BULLETINS L'ACADÉMIE ROYALE DES SCIENCES, DES LETTRES ET DES BEAUX-ARTS DE BELGIQUE AA ARTE ab Zen #7 BET e? BULLETINS H } DE vz d LL L'ACADÉMIE ROYALE SCIENCES, DES LETTRES ET DES BEAUX-ARTS DE BELGIQUE, QUARANTE-TROISIÈME ANNÉE. — Ze SÉR., T. XXXVII. Mo. Bot. Garden, 1896. BRUXELLES, F. HAYEZ, IMPRIMEUR DE L'ACADÉMIE ROYALE DE BELGIQUE. 1874 BULLETIN DE L'ACADÉMIE ROYALE DES SCIENCES, DES LETTRES ET DES BEAUX-ARTS DE BELGIQUE. 1874. — No. me mem CLASSE DES SCIENCES. Séance du 10 janvier 1874. M. Tu. Cer, directeur pour 1875. M. An. Quereer, secrétaire perpétuel. Sont présents : MM. J.-B. d'Omalius d'Halloy, J.-S. Stas, L. de Koninck, P.-J. Van Beneden, Edm. de Selys Long- champs, H. Nyst, Melsens, J. Liagre, F. Duprez, G. De- walque , Ernest Quetelet, H. Maus, M. Gloesener, E. Can- dèze, F. Donny, Ch. Montigny, Steichen, Brialmont, E. Dupont, Éd. Morren, Éd. Van Beneden, C. Malaise, membres; Th. Schwann, E. Catalan, A. Bellvnck, asso- ciés; Éd. Mailly, Alph. Briart, F. Folie, J. De Tilly, S F. Crépin et F.-L. Cornet, correspondants. Me SÉRIE, TOME XXXVII. 1 Qu VOLS ENGA S PR NET SREL (2) CORRESPONDANCE. M. le Ministre de l’intérieur transmet une expédition d’un arrêté royal du 9 décembre dernier, nommant MM. Cata- lan, de Koninck, Liagre , Maus, Montigny, E. Quetelet et Valérius membres du jury chargé de juger la 5° période du concours quinquennal des sciences physiques et mathé- matiques. — Le même haut fonctionnaire envoie une ampliation d’un arrêté royal du 31 décembre dernier, approuvant l'élection de M. Constantin Malaise, en qualité de membre titulaire de la classe. MM. Malaise, F.-L. Cornet, de Colnet d'Huart et Henri Sainte-Claire-Deville, nouvellement élus, remercient pour la distinction dont ils ont été l'objet. — La classe apprend avec un vif sentiment de regret la mort de M. Louis Agassiz, l’un de ses associés les plus éminents de la section des sciences naturelles, décédé à Cambridge (Massachusetts) le 14 décembre 1873. — La famille de feu Aug. de La Rive, de Genève, fait officiellement part de la perte cruelle qu’elle a éprouvée. — M. le professeur Axelkey, de Stockholm, demande l'échange de sa revue : Nordiskt Medicinskt, avec le Bul- letin. — Accepté. — M. J. Plateau adresse, à titre d'hommage, un exem- plaire de son ouvrage imprimé portant pour titre : Statique (5) expérimentale et théorique des liquides soumis aux seules forces moléculaires. Gand, 1873; 2 vol. in-8°. — Des remerciments sont votés à cet honorable académicien. — M. le secrétaire perpétuel présente, pour le Recueil des phénomènes périodiques : 1° le résumé des observa- tions météorologiques faites à l'Observatoire de Bruxelles en 1875; 2° le même résumé pour Liége, communiqué par M. D. Leclercq; 5° pour Chimai, par M. Christ; 4° les observations zoologiques faites à Melle pendant la même année, par M. Bernardin et à Ostende par M. Lanszweert; le résumé météorologique pour Ostende, pendant le mois de décembre 1875, par M. Cavalier. — L'Université de Gratz, l'Académie royale des sciences de Hongrie à Pesth, la Société royale des sciences et belles- lettres de Gothembourg, la Société royale des sciences d'Upsal, la Bibliothèque publique de Melbourne et l'Obser- valoire impérial de Pulkowa, remercient pour le dernier envoi de publications académiques. — M. le secrétaire perpétuel dépose sur le bureau PAn- nuaire de l'Académie pour 1874. Ce volume renferme, en ce qui concerne la classe des sciences, des notices sur Spring (avec portrait), Wesmael {avec portrait) et Maury, par MM. Schwann , de Selys Longchamps et Ad. Quetelet. ÉLECTION. La classe procède à l'élection du directeur pour 1875 : les suffrages se portent sur M. Brialmont. M. Gluge, directeur sortant, exprime à la classe sés ES? remerciments pour l'honneur d’avoir été appelé à diriger ses travaux, ainsi que pour le bienveillant concours qu'il a reçu de ses confrères pendant l'exercice de ses fonctions. Il installe ensuite M. Candèze, directeur pour l’année actuelle. M. Candèze, en prenant place au fauteuil, réitère ses remerciments personnels pour la distinction dont il a été l’objet et propose de voter des remerciments au directeur sortant. La classe répond par des acelamations à cette motion. PROGRAMME DE CONCOURS POUR 1875. La classe fait choix des cinq questions suivantes pour ce programme : PREMIÈRE QUESTION. Examiner et discuter, en s'appuyant sur de nouvelles expériences, les causes perturbatrices qui influent sur la détermination de la force électro-motrice et de la résistance interieure d’un élément de pile électrique; faire connaître en nombre ces deux quantités pour ee des piles principales. 1 DEUXIÈME QUESTION. On demande un exposé des connaissances acquises sur les relations de la chaleur avec le développement des végé- taux phanerogames, particulièrement au point de vue des phénomènes périodiques de la végétation, et, à ce propos, discuter la valeur de l'influence dynamique de la chaleur solaire sur l’évolution des plantes. (3) TROISIÈME QUESTION. On demande de nouvelles recherches sur le développe- ment embryonnaire des Tuniciers. QUATRIÈME QUESTION. On demande de nouvelles recherches pour établir la com- position et les rapports mutuels des substances albumi- noides. CINQUIÈME QUESTION. On demande la description du système houiller du bas- sin de Liége. La valeur de la médaille d’or attribuée comme prix est de mille francs pour la 4° et la 5° question; elle reste fixée à six cents francs pour les 4"°, 2° et 5° questions. Les auteurs des mémoires insérés dans les recueils de l’Académie ont droit à cent exemplaires de leur travail. Hs ont, en outre, la faculté den faire ürer un plus grand nombre, en payant à l'imprimeur une indemnité de quatre centimes par feuille. Les manuscrits devront être écrits lisiblement , rédigés en latin, en français ou en flamand, et adressés, francs de port, à M. Ad. Quetelet, secrétaire perpétuel, avant le 1 août 1875. L'Académie exige la plus grande exactitude dans les citations; les auteurs anront soin, par conséquent, d'indi- quer les éditions et les pages des ouvrages cités. On n'ad- mettra que des planches manuscritès. _ Les auteurs ne mettront point leur nom à leur ouvrage, (6) mais seulement une devise, qu’ils répéteront dans un billet cacheté renfermant leur nom et leur adresse. Les mémoires remis après le terme prescrit ou ceux dont les auteurs se feront connaître, de quelque manière que ce soit, seront exclus du concours. L’ Académie croit devoir rappeler aux concurrents que, dès que les mémoires ont été soumis à son jugement, ils sont déposés dans ses archives comme étant devenus sa propriété. Toutefois les auteurs peuvent en faire prendre des copies à leurs frais, en s'adressant, à cet effet, au secré- taire perpétuel. RAPPORTS. Sur les dérivés diallyliques, par M. L. Henry. Rapport de M. Stas. « Dans un travail précédent, M. Henry a fait connaître le tétrabromure d'un hydrocarbure, le dipropargvyle, qu’il a découvert, Cet hydrocarbure, isomère de la benzine, doit être octoatomique d'après les idées de l’auteur. La pré- sente notice a pour but de signaler la formation’ de cet octobromure par l’action du brome sur le tétrabromure de dipropargyle. M. Henry annonce en même temps la pro- duction du tétrabromure du diallyle bibromé par l'addition du brome au diallyle bibromé. Les faits annoncés par M. Henry sont appuyés de don- Sei nées analytiques qui ne laissent aucun doute sur la parfaite exactitude de la composition de ces combinaisons. J'ai l'honneur de proposer à la classe de voter lim- pression de la note de M. Henry dans le Bulletin de la séance. » Conformément aux conclusions de ce rapport, auquel ont adhéré MM. L. de Koninck et F. Donny, la classe vote lim- pression de la note de M. L. Henry dans les Bulletins. — Nouvelles synthèses de Pacide hyposulfureux et de l’acide trithionique, par M. Walthère Spring. Rapport de M. Stas, « Le travail présenté par M. Walthère Spring contient l'exposé des faits annoncés dans sa précédente note rela- tive à la constitution de l'acide hyposulfureux. Après avoir rappelé et discuté sommairement les idées émises sur la constitution de l'acide hyposulfureux, M. Spring a cherché à dériver l'acide hyposulfureux de l’acide sulfurique, considérant ainsi le premier comme l'analogue du second. A cet effet, il a fait réagir, au sein d’une atmosphère d’anhydride carbonique, le sulfate d'am- monium sur le pentasulfure de phosphore, qui, d'après les idées généralement reçues, jouit de la propriété de substi- tuer du soufre à l'oxygène dit typique. A Ia température nécessaire pour amener la fusion du sulfate d'ammonium, une vive réaction s'établit, il se forme des vapeurs conte- nant à la fois de l’hyposulfite, du sulfite et du polysulfure KS d'ammonium. Dans le résidu de la réaction, on constate l'existence d'une grande quantité d'hyposulfite, de sulfo- phosphate d'ammonium, mêlés à une faible quantité de trithionate ammonique. M. Spring a soumis à l'analyse lhyposulfite volatilisé et condensé à part; les résultats obtenus ne laissent aucun doute sur la composition du sel. Pour se rendre compte de l'existence du polysulfure d'ammonium dans les produits volatilisés, l’auteur a cher- ché d’abord si réellement le pentasulfure de phosphore ne substitue du soufre qu'à l'oxygène dit typique; en faisant passer sur du pentasuifure de phosphore fondu un courant d'anhydride sulfureux, il a trouvé que ce dernier est entiè- rement réduit. L'action substitutive du soufre ne se borne donc pas à l'oxygène dit typique : la substitution peut être totale. En reprenant l'étude de l'action de la chaleur sur l'hy- posulfite d'ammonium , M. Spring a confirmé le fait connu déjà de la formation du sulfite d’ammonium dans cette circonstance. ila donc établi que le polysulfure et le sulfite d'ammo- nium sont des produits secondaires, dont la formation ne présente rien d'anormal, et il conclut avec fondement que l'hyposulfite dérive directement du sulfate par substitution du soufre à l'oxygène. M. Spring détermine ainsi la rela- Lon intime qui existe entre les sulfates et les hyposulfites, et partant entre les acides qui y correspondent. Ne se contentant pas de cette déduction qni ne dépasse pas le fait, il a cherché à réaliser la synthèse plus directe de lhyposulfite d'ammonium. Supposant que l'acide hypo- sulfureux est de l'acide sulfurique dont un atome d'oxy- gène dit typique est remplacé par du soufre, il a fait réagir l'acide sulfhydrique humide sur le sulfamate d’ammonium. Lë e Le sulfamate s’est transformé, en effet, presque exclu- sivement en byposulfite d'ammonium. Pour ceux qui admettent que les réactions chimiques ou le mode de formation des corps permettent de dévoiler avec certitude la structure intime des composés, M. Spring a donc résolu le problème qu'il s'est posé. J'ai dit de plus que parmi les produits fixes de la réac- tion du pentasulfure de phosphore sur le sulfate d'ammo- nium se trouve une faible quantité de trithionate d'ammo- nium, Composé excessivement instable, comme le sont, du reste, tous les trithionates. il s'agissait de se rendre compte de cette formation. M. Spring y est parvenu par deux voies distinctes, qui, l'une et l’autre, ne laissent aucun doute sur les conclusions à déduire du résultat. Partant de l'idée que le trithionate provient de deux molécules d'hyposulfite qui perdent une molécule de sulfure d'ammo- nium, il a cherché à ramener les hyposulfites de plomb, d'argent et de mercure, dissous dans l’hyposulfite de potas- sium, à l'état de trithionate de potassium avec élimination de sulfure de plomb, d'argent et de mercure, et inversement à produire un hyposalfite par l'action d'un sulfure sur un trithionate. L'action inverse a été déjà réalisée par MM. Chancel et Diacon , qui ont transformé le trithionate de potassium en hyposulfite par l'addition du sulfure de ce mélal. Je passe les détails sous silence pour arriver directement aux résultats. M. Spring a opéré ces réactions directes et inverses, de manière à ne laisser aucun doute sur les relations intimes qui existent entre les hyposulfites et les trithionates; les derniers sont donc les sulfanhydrides des premiers. L’exposé qui précède prouve l'importance théorique du travail soumis par M, Spring au jugement de la classe. (10) En admettant, ce qui pour moi est probable, sinon cer- tain , que les idées qui l'ont guidé viennent à changer en se transformant, comme c’est le cas de toutes les conceptions qui vont au delà de l'expérience, il restera néanmoins le fait d’avoir établi, à suffisance de preuve, les relations qui existent entre les sulfates et les hyposulfites, les hyposul- Dies et les trithionates. J'ai l'honneur de proposer à la classe d’ordonner l'im- pression de la notice dans le Bulletin de la séance, de voter à M. Spring des remerciments pour sa communica- tion et de l’engager à continuer ses recherches. » Conformément aux conclusions de ce rapport, auquel a adhéré M. F. Donny, second commissaire, la classe a voté l'impression dans le Bulletin de la notice de M. Walthère Spring. Contributions à la théorie du blanchiment, note par i M. De Wilde. Hapnort de M. Stas. « M. De Wilde s’est proposé de se rendre compte de lac- tion chimique exercée par les agents employés actuellement dans le blanchiment des fibres végétales, contenant consi- dérablement de matières incrustantes, colorantes et rési- neuses. On sait que les solutions alcalines mêmes concen- trées n’opèrent la désagrégation des fibres et la dissolution des matières incrustantes, qu’à une température comprise entre 450° et 200°, suivant la nature des fibres végétales. GME) Le travail auquel M. Ge Wilde s'est livré lui a permis de constater que les matières incrustantes se dissolvent, au contraire, à froid et même dans des solutions alcalines diluées , lorsque les fibres végétales à désagréger et à blan- chir ont été préalablement soumises à l’action du chlore. D'après M. De Wilde, l'action exercée par le chlore sur les matières étrangères aux fibres serait double. La présence Tun chlorure dans. le liquide alcalin qui a servi à opérer la dissolution de la matière incrustante prouve indubita- blement qu’il y a eu subtitution chlorée. Mais y a-t-il eu en même temps décomposition d’eau, formation d’acide chlorhydrique et fixation d'oxygène sur la matière organique ? M. De Wilde le pense, et son inter- prétation n’a certes rien d’invraisemblable ; mais son travail ne renferme pas la preuve de l'exactitude de cette opinion. En effet, c’est par hypothèse qu’il admet que la matière Qui a éprouvé la substitution chlorée est insoluble par elle-même dans les solutions alcalines et qu’elle doit la solubilité qu’elle présente après avoir subi l’action du chlore, à une action oxygénée concomitante ou subsé- quente. Le fait mériterait d’être élucidé, tant au point de vue théorique que sous le rapport pratique. L'expérience, du reste, me semble facile. En effet, il suflira de constater, d’une part, la quantité de chlore existant à l'état d'acide chlorhydrique dans le liquide au sein duquel la fibre a été soumise à l’action du Chlore, et, d'autre part, la quantité de chlore à l'état de chlorure contenue dans la solution alcaline, ayant servi à la désagrégation des fibres. Ces quantités doivent être égales entre elles, si le chlore se borne à se substituer à l'hydro- gène. Au cas contraire, il doit y avoir augmentation de Chlore à l'état d'acide chlorhydrique et cette augmentation (12) doit être proportionnelle à la quantité d'oxygène fixée par la matière incrustante. Quoi qu'il en soit, les recherches entreprises par M. De Wilde sont importantes, au point de vue théorique et pra- tique, et si actuellement elles ne sont pas susceptibles de recevoir une application économique dans le blanchiment des fibres ligneuses, elles seront certainement un jour uti- litées par l'industrie. J'ai l'honneur de proposer à la classe d'ordonner l'im- pression du travail de M. De Wilde dans le Bulletin de la séance. » Conformément aux conclusions de ce rapport, auquel ont adhéré MM. L. de Koninck et Melsens, la classe a voté l'im- pression de la note précitée au Bulletin. Note sur la préparation de l’acétylène, par M. De Wilde. Rapport de M. Sias. « Dans un précédent travail, M. De Wilde a démontré que l’acétylène prend naissance par l'action de la chaleur sur le bichlorure d’éthylène. Toutefois ce mode de pro- duction fournit l’acétylène mélangé d'hydrogène et de gaz des marais, etc. En poursuivant ses recherches, M. De Wilde a trouvé qu'on obtient une quantité d’acétylène beaucoup plus considérable en faisant passer la vapeur du bichlorure d’éthylène sur de la chaux sodée, chauffée au rouge; ce nouveau mode de production est identique à celui que nous avons employé, il y a trente-quatre années, M. Dumas et moi, pour obtenir l’ éthylène à à l’aide du chlo- a 1 (15) rure d'éthyle. Tout ce qui tend à faciliter la préparation de l’acétylène a une valeur réelle. A ce point de vue la nou- velle méthode imaginée par M. De Wilde mérite d’être publiée. J'ai, en conséquence, l'honneur de proposer à la classe d'ordonner l'impression de la note de M. De Wilde dans le Bulletin de la séance. » Conformément aux conclusions de ce rapport, auquel ont adhéré MM. de Koninck et Melsens, second et troisième commissaires, la classe vote l'impression de la note de M. De Wilde dans le Bulletin de la séance. Seconde note sur l'action de l'hydrogène sur l’acétylène et l'éthylène, sous l'influence du noir de platine, par M. De Wilde. Rapport de M. Stas. «M. De Wilde a déjà signalé la propriété que possède le noir de platine de déterminer la combinaison de l’acéty- lène et de l'hydrogène. Il communique actuellement à la classe les résultats des recherches qu'il a faites à ce sujet; ainsi , il a constaté analytiquement que l'acétylène et l'hy- drogène se combinent dans le rapport de 1 à 2 et que 5 vo- lumes du mélange se condensent exactement en 2 volumes d'un gaz qui est l’hydrure d'éthyle. En appliquant ce mode d'action à l'éthylène, M. De Wilde a trouvé que ce corps se combine également directement à l'hydrogène et que l'union s'effectue volume à volume pour produire encore Re de lhydrure d'éthyle. L’exactitude de ces déductions résulte à suffisance de preuve de données analytiques, consignées dans Ja note. Aussi, je n'hésite pas à proposer à la classe d'en voter l'impression dans le Bullelin de la séance. » Conformément aux conclusions de ce rapport, auquel ont adhéré MM. de Koninck et Melsens, la classe a voté l'impression de la note précitée au Bulletin. — Note préliminaire sur l'action de l’effluve électrique sur quelques quz et mélanges gazeux, par M. De Wilde. Happo:t de M, Slas. e Dans ces derniers temps, MM. Thénard, père et fils, ont constaté les propriétés remarquables de l’effluve élec- trique sur les gaz et sur les mélanges gazeux. M. De Wilde s'est livré de son côté à quelques recherches dans la même direction. Le travail qu'il soumet au jugement de la classe renferme la description de l'appareil à effluve dont il s'est servi et les résultats auxquels il est arrivé jusqu'ici. Il a trouvé que sous l'influence de l'effluve l’anhydride sulfureux et l'oxygène s'unissent lentement pour donner naissance à de l'anhydride sulfurique, que l’éthylène et l’acétylène se condensent, le premier en un liquide incolore et volatil à odeur de pétrole, et le second également en un liquide qui se solidifie rapidement en jaunissant fortement. Le solide, produit ainsi, détone sous l'influence de la chaleur. Le fait de la condensation de l’éthylène a déjà été con- H (15) | staté par MM. Thénard; M. De Wilde le rappelle d’ailleurs dans sa note. L’effluve électrique constitue un nouveau et puissant moyen d'opérer des changements dans l'état de condensation des gaz et de réaliser des actions chimiques difficiles à produire par d’autres voies : à ce titre, la note préliminaire de M. De Wilde présente un véritable intérêt. J'ai l'honneur de proposer à la classe d'en décider l'im- pression et de lui voter des remerciments pour ses com- munications. » Conformément aux conclusions de ce rapport, auquel ont adhéré MM. de Koninck et Melsens, la classe a voté l'impression de la note précitée au Bulletin. — M. le Ministre de l'intérieur avait soumis à la classe une requête qui lui avait été adressée par M. Van Ryssel- berghe, au sujet de son météorographe. MM. Liagre et Gloesener ont bien voulu se charger d'examiner cette re- quête; après leur avis favorable, il sera répondu à M. le Ministre qu'il y a lieu de prendre en considération la de- mande faite par M. Van Rysselberghe. Une copie des deux rapports précités sera transmise au haut fonction- naire précité. (16) COMMUNICATIONS ET LECTURES. Additions au Synopsis des Cordulines; par M. Edm. de Selys Longchamps, membre de l’Académie. Deux ans et demi se sont écoulés depuis ma publication sur les Odonates de la sous-famille des Cordulines (séance de la classe des sciences de l’Académie du 9 mai 1871). Je décrivais alors 83 espèces ` aujourd'hui j'en produis 8 nouvelles, et je puis compléter le signalement de quinze des premières, dont la description n’était pas suffisante, ou dont l’un des sexes n’était pas connu. L'étude approfondie des Cordulines rencontre des diffi- cultés assez grandes, parce que, pour des causes dont je ne puis bien me rendre compte, à moins que la principale ne soit Ja grande agilité et la très-clairvoyante défiance de ces insectes en présence du chasseur, on n'en reçoit que bien peu dans les envois exotiques; à tel point que plus de la moitié des espèces connues ne le sont que d’après des exem- plaires uniques jusqu'ici, et souvent en fort mauvais état. On comprendra encore mieux la difficulté du travail, si lon réfléchit que beaucoup de ces types uniques sont dé- posés dans des musées (notamment en Angleterre) dont les règlements interdisent la communication hors du local de l'établissement, de sorte que les comparaisons si néces- saires ne sont pas possibles pour l’entomologiste étranger, à moins que celui-ci ne voyage accompagné de sa collec- tion, ce qui n’est pas praticable, surtout pour des insectes de grande taille. Sea, La À à. of oi SU dé ét int RR sisi | i (17) Ces règlements de musées sont certainement fort sages au point de vue de la conservation des types qu'ils possè- dent; mais il faut bien avouer qu'ils sont un terrible ob- stacle aux progrès de la science, surtout quand il s'agit d'espèces non décrites (comme c'est ici le cas) et qui s’y trouvent pêle-mêle en magasins non classés, parce que le nombre des névroptérologistes est on ne peut plus res- treint. La comparaison avec les objets que l'on a dans son propre pays se trouve done empêchée, et lon sait que le temps manque souvent en voyage pour écrire des descrip- tions complètes. Ces remarques sont nécessaires afin d'expliquer pour- quoi certaines de mes descriptions de 1875 sont réduites à de courtes diagnoses, tandis que d’autres sont complètes et comparatives. Les premières sont celles que j'ai écrites au British Museum et à celui d'Oxford, tandis que les se- condes concerner#*les types que je possède et ceux de la collection de mon ami M. Mac Lachlan, qui a la bonté de me les envoyer en Belgique, afin que je puisse les étudier à loisir. Je wai du reste admis dans le Synopsis que ce que j'ai vu. Rien n’est donné par compilation (1). Grâce à cette scrupuleuse précaution , j'ai pu jusqu'ici éviter de tomber dans des erreurs graves, malgré les diffi- cultés de diverse nature que je viens d'exposer (2). (1) J'avais fait une exception pour la Cordulia virens de Rambur à cause de la bonté des descriptions de cet auteur, En 1873 j'ai examiné le type unique à Oxford ; la lacune est donc comblée. (2) La seule erreur constatée est celle de la Macromia cingulata de Rambur qui est identique avee ma M. Whitei ° SÉRIE, TOME XXXVII. 2 1 i ( 18 © Écarter ces obstacles sera chose beaucoup plus ardue lorsqu'il s'agira de décrire et de comparer des groupes fort nombreux et composés d'espèces souvent très-voisines les unes des autres, comme cela existe chez les Libellu- lines, les Æchnines et les Agrions. Quand j'aurai à expo- ser ces nombreuses séries, il me sera presque impossible de décrire autre chose que les types de ma collection, à moins que les musées étrangers ne me a ce qu'ils possèdent. 2 (Addition). Hemicorounia assimnas, Hagen. o” Abdomen 30mm; aile inférieure 28 1/,. Nervure costale noire; membranule noirâtre, plus pâle à la base ; 5 cellules postrigonales suivies de 2 rangs ; ptérostigma long de 4™m, Côtés du thorax bruns avec deux bandes acier, la première infé- rieure incomplète. 4er et Ze segments de l'abdomen bruns, les autres noir-verdàtre mat, avec vestiges d'une tache brune au milieu des côtés des 5°-7e segments; les bords des 5e et 8e un peu élargis, ceux des 6° et 7° davantage. Appendices anals noir-luisant; les supérieurs plus longs que les deux derniers segments (longs de 3w) simples. Fémurs postérieurs longs de 6wm 1: les tibias des mêmes pieds de 6mm, Patrie : Nouvelle-Guinée. (Musée britannique.) N. B. La femelle type (Syn., n° 2) est de Célèbes. La connaissance du mâle permet de faire disparaitre le signe de doute apposé au sous- genre, Ce mâle a la plus grande ressemblance avec celui de F Oceanica de Taïti. H n’en diffère que par les pieds plus longs, le ptérostigma plus court, la costale noire et les appendices supérieurs plus longs. 4 (Addition). HewiconpusiA? virexs, Rambur. Q M'étant rendu cette année à Oxford, j'ai pu examiner le type, dont la diagnose avait été donnée d'après Rambur. Je complète ainsi qu’il suit le signalement : (19) Abdomen 59mm; aile inférieure 58. Longueur du ptérostigma 1 :/,. Abdomen grêle. Cette espèce, de Maurice, diffère beaucoup de la similis de Mada- gascar par sa grande taille. Ne connaissant pas le mâle, je ne puis affirmer avec certitude que c’est une Hemicordulia, mais l'absence de triangle interne aux ailes inférieures prouve en tout cas que si ce n’est pas une Hemicordulia, comme le fait cependant supposer le ptéro- sligma court, c'est une vraie Cordulia et non une Epitheca. N. B. Dans le Synopsis (n° 5) j'ai dit que le ptérostigma de la similis avait Amm1},. Il ne dépasse pas Å millimètre. 5 (Addition). Hemicorpusia Nove HoLLANDIÆ, De Selys. o“ Abdomen 31-52mm; aile inférieure 28-29. 9 Adulte. Membranule noirâtre , påle à la base; 6 antécubitales >; 4 posteubitales ; 5 cellules, puis 2 rangs postrigonaux. Tête jaunâtre-foncé; dessus du front et vésicule du vertex bleu- acier verdâtre; derrière des yeux noir; occiput jaune en arrière. Thorax brun-jaunâtre; une large bande antéhumérale et une humé- rale, une médiane complète aux côtés du thorax précédée d’une infé- ricure incomplète d’un vert bleuâtre métallique. Abdomen un peu élargi aux De et 8e segments, davantage aux Der et 7°; coloré comme chez la femelle décrite; mais le ler segment jaunâtre, et le 40° jaune au bout. Pieds noirâtres, les quatre fémurs antérieurs brun-jaunâtre ; les tibias postérieurs longs de 6 1/,mm, Appendices anals noirâtres; les supérieurs simples, un peu plus courts que les deux derniers segments (longs de Zen !},). L’inférieur triangulaire. 2 Jeune. Les dessins plus clairs; la moitié apicale du 40° segment jaune-clair. Patrie : Australie. (Musée britannique.) N. B. Le mâle étant maintenant connu, il y a lieu de supprimer le Signe de doute quant au sous-genre. Ce mâle ressemble à l'A. Aus- fraliæ par la coloration. Il en diffère par les appendices anals supé- rieurs simples, sans dent en dessous. I se sépare des H. Tau et inter- media par le front sans tache noire en T; et des H. Oceanica et assi- milis par l'abdomen à taches jaunâtres. 19 (Addition). CORDULIA SPINIGERA, De Selys. Q Abdomen 32m»; aile inférieure 53. Elle diffère du mâle parce que la tache noire en T du dessus du front est dépourvue de sa têle transverse; que l'abdomen est plus dé- primé, et que le ptérostigma est plus étendu étant long de 5". Les appendices anals sont plus courts que le dernier segment, épais (long de 2m), Il y a 8-9 nervules posteubitales. Patrie : Géorgie américaine. Musée britannique. Le mâle, de ma collection, est indiqué comme du Canada. Cependant je crois que les sexes signalés appartiennent à la même espèce. 22 (Addition). Conpusta cosTaLis, De Selys. J'ai réexaminé au Musée britannique la femelle type. Les dimen- sions doivent être rectifiées et complétées ainsi qu'il suit : Abdomen 31»; aile inférieure 51. Appendices anals 5 71. Les triangles des ailes et les espaces basilaire et médian sont d'une nuance brune un peu plus claire que le bord costal. 40 (Addition). EPITHECA SEPTENTRIONALIS, Hagen. L'écaille vulvaire de l’exemplaire femelle du Musée britannique que j'avais nommée (mais non décrite) sous le nom de Francklini a positivement l'écaille vulvaire redresséc en gouttière ou en onglet. Serait-ce encore une espèce différente des types de la septentrio- nalis du Dr Hagen ? 45 (Addition). EPITHECA CINGULATA, De Selys. Q Plus adulte. L'écaille vulvaire est un peu plus plissée que chez le type de Terre-Neuve. Patrie : Hospedal (Labrador). (Musée de Cambridge, Massachusets.) (21) 44%, EPITBECA NASALIS, De Selys. Q Abdomen 57™™, Aile inférieure 56. , o" Inconnu. © Elle diffère de l'albicincta (n° 44). 1° Par la taille plus forte; 2 Le ptérostigma plus court {long de 2m au lieu de 5) ct plus obscur. 5° L'écaille vulvaire fourchue, de même dimension, mais à bran- ches non divariquées. Patrie : Amérique septentrionale. (Musée britannique.) N. B. Elle ressemble aussi à la cingulata, mais s’en distingue par l’absence d'un cercle pâle aux articulations des segments, l’écaille vulvaire fourchue et le ptérostigma plus court. 49%. Gompnomacromia Vorxemi, De Selys. Ọ Abdomen 58%m, Aile inférieure 38. o” Inconnu. Ọ Ailes fortement lavées de jaunâtre ocracé, surtout dans leur seconde moitié et à l’extrême base. Réticulation noire; costale jaune- påle en dehors; ptérostigma mince allongé brun-jaunâtre (long de 5mm) ; ailes inférieures élargiès ; 10-12 antécubitales, 8-9 posteubitales aux supérieures. Second espace entre le nodus et le ptérostigma vide dans son premier tiers ; membranule blanche. Tête brun-olivâtre clair avec un reflet acier au-dessus du front et au vertex. Le petit œil temporal très-marqué. Thorax brun-olivâtre, mais le devant en dessus et les côtés d’un vert métallique foncé très- brillant, cette couleur interrompue par les sutures qui restent brunes et forment des raies. Abdomen un peu comprimé, presque égal, un peu épaissi à la base, noirâtre à taches dorsales lancéolées et mal arrêtées brun-clair aux 5-9° segments (ces taches consistent sur les 5-7° en un demi-anneau basal en dessus s’arrêtant à la suture trans- verse médiane, avec un prolongement dorsal postérieur aminci augmentant vers les derniers segments); côtés des 1° et 2° segments et (22) le 40e brunäâtres. Pieds grêles, fémurs brun-roussâtre, leur extré- mité en dehors, les tibias et les tarses noirâtres; onglets à division inférieure forte, un peu plus courte que la supérieure. Appendices anals coniques pointus courts, de la longueur du 40° segment, brun-jaunâtre, appuyés sur une protubérance conique qui termine l'abdomen. Écaille vulvaire courte, divisée en deux plaques arrondies par une échancrure étroite. Patrie : Carrancas, province de Minas (Brésil). Un individu unique pris à la mi-novembre 1872 par M. Camille Van Volxem, qui a bien voulu me donner les Odonates qu'il a recueillis pendant son voyage. Collection De Selys. N. B. Pai d'abord pensé que c'est la femelle de la setifera, dont le mâle est seul connu; mais je crois plus prudent de la décrire séparé- ment à cause du ptérostigma beaucoup plus long, de la nervure cos- tale jaune et des taches dorsales lancéolées brunes de l'abdomen. 52 (Addition). CORDULEPHYA PYGMÆA, De Selys. Ọ Abdomen 22m», Aile inférieure 22 1/2. ` Ailes inférieures très-étroites à leur bord anal; 9-10 antécubi- tales; ptérostigma livide, un peu plus long que chez le mâle. Appendices anals noirâtres, sas de la longueur du 40° segment. Écaille vulvaire très-courte. Patrie : Melbourne. (Musée britannique.) C’est la même localité que celle du mâle déerit. N. B. Ajouter aux En du genre : secteurs de l’arculus aux ailes inférieures presque réunis à leur origine. — Écaille vulvaire de la femelle très-courte. 70is. MacrOMIA mAGNIrF1CA, Mac Lachlan (in litteris). Abdomen o” 50mm; © 52. Aile inférieure o“ 43; Q 47 Ailes hyalines, nervures noires, la costale jaune en dehors, pté- rostigma noir (long de 9mm o, de 2 tj, ©) couvrant une cellule et de- mie; 12-15 antécubitales, 7 postcubitales, 4-2 hypertrigonales ; 4 mé- dianes; 2 rangs postrigonaux aux ailes supérieures; membranule blanche. ET (25) D'un brun noirâtre à reflets violets, marqué de jaune pâle. Lèvre inférieure jaunàtre-enfumé, plus foncée au bord et aux lobes latéraux, la supérieure jaune bordée de brun surtout aux côtés; rhinarium brun-enfumé; nasus jaune; front jaune en dessus, brun en avant, cette couleur avec un prolongement dans l'échancrure for- mant un T et rejoignant une fine bordure basale devant le vertex qui est noirâtre, bifide, ses deux sommets pâles en arrière. Occiput petit et derrière des yeux noir; le prolongement temporal des yeux sail- lant, graniforme. Thorax noir-acier ; les sinus antéalaires, une bande étroite antéhumérale s’arrêtant à la moitié de la hauteur, et sur les côtés une bande médiane un peu plus large faisant le tour du thorax entre les ailes et une raie terminale très-fine, peu marquée, jaune- pâle. Abdomen noirâtre, marqué de jaune ainsi qu'il suit : Un large anneau occupant le tiers médian du deuxième segment, mais divisé en deux taches par l’arête dorsale, un demi-anncau analogue en dessus aux 5-6° segments commencant un peu après la base, s’arrêtant à la suture médiane, formant par conséquent des taches dorsales. Le demi-anneau des 7° et Be segments est basal, se prolongeant sur le dos jusqu'à la moitié de ces segments en se rétrécissant; une tache basale courte transverse au 9° (et même au 40° chez le mâle). Pieds noirâtres assez longs. o Appendices anals noirâtres, plus clairs à la base; les supérieurs un peu plus longs que le 10° segment; subcylindriques épais à peine courbés l’un vers l’autre d’abord; leur pointe mousse un peu inclinée en dehors, cette pointe subdenticulée en dessous. Appendice inférieur égal, large, subtriangulaire, échancré au bout, les deux côtés de l’échancrure redressés. Q Abdomen subcomprimé presque égal. Appendices anals un peu plus courts que le 10° segment, eylindriques épais, pointus. Écaille vulvaire très-courte, échancrée en demi-cercle. Patrie : Californie; découverte par lord Walsingham. (Coll. Mac Lachlan.) N. B. Stature de lannulata, sen distinguant de suite par la tache en T et le devant du front noiråtres et l'absence de dent externe aux appendices supérieurs du mâle. Se rapproche de la cingulata (Whitei de Selys olim) par la tache (24) en T, mais cette espèce, reconnue maintenant comme étant du Ben- gale et non de l'Amérique, est plus petite, a la lèvre supérieure lar- gement bordée de noir, son triangle discoïdal des supérieures moins aigu, et le mâle porte une pointe dorsale relevée au 10° segment et une dent externe aux appendices supérieurs. La magnifica mâle se place près de la transversa par ses appen- dices supérieurs sans dents, mais s’en sépare immédiatement par son occiput non renflé, sa taille et sa coloration. 71 (Addition). Macromia TRIFASCIATA, Rambur. Ọ Abdomen 47mm ; aile inférieure 45. La base des ailes jusqu’à la première antécubitale et le bout des ailes supérieures à partir du PNR sont notablement lavés de jaune ocracé. Les Se et 9e segments sont colorés comme chez le mâle, mais pa- raissent un peu moins dilatés. (Les appendices anals manquent.) Patrie : Madagascar. (Musée britannique.) 75 (Addition). Macromia AFRICANA, De Selys. Abdomen o” 58mm; © 58; aile inférieure © 54; Q 56 o Cette espèce, d’après examen du mâle que je ne connaissais pas encore, est mal placée dans le groupe de la cincta. Elle appartient - certainement à celui de la trifasciata, que le mâle rappelle par les 7-8° segments bruns, élargis (surtout le 8°). Les appendices anals pâles sont malheureusement en partie brisés. Sur les côtés du thorax on voit une bande blanche comme chez la cincta, suivie d’une bande terminale peu distincte. Membranule gris-foncé, plus pâle à la base. Q Incomplète. Patrie : Afrique australe. (Musée britannique.) L'exemplaire type femelle complet, décrit précédemment et venant de Nubie est plus petit. 66 el 76 (Addition). MacROMIA CINGULATA , Ramb. (et Whitei De Sel.). Il y a une rectification importante à faire : ces deux espèces n’en font qu'une, et le nom de cingulata de Rambur étant beaucoup plus ancien que celui de Whitei, ce dernier doit disparaitre. PS NE ds ECS édite (25 ) C'est moi qui ai commis l'erreur de créer une seconde espèce qu'il X faut supprimer. La cause principale de cette erreur réside dans la patrie inexacte (Amérique septentrionale) indiquée par Rambur à la cingulata d'après l'étiquette du type unique de la collection Serville, dont la moitié de l'abdomen est détruite et qui était fort nouvellement éclos. Il ne diffère des femelles de ma Whitei que parce que la base et le bout des ailes sont plus lavés d'ocracé, et que le rhinarium est en- fumé. Une nouvelle comparaison ne me laisse aucun doute sur l'iden- tité spécifique et la patrie (Bengale) est bien certaine. Le mâle étant maintenant reconnu, l'espèce ‘cingulata doit être éloignee du groupe de la splendens et placé dans celui et près de la cincla (comme je l'avais fait déjà en décrivant l'espèce sous le nom de M. Whitei). 76s- (Addition), MACROMIA FLAvVICINCTA, De Selys. Abdomen o 47mm; Ọ 50-51. Aile inférieure d 41; © 44. Ailes hyalines (9°) ou légèrement salées (Q); réticulation noirâtre; costale jaunâtre en dehors; ptérostigma médiocre (long de Am) cou- vrant 2 cellules; membranule d'un blane sale; 15-17 antécubitales aux supérieures; 17 posteubitales; 2-4 hypertrigonales; 5-5 mé- dianes; 2 rangs postrigonaux. D'un noirâtre acier à reflets métalliques, varié de jaune. Lèvres jaunes, l’inférieure non bordée de noir, ayant seulement l'angle anté- rieur des lobes latéraux obscurci; une très-large bordure noire à la Supérieure; rhinarium obseur, nasus et front jaunes ; le devant de ce dernier noir, cette couleur formant un T à queue très-épaisse re- joignant sa base par le milieu de l'échancrure, qui est très-profonde ; vertex et occiput noirs, les deux pointes du vertex jaunes en arrière ; derrière des yeux noir avec une tache oblongue jaunätre inférieure. Thorax bleu-acier métallique; sinus antéalaires, une bande humé- rale ne les touchant pas et sur les côtés une médiane latérale faisant le tour entre les ailes et une terminale jaunes. Abdomen noir annelé de jaune. Au 2e segment l'anneau est basal et occupe sa première moitié; aux 3-6: anneau est aussi basal et va jusqu'à la suture mé- diane et il est marqué en dessus d’une tache dorsale basale noire ( 26 ) finement pointue en arrière où elle atteint presque la suture médiane; aux 7° et 8° il occupe la moitié basale; au 9e il y a une marque trans- verse latérale près de l'articulation. Pieds grêles, brun noirâtre y com- pris les fémurs antérieurs. s Abdomen cylindrique un peu renflé à la base, et dilaté aux 7-9 segments; le dos du 40° avec une bosse médiane pointue qui, vue de profil, forme un angle aigu. Appendices anals jaune foncé; les supérieurs plus longs que le 10° segment, subeylindriques, leur bord interne très-légèrement courbé en dedans, l’externe portant à sa moilié (un peu plus loin chez la cingulata) une dent aiguë ; la seconde moitié amincie et coupée en biseau au bout de façon à former une pointe aiguë relevée. Appendice inférieur un peu plus long triangu- laire, notablement recourbé en haut au bout qui est tronqué, presque émarginé. Le bord anal très-excavé entre la membranule et l'angle qui est saillant. Ọ Abdomen un peu plus épais, non dilaté au bout. Appendices anals coniques très-pointus (jaunåtres?) un peu plus longs que le der- nier segment. Écaille vulvaire bilobée en deux feuilles ovales contiguës allant au delà du tiers du 9e segment. : Un vestige brun-jaunûätre entre les nervures costale et médiane allant jusqu’à la seconde antécubitale aux quatre ailes. Patrie : Nord du Bengale. (Musée britannique.) — Sans indication de patrie. (Coll. Mac Lachlan.) . B. Ressemble beaucoup à la M. cingulata (White? De Selys). Voici en quoi elle en diffère : de Les trois pièces de la lèvre inférieure non bordées de noir. 2° Le derrière du vertex et des yeux marqué de jaunâtre. 5° Les anneaux du sommet de l'abdomen un peu plus larges (parce que chez la cingulata le commencement de chaque segment est noi- râtre). 4 Les fémurs antérieurs non bordés de jaune. 5° Le ptérostigma plus long. 6° La taille plus forte. 7° La dent externe des appendices supérieurs du mâle placée au milieu, leur extrémité tronquée. ( 27 5° La forme du bord anal des ailes du mâle excavée (presque droite chez la cingulata): % La forme de l’écaille vulvaire de la femelle. La flavicincta se rapproche de la cincta de Java par la taille. Elle s'en distingue surtout par la présence d’une bande jaune antéhumé- rale, la forme ct la dimension des anneaux jaunâtres de l'abdomen et l’écaille vulvaire plus longue, bilobée. 77s. Macromia wesrwoopii, De Selys. © Abdomen 50mm, Aile inférieure 50. o Inconnu. Q Ailes hyalines; ptérostigma petit, noiràtre (long de 2mm), 16-17 antécubitales, 10-12 posteubitales ; 5 hypertrigonales aux ailes supérieures, 2 aux inférieures; 5-6 médianes; triangles petits libres ; 2 rangs postrigonaux. Le nodus placé aux Ce tiers de la longueur de la base au ptérostigma. ` D'un vert bronzé foncé, varié de fauve. Les lèvres et la face fauves; le front et la vésicule du vertex acier métalliques. Thorax acier, ayant en avant deux larges bandes antéhumérales fauves, deux sur les cò- tés, et les sinus antéalaires de même couleur. Abdomen vert bronzé, excepté un anneau basal fauve occupant le tiers basal du 7° segment. Écaille vulvaire courte, entièrement divisée en deux lamelles trian- gulaires pointues, écartées l’une de l’autre. Appendices anals écartés, pointus. Pieds noirs, grêles. Patrie : Penang (Sumatra); prise par Miss Ormerod. (Musée d'Ox- ford.) N. B. Elle appartient probablement au groupe de la cincta, de la flavicineta et de la cingulata (Whitei, de Selys olim). Elle sen dis- tingue par l'absence d’anneaux jaunes à l'abdomen, excepté au 7° seg- ment, et la taille plus forte. C'est de la cincta qu’elle se rapproche davantage ayant les lèvres fauves sans bords noirs; mais la base des ailes n’a pas de marque rune. Je l'ai dédiée à l’éminent professeur O. Westwood qui a facilité avec la plus louable obligeance mes recherches au Musée de l'Univer- sité d'Oxford. (28 ) 7747. MacromIA MOOREr, De Selys. ©‘ Abdomen 49mm Aile inférieure, Ailes hyalines; ptérostigma brun-jaunâtre, long de Jm t|; 14-16 antécubitales, 8-9 postcubitales; 4 hypertrigonales aux supé- ricures. Triangles libres. Lèvres jaune -rougeûtre, l'inféricure et ses lobes peu bordés de brun , la supérieure à peine limbée de roux foncé. Le reste de la face et le front olivåtre-clair, le front échrancré, ses deux lobes à reflets acier, en avant. Thorax vert à reflets acier, mais le bas du devant, le bord postérieur des côtés et le dessous d’un beau rouge brun ; puis les sinus antéalaires et une bande latérale médiane faisant le tour entre les ailes jaune citron. Abdomen marqué de jaune. Pieds noirà- tres. Appendices anals supérieurs plus longs que le 40° segment presque subcylindriques, bruns, avec une dent externe à la moitié de leur longueur; l’inférieur plus long que les supérieurs, roux, un peu re courbé en haut. Le 10° segment, vu de face, montre une petite carène dorsale com- mençant par un petit mamelon échancré qui, vu de profil, forme une élévation à angle droit, remplaçant la pointe qui existe chez les autres espèces du groupe de la cincta. Q Inconnue. Patrie : L'Hymalaya (Collection du Dr Moore.) N. B. Elle se rapproche de la cincta par la taille et par l'appendice inférieur du mâle plus long que les supérieurs. Elle en diffère par le ptérostigma très-court, jaunâtre, les sinus et la bande entre les ailes Jaune-citron, et surtout par le 10° segment élevé en mamelon bituber- culé et non en pointe aiguë. On peut la placer comme la dernière espèce du groupe. En lui donnant le nom du Dr Moore, j'ai saisi l'occasion de témoi- gner ma gratitude envers le savant directeur de l'East India Museum, à Londres. (29) 79 (Addition). SxNTHEMIS MACROSTIGMA, Hagen. J'ai examiné au Musée britannique plusieurs exemplaires de taille variable : Abdomen œ 57"-4{mm; © 56. Aile inférieure o“ 51-55; Q 50; 55. Chez l’un des mâles, le plus petit, la gouttelette basale des ailes inférieures est forte , noire , et atteint la première antécubitale. Chez l’une des femelles, la plus grande, les ailes sont limpides comme chez l’un des måles où la gouttelette basale des quatre ailes est au contraire très-courte ne touchant pas la première antécubitale. Patrie : Un mâle est indiqué du nord de l'Australie; les autres exemplaires n'ont pas de désignation spéciale. La femelle que j'ai décrite précédemment et dont les ailes sont fortement colorées de jaune ocracé est des Iles Fidji. N. B. A. Il faut ajouter à la description, que les appendices anals supérieurs des màles portent un peu après leur base en dessous , une très-petite pointe , et que le bout de l’appendice inférieur est un peu émarginé. N. B. 2. C'est avec quelque doute que je rapporte ici un exem- plaire, femelle jeune, provenant de Swan River (Australie occiden- tale) déposé au Musée d'Oxford : Abdomen 42m», Aile inférieure 54. Ptérostigma large jaune (long de 5mm) entre des nervures jaunes. Membranule blanche ; rétieulation brune, costale jaune; 2 rangs de cellules postrigonales. Une bande Sous-costale et une sous-médiane d'un brun roussâtre allant jusqu'aux triangles. Le T frontal noirâtre mal arrêté. Abdomen comprimé, les trois derniers segments paraissant mous en dessus, comme chez les Cordu- légasters femelles, et supportés par de longues lames vulvaires ana- logues à celles des Uracis. Je rapporte provisoirement cette femelle à la macrostigma à cause de sa taille, de la structure des derniers segments et des deux bandes basales des ailes analogues à l'exemplaire des Îles Fidji; mais le pté- rostigma semble plus court. Il faudrait connaître les mâles des deux localités pour décider la question d'identité. ( 30 ) 80 (Addition). Sxxraemis Lracrir, De Seivs. (Description rectifiée et complétée au Musée britannique en 1875.) o* Abdomen 42rm Aile inférieure 35. Ailes hyalines, les inférieures ayant à leur base deux vestiges bruns à peine visibles; réticulation noire, costale finement jaune en dehors; ptérostigma noirâtre entre des nervures noires non dila- tées (long de 5"m); membranule noirâtre; 42 antécubitales; 7 post- cubitales; 1 basilaire; 6 médianes aux supérieurs; triangles libres suivis de 2 cellules puis d’un seul rang. Lèvres et face jaunâtres; une tache brune en T sur le front ; la queue de cette tache est épaisse, prolongée en avant jusqu'au nasus; der- rière de l’occiput jaunâtre, renflé. Thorax noirâtre irisé, ayant en avant une bande antéhumérale divisée en deux taches très-isolées, la supérieure arrondie , et sur les côtés deux bandes complètes jaunes x la seconde plus large, terminale. Abdomen très-grêle, noirâtre mar- qué de jaune clair ainsi qu'il suit : au Ier segment une tache basale; au 2° un anneau médian interrompu au dos, s'élargissant sur les oreillettes; aux 5-8° une tache basale latérale courte triangulaire et une autre ronde dorsale placée au niveau de la suture médiane (en outre une tache latérale aux 5-4°); enfin une tache basale latérale aux 9-10 segments. Dessus du 410° plat. ; Pieds d'un brun noiråtre, l'extérieur des premiers fémurs jaune. Appendices anals supérieurs plus longs que les deux derniers segments (longs de 5 ‘/,"") grêles, subeylindriques à peine courbés en dedans après la base, inclinés ensuite en dehors, puis en tenaille au bout, qui forme une petite tête un peu élargie inférieurement. Appendice inférieur d'un tiers plus court, plus pâle, triangulaire allongé, le bout presque pointu, redressé. Ọ Inconnue. Patrie : Nouvelle-Hollande. Un mâle en mauvais état au Musée britannique. N. B. Diffère de la macrostigma par le ptérostigma plus court, noir, non dilaté; la membranule noirâtre ; l'appendice inférieur plus À | | | ` (51) long ; les deux doubles taches antéhumérales, enfin les deux bandes jaunes des côtés du thorax entières. Cette description confirme la diagnose trop courte donnée dans le Synopsis. 81 (Addition). SYNTHEMIS EUSTATACTA, Burmeister. Deux måles et une femelle du Musée d'Oxford présentent les dimensions suivantes : Abdomen d“ 54m; © 37. Aile inférieure o” 29 ; Q 51. Ptérostigma o 21/,; ð. Patrie : Adélaïde. Cette indication est précieuse, car les deux exemplaires examinés précédemment portaient l'indication assez vague : Nouvelle-Hollande. N. B. Dans le Synopsis il y a interversion de dimensions pour le mâle. Il faut lire : Abdomen 52 et aile inférieure 29. 82 (Addition). SxNTHEMIS GUTTATA, De Selys. Il y a au Musée britannique un måle et deux femelles : le bout de l'abdomen manque, mais en examinant de nouveau l’ensemble des exemplaires, je suis porté à croire que l'espèce est plutôt du groupe de la virgula et de la brevistyla que de celui de l’eustalacta. 82%. SYNTHEMIS REGINA, De Selys. Abdomen o 44mm ; Ọ 40. Aile inférieure d 35; Q 55 z Ailes assez larges, hyalines (5°) légèrement salies (Q) ayant chez la femelle seulement un très-léger vestige de gouttelette basale entre la nervure sous-costale et la médiane. Nervures noires, la costale très- fiuement jaune -soufre er dehors jusqu’au ptérostigma qui est noir (long de 2mm 2, de 5m Ọ) et surmonte une et demie à deux cel- lules ; membranule blanchâtre; tous les triangles libres (l'interne ir- régulièrement traversé chez une femelle), 2 cellules, puis un ou deux rangs postrigonaux ; 3-5 basilaires ; 5-6 médianes; 4 hypertrigonale; 14-45 antécubitales et 8 posteubitales aux supérieures. (Largeur de l'aile inférieure : 9mm chez le o: 40 ’}, chez la Q.) (32) Corps brun-noirâtre. Lèvres jaunes, la supérieure traversée et bor- dée de noir; rhinarium et nasus jaunes; devant du front noir (ex- cepté de côté) formant un T en dessus par une queue épaisse qui re- joint le noir de sa base par l'échancrure. Tête noire en arrière, ayant une tache jaune contre l’occiput et une derrière chaque œil ; thorax noirâtre en avant, avec une ligne médiane jaune à la suture dorsale (plus large chez la ©), les côtés et le dessous jaune- soufre avee une bande acier à la suture médiane, Abdomen long, grêle, à peine renflé à la base, noir avec une tache dorsale arrondie au 4°" segment , les côtés du 2°, execpté le bout (mais y compris les oreillettes chez le”), une tache basale latérale suivie d'une médiane également latérale au 5° jaunes. Ces taches dessinent au dos de ce segment un fer de lance noir sur la première moitié. Les deux taches latérales jaunes sont placées de même aux 4-6° segments, mais bien séparées les unes des autres et plus petites; le 7° segment jaune, excepté une bande ter- minale et une raie latérale noires; les Se et 9e noirs, avec une tache ventrale jaune et un petit point latéral au premier tiers du 8e. d Le 10° segment noir déprimé au bout, mais renflé à sa base où il est élevé en une corne étroite perpendiculaire mince presque émarginée. Pieds noirs; intérieur des premiers fémurs jaune. Appendices anals supérieurs un peu plus longs que le 40° segment (longs de Ann), noirâtres, subeylindriques presque droits vus en dessus, le bout subitement élargi en palette intérieure penchée et se terminant en dehors par un petit onglet externe recourbé en dedans. Appendice inférieur d'un tiers plus court, subtriangulaire étroit, re- courbé en haut, le bout un peu émarginé. © Le 10: segment plat, échancré à son bord postérieur, un peu plus court que le 9°, terminé par un tubercule arrondi noirâtre entre les appendices anals qui sont noirs (longs de 2™m), presque aussi longs. que les deux derniers segments, fusiformes, villeux, mais épaissis après leur milieu, à pointe peu aiguë. Écaille vulvaire noire, plus courte que la moitié du 9 segment, presque entièrement divisée en deux feuilles lancéolées aplaties, à pointes aiguës distantes. Patrie : Queensland (Australie). (Musée brit. et collect. Mac Lach- lan.) N. B. Espèce voisine de l’eustalacta par l'onglet redressé du e ) ; | ( 55 ) 40° segment du måle. Elle s’en distingue par la forme et la longueur -de cet onglet, la palette terminale des appendices supérieurs et l'ap- pendice inférieur à bout mince à peine échancré. Les deux sexes s’en séparent encore ainsi que de la guttata, par la lèvre supérieure noire avec deux taches jaunes, les côtés du thorax jaunes avee une seule bande médiane noire, l'absence de gouttelette basale noire aux ailes supérieures du mâle et le ptérostigma noir. Si la femelle attribuée avec quelque doute à l'eustalacta , lui appar- lient réellement, celle de la regina serait bien différente , son écaille vulvaire n'étant pas prolongée en lames analogues à l'écaille des Uracis, mais de as forme ordinaire, comme celle des S. virgula et brevistyla. Si l’on compare la regina à la brevistyla , on trouve que cette der- nière est beaucoup plus petite, que ses bandes latérales au thorax sont plus étroites, divisées chacune en deux, et que le 7° segment n'est pas jaune en dessus. Le 10° chez le mâle est d'ailleurs dépourvu d'onglet comme chez la virgula , dont la femelle a l’écaille vulvaire plus courte. 82er, SYNTHEMIS VIRGULA, De Selys. d o" Abdomen 54mm; © 55-37. Aile inférieure o“ 29; Q 32. è o Ressemble à la femelle (décrite plus bas), mais il ya au 5° seg- ment un anneau basal clair submédian, qui interrompt la bande noire dorsale, 40° papae plat. Appendices anals pardissant conformés comme ceux de la brevi- styla; les supérieurs longs de Les '/,, poilus ; Ptérostigma long de 2ww 1/,. Les triangles libres, suivis d'un seul rang de cellules. Q Ailes assez étroites, lavées de jaunâtre ocracé, ayant une gout- telette basale noire, occupant l’espace entre la sous-costale et la mé- diane jusqu'à la {re antécubitale; les parties voisines un peu brunies; ptérostigma brun enfumé (long de 5") surmontant environ 5 cel- lules; nervures noires, costale jaune-pâle en dehors jusqu'au bout; membranule blanche; triangles libres aux inférieures, traversés par une nervule aux supérieures, suivis de 2 rangs; 2 nervules basilaires; Quie SÉRIE, TOME XXXVII. (54) 4-5 médianes; une hypertrigonale , 12-14 antécubitales et 8-10 post- cubitales aux supérieures. Corps noir-luisant. Lèvres jaunes, la supérieure largement bordée et traversée de noir. Rhinarium et nasus jaunes, ce dernier avec deux impressions basales brunes. Front jaune, mais le devant largement noir au milieu avec une queue médiane très-épaisse en T, qui rejoint le noir de la base par l’échancrure. Derrière de la tête noirâtre avec une large tache contre chaque œil et le derrière de l’oceiput jaunes. Thorax brun-noirâtre avec une ligne à la suture dorsale, une bande antéhumérale ne touchant pas les sinus , et deux bandes très-sinuées de chaque côté jaune- soufre, la seconde divisée en trois taches. Ab- domen comprimé, grêle, à peine renflé à la base, noir; une tache dorsale au ler segment, une grande tache latérale bilobée aux 2-5°; une tache basale et une médiane latérale arrondie aux 4-7*; une grande tache basale dorsale divisée en deux par l’arête au 8°, occupant ses deux premiers tiers; une tache analogue, mais plus petite au 9°, toutes en taches jaune-citron. Il y a en outre sur les 1-7° une bordure laté- rale jaune inférieure, et aux 8° et 9° une tache basale aussi inférieure qui y fait suite. Appendices anals noirs, cylindriques, séparés par une protubé- rance conique presque aussi longue. Écaille vulvaire très-courte, émarginée. Pieds noirs, intérieur des premiers fémurs jaune-pâle. Patrie : Melbourne (collection Mac Lachlan). — Australie (Musée brit.). N. B. Voisine de la brevistyla. Elle sen sépare par les bandes la- térales jaunes du thorax plus larges, la première non divisée en deux taches et par les pieds tout noirs, excepté l'intérieur des premiers fémurs. Elle ressemble beaucoup aussi à la guttata , mais en diffère par la lèvre supérieure largement bordée et traversée de noir, la raie anté- humérale jaune, la première bande latérale sinuée, le fond de lab- domen noir à dessins jaunes bien circonscrits. La gultata est peut-être du même groupe et non de celui de l’eustalacla, comme je l'avais sup- posé. Sur la capture dans l'Escaut, au mois de novembre 1875, d'un HYPEROODON ROSTRATUM; note par M. Ed. Van Bene- den, membre de l’Académie. Le 17 novembre un animal de grande taille fut capturé dans l’Escaut en aval d'Anvers. Les journaux politiques annoncèrent la prise d’un « poisson marin gigantesque , d'un monstre inconnu jusqu'à présent. » Il fut successivement exhibé à Anvers, à Malines, à Bruxelles et à Louvain. Ayant eu l'occasion de le voir et d'en faire ultérieurement l'acquisition pour le Musée de l'Université de Liége, j'ai pensé qu'il pouvait être utile d'en dire un mot à l’Académie. Le « monstre marin » est un Hyperoodon rostratum , mesurant environ An 20 de longueur. C'est un cétacé du groupe des Ziphioïdes, fort rare sur nos côtes. Il y a 25 ans environ, un autre individu de la même espèce fut capturé dans l’Escaut. Notre regretté confrère M. Wesmael en fit une étude sérieuse et le squelette de l'animal fut préparé pour le Musée de Bruxelles, où il figure aujourd'hui. Je me borne à signaler cet événement zoologique au même titre que l’on annonce de loin en loin l'apparition d’une comète. (36) Recherches sur les dérivés glycériques ; par M. Louis Henry, correspondant de l'Académie. H SUR LES DÉRIVÉS DIALLYLIQUES. . SE — Octobromure de dipropargyle CH Bre. Fai fait connaître récemment (1) un hydrocarbure, d'un genre tout à fait nouveau, le dipropargyle ou diallylényle, CH; — GH. isomère de la benzine CH... L'étude de cet hydrocarbure soulève des questions nom- breuses et paraît devoir me retenir longtemps. Parmi toutes ces questions, j'ai tenu à résoudre tout d'abord celle de son atomicilé ou de sa capacité de combinaison. C'est là en effet un point tout à fait fondamental dans la caractéristique et quant à la constitution chimique dé ce produit, d'une nature si exceptionnelle. J'ai la satisfaction d'r être parvenu. D’après son mode de dérivation du diallyle et sa for- mule, le dipropargyle doit-être octoatomique ou octova- lent. 0 4 8 Gel, Clio Gell, Calle Le, CH. CH, 0 5 5 E? CH, CM, C'est ce que conduit à admettre également le caractère (1) Bulletin de l'Académie, t. XXXVI, p. 41 (1875). (37) biacétylénique où plutôt biallylénique que j'ai reconnu à cet hydrocarbure (1), caractère qu'exprime la formule de structure que je lui ai attribuée provisoirement. Allylène. Composés propargyliques. Dipropargyle. CH, CH, (X) E | | HI C G C H | CH CH CH, | CH, C ni! CH. L'expérience a pleinement confirmé ces prévisions théoriques; j'ai réussi en effet à obtenir un octobromure de dipropargyle CH;Brs- Pai déjà fait connaître antérieurement, en partie du moins, l’action du bròme sur le dipropargyle; cette action, d'une violence et d’une énergie extrême, a pour résultat immédiat la formation d’un tétabromure CHBr,- Ce tétrabrômure, composé liquide, est encore suscep- tible de se combiner au brôme, par addition; l’action est lente à la température ordinaire; elle est rapide et même assez vive alors que Ton mélange le brôme avec le tétra- brômure, légèrement chauffé au préalable; après quelques minutes, le mélange se prend en une masse solide et cris- talline. Inutile d'ajouter que l'on prend une quantité de brôme, en rapport avec les formules C;H;Br, et Br,. La purification du produit est simple : l'excès de bròme s'enlève par un lavage à la soude caustique; en laissant pendant quelque temps, la masse étendue sur une brique poreuse, les parties non solidiliées se séparent aisément. (1) Voir ma notice citée plus haut. (58) Quelques cristallisations dans l’éther amènent le produit dans un état de pureté parfaite. L’octobrômure de dipropargyle constitue un corps d'un aspect extérieur remarquable. Sa solution dans le sulfure de carbone le dépose, par évaporation spontanée à l'air libre, en cristaux d’une transparence et d’une netteté par- faite. Ces cristaux sont ineolores, durs et cassants: ils ré- fractent fortement la lumière; j'en ai obtenu mesurant au moins un centimètre et je ne doute pas que l’on ne puisse en obtenir de fort grandes dimensions, si l’on opérait sur une quantité de ce produit plus considérable que celle que j'ai eue à ma disposition. — Ils sont prismati- queson tabulaires; les figures ci-con- tre représentent les deux formes les plus fréquen- tes; ceux de la figure 2 ont extérieurement Faspect de rhomboèdres. [ls appartiennent au système klinoédrique (sixième sys- tème). Mon collègue et ami, M. Ch. de la Vallée-Poussin, a eu l'obligeance de les examiner. Voici les mesures qu'il m'a remises : Fig. 1. Fig. 2. Notation de Lévy. mjt en avant = 107° 10, Die à gauche = 88" 54. niet à droite — 91° 6’. : Quant aux rapports de longueur et à l'inclinaison des E E f | Mëtt SE Aug SES CN a a SEENEN ke eet ege AT OE ET ( 59 ) axes, il n’a pas été possible de les déterminer; ces rapports exigeraient, pour être calculés, l'existence de modifications mesurables qui n'ont pas été trouvées sur les cristaux observés. La facette b! était trop exiguë pour qu'il fût possible d'en mesurer l'inclinaison. De sa solution dans l’éther , l'octobrômure de dipropar- gyle se dépose, par évaporation spontanée, sous forme d'une poudre grenue cristalline, d'une éclatante blan- cheur ; ces petits cristaux, examinés au microscope, ont la forme, en apparence rhomboédrique, que représente la figure 2. Ce corps est totalement insoluble dans l’eau; l'alcool anhydre, même bouillant, ne le dissout que très-faible- ment; son véritable dissolvant est le sulfure de carbone qui le dissout assez bien, surtout à chaud. Il se dissout aussi dans l’éther, mais moins facilement. Il se fond à 140°-141° et se congèle ultérieurement vers 150° (1). I n’est pas volatil. (4) Voici les points de fusion assignés à quelques autres brômures organiques, connus aujourd'hui : Tétrabrômure de carbone CBr, solide cristallisable, fusion 91° (Bolas et Grove). Bibrômure d'éthylène GH, Br, LS A i Tétrabrômure d'acétylèėne C,H, Br, Ce CS vi Tribrômure d’allyle CB, Br, a ENNE (Wurtz Tétrabrômure de crotonylène C,H,Br, PE — 115°-116° (Caventou, Henninger). Tétrabrômure de diallyle (C;H,0) Dr, gës Së 65° (Tollens). Les points de fusion de divers autres brômures solides ou solidifiables wont pas été déterminés jusqu'ici. ( 40 ) L'analyse de ce produit a fourni les résultats suivants : I. Or 1456 de substance ont donné 0:,2990 de brò- mure d'argent. (Méthode de Carius.) IL. 0%,4965 du même échantillon ont donné 0#,4095 de brômure d'argent. IH. 0#,2981 d'un autre échantillon ont fourni Oe GI de brômure d'argent. IN. 0,360% ont donné 0*,7494 de brômure d'argent. V. 0#,353574 ont donné 0*,7070 de brômure d'argent. VE 0#,5220 ont donné 06732 de brômure Yar- gent (1). Ces chiffres correspondent à la composition centésimale suivante : CALCULÉ. TROUVÉ. CH, Dr, Din E (Gs UL IV. à VI. CG — 72 10,02 » » » » Se » » » ” y H. r 6 0,85 n » Br, — 640 89,13 88,60 88,70 8871 88,4 39,16 88,95 718 Les brômures inférieurs correspondent à la composition centésimale suivante : CH, Br, CH, Dr, CRUE DE ft RE E E 12,90 Hoi E 1,50 1,07 | FRERES ec AE DORE 86,02 Le dipropargyle C,H; —C;H; est isomère avec la ben- zine. Quoiqu'elle présente en général les allures des hydro- carbures saturés, celle-ci jouit néanmoins, comme lon e (1) Pour les dosages V et VI, on a chauffé plus longtemps et à une tem- pérature plus élevée. lus Se RTE OT Eer ET e APTE LA sait, de la propriété de former aussi des dérivés d'addi- tion, notamment avec les corps halogènes , le chlore et le brôme,et l'acide hypochloreux (HO) CI. Ces dérivés répon- dent à la formule générale CHA Xe. il ne sera pas inutile de s'arrêter un instant à l'hexabrômure de benzine C;H;Br, pour le comparer à l’octobrômure de dipropargyle que je viens de décrire. Ces deux produits sont totalement différents d'aspect et de propriétés. L'hexabrômure de benzine C;H,Br, constitue une poussière cristalline, formée de petites aiguilles mi- croscopiques; il est fort peu soluble dans l'éther; son point de fusion est beaucoup plus élevé, il ne se fond qu'au delà de 200, vers 210°; on sait d'ailleurs que l'hexachlo- rure GH, (1) ne se fond lui-même qu'à 157°. (Zachar. eys.) La différence de composition des produits d’addition des deux hydrocarbures isomères C;H,, benzine et dipro- pargyle, démontre une différence profonde dans la consti- tution de ces deux corps, et spécialement dans la structure de leur noyau carboné Ce : dans la benzine, hexaatomique, les divers atomes de carbone constituent, suivant lex- pression reçue, une chaîne fermée, tandis que, dans le dipropargyle,octoatomique, la chaîne carbonée, quelle qu'en soit du reste la disposition intime, est ouverte. Cette différence fondamentale dans la structure des mo- lécules isomères C;H,, benzine et dipropargyle, s'accom- pagne d’ailleurs d’une aptitude fort inégale à la combinai- son par addition : autant en effet est facile et énergique la fixation du bròme sur le dipropargyle, autant elle est diffi- cile sur la benzine. (1) Zeitschrift für Chemie, 1871, p. 295. (42) Je tiens à faire remarquer en terminant que le dipro- pargyle est le premier et le seul composé octoralent dont on ait signalé l'existence jusqu'ici. Ni cette limite extrême de déshydrogénation , C,H, _, ni ce degré si élevé d’ato- micité, n'avaient été atteints. L'hydrocarbure le plus élevé en atomicité, obtenu jusqu'à présent, est le valylène, C;H,, composé découvert en 1865 par M. E. Reboul, dans le cours de ses belles recherches sur les dérivés amyli- ques (1). Le valylène est hexaatomique et forme un bro- mure cristallin C;H;Br,. L'étude de cet hydrocarbure est encore fort incomplète. J’ajouterai encore que parmi les corps simples, on n’en connaît aucun dont l'atomicité s'élève au delà de 6, encore le nombre des élements hexaatomiques est-il fort restreint; on ne peut en effet ranger dans ce groupe que le molyldène et le tungstène. On voit donc qu'avec le dipropargyle on arrive à des composés et à des dérivés d’un type général complétement nouveau. SIL Tétrabromure de diallyle bibromé CH;Brs. Diallyle. Diallyle bibrôme. CH, C,H, Br. N | GH, CH, Br. Tétrabrômure. Tétrabrômure. GH. — Br, C.B; Br— Br; | | CH. — Br, C;H,Br — Br,. Le diallyle bibrômé C;H,Br, se combine vivement avec le bròme, comme le diallyle lui-même, quoique avec une e (1) Comptes rendus, t. LX, p. 805. Se (45) énergie moindre, en donnant un tétrabrômure (C;H,Br;) Dr, Ca Ce produit constitue d’abord un liquide, extrêmement épais, visqueux qui se prend à la longue en une bouillie cristalline. On le débarrasse des parties non solidifiées en le laissant pendant quelque temps étendu en couche mince sur une brique poreuse. On le fait cristalliser dans l'alcool. Ainsi préparé, le tétrabrômure de diallyle bibrômé constitue de petites lamelles d’une blancheur parfaite, d’un aspect nacré, douces au toucher. I se fond à 76°-77°. \ Ce produit se dissout aisément dans l’éther et l'alcool, surtout à chaud. Il est totalement différent quant à l'aspect du tétrabrô- mure de diallyle; celui-ci se fond d’ailleurs à 65° (Tol- lens (1). L'analyse de ce corps à donné les résultats suivants : I. 0,1104 de substance ont fourni 0#,2298 de brô- mure d'argent. (Méthode de Carius.) H. 0,1002 ont fourni 0:,1998 de brômure d'argent. HI. 05",1008 ont fourni 05,2002 de brômure d'argent. Ce qui correspond à la composition centésimale sui- vante : CALCULÉ. TROUVÉ. CH, Br, I. IL. Wi Ce Gas Ta 12,86 » D D Bh ze 8 1,45 Ges P br, 480 85,71 85,87 85,02 85,78 560 100,00 (1) Tollens et Wagner. Berichte der deutschen chemischen Gesellschaft, t. VI, p 589 (1873). ( 44) Je me propose d'examiner prochainement l’action des hydracides halogénés sur le dipropargyle; j'aurai lhon- neur de soumettre à l’Académie le résultat des recherches que j'entreprends dans cette direction. Qu'il me soit permis de signaler, en terminant, les rela- tions que l’on est autorisé à établir entre le diallyle etle dipropargyle, et certains acides polyhasiques, notamment les acides tricarballylique C;H,0, et aconitique C;H,04. Eu égard à son mode de formation à l’aide de la glycé- rine tribromhydrique C;H;Br;, on peut assigner, avec certitude, à l'acide tricarballvlique la formule de structure | CH -- COOH CH, — COOH. : suivante : Ne QE (EENEG Ch, — Coon | Tribromhydrine CH, — Br, CH, Br. i CH Br. CHBr. | | Quant à l'acide aconitique, sa constitution peut ètre exprimée, suivant toute probabilité, par la formule CHO, CH, — (COONS CH, — COOH | E — ei DEER I CH — COOH. S'il en est ainsi, on peut s'attendre à ce que, par l'élec- trolvse de leurs sels alcalins, ces acides donnent l’acide PEE oui sis dd éme EES blé) S EENES de dd e ét mé be de cut à bu "sé dis + ( 45 ) tricarballylique le déallyle CH, — CH, et l'acide aconiti- que (1) le dipropargyle. C;:H; —C:H;. Il est également permis d'espérer qu'à l'aide du tribrô- mure de propargyle (C;H;)Br-Br, et du cyanure de potas- sium, il sera possible de réaliser la synthèse de l'acide aconitique, comme a réussi celle de l'acide tricarballylique en partant du tribrômure d'allyle (CH. Br-Br2. Je me propose d'essayer ces diverses réactions, aussitôt que l'état d'avancement des recherches dans lesquelles je suis engagé, pour le moment, me le permettra. Nouvelles synthèses de l'acide hyposulfureux et de l'acide trithionique, par M. Walthère Spring. De l'acide hyposulfureux. Dans une note sur la constitution de l'acide hyposulfu- reux que j'ai eu l'honneur de présenter dernièrement à l’Académie, j'avais pris date pour quelques réactions que je croyais devoir contribuer à résoudre le problème de la constitution de cet acide ; l'Académie voudra bien me per- mettre de lui communiquer aujourd'hui le résultat de mes recherches à ce sujet. Rose avait émis l'opinion que les hyposulfites retenaient au moins une molécule d'eau qu'ils ne pouvaient aban- donner sans subir une décomposition immédiate ; d’après (1) On sait que M. Berthelot a déjà obtenu de l'acétylène par l'électro- lyse d'une solution alcaline d’aconitate de potassium. Ce fait est de na- Lure à m’encourager à reprendre cette réaction dans d’autres conditions. Bulletin de la Société chimique de Paris, t. IX,p. 105, année 1868. ( 46 ) ce chimiste, cette eau ne jouait donc pas le rôle d’eau de cristallisation, mais faisait partie de la constitution de ces sels. I-résultait de cette manière de voir que l'acide hypo- sulfureux ne pouvait pas être exprimé par la formule H25205 comme l'admeltait déjà la théorie des types, mais bien par H?2$205 + H5O ou bien H#S206. C'est celte circonstance qui, il y a quelques années, permit à M. Dupré (Zeitschrift für Chemie, 1867, p. 510) de con- clure de l'action de lanhydride sulfureux humide sur le potassium que lacide hyposulfureux était Fanalogue de l'acide formique et que les hyposulfites devaient être représentés par la formule NaHSO? analogue de NaHCO?. De son côté, Odling exprima d'une façon analogue les rapports qui existent entre l'acide hyposulfureux, Facide sulfureux et l'acide sulfurique par les formules : š SC Eë H0 so S "ét So Entre temps Pape (Annales de Poggendorf, t. 422, p. #10) démontra que les hyposulfites pouvaient exister sans eau et ce fait fut confirmé depuis par plusieurs chi- mistes (1), M. Schorlemmer (Zeitschrift f. Chemie, 1869, p. 627) en conclut alors le premier que les opinions de Dupré et d'Odling sur la constitution de l'acide hyposul- fureux devaient être abandonnées et qu’on devait revenir à la formule H2$205. On sait qu'assez longtemps auparavant Koene (Bulle- tins de l'Académie royale de Belgique, t. X,p.59) avait déjà admis une formule analogue, en ce sens qu'il considéra (4) Voir les travaux de Letts. Berichte der deutschen chemischen Gesellschaft, 1870, p. 922. Wes (47) l’anhydride de cet acide comme de l'anhydride sulfurique dans lequel un atome d'oxygène serait remplacé par un atome de soufre, soit done SOZS au lieu de SO2.0. Ces idées ont été résumées par la formule qu'Odling proposa après lui, formule qui représentait l'acide hyposulfureux comme dérivant du type conjugué : il n 0. Sch H25 En 1870, M. Blomstrand (Berichte der deutschen che- mischen Gesellschaft, 4870, p. 957) souleva la question de savoir si anhydride hypotétique de Facide hyposulfu- reux $20? devait être considéré comme loxyde d'un radi- cal particulier SSO.0, ou bien comme le sulfure du radical sulfuryle S02.S; en d’autres termes, si l'on devait écrire le sel de sodium de cet acide Na?0?SSO ou Na?OSSO?. M. Blomstrand, s'appuyant sur les réactions qu'il a insti- tuées en vue de résoudre cette question, a émis l'opinion qu'il était plus probable que lanhydride de cet acide soit SS0.0 que S02.S. Cette opinion est partagée par plusieurs chimistes parce qu'elle semble confirmée par les recher- ches de M. Buchanan (Berichte der deutschen chemischen Gesellschaft, 1870, p. 485) qui a tenté de dévoiler la con- stitution de l'acide hyposulfureux par la voie analytique, c’est-à-dire en étudiant l’action du pentachlorure de phos- phore sur les hyposulfites. H admet que si la constitution de l'acide hyposulfureux était HS.SO2.0H ou, en d’autres termes, si l'acide renfermait le radical SO?, le chlorure de phosphore devrait donner naissance à du chlorure de sul- furyle lequel par son action sur l'eau devrait régénérer l'acide sulfurique. Il ne lui a pas été possible de découvrir ( 48 ) du SO?C}2? dans les produits de la réaction, mais bien des traces de chlorure du thionyle, et il en conclut qu'il demeure comme fait certain qu’on ne peut admettre l'existence du radical SO? dans l'acide hyposulfureux. Avant d'aller plus loin, je ferai remarquer que les dé- ductions que M. Buchanan tire de ses recherches, ne sont pas à l'abri de toute objection; il a en effet opéré sur de l’hyposulfite de plomb renfermant une molécule d'eau de cristallisation; celle-ci doit avoir pris part à la réaction et peut avoir agi d'une façon perturbatrice; de plus, Faction de loxychlorure de phosphore sur le sulfochlorure, ainsi que l’action du chlorure de sulfuryle sur le sulfochlorure ` de phosphore sont peu ou point connus (Blomstrand), il est possible que ces corps ne puissent exister en présence Pun de Pautre et c'est à cette circonstance que pourrait être due la présence du chlorure de thionyie. Enfin si le radical de l'acide hyposulfureux était $20, le chlorure de phosphore aurait dù donner CPS?0 corps qui aurait dû se décomposer en SO CP et S puisque la présence de CPS0 n'a pu être constatée. M. Buchanan n'a pu constater la présence de soufre libre. Je me suis proposé d'étudier cette question. Mais assez sur ce point el revenons aux phases par les- quelles ont passé les opinions des chimistes sur la consti- tution de l'acide qui nous occupe pour le moment. | J'ai déjà rappelé dans une note que j'ai eu l'honneur de présenter à l'Académie les vues de MM. Kekulé et Linne- man et de M. Mendelejeff sur cet acide, je ne m'y arréterai donc plus pour le moment. Tout récemment M. Michaelis a soulevé une nouvelle question dans un remarquable mé- moire sur les combinaisons du soufre (Ann. der Chemie, p. i, t. 170, 1873). D'après lui, il n'existe aucune relation dE CR GR NEE E, eh EE de (49) directe entre les acides sulfurique, sulfureux et hyposul- fureux dans lesquels il admet que le soufre possède des atomicités différentes et qu’il formule ainsi : S"102(0H}?, S10 (0H)?, S" (OH) — O — S" (0H) ou SỌ (0H)— 0 — tt, On voit par ce qui précède que deux questions sont à résoudre pour le moment, en premier lieu celle de savoir si l’on peut ou non admettre l'existence du radical sulfuryle dans l'acide hyposulfureux et en second lieu si réellement l'acide hyposulfureux ne peut être dérivé de l'acide sulfu- rique par substitution d'un atome d'oxygène par un atome de soufre comme l’admet la théorie des types. Occupons-nous d'abord de la solution de ee dernier point : mais avant d'entreprendre l'exposé des recherches que j'ai faites à ce sujet, je ferai remarquer qu'il existe déjà une réaction militant en faveur de l'opinion que l'acide hyposulfureux n'est que de l'acide sulfurique dans lequel un atome d'oxygène serait remplacé par un atome de soufre; c’est la réaction instituée par M. Girard qui a obtenu de l’hyposulfite de sodium en faisant bouillir du soufre en ileursavec une solution de pyrosulfate de sodium (Comptes rendus, t. LVI, p. 797). Je reviendrai plus tard sur le mé- Canisme de cette réaction qui ne manque pas d'intérêt. Un fait universellement connu est que le pentasulfure de phosphore, en réagissant sur un corps renfermant de l'oxygène typique, le lui enlève pour y substituer du soufre ; je me suis proposé de dériver de cette façon les hyposul- fites des sulfates. On ne pouvait à priori répondre du suc- cès d'une telle réaction à cause de la nécessité dans laquelle On se trouvait d'opérer par voie sèche. Le sulfate d'ammo- nium m'a paru se prêter le mieux à celte réaction; il pos- sède en effet un point de fusion relativement bas et peut 2° SÉRIE, TOME XXXVII. Mo. Bot. Garden, 1896. ( 30 ) être maintenu en fusion sans se décomposer rapidement, la décomposition ne commencant, comme on sait, qu’à 280°, tandis que la fusion se fait à 140° (Würtz, Dict. de chimie). Voici le détail de l’opération : Du sulfate d’'ammonium préalablement fondu dans une . Capsule de porcelaine afin de le dessécher complétement a été pulvérisé et la poudre fine introduite dans la panse d'une cornue tubulée. Au-dessus de cette poudre se trou- vail le pentasulfure de phosphore nécessaire à la réaction en morceaux de la grosseur d’un pois. Des essais compa- ratifs m'ont démontré que l'opération marchait le mieux dans ces conditions. A la tubulure de la cornue était adapté un tube en verre amenant de l’anhydride carbo- nique et le col de la cornue pénétrait dans un récipient. L'appareil ainsi disposé, Ur ai fait passer un courant d’anhydride carbonique et quand tout l'air en fut chassé, J'ai chauffé la panse de la cornue sur un bain de sable. Dès que le sulfate d’ammonium commence à fondre, la réaction se produit. Il s'élève des vapeurs blanches qui se conden- sent dans le col de la cornue et dans le récipient, il se dé- gage un peu d’ammoniaque, la matière qui se trouve dans la panse de la cornue se boursoufle, enveloppe les mor- ceaux de sulfure de phosphore et la réaction devient très- vive. Les produits de la condensation des vapeurs sont de trois natures différentes : dans le récipient et dans la partie du col de la cornue la plus éloignée de la source de chaleur se condensent des polysulfures d’ammonium en belles aiguilles jaunes, puis de faibles quantités de sulfite d'am- monium en fines aiguilles et enfin dans la partie du col de la cornue qui surplombe presque la panse, il s'était formé une croûte de près d’un millimètre d'épaisseur d'une | il 4 4 | d K A d À ZS RER PRE RE PETER EEN AE S A PERS ER ne EE RE PRE | (51 ) substance blanche un peu jaunie par du soufre et dont la cassure présentait une texture cristalline. Cette masse est déliquescente, je Tat dissoute dans l’eau et fait cristalliser ; les cristaux que j'ai obtenus ainsi, des écailles rhomboïdales, n'étaient autre chose que de l’Ayposulfite d'ammonium. La matière restée dans la panse de la cornue renfermait une grande quantité d’hyposulfite d'ammonium, du sulfate et un sulfophosphate d'ammonium ainsi qu'un peu de trithionate d’ammonium sur la formation duquel je revien- drai plus tard. Pour écarter tout doute sur l'identité de l’hyposulfite ainsi obtenu, j'en ai fait l'analyse qui m'a donné les résultats suivants : S = 38,55 °/, (HFN)? = 19,65 °/, d'autre part, la composition centésimale de l'hyposulfite d'ammonium est : S = 58,56 T (HN)? = 20,48 °}, On voit par cette expérience qu’à première vue l’action du pentasulfure de phosphore sur le sulfate d’ammonium ne paraît pas être nette; il faut encore se rendre compte de la formation du sulfure d'ammonium et du sulfite acide; de plus, le fait de la sublimation de l’hyposulfite d'ammonium devait aussi recevoir une confirmation directe, la propriété dont jouirait ce sel de pouvoir se sublimer dans certaines conditions étant mise en doute par plusieurs chimistes. Je crois avoir répondu à ces trois questions par les expériences suivantes : 4° Formation des polysulfures d’'ammonium. La forma- ( 52 ) tion de ces sels pouvait provenir d’une sulfuration totale du sulfate d'ammonium par le sulfure de phosphore. Dans la manière ordinaire de se comporter vis-à-vis des corps renfermant différents atomes d'oxygène, le sulfure de phos- phore ne substitue du soufre qu'à la place des atomes d'oxygène typiques; il fallait donc démontrer que P? S peut aussi substituer du soufre à d’autres atomes d'oxygène. À cet effet, J'ai fait passer un courant d'anhydride sulfureux sur du sulfure de phosphore maintenu en fusion dans un tube de verre de Bohème et l’anhydride sulfureux a été complétement réduit. 2° Ja repris l'étude de l’action de la chaleur sur lhy- posulfite d'ammonium ceristallisé ainsi que sur l'hyposul- fite d’'ammonium sec. Pour cela j'ai chauffé en premier lieu dans une cornue de verre de l'hyposullite d'ammonium cristallisé : à 60° le sel commence à fondre dans son eau de cristallisation, celle-ci se dégage à mesure que la tem- pérature s'élève et les dernières traces se volatilisent à 135°. Au delà de 135° il s’est sublimé du sulfite acide d’'ammonium qui s’est condensé dans le col de la cornue en grandes aiguilles incolores. L'action de la chaleur ayant été continuée, des vapeurs blanches se sont élevées dans la cornue et se sont condensées à la naissance du col sous forme de croûtes blanches; il s'est également dégagé de l’ammoniaque, mais pas de sulfure d’ammonium. La tem- pérature maxima a été 160°. Dans le récipient s'étaient condensés de l’eau de cristallisation et du sulfate d'ammo- nium. Dans le col de la cornue j'ai reconnu la présence du sulfite acide, du soufre et de beaucoup d’hyposulfite dam- monium. La panse de la cornue renfermait de l'hyposul- fite non décomposé en grandes quantités, du sulfite d'am- monium et du soufre. (55 ) La seconde expérience a eu lieu sur de l'hyposulfite dépourvu complétement d’eau: ce sel se comporte d'une façon identique au précédent sous l'action de la chaleur; l'eau ne joue done aucun rôle dans cette action. Ainsi que le fait a déjà été constaté, lors de l’action de la chaleur sur l'hyposulfite d'ammonium, il se volatilise du sulfite d’ammonium avec de l’hyposulfite et il reste du soufre avec le sel inaltéré. En comparant ces résultats à ceux de l’action du sulfure de phosphore sur le sulfate d'ammonium, on peut trouver la cause de la formation des trois sels mentionnés plus haut; on voit qu'ils sont un produit de l’action P? Së d'une part et de la décomposition de l’hyposulfite formé d'autre part. Cette expérience démontre, je crois, que Fon peut dé- river l'acide hyposulfureux de l'acide sulfurique en sub- stiluant un atome de soufre à un atome d'oxygène. Avant de terminer ce paragraphe, je ferai observer que la sublimation de l’hyposulfite d’ammonium m'a paru plutôt être due à une dissociation qu’à une véritable vaporisation, car, dans aucune des nombreuses expé- riences que j'ai faites à ce sujet, les vapeurs n'étaient transparentes. Occupons-nous maintenant de la solution de la question soulevée par M. Blomstrand, à savoir si l’on doit admettre ou non l'existence du radical SO? dans l'acide hyposulfu- reux. i La réaction que je viens de décrire ne permet pas de préciser si, lors de la transformation de l'acide sulfurique en acide hyposulfureux, c’est un atome d'oxygène du ra- dical ou un atome d'oxygène typique qui est substitué par du soufre; cest par une synthèse directe de l'acide ou d’un (54) de ses sels que l’on pouvait résoudre le problème. A ‘cet effet comparant les deux formules typiques : s0:2 o et szg» je me suis demandé si l'on ne pourrait obtenir Tacide hyposulfureux d’une façon analogue à l'obtention de l’acide sulfurique par l’action de son anhydride sur l'eau, à savoir en substituant H?S à H20. U m'a paru que si cette expérience était conronnée de succès, la formule typique de l'acide hyposulfureux recevrait une nouvelle confirmation. Dans une première expérience, j'ai fait arriver dans un flacon à trois tubulures convenablement refroidi de lan- hydride sulfurique, du sulfide hydrique et de l'ammoniaque secs; ces trois corps se sont combinés, avec mise en liberté de soufre, en un corps cristallisant en paillettes d’un blanc éclatant. Le corps ainsi obtenu est excessivement avide d’eau avec laquelle il se décompose entre autres en sulfure d’ammonium et trithionate d’ammonium: je n'ai donc pas obtenu lhyposulfite cherché, mais un corps paraissant être un sel d’un acide polythionique; l'étude de ce corps me détournant pour le moment du but que j'avais en vue, je l’ai remise à une époque ultérieure. L'insuccès de cette réaction peut avoir sa source dans l’action réductrice que le sulfide hydrique a dû exercer sur l’anhydride sulfurique encore libre : en faisant entrer celui-ci dans une combinaison, il devenait probable qu'on éliminerait la cause de sa destruction. Pour cela, je me suis procuré du sulfamate d’ammonium en recevant de l’anhy- dride sulfurique dans une atmosphère d’ammoniaque main- tenue en excès; j'ai obtenu ainsi un produit blane en poudre SR SC a a STEET EE EE EE E EE SE EE EES SE ( 55 ) cristalline devant répondre à la formule S053 + 3 NH5. (JAGQUELAIN. J'ai fait ensuite arriver dans le ballon dont les parois étaient tapissés de ce sulfamate d’ammonium , un courant de sulfide hydrique traversant de l’eau bouillante. Ce sul- fide hydrique est absorbé en grande quantité et le sulfa- mate se résout sous son influence et sous celle de la vapeur d'eau en un liquide tenant en suspension un peu de soufre et ne tenant en solution, pour ainsi dire, que de l’hyposul- fite d’ammonium. Je wai trouvé à côté de ce sel que de faibles quantités de sulfure d’ammonium qui pouvaient provenir de l’action du sulfide hydrique sur l'ammoniaque en excès, ainsi qu’un peu de sulfate dont la présence s'ex- plique aussi et fort peu de trithionate d’ammonium. Le résultat de cette réaction est aussi satisfaisant que possible quand on songe à la difficulté qu'on éprouve à saturer convenablement l’anhydride sulfurique par l’ammoniaque; il reste toujours du SOS libre, et c’est peut-être à sa pré- sence qu'est due la formation du trithionate d’ammonium ; les conditions sont, en effet, alors à peu près les mêmes que celles dans lesquelles j'ai fait ma première expé- rience. Je crois done que l’on peut conclure de ces deux syn- thèses ainsi qu’en s'appuyant sur les propriétés de l'acide byposulfureux, que l’acide hyposulfureux est de l'acide sulfurique dans lequel un atome d'oxygène typique est remplacé par du soufre, ou bien en reprenant la manière de voir de M. Mendelejeff, que l'acide hyposulfureux est l'acide sulfonique du sulfide hydrique et peut, par consé- quent, se représenter par la formule HS, SOSH. Il ne reste done plus qu'un point à éclaircir pour que la constitution de l'acide hyposulfureux soit fixé, c’est celui (56 ) de savoir si le radical SO? est symétrique ou non; en d'au- tres termes, si le soufre du radical est en contact direct ou uon avec le soufre typique. On sait que M. Keknlé, s'ap- puyant sur les produits de la réduction des acides sulfocon- jugués a émis l'opinion que le radical SO? n'était pas symé- trique; cependant plusieurs chimistes ne s'étant pas ralliés de nouvelles recherches à ce sujet : c’est le travail qui m'occupe pour le moment. De l'acide trithionique. Lors de Faction du pentasulfure de phosphore sur le sulfate ammonium, il s'était formé de petites quantités de trithionate d’ammonium; Cétait là un fait dont linter- prétation ne devait pas manquer d'intérêt. La manière la plus simple de concevoir la formation de ce trithionate est de supposer que le sulfure de phosphore ait agi à l'instar d’un sulfanhydride sur deux molécules d’hyposulfite d’ammonium d’après l'équation : AHIN)* S205 + Dags — (HIN S506 + 2AmPSS (? ); en d’autres termes , le P?S* aurait soustrait à l’hyposulfite d’'ammonium une molécule de sulfure pour donner ainsi naissance au trithionate. ` Il est évident que la voie sèche ne pouvait me permettre’ de vérifier cette hypothèse, les trithionates se décompo- sant trop facilement à une température tant soit peu élevée; j'ai donc suivi la voie humide. A cet effet, je me suis procuré de l’hyposulfite de plomb par double décomposition, et je Tat dissous dans de Th: posulfite de potassium. Cette solution a été ensuite portée à celte manière de voir, il devient important de faire RS SR ES E ET RS TE TEE EE EE DEENEN (57) à l'ébullition. Pendant les premiers moments, il s’est formé une petite quantité de sulfure de plomb, mais la produc- tion de ce corps a été bientôt enrayée. Après filtration, Jai de nouveau porté le liquide à l'ébullition, il s’est de nouveau formé une certaine quantité de sulfure de plomb qui a été séparée par filtration et ainsi de suite jusqu'à précipitation presque complète du plomb. La solution a été ensuite évaporée avec précaution, puis additionnée d'al- cool. Le précipité formé a été dissous dans l'eau et addi- tionné d’une nouvelle quantité d'alcool, ce qui a déterminé la cristallisation d'une certaine quantité de trithionate de potassium. La décomposition de lhyposulfite de plomb et de potassium m'ayant paru trop lente, j'ai essayé si le sel correspondant d'argent et de potassium ne conviendrait pas mieux à cette réaction. J'ai employé Phyposulfite double d'argent et de potassium obtenu par précipitation d’une solution d’hyposulfite de potassium par une solution de nitrate d'argent. L'opération marcha d’une facon identique à la précédente : dès qu’il y eut une certaine quantité de sulfure d'argent formé, il ne s’en produisit plus à moins que lon n’enlevàt par filtration la quantité de sulfure formée. Cette fois encore le liquide a laissé cristalliser du tri- thionate de potassium et même en plus grande quantité que précédemment. Les caractères physiques et chimiques du sel ainsi obtenu étaient tellement caractéristiques que j'ai cru superflu de l'identifier par une analyse. Enfin j'ai répété l'expérience en me servant de lhypo- sulfite de sodium et de mercure, tel qu’on l'obtient en ver- Sant une solution de chlorure mereurique dans une solu- tion d’hyposulfite de sodium jusqu’à ce que le précipité ( 58 ) formé ne se redissolve plus. Lors de l’ébullition le sulfure de mercure se précipite en montrant les mêmes phé- nomènes que la précipitation des sulfures de plomb et d'argent. On peut, dans ce cas, obtenir la précipitation totale du mercure sous forme de sulfure. La liqueur ainsi obtenue donnait avec netteté les réactions de l'acide tri- thionique; je Tat concentrée avec précaution au bain-marie jusqu’à ce qu’elle commence à se troubler par précipitation de soufre, puis je lai agitée avec de l'alcool absolu. Au bout de quelque temps il s'était formé deux couches dis- tinctes de liquide, l’une très-mobile occupant la partie supérieure du vase et l’autre sirupeuse. La partie supé- rieure décantée renfermait la presque totalité du trithio- nate de sodium et la seconde de l’hyposulfite et du sulfate de sodium. La solution du trithionate a été concentrée au bain-marie aussi fortement que le permettait l'extrême instabilité du sel, puis versée après filtration dans de Fal- cool absolu; il s'est produit un léger précipité blanchâtre qui s’est redissous par l’agitation et le lendemain les parois du vase ont été tapissées de petites aiguilles cristallines que j'ai soumises à l'analyse. Voici le résultat obtenu en ne mattachant qu'à déterminer le rapport proportionnel du sodium au soufre, éliminant par D la nécessité de prendre la quantité d'eau de cristallisation de ce sel en considération. S5 : Na? — 20,87 (calculé.) S5 : Na? — 19,52 (trouvé.) j'attribue cette différence aux impuretés que retenait le sel et dont je pat pu le débarrasser. Ce sel était donc du trithionate de sodium. Si je suis entré dans quelques détails sur cette dernière (59 ) expérience, c’est qu'il était à ma connaissance que le tri- thionate de sodium n'avait pas encore pu être obtenu jus- qu'à ce jour; en effet, d'après M. F. Kessler (Ueber die Polythionsauren, Pose. Any., t. 74, p. 249), Langlois et Plessy n'auraient pu réussir à obtenir ce sel par l’action de l’anhydride sulfureux sur l’hyposulfite de sodium ; lui- même a essayé de le préparer en mélangeant des quantités équivalentes de trithionate de potassium et de tartrate acide de sodium dans aussi peu d’eau que possible, mais sans Succès. Il] paraitrait donc que la décomposition de l'hypo- sulfite de sodium et de mercure par l’ébullition serait le procédé le plus rationnel pour l'obtenir; je suis occupé Pour le moment à en préparer de plus grandes quantités, afin de pouvoir étudier en détail les propriétés de ce sel. Je ferai remarquer que les quantités de trithionate de potassium et de sodium ainsi obtenus étaient relativement faibles, ce qui s'explique quand on considère qu'ils se sont formés dans des conditions voisines de celles qui contri- buent à leur destruction. C’est peut-être dans ce fait qu'il faut chercher la raison pour laquelle la génération de cet acide par cette voie a échappé à plusieurs chimistes qui ont étudié les produits de décomposition des hyposulfites doubles. Il résulte de ces faits que lorsqu'on enlève à deux molécules d'un hyposulfite une molécule de sulfure , d se forme le trithionate correspondant. En vue d'interpréter ce résultat, rappelons-nous la formule de l’acide hyposul- fureux, telle qu’elle paraît la plus probable pour le mo- ment : HO . SO?. SH. Cet acide est bibasique, mais la valeur de ces deux basi- ( 60 ) cités n’est pas la même ; d’une part, en effet, il joue le rôle d’un oxacide et d'autre part d’un sulfacide; on peut par conséquent dire que, comme oxacide, il est unibasique et que, comme sulfacide, il est unibasique. Ces considérations émises, on peut se demander quel serait l'anhydride d'un tel corps. Cette question a été ré- solue pour la première fois par MM. Kekulé et Linnemann (Ann. der Pharm., CXilI, p. 270); ces chimistes ont dé- montré par la synthèse de l’anhydride thiacétique que des acides unibasiques pouvaient aussi donner naissance à des anhydrides, bien que la théorie des types ait prétendu le contraire ; seulement, dans ce cas ce sont deux molécules de lacide unibasique qui perdent les éléments de H20 ou de H?S en se soudant. Si nous considérons done l'acide hyposulfureux comme sulfacide unibasique, nous devons nous représenter la formation de son anhydride comme suit : kO. SO? Ss KO .S0?.S D Pb—=KO.S0?.S.S0?. OK + PbS, réaction tout à fait identique à celle instituée par MM. Kekulé et Linnemann. C'H50 Gasos > Pb = C'HFOSOCEHS + PDS. On trouve encore une preuve du fait que l'acide trithio- nique est le sulfanhydride de l’acide hyposulfureux dans les réactions suivantes : Si l'on fait bouillir du trithionate de potassium avec du sulfure de potassium, il se forme de l’hyposullite de potas- sium sans dépôt de soufre (Chancel et Diacon, Sur les réac- | (61) lions et la génération des acides de la série thionique, Coweres RENDUS, LVI, p. 710) : K?S -+ K?S506 — 2K?25°205, réaction qui démontre que l'acide trithionique peut, à l'instar d’un anhydride, régénérer son acide par une réac- tion inverse à la précédente, J'ai vérifié l'exactitude de ces faits en essayant de reconstituer l'hyposulfite de plomb en partant d'un trithionate : pour cela j'ai fait bouillir du sul- fure de plomb en excès avec du trithionate de potassium ; au bout de quelque temps le sulfure de plomb a été par- semé de paillettes brillantes d'hyposulfite de plomb. Mais ici, Comme dans la réaction inverse, dès qu'il y a une cer- taine quantité d'hyposulfite formé, les progrès de la réac- lion sont enrayés, car elle tend à marcher alors en sens inverse On voit que ce fait donne la raison de l'arrêt qui se produit dans la précipitation du sulfure métallique lors de la décomposition des hyposulfites doubles de plomb, d'ar- gent et de mercure. Enfin on peut encore ajouter comme preuve à l'appui de ce qui précède, l'action de l'eau sur les trithionates : on Sait que l’eau les décompose en sulfate avec précipitation de soufre et dégagement d’anbydride sulfureux, phéno- mènes qui se passent comme suit si l'acide trithionique est l’anhydride de l'acide hyposulfureux : HO . S0? a S0? OH + HOH = HO. S0? . OH + HS. S0? . OH, acide hyposulfureux qui se décompose en soufre et en SO? au fur et à mesure de sa formation. On voit que l’acide hyposulfureux appartient à la classe des corps qui peuvent donner des anhydrides intra-molé- culaires et extra-moléculaires, pour me servir de l’expres- (62) sion proposée par M. Baeyer. La théorie fait prévoir lexis- tence de deux anhydrides intra-moléculaires et de deux anhydrides extra-moléculaires : Ham — H20 = $20? Hatz — HS = S05 2H?S05 — H?S = R?S+0° 2H?S05 — H?0 = Har, Les réactions que je viens de décrire démontrent, je crois, que SO? et H?S505 sont deux de ces anhydrides; le premier de tous, S?0?, est peut-être contenu dans le corps bleu, découvert par Vogel, que l’on obtient en dissolvant du soufre dans l’anhydride sulfurique. Quant à l’anhydride extra-moléculaire H2S105, son existence est peu probable. Ce travail a été fait à l'Institut chimique de l’Université de Bonn; je manquerais à un devoir que me dicte la re- connaissance, si je n’exprimais ici les sentiments de ma plus vive gratitude envers son illustre directeur, qui 3 bien voulu m'aider de ses savants conseils pendant l'exécution de ce travail. Contributions à la théorie du blanchiment; par M. P. De Wilde, professeur de chimie à l'École militaire et à l’Université libre de Bruxelles. On lit dans le tome I, page 219, de la seconde édition des Éléments de Partde la teinture, par Berthollet , le pas- sage suivant : a Les filaments du lin et du chanvre sont enveloppés » de parties colorantes, qui y sont retenues par une véri- » table combinaison et qui couvrent leur blancheur; mais » lorsque ces parties colorantes se sont combinées avec (65 ) l'oxygène, elles se trouvent réduites à un terme de dé- Composition où elles sont devenues solubles par les alcalis, de sorte que la potasse à laquelle la lessive doit son action les dissout et les sépare de filaments : en répétant plusieurs fois l'exposition sur le pré ou lim- mersion dans l'acide muriatique oxygéné et l’action des lessives, on sépare toutes les parties colorantes des fila- ments qui jouissent alors de leur blancheur. Le til perd par ces opérations près du tiers de son poids. » A la page suivante il ajoute : « Le blanchiment dont nous donnons la description est donc l'effet de l’action » successive des lessives et de l'acide muriatique oxy- » géné. » On sait que la découverte du blanchiment par le chlore est due à Berthollet. Cet illustre chimiste considérait le chlore comme étant de l'acide muriatique oxygéné. Il basait cette opinion erronée sur la propriété que possède l'eau de chlore exposée à la lumière solaire, de dégager de l'oxygène et de donner lieu à la formation simultanée de l'acide Chlorhydrique (acide muriatique). Les chimistes Savent aujourd'hui que dans cette réaction c’est le chlore, Corps simple, qui décompose l'eau pour former de l'acide Chlorhydrique aux dépens de l'hydrogène de ee liquide et que l'oxygène devient libre. Au point de vue pratique du blanchiment, l'erreur de Berthollet importait peu. L'illustre chimiste avait remarqué que les matières colorantes , résineuses, gommeuses, etc., Qui souillent la pureté des fibres végétales, devaient subir préalablement une oxydation avant de pouvoir se dissoudre dans les lessives alcalines. C’est en partant de ces considérations que Berthollet a donné la recette pratique du blanchiment. En deux mots, v y v v Yy Y y y d Ki ( 64 ) le procédé qu’il décrit consiste dans une succession de traitements alcalins, alternés avec des immersions dans leau de chlore, dans des bains acidulés et des expositions sur le pré. Les procédés de blanchiment actuels ne diffèrent pas au fond du procédé décrit par Berthollet. A l’eau de chlore on a substitué l'emploi du chlorure de chaux et aux les- sives caustiques, les alcalis carbonatés et les savons de colophane. Ces agents sont d'un maniement plus commode, leur action est plus facile à régler et la fibre souffre moins que par le procédé primitif. Mais le blanchiment ne s'applique pas exclusivement aux fibres textiles des tissus, ete. On blanchit aussi des quantités énormes de fibres végétales destinées à la fabri- cation du papier. La rareté du chiffon, comparée à l'énorme quantité de papier que notre époque consomme, a conduit l'industrie de la papeterie à la recherche de suc- cédanés pour remplacer totalement ou partiellement le chiffon, seule matière première jadis employée à la fabri- cation du papier. Aujourd'hui le sparte, la paille de céréales et d’autres ` tiges de graminées, le jute, les déchets de nattes de Rus- sie, fabriquées avec le liber d’un tilleul, et le bois même, sont employés à la fabrication du papier. Pour ia fabrica- tion du papier blane on exclut le jute, la natte de Russie et le plus souvent le bois, à cause de la difficulté qu’on éprouve de blanchir les fibres de ces matières, (Les fibres de bois dont nous parlons ici sont celles qu'on obtient par la désagrégation chimique du bois et nullement la pâte de bois obtenue par ràpage mécanique et connue sous le nom de pâte de Voelter..) Le traitement de toutes ces matières, et spécialement ( 65 ) de la paille et du sparte, leur transformation en pâte blanche ne peut se faire en suivant le procédé de blanchi- ment appliqué aux tissus et aux fils. Non-seulement le procédé serait long et dispendieux, mais la matière serait difficile à désagréger et à transformer en pâte. Aussi on procède autrement : après une division méca- nique suffisante, ces matières sont généralement enfer- mées dans de grands autoclaves avec une lessive de soude caustique passablement concentrée. En moyenne il faut près de 1 kilogramme de soude caustique pour 5 kilo- grammes de matière première. L’autoclave reçoit de la vapeur à 4-5 atmosphères de pression, par injection directe, ou bien on l'amène par chauffage direct à la même pression. Quand on opère avec le bois on doit même pous- ser la pression à 11-12 atmosphères. La durée de l'opéra- tion varie de 8-12 heures. Il faut done le contact prolongé, à haute température, d'une lessive assez concentrée de soude pour dissoudre les matières incrustantes, résineuses, gommeuses, etc., qui souillent les fibres végétales et pour permettre à celles-ci de se transformer en pâte. Cela prouve évidemment la grande résistance de ces matières à l’action directe des alcalis. Encore cette dissolution n'est-elle jamais complète ; Car certaines matières résistent énergiquement et pour les détruire et les dissoudre et ne laisser que la fibre avec la blancheur qui lui est inhérente, il faut, après un lavage Soigné de la pâte, les attaquer par de fortes doses d'une dissolution de chlorure de chaux. Ceci est surtout vrai pour le bois et le jute. Avec ces matières premières on obtient toujours une pâte plus au moins nuancée de Jaune. En outre, inconvénient très-grave , si toutes ces opéra- 27° SÉRIE, TOME XXXVII. ( 66 ) tions ne sont pas conduites avec beaucoup de soins et de prudence, les fibres souffrent énormément dans leur soli- dité. La résistance si grande qu'opposent aux lessives alca- lines les matières colorantes, incrustantes, etc., qui accom- pagnent les fibres végétales, nous a engagé à faire des recherches ayant pour but de rendre l'attaque de ces matières plus facile. Nous avions devers nous l'opinion de Berthollet et les expériences de M. Orioli sur le bois. Cet habile manufacturier traitait le bois par l’eau régale et le rendait ainsi facilement attaquable par les alcalis qui dis- solvaient les matières inerustantes, ete. I obtenait ainsi des pâtes faciles à blanchir. Mais l'emploi de l'eau régale est incommode, coûteux et peu pratique; toutefois la faci- lité avec laquelle ce mélange acide agit sur les matières à enlever, indique que c'est dans l'emploi des agents oxy- dants et chlorurants qu’on pouvait espérer de trouver la solution du problème. Nous nous sommes arrêté au chlore employé à l'état gazeux. Lorsque ce corps est mis en présence des matières premières citées plus haut et quand celles-ci sont humides, il agit rapidement et énergiquement sur elles, à l'excep- tion du bois, qui, à cause de sa structure spéciale, ne se laisse pénétrer qu'au bout d’un temps assez long, à moins d'opérer sur des copeaux excessivement fins. On commence par diviser mécaniquement la matière première ` soit paille, jute, natte de Russie ou sparte , ete.; puis on la fait bouillir avec de l'eau pour Fimprégner d'hu- midité, Ensuite on enlève l’eau et on laisse ressuyer la matière. Celle-ci est placée dans un bocal en verre, au fond duquel on fait arriver le chlore. Une action énergique se déclare, la température s'élève notablement et par le chan- (67) gement Ue nuance de la matière qui vire généralement vers le jaune orangé, on suit facilement le progrès de l'opéra- tion. Quand toute la matière est attaquée et que le chlore libre commence à s'échapper du bocal , on arrête le déga- gement du gaz et on laisse la matière baignée dans l'atmo- sphère du chlore pendant une demi-heure à une heure. On peut constater après cette opération que la solidité de la matière première n'a guère souffert. On fait ensuite débouillir avec de l’eau à deux reprises et pendant quelques minutes. Les eaux ainsi obtenues sont fortement acides et renferment une notable quantité d'acide chlorhydrique. ` Après ces opérations, la fibre se présente avec tous ses _ Caractères primitifs, sauf le léger changement de nuance imprimé par le chlore; elle est prête à recevoir l’action des alcalis. Si on l'arrose avec une lessive étendue renfermant une quantité de soude caustique égale à © du poids de la matière première brute mise en expérience, on voit immé- diatement la masse se colorer en brun très-foncé et aban- donner à la soude les matières incrustantes, colorantes, gommeuses, résineuses, etc., devenues cette fois facile- ment solubles dans les lessives alcalines, même très-faibles. La chaleur aide beaucoup à l'action de la lessive, mais Pour des matières premières telles que la paille et surtout le jute, l'intervention de cet agent n’est pas indispensable, et au bout de quelques heures la dissolution est complète même en opérant à la température ordinaire; à chaud elle se fait très-rapidement. En même temps la matière se ramollit, les fibres se séparent, se dissocient et tout sé transforme en une véritable pâte formée de fibres tout à fait intactes et légèrement colorées en gris par une matière colorante très-facile à détruire par le chlorure de chaux. D La quantité de ce dernier agent à employer n'est en ( 68 ) moyenne que la moitié de celle qu’on emploie habituel- lement dans l’industrie, soit un litre de chlorure liquide, à 1° B°, pour 100 grammes de matière première, On obtient par ce procédé un blanchiment irréprocha- ble; les fibres blanchies ont un éclat soyeux des plus agréables et leur solidité est irréprochable. Nous avons été assez heureux pour mettre la main sur quelques fragments de bois qui avaient été exposés hu- mides et à plusieurs reprises à l'action du chlore gazeux. Ils provenaient d’une traverse en bois blanc sur laquelle on déposait dans la caisse à chlorer d’une papeterie, les paquets de défilé de chiffon, qu'on y traite encore par le chlore gazeux. Cette traverse, après un séjour de plusieurs mois dans cette caisse, avait élé attaqué sur une épaisseur de 2-3 centimètres. La nuance de ce bois chloré était de- venu un peu jaunâtre; il n'offrait pas à la rupture une résistance aussi grande que le bois ordinaire. Mais sous l'influence des lessives alcalines bouillantes, ce bois brunissail et se désagrégeait comme les autres ma- tières premières signalées plus haut. I donnerait une pâte très-facile à blanchir par le chlo- rure de chaux et remarquable par sa blancheur soyeuse et : la longueur de ses fibres. Avec le jute et même la paille on peut remplacer la soude caustique par lammoniaque liquide, en dissolution étendue. L'action dissolvante des alcalis est rendue tellement facile par le traitement préalable au chlore gazeux, que si on lessive la masse avec une quantité insuffisante d’alcali, on arrive à la neutralisation complète de celui-ci, à tel point qu'il est impossible de constater encore la moindre réac- tion alcaline au moyen du tournesol; au contraire, par les ( 69 ) procédés actuellement en usage, on ne peut atteindre de bons résultats qu'à la condition d'opérer dans un milieu restant fortement alcalin jusqu'à la fin de l'opération et exigeant une quantité de soude double de celle que nous employons. Malgré cette forte dose d'alcali, le départ des matières à enlever est moins complet, car la destruction de ce qui reste adhérent à la fibre exige une quantité de chlorure de chaux environ double de celle qui nous conduit à un blan- chiment complet. La pâte de bois obtenue aujourd'hui industriellement par le bouillissage du bois dans de fortes lessives de soude caustique, se montre particulièrement rebelle au blan- chiment; il faut des quantités considérables de chlorure de chaux pour arriver à un blanc toujours jaunâtre. En sou- mettant la pâte brune telle qu'elle sort de lautoclave à l’action du chlore gazeux et ensuite à un lessivage à la soude, on peut constater qu’une grande quantité de ma- tières sont encore dissoutes et que sans le chlorage elles n'auraient pu l'être, malgré l’emploi de lessives très-con- centrées et des températures et pressions très-élevées. Dès lors le blanchiment de cette pâte devient très-facile. Les rendements obtenus par le procédé que nous venons de décrire sont les mêmes en moyenne que ceux qu'on alteint dans les papeteries où l’on blanchit les matières à fond; mais nous ne croyons pas nous tromper en disant que les fibres que nous préparons offrent infiniment plus de résistance que celles qu'on obtient par les procédés indnstriels actuels. Un essai, que nous avons fait exécuter dans des condi- tions industrielles, a conduit au même résultat que les essais de Jaboratoire. (70 ) Toutefois, si ce procédé réduit considérablement la de- pense en soude caustique et en chlorure de chaux, nous devons avouer que cet avantage est contre-balancé par les frais qu’occasionne le traitement au chlore gazeux; ces frais sont plus considérables qu'on aurait pu le croire d’abord. Ensuite les manipulations deviennent beaucoup plus nombreuses et plus compliquées. Eu outre, dans les papeteries bien dirigées , les lessives brunes qui sortent des appareils de lessivage sont évapo- rées et incinérées en vue de régénerer la soude. On récu- père ainsi 70 à 75 p. °/, de cet ingrédient. Dans le procédé que je viens de décrire l’évaporation et l'incinération des lessives laisse un carbonate de soude très-riche en chlo- rure de sodium. Il y a, par conséquent, perte d’une grande quantité de soude. Ce fait, au point de vue théorique, mérite notre atten- tion. H indique nettement que par l’action du chlore gazeux il y a eu dans les matières incrustantes, rési- neuses, etc., production du phénomène de substitution chlorée. Cette substitution du chlore à l'hydrogène ne suffit pas, à notre avis, pour rendre soluble dans les alcalis les com- posés dans lesquels elle s’est produite, car, en général, les composés chlorosubstitués ressemblent beaucoup aux com- posés originaires. Nous croyons que le chlore a agi en outre en oxydant indirectement ces matières, c’est-à-dire, en décomposant leau pour former de l'acide chlorhy- drique et en fixant oxygène naissant sur ces matières. Ce n’est qu'après cette oxydation que ces matières deviennent aptes à se dissoudre facilement dans les alealis. Celles qui résistent à cette action dissolvante directe ne se détruisent que sous l’influence d’une longne exposition (A) sur le pré ou bien par les oxydants énergiques comme les hypochlorites, l'ozone, l'eau oxygénée, les permanga- nates, ele. Tous ces corps cèdent facilement de loxygène aux matières facilement oxydables et les substances colo- rantes paraissent particulièrement aptes à leur enlever cet élement. Quoique les recherches auxquelles nous nous sommes livré n'aient conduit à aucune application pratique, nous croyons cependant utile den communiquer les résultats à l’Académie. Ces résultats démontrent, à mon avis, que la vraie théorie du blanchiment a été posée d'emblée par Berthollet. Quoique parti d’une hypothèse erronée sur la nature chimique du chlore, ses conclusions n'en sont pas moins rigoureuses ct il est vraiment étonnant que la théorie du blanchiment ait donné lieu, depuis son illustre auteur, à autant de controverses et de vues divergentes. Note sur la préparation de l’acétylène ; par M.P. De Wilde, professeur de chimie à l'École militaire et à l'Université libre de Bruxelles. Nous avons adressé jadis à l’Académie une note sur la production de l’acétylène par de nouvelles méthodes. L'Académie a voté l'insertion de ce travail dans ses Bulle- tins (2° série, t. XIX, n° 1). Nous disions alors que si l’on dirige la vapeur du chlo- rure d’éthylène ou liqueur des Hollandais à travers un tube en porcelaine chauffé au rouge vif, ce corps se dédouble en deux molécules d'acide chlorhydrique et une molécule (72) d'acétylène. Nous ajoutions cependant que la majeure par- tie de la liqueur des Hollandais subissait une altération beaucoup plus profonde; qu'il se déposait beaucoup de charbon dans le tube et qu'en même temps prenaient naissance, de l'hydrogène, du gaz des marais et un gaz chloré absorbable par le brome, probablement de léthylène chloré. Par ce procédé on pouvait préparer deux litres d'acétylène en partant de 100 grammes de liqueur des Hollandais. Nous avons repris l'étude de ce mode de préparation et nous sommes parvenu à augmenter dans une proportion très-considérable le rendement en acétylène , en introdui- sant dans le tube en porcelaine qui sert à la décomposition ignée de la vapeur du chlorure d’éthylène, des fragments de chaux vive ou mieux encore de chaux sodée. Les formules suivantes rendent compte de la réaction : C?H°, CP + Ca 0 = Ca CP + HO + CH’. CH, CE + 2 Na HO = 2 Na CI + 2H°0 CH. Lorsque l'opération est bien conduite, les produits secon- daires se présentent dans une proportion infiniment moindre que dans le procédé indiqué primitivement. Nous croyons pouvoir recommander ce nouveau procédé comme un des plus faciles et des plus économiques pour préparer en peu de temps des quantités considérables d'acétylène. - Il se prête aussi à une expérience de cours très-facile et très-belle. Au fond d'un tube à analyse en verre infusible on introduit une ampoule renfermant du chlorure d'éthy- lène et l’on remplit le tube de fragments de chaux sodée; on porte celle-ci au rouge, puis on chauffe l'ampoule pour vaporiser la liqueur des Hollandais. L’acétylène qui 75 ) se produit est amené par un tube abducteur recourbé dans une éprouvette renfermant le réactif cuproso-ammoniacal, destiné à fixer l'acétylène. Pour la préparation facile de la liqueur des Hollandais nous recommandons de préparer d'avance et d’'accumuler dans un gazomètre le gaz éthylène. On peut de cette façon mieux régler l'écoulement du gaz et amener toujours sen- siblement des volumes égaux de chlore et d’éthylène dans le ballon où se fait la combinaison des deux gaz. Action de l'hydrogène sur l'acétylène et l’ethylène sous linfluence du noir de platine ; par M. P. De Wilde, profes- seur de chimie à l'École militaire et à l'Université libre de Bruxelles. Nous avons signalé antérieurement à l'Académie la pro- priété que possède le noir de platine de provoquer direc- tement la combinaison de l’acétylène et de l'hydrogène. La note préliminaire dans laquelle nous annoncions ce fait curieux a été insérée dans les Bulletins de l'Académie, Znz série, t. XXI, n° 1. Ces expériences ont été continuées et nous prenons la liberté de soumettre à l’Académie les résultats obtenus. Nous avons modifié quelque peu notre mode opératoire. Dans une éprouvette graduée, maintenue verticalement le bout fermé vers le haut, nous introduisons jusqu'au fond une petite cuillère en platine, fixée à l'extrémité d’un fil du même métal et contenant un peu de noir de platine légère- ment tassé. Puis nous faisons arriver au fond de l’éprou- vette au moyen d’un mince tube recourbé, un courant 74 ) d'hydrogène see et pur. On place tout l'appareil sur la cuve à mercure et l’on fait passer de l'hydrogène pendant deux à trois heures pour éliminer l'oxygène et l'azote qui se trouvaient condensés dans le noir de platine et obtenir ainsi dans le tube de l'hydrogène sec et pur. On enlève alors le tube qui amène ce dernier gaz, et en inclinant l'éprouvette graduée, on fait sortir une partie de l'hydrogène qui s’y trouve. On note exactement le volume du gaz restant, puis on introduit l’acétylène pur et sec, préalablement mesuré avec soin, dans une autre éprou- vette. La combinaison et res qui s’ensuit sont très- rapides. Invariablement nous avons remarqué que deux volumes d’acétylène mélangé avec quatre volumes d’hydro- gène se condensaient en deux volumes d’un gaz ne ren- fermant plus d’acétylène, inodore et non absorbable par l'acide sulfurique fumant ou le brome. Voici le détail d’une des nombreuses expériences que nous avons inslituées : pivıstons de l’éprouvette. Fr eu noir de BCS EE E dr 75 Acétylèn e + Fort HE 100 Le volume des gaz mélangés se réduit à 52 divisions. D’après la formule : C'H? + 2H* = CH 2 vol. vo. 2 vol. les 32 divisions restantes doivent être formées d’un mé- lange de volumes égaux d’hydrure d’éthyle et d'hydrogène. 75 ) Ce mélange gazeux a été analysé dans l’eudiomètre de Bunsen. VOLUMES NORMAUX ramenés à { mêtre ep ion Après introduction d'air humide. . . . . 26:7 e.e. — du gaz à analyser . . . 57.7 e — E A AT E 93.3 » — déto re et Greef 714 e dach pe? TF om E egen 612 e Il résulte de ces chiffres que les 14.5 c.c. de gaz analysé étaient formés de : Hydrure d'éthyle . . . . dE CC Hydrog su fs fun à GE NR oe E E Si les deux volumes ne sont pas absolument égaux, on doit l'attribuer à un échange de gaz qui s'opère entre l'hy- drogène fixé dans le noir de platine et l'hydrure d'éthyle formé. Dans la note citée plus haut nous disions : «Si l’on fait la » même expérience avec moins de deux volumes d’hydro- » gène pour un volume d’acétylène, dans ce cas il ma sem- » blé qu'il se formait de l'éthylène; mais je ne veux pas » conclure définitivement; de nouvelles recherches me >» paraissent indispensables. » En effet de nouvelles expé- riences m'ont démontré que ma première manière de voir n'était pas exacte. En opérant dans les conditions indiquées, c'est toujours l'hydrure d’éthyle qui prend naissance et un excédant d’acétylène reste sans emploi utile. Nous avons étendu nos recherches à l’éthylène. En opé- rant de la même manière on peut constater que ce gaz se combine invariablement à un volume d'hydrogène égal au (76) sien, pour se transformer en hydrure d’éthyle. La combi- naison est seulement un peu plus lente qu'avec lacétylène CH + P = CH 2 vol, 2 vol. % vol. Voiei le détail d’une expérience : DIVISIONS. Hydrogène + noir de platine . . . . 25 ee DE, Li ou dite 25 geg: ob € 50 Après la combinaison il reste 25 divisions. Le gaz restant n’est absorbable ni par le brome ni par l'acide sulfurique fumant. Analysé dans l’eudiomètre de Bunsen, il donne les résul- tats suivants : Léa ns ORMAUX Après introduction d'air. . . 57.9 C.C. addition du gaz à nair: ; OTT + = 5 = Œotpgène VE SE e — détonation SR A 67.5 » — absorption de Co? ST SEN 50.9 » Il résulte de ces chiffres que les 10.2 de gaz analysé renfermaient : Hydrure déter :: 2 4 8.3 Hydrogène. . NÉE Qi 1.9 Eege ENS AUS La présence de l'hydrogène libre s'explique par l'échange que nous avons indiqué plus haut. < qu» Note préliminaire sur l'action de l'effluve électrique sur quelques gaz et mélanges gazeux, par M. P. De Wilde, professeur de chimie à l'École militaire et à l'Université libre de Bruxelles. Les faits curieux découverts récemment par MM. Thé- nard père et fils, en soumettant à l’action de l'efluve élec- trique des gaz ou des mélanges gazeux, nous ont engagé à tenter quelques expériences dans cette direction. Nous prenons la liberté de présenter à l'Académie les premiers résultats que nous ayons obtenus et nous nous proposons de continuer nos recherches. Description de l'appareil à effluves. — Notre appareil consiste en un tube en verre mince, d’une longueur de 50 à 60 centimètres et d’un diamètre intérieur de deux centi- mètres environ. Dans l'extrémité supérieure de ce tube nous maintenons au moyen d'un bouchon en caoutchouc, Où mieux nous soudons un tube à réaction ordinaire en verre mince d’un diamètre notablement plus étroit que le premier et s'engageant dans l'axe de celui-ci sur une lon- gueur de 15 à 20 centimètres. L'extrémité inférieure de ce petit tube est fermée, tandis que son extrémité supérieure reste ouverte et dépasse de 3 à 4 centimètres le long tube. A l'extérieur du long tube et en regard du petit tube nous Maiutenons au moyen d’un bouchon en caoutchouc placé vers le bas un large tube en verre servant de manchon. L'appareil ainsi préparé représente vers sa partie supé- rieure un système de trois tubes concentriques laissant (78 ) entre eux deux espaces annulaires. Le premier espace est compris entre le manchon et le long tube; il reçoit un liquide bon conducteur de l'électricité, soit de l'eau aci- dulée par l'acide sulfurique, soit une dissolution chlorhy- drique de chlorure d'antimoine, douée comme l'a prouvé M. Ed. Becquerel, d'un pouvoir conducteur très-grand. Le second espace annulaire est compris entre la paroi interne du long tube et la paroi externe du petit tube; il fait partie intégrante de la capacité du long tube et sa largeur d'une paroi à l’autre est de deux à trois millimètres. Dans le petit tube on verse également jusqu'en haut le liquide conducteur. Si l'on plonge un des pôles de la bobine de Rhumkorff dans le liquide du manchon et l’autre pôle dans le petit tube, l'électricité sous forte tension ne pouvant passer en étincelles à travers les parois de verre, traverse au contraire l'espace annulaire intérieur dans toute son étendue pour y exercer comme effluve son influence sur les gaz qui y auront été introduits. Nous nous servons d'une bobine de 30 centimètres de longneur alimentée par trois éléments de Bunsen de moyenne grandeur. Cette bobine peut donner des étincelles de 4 centimètres. Expériences. — Nos premières expériences ont porté sur des gaz composés, appartenant au groupe des corps non saturés. Nous présupposions qu'ils se prêteraient facile- ment à des combinaisons directes ou à des condensations polymériques. L'expérience a confirmé cette manière de voir. À. Expérience avec un mélange d’anhydride sulfureux et d'oxygène. — Un mélange de deux volumes d’anhydride sulfureux et un volume d'oxygène secs est introduit dans le tube à effluve placé sur la cuve à mercure. La bobine est (7) mise en activité; au bout de quelques instants on peut constater la diminution du mélange gazeux et l’on voit tomber de la partie supérieure du tube une trainée blanche très-légère qui finit par s'attacher aux parois du tube et à la surface du mercure pour y former un dépôt blanchâtre d'un aspect amorphe. L’absorption est assez lente : il faut 5 à 6 heures pour faire disparaître 50 centimètres cubes de gaz. On arrête l'expérience, on enlève le tube de la cuve à mercure et l’on y introduit quelques gouttes d'eau. Immédiatement le tube se remplit de fumées blanches semblables à celles qui fournit l’anhydride sulfurique. En lavant le tube avec une petite quantité d’eau, on constate que celle-ci devient très-acide et qu'elle donne avec le chlorure de baryum un précipité blanc insoluble dans les acides. ĮI résulte de cette expérience qu’il y a eu combi- naison directe des deux gaz et formation d'anhydride sul- furique. B. Expérience avec le gaz éthylène. — On introduit dans le tube de l’éthylène sec. La condensation est rapide (50 centimètres environ à l'heure). Il se condense à la sur- face du mercure quelques gouttes d'un liquide incolore, d'une odeur tenant à la fois du pétrole et de l'essence de térébenthine. Ce corps est probablement formé par un ou plusieurs polymères de l'éthylène. Au moment où nous exécutions nos expériences, MM. Thénard père et fils publiaient dans les Comptes rendus de l'Académie des sciences de Paris, séance du 25 juin 4875, un résultat en tout semblable à celui que nous venions d'obtenir. Ces savants chimistes se proposant de continuer leurs recherches sur l’éthylène, nous n’avons plus tenté de nouvelles expériences sur ce gaz. Nous ( 80 ) sommes persuadé que MM. Thénard conduiront à bonne fin le travail qu'ils ont si bien commencé. C. Expérience avec le gaz acélylène. --- Ce gaz se con- dense encore plus facilement que l’éthylène. Si l'on se rap- pelle qu'en soumettant ce gaz à l'action de la chaleur, M. Berthelot a pu obtenir des polymères de l'acétylène tels que la benzine, le styrolène, on pouvait s'attendre à la formation des mêmes composés sous l'influence de l'effluve électrique. L'expérience n’a pas vérifié ces prévisions. On voit au contraire se condenser sur les parois traversées par l'effluve un liquide jaune huileux qui se solidifie au bout de quelques heures et devient dur et cassant. Cette ma- tière est brune et amorphe. Nous avons vainement essayé de la dissoudre dans Tun où Pautre dissolvant employé dans les recherches chimiques. Chose curieuse, si on chauffe ce corps sur une lame de platine, il déflagre comme la poudre et laisse un résidu de charbon très-poreux. Il semble que ce corps, formé sous l'influence d’une électrisation plus ou moins prolongée, ait accumolé une quantité notable d'énergie. Dans cette expérience l'absorption de lacétylène est complète ct sans résidu gazeux aucun. Nous nous proposons d'étudier ce composé intéressant; mais comme sa prépara- tion en quantité un peu notable est très-longue, nous avons cru bien faire en communiquant à l'Académie le premier résultat de nos recherches. J H ct A Re i (81) Carte géologique de la bande méridionale des calcaires devo- niens de l’Entre-Sambre-et-Meuse, par M. J. Gosselet, professeur à la Faculté des sciences de Lille. Tous les calcaires des terrains primaires, qui fournissent les marbres de Belgique et du nord de la France avaient été confondus jusqu'en 1898. M. d'Omalius d'Halloy y dis- tingua le premier deux systèmes qui furent rangés plus tard, le supérieur dans le terrain carbonifère, l’mférieur dans le terrain devonien (1). En 1830 Dumont donna des preuves évidentes en faveur de cette distinction (2), qui n'avait guère été qu’en- trevue par M. d'Omalius (3). Les recherches de M. de Koninck, du regrettable Fr. Ad. Rœmer, professeur à Clausthal (1850), et de son frère Ferd. Ræmer, professeur à Breslau (1855), établirent que dans les environs de Couvin le calcaire inférieur ou calcaire eifélien de Dumont devait être divisé en trois Parties appartenant à trois assises géologiques différentes. M. d'Omalius d'Halloy et M. Dewalque, dans leurs excel- (1) Mémoires pour servir à la description géologique des Pays-Bas, de la France et de quelques contrées voisines, 182 (2) Mémoire sur la constitution géologique de la province de Liége. (5) Dans une conversation que jeus récemment avec notre vénéré maître, il s'étonna que je lui faisais l'honneur de lui attribuer la séparation des dën calcaires. Il m'avoua qu'il avait toujours cru que c'etait à Dumont que la science en est redevable; j'ai dù lui montrer par la lec- ture de son propre ouvrage que son admiration pour Dumont l'avait rendu injuste envers lui-même. me SÉRIE, TOME XXXVIL. 6 ( 82 ) lents traités sur la géologie de la Belgique, ont adopté ces divisions et leur ont donné les noms suivants : 1° Calcaire de Couvin ou calcaire à Calcéoles; 2 Calcaire de Givet ou calcaire à Strigocéphales ; 3° Calcaire de Frasne ou calcaire à Rhynchonella cuboïdes. Comme ces divers calcaires sont confondas dans la carte géologique de la Belgique et dans celle du départe- ment du Nord, j'ai pensé qu'il serait utile de tracer cette distinction sur la carte après une étude détaillée du ter- rain. Je n’ai encore examiné que la large bande calcaire qui s'élend de Rocquigny (Aisne) jusqu’à Givet (Ardennes), mais comme cette étude m'a révélé un certain nombre de faits intéressants, je désire ne pas en retarder la publi- cation. C’est du reste une région parfaitement caractérisée, située entre (Ardenne et la Fagne. Les limites de la carte sont : au N. une large vallée ouverte dans les schistes à Palmatum et que lon peut suivre depuis Glageon où elle se dégage des terrains secondaires jusqu'à Givet et bien au delà. C’est là que se trouvent les étangs de la Folie, du Hayon, de Virelles dans le Hainaut belge ou français; c'est là que coulent parallèlement aux strates l'Eau blanche, le ruisseau de Faucille et celui de Tombery dans la province de Namur, c’est aussi celte vallée que suit le chemin de fer de Chi- mai à Givet. On regreltera peut-être que je nat pas prolongé ma carte jusqu'aux schistes de Famenne proprements dits. La séparation de ces couches d’avec les schistes à Palmatum demandait plus de temps que je ne pouvais consacrer à ce travail et sortait du reste du cadre que je m'étais tracé. M de dé da dde Sd SG ii S bp À à deb nf à ii SN iris e S EE ES) de EE ( 85 ) J'aurais pu de mème me borner à la Grauwacke à Cul- trijugatus pour la limite S.; mais là j'avais des ressources que je ne possédais pas pour la limite septentrionale. Je ` me suis servi de la carte de Dumont pour marquer la sépa- ration entre la Grauwacke et les schistes rouges de Hierges. Dans ma carte je donne à la même assise plusieurs couleurs, pour distinguer les différences minéralogiques. De plus, j'ai employé deux teintes pour la même couleur : La teinte plate, désigne les affleurements que j'ai vus, et J'ai marqué par des hachures de même couleur les parties qui restent pour moi plus ou moins hypothétiques. De cette manière ceux qui voudront contrôler mes observations trouveront facilement les points qui m'ont servi de repère. Avant de commencer la partie descriptive de ce travail, j'ai quelques observations à présenter sur la classification du terrain devonien. Dès 1860 j'ai proposé de faire du calcaire à Strigocé- phales seul l'étage devonien moyen, toutes les couches qui sont au-dessous constituant l'étage inférieur et celles qui sont au-dessus l'étage supérieur (1); sur ce dernier point je suis d'accord avec tous les géologues, mais il n’en est pas de même en ce qui concerne l'étage devonien inférieur. Je le partage actuellement (2) en trois assises qui sont de bas en haut. 1e Schistes de Gédinne; 2 Grauwacke à Lens Murchisoni, ` 5° Schistes à Calcéoles (1) Mémoire sur les terrains primaires, 1860 , p. 140. (2) Bulletin E historique et littéraire du département du ` Nord, ete., t. HI, p. 255. ( 84 ) Dans la Grauwacke je range tant les couches désignées par Dumont sous les noms de Coblentzien et Ahrien, que les schistes rouges, et une partie des schistes gris (Grau- wacke à Spirifer cultrijugatus) de l’eifélien inférieur. La Grauwacke à Spirifer cultrijugatris est souvent réunie aux schistes à Caleéoles et constitue avec eux un groupe que l’on place dans le devonien moyen à côté du calcaire de Givet. Dans un mémoire tout récent et d’une grande valeur, M. de Kayser (1) a soutenu cette dernière opinion. Il m'oh- jecte qu’en Nassau on a trouvé la Calcéole avec le Strigocé- phale comme en Angleterre; je lui répondrai d’abord qu'en Angleterre la Calcéole n'est paslans les mêmes bancs que le Strigocéphale et de plus qu'à Néhou on trouve ce poly- pier avec Pleurodyctium et Leptœæna Murchisoni. M. de Kayser pense aussi que la délimitation du devo- nien supérieur et du devonien moyen telle que je la pro- pose est très-difficile à établir ; il préfère se servir d’une petite couche de fer oligiste, située à la base des couches à Cultrijugatus. En Belgique, quand la couche oligisteuse existe, ce qui est rare , elle se trouve vers la partie supé- rieure de la Grauwacke à Cultrijugatus ; elle ne peut donc nous servir d'horizon ni paléontologique ni stratigraphique. La base du calcaire de Givet est, au contraire , un excel- lent niveau minéralogique, et pour son importance en paléontologie, je m'en rapporte à M. de Kayser lui-même. « À peine la moitié des espèces du niveau supérieur de la couche à Calcéoles passe dans la couche à Crinoïdes ( base du calcaire de Givet). Parmi les formes qui font alors (1) Zeitschr. d. deutsch. geolog. Ges., t. XXII, pp. 289 et suivantes. SEET E MT CT ( 85 ) leur première apparition, nous trouvons des espèces avec des caractères entièrement nouveaux tels que le Strigocé- phale , les Davidsonia, les Dentales. Il est probable que les Spirifer aperluratus apparaissent aussi à cette époque. L'arrivée de nouveaux Gastéropodes et de Conchifères nou- veaux change d'une façon remarquable le facies de la faune préexistante (1). » Peut-on mieux me donner raison. M. de Kayser le reconnaît, mais il préfère conserver l’ancien usage et con- sidérer toute la formation calcaire (calcaire à Strigocéphales et calcaire à Calcéoles) comme une seule assise complexe; « de cette façon, ajoute-t-il, la division moyenne du de- vonien n’est pas reculée trop loin vers la formation devo- nienne inférieure déjà si excessivement puissante. » Si pendant la longue série de siècles correspondant à toute la période que j'ai appelée devonienne inférieure la faune ne s’est pas modifiée, les géologues ne doivent-ils pas tenir compte de ce fait. Si la formation devonienne inférieure acquiert par suite une puissance qu'ils trouvent excessive , ils ne peuvent s’en prendre qu'à D me Nature elle-même. Je comprends très-bien que l’on base la division du ter- rain devonien sur les caractères pétrographiques, que l'on y fasse une division moyenne essentiellement caleaire, séparant la division schisteuse et arénacée inférieure de la division schisteuse et arénacée supérieure. Mais alors il faut être logique et si l’on place le caleaire à Calcéoles avec le calcaire de Givet, il faut aussi lui réunir le calcaire de Frasne. Les mêmes raisons militent en faveur de l’un et de l’autre. (1) Zeitschr. d. deutsch. geolog. Ges, t. XXII, p. 337. ( 86 ) d espère montrer dans ce travail que le calcaire de Frasne a une importance sur laquelle on n’a pas encore suflisam- ment insisté et si l’on vient à le séparer du calcaire de Givet, on se demande ce que devient celui-ci. Peu de chose sans doute comme étage, mais il reste un excellent horizon pétrographique et paléontologique séparant la faune devo- nienne inférieure de la faune devonienne supérieure. Je commencerai donc par décrire le calcaire de Givet. CALCAIRE DE GIVET à Strygocéphalus Burtini. C’est un calcaire bleu foncé présentant parfois des veines blanches. Il est limité à la partie supérieure par une bande for- mée de calcaire argileux et de schiste où abondent des fos- siles d’une taille considérable. Cet horizon paléontologique que j'avais déjà signalé en 1857 (i) , je Dat retrouvé depuis avec une constance remarquable. Je l’ai désigné tout récemment sous le nom de zone des monstres (2) parce que je n’y avais rencontré qu’une seule espèce spéciale dont le nom m'était alors inconnu. C’est le Spirifer Orbelianus (5). Les espèces qui l'accompagnent sont Spirifer aperturatus, Spirifer Verneuili, Atrypa reticularis, Orthis striatula , toutes quatre de très-grande taille; on y trouve aussi des Orthocères et des Evomphales. (1) Bulletin de la Soc.géol. de France, 2° sér., t. XIV, p, 464. (2) Bulletin scientifique, historique et littéraire du département du Nord, t. HE, p. 296. (3) Décrit par Abich. H (87) La limite inférieure du calcaire de Givet est moins facile à caractériser. C'est également un calcaire argileux accom- pagné de schiste et où j'ai reconnu à Macon : Phacops latifrons, Orthoceras nodulosus, Gomphoceras inflatum, Lucina proavia, Pentamerus formosus. Au milieu de l'assise on trouve en abondance Cyatho- phyllum quadrigeminum, Strigocephalus Burtini, ete. Dans quelques endroits favorisés comme à Nimes, on peut récolter dans des caleaires altérés de nombreux Gas- téropodes. L’affleurement le plus occidental du calcaire de Givet a été exploité dans le village de Rocquignies (Aisne) et hameau des Égurces, commune de Wignehies (Nord), i s'y présentait avec l’inclinaison N. 20°0 — 75°. La carrière est aujourd'hui comblée et pour voir le calcaire de Givet, il faut passer aux carrières de Trou-Féron et de Glageon. Sur tout ce parcours les roches primaires sont presque en- tièrement cachées par le limon, mais à partir de Glageon, on peut les suivre d'une manière presque continue. Entre les Égurces et Trou-Féron, entre ce hameau et Glageon, il doit y avoir des failles qui rejettent de plus en plus la bande calcaire vers le Nord. A Glageon on constate la zone à S. Orbelianus à la partie supérieure de la carrière près du calvaire (incli- naison N. 35°0 — 72°) et dans celle du four à chaux sur le chemin de Counplevoie. Le marbre si connu sous le nom de Glageon fleuri se trouve à 20 mètres environ sous cette couche à S. Orbe- lianus et à un niveau bien supérieur à celui du Strigocé- phale. La bande calcaire passe ensuite sous Trélon; à la carrière des Moines au S. du bourg, on exploite les bancs à Stri- y ( 88 ) gocéphales sous le nom de Sainte-Anne de Trélon (ineli- naison N. 7°0); il y a une faille entre cette carrière et celles de Glageon. Les principales carrières de Trélon sont à l'O. du bourg et au N. de la route de Chimai. On y exploite pour le four à chaux les couches immédiatement inférieures au Gla- geon fleuri. Plus au S., contre la route, on voit le niveau à Strigocéphales. On peut constater qu'entre ce point et la carrière des Moines, il y a une faille, car si l’on prolonge idéalement les bancs de cette dernière carrière, ils iraient passer bien au S. de la route. Mais la faille la plus considérable de ces environs est celle d'Ohain, ainsi nommée parce qu’elle passe par le clo- cher d'Ohain. Elle rejette les banes de 200 à 300 mètres vers le S. C’est ce qui explique comment sur la traverse de Wallers, on trouve les schistes à nodules du devonien supérieur dans le prolongement des bancs calcaires du four à chaux de Trélon. Au S. de Wallers il y a plusieurs carrières dont les bancs plongent au N. 15° E. — 95°. Ainsi entre Rocqui- gnies et Wallers, la bande calcaire a passé de la direction E. 20° N. à la direction E. 7° N., puis E. 15° S. Elle traverse la frontière au S. de Baives, en pénétrant sur le territoire de Macon. Entre ces deux villages, il y a une colline calcaire où abonde le Cyathophyllum quadri- geminum. Dans la plaine qui s'étend entre Macon et Chimai, les roches primaires sont presque partout recouvertes par le limon. Une carrière de marbre a été ouverte au N. de Salles dans un calcaire qui m'a paru au premier abord rempli de Strigocéphales, mais en examinant avec attention les lignes blanches que j'avais prises pour des coupes de D Écosse ue EE ( 89 ) cette coquille, il ma semblé qu’on devait les rapporter à une autre espèce. En approchant de Chimai la bande calcaire éprouve une déviation considérable. On peut constater la présence de la zone à S. Orbelianus sur le chemin qui monte au SO. de la Ferme Thérisart; puis si lon continue à marcher vers l'E. dans la même direction, on arrive sur le devonien supérieur, Prend-on alors le chemin de traverse qui se dirige vers Chimai en suivant un pli de terrain, on retrouve le calcaire à Strigocéphales incliné vers l'E. Jl y a là un plissement accompagné probablement de quelques cas- sures, car on voit à la surface du sol un grand nombre de blocs d’une roche quartzeuse de filon analogue à celle que nous citerons plus tard. La bande calcaire reprend bientôt sa direction O-E., la partie supérieure passe contre la limite N. du parc du prince de Chimai, tandis que la base se dirige de Saint-Remy sur la ville et affleure ‘sous les murs du château. Elle possède à Chimai une largeur de 800 à 900 mètres. Entre Chimai et Virelles le calcaire présente plusieurs plissements que l’on constate facilement le long du chemin de fer, A l'E. de Virelles la voie ferrée quitte l'escarpe- ment calcaire pour pénétrer dans les schistes du devonien supérieur. Les couches de passage à S. Orbelianus y sont très-développées et très-riches en fossiles surtout en Cépha- lopodes. A Vaux et à Lompret, l'Eau blanche coule dans une gorge sinueuse ouverte dans le caleaire. Au S. de Lompret, un plissement considérable rejette la bande calcaire de près de 4 kilomètres vers le S. jusque contre Baileux où elle se trouve limitée par une faille. C'est peut-être aux émanations sorties par cette rupture qu'il faut attribuer la formation du rocher de do- (90 ) lomie, situé à Baileux, au S. et contre la route de Chimai. Je crois d'autant mieux à son origine métamorphique qu'il est traversé de fentes profondes où l’on a exploité du mi- nerai de fer. A partir de Boutonville , la bande calcaire réduite à une largeur de 400 mètres se continue de la manière la plus régulière (inclinaison N. 27°,0 — 60’ à Dailly), mais en s’élargissant constamment jusqu’à la limite orientale du territoire de Couvin. Au N. de cette ville un plissement fait naître une seconde bande calcaire au S. de la précédente. Lorsqu'on suit le chemin de Couvin à Boussu, on traverse au ruisseau d’Aine un petit lambeau de schistes à Calcéoles qui sépare deux plateaux de calcaire à Strigocéphales. La preuve que c’est l'effet d’un plissement et non d'une faille, c’est que l’on trouve des Calcéoles dans les bancs de calcaire et de schistes qui limitent des deux côtés le plateau méridional, pl. 1, fig. 5 En eech du confluent à ruisseau d’Aine, avec l'Eau noire, la bande schisteuse qui sépare les deux pla- teaux s’atténue et finit par disparaître. Le plateau cal- caire septentrional que nous avons suivi depuis le ruisseau de Boutonville se soude au plateau méridional et s'arrête brusquement avant d'atteindre la route de Couvin à Ma- rienbourg. Le plateau méridional se prolonge par PONO. jusqu'à Givet, sans subir d'accident remarquable. H est interrompu trois fois pour livrer passage à l'Eau noire : au N. de Cou- vin, au NO. de Pétigny et au S. de Nimes. Avant de tra- verser le second défilé, une partie de l'Eau noire se fraye une voie souterraine en suivant à peu près la direction des couches supérieures du calcaire et va sortir dans le village iioi lé. is (M) de Nimes, au point de contact du caleaire, avec les cou- ches à Orbelianus. Le plateau est coupé ensuite par le Viroin au S. de Dourbes, par le ruisseau du Fond de Treigne et par celui de Vaucelles au N. de ces deux vil- lages. A partir de Nimes apparaît une seconde bande de cal- caire située au S. de la précédente dont elle est séparée par quelques schistes; ainsi la voie ferrée de Marienbourg à Givet, après avoir traversé entre Dourbes et Nimes la principale bande de calcaire de Givet, passe au pied de nouveaux escarpements calcaires où l’on a ouvert une car- rière dans les bancs à Strigocéphales. Entre ces deux bandes calcaires, il y a un léger vallon formé de schistes qui appartiennent certainement à l'assise à Calcéoles, car, d’une part, jy ai recueilli Spirifer curvatus et Cyrthia hetero- , clyta ; autre part, ils se continuent à IO. avec les schistes de Pétigny, pl. 1, fig. 4 et 2. Sur le prolongement oriental du plateau méridional et Sur le territoire de Nimes, il y a eu des exploitations de minerai de fer dans les roches creusées dans le calcaire. Les parois en ont été si profondément altérées que les fos- siles s’en dégagent avec la plus grande facilité. On peut les ramasser sur le sol dans un état de conservation qui ferait envie aux fossiles tertiaires. C'est ce gisement remarquable qui a été exploré récem- ment par le regrettable Lehon; nous y avons rencontré, M. Ch. Barrois et moi, les espèces suivantes : Limnadie. Pleurotomaria subcarinata. Serpula. ~-= Nerinea. Goniatite. — binodosa. Cyrthoceras. — bilineata. Orthoceras. — Murchisoni. Bellerophon. i — angulata. (92) Pleurotomaria quadrilineata. Melania absoluta. coronat Rotula heliciformis. — fasciata. Eomphalus trigonalis. bicoronata. — turritus. Natica p piligera. — lœvis. Delphinula (nov. sp.) Littorina lirata. Turritella compressa. ERC stees Littorina subrugosa. entricosum. Catantostoma ne Dana coronata. Littorina Nismensis Megalodon cucullatus. Schizostoma dtplintotlee. Strigocephalus Burtini. Dentalium annulatum. Les deux bandes calcaires précitées coexistent encore, sur les territoires d’Olloy, de Vierves et de Treigne, sépa- rées de même par une mince bande schisteuse qui avait échappé à Dumont, mais qu’un faible vallon signale assez bien à l'intérieur. J'ai constaté d'une manière positive sa présence sur les chemins d’Olloy à Matagne, de Treigne à Matignolle, de Treigne et de Mazée à Romérée; jy ai trouvé : Bronteus flabellifer. Pentamerus galeatus. Atrypa reticularis. | Leptæna interstrialis. — Jlatilinguis. Calceola sandalina A Mazée les schistes disparaissent par la réunion des deux bandes calcaires, ou sont rejetés sur le territoire de Niverlée par une série de failles qui les fait disparaitre, ainsi que la bande calcaire méridionale. Un massif appartenant également au calcaire à Strigocé- phales se montre au N. de Dourbes, tout à fait isolé au milieu du devonien supérieur. C’est le résultat d’un plis- sement en forme de voussoir, car des deux côtés on ren- contre les couches à Orbelianus, pl. I, fig. 1. Entre Vaucelles et Doische, la bande calcaire a une lar- geur de 2 kilomètres et présente probablement plusieurs EE A ST ee on S (95 ) plis; mais à partir de la limite du département des Ardennes, elle reprend ses dimensions ordinaires. A Givet elie s'étale en éventail, comme je l'ai décrit dans un travail antérieur (1). Depuis Mazée jusqu'à Givet on exploite comme pierre de taille et comme marbre les banes inférieurs de l'assise. SCHISTES ET CALCAIRE DE COUVIN à Calceola sandalina. Cette assise est formée de schiste et de calcaire. Le schiste est argileux , grossier, passant souvent à la Grauwacke. Le calcaire est bleu foncé, subcompacte ou grenu; à Wallers, près de la frontière belge, on exploite comme pierre de taille un calcaire sublamellaire, formé de tiges d'encrines, ayant beaucoup d’analogie avec le petit granite des Écaussines. A Nimes on trouve un petit lambeau cal- Caire qui a un reflet rougeâtre assez analogue à celui du calcaire devonien supérieur (fig. 4). Fig. 4. — Coupe près de la chapelle de Nimes. 