jerkind, à l'origine de la vallée de Foldal, elles sont dirigées au N. E.; plus au nord, près (1) Le contour que sur ma carte j’ai assigné au terrain gneissique du Dovrefeld diffère notable- ment de la limite tracée par M. Keïlhau. D’après cet observateur, le sneehættan serait formé de schistes appartenant au même groupe que les couches argilo-feuilletées situées plus à l’est ; mais cette manière de voir me paraît peu conforme aux caractères RÉRRErphIqUes et stratigraphiques des roches, de même qu’à la structure orographique du sol. (p.81) DE LA NORWÉGE, DE LA SUÉDE ET DE LA FINLANDE. 81 de Kongsvold, leur direction passe au N. N. E.; à Drivstuen et plus loin au nord, elles continuent à se recourber vers le N. et le N. N. O0. La pente est presque constamment vers l’est, ce qui montre que les couches ont été relevées par les mêmes causes qui ont soulevé le Snechättan et la partie centrale du Dovrefield ; ainsi la superposition des schistes argilo-micacés et chloriteux au gneiss est ici manifestement concordante (1). Disposition des roches schisteuses du Dovrefield. — M. Nauman, qui a étudié avec beaucoup de soin et de talent la composition géologique du Dovrefield, a considéré les roches schisteuses comme relevées en forme de manteau autour de la partie centrale. Ayant observé du côté oriental, de même que du côté occiden- tal, une bande de gneiss porphyroïde, il a pensé que ces deux bandes ne for- maient qu'une même assise repliée circulairement sur elle-même, et décrivant une surface conique autour d'un point médian. Je n'adopte pas entièrement à cet égard les conclusions de M. Nauman ; la disposition des couches me paraît être moins régulière qu’il ne l’a supposé, et d’ailleurs j'ai constaté positivement que legneissporphyroïde ne forme pas une seule, mais plusieurs bandes à l'ouest du Sneehättan. J'ai traversé en plusieurs sens la haute plate-forme qui sert de base à cette cime; ainsi, en allant de l’Aamosdal dans le Repthal, du Repthal dans le Skamsthall, et de là dansle Kalvillathal, j'ai vu, sur la partie occidentale du plateau, les couches de gneiss présenter fréquemment des plis et des ondula- tions. Il est incontestable que les couches situées à l’est du Snechättan ont été relevées, de façon à plonger régulièrement vers l'est: quant à celles situées du côté opposé, elles inclinent tantôt à l’est, tantôt à l’ouest ; et même celles qui affleurent immédiatement à l'O. et au N. O. du Snechättan m'ont paru incliner plus généralement à l'est qu'à l'ouest (voir ma coupe, figure 8). D'après cette disposition stratigraphique, il semble qu'il y a eu plusieurs lignes ou centres de relèvement des couches. D'ailleurs, il ne faut pas oublier que les schistes de cette contrée montagneuse ne peuvent offrir, dans leur dispositionstratigraphique, la même régularité que si elles avaient subi l'empreinte d’un cataclysme unique, lequel aurait produit d’un seul coup le relèvement des strates et la forme géné- rale des accidents orographiques. En général , il serait erroné de considérer la disposition stratigraphique de tous les terrains qui composent un système de montagnes comme résultant néces- sairement des phénomènes qui ont produit les traits les plus saillants. Une telle (1) Sur le côté occidental du fiord de Drontheim, qui, dans une partie de son étendue, sépare le terrain de gneiss des schistes semi-cristallins , il y a une pareille harmonie stratigraphique; ainsi M. Keïlhau a cité près de Lexviken (Gæa norvegica, p. 409) un exemple de concordance et même de passage lithologique; mais un peu plus loin au N. N. E., près de Fiskumsfoss, sous le 64° ! degré de latitude , il y a, d’après cet habile géologue , une discordance de stratification, car le gneiss y est incliné de 85 degrés vers le sud, tandis que, un peu plus au midi, affleure du thonschiefer brillant, en couches presque horizontales. SOC. GÉOL. — 2° SÉRIE. T. VI. — Mém. n° 4. 11 82 CONSTITUTION GÉOLOGIQUE (N. 1, p. 82.) dépendance entre les caractères orographiques et stratigraphiques devrait avoir lieu , si le soulèvement d’une chaîne était le résultat d'un phénomène unique ; mais il n’en est presque jamais ainsi. Ce sont en général les premiers soulève- ments qui ont dù influer le plus fortement sur la disposition stratigraphique des terrains sédimentaires , tandis qu'au contraire ce sont les derniers qui ont dû donner aux montagnes les traits les plus marqués de leur configuration. Schistes des environs de Jerkind.— Décrivons maintenant les roches qui, dans la région du Dovrefield, constituent la formation semi-cristalline, argilo-feuilletée, et la partie adjacente du terrain gneissique. Les schistes des environs de jerkind, sur le plateau du Dovre, sont analogues à ceux de la contrée de Rôraas, peut- être un peu plus cristallins ; ils sont feuilletés, Iuisants , gris et verdâtres , res- semblant à des schistes argileux fortement modifiés. À une petite distance au sud de Jerkind , sur la vive droite du Folda Elv, ces schistes sont accompagnés de quartzite schisteux , dans lequel on distingue de petits feuillets de mica ; sur le flanc de la montagne qui borde le torrent, on voit en contact avec le schiste une syénite à grains moyens, plutôt petits que gros. L’hornblende s’y montre en lamelies allongées, avec du mica brun verdâtre, et avec beaucoup de grains feld- spathiques, dont une partie paraît appartenir à l'orthose, et l'autre à un feldspath du sixième système, caractérisé par l’hémitropie concave; il y a aussi des grains de quartz gris, tendant à prendre la forme de prisme hexagonal, dans certaines parlies où la masse environnante offre un aspect porphyrique. Cette roche s'étend vers le sud-est, jusqu'auprès de l'extrémité orientale du lac Lessüe: mais, aux environs de Fogstuen, l’amphibole disparaît en grande partie dans la roche ; et alors, au lieu d’une syénite, on n’a plus, ainsi que l’a observé M. Nauman, qu'un granite ordinaire, à petits grains, composé de feldspath et de quartz gris blanc, avec du mica noir, qui remplace l'amphibole. Une pareille masse de syénite se voit à l’est de Drivstuen, et au sud-est d'Opdal, entre les val- lées de la Driva et de l’Orkel-Elr ; elle tend également à se changer en granite dans sa partie centrale. Ces roches cristallines, de même que celles de lIôtun- field, prennent souvent une structure schisteuse à leur périphérie. Si l’on s’avance de Jerkind vers le nord, on marche sur des schistes luisants, feuilletés, jusqu’au haut de la plate-forme qui sépare la vallée de Foldal de celle de la Driva ; mais, en descendant vers Kongswold, métairie située dans la vallée de la Driva, on voit alterner avec des schistes chloriteux des bancs ondulés de schiste amphibolique, d’un vert nojirâtre, et l’on observe aussi des lames d’am- phibole répandues çà et là dans certaines couches de schiste chloriteux. Près de Kongswold affleure du micaschiste gris blanc et gris bleuâtre , formé de feuillets larges et continus, au milieu desquels on voit s’entrecroiser de grandes aiguilles d'amphibole verdâtre. Cette roche, qui ressemble à celle que j'ai citée dans le Jemtland , près de Stallstiernstuga , alterne avec des couches de mica feuilleté ; il y en a d’autres, composées d’une masse amphibolique, lamelleuse, (4.5) DE LA NORWÉGE, DE LA SUÈDE ET DE LA FINLANDE. 83 _ noirâtre : puis viennent des couches micacées, criblées d’une multitude de grenats rouges, de la grosseur d’un petit pois. On voit ainsi alterner une succession de roches schisteuses, remarquables par la variété de leurs cristallisations et par la beauté de leur aspect. Dans le défilé étroit de la Driva , que M. de Buch a comparé à celui de Schôllenen, sur le versant septentrional du Saint-Gothard, les schistes sont très tourmentés et présentent des contournements nombreux : en certains points les couches sont presque horizontales, tandis que tout auprès on les voit se dresser verticalement (1). Micaschiste poudingiforme des environs de Drivstuen. A l'issue du défilé, un peu avant la métairie de Drivstuen, le schisite micacé devient plus quartzeux qu'auparavant; il montre une alternance de lits siliceux et de lits micacés ; puis on y remarque, près de Drivstuen, des couches d’un aspect poudingiforme, con- tenant des cristaux blancs et ovoïdes d’orthose, parsemés çà et là, ainsi que des noyaux de granite ou de pegmatite, ayant une forme généralement arrondie, mais se terminant quelquefois en pointe : il y a aussi des noyaux de quartz d'un gris rougetre. Les lits siliceux qui accompagnent les couches d'apparence poudingi- forme sont discontinus, plus ou moins ondulés ; ce sont comme des lentilles très aplaties, qui, sur leurs bords, semblent se fondre dans la masse environnante. À 3 kilomètres environ au N. N. 0. de Drivstuen, près du village de Vammer, situésur la rive gauche de la Driva, proche le confluent du tor- rent de l'Aamosdal , la même roche est très développée, et j'en ai dessiné la disposition, qui est représentée par la figure ci- contre. ci, dans une masse de feuilletslarges et brillants de mica gris-foncé et verdâtre, sont enchâssés des noyaux de pegma- äu micaschiste pondingiforme tite, ou d’une matière feldspathique etun peu quartzeuse, d'un NT gris blanc, et d'un rouge clair, à lames moyennes et un peu grandes. Le diamètre de ces noyaux varie de 3 à 15 centimètres. Quelques-uns sont un peu anguleux; mais la plupart ont une forme arrondie, et sont assez nettement séparés de la masse micacée qui les environne , et dont les feuillets se contournent à l’entour. Plusieurs de ces noyaux sont recourbés, et semblent avoir.été dans un état pâteux; il en est même qui sont comme agglutinés ou soudés ensemble : ils sont, en général, couchés dans le sens de la schistosité, qui présente beaucoup d’ondulations; mais quelques-uns occupent une position oblique. Nous verrons plus loin une roche d'un genre analogue affleurer, en masse considérable, sur les pentes du Rustemberg, dans le haut de Ja vallée de Guldbrandsdal. Les couches poudingiformes (2) de Vammer sont associées à du (4) J'ai remarqué en deux endroits, entre Kongsvold et Opdal, un contraste de position entre les couches formant les deux flancs de la vallée de la Driva; elles sont presque horizontales sur l’un des côtés (le flanc droit), et verticales sur Pautre. (2) M. Nauman a nommé gneiss porphyrique ce micaschiste d'apparence poudingiforme ; mais cette qualification me paraît peu exacte, abstraction faite de toute considération théorique ; il est vrai 84 CONSTITUTION GÉOLOGIQUE CN: 1 p. 84) schisie micacé, généralement très quartzeux, offrant une alternance de lits chargés de mica, et de lits de quartz schisteux. Si l’on remonte le vallon de l’Aamosdal, qui conduit à une partie du plateau du Dovre atteignant presque à la limite des neiges permanentes, on marche pen- dant quelque temps sur du quartz schisteux et micacé, contenant quelques cou- ches poudingiformes ; puis, à 5 kilomètres environ de Vammer, presque à égale distance entre ce village et les chalets de l’Aamosdal, on voit affleurer du gneiss très bien caractérisé, à petits grains, renfermant un mélange de feldspath et de quartz gris, avec des paillettes micacées verdâtres; il offre la même stratification que les schistes quartzo-micacés situés à l'est, et auxquels il sert de support : sa direction varie généralement du N. N. E. au N. E. , et sa pente est constamment au S. E. En continuant à s'avancer vers le S. O., on voit encore reparaître dans le ter- rain gneissique des couches très quartzeuses; un peu avant d'atteindre le haut du plateau , j'ai remarqué dans le gneiss, au milieu du quartz gris et du mica vert, de larges lames d’orthose d’un rouge clair, qui lui donnent un aspect por- phyroïde. Au delà, sur la plate-forme qui supporte, du côté nord, le massif du Sneehättan , et que l’on franchit pour aller dans le Repthal, le gneiss contient des bancs de schiste micacé et amphibolique. Depuis la vallée de la Driva jusqu'ici, les couches plongent constamment au sud-est; mais ici elles s'ondulent en inclinaison, comme en direction : leur pen- dage est tantôt à l’ouest et tantôt à l’est. Le terrain de gneiss s'étend partout à l’entour de ce groupe remarquable de vallées rayonnantes, qu’on nomme Linthal, Skiradal, Gruvedal, Repthal et Svis- dal ; ce sont des déchirures profondes, produites par des dislocations dans la partie nord-ouest du Dovrefield ; elles convergent presque au même endroit, et envoient leurs eaux réunies à la Driva, qui coule un peu au nord. Vallées du Gruvedal et du Skamsthal. — F'ai remonté la vallée du Gruvedal, ainsi nommée à cause de ses mines de cuivre et de chrôme : la pyrite cuivreuse y imprègne des couches quartzeuses , micacées , amphiboliques et grenatifères , subordonnées au gneiss; elles sont redressées verticalement, et dirigées à peu près parallèlement à cette vallée, du N. N. E. au S.S. O. Non loin de ces mines, un peu au nord, on trouve dans certaines couches de gneiss et de micaschiste des noyaux lenticulaires, quartzo-feldspathiques, et alors la roche rappelle, jus- qu’à un certain point, le micaschite poudingiforme de la vallée de la Driva ; mais il y a des différences notables qui distinguent ces roches : dans Les es cris- tallins du Gruvedal , les noyaux sont plus petits, et ils ont moins l'apparence de que, tout à l'heure, nous allons citer sur le Dovrefield du gneiss porphyrique bien caractérisé ; mais il me paraît être distinct pétrographiquement et chronologiquement des roches que je viens de décrire, et que je considère coinme situées à la base du groupe semi-cristallin. (W.1,.8) DE LA NORWÉGE, DE LA SUÈDE ET DE LA FINLANDE. 85 cailloux roulés; ils sont mieux fondus dans la masse adjacente , et ils offrent davantage l’aspect de cristallisations opérées au sein de la roche. Entre les cimes de Skrimkolle et le massif du Sneehättan, le plateau du Dovre présente une dépression, où se trouvent plusieurs lacs, dont les eaux donnent naissance au torrent du Skamsthal ; ici le gneiss est en général faiblement in- cliné vers le sud-est : certaines couches renferment encore des noyaux feldspa- thiques, et forment peut-être le prolongement de celles que nous venons de voir dans la vallée du Gruvedal. A quelque distance au nord-est du lac de Leervand, dans des schistes feuilletés, associés au gneiss, et faiblement inclinés versleS.E., on exploite des veines de fer chromé, accompagné de serpentine. Le gneiss qui forme le massif du Sneehättan est, en général, fortement incliné, de 60 à 80 degrés : du côté nord et nord-ouest, de même que du côté oriental, la pente est plutôt vers le S. E. que vers le N. O. Ce gneiss contient une assez forte proportion de quar{z, avec du feldspath gris blanc et des paillettes de mica gris et vert ; il se divise assez facilement en plaques minces : on y voit des nids de quar{z contenant des écailles de fer oligiste. Si du Sneehättan on descend vers Kongsvold ou Jerkind, immédiatement avant d'atteindre la formation argilo- micacée el chloriteuse, on voit reparaître l’assise qui en constitue la base, et qui est caractérisée par la présence de noyaux de pegmatite, donnant aux schistes où ils sont enchâssés un aspect poudingiforme. Vallée du Guldbrandsdal. — En s'abaissant du plateau du Dovre vers le Guld- brandsdal, après avoir quitté le granite amphibolique de Fogstuen, on marche sur les schistes feuilletés du groupe semi-cristallin ; et, à mesure que l'on s'avance vers le sud-est, on s'éloigne de plus en plus du terrain gneissique. Un peu au delà du bourg de Dovre, on entre dans une gorge étroite, que borde du côté occi- dental le flanc de la montagne de Rustenberg ; ici se montre une roche dont l'aspect poudingiforme est encore plus prononcé que celui des schistes observés précédemment, autour de Drivstuen et de Vammer ; c'est un micaschiste, dont les larges feuillets, gris-verts et gris-blanchâtres, peu mélangés de quartz, se contour- nent autour d’une foule de gros noyaux, dont la largeur varie de quelques centi- mètres à 3 décimètres ; ils ont des formes très diverses, beaucoup sontarrondis sur leur contour, quelques-uns sont lésèrement recourbés. Dans la figure ci-contre, j’ai représenté les principales formes de ces noyaux et la disposi- tion des feuillets micacés qui les enveloppent. Leur composition est variée ; il y en a de quartz blanc et de gneiss; mais la plu- part sont formés de granite, ou plutôt de pegmatite, contenant feldspathique, dont la teinte varie du gris-blanc au rouge- clair, et dans laquelle on distingue un mélange de grandes lames, Vue . . À , du’micoschiste pondingiforme QUI paraissent être de l’orthose et de lames moyennes, offrant du Rustemberg. ee l’hémitropie concave, et ressemblant à de l’oligoclase. 86 CONSTITUTION GEOLOGIQUE (N. 1, p. 86.) Quand on brise les gros noyaux de pegmatite, on trouve quelquefois à l’inté- rieur de petites druses, formées de grains cristallins de feldspath et de quartz ; c’est probablement à cause de cette circonstance que des géologues ont assimilé ces noyaux à des concrétions (1). Toutefois, si ce sont des débris d’une formation plus ancienne, il semble que plusieurs d'entre eux ont dù éprouver une sorte de cristallisation, depuis qu'ils ont été déposés dans cette masse schisteuse. La sin- gularité des caractères que l’on observe dans la roche du Rustenberg rend son origine un peu obscure; quand on considère la forme générale et la diversité de composition de ses éléments, on est porté à croire qu'elle a été formée, comme les conglomérats, par la réunion de fragments de diverses roches, en partie rou- lés, en partie anguleux ; mais ces fragments ont dû éprouver une modification après leur dépôt, de même que la masse schisteuse où ils sont enchâssés. Voici la manière dont M. de Buch a envisagé cette roche (Voyage en Norwége , t. X, p. 184) : « Cette roche singulière n'est pas un poudingue; les parties en sont trop » pelites, et la masse principale a trop visiblement les caractères du gneiss ; mais » ce phénomène offre quelque ressemblance avec les poudingues du gneiss de la » Valorsine et du Bas-Valais, que Saussure a fait connaître ; c'est un gneiss ancien, » détruit à l'époque de la formation du nouveau. » Ces derniers mots expriment, surl'origine du micaschiste poudingiforme du Rustenberg, une idée dont le fond me paraît juste, en ce sens que c’est du gneiss qui a concouru, avec des matières granitiques et quartzeuses, à fournir les éléments de cette roche conglomérati- forme. Elle constitue, sur environ 7 kilomètres d'étendue, les parois de la gorge où le Lougen-Elvse précipite, de rocher enrocher, jusqu'au village de Lauergaard. Alors on voit succéder à la roche du Rustenberg du quartzite schisteux, d’un gris clair, et d’un gris blanchâtre, en masse tantôt grenue , tantôt compacte, et fendillée dans la cassure; il est ordinairement schisteux, ce qui provient en par- tie du mélange de feuillets de chlorite verte ; cette substance forme aussi des lits qui alternent avec le quartz schisteux. Les couches courent à l'O. N. O., et plon- gent de 45 degrés au N. N.E.; ainsi elles doivent s’enfoncer en dessous des masses poudingiformes du Rustenberg, dont les dernières couches paraissent aussi in- cliner vers le N. E.; le quartzite se prolonge un peu vers l’est dans la vallée de FOita-Elv; mais, aux environs de Vaage, le schiste feuilleté paraît être pré- dominant. Succession d'assises de quartzite et de schistes feuilletés dans le Guld- brandsdal. — Mais continuons à décrire la coupe longitudinale de la vallée du Guldbrandsdal : le quartzite se continue sans interruption, en ne présentant que des lits minces de schistes feuilletés, jusqu'au défilé de Kringelen, où le torrent (4) M. Hisinger a trouvé de la gadolinite dans les noyaux granitiques de la roche du Rustenberg ; la présence d’un minéral aussi rare tend à faire supposer que ces noyaux proviennent de la dénu- dation äu granite à gros grains, associé au gneiss de la Scandinavie, car c’est le seul granite où l’on treuve de la gadolinite dans le nord de l’Europe. @.4r.8) DE LA NORWÉGE, DE LA SUÈDE ET DE LA FINLANDE. 87 d'Ulen débouche sur le flane gauche de la vallée, pour venir se confondre avec le Lougen. Ici le schiste luisant, gris-blanc et gris-bleuâtre, largement feuilleté, et passant au schiste micacé, prend le dessus, et remplace le quartzite ; toutefois il renferme quelques couches quartzeuses, peu épaisses et subordonnées. C’est seulement au sud du village de Solheim que le quartzite redevient prédominant, et probablement il se relie souterrainement avec la masse située plus au nord (voir la coupe, figure 8). D'ailleurs, il offre les mêmes caractères ; il est schisteux, et souvent mélangé de petits feuillets verts, chloriteux ou micacés. On y voit quelquefois, suivant l'observation de M. de Buch, des druses tapissées de petits cristaux de quartz et d'épidote verte. Souvent les couches de schistes feuilletés qui séparent les bancs de quartzite deviennent compactes, prennent les carac- tères de la pierre ollaire, et peuvent être employées à la fabrication de poteries, comme la pierre ollaire des Alpes. J’ai aussi observé, à 3 ou 4 kilomètres après le relai de Solheim , des bancs calcaires interposés dans la série des couches quartzo-schisteuses. Près de Viig, il y a dans le quartzite une assise un peu épaisse de schistes lui- sants, feuilletés, gris et gris-bleuâtres ; puis le quartzite se continue en grandes masses, jusqu'au delà de Müen : alors il est de nouveau remplacé par des schistes feuilletés, ressemblant tantôt à du schiste chloriteux, tantôt à du micaschiste en feuillets continus. Près de Früen, c’est un schiste argileux, fissile, se divisant en plaques minces et larges, qu'on emploie comme ardoises à la confection des toi- tures. Entre Elstad et Lôsness , on voit encore du quartzite, en masses un peu considérables, qui alternent avec des schistes feuilletés. Ces couches successives, bien que s’ondulant fréquemment, présentent depuis le Dovrefield une assez grande régularité de stratification ; leur direction varie entre le N. N. O. et l'O., quelques degrés N.; leur pendage est presque constam- ment au N. À partir de Môen, l’inclinaison devient peu considérable et varie or- dinairement de 15 à 30 degrés. C'est immédiatement au sud de Lüsness que j'ai placé la limite du terrain semi-cristallin et le commencement de la formation silurienne du Hedemark. Comme les couches azoïques sont un peu ondulées, qu’elles ontune médiocreinclinaison et une faible cristallinité, la séparation des deux terrains n’est pas ici parfaitement tranchée. Néanmoins c’est bien en cet endroit qu'elle paraît avoir lieu ; car, à partir d'ici, commence une série puis- sante de couches calcaires d’un gris foncé, subcompactes, ressemblant aux cal- caires siluriens du midi de la Norwége; et, dans quelques-unes de ces couches, j'ai remarqué des corps à surface courbe, qui m'ont paru être des débris organiques. D'ailleurs, il est à noter que, depuis Le pied du Dovrefield jusqu'ici, la pierre cal- caire est rare dans le terrain azoïque semi-cristallin, qu'elle s'y trouve seulement en couches peu épaisses, tandis qu'ici il y en a une masse considérable, dont les couches paraissent être ondulées autour de l'horizon et s'appuyer sur les schistes feuilletés et le quartz-schiste situés plus au nord. On peut remarquer aussi que 88 CONSTITUTION GÉOLOGIQUE (N. 4, p. 88.) les couches situées au midi de Lüsness, jusque sur les bords du Miôsen, où elles sont liées à des calcaires fossilifères, présentent un aspect beaucoup moins cris- tallin que celles situées plus au nord; ce sont, outre la pierre calcaire, des grauwackes et des schistes argileux, qui ont tout à fait le facies des roches si- luriennes. Par la coupe que je viens d'exposer (regardez la figure 8), on voit que de Lüsness à Solheim, sur une étendue rectiligne de plus de 5 myriamètres, les couches plongent constamment dans le même sens, c’est-à-dire vers le nord. Leur inclinaison moyenne est certainement au-dessus de 20 degrés ; si donc, sur cel espace, les couches ne sonL pas repliées sur elles-mêmes, leur puissance to- tale doit s'élever à plus de 15,000 mètres. L'énormité de ce nombre peut jeter du doute sur l'évaluation à laquelle on est conduit ; néanmoins, il est certain que la formation quartzo-schisteuse du Guldbrandsdal à une épaisseur très con- sidérable. Nous avons observé, d’ailleurs, que la série des schistes semi-cristal- lins qui constitue la zone limitrophe, dans l'O. du Jemtland et dans le haut de la vallée de Verdal, a également une très grande puissance (1). Nous venons de voir que le quartz-schiste est très développé dans le Guld- brandsdal ; il l’est beaucoup moins dans la partie du terrain semi-cristallin qui s'étend vers l’ouest : ainsi, dans des explorations que j'ai faites sur le plateau nu et désert qui sépare la vallée du Lougen du massif de l'fotunfield, j'ai observé des schistes luisants, feuilletés, argilo-micacés et chloriteux, semblables à ceux décrits tout à l'heure, et accompagnés de bancs quartzeux ou quartzo-schisteux, peu épais; les grandes masses de quartzite que l'on voit affleurer sur les rives du Lougen s'amincissent peu à peu vers l’ouest, et se réduisent à de simples couches subordonnées à la grande formation de schistes feuilletés. Roches semi-cristallines sur le Fillefield.— Snr le plateau du Fillefield, comme dans la région ondulée qui se trouve à l’est de l'Iôtunfield, le terrain semi-cristal- lin offre à peu près la même composition et le même aspect que nous avons déjà fait connaître en décrivant la contrée située à l'est du Dovrefield et aux environs de Rôüraas. Il se compose principalement de schistes argileux, plus ou moins feuilletée, qui passent au schiste micacé, où au schiste chloriteux, quand ils sont - un peu doux au toucher. En quelques endroits, ainsi sur les rives du lac Lille- miôs ou Vangmiôs, entre Quamme et Thune, ils sont fissiles et subardoisiers, de même qu’on le voit aux environs de Früen dans le Guldbrandsdal, Ces schistes sont accompagnés de couches de quartzite, de schistes siliceux et de schistes argilo-quartzeux , quelquefois peu différents de certaines grauwackes à petits grains etquar(zo-schisieuses, qu'on trouve dans le terrain silurien. Ces roches pré- (4) Dans cette région limitrophe, l’inclinaison des schistes semi-cristallins offre, sur une étendue de plus de 30 kilomètres, une constance remarquable ; elle est toujours vers l'O. N. O., et reste com- prise entre 20 et 45 degrés. La direction est aussi uniforme, du S. $S. O. au N. N. E., de telle sorte que l'épaisseur de cette formation schisteuse ne doit pas s'élever à moins de 7 ou 8,000 mètres. (N,p.8.) DE LA NORWÉGE, DE LA SUÈDE ET DE LA FINLANDE. 89 sentent souvent une épaisseur un peu grande, sur les montagnes qui séparent le Valders ou la vallée du Beina-Elv de celle d'Hallingdal. Fréquentes masses de syénite. — Dans ces régions se trouvent fréquemment des masses de syénite, semblables à celles que nous avons déjà vues sur le Dovre- field et l’'Iotunfield ; toutes me paraissent être contemporaines. Entre les lacs de Vinstera et de Heimdal, et plus loin au nord, jusqu’à Sjôadal, le plateau est com- posé presque entièrement de syénite passant au granite; cette roche, qui se montre non-seulement sur les hauteurs, mais aussi dans les parties basses, paraît être le prolongement de celle qui forme le massif de l'Iôtunfield. C’est un granite amphibolique, à grains moyens et un peu petits, contenant un mélange d'horn- blende verdâtre et de mica noir; il y a aussi des grains quartzeux, répandus au milieu de lames de feldspath gris-blanc et d’un rouge clair, dont quelques-unes présentent l'hémitropie concave, propre aux espèces feldspathiques du sixième système cristallin. On y voit aussi des parties compactes, pétro-siliceuses , et la structure de la roche est quelquefois schistoïde ou veinée. Un peu plus à l’ouest, dans la vallée d'Espedal , une des branches du Guldbrandsdal, se trouve une roche syénitique, formée principalement de labrador et d’orthose, contenant aussi de l’hornblende, du fer titané et un silicate magnésifère, qui est du diallage bronzite ou peut-être de l’hypersthène. IT y a encore dans la même vallée de l’amphibolite, de la pyrite cuivreuse et une pyrite magnétique brune, remar- quable, parce qu'elle contient, d'après M. Scheerer, 22 pour 100 de nickel. Une syénite analogue à celle que nous avons signalée tout à l'heure, entre le lac de Vinstera et le Sjüadal, se montre en beaucoup de points sur le Fillefield ; on la trouve sur les principales cimes de cette région, sur le Bitihorn, sur le Sule- tind, le Skogshorn, etc. Elle affleure aussi sur les rochers qui séparent Les deux lacs Miôs et Strand, dans le Valders, et en divers points au bord même de ces lacs. Elle paraît donc avoir joué un rôle important dans les phénomènes qui ont pro- duit cette région montagneuse. Dans cette syénite, l'hornblende est presque tou- jours accompagnée de mica noir : lorsque ce minéral devient abondant, et rem- place l’amphibole, ce qui arrive souvent, la roche passe au granite ; elle prend quelquefois aussi l'aspect d’un eurite, ou d’un porphyre présentant des lames feldspathiques et des grains cristallins de quartz, comme je l'ai observé sur la montagne située au nord de la métairie de Nystuen, et près du lac Miôs. La tex- ture schisteuse est fréquente dans certaines parties de cette syénite, et il en résulte un passage au schiste ou au gneiss amphibolique. Superposition de roches massives à des schistes semi-cristallins. — Le sommet de plusieurs montagnes est formé de syénite et des roches schisteuses-cristallines qui lui sont associées, tandis que, sur le penchant, on voit affleurer des schistes argilo-feuilletés et des schistes siliceux , qui paraissent alors être recouverts par un chapeau de roche massive. C’est ce que l’on voit sur le Suletind qui est la cime culminante du Fillefield, et qui s’élève au-dessus d’un plateau composé en ma- SOC. GÉOL. — 2° SÉRIE. T. VI. — Mém. n° 1. - 12 90 CONSTITUTION GÉOLOGIQUE p.90) jeure partie de schistes luisants, plus ou moins feuilletés, argilo-micacés. Au- dessus de ce dépôt, on observe des schistes siliceux, des schistes micacés et amphi- boliques; on y voit, en outre, des couches contenant du feldspath, et ressemblant au gneiss. Ces schistes, dont l'inclinaison moyenne est d'une trentaine de degrés, sont recouverts par une roche feldspathique à gros grains, qui paraît être une variété de syénite, et qui se divise en bancs parallèles aux schistes sous-jacents. M. Keilhau a cité (Gæa, p. 391) un exemple non moins remarquable de super- position d’une roche massive aux schistes du groupe semi-cristallin ; il l’a observé sur le massif des Hallingskarven, qui atteint une élévation de près de 2,000 mè- tres, et qui s'étend sur plus de 2 myriamètres de longueur, entre la vallée de Hallingdal et le fiord de Hardanger. On y voit une masse granitique , schisteuse en quelques parties, s'élever, sur une hauteur de 3 à 400 mètres, au-dessus d’une série de schistes tendres, dont elle semble former l’assise supérieure; mais il faut observer que les schistes qui affleurent au-dessous de ce granite sont inclinés d'environ 60 degrés. Les couches de gneiss et de schiste amphibolique, qui se montrent parfois ainsi au-dessus des schistes semi-cristallins, et en connexion avec de la syénite, ré- sultent probablement d'une action métamorphique produite sous l'influence de cette roche ; ils n’appartiennent point au terrain de gneiss primitif. D'ailleurs on voit quelquefois, au voisinage de ces masses cristallines, les couches de schistes argilo-feuilletés se charger de silice, et former ainsi une sorte de hornstein, comme l’a déjà observé M. Keïlhau. Sur les plateaux situés à l’entour du massif syénitique de l'Iôtunfield, les schistes azoïques, semi-cristallins, présentent unestratification un peu ondulée en divers sens ; mais les directions les plus fréquentes se trouvent entre le N. N.E. et l'E.; la pente est plutôt vers le S. E. que vers le N. ©. ; elle est aussi plus ordi- nairement en dessous qu'en dessus de 45 degrés, et fréquemment les couches sont voisines de l'horizontalité. Nous avons vu que, sur le Dovrefield, Le terrain de schistes semi-cristallins s'ap- puie, à stratification concordante, sur le gneiss du Sneehättan. Dans la région située au S. ©. du massif de l'Iôtunfield, etsur le côté méridional du Sogneford, il y a beaucoup d'endroits où l’on peut observer une pareille concordance, tandis que, sur d’autres points situés plus au midi ou plus à l’est, la superposition est trans- gressive : citons des exemples de ces deux cas. Aux environs de Vossevangen, au midi du Sognefiord, le terrain gneissique et les schistes semi-cristallins, siliceux et argilo-micacés, présentent la même disposition stratigraphique. Exemple de superposition concordante des schistes semi-cristallins au qneiss. -— J'ai encore observé une concordance analogue sur les montagnes qui séparent le fiord d'Urland , une des branches du Sognefiord, de la vallée de Lerdal ; les circonstances que l’on y observe sont assez remarquables pour mériter d'être exposées ici : les deux terrains sont faiblement inclinés ; et, dans les couches de @1,p.9) DE LA NORWÉGE, DE LA SUÉDE ET DE LA FINLANDE. 94 schistes feuilletés, argilo-micacés, qui recouvrent le gneiss, on observe , à l’en- droit où a lieu la superposition, une alternance de couches qui, par leurs carac- tères minéralogiques, peuvent se rattacher à l’un ou à l’autre des deux terrains , comme le montre la coupe ci-jointe. Niveau Urland, Plateau séparant le fiord d Urland Vallon de la mer. de la vallée de Lerdal. de Tunniadal, 4° Gneiss mélangé de granite à gros grains, très feldspathique , contenant des lames d'oligoclase ; il est d'abord ondulé autour de l'horizon. Un peu plus haut, il court entre l'E. et le N. E., plongeant de 15 à 20 degrés au N. et au N. O. 2 Gneiss porphyroïde, renfermant des nodules allongés, larges de 3 à 6 et 7 centimètres, autour desquels on voit se contourner les feuillets de mica : ils sont formés d'un mélange de quartz et de feldspath, à petits grains ; on y distingue de petits cristaux d'oligoclase. Ce gneiss est analogue à la variété de schiste cristallin, porphyroïde, que j'ai observé à l’entour du Sneehättan; mais, dans le gneiss d'Ur- land,les noyaux quartzo-feldspathiques m'ont paru être un peu moins distincts de la masse environnante : ils se fondent au milieu d'elle, et ils sont accompagnés de veinules d’une composition analogue. Ce gneiss court à l'E. 35 à 40 N.,et plonge de 20 à 25 degrés au N. 0. 3 Gneiss ondulé et mélangé de granite, peu écarté de l'horizontalité. ° Schiste micacé gris bleuâtre, largement feuilleté, succédant au gneiss, à stratification concordante ; il est ondulé autour de l'horizon. 5° Schiste feuilleté, intermédiaire entre le schiste micacé et le schiste argileux modifié; la direction varie de l'E, N. E. au N. E. ; il plonge de 20 à 30 aus. E. et au N. 0. Ce schiste s'étend depuis le niveau de 5 à 600 mètres, du côté de l’Ur- landford, jusque sur le haut du plateau, à 13 ou 1400 mètres au-dessus de la mer. 6° Schiste micacé passant au gneiss : il y a une succession de bancs feuilletés, composés presque entièrement de larges feuillets de mica, de bancs quartzeux et de bancs’ quartzo-feldspathiques ; on observe une transition pétrographique d’une roche à l’autre, en même temps qu'il y a similitude stratigraphique ; les couches sont un peu ondulées, mais leur direction générale est au N. E., avec pente de 20 à 35 degrés au N. O. 7° Schiste micacé largement feuilleté, courant au N. 35 à 40° E., avec pente de 25 degrés au N. O. 8 Alternance de gneiss et de schistes feuilletés, ondulés, plongeant à l'O. 9 Gneiss mélangé de granite, courant à l'E. 20 à 30 N., et plongeant de 20 à 30 degrés au S. E. 92 CONSTITUTION GÉOLOGIQUE CN: 1, p.92) 10° Gneiss contenant des bancs amphiboliques, et souvent mêlé de granite ; il court entre le N.E. et l'E. N. E., avec pente au S. E. 11° Gneiss ordinaire, courant entre le N. 30 et 60 E., avec pente de 25 à 40 degrés au S. E. | | 12° Granite porphyroïde , offrant en certaines parties des indices de schisto- sité, qui le rapprochent du gneiss; il contient de grandes lames d’orthose et d’oli- goclase pris blanc, tirant sur le vert, et d’un rouge clair ; elles sont entourées d’une masse à plus petits grains, où brillent des feuillets de mica noir ou ver- dâtre. On voit, en outre, dans ce granite une matière compacte, pétro-sili- ceuse, d’un gris vert clair, répandue çà et là. Ce granite passe, en certaines parties, à la syénite, par la substitution de l’hornblende verdâtre à une partie du mica (1). 13° Lambeaux de gneiïss interposés dans le granite porphyroïde ; leur direction est généralement comprise entre le N. N. O. et l'O. N. O.; leur pente est au S. O. et au N. E. Exemples de superposition transgressive.— Citons maintenant des exemples de discordance de stratification entre les schistes semi-cristallins et le gneiss : j'en ai observé dans la vallée du Beina-Elv, entre le lac Vangsmiôs (2) et celui de Strand ou de Slidre ; les roches argilo-quartzeuses qui constituent les flancs de cette vallée s'appuient transgressivement, comme on va le voir, sur les schistes cristallins du terrain gneissique. Les coteaux verdoyants qui s'élèvent en pente douce sur la rive méridionale du lac Vangsmiôs sont formés d’une alternance de couches de schistesiliceux, ou quartzschisteux, d’un gris bleuâtre, etde schistes argilo-feuilletés, gris et gris bleuâtres, un peu luisants, fissiles en certaines par- ties, etse rapprochant du schiste ardoisier. Ces couches courent entre le N. etle N. E, plongeant de 30 ou 40 degrés au S. E. À sa sortie du lac Vangsmiôs, le fleuve Beina se précipite, en mugissant, dans une gorge étroite et pittoresque, où l’on voit affleurer des roches cristallines. D'abord c’est du granite oligoclasique, passant à un porphyre parsemé de noyaux cristallins de quartz; ensuite ces roches contiennent de l’amphibole, et prennent alors les caractères de la syénite. Un peu plus à l’est, dans l'intervalle qui sépare le lac Vangsmiôs de celui de Strand, on voit, avec cette syénite, des couches (G) de gneiss ordinaire, de gneiss amphibolique et de micaschiste. Ces schistes cris- tallins courent à l'O. et à l'O. N. 0.; leur inclinaison est très forte ou même (4) J'ai vu aussi, sur le plateau qui sépare le fiord d’Urland du vallon de Tunniadal, des blocs d’am- phibolite contenant du fer oxydulé. (2) Il y a, en Norwége, plusieurs lacs portant le nom de Miôs ou Miüsen. Outre le grand lac du Hedemark , qui est le Miôsen proprement dit, il y a celui de Vangs-Miôs (ou Miôs de Vang), aussi appelé Lillemiôs (petit Miôs), qui est situé dans la vallée du Beina-Elv, à l’est du Fillefeld ; il y a en- core un autre lac Miôs, situé à l’ouest du Goustafield, dans la grande vallée du Maan-£lv, qui aboutit au fiord de Langesund. (1,195) DE LA NORWÉGE, DE LA SUEDE ET*DE LA FINLANDE. 93 presque verticale. À peu de distance, à l'O. du lac Strand, reposent sur le gneiss (voir la coupe ci-contre) des schistes argilo-feuilletés et des schistes siliceux (S), présentant une disposition ondulée et presque horizontale. D'ailleurs, en explorant la montagne qui borde du côté septentrional la vallée du Beina-Elv et la partie occidentale du lac Strand, j'ai reconnu qu’elle est formée de schistes feuille- tés, qui courent entre le N. 20 E. et le N. E., avec une inclinaison de 0 à 30 degrés au S. E. Ces couches s'appuient donc d’une manière transgressive sur le terrain, gneissique : il y a discordance évidente de stratification, à la fois en direction et en inclinaison. D'ailleurs, je ferai observer que les schistes semi- cristallins présentent ici une direction et une inclinaison très peu différentes de celles qu’elles offrent à une certaine distance, à l'ouest, sur le bord méridional du lac Vangmiës. Entre Maristuen et Nystuen, j'ai observé un autre exemple de stratification discordante, qui est remarquable par la position relative des couches ; il est re- présenté par la figure 2. Le système inférieur se compose de couches de mica- schiste feuilleté et pailleté, dérivant probablement du gneiss, et accompagné de quartz-schiste. Le système supérieur consiste en une série de eouches de schiste argileux luisant, d'un gris foncé, et de couches noires, ampéliteuses et pyriteuses, qui, par suite de décomposition, se recouvrent d’un dépôt jaunâtre de sous-sulfate de fer et d’alumine. Quelques-unes des couches sont un peu plus feuilletées que les autres, et passent au schiste chloriteux ; il s’y trouve aussi quelques lits sili- ceux : leur direction moyenne est du N. 35 0. au S. 35 E.,avec pente de 35 à 40° au N. E. Les couches du système inférieur courent entre l'E. N. E. et le N. E., avec pente de 25 à 30° au N. O. Au premier abord, il paraît singulier qu’elles aientune inclinaison moins forte que les couches du système supérieur; mais ce fait n’est point inexplicable; car, pour s’en rendre compte, il suffit de concevoir qu'après le dépôt des couches supérieures, il y ait eu un soulèvement produit par des forces agissant obliquement, de bas en haut, du S. E. vers le N.0.; alors les couches du système inférieur, qui déjà avaient été relevées précédemment, auront pris une inclinaison inférieure à celle qu’elles avaient avant ce nouveau cataciysme, et qui devait être d'environ 65 degrés. De son côté, M. Keïlhau a observé dans les montagnes de la Norwége (voir Gœæa, p. 391) de nombreux exemples! de discordance de stratification entre le terrain gneissique et les couches du terrain azoïque, quartzo-schisteux. Il en cite dans la vallée de l’Etna-Elv et du Beina-Elv; il donne aussi une coupe que je vais reproduire, parce qu'elle montre bien le mode de superposition qui a lieu sur le massif montagneux du Hardangerfield, situé à l’est du fiord de Hardanger et au sud des Hallingskarwen. « Là, dit M. Keilhau, les deux terrains sont nettement séparés l'un de l’autre, tant par la composition des roches que par la stratifica- tion ; les couches de la formation la plus récente reposent, avec une inclinaison fe 6 & 94 CONSTITUTION GÉOLOGIQUE (X.4, p. 94.) médiocre, sur les feuillets verticaux du gneiss, et il est à noter qu’elles présentent l'aspect le moins cristallin près du contact. » | Ainsi, quoique dans certaines parties de la Norwége les schistes azoïques , ar- gilo-feuilletés, s'appuient d’une manière concordante sur les couches du gneiss primitif, on voit qu'ils forment un, ou peut-être plusieurs systèmes indépendants ; car les schistes qui sont superposés transgressivement au gneiss peuvent bien ne pas Ôtre rigoureusement contemporains de ceux qui succèdent au terrain primi- tif, sans discordance de stratification. Mais le rapport chronologique des forma- tions est difficile à déterminer, quand on est privé du secours des débris orga- niques, et que l'on est réduit à la considération de différences pétrographiques, souvent peu marquées, ou pouvant dépendre du voisinage de roches plutoniques. Schistes semi-cristallins adjacents au golfe de Hardanger. — Je regarderai comme un appendice à la formation quartzo-schisteuse de la Scandinavie cen- trale les schistes semi-cristallins qui s'étendent au-dessus du terrain gneissique, depuis les montagnes bordant l'extrémité la plus profonde du golfe de Hardan- ger, jusqu’à une petite distance à l’est du fiord de Stavanger, entre le 60e 1/2 et le] 59: 1/2 degré de latitude. En effet, les roches schisteuses de cette région, dont la montagne de Haarteig, haute de 1696 mètres, est le point culminant, offrent une grande analogie pétrographique avec celles de la vaste formation si- tuée un peu plus au nord-est, êt l’on ne peut douter qu'elles aient été déposées dans un même bassin, quoiqu’elles soient aujourd’hui séparées par une étroite lanière de terrain granito-gneissique. Les roches qui constituent les environs de Haarteig sont des schistes argileux, plus ou moins modifiés, passant au schiste micacé, ou à d’autres schistes cristal- lins, etaccompagnés de quartzite, parfois de bancs calcaires. Ils sont, en général, faiblement inclinés, et souvent ils ne paraissent former qu'une couverture peu épaisse au-dessus du gneiss. Il y a des endroits où l’on voit clairement que la superposition est transgressive : ainsi M. Keiïlhau a figuré (Gæa, p. M7) une coupe prise près de Haarteig, et dans laquelle on voit les feuillets verticaux du gneiss recouverts presque horizontalement par les couches quartzo-schisteuses de la formation semi-cristalline. . Schistes semi-cristallins formant des lambeaux dans la partie S. ©. du littoral norwégien. Sur la portion de la côte occidentale de la Norwége, qui est comprise entre le 59e et le 62- degré de latitude , depuis le golfe de Stavanger jusqu’au Nordfiord, le terrain de schistes semi-cristallins ne forme pas une zone continue; mais il a laissé des lambeaux plus ou moins étendus, en une foule d’endroits, soit sur les îles, soit sur les parties littorales de la terre ferme. Tantôt ces lambeaux sont tout à fait séparés Les uns des autres par des affleurements de terrain primitif ; tantôt ils constituent le sol de plusieurs îles placées les unes à la suite des autres, et for- 1,95) DE ! A NORWÉGE, DE LA SUÉDE ET DE LA FINLANDE. 95 mant comme les divers fragments d’une même masse : c’est ce qui a lieu notam- ment à l'embouchure du golfe de Stavanger, et aussi le long de la partie occiden- tale des fiords de Hardanger et de Bimmel. La composition pétrographique de ces divers lambeaux ressemble tellement à celle de la formation quartzo-schisteuse de la Scandinavie centrale, qu’on doit les considérer comme ayant été formés à la même époque, et dans des conditions semblables. La roche prédominante est du schiste argileux brillant, subfeuilleté, se rapprochant fréquemment du schiste micacé ou chloriteux. On y a exploité, dans la paroisse d'Olve, deux couches de pyrite cuprifère et un banc de fer oxydulé. Ce terrain renferme aussi, mais plus rarement, du schiste amphi- bolique ou des schistes cristallinsanalogues au sneiss. Il y a, en outre, des roches quartzeuses, vraisemblablement d'origine arénacée, du quartzite, du hornstein, de la pierre ollaire, et certaines variétés qui offrent l'apparence d’un conglo- mérat (savoir dans les régions littorales de Stavanger et de Hardanger) ; mais, comme la masse de la roche ne diffère pas beaucoup des parties qui y sont en- châssées, on peut avoir, des doutes sur leur véritable nature. Enfin la pierre calcaire se montre quelquefois aussi dans ces dépôts. Les directions des roches qui les composent sont très variables, de même que les découpures des îles et du littoral où on les observe ; d’ailleurs, comme on doit le penser , elles sont fréquemment en rapport avec ces découpures : ainsi dans le Bümmel-fiord, les couches sont, en général, dirigées parallèlement à cette partie du golfe, c'est-à-dire à peu près du N. E. au S. 0. Surla côte située entre le 61° et le 62° degré de latitude, il y a des directions assez fréquentes dans le voi- sinage de l'O. N. O., et d’autres encore plus nombreuses sont comprises entre Y'E. et leN. E. Dépôts de grès et de conglomérat situés sur le littoral, entre le Sogneford et le golfe de Drontheim. Groupe poudingifère du Sognefiord.—Ces dépôts se rattachent à deux groupes différents : l’un, que je nommerai groupe poudingifère du Sognefiord, comme formant les îles situées immédiatement au nord de l'entrée de ce golfe ; l’autre peut être appelé groupe poudingifère du golfe de Drontheim, car il’se montre le plus développé sur la partie du littoral qui forme l'entrée du golfe de Drontheim. Décrivons d’abord le premier de ces deux groupes. Les schistes semi-cristallins, argilo-micacés et chloriteux, qui recouvrent le terrain de gneiss sur la partie du littoral située au nord du Sognefiord(1), servent de support à des roches de grès (4) Ces schistes renferment en divers points des dépôts métallifères : ainsi on à extrait du minerai de cuivre de fahlbandes pyritifères, enclavées dans des schistes amphiboliques, micacés et chloriteux, entre Vaage et Grimmelie (Gæa, p. 419). On a aussi exploité du fer oxydulé formant un banc au sein du schiste chloriteux, à l'embouchure du Dalsford ; il y en a de même à Monsüe et Grünôe, près la grande île d’Hitteren. 96 CONSTITUTION GÉOLOGIQUE (N:4, pe 96.) et de conglomérat, qu’on voit leur succéder, sans aucune discordance destrati fi- cation ; il y a même, en quelques parties, une sorte de liaison pétrographique.Ces roches arénacées forment, à l’île d'Indre-Sule, des rochers escarpés, dont la hau- teur va jusqu'à 500 mètres; en outre, elles constituent la partie supérieure de montagnes qui s'élèvent à près de 1500 mètres au-dessus du niveau de la mer, savoir la montagne de Hornelen sur l’île de Brémanger , et celle de Quamshest sur la presqu'ile qui sépare les fiords de Dale et de Fürde. Il y a des grès à élé- ments de différentes grosseurs ; tantôt ils sont à grains fins, un peu argileux et subschisteux ; tantôt ils sont à gros grains , renfermant des noyaux gros comme un pois, et ils passent ainsi au poudingue. Les cailloux que contient cette roche ont un diamètre qui varie de 2 à 20 et 30 centimètres ; ils sont généralement for- més de quartz, de granite ou de gneiss, et la matière qui les entoure consiste en une masse de détritus très ténus, semblables à ceux qui forment la pâte des grauwackes. Les cailloux sont ordinairement arrondis ; mais on trouve aussi à l'île de Bremanger un conglomérat bréchiforme , renfermant des fragments an- guleux, composés en grande partie de micaschiste et de schiste argileux. On doit rapporter à la même formation un dépôt de grès qui se trouve dans la vallée du Van-Elv, à peu de distance au nord-est de l’île de Bremanger, sous le 62° degré de latitude ; il est remarquable, comme renfermant de la serpentine et du diallage. M. Keïlhau, à qui est due cette observation, regarde ces deuxsilicates magnésiens comme résultant d’une épigénie ou d’une action métamorphique. Le poudingue qui forme la plupart des îles situées à l'entrée du Sognefiord est fortement cimenté, et d’une grande ténacité ; aussi est-il presque impénétrable aux racines des plantes, et par suite sa surface est généralement dépourvue de végétation. L’inclinaison de ces roches de grès et poudingue est généralement peu considérable; elles sont un peu ondulées , mais leurs directions les pius fré- quentes sont comprises entre le N. \N. E. et l'E. N. E., de même que cela a lieu pour les schistes semi-cristallins , sar lesquels ils reposent à stratification con- cordante. Rarement ces roches se montrent en contact avec le gneiss ; cependant M. Keilhau dit (Gæa, p. 459) avoir observé un tel cas de contact au pied du pla- teau de grès de Olfoten, sur le côté méridional du Nordfiord. La superposition paraît y être transgressive; mais un peu plus à l’ouest, près de Bortne, elle semble être concordante. Groupe poudingifere du golfe de Drontheim. — Si maintenant on s’avance jus- qu’au C3 1/2 degré de latitude, sur le littoral et les îles qui bordent l'entrée du golfe de Drontheim, on observe des dépôts de grès et de conglomérat, qui sont analogues à ceux que nous venons de décrire, mais qui semblent se lier avec le terrain de gneiss, et avec des roches de granite et de syénite, de façon à présenter des relations anomales, dont l'explication n’est pas sans difficulté. N'ayant point visité les lieux, je me bornerai à en faire connaître succinctement la composition, d’après les observations intéressantes qu’a relatées M. Keilhau (Gæa, p. 416). L (N.1.n.9) DE LA NORWÉGE, DE LA SUÈDE ET DE LA FINLANDE. 97 Ici les roches de grès et dé conglomérat ne sont pas, comme à l'entrée du Sognefiord , séparées du terrain de gneiïss par une série épaisse de schistes semi- cristallins : il y a seulement quelques couches de schistes argileux et de schistes feuilletés, chloriteux, qui parfois sont placées à la séparation des deux terrains, et qui forment, en général, des bancs subordonnés dans la série des roches aréna- cées. Celles-ci présentent, sur le littoral de Drontheim, des grès rougeâtres, fré- quemment schisteux el micacés, ainsi que des conglomérats, dont les fragments, ordinairement arrondis, sont formés de roches cristallines, granitiques , gneissi- ques, amphiboliques, et de parties quartzeuses. Souvent la pâte du conglomérat consiste en une matière compacte, dure, siliceuse, en une espèce de hornstein ; cela se voit principalement dans le voisinage de masses cristallines , de granite ou de syénite. Près de Havna, à l’île d'Hitteren, le conglomérat est bréchiforme, renferme des fragments anguleux de granite et de gneiss, enchâssés dans une masse qui semble être un grünstein compacte. M. Keiïlhau a cité (Gæa, p. 449), sur la côte d'Hitteren, une autre localité, vers Langness et Balsnes, où, dans cer- taines parties du conglomérat, la pâte qui enchâsse les cailloux est cristalline, formée de grains de feldspath, de mica et d'amphibole, avec du quartz, et présente ainsi la com position de la syénite. En certains points, 1l y a des roches ayant la composition et la texture du gra-. nite, et qui cependant paraissent être stratifiées : ainsi, près de la pointe nord- est de l’île Frôyen, on a, d’après M. Keiïlhau , une alternance de bancs gra- nitiques et de lits de hornstein inclinés de 40 vers l’E.; au-dessus se trouvent des couches de conglomérat à fragments de granite,entourés d’une pâte quar1zo- feldspathique ; on y voit interposées des masses dont le contour est généralement arrondi, mais un peu irrégulier, et qui sont regardées par M. Keïlhau comme consistant en un granite à demi formé. Ces relations qu'il a observées lui parais- sent inexplicables, si l’on n’admet que le granite et la syénite de cette contrée ont pris naissance par voie de métamorphisme ou d'épigénie. IL est difficile d'émettre une opinion positive sur une localité qu’on n’a point visitée ; néanmoins plusieurs des faits cités par M. Keïlhau, et notamment la disposition stratiforme du granite ou des roches qui en dérivent, me paraissent avoir quelque analogie avec certains faits que l’on observe dans la zone anthraxifère de la basse Loire : la pierre carrée des environs de Chalonnes, qui est, à n’en pas douter , un dépôt de sédiment, puisqu'elle renferme des empreintes de plantes fossiles, offre dans certains bancs l'aspect d’un porphyre, et parfois même d'une sorte de granite. On sait d’ailleurs que certains grès, formés d'éléments granitiques, offrent de la ressemblance avec les roches dont ils proviennent. Je n'insisterai pas davantage sur ces faits, devant y revenir lorsque j’exposerai mes observa- tions sur l’ouest de la France. Parmi les roches cristallines de la région littorale que nous décrivons mainte- nant , il faut encore mentionner des roches porphyriques, verdâtres, probable- Soc. GÉOL. — 2° SÉRIE. T. VI. — Mém. n° 1. 13 98 CONSTITUTION GÉOLOGIQUE _: {N. 4, pe 9.) ment amphiboliques; elles se montrent parfois sous forme de filons,qui coupent la syénite et les roches arénacées. Quoique les grès et conglomérats de la côte de Drontheim ressemblent à des roches paléozoïques, particulièrement au vieux grès rouge, elles paraissent, sui- vant M. Keilhau (Gœa, p. 457), être liées au terrain de gneiss ; il y a, en beaucoup de points, des roches intermédiaires entre les deux formations, et ces passages pétrographiques sont accompagnés d’une concordance de stratificalion ; même, si l'on fait, dit M. Keïlhau, une coupe d’Hitteren à Aunüe , les couches gneissiques semblent être placées au-dessus des grès ou conglomérats; mais cette circon- stance est, je crois, accidentelle. . Formations semi-cristallines, calcaréo-quartzo-schisteuses et poudingifères du Finmark (Laponie septentrionale). Remarques générales. — Les formations azoïques , semi-cristallines du Fin- mark, comme celles du centre et du midi de la Norwége, renferment des roches stratifiées ou schisteuses, très différentes par leurs caractères pétrographiques : les unes ressemblent complétement à des roches paléozoïques , siluriennes ou dévoniennes ; les autres sont cristallines, et analogues à des schistes du terrain primitif. Nous avons vu qu'aux environs de Drontheim, les roches qui, par leur composition minéralogique et leur aspect, se rapprochent le plus des terrains de transition, occupent la partie centrale et supérieure du groupe. Mais, dans le Finmark, il y a une particularité bien singulière, car les couches de la zone orientale, qui recouvrent immédiatement le gneiss , sont les moins cristallines , et présentent des caractères minéralogiques qui les rapprochent du vieux grès rouge ; tandis que les couches situées plus au nord-ouest , et qui s'appuient sur les premières, offrent une texture cristalline beaucoup plus prononcée. En effet, sur les bords du golfe de Varanger, à l'extrémité orientale du Finmark, ce sont des grès et des conglomérats, avec des couches argileuses, qui recouvrent le gneiss. Puis, un peu au nord et au nord-ouest du Varangerfiord, ces roches sont remplacées par des quartzites et des schistes modifiés, feuilletés, passant au mica- schiste ; encore plus à l'O., ceux-ci se changent eux-mêmes en gneiss, comme on le voit à l'île Magerüe, et à l'ouest du golfe de Porsanger. Cependant la stratification reste toujours concordante, et l'inclinaison générale des couches est constamment vers le N. 0. Si donc on s’en rapporte aux apparences strati- graphiques, les couches qui se trouvent dans la partie nord-ouest du Finmark, et qui sont les plus cristallines, semblent être les couches supérieures , et par suite les plus modernes. Dans l’état actuel de la géologie, il y a plusieurs manières de se rendre compte d’une disposition aussi étrange : si, conformément à l'opinion de plusieurs géologues, on suppose que le gneiss et le micaschiste sont des roches purement ignées, et non des dépôts de sédiment devenus cristallins, dans cette hypothèse, W1,p.9) DE LA NORWÉGE, DE LA SUÈDE ET DE LA FINLANDE. 99 on attribuera au voisinage du gneiss l’endurcissement et le développement de la structure feuilletée dans les schistes ; mais si, d’après Ja manière de voir qui tend à prévaloir aujourd'hui, on regarde le gneiss et le micaschiste comme des roches de sédiment modifiées, alors il faudra attribuer le développement de la cristailinité à des causes dont l’action se sera fait sentir principalement sur la côte occidentale du Finmark. Les masses considérables de gneiss et de mica- schiste qui se trouvent à l’ouest de la formation calcaréo et quartzo-schisteuse du golfe d’Alten se rattacheraïent peut-être à la cristallisation des roches grani- tiques dont est formée une grande partie des îles du Nordland (4). M. Keïlhau a divisé les formations du Finmark, d’après leur composition pétrographique, en plusieurs groupes ; mais les couches qui composent ces divi- sions se succèdent sans qu'il y ait aucune discordance ; et même, les roches situées à la séparation de deux groupes offrent souvent des passages insensi- bles : il semble donc que ce soient les différents termes d'une même série. Ce- pendant, à l'exemple de l'habile géologue de Christiania , j'ai indiqué, comme formant un étage séparé, la zone de grès , de conglomérat et de schiste argileux du Finmark oriental. C'est sur cet étage que viennent s'appuyer les dépôts situés à l'O. ; il serait done l'étage inférieur ou le plus ancien, si les caractères de la stratification , dans les limites où 1ls peuvent être étudiés à la surface, n'étaient susceptibles d'aucune cause d’erreur. Néanmoins, vu l'absence complète de dé- bris organiques, il n’y a aucune donnée paléontologique qui puisse servir de guide , et je ne sais pas de motif important qui empêche de suivre l’ordre strati- graphique, quoique les conclusions auxquelles il conduit ne puissent être consi- dérées comme tout à fait certaines (2). Aïnsi je vais commencer la description des dépôts semi-cristallins du nord de la Scandinavie par la partie orientale. Comme je n'ai pas visité moi-même l’est du Finmark, pour ne pas laisser de lacune dans la description qui va suivre, j'ai extrait de l'intéressant ouvrage de M. Keilhau (Gœa Norwegica, p. 260) les principaux faits relatifs à la région comprise entre le golfe de Varanger et celui de Porsanger. Formation de grès, de conglomérat et de schiste argileux du Finmark oriental. Au-dessus du terrain de gneiss primitif, qui forme le côté méridional du Va- Le) 2 rapgerfiord, on voit affleurer, en stratification discordante, d’abord des couches (1) La cristallisation du gneiss et du micaschiste de la partie occidentaie du Finmark n’a probablement pas eu lieu en même temps que celle du gneiss vraiment primitif de la Scandinavie; en effet, les schistes cristallins qui forment la rive méridionale du golfe de Varanger, et qui appartiennent, sans aucun doute, au gneiss primordial, sontrecouverts transgressivement par la formation poudingifère du Finmark oriental , tandis que le micaschiste et le gneiss du Finmark occidental ne sont point séparés par une discordance stratigraphique de la formation quartzo - schisteuse qui les borde. (2) Les causes d’erreur inhérentes aux conclusions stratigraphiques peuvent tenir, soit à ce que les faits observés ne sont qu’un accident local ou superficiel, à ce que les observations sont trop peu précises où trop peu nombreuses, soit à ce que les couches ont subi un renversement. 100 CONSTITUTION GÉOLOGIQUE (Ne 4, p. 100.) faiblement inclinées de quartzite, et d'un conglomérat renfermant des cailloux en partie arrondis, en partie anguleux, de quartz, de granite, de gneiss , de mica- schiste et de thonschiefer ; au-dessus de ces couches se montre du schiste argi- leux. Suivant M. Keilhau,un exemple bien clair de superposition transgressive a lieu près de Karlebotn, au fond du golfe de Varanger. On y voit les couches de grès, inclinées seulement de 10 degrés vers le N., recouvrir les feuillets de gneiss, qui plongent de 45 degrés à l'O. N. O. Dans cette région, les couches de grès sont, comme on le voit, presque horizontales ; mais plus au N. elles prennent une inclinaison plus considérable. Sur la côte qui s’étend vers le Tanafiord, il ya des schistes plus ou moins durs et siliceux, contenant des bancs de quartzite ; et à l'île Vardôe, on remarque deux couches de conglomérat : au-dessus se trouvent un grès rouge-brunâtre , puis des couches se rapprochant du grès schisteux, du schiste argileux et du jaspe ; elles contiennent des lits minces de pierre calcaire, et sont recouvertes par une assise de thonschiefer noir, à feuillets non contournés. M. Keilhau regarde ces couches comme formant une espèce de bassin, dont le Persfiord occupe à peu près la partie centrale ; elles plongent d'environ 40 degrés vers l'intérieur du bassin, et leur direction décrit une courbe de forme parabolique, dont le sommet est placé du côté de la mer. M. Keilhau a limité la formation du Finmark oriental par une ligne cou- pant obliquement le Tanafiord, du N. E. au S. E., passant ensuite par le Langfiord, une des branches intérieures du Tanafiord, puis par le fond du Laxe- fiord. Le long de cette limite, les couches courent dans un sens généralement parallèle, du N. E. au S. O., avec pente au N. O. Les masses quartzo-schisteuses qui leur succèdent, et que j'ai coloriées en bleu sur ma carte, plongent aussi au N. O. Dans le Bufiord, la seule localité où M. Keilhau ait pu constater la position relative des deux dépôts, il les regarde comme étant stratifiés d'une manière concordante. Formation calcaréo-quartzo-schisteuse du Finmark occidental et de la Laponie centrale. Ce terrain , qui s’appuie sur la formation poudingifère du Finmark oriental, occupe la partie septentrionale de la presqu'île scandinave, et se prolonge vers le S. O. jusqu’au centre de la Laponie ; il se compose essentiellement de quart- zites schisteux ou stratifiés, de schistes argileux et de schistes feuilletés, micacés ; il renferme aussi des masses calcaires, interstratifiées, principalement aux alen- tours du golfe d’Alten. Dans ces dépôts on observe des passages insensibles entre les diverses variétés de roches quartzeuses, grenues et compactes ; il y a des tran- sitions analogues entre les schistes argileux et micacés. Néanmoins le schiste argileux se voit principalement à l’est du Laxeford ; les roches qui affleurent à l’ouest de ce golfe affectent plus habituellement les caractères d’un schiste feuil- (N.1, p.104) DE LA NORWÉGE, DE LA SUÈDE ET DE LA FINLANDE. 101 leté, micacé. En général, elles sont dirigées entre le N. E. etle N. N. E.; leur pendage le plus fréquent est vers l’ouest. L'ile Magerôe, qui forme l'extrémité septentrionale de l'Europe, est remar- quable par les variations pétrographiques des roches que l'on y voit affleurer, malgré une constance frappante dans leurs caractères stratigraphiques. Sur le côté occidental de cette île, on trouve du gneiss ; le côté oriental est formé de schiste argileux, sauf une portion occupée par du granite et une roche dialla- gique. La région centrale de l’île consiste en une bande de schiste micacé, passant au thonschiefer du côté S. E., et présentant en beaucoup de points un aspect argilo-micacé ; elle renferme des bancs interstratifiés de calcaire grenu , gris- blanc : de plus, les couches de ce micaschiste prennent les caractères du gneiss, sur la pointe qui borde du côté occidental l’anse de Kamôe , et il paraît en être ainsi à l'extrémité méridionale de l'île, au bord du détroit de Magerôe. Les directions de toutes ces roches ne s’écartent pas des lignes N. N.E. et N.E.; le schiste argileux qui affleure dans la partie orientale, à Kielvig,et aux environs, plonge constamment au N. E., sous un angle qui varie de 60 à 80 degrés; les couches de schiste micacé et de gneiss situées à l’O. s'appuient dessus, et sont inclinées dans le même sens, sauf dans la partie N. O., près du cap Nord, où il y a quelques exemples de pendage au S. O. Le micaschiste et le gneiss de l'île Magerüe paraissent donc, ainsi que l’a observé M. Keilhau, recouvrir à stra- tification concordante les schistes argilo-micacés , les schistes argileux , et les roches quartzeuses situées à l’est. Ils forment l'extrémité septentrionale d’une longue zone de schistes cristallins, qui constitue la côte du Finmark et les îles adjacentes. La lisière orientale de cette zone , celle qui borde la formation quartzo-schisteuse de l'E., consiste en une série de couches micacées , accompa- gnées d'un peu de gneiss ; le groupe d'îles situées à l’ouest , Qualüe, Sorüe, Seiland , etc., présente une formation gneissique bien caractérisée. Le gneiss de cette région ne diffère pas essentiellement de celui qui constitue une grande partie du terrain primitif de la Scandinavie; cependant, en certains points, il est très quartzeux, subcompacte, et tend à passer à un quartz schisteux el micacé, comme on le voit aux îles Havôüe et Masôe ; mais ailleurs, il est à gros grains, riche en feldspath, et alors il ressemble tout à fait au gneiss ordinaire : comme lui, il renferme souvent des bancs de schiste amphibolique, ou d'amphibo- lite schisteux. Les grenats rouges y sont fréquents, et ils abondent en beaucoup d'endroits ; on y trouve rarement des couches de calcaire cristallin. Le gneiss du Finmark m'a paru être moins souvent mélangé de granite , que celui de la Suède; cependant jy ai observé des veines et de petites masses de granite, aux environs du portde Hammerfest et à Seiland. De cette île à Mageroë j'ai fait seize observations stratigraphiques ; les directions que j'ai obtenues sont comprises, pour les trois quarts, entre le N. 50° E. et l'E. 30° N.; la pente est variable, au N. 0. etaus. E. La bande de micaschiste que j’ai tracée sur ma carte, entre le gneiss des îles 402 CONSTITUTION GÉOLOGIQUE (N.4, p. 102) du Finmark et le terrain quarizo-schisteux situé à l'E., paraît se relier à la vaste zone de micaschiste du Nordland. À l’ouest et au nord de Talvig, à l'entrée de l'Altenford , dans le détroit de Vargsund , qui sépare l’île Seiland de la terre ferme, et plus loin au N., jusqu’à Magerôe, on voit affleurer des roches schis- teuses, consistant principalement en micaschiste, accompagné de gneiss, de schiste amphibolique, et de calcaire micacé, à petits grains ; mais ce sont les couches micacées qui paraissent être prédominantes. Disposition des roches de l’Altenfiord. — Sur les rochers situés vers le milieu de l’Altenfiord, on voit le micaschiste s'appuyer sur un système de couches quartzo-schisteuses, analogues à celles que l’on observe à l’est de l’île Magerôe ; mais la pierre calcaire et l'amphibolitey sont très développéesen certaines parties. Elles sont associées à une série épaisse de couches de schiste argileux et de quart- zite. La ressemblance générale de ces roches avec celles qui composentles ter- rains de transition a déterminé M. Russegger à les assimiler aux formations paléo- zoïques de la Scandinavie méridionale, et à les considérer comme remplissant un bassin au milieu du gneiss et du micaschiste ; cependant sa manière de voir n’est pes confirmée par une étude plus approfondie de cette intéressante contrée. Je ferai d'abord observer que, parmi les couches calcaires et schisteuses des envi- rons de Kaafiord, il en est qui offrent un aspect cristallin; on y trouve même des bancs de schiste micacé où chloriteux, et des schistes analogues au gneiss. De plus, dans cette formation, on n’a pas encore trouvé de restes d'êtres orga- nisés ; tandis que, dans tous les bassins paléozoïques de la Suède et de la Norwége, il y a des couches très riches en fossiles, et principalement en orthocères. D’ail- leurs, les couches supérieures passent insensiblement au micaschiste; et, loin de remplir un bassin au milieu du gneiss, ce terrain est recouvert par de puissantes assises de micaschiste et de gneiss, qui s'étendent sur de vastes surfaces, par delà Hammerfest jusqu’au cap Nord (4). Si l’on fait une coupe des terrains qui s'étendent entre Talvig et Kaafiord , on observe, à la partie inférieure, des schistes argileux accompagnés de grauwackes, puis, au-dessus, des schistes gris, alternant avec des bancs:calcaires, un peu sili- ceux, tantôt compactes, tantôt à grains fins, contenant parfois des cristaux de dolomie ou des amandes de quartz calcédoine, et dedans sont interposées des masses dioritiques. On voit ensuite leur succéder une puissante assise de schiste argileux, mélangé. de: schiste talqueux et de calcaire dolomitique; au-dessus s'étend une masse épaisse de:diorite qu'on peut appeler cuprifère , ear c’est elle (1) Mes observations sur Kaafñord et Hammerfest ont été faites en 4839 , et consignées , pour la plupart, dans un Mémoire déposé à l'École des mines en mars 1840, antérieurement à la publication de la notice de M. Russegcer , et au Mémoire intéressant que M. Keilhau a publié sur le Finmark dans la 2° livraison de la Gæc norwegica. Je suis heureux de me trouver en harmonie avec l’habile géologue de Christiania sur la manière d'envisager le terrain d’Alten. Mes observations s'accordent aussi avec celles qu’a faites, il y a un demi-siècle, lillustre M. de Buch: dans la même contrée. (-1,p.10%) DE LA NORWÉGE, DE LA SUËDE ET DE LA FINLANDE. 103 qui renferme les principaux filons de minerai de cuivre. Elle se présente sous des aspects assez divers : en certaines parties elle est compacte, à grains fins ou schisteuse, présentant des plans de divisions parallèles aux couches environnantes, et, en outre, un système de fentes transversales; ailleurs elle est cristalline ou lamelleuse, comme les diorites ordinaires. Souvent elle offre un aspect porphy- rique, le feldspath y formant des nids avec un peu de quartz et de mica ; on y voit aussi çà et là des faisceaux de lames d’amphibole. Cette dernière substance paraît, en général, y être prédominante ; quelquefois elle est remplacée par du diallage, et alors le diorite passe à l’euphotide. Aux environs de Kaafiord, ces roches sont traversées par des veines de granite peu micacé , contenant de larges lames de feldspath rose, avec du quartz gris. Outre les roches décrites tout à l’heure,il y a une puissante assise de quartzite, qui paraît être placée au-dessus. Elle est très développée dans le fond du golfe d’Alten, et la montagne de Kongshavenfield (près d’Altengaard) en est com- posée presque entièrement; à la base, on voit le quartzite s'appuyer sur des schistes d’un gris foncé, paraissant correspondre à ceux où est enclavé le diorite cuprifère de Kaafiord. Les caractères de cette roche quartzeuse sont un peu va- riables : au Kongshavenfield, c’est du quartz à peu près pur, dépourvu de mica, fendillé, faiblement translucide ; ailleurs c’est un grès quartzeux, modifié, comme il y en a dans beaucoup de terrains paléozoïques ; ou bien encore c’est un quartz schisteux et micacé. Sur la côte orientale de l’Altenfiord, cette roche quartzeuse passe à des jaspes rubanés et très diversement colorés en gris, rouge, violet et vert ; elle est alors très ondulée, mais, en général, faiblement inclinée. Là, elle est accompagnée de roches dioritiques, et souvent il y a, entre le quartzite et le diorite, une roche intermédiaire, à la fois siliceuse et amphibolique. Sur cette rive de l'Altenfiord , on voit le quartzite et le diorite se prolonger jusqu’auprès d’Altnæs , en face de Talvig ; et alors on voit leur succéder des schistes verts, d’un aspect stats qui ani fortement vers le N., de manière à s’enfoncer au -dessous des schistes micacés situés plus au nord et inclinés dans le même sens. Fort souvent le diorite se montre sous forme de bancs interposés dans les roches stratifiées ; mais il con- stitue aussi des masses irrégulières, dont l'allure diffère tout à fait de celle des roches stratifiées adjacentes, et quelquefois il semble s'être épanché à leur surface. Le quartzite, qui est si développé au fond et sur le bord oriental du golfe d'Alten, ne paraît plus être représenté aux environs de Talvig que par des lits peu épais, placés à la partie supérieure de la puissante assise de schistes argileux qui encaisse le diorite cuprifère de Kaafiord. Au-dessus de ces couches minces de quartzite, on trouve une série de roches schisteuses et calcaires, qui affectent des caractères de cristallinité de plus en plus prononcés : ainsi les schistes deviennent feuilletés, passent tantôt au schiste chloriteux ou tal- queux , tantôt au schiste micacé; ils renferment des couches de calcaire grenu, 104 CONSTITUTION GÉOLOGIQUE (4, p.108) dolomitique, et pénétré de lames de trémolite. Au-dessus s'étend le mica- schiste en masses puissantes, qui forment la montagne d'Akka-Sokki, et un peu plus au N. O. le micaschiste s'enfonce lui-même sous le gneïss des îles du Finmark occidental. Les roches stratifiées de l’Altenfiord offrent une disposition régulière ; aux environs de Talvig et d’Alinæs, elles suivent une direction générale de l'E. N. E. à l'O. S. O., et plongent alors au N. O.; à Talvig et auprès, elles offrent une courbure arrondie, qui est partagée par toutes les couches. De là, vers Kaaford et Bossecop, elles suivent une direction moyenne peu différente du N. S., en inclinant généralement de 40 à 60 degrés à l'O. La ligne de jonction du micaschiste et du terrain calcaréo et quartzo-schisteux présente une disposition analogue; elle passe un peu au sud de l’isthme d’Alteid , qui sépare le Lang- fiord du Lille-Altenfiord; puis, en approchant du fiord de Porsanger, elle se re- courbe vers le N. N. E. , parallèlement à l'axe de ce golfe. Les principaux gîtes cuivreux que l’on a reconnus sur la rive septentrionale de la petite baie de Kaafiord se trouvent contenus dans la grande masse dioritique, que nous avions qualifiée de cuprifère ; ils se distinguent de la plupart des oîtes sulfurifères de la Scandinavie, en ce qu'ils se rapprochentle plus des filons pro- prement dits, c'est-à-dire de fentes remplies : ailleurs les sulfures métalliques se trouvent plutôt disséminés dans des roches que concentrés dans des fentes. Constitution géologique de l’intérieur de la Laponie. — Les couches du terrain quartzo-schisteux de l'Altenfiord paraissent se prolonger vers l’intérieur de la Laponie, dans la région que traverse le fleuve Alten , mais en présentant, comme nous allons le voir, des variations dans leurs caractères pétrographiques (1). A environ 2 myriamètres au sud de Bossecop, en gravissant par une pente douce le versant septentrional du plateau de la Laponie, j'ai observé une espèce de gneiss très quartzeux, d’un gris blanchâtre, présentant quelques grains feldspathiques au milieu d’une masse siliceuse, etdes paillettes de mica vert etblanc, couchées dans le sens de la stratification. Certains bancs ont l'aspect d’un quartzite schis- teux et micacé; ils alternent avec des couches de schiste amphibolique, dans le- quel prédomine l’hornblende noire. Les couches régulièrement stratifiées cou- rent à l'O. 42° N., et plongent de 20 degrés seulement au S. O. Ces roches, qui présentent des passages entre le gneiss, le micaschiste et le quartz schisteux, se rattachent très probablement aux quartzites de l’Altenfiord, et paraissent consti- tuer, en grande partie, les pentes du plateau vers le N. Plus loin, en allant vers le S., je les ai vues s'étendre sur de vastes surfaces, en continuant à courir entre l'O. 40° et 0. 45° N., avec pente auS. O. (1) Je décris ici d’une manière un peu détaillée les roches que j'ai vues en Laponie : mes obser- vations s’accordent en grande partie avec celles de M. de Buch et de M. Keïlhau ; mais elles rem- plissent une lacune, car ces deux savants n’ont point fait connaître la disposition stratigraphique des terrains qu’ils ont remarqués dans cette contrée. (W:4,p.1) DE LA NORWÉGE, DE LA SUÉDE ET DE LA FINLANDE. 105 Près de la petite île d'Houtzeiocken, située à environ 480 mètres au-dessus de la mer, dans le lit de la rivière d'Alten, sur les bords de laquelle nous avons campé, les roches schisteuses prennent les caractères du micaschiste proprement dit; elles offrent des lits alternants de feuillets de mica et de quartz gris. Leur direction est au N. 37° O., avec pente faible au S. O. Plus loin, le micaschiste, dans lequel on trouve souvent des grenats, se continue en suivant la même direc- tion, et en plongeant faiblement à l’ouest, jusque vers la zone culminante du pla- teau que l’on traverse pour se rendre au golfe de Botnie, zone à laquelle on donne le nom de Nuppivara. Alors le micaschiste change de caractères; et, à en juger d'après les gros blocs (1) épars dans la couche de détritus qui couvre la surface du sol et masque le roc solide, il est remplacé par du schiste argileux brillant, d’un aspect un peu cristallin, et se rapprochant des schistes de l’Altenfiord. Un peu plus loin , sur le sol ondulé qui sépare l’Alten-Elv du lac Zjolmijaure , j'ai vu ce schiste, d'un gris noirâtre, courir au N.17°0., et plonger de 95 à 30° à l'E. N.E, En contact avec lui, se trouve une roche amphibolique, verdâtre, en partie com- pacte, en partie lamelleuse. Le schiste argileux et l'amphibolite paraissent être les principales roches qui, au sud de Nuppivara, constituent la portion méridio- pale du plateau de la Laponie, portion qui s’abaisse par une pente douce vers Kautokeino. Le schiste offre souvent de petits feuillets de mica, et tend à passer au schiste micacé, de sorte que le nom de schiste argilo-micacé lui convient peut- être mieux que celui de schiste argileux. Un peu au sud-est du lac de Zjolmijaure, j'ai remarqué de petits rochers, sur lesquels on voit saillir, avec le thonschiefer, des couches de schistes siliceux, qui sont diversement colorés en vert, jaune et rouge, et qui m'ont rappelé les schistes siliceux de la partie orientale de l’Altenfiord : ici les couches courent au N.8°0.; elles sont beaucoup plus inclinées que précédemment, car elles plongent de 60 degrés à l'est. Plus loin, les schistes se continuent, en se rapprochant quel- quefois du schiste micacé, jusqu’au Siaberdasjock, qui est l’un des principaux affluents de l’Alten-Elv, et qui s’y réunit près de Kautokeino. Les bords de cette rivière sont, en grande partie, couverts d’un dépôt de sable ; mais, en quelques points, on y voit affleurer du schiste micacé ou amphibolique, déjà signalé par M. de Buch. | Le plateau septentrional de la Laponie, dont je viens de faire connaître la composition géologique, forme un prolongement latéral des montagnes de la Nor- wége ; il présente une surface légèrement ondulée, nue et déserte, sur laquelle saillit rarement le terrain solide : il est caché par une couverture épaisse de dé- tritus,de dessous laquelle on voit s'élever, en divers points, la crête des couches de (4) Par mi les blocs épars à la surface du sol, il y en a de roches cristallines, de granite, de roche amphibolique et]|‘diallagique. Ils sont à demi enfoncés dans une couche épaisse de détritus argilo- sableux, de; graviers et de cailloux, qui ont été transportés par les agents erratiques, et qui , chaque année, sont en partie remaniés par les courants provenant de la fonte des neiges. SOG GÉOL. — 2° SÉRIE. T. VI. — Mém. n° 1. 14 106 CONSTITUTION GÉOLOGIQUE (N. 4, p. 406.) schiste, mais sans qu’elle forme de véritables rochers. Cette région présente un aspect de solitude et de tristesse encore plus prononcé que les plateaux des envi- rons de Rôraas ; elle est d’ailleurs moins fortement accidentée. Quoique le pla- teau de la Laponie ne s'élève pas à beaucoup plus de 700 mètres au-dessus de la mer, il est, en général, dépourvu de végétation; c'est seulement au fond des dépressions les plus profondes que l’on voit croître quelques bouleaux chétifs. Environs de Kautokeino.—Le hameau deKautokeino, situé à peu près au centre de la Laponie, et au pied méridional du plateau que nous venons de décrire, est un point orographique important: il se trouve à peu de distance de la zone monta- gneuse de Ja Norwége, et, à l'origine de cette région de collines ondulées qui embrasse toute la Finlande et la plus grande partie de la Suède. D'ailleurs, il est placé sur une ligne géologique remarquable, à la séparation du terrain de gneiïss primitif et des formations schisteuses de la Scandinavie septentrionale, Le gneïss paraît peu développé autour de Kautokeïno : le sol est principalement granitique au sud de ce village. Le granite que l’on voit affleurer est à grains moyens, et à petits grains, offrant assez souvent une texture veinée ou schistoïde, par suite de la disposition des feuillets de mica noir, qui s’entrelacent autour des grains de quartz et de feldspath d’une teinte grise et d’un rouge clair. Un peu plus au midi, ce granite est accompagné de gneiss primitif, bien caractérisé ; mais, autour du village, on voit affleurer des schistes cristallins, dont les affinités géologiques sont un peu incertaines. En effet, ce sont des schistes micacés, poudingiformes, contenant une grande quantité de nodules ellipsoïdaux ou de lentilles très allon- gées, ayant de 4 à 6 centimètres d'épaisseur, sur 15 à 25 de longueur. Leur com- position est un peu variée : les unes sont formées de quartz hyalin translucide, les autres d'hornblende verdâtre, lamelleuse; on y voit aussi des parties feldspa- thiques. La masse dans laquelle ces nodules sont enchâssés consiste en un agré- gat de grains quartzeux et de paillettes micacées. Cette roche est probablement la même que celle observée à Kautokeino par un géologue anglais, M. Everest, quoique sa description diffère un peu de la mienne ; elle court de l'E. 43° N. à 0. 43° S., avec pente de 50 degrés au N. O. En remontant l’Alten-Elv, à environ 1 myriamètre au N. de Kautokeiïno, j'ai observé une roche talqueuse, passant à la pierre ollaire, verdâtre, onctueuse au toucher; elle est subcompacte, et n'offre pas de stratification bien marquée ; elle est traversée par des veines de quartz , et l’on y distingue de petits feuillets de talc blanc ; à peu de distance de là se trouve du granite. Le gneiss primitif, qui affleure un peu au midi de Kautokeino, a été observé par M. Keilhau au sud de Karasjock, de façon que sa limite s'étend le long du pied du plateau septentrional de la Laponie, vers le golfe de Varanger, comme elle est tracée sur ma carte. Les roches que nous avons vues affleurer sur le plateau de la Laponie , depuis (N.1,p.107) DE LA NORWÉGE, DE LA SUÉDE ET DE LA FINLANDE. 107 l'Altenfiord jusqu'à Kautokeino, sont de natures un peu diverses, puisque, dans la partie septentrionale, il y a des schistes cristallins, quartzeux et micacés, pas- sant au gneiss, et que, plus au sud, nous avons observé des schistes argileux et argilo-micacés, avec des roches amphiboliques. Si l'on considère l'orientation générale des couches, que nous avons vues courir entre le N.O.et le N. N.0O., dans l’intérieur de la Laponie, comme au fond du golfe d’Alten, on est conduit à conclure que les roches schisteuses de la Laponie se relient avec celles de l’Al- tenfiord. Ces dernières ont elles-mêmes des caractères pétrographiques assez variables : ainsi, sur le côté oriental et au fond du golfe d’Alten, le quartzite est prédominant, tandis que près de Talvig il est seulement représenté par quel- ques couches siliceuses ; en divers points, la pierre calcaire est très développée. Les schistes éprouvent eux-mêmes des variations considérables dans leur manière d'être, et présentent une foule d'états intermédiaires entre le schiste argileux ordinaire, le schiste micacé ou talqueux, et le gneiss. Cette variabilité pétrographique rend très difficile à fixer Le contour de la for- mation dont nous nous occupons actuellement : les limites que je lui ai assignées diffèrent de celles qu'a tracées M. Keïlhau sur sa carte de la Norwége septentrio- nale. D’après les observations que j'ai faites en Laponie, et qui viennent d’être exposées, les roches schisteuses qui affleurent entre le golfe d'Alten et Kautokeino, et qui stratigraphiquement paraissent se relier avec celles de l'Altenfiord, en diflèrent, au point de vue pétrographique, à peu près autant que celles des golfes de Porsanger et de Laxe, auxquelles d'ailleurs elles ressemblent d’une manière notable, car elles consistent principalement en schistes argileux, passant au schiste micacé, et en roches quartzeuses et micacées, se rapprochant quelquefois du gneiss ; aussi j'ai cru devoir considérer ces dépôts comme ne constituant qu'une seule formation. L'espace qui sépare le golfe d'Alten du fond du golfe de Por- sanger est en grande partie inconnu ; mais, d’après l’analogie pétrographique et la disposition générale des roches, il est vraisemblable que le terrain quartzo- schisteux qui affleure sur le côté occidental du golfe de Porsanger doit se relier avec celui qui forme le côté oriental du golfe d’Alten. En exposant les observations géologiques qu’il a faites dans le Finmark, M. Keilhau dit (Gæa norwegica , p. 276) avoir observé au fond du Laxefiord, et sur divers points, auprès des lacs de Laune-Javrek et Igja-Javrek, des schistes cristallins tendant à se rapprocher de roches gneissiques, parfois conglomérati= formes. Néanmoins, comme ils sont interposés à stratification concordante dans le terrain semi-cristallin, calcaréo et quartzo-schisteux, je n’ai pas cru devoir les distinguer par une teinte spéciale, d'autant plus qu'ils paraissent avoir peu d’étendue. 108 CONSTITUTION GÉOLOGIQUE CN: 4, p. 108.) Roches cristallino-schisteuses bordant, du {côté occidental, le terrain quartzo-schisteux du Finmark. Le micaschiste qui borde, du côté occidental, le terrain calcaréo et quartzo- schisteux du Finmark, et qui s'appuie dessus , occupe une très vaste étendue, MM. de Buch et Keiïlhau l’ont observé sur une grande partie de la côte du Nordland ; il constitue le Sulitelma (1884 mètres), qui est le massif de montagnes le plus élevé du nord de l'Europe, au delà du 63: degré de latitude. M. Keiïlhau a limité ce terrain, du côté méridional, par une ligne dirigée du N. O.aus. E., et coupant la côte norwégienne sous le 67° degré de latitude, sur le territoire des paroisses de Bejern et Bodüe. De ce côté, il est bordé par le terrain de gneiss primitif, qui constitue le midi du Nordland et le nord de la provincede Drontheim. Dans cette formation , le micaschiste est la roche dominante; il présente un aspect cristallin, et passe rarement au schiste argilo-micacé; il est presque con- stamment accompagné de couches subordonnées de calcaire cristallin, grenu, qui est plus ou moins dolomitique, et pénétré de lames de trémolite. Le grand développement de la pierre calcaire dans une formation aussi cristalline est digne de remarque; on y trouve aussi, comme roches accessoires, du gneiss, du schiste amphibolique, du schiste chloriteux et talqueux. D’après les observations de M. Keiïlhau et les miennes, la direction la plus ordinaire de ce terrain est voi- sine duN. E.; aux environs du golfe d’Alten, et plus au nord, le pendage est habi- tuellement au N.0.; mais, au midi du 70: degré de latitude, il est ordinairement au S. E., et plus souvent au-dessous qu’au-dessus de 45 degrés ; les couches sont fréquemment horizontales. Les grenats abondent dans les schistes cristallins de cette formation, de même que dans le gneiss du Finmark occidental : M. Keilhau y a trouvé de l’émeraude à Vorhoug, près de Kjeringôe, et de la topaze y a été signalée par M. Everest, près de Bodôüe. M. Sommerfeldt y a observé du dysthène et de la staurotide en- gagée dans du quartz, avec de la trémolite et de l’actinote. Des indices de fer chromé ont été signalés à Rodôe par M. Strôm; et, près de Storhorn, cet ingé- nieur à remarqué, dans une couche de micaschiste, un peu de cuivre pyriteux et de galène. Les minerais métalliques sont rares dans ce terrain, ainsi que dans les autres formations de la Norwége septentrionale (à l'exception de l’Altenford). Cependant, sur la presqu'île située entre l'OEford et Sjümen, sous 68 1/2 degrés de latitude, on a exploité, pendant quelque temps, un gîte de cuivre panaché dans du micaschiste ; mais le minerai était trop peu abondant pour que les travaux fussent productifs. Les îles qui forment comme une petite chaîne sur la côte du Nordland ne sont composées que partiellement de micaschiste ; cette roche en constitue le bord oriental; mais elle est limitée à l’ouest par un mélange de granite veiné, et de (N.1,p.19) DE LA NORWÉGE, DE LA SUÈDE ET DE LA FINLANDE. 109 gneiss passant fréquemment au granite. La portion des îles Loffoden et Trom- sen qui est formée de ces roches se distingue de la région du micaschiste par sa hauteur bien plus considérable ; elle présente des groupes de roches s’élevant fréquemment jusqu’à la région des neiges permanentes , et rappelant par leurs formes bizarres et variées les montagnes du Romsdal. Ce sont des masses nues et déchiquetées, hérissées de pics ou d’aiguilles, et bordées d’escarpements. On y voit, en divers lieux, des murs verticaux et étroits, entaillés par des cavernes profondes, qui les traversent quelquefois dans toute leur épaisseur. En allant à Hammerfest, nous avons longé la côte du Nordland, mais sans nous y arrêter; et, n'ayant point exploré par moi-même cette région pittoresque, je vais indiquer succinctement les caractères du terrain granito-gneissique qui la compose, d’après la description qu'en a donnée M. Keilhau (Gæa norwegica, p. 303). La séparation de ce terrain et du micaschiste se manifeste, en général, par les changements qui se produisent dans la hauteur et la forme des rochers; ils sont beaucoup plus élevés, plus escarpés et plus aigus dans la zone occidentale : ce- pendant il y a quelquefois des passages pétrographiques d’un terrain à l’autre. La formation granito-gneissique, qui est coloriée en rouge (Ÿ), offre tantôt les caractères du gneiss, tantôt ceux du granite veiné, du granite ordinaire, et quel- quefois de la syénite, par suite du mélange de lames d’amphibole avec le mica. D'ailleurs, le gneiss, quandil est à gros grains, et surtout quand il est accompagné de veines feldspathiques, semble passer au granite. Celui-ci présente souvent lui-même une texture veinée ; quelquefois, dans des masses granitiques à grains moyens, on voit des parties à grains beaucoup plus gros qui les traversent sous forme de veines ramifiées (1), ainsi à la montagne de Rôüken, sur l’île Andôe (Gæa norwegica, p. 305) : ici les veines sont horizontales. A l'île Vœrüe, des roches, dont la structure est en partie rubanée, en partie granitique, sont traver- sées aussi par des filons feldspathiques à gros grains. A Bierkôe, il y a dans le granite de gros noyaux de feldspath, qui lui donnent un aspect porphyrique. Les parties schisteuses qui sont associées au granite présentent souvent tous les caractères du gneiss ordinaire ; elles renferment des couches de schiste mi- cacé, de schiste amphibolique, et quelquefois de calcaire grenu, comme on le voit entre Sund et Reine, à l’île Moskée. Le graphite est fréquent dans ce ter- rain ; il y forme quelquefois des couches, et se trouve principalement dans le gneiss, ou dans les autres roches schisteuses qui en dépendent, telles que le schiste micacé et amphibolique. M. Keïilhau a observé que, dans le micaschiste de Jernstad, à l’île Andôe, il y a certaines couches, où le mica paraît être remplacé par du graphite. J'ai remarqué le même fait sur le versant méridional des Pyré- nées, dans la vallée d’Andorre. (1) Ces veines granitiques à gros grains me paraissent être l'équivalent des filons de granite à grandes parties, contenant souvent de la gadolinite et de l’orthite, qui traversent le gneiss et le gra- nite ancien de la Suède. 110 | CONSTITUTION GÉOLOGIQUE (N #, p: 410.) D'après les passages qui ont lieu entre le granite et le gneiss des îles du Nordland, M. Keilhau regarde (Gæa, p. 311) ces deux roches comme étant de simples modifications d'un seul et même type; mais il me semble que cette asso- ciation intime pourrait aussi être expliquée en la considérant comme due au mélange de deux roches, dont l’origine première est différente, mais qui ont été amenées à cristalliser dans des conditions analogues. Roches diallagiques de la Norwége septentrionale. | On observe dans la partie septentrionale de la Norwége des roches diallagiques analogues à celles qu'Esmarck a nommées Norite, et que nous avons déjà men- tionnées dans la partie méridionale et centrale de cette contrée. Dans le Fin- mark, comme dans les régions situées plus au sud , elles sont en connexion avec des roches amphiboliques, et souvent le diallage ne paraît s’y trouver qu'accessoirement , comme remplaçant de l’amphibole, ainsi que j'ai déjà eu l'occasion de l'indiquer. Leur texture est souvent schistoïde, principalement sur le pourtour des masses, et il y a des passages vers les roches schisteuses adja- centes. M. de Buch a signalé, il y a longtemps, plusieurs gîtes de ces roches dial- lagiques; d’autres ont été observés depuis par M. Keiïlhau et décrits dans son ouvrage (Gœa norwegica, p. 302). Ces roches intéressantes ont aussi fixé mon attention , lorsque j'ai visité le Finmark. Je vais indiquer brièvement les carac- tères des principaux gîtes. Dans la partie orientale de l’île Magerüe, à l’ouest de Kielvig , affleure une masse verdâtre, présentant des lames de diallage brun (bronzite), avec de la ser- pentine, et ressemblant, en certaines parties, à une roche dioritique à graine fins ; du côté E., elle passe à un granite amphibolique, peu quartzeux, qui, d’après la remarque de M. Keilhau, a quelque ressemblance avec le syénite de l'Iütunfield : il renferme lui-même des lames diallagiques , ce qui montre l'intime connexion des deux roches. Nous avons déjà vu que le diallage fait souvent partie des dio- rites ou amphibolites interposés dans le terrain schisteux qui entoure le golfe d’Alten, et s’étend à l’intérieur de la Laponie jusqu'auprès de Kautokeino. On trouve des roches analogues, souvent composées d'un mélange de feldspath et de diallage brun, sans amphibole, dans les schistes cristallins micacés, qui bordent à l’ouest la formation calcaréo et quartzo-schisteuse des environs de l'Altenfiord. Ces roches sont très développées un peu au nord-ouest de Talvig, sur l'isthme qui sépare les deux golfes d’Alten et de Quänanger ; en certaines parties, elles paraissent s'étendre sur le micaschiste et en être nettement séparées ; ailleurs le diallage se montre associé aux schistes cristallins adjacents, et semble en faire partie intégrante. Même, dans une couche de pierre calcaire ou de dolo- mie, située un peu au nord de l’isthme d’Alteid, M. Keilhau a observé (Gæa nor- wegica, p. 275) des nids de feldspath à très gros grains, avec du quartz, du mica @.4,p.11) DE LA NORWÉGE, DE LA SUÉDE ET DE LA FINLANDE. an brun et du diallage vert. Autour des golfes deQuänanger et de Lyngen, M. Keïlhau a signalé beaucoup de points, où le diallage se trouve associé à des roches serpen- tineuses ou dioritiques. Sur le côté occidental du Lyngenfiord, il y a une bande diallagique un peu étendue, allongée du N. N. E. aus. S. O. : il y en a une autre à l’île Kaagen. Ces roches, qui se lient avec des diorites (1) et de la serpentine, paraissent être assez abondantes en Norwége, et il y en a probablement beaucoup de gîtes qui nous sont inconnus. Remarques générales sur les formations quartzo-schisteuses et poudingifères du Finmark. Les terrains stratifiés de schiste argileux et argilo-micacé, de grès, de quartz schisteux, de conglomérat et de pierre calcaire, qui composent la plus grande partie du Finmark , sont incontestablement des dépôts sédimentaires ; la res- semblance de ces roches avec celles des terrains paléozoïques est si évidente, qu'il ne peut y avoir aucun doute à cet égard : seulement, les géologues, qui n’admettent la théorie du métamorphisme que dans une mesure restreinte, con- sidéreront probablement comme des roches plutoniques les schistes micacés et les gneiss de l’ouest du Finmark. Quant à la question de leur âge, les grès et les schistes argileux du Finmark oriental sont certainement postérieurs au terrain de gneiss primitif, puisqu'ils le recouvrent ; et même, dans le golfe de Varanger, M. Keiïlhau a montré que la superposition est transgressive, comme celle qui a lieu au contact du gneiss et des terrains siluriens du midi de la Norwége et de la Suède. Mais s’ensuit-il que l’on doive considérer les terrains stratifiés du Finmark comme appartenant à l'une des trois périodes silurienne , dévonienne et carboni- fère, de même que l'ont fait des géologues, par suite d’une certaine analogie pétro- graphique? Je ne puis être de cet avis, au moins en ce qui concerne les roches calcaréo et quar{zo-schisteuses situées à l’ouest du Laxefiord : mon opinion est fon- dée sur plusieurs motifs. D'abord les terrains paléozoïques, bien caractérisés, de la Scandinavie renferment des couches riches en fossiles, tandis que, jusqu’à ce jour, on n’en a trouvé aucune trace dans les formations du Finmark, pas plus que dans les dépôts semi-cristallins de la province de Drontheim. Cependant le terrain silurien du Jemtland, qui est très voisin de ces derniers, et qui est placé au bord de hautes montagnes, renferme des bancs chargés d'Orthocères. L'absence com- plète de fossiles rend évidemment très incertaine l’assimilation des terrains schisteux du Finmark et de la province de Drontheim, soit au système silurien, soit au système dévonien. (1) Un très grand nombre de gisements de rockes amphiboliques, diallagiques et serpentineuses n’a pu être indiqué d’une manière spéciale sur ma carte géologique, vu la petitesse de l'échelle, D'ailleurs, beaucoup de diorites ou amphibolites ayant une texture schisteuse ne peuvent être sépa- rés du gneiss ou des schistes cristallins qui les accompagnent, 112 CONSTITUTION GÉOLOGIQUE CN: 1, p.112.) IL faut observer aussi que, nulle part en Scandinavie, même au contact de roches pyrogènes , les dépôts paléozoïques ne présentent de schistes cristallins , micaschistes, gneiss et schistes amphiboliques, téls qu'on en trouve souvent dans les formations argilo-feuilletées que nous avons décrites. Presque toujours, quand les schistes paléozoïques sont modifiés, ils ont été endurcis , sont devenus siliceux, et la cause de ce métamorphisme est due à des roches pyrogènes parfaite- ment visibles ; tandis que les formations du deuxième groupe azoïque ont été soumises, sur de vastes étendues, à des causes de cristallisation, qui bien souvent ne se manifestent par aucune roche massive qu’on puisse observer à la surface. Un autre argument résulte des considérations orographiques suivantes : les errains paléozoïques du nord de la Norwége et ceux du Jemtland ne pénètrent point jusqu'au centre de la zone de hautes montagnes ; ils s'appuient sur les flancs de cette zone, et contribuent à en former les contre-forts, ce qui prouve qu'ils ont participé aux soulèvements de cette contrée ; mais ils n’atteignent qu’à une élévation bien inférieure à celle des cîmes composées de roches azoïques. Or, les dépôts quartzo-schisteux du golfe d’Alten occupent la même position oro- graphique que ceux de la Scandinavie centrale ; ils se trouvent dans la partie médiane et la plus élevée de la région montagneuse du Finmark. Ainsi ils consti- tuent la montagne de Noonskarfield (haute de 1083 mètres), qui est une des plus hautes cîmes de cette contrée, il y a donc lieu de penser qu'ils sont antérieurs à l’époque silurienne. Un autre motif, moins concluant à la vérité, est fourni par les roches diallagiques. Jusqu’à présent on n’a jamais trouvé ces roches, en Scandina- vie, au milieu de formations paléozoïques bien constatées ; or, elles se montrent interposées dans le terrain quartzo-schisteux du golfe d’Alten et de l’île Magerôe, qui paraîtrait alors être antérieur à l’époque silurienne. Mais cette considération n’a, je le reconnais, qu'une valeur secondaire, car il pourrait s'être produit en Scandinavie des roches diallagiques , seulement en un ou deux points, pendant le cours de la période paléozoïque (1). Néanmoins nous sommes conduit à la même conclusion que nous avons déjà déduite de l’absence des fossiles, des caractères lithologiques et de la situation orographique des formations quartzo-schisteuses des régions centrales et septen- (1) Il paraît s’être produit en Scandinavie des roches diallagiques à deux époques différentes, car on en trouve dans les terrains semi-cristallins du Finmark et des environs de Rôraas ; et d’un autre côté, dans Je midi de la Norwége, il y en a qui sont enclavées dans le terrain de gneiss primitif et traversées par des filons de granite à grandes parties. Or, ces filons offrent la composition et l’aspect du granite à gros grains associé au gneiss de la Scandinavie ; ils renferment plusieurs des minéraux qui en sont caractéristiques, tels que la gadolinite et l’orthite. Ce granite est certainement plus ancien que les terrains paléozoïques où il ne pénètre jamais ; il est très probablement aussi antérieur aux ormations semi-cristallines de la Norwége, formations dans lesquelles on n’a encore jamais observé de filons de granite à gadolinite. IL paraît donc y avoir des roches diallagiques appartenant à la période gneissique et d'autres se rattachant à la période des schistes semi-cristallins. (-1,p.15) DE LA NORWÉGE, DE LA SUÈDE ET DE LA FINLANDE. 113 trionales de la Norwége. Ainsi, jusqu’à ce que des découvertes paléontologiques, peu vraisemblables d’ailleurs, aient donné une nouvelle face à la question, nous regarderons ces dépôts comme étant, au moins pour la plupart, antérieurs à l’époque silurienne, et comme représentant le terrain de transition inférieur, ou ce groupe de couches qui a reçu le nom de Système Cambrien ou Cumbrien. D'ailleurs, il me paraît probable que les roches calcaréo et quartzo-schisteuses du Finmark sont à peu près contemporaines des formations semi-cristallines qui occupent la partie centrale de la Scandinavie : les dépôts de grès et de pou- dingues qui se trouvent sur la partie du littoral intermédiaire entre les golfes de Sogne et de Drontheim, et qui recouvrent des schistes argilo-feuilletés, sont sans doute plus modernes. L’analogie pétrographique porterait à croire qu'il en est de même des grès et conglomérats du Finmark oriental, si la question n'était compliquée et obscurcie par leur infra-position apparente, relativement aux roches quartzo-schisteuses situées plus à l’ouest. Néanmoins, si nous faisons abstraction de ces dépôts, dont la position géologi- que est problématique, et si nous rangeons par ordre d'ancienneté les formations semi-cristallines dont la position peut être appréciée d’une manière probable, nous mettrons à la base la formation quartzeuse du Nummedal et du Tellemark ; au-dessus, nous placerons, comme étant un peu plus modernes, les formations calcaréo et quartzo-schisteuses de la Scandinavie centrale, puis celles du Fin- mark; et la série sera terminée par les dépôts de grès et conglomérat situés sur la côte occidentale de la Norwége, dépôts auxquels il faudra peut-être joindre ceux du Finmark oriental. | On peut considérer comme correspondant probablement aux formations semi- cristallines du Finmark et de la Scandinavie centrale des roches quartzeuses et calcaréo-schisteuses qui affleurent aux environs de la petite ville de Tornea, et sur lesquelles il nous reste encore quelques détails à ajouter. Formations quarlzeuses et calcaréo-schisteuses des environs de Tornea. Dans la partie méridionale de la Laponie, près de l'embouchure du fleuve Torneà dans le golfe de Botnie, affleurent des roches de quartz schisteux, de schiste arcçileux et de pierre calcaire, qui ont déjà attiré l’attention de M. de Buch, lors de son voyage en Laponie. La colline de Nivavara qui s'élève sur la rive gau- che du Torneà Elv, en face du village de Korpikyla, présente une composition très différente des collines d’Avasaxa , Luppiovara, Pullinghi, situées plus au nord, Au lieu de consister, comme ces dernières, en un mélange de granite et d’un peu de gneiss, elle est formée de quartz schisteux, mélangé de parties talqueu- ses ou stéatiteuses, onctueuses au toucher. La couleur de cette roche varie du gris au vert jaunâtre ; on y voit de larges veines de quartz hyalin et des grenats rouges, rassemblés en petites masses granulaires. Les couches sont un peu ondu- SOC. GÉOL. — 2° SÉRIE. T. VI. — Mém. n° 41. 45 un CONSTITUTION GÉOLOGIQUE CN. 1 p.114) lées : leur direction et celle de la montagne ne sont pas tout à fait parallèles au cours du fleuve; elles courent à peu près de l'O. N. O. à l'E.S. E.; leur pen- dage est de 80° au N. E. Au sud-est de la colline de Nivavara, le quartz schisteux est caché par le dépôt de transport diluvien, mais je l'ai vu reparaître sur le littoral, entre l’embou- chure du Tornei et celle du Kemi Elv, à peu de distance à l’ouest du bourg de Kemi : ici le quartz gris blanc est un peu moins schisteux qu’à Nivavara; il con- tient de petits feuillets micacés, des grenats rosés, granulaires, et beaucoup de petites amandes de quartz hyalin. La stratification, qui est bien marquée, n’est pas tout à fait la même qu’à Nivavara; les couches courent du N. O0. au S.E., avec pente de 68° au N. E. Cette direction me paraît plus normale que celle des couches de Nivavara, car elle se rapproche davantage de l'orientation moyenne de la bande quartzeuse, qui paraît s'étendre d’une localité à l’autre ; il est à no- ter que le pendage est dans le même sens aux deux points extrêmes. M. Albrecht, avec qui j'ai visité la Finlande, m'a dit que, dans la partie centrale de cette contrée, il existe des roches quartzeuses qui paraissent se rattacher au quartz schisteux de Kemi; et celui-ci formerait alors une bande discontinue, s'étendant des bords du Torneà Elv aux environs de Kuopio, suivant la direction N. O.-S. E, Le quartz schisteux que nous venons de décrire pourrait, s'il était seul, être considéré comme se rattachant au terrain gneissique; mais à peu de distance de Nivavara, un peu au sud de Rukkola, on voit affleurer du schiste argileux, et, si l’on en juge par les blocs épars à la surface du sol, cette roche doit s'étendre jusqu'auprès. de Nivavara. Elle saillit dans le lit du fleuve Tornea, à la cataracte de Julha, entre Kukkola et Voyakkala. Ce schiste semble parfois passer à la grauwacke schisteuse ; mais, en général, 11 a un aspect un peu chatoyant, et l’on y distingue de petits feuillets de mica ; il ressemble aux schistes argilo-micacés, si communs en Laponie et dans la province de Drontheim. Il est accompagné d’un calcaire noir et subcompacte, La direction de ces roches est un peu variable, mais analogue à celle des couches de Nivavara; elle varie de l'O. à l'O. N. O avec pente de 40° au N. E., de façon que ce schiste argileux paraît s’enfoncer au-dessous de la bande de quartz schisteux de Nivavara et de Kemi. Immédiatement au-dessous de la cataracte de Julha, j'ai vu affleurer du gra- nite à grains moyens et un peu petits, dont le feldspath est rouge clair : il est analogue à celui que nous avons cité aux environs de Kautokeino. On le rencon- tre fréquemment dans la plaine qui environne l'embouchure du Torneà Elr : il y forme de petites bosses aplaties, et à peine saïllantes, qui séparent les divers affleurements du terrain calcaréo et quartzo-schisteux. Un autre lambeau de ter- rain argilo-schisteux paraît encore se trouver sur la côte où le Calix Elv se jette dans le golfe de Botnie; car, sur la presqu'île de Storÿü, et aux environs, Herme- lin a signalé l’existence d'un calcaire compacte et de sie argileux, d’un gris noirâtre ; auprès il y a de la syénite. » (-1,0.145) DE LA NORWÉGE, DE LA SUÈDE ET DE LA FINLANDE. 115 J'ai fait connaître dans ce mémoire les diverses formations de schistes, de quartzile, de conglomérat et de pierre calcaire qui sont plus récentes que le gneiss primitif, et antérieures, au moins pour la plupart, à la période silurienne. Avant d'aborder la description des terrains paléozoïques de Ia Scandinavie, nous allons d’abord étudier les phénomènes de soulèvement qui ont redressé les ter- rains non fossilifères, avant que les couches siluriennes aient commencé à se déposer. à Étude des soulèvements qu'ont éprouvés les terrains azoïques du nord de l’Europe. q P Multiplicité des directions des roches schisteuses et des accidents orographi- ques. — L'étude des systèmes de soulèvement dont les terrains azoïques de la Scandinavie portent l'empreinte est sujette à de grandes difficultés , à cause de la diversité et de la multiplicité des directions que présentent les roches schis- teuses et les accidents de la surface du sol. Quoique la côte norwégienne et la ligne de montagnes adjacentes paraissent dirigées moyennement du N. N. E. au S. S. O., elles sont loin d'offrir à un observateur attentif des caractères de sim- plicité : il suffit même d'examiner quelques instants une carte de la Scandinavie, pour reconnaître qu’une portion considérable des principaux traits orographi- ques n’est point subordonnée à cette orientation N. N. E.-S.S. O. D'ailleurs, si lon pénètre dans l’intérieur du pays, et que l’on étudie la disposition des feuil- lets ou strates des roches anciennes, on observera de telles variations, qu'il semble difficile, au premier abord, de rapporter à un système bien défini des directions qui paraissent dépourvues d’homogénéité. Ces difficultés ne m’ont point arrêté, et, en suivant les principes qu’a si habile- ment établis M. Élie de Beaumont, j'espère être arrivé à des résultats qui ne manquent pas de précision. J'ai tâché de tenir compte, dans une juste mesure, de tous les éléments susceptibles de représenter les effets multiples des forces souterraines qui ont disloqué l’écorce terrestre et en ont modifié le relief. Ainsi, j'ai pris en considération la forme des accidents orographiques, les directions des roches schisteuses ou stratifiées, le mode d’allongement des roches massives, et l'alignement des principaux groupes de oîtes de fer oxydulé ou oligiste, que l'on peut envisager comme des variétés particulières de roches massives. Comme j'ai parcouru la Scandinavie et la Finlande d’une extrémité à l’autre, et en divers sens, les matériaux ne m'ont point fait défaut : d’ailleurs, j'ai pu, dans plusieurs cas, corroborer les conséquences déduites de mes propres observations par celles qui résultent des directions de roches qu’ont recueillies deux géologues fort distingués , MM. Nauman et Keiïlhau (1). (1) Ce travail sur les systèmes de soulèvement du nord de l’Europe était rédigé, et un résumé en avait été publié dans le Zulletin de la Société géologique (2° série, t. VII, p. 683, séance du 17 juin 1850), et dans les Comptes rendus de l’Académie des sciences (t. XXX, p. 788), avant qu'eût 4 116 CONSTITUTION GÉOLOGIQUE © (N4, p. 6.) A la lecture de ce travail, on sera peut-être étonné de la multiplicité des phé- nomènes que je vais signaler comme ayant laissé des traces dans le nord de l’Europe : mes conclusions sont basées sur plus de trois mille observations de directions de terrains stratifiés ou schisteux, indépendamment des données fournies par les accidents orographiques et par les alignements de mines de fer. Quelques-uns de ces nouveaux systèmes peuvent n'être que des phénomènes locaux, que des groupes de dislocations propres aux régions scandinaves, mais plusieurs ont une importance évidente, d’autant plus que déjà j'ai pu en recon- naître des traces dans d’autres parties de l'Europe. D'ailleurs la multiplicité des soulèvements qui ont sillonné le nord de l'Europe paraîtra moins étrange, si l’on considère que les formations schisteuses de la Scandinavie doivent être comptées parmi les plus anciens membres de l'écorce terrestre, et que nulle part en Europe les terrains primitifs n'offrent un développement aussi considérable et ne s'étendent sur d'aussi vastes surfaces. La simple inspection d’une carte géogra- phique un peu étendue suffit pour montrer que la Scandinavie a été soumise à des phénomènes de dislocation très multipliés. En aucun autre pays de l'Europe on ne trouverait un littoral aussi découpé, ou, pour mieux dire, aussi haché que la côte norwégienne. Ses longues découpures entrecroisées, et dirigées dans des sens très divers, ne résultent certainement point d’actions érosives : des crevas- ses aussi profondes et à parois abruptes ne peuvent être que des déchirures pro- duites par différents phénomènes de dislocation. Du reste, je suis convaincu depuis longtemps que les principaux groupes de montagnes de l'Europe portent l'empreinte de soulèvements ou de dislocations multiples, que l'on parviendra à constater avec précision, dès que l'on possédera un ensemble suffisant d'observations. Déjà j’ai montré dans les Pyrénées (1) l'action successive de systèmes de soulèvements plus multipliés qu'on ne le croyait auparavant. La comparaison des traits orographiques et stratigraphiques m'a fait découvrir en Scandinavie une complexité encore plus grande, et, dans quelque temps, je déduirai des conclusions analogues des nombreuses observa- tions que, depuis plusieurs années, j'ai recueillies dans l’ouest de la France. La manière de voir que jexprime ici sur la multiplicité des phénomènes qui ont produit chaque groupe de montagnes est d’ailleurs parfaitement en harmonie avec les nouveaux progrès qu'a faits la théorie des soulèvements, par suite des derniers travaux de M. Élie de Beaumont. paru la 3° livraison de la Gœa Norvegica de M. Keilhau, livraison où il cite un grand nombre d’ob- servations stratigraphiques relatives aux roches schisteuses de la Norwége. En lisant ces intéressantes observations, j'ai été heurenx d’y trouver une pleine confirmation des résultats de mes recherches ; et, après avoir examiné ces documents, je ne vois aucune modification à introduire dans l'expression des faits que j'ai publiés en 1850, comme, servant de base à l'établissement des nouveaux systèmes de dislocations. (1) Annales des mines, 4° série, t. VI, p. 54 (1844). 1,P.H7) DE LA NORWÉGE, DE LA SUEDE ET DE LA FINLANDE. 117 L'étude des directions des roches schisteuses ou stratifiées doit être la base fondamentale de la détermination des systèmes de soulèvements ; aussi c’est par l’examen comparatif de ces directions que je procéderai d’abord ; mais, à mesure que j'obtiendrai un résultat, je tâcherai de le vérifier, en comparant les disposi- tions des roches avec l’orientation des principaux accidents orographiques de la région environnante. Dans mes recherches sur les soulèvements qu'ont éprouvés les terrains an- ciens de la Suède, de la Norwége et de la Finlande, un point important du pro- blème consistait à choisir , dans la vaste étendue de pays où ont eu lieu les obser- vations, les zones qui possèdent les caractères les plus prononcés d’homogénéité et de simplicité; ici il serait difficile de trouver des régions qui n'aient subi qu’un seul soulèvement, mais on peut concevoir des zones plus ou moins circonscrites, dans lesquelles prédomine un système particulier, d’une manière assez évidente pour qu'il puisse être constaté facilement. Tableau stratigraphique n° 1 : région gneissique d’Arendal. La première zone par laquelle commencera cette étude est celle qui forme le littoral des environs d’Arendal, et qui constitue la partie basse du Tellemark et du Nedenäs (Nedre Tellemarken et Nedenas) : elle présente une surface ondulée et un peu montueuse, à contours arrondis, entrecoupée de vallées ou de dépres- sions occupées par des lacs ; elle s'étend depuis le golfe de Langesund et le lac Nordvand ou Nordsoë (au nord-ouest de Skien), jusqu'aux environs de Christian- sand. Quand on explore les environs d’Arendal, on voit la direction des couches présenter des changements assez fréquents, mais presque toujours elle varie en- tre le N. N. E. et l'E. N. E. Je puis rappeler ici des faits précédemment exposés dans mon mémoire sur les gîtes métallifères de la Suède, Norwége et Finlande (1). Les environs d'Arendal renferment les plus importantes mines de fer de la Nor- wége, et offrent une bande ferrifère presque continue, qui s’étend depuis Oyestad jusqu'à Flakstad (sur l’île Nälsôe), et qui est dirigée à peu près du S. 0. au N.E., sur une longueur de 25 kilomètres. Il y a, un peu plusau nord-ouest, une deuxième bande, moins vaste et dirigée de même, s'étendant du bourg de Froland à l'usine de Nœs. D’autres mines sont encore exploitées sur le littoral, entre Arendal et Langesund, et leur ensemble forme comme une longue zone disposée parallèle- ment au littoral, du N. E. aus. O. Les roches schisteuses des;environs d’Arendal, et les gites qu’elles encaissent, sont orientés dans le même sens ; mais d’une extrémité à l’autre de la principale bande ferrifère d’Arendal, leur direction passe graduellement du N. N. E. à (1) Observations sur les gîtes métallifères de la Suède, de la Norwége et de la Finlande (Annales des mines , 1. XV, p. 209). 118 CONSTITUTION GÉOLOGIQUE (N. 1, p.418.) l'E. N. E.;c’est vers l'extrémité méridionale, à Larrestwed, Nüdebro ( près Üyes- tad) que la direction se rapproche le plus du N. Près d’Arendal elle est géné- ralement voisine du N. E., etne diffère pas notablement de l'orientation moyenne des roches de gneiss dans la contrée dont nous avons tracé plus haut les limites, et qui forme la partie basse du Tellémark et du Nedenäs : c’est ce qui est mis en évidence par le tableau ci-contre, dans lequel j'ai réuni toutes les directions que j'ai observées dans cette région. Ce tableau a été dressé d’après la méthode de ? M. Élie de Beaumont (1), c’est-à-dire que j'ai considéré la surface d’un demi-cercle comme étant partagée en espaces angulaires de cinq degrés, et à chacune des divi- sions j'ai rapporté les directions qui s’en rapprochent le plus ; quant aux directions également écartées de deux divisions successives, je les ai partagées en deux moitiés ; mais afin d'éviter la fraction +, tous les nombres ont été doublés. TABLEAU N° 4. — RÉGION GNEISSIQUE D’ARENDAL. (0) O 0. 0. O. 0. 0. 0. O0 LE © E © D O1 CE NI OS NO OC O0 = D D BEREEEBEE BEFREEEER ù FAR) = On voit ressortir dans ce tableau un groupe très considérable de directions, compris entre le N. E. et ’E. 40 N., et ayant pour valeur moyenne l'E. 43 N. Il y a, en outre, un assez grand nombre de directions comprises entre le N. 10 E. et VE. 45 N. : elles se rattachent probablement à divers systèmes ; mais, au lieu de présenter des rassemblements particuliers, elles semblent former comme un cor- tége autour du groupe actuel. Les observations que M. Keïlhau a publiées dans la 3° livraison de la Gœa Norwegica (p. 374), postérieurement à ma première notice, sont tout à fait d'accord avec les miennes, car il dit que « le long de la côte sud- » est de ia Norwége, il y a une large zone de gneiss, qui commence un peu à l'est » de Christiansand, et s'étend jusqu’à la limite du terrain de transition de Chris- » tiania, en présentant des directions comprises très régulièrement entre hora 2 » et A (N. 50 E. et E. 30 N.) (2), avec une inclinaison presque aussi constante vers » le S. E. » (1) Zxplication de la carte géologique de la France, par MM. Dufrénoy et Élie de Beaumont (t. I, p. 464). (2) Je ferai observer que, si l’on cherche à réunir en tableaux les directions qui sont énumérées dans la Gœæa Norwegica , fort souvent il est difficile d’y distinguer des groupes bien caractérisés, et appartenant aux systèmes les plus développés ; c’est que M. Keilhau, au lieu de citer dans son ou- W.1,p.119) DE LA NORWÉGE, DE LA SUÈDE ET DE LA FINLANDE. 119 Je dois ajouter que le littoral qui s’étend des environs de Christiansand à Lan- gesund est dirigé presqu’en ligne droite, duN. E. au S. E., dans un sens parallèle à l'orientation moyenne des couches ; tout concourt donc à démontrer l'existence d’un système de dislocations dirigé moyennement à l'E. 43 N. Mais il faut exa- miner s’il ne coïncide pas avec l’un de ceux que M. Élie de Beaumont a établis: les deux systèmes qui s’en rapprochent le plus sont : celui de Longmynd, qui, transporté aux environs d’Arendal, court au N. 32 E. (1), et celui de Westmore- land, qui est ici dirigé de l'E. 30 4 N. à l'O. 3058. Or, les directions E. 43 N. de la côte d'Arendal font un angle de 15 degrés avec le premier de ces systèmes, et de 12 1/2 degrés avec le second. Ces différences sont certainement trop considé- rables pour qu'on puisse les attribuer à des causes d'erreur, ou à une déviation locale. Je ne puis donc hésiter à considérer comme formant un nouveau système les redressements et dislocations qu’ont-éprouvés les roches schisteuses d'Aren- dal et la côte environnante, suivant la direction N. E., qui est également DENpEe aux bandes de minerai de fer enclavées dans le gneiss. Comme Arendal est une localité célèbre parmi les minéralogistes, et impor- tante à la fois par ses mines et par son commerce ; comme c’est l’un des points où mon nouveau système se montre le plus développé, je proposerai de l'appeler système d’Arendal : si on préférait lui donner le nom de la contrée plutôt que celui d’une ville, on pourrait le nommer système du bas Tellemark. Les hautes parties du Tellemark et du Nedenæs, qui sont plus éloignées de la côte, et où les accidents du sol sont plus élevés, présentent aussi beaucoup de directions du gneiss appartenant au, système d'Arendal ; mais elles y sont mélangées de directions qui doivent être rapportées à d’autres systèmes de redressement. En ce qui concerne son âge , on ne peut douter que le système d’Arendal soit antérieur à l’époque silurienne ; car l'inspection d’une carte géographique du midi de la Norwége montre un contraste évident entre la configuration du littoral situé au nord de Langesund et celle de la côte située au midi: aux environs d'Osterrisüer, on voit quelques baies dirigées de l’est à l’ouest ; mais la direction générale de la côte de Kragerôe, Tvedestrand et Arendal, ainsi que des îles adja- centes, est du N. E. auS. O., tandis que les sinuosités du littoral de Laurwig sont presque exclusivement dirigées entre le N. et le N. 0. La ligne de démarcation, qui est tout à fait tranchée, se trouve précisément au fiord de Langesund, qui vrage les résultats de chaque observation isolée, rapporte des moyennes ou des groupes de directions, dont chacun a une valeur très inégale , comme représentant un nombre de mesures plus ou moins considérable; en outre, il cite des directions recueillies par d’autres géologues, et qui expriment probablement les résultats de mesures isolées. (1) Comme les observations à l’aide desquelles on détermine l'orientation des systèmes de soulè- vement ne comportent presque jamais une exactitude de plus d’un degré, je n’ai pas jugé nécessaire de marquer les minutes dans l'expression de l'angle que font ces divers systèmes avec les méri- diens. 120 CONSTITUTION GÉOLOGIQUE (N: 1, p. 120.) sépare les formations paléozoïques des schistes cristallins situés au midi. De plus, aux environs de Brevig et de Langesund, on voit Les couches siluriennes inférieures reposer, à stratification discordante, sur le gneiss dirigé ici entre l'E. N. E. et le N.N.E., comme aux environs d’Arendal. La suite de ce travail montrera que le système d’Arendal est l’un des plus importants de la Scandinavie, et qu'il se manifeste dans presque toute l'étendue de la Suède, de la Norwége et de la Finlande , depuis le 58° jusqu’au 71e degré de latitude , et depuis le 3° jusqu'au 29° degré de longitude orientale, jusque sur les rives du lac Ladoga, aux environs de Saint-Pétersbourg (1). On serait porté à le considérer comme ayant coïncidé avec l'apparition des minerais de fer oxydulé ; néanmoins, comme ces minerais se montrent aussi alignés suivant d’au- tres directions, il est possible qu'ils se soient introduits suivant les plans de redressement de roches déjà soulevées. TABLEAU N° 2, —- SCHISTES CRISTALLINS DES ENVIRONS DE KONGSBERG, 0. 2 N. 45°0. 2 NV. 31 E. A59N. 3 O. 5N. 2 N. 40 O. 4 N. 5°E. 19 E. 40 N. 2 O. 10 N. » N. 35 O. 11 N. 10 E. 16 E. 35 N. 1 0. 15 N. 4 N. 30 O. 12 N. 15 E. 17 E. 30 N. 1 O. 90 N. 3 N. 95 O. 15 N. 20 E. 10 E, 25 N. » 0. 95 N. 2 N. 20 O. 98 N.%5E. 5 E. % N. » O. 30 N. 3 N. 15 O. 35 N. 30E. 8 E, 15 N. 1 O0. 35 N. 3 N. 10 O. 38 N. 35E. 6 E, 10 N. 1 O. 40 N. 1 N. 5 O. 36 N. HE 2 E. 5N.» Avant de quitter le midi de la Norwége, il me paraît convenable de faire con- naître les phénomènes qui ont produit le redressement des terrains schisteux des environs de Kongsberg et de la vallée du Snarum-Elv , terrains si importants par les riches dépôts d'argent et de cobalt que l’on y exploite, et que j'ai décrits dans le mémoire déjà cité. Quand j'ai visité les mines de Kongsberg et des environs de Modum , j'ai exploré la région environnante , et j'y ai fait un grand nombre d’ob- servations stratigraphiques. Les roches de gneiss, de schiste micacé, quartzeux et amphibolique y suivent des directions qui varient généralement du N. au N. N. O. Aux environs de Kongsberg, sur La rive droite du Lauven-Elv, elles courent moyennement du N. 10 O. au S. 10 E., et la régularité de leur disposi- tion a été démontrée par les études minutieuses dont la région argentifère a été l'objet. Dans la vallée du Snarum-Elv , leur direction est plus fréquemment voi- sine de la ligne N.S. Le tableau ci-dessus (n° 2) offre l’ensemble des observations (1) Dans le tableau que donne M. Élie de Beaumont (Æxplication de la carte géologique de La France, t. 1, p. 466) des directions qu’il a observées sur les montagnes des Maures et de l’Esterel, la direction N. E. est de beaucoup prédominante (sous environ 4 degrés de longitude orientale) ; or, cette direction est presque exactement parallèle au système d’Arendal. (N.1,p.1%) DE LA NORWÉGE, DE LA SUÉDE ET DE LA FINLANDE. 191 stratigraphiques recueillies par moi à l'ouest du terrain de transition de Chris- tiania, aux alentours des vallées du Lauven-Elv ei du Snarum-Elv. Onnedistingue, d'unemanière nette, dans ce tableau qu'unseulsystèmededirec- tions, dont l’axe correspond à la ligne N. 10° O.; or, si par cette région on mène un arc de cerele parallèle au système de la Vendée, il coupera le méridien de Kongs- berg sous un angle d'environ 11 1/2 degrés à l'ouest, et il coïncidera, à 1 1/2 degré près , avec l'orientation des roches schisteuses de cette localité. Le système du Forez, transporté ici, offrirait une coïncidence encore plus parfaite ; mais comme les directions N. 10°0. ne se prolongent pas dansla partie adjacente du terrain silu- rien, laquelle s’appuie sur le gneiss à stratification transgressive, et en courant ici à J'E. N. E., on ne peut pas supposer que le système post-silurien du Forez ait imprimé aux schistes métallifères de la vallée de Lauven l'orientation qu’ils pré- sentent; car elle résulte évidemment d’un système de soulèvement antésilurien , et qui paraît être le système de la Vendée, tel que l'a exposé M. Rivière et que l’a admis M. Élie de Beaumont. Je ferai remarquer, d’ailleurs, que la direction N. 10° O. représente l’orientation moyenne des célèbres fahlbandes ou assises pyritifères de Kongsberg , qui s'étendent sur 28 kilomètres de longueur, depuis Liôterud, sur le Dals-Elv, jusqu’à Rustad sur le Lauven. Quant aux schistes micacés, quartzeux et amphiboliques, qui accompagnent le gneiss dans la vallée du Snarum-Elv, et qui présentent des fahlbandes analogues à celles de Kongsberg , mais imprégnées de sulfarséniures cobaltifères, les por- tions où l’on exploite les mines de cobalt de Skuterud et celles de Svartefield, près de Snarum, courent sur une assez grande étendue du N. au$., ou du N. quelques degrés O. au S. quelques degrés E., suivant une orientation propre à un système de soulèvement que nous définirons un peu plus loin (S. méridien de la Scandinavie) (4). Néanmoins la bande cobaltifère qui s'étend de Skuterud aux mines de Snarum, sur une étendue de 8 à 9 kilomètres, court à peu près du N. 10° 0. au S. 10° E., c'est-à-dire ‘parallèlement aux assises pyritifères de Kongsberg. Ainsi on peut considérer le système de la Vendée comme étant le plus développé parmi ceux qui ont redressé les schistes métallifères des environs de Kongsberg et de la vallée du Snarum-Elv; d'autant plus que le Lauven-Elv, près de Kongsberg, et le Snarum-Elv, avant sa jonction avec le Drams-Elv, de même que plusieurs autres rivières et lacs de cette région, sont disposés dans un sens à peu près parallèle : on pourrait donc à la dénomination de système de la Vendée adjoindre celle de système de Kongsberg. (1) D’après M. Keilhau (voyez Gœu Norwegica, p. 374), dans la zone des environs de Kongs- berg, la direction N. S. serait prédominante ; s’il en était ainsi, le système que j'ai nommé système méridien de la Scandinavie serait ici le plus développé; cependant, d’après mes observations, i paraît l'être un peu moins, dans cette région, que celui de la Vendée. SOC. GÉOL. — 2° SÉRIE. T. VI. — Mém. n° 14. 16 192 CONSTITUTION GÉOLOGIQUE (N4, p.122) TABLEAU N° 3. — TERRAIN GNEISSIQUE DE LA SUÈDE CENTRALE ET ORIENTALE. . A0 N. 37 35 N, 34 . 90 N. 26 "25 UN, 18 20 UN 112 . 15 N. 10 . 10 N. 5 5 N. 2 . A5°N. 7 = Leu 2 (TO > 2 Z (eo) 6 N. N E O 8 N. N E (e) 0) N. N E O0 1 N. N E O. 20 N. 4 N. N E (0) 5 N. N E (e) 7 N. N E (o) 6 N. N E (9) l N. N E Maintenant, au lieu de continuer à discuter les observations stratigraphiques relatives à la Norwége, je vais passer à la Suède, parce que nous allons y recon- naître des systèmes de redressement qui ne se manifesteraient pas d’une manière aussi nette dans les montagnes de la Norwége. Nous allons considérer la partie centrale et orientale de la Suède, celle qui est située entre le 59° et le 61° degré de latitude, entre le golfe de Botnie et le 11° degré de longitude orientale; elle comprend la portion centrale et méridionale de la Dalécarlie et les régions limi- trophes, telles que l'Uplande, la Westmanie, le nord de la Néricie et l'est de Ja Vermlandie. Le tableau n° 3 résume mes observations stratigraphiques relatives à cette zone, qui est limitée, du côté sud-est, par les lacs Mälar et Hjelmar ; on y voit deux systèmes prédominants : l’un situé entre l'E. 85 et E. 45° N., qui corres- pond au système d’Arendal ; et un autre, compris entre le N. 20 et 30° E., dont la direction se rapproche de celle du système du Rhin (ici N. 28° E.). Le système N. 25° E. est très développé dans la Dalécarlie méridionale, et il se manifeste à la fois par la direction des roches schisteuses, et par les alignements des nom- breux gîtes de fer oxydulé et oligiste qui y sont enclavés. Lorsque j'ai visité la Suède, j'ai pris des calques d’un grand nombre de plans de mines, que les ingé- nieurs suédois m'ont communiqués avec une bienveillance dont j'ai conservé un souvenir reconnaissant. L'examen de ces plans a servi à fixer mes idées sur certains points de la ques- tion actuelle ; j'ai considéré surtout les plans des bandes de minerai de fer qui sillonnent en divers sens le midi de la Dalécarlie et les provinces adjacentes ; ces bandes sont fort nombreuses dans les paroisses de Norberg, Säter, Tuna, Gran- gjärde, etc. Elles ne sont pas toutes dirigées de la même manière, et souvent elles présentent des déviations. Les variations qui ont lieu dans leur allure peuvent s'expliquer de plusieurs manières, soit en supposant que ces lignes d'amas, et les couches qui les encaissent, aient été infléchies postérieurement endivers sens, soit en concevant que les masses ferreuses se soient injectées suivant différentes direc- tions, ou bien encore qu’elles se soient simplement introduites suivant les plans de. schistosité de roches déjà redressées. Quoi qu'il en soit, l'orientation de ces séries d’amas est évidemment un des éléments importants du problème que nous cher- ’ (%:.1,p.125) DE LA NORWÉGE, DE LA SUÉDE ET DE LA FINLANDE. 123 chons à résoudre. Dans la Dalécarlie méridionale et la région limitrophe, les bandes ferreuses suivent des directions qui sont toujours comprises entre le N. et le N. 80° E., comme on peut le voir en regardant les plans que j'ai annexés à mon Mémoire sur les gîtes métallifères de la Suède, de la Norwége et de la Finlande (planche ID) : Il semble que la ligne N, A0°E., qui est également écartée des deux limites N. et N. 80° E., devrait représenter l'orientation moyenne des bandes fer- reuses, mais il n’en est point ainsi. J’ai relevé avec soin, sur les nombreux plans de mines que je possède, les directions de ces bandes qui m'ont paru être les plus régulières, et je les ai réunies dans le tableau ci-après : pour le former, j’ai dû nécessairement tenir compte de la longueur des séries de gîtes qui présentaient une allure uniforme ; j'ai pris 50 mètres pour unité de longueur conventionnelle, de façon qu'une bande rectiligne, dont l'étendue est de 350 mètres, a pour coeffi- cient 7. Ce tableau concorde avec celui n° 3, qui comprend toutes les directions de couches que j'ai observées dans cette région ; l'un et l’autre conduisent aux mêmes conclusions : dans le tableau des alignements des gîtes de minerai de fer, on voit ressortir d’une manière encore plus frappante le système N. 25° E., qui paraît prédominer dans la Dalécarlie méridionale, surtout dans la paroisse de Grangjärde. Il y a un certain nombre de masses ferreuses dont l'allongement est dirigé entre le N. 30 etle N. 45° E., et qui, par suite, peuvent être rapportées au système de Longmynd (ici N. 38 E.); mais elles sont en nombre moindre. Le système d’Arendal se manifeste dans certaines localités, et notamment dans l'orientation de la longue série de gîtes du Bispberg. On pourrait être tenté de considérer la cause qui a produit les directions N. 25° E. du sud de la Dalécarlie comme se rattachant au système du Rhin, qui, transporté de Strasbourg ici, devient N. 29° E.: mais une coïncidence d’âge entre ces deux phénomènes me paraît inadmissible ; car les roches schisteuses qui en- caissent les amas de minerai de fer de l’intérieur de la Suède sont redressées presque verticalement, tandis que, un peu plus au sud-est, se montrent des couches siluriennes, qui ont conservé leur position horizontale. Je regarde le système du Rhin et celui du nord de l'Angleterre comme deux phénomènes qui ont disloqué les dépôts paléozoïques du midi de la Suède, et les ont réduits en lambeaux ; mais ici, comme dans l’est de la France, le système du Rhin me paraît avoir agi plutôt en produisant des fractures, qu’en redressant les terrains schisteux ou stratifiés. Aussi, pour peu que l’on admette les directions N. 26° E. de l'intérieur de la Suède comme appartenant à un système particulier, il faudra convenir que ce système est antérieur à celui du Rhin, et même à l’époque silurienne. Si l’on mène une ligne qui lui soit parallèle, à la latitude de 64 degrés , et sous le 10° de- gré de longitude, elle sera dirigée au N. N. E., et coïncidera exactement en di- rection avec l'axe de la série. de montagnes qui existe à la séparation de la Suède et de la Norwésce, entre le 64: et le 68° degré de longitude, et qu'on désigne 4124 CONSTITUTION GÉOLOGIQUE (N. 1, p.124) TABLEAU N° 3 bis : DIRECTIONS DE PLUSIEURS BANDES DE MINERAI DE FER DE LA SUÈDE. NOMS DES MINES DIRECTIONS | LONGUEUR de nur N. [N.5E. 1 15/20 des lignes la PADÈD degites. |(eu mètr.) ET 951301351401 N. E. [E. 40. 135130125120 115110 DES PAROISSES OU ELLES SONT SITUÉES, Paroisse de Graugiarde. Groupe de mines de Bastberg , Tun- karlsberg et Ivik. Mines de Nyaker. . . . . . . . — Padhand PR mire cit — Stall et Per Anderson. . Se — Läng et Norra-Grand, . Mines situées un peu plusau 8, 0. Groupe de Grangesberget (t). Wästra Ormberget. . . . . = IN Mines voisines des précédentes. .[N Sôdra Grängesberget. . . . .. .[N. 15 E. Norra Grângesberget. . . . . . .IN. 95 E, Mines voisines des précédentes, .[N. 19 E. IN E N 30 E. M E, 98 E. 17 E. .224 E. 27222 . 2NE. +. 26 E Mines de Strand. : ." 1. MOTORS ° |. Mines situées à l’ext° E. deStrand. . 4h N, 29 altolote) le allée: . Risberget et mines adjacentes. .[N. 24 E. : “lee Mines situées entre Strand et Ris- bergel' Ne eee) IN R20 NE Groupe de Hacksberg. Mines de Kjärr , Läng, Jord, ctc.IN. 3 E. Stora Hacksberg . . . . . . . . .IN. 21 EF. Lilla Marnäs et Fâll . . . .« , , .IN. 41 E. Stora Marnäs, Persbo, etc. . . .IN, 74 E. Gran, Small, Väg , etc. . . . . . NME; Paroisse de Tuna. Mines de Bank, Kärr, etc. . . .|E . Autres mines situées au 5. E, . .|E. 42 N.