APERÇU HISTORIQUE L'ORIGINE ET LE DÉVELOPPEMENT MÉTHODES EN GÉOMÉTRIE. « Lorsqu'on pense que c'est cette Géométrie qui fut si féconde entre les mains des Ârchimède, des Hipparque , des Apollonius ; que c'est la seule qui fut connue des Neper, des Viete, des Fermât ^ des Descartes, des Galilée, des Pascal, des Huygens, des Roberval ; que les Newton, les Hallej. les Macïauria la cultivèrent avec une sorte de prédilection, on peut croire oue celte Géométrie a ses avantages. (Carn OT, Géométrie de Position^ Dissertation préliminaire, p. xxx.) r= I/'L ï. APERÇU HISTORIQUE DES MÉTHODES EN GÉOMÉTRIE, r*RTICDLIE&EaENT DE CELLES QUI SE RAPPORTENT A LA GÉOMÉTRIE MODERNE, X soin b'cn MÉMOIRE DE GÉOMÉTRIE SIIRSSVX PRINCIPES GÉ aux plaisirs, l'honnête à l'utile, encore qu'ils ne sussent pas la raison de cette préférence, » s'étaient fait des idées vraies et de la philosophie et des mathématiques , quoiqu'ils ne pus- » sent pas encore pousser ces sciences jusqu'à la perfection. Or je crois rencontrer quelques Il traces de ces mathématiques véritables dans Pappus et Diophante « ( Descartes , /fè^r/e* pour la direction de l'esprit , A' règle.) HISTOIRE DE LA GEOMETRIE. 29 bure remarquable. C'est une spirale que Pappus décrivait, à l'imita- tion de celle d'Archimède, en faisant mouvoir uniformément un point sur un arc de grand cercle de la sphère, qui tourne lui-même autour de son diamètre (livre 4, proposition 30). Pappus trouva l'expression de la surface sphérique, comprise entre cette courbe et sa base; pre- mier exemple de la quadrature dune surface courbe. Le fameux théorème de Guldin, qui fait usage du centre de gra- vité pour la dimension des figures, se trouve dans les Collections ma- thématiques, et paraît avoir été imaginé par Pappus lui-même'. S 25. A la suite de la proposition 30 du livre 4, un passage, qui sert d'introduction au problème de la trisection de l'angle, nous ap- prend que la science des surfaces courbes, et des lignes à double courbure tracées sur ces surfaces, ou produites par des mouvemens composés (comme la spirale sphérique dont nous venons de faire mention), avait été cultivée par les anciens. Pappus y parle des lieux à la surface, et cite à ce sujet les ouvrages de Démétrius d'Alexandrie, et de Philon de Tyane. Le premier avait pour titre : Recherches linéaires; c'est la seule indication qui nous en reste. Le second traitait des courbes qui naissent de l'intersection de certaines surfaces nom- mées plectoïdes. Montucla observe avec raison qu'il n'est pas facile de deviner, sur une aussi légère indication, quelles étaient ces surfaces et quelles étaient ces courbes. Mais un autre passage de Pappus (livre 4, pro- position 29), dont il semble que ce savant historien n'ait pas eu connaissance, nous apprend que la surface de la vis à filets carrés, est une surface plectoïde; ce qui nous fait supposer que ce mot dési- gnait d'une manière générale les surfaces réglées, auxquelles il nous paraît convenir à raison de V entrelacement des lignes droites que présentent ces surfaces, ou bien qu'il désignait les surfaces appelées maintenant conoïdes, engendrées par une droite mobile qui s'appuie sur une droite fixe et sur une courbe, en restant toujours parallèle à I P^oyes la (In de la Préface du 7' livre des Colleclions mathématique*. 30 HISTOIRE DE LA GEOMETRIE. un même plan, ou bien encore qu'il désignait particulièrement les surfaces héliçoïdes, ou seulement la surface héliçoïde rampante, c'est- à-dire celle de la vis à filets carrés. Un savant géomètre napolitain, M. Flauti, dans un ouvrage récent, affecte, d'une manière générale, le nom de surfaces plectoïdes, à toutes les surfaces engendrées par une ligne droite '. Commandin, dans son commentaire de Pappus, avait pensé que le mot plectoïde pouvait provenir d'une erreur de copiste, et qu'il devait être remplacé par celui de cylindrique. Mais cette supposition est évi- demment erronée; car le mot plectoïde, dans le passage de Pappus qui donne lieu à l'observation de Commandin^, s'applique incontestable- ment à la surface de la vis à filets carrés, et non à une surface cylindrique. 5 26. Pappus, à l'occasion de la quadrafrice de Dinostrate, fait connaître deux propriétés de la surface héliçoïde rampante, qui mé- ritent d'être remarquées, comme renfermant deux modes de con- struction de la quadratrice, et surtout comme offrant une des belles spéculations des Anciens sur les surfaces courbes et les lignes à double courbure. Après avoir donné la génération, qu'il appelle mécanique, de la quadratrice, par l'intersection d'un rayon du cercle, qui tourne autour du centre, et d'un diamètre qui se meut parallèlement à lui-même (livre 4, proposition 25); Pappus dit que cette courbe peut se former par les lieux à la surface, ou bien par la spirale d'Archimède. Voici quels sont ces deux modes de construction : Premier moyen, proposition 28. ce Soit une hélice décrite sur un cylindre droit circulaire; de ses points ou abaisse des perpendiculaires sur l'axe du cylindre; ces droites forment la surface héliçoïde rampante; ))Par l'une de ces droites on mène un plan, convenablement incliné sur le plan de la base du cylindre; ce plan coupe la surface héliçoïde suivant une courbe dont la projection orthogonale sur la base du cylindre est la quadratrice. » • Geometria di sito sul piano e nello spazio ; Naples 1821. 2 Livre 4, proposition 29, note F, pag. 92 de l'édition de 1660. HISTOIRE DE LA GÉOMÉTRIE. 31 Second moyen, proposition 29. « Qu'une spirale d'Archimède soit prise pour la base d'un cylindre droit; que l'on conçoive un cône de révolution ayant pour axe l'arête du cylindre menée par l'origine de la spirale; ce cône coupera la surface cylindrique suivant une courbe à double courbure ' ; » Les perpendiculaires abaissées des différens points de cette courbe sur l'arête en question du cylindre, formeront la surface héliçoïde rampante (que Pappus appelle en cet endroit surface plectoïde); » Un plan mené par une arête de cette surface, et convenablement incliné, la coupera suivant une courbe dont la projection orthogonale sur le plan de la spirale sera la quadratrice demandée. )) Ces deux constructions consistent, l'une et l'autre, à couper la surface héliçoïde rampante par un plan mené par une arête, et à projeter la section sur un plan perpendiculaire à l'axe de la vis. Dans la première solution, on détermine la surface de la vis au moyen d'une hélice, par. laquelle on fait passer les génératrices de celte surface ; et dans la seconde construction on détermine ces géné- trices par le moyen d'une courbe à double courbure qui est l'inter- section d'un cylindre droit qui a pour base une spirale, par un cône de révolution qui a pour axe l'arête du cylindre menée par l'origine de la spirale. § 27. Nous remarquerons que ces deux constructions reposent sur les deux propriétés suivantes de la surface héliçoïde rampante, que Pappus n'énonce pas expressément, mais qui se trouvent démontrées dans ses deux propositions 28 et 29 : ' Cette courbe est l'hélice coniqite .- elle est une des lignes à double courbure que les An- ciens ont connues. Proclus en parle dans son Commentaire sur la i' définition du l" livre d'Euclide. Dans les temps modernes cette courbe a occupé plusieurs géomètres , parmi lesquels on distingue Pascal (De la dimension d'un solide formé par le moyen d'une spirale autour d'un cône; OEuvres de Pascal, tom. V, pag. -422) ; et Guido-Grandi {Epistola ad Th. Cevam; OEa- ▼res posthumes d'IIuygens, tom. II). M. Garbinski , professeur à l'université de Varsovie, a donné, il 7 a quelques années , ane construction graphique des tangentes à cette hélice conique (voyez Annales de mathématiques, tom. XVI, pag. 167 et 376). 32 HISTOIRE DE LA GEOMETRIE. 1° Si l'on coupe la surface héliçoïde rampante par un plan mené p^r une de ses génératrices, la section se projettera orthogonalement sur un plan perpendiculaire à l'axe de la surface, suivant une qua- dratrice de Dinostrate'; 2" Un cône de révolution, qui a pour axe celui d'une surface héli- çoïde rampante, coupe cette surface suivant une courbe à double courbure, qui se pr()jette orthogonalement sur un plan perpendiculaire à cet axe, suivant une spirale d'Archimède. Ce second théorème offre une construction de la spirale par les lieux à la surface, analogue à celle que Pappus donne pour la quadra- trice. S 28. Ces considérations de surfaces courbes et de lignes à double courbure, pour la construction d'une courbe plane, qui rentrent au- jourd'hui dans la Géométrie descriptive et font le caractère principal de l'école de Monge, méritaient, ce me semble, d'être remarquées dans l'ouvrage de Pappus. Elles auraient pu conduire ce géomètre à une construction des tangentes à la spirale et à la quadratrice. Il eût suffi de remarquer que ces tangentes étaient les projections des tangentes aux deux courbes tracées sur la surface héliçoïde, et que la tangente en un point de l'intersection de deux surfaces est l'intersection des plans tangens en ce point aux deux surfaces. On parvient ainsi fort aisément aux propriétés connues des tangentes de la spirale et de la quadratrice ^. Mais c'est là tout-à-fait l'esprit de notre Géométrie des- criptive moderne, et il n'est pas probable que les Anciens aient poussé aussi loin leurs spéculations dans la science des surfaces courbes. Il est douteux même que, du temps de Pappus, on eût une idée bien nette du plan tangent en un point de la surface héliçoïde. * Si le plan sécant, au lieu de passer par une génératrice de la surface héliçoïde , est mené d'une manière tout-à-fait arbitraire , nous avons reconnu qu'on obtient alors en projection une quadratrice alongée, ou accourcie, ou en d'autres termes, une conchoïde de la quadratrice de Dinostrate. - M. Th. Olivier, habile professeur de géométrie descriptive à l'école des arts et manufac- tures, a déjà fait usage de ce moyen, pour construire la tangente à la spirale d'Archimède {Bulletin de la Société philomatique de Paris, année 1833, pag. 22). HISTOIBE DE LA GÉOMÉTRIE. ^S § 29. En réfléchissant sur la nature des deux théorèmes que nous avons énoncés ci-dessus, on est conduit à les regarder comme de sim- ples applications de deux modes généraux de transformation de toutes espèces de courbes planes, en d'autres courbes différentes, au moyen de la surface héliçoïde rampante. Et de ces modes de transformation résultent des relations de construction, et de propriétés, entre des courbes qui ne paraissaient avoir de commun entre elles que la même forme d'équation entre des variables différentes ; telles sont quelques spirales et les courbes qui portent le même nom dans le système de coordonnées ordinaire. Je développerai cette idée dans la Note VIII. S 30. On remarque dans les Collections mathématiques plusieurs théorèmes qui appartiennent aujourd'hui à la théorie des transversales, entre autres celui qui en est le fondement, et qui font supposer que cette utile et élégante doctrine était employée par les Anciens, princi- palement dans leurs écrits sur l'analyse géométrique, auxquels se rap- portent ces théorèmes. Parmi ces propositions, qui appartiennent à la théorie des transver- sales, et dont plusieurs sont relatives à la proportion harmonique , nous citerons les suivantes, qui sont démontrées dans le 7*^ livre, comme lemmes destinés à faciliter la lecture des porismes d'Euclide. La 129'^ proposition fait voir que quand quatre droites sont issues dun même point, elles forment sur une transversale , menée arbi- trairemefit dans leur plan, quatre segniens qui ont entre eux un certain rapport constant , quelle que soit la transversale. Ainsi soient a, b , c, d, les points où les quatre droites sont rencontrées par une transversale quelconque, et ac, ad, hc , bd, les quatre segmens; le rapport —^ ; —, sera constant, quelle que soit la transversale. Cette proposition mérite que nous lui consacrions tout ce paragra- phe, pour appeler sur elle, dès à présent, toute l'attention de nos lec- teurs. • Les propositions 136, 137, 140, 142 et 145 sont ou des cas par- ticuliers ou la réciproque de cette proposition principale. Répétée sous tant de formes par Pappus, elle parait avoir été d'une ToM. XI. 5 34 HISTOIRE DE LA GÉOMÉTRIE. grande utilité dans les porismes d'Euclide. Cependant elle est aujour- d'hui sans application. « En recherchant les usages que les Modernes en ont pu faire, nous trouvons que Pascal l'a mise, dans son Essai pow les coniques, au nombre des théorèmes principaux dont il se servait dans son Traité de ces courbes ; que Desargues fit d'un de ses cas particuliers ( qui est précisément la 137^ proposition de Pappus) la base d'une de ses pra- tiques de la perspective (édition de Bosse, 1648, pag. 336) ; et que R. Simson l'a démontrée comme lemme de Pappus, et s'en est servi pour la démonstration d'une proposition de son Traité des porismes. Dans ces derniers temps, M. Brianchon l'a énoncée au commence- ment de son Mémoire sur les lignes du deuxième ordre, et M. Pon- celet l'a citée dans son Traité des propriétés projectives (pag. 12). Mais ces deux habiles géomètres en ont fait peu d'usage, n'ayant eu à considérer le plus souvent que le cas particulier où les quatre droites forment un faisceau harmonique. Cette proposition nous parait donc avoir à peine, jusqu'ici, fixé l'attention des géomètres. Cependant nous la croyons susceptible de nombreuses applications, et nous la regardons comme pouvant de- venir l'une des plus utiles et des plus fécondes de la Géométrie. Cette proposition jouera un rôle important dans nos deux principes de dualisation et de déformation des figures, comme étant la base de la partie qui concerne leurs relations de grandeur; et nous aurons aussi à en faire usage dans le cours de cette introduction. Par cette raison nous éprouvons, dès à présent, le besoin de donner un nom au rapport des quatre segmens qu'on y considère. Ce rapport étant dit harmonique dans le cas particulier où il est égal à l'unité, nous l'appellerons dans le cas général rapport ou fonction anhar- monique. Ainsi, quand quatre droites issues d'un même point seront rer^con- trées par une transversale en quatre points a, b, c, d, le rapport ^ : ^ sera dit fonction anharmonique des quatre points a, b, c, d. La proposition de Pappus consiste en ce que cette fonction a con- HISTOIRE DE LA GÉOMÉTRIE. » stamment la même valeur, quelle que soit la transversale; les quatre droites, issues d'un môme point restant les mômes. C'est là une belle propriété de la fonction anharmonique de quatre points, qui la dis- tingue de toute autre fonction différente qu'on pourrait former avec les segmeris compris entre les quatre points. La notion de la fonction anharmonique nous parait de nature à apporter une grande simplification dans plusieurs théories géomé- triques. Elle sera bien plus propre que le théorème de Ptolémée à servir de fondement à la théorie des transversales, où elle procure des démon- strations intuitives de toutes les propositions connues sur les systèmes de lignes droites, et donne lieu à beaucoup d'autres propositions nouvelles. Elle sera utile surtout dans la théorie des coniques, où elle mon- trera, entre une infinité de propositions isolées, une liaison et des rapports qui les rattachent toutes à un petit nombre de principes généraux. Nous comptons consacrer un écrit particulier à la théorie du rap- port anharmonique. Mais il nous faut en faire connaître dès à présent quelques propositions principales, particulièrement une autre forme algébrique sous laquelle peut s'exprimer la proposition de Pappus; nous renvoyons pour cet objet à la Note IX. S 31. Revenons à Pappus. La 130° proposition est une relation entre six segmens formés sur une transversale par les quatre côtés et les deux diagonales d'un qua- drilatère quelconque. Les 127° et 128° en sont des cas particuliers. Au lieu de regarder la figure du livre de Pappus comme repré- sentant les quatre côtés et les deux diagonales d'un quadrilatère coupé par une transversale, on peut la considérer comme représentant les trois côtés d'un triangle, et trois droites menées par les sommets de ce triangle et concourant en un même point. Ces six droites déterminent sur la transversale six segmens, dont chacun est pris entre un côté du triangle et une des deux droites menées par les sommets adjacens 36 HISTOIRE DE LA GEOMETRIE. à ce côté. La proposition de Pappus est facile alors à énoncer et à retenir j elle consiste en ce que le produit de trois segmens , qui n'ont point d exlrémilés communes , est égal au produit des trois autres : rapport semblable à celui qui constitue le théorème de Ptolémée. Envisagée ainsi, cette proposition de Pappus pourra servir pour démontrer que trois droites menées de certaine manière j)ar les som- mets d'un triangle , concourent en un même point , de même que celle de Ptolémée sert à démontrer que trois points placés de cer- taine manière sur les côtés d'un triangle sont en ligne droite. La ISl'' proposition fait voir que dans tout quadrilatère , une dia- gonale est coupée harmoniquenient par la deuxième diagonale et par la droite qui joint les points de concours des côtés opposés. La 132'3 énonce un cas particulier de ce théorème, qui, lui-même, peut être regardé comme une conséquence du théorème général exprimé par la proposition 130. La 139'^, dont les propositions 134, 138, 141 et 143 sont, ou la réciproque, ou des cas particuliers, prouve que quand un hexagone a ses six sommets placés, trois à trois, sur deux droites, les trois points de concours de ses côtés opposés sont en ligne droite. Théo- rème remarquable par lui-même, et parce qu'il peut être considéré comme le germe du fameux théorème de Pascal , sur l'hexagone inscrit à une conique. Au système des deux droites, dans lesquelles Pappus inscrivait son hexagone, se trouve substituée une conique quel- conque, dans le théorème de Pascal '. 1 La proposition 139 de Pappus, que nous présentons ici comme exprimant une propriété de l'hexagone inscrit à deux droites , peut être considérée sous un autre point de vue , et donne lieu alors à cet autre théorème remarquable, que Simson a énoncé le premier, comme étant l'un des porismes d'Euclide, celui auquel se rapportent ces mots de Pappus : u QnoD nmc ad DATSM ruNCTUM VERGiT. » Etant pris , dans ttn plan, deux points fixes et un angle qui ait son sommet situé sur la droite qui joint ces points ; si de chaque point d'une droite donnée on mène deux droites à ces deux points fixes, elles rencontreront respectivement les deux côtés de l'angle en deux points ; et la droite qui joindra ces deux points passera toujours par un même point (Sim- son , De Porismatihus , proposition 34). Nous citons ce théorème, parce qu'il nous sera utile dans la suite. Son analogue dans HISTOIRE DE LA GÉOMÉTRIE. É7 La proposition 130^, que nous avons citée plus haut, a reçu une généralisation semblable, que nous ferons connaître en parlant de Desargues. Pappus énonce dans sa préface, comme généralisation d^un porisme d'Euclide, un beau théorème, relatif à la déformation d'un polygone, dont tous les côtés passent par des points situés en ligne droite, pendant que ses sommets, moins un, parcourent des droites tracées arbitrairement. Ce théorème a acquis quelque célébrité dans le siècle dernier, par la nouvelle généralisation qu'il a reçue entre les mains de Maclaurin et de Braikenridge , et par la rivalité qu'il a excitée entre ces deux illustres géomètres. M. Poncelet a de nouveau traité cette matière avec toute l'étendue et la facilité que comportent les doctrines de son savant Traité des Propriétés projectives des figures. (Section 4, chap. Il et III). § 32. Nous devons faire mention d'une question qui peut se ratta- cher, comme les précédentes, à la théorie des transversales; c'est le fameux problème ad très aul plures tineas , rapporté par Pappus comme l'écueil des Anciens, et auquel Descartes a donné une nou- velle célébrité, en en faisant la première application de sa Géométrie. Il s'agissait, étant données plusieurs lignes droites, de trouver le lieu géométtique d'un point tel que les perpendiculaires, ou plus généralement les obliques abaissées de ce point sur ces droites, sous des angles donnés, satis/îsse?it à la condition, que le produit de certaines d entre elles fût dans un rapport constant avec le produit de toutes les autres. Cette question, connue sous le nom de Problème de Pappus, depuis que Descartes l'a ainsi désignée, avait exercé la sagacité d'Euclide et d'Apollonius, qui ne l'avaient résolue que pour trois ou quatre droites, auquel cas le lieu géométrique demandé est une conique : D'où ré- sulte cette propriété générale des coniques : « Quand un quadrila- l'eapace, qui n'a point encore été donné, se présentera naturellement comme corollaire de nos principes de transformation des figures. 38 HISTOIRE DE LA GEOMETRIE. tère quelconque est inscrit dans une conique, le produit des distances de chaque point de la courbe à deux côtés opposés du quadrilatère est au produit des distances du même point aux deux autres côtés, dans nu rapport constant, v Newton a donné de ce beau théorème une démonstration, par la Géométrie pure, et s'en est servi utilement dans ses Principes Mathé- matiques de la philosophie naturelle. Les traités des coniques, qui ont paru dans les premiers temps après ce grand ouvrage , lui ont em- prunté ce théorème; mais sans en faire tout l'usage auquel il était propre ; et depuis , il a en quelque sorte disparu de la théorie des coniques '. Cependant, nous croyons pouvoir le regarder comme la plus universelle et la plus féconde de toutes les propriétés de ces courbes. Nous citerons particulièrement, comme n'étant que des co- rollaires de ce théorème unique, le fameux hexagramme mystique de Pascal, le théorème de Desargues sur l'involution de six points, le rapport constant du produit des ordonnées au produit des segmens faits sur l'axe, le beau théorème de Newton sur la description orga- nique des coniques, et enfin, un autre théorème fondé sur la no- tion du rapport que nous avons nommé ci -dessus anharmonique , et d'où se déduisent une infinité de propriétés diverses des coniques. Mais nous dirons en passant, que ce dernier théorème est lui-même d'une telle généralité, et se démontre à priori d'une manière si facile, que c'est celui que nous proposerions pour fondement d'une théorie des coniques. ( Voir la Note XV). § 33. Ici se présente naturellement une observation, qui pourra justifier l'importance que nous avons déjà cherché à donner à la pro- position 129 de Pappus, et à la notion du rapport anharmonique. ' La stérilité qu'eut pendant des siècles cette proposition fond.imentale , d'où dérivent pres- que toutes les propriétés des coniques , et le peu d'importance que parurent aussi mériter, jusqu'à ces derniers temps, les beaux théorèmes de Desargues et de Pascal, qui en sont des corollaires naturels, rappellent cette pensée de Bailly, dont la justesse est bien sentie : « Il 11 semble que les idées aient comme nous une enfance et un premier état de faiblesse ; elles ne » produisent point à leur naissance, et elles ne tiennent que de l'âge et du temps leur vertu 11 féconde. » (Histoire de l'astronomie moderne , tom. II , pag. 60, ) HISTOIRE DE LA GEOMETRIE. M C'est que tous les théorèmes que nous venons de tirer du 7^ livre des Collections mathëmatiquos , y compris celui sur la déformation d'un polygone et celui ad quatuor lineas , et plusieurs autres théorèmes sur l'involution de six points, dont nous allons parler tout-à-l'heure , théorèmes qui sont tous des plus généraux et des plus utiles dans la Géométrie récente, peuvent dériver tous, comme de leur source com- mune, de cette seule propriété du rapport anJiarmonique de quatre points. Et cette manière de les présenter sera aussi simple que pos- sible; car elle ne nécessitera pour ainsi dire aucune démonstration. Nous ajouterons, qu'après avoir reconnu que la plupart des lemmes de Pappus, qui paraissent se rapporter au l*^'^ livre dos porismes d'Eu- clide, pouvaient se déduire de la proposition en question , nous avons pensé que cette proposition pourrait bien aussi être la clef de tout ce l*^*" livre des porismes , et conduire à une interprétation des énoncés que Pappus nous a laissés. Car il existe toujours ainsi, dans toute théorie, quelque vérité principale dont toutes les autres dérivent. Et en effet, en prenant la proposition dont il s'agit pour point de départ dans un essai de divination des porismes , nous avons obtenu divers théorèmes, qui nous ont paru répondre aux énoncés en question. S 34. Nous citerons encore du 1^ livre des Collection mathéma- tiques ^ une quarantaine de lemmes relatifs au traité de determinatd sectione d'Apollonius, et qui rentrent aujourd'hui dans les nouvelles doctrines de la Géométrie. Ce sont des relations entre les segmens faits par plusieurs points sur une ligne droite. On n'aperçoit pas, au premier abord, la vraie signification de ces nombreuses propositions, ni les rapports qui peuvent les rattacher ensemble à une même question, et la lecture dans cet état en est pénible. Mais avec quelque attention , on reconnaît qu'elles sont toutes relatives à la théorie de Vinvolution de six points, créée par Desargues et devenue d'un grand usage dans la Géométrie récente. Ce ne sont pas les propriétés de la relation d'involution la plus générale, celle qui a lieu entre six points ( il parait même que les Anciens n'ont pas connu les transformations de celte relation générale), mais ce sont 40 HISTOIRE DE LA GEOMETRIE. des propriétés de plusieurs relations que l'on peut aujourd'hui consi- dérer comme des cas particuliers de cette relation générale. Ainsi , les propositions 22 , 29 , 30 , 32 , 34 , 35 , 36 et 44 con- cernent une involution de cinq points. On y considère deux systèmes de deux points conjugués ^ , et leur point central, celui dont le pro- duit des distances aux deux premiers points est égal au produit de ses distances aux deux autres; et l'on déduit de là une autre relation entre les cinq points. Pour conclure cette relation de la relation générale entre six points , il faut observer que le conjugué du cinquième point, ou point central, est à l'infini. Les propositions 37 et 38 concernent une involution de quatre points, qui sont deux points conjugués, un point double et le point central. D'une relation entre ces quatre points, on en conclut une autre. Les propositions 39 et 40 sont une même propriété d'une involu- tion de cinq points ; on y considère deux systèmes de deux points conjugués, et un point double. Les propositions 41 , 42 et 43 sont une relation entre deux sys- tèmes de deux points conjugués et leur point central ; relation nou- velle, d'une forme différente des relations connues de l'involution de six points. Il en est de même des douze propositions 45, 46, et 56, qui sont une relation généi'ale entre deux systèmes de deux points con- jugués, leur point central et un autre point quelconque. Les propo- sitions 41 , 42 et 43, ne donnent que des corollaires de cette relation générale. Enfin, les propositions 61, 62 et 64, expriment une belle propriété de maximum et de minimum, concernant deux systèmes de points ' Il est utile , pour faciliter l'intelligence de ce passage sur les lemmes de Pappus , de lire la Note X , où nous présentons les différentes propriétés de la relation d'invol ution de six points ; c'est-à-dire les diverses transformations et les conséquences de cette relation. Nous y expli- quons ce qu'on doit entendre par points conjugués, point central, et points doubles. HISTOIRE DE LA GÉOMÉTRIE. 41 conjugués et un point double; elle consiste en ce que le rapport des produits des distances de ce point double aux points conjugués est un maximum ou un minimum. Pappus donne, par une construction élégante, l'expression géomé- trique de ce rapport; mais il ne fait qu'énoncer sa propriété de maximum ou minimum, qui se trouvait démontrée dans l'ouvrage d'Apollonius. C'est une véritable perte, que celle de la démonstration géométrique de ce cas de maximum ou minimum par les Anciens, quoiqu'elle n'offre aucune dilliculté à l'analyse moderne. Fermât en a fait une des premières applications de sa belle méthode de maximis et minimis ( Opéra mathematica, pag. 67 ). § 35. Cette analyse des 43 lemmes de Pappus nous paraît pouvoir en faire saisir l'esprit général et en faciliter la lecture. On y voit que plusieurs propositions y expriment un même théorème : c'est que les énoncés de ces propositions s'appliquent à des figures spéciales, et ont entre eux quelques différences provenant de la différence de po- sition des points que l'on y considère. C'est cette différence de position des points donnés et du point cherché par rapport à eux, qui a fait donner à l'ouvrage d'Apollonius le nom de Section Déterminée ; et les différons cas que présentent les variations de position de ces points, sont ce que ce géomètre, et Pappus d'après lui, ont appelé Epitagma\ C'est un des grands avantages de la Géométrie moderne sur l'an- cienne, de pouvoir, par la considération des quantités positives et néga- tives , comprendre sous un même énoncé tous les cas divers que peut présenter un même théorème, par la diversité de positions relatives des différentes parties d'une figure. Ainsi, de nos jours, les neuf problèmes principaux et leurs nombreux cas particuliers, qui faisaient l'objet des 83 théorèmes contenus dans les deux livres de la section déter- 1 C'est le sentiment de Ilalley et de H. Sirason. Le savant Commandin n'avait point tronvc la signification de ce mot qu'Apollonius appliquait à une partie de ses propositions ( Co//ec<. math., pag. S06 de l'édition de 1660). Le mot monachi, qn'on trouve aussi dans Pappus, parait avoir ëlé affenté par Apollonius aux propositions concernant les maxima et les minima. Ton. XI. 6 42 HISTOIRE DE LA GEOMETRIE. minée d'Apollonius, ne font plus qu'une seule et même question, résolue par une formule unique. Beaucoup d'auteurs, dans leurs écrits sur l'analyse géométrique des Anciens, se sont occupés de la Section déterminée , et ont cherché, soit à en rétablir complètement les deux livres, soit à en résoudre seu- lement diverses questions détachées. Nous trouvons au commencement du XVII<^ siècle, Snellius, Alexandre Andersen, Marin Ghetaldi; vers la fin du même siècle, Roger de Vintimille, Ilugo de Omérique; puis, R. Simson dans son ouvrage posthume. Opéra reliqua anno 1776, et vers le même temps, Giannini dans ses Opuscula mathematica. Dans ces derniers temps, J. Leslie a encore consacré plusieurs pages à ce problème, dans son Analyse géométrique (livre 2, propositions 10 — -18). Cette question est liée intimement à la théorie de Vinvolu- tion de six points, et sa solution paraît devoir dériver de cette théorie. En effet, une propriété nouvelle de l'involution nous a offert naturel- lement une construction simple et générale du problème de la section déterminée, qui nous paraît différer de toutes celles que l'on a données jusqu'ici. La même théorie offre aussi une démonstration du cas de maxim,um traité par Apollonius. {Voir la Note X.) S 36. Les lemmes de Pappus sur les lieux plans d'Apollonius, présentent aussi quelques relations entre les segmens faits par des points sur une droite, mais qui sont différentes des précédentes, et ne dérivent point comme elles des relations générales d'involution de six points. Cependant, on peut les rattacher aussi à une seule et même proposition , qui exprime une propriété générale de quatre points pris arbitrairement sur une ligne droite, laquelle est le second des théo- rèmes généraux de Mathieu Stewart \ Ainsi, les propositions 123 et 124, qui expriment une relation entre quatre points pris arbitrairement sur une droite, et un cin- 1 Some gênerai theorems of considérable use in the Higher parts of mathematics . Edimbourg, 1746, in-8°. Nous donnerons l'énoncé du théorème en question en parlant de Stewart , dans notre qua- trième Epoque. HISTOIRE DE LA GÉOMÉTRIE. 43 quième déterminé d'après une certaine condition, sont une consé- quence facile do ce théorème. Los propositions 125 et 126 expriment une relation entre quatre points pris arbitrairement en ligne droite ; et on reconnaît aisément que cette relation n'est qu'une transformation très-simple du même théorème. Les quatre propositions 119 — 122, qui, avec les quatre dont nous venons de parler, font les huit lemmes de Pappus sur les lieux plans d'Apollonius, concernent le triangle. Il est assez remarquable que ces quatre propositions, qui paraissent si différentes des autres et n'avoir aucun rapport avec elles, sont aussi des conséquences du même théorème de Stewart. S 37. R. Simson, en rétablissant les porismes d'Euclide, la section déterminée et les lieux plans d'Apollonius, a démontré un à un les nombreux lemmes de Pappus relatifs à ces trois ouvrages. On voit par ce que nous venons de dire combien aujourd'hui, en rattachant toutes ces propositions à quelques-unes seulement, on simplifierait ce travail. Mais une telle simplification n'était pas encore dans l'esprit de la Géo- métrie au temps de R. Simson (il y a près d'un siècle); et y eùt-elle été, elle n'eût point convenu au but de cet habile et profond géo- mètre, qui était de suivre pas à pas les traces et les indications de Pappus. S 38. Les autres lemmes du 7^ livre des Collections mathématiques, que nous passons sous silence, nous offrent moins d'intérêt que ceux que nous avons cités. Ce sont des propositions isolées relatives au cercle, aux triangles et aux sections coniques, et qui ne présentent pas de difficultés. Ces lemmes s'appliquent au traité de inclinationi- buSf à celui de tactionibus , et aux huit livres des coniques d'Apollo- nius ; et enfm , aux lieua^ à la sur/ace d'Euclide. Nous nous bornerons à remarquer parmi les lemmes relatifs au traité de tactionibus , le problème suivant , qui est résolu très-simplement par Pappus : « Faire passer par trois points situés en ligne droite les trois côtés d'un triangle qui soit inscrit dans un cercle donné, v (Proposi- 44 HISTOIRE DE LA GÉOMÉTRIE. tion 117^). Les propositions 105, 107 et 108 sont des cas particu- liers de cette question; on y suppose l'un des trois points situé à l'infini. Ce problème, qu'on a généralisé en plaçant les trois points d'une manière quelconque, est devenu célèbre par la difficulté qu'il présen- tait, et par les noms des géomètres qui l'ont résolu, et surtout par la solution aussi générale et aussi simple qu'elle pouvait l'être , don- née par un enfant de 16 ans, Oltajano, napolitain {voir la Note XI). Nous citerons enfin la 238^ et dernière proposition, qui s'applique aux lieux à la surface, et qui est la propriété de la directrice dans les trois sections coniques, qui consiste en ce que a les distances de chaque point d'une conique à un foyer et à la directrice correspon- dante, sont entre elles dans un rapport constant. » Ce beau théorème ne se trouve pas dans les coniques d'Apollonius. S 39. Le livre 8<= des Collections traite principalement des machines employées dans la mécanique pratique ; on y parle aussi de leur usage pour la description organique des courbes. Diverses propositions de Géométrie se trouvent aussi dans ce livre. Il en est une fort remar- quable , sur le centre de gravité d'un triangle ; nous l'énoncerons ainsi : (c Si trois mobiles placés aux sommets d'un triangle , partent en même temps et parcourent respectivement les trois côtés ^ en allant dans le même sens et avec des vitesses proportionnelles aux longueurs de ces côtés, leur centre de gravité restera immobile. » Les géomètres modernes ont étendu ce théorème à un polygone quelconque plan ou gauche. Montucla , en le démontrant par des con- sidérations de mécanique, dans les Récréations mathématiques d'Oza- nam, avait pensé que sa démonstration par la Géométrie pure offrirait des difficultés. Celle qu'en donne Pappus s'appuie sur le fameux théo- rème de Ptolémée , concernant les segmens faits sur les côtés d'un triangle par une transversale. Pappus, dans le cours de sa démonstra- tion, suppose la connaissance de ce théorème, dont il donne ensuite la démonstration. S 40. La proposition 14 du même livre est une solution très-simple de ce problème : étant donnés deux diamètres conjugués d'une el- HISTOIRE DE LA GÉOMÉTRIE. 45 lipse, trouver en grandeur et en direction ses deux axes principaux. Pappus ne fait qu'éuoncer sa construction, sans la démontrer. Euler en a rétabli la démonstration, et a donné en môme temps plusieurs autres solutions du môme problème {Novi Commenlarii , de Péters- bourg, t. III, ann. 1750-1751). D'autres géomètres l'ont aussi traité à leur manière. Ayant résolu la question analogue dans l'espace, où il s'agit de trouver, en grandeur et en direction, les trois axes principaux d'un ellipsoïde dont trois diamètres conjugués sont donnés, nous en avons conclu une nouvelle construction des axes de l'ellipse, qui nous pa- raît enchérir encore sur le degré de simplicité que présentaient déjà plusieurs solutions de ce problème'. Et, en effet, c'est une remarque qu'on peut faire souvent dans l'étude de la Géométrie, que les solutions de la Géométrie plane, qui ont leurs analogues dans l'espace, sont toujours les plus générales et les plus simples. ^> Ce principe donne un moyen d'épreuve, ime sorte de critérium, pour reconnaître si l'on est parvenu, dans une question, à toute la géné- ralité et à toute la perfection dont elle est susceptible, ou en d'autres termes, si l'on a rencontré la méthode et la vraie route qui lui sont propres. 8 41. La préface du 1^ livre des Collections mathématiques con- tient une défuiition nette de V analyse et de la synthèse, qui ne laisse aucun doute sur le caractère précis des deux méthodes; et Pappus donne souvent, dans le cours de ce 7*^ livre, des exemples de l'une et de l'autre, appliquées à une môme question. I Soit 0 le centre de l'ellipse; oa, oh ses deux demi-diamètres conjugués donnés ; Par le point a on mènera une droite perpendiculaire à ob, et on prendra sur elle deux et scgmens ae , ae' égaux à oh ; On tirera les deux droites oe, oe' ; l" Les axes principaux de l'ellipse diviseront en deux également l'angle de ces deux droites son supplément ; S» Le grand axe sera égal à la somme de ces deux droites, et le petit axe égal à leur dif- férence. 46 HISTOIRE DE LA GEOMETRIE. A la suite de cette définition, Pappus donne les titres des ouvrages que les Anciens avaient composés sur ce qu'ils appelaient le lieu résolu. Ils comprenaient sous ce mot certaines matières dont la con- naissance est nécessaire à ceux qui veulent se mettre en état de pou- voir résoudre les problèmes. Ces ouvrages étaient, pour la plupart, des exemples de leur analyse géométrique; en voici les titres, tels que les rapporte Pappus : un livre d'Euclide, des Données; deux livres d'Apollonius, de La section de raison; deux de La section de l'espace et deux des Attouchemens , du même; trois livres d'Euclide, des Poris- mes; deux livres encore d'Apollonius, des Inclinaisons ; deux des Lieux plans et huit des Coniques; cinq livres du vieux Aristée, des Lieux solides; deux livres d'Euclide, des Lieux à la surface; et deux livres des Moyennes raisons, par Ératosthène. A ce catalogue il faut ajouter les deux livres d'Apollonius, de la Section déterminée, dont Pappus parle dans la suite. De tous ces ouvrages, il n'est venu jusqu'à nous que les Données d'Euclide; les sept premiers livres des Coniques d'Apollonius, et son traité de la Section de raison. Mais, sur ce qu'en a dit Pappus, les autres ont été rétablis, aux XVI'' et XVII^ siècles, par divers géo- mètres, dans le style de la Géométrie ancienne. S 42. Le goût de cette Géométrie, qui a donné tant d'éclat aux sciences mathématiques jusques il y a près d'un siècle, surtout dans la patrie de Newton, s'est affaibli depuis, et aurait presque disparu, si les géomètres italiens ne lui fussent restés fidèles. On doit, de nos jours, au célèbre Fergola, et à ses disciples, MM. Bruno, Flauti, Scorza, plusieurs écrits importans sur l'analyse géométrique des An- ciens, qui s'y trouve rétablie dans sa pureté originaire. Les ouvrages que les Anciens avaient composés sur cette matière, et dont nous venons de rapporter les titres que nous a laissés Pappus, formaient un système de complémens de Géométrie, qui eussent hâté les progrès de cette science, s^ils nous eussent été transmis intacts à la renaissance des lettres. De tels complémens manquent à la Géométrie moderne : car on sent HISTOIRE DE LA GÉOMÉTRIE. 47 qu'eu égard à ses progrès et à son état de perfectionnement, ces complëmens doivent être faits aujourd'hui sur d'autres bases que ceux do l'école grecque. Ils devront être empreints surtout de l'esprit de simplicité et de généralité qui fait le caractère des nouvelles doctrines de la Géométrie. S 43. Vers le môme temps que Pappus, le géomètre Serenus s'ac- quit quelque célébrité par un ouvrage en deux livres, sur les sections du cylindre et du cône ', où il démontra, contre le sentiment de la plupart des géomètres de son temps, l'identité des ellipses faites dans ces deux corps, qu'il suppose à base circulaire et scalènes, c'est-à- dire obliques. On distingue dans le premier livre les deux problèmes suivans, dont les solutions Sont d'une facilité et d'une élégance qui ne laissent rien â désirer : (( Étant donné un cône oblique, à base circulaire, coupé suivant une ellipse, faire passer par cette ellipse un cylindre qui ait aussi pour base un cercle, sur le plan de la base du cône (propo- sition 20). )) Et réciproquement : (( Etant donné un cylindre coupé suivant une ellipse, etc.» (Proposition 21.) Serenus suppose, comme Apollonius, que le plan coupant, dans le cône, est perpendiculaire au triangle par l'axe : et c'est ici le lieu de remarquer, puisque nous n'allons plus trouver jusques aux temps modernes d'autre écrivain sur les coniques, qu'il parait que les An- ciens n'ont jamais formé ces courbes que de cette manière particu- lière; c'est-à-dire par des plans nécessairement perpendiculaires au triangle par l'axe; et que la question de savoir quelles courbes don- neraient d'autres plans sécans, menés tout-à-fait arbitrairement, n'a point été agitée par eux, ou au moins n'a pas été résolue. Peut-être leur avait-elle présenté des difficultés qu'il était réservé aux Modernes de surmonter. Nous verrons que ce fut Desargues qui eut le mérite de faire, le premier, ce pas important dans la théorie des coniques, ' U Voici un aperçu des découvertes qu'Huygens dut à la Géométrie des Anciens, et qui montre bien toutes les ressources que peut offi-ir cette méthode à celui qui sait en pénétrer l'esprit et y découvrir les voies de l'intuition qui lui est propre. Huygens , en s'occupant de la quadrature approchée du cercle et de l'hyperbole, trouva entre ces deux courbes des rapports nouveaux et singuliers. Il donna la rectification de la cissoïde, quand on n'avait encore rec- tifié que deux courbes, la parabole cubique et la cycloïde. Il détermina les surfaces des conoïdes paraboliques et hyper- boliques ; premier exemple de telles déterminations de surfaces courbes. On lui doit des théorèmes curieux sur la logarithmique, et les solides qu'elle engendre. Toutes ces propriétés, qui n'avaient été qu'énoncées par Huygens à la suite de son discours sur la cause de la pesanteur, ont été démontrées par Guido-Grandi , à la manière des Anciens. Huygens résolut le problème de la chaînette, imaginé par Galilée, ' Pemberton , Préface des Élémens de la philosophie newtonienne. On peut penser que cette admiration méritée pour le style géométrique d'IIuygens causa chez le grand Newton une sorte d'émulation qui lui fit adopter la même manière d'exposi- tion et de méthode dans son immortel ouvrage des Principes , quoiqu'il fût déjà en possession de toutes les ressources de l'analyse la plus savante. Nous énonçons cette opinion d'après M. le B'"". Maurice , qui l'a émise dans son excellente Notice sur la vie et les travaux d' Huygens. HISTOIRE DE LA GEOMETRIE. 103 qui y avait échoué, et remis sur la scène par Jacques Bemoulli; et le célèbre problème de la courbe aux approches égales, proposé par Leibnitz^ comme défi, aux disciples de Descartes, à l'occasion de son démêlé sur la mesure des forces vives. Ces deux questions paraissaient aux deux illustres géomètres qui les proposaient, nécessiter impé- rieusement le calcul intégral. Huygens sut les résoudre par les seules ressources de la Géoinétrio ancienne. § 12. Le célèbre traité De horologio oscillatorio doit prendre place à côté de l'ouvrage des Principes , dans l'histoire des grandes conceptions de l'esprit humain; il en est l'introduction indispen- sable que Newton eût dû créer, si le génie d'Huygens ne l'eût prévenu. Chacun des chapitres de ce traité suffirait seul pour exciter l'ad- miration. ' Le premier est la description des horloges à pendule, qui offraient^ pour la première fois, la mesure exacte du temps. Le deuxième , intitulé De descensu gravium , complétait la grande découverte de Galilée sur l'accélération des corps qui tombent libre- ment par la pesanteur, ou qui glissent sur des plans inclinés. Huygens considérait leur mouvement sur des courbes données. C'est là qu'il démontra cette célèbre propriété de la cycloïde , d'être la courbe tautochrone dans le vide. jh oqs. j Le troisième {De enolutione et dimensione Unedrum curvartim) est la célèbre théorie des développées ; acquisition capitale pour la théorie des courbes, et dont les usages dans toutes les autres parties des sciences mathématiques sont devenus aussi fréquens qu'étendus. Cette importante découverte ne fut point une simple spéculation géo- métrique dans les mains d'Huygens. H sut en tirer les plus heureuses conséquences, pour démontrer une foule de propositions neuves et remarquables, telles que divers théorèmes sur les rectifications des courbes, et la propriété de la cycloïde, d'avoir pour développée une seconde cycloïde égale, qu'on peut considérer comme la cycloïde même, déplacée dans le sens de sa base de toute la longueur de la demi-cir- 104 HISTOIRE DE LA GEOMETRIE. conférence du cercle générateur, et dans le sens perpendiculaire à la base, de la longueur du diamètre de ce cercle '. Dans le quatrième chapitre de VHorologium oscillatorium, Huygens résolvait d'une manière générale et complète le fameux problème des centres d' oscillation j qui avait été proposé par Mersenne , et fort agité entre Descartes et Roberval. C'est dans cette solution que l'on vit, pour la première fois, l'un des plus beaux principes de la mécanique, connu depuis sous le nom de principe de la conservation des forces vives. Enfin , le cinquième chapitre , où Huygens donnait une seconde construction de ses horloges, est suivi des treize célèbres théorèmes sur la force centrifuge dans le mouvement circulaire. Ce fut l'application de cette théorie au mouvement de la terre autour de son axe, et au mouvement de la lune autour de la terre, application qui dérivait virtuellement des propositions 2 , 3 et 5 , qui fit découvrir à Newton la loi de la gravitation de la lune vers la terre. Cette même théorie semblait être le complément de celle des dé- veloppées, pour conduire naturellement à la connaissance des forces centrales dans le mouvement curviligne, qui fut aussi l'une des grandes découvertes de Newton, et qui lui donna la démonstration à priori des fameuses lois de Kepler. Mais ces rapprochemens échappèrent à l'esprit d'Huygens, occupé de tant d'autres grandes conceptions. S 13. Le traité de la lumière est un des plus beaux monumens du génie d'Huygens, qui sut appliquer, avec une sagacité admirable, la Géométrie à son ingénieuse théorie des ondes. On y remarque surtout la belle loi mathématique , qu'il découvrit dans les phénomènes de la double réfraction du spath d'Islande. C'était, je crois, la première • Par cette disposition , la cycloïde et sa développée forment un pont à deux étages ; le piédroit de l'étage supérieur repose sur la clef de l'étage inférieur. On a coutume de dire que la développée de la cycloïde est une seconde cycloïde égale et posée dans une situation renversée , ou bien posée en sens contraire. { Voyez V Analyse des infiniment petits du marquis de Lhopital, pag. 92, et VHistoire des Mathématiques de Mon- tucla, tora. II, pag. 72 et 154). Cette manière de s'exprimer est erronée. C'est pour cela que nous avons décrit minutieusement la position de la cycloïde et de sa développée. HISTOIRE DE LA GEOMETRIE. 103 apparition, qui s'est reproduite depuis, des surfaces du second degré dans les phénomènes naturels. Cette grande découverte a été complétée par Fresnel, qui, pour expliquer les phénomènes de la polarisation de la lumière, a substitué aux ondes ellipsoïdales d'Huygens une surface du quatrième degré '. Fresnel, qu'une mort prématurée a enlevé aux sciences physiques et mathématiques, dont il était déjà l'un des plus illustres adeptes, a rendu une nouvelle vie par ce grand travail à la théorie d'Huygens, tombée depuis plus d'un siècle dans un oubli inex- plicable ; il l'a replacée au rang qu'elle doit occuper parmi les grandes vérités du monde physique. C'est ici le lieu de remarquer encore une belle déduction mathéma- 1 Fresnel a donné , pour cette surface du quatrième degté , la construction géométrique suivante , qui est extrêmement remarquable et qui conserve aux surfaces du second degré le principal rôle dans toute cette théorie: Qu'on conçoive un ellipsoïde (dont les deux demi-diamètres principaux sont proportionnels aux racines carrées des trois élasticités principales du milieu, ou bien aux vitesses de la lumière suivant les axes de ces élasticités) ; qu'on mène par le cen- tre de celle surface une Iransversale quelconque et qu'on porte sur cette droite , à partir du centre, des segmens égaux aux demi-diamètres principaux de l'ellipse résultant de la section de la sur- face par le plan diamétral perpendiculaire à la transcersale , les extrémités de ces segmens se- ront sur la surface du quatrième degré en question. (Voir le Mémoire de Fresnel , sur la double réfraction, dans le toni. Vil des Mémoires de l'Académie; le Mémoire de M. Ampère sur la Dé- termination de la surface courbe des ondes lumineuses dans un milieu dont l'élasticité est diffé- rente suivant les trois directions principales , etc. , imprimé dans les Annales de chimie et de physique, année 1828, et le Traité de la lumière de Herschel, tom. II, pag. 190 de la traduction de MM. Verhulst et Quetelet. ) D'après ce théorème, les belles lois de polarisation, découvertes dans ces derniers temps par d'illustres physiciens , et particulièrement celles de MM. Biot et le docteur Brewster , don- nent immédiatement des propriétés géométriques de l'ellipsoïde, et en général des surfaces du second degré. Ainsi ces phénomènes optiques , qui ont déjà jeté une si vive clarté sur tout ce qui tient à la structure intime des corps cristallisés, peuvent apporter les mêmes secours dans l'étude de la Géométrie rationnelle. On ne peut trouver un plus bel exemple de l'enchaînement qui unit toutes les sciences , ni une preuve plus évidente que des secours mutuels leur sont nécessaires pour suivre leur marche progressive d'un pas sûr et rapide. Puisse-t-on voir surtout , dans ce rapprochement , que les surfaces du second degré sont destinées à jouer un rôle important dans toutes les déductions des lois les plus générales de la nature , et que l'on ne peut trop se h.îter d'étudier et d'approfondir les innombrables pro- priétés géométriques que présentent ces surfaces , suit dans leur constitution propre , soit dans leurs relations entre elles. To«. XI. 14 • n' 106 HISTOIRE DE LA GÉOMÉTRIE. tique, tirée par Huygens de sa Théorie de la lumière ; mais qui a eu besoin d'être créée de nouveau, dans ces derniers temps, par M. Que- telet , pour fixer l'attention des géomètres et porter les fruits dont elle était susceptible. Huygens, par l'application de son système ondula- toire, a trouvé que a quand des rayons incidens émanés d'un point fixe, ou parallèles entre eux, se réfractent sur une courbe, si l'on conçoit une circonférence de cercle décrite du point lumineux comme centre , ou bien une droite perpendiculaire à la direction des rayons parallèles, et que de chaque point de la courbe dirimante, comme centre, on décrive une circonférence d'un rayon qui soit dans une certaine pro- portion constante avec la distance de ce point, à la circonférence ou à la droite fixe , toutes ces nouvelles circonférences auront une courbe enveloppe, à laquelle les rayons réfractés seront tous normaux. » Cette courbe est la forme de Vonde réfractée. C'est de là qu'Huygens concluait la loi du rapport constant des sinus d'incidence et de réfrac- tion. Ainsi, de même que Tschirnhausen a considéré, depuis ", la courbe enveloppe des rayons réfractés, de même Huygens considérait la courbe normale à ces rayons. La première seule a fait impression sur l'esprit des géomètres , et sa considération est devenue la base de leurs travaux en optique. La seconde a passé inaperçue, comme si elle n'avait pas reposé, comme la première, sur une construction purement géomé- trique, et indépendante du système, alors douteux, qui y avait donné naissance. Et cependant la courbe d'Huygens est généralement beaucoup plus simple que celle de Tschirnhausen, et se prête mieux à l'étude des propriétés optiques des courbes. H nous suffit de dire, par exemple, I Tschirnhausen a communiqué en 1682 , à l'Académie des Sciences de Paris , ses premières vues et ses premiers résultats sur la théorie des caustiques : Huygens avait présenté à la même académie, trois ans auparavant, son Traité de la Lumière. II était alors en possession de- puis long-temps de sa théorie des développées; il n'aurait donc eu à faire qu'un pas facile pour donner son nom aux célèbres caustiques dont l'invention et les usages en optique , et en Géométrie pour la rectification de certaines courbes , ont fait la gloire de Tschirn- hausen. HISTOIRE DE LA GEOMETRIE. 107 que la caustique de Tschirnhausen, produite par réfraction dans le cercle, s'est refusée jusqu'à ce jour à toutes les ressources de l'analyse qui n'a pu encore en donner l'équation, tandis que la courbe analogue d'Huygens est tout simplement une ovale de Descartes (courbe du quatrième degré), dont quelques considérations de Géométrie, ou quelques lignes d'analyse font connaître la nature ou l'équation '. Néanmoins, les courbes d'Huygens sont restées inaperçues, et ce n'est que depuis 10 ans que M. Quetelet, en cherchant à diminuer les difficultés d'analyse que présentent les questions de réfraction de la lumière, imagina de substituer, dans cette théorie, aux caustiques de Tschirnhausen des courbes qui en fussent les développantes, et parvint, en suivant cette idée heureuse, et par de pures considérations de Géo- métrie , à la construction de ces développantes par l'enveloppe d'un cercle mobile; ce sont ces courbes, qui répondent, comme on voit, aux ondes réfractées d'Huygens, que M. Quetelet appela caustiques secon- daires; cet habile géomètre en a étendu la doctrine au cas où les rayons incidens étaient perpendiculaires à une même courbe , et au cas de l'es- pace où les rayons incidens sont normaux à une même surface ^. Celte extension était comprise aussi dans la théorie d'Huygens. \\ en résulte immédiatement cette belle loi de la réfraction de la lumière, à savoir que « des rayons incidens, qui sont normaux à une même surface , jouissent de la même propriété après une réfraction sur une autre surface quelconque; et conséquemment se divisent après cette réfraction en deux groupes , qui forment deux séries de développables qui se croisent à angles droits. » Théorème que Malus, le premier, avait aperçu dans un faisceau de rayons émanés d'un même point, ou pa- ' Dans la réfraction sur une droite, la dificrence entre les deux courbes de Tschirnhausen et d'Huygens n'est pas moins sensible : la première est une courbe du sixième degré , dont le calcul est assez long , et la seconde est simplement une ellipse ou une hyperbole , ainsi que l'a trouvé, le premier, M. Gergonne. (Annales de Math. , tom. XI, pag. 229.) Ce savant géomètre avait eu déjà la pensée qu'il se pourrait bien que les caustiques eus- sent pour développantes des courbes beaucoup plus simples qu'elles. {Annal, de Math. , tom. V, pag. 289.) ' Nouveaux Mémoire» de l'Académie de Bruxelles, tom. III, IV et V. 108 HISTOIRE DE LA GEOMETRIE. rallèles entre eux, mais qu'il avait cru, d'après le résultat de calculs trop compliqués, ne pouvoir être étendu à un système de rayons nor- maux à une même surface \ C'est M. Dupin qui, le premier, par de pures considérations de Géométrie, donna au théorème de Malus toute la généralité qu'il devait comporter \ On voit, par les considérations qui précèdent, quelles ouvertures utiles et fécondes le traité de la lumière d'Huygens présentait aux géomètres, qui auraient eu confiance plus tôt dans les vues de ce grand génie. Exemple remarquable de la lenteur avec laquelle avan- cent et se perfectionnent nos connaissances positives, et leçon sévère pour l'orgueil de l'esprit humain. Cette digression est étrangère peut-être aux progrès propres des mé- thodes géométriques ', mais du moins , elle roule sur l'une de leurs plus belles applications aux sciences physiques, et peut-être pourra-t-elle porter quelques-uns de nos jeunes lecteurs à ce genre de recherches géométriques, qui est encore neuf et qui promet d'abondans résultats *. 5 14. La sagacité admirable qu'IIuygens a montrée dans toutes les grandes questions qu'il a soumises à la Géométrie, ne l'a point abandonné dans ses recherches sur la mécanique, telle que la fameuse question du choc des corps , qu'il résolut en même temps que Wallis et Wren ; et dans ses découvertes astronomiques , qui rendent son nom inséparable de ceux de Kepler, Galilée et Newton. 1 Mémoire sur l'optique , art. 22 et 27, dans le 14* cahier du Journal de l'École Polytech- nique . 2 applications de Géométrie et de Mécanique ; Mémoire sur les routes de la lumière , p. 192. 3 M. Uamilton , directeur de l'observatoire de Dublin, en continuant les beaux travaux de Fresnel , est parvenu a soumettre tous les phénomènes si compliqué» et si délicats de la lu- mière à un calcul analytique nouveau , qui parait devoir conduire aux lois mathématiques qui dominent toute cette vaste et importante théorie. Nous avons appris de M. Quetelet, avec un extrême plaisir, qu'un autre savant géomètre, M. Mac Cullagh , poursuit les mêmes recherches que M. Harailton, mais par de pures consi- dérations géométriques. Puissent les travaux de M. Mac Cullagh réhabiliter la Géométrie auprès des personnes d'un esprit juste et impartial , et rendre aux méthodes d'IIuygens et de Neveton l'estime qu'elles méritent. 1620-1677. HISTOIRE DE LA GÉOMÉTRIE. 109 Quoique la méthode des Anciens ait été presque toujours son seul instrument de raisonnement et de recherches, il connaissait toutes les ressources non-seulement de la Géométrie de Descartes, mais aussi du nouveau calcul de Leibnitz, qu'il avait étudié dès que cette su- blime découverte avait paru, et dont il avait su apprécier tous les avantages '. S 15. Nous devons citer parmi les contemporains de Wallis et bareow, d'Huygens, qui ont le plus contribué à l'avancement de la Géométrie, Barrow, le professeur de Newton à l'université de Cambridge. Ce géomètre publia en 1669 ses Lectiones Geoinetricœ , ouvrage rempli de recherches profondes sur les propriétés des courbes, et particuliè- rement sur leurs dimensions. On y remarqua surtout dans la dixième leçon, sa Méthode des Tangentes; méthode peu différente, il est vrai, de celle de Fermât, mais qui cependant, par la considération du petit triangle différentiel et l'introduction dans le calcul de deux quantités infiniment petites au lieu d'une seule, était un pas de plus vers la doctrine et l'algorithme de Leibnitz. On doit à Barrow, que ses connaissances dans les langues grecque et arabe mettaient en état de rendre ce service aux sciences, des versions latines, estimées, des élémens et des données d'Euclide ; des quatre premiers livres d'Apollonius, des ouvrages d'Archimède et des sphériques de Théodose. Les démonstrations, dans tous ces ouvra- ges, se trouvent pour la plupart refaites et simplifiées extrêmement. On a recueilli en 1684, sous le titre de Lectiones mathematicœ , les leçons faites par Barrow à l'université de Cambridge , sur la phi- losophie des mathématiques, dans les années 1664, 1665 et 1666; plus quatre leçons d'une date incertaine, qui ont pour objet d'indiquer la méthode par laquelle Archimède a découvert ses plus beaux théo- * L'anirersitë de Leyde possède de riches manuscrits qui lui ont été légués par Huygens , où se trouve, outre les productions de ce grand homme , une collection de lettres qu'il rece- vait de tous les savans. Messieurs les curateurs de cette université ont pensé , il y a quelques années, à faire imprimer une partie de ce précieux dépôt. Un projet aussi louable ne peut recevoir trop tôt son exécution. 110 HISTOIRE DE LA GÉOMÉTRIE. rèmes, et de montrer combien peu elle diffère de l'analyse moderne '. On ne pouvait remplir ce but avec plus de précision et de clarté que ne l'a fait Barrow; mais on regrette que ses autres leçons mathéma- tiques soient hérissées de citations grecques qui en rendent la lecture difficile. Enfin, Barrow, dans ses Lectiones opticœ, a appliqué avec habileté la Géométrie à un grand nombre de questions concernant la réflexion et la réfraction sur des surfaces courbes. Il a construit les points où se réunissent ïes rayons infiniment voisins; mais, malgré son goût et son habitude des spéculations géométriques, il n'a pas songé à con- sidérer la courbe qui nait de la succession de ces points ou de l'enve- loppe de ces rayons; comme Huygens, qui a touché de près aussi à la découverte de cette courbe , il en a laissé l'honneur à Tschirn- hausen. S 1 6. C'est ici le lieu précisément de parler du géomètre que nous venons de nommer. TscHiaîiHAcsEs , Tschirnhausen a reçu une grande célébrité de ses fameuses caus- tiques. Cette invention , en effet est devenue aussitôt la base de plusieurs théories physico-mathématiques. Considérée comme pure spéculation géométrique , elle avait le double avantage d'offrir un second exemple après les développées d'Huygens, de la génération des courbes comme enveloppes d'une droite mobile, et de donner naissance à une infinité de courbes rectifiables. des caustiques, de même que les développées, étaient en quelque sorte une application pratique de l'idée de De Beaune, d'exprimer la nature des courbes par quelque propriété commune à leurs tan- gentes. Mais ce n'est point cette considération abstraite qui a conduit Huygens et Tschirnhausen à l'invention des courbes qui portent leur nom ; et ce fut Leibnitz qui donna suite à l'idée de De Beaune, et la généralisa même en cherchant la courbe enveloppe d'une infinité de ' Quo planiùs appareat qualeni ille stibtilissimus vir ( Archimedes) analysin usurpârit, et quant hodiernœ nostrœ parum dissimilem. 1651 -1708. HISTOIRE DE LA GÉOMÉTRIE. 111 lignes droites ou courbes déterminées et liées entre elles par une pro- priété commune '. § 17. Tschirnhausen, homme de génie et l'un des plus passionnés pour la science qu'il cultivait, a encore eu d'autres titres, après l'in- Yention de ses caustiques, à un rang distingué dans l'histoire de la Géométrie. Dans un traité intitulé Medicina mentis, publié en 1686 ^, dont l'objet principal était d'indiquer les règles qui doivent nous guider dans la recherche de la vérité, Tschirnhausen, partant de cette idée, que les êtres mathématiques sont formés par le mouvement rapporté à quelque chose de fixe, proposa une génération nouvelle et univer- selle des courbes. Il les concevait décrites par un stylet qui tend un fil qui, étant fixé par ses extrémités à deux points fixes, glisse sur un ou plusieurs autres points fixes , ou s'enroule sur une ou plusieurs courbes de nature connue. C'était, comme on voit, une généralisation du mode de description des coniques au moyen de leurs foyers; géné- ralisation que Descartes avait déjà eu l'idée de transporter à la descrip- tion de ses ovales '. Tschirnhausen divisa les courbes en plusieurs genres, suivant qu'il y avait plus ou moins de foyers, et suivant la nature des courbes fixes. Il apprit à mener les tangentes aux courbes ainsi décrites; c'est là l'origine du problème de la tangente à une courbe exprimée par une équation dont les variables sont les distances d'un point quelconque de la courbe à plusieurs points fixes. S 18. Ce problème a eu quelque célébrité, et a été résolu de différentes manières originales par les premiers mathématiciens de " Acta Erud. Lipa. , ann. 1692 et 1694 , et OEuvres de Leibnitz , tom. III , p. 264 et 296. - Medicina mentit, sive tenlamen genuinœ logicœ , in quâ disseritur de methodo detegendi incognitos veritates, In-4o , Anist. On trouve dans le tom. III de In Bibliothèque universelle et historique (aaa. 1686), une ana- lyse très-détaillce de cet ouvr.ige remarquable de Tschirnhausen. 3 Géométrie de Descartes , liv. 2'. Ces courbes , imaginées par Desoartes , ont joué un grand rôle surtout dans sa Dioptrique. Nous n'en parlerons que dans notre quatrième Époque , où nous les trouverons reproduites dans le 1" livre des Principes de Newton. 112 HISTOIRE DE LA GEOMETRIE. l'époque : d'abord par Fatio de Duiller, qui releva une erreur échappée à Tschirnhausen, et dont la solution, basée sur de simples considéra- tions de Géométrie, nous parait offrir un des beaux exemples, aujour- d'hui très-rares, de la méthode des Anciens dans la construction des tangentes ' ; puis par le marquis de Lhopital qui , par la considération des infinimens petits, et sans calcul, en donna une construction élé- gante et de la plus grande généralité ^ ; et dans le même temps par Leibnitz, dont la solution a qui a cet avantage que l'esprit y fait tout sans calcul et sans diagramme, » repose sur un beau théorème de mécanique qu'il imagina à cet effet ^. Quelques années après , Herman compléta en quelque sorte cette théorie, en donnant une construction très-simple du rayon de courbure des mêmes courbes de Tschirnhau- sen, calculé directement et par la pure Géométrie, sans se servir des coordonnées auxiliaires de Descartes *. M. Poinsot a étendu aux surfaces ce mode de génération des courbes et la construction de leurs normales, et s'en est servi utilement dans un fort beau mémoire sur la mécanique ^ 1 Réflexions de M, Fatio de Duiller sur une méthode de trouver les tangentes de certaines lignes courbes, Bibliotbéqde cniveeseiie et historiqi'e , tom. V, année 1688. Tschirnhausen a répondu à ces réflexions de Fatio , et reconnu son erreur dans le tom. X du même recueil , même année. 2 Analyse des infinimens petits, section 2= , proposition 10. * Leibnitz considère \a question sous cet énoncé : « Mener la tangente d'une hgne courbe qui se décrit par des filets tendus. » Sa construction est fondée sur une règle générale de la composition des mouvemens, qu'on peut énoncer ainsi, en substituant à l'idée de mouve- ment celle de force , comme a fait Lagrange en reproduisant dans sa Mécanique analytique la condition d'équilibre qui résulte du principe de Leibnitz. « Si tant de forces qu'on voudra , qui sollicitent un point, sont représentées en grandeur et en direction par des droites, leur résultante passera par le centre de gravité des points extrêmes de ces droites , et sera égale en grandeur à la distance de ce point au point sollicité , multipliée par le nombre des forces. » (Journal des Savans , sept. 1693, et OEuvres de Leibnitz, tom. III, pag. 283.) Ce théorème peut être étendu au cas où les forces sont appliquées à des points différens d'un corps solide libre dans l'espace. {Correspondance mathématique de Bruxelles, tom. V, pag. 106.) 4 Methodus inveniendi radios osculi in curvis ex focis descriptis. Acta Erddit. , ann. 1702 j pag. SOI. 5 Théorie générale de l'équilibre et du mouvement des systèmes; 13"" cah. du Journ. de l'école HISTOIRE DE LA GÉOMÉTRIE. 113 5 19. Revenons à Tschirnhausen. En 1701, ce géomètre annonça à rAcadémic des sciences une nouvelle méthode générale, propre à suppléer le calcul infinitésimal dans plusieurs questions de haute Géo- métrie , telles que la construction des tangentes et des rayons de cour- bure '. Mais sa solution, qui reposait sur l'analyse de Descartes, n'était qu'une imitation des deux méthodes que ce grand géomètre avait don- nées du problème des tangentes, et qui consistaient à supposer que deux points d'une courbe distans d'abord l'uu de l'autre d'une quan- tité finie, venaient à se confondre. Le titre suivant : Essai dune méthode pour trouver les touchantes des courbes mécaniques , sans supposer aucune grandeur indéfini- ment petite ^, sous lequel Tschirnhausen présenta l'une de ses décou- vertes, fit grande sensation alors; et il devait en effet piquer vivement la curiosité des géomètres et assurer à son auteur, déjà célèbre, une gloire immortelle, si sa promesse était pleinement remplie. Mais cette méthode, loin de convenir à toute courbe mécanique proposée, ne s'appliquait qu'à un genre de courbes qui avaient pour abscisses des arcs d'une courbe géométrique à laquelle on savait mener les tan- gentes, et pour ordonnées des parallèles à une droite fixe ; et le calcul employé par Tschirnhausen était le même que pour le cas ordinaire où les abscisses étaient comptées sur une droite, au lieu d'être comptées sur un arc de courbe. Mais cette méthode avait toujours le mérite d'être une extension de celles de Descartes qui, pour maintenir l'uni- versalité et la suffisance de sa Géométrie, en avait exclu, comme on sait, les courbes mécaniques, désignant par ce mot celles qui ne pouvaient pas se déterminer par une mesure exacte et connue. Dès 1682, Tschirn- hausen avait exposé sa méthode des tangentes aux courbes géométri- ques, dans les actes de Leipzig, sous le titre IVova methodus tangentes curvarum expedite determinandi , et avait annoncé qu'il l'appliquerait plus tard aux courbes mécaniques. polytechnique. Co mëmoire vient d'être reproduit dans la 6* édition delà •S'/aft^wedeM. Poinsot. ' Histoire et Mémoires de l'Académie des Sciences, ann. 1701. 2 Mémoires de l'Académie des Sciences , ann. 1702. ToM. XI. 15 114 HISTOIRE DE LA GÉOMÉTRIE. aéBeiions «ur les mé- § 20. Lc but constaiit (Ic TscHimliausen , dans ses diverses spécu- thodes en Géométrie. ^ lations géométriques, était de rendre la Géométrie plus aisée, per- suadé que les véritables méthodes sont faciles ; que les plus ingénieuses ne sont point les vraies , dès qu'elles sont trop composées , et que la nature doit fournir quelque chose de plus simple. Nous rapportons à dessein cette pensée de Tschirnhausen, persuadé que toutes les vérités géométriques sont de même nature; qu'elles doivent être toutes également susceptibles de démonstrations faciles, et très-souvent intuitives. Et en effet, combien n'a-t-on pas d'exem- ples que celles qui avaient semblé d'abord présenter les plus grandes difficultés, et se refuser même à toutes les ressources des méthodes connues, sont devenues ensuite les plus simples et les plus évidentes? C'est qu'elles dépendaient de théories qui n'étaient point encore for- mées ou assez étendues, ou qui ne reposaient point sur leurs véritables bases. C'est en cela, soit dit en passant, que nous parait consister le principal avantage de l'analyse moderne sur la Géométrie. La première de ces deux méthodes a le merveilleux privilège de négliger les propositions inter- médiaires dont la seconde a toujours besoin, et qu'il faut créer quand la question est nouvelle. Mais cet avantage, si beau et si précieux, de l'analyse, a son côté faible, comme toutes les conceptions humaines; c'est que cette marche pénétrante et rapide, n'éclaire pas toujours suffisamment l'esprit; elle laisse ignorer les vérités intermédiaires qui rattachent la vérité trouvée avec le point de départ, et qui doivent former avec l'une et l'autre un ensemble complet et une véritable théorie. Car est-ce assez, dans l'étude philosophique et approfondie d'une science, de savoir quune chose est vraie, si l'on ignore com- ment et pourquoi elle l'est, et quelle place elle occupe dans l'ordre des vérités auquel elle appartient ? Il faut, ce me semble, dans l'état actuel de la Géométrie, pour at- teindre le but de Tschirnhausen, le perfectionnement indéfini de cette science, toujours observer, dans les spéculations auxquelles on appli- quera son esprit, les deux règles suivantes : lÊ HISTOIRE DE LA GÉOMÉTRIE. 115 1° Généraliser de plus en plus les propositions particulières, pour arriver de proche en proche à ce qu'il y a de plus général ; ce qui sera toujours, en même temps, ce qu'il y aura de plus simple, de plus naturel, et de plus facile ; 2" Ne point se contenter, dans la démonstration d'un théorème ou la solution d'un problème, d'un premier résultat, qui sufllrait s'il s'a- gissait d'une recherche particulière, indép.endante du système général d'une partie de la science; mais ne se satisfaire d'une démonstration ou d'une solution, que quand leur simplicité, ou leur déduction intui- tive de quelque théorie connue, prouvera qu'on a rattaché la question à la véritable doctrine dont elle dépend naturellement. Pour indiquer un moyen de reconnaître si la pratique de ces deux règles a conduit au but désiré, c'est-à-dire si l'on a rencontré les vraies routes de la vérité définitive, et pénétré jusqu'à son origine, nous croyons pouvoir dire que, dans chaque théorie, il doit toujours exister, et que l'on doit reconnaître, quelque vérité principale dont toutes les autres se déduisent aisément, comme simples transformations ou corollaires naturels; et que cette condition accomplie sera seule le cachet de la véritable perfection de la science. Nous ajouterons, avec un des géomètres modernes qui ont le plus médité sur la philosophie des mathématiques, « qu'on ne peut se flatter d'avoir le dernier mot d'une théorie , tant qu'on ne peut pas l'expliquer en peu de paroles à un passant dans la rue '.» Et en effet, les vérités grandes et primi- tives, dont toutes les autres dérivent, et qui sont les vraies bases de la science , ont toujours pour attribut caractéristique la simplicité et l'intuition ^. * Opinion de M. Gergonne, qui en faisait l'application à la nouvelle théorie des caustiques de M. Quetelet. Nouveaux Mémoires de F Académie de Bruxelles , tora. IV, pag. 88. 2 Cette opinion, admise dan» les sciences positives, est un résultat d'expérience, au- quel conduit la culture de chacune d'elles. Mai» on peut aussi la justifier à priori. Car les principes les plus généraux, c'est-à-dire qui s'étendent sur le plus grand nombre de faits particuliers , doivent être dégagés des diverses circonstances qui semblaient donner un ca- ractère distinctifet différent à chacun de ces faits particuliers, considéré isolément, avant qu'on eût découvert leur lien et leur origine commune ; car s'ils étaient compliqués de toutes 116 HISTOIRE DE LA GÉOMÉTRIE. t Division de la G^om^ S 21. Oïl aurd reïïiarqué , dans cette analyse succincte des progrès en trois branches, ^ ^ r^ > . s- t . prodigieux que la Géométrie a faits dans 1 intervalle d une trentaine d'années, que ces progrès furent dus principalement à deux grandes conceptions: celle des indivisibles de Cavalleri, et celle de V analyse appliquée aux lignes courbes, de Descartes. La première s'adaptait aux formes et aux procédés accoutumés de la Géométrie ancienne ; et l'on regarda comme appartenant à la Géo- métrie pure des Anciens les découvertes auxquelles conduisit cette méthode de Cavalleri. La deuxième, véritable instrument analytique, faisait de la Géomé- trie une science toute nouvelle , qui exciterait l'étonnement et l'admi- ration d'Archimède et d'Apollonius, qui n'en ont laissé aucun germe; on l'a appelée Géométrie mixte ^ Géom,étrie analytique, ou Géomé- trie de Descartes. Mais, tandis qu'une sorte de division s'établissait ainsi dans les mé- thodes de la Géométrie, un troisième mode de procéder, une troisième espèce de Géométrie, pour ainsi dire, prenait naissance. C'est celle que nous avons déjà dit avoir été employée par Pascal et Desargues, et dont les premiers germes se trouvaient dans les porismes d'Euclide, et nous ont été conservés par Pappus dans ses collections mathéma- tiques. Ainsi donc nous voyons la Géométrie divisée en trois branches : La première comprend la Géométrie des Anciens , aidée de la doc- trine des indivisibles et de celle des mouvemens composés; La deuxième est l'analyse de Descartes, accrue des procédés de Fermât, dans sa méthode de maximis etminitnis, pour calculer l'infini; La troisième Mifin est cette Géométrie pure, qui se distingue essen- tiellement par son abstraction et sa généralité ; dont Pascal et Desar- gues ont donné les premiers exemples dans leurs traités des coniques, ces circonstances ou propriétés particulières, ils en porteraient l'empreinte dans tous leurs corollaires , et ne donneraient lieu , généralement , qu'à des vérités excessivement embarras- sées et compliquées elles-mêmes. Ces principes les plus généraux sont donc nécessairement , par leur nature , les plus simples. ê # HISTOIRE DE LA GÉOMÉTRIE. 117 et dont nous verrons que Monge et Camot, au commencement de ce siècle, ont assis les fondemens sur des principes larges et féconds. Cette troisième branche de la Géométrie, qui constitue aujourd'hui ce que nous appelons la Géométrie récente, est exempte de calculs algébriques, quoiqu'elle fasse un aussi heureux usage des relations métriques des figures que de leurs relations de situation, ou descrip- tives ; mais elle ne considère que des rapports de distances rectilignes d'un certain genre, qui n'exigent ni les symboles ni les opérations de l'algèbre. Cette Géométrie est la continuation de Vanalyse géométrique des Anciens , dont elle ne diffère point quant au but et à la nature de ses spéculations; mais sur laquelle elle offre d'immenses avantages, par la généralité, l'uniformité et l'abstraction de ses conceptions, et de ses méthodes, qui ont remplacé les propositions particulières, incom- , plètes et sans liaison , qui formaient toute la science et l'unique res- source des Anciens, et surtout par l'usage, si utile, de la contempla- tion des figures à trois dimensions dans les simples questions de Géo- métrie plane. C'est dans celte Géométrie générale que rentrent les théories et leurs appliciitions, auxquelles on a donné, dans ces derniers temps, les dénominations de Géométrie de la règle, et Géométrie de situa- tion, suivant qu'on y faisait usage d'intersections de lignes droites seulement, ou d'intersections de courbes ou de surfaces, dans l'es- pace, pour découvrir les propriétés descriptives des figures. Des trois branches, bien distinctes, que nous venons de reconnaître dans la Géométrie, la seconde, qui est l'analyse de Descartes, offrit un tel attrait, et de si prodigieux avantages, qu'elle fut cultivée avec une prédilection marquée par les grands géomètres que nous avons nom- més dans le cours de cette troisième Époque. Il est vrai que cette Géométrie de Descartes, loin d'offrir un ordre de spéculations particulières, n'était autre qu'un instrument universel , propre à toutes les conceptions géométriques anciennes et modernes. S 22. Quelques mathématiciens cependant furent encore fidèles s\ la 118 HISTOIRE DE LA GÉOMÉTRIE. ^ méthode des Anciens. Parmi eux on distingue surtout De La Hire. DE LA HIRE, Ce géomètre, quoique familiarisé avec l'analyse de Descartes ^ enri- 1640-1718. chit la Géométrie pure de plusieurs ouvrages écrits dans le style des A.nciens , et qui eurent beaucoup de succès. Il fut aussi le digne continuateur des doctrines de Desargues et de Pascal, et introduisit dans la Géométrie, principalement par une nouvelle façon d'engendrer les coniques sur le plan, plusieurs inno- vations qui se rapportent aux méthodes récentes. C'est donc à un double titre que nous avons à citer ici ce célèbre mathématicien. Ses principaux ouvrages écrits dans le style de la Géométrie an- cienne sont : le grand traité des sections coniques , intitulé Sectiones conicœ in novem libros distributœ (in-fol., Paris 1685); son Mé- moire sur les épicycloïdes , contenant leurs dimensions , leurs déve- loppées et leur usage en mécanique pour la construction des roues dentées '; un second mémoire sur le même sujet, généralisé et ap- pliqué à toutes sortes de courbes, sous le titre : Traité des roulettes, où Von démontre la manière universelle de trouver leurs touchantes , leurs points d'inflexion et de rebroussement, leurs superficies et leurs longueurs , par la Géométrie ordinaire ^; et un mémoire sur les conchoïdes en général, contenant leurs tangentes, leurs dimensions, leurs longueurs, leurs points d'inflexion; (inséré dans les mémoires de l'Académie des sciences, année 1708). Nous devons ajouter à cette liste le Traité de Gnomonique , qui parut en 1682, et qui était un ouvrage vraiment nouveau, où De La Hire résolvait toutes les questions graphiquement, sans trigonométrie ' Ce rnémoire a paru en 1694, parmi d'autres mémoires de mathématiques et de physique de De La Hire. Il a été imprimé de nouveau dans le tom. IX des anciens Mémoires de l'Aca- démie des Sciences. De La Uire y dit qu'il y a vingt ans qu'il avait découvert les épicycloïdes et leur usage en mécanique. Depuis , Leibnitz a revendiqué l'honneur de cette double invention pour le célè- bre astronome Roeraer , qui l'aurait imaginée en 167-4 , pendant son séjour à Paris. Mais, comme nous l'avons déjà dit, il parait, d'après De La Hire lui-même, que la partie méca- nique, au moins, de cette invention remonte h Desargues. 2 Imprimé en 170-4 dans les Mémoires de l'Acadèm.ie des Sciences. ♦ HISTOIRE DE LA GÉOMÉTRIE. 119 même rectiligne, et en n'employant que le compas, la règle et le fil- à- plomb. S 23. Le traité des sections coniques eut une grande réputation dans toute l'Europe savante, et fit regarder De La Hire comme un auteur original sur cette matière. Sa méthode en effet, quoique pure- ment synthétique comme celle des Anciens, en différait pourtant essentiellement. Les Anciens avaient considéré les sections coniques dans le cône, mais seulement pour en concevoir la génération et en démontrer quelques propriétés principales (dont la plus considérable était le rapport constant du carré de l'ordonnée au produit des segmens faits sur l'axe) ', et faire servir ensuite ces propriétés primi- tives à la recherche et à la démonstration de toutes les autres : de sorte qu'ils formaient leur théorie des coniques sans connaître la na- ture ni aucune propriété du cône, et indépendamment de celles du cercle qui lui sert de base; et même Apollonius démontre souvent les propriétés du cercle de la même manière et en même temps que celles de l'ellipse. De La Hire conçut une marche plus rationnelle et plus méthodique, et conséquemment plus courte et plus lumineuse. Il com- mença par établir les propriétés du cercle qui devaient se représenter ' Si l'on demande la raison de la fécondité de cette propriété des coniques , on dira , en Géo- métrie analytique, que c'est parce qu'elle n'est autre que l'équation même de la courbe, et que dès-lors il n'est point étonnant que cette propriété se prête à toutes les transformations que l'on ferait subir à cette équation. Mais en Géométrie pure, il faut remonter à une raison plus di- recte , et prise de la nature seule de la chose, et non empruntée d'un système de coordonnées auxiliaire et artificiel ; et l'on reconnaît alors que cette raison est que la relation en question exprime une propriété de six points pris sur une conique. Mais ces six points n'ont pas entre eux toute la généralité de position possible ; quatre de ces points sont deux à deux sur deux droites parallèles. Hais, malgré cette condition restreinte , la relation dont il s'agit suffit pour construire une conique par points , quand on en connaît cinq , donnés arbitrairement. On conçoit donc qu'elle doit suffire aussi pour conduire à toutes les propriétés des coniques. Mais il faudra souvent suivre une voie moins directe, qui nécessitera quelques détours de plus que si l'on connaissait une relation générale de six points quelconques d'une conique. Cette observation explique pourquoi les beaux théorèmes de Desargues et de Pascal, qui expriment cette relation tout-à-fait générale de six points d'une conique, ont apporté dans cette théorie une facilité inconnue aux Anciens. 120 HISTOIRE DE LA GÉOMÉTRIE. ' dans les coniques, particulièrement celles qui tiennent à la division harmonique; et ensuite, il en fit usage pour découvrir et démontrer dans les sections du cône les propriétés analogues. Et cette méthode eut cela de remarquable alors, qu'elle ne faisait point usage du triangle par Taxe, et qu'elle s'appliquait indistinctement à toutes les sections du cône. Cette manière de procéder était, comme on voit, dans l'esprit de celle de Desargues et de Pascal, qui, par la perspective, transportaient aux coniques les propriétés du cercle. De La Hire a pu aussi emprun- ter du Brouillon projet des Coniques de Desargues, l'usage heureux que l'auteur y faisait de la proportion harmonique et de quelques re- lations d'involution. • C'est sous ces deux rapports que nous regar- dons ce géomètre comme le continuateur des doctrines de Desargues et de Pascal. S 24. Nous devons dire que la nouvelle méthode qui fait dériver les propriétés des coniques de celles du cercle, et de la considération du solide dans lequel ces courbes prennent naissance , avait déjà été pra- tiquée par deux géomètres du siècle précédent. D'abord par Verner, de Nuremberg, qui avait démontré ainsi plusieurs propriétés élémen- taires des sections coniques ' ; et ensuite avec plus d'étendue et d'une manière plus savante, par le célèbre Maurolicus de Messine, qui, après avoir traduit plusieurs écrits des Anciens, mit au jour, entre au- tres nombreux ouvrages de lui-même, un Traité des Coniques, où il suivit cette marche nouvelle, attribuant à celle qu'avaient suivie les Anciens, la prolixité de leurs démonstrations^. Il est juste de citer encore à ce sujet Guarini, contemporain de De La Hire, qui avait aussi donné en 1671, un Traité des Coniques, 1 /. P^erneri Lihellus super vigintiduohus elementis conicis , etc. ; in-4°. 1S22. 2 Çuoniam Âpollonms omnia ferè conicorum demonstrata conatus est in planutn rédigera , antiqtiioribtis insignior ; neglectâ conorum descriptione , et aliundè quœrens argumenta , cogi- tur persœpe obscurius et indirecte demonstrare id , quod contemplando solidce figurœ sectionem , apertius et brevius demonstratur, (D. Francisci Madrolici Opuscbla uathematica. In-4''; Venetiis, 1575 ;pag. 280.) HISTOIRE DE LA GÉOMÉTRIEJ «1 où il faisait un usage fréquent de la considération du cône, pour dé- montrer leurs propriétés. On y remarque surtout une démonstration extrêmement simple , et qui s'applique aux trois sections coniques en même temps, de la propriété du rapport constant des produits des segmens faits sur des cordes parallèles, qui avait toujours exigé la connaissance de plusieurs propositions préliminaires. Cette méthode était un progrès dans la théorie des coniques; mais Guarini, extrême- ment savant du reste dans toutes les parties de la Géométrie, ne l'a pas suivie systématiquement et avec le talent de De La Hire. ( Voir au sujet de Maurolicus et de Guarini la Note XVII.) § 25. Nous dirons, en passant, qu'outre la méthode des Anciens et celle adoptée par De La Hire, nous en concevons une troisième qui n'a point été employée, et qui eût été propre pourtant, si nous ne nous abusons, à simplifier extrêmement les démonstrations, et à mettre dans tout leur jour les principes et la véritable origine des diverses pro- priétés des coniques : sous ce rapport, on ne peut se dissimuler que la méthode des Anciens n'offrait qu'obscurité. Cette méthode eût consisté à étudier les propriétés du cône lui- même, et à les formuler, indépendamment et abstraction faite de celles des coniques ; et celles-ci se seraient déduites des premières avec une facilité et une généralité ravissantes. On le concevra sans peine, car partout où les Anciens employaient trois démonstrations différentes pour démontrer la même propriété dans les trois sections coniques, ellipse, hyperbole et parabole, parce qu'ils s'appuyaient sur les caractères particuliers à chacune de ces courbes, une seule démonstration suffira pour démontrer, dans le cône même, la propriété analogue , d'où celles des trois coniques doivent se déduire comme de leur vraie et commune origine. De cette manière, on eût vu prendre naissance dans le cône à plu- sieurs propriétés des coniques, telles que celle des foyers, qu'il semble qu'Apollonius ait devinée; et que ce géomètre, ni aucun de ceux qut l'ont suivi, n'ont rattachée ni aux propriétés du cercle, ni à celles du cône; de sorte que l'origine première de ces points singuliers, celle To«. XI. 16 121 HISTOIRE DE LA GÉOMÉTRIE. qui ne participe que de la nature du cône où la courbe prend nais- sance, est restée ignorée. Un autre avantage de la méthode que nous indiquons eût été de former, en même temps que la théorie des coniques, celle des cônes à base circulaire, dont très-peu de propriétés étaient connues jusqu'à ces derniers temps. Cela n'eût présenté aucune difficulté; et nous croyons pouvoir en indiquer comme preuve l'essai que nous avons fait de cette méthode dans un mémoire, où, en n'admettant que les seules propriétés du cercle dont la plupart sont évidentes, nous sommes parvenu à un très-grand nombre de propriétés nouvelles des cônes du second degré, dont une partie sont analogues et conduisent à celles des foyers des coniques; ce qui montre comment l'existence de ces points et leurs propriétés se rattachent à celles du cône '. On penserait, à la lecture des premiers mots du Traité des sections Coniques de Wallis, que la méthode que nous venons de proposer fût celle que suivit ce grand géomètre. Car il annonce qu'ayant re- connu que la théorie des coniques est difficile, et dans le but de la simplifier, il va d'abord étudier la nature du cône mieux que n'ont fait les Anciens, pour en déduire, comme de leur vraie source, les pro- priétés de ces courbes. Mais Wallis se hâte d'ajouter qu'il se bor- nera aux principales de ces propriétés , à celles qui peuvent conduire à la découverte de toutes les autres. Et en effet, après avoir démon- tré celle qui lui sert à exprimer les coniques par utie équation entre deux coordonnées, à la manière de Descartes, il suit une autre marche, et donne un traité analytique de ces courbes. § 26. Revenons au traité de De La Hire. Cet ouvrage est divisé en neuf livres. Le premier, qui est le fondement de tout lé reste, traite successivement des propriétés de la division harmonique d'une ligne droite ; de celles des faisceaux harmoniques ; et enfin des lignes divisées harmoniquement dans le cercle. Il s'y trouvé aussi quelques ' Mémoire de Géométrie pure sur les propriétés générales des cônes du second degré. 111-4° ; 1830. HISTOIRE DE LA GEOMETRIE. 123 cas particuliers de la relation d'involution de six points, quoique cette relation ne s'y trouve pas dans toute sa généralité. Ce livre est une introduction d'où se déduisent, dans la suite, des démonstrations fa- ciles et générales de théorèmes qui avaient coûté aux Anciens de longs et pénibles développemens. C'est en cela que consistent la nouveauté et le mérite de la méthode de De La Ilire. A l'exception du problème ad très et quatuor lineas, et des beaux théorèmes généraux qui faisaient la base des ouvrages de Desargues et de Pascal, toutes les autres propriétés connues des coniques se trou- vaient réunies, pour la première fois, dans le traité de De La Hire, et démontrées synthétiquement d'une manière uniforme et élégante. Plusieurs étaient dues à ce géomètre. Parmi celles-ci, nous citerons d'abord la théorie des pôles, qui consiste dans les trois théorèmes suivans : 1° « Si, autour d'un point fixe, on fait tourner une transversale qui )) rencontre une conique en deux points , les tangentes en ces points )) se croiseront toujours sur une môme droite. ( Propositions 27 et 28 du livre l^S et 24 et 27 du livre 2. ) Et réciproquement « Si de chaque point d'une droite on mène deux )) tangentes à une conique, la droite qui joindra les deux points de )) contact passera par un point fixe. » ( Propositions 26 et 28 du livre le% et 23 et 26 du livre 2. ) Ce point a été appelé, dans ces derniers temps, lepôle de la droite, et cette droite la polaire du point. 2° (( Si par un point fixe on mène plusieurs transversales qui ren- contrent une conique, les droites qui joindront deux à deux les points de rencontre de deux quelconques des transversales se rencontreront sur la polaire du point fixe. » (Propositions 22 et 23 du livre l^*", et 30 du livre 2. ) 3» Enfin (( Le point où chaque transversale rencontrera la polaire » du point fixe sera le conjugué harmonique de ce point fixe, par )) rapport aux deux points où cette transversale rencontre la courbe.» ( Propositions 21 du livre l*''', et 23 et 26 du livre 2.) 124 HISTOIRE DE LA GEOMETRIE. Cette dernière proposition était connue d' Apollonius. Elle est, dans le traité de De La Hire, la proposition fondamentale dont presque toutes les autres se déduisent. On voit, par exemple, dans la proposition 3 du 3«= livre, comment elle conduit naturellement à la propriété du carré de l'ordonnée comparé au rectangle fait sur l'axe. Ainsi cette proposition joue dans le grand traité de De La Hire le même rôle que la proposition du latus rectum, dans Apollonius ; que le théorème de l'involution de six points dans le Brouillon projet des Co- niques de Desargues; et que l'hexagramme mystique dans l'ouvrage de Pascal. Il est aisé de voir que, des trois propositions que nous avons énon- cées, les deux premières sont comprises dans le théorème sur le qua^ drilatère inscrit aux coniques, que nous avons dit que Pascal avait probablement déduit de son hexagramme , et que la troisième est une conséquence aussi de ce même théorème, au moyen de la 131'ns pro- position du 1*^ livre des Collections mathématiques , que nous avons citée en parlant de Pappus. Mais l'ouvrage de Pascal n'ayant jamais été publié, De La Hire a le mérite de l'invention de ces belles propositions. Depuis elles ont été reproduites par Maclaurin, dans son Traité des Fluxions, et dans son Traité des courbes géométriques ; par R. Simson, dans son Traité des Sections coniques ; par Carnot, dans sa Théorie des Transversales ; et par divers autres géomètres. La première et sa réciproque ont été démontrées dans la Géométrie descriptive de Monge, d'une manière intuitive fort élégante, et ont été étendues par cet illustre géomètre aux surfaces du second degré. C'est de cette époque que datent l'importance et les usages de cette théorie des pôles, renfermée auparavant dans les ouvrages profonds que nous venons de nommer, et presque inconnue aux jeunes géo- mètres qui n'ont étudié les coniques que dans les traités analytiques. Parmi d'autres propriétés remarquables des sections coniques , dues à De La Hire , nous citerons encore le lieu géométrique du sommet HISTOIRE DE LA GEOMETRIE. 125 d'un angle droit circonscrit à une conique, lequel est un cercle pour l'ellipse et l'hyperbole, et une droite pour la parabole (8« livre, pro- positions 26 , 27 et 28) ' ; et c'est Monge aussi qui a généralisé cette proposition, et fait \oir que le point d'intersection de trois plans rec- tangulaires, tangens à une surface du second degré, se trouve toujours sur une sphère, qui devient un plan si la surface est un paraboloïde. De La Hire a aussi considérablement enrichi la théorie des foyers , et donné une construction élégante et facile , par la ligne droite et le cercle , d'une conique qui doit passer par trois points et dont le foyer est donné. Problème utile en astronomie, et pour lequel le célèbre astronome et géomètre Ualley, qui l'avait résolu le premier, avait em- ployé une hyperbole "• S 27. Jusqu'à Descartes, il n'y avait eu qu'une manière de con- cevoir la génération des coniques, c'était dans le solide; c'est-à-dire, dans le cône à base circulaire. Mais la Géométrie de cet illustre nova- leur fit, comme dans les autres parties des mathématiques, une révolu- tion complète dans la théorie de ces courbes : elle apprit à leur donner naissance sur le plan, et sans qu'il fut besoin d'employer la consi- dération du cône. Il suffisait à Descartes de remarquer que dans son système de coordonnées toutes les coniques étaient représentées par l'équation générale du second degré. Ce mode d'expression analytique • De La Hire a aussi donné (dans les Mémoires de l'Académie des Sciences, année 1704), lo lieu des angles égaux, aigus ou obtus, circonscrits à une conique , lequel est une courbe du quatrième degré , qui se réduit au second , et devient une hyperbole , quand la conique proposée est une parabole. Dans ce même mémoire. De La Hire a traité la même question pour la cycloïde, et est parvenu à ce résultat curieux, savoir, que tous les angles égaux , droits , aigus ou obtus , circonscrits à cette courbe, ont leurs sommets sur une seconde cycloïde raccourcie ou alongée. Nous avons trouvé que les épicycloïdes du cercle jouissent de la même propriété ; c'est-à- dire que : Si à une épicycloïde engendrée par un point d'une circonférence de cercle qui roule sttr un au- tre cercle fixe , on circonscrit des angles tous égaux entre eux , leurs sommets seront situés sur une épicycloïde alongée ou raccourcie. * Methodus directo et geometrica cujus ope incestigantur Aphelia , etc. , Planetarum. Tbaî^sac- Tions FHiLosoPBiQUEs, anuéc 1676, n° 128. 126 HISTOIRE DE LA GEOMETRIE. était propre à la recherche et au développement de leurs nombreuses propriétés. Cette méthode fut adoptée d'abord par Wallis, qui, le premier, donna un traité analytique des sections coniques, et depuis par la plupart des géomètres qui écrivirent sur ces courbes. Cepen- dant on continua encore pendant un siècle, de considérer les coniques dans le cône; et les traités qui parurent dans cet intervalle réunirent les deux méthodes, celle des Anciens et celle de Descartes. La manière de Desargues et de Pascal de considérer les coniques, rentrait dans celle des Anciens, puisqu'ils formaient ces courbes par la perspective du cercle. Mais leur méthode tirait un de ses principaux avantages de l'emploi de la théorie des transversales, dont les Anciens avaient fait usage dans les systèmes de lignes droites seulement, et non dans la théorie du cercle ni des coniques. Grégoire de St.-Vincent, comme nous l'avons dit, avait imaginé de nombreuses manières de former les coniques, l'une par l'autre ; Schooten en avait donné diverses descriptions organiques; De Witt avait fait un pas de plus, en formant ces courbes de différentes manières assez gé- nérales, dont il s'était servi avec habileté pour démontrer leurs pro- priétés principales ; mais ses modes de description n'étaient pas les mêmes pour les trois courbes. De La llire , ayant sous les yeux la manière universelle , mais ana- lytique de Descartes, et les tentatives de De Witt, chercha aussi un mode de description générale des coniques sur le plan, qui put servir à démontrer leurs mêmes propriétés que dans le solide. § 28. Il exécuta son dessein de deux manières , dans deux ouvrages qui précédèrent son grand traité de 1685^ et commencèrent sa réputa- tion comme géomètre, en 1673 et 1679. Dans le traité de 1679 \ De La Hire définit les sections coniques des courbes, telles que la somme ou la difierence des distances de cha- cun de leurs points à deux points fixes, est constante, ou bien dont I Nouveaux élémens des sections coniques. Les lieux géométriques, La construction ou effection des équations, (ln-12 ; 1679.) HISTOIRE DE LA GEOMETRIE. 127 chaque point est à égale distance d'un point et d'une droite fixes. De ce seul point de départ, il conclut un grand nombre de propriétés de ces courbes. Cette manière de présenter la théorie des coniques a été adoptée par plusieurs géomètres, qui en ont fait la base de leurs ouvrages; tels que le marquis de Lhopital, R. Simson, Guisnée, Mauduit, etc. De La Uire réunit à cet ouvrage deux autres parties différentes sur les lieux géométriques, traités par la méthode de Descartes, et sur leur usage pour la construction des équations. Cette dernière partie est terminée par la construction, en n'em- ployant que la ligne droite et le cercle, d'un des plus fameux problèmes sur les coniques, qui est de leur mener une normale par un point pris au dehors de la courbe. Andersen ', Sluze et Iluygens l'avaient résolu pour la parabole seulement ; ce qui n'offrait pas une grande difficulté, parce que la question n'ayant dans ce cas que trois solutions , elle pouvait être résolue par un seul cercle. Mais le cas de l'ellipse et de l'hyperbole, qui admet quatre solutions, était une question très-diffi- cile, qui suffisait pour prouver toute la sagacité de De La Hire dans l'analyse de Descartes. S 29. Le traité de 1673, intitulé : Nouvelle méthode en Géométrie, pour les sections des superficies coniques et cylindriques , est celui où De La Hire se montre traiment original et novateur, et celui surtout qui nous porte à mettre ce géomètre au rang des fondateurs de la Géométrie Moderne. Cet ouvrage se compose de deux parties, dont chacune offre une méthode nouvelle, et a un mérite différent. Le titre que nous venons d'énoncer se rapporte j)lus particulièrement à la première partie, où l'auteur considère les coniques dans le cône : la deuxième, où il les engendre sur le plan, est intitulée Planiconiques. La première partie peut être regardée comme un essai de la méthode que De La Hire a suivie, douze ans après, dans son grand traité; car ' A. Andersoni Exercitafionum mttlhematicarunt Deçà» prima, etc. Paris; 1610, in-4'>. 128 HISTOIRE DE LA GEOMETRIE. il y commence par vingt lemmes qui roulent sur la même matière que le l^^ livre de ce traité, et dont il se sert ensuite pour démontrer avec une généralité nouvelle alors, et sans se servir du triangle par l'axe, les principales propriétés des coniques. Mais ses démonstrations sont loin d'offrir le même degré d'élégance et de simplicité que celles du traité de 1685. Dans ses Planiconiques , De La Hire imagina une description géné- rale des coniques sur le plan, au moyen du cercle, comme dans l'espace, et sans connaître aucune propriété de ces courbes : puis, il fit voir que les courbes ainsi engendrées sont effectivement les mêmes que celles que l'on peut tracer, dans l'espace, sur le cône. Ce que cette méthode a surtout de beau, c'est que les mêmes lemmes qui ont servi à trans- porter aux sections du cône les propriétés du cercle, servent pareil- lement pour les appliquer aux planiconiques , et les démonstrations restent les mêmes que dans la première partie. § 30. Ce premier ouvrage de De La Hire étant extrêmement rare , et les auteurs qui en ont parlé dans le temps , n'en ayant point fait connaître l'esprit '^ on nous pardonnera d'entrer ici dans quelques développemens pour dire ce qu'était cette merveilleuse théorie des planiconiques , restée si long-temps ensevelie et ignorée, et qui offrait la première méthode suffisamment générale pour la transformation des figures en d'autres figures du même genre. Concevons dans un plan deux droites parallèles entre elles, que l'au- teur appelle V une formatrice , l'autre directrice , et un point appelé ' Les Transactions philosophiques, année 1676, n" 129, rendent un compte favorable de l'ouvrage de De La Hire, mais ne parlent pas de la partie des Planiconiques. Le Journal des Savans , année 1674 (17 décembre), après avoir donné l'analyse de la pre- mière partie de l'ouvrage , dit ces seuls mots des planiconiques, qui devaient suffire pour les préserver de l'oubli : « L'auteur a ajouté à sa nouvelle méthode un traité des planiconiques , n qui est très-beau et très-commode , puisque, par là , il n'est plus besoin d'imaginer aucun 11 solide, ni plan , que celui sur lequel est la figure. » Wolf, dans son Commentaire des principaux écrits des géomètres, cite les autres ouvrages de De La Hire et omet celui dont il est ici question. Montucla n'en dit mot non plus. Cepen- dant Cornélius à Beughem en avait fait mention dans sa Bibliographica mathematica , et Murrhard , depuis , l'a inscrit aussi dans sa Bihîiotheca mathematica. HISTOIRE DE LA GEOMETRIE. 129 pôle. Par chaque point M d'une courbe donnée dans le plan, on mène, sous une direction arbitraire, une transversale ; elle rencontre la direc- trice en un point qu'on joint au pôle par une droite, et la formatrice en un deuxième point par lequel on tire une parallèle à cette droite. Cette parallèle rencontre la droite qui va du point M an pôle, en un point 31' , qui est dit formé par le point M. Chaqjie point de la courbe proposée formera ainsi le point corres- pondant d'une seconde courbe. Les points d'une ligne droite formeront des points appartenant à une deuxième ligne droite, et ces deux droites se couperont sur la formatrice. Enfin , les points d'un cercle formeront les points d'une section conique. Pour démontrer cette proposition sans supposer aucune propriété des coniques, DeLaHire imagine un cône à base circulaire, dans lequel est faite une section plane ; il abat le plan du cercle sur celui de la sec- tion en le faisant tourner autour de la droite d'intersection de ces deux plans ; puis , prenant cette droite pour formatrice , une seconde droite (qui, dans la position primitive du plan du cercle, était son intersection par un plan mené par le sommet du cône parallèlement à celui de la section), pour directrice , et pour pôle un certain point qu'il déter- mine convenablement, il prouve, par des comparaisons de triangles semblables, que la section peut être formée j)ar le cercle '. Telle est la méthode par laquelle De La Hire effectuait sur le plan, sans avoir besoin d'aucun solide, ni d'autre plan que celui de la figure, les sections d'un cône. C'est ce qu'il appelait îéduire le cône et ses sections en plan. J'appliquai à ces sections planes , dit-il dans la pré- face de son traité de 1679, les mêmes démonstrations que j'avais faites pour les solides, et je puis dire que cet ouvrage eut assez de bonheur pour mériter l'approbation des plus savans géomètres. L'éclat que jeta cette première production de De La Hire fut de peu ' Cette dcmonstrntioa est assez difficile; le principe de perspective que nous avons déduit du théorème de Desargues en offre une qui est naturelle et d'une extrême simplicité. Toa. XI. 17 ' 180 HISTOIRE DE LA GÉOMÉTRIE. de durée, et cet ouvrage, malgré son mérite incontestable, est, depuis plus d'un siècle, tombé dans l'oubli ; ce dont nous nous étonnerions, si nous ne savions que chaque époque a ses questions du moment, et que les idées les meilleures et les plus fécondes, pour être bien saisies, doi- vent venir dans le temps où les esprits sont tournés vers l'objet auquel * elles se rapportent. L'étude des sciences nous offre à chaque pas la preuve de cette vérité '. LE POIVRE. S 31 . La méthode de De La Hire a pourtant été reproduite, ou plutôt inventée de nouveau, en 1704, par Le Poivre (de Mons), géomètre inconnu de nos jours, mais qu'il y aurait injustice à ne pas nommer à côté de Desargues, Pascal et De La Hire dans l'histoire de l'origine et des progrès de la Géométrie moderne. Son ouvrage est intitulé : Traité des sections du cylindre et du cône, considérées dans le solide et dans le plan, avec des démonstrations simples et nouvelles. (In-8o de 60 pages). La partie relative à la description des coniques sur le plan n'est au fond que la méthode de De La Hire, mais pré- sentée d'une manière très-différente qui mérite que nous en exposions ici l'esprit et les procédés ". Il paraît que la première idée de l'auteur a été de tracer sur un cône une section plane, sans mener effectivement le plan qui la con- 1 Nous pourrions ajouter avec Montucla: «Qu'il est des préjugés jusque dans la Géométrie , et qu'il est rare que ceux qui sont dès long-temps accoutumés à une certaine manière de raisonner soient disposés à quitter une ancienne habitude pour en contracter une nouvelle. » [Histoire des mathématiques, tom. II, pag. 1-4-4.) 2 II a été rendu compte de cet ouvrage dans le Journal des Savans, année 170-4 ; et dans les Acta eruditorum , année 1707. L'article fort étendu du Journal des Savans paraît supposer que la méthode de Le Poivre est prise de celle de De La Hire. Mais la voie d'invention est trop différente dans l'une et l'autre , pour que nous adoptions cette conjecture. Ajoutons que l'ouvrage de Le Poivro a un mérite qui ne se trouve pas dans celui de De La Hire et qui n'a point été remarqué par l'auteur de l'article du journal; c'est de contenir un second mode de description de ses figures, basé sur leurs relations métriques , dont l'auteur aurait pu tirer un parti considérable s'il eût poussé plus loin cette idée heureuse. Le Journal de Leipzig parle très-favorablement de l'ouvrage de Le Poivre. « Non solum, inquit , intra paucas pagellas palmarias sectionum conicarum proprietates mira facilitate ac perspicuitate explicatj sed inter eas quoque aliquot proponit anteà parum cognitas. HISTOIRE DE LA GÉOMÉTRIE. 131 tient; ce qu'il fait de deux manières : par l'intersection de chaque arête du cône par une autre droite menée convenablement, ou bien par une proportion dont le dernier terme détermine sur chaque arête le point de la section. Puis, il remarque que ces mêmes procédés peu- vent s'exécuter aussi sur le plan même du cercle qui sert de base au cône, comme dans l'espace, et donner naissance aux mêmes courbes. Concevons un cône à base circulaire ; un plan coupant mené arbi- trairement déterminera sur le cône une section; c'est cette courbe qu'il s'agit de construire en faisant abstraction du plan sur lequel elle se trouve. Pour cela, il faut d'abord prendre dans l'espace les élémens nécessaires à la détermination de la position de ce plan; ce qui peut se faire de diverses manières. Le Poivre prend la trace du plan coupant sur la base du cône et une seconde droite parallèle à cette trace, et qui est l'intersection du plan de la base par le plan mené par le sommet du cône parallèlement au plan coupant. Ces deux droites et le sommet du cône déterminent la position du plan coupant; ces trois données devront donc suffire pour la construction de la courbe qui résulterait de l'intersection du cône et de ce plan , s'il existait réellement. Or, il est aisé de voir que, pour effectuer cette construction, il n'y a qu'à mener par un point M du cercle, base du cône, appelé cercle générateur , une transversale quelconque qui rencontrera la trace du plan coupant et sa parallèle, en deux points; joindre le deuxième de ces points au sommet S du cône, par une droite, et mener par l'autre point une parallèle à cette droite. Cette parallèle sera évidemment dans le plan coupant, et rencontrera l'arête SM du cône, en un point M' qui appartiendra à la courbe cherchée. Pour un autre point du cercle générateur , on aura un autre point de la section. Cette construction est générale, quelle que soit la position du point S dans l'espace ; et elle subsiste quand ce point est situé sur le plan du cercle, auquel cas il n'y a plus de côhe. La courbe formée alors par le point est encore une section conique '. ' Pour s'en convaincre, il suffit de concevoir la courbe que nous venons de construire dans 132 HISTOIRE DE LA GÉOMÉTRIE. Ainsi, la construction de l'auteur s'applique à la description des coniques sur le plan, comme dans l'espace. Pour le cas du plan, c'est comme on voit , la même construction que celle de De La Hire. Le point S est le pôle , la trace du plan coupant est la formatrice , et sa parallèle est' la directrice. S 32. Il y a, en général, dans les questions de Géométrie deux ma- nières d'appliquer les solutions auxquelles la théorie a conduit. La pre- mière, est de déterminer les points cherchés par des constructions de lignes; la seconde de les déterminer par des formules qui se réduisent ensuite à des calculs numériques. Il est toujours utile de chercher ces deux genres de solutions , parce que chacune comporte des propriétés de la figure, que l'autre n'indique point; et la question n'est résolue complètement que quand elle a été envisagée sous toutes ses faces , et que les diverses propriétés graphiques et métriques qui se rattachent aux deux solutions dont nous parlons , ont été découvertes et mises dans tout leur jour. La construction que nous venons de donner pour décrire les co- niques, soit dans l'espace, soit sur le plan, appartient au premier mode de solution. Pour la convertir en une formule numérique, on compare deux triangles semblables qui ont un sommet commun au point M du cercle générateur, et on en tire une proportion entre leurs côtés adjacens à ce sommet. Cette proportion donne la distance du point M' de la conique au point correspondant du cercle ; c'est la for- mule cherchée '. l'espace , et de la projeter sur le plan du cercle , avec toutes les lignes qui ont servi à sa construction. On aura en projection une courbe, et des droites qui serviront à sa construc- tion, comme les droites dans l'espace à la construction de la section du cône; c'est-à-dire que la construction de la courbe projetée sera absolument semblable à celle de la courbe si- tuée dans l'espace : et si l'on prend les lignes projetantes perpendiculaires à la trace du plan de la section sur celui de la base du cône , et également inclinées sur ces deux plans , alors la courbe projetée sera parfaitement égale à celle de la section du cône ; ce sera donc une section conique. On conclut de là aussi que, pour transporter aux coniques les propriétés du cercle, une seule démonstration suffira , soit qu'on considère la conique sur le plan du cercle ou dans l'espace. I II eût mieux valu prendre pour inconnue la distance du point M' au point S ; la formule HISTOIRE DE LA GÉOMÉTRIE. 133 § 33. La méthode de De La Hire et de Le Poivre était la plus heureuse et la plus féconde qu'on pût imaginer pour découvrir les nombreuses propriétés des coniques par celles du cercle; mais les avantages qu'elle offrait ne devaient point se borner à cet usage parti- culier ; elle avait un avenir plus grand , comme offrant un moyen gé- néral de transformer , sur le plan, les figures en d'autres du même genre, ainsi que ferait la perspective. L'importance de ces méthodes, qui forment une des doctrines princi- pales de la Géométrie récente , nous engage à entrer encore dans quel- ques considérations au sujet de celle de De La Hire et de Le Poivre, qui montreront ses rapports avec les pratiques de la perspective , avec une méthode analogue imaginée dans le même temps par Newton , et avec plusieurs autres méthodes, d'invention plus moderne, dont nous aurons à parler dans la suite. Le mode de transformation du cercle en une conique sur le plan, employé par De La Ilire et Le Poivre, a pour propriété caractéris- tique que : à chaque point et à chaque droite considérés comme ap- partenant au cercle générateur, correspondent un point et une droite appartenant à la conique ; et les relations de position des deux figures sont telles que deux points correspondans sont en ligne droite avec un point fixe S, et que deux droites correspondantes concourent sur un axe fixe, qui est la droite que nous avons appelée formatrice dans la méthode de De La Hire, et qui nous représentait, dans celle de Le Poivre, la trace d'un plan coupant. Ce point S et l'axe fixe, considérés comme appartenant au cercle, aurait conduit naturellement à diverses propriétés des coniques, particulièrement à celles de leurs foyers , dont l'auteur n'a rien dit. Il eût suffi , pour cela , de placer le point S au centre du cercle générateur. Cette dernière observation , relative à la position du point S , s'applique aussi au Traité de De La Hire qui dcuiontre les propriétés des foyers, mais en supposant ces points connus à priori, comme dans les coniques d'Apollonius , et sans être conduit à leur découverte. En plaçant le pùle au centre du cercle, la formatrice et la directrice étant d'ailleurs quelconques (mais pa- rallèles entre elles), on forme une conique qui a pour foyer le pôle : et diverses propriétés du cercle s'appliquent immédiatement a la conique, relativement à son foyer. 134 HISTOIRE DE LA GÉOMÉTRIE. sont eux-mêmes leurs correspondans par rapport à la conique; de sorte qu'ils jouent le même rôle par rapport à chacune des deux courbes. Si, du point fixe, on peut mener deux tangentes au cercle, elles seront aussi tangentes à la conique; et si l'axe fixe rencontre le cercle en deux points, la conique passera par ces deux points. On démontre encore que, quand deux droites sont parallèles, leurs correspondantes concourent en un point situé sur la droite que nous avons appelée la directrice, de sorte qu'un point quelconque situé à l'infini dans la première figure, a pour correspondant dans la seconde figure un point situé sur la directrice ; ce qui prouve, parce qu'il n'y a qu'une ligne droite qui puisse correspondre à une ligne droite, que tous les points d'un plan qui sont à l'infini doivent être considérés comme situés sur une même ligne droite. § 34. On reconnaît, à ces diverses propriétés, les figures homolo- giques dont M. Poncelet a donné, le premier, la théorie dans son Traité des propriétés projectives, Y^e pôle S est le centre d' homologie ; et la formatrice est l'axe d'homologie. Les personnes qui ont l'habitude des pratiques de la perspective reconnaîtront aussi, dans ce mode de déformation, les figures mêmes que l'on trace sur un plan, comme devant être la perspective l'une de l'autre. Ainsi, qu'on regarde la formatrice (ou axe d'homologie^, comme la ligne de terre, la directrice comme la ligne horizontale , le pied de la perpendiculaire abaissée du pôle (ou centre d'homologie) sur cette directrice, comme le point de vue, et enfin que, pour déterminer le point de distance, on porte, à partir du point de vue, un segment égal à cette perpendiculaire, sur la directrice; puis, qu'avec ces don- nées on construise la perspective de la conique décrite par De La Hire, on trouvera précisément son cercle générateur. (Voyez la Note XVIIL) Ainsi, la description générale des coniques sur le plan, qu'avait dé- sirée ce géomètre , existait à son insu depuis long-temps ; mais elle ne servait que comme simple pratique de la perspective à l'usage seu- lement des artistes. De La Hire a le mérite très-grand d'avoir le premier HISTOIRE DE LA GÉOMÉTRIE. 135 conçu l'idée de se servir d'une telle déformation de figure comme méthode de Géométrie rationnelle, pour transporter directement à une courbe les diverses propriétés d'une autre courbe décrite sur le même plan. Cette méthode était une généralisation de deux autres modes de transformation d'une figure en une autre de même nature. Le premier consiste à mener d'un point fixe des rayons à tous les points d'une courbe, et A les prolonger dans un rapport constant ; leurs nouvelles extrémités forment une seconde courbe semblable à la première et semblablement placée par rapport au point fixe; le second mode de transformation consiste à abaisser de tous les points d'une courbe des ordonnées sur un axe fixe, et à les prolonger à partir de cet axe dans un rapport donné; leurs extrémités appartiennent à une seconde courbe qui est du même degré et du même genre que la proposée; et les tangentes en deux points correspondans de ces deux courbes se ren- contrent sur l'axe fixe. C'est de cette manière que Stévin , Grégoire de St. -Vincent et, avant eux, le célèbre peintre Albert Durer, formaient l'ellipse au moyen du cercle. On tombe sur ces deux modes de déforma- tion en supposant dans celui de De La II ire que la trace et la directrice, dans le premier cas, et le point S dans le second, soient à l'infini. Nous trotivons dans la Géométrie des lignes courbes de John Leslie ', une construction des coniques, par l'intersection de deux droites mo- biles autour de deux pôles fixes , qui revient à celle de De La Hire. Ce célèbre géomètre a tiré cette construction des pratiques de la pers- pective; mais il n'en a point fait usage comme De La Hire et Le Poivre, pour démontrer les propriétés des coniques. S 35. Dans le même temps que De La Hire conçut sa méthode de description des coniques au moyen du cercle. Newton en imagina mwtox, aussi une du même genre, dont le but général était d'opérer sur le plan '*"- '"' des transformations de figures, dans lesquelles des points répondissent à des points, et des droites à des droites; et oii certaines droites con- vergentes devinssent parallèles. Il donna cette méthode dans le premier ' Geometrical analysis and G^ometry ofcurve Unes, etc. , Eldinbargh, 1821 , in-B». 136 HISTOIRE DE LA GEOMETRIE. livre de ses Principes , et montra comment elle pouvait servir pour transformer une conique quelconque en un cercle et simplifier ainsi des problèmes difficiles. Ce grand géomètre donna une construction géométrique et une expression analytique, l'une et l'autre très-simples, de ses figures trans- formées ; mais sans laisser apercevoir la route qui l'avait conduit à ce mode de transformation des figures j et c'est peut-être pourquoi il a été peu cultivé depuis, car l'esprit éprouve toujours quelque difficulté et quelque répugnance aux choses qui ne portent pas en elles plus que l'évidence qui convainc , et où ne se trouve pas celle qui éclaire et montre les véritables raisons des choses. Nous avons été curieux de comparer cette méthode à celle de De La Hire et de rechercher les différences qui pouvaient les caractériser, et donner quelque avantage à l'une sur l'autre, espérant par là retrouver le fil qui avait pu guider Newton. Nous avons reconnu que ses figures n'étaient autres que celles de De La Hire placées dans une position différente, l'une à l'égard de l'autre; et qu'on peut aussi les produire par la perspective, en les abat- tant ensuite sur un même plan, mais d'une autre manière que ne l'avait fait De La Hire ; et c'est ainsi probablement que Nevs^ton aura imaginé sa méthode. Ce procédé est en effet une des pratiques de perspective enseignées par quelques auteurs, dont nous citerons Yignole, Sirigati, Pozzo. (FoîV la Note XIX.) § 36. Il nous serait facile de montrer les ressources immenses que ces méthodes de transformation des courbes sur un plan auraient offertes dès il y a un siècle et demi aux géomètres, si une fatale et injuste prévention ne les avait éloignés de la culture de la Géométrie pure. Mais il nous suffit d'avoir fait voir que celle de De La Hire parti- culièrement, conduisait aux mêmes transformations et au même but que la belle théorie des figures homologiques , dont M. Poncelet a tiré des résultats aussi nombreux que remarquables. Cette méthode d'ailleurs, comme celle de Newton , n'est qu'un corollaire de notre principe gé- néral de déformation homographique , et nous ferions double emploi en nous étendant ici davantage sur ses applications. HISTOIRE DE LA GÉOMÉTRIE. 137 S 37. En terminant cet historique des premières méthodes de trans- formation des courbes, nous remarquerons que la manière ingénieuse par laquelle Le Poivre est parvenu à la sienne aurait mérité aussi l'atten- tion des géomètres; car elle repose sur une idée qui comprend tout un système de Géométrie descriptive, ou de représentation graphique, sur une aire plane, des corps situés dans l'espace. Cette idée consiste à re- présenter, dans la pratique de la perspective, un plan situé dans l'es- pace, par deux droites parallèles tracées sur le tableau, dont l'une est la trace du plan, et l'autre la trace d'un plan parallèle mené par le point de l'œil. De cette manière, une droite est déterminée par deux points, qui sont ceux où cette droite et sa parallèle menée par le point de l'oeil percent le tableau. Ainsi, voilà un moyen de représenter sur un plan tous les corps de l'espace, en se servant uniquement d'un point fixe pris arbitrairement au dehors de ce plan. Ce nouveau mode de Géo- métrie descriptive a été conçu et mis à exécution , il y a peu d'années, par M. Cousiuery, ingénieur des ponts et chaussées. Nous reviendrons sur l'ouvrage de ce géomètre, quand nous en serons à parler de la Géométrie descriptive de Monge. S 38. Les travaux des géomètres que nous avons cités au commen- G, 1733), et dans un mémoire qui fait partie des Transactions philosophiques, année 1735. Depuis , plusieurs autres géomètres appliquèrent avec succès la Géo- métrie de Descartes à la théorie générale des courbes géométriques. Nicole, à l'imitation de Stirling, qui avait démontré les propositions seulement énoncées par Newton dans son Énumération des lignes du troisième degré ^ avait aussi commencé une explication des principes qui avaient guidé ce grand géomètre, et la démonstration de son im- portante et curieuse proposition, non démontrée par Stirling, sur la description de toutes ces courbes par l'ombre des cinq paraboles diver- gentes '. L'abbé de Bragelongne, qui, dès 1708, avait démontré, le premier, les beaux théorèmes de Newtom sur la description organique des co- niques, et des courbes du troisième et du quatrième degré ayant des points doubles % entreprit l'énumération et l'examen des formes et des ufiections des courbes du quatrième degré. Travail immense et difficile, dont les premières parties seulement ont été publiées, la mort de l'au- teur nous ayant privé des suivantes *. BHtlKERaiDCE. 1683-1759. BRÀGELORGilE . 1688-1744. • Mémoireê de l'Académie des sciences, année 1731. * Journal des satans, 30 septembre 1708. •'• La première partie de cette énumération a été insérée dans les Mémoires de 'P Académie des sciences, années 1730 et 1731; la seconde partie n'a pas paru; l'analyse s'en trouve dans V Histoire de l'Académie pour 1732. 132 HISTOIRE DE LA GEOMETRIE. 1712-1786. 1707-1783. 1704-1752. OIOXIS DU SEJOCB 1734-1794. eODDIX, 1734-1805. L'abbé De Gua, dans un excellent ouvrage intitulé : Usages de V ana- lyse de Descartes (in- 12, 1740), donna les moyens de déterminer les tangentes, les asymptotes et les points singuliers (multiples, conju- gués, d'inflexion et de rebroussement), des courbes de tous les degrés, et fit voir, le premier, par les principes de la perspective, que plusieurs de ces points peuvent se trouver à l'infini; ce qui lui donna l'explication à priori d'une analogie singulière entre les différentes espèces de points et les différentes espèces de branches infinies, hyperboliques ou para- boliques , que peuvent présenter les courbes ; analogie à laquelle le calcul l'avait déjà conduit. Le but que s'était proposé cet habile géomètre , était de démontrer que l'analyse de Descartes pouvait être employée avec autant de succès que le calcul différentiel, dans la plupart des recherches relatives aux courbes géométriques. Il ne reconnaissait l'utilité de l'analyse infini- tésimale que pour la solution des problèmes de calcul intégral, et de ceux qui concernent les courbes mécaniques. Ce sont en effet les seuls pour lesquels il parait impossible de s'en passer, et ce sont même les seuls que Newton ait résolus par cette voie. Euler, dans son Introductio in analysin infinitorum (2 vol. in-4o, 1748), exposa les principes généraux de la théorie analytique des courbes géométriques, avec cette généralité et cette clarté qui caracté- risent les écrits de ce grand géomètre ; et, étendant ce genre de recher- ches à la Géométrie à trois dimensions, discuta pour la première fois l'équation à trois variables , qui renferme les surfaces du second degré. Dans le même temps Cramer donna, sous le titre : Introduction à l'analyse des lignes courbes algébriques (in-4°, 1 750) , un traité spé- cial, le plus complet, et encore aujourd'hui le plus estimé, sur cette vaste et importante branche de la Géométrie. Peu après, parut le Traité des courbes algébriques (in-12, 1756) de Dionis du Séjour et Goudin, où se trouvaient résolus par l'analyse seule de Descartes, et avec clarté et précision, les problèmes sur les affections des courbes, leurs tangentes, asymptotes, rayons de cour- bure, etc. HISTOIRE DE LA GÉOMÉTRIE. 133 On a encore de Goudin un Traité des propriétés communes à toutes les courbes, qui a pour objet de transformer une équation quelconque d'une courbe, en une autre qui ait des coordonnées différentes. C'est une suite de formules, à trois et à quatre variables, dont chacune ex- prime une propriété différente des courbes en général '. Nous citerons enfin Waring, qui, dans plusieurs écrits, a porté plus wtii!i«. loin que ses prédécesseurs ses découvertes dans la théorie des courbes ^. 1734-1798. Ce sont là, je crois, les derniers perfeclionnemens notables que la science des courbes dut à la Géométrie des Anciens et à l'analyse de Descartes. §11. Les progrès dans les autres parties de la science de l'étendue , ont été moins marqués et moins satisfaisans pendant l'intervalle de temps que nous venons de parcourir, que ceux qu'elle a faits dans la théorie générale des courbes géométriques. Cependant, les coniques ont continué d'être étudiées; et de nouveaux efforts pour donner l'in- telligence et ranimer le goût de la Géométrie ancienne, ont été faits par des mathématiciens d'un grand nom, tels que Halley, Stewart, Simson, etc. : quelques questions particulières ont encore été traitées, de loin en loin, par les célèbres analystes Euler, Lambert, Lagrange, Fuss, etc., dans les courts instans de loisir que leur laissaient leurs recherches de prédilection. Mais ces travaux , propres à entretenir la connaissance des doctrines anciennes, ne nous paraissent pas en avoir fait naître de nouvelles ; et les véritables progrès de la Géométrie pure ne datent que du commencement de ce siècle. • On y trouve , en particulier, quarante-cinq équations différentes de l'ellipse , en prenant soit le centre , soit le foyer, pour origine des coordonnées. Cet intéressant ouvrage de Goudin a eu 3 éditions , dont la dernière est de 1803 ; on a joint à celle-ci , comme aux deux premières, un mémoire sur les éclipses de soleil, et un précis sur les courbes algébriques, et, de plus qu'aux deux premières, un mémoire sur les usages de l'ellipse dans la trigonométrie. ^ Outre plusieurs mémoires , écrits en anglais dans les Transaction» philosophiques , de 1763 à 1701 , Waring a donné sur les courbes géométriques les deux traités intitulés : Miscellanea analylica de œquationibus algebraicis et currarum propriclatibu* , in-4o, 1762; et Proprietale» geometricarum currarum , in-A", 1772. ToM. XI. 20 154 HISTOIRE DE LA GÉOMÉTRIE. oéoméirje appliquée Mois , la Géométrle s'est acquis, à l'époque qui nous occupe, un aux phénomènes pliy- i X A i ' «cpies. autre titre à notre admiration, par ses applications aux phénomènes physiques, et par les grandes découvertes auxquelles elle a conduit Newton, Maclaurin, Stewart, Lambert, dans le système du monde. A aucune époque, cette Géométrie appliquée n'a jeté un aussi vif éclat; malheureusement, il a été de peu de durée, et nous devons convenir que, de nos jours, cette science est à peu près inconnue. Le calcul infinitésimal s'est emparé exclusivement de toutes les questions auxquelles elle avait été propre entre les mains de Newton et de ses disciples. Progrès de la Géomé- S 1^* Rcvcnons à la Géométrio théorique, et essayons de nous trie pure. i ■■ i . . i rendre compte, pari analyse des principaux ouvrages des géomètres qui l'ont cultivée pour elle-même, ou qui s'en sont servis comme d'un instrument dans l'étude des phénomènes physiques, de la nature et de l'étendue des recherches qui ont pu contribuer aux progrès de cette science. HAiLEï, Le célèbre astronome Halley, d'une grande érudition et très- versé 1656-1742 dans la Géométrie de l'école grecque, lui éleva un magnifique monu- ment par ses traductions, plus fidèles que les précédentes, de plusieurs ouvrages principaux des géomètres anciens. On distingue surtout sa superbe édition du traité des coniques d'Apollonius, où se trouve restitué, avec un grand talent, le 8" livre dont le texte jusqu'à ce jour n'a point encore été retrouvé. A la suite, sont les deux livres de Serenus sur les sections du cône et du cylindre. On doit encore à Halley, la traduction, sur un manuscrit arabe, du traité De sectione rationis , jusqu'alors inconnu; et la divination du traité De sectione spatii, rétabli sur les indications de Pappus. L'objet de ces deux ouvrages était, comme on sait, de mener par un point pris au dehors de deux droites, une transversale qui fit sur les deux droites, à partir de deux points fixes, deux segmens, dont le rapport dans le premier cas, et le produit dans le second cas , était donné. Chacune de ces deux questions admet généralement deux solutions. HISTOIRE DE LA GÉOMÉTRIE. 155 et, par conséquent, conduirait en analyse à une équation du second degré. Il est intéressant de voir avec quel art Apollonius résout la pre- mière par une moyenne proportionnelle. Ses considérations géomé- triques correspondent à l'opération que nous ferions pour chasser le second terme d'une équation du second degré. Dans l'estime que Newton portait à la Géométrie ancienne, il dis- tinguait particulièrement ce traité d'Apollonius. « Plus d'une fois, nous » dit le savant Pemberton ', je lui ai entendu approuver l'entreprise M de Hugues d'Omérique , de rétablir l'ancienne analyse , et faire de » grands éloges du livre d'Apollonius De sectione rationiSf ce livre )) nous développant mieux la nature de cette analyse qu'aucun autre » ouvrage de l'antiquité. )) La traduction de Ilalley est enrichie de plusieurs scholies, qui em- brassent dans des constructions générales et très-élégantes, le grand nombre' de cas que comporte la question, et qu'Apollonius traite mi- nutieusement, comme autant de formules que le géomètre doit toujours avoir sous sa main dans la résolution des problèmes. Dans un de ces scholies, on voit que le cas le plus général se réduit à mener, par un point donné, deux tangentes à une parabole déterminée suilisamment par les données de la question. Remarque heureuse, qui se prête à une discussion facile et lumineuse des cas particuliers du problème , et qui a conduit Halley à la connaissance de diverses propriétés de la para- bole concernant ses tangentes, telles que celle-ci : Quand un quadri- latère est circonscrit à une 'parabole, toute tangente à cette courbe divise deux côtés opposés du quadrilatère en segmens proportion- nels. Ces diverses propositions ne sont que des cas particuliers de la proposition générale que nous avons appelée propriété anharmonique des tangentes d'une conique. {Voir la Note XVI.} Halley ne savait pas un mot d'arabe, quand son amour de la Géo- métrie ancienne lui fit entreprendre la traduction du manuscrit de la ' F'iew of sir Isaac Newlon's philosophy, in^», 1728 ; traduit en français en 1786 , sons le titre A'Elémens de la philosophie Netctonienne. à. 156 HISTOIRE DE LA GÉOMÉTRIE. section de raison. Dans sa préface, il fait l'histoire de ce manuscrit enfoui depuis de longues années dans la bibliothèque Bodleïenne. Il dé- plore la perte d'une infinité d'autres ouvrages de l'école grecque ; et ne doute pas que beaucoup ne nous seraient rendus, si l'on voulait se don- ner la peine de les rechercher. Il adresse à ce sujet une prière à tous les savans qui peuvent avoir accès dans les bibliothèques de manuscrits. Nous nous faisons un devoir de rapporter ici, et le sentiment, et les vœux du célèbre Halley, qui doivent avoir une si imposante autorité au- près de toutes personnes éclairées et en position de rendre, de quelque manière que ce soit , quelques services aux sciences mathématiques. Une édition des sphériques de Menelaus, en trois livres, revue sur un manuscrit hébreu, avait été préparée par Halley. Mais elle ne vit le jour qu'en 1758, par les soins de son ami le docteur Costard, auteur d'une histoire de l'astronomie. Halley joignait à une profonde connaissance de la Géométrie an- cienne une parfaite intelligence de la méthode de Descartes. Il en fit usage particulièrement pour perfectionner la construction des équa- tions des troisième et quatrième degrés, par le moyen d'une parabole quelconque donnée et d'un cercle '. Les éditions qu'il a données des ouvrages d'Apollonius, de Serenus et de Menelaus, sont très-recherchées des amateurs de la Géométrie ^, et suffiraient seules pour assurer à Halley une place distinguée parmi les savans qui ont contribué aux progrès des mathématiques, si ses travaux en astronomie ne l'avaient placé à côté des hommes les plus célèbres d'une époque qui a réuni les noms de Dominique Cassini, delluygens et de Newton. § 13. Quoique Newton et Maclaurin, dont nous avons déjà fait con- naître les belles recherches sur la théorie des courbes géométriques, n'aient pas écrit spécialement sur la Géométrie des Anciens, ils portè- ' Transactions philosophiques, année 1687, n" 188, ^ Tous ces ouvrages sont très.rares, surtout le traité De sectione rationis, qui est encore aujourd'hui le seul livre où l'on trouve, avec une traduction plus exacte que celle de Com- niandin , le texte grec de toute la préface du 7' livre des Collections mathématiques de Pappus. HISTOIRE DE LA GÉOMÉTRIE. 157 rent une telle estime à cette méthode qu'ils s'en servirent presque ex- clusivement dans leurs recherches physico-mathématiques. Nous avons donc encore à jeter un coup d'oeil sur les travaux de ces deux grands géomètres. Nous citerons de Newton son Arithmétique universelle, et son grand ouvrage des Principes. \? Arithmétique universelle , modèle parfait de l'application de la méthode de Descartes à la résolution des problèmes de Géométrie et à la construction des racines des équations, présentait une foule de ques- tions variées se rapportant à toutes les parties des mathématiques. Cet ouvrage est trop peu lu de nos jours, parce qu'on oublie sans doute que son illustre auteur, en en faisant le texte de ses leçons à l'uni- versité de Cambridge, l'avait jugé propre à initier ses élèves dans la science et dans l'art du géomètre. S 14. Le premier livre des Principes contient un grand nombre de propositions diverses de pure Géométrie. On y remarque particu- lièrement de belles propriétés des coniques, et les problèmes sur la construction d'une conique assujettie à passer par des points et à tou- cher des droites , ou à avoir l'un de ses foyers en un point donné. Ces recherches, nouvelles alors pour la plupart, étaient des préliminaires qui suffirent à Newton pour soumettre à sa loi de la gravitation uni- verselle tous les phénomènes du ciel, et pour déduire de ce principe unique l'explication, à priori, et le calcul de tous les mouvemens des corps célestes. C'est là le plus bel hommage rendu aux recherches des géomètres de l'antiquité sur les coniques , depuis que Kepler y avait puisé la découverte des véritables formes des orbites planétaires. Le peu d'usage que l'on fait maintenant des propositions de Géo- métrie, et des nombreuses propriétés des coniques, par lesquelles il faut passer pour traiter par la méthode de Newton les grandes questions du système du monde , a contribué , indépendamment des avantages que présentait, sous d'autres rapports, la voie analytique, à faire abandon- ner cette première méthode que l'on a jugée longue et pénible, et qu'on a regardée comme ne promettant rien ou presque rien pour l'ave- k 158 HISTOIRE DE LA. GEOMETRIE. nir. Et cejugement a acquis chaque jour d'autant plus d'autorité que l'analyse, cultivée exclusivement, a fait des progrès continus qui per- mettent de simplifier et de perfectionner, de plus en plus, les premières méthodes analytiques que l'on a substituées à celle de Newton. Celle-ci au contraire, ayant cessé d'être cultivée, est restée dans l'état où elle était en sortant des mains de son illustre auteur. Et l'on ne songe pas , quand on la met en parallèle avec l'autre, à prendre celle-ci à son origine, et à citer les premiers essais des analystes pour convertir les beaux résultats de Newton en une analyse d'abord pénible et sans élé- gance, mais qui, depuis, s'est perfectionnée de jour en jour par les efforts continus des plus célèbres géomètres. Pourquoi donc, au moins, ne pas tenir compte des perfectionnemens que la méthode géométri- que, qui peut devenir si souvent intuitive, eût reçus aussi, si elle n'avait pas été abandonnée complètement? Un examen attentif des diverses propositions de pure Géométrie , dont il est fait usage dans les Principes de Newton, donnera une idée de ce qu'auraient pu être ces perfectionnemens. En effet, on reconnaît que ces diverses propositions, qui paraissent différentes entre elles , et dont chacune a sa démonstration particulière, peuvent pourtant se rattacher toutes à deux ou trois propriétés principales des coniques , dont elles ne sont que des cas particuliers, ou des conséquences faciles. Aujourd'hui donc, un commentaire nouveau des Principes de Newton, fait dans l'esprit et dans les formes de la Géométrie moderne, abrége- rait et faciliterait singulièrement la lecture de cet ouvrage immortel. § 15. Nous allons voir que les propositions de Newton peuvent dé- river, comme nous venons de le dire, de deux ou trois seulement des propriétés les plus générales des coniques. Dans les propositions 19, 20 et 21, sont résolus tous les problèmes sur la construction d'une conique dont un foyer est donné, et qui doit toucher des droites et passer par des points. Or les solutions de toutes ces questions se déduisent aujourd'hui immédiatement des questions analogues sur le cercle assujetti à trois conditions, soit parla théorie des figures homologiques, comme l'a montré M. Poncelet, soit parles HISTOIRE DE LA GÉOMÉTRIE. 159 transformations polaires, comme nous l'avons fait. (Annales de mathé- matiques, tom. XVIII.) Leslemmes 17, 18 et 19, sont la propriété du quadrilatère inscrit aux coniques, ou théorème ad quatuor lineas des Anciens. Nous avons fait voir que ce théorème se déduit avec une extrême facilité de la pro- position que nous avons appelée propriété anharmonique des points d'une conique; et celle-ci se démontre d'une manière intuitive, sans qu'il soit besoin de faire usage d'aucune propriété des coniques. [Voir la Note XV.) Les lemmes 20 et 21 , concernent la génération des coniques par l'intersection de deux droites qui tournent autour de deux pôles fixes. Dans le premier, les deux droites mobiles aboutissent respectivement aux points où des transversales, parallèles entre elles, rencontrent deux droites fixes. C'est le théorème que nous avons énoncé en parlant des coniques de De W^itt, et dont nous avons signalé un cas particulier dans un ouvrage de Cavalleri. Si les transversales, au lieu d'être parallèles, concouraient en un point, ce serait dans toute sa généralité le théorème de Maclaurin et de Braikenridge , que nous avons cité, comme étant, sous un autre énoncé, le théorème de l'hexagone de Pascal, et qui se déduit immé- diatement, comme nous l'avons fait voir (même Note), de la propriété anharmonique des points d'une conique. Dans le second lemme, les deux droites mobiles sont deux côtés de deux angles de grandeur constante, dont les deux autres côtés se croi- sent sur une droite fixe. C'est la description organique des coniques, qui a été reproduite par Newton dans son E numération des lignes du troisième ordre , et dans son Arithmétique universelle. Nous avons montré ( même Note ) que ce mode de description , dont les dé- monstrations qu'on en a données ont toujours été assez longues, se déduit avec une facilité extrême, comme le précédent, de la même pro- priété anharmonique. Les lemmes 23, 24 et 25, et leurs corollaires, sont des cas particu- liers de la propriété générale du quadrilatère circonscrit à une conique , A. m 160 HISTOIRE DE LA GÉOMÉTRIE. analogue à celle du quadrilatère inscrit, et que nous avons appelée propriété anharmonique des tangentes d'une conique. (Voir la Note XVI). Le corollaire 3 du lemme 25 prouve cette belle proposition, démontrée depuis de bien des manières, savoir que : a dans tout quadrilatère circon- )) scrit à une conique, la droite qui joint les points milieux des deux )) diagonales passe par le centre de la courbe. » Beaucoup d'autres propositions sont des problèmes sur la descrip- tion des coniques assujetties à cinq conditions, de passer par des points et de toucher des droites. Toutes ces questions se résolvent aujourd'hui, comme on sait, avec une grande facilité. Le lemme 22 sert à changer les figures en d'autres figures du même genre. Dans les propositions suivantes. Newton s'en sert pour transfor- mer des lignes concourantes, en des lignes parallèles, et faciliter la so- lution de quelques problèmes. Nous avons parlé de cette méthode dans notre troisième Époque; et nous avons fait voir qu'elle n'était autre qu'une des pratiques de la perspective. Cette remarque nous paraît propre à en faciliter l'intelligence. § 16. Dans toutes ces propositions préliminaires, et dans leurs co- rollaires. Newton a borné ses recherches à ce qui lui était strictement nécessaire pour sa grande entreprise. Mais on voit, par la nature de ces propositions, que s'il eût eu en vue l'accroissement et le perfectionne- ment de la théorie des coniques, elles l'eussent conduit facilement, par des généralisations naturelles de ses premiers résultats, aux propriétés les plus générales de ces courbes. Il ne lui aurait point échappé , non plus , que sa méthode pour la transformation des figures, s'appliquait naturellement aux figures à trois dimensions; et, depuis près d'un siècle et demi, nous saurious, ce que l'on n'a fait que dans ces derniers temps , transformer la sphère, par exemple, en une surface quelconque du second degré, comme on trans- forme par la perspective, depuis Desargues et Pascal, le cercle en une conique, pour découvrir et démontrer les propriétés de cette courbe. Toutes ces généralisations n'entraient point dans le but de Newton. m HISTOIRE DE LA GÉOMÉTRIE. 161 Mais elles n'auraient pu échapper aux géomètres qui auraient médité sur la partie purement géométrique du livre des Principes; et cette circonstance prouve combien peu les doctrines géométriques ont été cultivées depuis lors. § 17. C'est dans l'ouvrage de Newton qu'a paru pour la première fois la rectification des épicycloides. Il n'avait encore rien été écrit sur ces courbes célèbres, quoi qu'il paraisse, au rapport de Leibnitz, que, 10 ans auparavant, Roemer les avait déjà imaginées; et même, d'après De La Uire, que la première découverte de ces courbes et de leur usage pour la confection des roues dentées, remonte à Desargues, dont le génie, aujourd'hui mieux apprécié, était à la hauteur d'une aussi grande et aussi utile invention. C'est quelques années après que l'ouvrage de Newton avait paru, que De La Hire donna son Traité géométrique des épicycloides. 5 1 8. Nous citerons encore, du livre des Principes, les fameuses ovales, imaginées par Descartes pour réunir en un seul point, par la réfraction, les rayons de lumière émanés d'un autre point, comme font l'ellipse et l'hyperbole à l'égard des rayons de lumière parallèles entre eux'. Newton fait voir, d'une manière très-simple, que ces courbes sont le lieu d'un point dont les distances à deux circonférences de cercles sont entre elles dans un rapport constant. C'est aussi ce qu'avait montré la construction géométrique de ces courbes donnée par Descartes, et ce que Huygens avait conclu immédiatement, et sans démonstration, de son système ondulatoire, dans son Traité de la lumière. Nous ferons ici, à ce sujet, une observation qui se rapporte à la Géo- métrie de Descartes, mais que nous n'avons point trouvé l'occasion de placer plus tôt : c'est que la construction géométrique de ses ovales, qui était sulïisante pour l'application spéciale que le célèbre philosophe fit de ces courbes à la dioptrique, n'était pas propre à les lui faire con- naître complètement. Et Roberval, qui avait donné aussi, peu de temps ' Cette propriété des coniques , qui repose sur la relation entre le foyer et la directrice, est due aussi à Descartes , qui l'a démontrée dans sa Dioptrique. ToH. XI. -21 162 HISTOIRE DE LA GÉOMÉTRIE. après, la construction de ces ovales et discuté leurs formes, nilluygens, ni Newton n'en ont point eu non plus une connaissance complète, sous le point de vue géométrique. En eflfet, une de ces ovales n'est point à elle seule le lieu exprimé par la propriété démontrée par Newton, ou par l'équation du quatrième degré trouvée par Descartes; mais ce lieu doit toujours être l'ensemble de deux ovales conjuguées , inséparables l'une de l'autre dans leur expression analytique. Cette remarque a échappé à Descartes, dans sa Géométrie comme dans sa Dioptrique, et ensuite aux célèbres géomètres que nous venons de nommer. Elle pouvait bien être omise dans la Dioptrique , mais elle eût dû , ce me semble , être faite dans la Géométrie. Il est résulté de son omission que Tune des formes des courbes en question a échappé à l'analyse de Descartes; c'est le cas où les deux ovales conjuguées ont un point commun et forment une courbe unique ayant un point double ; on trouve que cette courbe est celle qu'on appelle le limaçon de Pascal. Il résulte de là, que cette courbe remarquable, qui est tout à la fois, comme on sait, une épicycloïde et une conchoïde du cercle, jouit de cette autre propriété, qu'on ne lui avait pas encore reconnue, d'avoir deux foyers , comme les ovales de Descartes. Dans ces derniers temps, ces ovales ont reparu sur la scène géomé- trique. Le célèbre astronome J. Herschel les a appelées lignes apla- nétiques \ à cause de leur usage en optique. M. Quetelet leur a découvert de singulières et curieuses propriétés que nous ferons con- naître dans la Note XXI. S 19. Maclaurin partagea le goût de Newton pour la Géométrie pure, et sut l'appliquer aussi avec la plus grande habileté aux recher- ches philosophiques. Son Traité des fluxions , où il se proposait, en établissant le lien et les rapports entre les méthodes d'Archimède et celle de Newton, de démontrer celle-ci avec toute la rigueur de l'école grecque, présente une foule de démonstrations synthétiques dans des questions diverses de mécanique et de haute Géométrie, où l'analyse ' Sans aberration. HISTOIRE DE LA GÉOMÉTRIE. 163 n'eût été ni plus facile, ni plus expéditive. Tout le monde sait avec quelle élégance et quelle facilité il résolut, par cette voie, la grande question de la ligure de la terre , qui suffirait seule pour rendre son nom immortel. Il fallait connaître l'attraction d'un ellipsoïde de révolution sur des points situés à sa surface ou dans son intérieur. Maclaurin sut tirer de quelques propriétés des coniques, toutes les ressources suffisantes pour la solution de cette question qui a toujours passé auprès des plus célèbres analystes pour l'une des plus difFiciles. Le jugement porté par l'illustre Lagrange à ce sujet, fera mieux apprécier que tout ce que nous pourrions en dire , le mérite du travail et de la méthode de Ma- claurin. Après avoir dit qu'il est des questions où la méthode géomé- trique des Anciens a des avantages sur l'analyse, Lagrange ajoute : (c Le problème où il s'agit de déterminer l'attraction qu'un sphéroïde 1) elliptique exerce sur un point quelconque placé à sa surface ou dans )) son intérieur est de cette espèce. M. Maclaurin, quia, le premier, )) résolu ce problème dans son excellente pièce sur le flux et le reflux )) de la mer, couronnée par l'Académie des sciences de Paris, en 1 740, » a suivi une méthode purement géométrique, et fondée uniquement )) sur quelques propriétés de l'ellipse et des sphéroïdes elliptiques ; et » il faut avouer que cette partie de l'ouvrage de M. Maclaurin est un » chef-d'œuvre de Géométrie , qu'on peut comparer à tout ce qu'Ar- » chimède nous a laissé de plus beau et de plus ingénieux. Comme » M. Maclaurin avait une sorte de prédilection pour la méthode des )) Anciens , il n'est pas étonnant qu'il l'ait employée dans la solution » du problème dont nous venons de parler; mais il l'est extrêmement, » ce me semble, qu'un problème aussi important que celui-là n'ait » pas été résolu depuis d'une manière directe et analytique, surtout )) dans ces derniers temps où l'analyse est devenue d'un usage si com- » mun et si général. On ne peut, je crois, en attribuer la cause qu'aux » difficultés de calcul que la solution de cette question doit renfermer, » lorsqu'on l'envisage sous un point de vue purement analytique » Je me propose, dans ce mémoire, de faire voir que loin que le pro- 164 HISTOIRE DE LA GEOMETRIE. » blême dont il s'agit se refuse à l'analyse, il peut être résolu par ce )) moyen d'une manière, sinon plus simple, du moins plus directe et » plus générale que par la voie de la synthèse, etc. '. » Cette plus grande généralité consistait à calculer l'attraction dans un ellipsoïde à trois axes inégaux, au lieu d'un ellipsoïde de révolution, comme avait fait Maclaurin. Mais déjà, D'A,lembert s'était proposé cette extension, et l'avait obtenue par de pures considérations de Géo- métrie, en suivant pas à pas la marche tracée par Maclaurin ". § 20. Il est une autre partie du travail de Maclaurin , dont Lagrange ne parle pas encore dans son premier mémoire que nous venons de citer, et qui conservait à la méthode géométrique un véritable avan- tage sur l'analyse; c'était le fameux théorème des ellipsoïdes dont les sections principales sont décrites des mêmes foyers. Il consiste en ce que les attractions de deux tels ellipsoïdes, sur un même point situé au dehors de leurs surfaces, s'exercent suivant la même direction, et sont proportionnelles aux masses des deux corps. Maclaurin n'avait dé- montré que le cas particulier le plus simple de ce beau théorème, celui où le point attiré est sur l'un des axes principaux des deux ellipsoïdes (Art. 653 du Traité des fluxions). Mais, ce cas particulier présentait d'assez grandes difficultés pour que les efforts de d'Alembert, qui y ap- pliquait l'analyse, ne conduisissent ce grand géomètre qu'à supposer ' Mémoires de V Académie de Berlin, ann. 1773. 2 Opuscules mathématiques, tom. VI, pag. 163; ann. 1773. Avant de savoir que d'Alembert , ensuivant les traces de Maclaurin , était parvenu par de pures considérations de Géométrie, à une formule d'intégrale simple, pour l'attraction d'un ellipsoïde à trois axes inégaux sur un point situé à sa surface ou dans son intérieur , nous avions cherché à donner cette même extension à la théorie de Maclaurin ; et, en adoptant le mode de décomposition du solide en cônes élémentaires , qui a été employé par Lagrange , nous sommes parvenu , par la Géométrie seule , à la formule de quadrature que l'on ob- tient en analyse. Notre procédé consiste à remplacer par des considérations géométriques , la première intégration que l'on effectue en analyse ; et cela se fait en remarquant que cette intégration correspond, en Géométrie, à l'évaluation de l'aire d'une ellipse, qui est la projection, sur un des trois plans principaux de l'ellipsoïde, de l'intersection de cette surface par celle d'un cône de révolution autour d'un axe perpendiculaire à ce plan princi- pal ; ce cône ayant même centre que l'ellipsoïde. mSTOIUE DE LA GEOMETRIE. 165 faux le théorème de Macluurin ' ; et pour que Lagrange, qui le démontra quelque temps après, bornât sa démonstration au cas particulier en ques- tion*. D'Alembert, pour réparer son erreur, en donna aussi trois démon- strations; mais, comme Lagrange, sans aller au delà de Maclaurin^. C'est M. Legendre qui, peu de temps après, fit faire un pas h cette question, en démontrant le théorème pour le cas où le point attiré est dans l'un des plans principaux des ellipsoïdes, et qui, dès lors soupçonna toute sa géné- ralité*, qu'il démontra en effet, quelques années après, dans un mémoire d'analyse, qu'on peut regarder comme un chef-d'œuvre de difficulté vaincue; mémoire fort beau et très-profond, et qui serait plus riche en- core en résultats intéressans, si M. Legendre avait donné la signification géométrique de plusieurs des nombreuses formules par lesquelles il lui faut passer, pour arriver à la conclusion du théorème en question '. Depuis, on a trouvé diverses autres démonstrations du théorème de M. Legendre, dont une que nous pouvons citer ici comme rentrant dans la méthode synthétique. C'est celle qui dérive du beau théorème de M. Ivory, par lequel on ramène le calcul de l'attraction sur des points extérieurs à celui des attractions sur des points intérieurs à l'ellipsoïde. Les différentes démonstrations qu'on a données de ce théorème s'écar- tent peu de celle même de son célèbre auteur , et l'on y fait usage de quelques transformations de formules analytiques. Il est peut-être à désirer, pour faire entrer ce théorème dans la théorie géométrique de l'attraction des ellipsoïdes, à laquelle il appartient par sa nature, d'en avoir une démonstration plus synthétique que les premières, c'est-à- dire , tout-à-fait indépendante des formules de l'analyse. La question de l'attraction des ellipsoïdes, restreinte au simple cal- cul de cette attraction, est maintenant résolue aussi complètement que le permettent les bornes de l'analyse, puisqu'elle se réduit à une ' Opuscules malhimaliques , tom. VI , pag. Hi. - Mémoires de V Académie de Berlin , ann. 177+ et 1775. ' Opuscules mathhnaiiqucs, tom. VII, pag. 102; ann. 1780. * Mémoires des savons étrangers, tom. X, * Mémoires de l'Académie des sciences, ann, 1788. im HISTOIRE DE LA GEOMETRIE. formule de quadratures elliptiques, qu'on ne sait pas intégrer en termes finis. Mais, cette grande question, envisagée sous d'autres points de vue, est loin d'être épuisée, et donnera lieu encore certainement à bien des recherches et à de belles découvertes *. Les travaux tout récens de deux célèbres analystes de France et de Koenisberg, MM. Poisson et Jacobi, sont une preuve qu'il restait encore beaucoup à faire, et appel- leront de nouvelles méditations sur cette matière d'un si haut intérêt. § 21. Le problème de l'attraction des ellipsoïdes, considéré indé- pendamment de son application à plusieurs questions de la philoso- phie naturelle , appartient à la Géométrie , et la solution qu'en a donnée Maclaurin est un des morceaux les plus propres à ranimer le goût et l'intelligence de cette Géométrie pure et intuitive, si mécon- nue depuis bientôt un siècle. Nous espérons que, par cette raison, on nous pardonnera d'être entré à ce sujet dans quelques détails, qui nous ont éloigné de la direction que nous aurions dû suivre dans l'examen des travaux géométriques de Maclaurin : ce sera rentrer dans ' Par exemple , quoiqu'on ne sache pas déterminer d'une manière absolue , ni en grandeur ni en direetion, l'attraction d'un ellipsoïde sur difiFérens points , ne pourrait-on pas trouver cer- tains rapports entre ces attractions , ou entre leurs directions ? Mais , sans imaginer de nouvelles questions , qui se présenteraient en foule à l'esprit, il en est une qui , ce me semble , s'est oflFerte d'elle-même , et dont il ne paraît pas qu'aucun des géomètres qui ont écrit sur cette matière, se soit occupé. On sait que la formule relative à l'attraction sur un point extérieur contient un coefficient, qui n'est pas connu à priori, mais qui dépend d'une équation du troisième degré, parfaitement déterminée; l'expression géo- métrique de ce coefficient est connue ; c'est un des axes principaux de l'ellipsoïde qui passe par le point attiré , et qui a ses sections principales décrites des mêmes foyers que celles de l'ellipsoïde attirant. Mais cette équation du troisième degré est un fait d'analyse, que l'on ne pouvait prévoir à priori d'après la nature de la question, et que l'on n'a point encore expli- qué. Il annonce que le problème de l'attraction d'un ellipsoïde dérive d'une autre question, d'un énoncé plus général , et qui admet généralement trois solutions. Dans deux de ces solu- tions, les deux hyperboloïdes à une et à deux nappes , que l'on peut faire passer par le point attiré, de manière que leurs sections principales soient décrites des mêmes foyers que celles de l'ellipsoïde donné , feront la même fonction que l'ellipsoïde qui passe par ce point fait à l'égard de la première solution qui résout la question même de l'attraction. 11 n'est pas rare de rencontrer de pareils faits d'analyse ; mais il est toujours intéressant d'en savoir l'origine et la signification. Alors seulement une question peut être regardée comme résolue complètement. HISTOIRE DE LA GEOMETRIE. 1«7 cette direction que d'indiquer maintenant sur quelles propriétés des coniques ce géomètre avait établi sa solution. Une seule suffit pour le calcul de l'attraction sur des points situés à la surface, ou dans l'intérieur de l'ellipsoïde, la voici : « Étant données deux ellipses semblables, semblablement placées » et concentriques; par un des sommets de la plus petite, on lui )) mène sa tangente qui rencontre l'autre ellipse en deux points ; » Par l'un de ces points, on mène dans cette seconde ellipse deux » cordes quelconques, mais également inclinées sur la tangente en » question; ■ -^ •>■ . ... )) Par le sommet de la première ellipse, on mène dans cette courbe )) deux cordes parallèles à celles de l'autre ellipse; » La somme de ces deux cordes est égale à celle des deux autres » cordes. » Maclaurin démontre ce théorème dans le cercle, par la Géométrie élémentaire ; et ensuite , en projetant les deux ellipses sur un plan parallèle à la tangente en question, et convenablement incliné pour que les ellipses deviennent en projection des cercles, il en conclut le théorème énoncé '. § 22. Le calcul de l'attraction sur les points extérieurs à l'ellip- soïde, n'était pas aussi facile; Maclaurin se servit, pour y parvenir, des deux propositions suivantes, dont il n'énonça que la première , mais dont on aperçoit la seconde dans le cours de la démonstration de cette première : {(1" Quand deux ellipses sont décrites des mêmes foyers, si, par » un point, pris sur un de leurs axes principaux, on mène deux trans- » versales, de manière que les cosinus des angles qu'elles feront avec » l'autre axe soient proportionnels respectivement aux diamètres des • C'est le seul théorème qui servit à Maclaurin pour démontrer cette importante proposition , admise par Newton sans preuve , savoir qu'une masse fluide homogène , tournant autour d'elle- même, devait prendre la figure d'un ellipsoïde de révolution, dans l'hypothèse de l'attraction en raison inverse du carré des distances. Et celte voie parut si belle à Clairaut , qu'il abandonna , dans sa Théorie de la figure de la terre, sa méthode analytique, pour suivre celle de Maclaurin. L 168 HISTOIRE DE LA GEOMETRIE. )) deux coniques, dirigés suivant cet axe, les parties des deux transver- )) sales, comprises entre les deux courbes respectivement, seront pro- )) portionnelles aux diamètres dirigés suivant leur premier axe. » 2» Quand deux ellipses sont décrites des mêmes foyers, si l'on )) mène deux diamètres quelconques, aboutissans à deux points cot^- )) respondans des deux courbes, la différence de leurs carrés sera con- )) stante. » Nous appelons points correspondans , ceux dont les distances à chacun des axes principaux sont proportionnelles aux diamètres des deux ellipses, perpendiculaires à ces axes respectivement. La première de ces deux propositions suffit à Maclaurin pour démon- trer que les attractions que deux ellipsoïdes de révolution, décrits des mêmes foyers , exercent sur un même point pris sur le prolongement de l'axe de révolution , sont entre elles comme les masses des deux corps. De là, il conclut, au moyen de la seconde proposition, que ce théo- rème a lieu aussi à l'égard des points situés sur le plan de l'équateur des deux sphéroïdes, au dehors de leurs surfaces. Ensuite, il remarque que sa démonstration de ce second théorème s'applique aux ellipsoïdes à trois axes inégaux , dont les sections principales sont décrites des mêmes foyers, quand le point attiré est sur le prolongement d'un de leurs axes; d'où résulte le célèbre théorème dont nous avons parlé. D'Alembert, et ensuite Lagrange et Legendre, avaient pensé que Maclaurin n'avait fait qu'énoncer son théorème, sans en donner la dé- monstration ; c'était une erreur de la part de ces trois illustres géomè- tres, car cette démonstration est identiquement la même que celle du cas qui avait précédé, et l'auteur dès lors devait se borner, comme il a fait, à ces seids mots : Von prouvera de la même manière , etc. ; et ne pas répéter des raisonnemens qu'il venait de faire quelques lignes plus haut, et auxquels il n'y avait à changer, ni ajouter, ou retrancher aucun mot '. ' La méprise des trois grands géomètres que je viens de nommer n'a peut-être pas été aper- çue, quoiqu'on se soit tant occupé, depuis, de la question de l'attraction des ellipsoïdes. Je n'en fais la remarque ici , que parce qu'elle nous ofFre une preuve bien certaine de l'abandon L HISTOIRE DE LA GÉOMÉTRIE. 169 S 23. Les deux propriétés des ellipses décrites des mêmes foyers, que nous avons énoncées ci-dessus , sont dues à Maclaurin ; ce sont probablement les premières que l'on ait données sur les coniques bi- confocales; de môme que son théorème sur l'attraction des ellipsoïdes dont les sections principales sont décrites des mêmes foyers, offre la première circonstance où il ait été question de deux tels ellipsoïdes. Ces surfaces se sont présentées, depuis quelques années, dans d'autres questions particulières; et elles nous paraissent devoir jouer désormais un rôle important dans la théorie générale des surfaces du second degré. Elles jouissent d'un grand nombre de propriétés qui n'ont point encore été remarquées, et dont nous parlerons dans une des Notes relatives à notre cinquième Epoque. § 24. C'est en considérant l'ellipse comme section oblique d'un cylindre à base circulaire, que Maclaurin démontre les propriétés de où est tombée In Gcomdtrie, dans la seconde moitié du siècle dernier, et dii peu de justice qu'il y aurait aujourd'hui à l'accuser d'iuipuissance , puisque, loin de la soumettre à du nouveaux essaii, on n'a pas même approfondi la nature et l'esprit des belles méthodes qui ont conduit Newton et .Maclaurin à leurs grandes découvertes. On a préféré , au contraire , après avoir tra- duit ces méthodes eu analyse, faire honneur à celle-ci des grands travaux de Newton , que ce philosophe aurait revêtus ensuite de la forme géométrique. Supposition gratuite, qui montre qu'on méconnaît le caractère de fécondité de la Géométrie, et la facilité extrême de ses dé- ductions naturelles, et souvent même intuitives, dans les questions où elle peut avoir un premier accès. Mais sans entrer en discussion , sur la nature et les moyens de cette méthode qui demanderait un défenseur habile, il nous suflit de rappeler que, pour attribuer ù la méthode analytique les découvertes de Newton , on est obligé de convenir que ce géomè- tre, en suivant celte voie, aurait fait usage du calcul des variations , dont l'invention est due à l'illustre Lagrange. Est-il possible d'admettre que le grand Newton, d'un esprit si réfléuhi et d'une vue si sùro et si étendue, aurait méconnu assez le caractère et l'immense importance d'une telle découverte, pour la passer sous silence , et dédaigner de s'en servir ensuite dans la lutte si pénible et si passionnée qu'il soutint contre Leibnitz? Autant valait qu'il ne produisit pas même son calcul des fluxions. Au reste, en attribuant à l'analyse les découvertes de Newton, on devrait, pour être conséquent et pouvoir en conclure l'impuissance de la méthode géométrique, en dire autant des travaux de Maclaurin, de Stewart, et même de la célèbre formule de Lambert, proclamée par Lagrange lui-même, la plus belle et la plus importante découverte de toute la théorie des comètes , quoiqu'elle ait dû le jour à de simples considé- rations de Géométrie. Lais.sons donc à la Géométrie ses œuvres. L'analyse a déjà d'assez brillans trophées, elle est assez riche d'avenir, pour applaudir franchement aux anciens succès de sa sœur ainée. ToH. XI. 22 170 HISTOIRE DE LA GEOMETRIE. cette courbe, en les faisant dériver de celles du cercle. Il ne s'est pas borné aux propositions que nous avons citées ; mais ayant trouvé cette méthode fort expéditive, il voulut la pousser plus loin que n'avait fait le marquis deLhopital, qui l'avait déjà enseignée à la suite de son traité analytique des sections coniques (liv. VI). En quelques pages seule- ment, Maclaurin démontra, avec une simplicité extrême, les principales propriétés de l'ellipse. On y remarque une démonstration naturelle, et qui surpasse en brièveté celles de Newion, pour le problème des forces centrales dans l'ellipse, le point attirant étant placé d'une manière quelconque dans le plan de la courbe : on y voit immédiatement que l'attraction est en raison directe de la distance, quand le point attirant est au centre de l'ellipse ; et en raison inverse du carré de cette distance, quand le point attirant est au foyer de la courbe. Le Traité des fluxions de Maclaurin pourrait donner lieu à beau- coup d'autres remarques concernant l'histoire et les progrès de la Géo- métrie j mais nous avons déjà dépassé les limites que nous prescrivait la destination de cet écrit; nous arrêterons donc ici notre aperçu sur les travaux de ce grand géomètre. 1. siMsoîr, g 25. Robert Simson, que nous avons déjà eu plusieurs fois l'occa- 1687-1768. sjon de citer, est un des géomètres du siècle dernier qui ont le plus approfondi la Géométrie ancienne, et qui ont le plus contribué à en répandre la connaissance. On lui doit un Traité des sections coniques en cinq livres, écrit dans le style rigoureux d'Apollonius, que l'on commençait à abandonner pour suivre exclusivement la méthode ana- lytique. Cet ouvrage était le premier qui contînt les deux célèbres théorèmes de Desargues et de Pascal. On y trouve aussi le théorème ad quatuor lineas / mais celui-ci avait déjà paru dans un traité des coniques de Milnes ', qui l'avait emprunté des Principes de Newton. ' Sectionum conicarum elementa nova methodo demonstrata ; Oxonii 1702. Cet ouvrage, imité du grand traité de De La Uire , comme l'auteur l'avoue dans sa préface , eut un grand succès et plusieurs éditions. On y considérait les coniques comme sections d'un cône à base circulaire , par un plan tout-à-fait arbitraire, sans se servir du triangle par l'axe. Mais la méthode nous y parait moins heureuse que celle de De La Hire , en ce qu'elle consiste à démontrer d'abord en HISTOIRE DE LA GÉOMÉTRIE. 171 Cette circonstance, que l'ouvrage de Simson contenait les trois théorèmes principaux que nous venons de citer, était la seule qui pût lui donner quelque avantage sur le grand traité de De La Ilire ; car, sous le rapport de la méthode, celui-ci nous parait lui être à plusieurs égards infiniment supérieur; il avait été un perfectionnement notable de la méthode des Anciens, et celui de Simson faisait sous ce rapport un pas rétrograde. En effet , Simson, à l'instar de De La Ilire dans son petit traité de 1679, et du marquis de Lhopital en suite, considère les coniques sur le plan , en les définissant chacune par une propriété spécifique et par- ticulière. Pour la parabole, c'est l'égalité des distances de chaque point de la courbe au foyer et à la directrice; pour l'ellipse, c'est la somme constante, et pour l'hyperbole, la différence, des distances de chaque point de la courbe aux deux foyers. De ces modes de description des trois courbes, Simson déduit les propriétés principales de chacune d'elles , et montre ensuite que ces courbes sont les mêmes que celles qu'Apollonius formait dans le cône oblique, en se servant du triangle par l'axe. Ce n'est qu'après avoir traité ainsi en particulier des trois sections coniques, dans les trois premiers livres de son ouvrage, que Simson les considère, dans les deux livres suivans, toutes trois ensemble, d'une manière générale, et démontre un grand nombre de leurs pro- priétés comnmnes. Le théorème ad quatuor lineas est la vingt-huitième proposition du livre quatre ; l'hexagramme de Pascal est la quarante-septième du livre cinq; et le théorème de Desargues est démontré dans les proposi- tions 12 et 49 du même livre. Simson n'a pas connu les rapports intimes particulier certaines propriétés de l'hyperbole , qui servent de fondement pour passer à celle» de l'ellipse. Les démonstrations, du reste, sont purement synthétiques, et d'une grande simplicité; quoique les proportions, sans cesse répétées, sous la forme ancienne , qu'il serait plus com- mode et plus rationnel de remplacer par celle d'une égalité de rapports, en rendent aujour- d'hui la lecture fatigante. 172 HISTOIRE DE LA GÉOMÉTRIE. qui lient ces trois théorèmes entre eux, et qui n'en font, pour ainsi dire, que des expressions différentes d'une seule et unique propriété géné- rale des coniques ; mais il a su apercevoir toute la fécondité des deux derniers , car il a fait voir que toute la théorie des pôles se déduit de l'un, et après avoir tiré de l'autre six corollaires, il ajoute qu'ils con- tiennent des démonstrations générales de plusieurs propositions du pre- mier livre des Principes de Newton. Il est à regretter que Simson n'ait pas mis à profit cet aperçu heu- reux, pour comprendre sous un seul énoncé général, et dans une seule démonstration, une foule de propositions partielles et restreintes, dont il avait donné auparavant autant de démonstrations différentes. C'était la seule manière de simplifier la théorie des coniques, d'en faciliter et d'en étendre la connaissance et les usages, et de lui préparer de nouvelles acquisitions. , g 26. Nous ne ferons que mentionner ici le célèbre Traité des porismes , oh. Simson a fait connaître la nature de ces propositions, qui avaient été jusqu'à lui une énigme indéchiffrable pour les plus savans géomètres : nous en avons parlé longuement à l'article d'Euclide et dans la Note III. La section déterminée , rétablie par Simson, fait partie du même volume que les porismes. Ce géomètre a aussi rétabli les Lieux plans d'Apollonius ', avec plus d'exactitude et de fidélité que n'avaient fait Schooten et Fermât. Il avait préparé une traduction nouvelle des œuvres de Pappus, qu'on a trouvée dans ses manuscrits qu'il avait légués au collège de Glascow^ : il est à regretter qu'elle n'ait pas été publiée; car c'était une entreprise moins facile qu'on n'a peut-être pensé alors, et qui exigeait une pro- fonde instruction dans la Géométrie ancienne. Personne n'était plus capable que le savant Simson de remplir cette tâche avec intelligence et habileté. On doit s'étonner que ses compatriotes n'aient pas recueilli un tel travail j et qu'en cette circonstance, le noble exemple de Milord J Apollonii Pergœilocorum planorum, libri II restituti ; in-U". Glosguœ, 1749. HISTOIRE DE LA GÉOMÉTRIE. 