7 SE E f? J d?. Id. id. Plateau très-riche en fossiles. e. Schistes à calcéoles: TS. f>. Lalcaire bleu. g. Grauwacke (1) Mémoire sur les terrains primaires, ele., D 56. (9%) Le calcaire est en général pauvre en fossiles, tandis que les parties schisteuses sont souvent très-riches. Les prin- ` cipales espèces de cette assise sont : | | Hart lamellosum. Rhynchonella angulosa | vesiculosum. pri nipilaris um. | Favosites cervicornis. —— pug | Alveolites subæqualis. Retzia ferrita (1). Cyathophyllum vermiculare. Pentamerus galeatus. Cyathophyllum ceratites. iplicatus. Phacops latifrons. Orthis. siriatula. Dalmanites laciniata — opercularis Bronteus flabellifer. — eifeliensis Gyroceras eifeliense. — tetragona. Orthoceras. — canaliculata. Phragmoceras. — umbraculum. Spirifer curvatus. Lie depressa, — concentricus. interstrialis. — speciosus — naranjana. ævicosta. —.. Jepis. Cyrthia heteroclyta. Chonete minuta. a de Po. Strophalosia productaides. | centrica. roductus subaculeatus. : un rtiularis. Sanguinolaria Ungeri. Jatilin ucina proavia. Rhynehonella cube Il m'a été jusqu’à présent impossible d'y discerner des niveaux paléontologiques constants. Le calcaire forme au milieu des schistes et à tous les niveaux des lentilles plus ou moins épaisses et plus on moins étendues. Les bancs supérieurs, ceux qui sont au contact du cal- caire de Givet sont eux-mêmes calcaires. Je les rattache (1) Ces deux espèces manqueraient en Belgique, d'après M. Kayser; je puis certifier les y avoir trouvées. a SU E F Lion es Li EST d (9) à l'assise inférieure, parce que j'y ai trouvé Calceola sanda- lina. La base de l'assise depuis Rocquignies jusqu'à Couvin et même au delà, est entièrement calcaire; elle a reçu de M. d'Omalius et de M. Dewalque le nom de calcaire de Couvin. Mais à partir de Pétigny, on voit le calcaire dimi- nuer, s'éloigner de la base et s'étendre, au contraire, à un niveau plus élevé; ainsi, à la sortie d'Olloy du côté de Vierves, il y a quelques bancs verticaux de calcaire ayant une épaisseur maximum de 20 à 50 mètres et contenant de nombreux fossiles. Ils sont séparés de la Grauwacke par quelques centaines de mètres de schistes fossilifères avec Calcéoles. Des amas isolés de même nature se trouvent souvent dans les parties supérieures de l'assise et, comme je l'ai déjà dit, le calcaire de Couvin n’est lui-même qu'une grosse lentille. U peut acquérir un développement tel, qu'il envahit toute l'assise. C’est ainsi qu'à la ferme de Beauvoir sur le territoite d'Ohain, près de Trélon, il s’avance presque au contact du calcaire à Strigocéphales; je ne puis même pas assurer qu'entre les deux on puisse trouver une couche de schistes, si petite qu'elle soit. De- vrait-on conclure , de la réunion des deux calcaires , à leur identité? Certainement non. On ne saurait trop s'inspirer des remarques si justes de M. d'Omalius d'Halloy : Le cal- caire, disait notre illustre maître à la Société géologique de France, forme dans les schistes devoniens et carboni- fères de Belgique des lentilles dont l'épaisseur, très-va- riable, est réduite parfois à rien, tandis qu'elle prend d'autre part une extension extrême. il y a quelques années on exploitait à Rocquignies sur (36 ) la route de Fourmies du calcaire alternant avec des schistes. M. Hébert y a recueilli entre autres fossiles Bron- teus Barrandei, Cyathophyllum Michelini. Je les rapporte à l’assise des schistes à Calcéoles. A Couplevoie entre Glageon et Fourmies se trouvaient aussi des carrières aujourd'hui abandonnées, dans le cal- caire de Couvin. Je nr ai pas rencontré d’autres fossiles que quelques polypiers. Un peu au N., l’ouverture d'un abreuvoir dans une pâture m'a permis de constater la pré- sence de schistes avec Orthis striatula. Cyrthia heteroclyta. — _interstrialis. Spirifer speciosus. Pentamerus galeatus. La ville de Fourmies est construite sur un massif de schistes à Calcéoles enveloppé dans un pli de la Grauwacke. On y trouve aussi des calcaires : l’un, exploité à l'E. de la station, est très-riche en Bronteus flabellifer et Penta- merus biplicatus ; l'autre, où l’on a ouvert une carrière au Ranquillet, commune de Wignehies, contient une très- grande quantité d'Orthocères et d’autres Céphalopodes. Le calcaire de Couvin, qui au S. de Trélon acquiert, on vient de le voir, une épaisseur extraordinaire , est exploité dans plusieurs carrières sur la frontière de la France et de la Belgique. L une d'elles fournit du marbre granite pres- que entièrement composé de tiges d’encrines. Entre ces carrières et celles que l’on a ouvertes dans le calcaire à Strigocéphales se trouve la colline de La Motte, formée de schistes avec un petit nodule calcaire au milieu et un autre sur le bord. Près de ce dernier on a retiré d'un puits de nombreux fossiles : Sp. speciosus, Pent. galeatus, Calceola sandalina, ete. Su. hou "EE E DEE Sd dd di PE ee D D PRE Te SS o (97) De l’autre côté du ruisseau, la colline de la Croix de Bourges on du Fay est formée de schistes grossiers pas- sant à la Grauwacke. Entre la frontière et Chimai, les schistes sont assez fos- silifères, et renferment encore quelques nodules calcaires. La route en traverse trois entre Macon et Salles; à l'E. de ce village, les couches à Calcéoles font un pli vers le S. que J'ai supposé produit par une série de failles étagées parce que dans tous les affleuremenis j'ai constaté l'inclinaison N et jamais l’inclinaison E. A VE. de Villers-la-Tour, on voit dans la tranchée du chemin de fer d'abord des bancs de calcaire encrinitique, puis du calcaire compacte auquel succède du calcaire rem- pli de Favosites; puis viennent seulement les schistes à Calcéoles. Le calcaire de Couvin passe sous la partie S. de Chi- mai; il est exploité dans les faubourgs et affleure sous la dernière maison de la route de Couvin, tandis que le fossé en face est creusé dans les schistes. Dumont, qui admettait l'identité du calcaire à Calcéoles avec le calcaire à Strigo- céphales, supposait que les deux bandes calcaires se réunis- sent un peu à l’est de Couvin. Elles sont en tous cas très- voisines, car on a trouvé le calcaire à Strigocéphales en creusant à la station. Néanmoins M. Dewalque a reconnu qu'elles-sont toujours séparées par une bande de schistes. Sans émettre le moindre doute à ce sujet, je suis bien obligé de déclarer que dans l'endroit où Dumont réunit les deux calcaires, je wai rien vu du tout, ni schiste , ni cal- Caire, Mais Dumont eùt-il eu matériellement raison, il n'était pas en droit de conclure de la contiguité des cal- caires à leur identité géologique. J'ai dit tout à l'heure pourquoi. 2e SERIE, TOME XXXVII. 7 (98) A FE. de Chimai la disposition stratigraphique de l'as- sise à Calcéoles est assez difficile à interpréter, parce que les couches primaires sont cachées par la terre végétale et qu'elles sont profondément affectées par le pli de Neuf- . maisons. Ce hameau est sur des schistes où j'ai recueillis : Spirifer speciosus. Rhynchonella primipilaris. Spirigera concentrica. Orihis eifeliensis Atrypa reticularis. Leptæna interstrialis, Rhynchonella angulosa. ` Chonetes minutus. Ainsi l’âge de ces schistes est hors de doute. Ils plongent vers le N. 15° E., s'enfonçant sous le calcaire de Givet qui affleure à 208 mètres de là avec la même inclinaison, el ils reposent sur le calcaire de Couvin que l'on voit dans le chemin de Baileux. En continuant à suivre ce chemin, on rencontre des schistes arénacés qui paraissent être sur le prolongement des schistes fossilifères que Ton voit sur la route de Couvin. Ceux-ci plongent au SE., faisant ainsi avec les schistes de Neufmaisons une voûte anticlinale qui se termine en pointe vers PE. 15° N. Ainsi, à partir de Neufmaisons, les couches se dirigent vers le SO. jusqu’à Bourlers où un second pli synclinal, peut-être compliqué de failles, leur rend la direction ENE. Si l’on suit le chemin de Chimai à Bourlers (fig. 2), on observe en descendant au ruisseau de la Bonte le calcaire de Couvin, puis au S. du ruisseau les schistes à Caleéoles inclinés au S. 55° E. et de nouveau le calcaire plongeant vers le S. Je suis d'autant plus disposé à soupçonner une faille entre ces seconds calcaires et les schistes qu’elle se (99 ) trouverait dans le prolongement de celle de Baileux dont il a été question plus haut. Fig. 2. — Coupe sur le chemin de Chimai à Bourlers. de la Bonte Ruisseau Wa Re 2 jet 3 Caleaire. 2. Schistes à Rhynch. angulosa. 0O. Faille, Au NE. de ce village les schistes disparaissent complé- tement et les deux calcaires sont en contact séparés par la faille. De Boutonville à Dailly, l'assise à Calcéoles est régu- lière. Entre Dailly et Desch la bande calcaire s'élargit par suite de plissements qui sont probablement en relation avec le pli qui affecte le calcaire de Givet et toutes les assises devoniennes au N de Couvin. A partir de Pétigny le calcaire de Couvin diminue d'im- portance; il ne paraît plus que comme une crête inter- rompue dont les mamelons, allungés dans la direction des couches, sont complétement isolés les uns des autres, comme s'ils étaient entourés de toutes parts par des schistes. Souvent même le calcaire est disposé à plusieurs niveaux dans les schistes (pl. T, fig. 3). Entre Mazée et Hierges le calcaire disparaît compléte- ment; on en retrouve quelques bancs sur le chemin de Vaucelles à Aubrive, puis au coude de la Meuse près de Ham-les-Malades ; sur la rive droite de la Meuse, il parait plus développé. ( 100 ) Dans la fortification du Mont d'Or, on trouve à la partie supérieure de l'assise, au contact du calcaire de Givet, des bancs calcaires très-riches en Calcéoles et en Pentamères. SCHISTES ET CALCAIRE DE FRASNE à Rhynchonella cuboïdes. M. d'Omalius d’Halloy et après lui M. Dewalque ont désigné sous ce nom une série de couches que Dumont avait confondues avec les schistes de Famenne et le eal- caire de Givet. Les schistes sont argileux, plus ou moins feuilletés, contenant des nodules argilo-caleaires. Le calcaire est quelquefois bleu foncé, généralement bleu clair ou bleu gris avec une texture demi-saccharoïde. D'autres fois il est rouge ou rose veiné de rouge et de vert. Ce calcaire est exploité pour marbre sous le nom de Rouge de Flandre, Cerfontaine, etc. On ne le rencontre guère qu’à la partie supérieure de l’assise, où il constitue tantôt de petits mamelons coniques isolés, tantôt quelques cou- ches adossées à une colline de calcaire gris. Le calcaire n’a d’ailleurs aucune position fixe dans l’assise; on le trouve tantôt à la base, tantôt à la partie moyenne, tantôt à la partie supérieure; ou même les bancs calcaires sont divisés et situés à plusieurs niveaux, comme dans la coupe que j'ai déjà donnée de Givet au fort Condé. C’est surtout au calcaire de Frasne qu’il faut appliquer les vues de M. d’Omalius sur la disposition du calcaire en lentilles. Rien n’étonne plus le géologue habitué à la con- tinuité des couches que de se trouver en présence d'une de ces collines telles que celle qui porte la eroix de Frasne. l d ( 101 ) Voilà une masse calcaire épaisse de 500 à 600 mètres et composée de bancs très-réguliers, qui disparaît tout à coup. Que devient-elle? Est-elle rejetée en avant ou en arrière par une faille? C’est la première pensée qui vient à l'es- prit; mais on se convainc bientôt qu’elle est erronée. On a beau chercher, on ne trouve plus de calcaire; d'un bout à l’autre, l'assise est schisteuse. Le calcaire de Frasne ne forme donc pas de plateau continu, mais des pitons qui simulent de loin un cône vol- canique, des collines isolées à contours arrondis souvent plus élevées que le plateau voisin du calcaire de Givet. Son importance est plus grande que celle du calcaire de Couvin et dans les environs de Marienbourg, où il acquiert son épaisseur maximum , il surpasse sous le rapport oro- graphique le calcaire de Givet lui-même. Il se réduit presque à rien aux deux extrémités de la région, près de Givet à l'E. et près de Trélon à l'O. Les principaux fossiles que j'y ai trouvés sont : bei me Rhynchonella Boloniensis. Orth semiluna. es asus semilævis. Terebratula elongata. Camarophoria formosa. jaani Urii. megistana. inflatus. CE ere — lævigatus. Orthis s — nudus. — EH — euryglossus. Leptæn — bifidus. Chonetes ata. — Bouchard. Eege e SE — conoideus. roductus subaculeatus. E ili. Receptaculites Neptuni = tenticulum. ites cervicornis. — aperturatus. Alveolites subæqualis. — belian: rbicularis. Spirigera concentrica. aiats auloporoides. Atrypa reticularis. Cyathophyllum cespitosum. Rhynchonella ciblées, (102) La limite inférieure de cette assise est marquée par la zone à Orbelianus dont j'ai mentionné plus haut la faune et que je rattache au devonien supérieur. mmédiatement au-dessus viennent les Réceptaculites; mais je wai pas encore pu reconnaître d’autres niveaux paléontologiques constants. La coupe suivante prise à Boussu en Fagne peut donner une idée de la disposition des couches. Fig. 3. — Coupe de Boussu en Fagne. 2 foura chaux Hermilage Se Gel CCS 1 ESS E A EE << EE Se LISE SLT CS a Q le Ka E Dn D S h Ka EN EN "A d. Calcaire de Givet. incl. N. 20°0 = 68 leai julai Sp p- Orb us. Schistes à nodules avee Receptaculites, 20™. c3. c5, Calcaire gris. bè. Schistes à nodules. P e7. Caleaire rouge. Sechi A Cardi Les couches les plus occidentales de cette assise sont des calcaires gris-clair ou noirs exploités dans le hameau de Trou-Féron. Des schistes avec nodules sont visibles en descendant vers le village. Le chemin de fer a tranché cette assise dans le bois du Fresse au au N. du chemin de Féronà Glageon. Je wai trouvé aucun fossile pouvant déterminer l’âge de ces EE ne aie EL ( 103 ) schistes et de ces calcaires argileux, mais leur position inférieure aux schistes à Cardium palmatum prouve suf- fisamment qu'on doit les ranger dans les schistes de Frasne. Fig. 4. — Tranchée du chemin de fer dans le bois Fresneau à Féron. Argile glauconifère 5 Argile SCH d Gault. 5 S Ss aire rege compact . Schistes argileux noirs avec nodules. as Ed ) See tes noirs très pr Card AE S Smp oe us 4 Je leur rapporte aussi PS) leur position les schistes que l’on rencontre à Glageon sur la route, ceux qui consti- tuent la colline du cabaret de Belle-Vue à Trélon et ceux que suit le sentier de Wallers. Dans ces derniers, j'ai re- cueilli Receptaculites Neptuni. Dans le bois de Surmont, près de Trélon, on a exploité un noyau de calcaire rougeâtre épais de 10 mètres et incliné vers le N. 45° E. ; il est directement surmonté par les schistes à Palmatum. A l'extrémité orientale de l'étang du Hayon se trouve le rocher du château Gaillard très-riche en RA. cuboides. Le calcaire qui forme la colline de la chapelle N.-D. des . Monts à Wallers est gris, à l'exception d'un point central qui est rouge. Une carrière sur la pente N. renferme de nombreux polypiers et un banc composé uniquement de Gastéropodes. A 50 mètres au SE. se trouve une autre émi- nence de calcaire gris appartenant au niveau des Récepta- ( 104 ) culites; il a été exploité sur le territoire de Baives et a fourni de nombreux fossiles aux géologues. La zone à Orbelianus le sépare du caleaire de Givet. Fig. 5.— Coupe de la colline de Notre-Dame des Monts à Wallers. Chapelle du mont SÉ Kä A Carrieres dé gier Bé "WE -7 7 Ge Za Be j - SL Bas Ge DA 2 1 À d. Calcaire de Givet. 1. Schistes à Orbelianu. 2. Calcaire à Réceptaculites. 3. Schistes 5. Caleaire KEN 6. Calcaire rempli de Gastéropodes. 7. Schistes. Sous le village de Baives, comme sous celui de Wallers, on trouve des bancs de calcaire bleu intercalés dans les schistes. Bailièvre se trouve entre deux collines de calcaire gris; au NO.il y a un petit piton de calcaire rouge intercalé pro- bablement dans les schistes à Palmatum et au S., sur le chemin de Chimai, on voit des banes schisteux couverts de Réceptaculites adossés à la zone à Orbelianus. On peut les suivre jusqu’au S. de Robechies. Entre Robechies et Virelles, le devonien supérieur s’est ressenti du plissement des couches inférieures, Ainsi, sur la route de Chimai à Beaumont, on trouve trois masses de calcaire gris subordonnées aux schistes à nodules. Un peu an S. de la ferme de la Maladrerie il y a un (105) gisement célèbre de schistes fossilifères où j'ai recueilli: Atrypa reticularis. | Rhynchonella semilævis. Spirigera concentrica. Rhynchonella cuboides. | eptæna. Receptaculites Neptuni. A 100 mètres au NE. dans le chemin et sur le terri- toire de Virelles des schistes d'un niveau plus élevé m'ont offert : | Orthis striatula. Leptæna. Productus subaculeatus. Atrypa reticularis. Camarophoria formosa. Orthis Dumontiana. La colline à laquelle sont adossés ces schistes est cal- cairė sur le versant S. et schisteuse sur le versant N. La grande colline qui est au NO. de Virelles parait, au con- traire, uniquement schisteuse; il en est de même de celle qui va de Virelles à la forge. Quelques mètres avant d'arriver au pont du chemin de fer sur Eau blanche, on trouve les bancs argilo-calcaires à Orbelianus, très- riches en Gastéropodes et en Céphalo- podes ; au-dessus viennent des schistes à nodules qui con- tiennent les mêmes fossiles; puis après avoir passé le pont une tranchée dans d’autres schistes un peu supérieurs ; J'y ai recueilli : Atrypa reticularis. Leptæna. Receptaculites Neptuni. Spirifer aperturatus. — Verneuili. — tenticulum. Sur le côté N. de la tranchée, il n’y a que peu ou point de fossiles, mais les Septaria y sont en grand nombre. Ces schistes s'enfoncent sous une colline de calcaire gris pas- sant vers le haut à des alternances de calcaire argileux bleu foncé et de schistes, puis de nouveau à des schistes avec nodules argilo-calcaires.… ( 106 ) Cette colline s'étend à lE. jusqu'à la station de Lompret, tout en diminuant beaucoup de richesse en calcaire. Près de la station elle n’est plus guère formée que de schistes avec nodules; vers le centre, il y a une étroite ligne de calcaire nodulaire entremêlé de matières schisteuses. Le nouveau chemin d’Aublain à Lompret fait une tran- chée dans les schistes à nodules sans fossiles (incl. N. 30° E.), en passant entre une butte de calcaire bleu gris de Frasnes, qui est au N. et le plateau de calcaire de Givet, qui est au S. Immédiatement sur ce dernier, on peut con- stater la présence de la zone à Orbelianus. A Aublain il y a un plissement remarquable de toutes ces couches. Le village est bâti sur une colline de schistes à nodules sensiblement dirigée du N. au S. Deux autres collines calcaires séparées par des schistes sont situées à l'O. de la précédente; elles ont la même direction et vont comme elle se terminer en escarpement sur le bord de l'Eau blanche. Sur la rive opposée de ce ruisseau se voient trois autres rangées de collines ayant une direction de l'E. à l'O; la première est formée de six pitons isolés de calcaire gris passant par points au marbre rouge, la seconde et la trol- sième, toutes deux de calcaire gris ou bleu foncé, ne sont peut-être que la répétition de la même couche par suite d'une faille ou d'un plissement. Dumont avait réuni ces collines calcaires au calcaire de Givet, mais j'ai nettement distingué les schistes qui les en séparent; jy ai même trouvé Receptaculites Neptuni et Sp. Verneuili. Au N. de Dailly le calcaire de Frasne forme une crête très-élevée; son importance diminue vers Boussu , puis augmente à partir de ce village. Quand on descend à Boussu par le chemin de Couvin, (107) on peut constater, comme le montre la coupe (fig. 53, p. 102, deux masses de caleaire gris séparées par 40 mètres de schistes à nodules. Mais bientôt ceux-ci disparaissent, les deux masses calcaires se soudent et finissent par envahir tout l'étage, par arriver même au contact du calcaire de Givet. Un petit rocher de calcaire rouge exploité dans le village est séparé du calcaire gris par 6 mètres de schistes avec encrines et polypiers. A l'O. de Frasne se trouve la grande colline calcaire qni a donné son nom à l'assise. Elle est intercalée au milieu des schistes à nodules ainsi que le petit piton de calcaire gris avec teinte rougeûtre qui est au N. Au SE. du même village, il y a une autre grande colline de calcaire gris intercalée dans les schistes à nodules. En approchant du territoire de Nimes, le calcaire diminue d'épaisseur et ne forme plus qu’une crête qui se prolonge jusque dans le village. La partie septentrionale de celui-ci est construite sur les schistes à nodules; ils entourent une seconde butte de calcaire gris et à la limite des deux roches du côté de Marienbourg, il y a une couche remplie de Favo- sites cervicornis et d’Alveolites aequalis. Sur la rive droite de l'Eau blanche avant son confluent avec l’Eau noire et toujours snr le territoire de Nimes, il y a encore une grande colline boisée de calcaire de Frasne. Quelques banes de calcaire rouge subordonnés à des schistes lui sont adossés vers le S. et ont été tranchés par le chemin de fer de Marienbourg à Vireux. Cette masse calcaire se termine en pointe à l'endroit où le sen- tier de Fagnolle se détache du sentier de Dourbes à Ma- rienbourg. Si on suit ce sentier on traverse une vallée schisteuse pour remonter sur un plateau de calcaire de Givet formant un ilot isolé au milieu des calcaires et ( 108 ) schistes de Frasne. La preuve que c’est bien le calcaire de Givet, c’est qu’il est bordé par la zone à Orbelianus; c'est à l’ancienne mine de plomb de Dourbes que nous avons trouvé les plus gros individus des monstrueuses variétés de cette zone. Dans la partie N. du bois de Fagnolle, il y a des rochers calcaires et probablement aussi des schistes, mais la végé- tation empêche de distinguer les limites des deux roches. Le calcaire se continue derrière les villages de Fagnolle et de Matagne-la-Grande en formant une crête qui contient deux des pitons les plus élevés du pays; l'un d'eux situé sur Dourbes est traversé d’épais filons de quartz blanc. Quand on monte, au S. de Matagne-la-Grande, le nou- veau chemin de Vierves, on trouve d’abord les schistes à Palmatum, puis les schistes à nodules qui renferment une petite lentille calcaire et qui nous ont fourni Spérifer nudus, Spirifer Urii, Rhynchonella semilævis, Camaro- phoria megistana. On arrive enfin sur des calcaires gris exploités au four à chaux et formant le bord septentrional d'une grande plaine plus fertile que le reste de la région. Le sol y est presque partout couvert par une couche de limon suffisante pour la cacher au regard curieux du géo- logue. On peut cependant s'assurer qu’elle est formée par les schistes et les calcaires de Frasne ; car on constate tant à Dourbes qu’à Matignolle la présence de la couche à Orbelianus formant la limite N. de la principale bande de calcaire de Givet. Nous Pavons aussi retrouvée sur le chemin de Matagne-la-Grande à Dourbes, à la jonction des couches de Frasne avec l’ilot de calcaire à Strigocéphales de Fagnolle. Dans le ravin au SO. de Matignolle, on peut voir la limite du calcaire de Givet indiquée sur la rive droite par aire us és eet die. An a age ( 109 ) une couche remplie de Receptaculites Neptuni, Favosites cervicornis, Cyathophyllum cespitosum et sur la rive gau- che par le niveau à Orbelianus, où mes compagnons, MM. Ch. et J. Barrois, ont ramassé Hir, boloniensis. A partir de Matagne-la-Petite et de Matignolle le sol est moins uni; on y distingue très-bien une série de vallons schisteux séparés par des collines calcaires, souvent très- régulières. L'une d'elles s'étend de Matagne à Gimnée sur une longueur de 5 kilomètres; elles vont en s'atténuant vers PE. en même temps que la matière calcaire diminue, et à partir du chemin de Mazée à Romérée on ne trouve plus guère que des schistes. Cette répétition de bandes alternativement calcaires et schisteuses est due à des plissements dont les environs de Romérée nous offrent de beaux exemples (fig. 6). Fig. 6. — Coupe prise au sud de Romerée. Bomsrés * a. Schistes à C. Palmatum. b. REEE à nodules e. Calca } Schistes et calcaire de Frasne. Le village est construit sur une selle de schistes à no- dules complétement enveloppée par les schistes à Pal- matum. À FE. il y a un piton de calcaire bleu dont les couches plongent de tous les côtés vers le pourtour. S'il ressuscilait quelque partisan de la défunte théorie des sou- lèvements, il ne manquerait pas de s'extasier devant une si belle preuve à l'appui de ses ingénieuses conceptions. Il ( 410 ) pourrait en trouver un autre exemple dans la même loca- lité. C'est le petit noyau calcaire exploité pour le four à chaux, qui forme aussi Taxe d'une seconde selle au milieu des schistes à nodules. A Gimnée les couches à Cuboïdes n'ont plus qu'une faible largeur. Le calcaire de Givet y forme une pointe qui se dirige de Niverlée à Doische et dont la limite septen- trionale suit presqne la route. En descendant de la cha- pelle de l'Ermitage à Gimnée, on rencontre la zone à Or- belianus et près du ruisseau sur le territoire de Niverlée j'ai pu constater la présence des Receptaculites. Le cal- caire de Frasne n’est représenté que par quelques bancs situés au milieu de la crête de schistes à nodules qui vient de Matignolle et dans lesquels MM. Barrois ont trouvé une trentaine de Gryphœus arachnoïdea réunis en un seul point. Une lentille de marbre rouge exploitée à l'O. du vil- lage est intercalée dans les schistes à nodules presque au contact des schistes à Palmatum. Entre Doische et Givet, les couches à Cuboïdes ont une stratification assez tourmentée par de nombreuses failles. Il y a quelques mamelons isolés de calcaire gris et d'au- tres de calcaire rouge. Je ne reviendrai pas sur la coupe si caractéristique du Fort Condé que j'ai donnée il y à douze ans (1). SCHISTES DE MATAGNE à Cardium palmatum. Ces schistes sont fins, noirs ou rougeûtres; ils se divisent soit en petits fragments polyédriques, soit plus souvent en feuillets très-minees comme de petites ardoises. Ils renfer- (1) Bull. soc. géol., 2me sér., t. XVII, p. 24. "eege s A t ia i aea aen lte kt deet a a A Ke ee AE (TH) ment parfois des nodules argilo-calcaires ou même des masses de calcaire soit rouge, soil gris clair, tout à fait semblables à celles qui sont intercalées dans les schistes de Frasne. Le passage entre ces deux assises se fait d'une manière insensible comme le montre la coupe de la carrière de marbre rouge de Gimnée. Fig. 7.— Coupe de la carrière de marbre rouge à Gimnée. S | A d. Marbre rou CO rungen? et modules S à Sp. euryglossus. 3. S e nodules. Cypridin D id. id. Sezbudere €: a ea ‘Bactrites, Camar. subreniformis. $ Schistes noirs feuilletés. C. Palmatu Les schistes à Palmatum sont donc difficiles à séparer des schistes de Famenne dont les premiers bancs sont sou- vent fins, rougeâtres, divisibles en petits fragments, ne se distinguant de certains schistes à Palmatum que par l'absence de ce fossile. . Néanmoins avec un peu d'habitude on arrive à recon- naître assez facilement les schistes à Palmatum. A la fin de nos études, mes compagnons et moi les distinguions à plus d'un kilomètre de distance. Je me hâte de dire que je ne D (1142) les ai jamais indiqués sur la carte sans m'être assuré de leur identité par la découverte de quelques fossiles. Le plus commun est la Cardiola retrosrata (Cardium palmatum). Il est très-abondant, mais généralement réduit à l'état d’empreinte. Il en est de même des Cypridines (Cy- pridina serralo-striata). Un brachiopode Camarophoria subreniformis , peuple certaines carrières. Enfin en cher- chant avec persévérance on peut se faire assez facilement une belle collection de Bactrites et de Goniatites transfor- mées en Limonite. _ Les schistes à Palmatum ayant offert moins de résistance aux agents atmosphériques que les roches voisines sont presque toujours ravinés, et comme ils forment un sol im- perméable, la vallée est marécageuse; souvent on y a fait quelques barrages pour établir des étangs ou réservoirs d'eau pour les forges. On ne doit done pas s'étonner si ces schistes sont en grande partie cachés par des allu- vions. L’affleurement le plus occidental que je connaisse est celui du bois du Grand-Fresseau à Féron dans la tranchée du chemin de fer (fig. 4p. 105) et dans un chemin creux voisin. A Trélon ils recouvrent directement le calcaire rouge du bois de Surmont et le calcaire gris de Chàteau- Gaillard; on les voit aussi en descendant la colline de Belle-Vue, à l'étang de Hayon, à l'entrée du canal de la Folie, etc. Ils doivent former le sous-sol de la vallée au N. de Bai- lièvre, où la Grande Helpe prend naissance, mais je n'ai pas encore pu les y découvrir. A la descente de la route de Chimai à Beaumont, on les a exploités pour sabler les allées du pare. A partir de l'étang de Virelles, on peut les suivre d’une ‘ PP RES PE TER SAR eg, À | f j (#9) manière presque constante jusqu'à Givet; je me bornerai donc à citer les accidents remarquables qu'ils présentent. Au S. de Marienbourg deux failles amènent une triple répétition des schistes à Cuboïdes et des schistes à Palma- tum (1). Si la tranchée du chemin de fer de Couvin n'avait pas mis ces failles au jour, on aurait pu croire que les schistes à Palmatum sont de simples bancs intercalés dans les schistes à Cuboïdes. Cet exemple montre qu'il ne faut par pour quelques diflicultés locales, repousser des faits Stratigraphiques qui sont parfaitement clairs en d’autres points. A 1 kilomètre environ à l'E. de cette tranchée, il y a trois petits pitons de calcaire gris qui font saillie hors de la plaine et qui sont enveloppés de tous côtés par les schistes à Palmatum; ils appartiennent donc à cette as- sise. Fig. 9. — Coupe d’un piton de calcaire gris, au SE. de Marienbourg. a Schistes à Cardium palmatum. i. Calcaire gris violacé par place. o Schistes à nodules. A l'O. et au NO. de Dourbes dans un pli formé par des roches devoniennes plus anciennes, il y a deux petits lam- beaux de schistes à Palmatum qui se signalent à l'exté- rieur par leur couleur noire. (1) Bull. Soc. géol. de France, 2we série, L. XXII, p. 29. Me SÉRIE, TON "1. (114) Au NO. de Givet et sur le territoire de Foische, les schistes à Palmatum sont très-développés; peut-être est-ce d'eux que dépendent une partie des masses de calcaire rouge exploités sur le territoire de Foische. Je résume la partie didactique de mon travail par les propositions suivantes : 1° Dans la partie de F'Entre-Sambre-et-Meuse qui fait l’objet de cette étude, les diverses couches ont des carac- tères minéralogiques et paléontologiques constants ; 2% Dans les schistes à calcéoles et dans les schistes de Frasnes, les calcaires constituent des lentilles très-varia- bles par l'épaisseur et par l'étendue; 5° Les couches sont affectées de nombreux plissements; mais les failles y sont également très-nombreuses et ont joué dans l'allure des strates un rôle plus considérable qu'on ne pensait d'abord: 4° I m'a été impossible de reconnaître des niveaux fos- silifères distincts dans les schistes à Calcéoles ; 5° Le calcaire de Givet présente trois niveaux que je puis caractériser par les espèces suivantes à partir de la base ` 7° Spirifer subcuspidatus, X Strigocephalus Bur- tini, 5° Spirifer Verneuili ; 6° Les schistes et calcaires de Frasnes ne m'ont montré d’autres niveaux paléontologiques distincts que le niveau à Spirifer Orbelianus, et le niveau à Réceptaculites à la base; le reste de la zone a une faune unique; T° Certains calcaires rouges sont intercalés dans les schistes à Cardium palmatum. Coupe de Fagnolle a Olloy. Fig. 1. Coupe de Dourbes a Olloy. Fig. À. Coupe de la Station de Couvut, au four a chaux de- Boussi. Fig. S Four à chaux. de Boussu ei WICH CLASSE DES LETTRES. Séance du 5 janvier 1874. M. J.-J. Taonissex, directeur, président de l'Académie. M. An. QUETELET, secrétaire perpétuel. Sont présents : MM. Grandgagnage, Gachard, P. De Decker, J.-J. Haus, M.-N.-J. Leclercq, le baron Kervyn de Lettenhove, R. Chalon, Th. Juste, le baron Guillaume, Alph. Wauters, Ém. de Laveleye, Ém. de Borchgrave, membres; J. Nolet de Brauwere van Steeland, Aug. Sche- ler, Alph. Rivier, associés; Ferd. Loise et F. Tielemans, correspondants. M. Ed. Mailly, correspondant de la classe des sciences, assiste à la séance. CORRESPONDANCE. M. Thonissen, aussitôt après l'approbation du procès- verbal de la dernière séance, se lève et adresse ses remer- ciments à la classe pour l'honneur, dit-il, d'avoir été appelé à diriger ses travaux pendant l'année qui vient de finir. Il ajoute que sa tâche a été singulièrement facilitée par les sentiments de cordiale amitié que n’ont cessé de lui témoigner ses confrères. Il termine en faisant remar- quer que toutes les séances ont fourni des communications : ( 146 ) intéressantes, qui ne peuvent qu'ajouter à la considération dont jouit l’Académie. H installe ensuite M. Chalon Ha les fonctions de direc- teur pour l’année actuelle. M. Chalon, en prenant place au fauteuil, félicite M. Tho- nissen pour la manière brillante et distinguée avec laquelle il a dirigé les travaux de la classe, et lui adresse les remer- _ ciments de tous ses confrères. — Il est donné lecture des pièces ministérielles sui- vantes ` 1° Transmetiant une ten d'un arrêté royal du 9 décembre dernier, par lequel M. De Keyser, directeur de la classe des beaux-arts pour 4874, a été nommé pré- sident de l'Académie pour la même année; 2 Adressant un exemplaire du budget du département de l'intérieur (avec annexes) pour l’année 1874; 3° Accompagnant divers ouvrages dont les titres seront mentionnés au Bulletin de la séance. - — La Société historique d'Utrecht, le Bureau de statis- tique de Ia ville de Pesth, la Commission impériale archéo- logique de Saint-Pétersbourg et la Société mexicaine de géographie et de statistique, à Mexico, remercient pour le dernier envoi de publications académiques ou adressent leurs récents travaux. ` ` — M. le secrétaire perpétuel dépose sur le bureau l'An- nuaire de l'Académie pour 1874, qui vient de paraître. Ce volume renferme, en ce qui concerne la classe des lettres, la notice de M. le baron de Gerlache, par M. Thonissen, et celle de M" Laforet, par M. Félix Nève. Ces deux notices sont accompagnées de portraits. EE Lee GE — La classe reçoit ensuite l'hommage des ouvrages suivants : 1° Annuaire de l'Observatoire royal de Bruxelles pour 1874, par M. Ad. Quetelet, 4 vol. in-19; 2 Histoire de la fabrication des monnaies, par M. R. Chalon, in-8°. Renrerciments. ÉLECTION. La classe procède à l'élection du directeur pour 1875. Les suffrages se portent sur M. le général baron Guillaume. L'honoraäble académicien, en venant prendre place au bureau, remercie ses confrères du témoignage d'estime dont il vient d’être l'objet et tient à les assurer qu’il cher- chera à s’en rendre digne. COMMUNICATIONS ET LECTURES. ADUATUCA. — Géographie ancienne. — Notice par M. J. Grandgagnage, membre de l’Académie. Les savants allemands ont continué à s'occuper d’une question qui paraissait épuisée. Nous croyons devoir y revenir nous-même, d'abord pour compléter nos trois pre- mières notices qui n'avaient qu'une conclusion, pour ainsi dire, négative; en second lieu pour examiner les nouvelles objections qui nous ont été faites, et dont plusieurs ont paru telles, qu'elles ne pouvaient ni ne devaient rester sans réponse. Nous venons répondre, au risque d'avoir à (148) reproduire certains détails, mais en les rachetant peut-être par quelques nouveaux aperçus. Après avoir simplement combattu l'opinion des autres, nous pourrons aujourd’hui articuler la nôtre (1). L'auteur de l'Histoire de César, adoptant l'opinion des deux savants français, MM. le général du génie Creuly et A. Bertrand, qui s’étaientrendus en Belgique pour l'œuvre de la Carte des Gaules, assigne à la ville de Tongres ‘emplacement de ce poste fortifié qui est désigné dans les Commentaires sous le nom d’Aduatuca avec la qualifica- tion tantôt de castellum, tantôt de castra. Mais avant de publier son livre, des doutes s'étant produits et le journal français lnstitut ayant rapporté l'opinion contraire que nous avions soutenue, ici même, dans le sein de l'Aca- démie, l’empereur Napoléon IH avait envoyé sur les lieux un officier du génie pour reconnaître si les environs de la ville de Tongres pouvaient s'accorder avec le récit que font les Commentaires de la terrible défaite subie par les Romains, non loin du castellum, sous les coups d’Ambiorix. Nous avons tout lieu de croire que le rapport de M. le ma- jor de Loqueyssie ne fut pas favorable à cette ville; ayant eu l’avantage d’avoir un entretien avec cet officier distingué sur le terrain contesté, nous l'avons entendu nous dire en propres termes que les diverses élévations et dépressions du sol, les seules où l’on pourrait à la rigueur supposer en (1) Voir les Bulletins de l'Académie, 2me série, t. XIV, n° 11; 1. XV, n° 3; t XVI, n°8, Dans la notice actuelle, comme dans les précédentes, nous partons d’une supposition qui, du reste, paraît généralement admise, c’est que le nom d’'Aduatuca, écrit dans les Commentaires, se reproduit dans le nom donné à la ville de Tongres par des écrivains postérieurs de plus d’un siècle à César : Afuaca, Aduaca Tongrorum, Aluatucum Tongrorum; tellement que ces derniers noms ne seraient qu’une variante de Pautre . ($19) ce pays le théâtre de la bataille, a ne présentaient pas des » positions bien redoutables, » ni propres, par conséquent, à justifier le récit du conquérant romain, Mais on tenait beaucoup, paraît-il, à l'emplacement indiqué, et cela, peut-être, pour échapper aux incertitudes, aux difficultés qui se rencontrent dans la recherche d’une autre localité. Tel est sans doute le motif qui détermina M. le général Creuly à publier un mémoire, où il déve- loppe lopinion qu'il n'avait d'abord que très-succinete- ment émise en faveur de Tongres, et où il s'applique, dans une réfutation pleine de courtoisie autant que de science, à combattre les divers arguments que contenaient nos pré- cédentes notices (1). i Faisons tout de suite une remarque qui a quelque va- leur. Dans nos premières études, en citant les différents écrivains qui placent à Tongres l'antique Aduatuca, nous avons signalé l'embarras qu’ils éprouvent tous pour trou- ver à environ une lieue de cette ville la grande vallée, le pas difficile où les Romains avaient dû s'engager dans leur retraite. Les uns indiquent le fond du village de Frère, les autres le fond du village de Lowaige, un autre encore les quelques enfoncements de terrain qui se rencontrent dans la direction de la ville de Looz. Selon nous (et peut- être avons-nous réussi précédemment à le prouver), au- cune de ces localités ne résiste à l'examen. Voici mainte- nant M. le général Creùly qui, partageant sans doute notre Opinion à cet égard, vient à son tour proposer une localité, une nouvelle, une autre localité; ce n’est ni plus ni moins que la quatrième ou la cinquième, et ce dernier choix ne nous semble pas plus heureux que les précédents. M. le (1) Carte de la Gaule sous le proconsulat de César, Paris, 1864. ( 120 ) général place le champ de bataille « dans le vallon du Geer » à l'endroit où il s’élargit brusquement entre Koninx- d heim et Russon. » Nous en appelons à quiconque connaît le pays ou pren- dra le soin de le visiter; il nous paraît bien difficile, pour ne pas dire impossible, d'accorder ce lieu avec le récit des Commentaires. Ce n’est en réalité qu’une vaste plaine, des- cendant par une pente presque insensible ou, du moins, très-légèrement inclinée, vers le Geer qui la traverse. Aussi rien de précis dans la notice descriptive de notre honorable adversaire; on dirait qu’il éprouve lui-même certain embarras à déterminer bien distinetement les dif- férents points de ce lieu. On ne peut guère l'appeler vallon qu'à cause de la rivière du Geer qui y coule, mais qui y coule, on pourrait dire en plaine. Admettons néanmoins cette qualification, et alors nous demanderons à notre honorable adversaire qui fait descendre les Romains de Koninxheim, nous lui demanderons où il place ce qu'il appelle le versant opposé que les Romains, dit-il, avaient à gravir. Il ne l'indique pas; mais, assurément, ce ne peut être qu’au delà de la rivière, car s’il y a là un vallon du Geer, les deux versants doivent se trouver sur l’une et l'autre rive. Les Romains auraient done eu la rivière à tra- verser, el non-seulement la rivière, mais les terrains maré- cageux qui la bordent. César ne dit rien de cette double circonstance qui aurait notablement aggravé la position du corps d'armée en retraite. M. le général Creuly n’en parle pas non plus. Son silence nous étonne; ce qui nous étonne encore davantage, c’est qu'il admet que les Romains, sup- posés à Tongres, avaient à diriger leur marche vers le camp le plus rapproché, vers le camp de Quintus Cicéron qu'il place à Gembloux ; or, les Romains, en descendant au Geer, suivaient une direction tout autre. (121 ) Pour expliquer cette marche, M. le général parle d’une route unique partant de Tongres et se bifurquant à cer- taine distance; il se garde de nous dire où la bifurcation se serait trouvée; mais il résulte de son texte qu’elle se trouvait sur le versant opposé. Ainsi on aurait été placer au delà du Geer la branche destinée à Gembloux, à Bavai, et cela, sans doute, pour se donner la peine de retraverser bientôt la rivière, afin de reprendre la vraie direction. Du reste nous admettons la bifurcation ; elle existe encore de nos jours; mais elle se trouve, elle a toujours dù se trouver sur la hauteur même. L'une des branches, celle que les Romains avaient à prendre, est la grande voie qui tend à Bavai en passant par Gembloux; elle suit tout te plateau” sans descendre au Geer, sans rencontrer ni versant opposé, ni pentes à gravir. Quant aux détails stratégiques que l’on nous oppose, il nous sera permis de ne pas nous y arrêter, d’abord à cause de notre incompétence, en second lieu parce qne nous n’entendons nullement contester que la complète défaite d'un corps d’armée puisse avoir lieu dans l'endroit indiqué comme dans vingt autres endroits de la Belgique. Là n’est pas le fond de la question. Le point capital est de savoir si la localité répond à la description de l'écrivain latin, si Ton peut y trouver l'application des termes ` magnam con- vallem, iniquissimo loco, ascensus, etc.; or ce que nous avons dit du terrain proposé nous paraît suffire à la néga- tive. Aussi notre honorable adversaire, reconnaissant peut- être que ces diverses expressions donnent lieu à des diffi- cultés, s’efforce-1-il d'en atténuer la portée? 11 n’hésite pas pourtant à déclarer que la signification du terme convallis e ne peut pas beaucoup différer de celle de vallis; » mais (122 ) il ne s'applique pas moins à donner à ce mot un sens ex- cessivement restreint, et, pour établir que le mot doit sep: tendre de simples ondulations du sol, d’un simple pli de terrain, il cite plusieurs auteurs latins, notamment Hirtius et César lui-même, lesquels parlent d’embuscades placées in convalle, inter convalles. Disons d’abord que nous avons inutilement cherché sur les lieux assignés à la bataille une ondulation du sol, un pli de terrain capable de cacher en embuscade les huit à neuf mille hommes d’Ambiorix. Mais il est une observation générale qui peut faire justice de toutes les citations latines, c'est que, dans les divers pas- sages qu’on nous objecte, le mot convallis est employé seul, sans aucune épithète, tandis que le récit de César porte : magna convallis. Notre honorable adversaire ne tient guère compte de l’épithète magna. Aussi, grande a été notre surprise, quand nous sommes arrivés à sa conclusion conçue textuellement en ces termes : < Concluons de tout » cela que, par les mots magna convallis, César n'a pu » entendre autre chose qu’une médiocre vallée (1)... » Après les considérations que nous venons de présenter, il peut être inutile de relever un autre point de la discus- sion où l’on critique assez vivement le sens particulier que nous avons donné au mot convallis. Quelle que soit sa signification propre, il est évident que là où il y a con- vallis, il y a nécessairement vallis; rien donc d'étonnant 1) Il est vrai que, pour atténuer l'effet d’une pareille conclusion, on recourt à celte alternative : une médiocre vallée ou un large vallon ; mais à supposer qu'on puisse appeler vallon les vastes champs, traversés par le Geer, qui s'étendent au delà de Koninxheim , nous pensons que la plume précise de César eût écrit lała. M. Driesen , soutenant une autre thèse, avait donné à magna le sens de longa. ( #25 ) si César, après avoir employé le premier de ces termes pour déerire bien exactement le lieu de la scène, emploie ensuite et immédiatement le mot vallis. Toujours est-il que les deux mots sont distincts. Dans nos précédentes notices, nous avons émis l'opinion que la convallée pour- rait bien être un point convergent de vallées, un entre- croisement de collines, et, aujourd'hui encore, nous esti- mons que la préposition con, cum, entraine cette idée de réunion, de connexion, de pluralité. Les citations latines qui nous sont opposées ont surtout pour objet de combat- tre cette interprétation, car, s’il est plus que difficile de trouver une grande vallée entre Koninxheim et Russon, il est encore bien plus difficile, il est impossible d'y trouver une convallée dans le sens que nous croyons devoir atla- cher à ce mot, c’est-à-dire une vallée qui vient se joindre à une autre. On cite d’abord Apulée : In quadam avia et lacunosa convalle a latronibus obsessus (Met. 1). « Comment, nous » dit M. le général Creuly, comment un point convergent » de vallées pourrait-il être un lieu écarté, un terrain par- >» ticulièrement propre à des embuscades? N'est-ce pas, » au contraire, un nœud de communications dans tout » pays?» Cette exclamation de notre honorable adversaire nous cause une nouvelle surprise. Il ne nous est pas donné de comprendre pourquoi un point convergent de vallées ne serait pas situé à l'écart, dans une solitude; nous pouvons indiquer en Condroz, en Ardenne, nombre de ces points convergents qui sont fort écartés, très-propres à des em- buscades, sans la moindre voie de communication. Après Apulée on cite Cicéron; mais nous nous trompons étrangement, si le passage , au lieu de contrarier notre in- f ( 124 ) terprétation, ne la justifie pas tout à fait: Romam in montibus positam et convallibus…. irridebant (Agr. H,35). Nous avons séjourné assez longtemps à Rome pour savoir que les monts Aventin, Capitolin, Viminal, Quirinal et autres, ne sont pas continus, mais s'élèvent irrégulière- ment sur plusieurs points de la ville éternelle, séparés entre eux par des parties basses qui nécessairement se rencontrent et s'entre-croisent, donc par des convallées telles que nous les avons définies. On cite ensuite Pline le naturaliste : Montes perfossos, convalles œquatas (XXXVI, 15, 24) (1); et l'on nous dit que l’auteur, « lorsqu'il décrivait une conduite d'eau creusée en tunnel sur les hauteurs et portée sur des remblais ou des arcades dans les ravins et autres dé- pressions du sol, n’avait nul besoin de penser à des vallées convergentes. » Notre honorable adversaire n’a-t-il pas pris garde que Pline décrit ici un fait? Et s’il est de fait que les aqueducs qu’il décrit traversent des vallées convergentes, il nous semble que Pauteur a bien dù penser à des vallées conver- gentes. Ces grands ouvrages vont généralemeut chercher l'eau dans les montagnes fort irrégulières, fort découpées du Latium, ayant ainsi à traverser des vallées qui s'entre- croisent. C'est à propos de ce qu'il appelle les ouvrages miraculeux de Rome, operum miracula, que Pline cite les aqueducs; et n'est-il pas à supposer que leur passage à Ki v v Y travers des vallées qui se rencontrent exige des travaux (1) Nous copions les chiffres de M. le général Creuly; d'après notre édition de l’ Histoire naturelle de Pline (Paris, Plon, 1845), nous pensons que la citation devrait être marquée ` lib XXXVI, cap. XXIV; le n° 15, en chiffres arabes, se trouve au chapitre XXII , après les chiffres romains. ee US DS A (139) plus considérables et, par conséquent, plus dignes de l'ad- miration que l'écrivain romain leur accorde? H nous semble aussi que notre honorable adversaire contrarie quelque peu cette admiration, quand, ici encore, affaiblissant la portée du mot convallis, il traduit les convalles æquatas de Pline par simples ravins ou dépressions du sol; quelques uns de ces magnifiques ouvrages traversent de véritables vallées, portés sur des arcades à plusieurs étages qui atteignent plus de cent pieds d'élévation. Il ya du même auteur une seconde citation, relative au phénomène de l'écho ` Hoc.... natura locorum evenit et plerumque convallium (ibid. 25). Nous ne sommes pas phy- sicien; mais, dans notre ignorance, nous avions toujours cru qu'une rencontre de vallées, un entre-croisement de collines, offrant au son plusieurs points de répercussion, devait être éminemment favorable à la production de l'écho, et que Cétait à juste titre, à dessein, avec une parfaite intention, que l'ancien naturaliste avait employé ici lex- pression toute spéciale de convallis au lieu du mot géné- ral vallis. Notre honorable adversaire soutient précisément le contraire. il nous reste à dire quelques mots sur un point que nous avons déjà touché dans nos premières notices, mais où l’on nous fait de nouvelles objections, ce qui nous oblige d'r revenir. Pour se mettre d'accord avec les Commentaires qui placent le castellum Aduatuca presque au centre du pays éburon, M. le général Creuly recule jusqu'au Bas-Escaut les frontières de ce pays; mais il tombe ainsi dans un autre désaccord, car c'est placer la plus grande partie des Ebu- -rons entre l'Océan et la Meuse, tandis que le contraire est textuellement écrit dans les Commentaires : Quorum pars ( 126 ) maxima) est inter Mosam et Rhenum (V, 24). On fait de grands efforts pour échapper à la difficulté; mais, comme nous l'avons déjà dit ailleurs, c’est en détournant de son sens tout naturel le passage que nous venons de citer (1). En étendant les Éburons jusqu’au Bas-Escaut, jusqu’à la mer, M. le général le déclare lui-même, il sépare les Mo- rins et les Ménapiens par le territoire éburon, ce qui n'est écrit nulle part. Tacite dit plutôt le contraire en parlant d’une expédition projetée par le guerrier batave Civilis : Ille... aliam manum Mosam amnem transire jubet, ut Menapios et Morinos et extrema Galliarum quateret (Hist. IV, 28.). Ainsi, dans une expédition qui devait être poussée jusque dans les Gaules, l’armée de Civilis avait à rencon- trer les Ménapiens, puis les Morins, ce qui semble exclure l'interposition d'un autre peuple. Un passage de César même nous montre également les Ménapiens et les Morins accolés l’un à l’autre (2) : Exercitum.... legatis in Mena- pios atque in.... pagos Morinorum.... deducendum dedit (IV, 22.). Nous doutons fort d’ailleurs que les divers textes dont on se prévaut aient la portée qu’on leur prête : Qui proximi Oceano fuerunt his insulis sese occultaverunt, quas aestus efficere consuerunt (VI, 31.). César ne dit pas là que les Éburons touchent à l'Océan; il ne dit pas même, comme le traduit M. le général, qu'ils sont voisins de la mer; il dit seulement que ceux des Éburons qui étaient les (1) Notre honorable adversaire cite inexactement le texte; au lieu de pars maxima il écrit pars magna, ce qui aiderait notablement à la thèse qu’il soutient, C’est pure inadvertance; nous en sommes d'autant plus Con- vaincu que sa traduétion porte : la majeure partie. — Carte de la Gaule sous le proconsulat de César , p. 51. (2) C’est ce que l’on voit encore dans une expédition de César contre les Morins et les Ménapiens (HH, 28). Wa, (127 ) plus rapprochés de la mer, proximi, se sauvèrent dans les iles formées par la marée montante. Un second passage qui nous est opposé nous paraît bien plutôt confirmer notre opinion ` Ad Oceanum versus in eas partes quae Menapios attingunt (VI, 33). Ainsi Labiénus, saccageant le pays éburon, se dirigea du côté de l'Océan vers les par- ties de ce pays qui touchent aux Ménapiens, qui atteignent les Ménapiens (attingunt); c'est done aux Ménapiens que continent les Éburons dans la direction de l'Océan , d’où il faut conclure que ce sont les Ménapiens qui occupent les côtes. On comprend du reste que, pour échapper à la ter- rible vengeance des Romains, les malheureux fuyards se sauvèrent partout où ils purent, et surtout se sauvèrent hors d’un territoire voué à la dévastation pour aller se jeter à travers le pays des Ménapiens dans les îles cò- tières (1). Il y en eut même beaucoup, au rapport de César, qui allèrent se livrer à des péuplades hostiles : Multi, ex suis finibus egressi, se suaque omnia alienissimis tradiderunt (VE, 31). Quand César parle de peuples qui touchent à l'Océan, cet écrivain, toujours si précis, le dit en propres termes: Venetos, Unellos, Rhedones, quae sunt maritimae civitates Oceanumque attingunt (IL, 54). Nous ne pouvons finir la discussion avec M. le général Creuly sans répondre à un reproche qu'il nous adresse en termes assez vifs; il nous accuse d’avoir commis une erreur à propos de ce passage des Commentaires ` Erant el virtute et numero pugnandi pares (V. 34). Il nous an (1) On nous pardonnera l'emploi que nous faisons du mot côtier, emploi que l'Académie française ne semble pas admettre, mais qui rend parfaitement notre idée : {les côtières, îles situées près des côtes, le long des côtes { 1928 ) semble cependant qu'on ne saurait dire en termes plus exprès que, dans la bataille livrée au voisinage d Adua- tuca, les Romains et les Barbares étaient égaux en nombre. M. le général ne l'entend pas ainsi; il prétend, malgré un texte aussi formel, numero pares, que les Barbares étaient les plus nombreux. Ce n’est plus traduire, pensons-nous, c’est ajouter à son auteur. Croyons bien d'ailleurs que, si la troupe d’Ambiorix eût été supérieure en nombre, le conquérant romain n'aurait pas manqué de le dire pour diminuer l’affront de la défaite. Toutefois nous ne pouvons que nous féliciter du solide appui que cette partie du mé- moire de M. le général fournit à notre opinion ; on ne sau- rait mieux la justifier. En effet, dit notre honorable adver- saire, il eut été bien étrange qu'une troupe de barbares vainquit de vieux soldats aussi nombreux qu'elle; et il ajoute qu'on a voulu expliquer par des difficultés de ter- rain exceptionnelles le prétendu fait d’une troupe de sol- dats romains aguerris, succombant sous les coups de bar- bares en nombre égal. Eh bien, ce prétendu fait, ce fait bien étrange est de tous points le fait mentionné très- explicitement dans les Commentaires; et ce fait bien réel ne peut s'expliquer, notre honorable adversaire le recon- naît pour le cas d’un nombre égal, que par des difficultés de terrain exceptionnelles, difficultés qui ne se rencon- trent pas, il le reconnait aussi, dans les lieux qu'il assigne à la déroute romaine. De tout ce qui précède il nous semble résulter qu'on ne peut guère placer à Tongres l’Aduatuca des Commentaires. Où faut-il la placer? Tel est le point que nous allons exa- miner le plus brièvement qu'il nous sera possible. La plupart des écrivains, surtout les écrivains belges et allemands, sont généralement d'avis que c'est entre la | | | ( 129 ) Meuse et le Rhin qu'il faut chercher la localité; mais on sait qu'ils varient sur le choix, proposant tour à tour Aix- la-Chapelle, Juliers, Julémont, Gressenick, ete. Plusieurs de nos historiens se sont prononcés pour Embour (1), et Cest à celte opinion qu'un examen attentif et souvent ré- pété des lieux nous avait conduit depuis fort longtemps. Toutefois nous avons tardé à publier nos observations, parce que, d'une part, ces historiens ne pouvaient guère nous appuyer de leur autorité, s'étant bornés à émettre leur avis sans discuter la question ni l’examiner d’un peu près; parce que, d'autre part, nous ne sommes pas étran- ger au village d'Embour et qu'on eût pu soupçonner quelque secret motif de partialité. Mais aujourd'hui qu'un ` savant allemand, Cohausen , s'arrête fermement à Embour, en traitant le sujet ex professo dans un écrit accompagné de plans, de cartes et de nombre de détails topographiques et stratégiques, nous pouvons parler plus sûrement. Voici le titre de cet écrit : Caesar am Rhein. — Forschungen und Bemerkungen zu der Geschichte Caesars von Louis Napoleon. — Von A. V. Co- hausen, oberst. im Künigl. Preuss. Ingenieur-Corps. — Bonn, 1867. Nous allons ajouter quelques observations à celles du savant allemand. Le point du haut plateau d'Embonr où lon s'accorde à placer Aduatuca est le lieu dit aujourd’hui la Hasette; (t) Aujourd’hui l'on écrit habituellement Embourg ; mais le nom s'est aussi écrit Embour ; on verra plus loin pourquoi nous croyons devoir adop- ter celte dernière orthographe. 27° SÉRIE, TOME XXXVII. z ( 430 ) c'est un recoin de ce vaste plateau, offrant tout l’espace nécessaire à l'assiette d’un castellum op castra selon les expressions de César. Or, s’il est un lieu qui réponde aux détails descriptifs que donnent les Commentaires, c’est assurément celui-ci. Laissons la tradition recueillie par plusieurs historiens et plaçant à cet endroit un chàteau- fort, une forteresse; ne voyons que les lieux et les faits rapprochés des textes (1). La Hasette se trouve presque au milieu du pays éburon, tel qu’on le délimite généralement : hoc fere est in mediis Eburonum finibus (VI, 29). Elle est défendue vers le sud par un rocher vertical, inabordable, à l’est et à l'ouest par (1) Cohausen écrit par erreur le Hasset. Plusieurs auteurs ont écrit Hassette, mais nous croyons celte orthographe vicieuse; le mot est pro- noncé Hazette par les habitants du pays. Une partie de ce lieu est resté vague, stérile et forme un terrain communal. Nul rapport entre les noms Hasette et Adualuca ; ils abondent les exemples de PE survenus avec le et s dans les noms de lieu : Aduaticorum devient Hastedon ou bien le AMont-falise, FAduaca des écrivains postérieurs à César ien Tongres. Gardons-nous des illusions trop souvent compagnes des recherches étymologiques et touchant même ne au ridicule; en nous déclarant incompétent, citons seulement un fait. Nous avons SCH dire à plu- sieurs chasseurs du pays que la Hasette était un fort bon poste de chasse; l'un d'eux s'est même servi de ces termes : « La Hasette est le rendez- » vous des lièvres et des lapins. » Et cela se comprend d'un terrain vague, solitaire, entouré presque entièrement de bois. Comme nombre de mots flamands ou allemands se retrouvent dans l'idiome wallon, on se deman- dera peut-être si la Hasette a été ainsi dénommée comme gite de lièvres (haas), comme endroit fréquenté par les lièvres : Aaas-heid, la côte des lièvres. Dans un autre écrit nous avons proposé Navette, Naf-heid, côte des bateaux , la côte au bas de laquelle stationnaient autrefois les bateaux de la Vesdre. Au pays de Liege la heid se dit généralement d'une lande ou colline stérile. Voir notre notice sur Chaudfontaine , pp. 129 et suivantes (Bulletin de l'Institut archéologique liégeois , année 1855). ( 151 ) des pentes rapides : reliquos aditus locus ipse per se mu- nilioque defendit (VI, 57), passage qu'il est plus que dif- ficile d'appliquer à Tongres, où la nature n’a rien fait pour la défense; nous n’en voulons pour preuve que les propres paroles du général Creuly définissant en ces termes la position de cette ville ` a une humble croupe , élevée d'une » vingtaine de mètres au-dessus de la plaine, avec laquelle » elle se raccorde par des pentes très-douces. » Anssi notre honorable adversaire garde-t-il un silence prudent sur ces mots : per se defendit. Wle garde également sur cet autre passage, où il est dit, à propos de la situation d'Aduatuca que le Rhin est proche (subesse Rhenum), expression qu'Embour justifie mieux que Tongres, cette dernière ville n'étant pas seulement séparée du Rhin par une plus grande distance, mais l’étant encore par la Meuse. C'est aussi ce qui semble résulter du récit que font les Commentaires d’une soudaine attaque des Sicambres, venant du Rhin surprendre Adualuca; ce récit d'une sur- prise ne porte pas que lennemi eût dù traverser la Meuse, mais fait, au contraire, supposer par son ensemble que le but de l'expédition était moins éloigné (VE, 55). La Hasette, comme nous venons de le dire, protégée de trois côtés par son rocher et ses escarpements, touche vers le Nord à la plaine, et c’est là que se trouvait le rempart (Munitio), bordant de ce côté une enceinte assez considé- rable, une ville des Sarrasins, disent les gens du pays. Encore aujourd'hui Ton peut suivre sur plusieurs points la ligne d’un retranchement, d'un parapet, sans doute un Ouvrage avancé. Le rempart se prolongeait et descendait sur la pente des collines; les murailles ont disparu, mais leur relief est encore visible. Les anciens du village ont vu des restes de ces murailles; ils parlent aussi de caveaux ( 132 ) que l’on avait découverts dans l'enceinte. Ce qui est encore remarquable, c’est la grande et belle voie qui mène à la Hasette et qui ne menait que là, voie vraiment romaine allant droit à son but sur une DE de presque un quart de lieue, sur une largeur d'environ trente pieds. Un pareil abord ne suppose pas un simple château féodal, mais un véritable établissement militaire (1). Là où se trouvait le rempart, le sol ne s'élève pas sensi- blement au-dessus de la plaine; on pourrait presque dire qu'il est à niveau. Aussi le soldat romain, le porte-aigle, fuyant devant Ambiorix pour regagner le camp, arrivé au pied des murailles et accablé d'ennemis, a pu sauver l'aigle en le lançant dans Fintérieur par-dessus le rempart : Petrosidius aquilifer, quum magna multitudine hostium premerelur, aquilam intra vallum projecit (V, 37). Les Commentaires parlent aussi d’une forêt qui joignait la place et par où les Sicambres, dans leur attaque soudaine, purent arriver presque au pied des retranchements sans être découverts : Nec prius sunt visi, objectis ab ea parte silvis, guam castris appropinquarent, usque eo ut qui sub vallo tenderent mercatores, recipiendi sui non haberent facultatem (VI, 57). Ces bois existent encore et ont même envahi une partie de la Hasette; nous ne savons si le voisi- nage immédiat de Tongres peut se prêter à l'existence de pareilles forêts. Sortant maintenant de l'enceinte pour descendre la plaine par une pente peu sensible, nous arrivons vers Île milieu du plateau d'Embour où le terrain s'élève et forme une éminence appelée aujourd'hui le Perit-Mont, autour de (1) Une assez récente exploitation de carrière, avec four à chaux, 4 dégradé, entamé même et détourné sur quelques points la voie. éme rer de "ZS ( 155 ) laquelle s'étendent des champs fertiles. N'est-ce pas là que Quintus Cicéron, oceupant alors le castellum, envoya plu- sieurs cohortes avec chevaux et valets pour récolter du blé? Quinque cohortes frumentatum in proximas segetes misit, quas inter et castra unus omnino collis intererat (VI, 56). Le Petit-Mont répond à la suite du récit des Com- mentaires qui parlent d'un jugum, d’un tumulus, d’une élévation situće au milieu des champs cultivés, et où se réfugièrent et se défendirent pendant quelque temps les moissonneurs romains surpris par les Sicambres : Calones in proximum tumulum concurrunt; — alii, ut in jugo consistant; — ii qui in jugo constiterant (VI, 40) (1). Quant aux environs du plateau d'Embour, ils sont des plus accidentés ` l’on ne peut s’en éloigner sans rencontrer dans toutes les directions de grandes vallées convergentes, des pas difficiles, des pentes à gravir : magnam conval- lem, iniquissimo loco, ascensus, etc. Rappelons ici que les Romains en retraite se proposaient de gagner le camp de leurs frères d'armes le plus rapproché ` ad proximam legio- nem perventuros (V, 29); or, le camp de Labiénus, établi (1) Le Petit-Mont est au Nord de la Hasette ; mais au Sud, et de même à une distance assez rapprochée se trouve la côte du Rond-Chéne qui justi- fierait aussi bien le récit de César, à supposer que ce serait vers le Sud, vers le plateau de Beaufays, que les soldats romains seraient allés mois- sonner. A la côte du Rond-Chéne, séparant la Hasette des champs cultivés de Beaufays, peut s'appliquer de tous points ce passage des Commentaires : Segeles.. . quas inter et castra unus omnino collis intererat. gaben que celte côte présente un point culminant (jugum, tumulus), où l'on remarque encore les lignes d’une petite redoute, construite, genge Där les Autrichiens vers la fin du siècle dernier. Notre auteur allemand n'a-t-il pas ici commis quelques erreurs? Voir plus loin la note de la page 136 ` ( 134 ) dans les Ardennes aux confins des Trévires et des Rhèmes, et que M. le général Creuly place du côté de Marche ou de Bure, était le plus proche du castellum Aduatuca supposé à Embour, et c'est là, en effet, c’est précisément au camp de Labiénus que parvinrent les quelques Romains échappés aux coups d’Ambiorix ` pauci, ex praelio elapsi, ad La- bienum pervenerunt (V, 37). Notre honorable adversaire est muet sur ce point (1). Si nous recherchons de plus près quel a pu être le lieu de la déroute romaine, nous dirons qu’une ancienne route, sortant du plateau d'Embour, traverse celui de Beaufays et va descendre dans le fond de Gomzé, en se dirigeant vers les Ardennes, par conséquent, vers le pays où se trouvait le camp de Labiénus. Ce fond de Gomzé, situé à une lieue environ d'Embour, nous semble pouvoir être assigné an théâtre de la bataille. H se rejoint aux vallées de Coirfalise et des Ris-de-Mosbeux, formant ainsi une grande con- vallée, dont les pentes sont roides et répondent aux expres- sions des Commentaires (2). (i) Peut-être même le mot pervenire, parvenir, dans son sens propre, justifie-t-il notre opinion. Parvenir, dit le. Dictionnaire de l'Académie française, arriver à un terme que l’on s'est propos Quant à l’assignation de Marche ou de Bure au camp de Labiénus, nous ne pouvons l’adopter; nous croyons qu'il faut aller plus loin pour trouver les confins des Trévires et des Rhèmes. Mais quand on place à Tongres l'Aduatuca des Commentaires, on est obligé, pour s'accorder avec les dis- tances indiquées par César d'un camp romain à lautre, de rapprocher le camp de Labiénus comme le fait M. le général Creuly. (2) Ainsi que nous l'avons dit, l'on ne peut s'éloigner d’Embour sans rencontrer quelque convallée. Un savant étranger, que nous avons conduit sur les lieux, a trouvé que les fonds de Gomzé étaient à une distance un peu mie: zrande de la Hasette; il inclinerait à placer le théâtre de la bataille dans le grand ravin qui sépare le plateau d’Embour de celui de Beaufays, | | i | ( 135 ) L'ensemble de toutes les circonstances que nous venons de relever, nous parait justifier l'opinion des écrivains qui placent sur la Hasette l'antique Aduatuca; mais il est encore une considération que nous ne pouvons omettre. Plusieurs peuplades de l’ancienne Gaule belgique ont laissé leurs noms aux localités où elles avaient leur principal établissement, les Hiem? à Reims, les Treviri à Trèves, les Suessiones à Soissons, etc. de même, la plupart de nos écrivains s'accordent à retrouver le nom des Eburones dans la dénomination du village d’Embours et, en effet, on peut conjecturer que ce peuple avait établi son siége prin- cipal presque au centre de leur territoire, dans sa partie la plus considérable, c’est-à-dire, entre la Meuse et le Rhin, sur un haut plateau dominant le pays et bordé tout à l'en- tour d’un cercle de collines escarpées. Mais comment expliquer que, dans ce centre éburon, soit venue se placer une forteresse ayant nom Aduatuca, un nom identique à celui d’une peuplade voisine, les Aduatiques ? et qui relie entre elles Enr les vallées de l'Ourte et de la Vesdre, là où la route moderne a fait un haut remblai qui forme une sorte d'isthme. A certaine distance de la asine on arrivait à la rude côte du Rond- Chêne où montait une voie primitive, abandonnée de temps immémorial, mais qui, tout récemment encore, nous montrait dans une propriété privée les ornières creusées dans la roche vive par les roues des chars. Cette voie descendait au delà de la côte dans le ravin , puis remontait vers Beaufays.. Assurément, la retraite des Romains trouvait là un passage des plus péril- leux. Par l'ancienne voie qu'un défrichement avec nivellement vient de faire disparaître, la distance du ravin à l'endroit où le castellum proprement dit devait s'élever, était de plus d’une demi-lieue. Ou pourrait ajouter que Fembranchement de route qui, de Beaufays, se dirige vers les Ardennes, par le hameau des Oies, sans passer par les fonds de Gomzé, conduit plus directement du côté de Marche, de Bure ou, selon nous, vers le point plus éloigné où le camp de Labiénus a dù se trouver. ( 136 ) Quelques auteurs, frappés de cette identité entre les noms Aduatuca et oppidum aduaticorum, ont fait des deux une seule et même place; cette opinion a été suffisamment réfatée (1). Mais nous trouverons peut-être une explication plus plausible dans ce fait consigné dans les Commentaires, à savoir que les Adaatiques, Cimbres et Teutons d’origine, étaient de nouveaux venus et comme des intrus au pays des Belges; qu'ils avaient été fort longtemps en guerre avec leurs voisins, mais qu’ils avaient fini par occuper, du consentement de tous, une certaine portion de territoire, après avoir soumis les Éburons et les avoir rendus tribu- taires (H, 29; V, 27). Or, pour contenir la peuplade sou- mise et assurer le payement des tributs, n’auraient-1ls pas établi sur les deux grandes parties du pays éburon deux postes fortifiés auxquels ils auraient attaché leur nom, lun | au siége principal de leurs tributaires, sur la rive droite de la Meuse, l’Aduatuca des Commentaires, l’autre sur la rive gauche, lAduaca, occupée plus tard par les Tongres, Aduaca Tongrorum? Au moyen de ces deux forteresses, (1) Ici nous ne pouvons partager l'opinion de notre auteur allemand, EEA Lag pe à E SEENEN l’Aduatuca, mais aussi Ton: confondre „eten faisant t du castellum un ouvrage avancé et comme la citadelle de RER Jl est vrai qu’un passage de César nous donne l'exemple d’un oppidum soutenu au dehors par des points fortifiés, des castella; il est vrai encore que ce passage s'applique ans à l'oppidum aduaticorum , et cela dans les termes suivants: Adu ..crebris caslellis circummuniti, oppido sese contine- bant (1 1,30); ; mais si is Romains, occupant le castellum aduatuca,avaieut eu en outre à leur disposition un oppidum, il nous semble impossible que César weùt pas mentionné dans sa relation du siége et des attaques un fait aussi important, qu’il ne leùt pas mentionné dans la description assez dé- taillée qu'il donne du castellum, et qu’il se fùt uniquement occupé de l'accessoire en passant le principal sous silence. SE de ( 407 ) ils avaient sous la main, ils tenaient sous leur dépendance les deux grandes parties du territoire éburon, séparées par le fleuve. Aussi bien dans les temps anciens que dans les temps modernes, il y a plus d’un exemple de ces dénomi- nations imposées par le vainqueur à des places bàlies au milieu du peuple vaincu. Nous ne savons si cette explica- tion a été proposée par quelque écrivain, mais elle nous paraît fort plausible (1). C’est là aussi une réponse à cette objection qui nous a été faite, que, dans notre opinion, il y aurait eu deux Aduatuca, tandis que les écrivains de l'antiquité, nous dit-on, n'en mentionnent qu'une seule. L’assertion nous semble inexacte, A défaut de textes portant en tontes lettres qu’il y avait deux endroits de ce nom, il suffit de la rigoureuse logique; car si Tongres est impossible comme Aduatuca des Commentaires (et nous croyons lavoir prouvé), il s'ensuit nécessairement qu'il y en avait une autre, la première, mentionnée par César, la seconde, Aduaca, Atuaca, mentionnée par les écrivains postérieurs et où vint s'établir la peuplade des Tongres. Arrivé au terme de cette trop longue discussion, nous (1) Depuis que cette notice a été écrite, nous avons reçu un intéressant article publié par M. le conseiller Schuermans dans les Annales de la So- ciété archéologique de Namur (t. XII, p. 175), où l'Aduatuca est signalée comme forteresse établie en plein territoire éburon par les Aduatiques Pour assurer leur domination ; nous ne pouvons que nous féliciter de nous être rencontré avec le savant magistrat sur l'origine et le nom du poste militaire. Une seule observation : l'auteur ne mentionne qu'une Aduatuca ; nous pensons qu'il y a eu deux places ainsi nommées, et que les Aduati- ques ont peut-être borné à ces deux places leur occupation du pays des Éburons, peuplade peu redoutable au rapport de César. Il nous paraît que textes s'accordent difficilement avec la grande extension que la notice de M. Schuermans semble donner à cette occupation. ( 138 ) demanderons à faire une dernière observation sur le mot Eburo. On sait que les Éburons, les Condruses, les Pæ- manes et quelques autres peuplades voisines étaient les descendants de ces tribus germaines qui, longtemps avant la conquête des Romains, avaient envahi nos contrées: Or, un fait qui nous semble assez remarquable, c'est que nous retrouvons le nom des Éburons bien loin de nos contrées, bien loin de la Germanie, même au sud des Gaules, que nous le retrouvons, disons-nous, dans les noms de plusieurs villes séparées entre elles par de grandes distances, dans Eburodunum, dans Eburomaqus, -= dans Eburobriga, dans Eburovices, là enfin où nous ne croyons pas que les antiques invasions germaines eussent jamais pénétré, en un mot, chez les purs Gaulois, chez les Celtes. Remarquons, en outre, que dans les divers noms de ces villes, le mot Eburo se trouve accolé à plu- sieurs mots que nous croyons celtiques, dunum, ma- gus, etc.; faut-il en iuduire que le mot Eburo serait lui- même d’origine celtique, resté dans nos contrées malgré l'établissement des Germains et par l'effet d'un mélange de races? Il est arrivé à plus d’un peuple envahisseur de prendre les mœurs et le nom du pays envahi, alors sur- tout que le peuple vaincu avait une civilisation plus avancée que le peuple vainqueur ; et telle était, sans doute, la civilisation des Celtes par rapport aux tribus germaines. Nous voyons par les écrits de Tacite combien les mœurs des Germains s'étaient modifiées pour se rapprocher des mœurs gauloises. A l’époque même de César , les diverses peuplades que nous venons de citer, Éburons, Condruses et autres, bien que se confondant sous le nom général de Germains, n'en avaient pas moins chacune leur dénomi- nation distincte : Condrusos, Eburones, Caeresos, Paema- F | | `» une des plus belles que la Belgique possède; rien de forcé, (68397) | nos, qui uno nomine Germani appellantur (H. 4); et dès lors n'est-il pas permis de conjecturer que ces peuplades, en venant occuper quelques points de notre pays, se dis- tinguèrent entre elles par les noms gaulois ou celtiques des localités où elles étaient venues s'établir (1)? Nous livrons ces conjectures à l'appréciation de nos sa- vants confrères, et nous finissons en rendant un nouvel hommage à la ville, assurément éburonne, qui a eu lheu- reuse et patriotique idée d'élever un monument au héros éburon. Si l'antique cité de Tongres n’a pas été le théâtre de la victoire d’Ambiorix, Ambiorix n’en est pas moins un des siens, et Ja statue qui lui a été érigée est digne du guerrier belge. Laissons de côté un détail de pure érudi- tion, le piédestal; mais que l'Académie veuille bien nous permettre de saisir cette occasion pour adresser au sta- tuaire un éloge que mérite assurément son œuvre. Il y eut d'abord quelques critiques; mais des voix autorisées, des voix même étrangères ont hautement protesté. Nous sommes heureux de pouvoir répéter ici ce que nous écri- vait un juge très-compétent ` « La statue d’Ambiorix est (1) Ainsi que nous l'avons dit plus haut, on rencontre dans plusieurs do- Cuments le mot Embour écrit sans Je g; et s’il est vrai, comme tout porte à le croire, que le nom des Éburons se soil conservé dans le nom de ce village, nous pensons que la véritable orthographe est Embour, comme lindique Je mot latin lui-même. C’est ce qui semble résulter aussi de ce mot Eburo qui se retrouve sur plusieurs points des Gaules, bien loin des langues germaniques. Du reste, à supposer la consonne g finale, on sait combien les Romains se mettaient à l'aise pour ramener aux formes et au #énie de leur langue les dénominations qu'ils appelaient barbares. Quant à la lettre m qui n’est pas non plus dans le nom latin, bornons-nous à citer un exemple de complète analogie, un exemple où le nom même d'Euro se retrouve : la ville actuelle d'Embrun s'appelait Eburodunum. ( 140 ) rien de théâtral ; mais lattitude ferme, énergique, har- die, d’un guerrier barbare. Il s'avance fièrement; sa large poitrine révèle force et courage; sa main, armée de la terrible hache, va se lever pour sauver la patrie. On ne peut contempler cette grande et fière image sans se sentir ému. » Honneur à l’œuvre de M. Bertin! y e Sg Y y Les Œuvres complètes de François de Pouhon (4). Note par M. Th. Juste, membre de l’Académie. En offrant à la classe, dans la séance du 4 août 1875, au nom de M°° de Pouhon, un exemplaire des OEuvres com- plètes de M. de Pouhon, j'ai annoncé l'intention de signa- ler brièvement les services rendus par ce publiciste dis- tingué. Né à Ensival le 18 octobre 1796 et mort à Bruxelles le 2 juin 1872, François de Pouhon joignait une rare indé- pendance de caractère à une féconde et remarquable ini- tiative. Tel il était au début de sa carrière, tel il resta jusqu'à la fin. Dans le premier écrit qu'il publie ` La Belgique en sep- tembre 1851, coup d'oeil sur son avenir politique et com- mercial, s'exprime en ces termes : « Le lecteur recon- naîtra sans doute que le désir du bien public a seul guidé ma plume, car je né vois pas quelle opinion, quel parti, (1) Voir Bulletins , 2 série, t. XXXVI, p. 206. ARRET EE i 1 à f T 4 d A Y À : D ee E e ( 44 ) ni quel pouvoir pourrait avoir à se louer de ma brochure. » Le désir du bien public : ce fut le seul mobile de Fran- cois de Pouhon dans toute sa carrière. Publiciste, écono- miste, représentant, il n'eut jamais en vue que la prospé- rité de la Belgique. Il écrivait en 1851 : « Que faudra-t-il à la Belgique, dans son organisation actuelle, pour prospérer après la crise européenne qui l'afflige particulièrement? — Le plus grand développement possible de sa richesse territoriale, le perfectionnement de ses industries, des débouchés pour leurs produits, et le commerce intermédiaire. » En 1832, de Pouhon fit paraître une seconde brochure sous le titre de ` La navigation de l'Escaut dans ses rap- ports avec les intérêts commerciaux de l'Europe. Là, per- cant l’horizon encore chargé d'orages, il prédisait ce qui a élé accompli sous nos yeux. « La création du royaume de Belgique, disait-il, aura utilement servi la politique géné- rale et contribué à la paix du monde. Mais ce grand résul- tat est soumis à une inexorable condition : c’est que la Belgique trouve dans son indépendance tous les éléments de la vie commerciale et manufacturière; c’est à ce prix seul que cet État pourra s’affermir, que sa tranquillité intérieure se fondera sur la fusion des partis et que tous les ferments révolutionnaires, qu’il est dans l'intérêt des souverains d’apaiser, disparaîtront successivement dans le sentiment commun de prospérité. Alors les deux peuples retrouveront dans l'instinct commercial et dans une com- munauté d'intérêts des motifs de rapprochement, qui leur ouvriront des voies fécondes de profits et d'avantages. Ils oublieront bientôt leurs premiers liens politiques et leurs querelles, car l'intérêt est le plus puissant véhicule de la réconciliation et de l'union des peuples. » + (142 ) De Pouhon prit une part active, éminente, aux débats que fit surgir le projet d'une route en fer d'Anvers à la Prusse. Dans trois écrits successifs (janvier, mars et juil- let 1855), il s'efforca de démontrer l'utilité et l'urgence de la route de fer; il disait qu'il ne s'agissait de rien moins que d'une découverte appelée à opérer une révolution dans le commerce intérieur de l'Europe et à exercer la plus grande influence sur la civilisation et la politique. Il se déclarait aussi partisan de l'intervention de l'État et expri- mait l'opinion qu'il serait dangereux d'abandonner à lin- térèt privé une entreprise dont dépendrait, à certains égards, la prospérité du pays. « Cette entreprise, disait-il avec chaleur, ne sera pas seulement productive pour nos industries , elle touche encore à notre organisation poli- tique. En se prêtant admirablement à l'état de défense du pays, à découvert presque partout, elle permettra le trans- port rapide des troupes et des munitions sur les points où l'ennemi se porterail inopinément en plus grandes forces. C'est encore un gage de réconciliation que peut offrir l'ordre de choses sorti de la révolution à une classe de citoyens qui ne demande, pour s’en rapprocher, qu’un témoignage de sympathie des pouvoirs de l'État pour les intérêts matériels du pays. De cette manière , notre indé- pendance se fortifiera à l’intérieur : par la fusion de toutes les opinions; à l'extérieur : en cimentant les liens d’affaires qui existent déjà et en en- créant de nouveaux. Voilà de nos jours les meilleures alliances : celles qui se contrac- tent de peuple à peuple par des intérêts mutuels de com- merce. En un mot, par l'exécution des chemins de fer, nous incrusterons notre nationalité dans le sol. » De Pouhon fut aussi un des principaux créateurs du cré- dit public en Belgique, en ce sens, comme nous l'avons ES EAEE = A T gege At di EE de a aaa aa aaa ( 1453 ) dit ailleurs, que Tun des premiers, peut-être même le premier, il chercha à le fonder sur des bases rationnelles. Rappelons que, dès 1838, il suggérait l’idée, il prouvait la nécessité de la création d’une Banque Nationale. Les idées sensées, lumineuses et patriotiques de l'émi- nent financier sont en outre exposées dans deux autres écrits qui virent le jour en 1844 et en 1847 : Du crédit public en Belgique et De l’état du crédit et de l’organisa- lion financière en Belgique. On 3 pu dire en toute vérité que de Pouhon sut rendre à la Belgique un incontestable service en lui indiquant et en faisant triompher les vrais éléments de sa constitution économique et financière. Les divers écrits de François de Pouhon, au nombre de seize, seront toujours consultés avec fruit par ceux qui voudront se rendre compte du prodigieux développement de notre prospérité industrielle et commerciale. C’est en même temps une étude fortifiante : car, dans ces pages, l’honnète homme apparaît partout, et tel est l'ascendant d'un loyal esprit qu'il sait rendre intéressants les sujets les plus abstraits et les plus arides. J'ai regardé comme un devoir d'appeler l'attention de la classe sur les œuvres du publiciste qui, faisant le plus noble usage de sa fortune, voulut donner à l'Académie un éclatant témoignage de haute considération. — M. Ferd. Loise donne lecture du commencement d'un travail intitulé: La Littérature allemande au dix-septième siècle, sous l'influence de la guerre de Trente Ans. La classe vote l'impression de ce travail dans le recueil des Mémoires in-8°. ( 444 ) Note sur la découverte de tables romaines à Ossuna; par M. Alphonse Rivier, associé de l’Académie. H ya plus de vingt ans que les tables de Malaga sont venues apporter à notre connaissance du droit romain un enrichissement inespéré, dont heureuse réalité, un mo- ment discutée, n’est plus contestée aujourd’hui. Voici qu'on annonce , un peu tardivement, une nouvelle découverte du même genre, plus importante peut-être que la première. Je demande la permission den entretenir un moment la classe, d’après les renseignements que je dois à la com- plaisance de Don Manuel Torrès Campos, membre et bibliothécaire de l’Académie de SE SNE et de légis- lation de Madrid. On a trouvé, il y a quatre ans, à Ossunä, dans l’ancien conventus Astigitanus, trois tables de bronze portant cha- cune trois colonnes d'écriture. Un avocat distingué de Séville, Don Francisco Caballero Infante Snazo, les a achetées à un prix considérable et en s'engageant, en outre, à faire étudier à ses frais les trois fils de l’auteur de la découverte. Dans ce moment même, Don Francisco Caballero s'occupe d’une étude approfondie sur sa précieuse acquisition, de concert avec Don Manuel Rodriguez de Berlanga, premier publicateur des tables malacitaines. L'ouvrage de MM. Caballero et de Berlanga doit paraître incessamment. Une des tables a été détériorée par un net- toyage maladroit. Je ne pense pas commettre d'indiscrétion en répétant ici ce que m'écrit mon savant correspondant madrilène d'après les témoignages provenant des personnes les plus autori- | i $ d E 2 ZS $ d ( 145 ) sées. Il résulte de ces témoignages que les tables d'Ossuna contiennent plusieurs lois municipales qu'on croit pouvoir faire remonter à Jules César. On sait que la République, déjà, introduisit en Espagne, en particulier par les colo- nies, les constitutions de latinité qui furent prodiguées plus tard dans la Péninsule ibérique (1). Ces lois concernent une colonie nommée Genitiva (2). On cherchera sans doute à fixer la relation qui peut exister entre cette colonie et le lieu même de la trouvaille. Or, Ossuna ou Osuna est l’ancien Ursaone de l'historien de la guerre d'Espagne (3), l'osss» de Strabon (4), loose d’Ap- pien (5), l'ous5&4 de Ptolémée (6); comme colonie latine on l'appelait Genua Urbanorum ou Ursorum (T). Ce nom de Genua embarrasse les archéologues; le Père Har- (1) Pune, A. N. Hi, 4: Universae Hispaniae Vespasianus NR Augustus jactatum procellis Reipublicae Latii jus dedit. — 5 : Oppid omnia (Baeticae) numero CLXXV. In iis coenae IX, municipia em. Latio antiquitus donata XXIX... — 3-5 passim. — Zumpt, Commenta- tiones epigraphicae, 1, pp. 197-198, Haies adde 564-570. — GıRauD, Les Tables de Salpensa et Malaga, 28-51. — BECKER-MARQUARDT, HHI, 1, 18-19, 32-54. (2) Voici ce que m'écrit à ce sujet Don Manuel Torrès Campos: « La colonie Genitiva à laquelle les tables d'Ossuna se rapportent devrait être, au dire de M. Guerra, une colonie indépendante de celles qui existaient alors dans la Bétique. Il est question d’un municipe dont le nom n'est pas mis dans les tables , tributaire de la colonie mentionnée. » (3) Bellum hispaniense, 26, 28, 41, 42 (4) Teoypayixa , IH, 2, 2. (5) lästeg, 16, 65. (6) H, 4 (7) Prine, I, 5: Urso, quae Genua Urbanorum (cognominatur). Graesse, Orbis Romanus, hoc vo. — Corpus Inseripticnum latinarum de l’Académie de Berlin, tome 11 (Hübner). Les inscriptions 1405 à 1422 ont trait à Ossuna et aux environs. — Zumpt, L. c. 566. Qme SÉRIE, TOME XXXVIL. 10 ( 146 ) douin (1) proposait de lire Gemina. On trouvera peut-être la solution de cette difficulté dans le monument qui vient d'être découvert. Genitiva signifiait probablement la Productive, la Fé- conde (2). Puisse l’étude des lois qui sont gravées sur ces vieilles tables de bronze, ètre féconde en progrès pour les sciences historiques et juridiques. — M. Nolet de Brauwere lira dans la prochaine réunion un travail intitulé ` Le particularisme linguistique flamand de la Flandre occidentale. (1) Page 185 de l’édition de 1741. La conjecture est d'Antoine Agustin. Tous les manuscrits ont Genua. (2) Apollo Genilivus équivaut à Popo; Feyfrwp. Caron, de liberis educandis, cité par Macrore, Sat. HI, 6: Nutrix haec omnia faciebat in verbenis ac tubis, sine hostia , ut Deli ad Apollinis Genitivi aram. Cf. Va- LERIUS FLaccus, Argonautica, V, 404 : Phoebi gemitoris ad aras. t k | d (147) CLASSE DES BEAUX-ARTS. EN Séance du 8 janvier 1874. M. L. ALvix, directeur. M. An. QUETELET, secrétaire perpétuel. Sont présents : MM. N. De Keyser, G. Geefs, A Van Hasselt, Jos. Geefs, C.-A. Fraikin, Éd. Fétis, Edm. De Busscher, J. Portaels, Aug. Payen, le chevalier L. de Burbure, J. Franck, G. De Man, Ad. Siret, J. Leclercq, Ern. Slingeneyer, Alex. Robert, F.-A. Gevaert, membres; F. Stappaerts, correspondant. CORRESPONDANCE. La classe apprend avec un profond sentiment de regret la perte qu’elle vient de faire en la personne de lun des membres titulaires de la section d'architecture ` M. Henri- Louis-François Partoes, né à Bruxelles le 24 aoùt 1790, et décédé dans la même ville, le 29 décembre 1875. M. Alvin s’est fait l'organe et l'interprète des sentiments de l'Académie, en prononçant le discours d'adieu lors des funérailles du défunt. — La classe décide que ce discours paraîtra au Bulletin. M. le secrétaire perpétuel s’est empressé d'exprimer à la famille de M. Partoes les condoléances de la Compagnie. ( 148 ) — M. le Ministre de l’intérieur transmet une ampliation d'un arrêté royal!du 9 décembre dernier, qui nomme M. De Keyser, directeur de la classe pour 18724, président de l’Académie pour la même année. — M. Everard annonce, par lettre en date du 17 dé- cembre dernier, qu’il a l'intention de faire, à Bruxelles, dans les nouvelles salles Ghémar, rue du Persil, une expo- sition de sa riche collection de tableaux. « Le produit de cette exposition, ajoute M. Everard, devant être entière- ment versé dans la Caisse des artistes belges, je prie la classe de m’autoriser à annoncer cette exposition comme étant faite sous le patronage de la Compagnie. » La classe ratifie unanimement l’assentiment que le bu- reau s'est empressé de donner aux généreuses intentions de M. Everard. Le bureau du comité directeur de la Caisse a adressé, de son côté, à Leurs Majestés,une lettre pour les prier d’inau- gurer cette exposition, à laquelle tous les membres de l'Académie seront invités. — M. le secrétaire perpétuel dépose sur le bureau An: nuaire pour 1874, qui contient, en ce qui concerne la classe, la notice, avec portrait, de feu F.-J. Fétis, par M. L. Alvin. — M. Blomme envoie une reproduction photographique de son projet d'arc de triomphe, que la classe a couronné récemment. : — M. De Busscher fait hommage d'un exemplaire de la notice qu'il vient de publier sous le titre de: Les armoiries du comté de Flandre, réplique à M Piot, une brochure in-8”. — Remerciments. LA SL NA (149) Discours prononcé aux funérailles de M. Henri-Louis- Francois Partoes, par M. L. Alvin, directeur de la classe des beaux-arts. e MESSIEURS, » L'artiste vraiment distingué que nous allons conduire à sa dernière demeure a fourni une des plus longues car- rières qu'il soit donné à l'homme de parcourir; on peut ajouter avec assurance que, celte carrière ayant été noble- ment remplie, la trace n’en sera pas de longtemps effacée : l'art auquel il avait consacré toutes ses facultés ne laisse point périr le nom de ceux qui lui ont voué un culte sin- cère et persévérant. » Enfant de Bruxelles, Partoes avait su se concilier la Confiance de ses concitoyens; ils estimaient ses talents et se plaisaient à rendre hommage à l'honorabilité de son Caractère. Cette confiance était bien légitime : de combien d'édifices remarquables n’a-t-il point doté sa ville natale! Quels avantages celle-ci n’eût-elle point retirés de l'exécu- tion de ses projets nombreux et variés, qui tous tendaient à remédier aux difficultés que présentent les communica- tions entre les divers quartiers de la capitale! Mais c’est un honneur suffisant pour la vie d'un architecte d’avoir construit le Grand-Hospice, dans la partie basse de la ville; l'hospice de Pachéco, sur le plateau supérieur; celui des Orphelines, au Midi, et, enfin, le grand hôpital Saint-Jean, qui fait face au Jardin Botanique. Ces grands travaux ont été appréciés et ont recu les éloges des prati- ciens les plus compétents. Les étrangers sont venus exprès Pour en étudier les dispositions , et, si quelques critiques ( 150 ) se mêlent à leurs éloges, elles ne sont point de nature à atteindre lartiste. Je n’en veux pour témoignage que ces lignes émanant d'une autorité incontestable en ces ma- tières. e La réédification du vieil hôpital Saint-Jean, dont l’origine datait du treizième siècle, est un titre de gloire bien légitime pour les administrateurs qui en ont conçu et exécuté le projet. C’est aujourd’hui l’un des plus beaux hôpitaux de notre époque et il fait, à justetitre, l'admiration des nombreux étrangers qui viennent le visiter, Examiné au point de vue de l’art, il peut soute- nir la comparaison avec les hôpitaux les plus vantés, et le talent de l'architecte y brille avec un grand éclat. » » Cette appréciation est tirée d’un livre dû à la plume du célèbre docteur André Uytterhoeven , dont l’art médical belge pleure la perte récente. ə Je craindrais d'abuser des moments de Passistance recueillie, qui me fait l'honneur de m'écouter, si j'entrais ici dans de minutieux détails biographiques : ils trouve- ront leur place naturelle dans la notice que l'Annuaire de la compagnie consacrera à la mémoire du défunt. Je me contenterai de rappeler que Henri-Louis-François Partoes est né à Bruxelles le 24 août 1790; que, jeune encore, il fut attaché aux travaux du corps du génie qui s’exécutaient, sous l'empire, au port d'Anvers; que, plus tard, on le trouve auprès de l'état-major de Napoléon Ier pendant la guerre d'Allemagne. » Rentré dans sa patrie, il fut nommé, après la consti- tution du royaume des Pays-Bas, architecte de ladminis- tration des hospices de Bruxelles. Plus tard, il siégea à l'hôtel de ville en qualité de conseiller communal. Nommé par le gouvernement membre de la commission des mo- ww w we % vw v DE ( 151 ) numents, il était vice-président de ce collége. La bien- veillance royale reconnut son mérite et ses services à deux reprises ` nommé chevalier de l’ordre de Léopold en 1845, il fut plus tard promu au grade d’officier. » Après la création de la classe des beaux-arts de l'Aca- démie royale de Belgique, il fut appelé, en 1847, par le libre choix de ses confrères, à y siéger en qualité de membre effectif. » Tant que ses forces physiques ont pu seconder sa bonne volonté, Partoes a pris part à nos travaux; mais, depuis plusieurs années déjà, nous étions privés de son utile concours; la maladie et les infirmités de l'âge le re- tenaient éloigné de nous. » La mort, en nous l’enlevant tout à fait, ne peut que raviver en nos cœurs le souvenir de tant de qualités qui lui avaient acquis notre affection, car chez lui le caractère était à la hauteur du talent. » Et maintenant, cher et vénéré confrère, adieu! La classe des beaux-arts dépose sur ta tombe le tribut de ses sympathiques regrets. » ÉLECTIONS. La classe était appelée, dans sa séance de ce jour, à pro- céder aux élections annuelles. Elle avait à pourvoir au remplacement d'un membre titulaire de la section de mu- sique, M. Ch. Bosselet, décédé , et de six associés, égale- ment décédés : MM. Jacques Becker et Edwin Landseer, de la section de peinture; M. Benzoni, de la section de sculp- ture; MM. Francois Forster et Keller, de la section de gravure; et M. le comte de Caumont, de la section des Sciences et des lettres. ( 452 ) Pour la place de membre titulaire, les suffrages de la classe se sont portés sur M. AboLpnEe SamuEL, directeur du Conservatoire royal de Gand. Cette élection sera soumise à l'approbation de Sa Majesté, conformément à l'article 7 des statuts organiques. Pour les places d’associés vacantes dans la section de peinture, les suffrages ont désigné M. CHARLES BECKER, membre de l’Académie des beaux-arts de Berlin, et M. WiL- LIAM-POWEL Frirx, membre de l’Académie des beaux-arts de Londres. Pour la place d’associé dans la section de sculpture, la classe a porté ses suffrages sur M. MONTEVERDE, statuaire à Rome. M. ALPHONSE François, membre de l’Académie des beaux- arts de l'Institut de France, à Paris, et M. RUDOLPHE STANG, professeur à l'Académie des beaux-arts de Dusseldorf, ont été élus associés de la section de gravure. Dans la section des sciences et des lettres, M. LE VICOMTE Henni DE LaBorpe, de l’Institut de France, à Paris, a été élu. La classe a également nommé deux correspondants dans la section de musique ` M. J.-H. Terry, professeur au Con- servatoire royal de Liége, et M. J.-Tu. Ranoux , directeur du même Conservatoire. — L'assemblée s'est occupée ensuite de l'élection du directeur pour 1875 : M. Balat a été désigné par le vote pour remplir ces fonctions. M. L. Alvin, directeur sortant, remercie ses confrères pour l'honneur d’avoir été appelé quatre fois déjà à diriger leurs travaux. Il les remercie également pour la bienveil- lance qu'ils n’ont cessé de lui témoigner dans l'exercice du SS: l Í ( 153 ) mandat qui vient de finir. Il installe ensuite le directeur pour l’année actuelle, M. De Keyser. M. De Keyser, en prenant place au fauteuil, annonce qu'il tåchera de remplir, à la satisfaction de la classe, les fonctions dont il a été revêtu. Il propose de voter des remerciments à M. Alvin, motion à laquelle répondent des acclamations prolongées. CONCOURS POUR 1874. La classe prend acte de la réception d’une gravure, avec billet cacheté portant pour devise: Ad valorem, destinée au Concours d'art appliqué de cette année. Le terme fatal du concours expire le 41° septembre prochain. fée er ee OUVRAGES PRÉSENTÉS. Annuaire de l'Observatoire royal de Bruxelles, par À. Quetelet , 1874, 41™ année. Bruxelles , 1875; in-12. Observatoire royal de Bruxelles. — Annales météorologi- ques, feuilles de juin et juillet 1872, Bruxelles, 1872; 2 feuilles In-4°, Plateau LI 1. — Statique expérimentale et théorique des liquides soumis aux seules forces moléculaires. Gand, 1875; 2 vol. in-8°. De Busscher (Edmond). — Les armoiries du comté de Flandre, réplique à M. Piot. Gand, 1875; in-8°. H ( 154 ) Chalon (Renier). — Histoire de la fabrication des monnaies. Bruxelles, 1873; in-8°. Terby (F.). — Observations de Jupiter et de Mars faites à Louvain pendant aide de ces planètes en 1875. Bruxelles, 14875 ; in-8°. Mahillon (V.-C.). — Éléments d’acoustique musicale et instrumentale. Bruxelles, 4874; in-8°. Société royale de numismatique à Bruxelles. — Revue de la numismatiqne, Des série, tome VI, Ir liv. Bruxelles, 1874; in-6°. Société mulacologique de Belgique. — Annales, tome VII, 1872. Bruxelles; in-8°; — Procès-verbal de la séance du 7 dé- cembre 1875. Bruxelles ; in-8°. Annales des travaux publies i Belgique, 2% cahier, tome XXXI. Bruxelles , 1875; in- Revue de l'instruction SCH XXI année, 6"° livr, Gand. 1875 ; in-8°. Willems’ Fonds te Gent. — Volks-Almanak, 1874. Gand; in-12. Messager des sciences historiques, 1875, An: livr. Gand; in-8°. Société archéologique de Namur. — Annales, tome XII, 5e livr. Namur, 1873; in-8°. Annales d'oculistique, 56% année, tome LXX, m° et 6e livr. Bruxelles, 1875; in-8°. Bataviaasch Genootschap van Kunsten en Wetenschappen. — Tijdschrift, deel XX , aflev. 4-6; — Notulen: deel X, n° 4; deel XI, n° 1. Batavia, 1875; 5 cah. in-8°. K. Institut voor de taal: land- en volkenkunde van Neder- landsche Indië. — Bijdragen, derde volgreeks, VIH? deel, 2% stuk. La Have, 1875; in-8°. Lussy (Mathis). — Traité de l'expression musicale. Paris, 1874; gr. in-8°. Société des études historiques à Paris. — L'Investigateur, DESEN" hi dd dd Sd a ( 455 ) 99% année, livr. d'octobre à décembre 1875. Paris, 1875; in-8°. Société de géographie de Paris. — Bulletin, décembre 1875. Paris, 1875 ; in-8°. Revue des questions historiques, VIH": année, 29% livr. 1“ janv. 1874. Paris ; in-8°. Société des antiquaires de Picardie, à Amiens. — Bulletin, 1875, n° 5. Amiens, 1875; in Bulletin scientifique du département du Nord, à Lille, ame anuée, n° 41 et 12. Lille, 1875 ; in-8&. Institut national genevois. — Bulletin, tome XVII. Genève, 1875 ; in-8°. Plantamour (E.). — Le congrès météorologique de Vienne en 1875. Genève, 1874; in-8°. Société vaudoise des sciences naturelles, à Lausanne. — Bulletin, 2™° série , vol. XII, n° 70. Lausanne, 1875; in-8°. Naturforschende Gesellschaft in Zurich. — Vierteljahrs- schrift, XVIe Jahrg., 1.-4. Hefte. Zurich, 1872; 4 cah. in-8°. K. preuss. Akademie der Wissenschafien zu Berlin. — Monatsbericht, November 1875. Berlin, 1874 ; in-8°. Gesellschaft Naturforschender Freunde zu Berlin. — Fest- schrift zur Feier des Hundertjährigen Bestehens. Berlin, 1875; in-4°. Naturhistorischer Verein zu Bonn. — Verhandlungen; 29. Jahrg., 2. Hälfte ; 50. Jahrg., 1. Hälfte. Bonn; 2 cah. in-8°. Schlesische Gesellschaft für Vaterlandische Cultur zu Breslau. — Abhandlungen : Phil.-histor. Classe, 1872/753; — Abtheilung für nature. und medicin, 1872 /75. — Funfzigster Jahresbericht, 1872. Breslau ; 5 cah. in-8°. Handelsstatistische Bureau zu Hamburg. — Tabellarische Uebersichten des Handels im 1872. Hambourg, 1875; in-#°. Medicin.- naturwissens. Gesellschaft zu lenu. — Zeit- schrift, VIlner Bd., 1.-4. Hefte. Iena, 1871-1875; 4 cah. in-8°. Université de Marbourg. — Thèses inaugurales et règle- ments de l'année 1875. WER K. Statistisch- topographische Bureau zu Stultgart. — Beschreibung des Oberamts Neresheim. 54. und 55. Hefte. Stuttgart, 1872-1875; 2 vol. in-8°; — Wurttembergische Jahrbucher , 1871. Stuttgart, 1875; 1 vol. in-8°. K. Akademie der Wissenschaften zu Wien. — Math.-na- turw. Classe, Sitzungsberichte , 1872, I. Abth., n° 6-10, H. Abth., n° 6-10, IHI. Abth., n° 6-10, 1873, L Abth., ne 1-5, IE. Abth., n°% 1-5. — Phil.-histor.-Classe, 72. Bd., Hefte 1-5, 75. Bd., Hefte 1-3; — Archiv, 48. Bd., Heft 2; 49. Bd., Heft 1-2, 50. Bd., Heft 4; — Fontes rerum, Bd. 57, Abth. II; — Almanach, 1875; — Tabnlae cod., vol. VE; — Hebra, atlas, 8. Lieferung; — Exnev (Franz), Härte an Krystall flächen ; in-8°. K. K. Central-Amtalt. für Meteorologie und Erdmagne- tismus zu Wien. — Jahrbücher, 1870-1871. Vienne, 1875; 2 cah. in-4°. Dorpater Naturforscher Gesellschaft. — Sitzungsberichte, He Bd., 5.-4. Heft. Dorpat; 1872-1875; 2 cah. in-12;— Archiv für die Naturkunde, Vier Bd., 2.-3. Liefer., Nier Bd., 1. Liefer. Dorpat, 1872-1875; 5 cah. in-8°. Société impériale d'agriculture de Moscou. — Journal, 1875, n° 5. Moscou , 1874; in-8° (en russe). - Société impériale des naturalistes de Moscou. — Bulletin, 1875, n° 2. Moscou, 1875 ; in-8°. Commission impériale archéologique de S'-Pétersbourg. — Recueil antiquités de la Seythie, liv. II avec atlas. S'-Pé- tersbourg, 1873; 2 vol. in-4° avec 1 atlas in-folio. Observatoire de Pulkowa. — Observations, vol. IV et V. St-Pétersbourg, 1872-1875; 2 vol. in-4°; — Jahresbericht, 1871-1872 und 1872-1875.S'-Pétersbourg, 1875; 2 cah. in-8°. Reg. Societatis Upsaliensis. — Nova acta, serie HI, vol. VIH, fase. 2; — Bulletin météorologique, vol. 4, n°° 1-12, vol. à, n° 1-6. Upsal, 1875 ; 1 vol in-4° et 3 eah. in-4°. BULLETIN DE L'ACADÉMIE ROYALE DES SCIENCES, LETTRES ET DES BEAUX-ARTS DE BELGIQUE. 1874. — No 2. —— . CLASSE DES SCIENCES. Séance du 7 février 1874. M. E. Canpèze , directeur. M. P.-J. Van BeNEDEN, faisant fonctions de secrétaire. Sont présents : MM. J.-B.-J. d'Omalius, J.-S. Stas, L. de Koninck, H. Nyst, Gluge, Melsens, J. Liagre, F. Duprez, G. Dewalque, Ern. Quetelet, H. Maus, M. Gloesener, . F. Donny, Ch. Montigny, M. Steichen, Brialmont, E. Du- pont, Éd. Morren, Édouard Van Beneden, €. Malaise, membres; E. Catalan, Aug. Bellynck, associés; Éd. Mailly, Alphonse Briart, J. De Tilly, F. Plateau, F. Crépin et F.-L. Cornet, correspondants. M. le directeur fait part à ses confrères que M. Adolphe Quetelet, secrétaire perpétuel, est retenu chez lui par suite Ze: SÉRIE, TOME XXXVII. 11 ( 158 ) d'une indisposition. Il invite M. P.-J. Van Beneden à rem- plir, pour aujourd'hui, les fonctions de secrétaire. CORRESPONDANCE. M. le Ministre de l’intérieur transmet, pour la biblio- thèque de la compagnie, un exemplaire de ouvrage inti- tulé ` Stalique expérimentale et théorique des liquides soumis aux seules forces moléculaires, par J. Plateau; deux volumes in-8°. — Remerciments. g — M. Roulez communique l'inscription suivante pour la médaille de concours décernée à M. Mansion au mois de décembre dernier : Pauko : MANSION Quon ÆQUATIONUM - DIFFERENTIALIUM PARTIALIUM - PRIMI + ORDINIS INTEGRANDARUM : THEORIAM SUMMATIM . EXPOSUERIT. ANN. MDCCCLXXIII. Les remerciments de la classe ont été exprimés à M. Roulez. — Les documents suivants sont présentés pour le re- cueil des phénomènes périodiques : 4° résumé des obser- vations météorologiques faites à Ostende en 1873, par D WER M. Cavalier; 2 résumé météorologique du mois de janvier 1874, pour Ostende, par le même ; 5° relevé des observa- tions barométriques et thermométriques faites à Liége, en 1875, par M. L; Pérard; 4° état de la végétation , à Salz- bourg, en 1872 et en 1875, par M. Charles Fritsch. — La classe reçoit les hommages suivants : 1° Un mot sur la vie sociale des animaux inférieurs, lecture faite en séance publique de l’Académie, par M. P.-J. Van Beneden; in-8°; 2 Bericht über die Verhandlungen des internationalen Meteorologen-Congresses zu Wien, 2-16 September 1873; grand cahier in-8°. Cet ouvrage est présenté par M. Ern. Quetelet, qui an- nonce, en même temps, qu’il vient d'en terminer la traduc- tion française, à la demande du Congrès. Ce travail parai- tra sous peu. M. Éd. Morren fait hommage, à l’Académie, du premier exemplaire de la Clusia. Ce recueil est accompagné de 15 planches et d’un portrait; il renferme les notices composées par Charles Morren en 1852 et 1853, avec une préface et une introduction écrites par M. Éd. Morren et dans les- quelles l’auteur ajoute de nouveaux renseignements à ceux qu'il a déjà publiés sur la vie et les œuvres de son père. La Clusia fait suite à la Dodonea, à la Lobelia et à la Fuschia : elle a été tirée à 80 exemplaires seulement. M. Morren fait ensuite hommage du 25° volume de la Belgique horticole, volume dans lequel il a fondé le nou- veau genre Canistrum, dans la famille des Broméliacées; en outre l’anteur s’est occupé dans cette publication d'une plante rare de la flore belge, le Sempervivum aqualiense. ( 460 ) — Les manuscrits suivants seront l’objet d’un examen : 1° Sur les dérivés diallyliques, par M. L. Henry. — Commissaires ` MM. Stas et de Koninck; 2 Recherches sur les camphres (2 note), par M. Éd. Dubois. — Commissaires : MM. Donny et Melsens; 5° Considéralions générales sur la détermination, sans calcul, de l’ordre d’un lieu yéométrique, par M. Louis Saltel. — Commissaires ` MM. Folie et Catalan; 4 Lettres de M. Genocchi sur le développement de la fonction log. F (x). —- Commissaire : M. De Tilly. RAPPORTS. M. J.-M. De Tilly donne lecture de son rapport, auquel a adhéré M. Liagre, second commissaire, sur une note de M. le capitaine d'artillerie Siacci, concernant la similitude des trajectoires des projectiles oblongs. La classe décide, conformément aux conclusions du rap- port précité, de transmettre une copie de celui-ci à M. Siacei. COMMUNICATIONS ET LECTURES. Note sur l'aurore boréale du 4 février 1874; par M. Ernest Quetelet, membre de l'Académie. Une belle aurore boréale a été observée dans la soirée du 4 février. J'ai reconnu le phénomène vers 7 h. 45 m. A ce moment tout le Nord-Ouest et le Nord offraient un bel arc blanchâtre reposant sur un fond sombre uniforme. Le ciel Fe S ae E EEEN F NA co en ei nnt ai i aa dd dd ( 161 ) au midi était parfaitement pur. Les instruments magné- tiques consultés immédiatement furent trouvés en pleine perturbation; déclinaison et intensité horizontale faibles. intensité verticale très-forte. De la tourelle, le phénomène était remarquable; larc blanc s'était rompu en amas d'apparence nuageuse. Mon attention fut surtout attirée par un nuage blanc très-lumi- neux qui se trouvait au Nord-Ouest un peu Nord. Son éclat était intermittent, mais il devenait de plus en plus brillant et tout à coup de grands jets lumineux en sont partis; ils s’élevaient verticalement entre Cassiopée et la Polaire. L'aspect de cette espèce de rideau lumineux pailleté d’or et de rouge était imposant. Vers 8 h. 10 m. l'éclat a diminué et le rayonnement a fini par s'éteindre. Les instruments consultés à ce moment indiquaient tous un retour vers l’état normal. Cependant larc blanchâtre persistait et plusieurs jets lumineux se sont encore élevés à une grande hauteur, mais ils étaient isolés et de couleur blanche. Les taches blanchâtres avaient encore un éclat intermittent, Quand la tache blanche la plus basse augmentait d'éclat, il était certain que les deux taches voisines, situées un peu plus haut, allaient aussi devenir plus brillantes. Cet ordre de succession dans l'éclat du phénomène rappelait l'aspect d’un incendie quand la famée rougeûtre est poussée par un vent violent. Vers 9 h. l'aurore boréale était devenue peu apparente et à 91/, h. tout le ciel s’est couvert d'un épais brouillard très-humide (1). (1) Ce cnrs Leg a duré le lendemain et le surlendemain , a proba- blement r encore une aurore boréale le 5, car ce jour-là dans la soirée e insthiménis magnétiques ont été de nouveau troublés. (462) M. Terby a observé cette belle aurore à Louvain. Je donne plus loin les résultats qu’il a adressés à Observa- toire. Cet observateur zélé a adressé également une notice sur une autre aurore boréale qui s’est manifestée dans la soirée du 15 janvier dernier. Celle-ci n’a pas été observée à Bruxelles, mais j'ai pu constater, d’après ies observa- tions magnétiques faites à 9h. du soir, que son apparition avait coincidé avec une diminution notable de la force magnétique horizontale. Voici le résultat des observations faites à Louvain, par M. Terby, dans la soirée du 4 février : . « Une belle aurore boréale est apparue pendant la soirée du 4 février. Ce phénomène a présenté des circonstances remarquables. » À 6h. 40m. du soir, une vive lueur régnait dans le N. et le NO.; elle affectait ia forme d’un are blanc un peu irrégulier, d'aspect nuageux et brillant, qui passait au- dessus de æ de la Lyre et au-dessous de D et y du Dragon. Au-dessous de larc auroral, le ciel offrait une teinte sombre, et lon aurait cru à la présence d’un épais nuage dans cette région, si Véga n’y avait conservé une grande partie de son éclat. » Dans le N. astronomique la lueur blanche est zébrée, ou traversée par des bandes sombres d'aspect nuageux, formant avec l'horizon de très-petits angles, dont l'ouver- ture est tournée du côté de l'E » À 6 h. 50 m., faible rayon par à du Cygne; la lueur s'élève dans le N. » AT h.25m., la lueur aurorale monte au-dessus de z du Cygne. éme temp rm es mm ( 165 ) » A 7 h. 45 m., l'are est admirablement dessiné; la limite du segment obscur passe par D et y du Dragon. » AT h. 50 m., larc passe par B, y du Dragon, ò, y du Cygne. Son extrémité NNE. se perd à l'horizon derrière un nuage, exactement sur le prolongement d'une droite descendant par £ et n de la grande Ourse. La position de l'extrémité ONO. de larc ma pu être déterminée aussi exactement parce que l'horizon m'était caché en partie dans cette direction ; mais on peut considérer comme à peu près certain qu'elle se trouvait située au-dessous de » de égase. » A 7h.56 m., un rayon se dirige vers « de Céphée ; un autre rayon passe par ò du Dragon; un troisième entre ¢ et n du Dragon. » Bientôt le N. se couvre entièrement de rayons qui atteignent la hauteur de la Polaire; leur base est située dans le segment sombre qui s'illumine sur presque toute son étendue; la partie qui longe immédiatement l'horizon conserve seule son aspect primitif. » A 8 h., lueur rouge dans la grande Ourse; tout le N. se colore légèrement; une immense gerbe rouge s'étend par : de Cassiopée et atteint presque le zénith. > AS h. 10 m., l'aurore semble momentanément ter- minée. » De 8 h. 15 m. à 8 h. 20 m., un phénomène très- curieux se produit : des lueurs fugitives, analogues à de faibles éclairs, se succèdent presque sans interruption dans le N.: elles s'évanouissent presque aussitôt et reparaissent chaque fois à une hauteur un peu plus grande; elles ont la forme de bandes arquées dont le bord inférieur concave est très-tranché, se détachant sur un fond très-noir; pour autant qu'il est possible de le remarquer, elles semblent ( 164 ) s'éteindre de basen haut, comme si le segment noir qu’elles surmontent s'élevait sabitement pour les voiler et les dé- rober à la vue. De faibles rayons apparurent encore un peu plus tard. Il est très-intéressant de noter qu’à 8 h. 40 m. un véritable éclair a brillé à l'horizon N. magnétique. » A 8h. 50 m., le N. semble avoir repris son état nor- mal et un brouillard se forme. Vers 9 h., le ciel se couvre et s'oppose ensuite à toute observation. > Cette aurore boréale succède à celle que j'ai observée le 15 janvier, après un intervalle de moins d’un mois, et se produit à la même date mensuelle que le magnifique phénomène du 4 février 1872. Aurore boréale observée à Louvain dans la nuit du 15 au 16 janvier 1874; par M. Terby, docteur en sciences, à Louvain. De 10 h. à 10 h. 15 m., lueur très-faible dans Je" N. See par moments, teinte rosée très-fugitive. L'horizon est très-sombre au-dessous de la lueur; le ciel est serein. 10 b. 55 m. Illumination évidente de tout l'horizon N. et NNO.; z du Cygne est au point culminant de l'are auroral. Vers 10 h. 48 m., colonne rosée à l'E. de æ du Cygne, elle se meut très-rapidement vers l'O. et vient s'évanouir sur cette étoile. 10 h. 55 m. Rayons à l'O. de z du Cygne. 11h. 45 m. Beaux rayons s'élevant du NO., du NNO. et du N., et lueur rouge. Le phénomène s'étend jusqu’à la gue e "e ee re éier ée E, EE ( 165 ) hauteur de æ de Céphée. Quelques rayons montent un peu plus haut dans le Dragon. Cassiopée n'est pas atteinte. 12 h. Nouveaux rayons allant jusque dans Céphée. Ils présentent un phénomène singulier : à première vue, leur mouvement de l'E. vers l'O. semble extrêmement rapide ; si, au contraire, on compare soigneusement leur position aux étoiles, ils semblent à peine se déplacer. A 12 h. 20 m., le ciel a repris tout à fait son état normal. La fréquence des variations de couleurs des étoiles dans la scintillation est généralement en rapport avec la consti- tution de leur lumière , d’après l'analyse spectrale; par M. Ch. Montigny, membre de l'Académie. Je ne puis préciser d’une manière plus complète les faits et les idées qui m'ont guidé dans l'étude de la relation in- diquée par le titre même de cette notice, qu'en rappelant le passage suivant de l’une de mes dernières recherches Sur la scintillation : « Dans la lumière émise par une étoile des rayons font défaut: ce sont ceux qui correspondent aux raies obscures que l'analyse spectrale révèle dans la plupart des étoiles, et dont le nombre, l'intensité relative, la réfran- gibilité varient d'un astre à l’autre. Le spectre de Sirius, par exemple , accuse deux raies obscures dans le bleu et une lrès-marquée dans le vert. L'absence des rayons correspondant à ces raies doit affecter certaines phases de la scintillation de cette belle étoile, observée à l'œil nu. En effet, à l'instant où tout autre rayon que les v v v v y we Si Ki ( 166 ) bleus se trouve intercepté, l'influence des rayons bleus existant dans la teinte complémentaire que l'image de Sirius revêt passagèrement, est, par suite, un peu diffé- rente de ce qu'elle serait si cette teinte n’était point privée des rayons bleus correspondant aux deux raies signalées dans la partie du spectre de cette étoile. L'in- fluence des rayons déficients dans la scintillation d'une étoile, influence qui modifie aussi sa couleur propre, et au sujet de laquelle je viens de citer l'exemple le plus simple à choisir, n'avait pas été signalée jusque main- tenant (*). » Après cet exposé, je fis remarquer, dans le même tra- vail, que la multitude de raies qui caractérisent le rouge, le vert et le bleu du spectre da d'Orion, d’après les mesures de MM. Huggins et Miller et celles du P. Secchi, permet d'attribuer à l'absence d'un grand nombre de rayons dans la lumière de cette étoile, dispersée par notre atmosphère, les irrégularités que présente sa scintillalion, et qui onl été signalées, d’une manière particulière, par M. le professeur Dufour, de Morges, dans l'importante Communication sur le phénomène de la scintillation que fit cet habile observateur à l’Académie, il y a quelques années (**). En effet, l'influence des rayons déficients dans la lumière de l'étoile z d'Orion intervient de deux manières KE) v Ki Ki v Ki SS Ki u y y (CH Notice sur la séparation des trajectoires décrites dans latmo- sphère par les rayons de méme origine sidérale, mais de réfrangibilité différente, et sur les effets de cette séparation à l'égard de la scin- tillation. BULLETINS DE L'ACADÉMIE ROYALE DE BELGIQUE, mr série, t. XXIX, 1870. (**) Sur la scintillation des étoiles. Lettre à M. Quetelet; par M. Ch. Dufour, professeur à Morges en Suisse. BULLETINS DE L'ACADÉMIE ROYALE DE BELGIQUE , jee série, t. XXII — — wf s ( 167 ) dans sa scintillation : d'abord, dans la nature des teintes complémentaires que son image scintillante revêt passagè- rement, comme il vient d’être dit à l'égard de Sirius; puis, par les nombreuses lacunes qui résultent de l'absence des rayons Correspondant aux raies spectrales dans les faisceaux colorés émanés de l'étoile x, faisceaux que l'atmosphère sé- pare par dispersion avant leur réunion dans l'œil de l'obser- vateur. On conçoit en effet, comme je l'ai dit aussi, que, par suite de l'influence de ces lacunes, les phases de la scin- tillation de l'étoile «seront moins fréquentes et aussi moins régulières qu'elles ne le seraient pour une autre étoile plus riche en rayons de lumière; car le passage d’une onde aérienne dans une de ces lacunes ne pouvant affecter, n'importe de quelle manière, les rayons qui y font défaut, ce passage ne sera suivi d'aucune variation de couleur ou d'éclat de l’image stellaire, contrairement à ce qui aurait lieu pour un astre plus riche en rayons de lumière. Ajoutons ici que les lacunes, plus ou moins dépourvues de rayons lumineux, qui existent entre les faisceaux colorés appartenant à une étoile dont l'image spectrale présente des raies nombreuses et marquées, s'élargissent inégale- ment dans notre atmosphère à mesure que l'étoile se rap- proche de l'horizon, et cela selon la réfrangibilité des rayons qui limitent chacune de ses lacunes. Il n’est pas Surprenant, d’après cela, que la courbe représentant la scintillation da d'Orion à des hauteurs différentes, ait présenté à M. Dufour des irrégularités plus considérables que celles qui ont affecté, dans ses recherches, les courbes de scintillation d’autres étoiles, entre autres la Chèvre, étoile à raies spectrales fines et peu nombreuses, dont la scintillation a été signalée comme étant la pius régulière par cet observateur. ( 168 ) Les rapprochements que j'ai établis primitivement ainsi entre les caractères de la scintillation des deux étoiles citées et la constitution de leur lumière respective d'après l'analyse spectrale, mont engagé à entreprendre une étude particulière de cette question. Je l'ai poursuivie autant que l'état du ciel et surtout d’autres occupations me l'ont permis, en étudiant, près de Bruxelles, la scintillation de quarante et une étoiles dont la composition de la lumière est assez bien connue, d'après ce mode d'analyse. Les résul- tats de mes observations, continuées jusque ces derniers temps, sont tout à fait favorables aux rapprochements primitivement établis, et c’est exposé général de ces résultats qui fait l'objet de la notice que ja l'honneur de présenter à l'Académie. Mais avant cet exposé, je dois dire que les faits y seront traités avec une indépendance absolue de toute théorie de la scintillation: je ne chercherai done pas à voir mainte- nant si les changements de couleur ou d'éclat, si caracté- ristiques dans la scintillation des étoiles, ont pour cause des phénomènes d'’interférenee, conformément à la théorie d'Arago, ou si les rayons stellaires sont subitement inter- ceptés par un phénomène de réflexion totale qui se pro- duit à la surface des ondes aériennes, selon l’explication que j'en ai donnée; ou bien si ces variations ont simplement lieu par le fait des inégalités de réfraction et de dispersion que les rayons d’une étoile subissent, par suite de l'inter- position de ces ondes aériennes mobiles sur leur trajet, ainsi que le veulent d’autres observateurs. Je n'ai nulle- ment en vue de m'occuper ici de cette question théorique, sur laquelle je reviendrai dans un travail général présen- tant l’ensemble de toutes mes observations sur la scintil- lation. Je m’appuie principalement dans ce qui suit sur (109 ) deux faits incontestables : l'un, la séparation, par suite de la dispersion atmosphérique, des rayons diversement colorés d'une même étoile avant leur pénétration dans l'œil ou la lunette de l'observateur; lautre, l'existence, entre ces rayons, de lacunes qui sont plus ou moins mar- quées selon la largeur, l'intensité et le nombre de raies sillonnant le spectre de l'étoile considérée. Mes observations embrassent deux périodes distinctes, l'une, comprenant quarante-sept soirées d'observations, s'étend du mois d'octobre 4870 à la fin de mars 1871, et l'autre, formée de dix-neuf soirées de recherches, a pour limites la fin de juin et le commencement de décembre 1873 (*). Dans l’une et l’autre série, les observations ont commencé avec la soirée et se sont étendues au plus jus- qu'à onze heures du soir. Les observations de la fin de dé- cembre 1870 et du commencement du mois suivant ont été caractérisées par de très-basses températures, qui atteignirent — 9» et — 10° à la fin des observations du 1% et du 4 janvier. L'instrument dont je me suis servi est une lunette as- tronomique supportant un grossissement de 85, et ayant un objectif de 77 millimètres de diamètre. Entre cet objec- tif et l’oculaire est adapté, très-près de celui-ci, un scin- (*} Divers empêchements ont séparé ces deux séries de recherches, et cela d'autant plus à mon regret, que les résultats obtenus à la fin de la première établissaient déjà nettement une différence marquée entre la scintillation des étoiles qui diffèrent le plus par les caractères des raies de leurs images spectrales. La saison que nous traversons se montre telle- ment défavorable aux recherches de ce genre, que je me suis décidé à limiter momentanément l'étendne de la Sieg période et à ne plus tarder à faire connaître les résultats réunis des deux séries, qui con- Cordent parfaitement avec ceux de la première considérée seule, comme on en jugera plus loin. CHOG tillomètre que j'ai imaginé et décrit précédemment (*). Je me bornerai à rappeler que cet instrument se compose essentiellement d’une lame circulaire de verre épais, mon- tée obliquement en avant des lentilles de l’oculaire, sur un axe de rotation parallèle à laxe de figure de la lunette. Cette lame traverse ainsi le faisceau de rayons lumineux convergeant vers l’oculaire dans toutes les positions qu’elle prend autour de son axe de rotation. Celui-ci est mis en mouvement par un mécanisme placé en dehors du corps de la lunette, et qui est réglé à l'aide d’un frein. Une aiguille participant à son mouvement permet de cal- culer exactement le nombre de révolutions que la lame accomplit en un temps donné. On conçoit aisément que l’interposition continue de la lame sous des inclinaisons variant régulièrement à l'égard d’un même rayon pendant un tour complet, et cela près du sommet de convergence des rayons émanés de l'étoile, fait décrire à son image . une circonférence parfaite dans la lunette. Quand l'étoile ne scintille pas, celle-ci forme un trait continu présentant la teinte de l'étoile ` mais si elle scintille, cette courbe se fractionne en arcs teints de vives couleurs, variant rapi- dement, et parmi lesquelles brillent ordinairement le rouge, le jaune, le vert, le bleu, quelquefois le violet, selon les caractères de la scintillation, lesquels dépendent de la nature de l'étoile, de son élévation et des circonstances atmosphériques au moment de l'observation (**). () Bulletin de l'Académie royale de Belgique, 2° sér., t. XVII. (**) La lame circulaire de verre du scintillomètre que j'ai construit en grande partie moi-même, et que j'ai fait voir à la séance de la classe des sciences, présente un diamètre de 47 millimètres et une épaisseur de 6,4 millimètres. Cette lame est inclinée de 13° 31. environ sur son axe de FETT Eege Ss (171 ) Afin d'énumérer le plus exactement possible ces ares colorés, si changeants et si fugitifs, j'ai adapté au foyer de l'oculaire de la lunette un micromètre composé de trois fils fins, qui se croisent diamétralement de manière à pré- senter dans le champ circulaire de l'instrument quatre secteurs égaux , opposés deux à deux, et valant chacun un seizième de cet espace circulaire. Ce micromètre étant convenablement éclairé à chaque observation, j'amène son centre ou le lieu de croisement des fils en un point de la circonférence décrite par l’image de l'étoile scintillante; la moitié du nombre de colorations qui apparaissent, à un instant donné, sur l'arc compris entre les fils formant les côtés de l’un des secteurs, indique évidemment le nombre de changements qui fractionnent le seizième de la circon- férence, laquelle présente des arcs colorés semblables sur toute son étendue. Cette donnée et l'intervalle de temps nécessaire à l’accomplissement d’une révolution de la lame inclinée, intervalle que je déduis immédiatement, au moyen d’un chronomètre à seconde et à arrêt, du temps qui s'écoule pendant trente-neuf révolutions de la lame, me permettent de calculer exactement le nombre des va- rations de couleurs que l’image de l'étoile scintillante éprouve en une seconde. Dans ces observations, je note également les diverses teintes qui fractionnent la circonférence, soit qu'il y en ait quelques-unes qui répondent aux instants très-courts où l’image de l'étoile reprend sa teinte naturelle, soit que la plupart diffèrent essentiellement de cette teinte, ce qui rotation. Le cercle décrit par l’image stellaire dans la lunette présente un diamètre de 23 millimètres à la distance de la vision distincte ordinaire, ainsi que je l'ai calculé et vérifié par l'expérience. (472) a lieu le pius souvent. TA à ces teintes successives Con- slituent les variations de couleurs dont il est question dans le travail actuel. Quant à la distance zénithale de l'étoile au moment de l'observalion, élément qu'il importe de connaître, comme nous allons le voir, je la détermine au moyen d'un instru- ment spécial avant d'observer les arcs colorés. On sait que la scintillation d’une étoile est d'autant plus marquée que sa distance zénithale est plus grande, toutes choses égales d’ailleurs. Les observations se rapportant à diverses étoiles scintillant à des distances très-différentes , pendant une même soirée, ne seraient done comparables entre elles que si nous pouvions réduire, à l’aide d'un calcul certain, les nombres des changements de couleurs qui caractérisent la scintillation d’une étoile, à des valeurs correspondant à une distance zénithale choisie, et la même pour tous ces astres. Ce calcul de réduction s'effectue aisément à l’aide de la deuxième des lois que M. Dufour 3 déduites de ses nombreuses recherches sur la scintillation observée à œil nu, et en suivant la marche tracée par cet observateur pour opérer cette réduction (*). U a dé- (*) Je crois utile de rappeler ensemble les trois lois que M. Dufour a dé- duites d’une série de treize mille observations faites à l'œil nu, à Morges; voici l'énoncé de ces lois, dont j'apprécie de plus en plus l'importance `" t° Toutes choses égales d’ailleurs, les étoiles rouges scintillent moins que les étoiles blanches; 2 Sauf près de l'horizon, la scintillation est proportionnelle au Sn que l’on obtient en multipliant l'épaisseur de la couche d'air que traverse le rayon lumineux émané de Vétoile, par la réfraction astronomique à la et où d on considère celle-ci; e fait de l'influence des couleurs, il y a encore entre la scin- tillation ps per des differences essentielles qui paraissent provenir des étoiles elles-mêmes. (175 ) montré que, sauf près de l'horizon, la scintillation est sensiblement proportionnelle au produit que lon obtient en multipliant l'épaisseur de la couche d'air que traverse le rayon lumineux émané de Fétoile, par la réfraction astronomique pour la hauteur où elle a été observée, D'après cela, si Pon désigne par Q et Q’ les produits cor- respondant à deux distances zénithales données, pour les- quelles les intensités de la scintillation d’une étoile pen- dant la mème soirée sont respectivement S et S’, on aura S = S'È. Si Q est exprimé en parties du produit Q pris pour unité, lequel réponde à la distance zénithale à laquelle on désire ramener par le calcul l'intensité S de la scintillation, on aura S exprimé en fonction de S’, qui est l'intensité de la scintillation réellement observée à la distance zénithale à laquelle correspond le produit Q’, à l’aide de la formule : M. Dufour a donné, dans les Annales de la Société vau- doise des sciences naturelles (année 1860, n° 47) CT, une table de réduction calculée de dix en dix degrés de hau- leur de l'étoile, et dans la supposition d'une élévation de l'atmosphère égale à $ du rayon terrestre, ou 79,5 kilo- mètres à peu près. J'ai construit une table semblable en la calculant pour chaque degré de distance zénithale ; elle m'a servi à ramener les nombres des variations de couleurs qu'une étoile a éprouvées, à différentes distances, pendant (7 Instruction pour l'observation de la scintillation des étoiles, par M. Charles Dufour, professeur à Morges. 2% SÉRIE, TOME XXXVII. 12 ( 174 ) la même soirée, au nombre de variations qui aurait affecté sa scintillation à 60° de distance zénithale (*). (*) C'est ici le lieu de faire remarquer que la manière de caractériser l'intensité de la scintillation par M. Dufour diffère, de prime abord, de celle qui résulte de mon procédé. Afin d'élucider ce point important, je citerai les indications que M. Dufour a données à l'égard du sien. « Il est facile, » dès que l'on y est un peu habitué, dit-il, d'apprécier assez exactement si » une éloile scintille plus ou moins qu'une autre étoile, et l'on peut indi- o quer cette scintillation par un chiffre comme en météorologie on apprécie » par un chiffre l'état du ciel ou la force du vent. Pour mon compte, j'ai » désigné par 0 une sciutillation nulle et par 10 les scintillations qui me » paraissent les plus fortes. De telles scintillations se rencontrent rare- » ment, seulement quand les étoiles sont près de l'horizon, qu'elles parais- e sent sautiller, changer de couleur et parfois disparaître, Avec un peu » d'habitude on ere à distinguer encore des degrés entre les scintil- » lations O et 4 Le principal cts qui, pour moi, mesure l'intensité de la scintillation dans les recherches à l'aide du scintillomètre, c'est le nombre des varia- tions de couleurs qu éprouve l'image de l'étoile en une seconde, estimé d’après la quantité d'arcs colorés qui divisent le cercle décrit par cette image dans la lunette. Si la durée d’une révolution du disque de verre incliné n’excède point 0°,34, qui est en moyenne la durée totale d'une impression sur la rétine, d'après M. Plateau, l'image de l'étoile décrit un cercle fermé; alors chaque couleur perçue sur ce cercle pendant une révo- lution du disque, résulte d’une seule impression lumineuse, et celle-ci reste tout à fait indépendante de l'impression qui a été excitée au même lieu de la rétine pendant la révolution précédente , si la vitesse de rotation de la lame ne dépasse pas une certaine limite. Dans les observations à l'œil nu, il est impossible que cet organe dis- zs individuellement des impressions lumineuses quand elles se super- avec la rapidité de succession qui caractérise les variations de See que subit l'image de l'étoile scintillante; aussi cet organe ne perçoit-il ci Ra que les effets les plus marqués qui résultent de cette superposition d'impressions différentes. Malgré la distinction qui existe, par ces faits mêmes, entre les deux modes d'appréciation de la scintillation, je suis très-porté à croire qu'ils sont liés entre eux par des rapports intimes de proportionnalité. Nous (475 ) Mon premier soin en abordant l'étude de la scintillation dans ses rapports avec la composition de la lumière spec- trale des étoiles, a été de m'assurer si la deuxième loi de M. Dufour s'applique tout aussi bien aux observations avec le scintillomètre que pour les mesures de l'intensité rele- vées à l'œil nu, et si les nombres de variations obtenues à l'égard de la même étoile, pendant la même soirée, à des distances zénithales différentes, se réduisent à une même valeur à la distance de 60°, qui est celle que j'ai choisie pour la réduction de mes observations. Le tableau suivant présente des exemples de ce calcul appliqué à la scintilla- tion de six étoiles principales. verrons, en effet, que le les EH lat; de la ceintillation de six étoiles principales, appréciées à l'œil nu par M. Dufour, se suivent précisément ans le même ordre que les intensités absolues mesurées à l’aide du scin- tillomètre pour les mêmes astres; de plus, les deux appréciations numéri- ques à l'égard de Procyon et Wéga sont précisément égales pour chacune. ( 476 ) Scintillation de plusieurs étoiles réduite à 60° de distance zénithale. jati 1 H Variations de couleurs |} DATE Distance Lettre? DATE Distance Weer Nombre ombr mbre Nomb! des zénithale f absolu réduit des zénithale Ä absolu réduit observé à la , bservé à la Zeit distance vn, istan OBSERVATIONS. | apparente Sistance pare [| OBSERVATIONS. | apparente.) ZZ | zénithale apparente. e 60°. aren 60° La Chèvre. Pollux, Le 17 oct. 4870.) T20 Di 417 | 42 ||Le45janv.1871.| 680287 f 181 92 67 18 18 : 4 64 43 140 99 60 41 39 | 28 6122 | 406 96 57 39 86 92 Le 47 nov.4810.| 69 13 152 13 56 33 80 100 67 0 120 70 64 43 115 80 Le 49 nov.1870.| 68 33 68 33 Wtei? janv.1871.| 63 47 152 116 66 39 60 36 54 18 80 145 64 5 53 39 52 42 16 117 63 31 4T 36 50 36 63 116 Aldébaran, Procyon. Le 23 nov.1870.| 72 49 72 25 || Lef9janv.1874) 67 5 100 54 69 37 54 23 65 : 75 49 66 57 46 27 62 23 62 52 Le Tmars1871.| 58 8 18 88 E 63 28 HT go || Le 17 fév. 4871.} pi 26 231 167 62 A 195 168 Î Le 20mars1871.| 60 20 69 Du 58 38 À 150 165 69 47 140 65 56 26 129 158 Régulus. x d'Andromède. Le 23 janv.1871.. 68 17 130 68 || Le 22 fév, 4874.) 59 38 | 110 115 6455 | 104 72 6146) 135 122 62 34 87 12 64 32 4147 444 63 34 474 118 Le 145 fév 4871.! 60 47 123 120 58 26 | 143 196 ||Le 4 mars1871.| 64 49 69 50 33 56 98 199 67 19 88 50 53 9 84 130 . 70 36 444 48 i | f | egen ET e LT D Les variations ramenées à 60° de distance zénithale, par le calcul, à l'égard d’une même étoile observée dans {a même soirée, concordent entre elles d’une manière très- satisfaisante, pour la plupart, quoique les nombres absolus mesurés aux diverses distances zénithales varient parfois du simple au double et même au triple. (La Chèvre, le 17 octobre.) Les distances apparentes ne diffèrent guère, il est vrai, que de 8° à 10° au plus; cela résulte de ce que mes observations ont été généralement comprises entre 90° et 72. À des distances zénithales moindres que 50° environ, les couleurs ne sont plus nettement distinctes, sauf par de très-grands froids, dans ma lunette de 77 milli- mètres de diamètre. Cette absence de netteté résulte de l'in- fluence que le diamètre de la lunette employée exerce sur le nombre, l'éclat des variations de couleurs dans la scin- tillation , ainsi que je Dat montré à l’aide de la théorie et de l'expérience (*). D'autre part, au-dessous de 72 à 74°, les valeurs réduites ne correspondent plus entre elles, ainsi que M. Dufour l'avait remarqué de son côté. Les développements qui précèdent étaient tout à fait indispensables, en vue d’éloigner tout doute à l'égard de la précision que la mesure de la fréquence de la scintillation réclamait dans la question de ses rapports avec la compo- ©) Bull. de l’ Acad. royale de Belgique, 2° sér., t XXIX , pp. 80 et 455. de wentre ici dans aucun détail au sujet de la fréquence relative de telle où telle teinte dans l'image d’une étoile scintillante, étalée en cercle. Les Couleurs varient non-seulement avec la teinte propre de chaque étoile, mais selon sa hauteur au-dessus de l'horizon et sous l'influence si pro- noncée des phénomènes atmosphériques. On a pu remarquer à l'égard de ceux-ci, combien, dans le tableau précédent, la fréquence de la scintil- lation a varié, d’une soirée à l’autre, pour la même étoile, entre autres Pour Procyon. Je me réserve de faire connaître ces particularités daus d’autres travaux sur la scintillation. ( 178 ) WS, sition de la lumière des étoiles d’après analyse spectrale. J’établirai cette comparaison à l’aide de la classification en trois types principaux, suivant lesquels le P. Secchi a rangé deux cent trente-quatre étoiles du ciel, en s'ap- puyant sur le nombre et les caractères des raies de leurs images spectrales. C’est parmi ces astres que j'ai choisi les quarante et une étoiles qui ont été l’objet de mes mesures de leur scintillation. Le P. Secchi a fait connaître à l'Acadé- mie des sciences de France , en septembre 1866, les carac- tères distinctifs de chacun des types auxquels il rapporte les spectres des étoiles qu’il a étudiées (*). J'emprunterai à l'ouvrage intitulé le Soleil, et publié récemment par le savant astronome italien , les principales indications qui suivent sur ces types. » Considérées au point de vue du spectre qu'elles pro- duisent, les étoiles se rapportent à quatre types parfaite- ment tranchés; quelques spectres, peu nombreux, au lieu de se rapporter nettement à l’une de ces catégories, semblent servir d’intermédiaires entre elles. » Le premier type est celui des étoiles blanches, comme Sirius, Véga, Altaïr, Régulus, Rigel, celles de la grande Ourse, à l’exception de +, celles du Serpentaire, ete. Toutes ces étoiles qu’on appelle communément blan- ches, bien qu’en réalité elles soient légèrement bleues, offrent un spectre formé de l’ensemble ordinaire des sept couleurs, interrompu par quatre grandes lignes noires, l’une dans le rouge, l’autre dans le vert-bleu, les deux dernières dans le violet. Ces quatre raies appar- tiennent à l'hydrogène... Outre ces raies fondamentales et très-larges, on voit dans les étoiles les plus brillantes, L Wes ee 2 e e Kaes Dëse | D SE, a Si Ki OC) Voir les Comptes rendus, t. LXHI et le journal l'Institut, du 31 octo- bre 1866 EE e eer ka Wm we wm wg ew a S S e SS e S e M EE WÉI RE it ie v v vv e e ( 179 ) comme Sirius, une raie noire très-fine dans le jaune qui paraît coïncider avec celle du sodium, et dans le vert des raies plus faibles qui appartiennent au magnésium et au fer. La particularité la plus frappante de ce type, c'est la largeur de certaines raies... La moitié à peu près des étoiles du ciel se rapportent à ce type... « Le deuxième type est celui des étoiles jaunes, comme la Chèvre, Pollux, Arcturus, Aldébaran, z de la grande Ourse, Procyon, ete. Le spectre de ces étoiles est parfai- tement semblable à celui de notre soleil, c’est-à-dire qu'il est formé de raies noires très-fines, très-serrées, et occupant la même position que celles de spectre solaire. Toutes ces étoiles ne sont pas également faciles à étu- dier. Les raies noires sont extrêmement fines dans le spectre de Pollux et de la Chèvre ; elles sont plus larges et plus faciles à reconnaitre dans Arcturus et Aldéba- ran. Cette dernière étoile pourrait même être consi- dérée comme servant de transition entre le deuxième et le troisième type, tandis que Procyon serait intermé- diaire entre le premier et le deuxième ….. Nous avons dit que le premier type contient à peu près la moitié des étoiles observées jusqu’à présent; les deux tiers de ce qui reste doivent être rangés dans la catégorie des étoiles jaunes dont nous venons de parler. » Le spectre du troisième type est assez extraordinaire ; il est composé d’un double système de bandes nébu- leuses et de raies noires. On peut prendre comme exemple celui da d'Hercule. En réalité, les raies noires fondamentales sont les mêmes que dans le deuxième type, comme on le reconnait surtout dans Aldébaran et Arcturus; mais, en outre, le troisième type contient un grand nombre de bandes nébuleuses qui divisent tout le spectre et en font une espèce de colonnade. Ces ( 180 ) » bandes dont la largeur et SEET sont Ever » forment pour les étoiles de cette catégorie des diffé- » rences assez considérables. Nous avons choisi pour type » fondamental + d'Hercule, car c’est l'étoile qui offre le » spectre le plus régulier. Nous pouvons encore citer D de » Pégase, : de la Baleine, œ d'Orion, Antarès, etc. Ces » étoiles sont très-remarquables, car elles sont toutes » variables, et d'une couleur tirant plus ou moins sur le » rouge ou l'orangé... Dans quelques étoiles plus petites, KI au lieu de colonnades, on voit des groupes de raies bril- lantes séparées par des espaces obscurs... Les belles étoiles de ce type ne sont pas nombreuses; les plus remarquables sont au nombre de trente environ, et en comptant celles de second ordre , nous en avons trouvé une centaine tout au plus. » Tels sont les principaux caractères des trois premiers types du P. Secchi. I! en admet un quatrième qui est com- posé de petites étoiles de couleur rouge de sang, assez nombreuses. Aucune d'elles n’a été l’objet de mes observa- tions. Parmi les quarante et une étoiles sur lesquelles mon attention s’est portée, il en est peu qui soient au-dessous de la troisième grandeur ` les étoiles d’un faible éclat n'ac- cusent pas des teintes suffisamment distinetes pour que ma vue me permette de les compter avec certitude. Le tableau suivant nous présente les étoiles que j'ai étudiées, classées suivant les trois types du P. Secchi, et rangées, dans chacun, selon les nombres moyens des varia- tions de couleurs qu’elles ont aceusées dans les mesures relevées pendant la durée de mes deux périodes d’observa- tion réunies; ces nombres étant ramenés par le calcul, à la distance zénithale de 60°. Pai rapproché de ces résultats d'abord les grandeurs ordinaires de ces étoiles d’après sir John Herschell, puis le nombre de soirées pendant les- v | 4 SS a, KENE leed EE AURA dd Ne, ( 181 ) quelles chaque étoile a été observée, et enfin le nombre total des observations dont elle a été objet {*). (*) I importe de dire ici que le type des étoiles jaunes à raies fines ou à bandes faibles, qui était le troisième dans la communication du P. Secchi à l'Académie des sciences de France, en septembre 1866, est devenu le deuxième dans l'ouvrage, le Soleil, du même savant. C'est ce dernier ordre que j'ai adopté. Dans le tableau suivant, chaque type comprend les étoiles qui s’y rap- portent d’après la communication dont il vient d’être question, sauf les exceptions suivantes ` t” Arcturus, qui figurait d'abord dans à bandes fines, a été transporté dans le tybe : à bandes uoires ou prr le troisième actuel par le P, Secchi, dans le catalogue des princit de ce groupe qu'il a indiqué à la page 394 de l'ouvrage le Soleil ; ° Procyon étant, d’après le P. Secchi, un intermédiaire entre le pre- D (ei elni des atoilus celui-ci et le troisième, j'ai inscrit Procyon dans le premier type et Aldé- barau daus le troisième, où cette dernière étoile se rencontre avec Arcturus qui, d'après le P. Secchi, présente les mêmes particularités dans son spectre Jai réuni ensemble à la fin du deuxième type trois étoiles d'Orion, parce que, sauf Bételgeuse, les étoiles de cette EE forment une Subdivision de ce type, au sujet de laquelle le P, Secchi s'exprime de la manière suivante dans l'ouvrage cité (p. 598): « Outre = quatre types > principaux, il y a des groupes d'étoiles qui méritent une attention par-” » ticulière. Tel est celui de la constellation d'Orion; il appartient au » deuxième type par l'extrême finesse de ses raies, mais, en même lemps, » il est très-remarquable par l'absence presque complète du rouge et du * jaune, de sorte que les étoiles de cette région présentent un double caractère : 1° elles ont une teinte verte très-prononcée; 2 les raies de leurs spectres sont si fines , qu'il est souvent difficile de les séparer. » Sirius, la plus belle étoile du ciel, si remarquable par l'éclat et la viva- cité de sa scintillation à l'œil nu, ne figure point dans le tableau, parce que mes observations à l'égard de cette étoile ont été relativement peu nom- breuses et ont eu lieu, le plus souvent, lorsque la température de l'air était assez élevée; cette dernière circonstance a dù affecter sensiblement la valeur de sa scintillation, qui a été observée d’ailleurs assez près de l'ho- rizon. M. Dufour n'a point fixé non plus l'intensité du phénomène à l'égard de Sirius, entre autres raisons, à cause de ce voisinage de l'horizon. = ( 182 ) (47 « Cla/ 9g “əwtuos 43 Sauu240N LTG « LR? 69 ‘AULULOS 19 ‘Ua ON td « 21 19 Sottakotg | rl: tasmo əpurağ vy ap u LI St əuuomog xop? nt In egg] eg ` mouapile |g EC ` 1088 IS | £6r 1680 | LS dn uono, 5r } TT" "` "` oseñpq op #6 |S+ |81 | 09 ou HIR ' ` | ‘esesgqep? d 06.6 | 0 ‘(Cqeuea) o1p y prieg ; L6G | 0} < * MESA n 1G + nue oy 5 5 |295 | 6 dës S Is “6 | Sp |" " judwçn d °° "` snontqdO,p e 3 jè (BEI 67 |'{orqemua) ec (all D'A 189% | S | * * uworrnpg | E Sie o Un ; > [O9 | SS Sub |8r6| 99 S T GES g snmvy L i der ` 9g Län Zeen el LE S LY OO) L9 " neamen L ES KS: PI an A 16 d do LG ; 6Y Fr |86 |- 9L °° agn p} L se pu? gt ai $ ` Hi LLO 66 E GG LE Is LL ee, DANI L Ge G ` opowospuy Do 6 r [Orr 66 ; GU 06: + | 68 : ‘quo f OF |: SH KRANT 56 D 001 79 run) à G} Gt 105% | £6 y 'opamoapuy, DAY - ` Hot ch l IK 99 ['\9IQLIEA rad L 09T 96 1 'xnljod f S À “osmo opuraf Dap d ` 7 Li DL "(A[{RLIPA 9} F LOG 86 WENNER GREEN E p "asmo apuraf HI ops eleesz SETER cessé SU OAI *}BA19S g S R A SUORA | "IVA 228 S SÉ S S SUOPICA | JBAJIS R SÉ S 5 Sa ERR St (EEN | ÉÈSE zem el SE AER lei EMA EERE DzrAkeka? 