| € Do] MOOD IS) Ge EI Gne MraAMpPNE se 0 nn. - INC ©) EC 00) D 0 0 EC OrmStoten ee Co Sie . . SIM ER ICE .lE. A0 N. Ho honlbnlalbelbeltalleslhte Utmälet (partie septentrionale). . N. 32 0 5 0 5 0 BERPEBEE 1 Hi 2 9 3 à nn En Finlande, comme en Suède, les directions du gneiss, des schistes quart- ‘zeux, micacés, talqueux et amphiboliques, ainsi que des bancs calcaires qui les accompagnent, sont assez variables, mais le tableau n° 5 montre qu’elles for- ment plusieurs groupes, dont le plus considérable est placé entre l'E. 20° et 35° N.: il coïncide à peu près avec le système d’Arendal, qui coupe le 22: degré de lon- gitude sous l'angle de 29° { à l'E. | Le groupe de directions qui vient immédiatement après, suivant l’ordre d’im- portance, est situé entre le N. 10° et 15° O., etil ne me paraît coïncider avec au- cun des systèmes anciens qu'a établis M. Élie de Beaumont : les deux qui s’en rapprochent le plus sont ceux du Morbihan et de la Vendée qui, transportés en Finlande, sous le 22° degré de longitude, deviennent N. 2810. et N. > E. : l'intervalle qui les sépare est divisé en deux parties presque égales par le nouveau système que je signale maintenant, et qui est dirigé ici N. 10° à 15° O. C'est au nord du golfe de Botnie, dans la partie inférieure du cours du fleuve Tornea, un peu au-dessous de sa jonction avec le Mounio, que ce système se manifeste le plus clairement. J'ai reconnu, en effet, que la plupart des collines granitiques qui bordent dans cette partie les rives du Torneà, et sur lesquelles les Académiciens français plantèrent leurs signaux de triangulation, notamment les collines de Pullinghi, de Kynsivara, de Mattarenghi, etc., et qui s'élèvent à 200et300 mètres de hauteur, sont dirigées entreleN. etleN.N. O., moyennement au N. 12° O., ainsi que les couches de gneiss qui sont enclavées dans le granite. On peut remarquer, d’ailleurs, que la partie inférieure du fleuve Tornea, et plusieurs des rivières situées à l'E., sont dirigées de la même manière. Le système de soulèvement qui se manifeste dans cette région peut être appelé système de Tornea. On peut encore ajouter à sa désignation le nom de système du Ladoga oriental, car il me paraît être non moins développé sur le côté nord- est du lac Ladoga, entre Sordawala et Salmis : en examinant une carte géogra- phique à grande échelle, de cette partie de la Finlande, on y voit le lac Ladoga présenter de nombreuses découpures dirigées à peu près dans le sens du méri- dien ; elles sont produites par des rochers plus ou moins escarpés, dont les eaux du Ladoga baignent le pied, et qui s’élèvent à 100 et même près de SOC. GÉOL. — 2° SÉRIE. T. VI, — Mém. n° 1. 17 430 CONSTITUTION GÉOLOGIQUE (N2 4, p. 150.) 150 mètres de hauteur ; on y remarque une série très épaisse de couches de schiste micacé et amphibolique, accompagné de pierre calcaire, et courant moyennement du N. 8 O0. au S. 8 E.; par suite, leur orientation coïncide avec une ligne parallèle à la direction du système de Torneä. On peut remarquer, en outre, qu'une partie des lacs si nombreux en Finlande, notamment ceux des en- virons de Kuopio, que plusieurs rivières de la partie méridionale suivent des directions voisines du N. 10° 0. ;il me semble donc que le système de disloca- tions qui à soulevé les collines de granite et de gneïss des rives du Torneä s’est prolongé à travers l'intérieur de la Finlande, et s’est étendu jusque sur les bords du lac Ladoga. Il doit être antérieur à l'époque silurienne, car autrement il serait impossible de comprendre comment les forces qui ont redressé verticalement les roches schisteuses du lac Ladoga auraient laissé dans la position horizontale les couches siluriennes inférieures des environs de Saint-Pétersbourg. Dans le même tableau relatif à la Finlande et au sud de la Laponie, on ob- serve des directions autour de certaines lignes, qui correspondent peut-être aux systèmes de Tunaberg, des Ballons et des Kiôl; mais ces rassembiements sont trop peu marqués pour que l’on puisse en tirer des conclusions bien positives. Tableau stratigraphique n° 6. — Région gneissique du sud-ouest de la Suède et du sud-est de la Norwége. | Avant d'aborder la zone montagneuse de la Scandinavie, je vais d’abord expo- ser les résultats d'observations stratigraphiques assez nombreuses que j'ai faites sur les roches de gneiss situées au sud-est du lac Miôüsen, et dans la zone littorale qui s'étend de Christiania à Helsingborg. Les directions que j'ai mesurées, en parcourant ce pays, sont peut-être encore plus variées que dans les régions con- sidérées précédemment, mais il eùt été difficile de partager cette longue zone en portions n'offrant que des directions semblables : d’ailleurs, quand même les changements fréquents qui ont lieu dans l’orientation des couches ne paraissent soumis à aucune règle, au moment où on les observe sur le terrain, cette appa- rente confusion disparaît lorsque les observations sont coordonnées méthodi- quement. , TABLEAU N° 6. — LONGITUDE MOYENNE = 9° + Ge O. 7 N. 45°0. 19 N. DE. N. É L O. 5°N. 9 N. 40 O. 20 N. 10 E. E. 40 N. 18!43e O. 10 N. 7 N. 35 O. 22 N. 15 E. E. 85 N. 13)5 "si 0. 15 N. 3 N. 30 O. 24 N. 2 E. E. 30 N. 8 0. 2% N. 7 N. 95 O. %61z2£S N. 5 E. E. 25 N., 5 O. 25 N. 12 N. 20 O. 31 PE? N. 30 E. E. 20 N. 7 O0. 30 N. 13 N. 15 O. 22 N. 35 E. E. 15N. 6 O. 35 N. 12 N. 10 O. 0 N. {0 E. E. 10 N. 4 O. 40 N. 9 N. 5 0. 259525 E. 5 N. 99 } 222 (4, p.14) DE LA NORWÉGE, DE LA SUEDE ET DE LA FINLANDE. 131 Le tableau n° 6, relatif à la région que nous considérons maintenant, offre, entre le N. 20° et N. 25° O., un rassemblement principal de directions, corres- pondant au système de Tornea que nous venons de définir tout à l'heure, et qui, transporté ici sous le 9° degré de longitude, court à peu près au N. N. O. On peut remarquer aussi que la partie du littoral située entre Moss et Varberg est diri- gée régulièrement du N. 20° O. au S. 20° E.; par conséquent, elle se rapproche beaucoup d’être parallèle au système de Tornea et du Ladoga oriental. Nous voyons dans.le même tableau un assez grand nombre de directions entre le N. 15° 0. et le N. 5 E. ; elles me paraissent appartenir, en partie peut-être, au système de la Vendée, mais principalement au système méridien, car c’est dans le voisinage de la ligne N. S.(1), qu’elles sont Les plus abondantes. Le groupe de directions qui est le plus considérable, après les précédents, estdirigé à l'E. 40° N., et correspond évidemment au système d’Arendal (iei E. 39° 5 N.). Les autres directions de ce tableau ne forment pas de groupes assez saillants pour qu'il soit nécessaire de s’y arrêter. Tableau stratigraphique n° 7. — Région gneissique d’Areskutan. Je vais passer actuellement à la province du Jemtland située sous le 63° degré de latitude, et renfermant une portion de la série de montagnes qui est limitrophe entre la Suède et la Norwége. Le sol du Jemtland occidental est fortement acci- denté, et l’on y remarque des hauteurs un peu considérables, que domine ma- jestueusement la cime isolée d’Areskutan. Celle-ci forme le point culminant de cette latitude, quoiqu’elle ne se trouve pas sur la frontière Suédo-Norwégienne, et qu'elle soit plus avancée vers l'E. que la plupart des autres sommités. Nous n’allons pas nous occuper en ce moment des dislocations qu’a éprouvées le terrain silurien de la partie centrale du Jemtland ; cette question sera traitée un peu plus loin. Considérons seulement le massif de schistes cristallins et métal- lifères, sur les pentes duquel viennent s'appuyer les strates paléozoïques contour- nés en divers sens. La montagne d’Areskutan, les hauteurs environnantes, les lacs et rivières qui les séparent, ont des directions comprises entre le N. N. O. et l'O. N. ©. ; il en est de même des couches de gneiss, de schiste micacé, de schiste amphibolique et de calcaire cristallin qui constituent cette région, ainsi qu'on peut le vérifier en examinant le tableau n° 7, qui résume les observations stratigraphiques recueillies sur la montagne d’Âreskutan, et aux alentours, entre le terrain silurien d'Ostersund et la formation semi-cristalline de la zone limitrophe entre la Norwége et la Suède. (4) Les observations de M. Keïlhau sont d'accord avec les miennes, car il-expose (Gæa Norwe- gica, p. 37h) que les couches de gneiss situées à l'E. du terrain de transition de Christiania courent très clairement du N. au S. avec de légères déviations vers le N. N. O. 132 CONSTITUTION GÉOLOGIQUE ; (N. 4, p. 452.) TABLEAU N° 7. —- LONGITUDE MOYENNE — 40° :. = [=] © HENHEME OO RGwwuo | & : K2 C9 K9 = Le] SO ND = S, de Tornea, 0. 0. 0. 0. 0. 0. 0. 0. 2 2 222220 SOON kR oo ae SRE ON © 6 PERRIN 22 F= Co & S. de Jemtland, 0. 30 N. Dans ce tableau, on distingue deux groupes de directions, dont le moins im- portant correspond au N. 20° O., et paraît appartenir au système de Tornea. L'autre est placé entre l'O. 30° et 35° N. ; il coïncide à peu près avec l’axe de la montagne d'Areskutan, qui est allongée dans le sens de l'O. 32° N. Ce dernier groupe me paraît appartenir à un système spécial, intermédiaire entre celui des Ballons (ici O0. 20° N.) et celui de Westerwick ou du Thuringerwald (0. 38° N.). On remarque dans le Jemtland beaucoup d'accidents orographiques alignés sui- vant la même direction O. 30° à 35° N.; en outre, dans la Laponie Suédoise, qui s'étend du 64° au 69° degré de latitude, depuis le Jemtland jusqu'au nord du Tornea Lappmark, il y a un grand nombre de hauteurs, de lacs et de cours d'eau disposés suivant des directions qui varient de l'O. 30° à 0. 40° N., et dont l'orientation moyenne est l'O. 34° N., sous le 15° degré de longitude orientale (4) : il y a donc lieu de donner à ce nouveau système la dénomination de système du Jemtland et de la Laponie Suédoise. Je le regarde comme postérieur à la période silurienne, du moins à la première moitié de cette période, car le lac Liten, toute la partie septentrionale du Storsjün , ou lac d'Ostersund, l’Alsensjün, etc., sont dirigés dans le même sens ; or ce sont des dépressions produites dans l'étage inférieur du terrain silurien par des dislocations postérieures à ces dépôts sédi- mentaires. Nous observerons aussi dans les couches siluriennes de cette contrée des directions comprises entre l'O. N. O. et le N. O. Je ferai observer que les roches siluriennes de la France occidentale présen- tent fréquemment des directions voisines de l’O. 16° à 20° N., et par suite paral- lèles au système du Jemtland , en tenant compte de la différence des longitudes. On peut citer , comme étant orientée de cette manière, la bande de quartzite qui s'étend de Domfront vers Prezampail (de l'O. 18° N. à l'E. 18 S.), et plusieurs autres bandes de grès de la presqu'île de Bretagne : ainsi on voit que le système du Jemtland n'est pas exclusivement propre au nord de l'Europe. (1) La montagne de minerai de fer de Gellivara paraît aussi être orientée dans cette direction, . (N.4,p: 155) DE LA NORWÉGE, DE LA SUÈDE ET DE LA FINLANDE. 133 Tableau stratigraphique n° 8. — Région semi-cristalline du Jemtland, du Herjedal, et du territoire norwégien limitrophe. Lorsque nous avons décrit les dépôts semi-cristallins qui occupent l’ouest du Jemtland et une grande partie de la province de Drontheim, nous y avons signalé une série de couches de schiste argileux, subfeuilleté, de grès quartzeux et de calcaire subcompacte : cette bande, qui par son aspect pétrographique ressemble aux terrains de transition, paraît être placée au-dessus des schistes feuilletés situés à l’E., mais sans offrir une stratification discordante, et simplement comme si elle formait la partie supérieure du groupe. Néanmoins j'ai jugé à pro- pos de réunir dans un tableau stratigraphique particulier les directions obser- vées à l'intérieur de cette zone poudingifère; mais, avant de l’examiner, discu- tons le tableau n° 8, qui résume les observations relatives aux schistes feuilletés, argilo-micacés et chloriteux, situés entre la bande calcaréo-poudingifère de Drontheim et la formation gneissique du Jemtland. Dans la région montagneuse qui forme la zone limitrophe de la Suède et de la Norwége, entre le 62: et le 64° degré de latitude, j’ai mesuré un grand nombre de directions de schistes feuilletés, et j'y ai réuni celles que j'ai observées en explo- rant la vaste dépression qui sépare les hautes plates-formes du Dovrefield de la province Suédoise du Herjedal, et forme le bassin supérieur de la Glommen et du fleuve Fœæœmund. Cette dépression est également formée de schistes feuilletés ; on y trouve en outre de nombreux gîtes de pyrite cuivreuse et de fer chromé. TABLEAU N° 8. — LONGITUDE MOYENNE — 9° ze © E. 35°N. 18 d ÉMNENE() « 25 N4 9 Q Z2Z22222 20, N 17 S, du Dovreñeld, "11520N10 2 LONG 5 N. 8 PAPLPPLPET 0. 0, O. 0. 0. O 0. 0. © NN > EFSaSueu Le tableau n° 8, qui résume tout cet ensemble d’observations, offre, entre le N. 20° E. et N. 25° E., un groupe principal de directions qui se rapporte au sys- tème des Kiôl; on ne doit pas être étonné de voir ce système offrir ici un grand développement, car la zone que nous considérons forme l'extrémité méridionale de la série de montagnes qu’on nomme les Kiël. Les directions N. N. E., que nous y voyons être les plus multipliées, sont parallèles aux directions N. 25° à 26° E., qui sont fréquemment offertes par les schistes cristallins de l'intérieur 134 CONSTITUTION GÉOLOGIQUE (N:1, p.154.) de la Suède, et par les gîtes de minerai de fer qu’ils encaissent. C’est cette simi- litude stratigraphique qui m'a déterminé à rapporter au même système le redres- sement suivant la ligne N. N. E. du gnciss et des schistes semi-cristallins , for- mations toutes deux fort anciennes , mais dont la première remonte évidemment à une époque encore plus reculée. Dans le tableau n° 8, il y a encore, entre le N. 10° et le N. 15° E., des directions fort nombreuses, qui ne forment pas de groupe distinct , mais dont une partie se rapporte probablement à un système qui a relevé, comme nous le verrons plus loin, les couches siluriennes du Jemtland dans le sens du N. 15° E. ; il a produit aussi dans la Vestrogothie des dislocations dirigées de même, qui ont donné nais- sance aux collines de Billingen et environs : aussi je le désignerai sous le nom de système de Billingen. Dans le même tableau, on remarque un autre groupe de directions un peu important, qui semble correspondre au système d’Arendal, mais qui provient peut-être d’un autre système que nous allons exposer tout à l'heure. Il y a encore un petit groupe, dont l'orientation s'accorde avec celle du système méridien de la Scandinavie, et un autre qui tombe sur l'E. 20° N. Tableau stratigraphique n° 9. — Zone calcaréo-schisteuse et poudingifère de la province de Drontheim. TABLEAU N° 9, — LONGITUDE MOYENNE = 8° +. 0. 12). | N. — 0. 2 N. — 19 E. 40°N. 45 35. | :N. 40° 0: #3 Ne) 5° 45 E. 35 N. 16 0. 5N. 9f6Ë | N. 350. 2 N. 10 E. AE E. 30 N. 9 O. 10 N. 7 | N. 30 0. 3 N. 45 E. 22(2% E. 25 N. &G 0. 45 N. 11 1 IN22500:+ 7 N. 20 E. 24 (5 E. 20 N. 10 0. 2° N. 8 | N. 20 O. 10 N. 95 E1 90} || EL 45 N. 41 0. 5 N 5 | N. 450. 5 N. 30 E. 18 E. 10 N. 8 0. 30 N. 9 | N. 10 O. 10 N. 85 E 90).25,)| US Mus 035 N. 6 | N° 610746 N. 40 E. RE | O. 40 N. 5 | N. — E. 19)” £z Ce tableau présente les directions que m'ont offertes les roches de la zone calcaréo-schisteuse et poudingifère qui s'étend à l’est du fiord d'Orkel et le long du bord oriental du fiord de Drontheim, depuis Opdal sous le 62° + de latitude, vers le lac de Snaasen , et plus loin vers le N. E., jusqu’au delà du 65° degré de latitude ; mais les observations stratigraphiques comprises dans ce tableau ne vont pas au delà du lac Snaasen : nous avons vu, d’ailleurs, dans la description des environs de Drontheim, que cette zone s'étend, sur une largeur de 3 à 4 myria- mètres, de Drontheim à l'extrémité occidentale da lac Sœlbo.Elle fait un angle très aigu avec l'axe du fiord de Drontheim, et suit, entre le 63° et le 65° degré de lati- tude, une direction moyenne du S. 40° O. au N. 40° E. Les roches qui la composent (49.15) DE LA NORWÉGE, DE LA SUÈDE ET DE LA FINLANDE. 135 courent généralement au N. 40°E., surtout un peu au midi de Drontheim : telle est d’ailleurs la direction du groupe principal que présente le tableau n° 9. On doit se demander si ce groupe de directions ne constitue point un système particulier, qui prendrait alors le nom de système de Drontheim ; les faits que j'ai observés ne paraîtront peut-être pas suffisants pour motiver l'établissement d’un tel système, qui viendrait augmenter le nombre déjà considérable des an- ciens systèmes compris dans le quart de cercle N. E. On peut observer que, dans sa partie méridionale, la bande calcaréo-schisteuse et poudingifère de Drontheim présente une disposition peu éloignée de l'orientation du système de Longmynd, c’est-à-dire du N. 33° 5 E. Plus au nord, aux environs de Vœrdalsôren, elle paraît se courber légèrement, de façon à se rapprocher de l'orientation du système d’Arendal : on peut donc être tenté d'envisager la disposition moyenne de cette bande, qui est intermédiaire entre les deux systèmes de Longmynd et d’Arendal, comme le résultat de leur action successive. Néanmoins le système de Drontheim ressort assez nettement de mes observations stratigraphiques, et je regarde son existence comme d’autant plus probable que le système d’Arendal paraît être antérieur à la formation calcaréo-schisteuse et poudingifère de Drontheim. Dans le tableau n° 9, nous trouvons, d’ailleurs, à peu près les mêmes rassem- blements de directions que dans le tableau précédent, ce qui doit être, car la bande poudingifère est interposée dans les schistes feuilletés à stratification con- cordante. Le groupe le plus important correspond au N. 20° E,., et paraît se rat- tacher au système des Kiül. N° 10. Terrain gneissique du Dovrefeid et du Romsdal. [Pableanx stratigraphiques, fan 11. Terrain semi-cristallin du Dovrefeld oriental. Sur le massif de montagnes qui constitue le Dovrefield , nous avons vu précé- demment qu'il y a deux sortes de roches, que la protubérance centrale et les hauteurs situées à l'O. sont formées de gneiss et autres schistes cristallins, tandis que, sur le pourtour du Dovrefield, du côté oriental, affleurent des schistes feuilletés, chloriteux et micacés , tendant à passer au schiste argileux. J'ai voulu constater si ces deux formations n’auraient pas subi des soulèvements différents ; dans ce but j'ai dressé deux tableaux, n° 10 et 14 : l'un comprend les directions de roches gneissiques mesurées dans le Dovrefield et le Romsdal; l’autre pré- sente les observations stratigraphiques beaucoup moins nombreuses, concernant la zone de schistes feuilletés qui forme l’est du Dovrefield. Les principaux groupes de directions sont communs à ces deux tableaux ; en effet, les schistes chloriteux offrent la même courbure que le terrain gneissique situé à l’ouest, et ils s’appuient dessus à stratification concordante. | 136 CONSTITUTION GÉOLOGIQUE (Ne4, p. 156.) TABLEAUX N° 10 ET 414. Ÿ LONGITUDES MOYENNES. LONGITUDES MOYENNES. LONGITUDES MOYENNES.! ORIENTA- ENTA- ORIENTA- TIONS ec net | S = TE —., A) TIONS. | TT 4 TT ADI TION EE = l 6° 1/2 7° 1/2 (Ne 10.) | (N° 44.) al . (OL . [3 . de Drontheim, d'Aren- dal, E.41N land, O.21 N. S.de Jemt- DDR CE D [SA FRERE 2 2 7 S. du Do- vrefeld 21 N. E, Hh ppm 0000 9 FORD OS RE NC 00 0. 0. 102 lo. 0. 0. lo. 0. 0. N. N. N. N. O000222 222727: = [Se] Em S, des Kiol. N.21E. SES Chacun des deux tableaux, n° 10 et n° 11, offre le principal groupe de direc- tions en regard de la ligne E. 20° N. (1); il faut remarquer ici que la côte du Romsdal, et celle située au midi de Drontheim, sont découpées par des fiords pro- fonds, qui ne sont autre chose que de grandes crevasses bordées d’escarpements gigantesques : or la direction d'une partie de ces crevasses est voisine de l'E. 20° N. Il paraît donc y avoir eu un système de redressements et de fractures orienté de cette manière, suivant une direction intermédiaire entre celle du système du Finistère (ici E. 11°1 N.)et celle du système du Westmoreland (ici E. 30e 1 N.); d'autant plus que, dans la plupart des tableaux stratigraphiques relatifs à la Nor- wége, on distingue un groupe de directions correspondant à ce système, que j'appellerai système du Dovrefield et du Romsdal. No:s verrons plus loin que le . terrain silurien de Christiania offre d'assez fréquentes directions, qui semble- raient coïncider avec celles-ci; mais elles ne sont probablement que la repro- duction d’inflexions antérieures. Dans le tableau n° 10, le groupe de directions qui est le plus important, après celui E. 20° N., est dirigé entre le N. E. et l'E. 40° N.; il paraît correspondreau système d’Arendal ; d’autres rassemblements de directions plus ou moins consi- dérables autour du N.30°E., du N.172E., du N. N.0., del'O. 30° N. etde l'E. O., paraissent se rattacher aux systèmes de Longmynd, des Kiôl, de Tornea, du Jemtland et de Tunaberg. (1) Je puis signaler encore ici un accord entre les observations stratigraphiques de M.'Keïlhau et les miennes ; il cite, en effet (Gæa norwegica, p. 373), la direction Hora 4 ?, comme la plus marquée dans la région de gneiss qui s'étend du fiord de Drontheim à la ville de Molde, dans le Romsdal. (.1,p.157) DE LA NORWÉGE , DE LA SUÉDE ET DE LA FINLANDE. 137 Sur le tableau n°11, on voit entre le N. E. et le N. 40° E. un groupe de direc- tions qui probablement dérive du système de Drontheim, plutôt que de celui d’Arendal ; un autre rassemblement, dirigé au N. 20° E., paraît se rattacher au système des Kiôl. LEO N° 12 : Région gneissique du Langfeld. Anne RpnIqUEs FH AE Région gneissique du Justedal. LONGITUDES MOYENNES. ORENTA ORIENTA- Re | ORIENTAE TIONS. TE E TIONS. T$ 4p2 = TIONS. (No 12.) ù DOQUN EUGENE NO a É S des Kiol? > NI © © vrefield E. 22 N. F Es = Em E HHH MH 00009 QD © 0. 0. 0. 0. 0. 0. 0. 0. 0. N. N. N. N. Lors de mon dernier voyage en Norwêége, je me suis rendu de la vallée du Romsdal dans celle du Justedal, en explorant les montagnes désignées sous le nom de Langfield, et en visitant les vallées de: Raudal, de Brœkke, et celle de l'Otta- Elv. Les directions que j'ai recueillies, en explorant ces montagnes formées prin- cipalement de gneiss, ont été réunies dans le tableau n°12, qui porte pour titre région du Langfield. Xci les directions comprises entre l'O. et Je N. O. sont un peu plus abondantes que celles situées dans les autres parties de la rose, contrai- rement à ce que nous avons vu dans la plupart des tableaux précédents. Le groupe le plus considérable est placé à peu près sur la ligne E. ©. (1) , et correspond au système de Tunaberg. La vallée de l'Otta-Elv, et plusieurs autres vallées de ce pays, suivent aussi une direction moyenne voisine de l'E. 0. Le tableau n°12 nous montre encore, autour de la ligne O. 15° N., des directions assez nombreuses, qui appartiennent vraisemblablement au système des Ballons. Les deux autres principaux groupes de directions se rapportent au N. 17° E. et à l'E, h2° N. : ils correspondent aux systèmes des Kiôl et d'Arendal. Les observations que j’ai encore à exposer ne vont pas donner lieu à la création de nouveaux systèmes ; néanmoins j'espère qu'elles offriront quelque intérêt, en fournissant la vérification des systèmes déjà établis. Au sud des montagnes du Langfield se trouvent celles du Justedal , qui constituent l'une des plus hautes (4) M. Keïlhau a remarqué, ainsi que moi, la prédominance de la direction E. O. dans la région qui s'étend du Nordford à la vallée d’Otta (Gæa Norwegica, p. 373). SOG. GÉOL. —: 2° SÉRIE. T. VIT. — Mém. n° 1, 48 138 CONSTITUTION GÉOLOGIQUE (N. 1, p. 158.) plates-formes de la Norwége , et qui offrent les plus vastes champs de neige de cette contrée, et même de tout le continent européen. J'ai séjourné pendant quel- que temps dans la vallée du Justedal pour en étudier les glaciers, que j'ai décrits dans mon Mémoire sur les glaciers du nord et du centre de l'Europe 4); en même temps j'ai recueilli beaucoup d'observations stratigraphiques relatives aux roches de gneiss, qui constituent le fond de la vallée du Justedal et les montagnes environnantes ; ces observations sont présentées par le tableau n° 13, qui em- brasse toute la région du Justedal, depuis les montagnes du Langfield jusqu'au fiord de Lyster. Ici, de même que dans le Langficld, les directions voisines de l'O., et appar- tenant au système de Tunaberg, sont de beaucoup les plus nombreuses: c’est d'autant plus remarquable que la direction générale de la vallée, qui est le ré- sultat de fractures, se rapproche d'être perpendiculaire à la ligne E. O. Aussi je considère les terrains anciens de la Scandinavie comme ayant été soulevés sui- vant la ligne E. 0. , à une époque très ancienne, antérieure au système des Pays- Bas, et même probablement au système des Kiôl. Comme le système de Tunaberg est extrêmement développé dans les montagnes du Justedal, surtout dans la partie septentrionale , ainsi que dans les montagnes du Langfield , je proposerai d'en compléter la dénomination, en l'appelant mine de Tunaberg , du Justedal et du Langfield. Les directions les plus nombreuses, après celles de la ligne E. O., se trouvent dans le voisinage du N. E. et de l'E. N. E,; par suite, elles appartiennent aux systèmes d’Arendal et du Dovrefield. MONTAGNES ADJACENTES AU SOGNEFIORD. L : N° 14 : Terrain gneissique Tableaux stratigraphiques. VAGUE ANRT Ou 0 BrAPAIG N° 45 : Terrain semi-cristallin, LONGITUDES MOYENNES. LONGITUDES MOYENNES LONGITUDES MOYERNES. ORIENTA- | = —-. || ORIENTA- a I ORIENTT AE “€ Fr y se Ca nt = S a. tn TIONS. 30 30 1/2 TIONS. 3° 5° ip2 TIONS. Bo ge 1 “à (N° 15.) (Ne 15.) \ i (N° 45.) | (N° 14.) (N° 45.) et 15 [°» . du Dron- theim, N. 29 E. S d’Arendal, Drontlieim et Long- mynd HHE 9000 © OO D O I O NI Or © BE EE LE ND À DSoR EE RD 0 S + . du Do- E. 22 N. vrefeld, ts $S des Kiol. N.20E S WOSNRFORBNONDE 0. O. O. O. 1 0. | o. 0. 0. 0 \. D. N. N. => AUSGE (1) Anies des mines, k° série, t. XII, P. 3: (1,019) DE LA NORWÉGE, DE LA SUEDE ET DE LA FINLANDE. 139 Après avoir exploré le Justedal , j'ai parcouru dans un bateau de pêcheur les principales branches de cette immense crevasse qui porte le nom de Sognefiord , et qui est si remarquable par son énorme profondeur et sa vaste étendue en lon- gueur. En beaucoup de points, j'ai gravi les ravins et vallons conduisant du bord de Ja mer sur les plateaux adjacents , qui sont en partie couverts de neige et de glace. Les tableaux n° 44 et 15 présentent l’ensemble des directions que j'ai observées dans les régions montagneuses qui environnent le Sognefiord et ses diverses branches, en y comprenant l'Iôtunfield, ou le groupe des pics les plus élevés de la Norwége, et le plateau du Fillefield ; car ces deux massifs de mon- tagnes se trouvent immédiatement à l'est du Sogneford. Dans Les tableaux strati- graphiques relatifs à ces contrées, les directions les plus fréquentes ne coïncident plus, comme dans les deux précédents, avec la ligne E. O., quoique telle soit à peu près la direction moyenne du Sognefiord ; mais cette déchirure est proba- blement un effet du système des Pays-Bas, qui est parallèle au système de Tuna- berg et beaucoup plus récent : il s'est produit à une époque où les couches de gneiss étaient déjà presque partout redressées. Les deux tableaux 14 et 15 nous montrent les directions rassemblées principalement entre le N. 10°E, et l'E. 20° N. Les plus nombreuses sont voisines du N. 40° E., et paraissent appartenir, en grande partie, au système de Drontheim ; cependant il faut probablement rapporter au système d'Arendal une portion an moins de celles qui se trouvent dans le ta- bleau 44 : il y en a sans doute aussi qui dépendent du système de Longmynd. On distingue, en outre, dans ces tableaux deux groupes moins considérables, qui se rattachent aux systèmes des Kiôl et du Dovrefield. Le n° 44 offre encore, suivant le N. N. O., un groupe qui représente le système de Tornea ; mais les directions que l’on pourrait y rapporter sont comparativement peu nombreuses dans le n° 15. Tableau stratigraphique n° 16. — Région semi-cristalline du Guldbrandsdal. Après avoir exploré le Fillefield et le Valders, qui est arrosé par le Beina-Elv, je suis remonté vers Je N. E. pour explorer les montagnes situées à l'est de l’Iü- tunfield, et au pied desquelles se trouvent les lacs Vinstera et Heimdal ; ensuite j'ai passé dans le Sjôadal, d’où j'ai gagné les rives du lac Otta, et je suis revenu au pied du Dovre, à l'extrémité orientale du lac Lessôe; ensuite j'ai descendu la grande vallée du Guldbrandsdal jusqu'au lac Miôsen. Comme les terrains qui constitueni ce vaste espace me paraissent appartenir à la même formation quartzo-schisteuse et semi-cristalline, comme leurs caractères stratigraphiques paraissent être semblables , j’ai réuni dans le même tableau (n° 16) toutes les directions que j'ai observées dans la grande vallée du Guldbrandsdal et dans ses diverses branches; seulement je n’ai pas inscrit celles que j'ai me- surées à l'extrémité sud-est du Guldbrandsdal, entre Lüsness et le lac Miôsen, parce que les roches qui afileurent en cetie partie-là me paraissent appartenir au terrain silurien. 110 CONSTITUTION GÉOLOGIQUE CN: 4, p. 440.) TARLEAU N° 16. — LONGITUDE MOYENNE = 7° <. [Su e Z = © ©o = 27 S du Morbihan, de Westerwick et du Jemtland 222200090009 9 N. N. N. N. N N. N. 0. 0. 0. 0. Le tableau n° 16 diffère des précédents, en ce que les directions les plus fré- quentes, au lieu d’être contenues entre le N.et VE. N.E., se trouvent entre l'O. etle N. N. O.; on peut remarquer d'ailleurs que , dans cette contrée, beaucoup de vallées occupées par des rivières et des lacs offrent dés orientations comprises dans le même espace angulaire. Les directions du tableau n° 16 sont rassemblées principalement dans l’inter- valle qui sépare le N. 35° 0. de l'O. 30e N.; elles se rattachent, sans doute, aux systèmes du Morbihan, de Westerwick et du Jemtland; mais il est impossible de séparer celles qui appartiennent spécialement à chacun d'eux. Il y a aussi, autour de la ligne E. O., un groupe assez important, qui appartient au système de Tuna- berg ou au système des Pays-Bas ; on voit encore, sur la ligne O. 15° N., des direc- tions assez nombreuses, qui dépendent peut-être du système des Ballons. Deux groupes moins importants se distinguent dans le quart de cercle nord-est : lun, disposé autour du N.E., correspond au système de Drontheim ou à celui d’Arendal ; l'autre, dirigé suivant l'E. 20° N., dérive probablement du système du Dovrefield. Jusqu'à présent, je n’ai point eu occasion de mentionner le système du Finistère en discutant les redressements qu'ont éprouvées les roches anciennes. Si, par le midi de la Scandinavie, on mène un arc de grand cercle parallèle à la chaîne les montagnes d’Arrez, il coupera les méridiens de la Norwége sous des angles de 77° à 82, et ceux de la Suède, sous des angles de 89° à 8€c à l'E. Cette ligne sera intermédiaire entre celles qui représentent le système du Dovre et celui de Tunaberg, faisant un angle d'environ 9° avec la première et de 44° £ avec la seconde. Or, dans les tableaux qui représentent mes observations stratigra- phiques, l’espace qui sépare les deux systèmes de Tunaberg et du Dovre n'est point dépourvu de directions, mais elles y sont en moins grand nombre que sur les lignes qui correspondent à ces systèmes. Ainsi on ne doit pas conclure, ce me semble, que le système du Finistère n’a exercé aucune action en Scandinavie, mais qu'il y est moins développé que les systèmes qui s’en rapprochent le plus @tp.14) DE LA NORWÉGE, DE LA SUÈDE ET DE LA FINLANDE. A1 par leurs directions, et qui ont laissé des traces plus profondes. Si le système du Finistère ne s'était manifesté nulle part d'une manière plus évidente que dans le nord de l’Europe, on n'aurait probablement pas été conduit à l’envisager comme un système indépendant. Néanmoins, outre les directions des roches schisteuses qui peuvent en dépendre, il y a aussi des accidents orographiques qui sont dis- posés dans ur sens parallèle. Déjà M. Élie de Beaumont a cité, d'après l'examen de la carte géologique du midi de la Suède, publiée par M. Hisinger, des disloca- tions et des lignes stratigraphiques dirigées à l'E. quelques degrés N. dans la région qui s'étend de Gôteborg à Upsal. Sur la côte de Norwége, au sud de Dron- theim, parmi les fiords profonds qui découpent cette partie du littoral, outre ceux qui coincident en direction avec les systèmes d’Arendal, du Dovre et de Tunaberg, il en est plusieurs qui sont dirigés entre l'E. 10° et l'E. 15° N., et qui, par suite, peuvent être rapportés au système du Finistère. / Indépendamment des observations stratigraphiques décrites précédemment, j'ai encore recueilli un certain nombre de directions dans les parties de la Scan- dinavie qui ne sont pas comprises dans les tableaux n° À à n°16; mais ces direc- lions sont trop éparses, et celles relatives à des régions circonscrites par leurs caractères physiques ne sont pas en assez grand nombre pour qu'il y ait lieu de les disposer en tableaux. Néanmoins je ferai une revue rapide des principales régions dont il n’a pas encore été question, et que j'ai eu l'occasion de visiter, ou qui ont été explorées par d’autres géologues; j’indiquerai alors les systèmes de soulèvement qui s'y manifestent, soit par la direction des roches schisteuses ou stratifiées, soit par l'orientation des principaux accidents de la surface du sol. Détermination précise des directions des nouveaux systèmes. — Mais aupara- vant je vais tâcher de préciser, autant que possible, les directions de mes nouveaux systèmes, d’après l’ensemble des observations précédentes ; pour cela, je suivrai la marche qui a été tracée par M. Élie de Beaumont, dans son remarquable Mémoire sur les anciens systèmes de montagnes de l’Europe. J’ai dû transporter en un point central les groupes de directions qui se distinguentle plus nettement dans les tableaux ci-dessus, en ayant égard aux différences de longitude des contrées où ont été faites Les observations stratigraphiques. Le centre de réduc- tion qui m'a paru le plus convenable est le point de la Scandinavie situé sur la zone limitrophe de la Suède et de laNorwége, sous le 61° degré de latitude et le 10° + degré de longitude à l’est de Paris. Comme la plupart des régions aux- quelles se rapportent mes observations stratigraphiques ne sont pas très éloi- gnées de ce point central, il ne m'a point paru nécessaire de tenir compte des excès sphériques; l’inexactitude qui en résultera est insignifiante, et mérite d’au- tant moins d’être prise en considération qu'elle est de beaucoup surpassée par les erreurs inévitables dans la détermination des axes de chaque groupe de direc- tions. Le tableau ci-joint a été calculé d'une manière expéditive, en admettant que les axes de grands cercles qui représentent les divers systèmes de dislocation, 142 CONSTITUTION GÉOLOGIQUE CN 4, p. 442.) ou les parallèles à ces axes, coupent les méridiens séparés les uns des autres par 4° de longitude, sous des angles qui varient régulièrement de 0,88. Le transfert des directions a pu ainsi être effectué rapidement, el sans donner lieu à des erreurs susceptibles d'affecter notablement les résultats définitifs. D'ailleurs, dans ce transport, au lieu d'exprimer en minutes les fractions de degré, il m'a paru plus commode de les exprimer en décimales. Les résultats du tableau de réduction ci-contre représentent les directions moyennes des nouveaux systèmes de soulèvement, sous le 40° + degré de langi- tude, ou à la latitude moyenne de 61°. Ces directions sont : Système de Tunaberg = 0. 3°,7 N.; système du Jemtiand — O. 310,2 N. ; système de Westerwick — O. 420 N. ; système de Tornea == N. 20°,2 O. ; système méridien == N.0°,2E système des Kiôl = N. 24°,2 E.; système de Drontheim == N. 42°,9 E.; système d'Arendal = E. 3% N. ; système de Dovrefield = E. 18,3 N. Pour faciliter les vérifications et comparaisons stratigraphiques ou orogra- phiques, j'ai jugé à propos de placer ici un second tableau présentant les direc- tions moyennes qu’offrent en Scandinavie les nouveaux systèmes que je viens d'établir, et les systèmes fondés antérieurement par M. Élie de Beaumont, sous les méridiens de 7°, 14° et 220, Comme les directions ne sont qu'approchées, je les ai exprimées seulement en degrés et demi-degrés ; d’ailleurs, j'y ai joint l’indica- tion des systèmes de soulèvement qui sont postérieurs à l’époque silurienne et antérieurs à la période jurassique. Directions approximatives des systèmes de soulèvement qui ont luissé des traces en Scandinavie et en Finlande , sous les T°, 14° et 22° degrés de longitude à l'est du méridien de Paris. RE EURE RTS TD EUR PTE NOR ENT TT DE RER PP CRE ET EP MP CE MST I TTET DÉSIGNATION DES SYSTÈMES. g° 4° 290 1| S. de Tunaberg, du me ve et du Justedal . . ... OMAN: O. 6:N. O. A35N [| S. des Pays-Bas. PSE OP RS À © LE INT OPPOUN: O0. 12 N S. longitudinal de la Bretagne. EPA CS ce O. 10 N. O. 16 N. 0. 25 N, 8: ‘des Ballons}. 24 mu tt dm straun 2 du 10 MIN MO OS NADINE Ni \| S. du Jemtland et de Ja QU suédoise : : | . “ O. 28 N. 0. 54 N. 0. 41 N. | S. de Westerwick . Mel ae let TA IRON 9 PIN N. O. N. 38 ©. AS. du Thuringerwald, SRE EP LES D : ee è O. 38 N. OBUILUN N. 39 O. SR NOU MORE AMEN A AT SRE RCE ; NA A0: N. 35 O. N. 28 O. ‘| S. de Tornca et du Ladoga oriental (ets. de Brévig). N. 23 O. N. 47 O. N. 40 O, Sa deTaNenTEe. ee EN AS TAMENONNE NE N. 42 O. NA GAD NALCE HS du Forez: à. . SO Ur TN ee cree 20e N. 40 O. Nr 110, NERSUE S. méridien de la Scandinavie. NT DT LE ae N°30: Nour: N. 10 E. S. du nord de l'Angleterre . . . . .. PME TS RE ME ue INT 0 En N. AT E. N. 148 E. S deBillingen "#7 ‘ etaliote tel TR on N. 12 E. N.-18 E. N°95 UE: Se JAI IN ST de ee CNE NET ET RPRS ET ANSE SRINS TO UE N ' 274F. N. 34 E. Se IduiRhinne er GILET nr UT 4 N. 22 E. N. 28 E. N. 35 EF. S:sde Loneynde EE MAR US N. 92 E. N- 88 E. N. E. MS. de DrOHRETEn LS FM NA EN OR M ETS N. 40 E. E. 44 N. E. 37 N. S. d’Arcndal . PRE EU CU ON PR EMEA LR: Ce E. 42 N. E.:36 N. E. 29 N. S. du W estmoreland AAA CE PTE REe Et Le ; E. 30 EC S22A125q0 Es sopAt2SqO pere saaaasqoh CE ral , | ‘5278500 rodeuen | 77418540 : spas À eg | 52712540 Fo 8 a 2 È I SENEE SRE 2 1 = 2 k] "SANT ). s S4A 15 4 [2 me NS À 7 n° me ‘ — 23 EEE È — î . es = SUOI)29I( SUOTIAl SUON99IT SuON9aut | SUO1J2911 É SUONI9IIG SUON2911Œ DE 86 AE 91? quan © 4 Æ 5 a = = == so |SEElS 2 siNOZ saa SNON |E ‘KISHINOUG 2 *S *TOIX SIG *S *NAIGIUAN *S *VaNUOL aQ°'S 'HOIMUAISIM AG ‘S *"aNVIInar nas | "ouaavans aa 'S| S + = Re = E “ Ê re - et = = = RIRE DAT D DR re ET ne mate 144 CONSTITUTION GÉOLOGIQUE (N: 1, p. 144.) Recherches du développement relatif des divers systèmes de soulèvement. —Al m'a paru intéressant de rechercher quel est le développement respectif des di- vers systèmes de dislocations qui ont marqué leur empreinte sur le sol du nord de l'Europe ; dans ce but j'ai tâché de composer, par la combinaison de mes obser- vations de directions, un tableau qui en offrît le résumé. Les mesures stratigra- pliiques auxquelles se rapportent les tableaux n° 1 à 16 embrassent un espace immense, qui comprend la Norwége, la Suède et la Finlande ; les méridiens extrêmes sont coupés par un même système sous des angles qui diffèrent de plus de 145 degrés, C'est-à-dire d’un intervalle angulaire supérieur à celui qui sépare les directions de deux systèmes adjacents. On arriverait donc à des résul- tats très défectueux, si l'on ajoutait ensemble les nombres de directions contenus dans les 17 tableaux, comme si elles se rapportaient à un espace d'une petite étendue. Mais on peut former un tableau général, en rapportant les groupes de directions correspondant aux divisions successives de chaque tableau à un même méridien central, à celui que nous avons déjà choisi précédemment comme mé- ridien de réduction, et qui correspond au 10° : degré de longitude à l’est du méridien de Paris. Pour opérer cette transformation , j'ai d’abord ajouté aux divisions angulaires de chaque tableau le coefficient de réduction relatif à la zone correspondante, coefficient qui est tantôt positif, tantôt négatif : alors cés divisions ne correspon- dent plus à des multiples de 5; mais j'y ai substitué des divisions multiples de 5, avec des divisions intercalaires, représentant des multiples de 5 augmentés de 2 4, Comme la moitié de 2: est À 7, j'ai rapporté à chacune des divisions de ce tableau de réduction tout ce qui ne s’en écarte pas de plus de 1°? : c’est la limite des erreurs que l’on peut commettre; mais comme les erreurs auront lieu, tantôt dans un sens, tantôt dans l’autre , il doit s'établir des compensations (1). Ensuite, pour ramener le tableau de réduction à ne plus contenir que des divisions multiples de 5, j'ai partagé en deux moitiés les nombres de directions tombant sur les divi- sions intermédiaires entre les multiples de 5, et j'ai ajouté chacune de ces moitiés au nombre situé au-dessus et au-dessous ; j'ai ainsi formé le tableau ci-contre, qui offre un résumé approximatif de l'ensemble de mes observations stratigra- phiques relatives aux formations non fossilifères de la Scandinavie. (1) J'aurais pu obtenir un résultat beaucoup plus précis, mais il aurait fallu exécuter un nombre fort considérable de multiplications; d’ailleurs une précision rigoureuse était évidemment superflue pour le but que je me suis proposé, et qui consistait simplement à donner une idée générale du développement relatif des divers systèmes de montagnes en Scandinavie. 145 DE LA NORWEGE, DE LA SUEDE ET DE LA FINLANDE. (N. 4, p. 445.) ATARI O LINE s:T RAT RO : soxotunu say jueJrod SUTIIUISTI9-TLU9S SUICI19 }52 (7 XAVITAVL £T « 67 97196168 |« € |« Uté Gr|GG|NT|« — | — | — S |7T|ST1Gr — : sotoumu sa queliod ‘sstou3 2p ue) 0 “apnyubuog ap oubap tv 04 n0 sonbiydoubuous sounsau sop uouonpat 9p pouauaD 102100] XAV41aVI salam AOQOO0O0©OO©O0O0O0O0O000000020 CAAAA A g À Q © 9 © 9 n CA A CAT A CROSS = à AA A Z. CARLA A CA CA A 22 O0O000000000000000022224228 CA A F2 LA [eo | AGAIN RSONO ROLL CAM AALALAAZE Qué ‘SAMIV'ININY SNOISIAIG LES AK TT « |g « C.188|« ST £ |$29 617 |G OT 07 « T : solotunn say jueJiod tssrauê ap üI119] nq XAVATAVL S RS Re. ‘es 8 |6 |TTIST|9T| :S D — :so1pumu sof que)10d SUT[RISH-TU8S SUIVI S2Q XAVAIAaVL 19 gr em. n T. VI. — Mé SÉRIE. GÉOL. — 2° Soc. 146 CONSTITUTION GÉOLOGIQUE + N. 1, p. 146.) Courbes du développement relatif des divers systèmes.— Ces tableaux sont re- présentés graphiquement par les courbes ci-jointes, que j'ai construitesien consi- TABLEAUX RÉSUMÉS. Bope boss N. œS = FM Ste © ME S 000000 25 ao 2 € gl = DE terrains semi- Des NOMBRE DIRECTIONS. COURBES CORRESPONDANTES." RE tre NE Aux lu terrains! terrain semi-| de Du terrain SYSTÈMES MIS EN ÉVIDENCE. cristallins. À de gueiss, | cristall.| gneiss. 58 | 128 \N°2./N°1. 59 161 ---— S. de Tunaberg. 13 ’ k O. 30,7 N. 39 80 40 83 37 77 39 78 42 82 50 71 40 87 A8 72 Lil 67 99 81 36 105 47 155 F ns | 152 un: SX 2002 0. TU 411 52 198 51 148 | 122 PT al 53 105 64 139 70 201 87 | 208 CN À : Li naiss 9: ESRI 63 168 x N.240,2E. 71 | 171 87 180 102 212 S. de Drontheim. 86 = cdi 71 29/ E.59"N. 51 166 52 | 142 70 Eh HET 68 | 123 |. S. du Dovrefield. = PL E. 18,5 N. u7 85 ||] 1985 |A665 (.1,p. 141) DE LA NORWÉGE, DE LA SUÈDE ET DE LA FINLANDE. 147 dérant les divisions angulaires du demi-cercle comme les abscisses, et les nombres de directions comme les ordonnées. Chaque intervalle angulaire de 5 degrés est représenté par une longueur de 5 millimètres, et à chaque dizaine de directions correspond une hauteur de ? de millimètre. Les deux courbes relatives au gneiss et aux terrains semi-cristallins ne pré- sentent pas tout à fait la même forme ; quelques-uns de leurs points d'inflexion se correspondent, mais pas tous. On peut observer que les sommets de la seconde courbe sont beaucoup moins saillants que ceux de la première : parmi ceux-ci, le plus proéminent est celui qui correspond à VE. 30° N. ou au système d’Aren- dal, et qui a pour ordonnée 254 ; la courbe n° 1, relative au terrain de gneiss, nous offre quatre autres sommets, qui mettent en évidence : Le système des Kiôl, ayant pour ordonnée. . . . 204 Le système de Tunaberg: . % ..s. 1. sr + 1 161 DOPAFS PUS HÉLROENER -#4- 0 eo = se +1 en 109 Le système méridien de Ja Scandinavie. . . . 148, Les autres systèmes ne se dessinent pas d’une manière nette sur la courbe ah à La courbe n° 2 n'offre que trois sommets bien caractérisés, correspondant aux systèmes suivants : 4° Le système de Drontheim, ayant pour ordonnée. 102 DeMlersystèmerdesRiolsesrt.ipuuties forttion jet 87 32, Le système du Doyrefeld. ..,.; . 1... …. 70 On pourrait sur la courbe n° 2, de même que sur celle n° 1, reconnaître les traces d’autres systèmes; mais ils sont faiblement indiqués, car les sommets qui leur correspondent ne s'élèvent pas à une grande hauteur au-dessus de la ligne horizontale qui à pour ordonnée 36, et qui forme la limite inférieure de la courbe n° 2. Parmi les systèmes de dislocations que font ressortir d’une manière évidente les deux courbes ci-dessus, un seul est commun à toutes deux, savoir le système des Kiôl ; cependant le système de Drontheim et celui du Dovrefield ont certainement marqué leur empreinte sur le terrain de gneiss, mais les in- flexions qu'ils ont produites sont, comme on le voit, beaucoup moins nombreuses que celles provenant d’autres systèmes. Influence des divers systèmes dans la formation des rides du sol scandinave. — La courbe n° 1 montre combien le système d’Arendal l'emporte, en Scandi- navie, sur tous les autres par la multiplicité des directions qu'il a imprimées aux roches schisteuses ; on doit se demander s’il a joué un rôle aussi important dans le soulèvement des montagnes les plus élevées. Sur tous les massifs un peu considérables j'ai reconnu les traces de plusieurs systèmes, aussi me paraît-il 148 CONSTITUTION GÉOLOGIQUE (NA, p. 148.) évident qu'ils ont été soulevés à plusieurs reprises; d’ailleurs, comme beaucoup de ces massifs n'offrent pas d’allongement dans un sens bien déterminé, il est difficile de constater orographiquement quel est le système qui a le plus forte- ment contribué à leur élévation. Dans la région qui renferme les pics gigantes- ques de l’Iôtunfield, le système d’Arendal est passablement développé, de même que le système des Kiôl, et il paraît en être ainsi du système du Dovrefield, dont l'empreinte se manifeste par l'allongement de la bande syénitique qui constitue l'Iütunfield, et qui est accompagnée de diverses sortes de schistes feuilletés et cristallins. Nous avons vu aussi que le système du Dovrefield a dù jouer un rôle important dans le soulèvement du plateau élevé d’où il tire son nom. De même le système de Tunaberg a dû contribuer puissamment à l'élévation des plateaux du Justedal et du Langfield, plateaux dans lesquels sa direction prédomine. Le système de Tornea, dont le nom est emprunté à la région qui borne la partie septentrionale du golfe de Botnie, a laissé des traces sur les montagnes adjacentes au Sognefiord, ainsi que sur celles situées au sud et à l'est de Dron- theim; d’ailleurs, les roches schisteuses de ces régions ont pu aussi être influen- cées par le système de Brevig , qui coïncide presque en direction avec celui de Tornea. Le système méridien de la Scandinavie est représenté par un nombre de directions presque aussi considérable que celui de Tornea. Il est beaucoup de régions, telles que celles du Sognetiord, du Guldbrandsdal, du Dovrefield, etc., où J'on trouve bien marqués des systèmes de directions fort différents et souvent rec- tangulaires. Néanmoins, quand un systèmea produitdes effets très prononcés dans une région, on y trouve habituellement beaucoup de directions qui semblent se rapporter à un ou plusieurs des systèmes qui lui sont adjacents par leur orienta- tion. Ainsi, dans les zones où l’empreinte du système des kiôl est très marquée, on observe aussi des directions propres au système de Drontheim et à celui d'Aren- dal. Évidemment ce fait tient, en partie, à ce que les effets produits par la cause prédominante embrassent une étendue angulaire un peu considérable; mais il semble aussi que les couches qui ont été relevées dans un certain sens peuvent être facilement infléchies suivant des directions rapprochées. Les systèmes des ballons et du Jemtland, dont la date est postérieure à l'époque silurienne, sont peu développés dans les zones de la Scandinavie auxquelles se rapportent les tableaux ci-dessus ; on conçoit que les schistes anciens, qui avaient été déjà redressés dans des directions diverses, pouvaient difficilement se plier aux inflexions que tendaient à leur faire subir des forces développées plus tard. D'ailleurs, vu l'inclinaison moins considérable des couches paléozoïques, les systèmes post-siluriens paraissent avoir agi avec moins de puissance pour redres- ser les terrains stratifiés ou schisteux. Parmi les systèmes antésiluriens déjà établis par M. Élie de Beaumont, on voit que le système du Finistère et celui du Morbihan ont produit en Scandi- navie les effets les moins marqués ; du moins, les directions qui s’y rapportent N.1,p.149.) DE LA NORWÉGE, DE LA SUEDE ET DE LA FINLANDE. 149 sont les moins nombreuses dans les zones où j'ai recueilli les observations résu- mées dans mes tableaux stratigraphiques. Traces} de divers systèmes dans les régions de la Norwége non comprises dans les tableaux précédents. Les tableaux stratigraphiques n° 1 à n° 16 ne s'étendent pas au delà du 65° degré de latitude, excepté le n° 5, qui embrasse la Finlande et la Laponie méridionale jusqu'au 68° degré. Les directions que j'ai mesurées dans la Norwége septentrionale ne sont point assez nombreuses pour qu'il y ait utilité à les réunir en tableaux. De son côté, M. Keilhau a relaté (Gea Norwegica) un nombre assez grand d'observations stratigraphiques ; mais l’espace où illes a recueillies esttrès étendu dans le sens des parallèles, et comprend 19 degrés de longitude; aussi serait-il difficile de les grouper méthodiquement, de manière à en faire ressortir des conséquences précises. Je me bornerai donc à indiquer les divers groupes de directions que M. Keilhau a signalés dans son texte, ou sur sa carte, et celles que j'ai observées dans le Finmark occidental. Je ferai connaître à mesure les systèmes de dislocations dont elles paraissent dériver. Finmark. — Je vais commencer par la portion orientale du Finmark; les directions que je vais citer dans cette région sont toutes extraites du mémoire de M. Keiïlhau, ou mesurées sur la carte qui l'accompagne. Le golfe de Varanger, qui est situé à l’extrémité nord-est de la Norwége, sous 28° de longitude orientale (1), est dirigé moyennement à l'O. 20° N., de même que les couches de gneiss pri- mitif qui affleurent sur la rive méridionale de ce fiord, près de Buggôe et de Lôüsklubben. Cette orientation paraît se rattacher au système de Tunaberg (ici 0. 18° N.) ou au système des Pays-Bas (0. 16° N.). La direction moyenne de l'île Vardôe, de la côte adjacente, ainsi que des couches de schiste argileux, de grès et de conglomérat qui composent cette partie du littoral, est N. 10° ©. ; elle ne coïncide exactement avec aucun système de dislocations; ceux dont l'orientation s’en rapproche le plus sont le système de Tornea, ou bien le système de Brévig, qui est postdévonien, et dirigé de même : une ligne parallèle à ces deux systèmes couperait le méridien de l’île Vardôe, sous un angle d'environ 5° à l’ouest. Les couches de grès et de schiste de la côte de Havninberg ont une direction E. 30eet quelques degrés N., qui se rapproche beaucoup d'être parallèle au système de Drontheim (ici E. 33° N.). Les couches de quartz grenu de Ja côte de Makur (long. 28°) courent du N. O.ausS. E., parallèlement au système du Jem- tland. La direction moyenne des couches de schiste argileux et de quartz schis- teux de Kiôlnæs et Naalnæs, sous 27° de longitude —E. 26° N.; elle est parallèle, à L° près, au système d'Arendal (ici E. 25° N.). La direction moyenne du Tana- (1) Toutes ces longitudes sont comptées à l'E, du méridien de Paris. 150 CONSTITUTION GÉOLOGIQUE (N: 4, p. 150.) fiord, et des couches de quartzite et de schiste qui affleurent sur ses deux rives, près de son embouchure, sous 26° 1/2 de longitude =N. 37° 1/2 E. ; elle coïncide à peu près avec celle du système du Rhin ou des Kiôl (N. 37° à36° E.). Snivant M. Keilhau (Gea , p. 267), les couches de grès et de schiste qui forment le fond du Tanaford plongent fréquemment à hora 10, ce qui donne pour leur direction hora {ou E. 30° N., c'est-à-dire une ligne intermédiaire entre le système d’Aren- dal (ici E. 26° N.)et le système de Drontheim (E. 35° N.). Les couches de quartzite et de schiste micacé qui forment la rive orientale du Laxefiord courent au N. 300 E., suivant une ligne peu écartée du système de Billingen (ici N. 27°1/2 E.). La rive orientale du golfe de Porsanger est dirigée, sous 23° 1/2 de longitude, au N. 27° E., parallèlement au système de Billingen (ici N. 26° E.); mais la direction moyenne de l'axe médian du fiord est le N.20°E., el peut être rapportée au système du nord de l'Angleterre (ici N. 19° E.). La direction moyenne des couches de schiste argilo-micacé de l'île Magerôe, sous 23° 1/2 de longitude, est le N. 37° E. ; elle coïncide à peu près avec la direc- tion du système du Rhin ou des Kiôl. Le gneiss qui forme les îles situées sur la côte deFinmark, entre Magerôe et l’Altenford, sur seize directions, m’en a présenté 12 qui sont comprises entre le N. 30° E. et l'E. 30° N.: les systèmes auxquelson peut les rattacher sont ceux des Kiôl ou du Rhin, de Longmynd, de Drontheim et d’Arendal. La direction moyenue de ces schistes cristallins se rapproche dela ligne N. E., qui représente l'orientation approximative du grand cercle parallèle au système de Longmynd. On peut rattacher au même système la ligne de détroits qui sépare la terre ferme des îles Seiland, Qualôe, etc., et la ligne qui, sur ma carte, forme la séparation entre le micaschiste et Le gneiss ; ces lignes font avec le méridien un angle de 40 et quelques degrés vers l'est. Les roches de schiste , de quartzite et de pierre calcaire de l’Altenfiord, sous 20° 1/2 de longitude, offrent une direction recourbée à angle droit ; aux environs de Talvig et au sud d’Altenæs, sur la rive orientale de l'Altenfiord, les directions varient entre l'E. N. E. et l'E. quelques degrés N.; les unes paraissent suscep tibles d’être rapportées au système du Dovrefield (ici E. 9 N.), les autres au- système de Westmoreland (ici E, 20° N.). Aux environs de Kaaford, les couches présentent une orientation presque perpendiculaire, suivant le N. quelques degrés O. J'ai recueilli un assez grand nombre de directions sur le côté occidental de l’Altenfiord, entre Talvig, Kaafiord, Bossecop et les environs de Raipas ; il en est beaucoup qui coïncident à peu près avec le méridien magnétique, c’est-à-dire qui courent au N. 11 à12°0., à peu près parallèlement au système de Tornea, ou de Brevig (ici N. 10e O.). Intérieur de la Laponie. — Sur le versant septentrional du plateau de la Laponie, on voit, comme je l’ai déjà indiqué p. 104, Les couches de quartzite schis- teux et micacé courir {sous 20° 4/2 de longitude), à l'O. 42° à 44° N., direction peu éloignée de celle du système du Jemtland et de la Laponie suédoise (ici O. (N-1,p.154) DE LA NORWÉGE, DE LA SUÈDE ET DE LA FINLANDE. 151 39° N.). Proche de la petite île d’Houtzeiocken, la direction des couches passe au N. 37° O., et alors elle est peu écartée de l'orientation des systèmes de Wester- wick ou du Thuringerwald (N. 40° 0.). Plus au sud, la direction des couches schisteuses se rapproche du N. quelques degrés O., et devient alors voisine de celle des systèmes de Tornea et de Brevig. Les couches de micaschiste, de quartzite et de pierre calcaire qui constituent le fond du golfe de Quänanger (golfe dit N. et S. Strüm) se relient avec les roches de l’Altenfiord et courent au N. 30 et quelques degrés O., à peu près parallèlement à ce golfe, et aussi parallèlementau système du Morbihan (ici N. 31° O.;. Nordland. — D'après la carte de M. Keïlhau, les schistes cristallins qui affleu- rent au N. E. de l’île de Vandô et au N. de Fuglôe, ainsi qu'à Skiervüe, offrent des directions voisines de l'E. O., qui paraïssent se raltacher au système du Fi- nistère (ici à peu près E. 2° N., sous le 18‘ degré de longitude). La grande bande d’euphotide, qui se trouve à l’est du Lyngenfiord, est dirigée moyennement au N.22° E,., et est à peu près parallèle au système de Billingen (ici N.2A°E., sous 18° degrés de longitude). La direction moyenne de la ligne que M. Keilhau a tracée, comme formant la limite entre le micaschite et le granite veiné, de Vandôe à Senjen, est le N. 42°E. ; elle coïncide à peu près avec l'orientation du système de Longmynd (ici N. h0° E., sous 16° 1/2 de longitude). C'est dans un sens parallèle qu’est allongé l'Archipel de Tromsen, qui comprend les îles Senjen, Kvalôüe, Renôe, etc. Le système de Longmynnd paraît donc avoir joué un rôle important dans les phénomènes qui ont produit la configuration de la partie septentrionale de la Norwége. L’archipel des Loffoden, qui se trouve au S. O. de l’île Senjen, présente deux sortes d'orientations différentes : considérées dans leur ensemble, ces îles forment un groupe allongé dans le sens de l'E. 30 et quelques degrés N. Cette orientation est à peu près celle du système d’Arendal; mais chaque île, considérée isolé- ment, présente des pointes dont la direction varie entrele N. N. E. etle N. 300E,, et qui, par conséquent, paraissent avoir été produites par le système des Kiôl (ici N. 26°E.). Les directions des roches de micaschistes et de gneiss du Nordland paraissent être assez variées; voici celles que M. Keilhau cite le plus fréquemment dans la Gea Norwegica. Plusieurs sont comprises entre l'O. et l'O. 15° N. : les plus voi- sines de l'O. 6° N. appartiennent probablement au système de Tunaberg ou des Pays-Bas ; quant à celles qui s’'approchent de l'O. 15°N., peut-être dérivent-elles du système que j'ai nommé système longitudinal de la Bretagne (ici O. 14°à 15° N.). M. Keïlhau cite des directions assez nombreuses entre le N. 20° O. et le N. 15° O., qui paraissent se rapporter an système de Tornea; l en indique cn- core un assez grand nombre entre le N. et N. 30° E., lesquelles peuvent seratia- cher à divers systèmes, tels que lesystème méridien, le système du nord del’An- 152 CONSTITUTION GÉOLOGIQUE (N.4, p. 152.) gleterre, le système de Billingen, le système des Kiôl ou le système du Rhin. La petite bande de micaschite et de calcaire cristallin que M. Keïlhau a indi- quée dans la partie orientale de l’île Hindôe, est allongée dans le sens du N. quelques degrés E., parallèlement au système méridien de la Scandinavie. Parmi les directions rapportées par M. Keilhau , il y en a encore plusieurs autour de la ligne E. 15° N.; elles paraissent dériver du système du Dovre- field. Dans le midi du Nordland, et dans le nord de la province de Drontheim, entre le Vefsfiord et le lac Rôs, M. Keiïlhau a signalé une zone de gneiss qui se fait remarquer par la constance de sa direction : elle court du N. au S., sur près de 1° 1/2 de latitude, dans le sens du méridien, sous le 11° degré de longitude. Le redressement de ces couches appartient, sans aucun doute, au système méridien de la Scandinavie, qui offre ici exactement la même direction. Sud-ouest du littoral norwégien. — La partie sud-ouest du littoral norwégien est composée principalement de gneiss, dont les directions se trouvent le plus souvent comprises entre le N. 300 0. et le N.;elles paraissent se rapporter aux systèmes de Tornea et de la Vendée, ainsi qu’au système méridien, qui est prin- cipalement développé à l'extrémité méridionale de la Norwége; cependant les” rivières qui aboutissent à cette extrémité coulent dans des vallées dont l'orien- tation est,.en certaines parties, du N. quelques degrés E. au S. quelques degrés O., et, par conséquent, parallèles au système du nord del’Angleterre. Ce phéno- mène paraît donc avoir influé sur l’orographie de cette région. Nummedal et Haut Tellemark. — Le même système semblerait aussi avoir contribué aux soulèvements des quartzites et des schistes semi-cristallins du Nummedal et du Haut Tellemark, car ils présentent fréquemment, surtout dans la partie orientale de la zone quartzeuse, des directions voisines du méridien, mais déviant plutôt un peu vers l’est que vers l’ouest; d’ailleurs, l’orientation des roches de cette région a lieu bien plus souvent entre le N. et l'E. qu'entre le N.et l'O. ; elle manifeste l’action de plusieurs systèmes, notamment de ceux du Dovrefield et de Drontheim, peut-être aussi des systèmes de Longmynd, des Kiôl et de Billingen, car on y observe des directions E. N. E. et N. E.;ilyen a aussi d'assez fréquentes entre le N. et le N. E., comme l’a indiqué M. Keilhau (Gea Norwegica, p. 43h). Remarques sur l’âge des divers systèmes de soulèvements. La détermination précise de l’âge des divers systèmes de soulèvements que je viens d'exposer présente des difficultés tenant à plusieurs causes; ainsi les for- mations qui en ont reçu l'empreinte sont dépourvues de fossiles, c'est-à-dire du cachet chronologique qui permet de juger l’âge des dépôts de sédiment. En outre, les terrains cristallins, dits primitifs, quoiquerenfermant probablement des forma- (N.1,p.155)]) DE LA NORWÉGE, DE LA SUEDE ET DE LA FINLANDE. 153 tions de plusieurs époques, ne paraissent pas être revêtus de caractères litholo- giques dépendant essentiellement de leur âge ; d’autres obstacles proviennent de ce que plusieurs systèmes d’âges différents suivent la même direction; ainsi, le système de Tunaberg et celui des Pays-Bas, le système des Kiôl et celui du Rhin, etc. Il y a quelquefois aussi des incertitudes provenant de ce que les in- flexions relatives à certains systèmes peuvent avoir été reproduites plus tard. Aussi, dans l’état actuel de nos connaissances, la solution de ce problème doit être nécessairementimparfaite ; mais les progrès ultérieurs de la géologie éclairciront probablement les questions qu'il convient aujourd'hui de laisser dans le doute. IL y a des systèmes qui ont fait sentir leur action à la fois sur le terrain gneissique et sur les schistes semi-cristallins qui lui sont superposés ; comme leur empreinte est fortement marquée sur les roches semi-cristallines de la province de Drontheim, ils doivent être postérieurs à ces roches : dans cette caté- gorie se trouvent les systèmes des Kiÿl, du Dovrefield et de Drontheim. Le système des Kiôl me paraît être le plus ancien des trois , d’abord parce que c’est celui qui a le plus fortement affecté Le terrain gneissique, comme le montrent les courbes ci-dessus; et d’ailleurs, la zone montagneuse qui est allongée suivant la direction N. N. E. du système des Kiôl paraît avoir été interrompue par les rides dépendant du système du Dovrefield. Quant au système méridien de la Scandinavie, il ÿ a dans les schistes semi- cristallins des directions qui paraissent s’y rattacher ; néanmoins je suis porté à le regarder comme antérieur à ces schistes , car la zone de gneiss située entre le 65° et le 66° degré de latitude, un peu à l’est du littoral norwégien , zone qui est dirigée très régulièrement du nord au sud, se trouve interrompue par la for- mation semi-cristalline, qui est ici relevée suivant la direction N. N. E. du système des Kiôl. D’un autre côté, les directions N. S. sont bien plus multipliées dans les roches du terrain de gneiss que dans celles du groupe semi-cristallin, et même le système méridien est à peine marqué sur la courbe n° 2. Néanmoins il est incontestable que les couches semi-cristallines ont été, en divers points, notam- ment entre le 63° et le 62e degré de latitude, relevées suivant la direction du méridien ; il s'y est produit aussi une file de sommités alignées dans le même sens. On trouve , en outre, dans le midi de la Norwége, des dislocations qui ont affecté les roches paléozoïques de Christiania, et y ont produit des ruptures diri- gées du N. au S. Mais déjà j'ai exposé précédemment qu'il y avait eu au moins deux (1) phénomènes de soulèvement dirigés dans le sens du méridien , et l’un d'eux parait remonter jusqu'à la période primitive; l’âge du second ne peut être fixé pour le moment d'une manière précise. Comme les traces les plus profondes des systèmes d’Arendal, de Tunaberg et de (1) Je suis porté à croire que le nombre des systèmes de redressements et dislocations produits dans le nord de l’Europe, suivant la ligne N. S., s'élève à trois; l’un remonterait à la période gneissique , l’autre à la période paléozoïque , et le troisième se confondrait avec le système de la Corse, Soc. GÉOL. — 2° SÉRIE. T. VI. — Mém. n° 1. 20 154 CONSTITUTION GÉOLOGIQUE (Ne 1, p.158.) Tornea nous sont offertes par les roches du terrain gneissique , et que les forma- tions semi-cristallines présentent comparativement peu de-directions qui puis- sent leur être rapportées , il est présumable que les systèmes d’Arendal (1), de Tunaberget de Tornea sont antérieurs aux groupes semi_cristallins ; mais je n’ai pas de données suffisantes pour déterminer sûrement leur âge relatif : il me paraît donc prudent d’ajourner cette recherche. Quant aux systèmes du Jemtland et de Billingen , j'ai déjà montré qu'ils sont tous deux postérieurs à l'étage inférieur du terrain silurien. TERRAINS PALÉOZOIQUES DE LA SCANDINAVIE. Disposition géographique des dépôts paléozoïques. — Les dépôts paléozoïques de la Scandinavie ne forment point une zone continue , comme ceux qui consti- tuent la partie sud-est du littoral de la Baltique. Ils ont rempli des bassins par- ticuliers, séparés les uns des autres par des collines granito-gneissiques ; mais probablement il existait des communications entre eux. Il est remarquable de voir que les roches paléozoïques de la Suède se trouvent presque toujours sur les bords de grands lacs, tels que le Wenern, le Wettern, le Siljan et Le Storsjôn ; de même elles se montrent en Norwége autour du lac Miôsen et de la concavité qui forme le fiord de Christiania. On ne peut cependant envisager ces dépressions comme des restes des bassins qui existaient à l’époque silurienne : mais les formations paléozoïques ont été perforées par des roches éruptives; et, dans les phénomènes qui ont déterminé l’exhaussement d’une partie des anciens fonds de mer au-dessus du niveau des contrées environnantes, il s’est produit, en même temps que les soulèvements , des affaissements partiels, et par suite de nouveaux bassins, qui n'ont pu être entièrement comblés à l’époque erratique. Ce sont comme des mers intérieures, qui offrent des voies de communication très favorables à l'industrie et au commerce de ces contrées; en outre, les myriades de poissons qui y vivent fournissent d'importantes ressources pour l'alimentation des habitants. Les deux étages du terrain silurien sont représentés, dans le nord de l'Europe, le premier par des assises de grès quartzeux, de schistes divers et de calcaires; le second par des roches calcaréo-schisteuses : à la base du système silurien se trouvent habituellement, en Suède et en Norwége, des couches quartzeuses , re- couvertes de schistes ampélito-alunifères et contenant des fucoïdes. J'ai observé que très souvent, aux points où ces couches s'appuient sur le gneiss, il existe à la séparation des deux terrains des masses de diorite ou de porphyre dioritique; c'est ce qui a lieu dans le Jemtland , près de Stammgärde, à l'extrémité occi- (1) Les directions voisines du N. E. que l’on observe souvent dans les terrains semi-cristallips, se rapportent au système de Drontheim, qui offre une orientation peu écartée de celle du système d’Arendal. (1.15) DE LA NORWÉGE, DE LA SUÈDE ET DE LA FINLANDE. 155, dentale du bassin silurien d'Ostersund; il en est de même à Ombersnæs , près: de Brévig, dans la Norwége méridionale, et aussi près de Christiania. D'ailleurs, l’âge des formations appartenant aux deuxétages du système silu- rien est fixé, en Scandinavie, par la présence d'un assez grand nombre de fossiles, dont plusieurs sont regardés comme caractéristiques par MM. Murchison et de Verneuil. Voici les principaux restes organiques contenus dans l'étage inférieur, en Suède et en Norwége : il y a une profusion de Trilobites, parmi lesquels je citerai Trinucleus caractaci, Ogygia Buchii, Asaphus expansus, A. tyrannus , Illænus crassicauda, Olenus gibbosus, O. alatus, O. scarabæoides. Les Olenus se trouvent avec l’Agnostus pisiformis et avec plusieurs espèces de Paradoæides et Conoce- phalus, dans les schistes noirs, alu nifères, qui recouvrent l'assise quartzeuse, la première de la série silurienne en Scandinavie. Ces fossiles constituent, avec quel- ques Brachiopodes, la faune primordiale, ou faune première de M. Barrande ; elle est caractérisée par les genres Paradoæides, Conocephalus et Olenus (4), qui, d'après cet habile géologue, ne reparaissent plus à des niveaux supérieurs. C'est dans les couches calcaréo-schisteuses, situées au-dessus des schistes alunifères, que commencent à se montrer les genres Asaphus, Ogygia, Ilænus, Trinu- cleus, etc., qui appartiennent à la faune seconde de M. Barrande. Les Orthocères abondent dans le même groupe de couches, et offrent les espèces duplex, com- mums, trochlearis, regularis, centralis, conicus, lineatus, etc.; on trouve aussi quelques Ptéropodes et Gastéropodes, savoir : Conularia quadrisulcata, Evom- phalus qualterianus, Bellerophon bilobatus, Turbo bicarinatus. Les Mollusques lamellibranches sont rares, mais il y a des Brachiopodes : ainsi les Orthis alter- nata, virgula, callactis et Lynx. 11 y a plusieurs Crinoïdes de la famille des Cystidées, que l’on rencontre dans presque tous les bassins siluriens de la Scandi- navie ; ce sont principalement le Sphæronites aurantium, les Caryocystites grana- tum et testudinarium. On trouve quelques Polypiers, parmi lesquels MM. Murchi- son et de Verneuil citent comme caractéristique le Chætetes petropolitanus. Enfin il y a des lits schisteux qui offrent une multitude d'empreintes de graptolithes. À la séparation des deux étages siluriens est un banc calcaire chargé de Pen- tamerus oblongus, espèce de Brachiopode qui, d'après MM. Murchison et de Ver- neuil, occupe tout à fait la même position dansle calcaire de Woolhope ou Horderley en Angleterre. L’étage supérieur est bien caractérisé dans le bassin de Christia- (4) M. Barrande a trouvé dans les couches siluriennes inférieures de la Bohême, outre des Cono- cephalus et Paradoxides, des Trilobites appartenant à quatre autres genres, savoir : Ællipsocephalus, Sao, Arionellus et Hydrocephalus, qu'il regarde comme exclusivement propres à sa faune première ; ces genres lui ont fourni vingt-sept espèces, en y joignant le genre Agnostus, le seul qui ait reparu ultérieurement. Avec les Trilobites, qui alors étaient les principaux habitants des mers, M. Barrande cite, comme faisant partie de sa faune primordiale de la Bohême, 1 Ptéropode (Pugiunculus primus), 1 Brachiopode (Oréhis Romingeri) et 2 fossiles analogues aux Cystidées. (Voir le Bull. de la Soc. géol., & X, p. 403.) 156 CONSTITUTION GÉOLOGIQUE (N. 4, p. 156.) nia, et mieux encore à l’île Gothland, par une grande abondance de débris ani- maux; on y trouve les Calymene Blumenbachii, Phacops macrophthalma et vario- laris, et Asaphus caudatus, les Orthoceras angulatus et imbricatus ; les Evomphalus equilateratus, catenulatus, subsulcatus et ungulatus ; les Turbo striatus, cornu- arietis et funatus; Murchisonia cingulata, Megalodon carpomorphum, Avi- cula retrofleæa ; les Spirifer trapezoidalis, exporrectus, sulcatus, crispus, radiatus, conchidium, subspurius, ptychoides, et elevatus; les Leplæna depressa, euglypha, lata, funiculata,imbex, Fletcheri ; les Orthis elegantula, hybrida, zonata, sinuosa ; les Terebratula Wilsonü, marginalis, imbricata, tumida et aspera. I y a, en outre, un certain nombre de Crinoïdes, notamment les Eucalyptocrinus rosaceus et decorus , le Galliocrinus où Eugeniacrinites costatus , l'Enallocrinus scriptus , E. punctatus et l'Ichthyocrinus tessera-condactylus. Le second étage silurien se distingue encore par l'existence de lits chargés de débris de Zoophytes, parmi les- quels on remarque les Catenipora escharoïdes et labyrinthica, Favosites Goth- landica et subbasaltica, Astræopora organum et Porites pyriformis (1). Quant au terrain dévonien, son existence en Scandinavie n'est point basée sur l'existence de fossiles propres à cette époque, mais simplement sur des analogies pétrographiques. On a regardé comme dévoniennes des roches arénacées, de grès ou de poudingue, qui paraissent correspondre au vieux grès rouge de l'Angle- terre; car, aux environs de Christiania, elles recouvrent les couches du système silurien supérieur. La formation paléozoïque la plus septentrionale de la Scandinavie est celle d'Ostersund, située presque à égale distance entre le golfe de Botnie et l’Atlan- tique, entre 63 et 63 1/2 degrés de latitude, sous le parallèle de Drontheim. Elle appartient à l'étage inférieur du système silurien, et entoure le lac d'Ostersund ; autrement dit Storsjôn, dont la longueur est d'environ 10 myriamètres, duS. E. au N. 0. Un peu plus au sud, sous le 61° degré de latitude, se trouve la région paléozoïque de la Dalécarlie, qui est beaucoup plus vaste que celle d’Ostersund ; car elle affleure sur les rives du lac Siljan, et de là se prolonge vers le N. O. jus- qu'auprès du lac Fœmund. Elle s'étend aussi très loin vers l’ouest, par-delà la frontière norwégienne, et elle paraît même se relier avec les dépôts paléozoïques du Hedemark et du lacMiôsen. A une très petite distance au midi de ces derniers , commence le bassin paléozoïque de Christiania, qui autrefois communiquait évi- demment avec celui du Hedemark. I! forme une bande large de 3 à 4 myria- mètres, et allongée du N. N.E. au S.S. O., sur une distance de 20 myriamètres , depuis le lac Miôsen jusqu’au fiord de Langesund, près de Brévig. La partie cen- trale de ce bassin est occupée par des roches granitiques , qui ont déchiré et en partie recouvert les terrains stratifiés ; ceux-ci se sont alors trouvés pincés, d’un côté entre le gneiss, de l'autre entre les masses de porphyre ou de syénite posté- rieures à l’époque dévonienne. (1) Ces restes organiques appartiennent à la faune troisième de M. Barrande. (N.1,p.17) DE LA NORWÉGE, DE LA SUÈDE ET DE LA FINLANDE. 157 Les roches siluriennes de l’étage inférieur, qui affleurent sur les rives des lacs Wenern et Wettern, paraissent avoir été déposées, ainsi que celles des lacs Roxen etHjelmar, dans un même bassin, présentant un contour très sinueux et des bran- ches irrégulières; ces roches ne forment pas un tout continu, mais elles sont pro- bablement des lambeaux d’un même dépôt, qui embrassait une grande partie de l’espace compris entre les lacs Wenern, Hjelmar, Roxen, et la partie méridionale du lac Wettern. Ce terrain a été disloqué lors de l’éruption des masses de trapp, qui en ont soulevé inégalement les diverses parties, et qui se sont épanchées à la surface des plates-formes de Kinnekulle et de Billingen. Les masses de calcaire, de schisteet de grès ainsi fracturées ont ensuite été dénudées pendant une longue série de siècles; et, lors de l’époque erratique, les dépressions qui séparaient les parties culminantes ont été, en partie, comblées par d’épais dépôts de transport. Mais, en divers points, les collines de roches primitives, qu’avaient recouvertes les couches siluriennes, ont de nouveau été mises à nu, par suite de la rupture et de la destruction de ces couches. C’est dans un bassin différent qu'ont dû être déposées les formations siluriennes qui constituent la côte de Calmar, les îles Oland et Gotland ; puis les cataclysmes qui ont donné naissance au golfe de Botnie ont partagé les dépôts de cette région en plusieurs masses, allongées dans un sens à peu près parallèle, du N. N. E, au S. S. O. Dépôts paléozoïques des environs de Christiania. Nous allons maintenant exposer les caractères principaux des terrains paléo- zviques de ces diverses contrées. Commençons par celui de Christiania, qui est le plus complet, et le seul qui présente à la fois les deux étages siluriens, recou- verts par le vieux grès rouge, comme l'ont démontré MM. Murchison et de Ver- neuil. Cette série de couches a été soulevée à plusieurs reprises, et se montre presque partout en contact avec des roches pyrogènes, remarquables à la fois par leurs caractères minéralogiques et par l’action qu'elles ont exercée sur les dépôts sédimentaires adjacents (1). Je vais d'abord esquisser la configuration de Ja zone paléozoïque, puis je dé- (1) Les formations paléozoïques de Christiania sont remarquables à beaucoup d’égards, et ont attiré l’attention des divers géologues qui ont visité la Norwége. Je citerai particulièrement M. de Buch, qui a signalé des relations importantes entre les roches de transition massives et stratifiées ; MM. Nauman et Hausman, que j'ai déjà cités pour leurs observations sur les dépôts azoïques, M. Keïlhau qui, après des explorations minutieuses, a tracé une carte géologique très exacte da ter- ritoire de Christiania, MM. Murchison et de Verneuil, qui ont eu le mérite d’assigner aux forma- tions paléozoïques de cette contrée leur véritable place dans l'échelle des terrains. Je mentionnerai encore M. Scheerer , qui a découvert dans la syénite zirconienne de nouvelles espèces minérales, et M. Daubrée, dont l’intéressant Mémoire sur les mines de la Suède et de la Norwége renferme quelques détails relatifs aux terrains de transition. J'espère, dans la description qui va suivre, ajou- ter quelques faits nouveaux à ceux signalés par mes savants devanciers. 158 CONSTITUTION GÉOLOGIQUE (4, p. 158.) crirai les roches qui la composent; je ferai connaître leur disposition stratigra- phique et j'examinerai les soulèvements qu'elles ont éprouvés. L'étude de ces phénomènes était encore à faire pour le bassin de Christiania; elle nous fournira des résultats intéressants.” Configuration de la région paléozoïque de Christiania. —Le terrain de transition s'étend entre le golfe de Christiania et le pied des montagnes du Tellemark et du Nummedal, dont il est séparé par unebande de schistes cristallins ; celle-ci, à son contact avec les roches paléozoïques, est plus basse que le massif de roches pyro- gènes qui constitue l'intérieur du bassin. Une pareille infériorité de niveau alieu pour le plateau granito-gneissique, placé à l’est de Christiania, et dont la surface ondulée ne s'élève qu’à une altitude de 150 à 200 mètres au-dessus de la mer. Le relief de la région paléozoïque est ainsi très remarquable : la périphérie est nota- blement plus basse que la partie centrale, et forme comme une ornière entre le noyau plutonique intérieur et les roches de schistes cristallins qui, à peu de distance à l'ouest, s’élèvent à unehauteur considérable; mais elles s’abaissent peu à peu vers l’est, jusqu'aux rivages de l’ancienne mer silurienne. Ainsi le terrain de transition se termine, du côté sud etsud-est, au Skager-Rack ou golfe de Chris- tiania, et la partie septentrionale est bornée par le lac Miüsen, tandis que son bord occidental coïncide avec la longue dépression du Tyriford et du Randsfiord. Cette élévation moindre des assises schisteuses qui forment le pourtour du bassin paléozoïque peut tenir, mais seulement pour une faible partie, à ce que les couches siluriennes, de nature argileuse, sont peu consistantes, et se laissent désagréger par les agents atmosphériques ; toutefois, si l'on compare les niveaux relatifs de la zone périphérique (4) avec l'altitude moyenne de la région centrale, quiest de 3 à 400 mètres, il est évident que cette région intérieure, aujourd'hui occupée par des granites et des porphyres, a éprouvé une sorte de tuméfaction ; le milieu du bassin a nécessairement été soulevé, et cette considération me semble militer en faveur de l’origine éruptive de ces roches massives et cristallines, que M. Keïlhau regarde comme des dépôts d'origine aqueuse transformés par une action métamorphique. Plus tard, je ferai connaître les mouvements successifs qui se sont produits dans cette région ; mais d'abord, j'ai à décrire les roches de transition qui la composent. En Angleterre eten France, à la partie inférieure du terrain silurien, on observe, en général, une suite épaisse de couches de quartzite ou de grèsquartzeux; ainsi, les quartzites d'Écouves, de Domfront et de Saint-Aubin du Cormier, dans la France occidentale: Mais, dans le terrain de Christiania, les roches de grès se montrent peu développées, ou manquent tout à fait en certaines parties. La base (1) Les altitudes du Miôsen, du Tyrifiord et du Randsford, sont de 131, 62 et 65 mètres au-dessus de la mer ; mais ces lacs nous cachent le fond de dépressions encore plus profondes ; et l'on peut con- sidérer le pourtour du bassin paléozoïque de Christiania comme ayant, dans une grande partie de son étendue, sa surface presque au niveau de la mer. (N.1,p.159) DE LA NORWÉGE, DE LA SUÉDE ET DE LA FINLANDE. 159 de l’étage silurien inférieur est habituellement formée de schistes noirs et d’un gris foncé, ampéliteux et alumineux, contenant des empreintes de fucoïdes, et exploités à Opslo, près de Christiania, pour la fabrication de l'alun (1). Cepen- dant il y a certains endroits où les couches siluriennes inférieures présentent une assise quartzeuse épaisse de plusieurs mètres. Cest, par exemple, ce qui a lieu aux environs de Brevig (2) : la coupe que je vais donner des terrains de cette localité montrera la succession des couches qui composent l'étage inférieur du groupe silurien. ‘Contact des couches paléozoïques et du terrain qneissique. — Presque partout où les roches paléozoïques et les schistes cristallins primitifs se trouvent en pré- sence dans le nord de l'Europe, il est facile de reconnaître leur discordance de stratification : aux environs de Brevig, et sur les rives du fiord de Langesund,il est tout à fait évident que le terrain silurien s’est déposé au-dessus de roches schis- teuses déjà redressées ; ainsi, à Ombersnæs et aux alentours, le gneisscourtentre J'E. N. E. et le N. E., avec pente de 70 à 80° au S. E.; et, sur sa tranche, on voit s'appuyer presque horizontalement les couches siluriennes, courant au N. N.0., et plongeant de 8 à 10°à l'E. N. E. Cette superposition transgressive se voit sur une très grande étendue ; d'ailleurs, la configuration extérieure des deux ter- rains est fort différente, etse manifeste même à une distance de quelques lieues ; en effet, le sol granito-gneissique constitue des roches de formes ballonnées ou moutonnées, et s’abaissant en pente douce vers la mer, tandis que le terrain de transition, qui borde le rivage, se termine par une falaise abrupte, et vu de loin, il présente une arête à peu près rectiligne. À Ombersnæs, le gneiss est très quartzeux, peu micacé, et intimement mélangé de granite, qui offre en certains points un aspect pétrosiliceux. On y voit des lames feldspathiques, d’un gris blanc et d'un rouge clair, formées d’orthose et d’oligoclase. Lei, les roches siluriennes inférieures ne reposent pas directement sur le terrain primitif ; elles en sont séparées par une masse en forme de banc, composée de trapp, ou plutôt de diorite, qui offre une texture particulière. On y voit une multitude de lamelles ou fibres blanchâtres, entrecroisées, paraissant consister en feldspath albite; elles forment des espèces de rosaces, à structure radiée, et sont accompagnées de lames amphiboliques, d’un noir verdâtre. Au-dessus, se montre du grès quartzeux, gris, très dur, à grains très serrés et à cassure inégale, subesquilleuse ; il est analogue aux quartzites de la Bretagne et à (4) L'emploi de ces schistes pour la fabrication de l’alun est dû à la présence de la pyrite de fer, qui se change sous l'influence de l'oxygène atmosphérique en sulfate acide de fer: ce changement est activé au moyen d’une torréfaction que l’on fait subir à la masse schisteuse; il y a réaction de l'acide sulfurique sur le silicate alumineux, d’où résulte du sulfate d’alumine , et il suffit d'ajouter du carbonate de potasse pour former de l’alun. (2) Je dois remercier M. Esmark, pasteur de Brevig, et zélé minéralogiste, qui a bien voulu me guider dans une de mes excursions autour de cette ville. 160 CONSTITUTION GÉOLOGIQUE (N. 1, p. 160.) ceux que je signalerai plus loin, sur les rives du lac Miôsen et du Storsjün. Il se divise en couches épaisses de 20 à 60 centimètres, et il forme une assise puissante d’une douzaine de mètres. Il est recouvert par du schiste ampéliteux et alunifère, d'un noir foncé, appartenant à la même assise que celui qu'on exploite près de Christiania. Certaines couches sont très fissiles, d’autres présentent une cassure inégale et conchoïde. On y voit beaucoup de pyrite de fer, tantôt disséminée sous forme de grains cristallins, tantôt en veinules ou en plaques intercalées. Dans cette assise schisteuse sont interposés des bancs minces d’un calcaire à petites lames, d’un noir foncé ; on y voit aussi des veines et des rognons de spath calcaire noir, à très grandes lames, que l'on nomme anthraconite. Au-dessus du schiste ampéliteux, on observe une série de couches de nature argileuse, à cassure iné- gale, dont la texture est subcompacte et faiblement schisteuse (Thonstein des Allemands). Un peu plus haut, les couches deviennent argilo-calcaires, puis il y a un changement de composition graduel, au point où succède à cette assise celle qui est formée principalement de pierre calcaire; en effet, dans cette zone intermédiaire, il y a des couches d’une nature mixte, et l'on voit dans Ia roche argileuse des rognons aplatis, ou de grandes lentilles calcaires, qui se terminent en pointe. Dans les bancs inférieurs de l’assise calcaire , on trouve aussi des lits argileux, bruns ou d’un gris foncé. En s’avançant de l’ouest vers l’est, quand on approche de Brevig, on voit com- mencer à se développer l’action modifiante de la syénite zirconienne ; en effet, les couches argileuses présentent des bancs durs et grenus, imprégnés de silice, et l'on y trouve des rognons composés d'un mélange d'argile avec des particules siliceuses et calcaires. À l’îlot de Stanholmen, situé dans le détroit qui sépare les deux golfes de Porsgrund et de Brévig, les couches argilo-calcaires présentent des druses tapissées de cristaux de paranthine; néanmoins ces couches ne paraissent pas être fortement modifiées; mais, à peu de distance delà, sur le coteau qui borde le rivage, l'assise calcaire présente des couches grises, et d’un vert clair, à grains fins , dures etimprégnées de silice; il y en a qui ont été transformées en une masse amorphe ou grenue, formée de grenats rudimentaires (variété de grenat allochroïte). La couleur verte de ces masses paraît due à de l’oxyde de chrome, et M. le pasteur Esmarck, qui cultive avec succès la minéralogie, m'a assuré que souvent elles renferment plus de 2 à à pour 100 de cet oxyde. A ces couches se trouvent associés des bancs calcaires plus ou moins purs, en partie lamelleux, en partie grenus, d’une couleur noirâtre, offrant un mélange de lames calcaires, grises et blanches ; ils sont exploités à Troswig pour la fabrication de la chaux. Entre cette localité et Brévig, j'ai observé deux filons de trapp, d’un gris-noirâtre, dont l'un, épais de 1,25, coupe les couches calcaires suivant le N. N. O., en plongeant fortement à l'O, J’ai observé aussi un filon pétrosiliceux épais de 2 mètres, et à peu près vertical, qui court à l'E. 30° N. A Brévig, l'étage silurien supérieur n’est pas représenté, et les roches succes- N. 1, p. 161.) DE LA NORWÉGE, DE LA SUÉDE ET DE LA FINLANDE. 161 sives que nous venons de déerire, comme formant l'étage inférieur, sont en résumé : 1° Une assise de quartzite, reposant sur une masse dioritique placée à la sépa- ration des terrains paléozoïques et primitifs ; 2° une assise de schistes ampéliteux et alunifères ; & un groupe de couches argileuses, argilo-quarzeuses et argilo-cal- caires ; 4° enfin une assise calcaire, entremêlée de lits argileux, et devenant sili- ceuse dans sa partie supérieure, qui est rapprochée de la syénite zirconienne. Dans les autres portions du bassin paléozoïque de Christiania, l'étage inférieur du terrain silurien est composé de roches analogues, mais présentant un déve- loppement inégal, et offrant, dans leur composition et leur aspect, des variations qui sont dues principalement à l'influence métamorphique des masses de granite et de porphyre situées dans le voisinage. : Sur le bord méridional du Tyrifiord, à la partie inférieure de la série paléo- zoïque, se trouve un poudingue ou conglomérat, qui a été signalé par M. Keil- hau (Gea Norwegica, p. 7), et que l’on peut considérer comme un représentant de l’assise de grès d'Ombersnæs, car il est placé à la base du terrain silurien, et associé avec les schistes ampélito-alunifères; il renferme une masse de frag- ments, en partie anguleux, en partie arrondis, de gneiss, de micaschiste, de schiste argileux, de porphyre et de diorite. Une pâte formée de détritus argileux leur sert de ciment, et en certains ponts, ce sont des particules porphyriques qui semblent envelopper les fragments, de même que cela a lieu dans la variété poudin- giforme dela pierre carrée appartenant au terrain authraxifère de la Basse-Loire. Dépôt silurien aux alentours de Christiania (1).— Près de Christiania, l’assise quartzeuse d'Ombersnæs ne paraît être représentée par aucune roche arénacée ou poudingiforme ; car, soit à la forteresse de Christiania, soit à Opslo, on voit les schistes noirs, ampéliteux et alunifères, situés à la base du terrain silurien, reposer directement sur le gneiss, sans mélange de couches de grès. La superposition est encore discordante; mais ici les couches paléozoïques ont une inclinaison un peu forte. Au pied de la forteresse de Christiania, le contact des deux terrains présente des relations intéressantes : le gneiss est dirigé à l'O. 10°N., avec pente de 68-au N.; le schiste ampéliteux court à peu près du N. au S., avec pente de 55° à l'O. ; ici donc inclinaison des deux terrains est forte, quoique ayant lieu dans des sens différents. A leur séparation , on observe l'intrusion de deux sortes de roches plu- toniques, qui paraissent avoir contribué à en déranger la stratification : l’une est (1) Au moment où le présent travail était sous presse, M. Kjerulf a publié à Christiania , sur le bassin silurien des environs de cette ville, un mémoire dont M. Barrande vient de donner une analyse succincte dans le Zulletin de la Société géologique (2° série, t. XII, p. 356). Je vois dans cet extrait que M. Kjerulf estime à 300 mètres seulement l'épaisseur totale des deux divisions du terrain silurien des environs de Christiania. Cette évaluation me paraît un peu faible; ainsi le dépôt des environs de Brevig, qui correspond à l’étage inférieur , paraît être, à lui seul, épais de 250 à 500 mètres. Quant à la formation arénacée qui représente le terrain dévonien près de Christiania, sa puissance approximative est de 300 mètres, telle que l’estime M. Kjerulf, SOC. GÉOL. — 2° SÉRIE. T. VI. — Mém. n° 1. 21 162 CONSTITUTION GEOLOGIQUE (N: 4, p. 162:) un diorite owporphyre amphibolique, analogue à celui que nous avons déjà signalé à Ombersnæs, près de Brévig; l'autre porphyre se montre interposé entre les couches schistouses, et semble: aussi s'étendre: à leur’ surface ; c'est la: variété d'eurite que M. de Buch a désignée sous le nom de Porphyrerhombique: La cris- lallisation y est moins développée que dans les grandes masses formées par le même porphyre au milieu du bassin de Christiania; néanmoins, dans la pâte grise, à cassure esquilleuse, on distingue beaucoup de cristaux de feldspath de forme rhombique. Le contact de ces porphyres, du gneiss et du schiste ampéli- teux, se fait remarquer par une multitude de veines de chaux carbonatée, qui traversent ces différentes roches; et principalement le diorite. On v voit aussi beaucoup de pyrite de fer ; elle abonde surtout dans le schiste-ampéliteux et dans le porphyre rhombique, où elle forme des cristaux cubiques. Les contournements que présentent les couches siluriennes aux environs de Christiania ne permettent pas d'apprécier la succession des couches d'une ma- nière aussi nette qu'aux environs de Brévig, et c'est ce qui a fait dire à M. Keilhau que la pierre calcaire alterne avec les schistes et en estcontemporaine (Gea, p. 7); mais nous avons, vu que l'assise argilo-schisteuse est située au-dessous : c’est elle qui est surtout développée aux alentours de Christiania. Néanmoins, dans le fond de mer où elle s'est déposée, les eaux tenaient en suspension à la fois des parti- cules calcaires et des détritus argileux : peut-être même, au moment où le dépôt limoneuxse formait, descauses particulières produisaientune précipitation presque continue de carbonate de chaux, de façon qu’il en est résulté des passages insen- sibles de l'argile schisteuse à la pierre calcaire ; et,.dans la succession des couches, on voit reparaître fréquemment des schistes argilo-calcaires ou calc-schistes, analogues à ceux qui se montrent si développés dans le terrain de transition des Pyrénées. D'ailleurs les molécules de carbonate de chaux se sont très souvent agrégées sous forme de larges nodules ou de lentilles, disposées les unes à la suite des autres, sous forme de chapelets parallèles aux plans de stratification. Les couches calcaires qui succèdent au schiste ont ordinairement une couleur grise et une texture compacte où à grains fins, lorsqu'elles ne sont pas très rap- prochées de roches éruptives. M. Keïlhau a observé, aux environs d’Asker et de Gieldhuus, une variété de ce calcaire, qui est remarquable à cause de sa texture oolitique; elle renferme, en:effet, de petites oolites, noirâtresà l'extérieur, el grises intérieurement, Les schistes du.bassin de Christiania contiennent, comme ceux de la Bretagne, une assez grande quantité de trilobites : dans les couches. ampéliteuses et alu- nifères qui occupent la partie inférieure se trouvent les Olenus alatus, gibbosus et scarabeoïdes, ainsi que l’Agnostus pisiformis ; ces fossiles représentent la faune primordiale de M. Barrande. Puis, dans les bancs calcaréo-schisteux situés au- dessus se montrent l'Ogygia Buchü, Asaphus tyrannus , À. expansus, [llænus crassicauda, Trinucleus caractaci, ete. Les bancs calcaires contiennent, en cer- (W4,0:165) DE LA NORWÉGE, DE LA SUÈDE ET DE LA FINLANDE. 163 taines parties, une grande abondances d'Orthocères : on y trouve aussi diverses espèces d'Orthis, notamment l'O. alternata et O. virgata, que M. Murchison a cités comme caractéristiques des roches siluriennes in{érièures de l'Angleterre ; il y a aussi des Polypiersiet desiCyatidées (4) qui forment une famille de Crinoïdes spéciale aux dépôts siluriens inférieurs du nord de l'Europe et de l'Amérique. Étage silurien supérieur. — l'étage silurien supérieur est beaucoup moins développé dans le bassin de Christiania que l'étage inférieur; il est repré- senté par des couches calcaires, qui se montrent principalement aux envi- rons d'Holmestrand et sur le pourtour du Ringerige. A la séparation des deux étages se trouve une assise calcaire, chargée d’une espèce particulière de térébratule (Pentamerus oblongus), espèce qui occupe la même place en Angleterre. D’après MM. Murchison et de Verneuil, les couches de l’étage silurien supérieur sont caractérisées, en Norwége, par un ensemble de fossiles, qui se montrent dans la même position géolagique . soit en Angleterre , soit en Russie : ce sont des Calymènes (C. Blumenbachii, C. macrophthalma , GC. vario- laris); il y aussi des Brachiopodes, tels que Leptæna depressa , L. euglypha , L. lata, la Terebratula reticularis et plusieurs Zoophytes, notamment les Cateni- pora escharoides et C. labyrinthica. Les Polypiers abondent tellement dans cer- taines couches que leur agglomération constitue de véritables bancs de coraux : c'est, par exemple, ce qui a lieu à l'île Langô, près de Holmestrand. Terrain dévonien. — Le terrain dévonien est représenté dans la contrée de Christiania par une formation arénacée, qui atteint une épaisseur de 250 à 300 mètres, et qui constitue des bandes allongées en ligne courbe, à l’inté- rieur du bassin paléozoïque ; les couches de grès succèdent au calcaire silurien de l’étage supérieur, et. c'est à cause de cette superposition évidente que MM, Mur- chison et de Verneuil les ont considérées comme l'équivalent du vieux grès rouge du pays de Galles ; d'ailleurs elles sont dépourvues de débris organiques. Ce grès est moins dur que le quartzite; il offre une teinte variant du gris ou gris verdâtre au violacé, au gris rougeàtre et gris jaunâtre : il est généralement à petits grains, réunis jar un ciment argileux ; les particules de quartz sont mêlées de fines la- melles brillantes, qui sont des débris de cristaux de feldspath , et il y aussi des paillettes de mica gris blanc. En certaines parties, surtout dans les couches infé- rieures de la formation, lemica est abondant, etle grès passe alors à un psammite un peu schisteux, se divisant en plaques minces. Au contraire , dans les parties supérieures du dépôt, le grès est à grains plus gros, et renferme des bancs de poudingue, où l'on voit une grande quantité de cailloux roulés de quartz blanc, larges de 3 à 5 centimètres, et entourés d'une masse de pelits noyaux et de grains de quartz. (1) MM. Murchison et de Verneuil citent le Chœtetes Petropolitanus et le Spheronites aurantium. 164 CONSTITUTION GÉOLOGIQUE CN. 4, p.166.) Le vieux grès rouge du territoire de Christiania n'occupe pas une grande éten- . due en superficie, parce qu'il est recouvert d’une nappe épaisse de porphyre rhombique, lequel s’est épanché à sa surface, de manière à ne le laisser affleurer que sur les coteaux formant le-rivage de la mer ou le flanc des vallées; le dépôt arénacé se montre ordinairement au pied d’un escarpement abrupte, qui termine, comme une façade, la masse porphyrique. Stor Elven. Steensford. Plateau du Ringerige. Christiania. 1 1 ! 1 ! l l ! 1 1 AÈSIR La coupe ci-dessus (1) est analogue à celle qui à été figurée par MM. Murchi- son, de Verneuil et Keyserling dans leur ouvrage sur la Russie ; elle représente, en effet, une section de la même contrée, s'étendant de Christiania au Steensfiord et au Stor-Elven , qui réunit le Randsfiord au Tyrifiord : on y voit la disposition des diverses roches siluriennes et dévoniennes, qui affleurent entre Christiania et le plateau porphyrique du Ringerige : les mêmes roches reparaissent en sens in- verse, quand on descend de ce plateau, et qu'on s’avance vers l’est jusqu’à la limite du terrain gneissique. Sur lescollines ondulées qui séparent le Ringerige de la mer, les couches silu- riennes inférieures sont fréquemment interrompues par des filons et masses irré- gulières de porphyre feldspathique, qui ont dù contribuer à produire l'état de bouleversement que présente ici la stratification ; les couches sont repliées un grand nombre de fois, elles offrent des changements fréquents de direction, et plongent tantôt dans un sens, tantôt dans l'autre. Granite amphibolique et zirconifère. — Avant d'exposer les modifications qu'ont éprouvées les dépôts stratifiés du bassin de Christiania, nous allons faire connaître succinctement les roches qui ont évidemment produit ce métamor- phisme, car c’est seulement autour d'elles qu'il s'est développé. La formation pyrogène la plus développée dans le territoire de Christiania se compose d'une roche granitique, offrant des caractères pétrographiques un peu variables; elle passe fréquemment du granite à la syénite, et souventaussi elle se montre à l’état de porphyre. Son caractère le plus constant consiste dans l'abondance du feld- spath orthose, qui est généralement à grandes lames et très brillant ; il forme les (1) Explication de la coupe ci-dessus : G — Gneiss qui encaisse le bassin paléozoïque de Christiania, r —= Eurite ou porphyre quartzo-feldspathique. — $ — Diorite. 1 — Étage silurien inférieur. — 2 — Étage silurien supérieur. 3 — Vieux grès rouge, recouvert par le porphyre rhombique du Ringerige. W.1,p.16} DE LA NORWÉGE, DE LA SUÈDE ET DE LA FINLANDE. 165 deux tiers de la masse, quelquefois beaucoup plus; au contraire , le quartz s’y trouve en petite quantité et manque même souvent. Le contact des lames de feldspath et des grains cristallins de quartz présente çà et là de petites druses, dont l’intérieur contient fréquemment des zircons, du sphène, de l’épidote, ou d’autres minéraux particuliers. La proportion de l'amphibole dans cette roche granitique est très variable ; aux environs de Frédéricksvern, elle forme un tiers à un quart de la masse; mais dans d’autres localités, elles ne montre que des lames peu nombreuses, parsemées çà et là, ou elle est même entièrement remplacée par du mica; la roche devient alors un granite pauvre en quartz, mais toujours très riche en feldspath. Cependant ilest rare que l'’amphibole ou le mica manquent tout à fait,et il est impossible de méconnaître dans cette contrée la connexionintime du granite et de la syénite; ce sont deux manières d’être dela même roche, résultant, sans doute, de ce que, au moment de la cristallisation, le rapportdes éléments du magma n’était pas partout le même. La syénite se trouve plus particulièrement développée dans la partie méridionale du bassin ; le granite se montre plutôt dans la partie centrale et septentrionale, au nord de Christiania. Ces roches ne pré- sentent presque jamais une structure veinée ou schisteuse qui les rapproche du gneiss. Le plus souvent elles sont à gros grains, et offrent une cristallisation très développée. Le feldspath a généralement un éclat assez vif et une teinte d’un rouge clair, plus ou moins marquée; ordinairement il ne paraît en exister que d’une seule espèce, de l'orthose ; aux environs de Frédéricksvern, il forme des masses lamelleuses qui ont jusqu’à 40 centimètres de largeur, et qui offrent des couleurs jaunes et bleuâtres, avec un éclat chatoyant, comme celui de Labrador ; mais j'ai vérifié par plusieurs essais que ce feldspath chatoyant est de l'orthose. L'amphibole appartüent à la sous-espèce hornblende; elle est d'un noir ver- dâtre, et forme de grandes lames, parsemées çà et là, au milieu dela masse feld- spathique ; tantôt elles ont pris l'empreinte des cristaux de feldspath, tantôt elles offrent le caractère inverse; la figure ci-jointe montre une disposition divergente des lames d'hornblende (H) au milieu de la masse feldspathique (F). Cette disposition est assez fréquente aux environs de Frédéricksvern. Le mica est habituellement d’un noir verdâtre, comme l’amphibole, mais en feuillets moins grands. Lorsqu'il prédomine, et que la roche devient du granite, il est rare qu'elle soit à aussi larges lames que beaucoup de variétés de syénite des environs de Brévig et Laurvig. C'est surtout dans ce dernier cas que la roche est riche en minéraux particu- liers : un de ceux que l’on y trouve le plus habituellement est Le zircon, et de Ià dérive la qualification de syénite zirconienne : on en trouve moins abondamment dans le granite que dans Ja syénite. Le fer titané et le sphène sont assez fréquents dans ces deux états de la roche. Dans la région comprise entre les fiords de Laur- vig et de Langesund, la syénite est généralement à très larges lames, et l’on y 166 CONSTITUTION GÉOLOGIQUE (NA, p. 166.) wouve beaucoup de minéraux rares, dont quelques-uns n’ont pas encore étésigna- lés ailleurs. Indépendamment de l’épidote, des grenats, de l’émeraude, de Ja chaux fluatée et de plusieurs'autres substances communes, ces minéraux remar- quables sont : la thorite, cancrinite, ‘éléolite, sodalite, bergmannite, glaucolite, leucophane, mosandrite, égyrine, wôhlérite, pyrochlore et polymignite. Certaines variétés de lasyénite, ou des porphyres qui paraissent s'y rattacher, contiennent des minéraux dont le gisement habituel est dans des roches volcaniques, savoir : l'analcime, la néphélime,la mésotype, le pyroxène et lepéridot. Le granite et la syénite du territoire de Christiania sont évidemment posté- rieurs au terrain de transition, carils en ont redressé et modifié les couches ; ils constituent ordinairement des montagnes de formes arrondies, quise distinguent par leur plus grande élévation et par leur masse plus considérable des collinesen dos d'âne ou en ballons, que forme le terrain gneissique de la région littorale. Les massifsde granitepostsilurien ont jusqu’à 750 mètres de hauteur, et sur leurs pentes on voit affleurer les couches siluriennes redressées. Cette roche éruptive forme aussi quelquefois des filons interposés dans les couches ou transversaux ; mais cette manière d’être s'observe rarement. Porphyre rhombique. — Au granite amphibolique et zirconifère, que nous venons de décrire, se trouvent juxtaposées, dans le territoire de Christiania, des . masses très étendues de ce porphyre rhombique que nous avons déjà:eu l’occa- sion de mentionner. Je les ai indiquées sur ma carte, d’après la délimitation que leur a donnée M. Keilhau sur sa belle carte géologique du territoire de Christia- nia. Ce porphyre est généralement chargé de cristaux de feldspatb, qui affectent des formes variées, comme on peut en juger par les figures ci-jointes, où j'ai réuni les principales formes de cristaux que j'ai eu on al DER l’occasion d'observer. Ces figures résultent, pour la plupart, du groupement de deux ou d’un plus grand \ 10€) My nombre de cristaux, qui s’accolent suivant les diffé- rentes faces du prisme modifié. Les dimensions des cristaux varient de quelques millimètres à 5 et 6 centi- mètres. Ils ont des teintes diverses, d’un gris blané, gris verdâtre, gris jaunâtre et rougeâtre : leur couleur est ordinairement plus claire que celle de Ja pâte environnante; celle-ci est, en général, d'un gris foncé, quelquefois d’un gris noirtre. En certaines parties, les grands cristaux rhombiques de feldspath de- viennent plus rares et sont remplacés par des cristaux allongés, hémitropiques, appartenant au sixième système cristallin, et paraissant formés, soit de labrador, soit d’albite; ils sont très minces «et effilés en forme d’aiguilles, ce qui a fait donner à cette variété le nom de porphyre aciculaire (Nadel porphyr). Porphyre pyroxénique. — En certains endroits , principalement à Jeur péri- phérie, ces masses porphyriques présentent des caractères particuliers; elles prennent une leinte d'un noir foncé, et l’on voit s'y développer des cristaux de 1,p. 167) DE LA NORWÉGE, DE LA SUEDE ET DE LA FINLANDE. 167 pyroxène très bien caractérisés ; la roche devient alors un porphyre pyroxénique ou mélaphyre:; elle offre même une analogie avec le basalte, qui a été remarquée par de: savants observateurs : mais: on n’y remarque pas la structure prismatique régulière qui est propre aux véritables formations basaltiques. Les caractères pétrographiques décrits ci-dessus se manifestent de la manière la plus évidente auxenvirons de Holmestrand, et ils ont déjà été signalés par M. Nauman, dans son intéressant voyage (Reise, etc., t. 1). Si l’on explore les diverses routes conduisant du bord de la mer sur je plateau, qui se termine par une muraille abrupte le long du littoral, on voitse succéiler une suite de roches très remarquables par les changements qui ont lieu dans leur aspect et leur composition minéralogique. La ville d'Holmestrand est bâtie au pied de l'escarpement, sur des couches de vieux grès rouge, qui plongent d’une douzaine de degrés vers l’ouest, et recouvrent le calcaire silurien supérieur de l’île Langô; la première assise de porphyre, celle quis’est épanchée à la surface de ce grès, est à peu près compacte, d’un gris foncé, ayant l'aspect d’une roche trappéenne ; puis on voit s’y développer des prismes de pyroxène noir; et, au sein de la masse, se montrent çà et là des nids et veinules blanches de chaux carbonatée. Ensuite la roche devient amygdaloïde, et présente beaucoup de nodules sphéroïdaux ; lesuns sont formés de spath calcaire blane, les autres d'une matière verte (probablement un hydrosilicate de fer), analogue à celle que l’on observe fréquemment dans les trapps. En certaines parties, le por- phyre est devenu d’un rouge violacé, par suite de la peroxydation du: fer. C'est aussi ce que j’ai observé fréquemment sur les roches de trapp des îles Ferüe. Puis, en continuant à monter la gorge qui mène sur le plateau, on est frappé des caractères singuliers de la roche porphyrique, qui devient alors pou- dingiforme ; elle empâte des fragments arrondis ou des boules, dont la grosseur varie de 1 à 35 centimètres, et qui paraissent être de véritables galets, car ils sont d’une nature tout à fait différente de la pâte qui les entoure ; ils consistent, en effet, en porphyre aciculaire, chargé d'aiguilles feldspathiques blanchâtres : on y remarque parfois quelques cristaux de pyroxène, mais ils sont beaucoup plus rares que dans la masse environnante. J'y ai aussi observé, en certains points, des cavités bulliformes, tantôt vides, tantôt remplies d'une matière verte. Souvent la masse qui enveloppe ces boules (voir la figure ci-jointe) est traversée par un ré- seau de filets minces et de plaques de chaux carbonatée. Ces LA filets ne pénètrent point, en général, dans les boules de por- IS TE, LA phyre aciculaire, probablement parce que celui-ci était plus consistant et non fissuré ; mais souvent elles en enveloppent la Nas surface extérieure. J'ai observé cet état poudingiforme sur une étendue notable, en suivant les routes qui conduisent dans des sens opposés, l’une vers Drammen , l’autre vers Laurwig.. La masse de porphyre qui offre cette disposition paraît former une bande épaisse de plusieurs mètres , et visible à une certaine hauteur sur l’escar- 168 CONSTITUTION GÉOLOGIQUE CN. 4, pe 168.) pement, qui résulte évidemment d’une grande fracture, de même que les murailles terminales des nappes basaltiques ; cependant cette bande poudingiforme ne me paraît pas constituer une couche bien distincte, qui serait intercalée dans la masse : en effet, à un niveau plus élevé, j'ai encore retrouvé des boules pareilles enchâssées au sein du porphyre. Je ne pense pas que l’on doive songer à une ori- gine aqueuse, car la matière qui enveloppe les boules ne consiste pas en un assemblage de détritus, mais c’est un porphyre contenant des cristaux très régu- liers de pyroxène et quelques lames plates de feldspath. On peut envisager ce phénomène comme le résultat d'un épanchement sous-marin ; la roche en fusion aura empâté des galets de porphyre aciculaire, provenant de la dénudation de masses situées dans le voisinage , et déjà consolidées depuis quelque temps. Au-dessus de la partie poudingiforme, le porphyre offre, en certains endroits, une texture compacte ; il se divise par des plans parallèles, et présente ainsi une apparence de stratification. Cette partie, épaisse de 2 à 3 mètres, présente quelque analogie avec le hornstein des Allemands ; mais elle ne forme point une assise régulière ni continue, pas plus que la masse poudingiforme. Plus haut, on voit se succéder des bancs porphyriques, dont la texture est variable ; ils contiennent généralement du pyroxène très bien marqué; mais beaucoup sont caractérisés par la présence d’amandes sphéroïdales, de natures diverses : les unes sont for- mées de chaux carbonatée ; d'antres d’une matière compacte, à cassure cireuse , verte ou rouge ; quelques-unes consistent en quartz hyalin, gris elair ; il ya aussi des veinules blanches de chaux carbonatée. Ces masses amygdaloïdes ont beau- coup de tendance à s’altérer au contact de l'air, elles deviennent rougeâtres ou violacées , et alors leur cassure est terreuse. A l'approche du haut du plateau, on voit Le porphyre offrir une cristallisation très développée, et déjà il commence à prendre des caractères qui le rapprochent du porphyre rhombique, car il offre, avec les nombreux cristaux de pyroxène noir, des lames de feldspath. D'abord la plupart de ces lames sont allongées en formes d’aiguilles , c'est le porphyre aciculaire ; puis les aiguilles sont accompagnées de lames plates rhombiques, et alors on a le passage du porphyre aciculaire au por- phyre rhombique. Plus loin, en suivant le plateau, et en s’éloignant de la mer, vers l’ouest, on remarque encore quelques variations dans la nature du porphyre. Cependant les cristaux de pyroxène y deviennent de moins en moins abondants, et finissent par disparaître tout à fait; le feldspath en aiguilles se montre aussi plus rarement, et la roche qui forme la surface du plateau est alors le porphyre rhombique bien caractérisé. À 15 ou 16 kilomètres à l’ouest ou au nord d'Holmestrand, le porphyre rhom- bique est remplacé par le granite amphibolique et zirconifère ; mais la ligne de démarcation entre ces roches est souvent difficile à tracer, car on observe des passages entre elles : dans l’une comme dans l’autre, l'élément prédominant est l'orthose, et quelquefois les lames feldspathiques du granite sont entourées d’une @1,p. 16) DE LA NORWÉGE, DE LA SUÈDE ET DE LA FINLANDE. 169 pâte pétrosiliceuse, comme celle du porphyre rhombique ; mais dans ce dernier la pâte à généralement une teinte plus foncée. : Les variations de nature offertes par les roches que je viens de décrire me paraissent importantes; car il est très remarquable de voir une même formation présenter successivement les caractères d’une roche quasi-volcanique (4), d’un porphyre pyroxénique ou mélaphyre, puis ceux d'un eurite ou porphyre feldspa- thique, et de voir celui-ci passer au granite. Îl est indubitable que le mélaphyre d'Holmestrand, le porphyre aciculaire,et le porphyre rhombique sont des états particuliers d’une même roche, car j'ai observé une variété qui offre à la fois les cristaux de pyroxène, les larges lames de feldspath rhombique, et des aiguilles feldspathiques semblables à celles du nadel-porphyr. La transition du porphyre rhombique au granite est un peu moins évidente ; cependant leur cristallisation parait avoir eu lieu à la même époque ; leur juxta- position et les passages qui ont lieu de l’un à l’autre montrent que ce sont deux produits de Ja solidification d'un magma qui présentait des compositions un peu différentes dans ses diverses parties, qui contenait un peu plus ou un peu moins «le chaux, et dans lequel la structure cristalline s’est inégalement développée. Cependant on n'observe pas une configuration tout à fait identique dans les sones formées de porphyre, et dans celles de granite zirconifère : les unes et les autres constituent des plates-formes, mais la surface des masses granitiques est plus ondulée , plus arrondie sur les bords; l’accidentation du porphyre rhom- bique est plus uniforme, les plateaux qu'il constitue sont plus unis, et se ter- minent presque constamment par des escarpements abruptes ; cette différence tient à ce que la texture du porphyre rhombique étant compacte, au lieu d’être grenue , il s’y est développé pendant son refroidissement des plans de divisions plus réguliers, les uns horizontaux , qui donnent à la masse l'apparence d’une succession d'assises, les autres verticaux , qui, conjointement avec des disloca- tions postérieures à la consolidation de la masse, ont produit ces précipices ou murailles à pic dont on voit des exemples sur le littoral d'Holmestrand , et sur . les bords du Ringerige ; souvent l'élévation de ces escarpements est d’une centaine de mètres. Nous avons vu que le granite amphibolique et zirconifère se montre assez rare- ment sous forme de filons ; iln’en est point ainsi du porphyre rhombique : il consti- tue fréquemment des veines puissantes ou des masses allongées, coupant la direc- tion des couches, ou quelquelois intercalées.entre leurs plans de stratification. Ces filons se rencontrent fréquemment aux environs de Christiania, et souvent ils ont endurci les schistes adjacents. J'ai déjà cité une injection de ce porphyre au pied de la forteresse de Christiania, à la séparation des terrains primitifs et de transi- (4) On trouve même, aux environs de Skien , da péridot dans ce porphyre pyroxénique, qui se rapproche ainsi encore davantage des roches volcaniques. Soc. GÉOL. — 2° SÉRIE. T. VI. — Além. n° 1. 99 470 CONSTITUTION GÉOLOGIQUE (IN. 1, p. 170.) tion ; la presqu'île de Tyveholmen , où M. Keilhau a eu l’obligeance de me con- duire, offre un dyke remarquable du même porphyre, qui coupe nettement les couches de schiste argileux et de schiste argilo-calcaire du terrain silurien; néanmoins ses parois sont ondulées et sinueuses. M. de Buch, et surtout M.Kei- lbau, ont signalé de nombreux exemples de semblables masses filoniennes. Roches euritiques. — D'ailleurs, les porphyres qui ont perforé le terrain de transition de Cbristiania offrent plusieurs variétés ; il en est qui diffèrent par leur nature et par l'aspect de leurs cristaux du porphyre rhombique ; ainsi, entre les bancs de schiste argileux et de pierre calcaire, on trouve quelquefois inter- calés des filons ou couches d’eurite d’un gris jaunâtre ou rougeâtre, où le feld- spath se montre en plus petits grains, et n’affecte pas la même disposition que dans la variété rhombique : de plus, le quartz l'y accompagne ordinairement, sous forme de petits noyaux ou de grains disséminés, tandis que ce minéral est rarement discernable dans le porphyre rhombique. M. Keilhau considère ces masses euritiques, intercalées à la manière de couches, comme un des plus puissants arguments contre l'origine éruptive des roches massives ; néanmoins leur production peut être expliquée de la même manière que celle des filons couches des autres contrées, el il n'entre pas dans mon sujet de m’arrêter à discu- ter cette question. * Roches dioritiques. — Pour terminer cette revue des roches massives de la région deChristiania, j'ai encore à mentionner les diorites, qui sont composés ici, commedans lesautres contrées, d’un mélange intime de grains feldspathiques d’un gris blanc ou blanc verdâtre, etde lames d’hornblende d’un vert foncé; il y a des variétés porphyriques, dans lesquelles le feldspath est à gros grains. Ces diorites ne se montrent point sur de grandes étendues de terrain ; ils forment plutôt des filons ou masses irrégulières, enclavées dans les dépôts schisteux et calcaires, tantôt dans le sens de la stratification, tantôt dans un sens oblique ou transversal ; aux alentours de Christiania, ces filons sont presque verticaux et assez réguliers, généralement dirigés du N. N. O. au S.S. E. : souvent les schistes sont endurcis à leur contact. Il est assez fréquent de trouver ces masses dioritiques près de la séparation du terrain silurien et du gneiss ; ainsi nous en avons déjà indiqué des exemples près de Brévig et de Christiania. Quant à l’âge de ces diorites, je les considère comme les roches plutoniques les plus modernes de celte région , car il n’est pas rare de les voir couper des masses ou des filons de syénite et de porphyre, et quelquefois ils leur servent de salbandes. Métamorphisme des dépôts paléozoïques. — Ce serait ici le lieu de faire con- paître l'action qu'ont exercée sur les terrains stratifiés les roches plutoniques des environs de Christiania; mais, comme j'ai déjà eu l’occasion d'exposer dans un précédent Mémoire (1) les caractères remarquables des transformations qui en sont résultées, je vais me borner à rappeler ici succinctement les principaux (1) Bulletin de la Société géologique , séance du 1 juin 1846. @1,p.17) DE LA NORWÉGE, DE LA SUËDE ET DE LA FINLANDE. 174 faits. Les modifications se sont produites sous l'influence des roches granitiques, de la syénite, du granite proprement dit, et du porphyre rhombique; elles se distinguent de celles que Fon observe en beaucoup d’autres contrées par le mode particulier de métamorphisme qui s’est développé, et quej'ai nommé ailleurs métamorphisme de silicification. Les schistes se sont endurcis et imprégnés de silice, suivant des zones à peu près parallèles au contour du granite ét du porphyre, comme le montre la carte détaillée des environs de Christiania par M. Keilhau. Sur quelques points peu éloignés de la formation gneissique, et particulière- ment dans la paroisse de Nannestad, au nord de Christiania, les schistes argileux qui avoisinent le granite n’ont point été siticifiés, ni sensiblement endurcis ; seu- lement, ils ont perdu un peu de leur schistosité, pour prendre une texture com- pacte, et de plus, ils renferment des cristaux de macles. 1! semblerait que le gneiss, quoique étant d'une origine beaucoup plus ancienne , aurait exercé une sorte d'action de contact, en favorisant la cristallisation maclifère. La pierre calcaire, qui recouvre les schistes argileux, où qui forme au milieu d'eux des tubercules aplatis, des plaques et des bancs intercalés, a été modifiée en même temps, mais elle a subi divers genres de métamorphisme. En beaucoup d'endroits, elle est devenue cristalline, tantôt grenue, tantôt lamelleuse, et généra- lement alors les plans de stratification s’y distinguent plus difficilement. Parfois il s’y est formé des minéraux particuliers, principalement des grenats à base de chaux, qui sont quelquefois accompagnés d’autres silicates ; ainsi, dans les célè- bres carrières de marbre de Giellebeck, on trouve, en outre, de l'épidote, de l'amphibole trémolite et de la chaux fluatée, avec un peu de blende. Il y a des calcaires métamorphiques où l'on observe des parties qui, au lieu de prendre un aspect cristallin, ont été modifiées de la même manière que les schistes : ils se sont endurcis par l'addition de silice, et sont devenus susceptibles de faire feu au bri- quet. On trouve quelquefors des restes d'êtres organisés dans les schistes endurecis, dans les calcaires siliceux ou cristallisés; mais ces débris ont éprouvé une alté- ration plus où moins profonde, et les phénomènes mélamorphiques produits au sein de la roche ont rendu plus difficile la conservation de leurs formes. L'influence modifiante du granite, de la syénite ou du porphyre s’est étendue habituellement jusqu’à une distance de 4200 à 1500 mètres; mais ici, comme je l’ai observé en Bretagne, dans les angles rentrants formés par le contour des masses graniliques , ou dans l’espace qui sépare deux de ces masses, le métamorphisme s'est étendu beaucoup plus loin que sur le bord des angles saillants; ainsi la bande calcaréo-schisteuse qui sépare les deux masses granitiques du lac Éger et du Pramsford, a été métamorphosée dans toute son épaisseur, qui est de 4000 à 5,000 mètres. J'ai encore à mentionner l'influence exercée par le porphyre rhombique sur le grès dévonien à la surface duquel il s’est épanché. Ce grès a pris dans les parties voisines un aspect compacte, pétrosiliceux, une cassure conchoïde ou inégale; 172 CONSTITUTION GÉOLOGIQUE CN: 1, p. 172.) on y voit même briller, en quelques parties, des lamelles feldspathiques ; en un mot,il a emprunté au porphyre une partie de ses caractères, et peut-être aussi une pelite portion de ses éléments, de façon que les couches situées près du contact offrent une manière d'être intermédiaire entre celle qui est habituelle au grès et celle qui est propre aux porphyres euritiques ; souvent même il est diffi- cile de tracer la limite entre eux. La séparation des roches granitiques ou porphy- riques et des strates siluriens du territoire de Christiania se fait encore remar- quer par l'existence d'un grand nombre de gîtes de fer oxydulé, de sulfures de cuivre et de plomb. Sur la plupart de ces gîtes on a ouvert, à différentes époques, des mines qui ont ensuite été abandonnées; cependant quelques gîtes de fer oxydulé sont maintenant encore en exploitation. Ces gîtes de contact ont été signalés depuis longtemps par M. Keilhau, et Les détails que j'ai donnés à leur égard dans un précédent Mémoire me dispensent d'y revenir actuellement. Soulèvements éprouvés par les couches paléozoïques du bassin de Christiania. TABLEAU N° 17. = OO NO © © EE Or © CN NI a” S. de N.2200. Brevig. = © O1 © ND NI Or G O1 Où E © © S. de O 4oN. Westerwick S. des Pays-Bas et du Westmoreland. a 0. 0. 0. 0. 0. 0. 0. O. 0. N. N. N. 22222LLALEZE PRRENERENz222 22222222RER CO02222222: J'ai réuni dans le tableau n° 17 les observations de directions que j'ai faites- dans le bassin paléozoïque de Christiania, depuis son extrémité septentrionale, . qui touche le Miôüsen, jusqu'à son extrémité méridionale dans le fiord de Lange- sund. En examinant ce tableau, on voit que les directions sont répandues sur toute la surface de la rose (1): cependant, on y distingue quelques groupes assez bien marqués. Un des plus nets se trouve compris entre le N. 20- et N. 25° O., et provient principalement des observations stratigraphiques recueillies aux alen- tours du fiord de Langesund et de Brevig. Les couches siluriennes de cettecontrée sont dirigées régulièrement du S. S$. E. au N. N. O., depuis l'entrée du fiord de Langesund jusqu'à une distance d'environ 2 myriamètres au nord de Skien. Elles forment une bande étroite, allongée dans le même sens, et comprise entre le (1) Si mes observations stratigraphiques relatives au territoire de Christiania avaient été plus nom- breuses, il aurait été convenable de les diviser en plusieurs tableaux. @.1,p.15%) DE LA NORWÉGE, DE LA SUÈDE ET DE LA FINLANDE. 4173 bassin gneissique, d’une part, et la syénite zirconienne de l’autre. Comme ce redressement des couches ne coïncide avec aucun des systèmes précédemment établis, je le rattache à un système nouveau, dont j'ai reconnu des traces en d’autres régions, et que je propose de nommer Système de Brevig, du nom de la petite ville située à la jonction des fiords de Frier et de Langesund. Le système de Brevig a produit plusieurs des traits orographiques de cette contrée : d’abord le fiord de Langesund et le Frierfiord, ensuite le lac Farris au nord-ouest de Laurwig, le Lauven Elventre Hedrum et Hvarnes, ainsi qu'aux envi- rons d’Efterlôd et un peu en aval de Kongsberg, puis la côte d'Holmestrand et une partie des rives du Dramsfiord; beaucoup d'autres vallées sont orientées dans le même sens, et il en est ainsi de la côte orientale du Skagerrack et du Cattegat. C'est encore à ce système qu’on doit rapporter les filons de diorite que j'ai cités aux environs de Christiania, comme courant fréquemment du N. N. O. aus.s. E. Plus loin j'indiquerai des traces de ce système dans le Hedemark et la Dalé- carlie. Quant à son âge, il me paraît être postérieur à l'époque dévonienne ; car les couches du vieux grès rouge , qui bordent la rive orientale du golfe d'Holmes- trand, sont orientées parallèlement à ce système, et de plus, une grande partie des lignes de fractures citées plus haut se trouvent dans des masses de syénite et de porphyre, qui se sont épanchées sur le vieux grès rouge. Je suis même porté à considérer les dislocations de la côte de Langesund comme postérieures au ter- rain carbonifère; car les bandes de calcaire carbonifère du nord de l'Angleterre offrent des branches dont la direction est voisine du N. 30° O. et parallèle, eu égard aux longitudes , au système de Brevig. Les roches de transition au milieu desquelles s’est faite la fracture dite canal du nord, qui a séparé l'Irlande du nord de l’Angleterre , offrent aussi une disposition à peu près parallèle. Je crois encore reconnaître des traces du même système dans l'orientation de certaines parties des terrains de transition de l’est de l'Allemagne , et dans la ligne qui, d’après la belle carte géologique de la Russie , par MM. Murchison , de Verneuil et de Koyserling, limite le terrain dévonien aux environs de Memel, sous 19 de- grés de longitude à l’est de Paris, suivant la direction N. 11° 0. parallèle au sys- tème de Brevig. Il est remarquable de voir que ce système coïncide presque en direction avec celui de Tornea et du lac Ladoga ; mais il est plus moderne, car le soulèvement des collines de la rive nord-est du Ladova à eu lieu , comme nous l'avons vu, antérieurement à la période silurienne. Il y a également parité de direction avec le système qui a produit le mont Viso dans les Alpes françaises ; mais ce dernier, que M. Élie de Beaumont a placé au milieu de la période cré- tacée, est, sans doute, postérieur au système de Brevig, quoique l'absence des terrains secondaires en Norwége ne permette pas de s'en assurer positi- vement. Examinons les autres groupes de directions que présente le tableau stratigra- 4174 CONSTITUTION GÉOLOGIQUE IN. 4, p.174.) phique relatif aux environs de Christiania : il ya, entre leN.etle N. N. E., des directions que l'on pourrait rapporter à divers systèmes , ainsi aux systèmes du nord de l'Angleterre, de Billingen et du Rhin; mais elles ne forment pas des groupes assez bien marqués pour qu'il y ait lieu de s’y arrêter. On observe une agglomération beaucoup plus considérable entre le N. E. et PE. ; d’ailleurs, il est facile de reconnaître , à l'inspection de la carte de M. Keiïlhau , que les Hhihes siluriennes situées au nord de Drammen, et principalement entre Drammen et Christiania , suivent généralement des directions comprises dans celte partie de la rose. Ici le système du Westmoreland est dirigé à l'E. 30° N. , et c’est proba- blement à lui qu'il faut rapporter les directions dont ïl s'agit. On conçoit facile- ment qu'à l'époque où il s'est produit, les couches aient été relevées, en partie, suivant des directions propres à des systèmes antérieurs, dont l'orientation était peu différente ; ainsi les inflexions produites sur les roches anciennes par les systèmes de Drontheïin, d'Arenda}, du Dovrefield et du Finistère, ont pu se repro- duire en cette circonstance (1). Le tableau n° 17 nous offre, suivant l'O. 40° N. , un groupe de directions qui paraît se rapporter au système de Westervick ou à celui du Thuringerwald ; il y a encore , suivant la ligne E. O., des directions qui dérivent peut-être du système des Pays-Bas. Quant au vieux grès rouge, outre les directions voisines du N. N. 0. , qu'il suit aux environs d' Hole tr il présente souvent, dans les autres parties du ter- ritoire de Christiania, des directions comprises entre le N. 15° et N. 30° E. , et qu'il paraît convenable de rapporter au système du Rhin. Du reste, on peut observer que les bandes de vieux grès rouge forment comme des lisières le long du bord des masses porphyro-granitiques. Considérations générales sur les dépôts paléozoïiques de Ghristiania. — Je vais terminer celte étude des terrains de transition de Christiania par quelques obser- vations relatives à la succession des phénomènes qui les caractérisent. D'après les observalions que j'ai faites aux environs de Brevig, où les couches siluriennes sont faiblement inclinées, et d'après ce que j'ai remarqué en divers points, près de la limite du terrain de transition et du gneiss, je considère l'épaisseur de l'étage inférieur du groupe silurien comme étant de 250 à 300 mètres ; l'étage supérieur est moins développé, et n’a probablement qu'une puissance de 100 à (1) On peut observer que les principaux accidents du sol paléozoïque ne sont point parallèles aux systèmes de dislocations compris entre le N. E. et l’E.; ainsi les dépressions occupées par des lacs, les grandes vallées, les fiords et baies qui se rattachent au golfe de Christiania, ne suivent point, en général, des directions voisines du N. E. ou de l'E. N. E. : ces grands traits orographiques résultent donc de phénomènes plus récents. Néanmoins la partie du littoral comprise entre Christiania et le bourg d’Asker (situé au S. O.), nous offre un grand nombre de découpures, dont les directions varient entre l'E. N. E. et le N. E., et qui par conséquent sont en rapport avec le système du West- moreland ou les systèmes voisins. (4. 4%) DE LA NORWÉGE, DE LA SUÉDE ET DE LA FINLANDE. 175 150 mètres. Quant à la formation du vieux grès rouge, son épaisseur est d'environ 300 mètres ; ainsi la puissance totale des terrains de transition du bassin de Christiania s'élève approximativement à 700 ou 800 mètres. Or, si l’on considère le relief des collines de gneiss formant les bords du bassin où se sont déposés les sédiments paléozoïques, il paraît peu probable que cette dépression ait eu, à peu de distance de ses bords, et dès le commencement de la période silurienne, une profondeur de 800 mètres : d’ailleurs l'existence d’un tel fond de mer serait peu en harmonie avec la présence des nombreux fossiles que l’on trouve, même dans les couches inférieures du terrain silurien. Ces considérations sont confirmées par d’autres faits , qui montrent qu'il a dù se produire dans le bassin paléozoïque de Christiania des ridements suivant VE. N. E. et le N. E., entre le dépôt du terrain silurien et celui du vieux grès rouge. C’est alors qu'ont été émergées la partie septentrionale et la partie méridionale du bassin, parties où l’on n'observe pas de couches dévoniennes ; il n’est plus resté qu'une dépression centrale, dans laquelle se sont entassés les détritus quar(zeux et granito-gncissiques, les sables et les cailloux roulés descendant des montagnes primilives situées à l'ouest, et qui déjà s’élevaient à une grande hauteur au-dessus des eaux. On peut remarquer une différence bien prononcée dans la stratification du ter- rain silurien et du vieux grès rouge : en effet, les directions N. E., E. N. E., qui sont offertes en si grand nombre par les couches siluriennes, sont rares dans le terrain dévonien ; il est donc présumable que les causes auxquelles on doit les attribuer ont agi avant l’époque du vieux grès rouge. En général, Ja direction des couches de ce grès s’écarte moins du méridien, et paraît être liée d’une manière plus intime au contour des masses éruptives sur le bord desquelles on les voit affleurer, tandis que les couches siluriennes sont dirigées dans un sens oblique , et parfois même transversal par rapport à ce contour. | D'ailleurs , la discordance stratigraphique entre les dépôts siluriens et dévo- nien des environs de Christiania est démontrée, non-seulement par la différence de direction, mais encore par l'inégalité d'inclinaison; car les couches du vieux grès rouge sont ordinairement moins contournées, et ont une pente plus faible que les roches siluriennes situées au-dessous ; il est remarquable de voir qu'elles plon- gent habituellement vers le centre des masses porphyro-graniliques , dont le poids semble avoir déterminé un relèvement de la partie périphérique. Quoi qu’il en soit, mes observations sur l’époque des redressements qui ont été produits dans le territoire de Christiania , parallèlement au système du Westmoreland , sont tout à fait d'accord avec l’âge que M. Élie de Beaumont a assigné à ce Sys- tème ; car il le place immédiatement avant l’époque du vieux grès rouge, qu'il considère comme formant l'étage dévonien supérieur. Les éruptions de syénite , de granite et de porphyre qui ont eu lieu dans le midi de la Norwége, à la fin de la période paléozoïque, ont mis à sec l’ancien fond 176 CONSTITUTION GÉOLOGIQUE (N. 1, D. 176.) de mer, et ont donné naissance à des montagnes hautes de 300 à 700 mètres : alors le vieux grès rouge à élé en grande partie recouvert par l'épanchement du porphyre rhombique ; c'est par suite de fractures et de dénudations ulté- rieures qu'il a été mis à nu sur le pourtour de ces masses plutoniques, où il forme comme des bordures marginales. A la suite de ces phénomènes , la surface de la Scandinavie a offert à peu près la même configuration qu'aujourd'hui, et dès lors les principaux traits orographiques ont été empreints à sa surface. Terrain silurien du Hedemark. Caractères généraux. — Le terrain silurien du Hedemark est allongé de l'O.S. O.à l'E. N. E.; il s'étend depuis le Randsford, à l'ouest du lac Miôsen, jusqu'auprès de la frontière de la Suède, où se trouve une vaste formation de grès qu'on suppose appartenir au système dévonien. Son extrémité méridionale touche presque aux roches siluriennes du bassin de Christiania, et jadis les dé- pressions où ces dépôts ont pris naissance devaient être réunies. Le contour que j'ai donné, sur ma carte, au terrain silurien qui entoure la partie centrale et septentrionale du lac Miôsen diffère beaucoup de celui que MM. Mur- chison, de Verneuil et Keyserling ont tracé sur leur carte de la Russie; il ne s'accorde pas non plus entièrement avec les limites qu'a indiquées M. Keilhau sur la carte jointe à la troisième livraison de son ouvrage intitulé : Gea Norwe- gica. est vrai que le périmètre de ce terrain paléozoïque est un peu difficile à déterminer du côté septentrional, parce que, dans cette zone, la formation semi- cristalline qui est en contact avec lui offre des caractères stratigraphiques peu différents. La présence d'une puissante assise de pierre calcaire superposée à de la grauwacke, et présentant l’aspect de roches siluriennes, m'a déterminé à don- ner plus d'extension que M. Keilhau à ce terrain et à le prolonger vers le nord- ouest jusqu’à Lüsness, dans la vallée du Guldbrandsdal. Il forme les premiers contreforts de la région montagneuse, et présente sur les rives du Miôsen des eollines verdoyantes, s'élevant à quelques cents mètres au-dessus de la mer, et dominés parles massifs de roches azoïques situés au nord et à l'ouest. Les voyageurs qui parcourent ces régions sont frappés de l’accroissement de fertilité qui se manifeste, dès que l’on passe de la région gneïssique à la zone paléo- zoïque ; cependant les différentes roches de cette zone ne sont pas également fa- vorables à la. végétation. En Norwége, comme dans les autres contrées , ce sont les roches calcaires et les schistes tendres, d’une désagrégation facile , qui sont les plus fertiles, tandis que les grès, les poudingues et les grauwackes dures, quartzeuses, sont peu propres à la culture ; et le sol qui en est formé ne présente que des forêts de conifères ou des landes marécageuses. Le terrain de transition du Hedemark renferme des débris organiques , prin- cipalement dans les couches calcaréo-schisteuses de la partie méridionale ; les (N: 4, p. 171.) DE LA NORWÉGE, DE LA SUÉDE ET DE LA FINLANDE. 177 principaux fossiles qu’on y a observés sont : Trilobites depressus, Orthoceras annulatus, O. trochlearis, O. distans, O. duplex. O. regularis, O. articulatus, O. imbricatus, Lituites cornu-arietis, Bellerophon globatus, Leptæna pecten, Orthis plicatella, O. truncata, Encrinites flexilis, Turbinolopsis bina. Ces fossiles appartiennent, en général, à l'étage inférieur du terrain silurien, et quelques-uns en sont caractéristiques : ainsi l'Orthoceras trochlearis et le Lituites cornu-arietis. Ici les roches stratifiées sont à peu près les mêmes que dans le bassin de Chris- tiania : elles présentent aussi du schiste argileux, du schiste ampéliteux, du schiste argilo-caleaire et de la pierre calcaire compacte, d'un gris foncé ou gris noirâtre. Cependant, si l’on considère l’ensemble du dépôt, on y reconnaît un plus grand développement de strates arénacés. Le schiste argileux proprement dit y est moins abondant ; il est remplacé en partie par de la grauwacke , qui semble for- mer ici une transition entre le schiste argileux, le grès et le poudingue : elle offre, en effet, beaucoup de variations, sous le rapport de sa texture, de sa com- position et de la grosseur de ses éléments ; elle est généralement à petits grains et schisteuse, mais souvent aussi elle est à gros grains : on y distingue, avec les parties arsilo-quartzeuses, des détritusfeldspathiques et micacés. Tantôt elle passe au schiste argileux ; tantôt, au contraire, les grains de quartz y dominent, et alors elle se rapproche du grès. La même formation renferme aussi des couches d’un grès habituellement dur et à grains serrés, ressemblant à du quartzite ; parfois cependant il est à gros grains, et devient poudingiforme. D'ailleurs, ces roches sont accompagnées, en certaines parties, d'un véritabie poudingue ou conglomérat, formé par une agglomération de cailloux roulés de quartz , de grès-quartzite, et de débris de roches primitives, granite, gneiss el micaschiste. La plupart de ces cailloux sont arrondis, quelques-uns ont seulement les arêtes et les angles émoussés ; leur largeur varie de 4 à 30 centimètres. Ils sont enchâssés dans une masse de détritus quarizeux, parfois mélangés de la- melles calcaires. Ce poudingue offre une suite de bancs irréguliers et grossière- ment stratifiés, composés les uns de gros cailloux, les autres de noyaux moyens; des couches de grès , de grauwacke , et de schiste argileux d’un gris foncé leur sont associées. La grauwacke, le grès et le poudingue, en couches alternantes, acquièrent un développement considérable entre Ringsager et Brottum, sur les collines qui avoisinent le lac de Niere, et le séparent du Miôsen. On les voit reparaître sur la rive opposée du Miôüsen, du côté occidental, dans la paroisse de Birid. La pierre calcaire, accompagnée de schiste argileux, constitue dans le bassin du Miüsen deux bandes principales, comme l'a montré M. Keilhau (Gæa norwe- gica , p. 38h) : la plus méridionale s'étend sur les deux rives du lac, depuis le Randsfiord jusqu’à la vallée de la Glommen, par les paroisses de Vardal, Ness, Vanget Rommedal ; elle paraît se trouver dans la partie inférieure de la formation paléozoïque , du moins autant qu'on peut en juger par l’inclinaison générale du SOC. GÉOL — 2° SÉRIE. T. VI. — Mém. n° 1. 