173 Stanhop, à qui fut due la publication des porismes et de la section dé- terminée, n'ait pas eu d'imitateur dans la patrie de Newton, où la Géo- métrie ancienne a toujours compté de dignes et célèbres admirateurs. S 27. Mathieu Stewart, disciple de Simson et de Maclaurin au col- lège de Glascow, puis à l'université d'Edimbourg, reçut de ses maîtres le goût de la Géométrie ancienne, et lui dut, comme eux, sa célébrité. Le premier de ses ouvrages, intitulé : Quelques théorèmes (jënéraux d'un grand usage dans les hautes mathématiques ( écrit en anglais), in-8", 1746, le plaça aussitôt dans un rang distingué parmi les géo- mètres; et lui procura, peu de temps après, la chaire de mathématiques devenue vacante par la mort de Maclaurin. La nature de ses fonctions, et la direction de ses premières études, le portèrent à continuer de cultiver particulièrement la méthode géométrique, et lui firent conce- voir le projet de l'appliquer aux questions les plus difficiles de l'astro- nomie physique, agitées alors parmi les géomètres, et qui, suivant eux, n'étaient accessibles qu'à la plus sublime analyse. C'était continuer les méthodes de Newton et de Maclaurin, dans les problèmes du système du monde, devenus, par les progrès naturels de la science, plus nom- breux et plus compliqués qu'au temps de ces deux grands géomètres. Dans cette vue, .Stewart mit au jour, en 1761, l'ouvrage intitulé : Tracts physical and 7nalhemalical, etc. , c'est-à-dire : « Traités de )) physique et de mathématiques, contenant l'explication de plusieurs M points importans de l'astronomie physique, et une nouvelle méthode )) pour déterminer la distance du soleil à la terre, par la théorie de la » gravité. » Une théorie très-étendue des forces centripètes, le calcul de la distance du soleil à la terre, et le problème si difficile des trois corps, où il s'agissait de calculer l'action réciproque du soleil, de la terre et de la lune, étaient les questions principales que Stewart résolut dans une suite de propositions qui n'exigeaient d'autres connaissances mathématiques que celles des élémens de la Géométrie plane et des sections coniques. L'ordre et la clarté de ces propositions, la simplicité de leurs démonstrations et la nature des questions difficiles qu'elles résolvaient, méritèrent à Stewart de grands éloges, et le firent estimer a. STEWIBT, 1717-1785. 174 HISTOIRE DE LA GEOMETRIE. l'un des plus profonds géomètres de l'époque. Cependant, nous devons dire que son calcul de la distance du soleil à la terre était erroné. La cause de l'erreur fut reconnue et expliquée d'abord par Dawson en 1769 % puis en 1771, par Landen ^. Elle provenait, non de la mé- thode en elle-même, mais de quelques quantités négligées à tort dans le but de la simplifier. On a fait depuis, de cette circonstance, un ar- gument contre la méthode géométrique; mais il suffit, pour le réfuter, de rappeler que de telles fautes ont échappé aux plus célèbres ana- lystes , et qu'elles ont été communes en astronomie surtout, où l'analyse ne procède que par voie d'approximations successives. g 28. Nous avons encore à citer de Stewart un ouvrage de pure Géométrie, intitulé : Propositiones geometricœ , more Veterum de- monslratœ , ad Geometriam antiquam illustrandam et promoven- dam idoneœ. Edim., 1763, in-S». Il nous faut entrer dans quelques détails , pour faire connaître cet ouvrage, ainsi que celui des Théorèmes généraux , qui l'avait précédé de dix-neuf ans. Peut-être à raison de la rareté de ces deux livres, aimera-t-on à en trouver ici l'analyse et l'énoncé des principaux théo- rèmes qu'ils contiennent. Le livre des théorèmes généraux contient soixante-quatre propo- sitions , dont cinquante seulement ont le titre de théorèmes j des quatorze autres, trois sont au commencement de l'ouvrage, et servent pour les démonstrations des théorèmes, et les onze autres le terminent; celles-ci sont pour la plupart des propriétés du cercle. Des soixante quatre propositions, les huit premières seulement sont démontrées ; on y trouve les cinq premiers théorèmes. L'auteur annonce, dans une courte préface, que pour démontrer tant de théorèmes si gé- néraux, et de si grande difficulté, il lui aurait fallu plus de temps qu'il ne pouvait en consacrer à ce travail. Je ne sais si, dans la suite, Stewart ' Four Propositions, etc.; c'est à-dire, Quatre propositions pour prouver que la distance du soleil déterminée par M. Stewart est erronée. ^ Animadversions on d' Stewarls computation of the sun's dislance from the earth ; in-8°. London. HISTOIRE DE LA GÉOMÉTRIE. 175 a restitué les démonstrations de ses théorèmes, ou si on les a trouvées dans ses papiers, et quel usage on en a fait. Les deux premières propositions expriment des propriétés générales de quatre points, dont trois sont en ligne droite, et le quatrième placé arbitrairement. Dans la seconde de ces propositions, le quatrième point peut être pris sur la droite où sont situés les trois autres. Cette propo- sition mériterait d'être plus connue qu'elle ne nous parait l'être. En voici l'énoncé : Etant pris en ligne droite trois points A, C, B, et un autre point quelconque D, en dehors ou dans la direction de la droite, on aura dT'bc .*- UiT'AC — dcT'ab = ab.ac.bc. C'est cette proposition dont nous avons dit que les huit lemmes de Pappus sur les lieux plans d'Apollonius peuvent dériver comme co- rollaires ou conséquences faciles. Peu de temps après qu'elle avait paru dans l'ouvrage de Stewart , Robert Simson en a fait un usage utile dans un appendice à ses Loca plana restituta , et un autre géomètre célèbre, Th. Simpson, l'a aussi démontrée et s'en est servi , sous le titre de lemme, pour résoudre plusieurs problèmes, dans ses exercices choisis pour les jeunes étudians en mathématiques '. Plus tard, Euler l'a aussi démon- trée comme lemme, pour inscrire dans un cercle un triangle dont les trois côtés passent par trois points donnés ", Nous trouvons en6n que le célèbre physicien et géomètre John Leslie l'a aussi démon- trée et s'en est servi dans le troisième livre de son Analyse géomé- trique '. On voit par ces citations, que cette proposition, qui est à peu près ' Select exercises for young proficients in the mathematicks ; in-B", 1752. Les deus premières parties de cet ouvrage sont un recueil de nombreux problèmes d'Algèbre et de Géométrie , résolus très-élégamment. Elles ont été traduites en français, sous le titre A'Eléviens d'analyse pratique, ou application des principes de l'Algèbre et de la Géométrie , à la solution d'un très-grand nombre de problèmes numériques et géométriques ; in-B", 1 771 . 2 Mémoires de l'Académie de Pétersbourg , ann. 1780. ' Geometrical analysis. Edinburgh, 1809; in-S". Seconde édition en 1821. 176 HISTOIRE DE LA GÉOMÉTRIE. inconnue de nos jours, mériterait bien de prendre place dans les élé- mens ou au moins dans les complémens de Géométrie '. Les cinquante théorèmes de Stewart peuvent être compris, à peu près, tous dans les quatre suivans, qui sont les plus généraux, et dont la plupart des autres ne sont que des cas particuliers : 1° Soit un polygone régulier de m côtés, circonscrit à un cercle du rayon R; soit n un nombre quelconque plus petit que ra; Si d'un point quelconque {pris dans Vintérieur du polygone si n 1 Quand le point D est pris sur la même droite que les trois points fixes , le théorème de Stewart exprime une relation générale entre quatre points quelconques situés en ligne droite. Nous avons reconnu que cette relation, ainsi que d'autres concernant aussi quatre points en ligne droite , dérivent d'une relation générale entre cinq points situés en ligne droite : Soient A , B , C , D , E , ces cinq points , on aura ÊÂT'bC.CD.DB + ËbTcD.DA.AC— ÊGT'dA.AB.BD — ËDr'AB.BG.CA=o. La manière de former les termes de cette équation est manifeste. Pour déterminer leurs signes , on divisera tous les termes par le produit AB.BC.CA. L'équation prend la forme : , DB.DG aDA.DG iDA.r)B_ j Dans cette équation , on donnera le signe -<- au produit de deux segmens comptés dans le même sens à partir du point qui leur est commun, et le signe — au produit de deux seg- mens comptés dans des sens diiférens. Voici quelles sont les relations entre quatre points , qu'on déduit de la relation générale ci-dessus : 1° Si on suppose le point E à l'infini, on aura, en divisant par EU , BC.CD.DB -+- CD.DA.AC — DA.AB.BD — AB.BC.CA =o. Chaque terme de cette équation est le produit des trois segmens formés par trois points pris deux à deux ; 2" Si les deux points E , D se confondent , il vient : DA.BC. + DB.AC — DC.AB = o. Cette équation exprime la relation la plus simple entre quatre points A , G, B, D, situés en ligne droite; 3° Enfin, quand le point D est à l'infini , l'équation générale devient ÈIT'BG -+- ËE'AC — E"g^'AB = AB.BC.CA. C'est l'équation de Stewart. HISTOIRE DE LA GÉOMÉTRIE. 177 est impair, et pris partout où Ion voudra si n est pair), on abaisse des perpendiculaires sur les côtés du polygone, la somme des puis- sances n de ces perpendiculaire sera égale à m.(Il" -+- Ar'R"-' ■*- Br4R''-4 ^ Ce«.R"-« -t- etc. ); V étant la distance du point au centre du cercle ; et A étant le coef- ficient du troisième terme du binôme élevé à la puissance n, multi- plié par f; B le coefficient du cinquième terme du binôme, multiplié par^; C le coefficient du septième terme multiplié par-^j et ainsi des autres. (Prop. 40). De sorte que H(n-I) A =,_-_-; „ n{n-l) (n— 2) (n-3) C = n(n— 1) (»— 2) (n— 3) (n— 4) (n— 5) 2'.4'.6' Etc., etc. Si le point d'où l'on abaisse les perpendiculaires est pris sur la cir- conférence, la formule se réduit à 1.3.8.7,.... (2n— 1) „ „ . . „„ m. ; î R". (Proposition 39.) 1.2.3.4 n Ce théorème général comprend les propositions 3, 5, 22, 23, 28, 29 et 45. 2° Soit un polygone régulier de m côtés , inscrit dans un cercle d'un rayon R ; et soit n tm nombre plus petit que m ; Si l'on prend arbitrairement un point dont la distance au centre du cercle soit v , la somme des puissances 2n des distances de ce point à tous les sommets du polygone sera égale à »n(R'" -t- o'u'R""-' ■+. 6'e4R"'-4 -^ c'eSR'-'-e ^ etc.) ; To». XI. Î3 178 HISTOIRE DE LA GEOMETRIE. a étant le coefficient du second terme du binôme élevé à la puis- sance n; b /e coefficient du troisième terme ; c le coefficient du qua- trième terme ; et ainsi des autres. (Prop. 42). Si le point est pris sur la circonférence, la formule se réduit à 1.3.5.7 (2n— n m. ï -2"R'". (Proposition -41.) 1.2.3.4 n ^ ^ ' Ce théorème général comprend les propositions 4, 26, 27 et 34. 3° Étant donnés m points quelconques , et autant de quantités a , b, c, ; n étant un nombre plus petit que m; on pourra trouver (n + 1) autres points, tels que la somme des puissances 2n des distances d'un point quelconque aux points donnés , multipliées res- pectivement par les quantités a, b , c, ... , sera à la somme des puissances 2n des distances des points trouvés au même point, dans le rapport de (a -h b -{- c-i- ...) à (n-4-1). (Proposition iA.) Ce théorème comprend les propositions 11, 12, 32, 33, 43. 4° Étant données m droites quelconques , et autant de quantités a, b, c, .... j n étant un nombre plus petit que m, on pourra trou- ver (n + 1) autres droites, telles que la somme des puissances n des distances d'un point pris arbitrairement aux droites données, mul- tipliées respectivement par a, b, c, ...., sera à la somme des puis- sances n des distances du même point aux droites trouvées, comme {a -^- b -\- c H — ) est à (n H- 1). (Proposition 49 et 83.) Ce théorème comprend les propositions 17, 21, 24, 25, 37, 38, 42,50,51,52. g 29. Nous avons trouvé qu'on peut donner aux énoncés des deux derniers théorèmes une extension très-grande et assez remarquable. Car, au lieu d'une seule relation, comme le comporte le premier de ces théorèmes, entre les puissances 2n des distances d'un point quel- HISTOIRE DE LA GÉOMÉTRIE. 179 conque aux points donnés et aux points trouvés, il y a une pareille relation entre les puissances 2 (n — (?) de ces mômes distances; t? pouvant avoir toutes les valeurs 0, 1, 2.... (n — 1); de sorte qu'il existera entre les distances d'un point quelconque aux points donnés et aux points trouvés n relations. Le théorème de Stewart n'en comprenait qu'une seule. La dernière de ces relations aura lieu entre les carrés de ces dis- tances. Elle prouve que les points trouvés ont le même centre de gra- vité que les points donnés, les masses de ceux-ci étant a,À,c,...,et celles des points trouvés étant toutes égales à l'unité. Pareillement, dans le second des deux théorèmes en question, qui énonce une relation entre les puissances n des distances d'un point quelconque aux droites données et aux droites trouvées, on aura une relation semblable entre les puissances quelconques (n — 2 S) dés mêmes distances; ^ CHAPITRE V. CINQUIEME EPOQUE. S 1. Dans ces derniers temps, après un repos de près d'un siècle, ofeméin. i^cfint. la Géométrie pure s'enrichit d'une doctrine nouvelle , la Géométrie descriptive , qui était le complément nécessaire de la Géométrie analytique de Descartes, et qui, comme elle, devait avoir des ré- sultats immenses , et marquer une ère nouvelle dans l'histoire de la Géométrie. Cette science est due au géuie créateur de Monge. Elle embrasse deux objets : Le premier est de représenter sur une aire plane tous les corps d'une forme déterminée, et de transformer ainsi en constructions planes les opérations graphiques qu'il serait impossible d'exécuter dans l'espace. Le second est de déduire de cette représentation des corps leurs rapports mathématiques , résultans de leurs formes et de leurs posi- tions respectives. Cette belle création, qui fut d'abord destinée à la Géométrie pra- tique et aux arts qui en dépendent, en constitua réellement la théorie générale , puisqu'elle réduisit à un petit nombre de principes abstraits et invariables, et à des constructions faciles et toujours certaines, toutes les opérations géométriques qui peuvent se présenter dans la coupe des pierres, la charpente, la perspective, la fortification, la gnomo- 190 HISTOIRE DE LA GEOMETRIE. nique, etc., et qui auparavant ne s'exécutaient que par des procédés incohérens entre eux, incertains, et souvent peu rigoureux. (Voir la. NoteXXm.) 5 2. 3Iais outre l'importance due à cette première destination, qui donnait un caractère de rationalité et de précision à tous les arts de construction, la Géométrie descriptive en eut une autre très-grande, due aux services réels qu'elle rendit à la Géométrie rationnelle, sous plusieurs rapports, et aux sciences mathématiques en général. La Géométrie descriptive , en effet, qui n'est que la traduction graphique de la Géométrie générale et rationnelle, servit de flambeau dans les recherches et dans l'appréciation des résultats de la Géomé- trie analytique; et, par la nature de ses opérations, qui ont pour but d'établir une correspondance complète et sûre entre des figures effec- tivement tracées sur un plan et des corps fictifs dans l'espace, elle familiarisa avec les formes de ces corps; les fit concevoir idéalement avec exactitude et promptitude, et doubla de la sorte nos moyens d'in- vestigation dans la science de l'étendue. La Géométrie devint ainsi en état de répandre plus aisément sa gé- néralité et son évidence intuitive sur la mécanique et sur les sciences physico-mathématiques. Cette influence utile de la Géométrie descriptive s'étendit naturel- lement aussi sur notre style et notre langage en mathématiques, qu'elle rendit plus aisés et plus lucides, en les affranchissant de cette com- plication de figures dont l'usage distrait de l'attention qu'on doit au fond des idées , et entrave l'imagination et la parole. La Géométrie descriptive, en un mot, fut propre à fortifier et déve- lopper notre puissance de conception ; à donner plus de netteté et de sûreté à notre jugement ; de précision et de clarté à notre langage; et sous ce premier rapport elle fut infiniment utile aux sciences ma- thématiques en général. S 3. En la considérant en particulier comme simple doctrine géo- métrique, nous trouvons encore qu'elle apporta un immense secours dans la science de l'étendue. Car elle devint , par ses principes et par HISTOIRE DE LA GEOMETRIE. IM la corrélation constante qu'elle établissait entre les figures à trois di- mensions et les figures planes, un véritable moyen de recherche et de démonstration en Géométrie rationnelle ; et par ses procédés , qui sont en Géométrie pratique ce que les quatre règles de l'arithmétique sont dans la science du calcul, elle fournit un moyen de solution à priori dans des questions où la Géométrie de Descartes, toute puissante en tant d'autres circonstances , se trouvait arrêtée par les bornes que ren- contrait l'algèbre elle-même. § 4. Monge nous donna, dans son Traité do Géométrie descrip- tive, les premiers exemples de l'utilité de l'alliance intime et systéma- tique entre les figures à trois dimensions et les figures planes. C'est par de telles considérations qu'il démontra, avec une élégance rare et une évidence parfaite, les beaux théorèmes qui constituent la théorie des pôles dans les courbes du second degré ; la propriété des centres de similitude de trois cercles pris deux à deux, lesquels centres sont trois à trois en ligne droite ; et diverses autres propositions de Géométrie plane. Depuis, les élèves de Monge cultivèrent avec succès cette Géométrie, d'un genre vraiment nouveau, et «à laquelle on a souvent donné, avec raison, le nom d'école de Monge, et qui consiste, comme nous venons de dire, à introduire dans la Géométrie plane des considérations de Géométrie à trois dimensions. Les découvertes faites de cette manière sont nombreuses ; leur exposé présenterait certainement une page intéressante dans l'histoire de la Géométrie ; mais nous ne pouvons nous le permettre ici , ni entrer dans des détails qui alongeraient beaucoup trop cet écrit '. g 5. Les procédés par lesquels Monge transforma les figures de Mrii.odedeir.nsniui. ■ L'un des géomètres qui les premiers aperçurent toutes les ressources de cette métliode . fut M. Brianchon , qui , dans un mémoire imprimé dans le treizième cahier du Journal de l'école polytechnique (année 1810 ), présenta sur ce sujet des réflexions neuves et étendues, auxquelles M. Poncelet nous apprend devoir la première idée des belles et nombreuses re- cherches géométriques , contenues dans son Traité des propriétés projectives. L'école de llonge est très-redevable aussi à M. Gergonne , qui l'a servie utilement par ses propres travaux , tou- jours empreints de vues philosophiques profondes, et par l'accueil qu'il a fait dans ses an- nales de Mathématiqms , aux productions des anciens élèves de l'école polytechnique. 192 HISTOIRE DE LA GEOMETRIE. l'espace en figures planes, par les projections orthogonales sur deux plans rectangulaires qu'il suppose abattus l'un sur l'autre, offrent en particulier un moyen de découvrir une foule de propositions de Géomé- trie plane sur les figures qui résultent de l'ensemble de ces deux projec- tions. De sorte qu'il n'est point à^épure de Géométrie descriptive qui n'exprime quelque théorème de Géométrie plane. Dans la plupart de ces théorèmes, se trouveront des lignes parallèles entre elles et perpendicu- laires à la droite qui servait d'intersection aux deux plans de projection; mais si l'on fait ensuite la perspective de la figure sur un plan, ces lignes deviendront concourantes en un point, et le théorème prendra une plus grande généralité. Voilà donc, comme nous l'avons dit, un moyen très-fécond de dé- montrer, d'une manière toute nouvelle et toute particulière, une foule de propositions de Géométrie plane. On démontrera, par exemple, la plus grande partie des théorèmes, sinon tous, de la théorie des trans- versales, et la plupart des innombrables propriétés des sections co- niques. Prenons, par exemple , l'épure où il s'agit de trouver le point d'in- tersection de trois plans ; ce point sera à l'intersection des trois droites suivant lesquelles ces plans se coupent deux à deux ; les projections de ces trois droites sur l'un des deux plans de projection passent donc par un même point; ce fait, évident, devient l'expression du théorème suivant : Si l'on a dans un plan deux triangles dont les côtés concourent deux à deux en trois points situés sur une même droite L , et que par un point , pris arbitrairement , on mène trois droites aux som- mets du premier triangle / qu'on les prolonge jusqu'à ce qu'elles rencontrent en trois points la droite L; qu'on joigne ces trois points respectivement aux trois sommets du second triangle , par trois droites ; ces trois droites iront concourir en un même point. Ce théorème serait susceptible de plusieurs conséquences : nous nous bornerons à faire remarquer qu'on en conclut, comme corol- laire, le théorème de Desargues dont nous avons parlé (deuxième HISTOIRE DE LA GÉOMÉTRIE. 193 Epoque, § 28); il suffit de supposer que le point pris arbitrairement est le point de concours de deux des trois droites qui joignent les sommets du premier triangle respectivement aux sommets correspon- dans du second. L'épure par laquelle on construit les traces d'un plan qui doit passer par trois points dont les projections sont données, conduit à un autre théorème de même nature que le précédent, et qui donne, comme corollaire, le réciproque de celui de Desargues. S 6. Ce genre de démonstration conduira avec une égale facilité à des propriétés des coniques , et même des courbes de tous les degrés. Concevons, par exemple, dans le plan horizontal, une conique qui sera la base d'un cylindre dont la direction des arêtes soit donnée; qu'on construise la trace de ce cylindre sur le plan vertical ; puis, qu'on fasse la perspective de l'épure sur un plan quelconque : on aura une figure qui représentera une première conique tracée arbitrairement, et une seconde conique construite au moyen de la première par les intersections de lignes droites issues de deux points fixes. Si, au lieu de la première conique, on prend une courbe d'un degré quelconque, on aura une seconde courbe qui sera du même degré. Yoilà donc un moyen de transformer sur un plan, une courbe quel- conque en une autre du même degré. Il est clair que les tangentes à la seconde courbe se détermineront au moyen des tangentes à la première; et ces tangentes se couperont, deux à deux, en des points qui seront tous en ligne droite. Ce sera la droite qui représente l'intersection des deux plans de projection. Cette circonstance offrira un théorème de Géométrie concernant les courbes de tous les degrés. Prenons, pour dernier exemple, un cylindre vertical ayant pour base sur le plan horizontal une conique; qu'on le coupe par un plan mené arbitrairement, et qu'on construise sur le plan vertical la projection de la courbe d'intersection; ce sera une seconde conique. Les tan- gentes à ces deux coniques se correspondront deux à deux, comme représentant les projections de chaque tangente à la courbe d'inter- To». XI. 25 194 HISTOIRE DE LA GEOMETRIE. section du cylindre par le plan transversal; si donc au moyen de ces projections on cherche les points où ces tangentes, dans l'espace , ren- contrent l'un des deux plans de projection, ces points formeront une ligne droite qui sera la trace du plan transversal sur le plan de projection. Cette circonstance donnera lieu à une propriété générale des deux coni- ques qui sont les projections de la conique située dans l'espace. Qu'on fasse la perspective de l'épure sur un plan, il en résultera une propriété générale du système des deux coniques quelconques, qui est celle-ci : Si par le point de concours des deux tangentes cotnmunes à deux coniques quelconques situées dans un plan, on tire arbitrairement une transversale qui rencontre ces deux courbes chacune en deux points, et qu'on leur mène leurs tangentes en ces points , les tan- gentes à la première rencontreront les tangentes à la seconde en quatre points qui seront deux à deux sur deux droites fixes , quelle que soit la transversale menée par le point de concours des deux tangentes communes aux deux coniques. Il est plusieurs autres manières de démontrer par des considérations de Géométrie à trois dimensions, ce théorème important dans la théorie des coniques; par exemple, si par une courbe du second degré on fait passer deux cônes, ayant pour sommets deux points quelconques de l'es- pace, et qu'on cherche la seconde courbe d'intersection des deux cônes, ce sera une seconde conique. Les relations entre ces deux courbes, situées dans l'espace sur deux cônes , sont faciles à saisir. Maintenant si l'on construit l'épure qui donnera la projection de la seconde co- nique sur le plan de la première, on aura un système de deux coniques situées dans un même plan , et dont toutes ces relations des deux courbes dans l'espace, offriront des propriétés intéressantes, au nombre desquelles se trouvera le théorème que nous venons d'énoncer. § 7. Ces exemples nous suffisent pour montrer comment chaque épure de Géométrie descriptive pourra exprimer un théorème de Géo- métrie plane, et nous croyons pouvoir dire que cette voie ouvrira une mine féconde de vérités géométriques. Sous ce point de vue, la Géo- métrie descriptive de Monge offre une méthode de Géométrie ration- HISTOIRE DE LA GÉOMÉTRIE. 193 nelle. Nous l'appellerons méthode de Transmutation des figures. Outre ce premier résultat de la Géométrie descriptive, d'opérer la transmutation des propriétés des figures à trois dimensions, en pro- priétés des ligures planes, nous devons faire remarquer un autre usage particulier de cette Géométrie; c'était de conduire à une infmité de moyens d'opérer sur le plan des transformations de figures en figures du même genre, ainsi qu'avaient fait De La Hire et Newton ; c'était, en particulier, d'offrir une infinité de moyens de remplir le but que s'était proposé De La II ire, de décrire sur un plan, au moyen du cercle, les différentes sections coniques, et de transporter ainsi les opérations de la perspective dans le plan. Il suffit, en effet, de concevoir un cône à base circulaire, ayant pour sommet un point quelconque de l'espace, et de couper ce cône par un plan mené arbitrairement; la section sera une conique, dont une des projections pourra être regardée comme une transformée de l'une des projections de la base du cône ; et comme cette transformée se construira par des opérations planes, le but de De La Hire se trouvera atteint. Cette solution générale du problème de De La Ilire conduira, comme on le pressent à cause de l'indétermination des différentes données de la question, à un grand nombre de méthodes différentes; et l'on par- viendra, de plusieurs manières, à celle même de De La Hire. 5 8. Bien qu'on ait apprécié les services rendus par Monge en fa- miliarisant avec les considérations de la Géométrie à trois dimensions , et en apprenant à passer tour-à-tour de cette Géométrie à la Géométrie plane, et de celle-ci à la première; on n'a peut-être pas reconnu dans le mode particulier de démonstration dont nous venons de donner des exemples, toute l'importance qui lui est due, tant à cause des vérités géométriques auxquelles il pouvait conduire, et dont un grand nombre alors eussent été neuves, que parce qu'il était un premier exemple de transmutation des figures à trois dimensions en figures planes, et réciproquement. Les services rendus par le seul mode de transforma- tion usité jusqu'alors, la perspective, dont Pascal surtout avait fait un si heureux usage, et dont De La Hire, dans son Traité des planiconiques , 196 HISTOIRE DE LA GEOMETRIE. avait réduit toutes les opérations à des constructions planes, étaient de nature à faire concevoir tous les avantages des autres modes de transformation qui pourraient se présenter, soit dans l'espace, soit sur le plan. Mais au surplus, en réfléchissant sur les procédés de l'algèbre, et en recherchant la cause des avantages immenses qu'elle apporte dans la Géométrie, ne s'aperçoit-on pas qu'elle doit une partie de ces avan- tages à la facilité des transformations que l'on fait subir aux expressions qu'on y introduit d'abord? transformations dont le secret et le méca- nisme font la véritable science, et l'objet constant des recherches de l'analyste. N'était-il pas naturel de chercher à introduire pareillement dans la Géométrie pure des transformations analogues, portant direc- tement sur les figures proposées, et sur leurs propriétés? La théorie des projections stéréographiques, par laquelle on ap- plique à des systèmes de coniques semblables et semblablement placées (parmi lesquelles peuvent se trouver des droites et des points), les pro- priétés évidentes et palpables de systèmes de courbes planes tracées sur une surface du second degré, cette théorie, dis-je, est un exemple frappant des avantages des transformations géométriques. Diverses mé- thodes qui se rattachent, comme nous le ferons voir, aux deux principes généraux de l'étendue , la dualité et Vhomographie des figures , que nous démontrons dans cet écrit, sont de telles méthodes de transfor- mation. Ces sortes de méthodes, dont l'utilité nous paraît bien constatée, méritent d'être cultivées; et, si nous ne nous abusons, les géomètres qui voudront méditer sur cet objet apprécieront davantage l'impor- tance philosophique de la méthode de transmutation que nous avons cherché à faire ressortir des principes de la Géométrie descriptive de Monge, Géométrie pcrspeciivc S 9- Lcs doctriucs dc Mougc ont déjà donné lieu à un ouvrage du de M. Consinery. même genre, dont l'occasion se présente de parler ici, par anticipa- tion, la Géométrie perspective de M. Cousinery, ingénieur des ponts et chaussées (in-4o, 1828), qui diffère de la méthode de Monge en ce HISTOIRE DE LA GÉOMÉTRIE. 197 que l'auteur ne fait usage que d'une seule projection, ou perspective, sur un plau. Un plan, situé d'une manière quelconque dans l'espace, est déter- miné dans l'épure par deux droites parallèles, dont l'une est la trace de ce plan sur celui de projection , et l'autre est la trace d'un second plan parallèle au premier, mené par l'œil ou point central d'où par- tent les lignes projetantes. Une droite est déterminée d'une manière analogue par deux points, dont l'un est celui où elle perce le plan de projection, et l'autre est celui où une seconde droite menée par l'œil parallèlement à la première, perce ce même plan. Pour déterminer un point, il faut connaître deux droites sur lesquelles il se trouve, dont l'une peut passer par l'œil, et se réduire à un point en perspective. Ces procédés sont simples et ingénieux; les épures auxquelles ils condui- sent ne sont point trop compliquées , et elles sont susceptibles, comme celles de la Géométrie descriptive de Monge, d'exprimer divers théo- rèmes de Géométrie, ainsi que le fait voir M. Cousinery. Sans chercher à apprécier les avantages que cette méthode pourra peut-être offrir sous le rapport industriel, c'est-à-dire comme instru- ment analogue à la Géométrie descriptive de Monge dans les arts de construction, nous ne la considérerons que comme moyen de trans- formation des figures, et comme méthode pour la recherche et la dé- monstration d'une foule de vérités géométriques : et sous ce rapport, elle nous paraît digne de l'attention des amateurs de la Géométrie. M. Cousinery, en se bornant à quelques exemples qui suffisaient pour convaincre de l'utilité de sa méthode, a ouvert un nouveau champ de spéculations géométriques, où l'on sera sûr de glaner abondamment. S 10. Il nous reste, au sujet de la Géométrie descriptive de Monge, Noureiu mode d« a- à parler de l'influence qu'elle a encore eue sur les progrès de la ''»■» co-ungeme. Géométrie pure, en introduisant dans cette science un mode de dé- monstration que les Anciens auraient repoussé comme une licence incompatible avec leurs principes rigoureux , et qui a eu , entre les mains de Monge et des géomètres de son école, les plus heureux ré- sultats. 198 HISTOIRE DE LA GEOMETRIE. Pour définir cette méthode, nous dirons « qu'elle consiste à consi- )) dérer la figure, sur laquelle on a à démontrer quelque propriété » générale, dans des circonstances de construction générale, où la » présence de certains points, de certains plans ou de certaines lignes, » qui dans d'autres circonstances seraient imaginaires, facilite ladé- )) monstration. Ensuite , on applique le théorème qu'on a ainsi dé- )) montré aux cas de la figure où ces points , ces plans et ces droites )) seraient imaginaires ; c'est-à-dire , qu'on le regarde comme vrai )) dans toutes les circonstances de constructions générales que peut » présenter la figure à laquelle il se rapporte. )) La Géométrie de Monge, nous offre de beaux exemples de cette manière d'agir. Ainsi, pour démontrer que , quand des cônes circonscrits à une sur- face du second degré ont leurs sommets en ligne droite, les plans de leurs courbes de contact passent tous par une même droite, Monge suppose que, par la droite lieu des sommets des cônes, on peut mener deux plans tangentes à la surface j les courbes de contact des cônes passeront toutes par les deux points de contact de ces plans tangens ; leurs plans passeront donc tous par la droite qui joindra ces deux points. Le théorème est donc démontré, pour la disposition supposée de la figure ; et Monge prononce que cette démonstration s'étend au cas où l'on ne pourra point mener de plans tangens à la surface par la droite lieu des sommets des cônes; c'est-à-dire, que le théorème a lieu pour toute position possible de cette droite. Cette méthode de Monge nous paraît fondée sur cette remarque, qu'une figure peut présenter dans sa construction la plus générale deux cas différens ; dans le premier, certaines parties (points, plans, lignes ou surfaces) d'où ne dépend pas nécessairement la construction géné- rale de la figure , mais qui en sont des conséquences contingentes ou accidentelles , sont réelles et palpables ; dans le second cas , ces mêmes parties n'apparaissent plus; elles sont devenues imaginaires; et cepen- dant les conditions générales de construction de la figure, sont restées les mêmes. Par exemple, si on dit de tracer dans l'espace une surface du second HISTOIRE DE LA GÉOMÉTRIE. 199 degré et une ligne droite, qui aient entre elles toute la généralité pos- sible de position; cette question comportera deux cas, celui où la ligne droite rencontre la surface et celui où elle ne la rencontre pas; et ces deux cas offriront la même généralité, parce que dans chacun d'eux la ligne droite sera tirée arbitrairement, sans avoir égard à la position déjà donnée à la surface du second degré, ils ne différeront qu'en ce que les deux points d'intersection de la ligne droite et de la surface sont réels dans le premier cas, et imaginaires dans le second. Nous dirons que ces deux points sont une des relations contingentes ou ac- cidentelles du système de la surface et de la droite. Nous n'avons pas besoin de faire remarquer que nous n'entendons nullement parler ici des circonstances particulières de construction d'une figure, auxquelles on a consacré l'expression de cas particulie?'s , qui sont celles où plusieurs ])oints^ lignes, ou surfaces, viennent à se con- fondre. Ainsi , dans l'exemple précédent, si la droite est tangente à la surface du second degré, ce sera un cas particulier ; et un théorème démontré sur cette figure ne serait point regardé comme s'appliquant nécessairement à la figure générale. §11. La méthode dont il s'agit, qui nous parait avoir pris naissance dans les beaux exemples que Monge nous en a donnés dans sa Géométrie descriptive, a été suivie depuis par la plupart de ses disciples, mais toujours tacitement, comme Monge avait fait lui-même, c'est-à-dire sans entrer dans les considérations que nous venons de présenter , et sans chercher à justifier cette manière hardie de raisonner. Ce n'est que dans ces derniers temps que M. Poncelet a abordé PriDcip* d. , franchement cette question, qui méritait d'être approfondie, et qu'il a rattachée à un point de doctrine important dans la Géométrie ration- nelle. On voit que nous voulons parler du principe de continuité , que ce savant géomètre a mis en avant et développé dans son Traité des propriétés projectives, et dont il a fait les plus heureuses applications ; mais qui, n'étant point démontré rigoureusement, n'a été considéré par d'autres célèbres académiciens que comme une forte induction, et un moyen précieux pour deviner et pressentir les vérités , mais non pour 200 HISTOIRE DE LA GEOMETRIE. suppléer aveuglément, et dans tous les cas, à leur démonstration rigou- reuse. Il faut en convenir, si les géomètres, en pratiquant la méthode de Monge, ouïe principe de continuité, devaient justifier cette manière d'agir, par des considérations de pure Géométrie", puisées dans quelques principes préexistans et démontrés à priori, les moyens, jusqu'à cejour, nous paraîtraient leur manquer : et si leur marche, comme celle de Monge, a toujours été assurée et n'a point laissé de nuage dans leur es- prit, ils ont puisé, ce me semble, cette confiance dans le sentiment d'in- faillibilité que les habitudes de l'analyse algébrique ont fait naitre en eux. Démonstration de la S 12. Nous croyons cu cfFet qu'on pourra, dans chaque cas parti- méUiode de Monge. . ' , • • l /.l l .• culier, justifier a posteriori la méthode en question, par un raison- nement fondé sur les procédés généraux de l'analyse. Il suffit de remarquer que les deux circonstances générales de con- struction d'une figure, dont nous avons parlé, et dont la distinction est importante , parce qu'elles nous paraissent être la véritable origine de la question qui nous occupe, n'entrent jamais en considération dans l'application de l'analyse finie à la Géométrie. Les résultats obtenus par cette méthode s'appliquent dans toute leur étendue à ces deux circonstances générales de construction. Ces résultats sont des théo- rèmes concernant les parties intégrantes et permanentes de la figure , celles qui appartiennent à sa construction générale, et qui sont toujours réelles dans les deux cas; théorèmes tout-à-fait indépendans des parties secondaires , ou contingentes et accidentelles de la figure, qui peuvent être indifféremment réelles ou imaginaires, sans changer les conditions générales de construction de la figure. Donc, quand ces résultats généraux sont démontrés, n'importe com- ment, sur l'une des deux figures, on peut conclure qu'ils ont également lieu dans l'autre figure. Cette manière de justifier la doctrine de Monge, qu'on regardera peut-être aussi comme une démonstration à posteriori du principe de continuité, considéré en Géométrie, comporte les exceptions dont ce principe sera susceptible j car ces exceptions ne seront autres que celles HISTOIRE DE LA GEOMETRIE. 201 que rencontrerait l'analyse elle - même. Ainsi , par exemple, on devra se garder d'appliquer ce principe aux questions dans lesquelles, si l'on voulait faire entrer dans l'analyse les circonstances générales de construction dont nous avons parlé, on trouverait qu'il y aurait à changer autre chose que les signes des coefficiens des quantités va- riables; par exemple, les signes des exposans de ces quantités '; on ne devra point l'appliquer non plus aux questions qui, traitées par l'ana- lyse, exigeraient des intégrales définies, parce qu'un simple change- ment de signe, qui établirait la différence entre les deux circonstances générales de construction de la figure, changerait totalement les résultats de l'analyse. Mais dans toutes les questions de Géométrie qui n'exigeraient que le secours de l'analyse finie, telle que Descartes nous a appris à en faire usage, on pourra mettre toute confiance dans la méthode de Monge. Ainsi, par exemple, si l'on considère dans l'espace un cône du second degré et un plan transversal placé de la manière la plus générale par rapport au cône; ce plan pourra avoir deux positions différentes, qui satisferont également à cette condition de plus grande généralité pos- sible. Dans la première, il coupera le cône suivant une hyperbole, dont on pourra tracer les deux asymptotes : dans la seconde, il coupera le cône suivant une ellipse; et les deux droites qui, dans la première figure, étaient les asymptotes de l'hyperbole, seront imaginaires dans la seconde figure. Néanmoins, toute propriété générale de la première figure, démontrée même avec le secours des deux asymptotes, appar- tiendra à la seconde figure ; pourvu , bien entendu , que cette propriété ne concerne point directement, ni implicitement, les asymptotes , parce que dans ce cas elle ne serait point une propriété générale, indépen- dante des circonstances de construction qui font que ces asymptotes soient ou ne soient pas réelles. ' Nous ne pensons pas que de telles questions puissent se présenter. Car les deux circon- stances générales de construction d'une figure, dont la considération est la base de notre manière d'envisager la méthode de Monge , nous paraissent ne diOcrer dans l'expression algé- brique de la figure que par la diScrence des signes des coeiBciens indépendans. ^ ToM. XI. 26 il 202 fflSTOIRE DE LA GEOMETRIE. Ce que nous disons de l'ellipse et de l'hyperbole, ne s'applique pas à la parabole; parce que la position du plan transversal, qui donne pour section dans le cône une parabole, est une position particulière^ et non plus parfaitement générale. Ainsi, une propriété de la parabole, qu'on aurait démontrée en s'appuyant sur cette circonstance que le plan transversal qui la fait naître dans le cône, a une position particu- lière par rapport à ce cône , n'appartiendrait point, par la seule vertu du principe de Monge, à l'ellipse ni à l'hyperbole. S 13. Les mêmes considérations ont lieu pour les surfaces du se- cond degré. Elles se divisent, sous un certain rapport, en deux classes; pour l'une de ces surfaces (l'hyperboloïde à une nappe), le plan tan- gent en chacun de ses points la touche suivant deux droites entiè- rement comprises sur la surface ; et pour les deux autres surfaces ( l'ellipsoïde et l'hyperboloïde à deux nappes ) , ces deux droites sont imaginaires. Eh bien, une propriété générale de l'hyperboloïde, dé- montrée avec le secours des deux droites en question, pourvu qu'elle ne comprenne ni directement, ni implicitement ces deux droites dans son énoncé, appartiendra également aux deux autres surfaces. Par exemple , qu'on veuille démontrer les deux théorèmes qui con- stituent la doctrine des projections stéréographiques ; on prendra l'hy- perboloïde à une nappe, pour lequel, avec le secours des deux droites que, par chaque point, on peut mener sur sa surface, ces deux théo- rèmes sont évidens; et on conclura immédiatement, avec toute sûreté, qu'ils ont également lieu pour les autres surfaces du second degré '>J'On conçoit que si, au lieu de démontrer ces deux théorèmes rela- tivement à l'hyperboloïde à une nappe, qui est une surface d'une construction tout aussi générale que celle de l'ellipsoïde et de l'hyper- boloïde à deux nappes, on les eût démontrés pour la sphère, on n'aurait pas pu les appliquer, en vertu seulement de la méthode de Monge , aux autres surfaces du second degré, parce que la sphère n'est point une surface d'une construction générale, mais au contraire d'une construc- tion particulière. S 14. Mais nous pouvons dire de suite qu'avec le secours d'une autre HISTOIRE DE LA GÉOMÉTRIE. 203 méthode, on applique les propriétés générales de la sphère à l'cUip- Méthode de g«nér.iiia. soïde ; et alors, par la métliode de Monge, elles deviennent des pro- priétés générales de toutes les surfaces du second degré. Cette méthode de transformation, que nous avons exposée dans la Correspondance Êj^ polytechnique (tom. III, png. 326), est analytique; elle consiste à faire croître proportionnellement les coordonnées de chaque point de la sphère. Nous nous en sommes servi pour transformer les propriétés descriptives, et celles concernant les volumes des corps; depuis, nous l'avons appliquée aux propriétés concernant les longueurs des lignes courbes, et les aires des surfaces courbes. Nous l'avons généralisée aussi sous un autre rapport en la rendant propre à transporter aux hyperboloïdes les ])ropriétés générales des paraboloïdes , comme celles de la sphère à l'ellipsoïde. Mais cette méthode générale étant com- prise, comme cas particulier, dans notre principe général de défor- mation homographique , nous n'insisterons point davantage sur ses usages et son degré d'utilité. Mais nous devons faire remarquer une différence caractéristique qui distingue cette méthode de celle dont nous parlions d'abord, quoique par l'une et par l'autre on généralise un premier résultat. Le mode de déformation que nous venons d'indiquer est une véri- table méthode de généralisation, qui transporte à une figure d'une construction tout-à-fait générale, les propriétés connues d'une figure d'une construction particulière. L'autre méthode, au contraire, qui fait usage des relations contin- |;eBtes, n'opère que sur une propriété d'une figure de la construction la plus générale, et la transporte à une autre figure d'une construction non moins générale, qui ne diffère de la première figure que par des circonstances secondaires et accidentelles qui ont servi à la démon- stration, mais qui, ayant en quelque sorte été éliminées dans le résul- tat des raisonnemens où on les avait fait entrer, ne sont pour rien, ni directement ni implicitement, dons l'énoncé de la proposition qu'il s'agissait de démontrer. S 15. Cette méthode nous paraîtrait mériter, plus qu'aucune autre. 204 HISTOIRE DE LA GEOMETRIE. le nom de méthode d'intuition , puisqu'elle est véritablement fondée sur la vue des choses. Mais ce caractère d'intuition est le propre, en général , des méthodes qui reposent sur la pure contemplation de l'éten- due, et particulièrement de celles où l'on fait intervenir la considéra- tion des figures à trois dimensions pour la démonstration des propo- sitions de Géométrie plane. La dénomination de méthode d'intuition , qui convient en général à la Géométrie de Monge , ne caractériserait donc pas ce principe , en vertu duquel on applique à un état général d'un système, les propriétés qu'on a démontrées pour un autre état également général du même système. Mais la dénomination de Méthode ou principe des relations contingentes nous paraîtrait la caractériser d'une manière assez précise et assez complète. Nous préférons cette dénomination à celle àe principe de continuité, parce que ce principe implique l'idée de l'infini , qui n'entre nullement dans la méthode des relations contingentes. Nous développerons cette idée dans la Note XXIV. Nous pourrions citer beaucoup d'exemples de l'application qu'on a faite tacitement du principe des relations contingentes ; mais nous avons trouvé une question nouvelle qui nous paraît éminemment propre à montrer l'usage et l'utilité de ce principe, c'est celle où il s'agit de déterminer en grandeur et en direction les trois diamètres principaux d'un ellipsoïde dont trois diamètres corijugués sont donnés. La solution de cette question ne se serait peut-être pas présentée aussi aisément par toute autre méthode. ( Voir la Note XXY.) S 16. Ce principe des relations contingentes sera peut-être basé un jour sur quelque principe métaphysique de l'étendue figurée, tenant à des idées d'homogénéité, telles que celles qu'on a apportées quel- quefois dans les sciences naturelles, particulièrement dans celles des corps organisés; il semble appartenir déjà à quelque principe général de dualité, tel que celui que semblent présenter ces mêmes corps où l'on a à reconnaître deux genres d'élémens, élémens permanens, élé- mens variables ; fixité et mouvement. Mais, en attendant que notre principe des relations contingentes HISTOIRE DE LA GÉOMÉTRIE. 205 soit ainsi démontré à priori, il nous parait assez justifié par les pro- cédés de l'analyse, comme nous l'avons fait voir, pour qu'on l'emploie avec assurance. ji Ce serait, du reste, une chose heureuse pour les progrès de la Géo- métrie rationnelle, que tous les géomètres n'abandonnassent pas les principes rigoureux des Anciens, et que pendant que les uns, en se confiant aux procédés faciles de la méthode de Monge, enrichiraient la science de vérités nouvelles, les autres cherchassent à établir ces vérités sur d'autres fondemens , offrant toute la rigueur désirable. Cette sorte d'association et ce double but seront utiles à la Géométrie, et contribueront puissamment à la doter de nouveaux principes et à fon- der leur véritable métaphysique. Il faudra en effet, après avoir décou- vert quelque vérité par la méthode, en quelque sorte superficielle, de Monge, qui s'empare et tire parti de quelque circonstance externe et palpable, mais accidentelle et fugitive, il faudra, dis-je , pour établir cette vérité sur des raisons permanentes et indépendantes des circon- stances variables de construction de la figure, aller au fond des choses et faire usage non plus comme Monge , des propriétés secondaires et contingentes qui suffisent, dans certains cas, pour définir diverses par- ties de la figure, mais bien des propriétés intrinsèques et permanentes de ces mêmes parties de la figure. Nous entendons par propriétés in- trinsèques et permanentes celles qui serviraient, dans tous les cas, à la définition et à la construction des parties de la figure que nous avons appelées intégrantes ou principales ; tandis que les propriétés secon- daires et contingentes sont celles qui peuvent disparaître et devenir imaginaires dans certaines circonstances de construction de la figure. La théorie des cercles tracés sur un plan nous offre un exemple de cette distinction que nous faisons entre les propriétés accidentelles , et les propriétés permanentes d'une figure. Le système de deux cercles comporte toujours l'existence d'une certaine droite, dont la considé- ration est fort utile dans toute cette théorie. Quand les deux cercles se coupent, cette droite est leur corde commune, et cette seule cir- constance suffit pour la définir et la construire ; voilà ce que nous 206 HISTOIRE DE LA GÉOMÉTRIE. appelons une de ses propriétés contingentes ou accidentelles. Mais quand les deux cercles ne se coupent pas, cette propriété disparait quoique la droite pourtant existe toujours , et que sa considération soit encore extrêmement utile dans la théorie des cercles. Il faut donc dé- finir cette droite et la construire par quelqu'une de ses autres propriétés, qui ait lieu dans tous les cas de construction générale de la figure, qui est le système des deux cercles. Ce sera une de ses propriétés joer- manentes. C'est par ces considérations que M. Gaultier ' , au lieu d'appeler cette droite la corde commune des deux cercles , l'a appelée aa^e radical / expression puisée dans une propriété permanente de cette droite , qui consiste en ce que les tangentes aux deux cercles , menées par l'un quelconque de ses points, sont égales entre elles, de sorte que chaque point de cette droite est le centre d'un cercle qui coupe orthogonalement les deux cercles proposés ". ' Journal de l'école polytechnique , 16" cahier, ann. 1813. Le beau Mémoire de M. Gaultier offre la première solution vraiment générale delà questioti du contact des cercles, ou des sphères ; solution qui permet de supposer que les cercles de- Tiennent des points ou des droites , et les sphères des points ou des plans. - La même propriété a fait donner, depuis, à cette droite, par M. Steiner, le nom de ligne d'égale puissance. { J^oir le Journal de M, Crelle, tora. I", et les Annales àe M. Gergonne , tom. XVII, pag. 29S.) Cette droite jouit, comme on sait, de beaucoup d'autres propriétés permanentes remarqua- bles, qui suffisent pour la construire, et qui auraient pu aussi servir à la définir. Ainsi, si l'on décrit un cercle quelconque qui coupe les deux proposés , ses cordes communes avec eux se rencontreront sur cette droite. Si par un des deux centres de similitude des deux cercles on mène une transversale qui les rencontre, et que par les points de rencontre on mène les tangentes aux deux cercles, les tangentes du premier cercle rencontreront respectivement celles du second , qui ne leur se- ront pas parallèles , en deux points qui seront sur la droite en question. C'est cette dernière propriété, qui a également lieu dans le système de deux coniques quel- conques tracées sur un plan , dont nous nous sommes servi pour définir deux droites qui existent toujours dans le système de deux coniques , et dont chacune joue le même rôle , par rapport aux deux coniques , que Vaxe radical par rapport à deux cercles. L'expression d'axe radical étant fondée sur une relation de grandeur particulière aux cercles, ne pouvait con- venir à ces deux droites, et nous les avons appelées axes de sijmptose, à cause de la rencontre ou du concours, qui a lieu sur ces deux droites , des tangentes aux deux coniques, menées en des points situés sur une transversale issue d'un de leurs centres d'homologie. ( Voir Annales de Mathématiques , tom. XVIII , pag. 283.) :;>0 HISTOIRE DE LA GEOMETRIE. 207 êl)ha connaissance des propriétés intrinsèques et permanentes des dif- férentes parties d'une figure, qu'on sera conduit à rechercher quand les propriétés accidentelles disparaîtront, sera très-utile au perfection- nement des théories géométriques, en leur donnant toute la géné- ralité qu'elles comportent, et souvent le degré d'évidence intuitive qui faib un des caractères de la méthode de Monge. ' 'Ainsi, la circonstance que l'axe radical de deux cercles est leur corde commune quand ils se coupent, a conduit Monge à démontrer, en considérant trois cercles sur un plan comme les sections diamétrales de trois sphères, que les axes radicaux de ces cercles, pris deux à deux, passent par un même point. Ce théorème n'est pas moins évident si on part, pour définir ces trois axes, de leur propriété permanente recon- nue par M. Gaultier. Car on voit tout de suite que le point d'intersec- tion de ces deux axes jouit d'une propriété caractéristique des points du troisième axe; d'où l'on conclut qu'il se trouve sur ce troisième axe. S 17. La doctrine des relations contingentes nous semble pouvoir im.giDiire. offrir encore un avantage ; c'est de donner une explication satisfai- sante du mot imaginaire , employé maintenant en Géométrie pure, où il exprime un être de raison sans existence, mais auquel on peut ce- pendant supposer certaines propriétés dont on se sert momentanément comme d'auxiliaires, et auquel on applique les mêmes raisonnemens qu'à un objet réel et palpable. Cette idée d'imaginaire, qui paraît au premier abord obscure et paradoxale , prend donc dans la théorie des relations contingentes un sens clair, précis et légitime. (Voir la Note XXVI.) Sous ce rapport , la distinction que nous avons faite entre les propriétés intrinsèques et permanentes des figures , et leurs propriétés fugitives et contingentes , paraîtra peut-être de quelque utilité. § 18. La Géométrie descriptive de Monge est une source de bonnes sijied«Mong«en«o- doctrines , qui n a point encore été épuisée. Après y avoir reconnu le germe, plus ou moins développé, de plusieurs méthodes, qui accrois- sent la puissance et étendent le domaine de la Géométrie, nous y voyons aussi l'origine d'une nouvelle manière d'écrire et de parler en Géo- métrie. 208 HISTOIRE DE LA GEOMETRIE. cette science. Le style , en effet , est si intimement lié à l'esprit des méthodes, qu'il doit avancer avec elles; de même qu'il doit aussi, s'il a pris les devans, influer puissamment sur elles et sur les progrès généraux de la science. Cela est incontestable, et n'a pas besoin de preuves. L'ancienne Géométrie est hérissée de figures. La raison en est simple. Puisqu'on manquait alors de principes généraux et abstraits , chaque question ne pouvait être traitée qu'à l'état concret, sur la figure même qui était l'objet de cette question, et dont la vue seule pouvait faire découvrir les élémens nécessaires à la démonstration ou à la solution cherchée. Mais on n'a pas été sans éprouver les inconvéniens de cette manière de procéder , par la difficulté de construction de certaines figures ; et par leur complication qui en rend l'intelligence laborieuse et pénible. C'est surtout dans les questions de la Géométrie à trois di- mensions, où les figures peuvent devenir tout-à-fait impossibles, que l'inconvénient que nous signalons se fait le plus sentir. Ce défaut de la Géométrie ancienne fait un des avantages relatifs de la Géométrie analytique , où il se trouve éludé de la manière la plus heureuse. On a dû se demander, après cela, s'il n'était point aussi, en Géométrie pure et spéculative, une manière de raisonner sans l'assis- tance continuelle de figures, dont un inconvénient réel, même quand leur construction est facile, est tout au moins de fatiguer l'esprit et de ralentir la pensée. Les écrits de Monge et le professorat de cet illustre maître, dont les manières nous avaient été conservées par l'un de ses plus célèbres dis- ciples, héritier de sa chaire % ont résolu la question. Ils nous ont appris qu'il suffit, maintenant que les élémens de la science sont for- més et très-étendus , d'introduire dans notre langage et dans nos con- > M. Arago , aujourd'hui secrétaire perpétuel de l'Académie des sciences , quitta les bancs de l'école, pour devenir suppléant de Monge, et bientôt après professeur titulaire. Les notices scientifiques de l'Annuaire du bureau des longitudes, par lesquelles cet illustre astronome po- pularise en Europe la science si difficile des phénomènes physiques, sont encore un modèle précieux du style sans figures, qui nous paraît éminemment propre à hâter les progrès de la Géométrie. HISTOIRE DE LA GEOMETRIE. 209 ceptions géométriques, ces principes généraux et ces transformations analogues à celles de l'analyse, qui , en nous faisant connaître une vé- rité dans sa pureté primitive et sous toutes ses faces, se prêtent à des déductions faciles et fécondes par lesquelles on arrive naturellement au but. Tel est l'esprit des doctrines de Monge ; et quoique sa Géomé- trie descriptive, qui nous en offre des exemples, fasse par sa nature essentiellement usage de figures, ce n'est que dans ses applications effectives et mécaniques, où elle joue le rôle d'instrument, qu'elle opère ainsi : mais personne plus que Monge n'a conçu et n'a fait de la Géométrie sans figures. C'est une tradition dans l'école polytech- nique, que Monge savait, à un degré inouï, faire concevoir dans l'espace toutes les formes les plus compliquées de l'étendue, et pénétrer dfins leurs relations générales, et leurs propriétés les plus cachées, sans autre secours que celui de ses mains, dont les mouvemens secondaient admirablement sa parole, quelquefois difficile, mais toujours douée de la véritable éloquence du sujet, la netteté et la précision, la richesse et la profondeur d'idées. S 19. Nous avons essayé, dans les pages qui précèdent, d'appré- mflueDce des docirinM p*iii*i 1 •! ^^ Plonge iur TaQi- cier, autant que nos laibles lumières nous le permettaient, la nature ')« et l'étendue des services rendus à la Géométrie rationnelle par les doctrines de Monge. Il nous resterait à parler de l'influence qu'elles ont eue aussi sur la Géométrie analytique, et même sur l'algèbre, considérée comme pure théorie des grandeurs abstraites, en général. Mais ce serait nous écarter du but de cet écrit, et surtout il y aurait témérité à nous d'aborder un tel sujet, où nous ne saurions être qu'his- torien, et qui a déjà été traité par un géomètre qui joint la profon- deur à la variété des connaissances dont il a fait preuve dans toutes les parties des sciences mathématiques et philosophiques '. Aussi nous nous bornerons à dire simplement que l'algèbre, qui avait déjà dû des progrès considérables à la Géométrie, lors de l'al- liance que Descartes fit de ces deux sciences, lui en dut de nouveaux, ' Essai historique sur les services et les travaux scientifiques de Gaspard Monge, pnr M. Ch. Dupin; pag. 199-248 de l'cdition in-8". To«. XI. 27 210 HISTOIRE DE LA GÉOMÉTRIE. dans ses parties les plus relevées et les plus épineuses, l'intégration des équations différentielles à plusieurs variables, par la corrélation profonde que Monge sut établir entre les symboles de cette langue, et les formes et les grandeurs de l'étendue. Nous citerons, pour exemple, la double expression analytique de certaines familles de surfaces, par une équation différentielle, et par une équation finie renfermant des fonctions arbitraires, dont la seconde se trouvait précisément l'intégrale complète de la première. On conçoit qu'en rapportant ainsi les phrases analytiques à des objets visibles, dont les parties ont entre elles des rapports évidens et palpables , la Géométrie ait pu contribuer puissamment aux progrès de l'analyse; et en un mot, que Monge ait pu faire de l'algèbre avec de la Géométrie '. Progrès de la G^omë- § 20. Il uous parait résulter des considérations dans lesquelles nous trie dus aux écrits de , ^ • •» •- Monge. sommes entré au sujet des doctrines purement géométriques de Monge, qu'à l'apparition de sa Géométrie descriptive , la Géométrie propre- ment dite, cette science qui avait illustré Euclide, Archimède, Apollo- nius; qui avait été le seul instrument de Galilée, de Kepler, de Pascal, d'Huygens, dans leurs sublimes découvertes des lois de l'univers; qui enfin avait produit les immortels Principes mathématiques de la phi- losophie naturelle de Newton; que cette Géométrie pure, dis-je, qui depuis un siècle était délaissée, fut tout à coup agrandie dans ses con- ceptions et dans ses propres ressources. On dut concevoir dès-lors le désir et l'espoir de tirer rationnelle- ment de cette science seule les vérités nombreuses dont l'analyse de Descartes l'avait enrichie. • Ouvrages de Carnet Divcrs ouvragcs fureut entrepris dans ce but et dans cet esprit. Les premiers qui parurent, et qui, par leur importance et l'influence ' i< L'analyse ne peut que retirer un très-grand avantage de son application à ce genre de » Géométrie ; car je donne la solution de plusieurs problèmes d'analyse qu'on aurait peut-être » beaucoup de peine à résoudre sans les considérations géométriques. » { Monge , Mémoire sur les propriétés de plusieurs genres de surfaces courbes, inséré dans le tora. IX des Mémoikes des SAVANS ÉTBARGERs, ann. 1775.) HISTOIRE DE LA GÉOMÉTRIE. 211 qu'ils ont eue, méritent d'être mis hors ligne, sont la Géométrie dépo- sition, et VEssaisurla théorie des transversales , de l'illustre Carnot. Ces deux ouvrages, dans l'histoire des progrès de la Géométrie ra- tionnelle, ne doivent point être séparés de la Géométrie descriptive de Monge, comme ayant été, comme elle, et dans le même temps, une continuation des belles méthodes de Desargues et de Pascal, et ayant aussi comme elle, contribué puissamment aux nouvelles théories et aux découvertes récentes de la Géométrie. Ce rapprochement entre les doctrines et les travaux des quatre grands géomètres que nous venons de nommer, qu'avaient pu faire pressentir nos observations sur les méthodes de Desargues et de Pascal , nous pa- raît établir la véritable chaîne des pensées qui ont présidé aux progrès de la Géométrie. Mais peut- être devons-nous ajouter quelques mots pour développer nos idées sur ce point, et justifier ce rapprochement. S 21. Les figures que considère la Géométrie, et leurs parties , ont dc» genre, de m<- _-_ 11*1 • 1 thodej en Géométrie entre elles deux sortes de relations : les unes qui concernent leurs "«onneue. formes et leurs situations, appelées relations descriptives , et les autres qui concernent leurs grandeurs, appelées relations métriques. Ainsi, par exemple, qu'autour d'un point fixe, pris dans le plan d'une co- nique, on fasse tourner une transversale; et que par les deux points où elle rencontre la courbe, dans chacune de ses positions, on mène les tangentes à cette courbe j ces deux tangentes auront leur point de concours sur une droite fixe, qui sera lo. polaire du point fixe. Voilà une propriété descriptive de la conique ; voilà une relation descriptive d'un point et de sa polaire. Maintenant, que sur chaque transversale on prenne le point con- jugué harmonique du point fixe, par rapport aux deux points où la transversale rencontre la courbe ; ce point conjugué harmonique sera précisément sur la polaire du point fixe. Voilà une propriété mé- trique des coniques ; voilà une relation métrique d'un point et de sa polaire. Ces deux sortes de propriétés descriptives et métriques des figures , 4 212 HISTOIRE DE LA GÉOMÉTRIE. suffisent individuellement pour la solution d'un grand nombre de ques- tions. Mais il est toujours utile, et souvent indispensable, de les con- sidérer, en même temps, les unes et les autres. La science de l'étendue doit les comprendre sans distinction, ou serait incomplète. De là, on le conçoit, deux genres de méthodes en Géométrie ra- tionnelle ; ou au moins deux parties distinctes d'une méthode générale ; celle des relations descriptives et celle des relations métriques. Desargues, Pascal, De La Hire et Le Poivre procédèrent des deux manières; c'est-à-dire, qu'ils firent usage des deux genres de relations des figures : des relations descriptives , en se servant de la perspective pour transformer les figures ; et des relations métriques par l'usage répété de la proportion harmonique , de la relation d'involution, et de diverses autres propositions appartenant à la théorie des transver- sales. Cette distinction admise, on reconnaîtra que la Géométrie descrip- tive de Monge était une généralisation, immense, il est vrai, de la pre- mière méthode, la perspective, que ces géomètres employaient pour la démonstration des relations purement descriptives de leurs figures : nous avons vu en effet qu'elle était propre à cet usage , et c'est même dans le but de justifier nos paroles actuelles que nous nous sommes étendu alors sur ses applications pour cet objet. Quant à la théorie des transversales , comprise d'abord implicitement dans la Géométrie de position , puis exposée , sous son véritable titre , dans un écrit spécial, nous avons déjà dit et prouvé que ses principes et plusieurs de ses théories principales avaient été la base des découvertes de Desargues et de Pascal ; nous devons donc regarder cette théorie comme la mise en corps de doctrine des principes qui avaient servi à ces deux grands géomètres. Ainsi nous pouvons dire que la méthode de Monge et celle de Carnot sont, en Géométrie rationnelle , la généralisation et le perfectionnement immédiat des méthodes de Desargues et de Pascal ; que ce sont deux branches d'une même méthode générale, qui ont leurs avantages pro- pres et particuliers, et qu'on ne doit point séparer dans l'étude complète HISTOIRE DE LA GEOMETRIE. 213 des propriétés de l'étendue. II serait, au contraire, extrêmement utile de les y faire toujours marcher simultanément, sur deux lignes paral- lèles : elles s'aideraient mutuellement, et les progrès de la science en seraient plus complets et plus rapides '. Monge, et parmi ses disciples, surtout le savant auteur des Dàveloppemens et Applications de Géo- métrie, nous ont donné l'exemple d'une telle corrélation de méthodes, par celle qu'ils ont établie entre les procédés logiques de la pure Géo- métrie et le langage abstrait et symbolique de l'algèbre. § 22. Nous ne pouvons faire ici l'analyse des nombreuses et impor- tantes propositions qui abondent dans les deux ouvrages de Carnot; nous nous bornerons à y faire remarquer la belle propriété générale des courbes géométriques de tous les degrés, concernant les segmens qu'une telle courbe fait sur les côtés d'un polygone tracé dans son plan ; propriété qui constitue l'extension de la théorie des transversales à la Géométrie des courbes, et de laquelle, en particulier, se déduit, comme corollaire, le troisième théorème de Newton, relatif aux pro- duits des segmens faits sur des parallèles. Passons aux autres ouvrages qui, après ceux de Monge et de Carnot, Divcr. ooTr.gM a. ont servi le plus utilement la science. Tels nous paraissent être : L'intéressant Essai de la Géométrie de la règle, intitulé : Solutions peu connues de dijférens problèmes de Géométrie pratique (in-8°, 80 pages, an XII) j où M. Servois, après avoir réuni les théorèmes ' Les ouvrages de Monge et de Carnot offrent de beaux exemples de ces deux méthodes pour la démonstration des mêmes théorèmes, et prouvent, déplus, l'utilité de la concomi- tance que nous voudrions voir souvent établie entre elles; car les applications que Carnot fait de sa théorie des transversales , portent en partie sur plusieurs propriétés des sections coni- ques, et sur celles des axes radicaux et des centres de similitude de trois cercles tracés dans un plan , que Monge avait démontrées par de pures considérations de Géométrie. Mais Carnot , en se servant des relations métriques des figures , parvient, en même temps qu'aux théorèmes de Monge , h plusieurs propriétés concernant ces relations métriques , qui échappent en géné- ral à l'autre méthode, fondée en principe sur les propriétés purement descriptives des figures. Nous avions déjà fait quelques réflexions sur ces deux manières différentes de démontrer et de découvrir en Géométrie, à la suite do no» considérations sur le principe des relations contingentes. Géomédie. 214 HISTOIRE DE LA GEOMETRIE. principaux de îa théorie des transversales, en montre les usages, en Géométrie rationnelle, pour la démonstration des propositions, et dans la Géométrie pratique, pour résoudre sur le terrain, par des alignemens, les différens problèmes qui se présentent surtout à la guerre. Les Développemens et les Applications de Géométrie de M. Ch. Du- pin, où l'on a vu, pour la première fois, traiter par de pures considé- rations de Géométrie les questions difficiles de la courbure des sur- faces , qui avaient exigé entre les mains d'Euler et de Monge , toutes les ressources de la plus savante analyse. Les Élémens de Géométrie à trois dimensions (partie synthétique) de M. Hachette, où plusieurs questions sur les tangentes et les cercles osculateurs des lignes courbes, dont on n'avait jusqu'alors que des solutions analytiques, furent résolues aussi dans toute leur généralité, par des considérations purement géométriques. Le Mémoire de M. Brian chon sur les lignes du second ordre ^ où se trouvent déduites, pour la première fois, du célèbre théorème de Desargues sur l'involution de six points, de nombreuses propriétés de ces courbes. Le Mémoire sur V application de la théorie des transversales , du même auteur'. 1 Cet ouvrage a pour objet, comme celui de M. Servois, la solution de plusieurs problèmes par la ligne droite seulement. Déjà M. Brianchon s'était occupé de cette partie de la Géométrie , sous le titre même de Géométrie de la règle. ( Voir Correspondance sur l'école Polytechnique , tom. II , pag. 383.) Ce genre de Géométrie n'est point absolument nouveau. Nous avons parlé de l'ouvrage de Schooten sur ce sujet , et d'un ouvrage un peu antérieur, intitulé : Geometria peregrinans. Le traité de Schooten De concinnandis demonstrationibus , etc. , contient aussi des exemples de cette Géométrie : on en trouve d'autres dans les Récréations mathématiques d'Ozanam (édition de 1778), et dans divers traités de l'arpentage, particulièrement dans celui de Mascheroni , intitulé : Problèmes pour les arpenteurs , avec différentes solutions. (Pavie 1793. ) L'occasion se présente ici de faire mention de la Géométrie du compas de Mascheroni (ann. 1797) , ouvrage original et curieux, qui a pour objet la résolution, par le compas seulement, des problèmes que l'on résout ordinairement par la règle et le compas. Cette Géométrie est plus riche et plus étendue que celle de la règle, parce qu'elle embrasse les problèmes du second degré, qui sont tous ceux qui forment le domaine de la Géométrie ordinaire. Masche- HISTOIRE DE LA GÉOMÉTRIE. 215 Le Traité des propriétés projectives des figures de M. Poncelet, qui a pour but, comme l'indique le titre, la recherche des propriétés qui se conservent dans la transformation des figures par voie projective ; et où, par l'usage heureux de trois doctrines puissantes, \e principe de continuité, la théorie des polaires réciproques , et la théorie des figures homologiques à deux et à trois dimensions, le savant auteur a su dé- montrer, sans un mot de calcul, toutes les propriétés connues des lignes et des surfaces du second degré, et un grand nombre d'autres qui lui sont dues, et dont plusieurs sont regardées déjà comme des plus importantes de cette riche théorie. Divers mémoires de M. Gergonne, de M. Quetelet, de M. Dandelin et d'autres géomètres, qui ont paru dans les recueils scientifiques ', ont aussi enrichi la science de découvertes précieuses qui ont contribué à ses progrès. 8 23. De ces ouvrages, dont un mérite commun fut d'offrir, tous, Méihod des preuves convaincantes et multipliées des ressources infinies que la Géométrie pure peut puiser en elle-même, sont nées ces vérités sim- ples et fécondes, qui attestent seules la perfection de la science dont roni fait Toir qu'elle s'applique aussi arec facilité à la solution approximatire des problèmes qui dépendent des sections coniques, et d'une Géométrie plus relevée. Des essais du même genre que la Géométrie de la règle et celle du compas , et qui tiennent pour ainsi dire le milieu entre les deux , avaient déjà occupé , long-temps auparavant, de cé- lèbres mathématiciens. Cardan ,1e premier, dans son livre de suhlilitate, avait résolu plusieurs problèmes d'Euclide , par la ligne droite et une seule ouverture de compas , comme si l'on n'avait dans la pratique qu'une règle et un compas invariable. Tartalea ne tarda pas à suivre son rival sur ce terrain , et étendit cette matière par de nouveaux problèmes. General trattato di numeri, emisure; &'" parte, libro terso; in-fol. Venise, 1560. Enfin un savant géomètre piémontais J.-B. de Benedictis en fit l'objet d'un traité intitulé : Resolutio omnium Euclidii problematum , aliommque ad hoc necessarib inventorum, unà tantummodo circini data aperturâ ; in-4". Venise, lSo3. ' Le Journal et la Correspondance de l'école polytechnique ; les Annales de M. Gergonne; la Correspondance mathématique et physique de M. Quetelet ; le Journal allemand de M. Crelle. Plusieurs géomètres allemands , MM. Steincr, Plucker, MObius, etc., dignes collaborateurs des célèbres analystes Gauss , Crelle, Jacobi , Lejeune-Dirichlet , etc., écrivent dans ce der- nier recueil sur les nouvelles doctrines de la Géométrie rationnelle. Pious éprouvons un vif regret de ne pouvoir citer ici leurs ouvrages , qui nous sont inconnus , par suite de notre ignorance de la langue dans laquelle ils sont écrits. les récentes ro Géométrie. 216 HISTOIRE DE LA GEOMETRIE. elles sont les véritables bases : des théories, dont le germe se trouvait inaperçu, depuis des siècles, dans les écrits des géomètres, ont apparu, se sont développées rapidement, et ont donné lieu aux méthodes qui constituent la Géométrie récente. Parmi ces méthodes, nous distinguerons : Premièrement , la théorie des transversales, dont le principal théo- rème, relatif au triangle coupé par une droite, a une haute antiquité, mais auquel Carnot a donné une nouvelle existence, en en mon- trant, le premier , toute l'utilité et la fécondité, et en le transportant, par une généralisation infiniment heureuse, dans la théorie des lignes et des surfaces courbes \ Secondement, les doctrines sur la transformation des figures en d'au- tres figures du même genre, comme fait la perspective. Parmi les méthodes de cette nature, nous citerons : 1° La perspective elle-même, dont les principes sont la base des ouvrages de Desargues et de Pascal sur les coniques, et dont les usages, depuis, se sont étendus et souvent répétés. 2° La méthode qui consiste à faire croître dans un rapport con- stant, les rayons visuels menés aux diflférens points d'une figure, pour former une figure semblable et semblablement placée. 3° Celle qui fait croître proportionnellement les ordonnées des points d'une figure , ainsi qu'on opère dans le dessin d'un profil dont on veut rendre les dimensions en hauteur plus facilement appréciables ; mé- thode employée par Durer ^, Porta ^, Stevin, Mydorge et Grégoire de S'-Vincent , pour former l'ellipse par le cercle *. • Un théorème analogue , relatif aux segmens faits sur les trois côtés d'un triangle par trois droites issues d'un même point et aboutissant respectivement aux sommets opposés, est aussi l'un des principaux de la théorie des transversales. Celui-ci, qu'on a attribué jusqu'ici à Jean Bernouilli , a été démontré en premier lieu par Jean Cera. { ï^oir la note VII.) 2 Institut iones geometricœ. Livre I""^. •' Elemenla curvilinea. Livre l", * Le P. Nicolas, qui a fait aussi usage de cette méthode dans son Traité des conchoïdes et des cissoïdes, a appelé homogènes , les courbes ainsi formées l'une par l'autre. {De conchoidi- bus et cissoidibus exercitationes Geometriœ } in4°. Tolosœ , 1692. ) HISTOIRE DE LA GÉOMÉTRIE. 217 4° Celle par laquelle on incline toutes les ordonnées d'une figure, en les faisant tourner autour de leurs pieds sur le plan de projection , et en leur conservant le parallélisme entre elles ; procédé usité surtout en architecture, pour la construction des arcs rampans '. 5" La méthode pour la construction des bas-reliefs, enseignée par Bosse et Pétitot*; et celle proposée, depuis, par M. Breysig, sous le titre : Essai d'une théorie de la perspective des reliefs, disposée de manière à servir en même temps aux peintres , in-8". Magdebourg, 1798 \ ' On peut, en même temps , augmenter proportionnellement les ordonnées. M. Hachette a fait usage de ce mode de déformation dans deux propositions de Géométrie, pour démontrer qu'une des propriétés de la projection stéréogrnphiquc de la sphère ne pourrait avoir lieu dans une autre surface qu'autant qu'elle serait du second degré. (Voir Correspondance poly- technique, tom. I", pag. 77.) Il est aisé de voir que ce mode de déformation peut être 'ramené à celui qui consiste à faire croître les ordonnées d'une surface suivant leur propre direction , et dans un rapport constant. - La constraction des bas-reliefs est regardée généralement comme incertaine et dépourvue de règles rigoureuses, comme était, par exemple, la perspective, il y a deux siècles, dans l'esprit de la plupart des peintres. Cependant, dès il y a long-temps, Bosse a écrit quelques règles géométriques pour cette construction. Nous les trouvons dans son Traité des pratiques géoinétrates et perspectives (in-8° , 1665). Un passage du même ouvrage nous apprend que Desargues, qui eut la gloire d'introduire dans les arts de construction les principes et la rigueur des opérations géométriques , av'ait appliqué à la construction des bas-reliefs sa ma- nière de pratiquer la perspective. II nous est permis de penser que ce sont les idées de Desar- gues, ou sa méthode même, que Bosse nous a transmises. Nous trouvons, depuis, de semblables règles pour les bas-reliefs, dans le Traité de Pers- pective de Pétitot, intitulé -.Raisonnement sur la perspective, pour en faciliter Tusage aux artistes , in-fol. , Parme 1758 (en français et en italien). Ces règles de construction de bas-reliefs produisant des figures du même genre que les proposées, nous devons les comprendre parmi les méthodes dont nous faisons ici l'énumé- ration. Il est vrai que ces règles sont presque ignorées, et surtout qu'elles n'ont jamais été employées en Géométrie rationnelle , pour la recherche et la démonstration des pro- priétés des figures ; mais elles n'en sont pas moins susceptibles d'un tel usage. ' Nous ne connaissons de l'ouvrage de M. Breysig que le litre, qui est rapporté par M. Poncelet à la page 397 du 8' volume du Journal de M. Crelle; mais nous n'hésitons point à mettre le mode de construction des reliefs, qu'il contient, au nombre des méthodes pro- pres à transformer les figures à trois dimensions en d'autres 6gures du même genre, parce que M. Poncelet nous apprend que les préceptes de l'auteur se trouvent d'accord avec les siens propres, qui produisent de telles figures. Toa. XI. 28 218 HISTOIRE DE LA GEOMETRIE. 6° La méthode des Planiconiques de De La Hire, et celle de Le Poivre, ayant pour objet, l'une et l'autre, de décrire, sur le plan de la base d'un cône, les mêmes courbes que donneraient, dans l'es- pace, les sections du cône par un plan. 7° Celle de Newton , pour transformer les figures en d'autres du même genre ; comprise dans le lemme 22 du premier livre des Prin- cipes^ et qui fut généralisée par Waring *. 8" Celle dont nous avons fait usage pour appliquer à l'ellipsoïde les propriétés descriptives et de volumes de la sphère , qui consiste à faire croître dans des rapports constans les coordonnées des points de la figure proposée. {Correspondance sur V école polytechnique , tom. III, pag. 326.) =" 9° Enfin , la belle théorie des figures homologiques ou perspective- relief de M. Poncelet, qui rentre dans celle de De La Hire et Le Poivre par le cas des figures planes, mais qui n'avait point encore été conçue pour les figures à trois dimensions *. ' a: et y étant les coordonnées d'un point d'une courbe donnée, et a:', y' celles du point correspondant de sa transformée , Waring prend les relations : px' ■+■ qy' ■+■ r Vx' -\- Qy' ■+- R "^ ~ Aa;' -1- By' -t- C ' ^ ~ Aar' + By' -t- c' Il présente ce mode de transformation comme une généralisation de celui de Newton, où l'on a x' ^ x' {Principes math., livre l"', lemme 22); et il se borne à faire voir que la nouvelle courbe sera du même degré que la proposée. ( /ï/»sce/fa«ea analytica , pag. 82; Proprietales curvarum algehraicarum , pag. 240. ) Nous démontrerons que les courbes ainsi construites peuvent être, aussi bien que celles de Newton , produites par la perspective ; de sorte que la généralisation de PF^aring ne porte que sur la position de la nouvelle courbe par rapport à la proposée , et non sur sa forme, ni sur ses propriétés individuelles, 2 Euler avait indiqué ce mode de transformation pour les courbes planes ; mais sans en faire d'applications : il dit que les courbes ainsi construites l'une par l'autre, ont de l'affinité; il les appelle Lineœ affines. (Introductio in analysin infinitorum ; livre 2, art. 4-42.) 3 M. Le François a fait usage, dans ces derniers temps, de la théorie des figures homolo- giques, comme moyen de déformation de quelques courbes du troisième degré , particu- HISTOIRE DE LA GÉOMÉTRIE. 219 Nous réunissons sous un môme titre ces diverses méthodes, parce que nous ferons voir que toutes, et la perspective proprement dite elle-même , dérivent d'un seul principe fondamental , dont elles ne sont que des applications particulières. Troisièmement , la théorie des polaires réciproques, que les élèves de Monge puisèrent dans les précieuses leçons de cet illustre profes- seur; dont il fut fait d'abord quelques usages particuliers pour trans- former des figures en d'autres où des droites correspondaient à des points et des points à des droites [voir la Note XXVI) ; et sur laquelle le célèbre auteur du Traité des propriétés projectives des figures a appelé toute l'attention des géomètres, en la faisant servir, le premier, à la transformation des relations de grandeur métrique et angulaire. Quatrièmement, la doctrine des projections stéréographiques, qui, considérée d'abord dans la sphère seulement, servait à la construction de certaines cartes géographiques; et qui, accrue d'un nouveau théo- rème, et étendue d'une manière très-générale aux surfaces du deuxième degré, offre aujourd'hui un moyen de recherche aussi simple qu'expé- ditif '. Les mémoires de l'Académie de Bruxelles, particulièrement, lièrement des focales de MM. Quetelet et Van Rees. (Dissertatio inauguralis tnathematica de quibusdam curvis geometriciê ; in-4°. Gand, 1830.) La méthode de ce géomètre diffère de celle de M. Poncelet, en ce qu'il se sert, pour construire ses courbes homologiques , d'une de leurs relations métriques. Mais cette relation n'est pas la plus générale que com- porte cette théorie; elle est un rapport harmonique; tandis qu'on peut prendre un rap- j)ort anharmonique qui donne plus de généralité à la construction des figures. Nous revien- drons sur cet objet dans notre Mémoire sur la Déformation homographique. La considération des relations métriques des figures étant la partie principale de ce Mé- moire, on nous permettra de rappeler ici qu'il a été adressé à l'Académie de Bruxelles en janvier 1830; et qu'ainsi il a précédé la publication de la thèse de M. Le François, que ce géomètre nous a fait l'honneur de nous adresser quelque temps après. ' La théorie des projections stéréographiques de la sphère , telle qu'on l'emploie aujour- d'hui dans la Géométrie spéculative, se compose des deux principes suivans : 1" La projection de tout cercle tracé sur la sphère est un cercle ; S" Le centre de ce cercle est la projection du sommet du cône circonscrit à la sphère suivant le cercle mis en projection. Ce second théorème, aussi essentiel que le premier, n'est connu que depuis quelques an- nées; nous l'avons énoncé pour la première fois, et démontré analytiquement, dans les if /é- mens de Géométrie à trois dimensions de M. Hachette (année 1817). Depuis nous avons appliqué. 220 HISTOIRE DE LA GEOMETRIE. contiennent les applications les plus heureuses de cette élégante doc- trine, par MM. Quetelet et Dandelin. S 24. Telles nous paraissent être les quatre grandes divisions aux- quelles on pourrait rattacher , sous le point de vue philosophique des méthodes , dans l'état actuel de la Géométrie, la plupart de ses nom- breuses découvertes récentes. Dans une cinquième, on comprendrait quelques théories particulières et spéciales, que leurs auteurs ont fait reposer sur les seuls principes de la Géométrie pure. Telles sont entre autres, la théorie des tangentes conjuguées , due à M. Dupin, qui en a fait les plus utiles applications spéculatives et pratiques; et la nou- velle Théorie des caustiques , par laquelle M. Quetelet a réduit à quel- ques principes de Géométrie élémentaire cette partie importante et difficile de l'optique, à laquelle ne pouvaient suffire toutes les ressour- ces de l'analyse. Ces théories, qui semblent au premier abord étrangères aux mé- thodes dont nous venons de parler, pourraient pourtant s'y rattacher sous certains rapports, et en recevoir d'utiles secours. Les singuliers rapprochemens que M. Quetelet a faits entre sa théorie des caustiques et celle des projections stéréographiques, en sont une première preuve; nous aurons occasion ailleurs d'en donner d'autres \ par de simples considérations de Géométrie, à toute surface du second degré , la théorie des projections stéréogra()liiqiies , et l'avons généralisée sous deux rapports : 1° en considérant des surfaces du second degré inscrites dans la proposée , au lieu de sections planes de celle-ci ; 2" en prenant pour plan de projection un plan quelconque. (Voir Annales de mathématiques , tom. XVllI, pag. 305, et toni. XIX, pag. 137. ) 1 Par exemple, M. Ch. Dupin , dans sa belle Théorie géométrique de la courbure des surfaces , n'a pas dégagé entièrement de considérations analytiques la démonstration de cette proposi- tion : u Quand deux surfaces du second degré ont leurs sections principales décrites des mêmes » foyers, elles se coupent partout à angle droit. » Les méthodes récentes conduisent de di- verses manières à une démonstration purement géométrique de ce théorème. Disons même, pour offrir un exemple de la portée de ces méthodes, que l'on parvient , sans plus de diihculté , à cette proposition beaucoup plus générale : Quand deux surfaces du second degré ont leurs sections principales décrites des mêmes foyers , de quelque point de l'espace qu'on les considère , leurs contours apparens paraissent se cotipar à angle droit. Nous ajouterons que les beaux résultats contenus dans un mémoire sur les axes conjugués et les momens d'inertie des corps (16" cahier du Journal de l'école polytechnique) , où M. Binet a HISTOIRE DE LA GÉOMÉTRIE. «1 Q 25. En même temps qu'une étude approfondie de l'état actuel de Perf«iioonero«i d» la Géométrie pure tend à justifier la division systématique que nous avons établie , elle fait voir, par le manque de généralité et de caractère précis d'une foule de théorèmes qui se rattachent aux méthodes que nous venons d'indiquer, que ces méthodes elles-mêmes n'ont point encore l'étendue , la fécondité et le degré de puissance désirables. Ainsi , par exemple , les méthodes comprises dans nos deuxième et troisième divisions, d'un usage facile et général pour la découverte et la démonstration des propriétés descriptives des figures, n'ont encore été appliquées que d'une manière restreinte aux relations de gran- c/ewr (lignes, surfaces ou volumes). N'est-il pas présumable qu'il leur manque quelque principe qui les rende applicables à des relations beaucoup plus générales, et peut-être à toutes sortes de relations? On conçoit donc que ces méthodes ne reposent point encore sur d'assez larges bases. Et en effet, nous croyons pouvoir dire que cha- cune d'elles est susceptible d'une très-grande extension. § 26. La première , celle des transversales , peut être accrue de Théorie d« tr.ii«.r- • 1 1 1 salei. prmcipes nouveaux, qui la rendent propre à de nouveaux usages, et suppléent en mille circonstances, et particulièrement dans l'étude des propriétés générales des courbes géométriques, à l'analyse de Descartes: dans son état actuel même, elle peut servir à diverses questions, qui ne lui ont point encore été soumises ; par exemple au problème géné- ral des tangentes et à celui des rayons de courbuf'e de toutes les courbes géométriques, dont nous avons indiqué les solutions dans le Bulletin universel des sciences (juin 1830) '. fait aussi usage de la même proposition que M. Ch. Dupin, et ceux auxquels M. Ampère est aussi parvenu sur le même sujet , dans son mémoire intitulé : Quelques propriétés nouvelles des axes permanens de rotation des corps; nous ajouterons, dis-je, que ces belles découvertes, regardées comme étant du domaine de la mécanique, et que leurs auteurs ont obtenues par l'analyse, peuvent aussi dériver de pures considérations géométriques : et peut-être trouve- rait-on que cette voie rattache davantage ces diverses découvertes à leurs principes premiers, en montre mieux l'enchainement , et en rend l'exposition plus facile et plus rationnelle. C'est ainsi que la Géométrie , en reculant ses limites, apportera toujours son flambeau dans quelque partie nouvelle des sciences physico-mathématiques. ' Construction des tangentes. — Pour dcleriuiner la tangente en un point »/• d'une courbe 222 HISTOIRE DE LA GEOMETRIE. Projections st^réogra- S ^7. La doctrine dcs projections stéréographiques, outre l'exten- p iques. ^.^^ qu'elle a déjà reçue par son application à toutes sortes de surfaces du second degré, est susceptible d'une nouvelle généralisation qui consisterait à placer l'œil, non plus en un point de la surface, mais arbitrairement en un lieu quelconque de l'espace , même à l'infini. De cette manière les sections planes de la surface du second degré ne seront plus, en projection, des coniques homothétiques entre elles, ou bien des coniques ayant toutes un même axe de symptose ; ces courbes auront entre elles une dépendance d'une expression plus gé- nérale; elles auront toutes un double contact (réel ou imaginaire) avec une même conique , qui sera la perspective du contour apparent de la surface du second degré (cette conique pouvant elle-même être imaginaire). géométrique , d'un degré quelconque, on mène par ce point deux transversales wA , mA.', sous des directions arbitraires ; on fait les produits des segmens compris sur ces droites entre le point m et les autres points où elles rencontrent la courbe ; soient P , P' ces deux produits ; Par un point /x , pris arbitrairement dans le plan de la courbe , on mène deux trans- versales, parallèles aux deux droites mk, m A'; et on fait les produits des segmens compris sur ces deux transversales entre le point /x et la courbe ; soient n , n' ces deux produits. On portera sur les deux droites mA , mA', à partir du point m, deux lignes proportion- 11 n n' . ,,....,, nelles aux rapports — , — respectivement ; la droite qm joindra les extrémités de ces li- gnes sera parallèle à la tangente au point m. Ainsi la direction de la tangente est déterminée. On pourrait construire directement la normale. Pour cela, on porterait sur les deux trans- P P' versales issues du point m, des lignes proportionnelles aux rapports —, — ; par les ex- trémités de ces lignes et par le point m , on ferait passer un cercle ; son centre serait sur la normale à la courbe au point m. Construction des cercles osculateurs. — Pour déterminer le cercle osculateur en un point m d'une courbe géométrique , on mènera , par ce point , la tangente à la courbe , et une trans- versale quelconque mA ; on prendra les produits des segmens compris sur ces deux droites entre le point m et les autres branches de la courbe ; soient T et P ces deux produits. Par un point fi, pris arbitrairement dans le plan de la courbe , on mènera deux parallèles à la tangente et à la transversale; et on fera les produits des segmens compris sur ces deux parallèles entre le point ^ et la courbe ; soient t et ît ces deux produits. P T «t On portera sur la transversale mA une ligne égale à — . — ; Vextrémité de cette ligne sera sur le cercle osculateur cherché. HISTOIRE DE LA GÉOMÉTRIE. 223 Ce théorème appartient à M. Poncelet, qui l'a donné dans son Traité des propriétés projectives (art. 6 10), et en a montré l'usage pour l'étude des propriétés d'un système de coniques ayant toutes un double contact avec une môme conique. Si l'on y joint, comme dans la projection sté- réographique proprement dite , un second théorème relatif à la projec- tion des sommets des cônes circonscrits à la surface du second degré suivant ses sections planes, cette théorie nouvelle offrira un champ de recherches intéressantes et inépuisables, et où se trouveront résolus une foule de problèmes sur la construction des coniques assujéties à des conditions diverses. {Voir la Note XXVIII.) S 28. Les méthodes comprises dans notre deuxième division , qui Méthode, a. d^rom.- ^^ * ' * tion det figarei. . paraissent étrangères les unes aux autres, et sont destinées à des usages pratiques difl'érens, peuvent, étant considérées comme moyen théo- rique de déformation des figures, être résumées en un seul et unique 11 suit de cette construction que , si l'on désigne par i l'angle que la transversale mi i p T fait avec la tangente , le rayon de courbure sera égal à R = • — • ;r« 2 »in. fl T 1 Si la courbe est du degré «i, t et ît contiendront m facteurs linéaires, P en contiendra m — 1 , et T en contiendra m — 2. Quand la courbe sera tracée , ces facteurs seront des lignes comprises sur les transversales ; et quand la courbe sera déterminée par son équation, on connaîtra immédiatement, au moyen de cette équation, les valeurs des quatre produits P, T, t, r; ce qui résulte, comme on sait , de la théorie générale des équations. Quand la courbe est tracée , il faut qu'elle le soit complètement , c'est-à-dire que toutes ses branches soient décrites, pour que les transversales la rencontrent en autant de points que l'in- dique le degré de la courbe. Par exemple , si la courbe est une de celles du quatrième degré , appelées ovales de Descarte» , il faut connaître sa compagne , qui est une seconde ovale , jouissant des mêmes propriétés que la première , qui n'est point indiquée par la construc- tion géométrique que Descartes et d'autres géomètres ont donnée de ces courbes , mais qui est renfermée dans la même équation, {foir la Note XXI.) Les constructions précédentes peuvent être simplifiées , parce qu'au lieu de quatre trans- versales, parallèles deux à deux, on peut n'en mener que trois, dont deux issues du point de la courbe, et la troisième tout-à-fait arbitraire. Cette modification des solutions ci-dessus repose sur la belle propriété générale des courbes géométriques donnée par Camot dans sa Géométrie de position, pag. 291. M. Poncelet a aussi donné une construction des tangentes ans courbes géométriques dans son Mémoire présenté, en septembre 1831 , à l'Académie des Sciences de Paris, sous le titre : Analyse des transversales appliquée à la recherche des propriétés projectives des lignes et surfaces géométriques. (F'oir le tom. VIll du Journal de M. Crelle, pag. 220.) HISTOIRE DE LA GEOMETRIE. principe de déformation , qui les remplacera toutes; principe qui nous parait offrir une doctrine nouvelle d'une grande portée, et d'un usage facile et plus étendu que celui de ces diverses méthodes. Cette doctrine reposera sur un seul théorème de Géométrie, que nous regardons comme la dernière généralisation, et pour ainsi dire comme l'original des prin- cipes qui donnaient lieu à ces méthodes. Nous ajouterons que toutes autres méthodes semblables, qu'on pourrait découvrir par la suite , pour convertir les figures en d'autres du même genre, ne seront aussi que des déductions de ce seul et unique théorème. Polaires réciproques et S 29. Quant à la théoric des polaires réciproques, qui sert àtrans- autres méthodes sein- p ir» J9i.iî 1 ,i * COr j. / 1 1 i biabics. former les figures en d autres figures de genre dmérent ( dans lesquel- les les plans et les points correspondent respectivement à des points et à des plans des figures proposées), et à convertir les propriétés Principe de dualité, dc ccs figurcs cu proprlétés des figures nouvelles, ce qui établit une dualité permanente des formes et des propriétés de l'étendue figurée, nous avons déjà annoncé {Annales de mathématiques , tom. XVIII, pag. 270), que cette théorie n'est point une méthode unique pour ces fins, et qu'il en existe plusieurs autres, qui mettent en évidence cette dualité, et qui sont d'un usage aussi facile dans leurs applica- tions. Ainsi, la dualité reconnue depuis deux siècles ' dans la Géométrie de la sphère, où chaque figure a sa figure supplémentaire dans la- quelle des arcs de grands cercles correspondent aux points de la pre- mière, et passent par un même point quand ces points de la première figure sont sur un même arc de grand cercle, cette dualité , dis-je, met dans une évidence parfaite la dualité des figures planes, et offre un moyen facile de transformation de ces figures. Qu'on conçoive en effet, sur une sphère, une première figure quel- conque, et la figure supplémentaire (c'est-à-dire, la figure enve- loppe des arcs de grands cercles dont les plans sont perpendiculaires • Nous avons dit que le théorème sur lequel repose cette dualité est dû à Snellius, et que ^ sa découverte avait été préparée par les transformations de triangles sur la sphère, que Viète avait faites pour résoudre quelques cas de la trigonométrie sphérique. HISTOIRE DE LA GÉOMÉTRIE. aux rayons qui aboutissent aux points de la première) ; et qu'on fasse la perspective de ces deux figures sur un plan, l'œil étant placé au centre de la sphère; on aura en perspective deux figures, dont l'une sera la transformée de l'autre, et où la dualité en question sera évi- dente. Mais on reconnaît aisément que cette transformation d'une figure plane peut s'effectuer directement sur le plan de la figure, sans l'em- ploi d'une sphère auxiliaife. En effet, la perpendiculaire abaissée de chaque point de la figure proposée sur la droite qui correspond à ce point dans la seconde figure, passera par un point fixe qui est la pro- jection orthogonale du centre de la sphère sur le plan de la figure; et cette perpendiculaire sera divisée en ce point en deux segmens dont le produit sera constant, comme étant égal au carré de la distance du centre de la sphère au plan de la figure. Il suffira donc , pour former une transformée d'une figure proposée, de mener, par un point fixe de son plan, un rayon à chacun des points de cette figure, de prendre sur le prolongement de ce rayon, au delà du point fixe, une ligne proportionnelle à sa valeur inverse, et de mener, à l'extrémité de cette ligue, une perpendiculaire au rayon. Toutes ces perpendiculaires cor- respondront respectivement aux points de la figure proposée , et en- velopperont sa transformée. S 30. Il est manifeste que ce procédé de construction des figures transformées s'applique aux figures à trois dimensions; nous l'énonce- rons ainsi : f Étant donnée une figure dans V espace, que d un point fixe, pris arbitrairement , on mène à tous les points de cette figure des rayons , et que sur ces rayons {ou bien sur leurs prolongemens au delà du point fixe), on porte des lignes qui leur soient respectivement pro- portionnelles, que par les extrémités de ces lignes on mène des plans perpendiculaires aux rayons; tous ces plans envelopperont une se- conde figure qui sera la transformée de la proposée, comme on F en- tend dans le principe de dualité. C'est-à-dire, qu'aux plans dans la figure proposée, correspondront des points dans la nouvelle figure, et ToM. XI. . 29 &. 226 HISTOIRE DE LA GEOMETRIE. quand ces plans passeront par un même point, ces points seront sur un même plan '. Quand les lignes proportionnelles aux valeurs inverses des rayons menés du point fixe aux points de la figure proposée, sont prises sur les directions de ces rayons, les plans menés par les extrémités de ces lignes, perpendiculairement aux rayons, peuvent être considérés comme les plans polaires des points de la figure proposée, par rap- port à une certaine sphère décrite du point fixe comme centre. Notre mode de transformation comprend donc celui de la théorie des polaires réciproques considérées dans la sphère; et il est plus général que celui-ci , en ce que dans la théorie des polaires les plans correspondans aux points d'une figure proposée sont toujours menés entre ces points et le centre de la sphère , tandis que dans notre mode de transformation, ces plans peuvent être menés au delà du point fixe qui représente ce centre ^. Cette connexion intime entre la théorie des polaires réciproques, d'invention toute récente, et la dualité des figures tracées sur la sphère, connue et usitée depuis près de deux siècles, nous a paru mériter d'être remarquée ici. S 31. Passons à d'autres modes de transformation. Il en est deux qui reposent, comme le précédent, sur des théories connues. Le premier est offert par le porisme d'Euclide que nous avons cité en parlant des collections mathématiques de Pappus (P "^ Epoque , S 31 ; en note); car, dans ce porisme, pour chaque point d'une figure plane on construit une droite, et on reconnaît aisément que quand les points de la première figure sont en ligne droite, les droites corres- pondantes dans la seconde figure passent par un même point. ' La démonstration de ce théorème est extrêmement facile. Nous la donnerons dans la note XXIX. 2 La plus grande généralité que nous venons de signaler n'a lieu que sous le rapport géo- métrique , et non quand on emploie la voie analytique; parce que dans ce dernier cas on peut supposer imaginaire le rayon de la sphère par rapport à laquelle on prend les polaires ; et alors les plans polaires des points de la figure proposée sont menés au delà du point qui représente le centre de la sphère. HISTOIRE DE LA GÉOMÉTRIE. 227 Le second résulte de la théorie des courbes et surfaces réciproques dont Monge a donné l'expression analytique. {Voir la Note. XXX.) § 32. On peut imaginer d'autres modes de transformation. Par exemple, soient dans l'espace un angle trièdre, et un triangle situé dans un plan mené par le sommet de l'angle trièdre ; que par chaque point d'une figure donnée dans l'espace on mène trois plans passant pas les trois côtés du triangle ; ils rencontreront respectivement les trois arêtes de l'angle trièdre en trois points qui détermineront un plan; tous les plans ainsi déterminés envelopperont une seconde figure, qui aura avec la proposée les rapports et les dépendances qui consti- tuent la dualité en question. Une figure étant donnée dans l'espace , qu'on lui imprime un mou- vement infiniment petit quelconque, et qu'on mène par ses différens points des plans normaux à leurs trajectoires; tous ces plans enve- lopperont une seconde figure, qui sera une transformation de la pro- posée, de même nature que la précédente. Que l'on suppose qu'une figure donnée dans l'espace soit sollicitée par plusieurs forces, et que par chaque point de la figure on mène le plan principal de ces forces relatif à ce point; tous ces plans envelop- peront une seconde figure qui sera encore une transformation de la proposée, de même nature que les précédentes. 5 33. De ces trois modes de transformation dans l'espace, le pre- mier, celui qui fait usage de l'angle trièdre, a son analogue sur le plan; c'est le porisme d'Euclide. Les deux autres n'ont point leurs analogues sur le plan : mais ils n'en sont pas moins propres à la transformation des figures planes. En effet, qu'une figure plane soit donnée à trans- former; on imprimera à son plan un mouvement infiniment petit dans l'espace; les plans normaux aux trajectoires des différens points de la figure envelopperont une surface conique (qui aura son sommet en un point du plan de la figure) ' , et un plan transversal mené arbitraire- ■ Nous donnerons la démonstration de ce théorème dans un écrit sur les propriétés géomé- triques du mouvement d'un corps solide libre dans l'espace. 228 HISTOIRE DE LA GÉOMÉTRIE. ment dans l'espace coupera cette surface conique suivant une figure qui sera une transformée de la proposée. On pourra faire servir ainsi, à la transformation des figures planes, chacun des procédés qu'on emploiera pour la transformation des figures dans l'espace, et qui n'aurait pas son analogue sur le plan. § 34. Nous pourrions citer d'autres modes particuliers de trans- formation, qui feraient comme les précédens, soit dans l'espace, soit sur le plan, le même office que la théorie des polaires réciproques. princpe de transforma- Mais toutcs ccs méthodcs pcuvcnt ctrc remplacées, comme celle de déformation, dont nous avons parlé ci-dessus , par un seul et unique principe, plus général et plus étendu que chacune d'elles. Ce principe, qui constitue une doctrine complète de transformation des figures, prend sa source dans un seul théorème de Géométrie , qui nous paraît être la raison première de cette propriété inhérente aux formes de l'étendue, la dualité, sur laquelle de savans géomètres ont déjà écrit, mais sans remonter, malgré les vues très-philosophiques qu'ils ont apportées dans cette partie de la Géométrie, à son principe primordial, indépendant de toute doctrine particulière. Caractère particulier de S 35. Nous allous tout dc suitc fairc concevoir, par quelques ré- flexions sur la nature de ce principe de transformation, et sur la théorie des polaires réciproques, comment il offre une plus grande généralité que cette théorie. Les figures considérées dans ce genre de transformation , ont entre elles une concordance , ou réciprocité , qui consiste en ce que à chaque point de la fgure proposée correspond un plan dans sa dérivée , et réciproquement à chaque point de celle-ci correspond tin plan dans la figure proposée. Cela résulte d'une seule et unique condition dans la construction de la seconde figure savoir, que : tous les plans qui, dans cette figure , correspondent à des points de la proposée , situés sur un même plan , doivent passer nécessairement par un même point. Voilà comment un point de la seconde figure répond à un plan de la première. Cette condition, qui constitue à elle seule la doctrine de transfor- la théorie des polai- res réciproques. HISTOIRE DE LA GÉOMÉTRIE. 229 mation dont nous parlons, parce qu'elle la distingue d'une infinité d'autres modes de transformation , dans lesquels des plans correspon- dent à des points, ou bien des points à des plans, mais où ces deux circonstances n'ont pas lieu en même temps; cette condition, dis-je, se trouve remplie dans la théorie des polaires , où l'on sait que tous les plans polaires des points d'un même plan passent par un môme point, (ou en d'autres termes, quand des cônes circonscrits à une surface du second degré ont leurs sommets sur un même plan , les plans de leurs courbes de contact avec la surface passent par un même point). Voilà pourquoi la théorie des polaires offre un moyen de transformation des figures, et met en évidence la dualité de l'étendue. Mais cette théorie offre une circonstance particulière; c'est que le point par où passent les plans polaires des points de la première figure qui sont situés sur un même plan, a lui-même pour plan polaire ce plan. De sorte que la première figure se construirait au moyen de la seconde, absolument de la même manière que cette seconde a été construite au moyen de la première. Ainsi, il y a réciprocité parfaite, ou plutôt identité parfaite de construction entre les deux figures. La théorie des polaires ayant été jusqu'à ce jour le seul moyen em- ployé pour la transformation des figures, on pourrait croire qu'elles doivent leur concordance , ou réciprocité de formes , dont nous parlions tout à l'heure , à l'identité de construction qui a lieu dans cette théorie des polaires. Ce serait une erreur grave. Cette identité de construction est une propriété accidentelle, particulière aux figures que produit la théorie des polaires, et qui se présente aussi dans d'autres modes de transformation ; mais ce n'est point elle qui donne lieu à la dualité de l'étendue ; et en effet , elle n'existe point dans divers autres modes de transformation, et notamment dans celui qui, comme nous le ferons voir, comprend tous les autres comme corollaires, ou cas particuliers. Aussi nous ne ferons aucun usage de cette identité de construction , et nous l'écarterons de l'exposition de notre doctrine de transformation, comme y étant étrangère, et ne s'y rencontrant que par circonstance particulière et accidentelle. tion. 230 HISTOIRE DE LA GEOMETRIE. Caractère particulier de S 36. Daus Ig mocle de tvansformation pav Yoîe (Ib mouvemeiit mfi- plusieurs autres mo- • ■•■•I '"■"■/l • i tir* des de transforma. niment petit, il J 3 identité de construction, comme dans la théorie des polaires : c'est-à-dire , que les plans normaux aux trajectoires des points d'une première figure enveloppent une seconde figure, qui est telle, que si elle eût été construite, et qu'elle eût éprouvé le même mouvement que la première, les plans normaux à ses trajectoires en- velopperaient la première figure. Une pareille réciprocité a lieu aussi dans les figures faites par l'em- ploi d'un système de forces. Mais il n'en est plus de même dans les transformations faites par la considération de l'angle trièdre. Si un point parcourt une figure don- née, le plan déterminé comme nous avons dit, au moyen de l'angle trièdre, enveloppera une seconde figure qui sera la dérivée ou trans- formée de la première. Mais si le point parcourt cette seconde figure, le plan mobile n'enveloppera point , comme dans la théorie des polaires et dans la transformation par voie de mouvement infiniment petit, la première figure ; il en enveloppera une troisième toute différente. Dans le cas particulier seulement où les trois sommets du triangle seraient situés dans les plans des faces de l'angle trièdre, il y aurait identité , c'est-à-dire , que la troisième figure ne serait autre que la première. Dans le mode de transformation des figures planes fourni par le porisme d'Euclide, il ne peut jamais y avoir identité de construction. Ainsi, quand le point mobile parcourt une figure proposée, sa droite correspondante, ou dérivée, enveloppe une seconde figure; mais si le point mobile parcourt cette seconde figure, sa droite dérivée en en- veloppera une troisième qui sera différente de la première. Mais on peut toujours substituer au mode de construction employé pour former la seconde figure au moyen de la première, un autre mode, qui servira à construire cette première au moyen de la seconde. Dans des cas particuliers, tels que ceux que présentent la théorie des po- laires, le mouvement infiniment petit de la figure proposée, etc., ces deux moyens de construction, qui généralement sont diflférens, se trouvent être les mêmes. Nous donnerons les relations générales qui HISTOIRE DE LA GÉOMÉTRIE. 231 ont lieu entre ces deux modes de construction, de manière à conclure toujours l'un de l'autre. S 37. Nous sommes entré dans des considérations, peut-être trop i. ib^ur» d» h»'" développées, pour bien pénétrer le lecteur de cette idée, que la dualité ''î '""'j^™""" •• de l'étendue ne provient nullement des circonstances de construction qui avaient semblé, dans la théorie des polaires réciproques, faire le caractère distinctif des modes de transformation propres à mettre cette dualité en évidence. Il résulte aussi de ces considérations, que la théorie des polaires réciproques n'est pas le mode de transformation le plus général. Mais si c'eut été la seule vérité que nous eussions voulu mettre en évi- dence, il nous aurait suffi de dire que, dans le mode général, qui comprend tous les autres, on peut, pour construire la figure corréla- tive d'une figure proposée, prendre arbitrairement dans l'espace cinq plans comme correspondant à cinq points désignés de la première figure; tandis que dans la théorie des polaires réciproques, deux figures corrélatives ont entre elles des dépendances beaucoup plus restreintes. Car si l'on y considère deux tétraèdres dont les sommets de l'un cor- respondent aux plans du second, les quatre droites qui joindront les sommets du premier respectivement aux sommets du second , opposés aux plans qui correspondent aux quatre sommets du premier, ces quatre droites, dis-je , seront toujours quatre génératrices d'un même mode de génération d'un hyperboloïde à une nappe '. Les autres modes de transformation ofirent pareillement quelques dépendances particulières de situation entre les figures et leurs trans- formées, mais qui sont différentes de celle que nous venons d'énoncer pour les figures polaires réciproques. ' Cela provient de ce que /e« droite» qui joignent les quatre sommets d'un tétraèdre aux pôles des faces opposées , pris par rapport à une surface du second degré quelconque , sont quatre géné- ratrices d^un même mode de génération d'un hyperboloide à une nappe. Ce théorème, que nous avons démontré dans les Annales de mathématiques, tom. XIX , |>ag. 76, est susceptible d'un grand nombre de corollaires. On en conclut , par exemple, qui; les quatre perpendiculaires abaissées des sommets d'un tétraèdre sur les faces opposées , sont quatre génératrices d'un même mode de génération d'un hyperboloide. 232 HISTOIRE DE LA GEOMETRIE. Ainsi, dans la transformation par voie de mouvement infiniment petit, on trouve que deux droites quelconques, et leurs dérivées, sont toujours quatre génératrices d'un même mode de génération d'un hy- perboloïde. Transformation des re- S 38. Nous n'avous parlé jusqu'à présent que des relations de des- anguîâirTs""''"" " cription et de situation entre les figures et leurs transformées; mais il y a à considérer aussi leurs dépendances de grandeur métrique et an- gulaire. Ce seront ces dépendances qui serviront à traduire les théo- rèmes 011 entreront des relations de grandeur. Ces dépendances générales de grandeur entre une figure et sa transformée reposent sur un principe très-simple qui n'a point été mis en usage dans la théorie des polaires; aussi , cette théorie, qu'on a appliquée d'une manière fort générale à la transformation des relations de description , ne l'a été que d'une manière restreinte aux relations de grandeur : d'abord parce qu'on ne lui a point soumis toutes les rela- tions auxquelles elle était propre, et ensuite parce que, faute du prin- cipe dont nous parlons, il a fallu prendre deux cas particuliers de cette théorie pour opérer la transformation d'une relation de grandeur. On a pris pour surface auxiliaire, ou une sphère, ainsi que l'a fait, le pre- mier, M. Poncelet dans son Mémoire sur la théorie générale des po- laires réciproques \ et ensuite M. Bobillier ^ ; ou un paraboloïde, comme nous l'avons proposé dans nos deux mémoires sur la Trans- formation parabolique des relations métriques *. Les dépendances de grandeur, entre une figure et sa dérivée, ne sont pas les mêmes dans ces deux modes de transformation. Elles con- sistent, dans le premier cas, en ce que l'angle de deux plans d'une figure est précisément égal à l'angle des rayons de la sphère auxiliaire qui aboutissent aux deux points correspondans à ces plans dans la seconde figure ; et dans le second cas, en ce que le segment intercepté sur l'axe ' Journal de M. Crelle, torn. IV. Ce mémoire a été présenté à l'Académie des sciences de Paris, le 12 avril 1824. 2 Annales de mathématiques , tom.'KNlU., ann. \^11-\Z^Q. 3 Correspondance mathématique de M. Quetelet, tom. V et VI. HISTOIRE DE LA GEOMETRIE. 233 du paraboloïdc auxiliaire par deux plans d'une figure, est égal à la pro- jection orthogonale, faite sur cet axe, de la droite qui joint les deux points de l'autre figure qui correspondent à ces deux plans. Ces deux modes de transformation ont été appliqués l'un et l'autre, et avec la même facilité, à toutes les relations qui se présentent dans la théorie des transversales. Le premier l'a été de plus à quelques re- lations particulières d'angles , par exemple aux théorèmes de Newton et de Maclaurin sur la description organique des coniques '; et le second à plusieurs relations de distances rectilignes, particulièrement aux théorèmes de Newton sur les courbes géométriques, ce qui nous a conduit à un genre tout nouveau de propriétés de ces courbes ^. S 39. Outre cette différence entre les dépendances générales de gran- deur, ces deux modes de transformation diffèrent encore l'un de l'autre par les relations descriptives , qui leur donnent à chacun quelque chose de particulier et de restreint. Par exemple, quand on emploie une sphère pour surface auxiliaire, s'il se trouve une autre sphère dans la figure qu'on veut transformer, il lui correspondra dans la nouvelle figure une surface du second degré de révolution ; on n'aura donc point les propriétés générales d'une sur- face du second degré quelconque. Pareillement, quand on prend pour surface auxiliaire un parabo- loïdc, si l'on a à transformer les propriétés d'une figure où entre un ellipsoïde, il lui correspondra toujours dans la seconde figure un hy- perboloïde, et jamais un ellipsoïde. Mais ce n'est pas ce manque de généralité qui offre le plus d'inconvéniens. C'est que toutes les droites qu'on peut considérer dans la figure proposée comme étant situées à l'infini, auront leurs dérivées, dans la seconde figure, toutes parallèles à l'axe du paraboloïde, et par conséquent concourantes en un point ' Mémoire de M. Poncelet, sur les polaires réciproques. * Nous citerons , par exemple, le théorème suivant, qui appartient à ce nouveau genre de propriétés des courbes : Si l'on mène à une courbe géométrique toutes ses tangentes parallèles à une droite quelconque , le centre des moyennes distances de leurs points de contact sera un point unique, quelle que soit la direction commune des tangentes. Nous avons appelé ce point le centre de la courbe. La même propriété a lieu dans les surfaces géométriques. To.ï. XI. 30 234 HISTOIRE DE LA GEOMETRIE. situé à l'infini. On aura donc une propriété de différentes droites parallèles entre elles ; tandis que si l'on avait pris une autre surface auxiliaire , on aurait eu la propriété correspondante pour des droites concourantes en un même point. Il est vrai que l'on peut, par une autre voie (et c'est l'objet des mé- thodes comprises dans notre seconde division), appliquer les propriétés de la sphère aux autres surfaces du second degré, et les propriétés d'un système de droites parallèles entre elles à des droites concourantes en un même point ; mais il y aurait à faire deux opérations graphiques ou intellectuelles au lieu d'une. S 40. Au surplus, sauf quelques cas particuliers, où les relations de description ou de grandeur d'une figure sont trop restreintes pour qu'on emploie le principe de transformation général et absolu, que nous exposerons dans cet écrit, ce principe offrira presque toujours, notamment en ce qui concerne les relations métriques, outre l'avan- tage d'une plus grande généralité dans les résultats, celui d'une ap- plication plus facile et plus spontanée que celle d'aucune méthode particulière. Sous ce rapport, ce principe de transformation et le principe de déformation qui remplacera les diverses méthodes comprises dans notre seconde division, appliqués dans leur plus grande généralité, et de la manière la plus abstraite, nous paraîtront justifier ce précepte de l'illustre auteur de la Mécanique céleste : a Préférez les méthodes » générales, attachez-vous à les présenter de la manière la plus simple, )) et vous verrez en même temps qu'elles sont presque toujours les )) plus faciles ' ; » auquel M. Lacroix a ajouté, avec l'autorité que lui donnent dans les sciences sa grande expérience et son profond savoir, que (( les méthodes générales sont aussi les plus propres à faire con- )) naître la vraie métaphysique de la science ". » Théories particulières § 41. La Géométrlc s'est accrue, depuis une trentaine d'années, de delà Géométrie. , , a i i • 11 • 1 propositions, et même de théories nouvelles, si nombreuses et si va- ' Séances des écoles normales; in-8°, 1800; tom. IV, pag. 49. 2 Essais sur l'enseignement; 3* édition, in-8°, 1828, HISTOIRE DE LA GÉOMÉTRIE. fSS riées, que nous avons dû, dans notre aperçu de ses progrès pendant cet intervalle, nous borner à y distinguer les méthodes principales, à en montrer l'origine, la nature et les usages en Géométrie rationnelle. Une analyse plus étendue de tant de travaux, sur lesquels reposent dans ce moment les progrès virtuels et l'avenir de la Géométrie, serait incontestablement d'une grande utilité, mais exigerait un volume, et dépasserait de beaucoup les limites que nous devons observer ici. Cependant, nous ne pouvons nous dispenser de signaler, parmi tant d'autres, deux doctrines, qui, sous des rapports différens, nous pa- raissent d'une importance majeure pour le perfectionnement de la Géométrie spéculative , et pour ses applications aux questions des phénomènes physiques. Nous voulons parler de la théorie des surfaces du second degré, et de la Géométrie de la sphère, c'est-à-dire, de la doctrine des figures tracées sur la sphère. Cette dernière est si ancienne , et les surfaces du second degré pa- raissent un sujet si rebattu, depuis surtout quelques années, que l'on ne pense pas, peut-être, qu'il reste grand'chose à faire sur ces deux objets, et qu'ils méritent l'importance que nous voulons leur donner. Nous devons donc nous empresser de justifier notre opinion, pour pré- venir le sentiment d'incrédulité que nous craignons qu'elle ne rencontre chez plusieurs des géomètres qui nous feront l'honneur de nous lire. § 42. La Géométrie de la sphère a une haute antiquité; elle a pris G«,mU MEMOIRE QUI SUIT. g l«r. La Géométrie descriptive de Monge est passée dans l'ensei- gnement des mathématiques. La théorie des transversales de Carnot , qu'un des géomètres qui ont le plus approfondi la métaphysique et la nature des sciences a déjà depuis long-temps émis le vœu de voir intro- duire dans les élémens de Géométrie ' , est appréciée par la plupart des professeurs, qui en comprennent aujourd'hui dans leurs cours les théorèmes principaux. Mais les autres méthodes dont nous avons parlé, sont encore éparses dans les mémoires des géomètres qui s'en sont servis, et dont la lecture, à cause du très-grand nombre des ré- sultats nouveaux qu'ils contiennent, peut paraître longue et pénible. C'est là, je crois, la véritable cause de l'éloignement pour la Géo- métrie rationnelle où l'on ne croit voir, et cette erreur est déplo- rable, qu'un chaos de propositions nouvelles trouvées au hasard, sans liaison entre elles et sans avenir pour un perfectionnement notable de la science de l'étendue. Nous avions pensé q»i'il serait utile, pour chercher à détruire cette erreur, de coordonner entre elles toutes ces vérités partielles et isolées, de les faire dériver toutes de quelques-unes seulement prises parmi les ' Cette ingénieuse théorie des transversales, dont les principes simples et féconds mériteraient bien d'être admis au nombre des élémens de la Géométrie. » ( Journal de l'école polytechnique, 10" cahier; Mémoire sur les polygofies et les polyèdres, par M. Poinsot. ) 254 HISTOIRE DE LA GEOMETRIE. plus générales, et de rattacher celles-ci aux méthodes dont nous avons parlé; ce qui eût été aussi une justification de notre classification. Ce travail aurait porté le titre à^Essais de complémens de Géométrie ra- tionnelle. Son objet principal eût été une exposition dogmatique des méthodes en question, et de leurs principales applications. Nous y joignions une théorie nouvelle et purement géométrique des surfaces du second degré, et une théorie, géométrique aussi, des courbes planes du troisième degré, avec lesquelles enfin il est temps de se familiariser; con- dition nécessaire des progrès ultérieurs de la Géométrie, comme a été jusqu'à ce jour la connaissance complète des courbes du second degré. Nos matériaux étaient plus ou moins avancés, ainsi qu'on peut en juger par diverses Notes que nous y avons puisées pour nous en servir dans cet écrit. Mais, ainsi qu'il devait arriver dans un travail qui em- brassait tant de recherches diverses, la matière s'est étendue, et nous avons reconnu qu'il nous fallait un plus long temps et un plus grand cadre que nous n'avions cru d'abord, pour le terminer sans une trop grande imperfection; et des retards trop prolongés devant avoir aussi leurs inconvéniens, nous nous sommes décidé à écrire d'abord sépa- rément sur les différentes parties que nous destinions à cet ouvrage; nous promettant de revenir ensuite à notre premier projet; et désirant toutefois qu'une plume plus habile et plus capable de le mener à bien nous prévienne dans l'accomplissement d'une entreprise que nous croyons utile à la Géométrie. 5 2. Nous nous proposons de traiter, dans le mémoire qui va suivre, des méthodes comprises dans nos deuxième et troisième divi- sions, et de mettre au jour les deux principes généraux de l'étendue, auxquels nous avons dit que toutes ces méthodes peuvent se rattacher ; et qui constituent deux doctrines générales de déformation et de trans- formation des figures. § 3. Nous démontrerons ces deux principes d'une manière directe, qui en fera des vérités absolues et abstraites, dégagées et indépendantes de toutes méthodes particulières propres à les justifier ou à en faciliter les applications dans quelques cas particuliers. HISTOIRE DE LA GÉOMÉTRIE. 235 Nous les présenterons, ainsi que nous l'avons déjà dit, dans une plus grande généralité qu'aucune de ces méthodes. L'extension que nous leur donnerons trouvera sa principale utilité dans un principe de re- lations de grandeur extrêmement simple , qui les rendra applicables à de nombreuses questions nouvelles. Ce principe repose sur une relation imique, à laquelle il suffira tou- jours de ramener toutes les autres. Cette relation est celle que nous avons appelée rapport anharmonique de quatre points ou d'un fais- ceau de quatre droites. C'est là le type unique de toutes les relations transformables par les deux principes que nous démontrons. Et la loi de correspondance entre une figure et sa transformée, consiste dans l'égalité des rapports anharmoniques correspondans. La simplicité de cette loi, et celle du rapport anharmonique rendent cette forme de relations éminemment propre à jouer un rôle si impor- tant dans la science de l'étendue. Quand les relations proposées paraîtront au premier abord ne pas ren- trer dans cette formule, l'art du géomètre consistera à les y ramener par différentes opérations préparatoires, analogues, sous certaines rapports, aux changemens de variables et aux transformations de l'analyse. ^^ 4. Nous commencerons par le principe de transformation dont la théorie des polaires réciproques offre des applications, parce que le second, quoique tout aussi général dans sa destination, en sera un corollaire naturel. Nous l'appellerons principe de c/i/a/yV^, suivant l'ex- pression de M. Gergonne; et nous dirons que deux figures qui auront entre elles les dépendances voulues par les lois de ce principe, sont corrélatives \ Après avoir démontré ce principe, nous en ferons diverses applica- ' Le mot corrélatif éiant employé d'une manière générale dans mijle circonstances, il serait bien à désirer qu'on eût un outre ndjcctif dériré du mot dualité. Par cette raison nous avions pensé à substituer au mot dualité celui de diphanie, qui aurait exprimé ce double genre de propriétés que présentent toutes les figures de l'étendue ; nous aurions dit le principe de diphanie, et nous aurions appelé diphaniques les figures qui auraient eu entre elles les re- lations prescrites par ce principe. Mais nous n'avons point voulu nous permettre de substituer une nouTclIc dénomination à celle qui a été généralement reçue. « 256 HISTOIRE DE LA GEOMETRIE. lions, qui nous conduiront à des propositions nouvelles, dont plusieurs seront des propriétés générales , d'un genre tout nouveau , des courbes planes et à double courbure, et des surfaces géométriques : puis nous donnerons la construction analytique et géométrique des figures cor- rélatives les plus générales ; et enfin , nous exposerons les rapports qui ont lieu entre ce principe et la théorie des polaires réciproques ; et nous en déduirons plusieurs autres méthodes particulières , qui offriraient , comme cette théorie, des moyens faciles de mettre en usage ce principe, s'il n'était démontré directement et à 'priori , comme une propriété inhérente à l'étendue figurée. S 5. Parmi les applications du principe de dualité , il en est une qui mérite que nous en fassions ici une mention particulière. En jetant un coup d'œil sur l'état de la Géométrie avant qu'on eût fait usage de la théorie des polaires pour transformer certains théo- rèmes , on s'aperçoit que l'on ne connaissait que très-peu de vérités qui fussent les conélatives d'autres vérités connues. Dans la théorie des courbes, par exemple , aucune de leurs propriétés générales n'avait sa corrélative. Cette circonstance prouve que la méthode analytique de Descartes , à laquelle on devait les plus belles découvertes , particu- lièrement dans la Géométrie des courbes, n'est pas applicable, ou du moins présenterait des obstacles très-grands si on cherchait à l'appli- quer à ce genre de théorèmes qu'on obtient immédiatement, en vertu du principe de dualité , comme corrélatifs de théorèmes démontrés par cette méthode de Descartes. Le principe de dualité donne donc, sous ce rapport, à la Géométrie pure un avantage incontestable sur la méthode analytique. Mais on ne conclura pas de là que l'algèbre , cet instrument merveil- leux, qui , jusqu'à ce jour, s'est prêté à toutes les conceptions géométri- ques, doive refuser son secours aux nouvelles propriétés de l'étendue, qui semblent échapper aux procédés de Descartes. On pensera au contraire qu'il suffira de modifier dans sa mise en œuvre, la grande conception de Descartes, en lui reconnaissant pour objet adéquat l'ap- plication des symboles algébriques aux idées de figure et d'étendue. HISTOIRE DE LA GÉOMÉTRIE. 257 Le moyen employé par Descartes a été de considérer tine courbe comme la conjonction de points se succédant d'après une loi donnée , et d'exprimer la position de tous ces points par une relation constante entre les distances de chacun d'eux à deux axes fixes. On conçoit sans peine, que le procédé analogue dans la nouvelle Géométrie analytique , sera de considérer chaque courbe comme l'en- veloppe de toutes ses tangentes; et d'exprimer la position de toutes ces droites par une équation unique entre deux variables, dont chaque système de valeurs correspondra à l'une de ces droites. Le principe même de dualité , appliqué aux procédés et aux rela- tions géométriques que représente l'équation d'une courbe ou d'une surface dans le système de Descartes , conduira immédiatement au nouveau système de Géométrie analytique en question. C'est ainsi que nous l'exposerons dans cet écrit, brièvement, comme simple ap- plication du principe de dualité, nous réservant de revenir sur cet objet, que nous avons traité directement, et sans le secours du prin- cipe de dualité , en suivant à peu près la marche adoptée pour l'ex- position de la Géométrie analytique en usage. Nous avons déjà dit en peu de mots en quoi consiste notre nouveau système de coordonnées , et nous en avons fait des applications {Voir le tom. YI, pag. 81 de la Correspondance mathématique de M. Que- telet). Mais si nous n'avons pas mis d'empressement à publier ce travail qui, si le principe de dualité n'était pas connu, aurait une grande utilité, parce qu'il servirait à démontrer directement tous les théo- rèmes corrélatifs de ceux qu'on obtient par la Géométrie de Descartes, c'est qu'il n'est point indispensable, aujourd'hui que le principe de dua- lité sert j\ transformer sur-le-champ les vérités obtenues par la méthode de Descaries. Néanmoins ce nouveau système de Géométrie analytique nous pa- rait mériter d'être développé, comme complétant, avec la doctrine des coordonnées de Descartes, l'œuvre que s'est proposée ce grand philo- sophe dans sa magnifique conception de l'application de l'algèbre à la Géométrie. Tom. XI. 33 238 HISTOIRE DE LA GEOMETRIE. § 6. Ce que nous venons de dire de la Géométrie analytique , rela- tivement aux propriétés de l'étendue découvertes par le principe de dualité, s'applique aussi en partie à la théorie des transversales, telle que Carnot l'a formée, et qu'elle a été appliquée depuis une trentaine d'années. Cette théorie ne convient pas, dans son état actuel, pour la démonstration de beaucoup de théorèmes relatifs aux lignes et aux surfaces courbes, qui sont les corrélatifs d'autres théorèmes qu'on a démontrés par cette théorie même. Cependant elle s'applique à ceux de ces théorèmes qui ne concernent que les systèmes de lignes droites , parce que Carnot a compris dans cette théorie le théorème de Jean Bernoulli (ou plutôt de Jean Ceva, comme nous l'avons dit. Note VI), qui se trouve être le corrélatif de celui de Ptolémée. Il suffira d'introduire pareillement dans la théorie des transversales, quelques théorèmes relatifs aux lignes et aux surfaces courbes , pour la mettre en état de satisfaire par elle-même et directement aux dou- bles questions qui doivent toujours se présenter désormais dans les spéculations géométriques. Ces théorèmes, qui seront précisément les corrélatifs des principes actuels de la théorie des transversales, ont déjà été obtenus par M. Ponceîet dans ses applications de la théorie des polaires réciproques; et cet habile géomètre en a fait usage dans son mémoire intitulé : Analyse des transversales appliquée à la recherche des propriétés projectives des lignes et surfaces géomé- triques {Voir tom. YIII du Journal de M. Crelle). Utilité du principe de .^ 7. Après avoir montré que le principe de dualité étend ses appli- dualité dans l'algè- ^ T ITT ri •"^ cations sur la Géométrie analytique , en y introduisant un nouveau système de coordonnées, nous devons ajouter que l'influence et la portée de ce principe peuvent s'étendre jusque sur l'algèbre même , considérée dans son abstraction absolue. On ne doit point s'étonner de cela; car Monge nous a appris, par d'assez beaux exemples, qu'aux lois de l'étendue et qu'à toutes les conceptions de la Géométrie suffi- samment générales, peuvent correspondre des considérations et des résultats de pure algèbre. C'est sous deux points de vue que nous envisageons les usages du HISTOIRE DE LA GÉOMÉTRIE. 259 principe de dualité en algèbre. D'abord comme moyen d'intégration dans plusieurs cas; et ensuite comme pouvant donner, par l'expression algé- brique de certains résultats de Géométrie , divers théorèmes d'algèbre. Nous allons expliquer en peu de mots cette double application du principe de dualité à l'analyse algébrique. § 8. A. une surface donnée, correspond, suivant le principe de dua- lité, la surface corrélative; et à chacune des propriétés de la première surface correspond une propriété de la seconde. ""'■'' ' Si la première surface est exprimée par une équation (dans un sys- tème quelconque de coordonnées), les relations géométriques qui ont lieu entrtf elle et la seconde surface serviront à passer de cette équa- tion à celle de la seconde surface, dans le même système de coordon- nées : et, réciproquement, à passer de l'équation de cette seconde surface à celle de la première ( Nous donnerons les formules qui servent à cela dans le système de coordonnées de Descartes). Si la première surface est représentée seulement par une équation aux différentielles partielles, à cette équation en correspondra une autre qui sera sa cor- rélative et qui appartiendra à la seconde surface. Cette autre équation sera généralement différente de la proposée , et pourra se prêter plus ou moins facilement qu'elle aux méthodes d'intégration. Si l'on peut l'intégrer, on aura l'équation de la seconde surface, et l'on passera, par les formules en question, de cette équation à celle de la première sur- face; ce sera donc l'intégrale de l'équation aux différences partielles proposée. Cette méthode est celle, comme on voit, que nous avons développée dans la Note XXX sur les surfaces réciproques de Monge, comme ayant pu avoir été l'objet de cette théorie des surfaces réciproques. Cette méthode, considérée analytiquement et abstraction faite de toute considération géométrique, n'est au fond qu'un mode de trans- formation algébrique, dont les relations entre les variables correspon- dantes nous sont indiquées d priori par l'expression analytique des relations qui ont lieu entre les figures corrélatives construites suivant le principe de dualité. 260 HISTOIRE DE LA GÉOMÉTRIE. g 9. Voici quelle sera la seconde manière de faire servir le principe de dualité à la découverte de divers théorèmes d'algèbre. Que l'on ait trouvé par ce principe un théorème de Géométrie ; et qu'en cherchant à démontrer ce théorème par l'analyse, c'est-à-dire, par la méthode des coordonnées , on éprouve une difficulté insurmon- table provenant de l'imperfection actuelle de la science algébrique, on cherchera à préciser le point de difficulté, ou en d'autres termes, la notion algébrique qu'il serait nécessaire d'admettre pour arriver à la conclusion désirée. Cette notion algébrique sera un théorème d'al- gèbre, qui se trouvera, de la sorte, démontré par des considérations géométriques. Un exemple éclaircira suffisamment cette manière de procéder. Supposons qu'on veuille démontrer par la méthode des coordonnées en usage, ce théorème : Si à une surface géométrique donnée on mène tous ses plans tangens parallèles à un même plan transversal, leurs points de contact avec la surface auront pour centre des moyennes distances un même point de l'espace , quelle que soit la position du plan transversal. En représentant par F {ce, y, z) = o l'équation de la surface, on trouve que les coordonnées des points de contact des plans tangens, sont données par cette équation et par les deux suivantes : dx ■+- (/F "d. = 0, dY dy -+- ^1 = o; a et Z» étant les deux quantités angulaires qui déterminent la direction commune aux plans tangens. Éliminant y el z entre ces trois équa- tions, on aura une équation résultante en x dont les racines seront les abscisses des points de contact des plans tangens avec la surface. Il faudra donc, d'après le théorème énoncé, que la somme de ces ra- cines soit la même, quelle que soit la direction commune des plans HISTOIRE DE LA GEOMETRIE. 261 tangens, c'est-à-dire, quels que soient les deux paramètres a et h. De là résulte donc ce théorème d'algèbre : Si entre les trois équations F(*, y, s) = 0, dF_ fltF _ dr ds rfF rfF _ dy dz on élimine les deux variables y et z, l'équation résultante en x aura la somme de ses racines indépendante des deux coefjiciens a et b. Cet exemple suffit pour montrer comment on fera usage du principe de dualité pour établir des théorèmes d'algèbre. § 10. Les idées de dualité que nous avons appliquées, dans les para- Apni.ciiioDd,ipriiidpe graphes précédens, à deux doctrines géométriques, la méthode des ■°''î" coordonnées de Descartes, et la théorie des transversales, et à une théorie algébrique, l'intégration des équations aux différences par- tielles, peuvent s'étendre à d'autres parties des mathématiques, prin- cipalement à la dynamique. Mais ce n'est point ici le lieu de traiter ce sujet pour lequel nous renvoyons à la Note XXXIV. g 1 1 . La seconde partie de cet écrit sera consacrée au second prin- Princp» a homogi.- cipe général en question, celui de déformation des figures. Comme les figures que l'on a à considérer dans les applications de ce principe sont du même genre, c'est-à-dire, qu'à chaque point, à chaque droite , à chaque plan de l'une correspondent respectivement un point, une droite, un plan dans l'autre, ainsi que cela a lieu, par exemple , dans deux figures semblables , ou bien dans deux figures planes dont l'une est la perspective de l'autre, nous appellerons ces figures homographiques ; et le principe en question sera dit principe de déformation homographique , ou simplement principe d'homo- graphie. § 12. Il ne paraîtra peut-être pas inutile, avant d'entrer en matière. 262 HISTOIRE DE LA GEOMETRIE. de bien préciser le caractère philosophique de ce principe, et la nature de ses applications dans la Géométrie rationnelle. Usages du principe d'ho Sa dcstinatiou première est de qénëraliser les propriétés de l'étendue. mographie. ^ _ _ * * De là naissent deux usages distincts auxquels il sera propre. Car cette généralisation peut se faire de deux manières; elle peut porter sur la construction et sur la forme de la figure, ou bien sur les pro- priétés de cette figure. Dans le premier cas la question qu'on se propose est celle-ci : Connaissant les propriétés dtune certaine fgure , en conclure les propriétés analogues cTune figure du même genre , mais dune construction plus générale. Par exemple, étant données certaines propriétés du cercle ou de la sphère, en conclure les propriétés correspondantes des sections co- niques ou des surfaces du second degré. Dans le deuxième cas, la question peut être énoncée ainsi : (con- naissant quelques cas 'particuliers d une certaine propriété qénérale inconnue d'une figure, en conclure cette propriété générale. Par exemple : prenons trois diamètres conjugués d'une surface du second degré ; on sait que la somme de leurs carrés est égale à une quantité constante. Ce théorème donnera lieu à cette question : étant donnée une surface du second degré, et étant pris un point quelconque dans l'espace , par lequel on mène trois droites ; à quelles conditions de construction devront satisfaire ces droites, pour que dans le cas particu- lier où ce point serait le centre de la surface, elles deviennent trois dia- mètres conjugués ; et quelle sera la propriété de ces trois droites qui deviendra celle des trois diamètres conjugués que nous avons énoncée? Ainsi, on conçoit bien les deux questions générales auxquelles est destiné le principe de déformation homographique. $ 13. La première de ces deux questions donne lieu à une véri- table méthode de recherches. En effet, qu'il s'agisse de démontrer telle propriété d'une figure; on prendra, parmi l'infinité des figures homographiques possibles, celle dans laquelle, à raison de sa simplicité ou d'autres circonstances. HISTOIRE DE LA GÉOMÉTRIE. 9«3 le théorème sera, sinon évident, au moins d'une démonstration plus facile. C'est ainsi que l'on a souvent réduit , par l'emploi de la pers- pective, la recherche des propriétés des coniques à celles du cercle. § 14. Sous le point de vue de la seconde question, le principe de déformation homographique peut être regardé comme appartenant à la classe des méthodes inverses. L'opération à laquelle il est propre est l'inverse de celle que nous pratiquons journellement pour con- clure d'un théorème général les cas particuliers qui s'y rattachent. Considéré comme une telle méthode, ce principe mérite peut-être quelque attention. En effet, quoi qu'il soit toujours facile en Géo- métrie de passer d'une vérité à ses corollaires , qui sont autant de vérités moins générales que la première, on n'a point encore de règles inverses pour passer de l'une de ces vérités particulières à la vérité gé- nérale. L'induction, l'analogie ou quelques considérations particulières, peuvent bien, dans certains cas, mettre sur les traces de cette vérité primitive et la faire deviner; mais ensuite sa démonstration devient une question toute nouvelle, pour laquelle on n'a aucune méthode spéciale, he principe d'homographie, et les différens modes de défor- mation qui en émanent, offrent une méthode de ce genre, véritable méthode de généralisation , la seule, je crois, que l'on ait encore tenté d'introduire dans la Géométrie rationnelle '. On appréciera ' Oseroi-je, par suite de ces considérations, indiquer un point de ressemblance entre cette méthode et le calcul intégral. Le but est le même dans l'un et l'autre; il s'agit de passer d'une dérivation d'un objet à cet objet. Étant donnée une quantité , on sait toujours , et à l'instant même , trouver sa différentielle ; mais pour la question inverse : étant donnée une quantité ou une équation différentielle , trouver son intégrale ; on n'a point de méthodes générales. Pareillement , étant donnée une proposition générale, on peut énoncer sur le champ ses cas particuliers; et dans la question inverse , où, étant donné un cas particulier d'une proposition générale inconnue, ou demande de déterminer cette proposition générale , on n'a point non plus de méthode générale. Ce rapprochement paraîtra peut-être moins étrange , si nous disons que le caractère pins particulier du principe d'homographie , parmi les autres modes de transformation des figures , est de passer, comme daus le calcul intégral , de l'infini au fini. Ce sont les propriétés d'une figure qui a des parties à l'infini qu'un veut, le plus souvent, dans les applications du principe d'homographie, transporter à une figure du mémo genre , mais dont les mêmes parties sont placées à des distances finies. 264 HISTOIRE DE LA GEOMETRIE. l'utilité de telles méthodes pour hâter les progrès de la science. Car il n'est point de découverte un peu capitale dont on n'ait rencontré, dès long-temps auparavant, quelques germes et quelques cas parti- culiers, qui auraient pu sur-le-champ, à l'aide de ces méthodes de généralisation, conduire à cette découverte. Il est donc important de rechercher et de cultiver ces sortes de méthodes. § 15. Nous ferons diverses applications du principe de déformation homographique : l'une d'elles portera sur le système de coordonnées qui constitue la Géométrie de Descartes, et conduira à un nouveau système de Géométrie analytique plus général, et qui serait propre à la démonstration directe par l'analyse, des propositions que ce prin- cipe aurait servi à démontrer comme généralisation de celles aux- quelles s'applique la doctrine de Descartes. Méthodes dérivées dn § 16. Lc prlucipe général de déformation homographique com- principe d'homogra- ii» /Il -Ti • • l l'ti» prend plusieurs méthodes particulières, qui serviront pour des questions spéciales et plus restreintes. Nous en distinguerons trois principales : La première sera la théorie des figures homologiques de M. Ponce- let, qui servira, par exemple, pour déduire des propriétés de la sphère une foule de propriétés des surfaces du second degré de révolution qui ont un foyer; mais nous y joindrons le principe des relations métri- ques, sans lequel cette élégante théorie ne pourrait atteindre à une foule de questions, et serait incomplète \ La seconde sera une méthode propre à l'extension des relations angulaires, qui servira particulièrement pour appliquer les propriétés de la sphère aux surfaces du second degré de révolution qui n'ont pas de foyer. Aucune des méthodes de transformation n'a encore été propre à ce genre de recherches. Et la troisième sera destinée à une classe très-nombreuse de pro- priétés appartenant à la Géométrie des mesures , c'est-à-dire aux lon- ' Par exemple , ce principe des relations de grandeur est indispensable pour connaître les propriétés métriques du système de deux coniques quelconques , dont M. Poncelet a donné les propriétés descriptives ; il en est de même pour la théorie des bas-reliefs dont les propriétés métriques ne sont pas moins importantes que leurs propriétés purement descriptives. HISTOIRE DE LA GÉOMÉTRIE. 265 gueurs, surfaces et volumes des figures, ce sera la traduction en pure Géométrie de la méthode analytique que nous avons déjà employée pour transporter aux surfaces du second degré, les propriétés de la sphère. Cette méthode nous servira particulièrement pour démontrer, par pure intuition, les belles propriétés connues, et plusieurs autres des diamètres conjugués des surfaces du second degré, que l'on n'a démontrées jusqu'ici qu'avec le secours de l'analyse. S 17. En général, nos applications du principe d'homographie aux surfaces du second degré, nous conduiront naturellement à de nombreuses propriétés de ces surfaces, que les procédés analytiques, employés jusqu'à ce jour, n'avaient point encore indiquées; et ces ap- plications feront peut-être voir qu'il est possible de baser sur de pures considérations de Géométrie et sans le secours du calcul, une théorie très-étendue des surfaces du second degré, ainsi que nous l'avons annoncé plus haut. L'analyse a de si beaux et de si immenses avan- tages sur la Géométrie, en tant d'autres circonstances, qu'on nous permettra d'ajouter ici que, dans cette théorie des surfaces du second degré, elle les cède à la méthode géométrique. Celle-ci y est beau- coup plus rapide et plus féconde que la voie du calcul ; elle est aussi plus lumineuse, parce que ne tirant ses ressources que de la nature même des choses , et sans considérations auxiliaires , elle montre mieux l'enchaînement des propositions, pénètre jusqu'à leur source, et peut conclure de quelque relation primordiale entre les figures, une infinité de déductions qui font autant de propositions diverses dont les rapports n'apparaîtraient pas toujours dans les formules et les transformations analytiques, et qui, dès lors, exigeraient des démon- strations différentes, souvent longues et pénibles'. S 18. Indépendamment des usages du principe d'homographie, 1 Noas croyons avoir déjà présenté dans notre Mémoire sur les propriétés des cônes du second degré , un exemple des «ivnntnges que la méthode géométrique peut avoir souvent sur l'analyse dans la théorie des surfaces du second degré. Car , outre que la méthode analytique n'avait point mis sur la voie des divers théorèmes auxquels des considérations géométriques nous ont conduit, elle les démontrerait plus longuement que nous n'avons fait; ce dont nous nous sommes convaincu en traduisant nos premières démonstrations en analyse. Toï. XI. 34 26$ HISTOIRE DE LA GÉOMÉTRIE. comme moyen de démonstration et de généralisation des propriétés de l'étendue, ce principe, en lui-même, renferme un troisième genre d'utilité, qui consiste dans la notion même de V homogf'aphie des figures. En effet, la considération de deux figures homographiques, et la connaissance des rapports qui les lient l'une à l'autre, présen- tent des vérités géométriques nouvelles , auxquelles peuvent se ratta- cher, comme corollaires, une foule de théorèmes connus, et qui peuvent conduire à beaucoup d'autres résultats nouveaux qu'on n'ob- tiendrait que difficilement sans le secours de cette doctrine des figures homographiques. Par exemple, nous dirons que les diverses manières de décrire les coniques, données par Newton, Maclaurin , De Witt, etc., et un grand nombre de propriétés de ces courbes, qui paraissent n'avoir aucun rapport entre elles, sont des conséquences immédiates de la théorie des figures homographiques. ( Voir les Notes XV et XVI.) Les propriétés que présente le système de deux corps parfaitement égaux, et même de deux corps semblables situés d'une manière quel- conque dans l'espace, sont aussi des conséquences de cette même théorie. Et ces propriétés, qu'on n'a point encore cherchées, sont nombreuses et conduisent à divers théorèmes curieux sur le mouve- ment infiniment petit, et même sur le déplacement fini quelconque d'un corps solide '. Nous ne considérerons, dans ce mémoire, les figures homographiques que comme moyen de déformation propre à la démonstration et à la généralisation des théorèmes ; nous proposant d'exposer dans un autre écrit particulier leurs propriétés générales dont nous venons de parler. Conclusion. S 19. Après les considérations que nous venons de développer, sur ' Nous citerons, par exemple, ce théorème qui peut entrer dans les principes de la méca- nique pratique : On peut toujours transporter tin corps solide d'une première position dans une autre position déterminée , par le mouvement continu d'une vis à laquelle on aurait fixé ce corps. ( P^oir le Bulletin universel des sciences , novembre 1830 ; ou la Correspondance mathématique de Bruxelles, tom. VII, pag. 3S2). HISTOIRE DE LA GÉOMÉTRIE. 267 la nature et la destination des deux principes de dualité et d'homo- graphie, on pensera peut-être que s'il doit exister, dans la science de l'étendue, quelques lois primordiales vraiment grandes et fécondes, comme en analyse le calcul infinitésimal qui a résumé et perfectionné toutes les méthodes de quadratures et de maxima, comme en méca- nique le principe des vitesses virtuelles d'où Lagrange a tiré tous les autres, comme dans les phénomènes célestes la grande loi de Newton ', on pensera peut-être, dis-je, que les deux simples théorèmes de Géo- métrie, d'où dérivent les deux principes de dualité et d'homographie, sont de ceux qui approchent le plus, dans l'état actuel de la Géométrie , de ces grandes lois générales qui nous sont encore inconnues. Ces deux théorèmes, en effet, embrassent dans leurs conséquences directes , non-seulement une multitude de vérités particulières , mais aussi des théories et des méthodes fécondes et d'une grande portée. Sans entrer dans le détail des applications de ces deux théorèmes, et des routes nouvelles qu'ils ouvrent aux spéculations géométriques, il nous suflira de dire que le premier divise en deux grandes classes toutes les propriétés de l'étendue ; qu'il n'en est pas une, quelque gé- nérale qu'elle soit, qu'il ne serve à convertir en une autre aussi gé- nérale dans son genre; Que le second généralise toutes les vérités particulières et isolées , en montre les rapports communs, et les lie entre elles en les rattachant • C'est l'opinion , sans doute , des personnes accoutumées à contempler plus particulière- ment les propriétés de l'étendue, leur nature, leur enchaînement et surtout cette continuité merveilleuse, qui leur donne, à un degré éminent, un caractère d'extensibilité indéfinie, que ne présentent point d'autres sciences positives; celle des nombres , par exemple. Cette opinion sur la Géométrie et son avenir est celle d'un savant, à qui ses travaux dans plusieurs parties diflërentes des sciences mathématiques, et la place distinguée qu'il a déjà prise, quoique jeune, dans les premières académies de l'Europe, donnent une grande autorité : « Il est fà- » cheux, m'écrivait M. Quetelet, que la plupart des mathématiciens de nos jours jugent si » défavorablement de la Géométrie pure..«... II m'a toujours paru que ce qui les retient » le plus est le défaut de généralité des méthodes qu'ils pensent y voir. Mais est-ce bien la i> faute de la Géométrie, ou de ceux qui l'ont cultivée? Je serai très-disposé à croire qu'il » existe quelques grandes vérités qui doivent être pour ainsi dire la source de toutes les » autres , à peu près comme le principe des vitesses virtuelles est pour la mécanique, n 268 HISTOIRE DE LA GÉOMÉTRIE. à une seule et même vérité générale ; et ce théorème comprend aussi , comme le premier, des méthodes dans ses innombrables corollaires. § 20. Les principes de dualité et d'homographie, et les diverses méthodes qui en dérivent; les autres modes de transformation que nous avons reconnus dans la Géométrie descriptive de Monge et dans la Géométrie perspective de M. Cousinery, et celui que fournit la théorie des projections stéréographiques , font, avec la théorie des transversales, les plus puissantes doctrines actuelles de la Géométrie récente, et lui donnent un caractère de facilité et d'universalité qui la distingue de la Géométrie ancienne. Ces modes de transformation, en effet, sont autant de moyens sûrs, de moules, pour ainsi dire, qui servent à créer à volonté des vérités géométriques sans nombre. Qu'on prenne une figure quelconque dans l'espace , et l'une de ses propriétés connues; qu'on applique à cette figure l'un de ces modes de transformation , et qu'on suive les diverses modifications ou trans- formations qu'éprouve le théorème qui exprime cette propriété, on aura une nouvelle figure, et une propriété de cette figure, qui corres- pondra à celle de la première. Ces moyens, que possède la Géométrie récente, de multiplier ainsi à l'infini les vérités géométriques , peuvent être assimilés aux formules et aux transformations générales de l'algèbre , qui donnent avec sûreté et promptitude la réponse aux questions diverses qu'on leur soumet, ou bien, en quelque sorte, aux réactifs du chimiste, qui opèrent d'une manière sûre et invariable la transmutation des matières qu'il leur présente; ces moyens sont donc de véritables instrumens, que ne possédait point l'ancienne Géométrie, et qui font le caractère distinc- tif de la Géométrie moderne. Dans la Géométrie ancienne, les vérités étaient isolées; de nouvelles étaient difficiles à imaginer , à créer ; et ne devenait pas géomètre in- venteur qui voulait. Aujourd'hui, chacun peut se présenter, prendre une vérité quel- conque connue , et la soumettre aux divers principes généraux de trans- HISTOIRE DE LA GÉOMÉTRIE. 269 formation; il en retirera d'autres vérités, différentes ou plus générales ; et celles-ci seront susceptibles de pareilles opérations; de sorte qu'on pourra multiplier, presque à l'infîni, le nombre des vérités nouvelles déduites de la première : toutes, il est vrai, ne mériteront pas de voir le jour, mais un certain nombre d'entre elles pourront offrir de l'intérêt et conduire même à quelque chose de très-général. Peut donc qui voudra, dans l'état actuel de la science, généraliser et créer en Géométrie ; le génie n'est plus indispensable pour ajouter une pierre à l'édifice. Aussi croyons-nous pouvoir regarder la Géométrie dans un état pro- noncé de progrès et de perfectionnemens rapides; et pensons-nous qu'on peut dire aujourd'hui, avec raison, de cette science, ce qui a paru, dans un temps, faire le caractère exclusif de la Géométrie ana- lytique : « L'esprit de la Géométrie moderne est d'élever toujours les » vérités soit anciennes , soit nouvelles, à la plus grande généralité )) qu'il se puisse '. w • Fontenelle , Histoire de l'y4cadémie de» sciences, ann. 1704 ; sur les spirales à finfini. \v^\^lvvvvvvvv\vvvvvvvv^lv^lvvv^^f^AAlvvv\\vvvvvvvv^lv^^^lvvv\^ NOTES. NOTE I. (PREHIKSB ÉPOQUE, §5.) Sur les spiriques de Perseus. Passage de Héron d'Alexandrie relatif à ces courbes. Proclus est le seul écrivain qui nous ait transmis le nom du géomètre Perseus, dans son Commentaire sur le premier livre d'Euclide; mais cet ouvrage n'est pas le seul de l'antiquité qui ait fait mention des lignes gpiriques , comme on parait l'avoir cru jus- qu'ici. Un ouvrage beaucoup plus ancien, de Héron d'Alexandrie, intitulé : Nomencla- tura f^ocabulorum geometricorum , reproduit en 1571 et 1579 par Conrad Dasypodius ', contient une définition très-distincte de la spire, ou surface annulaire, et des deux formes différentes qu'affecte cette surface, dont leg sections sont des courbes qui ont leurs propriétés particulières. Voici ce passage de Héron : Speira fit qiiando circulns aliquis centrum habens in circulo et erectus existons , ad planum ipsius circuit fuerit circumductus , et revertatur iterum unde cœperat moveri; illud ipsum figurœ genus nominatur xcoceç orbis. Discontinua autem speira est, quœ dissoluta est, aut dissolutionem habet. Continua vero, quœ uno in puncto concidit. Diminutionem habens est, quando eir- t Euclidit Elemenlorum libtr primua. Item Htnnis Ahxandrini vocabula quadam Gtomefrica, anteac nvnquam tdita } grœce et latine, per Cunradum Daiiypodium. Argentins, 1671, in-8<>. Oratio C. Daiypodii de Disciplinia mathemaiicis. Ejuadem I/eronis Alesandrini Nomenclatura Vocabuio- rum gtometricorum translatio ; ejutdem Lexicon mathtmalicum , es divirsis eolleetvm anUtiuia scriptia. Argent. , 1679 , in-8». 272 NOTES. culus qui circutnducitur , ipsemct seipsum secat. Fiunt autem et hariim sectioneg , lineœ quœdam proprietatem suam hahentes. Le passage de Proclus sur les spiriques, est un peu plus développé, et a l'avantage de nommer l'inventeur de ces courbes. Ce passage a été reproduit dans son texte grec, et traduit par M. Quelelet, à la suite d'une Notice sur les lignes spiriques, qui est pleine d'intérêt et remarquable par l'érudition qui y abonde. Cette Notice a été im- primée à la suite d'un mémoire de M. Pagani, sur ces courbes, qui a été couronné par l'Académie de Bruxelles, en 1824, et dans la Correspondance mathématique de M. Quetelet, tom. II, pag. 237. Les lignes spiriques ont presque toujours été le sujet de quelques méprises de la part des écrivains qui en ont parlé ; les uns ont pris ces courbes pour des spirales ; et d'autres ont assigné un âge trop rapproché à leur inventeur Perseus. Ramus, dans ses Scholœ mathetnaticœ, place ce géomètre après Héron et Geminus. Dechales le wet aussi après Geminus; et, en attribuant à ce dernier les lignes spiri- ques , il fait Perseus l'inventeur des spirales '. Blancanus fait une confusion singulière. Il fait naître Geminus avant Perseus; attri- bue à ce dernier les lignes spiriques, et dit, néanmoins, que Geminus avait écrit sur ces mêmes courbes 2. G.-J. Vossius place Perseus entre Thaïes et Pythagore, et lui attribue les spirales s. Bernardin Baldi le fait contemporain d'Archimède et d'Apollonius (250 ans avant l'ère chrétienne), et définit succinctement, d'après Proclus, les spiriques dont il est l'inventeur *. Heiibronner commet la même erreur que Vossius et Dechales, quant au nom des courbes de Perseus; mais il nous paraît assigner à ce géomètre l'époque qui lui convient s. Il l'inscrit entre Aristée et Menechme. C'est l'âge que nous avons cru devoir lui donner. Montucla le fait beaucoup moins ancien. Il le place dans les deux premiers siècles de l'ère chrétienne. C'est une erreur qui paraîtra incontestable d'après le passage de Proclus qui cite Geminus comme ayant écrit sur les spiriques, et celui de Héron que nous avons rapporté. Montucla avait pensé qu'avant lui on avait toujours confondu les spiriques avec les spirales d'Archimède, et qu'il était le premier qui eût fait connaître ce qu'étaient réel- lement ces courbes®. On voit, par ce qui précède, qu'en effet, Dechales, Vossius et 1 Cursus maihematicus, tom. \" ^Tie progressu matheseos, p. 8. 2 De natura mathematicarum scientiarum tractatio , atque clarorum mathematicorum chronologiu. Bonoiiiae, 1615, iii-4'>. 3 De universœ mafhesios natura et consHlutione liber; cui suljungitur chronologia mathematicorum. Amêtelodami, 1660, in-4o. i Cronica d'e Matetnatici overo Epitome deW istoria dellc vite loro. In Urbino, 1707 , in-4». ic Perseo , non si sa benc di quai j^atria si ftnsse. Fù cgli , corne s'ha da Proclo j invcntore dolle liiiee spiricke ^ le quali nascono dalle varie settioni dclla spira, n ( P. 25. ) 5 If istoria matheseos universa. Lipsia: , 1742, in-4'>. 6 Histoire des mathématiques ^ tom. I", p. 316. NOTES. 273 Heilbronner avaient commis cette erreur, mais elle n'avait point été partagée par Ber- nardin Baldi, ni Blancanus. Deux autres écrivains ont parfaitement connu la nature des spiriques. Le premier est Dysapodius qui, dans ses définition* et dioitiont ' de la Géo-' métrie, parle plusieurs fois de ces courbes. Le seconil est le savant Savile, qui, dans ses Prœlectiane» tredecim in principium elementormn E uclidi* (Oxonii, 1021 , in-4''), énumére les lignes que les Anciens ont considérées, et rapporte textuellement le pas- sage de Proclus qui fait connaître la génération des spiriques. (Lectura quarta , p. 73). NOTE II. (PRBHliRE ÉPOQDB, § 8.) Sur les lieux à la surface d'Euclide. Montucla dit, à la page 172 du premier volume de son Histoire de* mathématique» , que les lieux à la surface d'Euclide étaient des surface*; et, à la page 215 du même Tolume, que c'étaient des lignes à double courbure décrites sur des surfaces courbes, telles que l'hélice sur un cylindre circulaire. Il est jiossible que les Anciens aient désigné, en général, par ce mot, les surfaces et les courbes qui y étaient tracées. Mais quels étaient véritablement les lieux à la surface d'Euclide? Il ne nous reste, pour répondre à cette question, d'autre indication que quatre lemmes de Pappus, relatifs à cet ou- Trage; et comme ces lemmes ne traitent que des sections coniques, nous devons penser qu'Euclide ne considérait que les surfaces que nous appelons aujourd'hui du second degré. Et nous sommes porté à croire que ces surfaces étaient de révolution. Car, d'une part, il est certain que les surfaces de révolution du second degré avaient été étudiées antérieurement à Archimède, parce qu'après avoir énoncé quelques propriétés de leurs sections par un plan, il dit à la fin de la 12° proposition de son livre Des sphéroïde* et 1 LtxicOH mathtmaticum , ex diversis collectum antiquis scriptisj faitant partie du ToIume de 1S79, décrit ci-de(>a>. Speirica aeefionet ila se haltni, ut altéra ait incurvata , implicala timilit cauda ejuina. Alttra vtn im medio quidem est latior; es utraque vero parte déficit. Est etiam alia, qua oUonga c%m tit, in mtdio , intervallo utitur minore; sed ex utraque parte dilatatur. (f". 9, t». ) To«. XI. 35 274 NOTES. des conoïdes, «les démonslrations de toutes ces propositions sont connues;» et de plus, nous remarquons que le dernier lemme de Pappus est la propriété principale du foyer et de la directrice d'une conique; et ce théorème nous paraît avoir pu servir à démontrer que le lieu d'un point dont les distances à un point fixe et à un plan doivent être entre elles dans un rapport constant, est un sphéroïde ou un conoïde, ou bien à démontrer que la section de ce lieu, par un plan mené par le point fixe, est une conique qui a son foyer en ce point, et pour directrice l'intersection du plan de cette courbe par le plan fixe. Ainsi il nous semble probable que les lieux à la surface d'Euclide traitaient des sur- faces du second degré de révolution, et des sections faites par un plan dans ces surfaces, comme dans le cône. NOTE III. (première époque, § 8.) Sur les Porismes d'Euclide. On doit à R. Simson d'avoir rétabli la forme des énoncés qui caractérise les propositions appelées Porismes par les Anciens; et d'avoir aussi deviné plusieurs de celles qui sont indiquées si imparfaitement par Pappus. Dans la suite de son ouvrage, Simson reproduit, avec leurs démonstrations, souvent simplifiées et complétées, les 38 iQuamesA^s Collections mathématiques, relatifs aux porismes ; et donne ensuite la démonstration de cinq pro- positions de Fermât, converties en porismes, et diverses autres propositions très-générales relatives au cercle, trouvées par Mathieu Stewart, et faisant de véritables porismes. Mais Simson ne nous parait pas avoir abordé diverses autres questions que devait comprendre une divination complète de la doctrine des porismes. Ainsi, nous n'y voyons pas quelle a été la pensée d'Euclide en composant son ouvrage dans une forme inaccoutu- mée; sous quel rapport il méritait l'éminente distinction qu'en fait Pappus ; par quelles méthodes, ou opérations actuelles, il se trouve suppléé chez les Modernes, et enfin, comment différons passages de Pappus sur les porismes , et la définition de Proclus , peuvent recevoir une interprétation satisfaisante. Nous dirons , en un mot , que la doc- NOTES. 275 trine des porismes, son origine, ou la pensée philosophique qui l'a créée, sa destination, •es usages, ses applications et sa transformation dans les doctrines modernes, sont autant de mystères , qui ne nous sont pas dévoilés dans le traité de Simson. Ajoutons que nous n'y trouvons rétablis que six des trente propositions énoncées par Pappus. Un certain nuage nous a donc semblé couvrir encore cette grande question que nous a léguée l'Antiquité; à moins que d'autres écrits, qui nous seraient inconnus, ne soient venus depuis l'éclairer d'un plus grand jour, ou bien que notre faible intelligence n'ait pas compris l'ouvrage du célèbre Simson. Ces réflexions nous ont long-temps préoccupé, et détourné souvent de l'étude à laquelle nous aurions voulu nous livrer; car l'intérêt que le sujet est de nature à inspirer, était plus puissant que notre volonté. Nous avons été conduit de la sorte à former quelques conjectures sur cette doctrine des porismes, et à rétablir les 24 énoncés de Pappus, qui ont été laissés intacts par Simson. Nous allons présenter succinctement une analyse de notre travail, en réclamant l'indulgence du lecteur, car nous n'abordons une telle ques- tion, qui a excité la curiosité de grands géomètres , qu'avec la timidité et la défiance que doit nous inspirer le sentiment de notre faiblesse. Faute de documcns suflfisans pour rétablir par la voie analytique la doctrine complète des porismes , il faut , en quelque sorte , recomposer cette doctrine à priori , par la pure synthèse. C'est im système qu'il faut former, et soumettre à toutes les questions et aux épreuves auxquelles peuvent donner lieu les fragmens qui nous restent. La conception des porigmeg nous parait dériver de celle des donnée» ; et telle a été , selon nous, son origine dans l'esprit d'Euclide. Les porttmet étaient par rapport aux propositions locale*, ce que les donnée* étaient par rapport aux simples théorèmes des élémen*. De sorte que les pori*mes formaient avec les donnée* un cotnplément des élémens de Géométrie, propre à faciliter les usages de ces élémens pour la résolution des problèmes i. Sous ce point de vue, la destination spéciale Aes poritme* était de procurer la connais- sance des lieux ; en offrant les moyens de tirer des conditions par lesquelles un lieu inconnu était déterminé, une autre expression plus simple de ce lieu, propre à en faire connaître la nature et la position. Par exemple, si on demande un point dont les carrés des distances à deux points fixes, multipliés respectivement par deux constantes , aient leur somme constante, on démontrera I Ici noa$ hatarderon* une réflexion que nout n'avons pa* o*ë non» permettre en parlant du liTre dei Données d'Euclide. Dan> lea énoncés de poriames laiaaéa par Pappua, bien qu'il soit difficile d'en deviner le sena, ou reconnaît cependant que dana cea aortca de propositions , il y a quelque chose à trouver ; et Pappua désire cette cho*« cherchée par le mot donné , comme a fait Euclide dans le livre des Données, et il applique en même temps le même mot h chacune des choses données par l'hypothèse de la question. Les énoncés de Pappus auraient été plus intelligibles «'il n'avait désigné que celles-ci par le mot donné, elles autres, c'eat-i-dire celle* qu'il faut trouver , par le mot déterminé. Cette observation a'applique au livre des donnéea d'Euclide; mais c'est surtout en m'occupant de la divina- tion des poriamos , que lea inconvéniens d'un même mot pour deux chose* différentes m'ont para sensibles. 