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Quant à la moyenne 69 du deuxième groupe, elle est intermédiaire entre celles des deux autres types, quoiqu'elle soit un peu plus rapprochée de celle du troisième; 5° Si quelques étoiles de grandeurs peu différentes se rapprochent aussi par les intensités numériques de leur seintillation, particulièrement dans le premier type, aucune liaison remarquable ne s'accuse entre la fréquence du pre- mier phénomène et l'ordre de grandeur des étoiles; nous voyons même les deux derniers types présenter des gran- deurs moyennes égales, quoique leurs scintillations diffèrent notablement. Les deux premières conséquences mettent tout à fait hors de doute le fait que j'ai prévu, d’une connexité exis- tant entre la fréquence de la scintillation des étoiles et la constitution de leur lumière spectrale : les étoiles dont le spectre présente un double système de bandes obscures et de raies noires et auxquelles correspondent, par consé- quent, les lacunes les plus nombreuses et les plus mar- quées entre leurs rayons séparés par dispersion dans notre atmosphère, scintillent moins que les étoiles à raics spec- trales fines, et beaucoup moins que celles dont le spectre présente uniquement quatre raies noires, et qui n'offriraient ainsi qu’un très-petit nombre de lacunes entre leurs fais- ceaux de rayons dispersés par Pair. ( 184 ) Les scintillations moyennes des trois types sont dans les rapports des nombres 14, 14 et 9. On est en droit de se demander si la température de Fair qui exerce une influence si marquée sur la scintillation, puisque celle-ci est généralement d'autant plus prononcée que le froid est plus vif, n'est pas intervenue, pour certaine part, dans les valeurs qui caractérisent d'une manière si tranchée la scintillation de chacun des trois types d'étoiles. Il pourrait se faire fortuitement que les observations se rapportant au premier type, aient eu lieu en général par une température de lair plus froide que celle qui régnait lors des mesures relatives aux étoiles du troisième : s’il en avait été ainsi, il ne serait pas surprenant que la moyenne relative à celles-ci fút moins élevée que celle du premier type. Pour répondre à l'observation supposée , je ferai re- marquer d'abord que les étoiles a et B d’Andromède, qui appartiennent respectivement au premier et au troisième type, se trouvant dans la même constellation, par consé- quent dans une même région du ciel, ont été observées sen- siblement autant de fois et, sans aucun doute, dans des conditions de température-très-peu différentes. Eh bien, malgré cette identité, les intensités de leurs scintillations s'écartent notablement l’une de l’autre, puisque celle da, qui appartient au premier type, est 92, et celle de 6, du troisième type, est 57. Dans le but d’écarter complétement ici la question de l'influence de la température, il suffirait de rapprocher entre elles les scintillations moyennes des trois types et les températures de l'air à Bruxelles, qui correspondent, pour chacun de ces types, au milieu de la partie de chaque soirée dans laquelle mes observations ont été comprises. Les températures concernant la première série de mes ob- servations , qui est de beaucoup la plus nombreuse, étant Wd ph OR ES ein he e ( 185 ) publiées dans la partie mensuelle des Annales de l'Obser- vatoire de Bruxelles que son savant directeur M. A. Que- telet a toujours eu l’obligeance de me communiquer, ce dont j'eusse été très-heureux de le remercicrici, j'ai calculé, à l'aide de ces données, les moyennes de la température de lair correspondant au milieu de chaque partie des soi- rées où j'observai. Voici les résultats que j'ai obtenus non- seulement à l'égard de celles-ci, mais pour les intensités moyennes de la scintillation des étoiles indiquées dans le tableau précédent, et rangées, comme dans celui-ci, suivant les trois types du P. Secchi, ces résultats se rapportant aux quarante-sept soirées qui composent la première série : Premier type, Deuxième type. Troisième type. Scintillation moyenne . AU AS 68 56 Température moyenne de l'air RER Le D°,5 50,8 H est hors de doute que les faibles différences qui exis- tent ici entre les températures n’ont pu être la cause des écarts qui caractérisent la scintillation du troisième type relativement à celle du premier. Ajoutons, enfin, que les températures moyennes particulières, dans cette première série, aux étoiles z et B d’Andromède, dont il a été ques- tion plus haut, sont respectivement 6°,7 et 6°,8, quoique les intensités de la scintillation qui caractérisent ces étoiles dans cette même série soient représentées par 82 et 59, valeurs très-différentes. Les faits qui précèdent écartent neltement ici toute idée de l'influence de la température de lair sur les intensités de la scintillation relatives aux trois types. Les valeurs précédentes de la scintillation résultant de la première série de mes recherches sont identiques, pour (186 ) le deuxième et le troisième type, aux valeurs moyennes qui caractérisent ceux-ci dans l’ensemble des deux séries, et la valeur relative au premier type ne s'écarte pas notablement de la moyenne 86 qui lui est assignée par cet ensemble. Cette concordance contribue évidemment à assurer l'exac- tilude des observations et des résultats obtenus. Six étoiles variables figurent parmi celles du troisième type : en l'absence de données décisives concernant l'in- fluence que la variabilité de certaines étoiles serait suscep- tible d'exercer sur les caractères de leur scintillation, je ne vois aucune raison de soupçonner que les phases de la pé- riodicité de ces six étoiles, qui ont été observées d’ailleurs à des époques différentes et même éloignées, aient con- couru de façon à affaiblir relativement leur scintillation, et par conséquent la moyenne du groupe lui-même. D'ailleurs, cette influence de la variabilité ne pourrait être invoquée ni à l'égard de B d’Andromède, dont la scintillation est beaucoup moindre que celle de l'étoile a de la même con- stellation, mais du premier type, ni à égard d’Arcturus et d’Aldébaran, étoiles d’un éclat constant, et qui sont ca- ractérisées ici par une scintillation faible (* On a remarqué, sans aucun doute, que les étoiles + de Persée et Pollux, qui sont en tête du deuxième type, se distinguent par des scintillations aussi fortes que celles des étoiles Wéga et z d’Andromède du premier type. Nous pouvons nous expliquer cette particularité en nous rappe- x D AT M. Duiour 2 a fait remarquer, au sujet de dieses ep la périodi- ue l'étoile œ d'Orion ou Bételgeuse est de toutes les is d qu'il a pra ne celle dont la scintillation lui a paru la plus irrégulière (Bulletin de la Société vau- doise des sciences naturelles, 1860, n° 47 AA ( 487 ) laut la remarque suivante du P. Secchi ` a quelques spectres peu nombreux, dit-il, au lieu de se rapporter nettement à l’une des catégories, semblent servir d'intermédiaire entre elles. » Du reste, je suis loin de considérer la ques- tion qui nous occupe comme étant entièrement résolue ; je considère cette étude comme étant un premier pas vers une solution plus complète. Jl est hors de doute que, pour répondre à toutes les exigences de la question qui nous occupe, il importera d'avoir égard au nombre, à la largeur des raies des spectres appartenant aux diverses étoiles de chaque type, et surtout. à l'obscurité plus ou moins absolue des raies, dans les spectres des diverses étoiles. Cette atté- nuation de lumière est une question d’analyse spectrale délicate, dont il importe beaucoup de tenir compte ici, car, s'il existe dans les spectres stellaires des raies qui ne sont pas d’une obscurité absolue, il existe nécessairement aussi quelques rayons lumineux dans les lacunes correspondant à ces raies dans les faisceaux colorés des étoiles traversant notre atmosphère. Dans ce cas, la fréquence et les carac- tères de la scintillation de ces astres seront évidemment affectés par l'existence de quelques rayons lumineux dans ces lacunes. Remarquons, du reste, que la présence de rayons, en quantité variable, est incontestable dans les lacunes correspondant aux nébulosités plus ou moins obs- cures des spectres des étoiles du troisième type. Ajoutons enfin que, par leur présence plus ou moins marquée, ces mêmes rayons interviennent aussi dans l'impression finale résultant du mélange des diverses teintes sur la rétine, à chaque variation de couleur. Après avoir réuni dans ce qui précède, les considéra- tions qui tendent à démontrer, avec certitude, le fait d'une connexité intime entre la fréquence des changements 188 ) de couleurs dans la scintillation des étoiles et la constitu- tion de leur lumière selon l'analyse spectrale; après avoir apprécié à leur juste valeur certaines influences qui ont dù intervenir dans ce phénomène, je ferai remarquer que celte dépendance entre les deux phénomènes est parfaite- ment d'accord avec la première loi de M. Dufour, qui dit que les étoiles rouges scintillent moins que les blanches. En effet, les étoiles du troisième type étant rouges ou orangées selon le P. Secchi, ce sont précisément aussi celles qui scintillent le moins d’après mes expériences. Celles-ci établissent, de plus, une distinction semblable entre les étoiles rouges et les étoiles jaunes, ou du deuxième type, ce qui confirme ainsi le fait d’une différence que J'avais présumée à l'égard de la scintillation des étoiles jaunes relativement aux premières (`). on-seulement mes recherches confirment la première loi de M. Dufour et l’étend à d’autres étoiles colorées, mais elles en donnent une explication complète. Il importe de dire ici que M. Dufour, qui a adopté l'explication de la scintillation d'Arago, en la considérant comme une con- séquence des principes des interférences, avait rendu compte du fait que les étoiles rouges scintillent moins que les blanches, en faisant remarquer que l'onde rouge étant la plus grande des ondes lumineuses, il faudrait des dévia- tions plus considérables, des perturbations atmosphériques plus grandes pour faire interférer les rayons rouges. Ne pouvant adopter cette explication, j'ai attribué, dans le travail cité, la scintillation plus fréquente des étoiles blan- ches à ce fait, qu’à égale distance de l'observateur l'écar- (*) Notice sur la scintillation des re BULLETINS DE L'ACADÉMIE ROYALE DE BELGIQUE, 2° série, t. XXV, p ("109 ) tement total des faisceaux colorés, dispersés par l'atmo- sphère, et qui ont émané d’une étoile blanche, est bien plus grand dans ce dernier cas que si l'étoile est rouge, ou que ses faisceaux sont composés d’une plus grande quantité de rayons rouges, toutes choses égales d’ailleurs; par suite de cette différence, les rayons originaires d’une étoile blanche étant les plus nombreux et par conséquent les plus étalés ‘par dispersion , ils sont le plus exposés à subir des intercep- tions plus fréquentes par le passage des ondes aériennes. Cette explication, qui conserve ici toute son importance et sa valeur réelle, est complétée par le fait de l'influence des lacunes existant entre les rayons stellaires, lesquelles sont plus ou moins larges et nombreuses selon l'épaisseur et la quantité des raies spectrales de l'étoile. Quant à la troisième loi de M. Dufour qu'il a formulée en ces termes: e outre le fait des couleurs, il y a encore » entre la scintillation des étoiles des différences essen- » Delles qui paraissent provenir des étoiles mêmes, » l’analyse spectrale nous apprend la raison principale de ces différences, ainsi que cela résulte de tout ce qui précède (*). Je terminerai cette étude en appelant encore l'attention des personnes qui s’y intéressent, sur l’importance des observations de la scintillation à œil nu que M. Dufour a recueillies au nombre de treize mille, puis en signalant la concordance qui existe entre les intensités relatives de six étoiles qu’il a déduites, dans les Annales de la Societé vaudoise, de ses recherches à l'œil nu, et les valeurs abso- () M. Dufour, qui a réussi à constater, dans ses observations à l'œil nu, une différence qu'il a précisée par sa troisième loi ou proposition, s'était demandé si elle ne proviendrait pas d’une différence correspondante dans le diamètre des étoiles. 2e SÉRIE, TOME KO, , 15 ( 190 ) lues que j'assigne aux intensités moyennes de la scintilla- tion de ces mêmes astres. Voici ces résultats mis en parallèle dans le tableau suivant, où je rappelle aussi celui des trois types du P. Secchi auquel appartient chaque étoile. VARIATIONS INTENSITÉ RELATIVE TYPE z e la cculeurs observées | ETOILES. scintillation avec auquel l'étoile observée à l'œil nu.| Je scintillomètre. four.) (Montigny.) SPENTER Li 113 103 Premier. Méga e eer 110 98 Premier. Eege E CN 401 71 Deuxième. Aidéharan: =... 2 99 59 Troisième. AE a ET TU EM 59 Troisième. x d'Orion, Bételgeuse. . 90 (approx. 64 Troisième. Si nous augmentons d'un dixième chacun de mes résul- tats numériques de façon à porter ainsi la scintillation de Procyon au nombre 115 de M. Dufour, nous obtenons les valeurs respectives 113, 108, 85, 65, 65 et 70. Cette trans- formation nous montre que les seintillations de Procyon et de Wéga sont exactement dans le même rapport suivant les deux méthodes d'observation; et que, si les scintillations des autres étoiles ne se trouvent point en rapports parfai- tement égaux, du moins se suivent-elles dans le mème ordre, y compris Bételgeuse, dont l'intensité et les varia- tions sont plus marquées que celles d’Arcturus dans l’une et l’autre série. Ces concordances offrent d'autant plus d'intérêt à l'égard des deux méthodes employées, que les observations ont eu lieu sous des climats différents, celui de la Suisse et celui de la Belgique. + (49 ) Note sur le terrain dévonien; par M. J.-B.-J. d'Omalius d'Halloy, membre de l’Académie. M. Gosselet, auquel nous devons déjà beaucoup d'obser- vations intéressantes sur la géologie de la Belgique, vient de publier (1) un nouveau mémoire, intitulé ` le Système du poudinque de Burnot. L'importance de ce travail m'engage à le signaler à l'attention de nos géologues, car mon âge ne me permet pas de faire les explorations nécessaires pour juger toutes les innovations que propose M. Gosselet. Je me permettrai cependant de faire connaître, dès ce moment, mon opinion à cet égard. On sait que les dépôts de notre pays, que la géologie actuelle range dans le terrain dévonien, étaient divisés par Dumont en six systèmes qu'il désignait par les épi- thètes de gédinnien, coblentzien, ahrien, eifélien inférieur, eifélien supérieur et condrusien inférieur. Le nouveau tra- vail de M. Gosselet ne s'occupe pas des deux dernières de ces divisions ou dévoniens supérieur et moyen, mais il réunit les quatre divisions inférieures en un groupe, au- quel il étend le nom de Système du poudinque de Burnot, et dans lequel il indique dix divisions qu’il considère comme chronologiques, mais qui ne s'accordent nullement avec celles de Dumont et qu'il désigne de la manière sui- vante, savoir : grauwacke rouge de Rouillon, grès de Wé- pion, schistes noirs , grès du bois d’Ause, schistes rouges (1) Annales des sciences géologiques, t. IV, 1873. ( 192 ) et bigarrés, psammites et schistes compactes, arkose, pou- dingue supérieur. Je suis porté à adopter l'opinion de M. Gosselet, en ce qui concerne la réunion au système du poudingue de Bur- not, des dépôts de Belgique et de France que Dumont rangeait dans son système ahrien; mais je me hâte d’ajou- ter que cela ne porte aucune atteinte au coup d'œil strati- graphique de notre éminent compatriote, puisque les po- sitions restent les mêmes. Il y a d’ailleurs très-longtemps que je soutiens la thèse que, partout où il n'existe pas de lacunes dans la série des terrains, il y a des couches que l'on peut rapporter à la division que les géologues appel- lent supérieure aussi bien qu’à celle qu'ils appellent infé- rieure. C’est ce que M. Levallois appelle des couches de jonction. Je concois d’ailleurs comment Dumont avait séparé de son système eifélien les couches de la bordure de l'Ar- denne qu'il rangeait dans son système ahrien, parce que ces couches, relevées le long de dépôts très-métamorphi- ques, avaient subi plus fortement les effets de ce phéno- mène que celles classées dans le système eifélien. J'ai, d’un autre côté, lieu de croire que si Dumont n'avait pas été aussi tôt enlevé à la science, il aurait opéré la rec- tilication dont il s’agit; car une petite exploitation faite dans le bois d’Ause, au sud de Namur, ayant mis à décou- vert une roche quartzeuse blanche, j'en portai un échar- tillon à Dumont en lui demandant ce qu'il en faisait; il ré- pondit: c'est ahrien; je lui dis qu’il l'avait enluminé en éifélien et il reprit que nous irions voir la localité dès que la saison le permettrait; mais hélas Dumont était mort deux mois après. S avait vécu jusqu'à présent, il aurait vu dans le bois d’Ause une longue tranchée, présentant des | | "Eemeren (195 ) couches, presque horizontales, de roches quartzeuses blanches reposant sur des parties rouges semblables au poudingue de Burnot, d’où il aurait reconnu que sa carte était bien enlaminée et que s'il y avait un changement à faire, ce serait plutôt de donner la teinte eifélienne à la bande ahrienne placée sur la bordure occidentale de l'Ar- denne. 5 Pour en finir avec le système ahrien, je dirai que Dumont y rangeait une partie des roches schisteuses et quart- zeuses de l'Eifel, tandis qu'il plaçait l’autre dans son sys- tème coblentzien; mais cette distinction n'a point été admise par M. de Dechen dans sa belle carte géognostique des provinces prussiennes du Rhin et de Westphalie, où le tout est réuni sous le nom de Coblenzschichten. J'avais cependant conservé cette division dans la der- nière édition de mon Précis de géologie, en donnant, d’après mes principes de nomenclature, le nom de psam- mite de Abr à la partie ahrienne et le nom de phyllades de Coblence à la partie coblentzienne ; mais aujourd'hui que je suis d'avis de réunir au poudingue de Burnot les dépôts de Belgique et de France que Dumont appelait ahrien, et que j'avais désigné sous le nom de grès de Mon- ligny, je me range à l'opinion de M. de Dechen , d'autant plus facilement que je n'avais adopté la division que par respect pour l'opinion de Dumont, car je n'avais pas remar- qué, lors de mes courses dans l'Eifel, que les psammites fussent plus dominants dans l’'Eifel occidental que dans l'Eifel oriental. [l est à remarquer que ce second changement ne porte pas plus d’atteinte au coup d'œil stratigraphique de Du- mont que le premier, car son système abrien de l'Eifel étant séparé de celui de Belgique, dans lequel on ne con- ( 194 ) naissait pas encore de fossiles au temps de Dumont, celui- ci pouvait être porté à les considérer comme contempo- rains, puisqu'ils avaient pour caractère commun d’être immédiatement sous leifélien. D'un autre côté, de même que l’on admet des couches de jonction, on peut dire qu'il y a aussi des étages de jonction. En effet, depuis que les géologues s'attachent à multiplier les étages, nous voyons très-souvent des auteurs proposer de nouveaux étages, non-seulement en divisant les étages établis par leurs de- vanciers, mais aussi en prenant la partie inférieure et la partie supérieure de deux étages pour en former un nou- veau. Si les légers changements que je viens d’indiquer ne portent point d'atteinte réelle aux travaux de Dumont, il n’en serait pas de même de la partie du nouveau mémoire de M. Gosselet, d’après laquelle les puissants dépôts que Dumont a nommés systèmes coblentzien et système gédin- nien ne seraient que des membres du système du poudin- gue de Burnot, mélés avec les parties supérieures de ce dernier. Les opinions de M. Gosselet sont appuyées sur des coupes qu'il a relevées avec beaucoup de soin, mais qui sont prises dans des lieux qui, selon moi, ne permettent pas den tirer les conclusions qu’il en a déduites. Les unes sont prises sur la ligne qui s'étend entre Liége el Valenciennes. Or on sait que cette ligne, où le terrain silurien paraît au jour sur quelques points, le terrain dé- vonien est peu puissant, excessivement tourmenté et fréquemment renversé. Les exploitations de charbon y ont notamment fait voir que, pour arriver à la houille, il faut quelquefois traverser l’ampélite, le calcaire et même le poudingue de Burnot. Je ne sais s’il existe aussi de ces ( 195 ) renversements dans les localités où M. Gosselet a pris ses autres coupes, mais la puissante couche de poudingue, dite la roche du diable à Pépinster, relevée à la position verticale, prouve que le sol y a aussi été fortement tour- menté. Il est d'ailleurs à remarquer que toutes ces coupes ont été prises dans une contrée où le terrain dévonien in- férieur se trouve très-resserré entre le terrain silurien et le terrain dévonien moyen. Je pense que, pour nous faire admettre que le système coblentzien de Dumont n’est qu'un accident du système du poudingue de Burnot, M. Gosselet aurait dù nous donner des coupes s'étendant sur la grande partie du plateau de (Ardenne que Ton considère comme uniformément re- couverte par le système coblentzien, au lieu de se borner à prendre ses coupes dans les parties de la bordure du massif où plusieurs systèmes sont resserrés et mêlés par des glissements, des failles et des renversements. On doit en général, dans des contrées bouleversées, se défier des coupes où l’on n’est pas éclairé par le flambeau de la paléontologie et plus encore lorsqu'il s’agit d’un système qui, comme celui du poudingue de Burnot, est composé de roches qui varient dans une même couche par leur couleur, leur texture et leur nature. M. Gosselet pa- rail avoir donné une certaine importance à ces caractères dans l'établissement des dix divisions mentionnées ci- dessus. Il ma paru, notamment, qu’il admettait qu’un niveau pour les roches blanches, tandis que je crois que la couleur blanche s’y trouve à divers niveaux. On sait que le blancsest la couleur naturelle de la silice lorsqu'elle n’est pas colorée par une substance étrangère. Mais si l’oxyde ferrique a souvent coloré en rouge les roches du système du poudingue de Burnot, ce n’est pas une raison ( 196 ) pour que tout ce qui se formait à la mème époque ait été également coloré. Le grès bigarré du trias nous prouve,au contraire, que la même couche, au même lieu, peut présen- ter le mélange du rouge et du blane. Je termine en répétant que je ne me crois pas en état de faire les recherches nécessaires pour porter un jugement définitif sur l’ensemble des opinions de M. Gosselet; mais je ne trouve dans son mémoire aucun fait propre à dé- montrer qu'il y ait des changements à introduire dans les deux systèmes que Dumont avait nommés gédinnien et coblentzien,de sorte que, en attendant de nouvelles obser- vations, je n’admets d’autres changements à faire dans ce que j'ai dit, dans mon Précis de géologie, sur le terrain dévonien inférieur de Belgique, que la réunion du grès de Montigny au poudingue de Burnot; de sorte que je divise maintenant ce terrain en trois systèmes dont les types sont le poudingue de Fépin, les phyllades de Houffalize et le poudingue de Burnot qui correspondent aux divisions de Dumont, c’est-à-dire les deux premiers aux systèmes gédinnien et coblentzien et le dernier aux systèmes abrien et eifélien inférieur. — M. Dupont fait la communication suivante sur le même sujel : Je suis porté à admettre le parallélisme que vient d'éta- blir M. Gosselet entre les conches du terrain devonien inférieur du sud et du nord de notre bassin primaire. Quand il a été définitivement démontré que le terrain ardoisier du Condroz et du Brabant était non pas rhénan ou devonien inférieur, mais silurien, la question, abordée à f a E € i S KEE E Let (IFF ) par M. Gosselet, se posait d'elle-mème. Le savant géologue présente deux séries parallèles de couches résumant les coupes et les observations qu'il a faites. On doit être frappé des similitudes saillantes qu'elles offrent entre elles, et nous devons les prendre en très-sérieuse considération, car l’auteur a employé à ce travail non moins de dix ans. Si j'ai cru devoir entretenir, à mon tour, l'Académie du nouveau et remarquable mémoire de M. Gosselet, c'est pour lui soumettre quelques remarques sur les analogies qui se présentent dans la constitution générale des terrains qu'il vient d'étudier et celle du calcaire carbonifère de la mème région. J'ai fait connaître en 1865 que notre caleaire carboni- fère était plus épais dans ses affleurements méridionaux que dans ses affleurements septentrionaux. Cette circon- stance est due à ce que la série des couches est plus com- plète dans les environs de Dinant que dans les environs de Namur. C’est ce qui fut désigné sous le nom de phénomènes des lacunes. Ainsi des contrastes s'établissent entre la con- süitution de cet étage calcairè dans les bandes où on l'ob- serve, et cependant il s’y présente en même temps des similitudes extrêmement tranchées : on reconnait facile- ment les couches des environs de Namur dans la série stratigraphique des environs de Dinant et leur position relative peut y être fixée avec précision. Le terrain devonien inférieur nous retrace exactement ces circonstances, d’après le mémoire de M. Gosselet. H aurait au midi une puissance de 4,000 mètres qui serait réduite à 2,000 mètres au nord; la série des couches du nord se retrouverait avec des caractères très-semblables au midi; enfin deux groupes du midi, l'un faisant partie du système gedinnien, l’autre constituant le système hunds- ( 198 ) ruckien en entier, ne se trouveraient pas dans la partie septentrionale. I semble done qu'il y a là les éléments d'une règle qui s'étendrait, comme je l'ai déjà pensé, à plusieurs étages de nos terrains devonien et carbonifère et qui est de nature à appeler l'attention des géologues. Revendication de priorité en faveur de M. Louis Perard; par M. F. Folie, correspondant de l’Académie. On rencontre dans une communication faite par M. J. Ja- min, à l'Académie des sciences de Paris ( Comptes rendus , n° 1,5 janvier 1874), les passages suivants : e On à imaginé le mot de force coercitive pour exprimer la différence entre le fer et l'acier. On définit cette force : la difficulté qu’on éprouve à aimanter le métal et la résistance qu'il oppose aux causes de la désaimantation. Cela est vague et ne repose sur aucune expérience défi- nie : revenons aux faits. » P. 19. « Ce sont ces propriétés que le mot de force coercitive est censé expliquer ; il me semble qu'on peut les résu- mer d’une manière à la fois plus simple et plus claire, en disant que le fer doux est bon conducteur des tensions magnétiques et que l'acier l'est d'autant moins qu'il est plus dur. » P. 22. « Je propose donc de renoncer au mot de force coer- » citive et de le remplacer par l’idée de conductibilité qui, » grande ou faible, constitue la propriété essentielle du » fer et de l'acier et explique tous leurs effets. C’est parce w E NE, D A v vy Y Lists née és ( 499 ) qu'il est conducteur que le fer prend et perd le magné- tisme aussitôt qu'une cause extérieure intervient ou » cesse; Cest pour la même raison qu’il transporte à tra- » vers un Contact les tensions opposées de deux pôles et » qu'il ramène l'aimant à la neutralité; c'est encore pour » cela qu'il sert, au moyen d’armatures soigneusement » appliquées, à réunir et à transporter, sur des masses » polaires voisines, le magnétisme épars sur les surfaces » des aimants naturels. » C’est au contraire à cause de son peu de conduetihi- » lité que l’acier retient séparées les tensions contraires » aux extrémités d’un barreau et d'autant plus puissantes qu'il est plus long. > P. 25. Dans l'intérêt de lAcadémie de Belgique, je crois devoir réclamer la priorité de l'idée de conductibilité du fer ou de l'acier pour le magnétisme en faveur de M. L. Perard, professeur à l'Université de Liége, qui s’est servi le pre- mier, si je ne me trompe, de cette expression, dans son Étude sur les procédés suivis pour déterminer les éléments du magnétisme terrestre; cette étude, couronnée par l'Aca- démie de Belgique, avait été adressée à celle-ci en réponse à la question de physique mise au concours par la classe des sciences pour 1870; elle a paru dans le tome XXXVII des Mémoires couronnés et mémoires des savants étrangers, 1874. — On y lit en effet : « Le fer doux et l'acier offrent donc, sous le rapport » de l'induction magnétique, une différence importante » qui porte sur la vitesse du retour à l'état primitif, et sur » la répartition de la force dans la masse du barreau » induit. La régularité que l’on remarque dans les bar- » reaux d'acier de peu de longueur, porte à croire que la » différence se réduirait à la seule vitesse d'acquisition et Ki Ki S v WW www e e ww ww WW: WW WW ww y ve e ps Sg Sg sg Ss ( 200 ) de déperdition, si l'induction pouvait s'effectuer sur une molécule isolée d'acier ou de fer pur. » D'ailleurs la différence dont il s'agit a des degrés qui dépendent de la constitution physique ou chimique du fer ou de l'acier; les caractères qui constituent cette différence n’ont rien d'absolu. On peut les exprimer en disant que le fer le plus pur est le meilleur conducteur du magnétisme; que l'acier est mauvais conducteur, el, par cela même, un bon réservoir de magnétisme. » € e La grandeur du changement et sa persistance dépen- dent, et de la faculté d'induction, et de la faculté de conservation; en un mot, de la conductibilité plus ou moins bonne, du morceau d'acier, pour le magné- lisme....... Ces causes d'instabilité , corrélatives de la conductibilité d’un barreau pour le magnétisme, jouent eu certain rôle dans les indications de nos instruments. La stabilité, aussi importante que la régularité, est le but que l'on doit se proposer dans le choix de la matière destinée à confectionner les aimants. » Pour aimanter un barreau de fer, qui est bon conduc- teur du magnétisme, il suffit de présenter à l’une de ses extrémités un pôle inducteur : le magnétisme se déve- loppe aussitôt dans toute l'étendue du barreau, d'autant plus rapidement que le fer est plus pur; il se répartit d'autant plus régulièrement que le fer est plus homo- gène. Mais la stabilité v est presque nulle. Pour aiman- ter un barreau d'acier, qui est mauvais conducteur du magnétisme, il est nécessaire de prolonger l'action inductrice; le meilleur acier est celui dans lequel la force propre, une fois acquise, est le moins exposée à varier. Mais pour que la force se distribuât régulière- LEE EES, ( 201 ) » ment, il faudrait que la source inductrice pùt s'ap- » pliquer également à chaque molécule du barreau à » aimanter (1), et que celui-ci fùt bien homogène. Ces quelques citations suffisent, me semble-t-il, gy établir sans aucun doute, en faveur de M. L. Perard, priorité de l’idée de conductibilité appliquée au Wé tisme, et j'ai cru que l'Académie de Belgique, dans les mémoires de laquelle cette idée a été d’abord émise, était intéressée à celte revendication de priorité. C'est cette considération qui m'a décidé à lui communi- quer la présente note. Est-il besoin d'ajouter qu’en faisant cette revendication en faveur d'un professeur de l'Université de Liége, je ne prétends en aucune façon contester que M. J. Jamin soit arrivé de son côté, et d’une manière tout à fait indépen- dante, à la même idée? Je suis, au contraire, persuadé que, quand il l'a publiée, il n'avait pas connaissance du travail de M. L. Perard. (1) « Ces conséquences de la bonne et de la mauvaise conductibilité » des corps sont générales pour toutes les forces physiques: elles se véri- ` fient pour l’élasticité, la chaleur, ete. » pp. 8 et 9 ( 202 ) CLASSE DES LETTRES. ame ea Séance du 2 février 1874. M. R. Cuaron, directeur. M. An. QuETELET, secrétaire perpétuel. Sont présents : MM. Ch. Steur, J. Grandgagnage, J. Rou- lez, Gachard, P. De Decker, J.-J. Haus, le baron Kervyn de Lettenhove, J.-J. Thonissen, Th. Juste, le baron Guillaume, Félix Nève, Alph. Wauters, Émile de Laveleye, G. Nypels, Alph. Le Roy, Émile de Borchgrave , membres ; J. Nolet de Brauwere van Steeland, Aug. Scheler , Alph. Rivier, asso- ciés. M. Éd. Mailly, correspondant de la classe des sciences, assiste à la séance. CORRESPONDANCE. La classe recoit à titre d'hommage, de la part de M. F. Nève, un exemplaire de son ouvrage sur Adrien Bar- landus, et de M. Fr. Lenormant, associé, les deux volumes de ses Études d'histoire et d'archéologie. — Remerti- ments. ( 205 ` — La classe renvoie à l'examen de MM. Scheler et le baron Kervyn de Lettenhove, une notice de M. Stanislas Bormans, intitulée : Doon de Mayence, deux fragments manuscrits de la fin du XII siècle. ÉLECTIONS. Conformément à l’article 12 du règlement d'ordre inté- rieur, la classe procède à l'élection du comité de trois membres chargé, avec le bureau, des présentations de can- didatures aux places vacantes. CONCOURS DE 1874. Le terme fatal du concours annuel de la classe et du concours sexennal de Stassarl, pour une question d'his- toire nationale, expirait le 1° février. Voici la liste des mé- moires reçus en réponse aux diverses questions inscrites au programme de ces concours : PREMIÈRE QUESTION. On demande un essai sur la vie et le règne de Septime Sevére. Trois mémoires. Le premier porte pour devise : Payez bien les soldats et méprisez le reste; le second: Laboremus; le troisième: Peu d’empereurs ont montré une individualité plus forte et laissé dans l’histoire de Rome une trace plus ( 204 ) profonde. Ce dernier travail (sans billet cacheté) forme annexe au mémoire déjà présenté en 1872. Les commissaires désignés pour faire examen de ces mémoires sont MM. Roulez, Wagener et F. Nève. DEUXIÈME QUESTION. Exposez avec détail la philosophie de saint Anselme de Cantorbéry ; en faire connaître les sources: en apprécier la valeur et en montrer l'influence dans l’histoire des idées. Un mémoire. Devise : Aliter... quam priores tradi- turi, elc. (PLINE.) Commissaires: MM. Thonissen, Le Roy et Nève. TROISIÈME QUESTION. Donner la théorie économique des rapports du capital et du travail. Sept mémoires. Ils portent respectivement pour de- vises : 1° Il faut beaucoup de philosophie pour observer les faits qui sont trop près de nous. (RoussEAu.) 2 Als Beitrag zu einem Werke, zu einer Thal der Zukunft. (ScnuLze-DELITSCH.) 5° Un pour tous et tous pour un. 4° Le capital est presque la vie matérielle des États, ete. OSSI. 5 Mettre la lumière à la portée de toutes les intelli- gences, c’est le plus súr moyen de détruire les sophismes. 6° Primo vivere., 3 | | ( 205 ) T° Conscience et science font la devise de Phomme de bien. Commissaires : MM. Faider, Thonissen et de Laveleye. QUATRIÈME QUESTION. Faire Phistoire de la philologie thyoise jusqu'à la fin du seizième siècle. La classe décide que la seule communication (sans billet cacheté et portant pour devise: Houdt middel mate, Hov- | WAERT) reçue en réponse à cette question, sera remise à | la disposition de l’auteur; ce travail, incomplet, ne peut être considéré comme nn mémoire de concours. CONCOURS SEXENNAL DE STASSART. en 1194, les principes constitutionnels communs & nos diverses provinces et ceux par lesquels elles différaient entre elles. | Exposer quels étaient, à l’époque de l'invasion française Un mémoire, portant pour devise: Laboremus. Commissaires : MM. Nypels, Thonissen et Faider. Leem Ome SÉRIE, TOME Kn. 14 ne e 7 ( 206 ) COMMUNICATIONS ET LECTURES. Notice sur le particularisme linguistique flamand de la Flandre occidentale, par M. J. Nolet de Brauwere van Stéeland, associé de l’Académie. Depuis quelques années, un parti séparatiste flamand cherche à rompre l'unité si laborieusement accomplie entre tous les hommes de lettres néerlandais, en decà comme au delà de nos frontières du nord. Je me permets de signaler à l’Académie royale de Belgique les tendances d’une scission qui vise à un particularisme littéraire pro- vincial, auquel seule elle reconnait le titre et la qualité de langue nationale. Prémunir contre cette prétention, siridi- culement exagérée que je n'hésite point à la qualifier de déplorable facétie, c'est m'assurer d'avance l'approbation de tous les écrivains néerlandais dignes de ce nom. J'ai également la conviction de n'être point désavoué par mes honorables confrères flamands de la Classe des Lettres. Le triste privilége évoquer ces luttes scolastiques pa- rail acquis à la province de la Flandre occidentale. Bruges est encore aujourd’hui, tout comme elle le fut en 1839, le foyer d’une insurrection linguistique ; mais si la cause apparente et les moyens stratégiques mis en œuvre sont absolument les mêmes qu'à une époque appartenant déjà à l'histoire, les conditions de Ja tutje ont singulièrement changé à notre avantage. Il ne sera pas sans intérêt des: quisser d’abord — un peu longuement peut-être — les D de ide ER ET | ( 207 ) péripéties de ces combats d'autrefois, bien autrement homériques que ceux de nos jours et qui firent couler à gros bouillons.des flots d'encre et de bile. Ce fut peu de temps après l'émancipation politique de la Belgique que, du fond de la Flandre occidentale, surgit la question de savoir si quelques rares partisans de l'ortho- graphe surannée de Desroches prévaudraient contre un nombre bien autrement important de grammairiens et de littérateurs flamands, promoteurs d'un système orthogra- phique plus en harmonie avec celui de nos voisins d'outre- Moerdijk, sans toutefois s'identifier complétement avec ce dernier. Cette question, anodine d'abord, aigre-douce ensuite, passa au grave et à l'aigu en raison de la multipli- cité des accents de même nature, dont les Desrochistes émaillaient leur littérature, sans vouloir en démordre à aucun prix. Il y avait aussi une pléthore de voyelles désor- données, papillotantes à donner le vertige. Un certain n final, au nominatif de l'article masculin singulier, brochait sur le tout. Quant à supprimer celle lettre de malheur en tranchant la queue de l'article, les Desrochistes s'y oppo- saient formellement: ils prétendaient que c'eût été «démas- culiniser la langue de leurs pères, » expression des plus pittoresques et devenue célèbre depuis. I va de soi que les ` adversaires visaient à l'abolition de tout ce vieux fatras : ils répudiaient ces légions d'accents, ces voyelles alignées à perte de vue, traitant tout cela de bagage inutile et de Superfétation vieillotte. Quant à Pn masculinisateur (sic), ils soutenaient, -— non sans quelque apparence de raison, — que, même grammaticalement ere YI nje mas- culin-avait par lui-même des signes di caractérisés et pouvait se passer de ce maigre pae alphabétique. ( 208 ) On en était là, se mesurant des yeux, avec ce regard méfiant propre aux chiens de faïence, et se lançant de loin en: loin quelque écrit malfaisant et hargneux, lorsque le gouvernement mit soudain le feu aux poudres. Par arrêté royal du 6 septembre 1856, il institua un concours pour une « Dissertation critique sur les points controversés en » matière d'orthographe, de déclinaison et de conjugaison » dans la langue flamande, » nommant en même temps une commission composée de sept membres, tons hommes de lettres justement réputés parmi les plus marquants. Cet aréopage, présidé par notre regretté Confrère J.-F. Wil- lems, se réunit le 18 août 1839, afin de prendre connais- sance du volumineux dossier de son secrétaire-rapporteur. Un arrêt, dûment motivé, suivi de quelques propositions formulées en huit points, dispersa aux quatre vents les dé- bris du système de Desroches, dont le rapport de notre savant Confrère Bormans avait déjà culbuté l'échafaudage vermoulu... Tout aussitôt l'état-major Desrochiste quitta la Flandre occidentale pour la capitale, où il fixa son quartier général. Pierre Behaegel, ancien maître d'école retiré des affaires, homme juste, mais aigri par le malheur, je veux dire par la linguistique des temps, était le chef de ce petit cénacle. Un certain M. E. Bôn , magister de moindre alloi, figurait en qualité d’alter ego; enfin, M. l'abbé De Foere, membre de la Chambre des Représentants, orateur juré du parti, complétait ce triumvirat. Les noms des autres combattants, menue monnaie de ces grosses pièces, ne parvinrent point à la postérité. Ces nouveaux preux, — braves gens au demeurant, — avaient fondé la société littéraire « Vaderlandsliefde » (Amour de la patrie), dont les membres s'intitulaient ` d H | i ( 209 « Patriotes. » Ils siégeaient à l'hôtel de ville, mis à leur disposition par l’édilité de Bruxelles. Bardés d'accents aigus et graves, sans compter le signe circonflexe, que le grammairien Bôn tenait arboré sur son nom; cuirassés d’une myriade de voyelles impossibles et notamment de ce ter- rible article nominatif masculin singulier, den — singulier surtout! — dont la lettre finale symbolisait une exubé- rante virilité, ces hommes belliqueux proclamèrent une sorte de guerre sainte. Ne craignant pas de faire appel à des passions politiques mal éteintes et de rouvrir des plaies à peine cicatrisées, ils lancèrent leur défi au nom de la religion et de la nationalité, soi-disant en péril. Ils justi- fiaient ainsi le dire si pittoresque du docteur Snellaert : « Les Desrochistes exploitèrent la nationalité belge au profit de leur système, et ils surent crier si haut, ou chu- chotter tellement bas, que bien de bonnes âmes s’émurent, comme si l'article de (sans n final) eût porté toute l'armée du prince d'Orange sur ses épaules. » Les hostilités débutèrent par la publication intempestive de la pièce de concours de M. Behaegel, volumineux mémoire de 667 pages in-8, y compris deux supplé- ments (1). La détonation de ce lourd engin fut suivie d’une pétarade de pamphlets et de feuilles volantes, dont l'explo- Sion fit plus de bruit que de mal. Pendant ce temps, le camp opposé ne demeura point inactif, bien que la riposte officielle, c’est-à-dire le rapport de la Commission, ne parût que quatre ans plus tard, sous la forme d'une de ces bro- chures (de 640 pages gr. in-8°) si familières à notre (1) P. BEHAEGEL, Verhandeling over de vlaemsche spelkunst, enz. Brugge, 1837. ( 210 ) savant Confrère, M. Bormans (1). Dans l'intervalle, le Belgisch Museum de M. Willems ouvrit ses colonnes au feu croisé d'experts tirailleurs. La mêlée devint générale ` Quarante-quatre hommes de lettres, convoqués par le gou- verneur de la province, se réunirent le 14 octobre 1841 à Anvers, et adhérèrent publiquement à l'orthographe nou- velle, tandis qu’un congrès littéraire se tint à Gand le 23 du même mois et le jour suivant. L'élite de nos littéra- teurs flamands prit part à ces assises linguistiques, où toutes les provinces flamandes, même -— à douleur ! — la Flandre occidentale, eurent leurs représentants. Les par- tisans de Desroches, quoique invités, s’abstinrent de pa- raître. Ils furent condamnés par défaut et les règles de la Commission admises à l'unanimité. Notons, en passant, que le clergé était largement représenté à ce congrès, aussi bien qu’à la réunion d'Anvers. Les novateurs littéraires célébrè- rent cette éclatante victoire, nommée depuis la Pacifica- tion de Gand, par un banquet de deux cents couverts, auquel assistèrent trois ministres, le ministre plénipoten- tiaire des Pays-Bas, les autorités supérieures civiles et militaires de la ville et de la province, neuf membres de l’Académie royale de Belgique, — le président et le secré- taire perpétuel en tête, — en un mot, les sommités du Pouvoir, de la Science et des Belles-Lettres du pays (2). Ce terrible coup de fourchette porta le coup de grâce à une linguistique désormais condamnée, de même que ses accents graves et aigus furent impitoyablement maltraités J.-H. Bormans, Verslag over de ERE ingekomen bij het on van Belgie, enz. Gent, í - EI NELLAERT, Tael ee es en Gre feest, gehouden te Gent . den 23 en 24 october 4841. Gent, ( 211 ) par les accents moins graves mais bien plus aigus de la muse badine du poëte Van Duyse (1). Malgré leur défaite, les Desrochistes ne se tinrent point pour battus. Retranchés dans l'hôtel de ville de Bruxelles et pareils aux condamnés maudissant leurs juges, ils pu- blièrent le journal Den waeren Belg (Le vrai Belge), qui eut pour écho Les petites Affiches de Bruxelles, et pour auxiliaire une Revue éditée à Anvers (2). Ces écrits, d’un goùt, d'un style et d’une orthographe également douteux, lancèrent des gerbes d’amères récriminations, des fusées de gros mots, d'injurieux pétards. La langue néerlandaise s’y trouvait qualifiée de « langue bâtarde, schismatique et hérétique; — langue de dominés; — nouveau langage de gueux, adopté par la Société Biblique. » Les adversaires de Desroches y étaient réputés « hurleurs de Vénus (?), bala- dins de foire, défenseurs efféminés d’une langue de singes, etc. (3). » Telles étaient les aménités de haut goût dont le Desrochisme aux abois émaillait son grotesque feu d'artifice, auquel les brillants soleils s'obstinaient à faire défaut; mais comme toute œuvre pyrotechnique doit avoir son bouquet de la fin, ce fut M. l'abbé De Focre qui se chargea de le faire partir. Un arrêté royal du 1° janvier 1844 prescrivait l’adop- tion de l'orthographe nouvelle pour la traduction en fla- mand du Bulletin des lois. M. De Foere saisit cette occa- (1) Prupexs vax Dorse, De spellingsoorlog. Luimig hekeldicht in vier zangen. Gent, 1842. 2) Den tael-en lelterminnenden protestant. Roomsch catholick tyd- schrift ter verdediging der vlaemsche tael. Antwerpen, 1841. (5) Ib., tem, Scheurzieke, verketterde bastaerdspraek, — Domine's tael, — Nieuwe geuze tael door het Bybelgenootschap aengenomen. — Fen jankers, klugispeelders, verdedigers der verwyfde aepentael, enz. (212 ) sion pour interpeller le ministère et introduire la question flamande au sein de la Chambre des Représentants. On vit alors le curieux spectacle de fougueux adversaires politi- ques, marchant de pair, parlant à l’unisson et se passant, qui le séné, qui la rhubarbe Desrochiste. Piusieurs jours furent ainsi perdus pour les affaires sérieuses. Le Parle- ment se trouva transformé en arène linguistique, rappelant à s'y méprendre le turbot à la sauce du Sénat romain. Encore la sauce fut-elle peut-être décrétée; mais ici tout se passa en discussions oiseuses, stériles et sans issue. M. De Focre fut admirable de splendides non-sens el d’éblouissantes extravagances. Jl parla de langue indépen- dante, de grammaire émancipée, d'orthographe patriotique; traitant celle de la Commission de « séve néerlandaise, de consonnes hollandaises. » Il poussa jusqu’au cri du déses- poir : « On assassine la langue du pays!..... vous ne pouvez nous arracher la langue... la langue de nos pères. » Enfin justifiant son dire « mon opinion est une opinion poli- tique, » il rapprocha ingénieusement le congrès de Gand de la conspiration Van der Smissen. C’est alors que MM. Verhaegen et Dumortier — ce dernier ne sachant pas un traître mot de flamand — simulèrent un effroyable sai- sissement et furent bien près de déclarer la patrie en danger. L'hémicycle du Palais de la Nation frémit encore au sou- venir de ce discours interminable du 25 janvier, débité de ce ton un peu monotone, propre à l'orateur, et qui invitait à la sieste. M. le Ministre d'Anethan justifia sans peine l'acte posé par le Gouvernement; mais les honneurs de la séance furent pour M. De Decker. Dans une improvisation aussi savante au fond que brillante et serrée dans la forme, il réfuta les lourdes erreurs, entassées comme Ossa sur ( 215 ) Pélion , dont l’abbé De Foere avait farci son discours. De celte Voix sympathique, franche et sonore qui Commande lallention et impose la conviction, l'orateur captiva l'as- semblée pendant plusieurs heures. Il passa en revue toutes les illustrations littéraires d'un glorieux passé; mais lors- qu'il en vint à énumérer la phalange moderne anti-Desro- chiste, — lexicologues, linguistes, historiens, romanciers, poëtes et prosateurs, — sommant son adversaire d'en faire autant, ce dernier garda un silence tristement éloquent : c'était Taxen de l'impuissance, signal de la défaite du parti. La déroute fut complète : la petite garnison bruxelloise quitta son Capitole et se dispersa dans toutes les directions, emportant ses dieux lares — accents, voyelles, n mas- culin et le reste — dans les plis de son drapeau. Depuis ce moment il n’en fut plus autrement question. Le Desrochisme avait vécu ; on songea à lui faire des funérailles de première classe. A cet effet, vingt-quatre sociétés littéraires flamandes se réunirent en corps ou par délégation à l'hôtel de ville de Bruxelles, et ce dans le même local que les adversaires venaient de quitter. Là une adhé- sion solennelle au système orthographique de la Commis- sion royale, tel qu’il fut ratifié au congrès de Gand, se couvrit de plus de trois cents signatures. Cette imposante assemblée, connue sous le nom d'Union de Bruxelles, vota une adresse de remerciments à MM. De Decker et de Cors- warem et fonda l’union des sociétés flamandes dite Tael- verbond(1). Le même soir un banquet — inévitables agapes! — eut lieu au Waux-Hall. La prose et la poésie d'apparat du matin s’y éparpillèrent en toasts pétillants d'esprit, en (1) P.-F. van KeRcknovEN, Vlaemsch taelverbond, enz., met eene inlei- ding. Antwerpen, 1844. (214) vers scintillants d'humour, La verve caustique da satirique Van Ryswyck s'exerça sur les accents et les voyelles enne- mies en général et sur M. De Focre en particulier : les deux furent outrageusement persifflés et chansonnés d'im- portance (1). Le vainqueur sonnait à la fois son triomphe el le glas funèbre du vaincu. Ainsi se termina cette mémorable campagne linguis- tique. Elle ne compta ses morts et ses blessés qu'au figuré : quelques décès littéraires, quelques blessures d'amour- propre d'auteur déconfit et tout fut dit. Les guerres poli- tiques de peuple à peuple ne devraient pas autrement nir, Si j'ai donné trop d'extension à cette revne rétrospec- tive, si je fus un peu prolixe de détails, c'est que le récit n’est peut-être pas sans offrir quelque intérêt. I présente, en effet, une analogie frappante avec la scission actuelle, n'était que les rudes assauts d'autrefois se réduisent au- jourd’hui aux proportions amoindries d'une triste équipée. Les chefs d'école Behaegel, Bòn et De Foere sont rentrés dans les coulisses, pour faire place à MM. les abbés Gezelle, De Bo et Duclos. Si les moyens stratégiques ont qnelque peu changé, le prétexte ct le but à atteindre sont restés les mêmes ` comme en 1844 les particularistes brugeois inserivent Religion et Nationalité, non sur leur drapeau — ce serait trop glorieux ! — mais sur leur boiteuse enseigne. La haine, j'allais dire la peur du néerlandais existe tou- jours : seulement les Desrochistes voulaient une langue écrite, mauvaise si l'on veut, mais uniforme pour toute la (1) Tu, van Rvswvex, Volledige werken. Antwerpen, 1853. beggen ( 215 ) Belgique flamande; ils possédaient une grammaire, des règles, ridicules, mais fixes. Les novateurs modernes pré- tendent, eux, s’en tenir au dialecte de la Flandre occidentale, condensé dans un certain Idioticon qui leur tient lieu de dictionnaire, de grammaire , de syntaxe, de tout. Nous y reviendrons tantôt, après avoir indiqué — très-brièvement cette fois — l'origine d’un schisme littéraire, mal à l'aise, voire tant soit peu étranglé, dans son étroite circonserip- Lion. Les règles préconisées par la Commission royale et adoptées par le Gouvernement comme par tous les éeri- vains de quelque valeur, avaient singulièrement rappro- ché les idiomes flamand et hollandais. Déjà à cette époque M. Lebrocquy disait avec raison ` « Le flamand et le hol- landais ne forment pas deux langues distinctes, mais deux dialectes fort ressemblants d'une même langue... L'intime connexion des deux dialectes est un fait évident et incontes- table : sauf quelques différences de prononciation et d’ortho- graphe, tout leur est commun, grammaire, Syntaxe, génie. L'intime affinité des deux dialectes survivra à tous les systèmes d'orthographe que pourrait rêver le faux patrio- tisme, conspirant avec la fausse science (1). » On croirait cela écrit de nos jours. Les congrès internationaux littéraires hollando-belges, dont le premier eut lien à Gand en 1849 et le treizième l'an dernier à Anvers, contribuèrent largement à un rap- prochement linguistique, qui devint bientôt — ce qu'il D ent jamais dù cesser d’être — une identification com- plète. Le congrès de Bruxelles (1851) adopta le plan d'un dictionnaire néerlandais, dont MM. De Vries et Te Winkel (1) P. Lesrocquy, Analogies linguistiques, ete. Bruxelles, 1845. ( 246 ) pour la Hollande, M. le chanoine David pour la Belgique, furent nommés rédacteurs; enfin une Commission nou- velle (1), instituée par arrété royal du 25 janvier 1864, ayant examiné « la valeur des modifications introduites au système adopté pour l'orthographe flamande » et recher- ché o les moyens les plus propres pour arriver à l’unifor- mité, » un arrêté royal du 21 novembre suivant sanc- tionna les règles prescrites par cette Commission, en les adoptant « pour l’enseignement dans les écoles et athé- nées de l'État, pour la correspondance administrative, pour la traduction en langue flamande des lois et arrêtés et généralement pour tous les actes publics émanant d’au- torités légalement constituées. » L’unification de la langue néerlandaise, ainsi officiellement décrétée, était désormais un fait accompli. Cependant l'opposition naissante des scissionnaires bru- geois n’altendit point jusque-là pour étaler au grand jour ses grotesquês inepties. Déjà, lors du congrès de Bruges, M. David les signala à l'attention des hommes de lettres : « J'entends parler (disait-il) de cette nouvelle méthode d'écrire, non plus dans une langue commune à tous, mais dans le patois de la Flandre occidentale, qui en diffère essentiellement. S'il ne s'agissait que de quelques feuilles volantes, de chansons populaires, de vers de circonstance, je n’y trouverais point à redire. Cela se voit en tous pays. mais dans une œuvre sérieuse et de longue haleine, je tiens cette façon d'agir pour mauvaise... Au surplus il est peu sage de céder en tout aux errements populaires et d'écrire (1) Les membres de cette commission étaient MM. les professeurs Da- vid, Heremans, Stallaert, Van Beers, MM. Conscience, Rens, Dautzenberg et Delcroix, hommes de lettres. anime SR ( 247 ) comme parle tout le monde. Ce serait gåter et perdre la langue. Mieux vaut relever le goût du peuple par la bonté et la simplicité du style, l'habituant ainsi à un langage plus cultité, à cette langue littéraire, employée et com- prise dans toute la Belgique. Même en essayant parfois d’un localisme, d’un provincialisme, on doit encore se fonder sur l'analogie et se soumettre aux règles générales de la grammaire néerlandaise, qu'on ne peut ni contrecarrer , ni enfreindre (1). » Sans désigner nominalement aucun cou- pable, le savant académicien faisait une allusion transpa- rente aux poésies de M. Gezelle, qui venaient de paraître (2). L'année suivante notre savant Confrère, M. le professeur Heremans, publia dans une revue flamande (3) une ana- lyse détaillée, sévère, mais impartiale, de ces mêmes poé- sies. Ise montra justement impitoyable pour ce qu’il nom- mait des « singularités de parti pris, des sauts périlleux de mauvais goût, » qu’il se mit à éplucher et à disséquer avec une patience digne d'une meilleure cause. Je ne le suivrai pas dans l'énumération de ces pages, regorgeant d’idiotismes et d’aberrations grammaticales, qu'il cloua au pilori de la linguistique et flagella d'importance. Je me bornerai à citer son appréciation des tendances de la nou- velle école, résumées en ces quelques lignes : e Quand l’auteur donne carrière à ses sentiments poétiques, il n’est pas de ceux qui se servent de formes littéraires néerlan- daises, fixées depuis longtemps et respectées de tous : ses (1) Handelingen van het zevende Nederlandsch taal-en letterkundig kongres. Brugge, 1863. (2) E. H. Guro Gezeze, pbr.: Gedichten, Gezangen en Gebeden, etc. Brugge, 1862. (5) Nederduitsch maandschrift, 2° deel. Brussel , 1863. ( 218 ) œuvres sont pour le fond, comme pour la forme, autant de manifestes littéraires, n’admettant d'autre poésie natio- nale que basée, quant au fond, sur le catholicisme et sur un mesquin provincialisme, quant à la forme. » M. Gezelle paraissait, du reste, venir lui-même au-devant d’une cri- tique, qui s’adressaii à la vile prose aussi bien qu’à la lan- gue des dieux, lorsque, dans un appendice à son œuvre, il glissa cette phrase significative : La littérature flamande, pour être nationale, doit être catholique. Cet axiome — qui pour l'école brugeoise comprend la loi et les prophètes, — explique à lui seul la haine du néerlandais et le particu- larisme linguistique, par lequel on espère isoler la Flandre occidentale de tout contact littéraire avec la Hollande et même avec les autres provinces flamandes. Toutefois on n'avait signalé jusque-là que des essais isglés; mais à peine l'arrêté royal du 21 novembre 1864 eut-il paru, que les particularistes se mirent bravement à l’œuvre. Aux poésies de M. Gezelle succédèrent une étude sur la vie et les œuvres de Memiline, par M. James. Weale ; un ouvrage sur les anciennes côtes de la Flandre, par M. l'abbé Duclos, ainsi qu’un volume de poésies par M. l’abbé De Bo. Ce dernier édita en outre un « Idioti- con (1), » couronnement provisoire de l'édifice. Enfin la scission avait dès 1856 fondé une revue hebdomadaire, servant à la fois d'organe et de modèle cacographique aux pieux adhérents du système séparatiste. Comme bien on voit, les novateurs touchaient à tout : lexicographie, his- toire, beaux-arts, poésie, ils exploitaient tous les genres, même le genre ennuyeux. Vouloir rendre compte, en les détaillant, de ces publications parfois indigestes, serait (1) L. L. De Bo, Westolaemsch Idioticon. Brugge, 1873. ameen EEN EEN ( 219 fatiguant et oiseux. Contentons-nous de signaler plus- particulièrement l’{dioticon et le journal Rond den heerd (Autour du foyer). L'idée de condenser en un dictionnaire spécial la somme des expressions exclusivement propres à certaine localité, à une province, ainsi que les idiotismes du lan- gage, recueillis de la bouche du peuple, ne date pas d'hier : Depuis bien des années l'Allemagne, par de nombreux et remarquables spécimens de l'espèce, nous devança dans ce genre de compilations ; mais sauf quelques publications identiques, justement estimées comme idiotica de l'idiome wallon (4), rien de semblable n'existait en Belgique. Ce fat au congrès international néerlandais de Bruxelles (1851) que M: Stallaert prit l'initiative d'une proposition, par laquelle il faisait appel à toutes les spécialités linguis- tiques, tant en Belgique qu’en Hollande, — sans exception de contrée où d’idiome — qui voudraient bien recueillir les idiotismes de chaque localité. Ces idiotica seraient transmis à une commission, chargée de constater la valeur linguistique de chaque mot et d'accorder ensuite dans le dictionnaire national droit de bourgeoisie aux seules ex- pressions qu'elle jugerait être suffisamment néerlandaises, pour conserver à la langue lecaractère qui lui est propre (2). (1) R. H. J. Caueresier, Dictionnaire walon-françois. Liége, 1787. — L. Rewacte, Dictionnaire wallon et dee Liége , 1859-45. — J. Hu- BERT, Dictionnaire wallon-liégeois et français. Liége, 1855. — J.-B. Das- xoy, Dictionnaire wallon-français. l Teada 1356. — Cn. GRANDGA- GNAGE, Dictionnaire étymologique de la langue wallonne. Liége, 1845- 50. — J. Sicart, Glossaire étymologique montois ou Dictionnaire du wal- lon de Mons. Bruxelles et Leipzig, 1866. (2) Handelingen van het derde Nederlandsch letterkundig congres Brussel, 1852. ( 220 ) Pareille proposition, d’une exécution trop vaste pour abou- tir, à cette époque, n’en fut pas moins sagement formulée : car les idiotica spéciaux n'étaient pas destinés à être offerts tels quels en pâture à qui voudrait y puiser à pleines mains le sec et le vert: ces travaux, purement prépara- toires, allaient être dégrossis, épurés; il y avait un triage raisonné, un choix judicieux à faire, et cette laborieuse besogne incombait à une commission composée d'hommes compétents. La proposition de M. Stallaert ne fut pas réalisée dans le moment même; mais à quelques années de là, M. l'abbé Schuermans édita le premier Idioticon flamand (4), sous les auspices de la Société littéraire flamande de l'Université catholique de Louvain et avec le concours de plusieurs spé- cialistes, qui s'empressèrent d'en fournir les éléments. Cette œuvre vraiment remarquable a le mérite d’avoir été éla- borée avec la sage lenteur qui permet de choisir avec dis- cernement, d'émonder et de coordonner une matière assez vaste pour comprendre un nombre considérable de termes locaux, empruntés à toutes nos provinces flamandes, et condensés en un volume de neuf cents pages. Trois années plus tard parut l’Idioticon de M. l'abbé De Bo (2), mais différant essentiellement de l’œuvre de M. Schuermans. Tout d’abord cet énorme lexique de près de quinze cents pages gr. in-4°, ne contient que les termes propres à la seule Flandre occidentale. Quinze cents pages, rien que pour une province : cela parait bien volumineux! Sans doute, la terminologie flamande est riche : mais celle de la (1) L.-W. ScuuErmaxs, Algemeen vlaamsch Idioticon. Leuven, 1865- 1870. (2) L-L De Bo, Westvliaamsch Idioticon. Brugge, 1875. p ( 221 ) Flandre occidentale doit l'être à l'excès pour se permettre le luxe de tant de feuillets, alors que toutes les autres pro- vinces réunies n'en fournissent que neuf cents. Que M. De Bo ait entassé pêle-mêle dans son immense capharnaüm linguistique, tout ce que dech, delà et d'autre part encore lui fut amené à pleines charretées, on serait tenté de le croire; la politesse me défend de l'affirmer. Il existe un autre écart bien marqué entre l’Idioticon de M. De Bo et les publications similaires de lexicographes wallons ou flamands, tels que MM. Sigart, Grandgagnage ou Schuermans : ces derniers se servent, qui du francais, qui du néerlandais littéraire, soit dans la préface de leur œuvre, soit dans les commentaires ou dans les notes qui l'accompagnent. M. De Bo n’agit point de même : il écrit préface et commentaires dans le dialecte provincial dont l'dioticon fournit les échantillons; tout en empruntant bel et bien, aux prescriptions de l'arrêté royal du 21 no- vembre 1864, l'orthographe de cette même langue néerlan- daise que les particularistes brugeois ont en profonde aversion. Mais accoupler aa, ij et de, avec le patois occi- dental flamand, quand on avait ae, y et den sous la main, c'est là un de ces trompe-lœil qui font horriblement lou- cher; c’est, en outre, d’une logique désespérante. Autrefois « la langue de nos pères, » sauvegarde « de la religion et » de la nationalité, » ne se fût pas accommodée d’un tel compromis. L'orthographe de la Commission! Les Desro- chistes doivent en frémir dans un monde meilleur; et si la colère pouvait les ressusciter, l’indignation les ferait immé- diatement rentrer sous terre. Je wen souhaite pas moins la bienvenue à tous ces Idio- tica : il serait même à désirer que chacune de nos pro- vinces eût le sien propre; mais à condition que ces bons ° SÉRIE, TOME XXXVII. 45 (222) et honnètes dictionnaires fussent pénétrés de la haute mis- sion qui leur incombe. Cette mission n’est pas de détrôner les grammaires et les lexiques de la langue moderne écrite, dite littéraire et commune à toute une même race; mais de servir de réceptacle aux termes archaïques hors d'usage de la vieille école provinciale, ainsi qu'aux expressions locales modernes, entendues de la bouche du peuple. Si l'Idioticon veut les rendre intelligibles à tous, il doit tra- duire ces termes, non par des idiotismes nouveaux, mais par des équivalents généralement acceptés et compris; au- trement dit en pur néerlandais. Dans ces conditions un dictionnaire de l'espèce est d’une incontestable valeur : car beaucoup de termes anciens, aussi bien que certains idiotismes du langage populaire moderne ont conservé cette saveur particulière, ce goût de terroir un peu âpre parfois, mais qui exprime la pensée nettement et sans ambages. La langue néerlandaise, — comme toute langue moderne — plus perfectionnée, plus civilisée et partant plus collet monté que sa devancière, imprime sur tout cela un cachet de pruderie effaronchée, arrondissant les angles, adoucissant les crudités, gazant le trop décolleté; mais malheureusement aux dépens de la vigueur de l'expression, dont elle altère souvent le sens en lui enlevant le prime-sautier de sa naïve brutalité. D'autre- fois la signification primitive du mot échappe compléte- ment. H faut, d'une part, une circonspection extrême pour remettre en honneur un terme démodé, ou pour le sup- primer du vocabulaire usuel; une profonde science lin- guistique est requise , d'autre part, pour retrouver le sens propre d’un archaïsme nébuleux : c'est affaire aux philo- logues spéciaux et non pas au premier venu. C'est ce qu'a parfaitement compris la « Société de lin- ( 225 ) guistique sud -néerlandaise » en ouvrant récemment un concours pour « la meilleure collection d'idiotismes fla- mands. » Une Commission (Éheu!) de cing membres, prise dans son sein, tous professeurs de littérature néerlandaise et spécialistes des plus experts, offre toutes garanties pour juger en parfaite connaissance de cause. Qu'importent ces détails aux particularistes de la Flandre occidentale! Se soumettre aux décrets d’une commission, la tradition Des- rochiste s’y oppose. Néerlandais du nord , néerlandais du sud, que nous voulez-vous? Une société de linguistique sud-néerlandaise, qu'est-ce à dire? [ls n’en veulent point entendre parler, au point que deux des leurs refusèrent carrément d'en faire partie. Ce refus collectif, daté du 18 février 1870, est trop significatif pour n'en point don- ner une Couple d'extraits : Un premier, en note origi- nale (1), comme échantillon du style et des expressions fantaisistes de ses auteurs; un deuxième, plein d’enseigne- ments, mais dont je m’abstiens de qualifier les patriotiques tendances. En voici la traduction : « Et croit-on de bonne foi que nous renierions notre langue, pour M'IMPORTE QUELLE LANGUE NOUVELLE , ÉTRAN- GÈRE, SOI-DISANT LANGUE MATERNELLE? Non pas! Nous aimerions mieux parler et écrire le français, nous préfére- rions mille fois être Français que Flamands de cette façon, ou de telle autre facon qu'on voudrait l'appeler (2). » Les 3 SE « Het greil en het vereert ons stijf van gebeën te worden naar » het nieuw Taalkundig Genootschap van Mechelen, noch en zouden wij » haperen er onze hulp en naam aan te geven, ware ’t niet dat wij met » eenig achterdenken liggen. » (2} « En denkt men dat wij onze taal gaan verloochenen voor cene, ’t zij welke, nieuwe, vreemde, zoo gezeide moedertaal. Neen wij! fransch zullen wij liever leeren lezen en schrijven, feansch zullen wij zijo, duizend- ( 224 ) phrases soulignées sont à l'adresse de la langue néerlan- daise; on la désigne suffisamment, sans toutefois la nom- mer. C’est là une réserve dont feu les Desrochistes se seraient médiocrement souciés. Ils disaient hardiment « langue bâtarde, schismatique et hérétique; langue de dominés, langue de gueux. » Ces injures, fortement pimen- tées, accusaient une brutale franchise dont il faut leur sa- voir gré. Or, les particularistes brugeois ne pensent guère autrement ` pour eux il n’est qu'une seule langue fla- mande, celle de la Flandre occidentale, celle qui sauve- garde la foi et la nationalité. En fait de points cardinaux sur la carte littéraire du pays, ils ne reconnaissent que ce terrible occident, dans lequel ils se barricadent avec une regrettable obstination ; oubliant que le midi c’est le jour, la chaleur, la lumière; que le couchant c’est le soir, le cré- puscule, la nuit; que le soleil se perd dans l'occident et que leur littérature séparatiste s’y dérobe de même. Veut-on connaître de plus près les tendances de l’école particulariste , il suffit d'ouvrir un des neuf volumes de la revue hebdomadaire Rond den heerd (Autour du foyer), qui lui sert d'organe et remplace fort agréablement le Waeren Belg d'autrefois (1). Dans chaque livraison — ` après indication de l’évangile du dimanche — la vie som- maire ou détaillée du saint de chaque jour en absorbe la moitié. La Rédaction se réserve ainsi du pain sur la planche; car avant que d’avoir brugeoisement flamandisé les Acta Sanctorum des RR. PP. Bollandistes — de vrais, maal eerder en liever, als op zulken wijze vlaamsch, of "1 zij hoe men °t heeten wil. » (1) Ronn nex meeRD, Een leer- en leesblad voor alle lieden. Brugge , 18653-1875. mo Mem ( 225 ) de rudes savants et point particularistes, ceux-là ! — elle en a pour bon nombre d'années. Sauf de temps à autre une rare nouvelle historique, quelque généalogie de famille noble, puis de-ci de-là un petit conte de la Mère-lOie, le reste est consacré à de pieuses légendes, à d'onctueuses biographies, justifiant axiome ` e La littérature flamande, pour être nationale, doit être catholique. » Je n’y trouve point à redire, j'applaudirais même à cet ascétisme litté- raire, n'était que le moule linguistique dans lequel il se trouve coulé — accouplement hybride de termes anciens et modernes — le défigure et en fait de l'hagiographie sans rime en prose et sans raison en vers. Je suis loin de prétendre que la Rédaction de Rond den heerd se soit proposé d’idiotiser ses abonnés en les con- damnant aux idiotismes à perpétuité; mais elle borna sin- gulièrement leur horizon littéraire, en les sévrant de toute communion intellectuelle avec la linguistique néerlandaise. Adoptant franchement cette dernière , elle leur eùt ouvert un écrin littéraire des plus chatoyants. Sans même citer aucun de nos hommes de lettres sud-néerlandais, que pourrait-on reprocher au Jochébed de Bogaers, au Joannes en Théagenes de Ter Haar, à l'Ahasvérus et au poëme sublime De Schepping de Ten Kalte; à toutes ces poésies bibliques hors ligne? Que devient la magistrale traduction du Dante, par Hacke van Mijnden et tant de chefs-d'œuvre de nos voisins du nord? Il n’y a pas jusqu'aux ouvrages de J.-A. Alberdingk Thym et de M. l'abbé Schaepman, doc- teur de la Faculté de Rome , — ces polygraphes éminents, ces catholiques par excellence! — qui ne figurent ipso facto à l'index littéraire brugeois. Que ne faisaient-ils aussi de l'archaïo-idiotisme, en s'inspirant du mignon patois de leur province? Le schisme occidental leur eût peut-être ouvert les bras. ( 226 ) Serait-ce par hasard la peur d’une propagande hérétique qui embastille les particularistes dans leur idiome d'outre- tombe? Je wose l'affirmer, mais dans cette triste hypo- thèse, je citerai volontiers l'opinion d'un orateur et écri- vain politique éminent, peu suspect d’hérésie, je mima- gine : « À ceux qui semblent redouter l'influence de la Hollande sur la Belgique par la réhabilitation de la langue flamande, ne pourrions-nous pas opposer la prétention de voir, au contraire, la Belgique agrandir le cercle de son influence du côté de la Hollande? ..... Notre littérature belge exerce déjà, aujourd'hui qu’elle se sert de la langue française, un certain empire en Hollande : témoin les diverses traductions qu'on y a publiées d'ouvrages belges. Quel ne pourrait pas devenir cet empire, si la langue fla- mande était encouragée et réhabilitée chez nous, si la litté- rature flamande pouvait introduire en Hollande les idées et les mœurs catholiques, dont elle serait la véritable expression? (1) » Or, les particularistes n’entendent pas de cette oreille : pour eux catholique ne signifie pas universel, ce qui appliqué à la littérature, rendrait celle-ci commune et intelligible à tous. Ils prétendent, au contraire, à une langue purement locale, en patois flamand occidental, inintelligible partout ailleurs, produisant une littérature à leur usage particulier, réduite en outre au seul genre religieux. Certes, les pompes du culte, ses majestueuses cérémonies, ses touchantes et poétiques légendes, ont été et seront encore largement exploitées en prose et en vers; mais ce genre mystique ne constitue qu'une seule des (1) P. De Decker, Du pélitionnement en faveur de la langue flamande. Bruxelles, 1840 CARS ( 227 ) nombreuses facettes de notre joyau littéraire. On peut, on doit exiger des autres genres le respect de la morale et du sentiment religieux; mais les exclure serait se condamner volontairement à une monotonie, brillante peut-être, mais à la longue ennuyeuse. L'ennui naquit un jour de l’uniformité. Les rédacteurs de Rond den heerd Font si bien com- pris, que sous la rubrique folâtre de Waar `t vliegen wilt, ils déposent au bas de chaque livraison un tas de variétés, bien faites pour délasser d’une lecture mystique. Tout naturellement la langue néerlandaise n'y est point épar- gnée ` on la traite d’ « estropiement officiel » et ses adhé- rents de « misérables détracteurs de leur propre flamand... n'écrivant d'autre - langue qu'une espèce de jargon de procès-verbal, qu'ils nomment parfois du néerlandais (1). » Joli, mais filandreux : les Desrochistes disaient tout cela en deux mots et « langue de singes » ou hurleurs de Vénus » était bien autrement corsé. — Ailleurs la rédaction fait rêver à Mathieu Laensberg, sous le portrait duquel on lisait dans les vieux almanachs : C'était un homme d'importance, Rempli d'esprit et de science, lorsqu'elle signale ses collaborateurs comme « des hommes de la bonne souche, de la vieille roche, de l'antique croyance, amplement dotés de vertus et d'intelligence (2). » (1) Roxb pen meern, 1870. « Officieel gerabraaksel, — Ongelukkige verachters van hun eigen vlaamsch... die geen tale schrijven of dat soorte van procés-verbalgeknoei daar ze altemets nederduitsch tegen zeggen. 2) Ronn peN neERD, 1872. « Mannen van `t rechte bedde, van den ouden eed en "1 oud geloove, rijkelijk versierd met deugden en met verstand. » ( 228 ) Autre part ces modestes écrivains font une profession de foi linguistique, dans laquelle le néerlandais reçoit d’af- freuses chiquenaudes : « Dieu est notre but.... Nous sommes les messagers, les missionnaires du Christ... Nous persistons à tenir haut et ferme l’étendard de notre. propre flamand occidental; nous voulons rester libres de toute bâtardise ; libres surtout de l'amour aveugle et dérai- sonnable qu'éprouvent ceux qui ramassent les immondices des rues, pour en salir le noble édifice du vieux flamand occidental (1). » Immondices des rues n’est pas mal: il y a là un mordant qui l'emporte de beaucoup sur le e langue de dominés » de la première croisade; seulement ces épithètes ne sont pas trop catholiques, ni même chré- tiennes, car elles manquent de charité. La rubrique Waar °t vliegen wilt se termine d'ordinaire par une série de locutions proverbiales, donnant le petit mot pour rire, le mot de la fin. On y trouve des réjouis- sances de cette force : « Monsieur, j'en suis fàchée, mais J'ai la sonnette un peu bruyante, disait Thérèse Forte- en-gueule; et en effet, quand elle part, cest comme la cloche de Belleghem (2). » N'est-ce pas délicat ? Parfois mème ces proverbes, renfermant des joyeusetés plus ou moins hasardées, présentent par la manière — occiden- tale sans doute — d’épeler certaines expressions, un sens (1) Roxb DEN HEERD, 1872, « God was ons einde ... Voor Christo (sic) zijn wij boden en zendelingen... Hooge en vaste blijven wij den ouden standaard van ons eigen weslvlaamsch houden; vrij willen wij blijven van alle verbastering; maar vrij ook van die blinde , onredelijke liefde dergenen die 't stratevaagsel oprapen en er mede d edel gebouw van : oud westvlaamsch komen ontsieren, » (2) Lo. 1871. e Mijuheere , ’t spijt me, ’k zijn een beetje luide van balle (bel) zei Therese Scheld-hem-uit, en inderdaad , als zij opgaat, ’t is gelijk de klokke van Belleghem. » ( 229 ) amphibologique dont le néerlandais — moins parcimo- nieux de voyelles — aurait grand soin de s'abstenir (1). Mais si tel est le contenu d'une revue, organe principal et quasi-Moniteur de ce particularisme flamand, que dire des productions littéraires des chefs de l’école ; depuis les œuvres de M. Gezelle, si vertement tancées par notre savant Confrère , M. Heremans, jusqu'aux poésies récem- ment publiées par M. De Bo? Passer ces dernières au crible de la critique nous mènerait trop loin. Contentons- nous d'affirmer — on me croira bien sur parole — qu'au point de vue de la linguistique, tout cela est parfaitement détestable : Abréviations impossibles, — changements à vue du sexe des substantifs, — monstrueux accouplement de verbes auxiliaires, — mise à la torture de verbes régu- liers (2), — germanismes plantureux (5), — inexplicables non-sens, — affreux salmigondis d’archaismes, de néer- landais et de plat-brugeois,— termes inventés à plaisir, ne se trouvant dans aucun lexique, pas même dans l'Idioticon de M. De Bo (4), — légion de péchés mortels contre la grammaire, la syntaxe et la prosodie, — impénitence finale de l'auteur, Quel bilan! U est le même pour tout le clan brugeois. Voilà comment les gue de la Flandre occi- (4) I». 1872. « Als gij een nageltje hebt, ze heeft zij altijd een gatje om "Lin te steken (2) Gedregen, ta, verbroken, verblonden, spees, beschon: gen, etc, au lieu de gedragen, verslagen, verbraken, verblind, spijsde, beschenen, ete. (5) Verwandeld (Allem. ps Schalte (Allem. Schatten), au lieu de veranderd, schaduw (4) Tels que eper a. RE onverdwaalsch, etc. Com- prenne qui pourra ( 230 ) dentale se créent une langue à part, mystique par son ascétisme, banale de vulgarité, stationnaire par ses ar- chaïsmes , progressive seulement par son orthographe et de telle façon tourmentée, au point de faire croire qu'ils ne savent ce qu'ils veulent. Il serait cependant opportun de sortir d’un semblable imbroglio macaronique, et de se poser franchement ancien ou moderne; car il est difficile d'être tout cela à la fois. Il s’agit de choisir. Veut-on être ancien? Qu'on ne le soit point à demi, mais en plein : archaïque des pieds à la tête. On station- nera, incrusté dans le AU: siècle; on composera de la prose, de la poésie frustes, en dépit du progrès qui — même en littérature — se fait jour de tous côtés; on marchera, — non, on marquera le pas — avec ces vieilles phalanges momiliées dont parle P.-L. Courier. « Ils ne songent pas, les bonnes gens qui veulent maintenir toutes choses intactes, qu'à Dieu seul il appartient de créer; qu'on ne fait point sans défaire; que ne jamais détruire, c'est ne jamais renouveler. » Et plus loin, désignant un de ces archaïologues : « le jour de la création, quel bruit n'eût-il pas fait? Il eût crié : Mon Dieu, conservons le chaos! (1). » Les exemples de pareilles vieilleries, renouvelées, comme le jeu de l'oie, des Grecs, ne nous font pas défaut. C'est ainsi qu'en France, Balzac publia ses Contes drôla- tiques (Ê), qui sont, pour le fond comme pour la forme, un essai Rabelaisien des mieux réussis. Quelques poésies, en vieux flamand , éditées en Allemagne, par Hoffmann von (1) P.-L. Courier, Lettres au rédacteur du Censeur. Ve lettre. (2) Les Contes drôlatiques, colligez ez abbayes de Tourraine, et mis en lumière par le sieur de Balzac, ete Paris, 1855. ( 251 ) Fallersleben dans ses Horæ Belgicæ, sans parler d'une douzaine de « Loverkens » du même auteur, furent de véritables trompe-lœil auxquels plus d’un érudit belge — M. Snellaert tout le premier — se laissa prendre. En Bel- gique, notre regretté Dautzenberg donna également des « Loverkens », au nombre de vingt-six (1); tandis qu’en Hollande, le poëte Ten Kate en fournit une série de vingt- (rois, ayant pour titre ` Elck wat wils (2). Mais ces imi- tations de nos grands maîtres d'autrefois, charmantes de naïveté et archaïques à s’y méprendre, ne forment qu'une brillante exception dans l'œuvre complète de ces éminents écrivains; el s'ils se donnèrent le luxe d’un savoir archaïo- logique, ils ne lui durent point exclusivement une réputa- tion littéraire justement méritée : elle lear fut bien autre- ment acquise par des travaux en bel et bon français, allemand ou néerlandais moderne. Pourquoi les particu- laristes flamands occidentaux ne poseraient-ils pas toutes ces exceptions comme règle permanente? HU leur suffirait d’imiter le style et l'orthographe du prince de leurs poëtes anciens, de Van Maerlant, pour faire du provincialisme et produire des pastiches littéraires, à la grande délectation de quelques érudits emparcheminés, mais hors de la por- tée intellectuelle du commun des lecteurs. Ce serait le non plus oulire de l'isolement séparatiste. Veut-on, au contraire, faire du provincialisme moderne ? Qu'on écrive alors comme parle le peuple. Les modèles du genre fourmillent partout; il n'y a qu'à étendre la main pour les saisir à pleine poignée : A l'étranger, depuis (1) J.-M. Daurzexeerc, Verspreide en nagelatene Gedichten. Brussel, 1869 (2) J.-J.-L Tex Kate, Dichtwerken. Ze deel. Leyden, 1865. D ( 252 ) Jacques Jasmin et Frédéric Mistral, qui dotèrent la France de leur poésie provençale (1), jusqu'aux nombreux ou- vrages de Fritz Reuter, ce prosateur humoristique et Klaus Groth, ce leader de la poésie particulariste bas-alle- mande, dont le « Quickborn » obtint les honneurs de plu- sieurs éditions (2). La Belgique n’est pas moins bien par- tagée, depuis le dialecte de Gand, représenté par Jellen en Mietje (3), jusqu'à celui d'Anvers, dont notre éminent romancier et honoré Confrère M. Conscience nous livra un échantillon rempli d'humour (4). Je ne parle que pour mémoire de ces milles feuilles volantes, pamphlets, libelles, salyres, complaintes et chansons populaires ou populacières, qui pullulent dans l'idiome de chaque loca- lité. MM. les particularistes devraient, à ce compte, écrire dans le dialecte parlé de la Flandre occidentale : mais une citation de M. Lebrocquy rompt fort à propos le charme de cette utopie : « Dans la Belgique flamande , pour la prononciation, on compte autant de catégories qu'il y a de provinces; puis ces catégories se subdivisent en trois ou quatre clas- ses encore pour chaque province en particulier. De plus, le peuple — et sous le rapport de la langue parlée, tout le monde est peuple dans les contrées flamandes — reste partout asservi, de Taxen de tous, à une prononciation des - (1) J, Jasmx, Las Papillétos. Paris, 1860. — F. Misrna, Mirèio, 5° édi- tion. Paris, 1868, (2) Fritz Reuter, Saemtliche Werke, 13 B. Wismar, Rostock u. Lud- wigslust, 1868. — Kziaus Grots, Quickborn, 2 vol., Leipzig, 1871. (5) JeLLe EN Muer, Nieuwe uitgave, naer e nagelatene verbete- ringen en Serindit iaoei van den schryver. Gend (4) Voir pe Noonpsran. 1° deel, 3° jaargang. Lo 1442: DE Geest, Eene oude sprookvertelling, door H. CONSCIENCE. s sm ( 233 ) plus vicieuses. Maintenant, au milieu de toutes ces langues cacophones, laquelle choisir pour règle dominante (1)? » Une langue écrite uniforme et commune à toutes nos provinces, la langue néerlandaise en un mot, telle que tous les écrivains de quelque valeur lont généralement adoptée , serait la seule réponse plausible à la question de M. Lebrocquy. Mais les particularistes n'acceptent pure- ment et simplement ni le néerlandais moderne, ni le pa- tois local, ni la langue archaïologique : leurs œuvres ne sont pas plus des pastiches des maîtres du AUT: siècle, qu'elles ne sont une reproduction fidèle du dialecte bru- geois actuel, dont Willems, dans son Belgisch Museum et après lui Firmenich-Richartz, dans le supplément à son ouvrage Germaniens Vôlkerstimmen (2), donnèrent de remarquables spécimens. Non, les particularistes fabri- quent un mélange hybride de bon néerlandais et de pa- tois brugeois, dans lequel papillotent des termes en vieux flamand démodé, agrémenté, en outre, d'expressions fan- laisistes, dont ils sont seuls, sans doute, à comprendre la Signification. Les chefs de cette école, pour la plupart professeurs de collége, — ils y enseignent, peut-être bien, leurs pe- tites excentricités, — dédient parfois ces produits d’une plume capricieuse « à leurs élèves studieux. » Eu égard au « magister dixit — magistri ad exemplar, » — ils leur font là un cadeau bien dangereux : car si tous s’exer- cent à imiter ce patois panaché, ce mépris calculé de la grammaire et de la syntaxe, chacun écrivant dans le dia- < (1) P. Lesrocouy. Ut supra. (2) J. M. Finmexicu-RicuarTz, Germaniens Völkerstimmen. Anhang 3+ Band. Berlin, 1863. ( 234 ) lecte de son clocher ; et pour peu que lesautres provinces suivent ce bel exemple, n'ayant pour tout bagage linguisti- que, pour tout guide littéraire, qu'un Idioticon local: pa- reille confusion, renouvelée de Babel, justifierait le dire de ceux qui traitent le flamand d’abominable patois. Ce serait tout à fait cela, ct loin de se faire comprendre de son voisin, on finirait par ne plus s'entendre soi-même. Non, en tout pays civilisé, en France comme en Alle- magne, en Belgique comme aux Pays-Bas, il existe à côté d'une grande diversité d'idiomes parlés, une langue écrite commune à lous, ayant sa grammaire, sa syntaxe, ses règles invariables; et je ne vois pas que l'unité linguis- tique ait nui à la religion on compromis la nationalité d'aucun de ces peuples. Manzoni, le plus grand des écri- vains de l'Italie moderne et dont les particularistes fla- mands ne contesteront ni l'esprit religieux ni le patrio- tisme, rêva longtemps pour son pays cette homogénéité tant désirable ` « Pendant que d’autres poursuivaient l’anité de l'Italie par la politique et dans les ténébreuses menées des sociétés secrètes...., Manzoni, plus profondé- ment patriote que pas un, travaillait à commencer l'unité italienne par la langue. Ce fut le rêve et le labeur de ses silencieuses dernière années.» Il poursuivit « avec toute l'énergie d’une intelligence qui ne vieillit pas, l'unification de l'Italie intellectuelle et littéraire. Je ne sais s’il n’y tenait pas plus qu’à l’autre (4). » Or, c'est par cette unité de langue écrite que fleurit notre littérature nationale, comprise et estimée de tous, depuis la Flandre française — et passant par la Belgique (1) Le Correspowpaxr, Nouvelle série, t. LVIL, 10 janvier. Paris, 1874. ( 255 ) et la Hollande — jusqu'aux confins du Rhin bas-allemand. On n'en dira jamais autant des particularistes de la Flan- dre occidentale. Peut-être bien n’aspirent-ils pas à une publicité aussi étendue: bornant leur ambition à un étroit esprit de clocher; emmuraillant force chinoiseries dans les limites de leur Occident; rêvant à l'instar des vieux prè- tres d’Isis ou des lettrés du Céleste Empire, une langue flamande à leur usage particulier et à celui d’une petite caste d'initiés. En effet, pareille mixture linguistique ne sera jamais goûtée au delà de l'officine brugeoise où elle fut triturée; elle touchera tout au plus aux confins de l'arrondissement ` passé la province, les contrées voisines n'y comprendront plus rien. Cette considération suffirait à elle seule pour condamner la recette, aussi bien que la manière de s’en servir. ( 236 ) CLASSE DES BEAUX-ARTS. Séance du A février 1874. M. N. De Keyser, directeur, président de l'Académie. Sont présents : MM. L. Alvin, L. Gallait, G. Geefs, A. Van Hasselt, J. Geefs, Ferd. De Braekeleer, C.-A. Fraikin, Éd. Fétis, Éd. de De Busscher, Alph. Balat, Aug. Payen, le chevalier L. de Burbure, J. Franck, G. De Man, Ad. Siret, J. Leclercq Ernest Slingeneyer, Alex. Robert, F.-A. Gevaert, Ad. Samuel, membres; Éd. De Biefve, correspondant. M. R. Chalon, directeur de la classe des lettres, et M. Éd. Mailly, correspondant de la classe des sciences, assistent à la séance. M. le directeur annonce à ses confrères que M. Quetelet ne peut venir remplir ses fonctions de secrétaire perpétuel, par suite de son état de santé. = CORRESPONDANCE. M. Balat exprime de vive voix ses remerciments pour la nouvelle marque de sympathie dont il a été l'objet par son élection de directeur pour l'année 1875. 4 : À 3 Kap ( 237 ) — M. le Ministre de l'intérieur transmet une expédition d'un arrêté royal en date du 21 janvier dernier, approuvant l'élection de M. Adolphe Samuel, en qualité de membre titulaire de la section de musique. — Íl est donné lecture des lettres de remerciments de MM. Samuel, Terry, Radoux, Becker, Frith, Monteverde, François, Stang et le vicomte H. de Laborde, nouvelle- ment élus. M. Stang, en adressant ses remerciments, offre une épreuve d'artiste de sa belle gravure du Sposalizio.—Remer- ciments. ÉLECTIONS. La classe donne son approbation à la liste de candida- tures présentées par la section d'architecture, pour la place d’associé vacante par le décès de M. Louis Forster, de Vienne. CAISSE CENTRALE DES ARTISTES BELGES. M. Alvin, en qualité de trésorier de la caisse centrale des artistes, communique à la classe le rapport qu'il a fait au comité sur la situation financière de l'institution. H s'exprime en ces termes : e Un fait important s’est accompli dans le cours de l'année qui vient de s'écouler. Alarmé du bruit qui s'était répandu que le Gouvernement avait l'intention de conver- tir en 4 p. e, le 4 Us belge, le comité crut devoir recourir Qme SÉRIE, TOME XXXVII. 16 ( 238 ) à son conseil judiciaire , a par un avis motivé daté du 22 février 1873, reconnut à l'administration de la caisse le droit de placer son avoir en 4 !/2 du Crédit communal et approuva toutefois l’idée indiquée par le comité de sou- mettre la situation à l'examen du département des finan- ces. Ce qui fut fait par lettre datée du 25 du même mois. « Le Ministre des finances, entrant dans les vues du comité de la caisse des artistes, et la classe des beaux-arts, dans sa séance du 5 avril suivant, ayant approuvé le projet, ce haut fonctionnaire voulut bien charger son département de l'opération. L'avoir de la caisse, soit une somme de 176,700 franes, capital nominal, fut, en conséquence, vendu à la Bourse de Bruxelles. Le produit de la vente fut réappliqué par lachat d’un capital nominal de 174,000 francs du 4 ip. c. du Crédit communal. Une somme de fr. 167 95 c, résultant du décompte, a été versée entre les mains du trésorier de la caisse des artistes et figure au nombre des recettes de l'exercice. » L'opération a donc occasionné à notre institution une perte de fr. 2,532 07 c. La conversion de 4 1/ en 4 p. €. lui eût fait éprouver une réduction d’un neuvième de son avoir. Les craintes qui ont provoqué ce changement de placement ne se sont pas encore réalisées; mais plus le gouvernement tardera à opérer la conversion prévue, plus nous aurons à nous louer de la prévoyance qui nous à - conseillé de la devancer : car la réduction devant être en rapport direct avec le montant des fonds placés, la perte à subir par notre caisse se fût augmentée dans la proportion de l'accroissement de notre avoir. » Le Roi vient de faire à la caisse centrale des artistes un don de 1,000 francs, à l’occasion de la visite que Sa Majesté, accompagnée de la Reine, a faite à l'exposition ( 239 ) de la galerie Everard. Le produit des entrées à cette expo- sition a été de 2,000 francs environ. État général des recettes et des dépenses. — ANNÉE 1873. 1. — RECETTES. Gär . Encaisse au 31 décembre 4872 . . . fr, 394 88 . Cotisations bu TA A EE 4,568 » 3. Expositions (?) . net eeh AT 2,050 » 4. Intérêts des fonds TA UN a Bac Ëer 3 7,980 75 5. Décompte gi de la conversion 6 a Ds 467 93 6. Don de M. Ad. Sir e G 200 » Total des recettes. . . fr, 12,361 56 H. — DÉPENSES. 1. Frais d'administration et de perception . . . fr. 337 » 2. Pensions annuelles . A ERAT E 2,800 » 3. Secours temporaires 150 » 4. Achat de rente à 4 Us Š 8,812 24 5. Encaisse au 31 E d 1873 Total des dépenses. . . .fr. 12,361 56 IH. — RÉSUMÉ. 4. Avoir, y compris l’encaisse. . ve, .fr. 180,762 32 1 2. Fonds placés au Crédit eege 4 e te ven EE A 3. Intérêts annuels des fonds placés . 8,122 50 4. Progression sur l'année riens: en principal. 5,800 » 5. ld. id. id en intérêts . 261 » La classe a voté des remerciments à M. Alvin pour la manière dont il continue à gérer les intérêts de la caisse. mener (1) Dans ce chiffre figure une somme de 69 francs, arriéré de 1872 (2) Le produit de l'exposition des beaux-arts de Bruxelles, en 1872, n’a été encaissé qu’en 1873; il s'élève à 2,000 francs; le reste est un don de la Société des Aquarellistes. 1 5) La conversion du 4 1/2 belge en Crédit communal a laissé un reliquat de | fr. 163 93 cs. (+) Cette même opération a réduit l'avoir placé de = caisse de 2,700 francs. La perte totale a été, en conséquence , de fr. 2,532 07 © EEN e ( 240 ) COMMUNICATIONS ET LECTURES. D'après l'ordre du jour de la séance, la classe était appelée à s'occuper du projet relatif aux pensionnaires du gouvernement à Rome, adopté déjà en principe dans la réunion du 4 décembre dernier. Unediscussion préalable s'ouvre sur ce projet et donne lien à diverses observations au sujet desquelles la classe sera appelée à se prono définitivement dans une réunion ultérieure. OUVRAGES PRÉSENTÉS. Van Beneden (P.-J.). — Un mot sur la vie sociale des ani- maux inférieurs. Bruxelles, 1875; broch. in-8°. Morren (Éd.).— La Belgique teste XXIII année. Liége, 1875; un vol. in-8°. — Clusia. Recueil d'observations de téra- tologie végétale par M. Ch. Morren. Liége, 1852-1874; un vol. in-8°. Académie royale de Belgique. — Comptes rendus des séances de la Commission royale d'histoire, IV* série, tome Ir, 3° et Ar Bulletins. Bruxelles, 1875; in-8°. — Collection de Chro- niques belges inédites : Chronique de Jean des Preis, dit d'Outremeuse, publiée par A. Borgnet, tome HI. Bruxelles, 1875; 1 vol. in-4°. Pimentel (J. Guldino). — Marteau à vapeur à double et à simple effet. — Perfectionnement apporté au marteau à va- ( 241 ) peur à double et à simple Sg — Nouveau système de méca- nisme de distribution applicable aux locomotives à cylindres intérieurs. Bruxelles et Liége; 5 broch. in-8°. Firket (Ad.). — Carte de la production, par commune, des carrières de la Belgique pendant l’année 1871; — Carte de la production , de la consommation et de la cireulation des mine- rais de fer, de zine, de plomb et des pyrites en Belgique pen- dant l'année 1871; 2 feuilles in-plano. Société royale de botanique de Belgique. — Bulletin, LAN", n° 4 et 2. Bruxelles, 1875-1874; 2 cah. in-8°. Commissions royales d'art et d'archéologie. — Bulletin, 12° année, n° 9 et 10, Bruxelles, 4873 ; cah. in-8. Commission royale pour la publication des anciennes lois et ordonnances du pays. — Recucil des ordonnances des Pays- Bas autrichiens, 5° série, 1700-1794. Tome UI, par M. Ga- chard. Bruxelles, 1875; in-folio. Bulletin des archives d'Anvers. — Tome Viz, 4"° livraison. Anvers; cah. in-8°. Royaume de Belgique. — Recueil consulaire, tome XIX, 1875. Bruxelles; vol. in-8°. Musée de l’industrie de Belgique. — Bulletin, 55° année, janvier 1874. Bruxelles-Paris, 1874; cah. in-8°. Le Bibliophile belge, 8° année, liv. 9 à 12. Bruxelles, 1875; eah. in-8°, Lenormant (François). — Les premières civilisations. Études d'histoire et nes Tomes 1 et 2. Paris, 1874; 2 vol. in-$°. Société académique de Maine-et-Loire, à Angers — Mémoires, tome XXV à XXVIIL. Angers, 4871-1872; 5 vol. in-8?, Société linnéenne du nord de la France, à Amiens. — Bulletin, n°° 5 et 6, Ire année, 1872; n°* 7 à 16, 2° année, 1875. Amiens; 12 feuilles in-8°. Académie des sciences, lettres et arts d'Arras. — Mémoires, 2° série, tomes IV et V. Arras, 1870-1875; 2 vol, in-8°; — ( 242 ) Histoire de l’Académie d'Arras, par M. le chanoine E. Van Drival, secrétaire général. Arras, 1872; vol. in-8°. Société d’Émulation du Doubs, à Besancon. — Mémoires, IV: série, 6° volume, année 1870-1871. Besançon, 1872; vol. in-8°. Escort des sciences, belles-lettres et arts de Besancon. — Séances publiques du 24 août 1872, du 50 janvier et du 25 août 1875. Besançon, 1872-1875 ; 5 cah. in-8°. Société linnéenne de Bordeaux. — Actes, troisième série, tome VII, 2° partie. Bordeaux, 1872; vol. in-8°. Société d’Émulation de Cambrai. — Mémoires, tome XXXI, 2 et 5° parties; tome XXXII, Arr partie. Cambrai, 1871-1875; 3 vol. in-8°. Société dunkerquoise pour l’encouragement des sciences, des lettres et des arts. — Mémoires, tome XVI°, 1870-1871. Dunkerque; vol. in-8°, . Comité flamand de France, à Lille. — Bulletin, tome VI, n” 7 et8. Lille, 1875; in-8°. Société nationale havraise d'études diverses. — Recueil des publications, 57° et 38° années, 1870-1871. Le Havre; 2 vol. in-8°. Société d'anthropologie de Paris. — Bulletin, tome VHI, 2° série, 5° fase. Paris, 1874 ; in-8°. Société de biologie de Paris. — Comptes rendus des séances et mémoires, V° série, tomes 2 et 5°, Paris, 1872-1875 ; 2 vol. in-8°. Société archéologique, historique et scientifique de Soissons. — Bulletin, tome Uz, 2° série. Soissons, 1868; vol. in-8°. Société d'agriculture de Valenciennes. — Revue agricole, tome XX VI, 25° année, 12° livr. Valenciennes, 1875; in-8°. Indicateur de l'archéologue, juin et juillet 4875. S'-Ger- main; in-8°. Justus Perthes’ geographische Anstalt zu Gotha. — Mit- theilungen, 20. Bd., 1874, I. Gotha ; cah. in-4°. K. bayer. Akademie der Wissenschaften zu München. — ( 245 ) Abhandlungen : math.-phys. Classe, XI Bdes, 2. Abth.; — histor, Classe, XII" Bdes, 4. Abth.; — philos.-philol: Classe, XI Bdes, 4. Abth. Munich, 1875; 5 cah. in-4°. K. Sternwarte zu München. — Annalen, XIX. Bd. Munich, 1875 ; in-8°. K. K. Akademie der Wissenschaften zu Wien. — Sitzung der math.-naturw. Classe, X. Jahrg., 1875, n° 28, 29-50. Titel en Tafel. Vienne, 1875 ; 4 feuilles in-8°. — Sitzung der math.-naturw. Classe, Jahrg. 4874, n“ 1, 2, 5. Vienne, 1874; 5 feuilles in-8°. K. K. Universität zu Wien. — Uebersicht, Jahr 41873- 1874. Vienne, 1874;.2 cah. in-4°. Internationale meteorologen-Congresses zu Wien. — Bericht über die Verhandlungen. Vienne, 1873; cah. gr. in-8°. Archiv der Mathematik und e LV. Theil, 4. Heft. Greifswald, 4873; in-8°. Osio (Luigi). — Documenti diplomatici tratti dagli archivj milanesi, vol. HE, parte 1. Milan, 1875; in-folio. Siacci (F.). — Sur le problème des trois corps (extrait des comptes rendus de l'Académie des sciences de Paris); in-4°. Accademia pontificia de ` Nuovi Lincei di Roma. — Atti, tomo II, anno IHI (4849-1850). Rome, 1875; in-4°. Gyldén (Hugo). — Ableitung der declinationen aus den am verticalkreise der Pulkowaer Sternwarte in den Jahren 1842- 1849; in-4°; — Om summation af periodiska funktioner; in-4°; — Kort meddelande om integration af vissa; —- Om berakningen af solvarmets relativa intensitet pä olika punkter af Jordytan; — Om atmosferens höjd vid olika ärstider; — Formler och tabeller för beräkning af fyrars lysvidd; — Om stjernkatalogen i Lacaille's « astronomiae Fundamenta » ; — Antydningar om lagbundenhet i stjernormas rorelser. Helsing- fors; 7 cah. in-&. Società reale di Napoli. — Accademia delle Scienze en e matematiche , atti, vol. V; — Rendiconto, anni IX, X, XI. Naples, 1869-1875 ; 4 vol. in-8°. ( 244 ) Luis (Giuseppe). — se SN studio delle burrasche del clima di Roma. Rome, 1875; Revista scientifico RUSSE di Firenze. — Anno V, décembre 1874; anno VI, gennaio 1874. Florence, 1875; 2 cah. in-8°. Barboza Du Bocage (J.-V.). — Notice sur l'habitat et les caractères des Macroscincus coctei. Lisbonne, 1875; in-8°. Revista de Portugal e Brazil , n° 6, 7,8. Lisbonne, 1874; 5 cah. in-4°. Instituto historico, geographico e ethnographico do Brasil. — Revista trimensal; tomo XXXV, parte primeira (1° et 2° tri- mestres), tomo XXXV, parte segunda: Rio de Janeiro, 41872- 4875; 5 cab. in-8°. Institut Égyptien. — Bulletin, année 1872-1873, n° 12. Alexandrie, 4875; vol. in-8°. Royal geographical Society of London.— Journal, vol. XL (1872). Londres, 1875; in-8 Meteorological Society of London. — Journal, vol. I, n° 7. Londres; in-8°. Literary and Philosophical Society of Liverpool. — Pro- ceedings , sixty-second session, 1872-1873. Liverpool, in-8°; — Address, october 6 th. 1875, by Albert J. Mott. Liverpool, 1875 ; in-8°. The Penn Monthly, vol. IV, n° 47-48. Philadelphie ; 2 ak in-8°. Draper (Henry). — On diffraction spectrum photography. New-Haven , 1875; in-8°. Department of the interior, at Wa ashington. — Bulletin of the United States geological and geographical Survey of the territories, n° 4. Washington, 1874; in-8°. (245) L'ACADÉMIE ROYALE DES SCIENCES, DES LETTRES ET DES BEAUX-ARTS DE BELGIQUE À ÉPROUVÉ LE PROFOND REGRET DE PERDRE, LE 17 FÉVRIER 1974, SON SECRÉTAIRE PERPÉTUEL, M LAMBERT-ADOLPHE-JACQUES QUETELET, MEMBRE TITULAIRE DES TROIS CLASSES, GRAND OFFICIER DE L'ORDRE DE LÉOPOLD, ETC., ETC., ETC. L Académie. voulant donner à la mémoire du défunt un témoignage tout particulier d'estime et de considération, a décidé que mention spéciale des funérailles et insertion des discours prononcés Des vi les comptes rendus des séances du mois de mars 1874 Le 20 février 4874 ont eu lieu les funérailles de M. Adol- phe Quetelet, directeur de l'Observatoire royal de Bruxelles, secrétaire perpétuel de l'Académie royale de sciences, des lettres et des beaux-arts de Belgique, président de la Com- mission centrale de statistique du royaume, vice-président E? 2% SÉRIE, TOME XXXVII. 17 (246 ) du conseil d'administration de la Bibliothèque royale de Bruxelles, membre honoraire de l’Académie royale de médecine de Belgique, ancien professeur à l'École mili- taire , etc. M. Quetelet était correspondant de la plupart des sociétés scientifiques, littéraires ou artistiques du pays et membre-associé d’un grand nombre de sociétés de l'étranger (1). (1) Parmi les sociétés belges nous citerons particulièrement : Anvers, Académies des beaux-arts et d'archéologie ; Bruxelles, Sociétés de flore , weg d'agriculture et des sciences médicales; Gand , Société des beaux- e s; Liége, Société royale des sciences, Société d’émulation et Institut archéologique; Mons, Société des sciences (dont il était vice- président d'honneu Les pr Sen sociétés ou institutions étrangères dont faisait partie M. Quetelet , étaient : Instituts de France, de Genève , de Luxembourg , de Milan, de Venise, d'Égypte, d’Albany et de Rio de Janeiro; Sociétés royales de Londres, Édimbourg, Copenhague, Goettingue, Prague, Gothembourg et Naples; cadémies des sciences d'Amsterdam, Berlin, Besançon, Boston, Dresde, Pesth, Rome, Rouen, St-Pétersbourg, San-Francisco, Stockholm, Turin , Voice Vienné et Ú jdine; Universités de Bonn, Breslau, Erlangen, Kasan, Kharkoff, Koenigsber,, Munich et Santiago; Académies et Sociétés de médecine de Copenhague, Heidelberg, Munich, Paris, Rio de Janeiro, Turin et Wurzbourg; Sociétés de statistique de Dresde, Londres, Man- chester, Marseille et Paris; Sociétés géographiques de Darmstadt, Francfort , Mexico, New-York. St-Pétersbourg et Vienne; Sociétés météo- rologiques d'Édimbourg, Londres, Paris et Vienne; Sociétés anthropolo- giques de Berlin , SR i kasies et Vienne; Sociétés philosophiques e Manchester et de Philadelphie; Sociétés de physique d'Erlangen, Francfort, Genève, Koenigsberg et Rotterdam; Société astronomique, Institution royale et Institut des Actuaires de Londres; Académie d'his- ` toire de Madrid; Société impériale des naturalistes de Moscou; Société philomatique de SE (ite géologique et Société z0ologico-bota- nique de Vienne; Sociétés d'Angers, Arezzo, Batavia, Bayeux, Bogota, Bois-le-Duc, os. aa Cherbourg, Gem Dunkerque, Fulda, Harlem, Hartford, Lausanne Lille, Neuchatel, Ratisbonne, Sr - Ga, St-Omer, Strasbourg gedet. etc., ete , etc. ( 247 ) Une nombreuse assistance s’est réunie vers 40 heures et demie dans le vestibule de l'Observatoire, où le corps 8 était placé au milieu d’une chapelle ardente. L'Académie royale de Belgique y était représentée tout entière : les membres des trois classes avaient été informés par circu- laire que la Compagnie assisterait en corps aux obsèques de son regretté secrétaire perpétuel. On remarquait aussi parmi les assistants les membres de la Commission cen- trale de statistique; des députations de l’Académie royale de médecine, des deux universités de l'État et des deux universités libres; une députation du Cercle artistique et littéraire dont M. Quetelet avait été l’un des fon- dateurs et longtemps le président; M. Jules Robijns, délégué pour assister aux funérailles par la Société de sta- üstique de Paris; M. le comte de Kerchove, bourgmestre de la ville de Gand, où naquit M. Quetelet; M. de Balan, Ministre plénipotentiaire de Prusse à Bruxelles; M. John Savile Lumley, Ministre plénipotentiaire d'Angleterre; M. le chevalier de Britto, Ministre plénipotentiaire du Brésil; des membres du Sénat et de la Chambre des re- présentants; M. Stevens, secrétaire général, et M. Belle- froid, directeur général au Ministère de l’intérieur, ete., ete. I. le Ministre de l’intérieur, en faisant adresser à M. Ernest Quetelet, fils de l'honorable défunt, ses com- pliments de condoléance, avait exprimé ses regrets de ne pouvoir, dans l'état inquiétant de santé où se trouvait sa fille, assister à la cérémonie. M. Malou , Ministre des finances et M. le comte d’Aspre- mont-Lynden, Ministre des affaires étrangères, assistaient également aux funérailles. M. le lieutenant général P. Du Pont aîné, aide de camp du Roi, représentait Sa Majesté; il était accompagné de ( 248 ) M. le capitaine d'artillerie T. Brewer, officier d’ordon- RB rence. M. le comte T.-L. d’Oultremont, lieutenant au régiment des guides, officier d'ordonnance de Mer le Comte de Flandre, représentait Son Altesse Royale. Les honneurs militaires devaient être rendus par les troupes d'infanterie composant la moitié de la garnison, auxquelles s'était jointe l’École militaire, qui avait compté longtemps M. Quetelet au nombre de ses professeurs. Six discours ont été prononcés avant la levée du corps : au nom de l’Académie royale des sciences, des lettres et des beaux-arts, par M. N. De Keyser, président actuel de la Compagnie; au nom de l'Observatoire, par M. Éd. Mailly, ancien aide à cet établissement et correspondant de la classe des sciences de l’Académie ; au nom de la Commission cen- trale de statistique du royaume, par M. Putzeys, membre de celte commission et secrétaire général du Ministère de la justice; au nom du conseil d'administration de la Bi- bliothèque royale, par M. le baron Kervyn de Lettenhove, président de ce conseil et membre de la classe des lettres de l’Académie; au nom de l’Académie royale de médecine, par M. le docteur Tallois, secrétaire-trésorier de cette Aca- démie ;au nom de l'École militaire, par M. le colonel du génie Liagre, commandant de cet établissement et membre de la classe des sciences de l’Académie. Discours de M. N. De Keyser, président de l’Académie royale des sciences, des lettres et des beaux-arts de Belgique. « La Belgique vient de perdre sa plus incontestable illustration dans le domaine des sciences, celui de ses sa- vants qui avait su s’acquérir la réputation la plus univer- f t f | | ( 249 ) seile : le nom qu'il portait représente, à l'étranger, la Bel- ‘gique intellectuelle. R » L'Académie royale, qui se plaît à se reconnaître comme la création, comme l’œuvre préférée de notre confrère, ne saurait entourer de trop d’hommages cette tombe où va descendre la dépouille mortelle de son secrétaire perpétuel, de celui qui, pendant einquante-quatre ans, a pris part à ses travaux, qui, pendant quarante années, les a dirigés et a gouverné sa petite république de façon à lui assurer, au dehors, une renommée solidement établie. » Lambert-Adolphe-Jacques Quetelet est né à Gand le 22 février 1796. A l’âge de 18 ans, il était déjà professeur de mathématiques au collége de sa ville natale; cinq ans plus tard , il occupait la même chaire à l’athénée royal de Bruxelles, position qu'il échangea , en 1898, contre celle de directeur de l'Observatoire, établissement qui venait d'être fondé et dont il avait dirigé l'installation. Il waban- donnait point pour cela l’enseignement oral; indépendam- ment des cours d'astronomie qu'il avait ouverts à Observa- loire même, il enseigna cette science ainsi que la géodésie à l'École militaire dès la création de cette institution. » Membre de l’Académie des sciences et des lettres de Bruxelles depuis le 4°" février 4820, il a présidé la Com- pagnie du 5 mai 1832 jusqu’au 22 novembre 1834, époque à laquelle d fut nommé secrétaire perpétuel. » Il eut une part prépondérante dans la réorganisation qui, à la fin de 1843, compléta l'Académie par l'adjonction d'une classe des beaux-arts. Les statuts confèrent au se- crétaire perpétuel le droit de siéger dans chacune des trois classes comme membre titulaire; Quetelet aurait pu se passer de cette disposition ; il méritait à juste titre, par la variété de ses connaissances, un siége dans toutes les trois : ( 250 ) si les sciences exactes avaient été l'étude principale de sa vie, les lettres étaient loin de lui être étrangères; il s'était: même essayé à la poésie et il avait conservé du commerce de la muse un style facile, élégant et toujours correct qui rehausse le mérite de ses écrits scientifiques ; il a, d’ailleurs, produit de nombreux travaux qui rentrent dans la spécia- lité des sciences morales et politiques. Sa place était encore marquée dans la section des sciences et des lettres dans leurs rapports avec les beaux-arts; ses minutieuses recher- ches sur les proportions du corps humain, ses proposi- tions ayant pour objet l’élucidation de divers points de l’histoire artistique de la Belgique ont prouvé son apti- tude dans cet ordre d'idées. - » Pour rappeler les services que Quetelet a rendus à l'Académie, il faudrait refaire l’histoire complète de la Compagnie, depuis le jour où il a pris les rênes de son gou- vernement; il les a tenues d’une main ferme, s’identifiant avec l'institution au point que ni l’âge ni les infirmités n'ont jamais pu les lui faire abandonner un seul instant. On peut dire aujourd'hui qu’il est mort au champ d’hon- neur : il siégeait encore à l’une des séances de ce mois. » La variété de ses connaissances et sa grande expé- rience lui valurent de nombreuses missions du gouverne- ment; il a siégé dans presque toutes les commissions d'État qui, depuis un demi-siècle, ont été appelées à résoudre les questions d'enseignement, d'organisation scientifique, de statistique. Maintes fois, ses collègues lui ont déféré la présidence, notamment dans la Commission centrale de statistique, dont il dirigea les travaux pendant nombre d’années. Les Congrès scientifiques, dans quelque pays qu’ils se réunissent, tenaient à honneur de lavoir comme représentant de la science belge. (251) » Je n’essayerai point d'énumérer les distinctions hono- rifiques que lui décernèrent les souverains de presque toutes les nations civilisées, les distinctions plus flatteuses encore qu’il tenait de ses confrères en sciences de presque toutes les Académies du monde. » Tous ces honneurs, qui peuvent rehausser la pompe des obsèques, disparaitront bientôt; ils laisseront subsister des monuments plus durables : ces œuvres si nombreuses et si importantes que la critique étrangère a accueillies avec respect et reconnaissance, que sa patrie n’oubliera point. » D’autres souvenirs encore subsisteront dans tous les cœurs. [| n’est aucun de ses confrères, surtout parmi ceux qui lont connu avant que la maladie eùt altéré ses bril- lantes facultés, il n’en est aucun qui ne conserve dans sa mémoire les souvenirs des qualités aimables que l’homme du monde savait déployer lorsqu'il lui était permis de dépouiller l'enveloppe du savant. > Adieu, cher confrère; au nom de l’Académie dont tu as été l’âme pendant un demi-siècle, je dépose sur ta “tombe hommage de nos regrets. » D’autres voix rappelleront dans leurs détails les diverses phases de ta brillante carrière, ma tâche, aujour- d’hui toute pénible, mais toute d'affection , doit se borner à l’adresser ce suprême adieu. » Discours de M. Éd. Mailly, ancien aide à l'Observatoire royal de Bruxelles. » Je n'avais aucun titre officiel pour prendre la parole dans cette triste cérémonie; mais je connaissais M. Que- telet depuis un demi-siècle; j'ai été son élève à l’athénée (232) royal de Bruxelles et, pendant trente-sept ans, j'ai eu part à tous ses travaux; même après que l'état de ma santé meut forcé de renoncer à mon emploi à l'Observatoire, je conservai mon bureau dans cet établissement, où s'était écoulée ma vie,et dont le fondateur m'avait généreusement recueilli à ma sortie de l’université. 3 > C’est done comme ancien aide à l'Observatoire royal que je viens solliciter un instant votre attention pour vous entretenir de l'illustre défunt. » Lambert-Adolphe-Jacques Quetelet était né à Gand, le 22 février 1796. » Dès l’année 1814, nous le trouvons professeur de mathématiques au collége de sa ville natale, Au mois de juillet 1819, il est promu au grade de docteur en sciences de la nouvelle université fondée à Gand par le roi Guil- laume : la dissertation qu’il publie à cette occasion le fait appeler à l’athénée royal de Bruxelles et lui ouvre les portes de l’Académie des sciences et belles-lettres, dont il est élu membre le 4° février 4820, sur la présentation du commandeur de Nieuport, qui « avait rendu le témoignage » le plus favorable du savoir et des bonnes qualités du » candidat (1). » » À celte époque de sa vie, M. Quetelet cultivait à la fois les lettres et les sciences. Il fut redevable aux pre- mières de l’élégance et du charme des éloges qu'il eut à prononcer plus tard comme secrétaire perpétuel de l Aca- démie (2), et dont plusieurs rivalisent avee les modèles du genre. Il avait abordé l'étude des sciences par les mathé- matiques, la meilleure préparation pour donner de la recti- tude au jugement et pour développer l'esprit de critique et me Il des Nouveaux MÉMOIRES., (2) 1l fut élu secrétaire Goes dans la séance du 22 novembre 1854. ( 953 de précision , si nécessaire dans les recherches, soit de l'ordre physique, soit de l’ordre moral. La géométrie pure avait principalement attiré son attention, et ses travaux sur la focale, courbe nouvelle dont il avait fait connaître les propriétés dans sa dissertation inaugurale , sur les sec- tions coniques considérées dans le solide, sur les causti- ques et sur d’autres sujets, sont encore aujourd'hui cités avec éloge ; mais au moment où ils parurent, ils ne furent peut-être pas appréciés comme ils le méritaient ` peu d'hommes étaient capables de les lire en Belgique, et, à l'étranger, en France surtout, l’analyse infinité simale étai presque seule en honneur. » Cette circonstance et la noble ambition de se faire un grand nom changèrent peu à peu le cours des idées de M. Quetelet. Il commença à s'occuper de physique et d'as- tronomie : les leçons publiques qu’il fut chargé de donner attirèrent beaucoup d'auditeurs. I avait le talent de les rendre intéressantes en se mettant à la portée de ses jeunes élèves et des gens du monde; et pour augmenter encore leur utilité, il fit paraître des résumés qui furent traduits dans plusieurs langues. » M. Quetelet savait inspirer l'amour de la science. Pendant les sept ou huit ans de son professorat à l’athénée de Bruxelles, il forma plusieurs élèves, devenus plus tard des savants distingués et dont le plus éminent, M. Plateau, lui exprimait naguère sa lans une touc dédicace (1). (1) Voici cette dédicace, placée en tête de la Stalique expérimentale el théori ique des liquides soumis aux seules forces moléculaires : o ‘ous , * qui avez été l’un des actifs promoteurs de la régénération intellectuelle » de la Belgique, et dont les travaux ont tant contribué à l'illustration de » ce pays; vous, qui avez guidé mes premiers pas dans la carrière des ( 254 ) » M. Quetelet eut toujours du goût pour l’enseignement. Lorsqu'il eut quitté l’athénée, il continua à donner son cours public d'astronomie, auquel il avait joint, depuis 1827, un cours d'histoire des sciences (1). Plus tard, il professa longtemps. l'astronomie et la géodésie à l'École militaire. » Deux fois il fut appelé à discuter les questions rela- tives à l’enseignement supérieur. Dans la commission instituée par le roi Guillaume, en 1898, il se prononça pour la liberté de l’enseignement; dans celle que le Ministre de l’intérieur, M. Teichmann, avait chargée, au mois d'août de l’année 1831, d'élaborer un projet de loi sur l'instruction publique, il demanda la création d’une grande université centrale, avec deux écoles spéciales à Liége et à Gand, l’une pour les différents services publics, civils et militaires, l’autre pour l’industrie et le commerce. » C’est en 1823 que M. Quetelet songea à réaliser une idée souvent émise dans l’ancienne Académie, celle de la fondation d'un Observatoire à Bruxelles. M. Falck, ce mi- nistre à qui les lettres et les sciences ont tant d'obligations en Belgique, s'empressa de l’envoyer à Paris pour s’y exercer à la pratique des instruments et des calculs et recueillir les renseignements nécessaires à l'établissement projeté. » M.Quetelet s’acquitta de sa mission avec l’ardeur d’un homme poursuivant un but qui lui est cher. Dès son re- » sciences, et qui m'avez appris, par votre exemple, à exciter chez les » jeunes gens l'amour des recherches ; vous enfin, qui n'avez cessé d'être » pour moi un ami dévoué, permettez-moi de vous dédier cet ouvrage, » en témoignage de reconnaissance et de constante affection. » (1) Ce cours se donnait au Musée des sciences et des lettres, fondé à Bruxelles, à la fin de 1826, parle gouvernement des Pays-Bas. ( 255 ) tour, il envoya son rapport au gouvernement ; mais, malgré l'intervention officielle de l'Académie et les démarches personnelles de son président, le prince de Gavre, auprès du roi, l'arrêté ordonnant la création de l'Observatoire ne parut que le 8 juin 1826. » La persévérance, qui fut toujours l’une des grandes qualités de M. Quetelet, allait être mise à l'épreuve. Nommé directeur du nouvel établissement par un arrêté royal du 9 janvier 1898, il dut attendre encore quatre ans avant de pouvoir s’y installer. » De 1824 à 1839, nous le voyons fonder, avec M. Gar- nier, la Correspondance mathématique et physique, dont le cadre, d'abord restreint, ne tarda pas à s’élargir et qui est encore très-recherchée, » Bientôt il commence à s'occuper de recherches sta- tistiques, travaux pour lesquels il eut toujours une grande prédilection ; il fait des voyages en Angleterre, en Allema- gue et en Italie, et s'y crée des relations dont l’Académie de Bruxelles devait plus tard recueillir les avantages. » En 1835, il entreprend cette longue série d’observa- tions relatives à la météorologie et à la physique du globe, qu'il a discutées dans une suite de mémoires particuliers et qui ont fondé la Climatologie et la Périodologie de la Belgique. La force productrice remarquable de l'Obser- valoire de Bruxelles comme « Observatoire physique, » était signalée, en 1850 , dans les termes les plus élogieux, par sir John Herschel (1). Si l'astronomie proprement dite y tint d’abord moins de place, aucun reproche ne peut être adressé de ce chef à M. Quetelet. Les instruments méridiens ne furent montés qu’en juillet 1835, et le per- (1) Revue d'Édimbourg ; juillet 1850. (256) sonnel était tout à fait insuffisant pour mener de front les observations astronomiques et celles de la météorologie et de la physique du globe. On ne pouvait pas non plus songer à restreindre ces dernières dans un moment où le gouvernement britannique et d’autres gouvernements ve- naient de mettre sur pied un vaste système d'observations météorologiques et magnétiques combinées. » M. Quetelet se borna donc à déterminer la position de son Observatoire et à observer les principaux phéno- mènes célestes. Quelques observations d'étoiles furent faites à la lunette méridienne en 1837, 1838 et 1839 ; les observations furent reprises en 1848 , et, à partir de cette époque, elles s’étendirent aux ascensions droites et aux déclinaisons. Une troisième série a été commencée en 1857 et doit mener à un catalogue de 10,000 étoiles à mouve- ments propres ` ce catalogue fera honneur à l’homme qui en fut le promoteur et à son fils, M. Ernest Quetelet, appelé à le conduire à bonne fin , et dont tous les moments, depuis dix-sept ans, y sont consacrés. » Je wai pas à vous parler des services que l'illustre défunt a rendus à l’Académie de Belgique; mais ce n’est pas exagérer que de lui attribuer une part considérable dans le développement des travaux de ce corps savant et dans la considération dont il jouit à l'étranger. » Je wai pas non plus à faire ressortir le lustre que la Commission centrale de statistique, établie en 1841 par le Ministre de l'intérieur, M. Liedts, emprunta à la re- nommée universelle de M. Quetelet, renommée basée sur des travaux de premier ordre et qui suffiraient pour rendre son nom impérissable. > Aux yeux de M. Quetelet comme à ceux de sir John Herschel, les documents statistiques étaient, pour la philo- ( 257 ) sophie sociale et politique, ce que sont les données astro- nomiques ou les registres de la météorologie pour une explication raisonnée des mouvements des planètes ou de l'atmosphère. Il aurait voulu que le soin de les réunir et de les discuter fût confié à des hommes versés dans les mathématiques et surtout dans le calcul des probabilités. eur usage ne devait pas, d’après lui, se borner à des objets de nature administrative ou législative : sa Physi- que sociale et les compléments de cet ouvrage ont montré qu'on pouvait en relever considérablement l'emploi. Il a été, pour me servir des expressions de l’Académie de Berlin (1), le créateur « d’une nouvelle science, dans > laquelle l'observation et le calcul s’allient pour faire » ressortir les immuables lois qui gouvernent les phéno- » mènes en apparence les plus accidentels de notre vie $ physique et jusqu'à nos moindres actions. » » L'Observatoire, l’Académie et la Commission cen- trale de statistique ont été les institutions dans lesquelles l'activité de M. Quetelet s’est exercée avec les plus heu- reux fruits. Lorsque, déjà affaibli par l’âge et par une perte sensible de la mémoire, il cessa de participer utile- ment à leurs travaux, le souvenir des services rendus contribua à maintenir le prestige attaché à son nom et l'autorité dont il jouissait. >» À l'étranger, sa réputation m'avait fait que grandir. Dans sa séance du 48 mai 1872, l’Académie des sciences morales et politiques de l’Institut de France, qui, depuis de longues années, le comptait au nombre de ses corres- pondants , lui avait décerné la plus grande distinction dont elle dispose, en le nommant à une place d’associé. Quel- (1) Adresse de félicitations envoyée à l'Académie royale de Belgique, à l'occasion du centième anniversaire de sa fondation. ( 258 ) ques mois après, des honneurs presque princiers lui étaient rendus au Congrès international de statistique de Saint- Pétersbourg. Il était membre de la Société royale de Lon- dres, de la Société astronomique de la même ville, de l’Académie des sciences de Berlin, de l’Académie des sciences de Saint-Pétersbourg et de bien d’autres sociétés savantes qu'il serait trop long d’énumérer ici. » La séparation est toujours pénible et douloureuse pour des parents, pour des amis; mais quand un homme meurt comblé de jours, de gloire et d’honneurs; quand il doit laisser une grande trace dans l’histoire de la science, on se soumet avec résignation à la loi inévitable de ce monde, où tous nous ne faisons que passer, et la plupart, ignorés ou obscurs. » Discours de M. Putzeys, membre de la Commission i cenirale de statistique. « Cest un usage pieux que de rappeler les mérites de ceux qui viennent de nous quitter. » Cependant, si un homme pouvait se passer de cet éloge funèbre, c’est certainement celui que nous allons accompagner à sa dernière demeure. Mêlé activement, depuis près d’un demi-siècle, à tout le mouvement scien- tifique de notre époque, Quetelet avait acquis une position éminente et une notoriété universelle ; pour tous les hom- mes voués aux scientes exactes, aux sciences d’observa- tion, le nom de Quetelet représentait la science, le travail incessant, la conscience et la bonté. > À d’autres que nous il appartient de dire quels ser- vices Quetelet a rendus dans le domaine des mathéma- tiques, de l'astronomie, de la physique, de dire ce qu’il a été comme fonctionnaire publie, comme citoyen. Organe mer Sie rl E | ( 259 ) de la Commission centrale de statistique, que Tillustre défunt a présidée pendant plus de trente ans, je nai à vous parler de Quetelet que comme statisticien. » C’est en 1826 que le gouvernement des Pays-Bas fit de la statistique une branche de l’administration. » Quetelet y fut attaché pour le Brabant et, dès l’année suivante, il publiait le premier travail de ce genre qui eût encore paru dans le pays. Profondément imbu des sciences mathématiques, il était l’ennemi-né de la statistique de fantaisie ; il n’admettait pour point de départ que des faits bien vérifiés et rien ne lui-coûtait pour que ses déductions aboutissent à la plus grande somme possible de certitude. » Bien que chargé, dès 1898, des importantes fonctions de directeur de l'Observatoire, Quetelet continuait et éten- dait ses études statistiques; il les appliquait avec succès à des questions que l’on aurait cru devoir y rester étran- gères. C’est ainsi qu’en 1835, il publiait sa Physique sociale, et dix ans plus tard ses Lettres sur la théorie des probabilités appliquées aux sciences morales et politiques. L'idée dominante de ces deux livres remarquables est ainsi résumée par l’auteur lui-même : e L'homme, même sans » y penser, suit instinctivement les lois qui lui sont pres- » crites et qu'il exécute, sans s’en douter, avec la régula- » rité la plus grande. » > En 1841, le Gouvernement comprit la nécessité de donner de l’unité aux travaux statistiques, déjà nombreux, qui, sans direction, sans but précis, sans bases d'investiga- tion parfaitement déterminées, étaient accomplies dans les divers services publics. > Un arrêté royal créa une Commission centrale de sta- tistique et en donna la présidence à Quetelet, qui exerça ces fonctions jusqu’à sa mort. ( 260 ) » Sous l'impulsion d’un homme qui, déjà alors, était un vétéran de la science, la Commission centrale aborda réso- lâment son œuvre et, un an à peine après sa création, elle se trouvait en mesure de tracer le plan général des travaux à accomplir. Grâce au dévouement de tous, ce cadre a été rempli, parfois même élargi. » Trois recensements généraux de la population ont été exécutés en 1846, 1856 et 1866, avec des garanties de certitude ignorées jusqu'alors. » La situation générale du royaume a été exposée en tous ses détails dans des publications renouvelées de dix ans en dix ans. » Toutes les parties du service public ont été l’objet de travaux statistiques qui ont suggéré des améliorations plus ou moins importantes. » Tous ces travaux ont été accomplis, non-seulement sous la présidence et l'impulsion de Quetelet, mais avec sa coopération la plus active. » C'est sur son initiative et celle de l’un de ses collègues que la statistique a franchi les limites territoriales; — qu’elle 3 cessé de réunir exclusivement des données pure- ment locales, impossibles à comparer avee celles que four- nissaient d’autres pays. La statistique internationale a été fondée par le congrès réuni à Bruxelles, en 1853, auquel ont succédé les congrès de Paris, de Vienne, de Londres, de Berlin, de Florence, de La Haye et de Saint-Pétersbourg. Dans ces réunions de savants, appartenant à des nationa- lités si diverses, le vénérable président de la Commission centrale de Belgique ne comptait que des amis, et la con- sidération générale dont il était entouré rejaillissait sur notre pays. » C’est que là, comme partout ailleurs, le savant était | À ! ? ( 261 ) Modeste et bienveillant, convaincu, mais respectant les convictions d'autrui en les combattant; toujours calme, évitant tout ce qui aurait pu blesser ses contradicteurs; homme de science, on l’admirait ; homme politique, on le respeclait; homme privé, on l’aimait. » En quittant cette terre, il a pu avoir la conscience d'une longue carrière honorablement parcourue et la cer- Dinde des regrets qu’il laisserait derrière lui. » Discours de M. le baron Kervyn de Lettenhove, président du Conseil d'administration de la Bibliothèque royale. « Le conseil d'administration de la Bibliothèque royale unit à tous les hommages rendus à la mémoire de M. Que- telet l'expression non moins profondément sentie de sa douleur et de ses regrets. Non-seulement M. Quetelet était Son vice-président, mais il était aussi le plus ancien de ses membres, et, après avoir assisté à la fondation de la Biblio- thèque royale, il avait, pendant près de trente-sept ans, contribué par ses efforts assidus à en faire le premier dépôt littéraire du pays. » C’est ainsi que le nom de notre éminent confrère et ami se trouve partout associé aux progrès de la science, et Ton peut lui rendre ce témoignage qu'il n’est parmi nous aucune œuvre patriotique et utile à laquelle il n’ait apporté son concours. » Que cette vie de dévouement et de travail recueille dans le sein de Dieu sa récompense; qu'elle serve d'exem- ple à tous ceux qui, pour l’honorer une dernière fois, se pressent autour de ce cercueil! » Ze: SÉRIE, TOME XXXVII. ` 18 ( 262 ) Discours de M. le D” Tallois, secrétaire de l’Académie royal? de médecine. e Délégué, avec quatre de mes collègues, pour repré- senter l’Académie royale de médecine aux funérailles de l’homme éminent qu'elle s'était associé en qualité de membre honoraire, j'ai reçu en même temps du bureau la mission d'adresser un adieu suprême au collègue vénéré qui vient de terminer sa belle et honorable carrière. » Des voix plus autorisées que la mienne vous ont exposé et vous exposeront les mérites scientifiques du savant secrétaire perpétuel de l'Académie royale des sciences, des lettres et des beaux-arts; je me bornerai donc à vous rappeler quelques-uns des titres qu'il avait à faire partie de l'Académie au nom de laquelle je prends aujourd'hui la parole. » D'abord, Messieurs, est-il besoin de dire que toutes les sciences sont connexes , qu’elles se prêtent un mutuel appui dans la recherche de la vérité? Parfois, à un moment donné, telle de nos connaissances vient apporter un rayon de lumière là où on ne la croyait nullement appelée à dis- siper les ténèbres qui enveloppent toutes choses ici-bas. » Déjà, à ce titre, Quetelet méritait d’être membre de Académie de médecine; car, qui plus que lui, en Bel- gique, a sondé les profondeurs des diverses sciences qui forment l’ensemble des connaissances humaines? » Mais l’homme auquel nous rendons les derniers devoirs avait des titres plus spéciaux encore à être associé à nos travaux. ll cultivait des sciences qui ont des rapports _ intimes avec la médecine. Il était sinon le fondateur, du moins le propagateur, le vulgarisateur d’une branche de nos Connaissances qui a pris, dans ces derniers temps sur- | R E À ( 263 ) {out et sous sa vive impulsion , une importance très-grande et qui est appelée à rendre, dans l’avenir, d'immenses ser- vices non-seulement à l’économie sociale et à la philoso- phie, mais aussi aux sciences médicales, je veux parler de la statistique. » Oui, la statistique est un puissant moyen d’investiga- tion, qui rend de grands services à l’art médical et qui en rendra de bien plus grands encore, lorsqu'elle sera basée complétement sur les sages principes que notre savant col- lègue a tracés dans plusieurs de ses écrits et qu'il a résu- més dans son immortel ouvrage, auquel il a donné le titre de Physique sociale ou essai sur le développement des facultés de l’homme. » Je m'arrête, Messieurs, car j'aurais l'air de plaider pour légitimer la nomination de Quetelet comme membre de notre Compagnie, tandis que je n’ai d’autre but que de faire ressortir les titres de gloire de l’homme éminent dont nous déplorons la perte. Qui, d'ailleurs, lui contesterait un titre que lui ont décerné à l’unanimité ses collègues, le 29 octobre 1842, c'est-à-dire dès la seconde année de la fondation de l’Académie de médecine? » Comme je viens de le dire, Quetelet avait d’autres titres scientifiques qui le rendaient digne d’être associé à nos travaux. Aucune des branches des sciences naturelles ne lui était étrangère. ll était surtout une spécialité, une autorité même en physique, en astronomie et en méléoro- logie. Or, qui ne sait que la médecine tire parti des don- nées scientifiques émanant de ces trois sources ? Si le dif- ficile problème de la vie, c'est-à-dire de la santé et de la maladie, doit être un jour résolu, ne sera-ce pas peut-être en partie aux sciences naturelles que l'humanité sera rede- vable de cette grande et bienfaisante découverte ? ( 264 ) » Quoi qu'il arrive, le savant dont nous entourons le$ restes mortels aura beaucoup contribué à l’élucidation des diverses questions de sciences naturelles. » Cher et vénéré collègue, en attendant que nous puis- sions Le revoir dans le sein de l'Éternel, recois le dernier adieu que je l'adresse au nom des membres de l’Académie royale de médecine. » Discours de M. le colonel Liagre, commandant de l'École militaire. « Au nom du corps professoral de l’École militaire qui, depuis la fondation de l'établissement, a été fier de compter dans ses rangs la première illustration scientifique du pays; au nom des anciens élèves de l’École, qui ont toujours conservé le plus affectueux souvenir de leur maître vénéré, je viens apporter sur cetle tombe un juste tribut de regret et de reconnaissance. » Les relations de M. Quetelet avec ses collègues étaient toujours empreintes d’urbanité, de complaisance et de cor- dialité. Pour ses élèves il était un guide éclairé, un protec- teur dévoué. Sa parole flexible savait, suivant les cir- constances, s'adresser à leur raisonnement ou à leur imagination, ses leçons n'avaient rien de cette sécheresse didactique qui effraye et rebute tant de jeunes intelli- gences ; c’étaient plutôt d’instructives causeries, dans les- quelles il se contentait d’esquisser son sujet à grands traits, laissant à ses auditeurs le soin de le compléter ensuite en travaillant par eux-mêmes. Il leur ouvrait de larges vues sur l’horizon de la science, leur en faisait remarquer les beautés, leur en inspirait l'amour. C’est par ce procédé qu'il a instruit deux générations d'élèves et formé des DES T ( 265 ) hommes qui, dans les carrières les plus diverses, sont arrivés aux positions les plus élevées. » Doué d'une activité infatigable, d'une incroyable téna- cité au travail, d'une érudition aussi vaste que variée, Quetelet semblait avoir adopté la devise d'un des plus grands hommes de notre pays: Repos ailleurs. Il repose maintenant ailleurs, après avoir glorieusement parcouru ici une longue et laborieuse carrière. Sa mémoire ne périra pas. » A la suite de ces discours, le cortége funèbre s’est mis en marche. Une décharge de mousqueterie a salué le cercueil à sa sortie de l'Observatoire. Le deuil était conduit par MM. Ernest Quetelet et Clays, fils et gendre du défunt, accompagnés de MM. Madou, Robert, ainsi que des autres parents et alliés. Le cercueil était recouvert de l'uniforme et des nom- breuses décorations du défunt (1). Les cordons du poële étaient tenus à droite par MM. Mailly, Putzeys et Liagre, à gauche par MM. De Keyser, Tallois et le comte de Kerchove, bourgmestre de Gand. (1) M. Adolphe Quetelet avait été l’objet de hautes distinctions de divers pays. Il était grand officier de l’ordre de Léopold; grand-croix, avec collier, de l’ordre impérial de la Rose du Brésil; grand cordon de l’ordre impérial de Saint-Stanislas et commandeur, avec l'ordre en brillants, de Sainte-Anne de Russie; grand officier de l’ordre des SS. Maurice et Lazare d'Italie; de 2e classe, avec plaque, de l’ordre de la Couronne de Prusse; comman- deur, avec plaque, de l’ordre du Lion néerlandais, de l'ordre du Ghrist et de l’ordre de Saint-Jacques de Portugal, de l’ordre de la branche Ernes- tine de Saxe et de l’ordre de François-Joseph d'Autriche; chevalier de la Légion d'honneur de France , du Danebrog de Danemark et de l'Étoile po- laire de Suède. ( 266 ) Le cortége s’est rendu à l’église des SS. Michel et Gudule. Le service a été célébré par M. le curé-doyen Nuyts, assisté de son clergé. Une immense affluence remplissait l'église. Après la cérémonie, le corps a été transporté au cime- tière de la ville, à S'-Josse-ten-Noode, et déposé dans le caveau de famille. BULLETIN DE L'ACADÉMIE ROYALE DES SCIENCES, DES LETTRES ET DES BEAUX-ARTS DE BELGIQUE. 1874. — No 2. CLASSE DES SCIENCES. eene Séance du 7 mars 1874. M. E. Canpèze , directeur. Sont présents ` MM. J.-S. Stas, L. de Koninck, P.-J. Van Beneden, Edm. de Selys Longchamps, H. Nyst, Gluge, Melsens, J. Liagre, F. Duprez, G. Dewalque, H. Maus, M. Gloesener, F. Donny, Ch. Montigny, M. Steichen, A. Brialmont, E. Dupont, Éd. Morren, Édouard Van Beneden, C. Malaise, membres; Th. Schwann, E. Cata- lan, Aug. Bellynck, associés; Éd. Mailly, H. Valerius, F. Folie, F. Plateau, F.-L. Cornet, correspondants. ( 268 ) CORRESPONDANCE. M. Ernest Quetelet, membre de l’Académie, adresse ` officiellement à la classe une lettre d’information du décès de son père, M. Lambert-Adolphe-Jacques Quetelet, membre titulaire de la section des sciences mathématiques et physiques et secrétaire perpétuel de l'Académie, décédé à Bruxelles le 17 février dernier , à l’âge de 78 ans. M. Quetelet faisait partie de la classe des sciences depuis le 1° février 1820 ` il a donc participé à ses travaux pen- dant plus d'un demi-siècle. M. le directeur donne connaissance à ses confrères des dispositions qui ont été prises, en ce qui concerne l'Aca- démie, relativement aux funérailles. M. De Keyser, direc- teur de la classe des beaux-arts et président actuel de la Compagnie, s’est fait l'organe et l’interprète des sentiments de celle-ci tout entière et a adressé à M. Ernest Quetelet l'expression des regrets de ses confrères. La classe entend la lecture de la lettre de M. Ernest Quetelet en réponse à ces témoignages. Elle décide qu’une lettre de condoléance sera adressée, en son nom, au fils du défunt. On exprime ensuite le désir de voir l'Académie deman- der au gouvernement le buste de M. Ad. Quetelet. La com- mission administrative s’occupera de ce soin. — La classe apprend avec regret que l’état de santé de M. d'Omalius d’Halloy, son vénérable doyen d'âge, n’est pas sans inspirer de vives inquiétudes. ( 269 ) D’après le désir unanime de tous les membres, M. Can- dèze, directeur, se rendra auprès de M. d’Omalius au sortir de la séance, afin de lui exprimer combien la classe a été au regret de ne pas le voir à la réunion de ce jour et lui faire part des vœux qu’elle fait pour son prompt rétablis- sement. — Différents ouvrages envoyés par M. le Ministre de l’intérieur, pour la bibliothèque de l’Académie, seront mentionnés au Bulletin de la séance. — Remerciments. — M. Malaise, correspondant , fait hommage de deux brochures intitulées : 4° Excursion annuelle de la Société Mmalacologique de Belgique; 2 Note sur la description du terrain silurien du centre de la Belgique; in-8°. — Remerciments. — M. Helmholtz exprime par écrit ses remerciments Dour son élection d’associé. — L'Institut impérial des mines de Saint-Pétersbourg remercie par écrit l’Académie pour l'adresse de félicita- lions qui lui a été envoyée lors de la célébration de son jubilé séculaire, le 24 octobre 1873. — L'Académie royale des Sciences d'Amsterdam, la Société royale des sciences de Leipzig, l'Académie royale des sciences de Munich , l’Institut royal des sciences, let- tres et arts de Venise, l'Observatoire physique central de Saint-Pétersbourg remercient pour le dernier envoi de publications académiques. Ces institutions adressent, en même temps, leurs récents travaux. ( 270 ) — M. Louis Quaedvlieg adresse ses observations zoolo- giques faites à Visé, en 1873; M. Cavalier transmet son résumé météorologique pour Ostende pendant le mois de février 1874. — Réservé pour le recueil des observations sur les phénomènes périodiques. — M. J. De Tilly exprime par écrit le désir de se voir remplacer, pour des motifs personnels, dans les fonctions de commissaire pour les deux lettres de M. Genocchi qui ont été renvoyées à son examen. La classe désigne M. Ernest Quetelet pour remplir cet office. — Les travaux manuscrits suivants sont renvoyés à des commissaires : ` 1° Recherches sur les dérivés glycériques, par M. Louis Henry. — Commissaires : MM. Stas et de Koninck; -2X Recherches sur les phénomènes de la digestion chez les insectes, par M. F. Plateau. — Commissaires : MM. Schwann et Gluge; 5° Recherches morphologiques sur les pyrénomycètes. I. Sorpariées, par M. A. Gilkinet. — Commissaires : MM. Éd. Morren et Éd. Van Beneden: 4° Sur les centres des nerfs vaso-moteurs, par M. le doc- teur F. Putzeys. — Commissaires : MM. Schwann et Gluge. (271) RAPPORTS. Sur les dérivés diallyliques, par M. Louis Henry. Rapport de M, Stas, a Dans un précédent travail, M. Henry a montré que les composés allyliques se combinent directement à l'acide _hypochloreux pour donner naissance à des composés gly- cériques. On devait s'attendre à ce qu’il en serait de même des composés diallyliques. L'expérience a confirmé cette prévision. En effet, M. Henry a trouvé que le diallyle se combine à l'acide hypochloreux en formant une dichlor- hydrine diallylique. La note présentée par M. Henry con- tient l'annonce de ce dernier fait ainsi que l'exposé des propriétés de cette nouvelle dichlorhydrine. J'ai l’honneur de proposer à la classe de décider l'im- pression de ce travail dans le Bulletin de la séance. » Conformément à ces conclusions, auxquelles adhère le second commissaire, M. L. de Koninck, la classe vote l'impression de la note de M. Henry dans les Bulletins. Recherches sur les camphres (2° note), par M. Ed. Dubois. Rapport de M, F. Donny. « M. Dubois, déjà connu par ses recherches sur la constitution des camphres, décrit dans la note présentée actuellement à la classe un mode de préparation avanta- geux du camphre bromé. ( 272 ) Ce mode de préparation, comme tous ceux qui ont été indiqués depuis la découverte du camphre bromé par M. Swartz, repose sur la formation préalable d’un produit additionnel bromé C,,H,6,0Br,, produit que l’on dédouble ensuite en camphre bromé el en acide bromhydrique CioHis BrO + BrH. Mais si tous ces procédés se ressemblent théorique- ment, en pratique ils sont loin d'offrir les mêmes avan- tages. Jai pu constater, plusieurs fois , qu’en suivant les pres- criptions de M. Dubois la combinaison directe du brome et du camphre se fait très-régulièrement, et que le produit obtenu chauffé ensuite vers 100° se dédouble très- nettement en camphre bromé et en acide bromhydrique. Dans ces conditions il se forme peu de produits acces- soires, le rendement est considérable et la purification facile. En terminant sa note, et pour prendre date, l'auteur signale différentes réactions se rapportant à l'histoire du campbhre. Il constate qu’en chauffant, pendant 20 heures à 150° et dans un tube scellé, un mélange de camphre bromé de potasse et d'alcool, on produit une substitution inverse, de sorte qu'après la réaction on retrouve du camphre régé- néré, probablement avec formation d’acétate et de bro- mure de potassium d’après l'équation 5 (KHO) + C,H; HO + 2(C,, Hu Dr 0) = C,H KO, + 2 (KBr + H,0 + Ce HO). Reprenant ensuite les expériences de d’Arcet et de Ber- thelot sur l'action du fer chauffé au rouge agissant sur le camphre en vapeur, l’auteur parait avoir trouvé, parmi les | | | $ ( 275 ) nombreux produits de la réaction, un terpène Cio Hig. Ce résultat lui semble important, sous le rapport de la consti- tution du campbre, et l’auteur se propose de faire réagir du sodium sur le dérivé du camphre Cales: il espère convertir ainsi directement ce composé en terpène Cio Hi avec formation de chlorure de sodium. Enfin l’auteur constate qu’en chauffant à 180° un mé- lange de camphre bromé, d'ammoniaque et d'alcool, on obtient un corps parfaitement cristallisé qui présente des propriétés nouvelles, et qu’il considère comme du camphre amidé. Il se propose d'approfondir ultérieurement l'examen de ce composé. En résumé, je considère la note de M. Dubois comme intéressante , et j'ai l'honneur de proposer à la classe d'en ordonner l'impression dans ses Bulletins et de voter des remerciments à l’auteur. » Conformément aux conclusions favorables de ce rap- port, auquel adhère M. Melsens, second commissaire, la classe ordonne l'impression de la note de M. Dubois dans le Bulletin de la séance et décide d'adresser des remer- ciments à l’auteur pour sa communication. — M. F. Folie donne lecture de son rapport, auquel a adhéré M. Catalan, second commissaire, sur une note de M. Saltel, intitulée : Considérations générales sur la déter- mination, sans calcul, de l’ordre d’un lieu géométrique. La classe adopte les conclusions de ce rapport, deman- dant que l'auteur fasse une révision de son mémoire avant qu'il soit porté un jugement définitif sur celui-ci. (24 ) COMMUNICATIONS ET LECTURES. Recherches sur les combinaisons glycériques, par M. Louis Henry, correspondant de l’Académie. SUR LES DÉRIVÉS DIALLYLIQUES. § V.