23 178 CONSTITUTION GÉOLOGIQUE (N:4, p.178.) terrain; car c'est sur elle que s'appuient les couches situées plus au nord. La seconde bande calcaire s'étend de Torpen, sur le Dokka Elv, jusqu’à une assez grande distance à l'est de Ringsager; elle est séparée de la précédente par une zone de grauwacke, de grès et de schiste. Un peu au nord de la seconde bande calcaire, s'étend de la paroisse de Birid au lac Niere la zone de poudingue, de grès et de grauwacke à gros grains déjà mentionnée. Plus loin, en allant vers le nord-ouest, on observe une longue série de couches de grauwacke, de grès et de schiste, que recouvre, immédiatement au sud de Lüsness, la masse calcaire qui termine du côté nord la formation pa- léozoïque. La succession générale de ces roches est représentée par la coupe figure 3, Caractères stratigraphiques. — Les couches courent fréquemment entre le N.-E. et l’'E., de même que celles des environs de Christiania ; néanmoins, dans la partie septentrionale du lac Miôsen , et dans le midi du Guldbrandsdal, j'ai observé un grand nombre de directions comprises entre l'O. et l'O. 30° N. Dans cette partie-ci, la pente des couches est aussi beaucoup moindre, souvent même elle est voisine de l'horizontalité. Dans la partie du bassin de Christiania qui est située au nord de cette capitale, les couchés siluriennes plongent habituellement du sud au nord; sur les rives du Miôsen, l’inclinaison des roches paléozoïques a lieu dans le même sens, et d’une manière encore plus constante ; car, parmi les observations stratigraphiques fort nombreuses que j'ai recueillies, il y a bien peu de cas où les couches, au lieu de pencher vers le nord, se montrent verticales ou ondulées : il est très rare que la pente ait lieu vers le sud d’une manière nette; cependant c’est ce que j'ai observé près du relais de Frogner. Il paraît qu’une cause générale a déterminé le relèvement des couches, en les inclinant d'une manière presque constante vers le nord. Néanmoins il est probable que ces couches, dont le pendage a lieu vers le nord sur une étendue de plus de 8 myriamètres, ont éprouvé des plis ou des renversements, sans quoi leur puis- sance s’élèverait à des chiffres énormes , d'autant plus que leur inclinaison excède habituellement 45 degrés. Toutefois il est supposable que cette formation, dont le caractère général est arénacé, a une épaisseur de quelques milliers de mètres. Il ne paraît pas y avoir dans la région paléozoïque du Hedemark de masses pyrogènes un peu considérables ; M. Keilhau en cite, à la vérité, trois gîtes, mais tous très peu étendus , ce sont : L° une petite masse granitique, semblable à celles des environs de Christiania , située à Lager-aae, entre Vang et Loïten; 2° une masse eurilique, près de Tuterud , au sud du lac Eina; 3° une masse d’horn- blende noire , à gros grains, avec du mica et de la pyrite de fer, située près de Klukke, dans la paroisse de Birid. (N-4,p.179) DE LA NORWÉCE, DE LA SUEDE ET DE LA FINLANDE. 179 TABLEAU N° 148. — TERRAIN SILURIEN DU HEDEMARK. © S. longit. de-la Bretagne, 0. N TE = LE = Door mn - S. des Pays-Bas, du Westmoreland. 2AZALL2L227 DUBDOHOUUE 0. 0. 0. O 0. 0. O. O ET Les directions que j'ai mesurées en explorant le terrain silurien du Hedemark sont réunies dans le tableau ci-dessus (n° 18); elles sont rassemblées presque toutes de part et d'autre de la ligne E, ©., les unes entre l'O. et l'O. 30° N., les autres entre l’E. et le N. E. La première de ces deux agglomérations est la plus considérable (1) : on peut attribuer les directions qui en font partie aux systèmes des Pays-Bas, des Ballons et du Jemtland ; mais il y en a, autour de la ligne ©. 10° N., un groupe remarquable qui coïncide avec un système particulier que j'ai nommé système longitudinal de la Bretagne, parce qu'il est parallèle à l'axe de cette presqu'île. Quant aux directions situées entre l'E. etle N. E., il faut sans doute en attri- buer la plus grande partie au système du Westmoreland, de même que je l'ai fait pour les couches siluriennes des environs de Christiania. Il y a encore quel- ques directions très peu nombreuses autour du N. N. O. : elles se rattachent probablement aux mêmes phénomènes que les dislocations de la côte de Brevig; mais on ne se ferait pas une juste idée de l'importance de ce système, si l'on n'avait égard qu'au petit nombre de directions de couches qui en dépendent, car c'est un système moins ancien que beaucoup d’autres, et qui n'a pu que difficilement marquer son empreinte sur des couches déjà redressées. Mais il a influé d'une manière bien plus évidente sur le relief de la contrée : nous voyons, en effet, dans le Hedemark , dans la partie occidentale de la Dalécarlie et de la Vermlandie, un grand nombre de rivières et de lacs présenter une direction N. N. O., à peu près parallèle à la côte orientale du Skagerrack ; la partie sep- tentrionale du lac Miôsen, l'extrémité méridionale de la vallée du Guldbrandsdal, qui en forme le prolongement, sont dirigées de la même manière, ainsi que la vallée de la Glommen, du Klar Elv, etc. ; l'orientation commune de ces grandes vallées et dépressions me porte à regarder celte région comme ayant éprouvé d’une manière très prononcée l'influence du système de Brevig. (1} Mes observations présentent beaucoup plus de directions entre l'O. et l'O: 30: N. qu'entre l'E. et le N. E. : les premières sont, en effet, plus fréquentes dans le midi du Guldbrandsdal et dans la partie septentrionale du Jac Miôsen ; mais le rapport inverse aurait peut-être lieu, si les mesures strati- graphiques avaient embrassé uniformément toute la surface de la zone silurienne. 180 CONSTITUTION GÉOLOGIQUE (N. 4, p 180.) Dépôts paléozoïques de la Dalécarlie et de la partie limitrophe du Hedemark. Les dépôts paléozoïques de la Dalécarlie s'étendent depuis le lac Siljan jus- qu'à la frontière norwégienne, où ils se relient avec ceux du Hedemark. Dans leur partie orientale, ils suivent le contour circulaire d'une file de lacs qui se trouvent au nord du Siljan, et qui y envoient leurs eaux. Cette région offre des collines d'un aspect riant et pittoresque, s’élevant à 300 et 400 mètres de hau- teur au-dessus du niveau de la mer, de manière à dominer le plateau gneissique situé à l’est : à l’ouest et au nord-ouest du lac Siljan se trouvent des plates- formes élevées et couvertes de vastes forêts. Les terrains de transition de la Dalécarlie offrent deux formations bien dis- tinctes, un groupe de couches calcaréo-schisteuses, qui représente l'étage silurien inférieur, et un dépôt arénacé, de grès et de poudingue, qui est regardé par MM. Murchison et de Verneuil comme l'équivalent du vieux grès rouge. Décri- vons d’abord la première de ces formations. La pierre calcaire y est très déve- loppée, et semble même prédominer sur les collines situées entre les lacs Siljan et Oresjôün; mais dans une contrée comme celle-ci, qui a été si fortement dé- nudée par des agents érosifs d’une grande puissance, et où la surface déprimée des roches friables a été recouverte d’épais dépôts de transport, on conceit que les schistes argileux peu consistants doivent rarement affleurer. La pierre calcaire, qui forme principalement le sol des collines, est compacte, d'une teinte variable, grise ou d'un gris rougeûtre, quelquefois d'un rouge brun; elle est fréquemment mélangée d'argile, devient marneuse et passe au schiste argilo-calcaire. Elle est d’ailleurs accompagnée de couches de schiste argileux d'un gris foncé ou noir, et contenant des empreintes de Graptolites. Certaines couches calcaires sont remplies d'Orthocères : ainsi sur la colline d’'Osmundsherg, une des plus élevées du pays (425 mètres au-dessus de la mer, mais seulement 200 mètres au-dessus des plaines environnantes), on trouve une immense quan- tité de ces coquilles de Céphalopodes; il en est qui méritent bien la qualification de gigantesques, car elles atteignent 45 à 50 centimètres de longueur et 9 à 10de largeur. Leur test est fréquemment changé en spath calcaire, et j’en ai vu où les loges séparées par des cloisons successives renferment une certaine quantité de matière bitumineuse provenant de la décomposition du siphon où tube mem- braneux qui pénétrait jusqu’au fond de la coquille. Ces Orthocères appartiennent aux mêmes espèces que celles déjà signalées dans le Hedemark. On trouve aussi dans les couches calcaréo -schisteuses plusieurs espèces de Trilobites, notamment l'Illænus crassicauda , Asaphus expansus, À. laticaudus. Il y a des couches calcaires chargées de Crinoïdes, et l'on y observe, comme dans les calcaires siluriens des autres régions de la Scandinavie, des représentants de la famille des Cystidées, savoir : le Sphœæronites pomum et le Caryocystiles W.1r.18) DE LA NORWÉGE, DE LA SUÈDE ET DE LA FINLANDE. 181 granatum. M. Hisinger y cite (Versuch, p. 84) d’autres fossiles, savoir : le Turbo bicarinatus, T. centrifugus, Helicites obvallatus, H. utricularis, Anomites (Orthis) terebratulinus, À. jugatus, A. transversalis, A. psittacinus, À. rhomboidalis, A. novemradiatus, Madreporites stellaris et Milleporites cervicornis. Le grès affleure en quelques points entre les lacs Siljan et Oresjün, et il con- stitue une bande un peu étendue sur les rives du fleuve Ore, entre les lacs Ska- tungen et Orsasjôn; il est généralement à grains fins, argilo-quartzeux : sa cou- leur varie du gris blanc au gris rougeâtre, et la surface des couches est souvent parsemée de taches rondes et blanchâtres. Une formation de grès analogue s'étend à l’ouest du lac Siljan , et couvre d’im- menses surfaces entre le 60° 1/2 et le 62° 1/2 degré de latitude. Elle constitue le bassin supérieur de l'Oester et Westerdal Elfven, du Wan Elfven, et de beaucoup de leurs affluents. Ce grès est quelquefois accompagné de poudingue, de conglo- mérat et de grauwacke : ses limites, du côté septentrional, ne sont pas parfaite- ment connues ; du côté occidental, elles ont été déterminées par M. Keïlhau. Il ne s’étend qu'à une très petite distance à l'ouest du Klar Elv, autrement dit Fœmund Elv, et même le fond de la vallée où coule ce fleuve, près de Trysild, est composé de terrain primitif. Sur la cime isolée du Sélenfield, qui s'élève à une hauteur un peu considérable, à l'ouest de la vallée du Klar Elv, on a signalé (Gœa norwegica, p. 161) une roche de grès analogue à celle de la Dalécarlie, On en a encore observé un lambeau près de Narud, à l’est du lac Miüsen. MM. Murchison et de Verneuil regardent ces dépôts arénacés comme apparte- nant au vieux grès rouge; la similitude pétrographique vient, en effet, à l'appui de leur opinion. Néanmoins ce rapprochement ne peut être considéré comme tout à fait certain , et même, en quelques points au nord du lac Siljan, les cou- ches de grès semblent s’enfoncer au-dessous de la formation calcaréo-schisteuse qui représente l'étage inférieur du groupe silurien. Roches pyrogènes. — La région paléozoïque de la Dalécarlie a été le siége d’éruptions de roches plutoniques analogues à celles que nous avons décrites dans le bassin de Christiania, et offrant des types correspondants: il y a, en effet, une roche granitique, ayant habituellement, comme celle de la Norwége méridio- nale, les caractères de la syénite, et il y a, en outre, différentes sortes de por- phyres feldspathiques. La syénite est beaucoup moins riche en minéraux curieux que celle de Christiania, mais elle est remarquable en ce qu'elle contient fréquem- ment, outre le feldspath orthose d’un blanc vert, du labrador, de l'hypersthène et du fer titané. On y a signalé aussi du péridot, de même que dans le porphyre qui l’accompagne. Celui-ci se présente sous des aspects assez divers : ordinaire- ment il est d'un rouge brun, contenant des lames feldspathiques, blanches ou rouges; il y à des variétés tout à fait compactes, pétrosiliceuses, passant au jaspe et au hornstein. Il y a encore une autre sorte de porphyre, qui n’a été trouvée qu à l’état de blocs isolés, et qui est de nature dioritique, car elle est verdâtre et 182 CONSTITUTION GÉOLOGIQUE (1, p. 182., contient des lames d'hornblende noire, mélangées avec des cristaux de feldspath rougeàtre. Les eurites que nous venons de mentionner s'étendent sur une vaste surface, depuis le lac Wänjan jusque sur les montagnes qui séparent le bassin du lac Siljan de celui du Ljusne-Elfven ; ils forment autour des vallées de l'Üsterdal- Elfven et de ses affluents plusieurs montagnes, dont l'élévation ne surpasse pas, en général, 800 mètres ; ils sont assez fréquemment accompagnés de brèches et de conglomérats porphyriques. C'est à une éruption des mêmes roches pyrogènes qu'il faut attribuer la confi- guration remarquable de la contrée située au nord du lac Siljan ; elle a été sou- levée, de manière à présenter une plate-forme circulaire, porphyro-granitique, entourée de dépôts stratifiés paléozoïques, à la surface desquels se trouvent les lacs Siljan, Garsjôn, Oresjôn, Skatungen et Orsasjôn , qui forment comme une ceinture autour du massif plutonique. Le terrain de transition de la Dalécarlie renferme quelques gîtes métallifères, mais beaucoup moins nombreux que ceux de la région de Christiania, et ils n'ont jamais donné lieu qu’à des travaux sans importance (voir mon Mémoire sur les gîtes métallifères). Les roches silurienñes qui affleurent au nord du lac Siljan ont été relevées, et présentent même souvent une forte inclinaison : cependant je n’ai observé dans celte contrée qu'un petit nombre de directions ; elles ont été mesurées entre les lacs Siljan ct Oresjôn , et sont, pour la plupart, voisines du N. N. O. : aussi je les considère comme se rapportant au système de Brevig. Terrain silurien du Jemtland. Le terrain de transition du Jemtland n’a encore jamais été décrit, et l’on ne trouve à son égard que des indications très vagues dans les ouvrages géologiques relatifs à la Suède. Je l'ai parcouru dans toute sa longueur, depuis l'extrémité mé- ridionale du Storsjün ou lac d'Ostersund jusqu'au lac Kalln , et je vais indiquer les principaux caractères qu’il m'a offerts. La région qu'il constitue est non moins remarquable par son système hydrographique que celle du Siljan ; on y voit une très grande quantité de lacs, dont les eaux se réunissent dans le vaste bassin du Storsjün, et se déversent ensuite par le feuve Indal dans le golfe de Bothnie. A l'exception de son extrémité méridionale, qui est bordée de roches primitives, le lac d'Ostersund est situé entièrement dans le iussin silurien , qui enveloppe également dans son contour une partie des lacs environnants. À l'est s'étend un plateau légèrement ondulé, de granite et de gneiss, qui est en grande partie cou- vert de dépôt diluvien, et qui le cède en hauteur aux collines siluriennes : il s'abaisse insensiblement verslesrives du golfe de Bothnie; mais, du côté occidental, les couches paléozoïques viennent s'appuyer sur les pentes du massif imposant GP. 185) DE LA NORWÉGE, DE LA SUÈDE ET DE LA FINLANDE. 183 d’Areskutan et des fields moins élevés, qui s'étendent vers le sud-est, en formant les premiers contre-forts de la zone montagneuse limitrophe entre la Suède et la Norwége. | Le terrain de transition du Jemtland se compose à peu près des mêmes roches que celui du Hedemark, sauf quelques différences que je vais signaler : dans la région d'Ostersund je n'ai point observé de poudingue ni de conglomérat, mais le quartzite est très développé dans la partie méridionale. De plus, les roches schisteuses offrent moins fréquemment que celles du Miôsen les caractères de la grauwacke, elles ressemblent plus ordinairement au schiste argileux proprement dit : leur fissilité est souvent très prononcée, et alors elles passent au schiste ardoisier. La pierre calcaire fossilifère est moyennement développée. Quand on a quitté le bourg de Berg situé à l'extrémité méridionale du lac Storsjôn, au pied d’une montagne isolée de granite, sur une pelouse verdoyante qu’entourent d'épaisses forêts, si l'on s’avance vers le nord, les premières couches qu'on voit succéder au terrain primitif sont formées de quartzite : cette roche se trouve donc à la base du terrain silurien. Ici elle a un aspect métamor- phique, et l'on serait même tenté de la considérer comme n’appartenant pas à la formation paléozoïque, si elle n’était associée à des couches fossilifères. Ce quartzile est d’un gris clair, translucide, à grains très serrés, et même presque compacte ; quelquefois il est mélangé de petits feuillets chloriteux, et il alterne avec des lits de schiste modifié, gris, luisant et feuilleté. Souvent il est imprégné de quartz blane, dont les filets anastomosés le traversent dans tous les sens, carac- tère qui lui est commun avec les quartzites de la Bretagne et des Pyrénées, quartzites auxquels il ressemble d’ailleurs. Il y a une série épaisse de ces couches quartzeuses qui affleurent sur une grande étendue de terrain entre Berg et Kjôfra, et qui se prolongent vers le N. E., sur le territoire des paroisses de Näs et de Lockne. Leur direction générale est du N. N. E. au S. S. O., et leur inclinaison a lieu vers l’ouest. Aux couches supérieures de cette assise se trouve associé du schiste noir, ampéliteux, correspondant à celui que nous avons décrit aux environs de Chris- tiania. Puis on observe une suite de couches de schiste argileux, d’un gris plus ou moins foncé, qui est exploité en divers lieux comme schiste ardoisier. Il passe à des couches de grauwacke schisteuse, à grains fins, formées de détritus argilo- quartzeux, avec des paillettes micacées, et offrant souvent des plans de fissilité obliques ; cette grauwacke tend parfois à prendre les caractères d’un grès argileux. La pierre calcaire accompagne fréquemment le schiste et la grauwacke schis- teuse : quelquefois même , par exemple près de Kläppa, elle est associée à des couches quartzeuses. Elle ne forme point, en général, de masse très considérable et tout à fait indépendante ; néanmoins j’ai observé deux bandes calcaires prin- cipales : l’une affleure à l'ile Frôüsôn, près de la ville d'Ostersund, et se pro- 184 CONSTITUTION GÉOLOGIQUE (N:1, p. 184.) longe à travers le lac jusqu’à la rive opposée , où elle reparaît entre Ovicken et Marby ; elle est séparée des quartzites qui forment la base du terrain silurien par les schistes ampéliteux. L'autre bande, située plus à l'ouest, et séparée de la pre- mière par des bancs de schiste argileux, s'étend de Brasta à Mo et Alsen. La pierre calcaire de cette contrée est ordinairement compacte, grise, plus rarement d’un gris rougeâtre, ou bien d'un gris noirâtre, quand elle est associée à des schistes noirs ampéliteux. Tantôt elle est pure, tantôt elle est mélangée de couches de marnes ou de schiste argilo-calcaire. Elle contient les mêmes fossiles que celle du lac Siljan, et, par conséquent, elle appartient aussi à l'étage silurien inférieur. Certains bancs consistent en une agglomération de très grands Ortho- cères de l'espèce dite giganteus ; c’est ce qui à lieu près de la station de poste de Skatgard. On y voit aussi des couches criblées d'Encrines; et les Cystidées, qui caractérisent ce terrain en Scandinavie, s’y trouvent aussi représentées par les mêmes espèces de Sphæronites et de Caryocystites que nous avons déjà citées dans les autres bassins paléozoïques de la Suède. Si l'on estimait la puissance du terrain silurien d’Ostersund d’après l'étendue de l’espace où l’on voit les couches incliner régulièrement dans le même sens, on obtüendrait, de même que pour le Hedemark, une évaluation s’élevant à plusieurs milliers de mètres ; car il est des régions, ainsi des environs de Skatgard à Kläppa . (voir la coupe, fig. 4, pl. P, où les couches de quartzite, de schiste ampéliteux et de pierre calcaire, offrent un pendage constant sur une étendue de plus de 45 ki- lomètres. Néanmoins l'épaisseur de ces dépôts paraît être fort considérable. En explorant le terrain de transition du Jemtland , je n'y ai point observé de roche plutonique ; cette absence de masse éruptive paraît singulière, car les strates siluriens sont partout relevés sous un angle qui est généralement supé- rieur à 45 degrés, et qui est souvent voisin de 90 : en outre, parmi ces roches, il en est qui paraissent avoir subi une influence métamorphique aussi prononcée que si elles s'étaient trouvées dans le voisinage de formations ignées. Lorsque ce terrain aura été exploré plus complétement que je n'ai pu le faire, peut-être y découvrira-t-on quelques-unes de ces roches ; néanmoinsil me paraît peu probable qu'il y en ait des masses considérables. Je ferai encore observer une circonstance importante pour l’histoire des gîtes métallifères de la Scandinavie : c’est que l’on ne connaît point de mines de cuivre ni d’autres métaux dans le terrain silurien d'Ostersund, tandis qu'il y en à une grande quantité dans les montagnes de roches primitives situées tout auprès, du côté occidental. Ce fait vient à l'appui de plusieurs autres pour prouver que la production des gîtes de cette région est antérieure à l'époque paléozoïque, (N.1,p.185) DE LA NORWÉGE, DE LA SUÈDE ET DE LA FINLANDE. 185 TABLEAU N° 49, — TERRAIN SILURIEN DU JEMTLAND. du = EGDARDE CON ms S. de Brevig, N160. Fi Er Le en En 10 22 S. Jentland. O. 32 N. O » O NH? [e] NN O N. 3 0. N. 5 O Nov7 O N. 8 O N. 6 O 5 mt La stratification des couches siluriennes du Jemtland présente de fréquentes variations ; mais, si l'on examine le tableau n° 19, dans lequel j'ai réuni mes ob- servations stratigraphiques, on est frappé de voir que, contrairement à ce qui à lieu pour les terrains paléozoïques de Christiania et du Hedemark, il y a absence presque complète de directions entre le N.-E. et l'E., tandis qu'il y en a un grand nombre entre le N. et leN. E., ainsi que entre le N. et l’Q. N. O. Le groupe le plus important coïncide avec la ligne N. 15° E., et se rattache au système que j'ai nommé précédemment système de Billingen : un autre rassemblement de di- rections , qui se fait remarquer entre le N. 15° et le N. 20° O., dérive du sys- tème de Brevig. Il y a deux autres groupes moins considérables : l'un au N.-0., l’autre à l'O. 30° N.; ils paraissent se rapporter au système de Westerwick ou du Thuringerwald et à celui du Jemtland. Ce dernier a moins influé sur la disposi- tion des couches que les deux systèmes de Billingen et de Brevig ; ses effets ont plutôt consisté dans des dislocations dirigées à peu près suivant l'O. 30° N. De là sont résultées les dépressions des lacs Liten, Storsjôn, Alsen, Nälden, etc- Dépôts siluriens du midi de la Suède. Les terrains de transition du midi de la Suède sont plus connus que ceux situés au nord du 60° degré de latitude; et, comme ils ont une composition uniforme, il serait inutile de les décrire séparément. Je me bornerai donc à exposer leurs caractères généraux, afin qu'on puisse embrasser dans leur ensemble les faits relatifs aux formations paléozoïques, et aux phénomènes dynamiques dont elles portent l'empreinte. Les dépôts paléozoïques de la Néricie, de l'Ostrogothie, de la Vestrogothie, etc., ne se présentent point sous formes de masses continues et nettement circonscrites ; ce sont des lambeaux parsemés çà et là, formant souvent des protubérances. Tantôt ils sont séparés les uns des autres par des affleurements de roches primi- tives ; tantôt les intervalles qui existent entre eux sont recouverts de dépôts dilu- viens, de sable, de graviers, de cailloux roulés et de blocs erratiques. Mais, sur SOC. GÉOL. — 2° SÉRIE. T. VI. — Mém. n° 1. 24 186 CONSTITUTION GÉOLOGIQUE CN. 1, p. 186.) ma carte géologique, j'ai dû faire abstraction de cette enveloppe superficielle, qui recouvre, comme un manteau, la plus grande partie du pays. Quoique les roches siluriennes du midi de la Suède ne soient pas généralement redressées, il n’est pas moins certain qu'elles ont été soumises à de violentes dis- locations; car, entre les diverses parties qui devraient se correspondre et former un même horizon, si elles n'avaient pas été disloquées, on observe souvent des dif- férences de niveau considérables : il y a donc eu des soulèvements locaux, accom- pagnés de ruptures, qui ont divisé ces terrains en plusieurs portions ; et plus tard les puissants phénomènes d’érosion et de dénudation qui ont sillonné la surface du pays, à l'époque erratique, ont balayé une partie de ces masses fracturées, dont les débris ont été entraînés jusque dans les plaines du nord de l'Allemagne. Il n’en est resté çà et là que des lambeaux plus ou moins étendus, comme pour attester les violentes catastrophes dont cette contrée a été le théâtre. Caractères pétrographiques. — Les terrains de transition du midi de la Suède ont des caractères pétrographiques uniformes ; ils se composent de plusieurs assises qui nous offrent la reproduction des roches stratifiées décrites précédem- ment : ainsi, quatre assises régulièrement superposées, de grès, de schiste ampé- liteux, de pierre calcaire et de schiste argileux, constituent ces dépôts qui appar- tiennent exclusivement à l'étage inférieur du terrain silurien, si l’on faitabstraction de l’île Gotland (1). Les couches quartzeuses situées à la base sont ordinairement à petits grains, plus rarement à grains moyens ou à gros grains ; leur couleur est grise ou d’un gris brunâtre : on y remarque fréquemment des empreintes de fu- coïdes, mais elles ne renferment pas d’autres restes organiques. Le schiste ampé- liteux qui leur succède offre à peu près les mêmes caractères qu'aux environs de Christiania; il est pyriteux, alunifère, et mélangé d’une assez grande quantité de matière charbonneuse pour pouvoir brûler et servir de combustible dans le chauffage des chaudières employées à la préparation de l’alun. La même matière qui a été torréfiée, en abandonnant sor principe combustible, est soumise ensuite à un lessivage qui fournit du sulfate d'alumine. Le schiste ampéliteux est utilisé pour celte fabrication dans plusieurs établissements de la Vestrogothie, Néricie, Smälande, Scanie, etc. Dans ces provinces, de même que dans la Norwége méri- dionale, le schiste ampéliteux renferme fréquemment des rognons ou tubercules de spath calcaire noirâtre (anthraconite), et des lits d’un calcaire compacte, noir ou d’un gris foncé, qui contient des espèces remarquables de Trilobites, entre autres l'Olenus gibbosus et O. scarabeoides. On y trouve aussi des Paradoxides et Conocephalus, avec l’Agnostus pisiformis (2). Au-dessus vient une suite de bancs calcaires, compactes, gris, parfois rougeà- tres ou noirâtres, caractérisés ici, comme dans les autres bassins, par la présence (1) Cette île est composée de calcaire appartenant au système silurien supérieur. (2) Ge sont ces fossiles qui constituent la Faune primordiale de M. Barrande. 4.187) DE LA NORWÉGE, DE LA SUÈDE ET DE LA FINLANDE. 187 de grands et nombreux Orthocères (0. giganteus, O. communs, elc.), on y trouve aussi des Lituites , une espèce de Conulaire (C. quadrisulcata), l'Asaphus tyran- nus, À. expansus , l'Illænus crassicauda ; le Sphæronites pomum et quelques Polypiers. Au-dessus de la pierre calcaire on observe de nouveau des couches de schiste renfermant quelques bancs calcaires : il ressemble au schiste argileux ordinaire ; cependant en quelques points, où 1l est recouvert par des épanchements de roche trappéenne, il offre un aspect siliceux et prend l'apparence du hornstein, modifi- cation provenant sans doute de l'action exercée sur lui par la roche pyrogène qui le recouvre. Les schistes superposés à la pierre calcaire sont quelquefois riches en fossiles, surtout dans la Vestrogothie : on y trouve plusieurs Trilobites, tels que l'Asaphus caudatus, le Trinucleus granulatus, des Graptolites, des Encrines, des Cystidées (le Sphæronites aurantium), et plusieurs Polypiers. La série de couches que nous venons de décrire, grès quartzeux, schiste ampé- liteux et alunifère, calcaire à Orthocères et schiste à Graptolites, se montre d’une manière plus ou moins complète sur beaucoup de points du midi de la Suède : ainsi dans la Vestrogothie, entre les lacs Wenern et Wettern ; dans l'Ostrogothie, sur la rive orientale du Wettern; dans la Néricie, à l'ouest du lac Hjelmar ; dans la Scanie, entre Landskrona et Cimbrishamm ; dans la Smälande , sur la côte de Calmar, et dans l'île Oland. Quant à l’île Gotland, elle est formée presque entièrement de pierre calcaire riche en pétrifications , que MM. Murchison, de Verneuil et de Keyserling regar- dent comme appartenant à l'étage silurien supérieur : j'en aï indiqué les fossiles page 156. Sur les collines de Kinnekulle, Billingen, etc., situées dans la Vestrogothie, entre les lacs Wenern et Wettern, le schiste argileux, formant l'assise la plus élevée du terrain silurien inférieur, est recouvert par un épanchement de trapp qui paraît être de nature dioritique ; il consiste effectivement en un mélange de parties feldspathiques et de lamelles d'amphibole hornblende ; ces deux éléments deviennent plus distincts dans les parties supérieures, qui sont moins compactes ; quelquefois même l'amphibole s’y montre en grandes lames radiées. Ces trapps amphiboliques, qui se divisent souvent en masses prismatiques, comme les ba- saltes, se montrent encore daus la Scanie, entre Landskrona et Cimbrishamn ; ils constituent des masses en forme de filons ou dykes, qui coupent les couches silu- riennes, et forment au-dessus d'elles des éminences allongées. Les schistes s’en- durcissent au contact de ces trapps, et leur couleur, habituellement foncée, de- vient plus pâle, suivant la remarque de M. Hisinger. Depuis longtemps, on à aussi remarqué dans la Scanie un porphyre pyroxé- nique, gris noirâtre, différant des trapps mentionnés toul à l'heure, en ce qu'il a pour base du pyroxène, au lieu d’amphibole; il est donc analogue au basalte ; 188 CONSTITUTION GÉOLOGIQUE (N21, p. 188.) mais il ne se divise pas en prismes aussi réguliers. Quelquefois il est à gros grains, et, outre le pyroxène, on y trouve du péridot et une mésolithe radiée, à laquelle une analyse de M. Hisinger assigne pour composition atomique la formule : 5AS + NS°+ CS + Aq. Ce porphyre constitue plusieurs buttes, dont les principales sont celles de Gjelleberg, près de Rôstanga, et d'Anneklef, près de Hôr. C'est dans le terrain primitif qu’elles se trouvent en général ; mais l’une d'elles paraît être près des schistes siluriens, et probablement la roche ignée leur est postérieure, de même que le porphyre pyroxénique d'Holmestrand, qui offre beaucoup d’analogie pétrographique. G = Gmeiss, 1 — Assise de grès. 2 — Schiste ampéliteux et alunifère, 3 — Calcaire à Orthocères. 4 = Schistes à Graptolites, Les schistes cristallins, qui affleurent en couches redressées au pied des col- lines siluriennes situées entre le Wettern et le Wenern, nous fournissent de nou- velles preuves de la constante discordance de stratification qui existe entre les dépôts de la période silurienne et ceux de la période gneissique. Quelquefois les couches du terrain silurien sont relevées sous un angle plus ou moins grand, ainsi qu'on le voit à Omberg, sur la rive orientale du lac Wettern, à l'île Got- land, etc.; mais, en général , elles sont faiblement inclinées ou tout à fait hori- zontales. Cette horizontalité se manifeste surtout d'une manière frappante sur les collines isolées qui s'élèvent sur divers points de la Vestrogothie, et dont j'ai représenté une coupe par la figure ci-dessus. Les assises successives de grès, de schiste ampéliteux, de pierre calcaire et de schiste argileux forment comme une série de gradins sur le penchant de ces col- lines, dont la partie supérieure présente un petit plateau de trapp amphibolique. Il est remarquable de voir que, dans cette région, les couches aient été rom- pues et portées à des hauteurs assez considérables sans s’infléchir ; cependant elles ont été perforées, et ont Livré passage à des roches ignées qui sont venues s'épancher à leur surface. Traces de plusieurs systèmes de dislocations. — La colline allongée de Billin- gen, et la bande silurienne dont elle forme la partie septentrionale, sont orientées du N.17E. au S. 17 O.; plusieurs autres proéminences de la Vestrogothie et la partie méridionale du lac Wettern sont dirigées à peu près de la même manière. Ces divers traits orographiques me paraissent être le résultat d’un même système de dislocations, que j'ai nommé système de Billingen : ce phénomène a fracturé les couches, et les a soulevées, sans les infléchir, à des hauteurs de 200 à 300 mètres au-dessus de la mer,ou 450 à 200 mètres au-dessus du terrain gneissique envi- ronnaut. On peut encore observer que l'ile Üland, formée de couches siluriennes , et si remarquable par sa rectilignité, est dirigée du N. 19° E. au S. 19° 0., dans (1, p.18.) DE LA NORWÉGE, DE LA SUÉDE ET DE LA FINLANDE. 189 un sens exactement parallèle à cette série d'accidents, eu égard aux longi- tudes. Comme l'étage silurien inférieur est seul représenté dans plusieurs des bassins paléozoïques de la Scandinavie et d’autres contrées, comme il offre en Europe un développement beaucoup plus considérable que l'étage supérieur, il doit y avoir eu, à la fin de la première moitié de la période silurienne, des mouvements du sol assez considérables pour mettre à sec le fond d’une grande partie des an- ciennes mers. Cependant, parmi les systèmes de montagnes déterminés par M. Élie de Beaumont, il n’en est aucun qu'il indique comme s'étant produit à la fin de la première ou de la seconde époque silurienne : les deux systèmes de Billingen et du Jemtland sont peut-être destinés à combler ces lacunes. Les collines de la Vestrogothie ne sont pas toutes dirigées exactement comme Billingen , du N. 17° E. au S. 17° O.; il en est quelques-unes qui sont allongées dans un sens rapproché de la direction N. 26° E. du système du Rhin (Kinne- kulle, par exemple), ou de celle N. 9% E. du système du nord de l'Angleterre. Ces deux phénomènes ont donc pu contribuer à réduire en lambeaux les dépôts silu- riens du midi de la Suède, qui précédemment avaient été disloqués par le sys- tème de Billingen. M. Élie de Beaumont a justement attribué au système du nord de l'Angleterre (2) l'orientation de la côte suédoise qui s'étend de Calmar à Nykôüping. Quant à l’île Gotland, qui est allongée dans une direction très peu éloignée du N. 30° E., elle me paraît devoir être attribuée au système du Rhin, dont l’action s’est fait sentir après le soulèvement des couches siluriennes de l'étage supérieur ; elles courent, en effet, sur cette île de l'E. N. E. à l'O.S. O., et ont été relevées, comme l’a fait remarquer M. Elie de Beaumont, par la même cause qui a produit les rides du Westmoreland. La ligne qui sépare le dépôt si- lurien de la Scanie du terrain granito-gneissique situé au nord offre une direction tout à fait différente, qui est à peu près à l’O. 32° N., et qui se rapporte au système du Jemtland. Remarques sur les nouveaux systèmes de montagnes. — Ces études sur la géologie de la Norwége, de la Suède et de la Finlande, m'ont conduit à faire de nombreuses additions aux systèmes de soulèvements déjà fondés ; ces nouveaux faits confirment et généralisent les deux lois que M. Élie de Beaumont a déduites de ses beaux travaux sur les soulèvements des montagnes. L'une de ces lois con- siste dans la récurrence des directions de systèmes séparés les uns des autres par un long intervalle de temps; l’autre loi est relative à la tendance des sys- (1) Je ne parlerai point dans ce mémoire de l'île Gotland, que je n’ai point visitée, et dont le sol, d’après MM. Murchison et de Verneuil, appartient à l'étage silurien supérieur ; il est caractérisé par ja présence de plusieurs fossiles, tels que le C'alymene Blumenbachii, Asaphus caudatus, la Terebra- tula Wilsoni, Leptæna depressa, et Catenipora escharoïdes. (2) On doit encore rapporter au système du nord de l'Angleterre plusieurs îles et découpures du littoral dirigées du N. au S., qui se voient sur la côte occidentale de la Norwége, près de l'entrée du Sognefñord. 190 CONSTITUTION GÉOLOGIQUE Xe 1, pe 190.) tèmes de divers âges à affecter des directions orthogonales. Nous voyons, en effet, le système du Rhin coïncider en direction, à 1 degré près, avec le système des Kiôl, de même qu'il coincide approximativement avec celui des Alpes oeciden- tales. Ces rapprochements me paraissent d'autant plus remarquables que les trois séries d'accidents qui appartiennent à ces systèmes sont peu écartées du grand cercle de la sphère terrestre, qui représente leur orientation Inoyenne. Ainsi il y a eu, suivant la ligne N. N. E., un premier soulèvement dans le nord de l’Europe avant l’époque silurienne ; un deuxième, dans l’est de la France, pendant la période secondaire; et enfin un troisième, un pen plus au sud, pen- dant l’époque tertiaire : la ligne de soulèvements et de dislocations formée une première fois s'est donc reproduite plus tard à deux époques différentes. Nous avons vu aussi que le système des Pays-Bas coïncide en direction avec celui de Tunaberg, et le système de la Corse est peu écarté du système méridien de la Scandinavie. Le système de Brevig coïncide également avec celui de Tor- neä , et la même direction a été suivie plus tard par le système du mont Viso. Enfin le système du Dovrefield et celui du Sancerrois sont presque parallèles , et il n’y a qu'une différence de quelques degrés dans l'orientation des deux systèmes d’Arendal et de la Côte-d'Or. Il est facile de vérifier la perpendicularité de la plupart de ces nouveaux sys- tèmes les uns par rapport aux autres, ou bien par rapport à des systèmes déjà connus. Ainsi le système d’Arendal est perpendiculaire à celui,du Morbihan, le système méridien de la Scandinavie à celui de Tunaberg, et le système de Brevig à celui du Dovrefield ; le système longitudinal de la Bretagne et les deux sys- tèmes des Ballons et du Jemtland font des angles presque droits avec ceux de Billingen, des Kiôl et de Longmynd. TERRAINS SECONDAIRES. La partie méridionale de la Suède est la seule région de la Scandinavie qui présente deux formations appartenant à la série des terrains secondaires : on y trouve des dépôts jurassiques el crélacés, que nous allons décrire succinctement. Dépôts jurassiques.— La pointe de Kullen, qui borde l'entrée du Sund du côté nord-ouest, constitue l'extrémité d’une petite chaîne granitique qui traverse la Scanie de l'O. N. O. à l'E. S. E., sous le 56° degré de latitude, et se prolonge jusqu'aux environs de Maglehem, sur la Baltique, vers le milieu de la rade située entre Cimbrishamn et Sôlvitsborg. C’est dans la dépression située au pied de cette chaîne, du côté méridional, que se sont déposés les strates jurassiques , s’ap- puyant, d’un côté sur les pentes de la chaîne primitive, de l’autre sur les dé- pôts siluriens qui recouvraient alors une partie du terrain granito-gneissique de la Scanie. Des détrilus argilo-quartzeux et micacés s'accumulèrent au fond des eaux, et engendrèrent une formation composée de couches alternantes de grès et d'argile schisteuse, couches passant fréquemment des unes aux autres par une (N-4,p.19) DE LA NORWÉGE, DE LA SUÈDE ET DE LA FINLANDE. 191 variété intermédiaire, analogue à ce dépôt qui constitue les marnes irisées. Ce terrain est remarquable par la présence de couches de houille: on y trouve quel- ques Fougères semblant se rapprocher du genre Ophioglosse ; mais de nombreux débris de tiges d'arbres dicotylés, et beaucoup d'empreintes de feuilles réticu- lées, montrent que cette formation appartient, non à l’époque houillère, mais à l’époque jurassique. On y a trouvé, en outre, quelques empreintes de poissons et des dents de Squales. Par suite des causes de dénudation auxquelles a été soumis ce dépôt, il n’en reste plus aujourd’hui que deux lambeaux, dont l'un constitue la côte nord-ouest de l’Oresund (vulgairement le Sund), au N. et au S. d'Helsingborg , entre la pointe granitique de Kullen et Ja petite ville de Landskrona; l’autre se montre au nord du lac Ring, immédiatement au S. du 56° degré de latitude. C’est seule- ment dans le premier de ces lambeaux que l'on a constaté l'existence de la houille, au nord de la ville d'Helsingborg. Malgré leur faible épaisseur, les couches de combustible donnent lieu, depuis plus d’un demi-siècle, à une exploitation impor- tante, que j'ai visitée en 1845, avant de quitter la Suède ; on en tire annuellement à peu près 250,000 hectolitres de houille. Bien qu'appartenant au terrain jurassique, ce combustible n'offre point les caractères du lignite, mais 1l ressemble à de la houille maigre. Il y en a une variété schisteuse, et une autre compacte, à cassure conchoïde, brillante, et d’un beau noir. Ce charbon, qui est faiblement bitumineux, s'emploie au chauffage des chaudières à vapeur et des fourneaux de distillerie, à la cuisson de la chaux, des poteries, des briques , et enfin à l'économie domestique. Malheureusement une partie est très impure, et renferme plus de 20 pour 100 de matière terreuse. Ce combustible ne se présente qu'en couches minces, qui sont séparées par des lits de schiste bitumineux, et accompagnées d'un grès tendre, argilo-quartzo- micacé ; au-dessus est une puissante série de bancs de grès et d'argile schisteuse, Voici la succession qu’on observe : 1° de la surface à A ou 5 mètres de profon- deur, dépôt diluvien de sable, graviers, galets et blocs erratiques ; 2° couches alter_ nantes de grès et d'argile schisteuse , ayant une épaisseur qui, aux environs d'Hô- ganäs, varie de 50 à 70 mètres ; 3° une assise carbonifère, ayant une épaisseur de 4",50, dont il n’y a guère que le tiers à l’état de houille, etencore la seule couche qui soit pure a seulement 18 à 20 centimètres de puissance. Au-dessous de cette assise vient une couche d'argile schisteuse, un peu dure, d’un gris foncé, qui forme le mur de la couche principale de combustible, et qui est exploitée pour la confection des briques réfractaires : son épaisseur est de 1",66 ; au - dessous il y a un banc de grès puissant de 1 mètre , et au delà on trouve une série de couches argileuses, entremnèêlées de grès, qui s'étend jusqu'à une profondeur inconnue. Pour reconnaître s’il n'existe pas d’autres couches de combustible , on a sondé jusqu’à une profondeur de plus de 80 mètres au-dessous de l’assise carbonifère qui est exploitée; mais les recherches ont été infructueuses. Le dépôt de com- 192 CONSTITUTION GÉOLOGIQUE (N:1, p. 102.) bustible paraît donc borné à quelques lits d’une épaisseur très minime, mais offrant, ilest vrai, un assez grand développement dans le sens horizontal. Les couches courent avec régularité de l'E. N. E. à l'O. S. O., et inclinent vers le S. E. de 5 à 6 degrés. D’après les explorations qui ont été faites , l'étendue des couches houillères est d'environ 2,500 mètres dans le sens de leur direction, c’est-à-dire en allant de la mer vers le N. E. Dans le sens opposé, parallèlement au rivage de la mer, leur extension est aussi fort grande; car des sondages exécutés entre Hüganäs et Helsingborg ont démontré l'existence des couches de houille, mais à une profondeur trop considérable pour qu’elles puissent être exploitées, vu leur faible épaisseur et leur médiocre qualité. Du côté occidental, près du rivage de la mer, le dépôt carbonifère est interrompu par une grande faille, qui court du N. N. 0. auS. S. E., dans un sens parallèle à la côte ou à peu près perpendiculaire au plan des couches. La partie occidentale du bassin doit avoir éprouvé un abaissement très considérable ; car, pour retrouver le charbon à l’ouest de la faille, on a fait des sondages jusqu’à 230 mètres de profondeur, en traversant les couches alternatives de grès et d’argile schisteuse qui existent au-dessus de l’assise carbonifère, sans pouvoir atteindre celle-ci ; et comme, de l'autre côté de la faille, la houille n'est qu’à 60 mètres de profondeur, on voit que l’abaissement de niveau a dù être de plus de 170 mètres. On comprend que l'exploitation d'un dépôt aussi mince, et ne fournissant que du charbon médiocre, ne peut guère être avantageuse ; aussi on y a dépensé plu- sieurs millions de francs, et c’est à peine si aujourd'hui les produits des mines suffisent à payer les frais courants. Néanmoins ces travaux sont utiles au pays, comme fournissant de l’occapation à 210 ouvriers, sans en compter 250 qui sont employés à la confection de poteries et de briques réfractaires, au moyen d’argile et de combustible provenant des mines. Dépôts crétacés.— Le terrain de craie se montre en deux régions dans le midi de la Suède : on l’observe sur le littoral,entre Âhus et Canlsta at et à l'intérieur des terres, aux environs de Christianstad. Ces affleurements paraissent consli- tuer une zone de forme elliptique, dont la pointe se trouve près d'Ignaberg, à l'ouest du lac Finja, et qui est coupée obliquement par le rivage de la mer, d'Ahus à Carlshamn ; mais elle se prolonge vraisemblablement vers l'Est, sous les eaux de la Baltique. Un autre lambeau de terrain crétacé forme l'extrémité méridionale de la Scanie, depuis Malmô, vis-à-vis Copenhague, jusqu’à la pointe de Sandham- mar, entre Ystad et Cimbrishamn. Dans ces deux régions le terrain se compose de couches Ho bntalee: el est presque partout caché par le dépôt de transport diluvien; on ne le voit à découvert que sur les falaises de la mer, ou sur les berges des rivières et des lacs. Il offre une succession de couches sableuses et de couches calcaires, analogues à la craie tufeau et quelquefois à la craie blanche. Les couches sableuses sont les plus anciennes , et par leur aspect pétrographique elles G.1p.195) DE LA NORWÉGE, DE LA SUÈDE ET DE LA FINLANDE. 193 semblent se rapprocher de la craie chloritée et du grès vert, quoiqu'’elles soient plus modernes. Elles se trouvent principalement dans la partie Sud-Est de la Scanie, entre Ystad et Cimbrishamn, etsont accompagnées d’un calcaire sableux. On y trouve en certains points, notamment près de Kôpinge et de Kaseberg, beau- coup de fossiles, qui nesont pas toujours assez bien conservés pour qu’on puisse les déterminer avec certitude. M. Nilson y a signalé les espèces suivantes (1) : Belemnites mucronatus, Turbo sulcatus N., T. lœvis N., T. Basteroti, Pyrula planulata N., Rostellaria anserina N., Patellaovalis N., Arca ovalis N., Pectun- culus lens N.; Nucula ovata N., N. truncata N., Trigonia pumila N., Isocardia modiolus N., Venus exuta N.; Corbula ovalis N., C. caudata ; Avicula cœrules- cens N.; Inoceramus sulcatus N., Catillus Brongniarti N., Pecten quinquecosta- tus, P. undulatus, P. pulchellus, P. lineatus, P. arcuatus, P. corneus, P. orbi- cularis, P. membranaceus, P. lœvis et P. inversus ; Lima spinosa, L. semisul- cata, L. granulata, L. pusilla ; Ostrea conica, O. vesicularis, O. hippopodium, O. pusilla, O. lateralis N., O. ovata, O. lœvigata, O. curvirostris N. Il y a quel- ques foraminifères, ainsi : Lenticulites Comptoni; Nodosaria sulcata N., N. lœvi- gata N. et Planularia angusta N. On y trouve encore des Serpules et quelques zoophytes, des dents de squales et des débris de végétaux. Parmi les fossiles cités plus haut, la plupart des espèces qui ne sont pas exclu- sivement propres à la Suède, excepté le Pecten quinquecostatus , ont été trouvées ailleurs dans le terrain crétacé supérieur (étage de la craie blanche). C'est donc à cet étage que l’on doit rapporter les couches fossilifères des environs d'Ystad, quoique leur ressemblance pétrographique avec la craie chloritée semble indi- quer une origine plus ancienne. Aux environs de Christianstad, le dépôt crétacé est moins sableux, et renferme des couches puissantes d'nn calcaire gris blanchâtre et gris jaunâtre. A Ignaberg, on a ouvert des carrières dans ce calcaire, jusqu’à une profondeur de plus de 30 mètres, sans en alteindre la partie inférieure. Dans cette localité, ainsi qu'à Balsberg, un peu au nord deChristianstad, les couches sont chargées de dépouilles de mollusques, dont les principales espèces, signalées principalement par M. Nil- son, sont : Ammonites Slobei; Baculites anceps; Belemnites mucronatus, B. ven- tricosus ; Arca exaltata N., A. rhombea N.; Pectunculus lens N.; Catillus Cuvieri ; Pecten quinquecostatus, P. seplemplicatus, P. arcuatus, P. multicostatus , P. pulchellus, P. virgatus, P.subaratus, P. serratus, P. dentatus, P. lineatus ; Lima punciata, L. semisulcata, L. ovata, L. granulata, L. elegans, L. truncata, L. denticulata, L. lamellata N.; Ostrea arietina, O. laciniata, O. vesicularis, 0. hippopodium, 0. curvirostris, O. acutirostris, 0. lanata, 0. diluviana, O. Frons, 0. semiplana, O. auricularis, O. haliotidea, O. clavata, O. incurva, O. flabelh- (4) Voir les Petrificata suecana. C'est M. Nilson qui a qualifié, comme étant nouvelles, les espèces dont le nomest suivi de la lettre N. Soc. GÉOL. — 2° SÉRIE. T. VI. — Mém. n° 1. 25 494 CONSTITUTION GÉOLOGIQUE (N: tp. 194.) formis et O. plicata; Terebratula longirostris, T. semiglobosa, T. pulchella, T. minor N., T. rhomboidalis N., T. Defrancü, T. alata, T. octoplicata, T. pecti- ta, T. triangularis, T. costata; Crania spinulosa N., C. tuberculata N., C. nummulus ou Brattemburgensis, C. striata ou Ignabergensis. On trouve dans les mêmes couches quelques échinides, notamment Salenia areolata et Caratomus peltiformis. y a aussi quelques débris de zoophytes, ainsi : le Stephanophylla, où Discopsammia suecica. Parmi les espèces de mollusques citées plus haut, il en est plusieurs que nous avons déjà citées à Kôüpinge, près d'Ystad ; d’ailleurs ces espèces appartiennent presque toutes à l'étage de la craie blanche {étage sénonien de M. A. d'Orbigny), quoique les couches qui les renfermentaient plus d’analogie pétrographique avec la craie tufeau. Cependant les couches arénacées situées à l'Est d’Ystad paraissent être les plus anciennes ; celles des environs de Christianstad sont probablement un peu plus modernes, et celles que l’on observe aux alentours de Malmü paraissent être encore plus récentes, du moins à en juger d’après l'aspect pétrographique ; c'est seulement dans cette dernière localité que l'on trouve de véritable craie blan- che, renfermant des rognons interstratifiés de silex noir et des échinides (Spa- tangus où Micraster coranguinum et Ananchytes semiglobus) qui sont souvent silicifiés. Dépôts quaternaires et dépôts modernes. Pendant la série des périodes secondaires, la Scandinavie était à l’état de con- tinent; seulement, pendant les époques jurassique et crétacée, une petite portion du midi de la Suède s’est trouvée submergée; mais elle a été ensuite exondée, et est restée à l’état de terre ferme pendant la période tertiaire. Toute- fois, dans le laps de temps qui a séparé cette période de l’époque actuelle, une grande partie des régions scandinaves aététemporairement submergée ; c'est aussi dansl'intervalle des périodes tertiaire et quaternaire qu'ont été formés ces dépôts que l’on est convenu d'appeler erratiques, et dont nous avons donné la description dans des mémoires particuliers. Dans l'opinion d’une partie des géologues, ces dépôts auraient été produits par le concours de courants d'eau et de glaces flot- tantes ; mais d’autres géologues attribuent le principal rôle dans ces phénomènes à des glaces terrestres qui auraient alors couvert toute la Scandinavie et la Fin- lande, qui auraient servi de véhicules, et auraient buriné ces sulcatures que l’on observe même dans les parties les plus méridionales de ces contrées, jusque sur les côtes et même au-dessous du niveau actuel de la mer. Sans revenir sur ces questions, je ferai simplement observer que le relief du terrain a subi à cette époque de notables modifications : la surface des inégalités a été comblée, et les matériaux de transport ayant été étendus uniformément par les eaux ont formé un nivellement grossier, et ont produit, même au milieu des régions montagneuses, des plaines unies, à la surface desquelles on voit saillir (N.1,p.195) DE LA NORWÉGE, DE LA SUÉDE ET DE LA FINLANDE. 195 quelques monticules couverts de blocs erratiques. Ces causes ont aussi contribué à Ja configuration de plusieurs lacs de la Suède et surtout de la Finlande. Ces derniers sont généralement allongés du N. N. 0. au S.S. E., c’est-à-dire sui- vant la direction des traînées de débris et des sulcatures qui ont été burinées sur les rochers. Dans les dépôts de transport qui couvrent la surface de la Scandinavie, on trouve en diverses régions, notamment entre Chrisliania et Gôtoberg, ainsi qu'aux environs de Stockholm et d’Upsal, des coquilles semblables à celles qui vivent aujourd'hui dans l’Océan et la Baltique (1), ce qui prouve que ces points ont été plongés sous les eaux de la mer. En outre, on observe, surtout dans les parties basses de la Suède , des collines de sable et de graviers, qui sont allongées en forme de levées ou de digues, et que les Suédois nomment sandasar ; les plus remarquables sont indiquées sur ma carte et se voient entre le lac Wenern et la côte de Stockholm à Gefle : là il y en a neuf ou dix qui ont plusieurs myriamètres de longueur , notamment celles qui s’étendent de l’embouchure du fleuve Dal au lac Mälar. Ces traînées ou bancs de sable ont, sans doute, été formées au sein des eaux de la mer; mais c'est principalement dans des couches de vase situées au- dessus ou à la partie supérieure des dépôts de transport que se trouvent les coquilles marines. En outre, aux environs de Christiania, on observe des Serpules encore adhérentes à des roches polies et striées et des coquilles de Saxicava rugosa à des hauteurs de 60 et de près de 130 mètres au-dessus du niveau actuel de la mer. | Des traces analogues, telles que d’anciennes plages, des terrasses formées dans les eaux de la mer, et des érosions de falaises, se voient sur beaucoup de points du littoral de la Norwése, à diverses hauteurs, et jusqu'à environ 200 mètres au- dessus du niveau actuel de l'Océan ; d’où l’on conclut que dans ces contrées le niveau relatif de la terre et de la mer à éprouvé une série de changements. I est incontestable qu’à la suite de l'époque erratique , une portion du sol de la Scan- dinavie se trouvait sous les eaux, el à éprouvé une émersion qui continue encore aujourd’hui pour la côte orientale de la Suède, et une grande partie du littoral de la Finlande. Je vais ajouter quelques lignes relatives aux dépôts qui sont actuellement en voie de se produire en Scandinavie. Dans un mémoire précédent , j'ai exposé les caractères des moraines , ou accumulations de matériaux pierreux, que forment les glaciers dans les hautes régions du nord de l'Europe, notamment dans le Jus- tedal. Les détritus que les eaux courantes emportent du pied des glaciers et de (1) Parmi les coquilles observées au-dessus du niveau actuel de la mer, on cite les espèces sui- vantes : Murex despectus, M. antiquus, Patella fissurella, P. mamillaris, P. lacustris, Pholas crispita, Mya truncata, Sazicava rugosa, Venus exoleta, Tellina battus, T. triangularis, T. pla- nata, Littorina littorea, Cardium edule, Arca rostrata, Mytilus edulis, Ostrea islandica; i y a aussi des Scapules et des Balanes. 196 CONSTITUTION GÉOLOGIQUE (N: 1, p. 196.) dessus les montagnes ne tardent pas à se déposer dans les lacs où ces eaux vien- nent se clarifier ; de façon qu’en arrivant à la mer elles ne retiennent plus que très peu de particules en suspension. C'est donc surtout dans les lacs que s'opère la sédimentation : en même temps le concours de causes organiques et d'actions chimiques produit au sein de ces dépressions des dépôts particuliers. La couche d’eau qui s’y trouve est souvent peu épaisse, et les marais ne sont pas moins nom- breux en Scandinavie que les véritables lacs. Les plantes aquatiques qui s’y dé- veloppent engendrent par leur accumulation de vastes dépôts de tourbe où s'en- fouissent des coquilles terrestres et fluviatiles, avec des os des Mammifères du pays environnant. Néanmoins des couches de tourbe un peu plus anciennes ren- ferment des restes de quadrupèdes qui n’habitent plus la contrée; ainsi dans les tourbières du midi de la Suède on a trouvé des os de Rennes , d'Élans , de Cas- tors, etc. [l se produit, en outre, des dépôts contemporains de minerai de fer : l'oxyde provenant de la dénudation des amas de minerai et de l'oxydation des pyrites se dissout à la faveur des acides produits par la décomposition des matières végétales ; mais bientôt après il se précipite de nouveau à l'état de sous- sel insoluble, à mesure qu'il se suroxyde sous l'influence de l'air ; en se déposant sous forme gélatineuse, il englobe des Conferves et des carapaces d'Infusoires ; puis il se concrétionne, s’endurcit peu à peu, et engendre des dépôts de minerai de fer hydroxydé, composé de plaques et nodules de formes diverses. FI se produit aussi en quelques points des dépôts de tuf calcaire : ainsi M. Hisinger en a cité un près de Svenstorp, en Scanie, sur la lisière des paroisses d'Ingelsta et d'Herresta. Ce dépôt, qui offre des concrétions stalagmitiques, et où sont enfouies des coquilles d'Hélice, des os de Sanglier et des bois de Cerf, ainsi que des feuilles de Bouleaux et de Saules, se trouve près de la formation crétacée d'Ystad, et il me semble être produit par des sources qui lui ont emprunté du carbonate calcaire. Telle est, sans doute aussi, l'origine d’une couche analogue de tuf calcaire que l’on trouve dans le Jemtland , près d'Odensala , à l'embouchure d'un ruisseau dans le lac d'Ostersund ; là existe, comme nous l'avons vu, une for- mation silurienne contenant des bancs calcaires. EXPLICATION DES PLANCHES. PLANCHE I (deux feuilles). CARTE GÉOLOGIQUE ET MÉTALLURGIQUE DE LA SCANDINAVIE, avec vues et coupes géologiques indiquées ci-dessous. Cette carte est à l'échelle de 4555 ou de 1 millimètre pour 1830 mètres. FIG. 1. Coupe géologique du terrain silurien du Jac d'Ostersund (province du Jemtland, en Suède, à l'échelle de + pour les hauteurs, et 554 pour les longueurs. L’échelle est la même pour les figures 3, 8, 9 et 40. @.1,p.197) DE LA NORWÉGE, DE LA SUÉDE ET DE LA FINLANDE. 197 A. Granite à gros grains, appartenant au terrain primitif. S. Dépôt superficiel de sable et graviers, formant le terrain erratique ou diluvien. 2. Quartzite paraissant former la base du terrain de transition; il a une apparence métamor- phique ; il est gris-blanc, translucide, subcompacte ; en quelques points j’v ai vu intercalés de petits lits de schiste luisant modifié. Il court moyennement au N. N. E., avec forte pente au N. O. 3. Schiste noir, ampéliteux. L. Calcaire gris et gris noirâtre, compacte ; aux environs de Skatgärd il renferme une multitude de grands Orthocères, ayant jusqu’à 1 décimètre de largeur et 50 centimètres de longueur. Ce calcaire est quelquefois mélangé de schiste ampéliteux. 5. Quartzite qui repose sur la pierre calcaire précédente, et qui, par conséquent, paraît former une assise différente de celle n° 2. 6. Schiste argileux gris et gris bleuâtre, dont certaines parties sont fissiles, tégulaires, tandis que d’autres passent à une grauvacke à grains fins. 7. Calcaire gris, compacte, mélangé de schiste argileux et argilo-calcaire; il est riche en fossiles ; on y voit des Orthocères, des Spirifères, des T'érébratules, des Cystidées et des Encrines. 8. Alternance de couches calcaires et de couches de schiste argileux, ordinairement fissile, ardoisier. 9. Série alternante de couches de schiste argileux fissile et de grauvacke à petits grains, schisteuse. 10. Grauvacke schisteuse, dont certains bancs sont très quartzeux. La disposition stratigraphique de ces couches offre des variations assez fréquentes ; cependant, en général, leur direction ne s’écarte pas beaucoup du méridien. d. Amphibolite. G. Gneiïss et micachiste formant le commencement du terrain primitif. F1G. 2. Coupe géologique prise entre Maristuen et Nystuen, sur le Fillefield, en Norwége : elle offre une discordance de stratification entre deux systèmes de schistes azoïques, l’un (m) formé de micaschiste et de quartzschiste, l’autre formé de schistes argileux, ampéliteux (a), de schistes feuilletés, chloriteux et siliceux (c). . FiG. 3. Coupe géologique du terrain silurien du lac Miüsen, en Norwége, prise le long de la route de Christiania à Drontheim, par Lillehammer. 1. Schistes gris, luisants, feuilletés, qui forment les environs de Lüsness (un peu plus au N. O. ils sont associés à du quartzite) ; près de ce village, ils courent entre l'O. et l'O. N. O., avec pente de 20 à 40° au N.; ils appartiennent à la formation des schistes semi-cristallins. 9, Couches calcaires formant, à 4 kilomètre environ au S. de Lôüsness, un rocher assez élevé; c’est un calcaire gris bleuâtre, subcompacte, offrant beaucoup de lames et veinules de spath cal- caire ; il ne diffère en aucune façon des calcaires siluriens fossilifères, même il m'a seniblé y voir des traces de fossiles, mais peu distinctes; les circonstances ne m'ont pas permis de m'’ar- rêter en ce lieu assez longtemps pour m’en assurer d’une manière positive. Ces couches calcaires me paraissent faire partie du terrain silurien du Miôsen , et être situées à la limite de ce ter- rain. Leur stratification est un peu ondulée, peu écartée de l’horizontalité, mais avec un pen- dage plutôt au N. qu’au S. Ici les caractères stratigraphiques ne seraient pas assez tranchés pour fixer la ligne de démarcation entre les deux terrains; c’est surtout sur des différences pétrographiques que je me fonde. Les roches situées au S. de Lüsness sont beaucoup moins cristallines, renferment des masses de pierre calcaire compacte et de grauvacke à grains moyens et à gros grains, qu'il est impossible de distinguer des roches siluriennes. À ces roches calcaires sont associés des lits de schiste argileux d’un gris bleuâtre, foncé. 3. Longue série de couches calcaires, d’un gris foncé, un peu schisteuses, offrant une multitude 198 CONSTITUTION GÉOLOGIQUE (N. 1, p. 198.) d'amandes ou noyaux ovoïdes, gros comme des pois ; la structure en est généralement lamel- leuse (1). Ces couches forment sur la rive gauche du Lougen plusieurs monticules de formes arrondies. k. Schiste argileux d’un gris bleuâtre , parfois mélangé de lits ou de parties calcaires: il court d’abord entre l'E. 5° N. et V’E., avec pente de 15 à 25° au N. 5. Couches de grauvacke et de schiste, mélangées en divers points de lames calcaires; la grau- vacke renferme, en général, beaucoup de grains de quartz gris, qui sont parfois assez gros ; alors elle se rapproche du poudingue ; ailleurs elle passe à un grès, qui est ordinairement un peu schisteux. La direction de ces couches oscille de l'O. à l'O. 20° N., et leur pente varie de 0° à 35 et 40° au N. — Ces couches se prolongent jusqu’à la ville de Lillehammer, chef-lieu du Hede- mark ; mais, aux alentours de cette ville, l'inclinaison est plus considérable que dans les parties situées plus au nord. 6. Assise épaisse de grès quartzeux, accompagné d’un peu de schiste et de grauvacke schisteuse ; la direction est généralement comprise entre l’O. et l'O. 15 à 20° N. ; souvent les couches sont verticales, et leur pendage, qui a licu au N. E., est habituellement supérieur à 45 degrés. 7. Grauvacke schisteuse, à grains fins, grauvacke à grains moyens, et schiste argileux en couches alternantes. | 8. Couches de poudingue passant au conglomérat, formées principalement de galets de quartz, dont la largeur varie de quelques centimètres à 2 et 5 décimètres. — Ce poudingue offre une succession de bancs de gros galets et de bancs formés de petits noyaux, passant à un grès à gros grains; ils sont aussi mélangés de couches de schiste argileux d’un gris foncé, gris noirâtre, et de grauvacke quartzeuse. Comme précédemment, la pente est encore vers le N. de 55 à 70°; la direction est un peu changeante, mais ordinairement comprise entre l'O. et le N. ©. Ces couches se prolongent jusqu’à peu de distance au N. du bourg de Ringsager. 9. Schiste argileux dont la direction est un peu variable, et qui plonge au N. de 60 à 90°. 10. Alternance de calcaire fossilifère, de schiste argileux et de grauvacke, d'un gris foncé, gris noirâtre. Ces couches offrent des directions peu régulières, mais continuent à plonger au N. 11. Couches alternantes de grès quartzeux, de grauvacke et de schiste, à stratification variable, 12. Couches calcaires fossilifères , associées à du schiste argileux et à de la grauvacke schisteuse ; ces roches offrent des directions qui diffèrent sensiblement de celles observées aux environs et au N. de Lillehammer, car elles sont habituellement comprises entre l'E. 10 et l'E. 30° N. ; mais l’inclinaison continue à être généralement vers le nord ; cependant, près du relai de Fro- gner, la pente est de 70 à 75° au sud; en d’autres points, elle est presque verticale. — Ces couches calcaréo-schisteuses, que je considère comme situées à la base du terrain silurien de cette région, se prolongent depuis les environs de Biœrke jusque auprès de Nükleby, où cesse le terrain silurien, qui est remplacé par du gneiss. Le contact des deux sortes de formations n’est plus ici visible, car en cette partie les affleurements sont cachés par je dépôt de sable dilu- vien (s). 13. C’est presque immédiatement au S. du relai de Nôkleby que l’on voit affleurer du gneiss, dont les feuillets presque verticaux courent d’abord à l'E. 8° N., puis à l'O. 30 à 35° N. Il est accompagné de granite, dans lequel on distingue des cristaux d’oligoclase. FIG. 4. Vue de la montagne de Luppiovara, en Laponie, sur la rive droite du fleuve Tornea; elle est formée de granite à gros grains, et elle offre la structure en gradins comme les roches de trapp. FiG. 5. Coupe verticale de la mine de fer de Silbôüle située aux environs d’Helsingfors, en Finlande. FIG. 6. Coupe horizontale de la même mine. — Ces deux coupes montrent les relations de contact (4) II est possible que la structure amygdaline de ces calcaires soit due à des débris organiques, de même que dans le marbre campau des Pyrénées. {N. 1,p.19) DE LA NORWÉGE, DE LA SUÉDE ET DE LA FINLANDE. 199 du gneiss, du granite à gros grains et du fer oxydulé, qui est ici associé à des roches ampbhiboliques. : FIG. 7. Coupe géologique du terrain silurien des environs de Brévig (Norwége méridionale), à l’échelle de pour les hau‘eurs et 55655 pour les longueurs. 1. L. FIG. Gneiss quartzeux et peu micacé, intimement mélangé de granite gris, tirant sur le rouge clair, dont l’aspect est souvent subpétrosiliceux. — Le gneiss court à l'E. N. E., avec pente de 70 à 80° au S. E. Roche dioritique, formant un banc épais de 4 à 5 mètres, placé à la séparation du terrain pri- mitif et du terrain silurien; elle offre un mélange de lamelles d’hornblende d’un noir verdâtre, et de lamelles feldspathiques très allongées et entrecroisées, qui paraissent formées d’albite : elles sont concentrées autour de certains points, où elles forment des espèces de rosaces, à struc- ture radiée. Quartzite formant la base du terrain silurien, et reposant, à stratification évidemment trans- gressive, sur le terrain primitif, car il court à peu près du N. N. O. au S.S. E., et incline seulement de 8 à 10° vers l'E. Ce quartzite, qui forme une assise épaisse de 12 à 45 mètres, est à grains très fins el très serrés, à cassure inégale, subesquilleuse ; il se divise en couches régu- lières, de 20 à 50 centimètres d'épaisseur, et diffère tout à fait par ses caractères du grès d’'Holmestrand, qui paraît correspondre au vieux grès rouge. Schiste ampéliteux et alunifère, d’un noir foncé, très schisteux en certaines parties, présentant ailleurs une cassure conchoïde; il forme une assise épaisse d'environ 8 mètres. On y voit une assez grande quantité de pyrite de feren rognons, en veinules et en plaques interstratifiées. C’est cette assise schisteuse qui renferme des Trilobites appartenant au genre Olenus. On y trouve, d’ailleurs, principalement vers sa partie inférieure, dés lits peu épais de calcaire noir, à petites lamelles, ainsi que des veines et rognons de spath calcaire noir, à très grandes lames (anthraconite). Série de couches argileuses, argilo-quartzeuses et argilo-calcaires, ordinairement d’un gris foncé, quelquefois noires : ces couches sont compactes, à cassure inégale, douées d’une schis- tosité faible et souvent nulle. Dans la partie supérieure, il y a des plaques et lentilles de quartz grenu, gris blanchôtre, et des rognons consistant en un mélange de parties argileuses, quartzeuses et calcaires. Les couches les plus élevées alternent avec des bancs de calcaire grenu, gris-clair, et vert pomme, très siliceux et qui, dans certaines parties, offre une masse de grenats allo- chroïtes, à l’état rudimentaire, colorés en vert par de l’oxyde de chrôme. Quelques-unes de ces couches calcaires contiennent des Encrinites. Formation calcaire épaisse d'environ 70 à 80 mètres. A sa base, elle offre, comme nous venons de le voir, un passage et une alternance avec les couches de Ja formation argilo-quartzeuse et argilo-calcaire sous-jacente. L’assise calcaire inférieure, épaisse de 12 à 15 mètres, est exploitée à Troswig pour la fabrication de la chaux ; elle présente des couches noires, dont la texture varie de l’état compacte ou grenu à l’état lamelleux. On y observe une intercalation de quelques lits argileux très minces, bruns ou d’un gris foncé. Au-dessus s'étend une succession de couches calcaires, de couches argileuses, compactes et de couches siliceuses ; d’ailleurs la pierre calcaire de cette assise est fortement modifiée; elle est en général très siliceuse ou grenatifère, chargée de grenats verts (allochroïte) : elle serait impropre à la fabrication de la chaux. C’est sur ce terrain qu'est bâtie la petite ville de Brévig. . Syénite zirconienne à grandes parties, formant plusieurs îles aux environs de Brévig, et con- stituant le côté oriental du golfe. C’est évidemment à l’influence de cette roche qu'est due l’ac- tion métamorphique éprouvée par la formation calcaire, qui se trouve du côté opposé. 8. Coupe géologique s'étendant de la vallée du Gruvedal (au midi de Drontheim, sur le Dovre- field ) jusqu’à Lôsness, dans la vallée du Lougen (Norwége). 200 CONSTITUTION GÉOLOGIQUE CN: 1 p. 200.) 4. Gneiss dont sont formés les flancs de la vallée du Gruvedal, à sa jonction avec celle du Repdal; il court entre le N. etleN. E., avec pente de 45 à 50° au N. ©. 2, Gneiss porphyroïde, contenant une grande quantité de noyaux formés d’un mélange de feldspath et de quartz; il court entre le N. 10 et 30° E., avec pente de 60° au N. O. 3. Gneiss accompagné de micaschiste et de schiste amphibolique ; il court entre le N. et le N. N. O., avec forte pente à l’O.; il s'y trouve un dépôt de minerai de cuivre pyriteux. h. Schiste micacé, amphibolique et grenatifère (avec grenats d’un rouge brun), en couches subordonnées au gneiss, et imprégnées de pyrite cuivreuse, de cuivre panaché et de pyrite ma- guétique. Ce minerai de cuivre était exploité lorsque j'ai visité la vallée du Gruvedal (en 1845). La direction générale est au N. N. E., et l’inclinaison est presque verticale. 5. Gneiss accompagné de schiste micacé et de schiste amphibolique ; il court d’abord entre le N. etle N. N. O., puis la direction se rapproche du N. N. E.; il plonge de 50 à 60° à l’est. 6. Mêmes schistes cristallins, formant le pied de l’escarpement qui termine la vallée du Gruvedal; ils courent à l'E. N. E., avec pente de 60° au S. E. 7. Gneiss porphyroïde, contenant des noyaux quartzo-feldspathiques larges de 2 à 3 centimètres ; il court au N. E., avec pente de 60° au S. E. Un peu plus loin, sur le haut de l’escarpement terminal, la direction du gneiss varie entre le N. N. O. et l'O. N. O., et le pendage est de 60° à 70° au N. E. 8. Gneiss porphyroïde, analogue au précédent, avec des noyaux de la grosseur d’un œuf; sa direc- tion moyenne est d’abord au N. N. E., puis elle varie entre le N. N. E. ct le N. E., avec pente au S. E., généralement peu considérable. 9. Gneiss formant, du côté nord et nord-ouest, le pied du massif du Sncehättan ; sa direction est généralement comprise entre l'E. et le N. E.; sa pente varie de 30° à 90°; elle est presque tou- jours au S. E., rarement au N. O. 10. Gneiss très quartzeux, formant la cime du Snechättan, qui est recouverte, dans une grande partie de sa surface, d’un manteau de neige; la direction des couches est ondulée, comprise entre l'E. etl'E. 30° N.; elles paraissent être fortement inclinées des deux côtés de la verticale. 41. Gneiss s'étendant à l'E. et au S. E. du Snechättan ; sa direction varie entre l'E. et le N. E.; sa pente est au S. E., en général assez forte. ) 12. Schistes cristallins, intermédiaires entre le gneiss et le micaschiste. On y voit des bancs très quartzeux, passant au quartzite schisteux et d’autres porphyroïdes, chargés de noyaux quartzo-feldspathiques. La direction est à peu près la même que tout à l'heure, mais la pente devient plus forte. L 13. Schistes gris, feuilletés, micacés, s'appuyant à stratification concordante sur les schistes n° 12 ; ils courent, en général, à l'E. N. E., avec pente au S. E. Leur inclinaison est un peu considé- rable à l'approche de la masse plutonique ce Fogstuen. 44. Roche syénito-granitique, passant de la syénite au granite ordinaire; elle est, en général, à petits grains, offre un mélange de grains de quartz et de lamelles feldspathiques, qui paraissent formées principalement d’oligoclase, ou d’albite, avec des lames ou fibres d’hornblende verdûtre, et avec du mica brun et verdâtre. 45. Schiste feuilleté, analogue au n° 13, en couches presque verticales, dont la direction varie de VE. 10° N. à l'E. 30° N. 16. Schiste micacé gris, gris verdâtre et gris jaunâtre, très brillant, à petits feuillets, courant entre l'E. 20 et 30° N., avec pente au N. O. Un peu au S. E. d'ici, sur Je flanc droit de la vallée du Lougen, le micaschiste contient quelques grains feläspathiques, et se rapproche ainsi du gneiss. 47. Schiste micacé, semblable au n° 16, très ondulé, continuant à plonger à l'O. 18. Schiste micacé, poudingiforme, contenant une multitude de noyaux de diverses grosseurs, (W.1,p.201) DE LA NORWÉGE, DE LA SUËDE ET DE LA FINLANDE. 201 dont beaucoup ont l'apparence de cailloux roulés; ils sont formés de granite ou pegmatite, de gneiss et de quartz blanc. La stratification paraît être peu régulière, très ondulée. 49. Schiste feuilleté, micacé et chloriteux, d’un gris verdâtre, variant en direction du N. 100 . au N. O., et plongeant en général au N. E. 20. Assise épaisse de quartzite schisteux, formant les flancs de la vallée du Lougen-Elv, depuis Lauergaard jusqu’au point où vient y déboucher le torrent dit Ulen-Elv : sa direction est un peu variable, mais habituellement voisine de l'O. N. O. ou du N. O. La pente est au N.E., près de Lauergaard, puis elle passe au S. O. 21. Schiste gris et gris bleuâtre, luisant, feuilleté, passant du schiste argileux au micaschiste ; il est dirigé dé même que le quartzite n° 20, auquel il est superposé. Il plonge d’abord au S. O., puis au N. E. ( près de Solheim et au delà). 22. Puissante série de couches de quartzite, fréquemment un peu schisteux : il renferme très souvent de petits feuillets verts, chloriteux, ainsi que des lits de schiste feuilleté et des couches de pierre ollaire; j’y ai aussi observé des bancs calcaires subordonnés, à 3 ou 4 kilomètres au S. de Solheini ; la direction des couches varie, en général, du N. N. O. au N. O., avec pente de 20 à 60° au N. E. 23. Assise de schiste luisant, feuilleté, se rapprochant du schiste chloriteux et du schiste micacé. Près de Froen, c’est un schiste tégulaire, qui peut être employé comme ardoise; la stratification est comme dans le numéro précédent. 24. Quartzite analogue au n° 22, contenant quelques couches subordonnées de schiste luisant, feuilleté; sa direction est ordinairement comprise entre l’O.:ct l'O. 40° N.; pente de 20 à 45° au N.E. 25. Couches alternantes de quartzite et de schiste, stratifiées comme le n° 24. 26. Assise de schiste gris bleuâtre, luisant, feuilleté, ressemblant à du schiste argileux, modifié ; sa direction varie entre le N. N. O. et l'O. ; la pente est de 25 à 35° au N. E. et au N. 27. Schiste gris, très fissile, tégulaire, semblable à de véritable schiste ardoisier ; il court entre l'O. etl’O. N. ©. ; pente de 25 à 35° au N. 28. Assise puissante de quartzite, accompagné de schiste gris, feuilleté ; même direction générale que pour le n° 26; pente de 25 à 50° au N. 29. Schistes gris, luisants, présentant de larges feuillets contournés; les couches sont un peu ondulées, plongent de 20 à 40° au N. 30, Assise puissante de couches calcaires, appartenant au terrain silurien du Hedemark. (Voir la coupe de ce terrain.) Fi. 9. Coupe géologique s'étendant de Stordalen à Drontheim (Norwége). 1. Schiste argileux gris bleuâtre, formant les collines situées au N. de Stordalen , et contenant des couches dé calcaire compacte et subschisteux , en stratification ondulée. 2. Conglomérat formé principalement de Les de roches granitiques, de schiste micacé et de schiste feuilleté. j 3. Schiste argileux gris bleuâtre, un peu luisant, souvent plissé, incliné de 0 à 50° au S. O. et à l'O., parfois ondulé autour de l'horizon. k. Même schiste que le n° 3, associé à du poudingue analogue au n° 2, qui contient, outre les cailloux roulés granitiques, des galets calcaires et quartzeux ; la pente est à l'O. N. O. 5. Couches alternantes de schiste argileux et de calcaire gris, compacte et à petites lames; la direction est généralement comprise entre le N. et le N. N. E. ; la pente est très ondulée, 6. Succession de couches de poudingue analogue au précédent, 5e couches calcaires, de schiste argileux et de grès quartzo-schisteux, avec pente à l'O. 7. Schiste argileux, un peu luisant, gris, gris verdâtre et gris bleuâtre, en couches ondultes, courant entre le N. et le N. N. E., plongeant d’abord à l’O., puis à l'E. SOC. GÉOL. — 2° SÉRIE. T. VI. — Mém. n° 1. 26 202 CONSTITUTION GÉOLOGIQUE ANA, pe 202.) 8. Schiste gris, luisant, feuilleté, contenant en certains points des feuillets de mica noir, et passa ainsi au schiste micacé ; pente variable, généralement à VE. Y. Roche granitique, à grains moyens, très quartzeuse, parfois à structure veinée, à surface mou- tonnée, arrondie et striée par les agents erratiques. — On voit dans le granite et dans les schistes situés aux alentours de Drontheim de l’amphibolite lamelleuse, verdâtre (d); parfois elle est tra- versée en divers sens par des skôlar de chlorite verdâtre; j’y ai remarqué aussi @n filon de granite épais de 10 à 15 centimètres. FiG. 10. Coupe géologique s'étendant du lac d'Ostersund à Vœrdalsüren, dans le fiord de Drontheim (Norwége). ? $. Schiste argileux et grauvacke quartzeuse, à petits grains, en couches ondulées, dont la direc- tion yarie entre le N. et l'O. N. O., et dont le pendage est faible et ondulé ; à l’ouest du lac Liten il est plus généralement vers l'O. que vers l'E. D. Amphibolite lamelleuse, verdâtre. . Gneiss à grains moyens, gris blanc, accompagné de micaschiste, courant moyennement au N. N. E., avec pente de 45° au N. O. . Couches alternantes et ondulées de gneiss à petits grains, très quartzeux, de micaschiste gris, de schiste amphibolique verdâtre, avec du calcaire lamelleux et micacé, gris blanc. . Schiste micacé gris, et schiste amphibolique, plongeant de 30 à 40° à l'E. . Dépôt de sable diluvien, qui cache tout affleurement à l’est de Forssa. . Schiste gris, luisant, subfeuilleté, ressemblant à du schiste argileux modifié; il est évidemment très différent des schistes cristallins qui forment la montagne d'Areskütan, et qui se rattachent à la formation gneissique ; la séparation se trouve un peu à l’est de Forssa; les schistes feuilletés inclinent vers l’ouest. FES 6. Schistes feuilletés, verdâtres, dans la pâte desquels sont disséminés çà et là des feuillets de mica noir ; ils courent au N. 5° E. , avec pente à l'O. 7. Schiste micacé, accompagné de calcaire gris lamelleux, — N. 19° O. 8. Schistes cristallins, en partie compactes, en partie feuilletés et micacés, dirigés au N. quelques degrés E ; pente de 10 à 25° à l'O. 10. Dépôt sablo-graveleux, diluvien. 11. Schiste semblable au n° 9, — N. 30 à 40° E.; pente de 25° au N. O. 12. Dépôt diluvien, sablo-graveleux. 13. Succession de schistes gris, gris verdâtres et gris noirâtres, feuilletés, passant du schiste argi- leux modifié au schiste chloriteux et au schiste micacé; leur direction est variable, mais géné- ralement comprise entre le N. et le N. E., avec pente de 30 à 55° au N. O.; ces mêmes couches s'étendent sur la plate-forme, à surface ondulée, qui sépare la Suède de la Norwége. Ak. Schistes gris, feuilletés; ils contiennent des couches noires, ampéliteuses, un peu à l’est du relai de Suhl. ( Même disposition que précédemment. ) 45. Schistes gris et gris verdâtres, feuilletés, micacés, contenant des bancs de quartzite schisteux, el traversés par des veines de granite à gros grains; ils courent entre le N.et leN. N. E., avec ‘* pente de 50 à 80° à l'E. et à l'O. 16. Schistes gris, quartzeux, passant à la grauvacke quartzo-schisteuse, — N. 15° E.; pente à l'E. 17. Schistes gris verdâtres, subfeuilletés, plongeant de 45 à 60° à l'E. 18. Série épaisse de couches ondulées de calcaire gris et gris bleuâtre, compacte et schisteux, associé à du schiste argileux gris foncé, peu cristallin, seulement un peu luisant et légèrement feuilleté. 19. Dépôt argilo-sableux formant des terrasses dans la petite plaine où se trouve l'embouchure de la rivière de Subhl ou d’Indal dans la mer. LITE 1 Où & © @.1,p.205%) DE LA NORWÉGE, DE LA SUÉDE ET DE LA FINLANDE. 203 FIG. 11. Coupe prise dans la mine de Pitkäranta, sur le côté nord-est du lac Ladoga, en Finlande ; elle présente une masse de granite à gros grains (Ÿ), se ramifiant au milieu d’une roche diori- tique, stannifère et cuprifère (d), au sein de laquelle sont parsemés des nodules de spath- calcaire (A). FIG. 12. Vue géologique prise dans la vallée de Justedal (Norwége), à 6 ou 7 kilomètres en aval du village de Justedal ; elle présente un plexus de filons granitiques, à gros grains, qui traversent une masse de granite ancien, à grains moyens. FiG. 13. Vue géologique prise entre Kahra et Olkola, en Finlande: elle présente des filons de gra- nite rose, à gros grains, qui traversent une masse de granite ancien, gris noir, à grains movens. La partie centrale du filon le plus épais est à grains fins. FiG. 44. Vue géologique prise auprès de Karayaluolo, en Finlande ; elle présente un filon stélli- forme de granite à gros grains, interposé au milieu du granite ancien, à grains moyens et à texture veinée. Fi1G. 15. Vue géologique prise un peu au nord-est des mines de cuivre et d’étain de Pitkäranta, sur le côté nord-est du lac Ladoga, en Finlande ; elle présente un filon de granite à gros grains, dont la partie médiane est formée de quartz hyalin laiteux, et qui traverse une masse de gneiss et de gra- nite ancien, à petits grains. FIG. 46. Vue géologique prise entré Kafvabôüle et Helsinge, en Finlande; elle présente des lits con- tournés de gneiss, entre lesquels se sont injectées des veines de granite à gros grains. FiG. 17. Vue géologique prise entre Kafvabüle et Helsinge, en Finlande; elle présente des couches et lambeaux de gneiss interposés dans le granite à gros grains, et en même temps des veines et fodules granitiques, situés au milieu du gneiss. F1G. 18. Vue géologique prise auprès d’Abbors, en Finlande ; elle présente des filons de granite à gros grains (Ÿ) interposés dans le gneiss (G). F1G. 19. Coupe verticale d’un monticule de gneiss et de granite prise entre Kuttila et Lappayärvi, en Finlande. FIG. 20. Coupe verticale prise entre Nuchars et Kafvabôle, en Finlande; elle présente un monti- cule.de gneiss grenatifère et de granite à gros grains, dont la surface est arrondie et polie par les agents erratiques. F1G. 21. Plan géologique des îles Passa-Saari et Kanda-Saari, dans la partie nord-est du lac Ladoga, en Finlande. On y voit un monticule de granite ancien, en forme de dôme, qui'a soulevé des couches alternantes de roches cristallino-schisteuses, schiste micacé, schiste amphibolique, cal- caire cristallin et graphite. Ces couches sont disposées en forme d’enveloppes concentriques autour du dôme granitique. FiG. 22. Coupe verticale de l’île Passa-Saari. F1G. 23. Plan géologique de la partie méridionale de la montagne de Haukkaselka, située sur le côté nord-est du lac Ladoga, en Finlande: il présente une masse de granite à gros grains, qui s'est injecté au milieu de couches de schiste micacé (H), de schiste amphibolique (A) et de mica- schiste (MCA), contenant des veines interstratifiées de calcaire lamelleux, avec trémolite. F1G. 24 et 25. Coupes et projections verticales de ladite montagne de Haukka-Selka. FiG. 26. Coupe verticale de la carrière d'Oppivara, sur le côté nord-est du Jac Ladoga, en Finlande ; elle présente des veines de fer oxydulé et de serpentine interposées au milieu de couches d’un calcaire cristallin : au contact de ces veines on trouve de l’idocrase et plusieurs autres minéraux. 204 CONSTITUTION GÉOLOGIQUE, erc. (N°4, p. 204.) PLANCHE II. COUPES GÉOLOGIQUES ET OROGRAPHIQUES DE LA SCANDINAVIE. FiG. 4 et 2. Coupe géologique et orographique de la Scandinavie, s'étendant de Bogstad, au fond du Dalsfiord (côte de Norwége sous 61° 15’ de latitude), au littoral d'Huddikswall, dans le golfe de Botnie, sous 61° 42’ de latitude. — Dans cette coupe et dans la suivante, l’échelle des longueurs est d’un millionième et l'échelle des hauteurs est double; celles-ci sont comptées à partir de la ligne horizontale qui représente le niveau de la mer. La coupe (fig. 1 et 2) passe par le plateau da Justedal, l’un des plus élevés de la Norwége, et par les plus hautes sommités du nord de l’Europe (les Skagstülstinden, Galdhôüpiggen, Glittertinden et Nautgardstinden). On voit qu’il y a, pour ainsi dire, trois zones de faîtes, séparées par des dépressions : 1° la zone du Justedal, consistant en gneiss: 2° celle des Galdhôpiggen, formée de syénite; 3° celle de Herjehägna, composée de grès paléo- zoïque. Celle-ci forme la séparation entre la Norwége et la Suède, et, à partir de celle-ci, le sol présente un plan incliné vers le golfe de Botnie. FiG, 3 et h. Coupe orographique et géologique de la Scandinavie, s'étendant de l’île d'Hareiland, à l'entrée du Storford (côte de Norwége, sous 62° 20 de latitude ), à la plaine littorale située un peu au midi de Sundswall, dans le golfe de Botnie, sous 62° de latitude, — Cette coupe traverse, comme la précédente, trois zones de faîtes : celle de Brôste, dans le Langfield, celle du Sneebättan, sur le Dovrefield, consistant en gneiss, comme la première, et celle de Svukufeld, composée de schistes feuilletés, semi-cristallins ; cette dernière forme le prolongement de celle de Herjehägna, et est limitrophe entre la Norwége et la Suède. TABLE DES MATIÈRES CONTENUES DANS CE MÉMOIRE. Introduction : Objet et plan du mémoire, note RÉIOTIQUE NT LE te DÉPCRIPTION OROGRAPHIQUE- LM Ve Ole le ee Loue + e «la. e configuration orographique de la Finlande, de la Suède et de la Norwége. . . . Caractères propres aux montagnes de la Scandinavie . . . . . . . . . . Division en deux groupes des montagnes de la Norwége et de la Suède occidentale. Groupe de pics de l’Iôtunfeld. Montagnes situées au midi. . . . . . . . . Montagnes situées à l’est et au nord de l’Iôtunfield. . . . . . . . +. . . Configuration orographique du Dovrefield. Fausses idées des géographes. . . . Montagnes du groupe septentrional, formant la zone limitrophe suédo-norwégienne. Comparaison avec les montagnes du groupe méridional. . . . ,. . . … . Prolongements des montagnes de la presqu'île scandinave. . . . . . . . . Multiplicité des lacs et des marais en Scandinavie. . . : . . . . . . . DESCRIPTIONAGÉOEOGIQUE EM CR OS Classement des terrains de la Scandinavie en cinq groupes. . . . . . . Groupe des schistes cristallins ou terrains primitifs. . . . . . . . . ; Description pétrographique du gneiss primitif. . . . . . . . . . . . Roches cristallino-schisteuses qui en dérivent et minéraux y contenus. . . . . Roches cristallino-calcaires de la Scandinavie et minéraux y contenus. : Bandes calcaires d’Aker, du golfe de Nykôping. . . . . . . . . . . . Masses calcaires dans le terrain primitif de la Norwége. . . . . . . . . . Masses calcaires de la Finlande riches en minéraux. . . . . . . . . . . Roches cristallino-schisteuses au N. E. du lac Ladoga. . . . . . . . . . Origine probable du gneiss de la Scandinavie. . . . . . . . . . . . Minéraux métalliques contenus dans ce gneiss. . . . . . ,. . . . . + Ordre de succession des roches constituantes. Puissance du terrain primitif, . . Directions dominantes et inclinaisons des roches primitives dans les diverses régions du nord GEDEURO PC Ne MARS 2e, elle al Ver -cyue | leii ee dues Caractères des roches offrant un mélange de granite et de gneiss. . . ,. . . . Deux espèces de granite contenues dans le terrain gneissique de la Scandinavie. +. Relation de contact de ces deux granites, leur âge. . . . . . . . . Rapakivi ou granite pourri des Finlandais. . . . . . . . . . . . . Observations sur le développement du granite à gros grains. . . . . . . . Roches amphiboliques et syénites dans les terrains primitifs. . . . . . . . Roches amphiboliques et diallagifères du Sogneford et des environs de Bergen. . Roches nommées norite par Esmarck. Leurs gisements. . . . . « . . +. . GDOUPE DES SCHISTES SEMI-CRISTALLINS. . . . . . « + + © +1 » Existence de plusieurs étages ; leur composition générale. . . . . . . . . Comparaison avec les roches paléozoïques. Origine de l'aspect cristallin. . . . 206 TABLE DES MATIÈRES (N.1, p. 206.) Relations de contact des schistes semi-cristallins et du terrain gneissique. Disposition géographique des dépôts de schistes semi-cristallins. . . ec Formation de quartzite, avec schistes semi-cristallins, du Nummedal et du haut Tellemark Pétrographie, stratigraphie de cette formation, et gîtes métallifères. Formations quartzo-schisteuses de la Scandinavie centrale. . . . . . Configuration topographique et orographique de ces formations. . Constitution géologique du Jemtland. . . . . Au TR LC Terrain semi-cristallin entre la région d’ Areskutan et Le golfe de Droniein! s'ARNSIUR Roches calcaréo-poudingifères sur le littoral. . . . . . . . . ART ee Contrée de Rüraas et région limitrophe de la Suède. . . . . . . NL . Étendue et disposition des roches schisteuses sur le Dovrefield. . . Schistes argilo-feuilletés, syénites, micaschiste-poudingiforme, . . . . . 0 . . . Assises de quartzite et de schistes feuilletés du Guldbrandsdal, . , . , , , . . . Roches semi-cristallines du Fillefield et du Valders. . . . . . . . . . . . . Exemples de superposition concordante des schistes semi-cristallins par rapport au gneiss. . Exemples de superposition transgressive. . . . . . . .. . . MERE CAVE Schistes semi-cristallins dans le sud-ouest de la Norwége. . Dépôts de grès et conglomérat entre; le Sognefiord et la côte de DOM Un APS me Formations calcaires, quartzo-sthisteuses et poudingifères du Finmark septentrional et de la L'aponieicentrale ER RE DR PNR DA 4 Le de Disposition remarquable des roches de l’'Altenfiord. . . . . . . . . 16: Constitution géologique de l’intérieur de la Laponie. . . . LEONE * : Roches cristallino-schisteuses bordant à l’ouest le terrain quartzo- Mate #5 “ee ; Roches diallagiques de la Norwége septentrionale. . . . TRE JA Remarques générales sur les formations quartzo-schisteuses et poudingifères du on Formations quartzeuses et calcaréo-schisteuses des environs de Tornéà. . ÉTUDE DES DISLOCATIONS DES TERRAINS AZOÏQUES. . ; CHANT VAN dE Multiplicité des directions des roches schisteuses et des accidents ne nie Directions du terrain gncissique d’Arendal, de Kongsberg. . . . . RTE A 0 Directions des schistes cristallins et des gîtes de minerais de fer de la Suède centrale et orientale. Directions du terrain gneissique de la Sudermanie et de l'Ostrogothie, . . . . Directions du terrain gneissique de la Laponie méridionale et de la Finlande. . Directions du terrain gneissique du S. ©. de la Suède et du S. E, de la ANPHE . Direction du terrain gneissique de la région d'Areskutan, . . . . è : Directions des schistes semi-cristallins du Jemtland, du Herjedal et du territoire norwégien adjacent. . . . AE - Zone calcaréo- otre et Jos de la Here de TNT ANSE VA Directions du gneiss du Dovrefield et du Romsdal. . , . . . . . . . : Directions des schistes semi-cristallins du Dovrefeld oriental. . . . . . . . . . . Directions du gneiss du Langfield et du Justedal. . . . . . . . . . . . Directions du gneiss des montagnes adjacentes au Sognefñord. . . . . . . . . . Directions des roches quartzo-schisteuses du Guldbrandsdal. . . . . . . . . . . Détermination précise des directions des nouveaux systèmes de dislocations. . . . . . . Développement relatif des divers systèmes. . . . . . . . SN EE Leur influence relative dans la formation des rides du sol de la ue : de - Leurs traces dans les diverses régions de la Norwége, dans le Finmark, la Laponie se nale, le Nordland, le S.-0. de la Norwége, le Nummedal et le haut Tellemark. . . . Ages relatifs de ces divers systèmes. . . . . . . . 61 62 63 64 68 69 70 71 74 77 80 82 86 88 ELU 92 94 95 (N: 1, p. 207.) CONTENUES DANS CE MÉMOIRE. 207 TERRAINS PALÉOZOÏQUES DE LA SCANDINAVIE. . . . ER 0 le OIL Distribution géographique, des dépôts paléozoïques de la ae RD DS ce io Région paléozoïque des environs de Christiauia ; sa configuration. . . . . . . . . . 157 Position transgressive des couches siluriennes au-dessus du gneiss. . . . . . . . . 159 Pétrographie et stratigraphie des terrains silurien et dévonien. . . . . . . . . . . 159 Granite amphibolique et zirconifère. Ms ls ii ni, en cs von AO! Porphyre rhombiqueret.porphyre pyroxénique.- = … .. . ©: à: . … . .,. 166 Roches euritiques. — Roches dioritiques. . . Re LL Dislocations éprouvées par les dépôts paléozoïques dk Host de Christiania, 3 EL TE E Considérations, générales sur ces formations. . ., . “. . . . . . . .... . . . 147h Terrain silurien du lac Miôsen ou du Hedemark. . . . . 176 Dépôts paléozoïques de la Dalécarlie et de la partie eee du A — Fi. porphyriques. . . ee NC cms: AOÛ Terrain silurien du ntandl 7 RTS EU SU NUE: NE DEAN E) Dépôts siluriens du midi de la Suède. Cure pérogrphique et dent es 5 à ARE Dislocations qu’ils ont subies. . A PU tetes NO sens TS DÉPÔTS JURASSIQUES ET CRÉTACÉS DU MIDI DE LA En SA MES CES SN OR ee LES LI COUP D’OELL SUR LES DÉPÔTS QUATERNAIRES ET LES DÉPÔTS MODERNES. . . . . . . A9A ÉMDPICNTIONNDESSPLANCHES MR RS Ne ne si. ee Sn OT à où à 1906 FIN DE LA TABLE. à Là ' er T< " Lo w ! ou d'a da . LE A" L à + "A » æ L L a | ! - : 4 ? " « i | AL Fos D il , Ne LA WE S LAN Ne AUTRE ) ï 1:20 Yair | M 214 "# | 0 red » 7 x A4 È e MAN n'€ . Ni Pair | re 1 + A } »” GE [9 ‘si : " | . ñ | Da x 1 » Ar ? Mu ï AVI A 4 5 M . { n è . 2 À g Cr CL: dl . ul ! tire De L p à ' e" J | : no LA ' + nl h À 4e u'a.s des ] t ; n ÿ ou 21 , 8 Le f NE du i ù W ls 4 " ñ ‘ à £ + AA « l ROUTES . Ex TR | TE + 1. à LL . 1 t . . : { A sh, 4 " ’ ; il A “a " Ati ) ah } Hi L \ 0 Te « 2 Ne : É 4 L LUE Ï JA LR) ; LT vu , 1 (0 L ï 0 : A Lé ‘ #} , at UM LU ES J r | Le : l s mn . ' u 1 PA hi ’ . Le ’ w f L:: ; | 14 h F Fr ps L g MAS A £ Yi [l L L È E n . L nl ÿ 1 164 ’ 1 : Ur 1 + MÉMOIRES SOCIÉTÉ GÉOLOGIQUE DE FRANCE. hi Lement. La Société déclare qu'elle laisse aux Auteurs la responsabilité des faits et des opinions contenus dans leurs Mémoires. PARIS. — IMPRIMERIE DE L. MARTINET, Jmprimeur de lu Sociète géologique de France, AUE MIGNON, 2. MÉMOIRES SOCIÈTE GEOLOGIQUE DE FRANCE DEUXIÈME SÉRIE Op 2 .\ < DM F ae SALON, “= Cr WALeIne arte, PARIS GIDE, LIBRAIRE-ÉDITEUR ty Il. LES CORBIÈRES. ÉTUDES GÉOLOGIQUES D'UNE PARTIE DES DÉPARTEMENTS DE L'AUDE ET DES PYRÉNÉES-ORIENTALES, Par M. le vicomte D'ARCHEAC. Présentées à la Société géologique de France le 16 mars 1857 (1). mn INTRODUCTION. LL La surface d'environ 400 lieues carrées, qui fait l’objet de ce travail, est nette- ment limitée à l’est par la côte de la Méditerranée, entre l'embouchure de l’Agly et celle de l’Aude; au nord, par une ligne tracée de Capestang à Montlieu; à l’ouest, par une autre ligne tirée de Carlipac à Bessède-le-Sault, de manière à comprendre entre elles le bassin de l’Aude, de Narbonne à Carcassonne, Limoux, Quillan et Axat; au sud, la limite n’est point marquée par un bassin hydrographique, la dis- position des cours d’eau ne s’accordant pas avec les caractères orographiques du pays, mais elle est bien indiquée par la chaîne de montagnes qui, près de Peyres- trotes, commençant à s'élever de dessous la plaine de Rivesaltes, se dirige à l’ouest en (1) Nous avons publié successivement plusieurs notices qui ont servi de prodrome au travail que nous présentons aujourd'hui. Ce sont, par ordre de dates : 1° Coupe géologique des environs des Bains-de-Rennes, suivie de la description de quelques fossiles de cette localité, avec 1 planche de coupes et 5 de fossiles (Bull. de La Soc. géol. de France, 2 série, vol. XI, p. 185, 1854). 2° Résumé d'un Essai sur la géologie des Corbières, communiqué à la Société philomatique, le 44 juillet 1855. — L'Institut, 29 août, 5 et 12 septembre 1855. — Tirage à part, 32 pages, 1855, 3° Disposition cratériforme des couches secondaires et de transition autour de l'ilot amphibo- lique de Feuilla (Aude). Extrait d’une lettre à M. Élie de Beaumont (Comptes rendus de l’Académie des sciences, vol. XLIIT, p. 225, séance du 28 juillet 1856). h° Etudes géologiques sur les départements de l'Aude et des Pyrénées-Orientales (résumé). (Bull. de la Soc. géol. de France, 2 sér., vol. XIV, p. 460, séance du 16 mars 1857.) Soc. GÉOL. — 2° SÉRIE, T. VI. — Mém. n° 2. 27 210 INTRODUCTION. (N. 2, p. 2.) passant par Estagel, puis au sud de Saint-Paul, de Caudiès et d’Axat, pour se pro- longer vers Bellesta, et au delà dans le département de PAriége. Le quart sud à peu près de ce quadrilatère, à côtés inégaux et un peu irréguliers, appartient au département des Pyrénées-Orientales ; tout le reste dépend de celui .de l'Aude. Sa surface est essentiellement montagneuse, et sa plus grande partie est souvent désignée sous le nom de Montagnes des Corbières. On distingue quelquefois aussi, par l'expression de Basses-Corbières, les collines qui environnent la petite ville de la Grasse, le mont Alaric au nord, etc., et par celle de Hautes-Corbières, le massif de Monthoumet, celui des environs de Tuchan, la chaîne dont le pic de Bu- garach fait partie au sud, etc. Mais ces diverses dénominations n’ont aucun sens précis; elles ne s’appliquent d’une manière rigoureuse à aucun massif bien défini; et, comme ceux-ci sont assez nombreux, souvent indépendants les uns des autres, et appartiennent à des terrains d’âges très différents, on comprend de suite la nécessité de faire précéder la description géologique d’un tel pays par un examen préalable de ses caractères physiques et orographiques. Néanmoins, nous avons cru pouvoir, en prenant la partie pour le tout, nous servir du nom de Corbières comme premier titre de notre travail, son interprétation un peu vague convenant à un ensemble de groupes montagneux dont les relations ne sont ni bien définies ni bien apparentes. Si l’on mesurait intérêt géologique d’un pays à son étendue superficielle, ou à la grandeur des phénomènes physiques qui s’y sont produits, celui dont nous venons d'indiquer les limites en offrirait sans doute assez peu ; mais si, au contraire, cet intérêt résulte de la variété et de la complexité de ces phénomènes, il y a peu de régions qui, dans une étendue aussi restreinte, présentent, au géologue stratigraphe, minéralogiste ou paléontologiste, un champ de recherches plus riche et plus digne d’une étude approfondie. Les cartes et les profils, avec un texte explicatif, suffisent ordinairement, pour donner une idée des caractères du sol d’un pays de plaines, de collines ou de plateaux à couches plus ou moins régulières ; mais il n’en est pas de même lorsqu'on veut faire connaître une région très accidentée, dont tous les reliefs sont dus aux disloca- tions des couches, à leurs soulèvements aussi bien qu'à leur nature. Une description géologique ordinaire ne présente guère que l'anatomie d’un pays, ou plus exactement ce qu’en terme d'atelier on appelle un écorché. Or, ce dernier n’offre pas à l’esprit une idée plus complète ni plus vraie des formes extérieures et de l’aspect du corps humain, que les descriptions géologiques en question ne nous permettent d’appré- cier les formes extérieures et l'aspect général d’une surface donnée. Aussi ayons-nous cherché à obvier autant qu'il dépendait de nous à cet inconvénient, en faisant précéder l'étude proprement dite des terrains d’un exposé des caractères physiques et orogra- phiques du sol, accompagné de dessins assez nombreux distribués dans le texte et reproduisant les sites les plus intéressants et le facies particulier que chaque roche ou chaque système de couches imprime au paysage. Dans ce cas un dessin, même mé- diocre, sil est exact, en dira toujours plus que l'exulication la plus détaillée. (N. 2, p. 3) INTRODUCTION. 211 Nous avons été conduit à exécuter ce travail par l'intérêt seul du sujet. Une pre- mière excursion, faite presque par hasard dans l'été de 1853, nous avait convaincu que ce qu’on avait écrit jusqu'alors sur les Corbières ne pouvait être regardé que comme des ébauches indiquant à peine quelques-uns de leurs traits essentiels, sans en laisser soupçonner toute l'originalité. Les étés de 1854, 4855, 1856 et 1858 nous y ont ramené. Mais, tout en donnant ici le résultat de nos recherches, nous sommes loin de prétendre qu'elles soient suffisantes pour un travail complet. Celui-ci ne sera obtenu qu’à la condition d'y consacrer beaucoup plus de temps, de travailler 4 sur une carte topographique exacte à l'échelle de +, et de tracer, à la surface du pays, un réseau d'observations stratigraphiques, tel que ses mailles n'aient jamais plus d’un kilomètre carré. À ces conditions seules, on obtiendra un résultat com- parable, pour l'exactitude, à ce que l’on a fait récemment dans les régions plus faciles du nord et de l’est de la France et surtout en Angleterre. Ces Etudes ne sont donc que des matériaux destinés à préparer un travail définitif, qui, tel que nous le concevons, ne pourra encore être exécuté de longtemps. Les irrégularités dans la répartition superficielle des dépôts, les dislocations mul- tipliées qu’ils ont subies, l'absence d’axe de soulèvement principal ou de centre géologique sont des causes multiples qui contribuent sans doute à la difficulté des recherches dans ce pays; mais la rareté des communications, le petit nombre ou le manque absolu de carrières ou d'exploitations rendraient ces recherches bien plus difficiles encore, si l’absence presque complète ou le peu d'épaisseur de la terre végétale, le peu détendue de la culture au-dessus du fond des vallées, la rareté des bois sur les pentes et sur le sommet des montagnes, presque toujours nues et pelées, n'étaient pour le géologue une large compensation, en lui permettant d'aborder directement les roches sur tous les points qu’il juge nécessaire. Partout elles sont accessibles à son marteau, et ce n’est ordinairement pour lui qu'une question de temps. Mais celle-ci, se renouvelant pour ainsi dire à chaque pas, rend l'étude de certains cantons excessivement longue, eu égard à leur surface. Sans doute la forme des montagnes, les contours plats ou arrondis, anguleux ou quelquefois prismatiques de leurs crêtes ou de leur sommet, ce que nous désignons sous le nom de cassure stratigraphique, joints à la teinte générale propre à chaque système de couches, peuvent conduire souvent à des déductions probables sur leur niveau géologique ; mais ce sont des moyens dont on ne doit se servir qu’avec beaucoup de réserve et après une longue expérience, sans quoi on s’exposerait, à mettre en parallèle des dépôts différents, ou à en séparer d’autres qui sont du même âge. Les Corbières ne sont guère connues, et encore très partiellement, que des per- sonnes du pays qui fréquentent les Bains-de-Rennes et ceux beaucoup moins suivis d’Alet, de Campagne et de Ginoles, puis par les collecteurs de fossiles. La route d’Alet et de Couiza aux Bains-de-Rennes, qui n’a que quelques lieues, est encore la seule en bon état. Celle de Narbonne à la Grasse et Carcassonne n’est parcourue par aucune voiture publique, et tout le reste du pays compris dans le grand qua- 212 INTRODUCTION. (N. 2, p. 4) drilatère que limitent les quatre routes joignant Narbonne, Carcassonne, Quillan et Perpignan est sans voie de communication du nord au sud et de l’est à l’ouest. Les chemins tracés récemment, et en partie, de Portel à Durban, Tuchan et Estagel, ainsi que celui de Tuchan à Félines, Monthoumet et la Grasse sont des voies à peine carrossables, et le massif de montagnes et de vallées, compris entre la route d’Es- tagel à Quillan, Monthoumet, Tuchan et Couiza, est tout à fait impraticable avec la voiture la plus rustique. Plusieurs routes indiquées sur les cartes et reproduites sur la nôtre n’ont jamais existé. Cet espace est cependant habité par une population assez considérable, condamnée à un isolement presque complet, et l’état stationnaire de l’agriculture y est la con- séquence de ce manque de relations avec le dehors. Rien ne s’y perfectionne, ne s’y complète, ne s’y termine, et les chemins de fer de Perpignan et de Carcassonne n’apporteront aucun changement à cet état de choses tant qu’on ne pénétrera dans ce pays qu'à cheval, et que les transports s’y feront à dos de mulets. Quelques bonnes routes tracées, du N. au S. et de l'E. à l’'O., et passant par des localités bien choisies, suffiraient ceperidant pour mettre ses habitants en communication directe avec les villes qui les entourent. Les voyageurs que les nouvelles voies ferrées amènent aujourd’hui si facilement dans le voisinage, et qui hésitent à pénétrer dans des cantons où manque quelquefois le plus strict nécessaire, malgré les mœurs douces et hospitalières des habitants, y seraient attirés alors dans la belle saison et retenus sans doute par les sites variés, un beau ciel et tous les avantages de la vie des montagnes, sans avoir à craindre les fatigues et les inconvénients qu’on rencontre dans les régions plus élevées. Mais les communes ont trop peu de res- sources par elles-mêmes pour entreprendre de semblables travaux, fort coûteux en raison du relief très accidenté du sol, et il n’est guère possible que cette partie si intéressante du département de l'Aude sorte de son ilotisme actuel sans des secours spéciaux, non-seulement du budget départemental, mais encore de celui de l'État, si l'on voulait atteindre le but dans un petit nombre d'années. Les améliorations si désirables, produites par des communications ou des re- lations plus faciles et plus fréquentes, ne rendront cependant jamais cette contrée bien riche, car, excepté la vigne et l'olivier dont les produits sont assez précaires, la sécheresse naturelle, la composition et la disposition de la plus grande partie du sol s’opposeront toujours à ce qu’il donne, excepté dans le fond des vallées, d’autres produits agricoles assez variés et assez abondants pour dépasser les besoins du pays. Cet état de choses dans les Corbières, qui laisse tant à désirer lorsqu'on le compare à d’autres parties du Languedoc plus favorisées, n’a pas toujours été ce qu'il est aujourd’hui. Ainsi le tableau de ce pays au moyen âge devait être fort différent de celui que nous avons sous les yeux. Les nombreuses ruines féodales qui couronnent les chaînes de l’est et du sud sont situées sur des montagnes coniques, isolées de toutes parts; on n’envoit point le long des crêtes continues ni sur les plateaux et encore moins au fond des val- (N. 2, p. 5.) INTRODUCTION, 213 lées (1) : presque tous se trouvent dans la région secondaire des hautes Corbières, etils sont très rares dans celle des basses Corbières. Un très petit nombre ont servi de centre à l’agglomération des populations. Quelques villages en sont plus où moins rapprochés, tels que Gruissan, Leucate, Opouls (Opol de la carte), Durban, Tau- tavel, Rennes, Coustaussa, Durfort et Monseret. Les châteaux de Saint-Martin, de Montpezat, d’Aguilard, de Castel-Vieil, de Queribus, de Pierre-Pertus, de Saint- Pierre sont au contraire plus ou moins éloignés des villages. On peut se représenter ces populations d’hommes armés descendant par troupes de leurs donjons etse dirigeant vers la plaine par les vallées sinueuses qui longent le pied des montagnes, ou bien remontant vers ces cimes fortifiées, presque inaccessibles, aujourd’hui démantelées et solitaires. Ce mouvement qui animait alors le paysage a complétement cessé; les ruines sont désertes; la nature sèche, aride et stérile a repris tous ses droits sur ces points culminants de la contrée. Mais ces dernières traces d’une civilisation qui a eu son temps, son existence propre, son originalité et ses mœurs, impriment aux sites des Corbières ce caractère mélancolique et sévère qui s'attache aux témoins muets d’une prospérité qui n’est plus. Ces lieux élevés, qu’affectionnaient les seigneurs châtelains à cause de la facilité de la défense et oùils se trouvaient à l'abri de toute surprise, quoique dépourvus de végétation, ne manquaient cependant point d’eau. On remarque dans leur voisinage immédiat, ou dans leur enceinte même, des sources naturelles, dont l'existence paraît au premier abord très singulière, mais qui s'explique fort bien lorsqu'on étudie la disposition des couches. Le point d’où sort la fontaine, est toujours à une certaine distance au-dessous du sommet de lamontagne (châteaux d'Opouls, de Rennes, etc.). Les chapelles ou les ermitages consacrés par la dévotion des habitants partagent avec les demeures féodales le privilége d'occuper les lieux les plus élevés. Telles sont les chapelles de Notre-Dame des Auzils dans la Clape, celle de Saint-Martin près de Roquefort, les ermitages de Saint-Victor, de Notre-Dame des Pennes, de Saint- Vincent près d'Estagel, de Saint-Antoine de Galamus, de Notre-Dame de Lavals, etce À côté du développement matériel de la puissance féodale, il est remarquable que ce pays soit aussi pauvre en monuments religieux du moyen âge : à l’exception de quelques restes d’ailleurs peu importants (la Grasse, Alet, l'abbaye de Fontfroide), les églises sont d’une extrème simplicité. Les villes même, comme Limoux et Carcas- sonne, ne sont guère plus riches; Narbonne seule possède un spécimen de l’architec- ture de cette époque, qui est comme un souvenir de l’ancienne splendeur de la cité romaine. La population actuelle des Corbières, plus homogène, de mœurs et d’habitudes plus égales, et distribuée de manière à se trouver en rapport avec les avantages naturels du sol, habite particulièrement les plaines et le fond des vallées. Quelques villages (1) Le château de Couiza fait seul exception. Quant à celui de Salses, d’une construction très remarquable, il est moins ancien que les autres , et fut bâti au x1v° siècle, pour la défense générale du pays, et non pour une habitation particulière. A4 OROGRAPHIE, (N. 2, p. 6.) se voient sur les pentes des montagnes les moins élevées. Ce sont les seules portions susceptibles d'amélioration, de développement ou d’accroissement. La partie de cette population qui est restée pour ainsi dire soudée aux vieux créneaux, aux tours et aux pans de murailles démantelées du moyen âge, comme celles de Fitou, de Rennes et de Durfort, semble devoir rester dans un état stationnaire. Le château de Gruissan est du petitnombre de ceux dont le voisinage aura été témoin d’un développement re- marquable de richesse et de l'accroissement de ses habitants; aussi la nature du paysn’y est-elle pour rien, ce résultat, d’ailleurstrès récent, étant dû au caractère industrieux et entreprenant de sa population exclusivement adonnée aux opérations maritimes. Division du mémoire, Notre travail actuel sera divisé en deux parties qui peuvent être lues séparément quoique se liant par les rapports les plus intimes. La première comprend l'Oro- graphie ou la description des caractères extérieurs du sol; la seconde la Géologie ou la description des terrains qui entrent dans sa composition ; une troisième partie qui doit traiter de la Paléontologie ou de l'examen particulier des corps organisés fossiles, nouveaux ou imparfaitement connus, sera publiée ultérieurement. Dans un appendice nous réunirons quelques observations étrangères au pays qui fait parti- culièrement l'objet de ces études, mais qui peuvent offrir quelque intérêt par les rapprochements qu’elles suggèrent entre divers points du sud de la Provence, du Languedoc et du Roussillon. PREMIÈRE PARTIE. OROGRAPHIE. Le relief ou lorographie d’un pays comprend tous les accidents physiques de sa surface qui se trouvent au-dessus du niveau de la mer, ou, plus exactement, com- parés et rapportés à ce niveau. Dans notre carte, dont la partie orientale est bordée par la Méditerranée, le point le plus élevé se trouve sur le bord opposé ou occidental, au sud-ouest de Quillan, à 1294 mètres, et ce chiffre exprime alors exactement la hauteur maximum du relief que nous avons à considérer. Si l’on fait ensuite passer un plan par les autres sommités de cette surface, on vérra que toutes sont situées dans sa partie sud, et qu’il s’abaisse d’une part vers le N. jusqu’à son intersection avec la partie septentrionale de la vallée de l'Aude, de l’autre, vers l'E., jusqu’à ce qu'il rencontre le niveau de la mer. Mais ce plan général à double pente, loin d’être simple, uniforme et régulier dans chacune de ces directions, se compose au con- traire d’une innombrable quantité de fragments de toutes les formes, de toutes les dimensions, et dont les altitudes particulières sont très variables aussi. Par suite de la double pente du sol vers le N. et vers l'E., les principaux cours d’eau se dirigent suivant ces deux plans, les uns au N. pour se réunir à (N. 2, p. 7.) OROGRAPHIE. 215 l’Aude, les autres (l’Agly et la Berre) à l'E., pour se jeter directement dans la mer. La pente totale de l'Aude, d’Axat à la Méditerranée, est d'environ 400 mètres, dont 306 d’'Axat à Carcassonne et 94 de cette ville à son embouchure. La pente de la Boulsane et de l’Agly, depuis Puylaurens, est d'environ 350 mètres, leur direction générale étant sensiblement O.-E. On trouve, dans l'étendue que comprend notre carte, les représentants de la plu- part des formations tertiaires, secondaires et de transition avec des roches ignées et cristallines; mais ce qui lui donne un intérêt toui particulier, c’est la position relative. qu'affectent les roches sédimentaires des divers âges et leurs rapports avec l’orographie. A l’exception des dépôts modernes et quaternaires de la côte, de la vallée de l'Aude et de la plaine de Rivesaltes, nulle part on ne marche sur des cou- ches qui soient dans leur position première. Les dislocations des terrains tertiaire et secondaire n’ont, à peu d’exceptions près, produit que des vallées et des montagnes monoclinales. On n’y trouve.que quatre exemples de relief ayant un axe anticlinal, etil ny a point de vallées synclinales proprement dites, L'existence de véritables vallées de soulèvement n’a été constatée que sur deux points. Dans un ou deux cas, les couches nous ont présenté une sorte de disposition partiellement en entonnoir ou s'abaissant vers un centre commun ; dans quelques autres, un cirque de soulèvement sur le pourtour duquel elles inclinent en dehors. Les chaînes les plus étendues, dont le relief est si prononcé dans la partie sud de la carte, ne sont encore, pour la plu- part, que le résultat de dislocations simples, qui ont dû être suivies de pressions latérales pour produire les. effets observés qu’on ne pourrait expliquer par un seul mouvement de bas en haut. Elles sont toujours monoclinales, quoique les couches atteignent quelquefois la verticale. La surface du pays peut être ainsi comparée à un parquet dont chaque feuillet aurait été dérangé de sa position première, en tournant sur un de ses côtés comme charnière, sans dépasser, si ce n’est dans une ou deux localités, un angle droit, de manière qu'il pûten résulter un renversément complet, Il y a par conséquent très rarement intervertissement dans les rapports stratigraphiques, et les dépôts occu- pent encore la position géographique relative qu’ils avaient lors de leur formation. Seulement, pendant l’époque quaternaire , la dénudation des couches tertiaires, favorisée par les dislocations antérieures, a fait qu'aujourd'hui ces couches ne s’ob- servent souvent que par lambeaux discontinus, découpés sur leur pourtour, et ne représentent qu'imparfaitement leur extension première. La position géographique relative, irrégulière et capricieuse des dépôts tertiaires et secondaires, est un des caractères les plus frappants de la géologie de cette région ; de sorte qu’on n’y observe pas d’axe montagneux, de part et d'autre duquel les couches soient disposées suivant leur ancienneté relative, ni de centre autour duquel cet arrangement symétrique se soit, produit, et encore moins de bassin sur les parois duquel les sédiments offrent des zones concentriques placées en rapport avec leur ancienneté. Ainsi, sur le pourtour du massif de transition de Monthoumet, allongé 216 OROGRAPHIE. (N. 2, p. 8.) de l'E. à l'O. et qui occupe à peu près le milieu de la carte, on voit reposer succes- sivement, au nord, les poudingues tertiaires des plateaux, au nord-ouest le groupe nummulitique, à l’ouest celui d’Alet, au sud la formation crétacée supérieure, à l’est le lias et les dépôts houillers. | Cette distribution singulière des roches de divers âges ne pouvait, on le concoit, devenir sensible que sur une carte géologique où les divisions fussent assez nom- breuses. C’est pourquoi, sur la carte géologique de la France, où trois teintes seu- lement représentent toutes les roches crétacées et tertiaires, comme sur celle de M. Leymerie, qui d’ailleurs apporta une amélioration notable dans la classification et la répartition des terrains, ce caractère essentiel de la géologie géographique des Corbières devait rester inaperçu. Quoiqu'il n’y ait pas plus de centre ou d’axe orographique absolu qu’il n°y à d’axe ou de centre géologique dans l’espace que nous décrivons, on reconnaît, au premier coup d'œil jeté sur la carte, que les principaux reliefs de sa partie orientale sont alignés du N.-E. au S.-0., et ceux de ses parties centrales et méridionales, de beaucoup les plus accusés, presque exactement E.-0. Mais, après cette première impression, une étude plus approfondie fait voir qu'à ces traits généraux se rattachent de nombreuses exceptions, de fréquentes irrégularités locales, des dispositions toutes parüculières qui doivent être prises en considération parce qu’elle se lient à des effets partiels des pnénomènes généraux; d’où résulte un ensemble très compliqué de: petites montagnes, ou une sorte de réseau à mailles irrégulières, inégales, assez rapprochées, dont l'examen doit précéder la description géologique. La plupart de ces massifs montagneux, soit généraux, soit particuliers, ne portent point dans le pays de noms propres, et chaque portion d’une même chaîne, com- prise dans le territoire d’une commune, est désignée par le nom de cette dernière ou par le simple mot de la Montagne, par opposition à celui de la Garrigue, que les habitants appliquent quelquefois aux plaines. Un pareil morcellement de dénomi- nation a pu, sans inconvénient, être employé dans les opérations du cadastre, mais il n’en pouvait être de même dans une description physique et naturelle. D’autres dénominations, telles que celles de mont Tauch, de pic de Bugarach, de roc de Bi- trague, etc., ne s'appliquant qu’à des montagnes isolées, souvent en dehors des chaînes, ne pouvaient pas davantage servir à désigner ces dernières. Aussi, dans un premier Éssai que nous compléterons ici, leur avons-nous assigné des noms par- ticuliers toutes les fois qu’elles n’en avaient pas reçu, soit sur les cartes, soit dans le pays (1). Les feuilles de la carte de Cassini, qui comprennent les montagnes des Corbières, en représentent les contours d’une manière remarquablement exacte pour le temps où ce travail a été exécuté, et la réduction qui en a été faite pour les cartes départe- mentales, par M. A.-H. Dufour, a conservé ce que ce relief avait de plus essentiel ; (1) Société philomatique , séance du 14 juillet 1855. — L'/nstitut, 29 août 1855. (N. 2, p. 9.) OROGRAPHIE. 217 aussi nous a-t-il suffi, pour le but que nous nous proposions, d’un report de ces dernières, quoique le tracé des routes et des canaux ajouté au travail de Cassini y soit très défectueux ainsi que les noms de beaucoup de villages que nous n'avons pas dû adopter. A:ce report ont été ajoutées les cotes d'altitude que M. le Directeur général du Dépôt de la Guerre nous a autorisé à relever sur la minute des feuilles non encore publiées de la belle carte de France exécutée par les Officiers du corps d'État major. Cette addition importante à notre propre travail nous a servi aussi pour dresser plusieurs de nos coupes ou profils stratigraphiques. Mais la petitesse de l'échelle de notre carte n’a pas permis d'y reproduire les noms d’un grand nombre de localités que le lecteur trouvera dans le texte, et pour la position desquelles 1l devra avoir recours aux feuilles de Cassini. Nous avons fait reproduire en outre, et insérer dans le courant du texte, des dessins qui contribueront à donner une idée plus exacte encore du relief du pays et de ses autres caractères extérieurs. Les vues que nous donnons sont la simple repré- sentation de la nature, sans aucun arrangement des lignés ou des détails pour faire valoir le paysage et produire plus d’effet. Les sites des Corbières n’en avaient pas besoin, car en y trouve à chaque pas des tableaux en quelque sorte tout faits, et les paysagistes, qui voudraient quitter les voies si battues du nord de la France pour venir y passer quelques semaines, y trouveront une variété de sujets qu'ils rencontreraient difficilement ailleurs, dans un espace aussi restreint. Puissent nos croquis, bien imparfaits sans doute, leur faire naître le désir d'exploiter, sous le rap- port de l'art, cette mine encore vierge que les chemins de fer mettent aujourd’hui à 24 heures de Paris. | Nous décrirons, en allant du N. au S., les divers massifs montagneux dont l’en- semble constitue pour nous les Corbières; mais nous ne voudrions pas qu'on pût attribuer à ces divisions plus d'importance qu'elles n’en ont réellement. Elles ont été faites en vue d'une description géologique pour laquelle nous avions besoin de limiter nettement chaque partie distincte du relief compliqué du pays. C’est un exposé des caractères extérieurs du sol qui devait précéder celui de sa composition inté- rieure, celle-ci devant s’éclairer par celle-là, de même que, pour continuer une comparaison déjà employée, la représentation des formes extérieures du corps humain doit précéder celle de son anatomie et de ses organes. | Montagnes de la Clape. Le massif complétement isolé, désigné dans le pays sous le nom de montagnes de la Clape, est borné à l’est par la Méditerranée, au nord par le delta de l'Aude, à l’ouest par la plaine de Narbonne, au sud par l'étang de Gruissan. Sa direction géuérale est N. 35° E. à S. 35° O., parallèle à celle de la côte voisine. IT à environ 20 kilomètres de long sur 10 dans sa plus grande largeur, qui se trouve vers le nord. Ses points les plus élevés, situés à peu près vers le milieu de son axe de figure, sont la Poumarède à 210 mètres et le signal de Pech-Redon à 215 au-dessus de la mer. SOC. GÉOLOG. — 2° SÉRIE, T. VI. — Mém. n° 2. 28 218 OROGRAPHIE,. : (N. 2, p. 10.) L'ensemble de son relief représente un dôme elliptique très surbaissé, Sa surface, Route [NI | Ricardelle, | \ Il|\ 1 }1| Se ON COTIARD BISSONCOT Plateau de Courtal-Neuf. Ile Sainte-Lucie. Ile Saint-Martin. Gruissan. /||| ul IA: N° I. — Vue de la Clape prise des fours à chaux de Narbonne. peu accidentée dans la partie septentrionale, offre au contraire, vers le centre et le sud, des fentes ou gorges profondes, à parois verticales qui en rendent l'accès difficile. Une crête rocheuse, discontinue, flexueuse, un peu plus élevée que le reste de la surface, s'étend du N.-E. au S.-0., de Saint-Pierre de Mer à la chapelle de Notre-Dame des Auzils. Le dessin ci-contre(w 1), pris des buttes des fours à chaux de Narbonne, montre l'aspect général de la Clape, dans le sens de son grand axe, sur son versant occidental, dont le spectateur se trouve à - une distance de 8 kilomètres en ligne droite. Le dessin suivant (n° u), qui représente l'extrémité méridionale du massif, vue du château de Gruissan, à 2 kilomètres seulement, montre au contraire son relief dans un sens perpendiculaire à sa direction. Aucun cours d’eau permanent ne descend de la Clape. Quelqués sources peu abondantes, et dont plusieurs ne persistent pas toute l’année, sourdent à la jonction de la nappe calcaire qui constitue son revètement extérieur et des marnes ou calcaires marneux qui la supportent. Par suite de sa com- plète inaltérabilité par les agents atmosphériques, la surface de cette nappe épaisse est sèche, stérile, et donne à cette petite région naturelle un aspect triste et sauvage. Son isolement complet, qui tend à augmenter son élévation pour l’œil, et la forme particulière de ses courbes surbaissées, terminées par des crêtes verticales, la font distinguer aisé- ment à une grande distance. Les portions cultiva- bles et les métairies sont situées sur les pentes in- férieures de son pourtour ou vers le fond de quel- ques vallons intérieurs, là où la nature de la roche a permis la formation d’un sol arable. Les îles de Gruissan et celle de Saint-Martin se rattachent au massif de la Clape par leur position, par leurs caractères géologiques, et peuvent en être regardées comme lextrémité méridionale, découpée par plusieurs étangs, encore en commu- nication directe ou indirecte avec la mer. Cepen- (N: 2. p. 11.) OROGRAPHIE. 219 dant leur disposition stratigraphique les en distingue, comme on le verra plus loin, et c’est à celte circonstance qu'est due cette particularité que les portions cultivées BERTRAND DARCHIAC AP N° LI. — Extrémité méridionale de la Clape, de l’île de Saint-Martin sont situées sur son côté occidental, tandis qu’au nord, dans la Clape, elles se trouvent plus particulièrement à l’est ou vers la mer. Le bourg de Gruissan, qui s’est accru d’une manière si remarquable depuis quelques. années par les entreprises maritimes auxquelles ses habitants ont pris part, occupe l'extré- LE TBERTRANN. N° III. — Vue de Gruissan. mité occidentale d’une presqu’ile (1). La vue ci-jointe a été prise à l'ouest, sur la côte de l'ile Saint-Martin, près de la métairie de Galinat ; à droite du spectateur est la portion de l’île qui communique avec le bourg par un pont de bateaux ; à gauche, l'extrémité méridionale de la Clape vient se terminer à l'étang de Pech-Menau. Chaîne de Fontfroide. We , A . , sl = : ] Nous avons désigné sous le nom de chaîne de Fontfroide, d'après celui de l’an- cienne abbaye située dans une de ses gorges les plus profondes, un assemblage de (4) Nous avions déjà passé quelques semaines à Gruissan, au printemps de 1822, ne présumant guère alors le motif qui devait nous y attirer trente ans après. | 220 OROGRAPITIIE. (N. 2, p. 42.) montagnes, dirigé comme la Clape N. 35° E. à S. 35° O., qui commence à s'élever de la plaine au sud-ouest de Narbonne pour se terminer vers la métairie de la Sals au nord-ouest de Durban, le long de la rive gauche de la Berre. Son étendue est d'environ 35 kilomètres, et l'élévation de sa ligne médiane ou de son axe de figure augmente sensiblement du N.-E. au S.-0. De 139 mètres à Treilhes, elle atteint successive- ment 290 mètres à l’ouest de Lambert, 247 à la Quille, 280 sur le plateau des bois de Fontfroide, 386 près de l'ermitage de Saint-Victor, et 344 à l’ouest de la Sals. Cette chaîne diffère essentiellement de la précédente par sa composition géolo- sique plus complexe, par ses formes plus accentuées, par ses crêtes plus anguleuses : sa ligne de faite, simple où multiple, offre des arêtes plus vives, et elle est plus élevée. Ses ramifications comprennent au nord les collines de calcaire secondaire qui, sur la rive droite de l’Ausson, passent au nord de Quilhanet, de Bizanet, entourent le village de Montredon, longeant les routes de Narbonne à Lézignan et à la Grasse. Ces collines s'élèvent à 163 mètres d'altitude au nord-ouest de Bizanet, à 176 près de la métairie de Tal de Nerian, à 187, 195 et 166 à l’ouest de Montredon. Le plateau ondulé, souvent fort étroit qui occupe le faîte de la chaine de Font- froide, parfois réduit à un simple dos d'âne plus ou moins arrondi, s'étend de la métairie de la Grange-Neuve, par celle de la Quille, à l'extrémité sud des bois de Fontfroide. Interrompu par la fente étroite, à parois verticales où coule le torrent des moulins de Fontjoncouze, on peut considérer que la chaîne se prolonge orographi- quement par le grand escarpement de l'Ermitage de Saint-Victor jusqu'au massif d’où descendent le Rabe, le ruisseau d’Albas et plusieurs petits cours d’eau qui joi- gnent la rive gauche de la Berre. Le profil de sa partie centrale peut être représenté par la section d’un tronc de cône passant par son axe et dont les arêtes seraient formées de plusieurs plans. L'aspect de cette chaîne est beaucoup moins âpre et moins monotone que celui de la Clape. Il y a sur plusieurs points de sa partie supérieure des bois, clair-semés à la vérité, mais qui se liant aux portions cultivées, presque continues, de ses pentes inférieures et des collines de formation plus récente qui la flanquent à l'ouest et à l’est, contribuent à la rendre moins triste à l'œil. D'assez nombreux cours d’eau prennent leur source sur son versant occidental, se réunissant à l’Ausson pour se jeter dans l'Orbieu. Au nordle Vieret descend du plateau de la Quille, pour joindre la Robine au-dessous de Narbonne, et, de son versant oriental, de petits ruisseaux se rendent aux étangs de Bages et de Gruissan. Ccllines de Boutenac et de Fhézan. Deux groupes de collines, séparés par la vallée supérieure de PAusson que par- court la route de Narbonne à la Grasse, quoique géologiquement très distincts, parais- sent être cependant liés par un même accident stratigraphique qui les aurait affectés suivant une direction N. 25°0. à S. 25° E., tracant ainsi la ligne de partage des eaux du Rabe et de l’Ausson. Le premier de ces groupes comprend les collmes arrondies, (2, p. 15.) OROGRAPHIE. 221 arénacées et stériles de Boutenac qui s'étendent d’Auterive à Villerouge-la-Panouze, et d’où descendent au nord de petits cours d’eau qui se jettent dans l'Orbieu. Elles atteignent seulement 194 mètres d'altitude au-dessus des Olieux, et la coupe, pl. IH, fig. 23, montre leur forme générale en même temps que leur composition. | Le second groupe, qui] vient expirer en face du précédent dans la plaine de Thézan, à 99 mètres de hauteur absolue, se relève au S.-S.-E. à 370 mètres au mou- lin du Saut, à l’ouest de Dones, à 348 au Pech de la Selve, et à 315 au sud de Fontjoncouze. Ce massif s’anastomose ainsi vers Saint-Christol avec la chaine de Fontfroide. N° IV. — Collines de Thézan à Saint-Victor. Le dessin ci-joint, pris en face de Thézan, sur la pente méridionale des collines de Boutenac, montre la disposition de ces accidents montagneux jusqu'à l’ermitage de Saint-Victor. Les derniers plans appartiennent à la chaîne de Montpezat. Montagne d’Alaric. . La montagne d'Alaric est un massif isolé, compris entre là route de Lézignan à Carcassonne au nord, la vallée de la Bretonne à l’ouest, celles des Mattes et de l’'Orbieu au sud et à l'est. Dirigée de l'O.-N.-0. à l’'E.-S.-E., sa plus grande longueur est de 20 kilomètres et sa largeur de 6 à 7. On peut se la représenter comme une section de cylindre faite parallèlement à l'axe, et qui aurait été fracturée sur quelques points. Son altitude est de 595 mètres à l'extrémité orientale de la ligne de faite, et de 503 à l'extrémité opposée. Nous supposons ici que l'axe de la montagne est une ligne droite ürée de Fabre- zan à la métairie des Paillassés, mais en réalité cet axe semble se courber légèrement depuis la cime orientale vers laquelle convergent les vallons supérieurs, jusqu’à l’angle que forment la route et le lit de la Bretonne au nord de Monze. Il est encore indiqué au delà par une dépression que limitent deux chaines de collines parallèles appartenant au groupe lacustre on de la mollasse. L'une au sud, prolongement occi- dental de la Malptre, est de beaucoup la plus élevée; l'autre au nord, moins impor- tante, s'étend de Montirat à Cazilhac. Le mont Alaric, proprement dit, est limité, sur une grande partie de son pour- tour, par une sorte de fossé continu, profond, qui sépare les calcaires compactes gris blanchâtre de son revêtement extérieur, des marnes bleuàtres, des calcaires et 222 OROGRAPHIE. (N. 3, p. 14.) des grès qui l’environnent. À son extrémité occidentale ces calcaires compactes s'abaissent doucement pour s’enfoncer sous les marnes autour de Monze, tandis qu’à l'extrémité opposée, entre Moux et Camplong, une brisure naturelle, oblique à l'axe du demi-cylindre vient dévoiler complétement sa constitution géologique intérieure. Une brisure semblable s’observe à l'extrémité nord-ouest. La grande voûte qui forme * ainsi la montagne, prise dans son ensemble, offre un exemple remarquable de sou- lèvement normal simple. Toute sa surface est nue-et stérile, sauf dans quelques anfractuosités, comme à la métairie de Saint-Jean, où les marnes et les argiles sableuses inférieures aux calcaires compactes ont été mises à découvert. Dans le dessin ci-joint, pris au-dessus de Ribaute, la montagne est vue oblique- ment du côté du sud, depuis sa partie orientale jusqu'à l’autre extrémité qui se N° V. — Vue du mont Alaric, prise au-dessus de Ribaute. profile sur le dernier plan à gauche, en s’élevant au-dessus du village de Pradelles que masquent les collines arrondies de Montlaur. Nous donnerons plus loin une vue de l'extrémité orientale de la montagne prise du côté opposé, au-dessous des moulins de Moux. Les coupes fig. 15, 16, 17, 18 et 19, pl. HF, font connaître plus exactement la composition et l’arrangement des couches dans sa portion occidentale. Montagnes de la Grasse. Entre le pied méridional de la montagne d’Alarie, la rivière du Rabe à l’est, le massif montagneux du village de Monthoumet au sud, et les montagnes de la Malpère et de la Camp à l’ouest, on remarque une sorte de quadrilatère occupé par des mon- tagnes, ou mieux par des collines très accidentées, dans lesquelles il est difficile de trouver une direction bien prononcée, ou des accidents qui affectent une certaine symétrie. Les environs immédiats de la Grasse, quoique sans reliefs sur la carte, sont un des points les plus intéressants de cette surface, que nous désignerons par le nom de la ville située à peu près au milieu. (N. 2, p. 15.) OROGRAPHIE. 223 Le relief et les contours de ces petites montagnes varient singulièrement suivant le système de couches qui les constituent, et qui impriment à chacune d’elles un caractère particulier. Les assises plus ou moins redressées plongent dans plusieurs directions et sous des angles variés. Les altitudes, de 300 mètres au sud-est de Ribaute, de 434 à Pellat (1), en face du mont Alaric, atteignent 537 mètres au sud-ouest de Blanes, entre Durfort et Villerouge-de-Termenès. Sous le rapport hydrographique, cette surface est traversée du S.-0. au N.-E. par l’Orbieu, auquel se réunissent, près de la Grasse, l’Alsou et ses affluents, qui descendent des hauteurs de la Camp et de la Malpère à l’ouest, et près de Fabrezan, le Rabe et la Fourques qui prennent leur source sur le versant nord de la montagne d’Albas. Montagnes de la Malpère et de la Camp. Les collines des environs de la Grasse et le petit bassin de l’Alsou sont limités à l’ouest par une crête flexueuse, très contournée ou repliée deux fois sur elle-même, de manière à séparer complétement le bassin de l’Orbieu à l’est de celui du Lauquet à l’ouest. La portion nord de cette crête, au-dessus de Monze et d’Arquettes, est connue sous le nom de la Malpère, et sa partie méridionale, qui domine Mayronnes, sous celui de montagne de la Camp. La première se prolonge droit à l’O. dans lalignement des collines de Montlaur à la Bourdette et parallèlement au versant sud du mont Alaric, puis passe au-dessus de la métairie d’Andouar, de la métairie Blanche, de celles de Montgrand et d’Arzens, pour venir expirer sur la rive droite de l'Aude, entre Couf- foulens et Cavanac. Ses couches plongent au S., et l’on peut considérer comme en faisant partie toutes les collines du plan incliné jusqu’à la Lanquete. Cette crête qui atteint 470 mètres au sud de Monze, s’abaisse à la Bourdette en tournant au S., se relève hardiment au-dessus de Donnove à 510 mètres en plongeant à l'O., et conserve 488 mètres au-dessus d'Arquettes. La montagne de la Camp s’élève à 638 mètres au-dessus de la Bastide, puis à 693, 631 et 754 sur son bord méri- dional, aux fermes de Lasconals et de Capbiau, au-dessus de Lairière. Les talus qui s’abaissent de cette crête vers l'O. sont beaucoup moins rapides qu’à l’E., et sont sillonnés par d’assez nombreux ruisseaux, tels que la Baris, le Gumel, la Lauzeille et la Lanquete, qui se réunissent au Lauquet pour se jeter dans l'Aude, à Couffoulens. Montagnes de Monthoumet. Le massif de terrain de transition qui forme une zone de 46 kilomètres de long, sur 40 à 12 de largeur moyenne, depuis les environs d'Embrès et de Durban, à l'est, jusque sur la rive gauche de l'Aude, au nord d’Alet, et la rive gauche de la Sals, au nord des Bains-de-Rennes, laissant entre ces deux derniers points une baie (1) 11 serait possible qu’il y eût quelque erreur de chiffre dans cette cote, car ces collines ne nous paraissent pas plus élevées que le massif de Lasvals au nord-est de la Grasse, qui ne dépasse pas 300 mètres. 