276 ■ NOTES. qu'il existe un certain point fixe le) que la distance de chaque point cherché à ce point fixe sera constante, et l'on déterminera par les seules données de la question la position de ce point fixe et celte distance constante. Ce sera là un porisme, et ce porisme fera voir que le lieu du point cherché esl une circonférence de cercle. Cet exemple montre quel a été l'usage des porismes. Nous dirons donc qu'un recueil de porismes était un tableau de diverses propriétés ou expressions différentes des courbes (droites et circulaires seulement dans le traité d'Euclide), et que ce tableau présentait les transformations de ces propriétés les unes dans les autres. De sorte que les porismes, dans l'esprit d'Euclide, étaient, en quelque sorte, les équations des courbes. Ils donnaient la facilité et l'art de changer de coordonnées (en comprenant sous ce mot toutes les manières possibles d'exprimer une courbe par deux ou plusieurs variables). La doctrine des porismes était donc la Géométrie anali/ tique des Anciens : et peut-être, si elle nous était parvenue, y trouverait-on le germe de la doctrine de Descaries; nous croj'ons au moins que l'équation de la ligne droite (abstraction faite de la forme algé- brique sous laquelle nous l'employons) a fait partie des porismes mêmes d'Euclide; et c'est pour cela que nous l'avons choisie pour exemple de porisme dans le texte du dis- cours. Nous appuierons cette opinion de plusieurs preuves, dans un autre moment. Et si ces premières conjectures ne paraissent pas dépourvues de toute vraisemblance, nous ajouterons qu'il n'a manqué à Euclide que l'usage de l'algèbre pour créer les systèmes de coordonnées qui datent de Descartes. Voici quelle est la question générale à laquelle il nous semble qu'Euclide a pu destiner ses porismes : « Un lieu étant déterminé par une construction commune à tous ses points, ou par un certain système de coordonnées, trouver une autre construction, ou un autre système de coordonnées qui satisfasse à tous les points de ce lieu, et qui en fasse connaître la nature et la position. » D'après l'énoncé de cette question générale, l'objet des porismes aurait été de faciliter les changemens de construction des lieux, ou les changemens de coordonnées propres à tous leurs points; et le traité d'Euclide aurait été une collection de formules propres à remplir ce but. Ces changemens de construction, en effet, et ces transformations de coordonnées étaient les seuls moyens que la Géométrie, chez les Anciens, pût employer pour étudier les courbes qui se présentaient dans leurs spéculations, et pour s'en servir dans la réso- lution des problèmes. Proclus a donc laison de dire qu'il s'agit, dans les porismes, de l'invention d'une chose, que Von ne recherche et que l'on ne considère point pour elle-niêtne. En effet, ces nouveaux modes de construction, ces nouvelles coordonnées, que l'on cherche, ne sont que des auxiliaires qui ne doivent servir qu'à l'étude et à la contem- plation de la courbe sur laquelle on opère. NOTES. Î77 Les porismes renfermés dans les trois livres d'Euclide étaient un recueil de formules propres à la construction des lieux à la droite, au point et au cercle. C'étaient les ma- nières connues alors, ou inventées par Euclide, pour exprimer par deux coordonnées , liées entre elles pur une certaine relation, les descriptions diverses de ces trois lieux, et pour passer de l'une de ces descriptions à une autre. Gela avait pour objet de ramener à une même description, ou à un même système de coordonnées, les différentes parties d'une figure qui, par les hypothèses de la question, étaient produites par des descriptions ou des coordonnées différentes. Opération en quelque sorte analogue à la réduction de plusieurs fractions numériques ou littérales à un même dénominateur. Opération du reste, dont l'utilité doit être bien sentie des géomètres modernes qui la pratiquent journellement dans toutes les parties des mathé- matiques, en se servant de différens modes de coordonnées auxiliaires, et en les trans- formant les unes dans les autres, suivant les besoins de la question. Nous allons peut-être mieux faire comprendre l'usage des porismes, par un autre rapprochement avec les méthodes modernes. Les Anciens n'avaient pas, comme nous avons depuis Descartes, des termes de com- paraison entre les lieux auxquels ils étaient conduits dans leurs recherches géométriques. Pour nous , il suffit d'exprimer un lieu en coordonnées ordinaires; et nous en savons im- médiatement la nature : la discussion de son équation nous apprend ensuite les affections et les circonstances singulières de ce lieu , et le rang qu'il occupe, comme variété, dans la famille à laquelle il appartient. Ainsi l'équation du lieu , dans la doctrine de Descartes, est en quelque sorte l'expérimentation unique à laquelle il nous suffit de le soumettre, pour en connaître la nature , la position et les rapports avec les autres lieux connus. Les Anciens, au contraire, ne possédaient pas un tel procédé général et uniforme d'in- vestigation : et n'ayant pas un terme unique de comparaison , ils ont dû inventer divers moyens auxiliaires pour arriver à reconnaître les rapports d'un lieu , qui se présentait pour la première fois, avec les autres lieux déjà connus. Ces moyens ne pouvaient être que des changemens de description, ou de coordonnées du lieu, pour parvenir à quel- ques rapports assez simples, et même d'identité, avec les modes de description des lieux connus. Telle est l'origine de leurs porismes. Ils avaient pour objet de substituer à une expres- sion géométrique ou analytique d'un lieu, une autre expression, géométrique ou analy- tique du même lieu. Ces considérations montrent les rapports qui existent entre la doctrine des porismes et nos méthodes modernes; elles font voir aussi combien ces porismes devaient être utiles; car, envisages de la sorte, ils formaient véritablement une Géométrie analytiijue , qui ne différait de la nôtre que par les symboles et les procédés de l'algèbre, que Descartes a la gloire d'y avoir introduits. Ainsi ces porismes suppléaient, chez les Anciens, notre analyse moderne, qui les a remplacés à notre insu. Mais il est fort remarquable que la chose n'a fait que changer de nom; car l'analyse de Descartes ne présente elle-même, dans ses applications, qu'un porismo continuel, mais toujours d'une même nature, et d'une 278 NOTES. forme convenue , qui est très-propre aux usages auxquels nous l'employons. Car cette analyse a pour but, comme la doctrine des porismes d'Euclide , de tirer des conditions d'un lieu, une expression nouvelle de ce lieu, qui nous soit connue, et qui, par ses rapports avec certains termes de comparaison, nous fasse connaître la nature et la posi- tion de ce lieu. Par exemple, qu'on demande de trouver un point tel que le carré de sa distance à un point fixe, soit dans un rapport donné avec la distance de ce point à une droite fixe. En prenant dans le plan de la figure deux axes rectangulaires , et en appelant x et y les distances du point cherché à ces deux axes, on trouve entre ces variables une relation de la forme : x' -1- y' -t- oa: -<- 6y c= c% où a, b, c sont des coefficiens constans, composés avec les données de la question. Cette équation exprime donc ce porisme : « On peut trouver deux lignes , a , A et un carré c' , tels que les carrés des distances du point cherché, aux deux axes menés dans le plan de la figure, plus les produits de ces distances par les deux lignes a, b respectivement, forment une somme égale au carré c^. » Ce porisme fait voir, parles élémens de la Géométrie analytique, que le lieu cherché est un cercle. Mais si ces élémens n'étaient pas formés, ou qu'on voulût s'en passer, on simplifierait l'équation ci-dessus en changeant l'origine des coordonnées , et l'on arriverait à une équa- tion de la forme : ' a?' -+- y' = A% m qui exprimerait ce second porisme : « Il existe dans le plan de la figure un certain point, qu'on peut déterminer , et qui se trouve toujours à une même distance, qu'on peut déterminer aussi , de chacun des points cherchés. » Ce porisme fait voir que le lieu du point cherché est un cercle , de grandeur et de posi- tion déterminées. Ces résultats, auxquels nous sommes parvenu par la méthode des coordonnées de Des- cartes, auraient pu s'obtenir aussi sans calcul et d'une manière purement géométrique. Mais quelle que soit la voie que l'on suive, on voit qu'on peut les considérer comme des porismes. Et cela explique comment nous concevons que la méthode de Descartes a rem- placé les porismes, en substituant, à l'aide du calcul, aux divers genres de porismes dont les Anciens faisaient usage, une seule et unique formule générale qui se prête avec une facilité merveilleuse à toutes sortes de questions. Après avoir émis les idées que nous nous sommes faites sur la doctrines des porismes, il nous faudrait les soumettre à une interprétation du texte que Pappus nous a laissé sur NOTES. 279 cette matière. Mais cette Note est déjà trop longue , et nous ne pouvons entrer ici dans de tels développeinens. Nous nous bornerons à dire qu'en prenant pour point do départ, et pour base, notre manière de concevoir la doctrine des porisnies, nous avons obtenu nsseï naturellement une interprétation des vingt-quatre énoncés de porismes que n'a pas rétablis Simson. Nous nous sommes aidé , dans ce travail , des trente-huit Icmmes de Puppus sur les poris- mes, et de ses propositions sur les loca plana d'Apollonius. Car les porismes d'Euclide étant des propositions locales sur la ligne droite et le cercle, nous avons pensé qu'Apol- lonius avait dû s'en servir pour former ses /oca/^/una, qui, à leur tour, pourraient servir pour former un traité des porismes. Les limites dans lesquelles nous devons nous renfermer ne nous permettent pas d'énon- cer ici les porismes que nous avons trouvés comme répondant au texte de Pappus. Mais nous allons donner deux propositions très-générales qui nous ont paru comprendre, dans leurs nombreux corollaires, les quinze énoncés de Pappus, appartenant au premier livre des Porismes d'Euclide, et desquelles par conséquent on pourra déduire autant de théo- rèmes répondant à ces énoncés. De ces deux, propositions dérivent aussi plusieurs systèmes de coordonnées, particu- lièrement celui de Descartes. Il résulte de là une véritable connexion entre les porismes d'Euclide et les systèmes de coordonnées modernes, qui sera peut-être un commencement de justification des idées que nous avons émises sur la doctrine des porismes. Voici quelles sont les deux propositions en question ; nous les énonçons sous forme de porismes : Premier porisme : Etant prit , dans un plan, deux points P, P', et deux transver- sales qui rencontrent la droite PP' aux points E , E' ; et étant pris sur ces deux transoersales respectivement deux poifits fixes 0,0'; Si de chaque point d'une droite donnée on mène deux droites aux points P, P' , qui rencontreront respectivement les deux transversales EO , E'O' en deux points a, a'; On pourra trouver deux quantités / , ^ telles que l'on aura toujours la relation: Oa O'a' (1) =- -t- A = A*. ^ Ea E'a' Second porisme : Etant menées, dans un plan, deux droites fixes qui se rencontrent en un point S, et étant pris sur ces deux droites respectivement , deux points fixes 0,0'; Si autour d'un point donné on fait tourner une traversale , qui rencontrera les deux droites fixes en deux pointsa, a'; On pourra trouver deux quantités X , [x telles qu'on aura toujours la relation : /*» Oa O'a' 280 NOTES. Les réciproques de ces deux propositions sont vraies; c'est-à-dire que : 1° Quand l'équation (1 ) a lieu entre les segmens que les deux points variables a ,a' font sur les deux droites fixes EO , E'O', les deux droites Va, P'«' se croisent en un point dont le lieu est une droite déterminée par les valeurs des deux constantes ^ et [l. 2° Quand l'équation (2) a lieu entre les segmens que deux points variables a , a' font sur deux droites fixes SO, SO', la droite aa' passe toujours par un même point qui est déterminé par les valeurs des deux constantes X et ;u. Du premier porisme et de sa réciproque, on conclut aisément ce porisrae très-général qui concerne toutes les courbes géométriques : Porisme général. Les mêmes choses étant supposées que dans le premier porisme , si (le chaque point d'une courbe géométrique donnée on mène des droites aux deux points P, P' , qui rencontreront les deux transversales fixes , aux points a, a', respec- tive?nent ; Il existera des valeurs des eoeffîciens a, ê, y, (?, etc. , qui satisferont à l'équa- tion générale du degré m entre les deux rapports — , — , OaY f OV N /"Oa^"-' De là résultent une infinité desj'stémes de coordonnées, propres à représenter tous les points d'une courbe; on y trouve celui de Descartes, en supposant le point P à l'infini sur la transversale O'E', et le point P' à l'infini sur la transversale OE, et que les deux points 0, 0' soient l'un et l'autre à l'intersection des deux transversales. Le second porisme et sa réciproque donnent pareillement lieu à un porisme très- général, qui concerne toutes les courbes géométriques : Porisme général : Etant menées dans le plan d'une courbe géométrique deux trans- versales qui se rencontrent en S , et étant pris sur ces droites respectivement deux points fixes o , o' ; Une tangente quelconque à la courbe rencontrera ces deux droites en deux point» a, a'; Et si la courbe jouit de ce caractère général que, par un point pris au dehors , on puisse lui mener généralement et au plus m tangentes , Il existera des valeurs des eoeffîciens a, 6, y, , qui satisferont à V équa- tion générale du degré m entre les deux rapports —, r7~> OaV' ( O'a' A /Oa'^'"-' Sa / V Sa' y V Sa Revenons à nos deux propositions générales primitives exprimées par les équations (1) et (2). NOTES. 281 Chacune de ces équations peut so transformer de différentes manières en d'autres, qui auront deux, trois ou quatre termes. Plusieurs de ces transformations sont nécessaires pour donner l'interprétation des Poritme* du premier livre d'Euclide Nous devons ajou- ter que chacuue des équations que l'on obtient ainsi , sert à exprimer plusieurs porismes difiérens, parce qu'on y peut prendre pour inconnues du porisme, au lieu des coefBciens constans, comme nous l'avons fait, différentes parties de la figure, telles que les points o, o', ou les directions des transversales. On tirera de la sorte, de nos deux propositions générales, une multitude de porismes, et nous croyons ne pas exagérer en en portant le nombre à deux ou trois cents. Une telle abondance s'accorde bien avec ce que dit Puppus, de lu fécondité des Porisme* d'Euclide: « Per omnia Porinmata non nisi prima principia, et sernina lantum multarum et » magnnrum rerum sparsisse videtur (Euclide). » Des différentes équations identiques dont nous venons de parler , nous avons choisi pour exemples les deux (1) et (2), parce que ce sont celles qui embrassent le mieux l'in- fiuité de propositions que comporte celte matière, et surtout parce que ce sont celles qui ont leurs analogues dans l'espace, et qui servent à étendre la doctrine des Poritmes d'Euclide à la Géométrie à trois dimensions. Voici les deux théorèmes généraux qui rempliront cet objet; nous les énoncerons sous forme de porismes : Premier porisme : Etant donnés dan* l'etpace un triangle ABC, et troi* tran*ver- sale* quelconque* , qui rencontrent le plan du triangle en E, E' , E" i et étant prit tur ce* troi* droite*, troi* points fixe* O, 0', 0" ; Si de chaque point d'un plan donné on mène troi* plans postant retpectivement par le* troi* coté* AB, BC, CA du triattgle , et rencontrant respectioement le* trois tran*oer*ale* aux point* a, a', a"; On pourra trouver troi* quantités comtantes , telles qu'on aura toujours l'équation : Oa -t- O'o' Il a + /* 0"a" Ea E"o" Et, réciproquement, les trois coefïiciens 1, ix, v étant donnés, il leur correspondra toujours un certain plan qu'on pourra déterminer. Second porisme : Etant pris dan* l'espace un angle trièdre dont le sommet est en S , et étant pris sur ses arêtes trois points fixes O, O', O" ; Si, autour d'un point donné , on fait tourner un plan transversal , qui rencantrera les arêtes de l'angle trièdre en a, a' et a"; On pourra trouver trois quantités constantes,!, (j., v, telles qu'on aura toujours l'équatian : Oa O'o' 0"a" To«. XI. 36 282 NOTES. Et, réciproquement, si dans cette équation les trois coefficiens 1, [x, v sont donnés, il leur correspondra toujours un certain point dans l'espace. Ces deux théorèmes généraux sont susceptibles d'une infinité de corollaires , au nombre desquels se trouvent le principe de transformation des figures en d'autres du même genre, et celui de la- dualisation des propriétés de l'étendue. Mais nous ne pouvons entrer ici dans tous ces détails. Nous devons prévenir que, quoique nous n'ayons appliqué la doctrine des porismes qu'aux propositions locales , nous l'étendons cependant, suivant la définition générale de Simson, à toutes sortes d'autres propositions géométriques ou algébriques , où il y a cer- taines choses variables. Voici, pour terminer cette Note, une liste des auteurs qui ont écrit sur les porismes, ou qui seulement ont employé ce mot, sans dire la signification précise qu'ils lui attri- buaient. Il faut rappeler d'abord que , dans son acception commune et générale , le mot Wopia^ , chez les Grecs, signifiait corollaire. C'est dans ce sens qu'Euclide en a fait usage dans beaucoup de propositions de ses Élémens. Mais dans son Traité des porismes , il avait un sens particulier. Diophante, dans ses Questions arithmétiques , a plusieurs fois employé le mot pu- risme, pour désigner certaines propositions concernant la théorie des nombres, sur les- quelles il appuie ses démonstrations , et qui formaient probablement un ouvrage qui ne nous est pas parvenu. (F'oir, par exemple, les propositions 3 , 5 et 19 du livre V.) Pappus et Proclus, comme nous l'avons dit, nous ont laissé des définitions différentes des porismes d'Euclide. Ce sont là les trois seuls auteurs anciens où nous trouvions le mot porisme employé dans une autre acception que la signification commune de corollaire. Chez les Modernes, on le rencontre d'abord dans le cosmolabe de Besson( Paris, 1567, in-4''), où il est employé concurremment avec le mot corollaire, pour désigner des pro- positions déduites d'une proposition principale. (Pag. 203, 207 et 210.) Vers le même temps, Dasypodius, dans son livre intitulé : Volumen II matheniati- cum, complectens prœcepta mathematica , astronomica, logistica. (Argentorati, 1570, in-8°) a donné une définition des porismes, suivant le sens de Proclus, (P. 243 et suiv. ) Viète s'est servi du mot porisma en parlant du corollaire qui suit la proposition 10 du IIP livre des Élémens d'Euclide. (p^arioruni de rébus mathematicis responsorum liber FUI, cap. XIII.) Neper, dans son immortel oawage : Mirifici Logarithmoru7n canonis descriptio , ejuaque usus in utraque tri(/onometria, etc. (Edimbourg, 1614, in-4°), appelle porisma une sorte de scholie général qui résume les règles qu'il vient de donner pour la résolu- tion des triangles sphériques qui ont un angle droit ou un côté égal à un quadrant. Alexandre Anderson intitule Porisma un problème local, où il s'agit de trouver le lieu des sommets des triangles , qui , ayant même base , ont leurs deux autres côtés dans un rapport constant. Voir : Animadversionis in Franciscnni Fietam a Clémente NOTES. 283 Cyriaco nuper editœ , bravit Aixxptut^, per Âlexandrum Andersonum. (Paris, 1617, 10-4", 7 pages.) ' Bachet de Meziriac, à l'instar de Diophante, a aussi employé le mot porisme, et l'a donné à une série do propositions sur la théorie des nombres, qui précédent sa traduc- tion et son commentaire des six livres arithmétiques de l'analyste grec ; et qui sont comme autant do lemmes nécessaires pour l'intelligence de cet ouvrage. Ces porismes sont en trois livres intitulés : Claudii Gaspart» Bacheti tebiuiani in Diophantum , Porùmatum lihri tre«. (Paris, 1621 , in-fol.) Savile, dans ses Prœlectione* tredecim in principium elementorum Euclidti.(Oxonii, 1621, in-4°), a donné une définition des porismes, dans le sens de Proclus. (Lectura prirna , p. 18.) Albert Girard annonçait dans sa Trigonométrie (La Haye, 1626, in-16), et dans son commentaire des œuvres de Stevin (Leyde, 1634, in-fol., p. 459), avoir rétabli les po- rismes d'Euclide. Mais ce travail n'a pas vu le jour. Puisse-t-il n'être pas entièrement perdu! Kircher, dans la partie de son Ars magna Lucis et Umbrœ (Romae, 1646, in-fol.), qui traite des sections coniques, se sert en même temps des trois mots corollarium, contectarium et porittna , pour désigner des conséquences d'une proposition princi- pale. Mais le plus souvent cependant, le dernier mot s'applique à une proposition qui n'est pas la conséquence de celle qui a été démontrée, mais qui en est au contraire une généralisation , ou du moins qui s'y rapporte comme faisant partie de la même théorie. Par exemple, après qu'une propriété de la parabole vient d'être démontrée sous le titre de proposition , on trouve sous le titre de porismes les propriétés analogues de l'ellipse et de l'hyperbole {voir pag. 237 et 238; 242 et 243). Schooten, dans ses Sectiones triginta m,isoellaneœ (livre Y des Exereitationes ma- thematicœ. Leyde, 1657, in-4»), intitule Porisma la section 24', où, pour donner un exemple de la manière de découvrir en Géométrie les propriétés des figures, il se propose de trouver celles qui appartiennent à la figure formée par différentes droites menées d'une certaine manière dans le plan d'un cerclé". (P. 484 des Exereitationes mathematicœ.) Les quatre géomètres suivans ont traité formellement de la divination des porismes : Marin Glictaldi , De retolutione et compositione tnathematica, lib. V ^ opus pos- thuroum. Romœ, 1640. BuUiaud, Exereitationes geometricœ très : \° circa demonstrationes per inseriptas et circumseriptas figuras; 2" circa conicarum sectionum quasdam propositiones ; Z" de Porisniatibus. Parisiis 1657, in-4''. 'K.Kna\A\n\,Deresolutione et compositione mathematica, libri duo.Vaiay'ii, 1668, in-f". Fermât, f^aria opéra mathematica. Tolosse, 1679, in-fol. 1 Anderson atiit écrit plntieart ouTrnges (nr l'analyie géométrique de< Anciens, qui n'ont pa* été publiét. Uersenne, dans ton lirre de la Vérité des teisnces ( 162fi, in-12 ; p»g. 768), fait un grand éloge de ce géo- mètre , qui, pendant sa -vie , dit-il , n'a pat été traité selon son mérite , bien qu'il pût approcher d'Arcbiméde et d'Apollonius. Puis il ajoute qu'Anderson avait préparé plusieurs ouvrages pour suppléer à ceux des Ancien) qui ne nous sont pas parvenus ; et il engage les personnes qui les possèdent à ne pas en priver les sciences. 284 NOTES. Porismatuni Euclidœorum renovata doctrina, et s uh forma isag^^rjes recentiorihus Geometricis exhihita. Cet écrit, de quatre pages, avait été communiqué par Fermât, plusieurs années auparavant, à divers géomètres, et entre autres à Bulliaud qui en fait mention dans l'ouvrage que nous venons de citer de cet auteur. Maintenant, après qu'un siècle s'est écoulé sans nous offrir aucun écrit sur les poris- mes , nous trouvons : Lawson, Treatise concerning Porisms, 1777, in-4''. Ce géomètre est auteur d'un autre ouvrage sur la Géométrie des Anciens, intitulé : Geometrical analysis of the antients , in-S", 1775. Wallace, Geometrical Porigms , 1796, in-4°. Playfair , On the origin and investigation of Porisms ; Tran/iaclions de la société royale d'Édittibourg , tom. III , année 1794 , et lom. III , pag. 179 des OEuvres de Play- f air en quatre vol. in-8°, 1822. Lhuillier, Élémens d'analyse géotnétrique et d'analyse algébrique ^ in-4'', 1809. J. Leslie, Geometrical analysis, liv. III*^; in-8'', Edimbourg 1809 et 1821. Cet ouvrage a été reproduit dans notre langue par M. Auguste Comte, à la suite du second supplément à la Géométrie descriptive, par M. Hachette, in-4°, 1818. Dans ces dernières années, M. Hoëné Wronski a donné une nouvelle interprétation des porisraes, et s'est servi de ce mot dans son Introduction à la philosophie des mathé- matiques (pag. 217). M. Eisenman , professeur à l'école des ponts et chaussées de France, qui s'occupe d'une traduction des œuvres de Pappus, accompagnée du texte grec, a porté son attention sur la doctrine des porismes, dont il promet une explication nouvelle. (Voir Traité des pro- priétés projectives, introduction, pag. 37). Nous désirons vivement avec M. Poncelet, que la publication de cet ouvrage, qui serait si utile à la Géométrie, n'éprouve pas de trop longs retards. Castillon, célèbre géomètre du siècle dernier, qui était très-versé dans la Géométrie ancienne, pensait que le Traité des Porismes existait encore en Orient au XIII" siècle, et qu'un commentaire du fameux astronome et géomètre Nassir-Eddin de Thus, sur un ouvrage d'Euclide, dont parle d'Herbelot dans sa Bibliothèque Orientale , se rappor- tait à ce traité même, qui seul avait pu mériter d'être commenté par le célèbre géomètre persan. « Heureux, s'écrie Castillon, si je ne me trompais pas! Heureux les géomètres qui » posséderaient ces admirables livres et en connaîtraient le prix! » (Mémoires de l'acadé- mie de Berlin , années 1786 — 1787.) Que de découvertes précieuses pourront être faites dans les bibliothèques de l'Orient ' , si un jour elles sont explorées , sous les auspices de quelque gouvernement ami de<> sciences, et jaloux de la gloire qu'elles ont répandue sur les siècles des Ptolémée, des Médicis, de Louis XIV. 1 Les Persans prétendent posséder quelques ouvrages grecs que nous n'avons pas ; et nous voyons en effet que les Arabes en citent plusieurs qui nous sont inconnus. ( Voy. Montucla, Uistoirc des viuth., tome 1", pag. 373 et 394). NOTES. 285 NOTE IV. Ht (PREUIÈBE ÉPOQUE, § 12.) Sur la manière de construire les foyers dans le cône oblique, et d'y démontrer leurs propriétés. Apollonius appelle les foyer» des coniques, points d'application (Puncta ex appli- eatione fada), et les déniiil ainsi : chacun de ces points divise le grand axe de l'ellipse ou l'axe transverse de l'hyperbole, en deux segnaens dont le produit est égal au carré du demi-axe conjugué, ou, pour parler le langage d'Apollonius, est égal au quart de la figure. Ce qu'il appelle la figure est le rectangle construit sur le grand axe et sur le latut rectum. Cette construction des foyers ne les rattache, comme on Yoit, que très-indirectement au cône; et je ne sache pas qu'on ait encore donné, de ces points, une construction générale et directe, prise dans le cône même, dans le genre de celle de Jacques Ber- noulli pour le latu* rectum: si ce n'est pour le cas particulier du cône droit, ainsi que nous le verrons dans le cours de cette Note. Voici pour le cas général du cône oblique, la construction à laquelle nous sommes parvenu : Le plan coupant étant «uppoté , comme dan» le» conique» d'j4polloniu» , per- pendiculaire au TRiAKGLE PAR l'axe, gue par l'un de» deux »ommet» de la courbe , on mène un plan parallèle à la hane du cône, et le plan de la section sou»-con traire ; ce» deux plan» couperont le cône suivant deux cercle» : gue par leurs centre» on mène un cercle tangent au diamètre de la courbe »itué dan» le plan du triangle par l'axe ; lj point de contact sera l'un des foyers de tA courbe. Quand le diamètre de la courbe sera situé entre les centres des deux cercles, cette construction ne sera plus exécutable; c'est qu'alors ce diamètre n'est plus le grand axe de la courbe, qui, dans ce cas, est toujours une ellipse; le grand axe alors est perpendicu- laire au plan du triangle par l'axe. La construction des foyers pour ce cas est dilTérente, mais elle devient encore plus simple que dans le cas général. Que, sur la droite qui joint les centres des deux cercles, prise pour diamètre, on décrive une circonférence de cercle dont le plan soit perpendiculaire à celui du triangle par l'axe ; le» point» où cette circonférence rencontrera le grand axe de la courbe feront le» foyer» cherchés. Ces deux constructions conduisent à une expression unique et générale de l'exccn- 286 NOTES. Iricité d'une section conique, considérée dans le cône, savoir que : l'excentricité est moyenne proportionnelle entre les distances du centre de la courbe aux centres des deux sections .circulaires qu'on peut faire passer par l'un des sommets de la courbe, compris dans le plan du triangle par l'axe. Quand le cône est droit, l'expression de l'excentricité devient extrêmement simple: Que, du centre de la section d'un cône droit par un plan, on abaisse sur l'axe du cône une oblique parallèle à l'une des deux arêtes comprises dans le plan du triangle par l'axe; cette oblique sera égale à l' excentricité de la section. Remarque. — Notre construction des foyers, dans le cône oblique, démontre que les focales de MM. Quelelet et Van Rees, ces courbes du troisième degré qui sont le lieu géométrique des foyers des sections faites dans un cône, par des plans menés par une tangente au cône , perpendiculaire à l'un de ses plans principaux , que ces courbes , dis-je , considérées sur le plan , sont le lieu géométrique des points de contact des tangentes menées par un point fixe à plusieurs cercles qui passent par deux mêmes points, ou , plus généralement, qui ont même axe de symptose deux à deux. Proposition que nous avions énoncée déjà sans démonstration. [Correspondance math, de M. Quetelet, tom. VI, pag. 207.) Mais on voit de plus que ces focales ne sont pas toujours le lieu géométrique complet des foyers des sections du cône; et que, quand ces sections sont faites par des plans perpendiculaires au triangle par l'axe, il y a, outre la courbe du troisième degré., un cercle situé dans un autre plan, qui complète ce lieu géométrique. Cette remarque avait échappé à l'analyse employée par M. Van Rees , dans son inté- ressant mémoire sur les focales. [Correspondance mathém. , tom. V, pag. 361.) La construction que nous venons de donner des foyers des coniques, prises dans le cône oblique , ne se prête pas à la démonstration des propriétés de ces points , et n'est pas propre même à indiquer à priori leur existence dans les coniques. Il reste donc à rechercher comment, par la considération des coniques dans le cône, on peut être con- duit à la découverte de leurs foyers. Cette question a déjà occupé quelques géomètres. Hamilton , auteur d'un bon Traité géométrique des coniques considérées dans le càne^, a cherché à tirer de la nature même du cône les propriétés de la directrice des coniques. Mais il se sert du cône droit, et il y suppose connu à priori le foyer de cha- que section. (Pag. 100 et 122.) Dans ces derniers temps , MM. Quetelet et Dandelin, en considérant les coniques dans le solide, sont parvenus à de fort beaux résultats nouveaux, dont le suivant offre, je crois, la première construction qu'on ait donnée des foyers des coniques dans le cône : Un cône droit étant coupé par un plan , si on conçoit deux sphères inscrites dans le cône , et tangentes au plan, les deux points de contact seront les foyers de la section 1 De sectionihus conicis tractatus geometricus ,in quo, ex naturd ipsius coni , secHonum ajfectiones facillime deducuntur, methodo nova. Dublin , 1758 , in-4''. NOTES. 987 du cône par le plan ; et le* droite* suivant lesquelles ce plan sera rencontra par les plans des courbes de contact des sphères et du cône, seront les directrices correspon- dantes à ces deux foyers respectioeinent. M. Dandelin a étendu ce théorème aux coniques considérées dans l'hyperboloïde de révolution, au lieu du cûne droit'; et depuis, nous l'avons généralisé encore, en le rattachant, comme corollaire, à une propriété générale des surfaces du second degré. {j4nnales de mathématiques , tora. XIX, pag. 1G7.) Un autre corollaire de cette propriété générale, est lui-même une propriété des foyers considérés dans le cône oblique, savoir que : Un cône oblique étant coupé par un p^an quelconque , si l'on inscrit dans le cône une surface du deuxième degré , qui soit tangente à ce plan, de manière que le point de contact soit l'extrémité d'un des deux diamètres lieux des centres des sections circulaires de la surface , ce point de contact sera le foyer de la section faite dans le cône par le plan Ce théorème est très-général; mais on conçoit qu'il ne pourrait pas conduire à la dé- couverte des foyers d'une conique, et qu'il n'est pas propre à la démonstration des propriétés de ces points. Le théorème de MM. Quetelet et Dandelin, au contraire, con- vient parfaitement pour cet objet ; mais il ne concerne que les coniques prises dans le cûne droit. 11 reste donc encore à trouver le moyen de tirer de la nature du cône oblique la connaissance et les propriétés des foyers. Nous proposerons pour cela deux méthodes : La première consiste à prendre le plan coupant ( supposé perpendiculaire au triangle par l'axe, comme dans les coniques d'Apollonius ) de manière que l'axe du cône fasse avec ce plan un angle égal à celui qu'il fait avec le plan de la base du cône. Le point où cet axe percera le plan coupant sera le foyer de la section. Ce foyer correspondra au centre du cercle qui sert de base au cône, c'est-à-dire qu'il en sera la perspective; et dès lors les propriétés de ce centre donneront des propriétés caractéristiques du foyer. ^ La deuxième manière consiste à étudier d'abord les propriétés du cône, abstraction faite des sections qu'y peut produire un plan coupant. On y trouve d'abord des propriétés concernant deux plans menés par le sommet du cône, dont l'un est parallèle au plan de la base (laquelle est un cercle), et l'autre au plan d'une section sous-contraire ; et ensuite d'autres propriétés où deux lignes droites, menées d'une certaine manière par le sommet du cône, jouent, sous un rapport, un rôle analogue à celui de ces deux plans ,et présen- tent une grande analogie avec les foyers des coniques. Si l'on coupe le cône par un plan perpendiculaire à l'une de ces deux droites , la conique qui en résultera aura pour foyer le point où ce plan coupera cette droite; et une partie des propriétés de la droite , considérée dans le cône, s'appliqueront à ce foyer considéré par rapport à la conique. I lUémoires de l'Acadèmi» du Bruxelles, tome III. 288 NOTES. Voilà , comme on voit , un deuxième moyen d'étudier les propriétés des foyers dans le cône même. Quant aux propriétés du cône, relatives aux deux plans et aux deux droites dont nous venons de parler, elles s'obtiennent facilement par de simples considérations de Géomé- trie. Nous en avons trouvé un certain nombre , par cette voie , dans un écrit qui fait partie du sixième volume des Nouveaux Mémoires de l'Académie de Bruxelles. KOTE V. (PREMIÈKE ÉPOQUE, §15.) Sur la définition de la Géométrie. — Réflexions sur la dualité , considérée comme loi de la nature. La distinction qu'Aristote et Descaries ont faite des deux questions différentes qui sont l'objet constant des sciences mathématiques, nous autorise à hasarder une observation cri- tique sur la définition de la Géométrie, qu'on trouve dans presque tous les traités élémen- taires. C'est, dit-on, la science qui a pour objet la mesure de l'étendue. Or la mesure proprement dite, n'est que la très-pefite partie des propriétés de l'étendue, qui font l'objet des travaux des géomètres. Ainsi, nous ne sachions pas que MM. Gergonne, Poncelet, Stei- ner, Plucker, etc., dont les travaux récens n'ont point été sans éclat, aient beaucoup considéré la mesure, comme on l'entend dans la définition que nous venons de citer. La Géométrie descriptive de Monge, qui appartient essentiellement à la science des propriétés de l'étendue, peut servir pour trouver la fuesure des corps, mais ce n'est certainement là que le moindre de ses usages. La définition en question est donc incomplète et insuffi- sante. Mais cette insuffisance n'est peut-être pas sans conséquence fâcheuse; et contribue peut-être au délaissement où la science. est tombée. Caries mathématiciens qui n'ont pas suivi, depuis trente ans, les progrés de la Géométrie, ne connaissent de cette science que les méthodes de quadratures de Kepler, de Cavalleri, de Pascal, de Grégoire de S'-Vin- cent, etc., parce qu'elles ont des rapports intimes avec les théories du calcul intégral qui font chaque jour l'objet de leurs profondes méditations. Et l'on ne peut disconvenir que NOTES. 289 le calcul intégral, perfectionnement final et sublime de ces méthodes géométriques, les remplace toutes avec un avantage merveilleux. De là, l'idée que l'étude de la Géométrie pure est chose oiseuse, puisqu'elle serait tout entière renfermée dans les formules d'in- tégration, c'est-à-dire, dans une simple et unique question d'analyse. Mais si l'on comprend dans la définition de cette science les rapports de forme et de situation des figures , on ne pensera plus qu'une seule formule analytique puisse résoudre la variété infinie de questions différentes qui se présenteront à l'imagination : et un exa- men un peu approfondi de la nature de ces questions , conduira au contraire à reconnaître les grandes dillicultés qu'y peut rencontrer l'instrument universel des mathématiques, l'analyse de Descarlcs; on y reconnaîtra même un ordre général de questions pour les- quelles cette analyse, sous sa forme actuelle , paraît insudisante , ainsi que nous le ferons voir dans la suite (chap. VI, § 5). Nous pensons aussi qu'il résulterait encore de cet examen, la conviction que l'étude de la Géométrie pure, cultivée pour elle-même, et par ses propres ressources, est indispensable pour bien connaître les |)ropriétés de l'étendue, pour parvenir à la solution d'un grand nombre de questions importantes, et éclairer la marche de l'analyse dans toutes ses applications, soit à la Géométrie elle-même , soit aux phénomènes naturels. C'est un point historique digne de remarque, que les Latins, qui n'ont été que de bien faibles géomètres, avaient néanmoins senti le défaut delà définition ancienne de la Géométrie, et lui avaient substitué la suivante, que l'on trouve dans la Géométrie de Boèce : Geometria est disciplina magnitudinis immobilis , formarumque descriptio contemplativa , per quam uniusciijusque rei termini declarari soient. Cette défini- tion, ([ue donne aussi, à peu près dans les mômes termes, Cassiodore •, paraît avoir été employée depuis par les écrivains du moyen âge : nous citerons, par exemple, Vincent de Beauvais (du XIII" siècle), qui la donne dans son Miroir doctoral (liv. XVI, chap. XXXVI)'. A la renaissance elle était encore en usage. On la trouve dans la Mar- ffarita philosophica de Reisch «; et la définition que donne Tartaléa dans la troisième partie de son traité général des nombres et tlfes mesures est à peu près la même : « La Geometria è itna scientia, oiter disciplina , che contempla la descrition délie figure, ouer forme délia quantita continua itnniobile , corne che è la terra, e altre cose simili. » On a lieu" de s'étonner que cette définition n'ait pas été conservée. Dès il y a long- temps, il est vrai, plusieurs géomètres, et particulièrement D'Alembert,dans son Essai sur les éUmens de philosophie , ont cherché à y revenir, en appelant la Géométrie la science des propriétés de l'étendue figurée. Si cette définition exacte n'a point été adoptée depuis par tous les géomètres , nous en voyons deux raisons. Les uns ont sans doute voulu conserver l'étvmologie grecque du mot Géométrie, qui signifie mesure de la terre. Mais il est évident que ce mot , restreint à la signification rigou- 1 Aurelii Casiiodori , tenatorit, etc., Opéra omnia. Rotnmagi , 1679, in-fol., Iit. II, pag. 633. 2 Bibliotheca Mundi. Duaci, 1624, 4 vol. in-ful., tomiit tectindus, nnx Spéculum doctrinali inacribitur. i* Heidelberg, 1480, in-4o. Réimprimé soutent k Strasbourg , à Bâie et à Fribonrg. Toa. XI. 37 290 NOTES. reuse de son élymologie , n'a pu convenir que dans le premier âge de la Géométrie. Dès les premiers pas que cette science a faits, et du temps de Thaïes déjà, ce mot était insuiS- sant. Aussi a-t-il été critiqué sévèrement par Platon qui l'a trouvé Wt^icu^e'. Depuis lors, en conservant le nom de Géométrie à la science, on a substitué, dans sa définition, à l'idée de la terre, qu'il exprime, celle de l'étendue en général. Il fallait faire plus, et remplacer aussi l'idée simple àe mesure, par l'idée complexe de mestire et d'ordre, qui est indispensable pour donner au mot Géométrie un sens vrai et complet. C'est sans doute sous un point de vue philosophique que d'autres géomètres tiennent à exprimer un but unique, la mesure de l'étendue, dans leur définition de la Géométrie; voulant ainsi ramener à une idée unique et absolue, cet ordre particulier des phénomènes de l'étendue , qui forme la partie la plus considérable de nos connaissances positives. Mais quelque utile que soit toute espèce de généralisation dans les conceptions , comme dans les principes et dans les méthodes, et quelque admiration que méritent les idées grandes et belles que les principes d'unité, qui font le caractère de la philosophie ancienne, ont ins- pirées à Py|.hagore et à d'autres philosophes , on peut croire pourtant qu'une unité absolue n'est pas le principe de la nature. Les dualismes nombreux qui se remarquent dans les phénomènes naturels, comme dans les différentes parties des connaissances humaines, tendent au contraire à nous faire supposer qu'une dualité constante, ou double unité, est le vrai principe de la nature. Cette dualité , nous la trouvons dans l'objet même de la Géométrie , ainsi que nous ve- nons de le dire ; dans la nature des propriétés de l'étendue où le point et le plan ont des fonctions identiques [voir la note XXXIV); dans le double mouvement des corps cé- lestes, où sa constance reconnue la fait admettre comme principe ^; et dans mille autres phénomènes. Ainsi, en cherchant à puiser dans des considérations d'un ordre plus élevé la définition propre à la Géométrie, on voit que les convenances philosophiques ne s'opposent point à y comprendre les deux grandes divisions, l'ordre et la m.esure , qui répondent au double but de cette science. 1 Ilia cognitis atque perspectis , jiroxima estilla quam ridiculo admodum nomine [ 'yeXiîov ôvofia ) Geome- triam nuncupant (^ In lÊ.p\nomiie. Platonis oper'a omnia ; traduction de Jean de Serres , t II. p. 990. ) Cette critique si juste de Platon, a été reproduite par plusieurs écrivains du XVI" siècle. Le célèbre phi- lologue, et professeur de mathématiques , Nicodême Trischlin s'exprimait ainsi '. Amplissima est et pulcherrima sciencia fiijurarum. A t qnùm est inepte sortita nomen Geometriœ .' ( Ger. J Vossius , De universœ mathesios naturâ et cousiitutione Liber. ) - Ce principe est peut-être une objection contre le système de Newton sur la propagation de la lumière. Car si une molécule lumineuse était animée d'un mouvement de translation , elle aurait probablement aussi ini mouvement de rotation sur elle-même. Ce qui ne peut être admis, car il s'ensuivrait cette conséquence fausse que , dans la réflexion d'un rayon lumineux sur une surface quelconque, l'angle de réflexion ne serait point égal à l'angle d'incidence. NOTES. 291 NOTE VI. ( PREMIÈBE ÉVOQVE , § 22. ) Sur le théorème de Ptolémée, relatif au triangle coupé par une transversale. C'est improprement que ce théorème est dit de Ptolémée, puisqu'il se trouve dans les êphérique* de Mcnelaus , de qui Ptolémée l'avait emprunté. Mais l'Almageste étant beau- coup plus répandu et plus connu que ces sphériques, c'est toujours dans le premier de CCS ouvrages qu'on l'a remarqué, et de là est venue l'erreur qu'on a commise en l'attribuant à Ptolémée. rïuus trouvons que Pappus a démontré ce théorème, et s'en est servi dans le huitième livre de ses CoWecfjon* mathématiqueg , pour démontrer une proposition curieuse sur le centre de gravité de trois mobiles qui parcourent les trois côtés d'un triangle; qu'au XVI" siècle , après que Purbarch et Regiomontant venaient de le reproduire dans leur abrégé de l'Almageste", il parut être connu de tous les géomètres : Oronce Finée,dans son Arithmé- tique -, et StifFels, dans son Traité d'algèbre » , en firent usage pour démontrer géométri- quement la règle arithmétique det six quantités. Dans le même temps Cardan <, Gemma Frisius ', J. Schoner «, sans construire la figure géométrique l'indiquèrent dans l'Alma- geste, pour le même usage ">•, Maurolycus s'en servit, comme lemmc, pour démontrer V 1 Cl. Ploltmai Àlisandrini in magnam conslructionem , G. Purbachii cujusque discijiuli J de Higio- monte astronomicon epitoma. Venetiia, 1496, in-fol. 2 Arithmetica practica, liliris quatuor absoluta, etc., 1535, in-fol,, livre 4'^, chap. 4. 1 Arithmetica intégra. Norimbergee , 1544, in-4o. liv. 3°, pag. 294. ^ Practica anthmetice , et meiisurandi singularis. Ilediolani, 1639, in-S°, cap, XLVI. Opus novum de proportionibus numcrorum, etc., Batileœ, 1570, in-fol., prop, 6'*. ^ Arithmetica practicm methodus facilis. Antwerpiœ, 1540, in-8°. 6 AlgorithmU3 demonatrtttua,^Qi'\mhr)T^œ, 1534, in-4'>, de proportionibuaappendix. 7 II «'agit , d«n> cette règle dei six quantités , de résoudre cette question : Lt rapport d'une première quan- tité à Une seconde , étant composé du rapport d'une troisième à une quatrième , et du rapport d'une cinquième à une sixième , trouver le rapport d'une quelconque des seconde, troisième et cinquième quantités à une quel- conque des trois autres. Ainsi a, i, c, d, e, f étant le* six quantités , on a a ce 1 ~d' f et l'on demande d'en conclure le rapport d'une des trois quantités &, c, < k l'une des trois antres a, d, f. Cette question, présentée sous cette forme algébrique, est assurément la plus simple que l'on puisse imaginer, 29â NOTES. les propriétés des asymptotes dans l'hyperbole ' ; et Bressius pour la démonstration de plusieurs formule de trigonométrie 2. Dans le cours du XVII" siècle, les usages du théorème furent encore plus nombreux et plus variés. Mersenne l'a énoncé , dans deux de ses ouvrages , parmi les propositions principales des sphériques de Menelaus '. Stevin s'en est servi dans sa Pratique de l'arithmétique , pour composer les raisons de raisons, et montrer, par cet exemple, que la Géométrie peut, dans certaines questions, apporter plus de brièveté que l'algèbre ; Snellius a résolu à l'aide de ce théorème, la 35° question des Zetemata Geometrica de Ludolphe Van Ceulen ^; Beaugrand l'a employé dans sa Géostatique , pour composer les rapports de lignes; Desargues s'en est servi pour démontrer une belle propriété géo- métrique des triangles, qu'on trouve à la suite de son Traité de perspective , arrangé par Bosse (1648, in-8°); Pascal l'a mis dans son Essai pour les coniques , au nombre des théorèmes principaux sur lesquels devait reposer son Traité complet de ces courbes; Schooten, dans son Traité posthume. De concinnandis demonstrationibus , etc., l'a démontré synlhétiquement et par l'analyse : vers le même temps, un auteur italien, Guarini , en a fait le même usage que Beaugrand , pour composer des rapports de lignes ^. Peu d'années après, un autre géomètre italien, qui a eu quelque réputation dans les sciences, le marquis Jean Ceva, est parvenu de lui-même et d'une manière ori- ginale et ingénieuse à ce tliéorème, et à un autre du môme genre , qui est aussi l'un des principaux de la théorie des transversales, et dont on avait regardé jusqu'ici Jean Ber- nouUi comme le premier inventeur. L'ouvrage de Ceva où se trouvent ces deux théorèmes et quelques autres qui méritent aussi d'y être remarqués , est intitulé : De lineis se invicem secantibus, statica constructio. Milan, 1G78, in-4°. Nous ferons connaître, dans la Note suivante, la méthode qui distingue cet ouvrage, et l'on ne pourrait croire que Cardan, par exemple, lui ait consacré, dans ses deux ouvrages que nous venons de citer , plusieurs pages, si Ton ne considérait que cette règle est une extension de la règle de pro- portion entre quatre quantités, qui s'en déduit, en supposant, par exemple, c égal à d, et que celle-ci a toujours été la partie difficile et transcendante , pour ainsi dire , dans les traités d'arithmétique, jusqu'à l'invention de l'algèbre, et depuis encore, grâce à l'ancienne notation des proportions, qui fait usage de trois signes au lieu d'un, pour exprimer une simple égalité de deux rapports, et qui, malgré les inconvé- niens et les désavantages éviden» de cette complication , est encore employée de nos jours par beaucoup d'auteurs. Cardan attribue cette règle des six quantités au géomètre arabe Alchindus ( du X= siècle ) , qu'il place au rang des douze plus puissans génies qui aient paru depuis l'origine des sciences. ( Voir De suhtilitate ; lib. XVI, ) On trouve en effet dans la Bibliothcca Arulico-IIispantt de Casiri, une liste extrêmement nombreuse des ouvrages qu'Alchindus avait écrits sur toutes les parties des sciences mathématiques, philosophiques, morales , etc., et qui étaient encore , il y a un demi-siècle , dans la riche bibliothèque de l'Escurial t F. Maurolyci opuscula mathematica. Venetiis, 1575, in-4», pag. 281. 2 Metrices Astronomicœ lihri quatuor. Paris, 1681 , in- fol., liv. 4; prop»". 13. 3 Synopsis mathematica. Paris, 1626,in-24. Vniversœ geometriw , mixtœque mathematicœ synopsis , etc. Paris, 1644, in-4». =* OEuvres mathématiques de iudolphe Van Ceulen, traduites du hollandais en latin et enrichies de notes, par Snellius Lcyde , 1619 , in-4° , pag. 120. 5 EucHdes udauetus et methodicus , mathematicaque universalis Aug. Taurinorura , 1671 , in-fol., pag 249. NOTES. 293 Depuis, nous ne trouvons plus de traces du théorème de Ptoléraée, qui, après avoir été fort en usage, et connu de tous les géomètres, pendant près do deux cents ans, est resté infructueux, et peut-être même ignoré, pendant plus d'un siècle, jusqu'à ce que Carnot, qui était parvenu de lui-mèmo à ce théorème, parmi plusieurs autres de même nature, concernant le quadrilatère plan, l'eût fait connaître comme l'un des plus utiles et des plus féconds en Géométrie rationnelle, Nous devons dire cependant que, quelques années auparavant, Schubert l'avait déjà reproduit, comme lemme pour la trigonométrie sphériquedePtolémée' ;et qu'un autre géomètre du Nord, N. Fuss, s'en était aussi servi, ainsi que du théorème analogue dans la Géométrie de la sphère , pour démontrer quelques propositions, telles que celle belle propriété du cercle, que Fuss attribue àD'Alembert : « les points de concours des tangentes communes à trois cercles, pris deux à deux, sont en ligne droite K » Des auteurs que nous avons nommés , Mersenne seul a présenté le théorème en question comme étant de Mcnelaus; la plupart l'ont attribué à Plolémée; quelques-uns n'en ont point indiqué l'origine : ceux-ci sont, Maurolycus, Desargues, Pascal et Ceva : ce dernier y est probablement parvenu de lui-même. M. Flauli, dans sa Geomelrm di sito , avait déjà remarqué l'usage que Pappus a fait de ce théorème dans le livre huit de ses Collections mathématique*. Nous avons em- prunté du Mémoire de 31. Brianchon sur les lignes du second ordre, no» citations de Maurolycus et de Schubert , et du Traité des propriétés projectives de M. Poncelet , celle de Desargues. Nous ne doutons point que l'on n'en puisse trouver beaucoup d'autres que celles que nous venons d'ajouter à ces premières. Car le théorème en question a dû être très-familier aux Arabes, qui avaient commenté et illustré dans plusieurs écrits son ana- logue sur la sphère, qu'il sert à démontrer: et les mathématiciens d'Europe, en recevant ces théorèmes des Maures, en firent aussi le sujet de leurs méditations. Tel est Simon de Bredon , anglais du XIV* siècle, dont on conserve plusieurs écrits sur cet objet dans la bibliothèque Bodiéicnne, comme nous l'apprend le savant Halley dans satraduction des sphéritjues de Mcnelaus. Quant à l'origine des deux théorèmes, elle parait remontera Hipparque, qui avait pré- cédé Ptolésaée et Menelaus dans le calcul des cordes et la trigonométrie. On conçoit très- bien que ce célèbre astronome ait déduit la propriété du triangle sphérique de celle du triangle rectiligne; mais quelles spéculations géométriques ont pu le conduire à celle-ci ? Nous serions porté à penser que la découverte de ce théorème remonte à Euclidc , et qu'il a fait partie de ses porismes. Car il est dans le genre de différons lemmes que Pappus nous a laissés sur ces porismes; et l'un de ces lemmes (proposition 137 du septième livre des Collections mathématiques^ qui ne diflère du théorème en question que par un rapport de deux segmens substitué à un autre, nous parait avoir pu être destiné à faciliter la dé- monstration de ce théorème. 1 Trigonometria tphsrica è Ptoleinœo ; iVora /4cta de Pëteribourg, ann. 1704 , tom. XII , pag. 105. 2 IVopa Acta PetropoUlttna,»an 1767 et 1708, tom. XIV. 294 NOTES. Nous avons été encouragé dans cette conjecture , en voyant que ce théorème entrait na- turellement dans une collection de propositions toutes du même genre, que nous avons réunies comme pouvant répondre au premier livre des Porùmeg d'Euclide. NOTE VIL (suite de la note VI.) Sur l'ouvrage de J . Ceva, intitulé : De lineis rectis se invicem secantibus , statica constructio (ia-4o, Milan, 1678). L'idée sur laquelle repose cet écrit, consiste à se servir des propriétés du centre de gra- vité d'un système de points, dans des questions où l'on a à considérer les rapports des segmens que font les unes sur les autres , des droites qui se coupent, comme dans plusieurs propositions de la théorie des transversales. On suppose placés aux points d'intersection de ces droites des poids inversement proportionnels aux segmens faits sur ces droites; et des rapports entre ces poids, que donne le principe du levier en statique, on conclut les rapports entre les segmens. Ainsi , pour démontrer le théorème de Ptolémée de cette manière , concevons un triangle ABC dont les côtés AB,BG, CA soient coupés respectivement en c , a ,b par une trans- versale quelconque. Je suppose placé en a. G, A trois points matériels, dont la masse a' du premier est tout-à-fait arbitraire, et celles G' , A' des deux autres sont déterminées de ma- nière que le point B soit le centre de gravité des deux points matériels situés en a et G, et que le point h soit le centre de gravité des deux points matériels placés en G et A. Le centre de gravité des trois masses sera le point d'intersection e des deux droites a A, A B. On a par la loi de statique oB G' _ .. Kh oC a' -+- G' C6 Les poids a' et G' peuvent être remplacés par un poids unique (a' -t- G'), situé en B; NOTES. 299 le coniparaat à A', on aura il Tient donc C. Q. F. D. Ao «'^C'=A'.^; oB hb fie — = — • — , ou oB.iC.cA = oC.cB.6A. aC ko &o Passons au second théorème. II s'agit de démontrer que quand trou droite» , ittue* de* totiunet* d'un triangle , partent par un même point , les segmens qu'elles font sur les côtés opposés sont tels que le produit de trois d'entre eux , qui n'ont pas d'extrémité commune , est égal au produit des trois autres. Soit ABC le triangle; et Aa, B^, Cy trois droites qui se croisent en un même point D, et qui rencontrent respectivement les côtés du triangle en a, 6, y. Plaçons en A un point matériel, dont la masse A' soit prise arbitrairement, et en B et C deux autres points ma- tériels dont les masses B', G' soient telles que le centre de gravité des deux masses A', B' soit en y , et que le centre de gravité des deux masses A' , C soit en &. Le centre de gravité des trois masses sera à l'intersection des deux droites BS, Cy; c'est-à-dire en D. Il s'en- suit que le point a sera le centre de gravité des deux masses B', G'; et qu'on aura or , on a Ba C C^°^ F' C Af b;_ _ k'~ CiT' *' A' ~ Ar Br B« Ce Ay Gx Atf Br 1. On a donc G. Q. F. D. Jean Bernoulli a aussi démontré depuis ce théorème ( tom. IV, pag. 33 , de ses OEuvres); mais il ne parait pas qu'il en ait fait usage. Après avoir démontré ce théorème par sa méthode statique , Ceva en donne deux autres démonstrations purement géométriques,dont l'une, dit-il,estdeP. P. Caravagge. (Livre I, Proposition iO.) En considérant, au lieu d'un triangle, un quadrilatère, aux sommets duquel sont placés quatre points matériels, Ceva parvient à cet autre théorème, qui est aussi l'un des prin- cipaux de la théorie des transversales : quand un planrencontre les quatre côtés d'un quadrilatère gauche , il y forme huit segmens qui sont tels que le produit de quatre d'entre eux , qui n'ont pas d'extrémité comtnune , est égal au produit des quatre autres. (Livre I", propooition 22). 296 NOTES. Le premier livre est terminé par quelques propriétés de la pyramide triangulaire, et quadrangulaire, démontrées par la même méthode. Dans le second livre sont différentes propriétés des figures rectilignes, et des courbes du second degré, démontrées à l'aide des principes du premier livre. Nous citerons ia pro- position suivante, qui n'est aujourd'hui qu'un cas particulier de propriétés plus générales des coniques, savoir: quand tme conique est inscrite dans un triangle, les droites qui vont des sommets aux points de contact des côtés opposés se croisent en un même point. Enfin, dans un appendix, que Ceva présente comme un ouvrage différent sur des ma- tières étrangères à celles qui précédent, se trouvent résolues par une Géométrie profonde plusieurs questions concernant les aires de certaines figures planes terminées par des arcs de cercles différens , et les volumes et les centres de gravité de divers solides , tels que le paraboloïde et les deux hyperboloïdes de révolution. C'est cet appendix qui a fait dire à Montucla, qui probablement n'avait pas lu les deux livres qui constituent l'ouvrage annoncé , que « le titre exprime fort imparfaitement le contenu. » Le titre, au contraire , nous paraît convenir parfaitement à l'ouvrage auquel il se rapporte; et on peut dire seulement que Vappendix méritait aussi d'être annoncé sur la première feuille du volume. Un mot nous suffira pour démontrer par la méthode de Ceva une propriété curieuse et utile du quadrilatère. On a dans la figure dont nous avons fait usage en dernier Heu , AD C'-t-B' Ai? Ao/ AD XS Av — = : or , C = A' — , et B' = A' — ; donc — = h Bx A' ' es By' Ux es rB Considérant le quadrilatère AS D^,dont les points de concours des côtés opposés sont en C et B , on reconnaît que cette équation exprime le théorème suivant : Dans tout quadrilatère , la diagonale issue d'un sommet, divisée par son prolonge- ment Jusqu'à la droite qui Joint les points de concours des côtés opposés , égale la somme des deux cotés issus du même sommet, divisés respectivement par leurs prolongemens Jusqu'aux côtés opposés. Ce théorème a son analogue dans l'espace, qu'on peut démontrer de la même manière, en considérant, au lieu d'un triangle, un tétraèdre et quatre droites issues de ses sommets et passant par un même point; la figure représente ainsi un hexaèdre-octogone, dont les plans des faces opposées se coupent deux à deux suivant trois droites comprises dans un même plan ; La diagonale issue d'un sommet, divisée par son prolongement Jusqu'à ce plan, égale la somme des trois côtés adjacens à ce sommet divisés respectivement par leurs prolongemens Jusqu'au même plan. C'est ce théorème que nous avons admis dans l'application d'un nouveau système de coordonnées , insérée dans la Correspondance de M. Quetelet, lom. VI, pag, 86, an. 1830. NOTES. 297 NOTE VIII. ^PREUIÈRE ÉPOQUE, § 20.) Description des spirales et des quadratrices y au moyen d'une surface héli- çoide rampante. Analogie de ces courbes avec celles qui portent le même nom dans le système de coordonnées de Descartes. Les constructions de la spirale et de la quadratrice, laissées parPappus, ne sont que de simples applications de deux procédés généraux pour construire, par l'intersection de la surface béliçoïde rampante et d'une seconde surface déterminée convenablement, toutes les spirales, et une infinité d'autres courbes auxquelles je donnerai le nom de quadra- trice», parce qu'elles sont exprimées par les mêmes coordonnées que la quadratrice de Dinostrate. La seconde surface qu'il faudra employer sera , pour la construction des spirales, une surface de révolution autour de l'axe de la surface béliçoïde; et pour la construction des quadratrices , ce sera une surface cylindrique dont les arêtes seront perpendiculaires à l'axe de la surface béliçoïde. Nos constructions donnent immédiatement les tangentes et les cercles osculateurs des courbes que nous considérons. Mais elles ont pour principal avantage d'établir des relations géométriques constantes entre ces courbes et celles qui, dans le système de coordonnées ordinaires, portent le même nom; par exemple, entre la spirale hyper- bolique, et l'hyperbole, entre la spirale logarithmique et la logarithmique. Dans ce système , la spirale d' Ârchimède correspondra à la ligne droite. Jusqu'à présent ces courbes n'avaient entre elles d'autres rapports que la même forme d'équation entre des variables différentes, et cela n'établissait aucun lien de construction, ni aucunes relations géométriques entre elles. Le procédé qui fait servir les unes à la construction des autres conduit de la manière la plus satisfaisante aux propriétés qui ont rendu ces courbes célèbres, particulièrement la spirale logarithmique , et donne à priori les raisons géométriques de ces belles propriétés. Construction des spirales. — Concevons une surface de révolution, engendrée par une courbe quelconque autour d'un axe fixe situé dans son plan ; prenons cet axe vertical ; les perpendiculaires abaissées des points de la courbe sur cet axe seront ses ordonnée* , et les distances des pieds de ces perpendiculaires à un point fixe de l'axe seront les abscisses. Supposons que le plan de la courbe tourne d'un mouvement uniforme , et qu'en même ToH. XI. 38 298 NOTES. temps un pointM,placésurla courbe mobile, se meuve sur celte courbe comme si elle était immobile , et que le mouvemeut de ce point se fasse de manière que ses abscisses croissent uniformément. C'est-à-dire que le mouvement du point, estimé suivant l'axe de rotation, est proportionnel au mouvement de rotation. Le point M décrira ainsi , sur la surface de révolution , une certaine courbe à double courbure. La projection orthogonale de cette courbe, sur un plan perpendiculaire à l'axe de révo- lution , sera une spirale , dont nous allons tirer l'équation de celle de la courbe génératrice de la surface de révolution. Soit a = Fy, l'équation de la 'courbe génératrice; considérons cette courbe à un instant de son mouvement; soit M le point générateur sur cette courbe ; son abscisse z sera proportion- nelle à la rotation éprouvée par le plan de la courbe , depuis l'origine du mouvement ; cette rotation se mesurera par l'angle que la trace du plan mobile sur un plan horizontal fera avec un axe fixe qui marquera l'origine du mouvement ; soit donc u cet angle ; on aura z = au; et conséquemment au = Fy. Soit m la projection du point M sur le plan horizontal , et 0 le pied de l'axe de révolution sur ce plan. Le rayon Om, que je désigne par /-, est égal à l'ordonnée y du point M ; on a donc entre ce rayon et l'angle m, qu'il fait avec l'axe fixe dont nous venons de parler, la relation au ■=. Fr. Cette relation est l'équation, en coordonnées polaires, de la projection de la courbe à double courbure tracée sur la surface de révolution. Remarquons maintenant que la perpendiculaire abaissée du point mobileM, sur l'axe de révolution, engendre la surface d'une vis à filets carrés, qu'on appelle aussi surface hèli- çoïde rampante ; car cette droite est toujours horizontale, et elle s'élève au-dessus d'un plan horizontal d'un mouvement uniforme, en même temps que le plan vertical qui la contient tourne uniformément autour de l'axe de révolution. Donc la courbe engendrée par le point M est à l'intersection de la surface de révolution par une surface héliçoïde. On a donc ce théorème : 1° Toute spirale (nous entendons par spirale toute courbe représentée par une équation entre les deux coordonnées polaires r et m ) peut être considérée comme la jrrojection de l'intersection d'une surface héliçoïde rampante par une certaine surface de révo- lution déterminée convenablement , ces deux surfaces ayant pour axe commun la perpendiculaire au plan de la spirale, menée par son origine ; 2" au = Fr étant l'équation de la spirale , et a le rapport entre le mouvement ascensionnel et le NOTES. 299 mouvement de rotation de la droite génératrice de la surface héliçoïde , l'équation de ta courbe génératrice de la surface de révolution sera s « Fy; let ahtcitse» i. étant comptée* suivant l'axe de révolution, et let ordonnées ^perpen- diculairement à cet axe. Pour la spirale d'Archimèdc , dont l'équation est au = r. L'équation de la courbe méridienne de la surface de révolution sera z =y; c'est une droite; ainsi la surface de révolution sera un cône; c'est là un des deux théorèmes de Pappus. Pour la spirale hyperbolique , qui a pour équation ur = constante , L'équation de la section méridienne de la surface de révolution sera zy ^ a. const. = const. C'est une hyperbole équilatère , qui a l'une de ses asymptotes dirigée suivant l'aie de la surface héliçoïde. Pour la spirale logarithmique dont l'équation est u = log. r on aura a = a log. y; C'est l'équation d'une logarilhmiqus.dans laquelle les abscisses 2^^ sont proportionnelles aux logarithmes des ordonnées y. Ainsi : Si une logarithmique ordinaire engendre une surface de révolution , en tour- nant autour de son asymptote , et qu'on conçoive que cette asymptote soit l'axe d'une surface héliçoïde rampante , ces deux surfaces se couperont suivant une courbe à dou- ble courbure dont la projection orthogonale , sur un plan perpendiculaire à l'asymp- tote , sera la spirale logarithmique. Tangentes aux spirales. — Soit M un point de l'intersection de la surface héliçoïde par la surface de révolution déterminée, comme nous avons dit, de manière à produire une spirale donnée. La tangente en un point m de cette spirale sera la projection de l'inter- section des plans tangens à ces deux surfaces au point M. Le plan tangent à la surface de révolution rencontrera l'axe de révolution en un point 0 ; je suppose que le plan horizontal sur lequel on a décrit la spirale passe par ce point 0 ; la droite OM se projette sur ce plan en Om ; c'est le rayon vecteur de la spirale Le plan tangent à la surface de révolution coupe le plan horizontal suivant une droite 0/ perpendiculaire au rayon Om. Le plan tangent à la surface héliçoïde au point M passe par la génératrice de cette surface, laquelle est parallèle au rayon Om; la trace de ce plan sur le plan horizontal est donc parallèle au rayon Om. Il sullit donc, pour déterminer cette trace, d'en trouver un point. Or ce plan tangent passe par la tangente à l'hélice conduite par le point M sur la 300 NOTES. surface héliçoïde; cette tangente est dans le plan vertical perpendiculaire au rayon Om; soit ô le point où elle rencontre le plan horiiontal et a l'angle qu'elle fait avec l'axe de la surface liéliçoïde , on aura dans le triangle Mw9, rectangle en m, mù =:M«i tang. ce. Mais on sait, par les propriétés de la surface héliçoïde , que la tangente trigonométrique de l'angle a est proportionnelle à la distance du point M à l'axe de la surface; donc tang. « = Om. Const. Cette constante est égale au rapport qu'il y a entre le mouvement circulaire et le mouvement ascensionnel de la génératrice de la surface héliçoïde; nous avons repré- senté ce rapport par — ; on a donc enfin Om Mm. 0»t tang. a = ; et mS = a a. La droite mflest perpendiculaire au rayon vecteur Om; la trace du plan tangent à la surface héliçoïde est parallèle à ce rayon ; donc si on prend sur la droite 0^, perpendi- culaire à ce rayon , une partie Ont. Mm Ot = ot5 = le point t appartiendra à cette trace. Or cette droite Ot est la trace du plan tangent à la surface de révolution; donc le point t appartient à l'intersection des plans tangens aux deux surfaces, et conséquemment ce point appartient à la tangente en m à la spirale qui est la projection de l'intersection de ces deux surfaces. La ligne 0^ s'appelle , comme on sait, la sous-tangente de la spirale; la sous-normale est la partie On comprise sur le prolongement de la droite Ot entre le point 0 et la nor- male à la courbe ; elle est égale au carré du rayon divisé par la soutangente ; ainsi : a. Om On = fll»» Maintenant pour faire usage de ces formules , nous remarquerons que le plan tangent à la surface de révolution au point M, passant par le point 0, la ligne Mm est précisément égale à la sous-tangente de la courbe génératrice de la surface de révolution : cette sous-tangente étant prise sur l'axe de révolution. Appelons S cette sous-tangente , et remarquons que le rayon vecteur Ow de la spirale est égal à l'ordonnée y de la courbe génératrice de la surface de révolution, nous aurons: Ot = ^— , a Telles sont les expressions de la sous-tangente et de la sous normale d'une spirale, en fonction de la sous-tangente et de l'ordonnée de la courbe génératrice de la surface de révolution. NOTES. 301 Dans la spirale d'Arcbiméde , la ligne génératrice est droite ; on o '^ ^ const. ; donc On == const. Donc Dont la spirale d'Àrchtmède, la tout-normale ett conttante. Pour la spirale hyperbolique, la courbe génératrice est une hyperbole équilatére,dan8 laquelle on a , comme on sait , S. y = const. , donc Ot = const. ; donc Dant la tpirale hyperbolique la tout-tantjente ett conttante. Dans la logarithmique la soutangentc comptée sur l'asymptote est constante, donc S = const. ; et conséquemment dans la spirale logarithmique, on a 0* Ot — = const. , ou ^ const. ; y 0»» Or — est égal à la tangente trigonométrique de l'angle que la tangente à la spirale fait avec le rayon vecteur ; donc cet angle est constant; ainsi : Dant la tpirale logarithmique la tangente fait un angle conttant avec le rayon vecteur. Puisque Ot est proportionnel à Om, on voit que si l'on porte sur le rayon vecteur une ligne égale à la sous-tangente, l'exlrémité de celte ligne sera sur une spirale logarithmique semblable à la proposée; mais si on suppose que cette spirale fasse un quart de conversion autour de son centre, chacun de ses rayons viendra coïncider avec la sous-tangente corres- pondante de la proposée; donc les pieds des tangentes à cette spirale sont sur une seconde spirale qui lui est semblable; or deux spirales logarithmiques semblables entre elles sont nécessairement égales , parce que les angles que leurs tangentes font avec leurs rayons vecteurs sont égaux, et qu'à un angle donné ne correspond qu'une spirale; nous pouvons donc énoncer ce théorème : Dans la spirale logarithmique , les piedt det tangentes sonttur une seconde spirale logarithmique parfaitement égale à la première , tnais placée différemment. La même propriété a également lieu pour les pieds des sous-normales. Rayons de courbure des spirales. Les spirales étant considérées comme la section droite d'un cylindre qui passe par la courbe d'intersection d'une surface de révolution par une surface héliçoïde rampante, on trouve aisément , au moyen des théorèmes d'Euler et do Meunier, la valeur de leur rayon de courbure en un point quelconque, en fonction du rayon de courbure de la courbe méridienne de la surface de révolution. Pour abréger cette Note, nous omettrons ici cette construction , sur laquelle nous reviendrons dans un autre moment. Nous renvoyons aussi à un autre écrit la construction des quadratrices , analogue à celle des tpiralet. 302 NOTES. NOTE IX. (première époque, §30.) Sur la fonction anharmonique de quatre points , ou de quatre droites. Quand quatre points a, b, c , d sont en ligne droite, nous avons appelé la fonction ac hc ad ' bel le rapport anharmonique des quatre points. La proposition 129° du septième livre de Pappus, signifie que : quand quatre droites é'ont issues d'un même point, toute transversale les rencontre en quatre points dont le rapport anharmonique a toujours la même valeur , quelle que soit la transversale. Cette propriété de la fonction anharmonique de quatre points la distingue de toute autre fonction qu'on pourrait former avec les segmens que ces quatre points font entre eux. Mais la fonction anharmonique jouit d'une autre propriété encore plus capitale, et dont cette première dérive , c'est que : Si d'un point pris arbitrairement on mène des droites aboutissant à quatre points situés en ligne droite, la fonction anharmonique de ces quatre points aura préci- sément pour valeur ce que deviendra cette fonction quand on y substituera , aux quatre segmens qui y entrent, les sinus des angles que feront entre elles les droites qui comprendront ces segtnens. Cette fonction entre les sinus des angles de quatre droites issues d'un même point , sera Aile fonction anharmonique des quatre droites. Ce théorème prouve que la fonction anharmonique de quatre points est de nature projective, c'est-à-dire , que cette fonction conserve la même valeur quand on fait la pro- jection ou perspective des quatre points auxquels elle se rapporte. On peut généraliser ce théorème , en menant par les quatre points quatre plans quel- conques, pourvu qu'ils se coupent suivant une même droite, prise arbitrairement dans l'espace; la fonction anharmonique des quatre points conservera la même valeur y si Von y substitue , à la place des segmens, les sinus des angles dièdres que les plans qui comprennent ces segmens font entre eux. Nous avons exprimé le rapport anharmonique des quatre points a, b, c, d par la fonction ac hc ad ' bd NOTES. 303 Mais OD peut, tout aussi bien, prendre les deux autres fonctions ac de ab cb ab ' db ad ' cd On n'en peut pas former une quatrième semblable , arec les quatre points a, b, c, d. De sorte que le rapport anharmotiique de quatre point» peut t'exprimer de trois manières. Si l'un des points est à l'infini, ce rapport se simplifie, il ne contient que deux segmens. Ainsi soit le point d situé à l'infini , le rapport anharmonique des quatre points a,b,e et l'infini , s'exprimera des trois manières : ac ca ba cb ab bc Soient quatre points a, b, c, «/situés en ligne droite, et quatre autres points a',b', c', d' situés sur une autre droite, et correspondans respectivement aux quatre premiers; suppo- sons que le rapport anharmonique de ceux-ci, soit égal au rapport anharmonique des autres; c'est-à-dire, que l'on ait l'une des trois équations suivantes : (A). ac rd ' bc a'c' bd a'd' b'c' ' b'd'' ac âb ' de a'd db a'b' d'c' • d'b'' ab _ Vd '• cb a'b' cd a'd' c'b' ' c'd'' Je dis que les deux autres équations s'ensuivront nécessairement. Ainsi, l'une quel- conque des trois équations (A) comporte les deux autres. C'est une vérification qu'on pourrait faire par le calcul. Mais il est plus facile de se servir , pour démontrer cette propriété de la fonction anharmonique , d'une considération géométrique. Qu'on place les deux droites sur lesquelles sont situés les deux systèmes de points, de manière que les deux points correspondans d, d' se confondent en un point unique D; qu'on tire les trois droites aa',bb', ce' ; ces trois droites se couperont en un même point. Car soit S le point d'intersection des deux premières aa' , bb'. Tirons SD et Se; soit y le point où Se rencontre la droite a'b'c'; on aura par la proposition citée de Pappus : ao bc a'y b'y ^ * ÎD~^ • ïî)* Mais nous supposons que la première des équations (A) a lieu; y mettant D à la place de «A.»tA' ) Cy — (mf — »iB.»iB' ) «y -t- (wy — wC.mC' ) a.S= aS.Sy.ya. Mais on a ma — ■■: .> 'ir t Chacun des théorèmes que nous venons d'énoncer est susceptible de plusieurs consé- quences qui trouveront leur place ailleurs. (54) Nous ne pouvons terminer cette Note sans faire mention d'une propriété curieuse du cercle , où six points pris sur sa circonférence ont entre eux des relations analogues à celles de six points eu involution situés en ligne droite. Cette propriété est exprimée par le théorème suivant : Quand troi* droites, i**ue* d'un même point , rencontrent une circonférence de cercle aux point* a , a' pour la première; b, b', pour la seconde et c , c', pour la troi- sième , on a la relation : sin. i ca, sin. i ca' sin. ic'a, sin. i c'a' sin. i cb. sin. l cb' sin. i c'b. sin. i c'b' On voit comment on formera deux autres relations semblables ; de sorte qu'on aura, entre les six points a, a'; b, h' ;c , c', trois relations analogues aux relations (A) de l'involution de six points en ligne droite. Ajoutons qu'on aura pareillement, entre les six points, des relations analogues aux équations (B), aux équations (C) et aux équations (D). 328 NOTES. NOTE XL (freuière époque, §38.) Sur la question d'inscrire dans un cercle un triangle dont les trois côtés doivent passer par trois points donnés. Pappus nous a laissé une solution facile de ce problème, pour le cas où les trois points sont en ligne droite. Le cas général , qui offrait des difficultés , a été proposé en 1742 par Cramer, àCastil- ion, qui avait déjà donné des preuves d'habileté dans la Géométrie ancienne. Castillon trouva une solution du problème, fondée sur de pures considérations de Géométrie; elle parut dans les Mémoires de l'Académie de Berlin pour 1776. Aussitôt après, Lagrange en donna une solution différente, purement analytique et fort élégante. (Même volume des Mémoires de Berlin.) En 1780, Euler, N. Fuss et Lexell résolurent aussi ce problème (Mémoires de l'Aca- démie de Pétersbourg.) La solution d'Euler nous donne lieu à cette remarque , qu'elle repose sur un lemme qui est précisément le théorème de Stewart,dont nous avons parlé au sujet des lemmes de Pappus sur le Traité des lieux plans d'Apollonius. (1"= Epoque , §36-) Giordano di Oltaiano, jeune Napolitain, conçut la question d'une manière plus géné- rale, et la résolut pour un polygone d'un nombre quelconque de côtés, devant passer par autant de points, placés arbitrairement dans le plan du cercle. Malfati ne tarda point à la résoudre aussi dans cet état de généralité. (Les Mémoires de ces deux géomètres sont compris dans le tome IV des Memorie délia societa italiana.) Lhuillier apporta quelques modifications aux solutions de ces deux géomètres, dans les Mémoires de Berlin , année 1790 ; et revint sur cette question dans ses Elérneng d'analyge géométrique et d'analyse algébrique , année 1809. M. Carnot, dans sa Géométrie de position, reprit la solution de Lagrange , et en fit, en y introduisant des considérations géométriques, une solution mixte, qu'il appliqua au cas général d'un polygone quelconque. M. Brianchon introduisit dans cette question un nouvel élément de généralisation; en prenant une conique quelconque au lieu d'un cercle ; et la résolut pour le cas du trian- gle, et en supposant les trois points situés en ligne droite. {Journal de l'école polytechni- que , 10° cahier.) M. Gergonne fit un nouveau pas , en prenant aussi une conique, mais en rendant aux NOTES. 329 trois points leur généralité de position , et en ne se serrant que de la règle pour résoudre le problème. Les solutions antérieures exigeaient l'emploi du compas [Annale» de Mathématiquet , tom. I", page 341 , années 1810-1811). M. Gergonne n'avait pas abordé directement ce problème : il s'en était proposé un autre qui lui est analogue; c'était de circonscrire à une section conique un triangle dont les sommets fussent placés sur trois droites données. La construction que donna ce géomètre n'employait que la règle , et était un modèle d'élégance et de simplicité. Elle a été démontrée par MM. Servois et Rochat (Annale* de Mathématiques , tora. I"', pages 337 et 342). M. Gergonne observa que, par la théorie des /;o7e« dans les sections coniques, elle se transformait immédiatement en une solution de même nature , pour la question d'inscrire dans une conique un triangle dont les côtés passent par des points donnés. Il restait, pour compléter cette matière, à résoudre aussi, pour une section conique au lieu du cercle, le cas général d'un polygone quelconque. C'est à M. Poncelet qu'on doit ce dernier eiTort. La solution de ce géomètre couronnait dignement les travaux de ses de- Tanciers. Elle offre , sous tous les rapports , un bel exemple de la perfection à laquelle peuvent atteindre les théories de la Géométrie moderne. (Voir Traité des propriétés proj'ectives, page 352.) NOTE xn. (deuxième époque, § 2.) Cette Note sera placée à la suite de la Note XXXIV. To«. XI. 42 330 NOTES. NOTE XIII. (deuxième époque, § IS. ) Sur les coniques de Pascal. La plupart des notes biographiques contiennent quelques erreurs au sujet des coniques de Pascal; les unes en confondant le traité complet des coniques, qui n'a jamais été mis au jour, avec Vessai, le seul qu'ait connu Descartes; d'autres en alléguant un prétendu refus de ce célèbre philosophe de reconnaître Pascal comme l'auteur de cet essai, préfé- rant l'attribuer d'abord à Desargues , puis au père de Pascal, très-versé lui-même dans les mathématiques. Et quoique Bayle , dans son dictionnaire historique , ait réfuté une telle interprétation de l'opinion de Descartes , qui est contraire aux documens qui nous restent , et on peut dire aussi au caractère de ce grand philosophe qui n'admirait presque jamais rien, cette interprétation a pourtant été souvent reproduite depuis, et notamment par Montucla dans V Histoire des Mathématiques (tom. II, pag. 62). Dans ces derniers temps encore , un très-savant géomètre crut devoir attribuer à Desar- gues, au moins le théorème de l'hexagone ; quoique Pascal le présente au commencement de son essai comme étant de sa propre invention, et faisant la base de cet essai ; et qu'il ait soin de citer ensuite Desargues comme auteur d'un autre théorème qu'il énonce aussi. A celte preuve, qui serait suffisante pour assurer à Pascal la propriété de son célèbre théorème, nous avons trouvé à ajouter le témoignage de Desargues lui-même. C'est un passage d'un écrit de ce géomètre , en 1642 , rapporté par Gurabelle dans son Examen des œuvres de Desargues (in-4". 1644). En parlant d'une certaine proposition (qui n'est pas indiquée par Gurabelle), Desargues ajoute qu'il «remet d'en donner la clef quand la démons- » tration de cette grande proposition , nommée la Pascale, verra le jour : et que ledit » Pascal peut dire que les quatre premiers livres d'Apollonius sont, ou bien un cas, ou » bien une conséquence immédiate de cette grande proposition. » On ne peut douter qu'il ne s'agisse là du théorème de l'hexagone , que Pascal avait énoncé au commencement de son essai, comme lemme d'où se déduisait tout son traité des coniques. On voit encore , par ce passage curieux, que déjà ce merveilleux théorème portait, comme à présent, le nom de Pascal. NOTES. 331 NOTE xrv. (deuxième époque, § 23 et 31.) t Sxi/r les ouvrages de Desargtiesj la lettre de Beatu/rand j et l'Examen de Curabelle. Nous avons cité la lettre de Beaugrand , sur le Brouillon projet de* conique» de Desar- gues, d'après ce qu'eu a dit M. Poncclet dans son Traité deg propriétés projectivea , p. 05 ; car elle est extrêmement rare, et nous n'avons pu nous la procurer. Nous trouvons dans l'Examen des œuvres du sieur Desargues , par J. Curabelle , ( in-4" 1644 ), ouvrage très-rare aussi, un passage qui fait mention de cette lettre , et qui est assez curieux sous d'autres rapports. Curabelle, après avoir cité l'opinion émise par Desargues, en 1G42, au sujet d'une proposition de Pascal (celle de l'hexagone, proba- blement), dotit les quatre premiers livres d'Apollonius sont ou bien un cas, ou bien une conséquence immédiate, ajoute : « Mais quant à l'égard du sieur Desargues^ cet abais- » sèment d'Apollonius ne relève pas ses leçons de ténèbres , ni ses éoénemens aux » atteintes que fait un cône rencontrant un plan droit , auquel a sudisamment » répondu le sieur de Beaugrand, et démontré les erreurs en l'année 1639, et imprimé » en 1G42, en telle sorte que le public, depuis ledit temps, est privé desdites leçons de » ténèbres, qui étaient tellement relevées, au dire dudit sieur, qu'elles surpassaient de » beaucoup les œuvres d'Apollonius, ainsi qu'on pourra voir dans la lettre dudit sieur » de Beaugrand , imprimée l'année ci-dessus. » Ce passage donne lieu aux réflexions suivantes. D'abord il semble en résulter que Desargues , outre son Brouillon projet d'une at- teinte aux événemens de* rencontres du cône avec un plan, avait écrit un autre ouvrage sur les coniques , sous le titre de Leçons de ténèbres ; ce que font supposer aussi quelques passages du graveur et dessinateur Grégoire Huret, dans son ouvrage intitulé: Optique de portraiture et peinture , contetiant la perspective et pratique accotn- plie, etc; Paris 1670, in-folio. Les mots et imprimé en 1G42, nous avaient paru d'abord se rapporter à ce qui a été démontré en 1630; d'où nous avions conclu que la lettre de Beaugrand n'avait été imprimée qu'en 1642; mais nous la trouvons citée dans un autre écrit de Curabelle contre Desargues, dont nous allons parler tout-à-l'heurc , où il est dit qu'elle a été imprimée en 1639. D'après cela, il nous parait que les mots et imprimé en 1642, signifient que Beaugrand, outre cette première lettre, avait encore écrit et imprimé en 1G42 contre Desargues; 332 NOTES. peut-être à l'occasion de ces leçons de ténèbres , citées parCurabelle et Grégoire Hurel. Et en effet , il paraît que Beaugrand ne nfanquait pas une occasion de se signaler parmi les détracteurs de Desargues. Car nous trouvons qu'il avait aussi écrit une Lettre sur le Brouillon projet de la coupe des pierres de Desargues (1640, in-4''). Cette lettre est annoncée, sous ce titre, dans le catalogue de la bibliothèque royale, au nom de Beaugrand et à celui de Desargues; mais malheureusement elle ne se trouve plus dans la bibliothèque. Elle y faisait partie d'un volume dont la perte est bien regrettable , car il contenait d'autres pièces relatives à Desargues, qui avaient paru en 1G42 '. L'examen de Curabelle a amené des démêlés très-vifs entre lui et Desargues, qui nous sont révélés par un autre écrit intitulé : Faiblesse pitoyahle du sieur Desargues , em- ployée contre l'examen fait de ses œuvres, par J. Curabelle. Nous y voyons que Desargues avait offert de soutenir la bonté de ses doctrines sur la coupe des pierres, par une gageure de cent mille livres, qui n'a été acceptée que pour cent pistoles par Curabelle. Les ar- ticles d'une convention à ce sujet ont été rédigés, le 2 mars 1044 ; mais la difficulté de s'entendre sur tous les points, a donné lieu à divers libelles de part et d'autre; et enfin l'affaire a été soumise au parlement , le 1 2 mai de la même année. Elle était en cet état quand Curabelle publia l'écrit qui nous donne ces détails 2. La difficulté de s'entendre provenait principalement du choix des jurés. Le passage sui- vant montre bien l'esprit qui avait dirigé Desargues dans la composition de ses ouvrages de coupe des pierres, et l'esprit dans lequel étaient faites les critiques de ses adversaires ; c'est là en quelque sorte l'origine et l'âme du débat. Desargues voulait « s'en rapporter an, dire d'excellens géomètres et autres per- » sonnes savantes et désintéressées , et en tant qu'il serait de besoin aussi, des Jurés » maçons de Paris. » A cela Curabelle répond : « ce qui fait voir évidemment que le » dit Desargues n'a aucune vérité à déduire qui soit soutenable, puisqu'il ne veut pas » des vrais experts pour les matières en conteste; il ne demande que des gens de sa » cabale, comme des purs géomètres, lesquels n'ont jamais eu aucune expérience des » règles des pratiques en question, et notamment de la coupe des pierres en l'architec- » ture qui est la plus grande partie des œuvres de question , et partant ils ne peuvent » parler des subjections que les divers cas enseignent. » Ce passage, ce me semble, établit parfaitement la nature du démêlé, et peut faire décider à pr/oW la question entre Desargues et ses détracteurs. Quant à la méthode de Desargues en elle-même, elle a, depuis, été reconnue bonne et exacte, et l'on a su apprécier le caractère de généralité qu'elle présentait. Ne pouvant entrer à ce sujet dans aucun développement, nous nous bornerons à citer le jugement 1 La lettre de Beaugrand , sur le brouillon projet des coniques de Desargues , que M. Poncelet dit , dans son Traité des propriétés projectives , exister à la bibliothèque royale , ne faisait pas partie de ce \olume , et nous ne TaTons pu trouver inscrite sous aucun titre. 2 Je ne possède que les huit premières pages de cet écrit (in-4'>, petit texte), que j'ai trouvées jointes à mon volume de VExamen des œuvres de Desaryues. Se désirais en connaître la suite; mais je n'ai pu en ren- contrer nulle part un second exemplaire. NOTES. 333 qu'en a porté le savunt Freiier , dans son Traité de la coupe de» pierre*. De la Rue ayant dit que J. Curahelle avait relevé exactement toutet le* faute* de Detargue* (dans la construction des berceaux droits et obliques), Frezier, aprésavoir cité ce passage, ajoute: « Je n'ai pas tu cette critique, et par conséquent je ne puis juger de son exactitude; » j'avancerai cependant, sans lu craindre, que la méthode de Uesargues n'est du tout » point à rejeter. Je conviens qu'il y a des diflicultés, mais comme elles ne viennent que » d'une faute d'explication du principe sur lequel elle est fondée, et un peu aussi de la » nouveauté des termes, je vais suppléer, etc. » (Tom. II. pag. 208, édition de 17G8. ) Puis, dans l'explication de la méthode, Frezier dit que Desargues « a réduit tous les » traits de la formation des berceaux droits, biais, en talus et en descenfe, à un seul » problème , qui est de chercher l'angle que fait l'axe du cylindre avec un diamètre de sa » base, etc. » (pag. 209.) Et enfin Frezier conclut , après avoir expliqué clairement et dans toute sa généralité, la méthode de Desargues, qu'e//« était ingénieuse, et aurait dû lui faire honneur, si Bosse l'eût présentée d'une manière plus intelligible. Curabelle est un écrivain totalement ignoré de nos jours; cependant il parait qu'il a écrit sur la stéréotomie et différentes parties des arts de construction. Du moins l'extrait du privilège, qui est en tête de son examen des œuvres de Desargues, fait connaître les titres de plusieurs ouvrages qu'il devait mettre au jour après ce dit examen. Nous n'avons pu trouver aucune trace de ces ouvrages, ni pu constater qu'ils aient effectivement paru. De la Rue, dans son Traité de la coupe des pierres, cite plusieurs fois Curabelle, mais à raison seulement de l'examen en question. Desargues , en voulant assujettir la perspective pratique et les arts de construction à des principes rationnels et géométriques , s'était fait beaucoup d'autres détracteurs que Cura- belle, ainsi qu'on le voit dans les ouvrages du célèbre graveur Bosse, qui passa toute sa vie à les combattre. Cette persévérance, qui fait honneur à son jugement et à son caractère, lui attira aussi des persécutions; et il lui fut interdit d'enseigner les doctrines de Desargues à l'Académie Royale de peinture , où il professait la perspective. Des détracteurs de Desargues , le personnage le plus considérable parait avoir été Beaugrand, secrétaire du roi, qui avait des relations avec beaucoup d'hommes distingués dans les sciences , et qui , lui-même , n'était pas dépourvu de savoir en mathématiques , car il a publié , sous le titre In isagogem F. Vielœ Scholia , in-24, 1631, un commentaire sur le principal ouvrage analytique de Viète , et il a joué un certain rôle dans l'histoire de la cycloïde. Mais sa Géostatique, dont il est tant parlé dans les lettres de Descartes, et où il démontrait géométriquement que tout grave pèse d'autant moins qu'il est plus près de la terre , suffit pour montrer à quelles erreurs son esprit était sujet ; et l'on ne s'étonne pas qu'il ait si mal apprécié les productions de Desargues. L'estime que mérite Desargues, qui a été jusqu'ici si peu connu des biographes, nous a porté à entrer dans ces détails, espérant qu'ils pourront piquer la curiosité de quelques personnes, et les engager à rechercher les ouvrages originaux de cet homme de génie, et les pièces relatives à ses démêlés scientifiques. Sa correspondance avec les hommes les plus 334 NOTES. illustres de son temps, dont il partageait les travaux, et qui le Toulaient tous pour juge de leurs ouvrages , serait aussi une découverte précieuse pour l'histoire littéraire de ce dix-septième siècle qui fait tant d'honneur a l'esprit humain. Quant aux ouvrages de Desargues, voici quelques indications qui pourront peut-être en amener d'autres : Bosse écrivait en 1665, dans ses Pratiques géométrales , etc., que «feu M. Millon, » savant géomètre, avait fait un ample manuscrit de toutes les démonstrations de Desargues, » lequel méritait bien d'être imprimé.» On lit dans l'histoire littéraire de la ville de Lyon , par le P. Colonia , imprimée en 1728 : «On va bientôt donner au public une édition complète des ouvrages de Desargues. » M. Richer, chanoine de Provins, auteur de deux mémoires curieux et détaillés sur les » ouvrages de son ami M. de Lagny et sur ceux de M. Desargues, sera l'éditeur de cet » important ouvrage qui intéresse singulièrement la ville de Lyon. » Puisse un hasard heureux faire retrouver les manuscrits de Millon, et les matériaux réunis pour l'entreprise de llicher. NOTE XV. (deuxième époque , § 26.) Sur la propriété anharmonique des points d'une conique. — Démonstration des propriétés les plus générales de ces courbes. (1) Représentons-nous un quadrilatère inscrit dans une conique, et une transversale , comme dans le théorème de Desargues sur l'involutioa de six points. De deux sommets opposés du quadrilatère, menons des droites aux deux points où la transversale rencontre la conique; chacun de ces sommets sera le point de départ de qua- tre droites. On reconnaît aisément que la relation d'involution de Desargues exprimera que le rapport anharmonique des quatre points où les quatre droites issues d'un des sommets du quadrilatère rencontrent la transversale , est égal au rapport anharmonique des quatre points où les quatre droites issues du sommet opposé rencontrent cette transversale ; d'où NOTES. 333 l'on conclut que le rapport anharmonique det quatre première» droite* est égal au rapport anharmonique de» quatre autre». (2) On a donc ce théorème général, qui est la réciproque de la conclusion que nous venons de tirer du théorème de Desargues : Quand on a deux faisceaux de quatre droite» , qui »e eorre»pondent une à une, *i le rapport anharmonique de* quatre première» e»t égal au rapport anharmoni- que de* quatre autre» , le* droite* d'un fai»ceau rencontreront , re»pectivement , leur* correspondante» en quatre point» , qui »eront »ur une conique passant par les deux points , centres des deux faisceaux. Ce théorème, comme on le voit par la démonstration que nous venons d'en donner, n'est au fond qu'une expression différente de celui de Desargues; mais ses corollaires , ex- trêmement nombreux , embrassent une partie des propriétés des coniques, sur lesquelles semblaient ne pouvoir s'étendre les théorèmes de Desargues et de Pascal. Et en effet , outre les avantages propres de sa forme différente, il a quelque chose de plus général que chacun de ces deux tliéorcmes; et ceux-ci s'en déduisent, non plus comme transformation, mais comme simples corollaires. C'est ce que nous ferons voir tout-à-l'heure, en montrant la nature des applications auxquelles se prête ce théorème. Mais nous devons d'abord en donner une démonstration directe , puisque nous proposons de substituer ce théorème aux plus généraux dont on s'est servi jusqu'ici, et de tirer ceux- ci du premier. (3) Cette démonstration est d'une facilité et d'une simplicité extrême. Car, le théorème énonçant une égalité des rapports anharmoniques ôe deux faisceaux de quatre droites^ et ces rapports conservant les mêmes valeurs quand on fait la perspective de la figure, il suffit de prouver que cette égalité a lieu dans le cercle qui sert de base au cône sur lequel on con- sidère la conique. Or, dans le cercle, les angles que les quatre droites du premier faisceau font entre elles sont égaux respectivement aux angles que les droites correspondantes du deuxième faisceau font entre elles, parce que ces angles soue-tcndent les mêmes arcs; donc le rapport anharmonique des sinus des premiers angles est égal au rapport anharmonique des sinus des angles du deuxième faisceau; puisque ces sinus seront égaux chacun à chacun. Ainsi le théorème est démontré. (4) Imaginons que trois droites du premier faisceau, el les trois droites correspondantes du second faisceau , soient fixes ; que la quatrième droite du premier faisceau tourne autour de son centre, el que la droite correspondante dans le second faisceau tourne aussi , et de manière à ce que l'égalité des rapports anharmoniques des deux faisceaux ait toujours lieu; ce» deux droite» mobile» »e cougeront toujour» sur une conique, qui sera déterminée par les cinq points fixes de la figure, c'est-à-dire les centres des deux faisceaux , et les points où les trois droites fixes du premier rencontreront les trois droites fixes du second. (6) De là naît une infinité de manières d'engendrer les coniques, par l'intersection de deux droites tournant autour de deux points fixes. Car ou peut, d'une infinité de manières, former deux faisceaux de lignes droites, qui se correspondent une à une, et telles que le 336 NOTES. rapport anharmonique de quatre droites quelconques du premier faisceau , soit toujours égal au rapport anharmonique des quatre droites correspondantes du second faisceau. (6) Par exemple, concevons un angle fixe; et qu'autour d'un point, comme pôle, on fasse tourner une transversale; elle rencontrera, dans chacune de ses positions, les côtés de l'angle en deux points. Quatre points ainsi déterminés sur l'un des côtés auront leur rap- port anharmonique égal à celui des quatre points correspondans sur l'autre côté (parce que ce rapport sera le même que celui des quatre transversales qui déterminent ces points). Il s'ensuit que , si d'un premier point fixe on mène des droites aux points marqués sur le premier côté de l'angle , et d'un second point fixe des droites aux points marqués sur le second côté , on aura deux faisceaux de droites qui se correspondront une à une et qui se couperont sur une conique passant par les deux points fixes. D'où l'on conclut que : Quand les trois côtés d'un trianfjle , de forme variable, tournent autour de trois points fixes y et que deux des sommets du triangle parcourent deux droites fixes, le troisième sotnmet engendre une conique, qui passe par les deux points autour desquels tournent les deux côtés adjacens à ce sotnmet '. Ce théorème est précisément l'hexagramme mystique de Pascal , présenté sous une autre forme. C'est sous cet énoncé qu'il a été trouvé par Maclaurin et Braikenridge ; et qu'il a conduit le premier de ces deux géomètres à l'énoncé même du théorème de Pascal. (7) Maintenant , soient deux faisceaux de droites, émanées de deux centres difTérens, et se coupant une à une sur une même droite menée arbitrairement dans leur plan. Le rapport anharmonique de quatre droites quelconques du premier faisceau sera égal au rapport anharmonique des quatre droites correspondantes dans le second faisceau (parce que ce rapport sera le même que celui des quatre points où ces droites se rencontrent une à une sur la transversale fixe). Maintenant, qu'on transporte les deux faisceaux en d'autres lieux de leur plan , de manière à changer leur position relative ; leurs droites correspon- dantes ne se couperont plus une à une sur une droite ; mais il résulte de notre théorème cruelles se couperont toujours sur une section conique, qui passera par les deux sommets des deux faisceaux. (8) Supposons que les deux faisceaux primitifs, dans leur déplacement , aient conservé leurs centres respectifs; c'est-à-dire qu'ils aient tourné autour de leurs centres ; alors le théorème que nous venons d'énoncer exprime précisément le théorème de Newton, sur la description organique des coniques. (9) Si les rayons des deux faisceaux primitifs , au lieu de se croiser sur une même droite, se croisaient sur une conique passant par leurs deux centres, les deux faisceaux satisfe- 1 Le côté du triangle opposé an «ommet décrivant pourrait , au lieu de tourner autour d'un point fixe , rouler (ur une conique à laquelle les deux droites fixes seraient tangentes; alors le sommet libre décrirait encore une conique passant par les deux points fixes. Cela résulte de ce que quatre tangentes quelconques à une conique en rencontrent deux autres, chacune en quatre points, tels que le rapport anharmonique des quatre points de la première est égal au rapport anharmonique des quatre points de la seconde ( voir la Note suivante). Cette généralisation du théorème de Maclaurin et de Braikenridge conduira à un grand nombre de proposi- tions diverses, dont la plupart seront nouvelles. NOTES. 337 raient à la condition que quatre droites quelconques de l'un eussent leur rapport anharmo- nique égal à celui des quatre droites correspondantes du second [d'après le théorème (2) ]. Donc, après un déplacement quelconque de ces deux faisceaux, leurs rayons correspon- dans se couperont encore sur une conique. (10) Si les deux faisceaux ne font que tourner autour de leurs centres respectifs, on en conclut ce théorème : Si deux angles de grandeur quelconque, mai» constante, tournent autour de leurs sommets, de manière que le point d'intersection de deux de leurs côtés par- coure une conique passant par leurs sommets, leurs deux autres côtés se croise- ront sur une seconde conique qui passera aussi par les deux som?nets. (11) Ce théorème, qui est une généralisation de celui de Newton, n'est lui-même qu'une manière particulière, entre une infinité d'autres semblables, pour former les coniques par l'intersection de deux droites mobiles autour de deux points fixes , ou par l'intersection de deux côtés de deux angles mobiles autour de leurs sommets ; et au lieu de supposer ces deux angles de grandeur constante , comme nous venons de le faire, on peut les supposer variables, et il est alors une infinité de manières de régler la relation qu'ils devront con- server entre eux. Par exemple , on peut supposer que chacun d'eux intercepte sur une droite fixe des segmcns de grandeur constante. Ainsi le théorème de Newton , qui a eu quelque célébrité , et qui a paru capital dans la théorie des coniques, ne se trouve plus qu'un cas très-particulier d'un mode général de description de ces courbes. (12) Cette circonstance nous parait bien propre à montrer deux choses : d'abord qu'il est toujours utile de remonter à l'origine des vérités géométriques , pour découvrir, de ce point de vue élevé, les différentes formes dont elles sont susceptibles et qui peuvent en étendre les applications; car le théorème de Newton, que quelques géomètres très-distingués n'ont pas dédaigné de démontrer, comme l'un des plus beaux de la théorie des coniques, n'a pourtant point eu de grandes conséquences, parce que sa forme ne se prétait qu'à peu de corollaires. Le théorème général, au contraire, d'où nous le déduisons, se prête à une foule de déductions diverses. On voit ensuite ici une preuve de cette vérité, que les propositions les plus générales et les plus fécondes sont en même temps les plus simples et les plus faciles à démontrer; car aucune des démonstrations qu'on a données du théorème de Newton n'est comparable en brièveté à celle que nous avons donnée du théorème général en question (3); celle-ci même a l'avantage de n'exiger la connaissance préalable d'aucune propriété des coniques. (13) Reprenons les deux faisceaux que nous avons supposés se couper sur une droite , et supposons cette droite à l'infini; c'est-à-dire que les deux faisceaux aient leurs droites respectivement parallèles. Qu'on les déplace en les faisant tourner autour de leurs centres; alors leurs droites correspondantes se couperont sur une conique, qui passera par leurs centres. On peut énoncer ce théorème en disant que : Quand on a dans un plan deux figures semblables , mais non semblablement placées, les droites menées arbitraire- To«. XI. 43 i 338 NOTES. ment par un point de la première, rencontrent respectivement leurs homologues dans la seconde, en des points situés sur une conique ; théorème que nous avions énoncé sans démonstration dans un écrit sur le déplacement d'un corps solide dans l'espace (^Bulletin universel des sciences, tom. XIV, pag. 321.) (14) On peut donner au théorème général qui fait le sujet de cette Note, cet autre énoncé : Quand un hexagone est inscrit dans une conique , si de deux sommets on mèîie des droites aux quatre atitres sommets , le rapport anhartnonique des quatre premières sera égal au rapport anharmonique des quatre autres; C'est-à-dire que : Les quatre premières droites rencontreront une transversale quelconque en quatre points , et les quatre^autres rencontreront une seconde trans- versale en quatre points correspondans un à un aux quatre premiers ; et le rapport anharmonique des quatre premiers points sera égal au rapport anharmonique des quatre autres. Cet énoncé a la plus grande généralité possible , à cause de l'indétermination de position des deux transversales. (15) Supposons que la première transversale est l'une des quatre droites menées par le second sommet de l'hexagone, et que la seconde transversale est l'une des droites menées par le premier sommet; alors le théorème qu'on obtient est précisément le premier des théorèmes que Pascal a énoncés dans son Essai pour les coniques , comme se déduisant de son hexagramme. (16) Maintenant supposons que les deux transversales se confondent avec l'un des côtés de l'hexagone, le théorème qui en résultera sera celui même de Desargues sur l'involution de six points. (17) Dans ce théorème deDesargues, substituons aux segmens compris sur la transversale entre les deux points de la conique et les quatre côtés du quadrilatère , les expressions de ces segmens en fonction des perpendiculaires abaissées des deux points de la conique sur les quatre côtés; il en résultera ce théorème: Un quadrilatère étant inscrit dans une conique , si d'un point quelconque de la courbe on abaisse des perpendiculaires sur ses côtés , le produit des perpendiculaires abaissées sur deux côtés opposés sera au produit des deux autres dans un rapport constant quel que soit le point de la conique. Au lieu des perpendiculaires, on peut prendre des obliques faisant respectivement avec les côtés du quadrilatère sur lesquels elles sont abaissées, des angles conslans. Cette pro- position est donc le théorème ad quatuor lineas rapporté par Pappus. (18) Ainsi il est démontré , que l'hexagramme mystique, un autre théorème de Pascal aussi sur l'hexagone , celui de Newton sur la description organique des coniques, celui de Desargues sur l'involution de six points , et celui des anciens ad quatuor lineas, sont tous des corollaires de notre théorème. On conçoit par là le grand nombre de vérités particu- lières sur lesquelles ce théorème peut s'étendre, pour en montrer des rapports inaperçus jusqu'à ce jour, et une origine commune et satisfaisante. Nous pouvons donc regarder ce théorème comme étant, en quelque sorte, un centre, NOTES. 339 d'où dérivent la plupart des propriétés des coniques, môme les plus générales : il serait propre, à raison de cette très-grande fécondité, et de la facilité extrême avec laquelle il se démontre, à servir de fondement à une théorie géométrique des coniques. (19) Comme c'est la notion du rapport anharmonique qui fait le caractère principal de ce théorème , et qui le rend propre aux innombrables déductions qu'on peut en tirer, nous le désignerons sous le nom Ac propriété anharmonique des points d'une conique '. Remarquons que , de même que les théorèmes de Pascal , de Desargues , de Newton , et la question ad quatuor linea», sont des corollaires de cette propriété anharmonique, celle-ci peut aussi se déduire, par la même voie, de chacun de ces théorèmes , et servir par conséquent à passer de l'un à l'autre. Ce qui prouve que la notion du rapport anharmo- nique est véritablement le lien commun entre ces divers théorèmes , et qu'ils ne diffèrent l'un de l'autre que par la forme. On avait déjà remarqué les rapports, nous pouvons même dire la presque identité qui a lieu entre les théorèmes de Desargues et de Pascal, mais non point entre ceux-ci et les autres théorèmes principaux que nous avons cités. On démontrait, au contraire, chacun de ces théorèmes d'une manière différente, et toujours incomparablement plus longue que la démonstration intuitive que nous avons donnée du théorème en question. (20) Nous pourrions aussi déduire de ce théorème la belle proposition de Carnot, con- cernant le rapport des segmens faits par une conique sur les trois côtés d'un triangle tracé dans son plan, et qui exprime une propriété de six points pris sur une conique, tout aussi générale que les théorèmes de Desargues, Pascal et Newton. (21) Entin notre propriété anharmonique est encore susceptible d'une nouvelle forme, qui en fait une proposition nouvelle, différente de toutes celles qui précèdent, et qui se prête à un nouveau geure de déductions extrêmement nombreuses. Cette nouvelle proposition s'exprime par une égalité à trois termes. On peut l'énoncer ainsi : Etant donnée* dan» un plan deux transversale*; et étant pri* sur la première , deux point* fixes quelconques O , E , et sur la seconde deux points O' , E' , aussi quelconques ; Si 1 autour de deux pôles fixes P, P' , pris arbitrairement dans le plan de la fi- gure, on fait tourner deux droites qui rencontrent les deux transversales , respec- tivement , en deux points a , a' , déterminés de manière que l'on ait la relation Oa O'a' ^'^ Ê^-*-^Ëv=''' 1 et IX étant deux constantes ; Le point de concours des deux droites mobiles engendrera une conique qui pas- sera par le* deux pôle* P, P'. ' Roui ditont des points d'une conique , parce que noua verront dans la Note tuitante que Ie( coniques jouis- •ent d'une aeconde propriiti anharmonique, analogue à cette première, et qui concerne leur» tangentes. 340 NOTES. (22) Ce théorème , où il y a tant d'élémens arbitraires , tels que les directions des trans- versales, les positions des quatre points pris sur elles; celles des deux pôles , et les valeurs (les ileuxcoeflîciens, ne diffère point, au fond, des propriétés générales des coniques dont il a été question dans cette Noie; car nous le déduisons, comme chacune d'elles, de notre proposition anharmonique. Mais sa forme permet d'en étendre les applications beaucoup plus loin que l'on n'a fait à l'égard de chacune de ces propositions. (23) Ainsi , par exemple, si l'on suppose les deux points E ,E', placés sur la droite qui unit les deux pôles P, P', l'équation, au lieu d'exprimer une conique, devient celle d'une simple ligne droite. De là résultent , comme corollaires d'autant de propriétés des coniques, une infinité de propriétés de la ligne droite; et parmi ces propositions se trouvent divers systèmes de coordonnées, particulièrement celui de Descartes. Il est plusieurs autres manières de faire que l'équation représente une ligne droite. Il suffit , en général , de satisfaire à une seule relation de condition entre les données de la question, qui est exprimée par l'équation — -f- X = u; £ et £ étant les points où les deux transversales rencontrent la droite qui joint les pôles P, P'. Nous montrerons, dans un autre écrit, les nombreux usages auxquels l'équation (A) nous a paru se prêter dans la théorie des coniques , et dans celle des transversales. (24) Je reviendrai aussi ailleurs sur la propriété anharmonique des coniques, exprimée sous la forme d'une égalité à deux termes par le théorème (2); parce qu'elle se présentera dans la théorie des figures homo graphiques dont elle est une propriété générale. Nous l'énoncerons alors en ces termes : Deux faisceaux hotnographiques étant situés dans un même plan, les droites du premier rencontrent respectivement les droites du second, en des points qui sont sur une conique qui passe par les centres des deux faisceaux. Cet énoncé, qui substitue à l'idée de rapport anharmonique, qui est déjà très- simple, mais qui ne concerne directement qu'un faisceau de quatre droites, une autre notion qui comprend explicitement toutes les droites d'un même faisceau, apportera dans les applications du théorème une promptitude et une facilité nouvelle. (25) On nous pardonnera peut-être la longueur de cette Note , si l'on remarque qu'elle contient, avec leurs démonstrations, la plupart des propriétés les plus belles et les plus générales de la théorie des coniques. L'analyse, certainement, n'aurait point été plus briève, ni plus facile, dans cette circonstance, que la pure Géométrie. Nous observerons , à cette occasion , qu'aucune de ces propositions , qui sont pourtant les plus considérables et les plus fécondes de toute la théorie des coniques, n'entre aujour- d'hui dans les ouvrages analytiques où l'on étudie ces courbes. Ces ouvrages ne sont vérita- blement pas des traités des coniques; ce sont des applications de la Géométrie analytique, NOTES. 841 et une introduction à la théorie générale des courbes ; et dans ces applications on démontre, non pas les propriétés les plus générales et les plus importantes des coniques, mais celles seulement qui sont les plus élémentaires et les plus restreintes, parce qu'elles se prêtent mieux aux formules de l'analyse. Les autres, qui seraient les plus utiles, et sur lesquelles reposent les progrés incessans de la théorie des coniques, restent inconnues aux jeunes géomètres qui n'ont étudié cette importante théorie que dans les traités de Géométrie ana- lytique. L'étude des coniques a donc rétrogradé , depuis un siècle , d'une manière extraordi- naire. Cela est fâcheux ; non-seulement à cause du rôle important que ces célèbres courbes jouent dans toutes les parties de la Géométrie , et qui rend leur connaissance indispensable; mais aussi parce que , en principe général , on doit , dans toutes parties des sciences, accou- tumer l'esprit à toujours établir ses spéculations sur les vérités les plus générales que pré- sente chaque théorie. C'est le plus sûr, si non l'unique moyen, de simplifier l'étude d'une science et d'en assurer les progrés. NOTE XVI. (suite DB la FBiciDERTE}. Sur la propriété anharmonique des tangentes d'vne conique. Les théorèmes dont il a été question dans la Note précédente concernent les point» d'une conique. On sait qu'il correspond à plusieurs d'entre eux d'autres théorèmes ana- logues, concernant les tangentes de la courbe. Ainsi à l'hexagamme de Pascal correspond le théorème de M. Brianchon sur l'hexagone circonscrit; au théorème de Desargues cor- respond celui-ci, qui a été donné en premier lieu , je crois, par M. Sturm ' : « Quand un quadrilatère est circonscrit à une conique, les droites menées d'un point quelconque à ses quatre sommets et les deux tangentes menées de ce point à la courbe, forment un faisceau en involution. » Au théorème des Anciens ad quatuor linea* nous parait cor- ' Ce théorème était le lujet d'an mémoire annoncé comme devant faire (uite à deux premiers mémoire» de K. Sturm , «ur la théorie des ligne* du deuxième ordre , insérés dans lea Annales de lUathématiques , tom. XVI et XVU , mais qui n'a pas paru. 342 NOTES. respondre le suivant, que nous avons démontré dans notre premier Mémoire sur les transformations paraboliques ' : « quand un quadrilatère est circonscrit à une conique, une tangente quelconque à la courbe a le produit de ses distances à deux sommets opposés du quadrilatère dans un rapport constant avec le produit de ses distances aux deux autres sommets ; » enfin M. Poncelet a montré, dans sa Théorie des polaires récipro- ques, que le théorème de Newton sur la description organique des coniques a pareille- ment son correspondant ; et qu'il en est de même aussi du théorème de Garnot sur les segmens faits par une conique sur les trois côtés d'un triangle '. On doit penser que tous ces nouveaux théorèmes, qui expriment chacun une pro- priété générale de six tangentes d'une même conique, doivent dériver tous , de même que ceux auxquels ils correspondent, d'une seule et unique proposition qui correspondra à celle que nous avons appelée, dans la Note précédente, propriété anharmonique des points d'une conique. C'est ce qui a lieu en effet, et cette nouvelle proposition peut s'énoncer ainsi : Quand deux droites, situées dans un même plan , sont divisées chacune en qua- tre segmens, et que les points de division de la première droite correspondent un à un à ceux de la seconde ; si le rapport anharmonique des quatre premiers points est égal au rapport anharmonique des quatre autres, les quatre droites qui join- dront un à un les points correspondans , et les deux droites données, seront six tangentes d'une même conique *. On conçoit aisément que ce théorème comprendra une infinité de propositions diverses concernant la description des coniques par leurs tangentes. Car il existe une infinité de manières de concevoir deux droites divisées de t.elle sorte que le rapport anharmonique de quatre points quelconques de la première soit égal à celui des quatre points corres- pondans de la seconde. En recherchant dans les coniques d'Apollonius, et dans les auteurs modernes, les diverses propositions qui concernent les tangentes d'une conique , nous avons reconnu que presque toutes ne sont que des applications ou des corollaires du théorème que nous venons d'énoncer. Les théorèmes principaux que nous avons cités au commencement de cette Note, tel que celui de M. Brianchon, ne sont que des expressions difi"érentes ou des transformations de celui-là, qui, de la sorte, est un lien commun entre ces divers théorèmes , et sert à passer de l'un à l'autre. Nous appellerons ce théorème la propriété anharmonique des tangentes d'une co- nique. Il nous reste à donner la démonstration de ce théorème. Quelques mots suffiront. ' Art. lOjpag. 289dutom.V de la Correspondance mathématique de Bruxelles. ^ Journal de mathématiques , de M. Crelle , tom. IV_. ■' Quand les deux droites données ne sont pas dans un même plan , les droits qui joignent, un à un, leurs points de division , forment alors un hyperboloîde à une nappe. Ce que nous avons démontré sous un autre énoncé dans la Correspondance de l'école Polytechnique , tom. II , pag. 446. C'est de ce théorème général dans l'espace , que nous avons déduit la propriété des coniques dont il s'agit {voir la Correspondance mathématique de M. Quetelet , tom. IV , pag. 364). NOTES. 84S Le théorème exprimant une égalité de deux rapports anharmoniques , qui se conservera quand on fera la perspective de la figure, il suffit de la démontrer dans le cercle qui sert de base au cône sur lequel la conique est tracée. Il faut donc prouver que quand un angle est circonscrit à un cercle, si l'on mène quatre tangentes quelconques au cercle, le rapport anharmonique des quatre points où elles rencontreront le premier côté de l'an- gle sera égal à celui des quatre points où elles rencontreront le deuxième côté. Or cela est évident; car la partie de chacune des tangentes qui est comprise entre les deux côtés de l'angle est vue du centre du cercle sous un angle de grandeur constante; et par consé- quent les segmens que deux tangentes forment sur les deux côtés de l'angle sont vus , du centre, sous des angles égaux. D'où l'on conclut que les quatre droites menées du centre aux points où les quatre tangentes rencontrent le premier côté de l'angle , ont leur rapport anharmonique égal à celui des quatre droites menées du centre aux points où ces tangentes rencontrent le deuxième côté; et conséquemment les points de division du premier côté ont leur rapport anharmonique aux points correspondans du deuxième côté. Ainsi le théorème est démontré. Ce théorème peut prendre une nouvelle forme, et s'exprimer par une équation à trois termes, qui en fait une proposition différente, susceptible de nouvelles et nombreuses applications. Nous présenterons cette nouvelle propriété des coniques sous l'énoncé suivant : Etant donnéeê dans un plan deux transversales, et étant pris arbitrairement deux points fixe» 0, E , sur la première, et deux points fixes O' , E' , sur la seconde; si deux jwints variables, a, a', parcourent ces deux droites, de manière que l'on ait la relation constante ^ Oa O'a' fia ti a "k et (i étant des coefficiens constnns ; La droite aa', dans chacune de ses positions, touchera toujours une même coni- que qui sera tangente aux deux transversales fixes. Celte proposition est susceptible d'un grand nombre de corollaires qu'on obtient en disposant diversement des données de la question, qui sont les deux transversales, les quatre points pris sur elles, et les deux coefficiens X et fx. Si ces données ont entre elles la relation : OS O'S où S désigne le point de concours des deux transversales, la conique se réduira à un point ; c'est-à-dire ^ que la droite aa' passera toujours , dans toutes ses positions, par un môme point. C'est ce qui a lieu, par exemple, quand les points E, E , sont placés au point de con- 344 NOTES. cours S des deux trauTersales. De sorle que l'équation Oa O'a' _ Sa Sa' appartient à un point. Nous reviendrons, dans un autre moment, sur le théorème qui fait le sujet de cette Note. Nous le considérerons alors comme une propriété des figures homo graphiques ; et nous lui donnerons cet autre énoncé, qui est très-propre à en montrer de nombreuses applications. Quand deux droites , dans un plan, «ont divisées homo graphiquement , les droites qui joignent un à un les points de division de la première aux points homologues de la seconde , enveloppent une conique tangente aux deux premières droites. On peut remplacer, dans le théorème ci-dessus, le système des deux transversales fixes par une circonférence de cercle. On a alors ce théorème : Etant donnés quatre points fixes quelconques 0 , E , O' , E' sur une circonfé- rence de cercle; si l'on prend sur cette circonférence deux points variables a, a', tels que l'on ait la relation sin. i aO sin. i a'O' -+- ^ -■ : — tt; =f^i sin. i aE sin. 5 a'E' ^ et // étant deux constantes , La corde aa', e?iveloppera une conique qui aura un double contact avec le cercle , et qui touchera la droite EE' . Celte proposition, jointe aux deux qui nous ont déjà présenté de l'analogie avec le rapport anharmonique de quatre points, et l'involution de six points, dpnne lieu à une théorie dans laquelle une foule de propriétés du système de deux lignes droites se trouvent transportées au cercle; et tout cela s'applique par une transformation conve- nable, aune section conique quelconque; ce qui offre une source nouvelle de propriétés de ces courbes. Nous nous bornerons ici à faire remarquer qu'en prenant pour les points E , E', dans le théorème ci-dessus, les extrémités des diamètres qui passent par les deux points O, 0' , respectivement , on donnera à l'équation cette forme plus simple tang. 5 aO -H A taiig. j a'O' = fn , qui exprime un nouveau théorème. Parmi les corollaires qui dérivent de ce théorème, on trouve cette propriété du cer- cle osculaleur en un point d'une conique : Étant mené le cercle osculateur en un point A d'une conique, toute tangente à cette courbe le rencontre en deux points, qui sont tels que la différence des cotan- gentes des demi-arcs compris entre ces points et le point A est constante. NOTES. 345 NOTE XVII. ( TROISIÈME ÉPOQUE , § 24. ) Sur MauroUcus et Guarini. Maurolicus, le plus savant géomèlre de son temps, est auteur d'un grand nombre d'ouvrages, où se trouvent souvent des innovations heureuses et des traces de génie. C'est à lui qu'on doit celte remarque, qui fut, entre ses mains, la base de nouveaux principes de Gnomonique, que l'ombre de l'extrémité d'un style décrit chaque jour un arc de section conique : et c'est à cette occasion qu'il composa son traité des coniques dont nous avons parlé, et qui fait le sujet du 3" livre de sa Gnomonique, intitulée de lineis horariis libri III, qui parut d'abord en 1553, puis en 1575. Mais ce traité des coniques se borne à ce qui était nécessaire pour la Gnomonique; et ne comprend pas toutes les propriétés de ces courbes, qui se trouvent dans Apollonius. Nous citerons encore de Maurolicus l'introduction, dans les calculs trigonométriques, des sécantes, dont il imprima une table dans le volume intitulé Theodosii sphœricorum librilll, année 1558. L'analyse est tussi infiniment redevable à ce géomètre, qui pourtant est peu cité à ce sujet. C'est lui qui introduisit le premier l'usage des lettres, à la place des nombres, dans les calculs de l'arithmétique , et qui donna les premières règles de l'algorithme de l'algèbre. Maurolicus voulait, par cette innovation, élever les opérations nuQiériques à la même généralité, et h la même abstraction que les opérations graphiques de la Géomé- trie, dont l'ensemble est présent à l'œil, et peut même être suivi mentalement, et a le singulier avantage de se prêter à mille applications diverses. Nous avons cité Guarini à l'occasion du théorème de Ptolémée, dans la Note YI, et de la théorie des coniques en parlant du grand traité de De La Hire. L'ouvrage de ce géomètre, dont nous nous étonnons de ne trouver aucune mention chez les auteurs qui ont écrit sur l'histoire des mathématiques, est intitulé : Euclidea adauctus et methodicut , malhematicaque univenali» (in-fol. de plus de 700 pages, sur 2 colonnes, Turin 1071). Il contient 35 traités sur différentes parties de la Géométrie théorique et appliquée. Le 32" peut être regardé comme un chapitre de notre Géométrie descriptive actuelle. Il traite delà projection sur des plans, des lignes qui proviennent de l'intersection de la sphère, du cône et du cylindre entre eux; et du développement, sur nn plan, de ces courbes à double courbure. Toa. XI. 44 346 NOTES. Guarini est auteur aussi d'un ouvrage sur l'astronomie, intitulé : Mathematica cœlestis , in-fol. Milan 1683; que Weidler et Lalande ont cité, le premier avec ces mois d'éloge, j4 perspictiitate commendatur. Ces deux célèbres écrivains auraient pu comprendre aussi dans leurs bibliographies astronomiques, un autre ouvrage de Guarini, intitulé : Placita philosophica (in-fol. Paris, 1666), où , parmi d'autres matières relatives à la physique, à la logique et à la méta- physique , l'auteur détruisait le système de Ptolémée et y substituait certaines lignes spirales dans lesquelles il faisait mouvoir les planètes. Il émit aussi une opinion extraor- dinaire sur le flux et le reflux de la mer , et sur divers autres phénomènes. NOTE XYIII. (troisième époque , § 34.) Sur l'identité des figures homologiques avec celles qu'on décrit dans les pra- tiques de la perspective. — Remarque sur la perspective de Stevin. Il est aisé de reconnaître que les figures de De La Hire, celles de Le Poivre, et les figures homologiques sont identiquement les mêmes que celles que l'on décrit dans la méthode de perspective qui fait usage du point de vue et àes points de distance. Car celles-ci jouissent des deux caractères distinclifs des premières , qui sont ; 1° que leurs lignes homologues concourent sur une même droite, qui est la ligne de terre ; 2° que leurs points homologues sont sur des droites concourantes en un même point ( qui serait le rabattement du point de l'œil sur le plan du tableau, si le plan horizontal mené par l'œil eut tourné autour de la ligne horizontale). Mais cette seconde propriété des figures qu'on décrit dans la pratique de la perspective par le point de vue et les points de distance, est rarement démontrée dans les traités de perspective; car , quoi- que ces ouvrages soient extrêmement nombreux , nous n'avons peut-être aperçu cette propriété que dans ceux d'Ozanam , de Jeaurat, de Lambert (édition de 1773 ), et dans le traité récent de M. Choquet. Dans d'autres méthodes de perspective , telles que celles de Stevin , de S'Gravezande , de Taylor et du P. Jacquier , qui se servent du point de l'œil rabattu sur le plan de la NOTES. 347 figure, l'identité des figures construites , avec les figures de De La Hire, de Le Poivre, et les figures homologiques, est évidente, parce qu'il est fait usage, dans ces pratiques , des deux propriétés caractéristiques que nous avons énoncées. S'Gravezande et Taylor sont cités souvent , et à juste titre, comme ayant traité la per- spective d'une manière neuve et savante : mais nous nous étonnons que l'on passe sous silence Stevin qui, un siècle auparavant, avait aussi innové dans cette matière, qu'il avait traitée en profond géomètre, et peut-être plus complètement qu'aucun autre, sous le rapport théorique. Ainsi, nous ne trouvons que dans cet auteur la solution géométrique de cette question, qui est l'inverse de la perspective : Étant donnéet dans un plan et dan* une potition quelconque l'une par rapport à l'autre, deux figures qui sont la perspective l'une de l'autre, on demande de les placer dans l'espace de manière que la perspective ait lieu , et de déterminer la position de l'œil. Stevin, il est vrai, ne résout que quelques cas particuliers de cette question, dont le plus difficile est celui où l'une des figures est un quadrilatère et la seconde un parallélo- gramme. Le cas où les deux figures sont deux quadrilatères quelconques comporte toute la question. Mais Stevin ne pouvait le résoudre, parce qu'il ne faisait usage que des pro- priétés descriptives des figures de la perspective; et qu'il eût fallu considérer aussi leurs relations métriques. Nous aurons occasion de résoudre cette question générale dans les applications de de notre principe de transformation homographique. NOTE XIX. (troisième ÉPOQUE, $ 35.) Siir la méthode de Newton, pour changer les figures en d'autres figures du même genre. (Lemnae XXII du l" livre de» Principes). Pour donner aux figures de Newton la même position l'une par rapport à l'autre, que 348 NOTES. celles de De La Hire, il suffit de faire tourner la seconde autour du point B ', comme pi\ot , jusqu'à ce que ses ordonnées dg soient dcTcnues parallèles aux ordonnées DG de la première. La ligne aB de la seconde courbe aura pris, pendant cette rotation, une position a'B. On mènera par le point A une droite Ko égale et parallèle à a'B. Le point o sera le pôle (ou centre d'homologie), et la droite Ba, considérée dans sa position pri- mitive, sera la formatrice [oaaxe d'homologie). Maintenant pour montrer comment les procédés de la perspective ont pu conduire Newton à son mode de transformation, que l'on conçoive dans l'espace une courbe plane, et un tableau sur lequel on fait la perspective de cette courbe; que, par l'œil, on mène un plan transversal, et qu'autour des droites suivant lesquelles il coupera le plan de la courbe et celui du tableau, on fasse tourner ces deux plans, jusqu'à ce qu'ils s'appli- quent l'un et l'autre sur le plan transversal; alors la courbe proposée, sa perspective, et le point de l'œil seront dans un même plan, et représenteront les figures de Newton. La méthode de Nevston pourrait donc servir comme méthode pratique de perspective. Et en effet , nous trouvons qu'elle diffère peu de la première des deux règles de Vignole, démontrées par Ëguuzio Dante , et reproduites par Sirigatt et divers autres géomètres. NOTE XX. (quatrième époque, § 4.) Sur la génération des courbes dit 3" degré ^ par les cinq paraboles divergentes , et par les cinq courbes à centre. Les deux théorèmes que nous nous proposons de démontrer reposent sur une propriété des points d'inflexion des courbes du troisième degré , comprise dans l'énoncé suivant : Si, autour d'un point d'inflexion d'une courbe du troisième degré', on fait tourner une transversale , et qu'aux deux points où elle coupera la courbe on mène les tangen- tes, leur point de concours engendrera une ligne droite ; 1 Nous (upposons que l'on a le texte de Newton 80u> lea yeux. NOTES. 349 Le* droite» qui joindront deux à deux les point* où deux trantvertale* rencontre- ront la courbe te rencontreront tur cette droite ; Enfin cette droite rencontrera chaque transversale en un point, qui sera le conjugué harmonique du point d'inflexion par rapport aux deux point* où la transversale ren- contrera la courbe. II est manifeste que cette droite passe par les points de contact des trois tangentes à la courbe, qu'on peut mener, généralement, par son point d'inflexion. On voit donc que cette droite et le point d'inflexion jouissent, par rapport à la courbe , des mômes propriétés qu'un point et sa polaire par rapport à une conique. Par cette raison, nous l'appellerons la polaire du point d'inflexion. Le théorème que nous venons d'énoncer se démontre aisément par quelques considéra- tions de Géométrie ; et l'on en peut déduire diverses propriétés des courbes du troisième degré. Mais nous ne nous proposons ici que d'en montrer l'usage pour la démonstration des deux modes de génération de ces courbes par l'ombre de cinq d'entre elles. On sait que toute courbe du troisième degré a un ou trois points d'inflexion. Qu'on la projette, c'est-à-dire qu'on en fasse la perspective, de manière que l'un de ses points d'inflexion passe à l'infini ; sa polaire , à cause de la troisième partie de notre théorème, deviendra un diamètre de la courbe. C'est là l'origine des diamètres dans les courbes du troisième degré. Maintenant , que la perspective soit faite de manière que non-seulement le point d'in- flexion, mais la tangente à la courbe en ce point, passe tout entière à l'infini; la courbe aura un diamètre, et n'aura aucune asymptote, elle sera purement parabolique; c'est le caractère exclusif des cinq paraboles divergentes. Il est donc démontré qu'une courbe quelconque du troisième degré peut être projetée perspeclivement suivant une des cinq paraboles divergentes; d'où résulte que réciproquement ces cinq courbes peuvent produire . par leur ombre toutes les autres. C'est le théorème de Newton, le premier des deux que nous nous proposions de démontrer. Passons au second : Prenons la polaire d'un point d'inflexion de la courbe proposée , et projetons cette courbe, perspectivement , de manière que cette polaire passe à l'infini; il résulte de la troisième partie du théorème ci-dessus, que le point d'inflexion sera en projection le centre de la courbe. Ainsi donc toute courbe du troisième degré peut être projetée perspectivement suivant une courbe ayant un centre; d'où résulte que récipro- quement les cinq courbes qui ont un centre peuvent produire par leur ombre toutes les autres. C'est le second théorème que nous nous proposions de démontrer. Ce théorème et celui de Newton peuvent être compris sous ce seul énoncé, savoir : Ainsi que les courbe* du second degré ne peuvent donner lieu qu'à une seule espèce de cône , de mime le* courbes du troisième degré ne peuvent donner lieu qu'à cinq espèces de cônes ; En coupant ces cônes d'une certaine manière, on forme le* cinq paraboles cu- bique» ; Et le* coupant d'une autre manière, on forme le* cinq courbe* qui ont un centre. 350 NOTES. Le théorème que nous avons énoncé au commencement de cette Note donne une expli- cation facile de différentes propriétés des courbes du 3" degré qui ont un centre ; et de di- verses autres relatives aux points d'inflexion de ces courbes. Mais nous ne pouvons entrer ici dans ces détails. NOTE XXI. ( QUATRIÈME ÉPOQUE , § 18.) Sv/r les ovales de Descartes , ou lignes aplanétiques . M. Quetelet, dans sa belle théorie des caustiques secondaires , qui sont des dévelop- pantes des caustiques de Tschirnhau sen , a trouvé que les caustiques secondaires produites par la réflexion et la réfraction dans un cercle éclairé par un point lumineux, sont les ovales deDescartes, ou lignes aplanéliquesi. M. Sturm est parvenu aussi, de son côté et vers le même temps 2, à ce singulier résultat, qui donne à ces ovales, créées par Des- carfes pour la Dioptrique, une seconde application à cette même science. Pour exprimer en langage géométrique le théorème de M. Quetelet, nous dirons que : Deux cercles fixes étant donnés sur un plan, si le centre d'un troisième cercle tno- hile , et de grandeur variable , se meut sur la circonférence du premier cercle , et que son rayon soit toujours proportionnel à la distance de son centre à la circon- férence du second cercle , ce cercle mobile enveloppera une courbe du quatrième de- gré, qui sera l'ensemble de deux ovales conjuguées de Descartes. Parmi d'autres propriétés intéressantes que M. Quetelet a trouvées à ces courbes , nous citerons les deux manières dont il les forme dans le solide , ou , suivant l'expression des Anciens , par les lieux à la surface. Première manière : « Que l'on ait une sphère et un cône droit; que l'on fasse la pro- » jection sléréographique de la courbe de pénétration de ces deux surfaces, l'œil étant" » placé à l'extrémité du diamètre de la sphère parallèle à l'axe du cône , et le plan de ' Nouveaux Mémoires de l'Académie de Bruxelles, tom. III. 2 Annales de mathématiques de M. Gergonne, tom. XV. NOTES. 351 » projection étant perpendiculaire à cet axe; la projection sera une ligne aplanétique >. » Seconde manière : « Concevons deux cônes droits , ayant leurs sommets en deux points » difTércns , et leurs axes parallèles entre eux, l'intersection de ces deux cônes , projetée » sur un plan perpendiculaire à leurs axes, donnera les lignes aplanéliqucs 2. » Ces deux modes de génération donnent les deux ovales conjuguées qui forment une ligne aplanétique complète; et ils sont propres à montrer les différentes formes que peuvent prendre ces courbes, et particulièrement celles qui ont échappé à l'analyse de Descartes. Nous avons trouvé que le second théorème peut ôtre généralisé de la manière suivante : « Quand deux cônes obliques ont pour bases sur un même plan deux circonférences » de cercles , et que les droites qui joignent les centres de ces courbes aux sommets des » deux cônes respectivement, se rencontrent en un point de l'espace; un troisième » cône ayant pour sommet ce point , et passant par la courbe d'intersection des deux » premiers, rencontrera le plan de leurs bases, suivant une courbe du quatrième degré » qui sera une ligne aplanétique 3. » Pour décrire sur le plan, et sans la considération des lieux à la surface, ni des pro- jections, les lignes aplanétiques, on pourra se servir de la construction suivante, qui est plus expéditive que celle de Descartes, et qui a aussi l'avantage de donner en même temps les deux ovales conjuguées. Étant donnés deux cercle» dan» un plan, »i , autour d'un point fixe, pri» »ur la droite qui Joint leur» centre» , on fait tourner une transversale , qui rencontre les cercle» chacun en deux points; les rayon» mené» de» centre» de* deux cercle» à leur» points de rencontre parla transversale , respectivement , se couperont en quatre points , dont le lieu géométrique sera une ligne aplanétique complète, ayant se» deux foyer» situés aux centres des deux cercle». Cette construction résulte immédiatemeut du théorème de Plolémée, sur le triangle coupé par une transversale. Car ce théorème, appliqué à la figure, fait voir que chaque point de la courbe construite jouit de la propriété que ses distances aux deux circonfé- rences de cercle sont entre elles dans une raison constante. Cette description des ovales a encore l'avantage de donner, sans conslructiou aucune, les tangentes à ces courbes; car chaque point de la courbe correspond d'après la cons- truction, à deux points des deux cercles; et les tangentes à la courbe et aux deux cercles , en ces trois points, concourent en un même point; ce qu'il est aisé de démontrer par un théorème de Géométrie ^. On ne saurait avoir trop de moyens dilTérens de décrire une même courbe, parce que ■ Nouveaux Wémoires de l'Académie de Bruxelles, tom. V; et supplément an Traité delà Lumière de Sir J. Berachel , par H. Quetelet , pag. 403. 3 IVouveaux Mémoires de P Académie de Bruxelles, tom. V; et supplément au Traité de la Lumière , de Sir J. Herschel, par M Quetelet, pag. 307. ' On peut généraliacr aussi le premier théorème, et considérer les lignes aplanétiques dans une sorface quel- conque du second degré au lieu d'une sphère. * Correspondance mathématique de Bruxelles, tom. V, pag. 116 352 NOTES. chacun exprime une propriété caractéristique de la courbe, d'où dérivent naturellement plusieurs autres propriétés qui n'apparaissent pas aussi aisément dans les autres modes de description. Les descriptions précédentes des lignes aplanétiques font usage de leurs deux foyers; voici une autre manière de les décrire, où l'on ne se sert que d'un foyer, et qui offre plusieurs avantages particuliers. Etant donné un cercle et un point fixe , pris arbitrairement dans so7i plan , si par ce point on Tnène un rayon vecteur à un point quelconque de la circonférence du cercle, et une seconde droite , qui fasse avec un certain axe fixe un angle double de celui que fait le rayon vecteur avec cet axe , et qu'on porte sur cette seconde droite , a partir du point fixe , un segment proportionnel au carré du rayon vecteur, l'ex- trémité de ce segment aura pour lieu géométrique une ligne aplanétique formée de deux ovales conjuguées dont un foyer est au point fixe. Ce théorème, faisant dériver directement les lignes aplanétiques du cercle, est très- propre à faire découvrir plusieurs propriétés de ces courbes. Par exemple , les propriétés connues du système de deux ou de trois cercles s'appliqueront immédiatement au sys- tème de deux ou de trois lignes aplanétiques qui auront un foyer commun. Pour faire usage de ce théorème, il faut remarquer que si , au lieu d'une circonférence de cercle, l'extrémité du rayon vecteur parcourt une ligne droite, on forme alors une parabole qui a son foyer au point fixe. Ainsi, par exemple, quand deux droites tournent autour de deux points fixes en fai- sant un angle de grandeur constante, leur point d'intersection engendre un cercle; on en conclut que : Si l'on a deux groupes de paraboles ayant toutes le même foyer, et dont les unes passent par un premier point fixe , et les autres par un second point fixe ; et qu'on prenne une parabole du premier groupe, et une parabole du second groupe, de manière que leurs axes fassent entre eux un angle de grandeur constante , les points d'intersection de ces deux paraboles seront sur une ligne aplanétique. Ce théorème est susceptible de plusieurs conséquences, que nous ne pouvons exami- ner ici '. Les lignes aplanétiques jouissent d'une propriété assez curieuse qui , je crois , n'a pas encore été donnée. C'est qu'aie lieu de deux foyers seulement , elles en ont toujours trois : c'est-à-dire , qu'outre les deux foyers qui servent à leur description, elles en ont un troisième qui joue le même rôle, avec l'un des deux premiers, que ces deux-ci en- semble. La considération des trois foyers est bien propre à faire connaître toutes les formes possibles des lignes aplanétiques. Quand l'un des foyers est à l'infini , la courbe devient une conique , et conserve ses deux autres foyers. I On en déduit, entre autres, un théorème dont M. Quetelet a fait usage dans son Mémoire sur quelques constructions graphiques des orbites planétaires. V. les JS^ouveaux Mémoires de l'Académie de Bruxelles, tom, m. NOTES. 353 Quand deux foyers se confondent, la courbe a un nœud; elle devient le limaçon de Pascal ; et elle a encore deux foyers. Enfin, les lignes aplanéliqucs présentent un caractère générique qui pourra servir à les classer parmi les nombreuses courbes du quatrième degré; c'est qu'el/e* (mt deux point» ctnjtKjuéii imaijinaire» tituè» à l'infini. D'où l'on conclut que par uu point pris au dehors d'une telle courbe, on peut lui mener généralement et au plus, huit tangentes. NOTE XXII. (quatrième époque, § 29.) Extension donnée à deux théorèmes généraux de Stetcart. Voici quels sont les deux théorèmes qui présentent une bien plus grande généralité que ceux de Slevvarl, et desquels ceux-ci se déduisent avec plusieurs autres. Premier théorème : Etant donne* dan» un plan m point» A, B, C ,... et autant de quantité» a, b, c, ; n étant un nombre plu* petit que m, on pourra trouver (n + 1) autre* point» A' , B' , C, tel» que, si l'on prend un point quelconque M, il y aura entre te» distance» aux point» donnés , et »e» distances aux points trouvé* les a relations ex- primées par la formule mP^"-''^ -•- 6.mF^"-''> -+- = (mF^"-"^) + m'^^-<^^ -H .,..)■ où â peut avoir le* n valeurs 0, 1, 2,.... (n — 1). Si l'on fait i= o, ou a précisément le théorème 44 de Slcwarl. Les autres valeurs de c? donneront d'autres relations, qu'on pourrait énoncer comme autant de théorèmes diiïérens, mais qui néanmoins ont lieu toutes ensemble. C'est cette simultanéité de ces n relations différentes qui fait le caractère du théorème énoncé. ' On ne doit pas perdre de vue que le point M, dans ce théorème, est indéterminé; et qu'ainsi on aura n relations pour chaque position de ce point. ToM. XI. 45 354 NOTES. â serait susceptible d'uûe (n-+- 1 )"""" valeur, égale à «, mais qui conduirait à l'identité a -h b -t- c... a-i-o-HC-4-... ^ (n-t-1) JH- 1 yoilà pourquoi nous avons réduit à n le nombre des valeurs de à Deuxième théorème : Etant données dans un plan m droites , et autant de quan- tités a, b, c, .... ; n étant un nombre quelconque plus petit que m, on pourra trouver (n -h 1 ) autres droites, telles que si Von prend un point quelconque M dans le plan de ces droites, et qu'on appelle Ma, 3IS ,.... les perpendiculaires abaissées de ce point sur les droi- tes données, el Ma. , M§' , celles abaissées sur les droites trouvées , on aura entre ces perpendiculaires les ^-j— , ou ^ relations , déterminées par la formule n -t- I où â peut avoir les ~— valeurs 0, 1,2,.... ^^^ , si a est impair, et les ^ va- leurs 0, 1, 2, ^^i^> *«' n est pair. Si l'on fait à ^= o , on aura le théorème exprimé par les propositions 49 el 53 de Slewart. Les autres valeurs de â donneront d'autres relations , qu'on pourrait énoncer aussi comme autant de théorèmes différens ; mais qui cependant auront lieu toutes ensemble ; et cela, quelle que soit la position du point M. Jusqu'ici les théorèmes de Stewart, compris dans les deux théorèmes généraux que nous venons d'énoncer, sont restés, je crois, sans application, et comme des propriétés isolées d'un système de points, ou d'un système de droites. On peut penser cependant que ces systèmes doivent jouir d'autres propriétés du même genre que ces premières , et se rattachant toutes à une même théorie. J'aurais quelques raisons, par exemple, de supposer qu'un système de points donnés, et le système des points déterminés suivant le premier théorème en question, jouissent des propriétés communes aux systèmes de quatre points qui sont les extrémités de deux diamètres conjugués d'une ellipse. Du moins je formerai de tels systèmes de points en nombre quelconque ( systèmes particu- liers, il est vrai, c'est-à-dire assujétis à une loi déterminée), qui présenteront toutes ces propriétés. Malgré celte première analogie, je puis me tromper dans mes conjectures. Quoi qu'il en soit, on reconnaîtra , je crois , que les théorèmes de Stewart ne sont que les premiers pas dans un champ de recherches nouvelles qui mériteraient d'occuper l'esprit des géomètres. NOTES. 355 .1'. NOTE XXIII. (CIHQUIÉHE ÉPOQUE, § 1".) Sur l'origine et le développement de la Géométrie descriptive. ,^ En reconnaissant Monge comme le créateur de la Géométrie descriptive, il est juste de convenir que divers procédés de cette science , et l'usage des projections , dans diffé- rentes parties des arts de construction, étaient connus depuis long-temps, principale- ment des charpentiers et des tailleurs de pierres. Philibert de Lorme, Mathurin Jousse , Desargues , le P. Deran , et De La Rue avaient donné l'art du trait appliqué à la coupe des pierres et à la charpente, lequel reposait sur la théorie des projections. Desargues déjà , parmi ces auteurs , avait montré l'analogie qui existait entre divers procédés diffé- ren8,et les avait rattachés à des principes généraux. Enfin Frezier , officier supérieur du génie , dans son Traité de stéréotomie , ouvrage savant et rempli d'applications cu- rieuses cl utiles en Géométrie théorique et pratique, avait donné suite aux idées de généralisation de Desargues , et avait traité géométriquement, d'une manière? abstraite et générale, différentes questions qui devaient se présenter dans plusieurs parties de la coupe des pierres et de la charpente. Nous citerons, par exemple, tout ce qui tient au dévelop- pement sur un plan , des surfaces coniques et cylindriques ; la théorie de l'intersection des surfaces sphériques, cylindriques et coniques entre elles; la manière de représenter une courbe à double courbure dans l'espace, par ses projections sur des plans , etc. Mais toutes ces questions abstraites , qui résumaient une foule de questions de pra- tique , et qui font aujourd'hui autant de chapitres de notre Géométrie descriptive , dépen- daient elles-mêmes, dans leurs solutions, de quelques principes et de quelques règles plus élémentaires encore, qui leur sont communes, comme à peu près les quatre règles de l'arithmétique sont les outils communs à toutes les opérations du calcul. Ce sont ces règles élémentaires , abstraites et générales, que le génie de Monge a aperçues dans les opérations de la stéréotomie, ou créées, et qu'il a réunies en un corps de doctrine, sous le nom de Géométrie descriptive; doctrine dont la généralité, la lucidité et la facilité montrent l'homme de génie dans l'habile continuateur. A l'aide de ces principes simples et invariables, ou, suivant l'expression de Malus, à l'aide de ces outils, Monge a pu rectifier plusieurs pratiques incertaines et inexactes de la coupe des pierres, et a appris à v résoudre des questions qui avaient semblé jusque là passer les bornes de la science des stéréotomistes, ou qui n'y avaient reçu que des solutions empiriques. 336 NOTES. En parlant de l'origine de la Géométrie descriptive, on ne peut passer sous silence les services rendus à celte science par M. Lacroix et M. Hachette. M. Lacroix fut le premier qui développa les principes de la Géométrie descriptive, et les mit à la portée de tous les lecteurs, dans son ouvrage intitulé, d'abord Essai sur les plans et les surfaces (vol. in-S", 1795) puis. Complément de Géométrie, où se trouvent la clarté et la précision qui distinguent les écrits de ce célèbre professeur. Monge, en publiant son traité de Géométrie descriptive, dans la vue de rendre cette science aussi simple et d'un accès aussi facile qu'il se pût, en avait écarté d'abord diverses questions compliquées, mais qui devaient naturellement y entrer dés que les esprits se seraient familiarisés avec cette nouvelle doctrine. Ce fut M. Hachette , son élève à l'école de Mézières , puis son collègue comme professeur à l'école polytechnique , qui le premier remplit ces lacunes, dans deux ouvrages portant le titre de Supplémens à la Géométrie descriptive Çen 1812 et 1818). Les nouvelles questions générales, ou théories , ajoutées par ce géomètre à l'ouvrage de Monge, ont été reproduites dans le traité complet de Géométrie descriptive que lui-même a publié en 1821'; et ont passé, depuis, dans les nombreux ouvrages qui ont paru sur la même matière en France et à l'étranger. Sous ce rapport M. Hachette a rendu un grand service aux sciences mathématiques. ïl m'a paru qu'en Italie particulièrement, où la Géométrie descriptive et ses applications à la science de l'ingénieur, sont cultivées dans toute leur étendue, et enseignées dans d'excellens ouvrages -, on rendait à ce sujet pleine justice à ce savant en citant souvent ses ouvrages , et en les prenant même pour modèles. Nous regardons qu'ils ont grandement contribué à répandre et à étendre la connaissance de la Géométrie descriptive '. Depuis, d'autres bons traités de Géométrie descriptive ont encore paru en France. Nous devons citer ceux de MM. Vallée, Leroy et Lefebure de Fourcy. Les deux premiers sont aussi complets que le comporte l'état actuel de la science; le troisième, principalement destiné aux aspirans à l'école polytechnique, est très-propre à remplir son but, par l'ordre et la précision qu'on y trouve, et qui caractérisent toujours les ouvrages du sa- vant professeur qui l'a écrit. La Géométrie descriptive est encore en voie de progrès. M. Th. Olivier, pour qui cette partie des sciences mathématiques est depuis long-temps une étude de prédilection , a 1 Une seconde édition a paru en 1S38. 2 Nous citerons entre autres le Traité de M. l'ingénieur Serenns, intitulé: Trattato di Goometria Descrii- tiva, etc. , in-4'' , Rome 1826 ; et un recueil de mémoires divers , qui sont en partie des applications de la Géométrie descriptive, fait annuellement, à l'instar du journal de l'école polytechnique, par messieurs les professeurs de l'école de» ingénieurs des États Romains , sous le titre : Ricerche GeometrCche edidromotriclie faite nella scuola de^rinyegueripontifici d'acque e strade. ' Depuis que cette Note était écrite, une mort prématurée a enlevé M. Hachette aux sciences et à ses nombreux amis. Ses anciens élèves à l'école polytechnique, ceux surtout qui, comme moi, ont été honorés de son amitié et qui l'ont connu dans l'intérieur de son excellente famille, liront avec émotion les éloquentes paroles que trois savans illastres , ses collègues à l'Académie , MJI. Arago , Ch. Dupin et Poisson , et l'un de ses disciples, continuateur de ses travaux sur la Géographie descriptive, HT. Th. Olivier, ont prononcées sur sa tombe. NOTES. 357 donné, dans les derniers volumes du Journal de l'école polytechnique ,[>\us\euTS mémoi- res, sur différentes questions nouvelles qui entreront nécessairement désormais dans les traités qui paraîtront sur cette science. NOTE XXIV. (CIHQDIÈME ÉPOQUE, § 15.) * Sur la loi de continuité , et le principe des relations contingentes. On peut sans doute employer l'expression de principe de continuité , au lieu de celle de relation* contingente* : «ependant il y a entre l'une et l'autre une différence assez importante pour nous décider à adopter la seconde. En effet, le principe de continuité remonte à Leibnitz. qui, le premier, l'a proposé, comme exprimant distinctement celle loi de la nature que tout se fait par degrés inten- tiblet, ou , comme le disait la philosophie scolastique, Natura abhorret à saltu. C'est dans cette acception rigoureuse qu'on a employé, depuis lors, le principe de continuité. Ce prin- cipe tire donc son origine de l'infini. C'est ainsi que le repos est un mouvement infiniment petit; la coïncidence, une distance infiniment petite ; l'égalité , la dernière des inégali- tés; etc. Leibnitz exprime ce principe de cette manière : «Lorsque la différence de deux cas » peut ôtre diminuée au-dessous de toute grandeur donnée, in datis , ou dans ce qui » est posé, il faut qu'elle se puisse trouver aussi diminuée au-dessons de toute grandeur » donnée in quœtiti» , ou dans ce qui en résulte; ou, pour parler plus familièrement, » lorsque les cas (ou ce qui est donné) s'approchent continuellement et se perdent enfin » l'un dans l'autre, il faut que les suites, ou événemens (ou ce qui est demandé), le » fassent aussi '. n 1 tfouctllei que la propriété des premiers convenait aux seconds. » C'est par des considérations semblables qu'Archimède s'éleva à des propositions beau- coup plus difficiles, telles que les rapports des surfaces et des solidités du cylindre et de la sphère, la quadrature de la parabole, etc. On regarderait aujourd'hui comme suffi- samment prouvées par ces raisonnemens, les propositions qui en seraient l'objet; mais les Anciens, tout en se servant de la loi de continuité, comme moyen de découverte , ne l'ont point admise comme moyen suffisant de démonstration, et ont eu recours à des procédés souvent très-pénibles, pour donner des preuves tout-à-fait convaincantes, et hors d'atteinte de toute objection, des vérités qu'ils avaient à démontrer. Mais, depuis Leibnitz, \e principe de continuité fut admis comme un axiome, et pra- tiqué journellement en mathématiques. Ainsi , c'est sur ce principe que reposent la ' Nouvelles de la Répuhlique des Lettres , an lieu cité. ^ Commerce épistolaire de Leibnitz et BernouUi, tom. Il, pag. l\0. NOTES. 359 méthode des limites et celle des premières et dernières raisons. Cependant les géomètres ne firent usage de ce principe que tacitement, et sans l'invoquer comme une loi absolue, ainsi queXcibnitz l'avait considéré. On ne. peut se dissimuler qu'on doit à ce relâchement de la rigueur des Anciens, les progrés immenses que les modernes ont faits dans la Géométrie. Les Anciens , plus jaloux de convaincre que d'éclairer, ont caché tous les fils qui auraient pu mettre sur la trace de leurs méthodes de découvertes et d'inventions, et qui auraient pu guider les continuateurs de leurs travaux. Ce fut la cause de cette marche timide et embarrassée de la Géométrie, de l'incohérence de ses méthodes dans des questions de même nature, ou, pour parler pins exactement, de l'absence de méthodes sûres et propres comme celles de la Géométrie moderne à des classes entières de questions comportant une certaine généralité. i^fHR'f NOTE XXV. (CIHQTJIÈME ÉPOQUE, J 15.) Application du principe des relations contingentes à la question die déterminer^ en (frondeur et en direction j les trois diamètres principaux d'un ellipsoïde dont trois diamètres conjugués sont donnes. , ^ i ■ ifO .» Nous allons résoudre d'abord le problème analogue dans la Géométrie plane, où il s'agit de déterminer en grandeur et en direction les deux axes principaux d'une ellipse dont deux diamètres conjugués sont donnés. La solution de ce problème nous rendra plus facile l'exposition de celle du problème de l'espace, et nous offrira d'ailleurs, comme celle-ci , un exemple bien propre à montrer les usages du principe de» relation* con- tingentet et à on faire apprécier les avantages. Problème : Etant donné* deux diamètre» conjugué* d'une ellip*e, construire , en direction et en grandeur, le* deux diamètre* principaux de la courbe. Supposons qu'au lieu des deux diamètres conjugués d'une ellipse, on donne les deux diamètres conjugués d'une hyperbole, et qu'on demande à construire les axes principaux de cette courbe. L'un des deux diamètres conjugués sera réel, et donné en grandeur; appelons-le a; l'autre sera imaginaire, et son expression algébrique bV — 1 sera donnée 360 NOTES. La conslruclion des deux axes principaux de l'hyperbole est extrêmement facile; car on sait que si, par l'extrémité A du demi-diamétre a, on mène une parallèle au diamètre conjugué, elle sera tangente à l'hyperbole; et si sur celte droite on prend, de part et d'autre du point de la courbe, deux segmens égaux à h, leurs extrémités seront sur les deux asymptotes. Tirant doue ces deux asymptotes , et divisant en deux également l'angle ([u'elles font entre elles, et son supplément, on aura les directions des deux axes principaux de l'hyperbole. Ainsi le problème est résolu très-simplement. Pour transporter cette solution au cas de l'ellipse, par application du principe' des relations contingentes, il faut y remplacer la considération des parties contingentes de la figure , qui nous ont servi , et qui sont les asymptotes , par la considération de quel- qu'autre propriété de la figure, qui subsiste dans le cas de l'ellipse. Regardons les deux points où la tangente à l'hyperbole rencontre les deux asymptotes, comme les foyers d'une conique C, passant par le centre de l'hyperbole; les asymptotes seront les deux rayons vecteurs de cette conique; par conséquent les deux axes principaux de l'hyperbole, lesquels divisent en deux également l'angle et son supplément , formés par ces deux rayons vecteurs , seront , l'un la tangente, et l'autre la normale à cette conique C. Ainsi nous pouvons dire que la conique C, menée par le centre de l'hyperbole, est tangente à l'un de ses axes principaux. A raison de celte propriété, la conique G servira pour la con- struction des directions des deux axes principaux de l'hyperbole, et remplacera, pour cet objet, les deux asymptotes qui nous avaient servi d'abord. Mais cette conique G, à laquelle nous a conduit la considération des deux asymptotes, peut être construite sans faire aucun usage de ces deux droites ; car nous connaissons la direction de ses deux axes principaux qui sont la tangente et la normale à l'hyperbole au point A, et son excentricité dirigée suivant la tangente, laquelle excentricité est égale à b, c'est-à-dire au diamètre ù\^ — 1 de l'hvperbole divisé par V' — 1. L'autre excentricité de la conique C sera dirigée suivant la normale, et égale à la première multipliée par (/ — 1 ; c'est-à-dire à AV^ — 1 '. On a donc ce théorème : Si l'on regarde la tangente et la normale en un point A d'une hyperbole , comme les axes principaux d'une conique qui passerait par le centre de l'hyperhole , et qui aurait son excentricité , dirigée suivatit la normale, égale précisé7nent au dia- mètre conjugué de celui qui aboutit au point A , cette conique sera nécessairement tangente à l'un des deux axes principaux de l'hyperbole. Ce théorème exprime une propriété générale de l'hyperbole, indépendante des asymp- totes, quoi qu'elles nous aient servi à la démontrer. Toutes les parties de la figure que comporte cette propriété générale se retrouvent dans l'ellipse , nous pouvons donc , d'après le principe des relations contingentes, appliquer cette propriété à l'ellipse; ainsi nous dirons que : 1 Nous supposons qu'une conique a quatre foyers, dont deux réels et deux imaginaires; et deus excentricités, dont une réelle et l'autre imaginaire; les carrés de ces deux excentricités étant égaux et de signes contraires. 4«- ,p NOTES. 861 >$'( l'on regarde la tangente et la normale en un point d'une ellipse comme let axes principaux d'une conique qui passerait par le centre de l'ellipse, et qui aurait son excentricité , prise sur la normale , égale au diaînètre conjugué de celui qui aboutit au point pris sur l'ellipse, cette conique sera tangente à l'un des deux axes principaux de l'ellipse. L'excentricité située sur la norraalo sera réelle, puisque le diamètre auquel elle est égale est réel ; les deux foyers de la conique seront donc sur la normale à l'ellipse. Les rayons vecteurs menés de ces deux foyers au centre de l'ellipse feront des angles égaux avec celui des deux axes principaux auquel la conique est tangente. On en conclut donc ce théorème : Si, sur la normale en un point d'une ellipse, on prend, de part et d'autre de ce point, deux segmens égaux au demi- diamètre conjugué de celui qui aboutit à ce point , et que, des extrémités de ces deux segmens , on tire deux droites au centre de l'ellipse , ces deux droites seront également inclinées sur l'un des deux axes principaux de l'ellipse. Ce théorème donne , comme on voit , une construction extrêmement simple de la direction des deux axes principaux d'une ellipse dont on connaît deux diamètres conju- gués. Il nous reste à trouver la longueur de ces axes principaux. Plusieurs manières se pré- sentent, j, D'abord, on peut projeter orlhogonalement les deux demi-diamètres conjugués donnés, sur un des axes {)rincipaux ; la somme des carrés de leurs projections sera égale au carré de cet axe principal. On peut encore se servir de ce théorème, extrêmement facile à démontrer : Si par uti point d'une conique on mène la normale; le produit des segmens faits sur elle par le diamètre qui lui est perpendiculaire , et par un des axes princi- paux, est égal au carré du demi autre axe principal. Cette relation fait connaître les deux axes principaux. Mais on peut obtenir une expression des longueurs de ces axes, sans connaître à priori leurs directions. Pour cela remarquons que si, sur la tangente et la normale à la conique, considérées comme axes principaux, on construit une seconde conique qui passe par le centre de la première, et soit tangente, en ce point, à un axe principal de cette première conique, les segmens faits sur la normale, par sa perpendiculaire abaissée du centre de la première conique, et par cet axe principal qui est tangent à la seconde conique, auront leur pro- duit égal au carré du demi-axe principal de la seconde conique dirigé suivant cette nor- male; cet axe principal sera donc égal au second axe principal de la conique proposée, lequel est normal à la seconde conique ; on a donc ce théorème : Si l'on prend la tangente et la normale en un point d'une conique pour axes principaux d'une seconde conique qui passe par le centre de la première , et qui soit normale en ce point à l'un des axes principaux de cette première conique , To«. XI. 46 362 NOTES. «, l'axe principal de cette nouvelle conique , dirigé suivant la normale à la première , géra égal à l'axe principal de cette première conique auquel la seconde courbe est normale. C'est-à-dire que chacune des deux coniques a l'un de ses axes normal à l'autre courbe , et ces deux axes sont égaux entre eux. Si la première conique est une ellipse^ nous avons vu que la seconde conique a ses deux foyers réels placés sur la normale à la première conique ; son grand axe est donc dirigé suivant cette normale , et il est égal à la somme ou à la différence des rayons vecteurs menés des deux foyers au centre de l'ellipse proposée ; mais cet axe est égal à l'axe prin- cipal de cette ellipse auquel la seconde conique est normale, on en conclut donc enfin celte construction extrêmement simple du problème proposé : Par r extrémité A d'un des deux demi-diametres conjugués donnés , on mènera une droite perpendiculaire au second demi-diamètre ; on portera sur cette droite , à partir du point A , deux segm,ens égaux à ce demi second diamètre; On joindra par deux droites les extrémités de ces deux segmens au centre de la courbe ,• » On divisera en deux également , par deux nouvelles droites , l'angle que ces deux premières feront entre elles et son supplément ; Ces deux nouvelles droites seront , en direction, les deux axes principaux de l'el- lipse ; La somme des deux premières droites sera égale au grand axe, et leur diffé- rence sera égale au petit axe. La seconde partie de cette solution , relative à la longueur des axes, offre une construc- tion de deux quantités radicales qu'on trouve dans quelques solutions analytiques de la question, mais qui n'avaient point été construites aussi simplement. La marche que nous avons suivie paraît longue , parce qu'ayant pour but de faire une application du principe des relations contingentes , nous avons dû aller pas à pas et énoncer des théorèmes auxiliaires pour bien montrer le passage du contingent à l'absolu , dans les propriétés des foyers; ce qu'on n'aura point à faire généralement dans les applications du principe , quand on sera familiarisé avec lui. Ainsi nous résoudrons plus brièvement le problème de l'espace, quoiqu'il présente quelques difficultés en comparaison du premier, qui n'en offrait aucune. Problème : Etant donnés trois diamètres conjugués d'un ellipsoïde , on demande de déterminer , en grandeur et en direction , les trois axes principaux de cette surface. Concevons un hyperboloïde à une nappe, et son cône asymptote. Le plan tangent à l'hyperboloïde en un point m coupera le cône suivant une hyperbole 2, dont les dia- mètres auront leurs carrés égaux, au signe près, aux carrés des diamètres de l'hyperboloïde, qui leur seront parallèles respectivement '. ' Cela résulte de ce qu'un diamètre de l'hyperbole sera la partie d'une tangente à l'hyperboloïde , comprise entre deux arêtes du cône asymptote , laquelle partie a son carré égal , au signe près, au carré du diamètre NOTES. 363 Maintenant regardons cette hyperbole comme la coiiiqtie excentrique ' d'une surface du second degré qui passerait par le centre de l'hyperboloïdc. Cette surface sera normale à l'un des axes principaux du cAne^, qui sont les mêmes que ceux de l'hyperboloïde. Mais l'un des axes principaux de cette nouvelle surface est dirigé suivant la normale à l'hyper- boloïde au point m, et les deux autres suivant les diamètres principaux de la conique 2, lesquels sont les tangentes aux lignes de courbure de l'hyperboloïde. Nous pouvons donc énoncer ainsi le théorème , en faisant abstraction du cône asymptote : Si, en un point d'un hyperboloïde à une nappe , on mène sa normale , et les tan- gente» à tes lignes de courbure , et qu'on regarde ces trois droites comme les axes principaux d'une surface du second degré qui passerait par le centre de l'hyperbo- loïde , et qui aurait pour normale en ce point l'un des trois axes principaux de cet hyperboloïde , la conique excentrique de cette surface , comprise dans le plan tangent à l'hyperboloïde, aura les carrés de ses diamètres égaux, et de signes contraires , aux carrés des diamètres parallèles de l'hyperboloïde. Ce théorème, par le principe des relations contingentes, s'applique aux deux autres surfaces douées d'un centre ; on a donc cette propriété de l'ellipsoïde. Si l'on regarde la normale en un point m d'un ellipsoïde et les deux tangentes à ses lignes de courbure en ce point , comme les trois axes principaux d'une sur- face du second degré qui passerait par le centre de l'ellipsoïde et aurait pour normale en ce point l'un des trois axes principaux de cet ellipsoïde , la conique ex- centrique de cette surface, comprise dans le plan tangent à l'ellipsoïde , aura les carrés de ses diamètres égaux, et de signe contraire , aux carrés des diamètre* parallèles de l'ellipsoïde. Cette conique excentrique sera imaginaire; mais elle servira néanmoins pour construire les deux autres coniques excentriques qui seront réelles. En efl'et soient — b-cl — c- les carrés des deux demi-axes principaux de cette conique {bel 0 étant les deux demi-axes principaux de la courbe d'intersection de l'ellipsoïde par un plan parallèle à son plan tangent au point m); soit ^ > c; — c- est plus grand que — b-, et les foyers de la conique imaginaire sont situés sur l'axe c. Sur la normale à l'ellipsoïde, on portera, à partir du point m, deux segmens égaux respectivement à i et à c; Dans le plan déterminé par cette normale et une parallèle à l'axe c , on décrira une ellipse qui ait pour demi-grand axe, le segment égal à b,el pour excentricité le segment égal à c; Dans le plan déterminé par la normale et une parallèle à l'axe b, on décrira une de l'hyperboloïde, parallèle i cette tangente ; parce que te plan mené par cette tangente et ce diamètre eoape l'hyperboloïde auiTant une hyperbole, ' Il ett néceoaire , pour l'intelligence de ce qui va luivre , de prendre une connaissance préalable de la IVote XXXI, où nous expliquons ce que nous entendons par coniquet dcentriguei i'une surface du second degré, et faisons connaître diverses propriétés de ces courbes. 2 F9trIIoTKXXXI,art. II. 364 NOTES. hyperbole qui ait pour demi-axe transverse le segment c et pour excentricité le seg- ment b. L'ellipse et l'hyperbole ainsi construites seront les deux courbes cherchées, c'est-à- dire les deux coniques excentriques d'une surface du deuxième degré qui, passant par le centre de l'ellipsoïde, aurait pour normale en ce point l'un des axes principaux de l'ellipsoïde. Par conséquent les deux cônes qui auront pour bases respectivement ces deux coniques, et pour sommet commun le centre de l'ellipsoïde, auront pour axe prin- cipal commun cet axe principal de l'ellipsoïde (Note XXXI, art. 11 ). Les deux autres axes principaux communs aux deux cônes seront pareillement les deux autres axes prin- cipaux de l'ellipsoïde, parce que par son centre on peut faire passer deux autres surfaces du deuxième degré ayant pour coniques excentriques les deux mêmes courbes trouvées, et qui seront normales respectivement à ces deux axes principaux de l'ellipsoïde. La ques- tion de la construction des directions des trois axes principaux de l'ellipsoïde se réduit donc à trouver les trois axes principaux qui sont communs aux deux cônes qui ont pour bases les deux coniques en question ; ces trois axes principaux forment , dans l'un et l'autre cône, un système de trois axes conjugués; il faut donc chercher le système de trois axes conjugués communs aux deux cônes. On conclut de là que : Étant donnés trois diamètres conjugués d'un ellipsoïde ; pour trouver la direction de ses trois axes principaux , par l'extrémité A d'un des diamètres donnés , on mè- nera une droite perpendiculaire au plan des deux autres, sur laquelle 071 prendra, à partir du point A , deux segmens égaux respectivement aux deux demi-axes prin- cipaux de l'ellipse construite sur ces deux diamètres conjujjués. Soit h le plus grand de ces deux axes , et c le plus petit; On mènera, par la normale, deux plans , dont l'un parallèle au diamètre c, et l'autre parallèle au diamètre b ; On construira , dans le premier plan , une ellipse qui ait pour demi grand axe le segment b et pour excentricité le segment c; et dans le second plan , une hyperhole qui ait pour demi-axe principal le segment c , et pour excentricité le segment h; On regardera le centre de l'ellipsoïde comme le somtnet comtnun de deux cônes ayant pour hases respectivement cette ellipse et cette hyperbole ; Ces deux cônes se couperont stiivant quatre arêtes, qui seront deux a deux dans six plans ; lesquels plans se couperotit deux à deux suivant trois autres droites ; Ces trois droites seront les trois axes principaux de l'ellipsoïde. Pour déterminer la longueur de ces axes principaux, on peut projeter orthogonale- ment sur chacun d'eux les trois diamètres conjugués donnés; le carré de chaque axe sera égal à la somme des carrés des trois projections faites sur lui. Mais il sera plus simple de faire usage du théorème suivant, que l'on démontre très- aisément : La normale en un point m d'une surface du deuxième degré rencontre le plan dia- métral qui lui est perpendiculaire, et un des plans principaux P, en deux points dont NOTES. 