— Sur la dichlorhydrine diallylique Glo (OH): Cl. J'ai fait voir précédemment (1) que les composés ally- liques en général CHA X se combinent aisément avec l'acide hypochloreux (HO) CI, en donnant des dérivés gly- cériques (C;H;) X (OH) CI. Cela étant, le diallyle lui-même Glo qui, ainsi que je Tat déjà fait remarquer, présente en double les propriétés des composés allyliques, doit pouvoir fixer une double molécule d'acide hypochloreux, en formant une dichlorhydrine diallylique Gel, où CH, << Hl l OH D o H a pe H C’est en effet ce que l'expérience a constaté. Le diallyle se combine énergiquement avec l'acide hy- pochloreux. On agite l’hydrocarbure, dans un flacon en (i) Voir mes notices préliminaires. Comptes rendus, séance du 18 avril 1870 et Berichte der Deutschen Chemischen Gesellschaft, t. HT, p. 551 et t. V, p. 449. travail let, — autant du moins que je LE le puis, — sur cet objet. ` H i t $ ( 275 ) verre, avec de l'acide hypochloreux en ı solution peu con- centrée. La réaction s’accomplit avec un dégagement de chaleur assez notable pour qu'il faille plonger à diverses reprises et maintenir le flacon dans l’eau froide. Le diallyle qui surnageait d'abord, tombe bientôt au fond en formant un liquide huileux assez épais. La réaction étant terminée, on précipite le mereure dissous (1) en faisant passer un courant d'hydrogène sulfuré dans la liqueur, jusqu’à ce que le précipité, jaune d’abord, de sulfure basique, soit devenu noir. Il est nécessaire de cesser dès lors, afin d’éviter la formation de produits dial- lyliques sulfurés, qui se forment aisément, ainsi que je l'ai constaté dans une opération où le courant d'hydrogène sulfuré avait été trop longtemps prolongé. On agite ensuite toute la masse du liquide avec de l’éther en grande quan- tité, lequel dissout la dichlorhydrine formée. On distille au bain d’eau la couche éthérée. On filtre le liquide res- tant et on l’abandonne dans une petite capsule, sous une cloche, dans le vide, sur de l'acide sulfurique. Après quel- ques semaines, la dessiecation du produit est complète. Ainsi préparée et purifiée, la dichlorhydrine diallylique Cs Hio (OH), Cl, constitue un liquide incolore, ou faible- (1) J'ai préparé l'acide bypochloreux en suivant la méthode ordinaire autrefois indiquée par M. Balard : action du chlore gazeux, à froid, sur l’'oxyde mercurique en présence de l’eau La solution filtrée de cet acide hypochioreus n’est pas pure: elle ren- ferme habituellement, en plus ou moins grande quantité, des composé mercuriels dissous, tels que chlorure Lett rite et chlorate. La préci- Diane par l'hydrogène sulfuré, du mercure dissous, est absolument écessaire, alors que le produit de la réaction est fixe, comme c’est ici le ; ( 276 ) ment jaunâtre, transparent, extrêmement épais et vis- queux. Elle exhale, comme la dichlorhydrine glycérique, une odeur fraiche, agréable, mais plus faible; sa saveur est amère et piquante. Sa densité à 7° est égale à 1, 4. Elle est faiblement soluble dans l’eau au fond de laquelle elle tombe, elle se dissout fort bien dans l'alcool et dans l’éther. Elle ne se congèle pas encore vers — 20°, dans un mé- lange réfrigérant de glace et de sel marin. Elle n’est pas non plus distillable sans décomposition, sous la pression ordinaire : chauffée, elle dégage abondamment de l'acide chlorhydrique et se charbonne totalement. Cette dichlorhydrine diallylique est constituée de deux restes C; Hy (OH) CI de la dichlorhydrine glycérique, soudés ensemble, et elle présente en double, sous le rapport chi- mique, les propriétés de celle-ci. Elle se comporte en effet, comme la dichlorhydrine glycérique, sous l’action des chlorures et brômures négatifs, Ph Cly, Ph Br, , (Ca H30) CI, ete., sous l’action des alcalis caustiques, de l’acide azotique, etc. Je me borne aujourd'hui à cet énoncé gé+ néral, me proposant de revenir plus tard d’une manière spéciale sur ces diverses réactions. On voit donc que ce produit peut devenir le point de départ d'une longue série de dérivés diallyliques tétraato- miques, de composition et de fonction fort diverses; le nombre de ces dérivés est aujourd’hui restreint à deux savoir, Cs Hio Br, et C Ho lo, J'espère surtout réussir à produire l’érythrite diallylique Cs Hio (OH). L'analyse de ce produit a été faite par mon préparateur M. le D" Bisschopinck. En voici les résultats : I. 05.5826 de substance ont fourni 05.8818 de chlorure d’argent (Méthode de Carius). glement Sen sé noie tell nee ui de dd ddl LS (2717) I. 05.5156 ont donné 05.7864 de chlorure argentique. CALCULÉ. TROUVÉ. Gel: (0m Cl, 0/0. d H. C SH 12 M » mn H, Se 142 D » » CI, — 71 57,96 37,44 37,87 D — 352 ` » » Il ne serait pas possible d’assigner, dès aujourd'hui, à ce produit une formule rationnelle complète et certaine, puisque la structure du diallyle lui-même est encore dou- teuse. Quoi qu'il en soit, le diallyle C;H,,, étant certaine- ment constitué de deux groupements CH. soudés, la dichlorhydrine diallylique Ce Hio (OH), Cl, peut certaine- ment, quelle que soit du reste la structure des groupe- ments C; H; , être représentée par la formule ou GC o OH CH c. De plus, lexistence de ce corps même Cla + ` 2 [(OH)CI] démontre que les radicaux (OH) et CI sont fixés sur quatre atomes de carbone différents. Il est impos- sible en effet de maintenir fixés, d’une manière stable, sur le même atome de carbone deux groupements hydroxyle (OH), et il n’est pas plus possible d'r maintenir simultané- ment les radicaux (OH) et Cl; c’est ce que prouve la non- existence des glycols aldéhydique OH CH< on Ca Hony ` 2% SÉRIE, TOME XXXVII. 19 et acétonique Cn Hso+1 et des monochlorhydrines correspondantes OH Ca Hyn+t ës Ore Y OH Ca H5+1 g ! CI Ca Hany On doit donc nécessairement admettre que parmi les six atomes de carbone du diallyle (ou deux fois trois, puisque cet hydrocarbure est formé de deux moitiés symétriques), quatre (ou deux fois deux) ne sont pas saturés, c’est-à-dire sont reliés à leur voisin par une double soudure. Qu'il me soit permis, à l’occasion de l'érythrite dial- lylique, de m'arrêter un instant à un autre composé diallylique, de nature alcoolique aussi, composé déjà assez ancien, mais qui jusqu'ici ne parait guère avoir fixé lat- tention des chimistes et est resté en dehors des classifi- cations. Je veux parler de la pinakone acrylique Ce Hio02- Ce corps fut signalé, pour la première fois, il y a une dizaine d'années, par M. Ed. Linnemann (1). Je ne crois pas que depuis cette époque on sen soit occupé. Il se forme en même temps que les alcools allylique et propy- (1) Annalen der Chemie und Phärmacie. Supplement Band, t. HI, p. 257 (1864). ( 279 ) lique , lors de l'hydrogénation de l’acroléine, par le zine et l'acide chlorhydrique. C’est le produit principal de cette réaction. La pinakone acrylique C Dutt: résulte de la fixation d'une molécule d'hydrogène sur deux molécules d’acro- léine 2CH,0 + H, = Cell, Les connaissances que l’on possède aujourd’hui sur des produits, formés dans des circonstances analogues, aux dépens des aldéhydes ou des acétones, m'’autorisent à regarder la pinakone acrylique comme un glycol bisecon- daire non saturé et tétravalent. L’acroléine C; H,0, renferme certainement, en sa qua- lité d’aldéhyde, le groupement CHO et sa constitution peut être exprimée par la formule (C3H;) — CHO, formule qui ne préjuge rien quant au groupement bivalent C, Hz. La pinakone acrylique CçH,902 où Ce Hg (OH), peut en conséquence être représentée elle-même par la formule Suivante qui exprime son double caractère de glycol bi- secondaire, tétravalent. C d — CH (0H) CH, e La (OH) , de plus, on attribue à l’acroléine, la formule qui la range parmi les dérivés allyliques, formule qui, à mesure que se développent nos connaissances sur la struc- ture des composés tricarbonés non saturés, gagne de plus ( 280 ) en plus en certitude, la constitution de la pinakone acry- lique s'exprime de la manière suivante : Lë (OH) La pinakone acrylique représente, à mon sens, le pre- mier glycol non saturé connu. On sait qu’un produit de cette nature, mais bivalent seulement, le glycol crotoni- que C He (OH), a été signalé récemment par M. A. Hen- ninger (1) parmi les produits de réduction de lérythrite par l'acide formique. Quoi qu'il en soit, la pinakone acrylique mérite, à mon avis, d’être l’objet d’une recherche approfondie; je regarde en effet ce produit comme propre à donner des réactions, à subir des transformations et à former des dérivés du plus plus haut intérêt. Si, notamment, la formule que j'ai indiquée plus haut est exacte, il est à espérer que cette pinakone pourra être transformée en un hydro-carbure Ce He octo-atomique, mais différent du dipropargyle que j'ai fait connaitre récemment. De plus, ses dérivés d’addition CH, (OH), X,, avec les corps halogènes, ne doivent être autre chose que des déri- vés éthérés de l'alcool hexaatomique normal Ce Hs (OH); lequel est vraisemblablement la mannite. (1) Bulletin de la Société chimique de Paris, t. XIX, p. 2 (1873). ( 281 ) On voit par là que ce produit permettra peut-être de réaliser la synthèse totale de la mannite. li est à regretter que la pinakone acrylique soit un com- posé difficile à obtenir. Quoi qu'il en soit, je me propose de la comprendre dans le cadre des recherches que j'ai entre- prises avec mon préparateur, M. le D" Bisschopinck, sur l’acroléine. Recherches sur les camphres (2™ note), par M. Éd. Dubois, répétiteur à l'Université de Gand. PRÉPARATION DU CAMPHRE MONOBROMÉ. Les études que j'ai entreprises sur la constitution de ce Corps exigeaient la préparation de grandes quantités de substance ` j'ai done dù examiner les méthodes proposées jusqu'ici et j'ai pu modifier l'opération de manière à per- mettre d'obtenir des quantités considérables de produit. La méthode exposée plus loin a été découverte et mise en pratique depuis près de quatre ans et pendant longtemps je ne lui attribuais pas une importance assez grande pour en faire l’objet d’une communication scientifique; mais à la suite d’heureuses expériences thérapeutiques dont l'ini- tiative ; ga prise par M. le professeur Deneffe, diverses man ts, émanant de médecins et phar- maciens étrangers, ‘sont parvenues au laboratoire de notre Université; il n’est done pas inutile de décrire compléte- ment le mode nouveau de préparation, mode qui est un perfectionnement de la méthode indiquée par M. Swarts et par M. Perkin. On se rappelle que ce dernier chimiste ( 282 ) mélange le brome et le camphre en proportions convena- bles et distille presque immédiatement; on est donc-exposé à perdre une quantité notable de brome, inconvénient qui est en partie évité par le moyen suivant. On place dans un ballon 75 grammes de camphre, et l'on ajoute en une fois 80 grammes de brome; ces substances se combinent avec une légère élévation de température, et la masse se liquéfie ; il est avantageux de laisser les deux corps s'unir complétement, et par conséquent d'attendre deux à trois heures avant de continuer l'opération. Quand le mélange est devenu solide, on adapte le ballon par l'in- termédiaire d’un tube large à un récipient qui commu- nique avec un appareil condensateur pour le gaz acide bromhydrique; le ballon est alors chauffé à 400° au bain- marie et, au moment où l’action s'établit, il y a un dégage- ment violent d'acide bromhydrique qui entraine aussi un peu de brome; mais, au bout de quelques minutes, ce dégagement se modère et s'effectue même d’une façon si régulière qu'il n’est nullement nécessaire de surveiller l'opération. Aucun danger d’explosion n'existe, si, pour les quantités indiquées, on emploie des ballons d’environ un litre. La préparation est rapidement terminée et il est même avantageux de disposer plusieurs ballons qu'on mel successivement en communication avec le récipient. Le contenu des ballons est versé dans une capsule, traité par une dissolution chaude de carbonate sodique, puis dissous dans l'alcool bouillant; par le refroidissement il se dépose de magnifiques aiguilles blanches qui peuvent quelquefois atteindre une longueur de plusieurs centimètres, et qui sont le camphre monobromé pur. Les liqueurs alcooliques, séparées par décantation, sont concentrées et donnent une nouvelle cristallisation de substance encore pure, mais qui | | | | ( 285 ) se présente en cristaux moins beaux que les premiers; on continue le même traitement jusqu’au moment où l’on voit se déposer une substance huileuse signalée déjà par M. Swarts qui la considère comme une combinaison brom- hydrique du camphre bromé. Cette substance huileuse, que J'ai analysée plusieurs fois sans obtenir de résultats con- cordants, peut être traitée de deux facons différentes éga- lement avantageuses. On peut la faire bouillir avec une solution alcoolique de potasse pendant plusieurs jours, ou bien on peut la distiller en recueillant les portions qui pas- sent à 274°, Dans lun et l’autre cas, il suffit d’une disso- lution dans l'alcool bouillant pour obtenir un produit par- faitement cristallisé. Le mode de préparation que je viens d'exposer donne un rendement très-satisfaisant et il a l'avantage de ne pas exiger d'appareils spéciaux. M. Mätsch a publié récemment (1) un procédé qui per- met aussi de préparer d'assez grandes quantités d'un pro- duit destiné aux usages médicaux. D’après la description sommaire que Ten ai lue, ce chimiste emploie l'alcool pour faciliter la combinaison du brome avec le camphre, puis il détruit le bromure en le chauffant à 132°. Je n'ai pas étudié expérimentalement les deux procédés de facon à pouvoir déterminer lequel est le plus recommandable au point de vue de la pratique, mais la méthode que je pro- pose parait beaucoup plus simple. Le camphre bromé a été soumis à l’action de divers agents chimiques, mais jusqu'ici les résultats obtenus sont peu satisfaisants; ce corps qui, dans certains cas, échange son atome de brome avec facilité, résiste dans d’autres cas (1) Bulletin de la Société chimique de Paris, t. XXI, p. 55. ( 284 ) à des réactifs énergiques. On peut signaler le fait suivant : une solution nitrique de nitrate d'argent décompose le camphre bromé en donnant du bromure d'argent, tandis que la potasse alcoolique ne parvient pas à remplacer le brome par l’hydroxyle. Ce dernier fait signalé déjà par M. Swarts a été vérifié plusieurs fois dans le cours de mes recherches. Même à 150° la décomposition ne s'effectue pas ; je rapporterai cependant une particularité intéres- sante. Du camphre bromé a été chauffé pendant 20 heures à 150° avec un très-léger excès de potasse alcoolique; Pin- térieur du tube était au bout de ce temps recouvert de cristaux blancs cubiques, facilement solubles dans leau. La solution alcoolique dans laquelle on pouvait s'attendre à rencontrer l’oxycamphre a été distillée à l’aide d'un courant de vapeur d’eau; il s’est déposé dans le récipient un corps solide blanc, qui s’est dissous dans l'alcool et a été soumis à la cristallisation spontanée. La substance ainsi obtenue était blanche, semblable au camphre par l'aspect et l'odeur; elle fondait à 475°. C'était donc du camphre ordinaire, ce que l’analyse suivante a confirmé ` 0,24545 de matière ont donné 0,7083# de CO, et 0,2575 de H,0. Soit : C—78,80 et H—10,75. La formule Cal, A exige C— 78,94 et H —10,53. Il faut donc admettre que l'hydrogène naissant prove- nant de l'action de la potasse sur lalcool a opéré une substitution inverse dans le camphre bromé. ACTION DU FER SUR LA VAPEUR DE CAMPHRE. Cette action 3 été étudiée autrefois par d’Arcet ; d’après les indications de ce chimiste, le fer, au rouge, décom- pose le camphre en produisant une liqueur oléagineuse ( 285 ) colorée en jaune de laquelle on peut extraire par distilla- tion vers 140° un liquide plus léger que l’eau, d’une odeur aromatique particulière et dont la composition peut se représenter par la formule C;H;. Gerhardt émit l’idée que cet hydrocarbure pouvait être le styrol. Ce résultat assez singulier n'attira point l'attention des chimistes jusqu’au jour où M. Berthelot aborda ses re- cherches sur les hydrocarbures pyrogénés. Ce savant con- stata (1) que le camphre chauffé à une température élevée ` se décompose en donnant naissance à un grand rombre de composés parmi lesquels prédominent les hydrocar- bures de la série du benzol, mais que le styrol ne s’y rencontre pas, ou du moins ne s’y trouve qu'en très- faible quantité. En résumé, les produits de cette décom- position sont identiques à ceux que fournit l’essence de térébenthine soumise à la même influence. M. Berthelot n'ayant pas opéré dans les mêmes condi- tions que d’Arcet, j'ai cru pouvoir reprendre l'expérience, telle que lavait décrite ce dernier savant. Le camphre en vapeur était dirigé à travers un tube de fer de 1 */,; mètre de longueur, rempli de pointes de fer dont la surface était très-nette ; le tube de fer était maintenu au rouge et l’opé- ration fut arrêtée après la production de 200 grammes de substance. Le liquide ainsi obtenu était brun par trans- mission et verdàtre par réflexion; son odeur était très- forte et aromatique. Il fut soumis à la distillation; la portion passant avant 450° fut mise à part, et le résidu, placé dans un mélange réfrigérant, donna un abondant dépôt de camphre. La partie demeurée liquide fut réunie (1) Bulletin de la Société chimique de Paris, t. X , p. 550. ( 286 ) à la première portion et ce mélange, desséché par la potasse caustique en fragments, fut ensuite distillé sur du sodium. Les résultats obtenus ne diffèrent guère de ceux qu'a énoncés M. Berthelot. Presque tout le produit de la réaction est formé par les hydrocarbures de la série CH. parmi lesquels se rencontrent surtout le toluol et le xylol. Mais en examinant soigneusement les produits dont le point d’ébullition était supérieur à 450°, jai ren- contré une substance bouillant de 457 à 160°, s'oxydant facilement à l'air, et qui, après une nouvelle rectification sur du sodium, fut soumise à l’analyse. 0,2384% de matière ont donné 0,2585% d’eau et 0,77015 d’anhydride carbonique. Soit ` C — 88,089 et H — 12,06. La formule Cio H. demande : C= 88,20 et H— 11,80. Cette matière, sous l'influence de l'acide chlorhydrique fumant, se transformait au bout de quelques jours et don- nait des cristaux mal définis et souillés par une substance huileuse brunâtre. On peut donc considérer comme établie la formation d'un terpène par l’action du fer au rouge sur la vapeur de camphre. Malheureusement la quantité de substance re- cueillie était si faible qu'il a été impossible de compléter son histoire au point de vue physique et chimique. Cepen- dant, ce résultat, quelque incomplet qu’il soit, m’encou- rage à essayer la transformation du camphre en un terpène, mais celte fois-ci en évitant d'opérer à des températures élevées qui détruisent ou transforment la majeure partie du produit; je me propose done de faire agir le sodium sur le corps Call obtenu par l’action du perchlorure de phosphore sur le camphre. J'ajouterai que la décomposition est très-complexe, car {201 ) il se forme toujours dans le tube un dépôt abondant de charbon. L'action du zinc en poudre a aussi été essayée, mais elle n’est pas plus nette que celle du fer. Afin de conserver tous mes droits à l'étude d'un com- posé nouveau, j'annoncerai à l’Académie que le camphre bromé, chauffé avec l'ammoniaque alcoolique à 180° donne naissance à une substance blanche, cristallisant en longues aiguilles, d’une odeur aromatique agréable, don- nant avec divers acides des combinaisons définies et cris- tallisables. J'espère terminer prochainement l'examen et l'histoire de ce composé qui, par son mode de formation, semble être le camphre amidé. ( 288 ) CLASSE DES LETTRES. Séance du 2 mars 1874. M. R. Cuaron, directeur. ` Sont présents: MM. Ch. Steur, J. Grandgagnage, J. Roulez, Gachard, P. De Decker , J.-J. Haus, M.-N.-J. Le- clereq, Ch. Faider, le baron Kervyn de Lettenhove, J.-J. Thonissen, Th. Juste, le baron Guillaume, Félix Nève, Alph. Wauters, G. Nypels, Alph. Le Roy, Ém. de Borch- grave, membres; J. Nolet de Brauwere van Steeland, Aug. Scheler, Alph. Rivier, associés ; E. Poullet, P. Wil- lems, Ferd. Loise, correspondants. M. Cb. Montigny, membre, et M. Éd. Mailly , correspon- dant de la classe des sciences, assistent à la séance. a CORRESPONDANCE. M. Ernest Quetelet, membre de l'Académie, fait officiel- lement connaître, par lettre de faire part, la mort de son père, M. Lambert Adolphe Jacques Quetelet, membre titu- laire de la classe et secrétaire perpétuel de l'Académie, décédé à Bruxelles le 47 du mois de février dernier, à l’âge de 78 ans. 1 ( 289 ) M. le directeur rend compte des dispositions qui ont été prises en ce qui concerne l’Académie, pour les funérailles du défunt. La Compagnie a assisté en corps à cette cérémonie et M. De Keyser, président actuel, s’est fait l'organe et l'in- terprète de ses confrères pour prononcer le discours d'adieu, lequel figurera au Bulletin. — La commission administrative s’est empressée de transmettre par écrit, à M. Ernest Quetelet, l'expression des condoléances de l’Académie. La classe décide qu'une lettre de condoléance sera adressée en son nom à la famille de M. Quetelet et que le Bulletin renfermera la mention de ses regrets. Elle s’en référera à la commission administrative pour les disposi- lions à prendre afin de perpétuer la mémoire de l’éminent secrétaire perpétuel de la Compagnie. — Différents ouvrages envoyés par MM. les Ministres de l’intérieur et de la justice seront inscrits parmi les tra- vaux présentés à la séance. — L'Université de Vienne, la Société royale de littéra- ture de Londres , la Société de statistique de Manchester, les bibliothèques de Gotha et de Munich remercient pour les derniers envois. — M. Faider, sur sa demande, est remplacé par M. De Decker pour examiner, en qualité de premier commissaire, les mémoires de concours concernant la question des rap- ports du capital et du travail. ( 290 ) —— La classe reçoit de ses membres les hommages sui- vants : 4° Chronique de Jean des Preis, dit d'Outremeuse, t. IH, publié par M. Borgnet, dans la collection des Chro- niques de la Commission royale d'histoire. Vol in-4°; X La révolution belge de 1830, 2 lettre à M. de Bavay, par Théodore Juste. In-8° ; | 5° Docteur Arnold Gheytoven, aus Rotterdam, etc., par Alphonse Rivier. In-8°. M. De Decker présente au nom de l’auteur, M. E. Va- renbergh, un exemplaire de l Histoire des relations diplo- matiques entre le comté de Flandre et l'Angleterre au moyen âge. Un vol. in-8°. . M.E. de Borchgrave offre , au nom de M. le prince Eugène de Caraman-Chimay, un exemplaire de son livre intitulé: Gaspard de Coligny, amiral de France, d’après ses con- temporains. Un vol. in-8°. La classe vote des remerciments aux auteurs de ces dons. ÉLECTIONS. Le comité de présentation de candidatures aux places vacantes donne lecture de la liste qu'il a arrêtée en séance du matin. La classe adopte ces présentations, qui seront commu- niqués par circulaire confidentielle à tous les membres titulaires. (291 ) RAPPORTS. ee Doon DE MAYENCE; deux fragments manuscrits de la fin du treizième siècle; notice par M. Stanislas Bormans. Rapport de M, Scheler. « L'épuration des textes de l’ancienne littérature fran- çaise, branche importante de la critique littéraire , est un objet non moins digne de solliciter l'attention d’une Aca- démie, que les études consacrées à leur juste interpréta- tion. Aussi les investigations dirigées vers ce but ont-elles toujours rencontré bon accueil auprès de notre classe des lettres. Il en sera de même, je présume, du petit travail sur lequel j'ai honneur de lui faire rapport et qui, à mon avis, remplit toutes les conditions voulues pour figurer avantageusement, dans les Bulletins, à côté d’autres notices du même genre. La communication de M. Stanislas Bormans consiste dans la transcription de six colonnes d’un manuscrit du treizième siècle qui contenait, en un texte de beaucoup Supérieur à ceux que l’on connaissait jusqu'ici, la chanson de geste intitulée Doon de Mayence. Ces six colonnes, com- prenant 240 vers alexandrins, occupent les deux côtés d’une pièce de parchemin soigneusement enlevée à la couverture d’un ancien registre des archives de l'État à amur. Malgré son peu d'étendue, le fragment découvert par M. Bormans sera accueilli avec faveur par les philologues, ( 292 ) comme offrant un échantillon précieux d'une version remontant peut-être un siècle plus haut que la plus an- cienne connue ` savoir celle du manuscrit de Montpellier, qui a servi à la première publication du Doon de Mayence, faite en 1859, par les soins de M. Pey. Un examen atten- tif des 240 vers m'a fait constater que le manuscrit dont ils ont été tirés se distinguait surtout par une fidélité remarquable aux règles strictes de l’ancienne langue; les variantes que j'y ai découvertes (j'en ai noté, à part les divergences d'orthographe ou de flexion grammaticale , jusqu’à 120), mont semblé pour la plupart préférables à la leçon du texte publié. A la vérité, celui de notre fragment n’est pas exempt de quelques irrégularités de versification et de lapsus divers imputables au scribe et faciles à re- dresser, mais en somme , comme le prouvent encore cer- taines omissions de vers, il porte l’empreinte d’une plus grande authenticité. La copie faite par M. Bormans est scrupuleusement exacte et démontre une familiarité parfaite avec ce genre d'opérations. Néanmoins je ne puis cacher que, dans une vingtaine de passages, ma lecture ou ma notation diffère légèrement de la sienne; ainsi je lis : au vers 3274 cour- cerai pour courterai, vers 3310 pecoyer pour peloyer;, vers 5590 très cou ke pour trestou ke, vers 3909 si tenre- ment pour sincèrement, au vers 3875, j'écris de fit (pour vrai) en deux mots; enfin j'ai remarqué l’omission du mot mestre dans le vers 3765. Un deuxième fragment de 160 vers, appartenant au . même manuscrit, avail encore été trouvé par M. Bormans; mais l'écriture en est tellement effacée qu'il n’eût été pos- sible de le transcrire que par petits tronçons. En tête de sa copie, M. Bormans nous donne quelques | | | ( 295 ) détails sur les trois manuscrits connus jusqu'ici, et discute l'opinion émise par l'éditeur du texte imprimé, quant à l'originalité respective des deux parties du poëme. Sur ce dernier point, il me semble à tort reprocher à l'éditeur français une certaine ambiguïté. Selon moi, les paroles de M. Pey font assez clairement entendre qu'il considère la seconde partie du Doon de Mayence, tel qu’il nous est connu, comme l’œuvre d’un arrangeur remaniant une ré- daction beaucoup plus ancienne, tandis que la première partie, qui renferme les Enfances Doolin, serait l'œuvre propre du trouvère arrangeur de la seconde. C'est à la première qu'appartiennent les deux fragments découverts. Ceux-ci, M. Bormans ne se le dissimule pas, n’ont qu’une importance scientifique médiocre, mais dans le domaine des études paléographico-littéraires, les moindres choses ont du prix, et je termine en exprimant le désir que la classe ne néglige point l’occasion qui lui est offerte de témoigner son intérêt pour les recherches de cette nature, en ordonnant l'impression des quelques pages qui lui ont été soumises par le savant et laborieux archiviste de Namur. » M. le baron Kervyn de Lettenhove s'étant rallié aux conclusions de son honorable confrère M. Scheler, la classe vote l'impression du travail de M. Bormans dans les Bul- letins. Ze: SÉRIE, TOME XXXVII. 20 (294 ) COMMUNICATIONS ET LECTURES. Le coup d'État du 18 juin 1789; notice par M. Th. Juste, membre de l'Académie. Depuis le coup d'État du 48 brumaire an VIH l'Europe a vu plus d'une fois le triomphe de la force sur la légalité. Triste spectacle dont Olivier Cromwell avait donné le premier exemple lorsque, après avoir chassé les représen- tants de l'Angleterre, il ferma la salle des communes et fit inscrire au-dessus de la porte : Maison à louer. Joseph IF imita Cromwell. En abolissant la Joyeuse entrée du duché de Brabant, il ne fut pas moins témé- raire ni moins coupable que le chef de la république d'An- gleterre. Je n’ai point à juger maintenant les réformes décrétées par le fils de Marie-Thérèse pour ranimer et régénérer les Pays-Bas autrichiens. Les intentions de l'empereur philo- sophe étaient louables, ses projets dénotaient un esprit supérieur à certains égards; mais vouloir imposer ses innovations par la force, c'était provoquer et légitimer une révolution. Cette révolution éclata et bouleversa la politique de Joseph I. Partage de la-Turquie, abaissement de la Prusse, échange des Pays-Bas contre la Bavière, tous ces rêves s'évanouissaient. Désespéré, regrettant sa faute, Joseph IF rejeta sur d'autres une responsabilité qui lui pesait comme un DOO mn inc tte T ( 295 ) remords. « … Tout ce qui s'est écrit et tout ce qui s'est passé, disait-il, pour amener les choses à ce point sera à jamais incroyable , et si je ne pensais qu'à moi, je publierais celle Correspondance avec mes réponses, desquelles on n'a rien exécuté et où on verrait par quelles assurances J'ai été conduit à lâcher l’édit de la cassation des états et du conseil de Brabant, dont de Bruxelles on a envoyé la minute ici, comme on la voulait. » Quels sont donc les véritables auteurs du coup d'État du 18 juin 1789? Les représentants de Joseph IE dans les Pays-Bas se sont-ils bornés à exécuter ses ordres ou bien ont-ils été au delà? Ont-ils mal conseillé l'empereur; lui ont-ils par leurs obsessions arraché des mesures fatales, ou bien n'ont-ils été que les dociles instruments d'une volonté impérieuse et tyrannique? C’est ce que nous nous proposons de rechercher. Le 16 aoùt 1787 l’empereur Joseph IT écrivait de Vienne à son frère l’archidue Maximilien, électeur de Cologne ` « J'ai trouvé bon de changer le ministre comte » de Belgiojoso, et j'ai choisi Trauttmansdorff pour pren- >» dre sa place. Je Pai rappelé ici pour l’instruire ; je crois » qu’il aura au moins le liant pour réussir dans ce pays (la » Belgique), et le bon sens et la docilité pour bien exécu- > ter ce dont il sera chargé. C’est un homme honnête , » intègre, patient; voilà les qualités principales. » Ferdinand, comte de Trauttmansdorff-Weinsberg , né le 12 janvier 1749, avait alors trente-huit ans. Représen- tant du gouvernement impérial près de l'électeur de Mayence et les cercles du haut Rhin et de D Franconie, ( 296 ) il n'avait point recherché le nouveau poste , le poste si périlleux, où Joseph IT l'appelait. Le 5 août 1787, au mo- ment où il s'y attendait le moins, raconte-t-il lui-même, il reçut une lettre du prince de Kaunitz par laquelle le chancelier de cour et d'État lui annonçait que a S. M. » l'avait destiné à la place de ministre plénipotentiaire aux » Pays-Bas, sur le pied que l'avait été M. de Belgiojoso, » et qu'il avait fort applaudi à ce choix. » En consé- quence, le chancelier priait M. de Trauttmansdorff de se rendre tout de suite à Vienne, s'il voulait, comme il le devait, profiter de la « bonté gracieuse » de S. M. Cette lettre troubla M. de Trauttmansdorff. Il appréhen- dait justement d'entreprendre une tàche dont la réussite lui paraissait moins que certaine. il répondit le même jour au prince de Kaunitz que « quelque flatté qu'il fût du choix que S. M. avait daigné faire de lui pour une place si importante et si difficile, plusieurs raisons la ren- daient incompatible avec ses circonstances particulières; qu'il ne se sentait pas d’ailleurs les talents qu'il fallait pour la remplir, comme on l'attendait sans doute de lui en Te destinant, mais qu'il se rendrait cependant incessamment à Vienne pour prouver son obéissance et détailler plus amplement ses raisons. » Arrivé à Vienne le 12 août, Trauttmansdorff fut reçu dès le lendemain par l’empereur. Celui-ci ne voulut écouter aucune exeuse; il ordonna au nouveau ministre de se mettre au courant des affaires des Pays-Bas en lisant les actes qui les concernaient et de lui dire son avis. Selon ce qu'il rapporte, M. de Trauttmansdorff parcourut alors pendant une quinzaine de jours une quantité immense de papiers. « J'y vis à regret, dit-il, ce qui s'était fait, et je > tremblai de ce qui devait se faire encore ; je représentai LS NO De En 00 en Den | és mt is mcm dits (297 ) » qu'il y aurait de la suffisance de ma part à espérer de » mieux réussir, de la témérité à l’entreprendre; mais je » ne fus point écouté (1). » La situation était, en effet, très-inquiétante. Joseph H ne voulait point ratifier les concessions faites, le 28 mai précédent, par les gouverneurs généraux afin de prévenir un soulèvement qui paraissait alors imminent. Il avait ordonné au prince Albert de Saxe-Teschen et à l’archidu- chesse Marie-Christine de se rendre à Vienne pour lui rendre compte de leur conduite et leur avait enjoint de se faire accompagner par une députation des états de toutes les provinces. Les gouverneurs généraux partirent le 19 juillet pour Vienne, où le 42 août arrivèrent aussi les députés des états. Ceux-ci ayant été reçus par l’empereur, un des représentants du Hainaut, parlant au nom de toutes les provinces , conjura Joseph II de retirer les diplômes du 1° janvier qui changeaient la forme du gouvernement et réorganisaient l'ordre judiciaire; il l'adjura de redresser les infractions faites aux lois constitutionnelles et de dé- clarer que les constitutions , droits et priviléges des pro- vinces, en général et en particulier, seraient religieuse- ment conservés et observés. Joseph IT tira un papier de sa poche et lut sa réponse : a Le juste mécontentement, » dit-il, que je ressens de tout ce qui vient de se passer (1) Fragments pour servir à l’histoire des événements qui se sont passés aux Pays-Bas depuis la fin de 1787 jusqu'en 1789, publiés par le comte de Traultmansdorff avec des notes eæplicatives (Amsterdam, 1792, in-8° de 192 pages), passim. — Ces Fragments sont une nouvelle édition, plus correcte et plus développée, de notes explicatives publiées antérieurement « par le zèle indiscret d’une personne qui avait cru peut- être, dit M. de Trauttmansdorff, me rendre service en publiant à mon insu les notes que j'avais faites. » | we w y vyw y SS w VU VS SR VY ( 298 ) dans mes provinces belgiques ne peut s'affaiblir par un vain étalage de paroles; mais il me faut des faits suivis pour me prouver la réalité des sentiments de fidélité et d’'attachement dont vous me donnez ici les assurances de la part de vos commettants. J'ai chargé le prince de Kaunitz de vous communiquer par écrit les ordres que je fais passer à mon gouvernement et dont l'exécution doit avoir lieu préalablement avant d'entrer en délibé- ration quelconque. Le prompt et entier accomplissement de ces ordres est d'autant plus nécessaire qu’en faisant rentrer toute chose dans la règle il fera en même temps cesser l’état de souffrance dans lequel se trouvent la circulation et le commerce. Que le bien-être de mes sujets est le seul objet de toutes mes démarches, ce dont je donne journellement les preuves les plus réelles; que je ne veux point renverser votre constitution, vous vous en persuaderez à l'évidence, en vous rappelant que c'est dans le moment où vous aviez tout osé et mérité mon indignation , et qu'avec tous mes moyens de puis- sance, je vous ai néanmoins réitéré l'assurance de la conserver. » En résumé, l’empereur exigeait que toutes choses fus- sent remises dans l’état où elles se trouvaient le 1° avril de cette année. Quand laccomplissement de ces conditions préalables aurait ramené l’ordre légal, il s’entendrait alors, écrivait-il à son représentant à Bruxelles (1), il s'enten- drait avec les assemblées provinciales au sujet des amélio- rations qui pourraient être introduites dans les différentes branches de l'administration sans violer les chartes fonda- mentales du pays. (1) Le comte de Murray, gouverneur général par intérim. bëssegen TZ ( 299 ) Le 25 aoùt, Joseph IT annonçait à son frère, le grand duc de Toscane, le départ des députés belges venus à Vienne, et il ajoutait : « Les troupes sont enfin rassem- > blées dans les Pays-Bas sans bruit ni difficulté. Je crois » que tout le reste s’ensuivra aussi et constatera que le $ gouvernement a très-mal vu, mal jugé et combiné, et » que, par ses faux rapports, il a failli me prostituer à » jamais et renverser tout l’ordre des choses, si je n'avais » seul résisté à confirmer ce qu'il représentait pour si » nécessaire, si on ne voulait tout perdre. Les choses ont » pris une {out autre couleur; et sans troupes d'Allemagne, » je leur ai prouvé qu’en le voulant on pouvait être leur » maître et les faire obéir malgré leurs fanfaronnades. » M. de Trauttmansdorff, qui avait jugé tout autrement la situation, pria l'empereur de le faire partir sur-le-champ pour Bruxelles, avec ordre de dire en son nom: e Qu’ayant » regardé l'envoi des députés et la facilité avec laquelle » s'était faite la concentration des troupes comme une » marque de soumission et de confiance, S. M. voulait » témoigner une égale confiance à la nation; que le plan » qu'Elle s'était proposé pour les Pays-Bas n'avait d'autre » but que le bien de ces provinces; qu'on méconnaissait » ses bonnes intentions à cet égard , et qu’on les croyait » incompatibles avec la constitution; og Elle y renonçait » donc entièrement, et demandait que ce fussent les états » eux-mêmes qui lui suggérassent les moyens d'obtenir » ce but, sans léser des droits et des priviléges qw Elle » était bien éloignée de vouloir enfreindre. » Joseph IT répondit qu’il ne pouvait plus être question de cette concession, puisqu'il s'était déjà trop avancé en- vers les députés et avait, entre antres, exigé quelques points préalables. ( 300 ) Le comte de Murray avait cependant devancé les vœux de M. de Trauttmansdorff, mais au grand mécontement de l'empereur. Les états ayant accepté les conditions préa- lables, le comte de Murray déclara que les constitutions , lois fondamentales, priviléges et franchises des provinces étaient maintenus, tant pour le clergé que pour l'ordre civil; que les nouveaux tribunaux de justice et les inten- dances étaient et résteraient définitivement supprimés ; que les anciennes juridictions , tant supérieures que subal- ternes, les états et leur députation , les diverses adminis- trations des villes et du plat pays, étaient rétablis et main- tenus; qu’à l'égard du redressement des infractions à la constitution, il en serait traité avec les états, ainsi qu'ils l'avaient demandé; qu’on recevrait en conséquence leurs propositions sur cet objet, et que l’empereur y disposerait d’après l'équité et la justice, selon les lois fondamentales. Joseph H reprocha au comte de Murray de s'être laissé arracher par une nouvelle émeute cette déclaration, publiée, le 21 septembre, sur le perron de l'hôtel de ville de Bruxelles. Le 8 octobre, l’empereur adressait à M. de Trauttmans- dorff une lettre où il blâmait vivement M. de Murray donnait des instructions formelles à son successeur. (el ne « Vienne, 8 octobre 1787. » Je crois l’époque enfin arrivée où il convient de vous rendre le plus tôt possible à Bruxelles. Vous verrez par l'expédition de la chancellerie d'État qu'on dit les troubles finis. Mais M. de Murray a terminé par une école, à peu » près aussi forte qu'était celle du comte de Belgiojoso et de » leurs Altesses royales. » I a causé une espèce d'émeute; il a laissé insulter le mili- KI > x v z d v w v x >» 501 ) taire sans en tirer raison , en cédant sur tout, et en donnant aux élats une déclaration en mon nom, absolument con- traire aux ordres que je lui avais transmis; aussi me vois-je dans le cas, vu les infirmités de cet homme invalide, de conférer la place de commandant général au lieutenant général d’Alton, que j'ai nommé en même temps feldzeug- meister. C’est un homme à qui je connais assez de fermeté et d'intelligence pour bien gérer cette besogne. » Quant à vous, l'essentiel sera, lorsque vous serez aux Pays-Bas, de déclarer ne vouloir plus entendre parler de ce qui s'était passé, et que vous avez ordre de n’entrer en négociation quelconque avee les états sur tout ce qui est relatif à cette histoire scandaleuse; que les tribunaux restant entièrement sur l’ancien pied, ainsi que les grands bail- liages et les administrations municipales, il vous était en- joint de n’écouter là-dessus d’autres plaintes, mais de faire rentrer tout dans l’état qui a subsisté en avril de cette année, et de le faire observer de même. C’est la seule facon de faire cesser toutes les intrigues et clabaudages dont on ne verrait pas de fin sans cela. Il faut avoir la patience d'écouter beaucoup et de parler à différents individus; mais il faut tenir ferme, et ne pas se laisser arrêter, ni intimider par qui que ce soit dans l’exécution des ordres, et à l'égard de ce qu’on est en droit d'exiger. Il convient même de l’appuyer avec une force suffisante, et de ne pas cesser que tout ne soit exécuté, sans se laisser leurrer de vaines pa- roles, ou de promesses protractives. . » C’est le conseil de Brabant, et les fes qui sont i plus entêtés, et les plus mal intentionnés, et sans lesquels il n'y a pas moyen de rien faire. Il faudra done une bonne réforme. Le chancelier de Crumpipen est celui qui sera le plus en état, s'il veut parler en honnête homme, et qu'on ménage sen nom, d'indiquer les sujets les plus pervers, et qui mériteraient d'être renvoyés au plus tôt, me réservant (302) de les remplacer ensuite par d’autres individus, en confor- mité de ce que la Joyeuse entrée exige. » Voilà tout ce que je puis vous dire pour le moment; je désire bien d'apprendre incessamment votre arrivée à Bruxelles. » E) x bd M. de Trauttmansdoff arriva à Bruxelles le 27 octobre. « Mon début, dit-il, ne fut qwune suite de succès, et peut-être aurais-je eu le bonheur de réussir, si j'étais resté seul. » Mais il avait à lutter contre le comte d’Alton dont les pleins pouvoirs le rendaient absolument indépen- dant du ministre. Joseph If voulait que l’audace toujours croissante de l'opposition vint échouer contre une inflexible fermeté. M. de Crumpipen, chancelier de Brabant et commissaire chargé de faire aux états la demande des subsides ordi- naires, fut, le 20 novembre, insulté par des huées lors- qu'il sortait de sa voiture devant l'hôtel de ville de Bruxelles. Indigné, l’empereur lui écrivit bientôt (8 dé- cembre) : e … Mettez-vous au-dessus de toutes les me- naces, qui sont la ressource des poltrons, ainsi que de toutes les satires, qui sont les armes des gueux et fana- tiques échauffés par des fripons. Riez-en le premier, comme je le fais, et vous ferez même avorter le plaisir qu’ils se promettent d’avoir pu vous fàcher. Au reste, vous pouvez compter que je saurai vous soutenir de toute mon autorité et, s’il le faut, avec des canons et des baïonnettes, ainsi que tous ceux qui, pendant ces troubles, n’ont pas oublié ce qu’ils me doivent comme sujets et comme employés. Mais il est essentiel, monsieur le chancelier, que vous fassiez au plus tôt connaître au ministre (M. de Trauttmansdorff) les personnes du con- MN ww e NW, ww e RS E aa LL. tele D Éd St ATE A AEEA T A ett che A ( 505 ) seil de Brabant ainsi que les fiscaux qui, à cette ocea- sion, ont levé le masque, et je m'attends de votre zèle et impartialité reconnue, que vous les lui indiquerez fidèlement, sans égard pour qui que ce soit, puisque mon service et le bien de l'État exigent indispensable- ment qu'on se défasse le plus tôt possible de ces indi- vidus, que leur conduite a rendus indignes d'être con- servés plus longtemps dans des places de confiance. Vous indiquerez aussi au ministre les sujets imbus de Dons principes que vous croirez qualifiés , selon la con- stitution , pour succéder à ceux qui seront renvoyés (4).» Pour obéir aux injonctions de l'empereur, M. de Trautt- mansdorff publia le 17 décembre une nouvelle déclaration portant « que Joseph IT entendait que les édits, ordon- » nances, règlements et autres dispositions émanés à » l’époque du 1° avril 1787, subsisteraient dans leur force » et vigueur, à l'exception cependant des édits relatifs aux » intendances et aux nouveaux tribunaux. » La majorité du conseil de Brabant ayant refusé l'émana- tion de cette proclamation, le ministre, après avoir pa- tienté pendant cing jours, écrivit au chancelier le 22 jan- vier 1788 : e Si l’émanation ne se fait pas d'ici à deux » heures, je la ferai faire de force, dussé-je faire investir » le conseil et employer le triste moyen des canons et des » baïonnettes. » Les troupes, en effet, parcoururent les principales rues, occupèrent la Grand’place, et, par leur présence, arrachèrent l'adhésion du conseil de Brabant. Lorsque, au mois de mai suivant, les états de Brabant se réunirent à Bruxelles les troupes occupaient de nouveau MON “t VU VU CN M. vy v we (1) Cette lettre a été publiée par M. Gachard dans ses Analectes histo- riques. ( 304 ) les places principales de la ville. Les deux premiers ordres ayant accordé les subsides ordinaires, les gouverneurs généraux , qui étaient revenus dans la capitale des Pays- Pas autrichiens. déclarèrent, au nom de l’empereur, « que » S. M. accordait Foubli total du passé et rendait à la » mation et à ses représentants son ancienne bienveil- » lance et sa confiance; que résolue de maintenir la » constitution actuelle de ses provinces belgiques, elle » s'occuperait constamment de ce qui pourrait contribuer » à leur bien-être et prospérité. » Cette dépêche, très- inattendue, produisit une heureuse impression. Le tiers état, dont le vote était obligatoire, confirma la résolution des deux premiers ordres. M. de Trauttmansdorff voulut profiter de cette trêve. Le 4 juin, il fit proposer aux états de Brabant de se concerter avec lui pour la mise à exécution des parties essentielles des réformes de Joseph H. Une commission conféra avec le ministre; mais il fut impossible de s'entendre. Avant de se séparer les états adressèrent même à l'empereur une nouvelle représentation dans laquelle ils protestaient avec énergie contre toutes les mesures prises en dernier lieu tant au sujet du conseil de Brabant, dont les priviléges constitutionnels n'avaient pas été respectés, qu'au sujet de l’université de Louvain, qui avait été châtiée et disloquée, ainsi que du séminaire général, lequel avait été main- tenu. | La fermeture violente des séminaires épiscopaux de Malines et d'Anvers allait encore accroître l'effervescence des esprits. Dans une lettre confidentielle adressée le 23 septembre à M. de Cobenzl, vice-chancelier d'État, M. de Trauttmans- dorff prédisait une révolution prochaine si lon ne sp np ne ns e pp e Sg vvv v e e ( 305 ) hâtait de substituer la légalité à la violence. « La mé- » fiance, l'aigreur et l'esprit de vengeance sont au plus » haut degré, disait-il. Une sombre tristesse a succédé à » la folle résistance. Les provinces belges sont prêtes à se » jeter dans les bras d'une puissance quelconque, qui leur » assurerait leur constitution ; elles renonceraient même » à celle-ci pour être gouvernées par les voies légales, » Sans être toujours menacées et subjuguées par la force » militaire. » Il fallait, d’après lui, commencer par rap- peler le général d’Alton, qu’il considérait comme la prin- cipale cause des malheurs présents et à venir, et qui s'était fait non-seulement l’espion, mais le contrôleur et le juge en dernier appel du gouvernement. La lettre de M. de Trauttmansdorff ayant été communiquée à Joseph IE, celui-ci écrivit au prince de Kaunitz : « Il serait du plus pernicieux exemple de changer généraux ou employés qui déplaisent. Le ministre est le seul maître de gérer les affaires; qu’il se fasse estimer et aimer, la crainte qu’on aura du militaire sera un moyen de plus pour lui, Pour se faire obéir. — Tous ces contes sont des pau- vretés au-dessus desquelles le comte de Trauttmans- dorff doit se mettre et ne pas commencer, comme longtemps il s’en est défendu, à prêter l'oreille à des petitesses ou à des propos d’intrigants qui veulent semer la zizanie. Vous lui ferez comprendre cela, et s’il ne sait aucun autre moyen de rétablir la confiance, il faudra y renoncer et se retourner sur l'obéissance, en faisant en même temps argent de tous les droits et possessions en régales qui existent aux Pays-Bas. » C'était done avec anxiété que M. de Trauttmansdorff voyait approcher l’époque de la deuxième session des états de Brabant. [l craignait un refus des subsides. En effet, RS e y A ( 306 ) lorsque la session eut été ouverte le 21 novembre, le tiers état refusa formellement son adhésion, et, malgré les promesses et les instances du ministre, 1! demeura inflexible. Les états du Hainaut avaient également refusé les subsides, avec plus de fermeté encore que ceux de Brabant. Mais Joseph IF, lui aussi, demeurait inflexible. Il écrivit à l’archiduchesse Marie-Christine ` « Bien éloigné de faire » des concessions humiliantes et dangereuses, je suis fermement et irrévocablement décidé à ne point céder, et à faire venir les choses une fois à cette extrémité à laquelle on me force, et qui peut-être fournira seule l’occasion de couper en piein drap le mal dans sa source. Jose vous prier, tous deux , de bien épauler le ministre et le général des armes dans ce qui sera néces- saire de faire, et surtout de bien persuader que ce ne sont point des menaces, mais des réalités, et que je suis décidé à tout risquer plutôt que de céder sur des points dans lesquels j'ai clairement raison et le bon droit pour moi... » Quant à M. de Trauttmansdorff, il se montrait indécis et perplexe : il aurait voulu se concilier les états et cepen- dant ne point déplaire à l’empereur; il redoutait les consé- quences d’un coup d’État, et il n’osait point s’y opposer avec énergie et persistance. Tl écrivait à M. de Cobenzl (6 janvier 1789) : e Il nous faut pour cela au moins trente » mille hommes de troupes encore, et si nous pouvons et » voulons y employer une pareille force, ce serait une > duperie toute pure de se borner à cela, et de ne pas » faire d’un seul coup de ces provinces un pays de con- Ss e y ww RS KR Sg S NT u _» quête, qui n'aurait plus ni priviléges ni constitution; » reste à savoir si nous y gagnerions beaucoup; la consti- | | | ( 307 ) » tution ,si on n’en abuse, n'est certainement pas nuisible » à l'autorité, tandis que si on l’attaquait, nous nous prive- » rions dans le moment de tout ce que nous pouvons tirer » de ces pays-ci en la maintenant et donnerions de l'om- » brage à nos voisins, ou au moins l’occasion de se mêler » de nos affaires s'ils le voulaient (1)... » Mais à Joseph I} il tenait un tout autre langage ` a Il faut, disait-il, à tra- vers toutes les difficultés, se rapprocher toujours plus de l'époque où lon pourra une bonne fois tout finir (2). » Cette époque approchait; mais le dénoûment, si impa- tiemment attendu , devait tromper toutes les prévisions de la cour de Vienne. (À continuer.) Doon DE Mayence. — Deux fragments manuscrits de la lin du treizième siècle; notice par M. Stanislas Bor- mans, archiviste de l’État à Namur. Les éditeurs de Doon de Mayence nous disent qu'ils wont connu que trois manuscrits de cette chanson de geste. Le premier et le meilleur, qu’ils ont adopté pour leur texte et désigné par la lettre a, appartient à la Biblio- thèque de Montpellier et date d'environ la moitié du qua- torzième siècle; il est du format in-4°, d’une écriture à deux colonnes, et compte 225 feuillets en vélin. Mais, outre Doon de Mayence placé en tête du volume, et qui, (1) Lettre trouvée dans les papiers du comte de Trautimansdorff et publiée en 1790 par le comité des recherches. (2) Rapport à l'empereur du 14 novembre 1788 trouvé dans les papiers du comte de Trauttmansdorff et publié également par le comité des recherches. ( 508 ) ne se composant que de 11,505 vers, ne s'étend que du premier feuillet jusqu'au quarante-sixième, le reste du volume contient encore la plupart des autres poëmes de cette grande geste, notamment Gaufrey (10,735 vers), Ogier de Danemarche (13,200 vers), Guy de Nanteuil (5,0541 vers), Maugis d Aigremont (4,704 vers), l'Ama- chour de Monbranc (1127 vers), les quatre fils Aymon (12,177 vers). Le Doon compris dans ce recueil est, disent les édi- teurs, le plus ancien et le moins incorrect des trois ma- nuserits qu'ils ont eus à leur disposition. Ils y signalent toutefois quelques lacunes, parmi lesquelles deux assez considérables, chacune d’environ une colonne et demie, laissées en blanc par le copiste, et qu’ils ont comblées au moyen de leur second manuscrit ; les omissions de moindre importance et les autres inexactitudes ont été indiquées et corrigées par eux dans les Notes et les Variantes. Ils désignent leur second manuscrit par la lettre b. C’est le n° 2020 du Supplément français de la Bibliothèque na- tionale à Paris, petit in-folio de 130 feuillets de papier, écrit à Douay, Tan 1463. Malgré cette date assez récente, il renferme une version moins développée que celui de Montpellier, « puisqu'on n’y compte que 6,500 vers en- viron. En outre, la langue en est singulièrement altérée, rajeunie , et d’une orthographe si tourmentée, que celte seule considération aurait suffi pour faire accepter aux éditeurs les longueurs du manuscrit a, lequel, s’il n’est pas très-pur, se rapproche néanmoins beaucoup plus des habitudes du vieux langage. » Ce second manuscrit, ajoutent-ils encore, nous a cepen- dant été fort utile : « nous lui avons emprunté de pré- cieuses rectifications , et nous nous en sommes aidés pour combler les lacunes du manuscrit principal. » RÉ a a, TS PO DOS ET i ( 309 ) Leur troisième et dernier manuscrit, qu’ils désignent par la lettre c, est pareillement conservé à la Bibliothèque nationale sous le n° 7635 de l’ancien fonds français. C’est, comme le manuscrit précédent, un petit in-folio du quin- zième siècle. e Il nous a été d’un moindre secours, disent les éditeurs, que le manuscrit b, car il ne nous offrait qu'un texte fort mutilé, de 4,300 vers environ, dont les feuillets, par parenthèse, ont été intervertis à la reliure. Nous n’avons pas laissé cependant d'en tirer encore quel- que parti. » — « Íl ne faut rien négliger, ajoutent-ils, rien dédaigner pour épurer ces vieux textes autant que faire se peut : on sera maintes fois surpris de voir qu'un méchant copiste aura retenu la bonne leçon précisément à l'endroit où le scribe le plus attentif l'aura laissée échapper. » Ces dernières réflexions prouvent que les principes, les traditions philologiques du seizième, du dix-septième et du commencement du dix-huitième siècle n’ont jamais été entièrement oubliées en France, et qu'après de longues, de trop longues années de préoccupations militaires et politi- ques,et malgré Féclat éblouissant d’une littérature nationale moderne qui semblerait devoir suffire à la gloire où peut aspirer une grande nation par les productions de son génie et la hauteur de sa culture intellectuelle, les savants fran- çais du dix-neuvième siècle apprécient encore, avec la reconnaissance et le respect qu'ils méritent, les travaux littéraires des créateurs de leur belle langue , ainsi que les étades et les efforts d'érudition par lesquels les plus émi- nents de leurs prédécesseurs leur en ont conservé, trans- mis et éclairci les précieux monuments, comme d’autres, et en partie les mêmes, l'avaient déjà fait pour les restes des écrivains de la Grèce et de Rome. Tout le monde doit se rappeler les noms des frères Pithou et Dupuy, des Scaliger 2%° SÉRIE, TOME XXXVII. 21 ( 310 ) père et fils, des Étienne, de De Thou, des Casaubon, de Sau- maise et Turnèbe , de Baluze, et d’une foule d’autres. Les renseignements que j'ai donnés tout à l’heure sur les trois seuls manuscrits de Doon de Mayence conservés en France (1), je mai eu qu’à les emprunter aux éditeurs mêmes ; cette pénurie, pour ne pas dire ce manque absolu d'anciennes et bonnes copies de ce poëme , a dû parfois les gêner considérablement, ainsi que l’atteste leur note sur le vers 24 de la page 45 , et comme le lecteur s’en aperçoit encore ailleurs. ll ya plus : des divers rapprochements qu’ils ont eu soin d'indiquer, ils croient être fondés à « conclure que le poëme, tel qu’ils le publient, n’est que le remaniement d'une chanson plus ancienne mise en oubli par les nou- veaux jongleurs, mais bien connue encore de l’auteur de Girart de Viane qui y fait une allusion évidente, » et connue probablement aussi, comme ils tàchent de léta- blir, de l’arrangeur de la rédaction dont ils publient le texte, qu'ils ne désignent, par conséquent, en général que comme une révision de la composition primitive, « qui a dû précéder de cent ans au moins la rédaction que nous possédons. », Je me garderai bien d'élever la moindre objection contre cette conclusion; mais je dois avouer que je ne comprends pas pourquoi, ensuite, les éditeurs ne l’étendent pas à tout le poëme. Voici, en effet, ce qu’on lit page vu de leur (1) Les deux que l’on croyait exister à Venise d’après le catalogue de Zanetti, et sur lesquels le bibliophile Jacob (Paul Lacroix) et Adalbert Keller eux-mêmes se sont laissé tromper, se rapportent à un autre Doon de Mayence qui n’a rien de commun avec le héros des manuscrits de Montpellier et de Paris. ) | $ Í E t Í H f ( 311 ) Préface : « Le poëme se divise en deux parties : la pre- mière, qui compte 6,056 vers, est consacrée à la Jeunesse de Doon; la seconde, qui n’en renferme que 5,467, raconte les exploits du héros parvenu à son âge můr. » « De ces deux parties, la première est de beaucoup la plus intéressante, et c’est celle-là surtout que nous en- tendons louer. Les événements s’y enchainent avec plus de naturel; l'allure du récit est plus vive et plus franche; on voit que le poëte, affranchi de toute contrainte, s’aban- donne en toute liberté au tour de son esprit et aux inspi- rations de son imagination. Nous sommes persuadé que la Jeunesse de Doolin est une œuvre originale. » e Dans la seconde, au contraire, nous trouvons moins de grâce et d’aisance , mais plus de majesté et de grandeur; il y règne çà et là un cena souffle é Gees qui rappelle de temps en temps le ng Pour cette seconde partie, notre troüvère a dé avoir sous les yeux la rédaction primitive dont nous avons parlé ci-dessus. » J'avoue, dis-je de nouveau, qu’en dépit des raisons alléguées dans ces derniers paragraphes, j'ai quelque peine à comprendre pourquoi, après avoir constaté qu'à une époque, dont ils sont même parvenus à indiquer approxi- mativement la date, le poëme de Doon a subi un remanie- ment, ils n’admettent cette révision que pour la seconde partie et se disent « persuadés que la première, qui décrit là jeunesse de Doon, est une œuvre originale, » Cette distinction qu’ils établissent entre les deux par- ties, dont la dernière (1} seule aurait été remaniée, (1) Je dis la dernière parce que c’est réellement de celle qui termine le poëme qu'il s’agit, des 3,467 vers où sont racontées les gestes du héros à son âge mùr; j'ai besoin de prévenir toute confusion. ( 312.) m'étonne d'autant plus qu’ils me paraissent ne l'appuyer que sur des raisons purement esthéliques , qu’on ma tou- jours dit être les plus difficiles à discuter, et sur lesquelles les convenances me défendent de contredire des savants rompus à ce genre d'études. Jose tout au plus faire la remarque que les différences qu'ils ont observées entre la manière, la forme et le ton des deux arrangements, peut tout aussi bien résulter de la diversité du fond, de la plus grande variété des incidents et de la marche de plus en plus rapide du récit, dont, après une si longue course, le trouvère fatigué devait nécessairement sentir le besoin d'atteindre la fin. J'ai dit que tous les raisonnements avancés par les édi- teurs pour justifier leur opinion appartiennent au domaine esthétique, et n’ont par conséquent qu’une valeur sub- jective que tout autre juge pouvait contester. Je me suis exprimé en cela d’une manière trop absolue : j'aurais dù faire une petite restriction; car une de leurs preuves repose réellement sur une autre base, et cette unique ex- ception, loin de favoriser leur manière.de voir, me semble plutôt la contrarier et dès lors autoriser des doutes à l'égard de la justesse de cette opinion dont tantôt encore ils se déclaraient « persuadés, » et que, dans les lignes suivantes, nous allons les voir eux-mêmes réduire au rôle plus modeste d’hypothèse. Je reprends done ici, pour la continuer, la transcription de leur jugement sur la seconde partie du poëme que j'ai interrompue trente lignes plus haut après les mots : la rédaction primitive dont nous avons parlé ci-dessus. Voici, en effet, comment ils ter- minent : « Nous lisons dans la Jeunesse un passage qui semble confirmer cette hypothèse. Le poëte, décrivant les perfec- ( 313 ) tions de Nicolette, la met au-dessus de toutes les femmes, à l'exception d'une seule dont il sera question plus tard : » Tant com Dex a poveir, à qui trestout apent, Ne trouvast on pas femme de si trez bel semblant, Si sage ne si preus ne si aperchevant , Plus duite de parler bel et cortoisement , Fors que une autre aussi, dont vous orrés avant : Mes chele passe tout , vous orrés bien comment. « Ce soin que prend l’auteur de subordonner l'héroïne de la première partie, Nicolette , à Flandrine, l'héroïne de la seconde, n’indique-t-il pas qu'an moment où il écrivait ces vers, il avait sous les yeux la vieille chanson de Doon qu'il se proposait de remanier, et qu’il considérait la Jeu- nesse seulement comme une introduction à l'œuvre prin- cipale ? » I ne peut être douteux pour personne que le remanieur d'un écrit ait eu sous les yeux le livre qu’il remaniait; mais je conçois moins qu’on allègue précisément comme preuve d’une pareille opération un passage de la partie d’un livre que, d'un autre côté , on déclare être une œuvre originale, c’est-à-dire, si je l'entends bien, non remaniée; car les six vers qu'on donne comme preuve du remaniement (1), se trouvent dans la Jeunesse de Doolin (l'œuvre originale des éditeurs, vers 3,637-3,643) , c'est-à-dire dans la pre- mière partie, où il s’agit de Nicolette; et les passages qui vantent et exaltent l’autre héroïne, Flandrine, se lisent (1) U est vrai qu'ici (Préface, page vin) ils disent seulement que le trouvère e se proposait de les remanier; » pourquoi cessent-ils d'affirmer que celte révision eut réellement lieu? Cette inconstance m’embarrasse beaucoup; je crains bien qu’elle ne témoigne un peu de leur embarra aussi. ( 314 ) dans la seconde partie (vers 6,474-6,479, et 6,776- 6,779, etc.), c’est-à-dire dans la partie non originale de l'œuvre, pour autant du moins que je comprends les adjectifs primitif, remanié, revisé, original et même premier et second, comme eux, ce dont je ne suis pas tout à fait certain. A ces difficultés vient encore s'ajouter celle-ci, que les éditeurs, après avoir cité, comme nous venons de le voir, les six vers où l’auteur subordonne Nicolette à Flandrine, demandent , entre autres choses, s’il n’en résulte pas «qu'il (auteur, ou plutôt le remanieur ?) considérait la Jeunesse seulement comme une introduction à l'œuvre principale?» Je comprends trop peu la question pour oser entreprendre d'y répondre , et ne sais pas même quel sens ils veulent que je donne à ce qu’ils appellent l'œuvre principale, si c’est toujours ou non l’œuvre qu’ils ont appelée originale? Plus j'examine ces passages, plus j'y trouve d’obseurité et de difficulté, et comme il mest impossible de saisir et de classer tant de distinctions, et par conséquent de suivre jusqu’au bout les éditeurs dans leur démonstration, on me permettra de me borner à confesser mon embarras sans que j'essaye de pousser plus loin mon étude à ce sujet. Je n’ai du reste à rendre compte que des questions qui se rattachent directement aux deux fragments d’un ma- nuscrit sur parchemin, jusqu'ici inconnu, du poëme de Doon, dont je viens annoncer la découverte en tête de cette petite communication, et que je serais heureux que la classe des lettres de l’Académie royale de Belgique erût pouvoir juger dignes d’être accueillis dans ses Bulletins et portés ainsi à la connaissance des amateurs de cette litté- rature, non-seulement en notre pays, mais encore à l'étranger et particulièrement en France. ( 315 ) Je n’attache de l'importance à ma trouvaille que pour autant qu'elle puisse, de manière ou d'autre, contribuer à résoudre quelqu'une des questions soulevées par les édi- teurs, ou du moins aider à satisfaire à leur recommanda- tion de « ne rien négliger pour épurer ces vieux textes, » comme eux-mêmes en ont, à cette fin, donné l'exemple, quand ils ont aussi eu recours à l’œuvre des plus mé- chants copistes. Je n'ai pas la prétention de faire passer le texte de mes fragments pour absolument pur ou pour le meilleur possible; mais autant que mes connaissances en paléographie et lavis d’autres personnes très-compétentes en ces matières, qui ont vu les feuillets, me permettent d'en juger, l'écriture peut s’en rapporter à la fin du trei- zième siècle, date à laquelle le manuscrit de Montpellier même ne paraît pas remonter; et si l'antiquité d’une copie n'est pas toujours une garantie certaine de l'excellence des leçons qu’elle fournit, elle est au moins, aux yeux des critiques, une présomption de sa bonté relative, parce que les copistes postérieurs s’écartent en général de plus en plus de la langue de l'original, que parfois ils ne com- prennent plus qu'avec peine. Mes deux fragments proviennent d’un volume in-folio de moyenne grandeur, écrit à deux colonnes , chacune de 40 lignes. Le premier de ces fragments consiste en un seul feuillet dont les quatre colonnes (deux au recto et deux au verso) comprennent ensemble 160 vers correspondant aux vers 1782-1958, pages 55-60, de l'édition des Anciens poëtes de la France publiés sous la direction de M. E. Gues- sard, sauf une différence, de 16 vers en moins, dans le manuscrit, comme la comparaison des chiffres l'indique. Cette différence provient de lacunes, qui sont tantôt d’un vers, tantôt de deux, et qui, à cause d’autres variantes (J165) aux mêmes endroits, servant de rajustement, me parais- sent moins le résultat d’une négligence du copiste, que d'une suppression volontaire faite dans le texte écrit, ou d'une interpolation reçue dans le lexte imprimé. Le mau- vais état de ce feuillet, qui est en grande partie illisible, me défend den dire davantage à ce sujet ou d'examiner de plus près ce premier fragment ; il m'a pourtant été permis de constater que les variantes de mots et de formes ortho- graphiques y sont très-nombreuses et en partie fort remar- quables. Si je n’en ai pas recueilli au moins un échantillon, c'est parce que j'ai souvent trouvé ces sortes de triages trop incomplets pour être-réellement utiles, et que j'étais décidé à copier plutôt mon deuxième fragment qu'à en extraire péniblement les variantes éparses, disloquées et, sans explication, plus où moins énigmatiques pour le lecteur; d'après mon calcul, avec une copie suivie, nous devions de part et d'autre y mettre moins de temps et moins de peine. Je passe à mon second fragment, sur lequel il me sera d'autant plus facile d’être bref, qu'une partie des indica- tions précédentes le concernent déjà , et que sa bonne con- servation me procurera l'avantage d'en mettre le texte entier sous les yeux de l’Académie. H se compose d’un feuillet et demi, conservés dans toute leur longueur, mais séparés anciennement, dans le volume, par deux autres feuillets qui formaient le milieu d’un cahier de quatre feuillets on d’un quaternion. Autrement dit : de quatre feuillets in-folio pliés ensemble, nous n'avons que le pre- mier et la moitié (une colonne recto et verso) du qua- trième. Or, comme chaque page a deux colonnes et chaque colonne quarante vers, il nous manque d’abord, après la deuxième colonne du verso du feuillet complet, 320 vers; i f f i ( 317 ) ensuite, après la cinquième colonne de tout le fragment , 80 vers, ensemble 400, avant que nous rejoignions de nouveau le texte des éditeurs, avec lequel nous marchons ainsi de compagnie, dans le premier fragment, depuis leur page 55, vers 1782, jusqu’à la page 60, vers 1957; et dans le second, depuis la page 98, vers 3226, jusqu’à la page 105, vers 3391, ensuite depuis la page 115, vers 5755, jusqu’à la page 114, vers 3779, et plus loin depuis la page 117, vers 35868, jusqu’à la page 118, vers 5909, où nos fragments finissent. Ma communication serait incomplète, si je ne disais, en outre, que ces feuillets appartiennent au dépôt des archives de l’État, à Namur, et se trouvaient collés dans la couverture délabrée et en partie pourrie d’un registre de E hòpital Saint-Jacques du quinzième siècle. . Les chiffres en marge sont ceux de l'édition de Paris ; chez F. Vieweg, maison A. Franck, 1859. ! TEXTE DU SECOND FRAGMENT. 5226 Uns damoisiaus le viest et atorne si gent. Au moustier sunt alet ensanle devisant; Là le fist chevalier ses oncles maintenant. uant il fu adoubés devant toute le gent, 5250 Moult [par] li sieent bien li riche garniment, Tant par ot le chief blont et cresp et reluisant, Le vis lonc et traitic (sic) et la bouce riant, Jex vairs et amourous et le cors bien séant; Les bras gros et nervus et le puing par devant, Grailles par le çainture, biau cors et bien séant. Grans et biaus fu, et lons et de si biel sanlant : Tuit s’en sont mierveilliet, li petit et li grant; Car il wot que zt, ans, et si ot force grant; 5240 Onques n'en ot tant hom ki fust à celui tans. Arméures li font aporter tout errant; `~ (318) Unes cauces de fier lace à noïaus d'argent; Sa viesti dh aubierc et 1. iaume luisant; L’escut pent à son col, à un lion rampant, 3245 Et es de plain puing, à .r. boin fier trençant. Parmi les chevaliers vait joustes demandant ;- Mais n'i ot si hardit ki ost aler avant, Ne mais .1. chevalier comme apiele Gaiant, Pour con kil fu plus grans d'un autre durement ` 5250 Tuit le tienent entre aus li plus à mescréant; Car il avoit soufliert escumeniemant mt. ans treslous entiers et plus, mien ensiant, Car il avoit eüt de sa fille .r. enf; Il ne deignoit venir à nul amendement ; 5255 Ne fust mie souffiert, saciés tout vraiement; Mais tant estoit frans hom et de si haute gent Que nus bom ne l'osoit desdire tant ne quant. De Doon ca véut que on va si loant Sa bonté, sa valour et son grant hardement, 3260 Il en a tel desdaing et si grant mautalent, Que Damediu jura, le père raemant, Que ja fera chéoir son los et son beubant. i vasaus vait tantost unes cauces lacier Et viesti .r. haubiere fort et boin et doublier; 3265 Sour .1. cheval monta ki tant fist à proisier, Et pent l'escut au col ki estoit de nn Une lance enpuigna qui estoit de pron C'aguissier fist devant, et le fier ira Et le pointe endurcir pour le mius damagier. 5270 En le place est venus, si commence à bucie « Vasal, moult par vous voi devant tous palmoyer semonre cascun pour vo cors asaye! » Et pour aus metre arrière et pour vous avancier ; » Mais je vous courcerai, se jel puis esploitier; 5275 » De cel grant cheval sor vous ferai eslongier; » Se la quisse vous fraint n'en donroie 4. denier, » Car trop vous voi ichi .ı. petit manechier. » Et Hugues li respont : « Trop poés corechier ; » Or poés vo cheval et vos armes ballier, 3280 » Car il wi joustera, se Dius me puist aidier. » — « Oncles, fait Doolin, par le cors saint Ligier, E) EE e ( 319 ) » Ne foi que je doi Diu, le père droiturier, » Se vous ne me laissiés 1. poi esbanoyer » Et jouster à cestui ki en a desirier, 5285 e Jamais [je] n’amerai riens que vous ayés chier. » Donques porai-jou mal me grant honte vengier » Que on a fait ma mère, qui tant fait à proisier » Contre .u. chevalier au fier et à l’achier (sic), » Se jou ne puis cestui mater et justicier 5290 » Qui felenessement ci me vient laidengier. » Laissiés mi donc aler; se Dius me veut aidier, » Je li ferai anqui se grant jangle abaissier. » — « Biaus dous niés, fait-il, ne vous caut d’airier; » Bien devés vostre cors garder cl tenir cier 5295 « Ki si grant fais volés furnir et embracier, » De combatre à um. homes ki si sunt fort et fier. » — « Oncles, fait Doolin, trop poés prechier en 5298 » Dius est grans et poissans, bien me pora a 5500 — « Biaus dous niés, cil respont, ne te zë eg SEN » Tu feras ton plaisir quant ne le veus laissier. » Et li grans chevaliers, qui Dius doinst encombrier, Prent dou camp à son gret et si se tret arrier; Et Doolin se trait par dalés 1. vivier; 3505 Le chief de son cheval fait à lui adrechier. Et li grans chevaliers fait se lance baissier Et burte le cheval des espourons d'ormier Et vait ferir Doon sour l’escut de quartier Que parmi le plus fort li vaut fendre et percier : 5510 La lance fu si roide , fait en trons pecoyer Et Doolin Gert lui, que mot soing d’espargnier, Sour lescut de son col que tout li fet froissier ` 5515 Si bien le (sic, l. se) sot li bers ens estriers aficier 5515 Que tout envers le fist del cheval eslongier; 5517 Li hiaumes feri si de plain au sablonnier. Que li caus li brissa, ni a mais recouvrer; - 5519 Li diables fu près, ki le courut cargier. 5521 Li chevaliers fu mors, ensi com j'ai conté; Sa feme et si enfant en ont grant dol mené, 5525 Doi moult biel chevaliers (sic?) que il ot engenré; 5525 Mais il en ont entraus Nostre-Seignour juré, Mar lor a mort lor père, cier sera comparé : ( 520 ) Jamais joie n’aront si l’aront mort jeté. Quant on ot le vasal en le terre bouté, El palais sont venut et orent bien disné, 3330 Dos (sic) de Maience [en] a son oncle araisone ` « Sire, aler wen voeil, car trop ai demoré, » À Maience le grant, le nobile chité; » Que à ma mère ardoir se sunt tout acordé » Que il li metent sus que mon père a E 3333 » Mais elle a en couvent 1. chevalier » Qui contre deus les (sie, L. le) doit detendre en.r. pré; » Et jou le vengerai , se Dius l’a au — «a Biaus niés, ce dist ses oncles, à vostre volenté. » Mais moult par ai le cuer dont et abosmé 3340 » Que jou ue puis aler; si m'avés atorné » Et ferut ens el cors et playet et navré, » Que jamais n'averai léeche ne SR » Et de Diu et de moi vous soit-il p » Vous menrés avoec vous Fais i Ster 5545 e EL .1. sommier cargiet d’or Dn et esmeré, s — « Sire, fait Doolin, puis aie-jou dehé » Quant jou ja enmenrai home de mère né, » Monnoie ne argent vaillant ,1. of pelé, » Fors Diu, Nostre-Seignour, le roi de maïsté. » 3550 Ai mi, las del enfant ! porquoi l’a refusé! r li fil au Gaiant se sunt aceminé Et se sont enbuissiet en .1. grant bos ramé; Se Damediu n’en pense le roi de maisté! Ançois ke il soit nuis, l’aront si asoté Que il n'en a ami, quant saura la vreté (sic), 5555 Que il n’en ait le cuer ee S iré. Doolin a son cors si richement a De cauces , de haubierc et de ra (sic) iesmé, Que meillour n’en avoit en la crestienté, Puis li ont .r, cheval fort et boin amené, 5360 Et il i est montés par son seniestre lés; L'escut jete à son col, que il ot aporté, Et le lance en son puing à 1. boin fier quarré. Son oncle et touts (sic) les siens a à Diu commandé, Puis se met au chemin ; si a Diu aouré 3365 Et deprié de cuer, et a souvent clamé (321) Que il sa mère gart et le tiegne en santé, Et que il le jetast de la caitiveté U on a le sien cors à tort emprisonné. De la pitiet de lui a tenrement ploré. 5370 Mout (sic) manace souvent Herquambaut le maufé, Qui à tort li met sus ce que ains n'ot pensé; Et ke, se il puet onques , il sera comparé. Tant a penset en çou et tant a bien erré, Que el bos est venus, que vous ai devissé, 5375 U li traitour sunt ki si sunt aïré. Et quant il l'ont véut, es chevaus sont monté; Bien se sunt sour son cors de ferir acordé, Car garni furent bien et d'armes conraé. Quant il fu en .r. plain et il l'ont avisé, 5580 Tant par le virent biel et corsu et quarré Et errer vistement tout le cemin fierré, De la fréour de lui sunt tout espoenté. Lambers fu li prumiers qui devant a parlé : 3384 « Biaus dous frère, fait-il, Ken avés en pensé? » 5588 Et ses frères respont : « Par me crestienté, 5592 » Tres çou ke je le vic o-ge le cuer mué 5593 » Et si espaouri et forment tormenté, 3594 » Que si grant paour ai que tout m'a aveulé; 3587 » Ne jà n’iroie avant pour l'or d'une chité; 3589 » Par le mien ensiant dyable l'ont faé...... ! (Lacune de 520 vers.) x 5735 En .1. biau lit paret, onques ne vit si cier, Ne nus ne le poroit ne esmer ne proisier ` Plus de 1. mars valent li oreillier; r gardés dou sourplus se il vaut .m, deniers (sic). 5759 Le déduit que il ont ne vous sai anoncier : 3742 Mais amors, ki tout vaint, les sot si ensignier Que cil ki mains en sot s’e[n] sot très-bien aidier. Tant lor plaist et lor sist et itant l'orent cier, 5745 Qu'il vausissent la nuit durast 4, an entier. Mais elle ne set pas le mortel encombrier De son père, k’est mors el grant palais plenier. Et ses frères les fait la nuit escargaitier, (322) Chevaliers et siergens trestout entor vellier ; 5150 Et jurent (sic, l. jure) Damediu, le vrai roi justicier, Que Doolin pendra ains demain l'anuitier. Ausitost come il vit le jour esclerier, Au plus sage baron s’est alés cousillier : « Signour, consilliés-moi, pour Diu le droiturier, 5755 » Comment je me porai de cel glouton vengier, e Qui mon père m'a mort à guise de mordrier, » Ma serour a laiens , que je aime et tienc cier; » Honnie le vous (sic) a, ce sachiés sans trecier, e Mais, par icel Seignour qui tout a à jugier, 5760 » L'espaulle li ferai à l’espée trencier. » Faites-moi ces fossés trestous aplanoyer, » Si iroumes as murs ferir et Caployer. » 3763 — « Sire, fait li uns d'aus, vous volés foloyer; 5765 » Mais faites chi venir vostre mestre enginier ` » Sus le pont vous fera .1. engin santargier (sic), » Que nous porons aler .x. en .1. front pui... Et cius li respondi : « Bien fait à otroyer. » ngingneour manda , ki ot à mon Fochier; 5770 Et cil i est venus, qui ne l’osa lassier, 5775 ll li a dit : « Amis, toi couvient esploiter » De moi faire 3. engin, si haut et si plenier 3775 » Que les (sic) faces amont sor cel cretiel puyer; » Car Doon de Maience, qui Diex doinst encombrier, » Est là dedens enclos, je ne D) ai point cier : » père m'a ocis, qui tant fait à proisier. e 5779 — « Sire, cil respont, ne vous caut d'airer Lacune de 80 vers 3868 Car cius ki plus est vius plus de .xvı. ans n’en a. Or les consaut cis Diu ki ja ne mentira , 3870 Car se il est tués, la biele s’ocira. 3872 Or les sekeure Dius, ki le pooir en a, Car de fit sachiés bien que li uns en mainra; Or oyés ja comment, ki oïr le vaura, 5875 Dial son cheval mie n’en oublia : Del avaine et dou fain à plenté li donna, Et as autres chevaus dont mm. en i à; A. puc avoit laiens , dont il les abuvra. anı, jours et mt. nuis là dedens sejorna. ( 523 ) 3880 Tant a joie et deduit et tant forment l'ama moult s’esmaie poi, car en Diu se fia, Le glorieus celiestre, que souvent depria. Tout adiès carpenta li mestres, engingna, Son engien merveillous à grant paine leva, 5885 Si ke poi ne fali Cas crestiaus ne touca. Et Gautiers li siens sires, ki forment le coita, Ki armés richement entour l'engin ala, Priès des cretiaus vit Do; hautement li cria : « Par foi, fel orgillous , ore i mainrés vous ja! 5890 » Demain ferons de vous çou que fait en sera; » A morir vous couvient, ja riens ne vous faura, » Car celui mavés mort qui soueff nouri m'a » En se gente moullier com preudons m'engeura. » Et quant Doolin l'ot, ainc mot ne li sonna 5895 Nient plus que fust noyés, trestout çou ne prisa; d Ains se retourne arrière; N enoia encontra : Plus de at. fois le bouce li Puis li dist RES cie Nii vous E eiaeia ja; » , à qui je sui, tous nous escapera; 5900 » Car mes pères le set, ki pour nous priera, » Hermites en .1. bos; Dius se proière ora. » Par le voloir de Diu, ki li dist et manda, » Vien-ge en mon païs si comme il dit le mia: » Car nostres senescaus me mère acusée a; 5905 » Se elle n’a secours dedens .1. fu l'ardra. » Contre a. chevaliers batre m’estevera ; 5907 » N’i a mais que trois jours que li Sr sera. » 5909 Quant la biele l'entent si tenrement plora..... D H . . H D H D D . H H . ( 524 ) CLASSE DES BEAUX-ARTS. Séance du 5 mars 1874. M. N. De Keyser, directeur, président de l’Académie. Sont présents: MM. L. Alvin, L. Gallait, A. Van Hasselt, Jos. Geefs, Ferd. De Braekeleer, C.-A. Fraikin, Éd. Fétis, Ed. De Busscher, Alph. Balat, Aug. Payen, le chevalier L. de Burbure, J. Franck, G.De Man, Ad. Siret, J. Leclercq, Ernest Slingeneyer, Alex. Robert, F.-A. Gevaert, le baron Limnander, membres; F. Stappaerts et L. Terry, corres- pondants. i M. Ch. Montigny, membre, et M. Éd. Mailly, correspon- dant de la classe des sciences, ainsi que M. R. Chalon, membre directeur, et J. Nolet de Brauwere van Steeland, associé de la classe des lettres, assistent à la séance. eo CORRESPONDANCE. me La classe reçoit information officielle, par lettre de faire- part de la famille Quetelet, de la mort de M. Lambert- Adolphe-Jacques Quetelet , Pun de ses membres titulaires de la section des sciences et des lettres et secrétaire perpé- tuel de l'Académie, décédé à Bruxelles le 47 février dernier, à l’âge de 78 ans. Re | | | ( 325 ) M. le directeur rend compte des dispositions qui ont été prisès par la commission administrative pour que la Com- pagnie assistàt en corps aux funérailles du défunt. Il ajoute qu'il s’est rendu, en raison de ses fonctions présidentielles, l'organe et l’interprète de tous ses confrères en prononçant le discours funèbre. Une lettre de condoléance 3 été immé- diatement adressée à M. Ernest Quetelet fils, membre de l’Académie. La classe entend la lecture de la lettre que M. Ernest Quetelet vient d'adresser à M. le président de l’Académie pour remercier celle-ci des témoignages qui lui ont été exprimés. — MM. Radoux et Terry, correspondants, MM. Frith, Monteverde, Francois et le comte de Laborde, associés, accusent réception de leur diplôme d'élection. ÉLECTIONS. La classe arrête définitivement la liste des candidatures proposées dans la dernière séance pour le remplacement de l’un des associés de la section d'architecture, M. Louis Forster, de Vienne. CAISSE CENTRALE DES ARTISTES. -~ M. L. Alvin, trésorier de la caisse des artistes belges, rend compte des résultats de l'exposition organisée, dans le courant des mois de janvier et de février derniers, par M. Everard, au profit de l'institution. 2° SÉRIE, TOME XXXVII. 22 ( 326 ) Au don de Sa Majesté, déjà annoncé précédemment, il faut ajouter celui de S. A. R. Mer le Comte de Flandre, qui a fait parvenir à M. Everard la somme de 200 francs. Le produit des entrées et de la vente du catalogue, pendant les quatre semaines de l'exposition, s’est élevé à 2,122 francs. De plus, M. Everard ayant fait imprimer un catalogue illustré pour la vente publique qui a eu lieu à la fin du mois dernier, en a versé le produit dans la caisse et ya ajouté de quoi parfaire une somme de 800 francs, de sorte que la caisse centrale des artistes a recu, à l’occasion de l'exposition ouverte sous le patronage de la classe des beaux-arts de l’Académie, une somme de 4,129 francs. Une lettre de remerciments sera adressée au nom de la classe à M. Everard. COMMUNICATIONS ET LECTURES. M. Gallait prend la parole pour une motion relative au danger qui menace les tableaux de Rubens dans la cathédrale d'Anvers. a L'Académie ne peut pas, dit-il, rester indifférente dans cette grave question dont on s’est occupé dernièrement dans d'autres enceintes. Il faut assurer la conservation de ces chefs-d'œuvre; il faut aussi faire cesser le scandaleux abus qui n’en permet la vue qu'à prix d'argent. » M. De Keyser donne des renseignements sur la restaura- tion dont ces tableaux ont été l’objet il y a vingt ans el qui semble de nature à en assurer la conservation. On les ( 527 ) a attentivement examinés depuis peu et l’on n’a pas trouvé de traces de détérioration. M. Éd. Fétis dit qu’il wy a rien de rassurant pour l'avenir dans les résultats de l'examen auquel il vient d’être procédé. Si le mal n’est pas encore arrivé, il arrivera. Des tableaux placés dans des conditions de température où sont ces chefs-d'œuvre doivent inévitablement périr. Leur perte est certaine dans un avenir plus ou moins éloigné. M. Gallait dépose la motion suivante, à laquelle s'asso- cient MM. Alvin et Éd. Fétis : « La classe des beaux-arts de l'Académie vient joindre ses efforts à ceux qui ont été faits, dans ces derniers temps, pour soustraire les œuvres de Rubens aux risques de dété- rioration auxquels les expose leur situation actuelle dans la cathédrale d'Anvers et pour faire cesser la déplorable spéculation qui en interdit la vue au public. » Elle appelle de tous ses vœux le moment où ces œuvres merveilleuses, patrimoine de la nation, pourront être exposées en toute sécurité et de manière à servir, comme les autres productions des arts déposées dans les musées, aux études des peintres et à l’admiration des amateurs. » Une commission sera nommée lors de la prochaine séance , fixée au jeudi 9 avril, pour examiner la motion précitée. La classe décide également l'insertion de cette pièce au Bulletin. — La classe s’est occupée ensuite du projet relatif aux pensionnaires du gouvernement à Rome. Une décision définitive sera ultérieurement prise à cet égard. ( 528 ) OUVRAGES PRÉSENTÉS. Malaise (C.). — Note sur la description du terrain silurien du centre de la Belgique; — Rapport sur une excursion de la Société malacologique de Belgique dans les environs de Vir- ton. Bruxelles, 1872; 2 broch. in-8°. Rivier (Alph.). — Dr. Arnold Gheyloven, aus Rotterdam, Verfasser eines Remissorium juris utriusque und anderer juristischer Schriften. In-8° ; s. L n. d Ministère de l'Intérieur. — Annuaire statistique de la Bel- gique, IV° année, 1875. Bruxelles; vol. in-8°. Conseils provinciaux des neuf provinces , session de 1875; 9 vol. in-8°. Acar (F.). — Delectus seminum e collectione, anni 1875. Anvers, 4874; broch. in-8°. Caraman-Chimay (Le prince Eugène de). — Gaspard de Coligny, amiral de France, d’après ses contemporains. Paris, 1875; vol, in-8°. Diegerick (Alphonse). — Étude sur les imprimeurs yprois du XVI siècle. Ypres, 1873; broch. in-8°. Dubois (Alphonse). — Les Lépidoptères de l'Europe, leurs chenilles et leurs chrysalides, 47° sér., 58° et 59° livraisons. Bruxelles, 1873; 2 cah. gr. in-8°. Forir (H.). — Dictionnaire liégeois-français. Tome 1°, A-G- Liége, 1866 ; vol. in-8°. Pirmez (Octave). — Jours de solitude. 2° édition ; — Feuil- lées. Pensées et Maximes. 5° édition; — Heures de philoso- phic. Bruxelles; 3 vol. rel. in-8°. Rolin-Jaequemyns (G.). — Voordrachten over de grondwet. Gand, 1871-1872; 2 vol, in-12; — Des partis et de leur situa- ( 529 ) tion actuelle en Belgique. Bruxelles; broch. in-8°; — De la ré- forme électorale. Bruxelles, 1865 ; broch. in-8°. Asser (T.-M.-C.), Rolin-Jaequemyns (G.) et Westlake (J.). — Revue de droit international et de législation comparée. Tomes I à V, 1869-1873; — Archives de droit international et de législation comparée, n° 1, 41° année, 1874. Bruxelles ; à vol. et 4 cah. in-8°. Varenbergh (Émile).— Histoire des relations diplomatiques entre le comté de Flandre et l'Angleterre au moyen âge. Bruxelles, 1874; vol. in-8°. Académie d'archéologie de Belgique. — Statuts el règlement d'ordre intérieur et situation des finances au 50 novembre 1875. Anvers, 1875; broch. in-8°. Journal des beaux-arts, XVE année, 1874, n° 1 à 6. Saint- Nicolas, 1874; 6 feuilles in-4°. Commissions royales d'art et d'archéologie. — Bulletins, n” 41 et 12, XII: année, 1875. Bruxelles; cah. in-8°. Musée de l’industrie de Belgique. — Bulletins, 55° année, janvier à mars 4874. Bruxelles, 1874 ; 5 cah. in-8°. Revue de l'instruction publique, nouvelle sér., tome XVII, 1" liv., XXII? année, 4874. Gand, 1874; cah. in-8°. L'Illustration horticole, 3° sér. : 4° vol., tome XX, 9° à 12° livr., 4873; 5° vol., tome XXI, Ars liv., 4874. Gand; 2 cah. in-$°. Société royale de pharmacie de Bruxelles. — Bulletin, 18° année, n° 4 à 5. Bruxelles, 1874; 5 cah. in-8&. | De Vlaamsche School, 1875, Bldzn. 15-24. Anvers; 12 feuil- les in-4°, Société entomologique de Belgique. — Annales, tome XVI’, 1875; — Compte rendu , n° 96. Bruxelles, 1875; 1 vol. in-8° et 1 feuille in-8°. Société malacologique de Belgique. — Annales, tome VII, année 1872. Bruxelles; vol. in-8°. Académie royale de médecine de Belgique. — Mémoires des ( 550 ) concours et des savants étrangers. 4° fascicule du tome VIH; — Bulletin, n°% 4 et 2, tome VIII, 5° sér., année 1874. Bruxelles, 1874; vol. in-4° et 2 cah. in-8°. Annales de médecine vétérinaire, XXIII année, janvier- mars 1874. Bruxelles, 1874; 5 cah. in-8°. Société de médecine d'Anvers. — Annales, XXXV” année, janvier à mars 1874. Anvers; 5 cah. in-8°. Société de pharmacie d Anvers. — Journal, 50° année, janvier 1874. Bruxelles, 1874; eah. in-8°. Annales de l’électricité médicale et Écho médical réunis, nouvelle série, 15° année, janvier à mars 1874. Bruxelles, 1874; 5 fascicules in-8°. L'Écho vétérinaire, IV° année janvier à mars 1874. Liége; 5 cah. in-8°. Annales d'oculistique , 4"°-2° liv., 2° sér., tome 1, 37° année, 1874. Bruxelles ; cah. in-8°. Conseil de salubrité publique de la province de Liége. — Compte rendu des travaux de 4875. Liége ; broch. in-8°. Société médico-chirurgicale de Liége. — Annales, tome XIII, n° 42 et 15. Liége , 1875-1874; 2 cah. in-8°. Le Scalpel, XXVI" année, n° 27 à 359. Liége, 1874; 45 feuilles in-4°. La Presse médicale belge, 26° année, n° 4 à 15. Bruxelles; 45 feuilles in-8°, De Vries (Mathias). — Oratio de Academia Lugduno Batava Libertatis praesidio. Leide, 1874 ; broch. in-8°. K. Akademie van wetenschappen te Amsterdam. — Ver- handelingen , afd. natuurkunde, deel XII. Amsterdam, 1875; vol. in-4°; — Verslagen en mededeelingen : afd. natuurk., IL. reeks, VII. deel; afd. letterkunde, H. reeks, II. deel. Amsterdam, 1875; 2 vol. in-8°; — Jaarboek, 4872; Pro- cessen-verbaal, afd. natuurkunde, 1872-1875. Amsterdam, 1875; vol. et cah. in-8°; — Gaudia domestica. Elegia. Amster- dam , 1875; broch, in-8°. ( 551 ) Lenormant (François). — La magie chez les Chaldéens ét les origines accadiennes. Paris, 1874; vol. in -8°. Munaret (Le D’). — Notice sur T.-C.-E. Édouard Auber, sa vie et ses travaux. Lyon, 1874; broch. in-8. Chautard LL, — Quelques mots sur les raies de la chloro- phylle et leurs applications. Nancy, 1875; broch. in-8°. Boutarel (Aimé). — L'agriculture en France, sa situation, son avenir. Paris, 1874; broch. in-8°. Grad (Charles). — Résultats scientifiques des explorations de l'Océan glacial à l'Est des Spitzbergen en 1871. Paris, 1875; broch. in-8°. Gosselet (J.). — Le système du poudingue de Burnot. Paris; broch. in-8°. Académie des sciences de Paris. — Comptes rendus des séances, tome LXXVIII, n°° 4 à 45. Paris, 1874; 15 cah. in-4°. Société de biologie de Paris. — Comptes rendus des séances et mémoires : 2° sér., t. I, année 1854; 4° sér., t. IH à V, années 1866 à 1868; 5° sér., t. I, année 1869. Paris; 5 vol. in-8°. Société géologique de France. — Bulletin, 5° série, tome II°, n° 4, 4875. Paris, 1874; cah. in-8°. Société de géographie de Paris. — Bulletin , VI série, t. VH, janvier et février 1874. Paris; 2 cah. in-8°. Société des études historiques, à Paris. — L’Investigateur, 40° année, janvier 4874. Paris; cah. in-8°. Revue britannique , janvier à mars 1874. Paris; 5 demi-vol. in-8°. Indicateur de l’archéologque , n°° 15 et 14, janvier et février. Paris, 1874; 9 cah. in-8e. Le Progrès médical, 2° année, n°° 4 à 45. Paris, 1874; 15 feuilles in-4°. Archives de médecine navale , 1874, n% 1 à 5. Paris; 5 cab. in-8°, Journal de l’agriculture, 1874, tome 1%, n° 250 à 259. Paris, 1874; 10 cah. in-8°. ( 332 ) Société centrale d'éducation et d'assistance pour les sourds- muets en France. — Bulletin trimestriel, février 1874. Paris; cah. in-8°. Revue politique et littéraire, 2 série, 5° année, n° 27 à 39. Paris, 1874; 15 cah. in-# Revue scientifique de la France et de l'étranger , 2° série, 5° année, n° 27 à 59. Paris, 1874; 15 cah.in-4. L'Institut, nouvelle série, 2° année, 1874, n° 53 à 64. Paris, 1874; 12 feuilles in-4°. Revue hebdomadaire de chimie, 5° année , 4874, n° 1 à 15. Paris, 1874; 15 feuilles in-8°. Le Progrès médical, n% 4 à 13, 2 année, 1874. Paris; 45 feuilles in-4°. Société des antiquaires de Picardie, à Amiens. — Bulletin, t-XI, 1871-72-75. Amiens, 1875; cah. in-8°. Société littéraire, scientifique et artistique d’Apt. — Mé- moires, nouvelle série faisant suite aux annales, tome I‘, n°1, feuilles 4 à 7. Apt, 1874; vol. in-8°. Société nationale des sciences naturelles de Cherbourg. — Mémoires, 2° série, t. VII; — Catalogue de la bibliothèque, Ile partie, Jr livraison, décembre 1872. Cherbourg, 1875; 2 vol. in-8°. Société d’agriculture , de sciences et d’arts à Douai. — Mé- moires, 2° sér., tome XI, année 1870-1872. Douai; vol. in-8°. Société des sciences, de l’agriculture et des arts, à Lille. — Programme de concours. Lille; broch, in-8°; — Mémoires, année 4872, 2° part., 5° sér., 14° vol. Lille; vol. in-8°. Bulletin scientifique, historique et littéraire du départe- ment du Nord , n° 1, 6° année, 4874. Lille; in-8°. Société d' AE Fe naturelle et arts utiles de Lyon. — Annales, DN: sér., tome IV°, 4871. Lyon, 1872; vol. in-8°. Société vaudoise des sciences naturelles, à Lausanne. — Bulletin , 2° sér., vol. XII, n° 71. Lausanne, 1874; vol. in-8°. ( 335 ) Preussische Akademie der Wissenschaften zu Berlin.— Mo- natsbericht, décembre 1873 et janvier 1874. Berlin, 1874; 2 cah. in-8° Deutsche chemische Gesellschaft zu Berlin. — Berichte , VII. Jahrg., n° 1, 2,5, 4. Berlin, 1874; 4 cah. in-8. denkt: Wilhelm. — Programm des Vitzthumschen Gymna- siums, XII. Dresde, 1875; broch. in-8°. Justus Perthes’ geographische Anstalt zu Gotha. — Mitthei- lungen, 20. Bd., 1874, 11: Ergänzungsheft, n° 55. Gotha; 2 cah. in-4°. Naturwissenschaftlicher Verein für Steiermark zu Grüz. — Mittheilungen , Jahrgang 1875. Gratz, 4875; vol. in-8°. Geodätisches Instituts. — Beobachtungen mit den Bes- selľschen Pendel- Apparate in Königsberg und Güldestein. Hambourg, et vol, ër, Medicinisch-nat hafiliche Gesellschaft zu Jena. — Jenaische Zeitschrift fur Noturisseñsehaft; VIH. Bd., neue Folge, I. Bd., I. Heft. Jena, 4874; cah. in-8°. Archiv der Mathematik und Physik, 55° vol., 4° cah.; 56° vol., 4° cah. Greifswald , 1873; 2 cah. in-8°. K. sächsische Gesellschaft der Wissenschaften zu Leipzig. — Math.-phys. Classe : Berichte, 1872, HI und IV (nebst cinem Extraheft); 1875, I-II; — Abhandlungen, X. Bandes, n° VI. Leipzig, 1875, 4 cah. pet. in-8° et 4 cah. gr. in-8°. — Phil.-histor. Classe: Berichte, 1872 ; Abhandlungen, VI. Bandes, n° V; VIL Bandes, n° T. Leipzig, 1875; 1 cah. pet. in-8° et 2 cah. gr. in-8°. Geschiehts- und Alterthums Verein zu Leisnig. — Mitthei- lungen, IJI. Heft. Leisnig , 1874; in-8°. Catalogus codicum latinorum Bihliothecae regiae monacen- sis, tome I, part. HI; tome IV, part. I. Munich, 1875; 2 vol. in-S°, König. bayer. botanische Gesellschaft in Regensburg. — Flora oder allgemeine botanische Zeitung, 56. Jahrg., 1875. (354 ) Ratisbonne; vol. in-8° ; — Repertorium der periodischen bota- nischen Literatur, 49. Jahrg., 1872. Ratisbonne, 1875; cah. in-8°. Settiner entomologische Zeitung, 55. Jahrgang, n° 1-5. Stettin, 1874; cah. in-8°. Königliche Universität zu Tubingen. — Universitätschrif- ten, 1872 und 1873; — Zuwachsverzeichniss der Bibliothek , XIX und XX, 1871-1875; — Systematisch -alphabetischer Hauptkatalog, C. Philologie, Bogen 1-15, I. Hälfte. Tubingen ; 5 cah. in 4°; — Inauguralen-Dissertationen ,1875 ; 45 cah. in-8°. Physikalisch-medicinische Gesellschaft in Würzburg. — Verhandlungen, neue Folge, V. Bd., 4. de put ) Heft. Wurz- bourg , 1874 ; cah, in-8°. K. Akademie der Wissenschaften in Wien. — Sitzung der mathematisch-naturwiss, Classe, Jahrg. 1874, n° IV-VI. Vienne; feuil. in-8°. Anthropologische Gesellschaft in Wien. — Mittheilungen, HI. Bd., n% 7, 8, 9, 1875 ; 2 feuilles in-8°. K. K. geologische Reichsanstalt in Wien. — Abhandlungen, Bd. VI. Vienne, 1873; cah. gr. in-4°; — Jahrbuch, Jahrgang 1873, XXIII. Bd., n° 5. Vienne; cah. in-8; — Verhandlungen, n 11-12-43; cah. in-8°. Deutsche Gesellschaft für Natur und Volkerkunde Osta- sien e, — Mittheilungen, 5t" Heft, September 1875. Yokohama; cah. in-4°. Société royale danoise des sciences et des lettres. — Mémoires, 5° sér., vol. X , n°° 5 à 6, année 1875. Copenhague; 4 cah, in-4° ; — Bulletins pour 1875, n° 4. Copenhague; in-8°. Société de chimie de S'-Pétersbourg. — Journal, tome VI, n° 4 et 2. St-Pétersbourg, 1874; 2 cah. in-8° (en russe). Benedetto (P”.) — Sulla causa del diluvio universale. Rome; broch. in-8°. Bierens de Haan (D.). — Notice sur des tables Iogarithmi- ques hollandaises. Rome, 1874; cah. in Ae, an eo ere ( 335 ) Genocchi (4.). — Sur l'impossibilité de quelques égalités doubles; — Observations relatives à une note précédente de M. Menabrea concernant la série de Lagrange. Paris; 2 feuilles in-4°, Rapisardi (Francesco). — Elementi di geometria. Florence, 187%; vol. in-8°. Siacci (F.). — Sur un théorème de mécanique céleste; — Sur le problème des trois corps. Deux broch. in-4. Regno d'Italia. Ministero d’agricoltura , industria e com- mercio , direzione di statistica. — Meteorologia italiana, vol. VI à IX, années 1869 à 1873. Rome;5 vol. et 9 feuilles gr. in-4°; — Suppléments, vol. U et HI, années 1868 et 1869. Rome; 2 vol. gr. Im An, Società entomologica italiana, Firenze. — Bullettino , I° à V° année, 1869-1874. Florence; 20 fascicules in-8°. Academia de jurisprudencia y legislacion de Madrid. — Memoria y discurso. Sesion inaugural : 28 de noviembre de 1870 y 15 de noviembre de 1875; Constituciones de la Acade- mia. Madrid, 4870-1873; 5 broch. in-8°; — Principios del dere- cho penal con aplicacion al código espagñol, por Vicente Santa- maria de Paredes. Madrid , 4872; vol. in-8° Revista de Portugal e Brazil, n° 9, février 1874. Lisbonne et Rio de Janeiro; feuille in-4°. Institut égyptien à Alexandrie. — Bulletin, année 1872- 1875, n° 12. Alexandrie, 1875; vol. in-8°. Henwood (William Jory). — Observations on the detrital tin-ore of Cornwal.Truro, 1875; cah. in-8°. Chemical Society of tenté — Journal, ser. Il, vol. XI, n% 151 à 452; vol. XII, n° 155, 1873-1874. Londres; 5 cah. in-8°, London mathematical Society. — Proceedings, n° 64 and 65. Londres; in-8°. Statistical Society of London. — Quarterly Journal, vol. XXXVI , part IV, december, 1875. Londres; vol. in-8°. ( 336 ) Royal geographical Society of London. — Proceedings, vol. XVII, n° 1, année 1874. Londres; in-8°. London meteorological Society. — Quaterly Journal, vol. I, new series, n° 8, 1875. Londres; eah. in-8°. Nature, mes 217 à 229, vol. 9. Londres, 1874 ; 45 cah. in-8°. Asiatic Society of Bengal at Calcutta. — Journal, part I, n° 2; part II, n° 5; — Proceedings, n°° 5 à 8, mai à aout 1875. Calcutta , 1875; 6 cah. in-8°; — Bibliotheca Indica : new series, n° 260, 277,279 à 282, 285, 286, 288. Calcutta, 1875; 8 cah. in-8° et 4 cah. in-4°. Geological Survey of India, at Calcutta. — Memoirs 4° (Palaeontologia Indica) : serie VIH, pts 5 and 4, vol. IV; serie IX, part I, vol. I; — Memoirs 8°, vol. X, part I. Calcutta, 1875, 5 vol. gr. in-4° et 1 vol. in-8° ; — Records, vol. VE, pts. 4 at 4; 1875. Calcutta; 4 cah. in-8°. University of the State of New-York at Albany. — New- York meteorology, 1850-1863, second series , by F. B. Hough. Albany, 1872; vol, in-4°; — 84 th. and 85 th. Regents’ Report on the condition of the state cabinet of natural history. Albany, 1871-1872; 2 vol. et 1 cah. in-8°; — New-York state Library: Subject-Index of the general Library, 1872; 54 th. and 55 th. annual Reports of the Trustees. Albany, 1872-1875; 1 vol. et 2 cah. in-8 ; — The New-York civil List, 4869. Albany, 1869; vol. in-8°; — Manual for the use of the legislature of the State of New-York, 1871. Albany, 1871 ; vol. in-12. Albany Institute. — Transactions, vol. VII, 1872. Albany, 4872; vol. in-8°. -~ Museum of comparative Zoology at Harvard College, Cam- bridge (Mass.). — Illustrated Catalogue. Revision of the Echini by A. Agassiz, n° VII: pt. II; plates, pts. IH and IV. Cam- bridge, 1875 ; 2 vol. in-4°. Academy of Science of S'-Louis. — Transactions, vol. HI, n° 1. S'-Louis, 1875; vol. in-8°. "mg | BULLETIN DE L'ACADÉMIE ROYALE DES SCIENCES, DES LETTRES ET DES BEAUX-ARTS DE BELGIQUE. 1874. — N° 4. CLASSE DES SCIENCES. Séance du 28 mars 1874. M. E. Canpèze , directeur. Sont présents : MM. J.-S. Stas, L. de Koninck, P.-J. Van Beneden, Edm. de Selys Longchamps, H. Nyst, Gluge, Melsens, J. Liagre, G. Dewalque, H. Maus, M. Gloesener. F. Donny, Ch. Montigny, M. Steichen, A. Brialmont, E. Dupont, Éd. Morren , Édouard Van Beneden, C. Malaise, Membres ` Th. Schwann, E. Catalan, Aug. Bellynck, associés ; L. Henry, Éd. Mailly, H. Valerius, J. De Tilly, F. Crépin, correspondants. 2e SÉRIE, TOME XXXVII i 95 ( 338 ) CORRESPONDANCE. ome M. Candèze annonce qu’une amélioration très-sensible s’est montrée dans l’état de santé de M. d’Omalius. La classe apprend cette heureuse nouvelle avec un vif et profond sentiment de satisfaction. — La classe a eu le regret de perdre, le 10 mars der- nier, l’un de ses associés de la section des sciences mathé- matiques et physiques, M. de Jacobi , de Saint-Pétersbourg. — M. le professeur Van Rysselberghe informe, par écrit, que Sa Majesté , sur les propositions bienveillantes de M. le Ministre de l’intérieur faites d’après un rapport favorable de la classe, vient de lui allouer un subside de 3,000 francs pour le mettre à même de faire construire son appareil complet de météorographie. M. Van Rysselberghe adresse à ce sujet, à la classe, l expression de ses remerciments. — M. Liagre est appelé, par un vote unanime , à occuper la place de membre de la commission de la Biographie na- tionale , vacante par la mort de M. Adolphe Quetelet. — La classe accepte le dépôt d’un billet cacheté pré- senté par M. P.-J. Van Beneden , au nom de M. A. Renard, de Louvain. Ce document sera conservé dans les archives, après avoir été revêtu du contre-seing de M. le directeur et de celui de M. le vice-directeur. — La Société entomologique italienne, à Florence, a honte TT RNA SORTE es ( 339 ) offre la série complète de ses Bulletins et demande l'échange avec les publications de l'Académie. — Accepté. — Les Universités de Tubingue et de Santiago, la Société des Naturalistes de Gratz , l'Institut géologique de Calcutta et la Société d'agriculture de Lyon, en remerciant pour les derniers envois, adressent en même temps leurs récents travaux. ` — M. Ern. Quetelet communique l’état de la végéta- tion observé, le 21 mars dernier, dans le jardin de lOb- servatoire royal de Bruxelles. — La classe recoit de ses membres les hommages sui- vants : 1° Études sur l'électro-dynamique et l'électro-magné- tisme, seconde édition ; par M. Gloesener; in-8°; 2 La fréquence des variations de couleurs des étoiles dans la scintillation, etc., par M. Montigny ; in-8°; 5 L'énergie de la végétation ou application de la théorie mécanique de la chaleur à la physiologie des plantes, par M. Morren; in-8°. 4 Liste des jardins botaniques du monde, etec., par le même in-8°. — Les travaux manuscrits suivants seront l'objet d'un examen : 1° Quelques réflexions sur le problème de Malfatti, par M. Simons, répétiteur à l'École militaire. — Commis- saires : MM. Catalan et Folie; 2 Sur la question de l’abiogenèse, par M. le docteur F. Putzeys. — Commissaires : MM. Schwann et Gluge. ( 540 ) RAPPORTS. nu. o a me N$ Sur les centres des nerfs vaso-moteurs; par M. le docteur Putzeys, de Liége. Rapport de M. Schwan», e La plupart des physiologistes admettent un centre commun , présidant à la tonicité des vaisseaux sanguins , dans la moelle allongée, et M. Owsjannikow a cherché à déterminer d'une manière plus précise la position de ce centre dans cette partie de l’encéphale. Mais M. Goltz a déjà publié, en 4863, des expériences qui tendent à prouver que, chez la grenouille au moins, la moelle épi- nière est aussi importante pour le tonus vasculaire que la moelle allongée. Ces expériences n’ont pas trouvé de prime abord toute l'attention qu’elles méritaient. Actuellement leš preuves à l’appui nous arrivent en abondance et de tous côtés et se rapportent aussi aux mammifères. Depuis le commencement de cette année nous avons déjà reçu trois mémoires sur ce sujet, contenant de nou- ` velles expériences faites par M. Schlesinger, par MM. Goltz et Freusberg et par M. Vulpian et toutes confirment l'in- fluence de la moelle épinière sur le tonus des vaisseaux. Le travail de M. Putzeys rentre dans la même catégorie. Il confirme d’abord les observations de M. Schlesinger et fait ensuite l'expérience suivante : sur une grenouille décapitée et curarisée, il place une anse d’intestin sur les électrodes et y fait passer op courant électrique de mé- ( 541 ) diocre intensité. Le calibre des vaisseaux de la membrane interdigitale diminue déjà et le sang cesse de couler si le courant électrique est plus fort. I répète la même expé- rience sur une grenouille dont il a coupé, la veille, le plexus ischiadique dans l'abdomen sur un côté. L'irritation électrique de l'intestin ne produit aucun changement dans le calibre des artères de ce côté, tandis que l'effet est très-visible de Pautre côté! La moelle épinière contient done chez la grenouille un centre de réflexe qui agit sur les vaisseaux au moyen de fibres renfermées dans le plexus ischiadique. Comme le mémoire de M. Putzeys contribue à éclaircir une question importante de la physiologie, (at l'honneur d'en proposer l'insertion dans le Bulletin de l’Académie. » La classe adopte les conclusions de ce rapport, auquel a adhéré M. Gluge, second commissaire. ` Sur les produits d’addition de l'acide hypochloreux dux composés allyliques; par M. Louis Henry. apport de VI. Stas. « Depuis quatre années, M. Henry a publié plusieurs notices, dites préliminaires, sur les produits d’addition de l'acide hypochloreux aux composés allyliques. Quoiqu'il ne considère pas comme terminée la tàche qu'il a entre- prise, néanmoins il pense que le moment est venu de réunir tous ces travaux et d'en déduire les conséqpenees théoriques qu'ils renfermens, ( 542 ) On le sait, ses recherches ont porté sur les composés qui résultent de l’addition de l'acide hypochloreux à lal- cool allylique, à l’éther allyl-éthylique, à lacétate, au bromure, au chlorure d’allyle, tous corps qui s’y com- binent intégralement pour donner naissance à des dérivés glycériques. Le mémoire présenté à l'Académie contient l'exposé des propriétés de tous ces dérivés glycériques, ainsi que les données analytiques qui ont servi à établir leur composition. Ce travail est précédé d’une introduction dans laquelle M. Henry explique le but qu'il a poursuivi; il se termine par des considérations générales sur la structure des composés allyliques et des dérivés glycé- riques qui se forment par la combinaison directe des pre- miers avec l'acide hypochloreux. Il est ainsi conduit à admettre que lors de l'addition de cet acide aux composés allyliques, ses éléments, chlore et hydroxyle par lesquels on représente actuellement cet acide, se partagent entre les groupes formant lallyle. Représentant lallyle par la formule de structure, CHA CH CH? ? M. Henry arrive à conclure que le chlore de l'acide hypo- chloreux s'ajoute au chainon hydro-carboné CH, tandis que lhydroxyle se fixe sur le chaînon CH?. Les produits de l'addition de l'acide hypochloreux aux composés ally- liques auraient ainsi pour formule de structure CHEX J CH Ch D CH? (0H). ( 343 ) Les motifs sur lesquels se fonde M. Henry pour émettre son hypothèse paraîtront sans doute péremptoires à ceux qui admettent que les réactions chimiques permettent de dévoiler la structure intime des corps. En tous cas, ces considérations me semblent fort logiquement déduites et d'accord avec toutes les analogies. Aussi cette partie du mémoire est remarquable et importante; elle sera favora- blement accueillie, comme l'ont été, du reste, les recher- ches elles-mêmes. Avant de conclure, je dois faire remarquer que les faits consignés dans ce mémoire, sauf ceux relatifs à l'acide bichloro-propionique, ont déjà été livrés à la publicité dans des notes préliminaires que M. Henry cite dans son travail. Je comprends qu'un auteur, pour se réserver le fruit de son travail, fasse l'annonce des faits au fur et à mesure qu'il les découvre, en se réservant de rédiger plus tard ses recherches avec le développement qu’elles com- portent; mais il y a quelque chose d'incorrect que de réunir dans un mémoire des recherches publiées ailleurs , d'y joindre des considérations théoriques et de présenter ensuite l’ensemble à l’Académie. J'espère qu'il suffira de signaler à M. Henry l'irrégularité de cette manière de pro- céder el que la classe n’y verra point de motif pour ne pas accepter la proposition que j'ai l'honneur de lui faire, d’ordonner l'impression du remarquable travail de M. Henry dans le Bulletin de la séance. » Rapport de M, de Koninck, « Mon savant confrère M. Stas ayant parfaitement résumé le travail de M. Henry, je puis me dispenser d'indiquer à mon tour le sujet qui en forme la base. Je me joins à lui ( 544 ) | pour apprécier de la manière la plus favorable le mérite de ce travail dont les résumés préliminaires ont déjà reçu un bon accueil. Mais quelques-uns de ces résumés ayant paru dans des publications étrangères, je partage l'avis de mon confrère que cette manière d'agir n’est pas très-cor- recte au point de vue du règlement de l’Académie et qu'il ne faut pas l’encourager. Néanmoins, eu égard à limpor- tance du mémoire de M. Henry, je pense que la classe ne doit pas s'arrêter pour cette fois à la considération que je viens d'émettre et qu’elle peut consentir à imprimer ce mémoire dans le Bulletin de sa séance. » La classe adopte les conclusions de ces rapports. — Recherches morphologiques sur les Pyrénomycètes : I. SOR- DARIÉES ; par M. Alfred Gilkinet.- Rapport de M, Édouard Morren., « Le mémoire sur lequel l'Académie m'a fait honneur de me demander mon appréciation a pour sujet le dévelop- pement du Sordaria fimicola Ces. et de Nris., spécialement au point de vue de la fécondation et de l’évolution de la périthécie. On sait que les Sordaria constituent un genre que Cesati et de Notaris ont distingué parmi les Sphaeriacées, dans la classe des Pyrénomyeètes, qui appartiennent à la série des Ascomycètes. Ces petits champignons se plaisent sur les excréments et les fumiers. Ils ont eu le privilége d’être étudiés avec prédilection depuis quelques années el les découvertes importantes dont ils ont fourni les élé- / ( 545 ) ments les ont entourés d’une certaine notoriété. Parmi les travaux sur les Sordaria, nous n’en rappellerons que deux, les plus importants. M. Georges Winter a publié, l’année dernière, une monographie des Sordaria de l'Allemagne (Die deutschen Sordarien, dans les Abhandl. der Naturf. Gesellschaft zu Halle, vol. XI, livr. 4"°, avec 5 planches) dans laquelle vingt-deux espèces, attribuées à ce genre, sont décrites et figurées d’après nature ` ce mémoire a élacidé la systématique des Sordaria. Mais en 1870, M. Woronin a publié (dans les Abhandlungen herausge- geben von der Senckenbergischen naturforschenden Gesell- schaft, vol. VIT) de remarquables observations sur la morphologie et la fécondation des Sordaria fimisseda et Sordaria coprophila. Déjà en 1869, à Saint-Pétersbourg, M. Woronin avait fait part de ses découvertes : elles dévoi- laient pour la première fois la fécondation dans la classe des Pyrénomyeètes où l’on pouvait seulement la soupçonner par analogie, Dans son beau mémoire de 1870, publié par l’Institut de Senckenberg à Francfort, M. Woronin expose Par la plume et le dessin les phénomènes sexuels qui pré- cèdent la formation des périthécies. Ce mémoire du savant collaborateur de M. de Bary a fondé, dans la science, la fécondation des Pyrénomycètes. | Les observations de M. A. Gilkinet ont porté sur une espèce différente de celles étudiées par M. Woronin , espèce intéressante, dont les spores, se développant facilement dans la décoction de crottin de cheval, se prêtent à l'examen sur le porte-objet du microscope. Elles confirment dans les points essentiels les phases de développement telles qu’elles étaient connues et elles ajoutent à nos connais- sances plusieurs renseignements intéressants. Nous signa- lons, sous ce rapport, son opinion sur la diversité d'origine ( 346 ) des paraphyses et des thèques, opinion d’ailleurs conforme à la théorie générale. Il faut noter aussi l’enroulement progressif et basipète du carpogone. L'auteur admet, d’après des indices qui semblent probants, que la fécon- dation du carpogone s'effectue par copulation et non par diffusion du contenu du pollinode, mais la question importante de la formation des filaments ascogènes, que l’auteur, non sans raison, appelle bourgeons, reste à élucider. Le mémoire de M. Gilkinet mérite les encouragements de l’Académie et nous nous faisons un devoir d'en pro- poser l'impression. Il est accompagné de dessins qui représentent les or- ganes de la fécondation et de la fructification du Sordaria fimicola Ces. et de Nris. et deux figures concernent le S. minuta Feck), La morphologie et la structure que ces planches font connaître ont de l'analogie avec celles de M. Woronin, mais comme elles concernent une autre espèce du genre et qu’elles sont le complément nécessaire du texte, nous croyons que l'Académie ne saurait se dis- penser d'en ordonner également la publication. » Rapport de M. Édouard Van Beneden. « Si le nombre des personnes qui, en Belgique, s'occupent de botanique descriptive est considérable , si l’on y publie de longs et nombreux mémoires sur la flore belge, voire même sur la systématique de certaines familles exotiques, il faut néanmoins reconnaitre que bien peu de botanistes de notre pays ont suivi le mouvement scientifique qui s’est accusé en Allemagne et plus récem- ment en France, où l’anatomie et la science du développe- ( 347 ) ment des plantes ont acquis une importance prépondérante à côté de la physiologie végétale. Dans le mémoire qui vient d’être soumis au jugement de l’Académie se manifeste une tendance toute différente de celle qui caractérise la plupart des travaux de botanique publiés en Belgique dans ces dernières années. Un jeune docteur en sciences qui, depuis bientôt deux ans, travaille dans le laboratoire de M. de Bary, l’un des maîtres de la botanique en Allemagne, nous communique une série de recherches sur la structure et le développement d'une espèce du groupe des Sordariées, qu’il rapporte à la Sor- daria fimicola de Cesati et de Notaris. Ces champignons consistent en un mycelium (qui se développe sur les excréments de différentes espèces de carnassiers et d’herbivores) sur lequel apparaissent des organes de fructification qui ont été appelés périthécies ou périthèces. Les recherches de M. Gilkinet sur la structure des péri- thécies confirment des observations faites sur nne espèce Voisine, la Sordaria fimiseda, par M. Woronin. Leurs parois se constituent de quatre zones cellulaires, l’interne est plus particulièrement décrite dans le travail qui nous occupe. Cette couche donne insertion à des sortes de poils cellulaires appelés paraphyses, dont la forme et les carac- tères varient suivant le point où ils se trouvent insérés; Mais tous ont la même valeur morphologique; tous pro- cèdent exclusivement des parois de la périthéeie : ils ont une origine indépendante de celle des thèques. Ce résultat est important, en ce qu’il rectifie les recherches antérieures de MM. Woronin et Fuisting qui, supposant une origine Commune aux thèques et aux paraphyses, rattachaient celles-ci au nucleus de la périthécie; les organes piliformes ( 548 : qui revêtent la partie supérieure du périthèce ont pour ces auteurs une significatiou toute différente, circonstance qui leur avait fait donner le nom de périphyses. — Il résulte des recherches de M. Gilkinet que les paraphyses et les périphyses sont une seule et même formation morpholo- gique : ce dernier nom pourrait donc être supprimé. Le nucleus de la périthécie se constitue de l’ensemble des thèques. L'auteur a fort bien étudié leur développe- ment et leur structure; chaque thèque donne naissance à huit spores, qui se forment simultanément par fragmenta- tion du protoplasme des thèques, sans qu'il ait été possible de constater l'apparition préalable de noyaux. Les spores sont pourvues de deux membranes : une exospore et une endospore. Elles sont entourées, en outre, d’une matière gélatineuse qui se gonfle au contact de l'eau. Celle-ci est perforée à Fun des pôles de la spore d'un canal qui intéresse aussi Fexospore. I a reçu le nom de pore germinatif. Cet orifice, au moment de la germination de la spore, livre passage à l’endospore et au protoplasme pour la formation de la vésicule d’où partent les premiers filaments mycéliens. Cette germination, Pauteur la ob- servée sur le porte-objet en cultivant les spores dans une décoction de crottin de cheval. Le mycelium se développe comme chez tous les Ascomycètes et au bout de cinq à six jours les filaments mycéliens préludent à la formation des périthécies. L'une des cellules du mycelium bour- geonne et donne lieu à la formation d'un tube qui s'enroule immédiatement en une spirale , semblable, sous plusieurs rapports, à celle que M. de Bary a découverte et signalée dans l'Eurotium aspergillus glaucus ct chez VE. repens. Ce tube est le carpogone ou organe sexuel femelle. — Bientôt, près de sa base, apparait une cloison transversale ( 349 ) et immédiatement après on voit de la partie du tube qui se trouve sous la cloison partir un nouveau bourgeon, le pollinode, qui s'élève vers le sommet du carpogone et se met en contact avec lui; en même temps il pousse laté- ralement des rameaux qui vont embrasser le carpogone, comme le feraient autant de bras. M. Gilkinet n’a pas pu s'assurer si le contenu du polli- node de la S. fimicola entre en communication directe avec celui du carpogone, comme M. de Bary l’a observé chez l'Eurotium, ou si l'échange des matériaux se fait par voie endosmotique comme chez l'Erysiphe. Cependant l’auteur s'appuie sur différentes considérations pour rendre extrêmement probable une véritable copulation. Quoi qu'il en soit, le carpogone ne tarde pas à se diviser en cellules par des cloisons transversales. Le pollinode et ses bran- ches se ramifient et s’allongent; ils s'enchevêtrent tout autour du carpogone avec d’autres hyphes partant de la base de la spire, peut-être même du mycelium. Il est re- grettable que le doute avec lequel ce dernier fait est aflirmé n’ait pas été levé par l’auteur. Il me semble que Pour la détermination de la valeur morphologique du pol- linode, il eùt été important de décider positivement si les bourgeons qui s’entrecroisent avec le pollinode pour la formation des parois de la périthécie naissent comme le pollinode de la base du tube spirale, ou s'ils proviennent d'une autre souche et s'ils se développent différemment. En même temps se forment des crampons destinés à fixer la Sordaria. Les hyphes enveloppant le carpogone se divi- sent par formation de cloisons transversales et tangen- Delles, en nombreuses cellules. Ces cellules s'unissent latéralement de façon à former un tissu qui, différencié en plusieurs couches, devient la paroi de la périthécie. Elles ( 550 ) ont déjà atteint un haut degré de complication, quand le carpogone commence à se modifier à son tour. Les cellules du carpogone donnent naissance à des bourgeons qui se ramifient et dont les dernières ramifications deviennent les thèques de la périthécie. Quant aux paraphyses, elles ne se développent jamais ni sur le carpogone ni sur des parties divisées du carpogone. Les observations de M. Gilkinet sur la formation du carpogone et du pollinode, sur leur copulation et sur je développement de la périthécie chez la Sordaria fimicola, établissent que, contrairement aux observations de M. Wo- ronin, les Sordariées se développent à peu près de la même manière que l'Eurotium que Ton plaçait loin des Sordaria dans la systématique des Pyrénomycètes. Elles confirment les quelques données que l’on possédait sur la sexualité des Ascomycètes et elles établissent l'exactitude de l'opinion de Fries qui soutenait que l'Eurotium et Erysiphe sont des Pyrénomycètes inférieurs, tandis que d’autres bota- nistes, se fondant sur les différences considérables que révèle leur structure, les en avaient séparées. Après l'achèvement de son travail, M. Gilkinet a pu obtenir la germination d'une seconde espèce de Sordariée, la Sordaria minuta de Fuckel. Les recherches qu'il à entreprises sur cette Sphaeriacée, quoique encore incom- plètes, confirment déjà en tous points le mode de dévelop- pement exposé plus haut pour la Sordaria fimicola. — Des renseignements fort intéressants sont donnés, dans un appendice au mémoire, sur la formation du carpogone dans cette seconde espèce. Le mémoire de M. Gilkinet est une étude sérieuse et complète du développement des Sordariées. Les observa- tions y sont consignées dans un style clair et précis, qui ( 591 ) porte le cachet du langage véritablement scientifique. H contient des recherches neuves et originales, dont lim- portance ne saurait être contestée et qui présentent toute garantie quant à leur exactitude. Je pense que l'Académie peut se féliciter d’avoir reçu communication de ce travail qui figurera avec honneur dans ses publications. Je pro- pose en conséquence d'adresser des remereiments à lau- teur et de voter l'impression, dans le Bulletin, du manu- scrit et des deux planches qui l'accompagnent. » La classe a adopté ces conclusions. Conformément aux conclusions d'un rapport de M. Ernest Quetelet, la classe vote l'insertion au Bulletin d’une récla- mation de priorité faite par M. A. Genocchi, de Turin, au sujet d'une série de Binet, dont s’est occupé M. Ph. Gilbert dans une note insérée au Bulletin du mois de novembre 1875. Cette réclamation de priorité est conçue dans les termes suivants : « Dans une lettre que M. Gilbert ma fait l'honneur de m'écrire en m'adressant un exemplaire de son mémoire Sur le développement de la fonction F, l'auteur s'exprime comme suit : « La démonstration nouvelle que je donne de la série de » Binet et qui conduit à une infinité d’autres séries sem- » blables, sera, je pense, capable de vous intéresser. » « Je ferai remarquer que les séries semblables à celle de Binet, données par M. Gilbert dans le K IV de son mémoire, avaient déjà été publiées par moi, dans deux écrits qui ont paru en 1855 et 1859 dans les Annales de ( 352 ) M. Tortolini (Intorno ad alcune formole sommatorie. — Serie ordinate per fattoriale inversi), avec quelques autres résultats qui ne sont pas dépourvus d'intérêt. » COMMUNICATIONS ET LECTURES. Les observations météorologiques simultanées sur l'hémi- sphère terrestre boréal; note par M. Ernest Quetelet, membre de l'Académie, On sait qu’au congrès international des météorologistes, qui s'est réuni à Vienne au mois de septembre 1875, le délégué des États-Unis d'Amérique, M. le général Albert Myer, a fait au nom de son gouvernement la proposition d'observer les éléments météorologiques au même instant physique, une fois par jour, dans tous les Observatoires de la terre. Cette proposition a été accueillie comme elle méritait de l’être et elle a reçu un commencement d’exé- cution depuis le 1° janvier de l’année 1874. Les réseaux météorologiques qui jusqu'ici ont pris part à l’entreprise ont pour stations centrales : Washington qui observe à . . . Zb Aen du matin. Greenwich — See BE E A aris — e 0 35 — Bruxelles — e E — Utrecht — së = Christiania — SIT 20 — Copenhague — + ke — in — e A DT = : = s T 20 — Constantinople — 2 39 — St-Pétersbourg — , 2 4 — ( 553 ) Ces divers réseaux sont composés de nombreuses sta- tions météorologiques; les États-Unis notamment, en y comprenant le Canada, en possèdent près de cent. Les observateurs belges auront sans doute à cœur de prendre part à ce grand travail d'ensemble. Les Américains les y convient et prévoient que cette collaboration aura les résultats les plus avantageux pour le commerce et pour l’agriculture. Les observations, faites chaque jour simulta- nément dans les diverses stations, devraient être réunies et adressées aux stations étrangères qui enverraient, de leur côté, les résultats qu’elles auraient obtenus. Béjà l'Amérique s'engage à fournir un exemplaire imprimé de ses documents à tous ceux qui coopéreront à cette entre- prise internationale. Je crois faire une chose utile en communiquant à la classe des sciences un extrait de la lettre que M. le général A. Myer a adressée à mon père, le 51 janvier der- nier : « Washington D. C., 51 janvier 1874. » CHER MONSIEUR QUETELET, » J'ai reçu avec un sensible plaisir votre lettre du 20 décembre dernier, me notifiant la coopération, com- mencée le 4° janvier 1874, de l'Observatoire royal de Bruxelles au système d'échange international des obser- vations météorologiques simultanées. » Le secrétaire de la guerre a également reçu cette nouvelle avec beaucoup de satisfaction. Aussi je m'em- presse de saisir cette occasion pour vous exprimer mes propres espérances au sujet des heureuses conséquences 27° SÉRIE, TOME XXXVI. ( 554 ) qui ne peuvent manquer de résulter, pour le bien-être des États-Unis et de la Belgique, de leur mutuelle collabo- ration à cette entreprise internationale. » Notre Bureau s'efforcera par tous les moyens dont il pourra disposer de rendre ce travail utile aux deux pays et au monde entier; j'ai la certitude qu'il en sera fait de même de votre côté. » De plus amples explications au sujet du travail pro- jeté paraissent nécessaires. Je les spécifierai ainsi qu'il suit. » Lors du dernier congrès international météorologique de Vienne la proposition suivante fut adoptée : » Jl est désirable, en vue de l'échange des travaux météorologiques, qu’une observation uniforme, au moins, soit faite journellement et simultanément en autant de stations que possible, répandues sur toute la surface du globe. Cette observation devrait être de telle nature qu’elle pût servir à la préparation de cartes synoptiques jour- nalières. » Les États-Unis ont un intérêt spécial dans la récep- tion et l'échange des observations, pour en faire usage dans les travaux qui y sont actuellement en voie d’exécu- tion. » Il est à espérer que lorsque les relations se seront suffisamment étendues, bien des questions intéressantes qui jusqu'ici ne peuvent pas être résolues recevront une solution. C'est dans ce but que nous vous avons fait la demande de recevoir des rapports uniformes déduits d'ob- servations simultanées, prises journellement dans autant de stations que possible dépendantes de votre juridiction, ou bien encore de stations qui seraient disposées à con- courir volontairement à l'envoi de pareilles observations. En retour, il vous serait transmis des tableaux représentant - ( 355 ) les observations simultanées prises dans toutes les stations établies sur le territoire des États-Unis. » Les observations comprendraient au moins la pression atmosphérique (réduite), la température, le vent, la pluie, l'humidité relative et l'état du ciel. Elles devraient être faites à une heure et une minute, temps moyen de Bruxelles; les tableaux d'ensemble, imprimés ou manu- scrits, à votre gré, seraient expédiés en ballot, le 15 et le dernier jour de chaque mois. » Si, par suite de certaines circonstances, il était im- possible de transmettre ces tableaux d'ensemble sans qu'il s’y trouvât des lacunes, pour les jours où, comme cela peut arriver, les observations n'auraient pu être faites, ces tableaux n’en seraient pas moins reçus avec beaucoup de reconnaissance. es observatior ist t i t seront n bien accuëillies » En échange, nous nous proposons de vous expédier, le 15 et le dernier jour de chaque mois, les tableaux généraux des observations simultanées. Je vous en envoie ci-inclus un spécimen donnant les résultats (américains) pour un seul jour. » A titre de retour à ceux qui, répondant à votre invita- tion, voudraient bien coopérer à ce travail tant désiré de la part de notre Bureau, nous nous proposons d'envoyer tous les mois des exemplaires de la Revue météorologique men- suelle avec les cartes. Nous leur adresserions aussi les autres travaux publiés par notre Bureau, s'ils étaient désirés. » J'ai l'honneur de vous envoyer ci-joints des exem- plaires des rapports simultanés internationaux, rédigés jusqu’au 15 janvier, ainsi que des exemplaires de la Revue météorologique mensuelle que je vous prie de distribuer à ( 556 ) ceux qui ont bien voulu vous aider dans l'inauguration de cette entreprise. » En proposant cet échange comme partie d'un sys- tème auquel, nous pouvons l’espérer, une très-grande extension peut être donnée, le directeur général des signaux se rappelle avec plaisir le prompt encouragement reçu de votre part lors des premiers pas faits pour l'adop- tion du système et il est heureux de vous informer que la coopération pour un pareil échange de rapports, commen- çant le 4°" janvier 1874, a été sollicitée de MM. le professeur Wild, directeur de l'Observatoire physique central de Saint- Pétersbourg; le professeur Coumbary, directeur de l'Obser- vatoire de Constantinople ; le professeur Jelinek, directeur de l’Institut central de météorologie de Vienne; M. Robert Scott, directeur du Meteorological Office de Londres; M. Alexandre Buchan, secrétaire de la Société météorolo- gique d'Édimbourg ; M. le professeur Mohn, directeur de l'Institut météorologique de Norwége, à Christiania ; M. le professeur Buys-Ballot, directeur de l’Institut météorolo- gique d'Utrecht. » Le temps et les facilités aidant, notre Bureau cher- chera de nouveaux éléments de coopération. » L'avantage qui doit en résulter pour le bien-être des États-Unis est certain; aussi avons-nous l'espoir, comme la coopération désirée est universelle, que les résultats utiles le seront également. » J'ai l’honneur d’être, etc. » ALBERT-F. MYER, » Brigadier-général et directeur général des signaux de l’armée des États-Unis. » ere on E EE nd Mee. WT TTT "STEET ET dE en mad à 5: Had Lt ci à ( 357 ) Recherches sur les dérivés glycériques; par M. Louis Henry, correspondant de l’Académie. * Les dérivés du propane CH: peuvent être rangés parmi les combinaisons grasses que l’on a le plus et le mieux étudiées. Depuis environ une dizaine d'années surtout, c’est-à-dire depuis que les questions de structure moléculaire sont sé- rieusement à l'ordre du jour, ces composés ont été l’objet d'une prédilection marquée de la part d'un bon nombre de chimistes, I serait trop long de rappeler les travaux si nombreux et généralement si remarquables auxquels ces études ont donné lien : aussi bien les noms de leurs au- teurs sont devenus classiques dans les laboratoires. La raison de cette sorte de préférence s'aperçoit de suite : c’est dans les combinaisons tricarbonées que se pose Dour la première fois, dans toute sa plénitude et de la façon la plus simple, le problème tout actuel de l'isomérie et de la structure moléculaire. En raison même de sa constitution, CH; — CH; — CH;, le propane peut donner naissance à une variété de combi- naisons, saturées et non saturées, que l'on ne peut pas rencontrer dans les combinaisons bicarbonées, dérivées de l'éthane CH;— CH, ; mais en raison même de sa constitu- tion aussi, c’est dans ces dérivés tricarbonés que les ques- tions d’isomérie sont les plus simples et les plus abordables. Il n’est pas, dans le domaine scientifique, de sujet, quelque profondément remué qu'il soit, qui s'épuise, en chimie, moins encore peut-être que partout ailleurs. Il y ( 558 ) a de la place pour tous dans les champs de la science, et quelque nombreux qu’ils paraissent être , ce sont toujours les travailleurs qui font défaut à la moisson. Guidé par les considérations générales que j'ai énoncées tout à l'heure, j'ai, moi aussi, après et à la suite de tant d’autres, entrepris des recherches sur les combinaisons tri- carbonées. J'ai choisi la glycérine , comme point de départ; parmi tous les composés tricarbonés, il n’en est certainement pas de plus important ni de plus fécond; la glycérine permet, en effet, d'arriver à tous les dérivés du propane, qu'ils soient saturés ou non, quelle que soit aussi leur atomi- cité. Mes études se rattachent à quatre groupes principaux de composés : 1° Composés glycériques proprement dits (C; H;) X5; 2 Composés allyliques (C; H;) X ; 3° Composés propargyliques (C;H;) X ; 4° Composés diallyliques. Ces recherches ont absorbé depuis quatre ans une grande partie du temps disponible que me laissent les devoirs de l’enseignement qui m'est confié. Je crois le moment venu d'en commencer la publication. Ce n’est pas que je regarde ma tâche comme complétement et parfaitement remplie, ce n’est pas non plus, et encore moins , que je pense avoir épuisé, pour Je moment actuel, le sujet sur lequel ont porté mes efforts; mais dans l’état d'avancement où se trouvent déjà plusieurs parties de ces travaux , et où arri- veront successivement les autres, les retenir devers moi pour les compléter davantage et les perfectionner, serait peut-être moins profitable, pour la science, que les mettre au jour, dans leur forme actuelle. Pa paire got ( 559 ) Pour légitimer cette publication, que l'on pourrait peut- ètre trouver trop hâtive, je m'abrite avec confiance sous Fautorité de celui que l’on a regardé, jusqu'ici, comme le père de la chimie scientifique. Voici comment s'exprime Lavoisier dans un de ses Mémoires : , On. CHEN, Ze JS OR SE 2 we oe NOM NN WW E « La marche de l'expérience est si lente, qu'un physi- cien qui voudrait attendre pour publier le résultat de ses travaux qu'il en fùt entièrement satisfait, risquerait d'ar- river au bout de sa carrière sans avoir accompli la tàche qu'il s'était imposée et sans avoir rien fait pour les sciences et pour*la société. II faut donc avoir le courage de donner des choses imparfaites, de renoncer au mérile d’avoir fait tout ce qu’on pouvait faire, d’avoir dit tout ce qu’on pouvait dire, enfin savoir sacrifier son amour- propre au désir d'être utile et d’accélérer le progrès des sciences (1). » Ailleurs, il ajoute : « Cest le sort de tous ceux qui s'occupent de recher- ches physiques ou chimiques d'apercevoir un nouveau pas à faire sitôt qu’ils en ont fait un premier et ils ne donneraient jamais rien au public, s'ils attendaient qu’ils eussent atteint le bout de la carrière qui se pré- sente successivement à eux et qui paraît s'étendre à mesure qu’ils avancent pour la parcourir (2). » C’est la même pensée que Fourcroy développe en ces termes, plus précis encore et si éminemment applicables à notre époque de rénovation chimique, comme la sienne : « Les faits nouveaux que l'on observe ou que l’on découvre (1) Œuvres de Lavoisier, t. 11, p.38 (Paris, 1862). Mémoire sur la des- truction du diamant par le feu (2) Jd , p. 119. Mémoire sur la calcination de l’étain. ( 360 ) en chimie, ne sont pas comme ceux qui appartiennent aux autres branches de la physique. Les progrès rapides de cette science, la carrière nouvellement ouverte aux chimistes, le nombre des travailleurs qui se multiplie tous les jours, font désirer que les découvertes et les recher- ches particulières soient connues le plus tôt possible, soit pour l'avancement de la science en elle-même, soit pour assurer aux auteurs le droit d’antériorité et le prix de leurs travaux (1). » COS COS me De a ww e SUR LES DÉRIVÉS ALLYLIQUES. A l'instar des composés non saturés en général, les com- posés allyliques (C; H,) X se font remarquer par la facilité avec laquelle ils contractent des combinaisons par addi- tion, avec divers systèmes moléculaires, simples ou com- posés. Lorsque j'entrepris, il y a quelques années, des recher- ches sur les dérivés allyliques d’addition, le nombre en était fort restreint et l'étude fort incomplète, On n'avait guère fait réagir sur ces composés, et encore sur quelques-uns seulement, que les corps halogènes, notamment le chlore et le brôme. Si j'ai cru devoir reprendre l'étude des dérivés allyliques, sous ce point de vue, mon but n’a pas été, sans doute, de me préparer une moisson de composés nouveaux; quelque riche que püt être cette moisson, et elle peut l'être en réa- lité, il ny avait pas là de quoi me tenter bien fort : aujour- d'hui, en effet, que la chimie organique se développe si (1) Fourcrov, Mémoires de chimie ei observations. Avertissement. 561 ) rapidement, il n’y a souvent que peu de mérite à réaliser de nouveaux dérivés d’addition de composés non saturés, et des produits auxquels ne s’attacheraient d'autre intérêt actuel que celui de la nouveauté, n'auraient pour les chi- mistes, au point de vue scientifique, qu'une médiocre im- portance. Mais l'étude de ces dérivés allyliques d’addition est, en partie, l'étude des rapports qui existent entre ces composés et les composés glycériques, deux groupes de produits que l'on peut regarder, à juste titre, comme des types parfaits des composés saturés et des composés non saturés en gé- néral. C'est à ce point de vue que je me suis d’abord placé. J'espérais, en outre, constater dans le cours de ces recher- ches, des faits propres à jeter quelque lumière sur la constitution de ces composés, notamment des composés _allyliques; mon horizon s’est plus tard élargi; les dérivés allyliques d’addition mont conduit directement aux dérivés propargyliques et dipropargyliques , c’est-à-dire sur des régions presque ou totalement inexplorées de l'empire du carbone. Ces considérations légitimeront les recherches que j'ai entreprises sur ces dérivés d’addition. On verra par la suite que ce n’est pas sans quelque suc- cès que j'y ai consacré mon temps et mes efforts. § L — Sur les composés d’addition des dérives allyliques avec l'acide hypochloreux. Il ma paru intéressant et utile d'examiner l’action de l'acide hypochloreux (OH) CI sur les composés Poe pour diverses raisons. ( 362 ) A l'époque où j'ai entrepris cette étude (1), on n’avait guère fait réagir cet excellent réactif, si heureusement in- troduit par M. Carius dans la chimie organique, que sur des hydrocarbures, du moins parmi les combinaisons grasses; il n’était pas inutile de généraliser l’action de ce corps et de montrer qu'il peut s'ajouter à tous les composés non saturés, quelle qu’en soit la fonction. De plus, l’action de l'acide hypochloreux sur les dérivés allyliques m'a paru de nature à jeter quelque jour sur la constitution de leur radical C; Hy. J'ai la satisfaction d'avoir vu mes prévisions se réa- liser. Les dérivé sallyliques en général (C;H;)X , quelle qu'en soit la nature et la fonction, se combinent avec l'acide hypochloreux (HO) CI. Sur la molécule de ces composés, on ne peut en fixer qu’une seule d'acide (HO) CI. C'est, du reste, ce que faisait prévoir leur caractère de composés bi- valents. x (CHA X + (HO) CI — CH, ? (0H) CL Le résultat de la combinaison est un composé saturé triatomique, dans le fait, un composé glycérique, au moins monochlorhydrique. Cette combinaison s'effectue aisément, avec énergie même; un dégagement de chaleur notable l'accompagne. L'opération est des plus simples; j'en indiquerai, une fois pour toutes, les détails, afin d'éviter par la suite des répé- titions. On agite dans une fiole en verre, bouchée, le com- (1) En 1870. Voir plus loin l'indication des notices préliminaires pu- bliées sur cet objet. RE ET ON DR ee PTT SE ( 363 ) posé allylique avec de l'acide hypochloreux en solution étendue (1); il faut avoir soin, pour éviter l'action oxydante, de refroidir en plongeant à diverses reprises et en main- tenant le flacon dans de l’eau froide. L'opération est ter- minée lorsque l'addition d’une nouvelle quantité d'acide hypochloreux à la masse liquide ne détermine plus d’échauf- fement sensible. Le liquide étant refroidi, on précipite le mercure dissous, à l’état de chlorure ou d’oxysel, en faisant passer, à travers la masse, un courant d'hydrogène sulfuré, jusqu’à ce que le précipité, d'abord jaune, de sulfure basi- que soit devenu noir. Il est important de s'arrêter dès ce moment, afin d'éviter la formation de composés hydro- sulfurés, par l'échange de CI contre (HS). On agite alors la masse liquide, après ou sans l'avoir filtrée, suivant que le produit formé est ou n’est pas so- (1) J'ai toujours préparé l'acide hypochloreux qui m'a servi à réaliser ces réactions, par la méthode indiquée autrefois par M. Balard. On agite, à l'abri de la lumière directe et à froid, dans de grands flacons En verre remplis de gaz chlore, une bouillie d'oxyde rouge de mercure et d'eau, On renouvelle cette opération, plusieurs fois, en remplissant de nouveau le flacon de gaz chlore, jusqu'à ce que l'oxyde mercurique se Soit transformé en une masse d’un noir brunâtre d'oxychlorure. On enlève l'acide hypochloreux par l’eau et on filtre On peut de la sorte se préparer en peu de temps une quantité notable d'acide. On ne peut l’employer qu'étendu d'eau et presque incolore En admettant que Foxychlorure mercurique répond à la ësst? Hg,0, CI, ou 5HgO + Hg CI, (voir les analyses de Philipps, Soubeiran et Thaulow), il est facile de calculer la quantité d'oxyde HgO à employer Pour obtenir approximativement la quantité d’acide mg néces- saire pour faire réagir sur un poids donné de composé allyliqu On régénère l’oxyde mereurique de son oxychlorure par la ce caus- tique, Avant d'employer cet oxyde régénéré, il est nécessaire de le chauffer vers 500°, sans cela, sous l'action du chlore, on obtient une gear trop considérable d'oxysel sel mercurique soluble. ( 364 ) luble dans l’eau , avec un volume d’éther assez grand pour être sûr d'enlever la totalité du produit. La couche éthérée ayant été séparée, on expulse l’éther par une distillation au bain-marie; le produit reste et est soumis à une recti- fication ultérieure. Ce double traitement, par l'hydrogène sulfuré et par l’éther, de la masse liquide au sein de laquelle a été réa- lisée la combinaison est indispensable, alors même que le produit est insoluble et peut être aisément séparé; une certaine quantité de chlorure mercurique y reste, en effet, dissous et la distillation en est gênée ` de plus, quel qu'il soit, une partie du produit reste dissoute dans l’eau, l'éther sert à le recueillir. Ces réactions sont, en général, fort nettes et le rende- ment fort avantageux, sans être cependant théorique; on obtient le plus souvent au delà de 30 zl, de la quantité cal- culée; il est même des cas ou j'ai obtenu 80 et même 90 °/,, notamment avec l'oxyde d’éthyl-allyle: ce sont, en général, de véritables modes de préparation de ces produits. Alcool allylique C; Hy (OH) et acide hypochloreux (HO) Cl. L'alcool allylique se dissout dans l’acide hypochloreux étendu, en s'y combinant, la réaction est énergique et le dégagement de chaleur assez intense. Le produit formé reste dissous dans le liquide. Le rendement de l'opération n’est ici que médiocrement avantageux; de toutes les réactions de ce genre que j'ai réalisées, čest celle qui m'a donné les résultats les moins satisfaisants; la cause doit en être attribuée, sans doute, à l'oxydation que subit une partie de l'alcool de la part de l'acide hypochloreux. mnt NÉ dd SNS SSSR SEE dd nn aa o. ( 565 ) Le produit formé est une monochlorhydrine glycé- rique CH. (OH) CI. Cette monochlorhydrine constitue un liquide incolore, assez épais et visqueux, d’une faible odeur, d'une saveur douce et piquante. Elle se dissout aisément dans l’eau. Sa densité à 13° est égale à 1,4. Elle bout, sous la pres- sion ordinaire, vers 230°—935° Sa densité de vapeur a été trouvée égale à 4,15 (1). Substance . . "HV OA 08r,048. Pression edagitetgge E EE 769mm, Méreuré sohe ` of. LE, 615mm, Toner e e 185° Volume de la vapeur. . . . . . 