22h OROGRAPIHIE. (N.2, p.16. ! profonde occupée par le groupe tertiaire inférieur; ce massif, disons-nous, se dis- tingue de tous les autres, aussi bien par ses caractères orographiques que par l'an- cienneté de ses roches. On n’y observe pas non plus d’axe médian, et un plan que l’on ferait passer par ses points les plus élevés inclinerait très faiblement au N. Sur ce dernier côté les altitudes sont : au-dessus de Montjoie de 724 mètres, à l’est de Villardebelle de 661, et plus à l’ouest de 723, entre Pechemigé et les Aloues. Sur le bord méridional, on les trouve de 564 mètres au nord-ouest de Montferran.de 992 non loin de la Bernousse, de 874, 879 et 912 au Pech del Fraisse, sur le mont Tauch, qui limite à l’ouest le bassin de Tuchan, en constituant une sorte d’appendice ou de cap avancé au sud du massif que nous considérons. Ce dernier point est élevé de 790 mètres au-dessus du fond du bassin, sur le bord du ruisseau du Mas-de-Ségure. Vues d’un point élevé, comme les environs de la métairie de Ja Bernousse, ces montagnes offrent le plus ordinairement laspect de cônes arrondis au sommet, à pentes ou arêtes très régulières, souvent assez rapides, couvertes-d'une herbe courte et fine, serrée, formant d'immenses pelouses d’une uniformité remarquable, partieu- lièrementsur ce bord méridional du massif à la limite du terrain secondaire. Excepté dans les gorges plus ou moins profondes que suivent les cours d’eau, on y observe peu d’escarpements abruptes et de ces crêtes rocheuses si fréquentes et si étendues dans Jes chaînes tertiaires et secondaires. Le temps semble y avoir effacé ces effets extérieurs de brisement des couches dont la nature, le plus ordinairement argi- leuse, a favorisé l’action. Un assez grand nombre de cours d'eau prennent leur source dans ces montägnes. Tels sont la Rialsesse, à l'ouest, plusieurs des petits affluents du cours supérieur de l'Orbieu, la Berre, à l’est, et au sud, la Valette avec un autre affluent du Verdouble, le Mas-de-Ségure qui a son origine au-dessus de Palairax. Le village de Monthoumet, situé à peu près au centre de figure de cette zone montagneuse ancienne, peut très convenablement lui imposer son nom. Chaîne de Montpezat. A l’est du massif précédent, entre la rive droite de la Berre, celle de la rivière de Saint-Jean-de-Barrou, le petit bassin de Feuilla et le ruisseau de Treilhes qui s’en échappe pour se diriger vers la côte, s'élève une chaîne calcaire qui projette, par Roquefort et la Palme, un rameau large et déprimé vers le port de la Nouvelle. Le haut plateau appelé taillis de Montpezat en forme la partie principale qui, à partir de la rive droite de la Berre, entre Portel et Gléon, continue, mais dans une direction différente ou sensiblement N.-$., les roches de la rive gauche qui appartiennent à la chaîne de Fontfroide. La longueur du massif, entre Portel et Feuilla, est de 12 kilomètres, et sa largeur moyenne, à la hauteur de Coumelouvière de 7 à 8. Il forme, dans cette étendue, un plan incliné au N., dont l'altitude est assez faible en face de Portel, mais qui augmente (Map. it) OROGRAPHIE. 295 à mesure qu'on s’avance vers le S. On trouve les cotes 302 à l’ouest du Pla de la Devèze, 17 au-dessus de la métairie de Coumelouvière, et la crête de Feuilla, dirigée presque E., O., atteint 529 mètres immédiatement au nord du village. La montagne du Scouliens et celle de Montagliez, au-dessus d'Ortoux, sont aussi fort élevées et con- tinuent au S.-0. la crête précédente. Cette dernière, vue de Narbonne, a un caractère imposant, son voisinage de la côte augmentant son élévation apparente. Le plateau qui, de son pied, s'étend par Roquefort vers la Nouvelle, et est incliné à l'E, vers la mer, n’atteint que 101, 193 et 125 mètres au-dessus du niveau de cette dernière. Le plateau de Montpezat, dans toute son étendue du N. au S., et l’appendice sur- baissé dont on vient de parler, sont complétement incultes et dépourvus d'habitations. Quelques arbrisseaux rabougris et des touffes de buis épars cà et là rompent seuls la monotomie de ces immenses champs de pierres, dont l'inaltérabilité s'oppose à la formalion de la plus légère couche de terre végétale. Sur son versant occidental, jusqu’à la Berre, la nature du sol et d’assez nombreux filets d’eau qui se dirigent à l'O. favorisent au contraire la végétation et une culture assez variée sur les terri- toires de Saint-Jean-de-Barrou, de Fraisse, de Durban et de Villesèque. Chaîne de Périllous et chaînons qui s’y rattachent. Un caractère important, à la fois orographique et stratigraphique, sépare la crête septentrionale de Feuilla de la crête de Périllous (Perellos de la carte), située au sud-ouest, et qui court d’abord aussi E., O., pour se recourber ensuite au S., puis au S.-S.-0., en se ramifiant à partir du col de Ladat. En effet, tout le plateau de Montpezat inclinait au N. et au N.-E.; à partir de l’axe de la vallée de Feuilla, au contraire, tout le système de la chaîne de Périllous plonge au $S. ou au S.-E. La crête proprement dite atteint 698 et 708 mètres d'altitude, où 400 mètres au-dessus du village. Le col de Ladat, d’où partent les deux rameaux de Vingrau, est à 469 mètres, et le rameau oriental, momentanément interrompu, reprend sa direction S.-0. au Pas-del-Bouche, atteint 508 mètres dans la crête au sud du village, et conserve encore 495 mètres d'altitude à son extrémité sud, au pied de la tour de Tautavel, point le plus apparent de tout le pays, dans un rayon de 6 à 8 lieues. A l’est de cette série de crêtes coudées et s'étendant jusqu’à la plaine de Rive- saltes et aux bords des étangs de Leucate et de la Palme, s’abaisse un vaste plan calcaire, généralement incliné au S.-ÆE., d’une extrême aridité, et dont les seuls cours d’eau sont trois petits ruisseaux, l’un, qui descend de la Vaucrose à l’est de Treilhes ; l’autre, celui de Fitou, qui à à peine une lieue de cours, et le Roboul, le plus étendu, qui descend au S. pour se jeter dans l’Agiy, en amont de Rivesaltes. Trois petites plaines, semblables à des oasis épars sur cette nappe de pierres con- tinue, en interrompent seules la monotonie. La plus grande est celle d'Opoulis (Opol de la carte), formant un bassin elliptique à fond plat, et dont l'aspect rappelle SOG. GÉOL, — 2° SÉRIE, T. VI, — Mém. n° 2. 29 296 OROGRAPHIE. (Ne 2, p.18.) tout à fait celui de la plaine de Cuers, entre Marseille et Toulon ; la seconde, semi- lunaire, est occupée par les métairies des Gipières et de Saint-Thouin, et la troisième, moins unie que les précédentes, entoure le village de Treilhes. L’altitude de ces oasis est d'environ 150 mètres; c’est-à-dire qu’elles se trouvent placées sur le milieu de la pente générale, à partir du pied des crêtes culminantes. Le village de Périllous (Périllos ou Perellos), qui donne son nom à toute la chaîne, est situé, comme on l’a dit, au pied méridional du premier talus de la crête E., O. Le rameau qui s’en détache pour courir au S. prend le nom de rameau de Tautavel, et le grand talus, incliné à l'E, versla mer, est désigné sous le nom de plan d'Opouls et de Fitou. Du col de Ladat, situé à peu près sur le parallèle de Tuchan, se détachent, comme d’un tronc principal, en s’écartant au S.-0., trois autres ramifications : la première el la plus étendue, arquée à son origine, se dirige vers la métairie du Pas-del-Trou, à l'ouest de Vingrau, est interrompue brusquement pour livrer passage au Verdouble, et s’infléchit au delà, vers le S.-0., pour former la crête de Vidal. La seconde, partant du col même ou du Pech-del-Ginèvre (442 mètres), se dirige également au S.-0., et la troisième, que couronnent les ruines du château d’Aguilard, est beaucoup plus courte; elle finit à la Môle, aboutissant comme la précédente à la plaine de Tuchan, qu’arrosent le Mas de Ségure, le Camporel et quelques autres ruisseaux qui s’y réunissent avant de se jeter dans le Verdouble. Ces rameaux, à profils triangulaires ou tronc-coniques de la chaîne de Périllous, sont l’origine des formes orographiques qui caractérisent les montagnes de la région méridionale des Corbières. Ainsi le chaînon de Tautavel, dont le versant oriental se confond à l’est avec le plan d'Opouls, s’abaisse au S. vers l’Agly et se continue en s'infléchissant vers l'O. jusqu’au nord d’Estagel, où il oblige le Verdouble à faire un coude très prononcé avant de se réunir à l’Agly, un peu au-dessous de cette ville. Il en est de même au delà; la montagne de Paziols à Temaison, celle de la Croix-de- Lauzine au roc de la Cadrières, la crête de Vidal (263 mètres), sont les prolonge- ments des bifurcations du nœud de montagnes de Ladat et le point de départ des grandes rides que nous allons suivre en nous dirigeant vers PO. Vallée de Maury, de Saint-Paul et de Caudiès. Les territoires de Maury, de Saint-Paul-de-Fenouillet et de Caudiès occupent une large vallée à surface ondulée, dirigée E., O. et bordée par deux crêtes montagneuses abruptes, plus ou moins continues. L'une, au nord, est désignée sous le nom de chaîne de Saint-Antoine-de-Galamus, du nom de l’ermitage situé au nord-ouest de Saint- Paul, vers le milieu de sa longueur; l’autre, au sud, est la chaîne de Lesquerde et d'A yguebonne, nom tiré des deux villages les plus rapprochés de la ligne de faite, au sud-est de Saint-Paul et au sud de Caudiès. | La grande vallée, ainsi limitée, est à double pente, à cause d’une ligne de partage qui la coupe transversalement près de Saint-Paul (267 mètres) et où naît la rivière (N. 2, p. 19.) OROGRAPHIE. 227 de Maury, qui parcourt ensuite sa partie orientale jusqu’à sa réunion avec l’Agly, au- dessus d’Estagel. Dans sa partie occidentale, la Boulsane descend du roc de Lescales, tourne à V'E., au-dessous de Puylaurens, passe à Caudiès et se jette dans l’Agly, au sud de Saint-Paul. L’Agly, au contraire, qui prend sa source assez loin, au nord de la chaîne de Saint-Antoine, traverse cette dernière et celle de Lesquerde par deux fentes étroites, à parois verticales ou surplombantes, de 150 à 200 mètres de hau- teur, puis continuant son cours capricieux au S.-E, et à l'E. par la Tour-de-France et Estagel, coule encore au-dessous de cette ville, entre deux chaïnons calcaires jusqu'à Espira. Enfin, après avoir arrosé la plaine de Rivesaltes, elle atteint la côte, où souvent, vers le milieu de l'été, elle est à peine représentée par un mince filet d’eau (1). : Dans la vallée de Caudiés, continuation directe de celle de Saint-Paul, le paysage prend des formes plus grandioses et mieux arrêtées que dans les autres parties méri- dionales des Corbières, quoique toujours les mêmes quant à leurs caractères géné raux. Comprise entre deux murailles rocheuses presque verticales, cette vallée a quelque analogie avec celle du Graisivaudan vue de Grenoble; mais, si cette dernière se fait remarquer par l'abondance des eaux, la richesse et la fraicheur de la végéta- tion, et la plus grande élévation des montagnes qui la bordent, surtout à l’est, la vallée de Caudiès l'emporte par l'élégante symétrie et l'originalité de ses lignes de perspective, par les contours hardis et harmonieux à la fois de ses profils, et surtout par ces tons chauds et vigoureux que revêtent ses divers plans, lorsqu'on peut les admirer par un beau jour d'été, au lever ou au coucher du soleil. 1 y à un charme infini dans l'aspect que prend alors toute la nature voilée d’une riche teinte mélangée de pourpre et d’or, diversement nuancée suivant l'éloignement des objets ; sa transparence parfaite n’ôte rien à la pureté n1 à l'extrême finesse des contours montagneux, toujours détachés sur le fond du ciel, avec cette netteté particulière inconnue dans les régions du nord (2). Chaîne de Saint-Antoine de Galamus. Les deux chaînes découpées qui limitent au nord et au sud la vallée de Maury, de Saint-Paul et de Caudiès, identiques par leur composition, leur structure et leur relief, diffèrent complétement, par tous leurs caractères, de la plaine ondulée qui les sépare, et le contraste qui en résulte frappe toujours le voyageur le moins attentif. À partir du château de Queribus ou mieux de la Croix-de-Lauzine, au sud de (1) En traitant du terrain tertiaire supérieur de la plaine de Rivesaltes, nous parlerons de la cause probable de la diminution des eaux de l’Agly dans la dernière partie de son cours. (2) Lorsqu'on se dirige du N. au S., ce caractère que le ciel du Midi imprime au paysage commence à se manifester sur la rive droite du Rhône, dans les montagnes d’Annonay. À partir du 5° degré, il devient de plus en plus prononcé dans la région méditerranéenne, mais nous ne l'avons jamais observé dans la région océanique sous les mêmes latitudes où les teintes de l'horizon sont tou- jours froides comme au nord. 228 | OROGRAPHIE. (N..2, p. 20) Paziols, la chaîne septentrionale forme une muraille, légèrement penchée au S., dirigée droit à l'O. et atteignant 982 mètres d'altitude au plateau de Saint-Paul, puis 996 et 1015 un peu à l’ouest, dans les deux branches de sa bifurcation en cet endroit. Elle passe à l’'Ermitage-de-Saint-Antoine (390 mètres) placé immédiate- ment au-dessus de la brisure que traverse l’Agly, pour se continuer avec des altitudes de 900 et de 844 mètres jusqu’au plateau de la ferme de Malabrac (684 mètres). Après s'être déprimée au col de Saint-Louis, elle se relève pour constituer les grands escarpements de la forêt de Fange (1044 mètres au Tuc-du-Fouret, 992 et 951) et est coupée transversalement par le défilé sinueux de Pierre-Lis que parcourt l'Aude. A partir du pic de la Peops qui, à l’ouest des gorges, s'élève brusquement à 1145 mètres, une crête continue, atteignant 1256 mètres, se redresse d’abord à l'O.-N.-0., puis se courbe à la hauteur de Ginoles, presqu’à angle droit avec sa première direction. Elle se prolonge au N.-E., en s’abaissant à 680 mètres, et vient expirer sur la rive gauche de l’Aude, au nord de Quillan, de manière à circonscrire complétement toute la partie occidentale du bassin au fond duquel se trouve cette ville. Excepté dans cette dernière partie. la chaîne est sensiblement dirigée E.-0.; aussi pourrait- on regarder comme en étant le prolongement plus direct le long escarpement de Quirbajou que suit le cours de la Rebenti, et auquel appartient la cime qui s'élève entre cette rivière et le village de Coudons au nord. Cette cime couverte de sapins, comme les montagnes de Quillan qu’elle domine, attemt 1294 mètres au-dessus de la mer; c’est, ainsi qu'on l’a dit, le point le plus élevé de toute la région comprise dans notre carte. La chaîne de Saint-Antoine, dont les pentes sont tellement rapides, qu’excepté au col de Saint-Louis elle ne peut être traversée, même avec des mulets, que sur un petit nombre de points, n’a en général que 2 ou 3 kilomètres de largeur. et souvent moins. Sa crête et sa pente méridionale sont formées par un seul système de cou- ches calcaires plongeant au $S. sous un angle très ouvert, etsa pente nord par les têtes de ces mêmes couches et par les affleurements de étage sous-jacent. Par suite de cette disposition, elle ne donne naissance à aucun cours d’eau, si ce n’est tout à fait à sa base, d’où s’échappent quelques sources peu importantes. A cette ligne montagneuse, si simple et si nettement limitée sur son versant méri- dional, viennent se rattacher au nord denombreux et importants appendices, qui doi- vent être étudiés avec soin, car 1ls contribuent beaucoup à l'aspect du pays qui de là s'étend vers la bordure méridionale des montagnes de Monthoumet. Ainsi la crête rocheuse qui, partant des ruines de Pierre-Pertuse au nord-ouest de Duilhac, se ter nine à l’ouest par le roc de la Soulatge, se redresse avec une grande hardiesse, et l’on remarque à son extrémité occidentale une portion de couche puissante rephiée à angle droit vers le ciel. D’autres plis moins prononcés se voient encore dans le reste de cette immense écharpe dentelée. Le roc de Cubières, qui fait face au précédent, se rattache par sa base au massif même de Saint-Antoine. À l’ouest du défilé de l’Agly, avant qu’on atteigne le plateau de Malabrae, la-crête (N: 2, p. 21.) -. OROGRAPIIE. 229 principale se relève à 900 mètres, puis 1l s’en détache un rameau dirigé au N.-N.-0., qui se termine par le pic de Bugarach. Ce massif s'élève abruptement, au-dessus de la plaine qui l'entoure au nord et du ravin de Eauzadel à l'ouest, jusqu’à 1231 mètres d'altitude. C’est le point culminant de toute cette partie des Corbières, et ses formes anguleuses et heurtées, sa cime nue et coupée presque carrément, jointes à sa posi- tiou, lui donnent un aspect fort imposant et tout à fait particulier, quels que soient le côté et la distance d’où on l’aperçoive. La vue ci-jointe (N° vi) est prise au sud du pic, au-dessus du hameau de Lauzadel, sur le chemin de Malabrac. Le village de Bugarach se voit à gauche, dans l'éloignement, au fond de la vallée, et l'horizon est borné par les montagnes de Sougraigne et des Bains-de-Rennes. N° VI. — Pic de Bugarach. La partie la plus élevée du pic, à son extrémité sud-est, présente la forme d’un petit dôme surbaissé et se nomme la Tour de Bugarach. C’est un des principaux points géodésiques de la grande triangulation de la France, et une pierre scellée dans la roche, lors de ces opérations, porte le millésime de 1824. La ligne mért- dienne de l'observatoire de Paris passe à peu de distance à l’ouest de ce point. De ce sommet, lorsque le ciel est pur, l'œil embrasse un magnifique panorama, quin’a pas moins de 40 lieues de rayon, soit au nord-ouest vers Toulouse, soit à l’est vers la Méditerranée que l’on découvre sur une très grande étendue. On peut éga- lement bien juger de la disposition des crêtes parallèles qui l'avoisinent. Ainsi l'on 230 OROGRAPHIE. (N. 3, p. 22.) remarque à l’ouest, jusque sur le prolongement de la plaine de Caudiès, quatre de ces rides qui appartiennent à la chaîne de Saint-Antoine, puis, au delà, deux qui dépendent de celle Lesquerde et d’Ayguebonne. Ces crêtes sont plus ou moins élevées et tranchantes, les plus hautes étant comprises.entre le méridien de Quillan et celui de Caudiès. À l’est, elles ont moins de relief, mais leur rectilignité est toujours extrêmement remarquable. On peut reconnaître, à partir de la chaîne principale et en allant vers le N., la crête de Saint-Louis à Saint-Julia, qui, au-dessus de ce vil- lage, atteint 816 mètres, formant un vaste plan incliné au S. jusqu’au ruisseau de la Valette qui longe la grande route, puis celle du Petit-Parau à Saint-Just (969 mètres), enfin la montagne de Saint-Ferréol (Berriol de la carte) et celle qui s'étend de Bézu à la métairie du Mas, comprenant le massif de la Falconnière. Les couches calcaires de ces quatre crêtes plongent invariablement au S., et jamais la comparaison que l’on a souvent faite d’une surface montagneuse vue d’un point élevé avec celle d’une mer houleuse n’a été plus exacte qu'ici, où ces rides apparaissent commé d’énormes vagues qui se rapprocheraient ensemble et parallèlement du rivage situé au nord. Le pic de Bugarach est une anomalie à cette régularité, anomalie dont on peut trouver la cause dans la constitution géologique du pays et dans les dislocations qu’il a subies. Enfin une cinquième crête, peu prononcée, mais continue, placée en avant de sa base septentrionale, ne paraît pas avoir été affectée par son sou- lèvement. Elle est indiquée dans le croquis ci-dessous (w vu), pris dans le voisi- nage de Cubières. Au premier plan se trouve le village de Camps, bâti sur une LR D'ARCHIAC AD NAT N° VII. — Profil oriental du pic de Bugarach. petite crête parallèle à la chaîne principale, et le pic, qui se profile en arrière, se continue à droite par la crête nord dont on vient de parler, tandis qu’à gauche une crête fort élevée (1094 mètres) est celle que nous avons indiquée comme ratta- chant le pic au plateau de Malabrac et à la chaîne principale. Ces diverses rides calcaires ont toujours un relief qui les fait reconnaître à une très grande distance, aussi bien que leur teinte claire, leur surface presque entiè- tièrement dépourvue de végétation même la plus humble, leurs esearpements abruptes, souvent verticaux, tournés vers le N. et couronnant de ce côté des talus assez réguliers et moins arides. De leurs bases s’'échappent les sources de plusieurs (N. 2, p. 25.) OROGRAPHIE. 231 petites rivières, telles que celles de l’Agly au pied oriental du pic de Bugarach, la Sals ou ruisseau de Lauzadel, et plusieurs autres sur son versant ouest. Les cours d’eau de la Valette, du Bec, etc., descendent des massifs de Saint-Louis, de Saint- Just, de la forêt de Fange, etc. Chaîne de Lesquerde et d’Ayguebonne. Cette série de tronçons, alignés parallèlement à la chaîne de Saint-Antoine et présentant absolument les mêmes caractères, commence à s'élever de dessous la plaine de Rivesaltes, près de Peyrestortes, dont l'altitude est de 38 mètres seulement, pour longer la rive droite de l'Agly jusqu'à Estagel, en passant par l’ermitage de Notre-Dame des Pennes (197 mètres, pl. WE, fig. 17) et celui de Saint-Vincent. Elle traverse ensuite sur la rive gauche, où la portion comprise entre le coude du Verdouble et la rivière de Maury sert de nœud entre éette chaîne et le rameau de Tautavel infléchi au S.-0. De ce point à Lesquerde ou au défilé de lAgly, la chaîne éprouve quelques inflexions, atteignant successivement 330 mètres au roc Troquade, 502 au-dessus de Senbeat et 480 au-dessus de Lesquerde. Le dessin ci-joint, pris sur les bords de l’Agly, à la sortie de Saint-Paul de Fenouillet, peut donner une idée du caractère de ces montagnes, au pont de la Fons, où la rivière passe dans une gorge étroite coupée dans une muraille verticale (4). AA | N° VII. — Gorge du pont de la Fons, Au delà, jusqu'aux escarpements abruples que traverse le ruisseau des Adons (pl. IV, fig. 21) et aux sites pittoresques des environs de Saint-Pierre et d’Aygue- bonne, la chaîne constitue un mur parfaitement aligné E.-0., de 628 à 649 mètres de hauteur absolue. Le tronçon entre Ayguebonne et Puylaurens atteint 703 mètres. (1) M. C. Darwin a donné un dessin qui ne représente pas exactement l'aspect de cette gorge, ni les caractères stratigraphiques des roches (A description of active and extinct volcanos, 2° édit., in-8, p. 549. Londres, 188). j 232 OROGRAPINE. (NS 2, 1p. 24.) Entre la Boulsane et l'Aude, la crête couverte de sapins, depuis le roc d’Estables jus- qu'au pont de Baira, et le massif qui sépare la Rebenti de l'Aude, après le coude que celle-ci fait à l'ouest, en sont encore le prolongement qui s'étend bien au delà des limites de notre carte dans le département de l’Ariége. Montagnes de Quillan. » Si, après avoir gravi et dépassé le col de Saint-Louis, qui traverse la chaîne de Saint-Antoine à l’ouest de Caudiès, on descend dans le bassin de l'Aude par la vallée de Quillan, l'aspect du paysage change complétement. lei l'olivier ne domine plus comme à l’est; la température plus froide, plus variable et l'air plus humide, lui sont moins favorables, mais le chène, le peuplier et le châtaignier qui ne végète. point sur les sols calcaires, s’v voient partout. Les prairies naturelles et artificielles, le lin, le chanvre, y sont cultivés comme les céréales; les légumes et tous les pro- duits d’un sol fécond s’y rencontrent de Quillan à Couiza et à Limoux. Les environs d’Alet surtout sont renommés pour la qualité des fruits. N° IX. — Vue de Quillan. Quoique les montagnes qui entourent la petite ville de Quillan dépendent, ainsi qu'on la dit, du prolongement occidental de la chaîne de Saint-Antoine, leur dis- position particulière doit nous arrêter un instant. On a vu qu'à partir du défilé de (N: 9, p. 25. OROGRAPHIE. 233 Pierre-Lis un rameau principal se dirigeait au N.-0., atteignant des altitudes de 1145 à 1256: mètres, pour s’infléchir ensuite au N.-E., au-dessus de Ginoles, de manière à faire un angle droit légèrement curviligne avec sa première direction. Un peu au nord de ce pli la route de Quillan à Bellesta passe la ligne de faîte qui s’abaisse à 518 mètres en cet endroit, pour remonter à 680 au-dessus de Brenac. Ce ra- meau nord-est, d’une longueur à peu près égale au précédent, se déprime de même pour donner aussi passage à l'Aude, se relever encore à l'Espinet, à 682 mètres, et disparaître définitivement au delà, sous les grandes nappes tertiaires. Letroisième côté du triangle montagneux, sub-équilatéral, qui circonserit le bas- sin de Quillan, bassin qui n’a d’issue que les deux gorges par lesquelles l'Aude y entre au sud et en sort au nord, est formé de plusieurs montagnes coniques et arron- dies. Celles-ci sont moins hautes que les précédentes, de teinte sombre, noirâtre comme tout le fond du bassin, à pentes régulières, reliées entre elles par des courbes concaves et dominées par le roc de Bitrague, élevé de 482 mètres au-dessus de la mer ou de 200 mètres au-dessus du fond de la vallée. L'ensemble de ces dernières collines rappelle d’une manière frappante l'aspect des volcans anciens, et le roc de Bitrague lui-même a dans sa forme beaucoup d’analogie avec le Puy-de-Dôme. La vue du bassin de Quillan que nous donnons ici (n° 1x) a été prise sur la rive gauche de l’Aude un peu au nord de la ville, le long du chemin de Brenac. On re- marque à gauche la disposition des montagnes que nous avons signalées en dernier lieu, puis vers le fond de la vallée plusieurs collines basses de même composition. Sur le dernier plan se dresse la crête rocheuse couverte de sapins, qui ferme le bassin au sud, et le défilé de Pierre-Lis traverse les montagnes qui se profilent en arrière-plan, vers le milieu du dessin. Bassin de l’Aude entre Quillan et Alet. Les montagnes qui bordent la vallée de l'Aude, entre Quillan et Alet, sont du même âge que celles des environs de la Grasse et du mont-Alaric, mais elles présen- tent des caractères qui les font distinguer tout de suite des chaînes secondaires dont on vient de parler. Si l'on fait abstraction d’une crête relevée, d’ailleurs peu pro- noncée, dirigée à l'E.-N.-E., et passant par Campagne, puis au-dessus de Rennes, pour se terminer un peu au delà du pont de Serres, on remarque, s'étendant, à l'O. par Nebias et Brenac jusqu’à Bellesta, et à l'E. sur les territoires de Granes, de Rennes, de Serres et de Luc, une série de collines à plateaux terminés par des arêtes rectilignes, horizontales ou faiblement inclinées, d’une étendue plus ou moins considérable, et quelquefois brisées. Ces arêtes vives limitent des assises de cal- caires compactes, blanchâtres, coupées carrément, ou d’autres roches solides qui reposent sur des talus faiblement inclinés de marnes rouges. Entre les villages élevés de Rennes et de Saint-Ferréol au sud, comme au nord entre Arques, Peyroles, Veraza, etc., ces alternances se développent, semblables à de 01 SOC. GÉOL. — 2° SÈRIE, T. VI. — Mém. n. 2. 30 234 OROGRAPHIE. (N: 2, p. 26.) larges ondulations ou à d’immenses vagues venant du S.-0. pour expirer contre les couches secondaires ou de transition. Les bords sont formés par une nappe calcaire régulière, partout d’égale épaisseur, et les courbes légèrement concaves qui relient les divers plans des lames sont formées par les marnes rouges. Autour du village de Rennes ces nappes sont à 419 et 435 mètres d'altitude; elles atteignent même 582 mètres à la pointe avancée de Jandou, dont la crête horizontale, é#oite, tout à fait linéaire, se trouve à 263 mètres au-dessus de la Sals qui coule à la base du talus de marnes rouges (pl. IV, fig. 1). Cette disposition est représentée, dans la vue ci-jointe prise du village de Rennes, du côté du sud, et d’où l’on embrasse un magnifique horizon (n° x). Les pre- miers plans sont formés par les nappes calcaires et les argiles rouges tertiaires dont N° X. — Vue prise au sud de Rennes. nous venons de parler. Leurs lignes simples et peu inclinées contrastent fortement avec les contours anguleux, les lignes brisées, les flancs rapides ou verticaux des montagnes secondaires qui occupent le fond du paysage. À gauche du spectateur, le pic de Bugarach dresse hardiment sa pyramide tronquée au-dessus de toutes les crêtes environnantes de Saint-Just, de Saint-Julien et de Saint-Ferréol, qui se profilent les unes derrière les autres, vers le milieu du dessin, tandis qu’à droite, sur le dernier plan, on distingue encore l'extrémité de la forêt de Fange, la crête méridionale du bassin de Quillan et au-dessous de cette dernière le roc de Bitrague, reconnaissable à sa forme particulière. Montagnes des Bains-de-Rennes, de Sougraigne et de Soulatge. On peut désigner ainsi, faute d’une expression plus simple, les petites montagnes secondaires, d’une époque particulière, comprises entre le massif de transition de Monthoumet au nord, les montagnes de Tuchan à l’est, les rides parallèles de la chaîne de Saint-Antoine au sud et les collines des bords de la vallée de l'Aude, dont nous venons de parler à l’ouest. Ces montagnes, généralement dirigées de l'E. à l’O., moins élevées que celles qui les entourent au Url à l’est et au sud, n’offrent n de caractères bien particu- liers, sauf ceux qui résultent de leur composition , d’ailleurs très variée. Leurs plus (N: 2, p. 27.) OROGRAPHIE. 245 grandes alüitudes se trouvent sur leur limite septentrionale, dans le voisinage même des parties les plus élevées des montagnes de Monthoumet, où elles atteignent 641 mètres (métairie de Lausadel), et elles s’abaissent vers le S., à mesure qu’elles s’approchent des crêtes qui les limitent de ce côté, de sorte que, prises dans leur ensemble, elles constituent un plan général incliné du N. au S. Parmi les accidents les plus remarquables qu “elles présentent, on peut signaler la voûte soulevée de la Ferrière, à l'endroit où elle est intérrompue par la gorge étroite au fond de laquelie coule la Sals. Cette voûte se prolonge à l'E.-N.-E. sur la rive gauche du ruisseau de Sougraigne. Le sommet de l escarpement du pied duquel s’échappent les sources salées, ou roc de Balesou, à tout le caractère des grandes arêtes du sud. Par son aspect général, cette petite région se distingue bien de celles qui l’en- tourent. On n’y trouve, en eflet, ni les fôrmes arrondies en ballons et les surfaces N° XI. — Vallée des Bains-de-Rennes. unies et continues des montagnes de Monthoumet au nord, ni les lignes brisées des hautes murailles rocheuses et dépourvues de végétation du sud, ni ces grandes nappes horizontales ou faiblement inclinées et arquées, aux arêtes vives, reliées par des courbes concaves régulières de l’ouest; ici le paysage est plus varié et moins sévère. Les cours d’eau abondants qui s’échappent dans toutes les directions, par- ticulièrement les sources qui alimentent la Sals, l’Orbieu et l’Agly, entretiennent une fraîcheur qui favorise la végétation partout développée sur les sommets les plus élevés où se trouvent des métairies, aussi bien que sur les pentes et au fond des vallées. La culture y donne des produits relativement assez abondants, et la popu- lation y est plus dense, 236 | OROGRAPHIE. (N. 2, p. 28.) Les collines qui entourent les Bains-de-Rennes à l’ouest et au sud sont couronnées par des bancs de grès brisés, aux formes bizarres et fautastiques qui impriment au pays un aspect particulier. Le dessin ci-joint (n° x1) représente une vue de la vallée des Bains prise sur la rive gauche de la Sals, dans l’escarpement qui domine le moulin Tiffeau. « On ne peut parcourir les environs des Bains-de-Rennes, a dit un voyageur (4), » sans admirer la riche variété du paysage. C’est là-que la nature se plaît à élever » l'imagination de l’homme, en déroulant à ses yeux Pimposante majesté des » montagnes. Le sommet aride du Bugarach s’élance dans les nues avec une audace » épouvantable, et done au paysage un aspect à la fois majestueux et terrible, » landis que les montagnes environnantes, couvertes de chênes, traversées par mille » ruisseaux, offrent des vallons frais et délicieux dont on ne s’arrache qu’à regret, » et qui laissent dans le souvenir de celui qui les à parcourus un sentiment indéfi- » nissable d’admiration (2). » . Collines du groupe tertiaire lacustre et de la mollasse marine. Pour terminer ce coup d'œil des caractères orographiques, il nous reste à parler des collines formées, dans la vallée inférieure de l'Aude et dans le bassin de Narbonne et de Sigean, par les dépôts du groupe lacustre et de la mollasse marine. Elles offrent l'aspect ordinaire de tous les pays de plaines et de plateaux, quoi- que les couches en soient plus ou moins inclinées dans le voisinage des roches tertiaires plus anciennes ou des roches secondaires. Ces dérangements ont été d’ail- leurs trop faibles, dans les deux régions que nous venons d'indiquer, pour donner réellement au pays un aspect particulier. Elles entourent en quelque sorte, à l’est, au nord et à l’ouest, comme une demi-ceinture, les régions précédentes plus accidentées et qui en diffèrent essentiellement. Elles atteignent rarement 150 mè- tres d'altitude ; celles qui sont à l’ouest de Lézignan sont les seules qui s'élèvent plus haut. Aux environs de Sigean et du Lac, les collines basses, à surfaces planes, légère- ment Inclinées vers la côte, sont terminées par des arêtes rectilignes, se joignant sous divers angles, limitant des talus extrêmement réguliers et simulant des (1) Guide pittoresque du voyagewr en France, publié par F. Didot. Département de l'Aude, p. 18, 1836. (2) L’elfet que produit une montagne dans un paysage, et par conséquent sur nos sens et sur notre esprit, n’est nullement en rapport avec son altitude bu son élévation absolue au-dessus de la mer. Il dépend de son élévation relativement au relief du pays environpant, de sa forme, de sa teinte et de la disposition des lignes de perspective qui $’y rattachent. On ne doit donc pas s'étonner si le pic de Bugarach, malgré sa faible altitude, frappe vivement le regard : car, de quelque côté qu’on l'aper- çoive, son profil se détache toujours de la manière la plus nette et la plus bizarre au-dessus des montagnes et des vallées qui l'entourent. Vu du pied de la Montagne-Noire, ou des euvirons de Cas- teluaudary, il produit encore beaucoup d'effet. (N. 2, p. 29.) OROGRAPHIE. ë 237 ouvrages de fortification (pl. HE, fig. 41). Cette disposition s’observe sur une étendue de plus de 2 kilomètres entre les métairies des Clavettes, de Bellevue et du Clix. Le plateau qui porte Sigean, vu du sud-ouest, ressemble à un grand camp retranché. Plus au nord, sur le flanc oriental de la chaîne de Fontfroide, les collines atteignent 110 mètres au-dessus de l’étang de Bages ; leur relief est assez prononcé et leur inclinaison plus forte. Entre le Lac et Peyriac, les collines prennent quelquefois la forme de grandes écailles imclinées à l'O., et près du Prat-de-Ceste sont des buttes coniques en forme de tumulus. Les collines tertiaires qui s'élèvent entre la route de Narbonne à Marcorignan, la Robine et larive droite de l'Aude, composées à la partie supérieure de dépôts marins blanchâtres, jaunâtres ou grisâtres, dans leur partie moyenne de roches clastiques et argileuses rouges, et vers le bas de dépôts lacustres, affectent des formes tabu- laires, ou bien arrondies et coniques. Leurs teintes sont en rapport avec les carac- tères de ces roches. Les deux séries de collines alignées généralement du N.-E. au S.-0., et que l’on voit se développer au nord et à l’ouest de Lézignan, entre la route de Carcassonne et l'Aude, laissent entre elles une large dépression à fond plat, bien cultivée, s'étendant de Serame à Castelnau, et dont la richesse contraste avec les surfaces plus ou moims stériles qui la bordent. C'est, à proprement parler, une vallée de soulèvement, de part et d’autre de laquelle les couches plongent presque partout en sens inverse. Les plus élevées sont des roches clastiques et des argiles rouges, des marnes grises, jaunes et des calcaires subordonnés, le tout appartenant au groupe lacustre ; les plus basses sur les pentes inférieures de la vallée appartiennent aux étages nummuli- tiques. Les premières, qui atteignent, à l’ouest de Lézignan, 174, 194 et 203 mètres d’altitude, suivent par Moux le pied nord du mont-Alarice, s’inclinant vers cette montagne et se présentant sous la forme de crêtes dentelées, parallèles plus ou moins relevées, sur les territoires de Douzens, de Comigne, de Capendu et de Bar- baira (Barbeirac de la carte). Au delà, reprenant l'aspect de collines ordimaires, elles se continuent vers l’'O., dans l'alignement du versant nord du mont-Alaric jusqu’au delà de Cazilhac, avec des altitudes de 224 mètres (Montirat), 226 et 260 (Pech-Ange). L'espace compris entre cette ride et la rive droite de l'Aude est occupé par des collines plus basses, à couches presque horizontales, grises où rou- geûtres, solides, ou plus ou moins tendres. Autour de Carcassonne, comme de cette ville à Limoux, l'aspect seul des collines peu élevées, à contours arrondis, de teintes gris jauuâtre et gris verdâtre, suffit pour qu’on ne puisse les confondre avec les: reliefs du sol formés de dépôts plus anciens. Au nord de Aude, d'Olonzac à Conques, des collines semblables, mais générale - ment plus basses qu’au sud, coupées par d'assez nombreux cours d’eau, se dirigent de LE. à l'O., passant ensuite par Villegailhenc, Ventenac, Moussoulens et Raissac au nord d’Alzonne, etc. DEUXIÈME PARTIE. GÉOLOGIE. Parmi les travaux qui ont contribué à faire connaître la géologie des Corbières et des autres parties des départements de l'Aude et des Pyrénées-Orientales qui les avoisinent, on doit signaler surtout ceux de Dufrénoy, A. Paillette et Tallavignes, et de MM. Tournal, Vène, et Leymerie. D’autres observateurs ont aussi apporté le tribut de leurs recherches, depuis de Charpentier, Reboul, de Labouïsse-Roche- fort, jusqu'a MM. Boué, Marcel de Serres, Rozet, Bouis, Farines, Fauvelle, Com- panyo, Durocher, Rolland du Roquan, V. Raalin, E. Dumortier et Noguès. En outre, les fossiles des terrains de sédiment ont été étudiés par Picot-de-Lapeirouse, de Boissy, Alc. d’Orbigny, et par MM. Ad. Brongniart, Marcel de Serres, Ley- merie, Rolland du Roquan, Michelin, Noulet, Cotteau et par nous-même. Enfin les eaux thermales ont été examinées ou analysées par MM. Fréjacque, Estribaud, Ch. Darwin, Balard, Julia et Reboulh, etc. Il serait superflu de présenter ici un résumé historique de ces divers travaux, d’abord parce que nous aurons occasion de les rappeler dans le cours de ce travail, toutes les fois que nous mentionnerons des faits signalés par nos prédécesseurs ou que nous discuterons leurs opinions, et ensuile parce que cette revue rétrospective se trouve déjà en grande partie dans les volumes publiés de l'Histoire des progrès de la Géologie. Nous établissons comme il suit la série des divisions géologiques comprises dans l’espace que nous décrivons et qui sont représentées sur la carte par dix-huit teintes. TERRAINS. FORMATIONS. GROUPES. ÉTAGES. Le Moderne. Quaternaire. / Supérieure. Marnes bleues marines. Moyenne. . Mollasse marine. Mollasse d’eau douce ou grès de Carcassonne. Calcaires et marnes du bassin de Narbonne et de Sigean (gypses normaux). Poudingues des montagnes. Supérieur (marnes, grès et calcaires marneux). Nummulitique. { Moyen (marnes bleues à Turritelles et calcaires marneux). Inférieur (calcaires à Milliolites). Tertiaire. . , Lacustre. . . . \Inférieure. \D’Alet. (N. 2, p. 51.) TERRAIN MODERNE. 239 TERRAINS. FORMATIONS. GROUPES. ÉTAGES. [4 Marnes bleues. Grès, marnes et premier niveau de rudistes. L Calcaires marneux, gris, jaunes ou bruns avec échi- nides. Calcaires durs, gris, bruns, noduleux et second ni- veau de rudistes. h. Calcaires marneux à Zxogyra columba, Orbitolites \ concava et grès. À ‘ Calcaires compactes ou à Caprotines. \Inférieure . ne Marnes, calcaires et grès an (gypses anorm.), \ Jurassique. Lias Us anormMaux, dolomies, rauchwackes). Houillère. Dévonienne. Cristallin Granites, gneiss, etc. z ù sr * * * {Roches ignées (ophites, eurites granitoïdes, porphyres, diorites, amygdaloïdes). Supérieure. 3. AS du sud. Crétacée. Secondaire. . | De transition. Nos recherches ayant eu particulièrement pour objet les dépôts tertiaires et secondaires, nous passerons rapidement sur les autres divisions indiquées dans ce tableau. TERRAIN MODERNE. Les dépôts de l’époque actuelle, dus à l’action des agents atmosphériques, des cours d’eau et de la mer, fort importants au point de vue agricole ou économique, atteignent pas, en surface ni en profondeur, un développement qui doive nous obliger à en traiter ici d’une manière spéciale. Dans le plus grand nombre de cas, la terre végétale est d’ailleurs trop intimement liée aux caractères du sol sous-jacent, pour que nous ne remettions pas à en parler au fur et à mesure que nous examine- rons ce dernier. Les côtes de la Méditerranée et les bords des nombreux étangs saumâtres qui les découpent, entre l'embouchure de l'Aude et celle de l’Agly, tels que ceux de Gruissan, de Bages, de Sigean et de Leucate, ne nous ont offert que des plages sableuses, rocheuses et le plus ordinairement vaseuses, très basses, sans dépôts récemment émergés, coquilliers ou non, que l’on puisse rapporter à l’époque actuelle ou même à la précédente, et constituer ce que sur d’autres points du péri- mètre de cette mer on a décrit sous les noms de grès, de calcaires et de tufs qua- ternaires. Ainsi les oscillations du sol qui ont élevé ces derniers sur les côtes de l'Afrique, de l'Italie et sur le pourtour des grandes îles voisines, ne se seraient pas manifestées ou n'auraient point laissé de traces le long de ce rivage occidental. Les plages très basses, depuis la Camargue ou le delta du Rhône jusqu’à l’em- bouchure du Tech au sud de Perpignan, n'offrent point de lignes de dunes compa- rables à celles des côtes de l'Océan. Les petits amas de sable qu’on observe entre . Cette et Agde ne méritent pas ce nom, car leur élévation ne dépasse guère 5 ou 6 mètres, comme M. Marcel de Serres l’a aussi constaté récemment. Le faible balan- cement de la masse des eaux de la Méditerranée, les roches calcaires généralement dures, plus ou moins inaltérables, rarement marneuses, presque jamais arénacées, 240 TERRAIN MODERNE. " (N.2, p. 52.) ——. qui se trouvent dans son voisinage immédiat, et peut-être aussi la direction des vents dominants ne sont pas des circonstances favorables au développement de ces accu- mulations détritiques contemporaines, de sorte que ces côtes semblent offrir aussi, depuis l’état actuel des choses, une stabilité relative à peine troublée par les sédiments qu'apportent dans leurs crues l'Hérault, lOrbe, l'Aude, PAgly et la Têt. Ces dépôts successifs, quoique très faibles, ont cependant modifié un peu certaines parties de la côte et des étangs dont nous venons de parler, mais sur une échelle infiniment moindre que les atterrissements produits plus au nord par les eaux du Rhône (1). Cette uniformité et cette platitude du littoral du Languedoc, qui se manifestent à l'œil le moins expérimenté, par ces grandes et nombreuses lagunes qui le séparent de la mer proprement dite, se continuent encore sous les eaux jusqu’à uue distance considérable, car la ligne de sonde de 400 brasses se trouve partout à 10 lieues en mer, depuis l'embouchure du Rhône jusqu’au parallèle de Perpignan, ce qui dénote une pente excessivement faible et uniforme dans toute cette étendue. M. Tournal (2) a donné des détails intéressants sur les atterrissements formés par les crues de l'Aude, dans la dernière partie de son cours. Les lagunes connues aujourd’hui sous les noms d’étangs de Bages, de Gruissan, de Fleury et de Capestang ne seraient que les restes d’un grand lac qui, au temps de Pline et de Strabon, recevait directement toutes les eaux de l'Aude et les transmettait ensuite à la mer par une étroite ouverture. Aujourd’hui la rivière ne traverse aucun de ces étangs, si ce n’est par les eaux détournées de la Robine de Narbonne, qui se rendent à l'étang de Bages, qu’elles tendent à combler par les sédiments qu’elles y apportent. La salure de ses eaux paraît avoir diminué graduellement, de telle sorte qué les coquilles essentiellement marines n’y paraissent plus vivre, tandis que les plantes d’eau douce et les grenouilles peuvent s’y reproduire. Sur plusieurs points de leur pourtour, des exploitations de sel plus ou moins importantes sont aménagées de temps immémorial. Telles sont les salines d'Estarac, de Peyriac, les grandes salines de Sigean, de Cabanet et de Grimaud à l’ouest de la Nouvelle, l'OEil de la saline au nord du Lac, et d’autres exploitations disposées dans la partie sud de l'île Sainte-Lucie, le long du canal et au pied de son escarpement sep- tentrional. Quelques-unes de ces lagunes, tels que les étangs de Pudre et de Deüme, sont actuellement tout à fait desséchées. La langue de terre plus ou moins large, allongée du N. au S., que parcourent le canal de la Robine et le chemin de fer de Perpignan, et qui joint d’une part Pile de Sainte-Lucie à la Nouvelle, et de l’autre aux petites buttes de Montfort et de Saint-Laurent, est un dépôt de la période actuelle, recoupé encore à l’est, le long de la Clape, par le canal appelé l'Épanchoir-Sainte-Marie. C’est un ancien lai de la mer qui sépare aujourd'hui l'étang de Bages de celui de Gruissan. Le domaine de Connillac, où l’on avait essayé d'établir des rizières, celui de la Jasse, etc., sont de (1) Voyez, sur ce sujet, Élie de Beaumont, Lecons de géologie pratique, 1845, t. I, p. 366-103. (2) Journal de géologie, t. X, p. 332, 1830. (N. 2, p. 53.) TERRAIN MODERNE. 211 vastes prairies de quelques mêtres au-dessus de la mer, que l’on arrose facilement pen- dant l'été au moyen de retenues, et que l’eau couvre naturellement pendant l'hiver. Les atterrissements de l’Aude ont reporté son cours vers le nord, car, sous la domi- nation romaine, elle baignait les murs de Narbonne. Au x° siècle elle montrait déjà une tendance à s'éloigner dans cette direction, et ce fut en 1320 qu’elle se traca un nouveau lit du côté de Coursan. Comme toutes les rivières qui bordent les pays de montagnes, l'Aude entraîne daus son cours rapide une masse considérable de limon qui, avant d'atteindre la mer, se dépose sur les parties basses inondées, souvent fort étendues de la plaine qu'elle traverse. Ces sédiments, dit M. Rolland du Roquan (1), occupent toute la plaine de Coursan, et s'étendent de Lézignan jusqu’à la mer. Ils sont composés de détritus limoneux, très fins, constituant alors de bonnes terres arables; mais, lorsque des cailloux assez gros et assez nombreux viennent à s'y mêler, le sol est aride ou peu productif, Leurs limites ont été marquées par Du- frénoy sur la carte géologique de la France (2) où on les voit recouvrir aussi une sur- face considérable du fond de la vallée que parcourt le canal, entre Olonzac et Trèbes. M. du Roquan fait remarquer que ces derniers, par leur élévation au-dessus des plus hautes eaux de nos jours, pourraient appartenir à une période plus ancienne. À partir de Carcassonne commence, sur la rive gauche de l'Aude, un troisième lambeau de dépôts modernes qui se continue vers l’ouest, bien au delà des limites de notre carte. Il est composé, à sa partie supérieure, de terre végétale sablonneuse, fort estimée des cultivateurs, et, à sa base, de cailloux roulés. Le fond de la même vallée, lorsqu'on la remonte par Limoux, Alet, Couiza, Esperaza et Campagne, est aussi recouvert d'un dépôt limoneux tres fertile. Nous avions remarqué, épars cà et là dans la plaine de Lézignan, des fragments de calcaire lacustre compacte, très dur, celluleux, concrétionné, grisâtre ou blan- châtre, et dont les cavités paraissaient dues à des tubes de Phryganes, assez sem- blables en cela aux calcaires à Zndusia de l'Auvergne. Rien de ce que nous connais- sions aux environs ue pouvait nous faire soupçonner son gisement, mais nous observämes en même temps que les matériaux employés pour les stations de cette localité et de Capendu devaient provenir du même dépôt. N'ayant pu obtenir de renseignements immédiats à cet égard, ce fut M. P. Régnauld, ingénieur des ponts et chaussées, qui nous apprit plus tard que cette roche provenait de Ferrals, au sud de Lézignan. M. Noguës ayant bien voulu, à notre prière, en étudier la position et le développement, nous donnerons ici le résumé de ses recherches qu’il nous a adressé au moment où ces feuilles s’impriment. Ce calcaire, situé sur les territoires de Ferrals et de Fabrezan et connu dans le pays sous le nom de turet, n'occupe pas plus de deux kilomètres carrés. Il est limité (1) Notice géologique sur le département de l’ Aude (Annuaire du département de l'Aude pour 1844, p. 202). (2) En six feuilles, 1841. SOC. GÉOL, — 2° SÉRIE, T. VI, — Mém, n, 2. 34 242 TERRAIN QUATERNAIRE. (N. 3, p. 34.) à l’ouest et au nord par le groupe nummulitique, à l’est par un dépôt de transport ou sorte de poudingue qui suit le cours de l’Orbieu, et au sud il n’atteint pas la petite rivière de la Moissette. Les couches n’ont pas plus de 4 mètres d’épaisseur, et souvent beaucoup moins. Les métairies de Liourade, de Lastignes et de Montamier sont bâties dessus. M. Noguès pense que ce travertin est très récent, et en effet 1l paraît reposer horizontalement sur le dépôt quaternaire de la plaine. Nulle part 1l n’est recouvert, n’a été dérangé, et sa surface n’affecte aucun relief particulier. On y trouve des coquilles terrestres dont le test est bien conservé, identiques avec celles qui vivent encore dans le pays. Ce serait, en un mot, un produit de sources ther- males, analogue à celui que l’on voit aussi près de Vendres (Hérault), sur la rive gauche de l’Aude, et qui renferme l’ÆZelix nemoralis orné de ses vives couleurs. Le cours inférieur de l’Agly, depuis Espira jusqu’à la mer, est encore bordé de sédiments sablonneux, gris, très fins, fort épais, qui s'étendent de part et d’autre de la rivière sur les dépôts quaternaires de la plaine de Rivesaltes. Le Verdouble, la Berre et l’Orbieu, presque toujours fort encaissés, abandonnent sur leurs rives des amas de cailloux et de sable plus ou moins considérables, mais généralement peu étendus. Les cours d’eau de l’intérieur des montagnes, presque toujours torrentiels, ne for- ment que des atterrissements locaux en rapport avec les divers accidents des vallées étroites et profondes qu’ils parcourent. TERRAIN QUATERNAIRE, «Sur une grande partie des hautes collines formées par le terrain tertiaire des » environs de Carcassonne, on observe, dit M. Rolland du Roquan (1), des bancs » puissanis de cailloux roulés à peu près semblables à ceux que l'Aude charrie » encore. Ces cailloux, d’un volume quelquefois considérable, sont en général fai- » blement agglutinés par un ciment calcaire, et forment une roche qui se désagrége » facilement à l'air. L'âge de cette roche doit être certainement antérieur à l'ére » historique, car on la retrouve sur des points trop élevés pour qu’on puisse penser » que les inondations, quelque fortes qu’on les suppose, aient jamais pu les attein- » dre pendant la période actuelle. » Dans certaines localités du bassin moyeu de l'Aude, on voit ces dépôts à plus de 100 mètres au-dessus du niveau qu'atteignent les plus hautes eaux de nos jours. On n’y a pas encore rencontré de débris organiques, et leur composition pourrail parfois les faire confondre avec certaines couches tertiaires, si l'on ne remarquait pas que ces dernières sont toujours plus ou moins dérangées de leur position originaire, tandis que les sédiments quaternaires, parfaitement horizontaux, les recouvrent transgressivement. L'exemple que cite particulièrement M. du Roquan est très propre à donner une idée de cette disposition, entre Rouffiac d’Aude et Cépie, sur la route de Carcassonne à Limoux, où nous l'avons souvent observée nous-même. La colline basse, entaillée, montre la superposition du poudingue qua- (4) Loc, cit., p. 203. (N: 2, p. 55.) TERRAIN QUATERNAIRE, 243 ternaire à la mollasse tertiaire, également remplie de cailloux et ressemblant au nagelfluh de la Suisse et du Dauphiné. Lorsqu'on suit, sur une certaine étendue, le contact du dépôt le plus récent, on voit qu’indépendamment de sa superposition transgressive, il se distingue bientôt de celui qui l'a précédé par ses éléments plus volumineux et sa moindre cohésion. La vallée supérieure de l'Aude, très encaissée depuis les Pairouliés jusqu’à Couiza, offre peu de traces de dépôts quaternaires; mais de ce dernier point à Esperaza, Campagne et jusqu’au débouché du ruisseau de la Valette, on remarque, sous l'al- luvion moderne et la terre végétale, des accumulations de cailloux roulés et de blocs, d'autant plus volumineux qu’on remonte davantage le cours de la rivière. A l’entrée de la gorge par laquelle Aude sort de la vallée de Quillan, près de cette ville, un amas puissant de blocs calcaires et de roches cristallines, plus où moins arrondis, s'élève de 25 à 30 mètres au-dessus des eaux actuelles. Il en est de même lorsqu'on se dirige au sud, à l'entrée du défilé de Pierre-Lis, vers Axat et au delà. Le fond du bassin cratériforme de Quillan est occupé par un dépôt d’une semblable origine que recouvre une alluvion plus récente assez épaisse, et dont la belle végétation imprime à cette surface un aspect riant qui contraste vivement avec les formes sévères et les flancs arides des montagnes environnantes. Au nord de l'Aude, le fond de la vallée de POrbiel, autour de la petite ville de Conques, est occupé par un dépôt argilo-sablonneux fort épais qui contribue beau- coup à la richesse de la végétation qu’on y observe. Des jardins très soignés et très productifs y attestent la bonté du sol, aussi bien que intelligente activité des habi- tants. En suivant la route de Lastours, on trouve à mi-côte, avant le Foulon, un amas de cailloux roulés très volumineux, et plus bas le dépôt précédent auquel est dà, ainsi qu'à l'abondance des eaux vives qui le sillonnent, l’extrème fraîcheur de cette vallée, depuis la Bernède jusqu'à Sendilla, Lassac, etc. La végétation s'y développe avec une vigueur que nous n'avons observée nulle part dans ce départe- ment. Rien de plus gracieux que le paysage que parcourt la route, tracée comme une allée de jardin, suivant le cours sinueux de l'Orbeil et constamment couverte par les arbres touffus qui étendent leur ombre épaisse sur les flancs de coteaux rapides dont le sommet est entièrement dénudé. Plus à l’ouest, la plaine fertile d’Alzonne doit encore sa richesse à un dépôt qua- ternaire assez puissant qui en occupe toute l'étendue. Au-dessous de Carcassonne, à mesure que la vallée s'élargit, les détritus qui nous occupent prennent de plus en plus d'importance et s'étendent sur de plus grandes surfaces. Ainsi autour d’Argens et de Roubia ils sont très développés, et on les voit pénétrer dans les vallées latérales qui y débouchent. Au-dessous de Ribaute, sur la rive droite de l’Orbieu, un amas puissant de sable et de cailloux roulés recouvre transgressivement les marnes bleues du groupe nummulitique (pl. WE, fig. 44). Entre Saint-Laurent et Fabrezan, le lit du Rabe est souvent creusé dans un dépôt du même âge, qui n'a pas moins de 42 mètres d'épaisseur et s'élève çà et là sur les 244 TERRAIN QUATERNAIRE. (N. 2, p. 36.) pentes des collines nummulitiques. Le fond de la plaine d’Espalays à Parazols et à Saint-Laurent, de chaque côté du Rabe, offre encore des couches analogues assez épaisses. Autour de Lézignan et dans le tracé du chemin de fer, entre ce point et Villedaigne, on peut partout constater leur présence. Tout le premier plan du dessin pris de la butte des fours à chaux (antè, p. 218) peut donner une idée de l’aspect de la plaine de Narbonne. Le dépôt quaternaire qui en occupe le fond est parfaitement horizontal. Il s'appuie à l’est sur les couches inclinées de la Clape, et à l’ouest contre l’extrémité nord-est de la chaîne de Font- froide. Cette plaine bien nivelée, élevée de 3 à 8 mètres seulement au-dessus de la mer, ne nous a guère présenté, dans le parcours du chemin de fer et dans les fossés de la ville, qu’un dépôt caillouteux et de sable grisâtre plus ou moins argileux. Dans le vallon de Saint-Pierre de Bas, le dépôt terreux rougeûtre est plus épais et renferme peu de cailloux roulés. La plaine si bien nivelée de Montredon doit ce caractère au dépôt analogue qui en occupe le fond. Sur d’autres points, nous avons observé un sédiment meuble de cailloux roulés, très arrondis, presque exclusivement de quartz blanc laiteux, de grès et de schistes gris anciens. Rarement les galets proviennent des calcaires noirs crétacés ou jurassiques des environs et des calcaires tertiaires du voisinage. Il est donc probable que la plus grande partie de ces éléments ont pour origine les roches anciennes de la montagne Noire située au nord-ouest. M. Tournal (1) décrit ce dépôt sous le nom de terrain de transport des plaines, et il est, suivant lui, composé de cailloux roulés, de gravier, de sable grossier provenant de diverses roches parmi lesquelles il signale, outre les roches anciennes, des calcaires secondaires, des calcaires lacustres, des calcaires marins tertiaires. Le volume des fragments varie de la grosseur de la tête à celle du poing. Il est probable que le dépôt observé sur les bords du bassin, dans ses parties les plus anciennes, n'offre pas tous les éléments qui se rencontrent dans les exploitations du milieu de la plaine autour des murs de Narbonne. L'auteur y mentionne une dent de cheval et une défense d’éléphant. Cette dernière est sans doute celle qui a été mentionnée entre Nissan et Coursan, et que M. Rolland du Roquan associe, avec des Huîtres et d’autres fossiles, dans des sables jaunâtres qui seraient tertiaires, suivant nous, et non quaternaires ou diluviens, comme il paraît le croire. La coupe de la colline de Béziers et celle des petites falaises de Mèze que nous donnerons ci-après nous semblent justifier cette manière de voir. À une demi-lieue au sud de Narbonne, les roches tertiaires viennent affleurer dans les fossés de la route de Sigean, et les dépôts de la vallée ne paraissent pas s'étendre au delà, dans cette direction. Sur les premières pentes de la Clape, à gauche du chemin de Gruissan, entre le ravin de la Ricardelle et le col du Capitoul, de petits monticules de terre jaune rougeàtre, argilo-sableuse, semblable à celle des environs (1) Journ. de géologie, 1830, t. T, p. 320, — Voyez aussi A. Boué, Bull, Soc, géol. de France, 47e sér., ©, LIT, p, 324, 4835. (N. 2, p. 57.) TERRAIN QUATERNAIRE. 245 immédiats de Narbonne, reposent directement sur les calcaires compactes à Caprotines. Un peu plus loin, le poudingue tertiaire vient se placer entre les deux. Les petites vallées qui découpent le versant oriental de la chaîne de Fontfroide, et celle de la Berre qui est la plus étendue, ne nous ont point offert de dépôts de cette époque. Il en est de même dans la vallée si ouverte de la Murelle, que tra verse la grande route au nord de Sigean. Tout le pied du grand plan incliné de Fitou et d’Opouls n’en présente aucune trace jusqu'au bord de la mer. Ce n’est qu’un peu au nord du bourg de Salses que commence ia vaste plaine unie de Rive- saltes, dont les contours suivent au N.-0. et à l'O. la base des collines secondaires par Espira, Peyrestortes, etc. Cette plaine horizontale, d’une élévation moyenne de 16 mètres au-dessus de la mer, exclusivement consacrée à la eulture de la vigne, dont les produits sont si estimés, est composée à sa surface d’une terre rougeâtre ou alluvion ancienne, peu épaisse, recouvrant uniformément un dépôt de cailloux roulés. Celui-ci se relève un peu le long des pentes inférieures des collines cal- caires. Ainsi, à la métairie de Pares, il constitue un poudingue à ciment de sable rouge ocreux. Aux environs de Castel-Vieil, il atteint 45 mètres d'altitude. Il est composé de fragments plus ou moins gros de calcaires gris, compactes, sous-jacents. A Salses, le niveau de la plaine n’est qu'à 10 mètres au-dessus de la mer; près de Rivesaltes, sur la rive droite de l’Agly, à 15, et au moulin d’Espira à 28. Par suite du plongement à l'E. et au S.-E. des assises calcaires du plan d’O- pouls et de Fitou et du chaînon de Tautavel, le fond de la plaine de Rivesaltes est très aquifère, et la série des couches traversées par les nombreux sondages qu’on y a exécutés dans les strates tertiaires montre une composition assez variée sur la- quelle nous reviendrons tout à l'heure. Si l’on remonte la vallée de l’Agly à partir d’Espira, on voit que le dépôt de transport dans lequel la rivière a tracé son lit n’a qu’une faible importance. Les oliviers séculaires si remarquables par leur grosseur, leur nombre et leur belle végé- tation, au-dessus et au-dessous d’'Estagel, sont dans une terre grise caillouteuse assez médiocre en apparence et peu profonde. La petite vallée de Tautavel, que parcourt le Verdouble et bordée de deux chaînes rocheuses complétement nues, doit sa ferti- lité exceptionnelle et les beaux oliviers qui l’ombragent à la présence d’une terre jaune, argilo-sableuse, fort épaisse et sans doute encore de l’époque quaternaire. Cette végétation toute locale, qui contraste avec la sécheresse du pays environ- nant, semble une oasis de verdure au milieu d’un désert de pierres, el cesse au sud du village, dès que les roches noirâtres, schisteuses, sous-jacentes, viennent af- fleurer à la surface du sol. Le fond de la plaine de Tuchan est occupé par un dépôt caillouteux assez épais, mais recouvert d’une couche de terre végétale très mince qui manque même sou- vent. Les oliviers ne sont guère cultivés que dans sa partie nord, la portion sud étant plus particulièrement consacrée aux céréales et aux prairies artificielles. La plaine est arrosée par de nombreux filets d’eau qui descendent des montagnes à 246 TERRAIN TERTIAIRE. (N. 2, p. 38.) l’ouest, au nord et à l’est pour se réunir au Verdouble, et dont la fraîcheur sup- plée au peu de fertilité du sol lui-même. Les vignes occupent principalement la pente des collines tertiaires qui circonserivent le fond du bassin à l’est et au sud. Les accumulations de débris quaternaires de la vallée de la Maury, à l’ouest d’Es- tagel, sont assez épaisses, et les cailloux roulés de diverses grosseurs proviennent seulement des montagnes environnantes. Les talus naturels de celles-ci sont conti- nués jusqu'à leur base par des talus d’éboulement plus où moins réguliers. Enfin, au delà de la petite crête qui, près de Saint-Paul, forme la ligne de partage des bassins de la Maury et de Agly, la grande plaine que parcourt la Boulsane est complétement dépourvue de dépôts quaternaires. Sur tout le territoire de Caudiès, les roches secondaires noires, schisteuses, sont à découvert ou masquées seulement par les détritus anguleux qu’entraînent les eaux sauvages qui descendent des mon- tagnes voisines dont ils prolongent ainsi les pentes vers le thalweg de la vallée. Il n’y a donc autour des massifs montagneux des Corbières que des dépôts qua- ternaires d’une médiocre étendue, peu épais en général, toujours composés d’élé- ments en rapport avec ceux qui constituent les montagnes voisines et d’où ils ont rayonné, entraînés par des causes sans doute plus énergiques que les cours d'eau actuels, mais en suivant des directions peu différentes. La vallée de Cau- diès, malgré son étendue, semble faire exception. Aucun volume d'eau plus consi- dérable que celui de nos jours ne l'aurait parcouru. L’Agly qui la traverse un peu obliquement n°y pénètre et n’en sort que par deux pertuis fort étroits, dont un même ne pourrait être suivi sans danger. La Boulsane ne paraît pas avoir charrié de masses détritiques jusque dans la plaine où elle se réunit à l’Agly. Sur aucun point du pays nous n’avons observé d’amas de blocs, de cailloux et de sable en forme de monticules longitudinaux ou transverses, analogues à ceux que l’on a signalés dans certaines vallées des Pyrénées. Encore moins n’existe-t-il nulle part de blocs isolés comparables aux blocs erratiques des autres contrées. Ceux qu'on rencontre dans les dépôts dont nous avons parlé sont toujours d’un petit volume, et rien n’annonce que les phénomènes de transport de cette époque aient eu, sur aucun point de cette région, une bien grande énergie. TERRAIN TERTIAIRE. Formation tertiaire supérieure. M. Marcel de Serres (1) a indiqué, sur la rive gauche de l’Agly, en face du village d'Espira, une coupe de 7 à 8 mètres de hauteur, au bas de laquelle viennent af- fleurer des marnes argileuses bleues, fossilifères, sans doute du même âge que (1) Géognosie des terrains tertiaires, p. 86, in-8 avee 6 pl. de fossiles, Montpellier, 1829, — M. Marcel de Serres avait rédigé un trayail fort étendu sur la géologie des Pyrénées-Orientales, mais l'extrait qui en a été publié en 1829 dans les Mémorres de la Société linnéenne de Normandie (2 sér., t. 1, p. 157) n'a pu nous être d'aucune utilité, et la carte qui paraît y avoir été annexée nous est restée inconnue. (N: 2, pe 59.) FORMATION TERTIAIRE SUPÉRIEURE. 247 celles de la vallée du Tech et de la Têt situées plus au sud et appartenant à la for- mation tertiaire supérieure ou subapennine. Elles sont ici surmontées de sable marneux, blanc et jaune, avec du lignite, et de 3 mètres d'épaisseur, de marnes argileuses jaunâtres et de nouveaux sables marins jaunâtres de 2 mètres, le tout recouvert par le dépôt quaternaire de la plaine, dont l'épaisseur en cet endroit est d'environ 4 mètre. Les coquilles des marnes bleues sont mieux conservées que dans les couches correspondantes du Boulou, de Milias, de Banyuls et de Nef- fiach, et beaucoup d’entre elles ont même conservé une partie de leurs couleurs. Un dépôt analogue, indiqué près d’Estagel par M: Noguès (1), nous est complétement inconnu. Les couches tertiaires ne paraissent pas affleurer sur d’autres points du bassin inférieur de l’Agly ni sur les pentes des roches secondaires qui l'entourent, les dépôts quaternaires les débordant sans doute partout. Nous rappellerons ici, seulement pour mémoire, que Reboul (2) à émis quelques idées sur l’âge relatif et le mode de formation de ces couches. Ces 1dées ne reposent que sur un examen assez superficiel des faits, comme le prouvent les détails précé- dents et ceux qui vont suivre ; mais nous n’en sommes pas moins d'accord avec ce savaut sur la plupart de ses conclusions relatives à la multiplicité des soulèvements qui ont affecté la chaîne complexe des Pyrénées (3). Plusieurs sources jaillissantes, connues dans le pays sous le nom de Dals mattés, avaient fait présumer que des sondages artésiens pourraient y avoir quelque suc- cès, En effet, un peu au nord de Bages, village situé au sud de Perpignan, un premier forage a atteint une source jaillissante à 26 mètres au-dessous d’une marne très sablonneuse; à 46",11 on a rencontré une argile noire et compacte ; et à 47°,09 on a obtenu un jet d’eau limpide qui s’est élevé avec force, entrai- nant des fragments de pierre et du gravier (4). La disposition générale des cou- ches tertiaires du bassin rend compte à la fois des sources jaillissantes naturelles et de celles obtenues par l’art. Le premier sondage exécuté à Rivesaltes, dans l’axe de la vallée de l’Agly, et poussé jusqu'à 75",21, à traversé des argiles plus ou moins compactes et des marnes calcaires. À 67",40, on a rencontré une argile noire bitumineuse reposant sur une marne caleaire noire avec des Huïîtres bien conservées. Au delà, un sable très argileux renfermait la nappe jaillissante (5). L'année suivante, M. Farines (6) a rendu compte des entreprises semblables exé: cutées sur divers points de cette vaste plaine du Roussillon, et qui ont fait connaitre (4) Notice géologique sf le départément de l'Aude, p. 41, 1855. (2) Mémoire sur les terrains de comblement tertiaires (Mém. de la Soc. géol. de France, 1° sér., t. I, p. 202, 1834). (3) Bull. de la Soc. géol. de France, 1"°sér; t. I, p. 74, 1831. (4) J. Arago, Acad, des sciences, 43 sept. 1833, — L'Institut, 24 sept. 1833, p. 162. — Journal des Pyrénées-Orientales, T sept: 1833. (5)J. Arago, Acad. des sciences, 9 déc. 4833; — L'Anstitut, Ah déc. 4833, n° 31, p. 257. (6) Soc. philomatique de Perpignan, Résumé des @avaux du troisième trimestre. — L’/nstitut, 15 oct. 1834, p. 350, # 248 FORMATION TERTIAIRE SUPÉRIEURE. (N. 2, p.40.) assez bien sa constitution géologique. Dans la ville de Perpignan, placée à peu près à moitié de la distance qui sépare Rivesaltes de Bages, les sondages ont d’abord été sans succès. L'un sur l’esplanade avait cependant été poussé jusqu’à 125 mêtres, sans que la totalité des sédiments tertiaires eût été traversée. Un sondage exécuté à Rivesaltes a rencontré la nappe jaillissante à 52°,60, et la couche la plus basse était une marne argilo-calcaire imperméable, retenant les eaux à partir du banc de sable immédiatement superposé. Lasonde avait atteint successive- ment, à partir du dépôt quaternaire de la plaine, une série de vingt assises sudivisées en un certain nombre de lits d’argiles rouges, plus ou moins compactes, marneuses ou sableuses, de marnes argilo-calcaires blanchätres, sableuses où mélangées de gravier, de calcaires peu nombreux et de sable micacé argileux. A 40 mètres, la cuiller a ramené des débris de Cardium et de Pecten. Des cailloux de quartz ont été rencontrés à plusieurs niveaux (4). Plus tard, l’un de ces puits (le puits Singla) a rejeté mo- mentanément une grande quantité de sable micacé avec des fragments d’'Huîtres, de Chames, de Peignes, de Pectoncles, de Buccins, de Rissoa, de Natices, de Turbo, de Murexæ, etc. C’est de la couche de sable marin coquillier que l’eau jaillit (2), et cette circonstance permet de penser que c’est aussi le niveau de la couche coquil- lière qui se prolonge sous la plaine avec une inclinaison d'environ 5/1000. Dans son Résumé statistique des forages artésiens du département des Pyrénées- Orientales (3), M. Farines fait remarquer que ces entreprises, alors au nombre de dix-huit, et dont dix avaient réussi, ont toutes présenté une série d’argiles mar- neuses alternant avec des sables plus ou moins fins et quelquefois avec des grès et des marnes coquillières. L'épaisseur des diverses roches, leur ordre relatif et leur dureté varient d’un sondage à l’autre. Dans le plus profond, celui de l’esplanade de Perpignan, on n’a pas rencontré de couches de nature différente, et dans aucun on n’a traversé toute la série tertiaire, sauf peut-être à Espira de l’Agly, où, à 27 mètres, la sonde a touché une roche solide, dont l’âge n’est pas bien connu, mais qui paraît exister dans le voisinage des calcaires secondaires des environs. Elle est d’un noir rougeâtre ou grisâtre, schisteuse, pénétrée de veines spathiques et sans fossiles. L'auteur présume qu’elle appartient encore au terrain tertiaire et qu’elle se trouve placée à la séparation des calcaires compactes crétacés et des dépôts plus ou moins meubles de la plaine. Nous ne nous occuperons pas ici de la discussion théorique qui s’est élevée à l'occasion de ces ue entre M. Farines et M. Marcel de Serres (4), et dont nous (1) £d., ibid., p. 395.— D'’Archiac, Æist. des progrès de la géologie, t. 1f, p. 714, 1849. (2) Farines, L'Institut, n° 103, p. 136, 22 avril 1835. (3) Soc. philomatique de Perpignan. — L'Institut, n° 115, p. 236, 22 juillet 1835. {h) Notice sur Les puits artésiens (L'Institut, n° 91, p. 43, févr. 1835). — Zbid., n° 105, p. 156, 22 avril 1835. — Comptes rendus de l’Académie des sciences, t. T, p. 7, 1835. — Actes de la Soc. linn. de Bordeaux, t VAE, p. 120, 1835. ibid, t. VIII, p. 192, 1836. -— D’Archiac, ist. des progrès de la géologie, t. AN, p. 716, 1849. aan 4) FORMATION TERTIAIRE SUPÉRIEURE. 209 avons déjà eu occasion de parler; le premier affirmait qu'aucun des sondages exécutés dans les Pyrénées-Orientales n'avait traversé la totalité des terrains tertiair es; le second que les eaux jaillissantés devaient être cherchées au-dessous de celui- ST INOËS renver— rons le lecteur, que ce sujet pourrait intéresser, aux documents indiqués ci-dessous. MM. Companyo et Falip (1), après avoir rappelé que la première tentative de puits artésien faite dans ce même département était due à M. Fraisse, et avait été exécutée au mois de mars 1829, sur les bords de la Basse, dans la commune de Toulouges où elle avait complétement réussi, ont donné une statistique, intéressante et fort utile pour le pays, des travaux de ce genre entrepris jusqu’en 1854. Sur 87 sondages, 58 avaient donné des résultats satisfaisants et produisaient ensemble 34,853,920 litres d'eau par jour. La profondeur moyenne des 58 forages qui avaient réussi était de 76,87, et la moyenne de la quantité d’eau fournie par chacun d’eux de 600,929 litres ne le même temps. M. Fauvelle (2) qui, à partir de 1846, a exécuté à Perpignan les sondages du Pont d’en Bastit (l’auteur écrit aussi d’en Vestit), de la Loge, de la place Saint-Dominique et de la Poissonnerie, qui ont atteint une nappe d’eau jaillissante à des profondeurs différentes (143, 170, 175 et 162 mètres), pense cependant que c’est la même nappe qui a été rencontrée à diverses profondeurs. Il se fonde sur ce que les couches tra- versées sont les mêmes, que la qualité des eaux se ressemble (elles renferment du bicarbonate de soude et de la magnésie), et que, dans deux puits, le volume de Peau a diminué un instant, lorsqu’elle a commencé à jaillir dans un troisième. La couche aquifère est un sable quartzeux qui ne paraît pas être horizontal, et qui est placé sous une couche d’argile verte. Le niveau de la nappe d’eau différerait de 31 mètres, entre le Pont d’en Bastit et la place Saint-Dominique, à une distance de 570 mètres, et l'écoulement paraît avoir lieu du S.-0. au N.-E. Suivant une note manuscrite fort bien faite de M. F Re ),le nombre des puits artésiens qui ont réussi dans la plaine du Roussiilon, jusqu’en 1857, s'élève à 71; ils ont été exécutés dans les communes de Perpignan, Bompas, Saint-Estôve, Rive- saltes, Saint-Laurent, Pia, Théza, Villeneuve-la-Raho, Bages, Terrats, Toulouges et Canohès. Ils sont compris dans une zone de 3 à 4 lieues de long, sur 1 à 2 de large, et placée à égale distance des montagnes et de la mer. Toutes les tentatives faites en dehors de cette zone ont été jusqu’à présent infructueuses. Elle se divise elle-même en trois petits bassins : celui de Bages, celui de Perpignan et celui de Rivesaltes, et dans chacun, suivant l’auteur, les eaux jaillissantes ne proviendraient que d’infiltra- tion des rivières voisines ou des terres arrosées qui les dominent. (1) Rapport sur les puits artésiens qui existent dans le département des Pyrénées-Orientales (Bull. de la Soc. agric. scient. et litt. des Pyrénées-Orientales, 1854.) (2) Notice sur Le puits foré au pont d’en Vestit (Bastit), ibid., 1854, p. 33. — Légende des coupes de quelques puits artésiens, ibid. , p. 563. (3) 10 juin 1857. — Nous R. la connaissance de ces documents récents à l’obligeant intermé- diaire de M. Parès, qui les avait fait demander à l’auteur. Soc. GÉOL. — 2° SÉRIE, T. VI,. — Mém, n. 2. 32 250 FORMATION TERTIAIRE MOYENNE. (N. 2, p. 42.) La profondeur des puits varie entre 30 et 380 mètres. Les moins profonds sont ceux du territoire de Bages, et le plus profond (180 mètres) celui du Mas-Sauvy, le niveau du sol superficiel étant sensiblement le même. La quantité d’eau fournie par un de ces puits peut varier de 25 à 1200 litres par minute; la moyenne est d'environ 120, et le produit moyen des 71 forages, de 8500 litres par minute (ce chiffre ne produirait que 12,240,000 litres par vingt-quatre heures, au lieu de près de 25 millions, suivant les évaluations précédentes). Les observations thermométriques faites sur la température de ces eaux donneraient en moyenne 1 degré d’accroissement par 30 mètres de pro- fondeur; mais elles n’ont pas été exécutées dans des conditions propres à donner un résultat très exact pour chaque point. Les couches traversées sont partout sensiblement les mêmes. Ce sont des marnes argileuses avec des lits subordonnés de sable, de gravier, de calcaire quelquefois siliceux, et des coquilles marines disséminées çà et là. L'inclinaison générale est de l'O. à l'E., et la nappe aquifère se trouve dans un sable assez pur, plus ou moins épais, recouvert d’une argile verte, et dans lequel l’eau est d'autant plus abondante, qu'il est plus meuble et plus grossier. Les puits d’un même bassin s’influencent mutuellement, et l'établissement d’un nouveau puits diminue toujours la quantité d’eau fournie par les autres; il peut même en faire tarir quelques-uns. Néanmoins le produit total des eaux augmente avec le nombre des trous de sonde. Quant à la force d’ascension, elle dépasse rarement 4 à 5 mètres; souvent elle n’atteint pas 1 mètre au-dessus de la surface du sol, et le produit diminue rapidement à mesure qu’on élève l’orifice de sortie. Les dépôts tertiaires marins du Roussillon n’apparaissant à la surface, dans la portion que comprend notre carte, que sur quelques points de la vallée du Tèt; partout ailleurs 1ls sont masqués par la grande nappe des dépôts quaternaires. Quant à certains sédiments lacustres que nous avions d’abord cru pouvoir placer sur le même horizon (1), leur existence nous paraît actuellement très: modes et nous y reviendrons plus loin. Formation tertiaire moyenne, Dès 1828, M. Tournal (2) reconnaissait, dans le bassin de Narbonne, une série très complexe de sédiments lacustres reposant sur les calcaires secondaires et recouverts par des dépôts marins. Les premiers, dit-il (p. 31), qui ont la plus grande analogie avec les formations gypseuses de Paris et d'Aix, ont comblé pres- que entièrement le bassin, et les seconds n’occupent en général que le sommet des (1) Bull. de la Soc. géol. de France, 2 sér., t. XIV, p. 461-464, 1857. (2) Mém. sur la constitution géognostique du bassin de Narbonne (Ann, des scienc. nat, 1. XV, p. 19, 1828). (Ne 2, p. 43.) FORMATION TERTIAIRE MOYENNE. 251 collines. Dix années plus tard, M. Marcel de Serres (1) admit aussi cette distinction si rationnelle des uns et des autres, ainsi que leur ancienneté relative. Il fit remarquer de plus les dislocations fréquentes des couches d’eau douce ou grès de Carcassonne, et signala même les rapports que la présence de certains mammifères fossiles établis- sait avec la faune du gypse du bassin de la Seine. Cependant les dépôts marins du bassm inférieur de l'Aude. ont-été réunis ensuite aux divers sédiments lacustres de ce pays, et le tout a été colorié, sur la Carte géo- logique de la France (1841), comme représentant la formation tertiaire moyenne. M. Leymerie (2), sur la carte jointe à son mémoire, en a jugé de même, et, de son côté, M. Rolland du Roquan (3) n’a fait aucune mention des couches marines signa- lées depuis si longtemps ; il décrit seulement, sous le nom de terrain miocène (for- mation tertiaire moyenne), les sédiments arénacés et lacustres du bassin de Carcassonne et les calcaires marneux et gypseux, également laéustres, de celui de Narbonne et de Sigean. N'ayant pas fait nous-même remonter assez haut nos recherches historiques, nous avons omis de mentionner ces couches marines lorsque nous avons traité fort succinctement du bassin de l’Aude (4). En 1849, M. V. Raulin (5) reconnut que les couches marines de la mollasse de ce bassin étaient horizontales, tandis que les grès de Carcassonne, de Limoux, etc., reposaient à stratification concordante sur le groupe nummulitique. M. Delbos (6), en résumant avec beaucoup de lucidité les faits acquis à la science sur ce point, déduit de ceux-ci que les dépôts lacustres inférieurs du Languedoc peuvent repré- senter la mollasse du Fronsadais et le groupe lacustre moyen du bassin de la Seine. Ils recouvrent, dit-il, à stratification concordante, mais transgressive, ‘le groupe nummulitique, ce qui dénoterait une indépendance comparable à celle qui existe, dans le nord-ouest du bassin, entre le calcaire grossier des bords de la Gironde et la mollasse du Fronsadais; aussi place-t-il la mollasse marine du bassin inférieur de l'Aude dans le terrain tertiaire moyen. Il distingue, dans les calcaires lacustres et les poudingues, deux étages qui correspondraient plus particulièrement, lun au calcaire d’eau douce blanc du Périgord, l’autre à la mollasse du Fronsadais, aussi bien qu’au groupe lacustre moyen du nord de la France, qu’il désigne par lexpres- sion de terrain éocène supérieur. M. Paul de Rouville (7) a omis dans son tableau la mollasse marine de la vallée (1) Notice géologique sur le bassin de l Aude (Actes de la Soc. linn. de Bordeaux, t.X, 1"livr., 1838, p. 9, 15, 16 et 19). (2) Mém. Soc. géol. de France, 2° sér., t. I, pl. 12, 1846. (3) Annuaire statistique de l'Aude, p. 206, 1844. (4) Hist. des progrès de la géologie, 1. IX, p. 716, 1849. (5) Bull. de la Soc. géol. de France, 2° sér., t. VI, p. 536, 1849. (6) Thèse de géologie. Æssai d'une description géologique du bassin de l’Adour, p. 110, et tableau p. 162, in-4. Bordeaux, 1854. (7) Description géol. des environs de Montpellier, p. 169, et tableau p. 186, in-4 avec carte. Montpellier, 1853. 252 FORMATION TERTIAIRE MOYENNE. (N, 2, pe 44) de l'Aude, et il a désigné sous le nom d'étage sestien les dépôts lacustres des environs de Narbonne, en en séparant les couches de Carcassonne, qu’il place plus bas, dans la division qu’il appelle étage parisien. M. Noulet (1) a fait voir que de Boucheporn, en rapportant au terrain tertiaire inférieur tout ce qui sur la carte géologique de France est colorié en violet, au nord des Pyrénées, avait été au delà du vrai, et qu’en réalité on ne devrait y ranger que les dépôts lacustres qui, dans le bassin de l’Aude, reposent sur les dernières couches nummulitiques et en ont partagé les accidents. « A la suite de ces dérangements, dit l’auteur, les grès ou macigno du bassin de Carcassonne n’ont pas seulement formé par leurs déplacements le relief des montagnes de la Malpère, mais ils ont accom- pagné, et sur une grande étendue, le terrain nummulitique des Corbières.» La faune qui les caractérise est également distincte de celle des couches tertiaires qui sont dessus, comme de celles qui sont dessous. Cependant M. Noguès (2) n’a pas adopté d’abord cette classification qui avait pour elle tant d’observateurs éclairés et l'accord des données stratigraphiques et paléontologiques. Nos propres recherches étant venues confirmer celles qu’avaient publiées depuis longtemps M. Tournal et M. Marce! de Serres, les déductions de M. Raulin et de M. Noulet, aussi bien que les classifications proposées par MM. P. Ger- vais, Delbos et de Rouville, nous placerons dans la formation tertiaire moyenne les couches marines du bassin inférieur de l’Aude, en les désignant par l’expression de mollasse marine, puis dans la formation tertiaire inférieure, dont ils constitueront le premier groupe ou groupe lacustre, tous les dépôts sous-jacents d’origine d’eau douce qui recouvrent le groupe nummulitique, ou en son absence des roches secondaires. La mollasse marine est peu développée sur la rive droite de l'Aude, dans la dernière partie de son cours, et elle n’existe que sur des points isolés, souvent fort éloignés les uns des autres. Dans son premier mémoire, M. Tournal, comme nous venons de le dire, avait bien établi sa position relative et donné une coupe générale assez exacte des divers éléments composant le bassin tertiaire de Narbonne. Mais plus tard, dans sa Description géognostique du bassin inférieur de l Aude et de la Berre(3), travail intéressant auquel nous emprunterons quelques détails, sans en adopter les vues théoriques, 1l plaça les couches marines sous les couches lacustres avec gypse, et cela parce qu’il confondait certains dépôts d’eau douce fort peu importants, qui paraissent recouvrir très accidentellement les couches marines, avec le grand système lacustre et gypseux placé réellement dessous. D'un autre côté, il distinguait par l'expression de terrain miæle une partie de ces mêmes couches marines dont il reconnaissait très bien la superposition aux couches lacustres sur quelques points du bassin. Ainsi il admettait (p. 37) que les assises supérieures des collines de Moussan, de le Brète (ou (4) WMém. sur les coquilles fossiles des terrains d'eau douce du sud-ouest de la France, p. 21, in-8. Paris, 1854 (deuxième mémoire). (2) Notice géologique sur le départ. de l'Aude, in-12. Carcassone, 1855. (3) Journal de géologie, t. X, p. 247 et 308, avec carte et coupes, 1830. (N: 2, p. 45.) FORMATION TERTIAIRE MOYENNE. 253 Levretes), de Fresquet et même jusque vis-à-vis Saint-Marcel, dans la vallée de l’Aude, étaient formées de grès marin exploité, de sable avec du gravier, et de calcaires blan- châtres avec des fragments roulés de grandes Huîtres, des galets quartzeux recouverts de Flustres et de Balanes, roches appartenant à un seul et même ensemble de dépôts marins placés sur des glaises rouges et des poudingues d’origine lacustre, qu’il séparait encore de la série d’eau douce et gypseuse sous-jacente. En un mot, M. Tour- nal semblait distinguer les dépôts marins plus rapprochés de la côte et qui recouvrent quelquefois, en effet, le terrain secondaire, de ceux qui, plus éloignés, situés vers le milieu du bassin et certainement du même âge, recouvrent cà et là le groupe lacustre (1). La différence des dépôts marins sur ces divres points est en rapport avec leur distance du rivage. Ils ont dû subir, par suite de leur position même, pen- dant l’époque quaternaire, des dénudations plus prononcées que ceux qui les sup- portent, d’où résultèrent l'isolement des lambeaux actuels, leur petit nombre et leur faible étendue. D’après nos propres observations, la mollasse marine, reposant sur les argiles rouges et le poudingue de la formation suivante, occupe toute la partie supé- rieure de la colline comprise entre la msison de campagne de Fresquet et la route de Moussan. Avant d'atteindre ce dernier village, au sud-est de Notre-Dame de la Montade, la route traverse un mamelon formé de calcaire blanc, arénacéo- sableux, offrant de nombreux moules de fossiles marins, et constituant sans doute la base de cette colline. En cet endroit, l'épaisseur totale de la mollasse n’a pas moins de 80 mètres ; c’est la plus grande que nous lui connaissions dans le pays, et son altitude atteint 122 mètres. Les autres collines alignées du N.-E. au S.-0., bordant la vallée de l'Aude, de l’écluse de Deffence au Vieux moulin, au-dessous de Marcorignan, en font également partie. Ces dernières, moins élevées que les précé- dentes, sont coupées par le chemin au nord de Moussan, et composées, comme par- tout, vers le bas, de marnes grises et verdâtres, plus ou moins argileuses, remplies d’Ostrea virginica, et au-dessus de calcaires sableux ou marneux, gris blanchâtre, en bancs peu suivis. En longeant ensuite à gauche le pied de ces collines, pour joindre la grande route près du pont, on remarque des collines plus basses encore, sableuses, passant à un grès assez semblable à la mollasse d’eau douce ou grès de Carcassonne. De Marcorignan à Fresquet, on suit la base des buttes de mollasse marine; mais, en face de cette maison de campagne, des grès, des poudingues et des calcaires grumeleux, appartenant au terrain tertiaire inférieur, sortent de dessous et s’en- foncent au S. sous la colline de Lestagnol. Celle-ci, entourée par les poudingues (1) I est juste de faire remarquer que cette appréciation contraire à sa première manière de voir lui avait été suggérée par Reboul, souvent enclin à déduire des théories de faits incomplétement observés (p. 251). La coupe supposée du bassin de Narbonne (pl. 9, fig. 4) devait être très défec- tueuse d’après cela, car les dépôts marins B et D sont synchroniques, sur le même horizon et au- dessous du terrain d’eau douce c, au lieu d'être séparés l’un de l’autre par ce dernier. Ce sont seule- ment deux aspects un peu différents sous lesquel se présente le même dépôt. 254 FORMATION TERTIAIRE MOYENNE. (N. 2, p. 46.) rouges et s’élevant à environ 70 mètres au-dessus de la plaine de Montredon, est composée de calcaires blanchâtres, poreux, à ciment spathique ou cristallin, de cal- caires blancs, tendres, friables, et de marnes blanches, quelquefois argileuses et sableuses. On y trouve répandues les Ostrea crassissima, Lam. (1), et palliata, Gold., des moules de Tellines, de Mytilus, de Fénus, etc. Les dépôts marins que nous rapportons à la période moyenne forment donc, dans cette petite région, le couronnement, bien caractérisé par sa teinte, sa forme et son aspect général, des collines comprises entre Lestagnol au sud, la jonction du canal de la Robine au nord, et le village de Marcorignan à l’ouest. Ils sont limités sur le pour- tour de leur base par les affleurements des marnes et des poudingues rouges qui les supportent. Près du Luc, en remontant la vallée de l’Orbieu, un lambeau de mollasse marine est encore indiqué (2), mais nous ne le connaissons pas. M. Tournal pense que les fossés des fortifications de Narbonne ont été creusés dans les couches de la mollasse marine, ce qui expliquerait la grande quantité d’Huîtres que l’on rencontre au bas des remparts. Cependant, d’après ce que nous dirons de certaines couches en place mises récemment à découvert dans les fossés du bastion de l’ouest, non loin du pont, il est difficile de croire, à moins d'admettre quelque irrégularité dans la stratification, que les Ostrea crassissima, si abondantes un peu au delà vers la partie supérieure du talus de la contrescarpe, proviennent origi- nairement du fond du fossé. Mais, d’un autre côté, on doit reconnaître que les valves, quoique brisées, ne sont nullement roulées comme les cailloux que le même sol superficiel renferme. Leurs caractères sont d’ailleurs parfaitement identiques avec ceux des Huîtres des localités les mieux déterminées stratifiquement, de sorte qu'il ne peut rester aucune incertitude quant à leur âge, s’il y en a quant à leur gisement originaire. Les puits ordinaires de la ville ont traversé, au-dessous des dépôts modernes et quaternaires, 6 ou 7 mètres de marne bleuâtre, d'apparence lacustre, reposant sur un sable marin micacé, où l’Ostrea crassissima paraît avoir été rencontrée. Un sondage artésien qu’on y avait entrepris, et dont l’orifice était à 10 mètres au-dessus du niveau de la mer, a traversé 65 mètres de dépôts marins, composés en général de marnes bleues un peu micacées, avec des Huïîtres et d’autres bivalves. La sonde a rencontré au delà 25",32 de marnes argileuses rouges, quelquefois très sableuses, sans fossiles, et l’on s’est arrêté à 123°,43, sans avoir obtenu d’eau jaillissante, dans une roche dure, très compacte, que M. Tournal croit être un poudingue (3). À une demi-lieue à l’est de Narbonne, sur le chemin de Gruissan, une excava- (1) Ces Huîtres, quoique assez voisines de l’O. vérginica Lam., s’en distinguent néanmoins par leur forme générale plus allongée, et atteignent des dimensions beaucoup plus grandes. (2) Noguès, Loc. cit., p. 38. Avec l’Ostrea crassissima, l’auteur signale encore dans ces couches les O. gigantea et longirostris, sans doute par suite de quelques erreurs de détermination. (3) Journ. de géol., t. IL, p. 183, 1831. (N. 2, p. 47.) FORMATION TERTIAIRE MOYENNE. 255 tion faite près du domaine de Creissel a mis à découvert un lambeau de calcaire marin rempli de moules de Cythérées, de Buccardes, de Moules, de Pectoncles, d’Arches, d’Anomies, de Natices, de Cérites, de Pyrules, de Balanes, avec des pattes de crustacés, des dents de Squales et même des ossements non encore déterminés de mammifères (1). Au midi de Narbonne, on voit s'élever, à 6 ou 7 mètres au-dessus de l'étang de Bages et des prairies basses que parcourent le chemin de fer et la Robine, un petit mouvement de terrain qui porte les domaines de Montfort, du Jardin et de Saint-Laurent. Ce plateau, comme l’avait déjà observé M. Tournal, est composé par la mollasse marine, toujours remplie d’'Ostrea crassissima, de grands Pecten, etc. Dans la partie septentrionale de la Clape, au lieu dit Las Bugadelles, sur le chemin de Marmoulières à Saint-Pierre de Mer, M. Tournal (2) signale encore un banc de marne bleue qui recouvre un calcaire compacte avec des fossiles brisés (3). Au som- met de la petite colline à laquelle est adossé le bourg de Gruissan, du côté de l’E., on observe (pl. IV, fig. 10-41) un poudingue à très gros éléments de grès reliés par un ciment de calcaire sableux. Ces grès sont de diverses sortes et de teintes variées, grises, roses, jaunâtres, ou verdàtres, généralement très durs et à grain fin. Sous ce conglomérat, élevé de 18 mètres au-dessus de la mer, est un grès calcarifère co- quillier renfermant particulièrement des Huîtres. Si, à partir du cimetière, on s’a- vance vers l’E., on voit se développer sur le flanc du coteau, à mesure que les cal- caires secondaires s’abaissent, des argiles sableuses blanches, panachées de rose, qui ne tardent pas à descendre elles-mêmes au niveau de la plage. Lorsqu'on tourne, à l'E., du côté de la tuilerie, ces couches panachées, qui peut-être ne font plus partie de la mollasse marine, semblent passer à un calcaire lacustre blanchâtre, également recouvert par le poudingue. À 50 ou 60 mètres de ce point affleurent, fortement inclinés à V'E., les calcaires compactes à Caprotines qui occupent tout le reste de la colline et sont surmontés par le poudingue. Nous ne pensons pas qu’il existe un dépôt semblable dans l’île de Saint-Martin, à l'endroit indiqué sur la carte de M. Tournal. C’est sur la côte occidentale, et non en face même de Gruissan, où il n’y a que les calcaires à Caprotines et les couches néo- comiennes plus anciennes, que nous avons observé, un peu au sud de la métairie des Pujols, des calcaires caverneux et des bancs remplis d'Huîtres, qui plongent au N.-O. en s'appuyant sur les calcaires crétacés inclinés à l'E. Ce lambeau, indiqué sur la carte géologique de la France, y est beaucoup trop étendu. On voit ainsi que les restes de dépôts marins tertiaires de la Clape, de Gruissan et de l’île Saint-Mar- tin, sont complétement discordants avec les calcaires crétacés qui les supportent , (1) Marcel de Serres, Géognosie des terrains tertiaires, p. 88, in-8. Montpellier, 1829. (2) Descript. géognostique du bassin inférieur de l'Aude et de la Berre, p. 9 (Journ. de géol., t. 1,830). (3) Cette localité est indiquée, nous ne savons pourquoi, près de Fleury, village qui est situé à 5 kilomètres au nord nord-ouest de ce point. La carte de M. Tournal porte aussi les Hugadelles au lieu de Las Bugadelles. 256 TORMATION TERTIAIRE MOYENNE. (Nu2, p.48.) tandis que les dépôts lacustres, qui ailleurs se trouvent interposés, sont concordants avec ces mêmes calcaires crétacés, dont ils ont partagé le dernier relèvement. Le point le plus méridional où nous connaissions des sédiments tertiaires de cette période est aussi celui où ils sont le mieux développés et le mieux caractérisés : c’est dans l'ile de Sainte-Lucie, dont ils occupent toute la partie nord-ouest, ou le tiers environ, le reste offrant une surface plane, ou ancien lai de la mer, submergée encore à certaines époques et par certains vents, depuis le Grau ou la redoute de Vieille Nouvelle jusqu’au fort de la Nouvelle. Le canal, continuation de la Robine de Narbonne, au lieu de couper le massif tertiaire comme l'indique la carte, le con- tourne à l’est comme le chemin de fer à l’ouest, pour venir aboutir tous deux à l'extrémité occidentale du petit port de la Nouvelle. Reboul (1)et M. Tournal (2) ont fait connaître les couches marines de Sainte-Lucie en les rapportant à leur horizon naturel; mais le dernier de ces gévlogues a men- tionné de plus un calcaire lacustre blanc, sonore et très compacte, surmontant les dépôts marins, puis de gros blocs de calcaire compacte, également d’eau douce, épars çà et là à la surface de l’île. Sans nier absolument l'existence du calcaire lacustre précédent, nous devons avouer que nous ne l'avons pas rencontré en place, bien que nous ayons parcouru l’île en divers sens; nous ne pensons pas, en outre, que le poudingue à gros blocs dont nous allons parler ait pour ciment un calcaire d’origine d’eau douce. Lorsque venant de la Nouvelle ou du sud on monte le plan incliné du massif ter- tiaire, on rencontre des calcaires jaunâtres, à cassure un peu térreuse, à gros grains, uniformes, donnant une assez belle pierre d'appareil, et qui ont été exploités à peu de distance du pied de la colline. Ces bancs, qui rappellent par leur aspect le cal- caire grossier moyen du bassin de la Seine ou le calcaire à Astéries des bords de la Garonne, se relèvent sensiblement au N.-0. Le premier cap que l’on voit à gauche, et au pied duquel passe le chemin de fer, montre des bancs moins suivis, une pierre moins homogène, sableuse, blanc jaunâtre, alternant avec des marnes sa- bleuses ou entourées par elles. La petite anse qui sépare ce promontoire de celui de l'Ermitage est bordée par les mêmes couches, qui continuent à se relever vers ce dernier point, où l’on trouve, vers le tiers supérieur de l’escarpement, les bancs de pierre de taille précédents. Au-dessus est une marne blanchâtre, sableuse, remplie d'Ostrea crassissima, de grands Pecten, etc.; puis, formant la partie la plus élevée du cap et de toute l’île, vient un poudingue de 8 mètres d'épaisseur. Cette dernière assise est remarquable par le volume de ses éléments, de plusieurs pieds cubes, entourés de sable et renfermant souvent dans leurs interstices des amas d’Ostrea crassissima. On trouve aussi ces coquilles disséminées dans la masse et toujours parfaitement con- (1) Sur les terrains tertiaires inférieurs (Acad. des sciences, 28 mars 1831, — Journ. de géol., t. I, p. 181, pl 3, fig. 1, 1831). (2) Journ. de géologie, t. I, 1830. (N. 2, p. 49.) FORMATION TERTIAIRE MOYENNE. 257 servées. Elles ont donc certainement vécu dans les endroits mêmes où on les observe, sur un ancien rivage où les blocs étaient accumulés. Ceux-ci sont de grès, de cal- caires compactes et d’autres variétés. Ils existent sur tout le pourtour de ce petit promontoire, et le dépôt clastique qu’ils constituent diminue d’épaisseur lorsqu'on s’avance vers le nord, comme le montrent les travaux exécutés pour l'établissement du chemin de fer qui en suit le pied. Le plan incliné, qui se relève aussi jusqu’à la Bergerie, sur la limite septentrionale de l’île, est formé par les calcaires marins jaunâtres précédents, qui occupent une partie du talus, surmontés de même par un poudingue épais, à éléments moins volu- mineux que celui de l’Ermitage, et remplissant les anfractuosités des calcaires, de manière à se trouver souvent au même niveau le long de la falaise. Lorsqu'on suit cette dernière vers l’ouest, jusqu’à la descente du domaine de Sainte-Lucie, on retrouve bientôt les bancs calcaires jaunâtres, solides, arénacés, bien suivis, toujours remplis d’une immense quantité de grands Pecten. Les escarpements de cette partie nord de l’île font un agréable contraste, par la force et la fraîcheur de leur végétation, avec la nudité et la tristesse de presque tout le reste. Cette circonstance est due sans doute à ce qu'ils sont abrités des vents dominants, à la composition du sol formé par les détritus meubles des calcaires et des marnes, et à l’existence de quelques sources. Une fontaine abondante sort en effet le long du chemin, au pied de la muraille rocheuse à laquelle sont adossés les bâtiments de Sainte-Lucie. En résumé, on voit que le massif tertiaire marin de cette île, et qui en constitue tout le relief, se compose, vers le bas, de marnes blanches et grises, puis de cal- caires blanc-jaunâtre, à cassure terreuse, très coquilliers, souvent sableux, plus ou moins régulièrement stratifiés, dont les fossiles, à l'exception des Peignes et des Huîtres, sont toujours à l’état de moules, et enfin de poudingues au sommet, le tout connu sur une épaisseur totale de 38 mètres (voy. la coupe, pl. V, fig. 4). D’après ce que nous venons de dire, on pourrait donc supposer que, sous la plaine de Narbonne, les dépôts quaternaires recouvrent des couches marines assez puissantes, dont les lambeaux, signalés à l’est et au sud, sont des portions émergées ou restéés au-dessus du niveau actuel de la mer. On doit remarquer cependant que la base des affleurements de la mollasse marine, telle que nous la con- naissons dans les collines situées à l’ouest, atteint souvent 40 ou 50 mètres d'altitude, de sorte qu’elle descendrait à 60 mètres au-dessous de la mer dans la plaine de Narbonne, suivant les données fournies par le forage exécuté dans cette ville. On aurait alors une différence de niveau de 110 mètres pour une même couche prise à une distance de moins de ? lieues, et qui, à l’est et au sud, se relève sensiblement, puisque la mollasse atteint encore 38 mètres au-dessus de la mer dans cette dernière direction. Les marnes argileuses et le poudingue rencontrés dans le sondage corres- pondraient aux roches analogues qui supportent la mollasse marine dans les collines de Fresquet à Moussan, etc., et l’on peut concevoir que la plaine de Narbonne est due à une dépression antérieure aux dépôts quaternaires et modernes. Peut-être SOC. GÉOL, — 2° SÉRIE, T. VI. — Mém. n° 2. 33 258 FORMATION TERTIAIRE INFÉRIEURE. (Ne 2 p. 50.) aussi est-ce une portion du sol sous-marin, restée en place lors de l’émersion de toutes les parties environnantes ? Quoi qu'il en soit, les lambeaux de la formation tertiaire moyenne, isolés aujour- d'hui, et qui ont dû fare partie d’un dépôt plus ou moins continu de sédiments marins, ne se trouvent, comme nous le disions en commençant, que dans cette région inférieure du bassin de l'Aude, reposant, vers le milieu de la vallée, d’une manière généralement assez concordante sur les couches tertiaires d’eau douce, et le long de ses bords d’une manière complétement discordante sur les roches secondaires. Dans le premier cas, ils atteignent jusqu’à 122 mètres d'altitude ; dans le second, ils ne dépassent pas 38. Leur plus grande épaisseur connue est de 80 mètres. Au nord de l'Aude, dans le département de l'Hérault, la mollasse marine prend beaucoup plus d'importance (4). Elle y donne lieu à des exploitations considérables de pierres de construction, et elle à fourni, pendant Fépoque romaine et au moyen àge, la plupart des matériaux employés dans les monuments de Narbonne. Quoique la faune de ces dépôts ne soit pas très variée, elle mériterait cependant d’être l’objet d’une étude particulière, ne fût-ce que pour servir de terme de compa- raison avec celle d’autres pays. Quelques recherches sur ce sujet ont été faites il y à longtemps par M. Marcel de Serres; mais elles ont été à peu près perdues pour ses successeurs, et aucune espèce de la formation tertiaire moyenne du Languedoc ne se trouve même indiquée dans le Prodrome de paléontologie d’Ale. d'Orbigny. Formation tertiaire inférieure. GROUPE LACUSTRE. Les dépôts que nous réunissons sous le titre de groupe lacustre ou de premier groupe de la formation tertiaire inférieure, à laquelle nous les rattachons par des considérations à la fois stratigraphiques et paléontologiques, sont très développés dans le bassin moyen et inférieur de l'Aude, à partir des environs de Limoux. Ils bordent la vallée, depuis Carcassonne jusqu’à Narbonne, pour redescendre au S. jus- qu’au delà de Sigean, et pénétrer en plusieurs points au milieu des massifs de mon- tagnes. Ils s'étendent ensuite, bien au delà des limites de notre carte, au nord, dans le département de l'Hérault, et surtout à l’ouest dans l’arrondissement de Castelnau- dary et dans les départements voisins, longeant le pied de la montagne Noire, comme ils dessinent au sud les contours découpés des Corbières. On à vu que sur la carte géologique de la France, de même que sur celle de M. Leymerie, 1ls avaient été réunis à la mollase marne et coloriés comme représentant la formation tertiaire moyenne. Trois principales sortes de roches composent ce premier groupe : 1° des grès cal- (1) Voyez À. Boué, Sur les environs de la Vernède et de Nissan (Bull. dela Soc. géol. de France, Are sér., t. III, p. 325, 14833). — Marcel de Serres, loc. cit. — Tournal, Loc. cit., etc. (N. 3, p. 51.) GROUPE LACUSTRE. 259 carifères ow mollasse d’eau douce (grès de Carcassonne); 2° des marnes et des pou- dingues rouges, puis des calcaires marneux et des marnes blanchâtres et jaunâtres, renfermant souvent des amas réguliers de gypse ; 3° des poudingues. Les premiers et les troisièmes passent fréquemment les uns aux autres par la prédommance de l’un de leurs éléments, mais en général les poudingues semblent occuper la partie supé- rieure. Quant aux marnes et aux calcaires marneux blanc-jaunâtre, ils se montrent presque exclusivement, des environs de Narbonne à Sigean, sur le flanc des roches secondaires de la Clape et de la chaîne de Fontfroide. Dans plusieurs régions mon- tagneuses les poudingues existent seuls aussi, de sorte qu’il y a une certaine imdé- pendance géographique dansla distribution de ces diverses roches. Les deux premières nous paraissent être synchroniques, du moins n’avons-nous aucune preuve strati- graphique du contraire, et, bien que les poudingues des plateaux élevés soient plus récents, leur position souvent isolée nous les fera décrire en dernier lieu. L'origine d’eau douce des marnes et des calcaires est mise hors de doute par la présence exclusive de coquilles fluviatiles et terrestres, répandues à profusion sur certains points, comme par celle des plantes, des insectes et des poissons. L'origine des poudingues et des grès ou mollasses serait plus douteuse, si dans leur prolonge- ment à l’ouest.et au nord, au delà des limites de notre carte, l'existence de coquilles fluviatiles et terrestres et de débris de mammifères, toujours à l’exclusion de fossiles marins, ne justifiait complétement l'opinion à laquelle nous nous rattachons. Ainsi un caractère négatif, commun à ces trois sortes de dépôts, quels que soient les pots où nous les observions, est le manque absolu de débris organiques essentiellement marins ; et un caractère positif également commun, outre celui des fossiles terrestres ou d’eau douce, est leur liaison stratigraphique avec les dépôts tertiaires plus anciens qu'ils recouvrent, et, en l’absence de ceux-ci, leur concordance avec les couches crétacées anciennes qui les supportent. Nous avons déjà décrit les caractères orographiques qu'affectent les collines for- mées par les dépôts de ce groupe, ainsi que leur aspect général; aussi passerons- nous immédiatement à l'examen de leurs caractères pétrographiques et stratigra- phiques, d’abord en descendant la vallée de l'Aude et ensuite dans l'intérieur des massifs de montagnes. Quoique l’ordre de superposition indiqué dans la légende de la carte soit plus conforme à la nature, il nous a semblé plus commode d'adopter le suivant pour la description. Mollasse d’eau douce ou grès de Carcassonne. Nous désignons sous le nom de mollasse la roche dominante de cette section. Elle est à grain fin, grise, jaunâtre, blanchâtre ou verdâtre, composée de sable siliceux et de marne en proportions variables. Elle est généralement peu dure, souvent friable, d’un aspect uniforme et à cassure terreuse. Des lits irréguliers ou de petits amas de cailloux et de galets très arrondis y sont subordonnés çà et là. 260 FORMATION TERTIAIRE INFÉRIEURE. (N.2, p. 59.) La mollasse constitue toutes les collines des environs de Limoux. En face de cette ville, sur la rive gauche de l'Aude, ses couches plongent de 15° à 48° au N. Le dessin fig. 2, pl. II montre la disposition qu’elles affectent, sur la rive droite, depuis le confluent du ruisseau de Lagagnoux jusqu'à Salles. Les assises qui hordent la rive gauche sont semblables et disposées de même. Au sud de la chapelle de Brasse, la mollasse recouvre, avec une concordance parfaite, des grès à gros grains, puis à grains fins qui se lient à des calcaires marneux gris et jaunâtres remplis de Nummu- lites (pl. HI, fig. 1 et 3), et dont le plongement est constamment le même. La mol- lasse paraît atteindre 344 mètres d'altitude sur la crête qui sépare le ruisseau de Lagagnoux de celui de Corneilla, et elle se trouve à 462 mètres seulement sur la rive droite de l'Aude, au moulin en amont de Limoux. Plus au sud, la vallée ne nous a plus offert de traces de cette roche ni d’autres dépôts de ce groupe. La leinte générale gris-jaunâtre des collines de Limoux, dont les pentes supé- rieures sont couvertes de vignes qui donnent ce vin blanc connu sous le nom de blanquette de Limoux, et les parties basses cultivées en céréales permettent de les distinguer au premier coup d'œil des autres roches qui limitent le bassin à l’est. Ainsi, de dessus le pont de la ville on voitse profiler en arrière, avec une grande netteté, les erêtes de la Malpère et de la Camp qui forment deux massifs puissants, de teintes et de formes tout à fait différentes. Dans une coupe prise plus à l’ouest, à travers la vallée de la Corneilla, depuis la métairie de Saint-Pierre-le-Clair jusqu’au Pech-de-Brau, coupe que nous devons à M. Noguës et sur laquelle nous reviendrons, on voit les grès et les poudingues de la mollasse recouvrir régulièrement, au-dessous de Saint- Pierre, les marnes à Operculines du premier étage nummulitique (pl. V, fig. 7). De Limoux à Carcassonne la mollasse règne constamment avec les mêmes carac- tères pétrographiques. Les couches sont plus ou moins inclinées dans un sens ou dans l’autre, sous des angles qui ne dépassent pas 20° à 25°. Les cailloux y sont parfois assez nombreux pour constituer un poudingue, véritable nagelfluh plus ou moins cohérent. Non loin de Rouffiac, localité que nous avons déjà citée pour la superposition du poudingue quaternaire horizontal, sur les bancs inclinés de la mollasse, on observe cette modification de la roche principale, ainsi que la présence de marne grise ou noirâtre, entre les bancs de grès gris calcarifère qui plongent de de 40° à 12° au S.-0. Les cailloux y forment par leur réunion des lits irréguliers, ou bien sont disséminés dans là masse calcaréo-sableuse. Ils sont toujours très arrondis, de la grosseur d’une noix jusqu’à celle du poing, rarement plus volumineux. Des inclinaisons inverses des précédentes se voient à peu de distance de ce point. Les collines formées par la mollasse, à l’ouest de l’Aude, occupent deux bandes à peu près parallèles, dirigées à l'O.-N.-0., et laissant entre elles une large vallée à fond plat qu’arrosent le Treboul et le Fresquel le long de sa limite nord, ainsi que les nombreux affluents qui descendent des deux chaînes. La ville de Castelnaudary est bâtie sur un îlot allongé, qui atteint 219 mètres d'altitude à son extrémité occiden- tale, ou 67 mètres au-dessus de la plaine, et compris entre les rivières précédentes (N. 2, p. 55.) GROUPE LACUSTRE. 261 qui se réunissent au-dessous de Villepinte. Au nord et au sud, les deux zones reposent sur le groupe nummulitique, et leur composition autour de Castelnaudary, d’Alzonne, de Conques, etc., est très uniforme. La roche est généralement grise, panachée de jaune, terreuse, peu solide, à grain fin, dans la première de ces localités; elle est gris-bleuâtre et à grain plus grossier dans la carrière d’Issel, au nord ; à Pezens elle est solide, gris-bleuâtre, à grain fin, uniforme, à cassure inégale et essentiellement composée de sable siliceux, de grains verts, d'argile et de calcaire. Les bancs, peu suivis, fournissent cependant des dalles assez grandes; certaines parties passent à un poudingue par le mélange de petits cailloux de quartz. Les assises inférieures ren- ferment du gypse exploité dans les communes de Sauzens, Caux, Montréal, Mas- Saintes-Puelles, etc., au delà des limites de la carte. L’inclinaison assez faible est ordinairement au S., sur le pourtour de la Montagne-Noire. Les travaux exécutés en 1856 pour l'établissement du chemin de fer et de la gare, le long du canal, à l’entrée de Carcassonne, ont coupé les couches les plus solides de la mollasse, qui sont d’un gris légèrement rougeâtre, à grain fin, avec du mica argentin assez abondant. On y a recueilli les premiers fossiles trouvés jusqu’à présent dans le grès de Carcassonne proprement dit : ce sont une portion de mâchoire très fruste, probablement de Lophiodon et une Trionyæ (1), dont nous devons la con- naissance à M. Noguës. Ces couches forment aussi la colline de la vieille Cité, dont le pied est baigné par l'Aude et que couronne sa double enceinte de tours et de murailles crénelées, le monument de ce genre le plus curieux que nous ait légué le moyen âge. Ici la roche est un grès grisâtre, plus ou moins sableux, à grain plus ou moins gros, dont la stratification n’est pas toujours très distincte. Vers le haut, les bancs sont moins épais, et la structure massive tend à prédominer. Vers la base, cette pierre tendre, qui a été exploitée à la scie, est composée de grains de quartz, reliés par un ciment marneux ou argileux gris. Tantôt le grain est très fin, tantôt, par le mélange de très petits cailloux de quartz ou d’autres roches, la pierre passe à un poudingue ou macigno à très petits éléments. Ces deux variétés sont employées comme pierre d'appareil sous le nom de pierre de Carcassonne. Une troisième variété de grès gris jaunâtre, plus dure, mais moins susceptible d’être taillée, est utilisée comme moellons. Le plateau de la cité est à 144 mètres d'altitude. M. Rolland du Roquan (2) fait remarquer que, dans cette partie du bassin de l'Aude, les banes inférieurs sont ceux qui fournissent les plus gros blocs débités comme pierres de taille, tandis que les supérieurs ne sont propres qu’à servir de moellons. Un lit, plus marneux que le reste de la masse, sépare les assises de grès, et cette (1) Gette espèce, qui paraît être nouvelle, se rapproche de la 7! Barbaræ, Owen, des falaises d'Hordwell (Monograph of the fossil reptilia of London-clay, pl, XVI, p. 50, Palæontographical Society, 1849). (2) Loc, cit., p. 208, 1844. 262 FORMATION TERTIAIRE INFÉRIEURE. (Ne 25 p. 04.) marne grise ou rougeûtre, quelquefois endurcie, est désignée dans le pays sous le nom de tuf ou roc mort. On peut suivre ces assises sur la rive gauche de l’Aude, et on les voit reposer directement sur la série nummulitique, au-delà de Conques (pl. V, fig. 10), où un Lophiodon (L. occitanicum, P. Gerx.) a été trouvé. La mollasse grise des collines et de la plaine de Carcassonne (1) se continue à l’est de la ville, le long de la route de Narbonne jusqu’à 4 kilomètre des Capucins, près de Trèbes, où la roche devient rougeâtre. Les couches de marnes argileuses rouges alternent avec des bancs solides de grès gris, argileux et des bancs de poudingue à petits éléments, le tout presque horizontal ou faiblement dérangé par places. Si l’on prend la route de la Grasse au sud-est, de manière à couper le système presque per- pendiculairement à sa direction et en descendant dans les couches, les rochestendres, argileuses, rouges, tendent à prédominer. Au premier ravin que l’on rencontre au delà de Fontiés, elles plongent sensiblement au N. Les poudingues qui s’y trouvent associés sont à ciment de grès, et, lorsqu'on traverse les trois autres ruisseaux qui descendent des hauteurs de Montirat, on observe successivement des grès gris, jaunâtres, des marnes rouges et jaunes alternantes et quelques poudingues peu déve- loppés, presque verticaux et alignés dans le prolongement du versant nord du mont- Alaric. Au col que traverse la route avant de descendre dans la vallée de la Bretonne, des grès marneux, gris-noirâtre, des calcaires impurs gris, des marnes grises feuil- letées, d’une quinzaine de mètres d'épaisseur, succèdent d’une manière concordante aux assises précédentes et constituent le premier étage nummulitique. Sur le prolongement de cette crête, la mollasse contourne à l'O. les affleurements du groupe nummulitique qu’elle sarmonte, constitue les hauteurs de Notre-Dame de Long et de la métairie Blanche, tout en formant aussi, comme on l’a dit, une autre ride distincte vers Cazilhac, et dont les couches plongent au N. En se recourbant à l'E., les mêmes assises occupent la partie supérieure des montagnes qui, entre la métairie Blanche et celle dela Bourdetie en face de Pradelles, présentent leurs couches redressées au N. vers le mont-Alaric. Dans tout ce grand escarpement supérieur (pl. V, fig. 3), moins abrupte, moins sinueux, moius accidenté que l’in- férieur, et dont les pentes gazonnées, assez régulières, s'élèvent jusqu'à la crête largement découpée de cette partie nord de la Malpère, à 470 mètres d'altitude, l'épaisseur du groupe est de 150 à 460 mètres. Il se compose de bas en haut de marnes grises et jaunes, de grès gris, marneux, à grains plus ou moins fins, souvent schistoïdes, de calcaires marneux, de marnes grises, de nouveaux grès marneux, gris, à grains fins, etenfin de poudingues à petits éléments vers le sommet. Au-dessus des métairies de la Bourdette et de Caudouat les couches tournent de telle sorte (1) De même que nous avons vu la mollasse marine fournir les matériaux de tous les monuments anciens et modernes de Narbonne, de même la mollasse d'eau douce ou grès de Carcassonne, a fourni ceux des édifices de divers âges du bassin moyen de l’Aude. Des blocs de grandes dimensions, une taille facile et sa résistance aux agents atmosphériques ont de tous temps fait rechercher cette pierre pour les constructions. (N: 2, p. B5.) GROUPE LACUSTRE. 263 que, dans la crête orientale, elles plongent à l'O. et semblent converger vers Fajac avec les précédentes. Lorsqu'on descend de la Bourdette à Pradelles, on les voit affecter les caractères que nous avons signalés au nord. Ce sont des marnes rouges, grises, schisteuses, des calcaires et des grès marneux gris et rouges, se divisant en grosrognons aplatis. Les plans des couches solides, divisées ainsi en polyèdres plus ou moins réguliers, ressemblent à la surface d’un grand pavé. Nous reviendrons plus loin sur la région de la mollasse et des poudingues, située au sud, et nous allons reprendre celle qui longe le pied nord du mont-Alaric. Dans leur continuation vers l’E., les couches que nous avons indiquées entre Fon- tiés et la Bretonne (pl. V, fig. 3) deviennent très variées et acquièrent une épaisseur plus considérable. Ce sont celles que précédemment (4), adoptant l'opinion de Tal- lavignes, nous avions cru devoir rapporter à l'étage nummulitique supérieur. En les rangeant aujourd’hui dans le groupe lacustre qui nous occupe, leurs vrais rapports géologiques nous paraissent être beaucoup mieux établis. Toutes ces couches qui plongent au N., sauf un petit axe anticlinal dont nous parlerons sur la rive gauche de la Bretonne, ne tardent pas à présenter un pendage inverse ou vers la montagne. Ainsi la coupe (pl. I, fig. 16) faite à l’est de Barbaira et perpendiculaire à l'axe du mont-Alaric offre la série suivante, à partir du village qui est sur des marnes. 1° Psammite gris panaché. 2° Marnes rouges. 3° Grès-rougeûtre très dur. 4° Marnes. 5° Poudingue avec de gros cailloux. 6° Marne rouge. 7° Psammite gris, quelquefois rougeûtre. 8° Poudingue à petits nodules. 9% Mollasse gris-bleuâtre, très dur, à grain fin, uniforme, à cassure esquilleuse, conchoïde en grand, composée de calcaire, d’un peu d'argile, de beaucoup de sable siliceux très fin avec des grains verts, rouges et jaunes; elle forme une crête qui domine les autres rides avant la combe Saint-Jean; elle est exploitée comme pierre d'appareil et doit être d’un excellent usage. Elle plonge au S. ou vers la montagne, sous un angle de 75° ; son épaisseur est de 25 à 30 mètres, puis elle passe à un poudingue et à des marnes grises qui lui succèdent. 10° Marnes schistoïdes rouges, panachées de gris. 11° Alternances de marnes gris-jaunâtre sableuses, panachées, ou rouges, de grès friables, gris ou rouges, micacés, passant à des psammites, puis se divisant en nodules et affectant une structure amygdalaire. Cette dernière série, qui n’a pas moins de 200 mètres d'épaisseur, se termine par un banc de calcaire gris-brunâtre, très dur, très fragile, bordant le vallon qui sépare toutes ces rides squamiformes du flanc de la montagne. Ce banc calcaire nous paraît appartenir à l'étage nummulitique supérieur. Toutes les assises que nous venons d’énumérer, redressées ainsi parallèlement au mont-Alaric et parfaitement concordantes, ont une épaisseur totale de près (4) L’Anstitut, 12 sept. 1855. — Bull. Soc. géol. de France, 2° sér., t. XIV, p. 46, 1857. 264 FORMATION TERTIAIRE INFÉRIEURE. (N. 2, pe 56.) de 800 mètres. L’inclinaison atteint jusqu’à 80°, et le sillon, ou fossé qui sépare le banc calcaire gris-brunâtre des calcaires blancs compactes de la montagne, est occupé par les marnes bleues du deuxième étage nummulitique. Ce système de couches si variées se continue vers l'E. par Capendu, Comigne, Douzens et Moux, avec des caractères toujours comparables, et limité de la même manière. Ainsi l’église de Capendu est bâtie sur une de ces sortes de crêtes dont nous avons parlé, et le moulin du village sur une autre. Une coupe S.-N. de la colline de Saint-Martin, qui longe le pied septentrional du mont-Alaric jusqu'à Capendu, montre successivement de bas en haut : 1° Poudingue composé de petits fragments de diverses roches, reliés par un-ciment calcaire gris, passant à un grès grossier, grisâtre, peu solide. 2° Marnes rouges. 3° Grès gris friable. &° Marnes rouges. 5° Psammites rougeâtres, tachés de gris. 6° Marnes rouges. 7° Grès grossier rougeâtre, passant à un poudingue. 8° Argile rouge panachée de gris et passant à un 9° Psamunite rouge panaché de gris jusqu’à l’entrée de Capendu. Ce dernier repose sur des argiles rouges également panachées de gris qui portent le village. Ici comme précédemment, les couches forment une série de petites crêtes den- telées parallèles, plongeant au S. ou vers le mont-Alarie, sous des angles de 15° à 25°. C’est sur le sol accidenté, compris entre cette colline et la coupe précé- dente, que se livra, dit-on, la bataille où l’armée d’Alaric II fut défaite. De ce point à Comigne, le chemin est constamment tracé sur les affleurements des grès, des psammites, des argiles rouges et des poudingues plongeant vers la montagne. Ce dernier village est bâti sur le calcaire gris-bleuâtre ou brunâtre, dur, compacte ou à grain très fin, en bancs réguliers, du premier étage nummulitique à son contact avec les marnes bleues du second. De Comigne à Douzens, on traverse de nouveau la série de ces crêtes ou écailles de grès, de marnes rouges, de grès marneux, gris et rouges, et de poudingues qui se répètent plusieurs fois par suite de brisures longitudinales et de relèvements paral- lèles, Entre Douzens et Cabriac, le plongement n’est plus que de 15° à 20°. De cette dernière métairie vers Moux, l’inclinaison au S. redevient très prononcée, les couches sont même presque verticales, et la route passe entre les crêtes dentelées, dis- continues, dirigées E., O. Près de Moux, les grès et les poudingues sub-verticaux affec- tent çà et là des formes bizarres rappelant celles de sphinx et d’autres grands animaux couchés ou accroupis et mutilés par le temps. Les collines de Moux, celles entre autres qui portent les moulins, sont composées de poudingues, de grès marneux et de marnes rouges plongeant au contraire vers le N., comme le grand talus en forme de rideau qui les sépare du pied du mont-Alaric, et qui n’est que la répétition, par suite d’une faille, des assises précédentes. Le dessin (N: 2, p. 57.) GROUPE LACUSTRE. 265 ci-dessous, pris des moulins de Moux, montre cette disposition sur le premier plan (n° xt). Le vallon qui borde la route à l’est du village est encore occupé par des affleure- ments squamiformes de grès et de poudingues rouges, mais, à partir de ce point jusqu'à un kilomètre au delà de Conilhac, les pentes inférieures des collines appar- tiennent au groupe nummulitique, et les parties supérieures plongent au N. comme les couches sous-jacentes. En s'approchant de Lézignan, les grès, les poudingues et les argiles rouges inclinent de nouveau au S. et masquent complétement les assises nummulitiques. Ils constituent toutes les collines situées au nord du bourg et qui se prolongent au N.-E. vers la butte isolée de Montrabech. N° XII. — Vue de l'extrémité orientale du mont-Alaric, prise des moulins de Moux. Le chemin de Lézignan à Escales, comme celui de Sérame, en fait connaître la composition. En suivant ce dernier on remarque, à partir du pont: 110 Poudingue à cailloux très roulés de calcaire noir et de psammite, reliés par un ciment de grès gris. 2 Marnes grises et rouges. 3° Grès argileux, rose, panaché. L° Marnes semblables au n° 2. 5° Grès gris. 6° Marne grise solide. 7° Calcaire sableux ou grès mollasse, gris, à grain fin, exploité. 8° Poudingue. 9 Calcaire lacustre, gris blanchâtre, employé pour alimenter un four à chaux placé sur le bord de la route. 10° Poudingue. 11° Calcaire sableux gris bleuâtre, sub-cristallin, à grain fin, vers le sommet de la colline. Au delà du château de Sérame, des buttes formées par les roches nummulitiques plongeant au N. sont surmontées, à stratification parfaitement concordante, par des calcaires marneux, blanc jaunâtre, du groupe dont nous parlons (pl. V, fig. 5). Ceux-ci occupent la même position relative au nord-est de l'écluse de Pech-Laurier (pl. V, fig. 6), et, si de ce point on se dirige vers Homps, on voit les couches marneuses grises Soc. GEOL. — 2° SERIE, T. VI. — Mém. n° 2. 34 266 FORMATION TERTIAIRE INFÉRIEURE. (N. 2, p. 58.) et jaunes plongeant toujours au N. sous des angles qui varient de 10° à 25°. A celles-ci succèdent des marnes rouges lie-de-vin, des calcaires marneux de teinte semblable ou gris, inclinant encore de même jusqu’au pont d’Ognon, et sur lesquels est bâti le village de Homps. Comme le long du versant nord du mont- Alaric, ces diverses assises constituent aussi des écailles imbriquées, de diverses grandeurs, alignées N.-E., S.-0, passant par les métairies de Saint-Hilaire, de Saint-Michel et du Port. Au pont de Bassanel, les affleurements des couches rouges qui forment le lit de la rivière courent exactement comme ses bords (pl. V, fig. 4). En descendant de Tourrouzelle par le chemin d’Escales, on voit les couches rouges plissées incliner en sens inverse, et la coupe de la colline de Saint-Étienne, qui vient ensuite, montre des marnes grises reposant sur le groupe nummulitique et plongeant au S. comme ce dernier, par suite d’une anomalie à l’inclinaison géné- rale dans cette chaîne de collines. Le village d’Escales est bâti sur une crête de grès mollasse calcarifère, gris bleuâtre, très dur, à grain plus ou moins fin, avec du sable siliceux, un peu d'argile, des grains verts, noirs et jaunes. Cette ruche, qui plonge au S.-E., est semblable à celle que nous avons vue exploitée dans la coupe de Bar- baira à°la combe Saint-Jean. En se dirigeant ensuite au S.-E., vers l’ancienne tour, on traverse des grès, des poudingues bruns ou rougeâtres, des argiles jaunes, rouges et grises, c'est-à-dire les roches clastiques de Lézignan. Les marnes y sont peu fré- quentes, et le tout recouvre le groupe nummulitique. Le plongement général est au S., et quelques dislocations locales s’observent çà et là. Après la métairie de la Boriette, ces mêmes assises se présentent de nouveau au-dessus des couches nummulitiques, et se continuent sans interruption jusqu'a Lézignan, avec une inclinaison au S., absolument comme sur le chemin de Sérame. La mollasse, sur la rive droite de l’Orbieu, paraît exister aux environs du Luc, tandis que de Gasparet-à Ornaisons règne un poudingue qui en fait sans doute partie. Lorsqu'on remonte la vallée de l’Ausson vers Thezan, on trouve encore, depuis lau- berge du Pont, des marnes jaunes panachées de blanc et des poudingues horizontaux recouverts par le dépôt quaternaire de la grande plaine que parcourt la route de Narbonne à la Grasse. Ces roches s’appuyent au nord, jusque non loin de Ville- rouge, sur la partie inférieure des grès et des calcaires secondaires qui encaissent la vallée. La limite des deux terrains est facile à saisir, même à une certaine distance. Au nord de l’Aude, dans la direction de Béziers, les couches disloquées forment çà et là de petites crêtes ou des monticules qui s'élèvent au-dessus du niveau géné- ral de la plaine. Elles inclinent de 45° à 20° tantôt dans un sens tantôt dans l’autre, et cette disposition est d'autant plus prononcée qu'on s'approche davantage de Carcassonne. Dans toute cette région le plongement est plus généralement au S. ou au S.-E. A l’est de Névian ce système disparaît sous la vallée ou s’amincit beaucoup sous les collines de mollasse marine comprises entre la route de Narbonne et la rive gauche de l'Aude, pour cesser tout à fait de se montrer avec ses caractères, là où les calcaires marneux leur succèdent. (8. 2 p. 39.) GROUPE LACUSTRE. " 267 Poudingues, argiles et calcaires marneux avec gypse du bassin de Narbonne et de Sigean. Les premières collines tertiaires qui s'élèvent au-dessus de la plaine où lOrbieu se Jette dans l’Aude sent, comme on l’a vu, couronnées de dépôts marins rapportés à la formation moyenne. Ceux-ci recouvrent des couches d’origine lacustre dont les premières seules présentent une certaine analogie avec celles que nous venons d'étudier sur Le côté opposé dela vallée autour de Lézignan. Les suivantes, qui reposent immédiatement sur le terrain secondaire, sont très différentes à la fois et du grès de Carcassonne et des roches nummulitiques. Cependant les caractères strati - graphiques généraux, et les caractères minéralogiques comparés à ceux d’autres régions, ainsi que certains fossiles nous font, contrairement à l'opinion de quelques personnes, regarder, quant à présent, le tout comme l'équivalent géologique de la série lacustre dont nous venons de nous occuper dans le bassin moyen de l'Aude. S'il était démontré plus tard que ce parallélisme n’est pas exact, notre carte n’en serait pas moins vraie, ces dépôts y étant représentés par une teinte particulière. Ainsi commence une nouvelle série de couches, là précisément où la précédente cesse de montrer, ce qui fait présumer que tout l’espace compris entre la chaîne secondaire de Fontfroide à l’ouest, celle de la Clape à l’est et les plateaux au sud de Sigean se trouvait, dans le même temps, dans des conditions différentes de celles de la partie moyenne du bassin de l'Aude. Cet espace, que nous désignons par l'expression de bassin de Narbonne et de Si- gean. devait être couvert d’eau douce et dans un état de tranquillité ou de repos relatif, comme le prouvent la nature des sédiments que nous y observons, l'absence, si ce n’est tout à fait à la base et au sommet, de roches clastiques et la présence au contraire de marnes et des calcaires marneux, tendres ou friables avec des débris organiques végétaux et animaux, lacustres et terrestres, quelquefois bien conservés. Lorsqu’en sortant de Narbonne on quitte la route de Marcorignan pour prendre le chemin de Moussan, on longe à gauche de petits coteaux formés de poudingues solides ou incohérents, à ciment argileux ou terreux, jaune ou rougeàtre, en bancs irréguliers, qui alternent avec des argiles plus ou moins sableuses, jaunâtres et rougeâtres. Ces poudingues à noyaux de calcaires compactes, gris ou noirâtres, de grosseurs variables, de quartz toujours très arrondis et de grès, s'élèvent d'abord de 10 à 42 mètres au-dessus de la plaine. En continuant à s’avancer on remarque que les cailloux sont partout très roulés vers le pied des monticules composés ensuite d'argile sableuse jaune. Ces buttes entourent et dominent les exploitations de gypse près du domaine de Malvezy. On voit sortir sous les calcaires marneux, blanc-jaunâtre, en lits très minces ou feuilletés, d’une régularité parfaite, de 10 à 12 mètres d'épaisseur, des marnes d’un bleu-gris très uniforme, enfin les marnes gypseuses et le gypse. Dans le ravin qui part du pied de la butte la plus orientale on observe des plissements et même des froncements très prononcés. Sur le versant est 268 FORMATION TERTIAIRE INFÉRIEURE. (N. 2, p« 60.) de cette même butte, le long de la route, un lambeau de mollasse marine avec Ostrea crassissima atteste un déplacement que confirment les dislocations des collines voisines. A l’ouest de la métairie, quatre exploitations de pierre à plâtre ont été successive- ment ouvertes au pied de ces dernières, composées comme les précédentes et dont la disposition paraît due, ainsi que l’avait fort bien remarqué M. Tournal, à un soulèvement local qui aurait fait affleurer les couches gypseuses au-dessous du pou- dingue et des argiles rouges. Le plongement général est au S.-0., et, ce qui prouve bien que cette disposition est purement accidentelle, c’est que les couches de la colline tabulaire de la Bergerie et de Fresquet au nord-ouest, formée par la mollasse marine, n'ont éprouvé aucun dérangement (pl. V, fig. 2). Mais rien n’établit que cet accident soit dû à quelque roche ignée restée dans les profondeurs du sol. La coupe d’un puits de 10 mètres de profondeur a présenté les détails suivants reproduits par Dufrénoy (4) : 4° Dépôt quaternaire de la plaine. 2° Argile schisteuse jaunâtre avec des cristaux de gypse et divisée par trois lits de gvpse cristallisé, de 0,05 chaque, 0,53. ÿ 3° Lit de silex avec soufre terreux et cristallisé, 0,10. L° Aroile gypseuse avec veines de gypse de 0",08 et veinule de soufre, 0,32. 5° Argile compacte avec de grands cristaux de gypse limpide. 6° Marne argileuse et schistes contournés. 7° Argile compacte avec cristaux de gypse. 8° Marne schisteuse et cristaux de gypse disséminés. 9 Marne rubannée avec de petites veines de soufre disposées dans le sens des feuillets. 40° Marne schisteuse — n° 7. 41° Marne dure schisteuse, rubaunce, très bitumineuse, 42° Argiïle tendre avec des rognons de soufre aplatis, de 0,02 d'épaisseur, formant deux lits discontinus. C’est le gisement le plus riche de cette substance. 43° Couche de gypse de 0,08 donnant de bon plâtre. ÿ 14° Argile schisteuse dure avec quelques rognons de soufre. 15° Calcaire marneux et veinules de gypse fibreux. 16" Argile schisteuse dure avec quelques rognons de soufre et un peu de lignite. Toutes ces couches plongent de 20° au N. Le soufre en rognons à une cassure vitreuse. Il est cristallin, noir, ou plus ordinairement d’un blanc jaunâtre, terreux, à cassure mate et cependant presque pur, car ces rognons donnent jusqu’à 90 pour 100 de soufre. D'après M. Noguëès (2), les carrières actuelles présentent la coupe suivante : 4° Marne calcaire, jaunâtre, feuilletée, avec des cristaux de gypse. 2° Marne argileuse blanche, pénétrée de sulfate de fer et se divisant en fragments pelyvédriques. 3° Gypse bleuâtre mélangé de marne. h° Marne argileuse bleue. 5° Gypse cristallin et mélangé de marne. (4) Mém. pour servir à une description géologique de la France, t. HE, p. 82, 1836. (2) Loc. cit., p. k1, 1855. (N. 3, p. 61.) GROUPE LACUSTRE. 269 M. Tournal (1), qui a décrit sommairement ces couches, à donné aussi l’analyse du soufre qu'on y rencontre (2). Une autre exploitation ouverte sur le chemin de Védillan a été abandonnée et les excavations ont été comblées. Si de ce point on suit le chemin de Moussan , on trouve, au-dessus du gypse, suivant le même obser- vateur : 4° Un grès ferrugineux avec Hélices, Planorbes et Lymnées ; 2° Marnes rougeûtres sans fossiles ; 3° Grès ferrugineux; h° Marnes rougeûtres ; 5° Calcaire lacustre très compacte avec des Lymnées, des Planorbes et des Paludines ; 6° Poudingue de galets roulés de diverses roches, réunis par un ciment plus argileux ; 7° Calcaire d’eau douce blanc; 8° Poudingue = n° 6. Dans son Mémoire de 1828, M. Tournal regardait déjà avec raison ces argiles rouges recouvrant le gypse, mélangées de cailloux de quartz et passant à un poudingue, comme très constantes dans toute cette région de Malvezy à Védillan, Moussan, etc: La butte isolée de Montlaurès qui s'élève au nord de Malvezy, formée de calcaires secondaires gris-blanchâtre, est entourée à sa base de calcaires en dalles, semblables à ceux quirecouvrent le gypse, et de poudingues inclinés, le tout montrant des rela- tions stratigraphiques et des caractères minéralogiques que nous retrouverons bien- tôt au pied du versant occidental de la Clape. Sur la route de Marcorignan à Narbonne, les poudingues et les argiles rouges sor- tent de dessous la mollasse marine en face de la maison de campagne de Fresquet. Ils entourent la base occidentale de la colline de Lestagnol où le poudingue incohérent, avec des cailloux roulés de quartz, de calcaire noir et de grès, repose sur une argile rouge grumeleuse. Leur épaisseur totale est de 45 mètres, et le calcaire lacustre du cimetière de Montredon vient affleurer dessous. Ils ont été coupés par le chemin de fer près du moulin, et à 150 mètres de la métairie de le Brètes (ou Levretes) ils sont interrompus par les calcaires secondaires qui font une pointe au nord-est. À la des- cente de Sainte-Joannes reparaissent les dépôts tertiaires qui longent ensuite par : Couderc et Crabit les calcaires rapportés au lias. Les poudingues existent à mi- chemin de Couderce à Sainte-Joannes et, dans toute cette petite région, présentent la tête de leurs strates à VE. et au N. De l’autre côté de la plaine de Narbonne, le tiers nord-ouest à peu près du massif triangulaire de la Elape est formé par les couches de ce groupe, dont la plus grande altitude ne dépasse pas 137 mêtres à l’ouest d’Armissan. Dans sa partie sud, le long du chemin de Gruissan, avant le col du Capitoul, on voit affleurer un poudingue à gros éléments qui repose sur la pente inférieure des calcaires crétacés, et qui se (1) Loc. cit., p. 309, — Des coupes plus détaillées avaient été données dans le premier mémoire de l’auteur (Ann. des se. nat., t. XV, p. 31, 1828). (2) Journ. de pharm. — Bull. univers. des se., 1829. 270 FORMATION TERTIAIRE INFÉRIEURE. (N. 2, p. 62.) continue lorsqu'on remonte vers le nord, masqué çà et là par les amas de terre jaune dont nous avons parlé. Dans le ravin de la Ricardelle (pl. IE fig. 40), ce poudingue est composé de gros fragments de calcaire noir, reliés par un ciment jaunâtre peu abondant. Son épaisseur est de 3 mètres, et il plonge de 40° au N.-0. Il repose, d’une manière concordante, sur des calcaires crétacés à Orbitolines, ce qui prouve une dénudaiion antérieure des calcaires compactes à Caprotines en cet endroit. Au- dessus du poudingue viennent un calcaire marneux, jaunâtre, fissile, à cassure sub- compacte, à grain très fin, et un second poudingue d’une épaisseur égale au premier. Prolongée jusqu’à la plaine, la coupe montre que ces roches clastiques ne tardent pas à devenir presque horizontales. Quoique peu étendue, elle fait voir en outre que, si les couches crétacées -ont été brisées et partiellement dénudées avant le dépôt tertiaire, elles n’ont pas dû être soulevées bien sensiblement, car la régularité et le parallélisme absolu des lits les plus minces de l’assise de calcaire marneux dé- montrent qu'ils n’ont pu se former ainsi que sur un plan horizontal ; une incli- naison de quelques degrés serait accusée par leur disposition même. On a donc ici la certitude du soulèvement simultané des roches secondaires et tertiaires. Si l'on continue à remonter de la Ricardelle vers le nord, la largeur des dépôts qui nous occupent augmente de plus en plus. Ils consitutent les collines basses à l’ouest de Saint-Pierre du Roc et celles qui entourent le village d’Armissan au sud, à l'ouest et au nord. Dans cette dernière direction, comme au nord-ouest, nous n'avons pas observé de poudingues à la base ni même dans toute la hauteur des collines, qui est de 60 à 65 mètres ; elles sont formées de marnes et de calcaires marneux tendres et même friables, blanc-jaunâtre, parfaitement stratifiés, qui se relèvent à lap- proche du terrain secondaire sur lequel ils reposent d’une manière concordante. Ces couches plongent au S.-0. où à lO., mais plus souvent au N.