365 le produit dei dùtancet au point m ett égal au carré du demi-diamètre de la surface , qui e«t normal au plan principal P. On peut encore déterminer les longueurs des axes principaux de l'ellipsoïde sans con- naître leurs directions; en construisant trois surfaces dont les axes majeurs sont égaux respectivement à ces trois axes principaux. Cela dépend d'un théorème que nous allons démontrer. La surface qui a pour axes principaux la normale et les tangentes aux lignes de cour- bure de l'ellipsoïde au point m, et qui passe par le centre de cet ellipsoïde et touche en ce point l'un de ses plans principaux, cette surface, dis-je, a le carré de son demi-axe dirigé suivant la normale égal au produit des segmens faits sur cette normale, à partir du point m, par le plan principal et le plan diamétral perpendiculaire à cette normale '. Donc, d'après le théorème que nous venons d'énoncer ci-dessus, cet axe de la surface est égal à l'axe de l'ellipsoïde perpendiculaire au plan principal. On a donc ce théorème : Quand deux turface» du second degré sont telles que chacune d'elles ait son centre sur l'autre et ses trois axes principaux dirigés suivant la normale et les deux tangen- tes aux lignes de courbure de cette autre ^ l'axe de la première surface dirigé suivant la normale à la seconde est égal à l'axe de la secande surface dirigé suivant la nor~ r\t,ale à la première. On conclut de là que : Si l'on regarde la normale en un point d'une surface du second degré ^ et les tan- gentes aux deux lignes de courbure en ce point , comme les trois axes principaux communs à trois surfaces passant par le centre de la proposée , et tangentes respecti- vement à ses trois plans diamétraux , les axes principaux de ces trois surfaces, diri- gés suivant la normale à la proposée, seront égaux respectivement aux trois axes principaux de cette surface. Quand la surface proposée est un ellipsoïde déterminé seulement par trois diamètres conjugués, nous avons vu comment on détermine les coniques excentriques communes aux trois autres surfaces, ce qui suffit pour la construction de ces surfaces; ce dernier théorème pourrait donc servir, à la rigueur, pour résoudre la question de déterminer les longueurs des trois diamètres principaux de l'ellipsoïde, sans connaître leurs directions. Mais cette manière serait difficile et peu praticable. Néanmoins le théorème sur lequel elle repose nous a paru mériter d'être connu, comme exprimant une belle propriété générale des surfaces du deuxième degré. Les théorèmes précédens conduisent , sans difficulté , à plusieurs autres qui offrent quelqu'intérèt. Par l'extrémité m d'un des trois diamètres conjugués, menons deux droites égales et I Cela rëtulte de ce théorème , connu dan» la théorie élémentaire det tnrfacea dn second degré , qne « le plan tangent en un point de la surface et le plan mené par ce point perpendiculairement à l'un det trois diamètres principaux , font sur ce diamètre , i partir du centre de la surface , deux segmens dont le produit est égal au carré du demi-diamètre, » 366 NOTES. parallèles aux deux autres; et décrivons une ellipse E qui ait ces deux droites pour dia- mètres conjugués. Le cône qui a son sommet au centre de l'ellipsoïde , et pour base cette ellipse, rencontre l'ellipsoïde suivant une seconde ellipse E' située dans un plan parallèle à celui de la première. Ainsi les deux ellipses sont homothétiques. La seconde a son centre sur le diamètre qui aboutit au point m; soit m' ce centre; on trouve aisément qu'on a toujours om = om'V^S. Cette seconde ellipse jouit de la propriété que si l'on prend sur elle 3 points A', B', C, tels que le centre de leurs moyennes distances soit situé au centre de l'ellipse , les trois droites OA', OB', OC, seront trois diamètres conjugués de l'ellipsoïde. C'est là une pro- priété des surfaces du second degré, qu'il est extrêmement facile de démontrer. Maintenant regardons le point m' comme l'homologue du point m par rapport au point 0, pris pour centre de similitude, et concevons trois surfaces homothétiques aux trois surfaces du théorème précédent, qui ont leur centre commun en ot, et qui, passant par le centre 0 de l'ellipsoïde, sont normales respectivement à ses trois axes principaux. Ces trois nouvelles surfaces auront leur centre de figure en ?n'; elles passeront par le point 0 qui est le centre des imilitude; elles seront tangentes, en ce point , respectivement aux trois premières surfaces ; et par conséquent elles seront normales respectivement aux trois axes principaux de l'ellipsoïde ; et elles auront toutes trois les mêmes coniques excentriques , situées dans des plans parallèles aux plans des coniques excentriques des trois premières surfaces. Soient A et c les deux demi-diamètres principaux de la conique E, J' et e' les deux demi-diamètres principaux de la conique E' ; ils seront parallèles respectivement aux premiers , et l'on aura b_ , c_ Pour former les deux coniques excentriques des trois nouvelles surfaces, il faut donc élever par le centre m de la conique E' une perpendiculaire au plan de cette courbe , prendre sur cette droite deux segmens égaux à A' et c' et décrire dans les deux plans rec- tangulaires menés parla normale et par les deux axes i'et c' respectivement, une ellipse et une hyperbole dont la première ait pour demi-grand axe b', et pour excentricité c'; et dont la seconde ait pour demi-axe transverse c' et pour excentricité b'. Cette ellipse et cette hyperbole seront les deux coniques excentriques des trois nouvelles surfaces. Les cônes qui auront pour sommet le point 0, et pour bases ces deux coniques , auront leurs axes principaux dirigés suivant les axes principaux de l'ellipsoïde. On conclut delà le théorème suivant: Etant donnés trou diamètres conjugués OA , OB , OC d'un ellipsoïde ; pour déter- miner, en direction et en grandeur , les trois axes principaux , On cherchera, en direction et en grandeur, les deux demi-axes principaux de l'ellipse qui passerait par les trois points A, B, C, et aurait pour centre le centre NOTES. 367 det moyenne» dùtancet de cet trou point*. Soient h et c cet deux demi-axe* princi- paux ; Par le centre de l'ellipge on élèvera , *ur *on plan , une perpendiculaire, *ur laquelle on portera deux «egmen* h' , c' égaux retpectivement à b-e^ à c ; Dan* le* deux plan* rectangulaire* déterminé* par cette perpendiculaire et le* deux axe* b , c , re*pectivement , on décrira deux conique* , dont l'une , qui *era une ellipee. ait pour demi-grand axe le eegment h' et pour excentricité le eegment c , et dont l'autre , qui *era une hyperbole, ait pour demi-axe tran*ver*e le eegtnent c', et pour excentricité le eegment b' ; 1° Le* deux cône* qui auront pour eommet commun le point O, et pour ha*e* , re*- pectivement , cette ellip*e et cette hyperbole , auront même* axe* principaux que l'el- lip*oïde ; 2° Le* troi* *urface* qui auront pour conique excentrique cette ellipse et cette hy- perbole, et qui pa**erontpar le centre de rellipeoïde, auront leur* troi* axe* majeur* égaux aux troi* axe* principaux de Fellipeoïde, divi*é* par vS. Ce théorème offre, comme on voit, une seconde solution de la question de trouver en direction et en grandeur les trois axes principaux d'un ellipsoïde dont trois diamètres conjugués sont donnés. Et cette solution est aussi simple que la première. Mais l'avantage du théorème est de conduire à diverses conséquences que ne donnait point la première solution. Ainsi on en conclut immédiatement que : Quand troi* diamètre* conjugué* dun ellipsoïde doivent aboutir à troi* point* donné* , et qu'un de* troi* axe* principaux de V ellip*oïde doit avoir une longueur donnée, le centre de l'ellipeoïde e*t indéterminé et a pour lieu géométrique une *urfaee du eecond degré , dont le centre e*t *itué au centre de* moyenne* di*tance* de* troi* point* où doivent aboutir troi* diamètre* conjugué* de l'ellipgoïde. On peut donner les longueurs de deux des trois diamètres principaux de l'ellipsoïde, et le centre de l'ellipsoïde est encore indéterminé ; alors il a pour lieu géométrique la courbe à double courbure qui provient de l'intersection de deux surfaces du second degré qui ont les mêmes coniques excentriques; cette courbe est une ligne de courbure de l'une et l'autre surface. '^\io^ " Quand les trois diamètres principaux de l'ellipsoïde sont donnés en longueur, huit ellipsoïdes satisfont à la question; leurs centres sont les points communs à trois surfaces du second degré qui ont les mêmes coniques excentriques. Quanta la direction des diamètres principaux des ellipsoïdes, on a ce théorème : Quand trois diamètre* conjugué* d'un ellipsoïde doivent aboutir à troi* point* donné* , Quel que *oit le point de l'e*pace qu'on prenne pour le centre de cette *urface , te* troi* axe* principaux *eront les trois axes principaux commun* à deux cône* qui au- ront ce centre pour *ommet, et qui paseeront reepeetivement par deux conique* fixe*, dont la construction dépendra uniquement de la position de* troi* point* donné*. #. 368 NOTES. Ces deux coniques sont telles que le cône qui a pour base l'une d'elles , et pour sommet un point de l'autre courbe, est de révolution ; l'ellipsoïde qui aurait son centre au sommet du cône sera aussi de révolution ; on en conclut donc ce théorème : Si l'on demande un ellipsoïde de révolution dont trois diamètres conjugués aboutis- sent à trois points donnés , une infinité d'ellipsoïdes satisferont à cette question ; leurs centres seront situés sur deux coniques , ellipse et hyperbole , situées dans deux plans rectangulaires , et dont l'une aura pour sommets et pour foyers les foyers et les som~ mets de l'autre. NOTE XXYl. ( CINQUIÈME ÉPOQUE , § 17. ) Sur les imaginaires en Géométrie. La considération des relations et des propriétés contingentes d'une figure , ou système géométrique, est propre à donner l'explication du mot imaginaire , employé maintenant assez fréquemment, et avec avantage, dans les spéculations de la Géométrie pure. Enefi"et, on ne peut regarder l'expression d'imaginaire que comme indiquant seule- ment un état d'une figure dans lequel certaines parties, qui seraient réelles dans un autre état de la figure, ont cessé d'exister. Car on ne peut se faire l'idée d'un objet ima- ginaire, qu'en se représentant en même temps un objet de l'espèce, dans un état d'exi- stence réelle; de sorte que l'idée d'imaginaire serait vide de sens, si elle n'était toujours accompagnée de l'idée actuelle d'une existence réelle du même objet auquel on l'applique. Ce sont donc les relations et propriétés que nous avons appelées contingentes qui don- nent la clef des imaginaires en Géométrie. Mais on voit par là qu'on pourrait très -facilement éviter, si l'on voulait, la consi- dération de» imaginaires , dans le raisonnement; il suffirait d& supposer, à côté de la figure dont on a à démontrer quelque propriété , une seconde figure de même nature , mais, dans un état général de construction où les parties contingentes, qui sont imaginaires dans la figure proposée, seraient réelles. C'est là effectivement ce que l'on fait tacitement, en raisonnant sur les imaginaires comme sur des objets réels ; de sorte que l'on peut NOTES. 369 dire que l'emploi du mot imaginaire est une manière abrégée de s'exprimer , et qui signifie que les raisonnemens que l'on fait s'appliquent à un autre état général do la figure, dans lequel les parties sur lesquelles on raisonne existeraient réellement, au lieu d'y être imaginaires comme dans la figure proposée. Et comme , d'après le principe des relations contingentes, ou si l'on veut, d'nprés le principe de continuité, les vérités démontrée» pour l'un des deux états généraux de la figure s'appliquent à l'autre état , on voit que l'em - ploi et la considération des imaginaires se trouvent complètement justifiés. Nous devons faire ici une observation importante. La voici : Etant donnée une figure, dans laquelle se trouvent des parties imaginaires , on peut toujours, d'après ce que nous venons de dire, en concevoir une autre, de construction aussi générale que la première , et dans laquelle ces parties qui étaient d'abord imagi- naires, sont réelles; mais, et c'est en cela que consiste notre observation, il n'est jamais permis de raisonner, ni d'opérer sur la première figure ellc-mAme, en y regardant comme réelles, certaines parties qui y sont imaginaires. Par exemple, si une expression donnée par le calcul, pour déterminer un point sur une droite, est imaginaire, ce point sera lui-même imaginaire; et on commettrait une faute très-grave en construisant ce point comme si son expression était réelle. Le point ainsi construit n'appartiendrait point à la figure, ni à la question proposée; et tous les résultats déduits de la considération (Je ce point seraient empreints d'erreurs. Ainsi, dans chaque système de diamètres conjugués de l'hyperbole, les directions des deux diamètres sont réelles ; mais la longueur de l'un des deux diamètres est toujours imaginaire; le carré de cette longueur est réel, et les propriétés générales de l'ellipse, où n'entrent que les carrés des diamètres conjugués, s'appliqueront à l'hyperbole comme à l'ellipse; mais celles des propriétés dont il s'agit, où ces longueurs ne sont employées qu'au premier degré, n'auront plus d'application dans l'hyperbole, parce que si l'on vou- lait construire l'axe imaginaire de l'hyperbole en le supposant réel, on commettrait une erreur; la ligne ainsi construite, et le point qui serait son extrémité , n'appartiendraient pas à la figure, ni à la question proposée, mais bien à une autre figure et à une autre ques- tion. Ce serait une chose intéressante, de rechercher les rapports et la corrélation qui peuvent avoir lieu entre les propriétés de deux figures , dans l'une desquelles on a construit , comme étant supposées réelles , des parties qui dans l'autre sont imaginaires '. Tels sont l'hyperbole équilatère, et le cercle décrit sur son axe principal comme diamètre. Toute corde du cercle, perpendiculaire à cet axe, a son carré réel: si son pied sur l'axe est dans l'intérieur du cercle, cette corde a aussi sa longueur réelle; mais si son pied est au dehors du cercle, cette longueur est imaginaire, bien que son carré soit réel ; si on la construit en la supposant réelle, son extrémité déterminera un point qui appartiendra à une hyperbole équilatère. Et la corde en question jouira de propriétés difi'érentes, suivant ' Ce qni retient , en analyse , è changer JZ+T en l/^, on , plu» généralemeut , Tonitë en l'une de ie« racinea , dana cerlaina terme* dea formulea appartenant i la question propoaée. To«. XI. 47 # 370 NOTES. qu'elle sera prise dans le cercle ou dans l'hyperbole. Par exemple, dans le cercle, les droites menées de l'extrémité de la corde aux deux extrémités du diamètre, font entre elles un angle droit; et dans l'hyperbole, ces deux droites font entre elles un angle de grandeur variable. M. Garnot a déjà fait, dans son Traité de la Corrélation des figures de Géométrie , et dans sa Géométrie de position, des réflexions sur la corrélation des figures dont nous parlons, et sur celle des formules algébriques qui leur correspondent en analyse. Mais l'objet principal des travaux de cet illustre savant, dans cette matière, étant la corrélation des figures qui ne diffèrent que par de simples changemens de signes des variables elles- mêmes, et non de leurs fonctions, dans les expressions algébriques, la corrélation des figures qui diffèrent, comme nous venons de dire, en ce que l'on construit dans l'une, comme étant réelle , une expression imaginaire dans l'autre, cette corrélation, dis-je, est un objet de recherches tout nouveau , et qui nous paraîtrait susceptible de conduire à quelques lois générales de l'étendue, qui pourraient accroître la puissance des doctrines géométriques. Nous citerons encore à ce sujet le célèbre Lambert , qui a fait un usage très-curieux et très-utile des rapports imaginaires déduits de la comparaison de l'hyperbole équilatère et du cercle, qui auraient un centre commun ; et qui a imaginé une espèce de trigonomé- trie hyperbolique, au moyen de laquelle il trouve des solutions réelles dans des cas où la trigonométrie ordinaire en fournit d'imaginaires , et réciproquement. NOTE XXVIT. (CIITQUIÈME ÉPOQUE, § 23. ) Sur l'origine de la théorie des polaires réciproques, et celle des mots pôle et polaire. Après que Monge eut démontré , dans sa Géométrie descriptive , que , quand le sommet d'un cône circonscrit à une surface du second degré parcourt un plan, le plan de la courbe de contact passe toujours par un même point; et que quand le sommet du cône parcourt une droite, le plan de contact passe toujours par une seconde droite, MM. Livet et Brian- ■îsak. NOTES. 371 chon firent voir que, quand le sommet du cône parcourt une surface du second degré, le plan de contact enveloppe une autre surface du second degré. (XIII" cahier du Journal de Yicole Polytechnique , année 1808.) Dans le même mémoire, M. Brianchon fit usage de cette théorie pour déduire, du fameux théorème de Pascal sur l'hexagone inscrit aux coniques, le théorème non moins beau, ni moins utile sur l'hexagone circonscrit à une conique , et qui consiste en ce que leê trou diagonale* de cet hexagone, qui joignent deux à deux ses sommet» opposé* , pos- tent par un même point. Premier exemple d'un tel usage de la théorie des polaire* , et dans lequel se présentait, d'une manière bien remarquable, par l'analogie de ce théo- rème avec celui do Pascal , la dualité des figures planes. Ensuite MM. Encontre et de Stainville se servirent de celte théorie pour faire une vé- ritable transformation de figure. Il s'agissait de circonscrire à une conique, un polygone dont les sommets fussent placés sur des droites. Ces géomètres remarquèrent que, d'après la théorie des pôle* , ce problème pouvait être ramené à celui où il s'agit d'inscrire dans une conique un polygone dont les côtés passent par des points donnés ; problème qu'on savait résoudre. (Voir Annales de mathématiques , tom I", pag. 122 et 190) '. C'est dans cet excellent recueil^ qui a si puissamment contribué depuis vingt ans aux progrès des mathématiques, et de la Géométrie particulièrement, que les dénominations de pôles plans polaires et droites polaires , qui ont facilité l'usage de cette théorie, ont pris naissance. M. Servois a d'abord appelé pôle d'une droite, le point par où passent toutes les lignes de contact des angles circonscrits à uue conique, et qui ont leur sommet sur la droite ; puis M. Gergonne a appelé cette droite \a polaire du point ; et a étendu ces dénominations au cas de l'espace. (Voir Annales de mathématiques , tom. I", pag. 337, et tom. III, pag. 297.) Elles ont été adoptées par tous les géomètres qui ont écrit sur les surfaces du second degré. ' Nous avona donné l'hiatorique de ce problème dana la Note XI. «■• 372 NOTES. NOTE XXYIII. (cinquième époque, § 27.) Généralisation de la théorie des projections stéréographiques . — Surface du second degré tangente à quatre autres. Les deux théorèmes dont on fait usage dans la théorie des projections stéréographi- ques, considérée comme méthode de recherche, deviennent les suivaus, dans cette théorie généralisée comme nous l'ayons dit , c'est-à-dire, quand on prend le lieu de l'œil en un point quelconque de l'espace : Si l'on fait la perspective d'une surface du second degré sur un plan quelconque , l'œil étant placé en un point de l'espace, pris arbitrairement au dehors de la surface: 1° Les projections des courbes planes tracées sur la surface seront des coniques ayant toutes un double contact , réel ou imaginaire , avec une conique unique, qui sera la perspective du contour apparent de la surface; 2° Le pôle de la corde de contact de chaque conique avec la conique unique sera la projection du sotnmet du cône circonscrit à la surface , suivant la courbe plane dont cette première conique sera la projection. A ces deux premiers principes , il sera utile de joindre ce troisième : Les projections de deux droites polaires réciproques par rapport à la surface, sont deux droites dont chacune passera par le pôle de l'autre; ces pôles étant pris par rapport à la conique unique. Au moyen de ces trois théorèmes , on parvient avec une facilité extrême à la découverte des nombreuses propriétés d'un système de coniques inscrites dans une même conique unique; et il n'est besoin, pour ainsi dire, d'aucune démonstration, parce qu'il suffit de contempler dans l'espace, et de traduire sur le plan, les relations apparentes des courbes tracées sur la surface du second degré. De cette théorie des coniques décrites sur le plan , il est facile de s'élever à la théorie analogue dans l'espace , c'est-à-dire aux propriétés d'un système de surfaces du second degré , inscrites dans unç même surface unique du second degré. Nous appelons surfaces inscrites l'une à l'autre, deux surfaces se touchant suivant toute l'étendue d'une courbe. Pour deux surfaces du second degré , cette courbe de contact est plane. On parvient ainsi à de nombreuses propriétés des surfaces du second degré, et à la solution d'un grand nombre de questions relatives aux contacts de ces surfaces, et dont toutes celles concernant les contacts des sphères, ne sont que des cas particuliers. Et ce 9 NOTES. 373 que cette théorie peut oiTrir de satisfaisant aux géomètres qui aiment à rechercher la plus grande généralisation possible , c'est que toutes ces questions ne sont elles-mêmes dans leur généralité , que les corollaires d'une seule , qui les comprend toutes dans son énoncé et dans sa solution ; la voici : Problème. — Etant donnéeê quatre surface» du tecond degré inscrite» dans une même surface du second degré E , décrire une surface du même degré gui touche les quatre première» , et qui soit , comme elles , inscrite dans la surface E. La solution do ce problème est extrêmement simple ; mais pour la présenter avec netteté et précision , il nous sera utile d'admettre quelques définitions : Quand deux surfaces du second degré sont inscrites dans une même surface du second degré, elles se coupent suivant deux courbes planes, réelles ou imaginaires, mais dont les plans sont toujours réels; nous appellerons ces plans, par analogie avec la dénomina- tion d'axes de symptose dans les coniques , plans de symptose des deux surfaces. Les deux surfaces jouissent aussi de la propriété , qu'on peut leur circonscrire deux cônes du second degré; réeis.ou imaginaires, mais dont les sommets sont deux points toujours réels. Nous nous servirons, pour désigner ces deux points, de l'expression de centre* d'homologie des deux surfaces , employée par M. Poncelet. Nous appellerons droite de symptose des deux surfaces, toute droite comprise dans l'un de leurs deux plans de symptose, et plan d'homologie , tout plan mené par l'un de leurs deux centres d'homologie. Maintenant concevons trois surfaces du second degré , inscrites dans une même surface du même degré , elles auront, deux à deux, deux plans de symptose ; en tout six plans de symptose. On démontre que ces six plans passent , trois par trois , par quatre droites ; et que les quatre droites concourent en un même point de l'espace. De sorte que les six plans de symptose sont les quatre faces au sommet , et les deux plans diagonaux d'une pyramide quadrangulaire. Nous dirons que chacune des quatre droites par lesquelles passent, trois à trois, les six plans de symptose, est une droite de sympto»e commune aux trois surfaces; et qu'un point quelconque de l'une de ces quatre droites est un point de symptote commun aux trois surfaces. Considérons les centres d'homologie des trois surfaces : prises deux à deux, elles en ont deux ; ce qui fait six centres d'homologie. .à-. ■)_.. . • i On démontre que ces tix centres d'homologie sont, trois par trois , sur quatre droites, et que ces quatre droites sont dans unmême plan. De sorte que les six centres d'homologie sont les quatre sommets et les deux points de concours des côtés opposés d'un quadrilatère. Nous appellerons droite d'homologie commune aux trois surfaces, chacune des quatre droites sur lesquelles sont, trois à trois, les six centres d'homologie des trois surfaces , et plan d'homologie commun aux trois surfaces, tout plan mené par l'une de ces quatre droites. 374 NOTES. Concevons quatre surfaces dn second degré , inscrites dans une même surface du second degré. On démontre que ce* quatre surfaces ont huit points de symptose qui leur sont communs ; c'est-à-dire qu'il existe dans l'espace huit points , dont chacun se trouve sur un plan de symptose de chaque combinaison des quatre surfaces deux à deux. De sorte que chacun de ces huit points est le point d'intersection commun à six des douze plans de symptose qu'on obtient en combinant les quatre surfaces deux à deux. De même, on démontre que les quatre surfaces ont Imit plans d'homologie communs ; c'est-à-dire qu'il existe huit plans, dont chacun passe par un centre d'homologie des quatre surfaces prises deux à deux. De sorte que chacun de ces huit plans contient six des douze centres d'homologie, qu'on obtient en combinant les quatre surfaces deux à deux. Tout ceci admis , nous pouvons donner un énoncé facile de la solution du problème proposé. Première solution. On construira les huit plans d'homologie communs aux quatre surfaces, et leurs huit points de symptose communs. On prendra , par rapport à l'une quelconque A des quatre surfaces, les pôles des huit plans d'homologie, et on joindra par une droite, chacun de ces pôles à chacun des huit points de symptose; on aura ainsi soixante-quatre droites, qui rencontreront la surface A en cent vingt-huit points ; dont chacun sera le point de contact d'une surface cherchée avec la surface A. Seconde solution. Après avoir construit, comme pour la première solution, les huit points de symptose, et les huit plans d'homologie communs aux quatre surfaces, on prendra les plans polaires de ces huit points de symptose , par rapport à l'une quelconque A des quatre surfaces; ces huit plans polaires rencontreront chacun des huit plans d'homologie suivant huit droites; on aura ainsi soixante-quatre droites, par chacune desquelles on mènera deux plans tangens à la surface A. Chaque point de contact des cent vingt-huit plans tangens ainsi menés , sera le point où l'une des surfaces cherchées touchera la surface A. On voit , par chacune de ces deux constructions, que le problème admet, dans sa plus grande généralité, cent vingt-huit solutions. Il est utile de remarquer, pour la discussion des cas particuliers, très-nombreux, renfermés dans ce problème général, et pour lesquels le nombre des solutions peut diminuer considérablement, que ces solutions sont données seize à seize par chaque plan d'homologie, ou par chaque point de symptose commun aux trois surfaces. De sorte qu'il s'évanouira autant de fois seize solutions, qu'il manquera de plans d'homologie, ou de points de symptose communs aux quatre surfaces. Par exemple , si les quatre surfaces sont des sphères , elles n'auront qu'un point de symptose (c'est le point que M. Gaultier a appelé centre radical des quatre sphères.) Il n'y aura donc que seize solutions. Il peut paraître étonnant , au premier abord , que quatre sphères situées d'une manière NOTES. 375 quelconque dans l'espace, et une cinquième qui leur serait tangente, soient considérées comme cinq surfaces du second degré, inscrites dans une môme surface unique du même degré. Mais il est facile d'en voir la raison. Une surface du second degré dont un des axes devient nul, se réduit à une conique; toute autre surface du second degré passant par celte conique , la touche en tous ses points, et peut être regardée comme lui étant circonscrite. Donc plusieurs surfaces du second degré, qui passent par une même conique, jouissent des propriétés d'un système de surfaces circonscrites à une même surface du second degré; cette surface ayant, dans ce cas, l'un de ses axes nuls et se réduisant à une conique. Remarquons que le plan de cette conique est, par rapport à deux quelconques des surfaces, un plan de symptose,et que la conique peut devenir imaginaire, quoique ce plan reste réel; on en conclut par le principe de continuité , ou de* relation» contin- gente», que plusieurs surfaces du second degré, qui ont un plan de symptose commun, peuvent être considérées comme autant de surfaces inscrites dans une même surface du second degré. Maintenant on peut supposer que le plan de symptose commun aux surfaces, soit à l'infini; alors les surfaces seront semblables et semblablement placées. Donc plusieurs surfaces du second degré semblables entre elles et semblablement placées , peuvent être considérées comme un système de surfaces du second degré toutes inscrites dans une même surface unique du même degré. Ainsi il est démontré que les solutions que nous avons données d'une surface du second degré tangente à quatre autres et inscrite, comme elles, dans une même surface du même degré , s'appliquent à la construction d'une sphère tangente à quatre autres , et plus géné- ralement d'une surface du second degré tangente et homothétique à quatre autres. NOTE XXIX. ( CIRQCIÈHB ÉPOQUE, § 30.) Démonstration d'un théorème d'où résulte le principe de dualité. Le théorème en question ne peut pas se déduire , comme dans le cas des figures planes, des propriétés des figures supplémentaires tracées sur la sphère; mais sa démonstration 376 NOTES. directe est extrêmement facile. Elle repose sur cette proposition de Géométrie élémen- taire, savoir: « Si d'un point fixe on mène des rayons aux différens points d'un plan, » que sur ces rayons (ou bien sur leurs prolongemens), on porte, à partir du point fixe, » des lignes proportionnelles aux valeurs inverses de ces rayons, les extrémités de ces » lignes seront sur une sphère qui passera par le point fixe, et qui aura son centre sur » la perpendiculaire abaissée de ce point sur le plan. » Il résulte de là que les plans menés par les extrémités de ces lignes, perpendiculaire- ment aux rayons, passeront tous par un même point situé sur cette perpendiculaire, lequel sera l'extrémité du diamètre de la sphère. Pour un autre plan, on aura un autre point correspondant. Il faut prouver maintenant que si plusieurs plans 'passent par un même point, leurs points coKKESvo'siiKfis seront sur un même plan. Or, à chacun de ces plans correspondra une sphère, et toutes ces sphères passeront par un même point 0 situé sur la droite me- née du point fixe S au point d'intersection de tous les plans. La droite SO est donc une corde commune à toutes les sphères ; par conséquent le plan perpendiculaire à cette droite , mené par le point 0 , passera par l'extrémité du dia- mètre de chaque sphère , issu du point S. Or l'extrémité de ce diamètre est, sur chaque sphère , le point correspondant au plan auquel cette sphère correspond ; donc tous ces points correspondans sont sur un même plan. Ce que nous voulions démontrer. Il suit de là, que les figures construites dans l'espace comme nous l'avons dit dans le texte de cet écrit, jouiront des propriétés de la dualité', comme celles dont la cons- truction sur le plan avait résulté des figures supplémentaires de la sphère. NOTE XXX. (cinquième époque, § 31.) Sur les courbes et surfaces réciproques de Monge. — Généralisation de cette théorie. Voici quelles sont ces courbes et ces surfaces réciproques : X , y étant les coordonnées d'un point d'une courbe plane, celles du point correspon- dant de la courbe réciproque sont x' ■= p , y' = px — y , p étant égal à ^. La récipro- NOTES. 377 cité des doAx courbes consiste en ce que la première so forme de la seconde, comme celle-ci s'est formée de la première. (Voir Correspondance sur l'école Polytechnique , tom. I", pag. 73, ann. 1805.) Le Mémoire de Monge *ur le» turfacet réciproque» se trouve indiqué dans une liste de ses difl'érens mémoires, placée au commencement de son application de l'analy»e à la Géométrie ( troisième édit. , ann. 1809). II devait faire partie des mémoires de l'Institut année 1808; mais je crois qu'il n'a point été publié. Au titre de ce mémoire est jointe, en ces termes, la définition des surface» réciproque» : « X, y , z, étant les coordonnées d'un point d'une surface courbe, pour lequel on a » l'équation difléreutielle dz =pda> -h qdy, les coordonnées x' , y', z' de son point ré- » aiproque ont pour expressions » Le lieu de tous ces points réciproques est la surface réciproque de la surface pro- » posée. La réciprocité de ces deux surfaces consiste en ce que la première surface est » le lieu des points réciproques de la seconde , comme la seconde est le lieu des points » réciproques de la première. » C'est-à-dire , que les valeurs de x, y, z en x' , y', z' auront la même forme que celles de x', y' , z' en jr, y, z. Et en effet on trouve * =P' > V'=^'î^ ' =p'x' -\- q'y' — «'. On reconnaît à l'inspection de ces formules que à chaque plan tangent de la première surface, corre»pond un point de la »econde; et que , quand ce» plan» tangen» pas»ent par un même point, ce» point» , qui leur corretpondent , »ont »ur un même plan. En effet , le plan tangent au point (x, y, z) de la première surface est déterminé par les valeurs des coordonnées de ce point et les valeurs des deux coelEciens différentiels p et q. Ces valeurs donnent aussi la position du point (^x, y', z') qui correspond à ce plan tangent. Maintenant, si ce plan tangent, dont l'équation est «-Z=;)(*-X)-f-9{y-Y), passe par un point fixe \»,S , ^) , on aura entre les coordonnées de son point de contact ( X, y, z) , la relation z — y = p{x — a) -f. 5{y — f). Substituant dans cette équation les valeurs de x,y, z en x', y', z', p' et q' , on a V -+- y= ax' ■+■ Cy' , équation d'un plan , comme il fallait le trouver. Ainsi les surfaces réciproques de Monge peuvent être considérées comme des trans- formées l'une de l'autre suivant le principe de dualité. Tom. XI. 48 378 • NOTES. Et en effet ces surfaces sont tout simplement polaires réciproques par rapport au paraboloïde de révolution qui a pour équation a;' -4- y" =: a. Cette construction géométrique des surfaces de Monge fait voir qu'elles ne sont qu'un cas particulier d'une classe générale de surfaces réciproques , qu'on peut exprimer ana- lytiquement comme celles-là , et qui , considérées géométriquement , sont des polaires réciproques par rapport à une surface du second degré quelconque. Il est à regretter que le mémoire de Monge n'ait pas été publié. Il eût été intéressant de connaître la voie qui l'a conduit à l'invention de ses surfaces réciproques, et préci- sément de celles dont l'expression analytique est la plus simple parmi une infinité d'au- tres; de savoir si c'est la théorie des pôles dans les surfaces du second degré qui a guidé ce grand géomètre; et surtout quel usage il faisait de la considération de ses surfaces réciproques. Nous savons que les courbes réciproques lui ont offert un moyen de ramener aux quadratures l'intégration des équations différentielles à deux variables, de la forme y = xYp '*' fp , F et ^ étant des fonctions quelconques de ^ = ^. D'après cela, il est naturel de penser que Monge a imaginé pour le même usage les surfaces réciproques; et qu'elles lui ont servi à intégrer des équations aux différences partielles à trois variables. Et en effet, on reconnaît qu'elles peuvent être propres pour cet usage. Soit, par exemple, à intégrer l'équation aux différences partielles ^{x, y, 2, p, q) = o; On la regardera comme appartenant à une surface A, c'est-à-dire, que son intégrale se- rait l'équation de la surface A. A l'équation différentielle proposée correspondra une équation appartenant à une sur- face A' réciproque de A; cette équation sera F (p'> i'' p'^' + l'y' — «'> ^' ) y') = o. Si cette équation, qui est différente de la proposée, est intégrable, on obtiendra par l'intégration une équation f{a;', y', z')=^o, qui sera l'équation finie de la surface A'. On passera de cette équation, par la voie de l'élimination, à l'équation de la surface réciproque de A', qui sera la surface A; cette équation sera donc l'intégrale de l'équation proposée. Si l'équation proposée contenait les coefiiciens différentiels du second ordre _ rf'z _ d'z _ d'z dx' dxdij dy' la méthode serait la même. On passerait à l'équation différentielle en x' ,y', z' ,p',q , r , s', t', NOTES. 379 en remplaçant les coefficiens différentiels r, #, t, par leurs expressions en fonction de ceux r', *', t'. On trouTe pour ces expressions • 7. 1 ' = et réciproquement rr — »"' r't'~-s' ' r't'—t"' ■ , »' = ■ T . ' = r«— «' r«— «' rt — »' On agirait de même pour des équations aux différences partielles d'un ordre supérieur. Mais ce procédé d'intégration ne parait pas propre à procurer des intégrales générales , admettant les fonctions arbitraires que comporte l'équation différentielle proposée. Car si l'on faisait entrer ces fonctions arbitraires dans l'intégrale de l'équation en x , y', z', qui représente la surface Â', elles empêcheraient d'en déduire par la voie de l'élimination l'équation de la surface réciproque A. I Le calcul de ceaexprettion* eit facile. Que l'on difîérenlie l'éituation x=p' , puis l'équation y =: q' , par rapport à x et i y sncceuiTement, en regardant />' et g' cooime fonctions de x' eit/ , on aura lei quatre équation* : et 1 dp' dx' dp' dy' ~ dx' dx ' dy' dx ' dp' dx" dp' dy' dx' dy dy' dy dq' dx' dq' dy" " ~ dx' dx '*' dy' dx ' dq' dx' dq' dy' dx' dy dy' dy , on a dp' dp' dq' , dq' dx' ' dy' '^ dx'"^* ' dy' ' ^r. dx' dp dy' dq dx' dp dx ds ' dx dx "' dy dy dy dy t quatre équationa ci-dcMua deviennent donc 1 = r'r -+- »'s , 0 = r'$ ^ t't. 0 = s'r ^ f» , 1 == ,'« -♦- t't. De ce( équation* on tire lei Taleura de r, t, t, en fonction de r' , t' , t ; et réciproquement. 380 NOTES. Cette diflBculté doit faire regretter \ivement que le travail de Monge, qui avait déjà tant contribué aux progrès de la science dans ce genre d'analyse si épineuse, ne nous soit pas parvenu. Nous avons dit que les surfaces réciproques de Monge étaient, parmi les surfaces po- laires réciproques , celles dont l'expression analytique était la plus simple. Nous devons ajouter qu'il est une autre espèce de surfaces réciproques, analogues à celles de Monge, qui sont d'une égale simplicité dans leur expression analytique , mais qui ne font pas partie des surfaces polaires. Voici les relations de ces nouvelles surfaces réciproques : X , y , z étant les coordonnées d'un point d'une première surface, et x' , y', z' , les coordonnées du point correspondant de la surface réciproque, on aura x' =z q, y' = — p, z' = — px: — çy -+- 2 , et '^ — q') y=^—p', « = — p'^' — q'y' + ='• Ces formules pourront servir, comme celles de Monge , pour l'intégration des équations aux différences partielles; et il pourra arriver qu'elles conviennent dans des cas où les autres ne conviendraient pas , c'est-à-dire , ne conduiraient pas à une équation intégrable. Car l'équation proposée étant F(*; y, ^, p, q) — o, on la transforme , par les formules de Monge en celle-ci : f (p'j q'> A' -+- q'y' — ^'^ ^'> y' ) = <>; Et par les nouvelles formules , en la suivante : f (î'j -~P'> — ;>'*■' — ÇY -+- 2' > — y'> 3;')=rr0. Il est possible que cette seconde équation se prête plus facilement aux méthodes d'inté- gration que la précédente. Les relations des coefficiens différentiels du second ordre sont aussi simples que dans les formules de Monge. On les obtient en différentiant successivement les deux équations x = q', y= — p', par rapport à aT,puis par rapport à y, et en regardant q' et p' comme fonctions de x' et y'. On a ainsi quatre équations , dont trois comportent la quatrième , et d'où l'on tire les expressions - , »' = , r — , ri — «' rt — s' rt — s' et r' s' f r'f — s" r't'—s' r't' — s" NOTES. 381 Nos nouTellcs surfaces réciproques ont entre elles , comme celles de Monge, une rela- tion géométrique qu'on peut exprimer de diverses manières. Nous nous bornerons à présenter la suivante : Une turface étant donnée , on pourra lui imprimer un mouvement infiniment petit , tel que let plant normaux aux direction* que prendront te» différent pointt , pendant ce mouvement , teront précitément let plant tangent à la turface réciproque; Le mouvement à imprimer tera le rétultat det deux mouvement élémentairet timui- tanét ; dont le premier tera de révolution autour de l'axe det z regardé comme fixe , et le tecond de trantlation dant la direction de cet axe. Les surfaces réciproques de Monge, et les nouvelles dont nous venons de donner l'ex- pression analytique et la construction géométrique, sont, les unes et les autres , des cas particuliers de surfaces d'une expression analytique beaucoup plus générale, et dont la considération pourra servir, comme ces premières, à l'intégration des équations. Voici quelles sont les formules générales qui correspondent à ces surfaces : X , y, 2, étant les coordonnées d'un point de la première surface ,elp,q les deux coeflR- ciens différentiels dz dz dx dy les coordonnées du point réciproque de la seconde surface seront (U X = y = A'" (px-^qy—s) + A" - K'q - -Kp D'" {px + qy — z) ^ D" — D'î - -Dp' W"{px^qy-z) -t- B" — Wq- - Bp D"'{px-i-qy — z) -t- D" —U'q- -Dp' C" {px + qy—z) -f- C" — C'q - -Cp U"'{px-i.qy — M) ^ D" _ D'î — Dp A, B, C , D; A', B', C, D' ; A", B", C", D" et A'", B'", C", D'", étant des coefficiens arbi- traires. Et l'on a réciproquement : (ï) y = D (p'x'-^-q'y'—z')-t-C ~Bq' — kp' D'" (pV ^ c'y' — s' ) -.- C" — B"'g' — A"'p' ' D' (pV-ngY — V)-f-C' — BY — A'p' D'" (pV -H gy _a') ^ C" — B"'9'— A"'p' ' D" [p'x'+q'y' — z') -<- C" — V'q' — k"p' D'" (pV -+- q'y' — z') -f- C" — B'q' — A"'p' * Les expressions de p , q\ en x, y, z, et celles de p, q, en x',y', z', sont d'un calcul assez 382 NOTES. long. Pour les former, nous représenterons par le symbole (A' B" C") le polynôme A' ( B"C"' — B"'C" ) + A" ( B"'C' — B'C" ) -+- A"' ( B'C" — B"C' ) ; par (B' C" A'") ce que devient ce polynôme quand on y change A' en B', B" en C" et G"' en A'"; et ainsi des divers autres polynômes semblables, faits avec les seize coefEciens A , B , C , D ; A', B', C , D' ; A", B", G", D" et A'", B'", G", D", pris trois à trois. On aura , d'après cette notation abrégée, les expressions suivantes de p', q',p et q : (1) (2) , _ (B'C"iy")a; — (B"C'"D)y -+- {W"CW)z — (BC'l)") P ~ ~ (U'A"B"')a; — (D"A"'B)y -f- (D"'AB')z — (DA'B") ' , _ (C/D"k"')x — (C"D'"A)y -t- (G'"DA')s — (CD' A") ' ~ (D'A"B"')j; — (D"A"'B)y -4- (D"'AB')a — (DA'B") ' (B'C"D'") a/ — (G'F'A"') y' +(D'A"B'") z'—(k'W'C"') P == -~ (B"'CD')ar'— (C"'DA')y'-4-(D"'AB')z'— (A"'BC') ' (BC'^D'")a:' —(CD" A"') y' +(DA"B'")z'— (AB"C"') ^ "^ (B"'CD' ) x' — ( C"'DA') y' +(D'"AB' ) z' — (A"'BC' )' Pour mieux apercevoir les rapports qu'ont entre elles les expressions de p', q', p, q , représentons par les lettres a, b, c, d; a', h' ,c' , etc., les différens polynômes qui sont les coefficiens de ces expressions; de manière que l'on ait : o = (B'C"D"'), 6 = - (C'D"A"'), c = (D'A"B"'),d= (A'B"C"') , a' = — (B"C"'D), h' = (C"D'"A), c' = — (D"A'"B), d' = — (A"B"'C), a" = (B'"CD' ), b" = — (C"'DA'), c" = (D"'AB' ),', y',enfonctiondear,y, z,p,j', elles valeurs de a;, y, ^, p, gi en fonction de a;', y', z',p',q'; NOTES. 388 c'est-à-dire, qu'outre la même forme, ces valeurs ont les mêmes coefficiens. Cela a lieu pareillement dans les formules particulières que nous avons données après celles de Monge. Mais une telle réciprocité parfaite n'a pas lieu dans les formules générales où les expressions de x', y', z\ p', (/', sont bien de même forme que celles de x, y, z, p, q, mais ont des coeiliciens diil'érens. Pour donner à ces formules générales la réciprocité parfaite dont il s'agit, il suffit de disposer de six des seize coefficiens arbitraires Â,B, G,D;Â', B', etc. ; et de faire D = A'" , D' = B'" , D" = C" , B = A' , C = A", C = B" ; il en résultera d = a'" , d' = b'" , d" = c'" , b = a', c=a", c' = b"i et les expressions de x', y', z',p', q, restant les mêmes, celles de x, y, z, p, q devien- dront (3). K = A'" (pV -t- q'y- - -«'' -f- A" -AY -Ap' D"'(pV+5y- -»'; + D" -DY -Dp" B'" (p's' + q'y' - -s' )-»-B" -BY -Bp D"'(pV -t-îY- -■*'; )-t- D" -DY ^Mp' C"'(pV-.-9Y- -x! )-*-C" -CY -Cp D"'(pV+9y- — z! ^ )-+-D" -DY -Dp' p = — «y 1 = ex' -H c'y' -4- c"s! — c" bx' -4- b'y' -»■ fc"a' — b" ex' -f- c'y' -t- c"a' — c" Il faudra se rappeler que, des seize coefficiens A, B, G, D; A', etc., que contiennent les formules (1) et (3), dix seulement sont arbitraires, à cause des six égalités que nous avons supposées, D^ A'", D'=B'", etc. On disposera des dix coefficiens arbitraires, de ma- nière à simplifier les formules, et à les approprier aux différentes questions auxquelles on voudra les appliquer. Pour obtenir les formules de Monge, il faut faire tous les coefficiens nuls , excepté les trois A, B', C", auxquels on donnera les valeurs A = — 1 , B' = — 1, C" = 1. 384 NOTES. NOTE XXXI. (CINQUIÈME ÉPOQUE, § 48.) Propriétés nouvelles des surfaces du second degré , analogues à celles des foyers dans les coniques. § 1. Propriétés des coniques excentriques d'une surface du second degré. (1) « La tangente et la normale , menées par chaque point d'une conique, vont rencon- » trer chacun des deux axes principaux de la courbe en deux points, qui sont conjugués » harmoniques par rapport à deux points fixes; » Ces deux points fixes sont réels sur le premier axe de la courbe; ce sont les deux » foyers ; et ils sont imaginaires sur le second axe » *. Voici le théorème analogue dans les surfaces du second degré : La normale et le plan tangent , menés en un point quelconque d'une surface du second degré, rencontrent chacun des trois plans diamétraux principaux de la sur- face 2, en un point et suivant une droite ; Ce point est toujours le pôle de la droite , par rapporta une certaine conique , située dans le plan principal ; Sur le plan du grand et du moyen axe de la surface , cette conique est une ellipse ; Sur le plan du grand et du petit axe , elle est une hyperbole ; Et sur le plan du moyen et du petit axe , elle est toujours imaginaire. (2) On peut encore considérer comme correspondant à la propriété des coniques que nous avons énoncée , le théorème suivant : Si, en chaque point d'une surface du second degré, on mène la normale à la surface , et les tangentes aux deux lignes de courbure qui se croisent en ce point, ces trois droites iront rencontrer chacun des trois plans diamétraux principaux de la surface en trois points qui seront tels que la polaire de chacun d'eux, prise par rapport à une certaine conique située dans ce plan , passera par les deux autres. (3) Les trois coniques que l'on obtient , soit par ce théorème, soit par le précédent , sont ' Cea deux points donnent lieu à deux foyers imaginaires sur le second axe. De sorte qu'on peut dire que la conique a quatre foyers , dont deux toujours réels , situés sur le grand axe , et deux toujours imaginaires, situés sur le petit axe. 2 Nous supposons que la surface a un centre ; mais les théorèmes que nous allons énoncer s'appliqueront d'eux-mêmes aux paraboloïdes. NOTES. 385 parfaitement déterminées ; et l'on reconnaît aisément qu'il existe, entre chacune d'elles et la surface, ces rapports trés-siraplos , et qui suffisent pour la construction de ces courbes , savoir, que: Chacune de» trois conique* en qiiettion e»t gitue'e dan* le plan d'une section prin- cipale de ta surface ; elle a pour foyer* ceux de cette *ectivn , et pour sommet* les foyers des deux autres sections principale» de la surface. (4) 11 résulte de là, que le grand axe de l'ellipse et l'axe transverse de l'hyperbole sont situés sur le grand axe de la surface ; Et que les sommets de l'ellipse sont les foyers de l'hyperbole , et réciproquement ; d'où il suit que les deux autres axes principaux des deux courbes, lesquels sont à angle droit, ont leurs carrés égaux entre eux , au signe prés. Quant à la troisième conique, imaginaire, elle aura deux foyers réels, situés aux extré- mités du petit axe de l'ellipse; et ses deux axes principaux imaginaires , leurs carrés étant égaux, aux signes prés, aux carrés du grand axe de l'ellipse et de l'axe transverse de l'hy- perbole. (5) En supposant qu'une conique ait quatre foyers , situés deux à deux sur les deux axes principaux, dont deux réels et deux imaginaires, on pourra énoncer ainsi les rela- tions entre les trois courbes , savoir, que : Une des trois courbes étant donnée , chacune des deux autres sera dans un plan mené perpendiculairement à celui de la première par l'un de se» axes principaux, et aura pour sommets les foyers , et pour foyer* le* *ommet* de cette première , *ituée *ur son axe principal. Gela suffît pour construire les deux autres coniques , quand l'une des trois est donnée. (6) Pour fixer les idées , soit *' y' *' , a' i' c' l'équation de la surface ; les trois coniques en question auront pour équations *' -,- y' _ 1 a'—c' "^ b' — c' ' X' iT ^ ::^—r, = '> o'— 6' c' — b' i'—a' c' — a' = 1. Si a > & > 0, la première courbe, située dans le plan des xy , sera une ellipse ; la se- conde, située dans le plan des xz, une hyperbole ; et la troisième, située dans le plan des yz, imaginaire. ToM. XI. 49 386 NOTES. (7) Nous appellerons ces trois courbes les coniques excentrique» , ou les coniques fo- cales de la surface >. Ainsi, de même qu'une section conique a deux couples de foyers, ou deux excentri- cités, dont l'une imaginaire; de même une surface du second degré a trois coniques fo- cales, ou excentriques , dont deux réelles et la troisième imaginaire". (8) On voit par la construction que nous avons donnée des coniques excentriques d'une surface du second degré , que : Quand deux surfaces du second degré ont leurs sections principales décrites des mêmes foyers , elles ont les mêmes coniques excentriques ; et réciproquement, quand deux surfaces ont une même conique excentrique , elles ont leurs sections princi- pales décrites des mêmes foyers. (9) Maintenant que la définition , et la construction des coniques excentriques d'une surface du second degré sont bien entendues, nous allons exposer plusieurs propriétés de ces courbes, et montrer leur analogie avec certaines propriétés des foyers dans les coniques. « Quand un angle est circonscrit à une conique, les deux droites, dont l'une divise en » deux également cet angle, et l'autre son supplément, vont rencontrer chacun des deux )) axes principaux de la courbe en deux points, qui sont conjugués harmoniques par » rapport aux deux foyers situés sur cet axe. » Pareillement : Quand un cône est circonscrit à une surface du second degré, ses trois axes principaux vont rencontrer chacun des plans diamétraux principaux de la surface en trois points , qui sont tels que la polaire de chacun d'eux , prise par rapport à la conique excentrique située dans le plan diamétral , passe par les deux autres. (10) « Si d'un point, pris dans le plan d'une conique, on mène deux droites aux deux » foyers, elles seront également inclinées sur la droite qui divise en deux également » l'angle des deux tangentes menées de ce point à la courbe. » Dans les surfaces , on a ce théorème analogue : ' J'emploierai la première de ces deux expressions, qaoique j'eusse préféré la seconde à cause de sa plus parfaite analogie avec les foyers des coniques et les lignes focales des cônes. Mais le nom de focale ayant été donné par M. Quetelet à une courbe du troisième degré, qui est le lieades foyers des sections planes faites d'une certaine manière dans un cône du second degré, je ne puis me servir ici de ce mot pour désigner d'autres lignes courbes. Je proposerais d'appeler ces focales du troisième degré/bcoïde* ou plutôt/bcoigueSj conformément aux idées de 91. Ch. Dupin sur la nomenclature de la Géométrie. (Développemens de Géométrie ; Notes à la suite du quatrième mémoire). Alors on consacrerait l'expression àe conicjucs focales, on a\m^\emen\, àe focales , aux deux courbes qui jouent dans les surfaces du second degré le même rôle que les foyers dans les coniques. Et, lorsqu'on considérerait ces deux courbes l'une par rapport à l'autre , et sans parler de la surface à laquelle elles appartiennent , on pourrait les appeler focales conjuguées. 2 II paraîtra sans doute extraordinaire de nous entendre dire que de deux excentricités des coniques, Vune est imaginaire ,• et que des trois coniques excentriques des surfaces du second degré une seule aussi est imaginaire , quand on sait fort bien que les imaginaires ne peuvent jamais marcher que par couples. Aussi nous NOTES. ssr Un point de Vetpaee étant prit pour le tommet commun de» deux conet , dont l'un circonscrit à une surface du second degré , et l'autre ayant pour base l'une des coni- ques excentriques de la surface , ces deux cônes auront mêmes axes principaux et mêmes lignes focales. (11) «Si d'un point, pris sur une conique, on mène deux droites à ses foyers, ces » deux droites sont également inclinées sur la normale à la conique en ce point, ou bien » sur sa tangente : » C'est là l'une des plus anciennes propriétés des coniques ; Toici son analogue dans les surfaces ; Si un point , pris sur une surface du second degré , est regardé comme le sommet d'un cône qui ait pour base une de ses coniques excentriques , la normale à la surface et les tangentes à ses lignes de courbure en ce point seront les axes princi- paux du cône '. Et si la surface est un hyperboloïde à une nappe , les deux lignes focales du cône seront les deux génératrices de cet hyperboloïde , qui passent par le sommet du cône. (12) De la première partie de ce théorème on conclut que: Si, par une tangente en un point quelconque d'une surface du second degré, on mène deux plans tangens à l'une des coniques excentrique* de la surface , ils seront également inclinés sur le plan tangent à la surface, mené par sa tangente. (13) Le théorème (10) est susceptible de plusieurs conséquences. En effet, quand deux cônes du second degré ont les mêmes axes principaux, et les mêmes lignes focales , ils se coupent à angles droits^; on conclut donc du théorème (10) que : Pour un œil placé en un point quelconque de l'espace , le contour apparent d'une surface du second degré , et l'une des coniques excentriques de la surface paraissent se couper à angles droits. (14) Les deux cônes qui ont un même sommet, et pour bases les deux coniques excen- triques d'une surface, ont les mêmes axes principaux et les mêmes lignes focales; donc ces deux cônes se coupent à angles droits ; ce qu'on peut exprimer ainsi : dcTons dire qu'il exiate dan* le* conique» on troisième couple de foyers , qui sont toujours inuginaire* et toi^ours situés à l'inflni. Ces foyers n'ont point encore été aperçus , parce que l'on n'a point cherché à remonter , dans l'étude des coniques , à la véritable origine de leurs foyers proprement dits , et à l'analogie qui peut avoir lieu entre leurs propriétés spéciales et les propriétés générales relatives à tout autre point pris dans le plan de la courbe. Pareillement il existe , dans chaque surface du second degré , une quatrième conique excentrique , tonjour* imaginaire , et située ï l'infini. Il nous est inutile ici de considérer le troisième couple de foyer* des coniques, ni la quatrième conique excentrique des surfaces. Nou* essaierons, dans un antre moment, de présenter les propriétés générale* des coniques, et celles detsurfaces du second degré , d'où dérivent les propriétés particulières aux foyers et aux conique» excentriques. ' Oe sorte que , un cane ayant pour base une conique , si cette courbe est prise pour conique excentrique d'une surface du second degré menée par le sommet du cône, cette *urface «era normale i l'un de* troi* axe* principaux du cône. ' Mémoire sur les propriétés générales des cènes du second degré, pag. 88. 388 NOTES. De quelque point de l'espace qu'on considère les deux coniques excentriques d'une surface du second degré , elles paraissent se couper à angles droits i. (15) Si, au lieu d'un cône, on circonscrit à la surface un cylindre, le théorème (10) deviendra celui-ci : Un cylindre étant circonscrit à une surface du second degré , si , par l'une des coniques excentriques de la surface , on fait passer un second cylindre ayant ses arêtes parallèles à celles du premier, les bases de ces deux cylindres , sur un plan perpendiculaire à leurs arêtes , seront deux coniques décrites des mêmes foyers. (16) Et on conclut de là que : Les projections orthogonales des deux coniques excentriques d'une surface du second degré , sur un ■même plan quelconque , sont deux coniques qui ont les mêmes foyers. (17) Le même théorème (10) donnerait lieu à beaucoup d'autres conséquences, rela- tives aux systèmes des surfaces qui ont les mêmes coniques excentriques ; mais nous devons nous borner , dans ce moment, aux propriétés de ces courbes mômes. (18) Les foyers d'une conique jouissent d'une propriété générale, qui pourrait servir à les définir, car elle est caractéristique; c'est que: « Si par un point, pris arbitrairement dans le plan d'une conique, on mène deux » droites rectangulaires, de manière que le pôle de l'une, pris par rapport à la conique, » soit sur l'autre, ces deux droites rencontreront chacun des deux axes principaux de la » courbe en deux points, qui seront conjugués harmoniques par rapport à deux points » fixes ; ces deux points fixes sont réels sur le grand axe de la courbe ; ce sont ses deux » foyers; ils sont imaginaires sur le petit axe. » On a pareillement, dans les surfaces, cette propriété caractéristique des coniques ex centriques : Etant donnée une surface du seco7id degré , si par un point , pris arbitrairement dans l'espace , on mène trois droites rectangulaires , telles que la polaire de chacune d'elles , prise par rapport à la surface , soit située dans le plan des deux autres , ces trois droites rencontreront chacun des trois plans principaux de la surface en trois points , qui seront tels que la polaire de chacun d'eux , prise par rapport à la conique excentrique située dans ce plan , passera par les deux autres. (19) Pour saisir l'analogie entre certaines propriétés des coniques excentriques, qui vont suivre, et certaines propriétés des foyers, il faut regarder la double excentricité d'une conique , c'est-à-dire la droite qui joint ses deux foyers, comme étant elle-même une conique dont le petit axe est nul ; de cette manière on regardera toute droite menée par un foyer comme une tangente à cette conique. (20) On sait que « toute transversale, menée par un foyer d'une conique, a son pôle, pris ' J'avais déjà eu occasion d'énoncer ce théorème dans mon Mémoire sur les propriétés générales des surfaces de révolution , inséré dans le tom. \ àe» lYoïiv. Mém. de l'Académie de Bruxelles (ann, 1829) ; et j'avais dit alors que les deux coniques en question jouissaient de beaucoup d'autres propriétés, qui n'avaient point encore été découverte». Cette Note en effet en contient plusieurs qui me paraissent nouvelles. NOTES. 389 » par rapport à cette courbe, sar la perpendiculaire à cette transTcrsale, menée par le » fover. » Pareillement : Tout plan trantvertal , tangent à une conique excentrique d'une turface du tecond degré , a son pôle ,pri* par rapport à la turface , sur la perpendiculaire à ce plan , menée par non point de contact avec la conique. (21) Le théorème précédent, relatif à une conique, est un cas particulier de celui-ci , qui n'a peut-être pns encore été remarqué , mais qu'il est facile de démontrer : « Étant menée une transversale quelconque dans le plan d'une conique, si on prend son » pôle par rapport à la courbe, et le point conjugué harmonique de celui où cette droite » rencontre le grand axe , par rapport aux deux foyers, la droite qui joindra ces deux points » sera perpendiculaire à la transversale. » Pareillement : Étant donnée une turface du tecond degré , ti l'on mène un plan transversal quel- conque , qu'on prenne ton pôle par rapport à la turface, et le pôle de ta trace tur U plan d'une conique excentrique , par rapport à cette courbe, la droite qui joindra eet deux pôles sera perpendiculaire au plan transversal. , (22) « Le produit des distances des foyers d'une conique à une tangente quelconque » est constant. » Menons par les foyers deux droites parallèles à la tangente , et regardons- les comme les tangentes à la double excentricité de la conique, suivant ce que nous avons dit plus haut (19); le produit des distances de ces deux droites à la tangente sera constant. Pareillement : Pour chaque plan tangent à une surface du second degré , le produit de ses distan- ce* aux deux pointt d'une det coniquet excentriquet de la turface . pour letquelt le* tangentes à cette courbe sont parallèles à ce plan , est constant. (23) « Le produit des distances d'un foyer d'une conique à deux tangentes parallèles » entre elles, est constant. » Pareillement: Le produit des distances de chaque point d'une conique excentrique d'une surface du second degré , à deux plant tangent à la turface , parallèles entre eux et paral- lèlet à la tangente à la conique au point pris tur elle , ce produit, tUt-je , ett con- stant, quelque toit ce point. (24) «Si, par un foyer d'une conique, on mène une droite parallèle à une tangente » quelconque à la courbe, la dillércnce des carrés des distances de ces deux droites au » centre de la conique, sera constante.» Cela se conclut immédiatement de ce que le produit des distances des deux foyers à une tangente est constant. Pareillement: Etant mené un plan tangent quelconque à une turface du tecond degré, et un plan tangent à l'une de tet cotiiquet excentriquet , parallèle au premier , la différence de* carré* de* dittancet de ce* deux plant au centre de la turface tera conttante. 390 NOTES. Ce théorème et le précédent pourraient servir à la construction des coniques excen- triques d'une surface. (25) « Le sommet d'un angle droit , dont un côté glisse sur une conique, et l'autre côté » sur un foyer, engendre la circonférence de cercle décrite sur le grand axe de la courbe , » comme diamètre. » Pareillement : Le sommet d'un angle trièdre trirectangle , dont une de» face» glisse »ur une surface du second degré . et dont le» deux autres faces glissent respectivement sur les deux coniques excentriques , parcourt la sphère décrite sur le grand axe de la surface comme diamètre, (26) Deux faces de l'angle trièdre trirectangle pourraient glisser sur la surface , et la troisième sur l'une des deux coniques excentriques; ou bien deux faces pourraient rouler sur une conique excentrique et la troisième sur la surface , ou sur la seconde conique excentrique : dans chacun de ces trois cas, le sommet de l'angle trièdre engendrerait encore une sphère, qui serait différente dans chacun de ces cas. (27) On aura reconnu , par la construction et par les équations que nous avons don- nées des deux coniques excentriques d'une surface du second degré, les deux courbes déjà trouvées, depuis long-temps, par plusieurs géomètres; par M. Ch. Dupin, Comme lieu géométrique des centres d'une infinité de sphères tangentes à trois sphères données ', et ensuite comme limites de deux séries de surfaces du second degré trajectoires orthogonales entre elles ^ ; par M. Binet comme lieux de l'espace pour lesquels un corps solide a deux de ses momens d'inertie principaux égaux entre eux 3 ; par M. Ampère comme le lieu des points d'un corps qui admettent une infinité d'axes permanents de rotation ■* ; par M. Quetelet 5, puis MM. Demonferrand ^ et Morlon ', comme le lieu des sommets des cônes de révolution qu'on peut faire passer par une conique ; par M. Steiner *, et ensuite M. Bo- billier *, comme le lieu des sommets des cônes de révolution qu'on peut circonscrire à une surface du second degré. Mais , dans les diverses recherches de ces géomètres , rien n'avait pu faire soupçonner , je crois, l'analogie que nous avons montrée entre les propriétés des courbes en question , considérées par rapport à la surface à laquelle elles appartiennent , et les propriétés des foyers dans les coniques. Plusieurs de ces propriétés ont été énoncées d'une manière plus complète que celles des ' Correspondance sur Vécole Polytechnique , tom. l<'^ , p. 25 , et tom. II, p. 434. ^ Développemens de Géométrie , p. 280. B Journal de Vécole Polytechnique ,16^ cahier, p. 63. * Mémoire sur les axes permanens de rotation des corps , p. 65. ' IVovveaux Mémoires de l'Académie de Bruxelles , tom. II, p. 151 , année 1830 ; et Correspondance ma- thématique , tom. III , p. 274. ^ Bulletin de la société philomathique , ann. 1825. ' Transactions de la société philosophique de Cambridge , tom. III , première partie , p. 185. 8 Journal de M. Crelle, tom. \", p 38 ; ai Bulletin de M. De Férussac , n° de janvier 1827 , p 2. ' Correspondance mathématique de M. Quetelet, tom. IV, p. 157 . NOTES. 391 foyers ; cela provient de la forme plus complète aussi des surfaces du second degré , qui ont trois dimensions, et qui ne deviennent des coniques qu'en perdant une de ces dimen- sions. U résulte aussi de là, que plusieurs corollaires, ou cas particuliers des propriétés générales des coniques excentriques , peuvent bien n'avoir pas leurs analogues dans les foyers; parce que ce qu'elles auront perdu de leur caractère de généralité, en devenant cas particuliers, était précisément ce qui établissait leur analogie ou leur lien avec les pro- priétés des foyers. (28) Toutes les propriétés des coniques ont aussi leurs analogues dans les cAnes du se- cond degré, où les deux lignes focales jouent le même rûle que les foyers. Mais il est, dans ces cônes , une propriété caractéristique qui nous a servi a définir ces droites >, et qui oe peut avoir lieu dans les coniques, quoiqu'elle conduise immédiatement à beaucoup de propriétés des foyers dans ces courbes ; c'est que : tout plan perpendiculaire à une ligne focale , coupe le cône suivant une conique qui a l'un de te* foyer» au point où ce plan coupe la ligne focale. Il était naturel de penser que ce théorème devait avoir son analogue dans les surfaces du second degré. Et en effet on trouve que : Chaque conique excentrique d'une surface du second degré Jouit de la propriété que le plan normal, en un quelconque de tes points, coupe la surface suivant une conique qui a l'un de ses foyers en ice point. Ce théorème établit parfaitement l'analogie qui a lieu entre les coniques excentriques d'une surface du second degré , et les lignes focales d'un cône du second degré. (29) Il est une propriété principale des coniques, qui se retrouve dans les cônes, et dont nous n'avons point encore fait mention relativement aux surfaces du second degré. <( C'est que : la somme ou la différence des rayons vecteurs menés d'un point d'une co- <( nique aux deux foyers est constante.» Nous avons fait, pendant long-tems, des tenta- tives pour trouver quelque chose d'analogue dans' les surfaces: mais sans obtenir aucun succès. Aussi désirons-nous vivement que cette matière offre asseï d'intérêt pour provo- quer d'autres recherches. Nous avons bien quelques raisons de penser que le théorème que nous cherchions ne sera pas exprimable explicitement comme celui des coniques, parce qu'il dépendra d'une équation du troisième degré; mais nous n'en pensons pas moins qu'il y a là quelque chose à trouver , et que cet objet doit exciter l'intérêt et la curiosité des géomètres. § 2. Propriétés de deux ou de trois surfaces qui ont les mêmes coniques excen- triques. (30) Nous venons de considérer les rapports qui existent entre une surface du second degré et ses coniques excentriques. Nous allons maintenant parler des propriétés com- munes à deux ou à trois surfaces qui ont les mêmes coniques excentriques. ■ tVimoirt sur Us propriilis générales des canes du second dejri , p. 13. 392 NOTES. « Par un point on peut faire passer deux coniques qui aient pour foyers communs » deux points donnés; l'une est une ellipse, l'autre une hyperbole ; elles se coupent à » angles droits, et les tangentes à ces courbes, en chaque point d'intersection, divisent » en deux également l'angle et son supplément , formés par les deux droites menées de » ce point aux foyers des courbes. » Pareillement: Par un point quelconque de l'espace, on peut faire passer trois surfaces du second degré qui aient pour conique excentrique commune une conique donnée ; l'une est un ellipsoïde; la seconde un hyperboloïde à une nappe et la troisième un hyperboloïde à deux nappes ; Ces trois surfaces se coupent deux à deux à angle droit ; les trois tangentes à leurs courbes d'intersection ati point donné , sont les axes principaux du cône quia son sommet en ce point, et pour base la conique excentrique ; Et les lignes focales du cône sont les deux génératrices de l' hyperboloïde à une nappe qui se croisent en son sommet. Ajoutons que les courbes d'intersection de ces surfaces prises deux à deux , sont des lignes de courbure de ces surfaces. Ce qui a déjà été démontré par MM. Dupin et Binet. (31) Ce théorème est susceptible de nombreuses conséquences. Car il en résulte que la plupart des propriétés relatives à une surface et à sa conique excentrique , donnent lieu à des propriétés relatives à deux ou à plusieurs surfaces qui ont la même conique excen- trique. (32) Ainsi du théorème (11) ou conclut que : Quand deux surfaces du second degré ont une même conique excentrique , si on prend un point quelconque de l'espace pour sommet commun de deux cônes circonscrits respectivement aux deux surfaces , ces deux cônes auront les mêmes axes principaux , et les mêmes lignes focales ; Ces trois axes principaux seront les normales aux trois surfaces qu'on pourrait faire passer par le sommet commun des cônes , et qui auraient mêmes coniques excen- triques que les deux surf aces proposées . Et les deux lignes focales seront les génératrices de l'hyperboloïde à une nappe qui sera l'une de ces trois surfaces. (33) On conclut de ce théorème que : Quand deux surfaces du second degré ont une même conique excentrique, de quelque peint de l'espace qu'on les considère, leurs contours apparens semblent se coupera angles droits (1). (34j Et, par conséquent : deux telles surfaces sont propres a former les deux nappes , lieu des centres de courbure d'une certaine surface unique. (35 ) Quand le sommet des cônes est à l'infini , le théorème (32) donne lieu au suivant : ' J'ai déjà démontré ce théorème pour deux surfaces de révolution dan» mon Mémoire sur les propriétés générales de ce» surface» , et pour deus surfaces quelconques , ainsi que je l'énonce ici , dan» un mémoire sur la Construction des normales à diverses courbes mécaniques , présenté à la société pliiloraatique en avril 1830. NOTES. 393 Quand deux turfacet du second degré ont une même conique excentrique , si l'on conçoit deux cylindres circonscrits à ces surfaces respectivement, et ayant leurs arête* parallèles entre elles, les sectiotu de ces cylindres , par un plan perpendiculaire à leurs arêtes , seront deux coniques qui auront les mêmes foyers. On voit que la propriété des dcui surfaces , d'avoir leurs sections principales décrites des mômes foyers , est une conséquence particulière de ce théorème. (30) « Si, sur la tangente el la normale en un point d'une conique, prises pour » axes principaux, on construit deux autres coniques, passant par le centre de la coni- » que proposée, et normales respectivement à ses deux axes principaux : « 1° Ces deux coniques auront les même foyers; « 2° Leurs axes dirigés suivant la normale à la conique proposée seront égaux respec- tivement aux axes de celle-ci , auxquels ces deux coniques sont normales respectivement. » Pareillement : Si la normale en un point d'une surface du second degré , et les deux tangentes aux lignes de courbure en ce point sont prises , en direction, pour les trois axes principaux de trois autres surfaces du second degré, passant toutes trois par le centre de la propo- sée, et normales, en ce point, respectivement aux trois axes principaux de cette surface: 1° Ces trois surfaces auront les mêmes coniques excentriques ; 2° Les diamètres de ces surfaces , dirigés suivant la normale à la surface proposée , seront égaux respectivement aux trois diamètres de la proposée , auxquels ces sur- faces seront normales. (37) Le caractère par lequel on exprime, en analyse, que deux surfaces ont leurs sec- lions principales décrites des mêmes foyers, consiste en ce que la différence des carrés de leurs diamètres principaux est constante. Ainsi o', A', c' étant les carrés des trois demi-diamètres principaux de la première sur- face, et a", h", c", les carrés des trois demi-diamètres principaux de la seconde, on a a' — a" = A' — b' = c ■ — c'\ Cette relation entre les deux surfaces, qui suffit pour exprimer qu'elles ont les mêmes coniques excentriques, peut être généralisée de deux manières, et dériver de propriétés relatives à tous les points des deux surfaces, et non pas seulement à leurs sommets. Nous exprimerons l'une de ces propriétés générales par le théorème suivant : Quand deux surfaces du second degré ont une même conique excentrique , si l'on mène deux plans , tangens à ces deux surfaces respectivement, et parallèles entre eux , la différence des carrés de leurs distances au centre des deux surfaces sera con- stante, quelle que soit la direction commune de ces deux plans tangens. (38) Il résulte de là que : Quand un ellipsoïde et un hyperboloïde ont mêmes coniques excentriques , les plans tangens à l'ellipsoïde , menés parallèlement aux plans tangens au cône asymptote de l' hyperboloïde , sont toxu à la même distance du centre commun des deux surfaces. (30) La seconde propriété générale en question concerne deux surfaces de même es- ToM. XI. 50 394 NOTES. pèce, c'est-à-dire toutes deux ellipsoïdes, ou hyperboloïdes, à une nappe, ou à deux nappes. Pour l'énoncer nous appellerons points correspondant des surfaces deux points dont les coordonnées, suivant chaque axe principal, sont proportionelles aux demi-diamè- tres des surfaces, dirigés suivant cet axe. D'après cela : Quand deux surfaces du second degré , de même espèce, ont une même conique excentrique , deux deini-dtatnètres de ces surfaces , aboutissant à deux points cor- respondans , ont la différence de leurs carrés constante. (40) On déduit de ce théorème une autre propriété remarquable des surfaces qui ont les mômes coniques excentriques , et qui, considérée particulièrement dans les ellip- soïdes, est le fondement du beau théorème de M. Ivory sur l'attraction de ces corps. C'est que : Quand deux surfaces du second degré, de tnême espèce, ont les mêmes coniques excentriques, la distance entre deux points, pris arbitrairement sur ces deux surfaces respectivement , est égale à la distance des deux points correspondant à ces deux premiei's. (41) Nous allons terminer ce paragraphe par deux théorèmes qui ont aussi, comme celui-là, leur application dans la théorie de l'attraction des ellipsoïdes. Maclaurin a démontré que : « Quand deux ellipses sont décrites des mêmes foyers, si, » par un point pris sur un de leurs axes principaux , on mène deux transversales qui fas- » sent avec l'autre axe des angles dont les cosinus soient entre eux comme les diamètres )> des deux ellipses dirigés suivant ce second axe, les segmens interceptés sur ces deux » transversales, par les deux ellipses respectivement, seront entre eux comme leurs diamè- » très dirigés suivant le premier axe. » (art. 648 du Traité des fluxions de Maclaurin.) On peut donner au théorème analogue, dans les surfaces du second degré, un énoncé plus étendu et plus complet. Le voici : Quand deux surfaces du second degré ont les mêmes coniques excentriques , si par un point fixe , pris sur l'un de leurs axes principaux , on mène arbitrairement une transversale à travers la première surface; puis une seconde transversale dé- terminée par la condition que les cosinus des angles que les deux transversales feront avec chacun des deux autres axes principaux soiejit entre eux comme les diamètres des surfaces dirigés suivant chacun de ces axes ; il arrivera que : 1° Les segmens interceptés sur les deux transversales par les deux surfaces res- pectivement, seront entre eux comme les deux diatnètres des surfaces dirigés sui- vant le premier axe principal ; 2" Les sinus des atigles que les deux transversales feront avec ce premier axe principal, seront entre eux comme les diamètres des deux surfaces , qui passeront par les points où les deux transversales perceront le plan diamétral perpendiculaire à ce premier axe ; 3° Ces deux diamètres seront, dans les deux surfaces, correspondans entre eux. (42) Ce théorème peut servir à démontrer très-facilement le théorème de Maclaurin, concernant l'attraction des ellipsoïdes sur les points situés sur leurs axes principaux NOTES. 395 (art. 053 du Traité de» fluxion» ) ; et celte démonstration est directe, et ne nécessité pas, comme celle de Macluiirin, la connaissance préalable de l'attraction d'un ellipsoïde de révolution sur les points situés sur son axe de révolution. (43) On démontre aisément que : « Quand deux coniques ont les mêmes foyers , » si d'un point, pris sur l'un de leurs axes principarux , on leur mène deux tangentes, » les cosinus des angles qu'elles feront avec l'autre axe principal seront entre eux » comme les deux diamètres des coniques dirigés suivant cet axe. » ParcillcmeDt : Quand deux surfaces du second degré ont les mêmes coniques excentriques , si par une droite située dans l'un de leurs trois ^10»» principaux on leur mène deux plans tangen» , les cosinus des angles qu'ils feront aoec l'axe principal perpendiculaire à ce plan seront entre eux comme les diamètres des surfaces dirigés suioant cet axe. (44) Ce théorème aurait pu résulter de l'analyse employée par M. Legendre dans son mémoire sur l'attraction des ellipsoïdes >, si ce célèbre géomètre eût cherché la signifi- cation géométrique des formules analytiques par lesquelles il lui a fallu passer pour ré- soudre directement cette question difficile. Mais nous croyons pouvoir dire que cette traduction , en langage ordinaire, des formules de M. Legendre, aurait conduit à beau- coup d'autres résultats intéressans. Ainsi l'on y aurait vu que les surfaces coniques dont il se sert pour représenter la marche de ses intégrales , ont toutes pour axes principaux communs ceux de la surface conique circonscrite .à l'ellipsoïde attirant ; et que l'un de ces axes est précisément cette droite qui jouit d'une propriété de maximum, et qui joue un rôle important dans cette matière. Cette propriété de maximum est exprimée par M. Legendre analytiquemcnt par une équation du troisième degré; en Géométrie elle signifie que : Si autour du point attiré on fait tourner une transversale et qu'on prenne la différence des valeurs inverses des distances de ce point aux deux points où la transversale rencontre la surface de l'ellipsoïde , cette différence sera un maximum quand la transversale aura pour direction celle d'un des trois axes principaux du cône circonscrit à l'ellipsoïde , et qui a pour sommet le point attiré. Et on trouve que quand cette différence, au lieu d'être un maximum , ào\\. être con- stante, alors la transversale décrit un cône du second degré. Ce sont là les cônes dont M. Legendre s'est servi. Leur propriété commune est qu'ils passent tous par les courbes à double courbure du quatrième degré, qui sont les intersections d'un certain hyperbo- loïde à deux nappes par une série de sphères concentriques. (45) Nous ferons remarquer que tous les théorèmes que nous avons présentés jus- qu'ici sont de la plus grande généralité , à l'exception des deux derniers ; c'est-à-dire que dans ces théorèmes, les points, les plans, les droites, que l'on avait à considérer par rap- port aux surfaces du second degré, avaient des positions tout-à-fait arbitraires dans l'espace. Dans les deux derniers, au contraire, le point par lequel on mène les transver- sales est pris nécessairement sur l'un des axes principaux des surfaces, et la droite par ' Voir le» Ximoirtt de VAcadimi» det Sciences , ann. 1788. 396 NOTES. laquelle on mène des plans tangens à ces surfaces est prise dans l'un de leurs plans princi- paux. Il serait intéressant de connaître les théorèmes généraux relatifs à des positions tout-à-fait arbitraires de ce point et de cette droite dans l'espace; desquels théorèmes généraux se déduiraient, comme cas particuliers , ceux que nous avons énoncés (41 et 43 ). Nous signalons ce sujet de recherches, dans l'intérêt de la Géométrie, et aussi par ce que nous croyons que ce serait un moyen de trouver directement, par la Géométrie et sans se servir du théorème de M. Ivory, l'attraction des ellipsoïdes sur des points exté- rieurs quelconques, comme nous avons dit que le théorème (41) donne WKtraclion sur des points situés sur les axes principaux. § 3. Système de surfaces du second degré aigtmiies*''m^mesJçaniques excentrique» (46) « On peut décrire dans un plan une Infinité de conques qui aient pour )> foyers communs deux points donnés; elles formant deux série/d'ellipses et d'hyperbo- » les; chaque ellipse coupe en quatre points, et à ancle droit ,jffiacune des hyperboles. » Pareillement : On peut former une infinité de surfaces du second ^gré , qui nient toutes pour conique excentrique commune une conique donnée ; toutes ces surfaces se partagent en trois groupes; dans le premier ce sont des ellipsoïdes ; dans le second des hyper- boloïdes à une nappe ; et dans le troisième des hyperboloïdes à deux nappes ; Deux surfaces quelconques , appartenant à deux groupes différens, se coupent par- tout à angle droit ; et leur ligne d'intersection est une ligne de courbure de chacune des deux surfaces ; Trois surfaces quelconques, appartenant respectivement aux trois groupes , se coupent en huit points ; En chacun de ces points les normales aux surfaces sont les axes principaux du cône qui a ce point pour sommet et qui passe par l'une des coniques excentriques communes aux trois surfaces ; Et les deux génératrices de l'hyperholoïde à une nappe , en ce point , sont les deux lignes focales de ce cône. (47) « Plusieurs coniques, décrites des mêmes foyers , jouissent de toutes les pro- )> priélés d'un système de coniques inscrites dans un même quadrilatère : les côtés du » quadrilatère sont imaginaires, mais deux de ses sommets opposés sont réels, ce sont » les deux foyers ; et la droite qui joint ces deux points peut être considérée comme une )) des coniques inscrites dans le quadrilatère. « Cette propriété capitale des coniques décrites des mêmes foyers , dont M. Poncelet a déjà fait usage , peut être la source d'un grand nombre de propriétés de ces courbes ; et de ces propriétés peuvent se déduire , comme cas particuliers, celles des foyers par rap- port à chaque conique. Pareillement : NOTES. 397 Plutieura turface» qiiioht le» mêmes conique» excentrique* peuvent être con»idérêe» comme étant toutes inscrites dans une même surface déoeluppable; Cette surface est imaginaire; et cependant deux de ses lignes de striction sont réelle»; ce sont les deux coniques excentriques communes aux surface» ; le» deux autre» ligne* de ttriction tout imaginaires , l'une est la troisième conique excentrique de» turface» ( tituée dans le plan du petit et du moyen axe principal) , et l'autre e»t à l'infini. Ajoutons que : Le» deux ligne» de striction réelles peu cent être regardée» comme de» surfaces dont un axe est nul , et qui appartiennent à la série des surfaces proposée». (48) Ainsi : De» »urfaces du second degré qui ont le» même» conique* excentrique» , et ce» deux courbe», considérée» comme des surfaces infiniment aplaties .Jouissent de toute» le* propriétés d'un système , de surfaces du second degré inscrites dans une même surface déoeloppahle. Ce théorème me parait être le plus fécond et le plus important de toute la théorie des surfaces décrites des mêmes foyers. On en déduira aisément un grand nombre de pro- priétés de ces surfaces. (49) Un tel système de surfaces s'est présenté déjà dans diverses questions, et notam- ment, ce qui est asseï remarquable, dans des questions de physique et de mécanique ; et l'on a été conduit ainsi à découvrir quelques-unes de leurs propriétés. Mais ces propriétés, peu nombreuses, sont restées isolées, sans qu'on ait cherché à les rattacher à quelque théorie relative aux surfaces du second degré eu général, ni à quelque proposition fonda- mentale , comme celle que nous avons énoncée en dernier lieu. (50) Les théorèmes suivans sont des conséquences de cette proposition. Quand plusieurs surfaces du second degré ont mêmes canique» excentrique» , li l'on mène un plan transver»al quelconque qui le» rencontre »uivant de» conique» , et que ce» courbes soient prises pour le* lignes de contact d'autant de cônes circonscrits à ces surfaces respecticement , tous ces cônes auront leurs sommets sur une mente droite , qui sera perpendiculaire au plan transversal. Ou, en d'autre termes, et plus généralement : Les pôles du plan transversal , pris par rapport aux surfaces, seront situés sur une même droite perpendiculaire à ce plan. (51) Comme les deux coniques excentriques des surfaces peuvent être regardées elles- mêmes comme deux surfaces infiniment aplaties, on en conclut cette propriété particu- lière de ces deux courbes : Étant données les deux coniques excentriques d'une surface du second degré . si l'on mène un plan transversal quelconque , et qu'on prenne , par rapport à chaque conique, le pôle de la trace de ce plan sur celui de cette courbe , la droite qui Joindra ces deux pôles sera perpendiculaire au plan transversal. Et si ce plan transversal est tangent en un point de la surface du second degré , cette droite sera la normale à la surface en ce point. k 398 NOTES. (52) Quand plusieurs surfaces du second degré ont les mêmes coniques excentriques , si par une droite quelconque de l'espace on leur mène des plans tanqens ; les normales à ces surfaces, menées par leurs points de contact avec ces plans , formeront un para- boloïde hyperbolique, (53) Si la droite par laquelle sont menés les plans tangens est normale à l'une des surfaces, le paraboloïde deviendra une conique; et les points de contact des plans tangens aux surfaces seront sur une courbe plane du quatrième degré. Et si la droite est située d'une manière quelconque dans un des plans principaux des surfaces , les points de contact des plans tangens menés par cette droite seront sur une circonférence de cercle. (54) Quand plusieurs surfaces ont mêmes coniques excentriques , si un point quel- conque de l'espace est regardé comme le somtnet commun d'autant de cônes circonscrits à ces surfaces , les plans des courbes de contact envelopperont une surface dévelop- pable, qui Jouira de la propriété que chacun de ses plans tangens la coupera suivant une conique; les trois plans principaux des surfaces , et les trois principaux com- muns aux cônes qui leur seront circonscrits (32) , seront des plans tangens de cette développable ; Cette surface est du quatrième degré , et son arête de rebroussement est la courbe à double courbure du troisième degré. (55) Quand plusieurs surfaces ont mêmes coniques excentriques , si d'un point quelconque de l'espace on abaisse des normales sur ces surfaces, 1° Ces normales formeront un cône du second degré; 2° Les plans tangens aux surfaces , menés par les pieds des normales , formeront une développable du quatrième degré. (56) Quand plusieurs surfaces ont les mêmes coniques excentriques , si d'unpoint, pris dans l'un de leurs plans principaux , on abaisse des normales sur ces surfaces: 1° Toutes ces normales seront situées dans deux plans , dont l'un sera le plan principal , et l'autre sera perperdiculaire à ce plan principal ; 2° Les pieds des normales comprises dans le plan principal seront sur une courbe du troisième degré , qui est celle que M. Quetelet a appelée focale à nœud ' ; 3° Les pieds des normales cotnprises dans le second plan sont sur une circonfé- rence de cercle , qui a pour diamètre la perpendiculaire abaissée du point fixe sur la polaire de ce point , prise par rapport à la conique excentrique située dans le plan principal oit ce point est placé ; 4" Enfin les plans tangens aux surfaces, menés par les pieds des premières norma- les , enveloppent un cylindre parabolique ; et leurs plans tangens inenés par les pieds des autres normales passent tous par une même droite , située dans le plan principal. Si l'on conçoit menée par le point fixe une conique concentrique , semblable et scm- ' M. Quetelet a trouvé cette courbe comme lieu géométrique des sections faites dans un cône droit, par des plans menés par une même droite tangente au cône et perpendiculaire à l'une de ses arêtes. NOTES. 399 blablement placée à la conique excentrique , le plan dans lequel sont les second&t nor- males sera normal à cette conique. (67) Quand plusieurs surfaces ont les mêmes coniques excentriques , si on leur mène des normales parallèles entre elles, leurs pieds seront sur une hyperbole équi- latère , dont une asymptote sera parallèle aux normales. (58) Quand plusieurs surfaces ont les mêmes coniques excentriques , si on mène un plan transversal quelconque , et qu'on cherche toutes les normales aux surfaces , contenues dans ce plan : 1° Ces normales envelopperont une conique ; 2° Les plans tangens aux surfaces , menés par les pieds des normales passeront tous par une même droite ; 3° Les pieds des normales sur les surfaces formeront une courbe du troisième degré , qui sera la focale à nœud. (59) On sait que le sommet d'un angle droit, dont les deux côtés roulent sur deux coniques décrites des mêmes foyers, engendre une circonférence de cercle; Pareillement : Quand trois plans rectangulaires sont tangens respectivement à trois surfaces du second degré , qui ont les mêmes coniques excentriques , le point d'intersection de ces trois plans se trouve sur vue sphère. Cette propriété de trois surfaces dont les sections principales sont décrites des mêmes foyers, a déjà été démontré analytiquement par M. Bobillier {Ann. de Mathématiques , tora. XIX , pag. 329. ) (60) Les théorèmes que nous venons d'énoncer dans cette Note sont les plus impor- tans de ceux auxquels nous sommes parvenu dans la théorie des coniques excentriques des surfaces du deuxième degré. Il nous resterait maintenant à montrer que cette théorie nouvelle sera un élément utile dans la Géométrie rationnelle ; mais cette Note étant déjà trop longue, nous nous bornerons ici à citer, parmi les questions où l'on fera un usage utile de cette théorie, les trois suivantes, dans chacune desquelles on parvient sans peine à une foule de propositions diverses : 1° La distribution, dans l'espace, des axes principaux et des lignes focales de tous les cônes qu'on peut faire passer par une même conique, ou bien circonscrire à une même surface du deuxième degré; 2° La distribution dans l'espace des axes principaux de tous les ellipsoïdes qui ont leurs centres en diiïérens points de l'espace, et dont trois diamètres conjugués aboutis- sent à trois points fixes ; 3° Enfin, la distribution, dans l'espace, de tous les axes parmanens de rotation d'un corps solide; et les valeurs des raomens d'inertie du corps par rapport à ces axes. k 400 NOTES. NOTE XXXII. ( GINQUIKSIE ÉPOQUE , § 49). Théorèmes analogues, dans les surfaces du second degré, aux théorèmes de Pascal et de 31. Brianchon dans les coniques. (1) Soit un hexagone inscrit dans une conique. Ses trois côtés de rang impair, pro- longés jusqu'à leur rencontre, forment un triangle; et les côtés de rang pair sont trois cordes de la conique , comprises respectivement entre les trois angles de ce triangle. Le théorème de Pascal exprime que ces trois cordes rencontrent respectivement les trois côtés opposés du trianfjle en trois points qui sont en ligne droite. On peut donc, pour exprimer le théorème de Pascal , substituer à la considération de l'hexagone celle d'un triangle tracé dans le plan d'une conique. C'est en envisageant sous ce point de vue ce théorème, que nous allons le transporter aux surfaces du second degré , où son analogue sera une propriété d'un tétraèdre dont les arêtes rencontrent une surface du second degré. (2) Voici quel est ce théorème : Quand les six arêtes d'un tétraèdre . placé d'une manière quelconque dans l'es- pace , rencontrent une surface du second degré en douze points; ces douze points sont trois à trois sur quatre plans , dont chacun contiettt trois points appartenant aux trois arêtes issues d'un même sommet du tétraèdre ; Ces quatre plans rencontrent respectivement les faces opposées à ces soniTnets , suivant quatre droites qui sont les génératrices d'un même mode de génération d'un hyperholoïde à une nappe. On peut former plusieurs systèmes de quatre plans qui contiennent, trois par trois, les douze points de rencontre des arêtes du tétraèdre et de la surface ; le théorème aura lieu pour chacun de ces systèmes. Par exemple , si les quatre sommets du tétraèdre sont dans l'intérieur de la surface , on pourra prendre les quatre plans en question de manière que chacun d'eux contienne les trois points où les arêtes issues de chaque sommet respec- tivement , et non les prolongemens de ces arêtes , rencontrent la surface. Cette propriété du tétraèdre, considéré par rapport à une surface du second degré, cor- respond , comme on voit , à la propriété du triangle tracé dans le plan d'un conique, qui est exprimée par le théorème de Pascal ; et c'est sous ce point de vue que nous présentons le théorème ci-dessus comme l'analogue , dans l'espace, de celui de Pascal. Si les six arêtes du tétraèdre sont tangentes à la surface du second degré, il n'y aura NOTES. 401 qu'un seul système de quatre plans qui contiendront, trois par trois, les six points de contact; et le théorème deviendra celui-ci : (.3) Quand le* six arêtet d'un tétraèdre tant tangente* à une turfaee du *econd degré', le plan de* trois points de contact des arête* issue* d'un même sommet ren- contre la face du tétraèdre opposée à ce *ommet , *uioant une droite ; et le* quatre droite* ain*i déterminée* appartiennent à un même hyperholoïde à une nappe '. '"> (4) Si le tétraèdre proposé est inscrit dans la surface du second degré, on pourra con- sidérer chacun de ses sommets comme situé au dehors de la surface, mais infiniment voisin d'elle; les trois points par où les arêtes issues de ce sommet pénétreront dans la surface détermineront son plan tangent, et l'on conclut de là le théorème suivant: Quand un tétraèdre est inscrit dans une surface du second degré , les plans tan- gens mené* par ses sommets rencontrent respectivement les plan* des faces oppo*ée*, suivant quatre droites qui *ont des génératrices d'un même hyperholoïde ^. (6) Le théorème de M. Brianchon consiste en ce que dans tout hexagone circonscrit à une conique, les trois diagonales qui joignent un à un les sommets opposés, concourent en un tnême point. Considérons les sommets de rang impair, ils déterminent un triangle de position tout-à-fait arbitraire par rapporta la conique. Chacun des sommets de rang pair de l'hexagone est le point d'intersection de deux tangentes issues de deux sommets du triangle; qu'on joigne ce point, par une droite, au troisième sommet du triangle, on aura ainsi trois droites qui concourront en un même point. Cette proposition , qui n'est , sous un autre énoncé, que le théorème de M. Brianchon, est une propriété d'un triangle quelconque tracé dans le plan d'une conique. (fi) On a pareillement dans l'espace le théorème suivant: Si par les arêtes d'un tétraèdre , placé d'une manière quelconque dans l'espace, on mène douze plans tangens à une surface du second degré ; ces douze plans se ren- contrent trois à troi* en quatre points , dont chacun est l'inter*ection de troi* plan* mené* par le* arêtes comprises dans une face du tétraèdre ; Le* droite* qui joignent ce* quatre points respectivement aux sommets opposés à ces faces, sont quatre génératrices d'un même mode de génération d'un hyperholoïde à une nappe. Tel est le théorème qui peut être considéré comme l'analogue, dans l'espace , de celui de M. Brianchon. > On pourra former de différentes manières, le système de quatre points qui sont les intersections , trois par trois , des douze plans tangens à la surface du second degré. (7) Si les arêtes du tétraèdre sont tangentes à la surface , il n'y aura qu'un seul système de quatre points et le théorème s'exprimera ainsi : j» Quand le* six arête* d'un tétraèdre sont tangentes à une surface du second degré, ' J'ai déjà déduit ce théorème d'un autre plu> général , et difTcrent du théorème ci-deuut, dani le tom. XIX dea Annales de mathàmatùjues , p. 79. 3 M. Steiner et Bobillier (Voir A /ma/»* <{« matimathiques , tom. XVIII, p. 336) etnout, entuite ( tiùl. tom XIX , p. 67), avoni déjà démontré ce théorème de divcrtet manière* Tox. XI. 51 402 ISOTES. le* plans tangeng à la surface , menés par les arêtes comprises dans une même face du tétraèdre , se rencontrent en un point ; que ce point soit joint par une droite au sommet opposé à cette face ; on aura ainsi quatre droites qui seront des génératrices d'un même mode de génération d^un hyperboloïde à une nappe. (8) Si le tétraèdre proposé est circonscrit à la surface, le théorème général donnera, comme corollaire, le suivant : Quand un tétraèdre est circonscrit à une surface du second degré , les droites qui joignent ses sommets respectivement aux points de contact des cotés opposés , sont quatre génératrices d'un même mode de génération d'un hyperboloïde à une nappe. (9) L'ensemble d'un tétraèdre et d'une surface du second degré, situés d'une manière quelconque dans l'espace , présente diverses autres propriétés différentes de celles expri- mées par les deux théorèmes généraux (2) et (6) , et qui , comme elles , correspondent à des propositions de Géométrie plane. Nous rappellerons ici le double théorème suivant , que nous avons démontré dans les Annales de M. Gergonne (tom. XIX, p. 76), et qui nous paraît plus fécond en conséquences que ces deux théorèmes (2) et (6) : tlEtant donné dans l'espace un tétraèdre etune surface du second degré ; \° Les droites qui joindront les sommets du tétraèdre respectivement aux pôles des faces opposées , pris par rapport à la surface , seront quatre génératrices d'un même mode de génération d'un hyperboloïde ; 2° Les droites d'intersection des faces du tétraèdre respectivement par les plans polaires des sommets opposés, sont quatre génératrices d'un même mode de génération d'un second hyperboloïde. (10) Voici encore une propriété générale du tétraèdre, qui peut faire partie de la même théorie que les précédentes : Etant donnés dans l'espace un tétraèdre et une surface du second degré; \° Le plan polaire de chaque sommet du tétraèdre , pris par rapport à la surface , rencontre les trois arêtes adjacentes à ce sommet en trois points ; on a de la sorte , sur les arêtes du tétraèdre , douze points ; ces douze points sont situés sur une même surface du second degré ; 2° Si par le pôle de chaque face du tétraèdre , pris par rapport à la surf ace , on mène trois plans , passant respectivement par les trois arêtes comprises dans cette face ; on aura ainsi douze plans ; ces douze plans seront tangens à une mêtne surface du second degré. , (11) Des quatre théorèmes généraux (2), (6), (9) et (10) que contient cette Note, les deux derniers sont doubles, chacun d'eux ayant dans son énoncé deux parties différentes qui pourraient faire deux théorèmes distincts. Les deux premiers auraient pu recevoir un énoncé aussi complet, si nous ne nous étions pas renfermé strictement dans l'analogie qu'ils présentent avec les théorèmes de Pascal et de M. Brianchon. Pour compléter ces deux théorèmes , nous dirons que, dans chacun d'eux , on forme un second tétraèdre dont les faces et les sommets correspondent respectivement aux faces et aux sommets du tétraèdre proposé ; et que : NOTES. 403 1* Leê face» correspondante* det deux tétraidret te coupent deux à deux , suivant ifuttlre droite» qui sont les génératrices d'un même mode de génération d'un hyper- boloïde, Et 2" Le» sommets corresponduns de» deux tétraèdre» »ont , deux à deux , sur quatre droites qui sont le» génératrice» d'un même mode de génération d'un »econd hyperboloïde. NOTE XXXIII. ( CINQUIÈME ÉPOQUE , § 50). Relations entre sept points d'une courbe à double courbure du troisième degré. — Diverses questions où ces courbes se présentent. (1) Par six points donnés dans l'espace on peut faire passer une courbe à double courbure du troisième degré. En effet, regardons le premier des six points comme le sommet d'un cône du second degré devant passer par les cinq autres points; ce cône sera déterminé, puisqu'on en con- naîtra cinq arêtes. Pareillement on pourra mener un cône du second degré qui ait son sommet au second des six points, et qui passe par les cinq autres. Les deux cônes auront pour arête commune la droite qui joindra les deux premiers points ; ils se couperont donc suivant une courbe à double courbure du troisième degré, qui, avec cette droite , fera l'intersection complète, du quatrième degré, des deux cônes. Or cette courbe passera par les six points proposés , par lesquels passent les deux cônes ; la proposition énoncée se trouve donc démontrée. (2) Remarquons que tout autre cône que les deux premiers, qui aura son sommet en un point de la courbe à double courbure du troisième degré, et qui passera par celte courbe, sera aussi du second degré. Car tout plan mené par son sommet ne coupera la courbe qu'en deux autres points, et par conséquent ne coupera le cône que suivant deux arêtes , ce qui prouve qu'il est du second degré. Ainsi nous pouvons dire que : Le lieu géométrique des sommets des cônes du second degré , qui passent to\i» par 404 NOTES. »ix points donnés dans l'espace, est la courbe à double courbure du troisième degré déterminée par ces six points. (3) Considérons un seplième point, pris arbitrairement sur la courbe à double courbure du troisième degré qui passe par six points donnés ; soient a,b,c,d,e.f, ces six points donnés , et y , le seplième point. Ces sept points , pris dans un ordre quelconque , sont les sommets d'un eplagone gauche , dans lequel ou peut regarder chacun des côté.s comme opposé au sommet de l'un des angles respectivement. Ainsi , si l'ordre des sommets est le même que celui des lettres a, h, c, d, e, f, y, qui les représentent , le quatrième côté de sera opposé au premier sommet a, le cinquième côté ef au secoud sommet b, et ainsi des autres. Les relations qui doivent avoir lieu entre les sept points a, h, c, etc. , pour qu'ils appar- tiennent à une courbe à double courbure du troisième degré , sont exprimées par le théorème suivant : Quand un eptagone gauche a ses sommets a, b j c , etc. , situés sur une courbe à double courbure du troisième degré , le plan de l'un quelconque des angles a de l'eptagone , et les plans des deux angles adjacensh et^, rencontrent respectivement les côtés opposés, en trois points qui sont dans un plan passant par le sommet du pre- mier angle a. (4) Il suffit que cette propriété de l'eptagone inscrit à une courbe à double courbure du troisième degré soit vérifiée pour deux angles de l'eptagone , pour qu'elle ait lieu pour les autres angles. D'où l'on conclut que : Quand un eptagone gauche est tel que le plan d'un angle et les plans des deux angles adjacens rencontrent respectivement les trois côtés opposés, en trois points qui soient dans un plan passant par le sommet du premier angle j et que la même chose ait lieu pour un des six autres angles ; elle aura également lieu pour chacun des cinq autres angles ; et alors , par les sept sommets de l'eptagone , on pourra faire passer une courbe à double courbure du troisième degré. (5) D'après ce théorème, il sera très-facile de construire, par points, en employant la ligne droite seulement, la courbe à double courbure du troisième degré qui doit passer par six points donnés. Pour cela on cherchera le point où un plan quelconque mené par deux des six points donnés rencontrerait la courbe. Le même théorème conduira à la solution de beaucoup d'autres questions, par exem- ple, de déterminer les tangentes et les plans osculateurs à la courbe en chacun des six points donnés; etc. Mais au lieu d'entrer dans ces détails de construction des courbes à double courbure du troisième degré , nous allons indiquer quelques questions où ces courbes se présentent. Car, jusqu'à présent, elles ont à peine été aperçues dans les spéculations géométriques, et les exemples que nous allons donner du rôle qu'elles peuvent y jouer, prouveront peut- être qu'il sera utile de s'occuper de l'étude de ces courbes , et qu'on ne peut le faire trop tôt. (()) Quand les quatre faces d'un tétraèdre mobile sont assujéties à passer respecti- NOTES. 405 ventent par quatre droites située» d'une manière quelconque dans l'espace , et que trois sommets du tétraèdre doivent se trouver sur trois autres droites, placées aussi d'une manière quelconque dans l'espace , le quatrième sommet du tétraèdre parcourra une courbe à double courbure du troisième degré. Ce théorème correspond à la proposition de Géométrie plane sur la description des coniques, démontrée par Muclaurin et Bruikenridge, et d'où se déduit le théorème de l'hexagramroe de Pascal. (7) Ayant dans l'espace trois points et trois plans, placés d'une manière quelconque , si autour d'une droite fixe on fuit tourner un plan transversal qui coupera les trois plans donnés suivant trois droites , et que par ces trois droites on mène trois autres plans passant respectivement par les trois points donnés ; ces trois plans se couperont en un point qui aura pour lieu géométrique une ligne à double courbure du troisième degré. Ce théorème peut être regardé comme correspondant aussi à la même proposition de Géométrie plane que le précédent. (8) Si trois angles dièdres , dont les arêtes sont fixes dans l'espace , tournent autour de ces arêtes de manière que trois faces de ces trois angles aient leur point d'inter- section toujours situé sur une droite donnée, le point d'intersection des trois autres faces engendrera une courbe à double courbure du troisième degré, qui s'appuiera sur les arêtes des trois angles mobiles. Ce théorème a de l'analogie avec le théorème de Newton sur la description organique des coniques par le point d'intersection de deux côtés de deux angles mobiles. £t,dc même que le théorème de Newton n'est qu'un cas particulier de théorèmes plus généraux sur la description des coniques, ainsi que nous l'avons montré dans la Note XV, le théo- rème ci-dessus n'est lui-même aussi qu'un cas particulier de propositions plus générales sur la description des courbes à double courbure du troisième degré. (0) Telle est la proposition suivante : Si trois cordes d'une courbe à double courbure du troisième degré, sont prises pour le* arêtes de trois angles dièdres, de grandeur quelconque , et mobiles autour de ces arêtes ; et que le point d'intersection de trois faces de ces trois angles parcoure la courbe du troisième degré; le point d'intersection des trois autres faces des trois angles engendrera une seconde courbe à double courbure du troisième degré qui s'appuiera sur les trois cordes de la pretnière. (10) Le théorème suivant appartient encore à la même théorie que les précé- dens : Si trois points se meuvent avec des vitesses quelconques, mais uniformes , sur trois droites placées d'une manière quelconque dans l'espace , et que par chacun de ces points et une droite fixe , différente pour chacun de ces points , on mène un plan ; le point d'intersection des trois plans ainsi menés , engendrera une courbe à double courbure du troisième degré , qui s'appuiera sur Us trois droites par lesquelles passent les trois plans. 406 NOTES. (11) Les théorèmes suivans appartiennent à des théories différentes : Quand plusieurs surfaces du second degré passent par huit points donnés, leurs centres sont sur une courbe à double courbure du troisième degré ; Et, plus généralement, les pôles d'un plan quelconque , pris par rapport à ces suî'faces , sont sur une courbe à double courbure du troisième degré. (12) Quand un corps solide est en mouvement , si, à un instant quelconque , on demande quels sont les points du corps dont les directions tendent vers un même point donné, c'est-à-dire , dont les tangentes à leurs trajectoires passeîit par un point donné , ces points seront situés sur une courbe à double courbure du troisième degré , et les tangentes à leurs trajectoires , menées par ces points , formeront un cône du second degré. (13) Soit un S5'stéme de forces sollicitant un corps solide; que pour chaque point m de l'espace on conçoive le plan principal de ce système de forces, relatif à ce point, et la normale à ce plan, menée par ce point ; Celles de toutes ces normales qui passeront par un point donné de l'espace , forme- ront un cône du second degré ; et les points m par lesquels elles seront tnenées, seront sur une courbe à double courbure du troisième degré. (14) Les tangentes aux différens points d'une courbe à double courbure du troi- sième degré forment une surface développable du quatrième degré; Et réciproquement , toute surface développable du quatrième degré a pour arête de rebroussement une courbe à double courbure du troisième degré. On peut donc encore rattacher à la théorie de ces courbes les questions où se présentent des surfaces développables du quatrième degré. Telles sont les suivantes : (15) Six plans étant donnés , situés d'une manière quelconque dans l'espace, sil'on demande de mener une conique qui touche ces six plans ; une infinité de coniques satisferont a la question; tous leurs plans envelopperont une surface développable, du quatrième degré. (10) Quand les quatre soinmets d'un tétraèdre variable parcourent quatre droites fixes , placées d'une manière quelconque dans l'espace , et que trois faces du tétraèdre passent respectivement par trois autres droites données , la quatriètne face roule sur une surface développable du quatrième degré. (17) Etant donnés dans l'espace trois points et trois plans , si le somjnet d'un angle triède , dont les trois arêtes tournent autour des trois points , parcourt une droite , les points où ces trois arêtes perceront les trois plans donnés seront dans un plan qui roulera sur une développable du quatrième degré. (18) Si trois points se meuvetit respectivement sur trois droites , avec des vitesses quelconques , mais constantes , le plan déterminé par ces trois points roulera sur une surface développable du quatriètne degré. (19) Quand plusieurs surfaces du second degré sont tangentes à huit mêmes plans, si l'on regarde un point de l'espace comme le sommet d'autant de cônes cir- NOTES. ¥» eonseritt à ces turface», le* plant de* courbe* de contact envelopperont une de've- loppable du quatrième degré. (20)  une turface du second degré on peut circontcrire une infinité de cône* : *% l'on demande qu'un det axet principaux de chaque cône patte par un point donné , ton* cet axet principaux formeront un cône du tecond degré; et le* plan* mené* par le* *ommet* de* cône* , perpendiculairement à ce* axe* re*pectivement , enveloppe- ront une déoeloppable du quatrième degré. (21) Un corps solide étant donné, par chaque point de l'espace on peut mener trois droites qui seront trois axes permancns de rotation du corps relativement à ce point, et une infinité d'autres droites qui seront des axes permanens de rotation du corps relative- ment à d'autres points pris sur ces droites ; 1" Toute* ce* droite* forment un cône du *econd degré : 2° Le* plan* mené* perpendiculairement à ce* droite* , par le* point* pour let- quel* elle* sont de* axe* permanen* de rotation du corp* , enveloppent une déoelop- pable du quatrième degré. (22) Quand un corps solide est en mouyement , chaque plan , pris dans le corps , roule, pendant le mouvement, sur un surface développable qu'il touche successivement suivant les diiTérentes arêtes successives de cette surface; nous appellerons cette surface la déoeloppable trajectoire du plan ; A un instant quelconque du mouvement , tous les plans qu'on aura menés dans le corps toucheront leurs déoeloppable* trajectoire* , chacun suivant une droite; Si on demande quelle* *ont celle* de ce* droite* qui , à cet in*tant du mouvement , sont situées dans im plan donné; toute* ce* droite* envelopperont une parabole ; et tous les plans qui touchent leurs développables trajectoires suivant ces droites enve- lopperont une déoeloppable du quatrième degré. (23) Quand un corps est en mouvement , les tangentes aux trajectoires des points d'une droite, à un instant du mouvement , forment un paraboloïde hyperbolique ; et ce* tangente* *e meuoent pendant cet in*tant dan* de* plan* qui forment une déve- loppable du quatrième degré. Etc., etc., etc. 408 NOTES. NOTE XXXIV. (chapitre VI, § 10.) Sur la dualité dans les sciences mathématiques. — Exemples pris dans l'krl du Tourneur , et dans les Principes de la dynamique. Parmi les modes de transformation sur lesquels reposent les doctrines les plus fécondes de la Géométrie récente , on doit distinguer essentiellement celui qui donne lieu à recon- naître cette loi mathématique de l'étendue figurée, \a dualité. Outre l'avantage que présente cette méthode , comme moyen de découvertes , le principe sur lequel elle repose établit une relation constante qui lie deux à deux toutes les vérités géométriques; ce qui fait pour ainsi dire deux genres de Géométrie. Ces deux Géométrie» se distinguent par une circonstance qu'il est très-important de remarquer : dans la pre- mière le point est l'unité, et pour ainsi dire Vêlement, ou la monade , dont on se sert pour former les autres parties de l'étendue; c'est là la base de la philosophie de la Géomé- trie ancienne et de la Géométrie analytique. Dans la seconde Géométrie on regarde la droite, ou ]e plan, suivant qu'on opère sur un plan ou dans l'espace , comme l'être primitif, ou l'unité, qui doit servir à former toutes les autres parties de l'étendue. Cette division de toutes les propriétés de l'étendue en deux classes distinctes , reposant sur deux idées premières essentiellement différentes, est un fait qui nous paraît, comme à MM. Gergonnc et Poncelct qui l'ont montré dans tout son jour •, d'une haute importance dans la Géométrie. Mais nous étendons cette importance à plusieurs autres parties des sciences mathéma- tiques, où il nous semble que, prévenu par cette belle loi de l'étendue figurée , la dualité, et guidé par ce dualisme de l'être primitif qu'on peut prendre pour élément et point de départ dans la Géométrie, on sera conduit à chercher quelque chose de semblable. Nous trouvons un exemple d'une telle dualité, dans l'essai que nous avons présenté d'une nouvelle doctrine de Géométrie analytique analogue à celle de Descartes, et où le plan joue le même rôle que le point dans celle-ci^. L'application des mêmes idées de dualité peut s'étendre sur la mécanique. En effet l'élé- ' Annales de Mathématiques , tom. XVI , pag. 209 et tom. XVII , pag, 265. ^ Noua avons exposé en peu de mots les principes de ce nouveau système de coordonnées dans la Corres- pondance mathématique de M. Quetelet , tom. VI , pag. 81. NOTES. 409 ment primitif des corps auquel on applique d'abord les premiers principes de cette science, est comme dans la Géométrie ancienne, le point mathématique. IVc sommes-nous pas autorisés à penser, maintenant, qu'en prenant le plan pour l'élément de l'étendue, et non plus le point, on sera conduit à d'autres doctrines, faisant pour ainsi dire une nou- velle science. Et s'il existe un principe unique pour passer de cette science à l'ancienne, comme le théorème de Géométrie qui établit la corrélation des propriétés de l'étendue figurée, ce principe sera la base d'une dualité semblable dans la science du mouTcment des corps. § 2. Les deux exemples de dualité que nous venons de citer sont fondés sur le dualisme que présentent, dans la composition des corps, le point et le plan. Mais on trouvera, dans les différentes parties des sciences mathématiques, d'autres lois de dualité, fondées sur d'autres principes; et l'on sera conduit, je crois, à regarder, comme nous l'avons déjà dit dans noire Note sur la définition de la Géométrie (Note V) , qu'un dualisme universel est la grande loi de la nature , et régne dans toutes les parties des connaissances de l'esprit humain. En nous renfermant ici dans le domaine de la Géométrie , nous allons présenter deux exemples, trcs-différens, de dualité, qui viendront à l'appui des idées que nous venons d'émettre. § 3. Le premier nous est fourni dans les arts de construction par le mécanisme du tour. Il existe, pour chaque objet dont s'occupe le tourneur, une double manière de le construire ; la première en fixant l'ouvrage, et en faisant mouvoir l'outil; la seconde, et c'est celle employée par le tourneur, en fixant l'outil, et en faisant mouvoir l'ouvrage. Voilà donc, dans les arts , une dualité de description bien prononcée et constante. On sait que chacune de ces constructions repose, dans chaque circonstance, sur des principes géométriques; il existera donc aussi, dans les deux théories relatives à ces deux modes de construction, une dualité constante. C'était, ce nous semble, une question intéressante, que de chercher les lois mathéma- tiques qui pouvaient lier entre elles ces deux théories, de manière que les procédés indi- qués par l'une servissent à faire connaître, en vertu de ces lois seulement, les procédés correspondans dans l'autre. Cette question, dans laquelle nous avions craint d'abord de rencontrer des difficultés, nous a conduit à une loi de dualité extrêmement simple, qui peut offrir, en particulier, une théorie du tour à tourner, et le moyen de décrire avec cet instrument toutes les courbes qu'on a coutume de décrire par un stylet mobile. Voici sur quel principe reposera ce mode de description. Quand une figure plane ett en mouvement dans ton plan , l'un de te* pointt décrit une courbe ; Le mouvement de cette figure ett déterminé par des relationt constantet , qui doi- vent avoir lieu entre elle et det points ou des lignes fixes tracées dont son plan : Cet pointt et cet lignet forment , par leur entemble , une seconde figure, qui reste fixe pendant le mouvement de la première ; Tos. XI. 52 410 NOTES. Que l'on considère maintenant la première figure dans une de ses positions , et qu'on la suppose fixe; puis, qu'on fasse mouvoir la seconde figure , de manière quelle se trouve toujours dans les mêmes conditions de position par rapport à la première figure ; Un stylet fixe , placé au point décrivant de la première figure , tracera sur le plan mobile de la seconde figure une courbe , inobile avec ce plan , et qui sera identique- m,ent la même [sauf la position) que celle qu'aura tracée d'abord le point décrivant de la première figure , quand celle-ci était en mouvetnent. Tel est le principe unique, qui lie entre elles les deux manières de décrire les courbes planes, par un stylet mobile, et par un stylet fixe. Pour en faire une application, prenons la description de l'ellipse par un point placé au sommet d'un triangle de forme constante, dont les deux autres sommets se meuvent sur deux droites fixes. La figure mobile ici est le triangle; et les deux droites forment la figure fixe. Il faudra donc, d'après notre principe, faire mouvoir ces deux droites de manière qu'elles passent constamment par les deux sommets du triangle, qui glissaient sur ces droites. On conclut de là ce théorème : Quand les côtés d'un angle de forme invariable glissent sur deux points fixes , un stylet fixe, placé en un point quelconque , trace , sur le plan mobile de l'angle en mou- vement, une ellipse. On voit, en effet, que le mécanisme du tour à ovale a pour but de donner à une sur- face plane, le mouvement d'un angle dont deux côtés glisseraient sur deux points fixes. Voilà donc la raison géométrique de ce mécanisme , qui est de l'invention du grand peintre Léonard de Vinci. Notre principe explique avec une égale facilité le mécanisme du tour à épicycloïde. Car il donne le théorème suivant, sur lequel nous paraît reposer ce mécanisme : Qua7id une courbe roule dans un plan sur une autre courbe , l'un de ses points décrit une épicycloïde , qu'on peut engendrer d'une seconde manière , en faisant rouler la seconde courbe sur la première , et en plaçant un stylet fixe au point dé- crivant de la première courbe , lequel stylet tracera, sur le plan mobile une courbe qui sera précisément cette même épicycloïde. L'ellipse et l'épicycloïde sont , je crois , les seules courbes qu'on décrive sur le tour par un mécanisme particulier à chacune. On pourra , au moyen du nouveau mode de descrip- tion des courbes, tracer semblablement une infinité d'autres courbes. Pour la conchoïde de Nicomède , par exemple , on est conduit à cette description : Que l'on conçoive un angle déforme invariable, dont un des côtés, indéfini, glisse sur un point fixe , et dont l'extrémité de l'autre côté glisse sur une ligne droite me- née par ce point fixe ; un stylet fixe , placé en un point de cette ligne droite , tracera sur le plan de l'angle inobile une courbe qui sera une conchoïde de Nico?nède. Si la droite, sur laquelle glisse l'extrémité d'un des côtés de l'angle, ne passait pas par le point fixe par lequel passe l'autre côté de l'angle, alors, en plaçant convenablement le NOTES. 411 stylot fixe , on décrirait la cissoïde de Dioclés; une autre position du stylet fixe donnerait la focale à nœud de M. Quetelet ; et en général , dans ce mouvement , un stylet fixe tracera l'une des courbes tieuif des pied* det perpendiculaire» abai»*ée» d'un point sur le* tangentes d'une parabole. Nous avons appliqué notre principe à la construction de beaucoup d'autres courbes, même en les considérant comme l'enveloppe de leurs tangentes, et non plus comme la suite d'une infinité de points. Alors ce n'est plus un stylet qui imprime sa trace sur un plan mobile, mais un outil tranchant qui emporte la superficie du plan mobile, et laisse en relief la courbe qu'il s'agit de tracer. . '- ' Les mêmes théories s'appliquent aux figures à trois dimensions. Ainsi voilà une dualité de doctrines, concernant la double description mécanique des corps, qui est bien prononcée, et qui repose, comme celle des propriétés de l'étendue, sur un seul et unique théorème. $ 4. Nous puiserons notre second exemple de dualité dans le système du monde et dans les lois de la mécanique. Tous les corps célestes sont doués de deux mouvemens, l'un de translation, et l'autre de rotation autour d'un axe. Ce double mouvement se retrouve dans le mouvement élémentaire d'un corps solide, c'est-à-dire dans tout mouvement infiniment petit de ce corps. Celte coexistence de deux mouvemens est un fuit qui n'a rien d'étonnant, aujourd'hui que les théories mathématiques en donnent l'explication , et le feraient découvrir si la connaissance qu'on en a acquise n'avait été le résultat des observations des astronomes. Mais, si le mouvement de rotation est, aux yeux de l'observateur, une propriété des corps célestes, tout aussi prononcée que le mouvement de translation, et inhérente aussi à tout ce qui est soumis à l'action des forces de l'univers, les géomètres n'ont pas traité ces deux sortes de mouvement avec la même impartialité. Ils ont considéré que le mouve- ment de translationestle mouvement naturel et élémentaire des corps. C'est dans le sens de cette idée première, qui date de l'origine des sciences', que d'Alembert , dans le discours qui précède son Traité de Dynamique, dit : « Tout ce que nous voyons bien distinctement » dans le mouvement d'un corps, c'est qu'il parcourt un certain espace, et qu'il emploie » un certain temps à le parcourir. C'est donc de cette seule idée qu'on doit tirer tous les » principes de la mécanique, etc.» Cette manière de philosopher peut paraître avoir été 1 Quoique lea philosophes anciens aient connu le mouvement de rotation des astres sur eux-mêmes , et l'aient regardé comme inhérent ii la nature des corps, ils n'en ont pas moins considéré le mouvement de trans- lation comme le mouvement primitif et préexistant au mouvement de rotation. C'est ce que l'on voit dans Platon qui dit que Dieu avait imprimé aux astres le mouvement qui leur étoit le plus propre, c'est-à-dire le mouvement rcctiligne, qui les fait tendre vers le centre de l'univers, et qu'ensuite, par une conversion unique, il changea le mouvement de chaque corps en un mouvement de rotation autour de lui-même, et un mouve- ment circulaire dans l'espace. Motum enim dédit cœlo, eum qui corpori Ht aptissimus (t. e. directum),,. Itaque vna concersione atque eddcm , ips$ circum se torquetur et vertitur. (On a interprété différemment ce passage de Platon ; mais nous adoptons ici le sens qui lui a été donné par le grand philosophe Galiléi- , dans ses Discorsi « ditnoetrasioni matematiche , pag. 264.) ^ 412 NOTES. une suite de l'habitude où l'on a toujours été de considérer le point comme l'élément de l'étendue et non pas \eplan, qu'on a toujours considéré , au contraire , comme un assem- blage àe points. La substitution définitive que Varignon a faite , dans la mécanique ration- nelle , des forces aux mouvemens , substitution si heureuse sous d'autres rapports, nous paraît avoir contribué puissamment aussi à fonder les doctrines de la mécanique actuelle, qui reposent sur Tidée première du point considéré comme l'élément de l'étendue. Mais ne peut-on pas supposer, maintenant, que les deux mouvemens inséparables des corps de l'univers doivent donner lieu à des théories mathématiques dans lesquelles ces deux mouvemens jouiraient identiquement le même rôle. Et alors, le principe qui unirait ces deux théories, qui servirait à passer de l'une à l'autre , comme le théorème sur lequel nous avons basé la dualité géométrique de l'étendue en repos, et celui qui nous a servi à lier entre eux les deux modes de description mécanique des corps, ce principe, dis-je, pourrait jeter un grand jour sur les principes de la philosophie naturelle. Peut-on prévoir même où s'arrêteraient les conséquences d'un tel principe de dualité? Après avoir lié deux à deux tous les phénomènes delà nature, et les lois mathématiques qui les gouvernent, ce principe ne remonterait-il point aux causes mêmes de ces phéno- mènes ? Et peut-on dire alors qu'à la loi de la gravitation ne correspondrait point une autre loi qui jouerait le même rôle que celle de Newton, et servirait comme elle à l'ex- plication des phénomènes célestes? Et si, au contraire , cette loi de la gravitation était elle-même sa corrélative dans l'une et l'autre doctrine, ainsi que peut être une proposition de Géométrie dans la dualité de l'étendue figurée, ce serait alors une grande preuve qu'elle est véritablement la suprême et unique loi de l'univers. Hâtons-nous de justifier ces idées (contre lesquelles nous ne nous dissimulons point les objections tirées de la force centrifuge, qui établit dans la pratique, une différence radi- cale entre la translation et la rotation des corps; mais dont nous faisons abstraction parce que nous ne considérons que des mouvemens infiniment petits), hâtons-nous, dis-je, de justifier ces idées par quelques réflexions sur ce qui nous paraît avoir été déjà fait, et pouvoir être continué, dans le sens de cette corrélation que nous supposons devoir exister entre les théories relatives au mouvement de translation, et celles relatives au mouvement de rotation. § 5. Euler a fait voir, le premier, que quand un corps est retenu par un point fixe, tout mouvement infiniment petit du corps n'est autre qu'une mouvement de rotation autour d'une certaine droite passant par le point fixe. Lagrange a donné dans la première édition de sa Mécanique analytique (année 1788) les formules qui servent à décomposer ce mouvement de rotation en trois autres se faisant autour de trois axes rectangulaires menés par le point fixe. Ces formules offraient une ressemblance remarquable avec celles qui servent à décomposer le mouvement rectiligne d'un point, en trois autres mouvemens rectilignes. Plus tard Lagrange a complété cette analogie , en donnant dans la seconde édition de sa Mécanique analytique (année 1811), la construction géométrique des trois rotations qui peuvent remplacer une rotation unique. Cette construction se réduit à porter sur les axes NOTES. 413 de rotation des lignes proportionnelles aux mouTemens de rotation, et à composer et décomposer ces lignes comme si elles représentaient des mouveraens reclilignes. Sitôt qu'on a su que tout mouvement d'un corps retenu par un point fixe était un mou- vement de rotation autour d'une droite, on a reconnu que le mouvement d'un corps par- faitement libre pouvait se décomposer à chaque instant eu deux autres, l'un de translation commun à tous ses points, et l'autre de rotation autour d'un axe mené par l'un de ses points. Cela se réduit à dire que quand un corps parfaitement libre éprouve un mouve- ment infiniment petit , on peut mener par chacun de ses points une droite qui, pendant ce mouvement, restera parallèle à elle-même. Il est facile de reconnaître que toutes ces droites seront parallèles entre elles; et que l'une d'elles te mouvra dan» ta propre direction; ce qui fait que le mouvement du corps sera identiquement le même que celui d'une vis dans son écrou '. Voilà , je crois, ce que l'on a fait relativement à la théorie des mouvemens de rotation. Il paraîtra peut être étonnant qu'après avoir eu à considérer, dans le mouvement d'un corps solide libre , la rotation autour d'un axe mené par l'un quelconque de ses points , on n'ait pas été conduit à supposer qu'un corps fût soumis à plusieurs rotations autour de divers axes , comme dans le cas où il est retenu par un point fixe , et à composer entre elles ces diverses rotations. Celte question devient indispensable, pour faire les premiers pas dans les nouvelles théories que nous concevons. Elle nous a conduit à reconnaître que, quand un corpt ett toumit à plusieurs mouoemens de rotation autour de divers axes placés d'une ma- nière quelconque dans l'espace, on peut remplacer d'une infinité de manières ce sys- tème de rotations , par deux rotations uniques autour de deux axes dijférens. L'un de ces axes peut être situé à l'infini ; ce qui fait voir que le mouvement effectif du corps est une rotation autour de l'autre axe, pendant que celui-ci se meut dans sa propre direction. Résultat conforme à celui que nous avons obtenu ci-dessus par la considération des mouvemens reclilignes des points du corps. La composition d'un système de rotations autour de plusieurs axes quelconques , est très-simple , et conserve l'analogie que Lagrange a trouvée entre la composition des rota- tions autour de divers axes passant par un point fixe, et la composition des mouvemens reclilignes d'un point. On portera sur chaque axe de rotation une ligne proportionnelle au mouvement de rotation autour de cet axe, et l'on regardera toutes ces lignes comme un système de forces sollicitant un corps solide. On composera toutes ces forces en deux forces uniques, et l'on regardera leurs directions comme les axes de deux rotations qui pourront remplacer le système de rotations proposé. Les mouvemens de rotation autour de ces deux axes seront représentés en grandeur par les deux forces. Maintenant, nous supposerons que les rotations d'un corps autour de divers axes appar- l J'iTiia déjà énoncé ce théorème avec plu>iear> autres relatifs au déplacement d'un corps solide libre dans Tespace. Voir le Bulletin universel des sciences ; tom. XIV , pag. 321 , année 1830 ; et la Correspondance de n Qucteiet , tom. VU , pag. 358. ' 414 NOTES. tiennent à des plans menés par ces axes , de même que l'on regarde les mouvemens recti- lignes imprimés à un corps, ou les forces qui sollicitent un corps, comme appliqués à l'un des points du corps qui se trouvent sur les directions de ces mouvemens ou de ces forces. Chacun de ces plans, pendant le mouvement réel du corps, aura tourné sur lui-même , autour d'une droite située dans ce plan (laquelle droite ne sera point sortie, pendant le mouvement du corps, de la position primitive du plan, dans laquelle elle aura tourné autour d'un point fixe). Nous appellerons ce mouvement de rotation du plan sur lui-même, sa rotation effective , et nous dirons que la rotation partielle du corps autour de l'axe contenu dans ce plan est la rotation imprimée au plan. Ainsi la rotation effective d'un plan est le résultat de la combinaison de sa rotation imprimée , avec les autres rotations imprimées à d'autres plans du corps. Ces dénominations étant admises , on parvient au théorème suivant : Quand un corps solide est soumis à plusieurs rotations simultanées autour de divers axes j, si par ces axes on conçoit menés des plans dans le corps , ces plans éprouveront des tnouvemens effectifs sur eux-mêmes ; Si on fait le produit de la rotation effective de chaque plan , par sa rotation impri- mée, et par le cosinus de l'angle que font entre eux les axes de ces deux rotations , la somme de ces produits sera une quantité constante , quels que soient les plans menés par les axes de rotation; Cette quantité sera égale à la somme des carrés des rotations imprimées , plus le douille de la somme des produits de ces rotations multipliées deux à deux et par le cosinus de l'angle que comprennent leurs axes. Quand un corps soumis à plusieurs rotations est en équilibre, si on lui fait éprouver un dérangement infiniment petit , des plans menés par les axes de rotation éprouveront des rotations effectives sav eux-mêmes; nous les appellerons les roiOiûons virtuelles de ces plans. La condition d'équilibre du corps pourra s'exprimer par une équation qui nous ofl'rira un principe des rotations virtuelles analogue au principe des vitesses virtuelles. Voici ce principe : Quand différens plans d'un corps solide sont soumis à des rotations autour de différens axes contenais dans ces plans ; pour que ces rotations se fassent équilibre , il faut que si l'on donne au corps un mouvement infiniment petit quelconque, et qu'on fasse, pour chaque plan, le produit de sa rotation imprimée par sa rotation effective, et par le cosinus de l'angle que font entre eux les axes de ces deux rota- tions , il faut , dis-je , et il suffit que la somme de tous ces produits soit égale à zéro. Ce qui précède suffira pour bien faire comprendre comment nous avons entendu qu'il était possible de créer de nouvelles doctrines dans la mécanique rationnelle, en substituant dans les théories actuelles, pour ce qui concerne le mouvement général d'un corps, les mouvemens de rotation aux mouvemens rcctilignes , et pour ce qui concerne les corps eux-mêmes, considérés comme parties de l'étendue, les plans aux points. NOTES. ^ 4M I comme on peut le faire dans la Géométrie pure et dans la Géométrie analytique '. § G. San.s rechercher si ces nouvelles doctrines pourraient offrir quelques avantages dans leur application aux questions de l'astronomie pratique et de l'astronomie physique, ce que l'on pourrait peut être contester à priori, parce qu'il parait probable que les mé- thodes analytiques en usage , qui sont fondées sur la doctrine des coordonnées de Descartes, conviennent mieux aux théories actuelles qu'à ces nouvelles théories, nous pensons que du moins on ne pourra nier que leur introduction dans la mécanique rationnelle, ne soit pro- pre à jeter un nouveau jour sur l'ensemble de son vaste domaine, et sur plusieurs ques- tions particulières qui nous semblent n'avoir point encore été complétées. Nous citerons par exemple, la singulière analogie qui a lieu entre les forces et leurs momens, par rap- port à un point fixe; analogie qui s'explique très-clairement par l'ingénieuse théorie des couples dans la statique. Cette concordance se retrouve dans la dynamique, entre les mou- vemciis reclilignes et leurs momens par rapporta un point; on la reconnaît dans les deux principes de la conservation du mouvement du centre de gravité et des aires; M. Binet l'a démontrée aussi dans le principe des forces vives; elle s'étend certainement plus loin, et sa cause première, encore ignorée, est une question d'un très-haut intérêt. La théorie des couples , que nous venons de citer , nous parait une doctrine tout-à-fait conforme aux idées de corrélation que nous venons de développer. C'est la statique traitée, pour ainsi dire, d'une manière impartiale relativement aux doubles doctrines de dyna- mique que nous avons fait entrevoir. Partout en effet les couples jouent le môme rôle que les simples forces; celles-ci semblent destinées au mouvement de translation, et les couples au mouvement de rotation; les unes et les autres sont soumis aux mêmes lois mathéma- tiques de composition et de décomposition. Nous pouvons donc regarder cette élégante théorie des couples comme une conception éminemment heureuse , et qui était indispen- sable, comme introduction à une théorie complète de la double dynamique dont nous avons parlé. § 7. Depuis que j'avais été conduit à considérer les mouvemens de rotation à l'instar des mouvemens reclilignes, et à rattacher, comme je viens de le faire, celle question à la dualité de l'étendue figurée en repos, j'ai lu les excellentes réflexions que mon ancien camarade de l'école Polytechnique, M. Aug. Comte, a faites sur la théorie des couples de M. Poinsot, dans les quatre leçons de son Cours de philosophie positive , où il traite de la mécanique. J'ai été extrêmement flatté d'y voir mes idées sur ce sujet confirmées par la manière dont ce profond penseur conçoit aussi la question générale du mouvement des corps, et l'utilité de la théorie des couples dans les questions qui s'y rapportent. Je terminerai cette Note par les propres paroles de M. Aug. Comte , qui seront de nature à fixer l'attention des géomètres sur les nouvelles doctrines que l'on pourrait introduire dans la dynamique. I Cette théorie de« iiioureiii«fM de rotation fera partie néceMsirement de la nouvelle branche de la mécani- que, que M. Ampère vient de comprendre dans >a olaaaifîcation de> connaistance» humaines, sous le nom de Cinimatique (science du mouvement), qui doit précéder la statique , et faire avec elle l'objet complet de la mécanique élémentaire. (Voir Essai svr la Philosophit des Sciences, par H. Ampère, in-S», 1834) 416 NOTES. « Quelles que soient , en réalité , les qualités fondamentales delà conception de M. Poin- » sot par rapport à la statique, on doit néanmoins reconnaître, ce me semble, que c'est » surtout au perfectionnement de la dynamique qu'elle se trouve par sa nature essentiel- » lement destinée, et je crois pouvoir assurer à cet égard que cette conception n'a point )> encore exercé jusqu'ici son influence la plus capitale. Il faut la regarder en efi'et comme » directement propre à perfectionner, sous un rapport très-important, lesélémens mêmes » de la dynamique générale , en rendant la notion des mouvemens de rotation aussi » naturelle , aussi familière , et presqu aussi simple que celle des m,ouvemens de » translation , car le couple peut être envisagé comtne l'élétnent naturel du mou- » ventent de rotation , aussi bien que la force l'est du mouvement de translation. » Depuis que cette Note était écrite , a paru l'opuscule de M. Poinsot sur une Théorie nouvelle de la rotation des corps. Cet ouvrage réalise les idées que nous avions con- çues sur la possibilité et l'utilité d'introduire dans la dynamique la considération directe des mouvemens de rotation, à l'instar des mouvemens de translation. Par cette méthode, mise en œuvre avec une sagacité admirable, se trouve résolue par le simple raisonnement une question compliquée et difficile, qui, jusqu'ici, avait été du ressort de l'analyse la plus savante , et se trouvent démontrés de beaux théorèmes qui avaient échappé à cette analyse, et qui présentent une image claire de toutes les circonstances de la rotation d'un corps. NOTE XII. ( DEUXIÈME ÉPOQUE , § 2. ) Sur la Géométrie des Indiens, des Arabes, des Latins et des Occidentaux au moyen âge. Les limites dans lesquelles nous avons dû nous renfermer, ne nous permettaient de parler que des principales découvertes en Géométrie , particulièrement de celles qui avaient donné lieu à quelque théorie, ou à quelque méthode se rapportant à la Géomé- trie moderne. C'est pourquoi nous avons fixé le commencement de notre deuxième Epoque aux travaux de Viète. Mais, depuis plus d'un siècle déjà, la Géométrie était cul- tivée avec ardeur; et si elle ne s'est pas enrichie de méthodes d'une importance majeure, NOTES. 417 comme l'analyse, qui, pendant ce siècle, avait poussé ses découvertes jusqu'à la résolu- tion des équations des troisième et quatrième degrés; les travaux des écrivains qui l'ont cultivée ont néanmoins préparé les grands travaux des géomètres du XVII" siècle sur- tout CM introduisant dans celte science un élément nouveau, qui était le germe de ses progrès ultérieurs. Cet élément était le calcul algvhrùjue , qui n'avait pas été connu des Grecs, ou qu'ils avaient rejeté, par suite de leur distinction tranchée entre l'arithmé- tique et la Géométrie. C'est ainsi, par exemple, qu'ils démontraient sur des figures et par de pures considérations géométriques, les dix premières propositions du second livre d'Euclide, qui ne sont au fond que des règles de calcul. Cet élément a fait le caractère spécial de la Géométrie de Viète, de Fermât, de Descartes; nous devons donc, pour re- monter à la source d'une si grande et si utile innovation, et pour la suivre dans ses dé- \eloppemens, jeter un coup d'œil sur les premiers travaux des Géomètres à la renaissance des lettres. C'est à cet objet que nous avions destiné cette Note. Mais, depuis qu'elle était écrite, a paru le premier volume de Y Histoire de» science» niathématiqueê en Italie, où M. Libri, dans un éloquent discours préliminaire, expose la marche des sciences chez les dilTérens peuples de la terre, à partir de la plus haute antiquité. Cet ouvrage, dont chaque page porte le cachet de la plus profonde et de la plus étonnante érudition , attribue aux Arabes et aux Indiens une plus grande part dans le développement des sciences, qu'on n'a supposé jusqu'ici. Nous avons cru dès lors devoir porter un regard rapide sur la partie géométrique des ouvrages hindous et arabes, dont de savans orientalistes de l'Angleterre nous ont donné des traductions il y a quelques années. Et pour compléter cet aperçu des élémens divers qui ont concouru au rétablissement des sciences en Europe, nous l'avons étendu sur la Géométrie des Latins et au moyen âge. « L'esprit humain parait marcher dans une route si nécessaire : chaque progrès semble tellement déterminé d'avance, qu'on essaierait en vain d'écrire l'histoire d'un peuple ou d'une science, en partant d'une époque quelconque, sans jeter un regard sur les temps et les événemens antérieurs '. » Cette pensée juste nous servira d'excuse pour la longueur que la tâche qu'elle nous impose, va donner à cette Note. Géométrie des Indiens. Ayant reçu des Arabes, dans nos fréquentes communications avec ce peuple, noire système de numération , nous lui avions d'abord fait honneur de celle idée ingénieuse et féconde, qui a rendu de si grands services aux sciences, et à l'astronomie principalement. Mais on a reconnu depuis, par dilTérens documens émanés des Arabes eux-mômes, que cet honneur appartenait aux Indiens. Une si belle cl si utile invention, qui, avec neuf signes seulement, prenant des valeurs de position suivant une loi très-simple, pouvait exprimer ' Oistoire des sciences maihématiijuet en Italie, par H. Libri j Discours préliminaire, 1. 1, p. 3. To«. XI. 53 418 NOTES. tous les nombres imaginables, et abrégeait singulièrement les calculs, si pénibles chez les Latins, était propre à mériter à ses auteurs l'estime de l'Europe qui l'avait adoptée universellement, et à faire penser que le peuple Hindou avait été capable d'autres progrés dans les sciences mathématiques. En effet , on ne tarda point à apercevoir quelques indications qui annonçaient que ce peuple avait cultivé aussi une arithmétique supérieure, d'où dérivait celle qui nous a été transmise des Arabes par Fibonacci , sous le nom (\' jélcjehra et Âbnucahala , et qui forme aujourd'hui notre algèbre. L'histoire des sciences était vivement intéressée à l'éclaircissement de ces premières indications. Depuis une vingtaine d'années elles ont reçu une confirmation complète. Au commencement de ce siècle, MM. Taylor, Strachey et Colebrooke ' nous ont fait connaître les ouvrages mathématiques de deux auteurs hindous , qui passent pour les plus célèbres de leur nation , Brahmegupta et Bhascara Acharya; le premier du VI" siècle et le second du XII" de l'ère vulgaire. Ces ouvrages traitent de V arithmétique , de l'algèbre et de la Géométrie. L'arithmétique et l'algèbre en sont la partie la plus considérable , et con- firment pleinement l'opinion émise en faveur des Indiens, comme inventeurs de ces deux branches de la science du calcul , telles que nous les avons reçues des Arabes, et même dans un état de plus grande perfection. En effet, les commentaires de divers auteurs hindous, qui accompagnent le texte de ces deux ouvrages , attribuent à un auteur, encore plus ancien que Brahmegupta, et qu'ils nomment Aryabhatla, la résolution de l'équation du premier degré à deux inconnues, en nombres entiers, par une méthode semblable à celle de Bachet de Méziriac, qui a paru en Europe, pour la première fois, en 1624. « Les ouvrages de Brahmegupta et de Bhascara renferment des recherches d'un ordre beaucoup plus élevé. Outre la résolution générale de l'équation à une seule inconnue du second degré , et celle de quelques équations déri- vatives des degrés supérieurs, on y trouve la manière de déduire d'une seule solution toutes les autres solutions entières d'une équation indéterminée du second degré à deux inconnues; et cette analyse, que nous devons à Euler, était connue aux Indes depuis plus de dix siècles. Un calcul qui a de la ressemblance avec les logarithmes, des notations par- ticulières fort ingénieuses, et surtout une grande généralité dans l'énoncé des problèmes attestent les progrès de l'analyse indienne. Cette science, que les Hindous appliquaient à la Géométrie et à l'astronomie , était pour eux un puissant instrument de recherche , et l'on doit citer avec éloge plusieurs problèmes géométriques dont ils avaient trouvé d'élé- gantes solutions. » Nous nous bornerons à celte indication succincte des travaux analytiques des Hindous, que nous avons empruntée de l'Histoire des sciences mathématiques de M. Libri. Mais ' Bija Ganita, or ihe Àlgelra of the Ilinius , ly Edv. Strachey. london; 1813 in-4i>. — Lilawati or a treatise on /Irithmetic aud Gaomctry by Bhascara Acharya, iranslated from the original sanscrit ly J. Taylor. Bombay; 1816, in-4o. — Algehra, with Arithmetic and Mensuration , from the sanscrit of Brahmegupta and Bhascara; translatedbyJI, T. Colebrooke. London j 1817, in-4''. NOTES. 419 il nous faut entrer dans plus do déTcloppcmcns pour faire connaitre leur Géométrie , qui est ici notre objet spécial. Ou s'est borné, dans les extraits et les analyses qu'on en a donnés, à citer quelques pro< positions, qui sont : le carré de l'hypoténuse; la proportionnalité des eûtes dans les trian- gles équiungles; les scgmens faits par la perpendiculaire sur la base d'un triangle; l'aire de celle figure en fonction des trois côtés; un rapport approché de la circonférence au diamètre; la valeur des côtés des sept premiers polygones réguliers inscrits au cercle; une relation entre la corde d'un arc, son sinus-verse et le diamètre; et enfin quelques propo- sitions sur le calcul des distances par l'ombre du gnomon >. On n cru voir, généralement, dans ces diverses propositions, et conséquemment dans la partie géométrique des ouvrages de Brahmegupla et de Bhascara, des élémens de Géo- métrie, ou du moins, les propositions élémentaires et primordiales sur lesquelles repo- sait toute la science des Hindous. Aussi a-t-un regardé leurs connaissances géométriques comme infiniment inférieures à leurs connaissances en algèbre -. Mais en cherchant à nous rendre compte, par une étude approfondie de la partie géo- métrique des ouvrages hindous , de la signification de plusieurs propositions dont on n'avait point encore parlé, et du rôle que ces diverses vérités, qui paraissaient d'abord sans lien entre elles , et comme jetées au hasard , jouent dans cet ouvrage , nous avons été conduit à reconnaître, d'une part, que les propositions dont il n'avait point encore été fait mention étaient précisément celles qui avaient le plus de valeur; et ensuite, que l'ou- vrage de Brahmegupta, principalement, loin de nous offrir des élément de Géométrie , ou le résumé des propositions les plus usitées chez les Hindous, roulait simplement sur une seule et unique théorie géométrique. Cette théorie est celle du quadrilatère inscrit au cercle. Brahmegupta y résout cette question , digne d'être remarquée : Comtruire un quadrilatère inscriptible , dont l'aire, le* diagonale» , le» perpendiculaire» et diverge» autre» ligne» , ainti que le diamètre du cercle , «oient exprimé» en nombre» rationnel». Tel est l'objet de l'ouvrage de Brahmegupta, si nous ne nous abusons dans notre inter- prétation de la plupart de ses propositions , dont le sens doit être deviné à cause de la con- cision extrême des énoncés, où manque la plus grande partie des conditions qui devraient y entrer. On sera étonné sans doute de voir réduire à de telles questions ce qu'on a pu regarder^ avant une lecture attentive, comme formant des élémen» de Géométrie. Ces questions ' Voir Correspondance polytechnique , t. III. Jarcvier 1816; article traduit par H. Terqnem de l'oiiTrage de 9. Hutton , intitulé Tracts on Mathematical , etc. III vol. in.8°; Londres 1813. H. Hutton avait reçu cet neafi et précieux document (ur l'algèbre et la Géométrie de» Indiens, de H. Strachey avant que le* publications di ce savant orientaliste eussent paru. — Ediuburg Review, 1817, n" L\ II. — Delambre , Uisloire de l'Astronomie ancienne, t. I; et Histoire d« l'Astronomie du moyen âge, Discourt préliminaire. — Journal de» savons, septembre 1817. " They [ihe kindus) cultivated Atgebra much more , and icith yreater suceess , than Geometry ; as i* évident from the comparatively low state of Iheir knowledye in the one , and tke high pitch oftheir attuinments in ihe otker. CoLUtooiJi; Brahmegupta and Bhascara, Algebra ; Dissertation , p. XV. i 420 NOTES. dénotent , sinon un savoir très-étendu , du moins une certaine hahilelé en Géométrie, et une habitude du'calcul. Sous ce rapport elles sont dans l'esprit algébrique des Hindous. Elles nous font voir qu'il nous reste entièrement à connaître leurs élémens de Géométrie, et elles sont propres à nous faire désirer de retrouver encore d'autres fragmens semblables, du temps de Brahmegupta, ou d'un temps antérieur; car elles nous prouvent que la Géomé- trie alors a été cultivée avec succès. L'ouvrage de Bhascara n'est qu'une imitation très-imparfaite de celui de Brahmegupta , qui y est commenté et dénaturé. On y trouve, en plus , quelques questions nouvelles sur le triangle rectangle (qui étaient étrangères à la question traitée par Brahmegupta); une ex- pression approximative remarquable de l'aire du cercle eu fonction du diamètre ; la valeur des côtés des sept premiers polygones réguliers inscrits , en fonction du rayon ; et une formule pour le calcul approximatif de la corde en fonction de l'arc, et vice versa. Mais les propositions les plus importantes de Brahmegupta, relatives à sa théorie du quadrilatère inscriptible au cercle, y sont omises, ou énoncées comme inexactes. Ce qui montre que Bhascara ne les a pas comprises. Cette circonstance et les commentaires de différens scoliastes , nous paraissent prouver que, depuis Brahmegupta, les sciences, dans l'Inde, ont été en déclinant , et que l'ouvrage de ce géomètre a cessé d'y être compris. On sait, du reste, que dans l'âge présent , les savans indiens sont d'une ignorance profonde en mathématiques i. Nous allons présenter une analyse succincte de l'ouvrage de Brahmegupta. Ensuite nous analyserons semblablement celui de Bhascara; et nous signalerons les différences notables que nous avons trouvées entre ces deux ouvrages , écrits à six siècles d'intervalle. Stir la Géométrie de Brahmegupta. Les ouvrages de Brahmegupta , dont l'Europe est redevable au célèbre M. Colebrooke , sont extraits d'un traité d'astronomie dont ils forment les douzième et dix-huitième cha- pitres. Le douzième est un traité d'arithmétique (intitulé Ganita), et le dix-huitième un traité d'algèbre (intitulé Cuttaca). La Géométrie fait partie du traité d'arithmétique, où elle occupe les sections IV, V, ....,IX,sous les titres , dans le texte anglais, Plane fic/ure. Excavations , Stacks , Saw, Mounds of Grain , et Measure hy Shadow. La section IV, intitulée : figures planes, triangle et quadrilatère , se compose de vingt-trois propositions , comprises sous les § 21-43. Toutes ces propositions se réduisent à des énoncés d'un style elliptique, extrêmement concis, et ne sont accompagnées d'aucune démonstration. Elles sont présentées d'une ma- nière générale, sans le secours d'aucune figure , et sans qu'il en soit fait aucune application ' A Poona, que Ton peut regarder comme le principal établissement des Bramines, il y a tout au plus dix ou douze personnes qui entendent le Lilavati ou le Bija-Ganita; et quoiqu'il y ait plusieurs astronomes de pro- fession à Bombay , M. Taylor n'en a pas trouvé un seul qui entendit une page du Lilavati. (Delambre , Histoire do rAstronomie ancienne , t. I , p. 545.) NOTES. 421 Dumérique dans le texte. Mais des notes d'un auteur hindou , nommé Chaturreda , con- tiennent les figures et les applications qui s'y rapportent. Quelques-unes des propositions, mais en petit nombre, sont intelligible8,etlenr énoncé renferme toutes les parties qui composent une proposition complète. Mais les autres sont énoncées d'une manière très-imparfaite, et ne font aucune mention d'une partie notable des conditions de la question dont la connaissance est indispensable. Par exemple, s'il s'agit d'un quadrilatère, la proposition se réduit à l'expression des longueurs de ses quatre cAtés , et laisse ignorer les autres conditions nécessaires pour construire le quadrilatère, ainsi que les propriétés de cette figure , qui ont été , dans l'intention de l'auteur , l'objet de cette proposition. Toutes ces propositions de Brahmegupta ont donc besoin d'être devinées. Le sens que nous leur avons donné nous a porté à regarder l'ouvrage comme ayant eu pour objet de résoudre les quatre questions suivantes , relatives au triangle et au quadri- latère: 1" Trouver en fonction des trois côtés d'un triangle, son aire et le rayon du cercle gui lui est circonscrit ; 2" Construire un triangle dans lequel celle aire et ce rayon soient exprimés en nombres rationnels ; les côtés du triangle étant eux-tnémes des nombres rationnels ; 3° Un quadrilatère étant inscrit au cercle , déterminer , en fonction de ses côtés, son aire, ses diagonales , ses perpendiculaires , les segmens que ces lignes font les unes sur les autres par leurs intersections , et le diamètre du cercle; 4" Eufin, construire un quadrilatère inscriptihle au cercle , dans lequel toutes ces choses, son aire, ses diagonales, ses perpendiculaires , leurs segmens , le diamètre du cercle, soient exprimés en nombres rationnels. Du moins, ces quatre questions se trouvent résolues complètement dans les dix-huit pre- mières propositions de l'ouvrage de Brahmegupta , qui suffisent pour leur solution , et dont aucune n'y est étrangère ; de sorte qu'on peut dire que ce traité est écrit avec intelligence et précision. Quelques autres propositions , qui viennent à la suite, roulent sur d'autres matières. On peut regarder aussi l'ouvrage de Brahmegupta comme ayant eu pour objet unique une seule des quatre questions que nous venons d'énoncer , qui serait la dernière, relative au quadrilatère inscrit. Les trois autres seraient des prémices indispensables pour la solu- tion de celle-là ; et en effet, toutes les propositions dont elles se composent ont leur applica- tion dans la solution complète de la question du quadrilatère. Avant de passer à l'analyse de l'ouvrage de Brahmegupta, il nous faut faire connaître quelques expressions de la nomenclature mathématique des Hindous , dont ils font un usage trés-hcurcux pour énoncer les théorèmes d'une manière concise et sans le secours de figures ; ce qui leur donne un caractère de généralité qui manquait souvent à la Géométrie des Grecs. T^ous nous servirons ensuite des mêmes expressions: elles nous faciliteront le discours, et nous permettront quelquefois de conserver le style des géomètres indiens. Dans un triangle , un cûlé est appelé la base , et les deux autres, les côtés ou lesj'ambes ; la perpendiculaire est la ligne abaissée perpendiculairement sur la base, du point d'inter- 422 NOTES. section des doux côtés; les gegmens senties parties comprises entre le pied de la perpen- diculaire et les deux extrémités de la base. Dans un triangle rectangle , un côté de l'angle droit est appelé le côté, et l'autre le droit (upright), et le troisième l'hypoténuse. Au mot droit, qui ne s'applique dans notre nomen- clature mathématique qu'aux angles, nous substituerons celui de cathèle , qui était em- ployé par les Grecs et par les Latins. Le polygone de quatre côtés est appelé tétragone (excepté dans le titre de l'ouvrage ; ( Triangle et quadrilatère); l'un des quatre côtés est la bage; son opposé est appelé le som- met (summit), et les deux autres les flattes. Ne pouvant nous servir du mot sommet, qui s'applique invariablement dans notre langue, à un point, et jamais à une ligne, nous lui substituerons celui de corauste ,k l'imitation des Latins qui donnaient aussi un nom particulier au côté opposé à la base du quadrilatère, et l'appelaient coraustus. Ce mot se rencontre dans quelques anciens ma- nuscrits, et a été reproduit en 1486 dans la Margarita philosophica. Les perpendiculaires du quadrilalére sont celles abaissées sur la base des deux sommets qui sont les extrémités supérieures des deux flancs; de sorte qu'elles correspondent respec- tivement aux deux flancs. Chacune d'elles fait sur la base deux segmens. Le premier, situé entre la perpendiculaire et le flanc correspondant, est appelé le segment , l'autre est son complément. Les Indiens se servent du mot diagonale dans la même acception que nous. Dans le rectangle, les dénominations sont spéciales. Le rectangle est appelé ohlong; et deux côtés contigus sont appelés , comme dans le triangle rectangle , le côté et le droit; nous dirons le côté et la cathète. Le mot trapèze (trapezium) est employé plusieurs fois sans être défini. On voit par une note de M. Colebrooke , placée au commencement de la partie géométrique de Bhascara, et empruntée du scoliaste Ganesa,que ce mot, qui répond à la dénomination sanscrite vishama-chaturbhuj a , s'applique au tétragone qui a ses quatre côte's inégaux. C'est la signification qu'il avait chez les Grecs (voir la définition 34* du I'"' livre d'Euclide), et qui a été conservée jusqu'ici chez les géomètres anglais '. C'est la significa- ' Aujourd'hui , en France , le mot trapèze «'applique eiclusiTement au quadrilatère qui a deux côté» parai» lèles, et ses deux autres côtés non parallèles. C'est ver» le milieu du siècle dernier qu'il a pris cette nouvelle signification ; jusque là il avait eu celle d'Euclide. Cependant il avait déjà reçu à différentes époques, même éloignées, cette signification particulière; car dan» la proposition 174« du 7= livre des collections mathématique» de Pappu», ce mot s'applique nécessaire- ment à un quadrilatère qui a deux côtés parallèles et se» deux autres côtés quelconques ; et dan» le commen- taire d'Eutociu» sur la 49= proposition du 1" livre des coniques d'Apollonius, il a la même signification. Dans les temps moderne» nous la trouvons exprimée formellement dans un ouvrage de Peucer : Elementa doctrinœ de circulis cœlestibus , in-S", 1569, où nous lisons : Quœ vero no?i TXpxXXi^XÎ'i pxfi^x sunt, aut duas liaient Hneus cequahiliter distantes , ut rpx^rsiiix, mcnsulœ ; aut nvllas prorsus parallèles lineas habent, «/Tpa^rtÇofiâ'^ç. Les Latins avaient appelé mensa, ou mensula, le quadrilatère qui a deux côtés parallèle». Stévin l'a appelé hache , parce que, dit-il , il ressemble mieux à une hache qu'à une table. [OEuvres mathématiques de Stévin , page 373.) Du reste , toutes les dénomination» relatives aux diverses forme» du quadrilatère , ont beaucoup varié. Le rectangle , appelé par les Grecs erepo/xtxei;, a pris le nom de tetragonus parte altéra longior chei le» NOTES. 423 tion que nous lui donnerons aussi dans les propositions de Brahmegupta. Mais pour que ces proposilioiis aient un sens, il nous faut nécessairement supposer que le trapèze a ses diagonales à angle droit. Dans deux propositions seulement cette restriction n'est pas nécessaire ; il y a lieu de croire cependant qu'elle entrait dans l'esprit de Brahmegupta. Cette première condition dans la construction du trapèze n'est pas la seule que l'auteur hindou ait dû observer. Nous avons reconnu qu'en outre, ce trapèze doit être interiptible au cercle. Aucune de ces deux conditions ne se trouve indiquée, ni dans le texte de Brahmegupta, ni dans les notes du scoliaste Chaturveda. Le mot trapèze n'est employé que deux fois par Bhascara, et nous voyons que, dans les deux cas, l'auteur l'applique k un quadrilatère construit d'une manière particulière, et qui a ses diagonales rectangu- laires. Nous emploierons le mot trapèze dans ce sens , à défaut d'un autre mot , voulant con- server une expression abréviative , qui contribuera à faire ressortir le caractère propre des propositions de l'auteur hindou. La signification que nous venons d'attribuer au mot trapèze suffit déjà, avec la condi- tion que cette figure est inscriptible au cercle , pour donner un .sens à plusieurs de ces propositions, mais non pas à toutes; et dans plusieurs autres, il faut admettre pareil- lement, quoiqu'elles ne concernent pas le trapèze, qu'il s'agit encore du quadrilatère inscriptible. Dans celles-ci le quadrilatère a deux côtés opposés égaux entre eux , ou bien trois côtés égaux. Ces premières suppositions suffisent pour effectuer la construction des figures sur lesquelles roulent les propositions de Brahmegupta; mais cela n'est pas assez; il faut encore suppléer au silence de l'auteur, et découvrir quelles sont les propriétés dont ces figures , ainsi construites , jouiront ; propriétés qui ont fait le véritable objet de l'ouvrage. Cette question se présentera également pour d'autres propositions relatives au triangle , où les conditions particulières de construction de cette figure sont bien indiquées, mais où il n'est rien dit des propriétés dont elle jouira. D'après cela, voici le résumé des propositions que nous trouvons dans l'ouvrage de Brahmegupta. Nous les présentons en donnant à celles dont l'énoncé était incomplet et inintelligible , le sens et l'interprétation dont nous venons de parler. Nous les plaçons par LatiiK [voir Bocce, Catsiodore). Au moyen Age, Campanuii et Vincent de Beauvais lui ont donné celui do titrayone long; qu'il a conterTé à la renaiaaance, dans le< ouvrages de Zamberti, de Tartalea, etc. Ensuite quelques auteurs l'ont appelé oblong (rotr Alstedius; Encyclopœdia univtraa , lib. XV). Enfin il a pris en Trance le nom de rectangle (Mersenne, De la virile des scienctê, p. SIS) qu'il a conserTé. En Angleterre il a'tppelle toujours oblong. Vincent de Beauvais, écrivain du XIII° siècle, auteur d'une encyclopédie intitulée .^«cu/ummuniii, où se trouve réunie, avec un immense savoir, une Toule de dacnmens précieux pour l'histoire, appelait climimn le rhombe des Grecs, qui est notre losange ; timile climiam le rhomboïde, ou parallélogramme; et climinaria tous les quadrilatères irréguliers, c'est-à-dire les trapèies des Grecs. Campanus , écrivain du même temps, à qui l'on doit en Europe la première traduction dXuclide, qn'il avait faite sur un texte arabe, a appelé le rhombe helmuayn ; le parallélogramme, êimilis helmuayn; et le trapèie d'Euclide , helmuariphe. Ces noms étaient employés & la renaissance ; on les trouve dans la Géométrie pratique de Bradwardio, et dans les ouvrages de Lucas de Burgo el de Tartalea. 424 NOTES. groupes, sans observer l'ordre qu'elles ont dans l'ouvrage indien; mais, au moyen des numéros de leurs paragraphes , on pourra rétablir cet ordre. 1° Quatre propositions sur le triangle, qui sont : Première; le carré de l'hypoténuse, dans le triangle rectangle; § 24. Deuxième; la manière de calculer la perpendiculaire en fonction des côtés; § 22. Troisième; l'aire du triangle en fonction des trois côtés ;§ 21. Quatrième; une expression du diamètre du cercle circonscrit au triangle; § 27. Ces propositions, les deux premières du moins, doivent être considérées comme des lemmes , utiles pour la suite. 2° Trois propositions qui ont pour objet de construire un triangle dont les côtés et la perpendiculaire , et conséquemment l'aire et le diamètre du cercle circonscrit , soient des nombres rationnels : Première ; triangle rectangle ; § 35, Deuxième; triangle isocèle; § 33. Troisième; triangle scalène; § 34. 3° Neuf propositions sur le tétragone inscriptible au cercle , qui sont : Première; l'aire du quadrilatère en fonction des quatre côtés; § 21. Deuxième ; l'expression de ses diagonales ; § 28. Troisième; la manière de calculer le diamètre du cercle circonscrit, en fonction des côtés; et une expression particulière de ce diamètre pour le trapèze (tétragone qui a ses diagonales rectangulaires); § 26. Quatrième; une expression particulière de la diagonale et de la perpendiculaire, dans un tétragone inscrit dont les flancs sont égaux ; § 23. Cinquième; manière de calculer les segmens que les diagonales et les perpendiculaires font les unes sur les autres , dans un tétragone inscrit dont les flancs sont égaux; § 25. Sixième; manière de calculer les perpendiculaires et les segmens qu'elles font sur la base, dans le trapèze inscrit; § 29. Septième; manière de calculer les segmens faits sur les diagonales par leur point d'in- tersection , dans le même quadrilatère ; § 30-3 1 . Huitième; manière de calculer la perpendiculaire menée du point d'intersection des diagonales sur un côté , et le prolongement de cette perpendiculaire jusqu'au côté opposé ; § 30-31. Neuvième; manière de calculer les segmens que les perpendiculaires font sur les diago- nales et sur les côtés , et ceux que les côtés opposés font sur eux-mêmes ; § 32. 4" Quatre propositions sur la manière de construire un quadrilatère inscriptible dans le cercle, dont les côtés, les diagonales, les perpendiculaires, les segmens que ces lignes font les unes sur les autres, l'aire du quadrilatère et le diamètre du cercle circonscrit , soient des nombres rationnels: Première; construction d'un rectangle ; § 35. Deuxième ; construction d'un quadrilatère dont deux côtés opposés doivent être égaux; § 36. NOTES. 42ÎÎ Troisième ; construction d'un quadrilatère ayant trois côtés égaux ; § 37. Quutricmo; construction d'un quadrilatère ayant ses quatre côtés inégaux; § 38. Le quadrilatère construit est un trapèze; c'est-à-dire qu'il a ses deux diagonales rectan- gulaires. Telles sont, suivant la signification que nous avons cru pouvoir leur donner, les pro- positions comprises dans les dix-huit premiers paragraphes de l'ouvrage de Brahmegupta , qui nous ont paru se rapporter à la théorie du quadrilatère inscriptible au cercle, et résoudre la question de construire un tel quadrilatère dont toutes les parties fussent rationnelles. Le mot cerclen'est prononcé que dans deux propositions, celles des §§ 26 et 27, où il s'agit de trouver le rayon du cercle circonscrit à un triangle ou à un quadrilatère; et le mot rationnel n'est jamais prononcé. Un quadrilatère n'est défmi que par l'expression des longueurs de ses côtés, sans qu'il soit rien dit des autres conditions de construction que nous avons supposé être l'inscriplibilité au cercle, ni des propriétés dont jouira le quadrilatère , qui consistent en ce que toutes ses parties soient exprimées en nombres rationnels. 5° Cinq propositions, qui viennent à la suite des dix-huit premiers paragraphes , sont étrangères à la question du quadrilatère inscriptible. La première concerne le triangle rectangle. Sous un énoncé très-différent, cette pro- position se réduit à ceci : Trouver tur le prolongement au delà de l'hypoténute de chaque côté de l'angle droit d'un triangle, un point dont les dittances aux deux extrémité* de l'hypoténute fassent une somme égale à celle des deux côtés de l'angle droit; §30. Les quatre suivantes sont relatives au cercle : Première. Expression de la circonférence et de l'aire du cercle en fonction du diamètre. Soit D le diamètre , R le rayon ; « Dans la pratique on prend circonférence = 3 D, et surface ^ 3 R^. » Pour avoir les valeurs vraies (the neat values), on prend circonférence = V Hi,])^ , et surface = 1/ 10.11* » ; § 40. Deuxième, u Dans un cercle, 1° la demi-corde est égale à la racine carrée du produit des deuxsegmens du diamètre perpendiculaire; 2° le carré de la corde, divisé par quatre fois l'un des segmens, plus ce même segment, est égal au diamètre. » § 41. Brahmegupta appelle le plus petit segment la flèche. Quand deux cercles se rencontrent, ils ont une corde commune. La droite formée des deux flèches correspondantes ù cette corde, dans les deux cercles, s'appelle V érosion. Troisième. « La flèche est égale à la moitié de la différence du diamètre et de la ra- cine carrée de la différence des carrés du diamètre et de la corde ; » L'érosion étant soustraite des deux diamètres, les restes multipliés par les deux dia- mètres, et divisés par la somme de ces restes, donnent les deux flèches. » § 42. Quatrième. § 43. Cette proposition est la même que la seconde partie du § 41. Telles sont les vingt-trois propositions qui composent la section IV. ToM. XI. 5^4 426 NOTES. La section V est intitulée Excavations. Elle donne la mesure d'un prisme , et d'une pyramide, et une méthode pour mesurer approximativement, dans la pratique, un corps irrégulier. Dans les sections VI, VII et VIII, intitulées Stacks, Saw et Mounds of grain , l'au- teur donne des régies approximatives pour mesurer des piles de briques , des pièces de bois et des tas de grains. La section IX est intitulée Mesure par le gnomon. L'auteur suppose une lumière placée sur un pied vertical, et un gnomon, qui est un style placé aussi verticalement. Il résout ces deux questions : 1° Connaissant la hauteur de la lumière, celle du gnomon , et la distance entre le pied de la lumière et celui du gnomon, trouver l'ombre projetée par le gnomon; §53. 2° Trouver la hauteur de la lumière, en connaissant les ombres portées par le gnomon placé dans deux positions différentes; § 54. Telles sont les propositions qui composent la partie géométrique de l'ouTrage de Brahmegupta. Avant de nous livrer à l'examen de celui de Bhascara, nous allons faire quelques obser- vations sur plusieurs de ces propositions. La règle pour la construction d'un triangle rectangle en nombres rationnels , s'exprime algébriquement ainsi : Soit a un côté du triangle ,eth une quantité quelconque , le second côté sera : i ( — — A ) , et l'hypoténuse k | — o' Cette règle repose sur l'identité Brahmegupta ne prononce pas, dans son énoncé, le mot rationnel; mais on trouve la même règle au § 38 de son Algèbre, et il l'intitule : Règle pour la construction d'un triangle rectangle en nombres rationnels. Bhascara donne la même proposition, dans la partie géométrique du Lilavati, § 140, et il ajoute que les côtés seront rationnels. Cette règle, pour la construction du triangle, est, comme on voit, une généralisa- tion des deux règles que Proclus, dans son Commentaire sur la quarante-septième proposition du premier livre d'Euelide , attribue à Pythagore et à Platon, pour former un triangle rectangle en nombres entiers, un côté étant donné en nombre im- pair ou pair. NOTES. 427 Ces deux règles des géomètres grecs, sont exprimées par les deux formules : /a' -+. 1 V /o' — 1 V qu'on obtient en faisant successivement dans celle de Brahmegupta, £ = 1 et & = 2. La formule de Brahmegupta peut prendre la forme : ( o' ^ i' )' = (o' — fc' )' -t- \a'h\ Cette formule a été très-usitée chez les géomètres modernes , où elle est le fondement de leurs méthodes pour la résolution des équations indéterminées du second degré. Brahmegupta s'en sert pour la construction du triangle isocèle dont les côtés et la per- pendiculaire sont des nombres rationnels. Voici sa règle : a e/ b étant deux nombres guelconqties , (a" -t- b') tera l'exprettion de» deux côtés égaux du triangle, et 2 (a' — b") sera la base : la perpendiculaire sera 2 ab; § 33. Pour former un triangle scalène dont les côtés et la perpendiculaire soient des nombres rationnels, on aperçoit dans la règle algébrique de Brahmegupta, § 34, qu'il construit deux triangles rectangles en nombres rationnels , ayant un côté commun. Ce côté est la perpendiculaire du triangle scalène formé avec les autres côtés. Plusieurs géomètres modernes ont résolu de cette manière la même question (voir les Commentaires de Bachet de Méziriac sur le VI* livre des Questions arithmétique* de Diophante, et les Sectiones triginta miscellaneœie Schooten, p. 429). Nous avons reconnu que les deux propositions sur le triangle isocèle, et scalène sont utiles pour la construction que Brahmegupta donne , sous les § 36 et 37 , pour le tétragone inscriptible au cercle, ayant deux ou trois côtés égaux. La formule (a*-*-b*y = (a'—b'Y -f- ia'b\ qui a servi à Brahmegupta pour construire en nombre rationnels un triangle rectangle, quand un côté est donné, peut servir aussi pour le cas où l'hypoténuse est donnée, car soit c cette hypoténuse ; faisons b = 1 dans la formule , et multiplions ses deux mem- ' Bocce, en «o servant auasi de ce> deux formulea, dana le 2' tirre de ta Géométrie , attribue la seconde à Archytas, 428 NOTES. bres par : -: elle deviendra c'(a' — I)' ce qui fait voir que les deux côtés du triangle seront de la forme , et ^ (a= + 1) ' a étant un nombre arbitraire. Bbascara a donné cette formule. Elle ne se trouve point dans l'ouvrage de Brahniegupta, parce qu'elle est inutile pour la solution de la question du quadrilatère inscrit, sur la- quelle roulent toutes ses propositions. Les § 2G et 27 sont les seuls où Brahmegupta ait fait mention du cercle circonscrit à la figure. Aucune condition semblable n'est indiquée dans aucune des autres propositions qui nous ont paru se rapporter au quadrilatère inscriptible au cercle. Le § 27, qui donne la manière de calculer le diamètre du cercle circonscrit à un triangle, exprime la formule connue, « le produit de deux côtés d'un triangle divisé par la perpen- » diculaire abaissée sur le troisième côté , est le diamètre du cercle circonscrit. » La manière de calculer le diamètre du cercle circonscrit au tétragone est la même; on considère le triangle formé par deux côtés contigus et une diagonale. L'expression des diagonales se trouve dans le § 28. Pour le tétragone qui a ses deux diagonales rectangulaires, le diamètre est égal à la racine carrée de la somme des carrés de deux côtés opposés. Cette proposition repose sur la propriété connue des cordes qui se coupent à angle droit dans le cercle , savoir que : La somme des carrés des quatre segmens faits sur les deux cordes, par leur point d'intersection, est égale au carré du diamètre du cercle. Propriété qui est la XP proposition du traité d'Archimède qui porte le titre de Lemmes. Le § 21 , qui donne l'aire du triangle et du quadrilatère en fonction des côtés, nous paraît mériter une attention particulière, de la part surtout des personnes qui aiment à rechercher les documens historiques que peuvent présenter les annales des sciences. Ce paragraphe se compose de deux parties, dont la première nous paraît susceptible de deux interprétations différentes. Si nous suivons textuellement son énoncé , elle exprime, en quelque sorte, une proposition négative; elle dit que telle règle, pour le calcul de l'aire d'un triangle et d'un tétragone, est fausse. Au contraire, en faisant un léger changement au texte, nous en tirons une règle exacte pour le calcul du trapèze qui joue le rôle principal dans l'ouvrage de Brahmegupta. Première interprétation. 