79 ec A La densité calculée est 5,81. L'analyse de ce produit a fourni les résultats suivants : I. 07,4524 de produit ont donné 0:',5582 du chlorure d'argent (méthode de Carius). H. 0#,3704 ont fourni Oe, A 09 de chlorure argen- tique (2). CALCULÉ. TROUVÉ. Les D C;H; (OH), Cl. L IL. C, — 36 D D D H. Les, 7 » 2 » cl — 55,5 32,12 31,17 52,00 0, rom 52 » » » 110,5 _ (4) La densité de vapeur de la monochlorhydrine glycérique ordinaire n’a pas encore été déterminée. (2) Ces analyses, de même que la presque ere de celles consignées dans ce travail e Dr L. Bisschopinck. Fr ( 366 ) Éther allytéthylique CsH,(0C: HA et acide hypochoreux (OH) C J'ai signalé, à diverses reprises déjà, la stabilité toute spéciale des dérivés éthérés, méthyl et éthyloxylés, etc. X(OCH,;) et X(OC,;H;), ainsi que la netteté des réactions qu’ils peuvent fournir par rapportaux composés hydroxylés correspondants X (OH). J’ai mis une fois de plus à profit ce fait pour fixer (OH) CI sur des dérivés allyliques du type général de l’eau. Dans ma pensée, un de ces groupements oxy-alcooliques mettrait le radical (C; Hy) à l'abri de loxy- dation par l'acide hypochloreux, oxydation que ce radical subit si aisément en présence de (OH). Mon espoir a été réalisé. L’éther allyl-éthylique C; H,(0C; H.) se combine vive- ment avec l’acide hypochloreux étendu, en s’y dissolvant. La réaction est fort nette, la purification du produit des plus aisée et quand on 3 soin d’employer approximative- ment la quantité nécessaire d'acide hypochloreux , le ren- dement est presque théorique. Le produit qui reste, après l'expulsion de l’éther, soumis à une première distillation passe presque tout entre 180° et 190°, vers 185° surtout; vers la fin, le thermomètre marque environ 200° et il y a une légère carbonisation. Redistillé de nouveau, le produit passe presque fixe à 185° (non corrigé). Ce produit est une monochloro-éthyline glycérique C; H; (OC, H;) (OH) CI. Cette monochloro-éthyline constitue un liquide inco- lore, quelque peu épais, d’une légère odeur de fruit, d’une saveur piquante et poivrée. (367 ) Sa densité à 11° est égale à 1,117. Elle bout, sans décomposition, sous la pression de 758 millimètres, à 183°- 185° Sa densité de vapeur a été trouvée égale à 4,5. Substance employée . . . . . . 08,0558. Pression D N PNR ECK ES 755m, Mercure soulevé. Sorne er Ee 622m. Températ M 185° Volume de Ki EE 7 Le 7 ER 59 ce. 5. La densité calculée est 4,7. Ce corps se dissout assez aisément dans leau, moins facilement cependant que la monochlorhydrine ordinaire. Renfermant encore un hydroxyle (OH) alcoolique, il réagit à la facon des alcools en général, notamment avec les chlorures négatifs et avec acide azotique. Avec le pentachlorure de phosphore Ph Cly, il donne une bichloro-éthyline C; Hy (OC, Hy) Cla et avec le penta- brômure Ph Br, une cAloro-brômo-éthyline C, H; (OC H;) CI Br; avec le chlorure d’acétyle, une chloro-acéto-éthyline C; Hy (OC, Hy) CI (Ca H50). Il se dissout dans l'acide azotique concentré; l'addition de l'acide sulfurique en sépare une chloro-nitro-éthyline C; Hs (0C; H;) CI (Az 04 sous forme d'un liquide épais Surnageant; ce produit est insoluble dans l’eau et plus dense que celle-ci. Sa réaction avec les alcalis caustiques offre un intérêt spécial. Elle a pour résultat la formation de l'éhyl-glycide can, < (O CH3) produit qui s'obtient de cette façon, aisément et à l’état de pureté. L'action des alcalis caustiques, en solution ( 568 ) concentrée, sur la monochloro-éthyline est vive et éner- gique; léthyl-glycide formée surnage le mélange C, H, (0 C, H,) CI (OH) + K OH = C, H; (0 C,H,) O + H,0 + K CL Léthyl-glycide correspond à l’épichlorhydrine CKE et en présente toutes les propriétés. Je m’occuperai de ce produit dans un travail spécial, consacré aux combinaisons glycériques. Je crois inutile d'insister davantage sur l'intérêt que pré- sentent ces deux composés éthylo-glycériques; on devine combien sont nombreux les dérivés auxquels ils peuvent donner lieu. L'analyse de ce produit a fourni les résultats suivants : J]. Os,5186 de substance ont fourni Os" ,3274 de chlo- rure d'argent. JI. 0s" ,2672 de substance ont donné Os',2754 de chlo- rure argentique. CALCULÉ. TROUVÉ. Es n a C;H,(0C,H,) CI (OH) olo: È IL. C, — 60 D » » ea e e CI — 35,5 25,62 25,40 25,49 0, — 32 » » ( 509 ) Acetate d'allyle C; Hs (Ca H; 03) et acide hypochloreux. L'acétate d’allyle se comporte avec l'acide hypochloreux comme l’éther allyl-éthylique , mais la réaction est moins nette et le résultat moins avantageux. Le produit est une chloro-acétine-glycérique CG Hy (Ca H; 03) (OH) CI. Ce produit brut ressemble aux produits acétiques que l’on obtient accessoirement, en même temps que la dichlor- hydrine, lors de l'action de l'acide chlorhydrique sur un mélange de glycérine et d'acide acétique. Il bout, à une première distillation, en grande partie entre 220° et Se surtout vers 250°. Peut-être se régénère-t-il ici, comme dans l’action de (OH) CI sur Falcool allylique lui-même , une certaine quantité de glycérine. Cette monochloro-acétine constitue un liquide incolore, assez épais, d’une odeur fraiche, d’une saveur amère et piquante. Sa densité à 9° est égale à 4,27. Elle bout sous la pression ordinaire vers 250°. La densité de sa vapeur a été trouvée égale à 4,87. Substance employée, - ... + + . 0s" 0524. Pression barométrique. . - . . . 769m, Mercure soulevé 651m Fempératur e RE 185°. Volume de bé EE E E 76 cc. H. La densité caleulée est 5,27. Cette chloro-acétine se dissout aisément dans l'eau. Ren- fermant un hydroxyle alcoolique (OH), elle réagit à la façon des alcools en général. Je crois inutile de m'arrêter davan- tage à l’'énumération des dérivés auxquels elle peut donner lieu. L'analyse de ce produit a fourni les chiffres suivants : Ze: SÉRIE, TOME XXXVII 25 (370 ) J. Os,5094 de substance ont fourni Osr,4752 de chlo- rure d'argent. I. Ogr,5144 de produit ont donné 0s" ,2942 de chlorure argentique. CALCULÉ. TROUVÉ. DEF A — C,H; (C,H,0,) (OH) CI Së E H. C sg A 60 b » » H; pers 9 » D CI — 35,5 25,97 23,07 25,15 0, —- 48 » » +52 Bromure d’allyle (C; H.) Br et acide hypochloreux. Le brômure d’allyle se combine vivement aussi avec l'acide hypochloreux. Le produit forme une couche hui- leuse , insoluble, au fond de la masse liquide. La réaction est fort nette et le produit facile à purifier ; il bout presque complétement à une température constante dès la pre- mière rectification. Ce produit est une chlorobrômhydrine glycérique (C; H;) Br (OH) CI. I constitue un liquide incolore, brunissant à la longue à la lumière, comme la plupart des dérivés brômhydriques. Il est quelque peu épais. Son odeur est faible et éthérée, sa saveur est douce et piquante, sa densité à 9° est égale à 1,764. | Il bout , sous la pression ordinaire , à 197°, sans décom- position (non corrigé). (371) Sa densité de vapeur a été trouvée égale à 5,88. Substance employée . . . . . . osr ,0549. Pression barométrique. . . . . . 756m. Mercure soulevés: is LR 6207. EE a E E E E E 185°. Volume de la vapeur . . . . . . 67 cc. 8. La densité calculée est 5,99. J’examinerai dans un travail spécial l’action des alcalis caustiques sur ce produit. Cette action donne lieu à des observations intéressantes. Renfermant un EEN alcoolique, il est propre à donner des dérivé tes triples (C;H;) Br CI X. C’est ainsi qu'il se | comporte avec l’iodure de phosphore, en formant une chlorobrômoiïodhydrine (CG H;)CIBr Lo; avec le chlorure d’acétyle une chlorobromoacétine CH. (C:H:0,) CIBr; l'acide nitrique le dissout, de cette solu- tion , l'acide sulfurique précipite, sous forme d'une couche huileuse surnageante, une chlorobrômonitrine (Cs HJ Br CI zO;). L'analyse de ce produit a fourni les résultats suivants ` I. Ger. 2019 de substance ont fourni Or, 7408 de chlo- rure et de brômure d’argent. IL. Osr,5204 de produit ont fourni Os',9874 de chlorure et de brômure argentique. CALCULÉ. TROUVÉ. SS e E (CHA (OH) CI Br. fo. 1. IL. 5 GE 36 » D » H. Ee 6 y» » Cl — 335 s 5 È 66,11 Ka mg 66,55 65,87 0 been of 16 » » » (372) Chlorure d'allyle (CG Hy) CI et acide hypochloreux. Le chlorure d’allyle se combine fort énergiquement aussi à l'acide hypochloreux; ce chlorure , qui d’abord surnage , tombe bientôt au fond du liquide en formant une couche huileuse, incolore, fort lourde. Une partie notable du pro- duit reste néanmoins dissoute. Après l'expulsion de l’éther qui a servi à le retirer, le produit brut soumis à une première distillation passe presque en totalité de 170° à 190°. Apres quelques rectifi- cations , on en obtient aisément un produit bouillant d’une manière constante vers 180°. Le rendement de lopération est fort avantageux; J'ai obtenu au delà de 50 °/, de la quantité théorique. Le produit ainsi obtenu est une dichlorhydrine glycé- rique (C; H;) CI (OH) CI. Cette dichlorhydrine constitue un liquide incolore, par- faitement limpide, assez épais, elle exhale une légère odeur éthérée; sa saveur est piquante. Sa densité à 9° est égale 1,369. Elle bout, sans décom- position , à 179°-180° (non corrigé). Sa densité de vapeur a été trouvée égale à 4,51 (1). Substance employée . . . . . . 087,0357. | Pression barométrique EN 767%, Mercure soulevé Re 614m, | Températures" "Re : 1850. | Volume de g EE 80 cc. 6. La densité calculée est 4,45. ` (4) La densité de vapeur de la dichlorhydrine glycérique ordinaire n’a pas été déterminée jusqu'ici. ffe ( 575 ) Cette dichlorhydrine est assez notablement soluble dans l’eau, fort soluble dans l'alcool et l’éther, Elle présente, sous plusieurs rapports, les propriétés de la dichlorhydrine glycérique préparée directement. Avec les alcalis caustiques, elle donne de l'épichlorhy- drine (C; H.) CIO; elle se dissout dans l'acide azotique fumant, l'acide sulfurique sépare de cette solution une dichloromononitrine glycérique (C; H;) CL (Az O,) sous forme d’huile surnageante. Chauffée légèrement pendant quelques heures avec de l'acide azotique concentré, elle s’oxyde et se transforme en acide bichloropropionique Cs H, Cla O- Je reviendrai plus loin d’une manière détaillée sur cette réaction, impor- tante au point de vue de la constitution de cette dichlor- hydrine. Les chlorures et brômures négatifs, Ph Cly, Ph Bry, (C> Hz0)Cl,ete., l’attaquent à la façon des alcools ordinaires, en donnant les dérivés éthérés correspondants. L'analyse de ce produit a fourni les résultats suivants : I. 0s,5566 de produit bouillant à 480° ont fourni 0s",7488 de chlorure d'argent. IL. Ger 2648 du même échantillon ont fourni Os ,5894 de chlorure argentique. UT. Oe ,5428 d’un autre échantillon ont donné Uer ,7664 chlorure d'argent. CALCULÉ. TROUVÉ. (C;H,) CI (OH) CI. dëi f. H. HI. C; TeS 36 » » » CJ H, beggen 6 » » » » CI, — 71 55,04 55,05 55,10 55,90 129 ( 374 ) Il eùt été intéressant d'examiner l’action de l'acide hypo- chloreux (OH) CI sur l'oxyde d’allyle lui-même (C; Hs), O. Il n’est pas à douter que (OH) CI s'ajoutant à chacun des radicaux Cz Hy, on obtiendrait un produit représenté par la formule CH, — (0B) CI Gi, — (OH)CI. Ce produit serait un anhydride, c’est-à-dire un éther simple d’une monochlorhydrine glycérique C; H; (OH); CI, et sous l’action des alcalis caustiques, on devrait en obte- nir par élimination de HCI, le produit 0 ou (CH) O CH, de c’est-à-dire un véritable anhydride ou éther simple de la glycérine, Cet oxyde répondrait certainement à la for- mule de structure suivante : CN, 0 :- CE, | | CH CH e 1 0. CB Avé > En un mot, ce serait le véritable éther du glycide de M. Reboul, de cette sorte d'alcool dont Kapiehloriydrioa est le dérivé chlorhydrique. CH, (OH) CH, CI | | CH CH t SÔ 0. CH, om. Glycide. Épichlorhydrine. L’oxyde d’allyle est un produit difficile à obtenir en quantité quelque peu notable. Je n'ai pas été à même jus- OOTO ( 575 ) qu'ici d'en réaliser, dans de bonnes conditions, la combi- naison avec l'acide hypochloreux. C’est un point sur lequel je me réserve de revenir par la suite. Mes premières expériences sur l'addition de l'acide hypochloreux aux dérivés allyliques remontent au com- mencement de l’année 1870. Une notice préliminaire, indiquant le fait en général, et notamment en ce qui con- cerne le brômure et le chlorure d’allyle, a paru, cette année, dans les Comptes rendus (séance du 18 avril) et dans les Bulletins de la Société chimique de Berlin (séance du 11 avril). Un chimiste allemand, M. H. von Gegerfeldt, parait s'être occupé de cet objet en même temps que moi; le numéro de mai de la même année, des Annalen der Chemie und Pharmacie (tome CLIV, page 247), renferme une notice de ce chimiste sur la combinaison du chlorure d’allyle avec l'acide hypochloreux. Je fais remarquer en passant que M. von Gegerfeldt s’est restreint à l'étude de ce seul dérivé allylique. M. von Gegerfeldt est revenu Dan dernier, dans les Bulletins de la Société chimique de Berlin, sur cette même réaction, tome VI, page 720. Je n'avais, en 1870, réalisé la combinaison de l'acide hypochloreux et du chlorure d’allyle qu'avec une quantité de matière restreinte, et il ne m'avait pas été possible de déterminer le point d’ébullition du produit avec toute l'exactitude et toute la précision désirable. On sait par expérience combien il est souvent difficile de fixer d’une manière certaine le point d’ébullition réel de certains pro- duits dont on ne possède qu’une faible quantité. Je me pro- posais du reste de revenir, ainsi que je lai fait depuis, sur cet objet et de l’examiner en détail. Le produit que j'avais ( 370 ) obtenu était d’ailleurs pur, ainsi que le constate l'ana- lyse HI, rapportée plus haut, analyse faite par M. le docteur B. Radzizewsky, mon préparateur à cette époque. J'avais assigné à ce produit 175°-180° comme point d'ébullition (non corrigé). Sa densité à 9° était 1,5699, et ayant constaté qu'il donne, sous l'action des alcalis causti- ques, de l'épichlorhydrine (C; H;) O CI, je disais que cette dichlorhydrine présentait les mêmes propriétés que la dichlorhydrine glycérique, assertion qui est exacte, sous ce rapport du moins; mon intention n’était certainement pas de me prononcer par là, d’une manière expresse et irrévo- cable, sur la constitution de ce produit. M. von Gegerfeldt assigne à cette dichlorhydrine, 180°- 185’, pour point d’ébullition (sous la pression de 753 m.), toute la colonne mereurielle étant dans la vapeur. J’admets l'exactitude de sa détermination et je la confirme. Il a con- staté que l’épichlorhydrine, qui en résulte sous l’action des alealis, donne, en se combinant avec l'acide chlorhy- drique , une dichlorhydrine différente, bouillant, dans les mêmes conditions que la première, à 176°-177°. De plus, il a constaté que sous l’action de l'hydrogène naissant — amalgame sodique et eau, — la dichlorhydrine bouillant à 183° donne de l'alcool allylique. Il en conclut que cette dichlorhydrine, produit d’addition de (OH) CI avec le chlo- rure d’allyle, est identique à celle qui résulte de l’addition du chlore Cl, à l'alcool allylique. C’est là un point que j'examinerai en détail dans la suite de ce travail. Les faits que je viens d'exposer démontrent que les dérivés allyliques (C; HA X, quelle qu'en soit la fonction, c'est-à-dire quelle que soit la nature du radical ou groupe- ment représenté par X, se combinent intégralement avec | ( 577 ) l'acide hypochloreux (OH) CI, en se transformant en com- posés saturés triatomiques (Cs HR (0 CI, lesquels sont des dérivés glycériques. Cette réaction constitue, à mon avis, un argument, d'une valeur réelle, en faveur de la formule de structure que l’on attribue généralement aujourd’hui aux composés allyliques C, H; X. Remarquons d’abord que M. Tollens a mis hors de doute l'existence, dans les composés allyliques, d'un chaînon alcoolique primaire — CH, X; on sait en effet qu'il est parvenu à transformer, par oxydation, le bibrômure de l'alcool allylique Br; (Cs H;) (OH) en acide propionique bibrômé Br, C; H, O ou Ca H; Bra — COOH (1) L'alcool allylique C H; (OH) et ses dérivés C; Hs X peu- vent donc être représentés prochainement, avec certitude, par les formules suivantes : CH, OH CH, X | CH, GH. Il reste à déterminer la structure du fragment C H; du radical allyle C, Hs, fragment non saturé bivalent, qui communique au système tout entier Cs Hs X le caractère de composé bivalent. (1) Annalen der Chemie und Pharm., t. CLXVII, p. 222 (1875). ( 378 ) Les trois formules suivantes sont seules théoriquement possibles pour ce reste Ca H; < | a) e b) CH, c) Ka — CH, CH. CH, — Je wignore pas que, dans la théorie des soudures mul- tiples ou de la saturation mutuelle des atomes de carbone, théorie qui a cours aujourd’hui, le choix entre ces trois formules est facile et que les deux premières, a) et b), doi- vent être immédiatement écartées comme impossibles et incompatibles, avec le fait d’une double soudure entre les deux atomes de carbone du reste C, H- Mais je laisse de côté cette idée et cette théorie, à laquelle je me range du reste, et dont j'apprécie lutilité et les services ` je préfère m'en tenir pour le moment strictement aux faits. Je rappelle d’abord que les monochlorhydrines aldéhy- diques cu D Ga et acétoniques Cn Hanpi de Ca Hangi sont jusqu’à présent des composés inconnus el ne parais- sent pas plus susceptibles d'exister à létat de liberté que les glycols ou bihydroxydes correspondants ~ OH C, Hn a < op Sg ZS Si c < on Cn H3n+t- (373 ) Tous ces corps sont représentés soit par les aldéhydes Ca Han pı — CHO soit par les acétones (C, H,,,,) — CO qui en résultent, par élimination respective de H CI ou de H (OH). Si les dérivés allyliques pouvaient être représentés par ` la formule a) en se combinant avec l'acide hypochloreux (OH) CI, ils donneraient virtuellement une #onochlorhydrine acéto- nique et celle-ci par élimination de H Cl, se transformerait en une acétone CH, X — CO — CH; CH, X | C | CB, Composé pouvant réellement exister et qui serait le pro- duit réel et final de Ja réaction. C’est ce qui n'a pas lieu. Si, au contraire, la formule b) CH, X cH, cH< était exacte, l'addition de l'acide hypochloreux (OH) CI aux ( 580 ) dérivés allyliques les transformerait virtuellement en une monochlorhydrine aldéhydique CH, X cn, cu < 0H et finalement, par le mécanisme indiqué ci-dessus en aldéhyde propionique substituće CH, X CH, | CH O. Or, c’est ce qui n’a pas lieu non plus. J'ai démontré que l'acide hypochloreux (OH) CI s'ajoute purement et simplement aux dérivés allyliques Cs H; A. cp les transformant en dérivés glycériques ; la formule c) CH, X H CH, est donc la vraie formule de structure de ces composés , et la seule admissible puisque seule elle est d'accord avec les faits. Je ne vois aucune difficulté à déclarer que j'admets comme parfaitement rationnelle et vraie aujourd’hui Phy- pothèse des soudures multiples du carbone. Cette hypothèse entraine, entre autres, cette conséquence que l’élimina- tion de HH ou des systèmes moléculaires équivalents HCI, etc., H(OH), dans un groupement hydrocarboné GH... n’a pas lieu aux dépens d’un seul chainon hydro- carboné CH; ou CH, , mais aux dépens de deux chainons ( 581 voisins — CH;, CH ou CH; CH,, CH, ou CH; CH et CH. Je crois qu'il n'existe, en fait de composés carbonés non saturés ou à lacunes, proprement dits, qu’un seul exemple à citer, savoir l’oxyde carbone CO. L'hypothèse, si ingé- nieuse, des soudures multiples rend les plus grands services dans la détermination ou de la structure des composés non saturés, en écartant un certain nombre de composés pos- sibles d’une manière abstraite, mais incompatibles avec cette idée. Les faits que je viens de rapporter peuvent, au besoin, servir de confirmation à cette théorie. À côté des dérivés allyliques C, H; X dérivés alcooliques primaires C, H; CHX,,et capables, comme ceux-ci en gé- néral, de faire aisément la double décomposition, se placent des dérivés isomères, produits de substitution du propy- lène, C; H; X, susceptibles, comme les dérivés allyliques, de combinaison par addition, mais incapables de faire la double décomposition. Je signale particulièrement, parmi ces produits, le propylène chloré C; H; CI, éb. 25° et le Propylène brômé C, H; Br, éb. 56°. La structure de ces produits est déterminée aujourd’hui d’une manière cer- taine, et leur formation, à l’aide du méthylchloracétol et du méthylbrémacétol CH; — CX — CH; sous l’action des - alealis caustiques, ne permet pas d'assigner à ces produits d’autres formules que les suivantes : CH, CI GH. Pr, CH, CH, Lo d Br Cn, dn. LL action de l'acide hypochloreux sur ces composés a été ( 382 ) examinée, il y a déjà assez longtemps, en 1865, par M. Linneman (1). A cette époque, les questions de structure moléculaire occupaient moins les chimistes qu'aujourd'hui. Je ne crois pas inutile de m'arrêter un instant sur ces réactions pour en constater les résultats, si différents de ceux que donnent les dérivés allyliques. Suivant M. Linneman, les propylènes chloré et brômé donnent, sous l’action de l'acide hypochloreux (OH)CI, tous deux de l’acétone monochlorée CH; — CO —C H, La réaction est fort nette avec le propylène monochloré. Cette différence considérable, dans l’action d’un même composé sur des produits isomères, et dans la nature des produits formés, dénote une différence profonde dans la structure moléeulaire. Le mécanisme de cette réaction me paraît intéressant à examiner. Je ferai remarquer d’abord que l’action de l'acide hypo- chloreux (OH) CI sur le propylène monochloré et mono- brômé ne constitue pas, comme c’est le cas avec les dérivés allyliques, un simple phénomène d’addition, il y a élimi- nation d’hydracide halogéné, HCI ou HBr. C;H CI cuo SO + (0H) CI = + GG, Dr CH, 00 Hr. S'il n’était emgoen que du propylène monochloré, on pourrait croire, à première vue , que la réaction se réduit au fond à une simple oxydation, addition d'un atome (1) Annalen der Chemie und Pharm., t. CXXXVII, p. 125. | 385 ) d'oxygène à un composé non saturé, accompagnée d'un déplacement du chlore CH, CH, CI | CO + 0 = co | I CH, CH,. Mais il faut bien vite renoncer à cette interprétation devant la production de l’acétone monochlorée à l’aide du propy- lène brômé, comme à l’aide du propylène chloré. L’atome de chlore, renfermé dans l’acétone formée , vient consé- quemment de l’acide hypochloreux (OH)CI, de même que l'atome d'oxygène lui-même. Cette transposition atomique ne se réalise pas et doit être écartée. Les choses se passent, d’après moi, de la manière sui- vante ` l'acide hypochloreux s'ajoute d’abord au propylène monochloré et monobrômé, et conformément à certains principes de la théorie électrochimique, les radicaux (OH) et CI se placent ou se fixent sur les chaînons carbonés incomplets qui en sont le plus différents par leur compo- sition et pour lesquels par conséquent ils éprouvent le plus d’affinité, c’est-à-dire l'hydroxyle (OH) vis-à-vis de CCI ou CBr et le chlore CI vis-à-vis de CH. CH, CH, ei z CO La CH, CH. + (0H) Cl = E më C Br C< Br CH, CH; Il se forme ainsi une monochlorhydrine et une mono- ( 384 ) brômhydrine acétonique. Ces produits n’ont qu'une exis- tence virtuelle et ils se transforment, en perdant HCI ou HBr en acétone monochlorée. De là vient que le produit final de la réaction est le même, quelle que soit la nature du dérivé propylénique dont on est parti, quel que soit le corps halogéné qu’il renferme. C’est, à mon avis , par un mécanisme semblable que se produit l’aldéhyde acétique monochlorée CH, CI — CHO dans la réaction, réalisée par M. Glinsky (1) de l'acide hypochloreux (OH) CI surl'éthylène monochloré C, H; CI. CH CI CH OH sc cH 0 ? CH, CI Si cette théorie est exacte, l’action de l'acide hypochlo- reux (OH) CI sur le chlorure d’allyle monochloré CH, CI — CCI — CH, devra me fournir l’acétone bichlorée, symétrique ou biprimaire CH, CI— CO — CH, CI. C'est ce que je me propose de vérifier incessamment. Je reviens à présent aux dérivés allyliques. J'ai fait voir que l'acide hypochloreux (OH) CI s'ajoute intégralement à ces dérivés et les transforme en chlorhydrines glycériques (C; H;) X (OH) CI. Quelle est la structure de ces combinai- sons glycériques ? Ou bien où se placent, en s'ajoutant au fragment C, H; ou — CH — CH, du radical allyle Cs Hs, les deux radicaux (OH) et Cl qui constituent, réunis, l'acide hypochloreux ? Deux sortes de dérivés glycériques sont susceptibles de ee (1) Zeitschrift für Chemie, t. III , p. 673; t. VI, p: 647. ( 585 ) se former suivant la position que prendront les radicaux (OH) et CI vis-à-vis des chainons hydrocarbonés CH et CB, : les uns répondant à la formule a) CH,X | CH(OH) | CH, Ci et renfermant un hydroxyle (OH) alcoolique secondaire; les autres répondant au contraire à la formule | b) CH,X ; CH CI CH,(0H) et renfermant un hydroxyle alcoolique primaire. I serait difficile de faire un choix entre l’une ou l’autre de ces formules en se fondant sur l'analogie; les faits aujourd’hui connus concernant la structure des dérivés d'addition tri-carbonés, les rendent en effet possibles toutes les deux. En se combinant à l'acide hypochloreux, le proprlène CH, — CH — CH, donne, suivant les expériences de ji Markownikow (1), une monochlorhydrine propylénique — He (OH) CI, qui, produisant par oxydation de l’acétone = Hu CH, — Ci — CO CH;, doit avoir pour struc- ture CH; — CH (OH) — CH, CI. Les dérivés allytiques n’étant autre chose que des déri- vés propyléniques primaires CH, — CH — CH, CI, cette réaction tendrait à faire attribuer aux dérivés allyliques d'addition avec (OH) CI la formule a). (1) Annalen der Chemie und Pharmacie, t. CLIV , p. 251 (1870). 2e SÉRIE, TOME XXXVII. 26 Ki ( 386 ) Mais la réaction de M. Markownikow constitue un fait en quelque sorte exceptionnel (1). Toutes les fois en effet qu'un système moléculaire XX’ formé de radicaux diffé- rents, en nature et en qualité chimique, d’inégale énergie s'ajoute à un groupement non saturé hydrocarboné C, H, formé de deux moitiés non symétriques, inégalement hydrogénées , on voit le radical le plus négatif se fixer sur le chainon carboné le moins hydrogéné , et le radical le moins négatif, le radical positif ou relativement positif, se fixer au contraire sur le chaînon carboné le plus riche en hydrogène. Cette règle trouve son application, en ce qui concerne les dérivés du propane, quant au chlorure d'iode Io Cl, aux hydracides halogénés et à l’acide sulfurique. En se combinant avec le chlorure d'iode Jo CI, le propy- lène CH. donne un chloro-iodure répondant à la formule CH, — CH CI— CH, lo. C'est ce que les expériences de M. Sorokin (2) ont prouvé. En se combinant avec l'acide sulfurique, H(HSO, ), le — (1) Le butylène H,C=C< CR se comporte, avec l'acide hypochloreux (OH) CI tout autrement que le pro- pylène CH, = CH — CH,. Conformément à la règle que nous énonçous plus loin, ce butylène fournit, en s'ajoutant à (OH) CI une monochlorhydrine butylénique C; A, (OH) CI, possédant la structure suivante : CH (HOH. CG — CCI Se 2 < CH. C'est ce que M. Butlerow a prouvé: voir Annalen der Chemie und Phar- macie, t. CXLIV, p. 26 (année 1867). (2) Zeitschrift für Chemie, t. VIL, p. 265 (1871). ( 387 ) propylène donne de l'acide isopropyl-sulfurique (CH, — CH(HSO,) et ultérieurement par distillation avee l’eau, l'al- cool isopropylique CH; — CH (0H) — CH, (1). Les dérivés allyliques se comportent de même; le chlo- rure d’allyle donne avec l'acide sulfurique un acide sulfo- isopropylique chloré, qui, distillé avec de l’eau, donne une monochhydrine propylénique CH, CI— CH(0H)—CH, (2). En s'ajoutant aux hydracides halogénés en général, HX, le propylène donne aussi des dérivés isopropyliques CH; — CHX— CH, (5) Les dérivés allyliques en se combinant à ces hydracides HX se transforment aussi aisément en dérivés propyléni- ques ordinaires CH,X — CHX — CH; (4). Pour résoudre la question de la structure de ces dérivés d'addition , il était done nécessaire de s'adresser à l'expé- rience dientas c’est sur la dichlorhydrine, (C;H,)CI (OH) CI, produit de la combinaison du chlorure d’allyle avec l'acide hypochloreux que j'ai opéré. Si Ja formule a) CH, CI CH (OH) CH, CI représente la constitution de ce produit, cest un alcool ———— (1) BerrneLoT, Chimie organique , t. I, p- (2) Orrennem, Annalen der Chemie, etc. Sapia Leet pg 364, (5) BerrHELOT, ouvrage cité, p. 117. Quant à Hlo, voir Erlenmeyer, An- nalen, etc., t. CXXXIX, p. 298. (4) I est à remarquer toutefois qu'en s'ajoutant aux bydracides halo- génés, notamment H CI et H Br, les dérivés allyliques donnent aussi, suivant les circonstances , des dérivés biprimaires CH, X— CH, — CH, X. Voir Ge- romont et Reboul. ( 388 ) isopropylique bichloré, comme la dichlorhydrine ordinaire et, en cette qualité d'alcool secondaire il doit donner Pacé- tone bichlorée symétrique CHaC1— CO —CH,CI, éb. 170°- 4171 (1). Si, au contraire , c’est la formule b) CH, CI CH o CH, (OH) qui est exacte, cette dichlorhydrine est un alcool propy- lique normal bichloré et en sa qualité d'alcool primaire, elle doit donner par l'oxydation un acide dichloropropio- nique C; H, Cat, ou CH,CI— CH CI— CO (OH). J'ai réussi à effectuer cette transformation. J'ai répété sur cette dichlorhydrine la réaction si élé- gante gu a exécutée d’abord M. Tollens sur le bibromure de l’alcoo! allylique (HO)H,C — CH, Br, et qui lui a donné l'acide bibromopropionique (OH) CO —C, H, Br, ou (OH) CO — CH Br — CH, Br (2). Voici les détails de cette opération : 10 grammes de cette dichlorhydrine allylique ont été introduits dans 30 grammes d'acide azotique fumant. La liqueur, d'abord claire, se trouble après quelque temps et laisse déposer une huile qui est une bichloro-mono-nitrine (C; H;)Cl (AzO;). L’oxydation est presque nulle à froid; après une nuit, les choses étaient restées dans le même état qu'au com- mencement. Le mélange a été chauffé, pendant une journée au bain- SA e . (1) Glutz und Fischer Journal für Praktische Chemie, t. IV, p. 52. (2) Voir le mémoire cité plus haut. ( 389 ) marie, à l’aide de l’eau tiède, dans une cornue , en rapport avec un réfrigérant de Liebig. L’oxydation marche régu- lièrement et tranquillement; il se dégage des vapeurs ru- tilantes et la couche huileuse disparait peu à peu. Le lendemain , le liquide refroidi avait déposé des cris- taux lamellaires d'acide oxalique, environ un gramme. Le liquide acide a été dissous dans l'eau; cette dissolu- tion a été agitée avec de l’éther pour reprendre l'acide chloré qui pouvait s'être formé. Après évaporation de la dissolution éthérée, il m'est resté un liquide très-acide, d’une désagréable odeur (1), fort pi- quante, colorant en vert les bords extérieurs de la flamme. Prévoyant qu’il serait difficile de purifier une aussi pe- tite quantité de produit acide, s'il s'en était formé, à cause de la solubilité de celui-ci dans l’eau, je lai soumis à un traitement qui devait ie transformer en éther. Ce pro- duit brut a été mélangé avec son volume d’alcoo! anhydre et saturé par de l'acide chlorhydrique, dans un mélange réfrigérant. L'eau a précipité de cette dissolution une huile lourde, de couleur jaunâtre, d’une odeur étrange, rappelant celle des carottes sauvages. Après lavage à l'eau et dessic- cation sur du chlorure de calcium, ce produit a été distillé. Ila passé en grande partie vers 180°. La faible quantité de Produit que j'avais à ma disposition ne m'a pas permis de le soumettre à une nouvelle distillation. Ce produit est, ainsi que l'analyse l’a démontré, de l’éther bichloropropionique C; H; Cl O (0 Ca Hs). (1) Cette odeur est due à la chloropierine. J'ai constaté qu'il se forme ln ah Eben e sauts ehloro on brômon-nitrés d áth touionrs da ai d lors de l'oxydation, par l'acide azotique, des chlorhydrines, brômhy- drines et des chloro-brômhydrines glycériques. ( 390 ) L’éther bibrômopropionique (C; H; Br, O) C Hs O de M. Tollens, qui en est le correspondant, bout à 241°- 244° (1), sous la pression de 747 millimètres. La différence entre les points d’ébullition de ces deux produits est approximativement celle qui se constate entre les dérivés chlorés et brômés correspondants. L'éther bichloropropionique (2), ainsi obtenu , constitue (1) Voir le mémoire cité plus hau (2) Un éther Michiseseopiisiqie €, H; CI, O (C, H, 0) a déjà été Se il y a peu de temps, par M. Klimenko (Gi résulte de l’action de lalcoo sur le produit de la réaction du pentachlorure de phosphore Ph CI, sur l'acide pyruvique. Cet eg emmer e Wes E LEE er vers ÉTÉ C’est don qu celui ve "ont Cé ivé de ] "avide Ken MM. erigo. et Werner. La différence de volatilité qui existe entre ces deux éthers chlorés est analogue à celle que l'on constate entre les produits brômés correspon- dants, si bien étudiés par M. Tollens. a) p (C,H,0) 8) m (C,H,0) ës CHBr H. CE, Br. Eb. 1900-1910, Éb. 2100-2140, Le produit acide que j'ai obtenu par l'oxydation de la dichlorhydrine allylique C, H, Cl ~+ (OH) CI correspond évidemment à l'acide 2 bibrômo- propionique de M. Tollens. Son isomère, l'acide bic chloropropionique de M. Klimenko, doit correspondre à l'acide œ bibrômopropionique et doit avoir pour formule CO OH C Ci, CH. L’acide pyruvique C, H,0, devrait, en conséquence, être représenté par (©) Berichte der deutschen chemischen Gesellschaft, t, UI, p. 465 (1870). ( 591 ) un liquide incolore, d'une odeur spéciale, plus ou moins aromatique, d’une saveur doucetre, sa densité à 7° est égale à 1, 5. Il bout en se décomposant légèrement vers 180° sous la pression de 750 millimètres (1). Il est insoluble dans l'eau, fort soluble dans l'alcool et l'éther | I brûle avec une flamme fuligineuse, dont les bords sont colorés en vert intense. L'analyse de ce produit, après une seule distillation, a fourni les chiffres suivants : I. 0#,5014 de produit ont fourni 0s" , 4954 de chlorure d'argent. IL. Ger. 2900 de produit ont donné 0s" ,6314 de chlo- rure d'argent. la formule de M. Wichelbaus et non H En CH, ainsi que lont proposé récemment divers chimistes. (4) J'ai pris Ja densité de vapeur de cet éther à la température de l'ébul- lition de l'aniline, mais le chiffre que j'ai obtenu est trop faible. ERR E a E Osr,0507. Pression barométrique . 755" Mercure soulevé . . . . . 612m, ume de la vapeur. . . . 67c.5. euer geg 185°, Ce qui correspond à 3,21; la densité calculée est 5,90. ( 392 ) HE. Osr,5386 ont fourni Uer de chlorure d'argent. CALCULE. TROUVÉ. CH, CI,0,(C,H,). GP Į H HE CG — D 33 » » » H, — 8 4,16 » » D CL — 71 41,52 40,50 40,135 40,89 AS Sg 32 » » » DI 171 Le déficit en chlore tient sans doute à ce que mon pro- duit n'était pas tout à fait exempt dean ou d'alcool, n'ayant été soumis qu'une seule fois à la distillation; quoi qu'il en soit, cette analyse suffit à constater la nature du composé obtenu. La seule formule à assigner à cet éther bichloropropio- nique est la suivante. CO (0 C, H,) CH CI CH, CL C'est à mon avis le même produit que celui qu'ont obtenu, il y a peu de temps, MM. Werigo et Okulitsch, et plus tard MM. Werigo et Werner, en traitant par l'alcool le produit de l'action du pentachlorure de phosphore sur l'acide glycérique (1), produit que j'ai dù obtenir moi- même auparavant par l’action de Ph Cl, sur le glycérate d’éthyle lui-même (2). (1) Annalen der Chemie und Pharmacie, t. CLXVII, p. 49 (1875) et t. CLXX, p. 163 (1873). (2) Berichte der deutschen chemischen Gesellschaft zu Berlin, t. IV, p. 705. f e Kg ( 393 ) Il m'a paru désirable de préparer l'acide bichloropropio- nique lui-même à l'état de liberté. J'y ai réussi. J'ai répété, à deux reprises successives, l'opération pré- ` cédente sur la même quantité de dichlorhydrine allylique. Le liquide restant, après l'évaporation de l’éther, a été soumis à la distillation. Après un peu d’eau et d'acide azotique qui | passent vers 100°, le thermomètre monte rapidement jusqu’à 200°. Tout passe avant 220°. Vers la fin, il y a une légère décomposition, dégagement de H CI et carbonisation. Cette portion est l'acide bichloropropionique Cs H, CL O2. Fraîchement distillé, l'acide bichloropropionique con- stitue un liquide incolore, épais et visqueux. Après quelque temps, il se concrète en une masse cristalline, formée d’aiguilles blanches, radiées. ll fond à 50° (1) et bout vers 210°, sous la pression de 762 millimètres en subissant une légère décomposition. Sa densité de vapeur a été déterminée dans la vapeur aniline et trouvée égale à 4,63. Substance employée . . . . Osr,0545. Pression barométrique . . . 748m, Mercure soulevé 655% Température EE E 185° Volume de la vapeur. . . . 65cc.,6. La densité calculée est 4,94. L'acide bichloropropionique est déliquescent. Il est aisé- ment soluble dans l’eau, l'alcool et l’éther. tee e (1) Ce point de fusion a été déterminé sur un échantillon de cet acide Qui avait été desséché, aussi soigneusement que possible, en le comprimant Plusieurs fois entre des feuillets de papier à filtrer. C’est le même produit Qui a servi à prendre la densité de la vapeur et à faire l'analyse. ( 394 ) Voici l'analyse qu'a faite de ce produit mon prépara- teur, M. le D" Bisschopinck. I. Osr, 4582 de substance ont fourni 0s", 9154 de chlo- rure d'argent. H. Os ,4360 du même échantillon ont fourni (er 8758 de chlorure argentique. CALCULÉ. TROUVÉ. CU, CI, O (OH). WÉI L SE C; Dë 56 D » » % EH A » D DI C, — 71 49,65 49,42 49,58 D. — 32 » » » 145 Jétudierai dans un travail spécial cet acide bichloro- propionique dont je me propose de préparer une quantité suffisante, à l’aide du bichlorure de l'alcool allylique C; H; (OH) Ch. Cette transformation de la dichlorhydrine allylique Cs Hs Cl + (OH) Cl en un acide bichloropropionique dé- montre d’une manière certaine la véritable constitution de ce produit; il renferme un groupement alcoolique pri- maire CH, (OH); le chlorure d’allyle étant CH, CI | CH li CH, la dichlorhydrine auquel il donne naissance en s'assimi- | lant l'acide (OH) CI doit être représentée par la formule ! CH, CI | CH CI | CH, (OH). ( 395 ) Ce produit n’est done pas autre chose que le bichlorure de l'alcool allylique. Les propriétés de cette dichlorhydrine sont, au reste, celles du produit d’addition du chlore à l'alcool allylique (1), produit décrit par M. Tollens; les eux corps ont, ainsi que l’a fait remarquer d’abord M. von Gegerfeldt (2), le même point d'ébullition; de plus, suivant l'expérience qwa faite ce chimiste, de même que le bibrômure de l'alcool allylique C; Hs OH + Dr, cette dichlorhydrine donne, sous l’action de l'hydrogène nais- Sant, — amalgame sodique et eau — de l'alcool allylique C; H; OH Cela étant admis, les autres produits décrits plus haut doivent être, par analogie, représentés par les formules suivantes : CH, (OH) C;H,(0H) + CI(OH) CH CI CH, (OH). . CH, (OC, HA Cs H, (0C, Hai + CI (OH) CHCI CH, (0H). CH, (C, H,0,) C, H, (C, BA DA + CI (OH) ` ba cI CH, (01). CH, Br. (5) CH, Br + CI (0H) CH CI CH, (0H). On ten Ee a) Annalen der Chemie, ete., t. CLVI, p. 164 (2) Voir le mémoire cité plus haut. (5) L'oxydation de cette chloro-brômhydrine allylique doit donner de ( 396.) Les composés allyliques C;H,X se comportent donc sous l’action de l'acide CI(OH), conformément à la règle établie plus haut, comme sous l’action de l'acide sulfu- rique, des hydracides halogénés, ete.; c'est-à-dire que le radical CI se fixe sur le chaînon carboné CH le moins hy- drogéné, et le radical (HO) hydroxyle, moins négatif, sur le chainon le plus carboné CH3. Il est assez remarquable que le propylène se comporte d'une manière inverse, sous l'ac- tion du même réactif, s'il faut en croire les expériences de M. Markowuikow, et il n’y a pas de raison d'en suspecter l'exactitude (1). Est-ce peut-être à l'influence de la substi- l'acide chloro-brômopropionique CH, Br - CH CI — COOH. C'est en effet ce que j'ai constaté récemment. M. Massalski a entrepris l'étude de cet acide dans mon laboratoire. Voir plus loin ma notice préliminaire, 28 mars 1874. (1) Cette réaction est du reste d'accord avec ce qui se passe lors de l'addition des hydracides halogénés HX à Forge de propylène (CH) 0 Là ses dérivés de substitution primaire, l'épichlorhydrine (CH; CID héige (CH. Br) 0 H. Il CH, CI CH. + (0810 = | CH (0H) CH, CH, CH, Ee CR. gr CH + HEI ees | | CH (0H) CH, X | CH. Il semble donc que l'on puisse conclure de là que « l'addition d'un » hydracide halogéné HX à un oxyde glycollique (Ca Hm)O est équivalente, » Quant à la nature da produit formé, à l'addition de l'acide hypochloreu * (OH) CI à l'hydrocarbure correspondant Cn Hm. — H sera curieux de constater ce qui se passe dans d’autres cas analogues. | | | | ( 597 ) tution , opérée dans le chaînon CH, , CH. CH,X | | CH CH | | CH, CH, sur le reste C,H; du radical allyle, qu'il faut attribuer cette différence. Il serait difficile de se prononcer aujour- d’hui sur cette question. Toujours est-il vrai de dire que la position que prennent les radicaux (OH) et CI, et CI notamment, en se fixant sur le radical allyle C;H,, est conforme à tout ce que nous sa- vons sur la localisation des radicaux négatifs en général, Cl et O, dans les phénomènes de substitution. C’est en effet dans les chaînons hydrocarbonés déjà chlorés que s’intro- duit, à la place de l'hydrogène, le chlore réagissant, et alors que, par des modifications préalables survenues dans la composition d’un chaînon hydrocarboné, telles que no- tamment la transformation de CH; en carboxyle CO (OH), il wy reste plus de place pour le chlore, c’est sur le chaînon carboné le plus immédiatement voisin que celui-ci porte son action. C’est ainsi que, sous l’action du chlore, le chlorure d'éthyle CH; — CH, Cl, donne le chlorure d’éthy- lidène CH; — CH Cl, et non le chlorure d’éthylène CH, CI —CH, Cl; que l'alcool CH; — CH: (OH) se change en aldéhyde CH; — CH O, et virtuellement tout d’abord en glycol éthylidénique CH; — CH (OH et non en glycol éthylinique (OH) CH, — CH, (OH). C’est ainsi aussi que l'acide propionique CH; — CH, — COOH, sous l'action du brôme, donne les acides propionique monobrôme CH; — CH Br — COOH et propionique bibromé CH; — CBr, — COOH. ( 398 ) Lors de la formation de la dichlorhydrine allylique à l'acide du chlorure d’allyle CH, — CH — CH, CI et de l'acide hypochloreux (OH) CI, il est donc naturel et con- forme aux lois de l’analogie, que le radical CI se place le plus près possible du groupement chlore, et se fixe sur CH. Qu'il me soit permis, avant de terminer, de m'arrêter un instant encore à ces dérivés d’addition. D'après les vues que je viens d'exposer, ces produits sont des dérivés de substitution par le chlore, du glycol propy- lénique biprimaire ou des éthers mono-acides de celui-ci : CH (OH,) CH, (OH) bu, CH CI CH, (OH) du, (OH). CB, (C, H,0) CH, (C, H,0) bn, da cl CH, (0H) tm, (0H). Ces dérivés allyliques me paraissent par là de nature à rattacher les composés glycériques aux composés propylé- niques biprimaires. Sous l’action de l'hydrogène naissant, je présume qu’il sera possible de les transformer en ces dérivés propyléniques. C’est ee que je me propose d’exa- miner, notamment en ce qui concerne la monochlorhydrine allylique (C;H;)OH-+ (OH) CI qui doit me donner ce glycol propylénique (OCH, —CH,— CH, (OH) lui-même. Je ferai remarquer encore que si, comme je suis auto- risé à le prétendre, cette monochlorhydrine allylique à pour formule : CH, (OH) | CH CI CH, (0H), ( 399 ) elle constitue un produit différent de la monochlorhy- drine glycérique ordinaire, produit de l’action de l'acide chlorhydrique sur la glycérine ou de l'hydradation de l’épichlorhydrine : CH, CI CH > O. CH, Cette monochlorhydrine glycérique CH, CI | CH OH CH, OH n'est autre chose que le glycol propylénique primaire et secondaire, monochloré, ainsi que l’exprime la formule ci-dessus. En effet, an témoignage de M. L. Buff (1), ce produit donne, sous l’action de l’hydrogène naissant, un glycol propylénique qui, par oxydation, fournit de l'acide lactique ordinaire CH; — CH (OH) — CO (OH). Je n'espère pas pouvoir démontrer physiquement la différence de ces deux composés isomères, notamment en ce qui concerne la volatilité. Ces corps sont l'un et l'autre assez difficiles à obtenir et à purifier complétement, et leurs points d’ébulli- tion trop élevés pour pouvoir être déterminés, à l’aide d’une petite quantité, d’une manière rigoureuse. Mais je Compte pouvoir les différencier chimiquement et, sous ce rapport „leur différence doit être grande. La monochlorhydrine allylique C; H,(0H) CI(OH) est un (1) Annalen , etc. Supplement, Band V, p.247. ( 400 ) . glycol symétrique biprimaire monochloré CH, OH CR CI | CH, OH et en cette quantité elle doit pouvoir donner par oxydation successivement deux acides, répondant aux formules : CO OH CO OH l CH CI CH CI CH, OH CO OH. La monochlorhydrine glycérique ordinaire CH, CI CH OH Wi OH qui est un glycol dissymétrique primaire-secondaire , ne peut donner par oxydation qu'un seul acide CO OH du ou j CH, CI ou l'acide lactique ordinaire monochloré, produit que M. Glinsky a obtenu à l’aide de l'aldéhyde acétique mono- chlorée et de l'acide HCAz, en présence des acides (1). Je me propose d'examiner moi-même ce point. ` J'aurai l'honneur de faire connaitre à l'Académie le ré- (1) Zeitschrift für Chemie, t. VI, p.513. ( 401 ) sultat des recherches qui seront “aol dans ce but, dans mon laboratoire. Dans une communication prochaine, j'étudierai les dé- rivés d’addition des composés allyliques avec le chlorure d'iode Io Sur l'acide chloro-brômopropionique; par M. Louis Henry, correspondant de l'Académie. COMMUNICATION PRÉLIMINAIRE. J'ai démontré que les produits d’addition de l'acide hypochloreux (OH) CI aux composés allyliques sont des dérivés glycériques, alcooliques et primaires (4), de la formule générale CH, X CH CI CH, OH. J'ai réussi à transformer la dichlorhydrine allylique (C;H;) CI + (OH) CI en acide bichloropropionique C;H:Cl (OH). Cela étant, il était à prévoir que la chlorobrômhydrine allylique C; Hy Br + (OH) CI se transformerait, par oxyda- tion, en acide chloro-brômopropionique C; H; CI Br O (OH) ou CO OH CH CI CH, Br. begtete eg. eege La (1) Voir mon mémoire sur ces composés, page 9397. 2% SÉRIE, TOME XXXVII. 27 ( 402 ) Cette transformation vient d’être réalisée dans mon laboratoire par M. U. Massalski. M. Massalski a entrepris l'étude de cet acide chloro- brômopropionique et plus tard il aura l'honneur de faire connaître à l’Académie le résultat de ses recherches. Sur le radical propargyle; par M. Louis Henry, corres- pondant de l’Académie. Les composés propargyliques en général, C; H; X, sont au maximum fétravalents, comme l’allylène C; H, dont ils sont les dérivés primaires CH =C— CH, X. Mais de même que l’allylène, ils ne se saturent qu’en deux fois ou en deux temps, et de la sorte, ils déterminent avec les radi- caux simples ou multiples, avec les corps halogènes, notam- ment, deux séries de composés par addition : 4° d’abord avec une seule molécule X’, des BOES C;H,XX',, qui sont eux-mêmes bivalents ; 2 ensuite avec deux molécules (X’,) des composés saturés C; H; X X’,. On devine combien peuvent être extraordinairement nombreux ces dérivés, surtout si l’on considère qu'à côté de dérivés simples, ne renfermant qu'un seul radical X ou corps halogène, il peut en exister de mixtes, renfermant _plusieurs et même tous les corps halogènes à la fois, à _ côté d’autres radicaux ou résidus halogéniques. Je ne me suis certainement pas proposé de former ces longues séries de dérivés; la réalisation d’une telle entre- prise nécessiterait une quantité d'alcool propargylique que je mai pas l'espoir de posséder jamais; d’ailleurs ce ( 405 ) travail coûteux pourrait n'être, sous certains points de vue, qu'une brillante superfluité chimique. Je me suis borné à faire quelques-uns de ces produits seulement, ceux-là qui peuvent, sous certains rapports, être regardés comme des types. Dans le nombre, il en est certains qui me paraissent offrir un intérêt spécial au point de vue général, et sur lesquels je viens aujourd’hui attirer l'attention. Il s’agit des divers brômures que produit le propargyle. Les paraffines CH... étant des composés saturés et leur capacité de saturation égale à zéro, les groupements hydrocarbonés C, H, qui en dérivent, ont une valeur d’ac- tion chimique maximum égale au nombre d’atomes d’hy- drogène qui leur manquent pour atteindre la limite maxi- mum H... que ces groupements existent d’ailleurs à l'état de liberté ou seulement en combinaison, suivant qu'ils ren- ferment un nombre pair ou impair atomes d'hydrogène. Cela étant, le radical propargyle C; H;, dérivé du pro- pane C; Hs constitue un radical pentavalent, au même titre que l’allyle est trivalent, et le propyle C; H; monovalent 0 1 3 3 PE E gt ERT Mais à côté de leurs combinaisons saturées, où ils figu- rent avec leur capacité de saturation maximum , les radi- caux polyvalents, en général, en déterminent qui ne le sont pas et où ils figurent avec une capacité de saturation réelle Où actuelle, différant par n fois 2 unités d'action chimique de leur capacité maximum. C'est ainsi que le radical allyle CH; trivalent, est monovalent dans les composés allyli- ques; de la même manière et au même titre, le radical ( 404 ) propargyle C; H pentavalent, doit être aussi et simultané- ment, tri et monovalent, dans les deux séries de composés non saturés qu’il peut former. C’est ce que l'expérience a constaté. J'ai obtenu des représentants de ces trois séries de composés C; H; X, C; H; X; et C;H,X;. Je regarde, parmi ceux-ci, comme des plus intéressants les trois brômures C; H; Br, C; H; Br; et C; H; Br, à la description desquels cette notice est con- sacrée. Monobromure de propargyle C; H; Br. Ce produit résulte de l'action du tribrômure de phos- phore Ph Br; sur l'alcool propargylique C, H; ( Je reviendrai d’une manière détaillée sur cette réac- tion , dans un travail spécial. Le monobrômure de propargyle (C;H;) Br constitue un liquide incolore, mobile , jaunissant à la lumière, d'une odeur piquante, analogue à celle du brômure d’allyle ; d’une saveur brillante; — sa densité à 11° est égale à 1,59. Il bout sous la pression ordinaire à 88°-89°. Sa densité de vapeur a été trouvée égale à 4,20. © si Substance. Pression barométrique. Mercure soulevé. Température. La densité calculée est 4,11. Ce produit est insoluble dans l’eau , soluble dans l'alcool et l’éther. ll présente les propriétés générales des composés non ( 405 ) saturés et des composés propargyliques, et à la façon des éthers brômhydriques, primaires, il fait aisément la double décomposition, L'analyse de ce produit a donné le résultat suivant : 0%, 1978 de produit ont fourni 0%, 5122 de brômure d'argent. CALCULE. TROUVE. C, H; Br. d, C; pr pu 56 » D H. — 5 AT , $ Br. — 80 67,22 67,16 Tribrómure de propargyle Le H. Br- Ce produit résulte de la combinaison du brôme avec le monobrômure dans la proportion indiquée par les formules C; H; Br et C; H; Br. La réaction du bròme sur le monobrômure lui-même est violente, et va jusqu’à l'explosion ; il faut dissoudre le monobrômure dans l’éther, ou le verser dans l’eau et n'in- troduire le bròme que goutte à goutle en ayant soin de bien refroidir, sans quoi toute la substance se carbonise. On purifie le produit suivant la méthode ordinaire, lavage à la soude caustique, puis à l’eau et dessiccation à l'aide du chlorure de calcium. Ce tribrômure constitue un liquide peu épais incolore, jaunissant à la lumière, d’une faible odeur, excitant le lar- moiement quand on le chauffe , d’une saveur fort piquante; sa densité à 10° est égale à 2,33. Ce corps n’est pas volatil Sans décomposition. ( 406 ) Son analyse a donné les résultats suivants : L 0:,04654 de substance ont fourni 0%, 9544 de brô- mure d'argent. I. Oe BS de substance ont fourni 0‘,1,1782 de brò- mure d'argent. CALCULÉ, TROUVÉ. ES beggen, ge mg C; H; Br, Sa l H: Ci Spa 56 » » mn E saae ni » m D Br, — 240 86,02 87,25 87,16 rl 279 Ce produit avait été préparé avec du brômure de propar- gyle bien pur. L'excès de bròme trouvé tient sans nul doute à la présence d’une petite quantité de pentabrômure C; H; Bry, dont la formation s'explique aisément. Pentabrômure de propargyle s H; Bry. Ce produit résulte de l'addition du brôme au tribrômure C; H; Br;. Cette combinaison s’accomplit avec beaucoup moins d'énergie que la précédente; le dégagement de chaleur est encore notable cependant. On purifie le produit comme précédemment. Le pentabrômure de propargyle C; H; Bry, constitue aussi un liquide, mais un liquide épais et visqueux , inco- lore, jaunissant aussi à la lumière, inodore et presque in- sipide , faiblement piquant sur la langue. Sa densité à 10° est égale à 3,01. I n’est pas distillable. ( 407 ) L'analyse de ce produit a fourni les chiffres suivants : L 0%,8,146 de substance ont fourni 1:,7476 de brô- mure d'argent. H. 05,6872 de substance ont fourni 0#,14704 de bro- mure. CALCULÉ. TROUVÉ. = | EE C;H,Br, olo I; II. C, — 56 » à » CR Lee » n Br, — 400 91,11 91,29 91,05 On remarque que la densité de ces produits croit d’une manière progressive, à mesure qu'ils sont plus riches en brôme. CH, Br d = 1,39 Br = 67,2% CH Dr, — 255 — 86,02 CH, Br, — 50i Se 91,11. Le tribrômure d’allyle C; Hz Br; qui renferme 85,40 °/, de bròme seulement est solide et se fond à 46°. Il est assez étonnant que des composés analogues tels que Je tribro- mure et surtout le pentabrômure de propargyle, quoique beaucoup plus riches en bròme , soient liquides. J'attribue cet état à un phénomène de surfusion persistante. Ni l’un ni l’autre de ces corps ne s'est congelé à — 10°, et je les conserve depuis deux mois environ dans une place , à côté du tribrômure d’allyle à l'état de cristaux. J'espère qu’un heureux hasard les amènera à l’état solide. La structure des composés que je viens de faire con- naître est facile à déterminer, étant donnée celle de l'al- cool propargylique C; H, (OH). Cet alcool représente, ainsi que je l'ai déjà dit, le dérivé ( 408 ) hydroxylé primaire (1) de l'allylène, lequel est lui-même ie méthyl-acétylène C-H; C;H; (OH) CH, CH, (0H) l | C C {il WI CH CH. La constitution des mono , tri et pentabromures de pro- pargyle peut par conséquent s'exprimer par les formules suivantes : CHBr. CH. Br,. C,H; B. CH, Br CH, Br CH,Br c CBr CBr, CH CHBr CHBr. Je dois faire remarquer en terminant que divers pro- duits de composition analogue ou identique, mais isomères avec ceux-ci, ont déjà été signalés précédemment par M. Liebermann, dans le cours de ses belles recherches sur les dérivés allyléniques (2). Ces dérivés sont les suivants : Allylène iodé d 2,4, 10. Biodure d’ aliviène iodé á (C,H, lo) lo, Bibrômure d’allylène A (C;H, lo) Br, Bibromure d'allyline FRE Sen (C,H; Br) Bra. Ces corps s'obtiennent tous aux dépens de la combi- (1) J'ai acquis la preuve expérimentale que l'alcool propargylique est ainsi constitué et renferme les groupements CH, (OH) et CH. Je publierat ces réactions dans le travail que j’achève sur les composés propargy- liques. (2) Annalen der Chemie und Pharmacie, 1, CXXXV, p, 270. ( 409 ) naison argentique de l’allylène, sous l’action des corps halogènes, en une seule réaction ou en plusieurs réactions successives, Ce composé argentique C; H; Ag répondant à la formule GE e kel gr Ag. Ces produits doivent eux-mêmes répondre aux formules suivantes de structure : C;B;lo ` (C;H;lo)lo, (C,H,lo)Br, (C;H,Br)Br,. CB, CB; CH; CH; l ł | l £ CIo C Br CBr W fl ii | Clo Clo, CloBr CBrBr. où partout le groupement méthyle est conservé intact. Le bibrômure d’allylène monobrômé CH, — CBr— CBr de M. Liebermann a du reste des propriétés différentes de son isomère le tribrômure de propargyle CH, Br — CBr — CHBr. U ne paraît pas notamment pouvoir se transformer en tétrabrômure. Sur la lactide et la distillation sèche de l'acide lactique ; par M. Louis Henry, correspondant de l’Académie. On désigne sous le nom assez exceptionnel de lactide un produit solide, cristallisable, qui résulte de la déshy- dratation de l'acide lactique (1), sous l’action de la chaleur. (1) L’acide lactique dont il est question dans celte notice est l'acide lactique ordinaire, de la fermentation. ( 410 ) La lactide fut découverte en 1833, par MM. Jules Gay- Lussac et Pelouze (1). Son étude fut reprise en 1845 par M. Pelouze seul (2). Depuis cette époque, divers chimistes det de ce produit, notamment M. Engelhardt en 1849 (5), plus tard MM. Wurtz et Friedel (4) dans le cours de leurs belles recherches sur l’acide lactique et dans ces dernières années, à partir de 4865, plus particulièrement M. Wislicenus (5). Pour être complet, je signalerai encore MM. Brodie (6) et Hubner (7) qui ont touché incidemment à ce composé, à l'occasion d’autres objets. Quoique l'existence de la lactide ait été signalée , depuis un assez grand nombre d'années déjà, sa signification chi- mique est encore indéterminée ou toutau moins déterminée d’une manière fort imparfaite. On représente généralement la lactide par la formule C; H, O, différant de celle de l'acide lactique C; He O; par une molécule d’eau en moins. C'est la relation qui existe entre un acide biatomique et son anhydride, notamment entre l'acide et l’anhydride succinique. Aussi a-t-on re- gardé d'abord la lactide comme l’anhydride lactique , avec d'autant plus de raison en apparence du moins, qu'à l'instar des anhydrides proprement dits, elle régénère facilement en s’hydratant l'acide lactique primitif. Mais il est à remarquer que ce ne sont que les acides (1) Annalen der Chemie und ae LVH, p. 44. (2) Annalen , ete., t. LIH , p.142 (3) Annalen der Chemie , ete.. t. , LXX, (4) Annales de chimie et de physique, K erg p. 108. (5) Annalen , t. CXXXIII , p. 257. (6) Annalen. Supplément Band, t. IHI , p. 218. (7) Annalen ,t. CXXXI, p.72. ( 411 ) bibasiques qui, par simple déshydratation, sous l'action de la chaleur, donnent l'anhydride correspondant. Or l'acide lactique n’est que monobasique. Par cela seul, la lactide ne peul constituer un anhydride lactique véritable, au même titre que l’anhydride acétique ou plutôt que l’anhy- dride succinique , par rapport aux acides correspondants. L'action de l'ammoniaque d'ailleurs écarte compléte- ment cette assimilation. Aussi tenant compte du double caractère, alcool et acide , de l'acide lactique, M. Wislicenus (1) a regardé la lactide comme un éther lactique, c'est-à-dire qu'il admet que les éléments de l’eau qui, lors de la formation de ce pro- duit, s’éliminent de l'acide lactique, viennent tout à la fois de l'hydroxyle (OH) acide et de l'hydroxyle (OH) alcool; dans les anhydrides d'acides proprements dits, cette eau provient exclusivement de l'hydroxyle acide. Kë Cette idée est acceptée aujourd’hui par tous les chimistes. La question qui se pose immédiatement est de savoir combien de molécules d'acide lactique représente cette sorte d’éther. Dans les traités de chimie les plus récents tels que ceux de Schorlemmer et de Fittig, on attribue en- Core à la lactide la formule C; H, 0,, et l’on en exprime la structure par le symbole co | 0 CH > CH. c'est-à-dire que l'on en fait un éther composé, formé aux dé- pens d’une seule molécule d'acide lactique, s'éthérifiant elle- même par son côté acide COOH et son côté alcool CH OH. (1) Mémoire cité plus haut. ( 412) Cette formule, fort élégante d’ailleurs, explique bien, de plus, le dédoublement de la lactide sous l’action de la chaleur, en aldéhyde acétique et oxyde de earbone. Il ma paru difficile à admettre que la formule C; H, Oe pût représenter réellement la molécule de la lactide. Que lon veuille en effet remarquer que cette formule fait de ce corps un isomère de l'acide acrylique, et que celui-ci, corps solide à la température ordinaire, comme la lactide, bout vers 140°, tandis que celle-ci ne bout que vers 250°. Une différence d'au delà de 100°, quant à la volatilité , ne se constate pas entre des corps isomères ayant le même poids moléculaire. Du reste le fait de cette éthérification intra-molécu- laire, à la suite duquel se produirait la lactide, est extra- ordinaire, et en dehors de tout ce que nous connaissons, jusqu'ici du moins, dans les composés saturés. La lactide étant volatile, j'ai tenté, dans le but de fixer son poids moléculaire , de déterminer sa densité de va- peur. Je me suis servi de l'appareil si éminemment pra- tique de M. Hoffmann, et j'ai opéré à la température de ébullition de l’aniline, à 183. J'ai trouvé une première fois pour cette densité, 4,99 et une seconde fois, 4,65, en moyenne 4,81 (4). (1) Voici le détail de ces deux déterminations de la densité de vapeur de la lactide. I. Substance employée , . . . . 0er 0228. Pression barométrique . . . . . 766. Mercure soulevé . o : , . , | 700%. Re rte 185. Volume de la vapeur . .-. . . 62c.c. La densité trouvée est 4,99. ( 415 ) Les densités de vapeur calculées pour C; H, O, et ses multiples sont les suivantes : C;H,0, densité = 2,48. CG HAD où Gelle, 96. (Cin o er Ro TT 7,44. En présence de ces chiffres , il n’y a pas de doute à con- cevoir, la formule de la lactide est réellement (C; H, 0, ); ou Cs H; O,. La lactide est done un produit bilactique, elle représente deux molécules d’acide lactique, moins deux molécules d’eau. L’acide lactique C; He O; étant représenté par la for- mule de structure CO OH CHOH CH, formule dont la certitude est presque surabondamment démontrée , deux composés bilactiques ( C; H, 02) a, diffé- rents de constitution et de fonction, peuvent en être dé- rivés , suivant la nature des groupements hydroxyle (OH), aux depens desquels se forment les deux molécules d’eau IL. Substance RP EEEE Pression armée ROLE SN Mercure soulevé 695m empérature . E NON 185°. Volume de la geen: e LE ENEE La densite trouvée est 4,63. Je mwai pu arriver à compléter l'opération avec une quantité plus con- Sidérable de substance; deux expériences où j'avais employé 08,0520 et 087,0422 de substance, sont restées sans résultat. (414) éliminées, l’un répondant à la formule Ki CH l co 0 ce d 9 CH [j CH, l’autre répondant à la formule “n; (ur) CH l co 0 0 CO i CH | CH, Le premier de ces corps est à fonction double, c’est à la fois un anhydride d'acide et un anhydride d'alcool ou un éther simple. La fonction du second est unique, c’est doublement un éther composé, le lactate lactique proprement dit. L'action de l’ammoniaque m'a paru de nature à déter- miner laquelle de ces formules exprime la véritable con- stitution de la lactide. On sait en effet que si l'ammoniaque réagit facilement sur les anhydrides d’acides et sur les éthers composés, il n’en est pas de même sur les anhy- drides d’alcools ou les éthers simples qui opposent à son action une force de résistance presque invincible. Partant de là, si la lactide correspond à la formule (1) et re- présente un double anhydride d'acide et d'alcool, tout le côté CR l j en ( Ain"? éther simple, restant inaltéré, on obtiendra comme pro- duit de la réaction de l’ammoniaque une diamide dilactique de la formule ou bien, le sel monoammonique correspondant CH, l CH | po CO OH (H,Az) o Ke H, Az | CH CH, ou C;H,0,A7z,, produit isomère avec la lactamide CH; — CH (OH) — CO (H, Az) ou C;H,0,Az; si, au contraire, la lactide correspond à la formule D et est un double éther composé, on obtiendra comme produit unique de la lac- tamide COH, Az CHOH CH, comme dans la réaction de l’ammoniaque sur les lactates d’alcools et notamment sur le lactate d’éthyle. C’est cette dernière hypothèse que l'expérience a con- firmée. Sur de la lactide légèrement chauffée, j'ai fait passer, jusqu’à refus d'absorption, un courant d’ammo- niaque sèche. ( 416 ) 18: 5438 de lactide ont absorbé 0“,5072 d'ammoniaque, ce qui correspond à 22,92 P- Din: la quantité calculée est 25,5° (1). Le produit formé est exclusivement de la lactamide iden- tique à celle qui se forme par l'action de l’ammoniaque sur le lactate d’éthylique et fusible comme celle-ci à 74° (2). Voici quelques particularités à ajouter aux propriétés actuellement connues de la lactide. Elle cristallise, par refroidissement, de sa solution dans l’alcool bouillant, en prismes fort simples qui pa- raissent être klinorhombiques; ces cristaux sont transpa- rents, durs et cassants. Elle se fond à 421° et non à 107°, ainsi qu’on l'indique généralement dans les Traités et les Dietionnaires de Chimie, même les plus récents (3). Elle distille sans décom- position à 254°-255° sous la pression de 757 millimètres (non corrigé). Le chlorure d’acétyle ne l'attaque pas, même à chaud ; elle s’y dissout, et en cristallise inaltérée par le refroi- dissement. ) Je n’ignore pas que cette expérience est déjà rapportée dans le mémoire de MM. Wurtz et Friedel sur l'acide lactique (Annales de chimie et de physique, tome LXIII , 3° série, page 108). J'ai cru devoir la refaire, afin de bien constater, notamment par la détermination de son point de fusion, que le produit de cette absorption de l’ammoniaque par la lactide est bien de la lactamide, identique au produit de l'action de lammoniaque sur le lactate d’éthyle. Ce que j'ai dit plus haut montre que lanalyse seule ne peut résoudre celte question. (2) Wislicenus, Mémoire cité plus haut. (5) Cette indication remonte jusqu'à MM. Gay-Lussac et Pelouze; elle a passé de là dans la plupart des ouvrages quoiqu’elle ait déjà été contre- dite par M. Engelhardt. Voir le travail cité plus haut de ce chimiste. ( 417 ) Je crois avoir démontré quelle est la nature et la signi- lication chimique de la lactide. Cela étant, il est possible de donner à l’action de la chaleur sur l’acide lactique sa véritable interprétation; c’est en ce qui concerne cet acide, un phénomène chimique d’une nature toute spéciale, eu égard à ce que l’on observe chez d'autres acides polyato- miques. Envisagée dans sa phase principale, c’est-à-dire dans la production successive des produits désignés par Pe- louze sous les noms d'acide lactique anhydre et de lactide, la distillation sèche de l'acide lactique constitue un véri- table phénomène d'éthérification, mais d’un genre tout particulier. L’acide lactique, à la fois acide et alcool, réagit sur lui-même en deux temps, en donnant naissance à deux produits éthérés, avec élimination successive de une et de deux molécules d'eau : 1° Vers 440° à 150°, par une première réaction, il se forme le soi-disant anhydride lactique Ce Hio O; ou CH, CH OH Ce co 0 co OH Der ch, produit à triple fonction, tout à la fois acide, alcool et éther composé. M. Wislicenus a démontré la véritable nature de ce composé remarquable (1). Dee (1) Voir le Mémoire cité plus haut. 27° SÉRIE, TOME XXXVIL 28 (418 ) Chauffé lui-même vers 200°-250°, ce produit subit une nouvelle éthérification , interne, ou intra-moléeulaire, par la réaction de son côté acide COOH, sur son côté alcool CHOH , avec élimination d’une seconde molécule d’eau et formation de lactide ,produit doublement, mais exclusive- ment éther. C’est là sans doute un fait bien remarquable que cette éthérification spontanée d’un corps, réagissant sur lui-même, et à deux reprises successives, en tant qu'acide et alcool. S'il était permis de comparer les composés chimiques à des êtres organisés , et les phénomènes de ce que l'on ap- pelle l'affinité aux phénomènes de ce que l'on appelle la vie, je dirais que l'acide lactique, à la fois acide et alcool, constitue une sorte d’hermaphrodite chimique, et j'assi- milerais le fait de l'éthérification, réaction de deux com- posés antagonistes , aussi différents d’allures et de fonction que deux êtres de même espèce, mais de sexe différent, à | une sorte d’accouplement. L'éthérification lactique , s’opé- | rant entre deux molécules distinctes, agissant simultané- ment en tant ou achde et qu'alcool, rappelle fidèlement l'accouplement des limaces où, si mes souvenirs de z00- | logie sont exacts, chaque individu agit tout à la fois comme mâle et comme femelle. Mais laissons là ces questions de physiologie chimique. On sait que le phénomène de l’éthérification entre les alcools et les acides organiques s’accomplit déjà à la tem- pérature ordinaire, qu’il suit une marche progressive, que la chaleur l'accélère, et qu'enfin il reste toujours incom- plet, entre une masse donnée d'acide et la quantité équi- valente d'alcool. Ce sont les belles études de M. Berthelot qui nous ont révélé ces caractères importants de l'éthéri- fication directe. ( 49 ) Eh bien , les mêmes particularités caractérisent l’éthéri- fication spontanée de l'acide lactique. Il résulte de recherches récentes de M. Wislicenus (1) que cette éthérification commence dès la température or- dinaire et qu’elle s'accélère notablement sous l’action de la chaleur; M. Wislicenus a constaté dans de l'acide lacti- que, conservé pendant longtemps, dans une atmosphère séchée par de l'acide sulfurique, des quantités de plus en plus grandes, d’abord d’acide dilactique (anhydride lactique de Pelouze) et ensuite de lactide. On comprend par là que M. Wislicenus ait pu dire, en toute vérité — ce qui, au premier abord, semble paradoxal — qu'il est impos- sible d'obtenir de l'acide lactique C; H, Oz, d’une pureté absolue. Mais cette éthérification, quoique accélérée par la cha- leur, reste néanmoins, et même dans les conditions les plus favorables, toujours incomplète; j'ai fait dans le but de constater ce fait ou la limite d’éthérification lactique diverses expériences; en voici une qui me paraît con- cluante. 150 grammes d'acide lactique sec et sirupeux ont été chauffés dans une petite cornue, au bain d'huile, pendant environ quinze heures à une température variant entre 250 et 250°, et environ une demi-heure à 250°; il ne restait à la fin de l'opération que fort peu de chose dans la cornue; jai recueilli ainsi une cinquantaine de grammes de lactide. Ce chiffre correspond à peu près à la limite-maxi- mum de l’éthérification d’un alcool indiquée par M. Ber- thelot , dans le cours de ses recherches sur cet objet. (1) Annalen der Chemie und Pharmacie, t. CLXIV, p. 181. ( 420 ) En faisant passer à travers l'appareil pendant cette distillation prolongée , un courant lent d’anhydride car- bonique sec, on n’améliore pas le rendement de l'opéra- tion, ainsi que je l'avais cru d’abord. L'action de la chaleur sur les acides polyatomiques, notamment sur les acides-alcools, peut être envisagée sous un autre point de vue encore que sous celui de leur éthérification spontanée, à savoir sous le point de vue de la formation d'acides pyrogénés. Ces acides pyrogénés, d’une basicité égale à celle du produit primitif, mais d’une atomicité moindre, résultent d’une élimination d’eau dont les éléments ne proviennent pas exclusivement de lhydroxyle comme dans le cas précédent , mais simultané- ment de l’hydroxyle alcoolique et de l'hydrogène fixé directement sur le carbone, dans les chaînons hydro-car- bonés CH, et CH. Pour me restreindre à un seul exemple concernant un corps analogue à l'acide lactique, je rappellerai que l'acide oxybutyrique secondaire CO OH CB, CHOH | CH, | chauffé perd de l’eau et se transforme en acide croto- nique (1) solide, répondant à la formule COOn (1) Wislicenus, Zeitschrift für Chemie, t. V , p. 325. ( 421 ` En subissant une action de ce genre, l'acide lactique devrait se transformer en acide acrylique Il wa paru intéressant d'examiner aussi sous ce point de vue les produits de la distillation sèche de l'acide lactique. Mais pas plus que M. Moldenhauer (1), je n’ai pu ren- contrer de l'acide acrylique dans le liquide aqueux acide, qui distille en même temps que la lactide; je n’y ai trouvé, ainsi que lavait constaté déjà M. Engelhardt, que de l'acide lactique, à l'aide duquel j'ai obtenu un lactate plombique sirupeux, gommeux incristallisable (2). (1) Annalen , ete., t. CXXXI, p 325 (2) Il y a entre les acides lactique et acrylique les mèmes relations de composition et de fonction qu'entre l'alcool isopropylique et le propylène CH, — CH (0H) — COOH CH, = CH — COOH — H. 0 = CH; — CH (0H) — CH, CH, = CH — CH,. Cela étant, j'ai tenté de transformer l'acide lactique en acide acrylique par déshydratation directe. J'ai opéré non sur l'acide lactique lui-même, qui me paraissait peu propre à subir cette sorte de transformation, à cause de la présence du chaînon-COOH , mais sur le lactate d’éthyle. J'ai essayé sur Ce corps l’anhydride dite et le chlorure de zinc. Ni Tun ni l’autre de ces agents ne m'ont r Sur du lactate d’éthyle j'ai SS réagir de l’'anhydride phosphorique dans la proportion nécessaire pour faire de l'acide métaphosphorique H Ph 0,5. La réaction a été vive; mais la masse s’est en grande partie charbonnée; chauffée, elle a, en se boursouflant énormément, dégagé une grande quantité de gaz. Quoique j'eusse employé 40 grammes d’éther lactique, je n'ai recueill? qu'une quantité fort minime d’un liquide éthéré, insoluble et moins dense que l'eau Je mai pas eu suffisamment de ce piaui it pour ( 422 ) La lactide qui m'a servi à prendre les densités de va- peur rapportées plus haut, constituait un des produits accessoires de la préparation de l’éther lactique, par la réaction de l’éthyl-sulfate de potassium sur le lactate de calcium sec. Cette lactide était tout à fait pure et identique à la lactide obtenue directement, à l’aide de lacide lactique lui-même, ainsi que je l'ai constaté plus tard. Une combustion de ce produit faite par M. Bisscho- pink, mon préparateur, a donné les résullats suivants : Oe: ,1864 de substance ont fourni Os ,3404 d’anhydride carbonique et Os" ,0974 d’eau. TROUVÉ. CALCULE. C 50,00 49,85. H 5,56 5,79. Je ferai remarquer à cette occasion que la réaction de l’éthyl-sulfate potassique sur le lactate caleique constitue, à mon avis, la méthode la plus commode pour préparer le lactate d’éthyle. Ces deux composés sont des produits commerciaux. On chauffe les deux corps bien desséchés et intimement mélangés , dans une cornue au bain d'huile, dans la pro- portion indiquée par l'équation (CHK S O,), + (CsH50,), Ca =2 [(C,H,)C,H dr K,S0, + Ca S0,. l'examiner. Peut-être est-ce de l’éther acrylique? L'essai mériterait, je ois, d’être recommencé dans d’autres sa S avec une proportion en faible d’anhydride et celui-ci mélangé de sab L'action du chlorure de zinc ne ma pas donné 5 résultats plus avanta- geux. L'éther lactique le dissout à froid, en s'y combinant, et paraît s'en séparer sous l’action de la chaleur. ( 423 ) On distille jusqu’à siccité. La masse se fond et se bour- soufle faiblement. Le produit constitue un liquide jaunàtre exhalant une odeur empyreumatique. La réaction est en réalité plus complexe que ne l'indique l'équation ci-dessus. Une partie en effet du lactate se trans- forme, en perdant de l'eau, en polylactate, en dilactate probablement (1) i C, H, 0,(0H c, E, 0, Ca LOU 0 SËNN - ORP Cette eau donne avec l'éthyl-sulfate potassique de l'alcool et du sulfate acide et celui-ci, en réagissant sur le lactate calcique, produit de l'acide lactique. Aussi le rendement de l’opération est-il inférieur à ce qu'il devrait être et le produit distillé n'est-il pas homo- gène, Voici quelques détails sur une de ces préparations : 900 grammes de lactate caleique sec m'ont fourni en six Opérations successives environ 400 grammes de produit brut, le tiers environ passe avant 130°, et la moitié de 150° à 170°. Cette seconde portion, traitée par du carbonate potas- sique sec est aisément déshydratée, et le même traitement appliqué à la première permet de la séparer après quelques rectifications en alcool et en éther lactique. En somme, j'ai obtenu environ 250 grammes de cet éther pur, bouillant à 152°-155° sous la pression de 753 ; cela représente environ 50 /o de la quantité théorique; à 500 grammes de lactate calcique correspondent 541 grammes d’éther. (1) Voir Wurtz et Friedel, mémoire cité, page 115 ( 424 ) Si l'on pousse jusqu’au bout la distillation du produit brut, le thermomètre s'élève graduellement jusque vers 500° en restant assez longtemps fixe vers 260°-270°. Il passe des éthers lactiques condensés, des produits de décomposition de ceux-ci et de l'acide lactique; par le refroidissement , il se dépose assez abondamment dans ces liquides épais des cristaux de lactide. Quoi qu'il en soit, ce mode de préparation de léther lactique me paraît avantageux puisqu'on n'y fait usage que de produits commerciaux, dans des opérations fort simples. Deuxième note sur lapplication de la théorie mécanique de la chaleur à la physiologie des plantes ; par M. Édouard Morren, membre de l'Académie. Dans les quelques pages publiées par nous sur ce sujet, un des points qui intéressent particulièrement la physio- logie est la preuve fournie que la force solaire n’est pas utilisée par les organismes sans avoir été préalablement appliquée au travail d'élaboration de la matière organique- Cette élaboration est le propre de l’activité végétale. Chez les végétaux, comme chez les animaux, le mouvement de croissance est consécutif d'une désorganisation propor- tionnelle. Ce point important n'avait pas été élucidé; au moins n'est-il pas généralement connu. En effet, nous lisions il y a quelques jours, dans un mémoire de M. Barthélemy, professeur de physique au lycée de Toulouse, inséré dans les Annales des sciences E ED ( 425 naturelles (1874, 5% série, t. XIX, pp. 151-139), la phrase suivante ` « J'ai observé moi-même au Jardin des plantes » de Montpellier un Bambou (Bambusa mitis), qui erois-- » sait d'un centimètre par heure au mois de juillet. Un » pareil accroissement doit coincider avec la fixation d'une » quantité considérable de carbone. » Or nous ne croyons pas que cette coïncidence soit nécessaire. En effet, le carbone fixé par la réduction de l'acide carbonique, sous l'influence des rayons solaires, dans les organes verts des plantes, n’est pas immédia- tement appliqué à la formation des tissus dont les organes nouveaux sont constitués. Les matériaux de l'accroissement sont fournis par des matières organiques préalablement élaborées et leur application aux besoins de l'accroissement est accompagnée d’une dépense de force nécessitée par leur circulation et par leurs transformations. On voit souvent les plantes grandir, ou pousser selon l'expression heureuse et juste qui a prévalu dans l'usage, alors qu’elles ne fixent point le carbone. Les tubereules, les bulbes, les bourgeons, les graines, tous les organes quand ils poussent, non-seulement ne fixent point le car- bone, mais ils perdent une certaine quantité de cet élément en vertu de leur respiration et c’est précisément la chaleur ` fournie par cette combustion qui fournit aux végétaux le mouvement qu'il leur faut pour pousser. ( 426 ) Recherches morphologiques sur les Pyrénomycètes. — I. Sorpariges; par M. Alfred CARRE docteur en sciences naturelles. SORDARIA FIMICOLA (Ces, Er DE Wor", Sphaeria equina, Fckl., Fe rhen. 1802, Hypocopra fimeti (Pers.) Fries, a. vaccina CL b. equina , el, Symb. m Ri p- 24l, Hypocopra sterco- raria , Fùckl., Symb. myc., p. eng ordaria confert sa Ani, Mspt., Sphae- ria ANRO Rob. in Desmazières, o. Not (4849), no 40 (Annales des se. nat. 3, XI , p. 353), Sora fimicoia , Cesati et de Notaris, Schema di Classif, p. 226, Sordaria fimicola, G. Winter, La Sordaria dont le développement fait l'objet de ce mémoire me paraît devoir être rapportée à l'espèce décrite sons le nom de Sordaria fimicola, par Cesati et de Notaris (Schema di Classif., p. 226), et par Winter (1); en tous cas, j'ai pu l'identifier avec la Sphaeria equina de Fuckel (Fungi rhen., 1802), qui, nonobstant un séjour prolongé dans l’herbier, a germé généreusement sur porte-objet , et ma fourni un développement en tous points semblable à celui de la Sordaria déterminée auparavant par moi comme S. fimicola. Winter identifiant également les deux espèces, je me crois suffisamment autorisé à adopter le nom de Sordaria fimicola. La littérature des Sphacriacées n’a compté jusqu'à ce jour qu’un petit nombre d'ouvrages , pour la plupart des- criptifs et systématiques; seul, M. Woronin (2) sest (1) Abhandlungen der Naturf. Gesellschaft zu Halle. Band XII. ft. L Halle, 1875 (2) De e und Woronix, Beiträge = Morphologie und Physiologie der Pilze, Hite Reibe. Frankfurt a, M., 18 ( 427 ) occupé de l’étude morphologique des Sphaeria Lemaneae, Sordaria fimiseda et S. coprophila, et nous a donné, en même temps qu'une description exacte et détaillée de l'anatomie de ces trois espèces, l’histoire du développe- ment de deux d’entre elles. Je crois inutile de parler lon- guement à cette place du mémoire de M. Woronin, que j'aurai l’occasion de citer à chaque instant dans le cours de ce travail, soit pour m'y rapporter, lorsque mes résultats coincident avec les siens, soit pour signaler les divergences qui nous séparent; et, à ce propos, je crois devoir faire remarquer que la S. fimicola est suffisamment voisine de la S. fimiseda, sur laquelle le manque de matériel frais m'a empêché de diriger jusqu'à présent mes observations, pour justifier les comparaisons que j'établirai souvent entre les deux espèces. Si la littérature morphologique des Sphaeriacées pro- prement dites se réduit presque uniquement aux recher- ches précitées de M. Woronin , celle des Ascomycètes, en revanche, et en particulier celle des Pyrénomycètes compte quelques ouvrages d'une importance incontestable (1); ils Sont dus, pour la plupart, à l'éminent professeur qui est à la tête du laboratoire botanique de l'Université de Stras- bourg , et sous la direction duquel ont été faites les recher- ches consignées dans ce mémoire. Ils doivent être men- Uonnés ici tout d'abord, car les premières phases du shoot de la S. fimicola BE une telle nee Se De Bary, Ueber die Fruchtentwickel. der Ascomyceten. Leipzig, Dr Bary, Morphol. und Physiolog. der Pilze. Leipzig, 1866. Beiträge zur Morphol. und Physiol. der Pilze, Eurotium, Erysiphe, nebst Bemerkungen ueber die Geschlechtsorgane ge Ascomy- ten lite Reihe. Frankfurt a. M., 1870. 428 ` analogie avec celles décrites par M. de Bary pour l Euro- tium Aspergillus glaucus et D Erysiphe, qu’il est impossible de séparer l'étude de l’un de ces Champignons de celle des autres. Fuisting (1) ne fournit sur le développement des Pyré- nomycètes que des données ambiguës et s'occupe spécia- . lement de l'anatomie des Pyrénomycètes lignicoles et de leurs rapports avec les tissus hospitaliers qui les ren- ferment. Oersted (2), enfin, a cru rencontrer chez une Sphaeriacée des vésicules réunies en capitule au sommet d’un filament, et remplies de bâtonnets de forme et de grosseur variables. Oersted élève ces vésicules à la dignité d’anthéridies, et donne à leur contenu le nom de sperma- ties, sans mentionner, toutefois, la fécondation que ces organes sont destinés à opérer. Aucune découverte ulté- rieure n'étant venue confirmer les observations d'Oersted, je ne crois pas nécessaire de m’appesantir plus longuement sur ce sujet. La Sordaria fimicola (fig. 28-29) se rencontre sur les excréments de différents animaux carnivores et herbi- vores, et se multiplie aisément sur le crottin de cheval; bien qu’elle appartienne aux plus petites espèces du genre, elle fournit un bon matériel d'observation , en ce qu’elle se prête parfaitement à la culture sur porte-objet. A l'état de maturité, ses périthécies sont ovales-arrondies, atté- nuées en col à la partie supérieure, qui est dépourvue d’appendices piliformes , tels qu'on en rencontre chez plusieurs espèces de Sordariées. Elles sont libres (non (1) Zur Entwickelungsgeschichte der sm ëmer yceten. Bot. Zeit. 1867, pp. 177 et suiv. — Ibid., 1868 569 (2) Naturhist. Foren. Vidensk. pates KC ( 429 ) réunies dans un stroma), isolées ou en groupe, d'une couleur brun-jaunètre; elles atteignent, en général, une longueur minima de 300 mikr., et sont fixées au sub- stratum par des filaments mycéliens qui rayonnent de leur partie inférieure dans toutes les directions. La S. fimicola me fournit loccasion de confirmer des observations intéressantes faites par M. Woronin (4) sur la S. fimiseda. Sous l'influence de la lumière, elle se com- porte comme cette dernière et dirige la gorge de ses péri- thécies vers le jour, d’une façon très-prononcée : en second lieu, la gorge s'accroît considérablement après la maturité complète des spores, au point de dépasser souvent 700 mikr. (2). Cet allongement est dù à de petites papilles qui terminent la gorge, et qui , se divisant par des cloisons transversales au fur et à mesure de leur croissance, donnent naissance, par des transitions insensibles, extérieurement, aux couches de l'enveloppe, intérieurement, aux nouvelles paraphyses. J'ai pu constater, sur des exemplaires arrivés à maturité depuis plusieurs semaines, et préservés de la des- siécation par leur séjour dans le vase clos qui servait à leur culture, que les papilles en question étaient en parfait état de vie et susceptibles d’une croissance ultérieure. Quant à la structure des parois du périthèce, elle pré- sente les quatre zones concentriques (fig. 50) décrites par M. Woronin (3); une extérieure, de l'épaisseur d’une seule couche de cellules, à parois brunâtres, et qui donne au champignon sa coloration particulière; puis, en marchant (1) Loco citato, p. 9. (2) La Sordaria ees fig. 29 atteignait 750 mikr.; ce chiffre est même parfois dépa (5) Loco citato, mé 10 et suiv. ( 450 ; vers l’intérieur, une seconde zone, composée de quatre ou cing couches de cellules, à parois fortement épaissies; une troisième zone, de deux ou trois couches de cellules pseudo-parenchymateuses; une quatrième, enfin, inté- rieure, qui produit les paraphyses. Je renvoie au mémoire cité plus haut, pour la description détaillée des trois pre- mières de ces zones, et m’occuperai seulement de la qua- trième, qui, en raison de ses fonctions, mérite une atten- tion spéciale. Elle est composée de plusieurs couches (peut-être trois) de cellules qui varient considérablement de forme et de volume, suivant la position qu’elles occupent. A la base de la périthécie , elles sont plus larges, fort irrégulières, par- fois très-allongées en forme de massue, de bouteille, et n’ont entre elles qu’une faible adhérence, au point qu’une légère pression suffit pour les séparer; elles sont complé- tement incolores, et leurs membranes offrent peu de résistance à l’action de l’eau, qui les gonfle rapidement en les faisant disparaître. Cela est surtout vrai pour la couche de cellules la plus intérieure, qui est directement en con- tact avec le nucléus (la masse des thèques), et subit une certaine pression de la part de ce dernier. A mesure que l’on s'élève vers le haut de la périthécie, les cellules augmentent de régularité, en même temps qu'elles diminuent de volume; dans la partie supérieure, leur adhérence réciproque est assez forte pour que l'on puisse parfois séparer la couche tout entière qui tapisse la gorge, avec son revêtement de paraphyses. Les paraphyses, ainsi que l’on s’en convainera par la simple inspection des figures 31,32, 33,se présentent sous des formes très-variables, selon qu’elles revêtent la gorge ou la base des périthécies, c’est-à-dire, suivant que leur | ( 451 ) formation est de date récente ou ancienne. A l'extrémité supérieure de la gorge, elles sont courtes, mono-ou bicel- lulaires, en voie de division, remplies de protoplasme réfringent; plus bas, elles ont multiplié le nombre de leurs articles et gagné en volume; leurs cloisons de contact pré- sentent une tendance de plus en plus manifeste à s’arron- dir et à former une espèce de ménisque concave vers l'in- térieur des cellules, d’où il suit que les parties médianes des cloisons restent seules en contact, circonstance qui ` explique la fragmentation facile des pampa inférieures en cellules isolées. Jusqu'ici, cependant, les modifications des paraphyses sont de peu d'importance et n'ont trait qu’au volume et au nombre des membres dont elles se composent; en effet, elles ont pu se développer librement à la faveur de l’espace que leur fournissait la lumière de la gorge. Il n’en est pas de même des paraphyses qui revêtent la partie du péri- thèce directement en contact avec le nucléus, et surtout de celles qui tirent leur origine de sa partie la plus infé- rieure. Pressées par la masse compacte des thèques en voie de croissance, gênées dans leur développement et refoulées contre les parois de la périthécie, elles ont allongé leurs articles dans la direction verticale, la seule qui leur fût restée ouverte. Elles ont accompli leur rôle protecteur en entourant les jeunes thèques de leur tissu tendre et moelleux, mais non sans qu’il en soit résulté pour elles des déformations nombreuses. Il en est de même des couches cellulaires intérieures, qui se résolvent sou- vent en files de cellules, et dont les lambeaux accom- Pagnent presque toujours les paraphyses, lorsque Ton tente d'isoler celles-ci par un moyen mécanique. Pour les unes comme pour les autres, du reste, la maturation des ( eng Ee f ; de dé La figure 55 représente-ui un fragment. de la couche cellulaire intérieure qui tapissait la base d'une périthécie; les cellules sont encore en relation avec les paraphyses, qui ont subi toutes les déformations possibles; on peut aussi voir combien adhérence des cellules de la membrane est faible; plu- sieurs d’entre elles se sont déjà séparées de leurs voisines, auxquelles elles étaient unies, sans toutefois s’en éloigner beaucoup, et en conservant à peu près leur place dans le réseau cellulaire de la membrane. Il arrive parfois que la pression que l’on exerce sur le périthèce pour expulser les thèques enlève à un certain nombre de paraphyses leurs membres supérieurs les plus élargis; elles ne sont plus alors composées que des articles inférieurs allongés (fig. 52, A), et leur aspect pourrait faire croire à l'existence d’une seconde forme de paraphyses semblable à celle que l'on rencontre dans beaucoup d'autres Pyrénomycèles; un examen attentif ne laisse aucun doute sur leur nature véri- table. Le nucléus, qui occupe Tase du périthèce, se compose de l’ensemble des thèques ; il se développe, comme nous le verrons, aux dépens d'un organe femelle, à la suite d’une fécondation que nous apprendrons bientôt à connaître. Il n'est jamais étroitement entremêlé de paraphyses, comme cela se présente chez l’Ascobolus et les pézizes; sous ce rapport , le nucléus de la S. fimicola fournit un matériel particulièrement favorable aux recherches qui ont pour but de déterminer la signification morphologique des pa- raphyses. Ce n’est pas à dire que l’on parvienne souvent à extraire le nucléus complétement exempt de corps étrangers; au contraire, en général, on ne l’obtient {surtout par pres- thègues | EES ( 433 ) sion) qu'accompagné de fragments de la zone cellulaire intérieure et de paraphyses; mais, neuf fois sur dix, on peut se convaincre que ces dernières ne font pas partie du nucléus; elles sont disposées en une couche qui revêt sa face extérieure; elles l'entourent , assez étroitement, il est vrai, mais sans y adhérer fortement. Il ne m'a jamais été possible de reconnaitre aux thèques et aux paraphyses une origine commune, tandis que j'ai pu presque toujours me convaincre de l'insertion des paraphyses sur les parois du périthèce (1). L'histoire du développement des périthécies de la S. fimicola, exposée ci-dessous, et sa comparaison avec celle de l'Eurotium et de l'Erysiphe, apporteront du reste un argument vigoureux, sinon irrésistible, à la thèse que expose, et ne laisseront aucun doute sur la diversité d'origine des thèques et des paraphyses. A l'inverse de ce qui précède, M. Woronin (2) et Fuis- ting (3), préjugeant ainsi une origine commune, don- nent à l’ensemble des thèques et des paraphyses le nom de nucléus; aussi, ces deux auteurs distinguent les orga- nes piliformes qui revêtent la partie supérieure du péri- thèce de ceux qui contribuent à la formation de leur nucleus; ils réservent pour ces derniers le nom de para- physes, et donnent aux premiers celui de périphyses. Si le mode de développement que j'expose pour la S. fimi- cola se généralise dans la famille des Sphaeriacées, la (1) N est superflu d'ajouter que l'observation doit se faire rapidement, l'action de l'eau isolant au bout de peu de temps, thèques, cellules et (5) Fuisnixe, loco citato. Ze: SÉRIE, TOME XXXVII. 29 ( 454 ) signification morphologique attachée aux périphyses devra disparaître, en supposant même que leur nom soit con- servé à titre deseriptif pour désigner les paraphyses de la gorge. Les thèques de la S. fimicola (fig. 32 B) ne s’écartent pas du type de celles de la plupart des Ascomycètes; elles possèdent une longueur d'environ 180 mikr., dont 150 pour la partie sporifère. Dans les premiers temps de leur formation, elles se présentent sous l’aspect de tubes renflés en massue, remplis d’un protoplasme finement granu- leux, qui se fragmente plus tard en 8 spores, formées simultanément; je n'ai pas constaté l’apparition préalable de noyaux cellulaires. Leur mode de formation ne diffère pas de celui exposé par M. de Bary (1), Woronin (2), Fuisting (3) et Sachs (4). Les spores, au nombre de huit, sont disposées dans la thèque obliquement et en une seule rangée; elles possè- dent un exospore et un endospore : incolores dans les pre- miers temps de leur formation, elles ne tardent pas à prendre une couleur jaunâtre, qui passe ensuite au vert clair, puis au vert foncé; les spores mûres sont compléte- ment brunes et doivent leur coloration à l’exospore seul : l’endospore , ainsi que l’on peut s’en convaincre, lors de la germination, est complétement incolore. Les spores atteignent une longueur de 22 mikr. sur une largeur de 11, environ, et renferment, dans leur inté- rieur, une grande vacuole de nature indéterminée : elles (1) Physiologie der Pilze, etc. Leipzig, 1866. (2) Loco citato. $ (5) Loco citato, (4) Lebrbüch der Botanik, p. 11. gg, Lute case osdiminatià ( 435 ) sont entourées d’une enveloppe gélatineuse, réfringente , visible déjà dans l’intérieur de la thèque, et qui possède la propriété de se gonfler presque immédiatement au contact de l'eau, en augmentant considérablement de volume. On peut voir (fig. 34 A) une spore à demi sortie de la thèque déchirée; la partie de lauréole en contact avec l’eau est fortement dilatée, tandis que la partie opposée, encore engagée dans la thèque, a conservé son épaisseur primi- tive. Cette aire gélatineuse paraît devoir son origine à la couche la plus extérieure de l’exospore (1}, dont elle serait un épaississement; on peut voir (fig. 34) qu’elle est inter- rompue à l’un des pôles, et forme un canal qui se conti- nue jusqu'à la spore (2); c'est précisément en regard de ce canal que l’exospore lui-même est percé d’une petite ouverture (keimporus, pore germinatif), destinée à four- nir passage à l’endospore, lors de la germination. Le pore Serminatif est parfaitement visible, alors que les spores nouvellement formées sont encore transparentes et colo- rées en jaune : il regarde toujours la partie inférieure de la thèque. Les spores ne sont pas mees hon de la thèque, comme cela se produit chez beaucoup de Sordariées et (1) De Bary : Morphol. und Physiolog. der Pilze , p. 130. (2) Cette enveloppe est l'équivalent morphologique des appendices dont sont munies les spores de plusieurs autres Ascomycètes : je rappellerai cependant que la S. fimiseda possède deux espèces d’appendices, dont les uns sont de même nature que laire gélatineuse de la S. fimicola, et dis- posés aux deux extrémités de la spore, et dont les autres proviennent de la division de la spore primitive en deux cellules, desquelles la supérieure renferme tout le protoplasme , et devient la spore proprement dite; l'infé- rieure reste allongée, incolore hyaline, et constitue un appendice morpho- logiquement très-différent des premiers. ( 456 ) e même d'Ascomycètes en général ; leur sortie de Ja thèque a lieu de la façon la plus simple, par dissolution de la membrane de l’asque : elles sont susceptibles de germer immédiatement après leur maturation, et se laissent cultiver aisément sur porte-objet, ainsi que je lai mentionné plus haut; elles ne germent pas dans l’eau pure, mais bien dans le décocté de crottin de cheval. La germination a lieu de la façon suivante : quelques heures après le semis, l’endospore fait saillie à travers le pore germinatif, et forme une petite vésicule, dans la- quelle passe l’entièreté du protoplasme de la spore (fig. 4). De la hernie sphérique formée par l’endospore sortent des filaments mycéliens qui se ramifient un grand nombre de fois et s’accroissent rapidement, si lon a soin de renouveler leur nourriture; ces filaments se cloisonnent et augmentent de volume et de résistance avec l’âge; les premiers formés épaississent leurs membranes et se colo- rent en jaune, tandis que les ramifications nouvelles sont tendres et incolores. Après cinq ou six jours environ, le mycélium prélude à la formation des périthécies, qui naissent toujours sur des filaments mycéliens d’un certain âge, et jamais sur leurs dernières ramifications. Les premières phases de leur développement sont les suivantes : un filament mycélien, assez épais, produit une branche latérale, d’un diamètre à peu près égal au sien, parfois, un peu supérieur; cette branche ne tarde pas à se courber sur elle-même et à for- mer une spirale, semblable à celle que M. de Bary 3 dé- couverte et signalée dans l'Eurotium Aspergillus glaucus et E. repens. Il y a cependant, entre les deux développe- ments, des divergences qui, bien que paraissant légères ( 457 ) au premier abord, sont néanmoins assez caractéristiques pour empêcher qu’on ne les confonde : ainsi, chez l'Euro- tium, les branches destinées à former les périthécies ont acquis leur longueur définitive, qui est importante, avant que l’enroulement se manifeste; la croissance de ces branches s'arrête, et la formation de la spire commence de haut en bas, c’est-à-dire, en procédant de l'extrémité du filament vers sa base, qu'elle n’atteint pas; la périthé- cie se trouvera ainsi suspendue à un long pédicelle, formé de la partie non enroulée de la branche; de plus, les tours de la spire, primitivement lâches, se resserrent bientôt après, la torsion se produisant, cette fois encore, de haut en bas. Chez la S. fimicola, l'enroulement se produit en sens inverse du précédent; la branche latérale commence à s’enrouler dès les premiers temps de sa formation, et ne cesse de s’accroître que lorsque la spirale est achevée. Les figures 2-8 ne laissent aucun doute à cet égard; on peut y voir que les jeunes branches s’enroulent de très-bonne heure en tours serrés : à aucune phase du développement, on ne rencontre de spirale lâche. La S. fimicola présente encore une autre particularité qui mérite d'être signalée : ses périthécies, comme les vrilles qui leur donnent nais- sance, sont presque toujours sessiles, et, en tous cas, ne sont jamais longuement pédicellées comme celles de l'Eurotium, circonstances qu’explique, du reste, leur mode de croissance. Très-rarement, la spirale se trouve portée sur un court pédicelle (fig. 17), et l’on peu voir, dans le cas figuré, que la partie inférieure parail aussi Stimulée par la fécondation , car elle émet des crampons, au même titre que les hyphes formant l'enveloppe du périthèce (vide infra). Les tours de spire qui atteignent le nombre de cinq-six ( 438 ) chez l'A. glaucus, et celui de huit, chez TE. repens, sont notablement moins nombreux chez la S. fimicola; ils ne dépassent presque jamais le chiffre de trois et restent sou- vent en deçà. La spirale, complétement développée, pos- sède une membrane tendre et incolore; elle est remplie d’un protoplasme homogène; je n'ai pas remarqué qu’elle fùt d’abord divisée par des cloisons transversales, en un nombre plus ou moins grand d'articles. La première cloi- son apparait vers la base de la spirale, qu’elle divise ainsi en deux parties, dont l’une, l’inférieure, est de beaucoup la plus petite. De cette portion inférieure pousse presque immédiatement une branche latérale (fig. 7, 8) qui s’ache- mine vers l’extrémité supérieure de la spirale, en ligne directe, ou en contournant plus ou moins cette dernière : suivant la terminologie adoptée par M. de Bary, je désigne la spirale sous le nom de Carpogone, et la branche latérale sous celui de Pollinode. Dans la généralité des cas, le pollinode émet, avant d'avant d’avoir atteint la partie supérieure du carpogone, une ou deux branches latérales qui enlacent le carpogone (fig. 9-19). Le pollinode atteint rapidement la partie supé- rieure du carpogone, et se met en contact avec son extré- mité (fig. 12 et 13), ou avec une portion plus ou moins grande de sa surface latérale (fig. 40, 44). Ici se présente la question suivante : y a-t-il copulation réelle entre le pollinode et le carpogone? M. de Bary a résolu la question affirmativement pour lEurotium, négativement pour l'Erysiphe, chez lequel la fécondation ne peut avoir lieu qu'à travers les membranes, par endosmose. Bien que je u’aie pu vérifier si le contenu du pollinode de la S. fimicola entrait en communication directe avec celui du carpogone, je me crois autorisé, en vertu de l'analogie frappante qui | ( 439 | existe entre les phases correspondantes chez l’Eurotium et la Sordaria, à admettre également pour cette dernière une copulation réelle. ŢI est, da reste, un fait digne d’être signalé : lorsque, un peu plus tard, on cherche à extraire le carpogone de l'enveloppe qui le renferme, il arrive que l’on voit, attaché à sa partie supérieure, un petit fragment très-réfringent et qui se colore en jaune vif par liode; il me parait très-probable que cette apparence, qui m'a frappé souvent, est due à un fragment du pollinode arraché de celui-ci et qui est resté attaché au carpogone, avec lequel il avait contracté adhérence. La figure 13 re- présente un cas particulier, qui peut confirmer l'hypothèse de la copulation; la partie inférieure de la spirale a été déroulée par la dissection où la pression de la lamelle de verre; le pollinode n’en est pas moins resté fixé au sommet du carpogone, qu’il a retenu dans sa position primitive, tandis que la partie inférieure de ce dernier s’en écartail. Quoi qu’il en soit, le carpogone ne tarde pas à se diviser par des cloisons transversales en un certain nombre de cellules, nombre d'abord restreint, par la suite plus consi- dérable (fig. 21); en même temps, le pollinode et ses branches latérales se ramifient ; presque toujours, d’autres branches tirant leur origine de la base de la spire, peut- être aussi du mycelium qui lui a donné naissance, s'en- chevêtrent dans les précédentes, d’où il résulte que le Carpogone est bientôt entouré d'une enveloppe d’hyphes entre-croisées (fig. 16-20). En même temps commence la formation des crampons destinés à fixer la Sordaria au substratum qui la produit, et probablement aussi à lui procurer sa nourriture. Du côté extérieur des hyphes formant l'enveloppe, c'est-à-dire du eôté opposé à celui qui regarde le carpogone, croissent rapidement des fila- ( 440 ) ments minces et allongés (fig. 17, 19, 20), qui rayonnent dans toutes les directions, et vont s’anastomoser avec les myceliums voisins et s’enrouler autour des parties solides qu’ils rencontrent; très-souvent, le premier de ces cram- pons est produit par le pollinode lui-même (fig. 13). Ces organes (mycelium secondaire de M. Woronin) font penser aux sucoirs caractéristiques de l’'Erysiphe, bien que la constance et la régularité qui ont permis de tirer de ces derniers des caractères spécifiques, fassent complé- tement défaut aux crampons de la S. fimicola, qui se développent et se ramifient sans ordre apparent. Le myce- lium secondaire n'existe pas chez l'Eurotium, dont le fruit reste microscopique, et qu’un filament mycélien suffit à supporter et à nourrir; il est indispensable à la S. fimi- cola, qui atteint un volume relativement considérable. Les hyphes enveloppantes se fragmentent par des eloi- sons transversales et tangentielles en nombreuses cellules qui s'unissent latéralement entre elles, de façon à former au carpogone un revêtement non interrompu et dont les couches, de plus en plus nombreuses, ne tarderont pas à le dérober à la vue. Au moyen de réactifs appropriés, on réussit cependant assez souvent à rendre la spirale du car- pogone visible, et l’on peut s'assurer qu’elle est parfaite- ment intacte, alors que l'enveloppe se compose déjà de quatre ou cinq couches de cellules (fig. 21-23). Les parois de la périthécie, et j'insiste sur ce point, acquièrent donc un haut degré de développement avant que des change- ments surviennent dans la constitution du carpogone. Comment s’opèrent maintenant ces changements ulté- rieurs, et quel en est le résultat? Ici, l’investigation est entravée par des obstacles multiples; en effet, l'enveloppe du carpogone a augmenté le nombre de ses couches, les ( 44i ) cellules extérieures se sont colorées en brun clair, et le complexe tout entier ne dépasse souvent pas 50 mikr. ; si parfois on réussit encore à apercevoir le carpogone, il est dificile de décider si les ramifications qu'il paraît émettre lui appartiennent en propre, ou si elles sont des prolongements des parois qui l'entourent : de plus, les métamorphoses qu'il subit s’accomplissent avec une telle rapidité qu’il est presque impossible de trouver un état intermédiaire entre le carpogone intact et le carpogone ayant développé de nombreux bourgeons. L'organisme étant trop petit pour permettre une dissection , l’écrase- ment des périthécies est le seul moyen d'investigation qui reste, et bien que j'aie écrasé une quantité innombrable d'exemplaires, je n’ai pu réussir à extraire une spirale entière avec ses bourgeons : dans les périthécies trop jeunes, le nucleus n’a pas atteint une consistance suffi- sante pour vaincre la résistance des parois, et s'écrase dans leur intérieur; dans les périthécies plus âgées, le nucleus parvient à vaincre cette résistance, mais non sans éprouver de graves avaries : en outre, à cette époque, les difficultés sont compliquées par l'apparition des jeunes paraphyses. On peut cependant, à la longue, et en sacri- fiant un grand nombre de jeunes fruits, obtenir des frag- ments assez considérables du carpogone (fig. 24-26), et constater ainsi que celui-ci a poussé de nombreux bour- geons, qui absorbent de suite tout son protoplasme ; aussi, les cellules qui formaient la spirale sont-elles devenues incolores et tendres : elles se résorbent rapidement dans l'eau: toutefois, on peut souvent reconnaître deux ou trois tours du carpogone , indiqués par deux rangées de bour- geons, qui suivent les contours de la spirale, sans que cette dernière elle-même soit visible autrement que ( 442 ) comme interstice entre les bourgeons, et comme axe idéal du bourgeonnement. La figure 24 est très-instructive à cet égard ` on peut y voir un fragment assez étendu du car- pogone, dont une partie (a), divisée par des cloisons, n’a pas encore produit de bourgeons latéraux ; aussi est-elle encore remplie de protoplasme et se colore-t-elle en jaune par la solution iodée; plus loin (b), la formation des bour- geons a commencé, et l’on peut voir combien elle atteint fortement la spirale, qui est presque tout entière com- prise dans le bonrgeonnement. Dans la dernière partie (c), enfin, la formation des thèques est déjà vigoureuse, mais la spirale elle-même est résorbée et sa direction n’est plus indiquée que par les deux rangées de bourgeons qui en tirent leur origine et encadrent la place qu’elle occupait. Les figures 25, 26 représentent des parties assez étendues du carpogone en voie de bourgeonnement. Sur des périthécies un peu plus âgées, on peut obtenir des fragments du carpogone, auxquels sont attachés des bourgeons plusieurs foisramifiés (fig. 27) dont les dernières ramifications constitueront les thèques. En résumé , l'enveloppe du périthèce a atteint un déve- loppement important avant que le carpogone se modifie : celui-ci émet rapidement et sur presque toute sa surface des bourgeons multiples auxquels il cède son protoplasme; en cet état, le carpogone proprement dit parait épuisé par cette parturition nombreuse , et se fragmente avec la plus grande facilité en cellules isolées qu’accompagnent les hyphes ascogènes. — Quant aux paraphyses dont la for- mation a commencé de bonne heure, elles présentent les mêmes caractères que celles qui revètiront plus tard la gorge du périthèce dans sa partie la plus jeune; je ne les ai jamais trouvées en communauté d’origine avec les ( 445 ) thèques , "mais j'ai pu constater qu’elles émanaient de la paroi interne du périthèce (1). Il ne me semble pas inop- portun de rappeler, à cette place, que la couche cellulaire intérieure de l'Eurotium et de l'Erysiphe produit des prolongements courts et émoussés, qui s'introduisent entre les jeunes thèques dont ils comblent les interstices, et auxquels M. de Bary a donné le nom de tissu de rem- plissage (Ausfüllungsgewebe, Füllgewebe). Ces prolonge- ments peuvent être considérés comme l’état rudimentaire des paraphyses des Ascomycètes supérieurs, morpholo- giquement et sans doute aussi physiologiquement : dans l'Eurotium comme dans la Sordaria, ces organes wont qu'une durée limitée, et sont en dégénérescence complète à l'époque de la maturité des spores. Le développement que je viens d'exposer diffère de celui décrit par M. Woronin, pour la S. fimiseda et la Sphaeria Lemaneae. D'après cet habile observateur, la formation des périthécies aurait pour point de départ une vésicule d’un diamètre quatre ou cinq fois plus grand que celui du mycelium qui lui donne naissance; de ce mycelium et des filaments voisins partent de nombreuses branches qui appliquent sur la vésicule primitive leur extrémité renflée légèrement en massue; elles l’entourent bientôt, se cloisonnent et forment un peloton dont l'opacité empêche de suivre les destinées ultérieures. Je n'ai jamais rencontré de vésicule semblable, ni vu des filaments mycéliens voisins Prendre part à la formation des périthécies. Les divergences que je viens de signaler entre les pre- mières phases du développement de la S. fimicola, et (1) Comparez Janczewski, Botan. Zeitg. 1872, p. 257; sur la significa- tion des paraphyses de l'Ascobolus. (444 ) celles attribuées par M. Woronin aux S. fimiseda et Sphae- ria Lemaneae, existent-elles réellement? Je ne puis affir- mer absolument que non, n'ayant pu, jusqu'à présent, faute de matériel, étudier ces deux dernières espèces; cependant, il me paraît difficile d'admettre de grandes différences dans le développement des Sordariées entre elles, si l’on songe surtout à la ressemblance remarquable qui existe entre S. fimicola et l'Eurotium, dont les places sont si éloignées dans la systématique des Pyrénomycètes. Peut-être, M. Woronin a-t-il observé le carpogone, alors qu'il était déjà entouré des rudiments de son enveloppe; dans cet état, et vu d’en haut, il peut, jusqu’à un certain point, ressembler à une vésicule. Fuisting (1) parle dubitativement d’une hyphe épaisse qui donnerait naissance au tissu hyménial (thèques et para- physes) des Pyrénomycètes étudiés par lui,et compare cette hyphe, à laquelle il donne le nom de Woroninsche hyphe, au carpogone découvert par M. Woronin dans l’Ascobolus pulcherrimus. Du reste, les données de Fuisting sont tel- lement vagues, qu’elles ne peuvent être considérées comme apportant quelque éclaircissement à la question du déve- loppement des Pyrénomycètes. Qu'il me soit permis, avant de terminer, de résumer l'état de nos connaissances relatives à la sexualité des Ascomycètes, et d'examiner jusqu'à quel point les élé- ments nouveaux fournis par la connaissance du dévelop- pement des Sordariées confirment les résultats précédem- ment acquis. — En 1863 déjà, M. de Bary émettait l'opinion que le fruit des Ascomycètes était le résultat SU Ce ne me AE Nm a WEE RS EE e (1) Bot. Zeit, 1867, p. 195 et suiv. — 1868. ( 445 ) d’une fonction sexuelle (1). Depuis lors, ses belles recher- ches sur Erysiphe et l'Eurotium (2) ont effacé tous les doutes qui pouvaient encore exister à ce sujet. Chez ces deux genres d'Ascomycètes , les thèques se forment aux dépens de l'organe femelle ou carpogone , qui, chez l'Ery- siphe, est une cellule arrondie, chez l'Eurotium , une spi- _ rale pluricellulaire, à la suite d’une fécondation opérée par un organe mâle ou pollinode. Chez lEurotium, les contenus des organes sexuels se mettent en contact l’un avec l'autre; chez l Erysiphe, il n'existe pas de véritable copulation , les contenus des deux organes sexuels nen- trant pas en communication directe, et la fécondation ne peut s'opérer que par endosmose; en aucun cas, la forma- tion des thèques ne se manifeste en dehors du concours des deux organes susmentionnés. Si nous passons aux autres Ascomycètes, nous trou- vons la sexualité établie sans conteste pour le Gymnoas- cus Reessii (3). Elle peut-être admise également dans la classe des Discomycètes pour les pézizes (4) et l Ascobo- lus (5), bien que, pour les premières, l’origine des thèques, et, pour le second, la fonction dont elles sont le résultat nous soient encore inconnues. Le développement des Sor- dariées apporte une nouvelle pierre à l'édifice de la sexua- (t) F PEETRE der Ascomyceten. (2) Beitr: (5) no : eee EESE des Gymnoascus, Bot. Zeit, 1872. (4) De Bary : er der Ascomyceten, 1865. — Tulasne Aun. sc. nat, 5, Ser. V VI, p. sé WoRONIX. — Se ete. , II Reihe. — Janczewski: Botan. Zeit, ( 446 ) lité, et réalise un des desiderata indiqués par M. de Bus (4). La S. fimicola, en effet, est un Pyrénomycète élevé dans la série; la structure compliquée de ses périthèces déhis- cents, ainsi que la présence de paraphyses complètement développées, la placent au niveau des champignons les plus hautement organisés de sa classe; sous tous ces rap- ports, elle s'éloigne beaucoup de l'Eurotium et de l Ery- siphe dont les périthèces, composés d’un petit nombre de couches , ne s'ouvrent jamais à l'extérieur, et ne sont pas munis de paraphyses complétement développées (2), et l’on comprend, jusqu'à un certain point, que des au- teurs (3) aient cru devoir séparer l’ Eurotium et l'Erysiphe des Pyrénomycètes, auxquels Fries (4) les avaient réunis; cette séparation semble désormais inadmissible, et les ca- ractères sur lesquels elle est basée me paraissent , en pré- sence de l’analogie des développements, devoir être rele- gués au rang de caractères secondaires (5). M. de Bary a, (1) De Bary : Bemerküngen, etc. Beiträge, Ite Reihe. (2) Les différences sont plus accentuées encore, si, dans le groupe des Z nous considérons le genre Podosphaera, qui ne forme qu'une e thèqu e Oersted: System der Pilze, e (4) Fries : Summa veget ipanen Fries joint aux Pyrénomycèles sa famille des Périsporiacés, qui renferme , entre autres genres, les genres Eurotium et Erysiphe (p. 405 et suiv.). (5) Oersted sépare les Erysiphes des Pyrénomycètes, et donne de ces derniers la diagnose suivante ` « Die Sporocarpien öffnen sich mit einer » Pore,und enthalten ein festes sporenlager. » Je ferai remarquer que les péritbécies de tous les Pyrénomycètes, à une certaine époque de leur existence, sont encore fermées, et, sous ce rapport, ne se distinguent en rien de celles de Bee et de l'Eurotium. Quant au « festes Sporen- » lager », il dépend uniquement du nombre des thèques; plus celles-ci sont nombreuses, plus les hyphes qui les forment ont dù se ramifier. C'est l'ensemble de ces ramifications qui constitue le Sporenlager. LA ( 447 ) du reste, fait ressortir la justesse de la classification de Fries; « il sera difficile, disait-il, de réfuter les vues » émises par Fries au sujet de la place des Périsporiacés » et de leur adjonction aux Pyrénomyceètes, c’est-à-dire, » aux Ascomycètes avec périthèces; en aucun cas, la ré- » futation ne pourra atteindre les deux genres en ques- » tion (Erysiphe, Eurotium) (1) : » ces paroles reçoivent ici leur confirmation; l'Eurotium et l'Erysiphe doivent être placés désormais à côté des Pyrénomycètes typiques, dont ils se rapprochent beaucoup plus que ne le laissaient supposer leurs caractères extérieurs. Depuis l'achèvement du travail précédent, j'ai pu obte- nir la germination d’une seconde Sordariée, la Sordaria minuta de Fuckel (2). Les recherches que j'ai entreprises sur cette Sphaeriacée sont encore incomplètes; je puis ce- pendant annoncer dès à présent qu’elles confirmeront en tous points le mode de développement que j'ai exposé plus haut pour la S. fémicola. Ainsi que le montre la figure 35, (1) DE Bary, loco citato. (2) Cette Sordariée a été rencontrée par moi sur du crottin de cheval; je la rapporte à la S. minuta de Fuckel, en m'appuyant sur la structure des périthécies et des thèques, qui s'accorde assez bien avec celle que Winter (loco citato, p. 36) décrit pour la S. minuta: je dois faire remar- que nt que mes spores (fig. 36) sont notablement plus grosses que celles de cette dernière espèce; ainsi, tandis que Winter ne donne aux spores de la S. minuta qu’une longueur de 16-22 mikr. et une largeur de 10 mikr., les miennes possèdent une longueur assez générale de 20-22 mikr, et une largeur constante de 15-16 mikr. : l'appendice est petit (fig. 36) : bien que les spores se rapprochent peut-être davantage de celles de la S, curvula (pe Bary), je joins provisoirement cette Sordariée à la S.minuta, eu égard aux caractères susmentionnés ( 448 ) la formation du boges procède comme chez cette dernière; elle a pour point de départ enroulement d'un filament mycélien, dont les tours sont cependant moins nombreux que ceux du carpogone de la S. fimicola. — Quant aux paraphyses de l’une et l’autre espèce, elles ont la même signification morphologique. J'espère communiquer ultérieurement à l’Académie, et avec plus de détails, les recherches commencées sur cette espèce et quelques autres encore. Je me borne pour le moment à constater que les résultats obtenus sont suffi- sants pour me permettre de généraliser ce que j'ai dit ci-dessus de la S. fimicola, et de l’étendre à la classe en- tière des Sordariées. EXPLICATION DES FIGURES. SORDARIA FIMICOL A (Ces, et de Not). Fig. 1. — Germinati „24h iron après le semis. nus 97 75. — 2-6. — Enroulement progressif du filament mycélien qui forme le carpogone. (Grossissement, 600 environ — 7-8. — Développement du pollinode (a) au ps inférieur de la spire. (Grossissement, fig. 7, 600 , fig. 8, 900. — 9-15. — Développements ultérieurs du pollinode (a). Fig. .10, 11, e pollinode est appliqué au-dessous de l'extrémité du Carpogone ; dans les figures 12, 15, il est immédiatement en contact avec cette extrémité. (Fig. 12, grossissement, 900; les autres, 600.) — 16-20. — Formation de l'enveloppe du périthèce ; les figures 16, 17: 19, 20 (grossissement, 600) montrent une formation abondante de crampons (mycelium secondaire). (Fig. 15: grossissement, 700.) — 21-22. — Coupe optique d'un jeune périthèce dont l'enveloppe Se SE 19 Y os Se d HP A4 WM V Au d CH VI Lu pog mt: sə Wou 199 AU | It | D D S “ SI 3 [A | an dx JA P) : d | e ot | | wo} ‘to e S 5 ` de S , E e = > S KI (m = S ES) zE Kä H - CZ Bull ilki ` Lë Lith G. Seilereyns, Bruxelles. A . l. Sordariees, par M. Alfred € veetes. D Sur les Pyrenom — 449 ) compose de plusieurs couches de cellules. (Grossisse- ment , 600. — Coupe optique d'un hea dans un état plus avancé de développement ; — l’enve possède cinq couches de cellules; l'ascogone n’a pas encore éprouvé de modifica- tion. (Grossissement supérieur à 1000. — Fragment de l'ascogone; en a, la formation des thèques n'a pas nb — en he e ER ént avancée: en c, es jeunes H (=) (Grossissement 900 .) . — Fragments de l’ascogone. (Grossissement, 900.) aie ee des hyphes ascogènes produites par le carpo- 0.) gone. (Grossissement, 90 -= Paille complétement développé. (Grossissement, 180.) — (Grossissement très-faible). Périthèce a la gorge s'est contournée sous l'influence de la lum — Coupe au travers d'un périthèce, Ge les quatre couches ei EE Ee: les paraphjses et les thèques à tous les états de d = RROA de différents $ âges : (a), de la partie supérieure de la gorge; (b), de la partie inférieure; (c), du sommet du périthèce proprement dit, (Grossissement, 500.) — A. Paraphyses les plus âgées qui entourent le nucléus; (a), a. dont les articles ME sont enlevés; Thèques. (Grossissement, A. 500, B. 400.) = ren attachées partiellement à ep paroi cellulaire intérieure qui leur a donné naissance. (Grossissement, — Spores entourées de leur enveloppe gélatineuse. (Grossis- sement, 500.) SORDARIA MINUTA (Fckl.) — Enroulement du filament mycélien qui forme le carpo- gone. (Grossissement, 600 — Spores de la S. minuta. (Grossissement, 500.) SÉRIE, TOME XXXVII. 50 ( 450 ) Sur les centres des nerfs vaso-moteurs; par M. le docteur F. Putzeys, de Liége. Je ne passerai pas en revue tout ce qui a été écrit sur les centres toniques et réflexes des nerfs vaso-moteurs; cet historique m’entrainerait fort loin et offrirait d'autant moins d'intérêt qu'aujourd'hui les opinions sont peu con- troversées , les auteurs s’accordant presque généralement pour les placer dans la moelle allongée (Ludwig et Thiry, Lovén, Ditmar, etc.). Aussi peut-on lire dans la plupart des traités de physiologie que le centre des mouvements automatiques et réflexes des vaisseaux sanguins se trouve dans l’isthme de l’encéphale. Owsjannikow (1) est même allé plus loin et il a cherché à déterminer rigoureusement la situation du centre réflexe qui, suivant lui, comprendrait chez le lapin un espace long d'environ 4 millimètres , com- mençant à 4 millimètre en arrière des tubereules quadri- jumeaux et se terminant à 4 ou 5 millimètres en avant du calamus. En opposition avec les données qui précèdent, Goltz (2) néanmoins démontrait, il y a plusieurs années déjà, que chez la grenouille la moelle épinière est pour le tonus vasculaire un centre tout aussi important que la moelle allongée. Il ressortait de ses recherches que ces 1) Pa. Owssaxnixkow. Die tonischen und reflectorischen Centren a Gefässnerven. sens aus dem physiologischen Institut zù Leipzig- 6 Jahrgang 1871, (2) Virchow's te Bd 29. s. 394. a T | ( 451 ) deux parties de laxe cérébro-spinal agissent dans ce sens d'une manière indépendante et que la fonction peut être parfaitement entretenue par la seule présence de l’une ou de l’autre. D'autre part, interprétant les anciennes expériences de Legallois, il attribuait l'arrêt de la circulation, qui chez un lapin décapité suit immédiatement la destruction de la moelle épinière, non à l'arrêt des mouvements cardiaques (comme le croyait Legallois), mais bien à l’anéantissement du tonus des vaisseaux. S'appuyant sur ce fait, il était donc amené à admettre l’existence de centres automatiques dans la moelle épinière des mammifères. — Si je ne m'abuse , lui seul soutint cette opinion à laquelle est venu donner raison le récent travail de Schlesinger (1). Schlesinger a expérimenté sur des lapins : la moelle est sectionnée entre l’occipital et l’atlas, le nerf vague et le cordon du sympathique sont coupés au cou, l'animal est curarisé et reçoit ensuite une légère dose de strychnine. L'auteur arrive à des résultats tout opposés à ceux de ses prédécesseurs; il trouve que l'irritation d'un nerf sensible produit une contraction réflexe des artères, reconnais- sable à l'élévation subite de la colonne mercurielle du manomètre. — La strychnine possède done la propriété de mettre en évidence les centres réflexes vaso-moteurs situés dans la moelle, alors qu'avant l'empoisonnement ils étaient restés inertes vis-à-vis des excitations extérieures. Répétant ses expériences sur des chiens, Schlesinger n'obtint jamais que des résultats négatifs. (1) W. Scazesixcer. Ueber die Centra der Geffäss-und Uterusnerven. Med. Jahrbücher, 1. Heft, 1874. ( 452 ) Il pouvait être intéressant de rechercher l'existence de ces centres d’excitabilité réflexe dans la moelle de la gre- nouille. Je choisis pour mes recherches les exemplaires de Rana esculenta les plus vivaces que je pus trouver à cette époque de l’année. L'animal recevait d'abord dans le sac lympha- tique du dos quelques gouttes d’une solution de strychnine de 4 pour 2000, puis au bout d’un quart d'heure , quand il commençait à répondre avec plus de vivacité aux exci- tations extérieures , j'introduisais des ciseaux dans la bouche, je sectionnais une des commissures, et, d’un coup net, je tranchais les deux tiers de la tête à 5 ou 6 millimètres en arrière d’une ligne tangente au bord pos- térieur des tympans; j'étais ainsi certain d’avoir divisé la moelle épinière au niveau du corps de la deuxième vertèbre et les nerfs vagues par la même occasion. La grenouille était ensuite abandonnée à elle-même pen- dant quelque temps pour laisser le système nerveux se rétablir de la secousse violente imprimée par l'opération, et je lui injectais quelques gouttes d’une solution de curare de 4 °/,. — Lorsque la narcose était complète, je plaçais l'animal sur une de ces lames de verre dont on fait usage pour démontrer la circulation ; seulement je ne fixais pas la patte avec des épingles, qui auraient pu être accusées de produire une irritation locale et une contraction arté- rielle consécutive, je la laissais reposer parfaitement libre sur la rondelle de liége, évitant par là tout obstacle au courant sanguin, qui restait aussi normal et régulier quê possible. Je m’arrangeais alors de façon à avoir dans le champ du microscope une artère de moyen calibre dont les parois fussent bien apparentes. J'irritais par un courant élec- ( 455 ) trique (1) l’autre membre postérieur, la peau du dos ou de toute autre région en arrière de la section et j'observais immédiatement une contraction du vaisseau : tantôt celle- ci est uniforme, se présente sur toute la longueur de l'ar- tère observée; les parois se rapprochent peu à peu en res- tant parallèles et le diamètre est partout le même; les libres contractiles subissent au même moment l'influence nerveuse et entrent en action d’une façon simultanée; — tantôt on voit l'artère se rétrécir en des points situés à des distances plus ou moins grandes et régulières les unes des autres, alors que les espaces intermédiaires ne pren- nent aucune part à la contraction, qui est toute locale; il y a formation de nœuds et de ventres; le vaisseau devient tortueux , rétréci à certaines places, où il semble étranglé par un anneau et conserve son diamètre normal dans les points voisins; puis peu à peu sur toute son étendue il est Saisi par la contraction et finit par offrir une diminution générale de son calibre. L'intensité de la contraction est très-variable et peut aller jusqu'à effacement complet de la lumière du vaisseau, qui ne donne même plus passage à un globule sanguin; Dour un moment on peut voir ainsi la circulation cesser dans la membrane. La durée du phénomène est de quelques secondes à plusieurs minutes; je l'ai vu persister 4 minutes après la rupture du courant. Les excitants mécaniques (pincement, écrasement, pi- qûre), thermiques et chimiques (acides acétique, sulfu- rique, etc.) mont donné les mêmes résultats que élec- (1) J'ai fait usage de l'appareil volta-faradique Helmholtz et du levier- clef de du Bois-Reymond. ( 454 ) tricité et je leur ai vu produire tout aussi nettement ces contractions réflexes des artères. . Je désirai ensuite examiner quelle pouvait être Pin- fluence de l’irritation des intestins sur la circulation géné- rale d’une grenouille également décapitée et placée dans les conditions que j'ai décrites plus haut. Je rappellerai d’abord cette expérience de Goltz (1) qui lui a servi de point de départ pour affirmer et démontrer l'importance du tonus vasculaire pour la circulation sanguine et qu'il a appelée Klopfversuch. Si, chez une grenouille maintenue dans la position verticale on lie les nerfs vagues, on met le cœur à nu et qu'avec le manche d’un scalpel on donne sur le ventre un grand nombre de coups légers se suivant ra- pidement, on s'aperçoit bientôt que le cœur reçoit moins de sang, est pâle, affaissé, se contracte avec moins d’éner- gie; les veines-caves sont presque vides; dans la mem- brane interdigitale le courant sanguin a cessé et, si l'on ouvre les artères des membres, à peine y a-t-il écoulement de sang. Par contre les vaisseaux mésenthériques, intesti- naux , ete., les veines surtout, sont engorgés. Dans une communication ultérieure (2) Goltz déclare que l'interruption de la circulation consécutive à l'irrita- tion mécanique des intestins ne dépend pas uniquement de la dilatation locale de leurs vaisseaux, mais qu’il existe en même temps une paralysie réflexe générale du tonus dans le reste du système circulatoire. Il provoque encore cette paralysie réflexe par Pirritation électrique des nerfs mésentériques. (1) Loc. cit. (2) Centralblatt für die Med. Wissensch., 1864, n° 40. ( 455 Plus tard Ludwig et Cyon (1) ont observé, comme on sait, chez des mammifères la paralysie réflexe du tonus des vaisseaux, lorsqu'ils irritaient cette branche du nerf vague nommée par eux depressor cordis. Voici maintenant les résultats auxquels je suis arrivé. J'ouvre l'abdomen et j'extrais le paquet intestinal avec précaution, de manière à ne pas froisser les viscères; je place une anse sur les électrodes, en ayant soin de bien l'isoler pour éviter la propagation du courant aux organes voisins (peau, muscles, etc.). Par un courant de médiocre intensité on observe déjà une diminution extrêmement marquée dans le calibre des vaisseaux de la membrane interdigitale; que l’on gradue l’irritation et l'on pourra voir. l'effacement complet de la lumière du vaisseau et pour un temps très-court l’arrêt de toute circulation dans la région examinée. — Il arrive, lorsque l'expérience a été répétée plusieurs fois chez le même animal, qu'un courant faible finisse par rester sans effet; le phénomène reparaît alors Sous l'influence d’une irritation plus énergique. — Au sur- plus, j'ajouterai seulement que la contraction varie en in- tensité et en durée tout comme celle obtenue par la fara- disation d’un nerf cutané. Mais je devais me demander si l'emploi de l'électricité n'avait pas déterminé un engorgement des vaisseaux abdo- minaux et une anémie consécutive de la périphérie et si, par suite, les artères des extrémités n’éprouvalent pas tout simplement , au lieu d'une contraction, un retour passif sur elles-mêmes, leur contenu étant devenu beau- coup moins considérable. (1) Arbeiten aus d. Phys. Anstalt zu Leipzig. 1867, s. 198. ( 456 ) -Si cette supposition était exacte , anémie locale devait encore se montrer en dehors de l'influence des nerfs. Pour résoudre la question, je fis done la section du plexus ischiatique dans la cavité abdominale, en incisant la peau du dos, l’aponévrose et en divisant prudemment les muscles; les cordons nerveux étaient attirés au dehors à laide d’un petit crochet et coupés. Il n’y avait pas écou- lement d’une seule goutte de sang. — Le jour suivant je m'assurais que la circulation était bonne et régulière des deux côtés, puis je faisais passer un courant par une anse intestinale; je voyais alors la cireulation rester intacte dans le membre qui avait subi la division du sciatique ; de plus les artères ne variaient pas de calibre, quelle que fùt d’ail- leurs l'intensité de l'irritation. Si immédiatement j'examinais le côté sain, je trouvais les vaisseaux contractés, le cours du sang ralenti le plus souvent et parfois même complétement nul. En comparant les deux membranes interdigitales, J'Y voyais donc des effets tout opposés. Cette expérience double sur un même animal montre à l'évidence que la contraction active des artères des mem- bres est bien une conséquence de la galvanisation de lin- testin ` en effet, s’il s'agissait d’un afflux et d’une stagna- tion du sang dans les vaisseaux du ventre, on devrait trouver les mêmes effets des deux côtés, ce qui n’a pas lieu ; je suis donc autorisé à dire que l’irritation électrique de l'intestin produit chez la grenouille décapitée une con- traction des vaisseaux et une augmentation de la pression sanguine. — Elle prouve, en outre, que le nerf sciatique de la grenouille contient les filets vaso-moteurs et que sa section abolit toute contraction réflexe des artères du membre inférieur. ( 457 ) Comme on le voit, en irritant l'intestin par l'électricité, Goltz et moi sommes arrivés à des résultats opposés. Je dois me l'expliquer par les conditions différentes dans les quelles nous avons opéré. Goltz maintenait les grenouilles dans la position verticale, tandis que je les laissais reposer horizontalement. Mais en admettant que la circulation soit plus facile, que le sang continue à se distribuer normalement, lorsque l'animal est couché, en admettant qu’il revienne aisément au cœur des vaisseaux dilatés qui sont maintenant compa- rables à un système de canaux communicants, pour être ensuite de nouveau lancé à la périphérie, la circulation Persistera, il est vrai, presque normale par la seule action de l’organe central et sans le concours du tonus; mais la dilatation paralytique des vaisseaux ne sera pas pour cela transformée en contraction active. On pourrait encore penser qu'un courant électrique d'intensité modérée détermine une contraction réflexe des vaisseaux et un courant fort une paralysie réflexe. Cepen- dant je dois dire que j'ai fait varier l'énergie de l'irritation dans des limites étendues sans jamais obtenir autre chose qu'une contraction des artères de la membrane interdigitale. Ces deux conditions éliminées, il me reste à invoquer le fait, que Goltz a expérimenté sur des grenouilles ayant les Centres intacts, tandis que j'ai fait usage d'animaux déca- pités. On pourrait done $e demander si les cellules ner- veuses, qui président à la paralysie réflexe du tonus, noc- Cupent pas un point de l’axe-spinal situé plus haut que la deuxième vertèbre. Pour terminer je dois noter deux résultats contradic- toires que j'ai observés : chez deux grenouilles je remar- Quai des contractions réflexes des artères, du côté où le ( 458 ) plexus ischiatique avait été coupé. Comme je m'en assurai, aucune fibre cependant n'avait échappé aux ciseaux. Deux explications sont en présence : le bout périphérique du sciatique divisé s’anastomose avec le nerf coccygien ; il se peut que cette branche anastomotique renferme des filets vaso-moteurs dans certains cas seulement. Si l’on rejette cette hypothèse, il faut admettre que l'artère erurale avait déjà reçu des fibres propres du grand sympathique venues de plus haut, fibres qui se seraient distribuées aux parois du vaisseau et par réflexe auraient pu en produire la con- traction, malgré la section du tronc nerveux principal. Je n’aurai pas besoin de peser et de discuter longue- ment mes conclusions; elles se déduisent naturellement des faits qui précèdent et se formuleront en peu de mots: La moelle épinière de la grenouille possède un pouvoir réflexe vaso-moteur; cette fonction eet répartie dans toute son étendue, ainsi que j'ai pu wen assurer en pratiquant des sections transversales à différentes hauteurs. Chez la grenouille décapitée lirritation électrique de l'intestin produit la contraction réflexe des artères du membre inférieur et, comme conséquence, une augmenta- tion de la tension sanguine. Secondairement j'ajouterai que le plexus sciatique est la voie habituelle que suivent les fibres motrices pour se porter vers les parois artérielles, mais que cette vole semble ne pas être exclusive. Ces recherches ont été faites à l'institut physiologique de Strasbourg sur la proposition de M. le professeur Goltz : je lui offre ici mes plus vifs remerciments pour Ier: trême bienveillance avec laquelle il ma accueilli. ( 459 ) CLASSE DES LETTRES. Séance du 6 avril 1874. M. R. Craton, directeur. Sont présents: MM. Ch. Steur, J. Grandgagnage, J. Roulez, Gachard, P. De Decker, J.-J. Haus, M.-N.-J. Le- clereq, Ch. Faider, le baron Kervyn de Lettenhove, J.-J. Thonissen, Th. Juste, Félix Nève, Alph. Wauters, Em, de Laveleye, G. Nypels, Alph. Le Roy, Ém. de Borch- srave, membres; J. Nolet de Brauwere van Steeland, Aug. Scheler, associés ; E. Poullet, P. Willems, Ferdinand Loise, correspondants. CORRESPONDANCE. M. le Ministre de l’intérieur adresse différents ouvrages Pour la bibliothèque de l’Académie. — Remerciments. — L'Académie de législation et de jurisprudence de Madrid demande l'échange de ses publications avec celles de la Compagnie, Elle envoie, à cet effet, ses récents travaux. — Accordé. — La Société des sciences, des arts et des lettres de ( 460 ) Mons, l'Académie royale d'Amsterdam et l’Académie royale des sciences de Turin adressent leurs programmes de con- cours. — M. Chalon présente, à titre d'hommage de la part de l’auteur, un exemplaire de l'ouvrage intitulé : Essais sur l’histoire politique des derniers siècles, tome second, par M. Jules Van Praet, membre de la classe; 1 vol. in-8°. M. Chalon fait remarquer que ce nouveau volume de l’éminent historien se recommande suffisamment par lui- même pour ne pas devoir en faire l'éloge. M. Gachard fait hommage du tome 2° de la Collection des voyages des souverains des Pays-Bas, publiée par la Commission royale d'histoire dans le recueil de ses chro- niques; vol. in-4°. M. le baron Kervyn de Lettenhove présente, au nom de M. Auguste Scheler, le poëme intitulé : Les Enfances Ogier, par Adenés li Rois, publié par la Commission chargée d'éditer la collection des œuvres des grands écrivains du pays; vol. in-8°. M. De Decker offre, à titre d'hommage de la part de M. G. Rolin Jaequemyns, les années 1869 à 1873 (inclus), tomes (A V de la Revue de droit international et de légis- lation comparée, ainsi que le n° 4 de l’année 1874 du recueil portant pour titre : Archives de droit international, publié avec MM. T.-C.-M. Asser et J. Westlake; 5 vol. et 1 cah. in-8°. M. Rolin Jaequemyns ajoute à cet envoi un exemplaire de ses ouvrages suivants : Voordrachten over de grond- ( 461 ) wet (2 vol in-12). Des partis et de leur situation actuelle en Belgique et De la réforme électorale (2 broch. in-8°). M. Alphonse Wauters, en faisant hommage à la classe, au nom de M. Paillard, de Valenciennes, d’un volume por- tant pour litre ` Considérations sur les causes générales des troubles des Pays-Bas au XVI siècle, donne lecture de la note suivante au sujet de cet ouvrage : « Aucune partie de nos annales n’a été plus fouillée, étudiée, examinée sous toutes les faces, que cette époque, mémorable et désastreuse à la fois, qui embrasse la seconde moitié du seizième siècle. Les historiens de tous les pays ont exercé leur plume sur cette lutte gigantesque, dans laquelle nos provinces épuisèrent sans succès leurs res- Sources. Mais tout n’a pas été dit sur ce sujet et le rôle joué par plus d’une ville, plus d’une personnalité mar- quante, a besoin d’un examen approfondi. » On n'ignore pas combien la ville de Valenciennes se montra remuante et active dans toutes les phases de notre histoire jusqu’au moment où le sort des armes en fit une cité française. Son heureuse situation sur l’Escaut, au milieu Tune contrée plantureuse, et les grandes libertés qu'elle obtint dès le onzième siècle et les premières années du douzième, y développèrent une prospérité remarquable. Lorsque les agitations provoquées par les idées de réforme religieuse se produisirent, la population intelligente de Valenciennes, habituée à défendre ses franchises, ne put y rester indifférente; elle prit une part énergique à la lutte et en souffrit considérablement. » Le volume que j'ai l'honneur de mettre sous vos yeux constitue, ainsi que l’auteur le déclare, une introduction à ( 462 ) l'ouvrage qu’il se propose d'écrire sur l'histoire de Valen- ciennes pendant les troubles. Rédigé après de longues recherches dans les bibliothèques et les dépôts d'archives, ce travail me paraît destiné à obtenir un grand succès. M. Paillard a voulu se rendre compte des causes des trou- bles. Il me semble les avoir parfaitement résumées dans un passage (p. 11) que je vous demanderai la permission e reproduire : « Les causes des troubles des Pays-Bas, d'où sortit la république des Provinces-Unies, sont politiques, finan- cières et religieuses. » Au premier ordre d'idées se rattachent le profond mécontentement occasionné par le séjour prolongé des soldats espagnols après le départ du roi, et les dissenti- ments qui, par la faute de Philippe II, s'élevèrent entre les grands seigneurs du pays et les membres du conseil secret de la gouvernante (la consulte) : Granvelle, Viglius et Berlaymont. » Du second relève l'incroyable espagnoles, surtout dans leurs rapports avec les dix-sept provinces. » Enfin, au troisième appartiennent l’horreur de l'in- » quisition et la fondation des nouveaux évêchés. » « Il faut lire, plus loin, les pages où M. Paillard signale, en la flétrissant avec énergie, l’insouciance, pour ne pas dire le mépris, avec lequel Philippe H traitait les engage- ments pécuniaires pris en son nom. Avant de ruiner nos provinces et de décimer nos populations, il avait ruiné son crédit. Dans les Papiers d’État de Granvelle se trouve l'abrégé d’un budget espagnol pour les années 1560 et 1561; le déficit est de neuf millions de ducats « et l’on n’a » aucune ressource pour l'équilibrer. » v v "ek JON. e ge E, AER t dag finances ( 465 ) » Le livre de M. Paillard est rempli de faits et de réflexions; espérons que bientôt nous en verrons paraître la continuation. ». M. Wauters offre ensuite, en son nom personnel, un exemplaire de la livraison de La Belgique ancienne et mo- derne contenant la description de la ville de Tirlemont, et un exemplaire de lIntroduction au tome IV de la Table chronologique des chartes et diplômes relatifs à la Belgique. « En offrant à mes collègues deux volumes que je viens de publier, dit M. Wauters, qu'ils me permettent de leur présenter quelques considérations sur des faits qui y sont signalés. » En écrivant, pour la continuation de la Belgique an- cienne et moderne, l'histoire de Tirlemont, mon attention a été appelée sur le grand nombre de tumuli qui existaient autrefois à proximité de cette ville. En fouillant les archives de la localité et des villages voisins, j'ai rencontré la men- tion de vingt-six groupes de tombelles qui se voyaient anciennement dans un rayon d'une ou de deux lieues au- Jour de Tirlemont et parmi lesquels il y en avait qui étaient composés de trois ou de sept tumuli. Cette circonstance et ce fait que Tirlemont est le point de jonction de plusieurs anciens chemins qui sont évidemment d’origine romaine, m'ont amené à conclure à l'existence de la localité dès les Premiers siècles de notre ère, non peut-être comme oppi- dum,comme ville , Mais comme bourgade ayant une certaine importance. > Ce qui ne manque pas de quelque intérêt, pour l'his- toire de notre commerce, c’est l'exposé des travaux entre- Pris, au seizième siècle, pour canaliser la Gette jusqu’à ( 464 ) Tirlemont et des contestations qui s’élevèrent a ce propos entre cette ville et Léau. Aujourd'hui naviguer sur l'une des deux Gettes paraîtrait impossible. Sous le règne de Charles-Quint, cela s’accomplissait sans difficulté. Nous savons, par un document contemporain, que Léau voyait arriver tous les ans, en moyenne, de 340 à 420 bateaux, chiffre qui diminua de manière à n'être plus que de 176 à 184, après que la Grande-Gette fut devenue navigable depuis Budingen, où elle reçoit la Petite-Gette, jusqu'à Tirlemont. Aujourd'hui cette dernière ville ne songe plus à s'ouvrir des communications par eau, et Léau, jadis florissante et peuplée, n’est plus qu’un village de 1,800 habitants environ. » Dans un autre ordre d'idées, en rédigeant l’ Introduction au quatrième volume de la Table chronologique des chartes el diplômes imprimés, je me suis efforcé de prouver une fois de plus combien il importe de contrôler le récit des événements, en invoquant surtout le témoignage des écri- vains contemporains et des documents officiels et en mac- cueillant qu'avec défiance les assertions des auteurs moins anciens; Ceux-ci ne peuvent être admis à contre-balancer les dires de leurs devanciers que lorsqu'ils font preuve de sagacilé et de critique. Trop souvent, en acceptant sans dé- fiance les bruits populaires, les rancunes de parti ou de race, ils ajoutent de nouvelles erreurs à celles qui avaient déjà cours et donnent à un fait important une couleur tout à fait fausse. » C’est à propos de l'épisode de Bouchard d’Avesnes el de la rivalité des d’Avesnes et des Dampierre que je me suis livré à ce travail. Tout est doute, incertitude, confusion, si l'on accepte les données admises par Jacques de Guyse et d'Oudegherst. Des erreurs matérielles se constatent sans ( 465 ) nombre et ruinent leurs récits. Si, au contraire, on s'at- tache à compléter ce que dit Philippe Mouskés, qui vivait à ‘époque même de Bouchard, si on consulte les enquêtes ouvertes à l’occasion du premier mariage de Marguerite, si l’on étudie ensuite les autres documents du temps, le jour se fait insensiblement, les dates se corrigent, les consé- quences apparaissent précises et naturelles; l’histoire enfin acquiert, dans ses détails essentiels et caractéristiques, une exactitude que je pourrais appeler mathématique et qui wòôte rien au pittoresque du récit. » Je ne m'étendrai pas davantage sur mon travail, ne voulant pas abuser de l'attention que vous m'avez prêtée. » M. P. Willems offre un exemplaire de la 3° édition de son ouvrage intitulé : Le droit public romain depuis Vori- gine de Rome jusqu'à Constantin le Grand; vol. in-8°. M. E. de Borchgrave fait hommage, au nom des auteurs MM. Feys et Van de Casteele , des deux premières livrai- sons de l'Histoire d’Oudenbourg. W lit la note suivante à ce sujet : « La commune d'Oudenbourg était surtout connue jus- qu'à présent par l'importance que lui attribuaient certains annalistes en la représentant comme ayant été au V° siècle une Cité considérable détruite par Attila. Grâce à un car- tulaire assez complet et à de nombreux docaments, parmi esquels une collection considérable de comptes commu- naux, MM. Feys et Van de Casteele ont pu prouver qu'Ou- enbourg mérite une autre réputation que celle que lui avait value la légende. A l’aide des sources que nous venons d'énumérer, les deux auteurs ont écrit une histoire pleine 2e SÉRIE, TOME LA. 51 ( 466 ) d'intérêt et qui renferme des vues nouvelles sur plusieurs points obscurs; ils ont établi notamment l’étymologie du nom de la localité, la position et l'importance des premiers seigneurs d'Oudenbourg, puis des châtelains ou vicomtes, le rôle joué par les chambellans de Flandre, le dénombre- ment complet de la châtellenie et les principaux fiefs , etc. » Soixante-cinq chartes, presque toutes inédites, servent de pièces justificatives à ce travail dont le commencement donne une bonne idée de ce qu'il sera dans son ensemble et qui, à ce titre, paraît digne d’être signalé aux amis de notre histoire nationale. » M. François Lenormant, associé, offre un exemplaire de son ouvrage intitulé : La magie chez les Chaldéens et les origines accadiennes; vol. in-8°. Les remerciments de la classe sont exprimés aux auteurs de ces différents dons. CONCOURS DE 1874. Conformément à l’article 20 du règlement intérieur de la classe, il est procédé à la lecture des rapports sur les mémoires de concours dont l'examen est entièrement ter- miné, MM. Thonissen, de Laveleye et De Decker font con- naître leur appréciation sur les sept mémoires concernant la question des rapports du capital et du travail. MM. Nypels, Thonissen et Faider lisent également leurs eng iai ( 467 ) rapports sur le mémoire en réponse à la question posée pour le 2° concours historique de Stassart et relative à l'exposé des principes constitutionnels commüns à nos diverses pro- vinces à l’époque de l'invasion francaise en 1794. Les conclusions de ces rapports seront mises en discus- sion lors de la prochaine séance. KH COMMUNICATIONS ET LECTURES. —— M. Gachard donne lecture de la première partie d’une notice intitulée : Le cardinal Bentivoglio; sa nonciature à Bruxelles. Ce travail figurera en entier dans un prochain Bulletin. Quelques remarques à propos de la communication de M. J. Nolet de Brauwere van Steeland sur le parti- Cularisme linguistique de la Flandre occidentale; par M. P. Willems, correspondant de l'Académie. Dans la séance du mois de février notre honoré con- frère M. Nolet de Brauwere van Steeland a donné lecture d’une intéressante Notice sur le particularisme linguistique flamand de la Flandre occidentale, Au début de sa notice, il a exprimé la conviction qu’il ne serait point désavoué par ses confrères flamands de la classe des lettres. Je n'ai pas ( 468 ) eu l'honneur d'assister à la séance du mois de février; et lors de la séance du mois de mars le Bulletin du mois de février n’était pas encore publié. Il ma donc été impos- sible de faire plutôt mes réserves au sujet de certaines opi- nions émises dans le travail de M. Nolet. M. Nolet y a raillé avec sa verve habituelle, parfois un peu excessive, les prétentions particularistes de l'école west-flamande. C’est son droit, et je pense qu’à cet égard il a obtenu Tas: sentiment de tous ses confrères flamands. Mais, dans cette même lecture, il a traité fort dédaigneusement, pour ne pas dire plus, une publication d’un des littérateurs west- flamands, qui, à mon avis, est d’une importance et d'un mérite tout à fait supérieurs. Je veux parler de lIdioticon west-flamand de M. l'abbé De Bo. « Que M. De Bo, disait M. Nolet, ait entassé péle-mêle dans son immense caphar- naüm linguistique tout ce que deçà, delà et d'autre part encore lui fut amené à pleines charretées, on serait tenté de le croire; la politesse me défend de l'affirmer. » Le lexique de M. De Bo est volumineux, je le veux bien; mais aussi offre-t-il la physionomie complète du dialecte west-flamand ; la prononciation des mots, les lois de la phonétique, les particularités de la grammaire et de la syntaxe, les sens attachés à chaque mot. Et loin d’être en- tassés pêle-mêle, tous les matériaux ont été examinés minutieusement, coordonnés avec soin, illustrés par des annotations, qui démontrent de la part de l'auteur de longues recherches, un vaste savoir, la connaissance d l'application des lois rigoureuses que l'on suit actuellement s les travaux de linguistique. Aussi les juges les plus autorisés ont-ils fait de la publication de M. De Bo l'éloge le plus flatteur. M. De Vries, professeur à l’Université de Leyde, le savant collaborateur du grand dictionnaire néer- ( 469 ) landais et associé de la classe des lettres, écrivait à l’au- teur : e Votre Idioticon est d’une très-grande importance pour la connaissance de la langue néerlandaise moderne, et pour celle du néerlandais du moyen àge il est absolu- ment indispensable. » M. Van Helten, dans une étude savante sur la racine germanique lu (Rotterdam, 1873), cite l’Idioticon de M. De Bo comme un travail remar- quable, qui est de la plus haute importance pour l'étude non-seulement du néerlandais et du bas-allemand, mais des langues germaniques en général. Je crois, Messieurs, qu'il était de mon devoir de Geen au sujet de la lecture de M. Nolet les réserves que j'ai expri- mées, d’abord pour ma décharge personnelle, et ensuite pour honorer la mémoire d’un confrère, trop tôt enlevé à la classe des lettres, qui, si je suis bien renseigné , avait proposé M. l'abbé De Bo, précisément pour cette publica- tion, comme candidat à une place de correspondant de la classe des lettres. — La classe s’est occupée ensuite de la liste des candi- dats aux places vacantes, ainsi que des préparatifs des séances du mois de mai. (470 ) CLASSE DES BEAUX-ARTS. Séance du 9 avril 1874. M. N. De Keyser, directeur, président de l'Académie. Sont présents : MM. L. Alvin, G. Geefs, L. Gallait, Jos. Geefs, Ferd. De Braekeleer, C.