-0.. sous des angles de 45° à 20°. Lorsqu'on s'avance vers la plaine, elles deviennent presque horizon- tales. Quelques bancs minces sont plus compactes que le reste de la masse, et ceux que l’on exploite sont situés vers le tiers inférieur des coteaux. La colline placée à l'ouest d’Armissan, et dont on longe la base en venant de Narbonne, est composée versle haut, suivant M. V. Raulin (4), d’alternances de sable argileux jaune avec des poudingues à cailloux de grès rougeûtre et de calcaire compacte gris, puis, en dessous, d'argile jaune rougeätre ou verdâtre avec des lits minces de calcaire jaunâtre plongeant de 15° à l'O., 30° N. C’est au fond de la vallée, au sud du village, que lon exploite, de temps immémorial, les cal- caires en dalles dont on fait des pavés, des tablettes, des montants de cheminée, êtc., et qui renferment de nombreuses empreintes végétales, des Cyclades, des restes de tortues, etc. Les calcaires secondaires, contre lesquels ce système s'appuie, inclineraient dans le même ‘sens que les sédiments tertiaires, mais, sous un angle double, d’après le même géclogue. (1) Bull. Soc. géol. de France, 2° sér., t. XIIL, p. 171, 1856. (N. 8, p. 65.) GROUPE LACUSTRE. 271 M. Tournal (4) signale dans ces calcaires marneux en dalles des empreintes de * poissons qui ont 0”,70 de longueur, et au-dessous paraît exister du lignite, suivant la coupe donnée par M. Noguës (2). AoecneérERle 46 HE AU. :, 9"mèires: 2° Calcaire très argileux dur plongeant au N.-0 . . 0,05 DRCTTANVIED RE Ps M RSR IENOR RS 2 RUN 4) HAMNECIEDIATENATE RME EE CMTINMAN EE EN 060 SCalcarerarelenaimeA EN. 2iMe Ne tt pale 045 6° Marne noirâtre schisteuse. . . . . . . . (0,20 AeACalcare blanc ar sileuxs M CN 0:60 SPRATEUC USE Le les CN à sure «a de 1,00 9° Argile plus solide que la précédente. . . . . 0,05 10° Calcaires marneux en dalles, exploités. . . . » AMSAIONES NME PARU HT Su EI dune » Les restes de végétaux, très répandus dans les calcaires en dalles, ont été depuis longtemps étudiés et déterminés par M. Ad. Brongniart (3), qui les a décrits à la suite des mémoires de M. Tournal. Ce sont : Muscites Tournalu, Ad. Br.; Filicites polybotrya, id.; Smilacites hastata, 1d.; Callitrites Brongniartii, Endl.; Sequoites taxiformis, Ad. Br.; Pinites pseudo-strobus, id.; Taæites Tournali, id.; Comptonia dryandræfolia, Ung.; Betula Dryadum, Brong.; Carpinus macroptera, id.; Platanus Hercules, Ung.; Nymphæa Arethusæ, 14. Parmi ces espèces, cinq sont connues dans des dépôts très éloignés de celui-ci et rapportés pour la plupart à la formation ter- taire moyenne (Aix, Hœring, Radoboj). Des insectes diptères sont associés à ces plantes (4), ainsi que des restes de poissons, de tortues d’eau douce, des Planorbes, (1) Loc. cit., p. 315, et Ann. des sc. naturelles, t. XV, p. 34, 1828. La plupart de ces détails se trouvent dans ce premier mémoire de l’auteur. (2) Loc. cit., p. 39. (3) Notice sur Les plantes d'Armissan, près Narbonne (Ann. des se. nat., t. XV, p. 45, 1898).— Dictionnaire universel des sciences naturelles, t. XIIT, p.166, 1849. « Les espèces déterminées jus- » qu'à ce moment, dit le savant paléophytologiste, dans son mémoire de 1828, semblent indiquer » une flore analogue à celle des régions boisées du nord de notre hémisphère, dans laquelle les coni- » fères et les amentacées dominent, comme on le voit encore dans nos forêts et dans celles du nord » de l'Amérique. Outre ces espèces déterminables trouvées à Armissan, j'y ai observé une infinité » de feuilles de végétaux dicotylédones qu'il est impossible de rapporter à des genres ou à des familles » déterminées. » Ce passage diffère de ce que dit M. Noguès (p. 39), qui ne s’applique qu'à la flore générale du terrain tertiaire moyen, et non à la petite flore locale dont nous parlons. Celle-ei est, en effet, rangée dans la période tertiaire moyenne. Les végétaux fossiles, connus dans ces calcaires, sont aujourd’hui beaucoup plus nombreux, et devront être l’objet d’un travail particulier. Nous citerons entre autres une feuille palmée à cinq lobes, que nous à montrée M. Noguès, et qui n’a pas moins de 0®,40 de large sur autant de haut ; elle appartient à un génre voisin des Séerculia. (4) Marcel de Serres, Géognosie des terrains tertiaires, p. 219, in-8. Montpellier, 1829. — M. Marcel de Serres a aussi publié une note sur Les feuilles de dicotylédones trouvées dans Les couches lacustres moyennes d’Armissan (Acad. des se, de Montpellier, 22 novembre 1847. — L'Institut, 272 FORMATION TERTIAIRE INFÉRIEURE. (N. 2, p. 64.) des Lymnées, des Cyclades et même des débris d'oiseaux (1). On a done ici les dépôts liltoraux du lac limité de ce côté par les calcaires secondaires de la Clape - qui s’élevaient sans doute à peine de quelques dizaines de mètres au-dessus de son niveau. Si, en sortant d’Armissan, on prend le chemin de Marmoulières, on trouve, en montant vers le col, un calcaire gris blanchâtre, terreux, noduleux, et des marnes calcaires, grumeleuses, avec Orbitolines. Ce calcaire, qui devient blanchâtre, est divisé en bancs séparés par des marnes schistoïdes plongeant de 25° au S. Ces strates néocomiens sont recouverts de -calcaires marneux blanc-jaunâtre, très tendres, en lits minces, fort réguliers, plongeant d’abord de même, puis au S.- O., et semblables à ceux de la Ricardelle. L'inclinaison ne tarde pas à changer, tourne à l’O., comme la colline elle-même, et, vers le haut du col, les calcaires blancs, tachants, toujours en lits très peu épais et réguliers, montrent des em- preintes de bivalves (Cyclades ou Cyrènes?) et des traces de gastéropodes à coquilles très minces (Lymnées ou Paludines?). Après qu’on a dépassé le col, l'in clinaison est au N.-0. ou à PO.-N.-0. Les calcaires tertiaires se délitent en dalles et même en feuillets de 4 à 2 centimètres d'épaisseur, d’une extrême régularité et d’un aspect comparable à celui des calcaires schisteux jurassiques de Solenhofen. Ici, comme précédemment, les dépôts tertiaires suivent donc toutes les imflexions des couches secondaires, et leur plongement en éventail, ou plutôt suivant la géné- ration d’un cône très surbaissé, montre bien la simultanéité du mouvement qui a produit le bombement des uns et des autres, de même que la structure des premiers prouve que leur dépôt s’est effectué sur un plan horizontal parfaitement dressé. Une dénudation antérieure du sol secondaire avait aussi précédé la formation des marnes et des calcaires tertiaires. En continuant à s’avancer vers Marmoulières, on marche sur les calcaires secon- daires, et, si l'on s'élève sur le plateau qui domine le château, on est frappé du caractère des collines que l’on voit au nord, comparées à celles que l’on avait longées jusque-là au sud et à l’est. Ce sont des plateaux ondulés ou des croupes arrondies et surbaissées, à pentes largement convexes. Elles n’ont rien des formes heurtées et anguleuses des précédentes, mais leur surface monotone n’en est pas plus susceptible de culture et elle est seulement recouverte de bruyères ou d’une herbe rare et courte. On reconnaît de suite que cette partie de la Clape à été moins accidentée que celle du sud, et que sa composition doit être différente. En effet, toute la portion de ces collines, située au nord du chemin de Saint-Pierre-de-Mer, appartient aux dépôts tertiaires dont nous venons de parler autour d’Armissan. Malgré la distance à laquelle se trouve le spectateur, l'opposition des formes des 9 févr. 1848). — De la découverte du genre Notœus (N. laticaudus) dans les calcaires lacustres d'Armissan (Compte rend. de l’Acad. des sciences, vol. XLVI, p. 751, 1858). L'auteur ne décrit point ce poisson, mais parle de divers bassins tertiaires. (1) Noguëès, Loc. cit., p. 38. (N. 2, p. 65.) GROUPE LACUSTRE. 275 parties nord et sud de la chaîne peut encore être distinguée très nettement des buttes . des fours à chaux de Narbonne, où nous avons pris le dessin reproduit ci-dessus (p. 218). La limite des deux terrains suit de nombreux méandres autour de Marmoulières, de Tarailhan, et, de Courtal-Cremat à Courtalneau, des grès siliceux, bruns, ferrugi- yeux, à grains fins et souvent très durs, semblent encore appartenir au terrain tertiaire, comme ceux qu’on observe à l’ouest sur les flancs des collines de Vinassan. Mais, en descendant vers le vallon de la Bugadelle (las Bugadelles de Cassini), d’autres grès bruns, ferrugineux, calcarifères, schistoïdes en grand, nous ont paru secon- daires et sortir de dessous les calcaires compactes à Caprotines qui circonscrivent ce petit bassin. Plus au nord, les collines de Saint-Jean, de Salles et de Fleury sont de roches tertiaires lacustres. On les suit jusqu’au roc de Moulinassa, dit M. Tour- nal (1), et l’on y trouve des Planorbes et des Lymnées autour de Fleury et le long du chemin de Salles. Entre Saint-Jean et la vallée de l'Aude, sont des calcaires d’eau douce compactes, recouvrant des marnes rouges marbrées, sans fossiles. Si nous reprenons actuellement l'examen de ces dépôts au sud-ouest de Narbonne, à l’extrémité septentrionale des dernières pentes de la chaîne de Fontfroide, nous verrons s'élever, de dessous le dépôt quaternaire de la plaine, de chaque côté d’un ravin profond situé entre le second et le troisième four à chaux établis sur des buttes, à 2 kilomètres de la ville, un poudingue brèche, de 8 à 10 mètres d’épais- seur, dont les éléments, à peme émoussés sur leurs angles, sont de toutes les gros- seurs, depuis 0*,25 de diamètre jusqu’à l’état de gravier fin. Ils proviennent des calcaires secondaires qui constituent les collines voisines et sont reliés par un ciment de calcaire lacustre jaune compacte. Les bancs de ce poudingue inclinent d’en- viron 15° au N.-0.; ils s'élèvent très peu sur les pentes des buttes de calcaires d’eau douce et de marnes qui les supportent, déjà décrites par M. Tournal (2), et qui alimentent trois fours à chaux. La coupe que nous donnons (pl. HE, fig. 9) fait voir la position du poudingue sous lequel doit s’enfoncer le calcaire à Hélices et à Paludines qui forme la crête la plus élevée de la colline et tout le plan incliné au N.-0. Ce calcaire lacustre blanc jaunâtre, compacte, à cassure esquilleuse à l’intérieur et terreuse à la surface, est un peu celluleux, et la plupart des vides sont remplis de calcaire spathique. Une première variété de ce calcaire est friable, terreuse, et renferme des moules de petites Paludines, d'Helix Coqui, Brong. (3), de Valvées, etc. ; une seconde est blanc- (1) Loc cit., p. 321, 1830. (2) Loc. cit., p. 317. — Voyez aussi A. Boué, Pull. Soc. géol. de France, 1° sér., t. TX, p. 327. 1833. (3) De Boissy, Magazin zoologique de Guérin, 1844, pl. 88, fig. 1, 2, 3. — Cette espèce est citée par le même auteur avec l'A. Raumondi dans les calcaires du Pech de l’Agniel. — Voyez aussi J.-B. Noulet, Mém. sur les coquilles fussiles des terrains d'eau douce du sud-ouest de la France, in-8, p. 77, 1854. SOC. GÉOL. — 2° SÉRIE, T. VI — Mém. nm 2 35 274 FORMATION TERTIAIRE INFÉRIEURE. (N. 2, p. 66.) jaunâtre et rosàtre avec Helix Ramondi, Brong., de petites Paludines qui rappel- lent la P. viridis, Drap., et la P. Deshayesiana, Math., une Neritina voisine de la N. Brongniartiana, id.; enfin une troisième variété de roche est marneuse, tendre, rose tachée de jaunâtre, à cassure terreuse, et avec les mêmes fossiles. La figure 8 (pl. HT) est une coupe de la plus orientale de ces collines. On y voit le calcaire à Hélices recouvrant une série de bancs de 8 à 10 mètres d'épaisseur totale, de calcaires marneux, très variables dans leurs teintes, leur texture, leur dureté, leur composition plus ou moins marneuse et leur épaisseur quelquefois ré- duite à celle de simpleS feuillets. La stratification générale, très nette, n’est bien suivie que pour le banc supérieur de calcaire blanc à Hélices et pour le calcaire celluleux, dur, à cassure inégale, parfois compacte et à cassure conchoïde, qui est à la base de la coupe et que l’on exploite pour la fabrication de-la chaux. Enfin la coupe fig. 9 montre aussi la relation des buttes tertiaires lacustres avec les calcaires secondaires, compactes, gris-noirâtre. Ici, comme sur le bord opposé du lac, le long des pentes inférieures de la Clape, la concordance des deux systèmes est encore parfaite. Le plongement est de 25° au N.-0: A leur jonction est un petit vallon dont l’un des côtés est formé par les têtes des couches lacustres, l’autre par le plan supérieur des calcaires noirs. La composition et la stratification de ces diverses buttes sont d’ailleurs semblables, ainsi que leur relation avec les strates sous-jacents. À l’est, au pied de la première, on remarque un grès mollasse qui serait peut-être un rudiment de la formation moyenne? à l’ouest de la seconde, les couches tertiaires. peu élevées, semblent s'appliquer en biseau sur les roches plus anciennes sans dépression intermédiaire, et la superposition est plus obscure. En résumé, les calcaires lacustres et le poudingue qui les recouvre ont été redressés en même temps que les calcaires noirs qui les supportent, et les sédiments quaiernaires se sont ensuite étendus à leur pied. Ils doivent nous représenter 1c1 les dépôts d’eau douce des collines de Malvezy au nord, comme ceux de la Clape à l'est. - Si, à partir de ce point, on suit la route de Sigean, on marche constamment sur des roches du même groupe, formant de chaque côté des collines de teintes blanc- jaunâtre, à contours déprimés, peu élevées, ou à sommets surbaissés et tabulaires. Elles se relèvent d’une part vers la côte à l'E., et de l’autre verslesmontagnes secon- daires qu’elles longent à l’O., mais du côté desquelles les couches inclinent géné- raiement de 10°. Ce sont des calcaires jaunâtres, marneux, noduleux, tendres et ierreux, ou des calcaires marneux gris, à grain fin, bien stratifiés, quelquefois se délitant en dalles ou en plaquettes. Les sommets des buttes, des collines et les parties abruptes des pentes restent, à cause de leur sécheresse, à l’état de landes incultes; les parties basses du sol sont couvertes de vignes et de céréales. Par leur teinte générale, leurs formes mollement ondulées et leur culture, ces collines se déta- chent bien à l'œil des montagnes secondaires contre lesquelles elles s'appuient. On peut les suivre avec les mêmes caractères jusqu’au delà de Sigean, et elles atteignent (N. 2, . 67.) GROUPE LACUSTRE. "- 275 quelquefois 130 mètres d'altitude. Nous donnerons actuellement quelques détails sur leur composition dans cet espace. À une lieue au sud de Narbonne, sur la droite de la route, la colline de Pel-levate, près de la Coupe, nous a offert la série suivante en allant de haut en bas: 4° Poudingue incohérent, à noyaux de quartz blanc, de grès et de calcaire noir, entourés de sable jaunâtre. 2° Terre jaune. 3° Grès jaune passant quelquefois à un poudingue à petits noyaux, 1,50. L° Terre jaune. 5° Banc de calcaire lacustre blanc, 0,25. 6° Grès et terre jaune avec un lit de marne gris-verdâtre, sableuse , 0,25. 7° Glaise jaune, argilo-sableuse, exploitée pour les tuileries. Des lits de grès, plus ou moins terreux, jaunes, quelquefois micacés, y sont subordonnés. 8° Niveau de la route. Cette butte, allongée du N.-0. au S.-E., la plus élevée des environs, a de 60 à 70 mètres de hauteur, et ses couches plongent de 10° au N.-0.; elle est ex- ploïtée seulement à son extrémité sud-est, sur le bord de la route, pour alimenter les tuileries de Narbonne, ainsi que les dépôts analogues qui se montrent en face. Dans le poudingue du sommet, il y a des fragments qui atteignent 0w,50 de diamètre ; ce sont de véritables blocs. Les fragments de quartz qui n’ont jamais ce volume sont les plus roulés. Il serait donc possible de voir dans ce poudingue un dépôt quaternaire, malgré son élévation actuelle au-dessus du fond de la vallée. Cette masse argilo-sableuse est séparée du calcaire lacustre sous-jacent par un pou- dingue de quelques mètres d'épaisseur, à cailloux de calcaires compactes noirs, que l'on voit affleurer à gauche lorsqu'on suit le chemin de Bages. Le tout nous semble d’ailleurs représenter les dépôts rouges argileux et elastiques des chemins de Moussan et de Marcorignan. À la métairie de Montplaisir, la route coupe des couches plus basses de calcaire sableux, jaune, friable, renfermant des cailloux roulés assez volumineux, et il en est de même au delà. En face, des buttes couvertes de landes sont formées de cal- caire lacustre blanc-jaunâtre, très dur, celluleux, avec de petites Paludimes, etc. Les buttes qui longent la côte sortent de dessous le dépôt jaune argilo-sableux pré- cédent, qui s’'amincit à mesure qu'on s’avance versle sud, pour cesser avant le Prat-de- Ceste. M. Tournai ayant rapporté ce dernier à son terrain de transport et d’atterrisse- ment ancien, on conçoit que celui-ci occupe sur sa carte une étendue beaucoup plus considérable que sur la nôtre. On reconnaît d’ailleurs que presque partout les fossés de la route sont creusés dans les roches lacustres les mieux caractérisées, et il n'v avait pas lieu de donner une aussi grande extension aux dépôts plus récents ou qua- ternaires qu’il nomme terrain de transport des plaines. Tout le massif des collines situées entre la grande route et l'étang de Bages, et qui portent le moulin de Roy, le village de Lespequis et le domaine d’Estarac, est com- 276 | FORMATION TERTIAIRE INFÉRIEURE. (N. 2, p. 68.) posé de calcaires lacustres blancs, de marnes blanches, de calcaires marneux schis- toïdes, avec des Lymnées, et plongeant de 20° à 25° au N.-0. Les diverses assises ont été brisées, divisées en plusieurs plans par des failles, et, l’on peut les étudier entre Lespequis et Estarac. Bages est bâti sur une pointe avancée et isolée de ces mêmes roches. Le long de la route, à la hauteur de Lambert, est un calcaire lacustre blanc jaunâtre, compacte, à cassure esquilleuse à l’intérieur, terreuse à la surface, un peu celluleux et dont la plupart des vides ont été remplis par de la chaux carbonatée. En quittant la grande route au Prat-de-Ceste pour prendre le chemin de la Quille, on marche sur des calcaires lacustres jaunâtres, noduleux, caverneux ou tubuleux, passant au compacte, quelquefois panachés de rose, à cassure terreuse et inégale, avec des nids de calcaire spathique. Ils forment tout le plateau ondulé que l’on parcourt jusqu'au-dessus de Courtalneau, où ils sont blanc-jaunâtre, marneux, renfermant l’Helix Coquii, etc., et surmontés de marnes gris-verdâtre et blanches. Le tout plonge faiblement au N.-0. Au ravin que l’on atteint bientôt les couches affectent une disposition synclinale, et au delà succèdent des grès, des poudingues et des brèches à gros fragments de calcaire noir cimentés par du calcaire peu abondant, jaune et rose comme celui des couches précédentes. Les roches qui se montrent ensuite, lorsqu'on s'approche de la montagne, sont brun-noirâtre et paraissent provenir de grunsteins altérés ; puis viennent des grès assez épais, des calcaires modifiés, etc., dont la stratification est obscure, et qui appartiennent sans doute au terrain secondaire. Les dépôts calcaréo-sableux ou argileux tertiaires pénètrent plus ou moins avant dans les gorges et les vallées des montagnes, s'élèvent plus ou moins sur leurs pentes, et 1l est toujours facile, avec un peu d’attention, de tracer leurs limites respectives. On ne peut pas douter que la chaîne de Fontfroide ne formât un relief assez impor- tant, bordant de ce côté le lac de la dernière période tertiaire inférieure; mais 1l nous paraît aussi démontré que, comme la Clape, elle a subi un exhaussement en masse postérieur à ces mêmes dépôts lacustres. À l’ouest de la route, à partir du Prat-de-Ceste, ceux-ci sont redressés el affec— tent la forme de grandes écailles inclinées à l’O., ou bien de buttes coniques r'es- semblant à des tumulus. Au Saut-de-Lasc, des marnes argileuses feuilletées, grises, blanchâtres ou jaunâtres, sableuses, sont disposées en monticules toujours inclinés au N.-0., tandis que le long de la côte règnent les calcaires lacustres blanchâtres, inclinés de même d’Estarac à Peyriac. Sur le bord de la route, avant qu'on atteigne l’ancien étang de Pudre, on remarque, près d’une maison isolée, une butte dont les couches plongent au N.-E., composée de calcaires marneux feuilletés et de marnes gypseuses gris-blanchâtre, avec de gros cristaux de gypse, reposant sur une. mollasse grise et un calcaire marneux. De ce point au bord de l'étang de Bages se relèvent çà et là, au-dessus du niveau général de la plaine, des crêtes écailleuses de calcaire lacustre. IN, 2, pe 69.) GROUPE LACUSTRE. £ 271 Aux Pigeonniers situés en face de Peyriac, et dont l'altitude est de 61 mètres, M. Tournal (1) décrit un calcaire d’eau douce, blanc, horizontal, renfermant une grande quantité d’Hélices, de Lymnées, de Paludines, de Planorbes, de Physes, encore pourvus de leur test, et, lorsque de ce point on se dirige à l’ouest vers Sainte-Eugénie,les mêmes calcaires qui renferment de petits Cérites (Potamides) sont surmontés de sable marneux verdâtre. Les marnes et les calcaires lacustres, avec des empreintes de plantes, recouvrent des grès secondaires inclinés au N.-E., et entourent une petite butte de calcaire plus ancien, située entre la saline et l'étang de Doul. Celui de Pudre, que l’on trouve un peu plus loin, est entouré de calcaires généralement horizontaux, alternant avec des marnes vertes, et accidentellement inclinés de 45°. Les îles de l'étang de Bages, continue M. Tournal, sont formées de dépôts lacus- tres plus ou moins relevés. La petite île des Ouillous, qui ne s'élève qu’à 10 mètres au-dessus de l’étang, permet de les étudier facilement. Celle de la Planasse est presque entièrement composée de marnes rougeàtres et n’aiteint pas plus de 7 mètres. L'ile de Laute, la plus grande de toutes, ne présente que des marnes et des calcaires très compactes, régulièrement stratifiés, occupant sa partie supé- rieure. Lorsque quittant la route de Sigean on prend à droite celle de Portel, à la hauteur de la métairie de Fonloubi, on voit les couches tertiaires interrompues, l’espace de 200 mètres, par un affleurement de marnes feuilletées et de calcaires noirs remplis de fossiles du lias. Les collines de mollasse qui s'élèvent tout autour, à une centaine de mètres, paraissent s'appuyer contre les calcaires blancs compactes des bois de Fontfroide. Toutes les métairies situées au nord de Portel sont sur les dépôts ter tiaires qui, sans être très accidentés, sont cependant plus ou moins inclinés dans un sens ou dans l’autre. À la sortie de ce village, le long de la route du Lac, dans l’escarpement de la colline qui borde la rivière, des exploitations de gypse sont connues depuis longtemps par les descriptions qu’en ont données M. Tournal (2) et M. Marcel de Serres (3). La masse de gypse, plus ou moins marneuse, grise, tachée de bleu par places, schistoïde en grand, est parfaitement régulière dans toute sa hauteur et présente quelques veines charbonneuses. Elle est surmontée d’une couche d’argile feuilletée de 1 mètre, et plus haut d’un calcaire marneux de 10 à 12 mètres formant le sommet de la colline. On y trouve des Cérites et quelques rognons de silex blonds et noirs. Dans des calcaires marneux grisâtres, tachés de jaune, que M. Noguès a recueillis dans cette localité, nous avons reconnu des moules et des empreintes de petites Paludines et d’un Cerithium, identique avec une espèce des marnes gypseuses (1) Loc. cit., p. 318. (2) Description géognostique du bassin inférieur de l'Aude et de la Berre, p. 2h. (3) Observations sur les gypses tertiaires et secondaires du midi de la France (Actes de la Soc. linn, de Bordeaux, t. VE, p. 207, 1836). 278 FORMATION TERTIAIRE INFÉRIEURE. . (N: 2, p. 70.) d'Aix (1) et une autre espèce qui paraît être le C. subplicatum, d'Orb. (C. plicatum Gratl., non Lam.). | D'après M. de Serres, la coupe de la colline de Portel présente les détails suivants : 1° Dépôt quaternaire, 20 Calcaire lacustre en lits minces, nombreux, parallèles, avec Lymnées, Paludines et quelques rognons de silex. . . . . . . . . . LAURE, 3 mètres. 3° Calcaire lacustre compacte, ruiniforme, avec des coquilles fluviatiles. . . 6 L° Marne calcaire verdâtre contenant des blocs isolés de calcaire lacustre. . . 10 5° Calcaire lacustre compacte avec des rognons de silex . . . . . . . . .. lu 6° Bancs gypseux faiblement inclinés à l’E. Le gypse est blanchâtre ou grisâtre. © Les lits sont séparés par des marnes calcaires, de teintes variées, avec de nombreux débris de végétaux et des fruits de conifères . . . . . . . . li 7°: Calcaires lacustres et marnes jusqu’au bord de la rivière , où ils reposent sur les calcaires secondaires du fond de la vallée. . . . . . . . . s1SAEMT2D Si nous reprenons actuellement la route de Perpignan, à partir du point où nous l'avons quittée pour suivre le chemin de Portel, nous trouvons, à la première montée, le gypse exploité sous des marnes et des calcaires marneux schistoïdes gris- blanchâtre. Au-dessus viennent des marnes gypseuses; feuilletées, de 5 à 6 mètres d'épaisseur, surmontées à leur tour par une assise de marnes jaunâtres massives ou sans divisions apparentes et coupées par la route. Entre les feuillets des marnes précédentes se trouve fréquemment le dusodyle papyracé ou schiste bitumineux très fétide. Plus loin à droite, contre le pont du Lac, une autre plâtriére en pleine ex- ploitation est ouverte dans les mêmes couches qui plongent fortement au S.-E. La masse de gypse grise, rubanée, a une épaisseur de 3 mètres. ) À l’est du village, sur la rive droite de la Berre, entre les métairies du Clix, des Cavètes et les salines, les couches tertiaires lacustres affectent des formes dont le croquis, fig. 14, pl. IE, peut donner une idée. Elles simulent parfaitement un vaste front bastionné avec ses saillants et ses courtines. Au delà du large fossé du corps de place, des massifs isolés représentent des ouvrages avancés, tels que des redans sim- ples, des demi-lunes, des ouvrages à cornes. Les arêtes des lignes de fortification et les talus sont tracés avec régularité, et les petits lits de calcaire solide ressemblent de loin à une véritable maçonnerie. C’est sur le plateau opposé que parcourt la route de Portel qu'eut lieu, dit-on, la fameuse bataille de Sigean en 736, et l’on peut croire que les accidents du sol que nous venons d’indiquer entrèrent dans les dispo- sitions stratégiques des armées de Charles-Martel et des Sarrasins. On est frappé au premier abord, dit M. Tournal (2), de la ressemblance de ce (1) Cette coquille semble avoir été prise par M. Matheron pour une variété du €. margaritaceum ou pour le C. cinctum, mais ce n’est ni l’un ni l’autre, et encore moins le €. Lamarckii (Potamides), Brong. (non id. Deshayes), si répandu dans les calcaires lacustres de l'Auvergne, du Cantal, la meulière supérieure du bassin de la Seine, etc. (2) Loc. cit., p. 319. (N. 2, p. 1.) GROUPE LACUSTRE. 279 dépôt gypseux des environs du Lac avec ceux de Malvezy. Le gypse y est sali par les mêmes marnes bleues avec lesquelles il alterne. Les couches supérieures, à partir‘ du dépôt quaternaire, sont des marnes jaunes avec des cristaux de gypse disséminés, et, vers le bas, des bancs régulièrement stratifiés de gypse cristallin, d'autant plus pur qu'on s’enfonce davantage. Des marnes vertes, feuilletées, véritable dusodyle, aussi flexible que des feuilles de papier, alternent avec les bancs gyp- seux. Elles renferment une prodigieuse quantité d’empreintes de petits poissons (Cyprinus Cuvieri) et des restes de plantes semblables à celles des calcaires schis- teux d’Armissan. La masse gypseuse, d'environ 12 à 13 mètres d'épaisseur, est sur- montée de calcaires lacustres. Toutes les couches sont ici sensiblement horizontales. M. Marcel de Serres (1) a depuis donné de ce gisement une description fort détaillée à laquelle nous renverrons Îe lecteur. La petite ville de Sigean est bâtie sur un plateau incliné au N. et composé de calcaires marneux et de marnes blanches, jaunâtres, grisâtres, ou tout à fait crayeuses, en couches régulières, d'épaisseur variable et coupées à pie, de manière à présenter, à l’ouest et au sud, de véritables murailles. Elies inclinent légèrement au N., comme la surface du plateau, et ont la plus grande analogie avec les marnes supérieures du calcaire grossier du bassin de la Seine. M. Noguës y a trouvé des fossiles parmi lesquels nous avons reconnu, autant que le permettait le mauvais état des échantillons, des Hélices voisines, des Æ. Coquandiana, Math., Micheliana, id., le Planorbis rotundatus, Brong., et une Lymnée qui ressemble à la L. afuvelensis, Math. Lorsqu'on suit au sud la route de Perpignan, on voit affleurer sous ces cou- ches, jusqu’au col des Mazels (pl. IE, fig. 12) : 1° Calcaire celluleux, blanc-jaunâtre et marnes lacustres formant un petit mon- ticule.. . 13 mètres, etaprès une seconde dépression que parcourt la route : 2° Poudingue à très gros fragments de calcaire noir, empâtés dans un grès CAC AIT MPTOSSIEL, MARAIS her = delle reel ee alone. © 0®,50 3° Calcaire marneux blanc, compacte... . . . . . c RE x ve EN UC « A° Calcaire jaunâtre se divisant en dalles ou en nee VE ERONR TOD Re 2 5° Marne et calcaires marneux friables, blanc-jaunâtre. . . . . . . . . .. li Au sommet de la colline, encore occupé par ces marnes, on trouve des blocs de calcaire noir compacte qui, avec les marnes, recouvrent transgressivement un ensemble de marnes grises ou noirâtres, feuilletées, constituant la butte du télégraphe située à droite de la route. Ces dernières non-seulement occupent aussi toute la vallée de la Murelle, mais encore forment les sept huitièmes de la colline isolée de (4) Actes de la Soc. linn. de-Bordeaux, t. VE, p. 207, n° 67, nov. 1836. — Dufrénoy a donné une coupe intitulée : Disposition de la pierre à plâtre dans le calaire d'eau douce à Sigean (Mém. Dour servir à une description géologique de La France, t. IX, pl. 2, fig. 2, 1836) ; mais le texte, p. 80-82, ne fait aucune mention des carrières du Lac. Il semble cependant que ce soit à ces dernières que se rapportent les détails un peu vagues donnés par ce savant. 280 FORMATION TERTIAIRE INFÉRIEURE. (N. 2, p. 72.) Saint-Martin, au sud-ouest, couronnée par un poudingue à très gros éléments de calcaire compacte gris-noir, avec Caprotines. Cette assise, sur laquelle est bâtie la chapelle, représenterait les blocs précédents du col des Mazels (voy. ci-après le dessin de la vallée de la Murelle, près de Roquefort). De ce point, élevé de 120 mètres, on peut remarquer que la route de Narbonne à Sigean parcourt une dépression longitudinale très régulière, en fond de bateau, dont les bords, formés par les collines tertiaires dont nous avons parlé, se relèvent à l'E. vers la mer, à l'O. contre les montagnes secondaires, et au S. pour porter la ville de Sigean, de sorte qu’on peut regarder le bassin lacustre comme fermé de ce côté. Le plateau de calcaire compacte du Fer-à-cheval ou de Courtal-Neuf, qui s'étend de Roquefort à la Nouvelle, au nord-est, et à la Palme au sud, n’en offre point de traces. Les dépôts de même ori- gine que nous allons trouver au delà, dans cette dernière direction, doivent donc être considérés comme ayant appartenu à un bassin différent, ou qui n’était en relation avec le précédent que vers l’est, dans l’espace qu’occupe actuellement la mer. Le noyau de roches secondaires qui forment la base ou le substratum de la presqu'île de Leucate supporte un massif tertiaire horizontal, occupant la presque totalité de sa surface quadrangulaire. Ce massif, coupé à pic du côté de l’ouest, montre de bas en haut à partir des calcaires ou des dolomies noires crétacées (pl. HE, fig. 12) : 1° Marnes sableuses jaunâtres. | 2° Lits de cailloux ou poudingue incohérent. 3° Marnes sableuses jaunes, roses où blanchâtres, ressemblant à celles de la colline de Gruissan. Cette partie du talus formée de couches meubles se désagrége et se modifie incessamment par l’action des agents atmosphériques. h° Calcaire marneux-blanc, grumeleux. 5" Calcaire marneux en plaquettes. l 6° Calcaire lacustre très celluleux, compacte, grisâtre ou blanchâtre, de 1 mètre à 1,50 d'épaisseur, avec de petites Paludines, des Planorbes, etc. Cette dernière couche, qui occupe le plateau, est inaltérable à lair; mais, par suite de la destruction facile des assises sous-jacentes, elle se brise sur ses bords et couvre de blocs éboulés les pentes et le pied de la colline. On en‘trouve jusque dans le dépôt argilo-sableux jaune de la plaine que traverse le chemin de fer. Les calcaires secondaires percent cette série dans le village même de Leucate (4). Mais autour, les buttes du moulin comme celles du vieux château, sont encore tertiaires, ainsi que les parties nord et est de la presqu'île. Nous regardons ces dépôts comme du même âge que ceux de Narbonne et de Sigean, et nous les plaçons par consé- quent dans la formation tertiaire inférieure et non au-dessus, avec les auteurs de la carte géologique de la France et M. Rolland du Roquan (2). Nous ne connaissons point d’ailleurs la position géologique des grandes Huitres que ce dernier signa- (1) Cette bourgade très ancienne, mentionnée par Pompouius Mela, doit, dit-on, son nom à la blanchenr des roches qui bordent son rivage. Aujourd’hui cette blancheur n’a rien de remarquable et ne justificrait guère cette étymologie. (2) Loc. cit., p. 106. (N: 2, p. 75.) GROUPE LACUSTRE. 281 lait sur ce point. Peut-être s’y trouvent-elles comme dans l'ile de Saint-Martin , et alors elles ne fourniraient aucun argument propre à déterminer l’âge des dépôts lacustres. Les roches secondaires bordent immédiatement les plages marécageuses de la Nouvelle et de la Palme, s'éloignant un peu à l’ouest de ce dernier point, au delà de la route de Perpignan pour la rejoindre avant les Cabanes de Fitou et se conti- nuer jusque près de Salses, où s'ouvre à l’ouest la grande plaine de Rivesaltes, dont nous avons parlé. “ . Poudingues des montagnes. Les couches tertiaires dont nous nous sommes occupé jusqu'ici sont partout en rapport avec les dépressions principales du sol actuel, et l’on conçoit que les géo- logues qui les ont étudiées n'aient pas hésité sur leur classement, au moins d'une manière générale; car d’un autre côté on a déjà vu, et nous y reviendrons encore tout à l’heure, que leur parallélisme de détail avait été longtemps méconnu. Mais il n’en est plus de même lorsqu'on pénètre dans les massifs montagneux des Cor- bières, où des dépôts faisant partie du groupe dont nous parlons ont été placés dans la formation crétacée, dans le groupe nummulitique et même dans le terrain ter- tiaire supérieur. s La position toute particulière de la plupart d'entre eux, leur distribution géogra- phique également remarquable, leurs caractères pétrographiques, leur puissance, les altitudes qu'ils atteignent parfois et l'absence de débris fossiles dans le plus grand nombre des cas, pouvaient, au premier abord, les faire réunir à des roches plus anciennes, surtout lorsqu'on croyait à une discordance complète entre le groupe lacustre, tel que nous le considérons, et le groupe nummulitique sous- jacent. On a déjà fait voir que, dans la vallée de l'Aude, cette prétendue discordance n'existait pas, et qu'il en était de même dans le bassin de Narbonne et de Sigean; on concevra donc facilement que les dépôts lacustres du même âge qui s'étaient formés aussi dans les parties aujourd'hui montagneuses du pays aient participé aux dislocations et aux soulèvements qui ont accidenté le groupe nummulitique qu'ils recouvrent. Eu donnant aux environs d’Albas une coupe de ce dernier, dont il faisait remar- quer la grande épaisseur, Tallavignes disait : « Ces couches régulièrement stra- tifiées, plongeant au N. sous un angle d'environ 2%, ne forment pas, lorsqu'on » les suit vers l’ouest, une bande continue au-dessus du terrain de transition, » comme l’indiquent les cartes. Un puissant dépôt tertiaire qui recouvre ces » couches au nord s'appuie directement sur ce dernier terrain entre Albas et la > Caunette, et constitue les hauts plateaux de la Camp (1). » Aux environs LA C4 2 (1) Bull, Soc. géol. de France, 2° sér., t. AV, p. 1132, pl. 7, fig. 1, 1847, SOC. GÉOL. — 2° SÉRIE, T, VI. — Mém. n° 2. 36 282 FORMATION TERTIAIRE INFÉRIEURE. (N- 2, p. 74.) d’Albas, ces roches marneuses, arénacées, rougetres, alternent avec des cal- caires d’eau douce, et, lorsqu'on les suit jusque vers les bords du Rabe, on voit sortir dessous les grès et les marnes à Nummulites. Une coupe N.,S., parallèle à celle-ci, faite en remontant la vallée de l'Orbieu située à l’ouest, nous facilitera l'explication de quelques points intermédiaires sur lesquels nous reviendrons ensuite. Lorsqu’en sortant de la Grasse on quitte la route de Narbonne à la Borde-Rouge, . au pied de la grande montée, pour prendre le chemin de Saint-Pierre-des-Champs, on traverse, l’espace d'environ 500 mètres, une série de grès terreux, schistoïdes, de marnes grises avec Nummulites, de marnes et de calcaires gris alternants, de pou- dingues à petits éléments, de calcaires roses, compactes, ou amygdalins et arénacés, de calcaires marneux jaunes, de marnes grises et jaunes, enfin de grès gris et rou- geûtres plongeant constamment au S.-E. et courant N.-E., S.-0. En descendant à Saint-Pierre, après le tournant de la route, on voit succéder aux précédentes deux assises de grès et de poudingue à noyaux de grosseur moyenne, séparées l’une de l’autre par une couche de marne jaune et reposant sur une marne rouge et grise; puis vient un grès calcarifère, noduleux, gris taché de jaune. Les grès grossiers pré- cédents, rougeûtres, sont composés de petits fragments de quartz, de calcaire, de grains rouges et de sable fin, reliés par un ciment de calcaire spathique, ou bien ils sont gris-verdâtre, à grain fin, uniforme, calcarifères, avec des points verts et rouges, cimentés aussi par du calcaire spathique. Les petits cailloux sont dissé- minéscà et là dans le grès bleuâtre, ou sont accumulés par places. Au delà de Saint-Pierre, les poudingues siliceux et des marnes grises el jaunes plongent à l'O. comme les grès gris et les poudingues de Joffres. Ce système de roches clastiques, qui commence ainsi sur les pentes de la petite vallée de Saint-Pierre, se développe de plus en plus à mesure qu’on s'avance au S., vers Saint-Martin- RU D'ARCHIAC 48 NAT. — N° XIII. — Poudingues des rives de l'Orbieu. des-Puits, et constitue, à tous les niveaux, d'énormes assises affleurant sur les pentes des collines. Elles sont séparées quelquefois par des banes de grès ou des (N: 2, p. 75.) 3 GROUPE LACGUSTRE. 283 marnes sableuses jaunes plus ou moins endurcies. Vers la partie inférieure les poudingues sont à très gros nodules de quartz, de calcaires noirs, de schistes gris et noirs, etc., reliés par un ciment de grès à gros grains. D’autres, fort solides, tenaces, très durs, à nodules avellanaires de calcaire compacte gris ou noir, à cassure esquilleuse, sont cimentés par un calcaire rosàtre, sub-cristallin, abondant. Le dessin ci-dessus montre la disposition de ces roches clastiques sur les bords de l'Orbieu. Au sud de Saint-Martin, des roches rouge lie de vin, panachées de jaune et de gris, alternent avec les poudingues dont l’inclinaison est presque toujours de 15 à 20° à l'O. Quelques bancs de grès, parfois de calcaire, altertent avec les pou- dingues jusqu’à Durfort, où des calcaires se redressent à l'approche du terrain de transition qui porte les ruines du château (pl. WE, fig. 21). A Termes, un cal- caire compacte rose se voit à la jonction des deux terrains, et, un peu plus loin, les poudingues sont en contact avec les schistes. * La montée de la Plairoles, située au nord de ce point, sur le chemin de Blanes, après qu'on a passé le ruisseau, n’a pas moins de 300 mètres de hauteur verticale, et elle est entièrement tracée sur les poudingues auxquels plusieurs bancs de grès, de calcaires et de marnes jaunes sont subordonnés. Au sommet, ou sur le plateau, est un calcaire gris clair, compacte, et un calcaire noduleux, brun, compacte, à cas- sure esquilleuse. La texture de ce dernier est amygdalaire ou concrétionnée. Les nodules, en forme de petits rognons à couches concentriques, sont de la gros- seur d’une noisette, d’une aveline ou d’une amande ordinaire, et réunis par un calcaire bréchoïde de même nature. Les poudingues continuent à régner ensuite dans toutes les collines de Blanes, de Rouire et de Parets. En général, ces roches si développées dans ce canton, composées soit de gros, soit de petits éléments, sont à ciment de calcaire grossier. Les galets sont des calcaires noirs dans lesquels on peut distinguer des traces de Caprotines, des grès rouges, des schistes gris, jaunes ou verdâtres et des quartz blancs ougris. Quoique infiniment atténués dans les couches des environs de Saint-Pierre, ces éléments sont les mêmes qu'à la Plairoles, où le système nous à paru atteindre sa plus grande épaisseur. Son altitude est aussi très forte sur ce dernier point, où elle est de 537 mètres. Le long de la rivière, à Durfort et à Saint-Martin, on le trouve à 224 et 200 mètres seulement. Sa super- position au groupe nummulitique ne nous paraît pas ici plus douteuse qu'à l’est, quoique les couches fossilifères ne semblent affleurer nulle part le long du terrain de transition. Si maintenant du plateau de Prativiel, sur la route de la Grasse à Tournissan, on se dirige vers Talairan, on voit également, aux calcaires jaunes à Nummalites succéder des grès grossiers ou poudingues à petits éléments, des marnes calcaires panachées, toujours concordantes avec les couches sous-jacentes. Le village de Talairan repose dessus, et les poudingues précédents règnent jusqu'à moitié chemin de Jonquières, où commencent des grès brunâtres, schistoïdes, marneux, tendres, avec des traces 284 FORMATION TERTIAIRE INFÉRIEURE. / (N: 2, p. 76.) charbonneuses et des fragments de coquilles très minces, probablement d’eau douce (Lymnées, Planorbes, etc.). Les grès à Nummulites ne tardent pas à repa- raître pour constituer le sommet de la colline de Jonquières. Ainsi, ce qu'avait dé- duit Tallavignes de sa coupe d’Albas à la vallée du Rabe, au-dessus de Coustougé, se trouve confirmé par l'examen que nous avons fait de la région située à l’ouest. Seulement le grand développement des poudingues y a fait disparaître tout affleure- ment de roches nummulitiques proprement dites. Lorsqu'on suit le chemin de la Grasse à Durfort, comme nous venons de le faire, on remarque à l’ouest, au-dessus de Meyronnes, une montagne fort élevée dont les couches se profilent nettement, et l’on peut reconnaître, même de loin, que sa partie supérieure est formée de roches analogues à celles sur lesquelles on se trouve, et ses parties movennes par des marnes noirâtres dont les talus sont plus réguliers. C'est la montagne de la Camp, qui atteint 693 et 734 mètres d'altitude sur son bord méridional. De même, lorsqu'on se rend de la Grasse à Pradelles, on voit dans cette direction, au-dessus d’Arquettes, de vastes talus de marnes foncées couronnées par les couches solides d’une crête arquée dominant la plaine, se diri- geant du S. au N. pour tourner ensuite à l’O., au-dessus de la vallée de Monze ou de la Bretonne ; c’est la montagne de la Malpère, élevée de 510 mètres et dont nous avons aussi parlé (antè, p. 223). La coupe qu'a donnée Tallavignes de la première de ces montagnes nous la fait voir composée, comme celles des environs d’Albas, de poudingues très puissants à sa partie supérieure, et par le groupe nummulitique dans ses parties moyennes el m- férieures. A l’est de l'Aude, dit M. Raulin (1), la mollasse atteint des altitudes con- sidérables et forme particulièrement, soit en totalité, soit dans les parties supérieures seulement, la crête de la Malpère qui s'étend de Cavanac à Pradelles et qui, en se recourbant par Arquettes et Agrefeil (Greffeil de la carte), se rattache à la crête encore plus élevée du plateau de la Camp... En montant de Domnove à la Malpère, on trouve d’abord les marnes noires avec quelques banes de grès calcaire brun, coquillier, à la partie supérieure et dépendant du groupe nummulitique. Au- dessus viennent des alternances d'argile, de sable argileux vert-jaunâtre et rouge violâtre avec des bancs de poudingues dont les cailloux de différentes grosseurs sont, pour la plupart, de calcaires compactes. Le sommet est encore occupé par un poudingue calcaire de 3 à 4 mètres d'épaisseur. Ainsi cette coupe verticale repro- duit la coupe horizontale de la Borde-Rouge à Saint-Martin, sauf un moindre déve- loppement des poudingues. onme on pouvait eu juger de la plaine qui contourne la Malpère à l’est et au nord, ses couches plongent toutes à l'O., vers l’intérieur, et l’inclinaison est en moyenne de 15°, suivant M. Raulin. Le vallon du Mas paraît être la ligne où les deux pentes opposées viennent se réunir, celle du nord courte, celle du sud plus (1) Sur l'âge des formations d’eau douce, ete. (Actes de l'Acad. se. de Bordeaux, p. 335, 1855 ?). (et D LT GROUPE LACUSTRE. 285 longue, à cause de la double crête intérieure de Ladern (4). « Entre Saint-Hilaire » et la vallée de l'Aude, un peu au nord de Limoux, continue le même géologue, la » crête beaucoup plus basse est formée par un grand ensemble d’argiles jaunes, » vertes, rouges, violettes, et de mollasse verdâtre ou grisâtre, dure, avec des pou- » dingues à cailloux de calcaire compacte, de granite et de quartzite atteignant la » grosseur de la tête. Plus au nord, au confluent du Lanquet, les poudingues dispa- » raissent, et le terrain est seulement formé par des argiles vertes ou violacées avec » des bancs de mollasse verdâtre plongeant plus ou moins fortement vers le N.-0.. » comme nous Pavons encore vu autour de Limoux. Depuis la vallée de l'Orbieu jusqu’à celle de l'Aude, l'inclinaison des divers escarpements étant généralement à PO. ou au N.-0. dans les principaux accidents du sol indiquerait l'existence de failles N.-S. où N.-E., S.-0. Le cirque en entonnoir de Fajac, que couronne la Malpère, constituerait un accident particulier assez remarquable. On à vu (ant, p. 262 que les poudingues étaient peu développés dans la crête nord de la Malpère. Ainsi l'examen de cette dernière région nous démontre que, malgré les grandes dislocations qu’ils ont éprouvées, les dépôts lacustres les plus éloignés du bassin de l'Aude, placés au milieu d’un pays très montagneux, en contact même avec le ter- rain de transition, se rattachent d’une manière certaine aux dépôts calcaréo-arénacés, ou mollasse lacustre proprement dite, de Carcassonne et de Limoux. Nous voyons en outre que partout ils ont participé aux accidents du groupe nummulitique sous- Jjacent, et que leur réunion au terrain tertiaire inférieur est ici parfaitement jus- tifiée comme dans les parties basses du pays. Il existe encore au centre des Corbières, et au delà du massif de transition de Monthoumet, un bassin très circonserit, entouré de montagnes, dans lequel on ne pénètre aujourd’hui que par des gorges profondes et étroites, et dont le fond, comme les premières pentes, présente un dépôt puissant que nous croyons devoir mettre en parallèle avec les roches clastiques que nous venons de décrire au nord du même massif. Ce petit bassin est celui de Tuchan. Si de ce bourg on se dirige au S.-E., vers la gorge étroite par laquelle le Verdouble passe dans la vallée de Vingrau, on ne tarde pas à rencontrer çà et là, s'élevant au-dessus des dépôts de transport de la plaine, des lambeaux de poudingue en couches généralement inclinées au S.-0. et formant de grandes écailles de chaque côté du petit Verdouble ou rivière du Mas-de-Ségure. Ces affleure- ments se multiplient à mesure qu'on avance vers le pied de la montagne, et ils finis- sent, en se relevant comme celle-ci, par s'appuyer contre les calcaires secondaires à la hauteur de la Mole et de Courtal. Hs paraissent se continuer encore au delà, et jusqu'a une assez grande hauteur, par des sables ferrugineux et des grès en gros fragments, (4) Tallavignes (loc. cit., p. 4133), en disant que le terrain tertiaire qui recouvre les couches numimnulitiques était composé de roches marnô-arénacées rougeûtres, alternant avec des calcaires d'eau douce, désignait les environs d’Albas, et non le plateau de la Camp, comme paraît le croire M. Rau- lin (p. 337). 286 FORMATION TERTIAIRE INFÉRIEURE. (N. 2, p. 78.) sans doute peu épais, et après lesquels les calcaires compactes, grisâtres, crétacés, for- ment seuls une immense nappe continue, inclinée au N.-N.-0. jusqu’à la crête qui borde Ja vallée de Vingrau. Si l’on suit le grand chemin de Tuchan à ce dernier village, chemin qui passe assez loin au nord du point dont nous venons de parler, on reconnaît que les poudingues précédents s'élèvent beaucoup plus haut. On les trouve jusque sur le bord du plateau secondaire, à plus de 150 mètres au-dessus de ceux de la plaine. Ils sont tout à fait incohérents et leurs éléments très volumineux. __ Toute la colline de Paziols qui ferme le bassin au sud est composée des mêmes poudingues plongeant de 15° à 18° au N., de sorte que sur les côtés est et sud du bassin ils se trouvent relevés, et jusqu’à une grande hauteur, contre les roches crétacées anciennes. Au nord et à l’ouest, le relèvement est moins prononcé, et vers le milieu de la plaine ces roches, quoique disloquées çà et là, sont aussi quelquefois horizontales. M. Noguès a observé au-dessous des couches argileuses renfermant des bois charbonnés qui passent au lignite. M. Farines (1) a depuis longtemps décrit un gisement de cette dernière substance, à l’ouest de Paziols, sur la rive doite du Verdouble, au lieu dit la rive de la Prade. Par suite d’un éboulement qui s'était produit en cet endroit, on a pu y observer une couche de marne argileuse de 2 mètres d'épaisseur, bleuâtre, rouge, jaune et noi- râtre, avec un grès gris-brunâtre. Le fer sulfuré y est très répandu ; au-dessous est un dépôt caillouteux, un calcaire tubulaire friable, blanc-jaunâtre, très léger, et une seconde assise de galets. Le tout repose sur les calcaires secondaires crétacés. Le lignite fibreux, noir, dur, susceptible de poli, ou brun, friable, à texture ligneuse très prononcée, est disséminé dans le grès et l'argile en fragments comme des tronçons d'arbres. À 300 ou 400 mètres de la Prade, sur le bord opposé du Verdouble, en creu- sant au nord-ouest du village un canal d'irrigation, on a encore atteint à 0",60 de profondeur, une marne argileuse, continuation de la précédentè, avec du lignite qui à pu être employé pour le chauffage et même pour la forge. Par ses divers caractères, le dépôt clastique qui occupe le fond du bassin de Tuchan, relevé assez haut sur les flancs des montagnes plus anciennes, semble donc pouvoir être mis en parallèle avec celui que nous avons décrit au nord du massif de transition, depuis Albas jusqu’à la Caunette. Il repose ici sur les calcaires secondaires dont il suit les inflexions, comme au nord sur les roches nummulitiques, et s'est accumulé au fond d'un bassin fermé et aux dépens des calcaires qui en constituaient les parois. Les grès et les poudingues disloqués et redressés plus tard ont aussi été partiellement dénudés. On conçoit, d’après cela, qu'ils n’ont point dû se trouver en relation avec des dépôts d’un âge bien déterminé, ce qui aura contribué à les faire regarder par les auteurs de la carte géologique de la France et par M. Rolland du Ro- quan comme de la formation tertiaire supérieure. Mais si l’on compare leurs carac- (1) Soc. philom. de Perpignan, 8 janv. 1834. — L'Institut, 19 avril 4835. — D'Archiac, Æis- toire des progrès de la géologie, 1, IX, p. 716, 1849. (N. 2, p. 79.) GROUPE LACUSTRE, 287 tères statigraphiques avec ceux des dépôts marins supérieurs d'Espira dans la vallée de l’'Agly, et des vallées de la Têtet du Tech, on sera porté à regarder le remplis- sage du bassin de Tuchan comme synchronique des poudingues du groupe ter- tiaire lacustre plus ancien que nous venons de décrire. Dans le dessin ci-dessous (n° x1v), pris du plateau de calcaire compacte secondaire qui domine la métairie du Rec-del-Brisquet, toutes les collines situées au second plan à gauche, dont l’une porte le village de Paziols, ainsi que les talus et le fond de la vallée, sont formés par les poudingues tertiaires ; la montagne secondaire de Tuchan occupe le dernier plan. N° XIV. — Vue du bassin de Tuchan. Nous terminerons l'exposé des caractères variés et de la distribution compliquée de ce groupe lacustre en rappelant que, si dans la portion du bassin moyen de l'Aude que nous avons considérée, aux environs de Limoux et de Carcassonne, les données paléontologiques sont presque nulles, il n’en est pas de même au nord et à l'ouest dans le prolongement de ces assises. Ainsi à Issel, au nord de Castelnaudary, ontété rencontrésles Lophiodon isselense, Cuy. , tapirotherium, id.., occitanicum, 14. etle Palæotherium isselanum, id.; à Castra, les Palæotherium magnum, Cux., minus, id. ; à Villeneuve-la-Comptal et Mas-Saintes-Puelles, près de Castelnaudary les Palæotherium medium et minus; le Lophiodon tapirotherium est cité dans le lignite de Lambrol, entre Chalabre et Limoux, et nous avons déjà mentionné le Lophiodon occitanicum à Conques au nord de Carcassonne. M. Noulet décrit aussi trente-cinq espèces de coquilles fluviatiles et terrestres dans ce groupe qu’il désigne par l'expression d’éocène supérieur, et qu’il n'hésite pas à mettre sur l'horizon des dépôts gypseux de la Pro- vence, et en particulier du bassin d'Aix comme de ceux du bassin de la Seine (4). Partout où nous avons observé les relations de ce système lacustre avec le groupe marin nummulitique sous-jacent, elles nous ont paru telles qu'il n’était pas possible de placer entre eux un soulèvement d'une importance réelle, et que le grand évé- nement qui à dérangé l'un ne s’est produit qu'après le dépôt de l'autre. Enfin les (1) Deuxième Mém. sur les coquilles foss. du terrain éocène supérieur, p. 25, 1854. 288 FORMATION TERTIAIRE INFÉRIEURE. (N: 2, p 80.) couches lacustres du bassin de Narbonne et de Sigean, redressées comme les roches secondaires sur lesquelles elles reposent directement, nous ont offert des caractères Pétrographiques, des gypses et trop de fossiles analogues avec ceux du Bassin d'Aix ou de celui de la Seine, pour que nous ne mettions pas le tout sur le même grand horizon, en le réunissant à la formation tertiaire inférieure, dont ik représenterait ainsi les derniers sédiments et la dernière faune (1). GROUPE NUMMULITIQUE. Nous avons déjà traité, d’une manière assez étendue (2), des recherches dont le groupe nummulitique du département de l'Aude avait été l'objet ; il serait donc superflu de revenir sur cette partie historique à laquelle nous renverrons les per- sonnes qu'elle pourrait intéresser. Nous rappellerons seulement ici la phrase par laquelle nous terminions ce sujet. «Jusqu'à présent, ce que l’on sait de la formation » nummulitique en dehors de la chaîne des Pyrénées et en Espagne, depuis les » Asturies jusqu’à Girone, ne perniet guère de considérer la discordance des deux » étages des Corbières (systèmes alaricien et ibérien de Tallavignes) que comme un » accident local, et le classement de l’un dans le terrain tertiaire inférieur, comme » celui de l'autre dans la craie, attend encore la sanction de faits plus nombreux et » mieux démontrés. » (1) M. Noulet (Bull. Soc. géol. de France, 2° sér.,t. XV, p. 227, 1857), ayant reconnu que plusieurs espèces de coquilles fluviatiles et terrestres provenant des couches lacustres du bassin de Narbonne et de Sigean étaient identiques avec celles des couches tertiaires moyennes situées plus à l’ouest, croit pouvoir en conclure que les unes et les autres sont du même âge. Mais on sait que parmi les fossiles ceux-ci ont une faible valeur, car ce sont, de toutes les formes de la nature organique, celles qui ont le moins varié avec le temps. Les paléontologistes qui ont le plus étudié cette question, entre autres Ed. For- bes, savent les difficultés qu'il y a à distinguer les coquilles d’eau douce jurassiques ou crétacées d'avec les espèces tertiaires et même actuelles, à bien plus forte raison lorsqu'il ne s’agit que des espèces de deux périodes qui se sont immédiatement succédé. Dans les conditions de la question, et pour les dépôts lacustres du midi de la France, nous concevons la persistance de quelques coquilles fluviatiles et terrestres des derniers dépôts tertiaires inférieurs pendant toute ou partie de la période suivante. D'ailleurs, l’ensemble des autres caractères des sédiments lacustres du bassin de Narbonne et de Sigean, sauf peut-être ceux de la flore, ne nous permet pas, quant à présent, de douter de leur syn- chronisme général. Nous pourrons seulement abandonner cette opinion, lorsque des études géolo- giques plus complètes que les nôtres auront démoatré la superposition de ce système lacustre à celui du grès de Carcassonne, ou bien lorsqu'on y aurà trouvé la faune tertiaire moyenne des mammifères de l’Ariége, de la Haute-Garonne, etc. (2) ist des progrès de la géol., t. MX, p. 33-53, 1850. — Nous profiterons cependant de cette occasion pour réparer une omission que nous avons commise alors : « Tout semble prouver, dit » M. Rolland du Roquan (Descript. des coquill's foss. de la famille des rudistes, ete., p. 31, in-4 » avec 8 pl., Carcassonne, 1841), que cêtte suite de marnes et de grès (avec Nummmulites, Crassatelles, » Neritina conoidea, Natica, Lucina, ete.) occupant les parties b: sses des Coibières, et qui sont évi- » demment superposés partout aux calcaires compactes et aux grès micacés ferrugineux, doivent être » éloignés du terrain crétacé pour être compris parmi les couches les plus anciennes des formations » eéOCENES. » NePyP:81) GROUPE NUMMULITIQUE. 289 Non-seulement le temps n’a pas apporté cette sanction que nous attendions alors, wais encore toutes les recherches faites depuis s'accordent pour faire voir que rien n’était moins fondé que ce prétendu classement proposé dans un petit coin de la France. Ainsi que nous l'avons dit plus tard et que nous avons essayé de le démon- trer (1), « le système alaricien ou étage nummulitique inférieur des Corbières avait » été mal limité stratigraphiquement, puisqu'il reposait sur une discordance ima- » ginaire; pétrographiquement, puisqu'il comprenait les roches les plus dissembla- » bles; zoologiquement, puisqu'il n’embrassait qu'une partie des couches caractérisées » par la présence des Nummulites, laissant l’autre dans l'étage supérieur, sans même » établir la différence des espèces de chacun (2). » Par la simple considération de la répartition stratigraphique et géographique des Nummulites, nous avons pu conclure ailleurs (3) que «si, comme il était permis dele supposer, la présence de la Nummulites planulata, d'accord avec d’autres données » paléontologiques, marquait un niveau bien déterminé, il s'ensuivrait que tous les » dépôts nummulitiques des Corbières et des Pyrénées seraient postérieurs aux » lignites du nord de la France, et à plus forte raison à la faune marine des sables » du Beauvoisis. » Or nos études ultérieures sont venues de tous points confirmer ces prévisions. Sur le versant nord des Pyrénées, disions-nous plus loin (4), dans le bassin de la Garonne supérieure et de l'Aude, il n'y a que 5 espèces de Nummulites. Aucune d’elles n'appartient aux trois premiers groupes que nous avons établis dans ce genre: une seule est du quatrième, et une fort petite, mais extrêmement abondante, est rangée dans le sixième (N. Leymeriei). Cette dernière, qui se montre à profusion dans le massif du mont-Perdu, paraît manquer au sud dans les provinces espagnoles comme sur le versant atlantique du nord-ouest des Pyrénées, de sorte que:ces trois régions nummulitiques (versant nord-ouest des Pyrénées, versant sud, et versant nord comprenant le bassin de la Garonne supérieure et de l'Aude), déjà bien explo- rées et qui se touchent géographiquement, n’en ont, sur un total de 26 espèces, que 4 qui leur soient communes (W. Lucasana, Ramondi, biaritzensis et planulata). Cette distribution semble prouver que les rivages de la mer pendant cette période devaient offrir des golfes plus ou ou moins profonds et peut-être tout à fait séparés, en rapport avec ces différences, et dont nous avons aussi indiqué l'existence pro- bable pour les deux extrémités du versant septentrional des Pyrénées (5). ÿ (1) L'Institut, 5 sept. 1855. — Soc. philom., séance du 14 juillet 1855. (2) Bull. Soc. géol. de France, 2° sér., t. XI, p. 175, 1856. (3) Descript. des anim. foss. du groupe nummulitique de l'Inde (Monographie des Nummulites, p. 80, in 4, Paris, 1853). (4) Jbid., p. 83. (5) Description des fossiles des environs de Bayonne (Méim. de la Soc. géol. de France, 2° sér., vol. II, p. 190, 1846. — Description des fossiles du groupe nummulitique des environs de Bayonne et de Dax (Ibid., vol. III, p. 299, 1850). SOG. GÉOL, — 2° SERIE, T. VL — ém. n° 2. 37 290 FORMATION TERTIAIRE INFÉRIEURE. (N. 2, p. 82.) Dans l’espace que comprend notre carte, le groupe nummulitique est restreint au bassin hydrographique de l'Aude proprement dit, puisque nous n’en connaissons encore aucune trace à l’est de la chaîne de Fontfroide, dans le bassin de Narbonne et de Sigean, non plus qu’au sud dans celui de l’Agly. Les massifs crétacés et de transition, sur ces deux côtés de notre quadrilatère, ont donc opposé aux dépôts de cette période une barrière qu’ils n’ont point franchie, et prouvent aussi qu’ils avaient été déjà relevés suivant certaines directions que des mouvements postérieurs ont également suivies. Par suite des nombreuses dislocations qui ont accidenté lesroches nummulitiques, leur distribution actuelle, ou plutôt celle de leurs affleurements, est, on le conçoit, fort irrégulière, et il suffira de jeter un coup d'œil sur la carte pour s’en faire une idée. Il en est de même à peu près de chacun des trois étages que nous avons cru pouvoir ‘ établir dans sa hauteur. Tous trois sont caractérisés par la présence des Nummu- lites, mais composés de roches très différentes. Les deux premiers se lient cependant par certaines analogies ; aussi ne traiterons-nous de leurs accidents stratigraphiques qu’en parlant du second. Le troisième occupe souvent à lui seul des étendues assez considérables, par suite de ses caractères pétrographiques particuliers. Nous avons essayé de les distinguer sur la carte par les modifications de la même teinte fonda- mentale, et nous les décrirons successivement en marchant du S.-0. au N.-E. ou en suivant le cours de l'Aude, d’abord au sud de cette rivière et ensuite au nord ou au pied de la Montagne-Noire. d Étage supérieur. L'étage nummulitique supérieur comprend des calcaires jaunes ou gris, des marnes, des grès brunâtres ou jaunâtres et des psammites. La coupe de la rive gauche de l'Aude, au-dessous de Montazels, en face de Couiza (pl. WE, fig. 4 et 7), montre, à partir des marnes bleues coquillières, une assise de marne grise schis- toïde, à laquelle succèdent vers l’ouest des psammites, des poudingues et des grès gris- jaunâtre. Ces roches forment les collines basses que longent la route d’Esperaza, et plus loin le chemin de Rouvenac. Si de Couiza on monte vers Rennes, on trouve, au- dessus des marnes ou calcaires marneux coquilliers à Trochocyathes, un calcaire gris- bleuâtre, compacte, puis des marnes argileuses grises, sans fossiles, des marnes panachées de jaune et de violet avec un banc de poudingue subordonné, des grès gris, Calcarifères, en lits minces, alternant avec des marnes grises et jaunes, un peu feuilletées, des marnes rouges, panachées de jaune, des marnes grises, des grès gris calcarifères, et encore un poudingue. Toutes ces couches, depuis les marnes à Nummulites du fond de la vallée, plongent au S. comme si elles devaient passer sous les calcaires qu’on atteint ensuite et qui plongent au contraire au N. (pl. HE, fig. 1), disposition sur laquelle nous aurons occasion de revenir. Les roches aré- (N. 2, p. 83.) GROUPE NUMMULITIQUE. 291 nacées et marneuses, gris-jaunâtre ou brunâtre, qui bordent la route de Quillan jusqu'a Pastabrac et au ruisseau de Couleurs, appartiennent probablement à ce premier étage. L’'inclinaison générale de tout le système au S. fait qu’il ne se montre plus au nord de Couiza. Aux environs de ce bourg, l'étage supérieur ne renferme que peu ou point de fossiles, et l’on n’y remarque pas cette accumulation de petites Nammulites qui le caractérise au nord du massif de transition. Dans la coupe prise au sud de Limoux, non loin de la chapelle de Brasse ( pl. HE, fig. 3), les assises 2 à 5 semblent le représenter. Il est ici placé entre la base de la mollasse lacustre et des marnes grises exploitées qui appartiendraient au second étage. La première assise est un grès gris à gros grains, puis viennent suc cessivement un grès gris à grain fin, très dur, un calcaire marneux gris avec des fossiles et la VMummulites Leymeriei, un calcaire grossier jaunâtre avec N. Ra- mondi, Leymeriei et biaritzensis. Le second étage en cet endroit ne se sépare pas nettement du premier. En s’avançant vers l'E. par la Caunette, celui-ci conserve ses caractères peu tranchés, sous le grand manteau de poudingues du groupe lacustre. Il s’en dégage au nord, entre Saint-Pierre et la Borde-Rouge, où il renferme, comme on l’a déjà vu, des calcaires arénacés, des grès gris ou jaunâtres, alternant avec des marnes qui précèdent les couches marneuses grises, fossilifères, du pied de la montée, près de la métairie, à la jonction des deux routes. Si de ce point on se dirige vers Tournissan, la rampe taillée dans la montagne coupe plusieurs fois, dans ces détours, les couches plus ou moins dérangées, dont la série normale est assez obscure. On rencontre successivement de bas en haut, et avec une inclinaison toujours au $. : 1° Calcaire marneux fossilifère, recouvert par un banc de grès de 2°,50 d'épaisseur. 2 Calcaire gris avec MNummulites Ramondi. : 3° Calcaire compacte, gris, bréchoïde. L° Calcaires marneux en lits minces, compactes, irréguliers, gris-jaunâtre ou bleuâtre. 5° Calcaire sableux avec N. planulata? semblable à celui des escarpements de Saint- Laurent. 6° Calcaire gris sans fossiles. 7° Calcaire gris et marnes alternant avec A. planulata? jusqu’au ponceau, puis au delà. … 8° Marne grise, marne bleue et grès gris, grossier. 9 Marne et calcaire marneux gris, schistoïde alternant. Operculines, N. biaritzensis, N. Ramondi, Pecten, Spondylus, Huîtres, etc. Cette assise paraît être la répétition des numéros 4 et 2. 10° Marne grise. 11° Grès calcaire gris foncé avec quelques fossiles, N. Ramondi var., N. biaritzensis, etc. 49° Calcaire avec Turritelles, bivalves, Operculines, etc. 13° Calcaire avec N. Ramondi, var., alternant avec des marnes grises qui finissent par dominer, puis des calcaires marneux schistoides. 4h° Marnes grises schistoïdes avec Orbitoïdes papyracées et Turritelles. ; 45° Marnes jaunes et grises avec quelques bancs solides subordonnés. 46° Grès marneux, schisteux gris, avec V. Ramondi. 47° Marnes jaunâtres, avec Turritelles. 292 FORMATION TERTIAIRE INFÉRIEURE. en. 2, p. 84.) 18° Calcaire jaune avec N. Leymeriei et Ramondi, et reparaissant trois ou quatre fois par suite de failles. 19° Marnes grises avec Turritelles et semblables aux précédentes. 20° Banc calcaire bleuâtre, avec Alvéolines. 24° Banc calcaire bleuâtre très dur au sommet de la côte. ”. Cette coupe compliquée renferme les éléments des deux premiers étages, mais il est difficile de faire exactement la part de chacun d’eux. Les fossiles suivants, qui proviennent de diverses assises, ne caractérisent pas d'horizons bien tranchés : Operculina canalifera, d’Arch., Nummulites biaritzensis, id., N. Leymeriei, id., N. Lucasana, Defr., N. Ramondi, id., var. d, Alveopora elegans, Mich. (Porites, id. Leym.)?? Trochocyathus, Serpula quadricarinata, Munst. in Leym., Panopæa elongata, Leym. (1), Lucina mutabihs, Lam., Venus, Cypricardia? Cardita, Ostrea lateralis, Nils., Leym., O. multicostata, Desh., Natica Rouault, d’Arch., N. indét., T'urritella ataciana, d'Orb.? T'. carinifera, Lam., T. Brauniana, d'Orb.? T'. imbrica- taria var. Lam., Voluta ambigqua, Lam., Fusus bulbiformis, Lam. var. b, etc. Le plateau qui domine Tournissan est formé par un calcaire jaune, marneux, dans lequel abondent la Nummulites Ramondi, var. a, c et d, l'Operculina canalifera, les Turritella ataciana ? et Brauniana, des moules de Cardium, ete. La plaine qui est au- dessous, ou au nord du village, est occupée par les marnes bleues du second étage, et l’on a vu que, lorsque de la grande route on se dirigeait vers Talairan, on ren- contrait aussi les calcaires jaunes à Nummulites du premier, qui ne tardaient pas à être recouverts par les marnes, les grès et les poudingues lacustres. La coupe de la butte du moulin de Jonquières à Coustouge est plus satisfaisante que la précédente et comprend les étages 1 et 2. Le village est bâti sur des grès gris, marneux où psammites à grain très fin, avec du mica argentin et la Nummu- lites Ramondi var. c. Cette roche constitue aussi la butte du moulin, et toute la série qui vient au-dessous plonge également à l’O. En descendant la colline, on trouve successivement : 4° Grès gris ou psammite, avec JV. Ramondi, var. e, . . . . . . . 5 mètres. 2e! Marne:grisé iterreuse: 14. MM NME IERNE AO 3° Calcäire gris: 05. ons M NPRMIENEN EE RRR dE AMOR) ho :Marnes Le 1,0 RUE TAUPE SERRE UE OR DR LE CREER 2 Bo ACalcaire: à 450 0 ee LPO LC ANIRUE GE MP M PEMLE 1, VRAIES ARE OMATRE: 21 2e 0 can OR CN CT dela -s, DO DIR DR SE JeNCalCure En é FPT 8° Marne bleue, avec Vummulites Hamondi, Defr. var. bete, N. biaritzensis, d’Arch.; N. Leymeriei, id. (rare) ; Orbitoides submedia , id.; Baguettes d’échinide ; Cardita, Trochus, Panopæa elongata, Leym.; Turritella imbricataria, Lam., var. d très voisine de la 7°. angulata, Sow.; T. hy- brida, Desh.; 7°. ataciana, d'Orb. ? ONCAICATE ETS CNE D © (1) Ce fossile, l’un des plus constants du second étage, devra être de nouveau décrit et figuré. N. 2, p. 85.) GROUPE NUMMULITIQUE. 293 10° Marne bleue, avec Z’urritella et les autres fossiles du n° 8 . . . . . A mètres. 11° Calcaire gris. . 2. to En THON LEA EU 42° Marne grise. . . . TM 13° Grès brunûtre avec Aie taire ou noirâtre, avec N Pom nd 2 44° Marne jaune, avec un banc de calcaire bleu subordonné. . . 6 15° Bancs de calcaire gris-bleuâtre, sub-compacte, solide, régulier, à cassure ” esquilleuse, avec N. biaritzensis. . . . - DATE 16° Calcaire gris terreux , en lits minces et marnes nes shoes Son nant des lits de coquilles calcinées, des lits de calcaire marneux avec N. biaritzensis et Ramondi. ht DT 17 Calcaire dur, gris-bleuâtre, schistoïde, avec N. “planltaet Lucina cor! Ps ica. 8 18° Marne grise schistoïde . . . . . 2 19° Calcaire marneux gris, à cassure ASE avec NW. Ron var. cet bia Y caire gris très marneux. . ‘. À 14 I LS RARE LA ENS EEE EE LR 3,50 20° Calcaire bleu, avec VNummulites Le Des LE NEL cdd © US Bal 21° Calcaire et marnes jaunes, avec Nummulites jusqu’au ii Fe la colline. . : 25 Il serait possible qu'il y eût vers le bas de cette coupe quelques répétitions de sa partie moyenne, par suite de glissements ou de failles restées inaperçues, à cause de la ressemblance de plusieurs de ces assises, et par la grande quantité de couches ter- reuses qui peuvent se confondre facilement sur la pente de la colline. Quoi qu’il en soit, on reconnait ici nettement la composition du premier étage formé des assises 1 à 7, tout le reste appartenant au second. Si de ce point on descend la vallée du Rabe, on voit constamment les couches plonger à l’O., et les calcaires marneux gris-jaunâtre, pétris de VN. Leymeriei, former la partie supérieure des pentes que suit le chemin de Parazols; les marnes grises et bleues du second étage occupent les parties moyennes et inférieures. Il en est de même entre Tournissan et Saint-Laurent, dont la route est tracée sur les calcaires jaunes marneux à Nummulites Leymeriei et Ramondi var. a et d. La vallée que parcourt la rivière, entre Espalays et la Métairie-Blanche, est aussi creusée dans les marnes du second étage, surmontées d'assises calcaires qui occupent des mamelons à sommets rocheux, au-dessus des métairies de Montplaisir, de Cabagnol et de Mont- migea. Ce sont toujours des calcaires jaunes ou grisâtres, à cassure terreuse, pétris de N. Ramondi var. c et Leymerier. Nous connaissons peu encore les caractères du premier étage sur les pentes des montagnes de la Camp et de la Malpère orientale, et, dans la partie est du mont- Alaric, les talus inférieurs autour de Fabrezan, de Fontcouverte, et de Moux à ‘Comigne, que nous y rapportons, paraissent être dépourvus de fossiles. A Comigne, l’assise de grès calcarifère, solide, gris-bleuâtre ou brunätre, si con- stante partout à la jonction de la mollasse et des marnes bleues, porte le village, et ces dernières lui succèdent. Nous la retrouvons derrière Capendu et dans la coupe du ravin de Saint-Jean au sud de Barbaira. Si de ce point on tourne la base de la montagne par Floure et Ramel en remontant la vallée de la Bretonne, on remarque, sur le côté droit-de celle-ci, un petit axe anticlinal et, du côté opposé, un relèvement 294 FORMATION TERTIAIRE INFÉRIEURE. (N- 2, p. 86.) complet du groupe nummulitique, qui plonge alors au N.-0. normalement par rap- port au mont-Alaric, dont il circonscrit toute la partie occidentale par un vaste escarpement semi-circulaire. On à déjà vu le premier étage nummulitique succéder à la mollasse dans la crête étroite qui sépare la vallée de la Mer-d’Eaux de celle de la Bretonne. Il est com- posé, dans le talus que parcourt la route et sur une hauteur de 15 mètres, de grès marneux gris-noirâtre, de calcaires impurs gris et de marnes feuilletées de même teinte. Des lits minces en plaquettes, solides, remplies de fossiles (Ostrea multicostata, Desh., Nummulites Ramondi var. d, Defr., N. Leymeriei, d’Arch., avec d’autres rhizo- podes et de petits bryozoaires), constituent une véritable lumachelle ; au-dessous vien- nent les marnes gris-bleuâtre du second étage, avec des lits minces de calcaire marneux subordonnés, et qui se continuent jusqu’au pont. Les couches qui plon- geaient d’abord au N.-0. inclinent ensuite à l’O., à la Magdeleine d’Albesse, puis au S. dans toute la partie nord de la Malpère, de la Métairie-Blanche à Comelles et au delà. Si après avoir passé Monze et traversé la Bretonne, on gravit la montagne au- dessus de la métairie de Carbonnac, on marche d’abord sur les marnes bleues, d’environ 80 à 90 mètres d'épaisseur, puis on atteint le premier étage composé de deux assises puissantes de roches solides, séparées par une couche plus marneuse et surmontées d’un grès grossier schistoïde, calcarifère, avec grains de quartz, des grains noirs, jaunes et rouges, de petits cailloux de calcaire compacte gris, de feldspath, des fragments d’Huîtres abondants, etc. (pl. V, fig. 3). Les deux assises précédentes sont composées : l’une d’un calcaire gris-bleuâtre, à grains fins, sub- cristallin, à cassure anguleuse, avec un mélange intime de sable siliceux assez abondant, de grains vert-foncé et d’un peu d'argile, l’autre d’une sorte de mollasse grise, calcarifère, à grain très fin, à cassure terreuse, un peu micacée, légèrement schistoïde et renfermant parfois des empreintes végétales indéterminables. L'épais- seur de l'étage ainsi constitué est de 40 à 45 mètres. Depuis la Métairie-Blanche jusqu’en face de Pradelles, sur plus de deux lieues de long, il forme, à mi-côte, au-dessus des pentes rapides, mais uniformes et régulières, des marnes bleues, 15 ou 16 caps, plus ou moins avancés, ressemblant assez bien à des saillants de bastion, et dont les flancs abrupts et rocheux dessinent nettement leurs profils entre les marnes sous-jacentes et les talus gazonnés de la mollasse, placés au-dessus à 200 ou 300 mètres en arrière. En face de Pradelles, le promontoire fort avancé montre des roches en dalles minces, très dures, gris-bleuâtre plus ou moins foncé, à grain très fin, uniforme, à cassure esquilleuse, composées, comme toutes celles qui occupent cette position, de calcaire, de sable quartzeux, de grain vert-foncé, d’un peu d’argile et d'oxyde de fer. Vers le bas, un banc de calcaire marneux gris-noirâtre, micacé, est rempli d'Ostrea mullicostata. Le massif que traverse la route de Pradelles à Montlaur est entièrement formé par les deux premiers étages nummulitiques, mais abaissés irrégulièrement et | (N. 2, p. 87.) GROUPE NUMMULITIQUE. 295 souvent disloqués. Tous les petits accidents qui en résultent, et qui ont d’ailleurs peu de reliefs, rendent difficile la distinction de-ces étages sur une carte; aussi avons-nous dû en faire abstraction et supposer la partie supérieure du plateau exclusivement occupée par le premier, et ses pentes par le second. Montlaur et ses moulins sont sur des buttes appartenant au premier dont les couches plongent au N.-0., comme dans toute cette partie de la vallée des Mattes, qui doit avoir une origine analogue à celle de la Bretonne. La métairie de Bellevue, située au nord, est également sur une partie relevée de l'étage supérieur, ainsi que celle de Roque- negade (pl. IE, fig. 15). Tout à fait en dehors du mont-Alaric et de ces appendices, au delà des collines de Lézignan, les deux premiers étages nummulitiques sont bien développés sur le bord de l'Aude et des deux côtés de la plaine qu’arrose la Joure. La coupe (pl. V, fig. 5) montre leur disposition dans les buttes qui s'élèvent à gauche de la route au delà de Sérame; la fig. 6 la représente, sur la rive opposée de l’Aude, entre Argens et l’écluse de Pech-Laurier. Le village d’Argens est bâti sur le plan très incliné formé par une roche calcarifère, tenace, bleuâtre, compacte ou à grain fin, très solide et à la surface des couches de laquelle on observe des traces parfaitement dessinées du mouvement des vagues sur une plage unie et sableuse, traces auxquelles les géologues anglais ont donné le nom de ripple marks. L'escarpement opposé, qui do- mine l’écluse, est couronné par une roche analogue que nous retrouvons presque partout à ce niveau. Elle est schistoïde en grand, gris de cendre ou brunâtre, dure, solide, à grain très fin, très uniforme, composée à peu près en parties égales de calcaire et de sable siliceux avec un peu d'argile et des grains vert-foncé ou noirs. Au-dessous viennent des calcaires marneux gris, des marnes schisteuses de même teinte, alternant avec des lits calcaires plus solides et reposant sur les marnes bleues. Ces caractères se répètent des deux côtés de la vallée de la Joure à l’ouest, comme dans les collines qui passent derrière Roubia à l’est. Ainsila coupe (pl. V, fig. 4) offre cette même série surmontée de bancs solides, durs, placés entre la mollasse et les marnes bleues à Turritelles, puis par exception plongeant au S., à la descente de . Saint-Étienne. Du côté opposé, au-dessous de la tour d’Escales, de même qu'aux environs de la Boriette, les relations stratigraphiques et les caractères des roches sont identiques. De Conilhac à Moux, le premier étage se voit à mi-côte, entre les marnes bleues qui forment le pied des talus et la mollasse les pentes supérieures des collines. Étage moyen. Le second étage, celui des marnes bleues à Turritelles et des calcaires gris mar- neuæ, est connu surtout par ses fossiles. Ce sont les marnes gris-bleuâtre de Couiza, d’Albas, de Coustouge, de la vallée de Rabe, de Ribaute, etc., dont M. Leymerie (1) (1) Mémoire sur le terrain à Nummulites des Corbières et de La Montagne-Noire (Mém. de la Soc. géol. de France, 2° sér., vol. I, p. 337, 1846, avec cartes et 5 pl. de fossiles). 296 FORMATION TERTIAIRE INFÉRIEURE. (NC 2, p. 88.) a particulièrement signalé les espèces. C'est un bon horizon géologique placé entre les roches précédentes assez variées et les suivantes qui le sont aussi. Sur la rive gauche de l'Aude, en face de Couiza, l’escarpement que nous avons | déjà cité présente cet étage composé comme il suit (pl. I, fig. 7): 4° Marnes bleues (Nummulites Leymeriei, d’Arch. et J. Haime, Operculina ammonca, Leym., ©. granulosa, id, Trochocyathus bilobatus, Miln. Edw. et J. Haime, T. lineatus, d., id., 7. sinuatus, id., id., Cardita minuta, Leym., C. vicinalis, id., Cytherea custugensis, id, Cypricardia, Eulima, Turritella ataciana, d'Orb.? (1), Cerithium subfragile, Rouault (2). 2 Grès marneux jaunâtre. 3° Marnes gris-bleuûtre, avec les fossiles du n° 1 4° Marne grise. 5° Calcaire bleu d’ardoise à grain très fin, dur et sans fossiles. 6° Calcaire marneux gris, schistoïde, passant à un grès grisâtre, marneux, également schistoïde. 7° Calcaire bleuâtre, avec Milliolites. 8° Calcaire marneux grisâtre feuilleté (Cardita, Nummulites, etc.). 9 Grès marneux jaunâtre. 40° Calcaire gris d’ardoise, compacte, très dur. 11° Calcaire gris, noduleux, schistoïde {Carditu, etc.) et quelques bancs de calcaire jaunâtre, avec Vummulites Ramondi var. c. ï Le reste de la coupe appartient au troisième étage, et toutes les couches, d’une centaine de mètres d'épaisseur, plongent régulièrement de 15° à 20° au S.-S.-0. M. Leyinerie (3) y signale, outre les espèces précédentes, mais sans préciser la couche : Lunulites punctatus, Leym., Poriteselegans, id.. Astrœa distans, id., Serpula gordialis, Munst. Leyin., S.quadricarinata, id., Crassatella scutellaria, Desh.? Chama gigas, Desh., Modiola cordata, Lam., Neritina Schmideliana, Chemn.(conoïdea, Lam.), T'urritella Dufrenoyi, Leym., T. imbricataria, Lam. (1°. ataciana, d'Orb.?), F'oluta ambiqua, Lam., Fusus bulbiformis, id., F. longævus, id. Enfin, parmi les fossiles que M. Noguès à recueillis dans cette localité, nous avons encore reconnu : Eschara, nov. Sp., Vummuliles Ramondi var. d., Natica acutella, Leym., N. brevispira, id. , Turbo, nov. sp., T'urritella, fragments voisins des 7. Duvalii, Rouault, et incerta, Desh., Cerithium, nov. sp., Murex calcitrapa, Lam. Sur la rive opposée, lorsqu'on prend le chemin qui monte à Rennes, les marnes bleues recouvrent les calcaires compactes gris-bleu de la rive droite de la Sals et (1) Les Turritelles nommées par Alc. d’Orbigny ataciana, corbarica, Brauniana, pyrenuica et Pailletteana (Prodrome, vol. If, p. 310), mais parmi lesquelles ses prédécesseurs avaient cru recon- naître les 7. Archimedis, imbricataria, carinfera, etc., ne pourront être admises au’après une étude particulière comparalive que nous ferons ultérieurement ; jusque-là nous ne pouvons les citer qu'avec doute. (2) Gette espèce, incomplétement décrite et figurée, faute de bons échantillons, paraît n'être qu'une variété minor de notre €. sublamellosum. (3) Loc. cit., p. 351, 1846. (N: 3, p. 89.) GROUPE NUMMULITIQUE. 297 plongent aussi au S. en présentant leurs tranches à la rivière. Ce sont ensuite : un banc de calcaire bleu à Miliolites (n° 7 de la coupe précédente), un calcaire bleu sans fossiles (n° 5), une marne grise et un grès gris marneux (n° 4), un calcaire marneux gris avec Trochocyathus sinuosus, var.? Turritella Dufrenoyi, Leym., T'. terebellata, Lam., ou corbarica, d’Orb. (n° 3); puis le calcaire gris compacte et les autres couches décrites comme appartenant.au premier étage. L'inclinaison, ainsi qu’on l’a dit, est au S. vers les calcaires compactes, ruiniformes, qui plus haut plongent au N. (pl. HE, fig. 1). Sur la rive droite de la Sals, l'étage qui nous occupe ne parait commencer qu’au moulin de Coustaussa, où les marnes grises, sableuses, friables, avec Trochocyathus sinuosus et d'autres espèces voisines, la Serpula quadricarinata? Munst., in Leym., la Turritella imbricataria, Lam., var. b, la T. ataciana, d'Orb.?, une Huître que nous retrouverons dans les marnes de Ribaute, etc., succèdent aux calcaires qui bordent la route de ce point à Coustaussa. Ces derniers alternent avec des marnes bleu-grisâtre, magnésiennes, renfermant là Lucina corbarica, var. quadrata, Leym. (L. Leymeriei, d'Orb.), des Milliolites, des Alvéolines, l'Orbitolites complanata, puis avec une marne noire, grumeleuse, friable, remplie de Cérites, de Turritelles, de Cytherea ritidula, Lam., var. tumida, marne qui appartient à la base de l'étage. Au- dessus des marnessableuses grises à Trochocyathes du moulin, on trouve. en redescen- dant vers Couiza, des calcaires bleus compactes, à grain très fin, en bancs épais, plon- geant comme les marnes de 12° à 45° au N.-0. Tout ce système de calcaire gris-bleu et de marnes, fossilifères ou non, qui règne jusqu'à l'entrée de Couiza, plongeant au N. ou au N.-0. sous un angle plus ou moins grand, incline au contraire au S. au confluent des deux rivières, le long du château. Les calcaires bordant la route for- ment alors un plan incliné qui, après le tournant au nord, repose sur la première assise des marnes rouges du troisième étage, analogues à celles de la rive gauche de l'Aude dont la coupe reproduit à peu pres celle-ci, sauf un moindre développe- ment des bancs de calcaire bleu. Le changement d’inclinaison des strates que nous venons d'indiquer jelte un peu d’obscurité dans la coupe de la rive droite de la Sals; mais dans les environs immé- diats de Couiza, les deux premiers étages nummulitiques plongent régulièrement au S.-S.-0., des deux côtés de la Sals comme des deux côtés de l'Aude. Quant à leur position relativement à la crête calcaire du groupe d’Alet qui règne au sud de ce point, nous chercherons à l'expliquer lorsque nous aurons décrit le système de couches dont elle fait parlie. Plus au nord, lorsqu'on descend la vallée de l'Aude, le relèvement continu jusqu’au terrain de transition d’Alet ne permet plus aucun affleurement de ces deux étages nummulitiques. A la sortie des gorges, vers la métairie de Pairouliès, les couches qui reposent sur le terrain de transition, à stratification discordante, plus inclinées que celles de ce dernier, appartiennent toutes au groupe nummulitique, celui d’Alet, si développé au sud du massif, manquant de ce côté. En remontant la rive gauche de l'Aude, on SOC. GÉOL. — 2° SÉRIE, T. VI. — Mém. n° 2. 38 298 FORMATION TERTIAIRE INFÉRIEURE. (N. 2, p. 90.) observe la série suivante (pl. HE, fig. 1, et 3), à partir du premier étage, avant qu'on atteigne la chapelle de Brasse : 4° Marnes grises exploitées à la tuilerie. 2 Calcaire compacte, gris-noir pétri d’Orbitoïdes. 3° Calcaire compacte, avec VNummulites biaritzensis. h° Calcaire noir, compacte, avec des fossiles indéterminables. 5° Calcaire gris marneux, noduleux, schistoïde. Après un abaissement du talus où les couches cessent d’être visibles, on voit les suivantes se relever : 6° Calcaire gris-noirâtre, avec Vummulites planulata. 7° Calcaire bleu d’ardoise, avec N. planulata, N. Ramondi, var. d, Lucina corbarica, Leym., Volutes, Turritelles, etc. 8° Marne gris-jaunâtre. 9° Calcaire marneux gris, avec !V. Ramondi. 10° Calcaire gris-noirâtre, avec N. Ramondi. 41° Calcaire semblable au précédent. 42° Marne grise et calcaire avec AN. planulata, en face de la métairie de Pairouliès, où la coupe cesse au tournant du ravin. Toute cette série nous paraît dépendre du deuxième étage. Le troisième se voit sur la rive opposée, au contact du terrain de transition, et nous y reviendrons plus loin (4). Dans une coupe prise plus à l’ouest, de Saint-Pierre-de-Clair au Pech de Braw, que nous.devons à M. Noguës, et que nous avons interprétée comme lindique la fig. 7, pl. V, on observe, vers le bas de l’étage, une marne remplie de fossiles, et particulièrement de Cérites. | Non loin de la métairie de Pairouliès, le même géologue a recueilli des fos- siles, qu’il nous à communiqués ; ce sont : Operculina ammonea, Leym., Trocho- cyathus sinuosus, Miln. Edw. et J. Haime, T. cornutus, J. Haime? Porites? 3 es- pèces d’Astrées, Lucina (moule voisin de la L. mulabilis, Lam., ou mieux de la L. Argus, Mellev.), Ostrea, espèce commune dans les marnes de Ribaute, et que nous désignerons sous le nom d’O. subcrepidula, ©. inscripta, d'Arch.? Cerithium acutum, Desh., var. C., substriatum, id.? C. nov. sp., voisime des C. matreola, var. Lam. et Blainvillei, Desh., C. nov. sp., voisin des C. cinctum et clavus, C. nov. sp., Fusus bulbiformis, Lam. var. a. Les marnes et les calcaires marneux à Nummulites se continuent vers l'E. par Arse etla Caunette, pour former au delà les pentes de la montagne de la Camp, au-dessus de Meyronnes, comme celles qui entourent à l’ouest les communes du Villar et d’Arquettes. Plus à l’est, elles disparaissent avec le premier’étage, sous les poudingues du groupe lacustre, pour ne plus se montrer qu’autour d’Albas. Les (4) M. Marcel de Serres, qui rapportait toutes ces couches nummulitiques à la formation crétacée, y cite des Ammonites, des Bélemnites et des Hippurites, mais sans doute par suite de quelque mélange fortuit de fossiles qu’il aura recueillis ailleurs (a). (a) Actes de la Soc. linn. de Bordeaux, t. X, p. 38, 1838. (2, p.194.) À GROUPE NUMMULITIQUE. 299 environs de la Caunette ont, suivant Tallavignes (1), la plus grande analogie avec ceux de ce dernier village. La direction et le plongement des couches sont les mêmes de part et d’autre; leur épaisseur seule est différente et peu considérable à l’ouest. On y remarque beaucoup de polypiers et d’ostracées, caractère qui, Joint à la grande élévation qu’elles atteignent, et à l’absence des dépôts nummulitiques proprement dits entre les deux points, fait présamer que ces localités étaient séparées ou constituaient deux parties distinctes du rivage de cette période. Elles n'étaient point unies par une ligne droite de côtes, et un promontoire devait s’avancer au nord pour les ‘isoler l’une de l’autre. Cette hypothèse serait peu justifiée par le grand déve- loppement qu'ont pris les poudingues lacustres, précisément vers le milieu de l'espace qui sépare ces deux points, et qui prouverait plutôt une dépression qu’un bombement du sol avant leur dépôt. D’après M. Leymerie (2), le village d’Albas, situé près de la limite du terrain de transition et du terrain tertiaire inférieur, est bâti sur des poudingues calcaires et des grès rouges, surmontés d’une puissante assise de grès marneux bigarré, où domi- nent les teintes jaunâtres. A la partie supérieure de l’escarpement est un calcaire marneux associé à des roches arénacées quartzeuses. Cet ensemble de couches qui plongent au N. sous un angle de 25° nous semble appartenir au groupe d’Alet. Mais au delà de cette colline, et lorsqu'on descend du côté de Fontjoncofize, il serait recouvert de marnes grises épaisses, de marnes argileuses rouges et de calcaires compactes. Suivant Tallavignes (3), des grès fossilifères terminent la série. Ce sont sans doute ceux du moulin de Jonquières. Le tout n'aurait pas moins de 400 mètres d'épaisseur. M. Leymerie cite dans les marnes grises les fossiles suivants : Nummu- lîtes biaritzensis, d'Arch. (atacicus, Leym.), Venericardia minuta, Leym., Cardium hippopœum. Desh., Weritina Schmideliana, Chemn. (conoïdea, Lam.), Natica acu- tella, Leym., N. albasiensis, id., Cerithium acutum, Desh., €. albasiense, Leym., C. Deshayesianum, id., C. fusiforme, id., C. involutum, Lam., C. propinquum, Desh., C. V’enei, Leym., F'olula ambigua, Lam., Fusus bulbiformis, id. Nous dou- tons beaucoup que toutes ces espèces appartiennent à la même couche et surtout que la Nummulites biaritzensis se rencontre avec la Weritina Schmideliana.…. : La coupe du moulin de Jonquières à Coustouge, donnée ci-dessus (p. 288), montre la composition du second étage, qui comprend les couches 8 à 21. Le chemin de Coustouge à Fontjoncouze suit constamment le fond d’une étroite vallée excavée dans les marnes et les calcaires marneux, plongeant au S.-S.-0. Les fossiles abondent particulièrement dans les talus à mi-côte, situés à l’est du village et le long du chemin tracé sur la tranche des couches. Nous y avons observé les espèces sui- (1) Bull. de la Soc. géol. de France, 2° série, t. IV, p. 1132, 1847. (2) Loc. cit., p. 350, 1846. — Nous devons dire qu’un observateur attentif, qui à examiné récemment cette localité, n’a pu reconnaître les faits signalés par M. Leymerie, mais nous en à indiqué d’autres sur lesquels nous reviendrons plus loin. (3) Loc. cit., p. 1132. 300 FORMATION TERTIAIRE INFÉRIEURE. (N. 2, p. 92.) vantes : Trochocyathus sinuosus, Miln. Edw. et J. Haime, T. nov. sp., Trochosmilia multisinuosa, 1d. (jeune?) Orbitolites complanata, Lam., Nummulites Ramondi, var. d, N. Leymeriei, d’Arch. et J. Haime. Schizaster, indét., Panopæa elongata, Leym., Lucina corbarica, 1d., var. quadrata (L. Leymeriei, d'Orb.), L. corbarica regularis, Leym. (L. Coquandiana, d'Orb.), V'enericardia minuta, Leym., F.? nov.sp., Nucula margaritacea Lam.,? 2 Cardium, voisins des GC. Picteti, d’Arch. et discors, Lam., Ostrea subcrepidula, nov. sp., Turritella ataciana, d'Orb.? M. Leymerie cite en outre, dans les marnes : Nummulites biaritzensis, d'Arch. (atacicus, Leym.), Oper- culina ammonea, Leym., Serpula quadricarinata, de Munst., Crassatella securis, Leym., Lucina sulcosa, id., Cytherea custugensis, id., C. rabica, 1d., Chama gigas, Desh., Vatica brevispira, Leym., Turritella Archimedi, Brong., T. imbricataria, Lam. (probablement la T. ataciana, d'Orb.), Terebellum fusiforme, Lam. M. Ley- merie signale encore les fossiles suivants, comme se trouvant dans des grès au-dessus des marnes bleues : Porites elegans, Leym., Lucina corbarica, id., les Cardita trigona, Leym., et vicinalis, 1d., et le Cardium hippopœæum, Desh. On s’étonnera sans doute de trouver la L. corbarica citée au-dessus des marnes, puisque son gisement habituel est précisément au-dessous, caractérisant la partie inférieure de l'étage, tandis que les Nummulites biaritzensis, Leymeriei, et Ramondi, var. d, les Turritelles etles Trochocyathes, ou les Trochosmilia, abondent surtout vers le haut. À trois kilomètres de Coustouge, près d’une petite maison, la seule que lon ren- contre avant Foutjoncouze, les calcaires et les marnes bleues à Turritelles courant au N.-E. sont coupés par le lit du ruisseau, et l'on voit leur succéder un calcaire gris-bleuâtre, fendillé, puis des marnes brunes, schisteuses, se délitant en petits fragments etcontenant des nodules endureis, avec T'erebratula subpunctata, Davids., et Belennites paæillosus, Schloth., c’est- aire des couches qui appartiennent au lias(1). Ainsi, en cetendroit, dE le troisième étage du groupe manque, mais encore tout le groupe d’Alet et la formation crétacée. Le groupe nummulitique qui, autour de Couiza, reposait sur le groupe tertiaire inférieur, au nord de Limoux, sur le ter- rain de transition, qui disparaît entre la Caunette et Albas, et recouvre dans cette dernière localité quelque représentant du groupe d’Alet, se trouve ici, à un kilo- mètre et demi de Fontjoncouze, en contact immédiat avec le lias, par la suppres- sion de tous les intermédiaires (2). Toute la vallée du Rabe, au-dessous de Coustouge, observée et décrite par Dufrénoy (3), est ouverte dans les marnes bleues ou blanchâtres, très fossilifères, (1) D’Archiac, Æistoire des progrès de la géologie, t. VX, p. 527, 1856. (2) Nous ne comprenons pas bien ce que M. Leymerie dit de Fontjoncouze (Loc. cit., p. 449), où il cite, outre les fossiles de Coustouge: Astræa contorta, Levm., À. distans, id., Lobophyllia Miche- liana, id., Natica acutella, i4., N. albasiensis, id, Cerithium acutum, Desh., Voluta ambiqua, Lam. On verra plus loin que les roches des environs immédiats de ce village n’appartiennent pas au groupe nummulitique. (3) Mém. pour servir à une descript. géol. de la France, K XI, p. 60, 1834. (N. 2, p. 95.) GROUPE NUMMULITIQUE. 301 qui plongent de 35° à l'O. C’est une vallée monoclinale, et les plans des couches cal- caires du premier étage forment les talus de droite comme les petits escarpements que longe ou que traverse çà et là le chemin qui suit les talus de gauche (4). M. Leymerie (2) cite, d’après M. Vène, au fond de la vallée du Rabe, un calcaire avec des Lymnées et des Planorbes qui, suivant lui, occuperait la place de l’assise lacustre inférieure au groupe nummulitique de la Montagne-Noire. De son côté, TFallavignes (3) dit que les strates nummulitiques reposent directement à Coustouge sur des couches d’eau douce dont l’âge n’est pas suffisamment déterminé, et qui constituent un plateau élevé entre ce village, Caragulhes et Dones. Sans nous rendre bien compte de la position de ces dépôts, que nous n’avons pas observés au fond de la vallée ni sur ses flancs, il semble évident d’abord qu'ils ne s'étendent pas à l’est d’une manière bien continue, puisque nous avons signalé le contact des marnes à Turritelles avec le lias, et, ensuite, qu'ils ne peuvent appartenir qu’au troisième étage nummulitique, ou mieux au groupe d’Alet sous-jacent qui viendrait affleurer en cet endroit par suite de quelque dislocation locale. Aux environs de Saint-Laurent nous signalerons les fossiles suivants que M. Noguès nous a envoyés : Mummulites biaritzensis, N. Ramondi, var. d, Trocho- cyathus lineatus, T. nov. sp., Cardita, Pecten, Spondylus, Natica brevispira, N. acu- lella, Turritella Braunii, d'Orb.?, T. imbricataria, var. an ataciana, d'Orb.?, Ceri- thium, nov. sp. On a vu quelle était la composition du second étage dans la coupe multiple de la montée de la Borde-Rouge, sur la route de la Grasse à Tournissan. La vallée située au nord de ce dernier village et qui passe au nord-est par la Tuilerie, Espalays et Fabrezan, montre partout les marnes sableuses, gris-bleuâtre, du second étage, au- dessous du terrain de transport quaternaire. En face d’Espalays, les marnés schis- teuses, solides, grises, avec des Nummulites, sont redressées et plongent de 40° à h5° au S. en s'appuyant contre des calcaires compactes du troisième étage. Les marnes grises ou gris-jaunâtre, très épaisses, avec ou sans fossiles, occupent au (1) Entre Saint-Laurent et Coustouge, de Boissy avait recueilli dans des calcaires marneux gris ef sableux de cet étage : MNummulites Leymeriei, d'Arch., Operculina ammonea, Leym., O0. canalifera, d’Arch., baguette dentée de Cidaris, commune partout, deux Serpules, dont une nouvelle, de forme pupoide, Panopæa elongata, Leym. (P. pyrenaica, d’'Oxrb.), Crassatella, peut-être la €, securis Leym., Corbula pisum, Sow., C. indét., Tellina (moule rappelant la 7. biangularis, Desh.), Venus custugensis, Leym.?, Cardita, forme de la C. angusticostata, Lam., €. nov. sp., Cardium, voisin du €. senustriatum, Desh., C. hippopæum, Desh.? (fragment), Mytilus, voisin du AZ. affinis, Sow., l'rigonocælia nov. sp., Ostrea multicostata, Desh. , Neritina Schmideliana (jeune), Bulla, Sralaria reticulata, Sow., Delphinula, Turbo Wegmanni, d'Arch.? 7. lapurdensis, id., Turritella funiculosa, Desh., Cerithium, Pleurotoma, Voluta uniplicata, Sow.? Terebellum Braunii, d'Orb.; F. fusi- forme, Lam. (2) Loc. cit., p. 349. La phrase de M. Leymerie nous laisse d’ailleurs beaucoup de doute sur l'endroit précis où se trouve ce calcaire lacusire. (G)PBoc actif. pr 1485. 302 FORMATION TERTIAIRE INFÉRIEURE. (N. 9, p. 4) delà le fond de la vallée dont les pentes supérieures appartiennent aux calcaires jaunes à Nummulites du premier. A la Métairie-Blanche, sur les bords du ruisseau qui se jette dans la Neille, les marnes sableuses, endurcies, gris-bleuâtre, schis- toïdes, sont remplies d’Operculines et de Nummulites. Dans toute cette partie du pays, les couches plongent au S.-0.; au delà règne l’étage supérieur. En remontant la vallée de lOrbieu par Saint-Martin, Grafan et Ribaute, on voit les mêmes marnes border constamment la rivière. Au-dessous de ce dernier village, bâti sur le prolongement des assises calcaires du cirque de la Grasse, les marnes bleues les recouvrent à stratification parfaitement concordante dans l'escarpement de la rivière. Plus bas, ces marnes alternent avec des bancs marneux solides, très réguliers, renfermant des lits d’'Huîtres (O. subcrepidula, n. sp.) à plusieurs niveaux, et des rognons endurcis, disséminés, qui contiennent probable- ment des Milliolites, Cardita voisine de la C. mutabilis, d’Arch., un Pecten rappe- lant les P. imbricatus., Desh., et Gravesi, d’Arch., etc. Ces couches, qui plongent au N., ont été dénudées ou coupées en biseau, et leur surface est aujourd’hui recouverte d’un épais dépôt quaternaire (pl. HE, fig. 14). Au gué de la rivière, les lits de calcaire marneux, minces, très réguliers, alternant avec des marnes foncées, reposent sur des marnes de même teinte, schisteuses, plongeant au N.-0. À 500 mètres plus bas, sur la rive droite, les strates inclinent du côté opposé ou au S.-E., et, vers le grand escarpement que longe au delà l’Orbieu, elles paraissent incliner aussi au S.-E. sous les calcaires de la montagne. Nous avons ici une disposition apparente comparable à celle de Couiza, car les calcaires contre lesquels s’appuie le grand talus de Grafan sont inférieurs à ceux qui recouvrent les marnes bleues au-dessous de Ribaute. Ces marnes et les calcaires qui les accompagnent forment les pentes de la mon- tagne de la Camp et les talus qui lui succèdent au nord par Arquettes et Domnove, au-dessous de la crête orientale de la Malpère, avec une inclinaison à l'O. Elles consti- tuent les collines qui s’étendent des métairies de la Bourdette et de Caudouat en cir- conscrivant le pied sud du mont-Alaric jusqu’à Montlaur. La coupe (fig. 45, pl. HI), passant par Roquenegade, fait voir que les calcaires à Nummulites, sur lesquels est bâtie cette métairie, et les marnes bleues qui, placées dessous, forment l'escarpement à l’ouest et le fond du vallon, sont parfaitement concordants entre eux comme avec les calcaires compactes, gris-blanchâtre, de l’escarpement opposé et de la voûte de la montagne. Il n'existe donc point de faille en cet endroit, comme on l'avait admis d’abord, ni de superposition discordante, comme l'avait cru ensuite Tallavignes qui, dans sa coupe (1), représente les marnes bleues horizontales venant buter contre les caicaires redressés. On remarque seulement ici une petite vallée intermédiaire, ce qui a lieu toutes les fois que des couches meubles relevées succèdent à des couches solides. Ainsi s’évanouit le principal argument sur lequel se fondait Tallavignes pour établir l'indépendance de ses systèmes alaricien et ibérien. Nous aurions compris qu’il (1) Zoc. cit., pl. HE, fig. 41. (sp) GROUPE NUMMULITIQUE. 303 eût étayé son opinion par des exemples choisis autour de Couiza ou de la Grasse, où il existe en effet des discordances locales plutôt que sur ce point où elle est imaginaire. On a vu que le village et les moulins de Montlaur reposaient sur le premier étage qui plonge au N.-0.; mais les talus inférieurs de la colline et toute la vallée des Mattes au sud appartiennent au second. Cette vallée peut être attribuée à une faille, et le plongement précédent mdiquerait que le massif qui la borde au sud, et que parcourt la route de la Grasse, doit en partie être rapporté au troisième. Par suite d’une autre brisure, les couches au-dessous de Roquenegade inclinent normalement par rapport au mont-Alaric. Le second étage forme un vaste escarpement semi-circulaire, ou mieux semi- elliptique, circonscrivant toute la partie occidentale dé cette dernière montagne. Les têtes des couches relevées de son côté, au-dessus de Pradelles, de Monze et au delà, bordent la rive gauche de la Bretonne, qui coule ainsi au fond d’un immense fossé de circonvaliation. Les strates composés de marnes bleues plongent partout en dehors du cirque, suivant la génératrice d’un cône très surbaissé, dont le sommet se trouverait dans le plan de l’axe de la montagne, mais passant fort au-dessus de sa partie la plus élevée. Ils s'appuient sur les calcaires du troisième étage, qui forment aussi un bombement ou plan incliné inférieur, sorte d’élément d’une por- tion de cône réduit, concentrique ou compris dans le précédent. Les fig. 17 et 18 (pl. 1), dont l’une donne la coupe de l’extrémité occidentale du mont-Alaric du N. auS., et l’autre celle de VE. à l’O., mettent en évidence cette disposition fort simple. Les coupes fig. 19 et 15, prises à Pradelles et à Roquenegade, perpendicu- lairement à l’axe de la montagne, complètent les éléments'de la moitié de l’ellipsoïde au sud. Enfin la coupe (fig. 3, pl. V) de Fontiès à la crête nord de la Malpère, montre les rapports du groupe lacustre ou de la mollasse avec le groupe nummuli- tique de cette même région. La vallée semi-elliptique que suit la Bretonne depuis Pradelles, ou même depuis son origine jusqu’à la métairie de Ramel, entre Barbaira et Floure, est à la fois une demi-vallée de soulèvement et de dénudation. Sa limite extérieure est formée par les deux premiers étages nummulitiques, sa limite intérieure par un bombement des calcaires blanc-grisâtre, compactes, du troisième. Du sommet de la crête septentrionale de la Malpère au point marqué par la cote L70, et d’où la vue embrasse un véritable panorama géologique, compris entre la Montagne-Noire au nord et le massif de Monthoumet au sud, on peut très bien juger de la stratification divergente des deux premiers étages nummulitiques dans toute cette partie occidentale et méridionale du mont-Alaric. Leurs couches, comme celles de la mollasse, plongent invariablement en dehors de l’ellipse. L’extrémité occidentale du massif, l’étroite et profonde vallée que parcourt le torrent de la Bretonne, et celte crête de la Malpère qui se recourbe au nord vers Montirat pour s’abaisser ensuite vers Fontiès, offrent un exemple de soulèvement très remarquable par sa symétrie et sa simplicité, quoique composé d'éléments divers, qui donnent au relief 504 FORMATION TERTIAIRE INFÉRIEURE. (N. 2, p. 96.) ceniral, comparé aux reliefs latéraux, des caractères assez différents. Si, de plus, les poudingues et les assises sous-jacentes de la mollasse se courbent au-dessus de la Bourdette, de manière à plonger ensuite à l'O. vers Fajac, il semble qu’it en est de même au-dessus de Molières, tandis que, dans le massif qui sépare ce village du. Mas, le plongement serait au S. par suite d’une brisure et d’un relèvement paral- lèle au cours de la Lanquette. Mais, quelle que soit la direction d’une coupe passant par Monze, on ne peut pas avoir une disposition semblable à celle qu’a donnée Dufrénoy (1), laquelle indique la vallée de la Bretonne comme une vallée complète de soulèvement. On ne pour- rait obtenir une coupe dans laquelle les couches plongeraient de chaque côté en sens inverse, qu’en la faisant passer parle prolongement de l’axe de la montagne, mais alors on aurait au milieu, non pas la vallée de la Bretonne, mais le bombement qui est la continuation de cet axe. Un coup d'œil jeté sur la carte suffit pour qu’on se rende compte de cette disposition que doivent encore éclairer les coupes 17 et 48; et si quelque chose doit étonner, c’est qu'une structure géologique aussi simple que celle da mont-Alaric, et que l’on pourrait même citer comme un exemple de soulèvement tout à fait élémentaire et normal, ait pu être l'objet de tant de méprises. On a vu que, par suite du plongement inverse ou au S. des couches du premier étage, les marnes bleues se trouvaient resserrées et comme pincées entre celui-ci et le troisième, le long du pied nord de la montagne à Barbaira, Comigne, Moux, etc. On les retrouve au delà, dans les parties basses du sol, autour de Foncouverte, suivant M. Leymerie (2), qui y cite T'eredo Tournali, Leym., Terebratula tenuistriata, id., 1. montolearensis, id., var., major, Ostrea gigantea, Desh., des pointes d’échinides et des dents de Squales. La vallée de Moux à Conilhac résulte d’une brisure à peu près parallèle à l'axe du mont-Alaric, et par suite de laquelle les collines comprises entre la route et Montbrun offrent une coupe semblable à celle que l’on a de Moux au pied du mont-Alarie. Ce mouvement a fait affleurer les marnes bleues le long des pentes, depuis un kilomètre à l'est de ce dernier village jusqu’à la colline que contourne la route au delà de Conilhec, et le plongement général est au N., tandis qu’à partir de cette colline jusqu’à Lézignan et au delà le pendage inverse ramène de ce côté, comme on l’a dit, toutes les couches argileuses et clastiques rouges et grises de la mollasse. On a déjà vu aussi quelle était la disposition générale du premier étage dans la vallée de la Joure, dont toutes les parties inférieures et le fond, entre Castelnau et Rou- bia (3), sont occupées par les marnes bleues, ainsi que l’avait observé M. Raulin (4) ; (4) Zoe. cit., pl. I, fig. 41. (2) Loc. cil., p. 347. (3) M. Leymerie (/oc. cit., p. 2h47) cite dans les marnes bleues de cette localité : Venus rubiensis, Leym., Terebratula Venei, id., 2! Defrancei, Brong., Neritina Schmideliana, Chemn., Ostrea lateralis, Nils., Serpula quadricarinata, Munst.? (h) Loc. cit., p. 334. (N: 5, p.97.) GROUPE NUMMULITIQUE. 305 mais on doit remarquer de plus que, sauf le plongement accidentel au S. de la descente de Saint-Étienne, celui au nord des collines, de Conilhac à Moux, et peut-être quelques autres, l’espace compris entre Lézignan, Homps, Roubia et Castelnau, présente, dans son ensemble, deux chaînes de collines parallèles, dont les strates nummulitiques et de la mollasse plongent en sens inverse, et qui sont séparées par une large dépression qu’occupent ces mêmes marnes bleues. Cette vallée, dont l'axe est à peu près indiqué par le cours de la Joure et par celui de l'Aude à l’est, est donc un exemple de vallée de soulèvement, comme le montre la fig. 4, pl. V. Étage inférieur (calcaires à Milliolites). L’étage inférieur du groupe nummulitique est essentiellement calcaire et supporte les marnes précédentes. Lorsqu’en descendant des Bains-de-Rennes on a passé le pont qui traverse la Sals, sur la route de Couiza, et que l'on suit la rive droite de ce cours d’eau, on ne tarde pas à voir les calcaires blancs et les couches rouges du groupe d’Alet qui plongent au N.-N.-0., suivis par des marnes et des calcaires marneux, bleuâtres, pénétrés de veines de gypse blanc, fibreux, qui ont été exploitées. Bien que cette succession soit un peu obscure, nous rapportons cette assise à la base du groupe qui nous occupe. Il en est de même de la colline qui porte le village de Coustaussa, composée de calcaires gris-bleuâtre, souvent remplis de Milliolites et alternant avec des marnes grises ou bleuâtres. Les bancs qui supportent le vieux manoir plongent de 45° au N. Ce sont des calcaires bleuâtres, très durs, à grain fin, qui reposent sur une grande assise de marnes schistoïdes grises. On à vu que nous placions dans le second étage les couches qui viennent au delà, lorsqu'on se rapproche du moulin; mais nous conservons quelques doutessur les vraiesrelations des calcaires de Coustaussa et des marnes gypseuses avec le groupe d’Alet sous- jacent, à cause de la grande dislocation qui a affecté ce dernier jusqu'à Campagne. La coupe (fig. 4, pl. HE) montre, sous les marnes et les calcaires à Nummu- lites des deux rives de l'Aude, immédiatement au-dessous de Couiza, une assise de marne rougeâtre, et, si l'on descend jusqu’au ruisseau du Luc, on voit ces marnes se relever au N., puis sortir de dessous, successivement et régulièrement, tout un ensemble de couches qui finit par s'appliquer près d’Alet contre le terrain de transition. La partie la plus élevée de ce grand ensemble appartient au troisième étage nummulitique, et tout le reste, jusqu’au fond de la vallée, constitue le groupe d’Alet. Les marnes rouges dont nous venons de parler, et une partie des couches qu’elles supportent, alteignent, en se relevant, les hauteurs qui dominent la rive gauche de l'Aude jusqu’en face du village du Luc, etmême se prolongent encore au delà et en arrière de la Pujade. Au-dessous viennent une assise puissante de grès jaunâtre et rougeâtre, des marnes sableuses, des calcaires marneux plus ou moins solides et des calcaires en plaquettes, remplis de Milliolites; le tout forme la base du groupe Soc. GÉOL. — 2° sérig, T. VI. — Mém. n° 2. 39 306 FORMATION TERTIAIRE INFÉRIEUREÉ. (N. 2, p. 98.) nummulitique dans ce canton, et repose sur une grande assise de marne rouge, dis- tincte de la précédente et appartenant au groupe sous-jacent. Sur la rive droite les couches se relèvent de mème, et le monticule qui domine le four à chaux du Luc, à la jonction de la route des Bains-de-Rennes, montre de bas en haut, à partir des sables et argiles rouges ou première assise du groupe d’Alet qui borde la route (pl. HE, fig. 5) : ' 4° Calcaire bleuâtre à Milliolites. 2 Calcaire gris-blanchâtre, compacte, à cassure presque unie ou à très petites esquilles, également avec Milliolites, ou bien gris-jaunâtre, marneux, à cassure terreuse. 3° Calcaire gris. ] &° Calcaire gris, compacte, formant le sommet de la butte. Au four à chaux, on remarque un calcaire brunâtre, grossier, à grains noirs et rouges, avec du calcaire spathique disséminé. Le grand escarpement que longe au sud la route de Serres est constitué de même par le groupe d’Alet que couronnent les calcaires à Milliolites du troisième étage. Plus au nord, ceux-ci ne se montrent guère que par lambeaux et cessent bientôt tout à fait. Dans les collines de la rive gauche, au contraire, on peut les suivre, occu- pant les points les plus élevés du plateau qui domine les métairies de Coussergue, de la Caune et de Brau, au nord-ouest d’Alet. Ils paraissent y atteindre une altitude de 655 mètres, qui serait la plus considérable que présentent le groupe nummulitique et même le terrain tertiaire dans toute cette région. Sur ce plateau aride et complé- tement nu sont des calcaires gris-blanchâtre, à grain fin, sub-compactes, un peu schistoïdes où en plaquettes, durs, pénétrés de veinules de calcaire spathique et remplis de Milliolites, puis au-dessous des calcaires jaunes, compactes, également avec Milholites. Nous avons dû présenter d’abord la coupe des bords de l’Aude, entre Couiza et Alet, pour bien préciser les caractères et la position du troisième étage entre les marnes à Turritelles, à Trochocyathes et à Nummulites, et la première assise rouge du groupe d’Alet; mais, avant de le suivre au delà du massif de transition, nous reviendrons un instant sur nos pas pour examiner quelques points au sud de Couiza, où cet étage se montre encore. On a vu qu’en partant de ce bourg et suivant le chemin qui monte à Rennes, on traversait les marnes et les calcaires marneux du second étage, puis des couches rapportées au premier, le tout adossé à des calcaires blancs redressés et plongeant en sens inverse. Si l’on dépasse ceux-ci en continuant à s'élever, on recoupe un ensemble de couches rouges, sableuses et marneuses, avec des poudingues, plongeant comme ces calcaires et appartenant aussi au groupe d’Alet. Mais, le massif isolé de toutes parts qui porte ensuite le village de Rennes, dépend d’un système tout dif- férent, et qui n’est autre que le troisième étage nummulitique recouvrant ici les marnes grises gypsifères, supportées à leur tour par les premières marnes rouges du groupe tertiaire inférieur. CN: 2, p. 99.) GROUPE NUMMULITIQUE. 307 Ce massif est composé, sur une épaisseur de 40 à 12 mètres, de calcaires gris, à cassure inégale ou raboteuse, spathiques, avec des grains de quartz, remplis de Milliolites, et d’autres débris de coquilles indéterminables, puis de calcaires ana- logues aux précédents, mais bleuâtres à l’intérieur; enfin, de calcaires grisûtres, celluleux, et dont les parois des cavités sont tapissées de petits cristaux de chaux carbonatée. Ces bancs, qui, sur plusieurs faces, simulent très bien une vieille muraille, inclinent faiblement au N., et c’est aussi de ce côté, au-dessous du château, que se trouve une fontaine. Du côté du sud, les assises forment des gradins plus ou moins étendus dont la surface est cultivée. Entre ce point et la rive droite de l’Aude, nous ne connaissons pas de représen- tants de cet étage, si ce n’est peut-être dans les montagnes à l’ouest de Saint-Ferréol; mais plus loin, au sud-ouest, la route de Quillan à Bellesta coupe, en face de Brenac, une série de couches tertiaires, s'appuyant presque horizontalement au sud contre les calcaires redressés de la craie inférieure, et à l’est contre ceux de la crête de Quillan, ou du col de la route. On voit de haut en bas : 4° Calcaires à Milliolites, compactes, gris, à cassure esquilleuse. 2° Marne rouge et calcaires alternants. 3° Calcaire blanc-jaunâtre ou grisâtre, compacte, sans fossiles. L° Calcaire dur en rognons. 5° Calcaire marneux, sableux, grisâtre, en gros rognons alternants et entourés de marnes schistoïdes. 6° Calcaire gris avec grains de sable. 7° Marne rouge lie de vin clair. 8° Calcaire gris noduleux, en bancs épais, formant le reste de l’escarpement, passant à une lumachelle grossière, à un poudingue à petits nodules, et enfin à un grès. 9° Marne grise, Au-dessous viennent la première assise des argiles rouges et les calcaires com- pactes du groupe d’Alet. On trouve aussi dans le voisinage un calcaire marneux gris de fumée, tendre, schistoïde, avec Milliolites, Lucines, d’autres coquilles et des polypiers, un calcaire compacte, gris-rosâtre, avec Milliolites, et un calcaire gris Mmarneux, à cassure terreuse, avec des coquilles d'apparence lacustre (Palu- dines ?). Reprenons actuellement la description du troisième étage à l'endroit où l’Aude, sortant du terrain de transition, entre dans la plaine de Limoux. Sur sa rive droite, non loin de la métairie de Pairouliès, les roches de transition, plongeant de 35° au N., sont recouvertes, à stratification discordante, par des couches ter- tiaires inclinées de 55° vers le même point (pi. IE, fig. 4). Ce sont des grès et des calcaires compactes, alternant avec des marnes, des marnes grises schistoïdes, des calcaires gris marneux, noduleux, des calcaires gris-noirâtre, compactes, des calcaires lumachelles avec ostracées, des calcaires gris-bleu avec Milliolites et d’autres calcaires assez épais, également avec Milliolites et Alvéolines. Jusqu'ici le 308 FORMATION TERTIAIRE INFÉRIEURE. (N. 2, p. 400.) plongement est constant et se maintient de 55°; mais les marnes et les calcaires marneux du second étage, qui viennent ensuite, sont beaucoup moins inclinés et se raccordent parfaitement avec la mollasse qui leur succède. Pour avoir la série complète du groupe en ce point, il faut, aux détails ci-dessus, ajouter ceux que nous avons donnés d’après le profil de la rive gauche, où les couches se continuent jusque sur le territoire de Cornanel. La coupe fig. 7, pl. V, de Saint-Pierre de Clair, au Pech-de-Brau, que nous avons déjà citée, d’après M. Noguès, montre bien aussi la position du troisième étage entre le second et le groupe d’Alet. Le troisième étage accompagne sans doute la bande nummulitique étroite qui longe le terrain de transition vers Belcastel et la Caunette; mais au delà nous ne le connaissons pas dans cette direction, où il doit disparaître avec |les autres dépôts nummulitiques sous les poudingues du groupe supérieur lacustre. Dans les montagnes de la Grasse, nous avons rarement pu observer cet étage, Cependant on doit y rapporter évidemment les calcaires jaunes à Milliolites, qui portent le village de Ribaute (pl. HE, fig. 44), et les couches qui viennent afileurer ensuite dans le lit de la rivière lorsqu'on la remonte jusqu’au banc de calcaire marneux noirâtre avec Huîtres, Cérites, Pleurotomes, etc., anciennement exploité, à peu de distance de cet endroit, sous le nom de marbre de Ribaute (4). Ces couches sont la continuation de celles qui, par leur relèvement au sud-est, forment le tiers supé- rieur du cirque de la Grasse, dont nous donnerons la coupe ci-après. Dufrénoy (2) avait bien remarqué la présence des Milliolites dans ce même escarpement, mais il avait pris pour des Nummulites une petite espèce d’Orbitolite propre à ce niveau, et que nous retrouverons ailleurs. C’est encore au-dessous de la tour de l’ancien moulin qui domine le sentier de Ribaute, qu’on observe un banc de calcaire marneux rempli de ces petits corps operculiformes, cornés, que M. Viquesnel a rencontrés dans uue roche semblable, associés avec des Paludines, près de Baloukkeuï, également à la base du groupe nummulitique de la Turquie, et que M. Deshayes a décrits sous le nom de V’iquesnelia lenticularis (3). Sur les bords du Rabe, au-dessous du pont de Saint-Laurent, un psammite gris-jaunâtre, terreux, avec MWerita Schmideliana, et Nummulites planulata, semble appartenir au troisième étage, comme les roches contre lesquelles s'appuient les marnes bleues d’Espalays au nord-est. Mais c’est dans la montagne d’Alaric qu’il prend le plus de développement, des caractères plus nettement tranchés et une véritable importance dans l’orographie du pays. Ses calcaires compactes, très durs, blanc-grisâtre, plus ou moins foncés ou clairs, presque inaltérables parles agents atmosphériques, forment tout le revêtement (1) La coupe de ces coquilles ayant été prise pour des Paludines, la couche avait été regardée comme d’origine lacustre (Dufrénoy, Mém. pour servir à une descript. géol. de la France, vol. KE, p. 57, 1834). M. Noguès nous a fait remarquer, dans le cabinet de minéralogie de l’école de Sorèze, une fort belle table faite avec cette roche. j (2) Jbid., p. 60. (3) Magasin de zoologie de Guérin, 1856. (M: 2, p. 101.) GROUPE NUMMULITIQUE. 309 extérieur de la voûte, là où ce revêtement existe dans son intégrité. Partout le troisième étage succède immédiatement aux marnes bleues qui circonscrivent la montagne par des escarpements tournés de son côté dans la partie occidentale, et par une dépression sur presque tout le reste de son pourtour. Dans la vue déjà donnée (p. 265-57) de l'extrémité orientale du mont-Alaric, prise au-dessous des moulins de Moux, on remarque qu’au delà du rideau du second plan formé par les couches de la mollasse et les deux premiers étages, la montagne se profile suivant deux massifs distincts, séparés par une échancrure assez pro- fonde. Lorsqu'on s’avance ensuite vers son pied, on observe à droite une masse peu considérable qui succède aux marues bleues. Les bancs qui la composent, exploi- tés derrière le four à chaux qui se trouve au delà du ruisseau, sont les seuls qui nous aient paru dépendre de l’étage nummulitique inférieur, tout le reste de cette grande coupe devant être rangé dans le groupe d’Alet. On voit en cet endroit dix ou douze bancs assez réguliers, d’une épaisseur totale de 6 mètres: ce sont des cal- caires gris, compactes, avec Milliolites, Nummulites Lucasana, Alveolina sphærotdea, Orbitolites alaricensis, nov. sp., etc., des calcaires gris de fumée, compactes, presque exclusivement composés de Milliolites et de nombreuses pinces de crustacés, puis vers le bas un calcaire sableux, micacé, friable, un calcaire blanc quartzifère, à grain fin, grenu, en partie spathique, un grès quarizeux dur, un sable blanc de 10 mètres, et enfin un calcaire compacte, gris-blanchâtre, sub-cristallin, sans fossiles. Ces assises semblent faire partie d’un lambeau isolé, par suite du soulèvement et des dislocations du flanc de la montagne de ce côté. Le long de sa pente nord ce même étage en suit le pied et constitue la plus grande partie de son revêtement. Les marnes bleues reposent, à Comigne, sur une série de calcaires de ce troi- sième étage et que l’on peut étudier en suivant le chemin nouvellement tracé dans les brisures ou ravins de la montagne. On y voit, à partir des marnes du vallon, et en descendant dans les couches : 4° Calcaire blanchâtre, noduleux, compacte, dur, à structure concrétionnée. 2° Calcaire blanchâtre, compacte. 3° Calcaire gris, marneux, schistoïde, avec Nummulites, Orbitoïdes, etc. h° Calcaire concrétionné semblable au n° 1. 5° Marnes grises, avec Zerebratula tenuistriata, Leym., T. Venei, id., T. Sarra- cena, Tallav., Teredo Tournali, Leym., Cancer,’ ind., et quelques rares Nummulites Ramondi, var. d. et Leymeriei. 6° Calcaire blanc, compacte, avec Ostrea gigantea, Brand. 7° Calcaire blanchâtre, rempli de petites Huîtres et de Nummulites, 8° Calcaire gris, marneux, sub-compacte, avec JMummulites Ramondi, var. Orbitoïdes, etc. 9° Calcaire compacte, blanc grisâtre, avec de nombreux échinides peu détermi- nables. 10° Calcaires divers, blanchâtres. 11° Couches à Alvéolines et Afilliolites. 3° Étage, environ 45 mètres. 310 FORMATION TERTIAIRE INFÉRIEURE. (N. 2, p. 102.) 12° Calcaire gris-jaunâtre, marneux, renfermant des bancs scoriacés, celluleux, ferrugineux, d’un aspect dolomitique, sans présenter 8 cependant de quantité bien appréciable de magnésie. . . . 140 mètres. 2, (11.488 Marnes jaunes: frite ON RENE AL NEO EME 6 Tv cdi HAN : = 44° Grès gris, calcarifère, à grain fin. A 45° Marne rouge lie devint SR A TR co, f 16° Grès quartzeux roue en SN NS Ru 2 47° Calcaire compacte enSMOncE NE TR RENE al 18° Marnes blanchâtres et calcaires alternants. . . . . . . 83à10 C'est l’assise la plus basse mise à découvert dans les escarpements du ravin que parcourt la route. Dans celui de la Combe-Saint-Jean, entre Capendu et Barbaira, on voit suc- céder aux marnes bleues, qui occupent aussi le fond du fossé longitudinal dont nous avons parlé, des bancs calcaires solides plongeant au N. (pl. HE, fig. 46). Ce sont: 4° Calcaire gris terreux, schistoïde, avec Nummulites Leymeriei ? et peut- être placentula, Operculina canalifera, c’est-à-dire des espèces que jusqu'ici nous avions trouvées au-dessus des marnes bleues . . . . 2 mètres. 2° Calcaire gris, compacte ou sub-cristallin. . . . . . . . . . . 1 » Calcairegris-blanchâtre, sub-cristallin, avec quelques Nummulites Ramondi. 1,50 &° Calcaire gris-foncé, noduleux, en partie concrétionné, à cassure terreuse, avec quelques parties spathiques, quelquefois schistoïdes, avec N. ARa- monaa es cs Calcaire gris-blanchâtre, sub-compacte, schistoïde, avec N. Ramondi, var . d. Alveolina sphæroïdea, Cart., Ostrea gigantea, Neritina Schmide- Liane A NEA MONO PORN. NP RE ST 0 6° Calcaire gris foncé, compacte, avec Huîtres. . . . . . . . . . 15 1° Argile grise et rose, appartenant au noyau sur lequel se recourbent les assises précédentes ou au groupe d’Alet, 0 on Ainsi le troisième étage, dont la position ne peut laisser ici aucune incertitude, n’a pas plus de 45 à 50 mètres d'épaisseur, et cependant c’est à lui que toute la mon- tagne doit son caractère particulier. Mais nous verrons aussi plus loin que ce n’est pas tant à la puissance des assises que les montagnes doivent leur aspect, qu'aux caractères pétrographiques constants qu’elles affectent sur de grandes étendues. Si l’on contourne la partie occidentale du mont-Alaric, on voit, après la brisure oblique des Paillassés, où viennent au jour les marnes rouges, les grès et les pou- dingues du groupe d’Alet, les calcaires précédents continuer à former le vaste plan incliné à l'O. que longe la route de Monze (pl. IE, fig. 17, 18). Nous y avons observé les fossiles suivants : T'erebratula montolearensis, Leym., un Echinolampas voisin de VE. subsimilis, d'Arch. (indiqué par M. Cotteau comme étant l'E. ellipsoidalis, d’Arch.), le Periaster Orbignyanus, Cott., un Brissopsis, la Nummulites planulata ? lOperculina ammonea dans un calcaire gris très compacte avec un Schizaster ou UN. 8, p. 105.) GROUPE NUMMULITIQUE. 311 l'Hemiaster Alarici, Tallav., qui se trouvait aussi dans la même roche à la Combe- Saint-Jean. Les escarpements rocheux de la Bretonne, le long de la route de Monze, sont formés par les calcaires blanchâtres et par des calcaires marneux, terreux, concré- tionnés ou schistoïdes, semblables à ceux qui succèdent aux marnes bleues dans la coupe de Comigne. Le lit du torrent, complétement à sec dès le commencement de juin, est un calcaire blanchâtre, compacte, à petites concrétions comme les pré- cédents. La position relative et les caractères de ces couches avaient été d’ailleurs bien saisis par Dufrénoy (4), qui avait parfaitement reconnu les rapports de tout le système en cet endroit, c’est-à-dire des trois étages du groupe dont nous parlons. « La présence des Nummulites dans ces couches supérieures (celles du premier » étage qui couronne les marnes bleues) établit, dit-il (p. 55), une liaison intime » entre elles et les calcaires compactes que nous avons indiqués à la partie infé- » rieure de cette coupe (ceux du troisième étage). » Ces considérations ont été étendues, avec non moins de justesse, aux rapports de ces diverses assises avec celles des environs de la Grasse et de Tournissan à Saint-Laurent (2), Le savant auteur n’a vu, Comme nous, dans les relations anormales qu’on observe parfois entre les couches nummulitiques et les calcaires ou autres roches du groupe d’Alet de cette contrée, que le résultat de dislocations locales, plus ou moins étendues, et non d’un phénomène général qui aurait modifié sensiblement les formes du bassin. Les couches précédentes se poursuivent sur le flanc méridional du mont-Alaric. Aïnsi le plan incliné qui, à Pradelles, s'enfonce sous les marnes bleues, est exacte- ment composé de la même manière. Le village repose sur un calcaire gris-Marneux avec Nummulites Ramondi, des Operculines, des Huîtres, etc., subordonné à des marnes grises. Puis viennent au-dessous les calcaires gris à NV. Ramondi, Nerita Schmideliana, un grand Conoclypus voisin du €. conoideus, l’'Ostrea vesieuluris, ete. Si de Roquenegade on descend dans la vallée intérieure qui sépare les marnes bleues des calcaires du revêtement de la montagne, on rencontre, en gravissant ensuite celle-ci jusqu’au sommet, des calcaires gris marneux avec Operculina ammonea, des calcaires gris, compactes, en partie spathiques, avec Alveolina sphæroiïdea, Orbitolites ala- ricensis, nov. sp. (celle du four à chaux d’Alaric), des Milliolites, etc. , des calcaires gris de fumée, durs, compactes, remplis de N. Ramondi, var. d, enfin sur la cime un calcaire gris compacte, à cassure esquilleuse, avec Alvéolines et N. Ramondi, var. d. D'après les diverses coupes que l’on peut faire très facilement du mont-Alarie, on voit donc que ce massif résume tous les éléments du groupe nummulitique du pays, et montre en même temps ses rapports avec le groupe tertiaire inférieur d’Alet. Il est en eflet composé de calcaires du troisième étage nummulitique, for- (1) Loc. cit. , p. 52. (2) Loc, cit,, p. 61. 312 FORMATION TERTIAIRE INFÉRIEURE. (N720p. 208) mant une voûte demi-cylindrique, brisée en quatre points principaux, dont les retom- bées s’abaissent au N. et au S., ou de chaque côté de son axe, pour passer sous les marnes bleues du second. A celles-ci succèdent, au sud et à l’ouest, les calcaires nummulitiques du premier, tandis qu’au nord celui-ci est peu développé et ne nous a pas présenté de Nummulites. Cette voûte comprend à lintérieur les assises du groupe d’Alet, qui viennent au jour par de vastes déchirures que le soulèvement a déterminées à ses extrémités est et ouest et sur deux points de l’extrados (Combe- Saint-Jean et ravins au sud de Comigne); de sorte qu’on peut distinguer à la fois la composition intérieure de la montagne, l’arrangement symétrique de ses couches extérieures, et apprécier les effets des phénomènes dynamiques qui ont accidenté le tout et pour ainsi dire d’un seul coup, car le mont-Alaric est le résultat d’un soulè- vement simple dont on trouverait difficilement un second exemple aussi complet et aussi bien caractérisé dans toutes ses parties. Le soulèvement de la vallée de la Joure ne semble pas avoir été assez énergique pour faire affleurer le troisième étage; du moins ne l’avons-nous pas observé sur les points que nous avons parcourus. Considérés sous le rapport de leurs altitudes, les trois étages nummulitiques des Corbières ou au sud de l'Aude, présentent de notables différences en relation avec les accidents qui les ont affectés et avec leur composition minéralogique plus ou moins favorable à leur destruction. Ainsi le premier n’atteint généralement qu’une faible hauteur au sud de Couiza, et ne se relève qu'avec les marnes du second sur les pentes des montagnes de la Camp et de la Malpère. Les marnes occupent presque toujours les dépressions du sol. Leur base est à 225 mètres près de Couiza, à 173 au bas de Coustouge, à 143 à Monze, tandis qu’à Ribaute, sur les bords de l'Or- bieu, leur partie supérieure n’est qu'à 93 mètres. Le troisième étage s’élève au con- traire fréquemment. A l'extrémité occidentale du mont-Alaric, au nord de Pradelles, il atteint 503 mètres, puis 595 à l'extrémité opposée, au-dessus de Camplong, 279 à la crête supérieure du cirque de la Grasse. Sur la rive gauche de l’Aude, il paraît attendre la cote 655 au nord-ouest d’Alet, autant que nous en avons pu juger à distance, puis 526 sur le prolongement méridional du plateau, en face du Luc. La crête de Cassaigne est à 474 mètres, et le village de Rennes à environ 450. Région nummulitique de la Montagne-Noire. — Pour compléter la description du groupe nummulitique et donner une idée de ses caractères et de ses relations stra- tigraphiques sur le bord septentrional du bassin, nous examinerons deux coupes prises au nord de l’Aude : l’une aux environs de Montolieu, l’autre aux environs de Con- ques. Nous avons eu occasion d'exposer l'historique des observations faites sur cette zone jusqu'en 1850 (1); il serait donc inutile d’y revenir ici. (4) Æistoire des progrès de la géologie, t. IH, p. 34-50, 1850. — Nous avons omis de signaler alors la Notice de M. Rolland du Roquan (Annuaire de l'Aude, 184h) que nous ne connaissions pas, et dans laquelle l’auteur (p. 210) place les calcaires à Numinulites du pied de la Montagne-Noire et les calcaires lacustres sous-jacents à leur vrai niveau géologique. Eu (N. 2, p. 105.) GROUPE NUMMULITIQUE. 313 La mollasse ou grès de Carcassonne, dont nous avons indiqué la position et les caractères autour de Pezens, sur la route de Castelnaudary, se continue sur celle de Montolieu jusqu’à Moussoulens. Le plateau que l’on traverse après ce village offre un plan régulièrement incliné au S., formé par un calcaire dur, gris-bleuâtre, com- pacte ou semi-cristallin, à cassure raboteuse, inégale où esquilleuse, rempli de fos- siles, la plupart à l’état de moules (4lveolina sphæroïdea, Cart.. Nummulites Ra- mondi, Defr., Corbis lamellosa ? Lam., Cardium Brongniarti, d’Arch., C. obliquum, Lam.? Verita Schmideliana, Chemn., etc.). En descendant de ce plateau vers la vallée, on atteint successivement : 1° Calcaire marneux, grisâtre, à cassure terreuse, un peu schistoïde, avec Vummulites Ramondi, var. d, Operculina canalifera, etc. 2 Calcaire gris, compacte ou sub-grenu, avec Ostrea gigantea. 3° Calcaire blanc-jaunâtre, terreux, avec des parties cristallines (Nummulites Ramondr, var. d, N. biaritzensis, Operculina canalifera, Spondylus radula ? Yam., etc. L° Banc composé de Nummulites Leymeriei, avec quelques N. Æamondi, var. d, Solarium, etc., et entourées par-un calcaire marneux, gris-jaunâtre, à cassure ter- reuse, friable, sableux, avec points verts. 5° Calcaire marneux, blanc-jaunâtre, à cassure terreuse, peu solide, renfermant de nom- breux fossiles, tels que Nummulites biaritzensis, N. planulata, N. Ramondi, var., A lveolina ovoidea, Operculina ammonea, Serpula quadricarinata, Mactra ? Chama? Ostrea cariosa, Desh., O. indét., Zucina corbarica, Leym. (deux variétés transverses), Terebratula montolearensis, id., Natica longispira, id., N. brevispira, id., Nerita haliotis, var. d'Arch., Terebellum Braunii, d'Orb. (Terebellopsis, id., Leym.), 7. obtusum, J. de C. Sow., Rostellaria subfusoides, n., sp. Voluta ? 6° Calcaire gris, marneux, quelquefois avec des parties spathiques, plus ou moins solide, rempli d’Alveolina sphæroidea, Cart. et ovoidea, d'Orb. 7° Argiles sableuses violacées. 8° Calcaire blanc, compacte, écailleux, concrétionné, fragile, exploité au bas de la rampe, au tournant de la route. Ces deux dernières assises, qui affleurent par suite du plongement général au S.-0., appartiennent au groupe d’Alet, et continuent à se relever au N. pour former les collines basses qui entourent le promontoire de Montolieu au sud, à l'est et à l'ouest, et qui sont encore couronnées parles couches nummulitiques des buttes de Sainte-Croix, de Saint-Roch et du plateau de Montpertus. Si, après avoir passé la Rougeanne, on prend le chemin d’Alzonne, on recoupe de bas en haut la série précédente, c’est-à-dire, à partir des argiles sableuses grises et jaunes, plus ou moins argileuses du n° 7, de 10 mètres environ : 4° Banc calcaire avec des cailloux de quartz et des Alvéolines. . , . . 0,50 2 Calcaire terreux avec plusieurs variétés de Lucina corbarica Leym. (4) . 0",15 (4) La description de cette espèce devra être refaite et comprendre l'étude des nombreuses variétés qu’on trouve particulièrement dans cette couche, celles qu'a fait connaître M. Leymerie , et dont la L. Coquandiana, d'Orb., doit faire partie, et, peut-être même, les L. apisidis et cycloidea, Bell., formeront-elles les extrêmes de cette série de modifications. SOC. GÉOL, — 2° SÉRIE, T. VI. — Mém. n° 2. L0 …. Lé 314 FORMATION TERTIAIRE INFÉRIEURE. (N. 2, p. 106.) 3° Calcaire jaune solide, rempli d’A/veclina sphæroidea etovoidea, et calcaire marneux blanc-jaunâtre, avec de nombreux fossiles à l’état de moules ; Periaster Orbignyanus Cott.? Pygorhynchus, Tellina? (forme de la T. tenuistria, Desh.), Chama gigas? Desh., C. calcarata, Lam. ? Cardium, voisin du €. gratum, Defr., Mytilus, n. sp., Ostrea, indét., Terebratula montolearensis, Leym., Terebellum Braun, id., d'Orb., Rostellaria subfusiforme, n. sp., Ovula depressa, d'Arch. . . . . 20 mètres. &° Calcaire marno-sableux, friable, schistoïde, rempli de N. Leymeriei et Ramondi, var. . . he RCE EU D 5° Banc pétri d’Ostrea Dinan A Desh. sole PUR see CL 6° Calcaire gris en plaquettes, avec N. Leymeriei, Opera elc., OCCu- s pant la surface du plate EP RENE CNT EN ER RE L’inclinaison générale est au S.-S.-0., et ces assises sont recoupées dans le vallon que traverse ensuite la route, et sur les bords duquel elles forment des escarpe- ments rocheux assez abrupts. Vers la métairie de Bouillonnac elles sont recouvertes, à stratification concordante, par la mollasse qui plonge de même. La coupe pl. V, fig. 8, résume cette disposition (1). La coupe prise à partir de la rivière du Trapel, passant par Conques et remon- tant l’Orbiel jusqu’à la Rouirie, sur la route de Lectoure (pl. V, fig. 10), montre les mêmes relations, mais plus simples encore. Ainsi, au domaine de la Bernède, les couches qui s'élèvent de dessous la plaine quaternaire sont de haut en bas : des calcaires sableux ou des grès gris, calcarifères, schistoïdes, remplis d’Ostrea multi- costata, un calcaire terreux, gris, plus solide, et, vers le bas, formant le pied de l’es- carpement qui longe la route, des calcaires compactes, blanc-jaunâtre, à Alvéolines, le tout de 35 à 10 mètres d'épaisseur, et plongeant au S. Au moulin de Foulon, on voit sortir de dessous des marnes sableuses, gris-blanchâtre, un peu violacées, et, au domaine de Sindilla, comme l'avaient déjà indiqué M. Rolland du Roquan (2) et M. Noulet (3), les calcaires lacustres compactes, écailleux, semblables à ceux de Montolieu. Ces deux dernières assises font partie du groupe d’Alet. Ces exemples suffisent pour montrer combien le groupe nummulitique s’est aminei sur les dernières pentes de la Montagne-Noire, combien ses éléments constituants se sont simplifiés, comparativement à cé que nous avons vu au centre et au sud de l’ancien bassin, et enfin que les trois divisions suivies jusque sur la rive gauche de l’Aude n’y sont plus reconnaissables par leurs caractères minéralogiques, ni (1) Aux fossiles que nous avons rencontrés dans les couches précédentes, nous ajouterons les suivants, que M. Noguès a bien voulu nous communiquer : Baguettes de Cidaris, espèce pourvue de deux rangées d’épines opposées, et que nous avons citée souvent dans le second étage, Æ£'schara, n. Sp. citée aussi à Couiza, Zerebratula, nov. sp., Nerita Schmideliana (jeune?), Chemn., Vafica sigaretina, Desh., Solarium, Cassidaria carinata, Lam., et des moules indéterminables de Gérites, de Rostellaires, de Fuseaux, etc. (2) Annuaire statistique de l'Aude, 18h, p. 212. (3) Mémoires sur les coquilles fossiles du terrain d'eau douce du S.