1° Le produit des demi-sommes des côtés opposés donne une aire inexacte du triangle et du tétragone ; NOTES. 429 2° La demi-tomme det câtét e*t Jcrite quatre foi* ; on en retranche tucceêtioement le* côté» ; on fait le produit de* reste* ; la racine carrée de ce produit e*t l'aire exacte de la figure '. Quoiqu'il ne 8oit aucunement fait mention de la condition d'inscriptibilité au cercle, pour le tétriigonc, on ne peut douter qu'il ne s'agisse d'une telle figure dans la seconde partie de la ])ropositionj car on y reconnaît la règle élégante qui sert pour le calcul de l'aire du télragone inscrit, en fonction des quatre côtés. Cette règle comprend celle du triangle. Il suffit d'y supposer que l'un des côtés du létragone est nul. C'est ainsi que l'a entendu Chaturveda qui, dans une note très-courte, dit que pour le cas du triangle on retranche les trois côtés, respectivement, de trois des quatre demi-sommes écrites, et que la quatrième reste telle qu'elle est. Cette formule de l'aire du triangle en fonction des côtés, a été remarquée dans l'ou- vrage de Brahmegupta, par les géomètres qui en ont rendu compte, et a été regardée comme en étant la proposition la plus considérable; et l'on n'a jamais cité, je crois, la formule de l'aire du quadrilatère. Celle-ci cependant méritait à tous égards la préfé- rence; car, outre qu'elle est plus générale, plus difficile à démontrer, qu'elle suppose une Géométrie plus avancée, et, en un mot, qu'elle est d'une plus grande valeur scien- tifique, elle parait, jusqu'ici appartenir en propre à l'auteur hindou; car on ne la trouve dans aucun ouvrage des Grecs, et il n'en est pas de même de la formule du triangle, comme nous le dirons plus loin. Passons à la première partie de la proposition qui nous occupe, et qui énonce, comme inexacte, une règle qui l'est en effet , pour l'aire du triangle et d'un tétragone quelconque en fonction des côtés. Dans une note, Chaturveda fait huit applications numériques de cette règle, aux trois triangles , équilatéral , isocèle et scalène , et au carré , au rectangle , au tétragone qui a ses deux bases parallèles et ses deux tlancs égaux ; à celui qui a ses deux bases parallèles , et trois côtés égaux; et enfin au trapèze. Pour le triangle, il fait la demi-somme des deux côtés, et il la multiplie par la demi- base. 11 trouve toujours une aire inexacte. Cela doit être, car la demi-somme des deux côtés ne peut jamais être égale à la perpendiculaire. Pour le tétragone, il multiplie la demi-somme des deux bases, par la demi-somme des deux flancs. Il dit que le produit est l'aire exacte dans le cas du carré et du rectangle ; mais inexacte dans les trois autres cas. Cette manière de calculer l'aire du tétragone était employée comme exacte, par les arpenteurs romains. On la trouve dans le recueil intitulé : Rei agrariœ auctore» legesque variœ^ , et même dans la Géométrie de Boëce (IP livre; De rhomboide rubrica). ' Voici le teite de H. Colebrooke, qu'il faut avoir août lea yeux pour apprécier Ie> deux iuterprétation* dont il nout a paru susceptible : The jiroduct of half ihe sides and countersides is tht gross area of a triangle and tétragone. llalf the sum ef the sides set down four times, and severallylessenedby the sides, beingmul- tiplied together, the square-root of the product is the exact area. ' Cura Wilelmi Goesii. Amat. 1674, in-^"; voir p. 313. 430 NOTES. La règle pour le triangle se rencontre aussi , du moins pour le triangle équilatéral , chez les Gromatici Romani. L'une et l'autre ont encore été pratiquées , comme bonnes , parmi nous, au moyen âge. Car nous les trouvons dans les œuTres de Bède, parmi ces questions d'arithmétique ad acuendos juvenea ' , qu'on a regardées comme le germe du livre si connu des Récréations mathématiques - , et que le prince abbé de St.-Emeran a attribuées au célèbre Alcuin, le maître et l'ami de Charlemagne. Ces deux règles, qui attestent que nous avons eu nos temps d'ignorance, auraient-elles pénétré dans l'Inde, où des géomètres, véritablement dignes de ce nom, les auraient reconnues fausses ? Et la proposition de Brahmegupta aurait-elle été destinéeà substituer à cette pratique ignorante une règle vraiment exacte et géométrique? Il semble, du moins à raison de leur identité, que ces règles des occidentaux, et celles que l'auteur hindou énonce comme fausses, ont une même origine. Car il n'en est pas de l'erreur comme de la vérité. La vérité, en Géométrie , est la loi commune , elle est une , elle appartient à tous les temps , à toutes les intelligences qui savent la comprendre; et sa présence sur plusieurs points, chez plusieurs peuples, n'est pas une preuve de communi- cations entre eux. Mais quant à l'erreur, ses formes n'ont pas de loi; elles sont diverses, innombrables ; et la conformité , dans ce cas , dénote une origine commune. Cette circonstance offre peut-être quelque intérêt , comme fait historique attestant des communications scientifiques dans un temps éloigné , et prouvant du reste la haute supé- riorité des Hindous d'alors sur les occidentaux contemporains. Deuxième interprétation de la proposition. Dans notre deuxième manière d'interpréter la proposition , nous changeons quelques mots du texte , et nous lui faisons dire : 1° Dans le trapèze l'aire est égale à la dem,i-somme des produits des côtés opposés ; 2° Pour le triangle et le tétragone , la demi-som,me des cotés est écrite quatre fois ; on en retranche séparément les côtés ; on fait le produit des restes ; la racine carrée de ce produit est l'aire de la figure ^. ' Venerabilis Bedœ opéra ; 4tom. in-fol.; Cologne, 1812; 1. 1, colonne» 104 et 109. De campo qtiadrangulo ; un quadrangle a sa base égale à 34, le côté opposé égal à 32 et ses deux flancs égaux à 30 et ù 32 j son aire est /34 4-32\ /30 + 32\ (— J— ) X (— ^— ) == 31 X 33 = 1023. De campo trianijulo ; un triangle a se» flancs égaux à 30, et sa base égale à 18, son aire est ?^X-f==30X 9 = 270. Ce» règle» fausse» sont encore appliquées dans lei questions intitulée» : De civitate quadranguld ; De civitata triangulâ. 2 Montucla; Histoire des mathématiques , tom. I", pag. 490. ^ Voici quel pourrait être l'énoncé qui répondrait à cette interprétation; on -verra quel» légers changeraens il suffirait de faire au texte anglais pour l'obtenir : IJa/f thc sum of the products ofthe sides and couniersides is the area of a trapezium. In a triangle and tétragone half the sum of the sides set dowu four times , and seve- rally lessened ly the sides, heing multiplied togeiher , the square-root of the product is the area. NOTES. 431 Il est toujours question, bien entendu, du trapèze et du tétragonc inscriptibles au cercle. Pour obtenir cet énoncé, il suffit de supprimer le mot inexact {groi»), de remplacer tétragone par trapèze, ei de faire passer le mot triangle dans la seconde phrase , en y introduisant celui de tétragone. Cette seconde phrase conserve sa signification primitive; et la première prend un sens clair, et devient une proposition assez belle qui, peut-être, n'avait point encore été remarquée. Sa démonstration est facile , car les deux diagonales étant à angle droit, il est évident que l'aire du trapèze est égale à la moitié du produit de l'une par l'autre. Mais ce produit, suivant le théorème de Plolémée sur le quadrilatère inscrit, dont Brahmegupta s'est évidemment servi dans la proposition du § 28 i, est égal à la somme des produits des côtés opposés. Donc la moitié de cette somme est l'aire du trapèze. On n'avait cité, jusqu'ici , du § 21 , que la partie relative à la formule de l'aire du triangle en fonction des trois côtés : et l'on n'avait point fait attention à la formule de l'aire du quadrilatère inscrit au cercle, qui aurait mérité à tous égards la préférence sur la première ; ni à cette proposition , qui déclare inexacte» des règles identiques à celles qui ont été pratiquées par les Latins, puis parmi nous dans le moyen âge. La formule de l'aire du triangle avait fait d'autant plus de sensation dans l'ouvrage de Brahmegupta , qu'on ignorait généralement qu'elle eût été connue dans l'antiquité , par- ticulièrement des Grecs. Montucla , qui l'avait attribuée d'abord à Tartalea , n'en avait fait , ensuite, remonter l'origine qu'à Héron le jeune, écrivain du VII° siècle. Aussi M. De- lambre,en rendant compte de l'ouvrage de Brahmegupta, dans le discours qui précède son Histoire de l'astronomie au moyen âge, n'a trouvé d'autre objection à faire, dans l'intérêt des Grecs, contre cette formule du géomètre indien, si ce n'est que ce théorème très-curieux n'est que d'une utilité fort médiocre en astronomie. Mais nous devons con- venir ici que ce théorème , qui est resté inaperçu dans l'histoire de l'école d'Alexandrie , y a été connu. On le trouve démontré dans un traité de géodésie de Héron l'ancien (deux siècles avant l'ère chrétienne), intitulé la Dioptre , ou le Niveau, que M. Venturi de Bologne , a traduit , il y a une vingtaine d'années , sous le titre il Traguardo , dans son histoire de l'optique -. M. Venturi a encore trouvé ce théorème , sans démonstration , dans un fragment de Géométrie d'un auteur latin qui lui a paru être antérieur à Bocce. Nous l'avons vu aussi dans un manuscrit du XI' siècle que possède la bibliothèque de Chartres. Il y fait partie d'un traité de la mesure des figures , que nous croyons être le même écrit que cite M. Venturi; et que nous serions porté à attribuer à Frontinus. Ainsi la priorité, quant à la formule de l'aire du triangle, ne peut appartenir à Brahmegupta. Mais ce géomètre peut la céder, sans rien perdre de l'estime qu'elle avait fait accorder à son ou- vrage, puisque nous y trouvons la formule, beaucoup plus importante, de l'aire du ' Noa» n'entendon» pis dire que Brahmegupta a empranté ce théorème de l'AImageate de Ptolémëe; mai» qu'il l'a connu , et qu'il t'en e(t aervi pour parvenir i l'exprestion de> diagoualea du quadrilatère intcrit , qu'il donne dans le §28. 3 Commentari sopra la iloria » le Uorie dell' ottica. Bologna , 1814 , in-4<> , p. 77-147. 432 NOTES. quadrilatère inscrit, en fonction des côtés , qui lui appartient incontestablement , comme ne s'étant trouvée dans aucun ouvrage antérieur. Celle-ci avait paru jusqu'ici appartenir aux Modernes. Snelllus l'énonce comme étant de lui, dans son commentaire sur la première proposition du livre De prohlematibus miscellaneîs de Ludolph Van Ceulen ^ Mais nous avons quelque raison de croire qu'elle avait déjà été trouvée quelques années auparavant-. Sa démonstration géométrique n'était pas sans difficulté, au dire même d'Euler, qui en a donné une dans les mémoires de Pétersbourg^, trouvant très-embrouillées les deux que Philippe Naudé avait données pré- cédemment dans les mémoires de Berlin*. Cette proposition se trouve dans peu d'ouvrages, quoique souvent, dans le XVI" siècle et depuis, on se soit occupé du quadrilatère inscrit, ainsi que nous le dirons plus loin. Quant à la formule de l'aire du triangle , on la rencontre partout , chez tous les peuples et dans tous les temps. Les Arabes l'ont connue, et c'est d'eux que nous est venue la pre- mière démonstration que nous en ayons eue eu Europe. On la trouve dans un ouvrage de Géométrie des trois fils de Musa ben Schaker, traduit de l'arabe en latin, sous le titre F^erha filiorum Moijsi, filiiSchaker, 31ahutneti , Hameti , Haserv'. Elle y est démontrée d'une manière géométrique différente de celle de Héron d'Alexandrie ; ce qui nous fait supposer que les Arabes l'avaient reçue des Indiens; d'autant plus que les trois fils de Musa ben Schaker disent, dans leur ouvrage , que cette formule a été employée par beau- coup d'écrivains^ sans démonstration; et que d'ailleurs on sait que ces trois célèbres géomètres avaient puisé une partie de leurs connaissances mathématiques dans les ou- vrages indiens ". M. Libri a remarqué la formule en question dans un traité géométrique du juif Savosarda , écrit vers le XII" siècle '. Elle se trouve ensuite dans la Pratique de la Géométrie , de Léonard de Pise , où elle est démontrée à la manière des trois frères arabes. ' Après avoir dit qu'auparavant on calculait séparément les aires des deux triangles dont se compose le qua- drilatère, Snellius ajoute : Quanta operosior est hœc vulgata ad instigandam aream via , tanià gratins novum hoc nostrtcm theoremation benevolo lectori fiUuruja speramus, 2 Prœtorius, dans un ouvrage sur le quadrilatère inscrit au cercle, qui porte la date de 1698, et dont nous parlerons plus loin, dit que l'on a déjà cherché le diamètre du cercle circonscrit au quadrilatère, en fonction des côtés, et Vaire du quadrilatère. ' Novi commentarii , t. !";■■ , ann, 1747 et 1748. Variœ demonstratio-nes geomeiriœ. « La démonstration analy- » tique de cette formule n'est pas difficile j mais ceux qui ont cherché à en donner une démonstration géomé- )i trique ont trouvé de très-grandes difficultés. » I,es Novaacta de Pélcrsbourg, t. X, ann. 1792, contiennent une autre démonstration par S.Fuss. * Misccllanea Berolinetisia, t. III, ann. 1723. ' Cet ouvrage n'existe qu'en manuscrit. La bibliothèque royale de Paris en possède un exemplaire qui est joint à un grand nombre d'autres pièces scientifiques intéressantes, traduites de l'arabe et réunies sous le titre Mathemaiica, (Supplément latin , n" 49 , in-fol. Voir VHistoire des sciences mathématiques en Italie , de M. Libri. T Ie--,p. 266). L'académie de Bàle en possède aussi un manuscrit , sous le titre Liler trium fratrum do Geometrid, ^ Casiri, Biîliotheca Arabico-Hispana Escurialensis , etc. Mohammed len Musa Indonim in prœclurissimis inventis ingenium et acumen ostendit. (T. l" , p 427.) On lit encore dans la table de l'ouvrage ; Librum artis Ltgisticœ à Khata Indo editum enornavit. [Mohammed le» Musa.) ' Histoire des sciences mathématiques en Italie , p. 160. NOTES. 433 Il parait qu'on l'a trouvée aussi , avec la même démonstration , dans quelque écrit de Jordan Neinorariiis, postérieur de quelques années à Léonard de Pise. A la renaissance, cette formule a paru dans presque tous les ouvrages de Géométrie. Reisch l'a donnée dans la Margarita philotophica , en 1480. Nous avons de fortes raisons de croire qu'il l'avait empruntée de l'auteur latin dont nous avons parlé plus haut. On la trouve ensuite, avec la démonstration de Léonard de Pise, dans la partie géométrique de la Suinma de arith- metica, Geometria , etc., de Lucas de Burgo (Dittinctio prima , capitiilum octavum , f" 12); et dans la troisième partie du Traité général des nombre» et des mesure* , de Tartalea. Cardan l'a insérée, sans démonstration , dans sa Practica arithmetice ' ; et Oronce Finée dans sa Géométrie, liv. II, chap. 4. Ramus, dans ses Scholw mathematicœ , a rapporté la démonstration de Jordan et de Tartalea , en critiquant leur manière d'énoncer la formule , et leur reprochant de dire que l'aire du triangle est la racine carrée du produit de quatre lignes ; locution inusitée dans la Géométrie des Grecs , où le produit de deux ou de trois lignes avait une signification géométrique, mais non le produit de quatre lignes. Sncllius, en reproduisant cette critique de Ramus, dans ses notes sur les ouvrages de Ludol|)h Van Ceulcn^, a énoncé la règle à la manière des Grecs, en disant que l'aire du triangle est égale à celle d'un rectangle dont un côté est moyen proportionnel entre deux des quatre facteurs qui entrent dans l'expression algébrique, et dont l'autre côté est moyen proportionnel entre les deux autres facteurs. Millet Decbales s'est conformé aussi à ce style rigoureusement géomélrique des Grecs '. La formule en question se trouve dans une infinité d'autres ouvrages, qu'il est inutile de citer ici. Presque tous se servent de la démonstration de Lucas de Burgo , laquelle est celle des Arabes, qui nous a été apportée par Fibonacci. Quelques-unes cependant sont dilTcrcntes : telles sont celles de Newton ^ , d'Euler s, de Boscovich ". Celles ci doivent le degré de simplicité qui les distingue à la connaissance à priori de la formule dont il s'agit de trouver une expression géomélrique. Celle de Héron et celle des Arabes ont le mérite d'être naturelles, et de porter le cachet de l'invention. Mais probablement la voie algébrique, qui fait usage de l'expression de la perpendiculaire, est celle qui aura procuré originairement la découverte de cette formule ; particulièrement chez les Indiens ; car ce genre de démonstration est tout-à fait dans l'esprit de leurs spéculations mathématiques, qui reposent sur l'alliance de l'algèbre et de la Géométrie. Nous terminerons nos observations sur celte formule par une remarque sur les trois nombres 13, 14 et 15, que les Indiens ont pris dans l'application numérique qu'ils en ont faite. Ces nombres sont très-remarquables, en ce qu'ils paraissent inséparables de la formule. Ce sont, non-seulement ceux des Indiens a plusieurs siècles d'intervalle, ■ Cap. 03. De mmruris supêrficienim ; art. 4. ^ De figurarum traitsmutatioiie et sectione ; Problenia S.*), p. 73. s Curtua malhematicus. 1690, in-fol., t. I". Trigonomelria liber tertiue , prop. X. * Arithmilique uniteraelle ; t. I", problème XI ' Novi Cffinmonfam dePétertbourg; t. I^', ann 1747 et 1748 * {)p«ni, etc.; t. V, opu«14, To«. XI. 5o K_.. 434 NOTES. mais aussi ceux de Héron d'Alexandrie, de Héron le jeune' , des trois frères arabes, Mohammed, Hamet et Hasen; ceux de Léonard de Pise, de Jordan, de Lucas de Burgo, de Georges Vaila-, de Tartalea, et de presque tous les écrivains qui ont reproduit la formule. Le morceau de Géométrie latin que nous avons cité, et la Margarita philoso- phica, sont peut-être les seuls ouvrages qui ne s'en soient pas servis, ayant pris, pour application numérique delà formule, un triangle rectangle ; mais ces ouvrages emploient les trois mêmes nombres dans d'autres passages, pour calculer l'aire d'un triangle en cherchant la valeur de la perpendiculaire. Pour la même question, traitée dans l'algèbre de Mohammed ben Musa (l'un des trois frères arabes cités ci-dessus), on trouve pareille- ment ces trois nombres *. C'est une circonstance assex intéressante aux yeux de l'historien, que partout se retrouve l'usage de la formule en question, et surtout des trois nombres 13, 14 et 15, employés •dans les ouvrages les plus anciens, et chex tous les peuples, disons-nous; chez les Grecs, presque à l'origine comme au déclin de l'école d'Alexandrie ; dans les Indes , chez les Latins, chez les Arabes; et, dès la renaissance, dans toutes les parties de l'Europe où les sciences sont cultivées. L'usage général de ces trois nombres semble dire qu'ils ont eu une origine commune. Telle avait été d'abord notre pensée , et nous avions regardé ces trois nombres comme une circonstance heureuse, propre à répandre quelque jour sur la question concernant la nature et l'étendue des communications scientifiques qui ont eu lieu dans des temps reculés entre l'Inde et la Grèce. Mais nous n'avons pas tardé à reconnaître que ces nom- bres n'offraient probablement pas les secours historiques que nous avions espérés d'abord. En effet, on aura cherché naturellement, pour application numérique de l'expression de l'aire d'un triangle, soit par la formule en question , soit par le calcul de la perpendicu- laire, trois nombres pour lesquels cette aire, et conséquemment cette perpendiculaire, fussent exprimées en nombres rationnels. La solution de cette question n'offre pas de difficulté. Elle se réduit à construire deux triangles rectangles en nombres rationnels, ayant un côté commun. C'est ainsi que Brahmcguptaa fait, comme nous l'avons dit au sujet de son § 34. Et il est à remarquer que la manièi'e de construire un triangle rectangle en nombres rationnels et entiers était connue des Grecs et des Latins, qui se servaient des deux formules imaginées, l'une par Pythagore, et l'autre par Archytas ou Platon. Maintenant, parmi tous lessytèmes de deux triangles rectangles exprimés en nombres rationnels entiers , et ayant un côté commun , on aura pris celui où ces nombres sont les ■ Voir son Traité de Géodésie ,vas>ca\xicxii qui «e trouve à la bibliothèque royale, sou» le n° 2013. Barocci a donné une traduction, accompagnée de commentaires , du Traité de Géodésie de Héron le jeune et de son livre sur les machines de guerre, sous le titre : Ileronis mcchanici lihcr de Machinis iellicis , nccnon liber de geodœsiâ; in-4'>, Venetii», 1572. Mais le manuscrit dont il s'est servi était incomplet , et la formule de l'aire du triangle ne s'y trouve pas. 2 Georgii Vallœ Placentini viri Clariss. De expetendis et fugiendis relus opiis , etc.; 2 vol. in-fol., Venise, 150t. Liber XIV, et Geometriœ V. ; cap. VII, Dimcnsio universalis in omni triangulo. ' The Jlgebra of Mohammed ben Musa , edited and iranslated by F. Rosen. London , 1831 , in-S" , p. 82 du texte anglais , et p. 61 du texte arabe. NOTES. 435 plus petits; ce sont ceux qui ont pour eûtes, le premier 6, 12, 13, et le second 0,12,15. Plaçant nés deux triangles de manière que leurs deux côtés égaux se confondent et que les autres cdtés des angles droits soient dans le prolongement l'un de l'autre , on forme le triangle scalcne qui a sa base égale à 14 , et ses deux autres côtés égaux à 13 et 15. C'est ainsi que dillércns géomètres, chacun de son côté, auront pu être conduits au triangle exprimé par les trois nombres 13, 14 et 15. Cependant nous devons dire qu'avec les deux triangles rectangles dont nous nous sommes servi pour former celui-là, on en peut former un autre encore plus simple. Pour cela il faut superposer leurs deux côtés 0 et 6 ; il en résulte le triangle qui a pour base 4 , et pour côtés 13 et 15. Sa hauteur est 12 , comme pour le premier. Mais ce triangle est obtusangle; sa perpendiculaire, tombe en dehors de sa base; et, bien que ce cas puisse se présenter aussi souvent que celui d'un triangle acu- tangle , on le regarde généralement comme étant moins propre à servir d'exemple. Ainsi , naturellement, on aura choisi le triangle dont les côtés sont 13, 14 et 15. Ces considérations montrent que l'ou ne doit pas conclure , de ce que les Indiens ont employé les trois nombres, 13, 14 et 15, de même que Héron l'ancien, dans leurs ap- plications de la formule de l'aire du triangle, qu'ils ont reçu cette formule du géomètre d'Alexandrie. Mais l'eussent-ils reçue, les droits de Brahmcgupta au titre de géomètre habile n'en recevraient aucune atteinte, puisque son ouvrage contient une formule beau- coup plus importante et des questions plus difficiles, dont nous ne trouvons pas de traces chei les Grecs. Le S 28 de Brahmegupta donne les expressions des diagonales d'un quadrilatère inscrit au cercle, en fonction des côtés. Ce sont les formules connues. Elles résolvent le pro- blème où il s'agit de construire avec quatre côté» donnés , un quadrilatère itiscriplihle au cercle. De sorte que le géomètre indien a connu la solution de ce problème. Cette cir- constance n'est pas indifférente. Car ce problème, agité chez les Modernes, y a eu pendant un temps quelque célébrité ; et tous n'y ont pas réussi. Nous donnerons une courte notice des géomètres qui s'en sont occupés , dans nos obser- vations sur le§ 38, qui est une suite de ce premier problème. Pour ne pas trop alouger cette Note, nous omettrons les observations auxquelles peu- vent donner lieu les propositions des § 23, 25, 2S), 30-31 et 32. Nous dirons seulement que la seconde partie du § 30-31 énonce une proposition assez remarquable. Brahme- gupta montre comment on calculera la perpendiculaire abaissée du point d'intersection des deux diagonales du trapèze sur sa base, et donne (sans indiquer le moyen de la cal- culer), l'expression du prolongement de cette perpendiculaire, jusqu'à la base supérieure. De celte expression nous concluons immédiatement que cette perpendiculaire pa*se par le point milieu de la bâte supérieure. Proposition facile à démontrer, mais qui mérite d'être signalée dans l'ouvrage de Brahmegupta. Elle fait bien voir qu'il est question d'un quadrilatère qui satisfait aux deux conditions d'être inscriptible dans le cercle et d'avoir ses diagonales à angle droit. Nous allons rapporter les énoncés des quatre propositions comprises sous les § 35 , 436 NOTES. 36, 37 et 38, qui nous ont paru résoudre la question de construire un quadrilatère inscriptible dans le cercle, et dont toutes les parties fussent rationnelles. § 35. Le côté est prié arbitrairement ; son carré est divisé par une quantité quel- conque; du quotient on retranche cette quantité ; la moitié du reste est la cathète de Vohlong ; et si l'on y ajoute la quantité^ on aura la diagonale. Ainsi soit a le côté de l'oblong, h la quantité prise arbitrairement. 5 b \ sera la cathète, et i ( b\-^b=\i—-*-b\ sera la diagonale. En effet on a D'après ce que nous avons déjà dit de cette formule , appliquée à la construction du triangle rectangle, on ne peut douter qu'il ne s'agisse ici de la construction d'un oblong dont les diagonales soient exprimées, comme les côtés, en nombres rationnels. L'aire de l'oblong sera rationnelle aussi ; et il en sera de même du diamètre du cercle circonscrit à l'oblong, puisque ce diamètre est égal aux diagonales. § 36. Que les diagonales d'un oblong soient les flancs d'un tétragone ; que le carré du côté de l'oblong soit divisé par une quantité prise arbitrairement , et que le quo- tient soit retranché de cette quantité ; le reste divisé par deux , augmenté de la cathète de l'oblong , sera la base , et diminué de la cathète sera la corauste. Soient a et i le côté et la cathète de l'oblong, et c une quantité prise arbitrairement. Les deux flancs du tétragone seront égaux aux diagonales de l'oblong; sa base sera égale à «'\ - / «' , c — — J + 6 , et sa corauste a i ( c — r- ) — b. § 37. Les trois côtés égaux d'un tétragone , qui a trois côtés égaux , ont pour va- leur le carré de la diagonale d'un oblong. On trouve le quatrième côté en retranchant le carré de la cathète de trois fois le carré du côté de l'oblong. Si ce quatrième côté est le plus grand , il sera la base du tétragone , s'il est le plu* petit il sera la corauste. Ainsi soient a le côté de l'oblong, et b sa cathète; a- + b- sera le carré de sa diago- nale. Nous supposons qu'il est formé suivant la règle du § 35; de sorte que sa diagonale, \/a" -t- V , sera un nombre rationnel. On prendra (a' + i ) pour la valeur des trois côtés égaux du tétragone, et (3a — b ) sera l'expression du quatrième côté. § 38. Les côtés et les cathètes de deux triangles rectangles , multipliés réciproque- NOTES. 437 ment par le» hypoténuse* , tant le* quatre calé* inégaux d'un trnpéie. Le plu* grand e*t la ba*e , le plu* petit la coraugte et le* deux autre* gont le* flancs. Soient a,b, c,\c côlé, la callièle, el i'hypolénusc ilu premier triangle, el a', i', C, le côté, la cathétc et l'hypoténuse du second triangle '. Les quatre côtés du trapèze seront ao' , hc , a'c, h'c. L'ordre dans lequel ces cAtés seront placés est indiqué par l'auteur, puisque les deux extrêmes seront les bases et les deux moyens les flancs. Les propositions que présentent ces quatre paragraphes sont évidemment incomplètes, puisque chacune se réduit à donner une construction particulière des quatre côtés d'un tétragone. Or, d'une part, ces côtés ne sufiiscnt point, excepté dans la première où il s'agit de l'oblong, pour la construction du tétragone ; et ensuite le tétragone étant cons- truit, il n'est rien dit des propriétés dont il jouira , et qui ont dû faire l'objet de ces pro- positions. On doit donc penser que la construction des côtés, donnée par Brahmegupta, répond à une question qui avait été énoncée primitircmcnt dans le titre de l'ouvrage et qui en a disparu dans quelqu'un des manuscrits qui se sont succédé. Il fallait retrouver quelle avait été celte question; sans quoi l'on n'aurait point connu et l'on n'aurait su apprécier l'ouvrage de Brahmegupta. Le scoliastc Chaturveda, dans l'application numé- rique qu'il fait des quatre propositions, parait avoir ignoré complètement leur destina- tion; et ne nous fournit aucune donnée ni aucune lumière à ce sujet. Mais ayant reconnu qu'il est question, dans la plupart des autres propositions dont nous avons déjà parlé, du tétragone inscrit au cercle, nous avons pensé d'abord qu'il en était de même des quatre propositions dont il s'agit. Ensuite, la première de ces quatre propositions, exprimée algébriquement, nous présentant la formule qui sert pour la construction d'un rectangle dont les côtés et les diagonales soient des nombres ration- nels, et celle-ci, d'ailleurs, faisant suite dans l'ouvrage aux deux propositions qui nous ont déjà paru avoir incontestablement pour objet, de construire un triangle dans lequel les perpendiculaires et conséqucmment l'aire et le diamètre du cercle circonscrit, fussent exprimés en nombres rationnels, nous avons été conduit naturellement à supposer que c'était une question analogue que Brahmegupta avait résolue pour le tétragone inscrit. En effet, en formant avec les quatre côtés dont l'expression est donnée par chacune des quatre propositions, un tétragone inscriptible au cercle, et en appliquant à cette figure les différentes formules que contiennent les autres paragraphes de l'ouvrage pour le cal- cul de l'aire du tétragone, de ses diagonales, de ses perpendiculaires, du diamètre du cercle circonscrit, et des segmens que différentes lignes font les unes sur les autres, nous avons trouvé que toutes ces formules donnent des expressions rationnelles. Nous avons dû en conclure que tel avait été l'objet des quatre propositions de Brahmegupta. La proposition du § 38 nous donne lieu à plusieurs observations. Les quatre côres du tétragone ont pour expressions ac , bc , a'c et A'c. L'auteur a pres- crit l'ordre dans lequel ils seront placés; les deux extrêmes seront opposés. D'après cette ' ' Itoui détignerons plua loin cei deux triaoglei son* le nom de triangle* générateur*. 438 NOTES. règle, on reconnaît aisément qu'ils proviendront de la multiplication des deux côtés d'un même triangle par l'hypoténuse de l'autre; et les deux moyens de la multiplication des deux côtés de celui-ci par l'hypoténuse du 1". Car la somme des carrés des deux côtés ae', be', est égale à la somme des carrés des deux autres côtés a'c, b'c; cette somme étant c^c'^. Ce qui prouve que si ac' est le plus grand côté , bc' sera le plus petit ; conséquem- ment ac et bc' , qui proviennent de la multiplication des côtés d'un même triangle par l'hypoténuse de l'autre, seront opposés entre eux, dans la construction du tétragone. Nous concluons de là que la somme des carrés des deux côtés opposés est égale à la somme des carrés des deux autres côtés; et le quadrilatère étant supposé inscriptible dans le cercle, il résulte de cette égalité des sommes des carrés des côtés opposés, que le* deux diagonales du quadrilatère sont à angle droit. Ainsi il est démontré géométriquement que dans le § 38 ,1e mot trapèze s'applique exclusivement au quadrilatère qui a ses dia- gonales à angle droit. Soit ABCD le trapèze ; on aura AB = ac' , BC = a'c , CD = bc' , et AD = b'c. Les formules du § 28 donnent pour ses diagonales : AC = ab' -+- ba' , BD = aa' h- bb'. 0 V IJ On peut calculer l'aire du trapèze par la formule du § 21 ; mais il est plus simple de remarquer que les diagonales étant à angle droit , celte aire est égale au demi-produit de ces deux lignes ; ainsi son expression est | (ab' -+- ba') [aa' -f- bb'}. Le diamètre du cercle circonscrit est égal , suivant la seconde partie du § 26 , à la racine carrée de la somme des carrés des deux côtés opposés , qui est ici : b'c" = c'Va' b' = ce'. Les perpendiculaires BE , CF abaissées des deux sommets B, C, sur la base AD , calculées dans les deux triangles ABD, ACD, par la règle du § 22, ainsi qu'il est dit par Brahme- gupta , au § 29, sont : BE = -(« bb') , CF = - (ab' C ba'). NOTES. 439 Les segmens que ces perpendiculaires font sur la base AD , sont : AE = - (ab' — 60') , DE B= i (aa' h- bb') , e c h a DF=- (bb'—aa'), AF= - (ai' + Aa'). Les segmens faits sur les deux diagonales, à leur point d'intersection, calculées par la règle du § 30-31 , sont : A0 = a6', C0 = o'6, BO = oa', DO = W. La perpendiculaire 01, dans le triangle AOD , calculée, comme il est dit au § 30-31 , (ou par une proposition résultante de la similitude des deux triangles EBD, lOD), est 01 =^; et son prolongement OL, jusqu'à la base supérieure, est égal , suivant la règle du même paragraphe, à la demi-somme des deux perpendiculaires BE, CF, moins OU d'où OL = i àc. Enfin nous n'avons pas besoin de donner les expressions des segmens faits sur les diago- nales et les perpendiculaires, par leur intersection, non plus que sur les côtés opposés ; parce que tous ces segmens, dans un quadrilatère quelconque , sont exprimés rationnelle- ment en fonction des eûtes, des diagonales et des perpendiculaires. Ainsi toutes les parties de la figure sont rationnelles. Nous pouvons donc regarder la proposition du § 38 comme ayant eu pour objet de former un tétragone ayant ses quatre côtés inégaux, qui fût inscriptible au cercle, et dans lequel toutes les expressions que Brahmegupta a appris à calculer par ses autres proposi- tions , fussent rationnelles. Ces expressions ne sont point calculées dans l'ouvrage indien. On ne doit pas en être étonné, puisque Brahmegupta se borne toujours au simple énoncé , le plus succinct pos- sible, de ses propositions , sans en donner aucune démonstration, ni aucune Térification à posteriori. Nous faisons cette observation parce que Bhascara donne , comme formant une propo- sition nouvelle qu'il s'attribue, les expressions des diagonales AC, BD, et reproche aux écrivains qui l'ont précédé, particulièrement à Brahmegupta, d'avoir omis cette règle, beaucoup plus courte , dit-il, que la formule du § 28 qu'ils ont donnée. Les valeurs assignées aux côlés du quadrilatère par l'énoncé de la proposition § 38 , et les valeurs que nous avons trouvées pour les segmens OA , OB , OC , OD , font voir que les côtés de chacun des quatre triangles AOB , BOC , COD , DOA , qui sont rectangles en 0 et qui composent le quadrilatère, proviennent respectivement de la multiplication des trois côlés de chaque triangle générateur , par un côté de l'autre triangle. Ainsi les trois côtés du triangle AOB sont ac' , ah' , aa' ; ils proviennent de la multiplication des côlés e' ,b' , a', du second triangle générateur par le côté a du premier. On peut donc, non-seulement déterminer les quatre côtés du quadrilatère, au moyen des deux triangles générateurs, mais aussi effectuer la construction du quadrilatère. Car 440 NOTES. il suffit de former, comme nons venons de le dire, les quatre triangles rectangles AOB, BOG, COD, DOA , et de les réunir ensemble. C'est ainsi que les scoliastes, particulière- ment Ganesa, dans ses notes sur l'ouvrage de Bhascara, ont compris la construction du quadrilatère; et ont suppléé de la sorte à la condition d'inscriptibilité au cercle, que nous supposons avoir été dans les intentions de Brahmegupta. On conçoit dès lors com- ment Chaturveda a pu faire des applications numériques des règles de Brahmegupta, en ignorant cette condition d'inscriptibilité. Avec les quatre côtés d'un quadrilatère inscrit au cercle, on peut former deux autres quadrilatères qui seront inscrits dans le même cercle. Ainsi a, S, y, â, étant les quatre côtés, pris consécutivement, du quadrilatère, on peut les placer dans l'ordre «, ê, â, y, ou bien dans l'ordre a, y, ê, â. Ces trois quadrilatères ont, deux à deux, une même dia- gonale; de sorte que de leurs six diagonoles il n'y en a que trois différentes; les trois autres étant égales respectivement à ces trois premières *. Si l'on applique cette remarque à la figure de Brahmegupta, les deux nouveaux qua- drilatères ne seront plus des trajièzes, c'est-à-dire, qu'ils n'auront plus leurs diagonales à angle droit. Mais ces lignes seront encore rationnelles ; ainsi que toutes les autres par- ties du quadrilatère que nous avons calculées pour le trapèze. De sorte que les deux nouveaux quadrilatères satisfont à la question générale que nous supposons que l'auteur hindou s'est proposée ; aussi aurait-il pu comprendre ces deux quadrilatères dans sa solution. L'existence de ces deux nouveaux quadrilatères a été connue de Bhascara, qui a donné l'expression de la troisième diagonale; mais qui n'a nullement aperçu quel était l'objet de la proposition de Brahmegupta, soit par rapport à l'inscriptibilité au cercle, soit par rapport à la rationalité des différentes parties de la figure. Cette troisième diagonale est égale à ce. C'est précisément la valeur du diamètre du cercle circonscrit au quadrilatère. Ce qui prouve que le quadrilatère a deux angles droits qui sont opposés. Cette forme particulière du quadrilatère , qui mérite d'être remarquée , ne l'a pas été par Bhascara ^ • Ces trois quadrilatères ont la même surface. Leurs trois diagonales diffe'rentes ont avec cette surface et le diamètre du cercle circonscrit une relation qui consiste en ce que : Le produit des trois diagonales , divisé par le double du diamètre du cercle circonscrit, est égal à l'aire de l'un des quadrilatères. Cette proposition parait due à Albert Girard, qui l'a «inoncée dans sa Trigonométrie. Nous ne trouvons pas qu'elle ait été reproduite depuis. 2 Cette propriété du quadrilatère, d'avoir deus angles droits, fait voir que la question de construire un quadrilatère inscriptible au cercle , dont les côtés , l'aire , les diagonales , les perpendiculaires , ainsi que le diamètre du cercle, soient exprimés en nombre rationnels, est susceptible d'une solution très-simple , qui con- siste à prendre pour le diamètre du cercle un nombre rationnel quelconque , et à décomposer de deux manières différentes le carré de ce nombre en deux autres carrés, les racines de ces nombres carrés seront les côtés du quadrilatère. On formera de cette manière les mêmes quadrilatères que par la méthode de Brahmegupta. Il est facile de voir que l'on peut encore opérer ainsi : Que l'on prenne un triangle scalène quelconque ABC , de manière que ses côtés et sa perpendiculaire soient des nombres rationnels ; et que par ses deux sommets B , C, on élève des perpendiculaires sur les côtés AB, AC, respectivement. Ces droites se couperont en un point D, et le quadrilatère ABDC satisfera à la question. En changeant l'ordre de ses côtés on formera le trapèze de Brahmegupta. NOTES. 441 Reprenons les expressions do la perpendiculaire CF el du segment FD. On a b b CF=: - (o6'^-io'), VD=- (bb' — aa'). c c Les deux lignes CF, FD, sont les côtés d'un triangle rectangle, dont l'hypoténuse est CD = Ac'. Ces expressions ne contiennent pas explicitement la quantité c' , ni par consé- quent le c6té CD, mais seulement les quantité a, b', dont la somme des carrés est égale au carré de o', ou CO = a'b et DO = b'b , dont la somme des carrés est égale au carré de CD. Ces expressions seraient donc encore rationnelles , quand bien même c', ou le côté CD, ne le serait pas. Par conséquent les lignes CF, FD donnent une solution géomé- trique de ce problème. Décomposer tin nombre donné [carré ou non) en deux nom- bref carrée, connaitgant une première solution de la question. Remplaçons o'', par A; on pourra exprimer ainsi, algébriquement, la question et sa solution; Pour résoudre l'équation x' -+- y = A , en nombres rationnels, quand on connaît un premier système de racines x', y', de cette équation, on prendra arbitrairement trois nombres carrés , a, b, c, tels que Von ait a' -t- b' = c^; et les racines cherchées seront ay' ■+- bif c hy' — ax' y = —c — Ces formules, auxquelles conduit naturellement la question géométrique de Brahme- gupta, contiennent virtuellement les formules générales pour la résolution de l'équation Ca?' ± A=y' ', que l'on a trouvées, au grand étonnement des géomètres européens, dans l'algèbre de cet auteur hindou, et qui, dans le siècle dernier, avaient fait honneur au grand Euler, qui, le premier, y était parvenu parmi les Modernes. ' En effet , dans l'ëqiiation à résoudre j:^ + y^ =: A , et dans les deux équations de condition x'^ -i- y'^ ^ K et o^-t-A^^c*, remplaçons 4? par x\/C, x' par x\^C, a par oJ/Cj elles deviendront Cx" + ?=■ = A, Cx'" + y''= A, Ca3 -t- i3 = c»; et les expressions des racine* X et y deviendrontj , par ces substitutions, S V ay' ■+■ bx' 0 Cax' — hy- c Ce sont les racine* de l'équation Cjt^ -|- y!> = A. maintenant observons que ce* racine* satisfont k cette équation , quelle* que soient le* valeurs des deux To». XL 56 442 NOTES. Les Indiens faisaient usage concurremment de l'Algèbre et de la Géométrie dans leurs spéculations mathématiques ; de l'algèbre pour abréger et faciliter la démonstration de leurs propositions géométriques, et de la Géométrie pour démontrer leurs règles d'algèbre et pein- dre aux yeux , par des figures , les résultats de l'analyse. Nous verrons des exemples de cette manière d'opérer, dans plusieurs passages des ouvrages de Bhascara, et dans les ouvrages des Arabes, qui ont reçu des Indiens cette alliance de l'algèbre à la Géométrie. Il paraît donc pos- sible que les Indiens soient parvenus à leur solution des équations indéterminées du second degré , par des considérations géométriques puisées dans la question du § 38, et que ce soit là la raison primitive de la présence du morceau de Géométrie intercalé dans les Traités d'a- rithmétique et d'algèbre de Brahmegupta. Ce qui viendrait à l'appui de cette conjecture, c'est qu'il paraît que les Arabes s'étaient aussi occupés des équations indéterminées du second degré, et qu'ils les avaient résolues par des considérations géométriques; ce en quoi ils auraient été , probablement, les imitateurs des Indiens. Cela semble résulter d'un passage de Lucas de Burgo, qui, dans sa Summa de Arithînetica , Geotnetria, etc. (distinctio prima , tractatus quartus) , parle du Traité des nombres carrés de Léonard de Pise, où se trouvait résolue l'équation x- -t- y"= A , par des considérations et des figures géo- métriques. Les formules de Léonard de Pise, que Lucas de Burgo rapporte', sont les nombres C et A, qui par conséquent peuvent être supposés négatifs. De sorte que l'équation peut prendre la forme , 0*2 ± A = y2 . et ses racines deviennent / ay' -t- bx' ' X = c (1) " r . , ' Cax ■+- by Nous donnons le signe possitif à la valeur de y, parce que cette variable n'entrant qu'au carré dans l'é- quation, son signe est indilTérent. Les équations de condition entre x' et y' d'une part, et a, 4^ c, de l'antre, sont Cx'^ ± A = 2/'3, Ca2 -+- c3 = 4a. C'est-à-dire que x' et y' sont un système de racines de l'équation proposée; et que - et - sont un système de racines de l'équation Cx^ -\-\ ^ y^. Les formules (1) qui résolvent l'équation Cx^ rt A = j^ sont précisément celles que l'on trouve dans l'al- gèbre de Brahmegupta (section VU; pag. 364 et art. 63 de la traduction de M. Colebrooke.) Ainsi ces formules générales pouvaient se déduire facilement de la simple question de Géométrie traitée par l'auteur indien. ' Cardan dit aussi avoir emprunté de Léonard de Pise ces mêmes formules, qu'il donna, sans démonstra- tion, dans sa Practica Arithmetice (chap. 68, question 44). Viète est le premier qui les ait démontrées, au commencement du IV» livre de ses Zététiques. Sa démonstration est analytique. Peu de temps après, Alexandre Andersen s'est aussi occupé de cette question d'analyse indéterminée, et a démontré par des considérations géométriques les formules de Diophante , qui sont différentes de celles de Léonard de Pise ( voir Exercitatio- num mathematicarum Decas prima. Paris , 1619, in-4'»). Dans les notices historiques sur les équations indéterminées du second degré , on ne fait remonter qu'à NOTES. 443 mêmes que celles que nous avons déduites de la question géométrique de Brahmegupta. Or, Léonard (le Fisc avait rapporté ses connaissances mathématiques de l'Arabie. Nous devons donc attribuer ses formules, pour la résolution des équations indéterminées du se- sond degré, aui Arabes ; et penser que ceux-ci les avaient reçues des Indiens. Après avoir formé notre opinion sur les questions précises qui avaient été l'objet des §§ 21 à 38 de l'ouvrage de Brahmegupta, nous avons été curieux de savoir si, parmi les Modernes, et à quelle époque, les mêmes questions avaient été traitées; et si l'on pouvait établir une sorte de comparaison entre le travail des géomètres hindous et celui des géo- mètres européens. Voici ce que nous avons trouvé à ce sujet : J.-B. Bencdictis a résolu la question de construire avec quatre côtés donnés un qua- drilataire inscriptihle dans le cercle {voir son recueil intitulé : Diversarum specida- tionum nutthemalicarum et p/iysicarum liber. Taurini , 1585 ; in-fol°). Ce problème lui avait été proposé par le prince Charles-Emmanuel de Savoie. En 1504, le célèbre Joseph Scaliger en inséra une solution inexacte dans ses Cyclome- trica elementa duo (Lejde, in-fol. ). a, b, c, d, étant les quatre côtés donnés, on conclurait de cette solution que le diamètre du cercle dans lequel le quadrilatère formé avec ces quatre côtés serait inscrit, aurait pour expression Va'^^P ■+■ V c- -\- . 2 The diameter and the square of the semidiameter , leing severally multiplied Jy three, are the practical circumference and area. The square-roots extracted from ten times the squares oftho same arc the neat values. * NOTES. 447 dicunt , ti qui» toiret radiée* numerorum rectâ radiée carentium invenire, ille faci- liter inveniret , quanta ettet diameter retpectu eircumferentiœ. Et teeundum eot , ti diameter fuerit unitai , erit circumferentia radix de decem : ti duo, erit radix de quadraginta : ti tria, erit radix de nonaginta : et tic de aliit , etc. Rcgioinontanus ( 1436-1476 ), au contraire, attribue le rapport V\0 aux Arabes. Voici ses paroles : Ara- het olim circulum quadrare polliciti ubi eircumferentiœ tuœ œqualem rectam det- criptittent, hanc pronuntiavere tententiam : ti circuli diameter fuerit ut unum , circumferentia ejut erit ut radix de decem. Qiiœ tententia cum tit erronea... Butéon (1492-1.')72), dans le second livre de son ouvrage De quadraturâ circuli , libri duo (Lyon , 1559 , in-8°), où il fait l'histoire de ce problème, et réfute les paralogismes qu'il avait déjà occasionés, énonce en ces termes la même opinion que Kcgiomontanus : Te- TRAGONiSMus SECVKDUM Arabes. Omnit circuU perimetrot ad diametrum. décupla ett potentià Putet igitur hujutmodi tetragonitmum teeundum Arabet ette faltum , et extra limitet Archimedit. Sur la Géométrie de Bhascara Acharyn. Les ouvrages de Bhascara sont, comme ceux de Brahmegupta, un traité d'arithmétique, que l'auteur appelle Lilavati, et un traité d'algèbre qu'il appelle Bija-Ganita. La Géométrie se trouve comprise dans le Lilavati, où elle forme les chapitres VI, VII, VIII , IX , X et XI, sous les §§ 133-247. Le chapitre VI est le plus considérable ; il traite des figures plants : les autres sont peu de chose, et ont les mêmes titres, excavationt , ttackt , etc., que dans le traité de Brah- megupta. Le Bija-Ganita contient aussi quelques questions de Géométrie , qui s'y trouvent comme applications des règles de l'algèbre , et qui sont résolues par le calcul. On remarque encore dans cet ouvrage quelques propositions algébriques qui y sont démontrées par des consi- dérations géométriques. Nous ferons connaître ces propositions isolées , après que nous aurons examiné la partie géométrique proprement dite. Nous diviserons celle-ci en cinq parties : les trois premières seront relatives au triangle en général, au triangle rectangle et au quadrilatère; la quatrième comprendra quelques propositions sur le cercle ; et dans la cinquième seront les règles pour la mesure des volu- mes, et le chapitre sur l'usage du gnomon. Première partie : Proposilionx tiir le triangle. 1° Théorème du carré de l'hypoténuse, § 134. 2° Expression des segmens faits sur la base d'un triangle par la perpendiculaire ; et expression de la perpendiculaire, §§ 163-104, 165, 166. 3° L'aire du triangle est égale à la moitié du produit de la base par la perpendiculaire, §1641. ' Le commentateur Ganéta démontre autrement que noui n'avont coutume de le faire, d'après Euclide, que l'aire du triangle est égale a la moitié du produit de la base par la perdendiculaire. 448 NOTES. « 4° Formule qui donne l'aire du triangle en fonction des côtés, § 167. Nous l'énoncerons ci-dessous, au sujet du quadrilatère. Deuxième partie : Sur le triangle rectangle. 1° Régies pour former un triangle rectangle en nombres rationnels; Quand un côté est donné , §§ 139, 140, 141, 14.3, 145; Quand l'hypoténuse est donnée, §§ 142, 144, 146. 2° Construire un triangle rectangle dont on connaît un côté et la somme ou la diffé- rence de l'hypoténuse et du second côté, §§ 147, 148, 149, 150, 151, 152, 153. 3" Règle pour déterminer sur un côté d'un triangle rectangle le point dont la somme des distances aux extrémités de l'hypoténuse est égale à la somme des deux côtés de l'an- gle droit , §§ 154, 155. 4° Construire un triangle rectangle dont on connaît l'hypoténuse et la somme ou la différence des deux côtés de l'angle droit, §§ 156, 157, 158. Troisième partie. Propositions sur le quadrilatère. 1» La demi-somme des côlés est écrite quatre fois, on en retranche séparément les côtés, et l'on fait le produit des restes. La racine carrée de ce produit est l'aire, inexacte dans le quadrilatère , mais reconnue exacte dans le triangle ; §§ 167 , 168. C'est la formule de Brahmegupta , que Bhascara a copiée , sans l'avoir comprise , et sans avoir aperçu qu'il y était question de quadrilatère inscrit au cercle. Yoilà pourquoi il dit que la règle est inexacte pour le quadrilatère ; et qu'il prouve ensuite qu'il est absurde de demander l'aire d'un quadrilatère dont on ne connaît que les côlés , parce qu'avec les mêmes côlés, dit-il, on peut former plusieurs quadrilatères différens '. §§ 169-170, 171, 172. 2° Dans le quadrilatère équilatéral, ou losange , l'aire est égale à la moitié du produit Il forme un rectangle qui a même base que le triangle , et pour hauteur la moitié de la perpendiculaire. La base supérieure du rectangle retranche du triangle un petit triangle qui est divisé par la perpendiculaire en deux triangles rectangles. Ceux-ci sont égaux respecti\ement aux deux triangles qu'il faut ajouter à la portion inférieure du triangle proposé pour compléter le rectangle. D'où il conclut que l'aire du triangle est égale à celle du rectangle, et conséquemment égale au produit de la base par la moitié de la perpendiculaire. Cette démonstration est très-simple et parle aux yeux autant qu'à l'esprit. C'est celle qu'emploient les Arabes, et qui a été adoptée à la renaissance, particulièrement par Lucas deBurgo etTartaléa. ' Le scoliaste Suryadasa, auteur de deux commentaires excellen», sur le Lilavati et le Bija-Ganita (Cole- brooke ; Brahmegupta and Bhascara, al Le produit des cathètes ajouté au produit des côtés est une diagonale ; la somme des » produits des cathètes et des côtés , multipliés réciproquement , est l'autre diagonale. » Quand cette courte méthode se présentait , je ne sais pourquoi une règle laborieuse » a été employée par les premiers écrivains. » Bhascara ajoute que : « Si la corauste et l'un des flancs changent de place, l'une des » diogonales deviendra égale au produit des hypoténuses des deux triangles rectangles.» Nous devons conclure de ce passage, que Bhascara n'a pas compris les propositions de Brahmegupta qu'il reprend. Celui-ci, comme nous l'avons déjà dit, n'a pas énoncé les for- mules données au § 191-192 de Bhascara, parce qu'elles n'étaient, dans son esprit, qu'une simple vérification de la rationalité des diagonales , et non pas le sujet d'une proposition. Bhascara remarque qu'en changeant de place deux côtés contigus du quadrilatère , on en forme un second, où l'une des diagonales est différente, et a pour expression le produit des hypoténuses des deux triangles générateurs. Cela est vrai ; mais Bhascara ne dit pas plus pour ce second quadrilatère que pour le premier, quelles seront ses propriétés qui avaient été l'objet de l'ouvrage de Brahmegupta. Il ne remarque pas non plus que ce nou- veau quadrilatère a deux angles droits. 9° Calcul des segmens que les diagonales et les perpendiculaires d'un quadrilatère, et les côtés prolongés, font les uns sur les autres; §§ 193-194, 195-196 , 197, 198-200. On suppose connus les côtés , les diagonales et les perpendiculaires. Tous ces calculs sont sans difficulté ; ils reposent sur le principe de la proportionnalité des côtés dans les triangles équiangles. Telles sont les propositions sur le quadrilatère. Elles forment, avec celles qui concer- nent le triangle , la partie de l'ouvrage de Bhascara qui correspond aux dix-huit premiers paragraphes de celui de Brahmegupta. Avant de passer aux autres propositions de Bhas- cara , nous allons faire ressortir les différences que ces premières ont avec celles de Brah- megupta, dont elles ne sont qu'une imitation. Ces différences portent sur les points suivans : NOTES. 431 1° Toutes les propositions de Bhascara sont étrangères au cercle dont il est question formellement dans l'énoncé des §§ 2G et 27 de Brabmegupta, et qui joue le rôle principal dans plusieurs autres propositions. 2" La formule pour l'aire du quadrilatère (inscrit au cercle), donnée par Brabmegupta, est déclarée inexacte par Bhascara. 3° L'expression générale des diagonales du quadrilatère inscrit, donnée par Brabme- gupta, est censurée par Bhascara, comme étant d'un calcul pénible, et est regardée par lui comme n'étant applicable qu'à un quadrilatère d'une construction particulière. 4° Plusieurs propositions de Brabmegupta ne se trouvent point dans l'ouvrage de Bhas- cara. Telles sont les suivantes : I". L'expression du diamètre de cercle circonscrit à un triangle ou à un quadrilatère; II*. L'expression particulière du diamètre du cercle circonscrit à un quadrilatère ayant ses diagonales rectangulaires; IIP. La propriété de ce quadrilatère, qui consiste en ce que la perpendiculaire sur l'un de ses eûtes , menée par le point d'intersection des deux diagonales , passe par le milieu du côté opposé; IV La manière de former un triangle isocèle ou scaléne dont les côtés et la perpendicu- laire soient des nombres rationnels ; V La manière de former un quadrilatère inscriptible au cercle, dont deux côtés oppo- sés, ou bien trois côtés, soient égaux, et dont toutes les parties, ainsi que le diamètre du cercle , soient rationnels. L'absence de ces dernières propositions (IV° et V) dans l'ouvrage de Bhascara prouve que ce géomètre n'a point eu en vue comme Brabmegupta, de résoudre la question de construire un quadrilatère inscriptible au cercle, et dont toutes les parties soient ration- nelles. Enfin nous devons dire que l'ouvrage de Bhascara contient quelques propositions sur le triangle rectangle , qui ne se trouvent pas dans celui de Brabmegupta ; et qui , en effet, y eussent été étrangères à la théorie qui est l'objet de cet ouvrage. En résumé : l'ouvrage de Brabmegupta résolvait complètement, et avec précision , la question de construire un quadrilatère inscriptible au cercle, dont toutes les parties fus- sent rationnelles. Aucune proposition n'était étrangère à cette question, ni inutile pour sa solution. Celui de Bhascara n'a point un objet unique. On peut le diviser en trois parties prin- cipales , indépendantes les unes des autres. Dans la première, on donne l'expression de la perpendiculaire dans un triangle; et la formule pour le calcul de l'aire de cette figure en fonction des trois côtés; Dans la seconde, on traite de la construction d'un triangle rectangle en nombres ra- tionnels, et de quelques questions sur le triangle rectangle; Dans la troisième , l'auteur calcule différentes lignes dans un quadrilatère quelconque dont on connaît les quatre côtés et une diagonale. Il y a donc des différences nombreuses et tranchées entre les deux ouvrages. Malgré 452 NOTES. ces différences, nous devons reconnaître que le plus récent n'est qu'une imitation ou une copie du premier; copie imparfaite et défigurée, qui prouve évidemment queBhas- cara n'a pas compris l'ouvrage de Brahmegupta. Les notes de divers scoliastes, qui accompagnent le texte du Lilavati , nous montrent que ces écrivains n'ont pas été plus heureux que Bhascara , et qu'ils n'ont pas eu nou plus l'intelligence des propositions de Brahmegupta. Mais les propositions qu'il nous reste à citer du chapitre VI du Lilavati ont beaucoup plus de valeur que celles auxquelles elles correspondent dans le Traité de Brahmegupta. Nous allons en présenter les principales, où l'on aura à remarquer surtout une expres- sion très-approchée du rapport de la circonférence au diamètre, et une formule très- simple pour le calcul approximatif d'une corde en fonction de son arc. § 201. « Le diamètre du cercle étant D, l'expression D. ^ est à peu près la circonfé- » rence ; D. — est l'approximation employée dans la pratique. » Ces deux expressions ne se trouvent pas dans l'ouvrage de Brahmegupta. Le rapport ~ est celui d'Archimède. Le premier -^ est plus exact; car il est égal à 3,14160 , et l'on a — = 3,1428571.... Pour obtenir une plus grande approximation il faut se servir du rapport 3,1415926.... L'approximation des Indiens • est remarquable surtout à cause du petit nombre de 355 chiffres qui y entrent. Toutefois le rapport d'Adrien Metius,— = 3,14159292 est préférable. § 203. "c Règle. Le quart du diamètre multplié parla circonférence est l'aire du cercle. » Celte aire multipliée par 4 est la surface de la sphère. Cette surface , multipliée par le » diamètre et divisée par 6 est la valeur précise du volume de la sphère. » Ç 205-206. « Rèqle. Soit D le diamètre du cercle; D' — ^ est l'aire du cercle d'une ma- •* -^ jj ' 6000 » nière assez rapprochée; D'— est sa mesure grossière employée dans la pratique; » — - -f- — - — est la mesure du volume de la sphère. » Ces deux dernières expressions résultent du rapport d'Archimède ; car on a ^ 11 _ D' 22 î^ J. 5! _ I^' 22 § 206-207. Ce sont les relations entre la corde, sa flèche et le diamètre du cercle, données par Brahmegupta; §41 et 42. 1 Le rapport -rf-r ne doit pas être attribué à Bhascara; il est beaucoup plus ancien que ce géomètre. On le trouvent sou» la forme '" , dans l'alficbre de Mohammed ben Musa , qui , après avoir donné le» ■»ri(l(i(i ' o I i I i :ioooo ■ 62832 deux rapports — et \/lO, dit que les astronome» se servent d'un troisième, qui est ^" "" [Voirp. 71 de la traduction de M. Frédéric Roscn.) D'après cela on peut se demander si ce rapport appartient aux Indien» ou aux Arabes. M. Rosen et M. Libri pensent qu'il est d'origine indienne. (Voir Mohammed hen Musa, Algelra translated by F, Rosen , p. 199; et Histoire des sciences mathématiques en /«o^jc^pag. 128.) Ce rapport est connu en Europe depuis long-temps. Purbach en parle dans son traité de la construction des sinus , et Stevin dans sa Géographie. NOTES. 4d3 § 209-211 et 212. « Dans le cercle dont le diamètre est 2000, les côtés du triangle » équilatéral inscrit, cl des autres polygones réguliers sont: pour le triangle 1732 — ; pour wletélragone 1414-; pour le pentagone 1175—; pour l'hexagone 1000; pour l'epla- » gone867 — ; pour l'octogone 765 — ; et pour le nonagone 683 — ■ » L'auteur ajoute : « De différens autres diamètres on déduira d'autres côtés, comme » nous le montrerons sous le titre de conttruction des tinu*, dans le traité sur les sphi- » rique*. » La règle suivante enseigne une méthode expédilive, pour trouver les cordes par » une approximation grossière. » § 21.3. Soit c la circonférence, a l'arc; D le diamètre et G la corde; on aura : 40. a{c-a) le' — a{c — a) Cette formule approximative est très-curieuse; il serait intéressant de savoir comment les Indiens y sont parvenus. M. Servois l'a obtenue en prenant la formule qui donne, en série, le sinus d'un arc en fonction de cet arc (Voir Correspondance sur l'école Polytechnique , tom. III, troisième cahier). § 214. Exemple. Le diamètre étant 240, les cordes des arcs de 20, 40, 60, 80, 100, 120, 140, 160 et 180 degrés seront 42,82, 120, 154, 184, 208, 220, 236 et 240. § 215. Formule qui donne l'arc a, en fonction de la corde C, de la circonférence c et du diamètre D. -=-.-v/^ ic^c 4D+C On tire cette formule de celle du § 213, en résolvant une équation littérale du se- cond degré. Les chapitres VII, VIII, IX et X ne contiennent rien de plus que ceux auxquels ils correspondent dans l'ouvrage de Brahmegupta. Le chapitre XI a pour objet le calcul des distances par l'ombre du gnomon. On y trouve les questions traitées par Brahmegupta, et, de plus, celle-ci: un gnomon étant éclairé par deux points lumineux différons, si on connaît la différence des ombres et la diffé- rence de leurs hypoténuses, on saura déterminer les ombres. Cela se réduit à ce problème : Connaittaiit la perpendiculaire d'un triangle , la différence des segmens quelle fait sur la hase , et la différence des deux autres côtés , construire le triangle. Soit h la hauteur, ou perpendiculaire, du triangle, ^ la différence des segmens; et d 434 NOTES, la diiTérence des côtés; les segmens seront égaux à (^±d . /l C'est la formule de Bhascara. On trouve dans le Bija-Ganila plusieurs questions de Géométrie résolues par le calcul , et plusieurs règles d'algèbre démontrées par la Géométrie. Toutes ces questions sont trai- tées avec une précision et une élégance bien remarquables. Dans quelques-unes , qui pouvaient être résolues de plusieurs manières , c'est la solu- tion la plus simple que l'auteur a choisie , on croit lire un passage de V Arithjnétique universelle, où Newton donne des préceptes si judicieux sur le choix des inconnues. Ainsi, ayant à trouver la base d'un triangle scalène dont les côtés sont 13 et 5, et l'aire 4, Bhascara remarque que « si l'on prend pour l'inconnue la base cherchée, » on tombe sur une équation quadratique. Mais si l'on cherche la perpendiculaire abais- » sée sur l'un des côtés donnés, du sommet opposé, et les segmens faits sur ce côté, on )) en déduit, par une simple extraction de racine carrée, la base cherchée. Elle est 4.» (Bija-Ganita,§117.) Bhascara donne deux démonstrations du carré de l'hypoténuse. La première consiste à chercher par une proportion , l'expression des segmens faits sur l'hypoténuse par la per- pendiculaire ; et à ajouter ensemble ces deux segmens. C'est la démonstration employée par Wallis. [De sectionihus angularihus , cap. VI.) La seconde est tout-à-fait d'origine indienne ; elle est fort remarquable. Sur les côtés d'un carré, Bhascara construit intérieurement quatre triangles rectangles égaux entre eux, ayant pour hypoténuses ces côtés , et il dit voyez. En effet , la vue de la figure suffit pour montrer que l'aire du carré égale les aires des quatre triangles (ou quatre fois l'aire de l'un d'eux), plus l'aire d'un petit carré qui a pour côté la différence des deux côtés de l'angle droit de l'un des quatre triangles. C'est-à-dire que l'on a, en appelant c l'hy- poténuse d'un des triangles et a , A ses deux autres côtés , ah c' = i H {a—by = '2ab -t- (a~by , ou, c' = a'' -f- 6\ ce qui est la proposition qu'il fallait démontrer (Bija-Ganita , § 146). Les formules d'analy.se Hab -h {a — by= a'-^-b\ (a + by — (a'-+-Z» ') = "lab , (a-i-by — iab = {a — by , sont démontrées par des figures qui parlent aux yeux et à l'esprit, sans qu'il soit besoin d'aucune explication (§ 147, 149 et 150). NOTES. 455 Pour la résolution en nombres rationnels de l'équation indéterminée du second degré , Bhascara fait Toir , par une figure qui donne une signification géométrique à cette équa- tion , qu'elle peut se transformer en celle-ci {x — b) (y — a) = ab -h c. D'où il conclut qu'on peut prendre pour les valeurs rationnelles de x et de y ab-t-c xe=:b -^ n, y = a -i ; n étant un nombre arbitraire. Bhascara appelle cette démonstration géométrique. Il en donne ensuite une purement algébrique (§212-214). Plusieurs questions de Géométrie sont résolues dans le Bija-Ganita, comme applica- tion des régies d'algèbre. Quelques-unes dépendent d'équations indéterminées du second degré. Telles sont ces deux-ci : « Trouver (en nombre rationnels) les côtés du triangle » rectangle dont l'aire est exprimée par le même nombre que l'hypoténuse , ou bien « est égale au produit des trois côtés. » (§ 120.) Dans le premier cas, les côtés du triangle sont -T' 'ë ^' T ' *' ^^"^ '® second cas, ils sont 7^, -j^ et — . Bhascara ajoute qu'on peut trouver d'autres solutions '. Ces détails montrent que les Indiens, du temps de Bhascara du moins, appliquaient l'algèbre à la Géométrie, et la Géométrie à l'algèbre. Nous ne trouvons pas les mêmes traces d'une alliance aussi intime entre ces deux sciences , dans l'ouvrage de Brahme- gupta. C'est probablement parce qu'il est écrit beaucoup plus succinctement que celui de Bhascara; qu'il contient beaucoup moins d'exemples des règles algébriques, et qu'il n'en donne jamais aucune sorte de démonstration. Mais nous devons penser que cette application de l'algèbre à la Géométrie, qui donne aux ouvrages de Bhascara un carac- tère particulier, date d'un temps bien antérieur à cet écrivain, d'autant plus qu'elle a fait aussi le caractère des ouvrages arabes plusieurs siècles avant l'âge de Bhascara ; au temps, par exemple, de Mohammed ben Musa (IX" siècle). Les Arabes n'ont pu puiser que chez les Indiens, cette manière de procéder en mathématiques, qui n'était point pratiquée par les Grecs. Nous avons rejeté l'idée que les ouvrages indiens nous présentassent des élémens de ' L«> deux problèmet dépendent reipectiTement des deux éqnationi ; 436 NOTES. Géométrie , de même qu'ils nous offrent des traités d'arithmétique et d'algèbre. Nous crovons avoir démontré , en effet , que tel ne pouvait avoir été l'objet de l'ouvrage de Brahmcgupta , qui roule sur une seule question de Géométrie. Mais nous ne pouvons en dire autant de l'ouvrage de Bhascara; et nous consentons à y voir le résumé des connaisssances géométriques en circulation dans les temps modernes chez le peuple indien. La manière dont l'auteur a défiguré l'ouvrage de Brahmcgupta pour former le sien , et les notes des divers scoliastes , dont aucun ne l'a repris, nous prouvent que la science a singulièrement décliné chez les Indiens, et qu'ils n'ont plus de véritable traité de Géo- métrie. Nous ne saurions nous prononcer de même sur l'état de la science au temps de Brah- mcgupta. Les documens nous manquent ; et nous ne pourrions dire si l'intelligence et le génie mathématiques de cet écrivain et de ses contemporains étaient bien à la hauteur des ouvrages si parfaits et si remarquables qu'il nous a transmis ; ou bien si ces ouvrages ne seraient pas eux-mêmes, comme ceux des écrivains postérieurs , de simples fragmens d'un savoir véritable et très-ancien, qui auraient échappé à la destruction des temps et qui n'auraient point encore perdu, dans le siècle de Brahmcgupta, leur perfection et leur pureté primitive. Le célèbre hollandais Stevin , qui admettait un giècle sage « où les » hommes ont eu une connaissance admirable des sciences», siècle qui avait précédé celui des Grecs et qui ne lui avait transmis qu'une faible partie seulement de son savoir an- tique ' , Stevin, disons-nous, et notre illustre Bailly^ ne balanceraient point à se pro- noncer dans cette question , à la vue des ouvrages si étonnans de Brahmcgupta. Pour nous, qui n'avons point à aborder ici une si haute question historique, nous nous bornerons à appeler sur la partie géométrique des ouvrages de Brahmcgupta et de Bhas- cara, qu'on avait négligée jusqu'ici, l'attention des savans orientalistes, et des érudits qui s'occupent de l'histoire de l'Inde et delà marche de la civilisation humaine. Cette par- tie géométrique pourra leur procurer quelques documens et quelques aperçus utiles. Sur la Géométrie des Latins. Nous continuerions , pour ainsi dire, le même sujet, en passant de la Géométrie des Indiens à celle des Arabes. Mais, comme ce que nous aurons à dire de celle-ci , se liera plus naturellement encore avec les premiers travaux des géomètres européens, à la re- naissance des lettres, où nous verrons l'élément arabe non moins répandu, et non moins influent que l'élément grec, nous allons faire de suite une courte digression pour dire quelques mots de la Géométrie chez les Latins. ' OEuvrcs mathématiques de Simon Stevitt ; in-fol., leyde , 1634. Géographie ; définition VI , p. 106. 2 « Ces méthodes savante», pratiquées par des ignorans, ces systèmes, ces idées philosophiques, dans de» V têtes qui ne sont point philosophes , tout indique nn peuple antérieur au\ Indiens et aux Chaldéens : peuple )i qui eut des sciences perfectionnées , une philosophie sublime et sage , et qui , en disparaissant de dessus la i> terre , a laissé aux peuples qui lui ont succédé quelques vérités isolées , échappée» à la destruction , et que le » hasard nous a conservées. « {Ilistoire de l'astronomie ancienne, livre III , § xviu). NOTES. 457 Les sciences mathématiques furent extrêmement négligées par le peuple romain , où les esprits supérieurs ne s'appliquèrent qu'à l'art de la guerre, et à l'éloquence. La Géo- métrie, particulièrement, fut à peine connue à Rome. L'astronomie y fut plus en hon- neur, et l'on peut citer plusieurs écrivains célèbres, tels que Varron, J. César, Cicéron, Lucrèce, Virgile, Horace, Sénèque, Pline, qui possédaient la connaissance des phéno- mènes du ciel. Mais aucun ne les regarda comme devant être l'ohjct de recherches scien- tifiques et ne fit faire un pas à la science. On no cite même que Suipicius Gallus qui ait cultivé l'astronomie pratique, et qui ait prédit des éclipses. La Géométrie semble n'avoir eu pour objet unique chez les Latins, que de mesurer les terres et d'en fixer les limites: et les arpenteurs, qu'on appelait agrimenitoret ou gro- tnalici , étaient des hommes très-considérés , qu'on regardait comme les vrais dépositaires de la science. Cependant, quelques fragmens de leurs écrits qui nous sont parvenus, nous portent à leur refuser absolument le litre de géomètres. Car, outre que ces écrits roulent sur les questions les plus élémentaires de la Géométrie pratique, nous y trouvons des erreurs grossières. L'aire du triangle et l'aire du quadrilatère y sont calculées d'une manière inexacte. Nous avons rapporté leurs régies eu parlant du § 21 de la partie géo- métrique des ouvrages do Brahmcgupta. Malgré la considération dont les Gromatici ont joui à Rome , à raison des services qu'ils rendaient dans les différentes contrées de ce vaste empire, et quoique les noms des plus habiles nous aient été transmis par Boèce, à peu près tous aujourd'hui sont inconnus dans l'histoire de la Géométrie. Mais quelques hommes véritablement célèbres à d'autres titres, avaient cultivé les sciences pour elles-mêmes. Varron, qui passa pour le plus savant des Romains, et qu'ils regardaient comme un second Platon , avait écrit sur l'Arithmétique, la Géométrie, l'As- tronomie, la Musique et la Navigation. Il est fâcheux qu'aucun de ces ouvrages ne nous soit parvenu. Cet écrivain mérite d'être cité surtout pour avoir soupçonné l'aplatissement de la terre , comme nous l'apprend un passage de Cassiodore. L'architecture de Vitruve nous prouve qu'il fut un des hommes de son temps qui eu- rent le plus de connaissances en mathématiques. On peut citer encore Julius Scxtus Frontinus , qui a écrit en ingénieur habile sur la conduite des eaux. Son livre, qui est intitulé : De aquœductibus urbia Romœ nous est parvenu. On a de lui un autre ouvrage estimé sur l'art militaire '. Nous supposons que Frontinus avait écrit aussi sur la Géométrie , et qu'un Traité de la mesure des surfaces, que nous trouvons dans un manuscrit du XI" siècle, avec d'autres fragmens des Gromatici romains, parmi plusieurs ouvrages de Boèce, peut lui être at- tribué 2. Deux raisons concourent à nous autoriser à former cette conjecture. D'abord, Boèce, ' Stratagematum libri gualuor. ^ Ce manutcrit , grand in - folio , sar parchemin , appartient à la bibliothèqae de la ville de Chartre*. n. le 0'' G. Ilacnel l'a inacrit dans «es Calalogi librorum manuscriptorum , etc. (Lipsin, 1819, in-4'>). tout le titre •ul\ant : Arùtttelù M. elenchorum { Boctii Loyica , Rhatarica , Arithmetica , JUusica j To«. XI. 58 458 NOTES. au commencement du second IWre de sa Géométrie, qui roule sur la mesure des surfaces , nomme Julius Frontinus comme ayant été très-habile dans cet art , et annonce qu'il lui a fait des emprunts pour ce second livre. Vers la fin de l'ouvrage, Boèce donne la liste des principaux arpenteurs romains, et y inscrit Julius Frontinus. Cette double circonstance nous prouve que cet auteur avait écrit sur la Géométrie pratique. Ensuite, nous remar- quons que le morceau de Géométrie que nous trouvons dans le manuscrit dont nous venons de parler, présente avec le second livre de Boèce tant de points de ressemblance, qu'on en doit conclure avec certitude que l'un des deux ouvrages a été copié en grande partie sur l'autre. Le style pur et plus facile de ce morceau de Géométrie , annonce qu'il est an- térieur à l'époque où a vécu Boèce ; nous sommes donc porté naturellement à conclure qu'il est l'ouvrage même de Frontinus auquel Boèce a annoncé qu'il avait fait des em- prunts. Juin Firmici muthematica ; Materni Juniorts geometria ; cnnoncs , talulœ et diversa de astro?iomià. Ce titre est emprunté d'une note placée sur la partie intérieure de la couverture en bois du volume, et qui paraît aussi ancienne que lui ; elle est ainsi conçue : In hoc vohtmine continentur : Liber eleticorum Arisiotelis ; Logicaj Reîhorica ^ Aritlnneticaf Musica j Boecii ^ Muthematica Julii Firmici, Materni Junioris ; Geometria ; Canoiie.1, tabulai et alia de Attronomia. Vis-à-vis les mots Mathematica Julii^ etc., se trouve une annotation qui paraît aussi fort ancienne, et où nous croyons lire : liane suppositam credo. Et, en effet, nous ne trouvons aucune pièce de Julius Tirmicus Matcrnus. Mais il est vrai que, malheureusement, il manque 104 feuilles (140. ..343) dans ce manuscrit, à partir du chap. 20 du second livre du traité de la musique de Boèce, Nous supposons ({ue le reste de ju musique occupait 64 feuilles à peu près; de sorte que 40 feuilles auraient contenu d autres matières qui nous «ont inconnues et où aurait pu se trouver quelque chose de Firmious Matcrnus ; cependant on ne connaît et on ne cite de cet auteur que son traité d'astrologie en 8 livres. La feuille 244, la première après la lacune, contient la fin d'un écrit sur les corps réguliers. Puis, on trouve différentes pièces, placées les unes à la suite des antres, sans titres , et sans indication d'auteurs , et qui traitent, la plupart, de la Géométrie des arpenteurs romains et des mesures dont ils faisaient usage. Nous avons distingué parmi ce pêle-mêle les morceaux suivans, dont les deux derniers surtout rendent le manuscrit très-précieux : 1» Celui que nous attribuons à Frontinus; S» le livre d'arithmétique de Martianus Capella; 3» Le cinquième livre de l'ouvrage De re rusticd de Columelle , qui traite de la mesure des champ»; 40 Différens autres fragmcns de Géométrie , des arpenteurs romains ; 5» Un passage dul5« chap. des Éti/mologies d'Isidore de Séville, qui traite des mesures; 6° Les deux livres de la Géométrie de Boèce , dont le premier contient les neuf chiffres et le passage relatif au nouveau système de numération ; et dont le second est terminé par un autre passage encore relatif à cette numération , et qui ne se trouve pas dans les éditions qu'on a données de Boèce ; 7" Enfin un autre écrit sur l'usage des neuf chiffres , qui présente des analogies frappantes , d'une part avec les passages de Boèce et la lettre de Gerbert , et d'autre part avec notre propre système de numération. Cet écrit, dont il paraît qu'on n'a point encore eu connaissance, pourra jeter quelque jour sur la question encore controversée, delà vraie signification des passages de Boèce et de Gerbert, et de la date précise de l'introduction en Europe, de la numération indienne. Le manuscrit est terminé par quelques notions de la sphère céleste, puis un traité d'astrologie et des tables astronomiques. NOTES. 459 Ce morceau de Géométrie, du reste, peut faire honneur à cet écrivain, et est plus digne de porter son nom que le traité De qualitate at/rorum qu'on lui a attribué. Car nous le regardons comme l'écrit le plus parfait qui soit sorti de la plume d'un géomètre latin, sans en excepter le second livre de la Géométrie de Boéce. Car d'une part nous trouvons dans cet écrit la formule pour la mesure de l'aire du triangle par les trois côtés; et d'autre part, nous n'y trouvons pas la règle inexacte dont tous les arpenteurs romains se servaient pour mesurer l'aire du quadrilatère'; règle reproduite par Boéce lui-même. De nombreux points de ressemblance nous font penser que c'est ce traité qui a servi, h la renaissance des lettres, à composer la partie géométrique de l'encyclopédie qui a paru en 1480 , et a eu depuis de nombreuses éditions sous le titre de Margarita philo- tophica. Indépendamment de cette circonstance, qui doit lui donner quelque prix à nos yeux, ce traité aurait mérité les honneurs de l'impression, comme étant le meilleur écrit de Géométrie qui nous soit venu des Romains. Nous devons dire, cependant, que nous y trouvons , dans le calcul de l'aire des poly- gones réguliers en fonction du côté, une erreur que Boéce a commise aussi, et qui a encore été reproduite à la fin du XV' siècle dans la Margarita philotophica. L'auteur se sert de la formule suivante : Soit a le côté du polygone régulier, et n le nombre de ses côtés; son aire a pour ex- pression (n— 2)a' — (n— 4)o 2 L'absurdité de cette formule est palpable; d'abord parce qu'elle n'est pas homogène, et ensuite parce qu'on en conclurait, par une «impie érjualion du second degré, l'expression du côté d'un polygone régulier inscrit au cercle, en fonction du rayon du cercle , et réciproquement le rayon en fonction du côté. Questions qui dépendent , comme on sait , d'équations de degrés supérieurs. Peut-être tout le passage qui concerne la mesure des polygones réguliers , a-t-il été introduit par un écrivain postérieur dans le morceau de Géométrie que nous attribuons à Frontinus. Car la règle qui concerne le triangle équilatéral est en contradiction avec une autre règle parfaitement géométrique donnée auparavant. Ainsi nous trouvons ' Fotr page 313 du recneil intitulé : Aat agraria auclores legesqua varia; curd WUelmi Goetii, cujut acctdunt indices, antiquitates agraria et nota, unà cum /V. Rigaltii noiis et observationilittt. iLmtt , 1674, in-4'>; et page 172 de l'ouvrage de Columelle , Do re rusticâ libri XII. Pari» , 1643 , iii-8». ' On reconnaît cette formule dans le< règlea que l'auteur donne pour les polygones régulier» de 7, 8 , 0 , 10, II et 18 côté»; mai» pour le triangle, le pentagone et l'hexagone , il »e »ert de* formule» (uirante» : Pour le triangle, Pour le pentagone , Pour l'hexagone , a ' 3a3-4-o 3 4o3-f 460 NOTES. d'abord , sous le titre de trigono ysopleuro : « a étant le côté d'un triangle isopleure , )) o' — (^I!)^est le carré de la perpendiculaire; la perpendiculaire multipliée par jest l'aire » du triangle. Soit a = 30 , il vient /30\' 30 (30)' — ( -r ] = 673 = (26)' ; et 26 X -^ — ^^*^- » C'est l'aire du triangle. » Cette règle est exacte, et l'application numérique l'est aussi, en négligeant toutefois les fractions dans l'exlraclion de la racine de C75 '. On doit s'étonner alors de trouver ensuite , encore sous le litre de trigono ysopleuro , cette se- conde règle : « a étant le côté du triangle isopleure, son aire est-^^; — . Soit a = 28, l'aire 1 . ■ 1 (28)' +28 812 ,.„ » du triangle sera ^— ^-; , ou — = 406. » Remarquez que, de la sorte, le triangle dont le côté est 28, a une plus grande surface que celui dont le côté est 30. Ce rapprochement entre les deux exemples numériques de l'auteur , semble annoncer que la seconde règle lui est étrangère et a été prise d'un autre écrit. Cette seconde manière de procéder est suivie de sa démonstration , mais qui ne présente qu'une pétition de principe. Voici le raisonnement de l'auteur. Une aire donnée S est la surface d'un certain triangle équilaléral , dont le côté est égal à K "s+i — >_ Mettant à la place de S l'aire trouvée f_+f on a pour résultat a, qui est le côté du triangle proposé ; donc l'aire trouvée est exacte. Le défaut de cette prétendue démonstration est manifeste, car la formule l/8.aire H- T — 1 côté = ^ — ' est précisément, sous une autre forme, la même que celle-ci ; aire ^ " , , qu'il s'agit de démontrer. Mais pour passer de l'une à l'autre de ces deux formules , il faut résoudre une équation littérale du second degré. Cette circonstance est assez remarquable dans la Géométrie des Latins. > Prendre j/675 = a6, c'est la même chose que 15.l/3 = 28, ou \/3 =-^5- D'après cela l'expression de l'aire du triangle, qui est exactement -»/ 3, devient-. ^^ = «^ 33 ■ C'est la formule dont se sont servis quelques auteurs latins, tels que Columelle (Oe re rusHcâ ; liv.V, chap. 2); et qui a été employée encore dans les temps modernes. On la trouve dans plusieurs ouvrages de Géométrie pratique (voir Georgii Vallœ , de expetendis et fugiendis relus ; liber XIV et Geometrije V ; cap. IIII. — Il brève trattato di Geometria del sig. Gio. Franc. Peverone di Cuveo ■ m Lione, 1550, in-40. — Livre III de la Géométrie pratit^ue de Benrion ; p. 341 et 349 ; seconde édition , Paris , 16S3). NOTES. 461 Le morceau de Géométrie en question étant ce qui nous est parvenu de mieux et de plus complet des écrivains latins, et paraissant résumer tout leur savoir en Géométrie, nous allons donner l'indication des questions sur lesquelles il roule. Ce sont : 1° Le calcul de la perpendiculaire dans un triangle dont les côtés sont donnés' ; 2» Le calcul de l'aire du triangle, en fonction de cette perpendiculaire; et la formule qui donne l'aire en fonction des trois côtés ; 3» Les deux formules qui servent à former un triangle rectangle en nombres entiers, l'un des côtés étant donné en nombre pair ou impair , qui sont : -¥■ a\ Pour un nombre impair ( — ~ 1 = ( j Pour un nombre pair j|_)-f.l|=:jf_j — || 4° L'expression dii diamètre du cercle inscrit dans un triangle rectangle, qui est égal à la somme des deux côtés de l'angle droit moins l'hypoténuse; 5° Le calcul de l'aire du carré , du parallélogramme , du losange (ou rhombe) et du quadrilatère à bases parallèles ; L'auteur appelle l'un des côtés du quadrilatère sa base , et le côté opposé le commet ou la corauste {vertex «eu coraustus). Le mot coratistug ne se trouve plus dans aucun lexique; il n'a peut-être été reproduit chez les Modernes que dans la Margarita philo- sophica ; 6° Le calcul (basé sur une règle fausse) des surfaces des polygones réguliers ; 7° Le rapport — ou —, de la circonférence au diamètre ; 8° Enfin l'aire de la sphère , égale à celle de quatre grands cercles ; Les noms sont si rares dans l'histoire des sciences , chez les Latins, que l'on est réduit à citer les écrivains qui nous ont laissé quelques traces d'un faible savoir en Géométrie , même sans avoir contribué à ses progrès. C'est ainsi que nous nommerons Martianus Capella, saint Augustin, Macrobe, Boèce, Cassiodore et Isidore de Séville. Le premier, sur l'époque duquel on n'est pas d'accord , et que les uns fixent au III* siècle et d'autres au V", nous a laissé un ouvrage en neuf livres ^, dont les deux premiers , qui forment une sorte d'introduction aux sept autres, sont un petit roman philosophique et allégorique, intitulé : de* Noce» de la philosophie et de Mercure , et dont les sept autres sont consa- ' L'autenr prend ponr les côté« du triangle le« trois nombres 13, 14 et 15, dont s'était servi Héron d'Alexan- drie dans son traité de Géodésie, et qu'on trouve aussi dans la Géométrie des Indiens. {Voir ci-dessus l'analyse de l'ouvrage de Brahmegupta). ' JUartiani JUinei felicis Capellœ , Carthagtnùnsiê , viri pneotisulari* , Satyricon , in quo dtlVtipUù Phito- loijia it Mtrcvrii lUri duo et d» leptam artibus liberalilius libri ringulam , etc. 462 NOTES. crés aux sept arts libéraux : la Grammaire, la Dialectique , la Rhétorique , la Géométrie , l'Arithmétique , l'Astronomie ' et la Musique. Dans le livre de la Géométrie, l'auteur semble avoir employé ce mot suivant son sens étymologique ; car il débute par des notions de géographie. Ce qui est de la Géométrie proprement dite , se réduit à quelques définitions des lignes , des figures planes et des solides , qui la plupart sont prises d'Euclide , et énoncées sous leur nom grec. Chose assez remarquable, parce que dans d'autres écrits du même temps ou un peu moins anciens, tels que ceux de Boéce , de Cassiodore , les noms grecs ont été remplacés par des dénomi- nations latines. Le livre d'arithmétique de Marlianus Capella est plus savant que son livre de Géométrie. Il est, comme l'arithmétique de Boèce, une imitation des ouvrages platoniciens et pytha- goriciens, particulièrement de celui de Nicomaque,qui traite des propriétés des nombres et de leurs divisions en diverses catégories, dénombres pairs, impairs, composés, parfaits, imparfaits, abondans , diminutifs, plans, solides, triangulaires, etc. Saint Augustin a écrit sur la musique. On lui attribue aussi, assez légèrement, des prin- cipes d'arithmétique et de Géométrie; mais qui n'offrent qu'une simple nomenclature. Il en est de même du traité de Géométrie de Cassiodore, compris dans son seizième livre , qui traite des sept arts libéraux , et de la partie géométrique de cette espèce d'ency- clopédie que le célèbre Isidore de Sévillc a laissée sous le titre i\'Eti/mologies. La Géométrie de Boèce a plus d'importance que les écrits dont nous venons de parler; parce qu'elle est plus savante, qu'elle fait connaître pour la première fois , chez les Latins, la Géométrie d'Euclide , et qu'elle contient quelques traits intéressans de l'histoire des sciences. Nous allons donner une analyse de cet ouvrage , qui est aujourd'hui peu connu. Il est en deux livres. Le premier est une traduction à peu près littérale des définitions et des énoncés des propositions des quatre premiers livres d'Euclide. Ensuite on trouve , sous le titre defigiiris geometricis , quelques problèmes résolus par Boèce, qui n'offrent rien d'intéressant. Ce premier livre est terminé par l'exposition d'un nouveau système de numération, différent des systèmes grec et romain , qui fait usage de neuf chiffres, et que l'on a cru reconnaître pour être précisément notre système de numération actuel. Mais ce point de l'histoire des sciences , qui depuis deux siècles a fixé l'attention des savans , n'a pas encore été résolu d'une manière définitive. Nous reviendrons , plus loin, sur ce passage intéres- sant de la Géométrie de Boèce. Nous discuterons aussi , dans un article spécial , un autre passage du même livre , où nous croyons trouver la description du pentagone étoile ou de seconde espèce. Le second livre est consacré à la Géométrie pratique , telle qu'elle était connue des arpenteurs romains. L'analyse que nous avons donnée, en parlant de FrontinuSj d'un traité de Géométrie pratique, resté manuscrit, répond à ce second livre, qui paraît avoir ' Dan» ce huitième IiTre se trouve un chapitre très-remarquable, intitulé : Quod tellus non sit centrum omnibus planetis , où Martianus Capella fait tourner Mercure et Vénus autour du soleil. C'est là que Cop ernic a pris la première idée de son système. NOTES. 463 été copié sur ce manuscrit, cl qui n'en diffère essentiellement qu'en deux points, au désa- vantiige de Roécc. Cet écrivain célèbre ne donne pas la formule pour le calcul de l'aire du triangle par les trois côtés , qui se trouve dans le manuscrit , et donne la règle inexacte, employée par les arpenteurs romains , pour le calcul do l'aire du quadrilatère , qui ne s'y trouve pas. En donnant les deux formules pour construire un triangle rectangle en nombres en- tiers, l'un des côtés étant connu, Boècc attribue à Ârchytas celle où ce côté est pair. Proclus, comme on sait, attribue cette formule à Platon et l'autre à Pythagore. A la suite de ce livre de Géométrie pratique, on a joint une autre partie, qui ne se trouve pas dans tous les manuscrits de Boèce, et dont voici le sujet. Après une sorte de dissertation sur l'origine, l'utilité et l'excellence de la Géométrie, Boèce rapporte la substance d'une lettre de J. César, où l'on voit que ce grand homme voulait que la Géomé- trie servît de règle dans tout l'empire romain et ses colonies, pour ce qui regardait la mesure et la limitation des terres, les édifices publics et particuliers, les fortifications des villes et les grands chemins. L'auteur énumère ensuite les diverses matières qui peuvent donner lieu à controverses dans les opérations de la mesure des terres. Il remarque quelles sont les qualités que doit avoir un arpenteur, et donne les noms de ceux qui ont eu le plus de célébrité, et des empereurs par ordre desquels ils ont travaillé. Il donne ensuite la nomenclature des bornes diverses dont on se servait pour distinguer les provinces , les grands chemins et les possessions des particuliers. Puis il énumère les connaissances qui sont nécessaires en arithmétique et en Géométrie, pour être un parfait géomètre. Ces connaissances embrassent les propriétés des nombres et leur divisions en nombres pairs, impairs , composés, etc. ; l'ordre logique que l'on doit suivre en Géométrie ; les définitions des figures que considère la partie la plus élémentaire de cette science , et les différentes mesures en usage chez les arpenteurs romains. Enfin l'ouvrage est terminé par un morceau qui ne concerne que l'arithmétique, et que nous avons reconnu , en effet, n'être qu'une réunion de divers passages du premier livre de l'arithmétique de Boèce, pris, dans l'ordre suivant, du chapitre 32, de la préface, et des chapitres 1 , 2, 1 , 32, 19 , 20 , 22, 12, 20 et 27. Tout ce morceau est sans doute étranger à la Géométrie de Boèce, et y a été joint à tort par quelque compilateur. Les éditions de Boèce, et la plupart des manuscrits, ne contiennent que deux livres de Géométrie. Cependant il existe quelques manuscrits qui en contiennent cinq. M. Libri en signale un à Florence, à la bibliothèque de St.-Laurent >. Nous voyons dans la Biblio- theea hihliolhecarum ic Montfaucon (tom. I", pag. 88), qu'il en existe aussi un dans la bibliothèque du Vatican , avec un traité sur les nombres , en deux liercs [Boetii de numeris duo /iiri),qui paraît être différent de l'arithmétique. Il est à désirer que ces manuscrits , qui peuvent être utiles pour l'histoire des sciences , sortent enfin de la pous- sière des bibliothèques. ' HUloire du sciencts m Italie, tom. 1" , p S9. 464 NOTES. Sur le passage du premier livre de la Géométrie de Boàce, relatif à un nouveau système de numération . Le passage de la Géométrie de Boèce, dont il s'agit, paraît être resté inaperçu pendant long-temps, quoique les manuscrits des œuvres de cet écrivain ne soient pas rares , et que sa Géométrie ait été imprimée dès 1491 , puis en 1499 et en 1570. Ce n'est, je crois , que vers le milieu du XVII° siècle que Isaac Vossius,dans ses notes sur la géographie de Pomponius Mêla , fit connaître ce passage , et signala les neuf caractères ou chiffres , qu'il contenait. Depuis, ça été une question souvent agitée , de savoir si c'est bien préci- sément de notre système de numération que Boèce veut parler, et si les Grecs en ont eu connaissance, ainsi qu'il le rapporte. Ce point historique offrait un grand intérêt , par lui-même , et comme devant être d'une haute importance dans la question plus générale de l'origine du calcul indien , et des voies qu'il avait suivies pour se répandre au loin, et apparaître tout à coup parmi nous, au commencement du XIII" siècle, dans de nombreux ouvrages '. Cependant on n'a point encore été d'accord jusqu'ici sur la vraie signification du pas- sage de Boèce, et l'opinion émise le plus généralement a été en faveur d'une autre pièce, du X" siècle, qui est une lettre et un petit traité attribués à Gerbert (devenu pape en 999, ' 1° L'ouvrage de téonard Fiboiiacci , de Pise, commençant ainsi : Incipit liber Abbaci, compositus à Leonardo filio Bonacci Pisano, in anno 1202; et dans lequel se trouvent aussi, pour la première fois, en Europe, les principes de l'algèbre. a» Le Traité d' Arithmétique pratique de Jordan Némorarius (ver» 1200), resté manuscrit dans la bibliothèque savilienne , sous le titre : Algorismus Jordani, tam in integris quavi in fractis demonstratus. Cet ouvrage est différent de l'Arithmétique spéculative en dix livres, du même auteur, mise au jour et illustrée par Fabre d'ÉtapIes, en 1496. 3" Le traité d'Arithmétique de Sacro Bosco, intitulé : Tractatus /4lgorismi , écrit en 1236, en vers, et com- mençant par CCS deux-ci : Hiec algorismus t ars prœsens , dicitur in quâ Talibus Indorum fruimur bis quinque JîgHris. 4^ Un passage du Spéculum doctrinale , de Vincent de Beauvais (1194-1264), intitulé : De computo et alyo- rismo (livre XVI, chap. 9), où la connaissance de nos neuf chiffres, et de leurs valeurs de position, ainsi que l'usage du zéro, sont parfaitement exposés. 5° VAlgorisme , ou Traité d' Arithmétique , écrit en français par un anonyme, sousPhilippe-le-Hardi (1270- 1285). (M. Daunou, dans le Discours sur l'état des lettres en France , au XIII« siècle , mis en tète du tom. XVI de V Histoire littéraire de la France (in-4», Paris, 1824), fait mention de ce Traité , qu'il dit exister dans la bibliothèque de S'e-Geneviève , sous le n" BB 2 , in-4<> ; mais malgré les recherches réitérées de MM. les con- servateurs de cette bibliothèque , nous n'avons pu l'y trouver). 6° Le Traité de Maxime Planude , écrit en grec , vers la fin du XIII» siècle, sous le titre : Calcul selon les Indiens , dit le grand calcul. Il est assez singulier qu'aucun de ces traités d'Arithmétique , qui sont si précieux pour l'histoire des sciences, et qui marquent un grand pas de l'esprit humain , n'ait pas encore été imprimé. Outre ces ouvrages, il existe d'autres écrits du même temps, tels que le Calendrier de Roger Bacon, les Lettres de Jordan Némorarius , et les traités De sphœra el De computo de Sacro Bosco , où il est fait usa g e des chiffres arabes. NOTES. 463 sous le nom de Sylvestre II), oi!i l'on a aperçu notre système de numération , et l'on a ré- pété, . Voir livre XXIV, chap. 98 ,p. 997. * Par exemple , ce traité , et la lettre d'envoi qui lui sert de préface , sont-iU bien de Gerbert ? Et en suppo- sant qu'ils roulent sur notre système de numération (ce que je crois), leur origine directe vient-elle des Sarraxins d'Espagne ? Ces deux questions, qui sont soulevées ici pour la première fois depuis que , sur l'autorité de malmesbury , on a fait honneur à Gerbert de l'importation du système arabe , ne sont peut-être pas dépour- vues d'intérêt. Car cette lettre et le traité, qu'on croit généralement être resté manuscrit, sont imprimés en entier , sous le titre de numerorum divisione, dans le» OEuvres de Bcde (672-735), comme étant de cet écrivain. Il est asset étonnant qu'ils n'y aient pas été aperçus , surtout par Montucla et par Delambre , qui , l'un et l'autre, ont parlé de ce chapitre des œuvres mathématiques de Bède. (Voir Histoire de» mathématiques , tom. I", p. 496, et Histoire de l'astronomie ancienne , tom. l'"', p. 322.) naintenant , ce sera peut-être un point d'histoire à résoudre , de savoir si U lettre et le systènie de numéra- tion attribués à Gerbert , sont de lui ou de Bède. Sans vouloir aborder cette question, qui est du ressort des savans écrivains qui continuent V//istaire littéraire de la France ,no\it nous permettrons de dire que la grande ressemblance, quant au fond et dans les mot* mêmes , que nous reconnaissons entre ce Traité et le passage de Boèce , nous porte à le croire de l'écrivain le plus rapproché de ce dernier; c'est-à-dire de Bède, qui ne lui est postérieur que de deux siècles. Dne antre raison, c'est que du temps de Gerbert, les Haures d'Espagne devaient se servir, comme les Indiens et les Arabes , du zéro (ou du point, comme séro); de sorte que Gerbert , en transmettant leur système de numéra- tion, aurait fait usage et aurait parlé expressément du téro, dont nous ne pouvons trouver aucune trace dana le traité en question , où nous supposons que ce signe auxiliaire est suppléé par l'emploi de colonnes , comme To«. XI. S9 466 NOTES. ■*- la Géométrie de Boèce , qui est la partie la plus importante de cet ouvrage , surtout comme document historique unique. Voici la traduction à peu près littérale , qui nous paraît rendre le sens de ce passage : « Les Anciens avaient coutume d'appeler digits toute espèce de nombre au-dessous de » la première limite , c'est-à-dire ceux que nous comptons depuis un jusqu'à di.\, qui » sont 1,2,3,4, 5, 6, 7, 8 et 9. » Ils appelaient articulés tous ceux de l'ordre des dixaines, et des ordres suivans à » l'infini ' ; » Nombres composés tous ceux compris entre la première et la seconde limite , c'est- » à-dire , entre dix et vingt , et tous les autres suivans , excepté les limiter- ; » Et nombres incomposés tous les digits et toutes les limites -. » Les nombres multiplicateurs changent de place entre eux ; c'est-à-dire que tantôt le dans Boèce , ainsi que nous allons le dire. £niîn une troisième considération , qui rend admissible l'opinion que Bède a pu écrire ce Traité, c'est que l'on trouve nos chiifres dans quelques manuscrits très-anciens des oeuvres de cet écrivain , ainsi que l'a remarqué Wallis dans son Histoire de P Algèbre (p. 11). ' C'est-à-dire tout décuple ou centuple, etc., d^an digit. Cette distinction des nombres, en digits et en articulés , avait pour objet snrtout de donner des dénomina- tions spéciales au chiffre des unités et à celui des dixaines, dans un nombre exprimé par deux chiffres, tel que 27 j parce que ces deux chiffres, considérés dans un calcul, pouvaient bien ne pas représenter les vérita- bles unités et dixaines de la question. C'est ce qui a lieu, par exemple, si le nombre 37 résulte, dans une multiplication, du produit du premier chiffre du multiplicateur par le second ou le troisième chiffre du multiplicande. Les àéaominnûons ie digits ei articulés (digitus ei articulus) mét\ieiA bien d'être remarquées ici, car on peut dire qu'elles suffiraient seules pour indiquer qu'il est question de notre système de numération, avec lequel elles se sont toujours présentées depuis : au X" siècle ou antérieurement, dans le Traité attribué à Gerbert; au XIII= siècle dans les ouvrages de Sacro Bosco, de Vincent de Beauvais, etc.; et à la renaissance dans tous les traités d'arithmétique, qui commencenttoujours comme ce passage de Boèce (, Voir Opuscultim de praxi numcrorum guod algorismum vocant, pièce très-ancienne, trouvée et mise au jour en J503, par Josse Clicthovée; Margarita philosophica ; Summa de Àrithmetica de Lucas de Burgo ; Algorithmus demonstratus de Schonet ; S eptem partium Logisticœ arithmetices questiones, de Schroter; Arithmetica practica in quinquo paries digesta , de Morsianus ; Arithmetica practica lihris IV ahsoluta, d'Oronce Finée ; Arithmetica practicœ methodns facllis j de Gemma Frisius , etc.) 2 Ainsi les /mi«!« étaient des nombres, et n'étaient autres que les arttc«i"G I On voit à la suite du neuf, un rond dans lequel est inscrite la lettre a; nous parlerons plus loin de ce dixième signe. ' Spiciiegium obserrationum ad hittoriam notarun nupuratium pertinentium , etc. Vitlemlierg , in-to, (28 page»), 176.5 " Cet noms avaient dëj& ëtë trouvés dans un manuscrit , par le savant orientaliste Greaves. Le célèbre Huet , ëvf que d'Avranclie , pensait qu'ils y avaient été insérés postérieurement à Boèce , en faveur des Orientaux , au 468 NOTES. # Au-dessous de cette première ligne en est une seconde, sur laquelle sont les chiffres romains I, X, C, M, X, G, M.I, etc , écrits de droite à gauche. Trois autres lignes , ensuite , contiennent en chiffres romains , d'autres nombres qui sont respectivement la moitié , le quart et le huitième de ces premiers. Enfin , sur deux autres lignes, sont d'autres caractères romains représentant les fractions de l'once; et sur une dernière ligne , sont les nombres 1,2,3, 4, 12, écrits en chif- fres romains. De tout cela , nous ne prenons que la ligne des chiffres I, X, C, M, X, etc.; et nous sup- posons que la table dont Boèce ^eut parler , « que les Anciens , dit-il , appelaient table de Pythagore , et à laquelle les Modernes ont donné le nom à' Abaque. » n'était point la table de multiplication , mais un tableau destiné à faire les calculs dans le nouveau système de numération qu'il va exposer. Voici ce qui caractérisait ce tableau , et ce qui le rendait propre à cet usage. Dans la partie supérieure , était une ligne horizontale , divisée en un certain nombre de parties égales; et des lignes verticales partaient des points de division. Ces lignes , prises deux à deux consécutivement , formaient des colonnes. Sur les portions de la ligne horizontale, comprises entre ces colonnes, étaient inscrits ^ en allant de droite à gauche, les chiffres romains I, X, C, M, X, C, M.I, X. M.I, etc.? signifiant un, dix, cent, mille, dix mille, cent mille, mille mille , dix mille mille, etc. ; comme il suit : X.I.M.I I.M.I C.M.I X.M.I M.I M I >»■ A l'aide de ce tableau, substitué à la table de multiplication , nous allons pouvoir, je crois, donner un sens intelligible au texte de Boèce, dont je reprends la traduction: « Voici comment ils se servaient du tableau qui vient d'être décrit. Us avaient des » apices ou caractères , de diverses formes. Quelques-uns s'étaient fait des notes d'apices, » telles que J^ répondait à l'unité, Vj) à deux ; ^^ à trois; LœL^ » quatre; » \£ à cinq; §^ à six; J_>' à sept; Ç) à huit ; et enfin Ç\ à neuf .Quelques temps où la connaissance des lettres arabes s'introduisait parmi nous. II attribuait aux quatre suivans, Ârlan , Quimas , Zenis et Tcmenias ,une origine hébraïque [Demonstratio Evangelica, prop. IV. Voir aussi Heil- bronner, Ilistoria mathcseos , p. 744^. ' Nous reproduisons ici les neuf chiffres sous la forme qu'ils ont dans ce plissage de notre manuscrit. Plusieurs NOTES. ^ 469 » antres, pour faire usage de ce tableau, prenaient les lettres de l'alphabet; de manière » que la première répondait à l'unité, la seconde à deux; la troisième à trois, et les » suivantes aux nombres naturels suivans. D'autres enfin, se bornaient à employer, dans » ces opérations, les caractères usités avant eux pour représenter les nombres naturels. » Ces apicet (quels (|u'ils fussent), ils s'en servaient , comme de la poussière ' ; de ma- » niére que s'ils les plaçaient sous l'unité, chacun d'eux ne représentait toujours que » des digit*. » Cette dernière phrase et les suivantes sont très-importantes. C'est là ^ne nous crovons Toir ce qui fuit précisément le caractère propre de notre système de numération , c'est-à- dire la valeur de position de* chiffre*. Pour les comprendre, il faut fixer son attention sur le tableau que nous avons décrit et tracé ci-dessus. Car c'est ici que se montrent l'uti- lité et l'usage de ce tableau. ?(ous reprenons la dernière phrase de Boèce, et nous continuons : « S'ils plaçaient ces divers apices sous l'unité (c'est-à-dire dans la colonne de» unités), » ils représentaient toujours des digits. » Plaçant le premier nombre, c'est-à-dire deux (car l'unité, comme il est dit dans les » arithmétiques, n'est pas un nombre, mais l'origine et le fondement des nombres), » plaçant donc deux sous la ligne marquée dix , ils convinrent qu'il signifierait vingt ; » que troit signifierait trente ; quatre , quaraîtte; et ils donnèrent aux autres nombres » suivans les significations résultantes de leur propre dénomination. » En plaçant les mêmes apice* sous la ligne marquée du nombre cent, ils établirent » que 2 signifierait deux cents ^ 3, trois cents ; 4, quatre cents ; et que les autres ré- » pondraient aux autres dénominations. » £t ainsi de suite dans les colonnes suivantes : et ce système n'exposait à aucune erreur. » On peut voir, je crois , dans ceci une description assez claire du principe de notre sys- tème de numération, la valeur de position des chiffres , croissant suivant une progres- sion décuple en allant de droite à gauche. Les colonnes dont il était fait usage, et qui sont formellement indiquées dans le texte par le mol paginula oa pagina ( petite bande), permettaient de se passer du zéro , parce que là où nous l'employons , on laissait la place vide. Un passage de l'arithmétique de Planude s'accorde avec cette supposition, que, dans l'origine de notre système de numération, on se servait de colonnes qui dispensaient de l'usage du léro. Car Planude dit que le léro ( rÇty/sa) se met dans les places vides ; et comme les places augmentent les valeurs des chiffres , ainsi font les zéros qui rem- en dehors du texte, ce qui fait suppoier que ceux-ci ont été ajouté» par quelque copiitc. Cela nous confirme dans l'opinion que cette ligne de chiffres no faisait pas partie, dans l'autographe de Boèce, du tableau dont il parle; et que ce tableau ae composait seulement de colonnes verticalea au haut desquelles ëtaieut inscrits les nombres un, dix, cent, mille, etc., sigoi- fiant unités , dixaines , centaints , etc. ' lia varie eeu pulverem disperyere..,. Boèce fait allusion sans doute à la poussière, au pulvis emditus de Cicéton {De nalurd ûeorum, lib. II), que les Anciens étendaient sur leurs abaque* pour y tracer leur* figures de Géométrie. m- m 470 ^ NOTES. plisgent les places vîdes^. Ainsi, antérieurement à l'usage du zéro, il y avait des places vides; ce qui ne pouvait se faire qu'au moyen de colonnes. Peut-être, quand on aura voulu supprimer les colonnes, et ne pas s'astreindre à l'usage d'un tableau préparé pour ce genre de calculs , aura-t-on laissé seulement celles où se trouvaient des zéros ; de sorte qu'alors deux petites lignes verticales (formant une co/onwe) auraient fait l'of- fice du zéro. Ensuite on aurait changé cette figure en celle du zéro actuel , qui est d'une description plus simple. Après avoir exposé succinctement le principe du nouveau système de numération , Boèce donne les règles de la iniiltiplication et de la division. Voici comment il s'exprime : « Dans les multiplications et les divisions, il faut savoir, et observer avec soin, dans » quelle colonne on doit placer les digits , et dans laquelle les articulés. Car , si un » nombre des unités est multiplicateur d'un nombre des dizaines, on place les digits » dans les dixaines, et les articulés dans les centaines; si le même nombre est multiplica- » teur d'un nombre des centaines, on place les digits dans les centaines , et les articulés » dans les mille; s'il est multiplicateur d'un nombre des mille, on place les digitx » dans les mille, et les articulés dans les dix mille; et multiplicateur d'un nombre des » cent mille , on place les digits dans les cent mille , et les articulés dans les mille-mille. » Mais si un nombre des dixaines est multiplicateur d'un nombre des dixaines, on » place les digits dans la colonne marquée cew^, et les articulés dans les mille; » S'il est multiplicateur d'un nombre des centaines , on place les digits dans les mille , » et les articulés dans les dix-mille ; » Multiplicateur d'un nombre des mille , on place les digits dans la colonne des dix » mille , et les articulés dans celle des cent mille ; » Et multiplicateur d'un nombre des cent mille , on place les digits dans les mille- ^Iff^ » mille, et les articulés dans les dix mille-mille. » Semblablement, un nombre des centaines étant multiplicateur, etc. , etc. Tout ce passage est très-intelligible , et répond parfaitement aux règles que nous obser- vons pour la multiplication; il confirmerait, au besoin, le sens que nous avons donné aux phrases précédentes. C'est dans ce passage principalement qu'on a trouvé de l'analogie avec notre système de numération. Viennent ensuite les règles de la division. L'auteur commence ainsi : « Maintenant les divisions , de quelques grands nombres qu'il s'agisse , deviennent » faciles pour le lecteur dont l'esprit est préparé par ce qui précède. Aussi nous n'en par- >> lerons que sommairement; et s'il se rencontre quelque difficulté, nous laissons à l'atten- )) tion du lecteur le soin de la résoudre. » L'obscurité du texte ne nous permet pas d'en traduire la suite; nous supposons qu'il nous est parvenu tronqué et défectueux; mais cette suite n'est pas nécessaire pour fixer notre opinion sur le système de numération que Boèce vient d'exposer ; ce qui précède suffit. ' Dclambrc , Histoire de l'astronomie ancienne , t. 1='' , p. 519. k NOTES. • 471 Les régies que l'auteur donne pour la division , nous paraissent se rapporter aux cinq cas suivans : 1° Diviser des dixaines par des dixaines , ou des centaines par des centaines, etc.; 2° Diviser des dixaines, ou des centaines, ou des mille, etc., par des unités; ou bien des centaines ou des mille, etc., par des dixaines; 3° Diviser des dixaines ou un nombre composé de dixaines et d'unités , par un nombr»^ composé do dixaines et d'unités; 4° Diviser des centaines ou des mille, etc., par un nombre composé de dixaines et d'unités; 5° Enfin , diviser des centaines ou des mille, par un nombre composé de centaines et d'unités. Ici se termine le premier livre de la Géométrie de Boéce. Le passage que nous venons de rapporter est le seul que l'on ait cité comme traitant , d'un nouveau système de numération, et c'est le seul probablement qui se trouve dans les manuscrits sur lesquels on a travaillé jusqu'ici. Mais celui que nous avons sous les yeux, contient encore, à la fin du second livre, un second passage sur le même sujet , qui mérite d'être connu , car il nous parait montrer bien distinctement la valeur de po- sition des chinVes. Le voici : Apre» le tableau des fractions de l'once, Boéce ajoute: « Dans la formation du tableau ci-dessus , ils (les Anciens) se servaient de caractères de n différentes sortes et de formes différentes. Mais nous , nous n'en employons pas d'autres , » dans tout ouvrage de ce genre, que ceux que nous avons tracés dans la construction de » l'abaque. Nous avons assigné la première ligne de ce tableau aux unités; la seconde aux » dixaines; la troisième aux centaines; la quatrième aux mille; et enfin les autres lignes » aux litnitet ' des autres nombres. Si on place des apiceg sur la première ligne , ils repré- » senteront des unités; sur la seconde des dixaines, sur la troisième des centaines; sur la » quatrième des mille , et ainsi de suite des autres. » Ensuite Boéce donne les valeurs des fractions de l'once, dont auparavant il a donné seulement les noms, dif/itiiéi , statera , qtiadrans , drachma , etc. Tout ce passage se rattache évidemment au tableau des divisions de l'once, et doit être rétabli dans l'ouvrage de Boéce. De ce qui précède f nous croyons pouvoir conclure que le système de numération exposé par Boéce, est le système décimal , dans lequel les neuf chiffres dont il se sert prenaient des valeurs de position, croissant en progression décuple en allant de droite à gauche; et enfin que ce système de numération était précisément celui des Indiens et des Arabes , et le nôtre actuel; avec cette différence légère, que, dans la pratique, les places où nous mettons le zéro, restaient vides alors; et que cette dixième figure auxiliaire était suppléée par l'emploi de colonnes marquant distinctement l'ordre des unités, dixaines, centai- nes , etc. ' Ici Boéce donne an inot limes nne acception temblable & celle qu'il a prite cliei lc« Hodemei. Voir dan» une note ci-des. Nous ne nous sommes pas encore procuré cet écrit. NOTES. 475 5 Quelle est donc la difTérence réelle entre les deux systèmes de numération? C'est qu'après avoir représenté, dans l'un et l'autre, les neuf nombres de l'ordre des unités par neuf caractères particuliers, les Grecs représentent les neuf nombres de chacun des ordres suirans par d'autres caractères diiïérens, tandis que les Indiens les représentent par les neuf premiers caractères eux-mêmes; dont les valeurs diverses sont dillérentiées et indi- quées par les places qu'ils occupent : et comme ces places sont les mêmes dans les deux systèmes, on voit que les calculs ne doivent point être plus didlciles dans l'un que dans l'autre, et qu'ainsi il n'y avait pas de raison bien majeure pour substituer le système indien, quoique plus savant et plus complet , au système grec ; substitution qui aurait pu se faire entre les mathématiciens; mais qu'il n'aurait pas été facile d'imposer à tout un peuple. On en trouve la preuve chci les Romains, dont le système de numération rendait les calculs extrêmement pénibles, et qui néanmoins l'ont conservé, quoiqu'ils connussent celui des Grecs qui lui était infiniment supérieur. Une objection, qui au premier abord parait très-forte contre l'opinion de ceux qui pensent que les Grecs ont connu le système indien, c'est que dans le leur ils n'avaient pas de moyen pour exprimer de très-grands nombres (ils s'arrêtaient à quatre-vingt-dix- neuf millions), et qu'Archimède a écrit un livre des Principe», pour remédier à ce défaut, et s'est servi dans son Arénairc du moyen qu'il avait imaginé. Si dans l'école de Pytha- gore, dit-on, on avait possédé le système indien, Arcbimède l'eût connu, et n'aurait pas eu besoin de chercher les moyens d'exprimer de grands nombres; puisqu'il lui aurait suffi de proposer ce système. Sans doute, si Arcbimède avait voulu créer un nouveau système de numération, on en conclurait qu'il ne connaissait pas celui des Indiens; mais tel n'a point été son but; il n'a voulu que trouver le moyen d'exprimer de grands nombres dans le système même des Grecs. Qu'a-t-il fait pour cela? Il a appliqué à ce système, à partir de la limite où il cessait de satisfaire aux besoins du calcul , le système indien , c'est-à-dire la valeur de ■position des chiffres. Est-ce là une preuve qu'Archimède ignorait ce système indien? Peut-on dire même qu'il n'en avait pas parlé dans son livre des Principe* , qui ne nous est pas parvenu, et qui roulait sur la numération, et appliquait au système des Grecs le principe des valeurs de position des chiffres. Dans son Arénaire il n'a point eu à entrer dans les détails qui se seront trouvés dans les Principes , parce que cet ouvrage n'avait pas pour objet d'exprimer de grands nombres, comme on parait le croire quelque- fois ; il avait pour objet uniquement de calculer le nombre des grains de sable qui se trouveraient dans la sphère décrite du soleil comme centre et embrassant les étoiles fixes. Et ce nombre calculé , il voulait l'exprimer dans le système de numération des Grecs. C'est pour cela qu'il propose de donner aux chiffres placés au delà de la huitième colonne, des valeurs de position , qui étaient les mêmes que dans le système indien. Le peu de documens qui nous restent, ne nous dit pas comment se faisait la fixation de ce point à partir duquel les chiffres avaient une valeur de position. Etait-ce par un signe particulier ? ou bien fallait-il que les huit premières colonnes fussent en nombre complet? ce qui aurait introduit dans le système grec la considération du 7.éro,sous une forme quel- conque, telle qu'un point, un vide ou une colonne. On sait, du reste, que le zéro était 476 NOTES. connu des Grecs , et qu'il leur servait à marquer l'absence de degrés ou de minutes , etc., dans leurs calculs des fractions sexagésimales '. Toutes ces considérations n'étaient pas au-dessus du génie d'Archimède; mais rien, ce me semble , ne doit nous autoriser à dire qu'il n'a pas pu en puiser le principe dans la con- naissance du système indien ; ou bien que s'il avait connu ce système , il eût fait autrement dans son Àrénaire. Mais Apollonius, dira-t-on, s'est occupé aussi , après Archimède, de perfectionner le système de numération des Grecs; il a réduit à quatre colonnes les octades ou tranches de huit colonnes d'Archimède ; s'il eut connu le système indien , il aurait appliqué à partir de la seconde colonne , le principe de valeur de position qu'il appliquait à la cinquième. Mais , pour juger le travail d'Apollonius, qui ne nous est point parvenu , et dont le résultat seul nous est connu par des fragmens de Pappus , il faut rechercher pourquoi il s'est fixé à quatre colonnes , plutôt qu'à trois ou à cinq. La raison nous paraît être celle-ci : C'est que les Grecs avaient trente-six chiffres pour exprimer tous les nombres composés de quatre co- lonnes, tels que 2354. Les yingtsept premiers chiffres étaient des lettres différentes de leur alphabet; et les neuf suivantes , qui exprimaient les mille, étaient les neuf chiffres des unités , marqués d'un iota, ou d'un accent. C'étaient ces trente-six mêmes chiffres qui leur servaient à exprimer les nombres au delà des simples mille, jusqu'à la huitième co- lonne exclusivement; et à partir delà cinquième colonne, ces chiffres représentaient des myriades, et on plaçait au-dessus d'eux la lettre m, ou bien après eux, et avant la qua- trième colonne, les lettres m» pour désigner ces myriades. Ces signes étaient embarras- sans, compliquaient les calculs, et pouvaient faire naître des erreurs; et Apollonius a voulu les supprimer. C'est ce qu'il a fait en imaginant les tranches de quatre colonnes, et en leur donnant des valeurs de position. Nous voyons dans cette idée d'Apollonius, de même que dans celle d'Archimède, l'in- tention de conserver religieusement les caractères employés par les Grecs avec leur signi- fication, et de les approprier à l'expression de tous les nombres possibles. Et nous voyons que ces deux grands géomètres sont parvenus à leur but de la manière la plus heureuse, en attribuant à ces caractères des valeurs de position, suivant le principe même de la numération indienne. Cela prouve-t-il qu'ils aient ignoré absolument ce système indien ? Sur un passage de la Géométrie de Bocce , relatif au pentnyone réçjtdier de seconde espèce. — Origine et développement des polygones étoiles. Boèce, dans le premier livre de sa Géométrie, qui est une traduction de propositions prises des quatre premiers livres d'Euclide, ne donne pour chaque théorème, ou problème, que son énoncé et la figure qui s'y rapporte. Sa dernière proposition prise d'Euclide est le problème d'inscrire dans un cercle un pentagone régulier ( proposition XI" du 4™° livre d'Euclide) ; après l'énoncé de cette ques- ' Voirie Mémoire de M. Delambre sur l'arithmétique des Grecs NOTES. 477 tion, se trouve, suivant l'usage, la figure qui s'y rapporte, et cette figure a cela de remar- quable, qu'elle présente à la fois le pentagone ordinaire et le pentagone étoile, ou de teconde etpece. De plus, après cette figure se trouve une explication qu'on ne rencontrait pas à la suite des autres propositions , et qui nous a paru avoir pour objet de justifier cette double figure, ou plutôt ce nouveau pentagone , présente comme répondant au problème proposé. Comme ce passage de Boèce est assez difficile à comprendre, et que nous pouvons très- bien nous tromper dans la signification que nous lui donnons, nous allons le rapporter ici, en suivant le texte d'un manuscrit beaucoup plus correct que l'édition deBasle (1570), « Intra datum circulum, quinquanyulum quod est œquilaterum atque œquiangu- )) lutn detignare non disconvenil. » Ici se trouve la figure qui répond à la question, et l'auteur ajoute: M Nain omnia qiitecutnque xunt numerorum ratione guâ constant ; et proportiona- » literalii ex aliis conslituuntur. Circumferentiœ œqualitate multiplicationibus suis » quidem excedentes ; atque alternatim portionibus suis terininum facientes. » Il faut inscrire dans le cercle un pentagone équilatêral et équiangle. La figure qui répond à la question, présente deux pentagones, dont l'un est de forme nouvelle, et diffère, par conséquent, du pentagone ordinaire. Boèce le justifie ainsi : Car tout ce qui est exprimé en nombres , a lieu par la propre raison des nombres ; et ceux-ci se déduisent proportionnellement les uns des autres. Les arcs ' deviennent plus grands d'une quantité égale à eux-mêmes , par leur dou- blement, et leurs cordes- , prises de deux en deux, forment le périmètre ' de la figure. Si cette traduction du texte de Boèce est admissible, elle nous paraît répondre à la con- struction du pentagone étoile. En effet, soient A, B, G, D, E, les cinq sommets du penta- gone régulier ordinaire. Les arcs que soutendent ses côtés sont ÂB, BC, CD, DE, EÂ. Qu'on les double , ils deviennent ABC, BCD, CDE, DEA, EAB; et les cordes de ceux-ci sont AC, BD, CE, DA , EB. Qu'on prenne ces cordes de deux en deux, on a AC, CE,EB, BD, DA : et considérées dans cet ordre, ces cordes forment le pentagone étoile. ■ Circumferentia est , dan< plusieura autre» passages de Boéce , la dénomination des arcs du cercle. ' Nous traduisons portionibus far \e mot cordes, parce qne portio est la dénomination da segment ée cercle, qui n'en arait point d'autre chei les Latins. ( Portio circuli est figura quœ sub recta et circuit circumfirtntiâ continetur). Et ici nous supposons que Boèce a pris le tout pour la partie, c'est-à-dire le segment pour sa corde , parce que le mot corde n'avait pas alors de dénomination simple, on disait linea inscripla, " Los I^lins appelaient terminus l'extrémité d'une ligne, et le périmètn d'un polygone on d'une figore quelconque [Figura est quod sub aliquo vil aliqu^us TiiBiRU continetur. Définition de Boiee}. 478 NOTES. Du reste, on ne doit peut-être pas s'étonner de trouver dans Boèce cette figure; car il paraît, comme nous allons le montrer ci-dessous, qu'elle a été connue dans l'antiquité, particulièrement de Pythagore; et de plus, on la retrouve au XIIP siècle dans le com- mentaire de Campanus sur Euclide ; et pendant trois ou quatre cents ans , la théorie des polygones étoiles, qu'on appelait alors polygones égrédîens , a été cultivée et avait même pris de l'extension. Mais cette théorie , depuis, s'est perdue , et est restée ignorée, parce que, sans le concours de l'analyse algébrique, elle n'offrait qu'un intérêt de curiosité et n'ap- portait aucune utilité réelle en Géométrie. Mais l'illuslre géomètre qui l'a créée de nou- veau au commencement de ce siècle , et dont elle porte le nom , lui a donné une importance qu'elle ne peut plus perdre, en montrant son véritable caractère scientifique, et le lieu analytique qui l'unit nécessairement et d'une manière indissoluble aux polygones anciens '. Néanmoins cette théorie peut faire honneur au moyen âge , où l'on a si rarement l'oc- casion de signaler quelques traces de génie, et quelques germes d'innovations fécondes. C'est pourquoi nous allons rapporter ce que nous avons trouvé à ce sujet dans l'histoire d'une époque dont il nous reste de trop rares documens. Mais disons d'abord sur quelle autorité nous avons avancé que le pentagone étoile avait été considéré dans l'antiquité, particulièrement par Pythagore. Nous trouvons dans l'Encyclopédie d'Algtedius"^ , au XV* livre, qui traite de la Géo- métrie , immédiatement après la construction du pentagone régulier ordinaire, le passage suivant : « Pentagonum etiam ita scrihitur , et à svperstitiosis notatur hoc noniîne iesns. r> (Ici se trouve figuré le pentagone étoile, avec les lettres i, e , g , n , g , placées à ses cinq sommets. ) « Si -pentagono ita eonstrueto addas lineam ex super iori angnlo in oppogitnm angu- » lum ductam , fiet illa figura, quam wocanf sanitatemPvthagorae; quia Pythagorag , » hac figura delectalus, adscribebat singulis prominentibus angulis lias quinque )) lifteras v,y,i,fi,a, Germaui vacant eiu Trudcnfus: quia sacerdotes veteres Ger- » manoruin et Gallorum, vocabantur Druidœ : qui dieuntur calacos (peut-être cal- » ceos) hujus figurœ gestasse.i) Kirchcr dans son Aritlimologia^ { pars V , De Magicis amuletis ) , parle dans le même sens du pentagone étoile; qu'il appelle 2>en. — Item, 1610 , in-4°. — Les six premiers livres des élémens géométriques d'Euclid» , avec les démonstrations de Jacques Peletier , du Mans. Genève , 1628, in-8°. ' Euclidis clementorum ,libri XV -y accessit XVI de solidorum regularium comparatione ,eic.'R.oma, 1674, in-S°. A eu de nombreuses éditions. ' Scholarummathemalicarum,liinXXXl. îranof., 1S69, in-4'>. — Item, Basile», 1669. — Item, Francf , 169». — Item, ibid., 1627. ' Sic quinquangulum è continuatis crdinatis quinquanguli taleribus factum aquat quinqu» inttriorts angulos duohut redis. 480 NOTES. wardin , qui , le premier, a étendu la théorie dii pentagone étoile aux polygones d'un plus grand nombre de côtés , et qui a fondé la yéritable doctrine des polygones étoiles. L'ouvrage dans lequel nous la trouvons, a pour titre : Geometria speculativa Thome Bravardini , recoligens ornncg conclus iones (jeometricas studentibus artium , et phi- losophiœ Aristotelis ,valde necessarias , simul cum quodam tractatu de quadralurâ circuit; noviter editio. Parisiis, apud Reginaldum Chauldiere, in-fol., vingt feuilles, sans date. La première édition de cette Géométrie était de 149Gi; plusieurs autres ont paru en 1505, 1508, etc. 2. Nous ne connaissons que celle que nous venons de citer. Après avoir traité des polygones réguliers ordinaires , qu'il appelle figures simples , Bradwardin consacre un chapitre aux polygones étoiles , qu'il nomme figures à angles égrédiens. Il dit que ces polygones sont formés par le prolongement des côtés d'un j)olijgone simple , jusqu'à leur rencontre deux à deux ; et il ajoute qu'il n'a pas vu qu'il ait été parlé de ces nouvelles figures par d'autres géomètres que par Campanus, qui en a traité en peu de mots et accidentellement. Voici l'analyse de cette partie de l'ouvrage de Bradwardin. Le pentagone est la première figure à angles égrédiens. La somme de ses angles est égale à deux droits. La somme des angles des autres polvgones à angles égrédiens va en augmen- tant de deux droits, comme dans l'ordre des figures simples. Cela s'accorde avec la formule 8 = 2 (m — 4), qui donne la somme des angles du poly- gone égrédient de w côtés. Les polygones égrédiens au premier orrfr« donnent lieu, parle prolongement de leurs côtés jusqu'à leur rencontre deux à deux, aux polygones égrédiens du second ordre; comme les polvgones simples ont formé les polygones égrédiens du premier ordre. L'eptagone est la première figure à angles égrédiens du second ordre ; il provient de l'epta- gone à angles égrédiens du premier ordre ; celui-ci est la troisième figure du premier ordre. Pareillement le pentagone égrédient, première figure du premier ordre, avait été formé du pentagone simple, troisième figure de l'ordre des polygones simples. Cette ana- logie conduit Bradwardin à énoncer ce principe général : la première figure d'un ordre est formée par le prolongement des côtés de la troisième figure de l'ordre précé- dent. Enfin l'auteur termine en disant qu'il serait trop long de parler des angles de ces figures ; mais qu'il croit , sans pouvoir l'assurer , que la première figure de chaque ordre a la somme de ses angles égale à deux droits, et que dans les autres figures cette somme va en aug- mentant toujours de deux droits en passant d'une figure à la figure suivante. Les figures représentées en marge de l'ouvrage, sont le pentagone, l'hexagone, l'eptagone et l'octogone du pcemier ordre ; l'eptagone , l'octogone et le nonagone du second ordre , et enfin le nonagone, le décagone et le dodécagone du troisième ordre. Deux siècles après Bradwardin, Charles de Bouvelles, dont on ne cite ordinairement qu'une prétendue solution de la quadrature du cercle , a reproduit dans diverses éditions ' Heilbronner , Ifistoria Mathcscos , p. 523. ^ Montucla , Uisioire des mathématiques ^ t. I^'^, p. 573. I NOTES. /«81 d'un traité de Géométrie ' , la théorie des polygones égrédien»; mais moins complètement que n'avait fait Bradwardin. On trouve dans son ouvrage le pentagone égrédient,i\n"\\ a appelé aussi taillant, et dont il prouve que la somme des cinq angles est égale à deux droits , l'hexagone éijrédient , composé do deux triangles , l'cptagone égrédient , provenant du prolongement des côtés do l'cptagone ordinaire, et l'eptagone pltts égrédient, formé par le prolongement des eûtes de l'eptagone égrédient , et dans lequel l'auteur prouve que la somme des angles est égale à deux droits. On a fait mention de cette théorie dans l'extrait de la Géométrie de Bouvelles, inséré dans les Appendices de la Maryurila philoxophica -, Ces premières notions sur la théorie des polygones étoiles , ont passé inaperçues dans les nombreuses éditions de cet ouvrage, comme dans celles de la Géométrie de Bouvelles, dont on n'a parlé qu'au sujet et sous l'inspiration d'une fausse solution de l'inscription de l'eptagone régulier au cercle, et d'une prétendue quadrature du cercle, empruntée du cardinal Nicolas De Cusa. On trouve dans les figures de la perspective de Daniel Barbare*, le pentagone, l'hexa- gone et les deux eplagones étoiles. Mais il ne paraît pas que l'auteur ait eu l'intention de produire ces nouveaux polygones, il a voulu seulement montrer que les polygones réguliers ordinaires donnent lieu de deux manières à d'autres polygones qui leur sont semblables. La première est de prolonger leurs côtés jusqu'à leur rencontre deux à deux (comme pour former le polygone de seconde espèce) ; les points de rencontre sont les sommets d'un secoud polygone semblable au proposé. La seconde manière est de tirer toutes les diago- nales allant de chaque sommet au second ou au troisième sommet après lui; elles forment par leurs intersections un autre polygone, semblable aussi au proposé. Mais dans ces deux modes de construction, on forme aussi un polygone étoile, qui se trouve être la partie la plus remarquable de la figure. Kircher , que nous avons cité déjà ci-dessus au sujet du pentalpha et de X'hexalpha , a fait usage, dans un autre ouvrage ^, de l'eptagone du second ordre (ou troisième espèce) pour rendre sensible l'explication comprise dans un passage remarquable de Dion Cassius, au sujet des sept jours de la semaine que les Égyptiens ont consacrés aux dieux dont les sept planètes portaient le nom. Ces planètes étaient, dans l'ordre de leurs distances à la terre , Saturne , Jupiter , Mars , le Soleil , Vénus , Mercure et la Lune. Kircher les suppose ' Geomefrim introducHonU libri sex , hreviscvlU annotationihus explanati, guibus annectvntvr libelli de circuli quadraturâ , et de ctilicatione sphtrœ , el iniroductio inperspectivam Caroli BovilU. Paris, 1503, in-fol. Cet ouvrage , moina Viiilroduclio in perspectivam , a été reproduit en français , sous le titre ; Livre singu- lier et utile , touchant l'art et pratique de Géométrie , composé nouvellement en français , par maître Charles de Bouvelles , chanoine de Koyon , Paris , 1542 , in-4°. D'autres éditions ont paru en 1547, 1561 , 1557 et 1608. Bouvelles a composé beaucoup d'autres ouvrages, où il s'est montré philosophe, théologien, historien, orateur, poète et canoniste. 3 Page* 1831 , 1233 et 1235 de l'édition de 1535. (c Penlagonus uniformis dicitur , cujus lattra non se mufuo intercidunt Egrediens verà, citm ejus lalcra se invicem sécant. /lexayonus..,, » ' La pratica délia perspettiva di monsignor Daniel Barbare , Venise , 1689 , in-fol. * Ars magna lucis et umbrœ in decem libros digetta Koma , 1646 , in-fol , pages 217 et 637. Ton. XI. 61 482 NOTES. rangées dans cet ordre sur une circonférence de cercle ; et en passant successivement de la première à la quatrième, de la quatrième à la septième, de celle-ci à la troisième , etc., il trace une figure qu'il appelle eptagone (c'est l'eptagone de troisième espèce) , dont les sommets consécutifs désignent les sepi jours de la semaine , dans leur ordre naturel. Ainsi Saturne répond au samedi, le Soleil au dimanche, la Lune à lundi, Mars à mardi. Mer- cure à mercredi , Jupiter à jeudi et Vénus à vendredi. La formation de cet eptagone , dit Kircher , est une belle propriété du nombre sept. Les ouvrages dont nous avons parlé jusqu'ici , bien que leurs auteurs aient joui d'une certaine célébrité, ne sont plus guère connus depuis long-temps; parce qu'en effet ils ne se recommandaient point par ces productions du génie qui immortalisent les œuvres et leurs auteurs, où l'on aime à rechercher encore, après des siècles, les pensées des inventeurs et les traces de leurs efforts. Il n'y a donc rien d'étonnant que le polygone de Boèce, celui de Campanus, et la théorie de Bradwardin, soient inconnus aujourd'hui. Mais nous avons à citer maintenant, dans l'histoire de cette théorie, un nom célèbre , un ouvrage mémorable, une de ces découvertes rares qui font la gloire des temps modernes , enfin des considérations analytiques qui, il y a deux siècles, auraient dû faire une impres- sion profonde sur l'esprit des géomètres. Mais Kepler a devancé son siècle; car c'est de lui qu'il s'agit , et de l'ouvrage de V Harmonique du inonde ' , et de la belle proposition sur le rapport des carrés des temps des révolutions aux cubes des distances au soleil , et de celte autre, d'un genre tout différent , qu'une même équation détermine les diverses espèces de polygones d'un même nombre de côtés. On observera sans doute aujourd'hui qu'aucune conception nouvelle ne s'était jamais présentée dans des circonstances en apparence plus favorables pour assurer rapidement à l'auteur une gloire durable. Cepen- dant la savante théorie de Kepler est tombée dans l'oubli, et, de son livre immortel, il n'est resté que l'énoncé de sa grande loi des mouvemens des corps célestes ; encore a-t-elle été méconnue , et peut-être dédaignée, par ses contemporains, parmi lesquels on nomme à regret et Descartes et Galilée ; encore a-t-il fallu que , près de 80 ans plus tard , Newton l'expliquât, la fît comprendre et lui donnât la vie"! La théorie des polygones , qui a guidé Kepler dans ses longues et pénibles spéculations, a été encore moins favorisée; la simple curiosité ne s'en est pas mêlée ; rien n'a pu la sauver d'un oubli complet : oubli qui nous rappelle cette triste réflexion que fait Bailly, précisément au sujet des lois de Kepler : « C'est donc en vain qu'on découvre des vérités ; on parle à ses contemporains, ils n'écoutent pas ! » Non ce n'est pas en vain ; mais trop souvent les vérités nouvelles ne sont que pour l'avenir. ' Harmoniccs Mxindilihri V. Lincii AustriiB ; 1619 , in-fol. 2 Kepler a prévu en quelque sorte que les découvertes qui lui avaient coûté 17 ans de travail , et de travail continu , ne seraient comprises qu'après un long intervalle de temps : Il Le sort en est jeté , dit ce grand homme , avec l'accent de l'enthousiasme , j'écris un livre qui sera lu par 11 ceux de l'âge présent ou par la postérité, il n'importe : qu'il attende son lecteur pendant cent ans; Dieu 11 n'a-t-il pas attendu six mille ans le contemplateur de ses œuvres? « [Jacio in aleam, librumque scrilo , seu prœacutihus , seu jjosieris legeiidum; nihil interest : expectat Me suum lectorem pcr annos ccntum ; si Deus ipse per annorum sena millia contemplatorem prœstolatus est. HtRHosiCES Mhhdi, liber V; p. 179.) NOTES. 483 L'ouvrage Je Kepler est en cinq livres. Le premier , qui a pour titre : De fignrarum regularium ,quœ proportione» harmonica* pariuiit, ortu, clattibut , ordine et diffe- rentiù , cauxâ tcieitliœ et demontlrationi» , est consacré à la théorie générale des figures régulières, et comprend en particulier celle des polygones étoilét. Dans le préambule, Kepler reproche à Ramus d'avoir critiqué le X" livre d'Euclide, et d'avoir voulu le rejeter de la Géométrie. Il se propose de le compléter, en traitant des polygones réguliers qui ne sont pas inscriptibles dans le cercle géométriquement , et en montrant ce qui les distingue de ceux qu'on sait inscrire. Il promet d'écrire sur cette partie de la Géométrie en philosophe, et d'une manière plus claire, plus aisée et plus populaire qu'on n'a fait jusqu'alors. Ce livre commence par de nombreuses définitions, indispensables pour comprendre l'ouvrage ; mais dont nous ne rapporterons ici que les deux ou trois suivantes. Les figures régulières sont celles qui ont leurs côtés égaux, et leurs angles égaux. On les distingue en deux classes. Les unes sont primaire» et radicales ; ce sont les polygones réguliers ordinaires; et les autres sont e/oiVee*,' celles-ci sont formées par les prolongemens des côtés d'une figure rae//cfl/e '. Inscrire une figure dans le cercle, c'est déterminer par une construction géométrique (c'est-à-dire au moyen de la ligne droite et de la circonférence), le rapport de son côté au diamètre du cercle. Ensuite Kepler rappelle plusieurs propositions du X' livre d'Euclide, dont il se servira. Et il commence à la proposition trente-cinq , à traiter des dilTérens polygones réguliers. Il considère d'abord ceux qui sont inscriptibles dans le cercle géométriquement. On remarque , quant aux polygones étoiles , le pentagone de seconde espèce , l'octogone et le décagone de troisième espèce , le dodécagone des troisième et cinquième espèces , les pentédécagonesdes deuxième, quatrième et septième espèces, et l'étoile de 24 côtés, des cinquième , septième et onzième espèces. Passant aux polygones qui ne peuvent pas être construits géométriquement , il démontre que l'eptagone ordinaire et ses deux étoiles sont du nombre. Alors il a recours à l'analyse, pour lui reprocher bientôt de n'être pas plus habile , et de ne rien lui apprendre. Ce pas- sage contient plusieurs aperçus analytiques qui auraient dû préserver l'ouvrage de l'oubli. « On m'objectera, dit-il (page 34), l'art analytique, appelé algèbre par l'arabe Geber , )) et cotta par les Italiens : car les côtés des polygones de toute espèce paraissent pouvoir » être déterminés par cette méthode. » Par exemple, pour l'eptagone. Juste Byrge, qui dans ce genre a imaginé des choses » très-ingénieuses et même incroyables, procède ainsi etc. » Kepler cherche par des considérations géométriques l'expression du côté de l'eptagone régulier inscrit au cercle , en fonction du rayon ; et il parvient à cette équation: 7 — 14y -f- 7 iiij — 1 vj œquè valent pgurœ nihili; ■ Kepler ne dit pat *i celte idée de polygone* étoilét ett de loi , ou t'U l'a empruntée de quelque ouvrage antérieur. 484 NOTES. ou, suivant nos symboles actuels, 7 — 14 a;- -t-l x'* — a?s==o. oùar est le rapport du côté de l'eptagone au rayon du cercle. « La valeur de la racine d'une telle équation , dit-il , n'est pas unique ; car il y en a deux » pour le pentagone, trois pour l'eptagone, quatre pour le nonagone , et ainsi de suite.»" Il ajoute que (pour l'eptagone) les trois racines sont les côtés de trois eptagones dif- férens, qu'on peut concevoir inscrits dans le même cercle. Voilà l'interprétation bien nette des trois racines de l'équation qui donne le côté de l'eptagone régulier inscrit au cercle. Voilà la notion analytique qui unit nécessairement la théorie des polygones étoiles à celle des polygones des Anciens. Kepler exprime encore, plus loin, ce même principe en des termes remarquables , car en avouant les difficullés que fait naître la fécondité même de l'analyse, il reconnaît tout ce que cette méthode a de beau. u Jusqu'ici, dit-il, le côté d'un polygone, et celui d'une étoile du même nom, avaient » eu chacun une description propre et sûre. Dans l'analyse algébrique , ce qu'il y a surtout » d'admirable ( quoique ce soit là précisément ce qui embarrasse le géomètre) , c'est que i> la chose demandée ne peut pas être donnée d'une seule manière. Mais , encore bien que » ce ne soit pas démontré généralement, poursuivons ce que nous avons commencé » plus haut, qu'il y a autant de nombres qui satisfont à l'équation, qu'il se trouve, dans » la figure, de cordes ou de diagonales de longueurs différentes ; comme, dans le penta- » gone , deux; dans l'eptagone, trois; dont un pour le côté, et les autres pour les diago- » nales. C'est pourquoi , enfin , tout ce qui est énoncé du rapport du côté de la figure » au diamètre, est commun aux rapports de toutes ses autres lignes au même diamètre.» Kepler reproduit ces mêmes considérations dans la proposition suivante , où il démontre que la division d'un arc en trois, cinq, sept, etc. parties, n'est pas possible géométri- quement. «Plusieurs lignes, dit-il, répondent à la question, et d'une propriété com- » niune à plusieurs choses on ne peut rien conclure de spécial et de particulier à l'une y> d'elles. ' » Le second livre, intitulé : De ftgurarum régula ritirn cotujnientîâ , traite encore des polygones réguliers, puis des polyèdres. Kepler passe eu revue les différentes ma- nières d'assembler des polygones, soit de même espèce, soit d'espèces différentes, pour remplir exactement une surface plane, et pour former des polyèdres réguliers. ' Au milieu de ce» considération» mathématiques si justes et si profondes , on trouve quelques réflexionl qui annoncent l'usage bizarre et chimérique que \eut faire de ses savantes spéculations sur les polygones le génie de Kepler, dominé par les idées pythagoriciennes et platoniciennes sur les propriétés cosmo- graphiques des nombres : tel est ce passage qui termine la proposition 45« : « Il est donc prouvé que les » côtés de ces figures doivent rester inconnus, et sont de leur nature introuvables. Et U /t'y a rien d'èton- i> nant en ceci, que ce qui ne peut se rencontrer dans l'Archétijpe du monde, ne puisse être exprimé dans la )> conformation de ses parties, n Ce sont de pareilles idées qui ont conduit Kepler à l'une des plus grandes découvertes qu'on ait jamais faites ! NOTES. 485 Le livre III, De ortu proporlionum harmonicarum , deque naturâ et differentiii rerutn ad catitum pertinentium , qui ne trailo que de l'harmonie musicale, est étran- ger à la Géométrie et à l'astronomie. Dans le livre IV, qui a pour litre : De configurationibu* harmonicig radiorum tide- raliutn in Terra, earinnque eff'ectii in ctendts Meteoris, aliiique Naturalihii» , Kepler fait usage des polygones étoiles et de la valeur de leurs angles, auxquels il com- pare les configtiraliont , ou distances angulaires des planètes : ces angles correspondent à des circonstances et à des phénomènes sublunaires qui diflèrent suivant qu'ils appar- tiennent à tels ou tels polygones. Les configuration* efficaces , celles qui sont propres à stimuler la nature subluuaire et les qualités intérieures de l'àme, sont exprimées par les angles des polygones inscriplibles géométriquement. On y trouve le carré, le triangle, le pentagone de seconde espèce, l'eptagone de troisième espèce, le décagone de troisième espèce, et le dodécagone de cinquième espèce. Le V* livre a pour titre : De harmoniâ perfectissimâ motuum cœlettium , ortuque exiigdem Excentricilatum , semidiametrorumque et Temporum periodicorum. Kepler y compare les cinq corps réguliers aux rapports harmoniques; et cherche à y découvrir des analogies avec les mouvemens des planètes. C'est dans ce V livre, comme l'indique le titre, que se trouve sa magnifique loi du rapport constant des carrés des temps des révolutions des planètes aux cubes de leurs distances au soleil '. On voit par l'analyse que nous venons de donner de l'ouvrage de Kepler, que la doc- trine des polygones étoiles y joue un rôle important et nouveau sous le rapport analy- tique. Cependant nous ne saurions en trouver depuis aucune trace , quoiqu'elle eût dû se présenter dans la théorie des sections angulaires qui a occupé souvent les géomètres. Wallis particulièrement, qui, un demi-siècle seulement après Kepler, a écrit l'histoire de l'algèbre, et un traité des sections angulaires, n'aurait pas dû la passer sous silence. Ce géomètre a bien vu que la seconde racine de l'équation du second degré par laquelle ' On revient tonjonra «Tec une senaibilité mèli'e de vénération sur le* termes même» dont Kepler te tert pour annoncer «a grande découverte ; il* expriment tout «on bonheur , et toute l'importance qu'il a mite & pénétrer ce tecret >i caché : « Aprèa avoir trouvé les vraies dimensions des orbites parles observations de Brahé et parl'eflbrt continu i> d'un long travail, enfin, dit-il, enfin , j'ai découvert la proportion des temps périodiques & l'étendue de » ces orbites ; Sera ^idem refpexit inertem , Respexit tamen , et tongo post tempore venit ; » Et si vous voulcx en savoir la date précise, c'est le 8 de mars de cette année 1618, que d'abord conçue dans D mon esprit , puis essayée maladroitement par des calculs , partant rejetée comme fausse , puis reproduite le » 16 de mai avec une nouvelle énergie , elle a surmonté les ténèbres de mon intelligence : mais si plei- » nement conGrmcc par mon travail de 17 ans sur les observations de Brahé, et par mes propres médita- « tions parfaitement concordantes, que je croyais d'abord rcver et faire quelque pétition de principe : » mais plus de cloutes j c'est une proposition très-certaine et très-exacte, que le rapport entre les temps « périodiques de doux planites est précisément sesqui - altère du rapport des motfennes distances. » ( Livre V, pag. 189. ) 486 NOTES. on détermine le côté du pentagone régulier inscrit au cercle , en donnait la diagonale ' ; mais cette interprétation géométrique de la racine étrangère ne suffisait pas ; il fallait la rapprocher de l'énoncé même de la question, pour y voir non pas seulement une diago- nale , mais le côté d'un second pentagone. Cette idée qui nous paraît si simple aujour- d'hui, et qui complète la solution analytique de la question, a échappé aux Bernoulli, à Euler, à Lagrange, et n'est venue que de nos jours à l'esprit d'un géomètre. La doctrine des polygones égrédiens de Bradvrardin , a été vivement combattue par un auteur du XVII" siècle , Jean Broscius, dans un ouvrage intitulé : Âpologia pro Aris- tote/e et Euclide contra P. Ramnni et alion. Dantisci , 1652,in-4°. Elle n'avait rien à redouter d'aucune attaque, qui n'aurait dû servir même qu'à la propager, et à en répandre la connaissance. Cependant, par un hasard singulier, cet ouvrage de Broscius est peut-être le dernier qui ait traité de ces polygones , qui depuis sont tombés entièrement dans l'oubli, et qui n'ont même réveillé aucun souvenir, au commencement de ce siècle , quand M. Poinsot les a créés et remis sur la scène. Voici ce que contient l'ouvrage de Broscius , sur ces polygones. D'abord il reprend fortement Ramus pour s'être servi du pentagone étoile , comme exemple d'une figure , autre que le triangle, où la somme des angles était égale à deux droits. « Ce qui prouve , dit-il , l'ignorance de Ramus en Géométrie. Car celte figure est un dé- >) cagone qui a cinq angles renlrans et cinq angles saillaus , et la somme de ces angles est » égale à seize droits. » Broscius cite l'ouvrage de Bradwardin , et prouve qu'on peut former une infinité de figures dites à angles égrédiens, de 7, 9, 11 , etc., côtés, dans lesquelles, comme dans celle de Ramus , la somme des angles soit égale à deux droits. Bradvyardin n'avait fait que soupçonner cette belle proposition, sans la démontrer; et Charles de Bouvelles ne l'avait appliquée qu'à l'eptagone égrédient de troisième espèce. Broscius va plus loin ; il considère les figures de différentes espèces pour un même nombre de côtés , et donne la somme de leurs angles. Il trouve qu'il y a trois espèces d'eptagones, y compris l'eptagone ordinaire, dans les- quels la somme des angles est 10, 6 et 2 droits ; Trois espèces d'octogones, dans lesquels la somme des angles est 12, 8, 4 droits; Six espèces de figures à 14 angles égrédiens (y compris le polygone ordinaire de 14 côtés), dans lesquelles la somme des angles est égale à 24, 20,16, 12, 8et4 droits ; Sept espèces de figures à quinze angles égrédiens, dans lesquelles la somme des angles est égale à 2G, 22, 18, 14, 10, 6 et 2 droits. Ces résultats s'accordent avec la loi trouvée par M. Poinsot, d'après laquelle la somme ' Cette remarque avait déjà été faite probablement, un siècle et demi auparavant, par Stifels ; car oa trouve dans son algèbre les expressions du côté et de la diagonale du pentagone régulier en fonction du rayon du cercle circonscrit ( cos'r son Arithmetica intégra, fol 178 V ), et en supposant qu'il n'ait point obtenu ces expressions par la résolution de l'équation du second degré, leur forme a dû lui montrer que les carrés faits sur ces lignes sont les racines d'une semblable équation; car ce géomètre, très-babile algé- bristc pour son temps, était fort exercé dans la résolution des équations du second degré. NOTES. • 487 des angles de chaque polygone est S=2(m — 2 A), m étant le nombre de côtés du poly- gone, et h celui qui marque Vetpèce , ou l'ordre do cette figure. Le point de vue sous lequel Broscius considère ces nouvelles figures , en les regardant comme des polygones à angles saillant et renlran* alternatiTemcnt, et dont les côtés ne se coupent pas, le conduit à un mode de construction nouveau de ces figures, et à une propriété curieuse d'isopérimétrie. Prenons pour exemple un eptagone régulier ordinaire, et marquons les points milieux de ses sept côtés. Qu'autour de la droite qui joindra deux points milieux consécutifs, on fasse tourner le petit triangle que cette droite retranche de l'eptagone, et que ce triangle s'applique entièrement sur la surface de la figure. Qu'on fasse tourner semhlablcment autour de chacune des six autres droites joignant deux points milieux consécutifs , le petit triangle qu'elle retranchait de l'eptagone; tous ces petits triangles formeront , dans leurs nouvelles positions, un nouveau polygone de quatorze côtés, à angles saillaus et rentrans alternativement. Ce nouveau polygone de quatorze côtés a évidemment le même périmètre que l'epta- gone proposé. Maintenant, qu'autour de chaque droite qui joint deux sommets d'angles rentrans con- sécutifs , on fasse tourner le petit triangle que cette droite retranche du polygone, on for- mera de cette manière un troisième polygone de quatorze côtés, ayant encore ses angles alternativement saillans et rentrans ; et ce nouveau polygone aura évidemment son péri- mètre égal à celui du second, et par conséquent à celui du premier. Les surfaces de ces trois polygones sont extrêmement différentes entre elles ; puisque le second est placé dans l'intérieur du premier, et le troisième dans l'intérieur du second. Maintenant, on reconnaît aisément que le second polygone n'est autre que l'eptagone de seconde espèce dans lequel les portions de ses côtés comprises dans son intérieur auraient été eflacées; et que pareillemeut le troisième polygone n'est autre que l'eptagone de troisième espèce , dont les parties de ses côtés comprises dans son intérieur auraient aussi été effacées. Voici donc une nouvelle manière de former les polygones égrédiens , en les faisant dériver les uns des autres. Celte méthode méritait d'être remarquée, surtout à cause de cette circonstance singulière, que tous les polygones déduits ainsi d'un premier, quel qu'il soit , ont toujours le même périmètre. Nous ne trouvons pas d'autre ouvrage où l'on ait parlé des polygones égrédiens, jus- qu'au commencement de ce siècle où cette théorie a reparu toute nouvelle, sans que son célèbre auteur et les géomètres qui l'ont admirée, se soient doutés du rôle qu'elle avait déjà joué pendant quatre siècles. Géométrie des Arabes. Depuis le VIII" siècle jusqu'au XIII», l'Europe demeura plongée dans une ignorance profonde. L'amour et la culture des sciences furent concentrés pendant ce long intervalle I 488 NOTES. chez un seul peuple , les Arabes de Bagdad et de Cordoue. C'est à eu\ que nous ayons dû la connaissance des ouvrages grecs qu'ils avaient traduits pour leur usage, et qu'ils nous ont transmis, long-temps avant qu'ils nous parvinssent dans leur langue originale. Jusqu'à ces derniers temps, on a pensé que c'était là la seule obligation que nous eus- sions aux Arabes ; et l'on a négligé de rechercher et d'étudier leurs propres ouvrages , pensant que l'on n'y devait trouver rien d'original , ni d'étranger aux doctrines et à l'éru- dition grecques. C'est une erreur sur laquelle on revient aujourd'hui, surtout depuis qu'on connaît les ouvrages hindous, et que l'on sait que les Arabes y ont puisé les principes du calcul algébrique qui les distingue essentiellement des ouvrages grecs. Mais il y a trop peu de temps que cette erreur est détruite, et les ouvrages arabes nous sont encore inconnus. Un asseï grand nombre existent depuis plusieurs siècles en Eu- rope, la plupart dans leur langue originale et quelques-uns en latin, ayant été traduits dans les XII° et XIII" siècles. Faisons des vœux pour que leur importance soit appréciée et pour qu'ils ne tardent pas à sortir des bibliothèques où ils sont restés enfouis : alors seulement on pourra songer à une véritable histoire scientifique des Arabes. Pour le mo- ment il n'est possible de réunir que quelques faits principaux et quelques données éparses , qui ne permettraient pas de juger avec confiance de la part que cette grande et illustre nation a prise dans l'œuvre de la propagation et du perfectionuement des sciences mathématiques, et où n'apparaîtrait pas dans un jour suffisant le caractère que ces sciences ont reçu du mélange des élémens grec et hindou qui les ont constituées. Mais ce carac- tère se montre dans les ouvrages des Européens au XV° siècle, ouvrages imités de ceux des Arabes , et c'est là pour le moment où nous pourrons l'étudier et le reconnaître avec évidence. Le goût et l'ardeur des Arabes pour les sciences se développèrent rapidement au VIII° siècle, où commença le règne des Abbassides. Ces princes , nobles imitateurs des Ptolémées d'Egypte, firent de Bagdad le centre de tous les talens du monde '. Ils recueil- lirent avec activité toutes les lumières qu'ils purent trouver chez les nations que les suc- cesseurs du prophète et les Ommiades avaient subjuguées. Les Arabes s'approprièrent ainsi des sciences toutes faites 2, dont ils devinrent les seuls dépositaires, quand, par suite d'une fatalité attachée à l'espèce humaine, elles déclinaient et se perdaient chez les peuples qui les avaient créées et perfectionnées pendant des siècles. Les Grecs surtout et les Hindous^ furent tributaires dans ce contingent scientifique. Telle est l'origine des sciences, de la Géométrie particulièrement, chez les Arabes. Les élémens d'Euclide paraissent être le premier ouvrage qu'ils traduisirent, sous le ' Libri, Histoire des sciences mathématiques en Italie , tom. I«', pag. 117. ^ « On ne peut point douter que Ics^Arabes n'oient eu depuis la fondation du Khalifat et l'établissement de leur empire, une grande estime pour les arts et pour les sciences , puisqu'ils ont traduit en leur langue tous les meilleurs livres grecs , hébreux , chaldéens et indiens. » ( D'Herbelot , Bihl. orientale ^ au mot Etm \science~\ ). ' On litdans la Bill, orientale de U'IIerhelot, au mot helah (qui signifie Traité) , les titres d'un grand nombre d'ouvrages que les Arabes avaient traduits ou imités des ouvrages indiens, sur toutes les parties des sciences mathématiques et philosophiques. NOTES. 489 régne (l'Almansor, dans le YIII" siècle. Bientôt après on dut aui encouragcmcns éclairés du calife Al Mamoun (qui commença à régner à Bagdad en l'an 814) la connaissance des ouvrages d'Archiméde, d'Apollonius, d'Hypsicle, de Ménélaus, de Tbéodose et l'Al- magesle de Ptolémée. Dès lors les progrés des Arabes dans les sciences furent rapides; et le IX* siècle compta des géomètres habiles et d'un savoir très-élendu. Trois frères , Mohammed , Hamet et Hascn , fils de Musa ben Schaker, furent célèbres , par les traductions qu'ils donnèrent de divers ouvrages grecs et hindous , et par leurs propres écrits sur toutes les parties des sciences mathématiques, dont plusieurs nous sont parvenus. Des tables astronomiques que Mohammed ben Musa avait dressées dont le tyttème indien, furent long-temps célèbres dans l'Orient. Mais un ouvrage beaucoup plus précieux et plus important à nos yeux, est son Traité d'Algèbre , le plus ancien qui fût connu jusqu'à ces derniers temps, où ceux des Hindous nous sont parvenus. C'est dans cet ouvrage que nous avons puisé nos premières connaissances algébriques, d'a- bord par l'entremise de Léonard de Pise qui avait été s'instruire en Arabie, et ensuite en l'ayant nous-mêmes à notre disposition , et en le traduisant au XIII° siècle. De là, on a regardé Mohammed ben Musa comme l'inventeur de l'Algèbre ', et son nom est resté, à juste titre, en grande réputation chez les géomètres européens. Cependant son ' Cardan dit, au commencement de ion Àra magna ; Bœe an olim à Mahomet» , Mosis Araiis filio , initium êvmpsit. Et$nim hujus rei locuples testis Leonardus Pisanus. Il répète la même cboae dam son traité De subtilitate (liv, XVI) , où il place Hohammed ben Buta apré» Arohytat , et le neuvième parmi les douze plus grands génies de la terre, lluic Afahomelus Moisis filius Àrabs, Alyebraticœ ut ita dicam artis inventer , succcdil, Ob id inventum ab artis nomine cognomen adeptus est. Tartalea attribue aussi à Sohammed ben Husa , rinvention de l'algèbre , qu'il appelle dans le titre de la VI° partie du Traité général des nombres et des mesures : Antica pralica speculativa de larte magna , detta in Arabo /tlgebra et Almucabala , over regola delta cosa, trovata da Alaumeth, figlio de Moite arabo , la qvale se puo dire la perfetta arte del calculare , etc. On avait attribué d'abord l'invention de l'algèbre à Gcber , autre géomètre arabe. Ainsi, Stifels , célèbre algé- bristre allemand , contemporain de Cardan , écrit au professeur Milichius : Tuo quoque constlio usus , Algebram ( }U(im persuasisti bonis rationibus à Gebro astronome, autore rjus , ita esse nuncupatam) mullis exemplis illustratam scripsi ^Arithmetica intégra, pag. 226 v<> ) ; et appelle souvent l'algèbre Régula Cebri. Cette opinion était encore partagée au XVII° siècle {voir Kepler, IJarmonices Mundi lib. I, prop. 45) ; mais comme elle n'avait pas d'autre fondement que la ressemblance (les mots, elle n'a pu se soutenir, surtout quand on a connu la vraie étymologie du mot Algèbre , qui provient de la double dénomination Algebr V Almocabelah, dont te servent toujours les Arabes , et qui signifie opposition et comparaison. Cette déuo- minatinn, que nous avons remplacée par le seul mot Algèbre, se rapporte asaei bien aux équations dont le mécanisme est le fondemeni de toute la science. D'autres écrivains, à la tète desquels on trouve Regiomontanus et Scheubel, avaient regardé Diophante comme le premier inventeur de l'algèbre, et cette opinion a prévalu généralement; parce qu'en effet, Diophante avait une grande antériorité sur les Arabes. Hais aujourd'hui la question de priorité est entre les Grecs et les Hindous. Brahmegupta est postérieur de deux siècles à Diophante, mais la perfection de loa ouvrage annonce certainement que l'algèbre avait déjà une existence très-ancienne dans l'Inde. Car, ainsi que le dit Peleticr dans son Algèbre, c'est là une de ces choses qui, loin de devoir leur in- vention à un seul auteur , n'ont pris règle , forme et ordre qu'après un long temps de circuitions , d'inter- missions et de continuelles exercitations d'esprit. To.li. XI. 62 490 NOTES. ouvrage, auquel, ne fût-ce que par reconnaissance, étaient si légitimement dus les hon- neurs de l'impression, est resté manuscrit, et depuis trois siècles dans l'oubli, quand pour la première fois, en 1831, M. Rosen l'a publié en arabe et en anglais. M. Libri Tient aussi de reproduire, dans le P' volume de son Histoire des sciences en Italie , l'une des traductions latines que l'on conservait à la bibliothèque royale. Celle-ci n'est pas aussi complète que le manuscrit dont s'est servi M. Rosen. La partie géométrique , entre autres , ne s'y trouve pas. On sait que Mohammed ben Musa avait tiré des Indiens une partie de ses connais- sances mathématiques ^ Nous devons penser que c'est d'eux qu'il reçut l'algèbre. Son ouvrage présente des points de ressemblance certains avec les leurs , et nullement avec celui de Diophante. Mohammed y fait usage, comme les Indiens, de considérations géométriques, pour mettre dans tout son jour la certitude des opérations de l'algèbre; on distingue surtout la manière dont il démontre, par cette méthode, les règles pour la résolution de l'équation du second degré dont il considère trois cas -. L'ouvrage con- ' Casiri, Bihliotheca Arabica- ffispana , pag. 427-42S. — Coiebhooke, Brahmegupta and Bhascara Algelra ; Dissertation, pag. lxxii. — F. Rosen, Algelra of Mohammed ben Musa. Préface , pag. viii. ^ Ces trois cas dont l'auteur ne donne que des exemples numériques, sont exprimés par les trois équations littérales : ax^ -\- bx — c r= 0 , ax^ — bx — c := 0 , ax^ — Jo; -V- c = 0. Le quatrième cas que peut présenter l'équation générale du second degré est ax^ -\- bx -i- c z= 0 , où tous les termes sont positifs. Mohammed n'en parle pas, parce que les racines, dans ce cas, sont tou- jours négatives. Dans les autres équations il ne prend que les racines positives, et laisse de côté, comme insignifiantes, les racines négatives. Dans la troisième, ax^ — bx -\- c = o , où les deux racines b . 1 ' = ^ ± 2li l/i^-4ao sont positives (supposé qu'elles sont réelles), Mohammed dit qu'on les calcule l'une et l'autre, mais que dans chaque cas il faut s'assurer qu'elles répondent à la question. On essaie d'abord la première , qui pro- vient dusl^aeplus; et si elle ne convient pas, la seconde, qui provient du signe moins, conviendra cer- tainement. ( tVhen you meet with an instance ivhich refers you ta this case , try ils solution by addition, and ifihat do not serve, then subtraction certainly will. Page 11.) Les Indiens admettaient aussi les deux racines, dans les cas où elles convenaient toutes deux [Bija-Ganita, § 130, 139), et en rejetaient une, comme absurde, dans d'autres cas {ibid., § 140, 141). Par exemple dans cette question : L'ombre d'un gnomon qui a douze doigts de hauteur, étant diminuée du tiers de l'hypo- ténuse, devient 14 doigts, quelle est l'ombre? On est conduit pour déterminer l'ombre, à une équation du second degré dont les deux racines sont positives et égales à "^ et à 9. La première convient parce qu'étant plus grande que 14, elle peut, étant diminuée du tiers de l'hypoténuse, devenir égale à 14; mais la seconde étant plus petite que 14 , elle doit être rejetée , dit Bhascara , à cause de son absurdité (ly reason of its incongruity). Lucas de Burgo suit en tout point Mohammed ben Musa; il considère trois cas aussi; il donne la solu- tion de chacun dans un strophe de quatre vers latins; puis il la justifie par des considérations géomé- NOTES. 491 tient aussi , comme ceux des Indiens, une partie géométrique sur la mesure des surfaces. On y rcmarquo les trois expressions -^, kIO et -^^^ du rapport approché de la cir- conférence au diamètre, qui, comme nous l'avons dit, ont été connues des Indiens ■; et les trois nombres 13, 14 et 15 pris pour les calés d'un triangle que nous avons trou- vés aussi dans les ouvrages de Brahmegupta et de Bbascara. L'ouvrage de Mohammed est beaucoup moins étendu que ceux-ci ; il ne traite pas comme eux des équations indéterminées du second ni du premier degré. Nous en trou- vons la raison dans la préface de l'auteur qui nous apprend qu'il a composé ce traité succinct, à la demande du calife Al Mamoun , pour faciliter une foule d'opérations qui se présentent dans le commerce des hommes et dans les besoins de la vie. Ce passage suffirait pour nous prouver que les Arabes possédaient alors des ouvrages plus étendus et d'un ordt'e plus élevé, si nous ne savions pas qu'en effet ils connaissaient les savans ouvrages des Indiens, et qu'eux-mêmes ont écrit sur la résolution des équations du troisième degré, comme nous le dirons plus loin. Quoi qu'il en soit, c'est un fait bien remarquable et digne de la méditation des savans de l'Europe, qu'un traité d'algèbre, regardé comme élémentaire au IX" siècle chez les Arabes, et en quelque sorte comme manuel pratique à l'usage du peuple, a été 700 ans après V Ars magna des Européens, et la base et l'origine de leurs grandes découvertes dans les sciences ^. triques. Quant nu cas où les deux racines sont positives, il reconnaît qu'elles peuvent convenir l'une et l'autre dans certaines questions , mais que dans d'autres l'une seulement satisfait. ( Siche luno e laltro modo satisfa cl ihema. Ma a le volte se hane la verita a luno modo, À le voile a laltro. El perche se cavando la radice del ditto rémanente de la mita de le cote non satisfacesse al thema. E tu la ditta R ( radice ) agiongi a la mita de le eose, e haverai el quesito : et mai fallara che a uno de H doi modi non sia satisfatto et quesito, cioe giongneudola , overo cavandola del dimeccamento de le cose , etc. (Samma de Arithmetica, etc. Distinc- tio 8, tractatus 6, art. 12.) Ces rapports manifestes, qui ont lieu entre l'ouvrage de Mohammed ben Ilusa et ceux des Indiens , d'une part , et celui de Lucas de Burpjo, de l'autre , montrent bien l'origine de l'algèbre des Européens , et l'in- fluence directe que les ouvrages arabes ont eue sur les progrès et le caractère des sciences mathématiques & la renaissance. Tel a été l'objet de cette note. gofi3'* 39**? ' Il parait que le rapport .' ' = p^ = 8,14160 est dû aux Indiens , et qu'ils l'avaient trouvé en cal- culant le côté du polygone régulier de 768 côtés. Gl' Indiani, corne apparisce da un liiro dei Bramini, inti- tolato Ajin-Akbari, avean trovalo con ingegnosissimo metodo Geomeirico , viediante l'inscrizione di un poli- qono regolare di 768 lati, che la circonferenza del circolo sta al diamètre corne 3027 a 12-50. ( Saggio sulla ttoria délie matemaliche , opéra del sig. P. FaiifciiiNi, Lucca, 1821 , in-8°.) Th. Simpson est parvenu de lui- même au rapport 3,1416, par l'inscription du polygone de 788 côtés j il a obtenu même le rapport plus ap- Droché — • ( y. ses Élim. de Géom.) Sa méthode est très-simple : je ne sais pourquoi on n'en parle jamais. •^ 200000 "■ ' r I J 1 T 3 Jusqu'ici nous n'avions connu des Arabes que le traité d'algèbre de Mohammed ben Husa. C'est le seul du moins dont les géomètres du XVI^ siècle, Lacas de Burgo, Cardan, Peletier, Tartalea, Stevin , etc., aient parlé. Hais beaucoup d'autres auteurs arabes ont écrit sur l'algèbre; on trouve les noms de plusieurs d'entre eux et les titres de leurs ouvrages dans la Bibliothèque orientale de D'IIerbelot , au mot Gebr ; et an mot Ketab (pag. 966 , 2™" colonne ; 967 , 1" col. ; 981 , 1« col. ; édit. in-fol. de 1697). Il existe un ouvrage, traduit de l'arabe en anglais, à Calcutta, en 1812, qui traite de l'Arithmétique, de la Géométrie et de l'Algèbre, ot dont je m'étonne que l'on ne parle pas depuis quelques années qu'on 492 NOTES. Mohammed avait écrit sur les triangles plans et sphériques un traité qu'on dit exister encore sous le titre : De figurîs plants et sphœricis. On possède aussi un ouvrage de Géométrie qu'il a composé probablement en commun avec ses deux frères, Hamet et Hasen , car il a pour titre p^erba filiorum Moi/si, filii Sehaker, Mahumeti , Hameti, Hasen. Dans cet ouvrage se trouve démontrée la formule de l'aire du triangle en fonction des trois côtés ; et l'application en est faite au triangle qui a pour ses côtés les trois nombres 13 , 14 et 15, comme chez les Indiens. La démon- stration est celle que Fibonacci et Jordan Nemorarius ont donnée au XIII° siècle et que Lucas de Burgo et Tartalea nous ont fait connaître. Elle paraît appartenir aux Arabes, car elle est différente de celle de Héron d'Alexandrie. Les trois fils de Musa ben Sehaker ont écrit beaucoup d'autres ouvrages dont on trouve l'indication dans la Bibliotheca yï rahico-Ilùpana de Casiri (tom. I'"', pag. 418). Alkindus, l'un de leurs plus célèbres contemporains, que Cardan met comme Mohammed ben Musa au nombre des douze plus puissans génies du monde ' , a aussi écrit sur toutes les parties des mathématiques. Cardan cite avec éloge son traité De régula sex quanti- tatum -. Nous avons dit dans la Noie VI quel était l'objet de cette règle des six quantités , qui s'effectuait par le calcul ou par une construction géométrique déduite du théorème de Plolémée. Alkindus avait écrit sur l'arithmétique des Indiens [De Arithmeticâ indicâ) , et sur l'algèbre ( Z?e quantitate relatioâ , seu Algehrâ). Nous ne citerons pas ses autres ou- vrages, qui sont extrêmement noml)reux. Une partie doit se trouver encore dans les biblio- thèques d'Espagne. Plusieurs, sans doute , ofi'riraient de l'intérêt s. «'occupe d'étudier l'histoire des sciences chez les Indiens et les Arabes. Nous trouvons le titre suivant de cet ouvrage que nous ne connaissons pas encore, dans le catalogue de la bibl. de H, Langlès, art. 562, The khoolasut-ool-hisai , a compendium of arithmeiic and gcometry ; in ihe arabic language, by Buhae- oodd-deen , of Amool in Syria, with a Iranslation into persian and commcntary , hy ihe late Muoluwee Rtioshvn L'iee of Jvonpoor: to whichis added u ircatise on algcbra, hy Nvjm-ood-den Ulee khan, head Qazee , ta the Stidr Dccwanee and Nizamut Vdalut. Rcviscd and edited ly Tarinec Churun Mitr, Muoluwee Jan Vlee and Ghoolam f7(4Kr. Calcutta , Pereira, 1812, grand in-8", M. Libri vient de mettre au jour un ouvrage d'algèbre traduit de l'original arabe en latin, et resté manus- crit à la bibliothèque royale, sous le titre : Liber augmenii et diminuiionis vocatus numoratio divinationis ex eo ({uod sapicntes Indi posuerimt , qtiem Abraham compilavit, et secundum librum gui Indorum dictus est, composuit. Cet ouvrage est précieux sous plusieurs rapports. D'abord il est essentiellement différent de celui de Moham- med ben Musa ; car il roule uniquement sur les règles de fausse position simple et double. Et ensuite il nous apprend que ces règles viennent des Indiens. On les avait attribuées jusqu'ici aux Arabes , sur l'autorité de Lucas de Burgo, qui les a appelées règles d'/felcataym, « e vocabulo Arabo, « [Summa de Arith., etc., Distinctio septima , tractatus primus.) Mais dans d'autres ouvrages du même temps, on les appelle Régula falsi , seu augmenti et dccrementi , comme le compilateur Abraham (voir Algorithmus de inlegris , minutiis vulgaribus , ac proportionibus , cum anncxis de tri , faUi , aliisque regulis. Liptzck, 1507, in-4<>. ) ' De sublilitate libri XXI , lib. XVI. ^ Ibid., lib. XVI. — Practica arithmetice , cap. 46. — Opus novum de proportionibus nnmerorum , etc. Prnpositio quinta. ^ Tel serait son traité d'arithmétique indienne. Car il est assez singulier que, depuis si long-temps qu'on NOTES. 493 Thébit ben Corab , disciple de Mohammed bcn Musa, fut aussi un géomètre célèbre qui embrassa les malbémaliqucs dans toute leur étendue. Parmi les nombreux ouvrages qu'il a laissés , et dont on trouve le catalogue dans Casiri , il en est un dont le titre De problematibus aUjebrici* geometricâ ratione comprobandit , aurait dû piquer vive- ment la curiosité des géomètres; car il annonce que Thébit avait appliqué l'algèbre à la Géométrie. C'est sans doute le titre de cet ouvrage qui a fait dire à Montucla que : <( Thébit a écrit sur la certitude des démonstrations du calcul algébrique, ce qui pour- » rail donner lieu de penser que les Arabes eurent aussi l'idée heureuse d'appliquer » l'algèbre à la Géométrie. » Cette conjecture est devenue pour nous un fait certain , constaté déjà par l'algèbre de Mohammed ben Musa , et dont on trouve une preuve plus convaincante encore dans un autre ouvrage dont on doit la connaissance récente à M, L.