-A. Fraikin, Éd. Fétis, Edm. De Busscher, Alph. Balat, Aug. Payen, le chevalier L. de Burbure, J. Franck, G. De Man, Ad. Siret, J. Leclercq, Ernest Slingeneyer, Alex. Robert, A. Gevaert, le baron Limnander, Ad. Samuel, membres; Éd. De Biefve, corres- pondant. M. Éd. Mailly, correspondant de la classe des sciences , assiste à la séance. ; CORRESPONDANCE. La classe apprend avec regret la mort de lun de ses plus éminents associés de la section de peinture, M. Guil- laume de Kaulbach, directeur de l'Académie royale des beaux-arts de Munich. M. de Kaulbach est décédé dans cette ville le 7 avril 1874, à l’âge de 69 ans. nil lose talons (471) ÉLECTION. Il est procédé à l'élection d’un associé dans la section d'architecture, en remplacement de M. Louis Forster. M. Ferstl, architecte à Vienne , est élu. COMMUNICATIONS ET LECTURES. L'ordre du jour de la réunion appelle la classe à s'oc- Cuper de la motion de M. Gallait relative aux tableaux de Rubens qui se trouvent dans la cathédrale d'Anvers. Différents membres prennent part à la discussion qui s'ouvre sur ce sujet. M. Gallait déclare qu'il n’a pas été dans son intention de soulever la question de propriété des tableaux de Rubens. L'Académie n’a pas à s'occuper de cette question, qui n’est pas de sa compétence ; mais les mesures à prendre Pour assurer la conservation des œuvres du maître et pour faire en sorte qu'elles ne soient pas soustraites à l’admira- tion des amateurs et aux études des artistes sont des Points sur lesquels elle a le droit de fixer son attention, Sans sortir de la sphère de ses attributions. M. Gallait insiste sur la nécessité de pareils yes M. De Burbure vations thermorné- triques qui ont été faites dernièrement dans la cathédrale d'Anvers et qui ont fait constater que la température n’y a ( 472 ) varié que d’une manière insignifiante pendant une période de quinze jours. M. De Keyser rappelle que lors d’une récente visite faite par la Commission royale des monuments pour s'assurer de l’état actuel des tableaux de Rubens, il a été reconnu qu’ils n'ont subi aucun dommage depuis la restauration qui en a été faite il y a vingt ans. M. De Braekeleer présente des observations dans le même sens. M. Éd. Fétis fait remarquer que l'intervention de l’Aca- démie dans la question dont on s'occupe se réduit, en définitive, à exprimer le vœu qu'il soit veillé avec solli- citude à la conservation des tableaux de Rubens et que ces chefs-d'œuvre restent en tout temps accessibles au public. C'est tout ce qu'a voulu M. Gallait, qui n’a nullement demandé la nomination d’une commission , laquelle wau- rait pas de mission déterminée à remplir. M. Alvin est aussi d'avis que la démarche de M. Gallait à laquelle il s’est associé, ainsi que M. Fétis, n’a pas la portée qu'on lui a attribuée par erreur. Il ne s’agit pas pour l'Académie d'émettre une opinion sur la question de la propriété des tableaux de Rubens , mais d'exprimer seu- lement le désir que rien ne soit négligé pour en garantir la conservation et le libre accès. Il pense donc que le but de M. Gallait est atteint par la publicité donnée à sa motion et que sans prolonger un débat désormais inutile, lACa- démie peut passer aux autres objets portés à son ordre du jour. Il est décidé que la question étant épuisée, il n’y a pas lieu de nommer une commission. (475) OUVRAGES PRÉSENTÉS. Commission royale d'histoire. — Collection de chroniques belges inédites : collection des voyages des souverains des Pays-Bas, publiée par M. Gachard, t. II. Bruxelles, 1874; vol. in-4°. Commission pour la publication d’une collection des œuvres des grands écrivains du pays. — Les Enfances Ogier par Adenés Li Rois, publié et annoté par M. Aug. Scheler. Bruxelles, 1874; vol. in-8°. Commission royale pour la publication des anciennes lois el ordonnances du pays. — Recueil des anciennes coutumes de la Belgique : Pays et Comté de Hainaut, par M. Ch. Faider, tome second. Bruxelles, 1874; vol. in-4°. Gloesener (M.). — Études sur l’électro-dynamique et l’élec- tro-magnétisme. 2° édit. Bruxelles, 1875; vol. in-8°. Montigny (Ch.). — Sur la fréquence des variations des cou- leurs des étoiles dans la scintillation. Bruxelles, 4874 ; in-8°. Morren (Édouard). — L'énergie de la végétation ou appli- cation de la théorie mécanique de la chaleur à la physiologie des plantes. Bruxelles, 1873; broch. in-8°; — Liste des jar- dins botaniques du monde. Liége, mars 1874; broch. in-8°. Van Praet (Jules). — Essais sur Fhistoire politique des derniers siècles. Bruxelles, 1874; vol. in-8°. Wauters (Alphonse). — Géographie et histoire des com- munes belges. jr liv. : ville de Tirlemont. Bruxelles , 1874; cah. in-8°; — Table chronologique des chartes et diplômes imprimés concernant l'histoire de la Belgique. Introduction au tome IV. Bruxelles , 1874; in-4°. Willems (P.). — Le droit publie romain depuis l’origine-de ( 474 ) Rome jusqu’à Constantin le Grand. 3° édit. Louvain, ët vol. in-8°. De Potter (Frans). — Geschiedenis der stad Kortrijk, 15 deel, met platen. Gand, 1873; vol. in-8°. Baguet(F.-N.-J.-G.).— De l'enseignement moyen. Bruxelles. 1874; vol. in-8°. (Envoi du Ministère de l'intérieur.) Bonnewyn (Henri). — Mémoire sur l’histoire et la maladie du Solanum Tuberosum; — Sur la présence du chlorure de potassium dans le chlorate de potasse du commerce, 1" et 2° réponse; — Sur la conservation des poudres pharmaceu- tiques; — Recherches de la picrotoxine dans la bière; — Fal- sification de la bière par la picrotoxine ; — Réactions chimiques de la picrotoxine dans la bière; — Quelques observations sur la notice biographique de Francois-Gaspard Leroy, pharmacien. Bruxelles; 8 broch. in-8°. Feys (E.) et Van de Casteele (D.). — Histoire d'Oudenbourg, t. I et H, 47% liv. Bruges, 1875; 2 fase. in-4°. Paillard (Charles). — Considérations sur les causes géné- rales des troubles des Pays-Bas au XVI: siècle. Bruxelles, 1874; in-8°. f Ministère de la Justice. — Administration de la justice eri- minelle et civile de la Belgique pendant les années 1861 à 1867. Résumé de statistique, 2 part. Bruxelles, 1874; cah. in-4°. Ministère des Affaires Étrangères. — Recueil des rapports des secrétaires de légation de Belgique, t. II, 6° liv., mars 1874. Bruxelles; in-8°. Commissions royales d'art et d'archéologie. — Bulletin, 15° année, 4874, n°° 4 et 2. Bruxelles; cah. in-8°. Exposition universelle de Vienne, 1875.— Documents et rap- ports des jurys et délégués belges (6°, 7°,8°, 12° et 16° groupes); — istribution solennelle des récompenses aux exposants el à leurs eoopérateurs. Bruxelles, 1874; 6 broch. in-8°. (Envoi du Ministère de l’intérieur.) Analectes pour servir à l'histoire ecclésiastique de la Bel- ( 475 ) gique, tomes VIII, IX et X, années 1871, 1872 et 1875. Bruxelles et Louvain; 10 cah. in-8°, (Envoi du Ministère de l'intérieur.) Le Bibliophile belge, tome IX, 9° année, 1874, liv. 1, 2 et 5. Bruxelles; in-8°. Annales de Vélectricité médicale et écho médical réunis, nouvelle série, 15° année, avril 1874. Bruxelles ; fase. in-8°. Académie d'archéologie de Belgique. — Bulletin, 9° fascie. ; — Annales, 2° sér., tome X, 4" livr. Anvers, 1875-1874; 2 cah. in-8°. Institut archéologique liégeois. — Bulletin, t. XI, 5° et dernière liv. Liége, 1873; vol. in-8. Société royale de numismatique, à Bruxelles. — Revue de la numismatique belge, 5° sér., t. VI, 2 liv. Bruxelles, 1874; cah. in-8° Société d'Émulation de Louvain. — Rapport sur les travaux de l’année 1872-1875. Louvain, 1874; cah. in-8°. Société paléontologique et archéologique de l’arrondissement judiciaire de Charleroi. — Documents et rapports, tome. V, 1872. Bruxelles, 1872; vol. in-8°. (Envoi du Ministère de l’inté- rieur.) Nederduitsch letterkundig jaarboekje voor 1874, 44° jaar- gang. Gand; in-12. (Envoi du Ministère de l'intérieur.) Van der Willigen (V.-S.-M.). — Mémoires de physique, V. Harlem, 1874; cah. gr. in-8°. Musée Teyler, à Harlem. — Archives, vol. I, fase. HI. Harlem, 4875; cah. gr. in-8°. Société hollanilaise des sciences, à Harlem. — Archives néer- landaises, t. VIII , Ze et 4° liv. La Haye, 1873; 2 cah. in-8°; — Bibliotheca ichthyologia et piscatoria. Harlem, 1873; vol. in-8°. K. Instituut voor de Taal-, Land- en Volkenkunde van Nederlandsch Indië. — Bijdragen, 3° volgreeks, VIII: deel, * en 4° stuk, La Haye, 1874; cah. in-8°. Nederlandsche entomologische Vereeniging. — Tijdschrift ( 476 ) voor entomologie, 46° jahrg., He serie, VIII: deel; plaat en 1-8, VIJ? deel. La Haye, 1875 ; 6 cah. in-8°. Université de Leyde. — Anales academici, 1868-1869, 1869-1870. Leyde, 1875-1874 ; 2 vol. in-#°. Maatschappij der Nederlandsche letterkunde, te Leiden. — Handelingen en mededeelingen , 1872 en 1875; — Levens- berichten, 1872 en 1875. Leyde, 1872-1875; 4 vol. in-8°. Provincial Genootschap van kunsten en wetenschappen in Noordbrabant. — Handelingen over 1872; — Versameling van oorkonden betrekkelijk het beleg van s'Hertogenbosch in den jare 1629. Bois-le-Duc, 1871-1872; 2 cah. in-8°. Zeeuwsch Genootschap der wetenschappen te Middelburg. — Archief, IHe deel, 4° stuk. Middelbourg, 1875; in-8°. Stoppelaar (J.-H.).— Het papier in de Nederlanden , gedu- rende de middeleeuwen; — Nehalennia Altaar; — De verte- genwoordigers der midden-Nederlandsche dichtkunst te Mid- delburg (1565-1415). Middelbourg; 5 broch. in-8°. K. Natuurkundige vereeniging in Nederlandsch Indië, Batavia. — Natuurkundig tijdschrift voor Nederlansch Indië, deel XXXII, aflevering 4-6. Batavia et La Haye, 1875; cah. in-8°. Lenormant (François). — Choix de textes cunéiformes, 2° fasc. Paris , 1874; in-4°. Perrey (Alexis). — Bibliographie séismique, 2° et 3° par ties. Dijon ; 2 cah. in-8°. Ricour (Auguste). — Application de la géométrie élémen- taire à l’arithmétique. Douai, 1873; in-8. Robert (Eugène). — Excellence de la création tirée de la forme extérieure des corps. (Extrait des Mondes, tome XIV, 1867 Société d'anthropologie de Paris. — Bulletins, t- H UF série), 4° fase. Paris, 1874; cah. in-8°. : Société philomatique de Paris. — Bulletin, t. X, mr!" juin 4875. Paris, 1873; cah. in-8°. CNT ) Société l’agriculture, sciences et arts de l'arrondissement de Valenciennes. — Revue agricole et trimestrielle, 26° année, 1874, t. XXVII, n° 1 et 2. Valenciennes; cah. in-8°. Société savoisienne d'histoire et d'archéologie, à Chambéry. — Mémoires et documents, t. XIV, 1873. Chambéry, 1875; vol. in-8°. K.preussische Akademie der Wissenschaften zu Berlin. — Monatsbericht, Februar 1874. Berlin, 4874; cah. in-8°. K. B. Akademie der Wissenschaften zu München. — Sit- zungsberichte: math.-physik. Classe, H. Heft, 1875; philosoph. philolog. und hist. Classe, IV. und V. Hefte, 1875. Munich, 1873; 3 cah. in-8°. Kaiserliche Akademie der Wissenschaften in Wien. — Sitzungsberichte : philos.-hist. Classe, 1873, 74. Band, Heft 1, 2, 3; math.-naturw. Classe, 1873, I. Abtheil., nr. 6 u. 7; IT. Abtheil., nr. 4 u. 5, 6 u. 7; IE. Abtheil., nr. 1-5; — Archiv für österreichische Geschichte, 50. Bd., 2. Heft; 51. Bd., I. Heft; — Denkschriften , philos.-histor. Classe, 52. Bd., 1873. Vienne, 1873; 9 cah. in-8° et 4 vol. in-4°. Naturwissenschaftlicher Verein in Carlsruhe. — Verhand- lungen , VI. Heft, 1872. Carlsruhe , 1873; cah. in-8°. Naturforschende Gesellschaft in Danzig. — Schriften, 5. Bd., 2. Heft, 1875. Dantzig; in-8°. Zoologische Gesellschaft zu Frankfurt a. M. — Der Zoolo- gische Garten, XIV. Jahrg. (Juli-December 1875). Francfort- S/M; 6 cah. in-8°. Berliner Gesellschaft für Anthropologie, Ethnologie und Uergeschichte. — Sitzung, Juni, Juli und October 1875. Berlin; 3 eah. petit in-4°. Deutsche chemische Gesellschaft zu Berlin. — Berichte, VIL Jahrg., nr. 3. Berlin, 1874; cah. in-8°. Instituto y observatorio de marina de San-Fernando. — Anales, seccion 2°, observaciones meteorológicas, año 1872. San-Fernando, 4875; cah. gr. in-4°. ( 478 ) Carrara. — Progresso e regresso del giure penaole nel regno d'Italia, opuscoli, vol. IV et V. Lucques, 1874; 2 vol. in-8°. Menabrea (L.-F.) et Boncompagni (A.-D.-B.) — Un ultima lettera sulle peripezie della serie di Lagrange in riposta al prof. Angelo Genocchi. Rome, 1874; cah. in-4°. Società dei naturalisti in Modena. — Annuario, serie IF : anno VIP, anno VII (fascicolo I°). Modène, 1873-1874; vol. ct cab. in-8°. Reale Accademia delle scienze di Torino. — Memorie, serie seconda , tomo XXVII. Turin , 4875; vol. in-4°. Regio osservatorio dell Universita di Torino. — Bollettino meteorologico ed astronomico, anno VII, 1875. Turin, 1875; vol, in-4° obl. Royal Society of London. — Proceedings, vol. XXI, n° 146 and 447; vol. XXII, n° 448 to 450. Londres, 1873-1874; 5 cah. in-8°; — Philosophical Transactions, pts. I and IF, 4873. Londres, 4874; 2 vol. in-4°; — The Royal Society, 50 th november 1873. Londres, cah. in-4°; — Klein’s anatomy of the lymphatic. system, I. Londres, 1875; vol. in-8°. Geological Society of London. — Quarterly Journal, vol. XXX, part I, n° 447. Londres; cah. in-8°. Eniéholsgico! Society of London. — Transactions, parts 1 to V, 1875; part 1, 1874. Londres; 6 cah. in-8°. Zoological Society of London. — Proceedings of the seien- tific meetings, pts. I and II, 1875. Londres; 2 vol. in-8°; — Transactions, vol. VIH, pt. 6. Londres, 1875; in-4°. Society of antiquaries of London. — Archaeologia : vol. XLII , 2; vol. XLIV, 4. Londres, 4873; 2 vol. in-4°. Numismatic Society of London. — Journal, new series, n° LH, 1875, part IV. Londres; cah. in-4°. Asiatic Society of Bengal, at Calcutta. — Journal, 1873; part 1, n° 5; — Proceedings, n° 9 and 10, 4875. Calcutta, 1875; 5 cah. in-8°; — Bibliotheca Indien: new series, n° 208, 287, 289, 290, 291, 295, 299. Calcutta, 1875-1874; 7 cah. in-8°. ( 479 ) Geological Survey of Canada at Montreal. — Exploration géologique du Canada. Rapport des opérations de 1870-1871. Ottawa , 1875; vol. in-8°. s Essex Institute at Salem: — Bulletin, vol. IV, 1872. Salem, 4875; vol. in-8°. Universidad de Chile, Santiago. — Anales ` P seccion, Memorias cientificas i literarias. Santiago, 1871-1872 ; 2 vol. in-8°; 2 seccion. Boletin de Instruccion publica. Santiago, 1871-1872; 2 vol. in-8°; — Elementos de la filosofia del spi- - ritu humano por don Ventura Marin. Santiago, 1872; vol. in-8°; — Colonizacion de Llanquihue, Valdivia i Arauco, etc., por don José Antonio Varas. Santiago, 1872; vol. in-8°; — Resena de los trabajos de la Universidad desde 1855 hasta el año 1872, por su Rector sefior don Ignacio Domeyko. Santiago, 1872, cah. in-8°; — Los precursores de la independencia de Chile, por Miguel Luis Amunätégui, tomo I, H, HI. Santiago, 1870-1872; 5 vol. in-8°; — Annuario estadistica, tomo XII. Santiago, 4872; vol. in-4°; — Cuenta jeneral de los entrados i gastros fiscales de la República de Chile en 1871. Santiago, 1872; vol. in-4°;, — Lei de presupuestos de los gastros gene- rales de Ja administracion publica, año 1875. Santiago; vol. in-4°; — Compilacion de leyes i decretos vijentes en materia de instruccion publica, por M. E. Ballesteros. Santiago, 1872; Vol. in-8°; — Ordenenza de Aduanas de la Republica de Chile. Valparaiso, 1875 ; cah. in-8°; — Sesiones ordinarias i estraor- dinarias de la Cámara de Diputados, en 1872, num. 4 i 2; Sesiones ordinarias de la Cámara de Senatores, en 1872, num. À Santiago; 5 vol. in-8°; — Estadistica comercial de la Repu- blica de Chile, año de 1871. Valparaiso, 1872; vol. in-4°; — Memorias de 4872 : del interior i apéndice; de relaciones exteriores i apendice; de justica, culto e instruccion publica; de colonizacion. Santiago, 1872 ; 3 vol. et 3 cah. in-8°. Ordnance Survey Office, Southampton. — Results of the comparisons of the Standards of length. Southampton , 4875; cah. in-4°, ( 480 ) Smithsonian Institution, at Washington. — Miscellaneous collections, vol. X. Washington, 1873; vol. in-8°. U. S. Naval Observatory, Washington. — Meridian Circle : . Observations for 1871, Appendix I. Washington, 1875; vol. in-4°, U. S. Geological Survey of the Territories, Washington. — Acrididae of North America, by Cyrus Thomas. Washington, 4875; vol. in-4°; — Contributions to the extinet vertebrate fauna of the western territories, by Joseph Leidy. Washing- ton, 1875; vol. in-4°; — First, second, third and sixth annual Reports for the years 1867, 1868 and 1869. Washington, 18755. 2 vol. in-8° ; — Miscellaneous publications, n° 4 and 2. Washing- ton, 1875; 2 cah. in-8°. War Department, Office of the chief signal Officer, at Washington. — Annual Report, 1872. Washington, 1875; vol. in-8°. The american Journal of science and arts. — N" 57, 58 and 39, vol. IL. New-Haven, 1874; 5 cah. in-8°. The Penn Monthly. — Vol. V, nz 51 and 52, march and april 1874. Philadephie; 2 cah. in-8°. BULLETIN DE L'ACADÉMIE ROYALE DES SCIENCES, DES LETTRES ET DES BEAUX-ARTS DE BELGIQUE. 1874. — N°5. | CLASSE DES SCIENCES. Séance du 5 mai 1874. M. E. Cannëze, directeur. Sont présents : MM. J.-S. Stas, L. de Koninck, P.-J. Van Beneden, Edm. de Selys Longchamps, H. Nyst, Gluge, Melsens, J. Liagre, F. Duprez, G. Dewalque, H. Maus, M. ear. F. Donny, Ch. Montigny, M. Steichen, A. Brialmont, Éd. Dupont, Éd. Morren, Éd. Van Bene- den, C. Malie, membres; E. Catalan, Aug. Bellynck, associés; L. Henry, Éd. Mailly F. Plateau, F. Crépin, F-L. Cornet. correspondants. M. F. Stappaerts , correspondant de la classe des beaux- arts, assiste à la séance. Ze: SÉRIE, TOME XXXVII. 52 ( 482 ) CORRESPONDANCE. es La classe 3 perdu, le 28 mars de cette année, l’un de ses associés de la section des sciences mathématiques et physiques, M. P.-A. Hansen, directeur de l'Observatoire de Seeberg , près de Gotha. M. Hansen était né à Fondern (Schleswig), le 8 décembre 1795. Il était associé de la Compagnie depuis le 15 décembre 1864. —M. le Ministre de l’intérieur envoie différents ou: vrages pour la bibliothèque de l’Académie. Des remerci- ments sont votés à ce haut fonctionnaire, et l'inscription de ces ouvrages aura lieu au Bulletin de la séance. — L'Université de Kharkow adresse une lettre de con- doléance au sujet de la mort de M. Ad. Quetelet, que cet établissement s’honorait de compter depuis 1860 parmi ses membres honoraires. — M. le professeur M.-S. de Rossi, de Rome, annonce qu'il vient de fonder un recueil mensuel, intitulé : Bol- lettino del Vulcanismo italiano. Il transmet, en même temps, les trois premiers numéros qui ont paru de cette publication, et demande l'échange avec le Bulletin de l'Aca- ie. — Accordé. — M. le D" F. Putzeys retire le travail portant pour titre : Sur la question de l'abiogenèse, qu'il avait soumis à l’Académie. ( 485 ) | — M. Bernardin transmet le résultat de ses observa- tions des phénomènes périodiques du règne végétal, faites à Melle le 21 avril dernier. — M. Cavalier envoie son résumé météorologique pour Ostende pendant le mois de mars de cette année. — La Société des naturalistes de Dresde et la Smith- sonian Institution de Washington remercient pour le der- nier envoi annuel de publications académiques. — La classe prend acte de la présentation du tome XXXVII des Mémoires couronnés et Mémoires des savants étrangers publiés par l'Académie (in-4°), volume dont l'impression vient d’être terminée. — M. F. Crépin, correspondant, fait hommage de la 5° édition de son Manuel de la Flore de Belgique (un gros volume in-12). Il ajoute à ce don un exemplaire du Compte rendu de la session extraordinaire de la Société royale de botanique de Belgique et de la Société botanique de France, qu'il a publié en collaboration avec MM. Ch. Baguet et Ch. Gilbert (une brochure in-8° M. J.-M. De Tilly, correspondant, offre une notice de sa Composition, intitulée : Sur des traités récents de balis- tique et sur l’état actuel de cette science. In-8°. La classe vote des remerciments aux auteurs de ces dons. ke mg — L'ancienne Société des sciences naturelles de Stras- bourg fait connaître qu’elle a transféré son siége social à Nancy et qu'elle porte actuellement le titre de Société des sciences. Elle annonce la reprise de ses travaux. (484) — La classe renvoie à l'examen de MM. Liagre et De Tilly le mémoire manuscrit suivant ` Remarques sur la théorie des courbes et des surfaces, par M. E. Catalan, associé. — Conformément à la demande exprimée par la classe des lettres, la classe des sciences renvoie à l'examen de MM. Kaes. Montigny et Mailly un mémoire de M. Con- stantin Rodenbach , portant pour titre : Métrologie. Léi: lon-prototype universel des mesures de longueur. — Une note de M. De Tilly, correspondant, Sur la similitude mécanique en général, et sur le mouvement d’un corps solide de révolution , est renvoyée à l'examen de MM. Liagre et Catalan. — La classe autorise M. C. Malaise à retirer des archives un billet cacheté déposé par cet académicien le 3 juin 1871. L'ouverture de ce billet aura lieu lors de la prochaine réunion. ÉLECTION. D'après l’article 20 des Statuts organiques, la classe procède à l'élection de son délégué auprès de la commission administrative pendant l’année 1874-1875. M. J.-S. Stas, membre sortant et trésorier de la Compagnie, est réélu. Ee RE E | e (485) : RAPPORTS. Recherches sur les phénomènes de la digestion chez les insectes, par M. Félix Plateau, correspondant de l'Aca- démie. Rapport de M. Gluge. « C’est pour combler une lacune signalée depuis de longues années par Strauss Dürekheim, que M. Félix Pla- teau a entrepris des recherches sur la digestion des in- sectes. Le Traité classique de M. Miine Edwards sur la physiologie et l'anatomie comparée ne renferme guère que des détails anatomiques lorsqu'il s'occupe de la digestion des insectes. Notre jeune confrère a bien compris qu’une double tâche s'impose au professeur universitaire, celle d'enseigner, et celle peut-être plus importante encore, de Contribuer aux progrès de la sciencé. Je ne puis mieux faire que de reproduire ce que le résumé par lequel l'auteur termine son mémoire renferme de de saillant. SEH les de EH ne sont SS détoucsies de leur rôle primitif pour devenir des glandes séricigènes , des glandes à venin, etc., elles secrètent un liquide neutre ou alcalin possédant, au moins pour lune des paires de glandes, la propriété caractéristique de la salive des verté- brés de transformer rapidement les aliments féculents en glucose soluble et assimilable. Dans un grand nombre de cas (insectes carnassiers, orthoptères), l’æœsophage se dilate en un jabot terminé par Un appareil valvulaire étroit. Les aliments plus ou moins ( 486 ) divisés par les pièces buccales s'accumulent dans ce jabot qui est très-dilatable, y sont imprégnés par des liquides particuliers, neutres ou alcalins, et y subissent une action digestive évidente ayant pour résultat, chez les insectes carnassiers, la transformation des matières albuminoïdes en substances solubles et assimilables analogues aux pep- tones; chez les insectes qui se nourrissent de matières vé- gétales, une production abondante de sucre aux dépens de la fécule. Cette digestion dans le jabot est très-lente et tant qu’elle n’est pas terminée, la suite du tube digestif reste vide. Lorsque la digestion dans le jabot a pris fin, les matières soumises à une pression énergique de la part des parois de cet organe qui exécutent des contractions péristaltiques, glissent ou filtrent petit à petit au travers de l'appareil val- vulaire (gésier des auteurs) dirigées par les sillons et les saillies chitineuses de celui-ci. L'appareil valvulaire n’est point un organe triturateur auxiliaire des pièces buccales, car chez les coléoptères car- nassiers et les locustiens où il affecte une forme clas- sique, les matières animales ou végétales qui l'ont tra- versé se retrouvent, après le passage, en parcelles de même forme et de même grandeur qu'avant l'opération. Chez les insectes qui n’ont ni jabot ni appareil valvulaire, les ali- ments passent d'une manière continue dans l'intestin moyen. ns l'intestin moyen les matières alimentaires qui ont résisté à l'action du jabot ou qui y ont pénétré directement chez les insectes où le jabot et l'appareil valvulaire man- quent, sont soumises à l’action d’un liquide alcalin ou neutre, jamais acide, secrété soit par des glandes locales spéciales, comme chez les orthoptères, soit par une multi- ( 487 ) tude de petits cæcums glandulaires, comme chez beaucoup de coléoptères, soit par une simple couche épithéliale. H n'a aucune analogie avec le suc gastrique des vertébrés; sa fonction est différente suivant le groupe auquel l'insecte appartient ` chez les coléoptères carnassiers il émulsionne activement les graisses; chez les coléoptères hydrophiliens il continue la transformation de la fécule en glucose com- mencée dans l’œæsophage ; chez les scarabéiens il donne lieu au glucose aussi, mais cette action est locale, elle se passe dans l'intestin moyen et pas ailleurs; chez les chenilles de lépidoptères il détermine une production de glucose et de plus émulsionne les graisses; enfin chez les orthoptères herbivores, il ne semble plus y avoir formation de sucre dans l'intestin moyen; ce corps serait produit et absorbé en totalité dès le jabot. L’intestin moyen se vide en général lentement et d’une manière continue dans l'intestin ter- minal dont la première portion, ordinairement grêle et longue, est très-probablement le siége d’une absorption active. Le revêtement épithélial chez certaines espèces semble cependant indiquer qu’il peut s’y passer aussi des phénomènes digestifs secondaires. La réaction du contenu est neutre ou alcaline. La seconde portion plus large de l'intestin terminal ne joue que le rôle de réservoir stercoral; elle est accompa- Pagnée, par exemple, chez les coléoptères dytiscides, les nèpes, les ranâtres, d’un cœcum volumineux. Ce dernier n'est point une vessie natatoire, ainsi qu’on l’a dit plusieurs fois. Vide ou pleine de liquides, elle ne renferme jamais de gaz. Le produit liquide secrété par les tubes de Mal- pighi vient s’y accumuler et, dans certaines circonstances, y déposer des calculs qui peuvent être très-volumineux. Ces calculs sont oxaliques, uratiques ou phosphatiques. ( 488 ) Quelques substances résistent au travail digestif et sont rendues avec les excréments : telles sont la chitine des téguments des insectes, la cellulose végétale et la chloro- phylle que le micro-spectroscope permet de retrouver à toutes les hauteurs dans le tube digestif des insectes her- bivores. Les insectes n’ont rien qui ressemble aux chyli- fères; les produits de la digestion, sels dissous, peptones, sucre en solution, graisses émulsionnées traversent les tuniques relativement minces du tube digestif par un phé- nomène osmotique et se mêlent, extérieurement à ce tube, au sang dont des courants réguliers circulent le long des lignes ventrales et latérales du corps. Au tube digestif des insectes sont annexées des glandes tubuleuses en forme de longs eæcums, les tubes de Mal- pighi; ce sont des organes exclusivement dépurateurs et urinaires débarrassant le corps des produits d'usure des éléments organiques. Le liquide qu'ils secrètent renferme de Purée (douteux), de l'acide urique et des urates abon- dants , de l’acide hippurique (douteux), du chlorure de s9- dium, des phosphates, du carbonate de calcium , de oxa- late de calcium en quantité, de la leucine, des matières colorantes. Quant aux glandes anales, leur produit est très-variable suivant les groupes, mais il n’a aucun rôle à jouer dans la digestion et n’est pas non plus urinaire. Trois belles planches accompagnent le mémoire de M. Félix Plateau, et c’est avec plaisir que nous proposons à l'Académie d'insérer cet intéressant travail dans ses Mémoires. » M. Schwann, second commissaire, s'étant associé aux ( 489 ) conclusions du rapport de M. Gluge, la classe vote lim- pression du travail de M. F. Plateau, et des planches qui l’accompagnent, dans le recueil de ses Mémoires. COMMUNICATIONS ET LECTURES. Sur le chloral et les éthers éthyliques chlorés en général; par M. Louis Henry, correspondant de l'Académie. Le chloral qui était, il y a quelques années encore, une rareté dispendieuse, est devenu, depuis la brillante appli- cation qu’en a faite, en 1869 , M. le Dr Liebreich à la théra- Peutique, un produit commercial, d’un prix fort modique (1). Aussi, depuis lors, les chimistes ont-ils mis largement à Contribution ce composé; le chloral a été l’objet de travaux nombreux et intéressants, et a fourni une longue série de dérivés. Il y a trois ans, dans le cours de mes études sur l’action du pentachlorure de phosphore sur les composés éthérés, Je me suis moi-même déjà occupé du chloral; je suis re- venu, une fois encore dans ces derniers temps, sur ce Produit, à l’occasion des composés organiques à fonction d'alcool en général. (1) Je conserve une lettre de M. le De L. C. Marquart, le fabricant bien connu de produits chimiques de Bonn, où du chloral m'est offert au prix de 225 francs le kilogramme. Cette lettre est datée du 4 août 1869. Aujour- d'hui un kilogramme d’hydrate de chloral coûte une dizaine de francs. ( 490 ) On sait avec quelle énergie le chloral anhydre CCI; — CHO se combine par addition avec l’eau et les alcools proprement dits, en donnant soit le glycol éthylidénique trichloré lui-même CCI, — CH (OH), soit ses dérivés mono- alcooliques CCI; — CH< CZ +10 Le nombre de ces dérivés alcooliques est aujourd'hui fort restreint; il n’y a guère à signaler que les composés méthylique, éthylique et amylique. Or, ce ne sont là que des cas particuliers et isolés d’ap- plication d’une propriété générale. Le chloral anhydre se combine aisément avec les hy- droxydes des radicaux positifs en général ou, plus exacte- ment, avec les composés hydroxylés à fonction d'alcool, quelle qu'en soit du reste l’atomicité et quelle que soit la fonction qu'ils remplissent en même temps que celle d'alcool. J'ai constaté le fait de cette combinaison avec un grand nombre de composés alcooliques, de nature et de fonction accessoire fort diverses, notamment avec des alcools po- lyatomiques, tels que le glycol éthylénique et la glycérine, avec des éthers basiques, notamment la monochlorhy- drine éthylénique, les chlorhydrines et bromhydrines de là glycérine; avec des acides-alcools, du moins avec leurs éthers , tels que le lactate d’éthyle , le tartrate d'éthyle, ete- Je crois done être autorisé à considérer le chloral comme une sorte de réactif pour les composés de nature alcoolique en général. La réaction s'accomplit toujours dans le mème Sens : sur chaque groupement aldéhydique —CHO du chloral, se fixe une molécule d’aleool ou, plutôt plus exactement, 10 groupement alcoolique X(OH), X représentant un radieal tout entier C, H. simplement hydro-carboné, ou, d'une ( 491 ) manière plus générale, le fragment de la combinaison organique, combiné à l'hydroxyle alcoolique; le produit formé est un dérivé mono-alcoolique du glycol éthylidé- nique trichloré CCI, — CH (OH), ; la formule générale Gei, DR e Aë en représente la composition et la fonction. On voit ainsi que ce produit est lui-même de nature alcoolique ; aussi se comporte-t-il comme les alcools , sous l'action des chlorures, brômures, négatifs en général, en donnant les produits éthérés correspondants. La réaction du pentachlorure de phosphore sur ces com- posés est particulièrement nette ; on en obtient des dérivés chlorhydriques de la formule générale. N CARS ee à Le pentabrômure de phosphore se comporte de même. Avec le chlorure d’acétyle, on obtient des dérivés acétiques. Dans toutes ces circonstances, le groupement oxy-al- Coolique XO reste intact et inaltéré, quelque compliqué qu'il puisse être d’ailleurs de composition et de fonction. Ces composés d’addition du chloral sont en général insolu- bles ou fort peu solubles dans l’eau au fond de laquelle ils tombent; sous l’action de l'acide sulfurique, ils régénèrent tous le chloral; avec les alcalis caustiques, en solution alcoolique particulièrement, ils se comportent comme le choral lui-même et donnent du chloroforme. Aucun d’entre eux n’est volatil comme tel et sans dé- composition; à la facon des combinaisons dites molécu- laires, ils se décom posent ou plutôt se dissocient quand on les ( 492 ) chauffe; aussi bouillent-ils sans point fixe; leurs composés générateurs, séparés momentanément par la chaleur, se recombinent, dans les parties froides de l'appareil, en régé- nérant le composé primitif. La combinaison du chloral anhydre avec les composés à fonction alcoolique est accompagnée d’un dégagement de chaleur; cette combinaison est d’autant plus énergique et par conséquent le dégagement de chaleur d'autant plus intense que le radical ou le groupement X en général, fixé sur lhydroxyle, est plus positif et d’un poids moléculaire moins élevé. Ce dégagement de chaleur atteint son maxi- mum avec leau H (OH), où ce groupement X est à son minimum de poids et à son maximum d'énergie positive. Fort intense avec les alcools méthylique et éthylique, ce dégagement de calorique l’est déjà notablement moins avec l’alcoo! amylique, où l'hydroxyle est fixé sur groupe- pement hydrocarboné d'un poids fort élevé; il diminue en général d'intensité à mesure que le groupement X s'éloigne plus de l'hydrogène, en poids et en nature , soil par la présence de nombreux atomes de carbone, soit par celle d'éléments négatifs; quoique énergique encore, la combinaison du glycol monochlorhydrique CH, O — CHa (OH), avec le chloral, l’est moins que celle de l'alcool lui-même CH; — CH, OH, et la combinaison du lactate d’éthyle CH; — CH (OH) — CO (OC,H;) l’est incom- parablement moins que celle de l'alcool isopropylique lui-même. J'examinerai ici quelques cas particuliers de cette réac- tion générale, qui me paraissent offrir un intérêt spécial. ( 495 ) Glycol monochlorhydrique CH, CI — CH, (OH) et chloral. Le glycol monochlorhydrique CH, CI — CH, (OH) (1) n’est autre chose qu’un alcool éthylique CH; — CH, (OH) (1) J'ai préparé le glycol monochlorhydrique dont j'ai fait usage , direc- tement, par la réaction de l'acide chlorbydrique lui-même sur le glyco lui-même, On sature d'acide H CI, gazeux et sec, le glycol, bien refroidi à l'aide d’un mélange réfrigérant, Le produit est chauffé pendant quelques heures au bain d’eau vers 100°, dans une ampoule en verre résistant, scellée à la lampe. Le liquide reste homogène et ne se sépare pas en deux Couches, la distillation du produit brut est assez difficile et accompagnée de soubresauts. Après le départ de l'excédant d'acide H CI, il passe d'abo de l’eau, puisun mélange d’eau et de glycol D E et finale- ment le produit seul. Il ne distille pas grand’c au delà de 140°, On déshydrate aisément le produit à l’aide du Se potassique. Cette méthode est, à mon avis, la plus simple et le rendement en est très-avan- tageux. J'ai préparé le glycol lui-même par la méthode indiquée par M. Atkin- son. A cette occasion, je ferai remarquer combien il est important de ne pas pousser trop loin et de ne pas continuer trop longtemps l'évapora- tion, au bain-marie, de la solution aqueuse renfermant le glycol et l'acé- tate ae On doit s gg se quel iis commence à se Keen ainsique M. Wurtz l'indique et de Physique, t. LV, Se ae “ns 409). Cette évaporation peut être l’origine de la perte d'une grande quantité de produit. C’est ainsi que je m'explique qu'autrefois je mai obtenu, dans diverses opérations, qu’un rendement fort PEU avantageux. (Voir mon travail sur les dérivés nitriques des glycols dans les Annales de Chimie et de Physique, t: XXVII, sér., 4° année 1872.) une opération récente, à l’aide de 870 grammes de brômure d'éthy- lène brut, j'ai obtenu 140 à 130 grammes de glycol, ce qui représente 50 °/; du rendement théorique. Le brômure d’éthylène devrait fournir le tiers de son poids de glycol, soit 33 9/3 je n’en avais obtenu précédemment que 8; dans l'opération queje viens de rapporter, j'en vg environ 17. M. gants à obtenu autrefois 13,4°/, et M. E. Demole, par un procédé nouvellement indiqué et qi vege = EE 147. rak der Deutschen chemi- schen Ges , t VII, p. 644). On voit par là combien mon chiffre est ee ( 494 ) monochloré; aussi se comporte-t-il avec le choral anhydre comme l'alcool éthylique lui-même. À 12 grammes de glycol monochlorhydrique pur, j'ai ajouté 21 grammes de chloral anhydre, quantités qui cor- respondent aux poids moléculaires de ces deux produits; la combinaison est immédiate et le dégagement de chaleur intense. Le produit constitue un liquide épais et visqueux, exha- lant une forte odeur, analogue à celle du chloral; contre mon attente, il ne s’est pas solidifié par le refroidissement comme le fait l’alcoolate de chloral lui-même. Ce produit est plus dense que l’eau au fond de laquelle il tombe, sans s’y dissoudre; ce n’est qu’à la longue qu’il disparaît. Chaufté , il se dissocie ; il commence à distiller dès 90° environ, le thermomètre s'élève graduellement jusqu'à 150° et même au del ; le liquide distillé s’échauffe beau- coup de lui-même et reconstitue le produit primitif. Ce corps réagit intensément et dès la température ordi- naire après quelques instants, avec le chlorure d’acétyle; en formant sans doute le produit éthylénique chloré CO — CH < La Cl correspondant à celui que MM. V. Meyer et T ‘Dulk (1) ont obtenu par l'action du chlorure d’acétyle sur l’alcoolate de chloral. Je ne me suis pas arrêté à examiner ce composé. La réaction du pentachlorure de phosphore offre, à cause de la nature du produit formé, plus d'intérêt. Cette réaction est énergique et le dégagement d'acide chlorhy- drique abondant. Le produit brut de la réaction a été traité par l’eau pour détruire l’oxychlorure de phosphore NEE RE ARE (1) Annalen der Chemie und Pharmacie, t. CLXXI , p. 69. ( 495 ) formé. Il reste, après ce traitement, un liquide incolore, huileux, plus lourd que l’eau; je Dat lavé au carbonate sodique et desséché sur du chlorure de calcium. Ce produit est d’une pureté remarquable. Soumis à une première rectification, il passe presque tout entier entre 250° et 240°; à la fin seulement, il y a une légère carbo- nisation ; à une seconde rectification, cette portion a passé, fixe à 255. Le produit ainsi obtenu C, H, Cls O constitue un éther éthylique pentachloré, auquel, si l’on tient compte de son mode de formation, on peut assigner la formule de struc- ture suivante : EELER, ER OCH,-CH,CI ën EH CCI, pi | +PO CI, +HCI. CO Cet éther éthylique pentachloré constitue un liquide incolore, d'une limpidité parfaite, quelque peu épais, exhalant une odeur piquante et camphrée, d'une saveur amère et douceâtre. Sa densité à & est égale à 1,577. Il bout sans décomposition, quand il est pur, à 255° (non corrigé), sous la pression de 763 millimètres. Sa den- sité de vapeur a été trouvée égale à 8,30. Substance employée . . . . . . 0s',0615, Pression barométrique . . 770%. Mercure soulevé be von Tempé SRE RE 185. pérature. . . . Volume de la vapeur . . . . . - 69cc.6. La densité calculée est 8,51. ( 496 ) Cet éther pentachloré est insoluble dans l’eau au fond de laquelle il tombe; il est aisément soluble dans l'alcool et l'éther. : Lean le décompose en ses générateurs, le chloral et le glycol monochlorhydrique, avec production d'acide chlor- hydrique. Cette décomposition s’accomplit déjà à la tempé- rature ordinaire, quoique lentement ; aussi le produit, qui est neutre, quand il est bien pur, devient-il acide à Pair humide et répand-il, après quelque temps, des fumées d'acide de chlorhydrique. La décomposition est rapide dans l’eau chaude, surtout en vase clos. Les alealis caustiques, en solution alcoolique spéciale- ment, agissent beaucoup plus énergiquement, en donnant, en même temps que le chlorure du métal alcalin, les pro- duits de l'action des alcälis sur le chloral et le glycol mono- chlorhydrique, pris isolément. Chauffé avec de l’acide sulfurique concentré, cet éther pentachloré dégage de l'acide chlorhydrique, régénère le chloral anhydre et donne du glycol chlorosulfurique, comme avec le glycol monochlorhydrique lui-même. L'analyse de ce produit a fourni les résultats suivants : I. 0%, 5804 de substance ont fourni 41%, 0988 de chlo- rure d'argent. (Méthode de Carius.) IL. 0%, 5848 de substance ont fourni 0%, 1160 de chlo- rure d'argent. ` i FI. 0%, 4228 de produit ont fourni 4%, 2286 de chlo- rure d'argent. IV. 0%, 4548 de produit ont donné 1#, 2632 de chlo- rure d'argent (1). (1) Pour ces deux derniers dosages, on a chauffé plus longtemps et à une température plus élevée. ( 497 ) Ce qui correspond aux chiffres suivants : CALCULÉ, TROUVÉ. — EE T , GH. CI,0. JA I. Il. HI. IV. C, bre à 48 H D » » OH s — 5 » » » » » Ci — 177,5 72,00 71,45; 71,922; 74,88; 71.86. -riggs 16 » » » LA 246,5 Lactate d’éthyle CH,- CH (OH) -CO (OC; H;) et chloral. L’acide lactique, à la fois acide et alcool , est, en cette dernière qualité, susceptible de se combiner avec le chloral anhydre. C’est en effet ce qui a lieu. Dans le but d'obtenir des résultats plus nets qu'avec l'acide lactique lui-même, j'ai fait usage d’un de ses éthers, le lactate d’éthyle CH, - CH (OH) - CO (0 C,H;). 24 grammes de lactate d’éthyle pur ont été mélangés avec 50 grammes de chloral anhydre. Ce qui équivaut à une molécule de chacun de ces produits. Les deux liquides se mélangent en se combinant, mais l'échauffement est faible et ne dépasse guère 40° à 15°. La Combinaison ne paraît au reste s'effectuer que succes- sivement, car le mélange, qui est d’abord soluble dans l'eau, y Biet insoluble après quelques heures. C’est un liquide épais et visqueux tombant au fond de l’eau où il ne se dissout qu’à la longue. i Je mai pas essayé de distiller ce produit; j'ai cru inu- tile aussi de le soumettre à l'analyse. L'action qu’il subit de la part du pentachlorure de phosphore en établit suffi- Samment la nature et la composition. 2% SÉRIE, TOME XXXVII. 35 ( 498 ) Le produit de la combinaison a été versé par petites portions sur 42 grammes de pentachlorure de phosphore. La réaction est vive et énergique et de l'acide chlorhy- drique se dégage en abondance. Le produit brut de cette opération, mélange formé d’oxychlorure de phosphore et du composé lactique du chloral, a été soumis au traitement indiqué précédemment. Seulement le composé lactique n'étant pas volatil, je mwai pu le distiller, le chlorure de calcium ne parvenant à le dessécher que fort imparfaitement, ainsi que l'analyse la démontré, il a fallu l’abandonner pendant quelque temps, dans le vide, sur de l’acide sulfurique. Ce dérivé lactique, de composition assez complexe, répond, ainsi que l'indique son mode de formation, à la formule „H (co CH ci) PR (cn S c0 (0G, d CO(0 C, H,) | > O—CH CO (0C,H,) ue n gees T OH CH, +PhCI,—=CHCI-0- CH + Ph O Ch +H Cl. 2 | Coe. + à Il me paraît assez difficile de lui donner un nom, et sur- tout un nom simple, je l'appellerai, faute de mieux, éther tétrachloré — oxy-éthylo-lactique. Ce prodnit constitue un liquide incolore, épais et vis- . queux , d’une étrange odeur, toute spéciale, d'une saveur douceâtre, Sa densité à 11° est égale à 1,42. Il est insoluble dans l’eau au fond de laquelle il tombe. Lean. les alcalis et l'acide sulfurique réagissent sur lui ( 499 ) d’une manière analogue à celle que j'ai indiquée plus haut en ce qui concerne l’éther pentachloré. Pur et fraichement préparé, il est neutre, mais à l'air humide, il s’acidifie et répand alors des fumées d'acide chlorhydrique. Ce corps n’est pas volatil. Chauffé, il jaunit; au-dessous de 200° , il passe un liquide plus dense que l’eau et inso- luble ; à ce point de l'échelle thermométrique, la masse devient grise, et paraît se solidifier en devenant spon- gieuse; en même temps il se dégage d’abondantes vapeurs d'acide chlorhydrique. I est à remarquer que ce corps renferme les éléments du chloral et du chloropropionate d'éthyle ` ce sont là, sans doute, les produits principaux de sa décomposition. L'analyse de ce corps a fourni les résultats suivants : I. 0:,4194 de ce produit, après dessiccation dans le vide ont fourni 0s" ,8344 de chlorure d'argent. IL Os, 3972 du même échantillon ont fourni 0s" , 8118 de chlorure d'argent. D'où l’on déduit CALCULÉ,. TROUVÉ. ? SN e mm GH, Cl; Os- LA i IL. E Dese: 84 D Di nm H,, — 10 » » D CI, — 142 50,00 49,22 30,5% (1) O0, — 48 » » » pr ns (1) Voici le résultat des trois Ss de ce ed simplement dessé- ché à l'aide du chlorure de calciu CL st, 48,23; 48,30; 48,30. © 500 ) La formation de ce composé constitue, à mon avis, un exemple des plus remarquables de la stabilité des groupe- ments oxy-alcooliques, en présence des chlorures négatifs et particulièrement du pentachlorure de phosphore, stabi- lité que j'ai signalée à diverses reprises déjà et dont j'ai pu tirer un parti avantageux. Glycol éthylénique CH, (OH), et chloral. Le chloral et le glycol éthylénique se combinent avec énergie. A 10 grammes de glycol pur, jai ajouté 48 grammes de chloral anhydre, ce qui correspond à deux molécules de ce composé pour une de glycol. La température s'élève d'environ 70°. Le produit constitue un liquide fort épais et visqueux , tombant au fond de l’eau et ne s’y dissolvant qu'à la longue. Chauffé, ce corps se dissocie à la façon des autres combinaisons de cette sorte. Je Tat soumis à l’action du pantachlorure de phosphore. Le produit de la réaction précédente a été versé par pe- tites portions sur 70 grammes environ de pentachlorure, ce qui correspond à deux molécules de ce composé. La réaction est fort vive, et le dégagement d'acide chlorhy- drique très-abondant. Le produit brut de la réaction a été soumis au traite- ment indiqué précédemment. N'étant pas volatil, le com- posé formé n’a pu être purifié et désséché qu’à l’aide du chlorure. de calcium, puis par le vide , en présence de l'acide sulfurique. Ce produit est assez complexe dans sa composition; ( 30L ) il répond sans doute à la formule CH. OCHE = CE ER. EE EE C'est, ainsi que l'indique cette formule, du glycol diéthy- lique tétrachloré. Ce corps constitue un liquide incolore, fort épais, cou- lant difficilement; d’une odeur faible; d’une saveur pi- quante. Sa densité à 17° est égale à 1,75. Il est insoluble dans l’eau au fond de laquelle il tombe. Il n’est pas distillable sans décomposition; Cest ce que fait prévoir le rapprochement de sa formule de celle de l'éther pentachloré, qui bout déjà à 255° (1). CH, CI CH, — O — (CH CI — CHA | CB, CI CH, CI Éb. 84 Éb. 255° CH, (OH) CH, — O (CH CI — CCI) | CH, CI CH, — 0 (CH Ci — CCI). Éb. 150°. Chauffé, ce corps se boursoufle d’abord considérable- ment; dès avant 400°, il distille un liquide plus dense que leau et insoluble; il continue à passer du liquide jusque (1) L'éther pentachloré et le glycol diéthylique tétrachloré renferment l'un et l’autre, à peu de chose près, la même quantité de chlore: le premier 72,00 °/,; le second 72,08°/,. Le poids moléculaire de l'éther pentachloré est 246,5; celui du glycol diéthylique tétrachloré est 394. Le rapprochement de ces chiffres montre bien l'influence du poids mo- léculaire sur la volatilité des corps et la raison pour laquelle Pun de ces Produits n’est pas distillable, du moins sous la pression ordinaire. ( 502 ) vers 255°, point où la distillation s'arrête; il se dégage en même temps d’épaisses vapeurs blanches et de l'acide chlorhydrique et il reste un résidu assez abondant d'un gris noirâtre. La portion qui avait passé de 200° à 235° environ, soumise à une seconde rectification, commence à distiller avant 100°; le thermomètre s'élève progressive- ment jusque vers 260°-270°, point où il passe probable- ment du produit non altéré; il reste une masse brune non distillable. Il semble résulter de là que, sous l’action de la chaleur, ce composé se dédouble, en partie du moins en chlorure ou hydroxy-chlorure d’éthylène et en chloral dont il renferme les éléments. Soumis à l’action de l'eau, des alcalis caustiques et de l'acide sulfurique, ce produit se comporte comme le font les produits de même nature précédemment examinés. L'analyse de ce corps ne m'a pas donné des résultats bien satisfaisants; il n’a pas été possible de le dessécher complétement, même dans le vide sur l'acide sulfurique. On y a trouvé 68,03 et 67,50 0/, de chlore; la formule indiquée plus haut en demande 72.08. Mono-éthyline éthylidénique CH; - CH < SC "s et chloral. L'aldéhyde acétique CH; —CHO se combine vivement, comme l’on sait, et avec un dégagement de chaleur intense avec l'alcool. Le produit de cette combinaison , qui distille en se dissociant comme tous les composés analogues, re- présente le dérivé mono-éthylique du glycol éthylidénique CH; — CHO +- C, H, OH = CH, — CH cu H. C'est ce que prouve sa transformation en éther éthylique de. à E on ot A un con ponts a ( 505 ) monochloré sous l'action de l'acide chlorhydrique (1) (Ad. Wurtz et Frapolli). Cette mono-éthyline éthylidénique est elle-même de nature alcoolique, ainsi que l'indique sa formule. Il m'avait paru intéressant de faire réagir sur ce produit le chloral anhydre; j’espérais montrer par là le véritable caractère de composé individuel et alcoolique du produit d’addition de l’aldéhyde à l'alcool; j'espérais en outre obtenir, par l'action du pentachlorure de phosphore sur le produit de cette combinaison CH, -cH < OÙ Hs e CH gett, - CH < QECH (C, H, 0) - CH3) un éther tétrachloré éthyloxylé, dérivé piquant d'intérêt à cause de sa composition et devant répondre à la formule (cc, — cH cı) S o—[cH (OC,H,)— CH). Les faits n’ont pas répondu à mes prévisions. La mono-éthyline éthylidénique se dédouble au contact du chloral en alcool et en aldéhyde; celle-ci se dégage et il se forme simplement de l’alcoolate de chloral CCI; — CH (OH) (OC, H,). Aussi sous l’action du pentachlorure de phosphore obtient-on, non l’éther tétrachloré éthyl- oxylé dont j'ai indiqué plus haut la composition, mais de l'éther tétrachloré lui-même, ainsi que l'indique déjà son point d’ébullition 188° et que le démontre l'analyse. La réaction du chloral sur la mono-éthyline éthylidéni- que, dans les conditions ordinaires, est accompagnée d'un dégagement de chaleur notable ; peut-être est-ce à cette circonstance qu’il faut attribuer le départ de l'aldéhyde et (1) Comptes rendus, t. XLVII, p. 418. KI ( 504 ) réussirait-on par un refroidissement énergique à mainte- nir en présence et combinés les trois corps, aldéhyde, chloral et alcool. Il n’y a au reste rien d'étonnant dans ce fait de l’expul- sion de l’aldéhyde de son alcoolate par le chloral; l'aldéhyde ` et le chloral sont deux composés équivalents, mais iné- galement énergiques, vis-à-vis des hydroxyles alcooli- ques; le plus fort chasse le plus faible de sa combinai- son. Sur les éthers éthyliques chlorés. A l'occasion de l'éther pentachloré que j'ai décrit plus haut, je crois pouvoir m’arrêter quelques instants aux dé- rivés chlorés en général de l’éther ordinaire. Le chloral et les aldéhydes m’amènent d’ailleurs d’une manière fort naturelle sur ce sujet, car cet éther pentachloré est le second dérivé de cette nature que j'ai rencontré dans le cours de mes recherches sur le chloral. L’éther éthylique € ep > O ou C, Hio O peut donner naissance à des dérivés chlorés de substitution multiples, à la suite d’une substitution partielle, plus ou moins doté ou d’une substitution totale du chlore à l’hydro- gène, depuis des dérivés monochlorés, jusqu’à un dérivé déca ou perchloré. L'éther étant représenté par la formule de structure (ON, CR J— 0-2 (CR, CH) on voit de suite que, sauf l’éther perchloré, unique de son espèce, tous les éthers chlorés en général peuvent être représentés par plusieurs isomères, suivant la position que prend le chlore en entrant dans la molécule, à la place de l'hydrogène. On aperçoit de suite aussi que ces dérivés A LEI LS ( 505 ) chlorés doivent être d'autant plus nombreux, que la sub- stitution est plus complète, jusqu’à une certaine limite de chloruration cependant, pour de là diminuer à mesure que l’on se rapproche davantage de l’éther perchloré. Voici quel est en réalité le nombre des diverses variétés isomères possibles de ces éthers chlorés (1). Éther monochloré (C.H, CI) O 2 isomères. — bichloré (C, H; CI,) 0 6 — — trichloré (C, H, Cl,) O 9 — tétrachloré (C,H,C1,)O 14 — — pentachloré (C,H; C1)0 414 — hexachloré (C,H,CI,)0 414 — heptachloré (C, H, CI) O 9 —; octochloré (C, HCl} 0 6 — 2 1 | nonochloré (C, H Cl) O — perchloré (C Clio) O Ce qui fait en totalité 77 éthers chlorés différents. (1) Ces nombres peuvent se déduire des formules générales suivantes : Nappi = De X Neppi + Ni X Map + + Dp X Dec (1) pour les dérivés renfermant un nombre impair d'atomes de chlore. SC 2 Nap = Lo X Dën + Di X Dän E Lu pour les dérivés renfermant un nombre pair d'atomes de chlore. Do, Di, Us: Dp, Nap le indiquent les nombres des isomères chlorés dérivés de C, H,, où il y a 0, 1,2 ..…. P. Ap atomes de chlore. C, H; étant H; — CH, , il est facile de constater quen,—1,0,=2,0,=5,1;=5, n,=2, D; = 1; Dgs Ny, Ng; Dgs Dit. Voici quelques exemples. Appliquant la formule (1) à la recherche du nombre des dérivés trichlorés, on fait p— 1 et lon a N; = No X Ng + D, X D3 = FXF FIKS m EH Appliquant la formule (n) à la recherche du nombre des dérivés hexa- ( 506 ` Le nombre de ces dérivés connus est aujourd’hui fort restreint et je ne crois pas inutile d'en dresser la statis- tique, de ceux du moins dont l'existence est certaine. On connait un des deux éthers monochlorés possibles : c’est la monochloro-éthyline éthylidénique (CH; — CH CI) (0) (CH, — CH). Ébullition vers 98. Ce composé se forme directement dans l’action du chlore sur l’éther lui-même (1) (Jacobsen) et s'obtient plus aisément par l’action de l'acide chlorhydrique sur un mélange d’aldéhyde et d'alcool (Wurtz et Frapolli) (2). Des six éthers bichlorés possibles, deux sont connus, l’un et l’autre ont été obtenus par M. Lieben. L'un d’entre eux (ébullition 4116°-417°), symétrique dans sa composi- tion (CH; — CH CI) O (CHCI— CH résulte de l’action de l'acide chlorhydrique sur l’aldéhyde acétique (5); c'est l’éther simple de la monochlorhydrine éthylidénique CH; —CH< l. L'autre (ébullition vers 145°) dissymétrique chlorés , on fait p=5 et l’on a De zz Do X Det: DN nyn X, + nsf: > ht BA SCT SS I LI XILSXS = 14, C'est à M. U. Massalski que je dois l'indication de ces formules. | On remarquera que de part et d'autre des dérivés pentachlorés C, H; CLD se trouvent des séries de dérivés, plus et moins riches en chlore que ceux-ci, en nombre précisément égal. La raison de ce fait s 'apergoit de suite, Ces dérivés ont une composition réciproque, et se trouvent dans les mêmes relations par rapport aux combinaisons E et simples, l'éther lui-même Ca H;),0 et l'éther perchloré (C, Cl), je Berichte der Deutschen chemischen Rs zu Bertin, t. IV, o EE rendus, t. XLVII, p. 418. t. XLVI, p. 662. ( 507 ) dans sa composition (CH, Cl — CH CI) —0—(CH, —CH;), résulte de l’action du chlore sur l’éther lui-même (1). Aucun éther trichloré n’est connu avec certitude ou du moins aucun n’a été isolé jusqu'ici. Parmi les quatorze éthers tétrachlorés possibles, deux ont été signalés. L'un, connu depuis longtemps, produit Don distillable, symétrique de composition, répond à la formule (CH; — C Ch) — O — (CCI — CH;). I a été trouvé par M. Malaguti parmi les produits de l’action directe du chlore sur l’éther (2). L'autre a été obtenu par moi-même (5); il bout à 188°; dyssimétrique dans sa composition, il répond à la formule (CCI, — CH CI) — 0 — (CH, — CH). Il résulte de l’action du pentachlorure de phosphore sur l'alcoolate de chloral. Ce corps a été obtenu depuis par MM. Wurtz et Vogt (4) par la chloruration directe de l’éther (1) Comptes rendus, t. XVIII, (2) Annales de Chimie et de eg t. LXX, p. 558 (année 1859). (5) Berichte der Deutschen chemischen Gealtach; t. IV, pp. 101 et 435. (4) Comptes rendus, t. LXIV, p. 777 (année 1872). ans le cours de leur remarquable travail, MM. Ad. Wurtz et G. Vogt identifient mon éther tétrachloré avec celui de M. ege AC Voici comment ils s'expriment : « De fait ce corps est identique avec l'éther tétrachloré C, He CI, 0 que > M.Malaguti a décritcomme un des produits de l'action directe du chlore > sur l'éther et que M. Henry a obtenu récemment en faisant agir le pen- " tachlorure de phosphore sur l'alcoolate de chloral. » J'éprouve le regret de devoir kee qe ire SE est pr L'éther tétrachloré de M. Mal différents de propriétés et de constitution. On trouve dans le Mémoire même de M. Malaguti tous les éléments nécessaires pour s’en convaincre. Le produit obtenu par M. Malaguti et analysé, après une purification ( 508 ) monochloré indiqué plus haut, en présence de Tode, laborieuse, était certainement de l'éther tétrachloré pur, ainsi que les chiffres trouvés à l’analyse le démontrent. CALCULÉ. TROUVÉ à Cr x 22,64 ol, 22,19 Hi 4 tr Se 2,84 Css: ST 67,54. Mais cet éther PE qui, chauffé, se colore déjà entre 135 et 140° en dégageant de l'acide chlorhydrique et auquel M. Malaguti n'assigne aucun point ue. sans doute parce qu'il n'est pas distillable, de- vait être constitué, en très-grande partie et même en presque totalité, par un éther tétrachloré symétrique de la formule (CH, — € CI,)0 (C Cl, — CH;) mélangé d’une petite quantité d’un autre éther tétrachloré, se ratta- chant au chloral et ayant, suivant toute vraisemblance, la formule de l'éther tétrachloré que j'ai obtenu (C CI, — CH CH — 0 — (CH, — CH;). C'est ce que démontre l'action de la potasse alcoolique sur l'éther tétra- chloré de M. Malaguti. En même temps que du chlorure de potassium qui se précipite abondamment dans cette réaction, il se produit un peu de chloroforme et de formiate, — on trouve toujours dans la liqueur, sui- vant M. Malaguti « des traces sensibles d'acide formique. » Mais il se forme en quantité considérable de l'acétate potassique. Les produits réels de la réaction sont bien du chlorure et de l'acétate de potassium. Cette formation d'acide acétique ne s'explique que pour autant que l’on attribue à cet éther tétrachloré la formule (CH, — C Cla) — 0 — (C Cl, — CH3). Quant au chloroforme et à l'acide formique qui sont des produits fort accessoires, ils dérivent sans doute d’une petite quantité d’un ge éther sem répondant à la formule (C CI, — CH CI) — O (CH, — CH3). l’'ammoniaque et celle de l'hydrogène sulfuré sur l'éther os de M. Malaguti confirment la formule que lon est amené à attribuer à ce produit, de par l’action des alcalis caustique Je ferai remarquer, pour terminer, que la formule ee par moi au produit de M. Malaguti est celle que donne déjà à ce corps M. Erlenmeyer (*) et que lui attribuait déjà Gerbardt dans son grand ouvrage (** (©) Lehrbuch der organischen Chemie, p (*) Traité de Chimie organique, t. II, P- h: ( 509 ) Un seul des éthers pentachlorés est connu; Cest celui que j'ai décrit plus haut (CHI, — CH CI) 0 — (CH, CH, CÌ). On ne connaît jusqu'ici aucun éther hexachloré, hepta- chloré, octochloré et monochloré. = Quant à l'éther perechloré lui-même, MM. Regnault et Malaguti lont fait connaître depuis longtemps déjà dans le cours de leurs remarquables travaux sur les produits de substitution du chlore (1); c’est le produit ultime de l’action du chlore sur l’éther anhydre. J'ai signalé tantôt l’existence de 77 dérivés chlorés de l'éther ordinaire. Je wai pas besoin de dire qu'aucun chi- miste, à coup sûr, ne se proposera de préparer celte longue série de dérivés; ce n’est pas que je regarde un tel travail comme superflu et inutile; j’ai, au contraire, la persuasion que si tous ces corps étaient connus et leurs propriétés bien exactement déterminées, il pourrait résulter de leur rapprochement comparatif des remarques curieuses et importantes concernant l'influence de la composition et de la structure chimique des corps sur leurs propriétés phy- siques; mais pour réaliser une tâche pareille, il faudrait, outre un trésor de patience et de persévérance, des moyens et la connaissance de composés qui nous sont inconnus aujourd'hui. Sans vouloir tout faire, il peut être utile de s'efforcer de rendre moins incomplète la série de ces déri- vés, série si courte aujourd'hui. eaman a E (1) Annales de Chimie et de Physique, t: LXXI, p. 592 (année 1859) et t. XVI [3], nn ( 510 ) Je ne crois pas qu'il y ait beaucoup plus à attendre de l'étude des produits de l’action directe du chlore sur l’éther, que ce que nous connaissons aujourd’hui, quelque pro- fonde et minutieuse que puisse être cette étude. Ces produits, même ceux-là qui sont inégalement chlo- rés, sont souvent en effet ou doivent être fort rapprochés de propriétés, leur séparation les uns d'avec les autres doit être malaisée et la détermination de leur structure est tou- jours un problème difficile et qui me paraît même quelque- fois insoluble alors que Ton manque de données prélimi- naires. Ce n’est donc pas là la voie à suivre. Pour obtenir de ces dérivés chlorés et pouvoir leur assigner avec certitude une formule rationnelle, il est né- cessaire de recourir à la synthèse, c'est-à-dire de réunir deux composés bicarbonés déjà formés, de structure bien connue, Je ne crois pas inutile d'indiquer ici quelles sont, à mon avis, dans cet ordre d'idées, les méthodes générales qui permettront vraisemblablement d'obtenir un assez bon nombre de ces produits. Ces méthodes consistent dans l'application et l’exten- sion à l’aldéhyde et à ses trois dérivés de substitution, comme au glycol monochlorhydrique, tous composés actuel- lement connus, des trois réactions que j'ai indiquées plus haut, savoir : la réaction de MM. Wurtz et Frapolli, celle de M. Lieben et enfin celle que j'ai indiquée moi-même. D’après MM. Wurtz et Frapolli, l’action de l'acide chlor- hydrique sur la mono-éthyline éthylidénique, mélange d'alcool et d’aldéhyde, donne un éther monochloré de la formule (CH;— CH CI) O (CH, —CH;). C’est au fond unè véritable éthérification,. remplacement de (OH) par cl. L'action du pentachlorure de phosphore que j'ai moi-même ( 511 ) réalisée deux fois déjà, pour obtenir l’éther tétrachloré et l'éther pentachloré, est une action au fond du même genre. IT y aurait donc à essayer l’action de l'acide chlor- hydrique ou du pentachlorure de phosphore, sur les com- binaisons de l'aldéhyde monochlorée et bichlorée avec l'alcool, de laldéhyde elle-même et de l'aldéhyde mono- chlorée et bichlorée avec le glycol monochlorhydrique. Ces réactions conduisent théoriquement aux composés sui- vants : Aldébyde mono-chlorée et alcool (CH, CI — CH CI) O (CH, — CH;). — bichlorée (CH CI, — CH CI) O (CH, — CH, ). Aldéhyde et glycol monochorhydrique (CH, — CH CI) O (CH, — CH, CI). — monochloréeet id. (CH,CI — CH CI) O (CH, — CH, CI). — bichlorée et id. (CH CI, — CH CI) O (CH, CH, CI). Sous l’action de l'acide chlorhydrique, l'aldéhyde elle- même a donné, suivant M. Lieben, un éther bichloré symétrique de la formule (CH; — CH CI) — O — (CH CI — H;). L'extension de cette même réaction aux dérivés chlorés de l’aldéhyde est de nature à donner peut-être des dérivés tétra, hexa et octochlorés de même aspect général et également symétriques, savoir : (CH, CI — CH CI) O (CH CI — CH, CI). (CH CI, — CH CI) O (CH CI — CH Ci). (CCl, — CH CI) O (CH CI — CCI). Je ne doute nullement que l'essai de plusieurs de ces réactions ne soit couronné de succès. Aussi aurais-je bien l'intention d'en réaliser quelques-unes, si je parvenais à me procurer les dérivés chlorés de l’aldéhyde autres que le chloral, et si le glycol monochlorhydrique n’était un pro- duit aussi coûteux. ( 512 ) Sur la production des hydrocarbures acétyléniques; par M. Louis Henry, correspondant de l’Académie. Les hydrocarbures acétyléniques forment incontestable- ment dans les hydrocarbures fétravalents et dans les hydro- carbures non saturés en général, un des groupes les plus remarquables. Le nombre de ces hydrocarbures est aujourd’hui fort restreint. On ne connaît guère en effet, d’une manière cer- taine; que l’acétylène CH=CH, et son dérivé méthylique, ‘allylène CH; —C=CH et dans le groupe aromatique, le phényl-acétylène de M: Glaser. C’est que les méthodes qui ont servi jusqu'ici à obtenir ces hydrocarbures ne sont pas, semble-t-il, d’une application générale, ni bien étendue. Les points de départ ont été jusqu'à présent soit un hydrocarbure bivalent CH... soit une acétone méthylique de la formule générale C,H,— CO — CH; Par des méthodes suffisamment connues et que je crois inutile de rappeler, on transforme l'hydrocarbure ou l'acé- tone en un hydrocarbure bivalent, halogéné, mono-substi- tué, chloré ou brômé, CH. X, par exemple, duquel, sous l'action des alcalis caustiques, on élimine une molécule d’hydracide halogéné HX. L'éthylène monobrômé CH, — CH Br et le propylène monochloré CH, — CCI— CH, ont donné ainsi respective- ment l’acétylène et l’allylène. Mais on n’a pas réussi avec les composés correspondants renfermant 4, 5 et 6 atomes de carbone, le crotonylène C,H, et l’hexoylène Gel de SNS PE RE à ( 513 ) M. Caventou (1), le valérylène C;H, de M. Reboul (2) sont tétravalents , mais ne paraissent pas être acétyléniques et appartenir au groupe de l’allylène. De l’acétone proprement dite CH; —CO—CH,, on passe aisément à l’allylène et de la pbéaylaméthyiaeétons GH, —CO— CH, on arrive sans grande difficulté au phényl-acétylène C;H,—C=CH, ainsi que l'a constaté M. Friedel (3); mais il n’a déjà plus été possible à M. B. Radziszewski d'obtenir un hydrocarbure acétyléni- que, le phényl-allylène CH, — CH, — C = CH, en partant de l’acétone monophénylique CeHs— CH, —CO— CH; (4). Il wa paru que les composés les plus propres à servir de point de départ pour la production des hydrocarbures acétyléniques doivent être les aldéhydes, du moins les aldéhydes répondant à la formule générale C.H:,,,— CH3 —CHO ou plus généralement C,H, — CH; — CHO (5). (1) Comptes rendus , t. LVI, p. Ve ng t. LIX, p. 449. (2) Comptes rendus , t. Lem. p. 2 (5) Comptes rendus, t. LIX, p. Dé Gah ett. LXVII, p. 492 (1868). (4) pris der Deutschen chemischen Gesellschaft zu Berlin, t. I, p.199 (18 (5) Des er ne renfermant pas le chaînon CH,, immédiatement attaché au groupement aldébydique CHO, mais bien les chaînons > CH— et ZC — telle qu'est l'aldéhyde isobutylique CH: > CH — CHO et telle CES ' Que sera l’aldéhyde triméthyl-acétique CR C — CHO, ne pourraient évidemment pas donner lieu à des homologues de l'acétylène Cn H; — C = CH, par la méthode que j'indique dans ge notice. En ce qui concerne l’aldéhyde isobutylique CH: © CH — CHO, je ne doute nullement que l’on n’obtienne, en la soumettant au système de réac- tion que j'indique plus loin, des composés identiques à ceux qu'a obtenus 2°° SÉRIE, TOME XXXVII. ( 544 ) Les hydrocarbures acétyléniques, homologues de lacé- tylène,renferment un groupement caractéristique—C=CH, acide en quelque sorte, où l’hydrogène se remplace facile- ment par certains métaux, le cuivre, l’argent, ete. Ce groupement acétylénique est renfermé virtuellement dans les aldéhydes de la formule générale indiquée ci-dessus et il s’agit de le mettre à nu par l'élimination des éléments d’une molécule d’eau. Ca Hane — CH, — CH O. CnHan+i— C = CH +H,0. Il serait inutile de songer à atteindre ce résultat par une déshydratation réelle opérée sur l’aldéhyde elle-même. On sait, en effet, que sous l’action de corps avides d’eau, no- tamment l’acide chlorhydrique, les aldéhydes donnent des produits de condensation, à la suite d’une élimination d'eau dont les éléments viennent de deux molécules différentes d’aldéhyde. Si l'on ne peut pas éliminer une molécule d’eau du sys- tème — CH, —CH O, on peut éliminer aisément ce qui en est l'équivalent, deux molécules d’hydracide halogéné, du système correspondant — CH,— CHX. La voie à suivre m'a paru devoir être SES, trans- former, sous l’action du pentachl mure de phosphore, l’ aldéhyde en son Keng bichloré ou bibrômé, et faire agir sur celui-ci, à deux reprises diffé- M. A. Butlerow en partant de l’isobutylène Se D>C= CH, composés H qu'il a décrits dans son beau mémoire Sur la structure chimique des hydrocarbures non saturés. (MÉMOIRES DE L'ACADÉMIE IMPÉRIALE DES SCIENCES DE St-PÉTERSgOURG , vs sér., t. XV, n° 7.) (55 ) rentes, les alcalis caustiques de façon à transformer finale- ment le système — CH, —CHX, en —C=CH, c’est-à- dire le système aldéhydique dans le système acétylénique. L'expérience a confirmé mes prévisions. Dans le cours de recherches qu’il a entreprises, d’après mes indications, sur les dérivés de l’aldéhyde valérique, composé facile à obtenir, M. Gustave Bruylants a réussi à produire un nouvel hydrocarbure acétylénique, de la for- mule CH. L’aldéhyde valérique C;H,,0 étant l’aldéhyde isopropyl- acétique, ainsi que l'indique la formule CH, CE, V | CH, | CH 0. l'hydrocarbure acétylénique Cy Hs qu’en a déduit M. Bruy- lants doit être représenté par la formule CH, CH, V C’est en un mot l’ésopropyl-acétylène. d Sous l’action du chlorobrômure de phosphore Ph Cl; Br, (1) l’aldéhyde valérique a été transformée en bibrô- (1) Mélange de trichlorure de phosphore et de bròme, à molécules égales. (516) mure d’amylidène (4). CR, CH, | CH Br, Sous l’action des alcalis caustiques, celui-ci a été trans- formé lui-même, d’abord en amylidène monobrômé CH, CH, et finalement en isopropyl-acétylène CH, CH, CH | G Il CH. L'isopropyl-acétylène constitue un liquide incolore, fort mobile, très-léger, insoluble dans l'eau et bouillant à 36° ET (1) Il me parait rationnel et avantageux de terminer par la finale « idène » les noms des hydrocarbures Ca H, — CH < correspondant aux aldéhydes Ca Hz — CH O et dont celles-ci sont les oxydes Cette dénomination adoptée d'abord et depuis fongtemps en usage pour l'hydrocarbure CH, — CH, l'éthylidène, renfermé dans les dérivés CH, — CHX, de l'aldéhyde acétique, est susceptible et mérite d'être généralisée pour la commodité du langage. ( 917 ) ll est à la fois tétravalent et acétylénique; il donne successivement avec le bròme un bi et un tétrabromure CsHs Br, et C;H,Br,. Avec les solutions argentiques et cui- vreuses ammoniacales, il donne les précipités caractéris- tiques des composés acétyléniques. Je ne parlerai pas davantage des propriétés de ce nouvel hydrocarbure sur lequel M. Bruylants publiera dans un prochain avenir un travail complet ; mais je me permetirai, à cette occasion, de m'arrêter un instant à deux autres hydrocarbures pentacarbonés C;H,, isomères avec celui-ci et également térravalents. L'un deux est acétylénique, il a été obtenu par M. Frie- del (1) à Faide de l’acétone méthyl-propylique C;H, — CO —CH;. Cet hydrocarbure, sur lequel M. Friedel n’a donné que des indications fort incomplètes, bout vers 45°. C’est, selon toute vraisemblance, le propyl-acétylène normal Un autre hydrocarbure C;H,, plus anciennement connu, est le valérylène de M. Reboul (2). Ce produit n’est pas acétylénique. Il provient du brô- En (1) Annales de Chimie et de Ph erg t. XVI (4° série), p. 367. (2) Comptes rendus, t. LVIII ( 518 ) mure d’'amylène ordinaire. L'amylène étant je crois que l’on peut représenter la structure de cet hydro- carbure par la formule suivante : CH, CH, C l € ll CH, A l’aide du bibrômure de ce valérylène, M. Reboul à obtenu un nouvel hydrocarbure hexaatomique et acétylé- nique, C;H4, le valylène (1). U me paraît légitime, eu égard à son mode de formation, d'attribuer au valylène la structure suivante, CH, C— CH, Eol C— CH. Je me propose de faire appliquer la méthode générale quê je viens d'indiquer à la production d’autres hydrocarbures acétyléniques, à l’aide des aldéhydes correspondantes (2). DORA NUS (1) Comptes rendus ,t. LX, (2) On peut regarder dès à ge? l'acétylène comme susceptible d'être obtenu, d’après cette méthode, à l'aide de l'aldéhyde acétique CH; — CHO. Cette aldéhyde se transforme en effet aisément en brômure ( 549 ) Un hydrocarbure acétylénique CH — C = CH ne différant d’une aldéhyde que par une molécule d'eau, en moins, il serait intéressant de réaliser la transformation inverse de celle que je viens de signaler, e’est-à-dire la d'éthylidène CH, — CH Br,; celui-ci, sous l’action des alcalis caustiques , onne de l’éthylène monobrômé CH, = CH Br, à l’aide duquel on passe facilement à l’acétylène, ainsi que l'a constaté d’abord M. Sawitsch. Je crois aussi qu’il ne sera pas difficile de passer de l’aldéhyde pro- pionique CH; — CH, — CH O à l’allylène CH, — C = CH. M. Reboul (*) a fait connaître récemment le Geier à e propylidène cu SE — Sie Cl, produit de l'action Ph CI, s les alcalis caustiques ce Ges ne fournisse le propylidène monochloré CH, — CH = CH CI à l’aide duquel on arrivera à genge de même qu'avec le prépylène monochoré ordinaire CH, — C CI = J'ajouterai enfin qu’un hydrocarbure de la formule Gen nommé, assez improprement suivant moi, ænanthylidène, a été obtenu en 1867 par un élève de M. Limpricht, M. E. Rubien (**), en partant de laldéhyde œnan- thylique C, H}; O. M. Rubien ne constate pas dans son travail, fort concis d’ailleurs, si son hydrocarbure est {étravalentet acétylénique ou non. Pour moi, je ne doute pas qu'il ne possède ce double caractère, c’est ce que je me propose d'ailleurs de vérifier. Comme l’aldéhyde œnanthylique paraît être l'aldéhyde de l'acide normal C}, il est vraisemblable que l'œnanthyli- dène de M. Rubien répond à la formule et soit l'amyl-acétylène normal. () Comptes rendus, t. LXXVI , p. 1270 (année 1873). (”} Annalen der Chemie und Pharmacie, t. CL, p. 294. ( 520 ) transformation des hydrocarbures acétyléniques en aldé- hydes. Il est certainement inutile de songer à réaliser cette transformation par hydratation directe; mais si l'eau elle- même ne peut être fixée sur un hydrocarbure acétylé- nique, peut-être n’en sera-t-il pas de même de systèmes moléculaires équivalents, tels que notamment l’acide hypo- chloreux et l'hydrogène sulfuré H donnant à la suite de leur combinaison une aldéhyde mo- nochlorée ou sulfurée Cn Han +1 C= CH Ge Ba, y à — CH CI CO Co Han +1 — CH, — CH S. C’est ce que je me propose d'examiner moi-même. Avant de terminer, qu’il me soit permis d’ajouter que les recherches de M. G. Bruylants sur les dérivés valéri- ques, de même que celles de M. U. Massalski sur l'acide chloro-brômo-propionique, recherches que (a eu l'honneur de signaler à l’Académie, lors de la dernière séance, doi- vent servir à élaborer la dissertation nécessaire pour lob- tention du grade de docteur devant la Faculté des sciences de Louvain. (521 ) Recherches sur les dérivés glycériques; par M. Louis Henry, correspondant de l’Académie. SUR LES DÉRIVÉS ALLYLIQUES. SU. — Sur les produits d’addition des composés allyliques avec l'acide hypobromeux. Depuis l’époque où M. Carius a si heureusement introduit en chimie organique l'acide hypochloreux, cet excellent réactif est devenu d’un usage fréquent et, peut-on dire, classique dans les laboratoires. On sait quel parti avanta- geux divers chimistes ont tiré de son emploi. Les composés analogues à l'acide hypochloreux , l'acide hypobrômeux et surtout l'acide hypo-iodeux, ne jouis- sent pas de la même faveur; l’un et l’autre n’ont été, à ma Connaissance, employés jusqu'ici qu’une seule fois. M. Glaser (1) a décrit autrefois, dans un travail publié dans nos Bulletins, le produit d’addition de l'acide cinna- mique à l'acide hypobrômeux ; encore ce produit a-t-il été obtenu par une voie indirecte, et sans que l’on fit usage de l'acide hypobrômeux lui-même. Il y a quelques années, M. Lippmann (2) a fait connai- tre des dérivés d’addition de l'amylène à l'acide hypo- iodeux , obtenu dans des conditions spéciales que je crois mutile de rappeler pour le moment. (1) Bulletins de l'Académie royale de Belgique, t. XXIV, Ze série, p. 54, 1867. (2) Comptes rendus, t. LXIH, p. 968. (522) Je ne vois d’autre raison du délaissement dans lequel sont restés jusqu'ici ces deux composés intéressants, que la difficulté de les obtenir, difficulté au fond plus appa- rente que réelle, surtout en ce qui concerne l'acide hypo- iodeux. J'ai fait connaître précédemment les produits d’addition de plusieurs composés allyliques avec l'acide hypochlo- reux (1); diverses raisons, notamment l'espoir de pouvoir compléter dans quelques-uns de ses termes importants la série déjà si longue, mais encore-si incomplète, des combi- naisons glycériques, m'ont engagé à examiner les dérivés correspondants des acides hypobrômeux et hypo-iodeux. J'ai constaté qu’en général les dérivés allyliques C;H,X s'ajoutent à ces acides, avec la même facilité, dans les mêmes conditions et en même quantité moléculaire, qu'avec l'acide hypochloreux lui-même, en donnant éga- : e D 1 # nn: wm lement des composés glycériques, ydriq iodhy driques, répondant aux formules générales (C; H;) X (OH) Br et (C; H5) X (OH) lo. i Je me restreindrai dans cette notice à étude des déri- vés de l’acide hypobrômeux et même au produit de son addition avec le chlorure d’allyle (2). AA EDUT E Le eee (1) Bull. de l Acad. royale de Belgique, t. XXXVII (2e série), p- 557. (2) L’acide hypobrômeux s'obtient, sans grande difficulté, comme l'acide hypochloreux, d'après le procédé anciennement indiqué par M. Balard. ns de grands flacons en verre, on agite avec du brôme, que lon y introduit par petites porti ives, bouillie claire d'oxyde rouge mercure. La seule différence dans le procédé est la nécessité où l'on est de chauffer le flacon dans de l’eau tiède pour favoriser la réaction du brôme. La solution étendue d’acide hypobrômeux ainsi obtenu constitue, après filtration, un liquide d'un jaune orange, même en l'absence du brôme- Elle S ( 523 ) Le chlorure d’allyle C; H.C se combine vivement avec l'acide hypobrômeux. On emploie celui-ci en solution aqueuse et étendue, aussitôt après sa préparation. L'opé- ration se fait de la même manière et dans les mêmes con- ditions qu'avec l'acide hypochloreux. Il est bon de refroidir, afin d'éviter la formation de produits d’addition du bròme, à la suite de l’altération de l’acide hypobrômeux. La plus grande partie de la ehloro-brômhydrine allylique (C; H;) CI [ (OH) Br ] formée reste dissoute dans l’eau; il s’en sépare une partie au fond du vase, sous forme d’une couche huileuse, mélangée avec l’excédant du chlorure d’allyle employé. J'ai recueilli à part cette couche huileuse, et je Tat dis- tillée au bain-marie pour en expulser le chlorure d’allyle. Le reste a été reversé dans la masse liquide d’où j'ai retiré le produit dissous à l’aide de l’éther. On a fait passer dans cette solution éthérée un courant d'hydrogène sulfuré jusqu’à ce que tout le mercure dissous fût précipité à l’état de sulfure basique jaune. Cette solu- tion filtrée a été soumise à la distillation, au bain d’eau, Pour expulser l’éther, et le liquide restant a été rectifié à part. Le produit, ainsi obtenu et purifié, est d’une pureté remarquable ; il passe dès la première distillation presque totalement entre 490° et 200°, surtout vers 195°-197°; vers Ja fin seulement, il y a une légère carbonisation. L'analyse de ce produit a donné les résultats suivants : est fortement mae H est nécessaire de employer immédiatement après sa prépara C'est M. G. sec? qui a eu l'obligeance, pendant les vacances der- nières, de me préparer l'acide hypobrômeux que j'ai employé. (52) L 0#,4732 de substance ont fourni 0:",9014 de chlo- rure et de brômure d'argent. I. 07,5524 de substance ont donné 1“,0464 de chlorure et de brômure d'argent. Ce qui correspond à TROUVÉ. C, H; CI Br (OH). CALCULÉ, I. JE. C asi 36 » » Lü H; EE 6 H » ” a Ft ” } 66,37 °) 66,37 66,00 O — 16 175,5 La chloro-bromhydrine allylique (C; H;) CI [(OH) Br] ainsi préparée, constitue un liquide incolore, quelque peu épais, brunissant à la longue à la lumière, comme la plu- part des dérivés brômhydriques ; son odeur est faible et éthérée; sa saveur douce et piquante. Sa densité à 11° est égale à 1,759. Elle bout, sans décomposition, à 197°-198° sous la pres- sion de 746 millimètres (non corrigé). Sa densité de vapeur, déterminée à 185°, dans la vapeur d’aniline, à été trouvée égale à 5,62 (1). Substance employée 087,0339. Pression barométrique e Ee 746% Mercure spule s y 40. 626™. Température . © 185° Volume de la vapeur s 79 ec. 6. La densité calculée est 5,99. Ce produit présente les propriétés ordinaires des COM Neo SE (1) Le produit qui a servi à prendre cette densité de vapeur n'avait Été soumis qu’à une seule rectification. On voit par là combien la purification de ce corps est facile. ( 525 ) posés glycériques de cette nature. Il n’est que faiblement soluble dans l’eau, au fond de laquelle il tombe ; l'alcool et l’éther le dissolvent aisément. Sous l’action des chlorures des radicaux négatifs, Ph Cl;, Ph Bry, etc., du chlorure d’acétyle, ete., il réagit à la façon des alcools, en donnant les dérivés éthérés correspondants. J'examinerai plus tard, dans un travail spécial, l'action des alcalis caustiques sur ce produit, action que je regarde comme d’un intérêt tout spécial, au point de vue de sa constitution. Mais dès à présent, je tiens à signaler comment ce corps se comporte avec l'acide azotique. Cette chloro-brômhydrine se dissout, avec un notable échauffement, dans l’acide azotique fumant; l'acide sulfu- rique précipite de cette solution une chloro-brômo-nitrine, (C; Hs) CI (Az O;) Br, sous forme d’une huile lourde. Chauffée légèrement avec de l'acide azotique de con- centration ordinaire, cette chloro-brômo-nitrine s’ofyde en se transformant en un acide chloro-bromo-propionique GH. CI Br 0. Cette réaction démontre quelle est la véritable constitu- tion de cette chloro-brômhydrine allylique. Le chlorure d’allyle étant CH, CI deux chloro-brômhydrines isomères sont susceptibles, théoriquement, d'en être déduites par l'addition de l'acide hypobrômeux a) CH, CI Re dee (OH) da Br | | CH, Br CH, (OH). ( 526 ) L’analogie constante que Ton constate entre les com- posés chlorés et les composés brômés correspondants, me faisait prévoir que l'acide hypobrômeux , se comportant comme l'acide hypochloreux, donnerait, en s'ajoutant au chlorure d’allyle, un produit alcoolique primaire, de la for- mule b). La transformation de cette chloro-brômbydrine en un acide chloro-brômo-propionique a confirmé cette prévision théorique. Le produit d’addition de l'acide hypobrômeux au chlorure d’allyle doit done être représenté par la for- mule CH, CI cH Br CH, (0H). J'ai réalisé cette oxydation dans les mêmes conditions que celle de la dichlorhydrine allylique (UTC Hs) CI[(OH) CI] et l'acide chloro-brômo-propionique a été isolé par le même procédé que celui qui mwa servi pour l'acide bichlo- ro-propionique. Cet acide chloro-brômo-propionique CH: Cl — CH Br— CO OH bout à 245° en subissant une légère dé- composition; quelque temps après sa distillation, il se prend en une masse cristalline, formée de petites lamelles, fusibles vers 37°. Je n’entrerai pas davantage dans la des- cription et l'examen de ce produit; Ten ai confié l'étude à M. Massalski, ainsi que celle de l'isomère correspondant . CH, CI—CH Br— CO OH, produit de loxydation par l'acide azotique de la brômo-chlorhydrine allylique (C; Hs) Br [(OH) C1] (2. Je reviens à la chloro-brômhydrine allylique. Le radical e EE ee D (1) Voir le numéro précédent des Bulletins, pages 88 et suivantes Id, id, page | | | | ( 527 ) allyle, CH. triatomique, des dérivés glycériques étant CH, cH cn, les composés glycériques, mixtes triples C;H,XX'X”, doivent être représentés par trois isomères, CH, X CH, X CH, X’ | | | CH AT CH X” CHX | | | CH, X” CE, E CH, X” les radicaux ou résidus halogéniques X, X’ et X” étant suc- cessivement fixés dans ces dérivés sur le chaînon hydro- carboné CH. Cette déduction spéculative importante dans la théorie générale des combinaisons glycériques n’était, jusqu'ici, qu’une hypothèse vraisemblable. Je la regarde comme expé- rimentalement démontrée aujourd’hui. Les trois chloro- brémhydrines glycériques (C;Hs) CI Br (OH) existent et peuvent être différenciées les unes d’avec les autres, chi- miquement du moins. Lune de ces chloro-brômhydrines, la plus ancienne en date, a été préparée par M. Reboul (1). Elle résulte de la Combinaison de l'acide chlorhydrique à l'épibromhydrine (C; HA Pr ou de l'acide brômhydrique à l'épichlorhydrine (C; DHA CI O, et répond à la formule CE, CI CR (0H) CH, Br. s (1) Annales de Chimie et de Physique, t. LX, p. 28. (Année 1860.) (528) C’est un alcool isopropylique chlorobrômé et en sa qua- lité d'alcool secondaire elle donne, par oxydation, ainsi que Da récemment démontré M. A. Theegarten (1), une acétone chlorobromée corps solide, fusible à 54° — 35° et bouillant à 477° — 180° Les deux autres chloro-brômhydrines, obtenues par moi- même CH, CI CH, Br. CH Br CH CI | | CH, (0H) CH, (OH) sont les produits d’addition de l'acide hypochloreux au brô- mure d’allyle et de l'acide hypobrômeux au chlorure d’allyle. L’une et l’autre représentent de l'alcool propylique normal chlorobrômé et en leur qualité d’alcools primaires, elles donnent par oxydation des acides chloro-brômo-propio- niques de cl CH, Br CH Br CH CI | CO OH CO OH corps solides cristallisables, bouillant l’un et l’autre vers 215. Le mode de formation de ces deux composés ne permet de concevoir aucun doute sur la position relative et inversé egene (1) Berichte der Deutschen chemischen Gesellschaft zu Berlin, t. IL p- 1276 (1873). ( 529 ) des deux corps halogènes CI et Br, vis-à-vis des chaînons hydrocarbonés CH, et CH du radical glycérique CH. L'action oxydante les différencie ensemble de leur troi- sième isomère, mais est impuissante à les différencier l'une de l’autre, leurs produits acides d’oxydation se res- semblant comme ces deux chlorobrômhydrines elles- mêmes. J'espère trouver dans l’action des alcalis causti- ques des faits propres à démontrer matériellement leur individualité propre, l’une devant donner vraisemblable- ment de l’épichlorhydrine et l’autre de l’épibromhydrine ou un autre produit. Je reviendrai plus tard sur cette ques- tion dans un travail d'ensemble, dont je recueille les élé- ments, concernant l’action des alcalis caustiques sur les dérivés mixtes d’addition des composés non saturés en général. Avant de terminer, je tiens à faire remarquer que ces trois composés isomères si différents d’origine et de fonc- tion sont cependant, pour autant que j'aie pu en juger jusqu'ici, identiques au point de vue physique, notam- ment quant à la volatilité et à la densité, deux particula- rités des plus importantes dans le signalement physique des corps composés. C'est là sans doute un genre d’isomérie bien remarqua- ble et d’une délicatesse digne d'attention. L'identité physique, qui me paraît exister entre ces Chloro-brômhydrines, me paraît aussi se continuer entre les deux acides chloro-brômo-propioniques auxquelles deux d’entre elles donnent naissance par oxydation. J'espère Que les recherches entreprises par M. Massalski permet- tront de nous édifier complétement sous ce rapport. Partant de ces trois chloro-brômhydrines glyeériques, il est facile d'en déduire d’autres séries d’isomères glycéri- 2®° SÉRIE, TOME XXXVII. ( 530 ) ques mixtes triples, notamment trois chlorobrômo-acétines, trois chloro-brômo-nitrines. I ne sera ni inutile ni superflu de préparer ces composés, afin de pouvoir les comparer sous le rapport physique. De la distinction originelle du testicule et de l'ovaire; carac- tère sexuel des deux feuillets primordiaux de l'embryon; hermaphrodisme morphologique de toute individua- lité animale; essai d’une théorie de la fécondation; par M. Édouard Van Beneden , membre de l'Académie. PREMIÈRE PARTIE. L Introduction. Homologie de er et de l’endoderme dans les divisions primaires du règne animal. IL. Historique des recherches faites sur Fori- gine des produits sexuels chez les Fes (4). IH. Études sur l'Hydractinia echinata. Į. — INTRODUCTION. Huxley fut le premier qui démontra que tout l'organisme des Zoophytes, Méduses et Polypes, Hydroïdes et Siphono- phores peut se ramener à un sac formé de deux couches cellulaires adjacentes : l’ectoderme et l’endoderme (All- man) et qui considéra cette proposition comme exprimant la loi générale de structure chez les Zoophytes (2). Quoique (1) J'emploie cette dénomination dans le sens que mon père lui a attri- bué (1845) pour désigner les Polypes, les Acalèphes € et les Spongiaires; ) Observations upon the anatomy of the Diph yde and the unity of organisation of the Diphydæ and Siphonophoræ (Envoyé d'Australie à la ( 5951 ) l’on ne songeàt pas encore à cette époque à rechercher des homologies entre les Vertébrés et les animaux infé- rieurs, Huxley comprit toute la portée de sa découverte. Il reconnut et formula dans un langage clair et précis son opinion sur l’homologie qu’il croyait exister entre lecto- derme et l’endoderme des Cœlentérés et les deux feuillets cellulaires primordiaux des vertébrés. Voici en quels termes il exprima cette idée : « The peculiarity in the structure of the body-walls of the Hydrozoa, to which I have just referred , possesses a singular interest in its bearing upon the truth that there is a certain similarity between the adult states of the lower animals and the embryonic conditions of higher Organisation. For it is well known that, in a very early state, the germ, even of the highest animals is a more or less com- plete sac, whose thin wall is divisible into two mem- branes, an inner and an outer; the latter, turned towards the external world; the former, in relation with the nutri- tive liquid, the yelk. . The various organs are produced by a process of budding from one, or other, or both of these primary layers of the germ. » Il cherche même a établir un parallélisme, au point de vue histogénique, entre lectoderme des Zoophytes et le feuillet externe de l'embryon des vertébrés d'un côté, Linnean Society en 1847 et publié dans les PROCEEDINGS OF TRE Royal Socrery en juin 1849 La même opinion se trouve généralisée et exposée plus complétement dans un travail publié la même année, Memoir on the anatomy and affinities of the Meduse. ( 532 ) l’endoderme et le feuillet interne de l’autre. I conclut en disant ` « Thus there is a very real and genuine analogy, between the adult Hydrozoon and the embryonie vertebrate animal. » Toutes les recherches embryogéniques faites dans ces dernières années sur les premières phases du développe- ment embryonnaire des animaux de tous les embranche- ments, sont venues confirmer, en l’étendant à l’ensemble du règne animal, l'opinion de l’illustre naturaliste anglais. Et au premier rang des travaux faits dans cette direction se placent sans contredit ceux de Kowalewsky : en mon- trant l'identité du développement de l’'Amphioxus et des Ascidies, il combla d’un seul coup l'abime jugé infranchis- sable qui séparait l’'embranchement des vertébrés de tous les organismes inférieurs. Les importantes publications du même auteur sur les autres types d'organisation, jointes à celles de Gegenbauer, de Hæckel, de Ray Lankester, de Kleinenberg et de quelques autres, ont eu pour résultat d'étendre à ensemble du règne animal cette grande con- ception que toutes les parties des organismes animaux sè forment aux dépens de deux feuillets cellulaires primor- diaux, et partout homologues. Ces idées viennent d’être longuement développées et brillamment défendues dans deux écrits d'une haute por- tée philosophique : Hæckel a exposé, dans sa brochure Die Gastrœæa-Theorie, die phylogenetische Classification des Thierreiches und die Homologie der Keiïmblätter, une théo- rie qu’il avait énoncée tout d’abord dans sa Monographie des éponges calcaires. Des idées analogues, et à plusieurs égards tout à fait identiques, ont été publiées en Angleterre dans les Annals and Magazine of natural History SOUS le titre : « On the Primitive Cell-layers of the Embryo 45 ( 533 ) the Basis of Genealogical Classification of Animals » par mon ami E Ray Lankester. Tous les animaux pluricellulaires, chez lesquels le développement débute par le fractionnement de la cellule- œuf, passent dans le cours de leur évolution par une même forme embryonnaire, celle d’un sac dont les parois minces sont constituées par deux couches adjacentes; l’endoderme et l’ectoderme. La première circonserit immédiatement une cavilé qui est le tube digestif primordial; la seconde limite extérieurement le corps de l'embryon; elle seule peut être impressionnée par les causes externes. — La cavité digestive communique avec l'extérieur par un seul orifice qui sert à la fois de bouche et d'anus. — L’embryon se réduit à une cavité digestive, qui n’est qu’un simple estomac; Hæckel a proposé de donner à cette forme pri- mordiale le nom de Gastrula. — Comme cette forme em- bryonnaire se rencontre chez les Vertébrés aussi bien que chez les Mollusques, les Arthropodes, les Échinodermes, les Vers et les Polypes, il est clair que l’ectoderne est homo- logue chez les différents types d'organisation; que l’endo- derme a chez tous la même valeur morphologique ; que la cavité digestive primordiale des Vertébrés et celle de tous les autres types d'organisation ont la même signification anatomique. L'existence de cette forme commune dans le Cours de l’évolution de tous les animaux métazoaires, per- met de les ramener à une souche commune ; il y a conver- gence des grands types d'organisation et non parallélisme, comme on l'avait admis depuis Cuvier et von Baer. Enfin, on peut en induire l'existence, à une époque géologique reculée , d'organismes semblables à la forme Gastrula; ces Organismes, probablement variés de mille manières dans leur forme et dans leurs caractères extérieurs, ont été la ( 554 ) souche commune des Vertébrés, des Arthropodes, des Mol- lusques, des Échinodermes, des Vers et des Zoophytes; ils constituaient le groupe très-nombreux des Gastræades (Hæckel). Si l’endoderme et l’ectoderme sont homologues chez tous les Métazoaires, on est en droit de supposer que ces deux feuillets cellulaires ont aussi chez tous la même valeur histogénique et que les mêmes systèmes organiques se développent dans les différents types d'organisation aux dépens des mêmes feuillets primitifs. Cette induction a été déjà pleinement confirmée en ce qui concerne le système nerveux central qui se développe chez tous les animaux aux dépens de l’ectoderme. Dès lors, il est indifférent , si l'on veut connaître lori- gine d'un appareil, de la rechercher dans Pun ou l'autre type d'organisation; les résultats pourront s'étendre à l’ensemble du règne animal et recevoir une portée géné- rale. Or, de tous les types d'organisation celui qui se prête le mieux à la recherche de cette question capitale de l'origine des systèmes organiques, c'est celui des Polypes, encore appelés Zoophytes ou Cœlentérés. Chez eux, en effet, l’ectoderme et l’endoderme persistent avec leurs caractères embryonnaires pendant toute la durée de la vie: tous les organes des Zoophytes ne sont qu'une dépendance de l’un ou l’autre de ces feuillets, quelquefois des deux feuillets réunis. La forme polype se ramène avec la plus grande facilité à la Gastrula dont toutes les parties se conservent sans subir de grandes modifications pendant tout le cours de l’existence. ( 535 ) IL — HISTORIQUE. La question de l’origine des organes sexuels, de l'ovaire et du testicule, de l'œuf et du spermatozoïde est peut-être la plus importante de toutes celles dont la solution peut être donnée par l’histogénie, Aussi a-t-elle été l’objet d’un grand nombre d’investigations. Elle a été étudiée chez les Vertébrés, mais plus encore chez les Zoophytes. Les solu- tions qu'on en a données, basées en apparence sur les re- cherches les plus minutieuses, sont si diverses, et en même temps affirmées avec tant d'assurance, qu’il n’est pas pos- sible, en se fondant sur les renseignements publiés jus- qu'aujourd'hui, de se faire une conviction personnelle, et de prendre parti pour l’une ou pour l'autre opinion. Tandis que les uns soutiennent de la manière la plus positive que les œufs et les spermatozoïdes se forment aux dépens de l’endoderme , les autres certifient d’une façon aussi absolue l'origine ectodermique des produits sexuels. Tous ceux qui se sont occupés de l’organisation des Zoophytes et qui ont étudié, à quelque point de vue que ce Soit, leurs organes sexuels, ont reconnu que les œufs et les spermatozoïdes se développent entre l’ectoderme et lendo- derme. Rien n’est plus facile que de constater qu’il en est bien ainsi, au moins en apparence, et les sporosacs aussi bien que les Méduses libres laissent apercevoir les œufs et le testicule entre ces deux membranes. Sur ce point, du reste, toutes les affirmations sont unanimes. Les diver- gences commencent seulement quand il s’agit de décider quelle est l’origine primitive des produits sexuels. Lorsque Huxley commença la série de ses publications A ( 536 ) sur Ja morphologie des Hydrozoaires, Will et Milne Edwards avaient déjà établi que chez les Méduses les organes sexuels sont toujours en connexion avec quelque partie du système gastro-vasculaire; mais ces naturalistes n'avaient pas cherché à déterminer la nature de cette connexion. Dans son célèbre mémoire sur l'anatomie et les affinités des Méduses (1), Huxley décrit l'ovaire et le testi- cule des Cryptocarpées, des Phanérocarpées et des Rhizo- stomides comme étant formés à la fois par l’ectoderme et par l’endoderme; il reconnaît que toujours les œufs et les spermatozoïdes se trouvent en voie de développement entre les deux membranes, sans les faire dériver ni de Fane ni de l’autre. Dans ses Oceanic Hydrozoa, il se prononce, quoique avec réserve, en faveur de l’origine ectodermique des produits sexuels : « The reproductive organs consist, troughout the Hydrozoa, of spermaria and ovaria, portions of the tissue of the wall of the hydrosoma, and I believe, more particularly of the ectoderm , metamorphosed into spermatozoa or ova (2). » Kölliker (3), au contraire, affirme positivement que les œufs aussi bien que les spermatozoïdes se forment invaria- blement aux dépens des cellules de Pendoderme. Allman a toujours défendu la même thèse. Il a déclaré, dans un grand nombre de publications successives, que ses observa- tions ne laissent aucun doute relativement à l'origine endodermique des produits sexuels; il a formulé son opi- nion dans sa magnifique Monographie des Hydroïdes gym EE (1) On the Anatomy and the Affinities of the Family of the Medusæ. PaiLosoPæicaz Transactions, 1849, Part. I, pages 420 et suivantes. (2) The Oceanic Hydrozoa, publié par la Ray Society, 1858, page 16. (3) Icones Histiologicæ , 1866. Part. Il, page 89. ( 537 ) noblastiques (1), et tout récemment encore il a maintenu la même manière de voir quand il a rendu compte des recherches de F. E. Schulze (2) et de Kleinenberg (3). Allman signale la divergence qui existe entre ses obser- vations et les résultats auxquels Kleinenberg est arrivé par ses études sur Hydre d’eau douce. a Dans les Hydroïdes marins, dit Allman, les éléments sexuels se forment aux dépens d’une couche homogène, qui apparaît entre l’endo- derme et l’ectoderme du manubrium d'un gonophore, et il faut bien reconnaitre que jusqu'à présent nous n’avons pas de raison pour la faire dériver plutôt de l’une que de l'autre des deux membranes. Les œufs et les spermatozoïdes se différencient aux dépens de cette couche qui s’épaissit rapidement. Son accroissement s'opère comme si elle subis- sait constamment de nouvelles additions du côté de l'en- doderme, ce qui me porte à croire qu'elle s’épaissit par transformation progressive du tissu endodermique. Tou- jours est-il que les éléments reproducteurs se développent dans une direction centrifuge, que les œufs et les sper- matozoïdes les plus avancés dans leur développement se trouvent toujours au contact de l’ectoderme et les moins mürs dans le voisinage de l’endoderme. Ces faits ne démon- trent pas d’une manière absolue l’origine endodermique des produits sexuels; mais elles la rendent extrêmement probable. » Un autre fait qu'Allman invoque en faveur Monograph of the Gymnoblastic or Tubularian Hydroïds, 1872, 149. e Remarks on Prof. Schulzee Memoir on Sgen lacustris. QUARTERLY JOURNAL FOR MICROSC. sc., new series. Vol. XIE, 1872. (5) Some Account on Kleinenberg's Researches on vg Anatomy and development of Hydra. Ion, 538 ) de son opinion, c’est Pexistence, dans certains cas, d'une membrane mince à la face extérieure des produits sexuels, de manière à séparer ceux-ci du contact immédiat de lec- toderme. Cette membrane, Allman la considère comme n'étant autre chose que la lamelle musculaire de Kleinen- berg. Les Spongiaires comme les Cœlentérés sont constitués d'un endoderme et d’un ectoderme. Hæckel fait dériver de lendoderme les œufs aussi bien que les spermatozoïdes des Éponges calcaires. Chez les Spongiaires il n'existe ni ovaire ni testicule proprement dit; les œufs et les sper- matozoïdes peuvent se former par différenciation des cel- lules de l'endoderme en n'importe quel point du système canaliculaire, Cependant Hæckel a conservé un doute rela- tivement à cette origine, surtout en ce qui concerne les œufs. Les këng montrent chez tous les Spongiaires des tactifs et ils voyagent non-seulement à l’intérieur des canaux de l’Éponge, mais même dans l'épaisseur des tissus; aussi les trouve-t-on fréquemment entre l'endoderme et l’ectoderme, voire même au milieu des cellules de cette dernière membrane. Hæckel dit explicitement que la question de l'origine et de la situation primordiale des produits sexuels est la plus difficile et la plus obseure de toutes celles qui se présentent dans l'étude de l'histologie des Éponges, et il ajoute: « et des Zoophytes en général (1). » Dès 1864 ses études sur l’organisation et le développe- ments des Geryonides avaient fait dire à Hæckel que chez CU. (1) Monographie der Kalkschwämme , vol. 1, pp. 144 et suiv. el aussi p. 470. > ( 5359 ) ces Méduses les œufs aussi bien que les spermatozoïdes se forment aux dépens de l’endoderme (1). Les recherches de Keferstein et de Ehlers (2), de Claus et de P.-E. Müller chez les Siphonophores, de F.-E. Schulze sur les Cordylophora, enfin de Kleinenberg sur l’'Hydre d'eau douce, tendent à démontrer, tout au contraire, que les produits sexuels dérivent de l’ectoderme. Keferstein et Ehlers n’ont pas fait de cette question de l’origine des produits sexuels une étude spéciale. Ts affirment que ces produits naissent du feuillet ectoder- mique; mais nulle part ils ne rendent compte des observa- tions qui leur ont fait adopter cette manière de voir. Aucune description du mode de formation des œufs on du testicule n’est donnée dans leur mémoire. Claus (5) a décrit après Huxley, Keferstein, Ehlers et Gegenbauer le développement d'un bourgeon cellulaire qui, dans les cloches sexuelles des Siphonophores, se forme aux dépens de l'ectoderme et qui donnerait naissance, d'après lui , aux produits sexuels mâles et femelles. Tout récemment un excellent observateur danois, P.-E. Müller, est arrivé à des conclusions toutes sembla- (1) Hæckel, Die Familie der Rüsselquallen (Medusæ Geryonidæ), Jenaïsche Zeitschrift, I Bd , 1864, p. 449. i (2) Keferstein ùnd Ehlers. Zoologische Beiträge : Der aüsseren Hau allein kommt die Eigenschaft zu in ihren Zellen Nesselkapseln zu bilden, und sie hat mehr den Charakter einer blossen sl obwohl auch die Geschlechtsprodücte in ihr bereitet werden (5) Neue Beobachtungen über die Structur und LASER der Siphonophoren. Zeitschrift für wiss. Zool. Bd. XII. I avait déjà émis la même opinion dans son premier mémoire sur l’organisation des Siphono- res : Ueber Physaloptera hydrostatica. Zeitschr. für wiss. Zool. A. ( 540 ) bles en étudiant d’autres Siphonophores, principalement l'Hippopodius luteus (1). Kleinenberg (2) décrit avec beaucoup de détails la for- mation du testicule et de l’ovaire de l'Hydre, aux dépens de son tissu interstitiel qui n’est que la partie profonde de lectoderme. La formation de l'organe débute par un accroissement et une prolifération des cellules de ce tissu; Pune de ces cellules s'accroît exceptionnellement pendant que les autres restent stationnaires ; son noyau se déve- loppe et devient la vésicule germinative; son corps se charge d'éléments nutritifs de façon à constituer le vitellus de la cellule-œuf. Chez le Cordylophora lacustris, F.-E. Schulze fait appa- raître les œufs dans des épaississements de lectoderme- n ce qui concerne les œufs, il est très-explicite : il dit même que dès le début de leur apparition les œufs se trou- vent en dehors de la membrane anhyste qui sépare lecto- derme de l’endoderme. ser Il règne dans les sciences naturelles, et il en est amsi dans toutes les branches des connaissances humaines, des idées que tout le monde partage, qui sont regardées comme des vérités inébranlables ; on les accepte comme de véri- tables dogmes sans que l’on sache sur quoi ils reposent ni pourquoi on les admet. Cette croyance dans de prétendus ` axiomes scientifiques a été cause de bien des erreurs; elle a arrêté bien souvent dans leur marche progressive les sciences d'observation. Au nombre de ces dogmes scienti- fiques acceptés comme articles de foi par tous les embryo- IR Ee (1) Jagttagelser over nogle Siphonophorer. Kjobenhav E (2) Kleinenberg, Hydra, Eine Anatomisch - Et z liche Untersuchung. 1872. ( 54 ) génistes et tous les physiologistes se trouve la notion de la communauté d'origine de lovaire et du testicule. J'étais imbu du même préjugé quand j'ai commencé mes recher- ches, et il a fallu une circonstance particulièrement heu- reuse pour faire naître le doute dans mon esprit et me permettre de faire un pas vers la connaissance de la vérité. Quand je me suis rendu à Ostende pour tâcher de me faire une conviction personnelle sur la question de l’origine des produits sexuels chez les Zoophytes, j'étais loin d'imaginer qu’elle pùt être différente dans les deux sexes. Je fis d’abord toutes mes observations sur des colonies femelles, car les œufs sont plus faciles à distinguer au milieu de n'importe quel tissu que des cellules spermatiques. Quand j'eus reconnu de la manière la plus positive chez _ les Hydractinies, chez les Clava et chez les Méduses des | Campanulaires que les œufs prennent naissance dans len- doderme, et qu’ils ne sont en dernière analyse que des cel- lules endodermiques modifiées, je crus le problème résolu, et j'eus la conviction que les produits sexuels dérivent de lendoderme. Je me mis alors, à étudier des sporosacs mâles. Je crus reconnaître que le testicule se forme aux dépens de l’ectoderme. Je ne quittai pas mon microsco avant d’avoir obtenu une certitude complète. Plusieurs fois j'ai refait toutes mes préparations dans les deux genres que j'avais sous la main. Il fallut bien se rendre à l'évi- dence. Alors je compris la portée de ma découverte. Revenu à Liége, j'ai vérifié encore toutes mes observations sur des Hydractinies que j'avais ramenées vivantes. Si j'ai rappelé assez longuement l'histoire de mes recher- ches, c’est pour montrer que ce n’est pas sous l'influence d'une idée préconçue que j'en suis venu à établir la dis- tinction originelle des deux glandes sexuelles : j'étais telle- ( 542 ) ment pénétré de la croyance à la communauté d’origine de l'ovaire et du testicule, que j'étais au début plus tenté de douter de mes sens que de la vérité du dogme scientifique; tant il est difficile de se débarrasser de certaines idées pré- conçues et tant leur influence est funeste! Et quant aux divergences d'opinions entre les auteurs, je me les explique jusqu’à un certain point par cette considération que la plupart des naturalistes ont fait probablement des recher- ches sur l’un des sexes et qu’ils ont étendu à Pautre les conclusions de leur étude. Deux genres d’Hydroïdes communs sur nos côtes ont fait les principaux frais de mon travail ` l Hydractinia echinata de P. J. Van Beneden (1) et l'Hydra squamata de O. F. Müller (2), la Coryna squamata de Lamarck (3), le type du genre Clava de Gmelin (4), reconnu par John- ston (5) et Strethill Wright (6); Hincks (7) a restitué à cet animal son premier nom spécifique : il a désigné ce joli polype sous le nom de Clava squamata qui lui a été con- servé dans la monographie des Tubularides de Allman (8). (1) P. J. Van Beneden, Bulletin de l’Académie royale de Belgique, t. VHI, 1841 Ze Recherches sur lembryogénie des Tubulaires, MÉMOIRES DE L'ACA- DÉMIE ROYALE DE BELGIQUE, t. XVII, p. 104, pl. IX. 3 Recherches sur la faune liltorale de Belgique (Polypes). MÉMOIRES 51. (2) Otho Fred. Müller, Zool. Dan. Icon. Tab. IV. (5) Lamarck. Histoire des animaux sans vertèbre (4) Gmelin à créé le genre Clava dans la treizième ikk du Systema Naturæ, 1788 (5) Sekten. British Zooph., 1847, (6) Strethill Wright. Proc. Roy. Phy We Ca Edimb., vol. 1, p- 228, pl- X, fig. 2 et 3. (7) pre Brit. Hydr. Zooph., p. 4, pl. I, fig. 92. (8) Allman. A Monograph of the Gymnoblastic or Tubularian Hy- festae e H. IL — RECHERCHES SUR L'HYDRACTINIA ECHINATA. Les Hydractinies vivent en nombreuses colonies à la surface de différentes espèces de coquilles de Gastéro- podes ( Buccinum , Natica, et d’autres) abandonnées par leurs habitants naturels et occupées par des Pagures. Les pêcheurs de crevettes en prennent régulièrement dans leurs filets; et durant tout le temps que j'ai passé à Ostende j'ai pu wen procurer journellement. On peut les tenir vivants dans de petits aquariums pendant quelques jours si l’on prend la précaution de renouveler l’eau de temps en temps. Les colonies de cette espèce présentent, plus que tous les autres Hydroïdes, le phénomène du polymorphisme. Elles se composent toujours de trois sortes d'individus ou plutôt de trois formes de zooïdes. 1° Les Polypides ou Hydranthes, zooïdes mangeurs qui portent une couronne de tentacules disposés en une Ou en deux rangées. 2 Les zooïdes qui donnent naissance aux sporosacs. Ces individus chargés des soins de la reproduction sont appelés gonosomes par Allman. Ils sont plus grêles et plus courts que les Hydranthes ; ils sont dépourvus de ten- tacules ; quand il sont complétement développés, ils portent un grand nombre de sporosacs (1) à différents états de développement. 5° Strethill Wright a décrit une troisième sorte de z00ïdes ` certains individus dépourvus à la fois de tenta- (1) J'emploierai indiffé tl d td ph P d ( 544 ) cules et de bouche ne donnent jamais naissance à des spo- rosacs. Us ont un corps allongé de forme eylindroïde. J'ai constaté que leur système musculaire est extrêmement développé, principalement près de leur base d'insertion; c’est grâce à cette particularité qu’ils s’enroulent dès qu'on les touche. Je ne les ai jamais vus former une spirale à plu- sieurs tours comme Wright et Allman en ont figuré : tout au plus décrivent-ils, quand ils sont enroulés, un cercle complet ou plutôt un tour de spire. Ils se rencontrent exclusivement près des bords de la colonie. Je wai pas observé la quatrième forme de zooïdes dé- crite par Strethill Wright et Hincks. Des filaments allon- gés semblables à de longs tentacules et dépourvus de la faculté de s’enrouler en spirale ont été considérés par ces naturalistes comme représentant une quatrième catégorie de zooïdes. Allman a reconnu que leur présence n’est pas constante. Quant aux sporosacs développés directement sur le eœnosare, je ne les ai jamais observés, et en cela je n’ai pas été plus heureux que Allman. Je crois comme lui que Wright 3 commis une erreur en regardant comme des sporosacs nés directement sur le cœnosarc des zo0ïdes à blastostyle très-court. Je ne m'occuperaïici que des zo0ïdes de la seconde caté- gorie ` des gonosomes ou zooïdes reproducteurs. Les Hydractinies sont dioïques : tous les zooïdes repro- ducteurs d'une même colonie sont toujours du même sexe. On trouve dans une même colonie des zooïdes de tout âge et de toutes dimensions. Il en est qui ne portent en- core aucune trace de gonophores à côté d’autres qui en sont fortement chargés; de plus, chaque gonosome porte des sporosacs à des états de développement extrêmement nl. dns: (545 ) différents. Ces deux circonstances sont éminemment avantageuses pour l'étude de la question de l’origine des produits sexuels. Quand on 3 sous les yeux une colonie mâle, on est sûr en prenant n'importe quel zooïde repro- ducteur d’avoir choisi un individu mâle et il n’est pas né- cessaire de recourir à l'examen des organes et des produits sexuels pour déterminer le sexe. On peut donc affirmer que tel gonosome chez lequel les sporosacs n’ont pas encore commencé à se former, produira des sporosacs mâles ou femelles; il est possible de déterminer avec cer- titude le sexe de l'organe reproducteur dès le moment de son apparition et bien avant qu'on puisse le distinguer par la nature de ses produits. Les colonies femelles se reconnaissent avec la plus grande facilité. Le vitellus des œufs est d’un beau rouge Cl comme les œufs se laissent apercevoir à travers les parois minces et transparentes des sporosacs, ceux-ci apparais- sent avec cette même couleur vive qui caractérise à pre- mière vue les colonies femelles. Les testicules, au contraire, sont d'un blanc laiteux et l’ensemble de la colonie présente à peine une faible teinte rosée qui dépend de la présence Tune matière pigmentaire rose dans la cavité digestive et dans les cellules de l’endoderme. La teinte générale de ces colonies mâles est plus ou moins marquée; elle varie entre le blanc presque pur et le rose plus ou moins foncé, pou- vant même passer au brun dans quelques colonies. Je ne Sais pas à quoi il faut attribuer ces différences de teinte. : Caractères communs aux zooïdes reproducteurs mâles et femelles. Les zooïdes reproducteurs se distinguent immédiate- ment des Hydranthes par l'absence complète de tenta- Ze: SÉRIE, TOME XXXVII. 36 ( 546 ) cules. Ce caractère avait été reconnu par mon père, quand il fit dans son mémoire sur les Tubularides de la eûte d'Ostende la description de son genre Hydractinie (1). De Quatrefages, qui décrivit quelque temps après, sous le nom de Synhydra, le même animal, avait aussi signalé cette dif- férence entre les individus reproducteurs et les individus mangeurs (2). Cependant il existe autour de l'extrémité supérieure (pôle oral) du zooïde des tubereules globulaires qui ont, lair de tentacules atrophiés. Ils donnent à cette extrémité du corps une certaine ressemblance avec un chou-fleur (de Quatrefages). Ces tubercules sont exclusivement formés par l’ectoderme et jamais l’endoderme ne leur envoie au- cune espèce de prolongement, ce qui les distingue des tentacules proprement dits. Ces tubercules sont disposés en deux séries alternantes et leur nombre varie avec l’âge du zooïde. Ils ont les mêmes rapports de position avec la bouche que les tentacules chez les Hydranthes. Ces tuber- cules sont toujours fortement chargés d'organes urticants, comme les vrais tentacules des Hydroïdes. On pourrait les appeler des pseudotentacules. Je crois en effet que ces tubercules ne sont que des ten- tacules dégénérés (généalogiquement parlant) et je pense que les zooïdes reproducteurs ne sont dans le même sens que des Hydranthes modifiés à raison du rôle physiolo- gique particulier qu'ils ont à remplir dans l'économie de la colonie. Dans le cours de l’évolution ontogénique de ces EE EE (1) P.-J. Van Beneden, Recherches sur l'embryogénie des Tubulaires, MÉY. DE L'ACAD, ROY. DE BELG, VII. (2) De Quatrefages, oy. sur la Synhydre parasite, ANN. SC. NAT- 2 sét. t. XX, p. 232. DEE vg ( 547 ) zooïdes, les tentacules proprement dits n'apparaissent plus. Les pseudotentacules se montrent dès le début, avee leur caractère de simples dépendances de l’ectoderme. Le corps des zooïdes reproducteurs a une forme cylin- droide. On peut y distinguer quatre régions (pl. I, fig. 2, 5 et 4 1° Une portion basilaire toujours plus large et présen- tant dans toute sa hauteur le même diamètre, je Pappel- lerai la région gastrique; ® une portion moyenne aux dépens de laquelle se développent les sporosacs, je la désignerai sous le nom de région germinalive; 3° une portion terminale plus grêle que la région basilaire dans laquelle la cavité digestive est très-étroite, je l’appellerai région cambiale; 4 un renflement terminal dans lequel le canal digestif se dilate en une cavité ovoïde. C’est celte partie terminale renflée qui porte les pseudotenta- cules et l’orifice buccal. La présence de cet orifice a été niée par de Quatrefages; Allman doute aussi de sa présence (1). Cependant Strethill Wright avait déjà remarqué que la moindre pression exercée sur les parois du corps du zooïde détermine l’évacuation par un orifice terminal des matières alimentaires (2). Agassiz a trouvé une bouche bien développée chez l'espèce ere? caine du genre Hydractinie(3). at pu m'assurer de l'exis- tence constante d’un orifice à l’extrémité du renflement (1) Monography of the Tubularian Hydroïds, part. I, p 222. « I have ot satisfied myself as to the complete absence of a mouth in the blasto- style. » (2) Strethill Wright, Proc. roy. phys. Soc. Edimb., 1862. (5) L. Agassiz, Contrib. nal. Hist., U. S., vol. II, pl. XVI et vol. IV, p. 227. ( 548 ) terminal des zooïdes reproducteurs mâles et femelles. Cet orifice est petit et sert probablement d'anus plutôt que de bouche, quoique primitivement il ait rempli l’une et l’autre fonction. Il a cessé de jouer le rôle d'orifice buccal, à la suite de l'atrophie des tentacules et il est devenu très-étroit, depuis qu'il ne sert plus qu’à expulser des résidus peu volumineux. Le corps tout entier des zooïdes reproducteurs est formé, comme chez tous les Hydroïdes, d'un ectoderme el d'un endoderme; ces deux couches cellulaires sont en continuité l’une avec l’autre au niveau de l’orifice buccal. L'endoderme et l'ectoderme sont formés dans toutes les régions du corps d’une seule couche de cellules; mais ces cellules, surtout celles de l’endoderme , ont des caractères fort différents dans ces diverses régions. Je n'ai à m'oceu- per dans ce travail que de la région germinative; je décri- rai plus loin les caractères qu'affectent dans les deux sexes ces deux couches cellulaires. Entre les deux couches existe une membrane sans structure dont l’épaisseur varie d'un point à un autre (Stützlamelle de Leydig et de Reichert). La face externe de cette membrane n’est jamais lisse; au contraire, elle est toujours striée longitudinalement. Elle est tapissée dans toute la longueur du corps par une couche de fibres mus- culaires. J'ai pu démontrer chez les Hydractinies la conti- nuité des cellules de l’ectoderme avec ces éléments muscu- laires et confirmer pour ce genre les belles observations de Kölliker et surtout de Kleinenberg sur l'Hydre d'eau douce. Les procédés qui mont le mieux réussi pour isoler ces éléments ont été : 4° la macération pendant 24 heures de ( 549 ) colonies traitées au préalable par une solution de += d'a- cide osmique et 2° le traitement prolongé par une solution de +; de chlorure de platine mêlé avec -+ d'acide chromi- que; cette méthode m'a donné d'excellents résultats. Après un séjour de deux à trois jours dans cette solution, les Hydractinies laissent isoler facilement les éléments consti- tutifs de l’ectoderme. Je décrirai tout au long dans un travail spécial sur l'organisation et le développement des Hydractinies mes recherches sur la structure et la formation de lectoderme. Je veux seulement en dire un mot ici. La couche musculaire est surtout épaisse dans la région basilaire du corps; mais elle s'étend partout entre lendo- derme et l’ectôderme à la face externe d’une lamelle sans Structure. Elle est composée de véritables fibres-cellules. Chaque fibre consiste en un cordon de substance réfrin- gente (substance musculaire) entouré d’une mince couche de matière protoplasmique dans laquelle on observe un noyau ovalaire. La substance musculaire diffère notablement par son apparence, principalement par son homogénéité et sa réfrin- gence des cellules de l'ectoderme. Par ces caractères, ces éléments sont assez semblables aux fibrilles musculaires des Cordylophora, décrites par F.-E. Schulze; mais elles Ont les bords lisses chez les Hydractinies. Les fibres mus- Culaires des Hydractinies diffèrent beaucoup des prolon- Sements musculaires de l'Hydre décrits par Kölliker et Kleinenberg. Aux deux extrémités de la fibre, la substance muscu- laire s’amincit et se termine en pointe, tandis que la couche protoplasmique, au contraire, devient plus épaisse. Dans un grand nombre de préparations, j'ai vu la conti- ( 550 ) nuité de ces fibres-cellules avec une cellule de l'ectoderme. Cette continuité s'établit par l'intermédiaire d’un cordon de protoplasme dans lequel on ne peut plus distinguer aucune trace de substance musculaire. A côté de ces fibres, on en voit, dans toutes les prépa- rations , une foule d’autres qui se terminent à une de leurs extrémités par un cordon protoplasmique ; mais la conti- nuité avec les cellules ectodermiques 3 été rompue par la dilacération. Les cellules ectodermiques représentent phy- siologiquement des cellules nerveuses faisant en même temps fonction de cellules de sens et de cellules centrales. Les cordons protoplasmiques qui les relient aux fibres musculaires sont de véritables nerfs moteurs. L'ectoderme fait fonction de système nerveux; à ses dépens se forme le feuillet musculaire avec lequelil reste en continuité. Mes observations confirment en tous points les belles recher- ches de Kleinenberg sur l'Hydre d’eau douce , et je ne puis que me rallier aux considérations qu’il a énoncées avec tant de talent dans son remarquable mémoire. Je ne puis ad- mettre cependant l'absence d’un épithelium cutané; les faits embryogéniques sur lesquels Kleinenberg s'appuie pour dé- nier aux Hydroides un système épidermique ne me parais- sent pas concluants. A mon avis, l'ectoderme représente à la fois tant au point de vue anatomique qu’au point de vue physiologique, l'épiderme et le système nerveux confon- dus. Le seul point important par lequel mes observations sur les Hydractinies diffèrent des siennes, concernent la composition histologique des éléments musculaires. Chez l'Hydre il n'existe que des fibrilles musculaires qui sont de simples prolongements des cellules ectodermiques, de sorte que l'ectoderme est formé de véritables cellules neuromus- culaires (Kleinenberg). Chez les Hydractinies la complica- ( 551 ) tion histologique est plus grande. La cellule neuromus- culaire s’est divisée en gelinle nenToápifbćliale, en fibre nerveuse et en fibre laire). Aliman a trouvé des fibres musculaires longitudinales entre len- doderme et l’ectoderme des tentacules de la Tubularia indivisa. H a reconnu que ces fibres sont pourvues d'un noyau ovalaire à nucléole fort brillant. (Allman , Monogra- phie, part. I, p. 206.) J'ai pu constater aussi la continuité entre les cellules de l'ectoderme des bras des Méduses chez les Campanulaires et les fibrilles d’une extrême ténuité qui sont immédiatement sousjacentes à l’ectoderme. Je crois, sans cependant en être bien certain, qu'il n'existe pas chez ces petites Méduses de véritables cellules musculaires, mais seulement des fibrilles. Autour des sporosacs chez les Hydractinies, j'ai trouvé les éléments musculaires beaucoup plus grêles qu'autour de la région basilaire du corps et je n’ai pas pu me convaincre de l’existence de noyaux cellulaires dans les éléments musculaires de cette région. F.-E. Schulze wa pas trouvé de fibrilles musculaires autour des gono- phores des Cordylophora. J'en viens maintenant à la description de la région ger- minative du corps des gonosomes. Cette étude est insépa- rable de la description des sporosacs et de leur développe- ment. Mais il sera nécessaire de faire successivement cette étude chez les gonosomes qui portent des sporosacs femelles et chez ceux qui donnent naissance à des produits mâles. Pour simplifier le langage, je les appellerai simplement 30n0somes femelles et gonosomes mâles. Méthodes de préparation. Avant de faire l'étude des caractères de l’ectoderme et de l’endoderme dans la région germinative, il est nécessaire d'exposer les méthodes que j'ai employées. Les différentes couches cellulaires de ces organismes sont si transparentes et si nettement délimitées, que, dans la plupart des cas, il suffit d'examiner le gonosome vivant dans l’eau de mer. On enlève au moyen d’un scalpel une partie du cænosare et on la porte sous le microscope simple. Au moyen d’aiguilles ou d’un scalpel, on détache de sa base d’insection l'individu que l’on veut examiner. Si l'on a réussi à Deler sans le blesser, et si l'on prend la précaution de le recouvrir d'un couvre-objet sans trop le comprimer, le jeune gonosome s'allonge bientôt et s'épanouit absolument comme s'il se trouvait encore fixé sur son polypier; il se laisse alors examiner même avec les plus forts grossisse- ments. On peut même, en procédant lentement et progressi- vement, exercer sur lui une certaine pression, sans qu'il se contracte. Si l'on veut étudier la région germinative et le développement des sporosacs chez un gonosome adulte, il est indispensable d'enlever successivement avant de le porter sous le microscope tous les sporosacs que l’on peut apercevoir à la loupe, en commençant par les plus déve- loppés et en procédant d'arrière en avant. Les sporosacs se détachent très-facilement, dès que l’on comprime leur pédi- cule d’insection au moyen d’une aiguille, Quand le gono- some se trouve ainsi réduit à son blastostyle et à quelques sporosacs en voie de développement et à peine perceptibles à la loupe, on peut l'examiner sous le microscope et cette mutilation ne l'empêche pas de s'épanouir absolument ( 555 ) comme s'il n'avait pas souffert le moins du monde de l’opé- ration qu'on lui a fait subir. Je me suis servi avec grand avantage, principalement pour l'étude des détails histologiques, de différents réactifs, et jai eu recours à différentes méthodes pour durcir, colorer, couper et dilacérer. De tous les réactifs que j'ai employés, celui qui ma donné les meilleurs résultats, c’est l'acide osmique en solution faible. Je l'ai employé de la manière suivante: quand j'avais étudié un individu vivant après l'avoir préparé comme je Tat dit ci-dessus, je faisais agir sur lui sous le microscope une goutte d'acide osmique (en solution de + à zl que je laissais filtrer peu à peu sous le couvre-objet. Je pouvais observer ainsi l'action progressive du réactif sur les tissés qui, sous son influence, ne perdent rien de leur transparence primitive, mais qui se colorent légèrement et dont certains éléments deviennent d'une netteté admirable. C’est le cas plus particulièrement pour les cellules de l’ectoderme et de la couche musculaire. Ce réactif agit moins avantageusement sur les cellules de l'endoderme et sur les œufs. Ceux-ci noircissent trop rapi- dement à raison de la quantité de substances grasses qu'ils renferment. Quand le réactif a suffisamment agi, on lave après avoir enlevé l'acide par aspiration. La macération pendant 24 heures, après traitement par une Solution d'acide osmique de, m'a permis d'isoler les cellules de l’ectoderme et de démontrer leur continuité avec les fibres musculaires. Je me suis servi avec grand avantage dans le même we d’une solution de + de chlo- rure de platine mêlé à <= d'acide chromique. Pour l étude de l’endoderme į je me ec? trouvé très-bien d’une solution extrêmement diluée d'acide acétique. Quant aux cellules de l’ectoderme, elles gonflent et deviennent tout à fait ( 554 ) transparentes sous l'influence d'une solution même très- faible de cet acide. J'ai bien réussi à isoler les cellules de l’endoderme après une macération de deux à trois jours dans le liquide de Müller ou dans l'acide chromique à ve Les méthodes ordinaires de coloration par le carmin et le picrocarminate ne sont pas recommandables : l’ectoderme ne se colore presque paset il s’altère rapidement au contact d’une solution alcaline. Les cellules de l'endoderme, au contraire, se chargent tellement de carmin qu’en quelques instants elles deviennent tout à fait opaques. Par contre j'ai obtenu d'assez bonnes préparations par le rouge d’anhi- line en solution très-faible et par l'hœmatoxiline. Gonosomes femelles. Comme je l'ai fait observer plus baut, on trouve dans une même colonie des gonosomes à tous les degrés de développement : il en est qui portent un grand nombre de sporosacs : les uns, insérés à la face externe de la région ger- minative, sont les plus jeunes; les autres, au contraire, sont fixés par un pédicule grêle à la partie supérieure de la région gastrique. D’autres gonosomes beaucoup plus petits portent à peine un ou deux sporosacs (pl. I, fig. 3 et À) fort peu avancés dans leur développement; on en trouve, enfin, chez lesquels il n'existe encore aucune trace de sporosacs. C’est un semblable individu que j'ai figuré pl. I, fig. 2, et que je vais décrire en premier lieu. Les caractères de l’ectoderme sont sensiblement les mêmes dans toutes les régions du corps. La description que je vais en donner ne s'applique donc pas exclusivement à la région germinative. Ectoderme. — On sait qu'Ecker avait nié lexistence q ( 595 ) d'éléments cellulaires différenciés dans l'ectoderme aussi bien que dans l'endoderme des Hydres. M. Reichert a sou- tenu qu'il n'existe ni chez l’Hydre, ni chez les Tubulaires, ni chez les Campanulaires, aucune trace de cellules ni de noyaux de cellules dans l’ectoderme. On peut consi- dérer comme définitivement établi, après les recherches d'Allman, de Leydig, d’Agassiz, de Huxley, de Claus, de F. E. Schulze et de Kleinenberg que l’ectoderme de tous les Cœælentérés est formé de cellules à noyaux. Il est à peine concevable que M. Reichert, qui doit posséder le maniement du microscope, et doit connaître les méthodes employées aujourd’hui en histologie, ait pu émettre une semblable Opinion. Il n’est pas un des naturalistes que je viens de nommer qui ne soit tout aussi capable que M. Reichert de distinguer un organe urticant d’un noyau de cellule. En n'importe quel point du corps de l'Hydractinie, on distingue nettement que l’ectoderme est formé de cellules dont les noyaux se reconnaissent chez le gonosome vivant, sans l'addition d'aucun réactif. Les circonscriptions cellu- laires sont plus ou moins distinctes ` quand le zooïde est à moitié contracté, le bord externe de l'ectoderme est ondulé; tout le feuillet externe est alors couvert de petites bosselures déterminées par les cellules de l’ectoderme qui, dans cet état de demi-contraction du gonosome deviennent convexes. Quant , au contraire, le gonosome est étalé, ces bosselures disparaissent plus ou moins complétement : les cellules extodermiques deviennent planes et ressemblent alors à des cellules endothéliales. Sous l'influence de l'acide osmique, les contours cellu- laires apparaissent avec une netteté admirable; on voit alors tout l’ectoderme formé de cellules polygonales con- vexes à leur face externe, et séparées les unes de autres ( 556 ) par des sillons plus ou moins profonds (pl. i, fig. à et 6). Après la macération dans l'acide osmique, dans le liquide de Müller ou dans le mélange de chlorure de platine et d'acide chromique, ces cellules peuvent être facilement isolées. Leurs noyaux se colorent si l’on traite par une solution faible d’anhiline ou d'hæmatoxiline. L’épaisseur de ces cellules et de la couche ectodermique varie beaucoup. J'ai trouvé, sous ce rapport, d’un individu à un autre, des différences extrémement notables, et en une même région du corps, d’après l'épaisseur de la couche, ces cellules présentent des caractères assez différents. Le noyau est toujours de forme sphérique à contours assez pâles quoi- que toujours très-nets; il est toujours pourvu d'un nucréole réfringent. Quand l'ectoderme est mince, les cellules ne présentent extérieurement qu’une très-faible convexilé (pl. I. fig. 5); leur contenu est partout granuleux , comme s’il était exclusivement formé par de la matière protoplas- mique. Au contraire, quand lectoderme est épais, la surface externe des cellules est très-convexe: elles renferment alors une ou plusieurs vaeuoles remplies d’un liquide homo- gène et parfaitement transparent (pl. 1, fig. 6). Alors le noyau est refoulé à la périphérie avec la matière proto- plasmique dans laquelle il se trouve toujours logé. Dans l’ectoderme de la région germinative aussi bien qu'à la surface des sporosacs, il n'existe qu’un fort petit nombre de corps urticants. On en trouve un çà et là, habi- tuellement logé dans une cellule d'une forme particulière et située up peu plus profondément que les cellules ordi- naires de l’ectoderme. Ces cellules renferment en outre un noyau fort petit toujours situé près de la lamelle basilaire à côté du corps urticant. Je mai pas constamment ren- contré ce noyau. Quelquefois cependant ces cellules altei- ( 557 ) gnent la surface de l'ectoderme, et alors elles présentent habituellement un petit prolongement filiforme. Allman, Ehrenberg, Leydig, Hæckel, Schulze et Kleinenberg ont attiré l'attention sur ces petites soies (Spitzen Härchen). Allman les considère comme des organes de toucher, ce qui me paraît fort peu probable; il les appelle palpocils. Cependant je les ai plus fréquemment rencontrés sur les tentacules et les pseudo-tentacules que sur le reste de la surface du corps. Je crois avoir trouvé aussi quelquefois des organes urticants logés dans des cellules ordinaires de l’ectoderme. Probablement ils y arrivent secondaire- ment. Dans la région germinative du corps aussi bien qu’à la surface des sporosacs, l’ectoderme est toujours formé d'une seule couche de cellules. Les quelques rares cellules. qui donnent naissance aux corps urticants, et qui occupent la partie profonde de l’ectoderme, ne constituent jamais une couche continue de façon à former un tissu comparable au tissu intersticiel de l'Hydre (Kleinenberg) ou même à la couche profonde de l'ectoderme du Cordylophora (F. E. Schulze). Le tissu intersticiel n’est représenté chez les Hydractinies que par quelques cellules disséminées çà et là dans lesquelles se forment les corps urticants. Je ne décrirai ici ni les caractères ni le mode de formation de ces derniers organes, d’abord parce que leur étude est difficile à cause de leur petitesse et que je mwai pas pu les étudier suffisamment; en second lieu parce qu’ils ne présentent aucune importance eu égard à la question que j'ai princi- palement en vue de traiter dans ce mémoire. Couche musculaire. — Quand on examine la coupe Optique d'un gonosome vivant, on distingue nettement ( 558 ) entre l'ectoderme et l'endoderme une couche tout à fait transparente qui paraît fort réfringente et limitée par un contour plus foncé et moins régulier du côté de lecto- derme que du côté de l’endoderme (pl.I, fig. 2,5, 4,5 a,6a,8). Cette couche est notablement plus épaisse dans la région basilaire du corps que dans la partie germinative. Elle est formée à la fois par une lamelle sans structure (Stütz- lamelle) et par des fibrilles musculaires accolées à sa face externe. Kleinenberg donne à cette lamelle de l'Hydre le nom de lamelle musculaire. Il trouve les prolongements musculaires des cellules de l’ectoderme engagés dans une substance homogène et transparente qu'il appelle Binde- mittel. Reichert avait observé cette même membrane chez l'Hydre; mais il la décrit comme une membrane sans structure, et il affirme que les prétendues fibres muscu- laires de l'Hydre ne sont qu’une illusion produite par un plissement que subit cette membrane pendant la contrac- tion de animal! F. E. Schulze décrit chez le Cordylophora une lamelle hyaline (Stützlamelle) et des éléments muscu- laires appliqués à sa face externe. Chez les Hydractinies il west pas difficile de séparer complétement les éléments musculaires de la lamelle sans structure. Si l’on examine le gonosome de face, dans la région germinative, on aperçoit une striation longitudinale déterminée par des éléments situés sous les cellules ectodermiques, et qui ne sont autre chose que les éléments musculaires. Ils sont disposés parallèlement les uns aux autres sans cependant se tou- . cher mutuellement, au moins dans Ja partie antérieure du corps : la couche musculaire n’est continue ni dans la région germinative, ni dans la région cambiale, ni surtout à la surface des sporosaes. J'ai décrit plus haut les caractères des fibres musculaires dans la région basilaire du corps, et ( 559 ) j'ai indiqué en même temps les méthodes que j'ai employées pour isoler ces éléments. Dans la région germinative les fibres musculaires sont plus grêles, et je mwai pas réussi à démontrer leur continuité avec les cellules de lecto- derme. Cependant je ne doute nullement de l'existence de cette continuité. Kleinenberg dit qu’il a pu assez facile- ment isoler chez l'Hydre les cellules de l’ectoderme qui recouvrent la surface des tubereules sexuels et montrer leur continuité avec les fibrilles musculaires. Il ma été impossible d'obtenir ce résultat chez mes Hydractinies. Ce n’est que pour les fibres musculaires de la région gas- trique et principalement chez les individus spiraloïdes que j'ai pu démontrer cette continuité en isolant les fibres musculaires. Après la macération dans le chlorure de pla- tine on parvient à isoler les fibrilles musculaires et les cellules de l’ectoderme des sporosacs; mais je m'ai pas réussi à les trouver en continuité. Les fibres musculaires de la surface des sporosacs sont encore plus grêles et plus pâles que celles de la région germinative. Elles sont faciles à observer sur de jeunes sporosacs. Elles sont étirées en pointe au moins à une de leurs extrémités. Je m'ai pas trouvé , accolés aux fibres musculaires des sporosacs, des noyaux que je pusse considérer comme appartenant aux éléments musculaires. Mais la substance réfringente de la fibrille musculaire se montre entourée d’un peu de ma- tière granuleuse (protoplasme). Ces fibrilles ne présentent aucnne trace de striation transversale. Lamelle basilaire. — Sous la couche musculaire se trouve une membrane sans structure tout à fait transpa- rente et incolore. Elle a une épaisseur assez notable et peut être-très-facilement isolée, après macération, même ( 560 ) sur une assez grande étendue (pl. IE, fig. 5). Quand on a enlevé complétement les cellules de l’ectoderme et les fibrilles musculaires, on distingue encore à la face externe de cette membrane hyaline une striation longitudinale souvent très-marquée ; cette face n’est pas lisse, ce qui se voit bien quand, après l'avoir isolée, on la replie sur elle- même; le bord du pli montre alors des irrégularités. Je pense que la striation longitudinale de la membrane isolée et les irrégalités de sa surface dépendent de ce que la matière protoplastique qui entoure plus ou moins complé- tement les fibres musculaires reste en partie accolée à la surface externe de la membrane. L'existence de cette lamelle sans structure a été signalée depuis longtemps chez l'Hydre par Leydig, plus récemment par Reichert, par F.-E. Schulze et par Kleinenberg. Reichert l’a trouvée aussi chez les Campanulaires; F.