-0. de la France, 17 mém. Paris, 14851. (N. 2, p. 107.) GROUPE D'ALET. 315 même par la distribution de la plupart des fossiles. A l'exception de l’abondance constante de l’Ostrea multicostata à la partie supérieure et des Alvéolines à la base, les autres espèces n’occupent pas de niveau bien déterminé en rapport avec ce qu’on observe dans le reste du bassin. De plus, il y en a un certain nombre qui paraissent être propres à ce rivage septentrional de la mer nummulitique, ou du moins qui n’ont pas encore été rencontrées au sud. GROUPE D’ALET. Les dépôts qui forment la division la plus basse du terrain tertiaire n'avaient pas encore été bien caractérisés ni convenablement groupés lorsque nous commencâmes à étudier le pays. Réunis à la formation crétacée sur la carte géologique de la France, on les trouve associés tantôt aux couches crétacées proprement dites, tantôt aux assises nummulitiques. M. Leymerie (4) comprit nos deux groupes sous la teinte jaune de sa carte, ce qui était beaucoup plus rationnel, mais il ne les distingua l'un de l’autre, ni dans le texte de son mémoire, ni dans le tableau des terrains qui l’ac- compagne. Les limites générales de cet ensemble, ainsi envisagé, ont d’ailleurs été tracées d’une manière exacte. De son côté, Tallavignes (2), qui avait fait une étude stratigraphique plus détaillée du pays montagneux situé entre Aude et le massif de transition de Monthoumet, avait à la vérité distingué les divers éléments du groupe qui va nous occuper, mais il les avait mal limités. Par suite de considérations stratigraphiques qui ne se sont pas trouvées justifiées, il avait associé l'étage nummulitique inférieur aux marnes rouges, aux Calcaires, aux poudingues et aux grès sous-jacents, pour en faire son système alaricien, système, comme nous Pavons dit, mal fondé stratigraphiquement, pétrographiquement et paléontologiquement. En outre, n’ayant pas suivi assez loin, au sud du massif de transition, les couches inférieures de ce système alaricien, il n'avait pu le limiter à sa base, c’est-à-dire établir ses rapports avec les couches crétacées les plus récentes qui existent seulement de ce côté. Nous avons déterminé ce point essentiel de la question en 1853, en faisant voir (3) comment, dans la coupe des environs des Bains-de-Rennes, les calcaires compactes blancs et roses, les marnes rouges et la grande assise de grès quartzeux, base des montagnes qui entourent la ville d’Alet de l’autre côté du massif de tran- sition, recouvraient directement sur celui-ci l'étage crétacé le-plus récent du pays. En 1855 (4) nous avons établi plus complétement les caractères et les divisions naturelles de cet ensemble de couches, ses rapports stratigraphiques avec le groupe nummulitique qui le recouvre et sa distribution géographique dans l'étendue de (1) Loc. cit., 1846. ; (2) Loc. cit., 1847. | (3) Bull. de la Soc. géol. de France, 2: sér., vol, XI, p. 185, pl. I, fig. 4, 1854. (4) Société philomatique, séance du uillet 1855. — L’'/nstitut, 5 septembre 1855. 316 FORMATION TERTIAIRE INFÉRIEURE. (M. 2, p. 108.) notre carte. À une seule modification près, que nous indiquerons tout de suite; la composition de ce groupe reste aujourd'hui telle que nous lavions proposée alors. « Les montagnes escarpées qui bordent la rive gauche de l'Aude, entre Alet et la » Pujade, disions-nous, présentent, dans leur hauteur, trois assises de marnes rouge » lie de vin de 42 à 15 mètres d'épaisseur. La plus élevée, qui supporte les couches » à Milliolites, est séparée de la seconde par des roches grisâtres, calcarifères, de 25 » à 30 mètres. » Mais il nous a semblé depuis que la première assise de marnes rouges et jaunes des bords de l'Aude, au-dessous de Couiza, était supérieure aux calcaires en plaquettes avec Milliolites, les plus élevées des montagnes d’Alet, et que les roches grisätres, calcarifères, que nous placions entre la Pujade et Gabriel. au- dessous de ces mêmes argiles, n'étaient autres que des roches du troisième étage nummulitique. Aussi avons-nous dù réunir le tout à ce dernier. Cette assise de marnes rouges et jaunes est d’ailleurs peu constante, tandis que celles qui viennent au-dessous se suivent sur de grandes étendues de pays avec des caractères d’une uniformité remarquable. D'après cela, le groupe d’Alet se compose, dans ces mêmes montagnes des bords de l'Aude, des quatre assises suivantes : 4° Marnes rouges supérieures. 2° Calcaires compactes gris-blanchâtre. 3° Marnes rouges inférieures et poudingues. L° Grès quartzeux, reposant ici sur le terrain de transition. Le tout plonge régulièrement au S.-S.-0. sous le groupe nummulitique des envi- rons de Couiza, pour se relever ensuite dans plusieurs directions (pl. IE, fig. 1). Cette . composition du groupe est prise comme type à cause de sa netteté et de la facilité avec laquelle on peut l’étudier; mais elle est rarement aussi complète, aussi symé- trique, et nous verrons ses caractères se modifier par la prédominance d'un de ses éléments pétrographiques aux dépens des autres. Ce système de couches occupe sur notre carte quatre régions distinctes et tout à fait séparées. La première, située au sud et à l’ouest du massif de transition, borde le cours de l’Aude d’Alet à Quillan, en s'étendant à l’est et à l’ouest jusqu’à une distance plus ou moins considérable; la seconde, assez loin au nord du même massif, entoure la Grasse et forme le noyau du mont Alaric; la troisième constitue une zone plus à l'est, commençant au sud d’Albas, tournant par l'Ermitage de Saint-Victor, au N.-N.-0. jusqu’à Thézan et au delà, pour disparaître sous le dépôt quaternaire de la vallée de POrbieu ; enfin la quatrième longe le pied de la Montagne-Noire au nord de l'Aude. Nous commencerons par la région du sud ou des bords de cette rivière. Région du sud. — La vue d’Alet, que nous donnons ici, est prise au-dessus et un peu au midi de la ville, sur la rive droite de l'Aude (x° xv). Les masses rocheuses du premier plan appartiennent au grès inférieur qui repose sur le terrain de transition au bas de l’escarpement, le long de la grande route. Lorsqu'on jette un coup d'œil sur les pentes des montagnes de la rive gauche placées en face de l'observateur, on CN. 2, p. 400.) GROUPE D'ALET. 317 est tenté d’y voir plusieurs assises calcaires à des niveaux différents; mais ce n’est qu'une apparence trompeuse due à des portions détachées de l’assise n° 2, qui, privées de soutien, par suite de la destruction facile des marnes rouges inférieures, se sont abaissées en glissant sur les pentes de ces dernières. On s’assure aisément de cet effet en remarquant qu’au-dessus de ces grands fragments, descendus de leur niveau originaire, l’assise calcaire manque et est remplacée par un talus d’éboule- ment des marnes rouges supérieures. De là proviennent ces flexions irrégulières de l’assise calcaire en ce point, tandis que sur d’autres nous la verrons conserver une N° XV. — Vue d’Alet. Dans le voisinage immédiat du terrain de transition, les quatre assises précédentes ne se succèdent point avec la même régularité qu'à une certaine distance de ce contact, et leurs caractères, comme leur puissance relative, présentent diverses mo- difications. Ainsi, lorsqu'on gravit le sentier, qui de la grande route monte aux métairies de Coussergue et de la Caune à l’ouest, on traverse d’abord, vers le pied de l’escarpement, des calcaires marbres, gris, veinés de blanc, en bancs épais, plon- seant de 45° au N.-E., puis un calcaire marbre, sub-amygdalin, avec des veines ver- dâtres, des schistes lydiens, de nouveaux calcaires amygdalins ou schistoïdes, et des schistes gris terreux auxquels succède un grès brunâtre (assise n° 4). Ce grès passe à un psammite friable, blanchâtre, très micacé et à un poudingue à petits fragments 318 FORMATION TERTIAIRE INFÉRIEURE. (N. 2, p. 110.) de quartz. Cette première assise tertiaire, souvent réduite à l’état de sable avec des veines ferrugineuses, a de 35 à 40 mètres d'épaisseur. À mesure qu’on s'élève en la suivant, le nombre et la grosseur des cailloux augmentent, et la roche devient un poudingue à gros éléments, toujours plus ou moins incohérent, comme on peut bien en juger près d’une métairie qu'abrite une masse avancée de ce poudingue. Au-dessus est une argile sableuse, rougeûtre, et des psammites lie de vin assez épais (assise n° 3), un poudingue très solide, à ciment de grès, en bancs épais, rap- pelant la brèche du Tholonet, près d’Aix. Les nodules sont de quartz blanc, gris ou jaune, de calcaires compactes, etc. Viennent ensuite, jusqu’au sommet, un calcaire compacte blanc, cristallin (assise n° 2), des argiles sableuses rouges avec quelques bancs solides subordonnés vers le haut (assise n° 1), et des marnes jaunâtres. Les calcaires oolithiques jaunes qu'on atteint ensuite, les calcaires gris-blanchâtre à Milliolites, les calcaires en plaquettes, sub-compactes, remplis aussi de Milholites, et des grès calcarifères occupent la surface du plateau et couronnent cette longue série, en représentant, comme on l’a vu, le troisième étage nummulitique. Si de ce plateau aride et assez étroit, dont l’altitude est de 551 mètres, on redes- cend par la métairie de Berdichon, on traverse successivement les marnes sableuses rouges, violettes, supérieures, les calcaires blanchâtres, compactes, suberistallins, rui- niformes, un poudingue siliceux solide, les argiles sableuses rouges, inférieures, un calcaire compacte, oolithique à oolithes irrégulières, qui n’est probablement pas en place, des psammites lie de vin, les poudingues incohérents déjà signalés, enfin les psammites blancs, friables, à gros grains, passant parfois au poudingue, acquérant une grande épaisseur de chaque côté de la vallée et reposant sur le terrain de tran- sition. L’inclinaison de toute la série au S.-S.-0. est de 8° à 10° (pl. IE, fig. 1). Le plateau à l'ouest d’Alet atteignant, comme on vient de le dire, 551 mètres d'altitude, et le fond de la vallée vers le contact du grès et du terrain de transition étant à 180, si l’on estime à 70 mètres, ce qui est probablement exagéré, l’épais- seur du troisième étage nummulitique en ce point, il reste, 300 mètres pour la puis- sance totale des quatre assises précédentes. Celle de la base en forme à peu près le tiers; les calcaires ne dépassent pas 25 à 30 mètres, et les deux assises de marnes ou d’argiles sableuses rouges avec les poudingues sont à peu près égales (1). + (1) Les sources minérales d’Alet sourdent sur la rive droite de l’Aude, en amont et en aval, probablement à la jonction des terrains tertiaire et de transition. Trois sont thermales, la quatrième est froide. Celle de l'établissement des Bains situé sur le bord de la route, à A00 mètres au sud de la ville, a une température de 27°,5. Les eaux claires, limpides, ferrugineuses, légèrement styptiques, renferment des carbonates de chaux et de fer, du muriate et du sulfate de chaux. Les eaux miné- rales froides appelées les eaux rouges, sans doute à cause de leur voisinage des argiles rouges infé- ricures, sourdent un peu plus au sud-(4). Ces sources, mentionnées comme alcalines et ferrugi- neuses (2), sont indiquées comme sortant du ferrain crétacé à couches tres bouleversées. Mais, (a) Guide pilloresque du voyageur en France, éd. par F, Didot : Département de l'Aude, p. 21. Paris, 1836. (b) Compte rendu des travaux des ingénieurs des mines pendant l’année 4844, in-4. Paris, 14845, p. 20. (Résumé des travaux slalistiques en 1844.) F (2, p. 111.) GROUPE D'ALET. 319 Si d’Alet on se dirige vers Couiza, les grès inférieurs, interrompus cà et là par quelques affleurements de calcaires de transition, bordent la route jusqu’au moulin, et de la Bendouble à la métairie de Nègre. Tantôt gris-blanchâtre ou jaunâtre, micacés, tantôt grossiers, remplis de petits cailloux de quartz, les bancs sont épais, peu suivis, se fondent parfois les uns dans les autres et plongent au S.-S.-0. de 10° à 42°. Ils sont souvent séparés par des assises de marnes grises, feuilletées, plus ou moins foncées. En même temps on voit sur la rive gauche tout le groupe s’abaisser et les calcaires de l’assise n° 2 atteindre bientôt le fond de la vallée. Au-dessous règne un poudingue, continuation de celui dont on voit des blocs éboulés le long de la route, et que nous avons déjà mentionné dans cette position en face d’Alet. Il est iei composé de cailloux arrondis, de la grosseur d’un pois jusqu’à celle du poing, de grès gris-jaunâtre, brunâtre ou rougeâtre, de calcaire compacte gris ou jaune, réunis par un ciment quartzeux rouge ou gris, très dur, à gros grain ou à grain fin, avec du carbonate de chaux disséminé. Ce poudingue, subordonné ainsi aux marnes argileuses rouges inférieures, était coupé par l’ancienne route ; mais la nou- velle qui passe au-dessous à été tracée, après le pont de Nègre, sur un grès royge, brun-jaunâire ou panaché, fort épais, de la quatrième assise, supportant ainsi le poudingue et les calcaires qui surplombent le chemin. Ces derniers, que l’on a aussi taillés à pic pour élargir la route, en suivant le bord de la rivière, forment une sorte de muraille continue l’espace d’environ 300 mètres. Ils sont compactes, très durs, à cassure esquilleuse, sub-lithographique, souvent à l’état de brèche dont les fragments sont de teintes plus foncées que la pâte qui les entoure. La couleur générale de ces calcaires est le gris de fumée plus ou moins clair. Leur stratification est obscure, et l’on y observe de nombreuses veines de chaux carbonatée, courtes, entrelacées, réticulées et allongées dans le sens de la stratification. Leur épaisseur totale est de près de 20 mètres. Un accident local a occasionné en cet endroit une inclinaison inverse du plongement général (1). Cette seconde assise, si importante dans la composition du groupe d’Alet, forme d'après ce qui précède, on voit qu'il n'existe point de véritables couches crétacées dans tout le canton, et ensuite que les dépôts tertiaires n’y ont pas subi de dislocation très sensible. Nous n'avons point observé de failles en cet endroit. M. Ch. Daubeny (4) pense aussi que ces sources sont en rapport avec une dislocation qui aurait ouvert la vallée de l’Aude et produit les escarpe- ments des gorges qui la bordent, et cela perpendiculairement à la direction générale des couches. Mais ici la disposition est tout à fait différente de celle que nous décrirons pour les sources de Campagne et de Rennes, auxquelles le savant chimiste anglais assigne la même origine avec beaucoup plus de raison, suivant nous. (Voyez aussi pour l’analyse de ces eaux : Trouvé, Description générale et statistique du département de l'Aude, p. 54, in-4. Carcassonne, 1818.) (1) M. Marcel de Serres, qui rapporte toutes ces assises à la craie et les confond avec celles des Bains-de-Rennes, dit qu'aux approches d’Alet beaucoup de débris organiques les caractérisent, et que depuis longtemps les environs de cette ville fournissent aux curieux de nombreuses pétrifications (Actes de la Soc. linn. de Bordeaux, vol. X, p. 40, 1838). Nous ne savons pas ce qui à pu donner lieu à cette assertion. (a) -À Description of active and extinct volcanos, p. 548, in-8, 2° édit, Londres, 1848. 320 FORMATION TERTIAIRE INFÉRIEURE. (N. 2, p. 112.) encore le sol de la route, au-dessous du four à chaux établi à la jonction des routes de Serres et de Couiza. Elle est surmontée par les marnes sableuses rouges qui constituent la moitié inférieure de la butte, le reste étant, comme on l’a dit, formé par le troisième étage nummulitique (pl. HE, fig. 5). Cette assise rouge supérieure paraît occuper au delà tout le grand escarpement de la montagne que longe le chemin de Serres, plonge au S. et est couronnée par les assises nummulitiques de la crête de Cassaigne. On peut suivre ces argiles rouges en continuant à s’avancer directement vers Couiza. Elles sont exploitées sur le bord même de la route où elles sont brunes, panachées de rouge et de jaune, et supportent, avant qu’on atteigne le château de Couiza, les roches du groupe suivant, entre autres les calcaires bleuâtres à Milliolites coupés par le chemin, et qui à l’est bordent, comme on l’a dit, la vallée de la Sals. La limite du groupe d’Alet, à l’est de cette petite ville, trace un golfe profond dans le massif de transition, entre le ruisseau de la Valette et la Rialsesse. Elle passe au delà d’Arques et suit à l’ouest le cours de cette dernière rivière. Lorsqu'on remonte la Sals à quelques centaines de mètres au-dessus du pont de la route des Bains, ou de sa jonction avec la Rialsesse, la superposition du groupe tertiaire inférieur au terrain ancien offre les détails suivants que l’on peut opposer à ceux que nous venons de donner aux environs d’Alet. Au sortir du défilé, ces couches de transition plon- gent de 60° à l’O., et l’on voit leur succéder, plongeant de 45° au S. ou vers la montagne, la série suivante coupée par la LOUE, et que l'échelle de la fig. 4 (pl. TI) n’a pas permis de représenter avec détail. 1° Poudingue à pâte calcaire, enveloppant des noyaux de calcaires compactes, mètres. jaunes ÉLIENISPlUSIOUMNOMSMONCES EE PSP O0 2°ACalcairefcompacterrose, LME TR ON ER 2 70 0 3° Calcaire compacte gris-jaunâtre . . . 3 sb MENTALE. AN/OB k° Grès marneux, friables, rouges et jaunes ne dl EAU SI) 00 5ouCalcaire marneux, rouge amvyodalin 211000 Une faille interrompt ici la série, et au delà inclinaison est inverse ou au N. 6° Grès marneux rouge. . . . LA M. + ee OCT D 7° Marnes rouges et jaunes, ea de ne Be ls de + Le DORE NE UE 8°" Grès argileux ronge, noduleux M MP. à CPE RL SEMATNe ETS JAUNATE CCC NN : US ce PL CURE 10° Bancs minces de calcaire compacte, nt et marnes fouilletées, SANS nes LDC 11° Bancs minces de calcaire rouge, taché de gris-verdâtre.. . . . . . 0,70 12° Calcaire compacte gris-verdâtre, taché de rouge.. . . ee VÉO: DD 13° Marne jaunûtre, grisâtre, rouge, grumeleuse, ‘ie ou moins re SPAM 14° Marne gris-verdâtre, passant à un calcaire de même teinte, en grands OvOIdeS aplals. RSS EE 45° Poudingue semblable an 1200" EEE 16° Calcaire gris-verdâtre, taché de violet . . . . . . . . . . . 3,00 17° Marne grise et violette, . . . Le. RSR ONE RE 18° Marne et calcaire gris A du pont . #2 0006; 00 \ (N. 2, p. 113.) GROUPE D'ALET. 321 19° Calcaire en lits réguliers, formant une sorte de muraille ruinée, sub-ver- ticale, perpendiculaire au pont à l'endroit où se réunissent la Sals et la Rialsesse . . . . . CRE UN. Mt limelres: 20° Marnes grises, sableuses, Mables et po alre 2 A ER jusqu'à l’ex- trémité du talus. Ces couches situées au delà du pont sont sub-verticales, 45 à 50 mètres. La série est donc très complexe sur ce rivage de l’ancien golfe, et nous y retrou- vons difficilement les divisions précédentes. Si, comme nous le pensons, les calcaires 2 et 3 appartiennent à la grande assise calcaire d’Alet, il s'ensuit que le développe- ment des diverses roches est sur ce point inverse de ce que nous avons vu jusqu’à présent et de ce que nous tronverons encore plus au S. Les assises inférieures sont très réduites, tandis que les supérieures acquièrent une puissance et une com- plexité dont nous ne connaissons point d'autre exemple dans cette partie du bassin (1). La Sals coule ici dans une brisure, et, lorsqu'on descend sa rive droite, les couches plongent au N. sous un angle de 45°. La route, en tournant à gauche, coupe le prolongement des calcaires 2 et 3, qui dévient un peu au N., et on les voit reparaître au delà sur la rive gauche. C’est dans l'intervalle que laissent libre, sur cette même rive, les deux parties ainsi séparées, que les couches crétacées atteignent le bord même du cours d’eau et le suivent l’espace de 400 à 500 mètres au plus, sans se montrer sur la rive opposée. Au delà succèdent des marnes et des calcaires marneux bleuâtres avec des veines de gypse, puis les calcaires gris de la colline de Coustaussa rapportés au groupe nummulitique. La zone du groupe d’Alet se poursuit alors sur la rive gauche de la Sals pour passer sous le village élevé de Rennes. Dans ce trajet, au-dessous ou au sud de l’assise calcaire fortement redressée qui trace une arête toujours apparente à la surface du sol, se développent d’autres calcaires, des marnes rouges, des grès ferrugineux et des poudingues qui s'étendent au sud presque horizontalement au-dessous de Mouscayroles et des Patiassis, de manière à représenter la partie inférieure du groupe que nous venons de voir si réduite au confluent de la Sals et de la Rialsesse. Si nous reprenons actuellement la suite de la coupe de la montée de Couiza à Rennes, nous trouverons, à partir de cette même crête calcaire, et plongeant comme elle au N., les couches suivantes, dont l’inclinaison diminue à mesure qu’on s'élève, de sorte que les dernières paraissent être presque horizontales. ALNPOUTIQEUC NN ON OP. A PEN NN Tr I POP. EN) THÔITES. 2° Argiles rouges et grès Ro tdunnés AE VE PT ls" a 20 3° Grès jaunâtre, grossier, passant à un poudingue à petits élément h° Marne grise et jaune. 5° Grès terreux, gris-jaunâtre. (1) Nous doutons beaucoup qu'il existe aucune couche crétacée à Hippurites sur ce versant nord des montagnes de transition, comme l'indique M. Vène, dans sa coupe (Ann. des mines, 3° sér., vol. VI, p. 177, pl. 8, fig. 3, 1834). SOC. GÉOL. — 2° SÉRIE, T. VI. — Mém. n° 2. hi 322 FORMATION TERTIAIRE INFÉRIEURE. (N: 2, p. 114.) 6° Argile lie de vin, panachée de gris et de jaune, passant à une marne schistoïde rouge, jaune, sableuse et endurcie. 7° Argile grise et violette. 8° Grès. 9° Argile lie de vin et grès. 10° Calcaires à Milliolites supportant le village de Rennes. Ces derniers, sur la pente orientale de la colline, recouvrent des argiles grises, jaunes et rouges, traversées par une multitude de filets de gypse fibreux, obliques, flexueux, se coupant en divers sens, sur une épaisseur de 2 à 3 mètres, et deve- nant plus rare vers le bas où les argiles lie de vin leur succèdent. Le gypse forme aussi de petits rognons compris dans le réseau des veimules. On pourrait croire, au premier abord, que cette couche gypseuse correspond à celle de Coustaussa, mais cette dernière est évidemment supérieure aux calcaires blancs redressés le long de la Sals, tandis que l’autre est au-dessous. Nous supposons, à la vérité, comme le montre la coupe (pl. UE, fig. 1), que tout le groupe d’Alet a été recourbé en voûte, qu’une brisure s’est produite dans celle-ci en laissant affleurer au nord les tranches des couches brisées, tandis qu'au sud les calcaires à Milholites de Rennes ont pu se déposer d’une manière discordante sur les eouches arquées des marnes rouges, gypseuses, ete. C’est la seule explication que nous puissions donner de cette disposition dont il est d’ailleurs facile de se rendre compte, lorsque des bords du vallon de Mouscayroles on remarque la manière dont se profilent à l’ouest les autres couches du groupe. En donnant ci-dessus (p. 234-26) une esquisse du paysage que le regard embrasse du sommet de la colline de Rennes, nous avons insisté sur les caractères orographi- ques particuliers du groupe qui nous oceupe et qui se détache avec une netteté par- faite des roches plus anciennes sur lesquelles il repose au sud, depuis les montagnes de Quillan, à droite de l'observateur, jusqu’au pic de Bugarach, qui se dresse à sa gauche. Entre ce fond du tableau et le pied de la colline de Rennes, sur les terri- toires de Saint-Ferréol, de Bézu, de Granes, de Jandou, nous pouvons actuellement nous rendre compte de la composition de ces larges ondulations dont les bords supérieurs ou les arêtes sont formées par la nappe du calcaire d’Alet (assise n° 2), partout d’une égale épaisseur, tandis que les talus ou les courbes légèrement con- caves qui relient ces divers plans sont formés par les argiles rouges (assise n° 3). Les argiles sableuses rouges supérieures (assise n° 4) surmontent encore parfois les calcaires, et les grès de la base (assise n° 4) affleurent au fond des vallons. Cet aspect du groupe d’Alet, au sud de Rennes, se reproduit exactement au nord du massif de transition, sur les territoires d’Arques, de Peyroles, de Serres et de Veraza. Ce sont les mêmes ondulations produites par les alternances de la grande nappe calcaire des bords de l’Aude avec les assises de marnes rouges. La crête calcaire redressée qui, passant au nord de Rennes, se dirige ensuite vers Campagne, s’infléchit légèrement à l'0.-S.-0., et est accompagnée d’une partie des autres assises. Entre Quillan, ou mieux entre Lespinet et Couiza, il existe deux (N. 2, p. 115.) GROUPE D'ALET. 323 relèvements parallèles du groupe d’Alet, dans l'intervalle desquels les couches sont horizontales. La première ligne de soulèvement est contiguë aux calcaires secon- daires de la chaîne qui borde au nord le bassin de Quillan, la seconde est recou- verte par le groupe nummulitique des environs de Couiza. Ces accidents n’ont point d’ailleurs étendu bien loin leur influence, car, ainsi que le montre le dessin précé- dent, les plans des couches, à moins d’un kilomètre de distance, n’ont été affectés que par des failles très espacées qui les ont inclinés légèrement au S.-0. A la sortie du village de Campagne, du côté du nord, la route coupe successivement les strates dérangés par la seconde ligne de dislocation et plongeant de 45° au N.-0. Ce sont : 1° Calcaires compactes gris et jaunes. . . . . A LU MEITES: 2 Calcaire marbre se délitant facilement . . . VEN SON | 3° Argile grise et rouge, marbrée, enveloppant +. rognons ee LA EN. h° Calcaire gris-jaunâtre, caverneux . . . EURE CTUUAI 5° Marne rouge tachée de jaune, passant vers le "ne à ha teinte lie & WIDE à À 69) Calcairetrès compacte, tashé de jaune’. … ,. . . . . . «+ . . 7° Marne argileuse rouge (coupée par la route) . 8° Grès gris en bancs minces vers le bas. . . L - D » Û . . . . » Onsñe peut pas douter que les deux sources thermales de Campagne ne soient en rapport avec cette dislocation du groupe d’Alet, sur la rive droite de l'Aude (1). Avant de poursuivre l'examen de ce groupe au nord-ouest de Quillan, nous l’étu- dierons dans son extension vers l’'E., pour nous rendre compte de ses rapports avec les dépôts auxquels 1l a succédé régulièrement, c’est-à-dire avec les couches créta- cées les moins anciennes. La coupe N.-S. du pont de la Sals, au hameau de Jandou, que nous avions «déjà donnée (2) et que nous reproduisons avec quelques corrections (pl. IV, fig. 1), en offre un exemple très simple et très clair. Le dessin précédent (p. 2834-26) montre les arêtes supérieures des plans imclinés formées par assise des calcaires d’Alet. Cette vaste nappe, qui a conservé une uniformité de caractères si remarquable, a été divisée par des failles en un certain nombre de grands fragments, mais on voit toujours ses lignes blanches se profiler nettement au-dessus des (1) Ges eaux, utilisées de temps immémorial, ont une température constante de 28°,75, et leur débit n’éprouve aucune variation. Il s’en dégage du gaz acide carbonique (a). Désignées comme alca- lines et ferrugineuses, elles ont été aussi placées dans le terrain crétacé, qui, comme on vient de le dire, n'existe nulle part aux environs (b). M. Ch. Darwin (c), qui a fort bien remarqué la dislocation du groupe d’Alet en cet endroit, lui a attribué l’arrivée au jour des eaux chaudes, mais il a rangé les couches dans la formation houillère. On doit aussi à M. Ballard (d) un examen chimique de ces sources. (Voyez encore, pour l'analyse de ces eaux, la Description générale et statistique du départe- ment de l'Aude, par le baron Trouvé, p. 56, in-4. Carcassonne, 1818.) (2) Bull. de la Soc. géol. de France, % sér., vol. XI, pl. E, fig. 4, 1854. (a) Guide pittoresque du voyageur en France, éd. par F. Didot : Département de l'Aude, p. 13, 1836. (b) Compte rendu des travaux des ingénieurs des mines, pendant l’année 184%, in-4, p. 20 (Résumé des tra- vaux stalistiques), 1845 (c) À Descriplion of active and exlincet volcanos, p. 348, et Tableau, p. 578, in-8, 2° édit. Londres, i848. (d) Recherches sur les eaux minérales de Campagne (Aude). Limoux, 1846, 324 FORMATION TERTIAIRE INFÉRIEURE. (N: 2, p. 116.) talus de marnes rouges. À mesure qu’on s'avance vers l’E., ces calcaires sont dé- bordés par ces mêmes marnes inférieures, et celles-ci le sont à leur tour par les grès de la quatrième assise qui prennent un développement fort considérable lors- qu'ils cessent d'être recouverts, et qu’on les voit reposer sur les roches crétacées, entourant la vallée des Bains-de-Rennes à l’ouest, au sud et à l’est. Ces grès, que nous avons peu étudiés jusqu’à présent, parce qu'ils étaient presque toujours masqués par les marnes ou argiles rouges, prennent dans ces petites montagnes une certaine importance, et ils ont participé à tous les accidents qui ont disloqué les strates se- condaires. Nous reproduirons ici une partie de la description, que nous avons donnée en 4854, des trois assises du groupe, comprises dans la coupe précitée. La crête linéaire qui domine le hameau de Jandou, et dont nous avons déjà parlé (antè, p. 2384-26, et le dessin ci-après, p. 326-118), est formée par un calcaire com-— pacte, rose clair ou blanchâtre, taché de jaune, à cassure esquilleuse, renfermant des nodules avellanaires d’un calcaire semblable, mais souvent de teinte plus foncée. La roche se délite facilement, ou s’égrène en petits fragments. Son épaisseur ne dépasse pas 6 mètres, et elle ne présente, comme partout, aucune trace de fossile. De l’ex- trémité de cette espèce de muraille démantelée, élevée de 582 mètres au-dessus de la mer, et de 263 au-dessus de la Sals qui coule au pied, on peut, aussi bien que de Rennes, embrasser d’un coup d'œil le développement du groupe tertiaire inférieur, et juger de sa disposition comme de ses caractères généraux, depuis les environs de Quillan jusqu’à Alet, c’est-à-dire dans toute son étendue, sur les rives de l'Aude. Un banc de grès à gros grains, peu épais et peu solide, placé sous les calcaires précédents, représenterait le poudingue si développé autaur d’Alet (2). Les argiles rouges sableuses qui viennent ensuite, et qui jouent un rôle important dans l’aspect général du pays, sont très uniformes dans toute leur hauteur, sauf quelques lits plus argileux ou plus sableux intercalés çà et là. Elles impriment aux collines dont elles. constituent les pentes un caractère particulier, non-seulement à cause de leur teinte d’un rouge-brique ou violacée, mais encore par la régularité des talus, leur continuité, leur surface dénudée, quelquefois plus ou moinsravinée et dépourvue de végétation. Leur puissance, assez faible au nord, augmente rapide- ment au sud, où elle est de plus de 100 mètres. L’assise inférieure du groupe comprend ici desgrès quartzeux, souvent blanchâtres (1) Au nord de la métairie de Sourdon, la coupe montre, reposant aussi sur les argiles rouges, mais à un niveau plus bas que le grès à gros grains précédent, deux monticules déprimés formés, l'un d’une sorte de poudingue ou brèche calcaire à petits fragments, le second d’un grès gris schis- toïde, passant à un poudingue à petits noyaux de quartz et de roches anciennes, puis à une roche brun-jaunâtre comprenant des grains de quartz gris, roses, où blancs, avec de petits fragments de cal- caire marneux jaune et du calcaire spathique disséminé. On y trouve assez répandues des Orbitoïdes mal caractérisées, rappelant l'O. Fortisii d'Arch. Ces deux lambeaux seraient-ils des témoins de la base du troisième étage nummulitique, déposés dans une dépression du groupe d’Alet, ou bien la continuation du grès à gros grains qui supporte les calcaires au sud? C’est ce que des recherches ultérieures pourront seules décider. (N. 2, p. 117.) GROUPE D'ALET. 325 ou jaunâtres, très micacés, friables, schistoïdes et renfermant parfois une assez grande quantité de kaolin, comme vers le haut du ravin de la Brèche, non loin des Bains-de-Rennes. En cet endroit ils passent à un sable blanc à gros grains, puis à un grès peu solide, aussi à gros grains, roses, panachés de blanc, auquel succèdent de nouvelles roches jaunes et solides. Ailleurs ils sont gris foncé, calcarifères, à grains très fins, à cassure esquilleuse. Vers le bas du ravin précédent ils sont durs, jau- nätres ou bleuâtres à l’intérieur. Leur cassure est droite, anguleuse, ou bien unie et largement conchoïde. Quelquefois ils offrent des empreintes de Pecten ou d’autres bivalves toujours indéterminables. Les banes nombreux, réguliers, ont de 0",60 à 1,50 d'épaisseur, et, comme les argiles, leur puissance totale augmente rapide- ment à mesure qu'ils s’abaissent vers le S. Elle n’est pas moindre de 100 à 120 mètres au-dessus du confluent de la Sals et du ruisseau de Sougraigne. Contre le moulin Tifleau (pl. IV, fig. 1, et le dessin antè, p. 235-27), les bancs In- férieurs qui reposent sur les marnes bleues crétacées sont gris, durs, solides, un peu ferrugineux et micacés par places. Ils renferment des Alvéolines et d’autres fos- siles peu déterminables avec des empreintes végétales ramnifiées, peut-être des fucoïdes? On a déjà vu que c’est à la disposition des bancs les plus élevés de cette grande assise que le paysage des environs des Bains-de-Rennes doit une partie de son originalité. Ces bancs rompus, découpés en blocs énormes éboulés sur les pentes des collines, ou restés en place à leur sommet, y affectent les formes les plus variées tantôt de dômes, tantôt et plus ordinairement de pinacles, de pyramides irrégulières, d’aiguilles, de murailles démantelées, de crêtes découpées et dentelées qui permet- ent de reconnaître de très loin le système de couches auquel ils appartiennent. Si l’on remonte la Sals jusqu’au moulin de Laferrière, en suivant les travaux de la nouvelle route, on peut étudier cette grande assise des grès inférieurs coupés en travers par la vallée, et dont les couches très redressées courent de l'O. à l'E. Elles sont ici plus développées qu’en aucun autre point, et présentent toutes leurs variétés de couleur et de texture. Quelques lits d’argiles y sont subordonnés. Par suite du soulèvement de la Ferrière, les bancs offrent dans l'intervalle, avant la métairie de ille, un plongement inverse au N.-E. Entre les deux points ils sont demeurés presque horizontaux, reposant toujours sur les marnes bleues crétacées. Les grès couronnent les parties élevées du massif qui sépare la Sals du ruisseau de Sougraigne, et, si l’on se dirige vers ce dernier village, à partir de la jonction des deux cours d’eau, on les voit former encore, à gauche du chemin, les hauteurs qu dominent la Borde-Nove. Dans le dessin ci-joint, pris de la montagne des Cornes qui s'élève au nord- est, de ce dernier point, les grès dont nous parlons forment toutes les crêtes brisées du second plan, depuis le promontoire situé au-dessus des Bains-de-Rennes, à droite de l'observateur, jusqu’à la grande fente qui donne passage à la Sals, à gauche, au- dessous de la Borde-Nove, et que nous venons de décrire, puis les collines qui se continuent encore de ce côté jusqu’au bord du dessin, représentant une partie de la 326 FORMATION TERTIAIRE INFÉRIEURE. CN: 2, p: 18.) voûte de la Ferrière. En arrière et au milieu se profile la crête calcaire de Jandou. supportée par les argiles rouges. À droite s'élève dans l'éloignement, comme un fort Lente ÈS = Fchèe à Z'ARCHIAC AD NAT, BISSNN CNTTAP® N° XVI. — Vue prise de la montagne des Cornes. isolé, le village de Rennes bâti sur les calcaires à Milliolites, et le fond est occupé var les montagnes de craie inférieure de Quillan, de Saint-Julia, de Saint-Ferréol et de Saint-Louis; les premiers plans du dessin appartiennent aux divers étages de la craie supérieure. En continuant à suivre le chemin de Sougraigne, les grès tertiaires bordent les deux côtés du ruisseau et plongent toujours au S.-0., de sorte que celui-ci coule au fond d'une fente de dislocation, de part et d’autre de laquelle les marnes bleues crétacées se relèvent ensuite jusqu’à 35 et 40 mètres. Sur la droite du ruisseau, au- dessous du Cloutet, les grès renferment, comme couches subordonnées, des marnes bleu-gristre, schistoïdes, dans lesquelles des veines de lignite ou de jayet ont été exploitées (1). Les grès couronnent au delà l’escarpement formé par les marnes bleues à l’ouest de Sougraigne, et qui s’abaisse jusqu’au lit de la Sals. Le talus contre lequel s'appuie le village au nord est encore formé par ces grès. Sur la rive gauche, à peu près en face de la métairie du Cloutet. dont nous venons de parler, au delà d’une sorte de promontoire détaché, les grès affectent une disposi- tion différente, plongeant au N.-E. vers Le ruisseau, sous un angle de 45°, comme s'ils étaient appliqués contre les calcaires arqués en voûte qui les auraient rejetés de ce côté. Au delà de Sougraigne, en montant le sentier qui conduit à Bugarach, on traverse d’abord les couches crétacées plongeant au S. ou contre le prolongement de ) 102%/Calcaire compacte. gas deMumée. 4 2 . 2. 11 Lt AN Ro 9 11° Calcaire brun, Fa ou rougeûtre, en a spathique ou gris-jaunâtre eLferrenx in. 0, NTATE : HN OAES DA het ail 12 Marnes grumeleuses grises, tachées Fa jaune et 2 rouge, formant un talus NS IEMEMAATOUTETESTICOUPÉC EN PT. nn, à . . … 15 A partir de la seconde tour (xoy. le dessin ci-contre) et jusqu’au col du sentier de Ribaute, sur une épaisseur totale de 15 mètres, on trouve : 4° Calcaire compacte supportant la tour ,. . . at M:omilsmème: 2° Calcaire marneux gris avec Viquesnelia FTP 1, Desh ODA US 0 SAONE TSMOUIEUT ER ME RU 0. : 0,20 h° Marne rouge . . . ALT TS ETC RSR 0,20 5° Marne jaune grumeleuse, ne es gris et Fe rosâtre. 6° Grès quartzeux, gris-jaunâtre, à grains fins. 7 Calcaire arénacé, gris-brun. 8° Marne jaunûtre. 9° Calcaire noduleux, gris-bleuâtre. 10° Calcaire jaune, celluleux, à cassure terreuse, marneux, et dont les cavités sont tapissées de carbonate de chaux jaunâtre en cristaux microscopiques. En descendant directement de ce point à la Grasse, par le sentier qui tourne à gauche et débouche en bas sur la route, en face du pont, on traverse, sur une épais- seur d'environ 40 mètres, une série de calcaires compactes dont les pentes sont cultivées, et qui sont le prolongement des grandes assises du promontoire que contourne la rivière le long de la route de Pradelles. Ces calcaires plongent au N.-E., et peuvent être bien étudiés sur les bords de l'Orbieu, jusqu'à sa jonction avec l’Alsou et vers la métairie des Auzines. Les escarpements qui avoisinent le pont permettent de juger de l'importance de ces roches dans le groupe d’Alet. Si l’on remonte au contraire l’Orbieu au sud de la Grasse, on trouve, le long de la route de Narbonne, à la sortie de la ville, une butte dont les couches plongent au N.-E., et qui comprend : A D à |. à . Le RU ,20 DLL ORP ESS AAA TO een ce ne ne Med à nelle en nt 6e + ee 4 300 332 FORMATION TERTIAIRE INFÉRIEURE. {N. 2, p. 124.) 3° Calcaire gris compacte. . . . - ses rose diet ENREONIne n° Calcaire marneux gris, marne et calcaire marneux jaune, feuilleté, alternant avec des marnes grises et un banc de calcaire noir . . . . . . ." . 3 5° Marnes grises, feuilletées et calcaires subordonnés. . . . . . . . . 3 6° Deux bancs de calcaire compacte séparés par des marnes. grises et jaunâtres. 3 Des argiles jaunes et des bancs argileux endurcis, rouges, tachés de gris, bordent eusuite la route jusqu’au premier tournant où une argile grise exploitée leur suc- cède. Puis viennent des bancs marneux, une marne jaune, un banc calcaire gris foncé, compacte, recouvrant une argile rouge panachée de jaune. Tout cet ensemble arénacé, calcaire et argileux, dont les relations stratigraphiques nous laissent encore à désirer, est suivi par une vaste assise de calcaires compactes, gris-clair ou gris- noirâtre, avec des bancs marneux subordonnés, ou des espèces de brèches ou boues calcaires consolidées avec de très petits nodules endurcis. Cette assise, de 25 à 30 mètres de puissance, est redressée sous un angle de 45°. A la Borde-Rouge, on voit sortir de dessous et avec la même inclinaison des argiles, des marnes et des grès rouges de 50 mètres d'épaisseur, puis des argiles marneuses grises formant de petites collines désignées sous le nom de mille-versos. On a dit qu’un peu au delà, au pied de la montée, commençait le groupe nummu- litique plongeant au S. En face, sur la rive gauche de l’Orbieu, les collines sont couronnées par des calcaires horizontaux, coupés carrément sur les côtés et en biseau à leur sommet, de manière à figurer {rois immenses tumulus d’une régularité Æ Æ 0 D Si RCHIAC AD NATe a La { 10 N° XIX. — hives de l’Orbieu, près la Borde-Rouge. remarquable, que les habitants nomment Escoiredeous. Ces calcaires correspondent à ceux de la base du cirque ou des côtes de la Grasse qui s’abaissent vers le pont, et en même temps aux calcaires gris, compactes, redressés, dont nous venons de parler, sur la rive droite, le long de la route. Les talus qui les supportent sont formés (Ne 2, p. 125.) GROUPE D'ALET. 333 par les argiles rouges et les grès que nous avons mentionnés entre ce point et la ville. Dans le dessin ci-dessus, pris au tournant de la Borde-Rouge, les bancs calcaires précédents occupent le premier plan à droite, et les collines terminées par ces sortes de tumulus naturels forment en face trois autres plans successifs, sur la rive gauche. Les collines rouges (mille-versos) sortent de dessous les calcaires, à droite de l'observateur, comme le montre la coupe fig. 20 (pl. HP). Si en sortant de la Grasse, au lieu de suivre la grande route, on prend l’ancien chemin qui monte à gauche pour rejoindre la route de Tournissan sur le plateau, on traverse obliquement toute la série dont nous venons de parler, et l’on atteint de même les couches rouges inférieures qui s'étendent au nord, occupant la profonde vallée de Pratnau, dite vallée derrière les côles, et entourant la partie orientale du cirque. Sur le flanc gauche de celle-ci, on trouve, lorsqu'on descend le sentier qui vient directement de la ville, après avoir passé au pied de la tour où nous avons commencé la description de l’escarpement des côtes, on trouve, disons-nous, les calcaires que nous avons vus incliner à l’E., paraissant plonger sous des roches rouges, des grès friables, panachés de gris, des argiles sableuses et grumeleuses, des grès schistoïdes amygdalins et des grès durs, homogènes, à grain fin. Mais il est certain que le thalweg de ce vallon étroit et sinueux marque une ligne de failles qui produit cette apparence, et les assises rouges doivent plonger à l'E. comme les cal- caires des côtes et sous le même angle. Lorsqu'on remonte ce vallon au nord, on le voit se resserrer de plus en plus, les pentes se rapprochent, et le talus de droite, formé par les couches rouges, est sur- monté par les calcaires, prolongement de ceux que l’on a à sa gauche. Leur sépa- ration est due à la faille qui cesse elle-même à l'endroit où se termine le vallon fermé par une butte encore couronnée de ces mêmes calcaires. Ce témoin sert ainsi à relier, par la pensée, les crêtes des collines opposées. Plus loin, toujours dans la même direction, on voit, en débouchant dans la vallée de l’Orbieu, au-dessus de Ribaute, tout le massif montagneux de la métairie de Lavals, qui borde cette vallée au sud-est jusqu'à sa réunion avec celle de la Fourques. L’altitude de ce massif, composé par le groupe d’Alet incliné de 45° au S.-E., est de 300 mètres, et il semble offrir la contre-partie des escarpements de l'extrémité orientale du mont-Alaric, silué au nord-ouest au delà de la vallée, et dont les couches inclinent dans cette dernière direction. Le dessin que nous avons donné (antè, p. 222-114), pris de la montagne au-dessus de Ribaute, représente la portion est et sud du mont-Alarie, vue oblique ment par rapport à son axe, et l’observateur aurait à sa droite, mais un peu en ar- rière, le massif montagneux et aride de Lavals, dont nous venons de parler. A l’ouest de la Grasse, la route de Pradelles parcourt, jusqu’à la vallée des Mattes, un vaste plateau en grande partie formé par les mêmes calcaires que ceux des envi- rons de cette ville. Au delà; le massif qui sépare la vallée de Montlaure du pied du mont-Alaric, et la dépression qui entoure ce dernier, appartiennent comme on la vu aux deux premiers étages nummulitiques.. Les brisures que le soulèvement en 334 FORMATION TERTIAIRE INFÉRIEURE. (N. 2, p. 426.) voûte de la montagne a produites dans son revêtement formé par le troisième ont fait apparaître sur plusieurs points le groupe d’Alet qu’il enveloppe, et permettent de constater que la composition de l’intérieur du mont-Alaric a la plus grande ana- logie avec celle du même groupe d’Alet dans d’autres localités. C’est dans le ravin de la Combe-Saint-Jean, dans celui de Comigne et surtout aux deux extrémités du demi-eylindre, que les déchirures de ses parois ont été les plus énergiques et ont fait affleurer les assises les plus profondes. En continuant au sud de Moux la coupe que nous avons commencée derrière le four à chaux (p. 309-104, et dessin p. 265-57), et, en s’élevant au-dessus de la métairie d’'Alaric, on trouve un calcaire blanchâtre, sub-cristallin, puis des roches de transition éboulées ou déplacées, telles que des calcaires schisteux amygdalins, du quartz cloisonné, des lydiennes, des roches pétro-siliceuses ou des schistes endur- cis, etc. Plus loin, les calcaires amygdalins, verts et rouges, rappelant les variétés de marbre Campan et de griotte, se montrent en bancs épais. Les quartz lydiens et d’autres sont recouverts d’un banc de grès rouge très ferrugineux, puis d’argiles rouges et violettes. Des calcaires et des schistes gris-verdâtre, pénétrés de filons de quartz, apparaissent encore au delà des quartzites. Après l'interruption occasionnée par cet affleurement de roches anciennes qui atteignent près de 200 mètres au-dessus de la plaine, on trouve successivement, en montant ohliquement vers le sommet que l’on voit à gauche du dessin : 4° Grès jaune, gris et violacé. 2% Calcaire gris-jaunâtre, à cassure terreuse , veiné de noir, et calcaire ee compacte, sub-schistoïde « . . . . , . . 1 mètres. 3° Calcaire blanchâtre, noduleux, bréchoïde, sub- cisollin, ou SN à cassure esquillense. "+ … ie ES LE h° Calcaire gris de fumée, Vin FH ue ; 7 b® Calcaire gris, violacé, taché de'jaune. 2". à . | 6° — taché de jaune. F, —., NUE HOUSE ANT MR UME TH RENS TE IER } 8° Marne griscet jauge 1 454. 6100 RON ST AMENNEt © VA IENINNNNERRERSS 9 Grès quartzeux. . . shbotedel ele Meet een BEM 10° Calcaire marneux gris, Ee. RONPTRE er 11° Calcaire compacte, bréchoïde, gris et A e, LER fendillé, pus Le à la grande assise des bords de l’Aude . . . . . . . . . … . 8 42° Grès quartzeux. . . CARE TS RS él) E 15° Calcaire gris-jaunâtre, Ps fendillé RPM 0 SAMI ERRETR TR 14° Poudingue semblable à celui d’ ‘Alet = AVEUX LANCEMENT 15°MMANNES Sn: A nt 49 16° Calcaire compacte, ua ou gris, Fies # crête . sad can de la montagne . . . MUR + HEC COR 47° Marnes violacées formant un talus CRATELTAIP EE TN. © OR NC 18° Calcaire gris compacte. . . : 2 Cu LE 19° Calcaire se continuant jusqu’au is et nn sans ses ; 452 à 28 (N. 2, p. 127.) GROUPE D’'ALET. 335 L'étage nummulitique inférieur manque sur ce point où les calcaires du groupe qui nous occupe ont pris un développement exceptionnel aux dépens des argiles rouges et des poudingues. Peut-être la ponte méridionale de la montagne, que nous n'avons pas étudiée, donnerait-elle une coupe plus complète, les couches les plus basses n’ayant pas élé interrompues comme ici par un îlot de transition qui était resté à découvert pendant toute l’époque secondaire, et qui a été porté dans sa posi- tion actuelle lors du soulèvement de la montagne. Sur la pente nord de celle-ci, nous avons déjà indiqué la présence des couches rouges sous les calcaires de la Combe-Saint-Jean, dont la métairie ne doit son exis- tence qu’à leurs affleurements, et il en est de même dans les ravins qui descendent dans la plaine de Comigne. À son extrémité nord-ouest, au-dessous des Paillassés, une partie du revêtement calcaire ayant été brisée, on voit les assises rouges courbées en cintre suivre la flexion des calcaires du sommet et de la pente nord (voy. pl. HE, fig. 15, 16 et 19). Sur le versant méridional, nous n'avons pas observé d’affleu- rements aussi profonds. Région de l’est. — Le groupe d’Alet, dans la région du sud, reposait soit à strati- fication concordante sur la formation crétacée supérieure aux environs des Bains-de- Rennes et de Sougraigne, soit à stratification discordante sur l’inférieure, autour de Quillan, s'appuyant de même contre le terrain de transition, sur le pourtour du golfe qu’il occupe de Serres à Arques, Veraza et Alet. Le long de la lisière septen- trionale de ce même terrain, 1l est presque constamment masqué par des dépôts plus récents qui l’ont débordé de ce côté, mais de dessous lesquels nous venons de voir qu’il se dégageait au nord pour occuper une étendue assez considérable, quoique toujours circonscrit par eux. Il nous reste donc à chercher ce qu'il devient à l’est, entre le groupe nummulitique du bassin du Rabe et de la Fourques et les montagnes secondaires de la chaîne de Fontfroide. Nous avons dit (1) que, sans doute, le groupe d'Alet se prolongeait encore à l’est d’Albas, et que l’escarpement si pittoresque de l’ermitage de Saint-Victor qui do- mine la rive gauche de la Berre à l’ouest de Gléon semblait en faire partie. On à vu aussi (2) qu’à environ 1500 mètres de Fontjoncouze, sur le chemin de Coustouge, les marnes bleues à Turritelles s’appuyaient sans intermédiaire contre le Jias qui se montrait également à l’est du premier de ces villages. Dans l'intervalle se dresse une chaîne dirigée N.-E., S.-0., composée de calcaires compactes en bancs puissants, réguliers, à cassure inégale, gris de fumée, dégageant sous le choc une odeur fétide et traversés de veinules spathiques. Ces calcaires, qui ne renferment que des traces de coquilles d’apparence lacustre, plongent au N.-0., et c’est à leur pied que sort la fontaine de Fontjoncouze. Tout en restant incertain sur leurs vraies relations stratigraphiques, nous les regardions alors comme pouvant être jurassiques. (1) Loc. cit., p. 25, 1855. (2) Histoire des progrès de la géologie, vol. VI, p. 526, 1856. 336 FORMATION TERTIAIRE INFERIEURE. (N. 2, p. 198.) «Si de Fontjoncouze on prend le sentier qui descend à Portel par les moulins, » on voit les calcaires précédents constituer de grands escarpements, et le torrent » du Cingle se précipite en bondissant dans des gorges profondes et étroites de » l'aspect le plus pittoresque. La direction est N.-E., S.-0., et le plongement au » second moulin est de 45° au N.-0. En continuant à descendre au S.-E. dans cette » petite région du caractère le plus sauvage, on atteint bientôt des couches qui » rappellent les assises inférieures marneuses et arénacées du groupe tertiaire » d’Alet. Aussi conservons-nous beaucoup de doutes sur le véritable horizon des » grandes assises de calcaires sans fossiles que nous venons de mentionner et qui » semblent peu différer de ceux qui supportent l’ermitage de Saint-Victor. Ici » comme à l’ouest de Fontjoncouze, aucune couche d’un âge bien déterminé ne » paraît séparer le lias du terrain tertiaire inférieur. » De plus, nous avions observé au nord de cette région, près de Thézan, de nom- breuses et puissantes assises de calcaires rouges panachés de bleu, schistoïdes, des calcaires gris, compactes, sans fossiles, plongeant à l'O. et venant expirer sous les dépôts quaternaires de la plaine que parcourt la route de Narbonne à la Grasse. Mais nous n’avions pu soupconner leurs rapports avec les précédents, rapports qui nous frappèrent lorsque l'année suivante, descendant des collines de Boutenac vers Thézau, nous vimes se profiler les principaux accidents de terrain entre ce dernier village et la montagne de Saint-Victor, comme le représente le dessin ci-dessus (p. 2214-13) ; nous eûmes alors peu de doutes qu’à l'exception de certains lambeaux du lias, bien reconnaissables d’ailleurs, cette grande série de calcaires qui nous avait tant embarrassé ne représentat le groupe tertiaire inférieur de ce pays. H nous manquait cependant la connaissance de beaucoup de faits particuliers pour corroborer ce premier aperçu; aussi nous empressämes-nous d'accueillir l'offre que nous fit M. Noguës d'étudier l’espace qui comprend les environs de Font- joncouze, de Dones, le massif de Saint-Victor et ses appendices dans plusieurs directions. Bien qu’il reste encore aujourd’hui quelque chose à faire pour la déter- mipation absolue de certames relations stratigraphiques, ce que nous devons à ce zélé naturaliste n’en est pas moins fort important. Le versant nord et nord-est de la montagne de Saint-Victor offre, à plusieurs niveaux, des murailles verticales inaccessibles, séparées par des talus cultivés et auxquels on arrive par les pentes douces de l’ouest et du nord-ouest. Les couches inclinent de 30° à 40° au S. et au S.-0., et leur pied est baigné par le ruisseau le Ripon, qui se jette dans la Berre à peu de distance. La coupe générale montre, à partir du sommet : 4° Calcaire gris constituant trois assises puissantes. 2° Calcaires rougeûtres. 3° Calcaires gris compactes. L° Calcaires marneux rouge lie de vin. 5° Poudingue rouge. {N. 2, p. 129.) GROUPE D'ALET. 337 6° Calcaire gris compacte. 7 Calcaire rouge lie de vin, expâtant des cailloux. 8° Calcaire et poudingue. 9° Calcaire compacte gris. 40° Calcaire rouge noduleux, jaunâtre par places. 44° Grès gris ou verdâtre, formant la base de la montagne et mis à découvert daus le lit du Ripon, au tournant de la route, à l'endroit où elle traverse la chaîne de Fontfroide. C'est sur ces grès qu'est bâtie la métairie de Montplaisir. M. Noguës présume qu'ils peuvent être crétacés, ce qui nous paraît encore douteux, car, d’après les coupes faites de la montagne de Saint-Victor à Dones et de Fontjoncouze à Portel, ils reposeraient sur les calcaires noirs des gorges des moulins dont l’âge nous avait paru si problématique, et qui, à leur tour, semblent s'appuyer contre le Jias du côté de Fontjoncouze et contre les calcaires magnésiens du côté de Portel. La coupe détaillée que nous a donnée M. Noguès, depuis l'entrée des gorges des moulins, en remontant jusqu’au Mourel-de-Malvezy, un peu avant d’arriver à Fontjoncouze, et dont nous avons examiné la plupart des roches d’après les échantillons qu’il a bien voulu nous envoyer, fait connaitre la premiére de ces relations. 4° Calcaire rouge, noduleux, enveloppant des cailloux. 2 Calcaire gris, compacte, avec des strates contournés et des lits minces de calcaire rouge subordonnés. 3° Calcaire enveloppant des cailloux. h° Marne sableuse bleuâtre; niveau de la fontaine des moulins. 5° Couches épaisses de calcaire gris à cassure esquilleuse. 6° Calcaires compactes, noirâtres on brunâtres, fétides, à cassure droite, tranchante, angu- leuse, à très petites esquilles, traversés par quelques veines de calcaire spathique blanc, et renfermant des fragments de test qui, par leurs formes et leur minceur, paraissent tous provenir de coquilles lacustres (Paludines, Planorbes, Lymnées, Cyclades, etc.). 7° Calcaire gris à cassure esquilleuse. 8 Calcaires se divisant en plaques. 9° Calcaire compacte noirâtre. 40° Calcaire marneux, sableux, jaune et rouge lie de vin. 11° Calcaire compacte. 12° Calcaire avec cailloux. 43° Calcaire compacte. 44° Marnes jaunes. À 45° Calcaire compacte. 16° Calcaire noir, fétide, semblable au n° 6, et renfermant des débris de coquilles indéter- minables. D 17° Marne jaunâtre. 48° Calcaire du lias avec Bélemnites. Les assises de la montagne de Saint-Victor, ajoute M. Noguës, forment l'entrée des gorges, et reposent par conséquent sur les calcaires noirs, fétides, fossilifères, repré- sentant ceux de la fontaine de Fontjoncouze. Le tout, plongeant à l'O.-S.-0., atteint SOG. GÉOL, — 2° SÉRIE, T. VI. — Mém. n° 2. h3 338 FORMATION TERTIAIRE INFÉRIEURE. (N: 2, p. 150.) 386 mètres d'altitude au sud de l'Ermitage. Un calcaire compacte, gris de cendre, à cassure esquilleuse, renfermant des nodules concrétionnés, mais dont nous ne con- naissons pas bien le gisement, paraît s'étendre aussi des gorges des moulins vers Thézan. Les calcaires de Dones, prolongement de ceux de Saint-Victor, élevés de 348 mètres au Pech-de-la-Selve, et de 370 à l’ouest de ce village, reposeraient sur les grès de la formation crétacée ; or, si l’on jette de nouveau un coup d’œil sur le dessin déjà cité (antè, p. 2241-13), on sera convaincu que les grandes assises calcaires de Thézan sont la continuation des précédentes au N.-N.-E., et représentent par ‘conséquent une partie du groupe d’Alet. Nous trouvons d’autres preuves de l'extension de ce groupe dans l’examen de certaines collines, aujourd’hui isolées au milieu des psammites et des grès crétacés de cette région. Ainsi la colline de Roque-Longue, située entre Saint-André et Montseret, dirigée N.-N.-E, S.-S.-0., sur une étendue d'environ 1500 mètres, présente à l’'E.-S.-E. un talus abrupt couronné par une crête dentelée de rochers anguleux, et, du côté opposé, une pente douce qui se raccorde avec le fond d’un petit vallon(voy. pl. V, fig. 9). À son extrémité sud, où son altitude est de 166 mè- tres et son élévation au-dessus de la plaine de 70, elle porte les ruines du château et de la chapelle de Montseret (1). Elle est composée, dans sa moitié supérieure, de calcaires blane-grisâtre, durs, compactes, à parties spathiques, à cassure angu- leuse et raboteuse, ouesquilleuse en petit, montrant une multitude de petites Palu- dires, un Bulime? de grandes dimensions et des traces d’autres coquilles lacustres ; au-dessous viennent des marnes blanchâtres, des marnes violettes et panachées, avec minerai de fer en grains, un poudingue à ciment de grès grossier, calcarifère, grisâtre, avec des grains de quartz jaunâtre, des nodules de grès quartzeux gris ou jaunes, souvent entourés par un calcaire gris concrétionné. Cetie assise repose sur les grès et les psammites crétacés d’une manière qui semble être concordante, et le tout plonge de 8° à 10° à l’O.-S.-0. Si du village de Montseret on se dirige vers la route de Narbonne, on trouve, avant de passer la rivière, une seconde colline ayant l’aspect de la précédente, mais moins étendue, et dont les couches plongent à l’'E., de sorte que l’espace com- pris entre elles, disposé en fond de bateau, appartient encore au même groupe supporté par les couches secondaires arénactes (pl. V, fig, 9). D’autres collines iso- lées comme celles-ci, par suite de dislocations et de dénudations ultérieures, se (1) La forme particulière de cette montagne a fait ajouter son nom à celui du village de Saint- André, situé au nord, et appelé Saint-André de Roque-Longue, tandis que le caractère de sa crête a servi à désigner le château qu’elle porte et le village de Montseret, situé à son pied sud. On ne peut guère douter, en effet, que ce nom ne vienne de mons serratus, montagne dentée en scie. Ilest également singulier que cette étymologie soit celle du Montserrat, à l’ouest de Barcelone, dont la forme rap- pelle, mais sur une beaucoup plus grande échelle, celle de Roque-Longue, et qui est aussi composé en grande partie de roches du groupe d’Alet. (N..2, p. 151.) GROUPE D’ALET. 339 voient encore à l’est et au sud de Saint-André, et les rattachent à la ligne d’escar- pement de Thézan à Dones. Au nord de la plaine, les couches rouges du même groupe s'appuient sur les strates secondaires redressés de la Bergerie, à l’ouest de Boutenac, ou à mi-chemin de ce village à Villerouge, et tout le groupe disparaît au nord sous les dépôts qua- ternaires de la vallée de l’Orbieu. A l’ouest, il est borné par les étages nummulitiques qui règnent au-dessus des métairies de Montmigea, de Cabagniol et de Mont- plaisir. On voit, d’après ce qui précède, que si les couches qui composent ces montagnes nous sont assez bien connues, il n’en est pas tout à fait de même de leurs relations, d’une part avec les formations secondaires, jurassique et crétacée, de l’autre avec le groupe nummulitique qui se développe à l’ouest, et sous lequel elles doivent s’enfoncer. Au nord de la route de Narbonne, on peut présumer que les assises rouges de grès et de marnes des environs immédiats de Villerouge appartiennent aussi au groupe d’Alet et s'appuient en biseau sur la tranche des calcaires juras- siques et des dolomies qui affleurent le long du chemin de Boutenac. Ceux-ci sont bientôt recouverts par les psammites crétacés qui portent ce dernier village et qui se relèvent au delà de Gasparet pour former une sorte de bassin arénacé, circonscrit lui-même à l’est par les calcaires du lias de Montredon, etc. Malgré les incertitudes qui nous restent encore, on peut juger que la puissance du groupe tertiaire inférieur dans cette région orientale est aussi considérable que partout ailleurs, et que sa composition, en la considérant dans son ensemble, est aussi peu différente de ce que nous avions vu précédemment. Seulement les divers éléments qui le constituent n’affectent plus, dans leur position relative, cette symé- trie qui nous avait frappé autour d’Alet, de Quillan et de Bellesta. La netteté de ces deux grandes zones de marnes rouges, séparées par une assise calcaire et supportées par des couches puissantes de grès, a disparu das les montagnes qui entourent la Grasse, dans le massif du mont-Alaric, comme dans les mon- tagnes d’Albas et de l’ermitage de Saint-Victor à Thézan. Les alternances de cal- caires y sont beaucoup plus nombreuses, et l’on peut penser que les causes sédi- mentaires y ont éprouvé de plus fréquentes perturbations locales. D'ailleurs, partout même rareté de débris organiques, pour imprimer jusqu’à présent à ce groupe un caractère paléontologique tranché, et l’on serait tenté d’y voir, à peu d’excep- tions près, des dépôts d’eau douce, quelquefois torrentiels, plutôt que des sédiments formés au fond des mers. Région de la Montagne-Noire. — De même que le groupe nummulitique, celui d’Alet se montre très atténué sur les pentes inférieures de la Montagne-Noire. Autour de Montolieu, il comprend d’abord une assise peu épaisse de marnes sableuses grises, blanches, jaunâtres ou lie de vin, puis des calcaires blancs, compactes, écailleux, fragiles, concrétionnés, d’origine exclusivement lacustre, comme le prou- vent les coquilles qu'on y trouve dans toute leur épaisseur, qui est d'environ 310 FORMATION TERTIAIRE INFÉRIEURE. (PET 50 mètres (1). Ils forment, au sud-est de Montolieu, des collines basses, aplaties au sommet, et qui, particulièrement entre la chapelle de Saint-Roch et Arzone, laissent entre elles une sorte de bassin elliptique régulier. Un grès parfois feldspathique, d’une épaisseur variable, se trouve encore entre ces calcaires et les micaschistes du promontoire de Montolieu. Les calcaires qui plongent au S.-S.-0., comme le groupe nummulitique, se montrent également sur la rive droite de la Rougeanne, le long des escarpements (pl. V, fig. S). Au nord de Conques, la coupe suivante (pl. V, fig. 410) fait voir une disposition tout à fait semblable. À partir des couches à Alvéolines, ce sont des marnes sableuses grises, blanchâtres, ou un peu violacées, puis, en face du domaine de Sindilla, un calcaire lacustre compacte, blanchâire, écailleux, de 8 à 10 mètres d'épaisseur, une marne blanche, un second calcaire lacustre noduleux, des imarnes grises sableuses reposant sans doute sur les schistes anciens de la Rouirie (2). Ce système de couches s’observe depuis Cenne jusqu'à Caunes, et l'on peut supposer qu'il se continue dans le départementde l'Hérault, où des lignites paraissent y être subor- donnés à la Caunette et au delà. L'élément calcaire a conservé sur cette limite nord une importance relative plus considérable que les marnes ou argiles qui le surmontent ordinairement, et que les grès qui le supportent. Ces calcaires lacustres de Montolieu et de la vallée de l’Or- biel, près de Sindilla, etc., représentent certainement les calcaires d’Alet, les grandes nappes du cours supérieur de l'Aude, les calcaires de la Grasse, ceux de la région orientale de Saint-Victor à Thézan, comme ceux du mont-Alaric. Ainsi nous retrouvons toujours, à très peu près, dans leur position respective, les trois principales roches de notre groupe inférieur. Celui-ci joue donc un rôle fort im- portant du pied de la Montagne-Noire aux environs de Quillan et de Bellesta, et s'étend à l’est jusqu’à la chaîne secondaire de Fontfroide. Ses limites sont à peu près celles du groupe nummulitique, bien que ces dernières soient un peu plus resserrées, tandis que les dépôts lacustres, venus ensuite, les ont dépassées beaucoup à l’ouest et à l’est. Le bassin de l'Aude, pendant la période tertiaire inférieure, a été porté à deux reprises au-dessus du niveau des mers, après (1) Ces calcaires avaient été mis à leur véritable place en 1844 par M. Rolland du Roquan. Depuis lors, MM. Leymerie et Raulin les ont mentionnés de nouveau (voy. ÆZis/. des progrès de la géologie, vol. IL, p. 37, 1850, où nous avohs fait ressortir l’analogie de cette position avec celle du calcaire Jacustre de Rilly, près de Reims). Plus récemment M. Noulet (Y/ém. sur les coquilles fossiles du calcaire lacustre inférieur du département de l'Aude, 1854) à décrit, sans les figurer, les espèces suivantes provenant de ces calcaires: Pupa montolivensis, Noul., Bulimus primævus, id., B. mon- tolivensis, id., Cyclostoma uniscalare, i1., Physa prisca, 1, Lymnæa Leymerier, id. (2) M. Noulet (loc. cit.) signale dans ces calcaires: Pupa montolivensis, Noul., Bulimus primaævus, id, 2. montolivensis, id, Cyclostoma Brauni, id, Physa prisca, id., Lymnæa Lollandi, id, L. Leymeriei, id., L. atacica, i4., Planorbis primærus, id., P. conchensis, id. Ces fossiles, tous propres au pays, n’ont pas encore été observés ailleurs que sur les deux points que nous venons de décrire, bien que ces couches s’étendent fort au delà de part et d'autre, (N.2, p. 153.) RÉSUMÉ. 3h les derniers dépôts crétacés et après les dépôts nummulitiques. Pendant la période tertiaire moyenne, la mollasse marine a de nouveau succédé aux sédiments lacustres du bassin de Narbonne et de Sigean. RÉSUMÉ. Le terrain tertiaire inférieur du bassin de l'Aude, tel que nous venons de le caractériser et de le diviser en trois parties principales ou groupes, permet et oblige même de supprimer de la nomenclature générale, et comme n'étant point justifiées, la dénomination de système épicrélacé proposée par M. Leymerie, et celles de systèmes ibérien et alaricien introduites par Tallavignes. Ce ne sont plus, en effet, pour nous que des doubles emplois, puisque ces divisions correspondent, aussi exactement qu’on pouvait s’y attendre à une telle distance, avec celles du terrain tertiaire inférieur du nord de la France, de la Belgique et de l'Angleterre. Ainsi notre groupe lacustre, avec ses mammifères d’une part, ses coquilles, ses poissons et ses plantes exclusivement fluviatiles et terrestres, ses marnes gypseuses et ses gypses subordonnés de l’autre, se trouve être parallèle au groupe du calcaire lacustre moyen du bassin de la Seine, tel que nous Pavons limité (1). Les trois étages du groupe nummulilique représentent les sables et les grès moyens, le calcaire grossier et les lits coquilliers du Soissonnais; enfin le groupe d’Alel correspond, dans le bassin de la Seine, à l'ensemble des assises marines, fluvio-marines et lacustres, comprises entre l'horizon de la MVeritina Schnideliana et de la Nummulites planulata, et celui du calcaire pisolithique ou de la craie supérieure ; en Augleterre, à la série de Reading et de Woolwich et aux sables de Thanet; en Belgique, au système lan- denien (Dumont), etc. Nous avons fait remarquer ailleurs (2) combien le groupe tertiaire le plus ancien placé sous l’horizon des Nummulites était constant, non-seulement dans le nord- ouest de l'Europe et au pied des Pyrénées, mais encore dans presque toute la zone nummulitique orientale. Une partie de ces analogies se retrouve dans le dépar- tement des Bouches-du-Rhône et en particulier dans le bassin d'Aix (5), où existent l'horizon du groupe lacustre et celui du groupe d’Alet (groupe des lignites). Quant au groupe nummulitique qui les sépare ordinairement, 1} pourrait y être représenté par le système de couches rouges dont nous avons déjà parlé (4). On a va les motifs qui nous avaient fait adopter provisoirement l'expression de groupe d’Alet pour la (1) Bull. de la Soc. géol. de France, 1° sér., vol. X, p. 172, 1839. — Descript. géol. du département de l'Aisne, p. 73, 1843. — Histoire des progrès de la géologie, vol. IX, p. 447, 1849. (2) Histoire des progrès de la géologie, vol. XIE, p. 220, 1850. — Description des animaux Jossiles du groupe nummulitique de l'Inde, p. 77, 1853. (3) Histoire des progrès de la géologie, vol. IE, p. 724-729, 1819. (h) Nous avons dit, en cffet (Æisi. des progrès de la géologie, vol. IT, p. 747, 1849), qu’en pla- cant les gypses d’Aix sur l’horizon de ceux du bassin de la Seine, on était conduit à mettre l'étage des couches rouges, panachées, sableuses, argileuses ou détritiques au niveau des sables moyens et 3142 FORMATION TERTIAIRE INFÉRIEURE. (N. 2, p. 134.) petite région que nous décrivons; mais on conçoit, que d’après son extension, on pourrait même dire sa généralité, une expression comprenant à la fois toutes les couches marines ou lacustres qui lui correspondent dans divers pays serait pré- férable, et nous pourrions dès aujourd’hui proposer celle de groupe sous-nummu- litique qui répondrait au besoin de la science. M. Vézian, ayant fait une étude particulière des assises nummulitiques des en- virons de Barcelone, y avait établi en 1856 cinq divisions ou étages qu’il a depuis caractérisées et désignées par de nouveaux noms (1). Nous avons fait voir (2) que ces dénominations n'étaient pas nécessaires puisqu'elles désignaient les mêmes coupes que celles que nous avions proposées en 1855 pour le terrain tertiaire infé- rieur des Corbières. Notre terminologie avait, outre la priorité, l'avantage de ren- trer dans les classifications les plus usitées, et d’être basée sur une série complète, saus hiatus au-dessus ni au-dessous, ce qui n’a pas lieu en Catalogne. De la com- paraison de nos divisions avec celles de M. Vézian, il résulte le tableau suivant : GROUPES, ÉTAGES. ÉTAGES. Lacusire.L 0... 00. Grèsiet DOUdINETES.. Terrain tertiaire Supérieur . + "ManréSien.… . HAS à Eu : Terrain nummulitique inférieur { Nummulitique. | Moyen. . . . Igualadien.. . . . . f des Corbières. Inférieur. . . Castellien. . . . | de la Catalogne. | D’Alet ou sous-nummulitique. . Montserrien. . . . . Ce parallélisme a été aussi exposé peu après par M. Vézian (3); mais, si nous sommes d'accord avec lui sur ce point, nous rejetons complétement tout ce qui, dans sa comparaison des formations tertiaires du sud de l’Europe avec celles du bassin de la Seine, est contraire à ce que nous venons de dire. du calcaire grossier, et à regarder le groupe des lignites, placé dessous, comme synchronique de celui des sables inférieurs. Cette présomption se trouve appuyée par les observations que nous a communi- quées M. le marquis de Roys, qui considère les couches rouges de la Provence, placées entre les lignites et le gypse, comme représentant le groupe nummulitique tel que nous le comprenons aujourd’hui. Ces couches rouges existent aussi, dit-il, dans le département du Gard. Ce sont à la base des assises puissantes de poudingues, puis au-dessus des argiles et des calcaires marneux. Dans l'ancien lac d’Alais, dans les tranchées du chemin de fer, à Ners et aux environs de Saint-Hippolyte- de-Caton, elles sont recouvertes par l'équivalent des gypses d'Aix. 11 y a un petit lambeau de ces mêmes marnes, entre le pic-d’Aiguilles, près du confluent du Gardon et le pont de Vie-Blanche, sur la route de Beaucaire à Nimes, où la SUNÈRE Josition discordante des trois formations tertiaires peut être observée. {1} Bull. de la Soc. géol. de France, 2° sér., t. XIV, p. 374, 1857. (2) Zbid., t. XV, p. 308, 1858. (3) 1bid., p. 433. = je in et ÉD (2, p. 155.) FORMATION CRÉTACÉE. 343 TERRAIN SECONDAIRE. Formation crétacée. Les dépôts secondaires ne se montrent que dans les parties orientale et méridionale de notre carte; ils manquent complétement au centre, au nord et à l’ouest. Ils ne paraissent pas avoir jamais existé au nord du massif de Monthoumet, ni à l’ouest de la chaîne de Fontfroide et des collines de Boutenac, puisque les affleurements du terrain de transition au mont-Alaric et à Pellat sont immédiatement recouverts par le groupe d’Alet, et qu’au pied de la Montagne-Noire les couches tertiaires infé- rieures reposent sur les roches cristailines. En 1823, de Charpentier (4) coruprenait, sous le nom de terrain du calcaire alpin et du calcaire du Jura, toute la région des Corbières proprement dite avec le massif de transition de Monthoumet, et, sous celui de terrain de transition, les chaînes secondaires de Saint-Antoine et de Lesquerde avec la vallée qu’elles comprennent depuis Estagel jusqu’à Bellesta. Dans leur Essai d'une carte géologique des Pays-Bas, de la France et de quelques contrées voisines (2), publié vers le même temps, MM. d'Omalius d'Halloy et Coquebert de Montbret ont colorié cette surface, ou du moins une grande partie, comme terrains ammonéens, comprenant le calcaire juras- sique, le calcaire alpin, le lias, le quadersandstein et le muschelkalk. C'est à Dufrénoy (3) que l’on doit l’importante recüfication @avoir, en 1830, placé dans la formation crétacée inférieure tout le système de couches, rangé pré- cédemment dans le terrain de transition, ainsi que celui qui, des environs d’Estagel, s'étend au nord-est jusqu’à l'extrémité de la Clape. En 1841 (4), ce savant y rap- portait aussi toute la chaîne de Fonifroide ainsi que ses appendices, et, étendant la teinte verte de la carte géologique de la France jusque dans les vallées de l’Orbieu et du Rabe, il regardait par conséquent comme du même âge certaines parties du groupe d’Alet, et même des couches nummulitiques moyennes. Toutes les assises créta- cées plus récentes situées au sud, entre le massif de transition et la chaîne de Saint- Antoine, étaient confondues sous la même teinte verte, tandis que la région des Cor- bières, au nord de ce même massif, et les collines de Boutenac au nord-est, c’est-à-dire les poudingues des plateaux, le groupe nummulitique, celui d’Alet et une portion de la craie supérieure, étaient coloriées en jaune, teinte consacrée à la craie blanche et à la craie supérieure. (1) Zssai sur La constitution géognostique des Pyrénées, p. khh, in-8 avec carte. Paris, 1823. — Voyez Histoire des progrès de la géologie, 1. AV, p. 473, 1851, ett. VI, p. 525, 1856. (2) Anx. des mines, t. VIX, 1822. — Mémoire pour servir à une description géologique des Pays- Bas, etc., in-8. Paris, 1826. (3) Mémoires pour servir à une description géologique de la France, t. IX, p.64, 76 et 426, 1854. (a) Carte géologique de la France en 6 feuilles. Paris, 1841. 344 FORMATION CRÉTACÉE. (M. 2, p. 476.) Cependant, en 1838, M. Marcel de Serres (1) regardait encore les calcaires de la Clape comme jurassiques, mettait toutes les couches nummulitiques dans la forma- tion crétacée, et les montagnes des environs de Quillan, d’Axat et le pic de Bugarach, dans le terrain de transition. M. Rolland du Roquan (2) a donné quelques indica- tions qui ont peu avancé celte partie de la stratigraphie du pays. En 1846, M. Leymerie (3) apporta, dans le groupement et la distribution desroches tertiaires inférieures et crétacées, des modifications importantes qui n’ont pas été assez appréciées ou que peut-être l’auteur n’a pas fait assez ressortir. Il réunit sous une même teinte, ainsi que nous lavons dit, les groupes nummulitiques et d’Alet, puis sous une autre toutes les couches crétacées, c’est-à-dire qu'il établit la coupe générale la plus rationnelle qu'on pût faire alors. On à vu aussi (4) com- ment, sans entrer dans aucun détail stratigraphique ni géologique, il avait cepen— dant proposé de diviser en trois étages la formation crétacée des Corbières; mais ces‘divisions n’ont pu se maintenir après un nouvel examen des faits. Nous avons étudié en 1853 la série des couches crétacées des environs des Bains- de-Rennes (5), et nous avons montré quelle était la répartition des diverses faunes, depuis les bancs à Æxogyra columba qui reposent sur le terrain de transition jus- qu'aux marnes bleues supérieures que recouvre le grès tertiaire d’Alet. L'année sui- vante, nous avons désigné cette série qui constitue les montagnes depuis les Bains jusqu’à Soulatge et les environs de Padern, ainsi que le versant occidental de la chaîne de Fontfroide et les collines de Boutenac, sous le nom de formation crétacée supérieure, tandis que nous comprenions sous celui de formation crétacée inférieure tout le reste des couches de la même période, situées dans les parties orientale et méridionale de notre carte. Nous continuerons à employer ces dénominations, non-seulement parce qu’elles sont commodes, mais encore parce qu’elles sont l'expression la plus exacte des faits (6). Rien n’est plus tranché que les caractères stratigraphiques, pétrogra- phiques et paléontologiques de ces deux divisions, et leurs différences sont telles que, si l’on ne considérait que ce pays, on pourrait les regarder comme les types de deux terrains séparés par un laps de temps énorme. Leur discordance constante (4) Notice géologique sur le département de l'Aude (Actes de la Société linnéenne de Bordeaux, t. X, Are livr., 1838). (2) Notice géologique sur le département de l'Aude (Annuaire statistique el administratif de l'Aude pour 1844, p. 212). ê (3) Mémoires de la Société géologique de France, 2° s6r., &. 1, 1846. (4) Histoire des progrès de la géologie, t. IV, p. 474, 1851. (5) Bull. Soc. géol. de France, % sér., t. XI, p. 185, 1854. (6) On pourrait aussi, pour la commodité du langage et à un point de vue plus général, désigner sous le nom de formation crélacée supérieure l'ensemble des dépôts qui constituent pour nous les groupes de la craie blanche et de la craie tuffeau tels que nous les avons limités (Æist. des progrès de la géologie, t. IV, p. 4), et sous celui de formation crétacée inférieure les groupes du gault et néocomien. (N.2, p. 157.) RÉGION DU SUD. 545 est en effet beaucoup plus prononcée que celle qu’on pourrait observer entre les assises crétacées les plus élevées et le grès de Carcassonne. La formation crétacée supérieure se montre dans deux régions tout à fait séparées. L'une, au nord-est, occupe le plateau des bois et le versant occidental de la chaîne de Fontfroide , puis la partie des collines de Boutenac, qui lui fait face à l’ouest, au delà de l’Ausson, comprise ainsi entre le las, le groupe d’Alet et quelques par- ties de la formation inférieure; l’autre, au sud, s'étend de la rive gauche de la Sals, en face de Cassaigne, par les Bains-de-Rennes et Soulatge jusqu’à Padern, au con- fluent de la Valette et du Verdouble, appuyée au nord contre le terrain de transition, au sud et à l’est contre la formation crétacée inférieure, et s’enfonçant à l’ouest sous les dépôts tertiaires. La formation crélacée inférieure, beaucoup plus développée, se montre dans presque toute la partie orientale et méridionale de notre carte, sans apparaître nulle part à l’ouest, au nord ni à l’intérieur du quadrilatère qu’elle représente. Les caractères orographiques et pétrographiques distinguent, au premier coup d'œil, ses roches de celles de la formation supérieure, et sa distribution géographique n’est pas moins nettement tracée à la surface du pays. Il n’en est pas toujours de même par rapport aux autres roches secondaires plus anciennes. Formation crétacée supérieure. On vient de dire que les couches rapportées à cette première division occupaient deux régions distinctes fort éloignées l’une de l’autre; de plus, les différences que l'on remarque entre elles sont presque aussi prononcées que celles qui séparent les séries crétacées supérieure et inférieure, et cette circonstance s’accorde avec la difficulté de retrouver aujourd’hui les points par lesquels pouvaient commu niquer les eaux où leurs dépôts se sont formés. La région crétacée supérieure du sud étant beaucoup plus complète que celle du nord-est ou du bassin de l’Ausson, ses relations stratigraphiques étant plus claires et ses divisions mieux caractérisées, nous la décrirons la première en suivant la marche que nous avons déjà adoptée. RÉGION DU SUD. Dans la partie occidentale de la région désignée sous le nom de Montagnes des Bains-de-Rennes, de Sougraigne et de Soulatge (antè, p. 23-26), nous avons carac- térisé les quatre étages suivants, compris entre le massif de transition de Monthou- met au nord, les grès de la base du groupe d’Alet au sud-ouest, la formation cré- tacée inférieure au sud et à l’est. 4° Marnes bleues. 2° Grès, marnes, premier niveau de rudistes et couches de Sougraigne. ,{ Calcaires marneux gris, jaunes-ou bruns à échinides. TT durs, gris, bruns, noduleux, poudingue et second niveau de rudistes. L° Calcaires marneux à £xogyra columba, Orbitolina concava, et grès. SOC. GÉOL. — 2° SÉRIE, T. VI. — Mém. n° 2. ha 346 FORMATION CRÉTACÉE SUPÉRIEURE. (N. 2, p. 438.) Ces étages sont disposés du N. au S. dans l’ordre de leur ancienneté. Ils forment, par leur ensemble, une zone allongée de l'E. à l’O., des environs de Montgaillard et de Rouffiac jusqu’à la rive gauche de la Sals, en face de Cassaigne, sur une lon gueur de 5 lieues et une largeur de 2 au plus. Les couches, dirigées générale- ment aussi de l'E. à l'O., comme la limite du terrain de transition, plongent au S. ou au S.-S.-0. sous un angle d’autant plus grand, qu’elles sont plus anciennes et plus voisines du terrain de transition contre lequel-elles s'appuient. Elles dispa- raissent à l’ouest sous le groupe tertiaire d’Alet; au sud et à l’est elles semblent buter contre les couches redressées de la formation inférieure, courant aussi géné- ralement E.-0. Sur la limite nord de la zone, à la métairie de Lausadel, à quel- ques centaines de mètres des schistes de transition, ces couches crétacées atteignent 841 mètres d'altitude (au lieu de 641, voy. p. 235-27) et 760 aux environs de Fourtou, tandis qu’au sud, non loin de leur contact avec la formation inférieure, elles ne sont qu'à 309 mètres (Rouffiac), à 416 (Soulatge) et à 165 (Bugarach). Les marnes bleues, à la jonction de la Sals et du ruisseau de Sougraigne, sont à 319 mètres. La coupe, fig. 1, pl. IV, reproduction corrigée et complétée de celle que nous avons donnée en 4854, est prise dans la partie occidentale de cette région. C’est une projection sur un plan vertical dirigé N., S., presque perpendiculairement à la direction des couches, des détails observés depuis la crête rocheuse qui domine Jandou jusqu’au pont de la Sals. Quoique peu étendue, cette coupe est la plus com- plète et en même temps la plus facile à vérifier de toutes celles que l’on tracerait dans cet espace. Elle pourra donc nous servir de base et de terme de comparaison pour la descriplion des étages dont nous suivrons les caractères et la distribution dans les autres parties de cette région secondaire. Premier étage. — Marnes bleues. L'étage crétacé le plus élevé comprend cette assise de marnes bleues que nous avons d’abord fait connaître (1), et dont la position est nettement indiquée dans la coupe générale (pl. EV, fig. 1). A la séparation de ces marnes et des grès inférieurs d’Alet qui les recouvrent, on observe parfois une sorte d’alternance de plusieurs bancs de grès et d’argile schisteuse bleue. Les marnes proprement dites qui vien- nent ensuite sont grises ou d’un gris-bleuâtre plus ou moins foncé. Elles sont plus ou moins solides, souvent schistoïdes, très pyriteuses par places, quelquefois sa- bleuses, micacées, et passent à une sorte de grès noirâtre. Elles renferment des lits minces discontinus, ou des rognons déprimés, à surfaces noduleuses et ferrugineuses, composés de grès calcarifère compacte, gris foncé et d’argile brunâtre endurcie. On y trouve d’autres rognons déprimés de marne ferrugineuse brune, micacée, (1) Coupe géologique des environs des Bains-de-Rennes suivie de la description de quelques fossiles de cette localité (Bull. de la Soc. géol. de France, 2 sér., t. XI, p. 185, avec une planche de coupes et cinq de fossiles ; 23 janvier 1854). (N. 2, p. 459.) RÉGION DU SUD. 347 composée de donze à quinze zones minces, concentriques, avec des fragments charbonneux. Queques-unes plus compactes, brunâtres, pesants, paraissent contenir du fer carbonaté impur. Enfin on y remarque aussi des lits de 2 à 8 centimètres seulement d'épaisseur, très réguliers, à surfaces noduleuses, composés d’un grès gris à grain fin et très tenace. La coupe (pl. IV, fig. 3), prise au-dessus du confluent du ruissaue de Sougraigne avec la Sals, montre tout le fond de la vallée creusé dans les marnes bleues, recouvertes au sud par les grès tertiaires et reposant au nord sur les grès et les marnes du second étage crétacé. Les marnes bleues peu épaisses vers le haut des escarpements de la vallée des Bains, atteignent déjà 30 mètres dans le ravin de la Brèche, et elles augmentent comme les grès, en s’abaissant au S.-S.-0. L’escarpement abrupt qui borde la rive gauche de la Sals, a et auquel est adossé le moulin Tiffeau, à 1 kilomètre en amont des Bains, montre vers le bas la superposition des grès aux marnes crétacées. Les fossiles nous ‘ont paru rares dans ce talus; mais c’est dans le lit même de la rivière elsur sa rive droite, à 100 mètres en amont du moulin, lorsque les eaux sont basses, qu’ils sont fort abondants. M. E. Dumortier, qui, dès 1852, nous fit con- naître ce gisement placé précisément sur le premier plan du dessin que nous avons donné (p. 225-27), y avait recueilli une série d'espèces fort intéressantes que nous avons décrites et dont le nombre a été augmenté par des recherches ultérieures. Les coquilles et les polypiers très fragiles, souvent calcinés, ne peuvent être obtenus en bon état qu'avec beaucoup de précautions. Malgré leur abondance, les individus ‘complets sont assez rares, et le test a souvent éprouvé une altération particulière qui fait apparaître sa structure comme réticulée. On n’observe d’ailleurs les fossiles que sur une épaisseur de À mètre à 1,50, et tout le reste de la masse paraît en être dépourvu. Ils sont fréquemment à l’état de moules, ou bien” le test est partielle- ment détruit et rend leur détermination spécifique assez difficile. Nous y signalerons les espèces suivantes, en renvoyant pour les détails au mémoire précité, et pour les espèces nouvelles reconnues depuis lors à la partie paléontologique du présent travail qui paraîtra ultérieurement. Cyclolina Dufrenoyi, 3. Haime, Trochosmilin Dumortiert, id., T. granifera, id., T. nffeauensis, id., T. nov. sp., Rhabdophyllia salsensis, id., Cyclolites undulata, Blainv., GC. discoidea, id., var. corbierensis, C. numismalis ?, Lam., Serpula amphis- bœna, Gold.? (Gastrochæna), Teredo Deshayesi, d’Arch., Analtina royana, d'Orb.?, Poromya lata, Ed. Forbes, Crassatella regularis, d'Orb.,C. trapezoidalis, Rœm., Cor- bula striatula, Gold. id., var. a, C. indét., Tellina fragilis, d’Arch., T. Venei, 1d., Astarte similis, Munst., Gold., J’enus sublenticularis, d’Arch., Cyprina, voisine de la C. cordiformis, d'Orb.??, et une autre de la €. oblonga, id.?, Cardium Ttierianum, Math.?, C. Raulinianum, d'Orb.??, C. Villeneuvianum, Math., C. subguttiferum, d’Arch., C. corbierense, id., C. atacense, id., C. indét., fsocardia ataxensis, d'Orb., TZ. pyrenaica, id., Arca Dumortieri, d’Arch., A. Dufrenoyi, id., A. indét. Nucula semi-lunaris, de Buch? N. Ramondi, d’Arch., Mytilus?, Pinna bicarinata, Math., 348 FORMATION CRÉTACÉE SUPÉRIEURE. (N. 2, p. 140.) Lima ovata, Ræm. L. indét. (grande espèce voisine des L. chypeiformis et santonensis, d'Orb.),Pecten quadricostatus, Sow., id., var., P. Dumortieri, nov. sp. (1), Spon- dylus spinosus, \d., Exogyra auricularis?, Gold. (non'id. Brong.), E. spinosa, Math., Ostrea (fragment), Dentalium alternans, Müll.?, Bulla Palassoui, d’Arch., B. ovoides, id., B. Baylei, id., Natica lyrata, Sow., N. bulbiformis, id., N. Requieniana, d’Orb., N. Orbignyi, d’Arch., N. Matheroniana, d'Orb., N. molinæ, nov. sp., N. salsensis, nov. sp., Ringicula Verneuili, d'Arch., Tornatella Beaumonti, 1d., T. Charpentieri, 14., Trochus Lapeirousei, id., T'urbo?, indét., Turritella mulh- lineata, Müll., T. Prevosti, d’Arch., T. voisine de la T. Fittoniana, Gold., Chem- nitzia, indét., Cerithium disjunctum, Gold. (non id. Sow.), C. Barrandei, d’Arch., C. crebriformis, Zek., C. indét., Fusus cingulatus, Sow., F. Dumortieri, &’Arch., F. Leymeriei, id. 0 Han id., F. salsensis, id, F. Roland id., F. air id, F1, Var, a JE nl id., et une ou deux espèces nouvelles, Rostellaria pyrenaica, d'Orb., À. An Sow., À. securifera, Ed. Forbes, R. Nülssoni, Müll.? R. tiffeauensis, &’Arch., R. corbierensis, id., R. costata, Sow.. A cteonella lœævis, d'Orb.??, Buccinum rennense, nov. sp. (très petite espèce), Vau- hlus, indét., T'urrilites acuticostatus, d'Orb.?, Hamites plicatilis, Sow.?, Ammoniles, indét., voisine des À. Durga et Cala, Ed. Forbes. En remontant la rive gauche de la Sals, on voit les marnes bleues, toujours 7e- couvertes par les grès inférieurs d’Alet, plonger fortement au N. vers la métairie de la Hille où elles participent au soulèvement de la Ferrière. Sur le versant opposé de la colline après ce moulin, elles occupent la même position et plongent en sens inverse. * Si l’on prend, au contraire, le chemin de Sougraigne, elles forment le lit du ruisseau à la hauteur de la Borde-Nove (pl. IV, fig. 3), et s'élèvent dans le ravin qui longe cette métairie à l’est. Au delà elles sont interrompues par les grès tertiaires qui des- ceudent jusqu’au fond de la coupure, puis elles se relèvent de nouveau et atteignent jusqu'à 40 mètres à l'extrémité d’un petit promontoire dont nous avons déjà parlé, sur la rive gauche du cours d’eau et en face du tournant du chemin. La vallée est due à une brisure dont les effets ont été assez complexes, et les grès tertiaires sem— blent plonger sous les marnes crétacées de la rive opposée. Avant le village de Sou- graigne à Champ-de-Longue, ces marnes semblent alterner avec de petits banes de grès comme au moulin Tiffeau. A partir de ce point, les grès tertiaires, les marnes (1) Cette coquille remarquable, que M. Dumortier a trouvée depuis peu, est sub-circulaire, renflée vers les crochets, et d'environ 413 centimètres de haut, sur 12 de large et 6 à 7 d'épaisseur. Le test est composé de deux parties comme dans les Spondyles : l’une, interne, épaisse, surtout dans le voisinage des crochets, est très altérée dans les échantillons que nous possédons ; l’autre, externe, d'apparence cornée, mince, fragile, et dont la surface très uniforme ne présente que des stries concentriques, régu- lières, très fines, très rapprochées, à peine visibles à l’œil nu. Gette espèce est beaucoup plus renflée que ses congénères à surface unie ou striée concentriquement, telles que les P. disciformis, Schübl., corneus, Sow., circularis, Mant, semicingulatus et suborbicularis, Munst. Gold., etc., et, quoique encore imparfaitement connue, elle est trop distincte de toutes les autres pour que nous hésitions à les nommer dès à présent, (N. 2, p. 141.) RÉGION DU SUD. bleues et toutes les couches crétacées sous-jacentes relevées et plongeant de 25° au S.—S.-0., constituent une sorte d’amphithéâtre au nord-ouest de Sougraigne. On y observe de haut en bas la série suivante lorsque, de l’escarpement qui le limite au nord-ouest, on descend au S.-E. vers le village, de manière à couper les couches un peu obliquement : ! 4° De 3° 5° 6° 7° 8° 9° Grès tertiaire d’Alet, micacé, avec des traces de végétaux charbonneux. Marnes crétacées gris-bleu, avec de petits lits de grès subordonnés, des rognons argileux endurcis et des rognons d'argile rouge ou grise, très ferru- gineux, renfermant la Crassatella regularis, d'Orb., une Corbis nou- velle, une Cyprine voisine de la €. cordiformis, d’Orb., de petits Cardium, \'Ostrea proboscidea, d'Arch., etc. . . . ; Calcaire gris noduleux, très dur, rempli de rudistes (Radiolites e et HE tes), de polypiers, etc. . . . PAL 4e e Marne grise micacée, avec Ph Doéen te neo) Miln. Ed. etJ. Haïme, P. voisin du P. variolaris, id., id., Séephanocænia, Cyclolites, nov: sp., Meandrina radiata, Mich., Placosmilia arcuata, Miln. Edw. et J. Haime, 2. rudis, id., id., ou 2. Parkinsont, id., id.? Natica, voisine de la N. Dupinii, d'Orb., Cerithium rennense, d'Arch., C. nov. sp., ROSLEIORTG MOVE IS D RER RE EE : Psammite brun-jaunâtre ou grès micacé tire avec Ci Délires re spherica, Lam., C. elliptica, id., Placosmilia rudis ou Parkinsoni, Miln. Edw. et J. Haime (7urbinolia, id., Mich.), P. arcuata, id., id. P. nov. sp., Ællipsosmilia où Montlivaultia rudis, Miln. Edw. et J. Haime (Cyathophyllum, id., Sow.?), peut-être aussi serait-ce le Trochosmilia tiffeauensis, 3. Haime? plus complet que l'individu qui a été figuré, Zrochosmilia complanata, Miln. Edw. et J. Haime, 7. uri- cornis, id., id., 7. Dumortieri? J. Haime, Pachygyra labyrinthica, Miln. Edw. et J. Haine, Placosmilia cuneiformis, id, id., Astræa formosissima et formosa, Mich., Meandrina ataciana, id? Agaricia circularis, id., spongiaires 2 espèces, Vatica Matheroniana, d'Orb.? N. lyrata, Sow.? N. salsensis, nov. sp., N. Noguesi, nov. sp., Turbo, nov. sp., Scalaria (fragment voisin de la S. Dupiniana, d'Orb., Pleu- rotomaria submutabilis, nov. sp. (Cette coquille élégante rappelle tout à fait certaines espèces de l’oolithe inférieure, entre autres le P. muta- bris) dOrb:) Nue Marne schisteuse et ne lune, Calcaire gris compacte, à cassure esquilleuse, avec êtres ne et beaucoup de fragments de coquilles indéterminables. Les plans des cou- ches, parfaitement réguliers, sont ondulés à la surface. Grès gris, marneux, un peu micacé, passant à la couche suivante. Psammite gris, plus ou moins ferrugineux, calcarifère, micacé, moins sableux que le n° 5 et rempli de fossiles. Crassatella regularis, d'Orb., Lucina indét., Vucula producta? Nils., Pecten quadricostatus, Sow., Exogyra conica, Sow., Dentalium, Natica Matheroniana, 'Orb., N. Orbignyi, 'Arch., N. lyrata, Sow., N. molinæ, nov. sp., !V. sou- graignensis, nov. sp., M. salsensis, nov. sp., AV. nov. sp., (voisine de la 349 6 mètres. 25 350 FORMATION CRÉTACÉE SUPÉRIEURE. (N. 2, p. 142) NN. ervyna, d'Orb.), N. Noguesi, nov. sp. AV. nov. sp. (rappelant la N. Dupinii, d'Orb.), Avellana, nov. sp. (très voisine de l’A. Archia- ciana, d'Orb.), Trochus sougraignensis, nov. sp. (1), 7! indét., Æo- &.”cArchiaciana, d'Orb. (2), Turbo, voisin du T. Guerangeri, d'Orb., 3 mdét., Delphinula radiata, Zek., Phasianella gosauica, id., Tur- “eda multlineata, Müll., 7. Noguesi, nov. sp. (3), 7. nov. sp., T. weér, (moule), 7. indét. (moule rappelant celui de la Pyramidella canaacuiata d'Orb.),Cerithium ataxense, d’'Orb., C. crenatum, Brocc. m Gold, id., var., C. pseudocoronatum, d'Orb. (Terebra coronata, Sow. ), Verineaindét. (moule voisin de celuide la N. monilifera, d'Orb.) Rostellaria granulata, Sow., id., var. elonguta, R. simplex, d'Orb., R. plicata, Sow.? R. Requieniana, d'Orb., Pterocera? indét.. . . 10) mètres. 10° Calcaires gris, durs, noduleux, compactes en bancs alternant avec des MATNES. s'ulundut! lon lite) 2 HIT Nibinet SH PURE Te 41° Banc de rudistes et de polypiers, sembiable au n° 3 et paraissant en être un fragment déplacé. 42% Marne bleue et grise avec fossiles. 13° Calcaire gris-brunâtre alternant avec des marnes de même teinte. 14° Marnes grises et bleues du n° 2, reparaissant ici par suite de la faille qui a relevé tout l’escarpement au nord-ouest, La Lima ovata, Rœm. se trouve à la partie supérieure de cette assise dans laquelle M. Dumortier et nous avons recueilli les fossiles suivants, ainsi que d’autres déjà mentionnés dans l’assise n° 9 : Cyclolina, Placosmilia arcuata, Miln. Edw. et J. Haime, 2 Trochocyathus, dont un très voisin du 7. cupula, id., Trocho- smilia, Crassatella regularis, d'Orb., Arca Dufrenoyi, d'Arch., Nu- cula Ramondi, id., Dentalium decussatum, Sow., Natica bulbiformis, id., IV. salsensis, nov. sp., N. molinæ, nov. sp., Trochus sougrai- gnensis, nov. Sp., Phorrus, indét., Cerithium crenatum, Brocc. in Gold., C. pseudocoronatum, d'Orb. (Terebra coronata, Sow.), Rostel- laria granulata, Sow. 45° Dans le ravin du ruisseau qui longe le village à l’ouest reparaissent les calcaires qui correspondraient à la couche n° 3. Les marnes bleues très épaisses règnent sous le village de Sougraigne, plongent au S. vers la montagne et constituent les escarpements de la rive droite au-dessus du moulin. Elles sont recouvertes par les grès tertiaires d’Alet, et le promontoire qui supporte les maisons serait dû à deux failles situées l’une en decà et l’autre au delà. Les marnes se prolongent ensuite vers l'E. jusque près des Clamens, où se re- lèvent les calcaires du second étage. La série précédente n’a pas toute la netteté désirable; les couches coupées en (1) Il est singulier qu’une coquille aussi répandue n’ait pas encore été décrite; sa forme rappelle un peu le 7. Guerangeri, d'Orb., mais ses tours excavés, les bourrelets qui accompagnent la suture, comme dans le 7° Astierianus, d'Orb., les plis noduleux et obliques des tours supérieurs disparais- sant sur les derniers, suffisent pour la distinguer au premier abord. (2) Le seul échantillon qui a servi à établir cette espèce était probablement un individu jeune. (3) Coquille très variable, voisine de la 7. Fttoniana, Gold. (N. 2, p. 5.) RÉGION DU SUD. 351 biseau, par rapport à leur direction et à leur inclinaison, ont pu être affectées aussi par quelques dislocations difficiles à constater, mais qui auraient eu pour résultat de faire affleurer la même assise à différents niveaux. Nous reviendrons d’ailleurs sur cette coupe dans laquelle nous n'avions à considérer en ce moment que la partie supé- rieure (assise n° 2). En supposant exacte la manière dont nous comprenons le soulève- ment des couches de la rive gauche en face du village, les marnes bleues manqueraient au sud de la faille, les grès tertiaires courbés en voûte, comme les calcaires crétacés, reposent directement sur ces derniers, ainsi qu’on le voit en redescendant vers Bugarach. L’étendue géographique des marnes bleues est donc très faible, et les caractères particuliers de leur faune leur donnent seuls une certaine im- portance. En effet, de 105 espèces qui ont été recueillies sur deux points seulement (4 rhizo- pode, 12 polypiers, 1 annélide, 38 conchifères, 49 gastéropodes, 4 céphalopodes), nous avons pu en caractériser 90, et 15 sont restées indéterminées, par suite du mauvais état des échantillons. Des 90 espèces déterminées, 49 étaient déjà connues, et 4 ou près de la moitié sont signalées comme nouvelles. 5, déjà décrites, étant propres à la localité qui nous occupe, il en reste ainsi 44 dont nous avons à recher- cher le gisement dans d’autres pays. On pouvait s'attendre à trouver la plus grande somme d’analogie avec quelque assise crétacée du midi de la France, soit au sud-est, soit au sud-ouest, mais c’est sur le versant nord des Alpes, c’est dans la craie de la vallée de Gosau et d’autres localités voisines du Salzbourg, que nous rencontrons 14 ou près du tiers des espèces identiques avec celles des marnes bleues (Cyclolites discoidea, €. undulata, Natica lyrata, N. bulbiformis, N. Requieniana (N. angulata, Zek.), Cerithium disjunctum, C. crebriformis, C. crenalum, C. pseudocoronatum, F'usus cingulatus, Rostellaria læ- viuscula, R. costata, R. granulata, À cteonella lævis), et, ce qui est digne de remarque, c’est qu’à l'exception de la dernière, qui est d’ailleurs fort douteuse, ces espèces, sont très abondantes de part et d'autre. 2 espèces propres aux marnes bleues et très répandues aussi (Cerithium Barrandei, Turritella Prevosti) ont la plus grande res- semblance avec des formes de ces mêmes Alpes septentrionales (Cerithium pustulo- sum, Turritella Fittoniana). Enfin le Fusus Dumortieri ne paraît être qu’une modifi- cation de forme du F. cingulatus, dont il reproduit tous les ornements avec une singulière fidélité. 5 espèces (Cyclolites undulata, Cardium Ttierianum, C. Villeneuvianum, Lima ovala, Exogyra spinosa) se montrent dans les assises crétacées supérieures des départements des Bouches-du-Rhône et du Var (les Martigues, le plan d’Aups, le (Beausset, etc.). 3, Natica lyrata, N. Requieniana, A cteonella lœvis, qui existent aussi à Gosau, se trouvent dans les sables et les grès d'Uchaux (Vaucluse). De plus, la Turritella Prevosti est extrèmement voisine de la T. uchauxiana. k espèces (Corbula striatula, Dentalium alternans, Turritella multilineata, Rostellaria Nilssoni) appar- tiennent aux couches des environs d’Aix-la-Chapelle, où le Rostellaria granulosa et 352 FORMATION CRÉTACÉE SUPÉRIEURE. (Ne 2 p. 144.) les Fusus Decheni et Nœggerathi, pourraient aussi être regardés comme y représen- tant le Rostellaria lœviuscula et nos Fusus Leymeriei et corbierensis. 5 autres (Crassa- tella trapezoidalis, Astarte similis, Isocardia ataxensis, N'ucula semilunaris, Lima ovata) ont été citées çà et là dans le nord et le centre de l'Allemagne, dans les étages du pläner (Strehlen, Haldem Kieslingswalda, Isburg, Alfeld, etc.); 3 dans le premier étage de la craie tuffeau (Serpula amphisbæna, Hamites plicatilis, Pecten quadricostatus) ; la dernière remonte dans le premier groupe où existe également le Spondylus spinosus. 1 forme très douteuse aurait son analogue dans le gault (Cardium Raulinianum), 1 dans le premier étage ou craie jaune du sud-ouest (Anatina royana) ; 2 sont représentées à une immense distance de ces points, dans les lam- beaux crétacés de la presqu’ile occidentale de l'Inde (Poromya lata, Rostellaria securifera. Enfin l’Arthemis lenticularis de cette dernière localité pourrait encore être représentée par la J’enus sublenticularis, très répandue dans les marnes bleues. Des 90 espèces déterminées, h seulement (Cyclolites discoidea, Isocardia ataxensis, Pecten quadricostatus et Spondylus spinosus) ont été signalées dans les couches cré- tacées du troisième étage du même pays, et un beaucoup plus grand nombre dans le second, surtout dans les couches de Sougraigne, sur lesquelles nous reviendrons ci-après. Ainsi la presque totalité des fossiles connus dans cet étage appartient au groupe crétacé supérieur et au premier étage du second ou de la craie tuffeau; mais le manque d'espèces bien caractéristiques ne permet pas de préciser, quant à présent, son synchronisme avec un niveau déterminé dans d’autres parties de la France, car les analogies les plus prononcées ne se montrent qu'avec des localités fort éloignées géographiquement. Si l’on considère en outre qu’au milieu de cette faune il y a jusqu’à présent absence d’échinides, de bryozoaires, de rudistes, de brachio- podes(1) et d'Inocérames, une très grande rareté de céphalopodes et surtout d’os- tracés, dont nous n’avons vu qu'un échantillon de chacune des espèces douteuses que nous avons citées, tandis que les conchifères et les gastéropodes sont à peu près en même nombre, on en conclura que les marnes bleues se sont déposées sous l’in- fluence de causes locales entièrement différentes de celles qui présidaient dans le même temps à la formation des sédiments crétacés de l’ouest de la France. Ces causes étaient, au contraire, assez analogues à celles de régions fort distantes situées particulièrement vers le nord-est (2). (1) L'absence ou la rareté des brachiopodes dans la plupart des derniers dépôts crétacés est un caractère négatif qui s’observe fréquemment aussi dans les premiers dépôts tertiaires et qui rattache encore l'une à l’autre ces faunes qui se sont immédiatement succédé. (2) Voyez pour l’âge des couches crétacées des environs d’Aix-la-Chapelle : Æistoire des progrès de la géologie, vol. IV, p. 152; pour celles de la Provence, tbid., p. 483 et 519; pour celles du Salzbourg, 4bid., vol. V, p. 129 ; pour celles du nord et du centre de l'Allemagne, 2bëd., p. 194-312 ; enfin, pour celles de l'Inde, #bid., p. 414. (N. 9, p. 45) RÉGION DU SUD. 353 Deuxième étage. — Grès, marnes, premier niveau de rudistes et couches de Sougraigne, De nouvelles observations nous ont fait apporter quelques changements à la composition de cet étage tel que nous avions admis d’abord. En amont du village des Bains on voit succéder aux marnes précédentes des bancs minces de grès, des marnes et des psammites alternants. Cette assise com- plexe, de 16 à 18 mètres d'épaisseur totale, se voit sous les marnes bleues, à h00 mètres au sud des Bains, sur la rive gauche de la Sals. Les bancs nombreux ont une inclinaison tout à fait exceptionnelle de 45° au S. Ils ont été coupés dans le tracé du nouveau chemin. On peut aussi les étudier en face, sur la rive droite, où ils forment un escarpement abrupt, bordant le coude que fait la rivière en cet endroit. On y observe : 1° Grès gris, solide, divisé en plusieurs bancs. . . . HT OURS a lunettes. 2 Grès gris solide, micacé, à grain moyen, avec quelques HA noirs, bril- lants, de charbon ou de jayet. La surface des bancs offre des empreintes qui paraissent dues à des Fucoïdes. . . . . 0,30 3° Cinq bancs d’inégale épaisseur de grès micacé, es au Pons gris à l'intérieur, reulermant par places de petits cailloux de quartz. . . 2,00 h° Lits minces de psammites gris, micacés, dont les surfaces sont couvertes d'empreintes ramifiées (Fucoïdes)? . . . . . . . . . . . (0,50 5° Grès gris taché de jaune, . . . HEC 0050 6° Dix lits successifs de psammite gris, de 0, h à à ‘0v, 6 d épaisseur. . . 0,70 7° Trois lits de psammite gris semblable au précédent. . . . . . . 1,00 8° Grès gris, micacé, avec des nodules ferrugineux . . . . 1,00 9° Deux bancs de grès, gris-jaunâtre et bleuâtre à l’intérieur, de 1», 50 CHACUN ME SE ent LR us She 0 0 10° Psammite gris, ie en de its a Crale épaisse CR 100 41° Grès brun micacé, à grain fin, gris à l’intérieur . . . . . . . 0,70 42° Grès et marnes schisteuses alternants. : . . . . . . . . . 2,50 Peut-être la source dite du Cercle se rattache-t-elle à la dislocation qui a parti- culièrement redressé ces bancs. A cette série arénacée succèdent des calcaires, des grès calcarifères et des marnes grises, de 10 à 12 mètres d'épaisseur totale, que l’on peut bien observer lorsque, en sortant des Bains, on prend à droite le chemin qui monte rapidement derrière l'hôtel Tifleau. Il est tracé sur cette assise l’espace de 300 mètres. Comme les psam- mites, ces couches ne nous ont pas offert de fossiles bien déterminables. Nous n’y avons rencontré que quelques moules de bivalves rappelant l’Isocardia ataxensis, d'Orb. Si, à partir du confluent de la Sals avec le ruisseau de Sougraigne on prend le che- min de ce dernier village, on trouve les deux séries de couches que nous venons de mentionner recoupées sur leur prolongement, dans le ravin qui monte à gauche au-dessous de la métairie de la Borde-Nove. On les voit très clairement placées entre les marnes bleues et les couches à échinides (pl. IV, fig. 3). Au delà nous ne les Soc. GÉOL. — 2° SÉRIE, T. VI. — Mém. n° 2. L5 354 FORMATION CRÊTACÉE SUPÉRIEURE. (N. 2, p. 146.) connaissons plus avec ces caractères. Les couches que nous plaçons au même ni- veau sont entièrement différentes et aussi riches en débris organiques que celles-ci étaient pauvres. Le passage, ou la liaison et la continuité horizontale des unes et des autres, malgré leur extrème proximité, reste encore à déterminer Lorsque sortant des Bains-de-Rennes par le chemin de Montferrand, on se dirige vers l’E., en traversant le plateau accidenté que forment exclusivement les couches à échinides plongeant au S.-0., on atteint, à environ 3 kilomètres, une montagne qui se profile assez nettement comme un massif isolé de trois côtés et incliné au S.- O. sous un angle de 25°. Elle est connue dans le pays sous le nom de Montagne des Cornes, à cause de l'immense quantité d’Hippurites et de Radiolites dont ses cou- ches supérieures sont presque entièrement composées et qui lui ont valu une certaine célébrité. Visitée depuis Picot de Lapeirouse (1) jusqu’à ces derniers temps par tous les naturalistes qui ont parcouru les Corbières, nous ne sachons pas qu'aucun d’eux ait fait connaître ses rapports stratigraphiques (2). Mais il y a plus, c’est que plusieurs paléontologistes ont raisonné théoriquement sur les fossiles qu’on y trouve, sans se préoccuper le moins du monde de la place que ses couches occupent dans la série crétacée du pays. Cette détermination, à la vérité, ne pouvait pas être faite directement, du moins en partie, parce que la grande assise de rudistes qui forme le plan supérieur incliné de la montagne n’est pas recouverte et que des failles sem- blent l’isoler de trois côtés. On peut reconnaître cependant au premier abord que la plus grande partie de sa masse est supérieure à l'étage des échinides, constituant le plateau que lon vient de parcourir de même que les talus qui s’abaissent au S. vers la Borde-Nove. La pre- mière assise que l’on rencontre, en gravissant la montagne du côté de l’ouest par le sentier qui vient des Bains et le long d’un fossé, est un calcaire marneux, gris-jau- nâtre, tendre, friable, caractérisé par de nombreux fossiles, et surtout par des poly- piers bien conservés : Trochosmilia patula, Min. Edw. et J. Haime, Placosmilia arcuata, id., id., Ællipsosmilia ? indét., Pachygyra labyrinthica, Miln. Edw. et Y. Haime, Cyclolites hemispherica, Lam., C. Haueriana, Mich., Astræa Delcro- siana?, id., A. formosissima, id., À. ramosa, Sow. (Enallocænia, id., d'Orb., A strocænia, id., Miln. Edw. et J. Haime), A. octolamellosa, Mich., 4. decaphylla, id., À. indét. (petite espèce voisine de l’A. ramosa), Meandrina radiata, Mich., ba- guettes de Cidaris, Pyrina ataxensis (P. atacica, Cott.), Nucula (voisme de la (1) Description de plusieurs nouvelles espèces d'Orthocératites et d'Ostracites, in-f. Erlang., 1781, avec 13 pl. L'auteur ne mentionne pas spécialement cette montagne ; il dit seulement qu’il a fait une ample moisson de ces corps depuis Montferrand jusqu’à Sougragne (Sougraigne). Cependant quelques détails qu’il donne ensuite sur leur gisement prouvent qu’il les avait observés en place sur ce point, ainsi que M. de Labouïsse-Rochefort { Voyage à Rennes-les-Bains). (2) M. Rollan du Roquan, ayant confondu les diverses assises de grès de ce pays, ne s’est pas non plus rendu compte de la position de ces couches calcaires, sur les rudistes desquelles il a donné un mémoire important (Description des fossiles de la famille des rudistes qui se trouvent dans le ter- rain crétacé des Corbières, in-h, 8 pl., Carcassonne, 1841). ! «Ne 2, pe HAT.) RÉGION DU SUD. 355 N. Renauxiana, d'Orb.), Hippurites bioculata, Lam. (valves libres dans un état remarquable de conservation), Delphinula, nov. sp.; fragment de pince d’un très grand crustacé décapode macroure, peut-être du genre Klytia?. En continuant à s’avancer obliquement sur le versant méridional, on atteint un ravin assez profond dirigé au S.-E. et ouvert dans des marnes sableuses, grises, avec des bancs de grès subordonnés, recouverts, à l’origine même du ravin, au-dessous du sentier, par un caleaire gris de cendre, très dur, à grain fin, avec des grains de quartz, quelques parties spathiques; jaunâtre -en dehors, et renfermant en outre des cailloux de quartz blance-laiteux et quelques paillettes de mica blanc. Cette roche forme la séparation de l’assise de marne et de grès sous-jacents d’avec celle des cal - caires à rudistes qui constituent au-dessus le reste de la montagne. Ceux-ci sont d’abord des calcaires grisâtres, plus ou moins durs, à cassure esquil- leuse, avec des parties cristallines et jaunâtres ; quelquefois ils sont gris-bleuâtre. La première couche qui repose sur le calcaire à grains de quartz est un calcaire brunâtre impur, taché de jaune et rempli de Bulimina et de Globigerina, avec d’autres petits rhizopodes. Puis au-dessus viennent des bancs grisâtres, durs, à grains très grossiers, se brisant facilement en tous sens sous le choc du marteau. Cette série calcaire, de 15 à 18 mètres d'épaisseur totale, forme le plan supérieur de la mon- tagne régulièrement incliné au S.-0. et présente les tranches des couches sur ses flancs nord-est et nord-ouest. Outre la plupart des polypiers précédents qui y sont moins bien conservés, on y trouve très abondamment répandus : Cyclolites elliptica, Lam., C.rugosa, Mich., C. hemispherica, Lam., C. nov. sp., Rhipidogyra Martiniana, Miln.Eäw. et J. Haime (Lobophyllia, id., Mich.), Placosmihia Parkin- sont, Miln. Edw., et J. Haime, L. arcuata, id., id., Placosmilia cymbula, id., id., Trochosmilia uricornis, 1d., 1d., Ellipsosmilia Boissyana, d'Orb., Synastræa cor- barica, d'Orb. (Thamnastræa, id., Miln. Edw. et J. Haime, Astrœæa media, Mich.}?, Meandrina pyrenaica, Mich., M. ataciana, id., Actinocænia compressa, d’Orb. (Astrœæa, id., Mich.?); Astrœæa reticulata, Gold., Mich. (Stephanocænia formosis- sima, Miln. Edw. et 3. Haime, an À. formosa, Gold., et formosissima, Saw., apud d'Orb.?), 4. agaricites, Gold., Mich., 4. escharoides, Gold.?, Phyllocænia, voisine du P. pediculata, Miln. Edw. et 3. Haime, Pyrina ataxensis (atacica, Cott.), Hippuriles cornu-vaccinum, Bronn, 4. organisans, Des Moul. (1), Æ. bioculata, Lam., H. dilatata, Defr., H. sulcata, id., Sphœærulites angeiodes, Bayle (Ostracites, id., Pic. Lap., Radiolites, id., Lam., rotularis, id., ventricosa, id.), Caprinula Boissyi, d'Orb., Pecten quadricostatus, SOW., Exogyra conica, id., Natica Mathe- roniana, d'Orb., MN. salsensis, nov. sp., Venus, voisine de la #. vassyacensis, d'Orb., Phasianella gosauica, Zek.? (1) Cette espèce forme à elle seule un banc particulier vers le milieu de la hauteur de l’assise, abso- lument comme aux Martigues et au Beausset, localités dont nous donnerons les coupes dans l'appen- dice ci-après, et que nous voyons citer souvent sans que la succession des couches et leurs rapports aient été beaucoup mieux étudiés que dans les Corbières. 356 FORMATION CRÉTACÉE SUPÉRIEURE. (NX. 5, p. 148.) La vue que nous avons donnée et expliquée en partie (p. 326-118), prise sur la pente inclinée au S. de cette montagne, montre, sur le second plan que l’on a immé- diatement au-dessous de soi, les couches à échinides se continuant à droite jusqu'aux Bains-de-Rennes et constituant en avant le mamelon au pied duquel est la métairie de la Borde-Nove. Dans le ravin qui se dirige vers ce point affleurent, comme on Pa dit, les marnes grises, les grès marneux et les psammites que nous venons de voir supporter les couches à rudistes, et que recouvrent au contraire, au-dessous de la Borde-Nove, les marnes bleues SADENQMES surmontées à leur tour par les grès tertiaires (pl. IV, fig. 3). Il semble donc résulter de la disposition précédente que cette grande assise de calcaires à rudistes occupe ici la partie supérieure du second étage et qu’elle doit être regardée comme succédant immédiatement aux marnes bleues. On peut attri- buer sa position actuelle à deux failles, l’une au sud-ouest, vers le pied de la mon- tagne (pl. IV, fig. 6), puisque les couches à échinides et toute la série au-dessus se retrouvent lorsqu'on descend à la Borde-Nove, et l’autre au sud-est marquée par l’excavation profonde qui sépare la montagne des Cornes de celle du Clouet (pl. IV, fig. 7). Il faut supposer en outre que, par suite de leur nature même, les marnes bleues qui devraient recouvrir l’assise de rudistes auront été complétement dénu- dées après le soulèvement, ou bien que cette dernière, élevée par un mouvement tout à fait local au-dessus du niveau de la mer, n’a jamais été recouverte ici par les marnes, comme elle l’est sur son prolongement à l’est dans la colline de Sou- graigne. Le versant nord-ouest de la montagne du Clouet, qui fait face à celle des Cornes, est couvert de bois et terminé par les grès tertiaires; il est composé de marnes et de grès micacé qui supportent l’assise à rudistes, mais plongeant au N.-0. comme dans la coupe de Sougraigne située au delà, et que nous avons donnée (p. 349-141). On remarque dans cette dernière, sous l’escarpement supérieur des marnes bleues (n° 2), un calcaire gris, noduleux, très dur (n° 3), ayant tous les caractères de celui de la montagne des Cornes, renfermant les mêmes rudistes et aussi abondants ; seu- lement son épaisseur n’est ici que de 2 mètres. Au-dessous la marne grise à po- lypiers (n° 4) correspondant également à celle de la montagne des Cornes, est réduite à un mètre d'épaisseur. Mais la série des couches fossilifères qui viennent ensuite (assises 5 à 10) n’a plus d’analogie avec celle qui supporte à l’ouest les calcaires à rudistes ou les marnes bleues. Elle difière également des bancs à échinides si constants partout, de sorte que cette coupe de Sougraigne, tout intéressante qu’elle est en elle-même, nous éclaire peu sur ce que les autres laissent encore à désirer. L’assise ne 41 pourrait être une répétition du n° 3, ou représenter un grand fragment de cette dernière qui aurait glissé sur le talus. On l’observe encore sur la rive gauche du ruisseau, au delà du village, lorsqu'on monte le sentier de Bugarach, où les calcaires semblent plonger au S. contre le grand escarpement de la voûte de la Jouanne. (N.2, pe 149.) RÉGION DU SUD. 357 Plus à l’ouest, à la métairie de Linas, le troisième étage est surmonté par un rudiment de ce premier niveau de rudistes. Le champ labouré, situé à l’ouest de la ferme, montre à sa surface une prodigieuse quantité de polypiers qui devaient for- mer un véritable récif. La roche qui les renferme est un calcaire gris de fumée, taché de jaunàâtre, compacte, presque cristallin, à cassure finement esquilleuse, très dur et assez argileux malgré son aspect homogène. On y trouve particulière- ment les Astræa lamellosissima, Mich. (Prionastræa, id., d'Orb., Isastræa, id., Miln. Edw. et J. Haime), striata, Mich., agaricites, Gold. (Synastræa, id., Miln. Edw. et J. Haime), decaphylla, id., et 5 ou 6 autres espèces, le Dendrophyllia bre- vicaulis, Mich. (Barysmilia, id., Miln. Edw. et J. Haime), un Phyllocænia, nov. sp., etc. Cette couche paraît être ici recouverte par les grès tertiaires ; mais, lorsqu'on continue à s’avancer au nord-est, on atteint les calcaires à rudistes plongeant au S. Quant aux autres couches encore remplies de rudistes qu’on rencontre au delà, elles nous ont paru dépendre d’un étage plus ancien. Nous ignorons à quel niveau appartiennent ceux que l’on a cités aux environs de Fourtou, particuliè- rement près de la métarie de la Vernède et lorsqu'on se dirige de ce point vers Cubières (1). Les deux premières divisions de la formation crétacée supérieure, si bien carac- térisées par leurs roches et leurs fossiles dans la petite région des Bains-de-Rennes, sur les bords de la Sals et du ruisseau de Sougraigne, n’ont donc qu’un très faible développement horizontal. L’abondance des polypiers, et surtout des Astrées et des Méandrines, marque assez nettement la partie moyenne du second étage à la mon- tagne des Cornes, dans la coupe de Sougraigne et à la ferme de Linas, de même que l'accumulation prodigieuse des rudistes sa partie supérieure. Nous n'avons point observé les marnes bleues sur le versant méridional de la montagne qui sépare la vallée de Bugarach de celle de Sougraigne, et il en est probablement de même de l’assise à rudistes, si ce n’est dans la dernière localité que nous venons de citer. En iraitant de l’étage suivant nous reviendrons sur deux points qui se rattachent encore à celui-ci, mais qui n'auraient pu être bien compris en ce moment : ce sont la série fossilifère de Sougraigne et celle des calcaires gris noduleux au nord de Bugarach. Cependant nous ferons remarquer, dès à présent, que ces couches de Sougraigne déjà décrites (p. 349-141) se rattachent, par la présence de nombreux fossiles com- muns, aux assises supérieures du second étage comme aux marnes bleues du pre- mier, de manière à former un ensemble de dépôts zoologiquement distincts du troisième ou des couches à échinides sous-jacentes. On a vu que la faune des marnes bleues avait jusqu’à présent plus d’analogie avec celle de la craie du versant nord des Alpes qu'avec toutes les autres; or, cette relation se maintient encore pour le (1) De Labouïisse-Rochefort, Voyäge à Rennes-les-Bains, p. 419. 358 FORMATION CRÉTACÉE SUPÉRIEURE. (N. 2, p. 450.) second étage. Ainsi les profondes études de MM. Milne Edwards et J. Haime sur les polypiers proprement dits (1) montrent que 21 espèces de débris de cette classe se trouvent dans les assises du Salzbourg (2); de plus, 6 espèces de rudistes sont com- munes aux deux localités (3). Si, à ces 27 espèces, on ajoute le Delphinula radiata, la Phasianella gosauica et le Rostellaria plicata, puis 12 des 14 espèces signalées dans les marnes bleues, 2 ayant été comprises dans les précédentes, on aura 42 es- pèces communes à ces assises des Corbières et à celles des Alpes du Salzbourg. Le second étage se lie encore au premier par des caractères négatifs, tels que l'absence de brachiopodes, l'extrême rareté des échinides, des ostracées et des cé phalopodes, tous assez fréquents, au contraire, dans le troisième étage où manquent alors presque complétement, au moins dans sa partie supérieure, les polypiers et les rudistes. Tout tend donc à rapprocher les deux premiers étages de la formation crétacée supérieure de ce pays, comme à les séparer des deux seconds. 1° sous-étage, calcaire marneux gris, jaune ou brun, avec échinides. 2° sous-étage, calcaires durs, gris, bruns, noduleux, et second niveau de rudistes. Troisième étage. Le troisième étage, tel que nous le considérons aujourd’hui, est plus épais, plus complexe, et s'étend beaucoup plus loin que les précédents. Nous y réunissons des couches assez différentes au premier abord, lorsqu'on les considère isolément, mais qui n’occupent pas dans l’ensemble une place assez constante et ne présentent pas une association de fossiles assez bien caractérisés pour qu’elles constituent des hori- zons géologiques distincts. Il comprend les assises 8 à 13 de la coupe de la vallée de la Sals, les n° 14 et 15 de celle que nous avons donnée en 1854 devant être sup- primés. Nous établissons actuellement dans cette série deux sous-étages motivés dans le supérieur par la constance des caractères pétrographiques, celle de certains fossiles et surtout des échinides, puis dans l’inférieur, au contraire, par la variété des roches et la répartition généralement moins constante des corps organisés. Premier sous-étage. — La roche dominante de cette division qui, dans la vallée des Bains, succède régulièrement aux marnes grises et aux calcaires marneux pré- cédents, est grisâtre, jaunâtre ou brunâtre, plus ou moins tendre et peu solide, (1) Voyez le Tableau général de la classification des polypes placé en tête de la Monographie des polypiers fossiles des terrains paléozoiques, in-4°, 1851 (extrait des Archives du Museum d'histoire naturelle), et Histoire naturelle des Coralliaires ou Polypes proprement dits, vol. I, 1857. (2) Ces espèces sont : P/acosmilia cuneiformus, P. Parkinsoni, Trochosmilia complanata, T. Bazochesi, T. Boissyana, Diploctenium lineatum, Rhipidogyra occitanica, Astrocænia Æoninchi, A. reticula. A. ramosa, À. decaphylla, Columnastræa striata, Stephanocænia formosissima, Phyl- locænia pediculata, Montlivaultia rudis, Meandrina salisburgensis, Latimæandra ataciana, Thamnastræa agaricites, Cyclolites discoidea, C. undulata, C. Haueriana. (3) Sphærulites angeiodes, Hippurites cornu-vaccinum, I. sulcatus, H. organisans, H. biocu- latus, H. dilatatus. CN. 2, p. 151.) RÉGION DU SUD. 359 composée, en proportions diverses, d'argile, de calcaire, de sable siliceux et de mica blanc. Elle passe, suivant la prédominance de l’un ou de l’autre de ces élé- ments, au grès, au psammite, au caleaire ou à la marne, tout en conservant néan- moins le même aspect général qui la fait reconnaître.au premier coup d'œil. Sa structure est souvent schistoïde, quelquefois noduleuse, et la cassure toujours plus ou moins terreuse. Les calcaires marneux et noduleux, gris-brunâtre, compactes, à cassure finement esquilleuse, alternant avec des marnes endurcies de même teinte, renferment en général un grand nombre d’échinides, et particulièrement de Micraster. Ces roches constituent d’abord le petit plateau qui longe la rive gauche de la Sals, et auquel sont adossées de ce côté les maisons du village des Bains. Elles se continuent au nord-ouest par les métairies de Cuguillou et de Piquemole pour atteindre le bord de la rivière, en face de Cassaigne. Ce sous-étage s’observe en cet endroit l’espace de 100 à 500 mètres, recouvrant les calcaires du second, mais ni l’un ni l’autre ne passent sur la rive droite, où règne seul le groupe ter- tiaire d’Alet. Les calcaires à échinides constituent également tout le plateau ondulé à l’est des Bains, entre ce village, le pied de la colline de Montferrand au nord-est, celui de la montagne des Cornes à l’est et, au sud-est, les buttes qui, de celle-ci, s’abaissent vers le ravin de la Borde-Nove, où les fossiles sont très abondants. Ceux que l’on rencontre le plus fréquemment dans cette étendue sont : un Trochosmilia, Cyclolites discoidea, Blainv., Micraster Matheroni, Des., M. brevis, Ag., M. gibbus, Gold., M. cor-testudinarium, id., et une ou deux espèces nouvelles, Echinocorys vulgaris, Breyn, Holaster integer, Ag., H. subglobosus, 1d., Crassatella, nov. sp. voisine de la C. arcacea, Rœm., Venus parva, Sow., Isocardia ataxensis, d'Orb. (Cyprina Boissyi, d’Arch.) (1), Cardium productum, Sow.? C. indét. ou Zsocardia?, I. pyre- naica, d'Orb., Inoceramus digitatus, Sow. (2), Pecten quadricostatus, Sow., id. var. à 4 côtes intermédiaires, P. virgatus? Nilss., P. Nilssoni., Gold? P., nov. sp., Spondylus spinosus, SoW., S., nov. sp., Lima indét., Ostrea proboscidea, d’Arch. (3), O. frons, Park., ©. indét., Terebratula difformis, Lam., T. fragment voisin de la (1) Si, comme nous sommes porté à le croire, l’/socardia ataxensis, d’Orb., n’est qu’un individu jeune un peu déformé de notre Cyprèna Borssyi, celle-ci doit reprendre son ancien nom spécifique, sans toutefois que ses caractères génériques soient plus certains. Mais nous ne pouvons y reconnaître l’analogue de lV’Z. longirostris, Rœm., ainsi que l’admet en dernier lieu l’auteur du Prodrome de paléontologie (vol. IF, p. 242). (2) Cette coquille remarquable, très rare en Angleterre, où elle ne paraît pas même avoir été trou- vée en place, n'avait pas encore été signalée sur Le continent. Elle a été recueillie par M. E. Dumortier dans les calcaires compactes gris de fumée à échinides de la base de la montagne des Cornes. Elle paraît atteindre de 0",30 à 0",35 de diamètre, mais sa forme complète est encore inconnue. (3) Nous persistons à regarder cette Huître, qui paraît être la Gryphæa elongata, Sow., de Gosau, comme parfaitement distincte de l'O. vesicularis, et caractérisant ici, comme dans le sud-ouest de la France, un horizon également différent de celui où abonde cette dernière ou ses variétés. 860 FORMATION CRÉTACÉE SUPÉRIEURE. (N. 2, p. 182.) T. carnea, Sow., Phasianella supracretacea, d'Orb.? var. (4), Solarium quadratum. Sow.? Turbo, Trochus, Acteonella, indét., Pleurotomaria perspectiva, Sow.? P. Michelini d'Arch., P. Noguesi, nov. sp., Cerithium rennense, d’Arch., Hamites, rappelant VÆ. simpleæ, d'Orb., et des moules de plusieurs espèces d’Ammonites, dont les caractères sont toujours plus ou moins altérés, mais qui se rapprochent beau- coup des 4. Coupei, Brong. (in Sharpe, pl. VIE, fig. 2, et pl. IX, fig. 1), Mantelh, Sow., Carolinus, d'Orb.? Goupilianus, id., Pailletteanus, id., Tallavignesü, id. peramplus, Sow., in d’Orb. Cette dernière est plus déprimée, ses tours sont plus découverts, et ses plis sont plus réguliers que dans le type de l'espèce. Nous signale- rons en outre un fragment de Nautile déformé, voisin des N. Archiacianus et Fleu- riansianus, d’Orb. D'après ce que nous avons dit, les assises 5 à 10 de la coupe de Sougraigne (p. 349-141)semblent au premier abord représenter stratigraphiquement tout l'étage, avec une variété de roches et de fossiles qui ne se retrouve point ailleurs. Mais on re- marque, d’un autre côté, que presque aucune des espèces que nous venons de citer, et surtout aucun échinide, ne se rencontre dans les couches 5 et 9, si riches en débris organiques, tandis que plusieurs des coquilles les plus répandues dans les marnes bleues, et les plus caractéristiques, y sont'fréquentes et associées, dans la première de ces couches, avec des polypiers dont les uns existent aussi dans ces marnes bleues, les autres dans les couches à rudistes, et dont un certain nombre lui sont propres. Cette série de Sougraigne serait donc une anomalie locale dans la formation crétacée de ce pays. Le dessus et le dessous sont d’ailleurs parfaitement connus, et l’on ne peut pas douter qu’elle ne soit comprise entre les marnes bleues, les calcaires à rudistes et la couche marneuse à polypiers, d’une part, et le second sous-étage que nous verrons affleurer à l’est de Sougraigne, de l'autre. Or, puisque par ses fossiles cette série se rattache plutôt aux deux premiers étages qu’au troi- sième, que nous décrivons en ce moment, nous devons la regarder comme repré- sentant les grès, les calcaires marneux et les marnes grises sans fossiles du second étage, dans la coupe des bords de la Sals, au-dessus des Bains, En effet, à l’est de Sougraigne, au delà des affleurements de marnes bleues, on voit se succéder des calcaires gris, les marnes à échinides, les calcaires bruns nodu- leux et des calcaires gris, également noduleux, recouvrant les grès du quatrième étage. Autour des Clamens et des Clausses, les calcaires du troisième inclinent presque cireulairement vers le fond de la vallée. Le plongement au N.-0. de sa partie sud est dû au relèvement de la crête de calcaire compacte à Caprotines, qui surmonte les sources salées. À (1) Ce moule est un peu plus renflé qué ceux de Royan et sa spire plus courte, ce qui le rapproche de la Vatica bulimoides, Desh. Dès 1803, M. de Labouïsse-Rochefort, en appelant attention des naturalistes sur ce pays et en ex- primant le vœu qu’il fût étudié avec tout le soin qu’il mérite, en signalait les principales pétrifications, et donnait même, sous le nom de Fongiîte fer-à-cheval, la figure d’un Diploctenium (probablement le D. lunatum, Mich.) trouvé à une lieue des Bains (Voyage à Rennes-les-Bains, p. 465-467-481). (N. 2, p. 153.) REGION DU SUD. 361 Si l’on étudie le premier sous-étage, plus au sud dans la vallée de la Sals, on le retrouve à partir du versant méridional de la voûte de la Ferrière, dans l’escarpe- ment du hameau de la Vialasse, sur les deux bords de la rivière en cet endroit, et, de ce point à Bugarach, règnent constamment des calcaires marneux alternant avec des marnes grises plus où moins solides, plongeant de 8° à 10° au S.-0. Ces cou- ches, qui s'appuient contre les crêtes de calcaire compacte de la Falconnière et de Burtalaux, sont toujours caractérisées par la présence des mêmes Micraster auxquels s'associent çà et là des Cidaris (C. Kleinii, Desm.), une Lucine voisine de la L. turo- nensis, d'Orb.,lZsocardia ataxensis, 1d., le Cardium productum, Sow., le Spondylus spinosus, id., l'Ostrea proboscidea, d’'Arch., la Natica salsensis, nov. sp., des Tro- ques, des Cérites (C. pustulosum, Sow. in d’Orb.), une NVerinea, voisine de la N. monilifera, d'Orb.? des Phasianelles, la F’oluta Guerangeri, d’Orb.? des Am- monites (4. varians, Sow., in Sharpe, pl. VIE, fig. 7 et 9), un Nautile déformé, peut-être le N. Sowerbyanus, d’Orb.?, ete. Dans la montagne située au nord de Bugarach on voit, sous le grès tertiaire, des bancs calcaires noduleux, sans fossiles, dont la surface est ondulée: ils sont gris- jaunâtre ou brunâtre ; puis viennent des calcaires compactes, très durs, gris-bleuâtre, des calcaires gris-jaunâtre, nodtleux, formant les escarpements qui bordent le ruis- seau le long du sentier de Sougraigne. Ils reposent sur les calcaires marneux et les marnes schistoïdes, gris-bleu, à échinides, du fond de la vallée, qui portent le village de Bugarach. Cette coupe du versant sud de la montagne soulevée, séparant la vallée de Sougraigne de celle de Bugarach, nous présente donc aussi des détails différents de ceux de la coupe prise à l’ouest du premier de ces villages, car la res- semblance cesse à partir des grès tertiaires communs à toutes deux. Au sud, nous n’apercevons ni les marnes bleues, ni les couches à rudistes et à polypiers, ni la série des calcaires, des marnes et des psammites fossilifères de Sougraigne; nous ne voyons que des calcaires gris ou jaunâtres, compactes, noduleux, sans fossiles. Mais la superposition directe de ces derniers aux véritables couches à échinides s'ajoute à la considération des fossiles pour prouver que la série fossilifère de Sougraigne n’est qu'une modification du second étage sans débris organiques des Bains-de-Rennes, et ces mêmes calcaires gris, compactes, noduleux, au nord de Bugarach, en seraient une troisième modification ou un troisième facies. Les calcaires bleuâtres à échinides s'élèvent assez haut dans le village même, et, si l’on remonte la Sals vers la métairie de Lauzadel, on la voit toujours profondé- ment encaissée dans des marnes bleues assez analogues aux marnes supérieures, et dans lesquelles se trouvent également des rognons très ferrugineux de, marne en- durcie. Un peu plus loin, ces marnes feuilletées renferment des plaquettes de cal- caire marneux, plus ou moins épaisses. Elles plongent légèrement au S., et l'on arrive ainsi, de proche en proche, à celles que semblent recouvrir les calcaires rocheux de la base occidentale du pic de Bugarach. En cet endroit, les marnes bleues alternent avec des lits très réguliers de calcaires marneux, bleuâtres, affectant l’as- Soc. GÉOL. — 2° SÉRIE, T. VI. — Mém. n° 2. L6 362 FORMATION CRÉTACÉE SUPÉRIEURE. (N. 2, p. 454.) pect de certaines parties du lias d’autres contrées. Sous les roches de l’escarpe- ment occidental du ravin sont des calcaires marneux, noduleux, semblables à ceux de l'étage néocomien, mais sans fossiles, comme les assises marneuses précédentes; de sorte que, dans cette direction où nous pouvions espérer de saisir les rapports stratigraphiques des deux grandes divisions de la formation crétacée, ces rapports restent encore fort obscurs. Le dessin ci-dessous, pris au bord de la Sals ou du ravin qui descend de Lauzadel, montre la disposition qu’affectent les couches précédentes à la base du pic. Elles semblent être horizontales, parce qu’elles sont coupées perpendiculairement à leur inclinaison, qui est à l’E., comme le montre le dessin précédent (p. 229-21), où le même ravin se voit à gauche, au-dessous de l'observateur, à environ 2 kilomètres. Malgré leur disposition apparente, nous ne pensons pas que ces calcaires plongent réellement sous la masse du pie, mais nous croyons qu'ils s'appuient contre sa base à stratification tout à fait discordante. = = N° XX.— Extrémité occidentale du pic de Bugarach. Si après avoir examiné les couches crétacées supérieures, au nord, à l’ouest et au sud de Bugarach, nous nous dirigeons à l’est de ce village, vers la métairie de Linas, nous trouverons, à partir des marnes bleues à échinides du fond de la vallée, un calcaire noduleux gris, dur, sans fossiles, un calcaire brun marneux avec de nom- breux Micraster Matheroni, brevis et toutes leurs variétés, le Spondylus spinosus, une Ammonite (A. Coupei, Brong., in Sharpe pl. IX, fig. 1), etc., un calcaire gris Compacte, très dur, sans fossiles, schistoïde vers le bas et montrant à sa partie supérieure un lit de petites Huîtres (O. proboscidea, var. minor, d’Arch.) qui, en cet endroit, comme sur le chemin de la Vialasse et à l’est des Bains-de-Rennes, occupe un niveau constant. Ces dernières couches affleurent à plusieurs reprises suivant les ondulations du sol et sont surmontées, à la métairie de Linas qu’on ne tarde pas à attendre, par les bancs de polypiers et de rudistes que nous avons déjà décrits. Les calcaires noduleux, gris, durs, probablement aussi du second étage comme ceux de (N. 2, p. 155.) RÉGION DU SUD. 363 Bugarach, reparaissent encore au delà lorsqu'on suit le sentier qui conduit aux sources salées; puis viennent des calcaires que nous rapportonsau second sous-étage, tels que ceux avec des Nérinées de la combe de Baserque, en face de la montagne de Ramlosque, les calcaires du second niveau de rudistes, etc., sur lesquels nous reviendrons tout à l'heure. Ainsi, tout le grand plan incliné de Bugarach, qui plonge au S.-S.-0. et que coupe le ruisseau d’Escoussonel, paraît être séparé des couches crétacées inférieures par une ou plusieurs failles situées vers le pied du pie et masquées par des éboulements de ce dernier. Au delà de la ligne de partage des eaux de l'Aude et de l’Agly, qui de la base du pic de Bugarach se dirige au N.-E. vers les montagnes de Fourtou, dans la plaine de Soulatge, l'étage qui nous occupe est encore très développé. À partir de Cubières règnent les couches à échinides plongeant au S. Ce sont des calcaires marneux, gris, alternant avec des marnes de même tente et renfermant, outre les Micraster habi- tuels, l'Echinochorys vulgaris et le Galerites albogalerus, Ensuite viennent des grès et des poudingues plongeant de même. On traverse toute la série des calcaires durs noduleux sans fossiles de Bugarach, et l’on atteint les marnes et les calcaires mar- . neux gris-blanchâtre qui sortent de dessous au fond de la vallée comme dans cette dernière localité. Une faille à peu près parallèle au chemin de Cubières à Soulatge parait marquer la séparation des deux divisions de la formation crétacée, la supé - rieure au nord, l'nférieure au sud, et toutes deux plongeant de ce dernier côté, à peu près sous le même angle. La coupe de Soulatge (pl. IV, fig. 8) montre la colline à laquelle est adossé le village, composée de calcaires gris-jaunâtre en rognons, de grès jaune en bancs alternant avec des lits de marne, puis des marnes bleuâtres, schistoïdes, occupant le fond de la vallée et formant son escarpement sud. Les grès précédents sont en lits très minces et très réguliers au midi du village sur le chemin de Saint-Paul. A Pest plusieurs failles font reparaître ces assises à diverses reprises (fig. 9). Nous signale- rons encore dans les couches précédentes le Cardium ventricosum, d'Orb.?, l'Ostrea carinata, Lam., la Terebratula Robertoni, d'Arch., des moules de Phasianelles, l'Ammonites Pailletteanus ou Tallavignesi, d'Orb., des Cidaris, des Diadema, des Cyphosoma, l'Hemiaster Verneuili, Desh., etc. Enfin elles se continuent dans cette direction par Rouffiac jusqu'aux environs de Padern, sur les bords du Verdouble et de la Valette, où MM. de Boissy et Noguës ont recueilli l'Echinoconus gigas, Cott., une Discoidea, nov. sp., la T'erebratula difformis, Lam., etc. Deuxième sous-étage. — La seconde division du troisième étage est plus complexe que la première, et comprend, dans le profil général des Bains-de-Rennes, les assises 9 à 13 (coupe de 1854) (voy. ci-après pl. IV, fig. 4, 3 et 4). Ces coupes, prises de chaque côté de la rivière en sortant du village, au nord, montrent de haut en bas : 1° Calcaire jaune solide, divisé en plusieurs bancs, les uns très durs, nodu- ECS TES DTUR OIDE MERE. QU: D 0 . . + à + us Ud4 MIETTES. 