-Am. Sédillot. Cet ouvrage est un fragment d'algèbre (trouvé dans le manuscrit arabe n° 1104 de la bibl. royale), où les équations du troisième degré sont résolues géométriquement. M. Sédillot nous apprend qu'avant de passer à la solution de ces équations, l'auteur donne celle du problème des deux moyennes proportionnelles, qu'il résout par deux pa- raboles, et dont il se sert pour la solution de certaines équations. Le géomètre arabe se serait-il aperçu que toutes les équations du troisième degré peuvent se résoudre par les deux moyennes proportionnelles, et la trisection de l'angle; ce qui est, comme on sait, une des découvertes qui ont fait honneur à Viète. Il construit les racines des équations de la forme x^ — ax — b=o, par un cercle et une parabole. Mais nous pensons qu'il ne s'agit encore que d'équations numériques , les seules qu'on trouve dans les ouvrages arabes et chez les Modernes jusqu'à Viète, à qui est dû le pas immense qu'il fallait franchir pour arriver à l'idée et à la considération d'équations littérales. Toutefois , malgré cette restriction dans les spéculations algébriques des Arabes , nous pouvons dire que non-seulement ils ont possédé l'algèbre, mais qu'ils ont connu aussi l'art d'exprimer graphiquement les formules, et d'en présenter aux yeux la signification; art si beau et si précieux que Kepler regrettait de ne pas savoir ', et qui a été l'une des grandes conceptions de Viète. On avait toujours pensé que les Arabes n'avaient pas été au delà des équations du se- cond degré. On fondait cette opinion sur ce que Fibonacci et Lucas de Burgo s'étaient agite la question de l'origine de notre système de numération , et qu'on ne peut s'accorder sur la signi- fication du passage de Boèce et de la lettre de Gerbert qui s'y rapportent , on n'ait pas , au lieu de raison- ner sur la forme des cliifl'res, qui nécessairement a dû varier, compare ces deux pièces avec les traités d'arithmétique que les Arabes nous ont laissés, et dont aucun, je crois, n'a été ni traduit, ni publié dans le texte original. ■ Kepler, ne pouvant traduire graphiquement la propriété que représente l'équation du second degré qui donne le rapport du côté du pentagone régulier au rayon du cercle circonscrit , s'exprime ainsi : Quomodo affectionem Teprvesentalo ? quo actu geometrice? Nullo alto id doceor facere , quàm usurpando proporlionem , giiam qiiœro ; princiiiium petitur, Miatr calculator, destitutus omnibus geometriœ prasidiis , harens inler spineta numerorum , frustra cossam suam respectai. /Toc unum est discrimtn inter cossicat et inter geome- tricas determinationes. ( Hauomcu buubi liber I; pag. 87) 494 NOTES. arrêtés à ce point de la science'. Montucla , le premier, l'a mise en doute, et a pensé que les Arabes pouvaient bien avoir traité des équations du troisième degré ; il se fon- dait sur le titre Algehra cuhica , seti de prohletnatum solidoruni resolutione , d'un manuscrit apporté de l'Orient par le célèbre Golius , et qui se trouve dans la bibl. de Leyde 2. Le fragment d'algèbre trouvé par M. Sédillot confirme la conjecture de Montucla, et en fait un des points les plus importans de l'histoire scientifique des Arabes. Mais nous devons dire que rien ne nous autorise encore à penser qu'ils aient connu la résolution algébrique des équations du troisième degré, c'est-à-dire l'expression des racines de ces équations. Le titre du manuscrit de la bibl. de Leyde semble, au contraire, indiquer qu'il y est question de leur construction géométrique par les lieux solides ( les sections coniques) , comme dans celui de la bibl. royale de Paris. La trigonométrie est une des parties des mathématiques que les Arabes cultivèrent avec le plus de soin, à cause de ses applications à l'astronomie. Aussi leur dut -elle de nombreux perfectionnemens qui lui donnèrent une forme nouvelle , et la rendirent propre à des applications que les Grecs n'auraient pu faire que très-péniblement. Les premiers progrès de la trigonométrie datent d'Albategnius, prince de Syrie 3, qui florissait vers l'an 880 et qui mourut en 928. C'est ce grand astronome, surnommé le Pto- lémée des Arabes, qui eut l'heureuse et féconde idée de substituer aux cordes des arcs, dont les Grecs se servaient dans leurs calculs trigonométriques , les demi-cordes des arcs doubles, c'est-à-dire les sinus des arcs proposés. « Ptolémée , dit-il, ne se servait des cordes entières que pour la facilité des démonstrations ; mais nous , nous avons pris les moitiés des arcs doubles ■*. » Albategnius est parvenu à la formule fondamentale de la trigonométrie sphérique cos. a =cos. h COS. c. ■+- sin. b. sin. c. cos. A , dont il a fait diverses applications ^. On trouve dans ses ouvrages la première idée des tangentes des arcs, et l'expression ■^^^r^ , dont les Grecs ne se sont pas servis. Albategnius la fait entrer dans les cal- culs de gnomonique et l'appelle ombre étendue. C'est la tangente trigonométrique des Modernes. On voit qu' Albategnius avait des tables doubles , qui donnaient les ombres correspondantes aux hauteurs du soleil, et les hauteurs correspondantes à des ombres; c'est-à-dire les tangentes des arcs , et les arcs correspondans à des tangentes. Mais ses tables étaient calculées pour le rayon 12 , tandis que celles des sinus l'étaient pour le rayon 60; ce qui prouve qu'il n'a pas eu la pensée d'introduire ces tangentes dans les calculs trigonométriques *. ' Fibonacci résout bien quelques équations d'un degré supérieur , mais qui se réduisent au second. ^ Histoire des Mathématiques , tom, I'"' , pag. 383, ' Le nom propre de ce géomètre est Mohammed ben Geber ; il fut surnommé al Batani , parce qu'il était né à Batan , ville de la Mésopotamie, et de ce nom les Modernes ont fait celui de Albategnius. * Delambre , Histoire de l'astronomie du moyen dye , pag 13. ' Ibid, , pag. 21, 164. On sait que la formule correspondante, cos. A = sin. B sin. C cos. a — cos. B cos. C, est due à Viète qui l'a donnée en 1593 dans son Variorum de rébus mathematicis responsorum liber octavus, ^ Delambre, Histoire de l'astronomie du moyen âye , p. 17. NOTES. 493 C'est à Âboul Wefa et à Ebn Jounis , qui lui sont postérieurs d'un siècle, qu'est dû ce nouveau pas. Aboul Wefa (0.37-908), après ayoir exposé la théorie des sinus , définit d'autres lignes trigonomélriqucs « qu'il emploiera dans son ouvrage pour les faire servira la solution de diflércns problèmes de l'astronomie sphériquc. » Ce sont les tangente* cl cotangentes , qu'il appelle ombre verte et ombre droite, tl les técantes qu'il appelle diamètre de l'ombre. Aboul Wefa a calculé sa table de tangentes pour un rayon égal à 60 : il n'a pas calculé les sécantes. On n'a point cette table des tangentes ; mais ce qu'il importait de savoir, c'était la date certaine de leur introduction dans le calcul trigonométrique. Cette heureuse révolution dans la science, qui en bannissait ces expressions composées et incommodes qui contenaient le sinus et le cosinus de l'inconnue, ne s'est opérée que 600 ans plus tard chez les Modernes; on en a fait honneur à Regiomontanus; et près d'un siècle après lui Copernic ne la connaissait pas encore. Ebn Jounis (970-1 008) se servit aussi des ombres ou tangentes et cotangenles , et en eut aussi des tables sexagésimales '. Il eut le premier l'idée de calculer des arcs subsidiaires qui simplifient les formules, et dispensent de ces extractions de racines carrées qui rendaient les méthodes si pénibles. Ces artifices de calcul, aujourd'hui si communs, sont restés long-temps inconnus en Europe, et ce n'est que 700 ans plus tard qu'on en trouve quelques exemples dans les ouvrages de Simpson (Delambre, Histoire de l'astronomie du moyen âge, pag. 165). La trigonométrie sphériquc doit à Geber, astronome qu'on suppose avoir vécu vers l'an 1050, la formule Cos. C=sin. B cos. c, qui est la cinquième des six qui servent à la résolution des triangles rectangles^. La sixième, Cos. a» cot. B. cot. G, est resté incon- nue jusqu'au XVP siècle; on la doit à Vièlc. Ces deux formules sont celles qui contiennent les deux angles obliques du triangle. Les Grecs n'avaient eu que les quatre premières, qui leur suffisaient, parce que dans leurs applications de la trigonométrie à l'astronomie , le cas des trois angles connus ne se présen- tait pas. Tels sont les principaux perfectionnemens que les Arabes apportèrent à la trigono- métrie. Ils purent ainsi cultiver l'astronomie avec succès. Aussi compte-t-on un très-grand nombre d'auteurs arabes qui s'adonnèrent à celle science. Nous n'avons point à parler ici des progrès qu'ils y firent ; et nous dirons seulement quelques mots de l'une de ses appli- cations, la gnomonique, qui n'est au fond qu'une question de pure Géométrie. Les Arabes attachèrent une grande importance à la construction des cadrans qui étaient à peu près leur seul moyen do compter le temps. Dès le neuvième siècle, des géomètres ' Delambre , Hittoir» de l'astronomie du moyen Age , p. 164. * Roui appelons B , C , le* deux angles obliques du triangle ; i , c , les côtés opposés , et a l'hypoténuse. 496 NOTES. célèbres s'en occupaient. C'est à cet art que se rapportaient sans doute deux ouvrages d'Alkindus, intitulés : Z>e /loro/o^. scialhericorum degcrijitione ;el De horolog. hori- sontali prœstantiore , et les deux suivans de Thébil ben Gorah : De horometriâ seu horis diurnii- ac nocturnig ; et De figura linearum qiias (jnomometrum [stijli apiciéi umhra) percurrit. Ce dernier litre semble annoncer que Thébit se servait de la considération des sections coniques dans la construction des cadrans. Nous allons voir cette méthode pra- tiquée savamment par un autre géomètre arabe du XIIP siècle. Maurolycus en a eu la première idée chez les Modernes; et elle a donné à son ouvrage un caractère d'originalité qui lui a fait honneur. L'écrivain arabe auquel la gnomonique paraît le plus redevable , est Aboul Ilhassan Ali , de Maroc, qui vivait au commencement du XIII° siècle; son ouvrage avait pour titre: Livre qui réunit les commencemens et les fins , parce qu'il se compose de deux parties distinctes , dont la première traite des calculs et la seconde des instrumens et de leur usage. M. Sédillot , dont les sciences mathématiques et les langues orientales déplorent la perte récente (en 1832), a fait une traduction de cet ouvrage qui a été mise au jour par les soins de M. L. Am. Sédillot, son fils, sous le titre : Traité des in,strumens astronomi- ques des Arabes (2 vol. in-4°, Paris, 1834). Cet ouvrage est un traité complet et très-détaillé de la gnomonique des Arabes. 11 contient plusieurs choses nouvelles qui sont de l'invention d'Aboul Hhassan. On y trouve pour la première fois les lignes des heures égales , dont les Grecs n'avaient point fait usage. Il paraît que cette innovation, qui a été conservée chez les Modernes, est due à l'auteur lui-même, car il dit : « Ceci fait partie des choses inusitées que nous donnons dans cet ouvrage, comme le résultat de nos méditations et de nos réflexions. » (Liv. m , chap. 14). Il expose dans le plus grand détail la construction des lignes d'heures temporaires Rappelées aussi heures antiques, inégales^ , judaïques). Dans les chapitres XXVI et suivans , intitulés : Détermination du paramètre et de l'axe principal des parallèles , en quelque lieu que ce soit, Aboul Hhassan se sert des propriétés des sections coniques pour décrire les arcs des signes. Il calcule les paramétres et les axes de ces courbes , en fonction de la latitude du lieu , de la déclinaison du soleil et de la hauteur du gnomon. Cette partie de l'ouvrage prouve que le géomètre astronome Aboul Hhassan, était un homme de mérite. Il ne donne pas la démonstration de ses règles , mais elle devait se ' Ces heure» étaient égales entre elles pendant un même jour, mai» leur durée changeait d'un jour à l'autre , parce qu'elle était toujours la douïième partie du temps compris entre le lever et le coucher du soleil, les lignes qui marquaient ces heures étaient des courhes très-peu différentes de la ligne droite , ainsi que l'a reconnu M. Delamhre , par le calcul. [Histoire de l' astronomie ancienne , t. 3 , p. 481 ). Mais la nature de ces lignes n'est pas encore connue ; elle peut faire le sujet d'une belle question d'analyse , qui se réduit à ceci : Que sur une demi-sphère on suppose tracés des arcs de cercle dans des plans parallèles entre eux , et inclinés sur le plan du yrand cercle qui sert de hase à la demi-sphère ; que ces arcs parallèles soient divisés dans un rapport donné ; les points de division formeront une courbe à double courbure , située sur la demi-sphère ; que par cette courbe on fasse passer un cône ayant son sommet au centre de la demi-sphère , la section de ce cône par un plan, sera la ligne d'une des heures égales. NOTES. 497 trouver dans un Traité dei tectiont conique» , qu'il avait composé. M. Dclambre , qui a approfondi toute cette partie géométrique de l'ouvrage d'Aboul Hhassan, la trouve bien préférable aux procédés enseignés par Commandin et Clavius, qui ont aussi tracé leurs arcs des signes par des moyens tirés de la théorie des coniques. Cependant il reconnaît que les règles du géomètre arabe n'ont pas encore toute la simplicité dont elles sont suscep- tibles : il fait usage de la hauteur du pôle pour déterminer le paramètre , ce qiii com- plique et allonge les calculs bien inutilement, puisque l'expression de ce paramétre, réduite aux élémens indispensables, est indépendante de la hauteur du pâle, et ne con- tient que la déclinaison et la bauteur du gnomon , ainsi que le démontre M. Dclambre. C'est là un théorème assci remarquable, dit-il, et qui était assez important en gnomonique pour n'être pas négligé par les auteurs qui ont donné des méthodes si compliquées pour tracer les arcs des signes d'après les propriétés des sections coniques '. Ce théorème, en langage géométrique, signifie que toute* les sectiont d'un cône droit, faite» par det plans coupans , également éloignés de son sommet, ont le même para- mitre. Cette propriété du cône droit a lieu aussi dans le cône oblique. Cela résulte du beau théorème de Jacques Bernouili, que nous avons énoncé en parlant des coniques d'Apollo- nius, et qui lui a servi à déterminer le paramètre dans les sections du cône oblique (en supposant les plans coupans perpendiculaires au triangle par l'axe). On attribue à Mahomet Bagdadin , géomètre du X° siècle , un élégant traité sur la divi- sion des surfaces, qui a été traduit par Jean Dec et Commandin ^. Cet ouvrage a pour objet de diviser une figure en parties proportionnelles à des nombres donnés, par une droite menée d'après certaines conditions. Il se compose de vingt-deux propositions, dont sept sont relatives au triangle, neuf au quadrilatère et six au pen- tagone. L'auteur les énonce sous la forme de problèmes , dont il donne la solution , qu'il démontre ensuite. Cet ouvrage, par sa nature, est un complément nécessaire d'un traité de géodésie; aussi il a été imité par tous les géomètres modernes dans leurs traités de Géométrie pratique. Dée et Commandin pensèrent que ce traité pouvait provenir d'Euclide , qui, au rapport deProclus, dans son commentaire sur le premier livre des Elémens , avait aussi écrit sur la division des figures. Cette opinion n'a pas été partagée par Savile ; et depuis , la question est restée indécise. Nous sommes tout-à-fait porté à attribuer l'ouvrage à un géomètre grec; à Euclide, si l'on veut (puisque Proclus cite de lui un traité De divisionibus); car il ressemble parfaitement, par sa forme et par la pureté du style géométrique, aux ou- vrages des Grecs, et nullement à ceux des Arabes, qui , alliant la science des premiers à celle des Hindous, avaient introduit le calcul algébrique dans leur Géométrie, et démon- traient leurs propositions les plus générales sur des données numériques, et non pas dans ■ Histoire de l'astronomie du moyen âge , p 636. ^ De tuperficierum divisionibus liber âlachomelo Bagdedino ascriptus, IVune primiim Joannxs Dee Londi- nensù , et Federici Commandini l'rbinatis operâ in lucem edilus. Ftdtrici Covimandini de eadem re iibeUnt, Piwuri, 1670 , iii-4<>. To«. XI. 63 498 NOTES. l'état de généralité et d'abstraction que présentent celles du traité en question. Ajoutons que les Grecs avaient écrit sur la Géodésie dés les premiers temps de l'école d'Alexandrie , comme nous le Toyons par un ouvrage de Héron l'ancien, mis au jour par M. Venturi; et que s'ils n'avaient pas eu leur traité De divuionibus guperficierum , c'eût été une lacune que ne peut faire supposer la perfeclion qu'ils donnaient à leurs ouvrages. L'optique a été traitée chez les Arabes par un grand nombre d'auteurs , dont le plus célèbre est Alhasen. Son ouvrage , qui nous est parvenu ' , se recommande par des considé- rations de Géométrie savantes et étendues. On y remarque surtout la solution d'un pro- blème qui dépendrait, en analyse, d'une équation du quatrième degré. Il s'agit de trouver le point de réflexion sur uq miroir sphérique, le lieu de l'œil et celui de l'objet étant donnés. Ce problème a occupé de célèbres géomètres modernes, tels que Sluze,Huygens, Barrow, le marquis de Lhopital, R. Simson. Ce dernier l'a résolu très - simplement par de pures considérations de Géométrie. (iS'ecfioMMm conicarum libri V. Appendix, p. 223.) On a pensé que l'ouvrage d' Alhasen était imité du traité d'optique dePtolémée. Ça été l'opinion de Monlucla. Mais Delambre, quoiqu'il fût généralement porté en faveur des Grecs, ne l'a pas partagée. Il a même pensé qu'il se pouvait qu'Alhasen n'eût pas eu con- naissance de l'ouvrage de Ptolémée, parce que le sien lui est très-supérieur 2. Quoi qu'il en soit, l'ouvrage d' Alhasen fait honneur aux Arabes, et nous devons le regarder comme ayant été l'origine de nos connaissances en optique. Vitellion, géomètre polonais, l'un des plus savans du XIIP siècle, y a puisé utilement pour la composition de son traité d'op- tique, le premier qu'ait fait paraître un géomètre européen. On doit à M. L. Am. Sédillot la connaissance récente d'un ouvrage original des Arabes , intitulé : Traité des connues géométriques , par Hassan ben Haithem •*, Ce géomètre florissait vers l'an 1009, et mourut au Caire, en 1038. Il a composé un commentaire de l'Almageste , et un autre sur les définitions qui sont en tête des Elémens d'Euclide. Son traité des connues est divisé en deux livres: «Le premier, dit-il , comprend des » choses tout-à-fait neuves et dont le genre môme n'a pas été connu des anciens géomè- » très, et le second contient une suite de propositions analogues à celles qui ont été » traitées dans le livre des Data , mais qui ne se trouvent pas dans cet ouvrage d'Euclide. « Sous le titre de Prolégomènes , l'auteur se livre à une discussion métaphysique sur la ' Imprimé à Bàle en 1673 , avec la troisième édition de l'optique de Vitellion , 80118 le titre : Opticœ thésaurus. Alhazeni Arahis lihri septem^ nunc primum editL Ejnsdcvi liher de crepusculis et nubium ascensio-nibus . I tcvi. VitelHonis Thuringo-Poloni libri dcccm , à Fr. Risnero , in-fol , 2 Uistoire de r astronomie ancienne ,^. iXZàa tome \l. ' Nouveau journal asiatique , mai 1834. La copie sur laquelle M. Sédillot a fait cette traduction est du 3 juin 1144; elle se trouve, avec six autres opuscules sur les mathématiques, dans le manuscrit arabe, n» 1104 de la bibl. royale. M, Sédillot promet de faire connaître ces pièces, dont une, qui est le fragment d'algèbre sur la résolution des équations du troisième degré dont nous avons parlé plus haut , sera l'un des monumens les plus précieux de l'histoire des sciences chez les Arabes. NOTES. 499 définition des connue* , leurs divisions et subdivisions ; et la nature des quantités aux- quelles elles se rapportent. Ces préliminaires, dit M. Sédillot, qui caractérisent l'esprit des érudits du temps de Hassan ben Haithem, permettent d'apprécier assez exactement la philosophie mathéma- tique des Arabes. Mais le savant traducteur ne nous fait connaître que le commencement de ces prolégo- mènes , et nous ne voyons pas bien quelle peut être l'application de ces distinctions subtiles aux propositions de Géométrie qui forment le corps de l'ouvrage; sans doute elles portaient sur la forme môme que l'auteur a donnée aux énoncés de ces propositions ; mais raontraienl-ellcs l'utilité de cette forme inusitée , et le caractère scientifique , ainsi que la vraie destination de ces propositions? C'est là ce qu'il nous importerait de savoir. Cette forme est la même que celle des donnée* d'Euclide, de sorte que ce traité est une imitation et une continuation du livre des donnée* du géomèlre grec; mais avec cette diflérence que les propositions du premier livre «choses tout-à-fait neuves, et dont le genre même n'a pas été connu des Anciens, » roulent sur des propositions locales, tandis que toutes celles d'Euclide étaient des théorèmes ordinaires où tout est déterminé. Ainsi, dans les donnée* d'Euclide, l'objet d'une proposition était de démontrer que telle chose (point, droite, ou quantité), devant résulter de telle construction ou de telles conditions, était parfaitement connue; et de déterminer la valeur et la position de cette chose. C'est là aussi l'objet des propositions du premier livre des connue* de Hassan ben Haithem ; mais il y a dans chaque question une indétermination de condition , résultante de la considération d'un lieu géométrique. Ces propositions sont de deux espèces. Dans les premières il s'agit de démontrer que tel lieu, formé par la succession de points déterminés par telles conditions, est parfaitement connu; et de donner la construction directe et immédiate de ce lieu. Voici }|énoncé d'une proposition de cette espèce : « Lor*que de deux point* connu* de po*ition on mène deux ligne* droite* qui *e coupent enun point, où elle* forment un angle connu, et qu'en*uite on prolonge direc- tement une de* deux ligne*, si le rapport de cette ligne à son prolongement est connu, ton extrémité *era *ur une circonférence de cercle connue de position. » (Proposition VII du !•' livre.) Dans toutes ces propositions, le lieu géométrique est la ligne droite ou circulaire. Elles paraissent prises en général des lieux plan* à' K^oWonms. Dans les propositions de la seconde espèce , ce n'est pas le lieu géométrique qu'il s'agit de déterminer , mais quelqu'autre chose qui s'y rapporte , et qui doit être commune à une infinité de points ou de lignes , à cause d'une indétermination dans les conditions de con- struction. Exemple: « Lor*que deux cercles connus *ont tangens, et que l'un e*t dan* l'intérieur de l'autre , si l'on mine au petit cercle une tangente dont l'extrémité [autre que le point de 500 NOTES. tangence) soit terminée à la circonférence du grand cercle, et qu'on joigne par une droite cette extrémité au point de tangence des deux cercles, le rapport de cette der- nière ligne à la tangente est un rapport connu. >> (Proposition XIX.) Cette dernière proposition et celles de son espèce, sont , comme on voit , dans le genre des porismes d'Euclide, entendus suivant la doctrine de R. Simson. Les premières , qui sont différentes , parce que la chose à déterminer est le lieu géomé- trique , répondent à l'idée que nous nous étions faite sur la nature et la vraie destination de ces porismes, avant de connaître cet opuscule du géomètre arabe. (Voir Note III.) Cet ouvrage est le seul, jusqu'à ce jour, qui nous ait présenté de l'analogie, ou du moins une apparence d'analogie, avec le célèbre traité des porismes d'Euclide. Cette cir- constance lui donne du prix à nos yeux; et la découverte de cet opuscule, qui vient confirmer en quelque sorte l'opinion du savant géomètre Castillon, qui pensait qu'au XIII" siècle le traité d'Euclide existait encore en Orient, nous permet du moins d'espérer de trouver encore parmi les nombreux manuscrits arabes , restés jusqu'ici inconnus au fond des bibliothèques , quelques traces de cette doctrine des porismes. Nous ne savons si c'est à cette théorie que se rapporte un ouvrage de Thébit ben Corah , que nous trouvons indi- qué sous le titre suivant dans le catalogue des manuscrits orientaux de la bibliothèque de Leyde : Dato?'um sive determinatorum, liber continens prohlemata geometrica. Cet ouvrage , par son titre et par le nom de l'auteur , se recommande à l'attention des géomè- tres qui possèdent la langue arabe. Toutes les propositions du second livre des connues sont dans le genre , mais différentes de celles d'Euclide; elles appartiennent, comme celles-ci, à la Géométrie élémentaire , (à la ligne droite et au cercle); mais plusieurs offrent un degré de plus de difficulté. Elles sont de celles qu'on propose aujourd'hui comme exercices , aux jeunes étudians qui possè- dent déjà les élémens de la Géométrie. Nous citerons les suivantes: Lorsqu'on a un triangle dont les côtés et les angles sont connus , et qu'on mène une ligne du sommet à la hase , si le rapport du carré de la ligne au rectangle formé sur les deux segmens de la base est un rapport connu , la ligne menée sera connue de position. (Proposition XV.) Lorsque sur la circonférence d'un cercle connu de grandeur et de position on prend deux points par lesquels on mène deux droites qui se rencontrent en un autre point de cette circotiférence , si le produit des deux droites est connu , chacune de ces droites sera connue de grandeur et déposition. (Proposition XXII.) Lorsqu'on a deux cercles connus de grandeur et de position, et qu'on mène une droite tangente aux deux cercles , cette droite est connue de grandeur et de position. (Propositions XXlV et XXV, dernières de l'ouvrage.) « Toutes ces choses , dit en terminant Hassan ben Haithem, sont d'une utilité majeure pour la résolution des questions géométriques , et n'ont été dites par aucun des anciens géomètres. » Cet ouvrage mérite , par sa nature, d'être placé entre les données et les porismes d'Euclide, et les lieux plans ^' k^oWoams, , d'une part, et les ouvrages de R. Simson et de NOTES. 501 Stewart,(]e l'autre; il forme comme eu\ des complément de la Géomélrie élémentaire, destinés à faciliter la résolution des problèmes. On a cru trouver dans cet ouvrage de Hassan bcn Haithem , de l'analogie avec la Géomé- trie de position « comme D'Alembert et Carnot l'ont entendue. » Mais nous ne pouvons voir dans la pensée de D'Alembert, qui lui-même en reconnaissait la réalisation contraire à la nature de l'algèbre ' , dans la Géométrie de ponition de Carnot , et dans l'ouvrage du géomètre arabe, une telle analogie. Carnot , dans sa Géométrie de position , a eu principa- lement en vue d'établir la véritable théorie des quantités négative» ; et la Géomélrie de position ne fut , dans son esprit , et dans le fait , que la Géométrie ordinaire , dans laquelle, d'après cette doctrine des quantités négatives , une seule démonstration , établie sur un état suffisamment général d'une figure , devait s'appliquer immédiatement et sans nou- veaux frais, à toute autre forme de la figure ^, C'est à ce caractère nouveau de généralité , de facilité et de brièveté , et à la nature des théories et des nombreuses propositions nouvelles que contenait l'ouvrage de Carnot, qu'il a dû son importance scientifique et l'heureuse influence qu'il a eue sur les progrès de la Géométrie pure. Sans mettre en œuvre l'idée de D'Alembert, le livre de Carnot n'a donc aucune ana- logie avec l'ouvrage du géomètre arabe sur les connues géométrique». Nous ne pouvons terminer notre aperçu des travaux des Arabes en Géométrie sans dire un mot du célèbre astronome et géomètre persan Nassir Eddin de Thus ( 1201-1274), dont les ouvrages, qui traitent de toutes les parties des connaissances humaines, sont écrits en langue arabe. On y remarque , outre ceux qui se rapportent à l'astronomie , des traductions de plusieurs ouvrages grecs, d'Euclide, d'Archimède et de Théodose; un traité d'algèbre et un compendium d'arithmétique et d'algèbre. De tous ces ouvrages , les élé- mens d'Euclide seuls ont été publiés dans la célèbre imprimerie des Médicis (Rome, 1594, in-fol.), avec les commentaires de Nassir Eddin, qui sont estimés et qui, con- tenant plusieurs démonstrations nouvelles des propositions d'Euclide, ont servi à plu- sieurs auteurs modernes , dans le temps où la connaissance de la langue arabe était plus répandue qu'aujourd'hui. On y distingue une démonstration du cinquième postulatum , ' '> Il serait à sonhaiter qne Pon trouvât moyen de faire entrer la situation dans le ralcul des problèmes ; cela les simplinerait extrêmement pour la plupart ; mais l'état et la nature de l'analyse algébrique ne paraissent pas le permettre. » {Encyclopédie , article sitvation.) ^ C'était là une véritable innovation que n'avaient point osé se permettre , quelques années auparavant , deux mathématiciens qui avaient fait de la Géométrie pure l'objet spécial de leurs travaux , et qui lui avaient dû leur célébrité. Ifous voulons parler de R. Simson et de Stcwart qui donnaient , d'une proposition , autant de démonstrations que la figure & laquelle elle se rapportait prenait de formes différentes par le changement de position respective de ses parties. Carnot , au contraire , après avoir démontré une proposition sur une figure considérée dans un état général de construction , montrait ce que devenaient cette proposition et les formnle* qui l'exprimaient , ou qui s'y rapportaient , quand la figure changeait de forme par le changement de position de ses différentes parties. Ces nouvelles formules , qu'il appelait corrélatives , par rapport à la première , et qu'il déduisait immédiatement de celle-ci, sans démonstration , auraient été démontrées directement comme la première elle-même , par Simson et Stewart. 502 NOTES. que Wallis a trouvée ingénieuse , et qu'il a reproduite dans le tom. II de ses œuvres. De ce qui précède nous conclurons en résumé : Que les Arabes ont montré une grande estime et un goût prononcé pour les sciences mathématiques ; Qu'ils ont eu une connaissance complète des ouvrages et du savoir des géomètres grecs ; Qu'ils ont perfectionné la trigonométrie d'une manière notable , et que cette j)artie de la Géométrie a reçu d'eux sa forme moderne, indispensable pour les progrès de l'as- tronomie; Qu'ils ne paraissent pas avoir été au delà des Grecs dans les autres parties de la Géo- métrie, soit parce qu'ils n'ont pas eu le génie inventeur, soit parce qu'ayant acquis rapidement de grandes connaissances dans toutes les parties des sciences, ils ne se sont pas donné la peine de chercher à en reculer les limites ; Mais qu'ils ont eu, sous un autre rapport, un véritable avantage sur les Grecs; Qu'ils ont possédé l'algèbre des Indiens , et qu'ils ont connu l'application de l'algèbre à la Géométrie ; Que leurs travaux en ce genre ont été poussés jusqu'à la solution des équations du troisième degré par une construction géométrique ; Enfin , qu'en traitant l'une par l'autre , et par les secours que ces deux parties se prê- taient mutuellement, la Géométrie des Grecs et l'algèbre des Hindous, ils ont empreint leur science mathématique d'un caractère propre , caractère original qu'ils ont transmis aux Européens, et qu'il faut prendre entre les mains de ceux-ci pour l'origine et le fondement de la supériorité rapidement acquise au XVI° siècle sur les géomètres de l'Antiquité. Géométrie chez les Occidentaux au moyen âge. Pendant que les Arabes fournissaient une rapide et brillante carrière dans les sciences, les Européens étaient plongés dans l'ignorance. Ainsi , après Isidore de Séville, qui est le dernier que nous ayons nommé dans notre aperçu sur les travaux des Latins, peu d'écri- vains, jusqu'au XII" siècle, nous ont laissé quelques traces, non-seulement de la cul- ture, mais de quelques connaissances des sciences. Vers cette époque, un premier mouvement intellectuel s'opéra en Europe, et de nombreux efforts furent faits pour y transporter les sciences anciennes de la Grèce, conservées et cultivées par les Arabes. Ce mouvement se reproduisit avec une nouvelle énergie vers le milieu du XV siècle, et favorisé alors par la connaissance que l'on eut des manuscrits grecs , prépara les grandes découvertes du XVI" siècle, d'où date l'immense supériorité des Modernes sur les An- ciens, dans les sciences mathématiques. Nous allons jeter un coup d'œil rapide sur les travaux qui se rapportent à la Géomé- trie pendant cet intervalle de 800 ans. Tiii'' SIÈCLE. Au commencement du VIII" siècle , Bède eut une grande érudition pour son temps. NOTES. 503 et écrivit sur beaucoup de matières différentes. Ses ouvrages qui se rapportent aux ma- thématiques sout : 1" deux traités sur la musique théorique et pratique; 2° différentes pièces sur l'astronomie, où l'on distingue un petit écrit De circuit* tphœrœ et polo, un do gnomonique sous le titre De meimurâ horologii , et un De astrolahio , où il se sert de constructions graphiques ; 3° et enfin quelques pièces sur l'arithmétique. Une inti- tulée De arit/imelicu numeriê , est un extrait cxtrômement succinct de quelques défi- nitions prises des traités d'arithmétique d'Apulée et de Boèce, dont les noms sont cités par Bède. Une autre , De loquelâ per gettum digitorum , montre à compter par les doigts et leurs articulations. Ce livre a été emprunté et reproduit par divers auteurs. Une troisième, qui nous parait offrir aujourd'hui le plus d'intérêt dans le volumineux recueil des œuvres do Bède, est le traité De ntimerorum divùione, auquel on a fait jusqu'ici si peu d'attention, que les écrivains qui en ont rendu compte, se sont mépris sur son contenu '. Ce traité est précisément le même que celui qui fait suite à la lettre de Gerbert à Constantin, où généralement on a cru voir l'exposition de notre système de numération. Est-il de Bède ou de Gerbert ? Nous avons déjà soulevé cette question, en parlant du passage de la Géométrie de Boèce, relatif au même système de numération , et dont ce traité nous a semblé être une imitation et un développement : du moins l'un et l'autre roulent sur la même matière, et ont, à notre sens, la même origine *. Du reste on trouve dans les manuscrits anciens de Bède les chiffres arabes comme dans ceux de Boèce. ( fVallig , de algebrâ tractatu*, cap. IV. ) Enfin, les œuvres de Bède contiennent un livre De arithmetici» propositionihu* , où l'on trouve d'abord différentes manières de deviner un nombre qui a été pensé; et ensuite un assez grand nombre de questions arithmétiques, ad acuendos juveneg , est-il dit, et qui prouvent l'intention d'entretenir la culture des mathématiques. Mais on voit dans quel état déplorable elles étaient tombées , par les règles dont l'auteur se sert pour cal- culer l'aire du triangle et du quadrilatère. Nous avons rapporté ces règles en parlant des ouvrages de Brahmegupta. ' Hontacla , Histoire des mathématiques , t. I, p. 495 : • Bède fat auteur d'un livre d'arithmétique intitulé De numeris ; et d'un autre , De numerorum divisione , par lequel on voit combien dans son temps^ cette opéra- tion était embarrassée, n — Delambre , Histoire de l'astronomie ancienne, t. I, p. 382. « Dans ce chapitre [De la division des nombres), Bède enseigne à se servir des doigta et de leurs articulations , pour faciliter les divisions et les multiplications. » ' Kous nous empressons de réparer ici une erreur que nous avons faite en disant précédemment , que l'on n'avait point encore remarqué que la lettre de Gerbert se trouvait dans les œuvres de Bède. Nous ne nous étions pas aperçu alors que la remarque en avait été faite par Andrès, dans son ouvrage Delforigine , de progressi , e dello stato attuale d'ognilitteratura ; Parme, 7 vol. in-4», 1782-1799 ; où il s'exprime ainsi : Ma à da ossercarsi, cià che non vedo rifletluto né da matematici,nè da critici, che taie leitera riportata fra le Gerberziane i quella medetima affatto , che si ritrova nelle opère di Beda al principio del libre De numerorum divisione ad constan- tinom ; neio roijlio decidere se sia da riporsi fra le opère di Gerberto ovver fra quelle di Beda (t. ÏV, p. 63). Sais Andrès ne parleque delà lettre même, et non du traité qui lui fait suite; traité qu'il n'a connu que dans lei oeuvres de Bède, et qu'il n'a pas su être le même que celui qu'on attribue à Gerbert. Ifout ajouterons enfin que ce célèbre historien, qui a commenté longuement le passage de Boèce, pour prouver qu'il ne peut en aucune manière s'appliquer à notre système de numération (t. IV, p. 41-4Ô) , n'a pas remarqué son analogie avec le traité De numerorum divisione en question. S04 NOTES. Le livre De arithmeticig propogîtionibus a été revendiqué pour Alcuin, et compris dans ses œuvres. La question de propriété ici est sans intérêt. Âlcuin, disciple de Bédé, fut, comme lui, un prodige d'érudition dans son temps. ' Nous nous bornerons ici à dire qu'il a écrit sur les sept arts libéraux, et en particulier sur l'astronomie. Il ne nous est parvenu de ces ouvrages que les parties qui traitent de la grammaire et de la rhétorique; on reconnaît qu'elles sont imitées des écrits de Cas- siodore. La célébrité qu' Alcuin a conservée provient surtout de la part qu'il a prise dans la fondation des universités de Paris et de Pavie , et dans les efforts de Charlemagne pour résister au torrent des ténèbres qui se répandaient sur l'Europe , et rallumer le flambeau de la science. Mais la scolaslique prenait naissance, et l'élément religieux qui lui servait de base, fut tout puissant et occupa exclusivement les esprits. Aussi, chose très-remarquable dans l'histoire, aux efforts mêmes de Charlemagne succéda précisément l'époque de la plus profonde ignorance. Elle dura prés de deux siècles. x= SIÈCLE. Pendant ce temps l'histoire ne prononce guère que le nom de Gerbert (qui devint pape en 999 et mourut en 1003), et de quelques-uns de ses disciples. Ce moine, à l'exemple des sages de la Grèce qui avaient été s'instruire en Egypte, alla aussi s'in- struire en Espagne, seul point de l'Europe où les sciences, importées de l'Orient ^ fussent cultivées par les Sarrazins. De retour en France, il répandit avec ardeur ses connaissances. Elles tenaient du prodige aux yeux de ses contemporains, au point qu'il fut accusé de magie. Mais cela montre combien l'ignorance était profonde alors , car on doit convenir que l'ouvrage de Gerbert sur la Géométrie et ses traités de la sphère, de l'astrolabe et des cadrans solaires , ne roulent que sur les matières les plus élémentaires de la science , et ne comportent que des connaissances très-superficielles. Le contraste que ces ouvrages présentent avec l'état avancé des sciences à cette époque , chez les Arabes de Séville et de Cordoue , fait douter que ce fût d'eux que Gerbert ait reçu ses connaissances, comme on a coutume de le répéter d'après Guillaume de Malmesbury. On V reconnaît plutôt, surtout dans sa Géométrie, une imitation et un commentaire des ouvrages de Boèce, qu'un reflet du savoir et des méthodes arabes ' dont nous ne trouve- rons les premiers germes, en France, qu'au XIT" siècle. 1 Cetteobservation s'accorde avec celle de Goujet, qui dit que le Toyage de Gerbert en Espagne est réel , mais que le motif qu'on en donne ne l'est pas [De l'état des sciences en France depuis la mort de Charlemagne jus- qu'à celledu roi Rolert, p 55). Andrès, au contraire, qui a attaché une grande importance historique aux connaissances et aux travaux de Gerbert , leur attribue une origine arabe , en supposant toutefois que ce n'étaient pas précisément les Sarrazins qui avaient été les maîtres de Gerbert , mais bien les chrétiens espagnols leurs disciples , qui ne pouvaient enseigner aussi que les sciences et les méthodes des arabes. « Queste rayioni mifanno conyetturare non settza qualche prohahilità, che quel dotlo e grand'uomo che fu Gerlerto tutto egli si fece sotto la disciplina de'' crisiiani spaynuoli, sema avère avuto bisogno di mettdicare il soccorso dalle scuole de' Saraceni. Ma quantunque spagnuolifossero i maestri di Gerlerto , arabica pur era la dottrina , ch' ei trasse dalle Spagne e comunicà aile Gallio ed all'Italia. La scicnza favorita di lui era la matematica ; e la matematica, que si sapeva in Ispagna, tutia venive dclle scuole e da' libri de' Saraceni. Se vero è, che Gerlerto délia Spagna aile suuole Europee recasse l'aritmetica aralica, colla quale facili divenivano moite operazioni, che nell'antico metodo troppo erano , imba- NOTES. 505 Voici l'analyse de ce traité de Géométrie qui a été rais au jour par Bernard Pcx, dans le tora. III , seconde partie, de son Thetauriu anecdotorum novistimu». (Augustae Vin- delicorum, 1721, in-f°.) Après avoir donné les premières définitions relatives à la Géométrie , Gerbert fait connaître les mesures dont les Anciens faisaient usage; ce sont les digitu* , uncia, paltnus , texta , dodrant , etc., des Romains, dont on trouve la nomenclature dans la Géométrie de Boèce. Il se sert de ces mesures dans tout le cours de son livre , ainsi que des signes qui les représentent, et qui expriment aussi d'une manière abstraite les fractions telles que J , J, etc. Il emploie le mot coraustus pour désigner la base supé- rieure d'un quadrilatère. Il consacre plusieurs chapitres aux triangles rectangles, qu'il appelle trianguli pythatjorici, et qu'il apprend à construire en nombres rationnels, un côté étant donné. Il se sert pour cela des règles connues , attribuées à P) thagore et à Platon, qui donnent des nombres entiers pour les côtés du triangle ; et d'autres règles qui donnent des nombres fractionnaires. Les unes et les autres qui sont du même genre, déri- vent des formules générales que nous avons trouvées dans les ouvrages indiens. Au sujet de ces triangles rectangles, Gerbert résout un problème remarquable pour l'époque, parce qu'il dépend d'une équation du second degré; c'est celui où, étant données l'aire et l'hy- pethénuse , on demande les deux côtés. Soit A l'aire , et c l'hypothénuse , la solution de Gerbert, traduite en formule, donne pour les deux côtés la double expression : i\ l^c'-+-4A± Vc'—ikk ]. Ensuite il apprend à calculer avec l'astrolabe ou avec un autre instrument qu'il appelle horoscope, la hauteur d'une tour, la profondeur d'un puits, et la distance d'un objet inaccessible. Puis il calcule la perpendiculaire dans un triangle dont les côtés sont connus. Il prend pour ces côtés les trois nombres 13, 14 et 15. II donne pour la sur- face des polygones réguliers les formules fausses des arpenteurs romains , et résout aussi comme eux le problème inverse, étant donnée l'aire d^un polygone régulier , trouver son côté.VouT le cercle, il donne le rapport j. On trouve sous les titres: In campo quadrangulo agripennos cognoscere, et In campo triangulo agripennos invenire, les formules fausses que nous avons déjà signalées dans les œuvres de Bède, pour la mesure de l'aire du quadrilatère et du triangle; et Gerbert, dans ces exemples, se sert des mêmes nombres que Bède. Enfin on trouve (chapitre 85) la formule qui donne la somme des termes d'une progression arithmétique '. La formule pour l'aire du triangle en fonction razsanli, (jutata o imnudiatavunti , o p»f mez»o de' maestri sj>agnuoti rapiia fu da lui à Saraceni, corne dice Gugliemo di Malesburi, ( Dell' origine , de progreaai , etc., I' parte , cap. IX. ) — La nature dei ouvrage* de Gerbert ne nous permet paa de partager cette opinion sur l'origine de ses connaissances. ' Villoison dit que dans un manuscrit très-ancien, ce chapitre 8^ contient les chiffres arabes, (Voii AiuUecta grœca,i. 2, p. 163). Hais nous devons convenir que dans les deux manuscrits de la Géométrie de Gerbert qui existent & la bibliothèque royale de Paris (n»' 7185 et 7S77 c), nous n'avons vu que les chiffres romains, et les signes par lesquels les Latins représentaient les fractions. Ces signes ont été rapportés fidèlement par Pcx dans son édition de la Géométrie de Gerbert. To.T«. XI. 64 506 NOTES. des trois côtés n'y est pas; et on en trouve une autre pour le triangle rectangle, qui n'est pas exacte. A la suite de la Géométrie , est un petit écrit intitulé : Gerherti epùtola ad Adolhol- dum de causa diversitatig arearum in trigono œquilatero geometricè arithmeticève expenso. Gerbert explique que la formule géométrique \V^ de l'aire du triangle équi- latéral est exacte, et que la formule arithmétique - — - ne l'est pas, et qu'elle n'est qu'ap- proximative. Dans son explication Gerbert commet une erreur, car c'est la formule ■f-il.k-J. qui devait résulter de son raisonnement: et celle-ci est véritablement ap- proximalive. Car si on la rend homogène, en y introduisant l'unité de mesure linéaire, que nous appellerons ô, elle devient f-il-.k_â , et celle-ci approche d'autant plus de 2 y . l'expression -^ K 3, qui est l'aire exacte du triangle, que jJest plus petit. On voit par cette analyse de la géométrie de Gerbert, qu'elle est dans le genre des écrits de Boèce et de Bède ; et qu'on n'y peut reconnaître l'origine arabe qu'on a attribuée légèrement, et sans critique, aux connaissances scientifiques de l'auteur. Il parait que Gerbert a beaucoup écrit sur l'arithmétique, particulièrement sur un système de numération différent du système latin alors en usage; et c'est pour cela prin- cipalement que son nom est resté célèbre dans l'histoire des sciences. Nous avons parlé, au sujet du passage de la Géométrie de Boèce , du traité de numerorum divisione qu'on lui attribue '; et, en remarquant que cette pièce se trouve dans les deux éditions que l'on a des œuvres de Bède, nous avons eu la pensée qu'elle pourrait être de ce dernier. Mais Gerbert et ses disciples ont laissé plusieurs autres écrits sur le même sujet, qui prouvent qu'ils avaient alors une grande connaissance des procédés du calcul dans ce système de numération, qu'ils appelaient le système de VAhaque. Les écrits de Gerbert, qui la plupart se trouvent dans la bibliothèque du Vatican, sont intitulés : 1" Gerherti scholastici Abacus compositus ; 2° De numeris ; 3° Regulœ Abaci; 4° Fragmentum Gerherti regulœde Abaco ; 5° Gerherti arithmetica. l,c premier, Abacus compositus , existe dans plusieurs autres bibliothèques. Pez ayant trouvé à sa suite , dans la bi- bliothèque de l'abbaye de S'-Emeran à Ratisbonne, une autre pièce intitulée : G. Liber subtilissimus de ^W d'autres titres, portent le nom de Gerbert, qui, il est vrai, a été ajonté & une époque rapprochée : le premier est intitulé Rationes num«roruiK Abaci (manuscrit n° 6680) ; et le second Traciutus de Abaco {n- 7189. A). Nous supposons qu'une partie des manuscrits dont nous avons rapporté les titres ci-dessus, particulièrement ceux de la bibliothèque de Leyde, ne sont aussi que ce même traité De numerorum divisione. 3 Montfaucon , Bibtiotheca bibliothecarum manuscriptorum nova , t. I, p. 87. ' Histoire littéraire de la France, t 7, p. 206. * Montfaucon , ibid, t. I , p. 84: on voit à la pag. 116 que la bibliothèque dn Vatican possède d'autres pièce* du même auteur sous le titre : Berttelinus junior de A baco et alia plurima. ' Nous allons rapporter ce passage de Vignier, auquel il ne parait pas qu'on ait fait attention, et qui cepen- dant a une importance historique qui n'est point & dédaigner, car il nous prouve qu'au XVI' siècle on regardait no» chifire* et notre système de numération comme dérivant , si non dn système même de VAbaqtu , du moins 508 NOTES. avait pour titre : Incipit prœfatio lihri Ahaci quem junior Bernelinu» edidit Pari- siig '. C'est peut-être encore à ce traité de l'Abaque que se rapporte une autre pièce de Bernelin qui se trouve dans la bibliothèque de Leyde, à la suite de l'^AacM^de Gerbert, sous le titre : Scolica {Scholia probablement) Bernelini Parigiis ad Amelium suum édita de minutiis. On cite encore un moine nommé Halber qui, dans le même temps, a aussi écrit sur VAbaous de Gerbert. [Histoire littéraire de la France , t. 7, p. 138.) Il serait bien utile, pour éclaircir enfin les questions historiques relatives à l'origine et à l'introduction en Europe de notre arithmétique, et particulièrement à ce système de V Abaque, qui tient une grande place dans l'histoire littéraire du X° siècle, et qui pro- bablement n'était que renouvelé , après quelques siècles d'oubli , des ouvrages de Boèce, et de quelques auteurs du même temps -, qui eux-mêmes le tenaient de l'école de Pytha- gore, ainsi que le dit Boèce ^, il serait utile, dis-je, que l'on mît au jour les différentes pièces de Gerbert et de ses disciples, dont nous avons rapporté les titres ci-dessus, et que l'on fit attention, dans les bibliothèques de manuscrits, aux pièces semblables que cer- tainement on y devra découvrir. Au XP siècle, Hermann Contraclus se fit un nom par différens écrits sur les ma- thématiques, dont un sur la quadrature du cercle, et un sur l'astrolabe. Celui-ci, en deux livres, qui traitent de la construction et de l'usage de l'astrolable, a été imprimé dans le tome III du Thésaurus novissimus de Pez. Wallis dit, dans son histoire de l'al- gèbre, qu'un passage d'un manuscrit ancien de la bibliothèque Bodléienne l'autorise à de la même origine que lui ; ce passagejyient à l'appui de l'interprétation que nous avons donnée de VAhacns de Boèce : ic Gerbert, dit Vignier, eut encore un autre sien compagnon ou disciple es sciences géométriques et ma- » thématiques nommé Bernelinus, qui composa quatre livres De A baco et numeris. Desquels se peult apprendre n l'origine de Chiffre dont nous usons aujourd'hui es comptes d'arithmétique. Lesquels livres M. Savoye Fithou 11 m'a assuré avoir en sa bibliothèque, et recognoistre en iceux un sçavoir et intelligence admirable de la ■» science qu'ils traitent. Et pour ce qu'avec ceux là furent encore fort renommés au même temps en la France « plusieurs autres grands personnages , à cause de leur grand sçavoir es mêmes sciences philosophiques et » mathématiques , comme, etc. « [Bibliothèque historiale , 3 vol, in-f". ; Paris 1588 ; second vol. p. 643.) ' Il existait dans la bibliothèque de l'abbaye deS'-Victor un autre traité de VAbaque , que lUontfaucon inscrit sous le titre : Radulphi Laudunensis de Abaco. [Bib. bib. t. II , p. 1374.) 3 Par exemple nous sommes porté à croire que Victorius, mathématicien contemporain de Boèce, avait aussi écrit sur ce système, ou du moins avait laissé des calculs qui s'y rapportaient ; et que c'est à ce sujet que Gerbert et ses disciples citent souvent le calcul de Victorius et sa brièveté , car il ne parait pas que cela doive s'entendre du nouveau canon pascal que Victorius avait calculé. 5 Iln'estpas rare de trouver dans l'histoire des sciences, des idées, des principes, des théories même , qui ont paru et disparu ainsi , plusieurs fois et à de longs intervalles , avant de trouver un sol préparé pour y jeter de profondes racines et prendre une existence durable. Les polygones étoiles nous offrent un exemple de pareilles intermissions. Considérée d'abord dans l'école de Pythagore, et oubliée pendant dix siècles, Vétoile pen' iagonale reprend naissance dans la Géométrie de Boèce ; oubliée encore pendant six siècle», elle doit une nou- velle vie à Campanus ; un siècle après elle produit la théorie des polygones égrédiens ; deux siècles plus tard , le nom et les travaux mémorables de Kepler semblent devoir assurer un rôle brillant et durable à cette théorie , qui pourtant retombe dans un oubli complet pendant deux siècles , pour reprendre enfin l'existence impérisable que lui assurent les considérations analytiques qui l'unissent à la théorie des polygones ordinaires. NOTES. 5U9 penser que Hermann Contractus connaissait notre système de numération; et il le met après Gerbert , en tête des auteurs qui ont écrit sur ce sujet '. Le XII° siècle se distingue par quelques efforts contre l'ignorance générale. Plu- m» tiÈCLt. sieurs Européens, suivant l'exemple de Gerbert, quittent leur pays pour aller s'instruire au loin. On distingue parmi eux Adhélard , ou Âthélard, et Gérard de Crémone. Le premier visita l'Espagne, l'Egypte et l'Arabie; et à son retour traduisit de l'arabe plusieurs ouvrages, au nombre desquels se trouvent les Êlémens d'Euclide. C'est la première traduction que l'on ait eue en Europe de cet ouvrage, que l'on ne con- naissait que par l'extrait trés-reslreint et qui se bornait à quelques énoncés de proposi- tions, que Boèce en avait donné dans le premier livre de sa Géométrie. Adhélard avait joint à sa traduction , des Commentaires sur les propositions d'Euclide. Cet ouvrage est resté manuscrit -. M. Jourdain attribue à Adhélard un Traité de l'Astrolabe et une doctrine de \' Abaque '. ( Recherches tur le* traduction* d'Arittote , pag. 100. ) Gérard de Crémone ( 1114-1187 ) alla résider pendant long-temps à Tolède, pour y apprendre l'arabe et y faire de nombreuses traductions qu'il rapporta dans sa patrie. Elles s'étendaient sur toutes les parties des sciences qui Hérissaient parmi les Maures d'Espa- gne. On y distingue l'Almageste de Ptolémée, le traité des crépuscules d'Alhazen et le ' Bujutce Bermanni mentiontm reperio in juodam Bibliotheca BodleiatUB MSO, vbi dicUur guod ab Uer- manno et Prodocimo didicerini KsKcvit, hoc est [alio ttomine) ÀlGoaiSHCli. Hermann Contractus passe aux yenx de quelques historiens , de Brucker particulièrement, pour avoir coltivé des premiers la langue arabe , et fait les premières traductions latines d'Aristote. Mais M. Jourdain, en remon- tant à la source de celte opinion, croit qu'elle est erronée , ou du moins qu'elle n'est pas justifiée ; il pense que le traité de Tastrolabe d'IIermann n'est pas une version d'un ouvrage arabe, mais bien composé d'après des matériaux déjit publiés. [Recherches sur l'âge et l'origine des traductions latines d'Arislote, p. 166.) Je rapproche ce sentiment de M. Jourdain du fait cité par Wallis, parce qu'on en tire une induction favorable à l'opinion que j'ai déji émise souvent , savoir que tous les écrits sur V Abaque , tels que ceux de Gerbert et de ses disciples, émanent de la même source que celui de Boèce et ne proviennent point directement des ouvrages arabes empruntés des Sarraxins d'Espagne. 3 lise trouve dans la bibliothèque des dominicains deS'-IIarc à Florence, sous le titre : Euclidis Geometria cum Commenta Adelardi; et dans la bibliothèque Bodléienne sous celui de : Euclidis elementa cum scholiis et diagrammatis latine reddita per Adelardum Bathoniensem. La bibliothèque royale de Paris en possède aussi une copie (n° 7213 des manuscrits latins). Une autre , qui a appartenu à Regiomontanus , se trouve dans la bibliothèque de Nuremberg. ' Tlous ne savoni sur quelle autorité M. Jourdain se fonde , au sujet de cette doctrine de VAbaque, ni si elle portait précisément sur le système de VAbacus de Boèce et de Gerbert. Ce point historique est d'une grande importance, parce que tous les travaux d'Adhélard ont eu pour objet de faire connaître les ouvrages philoso- phiques et mathématiques des Arabes, dont il reconnaissait la haute supériorité sur les doctrines de la scolasti- quc du temps ; et nous serions porté à croire que s'il a écrit sur l'arithmétique, ce serait sur l'arithmétique même des Arabes, qui reposait bien sur le même principe de la valeur de position des chiffres , que le système de l'Abaque , mais qui en difTérait, suivant nous , par l'usage du xéro. Peut-être l'ouvrage d'Adhélard établissait-il la transition du système de l'Abaque à celui de» Arabes, et montrait-il l'identité des deux systèmes, dont le second néanmoins était d'une application pratique plus facile , et a remplacé le premier en prenant le nom d'Algoris- mus. Cet ouvrage d'Adhélard pourrait donc être très-précieux , comme résolvant peut-être la question , encore irrésolue, de la véritable origine , parmi nous, du système de numération en usage depuis cinq ou six •ièolM. 510 NOTES. livre de scientiis d'Alfarabius '. M. Jourdain pense que c'est aussi à Gérard de Crémone qu'on doit le traité de perspective d'Alhazen. ( Recherches critiquée sur les traductions latines d'Âristote, pag. 128.) Un traité d'arithmétique, qui se trouve dans la bibliothè- que Bodléienne sous le titre Algorismus magistri Gerardi in integris et minutiis -, serait-il aussi de Gérard de Crémone, qui, en effet, en rapportant d'Espagne une par- tie des connaissances scientifiques des Arabes, n'a pu négliger leur ingénieux système de numération, à moins que déjà il ne fût bien connu des hommes qui se livraient à l'étude des sciences, ainsi que nous serons porté à le penser, en voyant dans le siècle suivant le grand nombre d'auteurs qui ont écrit sur ce système de numération ou qui s'en sont servis dans leurs ouvrages. Trois autres hommes , contemporains d'Adhélard et de Gérard de Crémone , travaillè- rent aussi à faire connaître les ouvrages mathématiques répandus chez les Arabes. Ce sont Platon de Tivoli (Plato Tihurtinus) , le juif Jean.de Séville, connu sous le nom Johannes Hispalensis, et Rodolphe de Bruges ( Brughensig ). Le premier traduisit de l'arabe les sphériques de Théodose, vers l'an 1120 (imprimé en 1518); de l'hébreu, un traité de Géométrie de Savosarda ^; et divers autres ouvrages. Jean Hispalensis traduisit les élémens astronomiques d'Alfraganus (en 1142, suivant G. J. Vossius et plusieurs autres auteurs ) , et divers ouvrages sur l'astrologie, au nom- bre desquels est un traité d'Albumasar qui se trouve en manuscrit dans la bibliothèque Magliahecchi sous le titre : Liber introductorii majoris in magisterio scientiœ Astrorum , editione Albumazar et interpretatione Johannis Hispalensis ex ara- bica in latinum. Cette version paraît avoir été faite en l'an 1171 , car elle se termine par ces mots, scriptus est liber iste anno dornini nostri Jesu Christi 1171. Elle est précieuse, en ce qu'elle contient des tables astronomiques en chiffres arabes ''.Ce sont peut-être les plus anciennes qui aient une date certaine. Jean Hispalensis a aussi laissé un traité d'arithmétique arabe sous le titre A' Algorismus. C'est , jusqu'ici, le plus an- cien traité d'arithmétique qui porte ce nom, que nous trouverons dans tous les ouvrages du XIP siècle. Ce traité commence ainsi : Incipit prologus in libro Algorismi de practicâ Arithmeticœ , gui editus est à Magistro Johanne Hispalensi. W est très-com- plet; il comprend les sept opérations, addition, soustraction, duplation, médiaion, mul- tiplication , division et extraction de racines , d'abord pour les nombres entiers , puis pour les fractions. On trouve à la suite, sans interruption , et de la même écriture , sous le titre : ' Fabricius a formé une première liste de» traductions attribuées à Gérard de Crémone. [Bib. med. et infimœ lat,, t. 3, p. 115.) SI. Jourdain en a donné une seconde presque double. L'ouvrage d'Alfarabius n'y est pas com- pris C'est M. libri qui l'a trouvé dans un manuscrit de la Bibliothèque royale , sous le titre : Liber Alfarabii , de scientiis , translutus à magistro Gherardo Cremonensi, in Toleto, de arabica in latinum. [Uistoire des sciences mathématiques en Italie, t. 1 , p. 172.) _ 2 Heilbronner, Ilist. Math. , p. 601. ■' Liber Embadorum a Savosarda judœo in hebraico compositus , et a Platane Tiburtina in Latinum sermonem translatus, (In Bibliothccâ S. Marci DominicorumFlorentice.) M. Libri doit donner dans le second volume de son Histoire des sciences mathématiques , une analyse de cet ouvrage important. ■• Targioni , Rclazioni di alcvni Viaggi, etc. , t. 2, p. 67. NOTES. 5U Exeerptioneê de libro qui dicitur Gehra et Mucahala ', un morceau d'algèbre qui pa- raît en faire partie. C'est la résolution des équations du second degré. On y résout plu- sieurs questions telles que celles-ci : Quel est le nombre qui, ajouté à 10 fois sa racine, donne 39? Quel est le nombre qui, ajouté à 9, égale (5 fois sa racine? Cet ouvrage , qui paraît être resté ignoré jusqu'ici , est précieux - , comme étant le plus ancien traité d'arithmétique arabe et d'algèbre qui soit connu. On avait regardé jusqu'ici celui de Léonard de Piso comme étant le plus ancien. On doit à Rodolphe de Bruges la connaissance du Planisphère de Ptolémée, qu'il tra- duisit de l'arabe, sur une version commentée par un auteur nommé Molscra. Le texte, grec ne nous est pas parvenu. L'ouvrage de Rodolphe de Bruges a été imprimé pour la première fois en 1507, à la suite de la géographie de Ptolémée (Rome, in-folio); puis en 1530 '. Commandin en a donné en 1558 , une traduction plus correcte , accompagnée d'un commentaire qui est, en grande partie, un traité général de perspective; ouvrage écrit d'un stvie géométrique assez facile qu'on ne rencontre pas, généralement, dans les nombreux traités de perspective qui ont paru dans les XVI" et XVII' siècles. Le XIII° siècle marque une ère nouvelle dans l'histoire des sciences. Il prépare leur jme siècle. rétablissement en répandant la connaissance usuelle du système de numération arabe, de l'algèbre , et de plusieurs ouvrages importans de l'école grecque. Cette époque est presque féconde en écrivains ; on y trouve Jordan Nemorarius, Léonard Fibonacci de Pise , Sacro-Bosco , Campanus deNovarre, Albert-le-Grand, Vincent de Beauvais, Roger Bacon, Vitellion, dont les noms sont restés célèbres et honorent le moyen âge. Campanus traduisit sur un texte arabe et accompagna de commentaires les treize livres des élémens d'Ëuclide et les deux qu'on a attribués à Hypsicle ''. C'est cet ouvrage qui a servi à répandre en Europe la connaissance de la Géométrie. Il a été imprimé pour la pre- mière fois en 1482, et a eu plusieurs autres éditions. Pendant long-temps encore , après la renaissance des sciences , il a joui d'une grande estime; et les commentaires de Cam- panus ont été consultés par les géomètres qui ont écrit sur les élémens de la Géométrie, ■ Le manntcrit dit Exceptiont* de tibro qui dicitur Gleba et JUutabilia ; mais cela provient probablement d'erreur* du copitte, ' Let copies en doivent être très-rares , car les catalogues de manuscrits n'en indiquent aucune. ' Avec le Planisphère de Jordan , et ditTérentes autres pièces concernant l'astronomie, sous le titre général : tphœrœ atque astrorvm cœlestium ratio, natura et motus ; Valderus , Basileœ, 1636 , in-4<>. H. Delambre, dans son Histoire de l'Astronomie ancienne (t. 2, p. 4S6), a donné à la traduction latine de Rodolphe de Bruges la date de 1544 , au lieu de 1144. Cette erreur a été cause que ce célèbre astronome s'est étonné qu'une traduction faite en 1644 se trouvât dans un ouvrage imprimé en 1636. * Quelques historiens ont pensé que cet ouvrage de Campanus n'était autre que la traduction d'Adhélard , à laquelle Campanus avait joint des commentaires. Voici comment s'exprime Andrès à ce sujet , Sei [Campano) non Iraduxse corne si dice comunemcnle ; certo iltustro con comenti l'Euclide , iradotto primo dalV Arabo in Lalino daW Inglese Alclardo Gotho, corne ha fatto vedere il Tiraboschi [Dell' origine, de progresti, e dello stalo attuale d'ogni titteratura. Parte I, cap. IX). Le titre suivant d'un exemplaire manuscrit de l'Euclide de Campanus qui se trouve à la bibliothèque royale de Paris, sons le n° 7213, vient confirmer cette opinion : Euclidis philosophi socratici incipit liber Elementorum artis geometricae translatus ab Arabica in Latinum per Adelardum Gothum Bathonientem , sub commenta Magittri Campani JVotarriensit. (MS. du XIV< siècle). 512 NOTES. tels que Zamberti, Lucas de Burgo,Peletier du Mans, Clavius, etc., et par les algébristes qui ont traité des quantités incommensurables, comme Stifels dans son Arithmetica intégra. Nous avons dit , en parlant du passage de Boèce où nous avons cru apercevoir le pen- tagone étoile , que cette figure a été considérée expressément par Campanus, dans son commentaire sur la proposition 32° du premier livre d'Euclide , et que c'est là que Brad- wardin , dans le siècle suivant, a pris l'idée de ses polygones égrédiens , dont il a donné une théorie assez étendue. On trouve, à la fin du quatrième livre, deux propositions de Campanus ', dont la première a pour objet la trisection d'un angle ; et la seconde , l'inscription , dans le cercle , du nona- gone régulier. Ce second problème dépend de celui de la trisection de l'angle; et la solu- tion que Campanus donne de celui-ci est remarquable par sa simplicité; elle se réduit, en pratique, à la construction d'une conchoïde de Nicomède. En voici le principe: Que du sommet de l'angle, comme centre, avec un rayon arbitraire, ou décrive une circon- férence de cercle , qui rencontrera les deux côtés de l'angle en deux points a; 6; que l'on mène un demi-diamètre perpendiculaire au premier côté, et que par le point h on mène une droite, de manière que sa partie comprise entre ce demi-diamètre et la circonférence du cercle soit égale au rayon ; et enfin que par le sommet de l'angle on tire une parallèle à cette droite , cette parallèle opérera la trisection de l'angle. Campanus ne dit pas comment on déterminera la direction de cette droite issue d'un point de la circonférence, et dont la partie comprise entre le diamètre et l'autre partie de la circonférence , doit être égale au rayon. Peut-être était-ce là un problème dont il avait donné ailleurs la solution. On voit qu'elle peut s'effectuer, comme nous l'avons dit , par une conchoïde de Nicomède. Ce problème a eu quelque célébrité vers la fin du XVII" siècle, parce qu'ayant été proposé publiquement avec deux autres, dans le Jour- nal des Savans (août 1676), il a été résolu par Viviani , dans son ouvrage intitulé : Enodatio prohlematum universis geometris propositorum à Cl. et R. D. Claudio Cotniers, canonico Ebredunensi, collegialis ecclesiœ de Ternant Prœposito dignissimo. Prœmiêsig, horum occasione , tetitumentis variig ad golutionem illustris veterutn probletnatis de anguH trisectione (Florentiœ, 1677, in-4°). Viviani fit voir, par une dé- monstration géométrique très-simple, que les trois points où la conchoïde rencontre la circonférence du cercle, et qui répondent aux trois solutions du problème de la tri- section de l'angle, sont sur une hyperbole équilalére. On sait que la section d'une droite en moyenne et extrême raison, joue un grand rôle dans la théorie des quantités incommensurables du dixième livre d'Euclide, dans son treizième livre, et dans la théorie des corps réguliers. Les nombreuses propriétés de celle division d'une droite n'ont point échappé à Campanus , qui les a signalées comme étant admi- rables, et dérivant de quelque principe digne de l'attention des philosophes^. C'est cette ' Dan» l'édition de 1537 (Basle , in-fol.), qui comprend tous les ouvrages d'Euclide qui nous sont parvenus, ce» deux propositions sont placées à la fin du volume. 2 Mirabilis itaqve est poteniia lincœ seciindnm proportioncm hahentem médium duoqvc ex tréma divises. NOTES. 313 division que Lucas de Bur^o a appelée proportion divine , dans son ouvrage qui a pour titre: Divina proportione, etc. , et dont il a détaillé treize effetti , ou utilités. Aujour- d'hui ces propriétés sont peu connues , par ne qu'on ne voit dans la division d'une droite en moyenne et extrême raison, que la résolution il'unc équation du second degré qui doit renfermer toutes ces propriétés. Cela est vrai de celles qui sont purement analytiques , mais les plus remarquables et les plus nombreuses sont celles qui naissent de considéra- tions géométriques. Elles mériteraient qu'on réunit de nouveau toutes les propositions qui s'y rapportent, comme quelques géomètres ont fait à l'égard de la division harmonique d'une droite '. Ce serait assurément un recueil de propositions intéressantes, qui donne- raient lieu à de nouvelles découvertes sur le même sujet, et à quelques relations sembla- bles et d'une plus grande généralité ^ Campanus cite, dans une note qui est à la suite do la première proposition du quatorzième livre (le premier des deux d'Hypsicle), Aristée et Apollonius comme ayant démontré cette proposition, que les surface» du dodécaèdre et de l'icosaèdre réguliers inscrit* dans la même sphère sont entre elles dans le rapport des volumes de ces deux corps. L'ouvrage d'Aristée , dit-il , était intitulé : Expositio scientiœ quinque corporutn , et celui d'Apol- lonius avait pour objet la Comparaison flu dodécaèdre et de l'icosaèdre. Au commence- ment de la proposition dixième du même livre, qui est précisément celle que nous venons d'énoncer, Campanus prononce encore les noms d'Aristée et d'Apollonius. Les ouvrages de ces deux géomètres célèbres de l'antiquité ne nous sont point parvenus; et peut-être étaient-ils inconnus aussi de Campanus , qui a pu en parler d'après Hypsicle qui les cite à peu près dans les mêmes termes , au commencement de la seconde proposition de son premier livre. Dans sa préface, Hypsicle avait déjà parlé longuement d'Apollonius et de sou ouvrage De dodecahedri et Icosahedri in eâdeni sphœrâ descriptorum comparatione. II paraît qu'on n'a fait attention généralement qu'à ce passage; car on ne cite ordinaire- ment que l'ouvrage d'Apollonius, et nullement celui d'Aristée , et je ne vois que Ramus Cui cum plurima phitosophantium admiratione digna conveniant, hoc principium v$l prœcipuum tx supe- riorum principionim invanabili procedit natura , ut iam diversa solida tum magnitudine tum basium numéro, tum etiam figura, irraiionali quadam symphoniaraiionaliliter conciliet, (Lib. XIV, propoiition 10.) ' De Billy , Tractatus de proportione harmonica. Paria , 1668, in-4°. — Saladini , Delta proporsione armoiiica . Bologne, 1761, in-8'>. 3 Par exemple : la diTision d'nne droite en moyenrie et extrême raiaon, ae réduite i trouver entre deux pointa donnéaA, B, un troiaième point C, tel que l'on ait AC = AB. CB : un moyen facile de génëraliaer cette queation, c'eat de la regarder comme dérivant d'une autre , dana laquelle on a anppoaé qu'un point de la droite propoaée a diaparu en paaaant à l'infini. Soit I ce point ; lo point cherché C devra aatiafaire , par rap- port aux troia pointa donnéa A , B , 1 , à l'équation : câ^Ib! = CB.CI.BA.IA. En cITet, ai l'on auppoae le point I il l'iniini, l'équation ae réduit à la première ci-deaaua. Cette équation a cela de remarquable, que chacun dea quatre pointa qui y entrent y joue le même rôle par rapport aux troia autrea ; et que, quel que aoit celui dca quatre pointa qu'on auppoae i l'infini, l'équation résultante exprime toujoura la diviaion d'une droite en moyenne et extrême raiaon. Ton. XI. 63 I 514 NOTES. qui ait mis ce dernier au nombre de ceux qui ont écrit sur les cinq corps réguliers. Les historiens des mathématiques ne parlent de lui qu'au sujet de ses cinq livres ù'Élémens cotiiques , et de ses lieux géométriques , dont Viviani , comme on sait , a donné une divi- nation. Du reste , il n'est pas étonnant qu'Aristée ail écrit sur les cinq corps réguliers ; car cette théorie a été fort cultivée, et en grand honneur dès la plus haute antiquité des sciences chez les Grecs, Pythagore en avait fait le principe de sa cosmogonie , dans laquelle les cinq corps réguliers répondaient aux quatre élémens et à l'univers ', ce qui a fait qu'on les appelait les cinq figures mondaines [figurœ mundanœ -). Platon adoptait ces idées ^ , et avait aussi cultivé cette théorie * , sur laquelle Theatète , l'un de ses disciples, passe pour avoir écrit le premier ^. Ensuite, on trouve donc Arisléc, puis Euclide, Apollonius et Hypsicle ®. Ce dernier cite dans ses deux livres, Isidore-le-Grand , son maître, de qui il avait appris ce qu'il savait sur cet objet. Ces cinq corps réguliers ont joué un si grand rôle dans l'antiquité, par suite des idées pythagoriciennes et platoniciennes , qu'on les re- gardait comme étant le but final auquel étaient destinées et l'étude et la science des géomètres '. Pappus nous apprend * qu'Archimède a cherché à étendre cette théorie , et que ne pou- vant former plus de cinq polyèdres réguliers, il en avait imaginé d'un nouveau genre , qu'on a appelés semi-réguliers : leurs faces étaient, comme dans les cinq premiers, des polygones réguliers, mais non tous semblables entre eux. Ces nouveaux corps étaient au nombre de treize. Pappus en a donné une description très-claire, que Kepler a repro- ' Le cube représentait la terre j le tétraèdre , le feu j l'octaèdre , l'air ; l'icosaèdre , l'eau ; et le dodécaèdre l'univers. (Plutarque, Placit. philos., liv. 11 , cap. 6.) 2 Proclus, Commentarius in Euclidem, lib. 11, cap. 4. — Kepler, harmonices mundi liber secundus , p. 58. ' Timée, 3« partie — Vlulaïque , Platonicœ questiones, * Pappus, Collections mathématiques, livre 5, à la suite de la proposition ïvii. — Proclus, in Euclidem , lib. 11, cap. 4. ' Theatotus , Aiheniensis , Archytœ sodalis, Geometrica auxit, primusque de quinque aolidis tractavit ut Laertius et Proclus produnt, (Ueilbronner , Ilistoria matheseos , p 149.) * On n'est pas d'accord sur l'époque où a vécu Hypsicle que les uns placent dans le second siècle de notre ère , et les autres dans le second siècle avant J.-C, un peu après Apollonius. C'est cette seconde époque que nous avons adoptée en parlant d'Euclide; nous avons dit qu'Hypsicle lui était postérieur de près de 150 ans. Ce fut là le sentiment de Bernardin Baldi, dans sa Cronica de matematici, p. 37 , et de Vossius, qui pensa qu'Hypsicleavait vécu vers le temps de Ptolémée Lathyre ; et Isidore-le-Grand, son maître, dont il parle dans «es deux livres , sous Ptolémée Physcone. Cet Isidore-le-Grand pourrait être , suivant Vossius , celui que cite Pline dans sa Géograpbie. (\ ossius , De scientiis mathematicis , p. 328.) le savant médecin Mental , dans la préface de sa traduction latine du petit ouvrage astronomique d'HypsioIe, mWiuXé Anaphoricus sive de Ascensionihus ; Paris 1657 — 4'; et récemment M. Delambrc (Histoire de l'astro- nomie ancienne , t. !"■, p. 246) , et M. Francliini (Saggio délia storia délie matematiche , p. 146), ont placé aussi Hypsicle ver» l'an 146 avant J.-C. Mais Fabriciu» (Bibliotheca grccca, t. II , p. 91) , et d'après lui, Weidler , Heilbronner , Montuola et Lalande l'ont fait naitre dans le second siècle de notre ère. ' Nihil in antiquâ Geometriâ speciosius visum est quinque corporilus ordinatis, corumque gratta Geometriam , ut ex Proclo, initie , dictttm est, inventa esse veteres illi crediderunt. (Kamus, Scholaruvt malhematicarum , liber xxx.) 8 Collections mathématiques , livre 5 , à la suite de la proposition 17. NOTES. 515 (luile, en donnant les figures qui s'y rapportent , dans le second livre de son Harmonie du Monde. Les historiens passent sous silence ce travail d'Ârchiméde : il est vrai qu'il est, par sa nature, bien inférieur aux autres découvertes de ce grand homme. Il eût été plus digne du génie d'Archiméde , puisqu'il voulait aller au delà d'Euclide et des autres géomètres, dans cette théorie des figures régulières, de créer les nouveaux polyèdres étoilét, qu'ai décrits M. Poinsot, et qui forment la véritable extension dont cette antique et célèbre théorie était susceptible. Revenons à Campanus. Lucas Gauricus, astronome et astrologue napolitain, a mis au jour, au commencement du seizième siècle, sous le nom de ce géomètre, un traité De te- tragonitmo , *eu Quadratura circuli ' ; et depuis , quelques auteurs ont répété que Campanus a écrit sur la quadrature du cercle. Mais l'ouvrage dont il s'agit ne dénote qu'ignorance dans son auteur, et est absolument indigne de porter le nom du savant in- terprète d'Euclide. L'auteur prend pour base de sa quadrature le rapport — de la cir- conférence au diamètre, «.tecundùtn qtiod plerique tnathematici tcripgerunt etjuxta physicam veritatein)) ; et, en passant par quelques propositions intermédiaires, il en conclut que le côté du carré qui est égal en surface à un cercle, est 5 fois et \ la sep- tième partie du diamètre du cercle. De sorte que D étant le diamètre, l'air du cercle serait ^(— ) , au lieu de ^«-^r* 4 7'' 47. Sacro Bosco a dû une longue célébrité à son traité De gphœrâ mundi, qui est un ex- trait de l'Almagesle de Ptolémée , et qui pendant plus de 400 ans a servi dans les écoles à enseigner l'astronomie. Imprimé pour la première fois en 1 472 à Ferrare , il a eu depuis au moins cinquante éditions. Un grand nombre d'auteurs des plus célèbres , tels que Purbach , Regiomontanus, £lie Vinet, Glavius, etc. , l'ont éclairci par des notes ou des commentaires. Mais il est important de remarquer ici , pour se faire une idée vraie de l'état de la science alors, que cet ouvrage ne contenait que les notions les plus élémentaires de Pto- lémée; il faisait connaître les cercles de la sphère, les phénomènes du mouvement diurne , et disait quelques mots des éclipses. Ce n'est que deux siècles plus tard que l'on fit un pas de plus dans la connaissance de l'Almagesle , et que Purbach expliqua la théo- rie des planètes, qui en est la partie la plus importante et la plus difficile. Sacro Bosco a laissé sous le titre De yilgorigjno,\ia traité d'arithmétique écrit en vers. C'est notre arithmétique actuelle ^ : Sacro Bosco l'attribue aux Indiens. Il la divise en 9 parties, qui sont: Numération, addition, soustraction, médiation^, duplation*. ' Tetragonismus , id est circuli quadratura por 'Campanum , A rchimedem Syracusanum atgue Bœtium , mathematicw perspicacissimos adinventa. Venetiia , 1503 , in-4°. 3 On a du même temps, un outre traité d'arithmétique écrit aussi en vers latins, par Alexandre de Villedien. (Vossius , De icientiis malhematicis , p. 40. — Daunou , Uitloire littéraire de la France , t XVI , p. 113.) ' Division par deux. * Hultiplication par deux. Cette opération et la médiation ont été comprises dans les ouvrages du XVI° siècle, dan» les règles générales de la multiplication et de la division ; de sorte que les traités d'arithmétique n'ont plus eu que sept chapitres au lien de neuf. (Voir la Summa de arithmttica de Lucas de Burgo ) 516 NOTES. multiplication , division, progression et extraction des racines carrées et cubiques. Pendant très-long-lemps, les traités d'arithmétique se sont composés de ces 9 chapi- tres : on les trouve encore dans des ouvrages du XVP siècle. On a de Sacro Bosco quelques écrits sur l'astronomie , où les calculs sont faits en chif- fres arabes. Ces pièces et le traité de l'algorisme sont restés manuscrits. Les chiffres de Sacro Bosco sont l'origine des nôtres ; on suit très-bien dans les manuscrits des XIV" et XV° siècles , et même dans plusieurs ouvrages des premiers temps de l'imprimerie, les petites altérations successives qui leur ont donné définivement la forme actuelle. On doit à Jordan Némorarius : 1° Un ouvrage d'arithmétique en dix livres, qui est un traité sur les propriétés des nombres , imité de ceux de Nicomaque et de Boèce. Cet ouvrage a été imprimé avec des commentaires de Fabre d'Etaples ( Faier Stapulensis) en 1496, et a eu depuis plusieurs autres éditions. 2" Un traité d'arithmétique pratique, dans le système arabe, intitulé Âlgorismus , qui est resté manuscrit. .3" Un traité du planisphère, qui a été imprimé en 1507, 153fi et 1558 avec celui de Ptolémée. C'est dans cet ouvrage que se trouve démontrée pour la première fois dans toute sa généralité, cette belle propriété de la projection stéréographique qui est le fondement de la construction du planisphère, savoir que : tout cercle se projette sui- vant un cercle. Ptolémée n'avait démontré ce théorème que pour des positions particu- lières du cercle de la sphère mis en perspective, parce que cherchant partout la clarté et la facilité , comme le dit Proclus au chapitre X de son Hypotypose, il n'introduisait dans ses ouvrages et n'y démontrait que les propositions géométriques qui lui étaient absolument indispensables. Ptolémée faisait la projection sur le plan de l'équateur, l'œil étant placé au pôle, Jordan l'a faite sur le plan tangent à la sphère mené par le second pôle. Depuis, Mauroljcus et les autres géomètres l'ont imité. Nous remarquons ces légères différences entre l'ouvrage de Jordan et celui de Ptolémée, parce qu'elles sont, pour l'époque, de véritables inno- vations qui marquent les premiers pas de l'esprit de recherche et d'invention qui était rare au XIII" siècle, où les intelligences avaient assez, à faire d'acquérir les connais- sances que les Arabes leur livraient. La dénomination de projection stéréographique , que l'on a donnée à la projection employée par Ptolémée dans son planisphère, est moderne; elle est due à Aguilon qui l'a proposée et s'en est servi dans son optique '. La projection stéréographique jouit d'une propriété très-remarquable, qui consiste en ce que l'angle de deux cercles tracés sur la sphère, est égal à l'angle des deux ' Àguilonii Opticonim librisex. Paris 1613, in-f". " Quare tametsi stereographices ?iomiïic nusquavi vocatuvi hoc projecHonis genus repeHmiis ; qtiià tamen ncc alio guident uUo solitum est appellari , placuii hoc nomen usurpare ^ quod nohis in prœscnti visnm est ad rem ipsam quàm maxime accommodatum v (in praifatione). NOTES. 517 cercle» en projection. Ce beau théorème n'a pas été aperçu par Ptolémée ni par Jordan '. L'ouvrage le plus ancien, a la connaissance de M. Delambre, où il se trouve, est le traité de navigation de Roherston (1754). (Voir Traité d'astronomie , t. III. ) Il existe un traité manuscrit De trianguli» de Jordan *. Il avait aussi écrit trois livres De geometriâ , que Vossius suppose devoir se trouver dans la bibliothèque du Vatican ^, et qu'a possédés aussi la bibliothèque de l'académie de Leipsick *. Ramus lui attribue la démonstration de l'élégante formule ponr l'aire du triangle en fonction des côtés ^ Nous ne savons dans quel ouvrage Jordan l'a donnée; M. Venturi ne l'a pas trouvée dans son traité De triangulis'^. Cette démonstration est la même que celle que Léonard de Pisc a donnée dans le même siècle , dans sa géométrie prati- que. Elle paraît être d'origine arabe, car elle se trouve dans l'ouvrage des trois géomètres, fils de Musa bon Schaker, et dans celui du juif Savosarda. Jordan a aussi écrit sur l'optique, et sur la mécanique ^. Albert-le-Grand, ainsi nommé, dit Montucla , soit à cause de sa réputation , soit parce que son nom propre qui est Grolt, signifiait ^rand dans le langage du temps, avait écrit sur l'arithmétique, la géométrie, l'astronomie et la musique. Ces ouvrages ne nous sont point parvenus. Il fut célèbre par son habileté en mécanique. Cet écrivain, d'une fécon- dité étonnante, avait une connaissance étendue des ouvrages arabes. Roger Bacon, l'un des plus puissans génies du moyen âge, occupe le premier rang parmi les promoteurs de la renaissance générale des lettres et des sciences. II contribua particulièrement aux progrès des mathématiques en montrant dans plusieurs de ses ou- vrages" le rang qu'elles tiennent dans l'ensemble des connaissances humaines, et les secours qu'elles peuvent procurer dans toutes les recherches scientifiques , dont elles sont le fondement. Son optique contient, comme tout le monde sait, de savans aperçus et des découvertes réelles en théorie, et l'invention de plusieurs instrumens devenus de la plus haute utilité. Ses connaissances en astronomie lui firent reconnaître les erreurs du calendrier, dont il conçut la réformation. Le calendrier qu'il calcula, et qui est resté manuscrit, se dis- tingue par sa correction et par l'usage des chiffres arabes, qui sont les mêmes que ceux de Sacro Bosco. ' Nous avons dit dans notre cinquième Epoque que la projection (térëographique jouit d'une autre propriété ■ttez belle, concernant la détermination du centre d'un cercle en perspective ; et que les principes de cette projection , transportés aux surfaces du second degré , forment aujourd'hui uno méthode de recherche en Géométrie rationnelle. ' Ce traité se trouve dans la bibliothèque des nominicains à Florence (Montfaucon , Bib, hib.); dam celle de la ville de Basle (Uicnel, ca/a/o^t, etc.), et dans la bibliothèque royale de Paris (n" 7S78. A.). ' De scientiis mathematicis , p. 333. * C. Getnei , B ibliothcca universalis , ttc , t. II, fol. 77 v ' Schola mathemuthicœ ; à la suite du livre xwi' * Comme ntari sopra la storia e le leorie dell'oUica. Commentario II; del Traguardo, cap. XXX. ' Jordani de ponderibus propositionet XIII etdemonstrationes, KorimbergO), 1631, in-^». " Spécula mathematica. — Opus IVajui; quatrième, cinquième et sixième parties. 518 NOTES. Vitellion a laissé un savant trailé d'optique, imité de celui de l'arabe Alhasen, et qui est remarquable , surtout pour l'époque où il parut , par les principes de bonne Géo- métrie de l'école grecque, sur lesquels il repose. Tout le premier livre est consacré à la Géométrie. L'auteur y a réuni les propositions dont il aura à faire souvent usage dans la suite, et qui ne se trouvent pas dans les élémens d'Euclide. Quelques-unes sont prises des coniques d'Apollonius que cite Vitellion. D'au- tres qui concernent la division harmonique d'une ligne droite, sont dans le genre de celles qu'on trouve dans le septième livre des collections mathématiques de Pappus. D'au- tres enfin sont dans le genre de celles qui se trouvent dans le traité De inclinationibus d'Apollonius. Mais il n'est pas fait mention de cet ouvrage, ni de celui de Pappus. Vitellion, en citant les élémens d'Euclide et les coniques d'Apollonius, ouvrages avec lesquels il parait familiarisé , nous montre, d'une part, qu'une autre traduction d'Eu- clide que celle de Gampanus alors trop récente, était déjà en circulation en Europe, et ensuite que le fameux traité des Coniques y était aussi déjà connu. On avait pensé qu'on n'avait commencé à le connaître que 200 ans plus tard , vers le milieu du XV° siècle où Regiomontanus en méditait une édition '. Un autre écrivain, contemporain de Vitellion, Peccam, archevêque de Cantorbéry, a aussi laissé un traité d'optique ; mais qui est moins savant que celui du géomètre polonais. Vincent de Beauvais n'est point un auteur original ; mais son apeculum mundi, recueil immense , qui a reçu le nom à' Encyclopédie du XIII" siècle, mérite d'être cité comme donnant une idée de l'état où les sciences se trouvaient à cette époque , si l'on n'y com- prend pas, toutefois, les progrès notables qu'elles ont faits dans ce siècle même. On trouve dans cet ouvrage des extraits d'Euclide, d'Aristote, de Vitruve qui avait paru jusque là inconnu dans le moyen âge, de Boèce, de Cassiodore, d'Isidore de Séville, d'AIfarabius, d'Avicenne et de divers autres auteurs arabes. Vincent de Beauvais dit qu'Alfarabius - distinguait huit sciences mathématiques , qui sont l'arithmétique , la géométrie, la perspective, l'astronomie, la musique, la métrique ou la science des poids et mesures, et la science des esprits (c'est-à-dire la métaphysique). Il n'y a là que sept sciences ; la 8" qui est omise, est l'algèbre, qu'Alfarabius avait placée après l'arithmétique. Vincent de Beauvais n'en parle pas non plus dans la suite , ce qui fait penser qu'alors l'algèbre avait à peine pénétré en France, ou du moins qu'elle n'y était connue que dans le cercle restreint d'un très-petit nombre de mathématiciens. Notre système de numération est exposé très-clairement avec le zéro, sous le titre A' Algorismus.\idL Géométrie se réduit aux définitions et à quelques notions élémentaires. Ce qui nous prouve que les matières sur lesquelles roulaient les savans ouvrages de Sacro Bosco, de Campanus, de Jordan, de Vitellion, étaient encore toutes nouvelles, et que la connaissance n'en était point parvenue à Vincent de Beauvais. ' Muntucla, Histoire des mathématiques , 1. 1, p. 348. ^ Alfarabius fut l'un des arabes les plus célèbres du X° siècle , surtout comme géomètre et astronome. Dans le catalogue de ses nombreux ouvrages on en remarque un dont le titre : IVilns felicilatum, seii disciplinarum i.iathematicarum Thésaurus , prouve tout le prix qu'il attachait à la culture des mathématiques. NOTES. 519 Si nous avions suivi l'ordre chronologique, dans notre examen des écrivains du XIII" siècle, nous l'aurions commencé sans doute par Fibonacci, appelé communément Léonard do Pise , dont le Liber jébbaci porte la date de 1 202. Mais cet ouvrage a eu une telle in- fluence sur la direction qu'ont prise les sciences mathématiques au XV" siècle, que nous avons voulu le distinguer spécialement de ceux dont nous avons parlé jusqu'ici. Ceux-ci appartenaient à l'école grecque, quoique ce soit par l'entremise des Arabes, et dans leur langue , qu'ils aient pénétré en Europe. Ceux de Léonard de Pise , au contraire nous pa- raissent être d'origine Hindoue , quoiqu'ils aient passé aussi par la main des Arabes. C'est de là que provient le caractère qui les distingue des autres. Léonard Fibonacci a voyagé, comme on sait, en Orient; et à son retour a fait paraître un traité d'arithmétique et d'algèbre, commençant par ces mots : Incipit Liber Abbaci compotitu* à Leonardo filio lionacci Pisano , in anno 1202. L'arithmétique est notre 8;|rstème actuel , avec le zéro ; Fibonacci l'attribue aux Indiens : « Novetn figures Indorum hœ tunl : viiii, VIII, VII, VI, V, iiii, m, II, L 9, 8, 7, 6, 5, 4, 3, 2, 1.' cum hi* itaqne uovem fiyuri» et cum hoc sîgno O quod arahicè zephiruin appellatur, tcrlhitiir quilihet numeru», etc. » ^. Le traité d'algèbre que Fibonacci appelle, comme les Arabes , Algehra et Âlmuchaha, s'étend jusqu'à la résolution des équations du second degré, et de quelques autres qui se réduisent à celle-là. Il est une imitation de cette partie de l'algèbre, traitée par Mohammed ben Musa, qui était élémentaire, et en quelque sorte populaire au IX° siècle chez les Arabes. Fibonacci y fait des application de cette science à la Géométrie. Et c'est là le premier exemple et l'origine, chez les mathématiciens européens, de l'introduction de l'algèbre dans les démonstrations et les spéculations de la Géométrie. Cette alliance de deux sciences qui avaient été si distinctes chez les Grecs, forme le caractère propre de l'ouvrage de Fibonacci, où non-seulement elle se trouve mise en pratique, mais où elle ■ Cea chiffre» ressemblent il ceux de Sacro Bosco que beaucoup d'auteurs ont rapportés dans leurs ooTrages. [Voir particulièrement Heilbronner et Hontucla.] Du reste les chilTrcs arabes qu'on trouve dans un grand nom- bre de manuscrits latins des XIII' et XIV' siècles ont toujours la même forme. ^ On voit que presque tous les auteurs du XIII' siècle , Fibonacci , Jordan, Sacro Bosco , Vincent de Beanvais, Alexandre de Villcdieu , Roger Bacon, ont écrit sur le système de numération arabe , ou plutôt indien. Cela prouTe évidemment que depuis long-temps ce système était déjà connu et pratiqué des mathématiciens ; et que les recherches à Taire pour fixer la date de son introduction en Europe, dont l'honneur ne peut être attribué it Fibonacci ni&aucun des autres écrivains que nous venons de nommer, doivent remonter au delà du XIII' siècle. On ne peut croire en efTet que les écrivains du siècle précédent, qui avaient rapporté d'Espagne de nombreuses traductions des principaux ouvrages des Arabes , n'y aient pas compris leur système de numération, tant pour lui-même que parce qu'il devenait indispensable pour traduire leurs tables et autres ouvrages astronomiques , tels que ceux d'Ariachel, d'Alfraganus , etc. Kt en elTet nous avons déjà cité un traité à'' Atgorisme qui parait être de Gérard de Crémone , et un autre de Jean Uispalensis Ces deux écrivains ont vécu dans le XII' siècle. 520 NOTES. est exprimée formellement comme tenant à la nature même des deux sciences, qui doivent se prêter de mutuels secours ; car dans sa préface , Fibonacci dit : Et quia arithnetica et Geometriœ scientia sunt connexœ , et suffragatoriœ sibi ad invicem, non potest de numéro plena tradi doctrina, nisi inserantur geometrica quœdam , vel ad Geometriam spectantia; et il ajoute que souvent les règles et les opérations de l'algèbre tirent leur évidence et leurs démonstrations des figures et de considérations géométriques. Ensuite l'auteur annonce qu'il traitera avec plus d'étendue de ce qui concerne la Géométrie, dans un livre de Géométrie pratique qu'il a composé. Cet ouvrage divisé en huit chapitres est intitulé : Leonardi Pisani de filiis Bonacci Practiea Geometriœ , composita anno MCCXX. Il est resté manuscrit, de même que le traité d'algèbre. Bernardin Baldi nous apprend que Commandin avait préparé une édition de ce traité de Géométrie, mais qu'il est mort sans avoir pu réaliser ce projet '. Edouard Bernard, savant géomètre et astronome anglais du XVII" siècle, devait comprendre le traité d'algèbre dans le septième volume de la magnifique collection qu'il avait préparée des ouvrages des mathématiciens anciens -. Fibonacci avait laissé aussi un traité des nombres carrés, qui , d'après ce qu'on en peut juger par des passages de la summa de arithmetica , etc., de Lucas de Burgo, et de l'arithmétique de Cardan , qui le citent, roulait sur l'analyse indéterminée du premier et du second degré. Les formules dont ces deux géomètres font usage difi'èrent de celles de Diophante, et sont les mêmes que celles que l'on trouve dans les ouvrages indiens, à l'exception toutefois qu'elles ne résolvent point des questions aussi difficiles et aussi gé- nérales que dans ces ouvrages indiens. Nous devons regarder ce traité de Fibonacci comme une copie de quelque ouvrage arabe, emprunté lui-même de ceux des Hindous. Ainsi, en somme, les écrits de Fibonacci, qui au XVI" siècle ont été le modèle et le fondement de ceux de Lucas de Burgo, de Cardan et de Tartalea, avaient une origine purement arabe, et primitivement hindoue. C'est donc une opinion erronée, sur laquelle il faut revenir, que nous avons dû notre savoir et nos progrès dans les sciences, directe- ment et exclusivement aux ouvrages des Grecs. Les ouvrages de Fibonacci, dont on reconnaît aujourd'hui toute l'importance, sont cependant encore inédits; les manuscrits en sont très-rares; et le traité des nombres carrés est déjà perdu, depuis une soixantaine d'années. C'est le sort réservé aux traités ' Cronica de matematici , p. 89. 2 Cette collection devait avoir 14 volumes ; le détail des ouvrages qui devaient y entrer se trouve dans la Bililiotheca grœcaile"lùbTicius (\ih. 3, cap. 23). On remarque dans le volume VI , destiné à l'algèbre , le titre suivant d'un ouvrage de Thebit ben Corah , qui montre bien l'alliance intime que les Arabes avaient établie entre l'algèbre et la Géométrie, qui forme le carac- tère propre de leur science mathématique : Thabeti traciatus de veritate propositionum algebricariim demon- strationibus Gcomeiricis adstruenday cum aliis tractatibus egreyiis ^ quœ Gcbricam artem spectant, Arabicè et latine Les immenses et précieux matériaux préparé» par Éd. Bernard ont passé après sa mort dans la bibliothèque Bodléienne. On a lieu de s'étonner qu'une aussi belle et aussi utile entreprise n'ait pas reçu son exécution , dans un pays où les sciences ont trouvé souvent de nobles et généreux encouragemens. NOTES. »tî • d'algèbre et de Géométrie, si l'impression ne vient promptemcnt nous assurer la conser- vation de ces monumens si précieux de l'histoire scientifique des Européens '. Le XIV' siècle parait avec moins d'éclat que le XIII", dans l'histoire du moyen âge; xit* sUcle. parce qu'en cfTet les productions neuves et importantes qui rendent célèbres les noms de Fibonacci, de Sacro Bosco, de Campanus,de Jordan, de Vilellion, de Roger Bacon, de- mandaient à être méditées et étudiées silencieusement pour être bien comprises et porter leur fruit. Toutefois le XIV" siècle, trop peu connu encore , nous semble avoir rempli sa tâche; les études mathématiques ont continué d'être cultivées, et elles ne se sont point réduites à la simple reproduction ou à l'imitation de quelques ouvrages arabes: de pre- miers efforts ont été faits pour appliquer les connaissances acquises, et pour aller au delà ; les esprits ont été préparés à la lecture des textes grecs et au mouvement rapide et général qui a produit , dans le siècle suivant, le renouvellement des sciences. Le premier tiers du XIV° siècle nous olfre un homme qui a eu une grande célébrité par son savoir en philosophie, en mathématiques, en théologie et dans la littérature arabe, Thomas de Bradwardin, archevêque de Cantorbéry. Nous avons fait connaître la savante théorie des polygones égrédiens que ce géomètre imagina, sur la simple donnée du pen- tagone étoile de Campanus. Cette théorie était véritablement une conception nouvelle, qui doit faire honneur au XIV* siècle. Elle se trouve, comme nous l'avons dit, dans un traité intitulé : Geometria speculaliva, qui a été imprimé en 1490, et a eu depuis plu- sieurs autres éditions -. Cette date de 1 490 parait avoir induit en erreur les historiens des mathématiques. Bernardin Baldi, Heilbronner et Montucla , qui ont placé l'auteur à la fia du XV" siècle; et c'est peut-être là la cause pour laquelle on n'a pas fait attention jus- ■ iiLe» pertonnes qui ne se aont pas spécialement occnpées de recherches historiques, ne sauraient s'imaginer i> combien de manuscrits précieux ont été détruits, même dans ces derniers temps Après de si coupables » négligences, comment ose-t-on parler encore de la destruction des manuscrits au moyen âge ? Sous peine de n passer pour des barbares aux yeux de la postérité, il faut arrêter une telle dévastation. » {Uisloire des sciences mathématiques en Italie, 1. 1, p. ij). Nous nous faisons un devoir de répéter ces paroles de M. Libri ; nous voudrions qu'elles eussent souvent de l'écho. Sais on sent que le devoir qu'elle» commandent n'est point celui de simples particuliers ; mais bien celui des gouvernemens désireux de contribuer aux progrès des sciences et au développement de l'intelligence humaine. L'impression de quelques manuscrits auxquels s'attache un intérêt scientifique et historique, de même que la reproduction dans la langue nationale de quelques ouvrages étrangers, serait de leur part une digne et utile coopération , peu coûteuse du reste , aux travaux des hommes qui se vouent à l'étude. TJne seconde mesure à prendre, pour arrêter la destruction des raretés littéraires ( telles , par exemple , que les productions du XVI1° siècle, qui disparaissent tous lesjours), serait l'établissement d'une bibliothèque spé- ciale destinée aux sciences j bibliothèque en quelque sorte historique, où se trouveraient réunies, par siècles, toutes les productions du savoir et du génie, et qui deviendrait un centre où chacun se ferait un devoir et un bonheur de porter ses petites propriétés particulières, qu'on laisse perdre aujourd'hui parce qu'on ne sait réellement à quoi les réunir pour les rendre utiles et leur assurer une conservation durable. ' Dans un manuscrit de la bibliothèque royale (n° 7368 , copie du XIV" siècle) se trouve une pièce intitulée dans le catalogue , Fragmentum elementorum Geometria, où nous avons reconnu des passages de la Géométrie de Bradwardin. La théorie des polygones égrédiens y est ; mais on ne trouve dans les figures que le pentagone de seconde espèce et l'eptagone de troisième espèce, qui y sont appelés, comme dans l'ouvrage imprimé, penta- gone àa premier ordre , et eptagone in second ordre. Les autres polygones égrédiens n'y sont pas représentés. ToM. XI. 66 522 NOTES. qu'ici à son ouvrage; car le rajeunir ainsi de plus d'un siècle et demi, c'était en diminuer le mérite. Pour l'époque où il fut écrit, il nous paraît remarquable , non-seulement parla théorie des polygones égrédiens, mais encore par plusieurs autres, parmi lesquelles on dislingue quelques propositions sur les figures isopérimètres. Voici l'analyse de cet ouvrage : Son second titre est : Brève compendium artis Geometriœ à Thoma Bravardini ex libris Euclidig , Boetii, et Campant peroptimè compilatum. L'auteur aurait dû nom- mer aussi Archiméde et Thépdose, qu'il cite souvent, et de qui il a fait plusieurs em- prunts, pris du livre De quadraturâ circuit du premier, et des Sphériques du second. L'ouvrage est eu quatre parties : La première comprend les définitions , les axiomes et les pontulata qui sont en tête des élémens d'Euclide; et la théorie des polygones égrédiens. La seconde partie traite des triangles, des quadrilatères, du cercle, et des figures iso- pdrimetres , dont Euclide n'a pas parlé dans sa Géométrie , ainsi que le remarque Brad- wardin. Mais on sait que dans l'école même de Pythagore cette théorie a été ébauchée ; et que Zénodore, disciple de ce philosophe, a laissé sur cette matière un écrit, destiné à combattre ce préjugé vulgaire que les .fig.ures de contours égaux avaient des capacités égales. Cet ouvrage , le plus ancien des écrits géométriques des Grecs qui nous sont parvenus, a été conservé par Théon dans son commentaire sur l'Almageste '. Pappus a traité aussi cette matière, au commencement du cinquième livre de ses collections ma- thématiques. Bradwardin ne dit pas si les propositions qu'il démontre sont prises de cet ouvrage, ou de l'Almageste, ou bien s'il les a imaginées de lui-même. En voici les énoncés : Première proposition. — De tous les polygones isopérimètres , celui qui a le plus grand nombre d'angles est le plus grand en surface. Seconde proposition. — De tous les polygones isopérimètres d'un même nombre d'angles , le plus grand est celui qui a ses angles égaux. Troisième proposition. — De tous les polygones isopérimètres qui ont le même nombre de côtés et leurs angles égaux , le plus grand est celui qui a ses côtés égaux. Quatrième proposition. — De toutes les figures isopéritnètres , le cercle est la plus grande. L'auteur ajoute que la sphère Jouit de la même propriété parmi les solides. La troisième partie de l'ouvrage traite des proportions et de la mesure des aires du triangle, du quadrilatère, des polygones et du cercle. Bradwardin dit que l'aire du cercle est égale à celle du rectangle construit sur la moitié de la circonférence et la moitié du diamètre , pour côtés. Il conclut cette proposition de celle d' Archiméde qui est la même, en d'autres termes, et qu'il emprunte, sans démon- stration, du livre De circuli quadraturâ , où elle est énoncée ainsi : Un cercle quelconque est égal à un triangle rectangle dont un des côtés de l'angle droit est égal au rayon de ce cercle , et dont l'autre côté de l'angle droit est égal à la circonférence de ce ' Clavius l'a reproduit dans son commentaire sur la sphère de Sacro Bosco. NOTES. 323 » même cercle. Bradwardin ajoute que le rapport de la circonférence au diamètre est -V-; « Aoc ut habetur ah eodem Arcliimenide ' in prœdicto libello (De quadraturâ circuit.^» La quatrième partie traite des figures à trois dimensions , des places , des angles solides , des cinq corps réguliers et de la sphère. Le chapitre de la sphère est une collection de diverses propositions sur les cercles tracés sur cette surface, que Bradwardin dit avoir prises du livre des tphérique» de Théodose. Enfin on trouve un petit traité particulier sur la quadrature du cercle, qui est intitulé: Traotutu» de quadraturâ circuli editus à quodum archiepiscopo ordinù fralmm mi- norum. Ce traité est précisément le même que celui que Gauricus a attribué à Campanus. D'après ce que nous en avons dit, on pensera qu'il ne doit pas plus porterie nom de Bradwardin que celui de Campanus. Une idée de Bradwardin , fruit des premières lueurs de la philosophie platonicienne qui commençait à pénétrer en Europe, mérite d'être remarquée. C'est que cet écrivain chercha , le premier , à appliquer la méthode géométrique à la théologie ; et répandit de la sorte les premiers germes de cet esprit d'indépendance qui ne larda point à se faire sentir dans les cloîtres et les couvens; et qui, cultivé avec plus de succès dans le siècle suivant par un autre prince de l'église, le cardinal Nicolas de Cusa , philosophe platonicien , se- coua le joug de la scolastique du moyen âge, et aboutit à la philosophie moderne. Continuons l'histoire du XIV" siècle. Pediasimus, au commencement de ce siècle, a écrit sur la Géométrie et la géodésie; le moine Barlaam a laissé un traité d'arithmétiqne, et un traité d'algèbre en six livrés, intitulé : Logitticœ libri f^I , écrit en grec *, quoique l'auteur fût italien ; mais il avait été résider en Orient pour apprendre la langue grecque. Une version latine du traité d'algèbre a été imprimée en 1572 (Strasbourg, in-8°), puis en 1600 (Paris, in-4''), avec des scolies de Jean Chamber. Le traité original est peut- être le plus ancien ouvrage d'algèbre qui nous soit parvenu, après celui de Fibonacci, qui lui est antérieur de plus d'un siècle. Killingworlh a laissé des tables astronomiques, et un traité d'algorisme. Simon de Bredon a commenté l'Almageste de Ptolémée 3, et a écrit sur l'arithmétique. Isaac Argyrus, moine grec, a calculé des tables astronomiques, et a écrit sur l'astrolabe ; sur l'arithmétique, De extractione radiai* quadraticœ quadratorum irrationalium ; sur la géodésie , Compendium geodœêiw «eu de dimentione locorum. methodus brevi» ac tuta; et sur différentes parties de la Géométrie, De invenlione quadrangularium laterum ; Theorem,ata de triangulis ; De dimensione triangulorum aliarumque figu- rarum, ; De figuri» non rectangulit ad rectangula* reducendi*. ' Bradwardin appelle KTc\i'\mkAe Archimenidti. ' Delambre , en rendant compte du livre de cet ouTrage qui te rapp.orte aux calculs aitronomique* , a placé l'auteur avant Bède, en dinant toutefoia que l'on ignore l'époque précite où il a vécu. Cette inad- vertance ett tingulière, car Barlaam ett un pertonnage encore célèbre dant l'hittoire littéraire et politique du XIV' tiècle. ■'' Ed. Bernard devait comprendre cet ouvrage dant le t. VIII de ta collection dont ooat avont parlé plat haut. Il Tintitule : Super demonstrationas alù/uas Almageati : Orss mBOcrta. 524 NOTES. * Aucun de ces écrits n'a été imprimé ; nous regrettons de ne pouvoir dire quel en est l'objet, ni ce qu'ils ofl'raient, dans le temps où ils ont paru, de neuf et d'utile. Edouard Bernard devait en comprendre un, en grec et en latin , sous le titre : De figurarufii transmutatione ,(\ans sa collection des auteurs anciens. Paolo di Digomari , connu sous le nom de Paolo dell Ahbaco, a écrit sur l'algèbre, la Géométrie et l'astronomie , et fut aussi un littérateur distingué , qui a mérité d'être cité à côté de ses célèbres contemporains le Dante et Pétrarque. Montucla place au XIV° siècle Biagio di Parma qui écrivit sur l'arithmétique , la Géomé- trie, l'astronomie et l'optique, et qui fut un homme distingué dans son temps. Lucas de Burgo le cite parmi quelques auteurs modernes dont les ouvrages lui ont été utiles pour composer sa Suinma de Ârithmetica , etc. Mais il le place immédiatement après Léonard de Pise , et avant Sacro Bosco et Prosdocimo dePadoue, ce qui nous porterait à croire que ce géomètre l'a regardé comme étant du XIII'-" siècle ; c.ir il a observé , du reste, l'ordre chronologique dans renonciation des autres noms qu'il cite. Ce sont parmi les Anciens, Euclide et Boèce, et parmi les Modernes, Léonard de Pise, Biagio di Parma, Sacro Bosco et Prosdocimo de Padoue. Ce dernier a vécu sur la fin du XIV" siècle et dans le commencement du XV"; il a calculé des tables astronomiques, et écrit un livre De algorithmo , où Montucla suppose qu'il a traité de l'algèbre [Histoire des Mathématiques , t. II, p. 71G); mais cet ouvrage est probablement un simple traité d'arithmétique pratique, comme tous ceux qui portent le même nom i'algorisme ; d'autant plus que Bernardin Baldi ne cite Prosdocimo que comme ayant écrit sur l'arithmétique, et non sur l'algèbre. Du reste , le traité De algo- rithmo a été imprimé en 1483. C'est peut-être le premier ouvrage sur notre système de numération que l'imprimerie ait mis au jour. Le Compendium arithmetices Boetii de Fabre d'Etaples a bien été imprimé en 1480 ; mais cet ouvrage ne roule que sur l'arith- métique spéculative, ou théorie des nombres, qui est indépendante de la manière de les représenter en se servant de quelques-uns seulement pour exprimer tousjes autres '. Cossali , dans son histoire de l'Algèbre -, cite plusieurs autres Italiens qui ont écrit sur cette science dans le XIV siècle. On y voit que Guillaume de Lunis avait traduit l'al- gèbre de Mohammed ben Musa, sous le titre La Régala delV algehra. Nous avons dit, en parlant de la Géométrie chez les Arabes, qu'on avait eu dans les XIIP et XI V° siècles plusieurs autres traductions latines de cet ouvrage, dont l'une a été reproduite par M. Libri dans le premier volume de son Histoire des sciences mathématiques. L'astronomie a été la science la plus cultivée dans le cours du XIV'' siècle, où l'on 1 Le traité De alyorithmo de Prosdocimo nous parait olTrir de l'intérêt , parce qu'il confirme l'opinion de Wallis sur l'identité de la signification des mots ahacus et algorismus , dont il pensait que le second avait remplacé le premier dans les derniers temps du moyen âge. Walli» ayant lu dans un manuscrit de la Bib. Bodléienne que Hermann Contractus et Prosdocimo avaient écrit sur Vabacus , ajoute que cela signifie , sous un autre nom , algorismus, ou système de numération arabe. Le titre de l'ouvrage de Posdocimo , que Wallis ne connaissait pas, justifie pleinement son opinion. 2 Sioria critica d'ell' origine , trasporto e primi progressi in Italia d'elV Algehra. Parme , 1787 ; 2 vol. in-4o. NOTES. S2o trouve un grand nombre d'astronome»; la plupart ont laissé des traités de l'astrolabe. Nous n'avons point eu à les nommer, parce qu'il parait qu'ils n'ont pas écrit particuliè- rement sur la Géométrie. On voit, par ce qui précède, que les connaissances mathématiques chez les chrétiens du moyen âge, se sont formées lentement depuis le VI11° siècle jus(|u'à la fin du XIV°, d'abord de quelques notions superËoielles empruntées primitivement des Grecs et trans- mises parBoèce, Cassiodore et Isidore de Sévillc, et ensuite des ouvrages véritablement savans, que vers le XII" siècle on a tirés de l'Espagne et traduits de l'arabe en latin. Ceux-ci paraissent aujourd'hui, d'après les citations que nous avons faites , avoir été en très-petit nombre; car après avoir trouvé des traductions d'Euclide, de Théodose, de Ptolémée, d'Âlfaazen, de Mohammed ben Musa, nous avons auguré seulement, de quel- ques passages de l'optique de Yilellion, que les coniques d'Apollonius étaient connues, mais nous n'avons eu à citer aucune traduction de cet ouvrage important, ni de ceux d'Archimède, de Héron, de Ménélaus, de Pappus, de Serenus, de Proclus. Cependant nous ne pouvons croire que les ouvrages de ces géomètres grecs , dont il existait de nom- breuses traductions arabes, n'aient pas pénétré chez les chrétiens d'Europe aux XII" et XIII" siècles, en même temps que les élémens d'Euclide. Et en effet il existe des traduc- tions latines de quelques-uns '. Mais leur rareté, et le silence gardé sur les géomètres qui en ont été les auteurs , ou qui s'en sont servis, prouvent que ces ouvrage ont été peu con- nus, et que les sciences mathématiques, à la fin du XIV siècle, étaient encore dans l'enfance, en comparaison de l'état florissant qu'elles avaient atteint dès les premiers temps de l'école d'Alexandrie chez les Grecs, et dès le IX" siècle chez les Arabes *. Mais au XV" siècle, qui est l'époque de la renaissance générale des lettres, des scien- w' siicLs. ces et des arts, en Europe, les sciences mathématiques reçurent une impulsion nouvelle et féconde qui prépara rapidement les grands progrès qu'elles firent dans le siècle sui- vant. Cette impulsion fut provoquée par la connaissance des ouvrages grecs que l'on étudia pour la première fois dans leur langue originale, et dont on prépara aussitôt des traductions qui firent connaître dans toute sa pureté la Géométrie d'Euclide , d'Archi- mède, d'Apollonius, et des autres grands écrivains de l'antiquité. Ces premiers pas étaient déjà un progrès notable dans l'étude des sciences, quisufli- rait seul pour rendre célèbre le XV° siècle. Mais en même temps, un autre élément scientifique, en quelque sorte étranger aux connaissances des Grecs , l'algèbre indienne qui languissait depuis bientôt 300 ans en Europe, sans qu'on parût y faire attention, fut reproduite de nouveau; ses usages furent enseignés, et son importance mise dans ' Particulièrement dana le manuscrit de la Bibliothèque royale intitulé: Mathematica (lupplément latin, no 49, in-fol.) H. Libri a donné dans ton Ilistoir» des sciences math, en Italie , t. !<', p. 265, la liste de< ouTrages qui te trouvent dans ce volume. " Il faut cnnTcnir toutefois que nous connaissons très-imparfaitement l'histoire do moyen ige , que l'on a négligée jusqu'ici, tout occupé que l'on a été, depuis le XV^ siècle, d'étudier la littérature et les sciences grecques , et de puiser aux sources incomparablement plus précieuses qu'elles nous ont offertes , pour établir les fondemens de nos connaissances. 526 NOTES. tout son jour. L'alliance entre elle et la Géométrie, que Fibonacci avait prescrite, ne fut plus une idée stérile, mais un principe mis déjà en pratique. Enfin quelques ou- vrages originaux, premiers essais du génie, et premières applications des connaissances empruntées des Grecs et des Arabes , viennent encore contribuer à l'éclat duXV° siècle. Ajoutons que l'invention de l'imprimerie, qui prit naissance au milieu de ce siècle, apporta un secours immense et merveilleux aux efforts de l'esprit humain entravé et rebuté auparavant par la rareté et la défectuosité des manuscrits. Cette invention mémorable était le complément, en quelque sorte, d'un autre grand événement du XV° siècle, la prise de Constantinople qui livrait à l'Europe les arts, la littérature, la philosophie et les sciences de la Grèce ancienne '. Nous allons passer rapidement en revue les géomètres à qui sont dus les premiers travaux d'où datent nos progrès dans les sciences. A leur tête on trouve Purbach, et surtout son célèbre disciple Regiomontanus. Le premier est connu surtout comme astronome, et comme auteur du livre des Théo- riques des planètes^. Cet ouvrage était une suite de la sphère de Sacro Bosco, destiné à compléter la connaissance de l'almageste de Ptolémée, que Purbach avait débarassé des calculs et des démonstrations géométriques. Ensuite Purbach entreprit une traduction sur le texte grec, récemment apporté en Europe par le cardinal Bessarion , de la partie géométrique de cet ouvrage de Ptolémée. Cette traduction , qu'une mort prématurée l'empêcha de terminer, fut continuée par Regiomontanus, et parut à Venise en 1496, sous le titre : Ptolemei Âlexandrini astronomortim principis in magnam construn- tionein Georgii Purhuchii , ejusque discipuli Johannis de Regiomonte astronomicort epitomn. Venetiis , 1496 , in-folio. Les deux savans traducteurs substituent dans les calculs trigonoraétriques de Ptolémée, les */nM* aux cordes, ainsi qu'avait fait Albategnius, et après lui les autres écrivains arabes ; mais ils conservent les expressions — — , et ne font pas usage des tangentes ' ^ costnus ' I o o qu'Ebn Jounis avait connues et qu'Aboul Wefa avait introduites dans la trigonométrie .500 ans auparavant. Plus tard Regiomontanus les imagina, à son tour, et en fit une table connue sous le titre de table féconde , qu'il lui donna. Regiomontanus est un des hommes les plus remarquables que présente l'histoire des mathématiques. L'universalité de ses connaissances, la fécondité extrême de son esprit infatigable et le nombre de ses productions, peuvent le faire regarder comme le vérita- ble restaurateur des sciences en Europe. Ces productions comprennent, d'une part, les principaux ouvrages des grands géomètres de l'école d'Alexandrie, Euclide, Archimède, Apollonius, Ménélaus,etc. , que Regiomontanus, le premier, lut dans leur langue ori- ' Plusieurs autre* événemens contemporains, comme la découverte de l'Amérique , du Cap-de-bonne-£spé- rance et des Indes Orientales , qui amena le perfectionnement de l'astronomie , de l'optique , de la Géométrie , vinrent contribuer aussi à l'activité générale des esprits , et à l'impulsion forte que reçut la culture des sciences à cette époque. ^ Theoricœ Planetarum, imprimé pour la première fois à Venise, in-4<>, 1488, 38 ans après la mort de l'au- teur ; et réimprimé depuis , un grand nombre de foi) , le plus souvent avec des commentaires. NOTES. 527 ginale et dont il avait fait des versions plus correctes que celles qui nous venaient des Arabes; et, d'autre part, les propres découvertes de Regiomontanus. Parmi celles-ci on distingue surtout son traité De trianrjuU* omnimodis libri quinque (Norimberga? , 1 63>'i , in-folio). Cet ouvrage est un traité complet de trigonométrie plane et spbérique. Les deux [jremiers livres sont pour les triangles rectiligncs; ils renferment une foule de problèmes qui paraissent pour la première fois. Il s'agit toujours de déterminer, au moyen de trois données quelconques, les autres parties d'un triangle. Ainsi par exem- ple, dans le problème 7 du livre II, on donne le périmètre et deux angles d'un triangle; dans le problème 12 du même livre, on donne la base, la perpendiculaire et le rapport des deux cAlés. Regiomontanus dit que ce problème n'a pas encore été résolu par la Géométrie '. Et il y applique l'algèbre, qu'il appelle ars rei et cenetu; elle le conduit à une équation du second degré ; et il ajoalc quod re*lat prœoepta artii edocebunt'^. On voit par là que Regiomontanus possédait la connaissance de l'algèbre , qu'il avait acquise soit par l'ouvrage de Léonard de Pise , qu'il avait pu consulter en Italiç ; soit par les traductions de l'algèbre de Mohammed ben Musa; et cela n'est point étonnant, car un esprit vaste et pénétrant comme celui de Regiomontanus ne pouvait ignorer une in- vention aussi belle et aussi utile, l'un des plus précieux dons que nous aient faits les Arabes; mais ce passage offre de l'intérêt, parce que ses termes prouvent que déjà, vers le milieu du XV siècle, la connaissance des règles de l'algèbre était répandue et vulgaire parmi les mathématiciens. Et en effet Regiomontanus, qui fait encore usage souvent de la règle rei et centus , dans ses lettres que le célèbre bibliographe De Murr a publiées^, écrit à l'astronome Blanchinus, qu'il pense que cet art lui est ' La aolution de ce problème par la aeule Géométrie n'offrait paa de difficulté, et je ne «ait pourquoi Regio- montanus a cru devoir y employer néceasairement l'algèbre. En effet d'aprèa l'énoncé de la queation, le sommet du triangle cherché ae trouTera d'abord sur une droite parallèle à la baae donnée , et enauite aur nne circonférence de cercle, qui eat le lieu dea pointa dont lea diatancea aux deux extrémitéa de la baae aont entre ellea dana le rapport dea deux cotéa. Cette propoaition était connue dea Anciens : Pappua t'énonce comme l'une de cellea qui ae trouvaient dana le aecond livre de Lieux plant d'Apolloniua, et Eutociua l'a démontrée au commencement de aea commen- tairea aur lea coniquea de ce géomètre, pour donner un exemple des lieux géométriques qui servaient aux An- ciens dana la solution des problèmes. Elle ae trouve dana le Traité des connues géométriques de l'arabe Hassan ben Uaitem (1" livre, propoaition 9] Chez les Jlodernes nous la trouvons dans le livre De proportionibus numerorum , motuum , etc., de Cardan ; puis dana un ouvrage d'Alexandre Anderson (voir notre note III aur lea poriamea) ; dana les Discorsi e dimostrazioni matematiche, etc. (p. 39} de Galilée ; dana lea Lieux plans d'A- polloniua , reatitués par Fermât , Schooten et A. Simaon ; dana la Dioptrique de Huygena , et dana beaueonp d'autrea ouvrages. M I.egendre l'a comprise dana aea élémena de Géométrie. ' La baae étant 20, la perpendiculaire 6, et le rapport dea deux cotéa - , Regiomontanua prend pour l'incon- nue la différence dea deux aegmens faits sur la base par la perpendiculaire; et il arrive, par dea conaidéra- tiona géométriquea , a l'équation 20 census plus 200U aquales 680 rébus ; c'est-i-dire 20 f ^+2000=680 jr. Dans le problème 83 , où il s'agit de construire un triangle dont on connait la différence dea deux cotéa, la perpendiculaire , et la différence des aegniona qu'elle fait aur la base , Regiomontanua emploie eucore la règle rei et census. Nous avona dit , en parlant de la Géométrie dea Indien* , que ce problème te tronvait réaolu dan* le Lilavati de Bhascara. ' Dan* le premier volume de son recueil intitulé : Xtemoral/ilia Bibliothecarum puilicarum /Vorimiergensium ctunivtrsittttisAltdorfinœ Xorimbergs, 1786, S vol. in-8°. 528 NOTES. très-familier ' ; et celui-ci, en effet, s'en sert aussi dans ses réponses à Regiomontanus. Les livres III, IV et V traitent des triangles sphériques. Le livre III est dans le genre des sphériques de Ménélaus. Le livre IV renferme une trigonométrie complète ; et le livre V divers problèmes qui sont résolus pour la pre- mière fois. On y remarque celte proposition , qui correspond à une propriété des triangles plans connue des Grecs , savoir que : L'arc de grand cercle qui dioise en deux également r angle au nonimet d'u7i triangle sphérique, fait sur la base deux seg- jnens dont les sinus sont entre eux comme les sinus des cotés qui comprennent l'angle. Regiomontanus a écrit un traité d'arithmétique pratique qu'il appela ^Igorismus demonstratus. C'est l'ouvrage que Schoner a imprimé en 1534 sous le titre Âlgorith- mus demonstratus; changeant ainsi le mot algoristnus en algorithmus ,^aYCQ qu'il pensait que l'ouvrage de Regiomontanus, dont il avait trouvé une copie, avait dû être intitulé par ce géomètre algorithmes , ce mot provenant, dit-il, du mot grec aocSuoi altéré par les Sarrazins. Schoner ignorait donc que le mot algoristnus était consacré depuis plusieurs siècles, comme on le voit par les ouvrages de Sacro Bosco, de Vin- cent de Beauvais, etc., pour désigner notre système de numération -; et qu'ainsi c'était à dessein que Regiomontanus l'avait employé. Cet ouvrage , que nous avons déjà eu occasion de citer plusieurs fois, est très-remarquable sous un rapport dont nous n'avons point eu encore à parler ; c'est qu'il fait partout usage i\e lettres au lieu de quantités numériques suivant la coutume du temps; et ces signes abstraits, qui constituent la forme des sciences mathématiques modernes, sont employés même pour exposer le système de numération , et pour démontrer les règles de l'arithmétique pratique. Si une mort prématurée n'avait enlevé Regiomontanus dans la première période d'une carrière si brillante, peut-être lui aurions-nous dû la grande conception de Viète. Dans le recueil de lettres que nous avons cité précédemment on remarque une solution Irigonométrique de la question de construire avec quatre cotés donnés , un quadrila- tère qui soit inscriptible au cercle. Nous avons donné, en parlant de la Géométrie des Indiens, une notice historique sur ce problème dont plusieurs géomètres se sont occupés dans le XVI" siècle. Nous ne parlerons point des autres ouvrages de Regiomontanus, dont le nombre est très-considérable, mais dont la plupart, malheureusement, sont restés inédits. La liste s'en trouve dans plusieurs ouvrages dont nous citerons, comme étant les plus répandus, VHistoria matheseos de Heilbronncr, et Y Historia astronomiœ de Weidler. On concevra, à l'inspection de cette liste, d'autant plus étonnante que l'auteur a été enlevé aux sciences à l'âge de quarante ans, et que pendant sa courte existence il s'était ' Sed nunc eam eligi qtiam vohis arlitror familiarissimam, per artcm videlicet rei et censiis quod quœreiatis absolvendo , p. 94 du I" vol. du recueil cité. ^ La pièce ancienne mise au jour par Clichtoyée sous le titre Opusculum de praxi numerorum , qvod algo- rismum vacant , et quelques autres, restées manuscrites (dont deux existent à la bibliothèque S'f-GéneTJèTe , et une, en français , à la bibliothèque de l'Arsenal), disent que le mot algorismus provient du nom d'un philosophe appelé Aigus. Mai» on ne trouve aucune preuve de cette origine. NOTES. 529 livré principalement aux observations et aux calculs astronomiques, qu'il avait fait ilcs éphémérides comprenant trente années, dans un temps où le secours des logarithmes manquait au calculateur, qu'il était habile mécanicien et qu'il dirigeait une imprimerie, on concevra, dis-je, que Ramus l'ait mis sur le même rang que les grands génies qui ont honoré la Grèce '. Le cardinal Nicolas de Cusa, bien que ses œuvres mathématiques soient empreintes souvent de paralogismes qui leur ôtcnt aujourd'hui toute valeur, est cependant un des hommes qui ont le plus contribué au rétablissement des sciences, par l'importance qu'il leur reconnut et en les popularisant par l'usage qu'il chercha à en faire dans tous ses écrits, et même dans ceux qui se rapportaient à la théologie. Il suivait en cela l'exemple donné un siècle et demi auparavant par Bradwardin. On cite Nicolas de Cusa surtout au sujet de sa quadrature du cercle , où il a eu le pre- mier l'idée, en spéculations mathématiques, de faire rouler un cercle sur une ligne droite. On a cru voir dans cette idée les premières traces de la cycloïde, et Wallis s'est efforcé de faire remonter l'origine de cette courbe, devenue si fameuse dans le WII" siè- cle, à Nicolas de Cusa ; lui reprochant toutefois de l'avoir crue un arc de cercle. Mais rien ne nous parait annoncer, dans l'ouvrage de ce cardinal, qu'il ait songé à considérer la courbe engendrée par un point de la circonférence qu'il faisait mouvoir sur une ligne droite ; et , l'arc du cercle qu'il décrit sert seulement pour déterminer le point de la droite où venait se placer, après une révolution du cercle, le point de sa circonférence qui tou- chait d'abord cette droite. Il nous parait probable que l'auteur avait trouvé par des expé- riences mécaniques les principes de sa construction ^. Le cardinal Cusa est resté célèbre dans l'histoire, pour avoir adopté les principes de la philosophie platonicienne qui prenait naissance, et surtout pour avoir eu l'honneur de ressusciter, le premier parmi les Modernes, le système de Pythagore sur le mouvement de la terre autour du soleil , renouvelé depuis avec plus de succès par Copernic et Galilée. Le XV siècle nous présente deux peintres célèbres Albert Durer et Léonard de Vinci , qui méritent d'être comptés aussi au rang des géomètres les plus savans de leur époque. Le premier a laissé un ouvrage de Géométrie destiné aux architectes et aux peintres, écrit en allemand et qui a été reproduit en latin sous le litre suivant, qui fait connaître l'objet ' Noriberga ium Regiomontano fntebatur : maihematici indè et studii et operit gloriam tantam adepta , ut Tarentum Archyta , Syracusa Archimede, Sitantium Proclo, Alexandria Ctesibio ,nou justius guàm IVoriberga Regiomontano gloriaripossit. (Scholœ niathematica] , lib. 2, p. 62.) ' Let écrits mathématiquei de nicnlaa de Cu>a forment la troisième partie de aei œuvres complètes impri- mées à Paris en 1S14, in-f°, et & Basie en 156S, in-f». Ils se composent des pièces suivantes: lo De Geomttricis transmulationibus ; 2° Oe arithmeUcii complementis ; 3° De mathematicis complemenii» ; 4o De quadraturA circuit ; 6° De rinibus et chordie ; 0" De uud recti curvigue mensurd ; 7" Complementum iheolojicum figuratMm in complementis malhematicit ; S'' De mathematicd perfectione ; O" Reparatio calendarii ; 10» Correctio tabu- larum AlfonH ; II» A lia guceda m ex Gaurico in Cusam adjecta, La plupart de ces écrits roulent sur la quadrature du cercle , qui parait aToir occupé constamment Nicolas de Cusa. Dans celui D» mathemaiicit complementis , l'autear parle des tectiont coniques, et apprend i les décrire sur le plan. Toji. XI. 67 330 NOTES. de net ouvrage : Institutionum geometricarum libri quatuor, in quîhus tineas , super- ficies et solida corpora ita tractavit , ut non matheseos soluni sludiosis , sed et picto- ribus , fabris œrariis ac lignariis , lapicidis , statnariis , et universis demùm qui circino, gnomone , libella, aut alioqui certâ mensurû opéra sua examinant, sint summè utiles et necessarii. Dans le premier livre, Albert Durer apprend à décrire différentes lignes courbes; on y trouve plusieurs hélices planes, cylindriques, sphériques et coniques, la description de l'ellipse par l'allongement des ordonnées du cercle dans un rapport constant; ou bien en la considérant comme la section d'un cône droit, que l'auteur appelle pyrameWe. Il ap- prend à décrire aussi les deux autres sections coniques, l'hyperbole et la parabole. C'est un des ouvrages les plus anciens chez les Modernes , qui aient traité des sections coniques. On trouve aussi dans ce premier livre, la description par points, de l'épicycloïde en- gendrée par un point du plan d'un cercle qui roule sur une circonférence fixe. Dans le second livre on trouve l'inscription des polygones dans le cercle, et différentes autres figures régulières formées par des arcs de cercle; puis une quadrature du cercle et la manière d'assembler différens polygones pour remplir exactement une surface plane; on n'y voit point les polygones étoiles. Après avoir donné la construction du pentagone inscrit au cercle qui se trouve dans le premier livre de l'Almagcste dePtolémée, Durer apprend à construire un pentagone régulier sur un côté donné; et sa construction a cela de remarquable qu'elle se fait avec une seule ouverture de compas ; mais elle n'est qu'ap- proximative, et la figure, qui a conservé le nom Ae pentagone de Durer, n'a pas tous ses angles égaux ' , ainsi que l'ont démontré J.-B. de Benedictis ^, et Clavius •* dans le siècle suivant. Cependant à cause de sa facilité , la construction de Durer est employée par la plupart des architectes. Le livre III traite des corps solides ; des colonnes et des pyramides de différentes formes ; et des lignes qu'on trace sur leurs surfaces , dans les arts; de la construction des cadrans solaires, et de celle des lettres de l'alphabet. Dans le cinquième livre, l'auteur donne la description des cinq corps réguliers, et de plusieurs autres corps formés par des polygones réguliers , mais non tous semblables entre eux, comme sont les treize corps semi-réguliers d'Archimède. Puis on trouve plusieurs solutions de la duplication du cube; et enfin un traité de perspective , dans lequel Durer a imaginé le premier instrument connu, pour faire la perspective mécaniquement sur un verre ou une toile transparente. C'est surtout pour cette partie que l'ouvrage de Durer est cité dans l'histoire des mathématiques. Léonard de Vinci , l'un des plus grands peintres de l'Italie, fut un dé ces génies rares qui manient avec une égale facilité tous les objets des connaissances humaines, et dont le nom se présente dans l'histoire de chacune d'elles. Il cultiva particulièrement les ma- ' Chacun des angles d'un yrai pentagone régulier est de 108 degrés. Dans le pentagone d'Albert Durer , deux angles sont de 107" 2'; deux autres de 108» 22', et le cinquième a 109» 12'. 2 Diversarum speculationum •mathematicarum et physicarum Liber ; Turin 1585, in-f», ' Geometria practica , lib. viii , prop», 29. NOTES. 531 thématiques, et les sciences qui en dépendent, telles que la physique, la mécanique ra- tionnelle et pratique, l'hydrostatique, la musique, etc., persuadé, comme il le dit, qu't'/ n'y a point de certitude dan* le» tciencet où on ne peut pa* appliquer quelque partie de» mathématique», ou qui n'en dépendent pa» de quelque manière. Vérité trop peu sentie de nos jours encore, malgré les progrés qu'à faits depuis trois siècles, la raison humaine. Léonard de Vinci a laissé de nombreux manuscrits, où se trouvent répandues ses mes nouvelles et ses spéculations sur toutes les parties des sciences mathématiques: mais mal- heureusement ils n'ont point encore été étudiés; et sont restés jusqu'à ce jour sans porter aucun fruit. M. Venturi, savant professeurdeBologne, devait en faire connaître les parties les plus importantes dans trois traités qui se seraient rapportés à la mécanique, à l'hy- draulique et à l'optique. Malheureusement ce projet n'a pas reçu d'exécution. On doit seulement à M. Venturi la connaissance de quelques fragmens détachés des œuvres physico- mathématiques de Vinci '. Dans le premier, intitulé : De la degcente de» corp» grave» combinée avec la rotation de la terre, on voit que le célèbre peintre admettait l'idée du mouvement de la terre, émise déjà quelques années auparavant, par Nicolas de Gusa dont les œuvres n'étaient point encore publiées. Nous tie nous étendrons pas davantage sur les travaux physico-mathématiques de Léonard de Vinci. Mais il est une de ses inventions en mécanique que nous devons distin- guer ici , parce qu'elle se rapporte essentiellement à la Géométrie , et que nous la regardons comme le premier germe d'une théorie, peu cultivée depuis, et qui mérite néanmoins de fixer l'attention des géomètres. Nous voulons parler du tour à ovale, queLomazzo, élève de Vinci, lui attribue en ces termes: « f^inci fut au»»i l'inventeur du tour ovale , ouvrage admirable qu'un élève de Melzi apprit à Déni» , Frère de Maggiore, qui »'en »ert aujourd'hui avec beaucoup d! adre»»e (Lomazzo, Trattato délia Pittura, p. 17.) Or il nous parait que le tour à ovale , auquel les géomètres ont fait peu d'attention , car on n'en trouve nulle part la théorie mathématique, reposait sur une idée tout-à-fait nou- velle, concernant la description des courbes; et cette idée donnait lieu à une spéculation nouvelle en Géométrie. Jusque là on avait décrit les courbes par la trace d'un stylet mobile, imprimée sur un plan fixe: Vinci conçut leur description d'une manière inverse, c'est-à-dire au moyen d'un stylet fixe qui imprime sa trace sur un plan mobile. Tel est l'office du tour à ovale, qui sert à décrire l'ellipse. Quel mouvement fallait-il donner au plan mobile, pour obtenir ainsi une ellipse? Telle est la question qu'a dû se proposer Léonard de Vinci. Elle était, comme on voit, d'un genre tout nouveau; et ce célèbre peintre a su découvrir, parmi une infinité de solutions dont elle était susceptible , la plus simple incontestablement; elle se réduit à donner au plan mobile le mouvement d'un angle de grandeur constante, dont les deux côtés glissent ' Eêêai tur l»$ ouvragts phytico-malhinatiques dt Léonard de Vinci , avec de* fragmens tiré* d* *e* manv- criU. Pirit, an V, in-4°. 532 NOTES. sur deux points fixes. L'histoire de la science serait intéressée à connaître les considéra- lions de Géométrie qui l'ont conduit à ce beau résultat. Malgré tout l'intérêt que cette question, considérée comme moyen nouveau et général de décrire les courbes, devait offrir, et dans les arts, et comme pure spéculation géométrique, elle n'a fait presqu'aucun progrèsjusqu'àcejour. Sinos recherches historiques à ce sujet ne nous induisent point en erreur , nous croyons qu'elle n'a fixé l'attention que d'un seul géomètre, le célèbre Clairaut , qui l'a traitée dans un mémoire lu en 1740 à l'académie des sciences. Après avoir signalé le nouveau mode de description des courbes dont le tour à ovale offrait le seul exemple connu, Clairaut dit qu'il avait supposé d'abord que la courbe décrite sur ce tour devait être une conchoïde du cercle, mais qu'il n'a pas lardé à reconnaître qu'elle est une vraie ellipse d'Apollonius. Puis il fait deux applications de ce nouveau mode de génération des courbes. Il suppose dans la première qu'un cercle roule sur une droite; et dans la seconde qu'un cercle roule sur un autre cercle. Un stylet fixe imprime sa trace sur le plan du cercle mobile , et cette trace forme une courbe dont Clairaut cherche les équations. Sa solution est entièrement analytique, et les équations auxquelles il parvient contiennent même des intégrations qui ne sont pas effectuées. Dans un seul cas les inté- grales disparaissent et l'on reconnaît la spirale d'Archiméde. Ainsi , sous le rapport géométrique, Clairaut a laissé cette question intacte; c'est-à-dire que les diverses propriétés géométriques de ce mode de description des courbes, ses rap- ports avec la description ordinaire par un point mobile, et la manière de substituer un mode de description à l'autre, pour produire la même courbe, sont encore des questions neuves. Ces questions nous paraissent, tant sous le rapport théorique qu'à cause de leurs appli- cations aux arts , mériter d'entrer dans les spéculations de la science. Nous y reviendrons dans un autre écrit. Pour le moment nous renvoyons à la Note XXXIV, où se trouvent quelques développemens sur celte théorie, qui offre un exemple assez remarquable de dualité. Nous nous bornerons à ajouter ici que de cette théorie il résultera , sans cal- cul , que les courbes dont Clairaut a trouvé des expressions algébriques fort compliquées , qui ne lui ont permis de reconnaître la nature que d'une seule d'entre elles, la spirale d'Archiméde, sont tout simplement des épicycloïdes. Les unes peuvent être engendrées par un point mobile lié fixement à une droite qui roule sur une circonférence de cercle ; et les autres, par un point du plan d'une circonférence de cercle qui roule sur un cercle fixe. J. Verner n'a pas été un écrivain d'un esprit aussi vaste et aussi fécond que Léonard de Vinci et Régiomontanus, les deux plus grands hommes du XV° siècle que nous ayons nommés. Mais, considéré comme simple géomètre, il nous paraît devoir être placé immé- diatement après Régiomontanus. Ses ouvrages ne sont point l'imitation ou la reproduction des ouvrages grecs, comme c'était l'usage dans ces premiers temps de la culture des sciences; mais ils sont le fruit des propres idées de l'auteur et portent avec le cachet de l'originalité, celui d'une excellente et solide Géométrie. Dans un livre qui a été imprimé en 1.522, Verner traite des sections coniques, de la NOTES. 533 duplication du cube, cl du problème d'Archimède où il s'agit de diviser une sphère par un plan en deux parties qui soient entre elles dans un rapport donné '. Une quatrième partie de l'ouvrage est consacrée à l'astronomie ^ Nous avons déjà parlé, dans notre III' Epoque, du petit traité des coniques, qui, outre l'avantage d'être le premier qui ait paru en Europe, avait aussi celui de reposer sur une méthode différente de celle des Anciens. Verner considérait les coniques dans le cône, et se servait des propriétés de ce solide pour en déduire, d'une manière très-facile, celles de ces courbes. Méthode rationnelle , qui a été mise eu usage aussi , 50 ans après , par Maurolycus et sur laquelle ont reposé ensuite les ouvrages de Desargues, de Pascal et de Dclahire. Verner avait composé plusieurs autres écrits qui n'ont point vu le jour. Heilbronner en donne la liste dans son histoire des mathématiques ( p. 515). On y remarque un traité des triangles sphériques, en cinq livres , et un autre sur les applications de la trigonométrie a l'astronomie et à la géographie; un traité d'arithmétique et un de gnomoniquc, et un ouvrage intitulé: Tractatii» retolutoriu* qui propè pedinequii» exUtit librt't Datoruni Euclidis , qui paraît, d'après ce titre, se rapportera l'analyse géométrique des Anciens. Peut-être , faisant suite aux données d'Euclide , était-il dans le genre des porismes. ( F'oir notre opinion émise à ce sujet dans la Note III.) Nous serions curieux de connaître cet ouvrage de Verner. Il nous reste à parler de Lucas Paccioli , connu généralement sous le nom de Lucas de Burgo, dont l'ouvrage principal appartient à la fin du XV siècle et peut être regardé comme l'origine de l'école italienne qui a produit Cardan etTartalea, et qui a contribué si puissamment à donner aux sciences mathématiques la forme nouvelle qu'elles ont prise, dès la renaissance , et qui résultait de l'alliance de l'algèbre des Hindous et de la Géométrie des Grecs. Cet ouvrage est intitulé : Summa de Ârithmetica , Geometria , Proportioni e Proportionalila. Il a été imprimé pour la première fois en 1 494 par Paganino de Paganinis de Brescia , et a eu une seconde édition en 152t3. Nous avons eu occasion de le citer sou- vent , et de dire déjà l'influence qu'il a eue sur le renouvellement des sciences ; aussi nous nous bornerons à en donner ici une analyse briève, dont nous nous dispenserions même si cet ouvrage était moins rare et plus connu. Il est divisé en deux parties principales : l'ime, relative à la science du calcul, com- prend l'arithmétique et l'algèbre, et l'autre traite de la Géométrie. Les ouvrages dont l'auteur annonce s'être servi pour composer le sien sont ceux d'Euclide, de Boèce,de Léonard de Pisc, de Giordano Biagio de Parme, de Sacro Bosco, et de Prosdociroo de Padoue. ■ Ealociut, dan* ion commentaire >ar leaecond livre de la aphère et du cylindre, a rapporté le» solutions de ce problème données par Dionysidore et par Diodes. " Libellus super viginti duobus elementis conicis, — Commentorius , seu parapkrastica enarratio in unde- cim modos conficiendi ejus proUematis quod cuti duplicatio dicitur. — Comme niatio in Dionysidori pnblema , guo data tphœra piano sut data ratione secatur. Alius modus idem problema conficiendi ab eodem Vernero nooM- nmi compertua , demonstratusque. — De molu octavœ sphœrœ tractatus duo , ut et summaria enarratio theo- rica moiu* octavœ spkarœ. NorimbergiB , 1623 , in-4». 334 NOTES. La première partie est un traité complet de l'arithmétique spéculative, qui considère les propriétés des nombres, et de l'arithmétique pratique. L'arithmétique spéculative est dans le gCnre des ouvrages de Nicomaque, de Théon, de Boèce et de Jordan Nemorarius. M'ais elle est terminée par une partie sur les nombres carrés, qui ne se trouvait pas dans ces ouvrages et qui est très-remarquable. C'est une suite de questions qui appartiennent aujourd'hui à l'analyse indéterminée du second degré. Lucas de Burgo en donne seulement les solutions sans démonstration; il les em- prunte, dit-il, du Traite des nombres carrés de Léonard de Pise, où elles étaient démon- trées ^«r des considératiotis et sur des figures géométriques. Ces solutions, particulière- ment celle qui se rapporte à l'équation a?'-t-y' = A, sont difTérentes de celles de Diophante, et sont les mêmes que celles qu'on trouve dans les ouvrages indiens, et qui ont été imaginées dans le siècle dernier par Euler , ainsi que nous l'avons déjà dit en par- lant de la Géométrie de Brahmegupta. L'arithmétique pratique commence par l'exposition du système de numération , «dont les premiers inventeurs, suivant quelques-uns, dit Lucas de Burgo, sont les Arabes; ce qui fait que cet -art a été appelé abaco pour dire el muodo arabica; mais d'autres, ajoute- t-il , font dériver ce nom d'un mot grec '. » On trouve les quatre opérations fondamentales de l'arithmétique -, la théorie des progressions, et l'extraction des racines carrées et cubi- ques des nombres, arithmétiquement et géométriquement; puis le calcul des fractions; les règles de trois ; celles de fausse position que l'auteur appelle, d'après Léonard de Pise, règles A' Helcataym , et qu'il attribue aux Arabes , mais qui leur venaient des Indiens ; et l'arithmétique commerciale , traitée avec une grande profusion de questions et d'exemples : cette partie de l'ouvrage a été imitée par beaucoup d'auteurs allemands , dans la première moitié du XVP siècle. Lucas de Burgo, en passant à l'algèbre (Z)ï*<îwc^io octava), la regarde comme la partie de la science du calcul la plus nécessaire à l'arithmétique et à la Géométrie. Il dit qu'on l'appelle communément l'^rte niaggiore , ou la règle de la cosa, ou Algebra e Almuea- bala. Comme cet ouvrage est le premier traité d'algèbre qui ait été imprimé , et qu'on a ' Ce passage fait voir que , du temps de Lucas de Burgo , on n'était pas fixé sur la yraie origine de notre sys- tème de numération, La signification que nous avons dounée au mot abucus employé par Boèce nous autorise à adopter la seconde supposition de Lucas de Burgo, c'est-à-dire à regarder le mot ahaco comme dérivé du grec. Quoi qu'il en soit ce passage mérite d'être pris en considération dans les recherches sur l'origine de notre système de numération. 2 L'auteur donne plusieurs procédés pour chaque opération. Parmi ceux de la multiplication se trouve une méthode indienne donnée par Ganesa dans ses commentaires sur le Lilavati de Bhascara, qui consiste à écrire le produit de chaque chiffre du multiplicande par chaque chiffre du multiplicateur , en plaçant séparément , dans les deux cases triangulaires d'un carré , les chiffres des unités et des dixaines. Cette méthode ingénieuse sur laquelle repose celle des bâtons de Neper , paraît avoir été très-usitée dans le moyen âge et au XVI<= siècle ; car on la trouve dans plusieurs manuscrits {voir les no* 7378. A et 7352 des manuscrits de la bibliothèque royale de Paris) et dans plusieurs ouvrages imprimés, dont nous citerons le Compendion de lo abaco de Pellos ; Varithmeiica practica d'Oronce Finée; Varithmetica praciica de Peverone , et les scholœ matliematicœ de Ramus. M. Libri l'a trouvée aussi dans un ouvrage chinois. {Histoire des sciences mathématiques en Italie , t. I,p. 341.) NOTES. 535 coutume de le regarder comme ayant initié les géomètres dans celte science, il est essen- tiel de remarquer que Lucas de Burgo ne présente point l'algèbre comme un art nouveau, mais bien comme une chose connue depuis long-temps du vulgaire [del vulgo). Gela s'ac- corde avec la remarque que nous avons faite en rendant compte du traité De trianyulit de Rcgiomontunus, qui parle aussi des règles do l'algèbre comme d'une méthode fami- lière aux géomètres. On peut en conclure que, depuis le XIII" siècle où l'algèbre a été introduite en Europe par Fibonacci ' et par les traductions qu'on a faites alors de l'ou- Trage de Mohammed ben Musa , cette science a toujours continué d'être cultivée. Lucas de Burgo démontre d'abord la règle des signes; il apprend à faire les opérations arithmétiques sur les quantités irrationnelles , et démontre la plupart des propositions du dixième livre des élémensd'EucIide, qui forme une théorie étendue de ces quantités. Puis il passe aux équations du second degré , dont il considère trois cas , comme nous l'avons dit en parlant de l'algèbre de Mohammed ben Musa. Il dit que plusieurs autres équations d'un degré supérieur peuvent être ramenées à celles-là. Il considère les équations qui contien- nent l'inconnue, son carré, et sa quatrième puissance; ce qui donne lieu à huit cas qui s'expriment, par les symboles actuels, de cette manière: «4 = 0, x'^ -y- ax =: bx^ , «4 = 0*, *4 4- o = 6x\ x^ ■= ax^ , «4 -t- ax'=^ h , x^ + ax^ = bx , ar4 ï= o -t- bx^ -. Il apprend à résoudre les trois premières , et les trois dernières ; mais la quatrième et la cinquième, dit-il, sont impossible». En effet elles ne peuvent se réduire au second degré, mais seulement au troisième. Cela prouve qu'au temps de Lucas de Burgo la résolution des équations du troisième degré était inconnue. Cette première partie de l'ouvrage (arithmétique et algèbre) est terminée par les règles de société et une foule de questions relatives aux opérations commerciales , et même à la tenue des livres en parties doubles. Dans beaucoup de passages, Lucas de Burgo se sert de considérations géométriques pour illustrer ses règles de calcul ; il démontre ainsi les régies de fausse position ; la ' Noas nou( conformona à l'opinion reçue, en répétant que Fibonacci a, le premier, introduit l'algèbre en Europe, au commencement du XI1I° tiède ; mais nous pensons cependant que , depuis un siècle au moins , on avait déjà quelque connaissance de cette science ; et nous fondons cette opinion sur ce fait rapporté pré- cédemment , que Jean Hispalensis u écrit dans le XII» siècle sons le titre d''Algorismus , un traité d'arithmé- tique, & la suite duquel se trouve la résolution des équations du second degré, extraite, est-il dit, du livre De Gebrd et Slucabalâ. ^ Lucas de Burgo énonce ses équations en langage ordinaire; seulement, par abréviation, il se sert des lettres pet m pour signifier plus{più) et moins {mino) ; il se sert du mot égal., mais non du signe ==. Il appelle l'inconnue co«a; son carré censo ; et sa quatrième puissance censo de cetiso ,et la quantité connue il numéro. De sorte qu'il énonce la dernière équation , par exemple , ainsi : cens» de censo ejuale a numéro e censé. 536 NOTES. règle des signes en algèbre; et les formules pour la résolution des équations du second degré. Nous allons Toir que, réciproquement, dans la seconde partie de l'ouvrage, qui traite de la Géométrie, Lucas de Burgo fait un grand usage de l'algèbre. Ce traité comprend des éléraens de Géométrie asseï complets. 11 repose en partie sur les élémens d'Euclide; cependant, comme il en dilTère sous plusieurs rapports, nous allons en donner l'analyse. Il se divise en huit parties, en considération, dit l'auteur, des huit béatitudes (a reverentia de le S beatitudine). Dans la première, qui traite des figures triangulaires et quadrilatérales, on trouve la plupart des propositions qui font l'objet des I'='^, II" et VI" livres d'Euclide. L'auteur démontre à la manière des Indiens que l'aire du triangle est égale au produit de la base parla moitié de la hauteur; il démontre la formule de l'aire en fonction des trois côtés, comme Fibonacci et les trois frères arabes Mohammed, Hamet et Hasen, dans leur ou- vrage intitulé p^erba filiorum Moùi filii Schaker. Il apprend à calculer la perpendi- culaire dans un triangle, et pour cela il se sert du théorème des deux segmens qu'elle fait sur la base. Il donne de ce théorème une démonstration géométrique très-remar- quable. Il s'agit de prouver que la différence des carrés des deux côlés du triangle est égale à la différence des carrés des deux segmens faits par la perpendiculaire sur la base; ou bien, que le produit de la somme des deux côlés, multipliée par leur différence, est égal au produit de la base multipliée par la différence des deux segmens. Lucas de Burgo construit une figure dans laquelle se trouvent les expressions géométriques des quatre facteurs qui forment cette égalité; et, par la comparaison de deux triangles semblables , il conclut que le premier produit est égal au second. Cette démonstration est très-élé- gante et élémentaire, puisqu'elle ne fait pas usage de la proposition du carré de l'hy- pothénuse. Elle a été reproduite par Tartalea dans son General Trattato di Numeri e Misure ( 4" parte , f" 8 ). Dans la seconde partie on résout de plusieurs manières ce problème : Étant donnés les trois côtés d'un triangle et étant pris deux points sur deux d'entre eux, trouver la longueur de la droite qui joint ces deux points. La troisième partie traite de l'aire des quadrilatères et des autres polygones ; on y résout plusieurs problèmes sur les rectangles, par la voie algébrique : Lucas de Burgo se sert des formules qu'il a enseignées précédemment pour la résolution des équations du second degré. La quatrième partie comprend les propositions qui sont l'objet du IIP livre d'Euclide et la mesure du cercle. L'auteur démontre le rapport —, comme Archimède, par l'inscription du polygone de 96 côlés; et apprend à former la table des cordes des arcs, donnée par Plolémée dans le premier livre de l'Almagesle. La cinquième partie traite de la division des figures dans des rapports donnés; c'est celte partie de la Géométrie qui fait l'objet de l'ouvrage De superficierum divisionibus, de Mahomet Bagdadin, qu'on regarde comme imité d'un ouvrage d'Euclide , ou comme étant de ce géomètre lui-même. Lucas de Burgo complète cette matière, en traitant aussi de la division du cercle suivant des conditions données. NOTES. 8â7 La sixième partie concerne les volumes des corps; elle contient les propositions du XI» livre d'Euclide. Dans la septième partie on parle des diiïérens instruraens qui servent, dan^ la prati- que, pour mesurer, à la vue simple, les dimensions des corps. Enfin la huitième partie est un recueil de cent problèmes de Géométrie , résolus la plupart par l'algèbre, suivi d'un traité particulier des cinq corps réguliers. Voici quelques-unes des questions qui font partie de ces cent problèmes : Etant donnés deux côtés d'un triangle et son aire , trouver le troisième côté. Etant données l'aire et la différence des deux côtés d'un rectangle, trouver ces côtés. Soit a' l'aire, et d la différence des deux côtés; Lucas de Burgo prend pour le plus grand côté cota più -, c'est-à-dire a? -t- -, et pour le second côté cota mèno -, ou s — -. On a immédiatement, pour déterminer l'inconnue, l'équation t' = o', d'où X V? d'où se concluent les valeurs des deux côtés. Cette solution est plus simple que si l'on avait pris directement pour inconnues les deux côtés, ce qui eût conduit aux deux équations ys = a\ y — s = d , et à l'équation finale du second degré , y'-dy = à'. Dans la première partie de son ouvrage, Lucas de Burgo a donné d'autres exemples de pareils artifices de calcul, qui prouvent que l'algèbre, dans de certaines limites, était cultivée et perfectionnée depuis long-temps. Par exemple, que l'on demande deux nombres dont la somme des carrés soit égale à 20, et le produit égal à 8. Lucas de Burgo ne pose pas les deux équations a?"-»- y' = 20 etay = 8, qui conduisent à une équation du quatrième degré, réductible au second. Il fait mieux : il prend la somme de deux inconnues {x-\-z) pour le premier nombre cherché, et leur différence (j; — z) pour le second > ; de sorte qu'on a immédiatement les deux équations : *' -4- a' = 10 , et «' — «' = 8 ; d'où «' = 9 et s' = 1 ; a; = 3 , z=\. Les deux nombres sont donc 4 et 2. ' Luc» de Burgo appelle la première inconnue cosa, et la seconde (jHantità. Il dit que lei Ancieni ippelaient celle-ci cosa seconda ; mail que le» Hodernet la nomment timplement quanlitd, ^Distinctia oelava ; tractatus seitus.) To>. XI. 68 538 NOTES. Cette solution ressemble, par son élégance et sa simplicité , à celles que nous avons re- marquées dans les ouvrages indiens. Trouver le diamètre du cercle inscrit dans un triangle dont les côtés sont connus. Dans un triangle décrire deux cercles égaux , tangens entre eux , et dont chacun touche deux côtés. Étant donné un cercle , en décrire 3, ou 4, ou 5 , ou 6 autres égaux entre eux , tangens au cercle proposé, et tels que le premier touche le second, le second touche le troisième, le troisième touche le suivant, etc. Trouver le diamètre du cercle circonscrit à un triangle dont les côtés sont donnés. Étant donnée l'aire d'un triangle dont on sait que le second côté surpasse le premier d'une unité, et le troisième côté surpasse le second aussi d'une unité , quels sont les côtés du triangle. L'aire du triangle étant 84, Lucas de Burgo détermine ses côtés par une équation du quatrième degré , résoluble comme celles du second ; il trouve pour ces côtés les nombres 13,14 et 15. Par les sommets d'un triangle on élève trois perpendiculaires sur son plan , et l'on demande de déterminer le point de ce plan qui se trouve à égale distance des extrémités des trois perpendiculaires. Étant donné un triangle , on demande le diamètre du cercle qui , étant tangent à ses deux côtés , aura son centre sur la base. Dans tous ces problèmes les données sont numériques , et leurs solutions sont algébri- ques et dépendent la plupart d'équations du second degré. Pareillement, dans les premières parties de l'ouvrage, qui forment des élémens de Géo- métrie, les figures sont toujours exprimées par des nombres, comme s'il s'agissait de faire une application particulière d'un théorème. Ainsi, par exemple, pour démontrer la for- mule qui donne l'aire du triangle en fonction des trois côtés, l'auteur prend le triangle ABC dont les côtés sont 13, 14 et 15, et se sert toujours, dans tous le cours de son rai- sonnement , de ces nombres, à la place des côtés, que les Grecs employaient d'une manière abstraite en les désignant ainsi AB, BG, GA. Cette méthode était empruntée des Arabes, qui la tenaient des Indiens; elle a été suivie exclusivement par tous les géomètres du XVI° siècle , Cardan , Stifels , Tartalea , J.-B. Benedictis , Memmius , Commandin , Clavius, Slevin , Ad. Romanus, Ludolph Van Ceulen, etc., jusqu'à ce que Viète introduisît l'usage des lettres dans l'algèbre. Nous dirons plus loin la cause de cette manière de procéder, les avantages qu'elle offrait et les graves inconvéniens qui en résultaient. Lucas de Burgo a laissé deux autres ouvrages, qui méritent d'être cités, mais qui n'ont pas l'importance de celui dont nous venons de présenter l'analyse. Le premier est inti- tulé : Lueœ Pacioli divina proportione , opéra à tutti glîngegni penpicaci e curiosi necessaria ; ove ciacnn studioso diphilosophia , prospettiva , pictura , sculptura , ar- chitectura , musica e altre niateinatiche , soavissima , sottile e admirabile dottrina eonsequira e delectarassi con varie questione di gecreti»sitna scientia. Veneliis, 1509, in-4°. L'auteur appelle proportion divine la division d'une droite en moyenne et extrême NOTES. 539 raison, dont il démontre de nombreuses propriétés, et dont il fait diverses applications aux arts. L'autre ouvrage de Lucas de Burgo roule sur les polygones et les polyèdres ré- guliers , et sur l'inscription mutuelle de ces figures les unes dans les autres ; il a pour titre : Libellut in tre» partiale» tractatut , dioitu* quorumcumque corporum regttlarium et dependeiitium active pertcrutationis ; Venise, 1508, in-4°. L'auteur fait encore un fréquent usage de l'algèbre dans ces deux ouvrages de Géométrie. On voit par ce qui précède, que les ouvrages de Lucas de Burgo, comparés à ceux des géomètres grecs, présentaient un caractère propre qui mettait entre eux et ceux-ci une diil'érence bien marquée; c'est qu'ils reposaient sur une union constante entre l'algèbre et la Géométrie ; et ce caractère a été celui de presque tous les écrits mathématiques du XVI" siècle. Comme les ouvrages do Lucas de Burgo sont les premiers , parmi ceux qui ont enseigné les préceptes de l'algèbre et son application à la Géométrie, qui aient été imprimés, on les a regardés généralement comme la seule origine, au commencement du XVI" siècle, delà forme nouvelle que les sciences mathématiques ont prise, et des progrès immenses qu'elles ont faits depuis. Il n'est pas douteux, en effet, que les deux célèbres géomètres de l'Italie Cardan et Tartalea , n'aient dû leurs connaissances et la méthode qu'ils ont suivie à la Summa de Arithmetica , etc., de Lucas de Burgo, qu'ils citent souvent. Mais il y a lieu de croire qu'en Allemagne surtout, quelques autres ouvrages formaient un autre foyer de lumières, et ont répandu les mêmes principes d'algèbre et d'application de l'algèbre à la Géométrie. On en juge par le savant ouvrage de Stifels qui a paru en 1544 sous le titre Àrithmetica intégra (Nuremberg, in-4°), où se trouvent des élémens d'algèbre et une foule de questions de Géométrie , résolues par cette voie, comme dans la Summa de Lucas de Burgo. £t cet ouvrage de Stifels présente avec celui-ci des différences qui y font reconnaître une plus profonde connaissance et une plus ancienne culture de la science algébrique, ainsi que quelques pas de plus vers la forme abstraite qu'elle a prise depuis. Ainsi , par exemple , on y trouve les signes -+- et — et le signe ra-. dicalj/ ; l'inconnue et ses puissances sont représentées aussi par des symboles, au lieu de l'être parles mots cota, cento , cubo , cento de censo , etc.; et quand il y a plusieurs in- connues , les seconde, troisième, quatrième, etc., sont représentées par les lettres A, B, C, etc. '; le principe de la multiplicité des racines dans une équation , que Lucas de Burgo avait méconnu, est exprimé formellement et démontré-; et quant à l'application dogmatique de l'algèbre à la Géométrie, les exemples que Stifels en donne sont extrêmement ' Voir livre 3, chap. 6, inUiuXé De secundis radicibus. C'eit le premier exemple de l'uaage des lettre», pour représenter dans les équations les inconnues de la ques- tion. Il n'a pas tardé à être suivi par Peletler dans son Algèbre (ann. 16M ) et parButéon dans sa Logistica (ann 1659). Il est asseï singulier qu'une idée aussi heureuse, qui apportait dans le calcul une facilité actuelle si évidente , n'ait cependant pas été appréciée de Cardan ni de Tartalea. C'est là une des preuves les plus frap- pantes de l'empire de l'habitude, même chei les esprits les plus supérieurs. " Sunt autem œquationes quadam , quibus natura rerum hujus modi , dédit habere duplicem radicem, vidêlicet vtajorem et minorem : idquodpleni docebo alque demonstrabo. (Arithmetica intégra, f°. 243). Plus loin l'au- teur ajoute que l'équation ne peut avoir plus de deux racines : plures auttm duabus, nulla aquatio habebit. r''.844.vo. 540 NOTES. nombreux; on y remarque particulièrement toutes les propositions du 13" livre d'Euclide, qui s'expédient facilement par le calcul des équations du second degré. Cet ouvrage, il est vrai , est postérieur de prés d'un demi-siècle à celui de Lucas de Burgo ; et l'on pourrait croire que les différences que nous venons de signaler sont le fruit de la culture, pendant ce demi-siècle, des principes mêmes enseignés par Lucas de Burgo. Mais l'ouvrage de Stifels n'est, dans tout ce qui concerne cette partie de l'algèbre , qu'une imitation des ouvrages de deux autres algébristes allemands, Adam Risen et Christophe Rudolff, qu'il cite sou- vent avec de grands éloges, le second surtout. On avait déjà de celui-ci un traité d'algèbre en allemand , imprimé en 1522 sous le titre Die Coss , et dont il a été fait, dans le temps, en Italie, une traduction latine qui existe dans les manuscrits de la bibliothèque royale (n° 7365, in-4°, des manuscrits latins), sous le titre: jirithmetica Christophori Ro- dolphi ah Jamer, è germanicâ linguâin latinanià Christophoro Auvero , Pétri Da- negii mandato, Romœ anno Christi 1540 conversa. Nous avons reconnu dans cet ouvrage les progrès notables de l'algèbre et ses applications à la Géométrie que nous venons de signaler dans celui de Stifels. On trouve encore, dans quelques petits traités d'arithmétique qui ont paru en Allemagne dans les premières années du XVI° siècle , des exemples de l'application des règles du calcul aux questions de Géométrie: ainsi dans un Algoritlimus de integris et minutiis, imprimé à Leipsick en 1507, les règles défausse position sont appliquées à cette question : Etant donnés un côté de l'angle droit d'un triangle rectangle , et la somme des deux autres côtés , trouver ces côtés. Nous rappellerons enfin que , dès le XV siècle , Regiomontanus et l'astronome Blanchinus étaient très-versés dans la pratique des règles de l'algèbre , et que le premier en faisait usage dans son traité De triangulis , pour résoudre les propositions de Géométrie. Ainsi nous pensons pouvoir dire avec certitude que l'algèbre, dès les premiers temps du renouvellement des sciences en Europe, a été cultivée et appliquée particulièrement aux questions de Géométrie, et que le caractère des sciences mathématiques, au XVI° siècle, qui est résulté de celte union intime entre l'algèbre et la Géométrie, s'est mani- festé même avant qu'eût paru l'ouvrage de Lucas de Burgo ; mais que celui-ci ayant élé, le premier, mis au jour par la voie de l'impression, est devenu le plus répandu et a eu la plus grande influence sur les progrès des sciences mathématiques et la direction qu'elles ont prise. Les bornes de cet écrit, que nous avons déjà depuis long-temps dépassées, ne nous per- mettent pas de donner une analyse des ouvrages de Cardan, de Tartalea, de J. B. Bene- dictis 1 et de quelques autres géomètres du XVP siècle , où nous aurions aimé à étudier la I J.B. Benedictis , dans son ouvrage intitulé : Diversarum speculationum mathematicarum et physicaruvi liber ; Tauiitii , 1585, in-f» , fait usage continuellement de considérations géométriques pour démontrer ou Térifier les règles d'arithmétique et d'algèbre. Voici un exemple curieux de cette méthode. L'auteur se propose une question à trois inconnues, qui s'exprime parles trois équations x+y=:a, y+z^h, s+x=^c. Il la résout algébriquement, et pour vérifier les expressions qu'il a trouvées pour les inconnues , il se sert de cette consi- dération géométrique : Qu'on forme un ti'ianyle qiii ait pour côtes les trois nombre a^ b, c , et gu'on lui inscrive un cercle tanyent à ses trois côtés, les segmcns que les points de contact formeront sur ces côtés seront les NOTES. 541 marche de cette science, qui différait tant alors, par sa forme, de celle des Grecs, à en suivre les pas et à en constater les progrès , jusqu'aux travaux de Viète qui lui ont fait subir une nouvelle transformation éminemment heureuse, qui était nécessaire pour assurer à la Géométrie, dans toute l'étendue de ses besoins, les secours que la science du calcul devait lui prêter. Mais il nous faut bien préciser cette nouvelle forme qu'a prise la Géométrie , qui fait la différence immense qui a lieu entre les ouvrages du XVII" siècle et ceux du XVI°, et d'où datent véritablement les grands progrès qu'elle a faits depuis. La Géométrie, dans tout le cours du XVI" siècle, différait essentiellement de celle des Grecs, sous un certain rapport, c'est qu'elle n'opérait que sur des données numériques, ainsi que nous l'avons déjà dit ,à la suite de notre analyse des ouvrages de Lucas deBurgo. Cela était une conséquence naturelle de l'union intime qui s'était établie entre cette science et l'algèbre, union qui n'était possible qu'avec des données numériques, car l'algèbre alors n'était qu'une arithmétique supérie'ure , exclusivement numérique , qui ne différait essentiellement de l'arithmétique ordinaire que par l'usage de la règle des signes, et du mécanisme des équations; elle n'était point une science de symboles abstraits, comme Viète l'a constituée sous le nom de Logistique spécieute. Les opérations et les artifices de calcul , qui simplifiaient les démonstrations et remplaçaient les considérations géométriques dont tout géomètre grec aurait fait usage exclusivement, 'n'étaient donc pos- sibles , dans le XVI° siècle , que quand la Géomètre se faisait sur des données numériques. Aussi c'est ce qui a eu lieu jusqu'à Viète, ainsi qu'on le voit dans tous les ouvrages de cette taltur» dts trois inconnues x, y, i; d'où l'on conclat immédiatement que les valenr* de cet inconnaet «ont«=:^! ^^^^, etc., comme le calcal le( avait données, {foy. p. 82.) Benedicti» construit géométriquement, comme ou fait aujourd'hui, la racine poaitiTe de l'équation xi-t-4i.r:=i>. Il est vrai qu'il ne propose pas pécisément cette équation elle-même ; mais elle exprime immédiatement la question qu'il résout , et qui est celle-ci : Etant données deux droites », b , on demande d'en trouver une troisième x telle que l'on ait (x-i-a) x=:b^. {V. p. 368.) C'est peut-être le premier exemple de la construction géométrique d'une équation du second degré. Car les problèmes qu'Euclide a résolus (propositions 28 et 20 du sixième livre des ÉUmeus , et 84 , 85 , 80 et 87 des Données ) , bien que , traduits en algèbre , ils conduisent finalement à une équation du second degré, différaient essentiellement, par leur énoncé géométrique, d'une question algébrique. Les ouvrages de Cardan et de Tartalea , infiniment supérieurs è celui de J. B. Benedictis, font aussi constam- ment usage de l'algèbre en Géométrie et de la Géométrie en algèbre Les principes d'une alliance intime entre ces deux sciences sont exprimés trop formellement, et les exemples en sont trop nombreux pour que nous ayons besoin d'insister sur cet objet. Outre la partie algébrique des ouvrages de Tartalea, qui est la sixième partie de son Traité général des nom- bres et des mesures, ce géomètre avait composé un traité d'algèbre sous le titre à'Algebra nova, qui ne nous est pas parvenu, et dont la perte est bien regrettable. Dans la cinquième partie du Traité général (f" 88 v), Tartalea donne la solution d'une question de maximum , dont la démonstration devait se trouver dans cet ouvrage d'algèbre. Cette question est remarquable pour le temps ; il s'agit de diviser le nombre 8 en 2 parties, telles que leur produit multiplié par leur différence, soit un maximum. La solution de Tartalea est générale, et telle que la donnent les régies du calcul infinitésimal actuel. Prenez, dit-il , le carr^ de S, ajoutez-y le tiers de ce carré, et prenez la racine carrée de la somme , ce sera la différence des deux nombres cherchés. Ce choix de l'inconnue , la différence des deux parties du nombre proposé , est très-heureux et annonce une profonde connaissance des pratiques de la science. 542 NOTES. époque, l'une des plus mémorables de l'histoire de la science. Mais on conçoit que de la sorte la Géométrie avait perdu cette pureté de forme, et ce caractère de généralité et d'abstraction auxquels s'étaient tant attachés les Anciens, et qui paraissaient être l'apanage de cette science ; et si , sous un rapport , il y avait avantages réels , sous un autre , il y avait inconvéniens graves, provenant, d'une part, de ce que l'esprit, en opérant sur des nombres , perdait de vue les objets qu'ils représentaient , et ensuite , de ce que , en effec- tuant au fur et à mesure les calculs , on détruisait la trace et le fil du raisonnement. Aussi les démonstrations géométriques sont-elles d'une lecture très-pénible dans les ouvrages du XVI" siècle. La Géométrie des Grecs avait donc subi une véritable altération, mais altération très- heureuse , puisque c'est dans cet état que Viète a dû la prendre, pour lui appliquer sa grande conception de l'algèbre littérale, et lui rendre ainsi toute sa pureté et son abstraction primitives, en conservant néanmoins tous les avantages que la science du calcul pouvait lui apporter. Mais il est fort remarquable qu'il ait fallu, pour arriver à ce grand résultat, à ce perfectionnement de la Géométrie des Grecs , passer par un état d'al- tération, qui faisait perdre à cette science son caractère d'abstraction et de généralité, et qui la faisait descendre au rang des opérations concrètes et numériques. Ces considérations peuvent nous faire regarder les XV® et XVI' siècles, comme mar- quant dans l'histoire de la Géométrie une époque de préparations et de transition , où s'est élaborée la nouvelle forme qu'ont prise les sciences mathématiques; et nous devons ajouter que les Indiens et les Arabes ont une grande part dans cette transformation et ce perfectionnement, puisque le germe s'en trouvait dans leur principe d'application de l'algèbre à la Géométrie, et qu'ils l'ont développé eux-mêmes par leurs travaux d'un grand nombre de siècles. TIN DES NOTES. ^l^^lVv^A^^^v^^lvv^^^^^\^^^^A^Alvv^AlVv^vv/vvv^^^l\^^;vv\^lvv^A^/vvv^ ADDITIONS. Page 23. Héron d'Alexandrie, disciple du célèbre mécanicien Ctésibius, et célèbre lui-même par son Traité des Pneumatiques, et par diverses autres inventions mécaniques pour lesquelles il est cité dans le huitième livre des Collections de Pappus , excella aussi dans la Géométrie. Eutocius nous a conservé sa solution du problème des deux moyennes proportionnelles , et a emprunté d'un de ses ouvrages , vepl fierpixôy la règle arithmétique pour l'extraction de la racine carrée d'un nombre. Proclus le cite comme auteur de nouvelles démonstrations de diverses pro- positions des élémens , où il n'admettait que trois seulement des axiomes d'Euclide ' ; et Grégoire de Nazianzc (ann. 328-389) le met au rang des grands géomètres de l'antiquité. (Oratio 10.) Les ouvrages de Héron étaient nombreux, mais la plupart ne nous sont pas parvenus, ou sont restés inédits. De ceux qui concernaient spécialement la Géométrie il n'en est que deux qui aient été traduits et mis au jour. Le premier, dont les historiens des mathématiques , je ne sais pourquoi , n'ont point parlé, est dâ à Dasypodius. Il a pour titre : Nomenclatura tocabulorum geometricorum -, C'est une suite de définitions des différentes matières qui font l'objet de la Géométrie. Ces définitions sont accompagnées de commentaires et de développemens présenté» avec clarté '. Dans sa préface , Dasypodius annonçait qu'il possédait plusieurs autres ouvrages de Héron , qu'il se proposait de faire connaître. L'un d'eux, qu'il appelait AcTT/j/xa, est le second des deux ouvrages géométriques de Héron qui nous sont parvenus. Mais celui-ci ne nous est connu que depuis quelques années. Nous en sommes redevables au savant professeur de Bologne J.-B. Venturi, qui l'a traduit en italien, sous le titre : // Traguardo (Le Niveau), répondant ■ Commentarius tn Euclidem , liber tertiut. ' Euclidis Elementorum liberprimus. Item Iferonis Alexendrinivocabula quœdam Geometria anted nvnguam «dita, yrœcà et latine ; per Cunradum Dasypodium. Argentinae, lS7I,in-8o. — Oratio C. Dasypodii de Disciplinis mathematicis Ejuadem Uironis Alexandrini Nomenclaturœ vacabulorum geometricorum translatio, Ejutdem Lesicon mathamaticum , ex diversis collectum antiquis tcriptis. Argent., 1579, in-8o. ' Fabriciut {Bill, grœca , lib. 3, cap. 24), et Heilbronner [Uist. Matheseos , p. 398) , attribuent cet onvrage à Héron le jeune qui a vécu à Conttaiitinople , au VU» siècle de notre ère. Bernardin Baldi l'avait mii , comme Datypodiu» , au nombre dei ouTragea de Héron l'ancien, foir Cronica de matemaiici, p. SA. 544 ADDITIONS. au titre du texte grec , rsp} MoTrpx; , et l'a mis au jour dans ses commentaires sur l'histoire et la théorie de l'optique '. Cet ouvrage est un traité de géodésie dans lequel se trouvent résolues graphiquement sur le terrain , à l'aide de l'instrument appelé la dioptre par les Anciens , une foule de questions de géométrie pratique. Ce traité est digne du nom de Héron; il est un monument précieux de la Géométrie des Grecs , et doit prendre place à la suite des ouvrages d'Euclide , d'Archimède et d'Apollonius. 11 rem- plit une lacune qui existait dans les écrits qui nous sont parvenus de l'antiquité. Car les Anciens ayant toujours distingué sous le nom de géodésie , la Géométrie pratique de la Géométrie pro- prement dite 2, ils ont dû écrire particulièrement sur cette géodésie; et cependant il ne nous était rien venu de l'école d'Alexandrie , sur cette branche de la Géométrie. Nous connaissions seulement le traité de géodésie de Héron le jeune, postérieur de près de huit siècles à Héron l'ancien. Mais cet ouvrage, qui se réduit aux opérations les plus simples, dépourvues de démonstrations , n'était pas digne de figurer à côté des ouvrages géométriques des Grecs. La proposition la plus importante qu'on y remarquât était la formule qui donne l'aire du triangle en fonction des trois côtés. C'était le seul ouvrage grec où l'on trouvât cette formule , si répandue en Europe dès le commencement du treizième siècle , et qui paraissait d'origine arabe. Mais elle se trouve aussi dans le traité de Héron l'ancien , oîi elle est démontrée par une construction géométrique très-élégante. C'est là probablement que Héron le jeune l'a prise, car il cite souvent les ouvrages de son homonyme et ceux d'Archimède , et de plus il se sert dans l'application numérique qu'il fait de la formule , des trois nombres 13 , 1-4 et 15 pour côtés du triangle , qui sont ceux précisément de Héron l'ancien. Ces trois nombres , et la formule en question , se rencontrent aussi dans la Géométrie des Indiens et dans celle des Arabes , et même chez les Latins , ainsi que nous l'avons dit en parlant des ouvrages de Brahmegupta. Le traité de géodésie de Héron l'ancien étant encore à peine connu , nous allons énoncer plu- sieurs des questions qui s'y trouvent résolues au moyen de l'instrument qu'il appelle la dioptre. Elles font connaître ce qui constituait la géodésie , ou Géométrie pratique chez les Grecs ; et elles sont de nature à faire regretter que le texte original de l'ouvrage de Héron , et d'autres versions que celle de M. Venturi, n'aient pas encore été publiés '. ■ Commentari sopra la storia e le teorie deWottica, Bologna , 1814 , in-4». Cet ouvrage se compose des quatre parties suivantes : 1» Considerazioni sopra varie parti dell'ottica pressa di antichi ; Z° Erone il meccanico del traguardo tradotio dal greco ed illustrato con note ; 3" Dell'iride , degli aloni e dé paregli ; 41" Appendice intorno alVottica di Tolommeo, 2 Si enim in hoc differret solum Geometria à Geodœsia , quod hœc quidem eorum est quœ sentimus , illa vero non sensihilium est. (Aristote , lir. 2 de la Métaphysique , chap. 11.) ^ H. Venturi cite trois bibliothèques qui possèdent le traité de Héron ; ce sont la bibliothèque royale de Paris, celle de Strasbourg et celle de Vienne ; dans celle-ci l'exemplaire est incomplet ; il est le seul dont les biblio- graphes aient fait mention; on l'a pris, d'après Lambecius, pour un traité de Dioptrique. — {Voir Fabricius , Bih. grœca, lib. 3, c.24; — Hcilbronner, JTist. math. p. 283.) M. Venturi a fait sa traduction sur une copie de l'exemplaire de la bibliothèque royale , coUationné sur celui de Strasbourg. Ce dernier est probablement l'exemplaire qui a été en la possession de Dasypodius Que sont devenus les autres ouvrages de Héron que ce géomètre possédait aussi ? Conrad Gesner dit, dans sa Bihliotheca universalis {sive catalogua omnium scriptorum locupletissimus in tribus linguis laiina, grœca et helraica, Tiguri, 1545, fol.) que le célèbre Diego Hurtardo de Mendoza, 'ff' ADDITIONS. 545 1° Mesurer la différence de hauteur de deux points invisibles l'un de l'autre. 2* Tirer une ligne droite entre deux points invisibles l'un de l'autre. 8" Trouver la distance du lieu oij l'on est, à un point éloigné duquel on ne peut approcher. 4" Mesurer la largeur d'une rivière qu'on ne peut traverser. K° Mesurer la distance qui sépare deux points éloignés. 6° Mener, par un point donné , une perpendiculaire sur une droite dont on ne peut approcher. 