-E. Schulze chez les Cordylophora. Il est probable p ‘elle ne manque chez au- cun Hydroïde. Endoderme. — Comme le montre la figure 2 (pl. I), la cavité digestive est assez large dans la portion basilaire du gonosome ; elle présente à peu près dans toute la hauteur de cette partie du corps le même diamètre. Dans la région germinative la cavité digestive consiste en un entonnoir renversé dont le sommet correspond à peu près à la limite supérieure de cette région ( pl. I, fig. 4, 2, 3et 4) et mar- que le commencement de la partie cambiale du gonosome. L'endoderme présente à peu près partout la même épaisseur; mais les caractères des cellules qui le consti- tuent varient beaucoup d’une région à l’autre. Dans la région cambiale du corps les cellules ont une forme prismatique, mais leur largeur est extrêmement faible ( 561 ) comparativement à leur hauteur (pl. I, fig. 9). Elles sont fortement serrées les unes contre les autres. Leurs limites sont difficiles à apercevoir; leur noyau clair est très-petit et plus ou moins rapproché de la base d'insertion de Ja cellule sur la lamelle hyaline. Ces cellules sont formées d'un corps protoplasmatique finement, mais uniformément gra- nuleux. On n’y trouve jamais aucune trace ni de vacuole, ni de liquide hyalin, ni de globules réfringents, ni de ma- tière pigmentaire d’aucune sorte. Mais chaque cellule porte à son extrémité un cil vibratile presque toujours unique. Jai vu cependant quelques cellules isolées qui en portaient deux. Ces cils sont fort longs: ils ressemblent beaucoup au filament flagelliforme des Flagellates. Les cellules de la portion basilaire ou gastrique sont également de forme prismatique; elles ont à peu près la même hauteur que celles de la région cambiale, mais elles sont notablement plus larges (fig. 7). Elles renferment un noyau plus volumineux , sphérique, à contours très-pâles et toujours pourvu d’un nucléole. Ces cellules sont beau- Coup plus claires; elles renferment soit une grande vacuole remplic de liquide hyalin, soit plusieurs vacuoles anasto- mosées. Le noyau est alors refoulé à la périphérie: il se trouve dans la paroi protoplasmique de la cellule; ou bien ilest situé plus ou moins dans l'axe de la cellule et de sa sur- face partent des filaments protoplasmiques. Dans la partie de la cellule qui circonserit immédiatement la cavité diges- tive le protoplasme est toujours fortement chargé de glo- ules réfringents, peut être formés d'une matière grasse, et de grumeaux plus ou moins volumineux d’une matière Pigmentaire granuleuse. Chacune de ces cellules est pour- vue aussi d’un long cil flagelliforme. Dans la région germinative , l'endoderme possède à peu 2e SÉRIE, TOME XXXVII. 5T 562 ) près la même épaisseur Gei dans la région cambiale. Ce qui frappe tout d’abord quand on examine cette partie du gonosome , c’est l'existence dans l'épaisseur de l'endoderme de très-gros noyaux (fig. 1 a, 2,3, 4 et 8) tout à fait transparents, homogènes, et qui ne renferment aucune granulation, mais seulement un nucléole vol formé d’une substance très-réfringente. Dans le nucléole on trouve quelquefois, principalement dans les plus gros, une vacuole remplie d'une substance moins réfringente. Ces noyaux sont renfermés dans des cellules dont le corps fusiforme se termine en pointe du côté de la cavité diges- tive et repose par une base élargie sur la membrane anhyste (fig. 8). Le corps protoplasmique de ces cellules est fort développé; il se constitue d'un protoplasme très- finement, mais uniformément granuleux. Ces cellules d'une forme si particulière et dont les noyaux sont tellement distincts qu'ils attirent tout d’abord l'attention quand on jette le regard sur un de ces jeunes gonosomes, sont séparées les unes des autres par des cellules prismatiques grêles toutes semblables à celles qui constituent lendo- derme dans la région cambiale du corps. Elles en diffèrent seulement en ce qu’elles renferment souvent deux où plusieurs noyaux. Ces cellules sont toutes pourvues d'un long cil dirigé vers le pôle oral du gonosome et vibrant avec une grande activité. C'est dans l’entonnoir qui ter- mine supérieurement la cavité gastrique que les mouve- ments ciliaires sont les plus apparents. Ces cils semblent très-rapprochés parce que les cellules qui les portent sont fort étroites. Les mouvements ciliaires qu’on distingue dans l'entonnoir rappellent tout à fait ceux des membranes ciliées des animaux supérieurs ou tout spécialement ceux que l’on observe dans le tube digestif des Bryozoaires. PRE EE ( 565 ) Les grands noyaux des cellules de l’endoderme, caracté- ristiques de la région germinative, atteignent leurs dimen- sions maxima au milieu de cette région (fig. 2, 3, 4 et 8). Ils diminuent de volume au voisinage de la région cam- biale du gonosome, et, à la limite, il n’est pas possible de les distinguer des cellules prismatiques étroites de lendoderme de cette région. On trouve toutes les tran- sitions entre les petits noyaux des cellules prismatiques . grèles et les grands noyaux que j'ai décrits. D'un autre côté, à la limite de la région gastrique du gonosome , les cellules prismatiques étroites et dépourvues de matières pigmentaires et de globules réfringents, passent insen- Siblement aux grandes cellules qui composent l’endoderme de cette portion du corps. Tels sont les caractères de la région germinative des jeunes gonosomes avant l'apparition des premiers sporosaës. Comme je vais le montrer, c'est aux dépens de cette ré- gion que se forment les organes reproducteurs : ils ne sont à leur début que de simples diverticules des parois du Corps du polype. Si l’on examine un jeune gonosome, Comme celui que j'ai figuré (pl. I, fig. 3), on le trouve Construit absolument de la même manière que celui que je viens de décrire, avec cette seule différence qu’il porte Sur ses parois latérales, dans la région germinative, un tubercule conoïde (b) formé à la fois par Fendoderme et par l'ectoderme. Les caractères de ces deux couches cellulaires Sont identiques dans le tubereule et dans toute l'étendue de la région germinative. L'ectoderme y est seulement un peu plus mince: les cellules de cette couche sont un peu plus aplaties; mais ces différences sont si insignifiantes que je ne les aurais probablement pas aperçues, si elles ne se mar- quaient davantage dans les tubercules plus développés ( 564 ) (fig. 4). L’endoderme présente dans le tubereule qui n'est autre chose qu'un sporosac en voie de développement, la même épaisseur que sur tout le reste de la surface du corps. Les cellules à grands noyaux ne sont que de jeunes œufs interposés entre les cellules épithéliales prismati- ques de l’endoderme. Ces jeunes œufs se distinguent de ce qu’ils étaient dans la région germinative en ce que le noyau est devenu un peu plus grand; le nucléole laisse voir une tache claire (Schürnche Korn) comme si sa substance foncée présentait une vacuole remplie d'un liquide moins réfringent; ces jeunes œufs s’insèrent sur la lamelle basilaire par une base élargie (fig. 11); leur extrémité interne n’atteint plus, au moins chez ceux qui se trouvent dans le voisinage de l'extrémité du diverticule, la limite interne de l'endoderme. Les cellules épithéliales prismatiques adjacentes à la cellule devenue œuf, se touchent à leur sommet de façon à recouvrir celui-ci à son extrémité interne. L'œuf commence à être expulsé de l'endoderme et refoulé entre celui-ci et la membrane sans structure qui le sépare de l'ectoderme. À la coupe optique du tubereule on distingue dans ses parois quatre jeunes œufs (fig. 3). Dans le jeune sporosat pénètre un diverticule du tube digestif qui a une forme conoïde à sommet externe. Dans le gonosome représenté (pl. I, fig. 4), il existe trois Sporosacs inégalement développés. Le plus petit est situe dans un plan supérieur, plus voisin de l'extrémité orale du corps. Le moyen situé de l’autre côté du tronc est inséré un peu plus bas; le troisième notablement plus développé se trouve fixé par un pédicule en un point plus éloigne encore du sommet de lentonnoir qui termine supérieure- ment la cavité digestive proprement dite. A AONAN OEE NOEN REER ( 565 ) Le plus jeune sporosae a la forme d'un simple mame- lon; il n’est qu'un diverticule des parois de la région ger- minalive; il répond exactement à la description que je viens de faire du seul tubereule sexuel développé sur les parois du gonosome représenté pl. I, fig. 3. Le sporosac moyen (fig. 4 et 6) a une tout autre forme. Le tubercule primitif s'est renflé à son extrémité supé- rieure; il affecte maintenant une forme ellipsoïdale à grand axe plus ou moins perpendiculaire à l'axe du corps du gonosome. Un étranglement encore peu marqué tend à se produire à la base du sporosac et à le séparer du corps du polypule. Les parois du sporosac sont toujours consti- tuées par les deux couches fondamentales ` l'ectoderme et lendoderme. L’ectoderme est un peu plus mince, sauf à l'extrémité du sporosac où il s'élève en un tubereule assez étendu dans lequel il est fort difficile de distinguer les limites des cellules (pl. F, fig. 18). Les ovules sont encore logés dans l’endoderme; mais ils se sont arrondis, surtout du côté interne. Ils ont grandi: non-seulement leur corps protoplasmique, mais aussi leur vésicule germinative et leur nucléole sont plus volumineux et plus granuleux; ces éléments restent toujours extrême- ment distincts, et leurs caractères ne se modifient guère. Les œufs situés dans l’endoderme à la base du sporosac n'ont pas subi ces modifications (pl. I, fig. 20). Le divertieule de la cavité digestive est devenu une simple fente (pl. I, fig. 4). Il existe au sommet du jeune sporosae , sous l’ectoderme, un organe à bords nettement marqués, qui apparait sous la forme d’un croissant, dont la coneavité s'applique immé- diatement sur l’endoderme , tandis que par un point de sa ( 566 ) surface convexe, il touche à l’ectoderme. La plus grande partie de son bord convexe en est séparée par une mince couche cellulaire. Il faut recourir à l'examen de plus jeunes sporosacs pour connaître le mode de formation de cet organe et pour arriver à en déterminer la signification. Dans celui que nous avons figuré pl. T, fig. 12, on voit qu’au sommet du jeune sporosac l'ectoderme donne nais- sance, à sa face interne, à un tubercule formé de quelques cellules d'apparence eylindroïde ou conoïde, dans lesquelles on distingue un ou deux noyaux. Les cellules de l’ectoderme se sont multipliées sur place et le tubercule cellulaire, en se développant vers l’intérieur, a refoulé devant lui l'en- doderme, qui s’est déprimé en ce point de façon à se mouler exactement sur le tubercule. Celui-ci présente, à son début, différents aspects que j'ai figurés (pl. T, fig. 12, 15, 16). Dans quelque cas il résulte d’une véritable invagi- nation de lectoderme (fig. 13 et 15). Le tubercule plus ou moins conoïde au début (fig.13) prend en se développant, par suite de la prolifération des cellules qui le constituent, une forme globulaire (fig. 12). Les cellules de l'endoderme, en se moulant sur lui, se glissent véritablement entre le tubercule et l'ectoderme de façon à former à ses côtés des sortes de cornes ou plutôt des lames qui font l'effet de deux cornes, quand on les obsèrve à la section optique. Le tubercule se développe en largeur à son extrémité interne et s'étale sur l’ectoderme en même temps qu'il se pédiculise de plus en plus (fig. 14 et suivantes). C’est alors qu'il prend la forme d'un croissant ou plutôt d'une sou- coupe appliquée sur l’endoderme par sa concavité. Un pédi- cule le relie encore à l'ectoderme. Les cornes de l'endo- derme se sont développées progressivement en se glissant en quelque sorte entre le tubereule modifié dans sa forme PT NTI EI PRES ( 567 ) et l'ectoderme proprement dit. Je donnerai à ces cornes développées aux dépens de l’ectoderme le nom de lames médusoïdes; le bourgeon qui apparaît à la face interne de l’ectoderme et dont je viens de décrire le développe- ment, sera désigné sous le nom d'organe testiculaire. Je dirai plus loin pour quel motif j'ai choisi ces noms. En même temps que le bourgeon testiculaire se déve- loppe et qu'il change de forme, ses cellules et surtout les noyaux cellulaires se multiplient rapidement. Le tissu de l'organe testiculaire se caractérise toujours par l'abondance de ces noyaux assez volumineux, si on les compare à ceux des lames médusoïdes. Us sont d’abord de forme sphé- rique et assez semblables à ceux de l’ectoderme, sauf qu'ils sont plus petits. Les lames médusoïdes ou cornes de l’endoderme sont constituées par des cellules formées d’une substance ho- mogène dans laquelle on distingue de tout petits noyaux arrondis. Au début, il est impossible de distinguer la limite inférieure de ces lames du côté de l’endoderme, avec lequel elles se trouvent en continuité de substance (fig. 12, 13, 14 et 18). Pendant le développement ultérieur des sporosacs, lor- gane tesliculaire s'étale progressivement en une lame qui recouvre une partie de plus en plus étendue de la surface de l’endoderme. En même temps que l'organe se déve- loppe en une lame testiculaire, il devient de plus en plus mince, et ses noyaux cellulaires, d’abord sphériques, de- viennent ovalaires, puis successivement ils s’aplatissent de plus en plus. La lame testiculaire, en se développant, détermine l'extension progressive des lames médusoïdes qui se forment aux dépens des cellules de lendoderme et ` que l'on trouve partout entre la lame testiculaire et la ( 568 ) membrane hyaline; celle-ci reste accolée à la face interne de l'ectoderme (pl. J, fig. 24). Dans un sporosac, complétement développé, on trouve, en allant de dehors en dedans : 1° l'ectodgrme; 2° la couche de fibres musculaires; 3° la lamelle hyaline sans structure; 4° la lame médusoïde; 5° la lame testiculaire; 6° l’endoderme. Le pédicule qui relie primitivement lor- gane testiculaire au feuillet ectodermique s’atrophie très- tôt. Les extrémités des cornes (lames médusoïdes) se touchent alors et une lame cellulaire continue se trouve étalée entre la lame testiculaire et lectoderme (fig. 1, et tig. 20). Allman a étudié et décrit le développement du sporosac des Hydractinies. Il prend même ce développement comme type pour l’ensemble des Tubularides. « Au début, dit-il, les sporosacs sont de simples tubercules creux, nés des parois du blastostyle et formés à la fois par l’endoderme et par l’ectoderme. Bientôt l’endoderme se trouve séparé de lecto- derme au sommet du sporosac par l’interposition d'une petite masse granuleuse, aux dépens de laquelle se forment les produits sexuels mâles et femelles. A ce moment lecto- derme s'est différencié en deux couches cellulaires et nous avons dès lors tous les éléments dont se constitue le sporosac complétement développé. L'endoderme devient le spadix; celui-ci est entouré par les produits sexuels: l'interne des deux feuillets de l’ectoderme devient lendo- thèque ; l'externe devient l’ectothèque. « Dans les sporosacs d’autres Hydroïdes, dit-il, il appa- rait entre l’endothèque et l'ectothèque une membrane intermédiaire dans laquelle on observe des canaux gastro- vasculaires (la mésothèque). « Je wai jamais pu voir, dit Allman, comment se forme 569 ) cette membrane; elle apparait toujours complétement développée dès qu’on peut la reconnaître. » On le voit, ces données sont complétement inexactes et M. Allman reconnait lui-même l'insuffisance de ses observations. L'existence de l'organe testiculaire dans le sporosac des Hydractinies lui a échappé et son exposé du mode de dé- veloppement des parties du sporosac est tout différent de ce que j'ai moi-même observé. Les figures schématiques qui ont été publiées par Gegenbauer, d’abord dans l'Atlas de V. Carus et ultérieurement dans son Traité d'anato- mie comparée, pour représenter les homologies entre les gonophores des Hydroïdes en général, ne donnent aucun renseignement relativement à l’origine des produis sexuels: Gegenbauer a eu pour but d'établir les homologies qu’il avait constatées entre les sporosacs et les principales formes de Méduses; mais il n’a pas cherché à déterminer la signification des différentes parties de la Méduse dans leurs rapports avec les organes de la génération et Pori- gine première de ces éléments lui a échappé. Je wai pas parlé jusqu’à présent d'une particularité im- portante que présente constamment l'organe testiculaire, Quand il a atteint la forme d'un croissant. A ce moment il existe dans cet organe une fente horizontale, parallèle à la face concave et à la face convexe del organe; les noyaux cellulaires sont disposés en deux couches, séparées l’une de l’autre par cette fente : la conche profonde, adjacente à l’endoderme, est homologue de l'ectoderme du manubrium des Méduses et la couche externe adjacente aux lames médusoïides représente la couche ectodermique du sous Ombrelle des Méduses. Cette fente s'étend en même temps que l'organe testiculaire ; quand celui-ci se trouve réduit à n'être plus qu’une mince lame cellulaire, il devient impos- ( 570 ) sible de la distinguer; peut-être même disparait-elle com- plétement. Dans quelques sporosacs j'ai vu la fente de l'organe testiculaire s'ouvrir à l'extérieur à la surface de lecto- derme (pl. 1, fig. 45). Ceci montre que la fente testicu- laire n’est que l'extension de la fente que Ton observe dans quelques tubercules tels que celui qui est représenté (pl. 1, fig. 13), et qui elle-même n’est que le résultat de la formation de l'organe par invagination. La fente testicu- laire doit être considérée comme se formant primitivement par invagination de l’ectoderme, absolument comme cela se produit pour la formation de la cavité digestive de la Gastrula. Ce mode de formation de la gastrula par invagi- nation a été observé chez Amphioxus, les Cyclostomes et certains Batraciens; les Sagitta, les Phoronis et beau- coup d’autres vers; les Cyclas, Polycera, Eolis, Doris, Pleurobranchus, Arion et Limax, parmi les mollusques; chez plusieurs Échinides et Astérides parmi les Échino- dermes, enfin chez plusieurs Cœlentérés tels que la Pelagia noctiluca, Agalma rubrum, certaines Actinies, enfin chez les Cténophores. Mais dans tous les types d'organisation ontrouve d'autres espèces chez lesquelles la gastrula , au lieu de se développer à la suite de l'invagination d'une moitié de la vésicule blastodermique, se forme par creu- sement d’une cavité dans un amas de cellules affectant primitivement la forme d’un ovoide plein. D'après les observations de Van Bambeke, ce serait le cas chez le Pélobate ; il en est de même chez beaucoup d’Annélides, d'Hirudinées, de Trématodes; chez la plupart, si pas chez tous les Arthropodes; chez beaucoup de mollusques: chez tous les Spongiaires ; enfin chez la plupart des Cœlen- térés. Le procédé de formation d'une cavité par creu- ( 571 ) sement conduit au même résultat que l’invagination et doit être considéré comme une simple modification de ce dernier mode. L'invagination est le procédé primordial : on peut le démontrer facilement par l'étude comparative du mode de formation de la gastrula. On peut observer toutes les transitions entre une véritable invagination et un véritable creusement. On trouve encore une preuve de l'identité fondamentale de ces deux processus de développement dans l'étude comparative du mode de formation des organes nerveux centraux. D’après les récentes observations de Kuppfer, Gôtte, Rieneck, OEllacher et d’autres la moelle résulte, chez les poissons osseux, d’un simple épaissis- sement du feuillet externe; tandis que chez la plupart des vertébrés elle se forme, par invagination , aux dépens du même feuillet. ‘étude du mode de formation du système nerveux central chez les Arthropodes, chez les mollusques et chez les Vers a conduit à la même conclusion. Ray Lankester, qui a attiré plus particulièrement l'atten- tion sur l'identité fondamentale de ces deux modes de développement d’une cavité interne, a fait connaître que chez certains mollusques l'otocyste se forme par une véri- table invagination du feuillet externe (Céphalopodes, Lo- ligo), tandis que chez d’autres lmême organe se forme par développement progressif d’un tubercule cellulaire qui pro- cède du même feuillet embryonnaire (Nudibranches). De même pour la formation de l'organe testiculaire chez les Cœlentérés , le processus primordial a été l’inva- gination. Mais secondairement le développement s’est sim- plifié et la cavité testiculaire s’est formée par la production d'une simple fente dans un tubereulaire cellulaire primiti- ( 972 ) vement massif; cette modification dans l’évolution est le résultat de cette tendance qui sollicite le développement ontogénique d'un organe à devenir plus direct et plus simple que le développement phylogénique ` l'ontogénie mest qu'une simplification, un abrégé, une histoire con- densée de l'histoire phylogénique. Ceci est vrai surtout, s'il s’agit d'un organe rudimentaire, comme l'organe testicu- laire dans le sporosac femelle. Ce qui est remarquable, c’est queles deux procédés se présentent encore côte à côte dans les sporosacs d’une même espèce, que dis-je, sur un même gonosome d'Hydractinies.Je dois ajouter, cepen- dant, que le procédé du fendillement est beaucoup plus fréquent que l’invagination. Quelquefois l'organe testiculaire ne se pédiculise pas. Le bourgeon cellulaire de l’ectoderme s'étale dès le début et l’endoderme ne s'insinue pas entre le bourgeon testicu- laire et l'ectoderme. Les lames médusoïdes manquent alors, et la lame testiculaire s'applique immédiatement à la face interne de la lamelle hyaline sous-ectodermique. J'ai trouvé quelquefois des sporosacs constitués de cette ma- nière chez les Hydractinies femelles (pl. I, fig. 16). Dans d’autres individus l'organe testieulaire, au lieu de se développer également dans tous les sens, se porte tout entier d’un côté; il est appliqué contre l’une des faces latérales de l’endoderme. De l’autre côté, l'endoderme se trouve immédiatement accolé à la face profonde de lec- toderme dont il n’est séparé que par la membrane sans structure. Quand, par exception, l'organe testiculaire se dé- veloppe de cette manière au lieu d'apparaître à l'extrémité du sporosac, ce qui a lieu dans l'immense majorité des cas, il peut être situé de manière à ne pouvoir être aperçu sur une coupe optique du sporosac. Mais il est toujours possible, ( 573 ) en changeant la position du gonophore, de s'assurer de la présence de l'organe testiculaire. Je wai pas trouvé un seul sporosac dans lequel cet organe fit défaut. Les lames testiculaire et médusoïde s’amincissent beau- coup dans le cours de l’évolution du sporosac, et quand le gonophore est arrivé à maturité, elles se trouvent réduites à l'état de pellicules très-fines qui se confondent en appa- rence et qui ont même souvent un aspect fibrillaire, à rai- son de l'allongement considérable et de l'aplatissement des noyaux. Ceux-ci apparaissent alors à la coupe optique comme de petits bâtonnets réfringents. J'ai cru plus avantageux d'exposer sans brëieegeget le développement de l'organe testiculaire des sporosacs femelles, afin de rendre son histoire plus intelligible et de ne pas être obligé de scinder dans la suite l'exposé du développement de l'œuf. Je reviens maintenant à la description de la figure 4, pl. T. Ce gonosome porte trois sporosacs inégalement dé- veloppés. J'ai encore à faire connaître la constitution du Sporosac (c). Ce gonophore, beaucoup plus volumineux que celui que nous avons décrit en dernier lieu , affecte une forme globu- leuse et sa base étranglée constitue pour l'organe une sorte de pédicule. Ce nouvel aspect du sporosac est prin- cipalement déterminé par les modifications qui se sont pro- duites dans la constitution de l'endoderme. L’ectoderme à Subi aussi quelques changements; mais ils se résument dans un épaississement peu considérable, dépendant 1° de ce que toutes les cellules de l’ectoderme terminées exté- rieurement par une surface plane dans les sporosacs plus jeunes, sont devenus convexes; 2° de ce que des vacuoles remplies d'un liquide hyalin ont apparu à leur intérieur. A l'extrémité des sporosacs se trouve un renflement de lec- ( 574 ) toderme (fig. 16, 18, 19, 20), dans lequel il est impossible de distinguer aucune trace de territoires cellulaires, même en s'aidant de la solution d'acide osmique, si éminem- ment favorable pour faire apparaître les contours des cel- lules de l’ectoderme. Ce renflement terminal paraît formé par des cellules confondues en une masse protoplasmique commune dans laquelle on observe ça et là quelques noyaux. Leur protoplasme est très-finement, mais unifor- mément granuleux; il ne renferme ni vacuole, ni liquide hyalin. Dans quelque cas j'ai observé dans ce renflement terminal une dépression médiane correspondant peut-être à l'entrée de la fente testiculaire. Dans le pédicule, aussi bien qu’à la surface de la partie renflée du sporosac, on observe des fibrilles musculaires påles et grêles. Disposées parallèlement les unes aux au- tres dans le pédicule, elles se distribuent en divergeant à la surface des glomérules, comme si elles étaient autant de méridiens tracés sur un globe. Sous les fibrilles musculaires se voit Ja lamelle hyaline qui, au niveau du pédicule, présente à peu près l'épais- seur qu’elle affecte dans toute l'étendue de la région ger- minative, tandis qu'elle paraît plus mince dans le renflement terminal des sporosacs. Sous la membrane hyaline se voit la lame médusoïde, puis la lame testiculaire déjà peu distincte de la première, sauf cependant près de l'insertion des lames médusoïdes sur l’endoderme. Celles-ci s’insèrent sur la membrane endodermique par une base élargie (fig. 4, € et fig. 21). C’est toujours le cas dans les sporosacs bien déve- loppés. Immédiatement en dedans on voit la lame testicu- laire se terminer brusyuement. Ces deux membranes sar rêtent toujours au sommet du pédicule au point où celui-ci commence à s'élargir pour former la partie terminale dð flée du sporosac. Dans le pédicule Pendoderme est immé- ( 575 ) diatement appliqué contre la face interne de la lamelle hyaline; dans le renflement terminal du sporosac, il en est séparé par les lames médusoïde et testiculaire. Dans le pédicule les caractères de l’endoderme sont restés à peu près les mêmes que dans les jeunes sporosacs. On y trouve des cellules semblables à de jeunes œufs au début de leur développement; elles sont fusiformes et se trouvent intercalées, dans l'épaisseur de l’endoderme, entre les cellules prismatiques grêles. Cependant celles-ci sont notablement plus larges et, par conséquent, proportion- nellement moins longues que dans la région germinative ; leur noyau est plus volumineux. Mais ce qui les distingue Surtout des cellules de la région cambiale, c’est qu’au con- tact de la cavité digestive, elles se sont chargées de globules réfringents et de granules pigmentaires. Par là elles res- semblent déjà beaucoup aux cellules de l’endoderme basi- laire. Au contraire, dans le sporosac proprement dit, les jeunes œufs ont notablement grandi; leur corps primitivement peu développé et peu granuleux s’est considérablement accru; il s'est chargé de granules vitellins au point d'avoir perdu en grande partie sa translucidité, Malgré cette cir- ` Constance on y distingue toujours les grandes vésicules ger- minatives; elles sont restées parfaitement sphériques, tout à fait transparentes et pourvues d’un grand nucléole à nu- cléolin (granule de Schrün). Quand on traite par l’acide acé- tique très-faible (sol. de 4 pour 10,000) le vitellus s’éclaireit et l’on reconnait alors qu’il existe dans les vésicules germi- natives, à côté du nucléole, plusieurs granules réfringents, notablement plus petits que le nucléole proprement dit, Mais qui paraissent formés de la même substance que lui. Je wai pas pu m’assurer si ces globules existent dans les ( 576 ) vésicules germinatives avant l'addition de la solution aci- dulée. Toujours est-il qu'on ne voit pas de traces de ces nucléoles secondaires dans les vésicules plus jeunes, et que dans les œufs plus avancés ces corpuscules se trouvent plus volumineux à côté du nucléole auquel ils finissent par ressembler complétement. J'ai vu aussi que le nucléolin augmente de volume dans le nucléole à mesure que l'œuf approche de sa maturité, Dans des œufs complétement développés, la substance réfringente des nucléoles est sou- vent réduite à une mince couche qui entoure comme une fine pellicule le granule de Schrôn. Les œufs prennent peu à peu (fig. 18,19, 21 et fig. 1 d et c) une forme arrondie. En augmentant de volume principalement dans leur partie moyenne, les ovules ont exercé une pression croissante sur les cellules de forme prismatique qui les séparaient les uns des autres. Ils . ont fini par étrangler ces cellules et par les diviser en deux parties ` l’une interne, qui continue à circonserire le diverticule de la cavité digestive; l’autre externe adjacente à la lame testiculaire. Les portions internes sont beaucoup plus volumineuses ; la plus grande partie des cellules pris- matiques primitives est refoulée vers l’ E ee Il est pro- bable qu’un certain nombre de Il toplasmiques gràce à la contractilité de leur substance, se retirent vers l’intérieur plutôt que de se laisser étrangler. Quoi qu Hen soit, les œufs semblent progressivement expulsés de l'en- doderme ou plutôt cette membrane se reconstitue autour de la cavité digestive du sporosac de façon à recouvrir complétement les œufs d'un côté. Dès lors les œufs sem- blent avoir été refoulés entre Pendoderme régénéré et la lame testiculaire. En réalité ils restent plongés dans len- doderme modifié : car les cellules à petits noyaux qui per- Keng, gr S ( 577 ) sistent dans les espaces interovulaires situés sous la lame testiculaire, ne sont que les restes des cellules prismatiques primitives de l’endoderme (fig. 19 et 20, cio). Ces espaces interovulaires sont circonserits d’un côté par la lame testi- culaire, de l’autre par les œufs mêmes qui, à raison de leur forme ovoïde, ne peuvent pas se toucher suivant toute leur surface. Mais comme ces espaces sont extrêmement petits, qu'ils ont toujours passé inaperçus aussi longtemps que Ton n’a pas étudié suffisamment le développement des Sporosacs, il a été affirmé que les œufs se trouvent toujours chez les Hydroïdes entre l’endoderme et l’ectoderme. Les lames testiculaire et médusoïde, à raison de leur peu d'épai- seur, ne se reconnaissent que si l’on a suivi leur développe- ment. En fait, chaque œuf n’est en contact avec la lame tesliculaire que par cette partie agrandie de sa surface qui s'appliquait contre la lamelle hyaline, quand il était encore simple cellule endodermique. Par tout le reste de leur sur- face les œufs demeurent en contact avec des éléments endodermiques : les cellules interovulaires, les œufs voi- sins et les cellules de l’endoderme régénéré. L'endoderme régénéré à l'intérieur du sporosac con- stitue ce que Allman a appelé le spadix du sporosac. Il se moule sur les œufs et tantôt il s'élève jusqu’au sommet du gonophore (fig. 19), tantôt il en reste séparé par un œuf (fig. 20). Le spadix est formé par des cellules cylindroïdes id ESCH d un pan CH de EE réfr ingents si pour- vues Tud cil et ebe bai an beaucoup aux cellules épithéliales de la portion basilaire du corps. Cet épithélium se continue avec celui du pédicule qui, à son tour, passe à l'épithélium de la région gastrique. J'ai exposé jusqu'ici l'évolution des sporosacs aux diffé- 2% SÉRIE, TOME XXXVII. XS ( 578 ) rents moments de leur développement; leur étude com- parative a suffi pour montrer : 1° Que les œufs sont primitivement de simples cellules endodermiques et qu’ils se trouvent déjà différenciés dans l'épaisseur de l'endoderme avant que le sporosac ait com- mencé à se former ; 2° Que les œufs, en se développant, cessent de con- courir à la délimitation de la cavité digestive. Il est pro- bable qu'ici comme chez les Spongiaires, le cil de la cellule endodermique est successivement retiré comme le serait un pseudopode et qu'il finit par se fondre dans le corps protoplasmique de la cellule en voie de se transformer en œuf ? 5 Que les œufs semblent venir prendre position entre Tendoderme et l’ectoderme , tandis qu’en réalité ils restent entourés sauf là où ils sont en contact avec la lame tes- ticulaire par des éléments de l’endoderme; 4 Qu'une partie seulement des jeunes œufs qui se trouvent primitivement dans le sporosac atteignent leur maturité. Les autres, logés dans l’endoderme du pédicule , restent stationnaires au lieu de se développer et bientôt ils s’atrophient; ils reprennent probablement les caractères des cellules épithéliales voisines; ce sont des œufs avortés; 5° Entre l'ectoderme et l’endoderme se développe aux dépens de l’ectoderme un testicule rudimentaire , qui se réduit dans le sporosac adulte à une mince lamelle cellu- laire. Il en est de même de la lame médusoïde, dépen- dance de l'endoderme, qui va s’interposer entre la lame testiculaire et la membrane hyaline, Celle-ci conserve tou- jours sa même position à la face profonde des cellules de l'endoderme, dont elle n’est séparée que par la couche musculaire, C’est seulement quand tous les œufs sont déja CR RE EE ( 579 ) formés que l’organe testiculaire commence à se montrer, au sommet du sporosac. Il n’y a donc aucun lien génétique entre cette dépendance de l’ectoderme et les produits sexuels femelles. Pour terminer je dois dire encore quelques mots des parois du corps dans la région germinative, après la for- mation des premiers sporosacs. Chez des individus comme ceux que j'ai figurés (pl. I fig. 2, 3 et 4), la vraie zone germinative se trouve entre les lignes horizontales x et Y, y passant par le sommet de l’entonnoir qui surmonte la cavité gastrique. En effet dans cette région l’endoderme est constitué par de jeunes œufs déjà caractérisés par leur belle vésicule germinative et par des cellules prismatiques allongées. C’est dans cette région seulement que se for- ment de nouveaux sporosacs d’après le procédé que j'ai longuement décrit. Jamais un jeune sporosac ne se trouve dans un autre point du corps du gonosome. Plus bas, au contraire, au-dessous de la ligne x se voit dans la fig. 4 un . Sporosac ‘bien développé; chez des gonosomes adultes on en voit souvent un grand nombre (fig. 1); j'en ai compté ` jusqu’à douze, insérés au-dessous de cette ligne. Ils se trouvent fixés alors en des points du corps où l’endoderme présente tous les caractères de l’épithélium que j'ai décrit comme caractérisant la région basilaire ou gastrique du gonosome. Il y a décroissance régulière et progressive de bas en haut quant au volume et au développement des spo- rosacs. En dessous des sporosacs les plus avancés on en trouve souvent un ou plusieurs qui, ayant évacué leurs œufs, subissent une véritable dégénérescence. Ce sont des gousses flétries qui ont laissé échapper leur semence; je les appellerais volontiers des corps jaunes, si je ne craignais — ( 580 ) d'appliquer un mot pourvu d’une signification anatomique bien précise à un organe qui a une tout autre valeur mor- phologique. Ces sporosaes flétris sont physiologiquement à la région germinative de notre gonosome, ce que les corps jaunes sont à l'ovaire. Si, d'un autre côté, l’on considère que la région gastrique d'un gonosome est d'autant plus longue que celui-ci à porté un plus grand nombre de sporosacs, tandis que la région cambiale conserve toujours la même longueur, on reconnaitra que la région gastrique s'étend progressive- ment aux dépens de la région germinative au fur et à mesure que se forment les sporosacs; et qu'en même temps, la région germinative envahit progressivement la région cambiale. Celle-ci se déplace peu à peu de bas en haut à la suite de la transformation progressive de nou- velles cellules de l'endoderme cambial en ovules. L’endoderme de la région cambiale se régénère lui- même, probablement par multiplication cellulaire, abso- lument comme le font les cellules du cambium des dicoty- lédones qui donnent naissance à de nouvelles couches d'écorce et de bois, tout en conservant la même épaisseur et la même puissance génératrice. C'est cette comparaison physiologique avec le cambium végétal qui m'a déterminé à donner à cette région du corps le nom de région cambiale. Il ne se développe pas de sporosacs sur tout le périmètre de la région germinative, quoique sur tout son pourtour l’endoderme renferme de jeunes œufs. Or, les jeunes œufs ne mürissent que dans les sporosacs,; il faut donc qu’une partie des jeunes œufs avortent pendant la transformation progressive de l’épithélium germinatif en épithélium gas- tique. On reconnait en effet, quand on examine la région germinative, que les plus grosses vésicules germinatives ( 581 ) se trouvent dans la partie moyenne de cette région. Vers la ligne x elles sont moins volumineuses et passent insen- siblement aux noyaux des cellules gastriques. Au contraire, les noyaux de transition qu'on trouve vers la ligne y sont des noyaux de cellules cambiales en voie de devenir des vésicules germinatives. Les ovules avortés deviennent-ils de simples cellules gastriques ou bien s’atrophient-ils com- plétement de façon à disparaître? Je ne pourrais encore pour le moment donner à cette question une réponse caté- gorique. Le fait de l’avortement physiologique d’un grand nombre d'œufs en voie de développement est fréquent chez des formes appartenant à divers types d'organisation. Combien de milliers de vésicules de de Graaf avortent dans l’ovaire des mammifères! Combien on en trouve encore, tout au début de leur développement chez la femme arri- vée à l’âge critique, ou chez la poule perdant les attributs extérieurs de son sexe! Les prétendues cellules vitello- gènes des insectes ne sont-elles pas des œufs avortés? Il en est certainement ainsi des trois cellules qui, chez les Daphnies, sont constamment accolées à l'œuf en voie de développement (P.-E. Müller) ; chez un certain nombre de Phyllopodes et spécialement chez les Apus le même fait a été établi par les belles observations de von Siebold. Je puis terminer ici l'étude du gonosome femelle et des Sporosacs auxquels il donne naissance. Car le gonosome porteur d’un grand nombre de sporosacs ne diffère guère de celui que j'ai représenté (pl. I, fig. 4), qu’en ce que chez lui la région gastrique est notablement plus longue et en ce que dans la partie de cette région qui avoisine la région germinative s’insèrent un grand nombre de sporosacs d'au- tant plus volumineux qu'ils se trouvent insérés plus bas. ( 582 ) Je pourrais aussi compléter ici la description de Tout ei exposer les phénomènes de sa maturation progressive; mais je ne veux m'occuper dans ce travail que de la question de l'origine des produits sexuels. Je signalerai seulement, en terminant, ce fait important qu'il n'existe autour des œufs arrivés à maturité ni membrane, ni rien qui rappelle l’albumen des oiseaux. Quelques auteurs ont décrit une membrane mince autour de l'œuf de certains Cœlentérés. Je ne sais si cette membrane existe quelque- fois; mais elle manque positivement chez les Hydractinies. Huxley a démontré qu’elle fait défaut chez les Siphono- phores; Gegenbauer pense qu'elle n'existe ni chez les Ca- lycophorides ni chez les Physophorides ; Allman et Schulze lont cherchée en vain chez les Cordylophores. Enfin, Hæckel a établi que l'absence de toute membrane vitelline et de tout chorion autour de l’œuf des Spongiaires est une particularité distinctive de l'œuf de ces Zoophytes inférieurs. Gonosome mâle. Les colonies mâles présentent comme les colonies fe- melles, le phénomène du polymorphisme. Toute colonie mâle se compose d'Hydranthes, de gonosomes et de z00ides spiraloïdes. On y trouve des gonosomes à tous les états de développement et il n’est pas difficile d’en découvrir chez lesquels on n’apercoit encore aucune trace de sporosat- Le corps de ces jeunes individus est tout à fait constitué comme celui des jeunes gonosomes de sexe femelle; indé- pendamment de l'extrémité supérieure renflée et qui af- fecte plus ou moins la forme d’un chou-fleur, on peut distinguer une région cambiale , une région germinalivé et une région gastrique. La cavitégastrique est assez large: ( 585 ) elle se rétrécit brusquement à son extrémité supérieure et se termine par un entonnoir renversé dont le sommet cor- respond à la limite de la région cambiale. Quant à la struc- ture des gonosomes mâles, elle est la même que celle des femelles ` l’ectoderme présente ehez eux les mêmes carac- tères; les pseudotentaculesne sont que des épaississements de cette couche cellulaire dans lesquels se développe une grande quantité d'organes urticants. Sous l'épiderme se trouve la couche musculaire appliquée à la face externe de la membrane hyaline. L'endoderme est constitué chez le måle comme chez la femelle, au moins en ce qui concerne les régions gastrique et cambiale. Par contre , dans cette partie du corps du gonosome qui correspond à la région germinative de la femelle, on ne trouve pas d’ovules sem- bles à ceux que j'ai décrits plus haut. Les cellules qui con- Stituent l’endoderme de cette région ressemblent en tous points à l'épithélium endodermique de la région cambiale. Néanmoins on y rencontre ça et là des cellules qui ont des noyaux notablement plus grands à côté d’autres qui, à ce point de vue, ne diffèrent en rien des cellules cambiales ordinaires ( pl. I, fig. 4). U est impossible de confondre avec de jeunes œufs les cellules endodermiques à grands noyaux que Fon trouve chez le mâle. Mais le fait que cer- taines cellules tendent à se différencier des cellules voi- sines, démontre évidemment que cette région est homo- logue de la région germinative du gonosome femelle et que non-seulement la couche cellulaire aux dépens de la- quelle se forment les ovules chez les femelles, mais les Ovules eux-mêmes se trouvent chez le mâle plus ou moins différenciés, Je rappellerai, à ce sujet, une observation intéressante faite il y a longtemps par von Wittich : il a démontré que , chez le Crapaud, le testicule est enveloppé ( 584 ) d’une couche cellulaire qui est homologue de l'ovaire de la femelle; que dans cette couche apparaissent de véritables œufs qui peuvent atteindre dans certains cas un assez grand développement, de façon à ressembler complétement à de jeunes œufs de la femelle, sans cependant atteindre jamais leur maturité chez le mâle. Waldeyer a reconnu cette même couche cellulaire représentant un ovaire rudimen- taire chez l'embryon mâle du poulet, voire même chez les mammifères. Bien plus, il a vu des éléments semblables à de jeunes œufs apparaître chez le mâle et se former aux dépens de cette couche épithéliale superficielle, Je n'ai jamais trouvé chez le gonosome mâle des Hydracuinies de vrais ovules semblables à ceux que j'ai décrits dans la couche germinative du gonosome femelle; mais les cellules à noyaux plus volumineux qui y existent constamment représentent incontestablement l’une des phases de la transformation des cellules endodermiques ordinaires en ovules. Si cette interprétation est exacte, l’on peut affirmer l'existence d’un ovaire rudimentaire chez le mâle des Hy- droïdes. Ce qui confirme cette manière de voir, c'est que dans le développement des sporosacs mâles, l’endoderme germinatifse comporte exactement comme dans les jeunes sporosacs femelles. Une autre raison qui doit faire admettre chez le mâle une région germinative homologue de celle du gonosome femelle, c'est que les sporosacs mâles ne se développent jamais que dans une zone étroite, parfaitement limitée, qui correspond exactement à la zone germinative de la femelle. Le mode de développement des sporosacs est iden- tique à celui que j'ai décrit chez le gonosome femelle. Ces sporosacs sont, au début, de simples diverticules des parois du corps, formés à la fois par l’ectoderme et par ( 585 ) l'endoderme; la cavité digestive s'y prolonge et s'y ter- mine en un cul-de-sac circonserit par l'endoderme sou- levé (pl. Il, fig. 4 a et fig. 3). Le sporosac passe succes- sivement dans le cours de son évolution par la forme d’un tubercule conoïde, d’un ovoïde à grand axe plus ou moins perpendiculaire à laxe du corps du gonosome; enfin il devient globulaire en même temps qu'il se pédiculise. Tant que le sporosac a la forme d’une ovoïde allongé, le prolongement de la cavité digestive qui s'étend à son inté- rieur se réduit à une fente, l’endoderme étant alors adossé à lui-même, de façon à effacer plus ou moins complé- tement la cavité. Quand, au contraire, l'ovoïde se rétrécit à sa base pour devenir un véritable pédicule et qu'il se renfle dans la plus grande partie de son étendue pour constituer le sporosac proprement dit, la cavité digestive du gonophore se dilate progressivement. Dans un jeune sporosac semblable à celui que j'ai des- siné (pl. Il, fig. 7, 8 et 9), il s'est formé aux dépens des cellules de l’ectoderme et de la même manière que je Tat décrit plus haut pour le sporosac femelle, un bourgeon cellulaire arrondi qui déprime l'endoderme. Ce bourgeon est, dès le début, un peu plus volumineux que Chez la femelle; il est constitué par quelques cellules eéctodermiques de forme conoïde dans lesquelles on dis- tingue deux et quelquefois trois noyaux. J'ai vu aussi, dans quelques cas, ce tubercule résulter d’une véritable invagination de l’ectoderme (fig. 8). Ce bourgeon, qui west autre chose que le testicule en voie de développe- ment, s’accroit par multiplication cellulaire; il s'élargit et se développe dans tous les sens. L’endoderme se moule véritablement sur lui de façon à former exactement le contre-moule du bourgeon. De là résulte la production de ( 586 ) deux cornes endodermiqnes, les lames médusoïdes, (pl. I, fig. 9, 10 et suivantes). Le bourgeon testiculaire s’aplatit et s'étale; il se glisse véritablement entre l’endoderme et les deux cornes qui en partent latéralement. La face profonde du bourgeon , d’abord convexe , devient concave, et tandis que primitive- ment l’endoderme avait l'air de se mouler sur le bourgeon, c’est maintenant le bourgeon qui paraît se mouler sur la partie terminale de lendoderme (pl. I, fig. 11). Le bourgeon prend ainsi la forme d’une calotte ou d'une soucoupe qui, à la section optique, a l'apparence d’un croissant. Les cornes endodermiques s'élèvent rapi- dement, de façon à étrangler de plus en plus le pédicule par lequel l'organe testiculaire se trouve encore en continuité avec le tissu ectodermique. Ce pédicule se rétrécit et l'organe testiculaire finit par se détacher complétement de lecto- derme. Les deux cornes ou plutôt les lames médusoïdes se sont alors soudées entre elles et le testicule isolé se trouve entouré de toutes parts par des éléments endo- miques. Mais ies lames médusoïdes , formées par une seule rangée de cellules plates, sont très-minces et par là le testicule paraît situé entre lendoderme et lecto- derme. À ce moment, le testicule est formé d’un grand nombre de cellules dont les noyaux seuls sont bien distinets (pl. I, fig. 10 et suiv.). Ces noyaux sont extrêmement rapprochés l’un de l’autre. Ils ont une forme sphérique des contours pâles et ils sont encore pourvus d'un pet nucléole (pl. II, fig. 10, 41 et 19). Ils paraissent logés dans une substance protoplasmique commune assez réfringente. Je m'ai jamais réussi, ni en employant l'acide osmique, ni en me servant de l'acide acétique faible , ni en traitant par ( 587 ) les matières colorantes, à distinguer les circonscriptions cellulaires des éléments du testicule. Je ne sais si les cellules sont distinctes ou si elles sont différenciées seule- ment par leurs noyaux. L'organe testiculaire grandit; il devient une couche cellulaire épaisse , étalée comme un gros bourrelet tout au- tour de l'extrémité du spadix endodermique (pl. H, fig. 19, 15 et 14 et fig. 1 e); en même temps, les lames médu- soïdes s’amincissent notablement. Dans les jeunes sporo- sacs, quand le testicule est encore rudimentaire, il y a continuité entre le tissu cellulaire des cornes de l’en- doderme et la couche épithéliale du spadix; mais quand le testicule a atteint le développement de ceux que j'ai représentés (fig. 12, 153 et 14), les cornes sont nettement séparées du spadix sur les parois duquel elles s’insèrent par une base élargie. L’ectoderme des sporosacs mâles diffère assez notable- ment de celui des femelles. Dans les jeunes sporosacs mâles , il est proportionnellement plus épais, tandis que dans les sporosacs plus avancés il est notablement plus mince. Le développement de l'ectoderme au point de vue de son épaisseur aux différents moments de l'évolution des sporosacs est donc différent dans les deux sexes. Il semble qu’il y ait un rapport inverse de développement entre l’organe testiculaire et l'ectoderme. Quand le testi- cule est rudimentaire, l'ectoderme est plus épais; c’est le contraire quand le testicule se développe. Je wai jamais trouvé autour d’un sporosac mâle bien développé un ecto- derme formé de ces grandes cellules convexes et pourvues d'un système de vacuoles remplies d’un liquide hyalin. Ces Cellules sont toujours plates, très-larges, peu nombreuses et nettement cireonscrites (pl. I, fig. 5). F. E. Schulze a ( 588 ) signalé le même fait dans les gonophores mâles du Cor- dylophora. Quant aux cellules de l’endoderme, elles se modifient principalement en ce que leur largeur augmente, en ce qu’elles se creusent de vacuoles et en ce qu’elles se char- gent, au contact de la cavité digestive, de globules réfrin- gents et de granules pigmentaires d’une couleur rose. C’est cette matière pigmentaire répandue dans tous les zooïdes des colonies mâles et femelles, principalement dans les cellules endodermiques de la région gastrique, qui donne à ces polypes leur teinte rosée, couleur de chair. Quand on examine un sporosac mâle à un faible grossissement, on distingue toujours le spadix du sporo- sac, tranchant par sa coloration rose, sur le blane mat de la calotte testiculaire. Déjà dans un jeune testicule comme celui qui se trouve figuré (pl. H, fig. 11), on distingue une petite fente sèm- blable à celle qui existe toujours dans l'organe testicu- laire du sporosac femelle. Mais dans l'organe testiculaire du mâle, la fente se trouve toujours près de la surface. Elle sépare de la plus grande partie de la masse cellulaire du testicule une couche superficielle formée d’une seule rangée de cellules. Cette fente se développe en mème temps que le testicule et les cellules superficielles forment, au tissu séminal, un véritable épithélium. Cet épithélium ` est homologue de lectoderme du sous-ombrelle des Mé- duses; le testicule lui-même peut être considéré comme représentant la couche ectodermique du manubrium d'une Méduse mâle; la fente testiculaire est homologue de la qui, dans la Méduse, existe entre le manubrium et la face interne du manteau. Phylogéniquement il faut con- ( 589 ) | sidérer le sporosac comme ayant précédé la Méduse. Le sporosac n’est que l'organe reproducteur qui a pu s’isoler et atteindre la forme de Méduse, grâce au mode de déve- loppement de l'organe testiculaire par invagination de l’'ectoderme. La fente testiculaire n’est que le reste de la cavité résultant de cette invagination primordiale (Eënstül- pungshühle). Le système des canaux radiés de la Méduse et le canal circulaire du bord de l’ombrelle se sont formés aux dépens de la lame endodermique que j'ai appelée pour | ce motif la lame médusoïde. Il en est de même des cellules | endodermiques qui constituent toujours la charpente des tentacules. L'épithélium superficiel du testicule ne donne jamais naissance à des spermatozoïdes. Il subit, au contraire, dès que l'organe approche de sa maturité une sorte de dégé- nérescence graisseuse. J] n’est plus possible alors de distinguer les noyaux des cellules et l’on trouve dans cette couche un grand nombre de globules très-réfringents de dimensions variables (pl. H, fig. 14). Mes observations sur le développement des spermato- zoïdes ne sont pas encore assez complètes pour me per- mettre d'en donner la description. Je signalerai seulement ce fait que les noyaux de la masse testiculaire deviennent tellement nombreux qu'ils finissent par se toucher, quand le testicule a atteint le développement que j'ai représenté (pl. H, fig. 14). Ces noyaux sont alors fort petits et ils paraissent dépourvus de nucléole. Les caractères des sper- matozoïdes sont semblables à ceux du Cordylophora et de l'Hydre d’eau douce; mais la tête me parait notable- ment plus petite chez les Hydractinies. Habituellement le sporosac mâle, arrivé à son complet développement, a une forme parfaitement symétrique : le ( 590 ) spadix occupe Taxe du sporosac et il est recouvert de toutes parts par le testicule qui se comporte vis-à-vis de lui comme un dé à coudre vis-à-vis de l'extrémité du doigt qui le porte. Mais on trouve çà et là des sporosacs tout à fait dissymétriques (pl. H, fig. 4, d); on reconnait alors que le testicule entoure à la manière d'un bourrelet dont le plan serait horizontal le spadix dont l’axe est supposé ver- tical. Dans ce cas le spadix est accolé contre l’ectoderme, et dans certaines positions du sporosac on voit le spadix, au milieu, se porter jusqu'à l'extrémité du sporosac; à droite et à gauche du spadix on distingue la coupe 0p- tique du bourrelet testiculaire. Quelquefois le testicule se trouve tout entier développé sur l’un des côtés du sporosac et le spadix occupe l’autre côté. Ces différences dé- pendent exclusivement du mode de croissance et de la position du bourgeon testieulaire, au moment de son apparition. Elles sont du reste sans importance au point de vue morhologique. CONCLUSIONS. Chez les Hydractinies 1° Les œufs se développent exclusivement aux dépens des cellules épithéliales de l'endoderme. Ils restent, jus- qu'au moment de leur maturité, entourés par les éléments de l’endoderme. 2 Le testicule et les spermatozoïdes se développent aux dépens de l’ectoderme ; cet organe résulte de la trans- formation progressive d’un repli cellulaire primitivement formé par invagination. 5° Il existe dans les sporosaes femelles un rudiment d'organe testiculaire; dans les sporosacs mâles un rudi- ( 591 ) ment d'ovaire. Les sporosacs sont donc morphologique- ment hermaphrodites. L'endoderme et l’ectoderme ont, au point de vue sexuel, une signification opposée. S'il est vrai que les organes se forment par différenciation anatomiqueà la suite d’une division du travail physiologique, il faut admettre que, primitivement, l’ectoderme tout entier était chargé de la fonction sexuelle mâle, et que l’endoderme remplissait la fonction sexuelle femelle. Si l’ectoderme peut être appelé feuillet animal (nerveux et musculaire), parce que les cel- lules de l’épiderme, du système nerveux et du système musculaire résultent d'une différenciation progressive des cellules de l’ectoderme, ce feuillet doit être considéré en même temps comme le feuillet màle L'endoderme est le feuillet femelle en même temps que le feuillet végétatif. La fécondation consiste dans l'union d'un œuf, produit de l'endoderme avec un certain nombre de spermatozoïdes, produits de l’ectoderme; cet acte n’a d’autre but que de rassembler des éléments chimiques de polarité opposée, qui, après avoir été réunis un instant dans l'œuf, se sépa- rent de nouveau; car chez la plupart des animaux, dès que la division du vitellus en deux apparaît, les éléments aux dépens desquels va se former l’ectoderme sont déjà séparés de ceux qui vont fournir le feuillet interne de l'embryon. L’individualité nouvelle se trouve réalisée au moment où l’union entre les éléments de polarité opposée s'opère, absolument comme la molécule d’eau se forme par l'union des atomes d'hydrogène et de l'atome d'oxygène. Observation. — Il résulte de toutes les dernières obser- vations embryogéniques faites chez les vertébrés, que le feuillet moyen de von Baër et de Remak ne donne nais- ( 592 ) sance qu’à l’épithélium de la cavité péritonéale primitive. Or, d’après les observations de Waldeyer, l’épithélinm su- perficiel de l'ovaire des vertébrés n’est que cette partie de l'épithélium péritonéal qui recouvre la plaque moyenné (Mittelplatte de Remak). Les observations de Gôtte, de Peremeschko, de Schenk, d'OEllacher, de Rieneek, ont démontré que le feuillet interne et le feuillet moyen de Remak ne sont que des parties différenciées d’une même couche cellulaire (l’endoderme) qui dérive tout entière du vitellus blanc chez les Batraciens. L'épithélium sexuel femelle, qui persiste à la surface de l'ovaire des mammi- fères, aux dépens duquel se forment les tubes ovariens, les vésicules de de Graaf et les canaux de Müller dérivent donc, en dernère analyse, de l’'endoderme. Le testicule se forment aux dépens du canal de Wolff, d’après les obser- vations de Waldeyer et de plusieurs autres embryogé- mistes. Or, MM. His, Hensen et Waldeyer font dériver le canal de Wolff du feuillet externe (ectoderne) par l'inter- médiaire du cordon axial. Le testicule dériverait donc aussi chez les vertébrés du feuillet ectodermique. Mes conclu- sions pourraient done être étendues à l’embranchement des vertébrés et jusqu’à l'homme. Les vertébrés sont les seuls chez lesquels, indépendamment des Zoophytes, lori- gine des organes sexuels ait été recherchée; mais il est probable que ces résultats se vérifieront pour l'ensemble du règne animal. Se EE ( 595 ) EXPLICATION DES PLANCHES. Peancne I. HYDRACTINIA ECHINATA. Gonosomes femelles. i € f, 14 3,1 à Ay .— à différents états de développement. Les sporosacs sont d'autant plus développés qu'ils se trouvent plus éloignés de la région germinative située entre les lignes x et y. — a, sporosac en voie de développement et n'étant encore qu'un simple diverticule de la région germinative (obj. 5 de Hartnack). 2. — Jeune gonosomeavant la formation des sporosacs. — a , région gastrique. — b, région germinative limitée par les lignes æ et y. — c, région cambiale limitée par les lignes y et z. — d, renflement céphalique en chou-fleur, portant des pseu- dotentacules (obj. 5 de Hartnack). 5. — Jeune gonosome portant un sporosac en voie de développe- ment (b) (obj. 5 de Hartnack). 4. — Gonosome plus avancé KC eme sporosacs inégalem rad és a, p montre l'organe D us forme d’un om 5 de Hartnack). 5. ~= ais de l’ectoderme; a, vues de profil et reposant sur la lame hyaline “és elles sont séparées par des fibres muscu- laires; b, vues de face (obj. 10 imm. Hartnack; préparation à l'acide osmique). 6. — Cellules de l'ectoderme à vacuoles et gonflées par un liquide yalin. — a , vues de profil; b, vues de face (même grossisse- ment S Se pee de Papas qua Gest 7. — Cellul gion gastrique vues de profil. 8. — Ser de l'endod d rminative. On distin- ue les ovules et les cellules. “mains allongées. 9. — Sasa cellules de la région cambial 2° SÉRIE, TOME XXXVII. ; 59 ( 594 ) Fig. 10. — Mêmes cellules de la région céphalique Les figures 7 à 10 ont été dessinées d GZ des preparitan de l’endoderme traité par une solution très-faible + d’'a- cide acétique et vues au moyen de l’objectif à immersion 10 de Hartnack. Fig. 11. — Sporosac qui n’est encore qu’un simple diverticule du tube digestif (obj. 9. de Hartnack). Fig. 12 et 13. — ae ere Li ovales ECH de 2 cavité digest re de l'ectoderme. La figure 15 montre cet organe ormant par invagination Fig. i4. — SC ultérieure du deoin du sporosac. On voit dans le tubercule ectodermique la fente testiculaire. Un épithé- lium endodermique recouvre déjà la face interne des œufs. Fig. 45. — Formation de l'organe testiculaire par nine La fente testiculaire s'ouvre à l'extérieur du sporo Fig. 16. — oran testiculaire n'est pas séparé de oe par des lam usoïdes, Fig, 17, — ue a détaché de l’ectoderme montre la fente testiculai Fig. 18, 19 et 20. — Las: phases ultérieures du développement des sporo- sacs; c, i, o, sont des cellules endodermiques interovulaires. Les figures 12 à 20 ont été dessinées au même grossissement obj. 8 de Hartnack). Fig. 24. — Portion d’un sporosac pour montrer la lamelle hyaline LA, 0, -ectodermique séparée des œufs par la lame médusoïde Im et par l'organe testiculaire o, t, (obj. 10 à imm de Hartnack). F Prancae Il. HYDRACTINIA ECHINATA, Gonosomes måles. Fig. 1.— Gonosome adulte portant plusieurs sporosacs måles à diffé- rents degrés de développement en dessous de la région ST" mauve limitée par les lignes æ et y. Les sporosacs sont par les lettres a,b,c,d,e. Dans le sporosac b on voit le testicule en voie de développement aux dépens de l'ectoderme (obj. 5 de Hartnack). f 4 Dé: e Es r A A De Are Ñ > = Ch TO NES MO) PV | op [pue Dina > >~. -on a Co © D CH Ge 1 e GP ope oo © z0 © -Oo a © 2% dek Li Lich G Severeyns, 2 Late ge ann 2 E Kë S ( 595 ) Fig. 2. — Jeune gonosome mâle avant l'apparition des sporosacs. a, ré- gion gastrique; b, région germinative; c, région cambiale; d, renflement céphalique portant des pseudotentacules (obj. 5 de Hartnack). Fig. 5. — Jeune gonosome portant un sporosac ovoïde et un autre appa- raissant sous forme d'un tubercule sur les parois de la région EE tive (obj. 5 de Hartnack). Fig. 4. — Cellules endodermiques de dc région cambiale (obj. 10 à imm. de me tnack). Certaines cellules renferment des noyaux plus volumineux (ovules) Fig. 5. — Fibres musculaires montrant leur continuité avec des cellules de l’ectoderme. Elles proviennent de la région gastrique d’un zooïde spiraloïde. Préparation obtenue par dilacération après macéra tion pendant deux jours dans une pan de chlorure de platine et d’acide chromique (obj. 10 à imm. Ka um de Hartnack). Fig. 6. — Membrane hyaline montrant la striation longitudinale de sa face externe. Mêmes renseignements que pour la figure 5. Fig. 7,8 et9. — L’organe testiculaire à son début. I se forme aux dépens de l’ectoderme soit par épaississement (fig. 7 et 9), soit par invagination (fig. 8). Fig. 10. — Le testicule Be et s’aplatit. Fig. 11. — Le testicule prend la forme d'une calotte. I se pédiculise et l’on distingue nettement les lames médusoïdes. La fente tes- culaire est très-apparente Fig. 12, 13 et 14. — vg ultérieur des sporosacs mâles. Les figures 7 à 14 sont dessinées au mème grossissement (obj. 8 de Lee ( 596 ) — M. L. de Koninck rappelle qu'il existe aux États- Unis d'Amérique, comme dans les principales contrées de l'Europe, une commission chargée de la publication de la carte géologique du pays. Cette commission a pour but de s'occuper de la géologie, de la paléontologie et de tous les faits concernant l'étude du sol. Elle a pour chef M. Hayden, lequel a sous ses ordres toute une légion de géologues, de physiciens, de naturalistes, de géographes et d'artistes. Une reconnaissance géologique a été faite en 1871-1872 au centre de l'Amérique du Nord. La commission a relevé à cette occasion un très-grand nombre de points de vue des régions traversées. M. De Koninck fait passer sous les yeux de ses confrères 43 photographies in-f° et 44 photographies in-8° qui lui ont été offertes par M. Hayden, et qu'il a été prié par celui-ci de soumettre à l'Académie. Il signale que plusieurs de ces photographies repré- sent des vues de Geysers, et offrent un vif intérêt pour l'étude de ces phénomènes encore si peu connus. Sur la corrélation des formations cambriennes de la Belgique et du pays de Galles; par M. G. Dewalque, membre de l’Académie. A la suite d’un voyage entrepris dans le pays de Galles, pendant l'automne de 1872, pour étudier les caractères pétrographiques des formations les plus anciennes de cette région, j'ai annoncé à l'Académie (Bull., 2 sér.,t. XXXIV, p. 424) que leur comparaison avec ceux des formations analogues de notre pays m'avait permis d'établir le pa- ( 597 ) rallélisme des subdivisions du terrain cambrien dans les deux contrées. Je comptais alors pouvoir rédiger, dans un délai rapproché, une communication détaillée sur ce sujet, mais j'en ai été empêché jusque à présent par les ména- gements que ma santé m'impose. Comme j'ai eu l’occasion d'entretenir mes élèves du résultat de mes observations, je crois utile d'indiquer dès aujourd'hui le parallélisme que je crois avoir constaté. Il y a longtemps que j'ai assimilé notre terrain ardennais au cambrien , et j'ai persisté dans cet avis malgré les asser- tions contraires. Le cambrien du nord du pays de Galles est représenté, suivant Ja plupart des auteurs, par les grès de Harlech, les ardoises de Llanberis, les ardoises à lin- gules et les schistes de Tremadoc. Les deux premières dénominations s'appliquent à deux massifs que je consi- dère comme contemporains : leurs caractères sont dans les mêmes rapports que ceux de nos deux bandes devil- liennes de Monthermé et de Fumay, auxquelles ils res- semblent parfaitement, sauf que nos quartziles y sont sou- vent remplacés par des poudingues. Les ardoises de Fumay et de Llanberis sont absolument identiques. Notre système revinien correspond tout aussi exacte- ment aux Lingula flags; la ressemblance des roches est parfaite. Quant à notre système salmien, il faut remarquer que sa limite inférieure est peu nette, et qu’il a généralement subi un métamorphisme particulier qui ne permet guère d'espérer la rencontre de roches semblables dans le pays de Galles, Je crois pouvoir le mettre au niveau des schistes de Tremadoc, à cause de la position que ces deux forma- tions occupent entre le système revinien ou les Lingula flags, et la grande dislocation qui termine la période cam- ( 598 ) brienne. On remarquera que le système de Tremadoc est une formation locale, comme notre système salmien. Certains géologues pourront trouver ces ressemblances insuffisantes pour l'établissement du parallélisme dont il s’agit. Je crois pouvoir promettre qu’on trouvera la faune primordiale dans notre système revinien. Je viens de re- connaître dans un échantillon considéré longtemps comme indéterminable, une plante caractéristique des grès à fucoïdes de la Scandinavie, l'Eophyton linneanum, Tor. il provient du revinien de Stavelot. Ce genre se retrouve dans les ardoises à lingules de l’Angleterre. Il y a également plusieurs années que j'avais découvert un Dictyonema à Spa, à la base du salmien. J'ai conduit mes élèves plusieurs fois à cet endroit; et, l’année dernière, nous en avons trouvé plusieurs échantillons. Je me suis assuré, depuis lors, que c’est bien Dictyonema sociale, Salt., de la partie supérieure des ardoises à lingules (ce qui tendrait à faire relever la limite inférieure du salmien). J'ajoute que j'ai rencontré cette espèce dans la même position à Ruy, lors de l’excursion que j'ai faite au prin- temps dernier avec mes élèves. — M. Malaise demande la parole pour informer que, dans le pli cacheté qu’il a déposé le 3 juin 1871, se trouve une note annonçant que le Dictyonema dont il avait déjà signalé l'existence aux environs de Spa dans le terrain ardennais de Dumont, est le Dictyonema sociale Salt, espèce caractéristique des Lingula flags. Il compte, du reste, en entretenir bientôt l’Académie. ( 399 ) CLASSE DES LETTRES. eem Séance du 4 mai 1874. M. R. CnaLon, directeur. Sont présents : MM. J. Grandgagnage, J. Roulez, Gachard, Paul Devaux, P. De Decker, J.-J. Haus , M.-N.-J. Leclereq, le baron J. de Witte, Ch. Faider, le baron Kervyn de Lettenhove, J.-J. Thonissen, Th. Juste, le baron Guillaume, Félix Nève, Alph. Wauters, Ém. de La- veleye, G. Nypels, Alph. Le Roy, Ém. de Borchgrave, membres ; J. Nolet de Brauwere van Steeland, Aug. Scheler, Alph. Rivier, associés. = CORRESPONDANCE. Une lettre du Palais exprime les regrets de Leurs Majestés de ne pouvoir assister à la séance publique de la classe. LL, AA. RR. le Comte et la Comtesse de Flandre ont fait exprimer des regrets semblables. — M. le Ministre de l’intérieur adresse, par différentes dépèches, divers ouvrages qu'il offre pour la Bibliothèque de l’Académie. — Remerciments. ( 600 ) — M. le Ministre de la justice fait don de deux exem- plaires du tome 2° du Recueil des coutumes du Hainaut, publié par la Commission royale pour les anciennes lois et ordonnances du pays. — Remerciments. — La Société de littérature néerlandaise de Leyde remercie pour le dernier envoi de publications acadé- miques. — L'Académie royale des sciences, lettres et arts de Modène adresse le programme de son concours pour 1874. — La classe accepte la proposition faite par la Direction des Archives générales du département de la Côte-d'Or, à Dijon, d'échanger les publications académiques avec l'Inventaire des archives publié sous les auspices du conseil général du département précité. — M. le baron Kervyn de Lettenhove fait hommage du tome XVIII des Chroniques de Froissart (pièces justifica- tives), publié dans la collection des travaux de la Commis- sion de publication des œuvres des grands écrivains du pays. M. le baron de Witte fait hommage d’une brochure intitulée: Monnaies romaines de l’époque impériale (pł. XI). Il ajoute à ce don deux ouvrages de M. Edmond Le Blant, qui seront annoncés parmi les Ouvrages présentés. Le même académicien présente les tomes XIV et XV de la nouvelle série (années 1869-1874) de la Revue numis- matique de Paris, qu’il publie avec M. Adrien de Long- périer, associé de la Compagnie. ` ( 601 ) M. Wauters présente, au nom de M. l'abbé Hautcœur, un exemplaire du Cartulaire de l'abbaye de Flines, t. Ter. Il lit la note suivante au sujet de cet ouvrage: e L'abbaye de Flines, qui fut fondée d’abord sous le vocable de T Honneur- Notre-Dame, près d'Orchies, par Marguerite de Constantinople, dame de Dampierre, et depuis comtesse de Flandre et de Hainaut, fut ensuite transférée au village dont elle conserve le nom. Cette com- munauté de l’ordre de Citeaux a subsisté pendant cinq siècles, depuis 1254, époque de sa fondation, jusqu’au 25 août 1790, où elle fut supprimée. » Les archives du département du Nord ont conservé ses nombreux titres, qui composent 284 registres et volumes et environ 3,000 documents. » M. l'abbé Hautcœur a entrepris de publier ce trésor historique. Son premier volume, qui n’embrasse que le trei- zième siècle, contient 352 chartes outre quelques annexes. Il ne faut pas y chercher des pièces relatives à l’histoire politique. Non; les abbayes de l’ordre de Citeaux, comme on le voit aussi par le Cartulaire de l’abbaye de Cambron, dû à notre confrère M. le chanoine De Smet, ne consi- gnaient pas volontiers, dans leurs cartulaires, le souvenir d'actes de violence ou de contestations épineuses. Celui de Notre-Dame de Flines est important par le grand nombre de renseignements qu’il renferme pour l’histoire des familles et la topographie des communes. C’est à ce point de vue Surtout , comme nous avons eu plusieurs fois l’occasion de le constater, qu’il est bon de faire connaître les nombreux actes inédits que renferment nos dépôts d'archives. Le Cartulaire de Flines est imprimé et publié avec beaucoup de soin et exactitude et, sous ce rapport surtout, il ne mérite que des éloges. » ( 602 ) M. J. Nolet de Brauwere van Steeland fait hommage d’une brochure intitulée : West-Vlaamsch taal-particula- rismus. In-8°. La classe vote des remerciments aux auteurs de ces dons. — Sur la demande de MM. le baron de Witte et F. Nève, commissaires pour un mémoire de M. Constantin Roden- bach, intitulé : Métrologie : l'élalon-prototype universel des mesures de longueur, ce travail est renvoyé à la classe des sciences, comme étant plus directement du ressort des matières dont s'occupe cette classe. ÉLECTIONS. La classe procède, par scrutin secret, conformément à l'article 2 du règlement général de l'Académie, aux élec- tions pour les trois places d’associé vacantes et à l'élection de deux correspondants. Les résultats de ce vote seront mentionnés dans le compte-rendu de la séance publique. — M. Ch. Faider, délégué de la classe auprès de a commission administrative pendant l'année 1873-1874, a été appelé, par les acclamations de ses confrères, à rem- plir ce même mandat pour l’année 1874-1875. ( 605 ) JUGEMENT DU CONCOURS DE 1874. La classe a reçu des réponses aux lr", 2° et 3° questions de son concours annuel, ainsi qu’à la question posée pour le Ze: grand concours sexennal historique de Stassart. Les devises de ces divers mémoires ont été données, aux pages 205 à 205 du tome XXXVII des Bulletins. La première question, ainsi conçue : On demande un essai sur la vie et le règne de Septime Sevère, a donné lieu à l'envoi de trois mémoires. Rapport de M. Roulez. « Trois réponses à cette question sont parvenues à Aca- démie. Celle qui est marquée du n° 4 a pour devise ces paroles de Sevère mourant à ses fils : « Payez bien les sol- dats et méprisez le reste. » Il ne m’a pas été difficile de me convaincre qu’elle a déjà concouru , en 1872, avec la devise : Leptis-Eboracum. La classe me permettra en con- séquence de me référer à l'analyse que j'en ai donnée dans mon rapport d'alors. Si le mémoire offre aujourd'hui treize chapitres au lieu de onze, la différence provient du dédoublement de quelques-uns et de la suppression d'au- tres par suite du transport ailleurs des matières qui y étaient traitées. L'ordre des matières a aussi subi quelques légers changements. Enfin le dernier chapitre a reçu un Paragraphe nouveau intitulé : Mœurs. ( 604 ) Dans la préface, l’auteur, après avoir cité nommément quelques historiens anciens « les médailles, les inscriptions, les monnaies, » ajoute : a ce sont les seules ressources de l’histoire de Sevère et nous nous sommes borné, nous avons dû nous borner à l'étude de ces écrivains et de ces documents; l'imagination ne peut suppléer au silence de l’histoire, la méthode conjecturale, si chère à certains esprits, est loin d’être un progrès; car l’histoire re- cherche, juge, mais n’invente pas les faits. » Si ces lignes sont, comme elles le paraissent, une protestation contre le jugement porté sur le mémoire en 1872, elle tombe certainement à faux. Aucun des commissaires n’admet que l'imagination puisse suppléer au silence de l’histoire, mais, selon eux, il ne suffit pas que l'historien recherche les faits et les juge; il faut encore qu'il les examine, et qu'il s'assure de leur vérité. Or, dans ces dernières années sur- tout, la critique a fait voir la fausseté de certaines asser- tions des historiens de Sevère et en a révoqué d’autres en doute. Je citerai quelques exemples : Spartien raconte que Sevère, dans sa jeunesse, eut à se défendre d’une accu- sation d’adultère et qu’il fut absous par le proconsul Julia- nus, auquel il succéda dans le proconsulat, et qu'il eut pour collègue dans le consulat et pour prédécesseur sur le trône impérial. Or, à l’époque où Julianus fut envoyé en Afrique en qualité de proconsul, Sevère était déjà à Rome, et la différence d'âge entre l’un et l’autre a dû mettre ob- stacle à ce qu’ils aient été nommés consuls en même temps et à ce que l’un ait succédé à l’autre dans la charge de proconsul d'Afrique, charge d’ailleurs que Sevère n'a jamais gérée. La fausseté de ces détails autorise même le soupçon que la chose principale, c'est-à-dire l'accusation, n’est qu’une invention imaginée contre l'empereur, qui plus Sg OU Sg se ww v ( 605 ) tard voulut prendre des mesures pour réprimer l’adultère. e même historien rapporte qu'après avoir gouverné la Gaule lyonnaise, Sevère obtint le gouvernement de la Pan- nonie, puis celui de la Sicile, et qu'ensuite il fut nommé consul. Il est parfaitemeut établi actuellement qu’au temps de Sevère il était de règle de n’envoyer dans les Panno- nies que des personnages consulaires. D’après Hérodien, la ville d'Hatra, dont Sevère fit inutilement le siége, aurait été située sur le sommet d'une montagne très-élevée. Or le sol où l’on voit encore de nos jours les ruines de la muraille qui l’entourait n'offre rien de pareil; il est sim- plement accidenté par des collines et des roches calcaires. Ces assertions et d’autres sont cependant admises comme vraies par l’auteur du mémoire. Lui, qui ne veut pas qu’on invente les faits, il aurait bien dû nous apprendre à quelle source il a puisé les données suivantes sur l'orga- nisation de la Bretagne par Agricola : « Le pays soumis, » dit-il, était divisé en six provinces, que régissaient des » magistrats choisis par le préfet; les capitales de ces » provinces étaient Richeborough, Caer Leon, Londres, » York, Withera et Inverness. » Tout le monde croyait jusqu'ici que la Bretagne n'avait formé qu’une seule pro- vince romaine depuis Agricola jusqu'à Septime Sevère, qui, après la mort de Clodius Albinus, la partagea en deux parties, appelées l’une Bretagne supérieure et l'autre Bre- tagne inférieure. Dans l'organisation postérieure de Dio- clétien ce pays fut divisé en quatre provinces seulement , à savoir : 4° Britannia prima, X Britannia secunda, 3° Maxima Cæsariensis, 4° Flavia Cæsariensis, auxquelles on en ajouta, en l’année 369, une cinquième, appelée Valentia. Je me tromperais grandement si ce n'étaient pas des ( 606 ) faits imaginaires qui ont suggéré la plupart des observa- tions contenues dans les extraits suivants du tableau que l’auteur trace du système politique de Sevère : « La liberté municipale favorisée et étendue par les Antonins dispa- rut sous les empiétements des fonctionnaires impériaux. — La liberté du citoyen romain subit des atteintes. — L'ordre judiciaire subit à son tour une profonde modifi- cation et perdit toute son indépendance; jamais, il est vrai, les jurisconsultes n'eurent autant d'influence, ne jouirent d’une plus grande estime que sous ce règne; mais ils durent prendre le mot d'ordre chez le prince, qui n'avait pas étudié pour rien la jurisprudence dans sa jeunesse et qui prétendait au titre de justicier rigou- reux, mais équitable : la charge de préfet du prétoire fut donnée aux Papinien, aux Ulpien (!); mais ces hommes éminents d’ailleurs ne faisaient que commen- ter et exécuter les rescrits du souverain, le seul légis- lateur. » Un des premiers devoirs de celui qui entreprend d'écrire l’histoire du règne. d’un empereur romain, c'est d'acquérir une connaissance exacte du droit public de Rome à cette époque. L'auteur a donné plus d’une preuve qu'il ne le connaît que d’une manière insuffisante. Au chapitre V il écrit : « Pescennius Niger parvenu, par son mérile, aux » plus hautes dignités militaires et même, dit-on, au CON- » sulat » puis il ajoute en note : « Sparten lui donne le > titre de consul, mais nous n'avons pas trouvé le nom de » Niger dans les fastes consulaires. » L'absence du nom de Niger de ces fastes parait donc à notre auteur un motif suffisant pour révoquer en doute le témoignage de Spar- tien. Mais les deux consuls entrant en charge au 1* jan- vier donnaient seuls leur nom à l’année et étaient inscrits Ki W ww w WW ww ww. Www WW ( 607 ) régulièrement dans les fastes consulaires; un très-grand nombre de consuls suffecti ou substitués n’y figurent pas. Or Niger appartenait à cette dernière catégorie, comme Septime Sevère lui-même, lors de son premier consulat (4), et les fastes n’offrent pas plus le nom de l’un que de l’autre. L’investiture d’ailleurs du gouvernement de la Syrie n’au- rait dû lui laisser aucun doute sur l'élévation de Niger au consulat. Plus loin l’auteur commet la même erreur en disant de Clodius Albinus : « il fut questeur, préteur et » enfin gouverneur de la Bretagne. » Pour être envoyé dans cette province en qualité de légat propréteur, il ne suflisait pas d’avoir géré la préture, il fallait encore avoir passé par le consulat. Mes rapports précédents avaient attiré l'attention des concurrents sur les publications récentes relatives à Pau- torité des historiens de Sevère, dans lesquelles bon nombre de faits sont passés par le crible de la critique; l’auteur du mémoire n° { n’a tenu aucun compte de cet avis; il ne s'est même pas donné la peine de consulter les disserta- | tions historiques, fort recommandables pourtant, de | MM. Schulte et Hôfner sur Sevère, dont l’une a paru | en 1867 et l’autre en 1872. Il n’a plus négligé cette fois | de ranger les inscriptions et les médailles ou monnaies au | nombre des sources de l’histoire de cet empereur, mais cette mention ne suffit pas, il aurait fallu en tirer tous les | | renseignements qu’elles peuvent fournir. Bref, l'Académie —— (i) A propos de la nomination de Sevère au consulat, l'auteur du mémoire ne 2 fait une note pour nous apprendre que sous l'empire, ìl y eut douze consuls, deux tous les deux mois; son assertion manque d'exac- titude : ce nombre n'apparaît qu'à partir de Trajan; il avait été dans le Principe de quatre, puis de six. ( 608 ) avait déclaré nettement et catégoriquement qu’en deman- dant un essai sur la vie et le règne de Sevère, elle atten- dait surtout une œuvre d'érudition et de critique; l’auteur, à la tournure d'esprit duquel ce genre de travail ne paraît pas convenir , nous renvoie son mémoire sans l'avoir mo- difié sous ce rapport. Je me plais à en louer de nouveau le mérite, comme œuvre littéraire, mais comme pour le fond, il n’accuse aucun progrès, je persiste à penser que la classe ne peut lui accorder le prix. La réponse n° 5 porte pour épigraphe le jugement sui- vant d'Amédée Thierry sur Sevère ` « Peu d'empereurs » ont montré une individualité plus forte et laissé dans » l’histoire de Rome une trace plus profonde. » Cette réponse se réduit à un seul fragment, contenant le récit des événements depuis la mort de Pertinax jusqu'à l’arrivée de Sevère aux portes de Rome, mais le MS.t est accompagné d'une lettre anonyme à l’Académie, par laquelle l’auteur déclare que c’est lui qui a envoyé au con- cours de 1870 et de 1872 les écrits portant la même devise que ci-dessus. Il fait connaître en outre qu’une ophthalmie, survenue dans les premiers jours de décembre 1875, l'a empêché de mettre la dernière main au travail qu'il avait préparé et de le copier en temps utile. Il prie l'Académie d'admettre au concours actuel, en même temps que le fragment de son nouveau travail, ses mémoires de 1870 et de 1872. En faisant cette demande, il décline toute préten- tion à la médaille d’or, mais si elle est accueillie favora- blement, il nourrit l'espoir qu’il lui sera décerné une mé- daille d'argent. Le cas qui se présente ici est, je crois, sans précédent à notre Académie; je n'ai pas souvenance du moins que ( 609 ) depuis bientôt quarante ans que je fais partie de la Com- pagnie, il se soit jamais produit, L'auteur aurait pu sans doute nous renvoyer ses deux mémoires fusionnés plus ou moins bien en un seul, au moyen de suppressions et d’addi- tions, et s’il n’en possède plus les minutes, la classe, sans y être obligée par aucune disposition réglementaire, l'aurait peut-être autorisé à en faire prendre une copie au secréta- riat. Mais ce n’est pas cette voie qu'il a choisie; il ne nous demande pas moins que de retirer nous-mêmes ces mémoires de nos archives pour les remettre une seconde fois au con- cours. La question à décider par la classe est donc de savoir si elle peut ou veut examiner et juger à nouveau des écrits sur lesquels elle a déjà porté un jugement, rendu public. Le mémoire de 1870 a eté écarté comme ne répondant pas complétement à la question, par la raison qu'il était trop abrégé et paraissait même écourté à la fin, faute de temps; celui de 1872 n’a pas même été analysé, parce qu'il ne se Composait que de fragments et offrait des lacunes trop nombreuses et trop considérables pour pouvoir concourir avec des chances de succès. Le fragment envoyé au con- Cours de cette année comble une de ces lacunes, maïs une seule. La circonstance qui a provoqué chez l'auteur l'espoir d'obtenir aujourd'hui une médaille d'argent paraît être que ‘un des commissaires chargés d'apprécier le concours de 1870 a proposé d'en décerner une à son premier Mémoire ainsi qu’à celui de l’un des autres concurrents; Mais les deux autres commissaires ont ouvert l'avis qu'il n’y avait lieu d'accorder aucune récompense et la classe a adopté unanimement leurs conclusions. L'auteur se pré- vaut en outre de cette phrase de mon rapport de 1872 : « J'estime que l’Académie doit des encouragements à leurs 2%° SÉRIE, TOME XXXVII. ( 610 ) » persévérants et louables efforts. » On encourage non- seulement par des récompenses, mais aussi par des paroles : or, il est clair que si, en ce qui le concerne, je n'avais pas eu en vue un encouragement de cette dernière espèce, j'aurais proposé deux médailles d’argent au lieu d'une seule. Pour les prix quinquennaux, il est arrivé qu'on ne s’en tint pas aux ouvrages publiés pendant les cinq der- nières années, mais que l’on prit en considération des publications antérieures et que l’on couronnât ainsi l’œuvre entière d’un écrivain. Il ne semble pas qu’il en puisse être de même, quand il s’agit d’un écrit en réponse à une ques- tion déterminée. Enfin l’auteur de la lettre sollicite, subsidiairement, je suppose, la faveur d’être autorisé, lorsqu'il aura achevé son travail, à le soumettre au jugement de l’Académie en de- hors du concours, son intention étant, si elle juge qu'il suit la bonne voie pour ce genre de travaux, d'entreprendre des études analogues sur les autres empereurs de la famille e Sevère, connus sous le nom de princes Syriens. Dans cette condition l’Académie n’a pas le droit de refuser d'examiner son mémoire manuscrit. Mais pour qu'elle se détermine à en ordonner l’impression dans son Recueil des mémoires des savants étrangers, il faudrait, selon moi, qu’il fût de beaucoup supérieur à celui qu'elle aurait cou- ronné. Quant au projet de l'auteur de faire des recherches sur quelques-uns des successeurs de Sevère, je crains bien qu’il n’arrive trop tard. M. Höfner , docteur privé à l'Uni- versité de Giessen, a également annoncé son intention d'écrire une vs de Septime Sevère et de sa dy nastie, et ses Recherches publiées en 1872 sont destinées à lui servir de base et d'introduction. Le mémoire n° 2, ayant pour épigraphe le mot d'ordre COTE de Sévère à son armée : EE a déjà été envoyé au concours de 1872 avec la même divise: L'ordre et le nombre des chapitres ainsi que leurs intitulés n’ont pas été changés. Ces chapitres sont restés groupés en deux parties, mais celles-ci n’ont plus pour rubrique l’une Le guerrier et l’autre le souverain. L'auteur les définit de la manière suivante : « Dans la première, dit-il, qu'on pour- rait appeler l’histoire externe du règne de Sevère , nous nous occupons de la vie publique et des différentes guerres qu’il géra. Dans la seconde — histoire interne — nous étudions sa politique et les divers changements qu'il introduisit tant dans le droit que dans l'adminis- tration. » D’après lui donc les détails sur la naissance, les parents, l'éducation, le mariage et les enfants de Sévère appartiennent au domaine de la vie publique de l'empereur et celle-ci rentre dans l'histoire externe de son règne. L'auteur eût évité cette bizarrerie, si, suivant le conseil qui lui a été donné en 1872, il se fût borné à une division unique par chapitres. Je demanderai de nouveau à la classe la permission de me référer à mon rapport de 1872 pour l'analyse du mé- moire. L'auteur a courageusement mis à W We VW. e vy à profit les deux années qui se sont écoulées depuis lors, pour se livrer à de nouveller recherches; il a complété son œuvre et Da améliorée sous plusieurs rapports; mais il ne s'est pas corrigé de son intempérance de citations et d'explications inutiles ou déplacées. Que vient faire, par exemple, l'auto- rité de Marchant (p. 98) à l'appui de lassertion qu'en sa qualité de Pontifex Maximus, empereur a la surveillance Sur tout ce qui avait rapport à la religion? c’est une notion élémentaire d'antiquités romaines. Quelle valeur ajoutent à Son mémoire les notes sur les diverses personnes du nom ( 612 ) d'Hérodien (p. 4); sur A. Cervidius Scævola (p. 12); sur Tib. Claudius Pompeianus, à qui Didius Julianus proposa de partager avec lui le fardeau de l'empire (p. 27); sur la localité appelée Saxa Rubra (p. 41); sur Fanimal dit Crocotas (p. 80); sur l’auteur des Philosophoumena attri- bués à Hippolyte (p. 103); sur la découverte au Palatin d’une caricature représentant un homme en croix avec une tête d'âne (ibid.), ete. Je citerai comme exemples de digres- sions superflues les détails sur.la carrière politique de Pertinax avant son avénement à l'empire (p. 19 sv.) et la notice sur le colosse de Memnon (p. 69). Plus d’une fois le récit se trouve embarrassé par la reproduction dans tous ses détails d’un cursus honorum, qui aurait pu être ré- sumé, avec renvoi au commentaire épigraphique auquel il est emprunté. Dans l'exposé de la vie de Sevère il est déjà fait mention de ses fils et des dignités dont ils furent investis; malgré cela, une biographie détaillée des deux princes est donnée de nouveau dans le chapitre sur la politique de l’empereur (p. 82). A côté de cette exubérance de détails on pourrait ce- pendant signaler plus d’une omission. Il aurait fallu, selon moi, discuter les objections soulevées par Hôfner (p.37 fig.) contre la nomination de Sevère à la charge d'avocat du fisc. Si ma mémoire ne me trompe, les grands monuments élevés sons le règne de Sevère ne sont pas mentionnés. L'auteur eût dû cependant en parler non au point de vue de l’histoire de l’art, comme dans son mémoire de 1870, puisque cela n’entrait plus dans son plan, mais sous le rapport financier, à cause des dépenses qu'ils ont occa- sionnées, Le mémoire renferme beaucoup d'opinions que je ne partage pas et parmi celles-ci plusieurs que je considère ( 615 ) comme des erreurs. Je produirai deux ou trois exemples de ces dernières. Sevère, nommé questeur, fut envoyé en Bétique; mais il était à peine arrivé dans cette province, que la mort de son père l’obligea de se rendre à Leptis, sa ville natale. Dans cet intervalle la Bétique cessa de rele- ver de l'autorité du Sénat pour être rangée parmi les pro- vinces de l’empereur. Or, comme les fonctions de questeur ne pouvaient s'exercer que dans les provinces sénatoriales, on fut obligé d’assigner à Sevère une autre province séna- toriale pour y achever l'année de sa questure. La chose est si simple qu’elle se comprend d'elle-même sans avoir besoin d'être expliquée. L'auteur a cru cependant devoir en donner une explication qui me parait aussi peu intelligible qu'ac- ceptable. « Sevère, dit-il (p. 45), à son retour d'Afrique, » fut envoyé comme questeur en Sardaigne. Ce change- » ment s'explique aisément. Comme questeur Sevère » n'avait aucun pouvoir militaire et si Marc-Aurèle ne le » laissa pas en Bétiqne, Cest qu'il ne crut pas devoir » privilégier Sévère au point de lui donner directement » après la questure une magistrature à imperium. » Son explication est d'ailleurs en contradiction avec ce qu'il avance quelques lignes plus bas ` « Marc-Aurèle , y dit-il, » pour Je récompenser de sa bonne gestion, le nomma » l’année après sa questure lieutenant du proconsul d’Afri- » que. Cette charge lui donnait un certain pouvoir mili- » taire. » Cette dernière assertion n’est pas exacte non Plus. Les légats d’un gouverneur de provineg ne possé- daient par eux-mèmes aucun imperium; ils agissaient en vertu de celui que leur chef leur déléguait. A la page 15, l’auteur avance, comme un fait tout simple et régulier, que Sevère, après sa nomination à Ja Préture , quitta Rome l’année de son entrée en charge pour 614 ) se rendre dans la province de l'Espagne Tarraconaise, qu'il gouverna probablement en qualité de juridicus, dé- pendant du légat de la Bétique. De cette facon done le préteur Sevère se serait trouvé le subordonné d'un pro- préteur et pas même du propréteur de sa province, mais de celui d’une province voisine. M. Hôfner (p. 58), qui admet aussi le cumul de deux charges civiles, suppose du moins qu'il fut lieutenant du légat propréteur de la Tar- raconaise, M. Zumpt ( Comment. Epigraphic. W, p. 17) élude la difficulté en faisant gouverner la Tarraconaise par Sevère en qualité de légat propréteur après sa gestion de la préture. Selon l'auteur (p. 14) la prétendue accusation d’adultère, dont il a été question ci-dessus, aurait été portée contre Sevère à Rome et non dans sa patrie, avant son arrivée dans la capitale de l'empire. Il est pourtant impossible d'imputer à Spartien une erreur aussi grossière que celle de faire rendre la justice à Rome par un proconsul. A la page 68 on lit : e Et ainsi, comme le dit Dion , Dieu délivra la ville en faisant sonner la retraite, ete. » Une pareille phrase sous la plume d’un écrivain païen semble étrange, mais ce n’est pas le sens du texte grec ainsi CONÇU : Kai cure eds, ó prodperos TYY TIAI. KT). C’est ainsi que le dieu, qui délivra la ville, fit, ete. Ce dieu n’est autre que le Soleil, dont il est parlé quelques lignes plus haut. Je me bornerai, quant au fond du mémoire, aux re- marques critiques qui précèdent. En ce qui concerne le style, je me plais à reconnaître qu’il est devenu plus égal et a perdu le ton déclamatoire qui le déparait ; mais il à besoin encore d’être châtié. Si la question relative à Septime Sevère avait été mise au Concours pour la première fois en 1872, il y aurait ( 615 ) peut-être lieu d'examiner s'il ne conviendrait pas de la prorogér, afin de permettre à l’auteur du mémoire n° 2 de mettre la dernière main à son travail, et à celui du mémoire n° 3 d'achever le sien. Mais si la classe pouvait ne pas être arrêtée par la considération qu’il y a déjà eu trois prorogations et que les mémoires susmentionnés sont sur le métier depuis six ans au moins, elle ne vou- drait probablement pas s'exposer à l'inconvénient de de- voir faire imprimer un travail rendu sans objet par la publication d’un autre ouvrage sur le même sujet; car depuis que celui-ci figure à son programme, plusieurs per- sonnes s’en sont occupées en Allemagne. Le mémoire n° 2 est loin sans doute d'être parfait, mais il n’est pas sans mérite; produit de recherches étendues et d'un long la- beur, il offre le résumé de l’état actuel de nos connais- sances sur le règne de Septime Sévère. Il y a beaucoup plus à en élaguer qu’à y ajouter et corriger, et l’on peut invoquer en sa faveur la maxime : quod abundat non viliat. Je crois done devoir proposer à la classe de dé- cerner la médaille d’or à son auteur. » Rapport de M. A. Wagener. « Je wai que peu de mots à ajouter au rapport de mon savant confrère, M. Roulez, aux conclusions duquel je me rallie de tout point. Je suis d'avis, comme M. Roulez, que la classe ne peut accorder de prix au mémoire n° 1. En effet, ce mémoire se compose de quatre cahiers, dont le premier et la plus grande partie du quatrième sont consacrés aux prédéces- seurs et aux successeurs immédiats de Septime Sévère. H ( 616 ) est vrai que le quatrième cahier contient une peinture de la société, des mœurs et de la littérature de l’époque, mais cette peinture n’était nullement réclamée par l'Aca- démie. Il n’y a donc, en réalité, que le 2 et le 3° cahier dont nous ayons à tenir compte et qui se rapportent à la ques- tion proposée. Or, il me paraît évident que dans cette partie de son travail l’auteur est resté très-loin de ce que l’Académie était en droit d'attendre. Il ne connait, en effet, que les sources les plus vulgaires. Les médailles et les inscriptions ne lui ont rien révélé. Il ne cite, en fait d'écrivains modernes, que Montesquieu, Franz de Cham- pagny et l'abbé Freppel. Ce qu'il dit de l'administration de Sévère est incomplet, vague et superficiel. Les éloges qu'il adresse à Mammée et à Alexandre Sévère sont outrés. Ses opinions touchant Philostrate ne supportent guère l'examen; il se borne d’ailleurs à des affirmations et paraît complétement étran- ger à la ‘critique historique. Constamment préoccupé par le désir d’exalter le christianisme et de déprécier le paga- nisme , il tombe dans des exagérations regrettables , expri- mées dans un langage trop souvent déclamatoire. En ce qui concerne le mémoire n° 3, je pense, comme M. Roulez, que l'Académie ne peut pas couronner un fragment. Enfin, quant au mémoire n° 2, je crois, comme mon honorable confrère, que les nombreuses qualités qui le distinguent sont de nature à compenser amplement les quelques défauts qu'on pourrait y signaler. Si le style n'en est pas toujours très-soigné, si dans les citations il y s parfois une surabondance déplorable, ce ne sont là en dé- finitive que des détails , auxquels il sera facile à l'auteur ( 617 ) de remédier pendant l'impression. Je me rallie donc, sur ce point comme sur les autres, aux conclusions de M. Roulez, qui propose d'accorder la médaille d'or à l’auteur du mé- moire n° 2. » Rapport de M, Félix Aere, « La classe des lettres ne s’est pas trompée sur la dili- gence de trois concurrents qui avaient répondu deux fois à son appel, el qu’elle engageait à rentrer dans la lice en mettant la question pour la troisième fois au concours. Ils se Sont livrés à un nouvel effort, et si, aujourd'hui, ils ne se disputent point la palme de plus près, il en est un , du moins, à qui nous pouvons décerner sans hésitation la récompense promise. L'auteur du mémoire n° 4 a montré, dans son nouveau travail, de remarquables qualités. Si la valeur scientifique de son ouvrage était en rapport avec le mérite de la forme, Peut-être eùt-il prétendu à la médaille. Mais, évidemment, il n’a pas examiné avec assez de profondeur les sources qui lui étaient accessibles; il n’a tiré ni du texte des au- , leurs, ni de la lettre des inscriptions, les témoignages plus précis qui entourent d’une vive lumière bon nombre d'événements du règne de Sévère et contiennent de graves enseignements sur l'époque de ce prince. Dans quelques chapitres on trouve des aperçus d'his- toire religieuse et d'histoire littéraire qui ne sont pas sans élégance et sans justesse. Mais l'intérêt qu’ils comportent ne rachète pas la faiblesse de la partie politique du mé- moire. D'ailleurs, si ces aperçus sont empruntés à des écrits d’une incontestable valeur, ce ne sont point des (618 ) pages originales où l’on découvre le fruit de recherches personnelles. Nous avons ensuite reçu un cahier unique et fort mince, inscrit sous le n° 3; si nous pouvions condescendre aux intentions de l'auteur, il nous faudrait le rattacher à des cahiers plus volumineux, mais incomplets, qui nous ont été envoyés pour les deux premiers concours : malheureu- sement, nous n’avons encore entre les mains ni la matière d’un travail d'ensemble ni les éléments d'une comparaison qui serait bien fondée. Puisque la Commission ne peut prendre la tâche de recondre un fragment à d’autres frag- ments , elle se borne à exprimer le regret de se trouver déçue dans l'espoir que lui donnaient, pour une épreuve ultérieure, les procédés de saine critique qu’elle avait re- connus dans les premiers fascicules. La classe est enfin en possession d'un travail étendu et complet, comme résultat positif et dûment acquis de sa longanimité envers les nouveaux historiens de Septime Sévère. C'est le mémoire n° 2 auquel je suis d'avis de donner le prix d'accord avec les deux premiers commis- saires. Mettant à profit les judicieux conseils de notre savant confrère M. Roulez qui a posé la question en 4867 , l'au- teur a complété et partout amélioré son œuvre sous le rapport de l’érudition. I a pris soin de distinguer et de définir la valeur des sources anciennes dont il a fait usage : on lira avec intérêt, dans une notice préliminaire, Son appréciation des trois historiens de Sévère, Dion Cassius , Marius Maximus et Hérodien, contemporains et même témoins oculaires de beaucoup de faits. Dans le corps du travail, on aura la preuve en tout endroit qu'il a bien lu et fidèlement extrait les documents épigraphiques qu'il ( 619 ) devait mettre au nombre de ses matériaux les plus pré- cieux. Quoique l'écrivain ne se soit pas ingénié à donner plus de saillie à maint épisode curieux de son sujet, on verra volontiers ce qu’il dit de l'éducation et des études de son héros, de la physionomie nouvelle d’un César africain , et de même, comment il a tracé le caractère de Sévère et de ses compétiteurs à l'empire : esquisses assez nettes qui ‘deviendraient de bons portraits avec peu de retouches. On louerait aussi la rapidité de quelques narrations comprises dans l'histoire des campagnes de Sévère. Dans d’autres chapitres, tels que ceux qui concernent l'administration et les lois, on aurait à désirer plus de fermeté et plus d'égalité dans l'exposition. Mais on s'attache aux faits nombreux que l’auteur y a rassemblés, faits qui sont tirés en partie de récentes découvertes et qui nous initient à la vie publique de Rome et des provinces de l'Empire au troisième siècle. Que n’a-1-il placé, dans sa conclusion, un résumé substantiel de ses patientes études sur tant de graves questions, qui sont toutes très-importantes pour la Connaissance de la société gréco-romaine avant les inva- sions barbares! » Conformément aux conclusions des rapports de ses commissaires, la classe vote la médaille d'or de six cents francs au mémoire n° 2, portant pour devise : Laboremus. L'ouverture du billet cacheté fait connaître qu'il est dû à M. ADOLPHE-AUGUSTE DE CEULENEER, étudiant à l'Uni- versité catholique de Louvain. ( 620 ) DEUXIÈME QUESTION. Exposer avec détails la philosophie de S. Anselme de Cantorbéry; en faire connaître les sources; en apprécier la valeur et en montrer Pinfluence dans l'histoire des idées. Un seul mémoire a été recu. Rapport de M. J.-J. Thonissen. « A quelque point de vue que l’on se place, Anselme de Cantorbéry occupe dans l'histoire littéraire une place d'élite. Le premier, au seuil du moyen âge, il associa dans une large mesure les études de métaphysique générale à la dialectique pseudo-péripatéticienne. Il rouvrit à la phi- losophie la carrière des hautes spéculations sur l'être et la vérité en soi, qu'Augustin d'Hippone avait si brillamment développées. Précurseur, sous ce rapport, des Albert le Grand, des Thomas d'Aquin et des Bonaventure, An- selme exerça sur la direction des esprits une influence aussi forte qu'heureuse, Dans le vaste domaine de la théo- dicée , il trouva l'argument célèbre qui consiste à déduire l'existence de Dieu de son idée et qui, depuis le censeur contemporain Gaunilon de Marmoûtiers, a préoccupé la plupart des penseurs illustres : S. Thomas, Duns Scot, Descartes et Hegel lui-même. Ses observations sur le nominalisme excessif de Roscellin le rattachent à la grande et longue querelle des universaux. Enfin, par la forme sévèrement raisonnée de ses écrits, aussi bien que par l'imposant ensemble de ses travaux, il prélude au carac- ( 621 ) tère encyclopédique que recherchera bientôt la méthode scolastique. Ainsi que l’a dit avec raison l'illustre historien du professeur de l’abbaye de S-Marie du Bec, on ne peut que s'étonner de rencontrer, au onzième siècle , un humble moine élargissant, avec une si ferme initiative, les hori- zons de la pensée et le champ de la science. Plusieurs ouvrages de grand mérite ont été consacrés à la philosophie de S. Anselme. Tous les lettrés connaissent les beaux travaux du D" Hasse de Bonn, de MM. Bilroth, Mahler, Franck et Höhne. A côté de ces œuvres alle- mandes, sont venus se placer, en France, l’éloquente étude de M. de Rémusat et les travaux de MM. Hauréau , Rousselot, Bouchitté, Saisset et Charma. Mais tout n’est pas dit encore sur le pieux et savant religieux de S'-Marie du Bec, et la classe des lettres, tout en cherchant à faire Connaitre en Belgique les appréciations dont il a déjà fait l'objet, a voulu se procurer un nouveau travail critique, en posant la question suivante ` Exposer avec détails la Philosophie de S. Anselme de Cantorbéry, et faire con- naître les sources , en apprécier la valeur et en montrer linfluence sur l'histoire des idées. Un seul mémoire nous est parvenu. Il porte la devise : Aliter.... quam priores tradituri, fatemur ea quoque illo- rum esse muneris, qui primi quaerendi vias demonstra- verunt (Puixe, Hist. nat., l. IX, c. 45). Au début de son travail, l’auteur précise avec soin le point de vue auquel il a voulu se placer. Il dit que ce point de vue est surtout historique. Nous ne saurions pas Ten blâmer. A la considérer en elle-même, la philosophie d'Anselme n’a que peu de chose à nous apprendre aujour- d'hui. C’est comme initiateur de l'avenir, comme symbole vivant d’un fécond progrès, qu’Anselme doit surtout attirer ( 622 ) l'attention. Ce que la critique éclairée cherche dans ses œuvres, c’est bien moins un système, une théorie com- plète et achevée de toutes pièces, que des renseignements sur la forme de la philosophie au onzième siècle et sur les changements que le célèbre moine du Bec a su y intro- duire. Dans un premier chapitre, consacré à la dialectique de S. Anselme , l’auteur du Mémoire expose, en traits géné- raux, l’état de la science au moment où Anselme paraît sur la scène. C’est, selon lui, l'unique moyen d'apprécier équitablement la portée de la renaissance philosophique inaugurée par le docteur de Cantorbéry. I attache d'autant plus de prix à cette constatation de l’état de la philosophie avant le onzième siècle, qu'Anselme lui-même débuta par un traité de dialectique. Ce traité, intitulé De Gramma- tico et entièrement négligé par les critiques français, est peut-être le document le plus propre à nous faire bien apprécier la logique formelle, telle qu’elle était enseignée dans le trivium. Destiné dans la pensée d’Anselme à faire partie d’une Introduction générale à la dialectique, il a pour objet de fixer l'attention des jeunes disciples sur la vraie signification des noms de qualité. On n’a pas besoin de signaler laridité extrême d’un pareil travail. L'auteur du Mémoire l'expose avec toute la concision possible : encore s'excuse-t-il plus d’une fois de reproduire des idées et un langage qui sont si loin de nos habitudes modernes. Il a soin toutefois de montrer comment les circonstances du temps justifiaient l'essai d’Anselme. En ce temps si dénué de ressources intellectuelles, les disputes sur les mots offraient une importance qu’on aurait tort de mécon- naître. Au fond, ainsi que l’a dit M. de Rémusat, se cachaient les choses elles-mêmes. 11 n’était pas alors ( 625 ) indigne d’un esprit grave de se demander si, étant donné un lerme qualificatif ou adjectif, sa première signification porte sur la qualité considérée formellement et en soi; ou bien, s’il désigne immédiatement l'être substantiel que la qualité implique comme son support nécessaire, N'oublions pas que cette recherche préoccupait, après Anselme, le subtil Abélard, qu’on a plus d’une fois considéré comme le précurseur de la philosophie moderne. Dans la forme dialoguée, ordinaire aux leçons de l’époque, Anselme et son élève débattent en tout sens un problème dont nous trouverions aujourd’hui aisément, et sans tant de labeurs, une solution complétement satisfaisante. Mais l'auteur du Mémoire a voulu conserver à l'œuvre d’Anselme sa physio- nomie native, et il fait justement remarquer qu'en ce temps-là il n’était pas plus permis d'arriver à une conclu- sion en dehors des règles de la dialectique qu’il n’était loisible à un malade de l’époque de Molière de guérir en dépit de la faculté; mais ce qui est plus important à ses yeux que le dialogue du Grammairien, ce sont les ren- seignements qu'on y trouve sur la forme dans laquelle apparaissait aux premiers maitres la logique d’Aristote. On sait que, même du temps d’Abélard, les Analytiques n'étaient pas généralement connus dans les écoles. C’est là, et principalement dans la Métaphysique, qui ne fut expliquée à Paris qu’au commencement du treizième siècle, qu'on aurait pu se renseigner sur le caractère objectif de la logique du Stagyrite. La lacune était d'autant plus impor- tante que les commentateurs des écoles stoïciennes et alexandrines, Porphyre surtout, avaient de bonne heure négligé de mettre en lumière la portée objective de Ja logique du fondateur du Lycée. Or, Porphyre était, par son fameux traité des cinq voix , l'introducteur aux écrits ( 624 ) de Boèce, le traducteur et le commentateur d'Aristote. De fait, la dialectique des premiers siècles qui suivirent la renaissance carlovingienne était une forme bâtarde du véritable aristotélisme. L'auteur du Mémoire en prend occasion pour établir, d’après les meilleurs critiques, le sens général de la logique d’Aristote. Il montre ensuite les causes qui perpétuèrent dans les écoles le terminisme formaliste, gràce à l'influence des commentaires logiques de Psellus le Byzantin et des Sommes de Pierre d'Espagne, qui restèrent aux mains des écoliers jusqu’à la Renais- sance. L'auteur, poursuivant sa tâche, consacre dans le I° chapi- tre du Mémoire, de longs développements à la métaphysique d'Anselme, c’est-à-dire, à ses vues sur la vérité dans son concept absolu et sur les rapports des vérités particulières avec cette vérité transcendante. A ce sujet, il analyse et discute le dialogue De veritate et les parties du Monologue qui s’y rapportent. ĮI montre ensuite, conformément au programme de l'Académie, comment les vues du moine du Bec se rattachent aux théories de Platon et surtout à celles de S. Augustin, le correcteur chrétien de l'Aca- démie, Il entre, sous ce rapport, dans de minutieux détails critiques que nous ne saurions reproduire ici, même som- mairement. Selon lui, le trait caractéristique de la méta- physique anselmienne est précisément d’avoir mis en un vif relief l'élément absolu de la vérité et le lien, le rapport représentatif des vérités particulières avec la raison absolue dont elles constituent une imitation, un reflet dans le temps et dans l’espace. Selon l’auteur, c'est un titre de gloire pour Anselme d’avoir, dans un siècle bien peu favorisé, retrouvé cette idée, le plus beau fruit de la philosophie grecque à son apogée, et de l'avoir indiquée à l'avenir qu ( 625 ) ne l’oubliera plus. Il fait ressortir l'influence de cette vue fondamentale sur les philosophes postérieurs, notamment sur les grands maîtres du treizième siècle, l’âge d’or de la scolastique. Il profite de son étude sur la métaphysique et l'idéologie anselmiennes, pour reconstruire à grands traits le système traditionnel de la connaissance, auquel, selon lui, s’est ralliée toute l’antiquité et que l'on peut retrouver jusque dans nos penseurs contemporains. Il ramène ce système aux points suivants, que nous ne pou- vons qu'énumérer ` la tendance naturelle, instinctive de l'esprit vers la connaissance objective, inscrite par Aris- tote au début de sa métaphysique et mise en regard de la loi la plus universelle de la nature, l’infaillibilité, partant la légitimité ou la portée objective des tendances primi- tives des êtres organisés; le rapport représentatif des êtres avec leurs essences, subsistant dans le Nous absolu Ou dans la raison divine; le concours actif de l’absolu avec la raison créée dans lacte de la connaissance. D'après l'auteur, cette idéologie, dans ses traits essentiels, est celle de toute l'antiquité depuis Platon et Aristote. C’est l'hon- neur d'Anselme de l'avoir restaurée dans les écoles. Nous ajouterons que ces points sont traités avec d'abondants détails, et que l'exposition des vues d'Anselme est soumise à une libre et impartiale critique. L'auteur, dans cette Partie de son travail, ne pouvait manquer de s'occuper de l'ontologisme imputé au moine du Bec par les modernes. D'après lui, Anselme n’a pas partagé l'opinion de Male- branche et de Gerdil, qui soutiennent que les idées géné- rales et absolues sont vues par l'esprit en la raison divine, directement et immédiatement présente à l'homme. Ce qu’on a nommé l’ontologisme d’Anselme, dit l'auteur, n’est que la doctrine de l’exemplarisme ou du rapport idéal des 2°° SÉRIE, TOME XXXVII Ai ( 626 ) êtres avec la raison absolue, doctrine qui, tout en impli- quant la corrélation fondamentale des espèces finies avec l'être infini, rejette absolument l'identité des idées géné- rales avec cet infini lui-même et son aperception, au moins obscure, par l'esprit humain. L’idéologie d’Anselme , à son avis, suppose , non la vision immédiate de l'absolu, mais son action immédiate sur l'esprit. L'auteur estime que c’est là la doctrine commune d'Aristote et des écoles, et il reproche aux ontologistes de l'avoir confondue avec leur système. L'auteur termine ce chapitre en exposant les rares vues psycologiques d’Anselme. Il en signale les sources et, ici encore, il les soumet à une critique dé- taillée. Dans le chapitre suivant (HI), il examine la doctrine d'Anselme sur la nature de la substance physique. Il détermine la part que le docteur de Cantorbéry a prise aux disputes soulevées par la nominalisme de Roscellin, et par là à la querelle des universaux. L'auteur rappelle brièvement les incidents de cette question fameuse, à la discussion de laquelle Anselme n’a pas pris une part pré- pondérante. Il prend à tâche de prouver que le moine du Bec n’a jamais admis l'unicité numérique de toutes les substances d’une même espèce, comme le veulent les réalistes proprement dits. Il présente quelques aperçus nouveaux sur cette question abstruse et difficile. Il sef- force de prouver qu’Anselme se rallie à la doctrine d’Aris- tote mettant la substance proprement dite dans l'individu, et non pas dans le genre, dans l'espèce, dans l'universel en un mot. Ce n’est que plus tard, sous Abélard et ses successeurs , que le problème se complique et se pose clai- xement et définitivement. Nul, on le sait, n’a mieux que M. de Rémusat exposé cet intéressant épisode de l'histoire ( 627 ) des idées, dans la belle et profonde étude qu'il consacre aux universaux dans son livre sur le célèbre amant d'Hé- loise; mais, en ce qui concerne le réalisme exagéré que l’académicien français attribue à Anselme, l'auteur du Mémoire, qui rend fréquemment hommage à la science de son illustre devancier, a cru devoir se séparer de celui-ci, tout en avouant que le docteur du Bec est entré peu avant dans cette question. S Le chapitre IV renferme une longue analyse de la théo- dicée d'Anselme. L'auteur du Mémoire dit avec raison que c'est la première fois que l’on trouve dans l'Occident un travail aussi étendu, aussi sévèrement enchaîné et déve- loppé sur la nature et les attributs de l'absolu. Les parties importantes de la théodicée sont soumises à une critique détaillée. La preuve célèbre du Prosloge, de même que la censure qu'en fit un contemporain d’Anselme , sont scru- puleusement examinées. L'auteur rejette la preuve à priori déduisant la réalité de l'absolu de sa notion dans l'esprit qui le conçoit comme l'être le plus grand qui puisse exister (Ens quo majus cogitari nequit). I soutient que ni Des- Cartes, ni Leibnitz, ni l’école panthéiste allemande, n’ont pu légitimer cette preuve; mais, en même temps, il voit dans l'erreur d’un homme de génie un éclair de vérité dont Sillumineront les plus nobles représentants de la philo- Sophie : l'évidence spéciale de l'existence de l'absolu, tirée de la manière toute particulière dont l'âme humaine est affectée par cet intelligible transcendant et de notre ten- dance instinctive à nous élever, par chacune de nos facultés, jusqu’à la vérité sans bornes, jusqu’à la beauté Sans défauts, jusqu’à la bonté sans mesure, jusqu’à l'infini Personnel et vivant. L'auteur indique à la fois les sources et le côté original de la conception d'Anselme. Il montre ( 628 ) l'influence qu’elle exerça sur ceux-là mêmes qui la reje- tèrent, et il cite à ce sujet S. Thomas d'Aquin, qui n’a pas manqué de signaler, dans sa Somme théologique, la ten- dance primitive de la raison à s'élever jusqu’à l'absolu et qui en déduit l'infinité du premier être. L'auteur analyse également, en entrant dans tous les détails nécessaires, la doctrine d’Anselme sur la création substantielle, que nul BUS à lui n’avait exposée avec autant de précision. Il en * prend matière pour redresser quelques interprétations qu 'il croit inexactes et écarter quelques données contraires à la pensée ď’ Anselme. Dans le chapitre V, l’auteur s'occupe de la doctrine d'Anselme sur les rapports harmoniques de la philosophie et de la théologie. Tout en signalant quelques parties un peu obscures dans les vues du moine illustre de l’abbaye du Bec, il a soin de faire remarquer que personne n'a mieux que lui respecté les droits de la raison. Il s'excuse d’avoir dù côtoyer souvent le rivage réservé de la théologie. L'exemple de ses devanciers justifie, à son jugement, cette liberté dont il n’a usé, du reste , que là où l'impartiale eri- tique lui en faisait un devoir. La Mémoire se termine par une appréciation générale de la méthode scolastique, dont Anselme a été nommé le père et l'introducteur. L'auteur fait observer que c’est sur- tout par l'esprit encyclopédique qui préside à l'ensemble de ses travaux et par la forme plus sévère de l’argumenta- tion , qu'Anselme a mérité ce nom. Anselme , dit-il, n’a pas écrit une Somme; il n’a pas encore employé le syllogisme, comme cela deviendra la coutume aux siècles suivants. Mais il a embrassé, dans ses divers écrits, le cycle presque complet des connaissances divines et humaines. Le premier au moyen àge, il a formulé la doctrine de l'alliance de la 629 ) raison et de la foi. H a mérité ainsi le titre de père de la scolastique. En finissant, l’auteur indique l'identité essentielle de la philosophie d' Aibélne avec la tradition du passé, et il met vivement en lumière les titres qui recommandent à les- time de la postérité l'humble moine de l’abbaye de S'°-Marie du Bec. Le premier, en un sièele à moitié barbare, Anselme a su associer à la dialectique d'école les nobles spéculations métaphysiques dont s'étaient épris l'antiquité et les pères; il a inauguré une féconde renaissance intel- lectuelle. Qu'importent après cela quelques lacunes dans son œuvre, quelques faiblesses dans ses argumentations ? L'humanité ne vit pas seulement de démonstrations cor- rectes, ni de froide et banale exactitude. Qui se sou- viendrait aujourd'hui de l’exact et correct logicien de Marmoûtiers, si Anselme lui-même ne nous eût conservé sa censure? Seul l’homme de génie, révélateur des prin- cipes et des grandes lois, s'élève à immortalité. Le doc- teur de Sainte-Marie du Bec a élargi les horizons étroits de la science de son temps. Il a fondé une seconde fois, en Occident, la théorie de l'absolu; il a imprimé aux esprits une impulsion qui dure encore. Voilà ses titres à la gloire, à la persistante sympathie de la postérité. « Aussi » longtemps, s'écrie l’auteur du Mémoire, qu'il y aura une » philosophie, elle reconnaitra l’empire d'Anselme de » Cantorbéry. » Cette simple analyse suffit , croyons-nous, pour prouver que la question posée par la elasse a été très-convenable- ment résolue. Nous ajouterons que l’auteur, dans l'indica- tion des sources, fait preuve d’une érudition saine et abon- dante. Tantôt il traduit les auteurs, tantôt il les résume, et partout un système continu de notes permet au lecteur ( 650 ) de se livrer à un contrôle facile. Le style est lucide, cor- rect et même élégant. C'est une œuvre sérieuse à tous égards. Nous sommes d'avis qu'il y a lieu de décerner la médaille d'or au Mémoire portant la devise citée ci-dessus. » Rapport de M. Alph. Le Roy. « Le Mémoire sur la philosophie de saint Anselme, actuellement soumis à l'appréciation de la classe des let- tres, a été de la part de l'honorable M. Thonissen l'objet d’une analyse si fidèle et si complète, que je me crois tout à fait dispensé d’attirer l'attention sur le plan général de cette œuvre importante, Je m'empresse en outre de m'as- socier à mon savant et judicieux confrère, pour rendre hommage à la solide érudition de l’auteur, à son étude consciencieuse des sources, à la loyauté de ses procédés de controverse. Avant de formuler mes conclusions, cepen- dant, je crois indispensable d'entrer dans quelques con- sidérations sur un point essentiel, à peine indiqué en passant dans le premier rapport. Je serai aussi bref que possible. Chacun sait par quelles vicissitudes ont passé les écoles catholiques, depuis un demi-siècle, sous l'influence des doctrines de de Bonald et de Lamennais d’abord, de Gio- berti et de Rosmini ensuite, pour aboutir juste au point d'où elles étaient parties, je veux dire pour se rejeter fina- lement dans l’ornière de la métaphysique et de la méthode scolastiques. Dans le champ des théories pures comme dans le domaine de la politique, le célèbre programme de la Civiltà catholica est devenu le mot d'ordre de la nouvelle ( 631 ) croisade (1). Au P. Ventura, encore infecté de traditiona- lisme, mais en même temps thomiste énergique et zélé, a succédé le P. Liberatore , plus modéré, se déclarant fort disposé à reconnaitre les droits de la raison pourvu qu’elle s'incline devant la foi, mais jaloux par-dessus tout de con- vier la jeunesse à reprendre les habitudes intellectuelles du moyen âge (2). Le gant est jeté à la philosophie indé- pendante. Aux yeux des apôtres de cette réaction, la phi- losophie n’est tolérable que pour autant qu’elle consente à se contenter de son ancien rôle de servante de la théologie; bien plus, l’article Lvi du Syllabus de 1864 lui défend de se soustraire à l’autorité ecclésiastique, et l'article xrv lui enjoint expressément de tenir compte du fait surnaturel de la révélation. C’est sur ce terrain que s’est placé le con- Current; son travail est un plaidoyer en faveur des thèses annexées à la bulle Quanta cura, au moins autant qu’un exposé de la philosophie de saint Anselme. Le principe qui domine tout est celui-ci : Credo ut intelligam, la foi seule peut éclairer la raison. C’est la ne LME géo Meng (1) « Notre principal but, écrivaient les publicistes romains, est de re- Conduire l’idée et le mouvement de la civilisation à cette conception catho- lique avec laquelle elles semblent avoir e divorce depuis trois siècles » (Cf. Ferri, Histoire de la philosophie en Italie au XIX" siècle. Paris, 1869, in-S, t. Il, p. 314). (2) Ce n’est pas d'hier qu'il y a des théologiens qui les regrettent. Je ne citerai que le passage suivant beten geg dë l'abbé ker Feller sur saint Thomas d e « Quand les q t, les grandes vérités de la fo tituti je ts, de la société Civile et ri étaient à l'abri de la contradiction; on ne disputait Pas Sur ces grands objets, on ne les contestait pas, parce que l'inquiétude naturelle de la raison se nourrissait de spéculations où le bonheur des mes el les vérités éternelles n'étaient pas compromis; aujourd'hui elle Porte partout des regards téméraires et destructeurs. . . » ( 632 ) formule de tous les scolastiques et notamment de saint Anselme, dont le Prosloge 3 pour second titre: Fides quae- rens intellectum. Il est loisible à la raison d'aborder lexa- men de toutes les questions transcendantes; seulement; si ses spéculations lentrainent hors des sentiers de l'ortho- doxie, il ne lui reste qu’à confesser son erreur. Je cède la parole à notre écrivain : « Les scolastiques, dit-il, partent du fait de la révélation divine des vérités de la foi : c’est le principe générateur, la base de toutes leurs démonstra- tions. Et on leur reproche, après cela , de reconnaître, au- dessus de la raison, l'autorité de Dieu ! Que les rationalistes défient les catholiques de prouver les origines surnaturelles de l'Évangile, cela se conçoit. Qu'ils s’en tiennent assurés : les catholiques relèveront le défi. Ce qui est risible, c'est qu’on accuse les docteurs du moyen âge d'être restés con- séquents avec la maxime fondamentale de leur philosophie. Laissons une-bonne fois ces puérilités. La formule qui a soulevé tant d’ironiques clameurs dans le camp rationa- naliste : Philosophia theologiae ancilla, est conciliable avec le respect passionné de tous les droits de la raison. Il est vrai : saint Jean de Damas l’a transmise aux scolastiques; mais elle était connue de Clément d'Alexandrie et d'Ori- gène, et avant eux Aristote avait professé la subordination des sciences à la théologie (1). Elle n’exprime que la dé- pendance essentielle de l'intelligence finie à la raison ab- solue et son obligation de s’y soumettre, à condition que le fait historique soit prouvé. Quand les docteurs se sépa- raient des doctrines manifestement opposées à la foi, ils posaient un acte raisonnable et éclairé. » (1) Aristote dit tout simplement que la théologie (ou la philosophie pre- mière) est la plus élevée des sciences (Met., t. V, p. 1;1. XI, p. 6). ( 655 ) On ne saurait se dissimuler la gravité de cette déclara- tion. « La question est de savoir, dit Kant, si la raison, servante de la théologie, doit suivre pour lui porter la queue, ou marcher devant pour porter le flambeau. » Cette espèce de plaisanterie a été reprochée au philosophe de Kænigsberg, « attendu qu'il ne s’agit ni d’antériorité, ni de postériorité, mais d'infériorité (1). » Au fond pourtant, le problème est le même : si la démonstration de la légitimité de la foi doit être demandée à la raison, c’est apparemment Parce que celle-ci, en dehors de la foi, possède des lumières naturelles, des principes qui dominent le débat; si donc elle se soumet, c'est parce que l'évidence, et non une autorité extérieure, l'aura forcée de se soumettre. Il faut bien alors qu'on reconnaisse au point de départ la souveraineté ab- Solue de la raison; seulement, on ne lui accorde le droit de poser souverainement qu’un seul acte, l'acte de son abdication. Nous n'y sommes point : à l'égard de cet acte même, la Souveraineté de la raison est contestée, Abandonnée à ses propres forces, elle ne saurait opérer la démonstration qu'on réclame d'elle; elle a besoin du secours de la révé- lation et de la gràce (2); c’est-à-dire qu’il dépend de Dieu, et non de nous, que nous soyons capables de démontrer la légitimité de la foi. Mais en ce cas tout essai de démonstra- tion est inutile. Si nous ne sommes pas touchés de la gràce, nous n'atteindrons pas le but; si nous en sommes touchés, nous Sommes illuminés d'avance. La raison n’a rien à voir ici : nous tombons en plein mysticisme. Ee SEN Michaud, Guillaume de Champeaux. Paris, 1867; in-8° ; + inb ducit ad fidem, ope revelationis et divinae gratiae (Encycl. de 1846). ( 634 ) Il n’y a pas à sortir de là : ou point de démonstration possible , ou la philosophie a un domaine distinct de celui de la théologie, et dans ce domaine elle est indépendante. La raison, servante de la théologie, n’est plus la raison, mais la faculté de raisonner, ce qui est tout différent; elle west plus que l'instrument qui sert à tirer de prémisses imposées les conséquences qu'elles renferment; que dis-je? si les conclusions auxquelles elle arrive ne sont pas celles qu’on lui demande , vainement elle a respecté toutes les règles de la logique, la voilà suspecte; elle n'a plus qu'à recommencer ou à se taire. On en arrive ainsi, à force de distinctions subtiles déterminées par les besoins de la cause, à construire toute une science conventionnelle; mais se west plus là de la philosophie, et avec une telle méthode à son service, la théologie se compromet elle-même. La théo- logie se meut dans la région des mystères, dans une région où la raison ne pénètre pas; elle a tort de vouloir en des- cendre et de solliciter ensuite un passe-port pour y remon- ter. J'aime mieux dire avec saint Ambroise ` Si ratione convincor, fidem abnuo. à D'autre part, une démonstration n'est pas un simple rai- sonnement ; pour qu’il y ait véritablement démonstration, il est de toute nécessité que la vérité matérielle des prë- misses soit évidente; n'est-elle assurée que par une auto- rité extérieure, l'argumentation est ad hominem , ad vere- cundiam, c’est-à-dire insuffisante en soi, puisqu'il faudrait d’abord fournir la preuve que l'autorité qu'elle invoque est fondée à dogmatiser. On m'accorde le droit de fournir cette preuve, il le faut bien; seulement, on m'avertit que Si Jè ne crois pas d'avance, je ne la trouverai pas. La preuve n’existera done que pour le croyant; alors ce n’est plus une preuve; je crois parce que je crois, voilà tout. Nous tournons dans un cercle. ( 635 ) I n'y a que deux procédés de démonstration : l'induction et la déduction. A posteriori, par induction, on invoquera ici, puisqu'il s’agit d'un fait historique, des témoignages, des monuments, la tradition constante, des faits réputés surnaturels; mais que pourra-t-on rigoureusement tirer de là? Que le fait dont il s’agit a été regardé pendant une longue suite de siècles comme divin, mais non qu'il est divin. Il résultera de cette argumentation une présomp- tion aussi fondée que celle des Indous, qui s'appuient sur des preuves du même genre pour établir la divinité de l'inspiration des Vêdas. La grâce transformera cette pré- Somption en certitude ` oui, pour les privilégiés; mais pour les autres? C’est done affaire de sentiment , de confiance, non de démonstration; la conclusion contient plus et autre chose que les prémisses; or, en pareille matière, une haute probabilité ne suffit pas. Sera-t-on plus heureux à priori? [ei nous nous demanderons d’abord ce que c’est que divin, et ensuite si la doctrine qui nous est proposée comme telle répond pleinement à la notion du divin. Mais alors la divi- nité du christianisme sera démontrée, non par des consi- dérations touchant au fait historique de son apparition, de Sa propagation et de son organisation visible, mais par sa Conformité parfaite avec les vérités primordiales que nous entrevoyons au fond de notre conscience, et dont la con- naissance explicite est le but de nos plus ardentes, de nos Plus intimes aspirations. Or, ces vérités sont absolues par elles-mêmes, c’est-à-dire indépendantes de tout fait histo- rique, de tout fait qui a sa source dans un acte libre de l'homme et qui aurait pu, par conséquent, ne pas se pro- duire. L'homme aurait-il eu besoin de rédemption s'il n'était pas tombé? Or, on ne soutiendra pas, en bonne orthodoxie , que la chute était nécessaire. Au contraire, ( 636 ) que l’homme ait été racheté ou qu'il ne Vait pas été, les vérités premières dont il s’agit n’en sont pas moins éter- nelles (1), et si elles ne nous sont pas d'elles-mêmes acces- sibles, nous ne pourrons jamais dire de la doctrine chré- tienne ` ei vera incessu patuit dea. Si done la divinité du christianisme est démontrable, c’est que la certitude des prémisses qui forcent notre conviction à cet égard est su- périeure à celle du fait de la révélation, et d’un tout autre ordre. Mais alors la raison n’est point au service de la théo- logie. Que la foi chrétienne soit une source de lumières ; que la société régénérée par la bonne nouvelle ait les yeux des- sillés; que nos petits enfants en sachent plus sur les rap- ports de la créature avec son Créateur que le divin Platon lui-même, c’est une autre question. Mais ce qui est pure- ment de foi n’éclaire que les croyants, et en dehors de ce qui est de foi, il y a ce que la foi a pu rendre plus lumi- neux , mais ce qui n’en est pas moins primitif et éternel, ce qui est de raison, ce qui éclaire ou peut éclairer tout le monde, ce sans quoi la foi elle-même ne serait que l'atta- chement aveugle à une sublime hypothèse. Si saint Au- gustin a embrassé la foi chrétienne et catholique, cest parce que sa raison, soutenue par la grâce tant qu'on voudra, mais enfin sa raison, lui a dit que c’est ce qu'il y a de EC (2). Une fois croyant, il s’est incliné, il s’est humilié, il a même poussé les choses à l'extrême, jusqu'à écrire qu'il ne croyait à P Évangile que parce que l'autorité (1) « Elles subsistent devant tous les siècles, dit excellemment Bossuet, etdevant qu'il y ait eu un entendement humain (Consc. de Dieu, ch. 1V). ” (2) Contra Acad., t. HE, p. 20. | ( 637 ) de l'Église le portait à y croire (1). Ses saintes ardeurs l'ont plus illuminé que sa raison, je le veux bien; mais c’est sa raison pourtant qui lui a fait connaître qu'il y avait, avant l'Église, a un christianisme naturel (2). » Mais revenons. Si la foi est un don de Dieu, la raison l'est aussi, et la raison est même, par excellence, ce qui nous rattache à Dieu, ce qui nous fait son image, et cela indépendamment des événements de l’histoire. La raison peut être affaiblie elle ne peut cesser d’être la raison ` nous ne serions plus hommes, nous ne saurions plus remonter à Dieu, signaler sa présence. Les deux domaines sont également respecta- bles; mais il importe de le proclamer, ils sont incommen- surables entre eux, l’un n’est pas tout entier dans l'autre. La foi affirme beaucoup plus de choses que la raison, c’est son droit; mais la raison n’attend pas la foi pour être as- surée de l'évidence des vérités premières , et elle est par- faitement fondée à soutenir que rien ne peut être incom- patible avec cette évidence, car il n’y a pas deux vérités absolument opposées l’une à l’autre. Si le principe de con- tradiction est contestable, c’est le dieu de Hegel qui est le vrai dieu. Mais il faut bien avouer que nous n’atteignons Pas rationnellement le monde surnaturel; tout ce qui s’y Passe ne sera jamais pour la raison qu'hypothèse, tandis que la foi est pleinement autorisée à considérer les mys- tères comme des postulats indiscutables. C’est l'affaire des _CrOyants; mais vouloir, sur ce terrain, subordonner la mr (1) Ego verd Evangelio non crederem, nisi me catholicae Ecclesiae com- moveret auctoritas (Contra E par, Manich, ch. V). } On sait dat de l'autorité extérieure n’a pas toujours été d'accord avec lui-même (Voir piya. La philo- Sophie de saint Augustin. Paris, 1865, in-8°, t. Il, ch. IH). ( 658 ) raison à la foi, condamner l'esprit humain à une minorité perpétuelle, c'est tyranniser les consciences et dénaturer la pensée du Christ lui-même. La raison, quand elle tient l'évidence, parle au nom de Dieu, avec autant de droit que la foi, qui ne la tient pas. Quant à la scolastique, elle franchit tout à fait les limites de sa compétence lorsqu'elle condamne la raison humaine à ne contempler Dieu, lunivers et le moi lui- même qu’à travers les barreaux de la cage où prétendent la renfermer ses froides et abstraites définitions. Au moins saint Augustin et saint Anselme s’élevaient à Dieu et à sa révélation par des élans d'amour, par les ravissements de l’extase; la scolastique comprime toute expansion intel- lectuelle, paralyse tout essai de la pensée et du sentiment, étouffe toute vie, je ne dirai pas seulement philosophique, mais religieuse dans le sens le plus noble du mot, sous la chape de plomb de ses formules. Elle est atteinte d’un mal incurable; ne posant pour prémisses que des abstractions, elle ne peut aboutir qu’à des abstractions, de par la logique Aristote qui est son palladium ; sa théologie et sa science sont vides; elle ne consiste qu’en un enchainement de pro- positions aussi stériles les unes que les autres; elle prend les mots pour les choses, et les rapports des mots pour les rapports des choses. Elle a eu des audaces, des illusions spéculatives, des prétentions qui prouvent qu’elle n’a pas toujours su se résigner à être une simple méthode, l'ombre d’une science et d’une philosophie; mais les excès d’un Roscellin, d'un Amaury de Bène, d'un Simon de Tournay, et enfin la querelle tout entière des universaux attestent précisément qu’elle ne donnait point par elle-même satis- faction à la conscience. La pensée enchaînée brisait de temps en temps ses liens, et alors elle ne savait pas garder la mesure. ( 639 ) J'ai exprimé nettement mon sentiment sur ce point, parce que la loyauté m'en faisait un devoir, et ensuite parce que l'attitude prise par l’auteur a naturellement influé sur le degré d'indépendance de sa critique. Je res- pecte toutes les convictions ardentes et sincères; je n’op- poserai pas au concurrent une fin de non-recevoir, au nom des droits imprescriptibles de la science; s’il y porte at- teinte, c’est assurément contre son intention. Mais il doit être bien entendu que si mon verdict lui est favorable, je entends, en aucune façon, considérer comme sérieuse- ment scientifique la théorie qui sert de fondement à toute son argumentation, encore moins considérer cette théorie comme l’ancre de salut de la philosophie catholique. Elle règne pour le moment dans les écoles théologiques et dans quelques universités ; elle est et sera invoquée dans le grand débat religieux et politique qui s'annonce déjà comme l'évé- nement capital de ce siècle si tourmenté; la voici qui pé- nètre dans l’enceinte paisible des académies pour installer, là aussi, la restauration telle qu’elle l'entend, pour clore enfin, s’il faut l’en croire, l'ère révolutionnaire. Il impor- tait de le constater, de répondre à la franchise de l’auteur par une franchise égale, de ne point laisser subsister d'il- lusion sur l’estampille dont il a jugé bon de marquer son travail. La préoccupation dominante du concurrent est de ga- gner le plus possible saint Anselme à sa cause, si l’on peut Parler ainsi; je me hâte d'ajouter qu'on ne peut néanmoins lui reprocher d’affaiblir les objections des auteurs qui ont apprécié autrement que lui la philosophie du docteur du Bec. Mais ses meilleurs efforts sont consacrés à écarter de cette philosophie jusqu’au moindre soupçon d’ontologisme et de rationalisme, ces deux épouvantails de l’école théo- ( 640 ) logique contemporaine. Saint Anselme a soutenu formelle- ment, selon lui, la doctrine de l’exemplarisme, déjà préco- nisée par son maître Augustin. Le penseur du XI° siècle prend son point d'appui dans la tendance native et spon- tanée de l'intelligence à connaître, à savoir, c’est-à-dire à réaliser la fin de son être. En nous confiant à cet instinct, nous atteignons de plus en plus la possession de la vérité, pour laquelle nous avons donc une aptitude originelle; de là, quand nous pensons comprendre une chose , si nous la comprenons autrement qu’elle n’est, en réalité nous ne la comprenons pas. Mais qui nous garantira que nous la saisis- sons telle qu’elle est ? C’est ici qu’apparaît l’exemplarisme. A mesure qu’elle se dégage des formes sensibles, la raison se trouve en présence de l’ihtelligence divine en qui sont tous les archétypes, et par le concours de cette intelligence notre esprit se les assimile. Nos connaissances, en un mot, acquièrent leur certitude et leur valeur objective par lin- flux de la raison divine elle-même. Nous voilà bien près de Platon, plus près encore de Malebranche, ce semble; mais prenons-y garde. Selon Malebranche, nous voyons directe- ment les idées en Dieu; ce n’est point ainsi, selon notre auteur, qu’il faut entendre saint Anselme et les scolasti- ques. « Il est impossible, dit saint Augustin, de voir les idées divines, si ce n’est dans la vie bienheureuse; » et saint Anselme déclare adhérer à la doctrine de l’évêque d'Hippone; done, ajoute-t-on, saint Anselme n’a pu pro- fesser l’ontologisme. J'avoue que cette conclusion me pa- rait médiocrement motivée. Comment! Nous ne compre- nons rien si ce n'est la vérité, ce que Dieu nous laisse entrevoir en récompense de nos efforts, et cette vérité, dont la plénitude, sans doute, nous demeure insondable à cause de la faiblesse de notre vue, cette vérité, telle qu’elle ( 641 ) se montre à nous, ne serait pas une Communication immé- diate de Dieu ? « La lumière de la raison, dit saint Thomas, est l’image de la vérité incréée réfléchie dans le miroir de notre âme. » On ne saurait mieux parler. Mais à quel signe reconnailrai-je que l’image est fidèle? Si je n’entrevois directement la vérité divine en aucune manière, comment Pourrai-je m'assurer de la conformité de l’ordre de mes idées avec l'ordre réel? On répond avec saint Anselme : par analogie. « La manière dont parle l'Esprit suprême est incompréhensible. Les choses ne sont dans la connaissance que par leurs images, non par leur essence. Elles sont donc en elles-mêmes plus réelles que dans notre connaissance, et c’est comme telles qu’elles sont dans l'esprit divin qui les pense et les réalise. » C’est toujours la caverne de Platon; il n’y a que l'induction et l'analogie pour nous sauver. Mais les similitudes sont imparfaites, le saint doc- teur du Bec l’avoue; or, nous cherchons une certitude absolue ; et d’ailleurs, encore une fois, l'induction est im- possible si je n’entrevois la vérité au delà de son image. Comment , sans cela, pourrai-je savoir que la lumière qui m'éclaire n’est qu’une lumière réfléchie? Ou je m’aheur- terai à argument des sceptiques de la moyenne Académie, Ou il faudra bien que j'aie une certaine vue directe de Dieu, quoique mes yeux ne puissent soutenir tout l'éblouissement de cette splendeur. On accorde cela à saint Anselme, sauf à lui reprocher un défaut de précision ; mais alors il n’est Pas aussi loin de l’ontologisme qu’on veut bien le dire. Il faut prendre saint Anselme tel qu'il est. Il ne préten- dait certes pas, comme Hegel le donne à entendre, que nous possédons l'intuition intellectuelle de l'identité de l'idée et de l'être; c’est bien en nous qu’il cherchait la trace de la révélation divine. Mais la distinction que les Ze: SÉRIE, TOME XXXVII. 