564 FORMATION CRÉTACÉE SUPÉRIEURE. (Ne 2, p. 136.) 2° Poudingue à pâte calcaire enveloppant des cailloux de quartz blanc, gris- rosâtre, où passant à la lydienne. . . nt Mn la lrmètres: 39 Calcaires avec rudistes, souvent sableux, gris- ne) fe Dress so- lides, en bancs assez épais, alternant avec des marnes grises, sableuses et schisteuses. On les observe sur la rive droite, dans les escarpements rocheux des deux chemins qui conduisent sur le plateau, et, en face, sur la rive gauche, dans l’escarpement vertical qui borde la route im- médiatement contre la dernière maison. Ici la roche bleuâtre, très dure, ne laisse apercevoir les rudistes que dans la cassure fraîche. . sh cd Grès calcaires jaunâtres. . . . . A AS RE le Vans 29 ° Marnes grises et calcaires gris Hroe EN NP ON PR ed l'os HJET(E En face de la remise de l'hôtel du Bain-Fort, des marnes schistoïdes et des cal- caires sableux ou des grès calcarifères en lits minces subordonnés s'élèvent formant une voûte pour plonger ensuite au N. On y trouve des nodules ferrugineux, des traces de lignite et des empreintes de Trigonie (T. scabra, Lam.?), des moules d’Isocarde (T. ataxensis, d'Orb.?). La flèche de courbure des marnes au-dessus du niveau de la routeest de 3 mètres. Cette assise constitue la base de l’escarpement de la rive droite qui porte les maisons du village, les bords et le lit rocheux de la Sals en cet endroit, de même que sous le pont. Les eaux thermales du Bain-Fort . et du Bain-de-la-Reine qui s'en échappent sont sans doute en rapport avec la flexion des couches qu’on y observe. La vallée et la route, en faisant un coude à angle droit vers l'O. après le Bain-de- la-Reine, coupent les couches précédentes jusqu’au second tournant, celui du Bain- Doux. L’escarpement abrupt que lon suit entre ces deux points est formé de bancs épais de calcaires durs, gris ou jaunâtres, bleus à l’intérieur, noduleux, alter- nant avec des marnes, plongeant de 45° à l'O. et renfermant peu de fossiles (Le- master Desori, . Haime, T'ylostoma globosum, Sharpe (1), etc.). Ces bancs parais- sent être le prolongement de l’assise n° 1 des coupes précédentes. Dans l'angle même que forme la route avant le Bain Doux, une brisure de toute la série a relevé celle-ci au N.-0., et les assises qui de ce côté plongeaieyt au N. et à PO. reparaissent dans l’escarpement auquel s'appuie l'établissement, de même que sur la rive droite de la Sals. La source thermale est donc encore ici, comme au Cercle, aux Bain-Fort et de la Reine, en rapport direct avec une dislocation (2). Ce sous-étage se continue aussi au nord avec le précédent jusqu’à la rive gauche de la Sals en face de Cassaigne. (1) Ce genre établi par D. Sharpe (Quart. Journ. geol. Soc. of London, vol. V, p. 376, 1849) ne paraît pas encore avoir été signalé en France. Nous avons depuis longtemps recueilli cette même espèce à Marignac (Charente-Inférieure), à la partie supérieure du troisième étage, mais nous l’avions rapportée au genre Gobliconcha (Hist. des progrès de la géologie, vol. IV, p. 430). (2) Les Bains-de-Rennes paraissent avoir été fréquentés depuis les temps les plus reculés, car on y a trouvé, dit-on, des urnes cinéraires et des médailles celtiques et romaines. Il y a cinq sources miné- rales dont trois sont thermales et deux froides. Leur température diffère comme les principes qu’elles (N. 2, p. 457.) RÉGION DU SUD. 365 Si des Bains-de-Rennes on se dirige au N.-E. vers Montferrand, on marche d’abord sur les couches brunâtres où jaunâtres, noduleuses, à échinides, jusqu’au delà du lieu dit le Soulat; puis, en montant vers le village, on atteint des cal- caires durs, schistoïdes, gris ou gris-jaunâtre, inclinant fortement au S.-0., et enfin des grès jaunes, sur lesquels sont bâties les maisons. Nous rapportons ces derniers au quatrième étage comme ceux que, dans les coupes suivantes, nous trou- verons à la jonction des calcaires et des schistes de transition. A la sortie de Mont- ferrand, sur le chemin du Crousil, on rencontre un calcaire brun-jaunâtre très dur, à surface noduleuse, et un calcaire gris de cendre sub-compacte, rempli de petits rhizopodes (Bulimina et Guttulina) avec des moules de T'ylostoma qlobosum, Sharpe, et une Ammonite voisine de l4. Pailletteanus, d'Orb. À la Soulane ou col de Plegadou, une crête de calcaire rocheux sans fossiles borde un petit vallon à droite du chemin et recouvre les calcaires marneux à échi- nides des pentes de ce vallon. Cette crête appartiendrait ainsi à la base du second étage. Dans les calcaires marneux sous-jacents on trouve, outre les échinides habi- tuels à ce niveau, des empreintes indéterminables d’Ammonites, des moules de Chemnitzia Paillelleana, d'Orb. (1), etc. En suivant à l’'E.-S.-E. la limite du terrain contiennent. La source dite du Zain-Fort a une température de 51°,25. L’eau est légèrement amère, et il s’en dégage du gaz acide carbonique. Une autre source s'échappe près de là, dans le lit même de la rivière. L'eau du Bain-Doux sort à 8 mètres au-dessus du niveau de celle-ci; sa température est de 0°, sa saveur est un peu salée et d’une amertume prononcée ; elle renferme du muriate de chaux, etc. L'eau du Pain-de-la-Reine est aussi à 40°; elle est limpide et renferme des carbonates de chaux, de magnésie et de fer, des muriates de chaux, de soude et du gaz acide carbonique. L'eau du Cercle, en amont du village, est plus élevée par rapport à la Sals; elle est froide, acidule et ferrugineuse; sa saveur est fortement styptique. L'eau du Pont a les mêmes propriétés. (Voyez, pour l'analyse quanti- tative de ces eaux : Description générale et statistique du département de l'Aude, par le baron Trouvé, p. 56, in-4, 1818. Ces analyses ont été faites par MM. Fréjacque, Estribaud, Julia et Re- boulh. — Notice sur Les bains de Montferrand, par M. Estève. — Guide pittoresque du voyageur en France, édit. par F. Didot, Département de l'Aude, p. 17, 1836. — Voyage à Rennes-les- Bains, par M. de Labouïsse-Rochefort, in-8, p. 485, 1803-1832.) Dans un autre document (Compte rendu des travaux des ingénieurs des mines pendant l’année 1844, in-4, p. 20, Aésumé des travaux statistiques, 1845) nous trouvons indiquées 8 sources au lieu de 5. Elles sont désignées comme alcalines, acides et ferrugineuses, et leurs températures diffè- rent de 20° à 54e. Ælles sourdent du terrain crétacé en couches très bouleversées, dit la légende, mais nous n'avons vu partout que des failles très simples et des soulèvements peu prononcés. M. Ch. Dau- beney (A description of active and extinct volcanos, etc., 2° édit. p. 570, 578, 1848) y voit aussi des inclinaisons en sens inverse, et il rapporte les grès, les brèches et les calcaires à la formation houillère (Coal formation). (1) C’est non loin de ce point et de la montagne des Cornes que se trouve un petit amas d’eau appelé le lac de Barreng (Barrinc ou Baring), connu depuis longtemps (a), mais que nous n'avons pas visité. M. Marcel de Serres (6) le décrit comme entouré de couches calcaires et marneuses horizontales et (a) Voyage à Rennes-les-Bains, par M. de Labouïsse-Rochefort, p. 461, écrit en 1803, mais publié seulement en 1852. (b) Actes de la Société linn. de Bordeaux, t. X, 1838, p. 44. 366 FORMATION CRÉTACÉE SUPÉRIEURE. (N. 2, p. 158.) de transition et de la craie, on marche sur des grès grossiers, plus eu moins ferru- gineux, passant à un poudingue à petits éléments, puis à un minerai de fer géo- dique, recouvert à Crouzil par un calcaire noduleux dur, bleuâtre, et un calcaire noduleux jaunâtre. Plus loin on observe la coupe suivante : 4° Ealcaire brun lamellaire. 20 Grès grossier. 3° Calcaire grisâtre assez dur, en nodules, avec de petites Térébratules (7! Xobertoni, d’Arch.) et l’Anomya papyracea, d'Orb.?. : L° Grès. 5° Calcaire dur, gris-brunâtre ou blanchâtre. 6° Grès et sable ferrugineux reposant sur le terrain de transition. Les métairies de la Bernousse, de Lausadel, des Peyranues et du Fort sont situées sur la limite extrême des roches crétacées dont les plus basses, celles qui reposent sur les schistes intermédiaires, sont toujours des sables et des grès du quatrième étage. Les calcaires gris forment des promontoires avancés vers le nord et couronnés par ces métairies. Ils plongent fortement et régulièrement au S. Lorsqu'on des- cend des Peyranues à Fourtou, on atteint une assise de calcaire gris, avec quelques rudistes et des Trigonies, qui semble représenter les trois premières assises de cet étage sur les bords de la Sals. Elle recouvre ici les sables et les grès inférieurs de 25 à 30 mètres d'épaisseur et qui s'appuient sur les schistes anciens. Lorsqu'on suit le chemin de Fourtou à Sougraigne par le Belot, on voit le plonge- ment très régulier au S. de toutes les couches crétacées du versant droit de la vallée, qui portent à leur extrémité les métairies précédentes. Les grès de la base, les cal- caires durs, les calcaires marneux jaunâtres et d’autres plus solides représentent la coupe de Montferrand. La grande assise de grès plongeant au S.-0. semble passer sous les montagnes situées à l’ouest. Fort puissante dans la crête qui sépare le petit bassin de Fourtou de celui de Sougraigne, elle est recouverte eur les pentes par les calcaires gris noduleux qui, autour des Clamens et des Clausses, plongent presque circulairement vers le fond de la vallée. Le relèvement des calcaires à Caprotines situés au sud à fait incliner au N.-0. les couches qu’ils supportent. Les calcaires qui précèdent sont à leur tour surmontés par les calcaires bruns noduleux, régulières. Les fossiles recueillis dans cette localité par feu notre ami de Boissy sont assez nombreux, peu déterminables, et ne se rapportent pas en général à des espèces bien connues, à l’exception de la Cyclolites Haueriana, Mich., de la Poromya lata? ïd., Forbes, du Cerithium Barrandei, d’Arch., et du 7rochus sougraignensis, nov. sp. D’autres Cyclolites, une Fungie, plusieurs bivalves, dont une ZLyonsia moins transverse que la Z. elegans, avec la forme et les ornements de la Z. carini- fera, une pince de crustacé (Astacus ou Clytia?), un Pecten fort allongé, à 6 ou 8 grosses côtes, ysont assez répandus. Ces fossiles semblent devoir faire placer ces couches dans la série de Sougraigne, ou du second étage. (2, p. 159. RÉGION DU SUD. 367 puis par les calcaires gris et les marnes à échinides, et quelques couches du second étage auxquelles succèdent les marnes bleues supérieures de Sougraigne, très épaisses, couronnées elles-mêmes par les grès tertiaires d’Alet. Ainsi, entre Fourtou et Sougraigne, deux assises de grès quartzeux, assez sem- blables quant à leurs caractères pétrographiques, comprennent entre elles toutes les assises calcaires et marneuses crétacées. L’une, plus ferrugineuse et de teintes moins variées, repose sur le terrain de transition, et atteint de 35 à 40 mètres d'épaisseur; l’autre s'étend sur les marnes bleues du premier étage et appartient au terrain tertiaire. Toutes deux paraissent être dépourvues de fossiles. Nous suppo- sons que les grès et les sables de Fourtou représentent tout le quatrième étage ou le bord de l’ancien rivage crétacé dans cette partie du bassin. C’est également au second sous-étage que nous rapportons les couches qui, au nord de la ferme de Linas, le long du sentier qui conduit aux sources salées, à la combe de Bazerque, en face de la montagne de Ramlosque, renferment une multi tude de Nérinées. Ce sont des calcaires durs, gris-brunâtre ou jaunâtre, plus ou moins terreux, avec beaucoup de païties spathiques. L’une de ces Nérinées offre les caractères intérieurs de la NV. Pailletteana, d’Orb. Une autre constituerait une espèce de forme plus allongée. Les couches à Hippurites qui viennent ensuite appartiendraient au second niveau de rudistes. Les calcaires marneux gris nodu- leux qu'on rencontre à peu de distance au delà feraient encore partie de cette sous-division du troisième étage qui se continue vers l’est, pour se retrouver autour de Soulatge et sans doute plus loin, mais toujours incomplétement caractérisée par ses fossiles, si ce n’est par la présence de petits rhizopodes (Bulimina et Globigerina)" que nous n'avons pas observés dans la division supérieure partout reconnaissable à ses roches et à l’abondance des échinides. Sur le chemin de Bugarach aux Bains-de-Rennes, entre la Vialasse et la métairie de la Ferrière, la Sals coule au fond d’une gorge étroite dont les parois escarpées présentent l'accident géologique le plus complet qu'il y ait dans cette région. C’est une voûte parfaitement régulière, de 150 à 160 mètres de rayon, composée de cou- ches concentriques appartenant au troisième étage, qu'un soulèvement a fait surgir au milieu des grès tertiaires et des marnes bleues rejetées de chaque côté (4). Les roches, en commençant à la Vialasse, sur la rive droite, sont celles du premier sous- étage à échinides, puis viennent des marnes argileuses feuilletées, avec de petits bancs de grès calcaires subordonnés, un poudingue à noyau de quartz de toutes les gros- seurs, des grès, des psammites, irès micacés, gris ou jaunâtres, et des calcaires bleuâtres ou jaunâtres avec de petits rhizopodes. Les arceaux inférieurs de la voûte sont formés de calcaires compactes gris, durs, en bancs épais semblables à ceux du lit de la rivière en face du Bain-Doux. On trouve dans les grès précédents des pattes (1). Cette disposition avait été observée et signalée par M. Marcel de Serres (Notice géologique sur le département de l'Aude (Actes de la Soc. linn. de Bordeaux, & X, 1 livre, p. 49, 1838). 368 FORMATION CRÉTACÉE SUPÉRIEURE. (N. 2, p. 160.) de crustacées analogues à celles que nous avons souvent signalées dans la craie jaune de la Touraine et dans la craie grise micacée du sud-ouest aux environs de Gour- don, etc. Le sentier de la Vialasse à la Ferrière est tracé, vers le milieu de la voûte, sur un banc formé d'Hippurites organisans placées verticalement les unes contre les autres, absolument comme à la montagne des Cornes, mais appartenant ici au second niveau de rudistes, celui que nous avons signalé contre le village même des Bains. Ce soulèvement, dont l’axe est dirigé E.-N.-E., O.-S.-0, se rattache évidemment à la voûte du grand escarpement de Sougraigne dont il marque l’extrémité occiden-— tale. Le phénomène est ici plus régulier, sur une moindre échelle, et l’on se rend facilement compte de ses eflets, tandis qu’au sud de Sougraigne il est accompagné de circonstances plus complexes et qui ont une certaine analogie avec ce que l’on observe sur le versant nord du mont-Alaric. Les effets dynamiques sont assez com- parables de part et d’autre, et les marnes bleues plongent ici vers les calcaires redressés, presque verticaux, comme les marnes nummulitiques contre les calcaires compactes du troisième étage. Nous supposons que le ruisseau de Sougraigne coule dans une brisure profonde sur l’un des côtés de laquelle, au sud, les couches forte- ment redressées ont été arquées en voûte, tandis que sur l’autre, ou au nord, elles sont simplement melinées de 15° à 20° vers cette-même brisure. , Quatrième étage, — Calcaires et grès divers. Nous réunissons dans le quatrième étage toutes les assises crétacées qui, commen- cant un peu au-dessous du Bain-Doux dans la coupe générale de la vallée de la Sals (pl. IV, fig. 1), se développent jusqu’au terrain de transition. Ce sont d’abord des bancs de grès jaunâtres, de psammites argileux gris, de grès micacés rou- geûtres imparfaitement feuilletés, puis d’autres psammites gris, des calcaires bruns, de nouveaux psammites gris ou jaunâtres, des marnes grises, un second banc de grès calcarifère jaunâtre auquel succèdent des marnes, des psammites friables, des grès calcarifères jaunâtres semblables au précédent et alternant encore avec des psammites grisâtres. Les deux tournants de la route taillée dans ces couches mon- trent celles-ci coupées obliquement et plongeant au S.-0. Un calcaire grésiforme, gris, noduleux et marneux, de 7 à 8 mètres d'épaisseur, se voit dans le ravin qui aboutit au ponceau. Il est à 5 mètres au-dessus du niveau de la route, et les fossiles assez nombreux qu’il renferme sont peu déterminables. Au delà les assises suivantes se relèvent avec un pendage au S.-S.-0. de plus en plus prononcé (IV, fig. 5) : 1° Grès jaunâtre. 2° Psammite bleu micacé. 3° Grès. L° Calcaire marneux compacte, noduleux, très tenace, à cassure finement esquilleuse, gris au dehors, bleuâtre à l’intérieur, de deux mètres d'épaisseur, avec Serpule, Zima voisine des Z,cenomanensis, d'Orb., et granosa, Gold., Pecten quinquecostatus, SOw., P. quadricostotus; var.? id. (diffère du type par une des trois côtes intermédiaires (N. 2. p. 161.) RÉGION DU SUD. 369 toujours beaucoup plus petite que les deux autres), £xogyra columba, Gold. , var. minor, £. flabellata, Gold., var. Boussingaulti, d’Orb., Æ. Couloni?, var. étroite, d’Orb., Ostrea carinata, Lam. , fragment de Caprina, peut-être de la C. Aigulloni?, d'Orb. (1). 5° Grès quartzeux jaunâtre, à grain plus ou moins fin, de 4",50 d'épaisseur, formant une saillie très prononcée dans le lit même de la rivière et se suivant distinctement de chaque côté dans les escarpements qui la bordent. 6° Calcaire gris-brun, schistoïde, de 1°,50 d'épaisseur. Sa cassure est anguleuse, et il est pétri de fragments d’ostracées. La roche, d’abord grise, devient brune, à cassure inégale, remplie de petites Alvéolines globuleuses, différentes de celles des grès tertiaires du moulin Tiffeau. Par places, ce calcaire se délite en sphéroïdes ou en cylindres irré- guliers. 7° Calcaire en plaquettes, impur, gris-brunâtre, composé de fragments de coquilles et de polypiers calcinés, indéterminables, reliés par un ciment de calcaire marneux. Cette roche terreuse repose directement sur les 8° Schistes de transition gris-bleuâtre ou noirâtre. La surface de contact des deux terrains, de chaque côté de la rivière, est très ré- gulière ou faiblement ondulée. Son inclinaison est de 45°, et les deux stratifications sont complétement discordantes. Si l'on gravit la montagne qui borde la rive droite précisément au-dessus de ce point, on reconnaît, en atteignant le sentier qui la longe‘ à mi-côte, à 80 mètres au-dessus du lit de la Sals, que les couches à Alvéolines n’y existent plus. Le banc de grès (n° 5) est alors en contact immédiat avec les schistes, et au-dessus se voit encore la couche à Exogyra columba, etc. Mais cette dernière elle-même ne se continue pas sans doute très loin, puisque nous ne l’avons plus rencontrée en suivant à l’est le contact des sables ferrugineux et des grès avec les schistes de transition d’une part et avec les calcaires du troisième étage de l’autre. Ces couches arénacées seraient, jusqu’à Fourtou, les seuls repré- sentants du quatrième, et l’on a vu qu’elles étaient assez développées et toujours sans fossiles autour de ce dernier village, où elles forment la ligne de partage des bassins de la Sals et de l’Orbieu. C'est aussi dans ces grès que paraît avoir été ex- ploité le jayet à une époque reculée (2). Enfin nous regardons, comme en faisant essentiellement partie, une assise qui, au pass ou col de Capella, sur le sentier de la métairie de Linas aux sources salées, couronne le grand escarpement des calcaires à Caprotines du roc de Balesou qui domine les sources. La roche grisâtre est exclusivement composée d’Orbitolina con- cava, Lam. et conica, d’Arch., mélangées d’un peu de sable marneux. Son épaisseur (1) Cette couche fossilifère avait été déjà observée par Dufrénoy (a) et par M. Rolland du Ro- quan (4), mais ses rapports avec toutes celles qui la surmontent n'avaient point été établis, et, de son côté, M. Marcel de Serres n’a pas fait cesser la confusion. Les dislocations sont d’ailleurs bien loin d’avoir l'importance qu’on à voula leur attribuer. (2) Vène, Ann. des mines, 3° sér., t. VI, p. 167, 1834. (a) Mém. pour servir à une descripl. géol. de la France, t. I, p. 66 et suive, pl. 4, fig. 10, 1834. (b) Description des coquilles fossiles de la famille des rudistes, p. 32, 1841. SOC. GÉOL. — 2° SÉRIE, T. VI. — Mém. n° 2. LT 370 FORMATION CRÉTACÉE SUPÉRIEURE. CN. 2, p. 162.) est de plusieurs mètres, et elle est séparée des calcaires compactes par une assise argilo-arénacée noirâtre, avec du gravier plus où moins fin et des fragments de bois charbonné ou de lignite. Près de Bugarach nous avons aussi rencontré, mais non en place, un macigno ou grès grossier gris avec Orbitolina concava, qui provenait sans doute de quelque affleurement du même étage aux environs. La position de la couche du col de Capella, jointe aux fossiles des assises infé- rieures des bords de la Sals, et à la Panopæa striata, d'Orb., trouvée aux environs de Padern, permet de penser que nous avons, dans cette petite région crétacée des Corbières, le représentant d’une partie du 4° étage de la formation, tel que nous l'avons caractérisé dans le sud-ouest de la France et dans le bassin de la Loire. Par sa faune, cet horizon se distingue nettement des couches à échinides du troi- sième, de même que le premier niveau de rudistes de la montagne des Cornes se sé- parait de la faune des marnes bleues supérieures. Mais, à ce dernier égard, la série fossilifère de Sougraigne, qui se trouve plus bas, a dû être regardée comme le lien, au moins local, des deux faunes supérieures, et sans aucune analogie avec celle des couches à échinides sous-jacentes. 6 RÉGION DU NORD-EST. La formation crétacée supérieure de la région du nord-est ou du bassin de l’Ausson diffère de celle du sud par tous ses caractères. Les roches arénacées y règnent presque exclusivement; les bancs calcaires et marneux n’y sont que des accidents locaux, et les rapports stratigraphiques des unes et des autres, soit avec les dépôts ter- tiaires, soit avec les roches crétacées inférieures, et même avec celles du lias, sont encore pour nous fort obscurs. Nous étudierons ces couches d’abord dans la chaîne de Fontfroide, où se trouvent d’assez nombreux fossiles, ensuite dans les collines de Boutenac, sur la rive gauche de lAusson. L'ancienne abbaye de Fontfroide est située au fond d’une gorge étroite fermée à l’est par des montagnes assez élevées. Un ruisseau qui descend du sud et un che- min étroit qui longe les murs de l’église séparent celle-ci de l’escarpement abrupt d'une colline isolée que surmonte une croix de fer et qu’entourent de profonds ra- vins. Le ruisseau précédent se dirige ensuite au N.-0., passe sous un pont en face de l’abbaye, et à 500 mètres de celle-ci est traversé à gué par le chemin qui rejoint la route de Narbonne. Si, à partir de ce gué, on remonte la rive droite du ruisseau dont l’escarpement est revêtu d’un mur de soutenement, on coupe une série d’assises parfaitement concordantes, plongeant à l’E., sous un angle de 30°, qui augmente ensuite graduellement jusqu’au pont, où il est de 80e. Cette série, représentée (pl. V, fig. 12) (1), est composée comme il suit : (4) Le profil est tracé en suivant le bord du fossé, et, après le pont, le chemin de la Quilie ; mais, pour plus de clarté, nous avons indiqué en plan la position des bâtiments de l’abbaye et de la colline de la Croix dont nous donnons aussi la coupe particulière (fig. 14). (2 (N: 2, p. 165.) RÉGION DU NORD-EST. 371 1° Grès gris, durs, traversés par le ruisseau, mais ne paraissant plus dans le talus de la rive gauche, . . ., . . . . . . à: . . 925à30 mètres 2° Psammite. avec empreintes et moules de fossiles. . . . . . . 2 3° Psammite et grès gris micacé US ET nt ur 2 ut L° Banc d’Aippurites organisans . Lot RER RON 0,50 5° Grès et psammites gris ou ferrugineux. . . . . . . . . . 100 6° Grès blanc. . 7° Psammite ferrugineux L Ha POLE 4 51,94760 8° Couche à ZZippurites cornu-vaccinum, etc. … ELA C 2 9° Psammite gris-brunâtre ferrugineux , . . . . . . . . . 2 AOSESimantenvecinudistes MATE Ur: OL LE ae Push 1) 41° Psammites divers. É : : : sYret 100 12° Psammites plus argileux. LE . nc ont 13° Psammites gris-verdâtre. c = |} Ju c SP TREMUT C0 14° Calcaire gris noduleux avec rudistes. . 45° Grès brun. 4 “if A tés 16° Calcaire avec rudistes, divisé en 7 Dre 47° Grès brun micacé. 18° Calcaire avec rudistes. 19° Grès brun micacé. 20P \Galcaireravectrudistesst mise res tôle 21° Grès ferrugineux schistoïde. 22° Calcaire gris compacte 23° Calcaire gris-bleuâtre avec db, 2h° Grès ferrugineux. 25° Calcaire gris, compacte, remets 26° Grès ferrugineux. . . . , => ua LEA © . . . . . . . e . . . e 27° Calcaireavecrudistes (Æippuritesorganisans, Sphærulites Sauvagesi?). 28° Grès rouges, très ferrugineux, pouvant même fournir un minerai de fer. Ces grès, situés en face du petit pont, se continuent le long du chemin de la Quille et sont suivis dans cette direction par des assises toujours concordantes . . . . : rm ÿ 29° Calcaires schistoïdes, grisâtres, marneux, un Sea RTE avec T ere- bratula sella, Sow., Moutoniana, d'Orb., tamarindus, Sow.?, , . . [SA N WNWNOS NN ES% FF © = biplicata, id., nuciformis et depressa, Sow., Exogyra sinuata, id. , = Æ. Boussingaulti, d'Orb.?, Cyprina abbatiæ, nov. sp. (1) Salenia 8 ee EM ue Ut ER PE AR IR tre te SE 3 Ÿ30° Grès ferrugineux sans fossiles RO AEMEÉ DRE IAU 2 Î31° Grès gris-verdâtre ou jaunâtre, calcarifère, . . . . . . . . 30 cc à 32° Marnes bleues. 33° Calcaires compactes, gris-bleuâtre, formant les crêtes environnantes le long du chemin de la Quille. La colline de la Croix, dont la base est coupée par le chemin qui longe le Li de l'église et le ruisseau (pl. V, fig. 11), est formée par les assises 29, 30 et 81, et l’ab- (1) Gette espèce voisine de la C. cordiformis, d'Orb., est plus haute encore et plus trigone. Le moule a 0,09 de haut sur 0,07 de large et 0,06 d'épaisseur. 372 FORMATION CRÉTACÉE SUPÉRIEURE. (N. 2, p. 164.) baye elle-même est bâtie sur les grès n° 28 (1). Les couches fossilifères, qui passent sous la tour d’un ancien pigeonnier, sont ici des calcaires gris-bleuâtre, compactes, à cassure esquilleuse, en rognons aplatis, alternant avec des argiles bleuâtres, noirâtres ou grises, feuilletées, qui plongent toujours à l'E. sous un angle de 55° à 60°. Les grès ferrugineux (n° 30) leur succèdent, et la croix qui surmonte la colline est fixée dans un grès siliceux et calcarifère, gris-verdâtre ou jaunâtre, dur, schistoïde, à grain très fin et uniforme, avec points verts et quelques paillettes de mica. Cette assise constitue aussi les roches qui se profilent au sommet de la montagne dominant le vallon au sud. Les épaisseurs que nous assignons aux diverses assises de la coupe précédente sont un peu fortes, parce que la coupe n’est pas exactement perpendiculaire à la direction; cependant leur puissance totale n’a pas moins de 350 mètres. Elles se répètent nécessairement dans les collines qui bordent le chemin de l’autre côté et sur la gauche du ruisseau, mais les talus, couverts d’une épaisse végétation, ne per- mettent que de loin en loin de constater leur prolongement au S.-0. (2). Nous n’avons point déterminé toutes les espèces de rudistes des 9 assises dans lesquelles nous en avonsobservé, et toujours avec une grande abondance ; ce pourrait être l’objet d’une monographie intéressante, mais nous avons la presque certitude que certaines d'entre elles se présentent dans la plupart de ces assises, et qu’il n’y a aucune espèce qui appartienne à l’étage supérieur du sud-ouest de la France non plus qu’à l’inférieur. Toutes nous ont paru appartenir aux deux horizons de rudistes de la région sud des Corbières. Cette coupe de Fontfroide est donc remarquable par la réapparition des animaux d’une même famille, de mêmes genres et souvent de mêmes espèces, presque à l'exclusion des autres mollusques, à 9 reprises différentes, et caractérisant des assises calcaires, toujours séparées par des assises arénacées, quelquefois très épaisses et peu fossilifères. C’est un phénomène de récurrence de conditions semblables pendant un laps de temps très considérable dont oh rencontre peu d’exemples aussi nettement caractérisés. Toute cette série arénacée et cal- caire, considérée dans son ensemble, nous paraît correspondre aux étages 2 et 3 (1) L'église de Fontfroide est du xx‘ siècle, de cette période de l’art dite de éransition, où le plein cintre s'allie à l’ogive. Les grès rouges ou psammites des environs ont été employés dans sa construction. Ce qui reste aussi du cloître dénote un monument assez remarquable du même temps. (2) M. Tournal (a), en signalant cette localité, dit qu'avec les Hippurites et les Radiolites il a trouvé des Cyclolites, que nous avons aussi rencontrées avec d’autres polypiers, puis des Spatangues. Ces derniers fossiles justifieraient le niveau que nous assignons à ces couches relativement à celles de la région du sud, et le même géologue a indiqué ce rapprochement. M. Boué (b) y avait aussi reconnu les Hippurites organisans et cornu-vaccinum, mais il s'était mépris sur les vraies relations de ces couches avec les calcaires marneux, gris, compactes, situés à l’est, et qu’il suppose placés sur le système des grès, tandis que ce n’est qu’une apparence due au renversement de toute la série crétacée. (a) Journal de géologie, t. I, p. 249, 1830. (b) Bull. de la Soc. géol. de France, 1"° sér., t. III, p. 327, 1833. (N. 2, p. 165.) RÉGION DU NORD-EST. 373 de la région du sud. Quant à la disposition complétement anormale de ces couches qui semblent plonger sous les assises néocomiennes, elle résulte évidemment d’un renversement. En suivant le chemin de la métairie de la Quille, un ravin qui le traverse met à découvert les marnes (n° 32) dans lesquelles M. Noguès à rencontré quelques Térébratules peu déterminables (T. elegans, Sow.? et tamarindus, id.?) et un frag- ment de Bélemnite également indéterminable, mais dont nous devons dire que le facies, comme celui des Térébratules, s'éloigne un peu des formes crétacées. De ce point jusque sur le plateau, on marche presque toujours sur les marnes et les calcaires compactes (n° 33). Si, au contraire, on prend d’abord le ravin étroit et profond qui contourne à l’est le pied de la colline de la Croix, derrière l’abbaye, pour gravir ensuite l’escarpement et atteindre plus directement le plateau, on trouve, à partir de la base : 1° des calcaires bleuâtres en rognons enveloppés dans des marnes argi- leuses noirâtres avec quelques Exogyra sinuata; 2 des calcaires noduleux gris et des marnes de même teinte; 3° un calcaire jaune; 4° une marne jaune avec des nodules endurcis et des moules de Corbis ; 5° une seconde assise de marne jaune très puissante, couronnée par des calcaires et des grès qui occupent la partie supé- rieure de l’escarpement. Tout cet ensemble qui plonge à l'E. est discordant par rap- port à la colline de la Croix. Des grès gris-jaunâtre, un peu schistoïdes, courant N.-E., S.-0., et plongeant au S.-E., forment le plateau de la métairie de la Quille. En redescendant à l'E. vers la Plâtrière, on traverse des argiles lie de vin et des cargnieules accompagnant un gisement de diorite, des grès, une marne jaune et un nouveau banc de grès, une assise calcaire, une marne grise et un grès ferrugi- neux, avec des traces de Trigonies, l’une voisine de la T. Coquandiana, d'Orb., l’autre de la T. spinosa, Sow. Une masse puissante de calcaire gris-bleuâtre forme ensuite une crête élevée de chaque côté du ravin, plongeant en sens inverse de part et d'autre, puis viennent des marnes et des grès alternant jusqu’au gisement de gypse, de marnes gypseuses rouges, grises et vertes, avec cristaux de quartz bi-pyra- midaux accompagnant le pointement de diorite et d’amygdaloïde de la Plâtrière. Dans le voisinage même de la roche ignée, une couche de marne grise que coupe le chemin renferme abondamment une petite espèce de Turritelle qui paraît être nou- velle et voisine des T. Prevosti et Fittoniana. De ce point, en continuant à descendre jusqu'aux dépôts tertiaires de la plaine, on traverse des calcaires durs, cristallins et des grès dont les relations sont assez obscures. Ainsi ce versant oriental de la chaîne de Fontfroide, par l'absence de fossiles crétacés, le désordre apporté. dans la stratification et les changements produits dans les caractères pétrographiques des couches lors de l’apparition des roches ignées, nous laissait fort incertain sur ses vrais rapports géologiques, mais les observations plus récentes de M. Noguëès, en nous faisant connaître quelques faits nouveaux, nous ont déterminé à ranger une partie du plateau et de ce versant dans la formation crétacée supérieure. En suivant le chemin de Fontfroide à la Quille, il a reconnu des empreintes végé- s74 FORMATION CRÉTACÉE SUPÉRIEURE. (N. 2, p. 466.) tales dans les marnes schisteuses grises du ravin de la Pinède, recouvertes, au bas d’une petite cascade qu’on trouve en remontant ce ravin, par des calcaires com- pactes, puis par des grès avec quelques Orbitolines. À ceux-ci succède un calcaire pétri d’'Orbitolina discoidea, Alb. Gras, et courant N.-E., S.-0. Enfin une nouvelle assise de grès dont nous avons déjà parlé porte le domaine de la Quille. Cette coupe diffère donc un peu de celle qu'on obtient en montant directement l’escarpement, ce qui tient à ce qu’on traverse les couches obliquement, et peut-être aussi à quel- que disposition stratigraphique particulière. Au sud-est de la métairie, après avoir dépassé la limite des marnes gypseuses, en redescendant le versant oriental de la chaîne, M. Noguès a observé une couche de marne sortant de dessous les grès, se prolongeant de part et d'autre du chemin et renfermant des fossiles parmi lesquels nous avons reconnu des moules de Serpula amphisbæna, Gold. (Gastrochæna), semblables à ceux des marnes bleues du moulm Tiffeau, des fragments de Serpules dont un pourrait aussi provenir du Dentalium cras- sum, une Baguette de Cidaris vesiculosa, Gold.?, deux Nucules, dont une ressemble beaucoup à la N. pectinata, Sow., mais plus petite, l'autre trigone, renflée, pro- bablement nouvelle, des fragments de Térébratules paraissant provenir des T. car- nea, Sow. ou semiglobosa, id., lAvellana cassis, d'Orb., une T'urritella, voisine de celle de la Plätrière, le Dentalium medium, Sow. in Fitt. an alternans, Müll.? Ces données, quoique bien incomplètes encore, permettent cependant de penser que les grès, les calcaires ei les marnes, à partir des couches à Orbitolina discoidea qui seraient de la formation inférieure, jusqu'aux marnes à Turritelles de la Plà- trière, apparliendraient à la supérieure. Ce serait un facies différent à la fois de celui de la région du sud et de celui du bassin de l’Ausson proprement dit. Nous supposons que ce système occupe une partie du plateau des bois de Fontfroide avec les assises arénacées de l’ouest, et qu'à l’est il est séparé du lias par une zone étroite de la formation inférieure reposant sur ce dernier dont elle est peu distincte. C’est ainsi que nous l'avons compris sur la carte. Si nous reprenons actuellement l'examen des collines situées à l’ouest de Font- froide, nous trouverons constamment des roches arénacées. En face du gué, le plongement des psammites devient inverse ou au S.-0., assez faible, et, lorsqu'on monte la butte isolée que couronnent les ruines du château de Sant-Martin, on trouve successivement, à partir de sa base et plongeant fortement à PE. (pl. HE, fig. 22) : 4° Psammite gris tendre renfermant des bancs subordonnés avec de petits nodales ferru- gineux, des poudingues à petits cailloux de quartz, des grès quartzeux et des psam- mites ferrugineux très micacés, avec Cerithium Lujani, de Vern., très abondant, Pecten Dujardini, Desh., Cardium, Lima voisme de la Z. Reichenbachi? Ræœm., Mytilus voisin da M. semiradiatus, d'Orb., Arcopagia, Trigonies, Huitres, etc. 2° Grès feldspathique blanc. 3° Grès. CN. 2, pe 167.) RÉGION DU NORD-EST. 375 L° Vers la moitié de la hauteur de la colline affleurent deux couches de calcaire blanc, très dur, sub-cristallin, noduleux, peu épaisses, remplies d’Æippurites organisans, de Sphærulites angeiodes, Sauvagesi, etc., et séparées par une assise de grès. HACIÉS 6° Grès brun très dur, sur lequel reposent les murailles du château. On peut de ce point juger que le grand système arénacé qui se développe au nord, et que traverse la route de Narbonne, plonge à l'E. sous le même angle que les cal- caires des environs de Fontfroide. Il constitue les collines basses qui s'appuient sur le prolongement de la crête de cette dernière localité, et qui longe la route, depuis le Jardin-de-Saint-Julien jusqu’à Auris et Aussière, s'étendant ensuite dans toute la plaine de Fontlaurier à la Grange-Neuve. Le territoire des métairies de Saint- Martin, de Courtalet et tout le pays à l’est de Saint-André appartiennent à ces mêmes psammites ou à des grès ferrugineux, violacés, avec minerai de fer hydraté en grain. La colline basse qui joint la route au pied de celle du château de Saint-Martin sem- ble composée des mêmes couches, mais plongeant à l’O., ce qui nous fait présumer l'existence d’une faille indiquée, mais avec doute, dans notre coupe. Lorsqu'on prend la route de Narbonne à la Grasse, après l’embranchement de celle de Carcassonne, on voit succéder aux calcaires gris-noirâtre jurassiques qui la bor- dent, un peu avant d’arriver à la hauteur de la métairie d’Aussière, des grès ou psam- mites schisteux, micacés, tendres, gris-verdâtre, renfermant de petits nodules fer- rugineux et plongeant au S. sous un angle de 25° à 30°. Leur stratification est un peu tourmentée. Ensuite viennent des argiles sableuses, rouges ou grises, panachées, à la hauteur d’Auris, des bancs de grès puissants, et enfin, en face du Jardin-de-Saint- Julien, des poudingues à gros éléments peu roulés, de grès jaunâtre, reliés par un ciment de grès grossier. On y observe aussi des fragments de calcaire compacte ou sub-cristallin, jaunâtre, très dur. Ces poudingues plongent au N.-E. sous un angle assez prononcé. De la métairie de Saint-Julien à Fontfroide, le chemin suit des brisures constamment dans les psammites gris-bran qui forment sur la gauche une colline à profil triangulaire, dont les couches redressées plongent à l’'E., et sont celles dont nous avons donné une coupe détaillée prise le long de sa base méri- dionale. Au delà ou à l’ouest de la grande route, une suite de buttes coniques qui s’éten- dent depuis la Grange et Saint-Julien, vers Quilhanet et Bizanet, et dont les couches plongent à l’O., sont les {émoins du grand développement que prend, dans cette direction, le système arénacé qui se rattache à la base des collines de Saint-Martin et du vallon de Fontfroide. Sa limite orientale tourne autour de Saint-Amans et du moulin qui est au delà. Il existe également entre Saint-André et les montagnes calcaires qui s'élèvent au sud de ce village. Le massif de Roque-Longue et son an- nexe à l’est, dont les calcaires plongent en sens inverse, forment des îlots au milieu des psammites, comme ceux qui se voient plus au sud s'élèvent au-dessus de la mollasse du fond de la vallée. 376 FORMATION CRÉTACÉE SUPÉRIEURE. (N. 2, p. 168.) En remontant la vallée de l’Ausson, d'Ornaisons (Ornezons) à Gasparets, on mar- che sur un poudingue tertiaire. Mais en approchant de ce dernier village, les grès et les psammites crétacés sortent de dessous. Entre ce point et Boutenac, une première colline montre une série de psammites gris-brunâtre, rougeâtres, jaunâtres, très redressés (de 15° jusqu’à 50°), et courant N.-N.-E., S.-S.-0. Après avoir tra- versé ces roches arénacées, tendres, à gros grain et micacées, on les voit plonger en sens inverse avant d'atteindre Boutenac. Au-dessous des maisons affleure une assise de marne lie de vin, panachée de gris et de jaune, et, si l’on se dirige au sud- ouest, on retrouve encore les psammites gris plongeant à l'E.-S.-E. et constituant toute la colline située à l’ouest du village. La plaine qui s'étend au delà, couverte de vignes et de champs cultivés en céréales, contraste par son aspect avec les col- lines environnantes arénacées, sèches, nues, très surbaissées, à contours arrondis. Le sol aride de ces surfaces sablonneuses est cependant humecté çà et là par de petits suintements d’eau qu’occasionnent quelques lits de marnes, subordonnés aux grès (pl. IE, fig. 23). Les psammites gris ou très-ferrugineux se continuent sur le chemin de Villerouge avec la même inclinaison jusque près de la métairie, où leur succèdent, toujours en affectant la même direction, un calcaire gris-bleuâtre, compacte, fragile, à cassure droite, rempli de fragments de Pentacrines. Cette roche, qui affecte aussi une ten- dance à la schistosité et à se diviser en plaquettes, est séparée des psammites par un calcaire magnésien gris-jaunâtre, à cassure terreuse, de 5 à 6 mètres d'épaisseur, divisé en feuillets très minces ou papyracés, dont la coupe montre des lignes ou filets plus foncés, parallèles, très réguliers, extrêmement rapprochés. La direction est toujours N.-N.-0., S.-S.-E., et le plongement d’environ 45° à l'E.-N.-E. Le cal- caire bleu à Pentacrines repose à son tour sur une dolomie grise, cristalline, à grain fin et d’un éclat nacré. À ces assises calcaires succèdent de nouveau des grès jaunes et ferrugineux qui paraissent former toutes les hauteurs de ce point jusqu’à Villerouge. On y voit associées des argiles lie de vin et des roches qui ont la plus grande ressemblance avec celles du groupe tertiaire d’Alet. Cependant leurstratification semble concorder avec les calcaires et les dolomies, de manière à faire croire qu’elles passent dessous. . Aucun accident extérieur ne laisse soupconner de faille et encore moins un renver- sement. D'ailleurs ces nouvelles couches arénacées diffèrent de celles qui surmontent les assises calcaires. Ce sont de véritables grès, plus ou moins ferrugineux, et non des psammites. Sur les pentes des collines, au S.-E., du côté de la plaine, tout le système est bordé de marnes jaunes, panachées de blanc, qui dépendent de la mol- lasse, de poudingues horizontaux, et par le dépôt quaternaire du fond de la vallée. On a vu que les couches tertiaires se continuaient jusqu’à la Bouisse, près du pont de l’Ausson, au delà duquel la route coupe un lambeau de grès ferrugineux redressé, et qu'ensuite les mêmes grès rejoignaient ceux de la colline de Saint-Martin et du Jardin-de-Saint-Julien. GRR 0) RÉGION DU NORD-EST. 377 Si l’on jette un coup d’œil sur le dessin que nous avons donné (p. 221-1 3), on pourra concevoir que toute cette série arénacée qui, sur la rive droite de l’Ausson, disparaît avant d'atteindre Thézan, soit suivie au sud-est par la ligne des escarpe- ments qui vont se rattacher à la montagne de Saint-Victor, et nous représentent le groupe d’Alet; mais il n’est pas aussi facile de se rendre compte, dans les collines opposées de la rive gauche, d’une disposition analogue ou correspondante; car toutes les assises semblent y être concordantes, depuis les psammites de Boutenac, les calcaires et les dolomies de la métairie, jusqu'aux grès ferrugineux avec les argiles rouges, vertes et jaunes de Villerouge. Ces dernières assises, que nous sommes porté à ranger dans le groupe d’Alet, plongent cependant sous les calcaires, comme ceux-ci sous les collines arénacées de Boutenac, qui représentent à leur tour les couches arénacées de Saint-Martin, de Fontfroide, d’Auris, etc. En supposant que les calcaires bleus à Pentacrines et les dolomies soient le pro- longement des bandes calcaires de Thézan, situées du côté opposé de la vallée, mais plongeant eu sens inverse, il resterait encore à expliquer leur position relative- ment aux psammites de Boutenae, sous lesquels ils plongent. Mais ces roches n’ont aulle part leurs analogues dans le groupe d’Alet, et leur position sous les psammites est trop nette pour qu’on ne les rapporte pas au terrain secondaire et peut-être en partie à la formation jurassique. M. Noguès ayant parcouru récemment cette petite région avec beaucoup de soin, nous reproduirons les renseignements suivants, puisés dans les notes qu'il a bien voulu nous communiquer, et en indiquant les fossiles qu’il y a joints, de maniere à compléter et à rectifier ce qui précède. À l’ouest de Boutenac, des recherches de lignite ont été dirigées sur une couche de marne schisteuse inférieure aux grès, et qui renferme des empreintes végétales. A l’est du même village, dans le ravin de Corgné, on observe de haut en bas : 4° Psammites gris ou blancs. 2° Marnes schisteuses avec empreintes végéiales. 3° Psammites bleuâtres avec des fossiles parmi lesquels nous avons reconnu l’Anomia papy- racea, d'Orb., une Arche voisine de l'A. fibrosa, Sow., mais ayant des côtes rayon- nantes assez prononcées, le Cardium cenomanense, d’Orb.?, une petite valve peut- être d'Exogyra flabellata (Ë. Midas, Math.), et l’Ostrea galloprovincialis, id. (0. acutirostris, d'Orb.). Au nord de Gasparets, comme au sud-ouest de Villemajou, M. Noguës signale des grès gris avec Térébratules, Pecten, etc., constituant les collines au nord-ouest de Bouienac. Les psammites bruns, grossiers, très micacés, renferment : Cyclolites, indét., Crassatella? nov. sp., Cardium Hillanum, Sow., Trigonia (fragment peut- être de P. spinosa, Park?), Nucula (celle des marnes de la Quille, qui serait une var. minor de la N. pectinata, Sow.), Pecten quadricostatus, Sow., T'erebratula dif- formis, Lam. En se dirigeant au nord, vers le Luc, le même géologue a trouvé, au Soc. GÉOL. — 2° SÉRIE, T. VI. — Mém. n° 2. LS 378 FORMATION CRÊÉTACÉE SUPÉRIEURE. (N. 2, p. 170.) lieu dit Tannerel, un banc calcaire rempli d'Hippurites et de Radiolites recouvrant les grès. Ce banc se voit sur le chemin de Las-Munjas, de Pech-Magral, etc. Au sud de Boutenac, le ruisseau de Corgné longe la colline de Jasse-de-las-Vacas, composée de grès ou psammites gris et rouges, plongeant au N.-0. La métairie des Olieux se trouve sur ces grès, qui prennent un grand développement et renferment, aux environs du four à chaux, quelques bancs calcaires subordonnés. Le grand escarpement de la Roque- -Sestière, situé au nord-ouest des Olieux, est composé de calcaires compactes gris, durs, renfermant des cristaux de chaux car- bonatée et des veines de silex avec quelques fossiles (Pecten pulchellus, Math. (P. Matheronianus, d’Orb.), et d’autres petites bivalves indéterminées dont le test est fort mince). Ils plongent de 40° au N.-E. et courent N.-0., S.-E. Dans cette dernière direction, ils disparaissent sous la plaine de l’Ausson. Dans le ravin qui longe l’escarpement, on voit sortir de dessous les calcaires précédents : 4° des cal- caires compactes formant une seconde colline plus basse ; 2° un calcaire magnésien compacte (ravin de la combe del Ges); 3° des marnes schisteuses grises, bleuâtres ou verdâtres, etc. Ces diverses assises courent également N.-0., S.-E., des environs des Olieux à la Barie longue (vallée longue). Les chemins de Villerouge et de Fer- rals à Boutenac traversent cette série au trau de la Mène, à la Barie du Pech, et elle disparaît au Vignals, sous les alluvions de la plaine de l’Orbieu, vers la limite des communes de Boutenac, du Luc et de Lézignan. Le plongement différe de celui des grès de la Jasse- He en qui inclinent à l'O. et au N.-0. Il est facile de reconnaître, dans cette série de couches de la Roque-Sestière celle que nous avons traversée nous-même sur le chemin de Boutenac à Villerouge, et que représente la coupe fig. 23 (pl. HT). Les inclinaisons des assises crétacées, très variables dans cette région, pourraient donner lieu à beaucoup de méprises, si, tout en en tenant compte, on leur attribuait plus d'importance qu’elles n’en ont réel- lement. Les couches crétacées supérieures de la région nord-est que nous venons de décrire, tant dans la chaîne de Fontfroide que dans la vallée de l’Ausson, nous paraissent représenter seulement les étages 2 et 3 de la région du sud ou des mon- tagnes des Bains-de-Rennes à Soulatge, car nous n’y trouvons pas de fossiles qui le la faune des marnes bleues ni celle du quatrième étage, tandis que leurs rudistes sont propres aux deux divisions intermédiaires. Les altitudes de ces grandes assises arénacées, toujours plus ou moins inclinées à l'E. ou au N.-0., sont d’ailleurs assez faibles. Ainsi la butte du château de Saint- Martin (pl. HE, fig. 22), qui en donne une bonne coupe, quoique certainement incomplète, n’atteimt que 159 mètres; l’élévation de son sommet au-dessus de la Vitarelle, sur la route qui passe au bas, est de 93 mètres. Le point le plus élevé des collines de Boutenac, au-dessus des Olieux, est de 194 mètres au-dessus de la mer. Dans la chaîne de Fontfroide, la métairie de la Quille est à 247 mètres, et le pla- teau des bois au sud, à 280. (N. 2, p. 171.) FORMATION CRÉTACÉE INFÉRIEURE. è 379 Formation crétacée inférieure. Les couches qui appartiennent à la formation crétacée inférieure occupent pres- que à elles seules les portions orientale et méridionale de notre carte, et nous les avons rangées dans deux étages représentés chacun par une teinte particulière. Nous avions d’abord rapporté le premier aux calcaires à Caprotines de la Provence, et le second à l'étage néocomien inférieur du même pays; mais si ces rapprochements nous laissent encore quelque incertitude, à cause des fossiles dont la répartition ne s'accorde pas complétement avec ce point de vue, la séparation de ces deux étages dans le pays que nous décrivons, et bien au delà dans le département de l’Ariége, est on ne peut mieux jusüfiée.* La constance des caractères pétrographiques propres à chacun d'eux est un des faits les plus frappants de la géologie de cette contrée, et leur discordance complète, avec les assises crétacées supérieures, leurs formes orographiques parti- culières dont nous avons déjà parlé, enfin leur développement progressif à mesure qu'on s’avance de PE. à l’O., donnent à leur étude un mtérêt particulier. Nous dé signerons le plus récent de ces étages par l’expression de calcaires compactes où à Caprotines (1), le plus ancien par celle de marnes et calcaires néocomiens. Nous les décrirons simultanément, en commencant par le massif de la Clape, où la stratifica- tion, les roches et les fossiles présentent toujours une grande netteté dans leur dis- position, leurs relations et leur distribution, de manière à pouvoir servir utilement de terme de comparaison. MONTAGNES DE LA CLAPE,. Caractères généraux. — Excepté sur son versant occidental, à partir d’une ligne tirée de la Ricardelle à Fleury, le massif montagneux de la Clape est exclusivement formé par ces deux étages (2). Les parties les plus élevées appartiennent aux cal- caires à Caprotines, les pentes et le fond des vallées aux assises de l'étage mférieur. Les premiers constituent une sorte de revêtement de 18 à 20 mètres d’épaisseur, fendillé, coupé carrément, ou terminant la partie supérieure des vallées par des murailles verticales, quelquefois surplombantes. Ils ne forment ainsi qu'une vaste assise de calcaires compactes, gris plus ou moins foncé, d’un aspect très uniforme (1) Nous conservons provisoirement ce nom générique jusqu'à ce que les vrais caractères et les rapports de ces coquilles aient été définitivement établis. (2) Trompé par les caractères des roches, M. Tournal (4) rapportait les calcaires secondaires de la Clape au lias, tout en n'y citant cependant que des fossiles bien connus alors pour être crétacés. (a) Mém. sur la constitution géognost. du bassin des environs de Narbonne (Ann. des sc. naturelles, L. XV, p. 74, 1828). — Journal de géologie, t. I, p. 247, 1830. — Placé dans la formation crétacée inférieure par les auteurs de la carte géologique de la France, ce massif a été aussi mentionné comme crétacé par MM. Leymerie, Rolland du Roquan et Noguès, mais sans qu'aucune description, mème la plus succincte, en ait jamais élé donnée. 380 FORMATION CRÉTACÉE INFÉRIEURE. (N.2, p. 172.) et plongeant généralement à l’O.-N.-0. Les secondes, qui composent l'étage le plus ancien, sont au nombre de trois, et ordinairement assez distinctes, L'une, qui sup- porte les calcaires précédents, comprend des calcaires jaunes très marneux, peu solides, de 5 à 6 mètres d'épaisseur au plus ; l’autre, d'environ 50 mètres, renferme des calcaires gris, schistoïdes, ou se délitant en plaquettes, assez durs et remplis d’Orbitolines ; enfin la troisième, d’une épaisseur à peu près égale, est formée de marnes grises, schistoïdes, avec de nombreux lits de nodules endurcis de calcaire marneux, très tenace, gris plus ou moins foncé. Ces trois assises sont parfaitement concordantes entre elles et avec la nappe de calcaires compactes qui les recouvre. Par suite de linclinaison générale à l’O., elles forment à elles seules les collines qui longent la côte au nord de Gruissan. Les deux divisions conservent une identité parfaite dans leurs caractères sur lous les points de la Clape et des îles qui en dépendent ; mais, par suite de la différence des roches qui les composent et suivant le point où on les observe, elles n’ont pas été partout affectées de la même manière par les dislocations, et la partie nord du massif a été beaucoup moins accidentée et dérangée que la parte sud. Les relations des dépôts tertiaires des parties ouest et nord-ouest, relations sur lesquelles nous avons déjà insisté, montrent qu’ils ont été soulevés en même temps et par la même cause, bien qu’ilexistàt sans doute un bombement antérieur qui limi- tait de ce côté le lac de Narbonne. Les failles ou brisures principales, dirigées N.-N.-E., S.-S.-0., et d’autres moins étendues, sont postérieures à ces mêmes dépôts qui, nulle part en effet, n’ont pénétré dans les vallées qu’elles ont produites. Le bombement général actuel du massif peut être contemporain de ces failles, et ces divers phénomènes sont par conséquent postérieurs aux poudingues, aux marnes et aux calcaires lacustres redressés et plongeant partout sous les dépôts quaternaires de la plaine. La crête centrale de la Clape, dirigée N.-N.-E, S.-S.-0., et formée par les cal- caires compactes exclusivement, atteint sa plus grande altitude vers le milieu de l'axe, aux signaux de la Pomarède (210 mètres) et de Pech-Redon (215). Elle s’abaisse ensuite au N.-E. et au S.-0. Ainsi le plateau de la chapelle des Auzils est à 147 mètres seulement. Dans les collines de Gruissan et de l’île Saint-Martin, où l'inclinaison générale est inverse, ou à l’E., les mêmes calcaires passent sous la mer, tandis qu’au nord ce sont en général les assises les plus basses du second étage qui bordent la côte. Description particulière. — Le bourg de Gruissan, bâti sur une presqu'ile, à l'extrémité méridionale de la Clape, est adossé à une colline peu élevée dont nous avons déjà mentionné les dépôts tertiaires (p. 255-47) et entoure à l’ouest le pied d’une butte à pentes abruptes, que couronnent les ruines d’un vieux château (voyez pl. IV, fig. 10, et le dessin déjà donné p. 219-114). La butte du château se compose d’un massif calcaire supérieur, taillé grossière- ment à pic sur toutes ses faces et appartenant au premier étage. Sa base est CÉRAp Uma) MONTAGNES DE LA CLAPE. 381 formée d’une couche de 1",50 à 2 mètres d'épaisseur, pétrie d’une multitude de coquilles indéterminables, sorte de lumachelle que l’on peut observe particulière- ment sur la face orientale du monticule. Les talus moins abrupts qui descendent jusqu’à la mer sont composés de calcaires marneux jaunes, renfermant encore quel- ques Caprotines avec la Corbis corrugata d'Orb. (Sphæra, id., Sow.), l’'Exogyra sinuata, Sow., et de calcaires marneux gris, schistoïdes, avec Orbitolina conoidea, AÏb. Gras. Les couches plongent assez régulièrement à l’'E.; mais au pied occidental de la butte il y à un plongement plus brusque dans la même direction, et l’on voit affleurer des lits minces de calcaires grisâtres ou jaunâtres, alternant avec des marnes schisteuses grises qui renferment l’Echinospatagus Collegnii, d'Orb.?, et des nodules calcaires endurcis. La colline située à l'est, comme le montre la coupe (fig. 40, pl. IV), est le prolon- gement stratigraphique de cette butte du château. Le relèvement des calcaires à Ca- protines que lon voit en entrant dans le bourg, à gauche derrière les premières maisons, plongeant à l'E. de même que dans tout le reste de la colline, a fait affleurer à l'O., au-dessous du cimetière et le long de la plage, la première assise de l'étage inférieur (fig. 41). Ce-sont : 1° des calcaires blanchâtres, noduleux, enveloppés de marnes schistoïdes, de 3 à 4 mètres d'épaisseur, avec T'erebratula sella, Sow. (var. lata, in d’'Orb., pl. 510, fig. 10), T. nov. sp., an T. Roysii, d'Arch.?, une 4r- copagia voisine de l’A4. rotundata, d'Orb., le Salenia prestensis, Des., l'Echino- spatagus Collegnii (type), l'Exogyra Boussingaulti, d’'Orb. Ces marnes passent insen— siblement à un calcaire jaune marneux, tendre, alternant avec des marnes argileuses de même teinte, d'environ 10 à 12 mètres d'épaisseur, à en juger par le creuse- ment en cet endroit d’un puits qui descend au-dessous du niveau de la mer. Les fossiles de cette couche sont. particulièrement Panopæa Carteroni, d'Orb., Corbis corrugala, id., Avicula Sowerbyana, Math., Fenus vendoperata, d’Orb., une Trigonie indéterminable, Plicatula placunæa, Lam., et l'Exogyra sinuata, Sow. Vues de ce côté ou de face, ces couches semblent être horizontales, parce que leur tranche se présente perpendiculairement à l’inclinaison qui est à l'E. Derrière l’au- berge du Lion d’or, on peut aussi observer la superposition des calcaires compactes aux marnes jaunes et une sorte de passage entre les deux assises,comme à la butte du château. L'île de Saint-Martin, située au sud de Gruissan, est, à l'exception du petit lam- beau tertiaire que nous avons signalé sur sa côte occidentale, entièrement formée par les deux étages plongeant à VE. (pl. IV, fig. 12). La maison de santé bâtie au bout du pont est adossée à des calcaires gris de cendre, très compactes, à cassure finement esquilleuse, très durs, tenaces, avec des parties spathiques qui forment le plan supérieur de la colline et qui s’abaissent vers l'E. sous un angle de 20° à 22e. Presque au sommet, la roche montre dans la cassure une multitude de coupes de coquilles noirâtres, à structure fibreuse, appartenant aux Caprotina carinala ou Lonsdalei, d'Orb. À une douzaine de mètres au-dessus de la plage et au-dessus 382 FORMATION CRÉTACÉE INFÉRIEURE. (N. 2, p. 174.) du jardin de la maison précédente, un sentier à peine tracé, qui monte sur le plateau, traverse des calcaires remplis de coupes de rudistes (Sphérulites? Hip- purites ?). En suivant au contraire le pied de la colline, à partir du mur de clôture de l'habitation que nous venons de citer, et en se dirigeant à l’O., on trouve, sous les calcaires compactes, d’abord un banc de calcaire gris, très coquillier, ou lumachelle, déjà signalé dans la butte du château et formant la base du premier étage, puis, se relevant successivement à lO., un calcaire gris schistoïde qui occupe plus haut le talus de la colline. Au delà se montrent les marnes et les calcaires marneux jaunes avec Echinospatagus Collegnii, T'erebratula tamarindus, Sow., var., Exogyra sinuata, Sow., E. Couloni, var. aquilina, et falciformis, Leym., les marnes grises, et enfin les calcaires noduleux gris compactes avec les marnes qui les enveloppent. La Corbis corrugata x est particulièrement répandue. La portion du talus occupée par l'étage inférieur est toujours ici plus ou moins cultivée, tandis que les surfaces formées par les calcaires à Caprotines sont d’une stérilité et d’une nudité complètes. Ces derniers constituent ensuite une grande muraille qui traverse l’île du N. au S. vers son milieu, et à leur base affleurent des calcaires marneux gris, schistoïdes, avec Exogyra sinuala, Avicula, Gervillia anceps, Desh., Perna, Corbis corrugata, Rostellaria indét., Nautilus, Ammonites, etc., recouvrant sans doute les marnes jaunes et grises et des calcaires gris à Orbitolines subordonnés ici à la première assise; car les calcaires foncés, essentiellement caractérisés par ce dernier fossile, n'apparaissent qu’au delà de la vallée semi-circulaire qui accompagne les escarpe- ments précédents. Ces calcaires constituent à leur tour un plan continu, toujours incliné vers l'E. depuis Galinat, où la roche est d’un gris de fumée, compacte, à cassure esquilleuse, remplie de parties spathiques jusqu’à Saint-Martin. De dessous ces rpches semblent sortir, lorsqu'on descend vers les Pujols, les marnes et les calcaires jaunes fossilifères en rognons, avec Echinospataqus Leymeriei, Cott., F'e- nus voisine de la V. matronensis, d'Orb., Isocardia, Cypricardia !, Lucina, Panopæa obliqua, d'Orb., ete. Nous ne pouvons attribuer qu'à une faille cette disposition anormale. Les marnes et les calcaires jaunes règnent aussi au nord de cette mé- tairie près de laquelle se trouve un lambeau de calcaire à Caprotines. La coupe (pl. IV, fig. 12) doit passer vers l'extrémité sud de la faille qui de ce point se diri- gerait au N. Le plateau incliné à l'E. est entièrement composé de calcaires mar- neux à Orbitolines, continus depuis la côte jusqu'a la dépression centrale semi- circulaire. On rencontre en outre sur ce plateau une multitude de fragments de grès brun ferrugineux, verdâtre, gris-jaunâtre, poreux, quelquefois glauconieux, toujours très dur, à grain fin, homogène, passant à un grès lustré, mâis dont le gisement ori- ginaire nous est inconnu. Nous n’avons observé de roche qui ait quelque rapport avec celle-ci que dans le nord de la Clape. | (N. 2, p. 175.) MONTAGNES DE LA CLAPE. 383 Si nous nous reportons actuellement au nord de Gruissan, nous trouverons d’abord à l’est de la route de Narbonne, et s’élevant du milieu des marais, une colline sté- rile, allongée de l'E. à l’O., composée, comme les précédentes, de calcaires gris compactes inclinant de 15° à l'E. Au delà de l'étang, lorsque après avoir quitté la route on prend le chemin qui conduit à la métairie d’Albigairou, les premières couches qui s'élèvent au-dessus de la plaine sont : 1° Des calcaires marneux et des marnes grises schistoïdes enveloppant des rognons calcaires et remplis d'Orbitolina conoidea et discoidea, Alb. Gras, avec Æchinospatagus Collegnii d'Orb., Exogyra sinuata, etc. . 8 mètres. 2° Calcaire grisâtre, très dur, à cassure anguleuse, schistoïde, passant latéra- lement à des marnes jaunâtres qui forment un petit rideau à droite du chemin. Il occupe le sommet d’un mamelon d'une trentaine de mètres d’élévation. Les Orbitolines sont partout disséminées avec les mêmes fos- ° siles que ceux des marnes grises sous-jacentes, et quelques fragments dite AINPIODIE LIUCIC RIDE Me Re ee ee men ete. ee V2 Ces assises de l'étage inférieur plongent au N.-0. sous les escarpements abrupts formés par les calcaires compactes du premier, et à leur séparation se montre l’as- sise de calcaire jaune, marneux, déjà mentionnée plusieurs fois à ce niveau. Au pied de ces escarpements on remarque des cavités circulaires ou elliptiques, de 80 à 100 mètres de diamètre, sur 15 à 18 de profondeur, ouvertes dans les calcaires à Orbitolines précédents et représentant assez bien un ancien cirque entouré de gradins ruinés. Le fond de ces dépressions, dont l’origine est problématique, car il n’est guère possible de les regarder comme d’anciennes carrières, est cultivé ; la vigne, les oliviers, les figuiers et les amandiers en garnissent les parois, et elles con- stituent des oasis en creux, éparses au milieu d’une plaine de pierres, complétement dépourvue de végétation. Noug$examinerons d’abord les collines situées entre ce point et la côte ou à l’est de la crête rocheuse que forment les calcaires compactes, puis nous reviendrons étu- dier à l’ouest la vallée comprise entre ce mème escarpement et la chapelle des Auzils. Autour de la métairie de Crouzil on marche toujours sur les calcaires gris schis- toïdes à Orbitolines, Vatica clapensis, nov. sp. (1), Ammonite (très grosse, indé- term.), etc. À partir du ruisseau, les couches plongent au S.-E. et tout le système inférieur se relève au N.-0. La butte en forme de cône tronqué qui domine la Bergerie présente la disposition indiquée figure 15 (pl. IV). Elle est composée jus- qu'aux deux tiers de sa hauteur par des marnes grises schistoïdes avec des nodules endurcis, et couronnée par les bancs calcaires solides à Orbitolines. Elle montre ainsi la répétition de la coupe que nous avons eue en nous élevant du niveau des marais aux premières collines d’Albigairou. Les fossiles très répandus dans les mar- (1) Cette espèce, dont nous ne connaissons encore que des moules, rappelle la N. Coguandiana, d'Orb., mais elle est beaucoup plus conique, plus élevée, plus grande, et ses tours sont plus con- vexes. Elle atteint de 0,44 à 0,45 de haut sur 0,13 d'épaisseur. 354 FORMATION CRÉTACÉE INFÉRIEURE. (N. 2, 1. 176.) nes au pied de cette butte, le long du chemin, sont principalement : Echinospa- tagus Collegni, d'Orb., var. minor, elongata et acuminata, Diplopodia Malbost, Des., Panopæa Carteroni, d'Orb., Cyprina bernensis, Leym. (C. rostratä, d'Orb., uon Sow. in Fitt.), Terebratula sella, Sow.? T, prælonga, id. (T. biphcata, var. acuta de Buch), Plicatula placunæa, Lam., Serpula Richardi, Leym., $. gordialis, Schloth., etc. Toutes les collines qui, du vallon de la Bergerie s’étendent vers la côte, sont aussi formées par l'étage inférieur. Les calcaires durs à Orbitolines plongent au N.-0., et les marnes grises viennent affleurer dessous, dans le lit et sur les bords du ruis- seau. Des dislocations locales interrompent parfois l'allure générale des couches. Ainsi, dans l'alignement de la métairie de Saint-Aubrès, on remarque une dépres- sion à l’ouest de laquelle les couches se relèvent vers l'escarpement des calcaires compactes à Caprotines, de sorte qu’au pied de ce dernier on a une autre dépression, de part et d’autre de laquelle les strates plongent en sens inverse. Néanmoins Pinclinaison générale au N.-0. fait que les couches les plus basses, c’est-à-dire les marnes grises à nodules calcaires, £xogyra sinuata, Echinospata- gus, etc., qui sortent de dessous les calcaires durs à Orbitolines, constituent seules les dernières pentes des collines qui viennent expirer le long de la côte, sous les sables modernes, autour de la Quintaine, à la redoute de Montolieu au nord-est, comme aux environs d'Eldepal au sud-est. Sur ce dernier point on observe des bancs de calcaire compacte, noirâtre, à cassure très finement esquilleuse, d’un aspect trappéen, très dur et très tenace, subordonnés à l’assise inférieure. Les nodules des marnes grises de la Quintaine (pl. IV, fig. 43) sont très compactes, gris-bleuâtre foncé, tenaces, à cassure unie, finement esquilleuse, et composés de calcaire, d’un peu d’argile et de sable siliceux très fin. Ils sont disposés en lits irréguliers ; leur grosseur varie depuis celle du poing jusqu’à celle de la tête, et ils passent insensiblement au dehors à la marne qui les enveloppe. Le long de la côte de la Quintaine à Eldepal, l’épaisseur de cette assise est d'environ 50 mètres. Les Orbitolines y sont partout aussi répan- dues que dans les calcaires de la seconde assise. L'Exogyra sinuata S'y trouve à pro- fusion et atteint des dimensions énormes, tout en conservant les caractères propres au type de l'Angleterre. On y rencontre en outre plusieurs variétés de l’E£chinospa- tagus Collegnü, d'Orb., Diplopodia Malbost, Des., des Serpules (S. Richardi, Leym. et gordialis, Schloth?), Fenus Ricordeana, d'Orb., F. indét., petite espèce sub- elliptique, très plate, avec les crochets fort petits, Cypricardia, Pecten paraissant être une var. minor du P. «tavus, Rœm., Terebratula Moutoniana, d’Orb., T. prælonga, Sow. (T. biplicata, var. acuta de Buch), T. tamarindus, Sow, in Fitt. (4), Plicatula placunæa, Lam., Natica clapensis, nov. sp., de rares débris d’Ammonites et de Nautiles indéterminables. (1) Les limites respectives des 7. tamarindus et faba restent encore à déterminer par une com- paraison de leurs nombreuses variétés. (N. 2, p. 177.) MONTAGNES DE LA CLAPE. 385 Si, à partir des cavités cratériformes que nous avons signalées non loin de la mé- tairie d’Albigairou, on prend à gauche, par une dépression resserrée entre deux col- lines, pour remonter ensuite le grand ravin à parois verticales qui se dirige au N., on trouve, avant de s'engager dans celui-ci, les calcaires et les marnes grises à Orbito- lines avec de nombreux fossiles, de même que le long de l’escarpement qui est à l’ouest, Ce sont : Echinospatagus Collegnii, d'Orb., Diplopodia Malbosi, Des., Pholadomya elongata, Münst. (P. Langiüi, Voltz, giganteus, Sow. in Fitt., Scheuchzeri, Ag.), Pano- pœa rostrata, d'Orb. (P. arcualu, pl. 355), var. allongée, Corbis corrugata, d'Orb., (Cordiformis, d'Orb., Venus, id., Leym., Cardium galloprovincialis, Math. Sphæra corrugata, Sow.), Cardium, 2? espèces, moule voisin de la Crassatella trapezoidalis, Rœm., Pecten alavus, Rœm.? var. maxima (1), Exogyra sinuala, SO... T'erebratula sella, Sow., 1°. prælonga, id. (T. biplicata, var. acula de Buch), T. elegans, Sow. (T. lata, var. d’Orb., pl. 494, fig. 12), Natica bulimoides, d'Orb.? (fragment), N. Cornueliana, d'Orb.?, N. clapensis, nov. sp., V’oluta gruissanensis, nov. sp. (2). Le grand ravin qui se dirige ensuite au N. est en partie fermé, à son extrémité septentrionale, par une muraille transverse, formée comme ses parois par les cal- caires compactes supérieurs. Au delà de cette barrière on atteint une petite plaine ou vallée haute, Imégale, allongée du N. au S., vers le milieu de laquelle se trouve une métairie, et que domine à l’ouest la crète occidentale couronnée par la chapelle de N.-D. des Auzils. L'examen de cette petite région, de l’aspect le plus triste et le plus sauvage, n’est pas sans intérêt. On reconnaît en effet que, dans cette partie du massif de la Clape, il n'y a point d’axe proprement dit, mais deux crêtes rocheuses dirigées N.-N.-E., S.-S. O., for- mées par les Are gris compactes du premier étage AN à lO.-N.-0. Toutes les collines basses dont nous avons parlé, situées à l’est de la crête orientale, appartiennent à l’étage inférieur, et le fond de la vallée haute dans laquelle on se trouve, et qui sépare les deux crêtes précédentes, en fait également partie. L'escar- pement abrupt que l’on voit à l’ouest, ainsi que les gorges à l'entrée desquelles sont les métairies de Pierre-Dreite et du Rec, sont toujours formés par les tranches des calcaires compactes, aussi bien que le talus opposé de la vallée ; de sorte que cette dernière est monoclinale et que toutes ses couches plongent à l’O.-N.-0. sous un angle moyen de 25° à 30e. On peut voir en outre que le massif entier a éprouvé, dans le même temps que se produisaient les failles N.-E., S.-0., qui ont occa- sionné cette disposition, un bombement éentral dirigé dans le mème sens, de telle sorte que, vers le milieu de la vallée, les couches néocomiennes inférieures sont à (4) Ce Pecten, de 0,12 de haut sur 0,42 de large, et dont nous ne connaissons encore qu'un individu, ne paraît différer du véritable P. atavus que par sa taille beaucoup plus grande; ses deux ‘diamètres égaux lui donnent de l’analogie avec le P. inconstans, Sharpe, mais ses 6 grosses côtes divisées chacune par deux sillons latéraux l’en éloignent certainement. (2) Ce moule fusoïde, renflé, de 0,13 à 0,144 de haut sur 0,8 de large, présente de gros tuber- cules mousses bordant la suture. SOG. GÉOL, — 2° SÉRIE, T. VI. — Mém. n° 2. : h9 #86 FORMATION CRÉTACÉE INFÉRIEURE. (N. 2, p. 478.) plus de 100 mètres au-dessus de leur niveau, à l’est de l’escarpement oriental, le long de la côte. Dans le vallon principal, au-dessous de la chapelle des Auzils, la puissance de l'étage inférieur paraît beaucoup plus considérable qu'elle n’est en effet, par suite d'une faille qui le divise en deux gradins d’égale hauteur, vers la moitié du talus, au-dessous de la fontaine, au pied de la nouvelle rampe par laquelle on monte à la chapelle (1). En cet endroit on retrouve en effet le calcaire à Orbi- tolines de l’escarpement, situé à 60 mètres plus haut et reposant sur le même cal- caire marneux gris. L’Ævogyra sinuata atteint dans ces marnes les mêmes dimen- sions qu'à la Quintaine. La chapelle, qui domine au loin le pays, a été bâtie vers le milieu de l’assise à Caprotines, et la grotte qui lui sert de crypte est une excavation naturelle dans le même étage. Le plateau ondulé qui règne au-dessus, à 147 mètres d'altitude, n’est qu’un vaste champ de pierres d’où l’on peut se faire une idée exacte des caractères orographiques de cette portion méridionale de la Clape, de sa com- position et des accidents variés qui lui ont imprimé son aspect particulier. Le long du chemin de la métairie du Rec et de celle de Pierre-Dreite, on rencontre fréquemment, dans les calcaires gris compactes à Orbitolines, des moules de coquilles de très grande taille, telles que l'Avicula Sowerbyana, Math., la Vatica clapensis, le Turbo Tournali (2), nov. sp., la grande Volute déjà citée, le Nautilus Requie- nianus, d'Orb., et deux espèces d’Ammonites peu déterminables. Entre ces métairies, la faille que nous avons indiquée passe précisément au milieu du chemin, et l’on peut mettre un pied sur les calcaires compactes et l’autre sur les calcaires à Orbito- lines, deux assises dont les niveaux diffèrent en réalité de plus de 60 mètres. Le massif de la Clape s’abaisse à son extrémité méridionale, où il est traversé par la route de Narbonne. Depuis la métairie de Foucaude jusqu’au col du Capitoul, c’est presque toujours sur l’étage inférieur qu’elle est tracée, le supérieur formant des escarpements rocheux à une certaine distance de chaque côté. Le dessin que nous avons donné (p. 219-11) montre cette extrémité du massif, vue du château de Gruissan. Au premier col que l’on traverse lorsqu'on vient de Narbonne, on trouve, sur les côtés de la route, des calcaires noduleux, gris à l'intérieur et jaunes à la surface. Les rognons sont disposés par lits, espacés de 0",50 et subordonnés aux marnes. Au delà, en passant le second col et en descendant au Capitoul, se montrent quelques bancs de calcaires compactes, puis un calcaire marneux, gris, en grosses boules, qui (1) Tout le long de cette rampe, taillée dans le roc, des monuments funéraires ont été élevés à la mémoire des marins de Gruissan morts dans des expéditions lointaines. Chaque année, le jour de la Pentecôte, la chapelle à laquelle conduit cette modeste voie Appienne est le but d’un pèlerinage pour les populations environnantes, et particulièrement pour les marins. (2) Cette espèce, dont nous ne connaissons que le moule, atteint 0,12 sur 0,10 ; les tours arrondis sont surmontés d’une rangée de gros tubercules mousses accompagnant la suture, Elle rappelle un peu, par sa forme et ses dimensions, le Pleurotomaria Defrancei, Math. (N: 2, p. 179.) MONTAGNES DE LA CLAPE. 387 se fondent dans la pâte environnante, des marnes grises, schistoïdes, des calcaires à cassure terreuse, et, vers le bas, des calcaires marneux, jaunes, noduleux, en- tourés de marne jaune, sableuse. Ces diverses assises, qui ont de 15 à 18 mètres d'épaisseur totale et plongent de 15° au N.-0., renferment, outre l'Exogyra sinuata, toujours de moindre dimension que dans l’assise inférieure : Echinospatagus Ley- meriei, Cott., ÆE. Collegnii, d'Orb., Salenia prestensis, Des., Serpula gordialis, Schloth. ?, Cr Ta ina bernensis, Leym. (C. rostrata, d'Orb., id., ces in Fitt.), Ve- nus ai d'Orb., Panopæa neocomiensis, Leym., detche atula, sella SOW., var. lala, T. nov. sp., voisine de la T. Roysü, d'Arch., T. tamarindus, Sow., var. globosa et depressa, Exogyra subplicata, Rœm., Leym., ou Boussingaulti, d'Orb.?, Plicatula placunæa, Lam., etc. Nous citerons encore parmi les espèces que nous avons recueillies dans. l'étage néocomien de la partie sud de la Clape, et celles que M. Noguès a eu l’obligeance de nous communiquer : Echinospatagus argilaceus, d'Orb. (1), E. Collegnii, d'Orb... var. gibba, Diadema, indét., Serpula lituola, Leym., S. filaria, Gold., ou très voi- sine, Panopæa ressemblant à à la P. neocomiensis, mais un peu plus prolongée anté- rieurement, Cardium Cottaldinum, d'Orb., C., nov. sp., grande, déprimée, subtri- gone, C., nov. sp., plus oblique encore que le C. Guer pre d’'Orb., Fenus voisine de la F. Dupiniana, d'Orb., F. Galdrina, id., Astarte transversa, Leym.? (A., id., et neocomiensis, d’Orb., peut-être un peu plus trigone), Arca Raulini, d'Orb., À nov. Sp., identique avec des moules provenant du calcaire néocomien de Vassy, moins oblique que V4. Gabrielis, Leym., Nucula simplex, Desh., Trigonia cari- nata, Ag. (T. sulcata, id., harpa, Desh. in Leym. (2), T., indét., forme générale de la T. Fittoni, Leym., Paie nov. sp., l’une voisine du P.interstriatus, Leym., l’autre du P. Dutemplei, d'Orb., P. Cottaldinus, d’Orb.(3), Hinnites Leymeriei, Desh. in Leym. (Pecten, id., et Hinnites, id., d’° Orb.). Lima Cottaldina, d'Orb., Pinna, nov. sp., Vatica is Desh., Ammonites Deshayesii, Leym., 4., n. sp., rap- pelant un peu l'A. tonus ou ., plusieurs espèces indéter minables, Hamites in- certus, d'Orb.? Ancyloceras, fragment de la partie antérieure d’une très grande espèce, A. Matheronianus où Renauæianus, d'Orb.?), Belemnites semicanaliculatus, Blain. Malgré sa faible élévation, cette partie de la Clape n’a pas été recouverte par les dépôts tertiaires que nous retrouvons seulement à une certaine distance vers le pied des talus, en remontant au N. On à vu que, dans le ravin de la Ricardelle, les pre- miers bancs de poudingue tertiaire reposaient sur des calcaires à Orbitolina conoti- dea, gris ou jaunâtres, marneux, schistoïdes, à cassure terreuse et peu solides, qui (1) Nous ne connaissons encore provenant de la Clape qu’un seul individu jeune de cette espèce. (2) Les moules de cette coquille que l’on a figurés jusqu’à présent étaient tous fort incomplets et ne donnent qu’une idée imparfaite de sa forme réelle. (3) Suivant l’auteur de la Paléontologie française, cette espèce aurait 80 millimètres de hauteur, et la figure qu'il en donne, comme étant de grandeur naturelle, n’en a que 38; notre échantillon, assez mauvais, devait en avoir 90. 388 FORMATION CRÉTACÉE INFÉRIEURE. (N. 2, p. 180.) doivent avoir été dénudés et même déjà disloqués une première fois avant les sédi- ments tertiaires, autrement les calcaires compactes à Caprotines formeraient un plan incliné régulier, et supporteraient partout directement ces derniers. Les deux étages crétacés inférieurs, en formant la pente occidentale du massif, passent à l’est d’Armissan. Nous avons décrit leurs relations avec les dépôts lacustres depuis ce point jusqu'à Marmoulières et au delà, de même que les caractères diffé- rents que prenait le pays comparé à la partie sud de la Clape. Ces étages y conser- vent leurs caractères distinctifs et n’ont pas été affectés par des dislocations aussi énergiques ni aussi régulières, et la surface des nappes calcaires supérieures est moins profondément découpée et brisée. À la montée du chemin d’Armissan à Marmoulières, les roches qui supportent les couches tertiaires sont des calcaires blanchâtres, terreux, noduleux, à cassure inégale, et des marnes grumeleuses de même teinte plongeant de 25° au S. renfermant des Orbitolines, souvent disparues et en partie représentées par de petits vides dans la pierre. Les calcaires deviennent bleuâtres, séparés par des marnes schistoïdes, puis gris-jaunâtre et noduleux, sans interposition de marnes, et avec quelques rares fos- siles, tels que l'£Exogyra sinuata. Autour de Marmoulières, les calcaires compactes à Caprotines forment la plus grande portion des talus. A la base, ils sont gris, tantôt compactes et tantôt cristallins, montrant dans la cassure et dans les parties exposées à l'air une multitude de fragments de coquilles indéterminables. Ce banc est l’ana- logue de celui que nous avons déjà signalé au même niveau. On suit ces couches à leur limite le long du chemin jusqu'à Tarailhan, où les cal- caires à Orbitolines forment à leur tour le pied des talus et sans doute encore le massif au delà de la Quirou et de Courtal-Cremat, massif très déprimé et dont les couches, largement ondulées, sont relevées en fond de bateau à ses extrémités; au nord-ouest s'étendent les collines tertiaires, Sur tout ce versant les marnes jaunes crétacées du second étage paraissent manquer, et les calcaires compactes à Capro- tines reposent directement sur les calcaires à Orbitolines de Passise moyenne. Les caractères de celle-ci sont d’ailleurs assez obscurs comme sa stratification, faute de bonnes coupes, et la géologie détaillée de ces montagnes serait difficile à com- prendre si l’on n'avait pas d’abord étudié la partie méridionale. Nous avons men- tionné les grèssiliceux, bruns, ferrugineux, à grain fin, de la métairie de Courtalnau, qui nous ont paru tertiaires, tandis que ceux qu’on trouve en descendant vers le vallon de las Brugadelles, également ferrugineux, calcarifères, schistoïdes en grand, sont secondaires. On y trouve en effet l'Exogyra sinuata, et ils occupent le fond de cette petite plaine. Is sortent de dessous les calcaires compactes et représenteraient ici cette première assise de l'étage néocomien.que nous n’avions pas observée sur le versant nord-ouest du massif. La crête culminante qui borde à l'ouest le vallon de Saint-Pierre-de-Mer est formée par les calcaires gris, compactes, plongeant de 15° au N.-0., et d’une épais- seur de 15 mètres. Vers le bas, la roche présente encore ce caractère de calcaire QUE) MONTAGNES DE LA CLAPE. 389 coquillier ou de lumachelle grisâtre que nous avons si souvent constaté à ce niveau. Elle recouvre ici, comme à Gruissan, les calcaires jaunes et les marnes de l’assise supérieure qui manquaient à l’ouest. Ces dernières constituent les pentes assez fer- tiles qui entourent le vallon, et lui donnent, par la végétation dont elles se couvrent, un aspect riant qui produit un contraste agréable au milieu de cette nature partout si aride et si monotone. De ce point jusqu’à la côte, les calcaires compactes s’abaissent pour former encore le roc avancé de Saint-Pierre, autant qu’on en peut juger par les calcaires qui le constituent et dans lesquels on n’observe que des coupes d’ostracées indéterminables. Les roches à fleur d’eau, qui portent un petit redan complétement ensablé à la gorge, plongent à l'O. de 10° à 12. Ce sont des calcaires gris de fumée, très com- pactes ou sub-Hithographiques, à la surface desquels l’action de l’eau de la mer trace des linéaments réticulés d’une excessive délicatesse et semblables à une gravure sur bois. Par suite des brisures de cette grande assise, les calcaires et les marnes jaunes sous-jacentes constituent les talus en pentes douces, placés en arrière des deux mai- sons élevées sur ce point de la côte. Ces talus, susceptibles d'être cultivés en vigne, en jardinage et en céréales, rendent habitable cette partie isolée du littoral, comme les marnes inférieures celle de la Quintaine et d’Eldepal. Néanmoins les calcaires à Orbitolines s’y montrent à peine, et nulle part on ne voit les marnes inférieures à nodules. Vue dans son ensemble, cette portion de la Clape se distingue bien de celle du sud. À l'exception de la crête de Saint-Pierre, limite nord du bombement médian du massif, celui-ci n'offre plus de fentes profondes et répétées. Les pentes et la surface des roches sont partout adoucies, et, plus au nord encore, ce ne sont que des courbes régulières, continues, extrêmement surbaissées, sans aucune aspérité. Les calcaires compactes, qui jusque-là nous avaient offert des déchirures plus ou moins considérables, à parois verticales, accompagnées de soulèvement ou d’abaissement des strates, et qui mettaient à découvert toute la série crétacée du pays, semblent atténués ici, ou comme affaissés sur eux-mêmes, à mesure qu'on descend de la crête de Saint-Pierre jusqu’au niveau de la mer, où ils ne forment plus que quel- ques rochers à fleur d’eau. I y a donc eu une différence très sensible dans l’intensité des phénomènes qui ont agi au nord et au sud de la Clape, et leur plus grande énergie s’est concentrée dans la partie sud, autour de la chapelle des Auzils, des métairies de Crouzet, de la Quintaine, ete. Les collines de Gruissan et du Château montrent aussi des traces de dislocations assez énergiques, mais nulle part nous n’avons vu les couches brisées relevées sous un angle de plus de 45°. Nulle part nous ne les avons vues arrondies en voûtes et produisant une ligne anticlinale, comme au mont-Alaric et dans la mon- tagne de Sougraigne à la Ferrière. Nulle part aussi on n’observe de vallées syncli- nales. Ce sont partout de simples brisures avec déplacement du niveau d’un des bords, occasionnant des dépressions monoclinales. L'inclinaison de ces surfaces dis- 390 FORMATION CRÉTACÉE INFERIEURE. (N: 2, p. 182.) loquées est généralement à l’'O.-N -0., aussi bien à l’ouest de la crête principale que du côté de la mer. Les assises inférieures, quand elles s'y présentent, ou bien les supérieures, plongent dans le même sens. On doit remarquer néanmoins que les appendices détachés au sud du massif et séparés actuellement par des marais ou des étangs, tels que la colline allongée de l'étang de Pech-Menau, celles de Gruissan et l’île entière de Saint-Martin, ont un plongement inverse ou à l'E. Enfin la ligne brisée principale, formée par les crêtes médianes de Saint-Pierre à Poumarède, et de Pech-Redon à la chapelle des Auzils, est sensiblement parallèle à la côte dirigée N.-E., S.-0., de l'embouchure de l’Aude à la pointe sud de l’île de Saint-Martin ou au Grau de Grazelle. CHAÎNES ORIENTALES. Chaîne de Fontfroide.— On à déjà vu (p. 371-374, 163-166) que c’était seulement dans les montagnes et les gorges profondes à l’est de l'abbaye de Fontfroide et jusqu’à la crête occidentale du plateau de la Quille qu'avait pu être constatée la présence de la formation crétacée inférieure. Nous y avons compris les couches calcaires mar- neuses et arénacées, depuis l’assise n° 29 de la coupe jusqu'aux calcaires à Orbito- lina discoidea. Nous avons supposé ensuite que, limitées au nord et à l’est, comme l'indique la carte, par la formation supérieure et par le lias, les couches crétacées inférieures s’'amincissaient le long du versant oriental de la ehaîne, passaient au- dessous de la Plâtrière et venaient aboutir à la rive droite de la Berre, conjointe- ment peut-être avec une bande étroite du lias. Les nombreux gisements de diorites disséminés dans toute cette région, en dérangeant les roches et en modifiant leurs caractères plus ou moins profondément, ont rendu plus difficile aujourd’hui la dis- tinction des couches crétacées et jurassiques. » < Chaîne de Montpezat. — À partir de la rive droite de la Berre, au sud de Portel, les dépôts tertiaires recouvrent des calcaires gris compactes qui forment les pentes supérieures des montagnes et le plateau désigné sur les cartes par le nom de taillis de Montpezat. Ces calcaires que traverse le chemin de Fraisse à Sigean for- ment une immense lande pierreuse, et, lorsqu'on descend du plateau vers la mé- tairie de Montpezat, on voit sortir de dessous des calcaires jaunâtres, schistoïdes, marneux, avec des Exogyres, des £chinospalagus, un grand Pleurotomaire, lAvicula Sowerbyana de la Clape, etc. Au delà on retrouve, sous les mêmes calcaires com- pactes, les mêmes couches marneuses, avec Æchinospatagus argilaceus, d’'Orb.? E. Leymeriei, Cott. (1), T'erebratula tamarindus, Sow.,T. prælonga, id., T. sella, 1d., qui représentent lassise supérieure du second étage comme les calcaires précé- dents représentaient le premier. En continuant à descendre, on trouve des calcaires (1) Nous avons aussi trouvé un fragment d’échinide de la famille des spatangoïdes, voisin des genres Brissopsis, Brissus, Eupatagus, etc., formes qui n’ont pas encore été signalées dans les dépôts de cet âge. a ange CHAINES ORIENTALES. 391 marneux gris avec des nodules endurcis, qui ne tardent pas à disparaître sous les premières couches tertiaires supportant les ruines du château et la métairie de Montpezat. . Dans la coupe que nous avons donnée, de Sigean au col des Mazels (pl. IV, fig. 12), on à vu les couches tertiaires reposer transgressivement sur un système d'argile schisteuse noire que nous rapportons à l’étage néocomien. Elles renferment de petits bancs subordonnés de grès argileux et ferrugineux, et des bancs plus épais de grès brunâtre, d’autres d’un brun-verdâtre, toujours très peu solides, fendillés, se délitant en petits fragments, comme les argiles elles-mêmes très sèches et cinéri- formes. Ni les uns ni les autres ne nous ont offert de traces de fossiles. La direc- tion des strates paraît être N.-N.-E., S.-S.-0., et le plongement de 45° au N.-0. jusqu’au fond de la vallée que ces marnes occupent entièrement. Après le thalweg elles semblent plonger au S. sous les calcaires gris-noirâtre, plus ou moins foncés, compactes, qui, de ce côté, bordent la vallée par un escarpement vertical et con- stituent tout le plateau situé au delà. Au premier coup d'œil on est frappé de la ressemblance des marnes noires précé- dentes avec celles que nous verrons former le fond de la vallée de Caudiès, de Quillan, etc., et de l’analogie des calcaires du plateau avec les calcaires à Caprotines du même pays; aussi rien ne justifie jusqu’à présent, suivant nous, le classement des premières dans la formation jurassique, comme on le voit sur la carte géologique de la France et sur celle de M. Leymerie. Sans doute ces couches différent ici très notablement de l’étage néocomien de la Clape, mais il est probable que ce n’est qu'une modification de ses assises inférieures. On peut remarquer en outre : 4° que la vallée de la Murelle a dû être ouverte depuis le dépôt des sédiments tertiaires du bassin de Sigean, puisqu'il n’y en a aucune trace et qu’elle se trouve à un niveau beaucoup plus bas que la plupart d’entre eux ; 2° que ces couches crétacées sont sen- siblement dans le prolongement de la Clape; et 3° que les dislocations et les dénu- dations qui s’y sont produites ont été sans doute contemporaines de part et d’autre. 11 y a cependant ici cette différence que les dépôts tertiaires sont complétement dis- cordants avec les marnes noires supposées crétacées. La vallée de la Murelle nous paraît être une vallée de soulèvement, comme l’exprime la coupe que nous en don- nons (pl. IV, fig. 12). Dans le dessin ci-contre, qui représente une vue de cette vallée prise au pied de la butte de Saint-Martin, on voit à droite le village de Roquefort adossé à un escar- pement rocheux de calcaires à Caprotines, très durs, d’un gris clair ou foncé, ruini- formes, à cassure inégale et raboteuse ; au-dessous et formant les talus affleurent des calcaires marneux, schistoïdes, gris-jaunâtre, de 7 à 8 mètres d'épaisseur, avec Orbitolina conoidea, Echinospatagus Leymeriei, Corbis corrugata, Exogyra sinuata, Terebratula prælonga, etc. Cette couche représente la première assise de l'étage néocomien de la Clape. Puis viennent les marnes grises et noires sans fossiles du fond de la vallée. Dans la colline de Saint-Martin, située à gauche de lobserva- 392 FORMATION CRÉTACEE INFÉRIEURE. (N- 2, p. 184) teur, ces dernières sont immédiatement recouvertes par le poudingue tertiaire qui porte la chapelle, sans l'intermédiaire d’aucune couche fossilifère ou calcaire. D'ARGHIAC AD NAT N° XXI. — Vallée de la Murelle, Du sommet de ce point isolé, on peut remarquer au nord les dépôts tertiaires lacustres recouvrant les marnes noires des talus inférieurs de la vallée, et à l'est les calcaires compactes du plateau de Montpezat. Le grand développement que ces der- niers semblent prendre au sud, daus les montagnes plus élevées situées entre Las- cours et Feuilla (antè, p. 227-17), résulte, ainsi qu’on le verra, des brisures et du soulèvement en masse qu’ils ont subis, et non, conime on pourrait le croire au premier abord, d'assises calcaires sortant de dessous les unes des autres pour former ce massif. Les calcaires compactes du Fer à cheval ou plateau de Courtal-Neuf s'abaissent au N.età l'E. Ils hordent la route de Sigean à la Nouvelle, après le ruisseau de la Murelle et atteignent le niveau de la mer. Ils se relèvent au-dessous de la métairie de Fontcouverte pour laisser affleurer les marnes noires sous-jacentes du fond de la vallée, sur une hauteur de 10 mètres et une étendue horizontale de 200. Nous n'avons pas reconnu en cet endroit de représentant de l'étage néocomien, à la jonction des marnes noires et des calcaires compactes. Ceux-ci, conservant toujours leurs caractères habituels, bordent les vastes lais de la mer, les marais et les étangs qui forment la plage du petit port de la Nouvelle à la Palme. Leur épaisseur ne dé- passe pas 15 à 18 mètres, et ils ont été employés dans la construction de la digue du chemin de fer. Au sud de la métairie de Jugnes, la roche a été explortée comme marbre. Près de la Palme, on exploite aussi des calcaires noirs, compactes, à struc- ture un peu schistoïde ou réticulée, à cassure parfois conchoïde ou esquilleuse, pro- bablement plus anciens, mais que nous n'avons pas observés en place. Nous les avons vus seulement employés comme pierre de petit appareil. Presqu'île de Leucate. — Un calcaire gris-bleuâtre, compacte, dur, pénétré de nombreuses veines de chaux carbonatée et qui passe à la dolomie, constitue le noyau ou la base de la presqu'ile de Leucate. Ce calcaire sort de dessous les dépôts ter- GR 185:) CHAINES ORIENTALES. 393. tiaires dont nous avons parlé, le long de la côte occidentale, à 1500 mètres environ du village, et le chemin est presque constamment tracé dessus jusqu'aux premières maisons (pl. IE, fig. 13). A un kilomètre environ avant celles-ci, la roche est une dolomie noire, cristalline, fétide, traversée par des veines de calcaire spathique blanc. Elle renferme du sable siliceux très fin, des grains noirs, et une substance bitumineuse surnage la dissolution. On remarque dans le voisinage une roche bré- chiforme composée de chaux carbonatée blanche et de fragments de cette dolomie noire, cristalline. Une autre roche gris-jaunâtre et rougeàtre, cristalline, celluleuse par places, malgré son aspect, ne nous a pas offert de magnésie en quantité notable. Avant d'atteindre le village, le chemin traverse un petit col formé de couches tertiaires. Mais les premières maisons sont bâties sur les calcaires compactes qui affleurent dans toutes les rues jusqu’à la sortie de Leucate, du côté opposé où réap- paraissent les dépôts tertiaires auxquels appartiennent aussi les buttes du moulin et du vieux château. Les calcaires précédents se continuent au sud pour constituer la pointe basse et complétement stérile qui termine la presqu'île de ce côté. Plan d'Opouls et de F'itou. — Le grand plan incliné d'Opouls et de Fitou, dont nous avons déjà esquissé les caractères physiques généraux (p. 226-18), se relève depuis le bord de la mer jusqu'aux crêtes qui dominent le village de Périllous, à 698 et 708 mètres d'altitude. Il s’étend du N.-N.-E. au S.-S.-0., depuis le ruisseau de Treilhes jusqu’au Mas-de-Jau, sur le bord de l’Agly, au-dessous de la tour de Tautavel, sur une longueur de 26 kilomètres et une largeur maximum de 10. Ce plan peut être considéré comme composé d’une seule assise calcaire, dont l’épais- seur ne dépasse pas 20 à 25 mètres, mais qui, brisée en une multitude de frag- ments, aété soulevée en masse, de manière à former le plan incliné que nous voyons aujourd’hui, Si, en effet, on le remonte à partir de la côte et en se dirigeant à l'O. vers les crêtes, on ne trouve aucune différence dans la roche sur laquelle on marche presque constamment. Partout l'absence ou l’extrème rareté de la végéta- tion permet de constater ses plus petites modifications, telles que la présence des cargnieules, des dolomies, des brèches, des roches ignées, des assises marneuses sous-jacentes, etc. Ces accidents de la surface sont dus à des dislocations un peu plus profondes que l'épaisseur de la nappe calcaire, et qui ont amené au jour les roches inférieures. Sur certains points, des dénudations ont fait disparaître des frag- ments de cette nappe, mais nulle part nous n’avons vu une seconde assise un peu importante concourant avec celle-ci à donner à cette surface son aspect triste et monotone. Autour de rares métairies et de quelques villages (Feuilla, Treilhes, Opouls, Péril- lous et Fitou) on a profité des espaces plus ou moins étendus entre les fragments de calcaire compacte pour cultiver le sol un peu moins ingrat formé par les roches sous-jacentes. Mais partout ailleurs ces calcaires, inaltérables à l'air, sont d’une sécheresse et d’une aridité extrêmes. Les pentes inférieures et le fond des vallons offrent quelques faibles ressources à l’agriculture. La vigne en occupe une grande Soc. GÉOL. — 2° SÉRIE, T. VI. — Mém. n° 2. 50 394 FORMATION CRÉTACEÉE INFERIEURE. (N. 2, p. 186.) partie; quelques maigres champs de seigle et d'avoine clair-semés, des prairies artificielles non moins pauvres, rompent un peu çà et là cette monotonie du pays. De rares oliviers, de chétifsamandiers, élèvent par places leur feuillage gris, de quel- ques mètres au-dessus de ces récoltes souvent brülées et desséchées sur pied avant d'arriver à maturité. Si le paysage des environs de Fitou w’avait pas la mer pour horizon et son ciel du midi pour le revêtir de ses riches teintes, ce serait certaine- ment le plus triste de toute la France, et nousne pourrions lui comparer que la plaine de Costaros, dans le haut Velay, entre le Puy et Pradelles. La constance de cette composition du plan incliné d’Opouls et de Fitou, entre des altitudes qui diffèrent de 700 mètres pour une assise unique, brisée, disloquée, mais dont presque tous les fragments sont encore en place, est le caractère géologique essentiel de cette région. L'inclinaison des fragments n’est jamais très forte et ne dépasse pas 25°. Elle est fréquemment au N.-0., ou en sens inverse de la pente gé- nérale du sol vers la mer. Les coupes de Caprotines, si répandues dans les escarpe- ments de Roquefort, du plateau de Courtal-Neuf, de l’île de Saint-Martin, paraissent être plus rares ici. Environs de Filou. — À la sortie du village de Fitou, du côté de l’ouest, le fond de l’étroit vallon sur les pentes duquel les maisons sont bâties est occupé par une roche cristalline blanchâtre, s’élevant à une vingtaine de mètres au-dessus du ruis- seau, formant le tertre qui porte l’église, et se continuant au delà l’espace de 300 à 400 mètres. Cette roche à grain moyen, parfaitement cristalline, que M. Delesse regarde comme une eurite granitoïde, est composée de beaucoup d’oligoelase, quel- quefois disposé en étoiles, d’un éclat un peu grisâtre, se rubéfiant par laltération, puis d’orthose, de quartz blanc-jaunâtre, de mica noir foncé et de quelques grains. de fer oxydulé. Elle s’altère très facilement et se réduit en sable plus ou mpins grossier. Partout elle est surmontée de calcaires compactes qu'elle n’a pas sensiblement dérangés ni modifiés, et elle ne nous à point paru être en relation immédiate avec les couches anormales du vallon qui remonte au nord-ouest du village. On observe sur ce dernier point des marnes rouges et bleues, et surtout de nombreuses modifi- cations des bancs calcaires, telles que des roches magnésiennes noires, grises, cellu- leuses, une roche grise compacte, d’autres également magnésiennes et spathiques, etc., sans produits ignés bien apparents au contact même. M. Boué (1) à mentionné la roche granitique de Fitou comme une syénite ou une diorile, marquant une époque d’éruption, peut-être tertiaire, et supportant des calcaires gris compactes, à aspect jurassique. À la jonction est une couche de rauch- wacke ou de calcaire noir, gris, celluleux, cloisonné. Il signale les relations des masses de gypse qu'on trouve au delà avec les roches modifiées et la roche ignée qui, ajoute-t-il, a poussé çà et là des filons dans les calcaires compactes environ- nants. Le gypse ne serait ici que le résultat des calcaires altérés par des vapeurs (1) Journ. de géologie, vol. II, p.367, 1831. — Bull. universel et Ann. des sciences, 1831. (N. 2, p. 187.) CHAINES ORIENTALES. 395 sulfureuses, accompagnées d’émanations d'acide carbonique et de vapeurs chaudes contenant de la silice. Ces dernières, ayant agi sur les calcaires, les ont silicifiés, ou bien ont laissé cristalliser le quartz. Les marnes ne seraient que le résidu des por- tions calcaires altérées par ces divers agents. De son côté, M. Tournal (1) a décrit la roche ignée de Fitou comme une diorite, et la coupe qu'il donne du vallon où on l’observe est peu exacle, le village étant situé au fond même de la gorge que suit le ruisseau et non sur Pune des pentes, ainsi qu'il le représente. Il mentionne également le gypse exploité à quelque distance, près d’une masse de roche ignée. Dans la coupe de cette dernière localité, la roche gypseuse en contact est recouverte par les calcaires gris compactes du plateau. Le gypse est fibreux, saccharoïde ou grenu, renferme des cristaux de quartz bipyra- midaux, des plaques de quartz et des cristaux de fer sulfuré. Ce gisement a aussi été rappelé par Dufrénoy (2) qui n’a pas donné plus de détails. Nous venons de dire que la surface bosselée et accidentée du plan incliné que nous décrivons laissait voir çà et là les roches inférieures aux calcaires compactes à Caprotines. Nous citerons particulièrement deux points où les relations des cou- ches nous ont offert le plus d'intérêt : le premier est le cirque de soulèvement de Feuilla, au nord-ouest de Fitou, le second, les environs d’Opouls, au sud-ouest du même village. Cirque de Feuilla (3). —Le village de Feuilla est situé au fond d’une sorte d’en- tennoir à mi-chemin de Fitou à Durban: Les montagnes qui entourent forment, par leur réunion, une ellipse un peu irrégulière dont le grand axe dirigé E.-N.-E., 0.-S.-0., est d'environ 6 kilomètres et le petit de 4. Leur élévation atteint plus de 100 mètres au-dessus du fond de la cavité. La composition et la disposition de la partie supérieure de ses parois sont assez simples, mais les assises qui viennent au- dessous, particulièrement celles de la base et des portions centrales du cirque, sont plus complexes. Les assises les plus élevées qui plongent circulairement au N., au N.-E. et aus., de manière à présenter leur tranche vers Feuilla, circonscrivent, entre la paroi septentrionale et le village, trois rangées de collines basses, sub-concentriques ou parallèles. Les eaux atmosphériques que reçoit ce bassin, fermé au nord et au sud par des crètes ou des murailles continues, à l’est par des pics que relient des cols plus ou moins élevés, n’en peuvent sortir que par une seule issue située vers l'est, où le ruisseau de Treilhes les conduit à la mer, après avoir traversé les gorges étroites de Griant et de Cane-Vingane. Une coupe N., S. de la paroi septentrionale et de la portion centrale du cirque, passant par Feuilla, donne la série suivante (pl. IV, fig. 16) : (1) Mém. de la Soc. géol. de France, 1"° sér., vol. I, p. 43, 1835. (2) Mém. pour servir à une descript. géol. de la France, vol TX, p. 233, 1830. (3) D’Archiac, Comptes rendus des séances de l’Académie des sciences, vol. XLIIT, p. 225, séance du 28 juillet 1856. 396 FORMATION CRÉTACÉE INFÉRIEURE. (N. 2, p. 188.) 4° Calcaires supérieurs formant les hautes sommités. 2° Dolomie noire, cristalline, sableuse, fétide, traversée de veinules blan- | ches de chaux carbonatée. Cette assise est quelquefois divisée en deux par un banc de calcaire compacte. | 3° Calcaire compacte, gris foncé, avec des Orbitolines altérées. Calcaires compactes « \ à Caprounes. Calcaire gris-noirâtre compacte, à grain très fin; calcaire très dur, gris de fumée, à cassure finement esquilleuse en petit, droite et tranchante en grand. 5° Marnes et calcaires noirs, très compactes, subordonnés, en bancs ou en rognons. 6° Calcaires argileux schistoïdes, brun-noirâtre, ferrugineux à la surface avec Ammonites bifrons, Brug., Pecten æquivalvis, Sow., Terebra- tula subpunctata, Dav., Gryphæa Maccullochii, Sow., in Gold. 7° Calcaires bleus en lits minces. Étage néocomien. Lias supérieur. « Ÿ . . : e . = \ Ces assises constituent la paroi principale du cirque ; les suivantes qui sortent de dessous forment les collines intérieures. Ce sont : [l 8° Calcaire gris-rosâtre ou jaunâtre, marneux, en partie celluleux ct cloi- | sonné, à cassure inégale et raboteuse. Des portions d’un rouge plus foncé et d’autres plus claires, toujours spathiques, donnent à la roche l'aspect d’une brèche à petits éléments. 9° Calcaires ferrugineux, rouges, très durs, en plaquettes, traversés par une multitude de filets noirâtres, capillaires, bruns, généralement perpendiculaires au plan des feuillets, ou se croisant sous divers an- gles. Calcaires jaunes. | 10° Grès grossier friable, un peu feldspathique, ou sorte d’arkose d’une \ faible épaisseur. Lias inférieur. Toutes ces couches sont concordantes et plongent ici de 40° au N., puis vien- vent affleurer sous les grès. 11° Schistes satinés micacés, gris ou violacés ; schistes micacés et grès gris- jaunâtre micacé, à grain fin, courant N.-N.-0., S.-S.-E. et plongeant de 60° au S.-0. Terrain de transition. À 100 mètres au nord-est du village, ces schistes reposent sur une {12° Masse de roche dioritique, s’élevant de 7 à 8 mètres au-dessus du fond de la vallée et formant le point central auquel viennent se coordonner tous les accidents des environs. Cette roche, qui se brise très facile- Roche ignée. ment en tous sens, est d’un vert foncé, à cassure terreuse, à grain fin et égal. L'amphibole facilement altéré revêt toutes les fentes d’une poussière ocreuse. Le feldspath est aussi coloré en vert, de sorte que la \ teinte de la masse est parfaitement uniforme. Du côté opposé s'appuient les calcaires jaunes inférieurs du lias portant le vil- lage et constituant une partie de la colline qui se prolonge à l’ouest vers la Combe. Outre l’intérêt particulier qui s'attache à cette disposition cratériforme des couches (M2, p.489.) CHAINES ORIENTALES. 897 secondaires et de transition autour d’un îlot amphibolique, on voit que la clarté des superpositions permet encore d’assigner, d’une manière certaine, la place, jusqu’à présent restée douteuse, des calcaires magnésiens des environs de Durban et de Ville- sèque au nord de ce point, ainsi que celle des gypses qui y sont intimement liés. Le cirque de Feuilla n’offre point à l’œil une symétrie aussi parfaite que celui de Gaubert (Basses-Alpes) (1) ; il ne présente pas le développement grandiose du cir- que de la Bérarde en Oysans (2); mais il à une grande analogie dans sa disposition avec celui de Sombernon (Côte-d'Or) (3). Seulement les terrains qui le composent sont plus variés que dans ce dernier; ses bords sont plus déchiquetés, ses parois plus accidentées, ses teintes plus prononcées, ses formes et son aspect général plus àpres et plus sauvages. Si de ce point on se dirige à l’ouest vers la métairie d’Ortoux, on longe à droite les roches inférieures du lias, mais le Montagliez qui domine Ortoux, de même que les plus hautes sommités qui entourent Castelmaure, appartiennent encore à la formation crétacée inférieure, ainsi que le Scouliens, la plus haute montagne entre Feuilla et Fraisse. On a vu (antè, p. 225-17) que les caractères stratigraphiques généraux de cette région nous avaient fait placer la séparation des chaînes de Mont- pezat et de Périllous le long du grand axe du bassin de Feuilla, parce que c’est en effet à partir de cette ligne dirigée à peu près E.-N.-E., 0.-S.-0, que les couches plongent en sens inverse. Environs d'Opouls. — Lorsque des bords de la mer, près de Salses (4), on se di- rige au nord-ouest, on trouve, au delà du château, un monticule formé par un calcaire gris-jaunâtre, très compacte, à cassure droite et tranchante, finement esquilleuse, un peu schisteux et légèrement argileux. On atteint ensuite les’ premières pentes des collines de calcaires à Caprotines, de teintes claires, plongeant de 25° au S.-E. Certains bancs ont pu être exploités comme marbre. Ils sont d’un gris-bleuâtre clair rappelant le marbre bleu turquin, mais les veines et la teinte sont moins prononcées. On en a extrait des blocs considérables sans défauts ni terraces. Ces calcaires for- ment tous les talus pierreux inclinés à l'E. que l’on rencontre jusqu’à la métairie (1) D'Archiac, Histoire des progrès de la géologie, vol. IX, p. 739, 1849. (2) Élie de Beaumont, Faits pour servir à l'histoire des montagnes de l'Oisans (Société philoma- tique, T mars 1829, Mém. de la Soc. d'histoire nat. de Paris, vol. V, 1829. — Mém. pour servir à une description géol. de la France, vol. II, p. 339, 1834). (3) D’Archiac, ist. des progrès de la géologie, vol. VI, p. 689, 1856. (A) Salses ou Salces (Salsulæ), bourg mentionné par Strabon, Pomponius Mela et dans l'itinéraire d’Antonin, possède dans son voisinage deux sources salées très considérables, l’une appelée Fon-Es- tramé, l’autre Fon-Dames. Leur température est de 19. Elles renferment 25,14 de différents sels, dont 15,71 de chlorure de sodium, et le reste de chlorure de magnésium, de sulfate de soude, de magnésie et de carbonate de chaax. (Compte rendu des travaux des ingénieurs des mines pendant l'année 1844. Résumé des travaux statistiques, p. 36.) Ges sources, qui s’échappent de dessous les calcaires compactes, proviennent des schistes et.des marnes rouges néocomiennes sous-jacentes, comme toutes les autres dont nous parlerons. 398 FORMATION CRÉTACÉE INFÉRIEURE. de Parès, sur les bords du ruisseau le Roboul et au delà. Leur inclinaison est va- riable, et quelquefois inverse de celle du plan général. Dans cette dernière partie elle est de 20° à 25° au S.-0. Les calcaires sont compactes, gris-verdâtre, et pré- sentent de nombreuses coupes de Caprotines. Dans la butte de Castel-Vieil, ils reposent sur des calcaires schistoïdes, gris-jau- nâtre, remplis de fragments de coquilles indéterminables et représentant la couche que nous avons signalée au même niveau dans la Clape et l'île de Saint-Martin. Mais au-dessous, au lieu des marnes jaunes ou grises supérieures, ou bien des calcaires gris à Orbitolines, ce sont des marnes et des calcaires marneux roses qui viennent affleurer. On y trouve subordonnés de petits lits, de 0,05 d'épaisseur, composés de calcaire spathique et de chaux carbonatée ferrifer e. En suivant, à partir de ce point, le chemin d’Opouls, on traverse ces mêmes assises inférieures qui affectent des teintes rouges plus ou moins vives. Par suite des nombreuses brisures de la grande nappe calcaire qui occupait le pays et du soulè- vement partiel de ses fragments, les marnes rouges néocomiennes affleurent çà et là, et la route passe à chaque instant de l’une de ces roches sur l’autre. La plaine d'Opouls, qui forme une sorte de bassin à fond plat, est constituée par ces roches rouges terreuses, et circonscrite par les calcaires à Caprotines gris où blancs, quel- quefois saccharoïdes, comme au nord de Salses. Les ruines du château servent de couronnement à un bloc isolé de 20 mètres de hauteur, coupé à pic sur toutes ses faces et reposant sur une base en forme de tronc de cône. Ce massif rocheux est formé de calcaires à Caprotines, et son soubas- sement de 25 à 30 mètres par les marnes grises et les calcaires noduleux néoco- miens, semblables à ceux de la Clape. Les assises rouges de la plaine ne se montrent plus. Les fossiles, assez nombreux, quoique peu variés, sont principalement : £xo- gyra Boussingaulli, d'Orb., Ostrea carinata, Lam.? (fragment plus voisin de cette espèce que de l'O. macroptera, Sow.), Exogyra sinuata, Sow., Corbis corrugala, d’'Orb., Cyprina inornata, d'Orb.? moules voisins, l'un de la C. oblonga, d'Orb., et l’autre de la Panopæa neocomiensis, id., Diplopodia Malbosii, Des., Orbitolina conoidea, quelques spongiaires et des Serpules. C'est à la présence de cette assise marneuse, portée à une assez grande éléva- tion, au-dessus de la plaine environnante et surmontée de calcaires compactes plus où moins fendillés, qu’est due l’existence du village d’Opouls, qui sans cette dis- position ne posséderait pas d’eau potable, malgré la fertilité relative d’une partie de son territoire, Les marnes qui supportent le massif calcaire du château retiennent les eaux pluviales tombant à sa surface et qui produisent trois sources dont lori- gine ne s’expliquerait pas sans cela ; car lorsque, partant du village, on monte au château, on gravit un plan incliné exclusivement formé de calcaires compactes plongeant au S.-E.; arrivé à son bord supérieur, on voit qu'une faille seule peut avoir porté les marnes au-dessus de ce bord qu’elles semblent continuer au- jourd’hui, et que par suite le lambeau calcaire détaché de la nappe précédente à (N. 2, p. 190.) (N. 2, p. 191.) CHAINES ORIENTALES. 399 été relevé pour constituer le sommet actuel de la montagne. La coupe générale de celle-ci, telle que nous la concevons, est indiquée pl. IV, fig. 18. Les marnes néo- comiennes viennent affleurer, sur une épaisseur de 25 à 30 mètres et avec une inclinaison très faible au N.—0., entre les calcaires compactes du château, plongeant dans le même sens, et ceux de l'extrémité du grand talus plongeant du côté opposé. Les eaux retenues par les marnes sont réunies et amenées à la fontaine du village par une conduite établie dans le plan incliné des calcaires compactes. A l’ouest du château, on observe encore un accident assez semblable. Les marnes paraissent y être comprises entre deux assises de calcaires compactes. La petite plaine de Saint-Thouin et des Gipières, au nord-est de celle d'Opouls, serait aussi composée comme cette dernière. Chaïne de Périllous et chatnons qui s’y rattachent. — De Périllous à la tour de Tautavel, tout le versant sud-est des montagnes qui s'abaissent vers la plaine de Rivesaltes et la vallée de l'Agly est formé des mêmes roches et présente des acci- dents analogues aux précédents. Il est terminé à l’ouest par des murailles crénelées dirigées N.-N.-E., S.-S.-0., depuis le col de Ladat, où naissent les bifurcations dont nous avons déjà parlé. Tous les chaînons rocheux où rameaux décrits dans cette région (antè, p. 225-17), et qui descendent de ce col au S. S.-0., s’infléchis- sant ensuite à l'O. pour venir se rattacher à la chaine de Saint-Antoine de Galamus, sont formés par les calcaires compactes, et les intervalles qui les séparent appar- tiennent en général à Pétage néocomien. Nous dirons d’abord quelques mots des montagnes qui limitent ici la vallée du Verdouble, et nous considérerons ensuite séparément les deux chaînes méridionales. Les assises calcaires contre lesquelles s'appuient les grès et les poudingues ter- tiaires qui limitent à l’est la plaine de Tuchan forment une vaste nappe inclinée au N.-0. Ce sont des calcaires en général grisätres, compactes, appartenant à l'étage à Caprotines. Lorsqu'on descend vers le Pas-del-Trou, on les voit reposer sur l'étage néocomien comprenant des assises schistoïdes en grand, des calcaires marneux impurs, gris, avec Exogyra sinuata, Panopæa neocomiensis ? une secande espèce vol- sine des P. Carteroni et plicata, var.., la T'erebratula sella, Y'Orbitolina conoïdea, ete. Le fond de la vallée de Vingrau est occupé par des buttes de schistes et des bancs de grès subordonnés, semblables aux assises de la vallée de la Murelle. Les fossiles y sont rares et peu déterminables. Cette série schisteuse et arénacée, dont l’âge peut laisser quelque incertitude, se prolonge au N., limitée de chaque côté par les crêtes de calcaire compacte. Elle reparait à l’ouest du Pas-del-Trou, dans les vallons des Vialas et des Bolières, entre deux chaînes de calcaires compactes plon- geant à l'O. La crête principale qui domine Vingrau au nord-est a ses couches inclinées à VE., sous un angle de 80e. Elle est très découpée à son sommet, se continue au nord, en passant à l’est du col de Ladat, et se termine au sud, comme nous l'avons dit, à la tour de Tautavel. Lorsque venant de Tuchan on descend en face la 400 FORMATION CRÉTACÉE INFÉRIEURE. UN. 2, pe 102.) rampe de la route de Vingrau, on coupe obliquement une grande épaisseur de cal- caires schistoïdes, jaunâtres et grisâtres, des marnes noiràtres, schisteuses, avec des grès subordonnés que nous rapportons aussi au groupe néocomien. Les couches de la colline à laquelle Vingrau est adossé plongent de 45° à l’'E.-S.-E., au lieu d'être presque verticales, comme celles de la crête nord. Le fond de la vallée de Case-Nove et du Consul atteint à peine les roches noires argileuses et arénacées qui constituent, au contraire, le sol et les pentes inférieures autour de Vingrau. La dépression lon- gitudinale, vers le milieu de laquelle est situé ce dernier village, nous représente assez bien une vallée de soulèvement dirigée N.-N.-E., S.-S.-0., et dont un petit ruisseau marque le thalweg. Les argiles schisteuses noires et les grès qui viennent y afleurer appartiendraient peut-être au lias, mais aucun fossile déterminable n’est encore venu justifier cette présomption. De part et d’autre les couches crétacées plongent en sens inverse. Celles de la muraille orientale, sub-verticales, ont été portées à une plus grande élévation que celles du bord opposé qui plongent seule- ment de 20° à 25° à l’'O., et souvent beaucoup moins. Dans la grande muraille que forment ensuite les calcaires compactes jusqu’à Tau- tavel, ils atteignent une épaisseur plus considérable qu’au nord, et présentent une crèle dentelée à laquelle est adossé ce dernier village. Le dessin ci-dessous peut donner une idée de leur disposition et des formes abruptes et pittoresques qu’ils revêtent le long de cet escarpement tourné à l'O. Au delà de ce point ils cessent de se montrer avec ce relief accidenté ; ils s’abaissent et n’offrent plus que des collines dépri- mées (1). D'ARCHIAC AD NAT Æ N° XXII. — Tautavel. Sur la rive droite du Verdouble, la paroi correspondante de la vallée est moins élevée et limite aussi les roches noires schisteuses et arénacées qui en occupent le fond. À mesure qu’on descend, celles-ci prennent un plus grand développement, mais les collines calcaires se rapprochent vers Trilha; elles disparaissent de nouveau (1) Au pied de l'escarpement, à l’est du village, ou à gauche du spectateur, sort la source appelée la Formada ; elle est salée, et sa température est de 20° ou 23°,75. (Guide pittoresque du voyageur en France, publié par F. Didot, 1836. Département des Pyrénées-Orientales, p. 20. — Compte rendu des travaux des ingénieurs des mines pendant l'année 1844. Résumé des travaux statistiques, p. 36.) (N.2, p. 193.) : CHAINES ORIENTALES. LOT jusqu’à la vallée de lAgly, bordée par les calcaires compactes à Caprotines. Ces derniers sont blanc-rosâtre, sub-cristallins, ou à l’état de brèche, veinés de rose pâle, exploités en face du pont d’Estagel, le long de la grande route, et susceptibles d'être employés comme marbre. Les couches néocomiennes qui affleurent ici sont jaunâtres, quelquefois d’un aspect magnésien, rosâtres, et rappelant celles des environs d'Opouls. N° XXII. — Vue prise au sud d'Estagel. Le dessin ci-joint, pris de là colline au sud d'Estagel, montre, sur les derniers plans, à droite, la tour de Tautavel, où se termine le rameau de ce nom, puis un peu à gauche la haute muraille qui domine le village, et plus loin la crête de Vin- grau. Les collines situées en avant de ces lignes rocheuses, quoique en partie formées aussi par les calcaires compactes, sont surbaissées et arrondies jusqu’au bord de l’Agly, qui passe le long de la ville entre le second et le troisième plan du dessin. La montagne du Fauch, allongée du N. au S. et qui limite à l’ouest la plaine de Tuchan, est formée à son extrémité nord par le terrain de transition, tandis que sa partie moyenne et méridionale appartient aux deux étages de la craie inférieure. Le gypse et les dolomies de sa base orientale dépendent du lias. Les couches plon- gent à l'O. et présentent leurs tranches au bassin de Tuchan, qui, malgré sa lar- geur, serait une vallée monoclinale. Le dessin que nous avons donné (antè, p. 287) montre, sur le dernier plan, la face orientale de la montagne qui atteint 942 mètres au Pech-del-Fraisse. M. Noguës (1) à donné des détails sur sa composition ; mais les relations exactes de toutes les assises crétacées qui la composent nous laissent encore quelque imcertitude. Nous pensons que celles de l'étage néocomien à Orbi- tolina conoidea doivent en tonstituer une partie, puisque au-dessus viennent les cal- caires compactes gris, avec cristaux de chaux carbonatée, recouverts à leur tour par des calcaires à Orbitolina discoidea, qui occupent les points les plus élevés. Dans la partie sud du Tauch, dit M. Noguès, aux environs du grau de Padern, les calcaires argileux à échinodermes surmontent les couches à Orbitolines (2). (1) Études stratigraphiques sur Les terrains des environs de Tuchan, p. 29. Carcassonne, 1857. (2) Ces Orbitolines nous ont bien paru être l'O. discoidea, Alb. Gras, des calcaires de la Quille, et non l'O. concava, Lam., du col de Capella, ce qui nous fait ranger ces calcaires du Tauch dans SOC. GÉOL. — 2° SÉRIE, T. VI — Mém. n° 2. 51 402 FORMATION CRÉTACÉE INFÉRIEURE. {N. 2, p. 194.) Le plateau de Témaison et de Sabat, qui ferme la vallée au sud et contre lequel s'appuient les poudingues tertiaires de Paziols, est formé par des calcaires compactes semblables à ceux du plateau de Montpezat. Les marnes grises occupent les dépres- sions environnantes. La crête qui s'étend du roc de la Cadrière au Verdouble, comme celle de Vidal qui lui est parallèle dans sa dernière portion recourbée au N.-E., est formée par les calcaires compactes, ainsi que le roc de Padern situé plus au nord et dont les couches plongent au S. Tous les massifs rocheux qui se trouvent com- pris entre le cours sinueux du Verdouble au nord et à l’est, et la rivière de la Maury au sud, appartiennent à ces mêmes calcaires, et les petites vallées qui les séparent, aux marnes et aux calcaires marneux néocomiens. CHAINES MÉRIDIONALES. Chaïne de Saint-Antoine de Galamus. — A partir du château de Queribus com- mence la chaîne de Saint-Antoine formée par les calcaires compactes très redressés plongeant au S. et courant presque exactement E., O. Elle borde la vallée de la Maury d’une manière continue et est coupée au nord-ouest de Saint-Paul par une fente étroite et profonde qui donne passage à l’Agly. Si de Saint-Paul on prend le chemin de l’Ermitage de Saint-Antoine, on marche, dès qu’on à quitté la plaine, sur les assises redressées de calcaires compactes, et, lorsqu'on prend ensuite le sen tier de Cubières, on observe, à la limite du territoire de cette commune, au som- met de la crête, la superposition très nette de ces calcaires, qui n’ont pas ici moins de 500 à 600 mètres d'épaisseur, aux schistes néocomiens, plongeant aussi de 45° au S. Les calcaires, par suite d’une grande faille, se montrent de nouveau en cou- ches verticales, et les schistes gris, noirs ou bariolés qui leur succèdent d’une ma- nière concordante, forment le reste de la montagne. Au moulin, l’escarpement de la rive droite de l’Agly (pl. IV, fig. 20) montre, de bas en haut, des marnes noires, des schistes lie de vin, jaunes et gris, panachés, alternants, et des calcaires subor- donnés, surmontés par les calcaires compactes des crêtes précédentes. Sur le bord opposé, les couches argileuses offrent quelques plissements, et les calcaires eux- mêmes des flexions prononcées. En continuant à s'avancer vers Cubières, des calcaires gris-bleuâtre, sub-com- pactes, à cassure un peu scintillante, mais non magnésiens, accompagnés de grès, plongent constamment au S. sous le nème angle de 45°. Les grès noirs passant à des grès gris, très durs, à gros grain, constituent les collines qui précèdent le vil- lage. On y trouve subordonné un calcaire rosâtre très compacte, taché de jaune, à cassure esquilleuse et tranchante, rempli de polypiers ou de bryozoaires. On voit que dans cette région les caractères des couches rapportées à l'étage néocomien sont beaucoup plus variés que précédemment. l'étage néocomien; mais, si des échantillons plus complets venaient modifier cette détermination, ces mêmes couches représenteraient alors le 4° étage de la formation supérieure. (N. 2, p. 4195.) CHAINES MÉRIDIONALES. 403 Au delà de Cubières, nous avons décrit les assises crétacées supérieures jusqu'aux environs de Soulatge, mais les relations directes des deux systèmes de couches res- tent encore à déterminer ici, comme sur tout le reste de la ligne de contact, et nous sommes obligé de supposer ces relations complétement masquées où obscurcies par une ou plusieurs failles immenses et complexes de chaque côté desquelles les cou- ches, quel que soit leur âge, plongent toujours au S. La haute muraille dirigée N.-E., S.-0., entre Duilhac et Rouffiae, et que cou- ronnent les ruines de Pierre-Pertuse, se termine à l’ouest par le roc de Soulatge et se dessine avec une grande hardiesse au-dessus de la plaine environnante. A son extrémité occidentale, nous avons déjà signalé une portion de l’assise des calcaires compactes redressée à angle droit et d’autres plis moins prononcés sur le reste de cette sorte d’écharpe dentelée. En redescendani ensuite du col pour atteindre la grande plaine ondulée de Saint-Paul, on traverse une couche de dolomie noire, sableuse, fétide, qui se présente fréquemment dans cet étage. Dans tous les mame- lons de schistes et de calcaires noirs impurs qu'on remarque sur la rive gauche de l’Agly, au nord de la ville, les couches affectent la même direction que les grandes assises calcaires de la montagne. Si nous recoupons actuellement la chaîne de Saint-Antoine plus à l'ouest, par exemple au nord de Caudiès, nous la trouverons composée absolument de la même manière, à partir de son pied méridional. Le plateau de la ferme de Malabrac est entouré par les calcaires compactes plongeant toujours au S., et, lorsqu'on descend sur le versant nord, à la métairie de Lauzadel, on voit que, comme sur le chemin de Cubières, ces calcaires s'appuient contre les marnes noires, les calcaires et les grès inférieurs. On a alors devant soi la masse imposante du pic de Bugarach qui se dresse au nord de la chaîne à laquelle il se rattache par une crête étroite située entre Lauzadel et les métairies du Roubis et de Campo. A l’ouest, au nord et à l’est il présente les flancs abrupts de ses masses rocheuses entassées, figurant une im mense ruine cyclopéenne (voyez les dessins donnés pp. 229-21, 230-22 et 362-154). A la base du pic se montrent des grès et des poudingues à petits nodules, puis des caicaires marneux et des argiles bleues jusqu’au fond du ravin qui est au-dessous de Lauzadel et dont nous avons déjà parlé. En gravissant la montagne par sa partie méridionale, après avoir passé derrière cette métairie, on marche d’abord sur des pelouses gazonnées, puis on traverse des taillis clair-semés qui couvrent les pre- -mières pentes et ne permettent que difficilemeni de constater la disposition des roches qui les composent. Plus haut, les talus rapides formés de blocs éboulés, en- tassés, iuterrompus çà et là par de petits bois, n’offrent pas plus de ressources au géo- logue. Enfin les escarpements rocheux tout à fait abrupts qui couronrent le pour- tour de la montagne montrent des caractères très uniformes. Ce sont partout des dolomies gris-bleuâtre ou noirâtres, sableuses, fétides sous le choc du marteau, des dolomies gris-perle, cristallines, à grain très fin, à cassure inégale, dégageant tou- jours une odeur fétide. On observe aussi une dolomie bréchoïde traversée en tous 104 L FORMATION CRÉTACÉE INFÉRIEURE. (N. 9, p. 196.) sens par des veines blanches de calcaire spathique. Le sommet du pic, à sa partie sud-est, présente la forme d’un petit dôme surbaissé, appelé dans le pays la tour de Bugarach. C'est un des principaux points géodésiques de la grandé triangulation de la France. Une pierre scellée dans la roche porte le millésime de 1824, et son altitude est de 1931 mètres. La roche de cette partie culminante de toute la région des Cor- hières proprement dite est encore une dolomie compacte, gris de fumée, à cassure inégale et raboteuse, contenant du sable très fin, et dégageant sous le choc une odeur fétide (1). De ce point, d'ou, comme on la dit, la vue embrasse un si vaste et si magni- fique panorama, on reconnaît que le massif est allongé du N.-0. au S.-E., que les couches dolomitiques de son extrémité nord-ouest inclinent au S.-E., que vers le milieu de sa longueur elles sont très disloquées, puis verticales, tandis qu’à l'extré- mité opposée elles plongent inversement ou au N.-0. Ces couches n’ont pas moins de 650 à 700 mètres d'épaisseur totale, comme les calcaires de la chaîne de Saint- Antome dont cetie masse, presque isolée complétement, n’est qu’un appendice dé- taché vers le nord. A l’est du pic se relie une petite ride calcaire, basse, dirigée vers Camps, et au nord-est le pied de la montagne se rattache par une crête basse, for- mant la ligne de partage des eaux de l’Agly et de la Sals, aux montagnes de cal- caires compactes qui entourent les sources salées de Sougraigne (voyez le dessin p. 2350-22). La disposition des crêtes ou rides parallèles qui accompagnent la chaîne de Saint- Antoine, et la comparaison que cette disposition nous avait suggérée avec d’im- menses vagues qui se rapprochaient ensemble du rivage, ont été déjà l’objet de nos remarques (p. 230-22); or, le pic de Bugarach semble dû à la rencontre de deux de ces vagues qui par leur choc auraient contribué à soulever sa masse à la hauteur exceptionnelle où nous la voyons portée. Cette explication, tout hypothétique qu’elle paraît, n’en est cependant pas moins dans un rapport remarquable avec ce qu'on observe, car on conçoit que le choc de deux masses solides sollicitées par des pres- sions agissant en sens inverse, ou l’une vers l’autre, à pu produire dans la disposition synclinale de leurs couches précisément celle que nous venons d'indiquer, c’est- à-dire linclinaison de chaque extrémité de la montagne vers le milieu de sa lon- gueur, et une brisure accompagnée de redressements plus énergiques dans cette dernière partie soumise à l’action de deux forces contraires. Nous avons dit aussi que les marnes et les calcaires marneux gris-bleuâtre, en lits’ minces, très réguliers, formant les parois du ravin qui descend de Lauzadel au nord, à la base nord-ouest du pic, ne nous avaient présenté aucun fossile propre à nous (1) M. Marcel de Serres (a), qui en 1838 rapportait encore le pic de Bugarach au terrain de tran- sition, ne paraîl pas avoir remarqué que toute sa masse est dolomitique, comme l'avait très bien observé Dufrénoy longtemps auparavant. (a) Actes de la Soc'élé linnéenne de Bordeaux. t. X, p, 48, 1838. (NX. 2, p. (07) CHAINES MÉRIDIONALES. 405 guider sur leur âge. Leur straüfication, comme on peut en juger par le dessin (p. 362-154), est très régulière. Les couches de droite plongent-vers le pied de la mon- tagne, et celles de gauche vers l'O. Les talus au nord et au nord-est sont formés par des éboulis d’une grande épaisseur et qui masquent partout les relations strati- graphiques des deux séries crétacées. Le roc de Balesou, qui constitue l’escarpement supérieur de la montagne du pied de laquelle s’'échappent les sources salées de Sougraigne, est formé par les calcaires blancs ou gris, compactes, à Caprotines, plongeant fortement au S.-0., et surmontés, comme on l’a vu, par des argiles sableuses noires avec lignite, et par la couche à Orbitolina concava du col de Capella. Les marnes noires néocomiennes affleurent vers le bas de l’escarpement, et des galeries horizontales de recherche pour le sel y ont été entreprises sans succès. On à traversé des marnes gyp- seuses et du gypse blanc, gris et rouge, et l’on s’est arrêté à une faible distance. M. Vène (1) a donné une description des sources salées qui, suivant nous, sortent des marnes néocomiennes inférieures aux calcaires compactes. Il en signale cinq, éloignées de quelques mètres les unes des autres, et se réunissant bientôt pour former le ruisseau de Sougraigne (2). Leur degré de salure est un peu diflérent, et le vo- lume total de leurs eaux est de 800 mètres cubes par vingt-quatre heures. Ce volume, ainsi que le degré de salure, varie peu avec les saisons, mais il y a des changements brusques dans le régime des eaux et dans la quantité de sel qu’elles contiennent, sans cause extérieure apparente. Lorsque les eaux sont troubles et mélangées de terre rouge, elles sont plus abondantes et plus chargées de sel. M. Vène pense que la présence de cette substance provient de la dissolution de masses salines en rognons où en couches dans les marnes rouges (3). Ce gisement nous parait tout à fait sem- blable à ceux de Salses, de Tautavel, d’Espira, etc., dont les sources s’échappent de marnes néocomiennes noires ou rouges, el toujours au-dessous de l'étage des cal- caires compactes à Caprotines. M. Vène, ayant remarqué des fentes et des enfoncements dans les grès situés sur la pente méridionale de la crête qui limite la vallée, croit qu'ils peuvent résulter de (1) Zapport sur le terrain présumé salifère de Fourtou et de Sougraigne (Ann. des mines, 3° sér., vol. VE, p. 166, 1834).—D’Archiac, Æist. des progrès de la géologie, vol. IV, p. 473, 1851. (2) Nous avons dit que, malgré son origine, nous ne considérions pas ce ruisseau comme étant la véritable Sals, parce que les sources de celle-ci sont situées à une plus grande distance, au sud- est et au sud-ouest du pic de Bugarach, se réunissent à la métairie de Lauzadel, recoivent le ruisseau des Bringucts au-dessous du village de Bugarach, et le ruisseau de Sougraigne un peu au-dessus du moulin Tiffeau, à 1 kilomètre des Bains-de-Rennes. (3) L'eau des sources dont la température est ordinaire contient en moyenne 33 grammes de sel marin par litre et 2 grammes de chlorure de magnésium. Suivant M. Berthier, elle renferme 0,05 de son poids en sel marin, dont un cinquième de sulfates de soude, de chaux, de magnésie et de chlorure de magnésium (Ann. des mines, 3° sér., vol. V, p. 133). — Des cristaux de quartz bipyramidaux rouges et blancs sont cités dans la terre noire des champs voisins (de Labouïsse-Rochefort, Voyage à lèennes-les-Bains, p. 473). 106 FORMATION CRÉTACÉE INFÉRIEURE. (N. 2, p. 198; vides produits dans la montagne par la dissolution des masses de sel gemme, mais l’auteur n’a pas fait attention que ces grès sont au-dessus de la grande assise des calcaires compactes du roc de Balesou, tandis que les marnes salifères sont très cer- tainement à plus de 100 mètres au-dessous, lorsqu'on tient compte de l'inclinaison des couches, et qu'il n’y a aucune relation possible entre les uns et les autres. Nous examinerons ici la coupe qu’a faite le savant ingénieur des terrains compris entre le pic de Bugarach et les'montagnes au nord d’Arques; ainsi que l'explication qu’il en donne. Les couches ou assises portent des numéros de 1 à 28, en allant du S. au N. Toutes plongent régulièrement au S. et sans interruption, depuis celles qui con- stituent le pic de Bugarach (n° 1) jusqu’à celle qui repose sur le terrain de tran- sition (n° 22). Cette constance de l’inclinaison au S. est vraie, mais ce qui ne l’est pas, suivant nous, c’est qu'elle soit continue et régulière comme si ces couches crétacées se présentaient dans leur ordre absolu d'ancienneté, plongeant les unes sous les autres depuis la première jusqu’à la vingt et unième. Il résulterait de cette coupe, si elle pouvait être réelle : 4° que les couches à échinides du ruisseau des Bringuets (n° 3) passent sous le massif dolomitique du pie de Bugarach, ce qui est complétement inadmissible; 2 que le massif de calcaires compactes du roc de Ba- lesou, dont le grand escarpement borne au sud la vallée des sources, plonge à son tour sous les calcaires à échinides ; les couches à rudistes, les grès, etc., seraient alors beaucoup plus anciens que le pie de Bugarach, conclusion qui n’est pas plus réelle que la disposition précédente; 3° enfin, que les couches crétacées comprises entre les sources et le terrain de transition au nord seraient les plis anciennes de toute la formation, au lieu d’appartenir précisément à la série supérieure. Pour nous, nous admettons plusieurs failles qui ont relevé la masse du pie de Bugarach et celle des calcaires du roc de Balesou, accidents parfaitement comparables à ceux que nous avons vus jusqu’à présent comme à ceux dont il nous reste à parler à mesure que nous avancerons vers l'O. Quant à la coupe de la vallée des sources (fig. 4 du mémoire), M. Vène ne nous semble pas avoir donné aux diverses assises leur épais- seur relative, et les calcaires compactes n’y ont pas limportance que nous leur attribuons. La route de Caudiès à Quillan est tracée, dans toute son étendue, sur les assises crétacées inférieures, et la rampe du col de Saint-Louis a été taillée dans le grand étage des calcaires compactes qu’elle traverse obliquement. C’est vers le tiers infé- rieur de la montée que finissent les calcaires noirs, les schistes gris, sableux ou ter- reux, plongeant en cet endroit de 55° à 60° à l'E. et qui constituent toute la plane de Caudiès qu’on laisse derrière soi. Au delà de Saint-Louis on atteint l'extrémité de la crête qui s'étend d’Escudiés au Mas des Pouvils. Deux grands escarpements bor- dent au nord le ruisseau de la Valette. Ils constituent un plan incliné de 45° au S. (pl. IV, fig. 22). Les schistes noirs qui en forment la base sont surmontés de roches plus solides, telles que des grès, des calcaires impurs, arénacés, des calcaires gris (N. 2, p. 199.) CHAINES MÉRIDIONALES. 107 noduleux, bréchoïdes, sableux, plus où moins durs, appartenant à la base de l'étage des calcaires à Caprotines. On y remarque surtout un calcaire gris de fumée, à élé- ments spathiques, à cassure esquilleuse ou sub-grenu avec des grains de quartz. Au fond de la coupure que parcourt ce ruisseau, on observe la superposition de ce système aux marnes schisteuses noires plongeant aussi au S. Plus près de Laval, sur les bords de la route, ces dernières inclinent à l'E., et au delà, jusqu’au tour- nant vers Quillan, le plongement est au N. En décrivant les environs de cette der- nière ville, nous reviendrons sur cette partie de la vallée de l'Aude où se termine la chaîne Saint-Antoine, à laquelle appartient aussi tout le grand massif de la forêt de Fange qui s'étend du Tuc-du-Fouret élevé de 1044 mètres, et domine le col de Saint-Louis, jusqu’au défilé de Pierre-Lis. Chaïne de Lesquerde et d’Ayguebonne. — La chaine de Lesquerde et d’Aygue- bonne, parallèle à la précédente, dont elle est en quelque sorte la sœur jumelle, limite au sud la grande vallée à double pente d’Estagel, de Saint-Paul de Fenouillet et de Caudikès. Sur la rive gauche de l’Agly, les roches crétacées inférieures qui s'abaissent de la crête de Tautavel au S.E. disparaissent sous les dépôts tertiaires et quaternaires de la plaine de Rivesaltes, non loin d’Espira. Sur la rive opposée, les couches noires de l'étage inférieur se prolongent un peu au delà, formant des collines basses qui attei- gnent Peyrestortes. Elles bordent ensuite la route et la rivière lorsqu'on remonte celle- ci vers l'O. jusqu’au-dessous de l’ermitage de Notre-Dame des Pennes ou des Peines (pl. IV, fig. 17). Dans le ravin qui débouche au pied de la colline, on peut observer la superposition des deux étages plongeant au S.