7° Mesurer la hauteur d'un point inaccessible. 8° Mesurer la différence de hauteur de deux points inaccessibles. 9° Mesurer la profondeur d'un trou. 10° Traverser une montagne en suivant une ligne droite qui joigne deux points donnés des deux cdtcs de la montagne. 1 1" Creuser un puits sur une montagne , de manière qu'il aboutisse à une excavation souter- raine déterminée. 12° Tracer le contour d'un rivage. 18° Donner au terrain la forme d'un segment de sphère déterminé. 14° Donner au terrain une pente déterminée. 1S° Mesurer un champ sans entrer dedans. 16° Le diviser en parties données par des droites partant d'un même point. 17° Diviser dans une raison donnée un triangle et un trapèze. Page 45. La première proposition du livre IV des collections mathématiques de Pappus est une pro- priété générale des triangles , que l'auteur présente comme une généralisation du théorème du carré de l'hypothénuse dans les triangles rectangles. On n'a pas encore remarqué que cette proposition est précisément, sous une autre forme, la propriété des parallélogrammes sur laquelle repose en mécanique la théorie des momens; laquelle propriété n'a été découverte qu'au commencement du siècle dernier par Varignon qui l'a présentée aussi comme « quelque chose de semblable à la proposition 47 du I" livre des Élémcns d'Euclide (celle du carré de l'hy- pothénuse) , » et l'a énoncée ainsi : 5» sur deux côlés contigus d'un parallélogramme, et sur la diagonale issue du même sommet qu'eux, on construit trois triangles ayant un sommet commun situé en un point quelconque du plan de la figure, la somme ou la différence des deux premiers triangles sera égale au troisième triangle. (Voir les Mémoires de l'académie des Sciences de Paris, année 1719.) Déjà, long-temps auparavant, Varignon avait démontré, et avait employé en mécanique un théorème sur le parallélogramme , très-connu dans la Géométrie moderne , et qui n'est au fond que ce premier, sous un énonce très-différent , savoir que : Si deux côtés contigus d'un parallé- logramme et la diagonale issue de leur sommet commun, sont projetés sur une droite quelconque, la projection de la diagonale sera égale à la somme ou à la différence des projections des deux côtés., (Voir Projet dC une nouvelle Mécanique, in-4° , 1687, pag. 189.) i qui l'Europe fut redevable d'nn grand nombre de mnnnacrit* greca , en avait plnaieuri de Héron (r^tr fol. 319 verte). Ceux-ci le trouvent aani doute dan» la bibliothèque de l'Etcurial, où eat entrée la précieuse collection de Hendoxa. ToM. XI. 69 546 ADDITIONS. Page SS. § 3. Au nombre des géomètres qui , à l'imitation de Viète , ont fait des transformations de triangles sphériques , il faut placer Albert Girard qui a fait aussi usage du triangle réciproque , dans sa trigonométrie, imprimée en 1626, un an avant celle de Snellius; mais ce géomètre a compris sous ce mot les quatre triangles différens formés par les arcs de cercle qui ont pour pôles les trois sommets du triangle proposé ; de sorte qu'il regarde comme réciproques d'un triangle donné, le triangle de Viète et celui de Snellius. Ce Traité de Trigonométrie d'Albert Girard , qui est à la suite d'une table des sinus , tangentes et sécantes, est très-succinct, et néanmoins contient plusieurs clioses intéressantes. Dans la préface on voit qu£ l'auteur s'était occupé de V Analyse géométrique des Anciens, et avait rétabli leurs traités dont les titres nous ont été transrais par Pappus ; il dit , à ce sujet , qu'après ce petit Traité de Trigonométrie , « qu'il donne comme échantillon , il mettra au jour quelque chose de plus grand. » Page 68. § 14. Fermât avait écrit sur les Lieux à la surface. Mersenne nous l'apprend en ces termes : Omitto locos ad superficiem, cujus isagogem vir idem Cl. (Fermatius) amicis communem fecit, et alia quœ titinam ah eo tantitm impetremus. (Voir Vniversœ Geometriœ mixtœque mathematicœ synopsis, in-4°, 16-4-i, p. 388). Page 81, § 27. Nous avons dit que Desargues avait proposé la question de couper un cône à base elliptique , hyperbolique ou parabolique , suivant un cercle , et que Descartes en avait donné une solution fondée sur les principes de sa Géométrie analytique. Nous aurions dû ajouter que Desargues avait résolu aussi ce problème, par une construction graphique '. Ce que nous voyons dans la préface de la Synopsis universœ Geometriœ du P. Mersenne. Desargues réduisait ce problème à la recherche de l'axe principal du cône, c'est-à-dire de celui qui jouit de la propriété qu'un plan qui lui est perpendiculaire coupe le cône suivant une ellipse qui a son centre sur cet axe. Il construisait cet axe en employant deux lignes dont il déterminait autant de points qu'il voulait. Mersenne ne dit pas quelles étaient ces lignes : c'étaient probablement des sections coniques. Après avoir déterminé les sections circulaires du cône , Desargues s'en servait pour résoudre différens autres problèmes , tels que de couper le cône suivant une conique semblable à une co- nique donnée , ou qui satisfasse à la condition que le plus grand angle que fassent deux diamè- tres conjugués soit de grandeur donnée. ' Archimède a résolu ce problème pour le cas où le sommet du cône est dans le plan mené par l'un de» diamètre» principaux de la conique perpendiculairement à son plan; ce qu'on voit par le» proposition» 8 et 9 du livre des Sphéroïdes et des Conoïdes, Ce» propositions montrent aussi qu' Archimède avait déjà , avant Apollonius , considéré le cône oblique à base circulaire ; mais néanmoins c'est Apollonius qui , le premier, a étudié la théorie des coniques dans le cône oblique. * ADDITIONS. 547 Desarfjucs résolvait encore ce problème , le plu» général , dit Mersenne , qu'on puisse se pro- poser sur celle matière : Étant donnés un cône à base elliptique, parabolique, ou hyperbolique , et un plan sécant, déterminer, sans construire la courbe d'intersection du cène par ce plan , ses diamètres conjugés faisant entre eux un angle de grandeur donnée, ses tangentes, ses ordonnées, ses paramètres, et les autres principales lignes de cette courbe. Desargues fait lui-m^me mention d'un problème de celte nature, à la fin de son livret sur la perspective, compris dans le Traité de Perspective, arrangé par Bosse (in-S», 1648 ; roir p. M4) ; où il s'exprime ainsi : Ayant à pourtraire une coupe de cône plate , y mener deux lignes dont les apparences soient les essieux de la figure qui la représente. C'est-à-dire ; une conique étant mise en perspective , trouver sur son plan les deux droites qui seront , en perspective , les deux axes principaux de la perspective de la conique. Enfin nous voyons encore dans la préface de la Synopsie de Mersenne , que Desargues avait composé un traité complet sur l'angle solide où il résolvait ces quatre problèmes : 1° Étant donnés les trois angles plans , trouver les trois angles dièdres; 2° Étant donnés deux angles plans et un angle dièdre, trouver l'autre angle plan et les deuj autres angles dièdres; 8' Étant donnés un angle plan avec deux angles dièdres, trouver les deux autres angles plans, et le troisième angle dièdre; 4° Enfin , étant donnés les trois angles dièdres , trouver les trois angles plans. Mersenne ajoute que Desargues formait un second angle Irièdre , dans lequel les angles plans étaient les supplémens des angles dièdres du premier, et réciproquement. Ce qui réduisait les quatre problèmes à deux. C'est, comme on voit, l'angle trièdre supplémentaire, qui répond au triangle supplémentaire de la trigonométrie spbérique que Snellius avait imaginé quelques années auparavant , dans sou Traité de Trigonométrie. Et quant aux problèmes , ils constituent une solution graphique de la trigonométrie spbérique. C'est ce qu'on a appelé depuis la solution de la pyramide trian- gulaire. Ils forment aujourd'hui un chapitre des Traités de Géométrie descriptive et sont d'un fréquent usage dans les applications de celle science, principalement à la coupe des pierres. (Voir le Traité de Géométrie descriptive, de M. Hachette, et le 8' cahier du 1" volume de la Correspondance polytechnique.) Pagi 83. ^28. M. Poncelet a donné, comme correspondant, dans la Géométrie à trois dimensions, au théorème de Géométrie plane de Desargues , le suivant : Quand deux tétraèdres ont leurs sommets placés deux à deux sur quatre droites concourantes en un même point, les plans de leurs faces se coupent deux à deux suivant quatre droites qui sont dans un même plan. {Traité des Propriitè» projectires, art. 582.) Ce théorème peut être généralisé de cette manière : Quand deux tétraèdres ont leurs sommets placés deux à deux sur quatre droites qui sont les gé- nératrices d'un même mode de génération d'un hyperboloïde à une nappe, leurs faces se coupent deux à deux suivant quatre autres droites qui sont les génératrices d'un second hyperboloïde. 5^. ADDITIONS. Page 95. On trouve dans les lettres de Descaries de nombreux passages relatifs à la Géométrie. Son volume d'Opuscula posthuma (Amst. 1701 , in-i°) , contient aussi quelques morceaux de Géo- métrie. Il est à regretter que l'on n'ait pas encore songé à réunir tous ces passages épars , et à les comprendre dans une des nombreuses éditions que l'on a faites de la Géométrie de Descartes. Nous nous bornerons ici à remarquer dans ses lettres, une méthode particulière, que ce cé- lèbre philosophe a imaginée pour résoudre un problème, alors fort agité entre lui et «es illustres contemporains Fermât , Robcrval et Pascal ; le problème de la tangente à la cycloide. Cette méthode, qui a eu alors une grande célébrité, était d'une simplicité extrême, et convenait aux cycloïdes accourcies et allongées , comme l'a très-bien vu Descartes , et même à toutes sortes de roulettes, décrites par un point du plan d'une courbe quelconque qui roule sur une autre courbe flxe. Elle consiste à regarder les deux courbes comme deux polygones d'une infinité de côtés. Ces polygones sont en contact suivant un côté commun , et conséquemment ont à chaque instant deux sommets communs ; pendant un mouvement infiniment petit le premier polygone tourne autour d'un de ces deux sommets qui reste fixe ; le point décrivant engendre donc un arc de cercle qui a son centre en ce sommet fixe ; la normale à cet arc de cercle , qui est un élément de la roulette décrite , passe donc par ce sommet. Cette méthode , qui diffère essentiellement de toutes les autres méthodes pour mener les tangentes, est d'une simplicité extrême, et a toujours été employée depuis. Mais, à raison sans doute de cette simplicité même , elle n'a point attiré autant l'attention des géomètres qui n'en ont fait usage que dans la même question , en se bornant seulement à l'étendre aux épicy- cloïdes sphériques. En reconnaissant ce que cette méthode a de distinctif et de spécial par rap- port aux autres solutions du problème des tangentes , il était naturel de chercher si le principe sur lequel elle reposait n'était pas susceptible de quelque généralisation qui le rendrait appli- cable à d'autres questions. Le théorème suivant nous paraît offrir la généralisation de celui de Descartes : Quand une figure plane éprouve un mouvement infiniment petit dans son plan, il existe tou- jours un point qui, pendant ce mouvement , reste fixe; Les droites menées par les différens points de la figure, perpendiculairement aux trajectoire qu'ils décrivent pendant le mouvement infiniment petit, passent toutes par ce point fixe. D'après ce théorème , quand une courbe est décrite par un point d'une figure en mouvement dans son plan , il suffira , pour mener sa normale par le point décrivant , de déterminer le point qui restera fixe au moment du mouvement où le point décrivant aura la position qu'on consi- dère. Ce point se déterminera par les différentes conditions du mouvement de la figure. Par exemple , si l'on connaît le mouvement de deux points de la figure , on mènera par ces points les normales aux courbes qu'ils parcourent, le point d'intersection de ces deux normales sera le point cherché. Ainsi , qu'une droite de longueur donnée se meuve de manière que ses deux extrémités par- courent deux droites fixes, on sait que chaque point de la droite, et même que chaque point pris au dehors de la droite , mais fixé invariablement à elle, décrit une ellipse. Pour déterminer la normale à cette courbe, on mènera les normales aux deux droites fixes par les extrémités de la droite mobile ; ces deux normales se rencontreront en un point par où passera la normale cherchée. ADDITIONS. 549 Le mouvement de la figure mobile peut être rëglc par diverses autres conditions qui permet- traient encore de déterminer très-aiscmcnt le point en question. Soit, par exemple, la conchoïdc de Nicomëde décrite par un point d'une droite dont l'extré- mité parcourt une droite fixe , pendant que cette droite mobile glisse sur un point fixe. Consi- dérant la droite mobile dans une de ses positions, par le point fixe on lui mènera une perpendiculaire , et par son extrémité on mènera une droite perpendiculaire à la droite fixe ; le point de concours de ces deux perpendiculaires sera le point cherché par lequel passera la normale 5 la conchoïdc. Nous ne passerons point en revue ici toutes les autres conditions diverses du mouvement de la figure mobile pour lesquelles on saura déterminer le point en question , ni toutes les courbes auxquelles il sera facile par ce moyen de mener les tangentes. Ce qui précède suffit pour faire voir que le théorème que nous avons énoncé est une généra- lisation de l'idée de Descartes au sujet de la tangente à la cycloïde , et qu'il constitue une véri- table méthode des tangentes , méthode diflcrente de toutes les autres , et même de celle de Roberval , quoiqu'elle repose comme celle-ci sur des considérations de mouvement. Mais on conçoit que cette méthode , si facile , sera aussi comme celle de Roberval , bornée dans ses ap- plications , puisqu'elle suppose qu'on connaît les conditions géométriques du mouvement d'une figure de forme invariable , à laquelle appartient le point décrivant. Cependant elle s'applique h un grand nombre de courbes particulières et à des familles entières de courbes. Les usages de notre théorème ne se bornent pas à la simple Géométrie ; il peut être utile aussi en mécanique pour le calcul des forces vives : car il en résulte que les forces vives des difTcrens points de la figure mobile sont proportionnelles aux carrés des distances de ces points 2t celui qui , pendant l'instant où l'on considère le mouvement, est resté fixe : il suflit donc, ce point étant déterminé , de connaître la force vive d'un autre point quelconque de la figure. M. Poncclct nous a appris qu'il avait fait un tel usage de ce théorème dans plusieurs questions sur les machines , où l'on n'avait point jusqu'ici de métliode géométrique pour le calcul des forces vives. En énonçant le théorème en question , il y a quelques années (voir Bulletin Universel de% Science», t. XIV) , nous l'avons présenté comme un cas particulier d'un théorème sur le dépla- cement fini quelconque d'une figure plane dans son plan, et même d'un théorème encore plus général relatif à deux figures semblables , situées d'une manière quelconque danS un plan. Mais ces théorèmes dépendent eux-mêmes d'un principe encore plus général , que voici : Si l'on conçoit dans un plan deux figures qui ont été primilicement la perspective l'une de l'autre, et qui se trouvent actuellement placées d'une manière quelconque l'une par rapport à l'autre; Chaque point de l'une des figures aura son homologue dans l'autre figure; Il existera généralement trois points dans l'une des figures qui se trouveront superposés respec- tivement sur leurs homologues dans la seconde figure ; L'un de ces trois points sera toujours réel; les deux, autres pourront être imaginaires. Il résulte de là qu'il y a aussi trois droites dans l'une des figures , qui se trouvent superjK)- • sées sur leurs homologues dans la seconde figure; ce sont les droites qui joignent deux à deux les trois points. L'une de ces riroitrs est toujours réelle , et les deux autres peuvent être imaginaires. Quand les deux figures sont semblables, ce qui est un cas particulier de la perspective. « 550 ADDITIONS. deux des trois points , et deux des trois droites sont toujours imaginaires ; le troisième point est réel ; la troisième droite est aussi réelle ; mais elle se trouve située à l'infini. Cela a lieu pareillement quand les deux figures sont égales entre elles. Ces propriétés des figures planes ont leurs analogues dans les figures à trois dimensions, pour lesquelles j'ai déjà énoncé quelques théorèmes qui se rapportent à cette théorie. ( Voir Bulletin Universel des Sciences, t. XIV, p. 321 , année 1880.) Page 98. § 4. Les Arabes se sont occupés aussi de la description organique des courbes , et particulièrement des sections coniques. Nous le voyons par le titre des trois ouvrages suivans qui se trouvent dans la bibliothèque de Leyde : 1° Ahmed hen Ghalil Sugiureus De conicarum sectionum descriptione ; 2° Abu Schel Cutnœus De circino perfecto , quo etiam sectiones conicœ et aliœ lineœ curvœ describi possunt ; â° Mah. ben Husein De circino perfecto et formatione linearum. (Voir Catalogus Hbroriim tam impressorunt quam manuscriptorum bibliothecœ publicœ universitatis Lugduno Batavœ, in- folio, 1716, p. 4S4et45S.) Page 119. Parmi les pratiques nouvelles que contenait la Gnomonique de De la Hire , il en est une que nous aurions dû citer , parce qu'elle repose sur des considérations géométriques qui rentrent dans les doctrines de la Géométrie moderne. Il s'agit de la construction des lignes horaires , en se servîint de quelques-unes d'entre elles , qui sont déjà tracées. De la Hire résout trois questions : Dans la première il suppose connues sept lignes horaires consécutives ; Dans la seconde , -4 heures consécutives et l'équinoxiale ; Et dans la troisième, 3 heures consécutives , l'équinoxiale et l'horizontale. Et il détermine les autres lignes horaires. Soient connues , dans le premier cas , les sept lignes des heures consécutives X , XI , XII , I , Il , III et IV. Voici quelle est la construction de l'auteur pour déterminer les cinq autres : Par un point 0 de la ligne IV, on mène une transversale parallèle à la ligne X ; elle rencontre les lignes III, II, I, XII et XI en des points a, h, c, d, e; on porte sur cette transversale, de l'autre côté du point o, des segmens oa', ob', oc', od' , oe' égaux respectivement à oa, ob, oc, od, oe; et les points a' , b' , c', d' , e' appartiennent aux cinq heures cherchées. En eflfet , les deux plans horaires X et IV sont à angle droit ; les deux plans horaires III et V sont inclinés également sur le plan IV, et conséquemment ces deux plans sont conjugués har- moniques par rapport aux deux premiers X et IV. Il suit de là que les deux lignes horaires III et V sont conjugées harmoniques par rapport aux deux lignes horaires X et IV : donc toute transversale rencontrera ces quatre lignes en quatre points harmoniques ; et conséquemment , si cette transversale est parallèle à la ligne X , les deux points où elle rencontrera les lignes III et V seront à égale distance de celui où elle rencontrera la ligne IV. C. Q. F. P. '. ' Cette démonstration géométrique , que nous empruntons de l'ouvrage de De la Hire , est aussi rigoureuse ADDlTlOiNS. 531 Nous ne rapporterons pas les pratiques de De la Hire pour les deux autres questions ; elles sont aussi simples que la première , et reposent aussi sur les principes de la Géométrie élémen- taire qui rentrent dans la théorie des transversales. Mais ces trois problèmes donnent naturellement lieu à une observation que je m'étonne qu'on n'ait pas faite dans les ouvrages qui les ont reproduits. Cette observation porte sur le grand nombre de données que prend De la Hire pour construire les lignes horaires inconnues. Dans le 1" cas il en prend sept, dans le 2° quatre, plus la ligne équinoxialc ; et dans le 3° trois, plus la ligne équinoxialc et la ligne horizontale; ajoutez à cela que les lignes données doivent être consécutives. Est-il besoin de toutes ces données? Et quel est le plus petit nombre de lignes horaires qui soit suffisant pour construire les autres? La réponse à ces questions , c'est que trois lignes horaires quelconques suffisent pour déter- miner toutes les autres , dont on peut donner une construction tout aussi simple que celle de De la Hire pour le cas de sept lignes horaires consécutives connues. Voici quelle sera cette construction , qui va nous offrir une nouvelle application de la Théorie du rapport anharmonique , sur laquelle nous avons déjà cherché dans plusieurs passages de cet ouvrage à appeler l'attention des géomètres. Désignons par a, b, c les trois lignes données , qui répondent à des heures déterminées , mais quelconques , et qui seront même des fractions d'heure , si l'on veut. Soit d la ligne d'une 4° heure quelconque, qu'on veut construire au moyen des trois premières. Le rapport anhar- monique de ces quatre droites sera égal à celui des quatre plans horaires dont elles sont les traces sur le plan du cadran. Ainsi soient A, B, C, D ces quatre plans, on aura sin. c,a sin. da sin. C,A sin. D,A sin. c,b * sin. dj) sin. C,B ' sin. D,B que brière ; cependant H. Delambre ne la regarde pas comme bien >atiifaiiante ; et comme la pratique en qaettion lui parait utile et curieu>e , et mérite une démonstratioH en forme, il ., /j., telles qu'on aura toujours la relation sin. Oo sin. O'o' -+- A. -, = fi. sin. Ea sin. E'a' 2" porisme. Etant menés sur la sphère deux arcs de grands cercles, qui se rencontrent en S , et étant pris sur ces deux arcs respectivement deux points fixes O, O' ; Si autour d'un point donné de la sphère on fait tourner un arc qui rencontrera les deux arcs fixes en deux points a, a' , on pourra trouver deux quantités A, u telles qu'on aura toujours la relation sin. Oa sin. OV -: — -^- X. -: = /i. sm. Sa sm. Sa Page 294. Depuis que la note VII , sur l'ouvrage De lineis rectis se invicem secantihus statica constructio de Jean Ceva , était imprimée, a paru le 2-4" cahier du Journal de l'école Polytechnique , où se trouve un mémoire de M . Coriolis , intitulé : Sur la Théorie des momens considérés comme analyse des rencontres des lignes droites, qui a le même objet que cet ouvrage de Ceva. M. Coriolis y démontre , en peu de mots et sans calculs , par la théorie des momens , des théorèmes de la nature de ceux qui se trouvent dans la théorie des transversales de Carnot , mais qui présen- ADDITIONS. 555 tcnt une plus grande gcnëralité. On y remarque particulièrement une démonstration de la double génération de l'hyperboloïde à une nappe par une ligne droite. Pagi sis. A la suite de l'article (12) , ajouter : (12 bis). Il suit du théorème (12) que si l'on a trois systèmes de deux points A, A', B, B' et €,C', conjugués harmoniques par rapport à deux points fixes E, F, les six poinU A, A', B, B', C,C' seront en involution. Car soitO le point milieu du segment £F , on aura OA.OA' = ÔÊ', OB.OB' = ÔË', OC.OC = ÔË'. Donc les six points A, A', B, B', C, C forment une involution (art. 12). Page 890 , Abt. 27. Dans un mémoire qui a pour titre : Recherches sur ce qu'il y a d'analogue au centre des forces parallèles, dans un système à forces non parallèles, M. Minding , docteur à l'université de Berlin , a démontré un théorème remarquable qui offre une nouvelle propriété des deux coni- ques excentriques d'une surface du second degré. Voici l'énoncé de ce théorème : « Les forces d'un système étant supposées telles qu'elles ne se fassent pas équilibre, si on les fait tourner autour de leurs points respectifs d'application, sans déranger leurs inclinaisons mu- tuelles, il y a une infinité de positions du système dans lesquelles toutes les forces peuvent être remplacées par une résultante unique, La direction de cette résultante coupe toujours les contours d'une ellipse et d'une hyperbole situées dans deux plans perpendiculaires entre eux; ces deux courbes sont d'ailleurs dans de telles relations , que les foyers de l'une coïncident avec les sommets de Pautre. » Réciproquement, chaque droite qui joint un point de l'ellipse à un point de l'hyperbole, peut être considérée comme la direction de la résultante unique , pour une certaine position du sys- tème, n (Voir le Compte rendu des séances de l'académie des sciences de Paris , par MM. les se- crétaires perpétuels, année 18315 , p. 282.) En considérant les deux courbes en question comme les limites d'une série de surfaces du second degré toutes inscrites dans une même développable (voy. p. 397), on est conduit à penser que le théorème de M. Minding n'est qu'un cas particulier de quelque théorème plus général , dans lequel ces surfaces du second degré joueraient un rôle analogue à celui de ces coniques. Par exemple, au lieu de supposer que toutes les forces du système doivent prendre autour de leurs points d'applications des directions telles qu'elles aient une résultante unique , qu'on suppose que le couple minimum relatif à chaque position du système ait une valeur donnée (qui sera zéro dans le cas de la résultante unique), et qu'on demande quelle sera dans l'espace la position de l'axe de ce couple minimum ou axe central des momens. (Voir les Elément de sta- 536 ADDITIONS. tique de M. Poinsot, 6™' édition , p. 3S9). Le résultat de cette recherche offrira nécessairement une orénéralisation du beau théorème de M. Minding; et peut-être que les surfaces du second degré y joueront le rôle que nous venons d'indiquer. Cette théorie d'un système de forces qui tournent autour de leurs points d'application , en conservant leurs grandeurs et leurs inclinaisons mutuelles , peut prendre une grande extension et donner lieu à plusieurs questions intéressantes , si l'on y introduit la considération de l'axe central des niomens , au lieu de se borner au cas particulier d'une résultante unique. Par exemple : 1° Que l'axe central des momens doive rester parallèle à une même droite ; quelle sera la sur- face cylindrique qu'il décrira? 2° Qu'il doive rester parallèle à un même plan ; quelle sera la surface courbe qu'il touchera dans toutes ses positions? 3° Qu'il doive passer toujours par un même point; quelle sera la surface conique qu'il décrira ? W Qu'il doive être situé dans un plan donnné ; quelle sera la courbe qu'il enveloppera ? Nous ne pouvons nous occuper dans ce moment de ce genre de recherches ; nous l'indi- quons , dans l'espoir qu'il offrira de l'intérêt à quelques lecteurs. Page 396 , § 45. Depuis que cette Note est imprimée , je suis parvenu à la généralisation des deux théorèmes des §§41 et 43 , et j'ai reconnu , comme je l'avais pensé , que le second conduit à une démon- stration purement synthétique et indépendante d'aucune formule d'analyse , du beau théorème sur l'attraction que deux ellipsoïdes dont les sections principales sont décrites des mêmes foyers , exercent sur un mêihe point situe au dehors de leurs surfaces. Une telle démonstration avait paru à d'illustres géomètres devoir offrir des difficultés , et être peut-être au-dessus des res- sources de la synthèse '. Les deux théorèmes généralisés peuvent se déduire des deux cas particuliers énoncés aux §§ 41 et 43, au moyen d'un autre théorème qui est aussi une belle propriété des surfaces du second degré qui ont les mêmes coniques excentriques. Nous nous bornerons ici à l'énoncé de ce théorème : Quand plusieurs surfaces du second degré A , A' , A" , etc. , ont les mêmes coniques excentri- ques , si autour d'un point fixe S on fait tourner une transversale qui rencontre l'une d'elles A en deux points a , a', et qu'en appelant D le diamètre de cette surface qui est parallèle à la corde aa' . on porte sur la transversale , à partir du point S un segment Sm égal à J" ,, if étant une con- stante, l'extrémité m de ce segment sera sur une surface du second degré S, qui aura son centre au point S ; Pour les autres surfaces A' , A", etc., on formera semblablement , avec d'autres constantes y, ^•",etc., d'autres stir faces Z' , i;", etc.; Toutes les surfaces X, i:', S", etc. , auront, en direction , les mêmes axes principaux ; Et on pourra prendre les constantes d', J", etc. , de manière qu'elles aient aussi les mêmes co- niques excentriques. ' l,e^enàxc , Mémoire sur l'attraction dea ellipsoïdes , inséré dam les Mémoires de l'Académie des sciences , année 1788j voir page 486. — Poisson , JVote sur le mouvement de rotation d'un corps solide j année 1834. ADDITIONS. }im Page 4K9. La furmulr^ ln—i)a' — (n—A)a dont les arpenteurs romains se serraient pour calculer l'aire du polygone régulier de n côtés, est celle qui exprime les nombres polygonaux de l'ordre (n — 2). Ces nombres polygonaux étaient très-connus des Anciens ; on les trouve dans les ouvrages de Nicomaque , de Jamblique, de Théon , de Diophante , et dans l'arithmétique de Roècc , où ils occupent une grande place. C'est là l'origine de cette formule, employée par les écrivains latins , et qui n'a dû être regardée par eux que comme approximative. Mais l'approximation est très-grossière , et ne repose sur aucune considération vraiment géométrique. Nous avons dit que Gerbert avait reconnu que la formule relative au triangle n'était pas exacte , et qu'il avait essayé de la démontrer comme une formule approximative ; mais que soii raisonnement aurait dâ le conduire à l'expression g'H-o |/3 2 T' qui est véritablement la formule approximative : l'approximation est d'autant plus grande que l'unité linéaire prise pour exprimer le cdté a est plus petite. Page i69. Les mots pagina et paginula que nous avons traduits par le mot colonne , ce qui nous a conduit à un sens clair du texte de Boèce , sont employés par cet auteur dans le chapitre XVI du i' livre de son Traité de la Musique , où ils ont évidemment cette même signification ; les colonnes étant décrites , et indiquées dans la figure et dans le texte par des lettres. Nous trouvons encore une signification à peu près semblable des mots pagina et paginula dans une pièce sur l'astronomie , où ils sont employés pour exprimer l'intervalle entre deux cercle» concentriques , dans la description d'un astrolabe. Cette pièce se trouve dans un manu- scrit du XI' siècle , à la suite de la lettre de Gerbert h Constantin , sur la construction d'une sphère céleste. ( Manuscrits de la bibliothèque de Chartres. ) Page -470. Au lieu de cette phrase : « Peut-être, quand on aura voulu supprimer les colonnes, et ne pas s'astreindre à l'usage d'un tableau préparé pour ce genre de calculs , aura-t-on laissé seu- lement celles où se trouvaient des zéros , de sorte qu'alors deux petites lignes verticales (formant une colonne) , auraient fait l'office du zéro.n II faut substituer celle-ci : « Peut-être, quand on aura voulu supprimer les colonnes, et ne pas s'astreindre à l'usage d'un tableau préparé pour ce genre de calculs, aura-t-on laissé seulement celles où se trouvaient des places vides; de sorte qu'alors deux petites lignes verticales ( formant une colonne ) auraient indique »ine place vide , et fait l'office du zéro actuel. » 558 ADDITIONS. Page 472. Le Vocahularium de Nestor Dionisyus donne au mot Abacus la signification suivante : Tabella super qua decuplationes fiunt : Abacus dicta est quin etiam ipsa decuplatio. (Édition de 1496 Venise, in-folio.) Ce passage s'applique parfaitement à notre explication de Y Abacus, et sem- blerait prouver qu'au XV" siècle la signification de ce mot n'était pas encore perdue , comme nous l'avons pensé déjà d'après un passage de la Bibliothèque historiale de Vignier. Page 476. Cela prouve-t-il qu'ils aient ignoré absolument ce système indien ? C'est par une inadvertance , causée par la précipitation que nous avons mise dans la rédaction de cette dissertation qu'at- tendait l'imprimeur dont nous retardions à regret le travail , que nous nous sommes servi de l'expression système indien, au lieu de dire système de TAbacus. Il est évident que nous avons eu en vue seulement de prouver que l'assertion de Boèce n'était point inadmissible ; c'est-à-dire que le système de numération qu'il exposait, avait pu être connu des Pythagoriciens, comme il le dit : et ce système , nous le répétons , n'était pas précisément celui des Indiens , c'est-à-dire le nôtre actuel ; mais il n'en différait que par l'absence du zéro, et par l'usage nécessaire de colonnes qui marquaient la place des chiffres. Ce système n'était au fond que la représentation écrite de la table à compter, connue chez les Romains sous le même nom A' Abacus, qui était formée de cordons placés parallèlement, sur chacun desquels on pouvait faire glisser neuf boules , destinées à former des groupes qui re- présentaient les nombres 1 , 2 , 3 , 4 , S , 6 , 7 , 8 et 9; et les cordons exprimaient la nature des unités que ces groupes représentaient ; le premier cordon était celui des unités simples ; le Second celui des dixaines ; le troisième celui des centaines , et ainsi de suite. On voit que Y Abacus figuré n'était autre que V Abacus manuel ou palpable; les colonnes re- présentaient les cordons, et les neuf caractères (ou chiffres) représentaient les neufs collections de boules que l'on pouvait former sur chaque cordon. La transition de V Abacus manuel à V Abacus figuré, était donc naturelle, et n'exigeait aucun effort de génie ; on ne refuserait pas d'en faire honneur aux Romains , si Boèce ne l'attribuait pas à Pythagore. Et c'est ce nom de Pylhagore qui donne lieu , aux yeux de quelques person- nes, à l'objection la plus forte contre notre explication du passage de Boèce ; car on ne veut pas admettre qu'Archimède et Apollonius aient eu connaissance de ce système de numération qui leur eiU donne l'idée de la valeur de position des chiffres. Mais déjà plusieurs écrivains ont pensé que les Grecs, du temps même de Pythagore, ont connu la machine à compter, que nous venons de décrire sous le nom A' Abacus des Romains ; car cette machine est de la plus haute antiquité chez tous les peuples ' . Or , cette machine , ' Cette machine est le suanpan des Chinois. Elle était en usage non-seulement dans plusieurs parties de l'Asie, mais dans plusieurs autres contrées de la terre, chez les Étrusques, en Egypte, au Pe'rou. Voir le mémoire de H. Alex, de llumboldt, inséré dans le tom. IV du Journal de mathématiques de M. Crelle, pag. 205, sous le titre : Vher die lei verschiedeneii Vôlkcrn ûhlichcn Système von Zahlzeichen vnd ûber den Ursprung des S tellenwcrthes in den indischen Zahlcn : c'est-à-dire, Sur les systèmes de chiffres usités chez les différens peuples, et sur l'origine de la valeur de position dans V arithmétique indienne. On trouve cette machine , soit celle des Chinois , soit celle des Romains , représentée dans plusieurs ou- ADDITIONS. 559 comme l'observe l'iHustre M. de Humboldt ' , e»t fondée sur le principe de la valeur de position de» signe» rcprcsentalif» de» nombre». Elle devait donc , tout au»8i bien que Wibacus figuré, décrit par Boèce, donner à Archimède et à Apollonius l'idée de la valeur de position, idée, du reste , que ces deux grands hommes ont eue , puisqu'ils l'ont appliquée , comme nous l'avons dit , le premier à se» oclade» et le second à ses tétrade». Paob Kie. On a imprimé sous le nom de Sacro Bosco , un traité à' Algoritme , intitulé : Algorismus domini Joannis de Sacro liuêco, noviter impressum, Venetiis , 1523, in-4°. Cet ouvrage n'est pas de Sacro Rosco, dont le traité d'arithmétique est écrit en vers; mais il est le même que celui que Clichtovée a fait imprimer sous le titre : Opusculum de praxi nutnerorum quod Algorismum tocant. Ce traité présente avec les autres une différence légère, mais qui mérite néanmoins d'être remarquée. C'est que l'auteur dit vie placer un point au-dessus du chiffre des mille, pour le dis- tinguer des autres ; puis scmblablement, un point sur le quatrième chiSre après celui des mille ; et ainsi de suite sur le» chiffres pris de quatre en quatre. Ce sont, comme on voit, les tétrades d'Apollonius qui sont réduites, daus le système actuel, à des tranches de trois chiffres, puisque nous dénommons un nombre par tranches de trois chiffres en nous servant des mots unités, mille, millions, billions, etc. Au point on a substitué des virgules qui séparent ces tranches de trois chiffres. On trouve aussi ces tétrades marquées par un point , dans le Traite d'arithmétique de Purbach , Algorithmus G. Peurbachii in integris ,yieunx, 1515, in-4". Tragei. ( KotrVeUer, Rerum augusianarum vindelicontm libri octo, Venite, 1693, in-folio , pag. 268. — La Loubère, Du royaume de Siam , Paria, 1601, 2 yol. in-12. — Du Holinet, Le cabinet de la bibliothèque de S^'-Geneviève , Pari», 1698, in-folio, pag. 23. — V.ager , An Explanafion of the Elemenlai-y Characters ofthc Chinese f Lond.,1801, in-folio. ' foir le mémoire cité de H. de Humboldt. nir DS.S ADDITIONS. •*(■ vv vvvvvv^lVvvvvvvvv^\vv^^vv^^A^^{V\lv^lvwvv^^^lvvvvv\^\vvvv\^\^ TABLE DES MATIÈRES L'APERÇU HISTORIQUE. Paget. But de Fouvrage 1 Cdapitre. I. Première épocpic de la Gcomctrie 4 — II. Deuxième époque 61 — III. Troisième époque 9-4 — IV. Quatrième époque 143 — V. Cinquième époque 189 — VI. Objet du mémoire de Géométrie 263 NOTES. Note. I. Sur les spiriques de Perseus 271 — II. Sur les lieux à la surface d'Euclide 278 — III. Sur les porismcs d'Euclide 274 — IV. Sur la manière de construire les foyers dans le cône oblique, et d'y dé- montrer leurs propriétés 285 — V. Sur la définition de la Géométrie. — Réflexions sur la dualité, consi- dérée comme loi de la nature 288 — VI. Sur le théorème de Ptolémée, relatif au triangle coupé par une trans- versale 291 — VII. Sur l'ouvrage de J. Ceva, intitulé : Delineis rccti» se inticem secan- tibus, statica conslruclio (in-4°, Milan 1678) 294 — VIII. Description des spirales et des quadratrices, au moyen d'une surface héliçoïde rampante. — Leur analogie avec d'autres courbes, qui por- tent le même nom dans le système de coordonnées de Descartes . . 297 — IX. Sur la fonction anltarnionique de quatre points, ou de quatre droites. SO'2 -- X. Sur l'involution de six points. — Relations nouvelles entre ces points. S08 — XI. Sur la question d'inscrire dans un cercle un triangle dont les trois côtés doivent passer par trois points donnés 328 Ton. XI. 71 k o62 TABLE DES MATIERES. Pages. Note. XII. Sur la Géométrie des Indiens, des Arabes, des Latins et des Occiden- taux au moyen âge 416 Géométrie des Indiens 417 Sur la Géométrie de Brahmegupta 420 Sur la Géométrie de Bhascara Acharya 447 Géométrie des Latins 486 Sur le passage de la Géométrie de Boôce relatif à un nouveau système de numération 464 Sur un passage de la Géométrie de Boèce relatif au pentagone régu- lier de seconde espèce. — Origine et développement des polygones étoiles 476 Géométrie des Arabes 487 Géométrie des Occidentaux au moyen âge . . • 602 — XIII. Sur les coniques de Pascal 330 — XIV. Sur les ouvrages de Desargues ; la lettre de Beaugrand ; et l'Examen de Curabelle 331 — XV. Sur la propriété anbarmonique des points d'une conique. — Démonstra- tion des propriétés les plus générales de ces courbes 334 — XVI. Sur la propriété anbarmonique des tangentes d'une conique . . . , 841 — XVll. Sur Hlaurolycus et Guarini 345 — XVIll. Sur l'identité des figures homologiques avec celles qu'on décrit dans les — pratiques de la Perspective. — Bemarque sur la perspective de Stevin. 346 — XIX. Sur la métbode de Newton, pour changer les figures en d'autres figures du même genre. (Lemme XXll du l""' livre des Principes) , . . 347 — XX. Sur la génération des courbes du troisième degré , par les cinq para- boles divergentes ; et par les cinq courbes à centre 348 — XXI. Sur les ovales de Descartes , ou lignes aplanétiques 350 — XXII. Extension donnée à deux théorèmes généraux de Stewart 353 — XXllI. Sur rorigine et le développement de la Géométrie descriptive . . . 335 — XXIV. Sur la loi de continuité et le principe des relations contingentes . . 357 — XXV. Application du principe des relations contigentes à la question de déter- miner, en grandeur et en direction, les trois diamètres principaux d'un ellipsoïde dont trois diamètres conjugués sont donnés. . . . 359 — XXVI. Sur les imaginaires en Géométrie 368 — XXVll. Sur l'origine delà théorie des polaires réciproques, et celle des mots pôle et polaire 370 — XXVIII. Généralisation de la théorie des projections stéréographiques. Surface du second degré tangente à quatre autres. 372 — XXIX. Démonstration d'un théorème d'où résulte le principe de dualité. . . 375 — XXX. Sur les courbes et surfaces réciproques de Monge. — Généralisation de cette théorie 376 — XXXI. Propriétés nouvelles des Surfaces du second degré , analogues à celles des foyers dans les coniques 384 — XXXII. Théorèmes analogues, dans les surfaces du second degré , à ceux de Pascal et de M. Brianchon dans les coniques 400 — XXXÎII. Relation entre 7 points quelconques d'une courbe à double courbure du troisième ordre. — Diverses questions où ces courbes se présentent. 403 — XXXIV. Sur la dualité dans les sciences mathématiques; exemples pris dans l'art du tourneur, et dans les principes de la dynamique ...... 408 Additions , 543 ¥iy DE LA TABLE. l^^^^^^^^^(\a\vv^lvv^Alvvvvvv^^^^^^^^^^^^lvvv\^^^A^\^^lvvv^^(vvvv^^^ TABLE DES AUTEURS RoiHia DANS L'APERÇU UISTORIQUE. A. Aboul Wefa, 49S, 526. Aboul Hhassan Ali, 49 6. Abraham Abenezrx, -492. Adalbolde, 507. Adhelard, 509. A(juilon, 516. Ahmed benGhalil, 550. Albategnius , -494, 526. Albert-le-Grand , 611,817. Albumasar, 510. Alchindus, 292,492,496. Alcuin , 430, 504. Alfarabius, 510,518. Alfraijanus, 510. Alhazcn , 498, 509. Almansor , 489. Alstedius,423, 478. Ampère, 105,221,390, 415. Anderson (Alexandre), 42, 127, 282, 283, 442, 527. Andrès, 503, 504,511. Angelis, 93. Apian (P.), 446. Apollonius,?, 9, 15, 17—23,87, 41,42, 46,47, 80, 89,90, 116, 119, 121 , 124, 210,285,814, 325, 831, 476,489,500, 813,614,518, 558. Apulée, 503. Arago , 208 , 856. Archimède, 15—17, 21—23, 48, 86, 69, 76, 91, 116, 162, 163, 210, 273,358, 428, 475, 476, 489, 514, 513, 523, 546, 558. Archytas, 6,427,434,463. Argyrus, 523. Aristée, 7, 21, 48, 89, 518, 514. Aristole, 22, 59, 288, 544. Augustin (Saint), 461, 462. Auver (Christophe), 540. B. Bachet de Meziriac , 28S, 418 . 427, 448. Bacon (Roger), 464. Railly,38, 456, 482. Baillet , 86. Barbaro (Daniel), 481. Barlaam , 523. 564 TABLE DES AUTEURS. Barocci, 43-4. Barrow,91,109, 142,498. Bayer, 474. Bayle , S30. Beaugrand, 77, 78, 292, 331 , 333. Bède, 430, 463, 472, 502, 303, 303, 306. Bernard (Éd.) , 474, 320, 323, 324. Bernardin Baldi, 272, 814, 320, 821 , 824, 543. Bernelin , 307. BernouUi (Jacques), 19 , 63 , 69 , 97 , 103 , 497. BernouUi (Jean), 69, 97, 141, 216, 238,292, 338. Benedictis (J.-B.), 213, 443, 338, 340. Besson, 282. Bessarion , 326. Beughem , 128. Bhascara Acharya, 418, 419, 420, 423, 426, 428, 442, 447—490, 491, 327. Biagio de Parme , 324. BiUy (De), 443, 313. Binet , 66, 220, 244, 390, 415. Biot, 103. Blancanus, 272. Blanchinus , 527, 540. Bobillier,232, 390, 399,401. Boèce , 289 , 423 , 427 , 437 , 438 , 439, 461 , 462, 463, 493, 803,303, 306, 808, 316, 328, 387. Borelli , 7. Boscovich , 433. Bosse, 76, 78, 83, 88, 86, 87,217, 292, 833, Bossut, 71, 130,238. Bouillaud, 16, 283. Bouvelles , 480, 486. Bradwardin , 423, 480, 486, 512, 821, 823. Brahé, 483. Bragelongne, 131. Brahmegupta, 418, 419, 420—447, 480, 431,489, 491. Braikenridge , 37, 101 , 131 , 139 , 336, 40S. Bressius, 292. Brewsler, 103. Breysig, 217. Brianchon, 34, 78,83, 98,191,214,293, 310, 315, 328, 371 , 400—402. Broscius, 486—487. Bruno , 46. Bufifon, 63, Buhae-ood-deen , 492. Burja, 139. Butéon, 447—839. Byrge , 483. c. Calmet (D.), 474. Camerer, 33. Campanus, 423, 478, 479, 308,511—314, 518. Capella (Marlianus) , 458 , 461 , 462 , 472. Caravage, 293. Cardan, 213, 291, 433, 442,489,491,492, 820, 827, 333, 338, 839, 840, 333. Carnot,72, 117, 124, 184,211—213,216, 238 , 293 , 328 , 342 , 370 , 301 . Casiri, 292, 432, 490, 492, 493. Cassini , 36 , 181. Cassiodore , 289 , 423 , 461 , 462 , 323. Castillon, 284, 328,800. Cavalleri , 22 , 33 , 57 , 61 , 68 , 90 , 92 , 94 , 100, 116, 142, 159,288. César (J.), 457,463. Ccva (J.) , 93, 216 , 238 , 292, 293 , 294, 554. Chamber, 823. Charleniagne , 804. Chaturveda, 421 , 423 , 428 , 437 , 446, 449. Choquet, 346. Ciceron, 437, 469. Clairaut, 69, 138,141, 143,167,832, 853. Clairaut (J«) , 138. Clavius, 443, 479, 497, 512, 313, 338. Clichtovce,466, 473. Colebrooke , 418 , 419 , 420 , 422 , 465, 490. Colonia , 834. Columelle , 458 , 489 , 460. Comiers, 512. Commandin, 30, 41 , 497 , 320, 338. Comte, 284, 413. TABLE DES AUTEURS. 363 Copernic, 463, .iOS, 529. Coriolis, 5S4. Cossali , S24. Cote», 144, 146. Courcicr, 141 , 238. Cousinery, 137, 196, 268. Cramer, 152,828. Crclle,20G,215. Ctcsibius, 543. Curabellc, 86, 87, 330, 831 , 332. Cusa (Nicolas de) , 481 , 523 , 529. D. D'Alembert, 63, 164, 168, 238, 241, 289, 293,411,501. Dandelin, 215, 220,250, 286, 287. Dante (Egnazio) , 348. Dasypodius, 271 , 273 , 474 , 558. Daunou, 464. Dawson , 74. De Beaune, 96, 110. Dechales , 272 , 433. Dde, 497. De Gua , 162. De laHire, 19,48,69,87,88,90, 118— 180, 142,161,171, 195,212,218,346, 550 , 553. Delambre, 24, 27, 419, 431 , 465, 470, 476, 495 , 496 , 497 , 498 , 503 , 511 , 514 , 517, 623, 550. De la Rue, 333, 355. Delorme (Philibert), 855. Dcmctrius , 29. Demonferrand , 390. De Murr, 527. Dcran, 355. Desargues, 34, 39, 47, 67, 72,78,74— 88, 89, 92, 116, 118, 120, 128, 180, 142, 160, 161, 182, 211, 212, 216, 217, 241, 292, 293, 316, 830, 831— 834, 855, 546. Descartes, 22, 28, 37, 62, 63, 67, 58, 60, 65, 68, 71, 75, 76, 81, 86, 91, 94— 07, 104, 111, 113, 116, 140, 143, 161, 256, 257, 277, 288, 830, 850, 417, 482, 548. De Stainville, 871. Dherbelot, 488, 491. Dinostrate, 7, 30. Diodes, 7, 48, 411, 588. Dion Cassius, 481. Dionis du Séjour, 152. Dionysidore, 633. Diophanle, 11, 99, 282, 442, 489, 490, 1567. Doppelmayer, 446. Dumolinet, 559. Dupin (Ch.), 65, 108, 213, 214, 220, 243, 244, 356, 886, 890. Durrande, 238. Durer (Albert), 13S, 216, 529, 5tSS. E. Ebn Jounis, 495, 626. Eisenman, 284. Encontre, 371. Eratosthène, 7, 21 , 46. Errard, 443. Euclide, 9—14, 16, 21, 37, 39, 46, 67, 118, 273—284, 293, 422, 447, 497, 500, 511, 512, 514, 522, 541. Eudoxe, 6, 9. Euler, 45, 53, 66, 152, 153, 175, 214, 241 , 301 , 305 , 328 , 412 , 418, 432, 433, 486. Eutocius, 49, 422, 5^3. F. Fabre d'Étaples, 464, 816, 624. Fabri, 69. Fabricius, 610, 614, 520, 643. Fatio de Duiller, 112. Fiiucher, 357. Fergola, 46,66. Fermât, 22, 41, 87, 68, 60, 61—68, 79, 566 TABLE DES AUTEURS. 86, 88, 90, 94, 96, U2 , 172, 283, 417, 4-43, 443, 527, 846. Fibonacci (Léonard de Pise), 482, 433, 434, 442, 404, 473, 489, 492, 493, bU , i519, 835. Flamsteed, 56. Flauti, 30, 46, 66, 293. Fontenelle, 269. Fourier , 63. Français, 67. Franchini , 491, 514. Fresnel, 108. Frezier, 141, 333, 358. Frischlin, 290. Frisius (Gemma), 291, 466. Frontinus, 431, 457, 458, 489. Fuss, 53, 183, 188, 236, 293, 328, 432. G. Galilée, 16,68, 93, 103, 210,411, 482, 527, 329. Ganesa, 422, 440, 447, 334. Garbinski, 31. Gaultier, 68, 206, 207. Gauricus, 514. Gauss, 215. Geber, 483, 489. Gellibrand , 55. Geminus, 8, 20, 24. Gérard de Crémone, 509, 519. Gerbert (Sylvestre II), 458, 464 , 468 , 466, 472, 493, 803, 804, 808, 857. Gergonne, 83, 107, 113, 191, 218, 238, 288, 288, 328, 329, 371, 408. Gesner (C), 817, 544. Ghetaldi (Marin), 42, 283. Giannini, 42. Girard (Albert), 283, 440, 546. Goens (W.), 459. Golius, 500. Goudin, 152. Goujet, 504. Grandi (Guido) , 31 , 93, 102, 141. Greaves, 467. Grégoire de Nazianze, 543. Grégoire de St.-Vincent, 90—93, 94 , 126, 133, 142, 216, 288, 446. Grégory, 93. Guarini, 120, 348. Gudermann, 239. Gueneau d'Aumont , 238. Guillaume de Malmesbury, 465, 304. Guisnée, 127. Guldin, 29, 57, 90. H. Hachette, 214, 217, 241 , 248, 284, 356, 347. Haenel,445, 457. Hager, 559. Halber, 508. Halley, 12, 20, 41, 47, 36, 125, 140, 153, 134—136,293. Hamet ben Musa, 432, 434, 489, 492. Hamilton, 108, 286. Hasenben Musa, 432, 434, 489, 492. Hassan ben Haithem, 493 — 301 , 327. Heilbronner, 272, 445, 468, 514, 321, 328, 543. Henrion , 460. Heriger, 507. Hermann (Jacques) , 69 , 82 , 112, 141. Hermann Contractus , 308. Hermotime de Colophon , 9. Héron d'Alexandrie, 7, 271 , 431 , 433 , 434 , 492, 498, 543. Héron le jeune, 431 , 434, 544. Herschel, 103, 162, 240. Hipparque,24,233,293. Hippias , 8. Hippocrate de Chio, 3, 9. Horace , 457. Hudde, 99. Huet, 467, 474. Hugo de Omérique , 42. Humboldt, 538,539. Huret (Grégoire) , 79, 331. Hutton, 419. TABLE DES AUTEURS. 567 Huy{îen8,69,91,93, 101—109, 110, 127, 142, U3, 156,161,210,252, -498,527, B58. Hypsicle, 9, 489, Bll, 513, 514. I. Isidore-le-Grand , 514. Isidore de Millet, 49. Isidore de Séviile, 458, 461 , 462, 525. Ivory, 165, 394,896. J. Jacob (Simon) , 444 , 445. Jacobi, 166,215, Jacquier, 82, 145, 346. Jamblique, 557. Jean de Séviile {Johanne» Hispalensis) , 510, 619, 535. Jeaurat , 346. Jordan Nemorarius, 433, 434, 464, 492, 511,516,518,519. Jourdain, 509. Jousse (Mathurin), 355. K. Kâstner, 479. Kepler, 7, 22, 52, 56, 61, 90, 104, 157, 210 , 288 , 252 , 479 , 482-485 , 489, 493, 508, 514. Killingword , 523. Kircher, 283, 478, 481. L. Lacroix, 10, 234, 356, 358. Lagny, 334. Lagrange, 66 , 61, 63, 112, 153 , 163, 165, 168, 169, 188, 252, 267, 328, 412, 486. Lalande, 346, 514. Laloubèrc, 69, 93, 140. Laloubère (Simon), 559. Lambert, 53, 86, 143, 153, 154, 169, 185^187, 846, 870. Lamé, 247. Landen, 174. Laplace, 63, 234. Lawson, 284. Lefebure de Fourcy, 856. Lefrançois, 218, 219. Legendre, 165, 168, 237, 395,446,536. Leibnitz, 22, 62, 69,70,76, 86, 91, 97, 110, 112, 141, 142, 857, 859. Lejeune Dirichlet, 215. Léon , 9. Léonard de Pise [voir Fibonacci.) Léonard de Vinci {voir Vinci.) Léotaud, 93. Le Poivre, 130 — 135, 137, 142, 212, 218, 346. Leroy, 242, 356. Leslie, 42, 135, 175, 284. Lexell, 187, 188, 236, 328. Lhopital, 69, 82, 104, 112, 127, 170, 171 , 498. Lhuillier, 237, 284, 328. Libri, 68, 417, 418, 432, 452, 463, 490, 492, 510, 621, 524, 634. Livet, 370. Lomazzo, 531. Lorcnzini , 93. Lucas de Burgo (voir Paccioli.) Lucrèce , 457. Ludolph Van Ceulen , 292, 432, 433, 445, 538. Lunis (Guillaume de) , 524. M. Mac Cullagh , 108. Maclaurin, 16, 37, 101, 124, 142, 143, 146 —151, 154, 159, 162—170, 262, 266, 836, 394, 405. Macrobe, 461. Magini , 55. Magnus, 237,239. Mahomet Bagdadin, 497. 568 TABLE DES AUTEURS. Mahomet ben Husein , 830. Malfati , 328. Mallebranche , â57. Malus, 107, 333. Mamoun (Al) , 489, 491. Margarita philosophica , 289 , 422 , 433, 434, 439, 461,481. Marinoni ,446. Marinus, 49. Mascheroni, 214. Maternus (Julius Firmicus), 438. Mauduit, 127. Maurice, 102. Maurolycus, 120, 291 , 293 , 343, 496, 316. Memmius, 338. Mendoza , 344. Menechme, 6, 49. Ménélaus , 23, 26, 233, 291, 489. Mentelius, 314. Mercator, 93. Mersenne, 71, 73, 79, 81, 86, 89, 104, 283, 292,293,423,346. Metius (Pierre), 33. Meunier, 301. Milichius, 489. Millon , 334. Milnes, 170. Minding, 333. Mobius,213. Mohammed ben Musa , 432 , 434 , 432 , 48S , 489—492, 324. Monge, 32, 36, 63, 87, 117, 124, 123, 139, 189—210,211,219, 241,244, 268,288, 833, 370,376—383. Montesquieu , 94. Montfaucoa, 463. Montucla, 29, 44,91, 104, 128, 130, 272, 273, 296, 330, 431, 443, 463,474, 493, 494, 303,314, 821. Morssianus , 466. Morton, 390. Murdoch ,148. Murhard, 128, 443,479. Musa ben Schaker, 432, 489, 817. Mydorge, 88, 92,216. Nassir Eddin de Thus, 284, 801. Naudé, 432. Neil,64, 101. Neper, 83,282,334. Nestor ( Dionysius) , 838. Newton , 7, 10 , 22 , 38 , 33, 39 , 69, 76, 80, 81, 90, 91, 101, 102 , 104, 133, 142, 143, 144—146, 134, 133, 137—162, 167, 169, 193 , 210, 218 , 232, 266 , 336 , 347, 403 , 412, 433,482. Nicéron , 83, 448. Nicolas , 93, 216. Nicole, 69, 143,181. Nicomaque, 462, 816, 334, 887. Nicomède, 7, 23, 410. Nonius, 99, 140. 0. Olivier, 32 , 386. OItaiano, 44, 328. Oronce Finée, 291 , 433, 446, 466, 834. Ozanam, 44, 67, 86, 346. P. Paccioli (Lucas de Burgo), 42.3, 433, 434, 442, 447, 466, 473, 479, 490, 492, 493, 812, 313, 320, 333—339. Pagani, 272. Paolo di Digomari , surnommé Paolo dell' Abbaco, 473, 324. Pappus, 7, 12, 14, 17, 26, 28 — 46, 87, 39 , 1 16 , 180 , 274 , 291 , 297, 313 , 324 , 328, 422, 476, 814, 327, 348. Paracelse , 479 . Parent, 138, 242. Pascal, 31, 34, 48, 63, 68—74, 76, 78, 81,88, 89, 92, 93, 116, 120, 123, 140, . 142, 160, 162, 193, 210, 212, 216, 243, 288 , 292 , 293 , 330 , 33 1 , 336 , 400—402 , 408. Peccam, 818. TABLE DES AUTEURS. 569 Peletier, 479, 489, 491 , 812, 839. PeIlo8,473, 834. Pemberlon, 102, 158. Perier, 70. Perse, 472. Perseus, 8, 271. Petitot, 217. Peucer, 422. Peverone, 460, 834. Peyrard, 16, 20, 48. Pez (B.), 808, 306, 308. Philon de Tyane, 7, 29. Pithou, 807. Pitiscus, 88. Pitot, 139. Planude, 464, 469. Platon, 8, 7, 290, 411, 426, 434, 463, 814. Platon de Tivoli, 810. Pline, 437. Playfair, 284. Plucker, 218, 288. Plutarque, 472, 814. Poinsot, 48, 112, 282, 283, 415, 416, 478, 486, 318, 336. Poisson, 62, 66, 166, 386, 886. Polybe, 472. Poncelet , 34 , 37, 70 , 74 , 83 , 88 , 90 , 1 34, 136,147,138, 191, 199,213,218,219, 223 , 232 , 243 , 248 , 230 , 238 , 264 , 284, 288,293,308,310,314,329,342,408, 847. Porta, 216. Pozzo, 136. Proetorius , 432 , 444 , 448 , 446. Proclus, 8, 9, 12, 24, 31, 48, 89, 272, 274,276, 426, 463, 497,814. Prosdocimo , 309 , 624. Ptolcmée , 28 , 26 , 27 , 233 , 291 , 431 , 489 , 494,498,809,815, 316. Purbach , 291 , 446 , 432 , 813 , 326 , 339. Pylhagore, 4, 290, 428, 434, 463, 467, 472, 478, 808,814,829,538. Quetelet,91 , 108, 106, 107, 118, 162, 218, Toï. XI. 219, 220, 238, 248 , 267 , 272, 286, 380, 332,386,390,398,411. R. Rabuel, 140. Radulfus Laudunensis , 808. Ramus, 272,433, 479, 483,486, 814, 817, 829. Regiomontanus, 291, 444, 447, 489, 493, 813, 326—529, 540. Reisch. (Voir Margarita philosophica.) Renaldini , 283. Ricci (Michel Ange) , 93. Richer , 334. Rigault(N.),489. Riscn (Adam) , 840. Robertson, 317. Roberval , 87 , 88—6 1 , 68 , 90 , 93 , 94 , 96, 104, 140, 142, 161,848. Rochat , 329. Rodolphe de Bruges , 510, 811. Roemer, 87, 161. RogerBacon,511,517,319. Romanus (Adrianus), 33, 443,838. Rosen, 452, 490. Rudolff (Christophe) , 540. S. Sacro Bosco, 464, 466,311, 315, 318,819. Saladini , 313. Sauveur , 243. Saville, 273, 283. Savosarda, 432, 810, 817. Scaliger (J.), 443, 446. Scheubel, 489. Schoner (J.), 291, 466, 471, 823, 828. Schooten, 93, 98, 128, 172, 214, 283, 292, 427, 448, 527. Schroter, 468. Schubert, 139, 293. Scorza , 46. Scdillot, 496. 72 570 TABLE DES AUTEURS. Sédillot (L, Am.), 493, 494, 496, 498, 499, Sénèque, 437. Serenus, 47. Serenus (Ch.) , 3S6. Servois, 83, 98, 213, 329, 371, 453. S'Gravezande , 346. Simon de Bredon , 293. Simpson (Th.), 33, 75, 495. Simson (R.), 13, 34, 36, 41, 42, 43, 67, 68, 80, 124, 127, 133, 170, 173, 184, 274, 273, 498, 300, 501, 327. Sirigatti, 136, 348. Sluze , 68 , 93 , 99 , 127 , 498. Snellius, 42, 53, 140, 2^4, 292, 432, 433, 445. Sorlin, 237. Sporus, 7. Stanhop , 73. Steiner, 206, 213, 239, 288, 390, 401. Stevin, 89, 92, 98, 133, 140, 216, 292, 346, 422, 456, 491, 538. Stewart (M.), 42, 143, 133, 154, 169, 173—185, 232, 274, 324, 328, 333, 501. Stifels, 291, 486, 489, 338, 339. Slirling, 143, 131. Strachey, 418, 419. Sturm, 83, 316, 341, 330. T. Targioni, 310. Tartalea, 213, 289, 423, 43!, 433. 434, 447, 489, 491, 492, 320, 533, 530, 538, 539. Taylor, 346, 418, 420. Terquem, 419. Tirabosclii, 511. Thaïes, 4. Thebit ben Corah , 493 , 496 , 520. Théodose, 25, 235, 489, 510. Théon, 5, 534, 337. Theudius de Magnésie, 9. Thœtète , 9. Torricelli, 68, 93. Tschirnhaussen , 106, 110—114,553. u. Ubaldi (Guido), 89, 98. V. Valla(G.), 434, 460. Vallée, 242, 356. Van Heuraet, 64, 101. VanRees, 219, 286. Varignon, 357, 412, 545. Varron, 457. Velser, 859. Venturi, 431 , 498, 517, 631, 543. Verhulst, 103. Verner, 120,332,333. Victorius, 308. Viète, 5, 52-55, 65, 73, 282, 417, 442, 443, 493, 494, 538, 341, 542. Vignier, 507. Vignolle, 136, 348. Villedieu (Alexandre), 513, 519. ViUoison, 474, 805. Vincent de Beauvais, 289, 423, 464, 465, 466, 311, 518, 519. Vinci (Léonard de), 410, 529, 530—532. Virgile, 437. Vitellion,498,311,518. Vitruve, 437. Viviani , 7 , 93 , 141,312,514. Vossius (Gérard-Jean) , 272 , 510, 314 , 515. Vossius (Isaac), 464, 474. w. Wallace,284. Wallis,67,69,99, 101, 108, 122, 126, 141 , 454 , 465, 466 , 473, 485, 502, 508 , 524 , 529. Ward(J.),474. Waring, 133,218. Weidler, 346, 467 , 474, 314 , 328. TABLE DES AUTEURS. 571 Witt (Jean de) , 100 , 126 , 189 , 268. Wronski , 284. Wolf, 128. Wren,86,68, 93, 108,242. ^« Wright, 140. Zamberti , 423, 479, K12. Fin DE LA TABLE DES AUTEURS. MÉMOIRE DE GÉOMÉTRIE sva r m DEUX PRINCIPES GENERAUX - % « DE LA SCIENCE LA DUALITÉ ET L'HOMOGRAPHIE. To«. XI. » 73 n ..V» \vv\^lvvvvv^l\^lVV\\vvvv\^^^lVVV^^^lV\^\\\v^(vvvvv^^A^^l^^ MÉMOIRE DE GÉOMÉTRIE _/ _ r DEUX PRINCIPES GENERAUX DE LA SCIENCE : LA DUALITÉ ET L'HOMOGRAPHIE. PREMIÈRE PARTIE. PRinCIPE DE DUALITE. $ I^*". Deux méthodes à suivre. Nous avons dit, dans notre cinquième Époque, que le Principe de Dualité, que nous énoncerons d'une manière absolue, comme une propriété inhérente aux formes de l'étendue, n'est qu'une déduction rationnelle d'un seul théorème de géométrie. Il paraîtrait donc natu- rel de commencer par démontrer ce théorème, pour en tirer, comme une simple conséquence, le principe en question. C'est en efiet ce que l'on peut faire aisément. Mais si, généralement, une déduction d'une vérité fondamentale , offre moins de généralité que cette vérité 576 MÉMOIRE DE GEOMETRIE. première , de telle sorte que l'on ne puisse passer indifféremment de l'une à l'autre, il n'en est pas ainsi du principe de dualité, tel que nous allons le présenter. Ce principe comporte une si grand généra- lité, et il est d'une manière si précise l'expression ou la traduction du théorème en question, dans toute sa portée, que l'on peut pas- ser du principe de dualité à ce théorème, avec la même facilité que du théorème au principe. De là résulte qu'on peut suivre deux marches différentes, l'une con- duisant directement au principe, et l'autre directement au théorème. Dans la première, nous faisons usage de la géométrie analytique de Descartes, c'est-à-dire de la doctrine des coordonnées; la seconde se renferme dans les seules ressources de la géométrie pure des An- ciens qui 5 de la sorte , auraient pu parvenir , avec leurs seules con- naissances acquises, au principe de dualité. Cette seconde manière de procéder serait plus logique, et plus conforme au but que nous nous sommes proposé dans cet écrit, la généralisation et l'accroissement des doctrines de la géométrie ; mais, bien que cette marche soit extrêmememt simple, il nous faudrait cependant prendre d'un peu haut diverses considérations géométriques auxquelles on est moins accoutumé aujourd'hui qu'à l'emploi des formules de l'analyse. Pour nous conformer donc aux habitudes de la plupart des géomètres, et offrir une lecture plus facile, nous em- ploierons, pour le moment, la méthode analytique. Ainsi nous dé- montrerons directement le principe de dualité, et nous en conclurons le théorème unique de géométrie, dont ce principe n'est que l'ex- pression. Nous donnerons dans un autre écrit , où nous présenterons la théorie et diverses applications du rapport anharmonique , la dé- monstration directe, purement géométrique et indépendante de la doctrine des coordonnées, du théorème général en question. Cette démonstration, quand les voies seront préparées, sera plus briève et plus facile que la marche analytique que nous allons employer pour le moment. MÉMOIRE DE GÉOMÉTRIE. 577 § II. Méthode analytique. — Propositions préliminaires. (1) Théorème I. Si Von conçoit dans V espace un plan mobile , déterminé dans chacune de ses positions par une équation rap- portée à trois axes coordonnés quelconques des x, y et z; et que les paramètres de cette équation contiennnent , au premier degré, les coordonnées d'un point que nous appellerons directeur ; 1° Quand ce point parcourra un plan, le plan m,obile tournera autour d'un point fixe ; 2" Quand le point parcourra une droite , le plan mobile tournera autour dune seconde droite ; S** Quand le point parcourra une surface courbe , le plan mobile roulera sur une autre surface courbe ; Si la première surface est du second degré , la seconde sera aussi du second degré ; Et si la première surface est géométrique et du degré m, la seconde surface sera aussi géométrique, et telle que par une droite quelconque , on pourra lui mener m plans tangens. En effet soient x' , y\ s', les coordonnées du point directeur, l'équa- tion du plan mobile sera de la forme (1) Xjt' -4- Yy' -»- Z«'=:D; X, Y, Z et U étant des polynômes de la forme ax -\- by -{■ es — d, où les coordonnées courantes x, y, s n'entrent qu'aii premier degré. Soit (2) Lr H- My -t- N» = 1 l'équation du plan que parcourt le point directeur; L, M, N étant des constantes. Les coordonnées a?', y', s' de ce point auront entre elles la relation (8) L*' + My' -H Na'= 1. On voit aisément que les valeurs des trois coordonnées x, y, 2 , tirées des trois équations suivantes : (4) X = LU, Y = MU, X = NU, 578 MEMOIRE DE GÉOMÉTRIE. déterminent un point qui se trouve sur le plan mobile dans toutes ses positions. Car si on substitue ces coordonnées dans l'équation (1) du plan mobile , il en résultera l'équation Lx' -f My' -J- N^' = 1 , qui est identique, puisqu'elle n'est autre que l'équation de condition (3). Ainsi le plan mobile, dans toutes ses positions, passe par un point fixe , dont les coordonnées sont déterminées par les trois équations (4) ; ce qui démontre la première partie du théorème. Appelons ce point fixe le pôle du plan que le point directeur a parcouru. Quand le point directeur parcourt une droite, qu'on imagine deux plans passant par cette droite ; le point directeur se mouvra dans ces deux plans en même temps; le plan mobile passera donc par deux points fixes qui seront les pôles de ces plans ; ce plan mobile tour- nera donc autour de la droite qui joint ces points ; ce qui est la se- conde partie du théorème. Si le point directeur parcourt une surface courbe A , le plan mo- bile enveloppera une seconde surface courbe A'. Supposons la surface A géométrique et du degré m : une transver- sale menée arbitrairement la rencontrera en m points ; à chacun de ces points, considéré comme point directeur, correspondra un plan tangent à la surface A'; ces plans tangens, qui seront en nombre m, passeront tous par une même droite ( d'après la seconde partie du théorème) ; la surface A' admettra donc m plans tangens passant par une même droite quelconque. Si la surface A est du second degré, la surface A' sera donc aussi du second degré ; ce qui démontre les deux dernières parties du théorème. (2) La surface A', qui est l'enveloppe du plan mobile, quand le point directeur parcourt la surface A, peut être déterminée d'une seconde manière, par points, au moyen du théorème suivant : Théorème II. Quand le point directeur parcourt une surface courbe A, la surface enveloppe du plan mobile est le lieu géomé- trique des pôles de tous les plans tangens à la surface A; Et le point où le plan mobile , dans une de ses positions, touche MÉMOIRE DE GÉOMÉTRIE. 579 cette surface enveloppe , est le pôle du plan tangent à la surface A, mené par le point directeur auquel correspond cette position du plan mobile. En effet, pour obtenir le point où le plan mobile ^ dans une de ses positions, touche sa surface enveloppe A' , on regarde ce point comme l'intersection de ce plan tangent et de deux autres plans tan- gens infiniment peu différens ; or ces trois plans correspondent à trois positions du point directeur infiniment voisines, c'est-à-dire à trois points d'un élément de la surface A , lesquels sont sur son plan tan- gent. Le point de contact du plan mobile et de la surface A' est donc le pôle de ce plan tangent à la surface A ; ce qui démontre, en même temps , les deux parties du théorème énoncé. (3) Remarque. Ce théorème sera très-utile pour construire, par points, la surface enveloppe du plan mobile, quand le point direc- teur parcourra une surface donnée A. Car il suffira de mener les plans tangens de la surface A, et de chercher leurs pôles ; ce seront les points de la nouvelle surface. Or ces pôles se déterminent aisément, car soit La? + My -|-N^= 1 l'équa- tion d'un plan tangent à la surface A, les coordonnées de son pôle seront données par les trois équations linéaires X = LU, Y = MU, Z = NU. Ce moyen de construire par points la surface enveloppe du plan mobile, sert aussi pour trouver immédiatement l'équation de cette surface, sans recourir au calcul différentiel, ordinairement indispen- sable dans les questions de surfaces enveloppes. Car le calcul se réduira à éliminer entre les trois équations que nous venons d'écrire, et l'équation de la surface proposée A, les coor- données x' , y' , z' appartenant à cette surface; l'équation résultante en X, Y, Z, qui sont des fonctions des coordonnées x, y, z de la surface enveloppe du plan mobile, sera précisément l'équation de cette surface. Supposons, par exemple, que le point directeur parcourre la sur- 580 MÉMOIRE DE GÉOMÉTRIE, face du second degré représentée par l'équation Aa;^ -H By" -♦- Ca^ -t- 2 (Da; + Ey -+- Fa) = K; l'équation du plan tangent au point {x' , y' , s' ) de cette surface sera x{kx' -f- D)-+-y (By' -t-E) -4- a(Ca' -i- F) = K — (Dar' h- Ey' -*- Es'). Les trois équations de condition ci-dessus seront donc X [(K — {Dx' 4- Ey' -t- Fa')l = (Aa;' h- D). U , Y [(K — (D:r' -+- Ey' + Fa')] = (By' + E) U , Z [(K — {Dx' -+- Ey' + Fa')] = (Ca' -t- F) U. Il suffit d'éliminer x' ,y' , z' entre ces trois équations et la suivante kx" ^ By" -t- Qz" -I- 2 (Do;' -4- Ey' h- Fa') = K. Le résultat /X= Y' Z'\/ D' E' F'\ / LD ME NF\, (r- -^ F -" c^J( '^ -" r -*- r -^ rj = (' " T " T -" rj ' est l'équation de la surface enveloppé. Cette équation est du second degré, puisque X, Y, Z sont des fonctions linéaires des coordonnées courantes x ,y , z. (4) Théorème IIL Quand le point directeur se meut à l'infini, le plan mobile tourne autour d'un point fixe , comme si le point directeur parcourait un plan. En effet, si le point directeur est situé à l'infini sur une droite ayant pour équations a; = oa , y = bz, on aura x' = az' , y' = bs' ; et l'équation (1) du plan mobile, correspondante à cette position du point directeur, deviendra (aX -t- 6Y -t- Z)2' = D. * MÉMOIRE DE GÉOMÉTRIE. 581 Or z' est infini; cette équation se réduit donc à oX -♦- AY H- z =: o. Telle est l'équation du plan mobile, dans sa position correspon- dante au point directeur situé à l'infini sur la droite dont nous avons posé les équations. Ce plan passe évidemment par le point dont les coordonnées a? , y,z sont déterminées par les trois équations i Donc, dans quelque position que soit situé, à l'infini, le point di- recteur, le plan mobile passera par le point fixe que déterminent ces trois équations j comme si le point directeur parcourait un plan. C. Q. F. D. (5) Si l'on cherchait à déterminer ce plan, il faudrait mettre dans les trois équations (4), à la place dex,y, z , leurs valeurs tirées des trois équations ci-dessus; on aurait ainsi les valeurs des coefficiens L, M, N correspondantes à la position de ce plan. Or ces équations deviennnent LU = o, MUt=o, NU=so,- U n'est pas nulle, puisque c'est une fonction de x , y, z, qui est devenue un nombre par la substitution des valeurs de ces coordon- nées; il faut donc qu'on ait L = o, M = o, N = o; et dès lors l'équation L;r 4- My + Ns = 1 représente un plan situé à l'infini, et indéterminé de direction. Nous pouvons donc énoncer, avec M. Poncelet, cette idée para- doxale, mais d'une justesse mathématique: L'espace indéfini a pour enveloppe une surface plane. ( Traité DES PROPRIÉTÉS PROJECTIVES, p. 373 ). To«. XI. 74 582 MÉMOIRE DE GÉOMÉTRIE. (6) Théorème IV. Quand le point directeur prend quatre posi- tions a, b, c, d, en ligne droite, le plan mobile prend quatre positions correspondantes^ que nous désignons par Al, B, C^ D; Ces quatre plans passent par une même droite , et leur rapport anharmonique^ est égal à celui des quatre points a, b, c , d ; c'est-à- dire que l'on a sin. C,A sin. D,A ca da sin. C,B ' sin. D,B ch ' db En effet, les quatre plans A, B, C_, D passent par une même droite, puisque les quatre points a, b , c , d sont en ligne droite j par consé- quent si on tire une transversale quelconque qui rencontre ces quatre plans aux points «, 6, y, è, on aura ya ^a sin. C,À sin. D,A yÇ ' dS sin. C,B * sin. D,B Il suffit donc de prouver que le premier membre de cette équation est égal au second membre de l'équation ci-dessus. Pour cela, soient |, y, ç, les coordonnées d'un point fixe K , pris sur la droite des quatre points a, b, c, c?; et soient r' , r" , r'" , r'\ les distances de ces quatre points au point Kj leurs coordonnées seront x' = Ç -H /r' , j y' = V -f- mr' , \ pour le point a ; z' = Ç H- wr',- j x" = § -+- Ir" , I y" = y -+- mr" , \ pour le point b; z" = Ç -+- nr"; \ x'" = Ç -t- Ir'" , I y"' = V -\- mr'" , ) pour le point c ,• z'" = Ç -t- nr'"; / et a;iv = Ç + ;riv , j yiv = y ^_ twr'v , \ pour le point d ; ' Nous avons donné dans la Note IX la définition du rapport anharmonique de quatre points, ou de quatre plans. MÉMOIRE DE GÉOMÉTRIE. 583 Ijtn, n étant les quantités angulaires qui déterminent la direction de la droite ab. L'équation du plan mobile, dans sa position A , correspondante au point directeur a, est 1-, XÇ -f. Yv -1- ZÇ — U -•- (/X H- mY -(- rtZ) r' = 0. soit p' la distance du point K au point où ce plan rencontre le droite ab ; les coordonnées de ce dernier point seront de la forme X = Ç -\- Ip , y = !/ -4- mp , , ) a = Ç -f- ♦»/; elles doivent satisfaire à l'équation du plan; les y mettant, on aura une équation qui donnera la valeur de p'. Cette équation sera évidem- ment de la forme P + Q/ + (R + S/)r' = o,- P, Q, R, S étant des fonctions de ^, v, ç, /, m, n. Les distances /s", p'" , p^^, du point K aux points où les trois autres plans B, C, D rencontrent la droite ab, seront données parles équa- tions semblables p + Qp" + (R -H S/' )f" =0, P + Qp"' +{K+ S/")r"'=o, P -t- Q/î«' -+- (R -F Sp" ) r'v = 0. De ces équations, on tire p'" — p' r"' — r' 0-4-Sr" D'où /// '/ r'" — r" Q + Sr' ' ^IV p' r.v_^ Q-i-St^' û\y — p" fz, paral- lèles entre eux. Que le plan des deux axes k.x , By, et celui des deux axes kx , Cs , soient les deux plans donnés. ToK. XI. 81 638 MEMOIRE DE GEOMETRIE. Soit F [x, y, z) == o l'équation de la surface. Soient oc', y',z' , les coordonnées d'un plan transversal; les plans tangens menés à la sur- face, par la droite d'intersection de ce plan transversal et du plan des deux axes kx, By, couperont l'axe kz en des points dont les distances z au point C seront données par l'équation F (^% y', 2) = 0. On peut mettre cette équation sous la forme F [a;', y', z' H- (^ — «')] = 0. ou ^, , . ,, d'f , „ d'^ (2—2')' d^Y {z—z'y F [or , «', z) H (z — z ) -\- -f- + = 0 , ^ ^' ^ dz'^ ' dz" 1.2 dz'- 1.2. ...m m étant le degré de l'équation de la surface. Les racines {z — z') de cette équation sont les segmens compris sur l'axe des z, entre le plan transversal et les plans tangens; leur pro- duit est égal à \.-i....m.T{x',y',z') da"» Mais la transversale donnée est parallèle à l'axe Cs , donc les seg- mens interceptés sur elle, entre le plan transversal et les plans tan- gens, sont proportionnels aux segmens interceptés entre les mêmes plans sur l'axe ÇaZ. Ainsi le produit des segmens faits sur la trans- versale est égal à K.1.2....OT. F (a;', y', g') d-F ' K étant une constante qui ne dépend que de la distance de la trans- versale donnée au plan des deux axes Axy By. Pareillement, si par la droite d'intersection du plan transversal et du plan des deux axes kx, Cs, on mène les plans tangens à la sur- face, le produit des segmens compris sur la transversale, entre le MÉMOIRE DE GÉOMÉTRIE. 639 plan transversal et les plans tangens, sera égal à d"F ♦ dy'" K' étant une seconde constante qui ne dépend que de la distance de la transversale au plan des deux axes Aa? _, Cs. Le rapport des deux produits des segmens faits sur la transversale, suivant l'énoncé du théorème, est donc égal à K d"¥ ^ d-F F' d^ ' 1^-' Ce rapport est constant , parce que l'équation de la surface étant du degré m, les deux expressions d-F d"F rfy'"' dz'" sont des nombres ; le théorème est donc démontré. (90) Notre système de coordonnées peut procurer aussi une dé- monstration directe des propriétés générales des surfaces géométri- ques, que nous avons déduites ($ XIII), par le principe de dualité, du théorème de New^ton sur les diamètres des courbes. Nous avons donné cette démonstration directe dans la Corresp. math, de M. Que- telet, t. VI, p. 81. Je ne pense pas que le système de coordonnées en usage puisse conduire à une démonstration de ces propriétés , d'un nouveau genre, des surfaces géométriques. § XVIII. Construction analytique des figures corrélatives. (91) Dans les applications que nous venons de faire du principe de dualité, pour démontrer des propriétés générales de l'étendue, nous avons fait usage de ce principe seul, pris dans toute sa géné- ralité, sans avoir besoin de construire les figures corrélatives, et sans avoir égard aux différentes variétés de formes qu'elles pourraient pré- senter, suivant le mode de construction qu'on emploierait. 640 MÉMOIRE DE GEOMETRIE. Mais on peut demander de construire la figure corrélative d'une figure donnée. Cela se fera très-aisément de deux manières générales, analyliquement et géométriquement. D'abord par l'analyse. On prend l'équation générale d'un plan , rapportée à trois axes coordonnés quelconques, et renfermant, au premier degré, les coordonnées x' , y' , z' , d'un point; cette équa- tion sera de la forme (1) Xa:' -4- Yy' -1- Zs' = U, X, Y, z et U, étant des fonctions linéaires des coordonnées courantes X, y, z. Si on veut déterminer un plan de la figure corrélative, correspon- dant à un point de la figure proposée, on mettra les coordonnées de ce point dans l'équation (I) à la place de x' , y' , z' ; et cette équation deviendra celle du plan cherché. Si on veut déterminer un point de la figure corrélative , correspon- dant à un plan de la figure proposée, on prendra l'équation de ce plan ; je la suppose (2) La: + My -f- N« = 1 ; et les coordonnées du point cherché seront données, ainsi que nous l'avons démontré (1), par les trois équations (3) X = LU, Y = MU, Z = NU, OÙ ces coordonnées n'entrent qu'au premier degré. (92) Si, réciproquement, on veut déterminer, dans la première figure, le plan auquel correspondra ie\ point désigné de la seconde figure, on fera usage des mêmes équations (3), où l'on remplacera les coordonnées x , y , z, qui entrent dans les polynômes X, Y, Z, et U, par les coordonnées x" , y" , z" du point donné de la seconde figure; et ces équations donneront les valeurs des paramètres L, M, N, du plan cherché. Désignons par X", Y'', T," , U", ce que deviennent les polynômes MÉMOIRE DE GÉOMÉTRIE. 641 X, Y, Z, U, par la substitution dont nous venons de parler; on aura X" Y" Z" L = — , M = — , N = — , L" U" 11" et l'équation du plan de la première figure, auquel correspond le point {x" , y" , s",) de la seconde figure, sera \"x ^ T'y + Z"a = U". (93) Remarquons que si le point a;", y", s", était considéré comme appartenant à la première figure, le plan qui lui correspondrait dans la seconde, aurait pour équation Xx" -f- Yy" -t- Zs" = V. Cette équation diffère, en général, de la précédente; ce qui fait voir que : Dans doux figures corrélatives , à un même point de F espace, considéré successivement comme appartenant à la première figure, puis à la seconde, correspondent deux plans différens. Dans quelques modes de construction des figures corrélatives, tel que celui des polaires réciproques , ces deux plans se confondent tou- jours. Mais c'est là un caractère particulier de ces figures, étranger en quelque sorte au principe de dualité, et dont en effet nous n'avons point eu besoin de faire usage dans nos applications de ce principe. Nous donnerons dans un des paragraphes suivans la théorie géné- rale des figures corrélatives qui jouissent de cette propriété particulière. (94) Nous avons dit comment on déterminera, au moyen des trois équations linéaires (3), les coordonnées du point qui correspond, dans une figure corrélative, à un plan de la figure donnée. Comme ce calcul, sans offrir de difficulté, est un peu long, nous allons en donner le résultat. Conservons à X, Y, Z et U, les expressions générales que nous leur avons données (8); et désignons par le symbole (ab'c") le polynôme a (b'c" — b"c') -f- o' (b"c — Ac") H- a" (ic' — *'c); 642 MEMOIRE DE GEOMETRIE. par le symbole {a'b"c"') ce que deTÏent ce polynôme quand on y change a en a', b' en b" , et c" en &" / par {d'u"b"') ce que devient ce premier polynôme , quand on y change a en d' , b' en a" , et c" en b'" ; et ainsi de suite. Les expressions des coordonnées x , y , z, au point qui correspond au plan donné, seront _ (db'c") — {d'b"c"')L -+- (d"b"'c) M — (d"'bc') N "^ ~ (ab'c") — {a'b"c"') L -+- (a"b"'c) M — (a"'bc') N ' _ (da'c") — (d'a"c"') L + {d"a"'c) M — (rf"^ac") N ^~ (afi'c") — (a'i"c"') L -h (a"Z>"'c) M — (o"'ic') N ' _ (V -»- c'y' — z' Substituant ces valeurs dans les formules précédentes, on obtient ^ (db'c") (p'x' t- q'y'—z') — {d'b"c"') p' + {d"h"'c) g' + (d"'bc') ^ '^ (ab'c") (/)V -I- q'y'—z') — {a'b"c"')p' -t- {a"b"'c) q' -+- {a"'bc') ' (da'c") (p'x' H- g'y'— a') — (d'a"c"') p' -»- (rf"o"'c) q' -t- (rf"'ac") * ~ (ab'c") (p'x' ■+■ q'y'—z')—{a'b"c"')p' -♦- {a"b"'c)q' -t- (o"'6c') ' («to'fc") (pV + 9'y'— g') — {d'a"b"') p' -4- (rf"a"'fc) g' + {d"'ab") * "^ (oi'c") {p'x' -f- 9'y'— a')— («'A"c"')i>' + (o"i"'c) g' -t- (a"'Z>c' ) * Telles sont les coordonnées d'un point de la surface corrélative d'une surface proposée, en fonction des coordonnées d'un point de celle- ci. Les deux points se correspondent^ mais comme jusqu'ici le mot correspondant nous a servi pour désigner la relation entre deux parties corrélatives dans une figure et sa transformée , telles que un point et un plan, nous dirons que ces deux points des deux surfaces sont réciproques. On reconnaît les points réciproques dont Monge avait donné une expression particulière dans le titre d'un mémoire qui , je crois, n'a pas été publié. {Voy. la note XXX.) § XIX. Construction géométrique des figures corrélatives. (96) Soient a, b ,c, d, e, cinq points quelconques delà figure pro- posée; on pourra prendre arbitrairement dans l'espace cinq plans A, B, C, D, E, comme devant correspondre respectivement à ces cinq points, dans la figure corrélative qu'il s'agit de construire. ($11, théorème V). Il nous faut déterminer dans cette figure: !•* Le plan qui correspondra à un sixième point quelconque de la figure proposée; 644 MEMOIRE DE GEOMETRIE. Et 2° le point qui correspondra à un plan quelconque de cette figure proposée. Pour cela, considérons le tétraèdre abcd. Par le point e menons trois plans passant respectivement par les trois arêtes ab , bc, ca', et par un sixième point m menons trois autres plans passant aussi par les trois arêtes ab , ac, bc. Soit M le sixième plan de la figure corrélative, qui correspond au point m; c'est le plan que nous voulons déterminer. Aux quatre plans qui, dans la première figure, passent par l'arête ab, et qui sont cab, dab , eab , mab , correspondent, dans la seconde figure, les quatre points CAB, DAB, EAB, MAB'. Le rapport anharmoni- que des quatre plans est égal au rapport anharmonique des quatre points. (Théorème IV.) Cette égalité fera connaître le point MAB, c'est-à-dire le point où le plan cherché coupe la droite d'intersection des deux plans donnés A, B. Une égalité semblable fera connaître le point où le même plan cherché rencontrera la droite d'intersec- tion des deux plans donnés A, Cj et enfin une troisième égalité sem- blable fera connaître le point où ce plan rencontre la droite d'inter- section des deux plans B, C. Ainsi le plan cherché est déterminé par trois de ses points. C'est la première question que nous avions à résoudre. Maintenant, pour trouver le point n qui correspond à un plan N de la première figure, on prendra le point où ce plan N rencontre l'arête da du premier tétraèdre; à ce point correspondra, dans le second tétraèdre , le plan mené par l'arête DA et par le point cher- ché. On aura ainsi sur l'arête da quatre points qui seront 1° a, 2" t/, S*' le point où le plan ebc rencontre l'arête da , et 4" le point où le plan N rencontre cette arête ; et l'on aura quatre plans correspondans, passant par l'arête DA, lesquels seront 1° A, 2° D, 3° le plan mené par le point où le plan E rencontre l'arête BC, et 4° le plan mené par le point cherché. Le rapport anharmonique de ces quatre plans ' Nous désignons un point par les trois lettres qui représentent trois plans passant par ce point. MÉMOIRE DE GÉOMÉTRIE. 645 sera égal à celui des quatre points; cette égalité fera connaître le quatrième plan , celui qui passe par le point cherché. Deux autres égalités semblables feront connaître deux autres plans menés par les deux arêtes DB, DC, respectivement, et passant par le point cherché. Ainsi ce point sera donné par l'intersection de trois plans qu'on déterminera facilement. Le problème de la construction géométrique des figures corrélatives est donc résolu complètement. (97) Dans la pratique, on exprimera le rapport anharmonique de quatre plans par celui des quatre points où ces plans rencontrent une transversale; et on prendra pour cette transversale l'arête du tétraèdre opposée à celle par laquelle passent les quatre plans. On réduira, de cette manière, la construction des figures corré- latives à des formules très-simples et d'une grande généralité. Les quatre plans A, B, C, D, de la seconde figure, forment un tétraèdre dont les quatre faces correspondent respectivement aux quatre sommets du tétraèdre abcd de la première figure. Désignons par a' , b', c', d' , les quatre sommets opposés à ces faces respective- ment. Soient e, « les points où les deux plans ebc , mbc rencontrent l'arête ad; et soient e' , «' les points où les deux plans E , M rencontrent l'arête a'd' du second tétraèdre. Le rapport anharmonique des quatre plans abc, dbc , ebc , mbc sera le même que celui des quatre points , a, d,e, a; mais il est égal , comme nous l'avons dit ci-dessus (96), à celui des quatre points d' , a', e', a, qui correspondent aux quatre plans, dans la seconde figure; on aura donc aa ea a'd' e'd' (Aj ~T • "7 ^ ~r~i • ~7T î ad fd aa ea d'où aa a'd' f ea ^ e'd' ad a a' Ked ' e'a' Le rapport f^«-^ est une quantité constante, quel que soit le To«. XI.' ' 82 646 MEMOIRE DE GEOMETRIE. point m, puisqu'il ne dépend que de la position du point donné e et du plan pris arbitrairement E , qui lui correspond. Ainsi l'on a aa a'd' (a) — = A : tta a a 1 étant une quantité constante. Pareillement 6 étant le point où le plan mac rencontre l'arête bd du premier tétraèdre; et & le point où le plan M rencontre l'arête b'd' du second tétraèdre, on aura eh e'd' (a) — = H- ; ^ ' Sd S'b' ' /x étant une constante. Et enfin , appelant y le point où le plan mab rencontre l'arête cd; et/ le point où le plan M rencontre l'arête c'c/' du second tétraèdre, on aura ( ) ïl — . ïlÉL. lyd y'c' V étant une troisième constante. (98) Ces trois équations donnent immédiatement la construction des points et des plans de la figure corrélative d'une figure pro- posée. Car les points a! , & , y', déterminés par ces équations, appartien- nent respectivement à trois plans passant par les arêtes b'c' , c'a', a'b' du second tétraèdre, et correspondans aux trois points «, 6, y; et réciproquement les trois points «, g, y appartiennent à trois plans, passant par les trois arêtes bc , ca, ab du premier tétraèdre, et cor- respondans aux points «' , S' , /. D'après cela, veut-on construire le plan de la seconde figure qui correspond à un point m de la première ? Par ce point m on mènera les trois plans mbc , inca , mab qui rencontreront les arêtes ad, bd, cd en trois points; on regardera, dans les formules ci-dessus, «, S, y, comme étant ces trois points; et alors «', £', y' seront les points où MEMOIRE DE GÉOMÉTRIE. 647 le plan cherché rencontre les trois arêtes a'd' , b'd' , c'd' du second tétraèdre. Veut-on construire le point de la seconde figure, correspondant à un plan de la première? On regardera, dans les formules, a, 6, y, comme étant les points où le plan donné rencontre les trois arêtes ad, bd, cd du premier tétraèdre; et alors «', 6', y' seront les points ou les trois plans menés par le point cherché et les trois arêtes b'c', c'a' , a'b' du second tétraèdre rencontreront les arêtes opposées a'd' , b'd' , c'd' ; ce point sera donc déterminé '. § XX. Suite du précédent. — Discussion des formules pour la- construction géométrique des figures corrélatives. Divers théo- rème de géométrie qui s'en déduisent. Généralisation d'un po- risme d'Euclide. (99) Les formules (a) conduisent naturellement à divers corol- laires, dont plusieurs offrent des propositions de géométrie, nouvelles et très-générales. D'abord ces formules expriment le théorème suivant : Etant donnés deu.T tétraèdres quelconques abcd, a'b'c'd', si par chaque point d^une figure donnée on mène trois plans passant res- pectivement par les trois arêtes bc, ca, ab du premier tétraèdre, et rencontrant ses arêtes opposées aux points a, 6, /; Puis, qu'on prenne sur les arêtes d'à', d'b', d'c' du second té- traèdre, trois points «', 6', / de manière qu'on ait toujours CM _ a:d' ad a a' ' Cb e'd' ye r'd' V. ■ yd y'c' l, ft et V étant trois coefficiens constans. ' Nous regrettons d'avoir été oblige de réserver exclusivement le mot correspondant pour 648 MEMOIRE DE GEOMETRIE. Le 'plan déterminé par les trois point «', S', y' enveloppera une seconde figure qtii sera corrélative de la première. De sorte qu'aux points de la première figure qui seront situés dans un même plan, correspondront, dans la seconde figure, des plans passant tous par un même point. (100) Maintenant, remarquons que si du point m on abaisse des perpendiculaires sur les plans abc et dbc, leur rapport sera égal à celui des perpendiculaires abaissées du point « sur les mêmes plans , lequel est égal à ffla. sin. (da,abc) aa : — , , ,, . OU — X consl. ax. sin. [aa,abc) dx Dans le tétraèdre a'b'c'd' , le rapport des perpendiculaires abaissées des deux sommets d' , a', sur le plan aJS'y' , est égal à ^; donc, puisque -^ est proportionnel à ^, d'après les équations ci-dessus, nous pou- vons dire, que le rapport des distances du point m aux deux faces abc, dbc est proportionnel au rapport des distances du plan M aux deux sommets d' , a' du second tétraèdre. D'où il suit que : Dans deux figures corrélatives , le rapport des distances d'un point quelcoîique de la première figure à deux plans fixes de cette figure, est au rapport des distances du plan qui correspond à ce point , dans la seconde figure , aux deux points qui correspondent aux deux plans de la première , dans une raison constante , quel que soit le point pris dans la première figure. (101) De là on conclut le théorème suivant, qui n'est autre que le théorème (99) présenté sous un autre énoncé : Étant donnée une figure dans l'espace, et étant pris deux té- traèdres quelconques , dont A, B, C, D sont les faces du premier, et Q.,h, c, Aies sommets du second ; Si de chaque point m de la figure proposée on abaisse des per- désigner , dans la figure corrélative , le plan ou le point qui correspondent \ un point ou à un plan de la figure proposée. Si nous avions eu une autre expression, nous aurions appelé cor- respondans les points tels que a et a' , et nous aurions pu ainsi abréger le discours dans ce qui précède. MÉMOIRE DE GÉOMÉTRIE. 649 pendiculaires sur les quatre faces du premier tétraèdre , et qu'on prenne les rapports de la première perpendiculaire aux trois autres^ Et que Ton mène un plan transversal M , de manière qu'étant prises ses distances aux quatre sommets a, b, c, d du second té- traèdre, les rapports de la première distance aux trois autres soient dans des raisons constantes avec les trois premiers rapports , respectivement , ce plan M, qui correspondra ainsi, da?is toutes ses positions, aux points m de la figure proposée , formera une seconde figure corrélative de cette proposée. (102) La propriété caractéristique des figures corrélatives consiste en ce que, aux points de l'une, qui sont situés dans un même plan, correspondent, dans l'autre, des plans passant tous par un tnéme point. D'après cela, on conclut du théorème (99) cette proposition de géométrie. Étant donnés un tétraèdre SABC , et un plan , situés d'une ma- nière quelconque dans l'espace^ Si, par chaque point de ce plan, on mette trois plans, passant respectivement par les trois arêtes à lu base ABC du tétraèdre, et rencontrant respectivement les trois arêtes opposées SA, SB, se, en trois points a, 6, y; et qu'on forme les rapports des segmens que ces points font sur ces arêtes, lesquels rapports sont aS es yS 7k' CB' ■?€' Puis, que l'on prenne arbitrairement un second tétraèdre S' A' B' C , et que l'on divise ses arêtes au sommet, par trois points «', 6', /, de manière que les trois rapports a'k' fB' r'C 7W ' Ts'' Vs^' soient aux trois premiers , respectivement , dans des raisons con- stantes et quelconques ,* Le plan déterminé par ces trois points «', 6', /, qui correspondra 630 MÉMOIRE DE GÉOMÉTRIE. dans toutes ses positions aux différens points du plan donné, pas- sera toujours par un même point fixe. (103) Ce théorème, qui résulte ici comme corollaire de notre théorie analytique des figures corrélatives, en renferme néanmoins toute la doctrine. Et si ce simple théorème de géométrie était dé- montré à priori, et directement , nous en conclurions toute la théorie de ces figures, comprenant leurs relations descriptives et leurs rela- tions de grandeur. C'est ce théorème dont nous avons voulu parler dans la partie his- torique de cet ouvrage (5" Epoque, $ XXXIV), en disant que la théorie générale des transformations analogues à celles que présente la théorie des polaires réciproques, et d'où résulte le principe de dualité, déri- vait dun seul théorème de géométrie. Nous donnerons dans un autre écrit la démonstration géométrique et directe de ce théorème, et nous ferons voir comment tout ce qui se rapporte à cette doctrine de transformation peut en dériver. De sorte que le calcul algébrique dont nous avons fait usage pour exposer cette théorie, ne sera nul- lement nécessaire ; et les ressources de la pure géométrie lui suffiront, comme cela doit être , puisque cette théorie est elle-même une simple question de géométrie. (104) Reprenons les trois équations (a), sur lesquelles est fondée la construction des figures corrélatives; et supposons que la face ahc du premier tétraèdre soit située à l'infini ; les segmens «a , Sb , yc seront infinis, et dans l'équation aa la ad' s'd' — j • "j^^ TT • , , ' ad ca a a sa qui a donné lieu aux trois (a) , le rapport ^ deviendra égal à l'unité ; cette équation se réduira donc à ed a'd'' s'd' ad a'a' ' s'a' ou a'a' f s'a' -^ = 71'- ['''-Td' MOIRE DE GEOMETRIE. 651 on ad = -— X const. a a Ainsi les trois équations (a) deviennent yd = y. — - • ly d On pourra faire usage de ces formules pour certaines transfor- mations de figures dont les propriétés seraient exprimées en fonc- tion des projections de leurs points sur trois axes fixes. (105) Maintenant supposons que le sommet d' du second tétraèdre, lequel peut être pris arbitrairement dans l'espace, soit situé à l'infini. L'équation td _ a'rf' _ e'd- ad CL a e a s'écrira , , , B'd- frf ad ^ a a . • ; ad' s'a' et, à cause que le rapport ^ est égal à l'unité, on aura ad = oV. — — ; ta 1-^ est une constante: on a donc enfin t a (c) ad = ^. a'a . £t pareillement ,. i:d = ,..c'b', \ yd = V .y c . Ainsi ce sont là les trois équations qui serviront aux transformations , quand on voudra que le point qui correspondra, dans la seconde figure, à l'infini de la première, soit lui-même à l'infini. 652 s MEMOIRE DE GEOMETRIE. C'est ce qui a lieu, par exemple, dans la transformation para- bolique, et dans la transformation par voie de mouvement infini- ment petit, ou bien par la considération ê^un système de forces. (106) Mais ces divers modes particuliers de transformation ren- trent, comme on le voit, dans le principe général exprimé par les trois équations ci-dessus; et ce principe général conduirait immédia- tement à toutes les propriétés nouvelles des courbes et des surfaces courbes auxquelles nous sommes parvenu dans nos deux mémoires sur la transformation parabolique \ Et cela justifie ce que nous di- sions, au commencement du premier de ces deux mémoires, que ce n'était point un privilège exclusif pour la théorie des polaires réci- proques , de pouvoir servir à la transformation des figures ; qu'il exis- tait d'autres moyens, qui même étaient d'une grande simplicité. Et si l'on observe que les formules (c) ne sont qu'un corollaire des formules (a), on verra que les théorèmes auxquels elles conduisent, tels que ceux que nous avons obtenus par la transformation para- bolique, ne sont, ainsi que nous l'avions annoncé alors % que des cas particuliers de théorèmes plus généraux qui répondent aux for- mules (a). (107) Supposons que les bases abc, a'b'c' des deux tétraèdres soient l'une et l'autre à l'infini, les rapports — et ^, dans l'équation (A), seront égaux à l'unité; et il en résulte que les trois équations (a) deviendront A ed = —, V (108) Si les deux sommets d, d! des tétraèdres sont Tun et l'autre ' Correspondance mathématique et physique , tom. V et VI ; années 1829 et 1830. - Ibid. , tom. V, pag. 303. MÉMOIRE DE GÉOMÉTRIE. f^ 633 à l'infini, les formules deviendront a a' ff'A" y ro = -r: ye (109) Nous pourrions encore supposer que les deux tétraèdres se confondissent, et ensuite que leur base commune, ou leur sommet commun fût à l'infîni. (110) Les différens cas que nous venons d'examiner donneraient lieu à divers théorèmes , semblables au théorème général (99) , mais qui n'en seraient que des corollaires ; par cette raison nous nous dis- penserons de les énoncer. (111) Enfln, il nous reste un dernier cas à examiner, qui va nous conduire à un mode général de description purement graphique, des figures corrélatives, et à un théorème de géométrie, correspondant, dans l'espace, à une proposition sur l'hexagone inscrit à deux lignes droites, souvent répétée par Pappus, et regardée par R. Simson comme un des porismes d'Euclide. Supposons que les quatre sommets a', b', c', d' du second tétraèdre soient placés respectivement sur les quatre faces opposées aux som- mets a, b, c, d du premier tétraèdre. Soit e un cinquième point donné de la première figure ; prenons pour le plan correspondant E, dans la seconde figure, le plan dé- terminé par les trois points e', e* réciproques , la suivante, qui concerne leurs relations de grandeur : Si le sommet du cône prend quatre positions a, b, c, d, en ligne droite , le plan de contact prendra quatre positions A, H , C , D , telles qu'on aura toujours Sin. C,A Sin. D,A ca da Sin. C,B * Sin. D,B ~ cï ' dï* Ce qui résulte du théorème IV ( § II). Cette relation complète la théorie des polaires réciproques, consi- dérée dans ses applications à la construction des figures corrélatives et à la démonstration des deux parties du principe de dualité. (117) Remarquons que l'équation du plan mobile, telle que la donne cette théorie, ne renferme que neuf constantes arbitraires, tandis que l'équation générale qui nous a servi à démontrer le prin- cipe de dualité, en contient quinze. Le mode de construction des figures corrélatives qui résulte de cette théorie n'est donc pas le plus général; de sorte qu'une figure donnée, et sa corrélative construite par cette théorie, n'offrent pas, dans leur ensemble, la plus grande généralité possible (ce que nous rendrons évident dans le § suivant). On peut donc espérer qu'en disposant convenablement des quinze constantes arbitraires, on parviendra à des modes de construction MÉMOIRE DE GÉOMÉTRIE. 6S9 qui offriront, entre les deux figures, des relations que ne peut don- ner la théorie des polaires; de môme qu'en \ariant la forme de la sur- face du second degré auxiliaire, on peut obtenir de cette théorie des propriétés différentes des figures. Ainsi en prenant une sphère pour surface auxiliaire, M. Poncelet, et d'autres géomètres ensuite, sont parvenus à des résultats fort inté- ressans concernant les relations d'angles des figures. [Mémoire sur la théorie générale des polaires réciproques^ journal àe M^'Crelle, t. 4.) En prenant un paraboloïde, nous avons obtenu des résultats d'un autre genre, concernant principalement les relations métriques. (^Cor- respondance mathématique de M. Quetelet, t. V et VI.) (118) On sait que quand le plan polaire d'un point passe par un second point, réciproquement le plan polaire de ce second point passe par le premier. C'est de là qu'est venue la dénomination de polaires réciproques. Cette propriété résulte de ce que l'équation du plan polaire d'un point (w' , y' , s') , ne change pas , quand on y met X , y f z , kXix place de x\ y' , s' , et réciproquement. Ainsi les plans polaires des différons points d'un plan P passent par un même point p, qui lui-même a pour plan polaire, par rap- port à la même surface , précisément le plan P. Il suit de là que, dans les figures corrélatives construites par la théorie des polaires, à un même point de t espace, considéré comme appartenant successivement à la figure proposée , puis à sa cor- rélative, correspond un même plan. (119) Cela n'a pas lieu en général dans la construction des figures corrélatives; ainsi que nous l'avons déjà vu (93). C'est donc là un des caractères particuliers des figures corrélatives construites par la théorie des polaires. Ce caractère se présente dans d'autres modes de construction, ainsi que nous le verrons dans un des paragraphes sui- Tans. Mais il est important de remarquer ici que cette identité de construction des deux figures corrélatives, l'une par l'autre, dans la théorie des polaires, doit être regardée, dans la théorie générale des figures corrélatives, comme un fait accidentel, tout-à-fait indifférent 660 MÉMOIRE DE GEOMETRIE. soit pour la démonstration du principe de dualité,, soit pour l'applica- tion de cette théorie à la transformation des propriétés de l'étendue. (120) Nous ne saurions trop appeler l'attention du lecteur sur l'équation du n» (116), Sin. C,A Sin. D,A ca da Sin. C,B ' Sin. D,B "^ 7b ' db' qui représente toutes les relations qui sont transformables immédiate- ment par la théorie des polaires, de même que par les autres mé- thodes du même genre. Faute d'avoir aperçu cette relation, et de l'avoir reconnue comme le type unique de toutes celles qu'on pouvait soumettre à la théorie des polaires réciproques, on a été obligé de faire intervenir dans les transformations polaires la théorie des dé- formations par voie de perspective , pour les figures planes, et par la considération des figures homologiques , pour les figures à trois di- mensions. De sorte qu'on a fait dépendre les applications du principe de dualité , de la théorie des figures homologiques ' , tandis que l'un ' M. Poncelet, dans son Mémoire sur la théorie générale des polaires réciproques, après avoir pris une conique , ou une surface du second degré quelconque , pour transformer les relations descriptives , prend , pour la transformation des relations métriques , un cercle et une sphère. Puis il justifie cette méthode et démontre la généralité de ses résultats , en ces termes : ic On peut )) remarquer en passant , qu'attendu la nature particulière des relations que nous venons d'exa- i> miner , ces différens théorèmes auraient lieu , d'une manière analogue , dans le cas oii , à )i la place d'un cercle , on prendrait une section conique quelconque pour directrice ou auxi- i> liaire; car on peut toujours considérer l'un de ces systèmes comme la perspective ou projec- » tion centrale de l'autre , pourvu néanmoins que les figures auxquelles ils se rapportent soient Il elles-mêmes projectives de leur nature , et ne concernent par conséquent aucune grandeur )> constante et déterminée. » Au surplus, je crois devoir le dire expressément , cette observation, qui s'applique éga- » lemcnt au cas de l'espace que nous aurons bientôt h examiner, n'ajoute rien à la généralité )> des conséquences qu'il est possible de déduire des théorèmes précédons , quoique leur énonce )> suppose que les figures polaires réciproques soient prises simplement par rapport à un cercle i> auxiliaire, n (Voir Journal de M. Crelle , t. IV , p. 55.) Ainsi M. Poncelet démontre à posteriori , au moyen de la perspective , la généralité de ses transformations faites sur le plan avec un cercle pour conique auxiliaire. Pour le cas de l'es- pace il n'indique pas la démonstration analogue ; mais on comprend que ce sera par son ingé- nieuse théorie des figures homologiques , dont il a déjà fait de nombreuses et belles applica- tions dans le supplément de son Traité d^s propriétés projectives des figures. MÉMOIRE DE GÉOMÉTRIE. 661 et l'autre doivent avoir une égale indépendance et une égale facilité d'action. Et si même l'on veut établir entre l'un et l'autre des rap- ports, ce sera la théorie des figures homologiques qui pourra dé- river complètement du principe de dualité, comme nous le ferons voir au commencement de la seconde partie de cet écrit, tandis que ce principe ne peut nullement dériver de cette théorie. Aussi, dans nos applications du principe de Dualité, nous n'avons point été obligé de rechercher, comme on avait fait auparavant, les relations pro- jectives , c'est-à-dire qui sont transformables par la perspective ou par la théorie des figures homologiques; l'équation ci-dessus, et les diverses interprétations que nous lui avons données [§ III) , ont re- présenté toutes les relations transformables dont nous n'avons point eu à faire l'énumération. Il nous a suffi toujours de ramener les rela- tions proposées à la forme du rapport anharmonique , et de leur appliquer, d'une manière invariable, le principe de l'équation (1) (même$, art. 12) ou de ses diverses interprétations. Mais , pourra-t-on dire , la relation anharmonique est elle-même projective, et par conséquent de celles que l'on sait transformer par la théorie des Jtolaires. Cela est vrai. Mais il est vrai aussi, l» que cette relation n'a jamais été transformée d'une manière générale, et qu'elle n'aurait pu l'être, dans l'état où nous avons pris la théorie des polaires en entreprenant cet écrit, qu'au moyen d'une sphère ou d'un paraboloïde pour surface auxiliaire ; parce que la propriété des sur- faces du second degré exprimée par l'équation ci-dessus, est nou- velle; 2<* que, bien que la relation anharmonique soit projective, on n'a pas songé à la prendre pour le type unique des relations projectives, ni des relations transformables par le principe de dualité, c'est-à-dire pour la forme unique à laquelle devaient être comparées et ramenées toutes les autres relations ; ce qui donne un caractère de généralité et de précision aux méthodes de transformation, qui au- paravant étaient restreintes, et avaient quelque chose de vague et d'incertain dans leurs applications. Les théorèmes nouveaux auxquels nous sommes parvenu dans les ToM. XL 84 662 MÉMOIRE DE GÉOMÉTRIE. paragraphes précédens, la généralité qu'ils comportent et la facilité avec laquelle nous les avons obtenus, nous semblent justifier l'im- portance que nous attachons à la relation anharmonique et à l'équa- tion ci-dessus. (121) Cette équation, abstraction faite de son importance dans la théorie des polaires réciproques considérée comme moyen de trans- formation des figures , exprime une belle propriété des surfaces du second degré, dont on n'a pas encore fait usage, et qui mérite d'être introduite dans la théorie de ces surfaces, où elle sera susceptible d'applications très-nombreuses. Nous en présenterons, pour le mo- ment, une seule, qui, concernant la description des figures polaires réciproques , ne sera point étrangère à l'objet de cet écrit : et même les théorèmes que nous y démontrerons nous seront utiles dans le paragraphe suivant. Mais pour ne point interrompre notre examen des différentes méthodes particulières propres à la construction des figures corrélatives, nous reportons cette application de l'équation en question, dans un dernier paragraphe sous le titre de Note. § XXIII. Autre méthode tirée de la considération des sur/aces du second degré , et plus générale que celle des polaires réciproques. Applications de cette méthode. (122) Soit l'équation d'une surface du second degré Ax' -t- By' -4- Cz'= 1. Prenons pour l'équation d'un plan mobile kx'x -H By'y -{- Cz'z = l -\- Lx' -+■ My' -t- Na' , où a?', y'j z' , sont les coordonnées du point directeur m' ($ premier). Nous allons parvenir , par la considération de la surface du second degré, à une relation géométrique entre ce point directeur et le plan mobile. Ce plan a pour pôle , dans la surface du second degré , un point MÉMOIRE DE GÉOMÉTRIE. 663 m" dont les coordonnées x" , y", z" , ont pour expressions ar" = y = l -t-Lx' -t- My' ■+■ Na' ' y' l -t- La;' -i- My' -t- Na' ' a' 1 -t- L»' -t- My' M- Na' Concevons un plan fixe qui ait pour équation Lr -«- My -f- Na -f- 1 = o. La perpendiculaire abaissée du point m' sur ce plan a pour valeur 1 -t- Lar' -4- My' -♦- Na' mp 5=: ■ - — • J/ L' -4- M' -+- N' On a donc x' 1 *^P VL' -h M' -I- N' Soit o l'origine des coordonnées, qui est le centre de la surfacej on a otn X otn' x' et par conséquent, om I om *>*P |/L' + M' -♦- N' Soit fx le point oii la droite om" perce le plan mobile, dont le point m" est le pôle; et soit oa le demi-diamètre de la surface, dirigé sui- vant cette droite; on a comme on sait. „ oa ont = — Oft 664 MÉMOIRE DE GÉOMÉTRIE. D'où oa om 1 o/i m'p \/L' -h M' -+- N' Cette équation exprime les relations géométriques qui ont lieu entre le point directeur m' {x' , y' , z') et le plan mobile. On en tire ' 1 m p o/jt. = oa, . const. otn' Ce qui donne lieu à ce théorème : Si du centre d'une surface du second degré on mène un rayon à chaque point d'une figure proposée A' , et qu'on prenne sur ce rayon, à partir du centre de la surface, un segment qui soit à ce rayon divisé par la distance du point de la figure à un plan fixe, et multiplié par le carré du demi-diamètre de la surface compris sur ce rayon, dans une raison constante, le plan mené par l'extré- mité de ce segment, parallèlement au plan diamétral conjugué à la direction du rayon, enveloppera une autre figure A qui sera corré- lative de la proposée. (123) Si le plan fixe est à l'infini, cette figure A sera précisé- ment la polaire réciproque de la proposée. Car, dans ce cas, on a L = o, M = o, N = o, et l'équation du plan mobile se réduit à \x'x -+- By'y -t- Cz'z = l , qui est l'équation du plan polaire du point {x', y', z',) , par rapport à la surface du second degré. Et la formule géométrique prend alors la forme connue oa Ofi = ;■ Ainsi le mode de transformation exprimé par le théorème ci-dessus comprend, comme cas particulier, celui que donne la théorie des po- laires réciproques. (124) Ce mode de transformation jouit de la propriété suivante. MÉMOIRE DE GÉOMÉTRIE. 665 qui est l'une des plus utiles dans les applications de cette théorie, savoir, que Le plan corrélatif d un point est parallèle au plan diamétral de la surface auxiliaire , qui est conjugué à la droite qui va du centre de cette surface à ce point. Sous ce premier rapport, le mode général de transformation offre donc les mêmes facilités dans ses applications, que celui des polaires réciproques. (125) Mais, sous un autre rapport, il offre un grand avantage que n'a pas cette théorie. C'est que, à un même point de l'espace consi- déré comme appartenant successivement aux deux figures, ne corres- pond pas, dans les deux figures, un même plan, comme cela a lieu dans la théorie des polaires. Ainsi par exemple, au point pris pour centre de la surface auxiliaire , considéré comme appartenant à la figure A', correspond l'infini dans la surface A; et à ce point, con- sidéré comme appartenant à la figure A, correspond le plan fixe dans la figure A'. Cette différence rend notre mode de transformation immédiatement applicable à plusieurs relations métriques auxquelles la théorie des polaires réciproques n'est pas propre. Quelques exemples éclairciront cela. (126) Mais disons d'abord que le mode de transformation se simplifie quand la surface du second degré est une sphère. Alors les plans de la figure A sont perpendiculaires aux rayons menés du centre de la sphère aux points correspondans de la figure A'; et la formule de trans- formation est, en comprenant le rayon de la sphère dans le coefficient constant , m'p' Ofi = X. — îp. om Et si l'on vient à supposer que le plan fixe P, sur lequel sont abais- sées les perpendiculaires m'p' , soit à l'infini, la formule se réduira à A 0^= — ;• om 666 MEMOIRE DE GEOMETRIE. (127) Il faudra se rappeler toujours, dans les applications de la formule générale, que, au point o considéré dans la figure A, corres- pond le plan fixe dans la figure A'. D'où il suit que : 1° A un plan M mené par le point o, et considéré comme appar- tenant à la figure A, correspond, dans la figure A' , un point situé dans le plan fixe P ; Ce point est sur la perpendiculaire au plan M, menée par le point o (126). 2° A une droite L, menée par le point o, et considérée comme ap- partenant à la figure A, correspond, dans la figure A', une droite située dans le plan P; Cette droite est l'intersection de ce plan par le plan mené par le point o perpendiculairement à la droite L, (128) La formule ■m'p' OfJ. == A. om ne donne directement que les points m' de la figure A' correspondans aux plans de la figure A, et non les plans de la figure A' correspondans aux points de la figure A. Mais il est facile d'en tirer la manière de construire ces plans. Pour cela, étant donné un point s de la figure A, on concevra mené par ce point un plan perpendiculaire à la droite os ; on prendra dans la surface A' le point correspondant à ce plan , et la droite correspondante à la droite os ,* le plan mené par ce point et par celte droite sera le plan cherché. D'où l'on conclut que : Pour construire le plan S' de la figure A', correspondant à un point s de la figure A, on tirera la droite os, sur laquelle on prendra le point s' déterminé par la formule sy os = A. oS' Par le point o on mènera un plan perpendiculaire à la droite os ; ce plan coupera le plan fixe P suivant une droite ; le plan mené par cette MÉMOIRE DE GÉOMÉTRIE. 667 droite et par le point «' sera le plan cherché, qui correspond dans la figure A' au point * de la figure A. (129) Première application. Soit une sphère A ayant son centre en o. Menons -lui un plan tangent; la distance 0(x de ce plan au point o sera égale au rayon R de la sphère ; ou aura donc t m'p' _ j, ^ om' A. =n; dou — 7-,=con8t. om tnp Ce qui prouve que la figure A' est une surface du second degré de révolution, qui a un foyer en o, et le plan P pour plan directeur cor- respondant à ce foyer. Nous aurions pu dire à priori que la surface A' serait de révolution, parce que la sphère proposée A est placé symétriquement par rapport au plan P; et alors l'équation ^ = const. aurait démontré la pro- priété du foyer et du plan directeur. (130) Considérons trois plans diamétraux rectangulaires dans la sphère A; il leur correspondra, dans la surface de révolution A', trois points situés dans le plan P, qui seront tels que le plan polaire de chacun de ces points, par rapport à la surface de révolution, passera par les deux autres points. Ces trois points seront, par construction, sur les perpendiculaires aux trois plans diamétraux de la sphère, me- nées par le point o. Ces trois droites sont trois aa^es conjugués^ de la surface de révolution relatifs au point o, pai'ce que ce point est le pôle du plan fixe, par rapport à cette surface; on conclut de là que : Datis une surface du second degré de révolution , trois axes con- jugués relatifs à un foyer sont rectangulaires. (131) Supposons maintenant que la figure A soit une sphère ayant son centre en un point quelconque «. La surface A' sera du second degré, et l'on aura un plan S, correspondant au point s, qui sera le plan polaire du point o par rapport à cette surface A' ^. ' Voir § IX , art. 35 la dcGnition des axe* conjugués relatifs à un point. * Car, en gcncral, le plaa correspondant au point s est le plan polaire, par rapport à la surface A' , du point qui correspond à l'inCni de la première figure (27) , et ici ce point est le centre de la surface auxiliaire, c'est-à-dire le point 0 (128)^^^ *" *• *" 668 MEMOIRE DE GEOMETRIE. A trois plans diamétraux rectangulaires de la sphère, correspon- dront trois points situés dans le plan S, qui seront tels que le plan polaire de chacun d'eux, par rapport à la surface A', passera par les deux autres. Les droites menées du point o à ces trois points seront rectangulaires, comme étant, par construction, perpendiculaires res- pectivement aux trois plans diamétraux de la sphère; et ces trois droites seront trois axes conjugés relatifs au point o, puisque ce point est le pôle du plan S, par rapport à la surface A'. Ainsi trois axes conjugués relatifs au point o , sont rectangulaires; ce qui prouve que la surface A' est de révolution , et quelle a le point o pour foyer, et le plan S pour plan directeur correspondant. Cette surface est située d'une manière quelconque par rapport au plan P, puisque la direction de son plan directeur S dépend de la position du centre s de la sphère proposée, et que ce centre est pris arbitrairement dans l'espace. Si la sphère enveloppe le point o, la surface A' ne coupera pas le plan P; parce que si elle le coupait, à la courbe d'intersection cor- respondrait un cône circonscrit à la sphère, et ayant le point o pour sommet. Et si, au contraire, le point o se trouve au dehors de la sphère A, le plan P coupera la surface A'. (132) C'est un théorème de géométrie élémentaire, facile à dé- montrer, que « si autour d'un point fixe on fait tourner une trans- )) versale qui rencontre une sphère en deux points, et qu'on mène )) les plans tangens en ces points, la somme ou la différence des va- )) leurs inverses des distances de ces plans au point fixe sera con- » stante. )) Ce sera la somme quand le point fixe sera pris au dedans de la sphère, et la différence quand il sera pris au dehors. Prenons pour le point fixe le point o, et appliquons ce théorème à la sphère. A chaque transversale menée par le point o, corres- pondra, dans la seconde figure, une droite comprise dans le plan P; aux points où la transversale rencontre la sphère, correspondront les plans tangens à la surface A' , menés par cette droite ; et aux MÉMOIRE DE GÉOMÉTRIE. 669 plans tangens à la sphère correspondront les points de contact des pians tangens à la surface A' : on conclut donc du théorème énoncé, d'après la formule OM s= A. mp r t om 1 1 ont' — =^ — 0/K A m'p' OU cette propriété générale des surfaces du second degré de révolution à foyers : Étant mené un plan transversal cCune manière quelconque par rapport à une surface du second degré de révolution , si par une droite quelconque , prise dans ce plan , on mène deux plans tangens à la surfacCy et qu'on prenne pour chacun des deux points de contact le rapport de ses distances à un foyer de la surface et au plan fixe , la somme de ces deux rapports , si le plan fixe ne ren- contre pas la surface , ou leur différence , si le plan fixe rencontre la surface , sera une quantité constante. (133) Si le plan fixe est situé à l'infini, les points de contact des deux plans tangens sont les extrémités d'un diamètre de la surface ; la distance d'un de ces points à un foyer est égale à la distance de l'autre point au second foyer ; d'où l'on conclut que : Dans une surface du second degré de révolution , la somme ou la différence des distances de chaque point de la surface aux deux foyers est constante '. (134) Pour mieux montrer sous quel rapport le théorème précé- dent est une généralisation de cette propriété des foyers, nous re- marquerons que la droite qui joint les points de contact des deux plans tangens à la surface, passe par le pôle du plan fixe; et que par conséquent le théorème peut être énoncé ainsi : 1 Nous verrons dans la seconde partie de cet écrit (§ XXI), que ces proprictcs, qui semblent être particulières aux surfaces du second degré de révolution, peuvent dériver d'une propriété générale des surfaces géométriques d'un degré quelconque. ïo«. XI. 85 670 MEMOIRE DE GÉOMÉTRIE. Si autour (fun point fixe on fait tourner une transversale qui rencontre une surface du second degré de révolution en deux points , la somme ou la différence des distances de ces points à un foyer de la surface, divisées par les distances des mêmes points au plan polaire du point fixe , sera constante. Ce sera la somme si le point fixe est situé dans l'intérieur de la surface, et la différence s'il est situé au dehors de la surface. Nous pourrions, par la même méthode de transformation, démon- trer diverses autres propriétés nouvelles des foyers des surfaces de révolution, mais elles se présenteront dans nos applications du prin- cipe d'homographie. (135) Seconde application. Soit un polygone régulier de m côtés circonscrit à un cercle, et soit n un nombre plus petit que m; la somme des puissances n des perpendiculaires abaissées d'un point fixe o sur les côtés du polygone, sera constante, quelle que soit la posi- tion du polygone par rapport à ce point. Cela résulte d'un théorème de Ste wart , qui donne l'expression de la somme de ces puissances n, en fonction du rayon du cercle , du nombre m et de la distance du point o au centre du cercle '. Appliquant à ce théorème la formule m'p' O/X. = A. ;- , om on en conclut le suivant : Si, autour du foyer d'une conique, on fait tourner une rose des vents de m rayons ,• n étant un nombre plus petit que m ; La somme des puissances n des distances des m points où ces rayons rencontreront la conique , à une droite fixe , divisées res- pectivement par les puissances n des distances de ces points au foyer de la courbe, sera constante. (136) On peut remplacer, dans ce théorème, la distance de cha- ' Some gênerai theorems of considérable use in the higher parts of mathematics ; prop. 40. MIMOIRE de géométrie. 671 que point de la courbe au foyer, par la distance de ce point à la directrice. On donnera ainsi au théorème un autre énoncé. Mainte- nant, si l'on observe que le rapport des distances d'un point de la courbe à la droite fixe et à la directrice, est au rapport des distances de la tangente en ce point au pôle de la droite fixe et au foyer, dans une raison constante {voir la Note, $ XXVI), on conclut du théorème ci-dessus le suivant : Si, autour du foyer d'une conique, on fait tourner une rose des vents de m rayons ; et que par les m points où ils rencontrent la courbe, on lui mène ses tangentes ; n étant un nombre plus petit que m, la somme des puissances n des distances de ces tangentes à un point fixe, divisées par les puis- sances n de leurs distances au foyer, sera une quantité constante. (137) Ce théorème et le précédent sont susceptibles d'une foule de conséquences , que nous ne pouvons examiner ici. Mais eux-mêmes ne sont que des cas particuliers de propriétés des coniques très-géné- rales et où n'entre pas nécessairement la considération de leurs foyers. Une partie, par exemple, sont relatives aux diamètres des coniques, et sont une généralisation des propriétés des diamètres conjugués. Nous reviendrons, dans un autre moment, sur cette théorie, qui nous paraît nouvelle, et qui comprendra un très-grand nombres de théo- rèmes. (138) Troisième application. Si, autour de deux points fixes, pris sur une circonférence de cercle, on fait tourner deux droites, dont le point d'intersection soit toujours sur la circonférence, les distances de ces deux droites à un point fixe pris arbitrairement sur la circon- férence, seront entre elles dans un rapport constant. Qu'on prenne ce point fixe pour le point o, et qu'on applique à ce théorème la formule de transformation m'p' om on obtient cette propriété générale des coniques : 672 MEMOIRE DE GEOMETRIE. Étant menées trois tangentes fixes à une conique^ si Von mène une quatrième tangente quelconque , elle rencontrera les deux pre- mières en deux points, qui seront tels que le rapport de leurs dis- tances à la troisième tangente sera au rapport de leurs distances à un foyer de la courbe, dans une raison constante. (139) Si la conique est une parabole, on pourra prendre pour la troisième tangente fixe sa tangente située à l'infini, et l'on aura cette propriété de la parabole : Etant menées deux tangentes fixes à une parabole , une troisième tangente quelconque les rencontre en deux points dont le rapport des distances au foyer de la courbe est constant. (140) En considérant, dans le théorème général, deux positions de la tangente mobile, qui feront, avec les premières tangentes fixes, un quadrilatère, on en conclura ce théorème : Quand un quadrilatère est circonscrit à une conique , le produit des distances dune cinquième tangente quelconque à deux sommets opposés du quadrilatère est au produit des distances de la m,éme tangente aux deux autres sommets, dans un rapport constant; . Et ce rapport est égal au produit des distances d'un foyer de la conique aux deux premiers sommets du quadrilatère , divisé par le produit des distances du même foyer aux deux autres sommets \ On voit que chacun des deux foyers joue, en quelque sorte, le même rôle, par rapport aux quatre sommets du quadrilatère, que chacune des tangentes à la courbe. (141) La seconde partie de ce théorème donne une relation entre les quatre sommets d'un quadrilatère circonscrit à une conique et les deux foyers de la courbe , qui est exprimée par le théorème sui- vant : ' La première partie de ce théorème donne immédiatement , en vertu du théorème de l'ar- ticle 159 (§ XXVI ) , le suivant : Quand un quadrilatère est inscrit dans une conique , le produit des distances d'un point quel- conque de la courbe à deux côtés opposés du quadrilatère est au produit des distances du même point aux deux autres côtés, dans une raison constante. C'est le théorème ad très aut quatuor lineas des Anciens. ♦ MÉMOIRE DE GÉOMÉTRIE. 673 Quand un quadrilatère est circonscrit à une conique , le produit des distances d'un foyer à deux sommets opposés , est au produit des distances du même foyer aux deux autres sommets , dans une raison qui reste la même, quel que soit celui des deux foyers qtûon a pris \ (142) Quatrième application. Soit le théorème de Cotes sur la division du cercle en parties égales. Donnons-lui, pour en faciliter la transformation, cet énoncé : « Un polygone régulier de 2m côtés » étant circonscrit à un cercle, si d'un point O, pris sur la droite » indéfmie menée par le centre du cercle et par le point de contact » du premier côté du polygone, on mène des droites aux points de » contact de tous les autres côtés; )) l'' Le produit des droites menées aux points de contact des côtés » de rang impair sera égal à OC — R'"; » 2° Le produit des droites menées aux points de contact des côtés » de rang pair sera égal à OC — R" ; » R étant le rayon du cercle, et le point C son centre. » Faisons la transformation. Au cercle correspondra une conique ayant son foyer en 0 (131); aux côtés du polygone correspondront des points de la courbe, situés sur des rayons qui diviseront l'espace angulaire autour de ce foyer en 2m parties égales; aux points de contact des côtés du polygone , correspondront les tangentes à la co- nique menées par les points pris sur elle. Ces tangentes se construi- ront comme nous l'avons dit (128). On obtiendra ainsi un théorème, ' Si l'un des foyers est à l'infini , cette raison sera égale à l'unité , d'oii il suit que : Quand un quadrilatère est circonscrit à une parabole , le produit des distances du foyer de la courbe à deux sommets opposés du quadrilatère , est égal au produit des distances de ce foyer aux deux autres sommets. Si l'on suppose que les deux premiers sommets du quadrilatère soient deux points de la courbe , les deux autres sommets se confondront avec le point de concours des tangentes en ces deux points ; et il en résultera ce théorème : Quand un angle est circonscrit à une parabole, le produit des distante* des points de contact de ses deux côtés au foyer de la courbe, est égal au carré de la distance de son sommet à ce foyer. Ce théorème est un de ceux dont Lambert s'est servi dans ses Insigniores orbitœ cometarum proprietatcs. (Section l", lemme 3.) 674 MEMOIRE DE GEOMETRIE. ♦ correspondant, dans une conique quelconque, au théorème de Cotes. L'expression de ce théorème est un peu comphquée. Pour la sim- plifier nous supposerons que la droite qui, dans la nouvelle figure , est corrélative du point 0 de la première figure, soit située à l'infini. Alors on a le théorème suivant : Si l'on divise l'espace angulaire autour du foyer dune conique en 2m parties égales , en menant 2m rayons, dont le premier coïn- cide avec le grand axe ; et qu'aux points où ces rayons rencontrent la courbe , on lui mène ses tangentes ; Le produit des distances des tangentes de rang impair, au foyer, sera égal a ^^;:zr^; Et le produit des distances des tangentes de rang pair, au foyer, sera éqal a — . a e^ b étant les deux demi-axes principaux, et c l'excentricité de la conique. Si la conique est une parabole, on a ce théorème : Si l'on divise Vespace angulaire , autour du foyer d'une para- bole, en Ira. parties égales, par 2m rayons, dont le premier coïn- cide avec Vaxe de la parabole , et qu'on mène les tangentes à la courbe aux m points où, les rayons de rang pair la rencontrent , le produit des perpendiculaires abaissées du foyer sur ces tan- gentes sera égal à la puissance m de la distance du foyer à la directrice. § XXIV. Autres modes de construction des figures corrélatives : — Par le déplacement fini, ou infiniment petit, dun corps solide libre dans l'espace. — Par la considération d'un système de forces appliquées à un corps solide libre. (143) Quand on a un corps solide placé d'une manière quelcon- que par rapport à trois axes coordonnés, que nous supposerons rectangulaires, on sait que si l'on fait éprouver à ce corps un mou- • MEMOIRE DE GÉOMÉTRIE. 675 vement infiniment petit, les variations des coordonnées de chacun de ses points seront données par les formules suivantes, dues à Euler; ix' ^ii — y VN ■+■ S.' m , /y' = ,tm — «VL -H *VN , ^g' =s,tn — x'JM -f- y'Jl , OÙ les coefficiens H, im, $n, dL, (?M, (fN sont constans pour tous les points du corps. (Voir les Mém. de t Académie de Berlin, ann. 1750, pag. 185 — 217, ou la Mécanique analytique de Lagrange, tom. I^r^ pag. 169.) L'équation du plan mené par un point {x' , y', z') , perpendiculai- rement à l'élément rectiligne décrit par ce point, pendant le mouve- ment infiniment petit du corps, est («—*') ^x' -». (y— y') iy' -t- (a—*') <^a' = o, ou xJ'x' -+- ytTy' ■+• aJ'a' ^ x'Jx' ■*- yVy' -♦- z,'Jz.'. Mais le second membre est égal, d'après les formules ci-dessus, à x'Sl -\- y'im + z'$n ; l'équation du plan est donc xéx^ ■+■ yJ'y' -4- sJs' = x'il ■+■ y' dm ■+■ s'Jn. fx'f iy' , Sz' sont des fonctions linéaires des coordonnées x' , y' , z' ; de sorte que l'équation du plan ne contient ces coordonnées qu'au premier degré. On a donc, d'après le théorème 1 ($ II), cette propriété générale du mouvement d'un corps solide : Quand un corps solide éprouve un mouvement infiniment petit, les plans normaux aux trajectoires des points du corps situés dans un même plan, passent tous par un même point; Les plans normaux aux trajectoires des points situés sur une même droite, passent tous par une même droite ,* Les plans normaux aux trajectoires des points situés sur une surface du second degré, sont tous tangens à une autre surface du second degré ; 676 MEMOIRE DE GEOMETRIE. • Et, en général , les plans normaux aux trajectoires des points d'une surface du degré m, envoloppent une seconde surface géo- métrique à laquelle on peut mener m plans tangens par une même droite. (144) Ainsi, quand une figure de forme quelconque, éprouve un déplacement infiniment petit, les plans normaux aux trajectoires de ses points enveloppent une seconde figure qui est corrélative de la première. Voilà donc une manière très-simple de concevoir la description des figures corrélatives. (145) Cette méthode offre des avantages dans la géométrie spécu- lative, parce que les figures y ont une dépendance particulière, qui n'a pas lieu dans la théorie des polaires j c'est que chaque plan de la nouvelle figure passe par le point correspondant de la figure propo- sée. Cela fait que la seconde partie du principe de corrélation, c'est- à-dire le théorème IV, n'a plus besoin de démonstration; il est une conséquence immédiate de la construction des figures. (146) Mais il y a entre les deux figures un rapport de relations métriques beaucoup plus simple, qui repose sur ce théorème : // existe dans le corps un certain axe qui n'a de mouvement que dans sa propre direction ; Les plans normaux aux trajectoires de deux points quelconques a, b du corps rencontrent cet axe en deux points «, S, qui sont les pieds des perpendiculaires abaissées sur lui, des points a, bj De sorte que Von a toujours aS = ab. COS. (ab, X) ; X désignant la direction de l'axe en question. Ainsi l'on aura, entre les distances des points de la figure pro- posée et les segmens que les plans correspond ans , dans la figure cor- rélative, intercepteront sur l'axe X, des équations de cette forme. Ces équations serviront à convertir les relations métriques de la figure donnée en relations appaitenant à la nouvelle figure. • MÉMOIRE DE GÉOMÉTRIE. 677 Nous nous bornons, pour le moment, à énoncer cette proposition, pour ne pas surcharger cet écrit de détails étrangers à son but principal ; nous nous proposons do revenir sur ce sujet , pour établir, par de simples considérations de géométrie, les propriétés générales du mouvement d'un corps solide; lesquelles propriétés sont nom- breuses et intéressantes, et sont susceptibles, quoique purement géo- métriques, d'apporter quelque lumière dans plusieurs questions de mécanique. (147) Le déplacement fini quelconque d'un corps solide dans l'es- pace peut donner lieu aussi à la construction de figures corrélatives. Cette construction est fondée sur le théorème suivant : Si l'on a dans l'espace deux figures parfaitement égales , et pla- cées dune manière quelconque tune par rapport à l'autre ; Que l'on joigne par des droites les points de la première figure aux points correspondans de la seconde; et que par le milieu de chacune de ces droites on lui mène un plan normal^ Tous ces plans envelopperont une figure qui sera corrélative de chacune des deux figures proposées , et corrélative , aussi, dune troisième figure formée par les points milieux des droites qui joi- gnent les points homologues dans les deux premières. Ainsi, si la première figure est plane, la troisième sera plane aussi; et les plans menés par ses différens points passeront par un même point (ce point sera situé dans le plan de cette troisième figure). Si la première figure est une surface du second degré, la troisième figure sera aussi une surface du second degré ; et les plans menés par ses points envelopperont une autre surface du second degré. Nous donnerons dans un autre écrit la démonstration de ces théo- rèmes, qui peut se faire par de simples considérations de géométrie, ou par l'analyse '. ' On peut vérifier aisément ces théorèmes, au moyen des formules suivantes relatives au déplacement fini d'un corps solide dans l'espace, en fonction des six coefficiens indé- pendans qui sufiisent pour exprimer ce déplacement. Soient x, y, 3 les coordonnées d'un point du corps dans sa position primitive, et *', y', s' ToM. XI. 86 678 MEMOIRE DE GEOMETRIE. • (148) Le mode de construction des figures corrélatives que nous a fourni le déplacement infiniment petit d'un corps solide, peut être présenté d'une autre manière, où n'entre pas l'idée de mouvement. Voici comment ; Soit une vis , placée dune manière quelconque dans V espace; concevons que par tous les points dune figure proposée passent des hélices de la vis; \° Les plans normaux à ces hélices, menés par les points de la figure, envelopperont une seconde figure qui sera corrélative de la première ; 2° Le segment compris sur l'axe de lavis, entre deux plans nor- maux, sera égal à la projection orthogonale de la droite qui joint les deux points correspondans. De sorte que les relations métriques de la première figure seront faciles à transporter dans la seconde. (149) Il résulte de là que si Von coupe la surface dune vis (à les coordonnées du même point considéré après le déplacement; ces coordonnées ont des valeurs de la forme iv'=l -4-2;J/ 1— (L^-+-M^+N')-+-(Ma— Ny)+ ^ — ^— ^ '- ■ L.(Lan-My-+-Ns), y'^zm-t-yV^l — (L'+M=-f-N')-4-(Na;— L3)h ^^ '-• M.(La;+My-t-Na), 1- -\/ï -(L •+w ■ + N') -VT. 4-M; + N^ 1- -(L' -t-M- +IN') L^- -t-M^ + N' 1- -»/l- -{V '+M-' + 1N0 z':=n -+-Z l/l — (L^-i-lVr-f-N^)-t-(Ly— Ma;)H ,, 1.^ ^, -■ N. (La;-4-My+N3); où /, m , M , L , M , N , sont six coefliciens indcpendans. Ces formules sont la généralisation de celles d'Euler, qui ne convenaient qu'à un dé- placement infiniment petit du corps solide. Elles peuvent servir aussi pour la transformation d'un système de coordonnées rectan- gulaires en un autre système de coordonnées rectangulaires. Et soùs ce rapport elles satisfont à une question qui a occupé dans un temps les géomètres , savoir , de trouver de telles formules qui ne contiennent que les trois coefliciens indépendans nécessaires et suffisans pour exprimer la position des nouveaux axes, et oii ces coefliciens entrent d'une manière symétrique. Les formules de Monge qui ont résolu cette question (Mémoires de l'académie de Turin ; ann. 178-4 et 1783) ont l'inconvénient de contenir six expressions radicales différentes. Les formules précédentes n'en contiennent qu'une. MÉMOIRE DE GÉOMÉTRIE. 679 filets triangulaires ou rectangulaires, indifTéremment) par un plan quelconque , et que parles différens points de la courbe d intersection on mène les plans normaux aux hélices qui passent par ces points , tous ces plans passeront par un même point. Ce point sera situé dans le plan coupant. Ces considérations, qui conduisent à diverses propriétés nouyelles de la vis, offrent des méthodes de géométrie descriptive pour le dessin des épures relatives à différentes questions qui se présentent dans les arts. (150) Voici enfin un dernier mode de construction des figures cor- rélatives, que nous pouvons exposer sans calcul. Qu'on conçoive un système de forces sollicitant un corps solide libre; on pourra les remplacer d'une infinité de manières par deux forces uniques F, F'. L'une de ces forces sera tout-à-fait arbitraire de direction ; c'est-à-dire qu'on pourra prendre une droite quelcon- que pour représenter la direction de cette force; la seconde force sera alors tout -à-fait déterminée en direction et en grandeur. Si on cherche le plan du moment principal des forces du système, relatif à un point quelconque de la force F, ce plan passera par la force F'. Donc si on fait tourner la première force autour d'un point fixe, la seconde ne cessera pas d'être dans un même plan, qui sera le plan du moment principal du système de forces , relatif au point fixe. Et réciproquement, quelle que soit la position de l'une des deux forces dans ce plan, l'autre force passera par le point fixe; d'où il suit que les plans des momens principaux du système de forces, relatifs aux différens points du plan, passeront par le point fixe. On conclut de là que : Si Von conçoit dans t espace un système de forces, et que ton prenne les plans des momens principaux de ces forces , relatifs à tous les points dune figure , ces plans envelopperont une seconde figure qui sera corrélative de la première ,• c'est-à-dire que les plans relatifs à des points situés sur un plan passeront par un même point; ceux relatifs à des points situés en ligne droite passeront par une 680 MÉMOIRE DE GÉOMÉTRIE. m même droite; ceux relatifs à des points situés sur une surface du second degré envelopperont une seconde surface du second de- gré, etc. (151) Quant aux relations métriques de la nouvelle figure, on les conclura de celles de la figure proposée , au moyen de la proposition suivante, dont la démonstration est sans difficulté, mais serait ici sans intérêt : Si l'on prend un certain axe fixe , 'parallèle à la résultante de toutes les forces (l'axe que M. Poinsot a appelé l'axe central des momens ' ), le segment intercepté sur cet axe par deux plans quel- conques appartenant à l'une des deux figures ^ sera égal à la pro- jection orthogonale , sur cet axe , de la droite qui joint les deux points correspondans dans t autre figure. % XXV. Caractères particuliers de divers modes de construction des figures corrélatives. (152) Nous avons vu que la théorie des polaires réciproques n'offre pas la construction la plus générale des figures corrélatives, parce qu'elle ne donne à disposer que de neuf constantes, au lieu de quinze. Il en est de même des autres modes que nous venons d'ex- poser dans le paragraphe précédent, dans chacun desquels on ne peut disposer que de six constantes. Dans ces dernières méthodes, les figures corrélatives ont un caractère particulier; c'est que les plans d'une figure passent par les points de l'autre figure auxquels ils correspondent. Mais ces méthodes ont un autre caractère propre, qui leur est commun avec celle des polaires réciproques , et qui ne se présente pas d'une manière aussi palpable ; c'est une récipro- cité parfaite entre deux figures corrélatives; réciprocité qui consiste en ce que si, après avoir construit la figure corrélative A' d'une figure A, on voulait, par le même mode de construction, former ' Élémens de statique ; 6° édition , pag. 358. MÉMOIRE DE GÉOMÉTRIE. «81 la figure corrélative de A', on retrouverait la figure A. Cela a lieu, comme on sait , dans la théorie des polaires , parce que le point fixe par lequel passent tous les plans polaires des difTérens points d'un plan, a précisément pour plan polaire ce plan (118). 11 en est de même dans la construction des figures corrélatives par voie de mou- vement infiniment petit; c'est-à-dire que si la figure qui est l'enve- loppe des plans normaux aux trajectoires des points de la figure proposée, éprouvait elle-même le même mouvement, les plans nor- maux aux trajectoires de ses points envelopperaient la première figure; cela provient de ce que le point par lequel passent les plans normaux aux trajectoires de tous les points d'un plan a sa trajectoire normale à ce plan. Il en est de même aussi dans le mode de construction fondé sur la considération d'un système de forces; c'est-à-dire que si après avoir construit la figure enveloppe des plans des momens principaux d'un système de forces, relatifs aux différens points d'une première figure, on construisait la figure enveloppe des plans des momens principaux des points de cette nouvelle figure, par rapport au même système de forces, on retrouverait la première figure; cela vient de ce que le point par lequel passent les plans des momens principaux des diiférens points d'un même plan a précisément son moment prin- cipal situé dans ce plan. (153) Il est naturel de chercher s'il n'existerait pas d'autres sys- tèmes de figures corrélatives où une pareille réciprocité aurait lieu. Nous allons prendre la question d'un peu plus haut; et d'abord nous proposer la suivante : Quand un point direcleur parcourt une surface A, le plan mobile enveloppe une surface A' {§ II, théorème I); Si l'on suppose qtiun nouveau point directeur parcoure cette surface A' , quelle devra être l'équation d'un nouveau plan mobile entrainé par ce nouveau point directeur, pour qu'il enveloppe la première surface A 9 Soient x' , y' , z' les coordonnées du point directeur situé sur la 682 MÉMOIRE DE GÉOMÉTRIE, surface A, et Xx' -4- Yy' -f- Zs' = U , l'équation du plan mobile ; ce plan enveloppe la surface A'. Soit La; -4- My + Ns = 1 , L'équation d'un plan tangent à la surface A en un point a. Si le point directeur parcourt ce plan , le plan mobile tournera autour d'un point de la surface A' , dont les coordonnées sont données par les trois équations X = LU , Y = MU , Z = NU ; et ce point est précisément celui où le plan mobile touche la sur- face A' quand le point directeur est en a. (Théorème II.) Soient a;" , y", z" les coordonnées de ce point, et remplaçons, dans les trois équations précédentes X, Y, Z et U par X", Y", Z" et U", pour indiquer que les trois variables y ont les valeurs a;", y" , s"', nous aurons les trois équations X" = LU", Y" = MU", Z" = NU". L'équation X"x -t- Y"y -4- Z"z = U" représente un plan mobile entraîné par le mouvement du point (iv" , y" , z"). Si nous supposons que ce point soit sur la surface A', les trois équations précédentes auront lieu ; par conséquent l'équa- tion générale de son plan mobile se réduira à L^ -+- My -H Ni = 1. C'est précisément l'équation du plan tangent à la surface A. L'équation \"x -+- Y"y + Z"z = U" est donc celle qui convient au second plan mobile, pour qu'il en- MÉMOIRE DE GÉOMÉTRIE. 683 veloppe la surface A, pendant que son point directeur parcourt la surface A'. Or on voit que, pour former cette équation, il faut changer, dans l'équation du premier plan mobile, les coordonnées courantes en celles du second point directeur, et celles du premier point direc- teur en coordonnées courantes. On peut donc énoncer ce théorème général : Quand téquation dun plan mobile contient au premier degré les coordonnées x', y', z' d'un point directeur, si on y change les coordonnées courantes x, y, z, e» x', y', z', et vice versa, on aura une seconde équation qui représentera un second plan mobile , correspondant au même point directeur ; Si le point directeur parcourt une surface A, le premier plan mobile enveloppera une surface A' ; Et si le point directeur parcourt la surface A' , le second plan mobile enveloppera la pretnière surface A. Ainsi les deux surfaces jouissent de la propriété réciproque d'être engendrées l'une au moyen de l'autre, mais par deux plans mobiles différentes, c'est-à-dire dont les équations sont différentes. (154) D'après cela, on voit sur-le-champ que si l'on veut que le plan mobile ait la même équation , ou la même construction géo- métrique, pour les deux surfaces, comme cela a lieu dans la théorie des polaires réciproques et dans les autres systèmes qui reposent soit sur le déplacement d'un corps solide, soit sur la considération d'un système de forces, il faut que l'équation du plan mobile soit symé- trique par rapport aux coordonnées courantes et à celles du point directeur; car alors elle restera la même quand on y changera a;, y , s, en x' , y' , s' et vice versd, et les deux plans mobiles du théorème précédent auront la même équation. Cela a lieu dans la théorie des polaires; l'équation du plan polaire d'un point reste la même quand on y met les coordonnées de ce point à la place des coordonnées courantes, et vice versd. Il en est de même pour le plan normal à la trajectoire d'un point d'une 684 MÉMOIRE DE GÉOMÉTRIE. figure dé forme invariable qui éprouve un déplacement infiniment petit; ce qu'on voit d'après l'équation de ce plan normal (143). Il en est de même aussi pour le plan du moment principal d'un sys- tème de forces, pris par rapport à un point; l'équation de ce plan reste la même si on y remplace les coordonnées courantes par les coordonnées du point, et vice versa. Car en supposant les trois axes coordonnés rectrangulaires , et en désignant par A^, A^, A^ les sommes des composantes, suivant ces trois axes, des forces du système, transportées toutes à l'origine, et par M^, IVI,., M. les pro- jections sur les plans yz , zx et xy , du moment principal relatif à cette origine, on trouve que le plan du moment principal d'un point quelconque [x' , y' ^ z') , a pour équation {z'ky — y'Kz — Mx ):» -t- {x'kz — z'Kx — My )y -4- (y'Ax — x'ky — Mz )3 -f- ar'Mi -»- y'Mjr + z'Mj = o ; et une simple vérification fait voir que cette équation reste la même quand on y change les coordonnées courantes x, y , z en x' , y' , z' et vice versa. L'équation du plan mobile dans ce dernier mode de construction des figures corrélatives a tout-à-fait la même forme que celle du plan normal à la trajectoire d'un point d'une figure en mouvement; il y a en effet dans ces deux questions des rapports intimes re- marquables, dont il serait hors de propos de parler ici, et sur lesquels nous reviendrons ailleurs. (155) Il nous reste à faire voir que chaque fois que l'équation du plan mobile sera symétrique, comme dans les exemples précédens, elle aura nécessairement la forme de l'équation du plan polaire d'un point par rapport à une surface du second degré , ou celle du plan normal à la trajectoire d'un point d'un corps solide en mouvement. En effet, l'équation générale du plan mobile est de la forme {ax-i-bij-\-cz—d) x' -t- {a'x -»- b'y -+- c'a — d') y' -t- {a"x -+- h" y -4- c"s — d") z — {a:"x -4- h" 'y -+- c"'a— rf'") = o. MÉMOIRE DE GÉOMÉTRIE. 685 Celte équation sera la même, après le changement de x, y , s en x' , y' , z' et vico vorsd, si son premier membre est resté iden- tiquement le même, soit avec le môme signe soit avec un signe dif- férent. Dans le premier cas, en comparant le premier membre à ce qu'il devient par le changement en question, on trouve les six conditions : « rf = a"', rf'=i"', d" = c"', b = a' , c==a" , c' = b" ; et dans le second cas, on trouve les conditions 0 = 0, b' = 0 , c" = 0 , a" = 0 f rf = — o'", d'= — b"', d" = — c"' , b = — a', c = — a", c = — b". Telles sont les deux seules solutions de la question. Les deux équations du plan mobile qui y correspondent sont ax'x -4- b'y'y -t- c"«'a -+- b(y'x + x'y) + c{z'x •+•«'«)-♦- b"(s'y -+- y'*) — d{x -f- x') — d'{y -f- y') — d"{z h- s') — d'" = o , et b{y'x—x'y) -»- c(«'«— »'s) h- b"{»'y—y'*) — d{x—x') — d'{y—^)—d"{z—z') = o. Faisons o=2A, 6'=2B, c" = 2C, A = D, c=E, i" = F, d= — G, d' = — H, d" = — \, la première équation devient (2A*' -+- Dy' H- Ea' -+- G)« -h {2By' -^ Dx' -t- Fa' h- H)y -t- (2Ca' -H Ex' -4- Fy' H- I)a -f- Qx' -\- \\y' -t- la' — d'" = o. C'est l'équation du plan polaire du point {x', y', s')^ par rapport à la surface du second degré qui a pour équation d!" Kx'' ■+■ By' -4- Ca' -4- Dj?y -t- Exa -t- Fya -»- G* -4- Hy ■+• la — = 0. Donc , dans le premier cas, le plan mobile pourra toujours être Toi. XI. 87 686 MEMOIRE DE GEOMETRIE. considéré comme le plan polaire du point directeur par rapport à une surface du second degré. Nous devons observer que cette surface pourrait être imaginaire; alors en changeant le signe du dernier terme de son équation, on aurait une surface réelle. Ainsi on pourrait encore, dans ce cas, di- riger le mouvement du plan mobile par la considération d'une surface auxiliaire du second degré. Dans le second cas, si l'on fait d = — J'/, d' = — cf»/j , d" = — fn, b = Jîi, c = ^M, h" = cfL , l'équation du plan mobile devient (ar — x') ^l -+- (y — y') J'm -4- (s — a') Jn — (t/'m — x'y) tfN — {3;'z — s'x)jM — {z'y — y'z)^L=:o. C'est l'équation du plan normal à la trajectoire du point (a?' , y' , z') considéré comme appartenant à une figure de forme invariable , qui a éprouvé un mouvement infiniment petit. Remarquons que cette équation est satisfaite quand on y fait a; = a;', y= y'^eiz^ z'. (156) Il résulte de cette analyse que : Quand Véquation d'un plan mobile contient, au premier degré . les coordonnées x', y', z' d'un point , et qu'elle reste la même quand on y change les coordonnées courantes x, y, z e/i x', y', z' et vice versa, elle ne peut avoir que deux formes différentes ^ et le plan mobile peut être considéré comme le plan polaire du point (x' , y' , z'), par rapport à une surface du second degré déterminée j ou bien comme le plan normal à la trajectoire du point (x', y', z'), regardé comm.e appartenant à un corps solide qui éprouve un mouvement infiniment petit. Mais on conçoit que ces deux formes de l'équation du plan mo- bile pourraient avoir d'autres interprétations géométriques; comme nous l'avons fait voir à l'égard de la seconde , qui convient aussi au MÉMOIRE DE GÉOMÉTRIE. 687 plan du moment principal d'un système de forces, relatif au point (^', y', -'). v sin. N,A L'équation (2) devient donc sin. L,B sin. M,C sin. N,A f 8) ....... . — . • '- = 1 . sin. L,C sin. M, sin. M,B Cette équation prouve, par un principe de la théorie des transver- sales, que les trois plans L, M, N, menés respectivement par les trois arêtes de l'angle trièdre formé par les trois plans A, B, C, passent par une même droite. On a donc ce théorème : Etant donnés un angle iriède et une sur/ace du second degré ; et étant pris, par rapport à la surface, les pôles des trois faces de cet angle trièdre / les trois plans înenés respectivement par les arêtes de l'angle et par les pôles des faces opposées à ces arêtes, passeront tous trois par une même droite. Ce théorème exprime la construction géométrique du plan sur 692 MÉMOIRE DE GÉOMÉTRIE. lequel doit se trouver le pôle d'un troisième plan, par rapport à une surface du second degré, quand les pôles de deux premiers plans sont donnés. (166) Maintenant considérons le triangle abc, et soient /, m, n, les trois points où les plans A, B, C, respectivement, rencontrent les trois côtés bc, ca, ab. Le rapport des distances des deux points Z>, c au plan A, sera égal à ^; ainsi l'on a pareillement fa ^ f^\ "** an bn L'équation (2) devient donc an M cm équation qui prouve que les trois points /, m, n, sont en ligne droite. Donc : Un triangle étant placé (Tune manière quelconque par rapport à une surface du second degré , les plans polaires de ses sommets rencontrent respectivement les côtés opposés en trois points qui sont en ligfie droite. Ce théorème pouvait se conclure immédiatement du précédent par la théorie des polaires réciproques, mais il nous a paru intéressant de montrer que l'un et l'autre sont exprimés par la seule équation (2). (167) Des deux théorèmes (165) et (166) on déduit sans difficulté cette propriété générale des surfaces du second degré : Étant donné un tétraèdre , et étant pris les pôles de ses quatre faces , par rapport à une surface du second degré, et les plans polaires de ses quatre somme f-f ,• 1" Les droites qui joindront les sommets du tétraèdre aux pôles MÉMOIRE DE GÉOMÉTRIE. 693 des faces opposées à ces sommets seront quatre génératrices d'un même mode de génération d'un hyperboloide à une nappe ; 2° Les droites d intersection des plans polaires des sommets du tétraèdre par les faces opposées à ces sommets 7espectivement , seront quatre génératrices d'un mémo modo de génération d'un second hyperhohïde à une nappe. (168) Ce théorème est susceptible d'une multitude de conséquen- ces. Nous en avons exposé déjà plusieurs dans les Annales de Ma- thématiques, tom. XIX, pag. 76. Nous nous bornerons ici à faire remarquer qu'on en conclut que : Quand plusieurs surfaces du second degré sont telles que trois plans dontiés aient chacun le même pôle par rapport à ces surfaces : \° Les pôles dun autre plan transversal quelconque , pris par rapport à ces surfaces, sont situés en ligne droite ; 2** Les plans polaires dun point quelconque de l'espace, pris par rapport à ces surfaces, passent par une même droite; 3" Enfin, toutes ces surfaces ont leurs centres situés sur une même droite. ( 1 69) L'équation (2) servira pour la solution de cette question : Coîistruire une surface du second degré telle que quatre plans donnés aient pour pôles , par rapport à celte surface , quatre points donnés ; ces points satisfaisant à la condition exprimée par le théorème (167). On concevra un plan transversal situé à l'infini, et l'on construira son pôle , par trois équations semblables à l'équation (2), dont chacune déterminera un plan sur lequel sera ce pôle. Ce point sera le centre de la surface cherchée. On déterminera de même le pôle de tout autre plan transversal. Par le centre o de la surface et le pôle a d'un plan^ on mènera une droite qui rencontrera ce plan en « ; le produit oa. oa. sera égal au carré du demi-diamètre compris sur la droite. Si les points a et « sont d'un môme côté du point o, ce diamètre sera réel; et si ces points sont de côtés différens du point o, ce diamètre sera imaginaire. Tom. XI. 88 694 MÉMOIRE DE GÉOMÉTRIE. On déterminera ainsi autant de points qu'on voudra de la surface. Si l'on veut construire ses trois axes principaux, on cherchera d'abord un système de trois diamètres conjugés, ce qui se fera très- aisément. Pour cela on mènera par le centre un plan transversal quelconque, et on cherchera son pôlej on trouvera un point situé à l'infini sur une droite dont la direction sera l'intersection commune de trois plans qu'on déterminera par trois équations semblables à l'équation (2). La droite diamétrale parallèle à cette droite sera le diamètre conjugué au plan transversal. Par ce diamètre on mènera un second plan transversal, et on cherchera semblablement son diamètre conjugué. Ces deux diamètres et la droite d'intersection des deux plans formeront un système de trois diamètres conjugués. Ces trois diamètres feront connaître, par la construction que nous avons donnée dans la Note XXV, les trois axes principaux de la surface. Ainsi le problème est résolu complètement. Nous nous sommes étendu sur cette solution, parce que nous croyons qu'il serait utile qu'on ne négligeât aucune occasion de con- struire les surfaces du second degré déterminées par diverses condi- tions, pour hâter le perfectionnement de leur théorie, et arriver à la connaissance de la relation si désirée qui doit exister entre dix points d'une telle surface. Peut-être parviendra-t-on d'abord, en s'occupant de ce genre de questions, à quelques cas particuliers de cette relation , qui mettront sur la voie de la relation générale elle-même. .a. MÉMOIRE DE GÉOMÉTRIE. 695 l\^lv\^lvvvv\^^^lvvvvv\^^^^lvv^\vvv^^vv^lvvvvvv\^^\v^^^^^^^^^\^^ DEUXIÈME PARTIE. PRINCIPE D'iIOXOGRilPlIIE. § I. Démonstration du Principe d'homographie. ■ li'i - ■ (170) Les propositions auxquelles nous avons applicpié le principe de dualité nous ont conduit souvent à des propositions d'une plus grande généralité, dans leur genre, que ces premières dans le leur. On conçoit donc qu'en appliquant le même principe à ces nouvelles pro- positions, on en obtiendra d'autres, du genre des premières, mais qui pourront être plus générales qu'elles. Le principe de dualité offre donc le moyen de généraliser une foule de propositions connues. Mais on voit sur-le-champ que ce moyen devant toujours être le même, puisqu'il se réduit à répéter deux fois le mécanisme de la transformation des figures par le principe de dualité; on voit, dis-je, que ce moyen peut être érigé lui-même en principe général de l'é- tendue, immédiatement applicable aux figures proposées. (171) Voici comment nous énoncerons ce principe : Une figure de forme quelconque étant donnée dans f espace, on peut toujours concevoir une seconde figure du même genre, et jouis- sant des mêmes propriétés descriptives que la première, c*estàdire qu'à chaque point, à chaque plan, à chaque droite de la première fi- gure, correspondront, dans la seconde, un point, un plan, une droite; Aux points à V infini dans la première figure , correspondront, dans la seconde, des points situés tous sur un même plan ; de sorte qu'à des faisceaux de droites parallèles appartenant à la première » é 696 MÉMOIRE DE GÉOMÉTRIE. figure, correspondront, dans la seconde , des faisceaux de droites concourantes en des points situés tous sur un même plan ; Les deux figures auront entre elles des relations do grandeur , qui consistent en ce que : 1» Le rapport anharmonique de quatre points situés en ligne droite dans la première figure, sera égal au rapport anharmo- nique des quatre points homologues dans la seconde figure ; Et 2° Le rapport anharmonique de quatre plans de la première figure , passant par une piême droite, sera égal au rapport an- harmonique des quatre plans homologues, dans la seconde figure. Ainsi a, b, c , d, étant quatre points quelconques de la première figure, situés en ligne droite, et a' ,b' , c' , d' , étant les quatre points homologues dans la seconde figure, on aura toujours l'égalité ca da c'a' d'à' ^^^ 'cb '' Ib ~ '^' ' Jb' ' et A, B, C , D, étant quatre plans quelconques de la première figure, passant par une même droite, et A', B', C, D', étant les quatre plans homologues dans la seconde figure, on aura l'égalité sin. C,A ^ sin. D,A sin. C',A' sin. D',A' ^ ' sin. C,B ' sin. D,B ~ sin. C,'B' ' sin. D',B' " La démonstration de ce principe est bien simple; il suffit de con- cevoir une figure A' corrélative de la proposée A, c'est-à-dire sa transformée par le principe de dualité; puis de former une autre figure A" corrélative de A'; il est clair que A" sera du même genre que A , et que les deux figures auront entre elles toutes les dépen- dances comprises dans l'énoncé du principe. (172) Si les quatre plans A, B, C, D étaient parallèles entre eux, on remplacerait le premier membre de l'équation (2) par le rapport anharmonique des quatre points où ces plans rencontreraient une transversale quelconque; ainsi soient «, 6, -/, à, ces points, on aurait -, yo. d'à sin. C',A' sin. D',A' '^"■' ■'• 7?' ^ ~ sin. C',B' * sin. D',B' ' MÉMOIRE DE GÉOMÉTRIE. b97 On agirait de même si les quatre plans correspondans A', B', C, D', de la seconde figure, étaient parallèles entre eux. (173) Ces formules se simplifient quand un ou deux des points qui y entrent sont à l'infmi. Si le point d de la première figure est situé à l'infini , l'équation (1) deviendra ca c'a' d'à' Si l'un des quatre points a' , h', c' , d' de la seconde figure est aussi situé à l'infini, l'équation deviendra encore plus simple , car le second membre ne contiendra que deux segmens, de même que le premier. (174) Les deux équations (1) et (2) sont susceptibles d'interpréta- tions géométriques qui faciliteront dans beaucoup de questions les applications du principe d'homographie. L'équation (1) s'écrit sous la forme ca c'a' da d'à' Tb '7b' ^ db ' Jb'' Le second membre est indépendant de la position du point c, situé sur la droite ab, et de son homologue c'; nous pouvons donc écrire ca c'a' — : -— = const., cb cb quel que soit le point c sur la droite ab. Menons par le point c un plan quelconque Mj considérons-le comme appartenant à la première figure, et menons par le point c' le plan M' qui lui correspondra dans la seconde figure. Soient p, q, les distances du plan M aux deux points o, b^ on aura P ' ca q cb 698 MÉMOIRE DE GÉOMÉTRIE. Soient pareillement p' , q' , les distances du plan M' aux points a' , b' ; on aura p' c'a' q' c'b' On a donc P ?' - : i- = const 9 î Le plan M a été mené arbitrairement par le point c / et ce point avait une position quelconque sur la droite ah / de sorte que le plan M a une position tout-à-fait arbitraire dans l'espace. Cette équation exprime donc que : Bans deux figures homographiques, le rapport des distances d'un plan quelconque de la première, à deux points fixes de cette figure, est au rapport des distances du plan homologue , dans la seconde figure , aux deux points fixes qui correspondent à ceux de la pre- mière figure, dans une raison constante. (175) Maintenant considérons l'équation (2), et écrivons-la sous la forme sin. C,A sin. C',A' sin. D,A _ sin. D',A' sin. C,B ■ sin. C',B' ~ sin. D,B ' sin. D',B' ' Le second membre est indépendant de la position du plan C, qui est arbitraire , pourvu seulement que ce plan passe par la droite d'inter- section des deux plans A, B; on a donc sin. C,A sin. C'.A' ; = const. sin. C,B sin. C',B' Prenons dans le plan C un point quelconque m, appartenant à la première figure, et dans le plan C le point correspondant m' de la • seconde figure. Le rapport des distances du point m aux deux plans A, B, sera égal à ^!"' ' ; le rapport des distances du point m' aux deux plans A', B', sera égal à fl^^inF- Ces deux rapports seront entre eux dans une raison constante, d'après l'équation ci-dessus. On en conclut ce principe : MÉMOIRE DE GÉOMÉTRIE. 699 Dans deux figures homographtques , le rapport des distances dun point quelconque de la première, à deux plans fixes appartenant à cette première figure, est au rapport des distances du point homo- logue dans la seconde figure aux deux plans fixes qui correspondent aux deux premiers , dans une raison constante. Cette raison ne dépend que de la position des plans fixes auxquels on rapporte les points des deux figures. (176) L'un des deux plans fixes de chaque figure peut être pris à l'infini, nous allons voir ce que devient alors le théorème. Supposons que le plan B soit à l'infini, les quatre plans A,B, C, D, étant alors parallèles entre eux, nous nous servirons de l'équation (3), dans laquelle î est à l'infini. Cette équation devient ya sin. C',A' sin. D',A' da sin. C'jB' * sin. D',B' ' ou sin. C',A' sin. D',A' y a. ', : == moyennes distances, la déformation homograpliique donne un sys- )) tème de points, et leur centre des moyennes harmoniques , relatif » à la droite qui correspond à l'infini sur le plan de la première fi- )) gure. )) (207) Soit un système de points situés d'une manière quelconque dans l'espace , et leur centre des moyennes distances 5 si on les pro- jette tous sur un plan, par des droites parallèles entre elles, on aura, en projection , un système de points et leur centre des moyennes dis- tances. Faisant la figure homograpliique, et observant que les droites projetantes deviendront des droites concourantes en un même point ' Mémoire sur les centres des moyennes harmoniques. Voir Journal de M. Crelle , année 1828. MEMOIRE DE GEOMETRIE. 717 d'un plan fixe correspondant à l'infini de la première figure , on aura , d'après ce qui précède, ce théorème : Étant donnés un système de points dans V espace et un plan , si d'un point pris arbitrairement dans ce plan on mène des rayons à tous ces points , et un dernier rayon au centre des moyennes harmoniques des points oie ces rayons rencontrent un plan trans- versal quelconque , pris par rapport à la droite d'intersection de ce plan tratisversal et du plan donné, ce dernier rayon passera par un point fixe, quel que soit le point pris dans le plan donné. Ce point est nommé le centre des moyennes harmoniques du système de points, par rapport au plan donné. (208) Nous pouvons donc dire que : « Quand on a un système de points dans l'espace, et leur cettlre )) des moyennes distances, le principe d'Homographie donne un sys- )) tème de points, et leur centre des moyennes harmoniques , par )) rapport au plan qui correspond à l'infini de la première figure. » (209) Si par des points pris dans l'espace, et par leur centre des moyennes distances, on mène des plans parallèles entre eux, une transversale quelconque les percera en des points dont le dernier sera le centre des moyennes distances de tous les autres j faisant la figure homographique on conclut de là, d'après ce qui précède, cette autre proposition : Étant donné un système de points dans Tespace, et un plan fixe , si par une droite prise arbitrairement dans ce plan on mène des plans passant par tous ces points ; et qu'on prenne le centre des moyennes harmoniques des points où une transversale quel- conque rencontrera ces plans, par rapport au point où cette trans- versale rencontrera le plan donné ; le plan mené par ce centre et par la droite , tournera autour d'un point fixe , quand on fera mou- voir cette droite dans le plan donné. Ce point fixe est le centre des moyennes harmoniques du système de points, par rapport au plan donné. (210) Ces divers théorèmes sont dus à M. Poncelet qui les a dé- ToM. XI. 91 718 MÉMOIRE DE GÉOMÉTRIE. montrés par une voie directe dans son 3Iémoire sur les centres des moyennes harmoniques . W^ expriment, en quelque sorte, les pro- priétés descriptives du centre des moyennes harmoniques d'un système de points, puisqu'ils apprennent à déterminer ce point par des in- tersections de lignes droites et sans calcul. Dans le paragraphe suivant, nous allons présenter quelques autres propriétés du centre des moyennes harmoniques d'un système de points, qui sont d'un autre genre, et qui nous paraissent être les plus importantes de cette théorie, parce que les premières s'en déduisent aisément. $ VIII. Autres propriétés du centre des moyennes harmoniques d'un système de points. (211) Soit un système de points dans l'espace, et leur centre des moyennes distances- ce point jouit de la propriété que sa distance à un plan transversal quelconque , multipliée par le nombre des points , est égale à la somme des distances de tous les points à ce plan. Faisant la déformation homographique , on aura un système de points et leur centre des moyennes harmoniques par rapport au plan qui correspond à l'infini de la première figure (208). Appliquant à la propriété du centre des moyennes distances , que nous venons d'é- noncer, le principe des relations métriques de l'art. (176), on obtient ce théorème : Le centre des moyennes harmoniques dHun système de points, pris par rapport à un plan donné , jouit de la propriété que la somme des distances de tous ces points à un plan transversal mené arbitrairement , divisées respectivement par les distances des mêmes points au plan donné, est toujours égale à la distance du centre des moyennes harmoniques au plan transversal, divisée par sa distance au plan donné et multipliée par le notnbre des points. Ainsi, soit I le plan donné, et tt le plan transversal mené arbi- trairement, et représentons par ai, bi , .... gi, les perpendiculaires MÉMOIRE DE GÉOMÉTRIE. 719 abaissées des points a, b, et de leur centre des moyennes har- moniques g sur le plan I, et par ai:, bn, .... gn, les perpendiculaires abaissées des mêmes points sur le plan 7;^ on aura OT br gr ai bi ig quel que soit le plan transversal n. (212) Ce théorème peut servir à définir le centre des moyennes harmoniques d'un système de points par rapport à un plan donné. On peut même lui donner un énoncé plus caractéristique ; car si l'on suppose que les points soient matériels et aient, respectivement, leurs masses proportionnelles aux valeurs inverses des distances des points au plan donné, on voit que le centre de gravité de ces poids sera le centre des moyennes harmoniques des points du système. De sorte qu'on peut dire que : Le centre des moyennes harmoniques d'un système de points , relatif à un plan donné , est le centre de gravité de ces points , supposés matériels , et ayant leurs masses en raison inverse des distances de ces points au plan donné. Cette définition du centre des moyennes harmoniques d'un système de points relatif à un plan, comprend les propriétés de ce point, que nous avons démontrées dans le paragraphe précédent; c'est-à-dire que, de cette définition , on déduit aisément ces propriétés ; et de cette ma- nière la théorie du centre des moyennes harmoniques, bien que plus générale que celle du centre des moyennes distances, devient une simple application de celle-ci. (213) On peut encore supposer que les points du système soient sollicités par des forces parallèles entre elles, et égales aux valeurs inverses des distances de ces points au plan donné; alors on dira que le centre des moyennes harmoniques de ces points par rapport à ce plan, est le centre de ces forces parallèles, c'est-à-dire le point par où passera leur résiiltante quelle que soit leur direction commune. C'est sous ce point de vue que M. Cauchy a considéré le centre 720 MÉMOIRE DE GÉOMÉTRIE. des moyennes harmoniques d'un système de points ' , et est parvenu , par des considérations de statique, à en conclure les autres pro- priétés de ce point. Ce célèbre analyste a tiré de là aussi un moyen facile d'exprimer par trois équations, dans le système de coordonnées ordinaire, la position du centre des moyennes harmoniques, soit d'un système de points, soit d'un corps solide de forme donnée. (214) Si dans le théorème général (211) on suppose le plan trans- versal TT à l'infini, les rapports ~, ■^,-- seront égaux à l'unité, et l'équation deviendra 1 I n ai bi gt Ce qui prouve que : La somme des valeurs inverses des distances de plusieurs points à un plan ^ est égale à la valeur inverse de la distance, à ce plan, du centre des moyennes harmoniques de ces points, par rapport au plan , multipliée par le nombre des points. (215) Si l'on suppose, dans le théorème général (211), le plan transversal parallèle au plan fixe, en conclut cette autre propriété du centre des moyennes harmoniques : Quand on a un système de points et leur centre des moyennes harmoniques par rapport à un plan, si d'un point quelconque de l'espace on mène des rayons à tous ces points , et qu'on fasse le rapport de chaque rayon au segment com'pris entre le point auquel ce rayon est mené et le poitit où il perce le plan , le rapport relatif au centre des moyennes harmoniques , multiplié par le nombre des points, sera égal à la somme de tous les autres rapports. § IX. Propriétés du centre des moyennes harmoniques d'un système de points qui se meuvent dans l'espace. (216) Soient des points A, B, C,.... auxquels on imprime desmou- ' Voir dans le lom. XVI des Jnnalesde Mathématiques le rapport de MM. Legendre, Ampère et Cauchy sur le Mémoire sur les centres des moyennes harmoniques de M. Poncelet. lliNPmE DE GÉOMÉTRIE. 721 vemens quelconques, mais uniformes et rectilignes; on sait que leur centre des moyennes distances parcourra une droite. Soient a, 6, y,.... les positions de ces points après un temps 6', et a, b, c , leurs positions après un autre temps i; on aura, puisque les mouvemens sont uniformes Ââ~7' BÏ~7'**'' Faisons la figure homographique ; nous aurons un système de points A', B', C',.... qui parcourront des droites, de manière qu'au bout du temps 9 ils seront en «',6', /,... et qu'au bout du temps / ils seront en a', b' , c',.... On aura en désignant par iyj, k,... les points où ces droites percent un plan fixe P correspondant à Tinfini de la pre- mière figure. ou AV «V kx 6 A'a' ' la' ~ \a ~ t ' B'C iC BC 6 B'i' ' IP ~ Bb ~ t' AV A'a' 9 ta' ' ia' ~ t ' Br B'i' 6 ib' • ih' - 7 ' • • . et le centre des moyennes harmoniques de ces points, par rapport au plan P, parcourra une droite, correspondante à la droite décrite par le centre des moyennes distances des points A, B, C,.... Les distances des points «' , et a' au point i sont entre elles comme les distances de ces points au plan P : on peut donc les remplacer par ces dernières, dans la première des équations précédentes; il en est de même des dislances des points b' et b' au point j; et ainsi des autres; on a donc ce théorème : 722 MEMOIRE DE GÉOMÉTRIE. Si des point situés dans l'espace prennent des mouvemens rec- tilignes , de manière que les espaces qu'ils parcourent, divisés respectivement par les distances des points, dans leurs nouvelles positions, à un plan fixe, soient proportionnels aux temps , le centre des moyennes harmoniques de ces points , pris par rapport à ce plan f parcourra une ligne droite. (217) Supposons, dans les équations ci-dessus, que les points A', B', C... soient à l'infini, il viendra 1 J 6 ta ta t 1 J « ce qui prouve que : Si des points situés dans l'espace prennent tous des mouvemens rectilignes , de manière que les valeurs inverses de leurs distances à un plan fixe soient toujours proportionnelles aux temps , le centre des moyennes harmoniques de ces points, par rapport au plan, décrira une ligne droite. § X. Propriétés nouvelles des suîfaces géométriques. (218) Nous avons démontré, dans nos applications du principe de dualité : que , Si, par une droite prise arbitrairement dans un plan fixe , on mène les plans tangens à une surface géométrique , leurs points de contact avec la surface ont toujours pour centre des moyennes harmoniques , par rapport au plan, un tnéme point de V espace, quelle que soit cette droite. Cette proposition donne lieu, d'après les théorèmes du § VIII, à cette autre propriété générale des surfaces géométriques : Si par une droite , prise arbitrairement dans un plan fixe , on mène les plans tangens à une surface géométrique , la somme des MÉMOIRE DE GÉOMÉTRIE. 