-E. A leur contact, à la base de l’es- carpement, s’'échappent des eaux abondantes qui traversent immédiatement la route pour se réunir à l’Agly en face de Cazasses (Casas-de-Pena). L’étage inférieur con- tinue à former les talus de la route jusqu’à 2 kilomètres d’Estagel ; on le retrouve sur le prolongement de la crête de Tautavel, comme le montre le profil (pl. IV, fig. 19). Avant d'atteindre la ville, l’escarpement dans lequel la route a été taillée est composé de calcaire gris-bleuâtre, cristallin, à cassure sub-esquilleuse, à grain très fin, plongeant de 18° à 20° au S.-E., puis de calcaires blancs saccharoïdes, de cal- caires bréchoïdes semblables à ceux de la carrière ouverte près du pont, sur la rive opposée, de nouveaux calcaires saccharoïdes comme les précédents, d’une épaisseur d'environ 400 mètres, et joignant les premières maisons du faubourg (1). En cet endroit, la vallée de l’Agly sépare l'extrémité de la chaîne de Tautavel, avant son inflexion à l’O., de la Chaîne d’Ayguebonne et de Lesquerde proprement dite, dont nous étudions l'extrémité orientale. C’est dans le massif situé au nord d’Estagel et compris entre le coude du Verdouble et la route de Saint-Paul que paraissent se (1) M. Fauvelle a publié une note sur les marbres des environs d’Estagel, qui doivent tous appar- tenir à cet étage. Il signale particulièrement la brèche noire et blanche de Baixas, le marbre noir co- quillier de Casas-de-Pena, le marbre noir veiné de blanc du Mas-de-Fenouillet, un autre de teintes très variées de Porta den Rolland, gorge que traverse le Verdouble, etc. (Z'/nstitut, 1834, p. 34.) 408 FORMATION CRÉTACÉE INFÉRIEURE. (N. 2. p. 200.) confondre les deux directions; c’est un véritable nœud de montagne, malgré son peu d'importance apparente et son faible relief. Lorsqu'on remonte la vallée de la Maury, vers le village de ce nom, la plaine que borde au sud la chaîne tronconnée de Lesquerde, comme celle de Saint-Antoine au nord, est très ondulée; elle présente même des collines assez élevées formées par les argiles schisteuses noires et les grès argileux de Pétage néocomien qui occupent également la ligne transverse de partage tout près de Saint-Paul. Autour de cette ville, ces couches présentent quelques inflexions, mais les inchinaisons au S. prédo- minent généralement, surtout vers le pied de la chaîne de Saint-Antoine. Si l'on se dirige vers l’étroit défilé que parcourt l’Agly pour sortir de la vallée, et connu sous le nom du Pont de la Fons (1), les schistes et les calcaires noirs plongent fortement au S. sous le grand escarpement des calcaires compactes dont l’inclinaison de 70° est aussi au S. (voyez le dessin antè, p. 231-235), Au delà du pont, vers le milieu de la gorge, on remarque, dans les calcaires compactes gris-bleuâtre ou blanchâtres, de nombreuses coupes de coquilles bivalves et surtout de rudistes et de Caprotines (2). En continuant à suivre la rive droite, on atteint bientôt un monticule couronné de calcaires et supporté par quelques couches irrégulières d'argile rose panachée. La base est un granite à grains moyens avec feldspath rose et blanc, du quartz, un peu de mica noir, des veines de fer oligiste et du fer sul- furé. Cette roche est d’ailleurs très variable, très fragile, se désagrége facilement par l’aliération du feldspath. Une de ses variétés sans mica renferme un feldspath blanc et un autre coloré en vert-pistache. Un massif cristallin plus considérable lui correspond sur la rive gauche : c'est une syénite porphyroïde à grands cristaux de feldspath rose, avec du mica noir, du quartz, et qui passe accidentellement à une protogyne mal caractérisée. Elle forme le lit de la rivière, puis s’observe sur la rive droite, où elle supporte encore un lambeau calcaire. C’est alors un vrai granite à {1) Comme l'indique la carte de Gassini, et non pont de la Fou ou dela Font, comme quelques auteurs l'ont écrit. On observe près de cet endroit deux sources minérales : l’une chaude, celle du pont de la Fons, est de 27°,50, et la source froide, sur la rive droite, paraît être ferrugineuse (Guide pittoresque du voyageur en France, 1836, Pyrénées-Orientales, p. 10). — La première est rangée parmi les sources salées (Compte rendu des travaux des ingénieurs des mines pendant l’année 18hh, Résumé des travaux statistiques, p. 36). — M. Daubeney indique la température des sources et donne un dessin de la gorge du pont de la Fons dont nous avons déjà parlé (anfè, p. 231-23) (A descrip- tion of active and extinct Volcanos, 2: édit., p. 548 et 578, 1848). (2) Les deux gorges ou fentes étroites par lesquelles l’Agly pénètre dans la vallée au nord et en sort au sud sont, sans aucun doute, le résultat de deux brisures dirigées N.-0., S.-E., obliquement aux chaînes calcaires. On peut bien y apprécier l’action des eaux sur les roches le long des bords et dans le lit même de la rivière, où l'on observe des cavités arrondies, plus ou moins profondes, qui sont de véritables pot-holes. Ces cavités sont au delà du Pont formées dans les conditions les plus favorables. Le lit du torrent est très resserré, sa pente très rapide, et-cependant aucune d'elles ne dépasse 8 à 40 mètres de profondeur. Le polissage ou l'usure des parois de la gorge n’est pas plus considérable que celle des cavités; de sorte qu'on peut affirmer que l'action des eaux n’a pas augmenté de plus de 15 à 18 mètres la profondeur de ces gorges depuis qu’elles donnent passage à l’Agly. (2, p. 201.) CHAINES MÉRIDIONALES. 409 grain moyen avec feldspath rose et blanc. Vers le moulin de Saint-Arnac, la même roche est aussi recouverte par un lambeau calcaire. Dufrénoy (1) qui, dès 1830, avait très bien rapporté à la formation crétacée inférieure les calcaires du pont de la Fons et les marnes noires sous-jacentes, avait observé en outre que les calcaires devenaient plus cristallins à mesure qu’ils étaient plus rapprochés du granite. L'examen de la colline de Saint-Martin lui a fait reconnaître, depuis le calcaire saccharoïde jusqu’au granite, sur une étendue d’en- viron 100 mètres, la série des roches suivantes : 1° Calcaire rougeâtre, saccharoïde, ferrugineux . . . il) uiMmetres: 9° Dolomie cristalline et terreuse en masses cariées, avec de veines de fer spathique . . . . . . ME TD 3° Roche feldspathique, quartzeuse, Fo mant une sorte de Fo sbuche: péné- trée de fer spathique, de pyrite et de fer oligiste. . . . . . . . 22 L° Mélange de dolomie et de fer spathique . . . ze 2 5° Roche granitoïde non stratifiée, composée de feldspath rose, BE mica vert, de quartz peu abondant, et mélangée de fer Lo aE de fer oligiste écailleux en nids . . . . : ET) 6° Dolomie constituant la salbande de à le Delente et y Éncts elle renferme du fer oligiste écailleux, disséminé ou en rognons. . . . . » 7° Granite des montagnes de Saint-Martin, à petits grains et avec du micanoir. » Les relations des roches ignées et sédimentaires ont paru telles à l’auteur qu’elles ne lui ont pas permis de considérer les secondes comme s'étant déposées dans les anfractuosités ou les dépressions des premières. Tout porte à croire que les roches granitiques plus récentes ont dérangé et modifié les roches crétacées, lors de leur arrivée au jour, comme l'ont admis depuis MM. Rozet (2) et Durocher (3). D'après les renseignements que nous devons à A. Paillette, si prématurément enlevé à la science et à ses amis, il avait recueilli, dans les marnes noirâtres autour de Saint-Paul, des fossiles qu’Alcide d’Orbigny (4) a déterminés, et parmi lesquels ce dernier a reconuu l’Ammonites Milletianus, d'Orb., la Turritella V'ibrayeana, id., la Cardita tenuicosta, Mich., la Nucula pectinata, Sow., l'Ostrea Milletiana, d'Orb., et l'Orbitolina lenticula, 14. (5), qui jusqu’à présent n’ont été signalées que dans le gault. La Plicatula radiola, Lam., qui s’y trouve aussi, est commune à ce groupe et aux argiles d’Apt. Nous reviendrons plus loin sur cette particularité. De Saint-Paul de Fenouillet à Caudiès, la plaine est moins accidentée le long de sa partie sud, et elle devient même parfaitement horizontale, tandis qu’elle conserve encore quelques rides et quelques collines basses, à contours très arrondis le long de (1) Mém. pour servir à une description géol. de la France, vol. IX, p. 428, 1834. (2) Comptes rendus de l'Académie des sciences, vol. XXXI, p. 884, 1850. — Æevista minera, vol. IV, p. 184, 1853. (3) Annales des mines, L° série, vol. VI (4) Prodrome de paléontologie stratigraphique, vol. II. (5) On peut douter de l'exactitude de cette dernière détermination à cause de la ressemblance de cette espèce avec l'O. conoïdea, comme avec l'O. concava, jeune. SOC. GÉOL. — 2° SÉRIE, T. VI. — Mém. n° 2. 52 10 FORMATION CRÉTACÉE INFÉRIEURE. (N. 2, p. 202.) la chaine de Saint-Antoine. Nulle part les marnes noires schisteuses ni les grès ne sont masqués par un véritable dépôt quaternaire. La portion de la chaine de Les- querde qui borde la vallée au sud , entre le défilé du pont de la Fons et Saint-Pierre, au midi de Caudiès, forme une muraille parfaitement dressée, continue, et courant exactement E., O. Si de Caudiès on se dirige au sud-ouest en longeant d’abord la rivière, on re- marque, dans les murs en pierres sèches qui bordent le chemin, des £xogyra sinuata, des calcaires remplis d’Orbitolina, ete., et des grès marneux subordonnés aux marnes schisteuses noires des environs. Les schistes noirs calcarifères courent E.-S.-E., O.-N.-0., et plongent au S.-S.-E. Ils sont accompagnés de bancs de grès ou psammites brunâtres, puis viennent deux assises de roches noires calcaires, de 6 et de 10 mètres d'épaisseur, subordonnées à ces schistes dans un monticule à droite du sentier qui se dirige vers la montagne. Au delà se montre un grès argileux brunâtre, calcarifère, se brisant en fragments pseudo-rhomboïdaux. Au tournant du sentier, en commençant à monter, on atteint des couches pétries d’Orbitolina discoidea, Alb. Gras. Ce sont des calcaires gris de cendre, schistoïdes, un peu marneux , terreux et jaunâtres, celluleux, légers et passant à un grès tefreux friable. L'Exogyra sinuala Sy rencontre par places avec des £chinospatagus déformés, probablement VE. Collegni. Tout le reste de la montagne que parcourt obliquement le sentier qui conduit à la métairie d’Ayguesbonnes, située dans la vallée au sud, appartient aux calcaires com- pactes, et la dépression longitudinale qui la borde de ce côté jusqu'aux Adons montre vers son fond les schistes noirs et quelques couches charbonneuses sillonnées par de profonds ravins. Au delà ou au sud règne un second escarpement calcaire. En re- montant des Adons à Saint-Pierre pour passer près des ruines de Castel-Fizel, on traverse de nouveau les calcaires de la première chaine, redressés verticalement, et l’on peut à la croix, au point le plus élevé du sentier, juger très bien de la grande épaisseur des calcaires à Caprotines qui constituent presque à eux seuls toute la chaîne, et contre lesquels les schistes noirs et les grès s'appliquent aussi verticale- ment au-dessus de N. D. de Lavals (pl. IV, fig. 21). Ces diverses coupes sont par- faitement comparables à celles que nous a présentées la chaîne de Saint-Antoine. Si maintenant nous faisons plus à l’ouest une autre coupe N., S. en suivant le cours de l'Aude depuis Belbianes, au sud de Quillan, jusqu’à Saint-Georges ou le pont de Baira, au sud d’Axat, elle traversera à la fois le prolongement de la partie méridionale de la chaîne de Saint-Antoine et celle d’Ayguebonne, et, bien que la ligne de partage des eaux de la Boulsanne et de l’Aude soit transverse à la direction des deux chaînes, absolument comme celle du petit bassin de la rivière de Maury, nous trouverons encore au delà, dans la vallée de la Rebenti, la continuationexacte de la grande dépression longitudinale E., 0. que nous suivons depuis Estagel. L'étroit défilé que suit la rivière entre Belbianes et Saint-Martin, connu sous le nom de gorges de Pierré-Lis, coupe obliquement la chaîne de Samt-Antoine repré- sentée à l’est par le haut massif de la forêt de Fange, atteignant 951 mètres, et à (N. 2, p. 205.) CHAINES MÉRIDIONALES. AU l’ouest par la crête rocheuse continue qui limite de ce côté le bassin de Quillan, élevé de 1445 mètres au Sue de la Peops, immédiatement au-dessus du défilé. Les paroïs escarpées de la fente étroite que parcourent ensemble l Aude et la route sur sa rive gauche sont formées par des calcaires compactes, bleuâtres ou grisâtres, très redressés, souvent verticaux, sans apparence de plissements ni renversements. La route actuelle, exécutée de 1824 à 1826, entièrement taillée en forme de demi- voûte dans la roche, suit toutes les sinuosités de la rivière. Elle est trop étroite pour que des voitures ordinaires puissent la parcourir, et le dessin ci-joint peut donner une idée des difficultés que ce travail a présentées. N° XXIV. — Défilé ‘de Pierre-Lis. À la sortie du défilé se montrent des schistes noirs ou grisàtres, et bientôt réap- paraissent les calcaires compactes gris de fumée, avec de nombreuses veines de chaux carbonatée blanche. Un peu avant les ruines de l’ancienne abbaye, la roche renferme beaucoup de coupes de rudistes ou de Caprotines que l’on retrouve encore dans les calcaires gris compactes ou bleu-noirâtre au delà du village de Saint-Martin, et auxquels succèdent des calcaires d’un noir mat à cassure angu- leuse. Avant d'arriver au pont jeté sur la Rebenti, les calcaires bleuâtres montrent aussi des traces de rudistes, et ensuite viennent les roches schisteuses, grises ou noirâtres, plongeant au S.-0. On remarque en cet endroit un calcaire noir et par- ticulièrement une roche compacte foncée, d’un aspect trappéen, composée de cal- caire, d'argile, de sable très fin et de grains noirs. D’autres roches de même tente, se divisant en rhomboëdres ou en tables rhomboïdales très régulières , lui succèdent 12 FORMATION CRÉTACÉE INFÉRIEURE. (N. 2, p. 204.) jusqu’à Axat, où elles deviennent plus schisteuses, se délitent facilement, et pren- nent tout à fait l'aspect des schistes noirs calcarifères de Caudiès et de Quillan. Le plongementest au S., et cette circonstance, de même que les formes arrondies des collines qui bordent l'Aude jusqu’au défilé de Saint-Georges nous portent à regar- der le tout comme la réapparition du système de couches argileuses et arénacéo- calcaires du bassin de Quillan au nord, et de la vallée de Caudiès à l’est; c’est l'étage néocomien qui prend ici les caractères d’un terrain fort ancien. En effet, les calcaires du pont de Baira sont semblables à ceux du défilé de Pierre-Lis; on ya taillé de même une route dans le roc vif sur la rive droite de l'Aude, et ils représen- tent le prolongement des calcaires de la chaîne d’Ayguebonne, qui n’est elle-même qu'une répélition de celle de Saint-Antoine. Ainsi lorsqu'on marche du N. aus., les crêtes calcaires larges et saillantes du premier étage alternent toujours, avec des dépressions formées par les marnes argileuses, les schistes et les calcaires noirs du second. La fig. 1, pl. IE, montre la disposition générale de ces deux systèmes rapportés encore par M. Marcel de Serres au terrain de transition (1), tandis que M. Noguès y rapportait seulement l’inférieur (2). Malgré l’obliquité de la route relativement à la direction de la chaîne, malgré ses sinuosités et peut-être des plissements qui nous auraient échappé, et augmenteraient ainsi l'épaisseur apparente des calcaires à Caprotines, on ne peut pas estimer à moins de 1000 mètres leur puissance dans cette partie occidentale de la chaîne de Saint-Antoine, et il en est de même du prolongement de celle d’Ayguebonne par Puylaurens et le pont de Baira. Nous allons voir que ce grand développement, au- quel nous avait préparé l'étude de ces chaînes un peu plus à l’est, est loin d’être local. Montagnes de Quillan.— Si l'on se reporte actuellement à ce que nous avons dit des caractères physiques du bassin triangulaire de Quillan (antè, p. 232-214), on recon- naitra que les hautes crêtes calcaires qui le limitent, en formant au sud-ouest et au nord-ouest deux côtés du triangle, appartiennent aux calcaires compactes à Capro- tines, et que les collines du fond, ainsi que les montagnes de la rive droite-de l'Aude qui occupent le troisième côté, appartiennent aux schistes, aux calcaires noirs et aux grès de l'étage néocomien. (Voy. le dessin n°1x, p. 232-24.) Les formes anguleuses, heurtées et abruptes, et les teintes claires des premières, contrastent fortement avec les contours arrondis, les courbes largement flexueuses et les teintes sombres des secondes, et ces différences d'aspect s'accordent parfaitement avec leurs caractères pétrographiques. Nous étudierons d’abord la composition des montagnes calcaires au sud-ouest et au nord-ouest, et nous terminerons par celles de l’est. Lorsqu’en sortant de Quillan on monte la rampe dela grande route de Belesta, on voit qu'elle est taillée dans des couches plongeantuniformément au N.-N.-E., sous un angle (1) Notice géol. sur le département de l'Aude (Actes de la Soc. linn. de Bordeaux, vol. X, Arelivr., p. 52, 1838). (2) Notice géol. sur le département de l'Aude, p. 17, 1855. (N. 2, p. 205.) CHAINES MÉRIDIONALES. 113 variable, moyennement de 35° à 40°. Ce sont desschistes calcarifères noirâtres ou grisà- tres, se délitant toujours en très petits fragments et contenant, de distance en distance, des bancs de calcaire bleuâtre, très dur, compacte ou à grain fin, pénétré de nom- breuses veinules de chaux carbonatée. Ces bancs sont isolés, ou plus ordinairement rapprochés et groupés au nombre de 10 à 12, d’une épaisseur totale de 7 à 8 mètres. Entre les bancs sont des lits minces d’argile schisteuse gris-noirâtre. Les fossiles de ces calcaires sont des fragments de coquilles fort petites, indéterminables, et qu’on n’aperçoit même que dans les parties altérées par l’action de Pair. Dans les schistes calcarifères noirs, à 400 mètres environ du pied de la montagne, on trouve de petits lits remplis de fossiles parmi lesquels nous avons pu déterminer l'Echinospatagqus Collegni, d'Orb., la Plicatula radiola, Lam., et une variété, la Nu- cula bivirqata, Fitt., des moules incomplets pouvant se rapporter aux N. albensis ? d’Orb., ou pectinata, Sow.?, Corbula quillianensis, nov. sp., voisine de la C’. caudata, Nils. in Gold., T'ellina ou Lavignon, Solarium rappelant les $. moniliferum, Mich. et albense, d’Orb.; c’est-à-dire des formes qui, comme celles des environs de Saint-Paul, rapprocheraient plutôt ces couches du gault que du groupe néocomien. Des nodules marneux, diversiformes, s’observent aussi çà et là dans les marnes schisteuses, ainsi que des veinules ou plaques minces de chaux carbonatée. N° XXWV. Vers le tiers de la montée, on observe un plissement (n° xxv), circonstance tou— jours assez rare dans ce pays, au moins sur les flancs des montagnes. Les couches repliées ont été ensuite partiellement détruites vers le haut du pli. Les lits de calcaire gris-noir, compacte, sont traversés par de nombreux filets de chaux carbonatée. Au tournant de la route, des veines assez épaisses de cette substance suivent le plan des couches et donnent, en les brisant, des rhomboëdres très nets. Si l’on continue à s'élever, les calcaires tendent à prédominer, les schistes disparaissent, puis l’incli- naison change et passe au S.-E. Cette série de schistes noirs, de marnes et de cal- caires dont la stratification très apparente montre qu’il y a fort peu d’accidents qui puissent tromper l'observateur, a ainsi une grande puissance et atteint presque la moitié de la rampe. Avant le tournant du ponceau, les calcaires compactes bleuà- AU FORMATION CRÉTACÉE INFÉRIEURE. + (N. 9, pe 206.) tres laissent voir une grande quantité de coupes de bivalves, probablement de ru- distes ou de Caprotines, et la roche est lardée d’une multitude de veines spathiques obliques au plan de la stratification. Un peu avant l’ancien chemin qui descend à gauche pour rejoindre celui de Ginoles les calcaires compactes sont encore remplis de rudistes, de Caprotines et d’ostracées dont on ne peut distinguer; que les coupes, et le retour de la route qui traverse au-dessus les mêmes bancs les met encore mieux à découvert. Ces calcai- res se continuent ensuite Jusqu'au col, et constituent la grande muraille crénelée qui ferme le bassin au sud-ouest de Quillan, comme celle qui se continue au nord- est. L'inclinaison au S.-S.-E. est très évidente dans le plan incliné si parfaitement dressé qui, du bo;id de la route, s’abaisse vers Ginoles, tandis que les marnes noires, les argiles à Plicatules et les calcaires subordonnés inclinent au N.-N.-E., présentant les têtes de couches à la route. Un petit vallon s’observe à l'endroit où change l’inclinaison. En suivant au nord, puis à l’ouest le pied de la colline basse que baigne la rive gauche de l'Aude, en aval de Quillan, on voit cette colline formée par les cou- ches qui affleurent le long de la grande route. Ce sont toujours des marnes schis- teuses noires et des calcaires marneux, de tentes foncées, plongeant au N.-E. Si l’on prend le sentier qui conduit à Brenac, on trouve à environ 150 mètres au-dessus du fond de la vallée les calcaires gris-bleuâtre avec les marnes schisteuses subor- données à l'étage à Caprotines, plongeant alors au S.-S.-E. jusqu’à ce qu’on atteigne la crête nord-ouest. Sur le versant occidental de cette dernière, à une centaine de m êtres au-dessous de son sommet, on atteint les dépôts tertiaires du groupe d’Alet dont nous avons décrit les rapports stratigraphiques et la composition, et dont le dessin (p. 328-120) montre l’aspect général. Cette crète secondaire, interrompue par la vallée de l'Aude, se continue en- suite au delà, dans la même direction, avec le même plongement et supporte les couches, alors presque horizontales, du groupe d’Alet. Cette ride de Lespinet semble passer vers l'E. au sud de Saint-Ferréol, pour se rattacher à la crête qui s'étend de Saint-Just à Parau, ou bien à celle de Bezu et de la Falconnière, de sorte qu'en opposant d’une part la crête qui réunit le pic de Bugarach et le pla- teau de Malabrac, à la chaîne coudée qui ferme le bassin de Quillan puis, de Pautre la haute crête continue de la forêt de Fange, au sud, aux rameaux tronçonnés, situés au nord, on obtient une sorte d’ellipse très allongée dont le grand axe serait à peu près représenté par le vallon que suit le ruisseau de la Valette, et dont Saint-Louis et Laval occuperaient les foyers. A l’intérieur, on observe les rides inclinées au S. qui séparent la Valette du ruisseau du Rec, et les nombreuses collines arrondies de l'étage néocomien. La stratification générale ne représente point d’ailleurs celle d’une vallée de soulèvement, car il y a dans les principaux éléments de cette courbe un pendage prédominant au S. Le roc de Bitrague, qui s'élève au sud-est de Quillan, à 482 mètres d’altitude ou IN. 2, p. 207.) CHAINES MÉRIDIONALES. M5 à 200 mètres au-dessus du fond de la vallée, rappelle, par sa forme, un cône volca- nique et ressemble particulièrement au Puy-de-Dôme (voyez les dessins, p. 232-2/ et 234-26). À sa base sont des argiles feuilletées noirâtres, des calcaires schistoïdes gris-verdâtre, des grès calcarifères et micacés de teintes foncées, puis des grès psammitiques et des calcaires marneux, également foncés, avec quelques fossiles le long de la première colline qui forme le pied occidental du cône. Dans un psammite brun-noirâtre argileux, à grain fin, nous avons trouvé une Trigonie voisine de la T. Fittoni, une Lima, rappelant la L. Carteroniana, d'Orb., des contre-empreintes d’échinides paraissant se rapporter à l’£chinospatagus Collegni, d'Orb., la Panopæa Carteroni, id. Un Pecten de la forme des P. Dutemplei et Puzosianus, d'Orb., était dans un calcaire bleuâtre, foncé à l’intérieur, gris au dehors, très tenace, à grain très fin, micacé et sableux. Un grès jaune taché de rouge, micacé, à grain fin et peu dur, renfermait aussi une empreinte de Trigonie, probablement nouvelle. Le sommet de la montagne est composé de grès brunâtre ou grisâtre très tenace, plon- geant de 50° à 55° au S.-0., comme les crêtes environnantes des calcaires com- pactes à Caprotines. Les fossiles que nous y avons trouvés sont particulièrement des empreintes de Trigonies peu déterminables. Si l’on redescend la pente nord-ouest du cône, on retrouve d’abord les calcaires tenaces gris-noirâtre, à grain fin et micacé, et plus bas, le long d’un ravin qui suit les dernières vignes cultivées dans cette direction, un banc peu épais rempli d’£xo- gyra sinuata. On voit encore ce banc, lorsqu'on redescend le coteau à travers ces vignes jusqu’à la grande route, à l'entrée du faubourg de Quillan. Les individus de VE. sinuata sont de la taille de ceux des marnes bleues de la Clape, et, dans une couche voisine de celle qui les renferme, une autre ostracée peu complète nous parut être un individu jeune de l'O. Boussingaulti, d'Orb. Les couches plongent ici au N.-E., comme celles qui leur correspondent de l’autre côté de la rivière. Toutes les collines basses à contours arrondis ou déprimés qui occupent le fond du bassin de Quillan, entre Ginoles et Belbianes, appartiennent exclusivement à l'étage néocomien, et leurs couches affectent des inclinaisons assez variées quipour - : raient être l'objet d’une étude particulière intéressante, si la végétation qui les recouvre ne s’y opposait assez souvent (1). . Malgré la disposition coudée de la chaîne que nous venons d'indiquer à l’ouest de Quillan, cetaccident particulier des calcaires compactesn’empêche pas la grande ligne de la chaîne de Saint-Antoine de se continuer encore bien au delà dans la même direction. Ainsi, au sud de Coudons, un massif, élevé de 1294 mètres, est exactement dans l'alignement de la crête de la forêt de Fange. Plus loin, les escarpements for- ment une muraille couverte en partie de sapins, comme la crête de Belbiane, et qui (1) Trois sources, dont deux sont thermales, alimentent le ruisseau de Ginoles. La température de ces dernières est de 20° à 30°. II s’en dégage du gaz acide carbonique ; elles n’ont ni odeur ni saveur bien prononcées et sont signalées comme alcalines. 16 FORMATION CRÉTACÉE INFÉRIEURE. (N. 2, p. 208.) s'étend par le Blau jusqu’au roc de Saint-James, à l’est de Belesta. Le plongement se maintient constamment au S., sous un angle très ouvert. À Montplaisir, en face du pont de Belesta, on trouve adossé contre l’escarpement abrupte de ces calcaires à Caprotines, des calcaires jaunâtres terreux renfermant quelques rudistes, et un peu plus bas, au sud, un banc rempli d’Hippurites organisans, cornu-vaccinum, de Radiolites, etc. On ne distingue pas bien les couches qui séparent celles-ci des cal- caires compactes vers lesquels elles plongent, mais la distance d’à peine 30 mètres qui sépare les deux systèmes ne permet pas qu’il y ait un développement bien con- sidérable de la formation crétacée supérieure, dont'les relations avec l’inférieure sont encore ici tout aussi anormales qu'aux environs de Bugarach, de Soulatge, etc. Le groupe d’Alet, comme on l’a dit, borde en outre cet escarpement. La fontaine de Fontesterbe, située un peu plus loin sur.le bord de la rivière, sort des calcaires compactes à Caprotines, au fond d’une grotte qui rappelle en petit celle de Vaucluse. En août et septembre, la source devient intermittente. L’inter- mittence est de trois quarts d'heure, et les eaux diminuent des 9/10. A peu de dis- tance de ce point, les marnes néocomiennes sortent dé dessous les calcaires, qui s’éloignent vers le S., et les couches noires, marneuses et schistoïdes, forment alors des collines assez élevées des deux côtés de la rivière. RÉSUMÉ. Nous avons suivi le développement et les modifications des deux étages crétacés inférieurs depuis l'extrémité septentrionale de la Clape jusqu'ici, c’est-à-dire sur une étendue d'environ 35 lieues, d’abord du N.-E. au S.-0., puis à l’O. quelques degrés N. Partout la distinction de ces étages est restée nette et tranchée, mais leur puissance, leurs caractères pétrographiques, leur stratification et les débris orga- niques nous ont offert, suivant les points, des différences plus ou moins prononcées. . Leurs relations avec les couches crétacées supérieures sont, dans la plupart des cas, restées assez obscures, et nous avons pu seulement constater, dans quelques localités, celles qu’ils ont avec des formations plus anciennes. Dans la Clape, les deux étages surmontés de dépôts tertiaires lacustres n’ont été . accidentés que par des failles ou brisures simples, dirigées généralement du N.-N.-E. au S.-S.-0., et malgré un léger bombement, suivant l’axe, tout le système plonge au N.-0. L’épaisseur des calcaires compactes du premier étage ne dépasse pas 25 à 30 mètres ; celle de l’étage inférieur, autant qu’on en peut juger, 195 à 150. Les caractères pétrographiques de l’un sont uniformes et constants, ceux de l’autre plus variés. Autour de Gruissan et dans l’île de Saint-Martin, tous les caractères sont identiques avec ceux de la Clape, mais l’inclinaison est inverse ou à l’E., comme dans le prolongement de tout le système au S.-0. Car la chaîne de Montpezat, le plateau de Roquefort à la Palme et tout le grand plan incliné de Treilhes, de Fitou (N. 2, p. 209.) RÉSUMÉ. 117 et d'Opouls, plonge au S.-E. Ainsi, sous le rapport stratigraphique, les couches crétacées inférieures de l’est nous présentent deux accidents principaux bien distincts, lun qui les a inclinées à l’'O.-N.-0., dans le massif de la Clape, l’autre qui les a in- clinées en sens inverse ou au S.-S.-E., depuis l'étang de Pech-Menau, au nord de Gruissan, jusqu’à la tour de Tautavel. On à vu, en outre, que l'axe du petit bassin de Feuilla pouvait être considéré comme une ligne particulière de soulèvement, de part et d’autre de laquelle linclinaison générale au S.-S.-E. se trouvait modifiée. Das la dernière partie de la zone crétacée orientale, les caractères et l'épaisseur des étages n’ont pas encore très sensiblement changé, mais les roches occupent une surface de pays beaucoup plus considérable, et les dislocations qu’elles ont subies ont été plus énergiques. Aussi, portées à une grande hauteur dans les massifs qui entourent Feuilla au nord, dans la chaîne de Périllous, au col de Ladat, dans les crêtes de Vingrau et de Tautavel, nous avons pu voir le lias affleurer à l'ouest dans les dépressions les plus profondes, depuis les rives de la Berre jusqu'aux envi- rons de Tuchan. En se recourbant vers l'O. pour faire prèsque un angle droit avec la direction précédente, la zone crétacée inférieure n’augmente point de largeur, mais chacun de ses étages acquiert une épaisseur de plus en plus considérable. Ces deux cir- constances qui, au premier abord semblent être contradictoires, résultent du redres- sement beaucoup plus prononcé des strates qui forment les deux rides principales, de ceux qui constituent les dépressions et les autres rides ou crêtes secondaires qu’elles laissent entre elles, de même que celles qui s’y rattachent au nord et au sud. Cette disposition, conséquence des brisures parallèles dirigées presque E., O., suivies de soulèvements, simples pour la plupart, qui ont redressé toutes les couches en les plaçant presque sur la tranche, et toujours inclinées au S., permet de juger de l'épaisseur de ces dernières sur une étendue de pays comparativement assez faible, mais beaucoup plus grande néanmoins que cette épaisseur totale, à cause de la réapparition des mêmes strates à diverses reprises. Ainsi, sous le méridien de Saint-Paul, trois chaînes saillantes formées par les calcaires compactes, comprennent entre elles deux dépressions occupées par les marnes noires et les grès ou psam- mites de l'étage inférieur. De Quillan au pont de Baira, le nombre des accidents locaux augmente encore l'épaisseur apparente des deux systèmes. Indépendamment des dislocations principales qui font succéder un étage à l’autre lorsqu'on marche perpendiculairement à la direction, des accidents moms impor- tants, propres à chacun d’eux, concourent encore à cette apparence. C’est ce qu'on observe principalement dans l'espèce d’ellipse montagneuse comprise entre le pic de Bugarach et le bassin de Quillan. L’épaisseur des deux élages, qui était à peine de 200 mètres dans la Clape, ici n’a pas moins de 2000 mètres, car si l'inférieur est difficile à apprécier sous ce rapport, la chaîne des calcaires compactes redressés que coupent les fentes profondes de l’Agly et de l'Aude peut donner cette épaisseur d’une manière très approximative. D’un autre côté, ces mêmes roches, à peine incli- SOC. GÉOL. — 2° SÉRIE, T. VI. — Mém. n° 2. 53 h18 FORMATION CRÉTACÉE INFÉRIEURE. (N. ©, p. 210.) nées et légèrement soulevées dans le premier massif, sont redressées jusqu’à la verti- cale, dans cette région où des pics atteignent 1294 mètres d’altitude. Des environs d’Estagel à Belesta, outre leur plus grande épaisseur et les dislo- cations plus considérables qui, comme on l'a vu, ont imprimé à tout le pays un relief particulier et des formes orographiques tout à fait remarquables, les deux étages crétacés que nous considérons ont revêtu des caractères pétrographiques qu’ils n'avaient point dans la zone orientale. L’inférieur, par sa composition et ses teintes foncées, prend l'aspect de sédiments extrêmement anciens, et certains schistes des environs de Quillan pourraient, dans une collection, être pris pour des roches de transition. Il en est de même des grès, des psammites et des calcaires. Les roches du premier étage affectent aussi, ou des teintes bleuâtres, foncées, jointes à une grande compacité, ou, comme autour d'Estagel, des teintes claires ou d’un blanc pur, avec une texture à grain fin, complétement cristalline ou saccharoïde. Nous avons donc ici une preuve de ce que nous avons fait remarquer ailleurs pour des massifs beaucoup plus considérables, savoir, la relation directe qui existe entre les modifications éprouvées par les caractères pétrographiques des roches et l’énergie des phénomènes physiques qui les ont disloquées (1). Malgré tous ces accidents de la zone crétacée méridionale, 1l ne semble pas qu’ils aient fait nulle part affleurer le lias dans les dépressions qui séparent les chaînes ; du moins, aucun fossile de ce groupe n’y a-t-1l été signalé. Cette circonstance peut tenir à ce que les brisures parallèles étant très rapprochées et les redressements très prononcés, l’espace entre deux portions soulevées et inclinées du même côté ne suffisait pas pour laisser arriver au jour des couches plus anciennes. La grande épaisseur des étages dans cette région offrait en outre un obstacle qui n'existait point à l’est, où les plans fort étendus et peu inclinés étaient composés de couches d'une faible épaisseur comparative. Enfin, peut-être aussi le lias ne se prolongeait-il pas fort loin dans cette direction, où les roches crétacées reposent directement sur le granite ou sur le terrain de transition. Nous avons vu dans la Clape et sur son prolongement sud-ouest les dépôts ter- tiaires lacustres et marins recouvrir les calcaires du premier étage, et les roches du second surmonter, à l’ouest de la chaîne de Montpezat, aux environs de Feuilla et de Tuchan, les assises du lias. Quant aux relations des couches erétacées inférieures avec les supérieures, elles sont beaucoup moins claires. Sur un seul point, au col de Capella, au-dessus des sources salées de Sougraigne, nous avons signalé une couche à Orbitolina concava, c’est-à-dire la plus basse de cette série, reposant transgressive- ment sur les calcaires compactes. Partout ailleurs ces mêmes couches recouvrent le terrain de transition, ou bien les rapports de lastratification,comme dans la chaîne de Fontfroide, n’ont pu être encore suffisamment établis ; ou enfin les couches les plus récentes paraissent buter contre les chaînes redressées, depuis les environs de Rouf- (1) Histoire des progrès de la géologie, vol. V, p. 4, 1853, et vol. VIL, p. 140 et 441, 1857. (N. 2, p. 211.) RESUMÉ. 119 fiac jusqu’à Bézu, sans que le contact ait été observé directement. Dans ce dernier cas les assises crétacées supérieures plongent au S. comme les inférieures, quoique sous un angle beaucoup plus faible, et elles sont disposées par rapport à celles-ci en ordre inverse de leur ancienneté, le quatrième étage, comme on vient de le dire, en étant le plus éloigné vers le N. La formation crétacée inférieure a donc été redressée avant le dépôt de la supé- rieure, et celle-ci aété élevée ensuite dans la même direction que le massif paléozoïque qui la supporte, de manière à présenter aussi la même direction et le mème plonge- ment que la plus ancienne. En effet, aucun dépôt crétacé ou tertiaire ne s’observe au sud de la chaîne de Saint-Antoine, et la grande vallée d’Estagel au col de Saint- Louis, celle de la Boulsanne et le bassin de Quillan ont dû être émergés pendant tout le reste de la période secondaire où des dépôts crétacés supérieurs, comme pendant l’époque tertiaire tout entière, et la vallée de Caudiès enfin n’a pas même recu de dépôts quaternaires. Quelques fossiles nous ont suivi presque constamment depuis la Clape jusqu'au- tour de Quillan. Les Orbitolina conoidea et discoidea, V'Echinospatagus Collegni, l'Exogyra sinuata sont dans ce cas. Mais, si déjà dans la Clape la faune des marnes et des calcaires marneux inférieurs nous présentait, par l’association de certaines espèces, des différences sensibles avec les diverses faunes des étages néocomiens, tels qu’ils sont caractérisés dans la Provence, nous voyons, au-dessous des calcaires com- pactes des Corbières, réunis, des fossiles qui, en Provence, sont les uns au-dessus et les autres au-dessous des calcaires à Caprotina ammonia de ce dernier pays. Nous avons cité en outre aux environs de Saint-Paul de Fenouillet, et nous avons observé nous-même autour de Quillan des espèces qui, dans le nord de la France et en Angleterre, sont particulières au gault. Rien ne prouve encore, d’ailleurs, qu’elles appartiennent aux couches à £. sinuata. De pareils éléments sont donc peu propres à fixer lopinion sur la place définitive de nos deux étages crétacés inférieurs, d'autant plus que les calcaires à Caprotines, malgré leur analogie avec ceux de la Provence, ne nous ont présenté aucune espèce bien déterminable qui puisse en prouver le paral- lélisme. Il est probable que la connaissance des fossiles du calcaire lumachelle sou- vent cité à leur base dans la Clape, jetterait du jour sur cette question. Si l’Exogyra sinuata marquait avec l'Orbitolina conoïdea et les Echinospalagus un horizon absolu, tel que celui des argiles à Plicatules de la Provence, il en résulterait que ces calcaires compactes, constamment au-dessus, seraient parallèles au gault ou à une division inférieure du groupe de la craie tuffeau, plus ancienne que celle de l'Exogyra columba et de l'Orbitolina concava; mais, d’un autre côté, 1l resterait toujours à expliquer l’existence de plus de vingt espèces de coquilles, partout ailleurs propres à l'étage néocomien inférieur, avec d’autres propres à l'étage supérieur (argile à Plicatules). Ces spéculations nous semblent encore prématurées, et nous nous bornons quant à présent à une description pure et simple des faits que nous avons constatés (voy. postèa, p. 443). h20 FORMATION JURASSIQUE. (IN. 2 p. 212.) Formation jurassique, LIAS, Nous avons dit (1) que les représentants certains de la formation jurassique dans l’étendue de notre carte appartenaient aux deux premiers étages du lias. Les grandes assises de calcaires magnésiens, de grès, de marnes et de gypses qui règnent ordi- nairement au-dessous des couches fossilifères appartiennent sans doute à des étages plus anciens du même groupe, mais que nous ne pouvons préciser faute de débris organiques pour nous guider; aussi quelques personnes ont-elles cru y voir une dépendance du trias. Nous avons déjà publié des détails assez étendus sur ce que nous avions observé jusqu’en 1855 ; 1l ne nous reste donc qu’à ajouter ici les princi- paux faits que nous avons reconnus depuis et ceux qui nous ont été communiqués. On a vu (antè, 269-61) que la butte isolée au pied de laquelle se trouve la mé- tairie de Montlaurès, sur la droiteet à mi-chemin de Narbonne à Moussan, était com- posée de calcaires compactes gris-blanchâtre, s’élevant au-dessus des calcaires la custres et des poudingues tertiaires de la plaine de Malvezy. Bien que nous n’y ayons pas trouvé de fossiles, son analogie avee les collines situées à l’ouest et au sud ne permet pas d’y voir autre chose qu’un affleurement du lias. Si, après avoir repris le chemin de Moussan et traversé un monticule de calcaire marin sableux de la mollasse avec les poudingues sous-jacents, on descend vers le village, on remarque, dans la tranchée de la route à la hauteur de Notre-Dame de la Montade et à 250 mètres des maisons, des marnes bleu-noirâtre renfermant des bancs de calcaire bleuâtre subordonnés et plongeant de 40° au N.-0. À ces marnes succèdent des poudingues incohérents et grossiers plongeant de même et se conti- nuant l’espace de 60 à 80 mètres, jusqu'à l'entrée de Moussan. La présence de nombreux fragments de Gryphœæa Maccullochii, Sow. in Gold. (2) à la jonction des poudingues et des têtes de couches prouve assez que ces dernières appartiennent au lias. M. Noguës a constaté depuis que la butte située à droite du chemin était formée de calcaires compactes avec Pecten æquivalvis, Sow., et que les poudingues inco- hérents avec des fossiles et des roches provenant du lias occupaient une certaine étendue autour de Notre-Dame de la Montade et pouvaient être observés particuliè- rement au pied de la colline, dans un ravin parallèle à la route. Un coup d’œil jeté sur la carte suffira pour faire comprendre la disposition des (1) Histoire des progrès de la géologie, t. VI, p. 525, 1856. (2) Voyez pour ce fossile que nous citerons souvent, ce que nous en avons dit, Æüst. des progrés de la géol.,t. VI, p. 535, nota, en substituant toutefois la fig. 4 ab à la fig. 5 citée par erreur. La valve supérieure de cette coquille ne présente jamais non plus les caractères de la G. cymbium à laquelle quelques personnes l’ont rapportée. % (N. 2, p. 215.) LIAS. 421 limites respectives du lias et des dépôts quaternaires, tertiaires et crétacés entre les routes de Narbonne à Carcassonne, à la Grasse et à Sigean. La présence d’un lit rempli de T'erebratula tetraedra, Sow., dans les calcaires noirs d’une carrière ou- verte sur le bord de la route avant le village de Montredon, jointe à la Gryphœa Maccullochii signalée dans les grès calcarifères gris-brunâtre et les marnes schis- teuses au- He de la prise d’eau qui alimente l’aqueduc de Narbonne, caractérise suffisamment ces grandes assises si stériles à tous égards. En 1833, M. Boué (1) indiquait au Pech de Pastouret (ou Lastouret), à 3 kilo- mètres au sud de Narbonne, sur le versant oriental de la chaîne de Fontfroide, des marnes micacées grises, des calcaires gris-noirâlre et des grès micacés avec des Gryphées, des Peignes, des Troques, des Cérites et des Ammonites ferrugineuses de la famille des béliers (arietes de Buch). A la métairie de Pastouret, suivant les notes que nous devons à M. Noguës , les calcaires du lias recouverts par les dépôts lacustres comme aux fours à chaux (p. 273-63) plongent au N.-E. Les échantillons provenant de cette localité sont : un calcaire marneux gris, terreux, pétri de Pentacrinites scalaris, Gold. (pl. LIFE, fig. 3g), P. pentagonalis, id., Belem- nites paæillosus, Schloth.?, Lima?, nov. sp. (2), un calcaire dur, compacte, gris bleuâtre, avec Pecten acuticosta, Lam.?, un calcaire grossier, marneux, gris, avec Lima pectinoides, Sow.?, un calcaire gris de cendre, à cassure terreuse, avec Cero- mya, NOV. Sp., puis le Cerithium costellatum, Münst. Gold. (C. subcostellatum, d'Orb.), le Turbo duplicatum, Gold. etune petite Térebratule, peut-être la T. Moore, Dav. On peutsuivre ces roches par les métairies de Treilhes et de Saint-Hyppolite jusqu’à celle de Lambert. Près de cette dernière, en remontant le ravin, M. Noguès nous signale des marnes schisteuses, arénacées, passant à des psammites fossilifères, et des couches à polypiers. Un calcaire argileux qui recouvre ces marnes renferme particulièrement des Bélemnites (B.unisulcatus Hartm., Ziet.?) puis les Ammonites bifrons, Brug., et communis, Sow. Nous y avons reconnu de plus les T'erebratula rimosa, de Buch, et subpunctata, Dav. Les marnes gypseuses et les gypses, si déve- loppés aux environs et lorsqu'on se dirige au sud de ce point, sont inférieurs à ces affleurements du lias dont font encore partie les calcaires noirs fétides, celluleux, du Pech de l’Agniel, le long du chemin de Fontfroide. Sur presque tout ce versant oriental de la chaîne, les éruptions dioritiques ont modifié profondément les roches secondaires, de manière à les rendre méconnais- sables. Ce sont des gypses, des cargnieules, des amygdaloïdes, des argiles rouges, vertes, grises, elc., masquant les rapports originaires des couches en même temps qu’elles en ont altéré les caractères, et qui permettent à peine de supposer qu'une zone étroite du lias longe le pied des montagnes, non loin de la limite du terrain (1) Bull. Soc. géol. de France, A"° sér., t. III, p. 327, 1833. (2) Cette coquille, dont nous ne connaissons qu’un fragment, offre l’ornementation de la L. pec- tinoides, telle qu’elle est représentée dans l’ouvrage de Goldfuss, pl. 102, fig. 12, où l’on remarque dans chaque sillon trois stries filiformes au lieu d’une. L22 FORMATION JURASSIQUE. (N: 2, p. 214.) tertiaire lacustre, par Courtal-de-Ceste, la Plâtrière, Fraissinelle, la Fontaine, Sainte-Eugénie, Garrigue, ete. A la hauteur de la métairie de Fontloubi, sur le chemin de Portel, à 450 mètres de la route de Sigean, un lambeau de lias à été signalé il y a près de trente ans par M. Tournal (1). Son étendue ne nous à pas paru dépasser 150 mètres de large sur 250 environ de long. Ilest complétement entouré par la mollasse lacustre, et composé de marnes noires renfermant des bancs subordonnés de calcaires gris- bleuâtre ou noirâtre, très durs et subcompactes, à cassure esquilleuse, de 0",25 à 0®,55 d'épaisseur et plongeant de 45° à l'O. Les fossiles y sont très répandus; nous y avons recueilli les espèces suivantes : T'hecocyathus mactra, Min. Edw. et J. Haime, Astarte Voltzii, Hœn. in Gold.?, A.? (2 petites espèces indét.), Nucula rostralis, Lam., N. Hausmanni, Roem., Pecten pumilus, Lam. (P.paradoæus, Münst., P. personatus, Gold.), P. æquivalvis, Sow., Gryphœa Maccullochi, Sow. in Gold., T'erebratula tetraedra, Sow., T. punc- tata, id., 7. subpunctata, Dav., T. numismalis, Lam., var. (2), Turbo duplicatus, Gold. (T. subduplicatus, d'Orb.), Cerithium Patroclus, d'Arch. (3), C. armatum, Gold., C. costellatum, de Münst., Gold. (C. pseudocostellatum, d’Orb.), Fusus?(très pet), Belemnites unisulcatus, Blamv., B. paæillosus, Schloth.?, an bisulcatus, Hartm. Ziet.?, Ammonites bifrons, Brug., 1d. var. (4), 4. cornucopiæ, Young, A. variabilis, d'Orb. (5), À. Raquinianus, d'Orb. (an À. crassus, Phill.?), 4. crenatus, Rein., 4. communis, Sow., À. insignis, Schubl., 4. Calypso, d'Orb., A. nov. sp., voisine de l 4. punctatus, Stah], Ziet. Au nord du chemin on remarque, le long du ruisseau, un monticule formé de calcaires noirâtres, très durs, surmontés de calcaire gris-jaunâtre, celluleux, et dont les cavités ont été en partie remplies par de la chaux carbonatée. Avant de suivre au sud le développement des couches jurassiques, nous men- tionnerons leur présence à l’ouest sur le versant occidental des collines de Boutenac, entre ce village et Ferrals. Le lias suit à peu près le cours du ruisseau de Pailloux, formant une ride dirigée N., S., parallèlement à une autre ride de roches crétacées. Elle se termine à l’ouest des Olieux, sur la limite des communes de Boutenac et de (4) Journal de géologie, t. TI, p. 249, 1830. (2) Cette variété, qui s’accorde assez bien avec la fig. 5, pl. V, donnée par. M. Davidson (A #0n0- graph of Britsh ool. and liasic brachiopoda), se distingue du type et de ses modifications. habituelles par ses bords toujours tranchants, l’échancrure de la base beaucoup plus profonde et constante, et surtout par le crochet plus large, plus haut et.plus avancé. (3) Voyez pour cette espèce Hist. des progrès de la géol., t. VE, p. 52h, nota. (4) Cette coquille est beaucoup plus déprimée que le type; sa carène est simple, l'ouverture ogi- vale ; le dos est aplati sur les côtés, et les plis latéraux sont plus fins, plus nombreux plus rappro- chés et quelquefois fasciculés. Peut-être devra-t-elle, être considérée. eemme une espèce; particulière ? (5) Un seul échantillon sur vingt a présenté des tubercules.rudimentaires sur le pourtour,de l'om- bilic; tous. les autres se rapprocheraient davantage des Ammonites conrugatus Sow. ; hecticus Rein. Ziet., Murchisonæ Sow., etc. (N. 2, p. 218.) LIAS. 123 Thézan, et à son autre extrémité, au Rocadeous, près de la Barrie de Monteneris, où elle passe sous la vallée de lOrbieu. Ces couches, particulièrement dévéloppées au lieu dit le Pradel, plongent au N.-0., comme les couches crétacées, et montrent, de haut en bas, suivant M. Noguès à qui nous devons ces renseignements : 4° Calcaires compactes. 2° Calcaires en plaquettes. 3° Calcaire argileux gris et noir. L° Calcaire argileux bleuâtre avec Pecten æquivalvis. 5° Calcaires compactes. 6° Dolomie. 7° Marnes à Pentacrines et à Bélemnites. Au nord-ouest ou vers Ferrals, des grès succèdent à ce système. Si nous reprenons actuellement la description des affleurements du lias à l’ouest de Portel, dans le bassin de la Berre, nous verrons des fossiles de ce groupe signalés encore par M. Noguès sur deux points le long de sa rive gauche, dans la tranchée de la nouvelle route, avant la montagne de Saint-Victor. Plus loin, en remontant des gorges des moulins vers Fontjoncouze, les couches du lias (n° 18 de la coupe, p. 337-129) qui, au Mounelle de Malvezy, recouvrent les calcaires noirs compactes du groupe d’Alét, sont : 1° des calcaires argileux gris, tenaces, à cassure inégale, remplis de grains verts et renfermant des nodules subprismatiques de peroxyde de fer hydraté à la surface, avec des Bélemnites ; 2° un calcaire marneux, grisâtre, à points verts, avec Pecten disciformis, Schubl., Terebratula variabilis, Schloth., T. punctata, Sow.? Spirifer rostratus , de Buch, Belemnites elongatus, Mill.? 3° un calcaire argilo-sableux gris-jaunâtre, avec points verts, un peu schistoïde, à cassure terreuse, avec Gryphœa Maccullochii, Sow. in Gold., Bélemnites, etc. Nous avons signalé, à l’est et à l’ouest de Fontjoncouze (L), le lias caractérisé par le Peclen æquivalvis, Sow., une grande Lime, peut-être la L. gigantea, Desh.?, la Terebratula subpunctata, Dav., le Belemnites paæillosus, Schloth., lAmmonites concavus, Sow., etc. Suivant M. Noguës, il forme, en se continuant au sud, un massif considérable qui porte Saint-Christol et se trouve entouré par le groupe d’Alet. HE se prolonge encore au sud-ouest, vers les hauteurs situées entre Albas et Cous- touge. Ainsi M. E. Dumortier, en partant du premier de ces villages et suivant le chemin de Fontjoncouze, a rencontré à 2 kilomètres d’Albas un calcaire gris-jau- pâtre avec Gryphées, plongeant au S.E. ét recouvrant un calcaire gris compacte à grain fin rempli de Bélemnites. A 100 mètres plus loin, au col de la Peyre, sont des calcaires marneux bleus où jaunâtres, avec Pecten æquivalvis et Tebrebratula subpunctata, alternant avec des marnes noires; le tout d’une épaisseur assez considé- rable. Si l’on prend ensuite le chemin de Durban à Saint-Laurent, après sa rencontre avec le précédent, on trouve le long d’un ruisseau, et en laissant à droite la petite métairie de Palace, des blocs de calcaire bleu foncé, bitumineux, pesant, blanc- (1) AÆistoire des progrès de la géologie, t. NI, p. 527, 1856. 24 FORMATION JURASSIQUE. (N. 2, p. 216.) jaunâtre au dehors, avec Pholadomya ambigqua, Sow., Ammoniles planicosta, Sow., A. Bechei, id., etc. Le lias forme aussi au sud d’Albas une bande étroite comprise entre le groupe d’Alet et le terrain de transition; cette bande est dirigée O., E., des environs de Fourques à Durban. Entre Gléon et Villesèque, M. Noguës a observé des fossiles du lias, dans le prolongement de la couche que nous avons décrite au four à chaux, près de la métairie de Coumlouvière (ou Combe-la-Bière), sur le chemin de Fraisse à Montpezat, et où nous avions rencontré le Pecten æquivalvis, la T'erebratula punc- tata, Sow. in Dav., le Belemnites paæillosus, Schloth., les Ammonites bifrons, Brug., comensis, de Buch, annulatus, Sow. Au delà de Saint-Jean-de-Barrou, au sud-est de la chapelle de Notre-Dame des Olives, le lias, suivant M. Noguès, s’élèverait encore plus qu’au col de la Nouvelle, point que nous avions regardé comme sa plus grande altitude dans le pays. Les marnes noires et les grès ferrugineux de la vallée de la Murelle, au sud de Sigean, couches que surmontent les calcaires marneux avec fossiles néocomiens, autour de Roquefort comme à la descente de Montpezat, ne nous ayant offert aucun fossile du lias, soit dans le fond de la vallée même, soit sur ses flancs, autour de la butte de Saint-Martin, et à l'extrémité nord de la dépression, où .elles sont tra- versées à Fontcouverte par la route de la Nouvelle, nous avons dû les colorier provi- soirement comme faisant encore partie de l'étage crétacé inférieur. En décrivant le cirque de Feuilla (p. 395-107 et pl. IV, pl. 16) nous avons montré les assises du lias avec Belemnites, Ammonites bifrons, Pecten æquivalvis, Terebratula punctata, Gryphœa Maccullochü, etc., surmontées de la série crétacée inférieure et reposant sur de puissantes assises de calcaires gris, rosâtre ou jaunâtre, marneux, en partie celluleux et cloisonnés, de calcaires ferrugineux, rouges, très duis, en plaquettes, de calcaires jaunes et de grès grossiers friables, un peu feld- spathiques, plongeant de 40° au N., comme tout ce qui est au-dessus. Ce système recouvre les schistes paléozoïques au fond du cirque. Ces divers représentants du groupe du lias occupent ensuite le fond de la vallée à l’ouest et les pentes inférieures des montagnes qui environnent la métairie d’Or- toux, en se rattachant au lias de la grande vallée de Saint-Jean-de-Barrou, de Fraisse, de Durban et de Villesèque, où les calcaires magnésiens gris et jaunes, les marnes gypseuses et les gypses en font également partie et n’en sont que des modifications locales. On peut suivre ce système de couches au sud d’une manière continue par Castelmaure jusqu'à Embres, la Nouvelle, Donneuve et le roc isolé du château d’Aguilard ou de Vialas, à l’est de Tuchan. Dans la localité de Fond-Martin ou Fond-Marty, près de Donneuve, notre ami de Boissy avait recueilli une suite de fossiles que nous avons déjà cités (1), et dont nous reproduirons iei la liste avec quelques additions et corrections. Nous renvoyons le lecteur à ce passage pour les observations paléontologiques placées en notes. Ces espèces sont : (1) Æist. des progrès de la géol., t. VE, p. 533, 1856. (N. 2, p. 217.) LIAS. 425 T'hecocyathus mactra, Miln. Edw. et J. Haime, Pentacrinus scalaris, Gold. (pl. 52, fig. 3, g), P. pentagonalis, id. (pl. 55, fig. 2, b), P. basaltiformis, Mill. Gold. (pl. 52, fig. 2, e, d,e) Pholadomya Volizii, Ag. an reticulata, id.?, forme générale de la P. decussata, Ag., Corbula cardioides, Phil. Ziet. (Unicardium, id. d'Orb.), Astarte Voltsu, Hœn., Gold., À. corbarica, d’Orb. an acutimarga, Roem.?, A. bur- gomontana, id. Rich., À. nov. sp., très plate et régulièrement ovalaire, Amphidesma rotundatum, Phill., Trigonia literata, Young et Bd, Phil, Gold. (pl. 136, fig. 5, a) (1), Mytilus scalprum, Sow. Phill., Nucula rostralis, Lam., N. Hausmanni, Roem., V. ovalis, Ziet. in Gold., Arca cucullata, Münst. Gold., 4. inæquivalvis, Gold. (4. subliasina, d'Orb.), Lima pectinoides, Sow., L. indét., Pecten pumilus, Lam. (P. paradoæus, Münst., personatus, Gold.), P. æquivalvis, Sow., P. cingulatus, Gold. (non id. Phill.), Plicatula Neptuni, d'Orb., P. spinosa, Sow. (2), Gryphœa Maccullochii, Sow. in Gold., Terebratula punctata, Sow., T'. subpunctata, Day. (pro- bablement la T. Crithea, d'Orb.), T. tetraedra. Sow., T. variabilis, Schloth. an cynocephala, Ed. Rich.? (T. fidia, d'Orb.), T. numismalis, Lam., var. (3), Neri- lopsis voisin du N. philæa, d'Orb., mais plus globuleux et plus rugueux, T'urbo duplicatus, Gold. (T. subduplicatus, d'Orb.), Pleurotomaria Boissyi, nov. sp., Ceri- thium armatum, Gold., C. costellatum, Münst. Gold. (C. pseudocostellatum, d'Orb.), C. Patroclus, d'Arch., nov. sp. (Turbo, id. et Purpurina, id. d’'Orb.), Belemnites unisulcatus, Blainv., Ammonites bifrons, Brug., A. voisine de hecticus, Tiet.. A. communis, Sow.?, A. variabilis, d'Orb., 4. Raquinianus, id., A. mucronatus, id., 4. subarmatus, SOW., A. crenatus, Phill. Le lias constitue ensuite, avec ses dolomies et ses marnes gypseuses reposant sur les schistes de transition ousur le grès rouge houiller, une grande partie de la base du mont Tauch ou montagne de Tuchan; mais pour cette localité nous renverrons le lecteur au mémoire intéressant qu’a publié depuis peu M. Noguës (4). Enfin, le dernier point où nous pouvons citer avec certitude le lias caractérisé par ses fossiles nous à été signalé par M. E. Dumortier. C’est au col de Carbous, situé à 3 kilomètres au sud de Padern. Après avoir gravi un sentier rapide et passé une première crête, on arrive à un vallon cultivé, sur la pente méridionale duquel se trouvent des couches assez développées, avec Pholadomya Voltzi, Ag.? (peu différente de la P. ambigua, Sow.), la Terebratula subpunctata, Dav., le Pecten æquivalvis, Sow. le P. acuticosta, Lam.?, un P. nov. sp., la Plicatula Neptuni, d’Orb., des Bélemnites, etc. Les altitudes du lias, comme on pouvait le prévoir d’après l'explication que nous (1) Elle diffère du type de l'espèce du Yorkshire par la régularité symétrique de ses ornements. (2) Le seul échantillon que nous connaissions de cette localité nous a été communiqué par M. Noguès. (3) Voyez ci-dessus ce que nous avons dit de cette variété qui se trouve aussi à Portel. (4) Études stratigraphiques sur les terrains des environs de Tuchan, in-8, p. 24. Carcassonne, 1857. SOC. GÉOL. — 2° SÉRIE, T. VI. — Mém. n° 2. 54 426 TERRAIN DE TRANSITION. (N. 2, p. 218.) avons donnée de sa disposition relativement aux roches crétacées (p. 417-209), sont. en général assez faibles. La plus considérable paraît être au col de la Nouvelle, qui est à 404 mètres. Au sud-sud-ouest de Fontjoncouze la cote 345 serait aussi sur ses couches. Les collines de Montredon ne dépassent pas 187 et 195 mètres. Peut- être la cote 290, à l’ouest de Lambert, dans l'axe nord de la chaîne de Fonfroide, est-elle aussi placée sur le lias ? TERRAIN DE TRANSITION. Formation houillère. Un grès rouge qui, des environs de Tuchan, s'étend au nord et paraît recouvrir le bassin houiller de Ségur à Quintillan, nous est signalé par M. Noguès comme appartenant à la formation houillère et non au trias, et encore moins à la craie, ainsi qu'on l’avait cru d’abord. Ce petit bassin et celui de Durban, dans lequel ce grès s'étend aussi, ont été décrits par A. Paillette (1) ; les détails qu’il avait publiés ont été reproduits avec de nouvelles observations par Dufrénoy (2). Nous n'avons rien à ajouter ici sur ce sujet, d'autant plus que M. Noguës, qui a déjà donné deux notices sur ces dépôts (3), se propose de les étudier de nouveau. Formation dévonienne. Nous rapportons à ce troisième système paléozoïque le massif de Monthoumet qui s'étend de l'E. à l’'O., depuis les environs d’Embrès et de Durban jusqu'à Alet et aux Bains-de-Rennes, et qui à été marqué sur la carte géologique de la France sous la désignation générale de terrain de transition. M. Rolland du Roquan (4) a été plus explicite et l’a rapporté au système silurien ainsi que M. Noguès (5), mais nous ne savons sur quels motifs cette détermination est fondée. Sa longueur est de 12 lieues, et sa largeur, assez constante, de 2 à 3. On n’y observe pas d’axe régu- lier; les couches, généralement dirigées dans le sens de sa longueur, sont très tourmentées, et ses plus grandesaltitudes sont, sur sa limite méridionale, 564 mètres au nord-ouest de Montferrand, 992 au nord de la Bernousse, Ces deux points touchent presque à la craie. Dans la partie nord-ouest, au-dessus de Montjoy, le système atteint encore 721 mètres, puis 661 à l’est de Vilardebelle, et 723 plus à l'est, entre Pechmigné et Alloues. Les roches qui le composent sont des schistes noirâtres ou grisâtres, des calcaires schistoïdes, des bancs calcaires subordonnés, compactes, gris-bleuâtre , et surtout (1) Notice sur les bassins houillers de la partie orientale des Pyrénées (Ann. des mines, 3° sér., XVI, p. 663, 1839). (2) Lxplication de la carte géologique de La France, t. X, p. 591, 4844. (3) Bull. Soc. géol. de France, 2 sér., t. XIV, p. 785, 1857. — Notices sur les roches jpaléozoi- ques de Ségur et de Durban (Actes de la Soc. linn. de Bordeaux, vol. XXI, 6° livr., 1857). (4) Annuaire de l'Aude pour 1844, p. 26. (5) Notice géologique sur Le département de l'Aude, p. 17, 1855. (9. 2, p. 219) :ROCHES GRANITIQUES. 197 des calcaires amygdalins ou réticulés formés de nodules brun-rougeâtre, déprimés ou allongés, entourés de schiste argileux plus ou moins solide. Ces dernières roches, en bancs puissants subordonnés aux schistes, rappellent parfaitement la structure et la texture des marbres amygdalins de la vallée de Campan, comme celles des griottes de Caunes au pied de la montagne Noire sur le bord opposé du bassin de l’Aude ; mais nous n’avons pas observé de traces de Clyménies dans les nodules calcaires avellanaires. Néanmoins, c’est sur l’analogie de ces caractères et la liaison des diverses roches que nous sommes porté à regarder le tout comme une dépendance du troisième système paléozoïque. Les fossiles que nous avons ren- contrés sont des moules déformés, assez grands, de coquilles de céphalopodes indé- terminables, recueillis dans les calcaires gris-bleuâtre, schistoïdes, exploités sur le bord de la rivière, le long de la route de Villeneuve à Tuchan, un peu avant la ligne de partage des bassins de la Berre et du Verdouble. Entre Durban et Tuchan, la route coupe tout le système perpendiculairement à la direction des couches, et l’on peut, dans son trajet, avoir une idée de sa composition. On y remarque surtout des schistes luisants satinés, gris, jaunâtres, plus ou moins micacés, ou bien ternes, bleuâtres, verdàtres, violacés, alternants, des grès gris ou jaunâtres, des calcaires amygdalins, noirs, bleuâtres, en lits minces très réguliers, alternant avec des schistes, le tout sans fossiles. Sur le territoire de Missègre, à trois lieues au nord-est des Bains- de-Rennes, des carrières assez étendues ont fourni plusieurs variétés de marbre (gris, verts, cervelat, brèche violette et Sarrancolin). On à vu que le soulèvement du mont-Alaric avait fait affleurer les roches paléo- zoïques à la partie orientale de cette montagne. Tallavignes en a signalé un second affleurement à Pellat, un peu au sud de ce point. En décrivant le cirque de Feuilla, nous avons montré les schistes satinés et les grès paléozoïques supportant les assises les plus basses du lias et s'appuyant sur l’ilot de roche dioritique au fond de la vallée. j ROCHES GRANITIQUES. Les roches granitiques qui bordent la partie méridionale de notre carte suppor- tent çà et là des lambeaux de calcaires crétacés, plus ou moins modifiés par leur contact. Leurs caractères, leurs relations et leurs influences ont été observés et décrits par Dufrénoy (1), A. Paillette, Rozet (2) et M. Durocher (3). Ce dernier à tracé les limites de ces effets et en a donné des coupes très détaillées. Nos recher- ches au sud de Saint-Paul et de Caudiès n’ont rien ajouté à ce qu’avaient vu nos savants prédécesseurs, et toute cette partie de notre carte, au sud de la chaîne de Lesquerde et d’Ayguebonne, a été coloriée d’après la carte géologique de la France. (41) Mém. pour servir à une description géologique de la France, t. AI, p. 428, 1854. (2) Comptes rendus de l'Académie des sciences, vol. XXXI, p. 884, 1850. (3) Revista minera, t. IV, p. 184, 1853. 428 ROCHES IGNÉES. (N. 2, p, 220.) ROCHES IGNÉES. Les roches ignées, désignées collectivement par Palassou, sous le nom d’ophites, nom qui à été adopté sans plus d’examen par les géologues qui en ont parlé depuis, d'abord ne sont point des ophites proprement dites ou des porphyres verts antiques, dans le sens que MM. Cordier et Alex. Brongniart ont attaché à cette expression ; ensuite elles diffèrent trop souvent les unes des autres pour qu’on puisse les désigner toutes à la fois sous un nom collectif commun et spécifique. De plus, leurs gisements variés et leur distribution tendent à prouver, comme leur composition, qu’elles ne sont pas toutes contemporaines; enfin rien ne démontre que, comme on l’a dit, leur apparition date seulement de la dernière période tertiaire. Les trente et quelques gisements de roches ignées connus dans la région que nous avons étudiée sont compris dans un triangle dont les sommets seraient Montredon au nord, Notre-Dame de Faste à l’ouest et Fitou à l’est. Aucune de ces roches pyrogènes ne s’est fait jour à travers le terrain tertiaire ; nulle part nous n’en avons vu en contact avec ses dépôts. C’est sur le flanc des montagnes ou au fond des vallées qu’on les observe le plus ordinairement. Les gisements à l’est d'Ornai- sons, ceux de Treilhes, de Lambert, de la Quille, de Frayssinelle, de la Plâtrière et de Sainte-Eugénie, sur le versant oriental de la chaîne de Fontfroide, sont dans les couches crétacées où dans celles du lias. Ceux de Fontjoncouze, de Saint-Christol, de Gléon, de Villesèque, de Durban, de Castelmaure, et de Saint-Jean-de-Barrou, dans le lias même; ceux de Roquefort, de Fitou, dans les couches crétacées infé- rieures ; celui de Feuilla, dans le terrain de transition, où du moins la roche a soulevé celui-ci en même temps que les couches secondaires ; enfin ceux de Ségur sont dans le terrain houiller. Les gisements du versant oriental de la chaine de Fontfroide qu’a décrits M. Tournal (1) sont accompagnés de gypses anormaux, c’est-à-dire de gypses et de marnes gypseuses vertes, grises, rouges, etc., le tout non stratifié et n’affectant aucun ordre apparent relativement aux couches sédimentaires environnantes dans lesquelles les roches sont enclavées. I en est de même des gisements de Villesèque, de Durban et de Fitou. Dans les autres, le gypse ne se montre pas comme le résultat d'un phénomène concomitant. Cependant on ne peut guère douter que, là où il existe, il ne soit le produit d’une cause en rapport avec la présence des roches ignées. Mais nous ne pensons pas qu’il en soit de même des grandes assises de dolo- mies ou de calcaires magnésiens régulièrement stratifiées, crétacées ou liasiques, les unes grises ou noires, cristallines, toujours fétides, subordonnées aux calcaires (1) Observations sur les roches volcaniques des Corbières (Mém. Soc. géol. de France, 17° sér., _t I, p. 37, 1833). Voyez aussi : Noguès, Notice géologique sur le département de l'Aude, p. 15 (Annuaire du département de l'Aude, 1855). — D’Archiac, Hist. des progrès de la géologie, t. VI. p. 530, 1856. (N. 2, p. 221.) ROCHES IGNÉES. 129 compactes à Caprotines, ou bien constituant parfois tout l'étage sur une épaisseur de 600 à 700 mètres (pie de Bugarach), les autres grises ou jaunâtres, terreuses ou compactes et plus ou moins celluleuses. Ce sont des roches sédimentaires dont la texture et la structure ont pu être modifiées, comme les autres couches du même âge, mais dont la composition serait restée la même. Les caractères minéralogiques de ces couches ignées sont très variés. Ainsi toute la partie supérieure de la vallée de Treilhes, au sud-ouest de Narbonne, depuis la métairie jusqu’au pied du col de la Grange-Neuve, est occupée par des roches ignées ou métamorphiques. Ce sont des amygdaloïdes, brun-rouge, très ferrugineuses, renfermant des nodules verts d'aspect serpentineux, d’autres violacées dont les ca- vités sont tapissées de matière verte et d’un enduit ferrugineux jaune, des roches dioritiques grenues, gris-verdâtre ou brunâtre, très fragiles, d’autres à grain fin, à cassure terreuse avec mica brun, des nodules verts, etc. Plus au sud, à la Plâtrière, sur le chemin de la Quille où le gypse accompagne les produits ignés, on trouve uve roche dioritique vert clair à grain fin, une autre gris-verdâtre, une amygdaloïde de même teinte, à nombreux globules compactes, d’un vert foncé, avec des grains de quartzhyalin, une amygdaloïde ferrugineuse brun-rougeâtre. De nombreux cris- taux de quartz bipyramidaux rougeâtres sont disséminés dans les argiles, et le tout a surgi au milieu des strates secondaires crétacés. A l’ouest de Fontjoncouze, les calcaires compactes sont traversés par un filon de roche vert-pistache uniforme, grenue, à cassure terreuse, composée d’une substance vert-jaunâtre, à cassure esquilleuse, à éclat gras et d’une autre vert-olive plus foncé, à cassure céroïde. Un gisement semblable se voit au fond d’un vallon au sud-est du village. Dans les mamelons volcaniques de Villesèque, qui s'élèvent comme des cônes parasites au milieu d’un cratère, ce sont des amygdaloïdes brunâtres ou des roches sédimentaires profondément altérées, sortes de rauchyvakes à cassure terreuse, en- veloppant une multitude de globules sphériques de carbonate de chaux, blanc ou jaune, ferrifère, recouvert d’un enduit d’un bleu turquoise (4). D’autres à pâte d’un rouge-brun, ou gris-violacé, légèrement effervescentes, des roches dioritiques ver- dâtres, à cassure terreuse, des masses scorlacées brun-rouge, ou des calcaires marneux profondément altérés, etc., s’observent encore autour de ces centres d’éruption. Au fond du cirque de Feuilla, c’est une diorite granitoïde vert-foncé, à grain fin, à cassure terreuse, dont la substance principale, qui paraît être l’amphibole, s’altère facilement ; le feldspath serait lui-même coloré par ce minéral, ce qui donne à la roche sa teinte uniforme. La roche granitoïde de Fitou, gris-blanchâtre, que nous avons vue (antè, p. 394-186) contenir beaucoup d’oligoclase, de l’orthose, du quartz blanc-jaunâtre, avec du mica noir et peut-être un peu d’amphibole, est complétement différente des précédentes. (4) Voyez D’Archiac, Hist. des progrès de la géologie, t. VI, p. 531, 1856. 430 SOURCES MINÉRALES ET THERMALES. (NS pre) Enfin, au milieu et sur les bords du bassin houiller de Ségur, c’est, suivant À. Paillette (1), un porpyhre gris-clair ou blane-sale, à base de feldspath compacte, avec de petits cristaux de quartz et d’amphibole, se désagrégeant facilement et pro- duisant une argilophyre. Au château de Ségur, la roche est compacte, blanche ou gris-rougeâtre. Par leur action sur les couches de sédiment qui accompagnent la houille, les porphyres ont aussi donné lieu à des amygdaloïdes. Quelles raisons aurait-on de penser que des roches aussi différentes minéralogi- quement, dont les circonstances de gisement sont si variées, qui ont produit sur les couches traversées des eflets si compliqués dans certains cas, nuls dans d’autres, et cela à de très petites distances, qui ne se coordonnent à aucune ligne de fracture bien déterminée, qui ont surgi en quelque sorte d’une manière sporadique, que de telles roches, disons-nous, soient réellement contemporaines et appartiennent à la dernière période tertiaire plutôt qu’à toute autre? Sans doute nous avons la preuve que des roches ignées ont dérangé des dépôts assez récents sur d’autres points du versant nord des Pyrénées, comme nous l'avons dit nous-même (2); mais leur synchronisme avec celles-ci et avec beaucoup d’autres des départements voisins ne nous semble pas mieux justifié quele nom d’ophite sous lequel on a prétendu les dési- gner toutes. r SOURCES THERMALES ET MINÉRALES. Les sources thermalés et ferrugineuses de la vallée de l’Aude, depuis celles d’Alet et de Campagne jusqu’à Ginoles dans le bassin de Quillan, comme celles des Bains- de-Rennes dans la petite vallée de la Sals, sont en rapport avec des dislocations ou dés failles dans les roches secondaires ou tertiaires inférieures, et semblent en être la conséquence (voyez antè, p. 348-110, 323-115, 415-207, 364-156). Les sources du pont de la Fons, près de Saint-Paul-de-Fenouillet, sont dans le même cas (antè, p. 108-200). On a vu quelle était la position des sources salées de Sougraigne (antè, p. 405-197), de celles de Salses (p. 397-189), de Tautavel (p. 400-1992) et d'Espira provenant de gisements analogues, à la jonction des calcaires compactes à Caprotines et des marnes néocomiennes sous-jacentes. LIGNES DE DISLOCATIONS ET DE SOULÈVEMENTS: On pourrait sans doute imaginer, dans la région que nous venons de décrire, un grand nombre de soulèvements distincts, caractérisés par des directions différentes, si l’on prenait pour tels toutes les petites inflexions locales qui affectent les diverses parties d’une chaîne, toutes les failles accidentelles qu'on observe à chaque pas. Pour nous, nous voyons deux directions principales nettement accusées, suivant (1) Loc. cit. antè, p. 26-218. — Voyez aussi : Noguès, Notice sur le département de l'Aude, p. 15-16 (Annuaire du département de l'Aude, 1855). —Sur le terrain houiller def Corbières (Bull. Soc. géol. de France, 2° sér., t. XIV, p. 785, 1857). — Actes de la Soc, linn. de Bor- deaux, vol. XXI, 6° livr., 1857. (2) Mém. Soc. géol. de France, 1°° série, t. II, p. 167, 1837. (N. 2, p. 225.) LIGNES DE DISLOCATIONS ET DE SOULÈVEMENTS. 431 lesquelles les phénomènes se sont produits à des époques différentes ou à diverses reprises et sur des lignes parallèles. Ces directions sont N.-E., S.-0. dans la partie orientale de la carte, et E., O. dans toute la partie méridionale et centrale. On peut distinguer ensuite deux ou trois directions secondaires. Les massifs de la Clape et de Fontfroide formaient déjà des reliefs plus ou moins prononcés, alignés suivant la première de ces directions, pendant que se déposaient les sédiments lacustres du bassin de Narbonne et de Sigean dont ils marquaient les bords; mais plus tard ils ont été surélevés suivant le même axe, de manière à redresser aussi les couches d’eau douce sur leurs pentes. Ce fut lors de ce dernier mouvement que les assises, jusque-là continues de la Clape, furent brisées et prirent la disposition que nous leur voyons aujourd’hui. Le plongement général se prononc a au N.-0., tandis qu’à partir des îles de Gruissan jusqu'à extrémité du rameau de Tautavel, le mouvement de charnière dut s’exécuter en sens inverse. Les phéno- mènes du même ordre qui se sont produits plus tard, telle que lémersion des dépôts tertiaires moyens et ceux qui ont concouru à la distribution de dépôts plus récents, semblent s'être effectués suivant la même direction, quoique le grand axe moyen de la dépression comprise entre les deux chaînes, et qui embrasse la plaine de Nar- bonne et l'étang de Bages, soit plutôt dirigé N. 20° E. à S. 200 0. Au sud-ouest , davs lalignement de la Clape, nous trouvons le poudingue tertiaire du bassin de Tuchan relevé sur les pentes des calcaires compactes à Caprotines, absolument de la même manière que les calcaires marneux lacustres du versant nord-ouest de la Clape. La direction du massif paléozoïque de Monthoumet est sensiblement E., 0., et ses limites nord et sud sont parallèles à son axe de figure. Un plan passant par ses points les plus élevés inclinerait très faiblement au N. Le soulèvement de cette masse est sans doute le plus ancien de la région des Corbières, et les dépôts houillers ont pu se former après, dans quelques-unes de ses dépressions vers l’est. L'accident le plus important que nous observons ensuite dans l’ordre des temps est certainement celui qui eut lieu après le dépôt et la consolidation des calcaires compactes à Caprotines. C’est lui qui à imprimé à toute la région inférieure des Pyrénées, depuis Estagel jusqu’à Belesta et au delà, ses formes orographiques les plus remarquables et les mieux accusées. C’est alors que se sont produites ces rides ou crêtes dentelées, parallèles, courant généralement de PE. quelques degrés S., à l'O. quelques degrés N. Dans l'étendue de notre carte, ces montagnes s'élèvent d'autant plus qu'on s’avancede l'E. vers l'O. C’est ce que M. Durocher (1) a nommé le système de soulèvement des Pyrénées-Orientales. Après ce phénomène se déposèrent, au sud et au nord-est du massif paléozoïque, les roches crétacées supérieures, dans deux petits bassins dont nous ne pouvons au- jourd’hui retrouver ni même soupconner les points de communication. Leurs diffé rences pétrographiques et paléontologiques nous prouvent en effet que, s’ils sont en (1} Comptes rendus de l’Académie des sciences, t. XXXIH, p. 164, 1851. 432 LIGNES DE DISLOCATIONS ET DE SOULÉVEMENTS. (2, p. °.) partie contemporains, leurs sédiments se sont déposés dans des circonstances bien différentes. L'épaisseur des roches arénacées de l’un et la variété des faunes succes- sives de l’autre prouvent néanmoins qu’ils représentent un laps de temps énorme. Les couches crétacées du sud ont été redressées parallèlement à l'axe du massif paléozoïque contre lequel elles s'appuient directement, et sans doute par un mouve- ment de surélévation auquel ce dernier a été soumis. L’inclinaison des assises secon- daires au S. ou au S.-0. est d'autant plus faible et leur niveau absolu d'autant moindre qu’elles s’'approchent davantage des rides crétacées inférieures contre lesquelles elles semblent venir buter; suivant loute probabilité, ce soulèvement, parallèle aux deux précédents, est de beaucoup postérieur à la fin de la période crétacée. En effet, les grès tertiaires d’Alet, qui surmontent d’une manière concordante les marnes bleues de la craie, en ont partagé toutes les dislocations, au sud du massif de transition, et nous avons vu qu’au nord de celui-ci le groupe nummulitique qui reposait directement dessus avait été sensiblement redressé dans la même direction. Nous avons dit aussi que la mollasse de Limoux avait dû participer au même mou- vement, par suite du plongement général de tout le système au N., avec une incli- naison d'autant moindre qu'on s’éloignait davantage des schistes paléozoïques, dis- position tout à fait semblable à celle des couches crétacées supérieures du sud ; d’où il résulte que le soulèvement de ces dernières ne date que de la fin de la période tertiaire inférieure ou du dépôt des grès de Carcassonne. Ainsi, à trois époques fort éloignées les unes des autres, des soulèvements se sont produits dans cette région suivant la même direction. Quoique l'axe du mont-Alarie soit dirigé O. 15° à 16° N., les relations de la mol- lasse d’eau douce, sur le pourtour de cette montagne, nous portent à regarder la for- mation de sa voûte comme contemporaine de ce dernier soulèvement, et il en serait de même de la longue crète septentrionale de la Malpère. Entre la vallée du Rabe et le versant occidental de la chaîne de Fontfroide, on remarque des rides alignées N. 25° 0. à S. 25° E., et dont les couches plongent à l’0.-S.-0., depuis la montagne ou l’Ermitage de Saint-Victor jusqu’à Thézan. Elles se continuent au delà par des calcaires bleus, des argiles et des dolomies qui affleurent au-dessous des psammites de Boutenac. Dans cette dernière partie le plongement est inverse ou à l’£.-N.-E. : c’est celui que montrent aussi les couches arénacées de la colline de Saint-Martin et celles qui longent la chaîne de Fontfroide, tandis qu’au nord-ouest de la route, dans les monticules de la Grange, de Saint-Julien, de Quilhanet et de Bizanet, une inclinaison à l'O., un peu N., mdique une dislocation distincte de la précédente, et postérieure au groupe d’Alet comme au groupe num- mulitique. En effet, le relèvement des strates, qui depuis l’Ermitage de Saint- Victor jusqu’à Thézan appartiennent au premier, s’est fait sentir sur les bords du Rabe qui dépendent du second. La vallée de dislocation que parcourt cette rivière est exactement parallèle à la ligne tirée de Saint-Victor à la Bergerie, à l’ouest de (2, p.%%) LIGNES DE DISLOCATIONS Er LE SOULEVEMENTS. 133 Boutenac où l’affleurement du lias dénote aussi un phénomène analogue. L'âge plus précis de ce mouvement ne peut encore être déterminé avec les données que nous possédons. Il est possible que celui qui a soulevé le mont-Tauch et tracé la ligne de partage des eaux qui s’étend ensuite au N.-0., de même que celui auquel les pou- dingues des plateaux de la Camp et de la Malpère orientale doivent leurs altitudes actuelles, les fentes par lesquelles l’Agly traverse les chaînes de Saint-Antoine et de Lesquerde, etc., n’en soient encore que des corollaires. Quant aux mouvements qui ont accidenté les montagnes des environs de la Grasse, ils se seraient produits dans une direction presque perpendiculaire à la précédente, ou E.-N.-E., O0.-S.-0. : c’est au moins celle des principaux massifs du groupe d’Alet et des vallées qui les bordent. Nous retrouverons cette direction nettement accusée dans deux accidents remarquables au delà du massif de Monthoumet : les crètes redressées des couches d’Alet, entre Campagne et Serres, et la voûte de la Ferrière à Sougraigne. L’axe du bassin de Feuilla et la bande du lias d’Embrès à Donneuve affectent encore cette direction (1). Enfin la colline de Roque-Longue, alignée N.-N.-E., S.-S.-0., dans le prolongemeut du thalweg de la vallée de l’Ausson, ne s'accorde avec aucune des directions précédentes. La chronologie de ces divers phénomènes ne nous est donc pas révélée d’une ma- nière suffisante par l'examen des couches qu’ils ont accidentées, et nous ne trouvons que les deux soulèvements parallèles de la partie orientale de notre carte, et les trois également parallèles du sud et du centre dont les rapports stratigraphiques puissent nous éclairer. En résumé, nous trouvons huit séries de dislocations ou de soulèvements qui viennent se ranger dans cinq directions. Nous devons mentionner encore les dislocations plus locales produites par l’ap- parition des roches ignées, et sur l’âge desquelles nous n'avons aucune donnée pré- cise, puisque ces roches ont surgi à travers les dépôts de transition, au moins à deux reprises, avant et après les dépôts houillers, et successivement, à ce qu’il sem-— ble, à travers les couches jurassiques et crétacées, sans que nous apercevions bien positivement leur contact avec les roches tertiaires. Les bassins hydrographiques compris dans l'étendue de notre carte ne se coordon- nent point en général aux accidents dont nous venons de parler, et les rivières prin- cipales coulent dans des fentes plus ou moins profondes, perpendiculaires à la direction des couches. Telles sont l’Aude, d’Axat à Carcassonne, la Sals, depuis sa source au pied du pic de Bugarach jusqu’à sa jonction avec la Rialsesse , l’Agly, depuis son origine jusqu’à Estagel, la Berre, de Quintillan à Portel, le Verdouble, l'Orbieu, dans la plus grande partie de leur cours, etc. Les cours d’eau qui se jettent dans l'Aude sur sa rive gauche sont tous dirigés du N.-0. au S.-E., plus ou moins oblique- ment par rapport aux couches tertiaires inférieures peu accidentées qn'ils traversent. (1) Cette direction avait été signalée par Reboul (Bull. de la Soc. géol. de France, 1"° sér.., t. II, p. 78, 1831). C’est aussi celle de la chaîne principale des Alpes. SOC. GÉOL. — 2° SÉRIE, T. VI. — Mém. n° 2. 55 134 REMARQUES GÉNÉRALES. (N.2, p. 226.) REMARQUES GÉNÉRALES. Nous terminerons ces études en faisant observer qu'un caractère commun à la plupart des dépôts dont nous avons parlé est la présence fréquente de poudingues solides ou incohérents. Ainsi ces roches constituent presque à elles seules le terrain quaternaire de la vallée de l'Aude et de la plaine de Narbonne. On en remarque à la partie supérieure de la mollasse d’eau douce, à divers niveaux dans l'épaisseur de ce groupe, ainsi qu'à sa base, le long du versant nord du mont-Alarie, dans les collines de Moux, de Lézignan et de Montrabech, au-dessus et au-dessous des calcaires mar- neux et lacustres du bassin de Narbonne et de Sigean. Elles prennent surtout une puissance énorme au nord du massif de Monthoumet, autour de Saint-Martin, de Saint-Pierre, de Durfort, sur les plateaux élevés de la Camp et de la Malpère, et elles occupent tout le bassin de Tuchan. Les poudingues sont un des éléments importants du groupe d’Alet; ils apparaïs- sent dans la formation crétacée au-dessus du second niveau de rudistes, et surtout au milieu des psammites et des grès de la région supérieure du nord-est, du Jardin de Saint-Julien à Quilhanet, etc. L’étage des calcaires compactes à Caprotines ren- ferme souvent des brèches très puissantes. Les teintes d’un rouge plus ou moins vif sont encore un caractère très général dans une grande partie des dépôts ter- tiaires et surtout du groupe inférieur. On les observe également dans l’étage néoco— mien, au-dessous du plan d'Opouls et de Fitou, et sur d’autres points. Si maintenant on compare ces sédiments secondaires et tertiaires avec ceux du même âge dans le sud-ouest, dans le centre et le nord de la France, en Belgique, en Angleterre, etc., on ne verra nulle part un développement aussi constant de roches clastiques. Cette circonstance que M. de Verneuil a aussi constatée sur pres- que tout le versant sud des Pyrénées, au-dessus des couches nummulitiques pro- prement dites (1), est parfaitement d’accord avec ce que nous apprennent les caractères stratigraphiques et la distribution capricieuse des roches sédimentaires des Corbières, savoir la fréquence, à toutes les époques, de dislocations et de per- turbations qui ont affecté le relief du pays et interrompu la succession régulière des phénomènes sédimentaires, telle qu’elle avait lieu dans les régions que nous venons de rappeler. (1) Coup d'œil sur la constitution géologique de l'Espagne, par MM. de Verneuil et Collomb (Bull. Soc. géol. de France, 2° sér., t. X, p. 80-82, 1852.) (N. 2, p. 297.) COUPE DE LA COLLINE DE BEZIERS. H3: C2 di] APPENDICE. Nous réunissons ici quelques observations sur certaines localités des départements du Var, des Bouches-du-Rhône, de l'Hérault et des Pyrénées-Orientales, dont les dépôts tertiaires et crétacés ont de l’analogie avec quelques-uns de ceux que nous venons de décrire, et dont l'examen pourra par conséquent éclaircir les rapports généraux de ces derniers. A. COUPE DE LA COLLINE DE BÉZIERS (HÉRAULT). La coupe générale de la colline de Béziers, à partir de la surface du plateau, occupée par des décombres ou un: sol de remblai de 1 à 2 mètres d'épaisseur, nous a présenté : 4° Poudingue quaternaire incohérent, composé de cailloux roulés de quartz, de granite, de gneiss et de grès, de diverses grosseurs, depuis celle du poing jusqu’à celle de la tête, enveloppés dans un sable mélangé d'argile rou- geâtre.et brunâtre. Les fragments les plus volumineux se montrent sou- vent vers la partie supérieure. . . NT EE de + 2 mètres 2° Argile sableuse, brun-jaunâtre, ayant di ds lehm dela Ars da Bhin. 1,50 3° Sable marneux jaunâtre, micacé, avec Ostrea undata? Lam. ; irrégulière- ment consolidé et passant à un grès friable avec Pecten. Les Huîtres qui forment un lit mince à la partie supérieure de l’assise sont ensuite dissé- minées çà et là dans le reste de sa hauteur. Vers le bas les marnes sableuses deviennent plus argileuses et bleuâtres . . . . , . . 10 HERSADIeRMANEUX A IAUNATE EN CLR NON CU 8 Cette partie supérieure de la colline se voit particulièrement sur sa pente sud-est, par suite de l’inclinaison générale de toutes les couches de ce côté. Si l’on descend au contraire l’ancienne route à l’ouest, au-dessous du quartier, on trouve, à partir des marnes sableuses bleuâtres : 5° Lit d’Ostrea crassissima Lam. et une couche sableuse remplie de galets ; sorte de poudingue incohérent avec des Huîtres plus petites que les précé- dentes. Vers le bas des lits d'Huîtreset degalets alternent owse mêlent dans la masse arénacée. Cette assise s’est déposée sur la surface ravinée d’une : 436 COUPE DE LA COLLINE DU BEAUSSET. (N. 3, p. 28. 6° Roche arénacée, calcarifère, grisâtre, à gros grain et d’un grès calcarifère jaunâtre en lits minces affectant un faux délit très prononcé. La pre- mière passe à une mollasse jaune-verdâtre, à grain très fin, alternant avec de petits bancs de grès plus ou moins tuberculeux. Sa discordance ou sa discontinuité avec le poudingue à ostracées paraît se maintenir tout le long'de “latcolline: er M EE ENT Le: Ce RE 7° Marne argileuse bleue. . . . . . . . . . .* . . . n . » Si l’on continue la coupe à l’ouest de ce point, on trouve en face du pont et sous l’église : 8° Des bancs calcaires, marneux, brunâtres et jaunâtres, une marne blanche, gris-verdâtre, panachée et grumeleuse, un .poudingue brunâtre très nettement stratifié, le tout passant vers le bas, à des : 9° Calcaires blancs, noduleux, en bancs mal suivis, qui alternent avec des marnes sableuses et blanchâtres ou grisâtres renfermant encore quelque petits lits irréguliers ou amas de cailloux roulés. . . . . » 10° Sable marneux jaunâtre, micacé, renfermant aussi quelques petits cailloux. Ces trois dernières assises ont l’aspect de dépôts lacustres. . . » L'inclinaison générale de tout le système, de 8° à 40° à l’E., fait que, dans l’es- carpement qui borde l'Orbe à l’ouest, les tranches des couches se présentent comme si ces dernières étaient horizontales. Cette série, en se prolongeant ensuite au S.-0. jusqu’à Nissan et au delà, comprend des couches puissantes, solides, bien suivies, qui ont donné lieu à des exploitations considérables depuis une époque fort ancienne, particulièrement dans les carrières de Bregines (Brézine). Sur les côtés de la route avant d'atteindre Nissan, on voit aussi des dépôts d’origine lacustre sortir çà et là de dessous les dépôts marins (1), comme dans le bassin inférieur de l'Aude. Dans les petites falaises qui bordent la côte au nord de Mèze, sous un dépôt jau- uâtre terreux, peu solide, sans fossiles, nous avons aussi observé une roche jau- nâtre, calcaréo-sableuse, assez solide, remplie de petits cailloux de calcaire gris, jaune ou rouge, faisant passer la roche à un poudingue à petits éléments, avec beau- coup de débris de coquilles (Ostrea crassissima, Pecten, Cardium, etc.). Ces fa- laises, de 8 à 10 mètres seulement de hauteur, s'étendent l’espace d’un kilomètre environ. B. COUPE DE LA COLLINE DU BEAUSSET (VAR). PI. IV, fig. 23. La colline située à l’ouest du Beausset, sur la route de Marseille à Toulon, et qui se termine au village du Castelet, présente, depuis la butte dite le quartier d’Aulop (1) Voyez aussi Marcel de Serres, Notice géol. sur lé départ. de l’Aude (Actes de la Soc. linn. de Bordeaux, t. X, 1838). (ep. 29.) = COUPE DE LA COLLINE DU BEAUSSET. 137 jusqu’à la descente de l’ancienne route de Cujes, les détails suivants indiqués dans Ja coupe pl. IV, fig. 23 : 4° Calcaires compactes, schistoïdes, en dalles ou en plaquettes, à cassure inégale, gris de fumée ; calcaires marneux, gris-blanchôtre, tendres, ou luma- chelle et calcaires bruns compactes, ou avec des grains fins de calcaire spa- thique, enveloppés dans la pâte amorphe. Dans ces trois couches, mais par- ticulièrement dans la seconde, de 0",35 d'épaisseur, se trouvent une multitude d’Astartes, de Tellines, de Corbules, de Turritelles, de Cérites, de Chemmitzia, dEulima, de Natices très allongées, etc., brisées, dé- formées, presque toujours indéterminables. . . . . . L mètres. 2° Marnes jaunes, puis grès jaunâtre, brunâtre et Re ou | bleuâtre : à l'intérieur, et marne jaunâtre à la maison de la Buse. Calcaire gris-rou- geâtre avec un peu d'argile et de peroxyde de fer, à cassure grenue, en partie spathique, rempli de débris organiques triturés (rhizopodes, tels que Bulimina brevis? Cyclolina, puis des ostracées, Pecten, crinoïdes, etc.) 15 3° Calcaire marneux jaunâtre et calcaire marneux fragile remplis de rudistes bien conservés et d’autres fossiles; calcaire gris-blanchâtre, compacte ou subcristallin. Cyclolites elliptica, Lam., C. peut-être undulata, Blainv.? 2 Astrées, spongiaire, Caprina Coquandiana, d'Orb., Caprotina sub- æqualis,id., C. Archiaciana?id., Hippurites organisans, Desm. , H. cornu- vaccinum, Bronn, Æ. sulcatus, Defr., À. canaliculatus, Roll., Sphærulites Moulinsi, Bayle? (Les individus incomplets se rapprochent davantage de la S. ponsiana, d’Arch. (Radiolites Desmoulinsiana, d'Orb., pl. 551, fig. 3), que de la À. Desmoulinsiana, Math., pl. 8, fig. 4, 5.), S. an- geiodes, Bayle, id., Acteonella crassa an-Toucasiana, d'Orb.? . . . 10 h° Calcaires compactes, gris de fumée, en bancs épais remplis de rudistes et d’autres fossiles semblables aux précédents, mais engagés dans la roche . 20 DAMAER ES SNS ISSN MSA MU Et Siret hits adultes Marnes jaunâtres. . . EN £ | A0 Marnes bleues, jusqu’à la re Fe la TOHÉE ES Lee 6° Grès ferrugineux brunâtre, calcaires marneux, marnes bleu-foncé, for- mant le pied de la montagne et la plaine que traverse la route après le hameau. Depuis les calcaires à rudistes jusqu’à un kilomètre au nord-ouest de la montagne, cette dernière série de plus de 450 mètres d'épaisseur, quoique souvent à découvert, ne nous a pas offert de fossiles. Ces couches inclinent à l’O., et si on les suppose prolongées jusqu’au Castelet, on voit qu'avant ce village, bâti sur l’assise ne 4, il doit y avoir une faille qui sépare ce massif des calcaires de la série régulière précédente. L38 COUPE DES ENVIRONS DES MARTIGUES. (N. 2, p. 250.) C COUPE DES ENVIRONS DES MARTIGUES (BOUCHES-DU-RHÔNE). PI. LV, fig. 24. La partie méridionale de la petite ville des Martigues, située entre les étangs de Berre et de Caronte, est adossée à des monticules de grès gris, de marnes sableuses avec des couches d’argilebleue, melinés légèrement au N. et recouverts d’un dépôt de gravier à cailloux calcaires. En arrière ou au sud de ces buttes, on atteint un rideau presque continu, composé de calcaires marneux blanchâtres, tendres, courant E.. O. et plongeant de 35° au N. Ces calcaires, qui portent une maison sur un tertre isolé (les Capucins) et constituent un second tertre au delà, s’alignent exactement sur l’escarpement qui borde l'étang de Caronte à un kilomètre à l’ouest des Mar- tigues et coupé par le chemin qui longe le rivage. Si, à partir de cette falaise, on se dirige droit au S. ou perpendiculairement à la côte, on coupe successivement les couches crétacées indiquées dans le profil fig. 24, pl. IV. 1° Calcaire marneux blanc-jaunâtre, noduleux, à structure peu régulière, à stratification peu prononcée, plongeant de 45° au N. Certains bancs sont presque exclusivement composés d'£xogyra spinosa, Rœm., Math. (Æ. Matheroni, d'Orb.). L'aspect de cette première assise rappelle sin- gulièrement celui des calcaires de Royan à l'embouchure de la Gironde. Nous y avons trouvé les fossiles suivants : Cyclôlites discoidea, Blainv., Holectypus, Pholadomya rostrata, Wath., Crassatella galloprovincialis, id. (toujours à l’état de moules fort nombreux), Venus Martiniana, id., V. indét., Cypricardia, voisine de la C. trapezoidalis, d'Orb. (Crassa- tella, id., Rœm.), Cardium Villeneuvianum, Math.? C. (moules de plusieurs espèces indéterminées), Mytilus divaricatus, d’'Orb., Lima ovata, Rœm., Z. nov. sp., Pecten quinquecostatus, Sow., ou peut-être P. Mortoni, d'Orb.? Exogyra spinosa, Rœm. Math., Ostrea turonensis, d'Orb. (Vulsella, id., Duj.), Terebratula subundata, Sow. (an Touca- siana, d’Orb.?), T. difformis, Lam.? Hippurites Requieniana, d'Orb., H. Toucasiana , id.? Radiolites acuticostata, id., À. marallaris, Ma- th., an squamosa, d'Orb.? (Sphærulites, Bayle), 2. Martiniana, d'Orb. (Sphærulites, Bayle), À. sinuata, d'Orb. (Sphurulites, Bayle), Caprotina semistriata, &'Orb., et une ou deux autres espèces, Mafica Matheroni, d’'Orb., N. voisine de NN. ervyna, analogue à celle de Sou- graigne, Phastanella supracretacea, d'Orb., P. gosauica, Zek.? Turri- tella, Rostellaria? moules de trois ou de autres coquilles turriculées indéterminables . . . SOA PE RRISINÈITES 2° Grès mollasse très tendre se Ro en Me ie s MMM NS 3° Calcaire jaune, très dur, en bancs solides, rempli de fragments de coquilles INJÉTETMINADIES- NN AE 2 L° Deux bancs de 4 mètre à 1,95, Lan par une Eu "a UE ere gris à 1,50, et courant comme les assises précédentes. . . . . . A , (R. 2, p. 251.) COUPE DES ENVIRONS DES MARTIGUES. 439 5° Calcaire compacte, blanchâtre, dur, fragile, noduleux avec Alvéolines, Cyclolines, Æippurites sulcatus, Defr., À. organisans, Desm.? (individu jeune ?), Sphærulites squamosus et angeiodes, Bayle, . eu des lion HMS. 6° Calcaire blanchâtre avec Sphérulites et Hippurites . . . . . . . 6 7° Calcaire blanchâtre ou jaunâtre, marneux, à cassure inégale, moins com- pacte que le précédent, quelquefois terreux, grisâtre ou rosâtre, toujours plus ou moins noduleux, et passant au suivant (A/veolina compressa, d'Orb., Cyclolina, Bulimina brevis, d'Orb., etc}. + . . . . . +» 8° Calcaire blanchâtre compacte et calcaire blanc, en partie cristallin, à cassure inégale et terreuse, rempli de rudistes empâtés dans la roche (Sphærulites angeiodes? S. ponsiana?), Bulimina brevis, Cyclolina, etc. ‘Ces calcaires sont exploités dans une carrière où les bancs ont été dé- Fangés sl plie in, AOL enr SS 9° Calcaire blanchâtre cuis pent ui a nr organisans, pla- cées perpendiculairement au plan de stratification et figurant un récif CPIDOLVDELS ESS ER 2 CG dd 3 10° Calcaire blanc-grisâtre, compacte, à cassure anguleuse, avec Alvéolines, Cyclolines, Milliolites, Pulimina, Rotalina, etc. metre à » 14° Calcaire compacte, subcristallin, blanc-jaunâtre, avec quelques brie CSS CDS EEE EU PRIE TEE LULU R 20 12° Calcaire analogue au précédent renfermant beaucoup de rudistes de grandes dimensions empâtés dans la roche. Toute cette série de calcaires à rudistes et à rhizopodes est parfaitement continue, comme le montre la coupe de la colline située au delà de l’usine. La direction E., 0. et le plongement au N. sont constants. 13° En continuant à s’avancer au $., on voit affleurer une bande ferrugineuse dont la surface est moins stérile que celle des collines précédentes. Elle est cultivée çà et là et alignée exactement dans le même sens. Elle est composée de calcaires compactes ou à grain très fin, jaune, cristallin, plus ou moins sableux, passant vers le bas à un grès brun ferrugineux, plus ou moins solide ou friable, stratifié comme tout ce qui précède. Les traces de fossiles et surtout d’ostracées y sont assez répandues. ..… 1 L1 AiOrmètres. Sur la limitenord de cette bande on remarque, près d’une maison et non en place, un calcaire compacte, gris taché de jaune, à cassure finement esquilleuse, rempli de petits rhizopodes qui semblent être exclusivement des Milliolites (Biloculina antiqua, d'Orb., Triloculina cretacea, 1d.). Cette assise ferrugineuse est séparée de la suivante au sud par une sorte de fossé naturel, aligné E., O., et dont le bord méridional est formé par un escarpement de : Ah° Calcaire compacte bréchoïde, sublithographique, avec des |Caprotines et d’assez nombreuses Sphérulites ou Radiolites. Ces calcaires, au moins aussi puissants que toute la série précédente, forment des rides successives jus- qu’à Ja .crête culminante de la presqu'île, bordent et constituent le fond des ravins et paraissent s’abaisser vers la côte méridionale sans modifica- tions sensibles. L40 COUPE DES ENVIRONS DES MARTIGUES. (N. 3, p. 552.) Si de ce point on redescend au N. par le grand ravin qui débouche sur la rive de l'étang de Caronte, à l’est de la verrerie (la Gacherolle), on retrouve l’assise n°12 avec ses grands rudistes, reposant toujours sur la série ferrugineuse, calcaire et sableuse. Le petit promontoire qui porte en cet endroit une tour ruinée offre à sa partie supé- rieure un travertin, et au-dessous un sable gris mélangé de gravier, qui s'étend horizontalement sur les couches marneuses, crétacées, fossilifères plongeant sous le lac. Ces dernières sont la continuation de l’assise n° 1 de la coupe générale précé- dente. On peut encore vérifier l'exactitude de celle-ci en remontant le ravin qui, au sud des Martigues, suit à peu près la direction de la route de Saint-Pierre. On traverse alors successivement les mêmes assises dans leur prolongement oriental. Ainsi les monticules arénacés qui entourent la ville sont appuyés contre les couches cré- tacées plongeant au N. Un dépôt quaternaire, formé de détritus des calcaires envi- ronnants, s'étend jusqu'à une assez grande distance de la côte, et l’on atteint bientôt les calcaires marneux, blanc-jaunâtre, en rognons, des falaises de l’ouest (assise n° 4). Leur épaisseur est ici de 12 à 15 mètres. L’assise sableuse n° 2 est à peine recon- naissable ; les calcaires blanc-jaunâtre, spathiques, paraissent manquer, et l’on arrive de suite aux calcaires gris-blanchâtre, durs, avec Alvéolines , et à ceux où abon- dent particulièrement les Hippurites et les Sphérulites. La puissance de ces derniers est à peu près la même que dans la coupe précédente, mais leur étude est ici moins facile. La zone de calcaire sableux brun-jaunâtre, de grès ferrugineux et de sables jaunes, offre les mêmes caractères qu’à l’ouest; son épaisseur est de 35 à 40 mètres. Les grès et les calcaires passent à une sorte de lumachelle par la présence d’une grande quantité de coquilles brisées et particulièrement d’ostracées (1). Les premiers bancs de calcaires à Caprotines, qui sortent de dessous les sables ferrugineux, sont encore remplis de Sphérulites et d’Hippurites. Les Caprotines sont rares, et ce n’est qu’à 200 mètres environ du contact que se développent par- ticulièrement les calcaires blancs pétris de C. ammonia et Lonsdalii. Leur épaisseur est de 7 à 8 mètres au four à chaux, où ils ont été exploités. Au delà, lorsqu'on rejoint les sinuosités de la route qui parcourt la colline et jusqu’à sa descente au sud de la crête, on marche toujours sur les mênres calcaires, et les collines nues, stériles ou pelées, que l’on découvre au loin, n’y laissent pas soupçonner la présence d’un étage néocomien marneux inférieur. Les Caprotina où Chama ammonia, Gold., s’observent d’ailleurs à plusieurs niveaux au-dessus de celui que nous avons surtout signalé. En résumé, la composition de la partie nord de la presqu'île des Martigues offre, (1) C’est dans le prolongement vers Marignane de cette zone comparée aux grès d’Uchaux (Vau- cluse), que quelques géologues ont trouvé les équivalents du gault et des argiles à Plicatules (Bull. de la Soc. géol. de France, 1"° sér., t. XI, p. 419, pl. 6, fig. 2, 4842. — Hist. des progrès de la géologie, t. IV, p. 487, 1851). \ (N: 2. p. 255.) COLLINE CRÉTACÉE DES BAINS-D'ARLES. TE 1 à partir des grès et des marnes qui entourent immédiatement la ville, les quatre divisions suivantes : 4° Calcaires marneux blanc-jaunâtre en rognons, avec une assise de grès mollasse et deux bancs de calcaire brun, séparés par une couche de marne. Calcaires blancs ou blanchâtres, plus ou moins solides, avec de nombreuses Alvéolines, d’autres rhizopodes, beaucoup de rudistes occupant plusieurs niveaux distincts et quelques Caprotines. 3° Calcaires bruns, grès et sables ferrugineux. ke Calcaires gris ou blancs avec Caprotina ammonia et Lonsdalii. Les collines qui se prolongent à l’est des Martigues, formant le versant nord de la chaîne de l’Estaque, constituent, à partir de la plaine, deux séries parallèles dont les couches redressées présentent leur tranche au S. Elles tracent ainsi deux arêtes séparées par une dépression ou sorte de grand fossé dont le fond est presque plat. La moins élevée des deux, celle du nord, appartient aux grandes assises calcaires avec Hippurites, Sphérulites et rhizopodes (âssises 5 à 10 de la coupe), la plus haute aux calcaires blancs à C. ammonia, et l’étroite vallée qui les sépare, aux calcaires sableux et aux grès ferrugineux bruns ou jaunâtres. A une lieue des Martigues, l’avance- ment de la côte fait que les calcaires à rudistes passent sous les eaux de l'étang, et que les calcaires à Caprotines règnent seuls au delà jusqu’au changement de direc- tion à l’'E.-N.-E., où les assises à Hippurites, etc., forment de nouveau une rangée de collines basses, monoclinales, qui vient passer près du Pas-d’Alencier (4). On sait que le souterrain de la Nerthe, qui traverse la chaîne de l’'Estaque, à peu de distance de ce dernier point, a recoupé la mollasse tertiaire, les calcaires blancs à Capro- tines des couches jurassiques, et, sur le versant sud, un grand développement de mollasse, de poudingues et de grès (2). COLLINE CRÉTAGÉE DES BAINS-D'ARLES (PYRÉNÉES-ORIENTALES). PI. IV, fige 23. “ Le promontoire que contournent la route et la rivière du Tech lorsqu'on arrive aux Bains-d’Arles est formé par un massif de roches crétacées, dirigé du N.-0. au S.—E., et d’une lieue au plus de longueur sur une demi-lieue de large. Imdiqué par Dufrénoy sur la carte géologique de la France, il est entouré de trois côtés par le terrain de transition, et limité au sud par des roches cristallines. Il est éloigné de huit (1) C’est par erreur que les employés du chemin de fer désignent cette station sous le nom de Pos des Lanciers. (2) Matheron, Bull. de la Soc. géol. de France, 2° sér., t. IV, p. 261, 1846. SOC. GÉOL. — 2° SÉRIE, T. VI. — Mém. n° 2. 56 42 COLLINE CRÉTACÉE DES BAINS-D'ARLES. (6. 3, p. 254) lieues en ligne droite des dépôts crétacés des environs d’Estagel, et son isolement au milieu de terrains si différents et si anciens lui donne pour nous un certain intérêt | Le ong de la grande route, au-dessus et contre l'établissement militaire des Bains, est une roche cristalline quartzifère supportant un ensemble de couches secondaires qui plongent de 45° au N.-E. Mais on voit afileurer avant ces dernières des schistes micacés, gristres, qui semblent incliner au N.-0. ou à l'O. Ce sont eux qui, en réalité, se trouvent en contact avec la série suivante que présente, de bas en haut, l’escarpement de la montagne tourné à l'O. ou vers le village. 1% 6rés rouge pet s0Me PER Ve FOI DD 2° Grès rouge argileux, micacé, ou psammite lie & a VEN CPAS 3° Calcaire rouge et gris-verdâtre, compacte, en lits minces, alternant avec des argiles de même teinie., 1 mehaliainr, asia Re ie Ces couches rouges occupent le lit rocheux de la rivière et le bord opposé. 4° Marnes et calcaires schistoïdes gris et noirâtres . .: . . . . . . 4 5° Calcaires noirs, compactes, en bancs réguliers, arqués, et dont les tranches forment les bords de la rivière. Ils alternent avec des lits schisteux, noirs, graphiteux. . . 6 6° Bancs épais de calcaires sie Aleéltres siberoteilise, coupés par le tracé de la route et dont un rocher esfresté en place à gauche le dite de la Mdr Peur den el a d ot » SUR 7° Schistes calcaires grisâtres ou jaunâtres, ou AE 18 en lits minces, on- dulés, feuilletés . . . Re Per En AR MR tr. 2 8 Calcaires gris foncé, cuititlectér: se, Res UN 9° Marnes jaunâtres et grisâtres, souvent feuilletées, avec ; ds lits de grès subordonnés à la base, passant quelquefois à un calcaire celluleux jau- nâtre ou sorte de cargnieule d'un aspect magnésien ,. . . at 10° Grès et poudingues ferrugineux, à noyaux de quartz blanc, ren ici la crête de la montagne et recouverts de bruyères, . . . . . . . 40 e L’assise n° 8 constitue au sud la partie la plus élevée du prolongement de cette montagne. Lorsqu'on descend son versant oriental, on trouve les grès de l’assise supé-— rieure alternant avec des calcaires gris-noirâtre, schistoïdes, noduleux, qui ren- ferment de grandes espèces d’Astrées et de Lithodendron, puis des bancs pétris de rudistes (Hippurites organisans, H. cornu-vaccinum, Sphærulites angeiodes?, ete.). Far suite de leur plongement au N.-E., on marche presque toujours sur ces assises jusqu’au fond du vallon. La montagne que l’on voit au delà parait être composée de couches crétacées plus basses, peut-être néocomiennes, mais plongeant au S.-E. Vers l'extrémité nord que contourne la route, en face du village de Palada, on trouve des marnes et des argiles feuilletées, se divisant eu petits fragments, des grès eal- carifères brunâtres avec des fragments d’ostracées, probablement d'Exogyra sinuala. (N. 2, p. 255.) COMPARAISON DES APPENDICES B, C, D. h43 Le relèvement en masse de tout le système arénacé, marneux et calcaire, et son inclinaison au N.-E. peuvent être attribués à l'apparition d’une masse porphyrique, ou mieux de granite porphyrique, qui forme une cluse magnifique à parois verti- cales de 100 mètres de hauteur, et à laquelle est adossé l’établissement des Bains. L’escarpement tourné au N. offre des divisions prismatiques assez régulières. Dans la petite tranchée du chemin qui conduit du village à l'Établissement, on observe, entre deux filons de granite porphyroïde, gris-blanchâtre, mouchetée de mica vert essentiellement composé de feldspath blanc et de quartz hyalin, à cassure raboteuse ou inégale, une roche serpentineuse enveloppant des fragments de calcaire bleuâtre. Plus loin, une sorte de coin en gneiss, de 10 à 12 mètres de large, est aussi enclavé dans le granite. La séparation des roches est en outre de la plus grande netteté, et aucune altération bien sensible ne se manifeste au contact. COMPARAISON DES APPENDICES B, C, D. Le fait le plus essentiel qui ressorte de la comparaison des couches crétacées du Beausset, des Martigues et des Bains-d’Arles avec celles de la formation supérieure des Corbières, est la constance du grand niveau de rudistes, caractérisé par les Hip- Puriles organisans, cornu-vaccinum, sulcala, bioculata, le Sphærulites angeiodes, etc. On à vu que, déjà dans la région nord-est des Corbières, cet horizon était composé d’une série de couches très variées de plus de 300 mètres d'épaisseur; dans la col- line du Beausset, les assises 3 et 4, d’environ 60 mètres, nous paraissent en faire seules partie. Aux environs des Martigues, où la présence de nombreux rhizopodes vient s'ajouter à celle des rudistes, nous y comprenons les assises 5 à 12, dont l'épaisseur est de plusieurs centaines de mètres, et dans la colline des Bains-d’Arles, les calcaires noirs, schistoïdes ou noduleux qui la couronnent et occupent son ver- sant occidental. Au-dessus de ce même horizon viennent, dans la coupe du Beausset, les assises Let 2 qui pourraient représenter le premier étage ou les marnes bleues des bords de la Sals. Nous avons même peu de doutes que des recherches suivies n°y fassent découvrir un certain nombre de fossiles communs. Dans la coupe des Martigues, les assises À à 4 deviendraient aussi les représentants du même étage, tout en montrant des différences essentielles dans la faune, où les rudistes entre autres sont assez variés. La colline d'Arles ne nous a rien offert qui pût être mis en parallèle. Au-dessous du grand niveau de rudistes, les assises 5 et 6 du Beausset, qui sans doute renferment des fossiles sur d’autres points, représenteraient les étages 3 et 4 des Corbières, comme les calcaires bruns, les sables et les grès ferrugineux des Mar- tigues avec les autres couches qui leur sont associées. Dans la colline des Bains- d'Arles, les assises 9 et 10 seraient dans le même cas, si, ce qui est encore douteux, hhl COMPARAISON DES APPENDICES B, C, D. (N. 2, p. 236.) on considérait l’assise n° 8 comme l'équivalent des calcaires compactes à Capro- tines du département de l'Aude, et si tout ce qui vient plus bas jusqu’au grès rouge était aussi parallèle à l'étage néocomien des Corbières. Eu poursuivant encore plus loin cet essai comparatif de quelques points du littoral de la Méditerranée, on serait sans doute porté à mettre les calcaires blancs à Caprotina ammonia de la Provence sur l'horizon des calcaires compactes à Capro— tines des Corbières; mais, outre que dans le premier pays la division importante du gault et celle des argiles à Plicatules existent souvent entre notre quatrième étage ou son représentant et les calcaires à €. ammonia, dans le second on à vu (p. 19-214) ce qui s'opposait, quant à présent, à l’adoption définitive de ce paral- lélisme. TABLE DES MATIÈRES CONTENUES DANS CE MÉMOIRE. Pagination Pagination duvolume particulière INTRODUCTION... PREMIÈRE PARTIE. — Orographie. . DEUXIÈME PARTIE. — Géologie. . PABDEAURDESRTEBRRAINS ER M me De Us 0 CU TERRAIN MODERNE... « . . . + RERRAINAQUMDERNATREP MEET en Lee COM SN TERRAIN TERTIAIRE. Formation tertiaire supérieure . — Formation tertiaire moyenne. . . . . . . . . — Formation tertiaire inférieure. . — Groupe lacustre. DHAOUES — mollasse d'e eau Re bre de Carcas - sone). — Poudingues, marnes an et nn du bassin de Narbonne et deSigean . — Poudingues des montagnes. . — Groupe nummulitique . — Étage supérieur. . . . — + ‘Étage moyen. :./. |. — Étage inférieur. = Groupe d’Alet ou re — LES : MEN ON CO 0 TERRAIN SECONDAIRE. Formation crétacée . MES — Supérieure. 24: — région du sud. . 1 étage (marnes bleues) 2e 3 LR région du nor re — inférieure, ; . HR LAMAESA AC montagnes de la Clape . chaînes orientales. . chaînes méridionales. . — RÉSUMICRRE EE TC — Formation jurassique, lias. . . . . . . . . 209 214 238 tb. 446 TABLE DES MATIÈRES CONTENUES DANS CE MÉMOIRE. ("2 p. 235.) Pagination Pagination du volume particulière TERRAIN DE TRANSITION. Formation houillère. . . 3 DA 0 : c D 218 -—- Formation dévonienne M UE... COS 218 Roches granitiques. .. .. :,+,, 402 0. ORNE" CAR IR T 219 Roches ignées . . Æ 6 fe UE FU 8 60. CC OM ELA 028 220 Sources minérales et thermales - "OCT RE D CO Ion 222 Lignes de dislocation ou de soulèvement, . . . . . ,. . .‘. . . . 30 222 Remarques générales 2" PEN OC OR UC 0 226 Appendice. A. Coupe de la colline de Béziers (Hérault) . . . . . . . . 435 227 — BB. Coupe de la colline du Beausset (Var) . . . 3 CMS OA NES — C. Coupe des environs des Martigues (Bone Rhône). SL M 229 — D. Colline crétacée des Bains-d’Arles (Pyrénées-Orientales) . . . 441 233 Comparaison des appendices B, C, D . . . . . . . . 22 234 PLACEMENT DES DESSINS. N° I. Vue de la Clape, prise des fours à chaux de Narbonne, . . . . . 218 10 IL. Extrémité méridionale de la Clape. 7. 00 000719 41 III. Vue de Gruissan . s NE RTS 41 IV. Collines de Thézan à Saint- Victor. Core AD PAIN EL SCENE 17 ar "| 8 V. Vue du mont-Alaric, prise au-dessus de Ribaute. EL OUN GTR EC 1222 4h Vr Pic de Bugarache 7 ENT ATEN, MO MÈRES 20229 21 VIL Profil oriental du pic de Faro SERRE AABQUL., SR ER 18230 22 VIIT. Gorge dupontide Fons Del HUE 0 CRIER un NO, 00931 23 IX. Vue de Quillan . . . te PRO Rate e, CATRN232 2! X. Vue prise au sud de Run ce. SNA lement Cr ee 20 26 XI. Vallée des Bains-de-Rennes. . . . 235 27 XII. Vue de l’extrémité orientale du mont- airie LL. de HAE de Moux. 265 57 XIII. Poudingues des rives de l’Orbieu 4 1 . .: . . . . . . 282 74 XIV. Vue du bassin de Tuchan +. MPMAMERNMENE ER NP 207 79 XV. Vuæd'Alet + . . ER MARRON ES ET 109 XVI. Vue prise de la Fonte de comes! RU AR ES 118 XWIL Vallée de la Serrétéfide/Brenhe: 0 MR 1 GER. , +, . 1.0628 120 XVIII. Vue de la Grasse. . . SR DL LS ES il, 122 XIX. Rives de l’Orbieu, près de F Borde Houee metres rte rt RAR ITR 424 XX. Extrémité occientale du pic de Bugarach . . . . . . . . . . 362 154 AXI.: Vallée fle à Murblle #f aimée à er NUE St. OO 5 9 184 XXII. Tantavel,, 1, 40. DR ue GONE à CANCER 192 XXII. Vue prise au sud d’ RAS EN TMS - 2: ES RES 01 4195 ATV. Défléide Pierre-Lis Le NE One LR Il 203 KAV. Plissement prés de Quillan 4 + .. : ee 0. . NS 205 FIN DE LA TABLE DES MATIÈRES. ES COUPES RILNUES GÉOLOGIQUES RELATIVES A LA NORWÈGE, LA : Z 4 È $ + à EÈ à i LS : Sù 4 È no . | à É u à ‘ SSSR ss route rte la ler Hype 7 Marnengiärate. Clan. Lars : TA Bey EL Coupe din Siliien sétendan trot parue narbonne die dOStersundusquenlitetalie(Jentlant) dico dE Aa U EAU AC R Ton ON Com PO RE ENTER CALE EL OUT ErRCNIALE Lantre fbrmé de schistes gilet ehteux() EU UE sCUISLE leurlleLEny elite eUsiticeux (E): = Ghttar fénillatér Gilenire) faute ace era et graine Water ee Wi Croun® rt Seite eme ’ red il le me Lamine Machsur Litehanmer oL Piero rage avare Silurten du lie Miosen Hies 8% Coupe due , : 164 Vue dé a MontA ON È * i ÿ i À re des conchar enleirer ile plus en plar mise rerx lONE 6. Ære Onberenier SR SRE C = mer Dies G: Coupe des environs de Brévige (Norge méridionale Jmon ral 1 disposition du terrain, Silurienet son) contact avec le terrain primitit Oo. à à & Hache Firutingifèrme Ton du Pustenbery ue È 3 Ÿ Tanhätan à è Ÿ À È : È À ÿ È { Ÿ Jurorfiullrér À à ÿ (| È Ë $ ù Ÿ, = héros feutllohir Fig2iVue prise entre tariatuen cl ÉDE ET LA FINLANDE | RO VarA En Lerpos eLolrantila stature en Quinn) commet roches Lasniliquese Figo.Conpe verticale de la mine Fig: Coupehonirontale dés mmes de FendeLobersle Zermigeglarien Æe Fer nrydulé Ÿ 4 PRESS pi hrérn spireim) À Aten Su le FENTE En Normége présentant une, HUE Aux SYALEMON TE NCNER KONALEUNON ADI de granite el de fer de Silbole;en Fulande Ge Cnil y grain FE For aryduté (en Finlande) G: Cronile à pres grain N FL (Oo Or Ÿ sw Lange. D Es À lez | 66 65 Fproen Ty inqun ae san Ti Men, Oran CTP SN Coupe des termuns S'étendant dela vallée lu Gravedal jusqu'à Ja partie méridionale de celle dns Guldbrandsqul À ; S à +? : : JS Fnntère SuédoNorvogienne Jrhetar renicrertalne Se féhirter sms cata _f 2 n As - de RE Z Tenlalaian Garner PT Date alterne Fig, 9> Coupe dela vallée de Stdala Dronthenn. Hg 10 Coupés terrains situés entree bassin d'Üstersund danse Jemtland/euVoerdilsoren sur Luvôte de Norvège Lchrlle der distance horésentales pour les œuper 159,2 10: ===; : _—— Ë marésmatree Léchelle des hauteur est ny fix plier grande. ‘œnpe prise dans a nine de Piikäranta, sur le eëté Nord Est du ae représentant ue amas le site À res grains qui serai SRE 2 Rs x Se a je nue dansla vallée deeselal(Narvége) à 6. 7 lon? en val duvilage ea ee er) SE détail lé représente please an Granitiquen à pros era, qui braversent nemnsñe le granite nFiEN À pros muyens Fe L gs Ve pre entre Koh eat (Halancle}repmésentant des filons de. granite mea gros grains qui UmaversenLune masse de grandia ancien, GS non gran ina ens a partie tele du lan pla pau ext go Fig: 1% Vue prise pres ile kan alu Kel5Nüe prise à pea de distance au N (Res Re ae Re ON Anar ue gnutile a gros grains inierpme ve aumdieu du gro ne : moyens, à truelure veinée. LEat des mines de euivre el d'élain de met repioésentant un lande granite QD : de Quarz hyalin Laiteuil Uriverse. File prie entre Kafvatile eL elainge, représentant des lits contouméx Gien in peblx grains A grneiakentr lesquels se sont infectée des veines de graurile ms grtins |ON) La Este Non Hg 17, Vo prise entre Kalvabôle et Helainge représentant des couches cÜlambeautde gneiss interposés danale gramte À gros min et en mène Lana des vones el nodiles granitiques,ailués nb rlieu du gneixà (ein münficulé de sneiss ct de, appt (en Finlande) Te Hy-21ù CC lan des Mes À de Pañia Saari Eaunite mantonie 4, pr urainr. prier & Higl8 Yo des filon de granite à gros grains (Y) dans 1e gneiss (Ci pnse auprés d'Ab5rs en Finlande. el Kanda=Snar jp Verticale de Ile de petite grains 20 pe verbe dâls monticle de senc grealiére 1 de ane À gros grains, dont aurface est pelie parles agents ertiques entre Nuchars UK able) © Limite de La) culture du Lument Fig 26 Coupe vectieale delteutinens dDpprara en, ï INF am tale VGatire rails S Spot 7277 0777 Signes convemhoand pour La figures 21à 25 ration Crinare anriens Y° Granit madern M Wéarhinn À Jéirte nmphibulique) graine muryens jranéles parties MA ere aura tar votre entiere, Yertiy inlerrimbfiier, jiilematen ten nr à St) lamelles armpläbete Limit den Ta Fig 2 l'an Céologique dela partie ncrilianle delà montagne de Mau Sella ET 2 Clan sh F (1 EP | €? Tino" Vert] uen Ÿ pete tie tAtnwryl} FD) (Oh 440 lan onu 2 sb 0. hd ee” “ er i Nr Ne ' ete a | | | | Limiter cho LRETe tt Talent [LE Y— :% La Lys z 12 60 == ee = = 59 IL SN: Myers gant en inite able oaare à an prendepli rate V [2L C6 Mernos an St El . Jiméte 4} PAT LC LE ue puaxvall 2 jimite tu JTE «Ars Ô ns euertéitle Synramen feu EIRE Î jeratia à De je Are ten ñ gelé Fo sa +) #. = Echelle de la Carte ER = t x CARTE 4 À 5 > G © 2. ES : de : Zerrain eréae ñ 5 Aorrains Socvadaires >EOLOGIOUE et ME'TALLURGIQUE / ee O V £ ) = errainshanesrique Er mi L 41 JIU n e À PR DEEE » Aire L'huile à Terrpin daranien(Vraseyrerrage, de la fl || x < f. Acresins de transition Chat 4 Le N = ; à TES s' s' S' pereur 772 n RTE \ À LESC US EEE 170007770707) 777 9 = IN2e de Cuivre SC AND PE CRE TE Fo 77 \ /2 )1 | À = Éspp amphibatique spanche rer ta terrain Siturien f rhone féhtrpathique es : = retire pyraniéqueseratahantar Lephyre Féulputhique dressée par J. DUROCHER ; - EE Grunite ce Syénita sircontfère pacrant de Lun d d'autre j ue, e 2: Pan eV E da fiamant u ; ee & à matos quarese pautingÿsrer d'apres les mdications fournies par les Cartes FEES F er Terrains 2 [danstefinmark cten Laponie de Sémi Gstatlins rrmatians quartse ctealearss sehitarer Re N° [aan ta oriege centrale et oct DINC HUSINGER et KEICHAU = .l Formation culouretuchitteure cpoudingsfère de La previner de Drontheim Conjomtement D errsaate Rrmaton de puurtsite som pagne de mairies nimi Crirtalline tuslümantal et da NT \ rte para A ma \ TI F ivmation de micarchirte du Varalani et der Finmark avec les observations de l'Auteur / Terrains Crisiaïlins 1855. ++t+t+ Liméerte laNonndnanre etrte la Lapen\e Fusre À pans [e +=t=t-+ Zonterde lune ebite la Norme | 1 £ ÉTAT) KO Le termine grantm ee eme D (UN co. ‘Ven Limiter der terres previneer de (ar Suéte\rtt ste le Moriwège np r yrarat he Suite de la Légende wxplieative F- par datée = [ee ue û Fadte gross cailleutru = CREER d & a V DB 1 he plutomiques inter L ee out. à 505 7 (pré autkane), eu Dar à 230 À esprime que la Boileau (Datute atén/) SN: HOTTE myrésmétrer de tengneurs en Iptante Vérutmiret entres Tate tatin tape OP cerrent. de croire e alttudete 05m pi : RE ne as 5 5 A, = ; L étude de 505 métro, Ler Pins (Pinus rylwertri) À 250 mètre, et \ : La ocermr M eb L, Oct 10 (IAE TeN «ten mets seamtnure Mer, Lille Ofires Yüre) Lorphyre pyrexénigque se pprohnt dut Baratee Liindicaten ir Mme DA Pine = : TT e 7 : z | Gand imite td ée) n) nr tie rer riase ne l= x Fine gran et petite péri apr srsprntent de neherahéreures quartanier et eslrairesfatrant partie d divere ter Pi 8867 exprime là infhieure de Lnettppe de Nage permanente ÿuŸ couvre là partie } LE initiale du met Mél derigneune mentaune selerant au deeus ie 8 “nnetr eco ' mianrchite ponding orme prime ne dt ee | a | | Bnite dela vgetitian arterenente EL-ynfen Tete ALTÉÉE EORE ue ET = = RU | | 2 ou Ferd arpreme nn golfe profômt d terde de rcherralrnptes tn SE Three. Se Erouig-Mh-fe La Female ni mére Cavemple Je 500) éutique La température du leu exprimée en dyré rentrer. \ né ü LES Dr DEEE PRE Re ET) Lan my nat £E-de Promt him did tremtad © à a} ation e y à Et PAP \ vis É ré 2rrifere dual Er ue Ut Narusÿe ROSE L se ee 7 ; 130 P ge der cognilles marine, d'epéer vitanter, re trouvent à 110 metres au dersns du ) pu ésqué < / tit Guy Lars argentifére « Ferre dial Et de la Nord Ditomstiens ta wriettiet ds Honstat Prime ( | \ Tlamboary entière. CaprocobalfrÀ rréfenedtesut 1Statela Mile real Les nombres précédés des lettres Don sxprinent la détinaison de laïguille Nra5. EF — = à s E LS Ë Le LiQques VAE mpautent arar deun grandes coupes eryraphaques et roles (loér dx Flanehe À 7 2 iguille aimentée en 1145 \Y Polygunes aliton +) Carvohrentfere de las Dranilutmt euttrule Se Lartignestollengne mn e reprotent oran pince des neheget mp tournera GR CIRE Le 7 Je dla Laponie œntriles Les fléchas Endig want tar térwctions générales terra touteren ere = = = a —— CU : "A Le niaikear dererctr rar Ua cute espion t Ter Amutrure te true nu Herr Ê [2 5 Fi F Hertiee HS Qoreferifak delta lintande Mértdérles he : = d . f {u + = 5 NE ls & 5 a m bo Amprne chez lingypiler Citaures 5 livret Cravé chez Brhard-Shieble, He. Liompartenst À anoutsorhat af 251qs'h L - Men De mm éntee. à. MR x { rétaneliges inst nf ati simé CE 2 my corCugees Je et ù EMA un 24 uriatii oi Jr AA VAR ou ui UN +. à ru GR, On ANS om ne times AIT Dot dr lee int re t Till oh my Ÿ han Mt, Sd où cord ci DRE DE a er % Le, 4 Coieses DURS LRESS rom 2 ont RUMEUR en La “tte Le AA - TL DTT ON NEE tt mimi : sante ii mine de PNA 2 TA MAétntimitt Cliihent,: Men TETE à l'a, 4 fbauravies rbrqu à: arranger codé ing OR LS (RSS LOL Ve ï + est EN le ANG uote Not a ave dd aenmann 18 fi rc its TEE, PLUS UN F L = e L 3 = [y . $ FE 2m. mea MENT: sd … _ er —— out . ms L as » Mem dela Soc Ceoi de France Mém N°1 P] 2. Fier 1. Coupe Orograpluque et Géologique de la S inavie, S'é a cô € SEL asc : , sn qu J STapnqu sq a Seandinavie, s'étendant de la côte de Norw ége, sous 61° latitude,au littoral d'Hudikswall, dans Le Golfe de Botnie. Jéharter fe ulletar Terrain ; Qnezsré que 1 C) 7 trac grecrnséque Heat j Jycnite Touvorl aCCOrpUU née le roches schirteuse, (S ) TRADE D fer Mare ed quarts ie le groupe ont A Le 7e ) dr Croupes remi- (Ce) CL CN) : crürtetin. A ï ! À : ü LA a RL PONIERNO en APRES . ee fl : | : ! | i H ï k = — —— = d Bograd Lac de Silent Lac de Hèukkedal Hautplatcau Lacie Dritat £a Î Marpfaes Massy de Maiden Hassfeer falede Ajluent Hfutenes // allie de Va 7 fe dl | 2, ST? e Ta F G É Fe v à “ 7 ’ » dt ., ; lui o2eeZ couvert TVétestrand Vallée dudustatal aubrddelaner Jragrolstinen Clrneÿfiel ou Cléttertéter Vautgar sttriden \ÿoa Elo. deSjba £lo. du Mint. Fallra ne en Er, Lr 2e En 1 *. Z es LS deneiye ce de glace U03") (na du fiontte ter) (eos ee Calahopry) 52 (68) (3287) (zu) L a . . és ë 2 ed À Ly lo. urepeu eur Si lonfluent + L Tr FO Œ % 4 7 ) y PT LL l (700 a Xo0ve 47) {200 7227] (2531) 7 T ee Jar Ælo. (207). | 53 | —O SE te 1e. 2. Suite de [a coupe cidessus. Jehartes feuilleter degroupe cer créstalloruN) DipétCreës Dépôt degrés cle la Dalccartie Orient €,rapporte au. vicar gren rouge 2) Train granite-gneissique de la S'uëde (ZT) Jéhistes Ghaltifères Déoot de transport dilunienyrecouvrant Presque partout lerve solide gra | contenus dans Le 172) FC Lrratn Jrcessique or Ê | LIT TLIIIDE LILI. ES ZE CD SR EE 2 = — D Line. ù KNNS D — + — : - 7 M : TL 7 a : - RER Se Vallée dela Vallée du renal, fall dette, | lee Gmetrrinpte Vallée di Frhe Elo Lacde firna Lit Ep Cror än Roe-E Jar. an RÉ RP VTT Lea Ditig Lac d'Ürefrs") Clonemen Pres JoartadiauN (eat Mrutet et Le-Siter) dEngerAat, dlerychagne Aflauntprinepal (500) (rivière) fruwiere) frivière) (rivière) Crys Fogeh. Maftuentprine) Rigg deLoas Tlaine Fabaissant insensiblement: venr la mer (297) du Sor Joe (630) auNaubacdligen (188%) detre del-Flp, du rune (#50) (2722) : > orwrégre, sous 62° 20 de latitude, au littoral de Sundswall, dans le Golfe de Botmie. | ; F 18. 3. Coupe Orogaphique et Céologique de la Scandinavie, s'étendant de la côte de CU | Zérrain ghessique lc.) Zerran gresssique Jéhrstes, feuilleter du igrvupe sen -criréallèn (4) Fonchremé avec opentire É £ ï É contente daris Le, groupe | ù z : semé crédtallirr 1 | Tr 7 : je Re — 7 Ne —— _ Æ 2 os H 1 F 5 É —— —?— ——. a EE = ee = —— ——— ——— : ï ; 4 à Gr ! Fu : ete ue DT eu ; î AS 7: TANT TAC AL le d'Hacilmd VMartta nt loépgen Jiorb Branele Vera ls fibre. Plateau. de Proste er parte JSofkke Zac ? Lac de ne du ldlér de la” {1800 he) ldlon de Laë Far a TRE 7 Le) «ot æ ; 3 V du Jtorford couvert de neige (c7 à 100. 7] ( Vallée du fomsdal) deNordälur dvfor Fm Locrvarut Snechallan’ Driva pres Lrnrna Siralen prèr Tonveb Hitôyens au ce (68) (us) (22957) | Hongsotd Æo (496) de lime fitd = (ovd?) F 1g. k. Suite dela coupe aides: ; : : : , ï ren 72 DOPE déluDrerisiecottvr! que dou un solide Tran Jrantagneissique ANT Lentte acrdentate n cpu bien oùitles Terrain Jreussique ! Dépot de transport dilurert recouvrant Presque partor 4 Le Lerraur su « b DYLE Se AL : délistes feuilleter di jJroupe sex crstallirr (N) Es ï 1 5 ï : Pair Pre Dre ,S AY terre y da mer, ct, forme Pepresswonde Lac Üme Lac de Zac Buar Lac Zac Vemin Da Cünmna Fleuve Lacrne Plaine presque horézontale,sabatssant graduellement vers AS Héliyerc (750) uma ninvphe de Norrfiäll er CS (EE) pee (HR Prpe à Lusièurs ivil ; £ 73 1vicre A] x POS CC PAU PAUMEOUTS PHULOT ES 'e pr Lars ont Hnätten la riviere d'Hogaal cbrarroste p. (681) u huufie lt (520!) | c [264 ej° . 77 7) de Aepo orradique ou Diluvien (dables gravierns eb Blois elle est parsemeée de ler N £chelle de SR RER EE mo es, Lrhard- SEh à 2° Serie, TV PI 1 1 Millioniene pour les honqueurs 2 Millioniernes pour les Hatteiurs A Sne Ceolde lance . MémmN022) PM TR Meém. de a Soc, Weol. de Franc ZE = 2 Sér Ï VI PI Ill = T 7 * = 1 L : dx * TT: Ç « à aps « | TRE Coupe de Limoux au pont de Baiva | NE S : : À 2 D£ l'Achells des longueurs est celle de Cassine, celle des lauteuns he 0e = ( cs2 & ' à Ÿ \ | È : Roc de Pitraque 1 | | S Ü ER É 3 | Ÿ 219 > de « E ï | | | ‘ 2 ZA ALL) | Ÿ a | È ZIK 27777 LL LE | T L LLC - 3e pe Jire à : = - - = : TT COMpAler | ve D de transition = = : 5 Es 5 G Warnes et caleutres ncot LS" Caleaires compactes Mrnes eloalaires néovomtrens ' | ip TOR IR == Te Groupe del Gr nummuliique Groupe. d A/et arnes el caleutres néocorniens ê 7 | | Cr. nummuliique : : Der te se le Coey PBrasse li Capelle Tes lairouties Alet Couiz a or br à Campagne ’ Oullan Belbianes à : É . Axat É 72 de Para À Û + à NT à ES 5 D ce fnive 6 Ne e è ue Te Son dE Ua = n à C Re 0 See Den ee ce de Calle Lig. à Couches nummuliliques au sud de la chapelle de Brasse (rive Gauche) Li6.4, "Contact du éroupe nummulitique et du L'6. 5. Butte du Luce 6.6. Vallée de la Serre au nord de Quillan 10.2. (Collines de la mollasse prés de salle Q à éi dl Q ù ) A ; NOR ARS tecrain detransilion (rive droite.) Cale gris sans fossiles = 7 rive droite de l'Aude } NOTE ” Cul 7rus | È Cleblene- Mlle, & han HiX ttes Cuteures Ÿ M rg rouges Sable etmarne roue £ S'UPÉTLEUTC - — — lrgiles rouge are né & Cleaines compartes inférieures UC. gs nourä tri CPR TS 8 <Ÿ Cdleacres de avee me plntltta Ÿ mn Q È È Ÿ$ Ÿ er é S $ S k eX à CS \er S Ë pe à S 1 ; À è >: = ie < va < " ; : Fi6.8. (arrière du © four à chaux F6 9. Coupe des buttes des fours à chaux de Narbonne 6.10. Ravin de la Ricardelle F6. Formes du calcaire lacustre près du Lac © © 2 æ) 5) P N'ES SO | | — 2 < CL | £ louer Calvarpe pri Toudinques Cale. oulinques "Æ Anoträtre, secondaire - É Jaunatre far Sub ecompaeLe RON 0) x Gr 2 n Re fie ne SR = Ven 2e Mo.12. Coupe de Sigean au plateau du fer à Cheval RS. Fié.13. ‘Côte occidentale de Leucate Zchelle des longueurs quactruple de celle de Cassini, id. des hauteurs 16000 | | Col des MHaxels 102 S de fera Cieval Cle. letertre | ÿ Q 101 Calemnarrent enplaqueles Ÿ Ge ë Cale cd blanc grunèlete | È DIvea 3 a a Ÿ NUE > Harnes sable anne, È = patent Lang s Doñar ot blanvhätres | = ete Dunes = ES =—- ES = xs . loudingue EE GORE pe DOUORE— UE tre £ = LT Marne sableuse jatnätre —IJanes ve (RH UE He 0 Se at? ee : = ; TÈ Eee è ou jaune Don OT US CNT ! {res DIEU RTE & ompaetes et dolones noires avec Tacus r dur des Ÿ TT LOT LL (re? cal (l \ qe B. " Versant sud du Mont Alaric Fo. 1 Extrémité occidentale du Mont-Alaric F6 18 Extrémité occidentale du Mont=Alar | NE LS =225-$ù 2: D AL , 0 | SEC TE OS TELE 67 OT VE EL ALL PATES BE ; : ----0. à ( Coupe { Coupe F0 7 | Ÿ © | = = È || = À Sy Ÿ | Su | SAS SE || EE SE : / | Care QAR 1 | ÿ Groupe d'Het 727) Croupe PTT LCTIT | \ Ÿ °|| {| Il Lo. 19. \'ersant sud du Mont-\larie pér) s ! » : = MALE DR Gr “ e : : 6.23 ‘ollines de Boutenac | 5 ; u Aont-\laric Mig.20 Groupe d'Alet à la Borde-Rouée Fig. 21 Environs de Durfort Fig.22. Colline de St Martin 023 Collin | 2 æ © S de æ) : 4 0 à A ce ER en ve 1h ee S. NO te Res | S à a in | à la Bourdelle na Château À Fate & 7 2 Chaleaæit 5 £ sut e à w || Qu = Ÿ g PSE Pradelles > eee GR U a. | S ee Durfort ie Gasparets Boutenxe | X te Fi: GR oudinques fl S \ 3 «À ÈS = | me 0 LC / k 2 ÿ & — Groupe det : Te MIEL = 2 LPS x] es re \ UC: COMPECTES (7 CNT arTes rar à = Æ 5 —= ee NN — | É RREE CENT ‘ Justes de tranwiltort | QiS OU nor a tre marnessubor donnee» pe "es Lit. liaspretn Zears Cravé ex Avrd [TS ue des Btynardens, 28 Larks dArchiae del C “A. dé à Je M nl de tance. ; : … Mém N°2 PB. a is e So éol. de France | - = em ; 7€ Sér TNI PLV Non | l ENT | où d PRE ’ _ ? n 10.1. Coupe ééncrale des environs des Bains-de-Rennes Ho Re le de le Sale se \ DACLG $ ù rs ive droite de la Sals 2 ro) Ne : | | Sr | © : 5 LCR à a Sal Fo. 3 : { 10. #. Rive dauche de la Sals SE2 ; Lehelle des donguviers quadruples de celle de Cusstee, al. des hauteurs 2000. 2 = 5 2 = le compacte -rasitre.noduleux - £ : : Gres & gr gratis. 3 Ji à ' non Ci È à &| Ir: Jourdon C7 Dors Aire DORE [NN D 2 à È | | K È È DIN K& SE à 4 Ÿ | à * Le Ÿ 9 S se | SN 5 $ £ © À $ LS NS 7 All ob au SA { = D 2 a | KR ps gl il 2 (EX Le cn LE / AA L' j sn 5 N Ex n À È | rm | : NUL ré bd PQ à . u À /, as I RENNY k Aloe S ; Mvear de le Sels e lertiarres ayerieurs d'AHlet. Moulin Tifféau . ré s = : res IE RIRE = fs é . az moule Tifféurs. ; Ç 2° étage. Groupe d Het à = Mueau de la route. | 3 etage: "1 ? | Nas x DROLE : De di p ‘ x Û Ô a Me ur É : Le F6. à. Contact du Æ£ étage et du terrain de transition à [: 10.0. Coupe de la Montagne des Connes au ruisseau de Souéraiône Pic. ; Ÿ F6 8. Fig 9 | 9 6) ce) 2 É SET K s : à à. J. | SO à i NE 5 = N° & À, È ‘ \ 0 à uns É Sa rlikopodes. 5 CL Tognionine 1 OS = - e À Ce Grès jaune el lus de marne: Ÿ : À Hrnes d Marnes benatres schistoie ë Narne - F bon donnes Fig. 10 Collines de Grussan : Fo. LL. - Fi6.12. Ile SÙ Marun Hill X.0. Chateau =--—> NE S:0. Oe = E Caleair ER es compacles:. re Fil Ge marnettr, L rare 2 ns A'OUTIQUE TEE Dre co fuite Catraire gris a Orbiolines. laæ Oui Van gaunatre Le Calemarnter jaunes Mveau de la Mer — = 1 = = 70 | = Z Coupe du cirque de leuilla 0 = LL = nr. des Aux = Con NE > Lea * = Er Se fermitage V2 de Moulir Feuilla np res nes De . Paproi Po à à Ps Calor y FN # Le ES OBS HÉQUOILERE® Cale 5 ne (Lee et loute lc: es à ae = cal ang delire rene Lies superieur. ; : mis 99 as EG : ; FT à LU) na 0) IEEE Diétian Vo. 10. Fo. 19. Profil de la vallée de l'Aëly Fig. 20. VAE ® Dore 2 Tour de Tautavel é Le | A 2 £ FC be cr Ne 105 Zehelle double de Cassinr, il des auteurs 26000 3 LS Nes à Mes" LS" £ : L È : Crort À "& ; S'Pierre Ÿ RS \ è Ÿ [ Ÿ + SS : À > © Ÿ = à hi = À Opouls Fe Ÿ | \ 1) ? S N S S 152 > Sy ileavres W À AS ChEVTeS pK ANNEES Marnes norus > , = à 2e 7 De. 2 x arr 4 3 cudcatpes Warner etsa/estesl | 4 se x PANTIN : > S < N & S Zita TLCOUOTRE EL. taynals ale-neocorens, FR SCOMPAUES ENTOUSE NAN SCOPUS NE à eee aber NS ER Dr ne Cle. el grés Aadocornters AEEPRARSS > . < | Re Re fe dE Re it à rs _— : Re L DR Re CE EN AE 5 | | 62 rélacée près d'Arles (Prénées Orientales) se N : te 7e "+ Ê NEA Fo. 29 Colline erétacée près d'Arles (lrénées ales M6. 24 Coupe NS:de la presqu ile des Martidues (Bouches du Rlrône) je | E. = F n 0. Mrs = d È 1 N e S A a! Ce 22 . & Zi A ne | OPEL pp LT re Ÿ bre ù =? lues, 7 PR $ Ses 4} tbe, Te roche S D È S NQ | des Hameau | | — k Ka ñ it Aa (L MS = , % Grave chez Avr JTE Rue des Pernardns. 18 Paris è … dAriliac del Meém de la Soc Géol. de France AMém.N°2 PIC 25 SerT-MLPIM F | Ltang de Bages Alzonne Fig. Ile de SU Lucie. Coupe NO SE. or ea Aoovo des hauteur» 5008 Echelle des longueurs ral ; € | de Matvezy l'oudinuees ee nel fps ù 2-onviel du Ie. 2 3 > mér'idie (LORS Crête nond #70 a DÉESE Coeg DS de la Walpéres: 7e Fg.3. Coupe de Fontiés à la Malpere (crête nord } _ > Ù , Z = Echelle des lonqueurs» 20070, des hauteurs 10000 3 ; > = ; È Fonties Alquié SE Jaumet SS Carbone © 22 FE £ ent È TOME — em ENS À EEE Trou JE dage rnultique Le LA ner à > Fië +. Coupe de Homps à Léziônan ô me Z = e © Echelle des longueurs 8gece des hauteurs 10000 NS = 24 Ë Lérignan È à Homps HSE Jérame SR LÉ — - = ==i=-—;: = DéEG ea E SD L'Aucte Hollasse Keb Marnes bleues foret Fië.6. Coupe d'Argens à l'écluse de Pech-laurier (en arrière du plan) anal 1Tétage Let Marnes bleues Z étage d'Alzonne Fiÿ.8. Coupe à Arzens St Roch la Aougeanne Boullonna me Collines de Malvezy San Ûte Fië.7. Coupe de St Perre-e-Clair au Rech de Brau les (d'après A Noqués ) re otage mmeulinék 6.9. Collnes de Roque-Lonèue ia D de Montserel N 7/2) Hollasse reve Micaschistes Groupe d'Alet Groupe nummultique Fig 10. Coupe du Trapel à Lassac loulon Lassac da Bernède de Sernctlla Frapel . dollasse grise Croupe nummuli tique Fi6.12. Collines de Fontfroide (e) Sr créttces Groupe d et prit Croire de jër Colline de la Croix de Fontfroide F6. Torcr Ane. Abbaye Grès et psanimites rouges. Marnes el cale néocomiens. Crèx Jérrug® lontyroide ne, Abbaye de Cravéehez dort, JT Rue des Bernaærdens, 18 Faris d ireluac del RTL Mem Nos pl: Mem.de la Soc. geol de France : - < 000400 FF 3 à SE : D - 7 - Ge 27% Séne,LVI PL CARTE GEOLOCGIQUE DES CORBIERES. EXPLICATION DES SIGNES. ï 140,290,etc Altitudes eninètre . : Trrime : PT TD | — Les chiffres placés près des villes mdiquent , / 4 . RE - : = leur population et ceux le long des routes la ñ 3 2 distance en lieues de poste entre les relns (40 brun: 203 — CON —— Crade fer = foule Inperale ——— out Départementale. œurron AY Re Linite de Departement + Jürete arrondissement . Lünile de Criton/ Wire de Fer Carrière de Marbre. D Grrière de Pierre à batir Hllervuy 7 8 Fa Jorge Ca [1 À ! aoû. E Carrière de Pierre à chaux : Re 2 Depots quaternames et modernes. Frs pe Urhee & T 2 Ds ? ) s bl S_SUPETIEUTES à ipnevieile Mannes Lblenes. superieut A & £ j £ 5 S A olrlra n ï Mollasse manne è $ , é É ; 4 3 7 Que fi So 2 - + à 0 À 1@ = ; 22 3 ; l RCEC : $ ( SRE ; S | | &y 3 Tlheuve ! = Qalcaires el mames ŒuVassut ÿ sr, À BAT à an - À k Kg ; » 1 u Groupe deNarbonne etide Siren 1, À 8) . y à | ñ É Monthoum £ Le DATES & é He e £ ne M POUNNES AS MONTANES ë k NL TE, Ÿ 2 EE 5 RSILS È ES ) AT & © de de Darren ; + se deu douces. HS AT A PE _ ; ; À ; De RAC cd Cars oo | he € Ë ECS mue Z A JP 3 / # 2 LE S ? et p. ESS SAONbernes A. FLN QC Ë À 0) a - ? : = L DES $ ? \ [h Superient cs ? @ 5 TL ET 4 + Groupe de He 3 Nummulitique mu Une Lnfemeur Groupe d'Alel.. “e : —— ° Lerellos 300 Formation cretacce superieure Calcares compactes ou a Caprotmes id. Infenenre | Marnes et calcames neoconnens En ——— Garireëa Las Zamarc S'Hpolyt Formation houllère | | ; : = = : ES # RARES Se PUR Æ 2e > Name Te ————— = : 7 É à | ; 2 enr A a iméniome SNE | | KL 2 . Formation Levonierne 7 1 nt ID 1208 LA Zorrellas ? = ï | | | — Granites Cneass MicasolsLes mec RER 1 Echelle de 250,000 > pos F 25 Kiom ap Le L 10 5 TPE Uromohth par 2e Procede Avnil € rue des Bernardins |8 d'après Le # on . , UR