723 dislances de leurs points de contact avec la surface , à Uîi plan transversal quelconque , divisées respectivement par les distances de ces points au plan fixe, sera une quantité constante , quelle que soit la droite prise dans le plan fixe. (219) Si le plan transversal est à l'infini, le théorème devient le suivant : Si par une droite, prise arbitrairement dans un plan fixe, on mène les plans tangens à une surface géométrique , la somme des valeurs inverses des distances de leurs points de contact avec la surface , au plan fixe, sera constante, quelle que soit la droite prise dans ce pla?i. (220) Si c'est le plan fixe qui est à l'infini, le centre des moyennes harmoniques des points de contact devient leur centre des moyennes distances, eilc théorème (218) exprime une propriété générale des sur- faces géométriques que nous avons déjà démontrée, (l*^*^ Partie, art. 68). (221) Ces théorèmes ont également lieu pour une courbe géomé- trique plane, ou a double courbure. (222) Ils s'appliquent aussi aux surfaces coniques. Voici ce qu'ils deviennent dans ce cas. Que dans le théorème général (218) on suppose que la droite prise dans le plan fixe, tourne autour d'un point de ce plan; les plans tan- gens à la surface, menés par cette droite, seront tangens au cône qui a ce point pour sommet et qui est circonscrit à la surface; et si l'on suppose que le plan transversal passe par ce point, le rapport des per- pendiculaires abaissées du point de contact d'un des plans tangens à la surface sur le plan transversal et sur le plan fixe sera égal au rapport des sinus des angles que l'arête du cône qui passe par ce point, fait avec ces deux plans ; on a donc cette propriété générale des cônes géométriques : Étant menés deux plans fixes par le sommet d'un cône géomé- trique, si par une droite prise dans le premier plan et passant par le sommet du cône , on mène à cette surface tous ses plans tangens^ la somme des sinus des angles que les arêtes de contact feront avec 724 MEMOIRE DE GEOMETRIE. le second plan, divisés respectivement par les sinus des angles que ces arêtes font avec le premier plan , sera constante , quelle que soit, dans le premier plan, la droite par laquelle on a mené les plans tangens. (223) Par la considération du cône supplémentaire , formé par les perpendiculaires aux plans tangens du premier cône, on conclut de ce théorème cette autre propriété des surfaces coniques : Étant menées deux! droites fixes par le sommet d'un cône géo- métrique, si autour de la première on fait tourner un plan trans- versal et qu'on conçoive les plans tangens au cône suivant les arêtes comprises dans ce plan , dans chacune de ses positions, la somme des_ sinus des angles que ces plans feront avec la seconde droite, divisés respectivement par les sinus des angles qu'ils feront avec la première , sera constante pour toutes les positions du plan transversal. (224) En appliquant aux surfaces du second degré, et particu- lièrement aux surfaces coniques, les théorèmes généraux de ce pa- ragraphe, on obtient diverses propriétés nouvelles de ces surfaces. Si l'on prend une surface de révolution ayant un foyer, et que l'on observe que la distance de chaque point de la surface au plan directeur est proportionnelle à la distance de ce point au foyer, le théorème (218) exprimera la propriété générale des surfaces de révolution que nous avons démontrée dans nos applications du principe de Dualité {§ XXIII, art. 133). Ainsi l'on voit que cette propriété, qui paraissait d'un genre tout particulier aux surfaces du second degré de révolu- tion, dérive d'une propriété très-générale des surfaces géométriques, comme nous l'avions dit alors. (225) Les deux théorèmes (222 et 223) donneront diverses propriétés des cônes du second degré, lesquelles seront applicables immédiate- ment aux coniques sphériques, et plusieurs correspondront à des pro- priétés connues des coniques planes. Et si le cône est supposé de révolution, on aura diverses proposi- tions concernant un petit cercle tracé sur la sphère. Nous énoncerons MÉMOIUE DE GÉOMÉTRIE. 723 les quatre suivantes qui sont assez simples, et qui nous paraissent nouvelles : Un petit cercle étant tracé sur la sphère ; 1" La somme des sinus des arcs menés par les extrémités d'un diamètre quelconque du petit cercle , perpendiculairement sur un grand cercle fixe, sera constante^ 2<» La somme des sinus des distances d'un point fixe de la sphère aux arcs de grands cercles tangens aux extrémités dun diamètre du petit cercle , sera constante ; 3° Si, par un point quelconque pris sur un grand cercle fixe, on mène deux arcs tangens au petit cercle , la somme ou la dif- férence des valeurs inverses des sinus des distances des points de contact , au grand cercle fixe , sera constante / Ce sera la somme si le grand cercle fixe ne rencontre pas le petit cercle proposé ; et la différence s'il le rencontre. 4° Si autour dun point fixe on fait tourner un arc transversal qui rencontre le petit cercle en deux points , et qu'on mène les arcs tangens en ces points , la somme ou la différence des valeurs inverses des sinus des distances de ces arcs tangens , au point fixe , sera constante. Ce sera la somme si le point fixe est pris dans l'intérieur du petit cercle , et la différence s'il est pris au 'dehors. § XL Généralisation du théorème de Newton sur le rapport constant du produit des abscisses au produit des appliquées , dans une courbe géométrique. (226) Le théorème de Newton , appliqué aux surfaces, consiste en ce que : Dans toute surface géométrique , de quelque point de Vespace qu'on mène deux transversales parallèles à deux axes fixes , le rapport des produits des segmens faits sur ces deux transversales , entre ce point et la surface, sera constant. To«. XI. 9* 726 MEMOIRE DE GEOMETRIE. Ainsi soit M ce point, et soient A, A', A",... et B, B', B"...., les points où les deux transversales rencontrent la surface, on aura MA. MA'. MA" = const. , MB. MB'. MB" quel que soit le point M. C'est cette propriété des surfaces géométriques que nous allons gé- néraliser, en supposant que les deux transversales, au lieu d'être parallèles respectivement à deux droites fixes, concourent en deux points fixes. Pour cela, concevons un plan fixe quelconque P, et soient E, F, les points où les deux transversales MA, MB, le rencontrent. Le rapport ^vp sera constant, quel que soit le point M. On pourra donc écrire l'équation ci-dessus sous cette forme (!)• MA MA' MA' ME ME ME •• MB MB' MB" MF MF MF '■■ '•_ Faisons la transformation homographique. Nous aurons une sur- face géométrique, un plan fixe, et deux transversales issues d'un point quelconque de l'espace et passant par deux points fixes i,j. Ces deux transversales rencontreront la surface en des points a, a' ,a"y.. b, b', b" ,.... et le plan fixe en e eif; et l'on aura MA ma ta ME me te MB MF mb - mf .fi L'équation (1) devient donc ma ma' ma" _ /me\" ta ta' ta \»e/ mb mb' mb" ^ /«i/'\ " Jb' ~W' 'W'""''^jf) = const. MÉMOIRE DE GÉOMÉTRIE. 727 n étant lo nombre des points de rencontre de la surface par chacune des transversales. On tire de là ma. tua', ma" ta, ta.' ta" /meX" /mfX" = ( 7- : ( -^7- X (*)••• mb.n^b-.mb-' 'jb.jy.jl^' ^ (^j '(fJ ^ '""*'' ^ ""'""'' Ce qui exprime cette propriété générale des surfaces géométriques: Quand on a une surface géométrique et deux points fixes i , j , de quelque point m de l'espace quon mène deux transversales passant respectivement par ces deux points fixes, le rapport des produits des segmens compris entre le point m et la surface sur ces deux droites, sera au rapport des produits compris sur ces mêmes droites entre les deux points i, ], et la surface, dans une raison constante. (227) Supposons le point m. situé à l'infini sur la droite ij, et soient c, c' , c" ,.... les points où cette droite rencontre la surface; les rap- ports ^, ^,. .. seront égaux à l'unité, et l'équation deviendra , mb' mb' je. je. je — :^ const. te. te . te .... On a donc ma. ma', ma" ta. ta.' ta" je. je', je" mb. mb'. mb" * jb.jb.'jb" ou ma. ma', ma". ... jb. jb'. jb" = 1. 10. ta. ta".. .. mb. mb.' mb" j<^'j<^''j'^' Cette équation exprime le beau théorème de Carnot sur les surfaces géométriques. (V. Géométrie de position, p. 291.) On savait que ce théorème donnait comme cas particulier celui de Newton, mais on n'avait pas cherché à remonter de ce cas particu- lier au théorème général de Carnot. Le principe d'Homographie, en présentant sous un nouveau point de vue les relations qui ont lieu entre les deux théorèmes, sert à passer aussi facilement du cas par- ticulier au théorème général, que du théorème général au cas parti- culier. 728 MÉMOIRE DE GÉOMÉTRIE. (228) Ce théorème conduit naturellement à une solution graphique du problème des tangentes et de celui des rayons de courbure des courbes géométriques. Nous donnerons cette solution, qui est étran- gère à notre objet actuel, dans une Note à la suite de cet écrit. (229) Le théorème de Newton ne pouvait s'appliquer aux courbes tracées sur la sphère; le théorème général s'applique à ces figures. Pour cela il suffit de substituer dans l'équation (2), aux segmens wa, ia,... les sinus des arcs correspondans sur la sphère. Nous n'avons pas besoin d'énoncer le théorème de géométrie sphérique qui en ré- sulte. § XII. Généralisation des propriétés des surfaces géométriques rapportées à trois axes coordonnés. Théorèmes très-généraux, (230) Soient trois axes coordonnés O^ , Qy , Os; que par un point de l'espace on mène trois plans; parallèles respectivement aux trois plans yz , zx, xy^ et soient a, h , c, les points où ils rencontreront les trois axes Ox, Oy, Oz. Si l'on a entre les trois segmens Oa, Ob , Oc, une relation con- stante du degré w F (Oa, 0Z>, Oc) = o, le point m sera, dans toutes ses positions , sur une surface de l'ordre n ; Et réciproquement, si le point m appartient à une surface de l'ordre n, il y aura entre les trois segmens Oa , Ob , Oc une relation con- stante (1) F (Oa, 06, Oc) = o du degré n. C'est cette propriété des surfaces géométriques que nous allons généraliser. Faisons la figure homographique; nous aurons trois axes O'x', O'y', O'z' , et un plan, correspondant à l'infini de la première figure, qui coupera ces trois axes en trois points A', B', C, de sorte que ces trois points correspondront à ceux situés à l'infini sur les trois droites Ox, Oy, Oz. MEMOIRE DE GEOMETRIE. 7*9 Au point m correspondra un point m', et aux trois plans menés par le premier, parallèlement aux trois plans yOz, zOa;, aOy, cor- respondront trois plans menés par le second, et passant respective- ment par les trois droites B'C, C'A', A'B'. Soient a' , b' , c', les points où ces trois plans rencontreront les trois axes O'x' , O'y' , O'z' , res- pectivement. Soient enfin trois points d, e , f, pris arbitrairement sur les trois axes Ox y Oy, O5, et c?', e', /', les points correspondans sur les axes O'x' , O'y', O's'; on aura Oa _ O'a' A'a' Od ~Wd' ' K'd' ' Ob _ O'b' B'6' Ôë ~ ÔV ' BV ' Oc _ O'c' Ce' Of~'Ôf''Cf' Et Téquation (1) deviendra /•^ r r/^^'"' ^'^\ ^. /'O'b' 0'e'\ /O'c' 0'f\ -\ W • • «^ [(Xv '' X^'j- ^'\Wb^ •• B-vJ- ^«' (^ ■' w} ^^ J == "• Les facteurs Od, Oe, Of, sont des constantes que nous pouvons com- prendre dans les coefficiens de l'équation, qui sera simplement /OV ^ o'd' t réciproquement. (244) Nous avons démontré dans la première partie de cet écrit (5 XV, art. 77) que dans ce cas, où les segmens ont entre leurs valeurs inverses une relation du degré w , le plan déterminé par leurs extré- mités enveloppe une surface à laquelle on peut mener, par une même droite, n plans trangens. Supposons que la surface soit plane, on conclut de là et du théorème précédent, que : Étant donnés dans V espace un triangle et un angle trièdre ayant son sommet situé dans le plan du triangle , si par chaque point d'un plan transversal quelconque oti mène trois plans passant par les trois côtés du triangle, ils rencontreront respectivement les trois arêtes de l'angle trièdre en trois points ; et le plan déter- miné par ces trois points passera par un point fixe. C'est le théorème que nous avions présenté comme la généralisation d'un porisme d'Euclide, pouvant servir à la construction de figures corrélatives dans l'espace (V^ Epoque, $ 32), et dont nous avons déjà donné une démonstration (première partie, § XX, art. 112). (245) Enfin supposons , dans le théorème (234) , que les trois transversales soient perpendiculaires au plan du triangle ABC; les segmens A'a', B'Z>', Ce', seront proportionnels aux tangentes des inclinaisons des trois plans a'BC, Z>'CA, c'AB sur le plan ABC; et les valeurs inverses de ces segmens seront proportionnelles aux co- tangentes de ces inclinaisons; le théorème peut donc prendre cet énoncé : Si par les trois côtés d'un triangle on mène trois plans, de manière que les cotangentes de leurs inclinaisons sur le plan du triangle aient entre elles une relation constante du degré n, le MÉMOIRE DE GÉOMÉTRIE. 787 point d intersection de ces trois plans aura pour lieu géométrique une surface de l'ordre n. Et réciproquement. (246) Dans l'équation (4), au rapport anharmonique des quatre points A', D', a'. A", exprimé par A'V D'A" ÂV * D'A' ' on peut substituer le rapport anharmonique des quatre plans menés par le côté BC du triangle ABC, et par les quatre points A', D', a'. A" respectivement. Aux deux autres rapports anharmoniques qui entrent dans l'équation , on substituera pareillement les rapports anharmo- niques de quatre plans : ces rapports s'expriment entre les sinus des angles que les plans font entre eux. Maintenant si l'on considère que les sinus relatifs aux plans qui passent par les points D', E', F', sont constans, et qu'on peut les comprendre dans les coefTiciens de l'é- quation, on aura une équation entre les sinus des inclinaisons des trois plans a'BC, ;6'CA, c'AB, sur le plan ABC et sur les trois plans fixes A"BC, B"CA, C'AB; ceux-ci forment avec le plan ABC un tétraèdre fixe ; on a donc ce théorème : Etant donné un tétraèdre , si par les trois arêtes à la base on mène trois plans , de manière que les rapports des sinus de leurs inclinaisons sur la base, aux sinus de leurs inclinaisons sur les faces adjacentes respectivement aux trois arêtes, aient entre eux une relation du degré n, le lieu géométrique du point d'inter- section des trois plans sera une surface de l'ordre n. Et réciproquement. (247) Le rapport des sinus des inclinaisons d'un plan mené par une arôte d'un tétraèdre sur les deux faces adjacentes, est égal au rapport des perpendiculaires abaissées d'un point de ce plan sur ces deux faces; le théorème donne donc le suivant : Étant donné un tétraèdre, si P on prend dans l'espace un point qui soit tel que ses distances à trois faces du tétraèdre étant divisées 738 MEMOIRE DE GÉOMÉTRIE. par sa distance à la quatrième face, les trois quotiens aient entre eux une relation constante du degré n, ce point aura pour lieu géométrique une surface de l'ordre n. Et réciproquement. (248) Ainsi soient r, r' , r" , r'", les distances d'un point de l'es- pace aux quatre faces du tétraèdre, on aura entre les trois rapports r" une relation du degré n, , r r r , Multipliant tous les termes par r'" on aura une équation homogène du degré w, entre les distances r, r', r", r'". Ainsi : Quand un point est pris de m^anière que ses distances à quatre plans fixes aient entre elles une relation constante du degré n, ce point a pour lieu géométrique une surface de l'ordre n. Et réciproquement, étant donnés une surface géométrique de l'ordre n, et quatre plans fixes, les distances de chaque point de la surface à ces quatre plans auront toujours entre elles une certaine relation homogène du degré n. (249) Ainsi, par exemple, étant donnés quatre plans dans l'espace, si de chaque point d'un cinquième plan on abaisse sur ces quatre premiers des perpendiculaires r, r' , r" , r'" , on pourra trouver trois quantités a, S, y, telles qu'on aura entre ces quatre perpendicu- laires , la relation constante r -t- ar' -+- Sr" ■+■ yr'" = o. Les trois quantités a, 6, y, ne dépendront que de la position du cin- quième plan par rapport aux quatre premiers , et varieront avec la position de ce plan. MEMOIRE DE GEOMETRIE. 739 Pareillement, si de chaque point d'une surface du second ordre, on abaisse des perpendiculaires r, r', r" , r'" , sur quatre plans fixes, on pourra trouver neuf quantités constantes, a, b, c, d, e, f, g, h , i , telles quon aura entre ces perpendiculaires la relation con- stante r' +. or" -4- bt"' -4- Cf""' ■*■ drr' -^ err" H- frr'" ■+■ gr'r" -h Ar'r'" -♦- ir"r"' = o. Ces théorèmes sont des porismes. Ils sont propres à montrer la nature de ce genre de propositions ; et font voir comment nous avons pu dire, dans notre Note III sur les porismes d'Euclide, que la géo- métrie de Descartes avait remplacé cette doctrine. (250) Les théorèmes démontrés dans ce paragraphe sont de ceux qui n'offrent pas de difficulté à la géométrie analytique; mais par cette voie il faut une démonstration particulière pour chacun d'eux, et on ne découvre pas les rapports intimes qui ont lieu entre eux. Il est intéressant de voir que tous ces théorèmes, au nombre desquels se trouve le principe même de la géométrie analytique en usage, sont ou des expressions différentes ou des corollaires les uns des autres , et tous des conséquences d'un même et unique principe exprimé par l'équation (3). Tous ces théorèmes s'appliquent d'eux-mêmes à le géométrie plane , et la plupart ont leurs analogues aussi dans la géométrie de la sphère , où il suffira de remplacer par des rapports de sinus d'arcs de grands cercles, les rapports de segmens rectilignes. 5 XIII. Généralisation du système de coordonnées en usage. (251) Chacun des théorèmes contenus dans le paragraphe précé- dent peut servir de principe à un système de coordonnées analogue au système en usage, et dans lequel les trois variables qui détermine- ront chaque point de l'espace, s'élèveront, dans l'équation d'une sur- face, au degré même marqué par l'ordre de cette surface, c'est-à-dire 740 MÉMOIRE DE GEOMETRIE. par le nombre de points (réels ou imaginaires) où la surface sera ren- contrée par une ligne droite quelconque. De tous ces systèmes de coor- données, il en est un que nous allons examiner, parce qu'il conserve une analogie parfaite avec le système en usage, dont il est une géné- ralisation très-simple. Concevons que dans le théorème (232) les trois droites transversales soient les arêtes au sommet d'un tétraèdre OABC, dont la base soit le triangle ABC ; et remplaçons les points a', Z>', c', dans l'équation , par les points a, h, c , on aura ce théorème : Si par les trois arêtes à la base ABC dun tétraèdre OABC , on mène trois plans qui rencontrent respectivement les arêtes opposées aux points a., h, c, tels que Von ait entre les trois rapports Oa Oh Oc • ^^ Aa ' B6 ' Ce une relation constante du degré n, le lieu géométrique du point d'intersection de ces trois plans sera une surface de V ordre n. Et réciproquement. (252) Puisqu'on a, pour tous les points d'une surface, une relation constante Oa Oh Oc \ F Ao Bi Ccj entre les trois rapports Oa 06 Oc Aa Bi Ce il est clair qu'on peut, en prenant ces trois rapports pour variables indépendantes , représenter la surface par cette équation ; c'est-à-dire que chaque système de valeurs de ces trois rapports qui satisfera à l'équation, donnera trois points a, h, c, sur les trois axes fixes OA, OB, OC, et les plans menés par ces trois points et par les côtés BC, CA, AB, de la base ABC, se couperont en un point qui appartiendra à la surface. MÉMOIRE DE GÉOMÉTRIE. 741 Appelons ces trois rapports les coordonnées de ce point, et dési- gnons-les par X , y f z j l'équation de la surface sera F (^, y, a) = 0. Si cette équation est du premier degré, elle représentera un plan; et en général si elle est du degré n, elle représentera une surface de l'ordre n. Deux équations du premier degré donneront tous les points d'une droite. Ainsi une ligne droite sera représentée par les deux équations X ^ a« -H ,, ^, V, les trois équations prendront la forme W a'a' aa — X a'd" Sb = n. frf" v'c' yc ^^^ V. v'd' (281) Mais il nous faut peut-être démontrer rigoureusement ces équations , c'est-à-dire faire voir que nous pouvions comprendre les segmens infinis dans les cofficiens. Pour cela reprenons l'équation aa £0 a a £ a ad ' cd a'd' e'd' qui nous a servi (274) à démontrer les trois équations (a). Le point d étant à l'infini, les deux segmens ad, ed, sont infinis, et leur rapport est égal à l'unité; l'équation se réduit donc à aa o,'a' t'a' ea a'd' ' e'd' ' OU aa' r i'a' \ ald' V i'd'J r^o • PZy ^^^ "^^ constante indépendante de la position du point « et de son homologue «' ; on a donc aa aa aa= -— X const. = a -— ■ aa ad MÉMOIRE DE GÉOMÉTiyE. 761 Ainsi il est prouvé que dans nos formules de construction des fi- gures homographiques, nous pouvons faire entrer les segmens infinis dans les constantes. (282) D'après cela, supposons que le point c? étant à l'infini, au- quel cas on a les formules (b) , son point homologue d! soit aussi à l'infini j les formules (a) deviendront !aa ^ X. n'a! , eb = /u. Cb' , yc = y yV. (283) Si, au contraire, les points d, d', étant à distances finies, les deux plans abc , a'b'c' sont l'un et l'autre à l'infini , les formules seront de la forme Iarf = A d'à' , •yd= V y' à'. Ces formules comprennent le mode de transformation par accrois- sement, dans des rapports donnés, des coordonnées des points d'une figure. Mais la transformation qu'elles donnent est plus générale que celle-ci , parce que les coordonnées de la seconde figure peuvent être comptées sur d'autres axes que celles de la figure proposée. Nous consacrerons deux des paragraphes suivans {% XXIII et XXIV) à ce mode de déformation homographique, qui est susceptible de nombreuses applications. (284) Si l'on suppose le point d à l'infini, et le plan a'b'c^ aussi à l'infini, les formules deviendront (•). A Cb'' V 762 MÉMOIRE DE GÉOMÉTRIE. (285) Toutes ces formules sont très-simples. Elles expriment di- vers théorèmes de géométrie qui seraient nouveaux et qui pourraient offrir quelqu'intérêt ; mais comme ils ne sont que des corollaires du théorème général (275), nous nous dispenserons de les énoncer. (286) Les formules (a) peuvent donner lieu encore à d'autres cas particuliers du mode général de construction des figures homogra- phiques, qu'on obtient en donnant aux sommets a', b' , c' , d' , du second tétraèdre^ différentes positions particulières par rapport au premier tétraède. Il est deux de ces cas dont nous ferons l'objet de deux paragraphes particuliers {% XVII et XXII) à cause de leur im- portance, (287) Les formules (a') et (a") sont susceptibles aussi d'une discus- sion analogue à celle des formules {a), et de différons cas particuliers, comme celles-ci. Mais nous n'entrerons pas dans cet examen, qui n'offre aucune difficulté, surtout si l'on a égard aux théorèmes (176 et 177) qui se rapportent à cette question. (288) Le théorème (275) donne lieu à deux propositions de géo- métrie , qu'on peut considérer comme indépendantes de la théorie des figures homographiques. La figure construite dans le théorème (275) étant homographique à la figure proposée, aux points de celle-ci, qui seront sur un même plan , correspondront des points situés aussi sur un même plan ; on peut donc énoncer ce simple théorème de géométrie : Étant donnés un tétraèdre SABC , et un plan mené arbitraire- ment dans l espace ; Si par chaque point de ce plan on mène trois plans , passant par les trois arêtes à la base ABC du tétraèdre , et rencontrant les arêtes opposées en a, S , y , et qu'on forme les rapports des segmens que ces points font sur ces arêtes , lesquels rapports sont «s f s yS _ TK' clj' ^' Puis, qu'on ait un second tétraèdre quelconque S'A'B'C', et qu'on MÉMOIRE DE GÉOMÉTRIE. 763 prenne sur ses trots arêtes au sommet trots points «', ë', y , tels que les trois rapports ±51 £Ë! ?1^ «'A'' f'B" r'C' soient, respectivement, aux trois premiers dans des raisons don- nées et constantes ^ Les plans menés par les trois points a! , S', y', et par les trois arêtes B'C, A'O , A'B' , respectivement, se rencontreront en un point qui aura pour lieu géométrique un plan. (289) Les trois points «, ë, y, dans le théorème (275), détermi- nent un plan appartenant à la figure proposée , et les points «',€',/, déterminent le plan correspondant dans la figure homographique ; donc, si le premier plan tourne autour d'un point fixe, le second tour- nera aussi autour d'un point; on en conclut donc ce théorème : Étant donnés un tétraèdre SABC , et un point situé dune ma- nière quelconque dans V espace, Si autour de ce point on fait tourner un plan transversal , qui rencontre les trois arêtes au sommet SA, SB, SC, du tétraèdre, en trois points a, 6, y; et qu^on forme les rapports des segmens que ce plan fait sur ces arêtes, lesquels rapports sont aS es rS 1Â' 7b' ^' Puis, qu'on prenne un second tétraèdre quelconque S'A'B'C , et qu'on mène un plan transversal qui rencontre ces arêtes au som- met S'A' , S'B' , S'C , en trois points a , ê', y', tels que les trois rapports a'S' tf'S' ^'S' 7k'' CB'' yX' soient aux trois premiers dans des raisons constantes , ce plan pas- sera toujours, dans toutes ses positions , par un même point. (290) Ce théorème et le précédent, que nous venons de déduire 764 MEMOIRE DE GEOMETRIE. de la théorie des figures homographiques, en renferment, l'un et l'autre, toute la doctrine. Si l'un ou l'autre de ces deux théorèmes était démontré à priori et directement, nous en conclurions notre principe de déformation homographique, comprenant les relations de description et les relations de grandeur des figures. C'est l'un ou l'autre de ces deux théorèmes dont nous avons voulu parler dans notre Aperçu historique sur les méthodes en géométrie (V^ Epoque, § 28), en disant que toute la doctrine de transformation des figures en d'autres du même genre ^ reposait sur un seul et unique théorème de géométrie. Nous donnerons dans un autre écrit, qui trai- tera du rapport anharmonique et de ses nombreuses applications , la démonstration directe et géométrique de ce théorème. De sorte que le principe de déformation homographique se trouvera démontré di- rectement, et indépendamment du principe de Dualité. $ XVI. Construction analytique des figures homographiques . (291) La propriété des figures homographiques exprimée par le théorème (276) conduit à l'expression analytique la plus générale de ces figures, dans le système de coordonnées de Descartes. En effet, prenons trois axes coordonnés quelconques ox, oy, os, auxquels nous rapporterons les deux figures; et soient Aa: -f- By -I- Cs — 1 = o , k'x ■+■ B'y ■+- Cz — 1=0, k"3i -4- B"y -4- C'a —1=0, K"'x -V- B"'y + C"'z —1=0, les équations de quatre plans appartenant à la figure proposée; et ax -y- hy -+- ca — 1 = o , a'x -\- b'y + c's — 1 = o , a"x ■+- b"y -f- c"z — 1 ^ o , a"'x -+- b"'y -f- c"'z — 1 = o , les équations des quatre plans donnés qui doivent correspondre, dans la nouvelle figure, à ces quatre premiers, respectivement. MEMOIRE DE GÉOMÉTRIE. 765 Soient X, Y, Z, les coordonnées d'un point M de la figure pro- posée, et X , y, s , celles du point m qui lui correspondra dans la figure cherchée. Il faut déterminer ces coordonnées x, y, z, en fonc- tion de X, Y,Z. Le rapport des perpendiculaires abaissées du point M sur le pre- mier et le quatrième plan de la première figure, est égal à AX -4- BY -t- CZ — 1 A"'X H- B "Y ^ C"'Z — I ^ **"**' ' la constante étant indépendante des coordonnées X, Y, Z, et ne ren- fermant que les coefficiens A, B, C, et A'", B'", C", des équations des deux plans, et les quantités angulaires relatives aux axes coor- donnés, que nous supposons obliques pour plus de généralité '. Le rapport des perpendiculaires abaissées du point m {x, y, z) , de la seconde figure, sur le premier et le quatrième plan de cette figure, aura une expression semblable à la précédente. On aura donc, d'après le théorème (276), les trois équations sui- vantes, entre les coordonnées de deux points homologues dans les deux figures, («) De ces trois équations , on tirera les valeurs des trois inconnues x , ' L'expression de la perpendiculaire abaissée d'un point (x' , y' , z') , sur le plan qui a pour équation as -f-iy-t-cs — 1=», est (qj' + ty'-f-cj'— 1) t/l — co».'x,y— co«.ajr,» — COI ' y s -^i co: x,y. co». x,3. co: y,z. V/o* «in.s y,» -+-i* iin.ï *,s-i-c' *ia.^s,y — 2ab $iu. y^. tin. b^ co». {»s^y) — iac »in. s,y. sin. *,y coi. (y*,y«) — Sic »in. M^, tin. *,y oo(. {sM^y). ToM. XI. 97 ax ■+■ by -t- cs — - = /«• AX -4- A"'X -4- A'X -t- A"'B -f- A"X -f- A"'X -H BY -4- CZ — 1 a"'x + b"'y + a'x -t- b'y ■+■ c"'s — c'a — B "Y + C "Z — 1 ' B'Y + C'Z — 1 a"'x + b"'y -t- a"x -t- b"y -t- c"'s — c"z — 1 B"'Y -t- C"'Z — 1 ' B"Y -t- C"Z — 1 a"'x + b-'y -H c"'s — 1 B'"Y H- C"'Z — 1 766 . MEMOIRE DE GEOMETRIE. y , s, qui déterminent la position du point m correspondant, dans la seconde figure, au point M de la proposée. Ainsi le problème est résolu. (292) Les trois équations (1) renferment toute la théorie des figures homographiques. En donnant des valeurs convenables aux divers coefficiens qui y entrent , on exprimera par ces formules les différens modes de transformation particuliers. Mais nous n'entrerons point ici dans la discussion de ces formules, qui ne peut offrir aucune difficulté, surtout si l'on prend pour base la discussion des modes de construction géométrique que nous avons donnée dans le § précédent. (293) La première figure étant donnée de forme et de position par rapport aux trois axes coordonnés , les douze coefficiens A, B, C, A', B', C, A", B", C", A'", B'", C", sont des quantités connues, et il n'y a d'arbitraires dans les formules (1) que les quinze coefficiens a, b, c, a', b'y c', a", b", c", a'", b'", c'", l, ix. et v, qui servent à déter- miner la forme de la nouvelle figure et sa position, dans l'espace, par rapport à la première. Ainsi, pour effectuer la construction la plus générale des figures homographiques, tant par rapport à leur forme qu'à leur position dans l'espace, on a à disposer de quinze coefficiens arbitraires. Mais si l'on fait abstraction de la position de la nouvelle figure par rapport à la première, et qu'on ne considère que sa forme, on n'aura à disposer que de neuf coefficiens. Car il faut six conditions , et par suite six coefficiens indépendans pour fixer la position d'une figure dans l'espace, comme on le voit par les formules du déplacement d'un corps solide, que nous avons données dans la note de la page 677. Il s'en suit que des quinze coefficiens a, b, c, etc., six serviront à déterminer la position de la seconde figure dans l'espace , et les neuf autres à déterminer sa forme. Et en effet, cinq plans donnés, corres- pondans à cinq plans de la première figure, suffisent pour déterminer la seconde figure, quelle que soit leur position dans l'espace. Il suffit donc de chercher combien de données sont nécessaires pour déter- miner la forme de la pyramide tronquée formée par ces cinq plans. MÉMOIRE DE GÉOMÉTRIE. 767 Or, l'un d'eux coupe les quatre autres suivant un quadrilatère qu'on détermine par cinq conditions, et il reste à déterminer les quatre in- clinaisons de ces quatre plans sur le premier ; ce qui se fait par quatre données. Il en faut donc, en tout, neuf. Ainsi, une figure étant donnée, pour construire une figure homographique de la forme la plus générale en faisant abstraction de sa position dans l'espace, on a à disposer de neuf coefficiens arbitraires. (294) Les valeurs des trois coordonnées x, y , z, d'un point de la seconde figure, en fonction des coordonnées X, Y, Z, du point cor- respondant de la première figure, tirées des trois équations (I), seront de la forme («) y = '- Il n'est pas nécessaire de calculer les expressions de ar, y, z, pour vérifier qu'elles sont en effet de cette forme ; en voici une démonstra- tion à priori. Considérons les trois plans coordonnés yos, zox^xoy^ comme ap- partenant à la seconde figure , et cherchons les plans correspondans dans la première figure; soient . ax -t- Cy -f-r« — 1=0, a'x -4- C'y -*- y'Z — 1 = o, a"x -»- C'y -+- y"a — 1 = o, leurs équations. Concevons qu'on ait cherché le plan qui, dans la première figure, correspond à l'infini de la seconde (273) j et soit a"'s ■+. e"'y-h y"'»— 1 = o, son équation. La distance du point m {x, y , z) de la seconde figure au plan xoy sera proportionnelle au rapport des distances du point M (X, Y, Z), aX -+- GY -f- yZ - 1 a"'X-H C"Y-t- y'"Z— 1 a'X -+- CY + y'Z - 1 a"'X ■+- C'Y + y"'Z- 1 cl"\ -h /, les deux droites cm' , bm,' rencontreront la droite dm ^ c'est-à-dire que le point m' sera sur la droite dm. Ainsi, quand dans les équations (l)on aX = |u = v, deux points homologues quelconques des deux figures sont toujours en lignes droite avec le point d. (303) Il suit de là que : Chaque point du plan abc est lui-même son homologue dans les deux figures', Et, par conséquent, deux plans correspondons des deux figures rencontrent le plan abc, suivant la même droite; Et deux droites homologues quelconques percent ce plan au même point. On reconnaît, à ces propriétés descriptives, les figures homologiques de M. Poncelet. Le point d est leur centre dhomologie , et le plan abc leur plan dhomologie. (304) Ainsi, les figures homologiques rentrent dans la théorie des figures homographiques et ne sont qu'un cas particulier du mode gé- néral de construction de celles-ci. Les relations métriques qui ont lieu d'une manière générale entre les figures homographiques, s'appliquent donc aux figures homologiques. De là nous allons conclure dilTérentes relations métriques entre ces figures, qui n'ont point encore été remarquées, et sur lesquelles repose une partie considérable des applications de la théorie des fi- gures homologiques. (305) En général, les relations métriques des figures sont encore plus importantes et plus utiles à connaître que leurs relations pu- rement descriptives, parce qu'elles sont susceptibles d'un plus grand nombre d'applications, et que d'ailleurs elles suffisent presque tou- jours pour arriver à la connaissance des relations descriptives. Aussi nous regardons comme le côté faible de l'école de Monge, en géomé- trie spéculative , de s'appuyer spécialement et par principe , sur les 776 MÉMOIRE DE GEOMETRIE. propriétés descriptives des figures. La méthode des transversales est plus féconde, et procure des résultats plus variés, plus généraux et plus complets. Un examen comparatif de quelques théories géomé- triques^ ou seulement de quelques théorèmes obtenus par les deux méthodes, justifierait constamment cette observation. (306) Appliquons le principe de l'art. 175 aux figures homologi- ques. Prenons pour l'un des deux plans fixes de la première figure un plan passant par le centre d'homologie, ce plan sera lui-même son homologue dans la seconde figure 5 et si l'on remarque que le rapport des distances de deux points homologues à ce plan est égal au rap- port des distances de ces points au centre d'homologie, on en con- clura que : Dans deux fgures homologiques , le rapport des distances de deux poitits homologues au centre d'homologie, est au rapport des distances de ces points à deux plans homologues , quelconques , mais fixes f dans une raison constante, quels que soient ces points. (307) Ce théorème admet deux corollaires qui sont deux propriétés importantes de la théorie des figures homologiques. D'abord nous pouvons prendre pour représenter les deux plans fixes homologues des deux figures, leur plan d'homologie ; il en résulte que : Dans deux figures homologiques , le rapport des distances de deux points homologues au centre d'homologie , est au rapport des distances de ces deux points au plan d'homologie , dans une raison constante. Soient a, a' les deux points homologues, S le centre d'homologie, et a le point où la droite Saa' rencontre le plan d'homologie; le rap- port des distances des deux points a, a', h ce plan sera égal à ^; on aura donc, d'après l'énoncé du théorème, Sa aa — ; : ^ == const. ba aa C'est la relation que nous avons déjà démontrée dans nos applica- tions du principe de Dualité {§ VII). MEMOIRE DE GEOMETRIE. 777 (308) Ainsi, étant donnée une figure, et étant pris un point S et un plan fixe, si de ce point on mène une droite à chaque point a de la figure , qu'on la prolonge jusqu'à sa rencontre en « avec le plan fixe , et qu'on prenne sur cette droite un point a! tel que l'on ait Sa aa Sa' ' aa' >l étaîit une constante quelconque ; le point a' appartiendra à une figure homologique à la proposée. Le point S et le plan fixe seront le centre et le plan dhomologie des deux figures. La constante l peut être égale à l'unité. Alors les points a , a' sont conjugués harmoniques par rapport aux deux points S et «. (309) Soit I' le plan de la seconde figure , qui correspond à l'infini de la première; ce plan est parallèle au plan d'homologie, parce que deux plans homologues doivent se couper sur ce plan d'homologie. Le plan qui dans la première figure correspond à l'infini de la seconde, sera pareillement parallèle au plan d'homologie. Le rapport des distances d'un point a' de la seconde figure, à un plan fixe mené par le point S et au plan I', sera dans une raison con- stante avec la distance du point a de la première figure au même plan fixe (176). Or le rapport des distances des deux points a , a' , au plan fixe est égal à g^; on a donc, en appelant a'i' la perpendiculaire abaissée du point a' sur le plan 1', Sa' So = A. — — , a % X étant une constante , pour tous les points des deux figures. Ainsi : *t dtun point fixe on mène un rayon à chaque point a dune figure , et que sur ce rayon on prenne un point a' tel que le rapport de ses distances au point fixe et à un plan fixe, soit au rayon dans une raison constante , ce point appartiendra à une se- conde figure , homologique à la première. 778 MEMOIRE DE GEOMETRIE. Le centre d'homologie sera le point fixe; et le plan d'homologie sera parallèle au plan fixe. La distance entre ces deux plans sera égale à la valeur inverse de la raison constante donnée. Car pour un point « du plan d'homologie, on aura Sa = Sa', et 1 = ^ ou ai' = 1, et d'après l'énoncé, la raison constante est j* (310) Ainsi, si une figure A est donnée, et que le point S et le plan I' étant pris arbitrairement , on mène de ce point des rayons à tous les points a de cette figure, et qu'on prenne sur ces rayons des points a' déterminés par l'équation So' So = A • a' i ces points a' appartiendront à une seconde figure A' homologique à la première. Le centre d'homologie sera le point S et le plan d'homologie sera parallèle au plan I'. Sa distance à ce plan sera égale à la constante l. Réciproquement, si la figure A' est domiée, et que le point S et le plan I' soient pris arbitrairement , l équation So Sa = A — — a i servira à déterminer les points a d'une seconde figure A qui sera homologique à la proposée. Ces théorèmes seront susceptibles de nombreuses applications. (311) V étant le plan de la figure A', qui correspond à l'infini de la figure A , soit J le plan de la figure A qui correspond à l'infini de A'j et soit aj la distance d'un point a de la figure A au plan J, et a'i' la distance du point correspondant a' au plan I'; on aura, d'après le principe du n'' 177, aj. a'i' = const. Cette équation donne une manière nouvelle de former la figure MÉMOIRE DE GÉOMÉTRIE. 77fl homologique d'une figure proposée, au moyen du centre d'homo- logie et de deux plans parallèles entre eu\. La construction des figures homologiques serait susceptible d'une plus ample discussion, dans laquelle nous n'entrerons pas ici. $ XVIII. Applications de la théorie des figures homologiques. Propriétés générales des sur/aces géométriques. (312) Soient deux surfaces géométriques, d'un degré quelconque, homologiques entre elles j et soit S leur centre d'homologie. Que par une droite, prise arbitrairement dans un plan fixe P, on mène les plans tangens à la première surface; et soient o, b, c, .... leurs points de contact. A ces plans tangens correspondront des plans tangens à la seconde surface, en des points a', b', c', ....homologues aux points a, A , c, ....; et ces plans tangens passeront par une même droite située dans un plan fixe P', correspondant, dans la seconde figure, au plan P de la première. Soient ap, a'p', les perpendiculaires abaissées des points a, a' sur les plans P , P' respectivement ; on aura — : ^- = const. = A (306). Sa ap Soit o't;' la perpendiculaire abaissée du point a' sur un plan fixe II' mené arbitrairement dans l'espace; et mettons l'équation sous la forme Sa ap o't' Sa ax ap Soient pareillement bp et b'p', les perpendiculaires abaissées des points bf b' sur les plans P, P', respectivement, et b'r:' la perpendi- culaire abaissée du point b' sur le plan II'; on aura de même S6 bp b'r' Si' b'r' b'p' 780 MÉMOIRE DE GÉOMÉTRIE. Et ainsi pour les autres points. Or les points a' , h', .... étant les points de contact de la seconde surface par des plans tangens menés par une même droite prise dans un plan fixe P' on a (218) On a donc aussi ou (1) a'tc b'r' a'p' b'p' const. Sa Sa' ap Sb bp ' -^— ■+■ • -^— -\- ... • aV Sb' ' //t' ,. = const. Sa ap Sa' Sb Sb' a tr bp b TT . = const. Ce qui exprime ce théorème : Si ton a deux surfaces géométriques homoloyiques , et que par une droite prise arbitrairement dans un plan fixe , on mène les plans tangens à la première surface ; puis , qu'on fasse le rapport des distances de chaque point de contact , au centre dhomologie et au plan fixe , et qu'on divise ce rapport par celui des distances du point ho'mologue dans la, seconde surface , au même point et à un plan fixe mené arbitrairement dans V espace , la somme de tous les quotiens ainsi formés sera constante. Ce théorème donne lieu à deux corollaires qui sont eux-mêmes des propriétés très-générales des surfaces géométriques. (313) Que l'on suppose un second plan n" parallèle au planll', et qu'on fasse pour ce second plan l'équation analogue à l'équation pré- cédente ; puis , qu'on retranche ces deux équations l'une de l'autre ; tous les termes du premier membre de l'équation résultante auront un facteur commun qui sera la distance entre les deux plans n', II"; fai- sant passer ce facteur dans le second membre, on aura l'équation : Sa Sb Sa' -^ — : Sb' -t- .. ,. == const. ; up bp MÉMOIRE DE GÉOMÉTRIE. 701 ce qui exprime ce théorème : Quand deux surfaces géométriques sont homologiques , si par une droite , prise dans un plan fixe, on mène les plans tangens à la première ; qiCon fasse le rapport des distances de chaque point de contact au centre dhomologie et au plan fixe , puis le quotient de ce rapport divisé par la distance du point homologue dans la seconde surface, au centre d'homologie; la somme de tous ces quo- tiens sera constante , quelle que soit , dans le plan fixe , la droite par laquelle on a mené les plans tangens. (314) Supposons que le plan n', dans le théorème (312), se con- fonde avec le plan P , et que celui-ci soit situé à l'infini , les perpen- diculaires ap, hp , oV, ÂV, .... seront infinies, et les rapports bp ar b X seront égaux à l'unité; de sorte que l'équation (1) se réduira à Sa Sb s^'-^sb'-*- •••• = ''''''• Ce qui prouve que : Quand deux surfaces géométriques sont homologiques , si Pan mène à la première tous ses plans tangens parallèles à un même plan quelconque , la somme des distances des points de contact au centre d'homologie, divisées respectivement par les distances des points homologues de la seconde surface au même centre d'ho- mologie , sera constante , quel que soit le plan auquel les plans tangens seront parallèles. (315) Ces trois théorèmes s'appliquent à des courbes géométriques homologiques, planes ou à double courbure. Conséquemment ils s'ap- pliquent à deux sections planes d'un cône quelconque géométrique, parce que ce sont deux courbes homologiques , dont le centre d'ho- mologie est le sommet du cône. Appliquons donc le théorème (312) à deux sections planes d'un To». XI. 99 782 MEMOIRE DE GEOMETRIE. cône, et remarquons que les perpendiculaires abaissées des différens points d'un plan sur un autre plan fixe sont proportionnelles aux per- pendiculaires abaissées des mêmes points sur la droite d'intersection des deux plans ; on aura cette propriété générale des surfaces coniques : Si l'on fait deux sections planes dans un cône géométrique ; et que par un point d'une droite fixe, prise dans le plan de la première section, on mène toutes les tangentes à cette courbe; qu'on fasse le rapport des distances de chaque point de contact au sommet du cône et à la droite fixe , et qu'on divise ce rappo?'t par celui des distances du point homologue dans la seconde section, au sommet du cône et à une droite fixe menée arbitrairement dans le plan de cette seconde courbe ; la somme de tous les quotiens ainsi formés sera constante , quel que soit le point de la droite prise dans le plan de la première section par lequel on a mené les tangentes à cette courbe. (316) Si l'on suppose que la droite fixe dans la seconde section, soit à l'infini, le théorème prendra cet énoncé : Si l'on fait deux sections planes dans un cône géométrique quel- conque, et que par chaque point d'une droite fixe, prise dans le plan de la première section, on mène toutes les tangentes à cette courbe , la somme des distances des points de contact au sommet du cône , divisées respectivement par les distances de ces points à la droite fixe et par les distances des points correspondans , dans la seconde courbe, au sommet du cône , sera constante. (317) Si la droite fixe, prise dans le plan de la première section, est à l'infini, le théorème devient le suivant : Si l'on fait deux sections planes dans un cône géométrique , et que l'on mène à la première courbe toutes ses tangentes parallèles à une même droite quelconque , la somme des distances des points de contact au sommet du cône, divisées respectivement par les dis- tances des points homologues dans la seconde section, au sommet, sera une quantité constante. Ces théorèmes s'appliquent d'eux-mêmes à deux courbes planes ho- MÉMOIRE DE GÉOMÉTRIE. 783 mologiques situées dans un même plan, si au sommet du cône on substitue, dans leur énoncé, le centre d'homologie des deux courbes planes. § XIX. Surfaces du second degré homologiques. Propriété fonda- mentale des systèmes de trois axes conjugués relatifs à un point. (318) Deux surfaces du second degré homologiques sont inscrites dans un même cône qui a pour sommet le centre d'homologie j ce cône peut être imaginaire, bien que son sommet soit réel. Mais on ne peut pas dire d'une manière absolue que, réciproque- ment, quand deux surfaces du second degré sont inscrites dans un même cône, elles sont toujours homologiques. Car, par exemple, si l'une des deux surfaces est un hyperboloïde à une nappe et l'autre un ellipsoïde ou un hyperboloïde à deux nappes, il est évident qu'il ne peut y avoir homologie, car l'hyperboloïde à une nappe pouvant être engendré par une ligne droite, sa figure homologique ne peut être aussi qu'une surface sur laquelle on peut tracer des lignes droites, c'est-à-dire un hyperboloïde à une nappe, ou un paraboloïde hyper- bolique. Il est un autre cas où deux surfaces du second degré inscrites dans un même cône ne sont pas homologiques; c'est celui où l'une des sur- faces est un hyperboloïde à deux nappes placé à l'extérieur du cône, et l'autre un ellipsoïde , ou bien un hyperboloïde à deux nappes com- pris dans l'intérieur du cône, parce que dans ce cas aucune droite menée par le sommet du cône ne peut rencontrer en même temps les deux surfaces ; par conséquent aucun point de l'une de ces surfaces ne peut avoir son homologue dans l'autre. Mais dans les autres cas , où une droite menée par le sommet du cône pourra rencontrer les deux surfaces en même temps , elles seront homologiques; et l'on pourra prendre pour leur plan d'homologie, indifféremment, l'un ou l'autre des deux plans des courbes d'inter- section (réelles ou imaginaires) des deux surfaces. Cela résulte du Ihéo- 784 MÉMOIRE DE GÉOMÉTRIE. rème général démontré dans le § VIÏI de nos applications du prin- cipe de Dualité '. ' Généralement deux surfaces du second degré inscrites dans un c6ne se coupent suivant deux courbes planes (réelles ou imaginaires). Ce théorème est connu ; mais il me semble qu'on **• l'énonce d'une manière trop absolue ; car on suppose que , dans le cas même où les deux courbes sont imaginaires , leurs plans sont toujours réels. Cela n'est pas ; car ces plans peuvent être imaginaires , comme il arrive dans toutes les ques- tions où les choses qu'on considère sont doubles , ou admettent deux solutions. Pour en donner un exemple , qu'on conçoive une section elliptique faite dans un hyperbo- loïde à une nappe , et un cône circonscrit à celte surface suivant cette section ; qu'on fasse dans le cône une seconde section elliptique qui rencontre la première en deux points, et qu'on ins- crive dans le cône un ellipsoïde qui le touche suivant celte seconde section. Cet ellipsoïde et l'hy- perboloïde devront se couper suivant deux courbes planes , réelles ou imaginaires. Dans ce cas ces deux courbes sont imaginaires ; car l'ellipsoïde est renfermé dans l'intérieur du cône , et l'hy- perboloïde est tout-à-fait en dehors. Mais de plus, leurs plans sont aussi imaginaires; car ils doivent passer par les deux points d'intersection des deux courbes de contact du cône et des deux surfaces ; et si ces plans étaient réels , chacun d'eux couperait réellement les deux surfaces. Ce qui n'est pas possible puisqu'elles n'ont point de courbe d'intersection réelle. Ainsi , dans ce cas , il est démontré que les deux plans sont imaginaires ; il n'y a de réel que leur droite d'intersection. L'analyse conduit aux mêmes conclusions. Car soit F=:o l'équation d'un cône, ou plus géné- ralement d'une surface quelconque du second degré ; l'équation d'une seconde surface du second degré inscrite dans cette première, sera de la forme F -f- mV = o, P := o étant l'équation du plan de la courbe de contact des deux surfaces. Pareillement l'équation d'une troisième surface inscrite aussi dans la première sera F + m'P" = 0, f = 0 étant l'équation du plan de la courbe de contact. Des équations de ces deux surfaces inscrites dans la première , on tire nif — »j'P" = 0. D'où P ± P Cette d'ouble équation représente les deux plans sur lesquels se coupent les deux surfaces. Mais on voit que ces plans ne seront réels que quand les deux coefficiens m et m' seront de mêmes signes ; et qu'ils seront imaginaires quand ces deux coefficiens seront de signes contrai- res. Et dans ce cas l'équation donne les deux suivantes P = o, P' == 0. Ce qui prouve que les deux surfaces n'ont point d'autres points d'intersection que sur la droite même sur laquelle se coupent les deux courbes de contact, l^es deux points d'intersection peuvent être imaginaires ; mais cette droite est toujours réelle , parce qu'elle est l'intersection des plans des deux courbes de contact. DIRE DE GÉOMÉTRIE. 785 (319) Les différens modes de construction des figures homologiques que nous avons donnés dans le $ XVII, appliqués aux surfaces du second degré, conduisent à différentes propriétés nouvelles de ces surfaces, relatives particulièrement à leurs relations métriques. Nous n'entrerons pas dans le détail de ces diverses propriétés ; nous allons seulement examiner un mode de construction qui va nous conduire à une propriété nouvelle et fondamentale des systèmes de trois axes conjugués relatifs à un point. (320) Soit une surface du second degré A, un point fixe S, et un plan fixe P mené arbitrairement. Que du point S on mène une droite à chaque point a de la surface, et qu'on prenne sur cette droite un second point a' tel que l'on ait Sa' = A — , ap ap étant la perpendiculaire abaissée du point a sur le plan P, et X étant une constante; le point a' appartiendra à une seconde surface du second degré homologique à la proposée. Le centre d'homologie sera le point S, et dans cette seconde figure , l'infini correspondra au plan P de la première. Deux plans homologues dans les deux figures, auront pour pôles, pris par rapport aux deux surfaces respectivement , deux points homo- logues. Supposons que le plan P ait pour pôle dans la première sur- face le point S, centre d'homologie; ce point étant lui-même son homologue, sera le pôle du plan situé à l'infini par rapport à la nou- velle surface; c'est-à-dire que ce point S est le centre de figure de la nouvelle surface. Ainsi : Étant donnée une surface du second degré j tout point de V espace peut être pris pour le centre dhomologie d^une seconde surface homologique à la proposée , et ayant son centre de figure en ce point. (321) Cette seconde surface est indéterminée de grandeur, puisque ses demi-diamètres Sa' ont pour expression ap 786 MÉMOIRE DE GÉOMÉTRIE. où l est une constante arbitraire. Mais cette surface est déterminée d'espèce pour une position donnée du point S; c'est-à-dire que, quelle que soit la grandeur de cette surface , elle sera toujours sem- blable à une certaine surface unique, dont la nature ne dépendra ^ que de la position du point S par rapport à la surface proposée. (322) Mais si la surface A' est donnée , la surface A sera indéter- minée d'espèce et de position; parce que pour la former on disposera arbitrairement du plan fixe P. On construira ses points par la formule Sa 1 — = - . Sa'. ap A (323) Si la surface A' est une sphère, on aura — = constante. Or, il est évident qu'à cause de la forme symétrique de la sphère, la surface homologique A doit être de révolution, et avoir pour axe de révolution la perpendiculaire au plan fixe, menée par le centre de la sphère; l'équation — = constante exprime donc une propriété des surfaces de révolution. Propriété connue, du reste. Ainsi nous pouvons dire que : Une surface du second degré de révolution , et une sphère qui a son centre en l'un des foyers de cette surface, sont deux figures homologiques ; leur centre d'homologie est ce foyer. (324) Il suit de là que : Deux surfaces du second degré de révolution , qui ont un foyer commun, sont homologiques, et leur centre d'homologie est ce foyer. Car si l'on conçoit une sphère ayant ce foyer pour centre, elle sera homologique à chacune des deux surfaces; d'où l'on conclut que celles-ci sont homologiques entre elles '. ' En général , quand deux figtires sont homologiques à une troisième , et ont avec elle le même centre d'homologie , elles sont aussi homologiques entre elles, et ont ce même point pour centre d'homologie. En effet soit S le centre d'homologie commun aux trois figures ; a un point de la première , et a', a", ses homologues dans la seconde et la troisième. Soit P un plan de la première figure et P', P", les plans homologues dans les deux autres. Soient enfin a^, a'p', a"p", les perpen- MÉMOIRE DE GÉOMÉTRIE. 787 (325) Ces deux théorèmes sont la source d'un grand nombre de propriétés des surfaces du second degré de révolution, considérées par rapport à leurs foyers. Quelques-unes de ces propriétés, celles particulièrement qui ne concernent que les relations descriptives des surfaces, sont connues; mais beaucoup d'autres, où entre la considé- ration des relations métriques, seront entièrement nouvelles. Nous exposerons celles-ci dans un paragraphe particulier (§ XXI). (326) Reprenons les deux surfaces homologiques A, A', dont la seconde a son centre de figure au centre d'homologie. Considérons dans la surface A' trois diamètres conjugués ; leur pro- priété caractéristique est que le point situé à l'infini sur chacun d'eux a pour plan polaire, par rapport à la surface, le plan des deux autres. Les trois droites homologues, dans la surface A, jouiront donc de la propriété que le point oii chacune d'elles perce le plan fixe (qui est le plan polaire du point S), a pour plan polaire le plan des deux autres. D'où il suit que chacune de ces trois droites a sa polaire com- prise dans le plan des deux autres. Ces trois droites sont donc ce que nous avons appelé aives conjugués relatifs au point S. Or ces trois droites sont, en direction, les trois diamètres conjugués de la surface A'; donc Chaque système de trois axes conjugués d'une surface du second degré , relatifs à un point fixe , forme , en direction , un système de trois diamètres conjugués dune seconde surface du second degré , qui a son centre en ce point ; diculaire» abaissées des poinU a , a, a", sur les plans P, P', P", respectivement. On aura Sa ap Sa ap S^^'" <^' *^ S^ ""• a"p"' D'où S«' M «>' oa A a p Cette équation prouve que le point o" appartient à une figure homologique à celle à laquelle appartient le point a' (306). Les plans P', P" se correspondent, dans ces deux figures; et le point S est leur centre d'homologie. Ainsi le théorème est démontré. 788 MÉMOIRE DE GÉOMÉTRIE. Cette seconde surface est homologique à la proposée ; et le centre d'homologie est le point fixe. Les demi-diamètres de cette seconde surface se construisent par la formule Sa So' = A ap Nous donnerons, plus loin, deux autres constructions de ces demi- diamètres, sans se servir du plan fixe, qui est le plan polaire du point S par rapport à la proposée. (327) Du théorème précédent, et surtout de la formule So Sa' = A — . ap découlent naturellement les propriétés des systèmes de trois axes con- jugués d'une surface du second degré relatifs à un point ; car ces propriétés seront des conséquences de celles des diamètres conjugués d'une surface du second degré. Ainsi, l'on en conclut d'abord que, parmi tous les systèmes de trois axes conjugués relatifs à un point, il en est un où les trois axes sont rectangulaires. (328) Ces trois axes déterminent sur la surface les points pour les- quels le rapport ^— a une valeur maximum ou minimum,. Si l'on demande les points pour lesquels le rapport — a une va- leur donnée, ces points seront sur une courbe à double courbure provenant de l'intersection de la surface par un cône du second degré ayant son sommet au point fixe. Les axes principaux de ce cône seront précisément les trois axes conjugués rectangulaires de la surface, relatifs au point S. Car il est clair que ce cône passera par la courbe d'intersection de la surface A' par une sphère concentrique; ce qui prouve qu'il sera du second degré, et qu'il aura pour axes principaux les trois diamè- tres conjugués rectangulaires de la surface A'. (329) Soient trois axes conjugués Sa, Sb, Se, de la surface A, et MÉMOIRE DE GÉOMÉTRIE. 789 Sa', Sb'y Se', les trois demi-diamètres conjugués de la surface A', qui leur correspondent ; on aura ^ o„ S6 ^ , Se Sa' = A —, Si' = A — , Se' = A — , ap bp cp ap, bp, cp, étant les perpendiculaires abaissées des points a, h, c, sur le plan P, qui est le plan polaire du point S par rapport à la surface A. La somme des carrés des trois demi-diamètres Sa', SA', Se', est constante; on a donc aussi ce qui exprime un théorème déjà démontré (52 et 191). (330) La somme des carrés des projections des trois demi-diamè- tres Sa', SA', Se', sur une droite, est constante j on en conclut le théo- rème (191). (331) La somme des carrés des aires des triangles formés par les trois demi-diamètres conjugués Sa', Sb', Se', pris deux à deux, est constante ; de sorte qu'on a (So'. Si', sin. o'Si')' ■*- (Sa'. Se', sin. o'Sc')' -4- (Si'. Se', sin. i'Sc')' = const. On a donc (Sa. Si. sin.oSi)' (Si. Se. sin. iSc)' (Se. Sa. sin. cSa)' ap . bp bp . cp cp . ap == const. Les numérateurs sont les carrés des aires des triangles formés par les trois axes Sa, Sb, Se, pris deux à deux. Cette équation exprime donc une propriété de ces trois triangles. (332) Enfm si l'on a deux systèmes de trois demi-diamètres con- jugués de la surface A', le tétraèdre formé par trois quelconques de ces six demi-diamètres est égal en volume au tétraèdre formé par les trois autres. Exprimant le volume d'un tétraèdre par le produit des trois demi-diamètres qui le forment, multiplié par une fonction des angles que ces droites font entre elles, on en conclut que : To«. XI. 100 790 MEMOIRE DE GÉOMÉTRIE. Si l'on a dans une surface du second degré , deux systèmes de trois axes conjugués relatifs à un point, le volume du tétraèdre formé par trois quelconques de ces six droites, divisé par le pro- duit des perpendiculaires abaissées des extrémités de ces trois droites sur le plan polaire du point fixe , sera égal au volume du tétraèdre formé par les trois autres droites, divisé par le produit des perpendiculaires abaissées des extrémités de ces trois droites sur le même plan. (333) Si les trois demi-diamètres Sa', Sb', Se', sont rectangulai- res, on sait qu'on aura 1 1 1 -=7 -4- —=; -t- —=r = const.; Sa' Si' Se' "Py . f'±S ^ f'l\ = const. donc l Sa y \^^J ^ ^^ ce qui exprime le théorème (201). (334) La formule Sa (1) Sa' = A — ap peut être transformée de deux manières en une autre, qui donnera les demi-diamètres Sa' de la surface homologique k', sans se servir du plan P. Soit b le second point où la droite Sa rencontre la surface proposée A', ;6j5, la perpendiculaire abaissée de ce point sur le plan P, et b' le point homologue sur la surface A'; on aura bp Mais Sb' = Sa'^ puisque ce sont deux demi-diamètres de direction opposée; donc Sa' == > r^- Le plan P étant le plan polaire du point S, par rapport à la surface A , les plans tangens à cette surface aux points MEMOIRE DE GEOMETRIE. 791 a, b, se coupent sur ce plan; on a donc, d'après la propriété générale des surfaces géométriques (219), 1 1 — ± -— = const. ; ap bp le signe + étant pris quand les perpendiculaires ap, hp, seront di- rigées dans le même sens, et le signe — quand elles seront en sens contraire. Le premier cas a lieu quand le point S est dans l'intérieur de la surface, et le second quand ce point est pris au dehors de la surface. De cette équation on conclut Sa' Sa' I ± — - = const. = — • Sa So n D'où 1 / 1 In (*) s^=ni^*i-J- Ainsi cette équation servira à déterminer les demi-diamètres de la surface A', de même que l'équation (1). On prendra le signe + quand le point fixe S sera dans l'intérieur de la surface, et le signe — quand il sera au dehors. On conclut de cette équation, ce théorème : Si autour cTtin point fixe on fait tourner une droite qui rencontre une surface du second degré en deux points , et qu'on prenne sur cette droite , à partir du point fixe, un segment dont la valeur in- verse soit proportionnelle à la somme des valeurs inverses des distances des deux points de la surface au point fixe , si ce point est dans V intérieur de la surface , ou à la différence des valeurs inverses des deux mêmes distances, si le point fixe est au dehors de la surface , l'extrémité de ce segment sera sur une seconde sur- face du second degré, qui sera homologique à la proposée j le centre dhomologie sera le point fixe ; et ce point sera aussi le centre de figure de la nouvelle surface. 792 MÉMOIRE DE GÉOMÉTRIE. (335) Les différens théorèmes que nous avons indiqués ci-dessus au sujet du rapport — , s'appliquent, comme on voit, à l'expression ap ' . l Sa S6 Ainsi nous pouvons dire que, si l'on demande de mener la droite Sab de manière que cette quantité soit un maximum ou un minimum, trois directions de la droite satisferont à la question; et ces trois di- rections seront à angle droit. Si le point S est au dehors de la sur- face, elles seront les trois axes principaux du cône circonscrit à la surface et ayant son sommet au point S. Si on demande que l'expression j_ 1 Sa S/5 ait une valeur donnée, la droite Sab aura pour lieu géométrique un cône du second degré '; et ce cône aura pour ses axes principaux, les trois directions pour lesquelles cette expression a une valeur maximum ou minimum. Si la droite Sab prend trois directions rectangulaires, la somme des carrés des valeurs correspondantes de l'expression _i_ 1 Sa Sb sera constante. Etc., etc. ' Ce sont ces cônes du second degré dont M. Legendre s'est servi pour régler la marche de ses intégrales dans son mémoire sur l'attraction des sphéroïdes sur des points extérieurs , et dont il n'a donné que l'expression analytique. Et les droites qui jouissent d'une propriété de maximum, et qui marquent la limite des intégrales, sont précisément les axes conjugués rec- tangulaires de l'ellipsoïde attirant, relatifs au point alliré; ce sont aussi les axes principaux communs à tous ces cônes. Les considérations géométriques précédentes procurent une inter- prétation géométrique de plusieurs autres résultats analytiques obtenus par M. Legendre dans son mémoire, et font connaître particulièrement la signification d'un beau théorème relatif à l'attraction de différens ellipsoïdes semblables et concentriques sur un même point extérieur. (Voir Mémoires de V Académie des Sciences de Paris; année 1788 , p. -454). MÉMOIRE DE GÉOMÉTRIE. 793 (336) Maintenant, écrivons l'équation (2) sous la forme Sa' V Sa. SA / On sait, par une propriété générale des surfaces du second degré, que d étant le demi-diamètre de la surface, parallèle à la sécante Sab, on a 5^~~g^ = const., quelle que soit la direction commune de ce diamètre et de cette sécante. Il vient donc 1 _ , SA db Sa Or, si le point S est dans l'intérieur de la surface, (Sa -{- SA) est la corde comprise dans la surface sur la droite Sab', et si le point S est au dehors de la surface, {Sb — Sa) est cette corde; la désignant par c, on a donc, dans les deux cas. ou ce qui exprime que : Si autour d'un point fixe on fait tourner une droite qui ren- contre une surface du second degré en deux points , et qu'on porte sur cette droite , à partir du point fixe , un segment proportionnel au carré du diamètre de la surface qui lui est parallèle, divisé par la corde comprise dans la surface sur cette droite, V extrémité de ce segment sera sur une surface du second degré qui sera ho- mologique à la proposée. Le point fixe sera le centre dhomologie des deux surfaces , et le centre de figure de la seconde. On déduit de là plusieurs théorèmes relatifs à l'expression —, cor- respondant aux différentes propriétés connues des diamètres d'une surface du second degré. Nous n'avons pas besoin d'insister sur cet objet. 1 Sa' sa /■«'. C 5^' S«' = 1 c 794 MÉMOIRE DE GÉOMÉTRIE. § XX. Propriétés générales , nouvelles, des surfaces du second degré. (337) Les propriétés générales des surfaces géométriques, démon- trées dans le $ XVIII, s'appliquent aux surfaces et aux courbes du second degré, et donnent lieu à de nombreux corollaires oii se trou- vent plusieurs propriétés nouvelles de ces surfaces et de ces courbes. On y distinguera particulièrement certaines propriétés concernant leurs foyers. Nous réunirons celles-ci dans le paragraphe suivant. Nous allons présenter d'abord des propositions d'une plus grande généralité. Supposons dans le théorème (3 1 2) que les deux surfaces soient du second degré; par une droite prise dans le plan fixe on pourra mener deux plans tangens à la première surface; la corde qui joindra les deux points de contact passera par un point fixe, qui sera le pôle de ce plan par rapport à cette surface; nous pouvons donc énoncer ce théorème : Quand deux surfaces du second degré ont un centre d'homologie , si autour d'un point fixe on fait tourner une corde de la première surface, les rapports des distances des extrémités de cette corde au centre d'homologie et au plan polaire du point fixe , divisé respecti- vement par les rapports des distances des deux points homologues dans la seconde surface ^ au même centre d'homologie et à un plan fixe mené arbitrairement , auront leur somme ou leur différence constante. Ce sera la somme , si le point fixe et pris dans l'intérieur de la sur- face, et la différence , s'il est pris au dehors. Ainsi soient a ^ b, les extrémités de la corde de la première surface; a' , h' , les points homologues de la seconde; ap, hp, les perpendicu- laires abaissées des points a, h sur le plan polaire du point fixe, pris par rapport à la première surface ; et a'n , Z>':r, les perpendiculaires abais- sées des points a' , h' , sur un plan fixe n mené arbitrairement ; on aura Sa _ Sa' Sb Sb' — ± — : — = const ap ' a!r bp 6V MÉMOIRE DE GÉOMÉTRIE. 793 (338) Si le plan fixe mené arbitrairement est à l'infini , on conclut du théorème (313) celui-ci : Quand deux sw faces du second degré ont un centre dhomologie , si autour d'un point fixe on fait tourner une corde de la première surface , la somme ou la différence des rapports des distances des extrémités de la corde au centre dhomologie et au plan polaire du point fixe , divisés respectivement par les distances des points homo- logues de la seconde surface au centre dhomologie , sera constante. Ainsi l'on a S« . , SA „,, — : So' ± — : Si= const. ap bp On prendra le signe -j- quand le point fixe sera dans l'intérieur de la surface , et le signe — quand il sera au dehors. (339) Si ce point fixe est le centre de la première surface, son plan polaire sera à l'infini, et le théorème prendra cet énoncé : Quand deux surfaces du second degré sont homologiques , si du centre dhomologie on mène deux rayons aux extrémités dun dia- mètre de la première , la som,me ou la différence de ces rayons di- visés respectivement par les rayons menés aux points homologues dans la seconde surface , sera constante. Ce sera la somme quand la première surface sera un ellipsoïde , et la différence quand elle sera un hyperljoloïde. Si dans ce théorème on suppose que le centre d'homologie des deux surfaces soit le centre de figure de la première , on obtient le théo- rème de l'art. (334) que nous avons démontré directement. (340) Dans les trois théorèmes précédons, on peut suposer que la seconde surface se confonde avec la première, de manière que deux points de celle-ci, situés en ligne droite avec le centre d'homologie, se- ront homologiques ; et le plan d'homologie sera le plan polaire du point pris pour centre d'homologie. Car soient a, a' , les points où une droite menée par le point fixe S rencontre une surface du second degré, et soit « le point où elle rencontre le plan polaire P du point S ; on aura , 796 MÉiMOIRE DE GEOMETRIE, comme on sait, Sa aa Sa aa — ;■ = — , ou — : — ; = 1 = const. ; Sa' aa' Sa' aa ce qui prouve que les points a et a' peuvent être considérés comme appartenant à deux figures homologiques (308). Si le point S est pris au dehors de la surface, son plan polaire, qui est le plan d'homologie, divisera la surface en deux nappes, qui pourront être considérées comme étant les deux figures homologiques. (341) D'après cela, le théorème (337) donne le suivant : Si, autour dun point fixe 0 , on fait tourner une corde dune sur- face du second degré, et que d'un second point fixe S on mène aux extrémités a, b de cette corde , deux droites qui rencontreront la sur- face en deux autres points a', b'; et qu'on appelle ap, bp, les perpen- diculaires abaissées des points a, b, sur le plan polaire du point 0, et Bln^ b'TT, les perpendiculaires abaissées des points a', b', sur un autre plan fixe mené arbitrairement , on aura Sa Sa' S 6 S6' ap ' a'fr bp h'ir On prendra le signe -f- quand le point 0 sera dans l'intérieur de la surface, et le signe — quand il sera au dehors. (342) Si le plan fixe pris arbitrairement est à l'infini l'équation se réduira à O-, CI, — : Sa' ± — : SÈ' = const. (338). ap bp (343) Si le point O est le centre de la surface, son plan polaire est à l'infini, et l'équation, d'après le théorème (339), se réduit à Sa S6 — ± = const. Sa' Se' Donc : Si d'un point fixe on mène deux rayons aux extrémités d'un dia- MÉMOIRE DE GÉOMÉTRIE. 797 mètre d'une surface du second degré, ils rencontreront la surface en deux autres points ,• et la somme ou la différence des deux rayons di- visés respectivement par les segmens compris entre le point fixe et ces deux autres points , sera constante. Ce sera la somme si la surface est un ellipsoïde ^ et la différence si elle est un hyperboloïde. (344) Si sur un diamètre quelconque d'une surface du second degré on prend deux points fixes situés de part et d'autre et à égale distance du centre, les droites menées de l'un de ces points aux extrémités d'un autre diamètre quelconque, seront égales réciproquement aux droites menées de l'autre point aux extrémités du même diamètre. D'après cela, on peut donner au théorème précédent cet autre énoncé: Si sur un diamètre quelconque dune surface du second degré on prend, de part et et autre et à égale distance du centre , deux points fixes, et que de ces points on mène des rayons à un point quelconque de la surface, la somme ou la différence de ces deux rayons divisés respectivement par les autres segmens faits sur eux entre les points fixes et la surface , sera constante. Ainsi soient F, F' les deux points fixes pris sur un diamètre quel- conque d'une surface du second degré, de part et d'autre et à égale distance du centre ; que de ces points on mène deux rayons aboutis- sant à un même point quelconque w de la surface, et rencontrant cette surface en deux autres points n, n', on aura, quel que soit le point m, Tm î'm ± — — = CODSt. Fn F n Ce sera -|- si la surface est un ellipsoïde, et — si elle est un hy- perboloïde. (345) Dans les trois théorèmes des art. 337, 338, 339, les deux surfaces peuvent se réduire à des coniques situées sur un même cône ; alors on aura diverses propriétés des cônes du second degré. Ainsi le théorème (337) donne le suivant : Etant fait deux sections planes dans un cône du second degré, si To«. XI. lél 798 MEMOIRE DE GEOMETRIE. autour et un point fixe , pris dans le plan de la première section, on fait tourner une corde qui rencontre cette courbe aux points a, b, et que ap, bp, soient les perpendiculaires abaissées de ces points sur la polaire du point fixe , prise par rapport à cette première section, et vl'u, h'n, les perpendiculaires abaissées des points ho- mologues de la seconde section sur une droite fixe menée arbi- trairement dans le plan de cette courbe , on aura , en appelant S le sommet du cône , Sa Sa' S6 S6' — : -p ± — : — - = const. af a 7r bp b t Ce sera le signe + quand le point fixe pris dans le plan de la pre- mière section sera dans l'intérieur de cette courbe, et le signe — quand il sera au dehors. (346) Si la droite prise dans le plan de la seconde section est à l'infini, l'équation devient Sa „ , , S6 „,, — : Sa d= — Si = const. \ ap bp (347) Si le point fixe, pris dans le plan de la première section, est le centre de cette courbe , la polaire de ce point est à l'infini , et l'é- quation devient Sa S6 — ± — = const. Sa' Si' ce qui exprime que : Si l'on fait deux sections planes dans un cône du second degré , la somme ou la différence des arêtes menées aux extrémités d'un diamètre quelconque de la première section , divisées respectivement par les segmens compris sur ces arêtes, entre le sommet du cône et la seconde section, sera constante. Ce sera la somme si la première section est une ellipse, et la diffé- rence si elle est une hyperbole. (348) Si dans le théorème (346) on suppose que le cône soit de révolution , et que la seconde section soit un cercle, les arêtes Sa' , Sb', « MÉMOIRE DE GÉOMÉTRIE. 799 seront de longueur constante, on aura donc Téquation / Sa Si ") — dr -— = const.; >\ ap bp ce qui exprime que : Une section plane quelconque étant faite dans un cône de révolu- tion, si autour dun point fixe du plan de cette courbe on fait tourner une droite qui la rencontre en deux points, la somme ou la différence des distances de ces deux points au sotnmet du cône, divisées respec- tivement par leurs distances à la polaire du point fixe , prise par rapport à la courbe, sera constante. Ce sera la somme quand le point fixe sera pris dans l'intérieur de la courbe, et la différence quand il sera pris au dehors. (349) Si le point fixe est le centre de la courbe , l'équation devient Sa ± Sft = const. D'où l'on conclut que : Quand un cône de révolution passe par une section conique , la somme ou la différence des arêtes aboutissant aux extrémités dun diamètre de cette courbe est constante. Ce sera la somme si la courbe, est une ellipse, et la différence si elle est une hyperbole. (350) Si dans le théorème (347) on suppose que le cône soit de révolution, et que la première section soit un cercle, son centre sera sur l'axe du cône, et le théorème prendra cet énoncé : Quand un cône de révolution passe par une conique, la somme des valeurs inverses des arêtes comprises dans un plan quelconque mené par l'axe du cône est constante. :l § XXI. Propriétés nouvelles des surfaces du second degré de révo- lution , et des cônes du second degré. (351) Nous avons démontré (324) que : Quand deux surfaces du 800 MEMOIRE DE GEOMETRIE. second degré de révolution ont un foyer commun , quelle que soit la position respective de ces deux surfaces , elles sont homologiques , et leur centre d'hom^ologie est leur foyer comm,un. Appliquons aux deux surfaces le théorème (337), nous aurons celui-ci : Quand deux surfaces du second degré ont un foyer commun F, si autour dun point fixe quelconque O on fait tourner une corde de la première surface , et que a et h soient ses extrémités; quon mène les rayons Fa, Fh, qui rencontrent la seconde surface aux points a.', h', homologues des points a, b; que ap, bp, soient les per- pendiculaires abaissées des points a, b, sur le plan polaire du point O, pris par rapport à la première surface; et a'tt, h'j:, les perpendicu- laires abaissées des points a', b', sur un autre plan fixe U, mené ar- bitrairement dans l'espace , on aura So Sa' Si S6' — : — — ± — : — = const. ap ar hp b'-x- Le signe + ayant lieu quand le point fixe est pris dans l'intérieur de la première surface , et le signe — quand il est pris au dehors. (352) Ce théorème donne lieu à plusieurs conséquences. D'abord on en conclut, comme nous l'avons fait voir (art. 313), un théorème où n'entre point la considération du plan n, et qui est exprimé par l'équation Sa Si — : Sa ± — ; So = const. ap bp (353) Maintenant, prenant pour le plan II, dans le théorème gé- néral, le plan polaire du point fixe O par rapport à la première sur- face, et supposant ce plan polaire à l'infini, le point O sera le centre de cette surface ; les rapports ap bp ~7' ' TT" ' a TT o 7r MÉMOIRE DE GÉOMÉTRIE. 801 seront égaux à l'unité , et l'équation deviendra Sa ^Sb ± __ se: COnSt. Sa' Si' Ce qui prouve que : Quand deux surfaces du second degré de révolution ont un foyer commun , si par ce point on mèîie deux rayons vecteurs aux ex- trémités d'un diamètre de la première surface, la somme ou la différence de ces deux rayons divisés respectivement par les rayons de la seconde surface qui ont la même direction qu'eux, est constante. Ce sera la somme si la première surface est un ellipsoïde, et la différence si elle est un hyperboloïde. (354) Le rayon mené d'un foyer à un point quelconque d'une sur- face de révolution est égal au rayon mené par le second foyer, parallèlement au premier , mais en sens contraire ; d'après cette remarque, on voit aisément que le théorème peut prendre cet énoncé : Si l'on a deux surfaces du second degré de révolution placées d'une manière quelconque dans l'espace, la somme ou la différence des deux rayons vecteurs menés des deux foyers de la première à un point quelconque de cette surface , divisés respectivement par les rayons vecteurs de la seconde surface menés respectivement de ses deux foyers, parallèlement à ces deux premiers, sera constante. (355) Ce théorème est une généralisation assez remarquable de la propriété connue des foyers d'une surface du second degré. Car si l'on suppose que la seconde surface soit une sphère , on a précisément cette propriété, c'est-à-dire que La somme ou la différence des rayons vecteurs menés des deux foyers dune surface du second degré de révolution à un point de la surface est constante. (356) Si Ton suppose, au contraire, que la première surface soit une sphère, on aura ce théorème : Si par les deux foyers dune surface du second degré de révo- lution, on mène deux rayons vecteurs sous une même direction 802 MÉMOIRE DE GÉOMÉTRIE. quelconque , la somme de leurs valeurs inverses sera constante. Ce qui revient à dire que : Toute corde menée par un foyer dune surface du second decjré de révolution, est divisée en ce point en deux parties dont la somme des valeurs inverses est constante. (357) Supposons, dans le théorème (352) que la seconde surface soit une sphère, les lignes Sa', Sj6', seront des rayons de cette sphère; on peut les faire passer dans le second membre de l'équation qui devient : Sa S6 — ± — = const. ap bp Ce qui prouve que : Si d'un foyer d'une surface du second degré de révolution on mène deux rayons vecteurs aux extrémités d'une corde de la sur- face, qui tourne autour d'un point fixe, la somme ou la différence de ces deux rayons divisés respectivement par les perpendiculaires abaissées de leurs extrémités sur le plan polaire du poitit fixe, pris par rapport à la surface, sera constante. Ce sera la somme si le point fixe est pris au dedans de la surface et la différence s'il est pris au dehors. (358) Si dans le théorème (35 1 ) le point fixe est le foyer commun aux deux surfaces, on aura il restera donc Sa SZ> — = — = const. , ap bp ± = const. , Sa' S6' ce qm prouve que : Si par un foyer d'une surface du second degré de révolution on tire une transversale quelconque , qui rencontrera la surface en deux points , la somme des distances de ces points à un plan trans- .versal quelconque , divisées respectivement par leurs distances au foyer sera constante. MÉMOIRE DE GÉOMÉTRIE. 803 (359) Si l'on prend pour le plan transversal le plan directeur cor- respondant au second foyer de la surface, on en conclut que : r: Si cTun foyer d'une .surface du xecond degré on mène deux rayons aux extrémités dune corde passant par le second foyer, la somme de ces deux rayons divisés respectivement par les distances de leurs extrémités au second foyer sera constante. Dans ce théorème, comme dans le précédent, c'est la somme que nous prenons et non la différence, parce que, dans les deux cas, le point autour duquel tourne la corde de la surface est dans son intérieur. » (360) Quand une corde d'une sphère tourne autour d'un point fixe, il est facile de démontrer que les tangentes trigonométriques des demi-angles que les rayons de la sphère menés aux extrémités de la corde font avec le rayon mené au point fixe, ont leur produit con- stant '. Supposons que la sphère ait son centre au foyer d'une surface du second degré de révolution ; ces deux surfaces seront homologiques, et le foyer sera leur centre d'homologie. Les points qui correspon- dront, dans la surface de révolution, aux extrémités de la corde de la sphère seront sur les prolongemens des rayons menés à ces extré- mités; on conclut donc, de la propriété de la sphère, cette propriété des surfaces de révolution : * Si dun foyer dune surface du second degré de révolution , on mène deux rayons aux extrémités dune corde qui tourne autour dun point fixe , le produit des tangentes trigonométriques des demi- angles que ces deux rayons feront avec la droite qui joint le foyer au point fixe, sera constant, quelle que soit la corde menée par ce point. (361) Si le point fixe est pris au dehors de la surface, et que la ' Ce produit est égal à ^^ , R étant le rayon de la sphère , et D la distance du point fixe h son centre. Ce théorème, considéré dans le cercle, est dû à Lagrange, qui s'en est servi pour résoudre le problème d'inscrire dans un cercle un triangle dont les trois côtés passent par trois points donnés. (Voir Mémoires de l'.^cadémie de Berlin, ann. 1776, page 286.) 804 MÉMOIRE DE GÉOMÉTRIE. corde soit menée tangentiellement à la surface, son point de contact sera sur une courbe plane; et, d'après le théorème, le rayon vecteur mené à chaque point de cette courbe fera un angle constant avec la droite menée du foyer au point fixe ; d'où l'on conclut ce théorème : Le cône qui a pour sommet un foyer (Tune surface de révolution et pour base une section plane de la surface , est de révolution et a pour axe la droite menée du foyer au sommet du cône circonscrit à la surface suivant sa section plane. (362) Si la corde, en tournant autour d'un point fixe, reste toujours dans un même plan, ses extrémités seront sur la section faite par ce plan dans la surface, et le cône qui aura cette section pour base et le foyer de la surface pour sommet, sera de révolution; d'où l'on conclut que : Si autour d'une droite fixe, menée par le sommet d'un cône de révolution, on fait tourner un plan transversal , il coupera le cône suivant deux arêtes qui seront telles que le produit des tangentes trigonométriques des demi-angles qu'elles feront avec la droite fixe, sera constant. (363) Par la considération du cône supplémentaire , formé par les perpendiculaires aux plans tangens du premier, on conclut de ce théorème le suivant : Étant donné un cône de révolution et un plan fixe mené par son sommet, si par un droite prise dans ce plan et passant par le som- met du cône, on mène deux plans tangens à cette surface, le pro- duit des tangentes trigonométriques des demi-inclinaisons de ces plans tangens sur le plan fixe sera constant. (364) Ce théorème et le précédent donnent lieu à deux proposi- tions de la géométrie de la sphère, dont voici l'énoncé : 1° Un petit cercle étant tracé sur une sphère, si autour d'un point fixe on fait tourner un arc de grand cercle qui rencontre le petit cercle en deux points , le produit des tangentes trigonométri- ques des demi-arcs compris entre ces deux points et le point fixe , sera constant. IRE DE GEOMETRIE. 005 2° Un petit cercle étant tracé sur une sphère, si par un point pris arbitrairement sur un arc de grand cercle fixe , on mène deux arcs de grands cercles tangens au petit cercle , le produit des tan- gentes irigonométriques des demi-angles qu'ils feront avec l'arc de grand cercle fixe, sera constant. (365) La première de ces deux propositions peut être considérée comme répondant au théorème de géométrie plane qui exprime la propriété des segmens des cordes qui se coupent dans le cercle. La seconde correspond aussi à un théorème de géométrie plane qui consiste en ce que : «Si de chaque point d'une ligne droite tracée dans le plan d'un cercle on mène deux tangentes au cercle, le produit des tangentes trigonométriques des demi-angles quelles feront avec la ligne droite fixe , sera constant. (366) Les deux propositions précédentes peuvent être considérées comme exprimant, la première une propriété de quatre points pris arbitrairement sur la circonférence d'un petit cercle de la sphère ; et la seconde une propriété de quatre arcs de grands cercles tangens à un petit cercle. Sous ce point de vue , ces deux propositions seront très-utiles dans la géométrie de la sphère. Nous en ferons diverses applications dans un autre moment. On peut encore dire que la première exprime une propriété du quadrilatère sphérique inscrit à un petit cercle; et la seconde une propriété du quadrilatère sphérique circonscrit à un petit cercle. § XXIL Méthode pour les relations angulaires. — Transformation de la sphère en un sphéroïde aplati. (367) Considérons deux figures homographiques à trois dimensions ; qu'elles soient coupées respectivement par deux plans homologues quelconques P, P'; les sections seront deux parties homologues des deux figures ,,de sorte qu'elles seront elles-mêmes deux figures planes To«. XI. 102 806 MÉMOIRE DE GEOMETRIE. homographiques. On pourra placer les deux corps de manière que ces deux figures planes soient la perspective l'une de l'autre ; c'est-à-dire de manière que les droites joignant les points a de la première aux points homologues a' de la seconde , concourent en un même point 0 de l'espace. (Cela sera démontré dans le $ XXVI.) Considérons ce point 0 comme appartenant à la première figure ; il lui correspondra un point O', dans la seconde figure ; et aux droites Oa correspondront les droites O'a'. De sorte que les deux figures se- ront placées de manière que toutes les droites issues du point O dans la première, rencontreront toutes leurs homologues, respectivement, en des points situés sur un m,ême plan P' . Et, plus généralement. Deux droites homologues quelconques rencontrent respectivement les deux plans P , P' , en deux points a, a' qui sont en ligne droite avec le point O. (368) Maintenant, prenons pour le plan P', qui est arbitraire, celui dont le correspondant, dans la première figure , est à l'infini ; les points a seront à l'infini; on peut donc dire que : ' Les deux figures seront placées de manière que, si Von prend deux droites homologues quelconques , une parallèle à la pre- Tïiière , menée par le point 0 , rencontrera la seconde sur le plan fixe P' . ' (369) Réciproquement, une figure étant donnée, nous pouvons en construire une seconde, qui ait une telle forme et une telle position, par rapport à la première , que cette relation ait lieu. En effet, une figure étant donnée, prenons cinq points arbitraires, dans l'espace, a', b' , c' , d' et 0' pour former la figure homographique; et convenons que ces points correspondront à cinq points de la pre- mière figure, que nous allons déterminer. Que le point O' corresponde à un point 0 pris arbitrairement dans la figure proposée. Que les points a' ,b' , c' , correspondent respecti- vement aux points de cette figure situés à l'infini sur les droites Oa' , Oh' , Oc' ; et que le point d' corresponde à un point de la première MEMOIRE DE GÉOMÉTRIE. 807 figure pris sur la droite menée du point 0 au point c^ où la droite O'd' rencontre le pian a'b'c'. Nous pourrons, avec ces données, construire la figure homogra- phique de la proposée. Dans cette figure, il est clair que le plan a'b'c' correspond à l'infini de la proposée. Le point ^ correspond au point situé à l'infini sur la droite Oc^. Ainsi les quatre points a', b' , c' , â', situés dans un même plan, correspondent à quatre points situés sur les droites Oa' Ob', Oc', Oi'. Ce qui prouve que la figure située dans le plan a'b'c' est en perspec- tive avec son homologue dans la première figure. Par conséquent tout autre point s' du plan a'b'c' a son homologue à l'infini sur la droite Oî'. Il s'ensuit que Toute droite, dans la seconde figure , aura son homologue, dans la première , parallèle à la droite menée du point O au point où cette droite de la seconde figure rencontre le plan a'b'c'. Et si l'on regarde le point O comme faisant partie de la seconde figure, et qu'on le fasse entrer dans les propriétés de cette seconde figure, on voit qu'awa? angles que différentes droites de la première figure font entre elles, correspondront des angles égaux, faits par les droites menées du point 0 aux points où les droites homologues , dans la seconde figure, rencontrent le plan a'b'c'. Diverses applications de cette méthode particulière vont en faire connaître parfaitement l'usage. (370) Supposons que la figure proposée soit une sphère ayant son centre au point O; la seconde figure sera une surface du second degré. Prenons le point O', qui est arbitraire, sur la perpendiculaire abaissée du point O sur le plan P'. Cette surface sera alors de révolution au- tour de la droite 00' , parce que tout sera symétrique de part et d'autre d'un plan mené par cette droite. Ce moyen de déformation donnera donc des propriétés des surfaces du second degré de révolution , cor- respondantes à des propriétés de la sphère. Après avoir disposé du point O' et du plan P', nous pouvons encore 808 MEMOIRE DE GEOMETRIE. prendre arbitrairement un point d' pour correspondre à un point d de la sphère, en observant cette seule condition que les droites Od, O'd' se rencontrent sur le plan P'. Ainsi , pour un point O' et un plan P' déterminés, on pourra former une infinité de surfaces de révolution horaographiques à la sphère j et les propriétés de la sphère produiront des propriétés de ces surfaces. Nous pouvons faire en sorte que l'une de ces surfaces ait son centre au point 0 qui est le centre de la sphère. En effet, prenons le point d de la sphère sur la droit 00'; le point correspondant d' de la surface sera aussi sur la droite 00'; et ce point d' peut être pris arbitrairement sur cette droite. Cherchons en quel lieu il doit être placé pour que la surface ait son centre au point O. Remarquons que le point 0' correspond au point O de la première figure , et le plan P' correspond au plan à l'infini de cette première figure. Ce plan à l'infini est le plan polaire du point O par rapport à la sphère ; le plan P' est donc le plan polaire du point 0' par rapport à la surface de révolution. Donc, si le point O est le centre de cette surface, on aura Od'' = 00'. Oâ'. Il faut donc prendre le point d' de manière que l'on ait cette égalité; et alors la surface aura son centre au point O. -Pour déterminer un point m' de la surface, correspondant à un point donné m de la sphère, on mènera par le point m les deux droites mO, md , dont les correspondantes passeront par les points 0' et d' respectivement. La première passera par le point où la droite Om perce le plan P', et la seconde passera par le point où une parallèle à la droite md, menée par le point O, perce ce plan P'. Ainsi le point m' sera déterminé. Si la droite Om est parallèle au plan P', la droite O'm' sera paral- lèle à Om. On trouve aisément, par une comparaison de triangles semblables, que O'm' = Od'. De sorte que^ une corde de la surface, menée par le point 0', perpendiculairement à l'axe de révolution, est égale au diamètre dirigé suivant cet axe. Cela prouve que ce diamètre est le plus petit de la surface ; car s'il était le plus grand, on ne pour- MEMOIRE DE GEOMETRIE. 809 rait pas inscrire dans la surface une corde qui lui fût égale. Ainsi la surface est un ellipsoïde aplati. Et le point O' jouit de cette propriété qu'il est pris sur l'axe de révolution de manière qu'une corde menée par ce point, perpendiculairement à cet axe, est égale au diamètre de l'ellipsoïde dirigé suivant cet axe. Le plan P' est le plan polaire du point O' par rapport à l'ellipsoïde. Si on veut le déterminer directement sans chercher d'abord le point O', on trouve cette expression remarquable de sa distance au centre de l'ellipsoïde, savoir que : La valeur inverse du carré de la distance de ce plan au centre de V ellipsoïde , est égale à la différence des valeurs inverses des carrés des deux demi-axes principaux de l'ellipse génératrice de V ellipsoïde. (371) Dans ce qui va suivre nous désignerons toujours le plan en question par P' , et son pôle par O'. Il est bien entendu que ce plan et ce point ne sont pas arbitraires, et qu'ils sont, au contraire, abso- lument déterminés. Seulement si on les prend à droite de l'équateur de la surface, il existera pareillement, à gauche, un pareil plan et un pareil point. Nous regrettons de n'avoir pas à donner à ce plan et à ce point des dénominations particulières. Ces dénominations pour- raient tirer leur origine de celles de foyer et plan directeur^ car le plan et le point en question ont une relation directe avec le foyer et le plan directeur d'un ellipsoïde de révolution allongé. C'est que si l'on fait la transformation polaire de cet ellipsoïde, par rapport à une sphère concentrique, on obtient un elHpsoïde aplati, dans lequel le plan et le point en question correspondent respectivement au foyer et au plan directeur de l'ellipsoïde proposé. (372) Concevons une sphère ayant son centre au point O, et l'el- lipsoïde de révolution, aplati, formé homographiquement comme nous l'avons dit ; prenons le plan P' et le point O' de cet ellipsoïde ; ce plan correspondra à l'infini de la première figure j et ce point correspondra au point O, centre de la sphère. Nous allons passer en revue dilTérentes propriétés de la sphère qui s'appliqueront à l'ellipsoïde. 810 MÉMOIRE DE GEOMETRIE. Tout cône qui a pour base une section plane de la sphère et pour sommet le centre de cette surface, est de révolution. A ce cône correspondra, dans l'ellipsoïde, un second cône ayant pour base une section plane de cette surface, et pour sommet le point O' j et ce second cône rencontrera le premier sur le plan P' ; d'où l'on conclut que : Tout cône qui a pour sommet le point 0' et pour base une section plane de l'ellipsoïde , rencontre le plan P' suivant une conique qui^ vue du centre de la surface ^ parait être un cercle. (373) Un cône circonscrit à la sphère est de révolution. A ce cône correspond un cône circonscrit à l'ellipsoïde, qui rencontre le plan P' suivant une conique qui correspond à l'infini du premier cône. Si donc par cette conique on fait passer un cône qui ait son sommet au centre de l'ellipsoïde, il sera parallèle au cône circonscrit à la sphèrej donc Tout cône circonscrit à V ellipsoïde rencontre le plan P' suivant une conique qui, vue du centre , parait être un cercle. (374) Un plan tangent à la sphère est perpendiculaire au rayon qui aboutit au point de contact; donc Un plan tangent à V ellipsoïde et la corde menés du point 0' au point de contact, rencontrent le plan P' suivant une droite et en un point qui sont tels, que la droite menée du centre à ce point est per- pendiculaire au plan mené par le centre et par cette droite. (375) Deux plans tangens à la sphère font des angles égaux avec la corde qui joint les points de contact; donc Etant menés deux plans tangens à V ellipsoïde et la corde qui joint les points de contact, si par les droites suivant lesquelles ces deux plans rencontrent le plan P' , on mène deux plans passant par le centre de la surface, ils seront également inclinés sur la droite me- née du centre au point oie la corde qui joint les points de contact rencontre le plan P'. (376) Dans la sphère, deux droites polaires réciproques sont à angle droit, donc ,.™i™„. MÉMOIRE DE GEOMETRIE. 811 Deux droites polaires réciproques par rapport à t ellipsoïde , rencontrent le plan P' en deux points qui sont tels que les droites menées de ces points au centre de l'ellipsoïde sont à angle droit. (377) Trois diamètres conjugués de la sphère sont rectangulaires ; donc Trois axes conjugués de V ellipsoïde , relatifs au point 0' , rencon- trent le plan P' en trois points tels que les droites menées du centre de l'ellipsoïde à ces trois points sont rectangulaires. (378) Beaucoup d'autres propriétés de la sphère s'appliqueraient avec la même facilité à l'ellipsoïde aplati. Il est inutile de nous étendre davantage sur cet objet. Gomme nous l'avons dit ci -dessus, la théorie des polaires récipro- ques, ou plus généralement, le principe de Dualité, établit une rela- tion très-simple entre les ellipsoïdes de révolution allongé et aplati, et peuvent servir à passer des propriétés de l'un aux propriétés de l'autre ; de sorle que nous aurions pu déduire les théorèmes précé- dons des propriétés connues de l'ellipsoïde allongé. Mais ce n'était pas là notre but. Nous avons voulu donner une méthode qui servît à tirer directement, des propriétés de la sphère, les propriétés de l'ellipsoïde aplati, de même que par la théorie des figures homologiques on peut démontrer celles de l'ellipsoïde allongé. {Voir §§ XIX et XXI.) § XXIII. Méthode propre pour toutes sortes de relations , de lon- gueurs, d'aires et de volumes. (379) Dans la transformation homographique d'une figure , le plan situé à l'infini peut être pris pour son homologue dans la nouvelle figure. Dans ce cas, les formules générales qui nous ont servi à la con- struction des figures homographiques [S XV, équations (a) ] se sont simplifiées et sont devenues (1) arf = A. «'«/', ed = /u. f'rf', yd = V. y'd'. (Éq. («0, art. i83.) 812 MEMOIRE DE GEOMETRIE. Ces formules expriment que : Étant pris trois axes coordonnés quelconques Ox, Oy, Oz, dans la première figure ; et dans la seconde trois axes coordonnés O'x' , O'y', O'z', qui soient précisément les droites correspondantes aux pre- miers axes; si\,y, z, désignent les coordonnées d'un point quelcon- que m de la première figure, rapportées aux trois premiers axes , et x' , y' , z' , les coordonnées du point correspondant de la deuxième figure, rapportées aux trois autres axes, on aura (2) X = Xx' , y = fiy', z = vz' , 1, fj. et V étant trois constantes. Réciproquement, quand, entre les points de deux figures rappor- tées à deux systèmes d'axes coordonnés quelconques, on a ces rela- tions, ces deux figures sont homographiques , et ont cela de particulier, que le plan situé à l'infini, considéré comme appartenant à l'une d'elles, est lui-même son homologue dans l'autre. (380) Des formules (2) nous déduirions aisément toutes les proprié- tés des deux figures, et notamment celles sur lesquelles vont reposer les applications que nous allons faire de ce mode de transformation; mais nous préférons, pour ne point nous écarter de la voie purement géométrique que nous avons suivie jusqu'ici, déduire ces propriétés, particulières aux deux figures, de la théorie générale des figures ho- mographiques. (381) Soient donc deux figures homographiques, telles que le plan situé à l'infini dans la première soit lui-même son homologue dans la seconde. Les propriétés caractéristiques des deux figures seront, sous le rapport des relations descriptives , que à deux droites paral- lèles dans l'une , correspondrotit deux droites parallèles dans l'autre; et conséquemment, à deux plans parallèles dans l'une, correspon- dront deux plans parallèles dans l'autre; cela est évident; Et sous le rapport des relations métriques, que deux droites ho- mologues sont divisées en parties proportionnelles par des points homologues ^ c'est-à-dire que a, b, c, d, .... étant des points de la MÉMOIRE DE GÉOMÉTRIE. 813 première figure situés en ligne droite, et o', b', c', d'y .... les points correspondons dans la seconde figure, les segmens ab , cd, .... sont proportionnels aux segmens a'b', b'c' , .... En effet on a ba da Va' d'à' bc ' de b'c' ' d'& Supposons le point d à l'infini, le point d' sera aussi à l'infini et l'équation deviendra ba b'a' bo b'c' Ainsi les segmens ab,bc, sont proportionnels aux segmens a'b', b'c'. (382) Il suit de là que quand une droite de la première figure est divisée en parties égales, la droite homologue dans la seconde figure est aussi divisée en parties égales par les points correspondans aux points de division de la première droite. (383) Les deux sortes de relations descriptives et métriques que nous venons de reconnaître à nos figures homographiques donnent lieu à trois propriétés principales de ces figures , sur lesquelles repo- sent les applications auxquelles ce mode de déformation sera propre. Ces trois propriétés sont les suivantes : l'^ Le rapport de deux segmens pris sur deux droites parallèles quelconques dans la première figure , est égal au rapport des deux segmens correspondans dans la seconde figure. 2° Le rapport des aires de deux polygones plans quelconques situés dans deux plans parallèles , appartenant à la première fi- gure, est égal au rapport des aires des deux polygones correspon- dans dans la seconde figure. 3** Les volumes de deux parties correspondantes des deux figures seront entre eux dans un rapport constant. (384) Nous allons démontrer successivement ces trois propositions. Soient ab, cd, deux lignes parallèles, dans la première figure, et a'b', c'd', les deux lignes correspondantes de la seconde figure; il faut To«. XI. 103 814 MÉMOIRE DE GÉOMÉTRIE. ,>, prouver qu on a ab a'b' â ~ Vd/' Les deux lignes acj bdse coupent en un point e, et l'on a ab ea cd ec Pareillement les deux lignes a'c', b'd' se coupent en un point e' , et l'on a, parce que les deux lignes a'b' , c'd' sont parallèles, a'b' _ eV c^ ~ 7c'' Or on a ea e'a' -= —(381.); ec ec donc les premiers membres des deux équations sont égaux; c'est-à- dire que ah a'b' „ „ „ „ _ = C. Q. F. P. cd cd' (385) Soient deux aires planes T, U, situées dans deux plans pa- rallèles, et appartenant à la première figure, et soient T', U', les aires correspondantes dans la seconde figure ; elles seront aussi dans deux plans parallèles entre eux. Quelle que soit la forme des deux polygones T , U , on peut les dé- composer chacun en un certain nombre de petits parallélogrammes tous égaux entre eux, et ayant leurs côtés parallèles à deux axes fixes. T contiendra m de ces parallélogrammes , et U en contiendra n. Le rapport des aires des deux polygones sera — • Tous ces petits parallé- logrammes auront pour correspondans dans la seconde figure d'autres parallélogrammes , et ceux-ci seront aussi égaux entre eux (382) ; de sorte que les deux polygones T', U', seront divisés en autant de paral- lélogrammes, respectivement, que les deux T, U; par conséquent le rapport de leurs aires sera aussi — • Il sera donc égal au rapport des aires des deux premiers polygones. MÉMOIRE DE GÉOMÉTRIE. 815 (386) Il nous reste à démontrer la troisième proposition , savoir : que deux parties correspondantes des deux figures homographiques ont leurs volumes dans un rapport constant. Soient V, V, les volumes de deux polyèdres correspondans; il faut V démontrer que le rapport y, est constant, quels que soient les deux polyèdres, c'est-à-dire que v et v' étant les volumes de deux autres polyèdres correspondans, on aura » _ V 7 ~ V'* En effet, que l'on divise chacun des deux corps V, », en un certain nombre de petits rhomboïdes égaux entre eux, en menant trois séries de plans parallèles, dont les plans de chaque série soient également éloignés entre eux; supposons que les deux corps contiennent, le premier m rhomboïdes , et le second n ; le rapport de leurs volumes m sera — • Les deux corps correspondans V, v' , dans la seconde figure, seront divisés aussi en m et n rhomboïdes, qui seront différons des premiers, mais qui seront aussi égaux entre eux. De sorte que le rapport des vo- lumes de ces deux corps sera —- Il est donc égal au rapport des volumes des deux premiers corps. C. Q. F. P. (387) Les trois propositions que nous venons de démontrer ser- viront pour faire la transformation des relations de distances, d'aires et de volumes d'une figure. La transformation des relations de volumes se fera immédiatement, puisque les volumes des différentes parties de la nouvelle figure sont proportionnels aux volumes des parties correspondantes de la figure proposée. (388) Pour opérer la transformation des relations de distances et des relations de surfaces, concevons qu'une sphère fasse partie de la figure proposée. Il lui correspondra, dans la nouvelle figure, un ellipsoïde. Soit une ligne quelconque AB de la figure proposée, et R le rayon 816 MÉMOIRE DE GÉOMÉTRIE. de la sphère qui lui est parallèle; on aura dans la nouvelle figure une ligne A'B' et un demi-diamètre D' de l'ellipsoïde, qui sera parallèle au rayon R, et l'on aura ^ - 52 («). D'où AB = Ç. K. Donc : Pour faire la transformation d'une relation entre certaines lignes et une figure proposée, il suffira de remplacer, dans cette relation, ces lignes par les lignes correspondantes de la figure homographi- que , divisées respectivement par les demi-diamètres d'un ellipsoïde quelconque f qui leur seront parallèles , et multipliées par une con- stante. Si la relation proposée est homogène, on prendra cette constante égale à l'unité. (389) Pour les relations d'aires, concevons toujours une sphère faisant partie de la figure proposée; soit S une aire plane, et 2 la surface du carré construit sur deux rayons rectangulaires de la sphère, compris dans son plan diamétral parallèle au plan de l'aire S. On aura dans la seconde figure une aire plane S' et la surface 2' du parallélo- gramme construit sur deux demi-diamètres conjugués de l'ellipsoïde correspondant à la sphère, ces demi-diamètres étant compris dans le plan diamétral parallèle au plan de l'aire S', et l'on aura D'où S' s = ~. s. 2 est une constante, quelle que soit la direction du plan de l'aire S; on conclut donc de là que : Pour faire la transformation d'une relation entre des aires planes d'une figm'e, il suffit de substituer, dans cette relatiofi, à ces aires, les aires correspondantes de la figure homographique , divisées res- MÉMOIRE DE GÉOMÉTRIE. 817 pectivement par les surfaces des parallélogrammes construits sur deux demi- diamètres conjugués dun certain ellipsoïde, compris dans des plans parallèles à ceux de ces aires, et multipliées par une constante. Si la relation proposée est homogène, on prendra cette constante égale à l'unité. (390) Enfin nous pouvons énoncer de suite cette troisième règle : Pour faire la transformation dune relation entre les volumes de, différentes parties d'une figure, il suffit de substituer à ces volumes dans cette relation, les volumes des parties correspondantes de la se- conde figure, multipliés respectivement par une constante. Si la relation proposée est homogène, on prendra cette constante égale à l'unité. (391) On voit que ces principes de transformation introduiront, généralement, dans la nouvelle figure, la considération d'un ellipsoïde. Gela donne lieu aux observations suivantes, dont l'application se présentera dans beaucoup de questions : 1" Cet ellipsoïde auxiliaire est indéterminé de position; et géné- ralement il est indéterminé de forme ; 2° S'il se trouvait une sphère dans la première figure, il faudrait prendre dans la seconde figure, pour l'ellipsoïde auxiliaire, l'ellipsoïde même correspondant à la sphère, ou du moins un ellipsoïde homothé- tique (semblable et semblablement placé) ; parce que deux corps ho- mothétiques dans la première figure, donnent lieu dans la nouvelle figure à deux corps qui sont sussi homothétiques entre eux; 3° Dans les théorèmes qui, par leur nature, seront susceptibles de l'application du principe des relations contingentes, on pourra substi- tuer à l'ellipsoïde auxiliaire une autre surface du second degré. (392) Nous allons faire diverses applications de ce mode de dé- formation homographique. Prenons d'abord une sphère ; le principe de déformation donnera un ellipsoïde à trois axes inégaux; et les propriétés de la sphère se convertiront immédiatement en propriétés de l'ellipsoïde. Il est évi- 818 MEMOIRE DE GEOMETRIE. dent qu'au centre de la sphère correspondra le centre de l'ellipsoïde; et qu'à trois diamètres rectangulaires de la sphère correspondront trois diamètres conjugués de l'ellipsoïde. (393) Le cube construit sur trois rayons rectangulaires quelcon- ques a toujours le même volume; donc Le rhomboïde construit sur trois demi-diamètres conjugués d'un ellipsoïde a toujours le même volume, quel que soit le système de ces trois diamètres. Soient a,b, c les trois demi-diamètres principaux de l'ellipsoïde, le volume du rhomboïde construit sur trois autres demi - diamètres con- jugués sera toujours égal à ahc. (394) Le volume de la sphère est égal au cube construit sur le rayon, multiplié par | n. Donc Le volume de V ellipsoïde est égal au volume du rhomboïde con- struit sur trois demi-diamètres conjugués , multiplié par \ tt, c'est- à-dire à "l TT abc. (395) Quand deux sphères sont concentriques, les plans tangens à la plus petite retranchent de la plus grande des segmens égaux ; donc : Quand deux ellipsoïdes sont concentriques et homothétiques , les plans tangens au plus petit retranchent du plus grand des segmens égaux. Les secteurs correspondant à ces segmens sont aussi égaux. Les cônes circonscrits à l'ellipsoïde suivant les bases des segmens ont aussi des volumes égaux. (396) Prenons ce beau théorème d'Archimède : Le volume d'un segment de sphère est au cône qui a même base et même hauteur , comme le rayon de la sphère, plus la hauteur de l'autre segment, est à la hauteur de cet autre segment. {De la .sphère et du cylindre; livre II, proposition 3.) On en conclut immédiatement cet autre théorème, démontré aussi par Archimède, pour l'ellipsoïde de révolution seulement. {Des sphé- roïdes et des conoïdes, proposition 32.) Le volume d'un segment d'ellipsoïde quelconque est au cône qui MEMOIRE DE GEOMETRIE. 819 a mémo base et même sommet, comme la moitié du diamètre qui aboutit à ce sommet, plus la partie de ce diamètre non comprise dans le segment, est à cette même partie. Nous appelons sommet du segment l'extrémité du demi-diamètre qui passe par le centre de la base du segment. (397) La surface de la sphère est égale à quatre fois celle d'un grand cercle; donc Si l'on considère un ellipsoïde comme un polyèdre d'une infinité de faces infiniment petites , l'intégrale double qui donnera la somme de toutes ces faces divisées respectivement par les aires des sections faites dans l'ellipsoïde par des plans diamétraux parallèles à ces faces, sera égale à quatre. (398) Soit une sphère et deux plans fixes menés par son centre ; si autour de ce point on fait tourner un troisième plan , de manière que la somme des angles dièdres qu'il fera a\ec les deux plans fixes, soit constante, ce plan enveloppera un cône du second degré; et le produit des sinus des angles que chaque arête de ce cône fera avec les deux plans fixes sera constant '. L'aire du triangle sphérique déterminé sur la sphère par les deux plans fixes et par le plan mobile sera constante, puisque la somme des trois angles de ce triangle sera toujours la même; conséquem- ment le volume de la pyramide sphérique comprise sous ces trois plans sera aussi constant. Le cône percera la sphère suivant une conique sphérique. Le produit des distances de chaque point de cette courbe aux deux plans fixes sera constant; ce qui prouve que cette courbe est sur un cylindre hyperbolique dont les deux plans fixes sont les plans asymptotes. On conclut de là que : Étant donné un ellipsoïde, et deux plans fixes menés par son centre , si autour de ce point on fait tourner un troisième plan, de manière que la portion de l'ellipsoïde comprise dans l'angle trièdre ' J'ai (Icmontrc ces deux propositions dans mon Mémoire êur les propriétés générales des cônes du second degré, art. 24 et 26. 820 MÉMOIRE DE GEOMETRIE. formé par ces trois plans ait son volume constant, le plan mobile enveloppera un cône du second degré ; et la courbe d'intersection de la surface de l'ellipsoïde par ce cône , sera située sur un cylindre hyperbolique dont les plans asymptotes seront les deux plans fixes. (399) Si par un point fixe S on mène une transversale qui ren- contre un sphère en deux point a, a' , on aura Sa. Sa' = const. ; Donc Si par un point fixe S on mène une transversale qui rencontre un ellipsoïde en deux points a, a', on aura Sa, Sa' = const. D étant le demi -diamètre de l'ellipsoïde parallèle à la trans- versale. (400) Si par un point fixe on mène des droites aux extrémités a , b d'un diamètre quelconque de la sphère, on aura Sa -»- S4 = const. Donc Si d'un point fixe on mène des droites aux extrémités d'un dia- mètre quelconque d'un ellipsoïde, la somme de leurs carrés divisés respectivement par les carrés des demi-diamètres parallèles à ces droites, est constante. Ainsi l'on a So S6 — H = const. Or on a, par le théorème précédent. Sa. Sa' Si. Sb' = const. = X , — — — = A. On conclut de là Sa Sb — -4- — = const. Sa' Si' OIRE DE GEOMETRIE. 021 C'est le théorème de l'art. 343 (§ XX). (401) La somme des carrés des droites menées des extrémités d'un diamètre à un point quelconque de la sphère est constante et égale au carré de ce diamètre; donc La somme des carrés des droites menées des extrémités dun diamètre de l ellipsoïde à un point quelconque de cette sui'face , di- visés respectivement par les carrés des diamètres parallèles à ces droites , est constante et égale à l'unité. Ainsi soient A, B, les extrémités d'un diamètre de l'ellipsoïde, et m un autre point quelconque de cette surface, et soient D, D', les dia- mètres parallèles aux deux droites ?nA, mB, on aura mk. mB (402) Si, sur un diamètre d'une sphère et sur son prolongement, on prend deux points conjugués harmoniques par rapport aux extré- mités du diamètre, le rapport des distances de ces deux points à un point quelconque de la sphère sera constant ; donc Si sur un diamètre dun ellipsoïde on prend deux points conju- gués harmoniques par rapport aux extrémités de ce dia7nètre , les distances de chaque point de V ellipsoïde à ces deux points , divisées respectivement par les demi- diamètres parallèles aux droites sur lesquelles se mesurent ces distances, ont un rapport constant. (403) Si l'on a un système de points dans l'espace, et leur centre des moyennes distances, et que de ce point, comme centre, on décrive une sphère, la somme des carrés des distances d'un point quelconque de cette sphère à tous les points du système sera constante ; donc Si Ion a un système de points dans l espace , et un ellipsoïde qui ait son centre de figure au centre des moyennes distances de toits ces points, la somme des carrés des droites menées dun point quel- conque de l'ellipsoïde à tous les points, divisés respectivement par les carrés des demi-diamètres parallèles à ces droites, sera constante. (404) Soit un cercle, et deux axes coordonnés rectangulaires rae- Toï. XI. 104 82i MÉMOIRE DE GÉOMÉTRIE. nés par son centre. Qu'on mène deux rayons quelconques rectangu- laires; soient a;' j y' , les coordonnées de l'extrémité du premier, et a;", y", les coordonnées de l'extrémité du second; on aura évidemment, x" = ± y' et y" == ip x'. Faisons la déformation homographique ; nous aurons une ellipse, deux axes coordonnés Oa?^ Oy, dirigés suivant deux diamètres conju- gués, et deux autres diamètres conj ugués; et l'on en conclut ce théorème : L'équation d'une ellipse rapportée à deux axes conjugués étant a' b" si l'on représente par x', y' et x", y", les coordonnées des extrémités de deux demi-diamètres conjugués quelconques , on aura ,, a b * = ± - y' et i/" = =f: - :r. Ces relations entre les coordonnées des extrémités de deux demi- diamètres conjugués sont très-simple, et peuvent servir à démontrer rapidement les diverses propriétés connues de ces diamètres. Elles pourraient être introduites avec avantage dans la théorie analytique des sections coniqties, où on les démontrerait directement. (405) Qu'on prenne le théorème de Cotes, et qu'on le transporte à l'ellipse, en observant qu'à des secteurs égaux dans le cerle, cor- respondront des secteurs égaux dans l'ellipse, on aura le théorème suivant : Si l'on mène dans l'ellipse 2n demi- diamètres , qui divisent sa surface en 2n secteurs égaux, et qu'on appelle m„, m,, m,, les points de division consécutifs ; que d'un point 0,pris à volonté sur le demi-diamètre Cm^ , ou sur son prolongement, on mène des droites à tous les points de division; I ° Xe produit des droites menées à tous les points de division de rang pair, divisé par le produit des demi-diamètres parallèles à ces MÉMOIRE DE GÉOMÉTRIE. droites, sera égal à n ' > C»«o 2** Le produit de toutes les droites menées aux points de division de rang impair, divisé par le pioduit des demi-diamètres parallèles à ces droites , sera égal à cô" Cnto Nous pourrions dire que les points de division m„, m,, .... sont pris de manière que l'intégrale de l'élément de l'arc d'ellipse, divisé par le demi-diamètre parallèle à la direction de cet élément, a la même va- leur entre deux points de division consécutifs quelconques. On pourrait généraliser de même le théorème de Moivre. $ XXIV. Suite du précédent. — Démonstration géométrique des di- verses propriétés des diamètres conjugués dune surface du second degré. (406) Soient trois rayons rectangulaires r, r', 7-", d'une sphère, et trois autres rayons rectangulaires p, p', p" ; le sinus de l'angle que le rayon p" fait avec le plan des deux rayons r, r', est égal au sinus de l'angle que le rayon r" fait avec le plan des deux rayons p, p' ; donc le rhomboïde construit sur les trois rayons r, r' , p", a le même volume que le rhomboïde construit sur les trois rayons r", p, p'. On conclut de là que : Quand on a deux systèmes de trois diamètres conjugués dune surface du .second degré, le rhomboïde construit sur deux diamètres du premier système et un diamètre du second, est égal au volume du rhomboïde construit sur les trois autres diamètres. Nous avons déjà démontré (393) que le rhomboïde construit sur trois diamètres conjugués quelconques a toujours le même volume; on peut donc dire que : 824 MEMOIRE DE GEOMETRIE. Étant donnés deux systèmes quelconques de trois diamètres con- jugués , le rhomboïde construit sur trois quelconques d'entre eux a le même volume que le rhornhoïde construit sur les trois autres. (407) La somme des carrés des cosinus des angles que les trois rayons r, r' , r", font avec le rayon p est égale à l'unité; donc la somme des carrés des projections orthogonales des trois rayons r, r' , r" , sur le rayon p, est constante, quel que soit le système des trois rayons rec- tangulaires r, r', r" ^ on en conclut que : Si Von projette trois diamètres conjugués d'une surface du second degré sur un axe fixe, par des plans parallèles au plan conjugué à cet axe, la somme des carrés des projections sera constante, quel que soit le système des trois diamètres conjugués. (408) Si l'on mène une droite perpendiculaire aux plans projetans , la projection othogonale d'un diamètre, sur cette droite, sera égale à sa projection sur le diamètre fixe, multipliée par le cosinus de l'angle que ce diamètre fait avec la droite; on en conclut que : La somme des carrés des projections orthogonales de trois dia- mètres conjugués sur une droite fixe, est constante, quel que soit le système des trois diamètres conjugués. (409) Si l'on fait les projections sur trois droites rectangulaires, et qu'on fasse la somme de leurs carrés, on aura pour résultat, que : La somme des carrés de trois diamètres conjugués est constante. (410) Appliquant à ce théorème le principe du n° 388, on le gé- néralise de cette manière : Étant donnés deux ellipsoïdes quelconques , la somme des carrés de trois diamètres conjugués du premier , divisés par les carrés des diamètres du second, qui leur sont parallèles respectivement, est constante. (411) Et si la première surface est une sphère, on en conclut que : La somme des valeurs inverses des carrés de trois diamètres rec- tangulaires d'un ellipsoïde est constante. (412) La somme des carrés des perpendiculaires abaissés des extré- MÉMOIRE DE GÉOMÉTRIE. 82;'» mités de trois rayons de la sphère, rectangulaires, sur un diamètre fixe, est constante; donc Si, des extrémités de trois demi-diamètres conjugués quelconques d'un ellipsoïde, on abaisse sur un diamètre fixe des obliques paral- lèles au plan conjugué à ce diamètre, la somme des carrés de ces obliques , divisés respectivement par les carrés des demi-diamètres qui leur sont parallèles, sera constante. (413) Soient les trois rayons rectangulaires r , r', r" ; la somme des carrés des cosinus des angles que les trois plans qu'ils déterminent deux à deux font avec un plan donné, est égale à l'unité; on en con- clut que la somme des carrés des projections othogonales des paral- lélogrammes construits sur ces rayons deux à deux , sur le plan donné, est constante ; donc Vn rhomboïde étant construit sur trois diamètres conjugués dtun ellipsoïde , si Von projette ses faces sur un plan fixe, par des droites parallèles au diamètre conjugué à ce plan, la somme des carrés des projections sera constante, quel que soit le système des trois diamè- tres conjugués. (414) Si on mène un plan perpendiculaire aux droites projetantes, on aura les projections othogonales des faces du rhomboïde sur ce plan ; elles seront égales aux projections sur le premier plan, multi- pliées par le cosinus de l'angle des deux plans ; d'où il suit que : Les faces du rhomboïde cotistruit sur trois diamètres conjugués quelconqïies d'un ellipsoïde étant projetées orthogonalement sur un plan fixe, la somme des carrés de leurs projections est constante , quel que soit le système des trois diamètres conjugués. (415) Faisant les projections sur trois plans rectangulaires et ajou- tant leurs carrés, on en conclut que : La somme des carrés des faces du rhomboïde construit sur trois diamètres conjugués est constante. (416) Substituant, dans ce théorème, au parallélogramme con- struit sur deux diamètres conjugués, l'aire de la section faite dans l'ellipsoïde par le plan de ces deux diamètres , et appliquant au 826 MÉMOIRE DE GÉOMÉTRIE. théorème le principe de transformation du n" 389, on a le sui- vant : Étant donnés deux ellipsoïdes concentriques , la somme des carrés des aires des sections faites dans le premier par trois plans conju- gués, divisés respectivement par les carrés des aires des sections faites par les mêmes plans dans le second ellipsoïde, est constante. (417) Si la première surface est une sphère, il s'ensuit que : Dans un ellipsoïde , la somme des valeurs inverses des carrés des sections faites par trois plans rectangulaires, est constante. Pour appliquer ce théorème et le précédent aux hyperboloïdes, on substituera aux aires des sections diamétrales les aires des rhombes construits sur deux diamètres conjugués compris dans les plans de ces sections. (418) On voit par les théorèmes précédens, que les pi'opriétés des faces des rhomboïdes construits sur trois diamètres conjugués sont analogues aux propriétés relatives aux longueurs de ces diamètres. Et en effet, les unes se peuvent déduire des autres facilement, au moyen du théorème suivant : Si par le centre d'une surface du second degré on élève sur cha- que plan diamétral une perpendiculaire proportionnelle à Vaire du parallélogramme construit sur deux diamètres conjugués compris dans ce plan, l'extrémité de cette perpendiculaire sera sur une se- conde surface du second degré. Soient Oa, Oh, les deux demi-diamètres conjugués pris dans le plan diamétral, et Oy la perpendiculaire élevée sur leur plan, laquelle est égale à l'aire du parallélogramme construit sur Oa et 0Z>. Concevons le demi-diamètre Oc qui forme avec les deux premiers un système de trois demi-diamètres conjugués, et menons le plan tangent à la sur- face, au point c , et la perpendiculaire Op sur ce plan. Cette perpen- diculaire sera en raison inverse de l'aire du parallélogramme construit sur Oa et Ob , d'après le théorème (393). Donc Oy est en raison inverse de Op. Donc le point y appartient à la surface polaire réci- proque delà proposée, prise par rapport à une sphère auxiliaire con- MÉMOIRE DE GÉOMÉTRIE. 827 centrique. Celte surface polaire est du second degré ; le théorème est donc démontré. (419) Reprenons une sphère, et soient r, r' , r", trois rayons rec- tangulaires; menons un diamètre fixe p; le plan tangent à l'extrémité du rayon r rencontre le diamètre /î en un point dont la distance au centre de la sphère a sa valeur inverse égale au cosinus de l'angle que le rayon r fait avec le diamètre p : donc les plans tangens aux extrémités des trois rayons r, r", r", font sur le diamètre p trois seg- mens dont les valeurs inverses ont la somme de leurs carrés con- stante; donc Les plans tangens à une surface du second degré aux extrémités de trois demi-diamètres conjugués, rencontrent un diamètre fixe en trois points dont les distances au centre de la surface ont la som^me des carrés de leurs valeurs inverses constante. (420) Soient les trois rayons rectangulaires r, r', r", et un plan fixe P. Projetons sur ce plan, par des droites parallèles au rayon r", le parallélogramme construit sur les deux premiers rayons r, r' ; la projection sera égale à ce parallélogramme divisé par le cosinus de l'angle que son plan fait avec le plan P; donc la valeur inverse de cette projection sera égale à la valeur inverse du parallélogramme, multipliée par le cosinus ; si on projette de même sur le plan P les deux autres parallélogrammes construits, l'un sur ret r"^ et l'autre sur r', r", ou aura trois projections dont la somme des valeurs inverses des carrés sera égale à une constante. On en conclut, dans les surfaces du se- cond degré , une propriété que nous pouvons énoncer ainsi : Les faces dît rho7nhoïde construit sur trois demi-diamètres con- jugués d'une surface du second degré, rencontrent un plan fixe sui- vant six droites qui sont parallèles deux à deux, et qui, prises quatre à quatre, déterminent trois parallélogrammes; la somme des valeurs inverses des carrés de ces trois parallélogrammes a une valeur con- stante, quel que soit le système des trois diamètres conjugués. On peut exprimer ce théorème de cette manière : Un rhomboïde étant construit sur trois demi-diamètres conjugués 828 MÉMOIRE DE GÉOMÉTRIE. quelconques d'une surface du second degré, si on projette chacune de ses faces sur un plan fixe , par des droites parallèles au diamè- tre conjugué au plan de la face projetée , la somme des valeurs inverses des carrés des projections sera constante, quel que soit le système des trois demi-diamètres conjugués. (421) Si d'un point de l'espace on abaisse des perpendiculaires sur trois plans rectangulaires quelconques, menés par un point fixe, la somme des carrés de ces perpendiculaires sera constante, et égale au carré de la distance des deux points; donc Si d'un point m de l'espace on abaisse sur trois plans diamétraux conjugués quelconques d'un ellipsoïde trois obliques parallèles res- pectivement aux trois diamètres conjugués à ces plans , la somme des carrés de ces obliques, divisés respectivement par les carrés des demi-diamètres qui leur sont parallèles , sera constante, et égale au carré de la droite menée du point m au centre de l'ellipsoïde, divisé par le carré du demi-diamètre compris sur cette droite. Ainsi soient a,b, c, trois demi-diamètres conjugués d'un ellipsoïde; prenons leurs directions pour celles de trois axes coordonnés Ox , Oy, Oz, et soient x, y , z les coordonnées d'un point m de l'espace; soit Od le demi-diamètre de la surface compris sur la droit Om, on aura l'équation x" y' z^ Om a' b' c' ~ ôJ'' quel que soit le système des trois demi-diamètres conjugués a, b, c. Cette équation fait voir que la quantité a;' v" v' — -t- ^ + — a' b^ c' est plus grande ou plus petite que l'unité, suivant que le point m est pris au dehors ou au dedans de l'ellipsoïde; et qu'elle est précisé- ment égale à l'unité, quand le point m est pris sur la surface; c'est- MÉMOIRE DE GÉOMÉTRIE. 829 à-dire que l'équation s* «« »' — ^ f- ^. __ 1 a' 6' c' appartient à tous les points de la surface. (422) Soient deux droites fixes menées par le centre de la sphère, la somme des produits des cosinus des angles qu'elles font avec trois rayons rectangulaires est égale au cosinus de l'angle qu'elles font entre elles; ainsi cette somme est constante, quel que soit le système des trois rayons rectangulaires; on conclut de là que la somme des produits des projections orthogonales des trois rayons sur les deux droites, est constante. Et si l'on conçoit deux plans diamétraux per- pendiculaires respectivement aux deux droites fixes, on peut dire que la somme des produits des perpendiculaires abaissées des extrémités des trois rayons rectangulaires sur les deux plans, est constante. A ces trois perpendiculaires, correspondront, dans la figure ho- niographique, les obliques abaissées des extrémités de trois demi- diamètres conjugués de l'ellipsoïde, sur deux plans diamétraux, parallèlement aux diamètres conjugués à ces plans. Ces obliques seront proportionnelles respectivement aux perpendiculaires abaissées des mêmes points sur les deux plans fixes; on a donc ce théorème : Étant menés deux plans fixes par le centre d'un ellipsoïde, la somme des produits des perpendiculaires abaissées des extrémités de trois demi-diamètres conjugués sur ces deux plans, sera constante. Si les deux plans sont conjugués, cettesomme est égale à zéro. (423) Si l'on conçoit deux droites perpendiculaires aux deux plans respectivement, les perpendiculaires abaissées sur ces plans seront égales aux projections othogonales des demi-diamètres sur ces droites; on peut donc dire que : La somme des produits des projections de trois demi-diamètres conjugués sur deux droites fixes, est constante. Si les deux droites se confondent, on aura, comme simple corol- laire, le théorème (408). To«. XI. 105 830 MEMOIRE DE GÉOMÉTRIE. (424) Soient deux plans fixes et trois plans rectangulaires quel- conques menés par le centre de la sphère , la somme des produits des cosinus des angles que ces trois plans feront avec les deux plans fixes sera constante et égale au cosinus de l'angle des deux plans. Il s'ensuit que si l'on conçoit trois rayons rectangulaires , la somme des produits des projections, sur les deux plans, des rhombes construits sur ces rayons pris deux à deux, sera constante. On conclut de là un théorème semblable, à l'égard des projections des parallélogrammes faits sur trois demi-diamètres conjugués pris deux à deux; ces projections étant faites sur deux plans fixes par des droites parallèles aux diamètres conjugués à ces plans; et si l'on con- çoit deux autres plans perpendiculaires respectivement à ces deux droites, les projections othogonales sur ces plans seront égales res- pectivement aux premières projections multipliées par les cosinus des angles que les premiers plans font, respectivement, avec les deux nou- veaux; on peut donc énoncer ce théorème : Un rhomboïde étant construit sur trois demi-diamètres conjugués d'un ellipsoïde, si Von projette orthogonalement chacune de ses faces sur deux plans fixes , et qu'on fasse le produit de ces deux projec- tions, la somme de ces produits est constante, quel que soit le sys- tème des trois demi-diamètres conjugués. Si les deux plans se confondent, on a le théorème (414). (425) Si par un point fixe on mène dans la sphère trois cordes rec- tangulaires, la somme de leurs carrés sera constante {Géométrie de position, p. 166); donc Si par un point fixe on mène dans un ellipsoïde trois cordes paral- lèles à trois diamètres conjugués quelconques , la somme de leurs carrés , divisés respectivement par les carrés de ces diamètres , est constante. Le point fixe peut être pris sur la surface de l'ellipsoïde. (426) Si par un point pris dans l'intérieur d'une sphère on mène trois plans rectangulaires, la somme des aires des trois sections est constante [Géométrie de position , p. 167); donc MÉMOIRE DE GÉOMÉTRIE. 831 Si par un point fixe pris dans l'intérieur d'un ellipsoïde on mène trois plans parallèles à trois plans conjugués quelconques , la somme des aires des trois sections, divisées respectivement paries aires des sections diamétrales faites par les plans conjugués , sera constante. (J XXV. Réflexions sur la théorie des figures homographiques. — Démonstration de quelques-unes de leurs propriétés générales. (427) Nous n'avons considéré, dans ce Mémoire, la théorie des figures homographiques que comme méthode de transformation pro- pre à la démonstration et à la généralisation des propositions de géo- métrie. Mais cette théorie est susceptible de développemens d'une autre nature. Deux figures homographiques, situées d'une manière quel- conque dans l'espace, donnent lieu à un ensemble de propositions assez nombreuses qui appartiennent à la théorie propre de ces figu- res, et ces propositions pourront, soit dans leur généralité , soit dans divers cas particuliers, être utiles et offrir des résultats intéressans. Par exemple, deux corps semblables, ou deux corps parfaitement égaux, quelle que soit leur position dans l'espace, forment un sys- tème de deux figures homographiques ; les propriétés générales de ces figures appartiendront donc aux deux corps. La théorie des figures homographiques conduira donc aux propriétés générales du déplace- ment fini quelconque , ou du mouvement infiniment petit d'un corps solide dans l'espace. On voit donc que cette théorie mérite d'être étudiée pour elle-même, indépendamment de ses usages pour la transformation des figures. Aussi nous comptons revenir sur cet objet. Nous nous bornerons, dans ce moment^ à faire connaître seulement deux propriétés générales des figures homographiques, qui trouveront des applications fréquentes dans diverses recherches géométriques. Elles justifieront la forme des énoncés que nous avons donnés à deux propriétés des coniques, dans nos Notes XV et XVI 5 et nous en 832 MÉMOIRE DE GÉOMÉTRIE. déduirons une propriété particulière à deux figures homographiques planes, dont nous avons fait uscige précédemment (g XVI, art. 299.) Ensuite nous appliquerons, dans le paragraphe suivant, la théorie des figures homographiques à la perspective et particulièrement à une question dont nous avons parlé au sujet de la perspective de Stévin (Note XVIII); question dont ce savant géomètre hollandais n'a résolu que des cas particuliers, et qui depuis n'a jamais reçu une solution complète. (428) Quand on prend, dans deux figures homographiques, trois droites qui se correspondent, aux points a, b,c ,d, .... de la première correspondent des points a' , b' , c' , d' , .... de la seconde; et quatre quelconques des premiers points ont leur rapport anharmonique égal à celui des quatre points qui leur correspondent. Nous dirons que les deux droites sont divisées homographiquement par les points a, b, c, .... et a', b', c', .... Pareillement aux plans A, B, C, menés par une droite de la première figure, correspondent des plans A', B', C, .... passant par la droite correspondante de la seconde figure. Et le rapport anharmo- nique de quatre quelconques des plans A, B, C, .... est égal à celui des quatre plans correspondans. Nous dirons que les premiers plans forment un faisceau et que les plans correspondans forment un second faisceau, et que ces deux faisceaux de plans sont homographiques. Si les figures étaient planes , au lieu de faisceaux de plans , nous considérerions des faiceaux de droites ; et nous dirions que deux fais- ceaux correspondans sont homographiques. Ainsi, en résumé. Deux droites sont divisées homographiquement , quand le rapport anharmonique de quatre points quelconques de la première est égal au rapport anharmonique des quatre points correspondans de la seconde; Deux faisceaux de droites , compris dans un même plan ou dans deux plans diflerens, sont homographiques , quand le rapport anharmonique de quatre droites quelconques du premier faisceau est égal au rapport anharmonique des quatre droites correspondantes du second faisceau ; MÉMOIRE DE GÉOMÉTRIE. 833 Et deux faisceaux de plans sont homographiques quand le rapport anharmonique de quatre plans quelconques du premier faisceau est égal au rapport anharmonique des quatre plans correspondans du se- cond faisceau. (429) Los deux propriétés générales du système de deux figures homographiques que nous allons démontrer sont les suivantes : Première proposition. — Quand deux droites , placées dune ma- nière quelconque dans l'espace, sont divisées homographiquement , les droites qui joignent deux à deux les points de division corres- pondans , forment un hyperboloïde à une nappe. En effet quatre points de division a, b , c, d, de la première droite, ont leur rapport anharmonique égal à celui des quatre points cor- respondans a' , b' f c', d'y de la seconde droite. Il s'ensuit (ainsi que nous l'avons démontré dans notre Note IX, page 306) que, une droite quelconque qui s'appuiera sur trois des quatre droites aa', bb' , ce', dd', s'appuiera nécessairement sur la quatrième; d'où il suit que ces quatre droites appartiennent à un hyperboloïde à une nappe. (430) Deuxième proposition. — Quand on a dans l'espace deux faisceaux de plans homographiques , les droites suivant lesquelles se coupent deux à deux les plans correspondans, forment un hy- perboloïde à une nappe. Cette proposition résulte directement de la précédente; car soient L, L', les axes des deux faisceaux; A, B, C, D, .... les plans du pre- mier faisceau, et A', B', C, D', .... les plans correspondans du se- cond; les plans A, B, C, D, .... rencontreront la droite L' en des points a, b, c, d, ; et les plans A', B', C', D', rencontreront la droite L en des points a', b', c', d' Les quatre points a, b , c, f/, ont leur rapport anharmonique égal à celui des quatre plans A, B, C, D; les quatre points a', b', c', d', ont leur rapport anharmonique égal à celui des quatre plans A', B', C, D'. Mais par hypothèse le rapport anharmonique de ces quatre plans est égal à celui des quatre plans correspondans A, B, C, D. Donc le rapport anharmonique des quatrepoints a, b, c, d, est égal à celui des quatre points a', b', c', d'. 834 MEMOIRE DE GEOMETRIE. Donc les quatre droites aa' , bb', ce', dâl , appartiennent à un hyper- boloïde à une nappe. Or la droite aa' est l'intersection des deux plans A, A'; bb' est l'intersection des deux plans B, B', et ainsi des autres; donc, etc. (431) Les deux propositions précédentes ont leurs analogues dans la géométrie plane, et celles-ci exigent des démonstrations particulières. Première proposition. — Quand deux droites situées dans un même plan sont divisées homographiquement , les droites qui joignent deux à deux les points de division correspondans , enveloppent une coni- que qui est tangente aux deux droites proposées. Cela résulte évidemment de la propriété anharmonique des tangentes d'une conique, que nous avons démontrée dans la Note XVI. (432) Deuxième proposition. — Quand on a dans un plan deux faisceaux homographiques , les droites de l'un rencontrent respec- tivement les droites correspondantes de Vautre en des points situés sur une conique qui passe par les centres des deux faisceaux. Cela résulte de la propriété anharmonique des points d'une conique, démontrée dans notre Note XV. (433) Cette proposition et la précédente conduisent à une propriété remarquable du système de deux figures homographiques situées dans un même plan, dont voici l'énoncé : Quelle que soit la position de deux figures homographiques dans un même plan, il existe généralement trois points qui, considérés comme appartenant à la première figure , sont eux-mêmes leurs ho- mologues dans la seconde ; et trois droites qui, considérées comme appartenant à la première figure, sont elles-mêmes leurs homologues dans la seconde ; Deux des trois points peuvent être imaginaires , le troisième est toujours réel; Et deux des trois droites peuvent être imaginaires , et la troisième est toujours réelle '. ' C'est cette proposition dont nous avons fait usage dans un paragraphe précédent (art. 299 ). MÉMOIRE DE GÉOMÉTRIE. 833 Il est évident que quand les trois points sont réels, les trois droites sont précisément celles qui joignent deux à deux ces trois points. Pour démontrer le théorème , concevons dans les deux figures deux faisceaux correspondans dont les centres soient O, O'; les droites de l'un rencontreront respectivement les droites correspondantes de l'au- tre en des points situés sur une conique. Pour deux autres faisceaux ayant leurs centres en deux points correspondans û, Q', on aura pa- reillement une seconde conique. Les deux coniques passeront évi- demment par le point d'intersection des deux droites Où, O'û'; parce que ces deux droites sont des rayons correspondans dans les premiers faisceaux, ainsi que dans les deux autres. Soient A, B, C, les trois autres points d'intersection des deux coniques ; je dis que chacun de ces points, considéré comme appartenant à l'une des deux figures, est lui-même son homologue dans l'autre. En effet, les deux droites O'A, û'Ade la seconde figure correspondent respectivement aux deux droites OA, ûA de la première; donc le point d'intersection des deux premières correspond au point d'intersection des deux autres; c'est- à-dire que le point A, considéré comme appartenant à l'une des deux figures, est lui-même son homologue dans l'autre. Maintenant , les deux coniques ayant toujours un point d'intersec- tion réel, qui est le point de concours des deux droites Où, O'û', elles auront toujours un second point d'intersection réel; donc l'un des trois points A, B, C, est toujours réel. Quand les trois points A, B, C, sont réels , chacune des trois droites AB, BC, CA, considérée comme appartenant à l'une des deux figures, est évidemment sa correspondante dans l'autre figure ; de sorte qu'on peut dire que dans deux figures homographiques situées dans un même plan , il existe , généralement , trois droites dont chacune est elle-même son homologue dans les deux figures; et de là on peut conclure que de ces trois droites l'une et toujours réelle, parce qu'une question qui admet trois solutions en a toujours une réelle ; mais on démontrera cela directement, par un raisonnement analogue à celui que nous avons fait pour démontrer la réalité d'un des trois points. Au lieu de 836 MÉMOIRE DE GÉOMÉTRIE. prendre des faisceaux correspondans, on prendra des droites divisées homographiquement, et l'on considérera les coniques enveloppées par les droites joignant les points de division correspondans. Cette dé- monstration est sans difficulté d'après ce qui précède. Ainsi le théorème est démontré dans toutes ses parties. (434) Quand on sait à priori que deux des trois point A, B, C, sont réels, on en conclut que le troisième est réel aussi, parce qu'alors les deux coniques qui servent à déterminer ces points ont trois points d'intersection réels, et par conséquent ont leur quatrième point d'in- tersection réel aussi. Pareillement quand deux des trois droites en question sont réelles, la troisième est nécessairement réelle aussi. § XXVI. Application de la théorie des figures homographiques à la perspective ût à la construction des bas-reliefs. (435) Une figure plane et sa perspective sur un plan sont deux figures homographiques; car elles satisfont à la condition constitu- tive des figures homographiques, savoir que, à chaque point et à chaque droite de l'une , correspondent un point et une droite dans Vautre. Il suit de là que les relations générales, descriptives et métriques, de deux figures homographiques, et les propriétés qui en dérivent, s'appliquent à deux figures planes qui sont la perspective l'une de l'autre. De ces propriétés, on n'a considéré, généralement, que celles qui sont purement descriptives; et c'est sur elles qu'ont reposé la plupart des applications que l'on a faites de la perspective en géométrie spécu- lative, depuis que Desargues et Pascal, il y a deux cents ans, ont in- troduit cette méthode dans la théorie des coniques. En fait de relations métriques, on s'est borné généralement aux relations harmoniques; et quoique Pascal, dans son Essai pour les coniques , ait mis au nombre MÉMOIRE DE GÉOMÉTRIE. 837 des propositions principales qui lui servaient dans son traité complet de ces courbes, la propriété que nous appelons égalité des rapports anharmoniques de deux groupes de quatre points correspondans , on n'a pas tiré de cette proposition, si simple et si féconde, tout le secours qu'elle pouvait apporter dans les applications de la perspec- tive en géométrie rationnelle. Aussi ces applications nous paraissent n'avoir pas reçu tout le développement dont elles étaient susceptibles. L'élément le plus important et le plus indispensable en géométrie, les relations métriques, manquaient à cette théorie. Ces relations métriques sont les mômes que celles que nous avons démontrées pour les figures homographiques les plus générales. Elles dérivent, comme celles-là, de l'égalité des rapports anharmoniques de deux groupes de quatre points correspondans. Nous allons les re- produire ici, en adaptant leur énoncé aux figures particulières que l'on a à considérer dans la perspective. (436) 1" Quand deux figures planes sont la perspective tune de Vautre , le rapport des distances dune droite quetcofique de la pre- mière à deux points fixes de cette figure, est au rapport des distances de la droite correspondante dans la seconde aux deux points cor- respondans à ces deux points fixes, dans une raison constante. (437) 2» Quand deux figures planes sont la perspective Pune de l'autre, le rapport des distances dun point quelconque de la pre- mière à deux droites fixes de cette figure , est au rapport des distances du point homologue de la seconde , aux deux droites cor- respondantes, dans une raison constante. (438) Dans ce second principe, une droite de chacune des deux figures peut être située à Tinfini; ce qui donne lieu aux deux corol- laires suivans qui seront utiles dans beaucoup de questions : Premier corollaire. — Quand deux figures planes sont la perspec- tive Vune de VatUre, la distance d'un point quelconque de la pre- mière à une droite fixe prise dans le plan de cette figure , est dans une raison constante avec le rapport des distances du point homo- logue de la seconde figure à deux droites fixes, dont la première ToM. XI. 106 038 MÉMOIRE DE GEOMETRIE. correspond à la droite prise dans le plan de la première figure, et la seconde est Fintersection du plan de la seconde figure par le plan mené par V œil parallèlement à celui de la première figure. (439) Deuxième corollaire. — Quand deux figures planes sont la perspective tune de l'autre , si l'on mène dans le plan de la première la droite correspondante à l'infini de la seconde (c'est-à-dire la droite qui est l'intersection du plan de la première figure par le plan mené par l'œil parallèlement à celui de la seconde), et dans le plan de la seconde figure la droite qui correspond à Tinfini de la première, les distances de deux points homologues quelconques des deux figures à ces deux droites, respectivement, auront leur produit con- stant. (440) Ces théorèmes, qu'on n'avait pas encore donnés, je crois, permettront d'appliquer les principes de la perspective dans beaucoup de questions où l'on n'a point encore songé à en faire usage. Par exemple, on généralisera les propriétés des diamètres conjugués, et celles des foyers des sections coniques, comme nous avons fait à l'égard des surfaces du second degré par la théorie des figures ho- mographiques. Mais il est inutile d'entrer dans plus de développemens à ce sujet. Passons à d'autres rapprochemens entre la théorie de la perspective et celle des figures homographiques. \ ; (441) Puisqu'une figure plane et sa perspective sur un plan sont deux figures homographiques, on doit se demander si, réciproque- ment, deux figures planes homographiques quelconques peuvent tou- jours être considérées comme la perspective l'une de l'autre; ou, en d'autres termes , si deux figures planes homographiques quelconques peuvent toujours être placées sur une même surface conique. Si cela est, on conçoit que le problème de la perspective d'une figure plane sera réduit à une question de simple géométrie plane, sans considération aucune de géométrie à trois dimensions , savoir, de con- struire la figure homographique d'une figure donnée, qui satisfasse à certaines conditions de forme et de position. MÉMOIRE DE GÉOMÉTRIE. 839 Il est donc important de résoudre la question que nous venons de poser. , tt (442) Pour parvenir à sa solution, remarquons qu'une figure homo- graphique d'une figure proposée sera parfaitement déterminée si l'on connaît quatre points qui doivent correspondre , un à un , à quatre points de la figure proposée; de sorte que la question se réduit à celle-ci : Étant donnés deux quadrilatères plans , dont les sommets de l'un correspondetit , un à un, aux sommets de l'autre , on demande de les placer dans l'espace de manière quHls soient la perpsectioe l'un de Vautre. Il est clair que, dans cette position, les quatre côtés du premier quadrilatère rencontreront respectivement les quatre côtés correspon- dans du second quadrilatère en quatre points qui seront sur une même droite qui sera l'intersection des plans des deux figures. Et l'on sait que si autour de cette droite on fait tourner le plan d'une des deux figures, pour l'appliquer sur l'autre , les deux figures se trouveront, sur ce plan, dans les mêmes conditions que dans l'espace, c'est-à-dire que les droites joignant les sommets du premier quadrilatère, respectivement aux sommets correspondans du second, concourront encore en un même point. (C'est un des théorèmes de Desargues. Voir deuxième Epoque, § 28.) (443) D'après cela, le problème se ramène à cette question de géométrie plane : Étant donnés, dans un plan deux quadrilatères quelconques dont les sommets de lun correspondent un à un aux sommets de l'autre , on demande de les placer, dans leur plan, de manière, l"^ Que les droites joignant les sommets de lun aux sommets cor- respondans de l autre, concourrent en un même point ; Et 2° que les côtés correspondans se rencontrent un à un en quatre points situés en ligne droite. Solution. On regardera les quatre sommets a, b, c, d, du premier quadrilatère, comme appartenant à une première figure quelconque. 840 MEMOIRE DE GEOMETRIE. et les quatre sommets a', b', c' , dl du second, comme appartenant à une seconde figure qui doit être homographique à la première. Nous savons construire cette seconde figuré; c'est-à-dire que nous savons trouver tous ses points correspondans à des points donnés de la pre- mière; et réciproquement nous savons déterminer à quels points de la première figure correspondent des points désignés de la seconde. La construction des points des deux figures sert à déterminer leurs droites correspondantes {§ XV, art. 272). On cherchera la droite I qui dans la première figure correspond à l'infini de la seconde; et la droite J' qui dans la seconde figure cor- respond à l'infini de la première. On placera les deux figures de manière que les deux droites \, i' soient parallèles entre elles. Le côté ab de la première figure ren- contre la droite I en un point e qui correspond au point e' situé à l'infini, dans la seconde figure, sur la droite a'b'. A une droite quel- conque eg menée par ce point e, correspondra dans la seconde figure une droite e'g' parallèle à la droite a'b'. Menons eg parallèle, elle- même, à la droite a'b', et supposons qu'on ait déterminé la droite e'g' qui lui correspond. Pareillement, par le point f où le côté cd rencontre la droite I, menons une parallèle fli à la droite c'd' , et soit fh' la droite corres- pondante dans la seconde figure (le point f étant à l'infini). Les deux droites eg , fh se rencontreront en un point S , et les deux droites e'g', fh' se rencontreront en un second point S'. On placera les deux figures de manière que les deux angles eS/*, e'S'f , qui sont égaux, soient superposés l'un sur l'autre; et le pro- blème sera résolu. Démonstration. Remarquons d'abord que les deux droites I , J', dans cette position des figures, seront encore parallèles entre elles; ce qui est évident. Maintenant, les deux droites Se , S/" de la première figure, ont pour correspondantes, dans la seconde, les deux droites S'e', S'/'/ les points S et S' se correspondent donc. Par conséquent , quand l'angle e'S'f est MEMOIRE DE GÉOMÉTRIE. 8 il superposé sur l'angle eSf, le point S est lui-môme son correspondant dans la seconde figure ; et les droites Se, S/* sont elles-mêmes aussi leurs correspondantes dans la seconde figure. Il existe donc une troisième droite qui est elle - même sa correspondante dans les deux figures ( § précédent art. 434). Le point situé à l'infini sur la droite I, considéré comme apparte- nant à la première figure, est à l'intersection de la droite I et de la droite située à l'infini ; son homologue est donc , dans la seconde fi- gure, à l'intersection de la droite située à l'infini et de la droite J'; c'est-à-dire que ce point est lui-même son homologue dans les deux figures. Par conséquent la droite Si, menée par le point S , parallèle- ment aux droites I, J' est elle-même son homologue dans les deux figures, de même que les deux droites Se, S/! Il suit de là qu'une quatrième droite quelconque Sk sera aussi son homologue dans les deux figures, parce que les quatre droites Se, Sf, Si, Sk, con- sidérées comme appartenant à la première figure, ont leur rapport enharmonique égal à celui des quatre droites correspondantes dans la seconde figure. Les trois premières de celles-ci sont Se, S/" et St elles-mêmes, la quatrième est donc aussi la quatrième du premier groupe. Il suit de là que deux points homologues quelconques a, a', des deux figures , sont en ligne droite avec le point S ; ce qui est l'une des deux conditions du problème. Il reste à prouver que deux droites homologues quelconques se ren- contrent sur une droite fixe. Soit E le point de rencontre de deux droites homologues ab, a'b'; si on considère ce point comme appartenant à la première figure, son homologue sera sur la droite SE et sur la droite a'b'j ce sera donc le point E lui-même. Soient s et y' les points où la droite SE rencontre les deux droites I et J'. Considérons sur la droite SE les quatre points de la première figure qui sont S, s, E et l'infini, et les quatre points homologues de la seconde figure, lesquels sont S, l'infini, E et y'. Éga- lant le rapport anharmoniquc des quatre premiers points à celui des 842 MEMOIRE DE GEOMETRIE. quatre autres, on a ES ES Ef j)'S d'où Ee = y'S. Cette équation fait voir que le point E est sur une droite parallèle aux deux droites I, J', et distante de la première I d'une quantité égale à la distance du point S à la seconde J'. C'est sur cette droite que se couperont, deux à deux, toutes les droites correspondantes des deux figures. Ainsi la seconde condition de la question sera remplie. Ce qu'il fallait prouver. (444) Maintenant si l'on veut placer les deux figures dans l'espace, de manière qu'elles soient la perspective l'une de l'autre , il suffira de faire tourner l'une d'elles, la seconde par exemple, autour de la droite sur laquelle se coupent les droites correspondantes. Pour chaque po- sition de cette figure il y aura perspective : le lieu de l'œil variera de position; et l'on démontre aisément, par des comparaisons de triangles semblables, que, dans toutes ses positions, l'œil se trouve toujours sur une circonférence de cercle, dont le centre est sur la droite I, et dont le plan est perpendiculaire à cette droite. Quand le plan de la seconde figure aura fait une demi-révolution complète, il se re- trouvera abattu sur le plan de la première figure. Cette position des deux figures, comprises encore dans un même plan, présentera une seconde solution de la question que nous avons résolue, de placer deux quadrilatères dans un même plan, de manière, etc. Nous aurions pu obtenir directement cette seconde solution, comme la première ; mais pour cela il aurait fallu retourner le plan du second quadrilatère et l'appliquer de nouveau sur celui du premier. (445) Puisque deux quadrilatères dont les sommets se correspon- dent un à un peuvent être mis en perspective, on en conclut que deucû figures planes homographiques quelconques peuvent être placées de manière à être la perspective l'une de l'autre. (446) // suit de là que deux figures qui sont des perspectives dif- MEMOIRE DE GÉOMÉTRIE. 843 fàr&ntes dune même figure plane, peuvent être placées de manière à être la perspective lune de Vautre. Ou , en d'autres termes : Quand deux cônes passent par une même courbe plane, de quelque manière qu'on les coupe respectivement par deux plans, les deux courbes d'intersection pourront être placées sur un troisième cône. Donc, si l'on fuit la perspective B d'une figure plane A, puis la perspective C de la figure B , puis la perspective D de la figure C , et ainsi de suite, toutes ces perspectives étant faites sur des plans quel- conques et pour des positions différentes de l'œil, la dernière figure pourra être produite directement par une perspective de la première. (447) Le problème que nous avons résolu au sujet de deux qua- drilatères plans donne lieu naturellement à cette autre question : Étant donnés deux pentagones gauches quelconques, dont les som- mets de l'un correspondent un à un aux sommets de Vautre, peut-on les placer dans Vespace de manière que leurs sommets correspon- dans soient sur des droites concourantes en un même point, et que leurs côtés correspondans se coupent en des points situés sur un même plan? Le premier pentagone étant regardé comme appartenant à une figure quelconque , le second déterminera une figure homographique ; la question revient donc à celle-ci : Deux figures homographique s quelconques à trois dimensions peu- vent-elles être placées de manière à être homologiques 9 j ; La réponse à cette question est négative, ainsi que nous allons le démontrer. Que l'on cherche dans la première figure le plan I qui correspond à l'infini de la seconde ; et dans celle-ci le plan J' qui correspond à l'infini de la première. Que par un point m de la première figure on mène une droite ma parallèle au plan I; et qu'on cherche la droite homologue m'a' de la seconde figure ; elle sera parallèle au plan J' ; car le point «' où elle rencontrera ce plan correspondra au point « situé à l'infini sur la 844 MEMOIRE DE GEOMETRIE. droite ma de la première figure ; mais ce point a. situé à l'infini est sur le plan I, puisque ma est parallèle à ce plan ; donc son correspondant a' dans la seconde figure est à l'infini. Donc la droite m'a' est parallèle au plan J'. Ainsi toutes les droites ma,mb , me,... menées par le point m parallèlement au plan I, ont leurs homologues m'a', m'b', m'c',...., parallèles au plan J'. Si les deux figures étaient placées homologique- ment, les deux plans I, J' seraient parallèles entre eux, et les droites ma, mb , me,.. . seraient parallèles respectivement aux droites m'a', m'b' , m'e' ,.... Or, on peut bien placer les deux figures de manière que les deux plans I , J' soient parallèles entre eux, et que deux droites correspondantes ma, în'a' soient parallèles entre elles; alors deux autres droites correspondantes mb, mb" seront aussi parallèles entre elles; mais aucune des autres droites me, md,.... de la première figure, ne sera, en général, parallèle à sa correspondante. En effet , prenons deux figures homographiques quelconques , pla- çons-les de manière qu'une droite quelconque ab de la première coïn- cide avec son homologue a'b' dans la seconde, et de plus que les deux points correspondans a, a' coïncident; il existera sur ces droites un second point b qui coïncidera avec son homologue b' ; et il n'en existera pas un troisième, sans quoi les deux droites seraient divisées en parties égales ' ; ce qui est un cas particulier de la division homo - graphique de deux droites. ' En efiTet soit i le point de la droite ab qui correspond à l'infini de la droite a'b', et soit/ le point de celle-ci qui correspond à l'infini de la première ; considérons sur ab les quatres points a, b, i, et l'infini, et sur a'b' les quatre points correspondans, a', (ou a, puisque ces deux points sont superposés), b', l'infini , et j'; égalons les rapports anharmoniques de ces deux grou- pes de quatre points ; on aura ba b'a bi j'a Cette équation fait voir que si l'on veut que les points b et b' coïncident , il faudra qu'on ait bi =j'a ; condition qui détermine la position commune des points b, b'. Les deux points a', b' , coïncidant avec leurs homologues a, b, deux autres points homologues c, c', ne peuvent pas coïncider, à moins qu'il n'en soit de même de tous les autres points d, d', etc. Car si les quatre points a,b, c, d, correspondent respectivement aux quatre points a, b, c, d', en égalant les rapports anharmoniques , on trouve que les points d, d', coïncident. MÉMOIRE DE GÉOMÉTRIE. 845 Supposons donc les deux points a, b, de la première droite super- posés sur les deux points a', b', de la seconde. Soient m, m', deux points homologues quelconques des deux figures ; menons du premier, aux points a,by c,.... de la première droite, les rayons ma, mb, me,...., et du second, aux points correspondans de la seconde droite, les rayons m'a', m'A', m'c',.... Menons par la droite ab {a'b') un plan transversal quelconque; regardons-le comme appartenant à la pre- mière figure et soit Q' son homologue dans la seconde; puis, regar- dons-le comme appartenant à la seconde figure et soit P son homo- logue dans la première. Maintenant faisons la transformation homographique du système des deux figures, de manière que le plan transversal passe à l'infini, c'est-à-dire que son homologue dans les nouvelles figures soit à l'in- fini, les deux plans P, Q', deviendront parallèles entre eux; ce seront les deux plans que nous avons désignés ci-dessus par I et J'. Les droites ma, mb deviendront parallèles respectivement aux droites m'a', m'b'; mais les autres droites, me, md,.... ne deviendront pas parallèles à leurs correspondantes. Les deux figures ne seront donc pas homolo- giques. (448) Ainsi nous pouvons dire que : Deux figures homographiques à trois dimensions ne peuvent pas , en général, être placées de manière à être homologiques. Il suit de là que les figures homographiques sont d'une forme plus générale que les figures homologiques. (449) Toutes les propriétés des figures homographiques s'appli- quent aux figures homologiques; conséquemment elles doivent s'ob- server dans la construction des bas- reliefs. Ainsi les diverses relations métriques qui existent entre deux figures homographiques, ont lieu aussi entre une figure à trois dimensions et sa perspective-relief, de même qu'entre une figure plane et sa perspective sur un plan. Et si , au lieu de supposer qu'un relief est fait pour une position unique de l'œil, de même qu'une perspective plane, on le considère plus géné- lement, comme une représentation dun objet, dans laquelle des ToM. XI. 107 846 MEMOIRE DE GÉOMÉTRIE. points correspondent à des points et des surfaces planes à des sur- faces planes , alors la théorie des reliefs ne serait autre que la théorie générale des figures homographiques ; il y aurait simplement à pres- crire certaines règles générales à observer dans la disposition des données de la question pour produire, selon la destination du relief, la plus parfaite illusion pour telle et telle place du spectateur. Mais ces règles d'ordonnance ne pourraient point être absolues, et dépen- draient dans chaque question de l'expérience et du sentiment de l'ar- tiste; après quoi il resterait à construire géométriquement le relief, considéré comme figure homographique de l'objet qu'on veut repré- senter. $ XXVII. Note ($ XI, art. 228). Construction graphique des tan- gentes et des cercles oscillateurs des courbes géométriques. (450) Que l'on applique le théorème du $ XI à une courbe plane géométrique; et que l'on prenne le point m infiniment voisin du point de la courbe où l'on veut mener la tangente ; que les trois trans- versales mi, mj, ij, soient menées tout-à-fait arbitrairement; et que les points a, b, soient ceux où les deux premières rencontrent l'arc de la courbe duquel le point 7n est infiniment voisin ; cet arc sera pris pour la tangente, et le rapport '^ sera égal au rapport des sinus des angles que les deux droites mj, mi font avec cette tangente; après avoir rem- placé le premier rapport par le second, on pourra supposer que le point m soit sur la courbe même 5 alors, en substituant dans l'équa- tion de l'art. 227, au rapport ^ le rapport des sinus des angles S, «, que les deux droites mj , mi font avec la tangente à la courbe au point m, on aura l'équation sin. S mb' . mh" .... im.ia' .ia" .... je. je', je" .... ___ w __^ w .f o J ^ sin. a ma'. ma"..,. jm.jb'.jb".... ic.ic'.ic" Tous les facteurs du second membre sont des segmens faits sur les MÉMOIRE DE GÉOMÉTRIE. 847 trois transversales arbitraires mi, mj , ij, de sorte que le second membre est connu j et conséquemment la direction de la tangente est déterminée. Ainsi ce problème des tangentes, qui a eu une si grande célébrité il y a 200 ans, qui était (t le plus beau et le plus utile » que Descartes ait désiré savoir, se trouve résolu géométriquement, d'une manière tout-à-fait générale et très-simple, pour les courbes même auxquelles s'appliquaient les deux solutions analytiques de ce philosophe. Si l'on applique l'analyse à cette solution , on obtiendra la formule employée en géométrie analytique. (451) L'équation (2) conduit avec la même facilité à la solution^ d'un problème d'un ordre plus élevé que celui des tangentes, du pro- blème des cercles osculafeurs aux différens points d'une courbe géométrique. En effet, soient pris sur une courbe géométrique trois points con- sécutifs A, a, b', infiniment voisins. Par le point a soit menée, ar- bitrairement, une droite rencontrant bb' en m et la courbe aux points a', a", Soient b", b'",... les points où la corde bb' rencontre la courbe ; et menons une transversale quelconque qui rencontrera ma en î, mb enj, et la courbe en c, c', c".... On aura l'équation jb. ib'. jb" ic.ic'.ic" X , „ ,„ X ■ ., ■„ = 1. art. (227). mb. mb , mb 3^'J^-J'' Concevons le cercle qui passe par les trois points b ^a, h' ; et soit e le point où la droite ma le rencontre, on aura ma. me = mb, mb' d'où mb. mb' ma. ma'. , ma" ta. ta'. ta" et d'après l'équation ci-dessus, ma', ma".... ib. ib'. ib". •«' = 77. X . . , . „ X - mb".,., ta, ta', ta".... je. je', je".,.. Pour chaque transversale menée par le point a on aura une équation 848 MEMOIRE DE GEOMETRIE. semblable. Ainsi l'on déterminera autant de points qu'on voudra du cercle passant par les trois points b, a, b'. Et si l'on suppose que ces trois points se confondent, on aura le cercle osculateur à la courbe. Alors la droite bb' devient la tangente à la courbe au point w, et ce point m se confond avec le point de réunion des trois points b, a, b' ; la formule devient donc ma'. ma".... itn.ib".... icic'.ic" .... mi = — X .' . r . „ X im.ia . ta .... jc.jc.jc .... La tangente au point m étant connue, il suffira de déterminer un seul point e, pour que le cercle osculateur soit connu. Si l'on veut calculer son diamètre , on mènera la transversale mi perpendiculaire à la tangente ; alors l'expression de me sera la longueur du diamètre du cercle. On convertira aisément cette solution graphique en la formule analytique connue. (452) Il est important d'observer que pour ce genre de solution graphique des deux problèmes que nous venons de résoudre, il faut que la courbe soit tracée complètement , de manière que les transver- sales que l'on mène la rencontrent en autant de points réels que la courbe en comporte, c'est-à-dire, en autant de points réels qu'il serait indiqué par le degré de l'équation de la courbe, exprimée dans le système de coordonnées en usage. FI!V. ^^^\v^vvv\^^^lvvvvvv\^^/vvvvvvvvvv\vvvvv\^^^^lvvv\^A^(vvv^^ TABLE DES MATIÈRES COKTEKCES DANS LE MÉMOIRE DE GÉOMÉTRIE. PREMIÈRE PARTIE. P»ge». Principe de Dcalitê 57S Paragraphe I. Deux méthodes à suivre Ib. — II. Méthode analytique; propositions préliminaires 577 -f- m. Démonstration du principe de dualité S86 ' ; ■— IV. Applications du principe de dualité aux propriétés descriptives des figures o91 — V. Applications du principe de dualité aux propriétés métriques des figures. 595 — VI. Sur les pôles et les plans polaires des surfaces du second degré . . . 596 — VU. Généralisation du théorème sur la proportionnalité des rayons homolo- gues dans deux figures homothétiques. — Construction nouvelle des bas-reliefs 597 — VIII. Relations descriptives et métriques de deux surfaces du second degré inscrites dans un cône ; et de deux coniques quelconques situées dans un même plan 600 — IX. Transformation de diverses propriétés des diamètres conjugués des sur- faces du second degré. — Théorie des axes conjugués relatifs à un point 602 — X. Suite du précédent. — Propriétés plus générales des systèmes de trois axes conjugués relatifs à un point 60G — XI. Autres propriétés des systèmes de trois axes conjugués relatifs à un point. — Réflexions sur les méthodes de transformation .... 609 — XII. Transformation des propriétés du centre des moyennes distances d'un système de points. — Centre des moyennes harmoniques .... 616 850 TABLE DES MATIERES. Pages. Paragraphe XIII. Théorème de Newton sur les diamètres des courbes. — Propriétés nou- velles des surfaces géométriques 622 — XIV. Propriété du quadrilatère gauche; double génération de l'hyperboloïde à une nappe , par une ligne droite mobile 625 — XV. Transformation des propriétés générales des surfaces géométriques rap- portées à trois axes coordonnés 627 — XVI. Nouvelle méthode de géométrie analytique 6iS — XVII. Suite du précédent. — Applications du nouveau système de géométrie analytique 636 — XVIII. Construction analytique des figures corrélatives 639 — XIX. — géométrique des figures corrélatives 643 — XX. Suite du précédent. — Discussion des formules pour la construction géométrique des figures corrélatives. — Divers théorèmes de géomé- trie qui s'en déduisent. — Généralisation d'un porisme d'Euclide. . 647 — XXI. Différentes méthodes particulières pour former des figures corrélatives. 636 — XXII. Méthode des polaires réciproques. — Réflexions sur la transformation des relations métriques 637 — XXIII. Autre méthode tirée de la considération des surfaces du second degré , et plus générale que celle des polaires réciproques. — Applications de cette méthode 662 — XXIV. Autres modes de construction des figures corrélatives : — Par le dépla- cement fini ou infiniment petit d'un corps solide libre dans l'espace ; — Par la considération d'un système de forces appliquées à un corps solide libre 674 — XXV. Caractères particuliers de divers modes de construction des figures cor- rélatives 680 — XXVI. Note sur une propriété générale des surfaces du second degré . . . 687 DEUXIÈME PARTIE. Principe d'Homographie 69S I. Démonstration du principe d'homographie Jb. II. Applications du principe d'homographie. — Pôles et plans polaires dans les surfaces du second degré. — Axes conjugués relatifs à un point. 702 III. Lieu géométrique du point de rencontre de trois plans tangens à une surface du second degré , assujettis à certaine condition 70-4 IV. Propriétés des systèmes de trois axes conjugués d'une surface du second degré, relatifs à un point 708 V. Autres propriétés des systèmes de trois axes conjugués d'une surface du second degré, relatifs à un point 710 TABLE DES MATIÈRES. 851 Pakagraphe. VI. Propriété très-générale des systèmes de trois axes conjugués relatifs à un point, de laquelle les autres se déduisent 711 — VII. Propriété du centre des moyennes harmoniques d'un système de points dans l'espace 712 — VIII. Autres propriétés du centre des moyennes harmoniques d'un système de points 718 — IX. Propriété du centre des moyennes harmoniques d'un système de points qui se meuvent dans l'espace 720 — X. Propriétés nouvelles des surfaces géométriques 722 — XI. Généralisation du théorème de Newton sur le rapport constant du pro- duit des abscisses au produit des appliquées , dans les courbes géo- métriques 72.5 — Xll. Généralisation des propriétés des surfaces géométriques rapportées à trois aies coordonnés. — Théorèmes très-généraux 728 — Xlll. Généralisation du système de coordonnées en usage 739 — XIV. Démonstration géométrique de trois propriétés générales des surfaces du second degré 745 — XV. Construction géométrique des figures homographiques. — Divers théo- rèmes de géométrie 734 — XVI. Construction analytique des figures homographiques 764 — XVII. Théorie des figures homologiques. — Leur construction 773 — XVlll. Applications de la théorie des figures homologiques. — Propriétés géné- rales des surfaces géométriques 779 — XIX. Surfaces du second degré homologiques. — Propriété fondamentale des systèmes de trois axes conjugués relatifs à un point 783 — XX. Propriétés générales , nouvelles , des surfaces du second degré . . . 794 — XXI. Propriétés nouvelles des surfaces du second degré de révolution , et des cônes du second degré 799 — XXll. Méthode pour les relations angulaires. — Transformation de la sphère en un sphéroïde aplati 80a — XXIII. Méthode propre pour toutes sortes de relations, de longueurs, d'aires et de volumes 811 — XXIV. Suite du précédent. — Démonstration géométrique des diverses pro- priétés des diamètres conjugués d'une surface du second degré . . 823 — XXV. Réflexions sur la théorie des figures homographiques. — Démonstration de quelques-unes de leurs propriétés 881 — XXVI. Application de la théorie des figures homographiques à la perspective et à la construction des bas-reliefs 836 — XXVII. Note (§ XI , art. 228). Construction graphique des tangentes et des cer- cles osculateurs des courbes géométriques 846 VIN Dl lA TABLK. 1^ c- < — Q-