2 ( 642 ) modernes scolastiques ont établie entre le psychologisme et l’ontologisme n'existait pas pour lui; il donnait tout sim- plement à ses idées une valeur objective; il jugeait que ses notions analogiques, ses appréhensions d’un bien, d'une grandeur, d’un être supérieur à toutes les perfections, à toutes les grandeurs, à tous les êtres finis convenaient à l'Étre que sa foi, plus que sa raison, lui montrait comme le but suprême de toutes les aspirations humaines, comme le 7ò Ges de Platon. A l'instar d’Augustin, il commença, dans son désir d’être illuminé, par croire et par aimer; la méthode péripatéticienne, appliquée aux objets de la foi, vint ensuite rétrécir son horizon; il prit volontiers la défi- nition pour le défini, la formule pour l'empreinte fidèle, sinon adéquate , de l'essence. Disciple de saint Augustin, il fut le dernier père de l'Église; précurseur de la scolastique, il laissa tout d’un coup échapper la proie pour l'ombre en mettant le pied sur le terrain du réalisme. Sous ce dernier rapport, je dois le dire, il resta dans les bornes de la modération, moins cependant que saint Thomas, qui semble n’avoir admis que les preuves à pos- teriori de l'existence de Dieu (1). C’est la confiance exagérée de saint Anselme dans là portée de la logique qui a pu le faire considérer comme rationaliste, imputation certainement étrange. S'il est ratio- naliste, c’est à la façon de l’ontologiste Malebranche, de qui notre auteur, par parenthèse, n'aime guère qu'on le rapproche. Le célèbre oratorien tàchait d’abord de s'assurer des dogmes sur lesquels il voulait méditer, et alors il fai- fast PIRE, (1) F. Morin, Dictionnaire de théologie et de philosophie scolastiques (Coll. Migne), t. 1, col. 520. — Cf. Hauréau, De la philosophie scolaslique- Paris, 1850, t. 1, p. 208 ( 645 ) sait de son esprit le même usage que ceux qui étudient la physique. Apercevait-il quelque lumière? Il la suivait au- tant qu'elle l’attirait par la force de son évidence; mais à la moindre obscurité, je cite textuellement, il faisait halte et se rabattait sur les dogmes. Il prenait done ceux-ci pour objet de ses expériences, rien de plus; se heurtait-il contre la raison en essayant de les interpréter, il s'arrêtait court. Les spéculations de saint Anselme ne sont pas d'autre sorte; dans ces conditions, l’orthodoxie n’est jamais en péril. Ce- pendant l'opuscule ` Cur Deus homo? donne lieu à une difficulté plus sérieuse : Anselme prétend y démontrer l'incarnation par des arguments nécessaires, par la seule puissance de la raison, sans le secours des saintes Écri- tures, remoto Christo. Mais, dit notre apologiste, ne nous y trompons pas : il présupposait le fait de la chute, qui ne nous est connu clairement que par la révélation. Soit; mais dans ce cas la démonstration est bien près de se réduire à un cercle vicieux : c’est la révélation qui nous atteste la chute, et pourtant la certitude de ce dernier fait doit nous ètre acquise pour que celle du fait de la révélation puisse être établie. Autant dire que c’est la révélation qui doit nous démontrer la révélation. Saint Anselme n’a souci que de l'argumentation logique, insiste auteur : soit encore; mais c’est une singulière logique, il faut l'avouer, que celle qui démontre la thèse au moyen de la thèse elle-même : doreper rpérepsy, disaient les anciens. Saint Anselme n'est Pas rationaliste, non; au contraire, il ne sort pas du surna- turel; seulement il s’ingénie à tenter d'en sortir pour y rentrer triomphant. La fameuse preuve du Prosloge est pourtant, bien et dûment, un essai de démonstration rationnelle de lexis- tence de Dieu; elle n’a rien de théologique en soi. Mais C 644 ) quoi! elle est absolument vide et n’a un semblant de force que grâce à un saltus, comme Gaunilon et Kant l'ont établi tour à tour. Anselme tient à comprendre ce qu'il croit; il cherche une idée qui corresponde à sa croyance , qui jus- üfie celle-ci aux yeux de sa raison. Il trouve l’idée de la perfection, qui, selon lui, enveloppe l'existence, laquelle ne serait donc qu'un attribut logique. Dans les prémisses, il ne s’agit donc que de l’idée d’existence, de l'existence idéale; mais dans la conclusion, c’est bien l'existence réelle qui est affirmée ` voilà le saltus. L'auteur reconnaît que les objections de Gaunilon sont restées sans réponse ; mais il ne veut pas voir que c’est la méthode scolastique elle-même qui est ici frappée au cœur : elle ne spécule que sur des mots. Je reviens encore à cette méthode : le pro- blème des universaux s’est imposé à elle, et malgré toutes ses distinctions et ses combinaisons, elle devait être impuis- sante à le résoudre. L'auteur prend à partie M. X. Rousse- lots, et lui démontre victorieusement que le réalisme mo- déré de saint Anselme ne fait pas de lui un continuateur de Jean Scot Érigène, une sorte de panthéiste néoplatoni- cien; mais il n’en est pas moins vrai que le docteur du Bec, tout en admettant que la substance primaire est l'individu, attribuait une certaine réalité aux universaux, et que C'est par là qu’il croyait pouvoir passer de l’ordre logique à l'ordre des choses ` c’est pour cette raison même que Hegel, ainsi que je Pai déjà indiqué, s’est empressé de relever le crédit de sa preuve ontologique ébranlé par Kant. C'est la méthode scolastique, je le répète , qui est ici en cause; en prenant les groupements de mots pour les élé- ments des essences réelles, elle a confondu la forme avec le fond, la forme pure avec l’essence divine ` sans la doc- trine de la création, elle aurait substitué en fin de compte pp ne QE nn à ( 645 ) le dieu d'Aristote au Dieu vivant du christianisme. Mais je n’insisterai pas. Je dirai seulement que la science qui pré- tend nous faire atteindre la réalité par la seule puissance des formules et des distinctions logiques n'est que le fan- tôme d’une science, et qu'il n’est nullement étonnant que saint Anselme, véritablement philosophe quand il s’est abandonné à ses inspirations naturelles, wait plus été qu'un logicien tournoyant dans le vide quand il a cédé à l'empire de cette illusion. Tel il apparaît surtout dans son opuscule De grammatico, auquel notre écrivain fait décidément trop d'honneur, en en présentant une analyse plus étendue que le traité lui-même. Il y a sans doute un intérêt de curiosité à rechercher com- ment l'esprit humain, en ces temps demi-barbares, en est venu à faire un pareil abus des catégories d’Aristote; mais ni les subtilités d'Anselme ni les arguties analogues d’Abailard, esprit éminent pourtant sous d’autres rapports, ne méritent qu’on s’y arrête sérieusement : Non ragioniam di lor, ma guarda a passa. Je l'avoue : j’eusse préféré voir l'auteur aborder plus explicitement l'examen du traité De fide Trinitatis, bien que ce ne soit pas à proprement parler une œuvre philoso- phique; aucun ouvrage de saint Anselme, peut-être, ne donne une plus juste idée de la manière dont il concevait les rapports de la raison et de la foi, de la limite qu’il imposait à ses hardiesses, de ses procédés en matière spé- Culative, de la force et de la faiblesse de sa méthode ana- logique. L'auteur y a consacré quelques pages excellentes; à mon sens, ce n’est pas assez. Si maintenant, comme je le dois, je fais entièrement abstraction de ma manière de voir sur la mission que l'au- ( 646 ) teur assigne à la philosophie, je me plairai à reconnaître en lui un métaphysicien de bon aloi, un esprit élevé et tout ensemble plein de finesse et de justesse, dans un ordre de discussions aussi délicates, etoûilest si difficile de s'orienter. Profondément imbu des enseignements des Pères de l'Église et familier avec le génie de la scolastique, il rattache habi- lement ces deux traditions l’une à l’autre, et montre com- ment la philosophie de saint Anselme a été en quelque sorte un pont jeté entre elles. La philosophie moderne, d'autre part, n'a point de secrets pour lui; il connait les travaux de ses historiens les plus récents, et il y puise les éléments de comparaison des plus instructives; de plus, il ne se laisse dominer ni par les détails érudits, ni par les complications d'un sujet parfois enveloppé d’obscurités. Enfin sa ligne de conduite est droite, son but nettement accusé, et s’il plaide quelquefois plus qu'il n’expose, c'est avec une sincérité bien visible; sans doute il est désireux de convaincre son lecteur, mais il ne cherche jamais à le surprendre. Je ne sais si les partisans enthousiastes de la scolastique suivraient à l’occasion l'exemple de tolérance que je tiens à leur donner aujourd'hui; mes réserves faites sur la fameuse thèse Philosophia ancilla theologiae, je con- clus à la médaille d’or. Je voudrais seulement que l'auteur veillàt à mieux proportionner l'étendue de ses chapitres au point de vue de leur importance relative; qu'il appliqut ses soins à faire disparaître de la première partie quelques négligences de style d’ailleurs très-secondaires; enfin qu'il adoucit quelques expressions d’un caractère agressif, Se conformant en cela aux bonnes, aux saines traditions de notre Académie. » M. Nève, troisième commissaire , déclare adhérer aux conclusions des rapports de ses deux collègues. ( 647 ) La classe vote, en conséquence, sa médaille d’or de six cents francs au Mémoire présenté. Ce travail, ainsi que l’a fait connaître l'ouverture du billet cacheté, a pour auteur M. l'abbé Van Wepnixcex, docteur en théologie et aum6- nier de la cour, à Bruxelles. TROISIÈME QUESTION. Donner la théorie économique des rapports du capital et du travail. Sept mémoires ont été recus. Rappori de M. J.-J. Thonissen. « Composé d’une vingtaine de pages, le mémoire portant la devise : Un pour tous et tous pour un, ne mérite pas de fixer un seul instant l'attention de la classe. Le mémoire intitulé : Théorie économique des rapports du capital et du travail, avec la devise Primo vivere , est une œuvre plus sérieuse; mais, ainsi que l’auteur le recon- naît lui-même , elle a été écrite avec trop de précipitation. Elle laisse beaucoup à désirer sous le double rapport du fond et de la forme. L'auteur a fait entrer dans son plan, qui n’est pas toujours méthodique, une foule de détails Surabondants et de digressions inutiles. Ses doctrines éco- nomiques ne sont pas exposées avec la concision et la sim- plicité requises, et l’on pourrait même y signaler quelques erreurs, notamment en ce qui concerne les services que les caisses d'épargne peuvent rendre à la classe ouvrière. ( 648 ) En somme, le mémoire, sans être complétement dépourvu de mérite, ne répond pas aux conditions du concours. Je regrette de devoir émettre un jugement plus sévère encore sur le mémoire qui porte pour titre : Les théories de maître Pierre. Maître Pierre, instituteur daus un vil- lage qu’il a préservé des atteintes du socialisme, parle lon- guement d’une multitude d'objets qui n’ont aucun rapport direct et nécessaire avec la question posée par l'Académie. Il s'occupe de l'esclavage antique, des corporations du moyen âge, du double étalon, des billets de banque, des lettres de change , des chèques , des warrants , des bons du trésor, etc.; mais il perd à peu près constamment de vue le problème économique qu’il avait à résoudre pour rester dans les conditions du concours. Des 150 pages dont se compose le mémoire, il en est trente à peine qui traitent spécialement des rapports du travail et du capital, et là même on ne trouve aucune idée saillante. Eu ce qui concerne le mémoire ayant pour devise Con- science et science font la devise de l’homme de bien, je me rallie pleinement à l'opinion émise par M. de Laveleye. Je partage également l'avis de mon honorable et sa- vant confrère, à l'égard du mémoire flamand qui porte la devise : Als Beitrag zu einem Werke, zu einer That der Zukunft. Un sixième travail soumis à notre appréciation a pour titre : Entretiens du lundi ou traité économique des rap- ports du capital et du travail, avec la devise Mettre la lumière à la portée de toutes les intelligences, c’est le plus sûr moyen de détruire les sophismes. En lisant les pages qui servent d’avant-propos à ce mé- moire, je croyais avoir mis la main sur une œuvre réali- sant complétement les vues de la classe. « Ce qu’il faut, ( 649 ) dit l’auteur, proclamer dans l'atelier et au foyer de l'ou- vrier; ce qu'il faut répéter sous toutes les formes, jus- qu’à ce que cette vérité soit aussi lumineuse dans l’ordre moral que le soleil dans l'ordre physique, c’est qu'il existe des règles antérieures et supérieures à toutes nos con- ceptions, qui déterminent le développement graduel des Sociétés et l'augmentation progressive du bien-être de ceux qui les composent; qu’en dehors de ces lois il nx a que troubles, agitations stériles, déperdition de forces et misère générale ; que ces lois tendent pour chacun à une plus grande liberté d'action, pour tous à une plus large répartition dans les produits de l’activité com- mune. » En démontrant ees grandes vérités sociales, dans un langage lucide, méthodique et concis, l'auteur eùt incon- testablement mérité la palme académique. Malheureuse- ment, son long travail, composé de 554 pages in-4°, laisse à désirer sous le rapport de la concision; c'est une sorte de roman dialogué, où l’on voit un industriel de Molen- beek-Saint-Jean, M. Ebard, discuter sur les lois éternelles de la création et de la répartition des richesses, avec l’ajus- teur Chazy, le forgeron Van Huys, le mécanicien Colas, le Contre-maître Leroy et deux délégués du comité directeur de l'Internationale. Les ouvriers, et surtout les deux délé- gués , produisent crûment toutes les doctrines et toutes les Convoitises des niveleurs modernes. M. Ebard se défend, réplique, riposte avec vigueur, gagne du terrain et, à la suite de seize longs entretiens, il a le bonheur de convertir tous les ouvriers de son usine, qui lui témoignent chaleu- reusement leur reconnaissance par des applaudissements unanimes et prolongés. La nouvelle du succès obtenu par l'éminent industriel se répand au dehors, et bientôt KS Ss SS SS % vw Se e e e v y S ( 650 ) M. Ebard obtient l'honneur d’être nommé, à l’unanimité des suffrages, conseiller communal de Molenbeek-Saint- Jean. Le mémoire est généralement bien écrit. On y trouve un grand nombre d'excellentes idées sur les avantages de la vie sociale, sur laccord harmonique du capital et du travail, sur l'inégalité des conditions, sur la fixation des salaires et des prix, sur le mouvernent ascendant des classes ouvrières, sur les moyens d'améliorer la condition des prolétaires, sur les sophismes des écoles socialistes, sur les conséquences funestes des émeutes et des grèves. On voit que l’auteur connaît son sujet et qu'il a longue- ment étudié les redoutables problèmes qui compromettent aujourd'hui le repos et lavenir de la société européenne- Je regrette qu’il ait choisi la forme du roman dialogué, qui devait nécessairement entraîner des longueurs et noyer l'évidence des principes dans une multitude de détails surabondants; mais la classe aura à examiner si, malgré ces longueurs, le mémoire ne doit pas être couronné. L'au- teur pourrait être invité à abréger son travail sous la direc- tion de l’un des commissaires. Un septième mémoire, intitulé : Théorie économique des rapports entre le capital et le travail, a pour devise : Il faut beaucoup de philosophie pour observer les faits qui sont trop près de nous. Dans une série de chapitres, qu’il nomme conférences; l'auteur passe en revue toutes les objections auxquelles ont donné lieu les rôles respectifs du capital et du travail dans l’industrie moderne. Après s'être occupé de ce qu'il faut entendre par capital et par travail, il traite successi- vement de échange, du prêt, de l'intérêt, du salaire, de la solidarité du capital et du travail, pour aboutir à la con- ( 651 ). clusion que « la détermination de tous les rapports entre le » Capital et le travail nous est indiquée par la nature, et » que la constatation de leur légalité, comme de leur jus- » tice, n’est qu'une affaire de bon sens. » Ses doctrines ne Sont pas nouvelles, et ne pouvaient pas l'être dans une matière qui a préoccupé tous les économistes, depuis plus d'un demi-siècle; mais il y a, par malheur, des reproches plus graves à adresser au rédacteur du mémoire. Son tra- vail renferme des lacunes, des incohérences et des erreurs qui ne permettent pas de lui décerner la palme acadé- mique. » Rapport de M. E de Laveleye. « Le mémoire portant la devise : a Un pour tous et tous Pour un, » équivaut à peine à un chapitre de quelques pages. Celui qui porte : Primo vivere, est un peu plus sérieux, mais si l’on éloignait les digressions, il ne resterait que des considérations assez banales et parfois inexactes. Les Entretiens de maitre Pierre forment un ensemble bien écrit, dont l'exposition est claire et précise, mais c’est plutôt un petit traité d'économie politique qu’une réponse à la question posée. Le mémoire qui a pour devise : Il faut beaucoup de Philosophie pour observer les faits qui sont près de nous, n’est pas dépourvu de mérite. La question principale est traitée avec quelque étendue quoique bien des pages soient consacrées à des points accessoires, qu’il aurait suffi de toucher en passant. Malheureusement, l’auteur de ce tra- vail semble manquer de la préparation scientifique indis- pensable en pareille matière, Le style est très-négligé et les termes employés, les définitions manquent de précision ( 652 ) et même d’exactitude, Ainsi, la notion fondamentale , celle du capital n’est pas bien comprise. L'auteur ne dit pas un mot du redoutable problème qui, d’après tous les écono- mistes, forme le nœud de la question : le rapport entre le chiffre de la population et le taux du salaire. — A la page 48 le mémoire admet que l'industriel peut, « sans se gêner, augmenter le salaire de ses ouvriers. » C’est mécon- naître la loi économique qui règle les prix et les profits. — Mais, dit-il, à quoi bon augmenter le salaire? De toutes façans ,la même somme est dépensée et le même stimulant est imprimé à la cireulation et à la production. Cela est vrai, mais est-il indifférent à l’ouvrier que ce soit lui ou bien son patron qui consomme? — Ailleurs, l’auteur s'imagine qu’en pourrait remplacer les impôts actuels par les impôts sur le luxe. — Il semble ne point du tout connaitre les pré- cédents de la question en Angleterre et en Allemagne. Aussi ce travail ne peut, à mon avis, mériter le prix. Le mémoire portant la devise : Conscience et science sont la devise de l’homme de bien, est une esquisse incom- plète et superficielle qui, manifestement, n’a aucune des conditions d’un mémoire académique. Le mémoire flamand qui porte la devise ` Als Beitrag 24 einem Werke zu einer That der Zukunft-Schulze-Delitsch, est un travail d’un mérite très-sérieux. L'auteur connaît bien les principes généraux de l'économie politique, et surtout il est au courant des travaux récents publiés sur la question en Allemagne et en Angleterre. Il ne se Con- tente pas d'expositions abstraites; il a recueilli un grand nombre de faits qu'il cite à propos. A ce titre, ce mémoire me paraît supérieur aux autres travaux de ce genré Soumis à l'appréciation de l'Académie et qui manquent essentiellement d’originailté. S'il ne s'agissait que d'une ( 653 ) étude scientifique, je serais disposé à lui accorder la palme, mais les termes du concours réclamaient une œuvre simple, à la portée des classes laborieuses, et je ne sais si ce mémoire, quoique écrit en un style très-clair, répond suffisamment à cette condition. Quant au mémoire qui a pour devise ` Mettre la lumière à la portée de toutes les intelligences, c'est le plus súr moyen de détruire les sophismes, on peut lui reprocher de la prolixité, de fréquentes répétitions et le caractère un peu banal de l’exposition, qui ne fait que répéter ce qu'ont dit précédemment MM. Rapet et Lehardy de Beaulieu, entre autres. Comme analyse économique , il est très-infé- rieur au mémoire précédent; mais, d’autre part, il a le mérite d’être écrit de façon à être parfaitement compris par les ouvriers auxquels il est destiné. A ce titre il me paraît répondre aux conditions du concours, et je doute qu’on puisse espérer un travail mieux fait sous ce rapport. Tout en m’associant aux observations faites par M. Tho- nissen et même en exprimant plus de réserves que lui en ce qui concerne le style qui est parfois négligé et peu Correct, je pense que l’on pourrait accorder la médaille à ce mémoire. » Rapport de M. De Decker. « I est inutile de rendre un compte raisonné des sept mémoires envoyés au concours relatif à la théorie écono- mique des rapports entre le capital et le travail. La majeure partie de ces travaux, sans être dénués de tout mérite, ne peuvent évidemment aspirer au prix à décerner. Je me réfère, en général, aux appréciations que les deux ( 654 ) premiers commissaires en ont faites dans leurs rapports. Cependant, trois de ces mémoires me paraissent dignes d’un intérêt spécial pour la classe. D'abord , le mémoire ayant pour devise ` Il faut beaucoup de philosophie pour observer les faits qui sont trop près de nous. L'auteur, animé d’un esprit droit et d’un sens pratique incontestable, a cherché à donner un caractère trop vul- gaire à l'expression des grandes vérités sociales qui dominent cette matière et qui, selon le mot de Pascal, se sentent plutôt qu’elles ne se prouvent. De là des exposés de doctrine manquant de précision, des comparaisons qui clochent, des répétitions qui fatiguent, des incorrections de style qui ne permettent pas de reconnaître une valeur réelle à ces pages inspirées du reste par les sentiments les plus honorables. Comme conclusion, l’auteur préconise, à bon droit, l'application des principes religieux et moraux. « Prenez le décalogue, dit-il, analysez-le, et vous y trou- verez la solution de bien des questions économiques. Les principes les plus sains de l’économie politique se retrouvent tous dans la loi de Dieu. » L'auteur du mémoire rédigé en flamand (avec une épi- graphe allemande de Schulze-Delitsch) arrive à cette autre conclusion, fondée sans doute, mais incomplète, que la solution de la question mise au concours est tout entière dans les progrès de l'instruction professionnelle. C'est l’idée exprimée il y a deux ans par un des premiers hommes d'État de l'Angleterre, que toutes les influences du Gouver- nement et de la société doivent être dirigées vers la réali- sation de ces progrès. Ce mémoire flamand est de tous les travaux concurrents | ( 655 ) celui qui analyse le mieux ce qui a été publié sur la matière en Angleterre et en Allemagne; c’est lui aussi qui est le plus complet dans l'exposé historique de tout ce qui a été essayé chez diverses nations, dans le but de régulariser et d'améliorer les rapports entre les capitalistes et les travail- leurs. Cependant, ce mémoire, d’une valeur scientifique incontestable, ne me paraît pas atteindre le but que s’est proposé l’Académie, en ce sens qu'il ne revêt pas cette forme attrayante qui provoque une sympathique attention, qui entraine les esprits et les cœurs. Sous ce rapport essentiel, il convient de citer en pre- mière ligne le mémoire portant pour devise : Mettre la lumière à la portée de toutes les intelligences, c’est le plus súr moyen de détruire les sophismes. Il n’y a là, il est vrai, aucune vue nouvelle, aucune arme nouvelle pour combattre les préjugés , aucun remède pratique contre les maux qu’engendre la lutte du capital et du travail au sein de nos sociétés si profondément trou- blées par les passions démagogiques; mais on y trouve un ensemble d'idées justes et saines, un résumé clair et intel- ligible des doctrines des principaux économistes. Malheu- reusement, la forme d’entretiens rattachés, par une ingé- nieuse fiction, aux mille incidents de la vie d'atelier, emporte avec elle des longueurs et des hors-d'œuvre qui leur donnent des proportions que ne comporte pas un manuel destiné à être répandu avec fruit dans les classes ouvrières. Ces deux derniers mémoires l’emportent évidemment par des qualités différentes, mais réelles. Bien que ni l’un ni l’autre ne me satisfassent complétement, je crois, eu égard surtout au but pratique que l’Académie a voulu atteindre, pouvoir proposer à la classe de décerner le prix ( 656 ) au mémoire : Mettre la lumière, etc., à condition de l’abré- ger par d’utiles suppressions. » La classe, conformément aux conclusions des rapports qui précèdent, vote sa médaille d'or de mille francs au mémoire portant comme devise ` Mettre la lumière, etc. Toutefois, eu égard à la forme exceptionnelle de cette œuvre; elle décide de ne point l'imprimer dans ses recueils, mais de la recommander au Gouvernement, afin de mettre l’auteur à même de publier son travail de manière à le rendre facilement accessible aux classes de la société aux- quelles il s'adresse tout particulièrement. La classe procède à louverture du billet cacheté joint au mémoire ` le nom de M. Josepn Dauex, régisseur du Moniteur belge, est proclamé. DEUXIÈME GRAND CONCOURS SEXENNAL DE STASSART POUR UNE QUESTION D'HISTOIRE NATIONALE. Exposer quels étaient, à l'époque de l'invasion française en 1794, les principes constitutionnels communs à nos diverses provinces et ceux qui étaient particuliers à chacune d'elles. La classe a reçu, en réponse à cette question , un mê- moire portant pour devise : Laboremus. Rapport de M. CG Nypels. « L'histoire du droit national est un auxiliaire indispen- sable de l’histoire générale du pays. Prenant chaque insti- tution à son berceau etla suivant, pas à pas, à travers les 1 t i | ` PE CE ( 657 ) formes successives que lui impriment les événements politiques, ou les besoins, sans cesse mobiles, de la nation, elle fournit à l'historien des documents d'autant plus pré- cieux qu'ils sont généralement basés sur des actes irrécu- sables. C’est le mérite incontesté de l’école historique moderne d'avoir compris cette liaison intime de l’histoire politique et de l'histoire du droit. Nous ne possédons pas encore une histoire complète des institutions politiques et du droit public et privé de l’ancienne Belgique. A vrai dire, cette œuvre, longue et difficile, n’a pu être accomplie de nos jours, parce que tous les matériaux nécessaires n’ont pas encore été recueillis (1). Cependant, plusieurs travaux partiels ont été publiés. Les savantes recherches de Raepsaet; l'histoire des institu- tions politiques de la Flandre, de Warnkônig ; l'excellent livre de M. Defacqz; les Études sur les constitutions natio- nales de notre confrère M. Faider; enfin les nombreuses et utiles publications de notre infatigable confrère M. Ga- chard , sont entre les mains de tous ceux qui s'intéressent à l’histoire de la patrie. La classe des lettres peut revendiquer quelques études qui se rattachent directement à l’histoire de notre droit na- tional. Par les questions qu’elle a mises au concours elle a excité à ces nobles études, l'événement a souvent justifié ses prévisions, et elle a pu couronner successivement des mémoires très-estimables, à divers titres, dus à des hommes (4) Les magnifiques publications de la commission royale chargée de recueillir les anciennes lois de Belgique, satisferont amplement à ce besoin, quand elles seront complètes. T? SÉRIE, TOME XXXVII. 45 ( 658 ) laborieux qu’elle a, plus tard, admis dans son sein : MM. Pycke, Steur, Grandgagnage, Poullet, d’autres encore, peut-être , dont les noms m'échappent. Je suis heureux de pouvoir ajouter que le mémoire qui est soumis, en ce moment, au jugement de l'Académie, occupera une des premières places parmi les travaux dont je viens de parler. C’est un exposé (je wose dire une histoire) complet et très-détaillé non-seulement des principes constitutionnels (comme s'exprimait la question), mais des institutions poli- tiques générales, provinciales et locales qui ont régi nos ancêtres; un exposé fait directement sur les sources et qui ne peut être que l'ouvrage d’un homme versé, de longue date, dans l’histoire du droit. Et cette dernière considération me détermine à faire un reproche à l'auteur. D s’est trop exclusivement renfermé dans le rôle de narra- . teur; on aurait désiré, dans quelques endroits , un peu plus de discussion. Je m'étais proposé de présenter à l’Académie une ana- lyse complète de ce mémoire, mais j'ai dû renoncer à cette idée. L'ouvrage lui-même n’est, à proprement parler, qu'une analyse, tantôt succincte, tantôt détaillée, des innombra- bles documents que l’auteur a dù lire et étudier. En pré- sence de l'étendue considérable qu’il a donnée à son mémoire , mon analyse, pour être complète, aurait dû dépasser de beaucoup les limites d’un simple rapport. J'ai d'autant moins hésité à m'abstenir, que le résultat du concours ne peut, à mon avis, être un instant douteux. Il faut, cependant , que la classe ait une idée, au moins générale, de l'ouvrage qui lui est présenté. A cet effet, je vais résumer, à grands traits, les matières qui y Sont comprises. ( 659 ) Le mémoire est divisé en XVII chapitres. L'auteur parle, en premier lieu, du territoire et de ses divisions. Ce chapitre est très-complet et donne une idée exacte des sous-divisions du plat pays, dans chaque province , ainsi que des petits territoires qui, sous les noms de Terres d'empire, Terres franches, Terres de débats, etc., consti- tuaient des enclaves soumises à une administration parti- culière. On y rencontre aussi des observations générales sur les constitutions. Dans le chapitre IT sont décrites les sources des con- stitutions provinciales. La joyeuse entrée du Brabant, la bulle d’or, les traités, les diplômes, les capitulations, etc. Le chapitre IT intitulé du souverain dit le mode de transmission de la souveraineté. Les inaugurations du sou- Verain y sont décrites avec soin. Je veux, à l'occasion de ce chapitre, faire une observation. Dans les Pays-Bas, la souveraineté était héréditaire et indivisible. Ce principe, établi par une série non inter- rompue de faits depuis le moyen âge, avait été reconnu dans les pragmatiques sanctions de 1549 et de 1725, qui déterminaient, en même temps, l’ordre dans lequel se transmettait la souveraineté. Cependant, le nouveau souverain devait, à son avéne- ment, se faire inaugurer dans chaque province. Dans l'acte d'inauguration , il jurait lui-même de gouverner sui- yant les coutumes, les droits et les statuts du pays, et il recevait, en retour, le serment de fidélité des citoyens représentés par leurs mandataires légaux. L’inauguration avait done le caractère d’un contrat Synallagmatique qui devenait, ce semble, le titre et le Principe des droits du souverain. ( 660 ) Comment cela peut-il se concilier avec le droit hérédi- taire qui appelle le prince à exercer la souveraineté en vertu d'un droit qui lui est propre? L'auteur du mémoire dit : « dans les temps reculés , il était admis que les ducs et les comtes ne pouvaient faire, avant leur inauguration, que des actes de simple adminis- tration ou de police. Mais plus tard, le Gouvernement avait soutenu que la maxime ` le mort saisit le vif, devait être appliquée en toute rigueur et dès lors, notamment au dix- huitième siècle , nos souverains exercèrent tous les droits de la souveraineté, avant comme après leur inauguration. Bien plus, les derniers souverains de la maison d’Autriche furent inaugurés plusieurs années seulement après leur avénement. » C’est la solution, en fait, d’une controverse qui date de loin ; mais la question de droit reste entière. Je wai pas la prétention de la résoudre ici; mais il me semble que nos ancêtres du temps des ducs et des comtes étaient dans le vrai, et qu’à moins de reduire l’inaugura- tion à une vaine formalité, il faut y rattacher le point de départ de l’exercice des droits de la souveraineté. Dans la principauté de Liége, la souveraineté n'était pas héréditaire. Le prince-évêque était élu par les cha- noines tréfonciers. Léin devait demander l'institution canonique à Rome et se faire investir de ses régaux par l'Empereur; puis il était inauguré par le chapitre de Saint-Lambert. Là aussi, on n’était pas d'accord sur l’origine des droits du prince élu, Les auteurs, suivant le parti auquel ils appartenaient, la trouvaient, soit dans l'investissement donnée par l'Empereur, soit dans le bref d'administration provisoire émané du saint-siége, soit dans la capitulation ( 661 ) que le prince-évèque devait signer au moment de son inauguration. Cette dernière opinion était seule conforme à la nature des choses , du moins, c'est mon opinion. La constitution du pays de Liége soulevait une autre question très-débattue aussi et qui ne pouvait être soulevée dans les Pays-Bas où dominait la maxime ` le mort saisit le vif, la question de savoir à qui appartenait l'exer- cice de l’autorité souveraine, durant la vacance du siége (sede vacante). L'auteur du mémoire nous donne les éléments de cette controverse, mais il s’abstient encore de la résoudre en droit. Je poursuis mon résumé. Dans le chapitre IV, il est question des droits fonda- mentaux de l'Église. Il y est question notamment des juri- dictions ecclésiastiques. Le chapitre V nous apprend comment se composaient les États dans chaque province, le mode de délibérer des États et leur position à l'égard du souverain. Ils étaient, dit l’auteur, au-dessous du souverain et non à côté de lui, comme en Angleterre. Une annexe à ce chapitre traite des états généraux, institution à laquelle le peuple, à cause de l'esprit de provincialisme qui le dominait, attachait une médiocre importance. Le chapitre VI, Pun des plus intéressants du mémnire, nous fait connaître, avec assez de détails, les droits jpn- damentaux des personnes physiques et morales. Et un appendice parle de la propriété. Les chapitres VII, VIII et IX parlent, successivement, des institutions centrales, provinciales et locales. Ces inti- tulés indiquent suffisamment le contenu de chaque cha- pitre. On trouve, parmi les institutions locales, la mention ( 662 ) des nombreuses cours, lois, etc., qui administraient la jus- tice dans les villages. Dans le chapitre X, il est question de la part que pren- nent les États et les conseils provinciaux au pouvoir légis- latif et à la publication des lois. Les chapitres XI, XII et XIII parlent de l’action du souverain sur l’ordre judiciaire et l'administration de la justice; de ses droits comme régulateur des relations du pays avec les puissances étrangères et de ses prérogatives en matière militaire; enfin, de ses droits en matière finan- cière. Dans le chapitre XIV, il est question de l'octroi des lettres de grâce et de la nomination aux charges et offices publics. Puis viennent deux chapitres où le souverain est envi- sagé comme tuteur des provinces et des communautés , et dans son action sur le régime ecclésiastique national. Enfin, le dernier chapitre parle de la violation de la constitution. Comme vous le voyez, Messieurs, l’auteur n’a négligé aucune partie des constitutions qui ont régi nos ancêtres. Et si j'avais pu vous présenter autre chose qu’un résumé très-sommaire, Vous auriez pu vous assurer qu'il les déerit toutes avec le même soin. Ma tâche n'est pas finie. Je vais maintenant hasarder une observation critique qui ne porte pas sur le fond du mémoire , mais sur sa forme, ou plutôt sur la division des matières en ce qui concerne le pays de Liége. La classe n’a pas oublié qu'une première édition de ce mémoire portant une autre devise (Tanquam exploratur), lui a été présentée, l’année passée, et qu'alors, sur la propo- sition de ses commissaires , elle a décidé que la question à ( 665 ) laquelle répondait le mémoire serait maintenue au con- cours, parce que la réponse était incomplète. L'auteur, en effet, n'avait pas dit un mot des institutions de la princi- pauté de Liége. Aujourd'hui, le mémoire nous revient considérablement augmenté. L'auteur y décrit non-seulement les institu- tions du pays de Liége, mais aussi celles de la petite prin- cipauté de Stavelot, avec le même soin qu’il a donné aux institutions des Pays-Bas. Mais comment a-t-il procédé pour combler la lacune que présentait son premier travail ? Il a appliqué aux institutions de la principauté de Liége la division des matières qu’il avait établie pour les Pays-Bas catholiques, se bornant à ajouter à chaque chapitre deux sections nouvelles, l’une pour le pays de Liége, l’autre pour la principauté de Stavelot. Ainsi les institutions politiques du pays de Liége,siremar- quables par leur originalité, figurent là, en quelque sorte, Comme appoint des institutions des Pays-Bas. Pour en avoir une idée complète, il faut lire, successivement, dans chaque chapitre, la section qui lui est consacrée. C'est un mode de procéder que je ne puis approuver, Les institutions du pays de Liége diffèrent trop de celles des Pays-Bas catholiques, pour pouvoir être renfermées dans le même cadre. Elles exigeaient, d’ailleurs, par leur grande importance historique, un travail d'ensemble par- culier, Si cette observation est fondée, comme je le crois, il sera facile d’y faire droit, en réunissant, dans un livre par- ticulier, toutes les parties qui se rapportent au pays de Liége, sauf, peut-être, à donner à ce livre une nouvelle division des. matières. ( 664 ) Ce remaniement devrait être appliqué aussi aux chapi- trés consacrés à la principauté de Stavelot, qui formeraient ainsi le livre HI du mémoire. Je me résume: Comme exposé des faits, comme analyse des sources, le mémoire ne laisse rien à désirer; il est complet, autant, du moins, qu'il peut l'être dans l'état actuel de nos ressources littéraires. Mais je n’y trouve pas la conclusion qu’on était en droit d'espérer; je veux dire que l’auteur n’a pas couronné ses savantes recherches par un tableau fait à grands traits des conslitutions, ou, du moins, des principes constitutionnels qui régissaient les deux grandes divisions territoriales de notre pays. Mais peut-être l’auteur du mémoire a-t-il pensé que le moment de conclure n’est pas venu; peut-être a-t-il cru que les faits, les documents , désormais recueillis, ne sont pas suffisamment élucidés, qu’ils doivent être étudiés en- core dans leurs rapports avec l’histoire générale du pays. Quoi qu’il en soit, le mémoire portant la devise : Labo- remus, répond amplement aux termes de la question posée par la classe, et je pense qu’il y a lieu de lui attribuer le prix institué par notre excellent et regretté confrère feu M. le baron de Stassart. » Rapport de M. J.-J. Thonissen. « Je me rallie pleinement à l’opinion émise par mon savant confrère M. Nypels. Je pense, comme lui, que le prix doit être décerné au mémoire portant la devise Labo- remus. L'auteur ne s’est pas borné à répondre à la question posée par la classe, en nous fournissant un exposé COM- | ! | 1 ( 665 ) plet et détaillé des principes constitutionnels en vigueur dans nos diverses provinces , à l’époque de l'invasion fran- çaise en 1794. Il y a joint une appréciation très-remar- quable des institutions générales, provinciales et locales qui, dans l’ordre politique, régissaient nos ancêtres. Il prouve, à toutes les pages, que les sources de notre an- cien droit national lui sont parfaitement connues. De même que M. Nypels, je crois que l’auteur du mé- moire eût bien fait de placer, à la fin de son œuvre , une Conclusion générale, résumant, à grands traits, le résultat de ses vastes recherches et mettant les institutions an- ciennes en face de celles qui leur ont succédé. Mais il importe de remarquer que le mémoire, à défaut de con- clusion générale, renferme une foule de conclusions par- tielles très-intéressantes et très-instructives. A la fin de chaque paragraphe, l’auteur marque, sous des formes diverses et avec des expressions variées, d’une part, ce qui était fondamental, constitutionnel et permanent, d'autre part, ce qui existait en fait avec un caractère plus ou moins passager, Quant au reproche adressé à l’auteur de s'être trop exclusivement renfermé dans le rôle de narrateur, je ne saurais accepter sans réserve lavis de mon honorable con- frère. Les institutions de l’ancien régime, avant tout tra- ditionnelles et basées sur un développement historique, ne se laissent pas réduire en formules et en axiomes. L’historien moderne de nos provinces doit considérer Comme principe constitutionnel toute règle qui avait tou- jours été suivie et qui avait pour elle l'aveu du pouvoir et Taxen des corps représentatifs des sujets. Or, l'auteur a rand soin d'indiquer, aussi bien pour les institutions locales que pour les institutions générales et provinciales, ( 666 ) tont ce qui avait ce caractère de permanence et de stabi- lité. Quant aux points débattus entre le prince et les su- jets, il se contente de marquer le dernier état des choses, en d’autres termes, de constater les faits. On ne doit pas oublier que les institutions anciennes étaient mouvantes par leur essence même, et qu'il serait, dès lors, téméraire de se montrer affirmatif et tranchant là où les contempo- rains étaient divisés. » Rapport de M. Ch. Faider. « Je me rallie sans réserve aux propositions de mes honorables confrères MM. Nypels et Thonissen. J'estime que l’auteur du mémoire Laboremus mérite la médaille d’or. Son travail est remarquable, bien conçu et bien exécuté. Son érudition est alimentée par une vaste lec- ture et par l'étude des sources. Ses appréciations sont justes en général et sans parti pris. — Si l'on peut lui reprocher des longueurs et un peu de prolixité, on doit reconnaître que le style est clair et que l'ouvrage est g une lecture facile : tous ceux qui voudront se faire une juste idée des anciennes institutions fondamentales de notre pays n'auront qu'à ouvrir le livre de l'auteur que nous propo- sons de couronner., Déjà, l'an dernier, je l'avais j jugé digne du prix, mais j'ai reconnu avec M. Borgnet, qui avait posé la question et qui en connaissait les limites, qu’il fallait compléter le travail, en parlant du pays de Liége qui avait été omis : Paddition faite dans ce sens par lauteur est d’une véri- table importance, et je me félicite aujourd’hui d'avoir permis au savant concurrent de compléter son œuvre. ? : > D Conformément aux conclusions favorables des rapport ( 667 ) de ses commissaires, la classe vote le prix historique de Stassart, de la valeur de 3,000 francs, au mémoire pré- senté. Le billet cacheté qui y est joint est ensuite ouvert: il fait connaître que l'auteur est M. EnmonD PouLeer, correspondant de l’Académie, et pour la cinquième fois lauréat de la Compagnie. * La proclamation des résultats du concours annuel et du concours sexennal de Stassart aura lieu en séance publique de la classe, fixée au mardi prochain, 6 mai. COMMUNICATIONS ET LECTURES. Réponse aux « quelques remarques » de M. P. Willems, concernant ma notice sur le particularisme linguistique de la Flandre occidentale ; par M. J. Nolet de Brauwere van Steeland, associé de l’Académie. Au sortir de la séance dans laquelle notre honoré con- frère, M. Willems, avait lu ses « quelques remarques, » etc., insérées depuis au Bulletin du mois d'avril dernier (1), Jeus l'honneur de m’aboucher quelques instants avec ce savant professeur, et tout en désirant obtenir quelques éclaireissements sur la portée de ses « réserves, » je lui demandai s'il connaissait mon travail sur ce même parti- Cularisme linguistique, publié dans la revue flamande (1) Bullet. de l’ Acad. royale de Belgique, 2° sér., t. XXXVII, p. 467. ( 668 ) De Toekomst? M. Willems répondit aflirmativement, et voulut bien ajouter que si, dans ma notice du 6 février, j'avais parlé du profond savoir linguistique de M. De Bo et de son Idioticon, comme je leur rendis justice dans mon travail flamand, il se serait cru dispensé de formuler ses « réserves, » dès lors sans objet. Je comprends les préférences de M. Willems pour mon texte flamand. « Immense capharnaüm , » par exemple, en a disparu, pour faire place à « Idioticon -Arche de Noé, » ce qui, certes, est bien mieux et même légèrement flatteur à l'endroit du lexique en question. En effet, si « capharnaüm » est synonyme de confusion, de pêle- mêle, de tohu-bohu, e Arche de Noé, » au contraire, équivaut à ordre, méthode, symétrie. Hommes et bètes ne s’engouffrèrent point à l'aventure dans les flancs de cette vaste construction navale : ils y furent savamment classés et parqués à leurs étages respectifs. Au dire de M. Willems, M. De Bo, — Noë ad exemplar, — case les mots dans son lexique avec un soin au moins égal. Un exemple, emprunté à mon texte flamand, fera res- sortir d’une façon coneluante la belle ordonnance de l'Idio- ticon. J'y cherche la signification de lutterspeekte, accolé dans les poésies de M. De Bo, comme épithète au substantif stoel (chaise). « Lutter-, leuter-, loter-, lotterspeekte, Së dit dune roue dont les rayons sont... ontdodderd. » Ontdodderen étant introuvable, je me rabats sur dodderen. « Dodderen, voyez dotteren. » Cherchons toujours! « Dot- teren, équivalent de kadotteren, trembler. » Une chaise qui tremble? Je ne comprends pas trop bien. Voyons kadot- teren! e Kadotteren, trembler fortement, ou kloteren. ? Kloteren alors? « Kloteren, voyez klutteren, » etc., etc: C’est éblouissant de clarté. ( 669 ) Au premier aspect on croit à une gageure, à une mysti- fication, légèrement teintée de capharnaüm; mais en y regardant de près, l'Arche se montre dans toute sa splen- deur et l’on ne peut que louer le savant lexicugraphe de sa bienveillante sollicitude. Dans un lexique vulgaire, vous cherchez vivement et vous trouvez la signification d’un mot : tout est dit. Ici, au contraire, l’auteur vous exerce à la patience, cette vertu par excellence de tout bon linguiste et doublement méritoire lorsque, comme dans l'espèce, elle ne saurait aboutir. Puis, ce jeu de navette, ce va-et- vient perpétuel, ce renvoi de Caïphe à Hérode et d'Hérode . à Pilate, invitent à un temps d’arrêt : on ne furète pas ainsi dans tous les recoins, sans que parfois les yeux ne se reposent involontairement : sur toefelen, par exemple. Aussitôt la mémoire se meuble d’un imposant cortége d’équivalents, tels que toeven, lamoezen, bekukkelen, kloesteren, paloesteren, paluffen, steukelen, pampelen, palodderen. Ces gracieux synonymes, nombreux comme les fils du roi Priam , mais moins euphoniques que les noms des Troyens, sont parfaitement inintelligibles, hormis dans la West-Flandre; et encore! Ils n’en sont pas moins bons à connaître : on ne saurait trop enrichir « la langue de nos pères. » M. le professeur van Helten , dont M. Willems invoque l'autorité, aura beau m'écrire ` « Ce que je déplore avec » vous dans le travail du lexicographe, c’est que ses expli- » cations en exigent souvent d’autres, et celles-ci de » nouvelles : cela rend le recours à l’Idioticon inutilement » difficile et désagréable; » M. Willems n’en est pas moins convaincu que « tous les matériaux ont été coordonnés avec soin. » Après le spécimen fourni plus haut, je ne puis que me ranger à son avis. ( 670 ) Aucuns prétendent que M. De Bo mit quinze ans à ras- sembler lesdits matériaux : en ce cas il eut bien fait de le dire. Dans la préface de son lexique il avoue au contraire «avoir mis la main à l'œuvre à l'exemple de la Société Met Tijd en Vlijt de Louvain, qui prépara l'édition de M. Schuer- mans (1865-70). » Celle de M. De Bo parut trois ans plus tard (1875). Examiner et coordonner en si peu de temps le contenu de cet in-4°, formidable énormité de 1500 pages, semblerait tenir de la vertigineuse rapidité d’une vitesse à décuple vapeur, si M. Willems n'’affirmait que « tous les matériaux ont été examinés et coordonnés avec soin. » Ailleurs, M. De Bo dit encore : « certes, tout ce que » contient l'Idioticon n’est pas également utile et bon; » beaucoup de son s’y trouve mêlé au grain; on y rencontre » quantité de termes vicieux, de locutions mauvaises, » CONTRAIRES AU BON GOUT ET A L'ESPRIT DE LA LANGUE. 3 Puis, une note constate la participation de ving-sept colla- borateurs, non compris un etcætera des plus élastiques. Tout cela rappellerait vaguement « le pêle-mêle, amené dech et delà à pleines charretées, » si M. Willems n'assu- rait que « loin d’être entassés pêle-mêle, tous les maté- riaux, » etc. Enfin, M. De Bo termine ainsi sa préface ` « L'ouvrage est loin d’être complet : des milliers de mots, ET DES MEIL- » LEURS restent encore à exhumer du champ de la langue populaire; » tandis que M. Willems est d'avis que le lexique « offre la physionomie complète du dialecte west- flamand. » Je le crois volontiers; peut-être même est-il trop complet et pourrait-on en élaguer « quantité de termes vicieux, mauvais, contraires au bon goût, » ete- Mais entre les affi trop modestes, sans doute, — de l’auteur, et les assurances si positives de M. Willems, il n’y a pas à hésiter. (S7) Quant à traiter l'Idioticon o fort dédaigneusement, pour ne pas dire plus, » je men réfère volontiers aux pages 221 et 222 du Bulletin, où je souhaite la bienvenue à tous les Idiotica possibles, émettant même le vœu que chaque province ait le sien propre; mais sans qu'ils puissent se donner les allures de dictionnaires de la langue néerlan- daises, dont il serait loisible d'extraire les termes vieillis ou les idiotismes ramassés aux coins des rues, pour en défigurer les œuvres de nos écrivains modernes. Je tenais Surtout à m'élever contre pareille manie, que nos auteurs se permettent parfois comme fantaisie exceptionnelle, mais que les particularistes west-flamands établissent comme une règle, dont ils font un regrettable abus. Ma notice ravait pas d'autre but, si ce n’est peut-être de venger la langue néerlandaise des insultes de la Revue Rond den heerd. Je combattais alors pour l'honneur du drapeau. lciM. Willems partage ma manière de voir lorsqu'il dit : «€ qu’à cet égard il pense que j'ai obtenu l'assentiment de mes confrères flamands. » Il eût pu ajouter « et néerlan- dais, » ces derniers faisant chorus dans le tolle général contre le particularisme west-flamand, avec un ensemble digne du chœur antique. MM. les professeurs de Vries et van Helten, salués par M. Willems comme juges compé- tents, abondent dans le même sens (1). Tous prononcent (1) M. le professeur De Vries s'exprime en ces termes ` « J'ai lu votre notice avec un vif plaisir, et j'adhère complétement à vos idées. C’est pour moi une vérité absolue, que les tentatives faites par ces MM. de la West- Flandre pour élever leur dialecte à la hauteur de notre langue écrite, ou Pour le méler à celle-ci, ne peuvent être que très-préjudiciables à l'unité de l'idiome néerlandais. Cette prétention est-elle l'effet d'un parti-pris? Ou faut-il la considérer comme le résultat d’une connaissance imparfaite de la véritable langue néerlandaise, ou d'un développement intellectuel ( 672 ) la condamnation du système. Il n’est pas jusqu'à notre savant associé, M. Alberdingk Thijm, qui ne m'écrive : «Je ne termine pas cette lettre sans vous remercier du grand plaisir que m’a procuré la lecture de vos deux études, dans lesquelles il y a bien des choses que MM. De Bo et Gezelle pourront mettre à profit. » Entendre dire cela par un abonné à «Rond den heerd, » voilà, pour des particularistes ; une particularité particulièrement désagréable, une véri- table male-chance. S'agit-il toutefois de l’inappréciable valeur linguistique de l’Idioticon, ces mêmes juges compétents s'accordent à lui reconnaître un mérite hors ligne. Je n’ai jamais dit le insuffisant ? Je l'ignore. Quoi qu'il en soit, le fait est positivement déplo- rable. Japplaudis sincèrement à l'énergie que vous mettez à signaler les suites désastreuses que doit entraîner un particularisme aussi étroit. Si importants que les provincialismes puissent être pour la connaissance d’un idiome, ils n’ont aucunement le droit de s'infiltrer dans la langue générale et d'altérer la pureté que celle-ci a insensiblement acquise à travers les siècles. De son côté, M. le professeur Van Helten mécrit : La seule prétention qu'un Idioticon puisse avoir, c’est de nous initier à l’histoire de la langue. Grâce à la connaissance de la forme et de la signification des termes, appar- tenant à des dialectes usités anciennement ou employés encore de nos jours, la lumière se fait souvent sur la formation de la langue moderne, et les formes aussi bien que les significations en deviennent plus claires et plus précises. Mais, si un Idioticon est d’une extrême importance a ce point de vue, on ne saurait, dans aucun cas, lui attribuer une wg de valeur. Jamais les formes ni les sa de term t xel sivement à une fraction infime d'un peuple, ne ai s'imposer à la langue générale, Dans les siècles passés, s différents groupes d’un même > ont pu se contenter chacun de la connaissance et de l'usage de son propre dialecte, aussi longtemps qu’ils ne comprirent ni le besoin de se communiquer réciproquement la vie intellectuelle, ni celui de rendre la science accessible à tous. I en fut tout autrement à mesure que le peuple avança en civilisation et comprit la nécessité d'une communion intellec- ( 673 ) contraire; mais il y a loin de l'importance du lexique, à la manière dont les particularistes — M. De Bo en tête —s’en servent dans leurs écrits. C’est le cas de dire : l'excès en tout est un défaut. Dans mon travail flamand, je suis très-explicite à l'égard de l’œuvre en question. On y lit: « Qu'on ne me dise point ennemi des Idiotica en général et de l’Idioticon de M. De Bo en particulier : ce dernier lexique, comme celui de M. Schuermans, est le bien venu dans le monde littéraire néerlandais. Tous deux sont appelés à rendre de grands services, s'ils se contentent d’être le réceptacle de termes archaïques ou de provincialismes modernes; traduisant par tuelle. C’est ainsi qu’en France se dégagea, d’une foule de dialectes ditfé- rents, une langue écrite, See pour le pays entiér, et qui devint la langue parlée de tout homme civilisé. Il en fut de mème en DEEE la traduction de la Bible par Luther, comme en Angleterre, ete. En serait-il autrement entre les Flamands et les tegt Got non. Eux aussi, grâce aux progrès de la civilisation, surent faire de leurs divers Che une langue écrite uniforme, et qui peut servir de moyen Communication entre tous les hommes instruits et littérairement déve- loppés. Cela étant, peut-on repousser de gaieté de cœur les avantages qui résultent de cette langue commune, et se priver sciemment d’un des plus puissants leviers de la civilisation? Ou la tentative qu'on fait pour créer une langue nouvelle à côté de l'idiome dominant et généralement admis, sera-t-elle couronnée de succès? Ces deux questions , personne n'hésitera un seul instant à les résoudre négativement. Une vérité incontestable, c'est que la forme et la signification de certains mots usités, çà et là, dans la West-Flandre, anciennement Comme de nos jours, ne pourrons jamais prétendre à servir de base à la langue écrite ni au langage eet Un dialecte reste un dialecte, ET JAMAIS LE CAPRICE NI L'ARBITRAIRE Ne réussiront à l'élever à la hauteur d’une langue cultivée. Libre à chacun ds ne se servir que de son dialecte Particulier; mais, il faut qu’on le sache bien , Cest là un moyen de s'assurer un nombre fort restreint de lecteurs, au lieu de s'adresser à la généralité de ceux qui écrivent ou qui parlent LA LANGUE NÉERLANDAISE. ° SÉRIE, TOME XXXVII. 44 L 674 ) l néerlandais, les nébulosités d'anciens écrivains, ou les locutions peu connues d'un dialecte local. » Je vais plus loin : ne me bornant pas à dire du bien du lexique, je pousse la déférence jusqu’à faire l'éloge de son auteur: et si M. Willems parle de M. Be Bo comme « d’un des littérateurs west-flamands, qui est d’une impor tance et d'un mérite tout à fait supérieurs, » il redit sim- plement en prose les vers de ma notice : C'était un homme d'importance, Rempli d'esprit et de science. Or, voici en quels termes j'apprécie le savant lexico- graphe dans mon article flamand : « Je nat pas l'honneur de connaître personnellement M. De Bo; mais j'aime à rendre hommage à sa profonde science, autant qu’à son imagination poétique , si j'en excepte toutefois les formes linguistiques que revêt cette dernière. Pour tout le reste, mon respect et ma considération lui sont acquis, et je fais miennes bien volontiers les paroles de Méry : » Lorsqu'on me montre un homme vêtu de noir dans la rue, et qu'on me dit : voilà un savant, je me découvre comme devant un corbillard. » « Pour le moment je dois me contenter de cette admiration muette, quoique profondément sentie. » Que veut-on de plus”? Un moyen de se mettre d'accord, en conciliant bien des exigences, serait la publication de l’Idioticon en deux parties distinctes : la première, contenant la terminologie moyen âge, aurait son incontestable utilité pour le savant, retiré dans le silence du cabinet. La deuxième, agrémentée de tous les idiotismes d’un langage populaire, servirait au touriste, étranger à la West-Flandre, et désireux d'étudier sur le vif les singularités du particularisme moderne. C'est A SS VS GS Se we L v Si Di ( 675 ) ainsi que, entendant quelques jeunes gars parler de leur pieskadotter, où — ce qui revient au même — de leur tierlwiewielje, cet amateur de l'inconnu éprouverait à lin- Stant un double soulagement : d’abord, en se débarrassant le bras d’un formidable vade-mecum, complété par « des milliers de mots, et des meilleurs; » en y constatant en- suile, avec une indicible satisfaction, que ces gracieux enfants ne parlaient que de leur toupie. Sans l’aide de cet excellent lexique, il ne s’en serait jamais douté. C’est admi- rable! Et si, comme le dit M. De Vries, a l’Idioticon est abso- lument indispensable pour la connaissance du néerlandais du moyen âge » — personne ne le conteste! — «il est aussi d'une importance extrême pour celle du néerlandais moderne. » Pieskadotter et tierlwiewietje l'attestent suffi- samment. M. Willems veut bien parler de ma « verve habituelle, parfois un peu excessive. » Cela tient, sans doute, à un défaut de constitution. Or, on se refait difficilement à mon âge. Une transfusion de sang d'agneau, telle que naguère on l’a pratiquée dix-sept fois à Dresde avec succès, pour- rait seule, peut-être, modifier les vices de mon tempéra- ment et donner à mon style la douceur, le moelleux, le velouté qui lui manquent. Mais si le sort d'Eson est enviable, celui de Pelias ne me sourit guère. Où trouver d’ailleurs un agneau — et sans taches encore! — me garan- lissant la réussite de l'opération? D'ici là M. Willems vou- dra bien, en bon et généreux confrère, me pardonner un langage parfois empreint de quelque àpreté. Je termine ici, heureux d’avoir pu, grâce aux «réserves » de M. Willems, rendre justice aux éminentes qualités de M. De Bo et à la supériorité de son Idioticon. De son côté, M. Willems me saura gré des fréquentes citations, ( 676 j” empruntées à ce même texte flamand qu'il préfère à ma notice, et qui lui donnent raison sur tous les points. Il n'est pas jusqu’au savant lexicographe particulariste, qui ne soit redevable aux « réserves » de M. Willems, d’un certain surcroît de notoriété et de réputation linguistiques, dont, sans doute, il se déclarera satisfait. Toutes les parties ayant ainsi leurs meilleurs apaisements, on pourrait, je pense, s’en tenir là et fermer le dossier De Bo en disant comme au palais : Messieurs, la cause est entendue ! (677) CLASSE DES LETTRES. Séance publique du 6 mai 1874, à 1 heure. (Grand’salle des Académies, au Musée.) M. R. Cuaron, directeur de la classe. M. J. Lace, secrétaire perpétuel. Sont présents : MM. le baron Guillaume, vice-directeur; d: Grandgagnage, J. Roulez, Paul Devaux, Gachard, P. De Decker, J.-J. Haus, M.-N.-J. Leclercq, le baron J. de Witte, Ch. Faider, le baron Kervyn de Lettenhove, J. Tho- nissen, Th. Juste, Félix Nève, Alph. Wauters, G. Nypels, Alph. Le Roy, Émile de Borchgrave , membres; J. Nolet de Brauwere van Steeland, Aug. Scheler et Alph. Rivier, bssociés; E Poullet et P. Willems, correspondants. Assistent à la séance : Classe des sciences : MM. E. Candèze, directeur; A. Brialmont, vice-directeur; J.-S. Stas, L. de Koninck, P.-J. Van Beneden, H. Nyst, Gluge, Melsens , F. Duprez, G. Dewalque, H. Maus, M. Gloesener, F. Donny, Ch. Monti- _ gny, Steichen, E. Dupont, Éd. Morren, Éd. Van Beneden, C. Malaise, membres; E. Catalan, associé; Éd. Mailly, Correspondant. Classe des beaux-arts : MM. N. De Keyser, directeur, président de l'Académie; Alph. Balat, vice-directeur ; ( 678 ) L. Alvin, Guillaume Geefs, A. Van Hasselt, Jos. Geefs, Ferd. De Braekeleer, C.-A. Fraikin, Éd. Fétis, Edm. De Busscher, Aug. Payen, le chevalier Léon de Burbure, J. Franck, G. De Man, J. Leclercq, Slingeneyer, Alex. Robert , F.-A. Gevaert, Ad. Samuel, membres. Un public nombreux remplit la grand’salle des séances académiques, public composé en partie de dames, et parmi lequel on remarque différents personnages, entre autres, M. Alph. Vandenpeereboom , ancien Ministre de l’intérieur, et divers hauts fonctionnaires de l'État. A une heure, le bureau de la classe, composé de MM. Chalon, directeur, le baron Guillaume, vice-directeur, et de M. Liagre, nouvellement élu secrétaire perpétuel, vient prendre place sur l’estrade, ainsi que M. De Keyser, directeur de la classe des beaux-arts et président de l'Aca- démie, et M. Candèze, directeur de la classe des sciences. Leurs Majestés le Roi et la Reine, ainsi que Leurs Altesses le Comte et la Comtesse de Flandre, avaient fait exprimer leurs regrets de ne pouvoir assister à la séance. MM. Delcour, Ministre de l’intérieur, et le comte d'Aspre- mont-Lynden, Ministre desaffaires étrangères, ont exprimé des regrets semblables. M. le directeur, en déclarant la séance ouverte, donne connaissance, aux applaudissements unanimes de l'assem- blée, d’un arrêté royal daté d’Ardenne le 5 mai courant, approuvant l'élection, faite en séance générale des trois classes de l’Académie du même jour, de M. J. LIAGRE, membre de la classe des sciences, en qualité de SECRÉTAIRE PERPÉTUEL de la Compagnie. Il installe, en conséquence, le nouveau titulaire dans ses fonctions. ( 679 ) M. Chalon donne ensuite lecture du discours d'ouver- ture de la séance , lequel porte pour titre : La numismatique. Messieurs, Je ne viens pas, ici, traduisant Spanheim, de usu et Praestantia numismatum , exalter, sans restrictions, sans réserves, utilité et l'importance des médailles. Comme presque toutes les choses de ce monde, la numismatique a eu ses détracteurs injustes et ses partisans enthousiastes. Les uns, de même que le maitre à danser du Bourgeois-Gentilhomme, font de leur science favorite la première des sciences; les autres ne veulent y voir qu’un amusement assez puérile qu'ils poursuivent de leurs sar- Casmes, ou qu'ils accablent de leur superbe dédain. Pour rester dans le vrai, ne soyons ni Pun ni l’autre. C’est toujours loin des opinions exagérées qu’il faut cher- Cher la vérité. Ce sont principalement les monnaies antiques, aux- quelles on a donné le nom de médailles, qui ont fourni aux historiens ‘des renseignements utiles, non-seulement sur l’histoire politique proprement dite, mais aussi sur les reli- gions , les mœurs, les coutumes des peuples anciens. Elles Nous ont conservé les traits d’une foule de rois et de per- Sonnages illustres, la représentation de monuments aujour- dhui anéantis, la reproduction des chefs-d'œuvre de la Sculpture, ete. C’est gràce aux monnaies qu’on a pu réta- blir la liste et la chronologie de plusieurs dynasties asiati- ques qui s'étaient partagé la succession d'Alexandre, comme, par exemple, les rois de la Bactriane. ( 680 ) Les Romains, surtout, avaient fait de leur numéraire un véritable livre d'histoire. Les monnaies des deux derniers siècles de la république, les deniers dits consulaires, étaient forgés sous la direc- tion de magistrats spéciaux , les triumvirs monétaires. Ces magistrats paraissent avoir eu le droit de déterminer à leur fantaisie le type de ces deniers, et de les varier con- tinuellement. Ils en profitèrent pour rappeler, sur ces pièces, les événements, vrais ou légendaires, qui illus- traient la mémoire de leurs ancêtres. On peut ainsi y retrouver toute l'histoire romaine de Tite-Live, depuis Romulus dont la tête vénérable et barbue figure sur des deniers de la famille Memmia, frappés par Caïus Memmius qui fut tribun du peuple en 700 (cinquante-quatre ans avant J.-C.) et consul-subrogé, vingt ans plus tard. Les monnaies consulaires sont généralement d’une exé- cution charmante, et lon doit supposer qu’elles étaient l’œuvre d'artistes grecs, les citoyens romains ne cultivant d'autre art que l’art de la guerre. A partir d'Auguste dont l’imperium consistait dans la réunion, sur la tête du prince, de toutes les magistratures, la fabrication de la monnaie, sauf celle de bronze où l'in- tervention du sénat se constate par les lettres °S. C., dut dépendre, comme tout le reste, de la seule volonté des empereurs. Ils s’y faisaient souvent représenter; parfois, aussi, on y trouve les têtes de membres de leur famille, des impératrices, de l'héritier présomptif avec le titre de César, de prince de la jeunesse, ete. Au revers, est quelque allégorie à un fait historique, une victoire, une conquête (on dirait aujourd’hui une annexion), un mariage princier, une naissance, une mort. Ou bien encore, c’est une divi- nité qu’on invoque : Venus victrix, Mars ullor, genio populi romani, Fortuna redux, etc. ( 681 ) Dans le Haut-Empire, pendant les deux premiers siècles, ces pièces portent assez souvent la date de leur émission , non pas au moyen d'un millésime, comme sur nos monnaies modernes, mais par l'indication du consulat et du renou- vellement de la puissance tribunitienne du prince. Ces deux chiffres combinés donnent assez exactement l’année. Depuis le seizième siècle et l'introduction de la grosse monnaie d'argent, écus ou thalers, plusieurs États d’Alle- magne ont, à des intervalles plus ou moins rapprochés, frappé des monnaies historiques dans le genre des mon- naies romaines. Le roi Louis de Bavière a reproduit ainsi toute l'histoire de son règne, et plus récemment, la guerre de 1870-1871 a fourni l'occasion aux princes et aux villes libres qui y avaient pris part, de frapper des Sieges-Thaler Pour éterniser le souvenir de leur triomphe. La même chose a été faite chez nous lors du 25"° anniversaire de l'inauguration de S. M. Léopold Į“, et lors du mariage de S. A. R. le duc de Brabant. Mais toutes ces pièces, frappées à un petit nombre d'exemplaires, n’entrent guère dans la circulation. Ce sont de véritables médailles auxquelles on a donné la valeur, la grandeur, la forme et l'apparence de la monnaie ordinaire. On avait, à plusieurs reprises, proposé en France, de varier de cette manière le type de la monnaie; mais mes- sieurs les économistes utilitaires s’y sont toujours opposés, même pour la monnaie de cuivre. Une de leurs objections, qui nous paraît fort peu sérieuse , était e que la manie des » Collections ferait retirer de la circulation et immobilise- » rait un capital improductif. » Pourquoi, alors, ne pas chercher à empêcher qu’on n’emploie les métaux précieux, Por eut argent, à faire des bijoux, de la vaisselle, des ser- vices de table , ete. Tout cela aussi est perdu pour la circu- ation. ( 682 ) Il est évident qu'on ne peut former une collection de monnaies grecques, romaines ou modernes, sans étudier, disons même sans connaître l’histoire du pays dont on cherche à réunir les pièces; et c’est là un des côtés utiles de la numismatique. C’est principalement en cela qu’elle sert à l’histoire; elle force à l'étudier, elle donne à la mé- moire une grande facilité pour la retenir. C’est une mnémo- nique attrayante et sûre. Et ce n’est pas seulement l’histoire politique qui peut se lire sur les monnaies, c’est surtout et encore mieux lhis- toire des progrès et de la décadence de l'art, et cela avec des particularités bien curieuses. Ainsi, sous les empereurs qui ont régné dans les Gaules, et dont notre savant et illustre confrère, M. le baron de Witte, a retracé l’histoire, sous les Postumus, les Victorinus , les Tetricus, l'art de la gravure était, dans nos contrées, bien supérieur à ce qu'on faisait à Rome, à la même époque. Auprès des belles mon- naies de Postume, les pièces de Gallien sont réellement barbares. A partir de la décadence de l'Empire, pendant tout le moyen âge, et même, sauf quelques exceptions, à l'époque moderne, les monnaies cessent d’avoir ce caractère histo- rique qui les font appeler médailles. Les types deviennent invariables , s’immobilisent et n’ont plus qu'un but, indi- quer et faire reconnaître la valeur de la pièce. C'est le triomphe du positivisme utilitaire sur la fantaisie. Mais la fantaisie et, en quelque sorte, Part, chassés du système monétaire, se sont réfugiés dans les médailles. Au quinzième siècle, à ce renouveau de la littérature; des sciences et des arts, à l’époque qui vit naître l'impri- merie et découvrir un nouveau monde, des artistes ita- liens ressuscitèrent les médailles historiques. Ce n'étaient PT Sach DL D Je ( 685 ) plus des monnaies, mais de petits monuments, des bijoux destinés à glorifier des princes, à conserver les traits de personnages célèbres et le souvenir des événements. Telle fat l’origine de nos médailles modernes. Une médaille, une médaille de bronze, surtout, qui ne tente pas la cupidité et n’est pas exposée à être fondue, est le plus durable de tous les monuments. Les constructions les plus massives. les plus solides finissent par s'écrouler, les inscriptions lapidaires s’effacent, les statues se renver- sent et se mutilent, si elles sont de métal on en fait, selon les époques, des cloches ou des canons, les archives tom- bent en poussière, les livres, surtout ceux qu’on fabrique actuellement, ne peuvent avoir une longue existence, le chlore dont ils sont imprégnés en aura bientôt fait jus- tice; quand tout cela aura disparu dans le gouffre de l'oubli, la médaille se retrouvera intacte sous sa verte et brillante patine, Aussi, en France, on a compris de bonne heure qu’il était indispensable de réglementer la fabrication de ces petits monuments, de ne pas laisser au crétinisme ou à la méchanceté d’un individu le droit de fausser l’histoire ou d'outrager l'autorité dans des documents ineffaçables et qui traversent les siècles. Le droit de frapper des médailles et des jetons appartenait à l'État seul. Sous Louis XIV, l’Académie des inscriptions fut chargée de choisir les sujets des médailles et den rédiger les légendes. C’est à cette judicieuse intervention que l’on doit cette admirable suite de médailles françaises qui se con- tinue jusqu’en 1789. La Révolution qui voulait faire table rase de tout, làcha la bride aux médailleurs comme à tant d’autres, et bientôt ( 684 ) lart populaire nous régala de ses affreuses médailles de plomb, dont le sujet était aussi ignoble que la forme. On y vit le buste et la pipe du trop célèbre père Duchêne, la guillotine et autres aménités sans-culottes du même genre. Sous le consulat et sous l'empire, les anciens règle- ments furent remis en vigueur, et les médailles redevin- rent des monuments officiels. Malheureusement le mauvais goùt de l’époque, la manie de faire de l’art classique, ou plutôt de parodier les Grees et les Romains, produisit, au milieu de pièces réellement belles, des choses d’un ridicule incroyable. Sur une de ses médailles, Napoléon [°° est représenté tout à fait nu, debout, comme un géant, entre deux petites femmes agenouillées qui lui présentent des clefs. Ces deux malheureuses personnifient les villes de Vienne et de Presbourg. Les années 1848 et 1870 virent renaître l'art libre considérablement enlaidi, mais plus fertile que jamais. Les insanilés de ce genre écloses en France, dans les trois dernières années, se comptent par milliers. L’antiquité grecque ne paraît pas avoir connu ce Te nous appelons aujourd’hui médailles satiriques, mais il existe une ou deux monnaies romaines , de l'époque impé- riale, auxquelles on a voulu attribuer ce caractère. C'est, d’abord, un aureus de Claude où l’on remarque, dans le champ derrière la tête , un objet piriforme qu’on prétend être le bolet ou champignon à l'aide duquel sa tendre épouse le fit monter au rang des dieux (1). A PES AE ne A (1) Cette pièce est gravée dans le Trésor de numismatique ou de glyp- tique. — Iconographie des empereurs. ( 685 ) Puis et surtout, cette pièce de Gallien qui a donné lieu à tant de dissertations à cause de sa légende féminine : Gallianae augustae, allusion au caractère faible et effé- miné de ce prince. Cette pièce, selon notre savant con- frère, M. le baron de Witte, a dû être frappée dans les Gaules par ordre de Postumus, adversaire et rival de Gal- lien à qui il avait enlevé cette partie notable de l'Empire. Mais, si l'antiquité n’a produit que peu de médailles satiriques, les Romains nous ont laissé — triste legs — toute une catégorie de pièces singulières auxquelles on a donné le nom de spinthriennes, et dont il serait difficile de parler, ici, sans avoir recours au latin qui, « dans les mots, brave l'honnêteté. » On a beaucoup discuté sur l'ori- gine et la destination de ces pièces, mais le problème ne Dous paraît pas résolu. Par leur style et leur fabrication, elles appartiennent à l’époque du Haut-Empire. Cela paraît incontestable. Tibère, dit-on, retiré à Caprée, les faisait forger pour son usage et celui de ses courtisans. Cette supposition , dont on n’a, d’ailleurs, aucune preuve, nous semble difficile à admettre. Il est des positions élevées qui imposent à ceux qui les occupent le respect d'eux-mêmes, et quelle que soit la corruption morale d'un prince, peut-on croire qu'un empereur romain, qu'un homme sur qui convergeaient les regards de lunivers entier, ait eu l’idée d'afficher ses hon- leuses orgies sur des médailles qui pouvaient facilement Sortir du cercle de ses compagnons de débauche? On a dû beaucoup calomnier ces premiers Césars que nous ne connaissons guère que par leurs détracteurs. Néron lui-même, dont on a fait le type de la férocité, Néron était musicien, il aimait les arts et la poésie, il était jeune, toutes circonstances qui s'accordent assez mal avec ( 686 ) le caractère d'un tigre couronné qu’on se plait à lui attri- buer. e Les premières médailles satiriques et injurieuses Com- mencèrent à l’époque de la Renaissance et avec la Réforme. Un sujet qu’on reproduisit alors jusqu’à la satiété consis- tait en deux têtes de profil et opposées, de manière que le nez d’un des profils formait le menton de l’autre. L'une de ces têtes était coiffée de la tiare, c'était le Pape, l'autre, cornue , représentait le diable, Au revers , et dans la même position, se voyaient un cardinal et un fou. Cette gros- sière ineptie semble avoir paru fort spirituelle en son temps; car, plus d’un siècle après Luther, on la retrouve encore appliquée, cette fois, non plus au souverain pon- tife, mais à Cromwell et à Fairfax (1). Pendant que Louis XIV faisait exécuter d’une manière somptueuse l’histoire métallique de son règne, les Anglais, les Allemands et surtout les Hollandais, répondaient à ses apothéoses par une pluie de médailles, presque toutes plus grossières que.spirituelles. On y faisait allusion à son âge avancé, à ses infirmités, à sa décrépitude ; on le représen- tait satisfaisant à des besoins naturels auxquels l'homme le plus haut placé ne se peut soustraire. Mais qu’on ne dise pas, comme quelques auteurs fran- çais, que ce genre de pièces, auxquelles nous avons jadis donné le nom de médailles stercorales, soit spécial à la Hollande. Elles sont le produit naturel, inévitable de l'art libre, du réalisme. Les Français nous lont assez prouvé, depuis quelques années. Il existe aussi plusieurs monnaies satiriques et nous CH (1) Revue de la numismatique belge, t. II, 1846, p. 407. al e ( 687 ) citerons quelques-unes des plus connues. C’est, d’abord, le fameux écu d’or de Louis XII avec la légende : Perpam BaByLonis NOMEN. Cette pièce, très-rare quand elle est authentique, mais contrefaite depuis par la spéculation, est une espèce de menace que le roi faisait au pape Jules HE, en réponse à sa bulle d’excommunication. On sait que le nom de Babylone a été souvent donné à la ville des papes par les hérésiarques et les ennemis du saint-siége. L'allusion était transparente et directe. Un peu avant la révolution de 1789, dans les dernières années du règne de Louis XVI, on se montrait en riant à Versailles, (on riait de tout, alors, à peu près comme à pré- sent), on se montrait un louis d’or sur lequel le roi avait le front orné de deux cornes naissantes, du reste assez bien dissimulées. On pouvait, à première vue, les prendre pour deux mêches de cheveux. Cette ignoble plaisanterie fut attribuée, à tort nous lespérons, à un prince du sang. Ce qui parait évident, c'est que ce louis a été fabriqué à la Monnaie royale, avec un vrai coin, retouchée pour y mettre les cornes. Il avait le poids et l’aloi de la monnaie légale. Nous avons, jusqu'ici, plaidé la cause de la numisma- tique; mais nous tenons, avant tout, à être impartial, il faut que nous disions, à présent, le principal grief qu'on lui reproche, la plus sérieuse objection qu’on fait à son utilité. Il existe, dit-on, un certain nombre de pièces, monnaies ou médailles, qui, loin d’être des preuves à l'appui de l’histoire, sont en contradiction directe avec la vérité, Ainsi, quand les Ligueurs voulurent opposer au roi de Navarre le cardinal de Bourbon qu'ils proclamèrent roi malgré lui, ils lui donnèrent le nom de Charles X et frap- ( 688 ) pêrent les monnaies à son nom et à son effigie, ceci ne peut pas induire en erreur. Mais, le cardinal étant mort peu après, on continua, pendant plusieurs années, à frap- per monnaie au nom de Charles X et avec des millésimes postérieurs à sa mort. Un savant pourrait donc, dans quelque mille ans, s’il retrouvait l’une de ces pièces, faire un mémoire académique pour prouver, monnaie en mains, que la date donnée par les historiens d’alors à la mort du cardinal-roi n’est pas la véritable. La même singularité existe sur des monnaies de Louis XV. Ce prince mourut en 1774, et l’on trouve de lui des pièces de 6 et de 12 sols qui portent la date de 1779. Ces pièces posthumes furent frappées à l’ancien coin de Louis XV, type de 1770, en vertu de lettres patentes du mois d'août 1779, données par son successeur dans le but d'accélérer la fabrication de la menue monnaie qui faisait défaut dans la circulation. Il est évident que , dans ce cas, il eût été préférable de mettre à ces pièces un millésime antérieur à la mort du roi, que de leur donner la date de leur émission. On aurait tort de ranger dans la catégorie des pièces trompeuses les monnaies que les prétendants ou leurs par- tisans ont la coutume de faire frapper comme protestation, comme revendication d’un droit. Les Stuarts, au siècle dernier, ont fait forger, en Italie, des pièces de ce genre. Depuis lors, nous avons vu des monnaies de Louis XVI, de Napoléon II, de Henri V, de Napoléon IV; nous avons même vu des pièces de 5 francs de M. Thiers et du citoyen Gambetta. Mais, ici, ce sont plutôt des pièces satiriques que la revendication d’un droit que ces messieurs n'ont jamais eu la prétention d’avoir. N existe enfin, aussi, quelques médailles qui ne sont ( 689 ) pas d'accord avec l’histoire. Ce sont ordinairement des pièces qui avaient été faites dans la prévision d’un événe- ment qui ne s’est pas réalisé. Telle est la fameuse médaille de Napoléon Ter, portant en légende les mots : DESCENTE EN ANGLETERRE, el à l’exergue : FRAPPÉE A LONDRES EN 1804. Cette pièce constate, au moins, que les Français avaient eu l'intention d’envahir l’Angleterre, et que si la fameuse descente n’a pas eu lieu, c’est qu’on en avait reconnu l'impossibilité. C’est donc encore de Phistoire. Voilà, Messieurs, le grand crime de la numismatique dévoilé et avoué : il existe des monnaies et des médailles qui peuvent induire en erreur les historiens! Mais les autres documents, les autres matériaux qui servent de base à l’histoire, sont-ils, plus que les mé- dailles, toujours, partout, sans exception, l'expression de la vérité vraie ? Depuis quelques années, messieurs les archivistes, avec un zèle qu'on ne peut trop louer, compulsent les riches dépôts qui leur sont confiés et en publient les pièces les plus intéressantes. Quand on rencontre une charte en con- tradiction avec tous les historiens, avec les chroniques contemporaines des événements, on donne, sans hésiter, tort aux historiens et aux chroniques. Est-ce toujours avec raison? N'a-t-il pas pu arriver pour les chartes ce qui est arrivé pour les médailles? Ces chartes n’ont-elles pas élé faites dans l'espoir d'événements qui ne se sont pas réalisés ? On trouva, dit-on, dans les fourgons de l'empereur, à Waterloo, une proclamation aux Belges, datée de Lae- ken. Ne voudra-t-on pas, plus tard, en conclure qu'il avait gagné la bataille? Vos cartulaires, fort précieux, tout le monde en convient, n’ont-ils jamais été visités par quel- que Vrain-Lucas d’alors, et cela dans un intérêt qui nous h r ec appe? D Ze: SÉRIE, TOME XXXVII. 45 ( 690 ) Pour conclure, sans surfaire la numismatique, disons que la connaissance des monnaies et des médailles fournit à l’histoire — on ne peut le nier — des renseignements authentiques et précieux ; mais avouons aussi que l’histoire vient au secours des médailles et leur rend, avec usure, les services qu’elle en a reçus. Il est encore, en faveur de la numismatique, une consi- dération, toute morale celle-là, que nous ne pouvons nous dispenser de faire valoir. Le numismate est essentiellement conservateur, Craignant toujours pour ses chères collec- tions qu'il couve d’un œil inquiet , il professe à l'égard des émeutes, de la commune et du pétrole, l'aversion la plus prononcée. Ce n’est pas lui qui se laissera jamais enrôler dans une conspiration. Les gouvernements établis, qui garantissent l'ordre et la propriété, n'ont pas d'amis plus sûrs, de partisans plus dé- cidés que lui. Les applaudissements de l'assemblée ont accueilli cette lecture. M. Thonissen, insèrit immédiatement après à l'ordre du jour de la séance pour une communication intitulée : Un déterministe de 1787, est venu en donner lecture au bureau. Voici ce travail : On connait les doctrines propagées par les réformateurs qui s’attribuent le titre de Déterministes ou de Nécessi- taires, dans les nouvelles écoles de la philosophie et de la science. A les entendre, le libre arbitre, cette noble et glo- rieuse prérogative de l'humanité, est une décevante illusion, une chimère enfantée par l'orgueil et par l'ignorance de l'homme. Ce que nous nommons la volonté libre et spon- tanée n’est autre chose que le produit inévitable et fatal ( 691 ) des impressions que nous subissons machinalement à toute heure de notre existence; c’est l'expression nécessaire d'un état du cerveau produit par des influences extérieures, auxquelles nul effort de volonté, nulle protestation de la conscience ne savent nous soustraire. Ces influences pro- voquent et déterminent nos actes avec la régularité et la nécessité qui caractérisent tous les phénomènes de la na- ture. Dépouillés de lauréole d’être raisonnable et pensant, nous sommes, à notre insu, des esclaves, quand nous croyons commander en maîtres. Le monde moral n'est que la dernière évolution du monde physique (1). Mais que devient dans ce système le redoutable droit de punir? Est-il rationnel, est-il juste d’incriminer des actes qui ne sont pas imputables à leurs auteurs? Peut-on con- server les tribunaux criminels, les châtiments, les prisons, le code pénal, dans une société composée d'êtres servile- ment assujétis à des impressions qui leur viennent du de- hors? Est-il possible, en un mot, de maintenir la respon- sabilité sociale là où s'évanouit la responsabilité morale ? L'objection est singulièrement embarrassante, et tous les chefs des nouvelles écoles, ‘depuis les plus modérés jus- qu'aux plus exaltés, s'efforcent d'y répondre, parce que tous, et principalement les Anglais, repoussent avec indi- gnation le reproche de vouloir ébranler l'ordre social dans (1) Voy. Moleschott, La circulation de la vie ; Paris, 1866. — Louis Ne Science et nature, Essais de philosophie et de science naturelle; 869. Paris, 1866. — Stuart Mill, La philosophie de Hamilton; Paris, M. SC ne va pas aussi loin que MM. Büchner et Moleschott, mais ses doctrines n'en conduisent pas moins aux mêmes conséquences. — M. Lit- tré est également parti du déterminisme dans ses recherches sur l'Origine de l'idée de justice (LA SCIENCE AU POINT DE VUE PHILOSOPHIQUE , pp. 331 et suiv ; Paris, 1873). ( 692 ) Pune de ses bases ETS Ceux-ci disent que le droit nait du besoin, et que la peine devient nécessaire- ment légitime quand elle est l'expression des exigences de l'espèce (1). Ceux-là soutiennent que la peine est ample- ment justifiée par le profit qu’en retire le coupable lui- même, dont elle modifie les instincts vicieux, et par la protection qu’elle accorde aux citoyens honnêtes (2). D'au- tres encore prétendent que la société, en réprimant les actes qui la troublent, ne fait que déduire des conséquences justes, rationnelles et utiles de deux principes primor- diaux, celui de dédommagement ou de justice et celui de vengeance ou de talion (5). Je ne m'arrêterai pas à faire ressortir l'inanité de ces argumentations. Comment pourrait-on frapper avec jus- tice et raison des individus dépourvus de liberté morale? Comment pourrait-on avoir la prétention d’intimider par des lois pénales, d'améliorer par le châtiment, des êtres dont le crime est le résultat naturel, direct et inévitable de leur organisation défectueuse? Pour le moment, je me bornerai à communiquer à l'Académie une découverte à laquelle j'étais loin de m'atténdre. J'ai été amené à con- stater que le déterminisme, avec ses conséquences les plus radicales, les plus dangereuses, j'allais dire les plus gros- sières, a été prôné et défendu, il y près d’un siècle, au sein de l'Académie impériale de Bruxelles. J'ai acquis la preuve que l'épineux problème du maintien du droit criminel dans Rd 1) Moleschott, p. 205. (2) Stuart Mill, p. 563. Gen Littré, La science au point de vue philosophique, p. 343. M. Littré soutient que celte solution peut être parfaitement admise par les détermi- nistes. ( 693 ) une société délivrée du préjugé séculaire du libre arbitre, — problème qui a naguère préoccupé MM. Moleschott, Littré et Stuart Mill, — a été longuement et savamment discuté devant nos honorables prédécesseurs, avec une entière liberté de langage, deux années avant l'explosion de la révolution française. En lisant, il y a quelques mois, les procès-verbaux des séances de l’ancienne Académie impériale, j'y trouvai ces mots, à la date du 29 février 1787 : « Lecture d’un ouvrage de M. du Rondeau, intitulé: ESSAI PHYSIQUE SUR LA PEINE DE MORT (1). » M. du Rondeau était le médecin en titre de LL. AA. RR. le duc et la duchesse de Saxe-Tesschen, gouverneurs géné- raux des Pays-Bas autrichiens pour l’empereur Joseph I. C'était un naturaliste, et non pas un jurisconsulte, écri- vant un Essai sur la peine de mort , et cet Essai était qua- lifié de physique. Dès lors je dus supposer que l'académi- cien belge avait, à son tour, examiné la question de savoir Si, pour l'exécution de la peine capitale, la corde était pré- férable au glaive, question plusieurs fois agitée au dix- huitième siècle et que l’Assemblée législative de France résolut, le 20 mars 1792, en mettant à la disposition du bourreau la hideuse machine qui porte à tort le nom du doc- teur Guillotin. Notre habile et zélé secrétaire adjoint vou- lut bien faire la recherche d'un manuscrit oublié depuis bientôt quatre-vingt-dix ans. Il eut le bonheur de le retrouver et le mit à ma disposition. Grand fut mon étonnement en découvrant dans ce volu- mineux Mémoire, au lieu d’un triste débat entre le fer et ie a A à (1) MÉMOIRES DE L'ACADÉMIE IMPÉRIALE ET ROYALE DE BRUXELLES, t. V; Histoire de l'Académie, p. Lym. ( 694 ) la corde, une longue et savante dissertation sur le libre arbitre, les causes de la criminalité, le caractère de la jus- tice répressive, la nature et le résultat final des peines. Niant audacieusement l'existence de la liberté morale, fai- sant de l’homme le jouet passif des sens, le docteur du Rondeau était parti de ce principe pour demander la ré- forme radicale de toute la législation criminelle de lEu- rope. L’académicien belge du dix-huitième siècle était, dans toute la force des termes, ce qu’on nomme aujour- d’hui un déterministe. Il était même déterministe au plus haut degré; car, dédaignant les précautions oratoires et marchant toujours droit au but, il expose le principe et déduit les conséquences de son sytème, avec un courage et une loyauté qu’on ne rencontre pas toujours chez ses successeurs. Quelques citations suffiront pour justifier complétement l'opinion que je viens d'émettre. Le docteur du Rondeau pose le fondement de son argu- mentation dans les lignes suivantes : « L'homme n'est point libre dans son choix; il est évidemment nécessité à choisir ce qu’il juge le plus utile ou le plus agréable pour lui-même. Quand il suspend son choix, il n'est pas libre non plus; il est forcé de suspendre son choix jus- qu’à ce qu’il connaisse ou croie connaitre les qualités des objets qui se présentent à lui, ou jusqu'à ce qu'il ait pesé les conséquences de ses actions. L'homme, direz- vous, se décide à tout moment pour des actions qu'il sait devoir nuire à lui-même; l'homme quelquefois se tue, donc il est libre. Je le nie! L'homme est-il le maître de bien ou mal raisonner? Sa raison, sa sagesse, ne dé- pendent-elles pas, soit des opinions qu'il s'est faites, soit de la conformation de son individu ? Comme les vv y e V. ww w.e e e e e | | | | ( 695 ) unes ni les autres ne dépendent aucunement de sa vo- lonté, elles ne peuvent aucunement prouver sa liberté. Le sentiment intime qui nous fait croire que nous sommes libres de faire ou de ne pas faire une chose est une pure illusion. Lorsque nous remontons au principe véritable de nos actions, nous trouvons qu’elles ne sont jamais que des suites nécessaires de nos volontés et de nos désirs, qui jamais ne sont en notre pouvoir. Vous vous croyez libre, parce que vous faites ce que vous vou- lez; mais êtes-vous donc libre de vouloir ou de ne pas vouloir, de désirer ou de ne pas désirer? Vos volontés et vos désirs ne sont-ils pas nécessairement excités par des objets et par des qualités qui ne dépendent aucunement aer L'homme est, à chaque moment de sa durée, un instrument passif aux mains de la nécessité (1). » Assurément, ces idées n'étaient pas nouvelles à la fin du dix-huitième siècle; mais on voudra bien reconnaître que l'académicien belge les expose avee une précision, une netteté, une franchise peu communes. Nous ajouterons que, dans les longues pages de son Mémoire, il les défend contre toutes les objections avec la souplesse d’un esprit subtil et la science d’un érudit consommé. Il invoque tour à tour la médecine, la jurisprudence, la philosophie, la physique, l'histoire, la morale, la poésie, et il arrive ainsi très-souvent à des résultats qui se distinguent par une véritable origi- nalité. C’est ainsi notamment que plus d’une fois, en cher- chant à expliquer les actes des héros et des sages, il a clai- rement entrevu le programme historique que M. Büchner, l'un des princes du matérialisme germanique, a tracé, v vv ù v vV Y vvv y . 268 JE A DR . > œ ei © = mn E) kg (1) S$ 13? et 406 du MS. ( 696 ) en 1860, dans ses Essais de philosophie et de science na- turelle (4). Après avoir hautement répudié les notions que ses con- temporains se faisaient du bien et du mal, du mérite et du démérite , le docteur du Rondeau pénètre hardiment dans le vaste et triste domaine de la justice répressive. Adver- saire implacable de toutes les doctrines philosophiques et religieuses fondées sur le principe de la liberté morale, il se demande ce que la justice et le crime doivent être aux yeux de législateurs et de juges vraiment éclairés. A son avis, le crime n'existe pas dans la nature; c'est la loi seule qui impose injustement cette dénomination flé- trissante à des actes nécessaires et inévitables. Les causes multiples et infiniment variées qui engendrent la préten- due criminalité sont tout aussi matérielles, tout aussi indé- pendantes de notre volonté, que les miasmes qui produisent la fièvre. La colère est une folie passagère; la jalousie est un délire momentané; la rapacité, mère féconde du vol et de la fraude, est une aberration maladive; les passions dépravées qui amènent les délits contre les mœurs sont des dérangements organiques. Tout méchant est un homme dont le cerveau est troublé. Tout mal moral est le résultat d'un mal physique. Nous sommes aussi injustes lorsque nous savons gré à un homme d'être vertueux que lorsque nous condamnons celui qui ne l'est pas. L'assassin lui- même est un malade, comme tous les autres délin- quants (2). On le voit : c’est la doctrine pure et consolante de Pla- (1) T. I, p. 73. $$ 55 et suiv. du Mémoire. (2 $$ 131, 133, 180, 195, 272, 276,306, 535, 345, 343, 412, 419, 420, 444, 558. ( 697 ) ton abaissée, retournée au bénéfice du sensualisme. Pour le doux et glorieux disciple de Socrate, le crime est une maladie de l'àme. Pour le docteur du Rondeau, le crime est une maladie du corps. Cependant l'académicien belge, tout en proclamant cette doctrine audacieuse, ne veut, pas plus que ses successeurs du dix-neuvième siècle, anéantir la justice répressive; mais, plus logique, plus france et plus ferme que ces derniers, il ne commet pas l’inconséquence de recourir soit à de pré- tendus principes primordiaux de dédommagement et de vengeance, soit aux avantages problématiques que pré- sente l’intimidation par l'exemple : « Lon dit, s'écrie-t-il, » que les supplices publies sont nécessaires pour détour- » ner du crime. Mais de quoi sert l'exemple vis-à-vis de » personnes dont l’esprit est aliéné? Lon aura beau > pendre ou rompre vingt jaloux, cela ne changera pas » l'organisation des autres... L'éréthisme, les obstrue- » tions, la phlogose ne se dissipent pas au récit d’une exécution... La potence et la roue ne rectifieront Jamais les idées fausses (4). » De même que M. Moleschott Da fait dans ses Études sur la circulation de la vie, le docteur du Rondeau part du Principe qu'il faut nécessairement considérer comme légi- lime tout ce que requièrent les exigences de l'espèce hu- maine. Puisque les méchants troublent la marche paisible el régulière de la vie sociale, puisqu'ils contrarient le dé- Yeloppement normal et légitime de l'espèce, le gouverne- ment a le droit d'opposer un obstacle aux conséquences funestes de leurs actes, de même que le propriétaire d'un champ a le droit d'opposer une digue au torrent qui me- EE (1) $$ 158, 181 10, 515. KN Ki ( 698 ) nace d’envahir son domaine. Le pouvoir social peut done, sans hésitation et sans scrupule , priver les malfaiteurs de leur liberté; mais, comme toute méchanceté est le produit d'une maladie, la peine, par une conséquence naturelle et nécessaire , ne doit être qu’un traitement médical. L’académicien belge, plus courageux que beaucoup de ses successeurs, ne recule pas devant ces conclusions. Dans son système de répression, chaque prison sera une sorte d'hôpital où, à l'aide d'un régime bien approprié, on s'efforcera de modifier l’organisation vicieuse des détenus, « attendu qu'il n’est pas douteux que le tempérament de » l’homme ne puisse être corrigé, amélioré par des causes » aussi physiques que celles qui l'ont rendu vicieux. » On guérira le voleur et le vagabond de leur paresse invétérée, en leur faisant peu à peu goûter et désirer les charmes du travail. On extirpera les instincts dépravés du voluptueux, en le condamnant à une tempérance forcée. On profitera, pour l'amendement des autres délinquants, de la tendance à limitation qui distingue la nature humaine, et l'on recti- fiera leurs sens, en offrant constamment à leurs regards le spectacle salutaire et fortifiant des vertus opposées à leurs vices. On modifiera leurs impressions, on épurera leurs goûts, on élèvera leurs sentiments, on modiliera tout leur être, en multipliant les bons exemples , en substituant les conseils utiles aux instigations pernicieuses, en éloignant avec soin toute occasion de chute et de scandale. Et si, par une exception malheureusement trop fréquente, ils se montrent insensibles à cette correction médicale, on les séparera définitivement de leurs concitoyens. M. du Ron- deau en conclut qu'à l'époque où la vraie science de l'homme aura pénétré dans l'éducation des classes diri- geantes, où le monde moderne se sera dégagé des super- ( 699 ) stitions et des erreurs des vieilles écoles, où les lois sociales S’'adapteront réellement aux lois de la nature, ce sera aux médecins , et non plus aux jurisconsultes, que les peuples civilisés confieront la grande et épineuse tâche de rédiger le code des délits et des peines (1). Ajoutons que M. du Rondeau ne commet pas , comme certains déterministes de nos jours, la singulière inconsé- quence de conserver la peine de mort, dans un système de philosophie et de droit où chaque délinquant est nécessai- rement un malade. Une foule de pages de son docte Mé- moire sont destinées à prouver que la société n’a pas le droit de tuer les perturbateurs de l'ordre publie, quand même ils se montrent décidément incorrigibles. Il ne se contente pas de dire, comme M. Littré : « En ôtant..... la » vie aux malfaiteurs, la société met fin aux dommages » qu'ils causent, et procure à chacun une sûreté relative » d’après la vigilance des magistrats de judicature et de » police (2). » Toujours fidèle à sa grande règle de lassi- milation du crime à la maladie, l’académicien belge rejette l'échafaud, en s'écriant ` e La mort est pire que le mal; » elle ne corrige pas, elle détruit (3). » Aussi n’invoque- t-il pas le caractère d’inviolabilité de la vie humaine, Comme l'avaient fait un grand nombre de philosophes et de jurisconsultes contemporains, notamment Brissot de Warville, dont les œuvres lui étaient parfaitement connues. I ne se prévaut pas davantage des considérations de fait et d'équité qui ont déterminé l'opinion de la plupart des Ne = à (1) $$ 136 et suiv., 150, 182, 193, 272, 276, 280, 506, 517, 555, 542 et "Hr, 357, 558, 376, 419, 420, 444, 445, 455 et suiv. 2) Loc. cit., p, 344. (5) $ 337 10, ( 700 ) criminalistes de nos jours. Résolûment placé sur le terrain du déterminisme, il s'exprime ici, comme partout ailleurs, avec une entière franchise : « Si la cure, dit-il, ne ré- pond pas à notre attente, sommes-nous autorisés à Con- damner ces incurables, qui n’ont par devers eux qu'une organisation vicieuse qui les force à nuire à leurs égaux? Quoi! nous aurions la force de détruire des frères parce que leurs sens les servent mal! Qui de nous peut s'as- surer de la bonté des siens d’un moment à l’autre?..... I west pas plus raisonnable de détruire des hommes, parce qu'ils ont des qualités nuisibles à la société, que de jeter des pestiférés dans un puits. Les uns sont des hommes malades et les autres ne se portent pas bien (1). » Je ne crois pas devoir insister davantage. Voilà bien, dans son principe fondamental et dans ses conséquences dernières, ce déterminisme anglo-germanique qui, tout en niant l'existence du libre arbitre de l'homme, affecte la prétention de maintenir et de légitimer les tribunaux criminels. On s’étonne même que de telles doctrines aient pu se produire au grand jour, en 1787, dans la capitale des Pays-Bas catholiques, par l'organe d’un personnage "29 UE PUR 26 KE. w Y? vy y (1) $§ 28, 281 , 557, 378 ?. 11 fait cependant une exception à la règle, €t cette exception le conduit à une inconséquence manifeste, H veut qu'on mette à mort les conspirateurs et les ambitieux dont les manœuvres con- stituent une cause permanente de trouble et de péril pour la généralité de leurs semblables. « Ce sont, dit-il, des êtres dangereux dont il est impor- » tant de se défaire... I} serait dangereux de temporiser dans Ce €aS, en » attendant que le temps détruise cette manie : Salus populi supr ema » leg esto (8 579?). » Le docteur du Rondeau ne voyait pas qu'en faisant cette brèche au système, il sapait lui-même les bases de son argumenia- tion. > ee Eegen, ( 701 ) appartenant à la cour des gouverneurs généraux, On s'étonne surtout de les rencontrer au sein d’une compa- gnie dont le règlement imposait aux académiciens l'obliga- tion de respecter scrupuleusement la religion et les lois. Mais l’auteur du Mémoire a eu soin de nous indiquer lui- même la source de son courage exceptionnel : il se fiait à l'esprit de tolérance et comptait sur la protection de l'em- pereur Joseph JI. « Si je wai pas craint, dit-il, de m'élever » au-dessus des opinions reçues, je dois cette heureuse » hardiesse au gouvernement doux et éclairé sous lequel » je vis. La vérité plait aux grands monarques, aux bien- » faiteurs de l'humanité (1). » On me demandera peut-être pourquoi j'ai tiré de l'oubli un Mémoire qui s'attaque à la dignité de l'homme et en- lève au droit criminel ce caractère moral, sans lequel il n'est plus qu'un abus de la force, un expédient imaginé par les puissants et les riches. Ma réponse sera bien simple. J'ai voulu prouver, en premier lieu, que le déterminisme philosophique et juridique, qu'on nous présente aujour- dhui comme le degré suprême de la science de l'homme et du droit, n’est pas aussi nouveau, aussi original que le Prétendent ses propagateurs des deux côtés de la Manche. N'est-il pas certain que M. Stuart Mill ne fait que repro- duire la doctrine du docteur du Rondeau , quand il écrit : € Il y a deux faits qui, dans la théorie des nécessitaires, » suffisent pour justifier le châtiment : le profit qu'en » retire le coupable et la protection des autres hommes... >» Pour ce qui regarde le criminel, la théorie veut qu'en dest e mémo (1) $ te du Mémoire. ( 702 ) » contre-balançant l'influence des tentations présentes ou » des mauvaises habitudes acquises, la peine rétablisse » dans l'esprit la prépondérance morale du bien. » N'est-il pas incontestable qu'on retrouve, trait pour trait, les idées de l'académicien belge dans l’éloquent appel qu’un célèbre médecin français adressait naguère au savant futur qui nous montrera « à quelles conditions primordiales de lor- > ganisme se lient le crime et le vice... et qui reléguera » hors de toute appréciation judiciaire les problèmes déli- » cats, complexes, souvent insolubles de la responsabi- lité (1). » N’est-il pas manifeste que M. Émile de Girar- din se faisait, à son insu, le disciple du même docteur, quand il s'écriait: « S'il y a des hommes qui naissent » moralement difformes, comme il y en a qui naissent > difformes physiquement; s’il y a des idiots et des incor- » rigibles de naissance, comme il y a des aveugles, des » sourds-muets, des bossus et des culs-de-jatte de nais- » sance; si les difformités morales existent dans l'huma- » nité au même titre que les difformités physiques, sans > que l'homme soit plus responsable des premières que des » secondes, que devient et que vaut la doctrine de l'expia- » tion fondée sur le libre arbitre? Si la société croit » qu'elle à le droit et le moyen de punir, elle s’abuse et » tombe dans la même erreur que si elle fouettait avec des > verges l’eau qui a inondé ou le feu qui a incendié (2)- ? J'ai voulu, en deuxième lieu, redresser une erreur his- torique qui a été souvent commise à l'égard des Belges qui vivaient dans la seconde moitié du dix-huitième siècle. Jen Terate E (1) Cit. par M. Caro, dans sa remarquable étude sur le droit de punir (Revue des deux mondes , 1, CVI, 1875, p. 554). LE (2) Emile de Girardin, Le droit de punir, pp. 49 et 240. (Paris, 1871). er ( 705 ) Que de fois n’a-t-on pas dit que les Pays-Bas autrichiens étaient restés complétement étrangers au vaste travail intellectuel qui devait amener la chute de l’ancien régime et transformer de fond en comble les institutions, les lois et les destinées de l’Europe? Je dissipe cette erreur, en fai- sant voir que le mouvement de réforme et l’ardeur d’inno- vation, même dans ce qu’ils avaient de plus audacieux et de plus exagéré, s'étaient glissées jusque dans l'entourage de l’archiduchesse qui résidait au palais de Bruxelles. Je fournis à l’histoire future de notre civilisation nationale un épisode qui n’est pas dépourvu d'importance. ans une autre de nos solennités académiques, j'ai prouvé que le fameux principe de population, qui fait la gloire de Malthus, a été clairement défini par un de nos savants prédécesseurs, dix-huit ans avant le jour où parut à Londres le livre de l'illustre économiste anglais (1). Je prouve aujourd'hui qu'un autre de nos prédécesseurs a nettement décrit les principes et les conséquences du dé~ lerminisme médico-juridique. Je tâcherai de compléter ces recherches, afin de justifier de plus en plus ces paroles de l'éminent secrétaire perpétuel que nous venons de perdre : « Pendant la dernière partie du dix-huitième siècle, l'his- > toire des sciences et des belles-lettres en Belgique est $ pour ainsi dire tout entière dans les travaux de l'an- » cienne Académie de Bruxelles (2). » De vifs applaudissements ont éclaté après cette lecture. De EES (1) Bulletin de l’Académie, 2 série, t. XXI, pp. 455 et suiv. (2) Bulletin de l'Académie, (re série, t. I, p. 477. ( 704 ) M. Alphonse Wauters a succédé à M. Thonissen. Il est venu lire son travail portant pour titre : Les gildes com- munales au onzième siècle. Voici comment s’est exprimé cet académicien : Il y a peu de mots qui aient reçu dans notre pays plus d'applications diverses que celui de gilde ou gulde, terme d’origine germanique, correspondant au nom français association, société, et dont l’origine doit être cherchée dans gild ou gelt, c’est-à-dire argent ou taxe (1), parce que toute gilde suppose le payement d’une cotisation à l’aide de laquelle on en supporte les frais. Je n'ai point l'intention de vous entretenir de ces sociétés multiples auxquelles on donna plus tard le nom de gildes : corps de métiers, corps de tireurs ou serments, chambres de rhéto- rique, confréries; je me bornerai à esquisser les tendances des premières associations du même genre qui se formè- rent dans nos contrées et qui contribuèrent puissamment, au onzième siècle, à y préparer l’avénement des libertés communales. À peine étudiées chez nous avant qu’un savant alle- mand, Wilda, leur eût consacré un mémoire qui fut cou- robné en 1851 par l’Académie des sciences de Copenhague : das Gildenwesen im Mittelalter, et Augustin Thierry quel- ques pages du chapitre V des Considérations sur l'histoire de France, placées en tête de ses Récits des temps méro- vingiens (2), livre aussi remarquable par la forme que par le fond, nos vieilles gildes ont depuis été l’objet de maintes études intéressantes, mais dans lesquelles, ce me semble, on s’est laissé quelque peu égarer à la suite des guides dont nous venons de citer le nom et qui ne possédaient -iia SST ( 705 ) pas tous les éléments nécessaires pour apprécier nette- ment le rôle, l’organisation, le but des associations dont ils ont parlé les premiérs. Transformer les gildes en associations égalitaires, où toutes les classes de la société étaient mêlées , c’est con- fondre les époques et les idées qui y dominèrent. Les gildes furent essentiellement des sociétés de personnes égales entre elles par le rang et la fortune : tantôt elles se composèrent de serfs, tantôt elles affichèrent des tendances aristocratiques , et c’est ce dernier caractère qui établit une sorte de démarcation entre elles et les communes, dans la véritable acception de ce mot. Placer en Scandinavie le berceau des gildes, attribuer à des colonies saxonnes l’origine des associations de ce genre qui se formèrent en Flandre, supposer que les pre- mières gildes naquirent, en même temps que ces colonies, dans ce que l’on appela la West-Flandre, c’est localiser l’histoire d’une institution qui appartient à la race germa- nique tout entière et dont l'influence s’est étendue au loin. La gilde était si peu d’origine exclusivement scandinave Ou saxonne que les Francs l’introduisirent partout dans la Gaule, où elle fut l'objet de sévères prohibitions, tant lors d'un ancien concile tenu à Nantes que dans les recom- mandations adressées à ses subordonnés par l'archevêque incmar, de Reims, en 852. L'établissement des gildes dans nos contrées fut donc Pune des conséquences de la conquête de notre pays par les peuples d’outre-Rhin. Ce qui est vrai, c’est que nos populations, où le sang ger- manique dominait davantage , ne se convertirent qu’assez tard au christianisme, et que pour cette raison elles con- servèrent plus longtemps que leurs voisins du midi leurs rites et leurs usages primitifs, et, en particulier, l'usage 2% SÉRIE, TOME XXXVII. 46 ( 706 ) de se réunir périodiquement dans des banquets où l'on s’entretenait des intérêts communs et où l’on buvait à la santé des protecteurs célestes et des héros de la nation. Comme en Angleterre, les gildes continuèrent à exister chez nous; mais, tandis qu’au delà de la Manche les asso- ciations de ce genre se maintinrent paisiblement, chez nous elles furent souvent proscrites par le clergé et les rois francs, tantôt sous prétexte qu’elles provoquaient à livro- guerie, tantôt comme facilitant la formation de complots dangereux pour la sécurité de l'État. Ce fut surtout à l’époque où la monarchie carlovingienne forma un corps immense, difficile à diriger, entouré d’ennemis, pesant d’un poids presque intolérable sur la masse du peuple, que les gildes furent l’objet d'ordres sévères. a Quant aux serments, dit Charlemagne dans un capi- » tulaire de Tan 779, par lesquels on se lie mutuellement » en formant une gilde, que personne ne se hasarde à en » prêter. Quelques accords qu’on fasse, au sujet d'au- » mônes ou en cas d'incendie et de naufrage, que personne » ne prête de serment à ce sujet (3). » a Pour ce qui est des conjurations et des conspirations, > dit le même prince, en 794, qu'il ne s’en fasse point; » que partout où il s’en trouve elles soient anéanties (4). » Un capitulaire de Louis le Débonnaire, de l'an 821, est plus sévère et plus explicite : « Au sujet des conjuratious » formées par des serfs dans les Flandres , dans le Mem- » pisc et dans les autres cantons voisins de la mer , dit-il, » nous voulons que nos missi ou envoyés enjoignent aux » Seigneurs de ces serfs d’obliger ceux-ci à ne plus former » de pareilles conjurations. Que ces seigneurs sachent » que si leurs serfs n'obéissent pas à nos ordres après » que ces derniers leur auront été signifiés, ils seront eux- ( 707 ) » mêmes passibles de notre bannum, c'est-à-dire d’une » amende de 60 sous (5). » Ces textes nous permettent d'apprécier l'étendue du mal qu’on voulait réprimer. Malgré les prohibitions de tout genre, les gildes se multipliaient ; et, circonstance à noter, l'institution recevait mainte application utile : c'était un moyen de s’entr’aider, de se secourir en cas de naufrage, en cas d'incendie. N'est-il pas curieux de retrouver ce sys- tème de secours mutuel en usage dans un pays où, cinq siècles plus tard, le système des assurances réciproques ` contre les incendies et les épizooties parait en vigueur, particulièrement dans le territoire de Furnes (6) ? Les ravages des Normands, qui portèrent un coup sensible à la prospérité de notre pays, et l'établissement du régime féodal durent frapper au cœur et anéantir la plu- part des gildes qui s'étaient formées dans les campagnes. Bientôt il n’exista plus d'homme libre; chacun, successi- vement, s'engagea dans des liens de vassalité et courba la tête sous la loi du plus fort. Combien ce régime provoqua de murmures, de plaintes, de séditions, c’est ce qu'il serait impossible d’énumérer : les chroniques sont pleines de lamentations, écho affaibli du malaise général. Dans cette période funeste, les gildes rurales paraissent avoir disparu complétement de la Flandre, si ce n’est à Warneton , où il en y avait sept, qui léguèrent à autant de hameaux les noms de Reybrouckgilde, Slutsebekegilde, Buschegilde, Eerbruuckgilde, Wapperlinckgilde, Weinergilde et Hou- tegilde (7). L'institution des gildes reparut au dixième siècle et se multiplià aux Pays-Bas et en Angleterre, mais, surtout, dans un but exclusivement religieux. De cette nature sont la plupart des gildes anglo-saxonnes dont on a publié les ( 708 ) statuts (8) ; de cette nature aussi était la corporation placée sous l'invocation de saint Euchère, évêque d'Orléans, et qui se forma dans le monastère de Saint-Trond du temps des abbés Gontran et Adelard, au commencement du onzième siècle. Cette dernière corporation ou confrérie, formée surtout des serviteurs de l’abbaye, placée sous la dépendance du prieur, n'avait aucun caractère politique (9). Pour retrouver des associations dans le genre des vieilles gildes germaniques, alliant, comme elles, l'assistance mu- tuelle aux plaisirs de la table et jouant au besoin un rôle énergique, c'est ailleurs qu'il faut chercher. Nous en trou- verons dans les ports et dans les villes importantes, où habitaient un grand nombre de négociants, les uns chré- tiens, les autres juifs. Cette classe utile de la société avait été spécialement protégée par Louis le Débonnaire, et les empereurs d’Alle- magne lui accordèrent des priviléges et des immunités. Comme preuve de la sollicitude du fils de Charlemagne pour les marchands de ses États, nous citerons le capitu- laire de Tan 828, où il les exempte de tout service, ainsi que de tout tonlieu, sauf à Quentovic, à Dorestad et à l'Écluse (10). Plus tard, la profession de marchand continua . à être honorable et respectée. Les empereurs d'Allemagne ne tardèrent pas à accorder des priviléges et des immunités à ceux qui l’exerçaient. Ainsi, vers 975, Othon IT exempta les marchands de Magdebourg des tonlieux qui se payaient dans tout l'Empire, sauf en quatre endroits : Mayence, Cologne, Thiel et Barderwyek (11). Dans nos contrées se produisirent des stipulations ana- logues, qui témoignent aussi de la sollicitude dont le com- merce était entouré. Lorsque, au mois d'avril 1001 , l'em- pereur Othon II octroya à Erluin, évêque de Cambrai, ( 709 ) l'autorisation d'établir un marché, un tonlieu, une juridic- tion spéciale à Vendelgies ou Château-Notre-Dame (au- jourd'hui Câteau-Cambrésis), il garantit à tous ceux qui fréquenteraient le marché de cette localité la sécurité dont jouissaient les négociants qui se rendaient au marché de Cambrai (19). Et quand plus tard , en l’an 1005, son suc- cesseur Henri H confirma à la cathédrale de Cambrai ses droits et ses possessions, il se servit d'expressions qui attestent l'existence d’une paix et loi, c’est-à-dire d’une législation spéciale, pour les marchands de cette ville (13). Mais, ce n’était rien que d’avoir des droits ; à une époque telle que le dixième et le onzième siècle, un homme isolé ne comptait pas; pour mieux défendre leur personne, leur avoir, lenrs immunités, les marchands mirent en pratique notre vieille maxime nationale : l'union fait la force, et l'esprit d'association ne tarda pas à produire de merveil- leux résultats. Les ineursions continuelles des Normands ou Danois avaient anéanti la prospérité de Dorestad ou Wyck-te- Duerstede, vieux port jadis célèbre aussi comme atelier monétaire. Ce ne fut pas Utrecht qui hérita immédiatement de l’activité de Dorestad. Une localité jusqu'alors incon- nue, Thiel, dans le Teisterbant, devint le centre du com- merce dans les pays baignés par le Rhin inférieur, la Meuse inférieure et le Wahal. Bien que l'empereur Othon [°° en eût cédé la propriété à la cathédrale d'Utrecht (14), le domaine impérial y conserva une demeure, qu'Othon H comprit dans la dot de sa femme Théophanie (15) et dont Othon IHI fit abandon à la collégiale d’Aix-la-Chapelle (16). Thiel et ses habitants avaient done des droits particu- liers à la protection des souverains de la Germanie et de la Lotharingie. Dans ce port florissant, les marchands ( 740 ) constituèrent une association, une véritable gilde, dont l’origine, les règlements, la fin ne nous sont pas connus, mais dont les tendances sont dévoilées dans quelques lignes d’un chroniqueur, le moine Alpert, qui évidemment les a dénaturées, soit à dessein, soit par ignorance. Je laisse la parole à ce chroniqueur, qui écrivait vers Tan 1020 : a Les habitants de Thiel ont des mœurs et des coutu- mes différentes de celles de leurs voisins. Ce sont des hommes intraitables et qui ne s’assujettissent à aucune règle. Ils rendent des jugements, non pas conformément à la loi, mais comme ils l'entendent, prétendant que l’empereur leur en a octroyé le pouvoir. Si l’un d'eux emprunte un objet, il nie le prêt sans hésiter. L'un de ses compagnons est-il convaincu de mensonge, nul ne peut le contredire. Lorsqu'un objet est si petit qu'on sait le cacher dans la main, l’autre main sert à nier qu’on Pait eu en sa possession. L’adultère n’est pas rè- gardé comme un crime, et aussi longtemps que la femme du coupable ferme les yeux, le mari peut se livrer à la débauche. Dès la pointe du jour, les habitants de Thiel s'enivrent; ils comblent d’honneurs celui qui les excite au rire et à la boisson, par le récit de faits déshon- nêtes. C’est pourquoi ils se cotisent et emploient lar- gent qu'ils recueillent ainsi à distribuer des prix entre eux et à donner des repas solennels, aux principales fêtes de l’année. » Alpert termine en promettant les faveurs du Ciel au prêtre zélé qui réussirait à obtenir de l’empereur l'inter- diction de ces désordres. Il ne prétend pas dénigrer les habitants de Thiel. Oh non! c’est avec une profonde tris- tesse qu’il parle de la sorte. C’est pour leur bien, aurait-il pu ajouter. Son langage trahit de la crainte, car ces mar- CO PC vvv w WM a ew e wg wg vg wg vuv y VE ( TH) hands, enrichis par un commerce actif avec l'Angleterre, ne se gênaient pas pour se plaindre; ce fut pour faire droit à leurs réclamations que l’empereur Henri H dirigea, en 1018, contre Thierri de Vlaardingen, comte de Hol- lande, toutes les forces de la Lotharingie, qui, comme on sait, furent mises complétement en déroute (17). Il résulte du passage que nous venons de citer que les marchands de Thiel formaient une association jouissant, en vertu de concessions impériales, du droit de juger les différends qui s’élevaient entre ses membres, et ayant adopté, non pas la législation ordinaire, mais des statuts particuliers qui s’en écartaient d’une manière notable. Ce serait s'égarer étrangement que de lui supposer une tolé- rance condamnable pour des crimes ou des délits tels que le vol et l’adultère. Une société peut-elle s'organiser sur des bases semblables? Évidemment non : une organi- sation de ce genre ne serait respectée ni admise par per- sonne, pas même par des criminels de profession, encore Moins, je dirai plus, en aucun cas, par des gens voués au négoce, car le négoce, pour être continué avec profit, implique l’ordre, la régularité, l'honnêteté dans les trans- actions. Ce qui mécontentait Alpert, c’est que les mar- chands de Thiel n’admettaient pas les accusations dénuées de preuves, le système des conjurateurs, le duel judiciaire ; c'est que, conformément à la raison, ils réclamaient du plaignant des indices certains, des preuves formelles con- tre celui qu’il aceusait. Ce qu’Alpert ajoute des fêtes que les marchands de Thiel célébraient à des époques détermi- nées, des repas et des concours dont elles étaient accom- Pagnées, ne mérite pas moins d'attirer l'attention. Au milieu de l'effondrement littéraire qui se manifeste au dixième et au onzième siècle, nous entrevoyons le vague (712) espoir d'un meilleur avenir. Ces gais propos que la gilde aimait à entendre et à récompenser, reparaîtront bientôt plus nombreux et plus mordants; et quand une splendide couronne de communes libres ornera nos provinces, les trouvères, romans et thiois, naîtront chez nous plus nom- breux que partout ailleurs, comme en Provence et sur d’autres terres libres, pour égayer des populations avides à la fois de poésie, de bien-être et d'indépendance. On aimerait à suivre les destinées de cette corporation amie à la fois des plaisirs de la table et des plaisirs de l'es- prit, mais d’épaisses ténèbres couvrent ses destinées. Elle s’affaiblit sans doute en même temps que le pouvoir des empereurs sur la Basse-Lotharingie. Tandis que les évè- ques d'Utrecht favorisaient particulièrement leur capitale et les comtes de Hollande la ville naissante de Dordrecht, Thiel dépérit de plus en plus; dès l'année 1174, ce n'était plus dans ce port, mais à Kayserswerth, qu’un tonlieu se percevait sur la navigation du Bas-Rhin, au profit de l'empereur (18). Sa gilde s’éteignit, et jamais on n’en aurait soupçonné l'existence, sans les lignes qu’Alpert lui a consa- crées et par lesquelles il voulait la flétrir. Loin d'encourager le désordre moral, loin de pousser au parjure et au libertinage, les gildes, en ouvrant le cœur de l'homme à de saines aspirations, y faisaient naître le plus noble des sentiments, la pitié pour le malheureux. Leurs statuts érigèrent en principe l'établissement d’une étroite solidarité entre leurs membres, et à l'esprit de liberté, qui, grâce à elles, se réveilla et se répandit, on vit s'allier le dogme touchant de la charité. C'est ce qui distingue un document du plus haut intérêt, les statuts de la gilde de Valenciennes , dont nous ne possédons plus, il faut le regretter, qu’un texte en vieux français, traduction aus ( 715 ) faite en 1275, par maître Hugues Cabes et Alexandre du Pont, sur l’ordre du magistrat de cette ville. Rédigé avec peu d'ordre, mais avec une extrême naïveté, ce texte pré- cieux jette une vive lumière sur l’organisation des gildes au milieu du onzième siècle (19). Située au bord de l'Escaut , au centre d’un pays extrème- ment fertile, à proximité de plusieurs cités épiscopales, Valenciennes s'était élevée au rang de forteresse et de marché de premier ordre. Son palais royal, où les Carlo- vingiens avaient mainte fois séjourné, s'était transformé en un château dont le comte de Flandre, Baudouin V, s'empara à main armée en l'an 1005 et qui resta au Hai- naut lorsqu'une guerre éclata entre la comtesse Richilde, veuve de Baudouin VI, et son beau-frère, Robert dit le Frison. Si Richilde parvint à conserver Valenciennes , cela tint sans doute aux obligations que les notables de cette ville, réunis en confrérie sous le nom de Charité, avaient contractées envers elle. Les statuts de la confrérie dataient, en effet, des premières années de son règne : « Chest fait, » y est-il dit, « et ottryet du consentement du conte Bau- » duin et de la contesse Richeldis et d’Anselin (20) et de » tous les seigneurs de cheste ville. » Ils remontent done au delà de l’année 1067, époque de la mort de Baudouin. La confrérie était principalement composée de mar- Chands, profession qu’il fallait exercer pour en devenir le prévôt ou chef suprême; en vertu d’une concession de Baudouin et de Richilde, si l’on trouvait un négociant qui ne s'était pas fait recevoir au nombre de ses membres, la Confrérie pouvait opérer la saisie de tout ce que l’on trou- vait sur lui et en boire la valeur. Mais les gens de métier, tels que les boulangers, les cabaretiers, les tailleurs, les foulons, ete., ne pouvaient s’affilier à la gilde qu’à con- ( 714 ) dition de renoncer à leur état et de donner 22 muids de vin. Le droit d'entrée ordinaire s'élevait à 15 deniers, et chaque année, le jour de la Pentecôte, tout membre payait un denier pour les messes que l’on disait le jour de Saint- Pierre et le jour de Saint-Nicolas. La direction de la confrérie appartenait à un praepositus ou préposé, en français prévôt, qui rendait la justice avec l'aide de douze « bons frères, » choisis par l'association , et de douze autres personnes, que les douze premiers pouvaient désigner pour juger avec eux. Ces vingt-cinq élus ne pouvaient refuser d'accepter leur mandat, s'ils ne voulaient encourir une peine pécuniaire s’élevant à 5 sous. Défense était faite de leur désobéir, sous peine d'une amende de 4 deniers. Si le prévôt s’absentait , il était rem- placé par le maire, c'est-à-dire l'officier du prince. Il y avait, en outre, un doyen, un chancelier, un aumônier, des huis- siers et des ministres ou serviteurs. Tous ces dignitaires, sauf l’aumônier, devaient se trouver les premiers aux réu- nions. Le premier chancelier, Tisser ou Tissier, et le pre- mier aumônier, Obert, furent nommés à vie. Les statuts de la Charité stipulent en leur faveur certains avantages, notamment un traitement annuel, qui s'élevait à 8 sous pour le chancelier, à 2 sous pour l’aumônier. La confrérie possédait une maison de la Charité, où se tenaient les « communs conseils » ou séances générales de l'association et les plaids ou séances judiciaires. C'était là aussi que le prévôt donnait audience et que les régals et autres fêtes avaient lieu. On ne pouvait venir armé aux réunions , ni avoir sur soi autre chose qu’une vergille ou petite canne. Défense était faite d'y introduire des enfants ou des valets, afin que l'assemblée fût à la fois plus pai- sible et plus intime. Les pauvres n'étaient pas oubliés, Car ( 745 ) il était prescrit de leur distribuer, chaque fois, le dixième de ce qui était bu par les frères. D'autres articles concernent spécialement la répression des querelles. On s'efforce de les prévenir, d'en atténuer les conséquences. On punit celui qui se plaint sans motif, celui qui, ayant fait une plainte, n’y donne pas suite, ou se refuse à embrasser un confrère. Si un frère en frappe un autre ou lui fait « vergogne et honte, » l’un et l’autre se procurent des témoins et le coupable doit en donner Satisfaction ou quitter l'association. A défaut de témoins, le plaignant invite la partie adverse à déposer sous la foi du serment et en fait ensuite autant. Toujours on com- mence par essayer de réconcilier les deux adversaires; on ne recourt qu’en dernier lieu aux mesures de rigueur : la grande peine, c’est l'exclusion de la société. Tous les membres sont tenus d'assister aux obsèques d'un confrère et de conduire son corps, s’il le faut, jus- qu'à trois nuits (ou trois journées) de distance; le simple habitant de la ville (vilains) peut, s’il en a exprimé le désir, être conduit à sa dernière demeure comme un frère de la Charité. Les honneurs funèbres rendus aux frères reviennent de droit à leurs femmes lorsqu'elles meurent avant leur mari, aux veufs et aux membres n'ayant pas été Mariés. Ainsi, à l'heure de la mort, une égalité presque complète règne dans la confrérie, sans distinction d'âge, ni de sexe. De plus, chacun, s’il en est requis, est tenu d'en- sevelir le membre qui vient de mourir ou de veiller près de son cercueil. L'assistance mutuelle qu'ils se prêtaient à Valenciennes, les frères se la devaient au dehors. En cas de nécessité, ils Sont astreints à rester ensemble, au moins pendant un certain temps. Si les marchandises de l’un d’eux sont saisies Kb VC sans qu’il y ait de sa faute, tous ceux qui se trouvent auprès de lui en ce moment doivent contribuer à l’indem- niser, à proportion de ce qu'ils emportent avec eux. Si un chariot se brise, si un cheval refuse d’avancer, l'assistance des frères peut toujours être réclamée. Ici la gilde ne forme pas encore une véritable société politique, mais elle en renferme une en germe. Que le cri de commune parte d’ailleurs, il aura du retentissement à Valenciennes et, grâce à ces marchands habitués à se voir, à se concerter, à agir en commun, tout y sera préparé pour une meilleure organisation de la cité. C’est, en effet, ce qui se réalisa dès l’an 1114, c'est-à-dire un demi-siècle envi- ron après la mort de Baudouin VI. En retour de grands sacrifices d'argent faits pour la défense des droits du comte Baudouin II (de Hainaut), la ville de Valenciennes obtint alors une charte des plus intéressantes et des plus libérales, un diplôme qui constitue le plus ancien et le plus beau monument des libertés communales dans l’ancien comté de Hainaut (21). Les principes qui dominent dans la charte de la Charité de Valenciennes se retrouvent dans les premières lois de la ville d’Aire, qui furent sanctionnées par le comte de Flan- dre, Robert dit de Jérusalem, entre les années 1095 et 1110. Mais ici , s’il y a encore trace d'assistance mutuelle, on ne parle plus de fêtes, de réunions; le point essentiel est la répression des délits portant atteinte à la paix et à la tranquillité publique. Après la mort de Baudouin VI, la Flandre est devenue un théâtre de luttes continuelles, devant lesquelles l'autorité de Robert le Frison et les pré- dications d’Arnoul de Soissons s'arrêtent impuissantes (22). La classe bourgeoise, débordée par l'anarchie féodale, resserre les liens qui l’'unissent, et au déchainement des wg GEET Reeder oeaan gege A KEE) colères qui grondent autour d'elle, oppose des mesures pleines à la fois d'énergie et de sentiment. Alors que tout ailleurs est divisé, elle décrète la concorde. Elle adopte pour désignation le doux mot d’Amitié, et ceux qui la composent prennent le beau nom d'amis. La transforma- tion de la vieille gilde est complète. Proserite par Charle- magne et Louis le Débonnaire, suspectée à Thiel, régle- mentée à Valenciennes, à Aire elle domine. Elle protége la vie et les biens de ses membres, non-seulement à l’inté- rieur de la ville, mais aussi à l'extérieur, et, au besoin, si les juges de l’Amitié le réclament, le comte de Flandre lui-même ordonne la destruction de la maison d'un ennemi de l'Amitié, première application connue de ce droit d'ar- sin, si célèbre dans les annales de la Flandre. Tous les articles de la charte d’Aire sont remarquables : se borner à les analyser, ce serait en affaiblir le sens et la portée. « Ceux qui appartiennent à l’Amitié d’Aire promettent, par foi et par serment, de secourir leurs frères de Amitié en tout ce qui est juste et honnête. Si l’un d'eux commet contre l’autre quelque délit en parole ou en action, le lésé n’en prendra pas vengeance par lui ou par les siens, mais il portera plainte à l'officier du comte ou au chef de l'Amitié, selon que l'affaire sera de la compétence de l’un ou de l’autre, et le coupable amen- dera le délit selon l'arbitrage de douze juges choisis > t VW SS y v Yv We » Si celui qui a causé le dommage ou celui qui l'a subi, après trois avertissements successifs, ne veulent pas se soumettre à la décision des juges, ils seront exclus de l'Amitié comme méchants et parjures, et leur avoir sera adjugé au comte et au châtelain, sauf trois livres qui seront payées comme amende à l'association. » v v sg e S v“ Yy v Yy VY yv w vov v v a y v w © y Se WM y w ( 718 ) » S'il s'élève quelque tumulte dans la ville, le mem- bre de l’Amitié qui aura entendu le bruit et ne sera pas accouru pour intervenir de tout cœur, payera une amende de 100 sous. » Celui qui injuriera honteusement son ami de l’Amitié payera 5 sous à l’Amitié et à Pami insulté. Si l'amende n'est pas payée dans les huit jours, elle sera portée au double; la seconde semaine elle sera triplée; enfin, le coupable récalcitrant sera déclaré parjure. > Si quelqu'un tue son conjuré, il aura quarante jours pour amender ce meurtre, selon la décision des juges, et pour satisfaire les parents du défunt. Il faudra at- tendre l'expiration de ce délai pour tirer vengeance du crime et chasser le meurtrier de l’Amitié. Tous les amis doivent accepter le jugement prononcé, sous peine d’être déclarés parjures, et si les douze l’ordonnent, le comte et le châtelain détruiront la maison du criminel. » Les chevaliers et les vavasseurs devenant membres de l'Amitié et qui auront consenti, à la suggestion du chef de Amitié, à payer avec la ville les tailles et les exac- tions, seront considérés comme étrangers s’il commet- tent un vol. En outre, il sera interdit de leur vendre et de les loger, sous peine, pour le délinquant, d'une amende de cinq sous au profit de l’Amitié, et d’une indemnité en faveur de la personne lésée par le vol. » Une peine semblable est comminée contre celui qui, se fiant sur le nombre de ses parents, injurie ou mal- traite un membre de la gilde. » L'étranger qui blesse ou tue un ami et parvient à s'échapper sera, s’il est repris plus tard, présenté au chef del Amitié et jugé par les douze. S'il est tué ou blessé lors de son arrestation, le comte ne pourra rien réclamer pour w- wë ` v v Yy . E oct PU AS DRE. E. WE OK Des | v v e v v y ( 749 ) ce fait, et celui qui s’éloignera afin de ne pas coopérer à cette arrestation, payera 20 sous à l’Amitié et 40 au comte et au châtelain. » Tous ceux qui viendront au marché, sauf les homi- cides , pourront arriver et repartir en pleine liberté, à la seule condition de demander des trêves au chef de l’ Ami- tié. Mais l’homicide doit être arrêté sur-le-champ. » Siun membre de l’Amitié est dépouillé ou privé de son avoir de quelque autre manière, et s’il est sur les traces de ce qui lui a été enlevé, il ira se plaindre au chef de Amitié. Celui-ci, après avoir convoqué les amis, ira à leur tête à la recherche des objets volés jusqu’à la dis- tance d’une journée de marche pour l'allée et le retour. Celui qui ne se rend pas à cet appel payera une amende de 5 sous. Si le coupable n’est pas de l’Amitié et refuse toute restitution, le chef de l’Amitié, après avoir entendu la plainte du lésé et ouvert une enquête, interdira toute communication avec lui. » Si quelque membre a sa maison brûlée, ou si, tombé en captivité, il doit payer pour sa rançon la majeure partie de son avoir, chacun des amis donnera une pièce d'argent à Tam? appauvri. » Le droit de l’Amitié ne détruit pas le droit du comte et réciproquement. De quelque manière qu’un ami en lèse un autre, c’est la loi de l'Amitié qui détermine la peine (23). » Il a certainement existé de nombreuses institutions de cette législation caractéristique. A Lille, à Dixmude, peut- être même à Gand et à Bruges, la commune a porté le nom d’Amitié (en flamand de Minne) (24). Le premier des magistrats lillois, celui qui remplissait le rôle de bourg- mestre dans la capitale de la Flandre wallonne, ne s’appe- lait-il pas le ruward ou gardien de l'Amitié ? ( 720 ) A l'heure où se formulaient, dans les termes poétiques que nous venons de rencontrer, les aspirations de nos an- cêtres, la révolution communale s’opérait de toute part et, dans nos provinces, avec une assez grande rapidité. Par- tout où le négoce était possible, partout où il y avait un port, un marché, un certain mouvement d’affaires , il se formait une classe nouvelle qui se distinguait à la fois de la caste féodale et de la caste servile. C'était celle des bour- geois, autrement dite des marchands, appellations qui étaient quelquefois employées indifféremment, comme dans les lois municipales de Fribourg en Brisgau, de Fan 1122, où l’on voit que les bourgeois de cette ville de- vaient s’en rapporter, quand la solution d’une affaire était douteuse, à la coutume et à la loi des marchands et prin- cipalement de ceux de Cologne (25). Le bourgeois, le marchand n'était pas seulement un homme dévoué au triomphe d’un nouvel ordre d'idées politiques; non-seulement il réclamait le droit d’être jugé par ses pairs, de choisir ses magistrats, de ne payer que des taxes régulièrement établies, de n’être assujetti qu'à des peines déterminées et graduées, mais il vivait dans un intérieur dont les bases étaient tout à fait différentes de celles de la famille germanique. A l'inégalité existante entre l’homme et la femme, les bourgeois opposèrent l’établis- sement d’une étroite communauté entre les époux et de la parité des avantages accordés au conjoint survivant sans distinction de sexe; à l'exclusion des filles de la succession des fiefs et des biens censaux, elle substitua l'assimilation complète des sœurs aux frères. En un mot, à côté de la famille antique, où le père, l’ainé, le plus fort étaient tout, où la femme, la fille, le moins âgé étaient sacrifiés, elle éleva la famille bourgeoise, la famille moderne. er» Au commencement du douzième siècle, nous trouvons deux mentions de gildes et d'hommes des gildes trop curieuses pour ne pas être relevées. L'une est l'envoi au secours de la ville de Cologne, par le duc de Basse- Lotharingie, Henri de Limbourg, en 1106, d'une troupe armée formée d'hommes de gilde , de gelduni (26); l’autre, c’est l’organisation à Anvers, par le célèbre Tanchelme ou Tanchelin, d’une confrérie (gilda) à la fois politique et religieuse, subissant avec enthousiasme l’ascendant de ce prédicateur (27). Là nous voyons apparaître pour la pre- mière fois le germe de ces corps militaires qui portèrent ensuite le nom de serments; ici se manifeste de nouveau l'alliance intime de la religion et de la politique. Le nom de gilde fut souvent donné à des communes ou à des populations organisées communalement; mais, en réalité, la vraie commune différait de l’ancienne gilde, parce que tous les habitants pouvaient y être reçus. Les gildes, au contraire, comme nous le voyons par l'exemple de la Cha- rité, de Valenciennes, et celui de la Hanse de Londres, n'admettaient pas dans leur sein ceux qui ne renonçaient pas à certains métiers. A mesure que les artisans virent croître leur aisance et leur nombre, les gildes revêtirent un Caractère plus aristocratique et eurent de rudes épreuves à supporter. La plupart disparurent ou se trans- formèrent. Du temps de Jacques de Guyse, la confrérie valenciennoise dont Richilde et son mari avaient sanc- tionné l'existence, la confrérie de la Halle, comme cet auteur l'appelle, avait cessé d'exister (28). A Saint-Omer, côté de la vieille ghildhalle il s'en éleva une nouvelle, qui, en 1248, fut placée sur le même rang que l’ancienne et très-probablement l’absorba bientôt (29). Ne nous étonnons pas de ne retrouver que de faibles 2% SÉRIE, TOME XXXVII. 47 (722 ) vestiges de ces institutions si curieuses et si fécondes. Elles avaient prêché la concorde, la charité, la gaieté, lorsque le ciel était triste et couvert de nuages. Quand l'horizon s'éclaireit, quand la société commença à respirer, la nai- veté des statuts des premières gildes parut étrange. D’ail- leurs les passions humaines avaient plus d’une fois donné un éclatant démenti aux théories, les événements avaient provoqué des haines séculaires entre ceux que les lois nou- velles voulaient unir et associer. D’une part, déchirées par la discorde, amollies et corrompues par la prospérité; d'autre part, préoccupées de questions financières, absor- bées par de grands travaux ou des luttes politiques, les bourgeoisies du moyen âge oublièrent et négligèrent leurs origines. Faut-il s'étonner si l’on en vint à dédaigner ces vieux titres si poétiques dans leur langage et leurs aspira- tions, et qui constituent, en quelque sorte, l’une des pre- mières assises de la législation des sociétés modernes? NOTES. (1) Le mot gelda reçoit la signification de taxe dans ce passage de l'his- torien anglais Henri de Huntingdon : Hoc anno (scilicet 1119) pro neces- silatibus regis, geldis creberrimis et exactionibus variis Anglia com- pressa est. Historiarum l. VIH (2) Tome ter, pp. 287 et suiv. de l'édit. de Bruxelles (1840, in-12). Celui de nos écrivains qui s’est le plus occupé des anciennes institu- tions de la Flandre, Raepsaet, a parlé des gildes, mais n’en a nullement entrevu l’origine. Après avoir avancé que les propriétaires des anciennes villae romaines devinrent juges et administrateurs de tous les colons libres et censitaires et de tous les serfs et affranchis établis sur les fonds (725) de leurs villae et de leurs dépendances, transformées en « seigneuries et enclaves, » il ajoute : « Les habitants de ces enclaves, distribués par cantons ou maneria , servaient, individuellement et collectivement, une redevance au proprié- taire; et chaque manerium ou canton de contribuables était régi par des règlements ou coutumes assortis aux besoins, à la situation et au caractère de ses habitants. » Cette redevance s'appelait en langue tudesque et encore aujourd’hui en flamand un geld, qu'on a latinisé par le mot geldum; et tous les colons d'un canton ou d’une enclave, collectivement, étaient connus sous le nom de gelde , gilde, en latin, gilda, gildonia, et, individuellement, sous celui de gildones ….» I] en était de même des bourgs; tous les habitants du bourg de- vaient au seigneur un geld, qu'on Kass Siche gium, pour le distinguer de la redevance foncière, et après q tants des campagnes eurent été reçus dans I State avec le droit d s continuer de suivre leurs pré- cédentes lois et coutumes, mais à la charge de servir une redevance au peue, du Fours: é tous ceux Gei servaient en ninin la méme rede- vance é g » (OEuvres, t. V, Les PP. 557 et 558.) Ce sont là, il faut l'avouer, des erreurs aussi étranges que peu compré- hensibles (5 De ti ldonia invi j tibus, ut nemo facere Praesumat. Alio vero os de illorum gëtt, aut ge incendio, aut de naufragio, quamvis convenientiam faciant, nemo in hoc jurare prae- sumat (Pertz, Monumenta Germaniæ historica , Legum t. 1, p.57). ) De conjurationibus et conspirationibus ne fiant, et ubi sunt inven- tae destruantur (Ibidem., p. 7 (5) De conjurationibus servorum quae fiunt in Flandris et Mempisco et in caeteris maritimis locis, volumus ut per missos nostros indicetur dominis servorum illorum ut constringant eos ne ultra tales verdengt tiones facere praesumant. Et ut sciant ipsi eorundem servorum dom quod cujuscumque onjurationes facere issus rint postquam eis ec nostra jussio Genie indicata , bannum nostrum , id est sexaginta solidos, ipse dominus persolvere PE (Ibidem, p. 250). (6) L'abbaye de Saint-Nicolas, de Furnes, considérait comme un privi- lége le droit d’être placé sur le même pied que les habitants du pays de Furnes au sujet des incendies « occultes, » c’est-à-dire des incendies sur- venant sans que l’on en connût la cause; pour jouir de cet avantage, elle devait contribuer, à proportion de la valeur de ses propres biens, dans (724 ) l'indemnité qui était payée à d’autres dont le feu avait ravagé les pro- priétés. C'est ce que déclarent deux chartes de l’année 1241 : l'une datée du 13 décembre et émanant du comte Thomas et de la comtesse Jeanne; l’autre datée du même mois et émanant des échevins et coratores (keur- heeren) du pays de Furnes (Chronicon et cartularium abbatiae Sancti icolai Furnensis, pp.99 et 195) Quant aux épizooties, celles qui décimaient les troupeaux de moutons provoquèrent l’établissement , dans le même territoire, de ce que l'on appelait l’hamelingh ; on employait à compenser les pertes résultant de la mort d'animaux de l'espèce. En 1292, l’abbaye dont nous venons de parler protesta énergiquement qu’elle en see de temps immémo payé sa part, et sa réclamation fut admise par a bailli, ek? échevins o keurheers du pays de Furnes (Ibidem , p (7) Ces gildes sn mentionnées par merde ia illustrata , Hi p355 pes . de 1752), et, d’après lui, par Raepsaet, OEuvres com- plèles, t. V, p. 544. Elles existaient depuis très-longtemps, car il en est déjà question dans une charte concernant Warneton: Appendices urbanae vel villae, vel seit quas gildas vocant (Mabillon, De Morinis et Mori- norum rebus, D'après les rd que M. Desimpel, de Warneton, a bien voulu me transmettre par l'intermédiaire de M. le ch" Huygttens, ces gildes formèrent longtemps autant de divisions territoriales ou cadastrales, dont les véritables noms étaient : Reebrouckgilde, Sleutsebeegghilde , Bussche- ghilde, Heyrbeyerlinckghilde, Tree ynekghälde, Wemaerghilde è el Houtteghilde, noms qui diffèrent légèremen rus et qui, aujourd'hui, sont tout à (ie inconnus des habitants de la loca- lité. M. Desimpel à bien voulu, dans le croquis reproduit à la fin du pré- sent travail, en esquisser les limites, d’après les anciens terriers de là commune. On y voit que les gildes comprenaient presque toute la partie rurale de Warneton, dont la partie agglomérée , régie jadis par des lois spéciales , par des franchises , formait ce que l’on appelait la Bourgeoisie. M. Desimpel n’admet pas l’origine que je donne ici aux gildes de Warne- ton; je persiste néanmoins à y croire. La division territoriale en gildes west qu’un souvenir de l’ancien fractionnement de la population en asso- ciations portant le même n (8) Augustin Thierri a PR le texte des statuts de l'ouvrage cité plus haut (Z. c., pp. 168 et suiv.); mais l'ouvrage le plus curieux à consulter à ce sujet est celui de Thorpe, intitulé : Diplomala- rium Anglicum aevi Saxonici (Londres, 1865, in octavo), où l’on en trouve un très-grand nombre, qui étaient pour la plupart inédits. = HEI Jans ( 725 ) (9) M. Piot a publié (Cartulaire de l'abbaye de Saint-Trond, t. Ier, p. 154) lacte d'institution de la confrérie de Saint-Euchère, mais à la suite d'une confirmation scellée par l'abbé Nicolas en 1192. Cette charte étant très-importante à cause de son ancienneté, puisqu'elle remonte à lan 1050 environ, nous la reproduisons ici, telle que nous l'avions copiée sur l'original, dans le chartrier du monastère. nomine sancte et individue Trinitatis, Notum sit omnibus tam pre- sentibus quam futuris fidelibus quomodo nos, qui specialiter censemur servitores fratrum, preter cetera in unam convenimus societatem, in honorem et memoriam beati Eucherii, Aurelianorum gloriosi antistitis, a Deo nobis constituti specialis protectoris et patroni. Hec igitur societas et fraternitas in remedium animarum nostrarum à servitoribus hujus loci nata cepit exordium, faventibus pie memorie abbatibus Guntranno et successore ejus Adelardo, roborata hactenus a fratribus monachis qui idem societati presunt et intersunt, cujus tenorem et conditionem, ne quis temere infringere audeat, carta et atramento impetravimus roborari. Con- venientibus nobis, singulis annis, in festivitate ejusdem protectoris nostri, unusquisque capitis sui censum persolvat unum denarium, qui ad ejusdem nostre societatis mee (pertinet ?) fructus. In secundo conventu, qui fit ebdomade pascali quinta feria, ex communi libram deferemus, cujus tertia pars ecclesie, Mëwece cedet in elemosina fratrum. In depositione uniuscujusque fratris nostri, si ante sexta obierit, campane pulsabuniur, sin in crastinum differentur. Crastina que erit sepulture, si tempus et aer patitur, conventus fratrum ab ecclesia funus prosequetur et expleta com- Muni missa proximum a cimiterio fratrum locum sepulture occupabimus. Expleto funere, statim unusquisque fratrum persolvet obolum , de quibus xxx dierum exequiales misse constituentur ; de reliquo duo solidi ecclesie deputabuntur, ita dumtaxat ut tertia pars custodi, reliqua cedat decano in elemosina dominorum nostrorum. Sed et de reliquo fructu nostro tribus ebdomade diebus tres pro defunctis missas fieri censuimus. His ita pro tem mpore constitutis, placuit ut bujus nostre societatis con- ventus nusquam extra ambitum et domos servitorum celebretur, nec decanus ex ea nisi servitor constituatur, eo quod specialiter nostra est. Qui decanus electus a decano claustri statuetur, nec sine ejus nutu et arbitrio quicquam faciendum arbitramur. Si quis extraneus admitti petie- rit, non nisi ex consulto servitorum admittetur, et hoc quidem nec prece, nec precio, sed ex solo presumimus dominorum nostrorum servitio, a quibus tanquam a capite cetera membra pendemus. Verumtamen ne cui ( 726 ) tam ENEE et 7. appetenda societas vilescat, discat tone in x marcas expendimus , et quicquid deinceps habere possumus, in reme- dium animarum nostrarum tertie partis sanctam ecclesiam residue domi- nos nostros semper heredes relinquemus. (Original dans les Archives de l’abbaye de Saint-Trond.) (10) are des historiens de France, t. VI, p. 649. (11) Bondam, Charterboek der hertoghen van Gelderland, p. 65. (12) Fes homines jam dictum mercatum visitantes , euntes , nego- ciantes atque commorantes, eundo et redeundo talem obtineant pacem qualem juste detinent negociatores in mercato Cameracensis civitatis. debent qui illud Cameracense mercatum temerarie inquietaverit (Miræus et Foppens, Opera diplomatica, t. I, p. 148) (15) Omnes ibidem (c’est-à-dire à Lo negociantes, tali pace et lege siècle , les négociants avaient à Cambrai une législation spéciale, des cou- tumes ou lois distinctes. (14) Voyez un diplôme du 20 mai 950 dans Bondam (l. c., p. 59). Le roi s'y sert de l'expression : nova atque lapidea in eodem loco civitate (c’est-à-dire : la cité nouvelle et de pierres, située en cet endroit). Ne semble-t-il pas indiquer par : que Thiel venait d’être entouré de murs” (15) Le 14 avril 972. Bondam (l. c., p. 69). On parle alors de Thiel comme d’une curtis imperatoria. (16) Chartes du 4 octobre 998 et du 8 février 1000, dans Quix (Codex diplomaticus Aquensis, t. I, pp. 15 et (17) Ce passage d’Alpert, que lon trouvera dans le grand recueil de Pertz (l. c., Scriptorum t. IV, p. 748), a trop d'importance pour que nous n’en donnions pas la reproduction complète. Après avoir fait connaître les torts que les habitants de la Hollande causaient au commerce s'exerçant par le Wahal, il ajoute : Unde mercatores Tielenses , qui etiam reng prae caeteris facile ad quascumque querimonias excitandas accenduntur, crebro regem interpellabant , ut pro sua gratia eos ab Se injuriis defendat. Si id non faciant, neque se causa negotiandi in insulam (scilicet Britanniam) ( 727 ) venere, neque ad se Britannos commeari posse, et ideo vectigalia sibi ut martla, plenius provenire non posse dicebant. Set libet pauca, non detrahendo, set ex intimo corde condolendo, hic EE quibus mori- bus et inslitutis isti Tielenses ab aliis viris differant. Homines sunt duri et pene nulla SE BEE judicia non secundum legem, sed secundum voluntatem decernentes, et hoc ab imperatore karta traditum et confirmatum dicunt. Si quis quicquam ab alio mutuum sive accommodatum acceperit, et ille ad constitutas indu- cias rem suam repetit , comata animo inficias it, et sine mora se nihil ab ipso accepisse jurat. Et si quis deprehensus fuerit PAS perjurasse, a nullo posse redargui confirmant. Si rem quoque una manu tenuerit, si tantilla est ut pugno includi possit, cum altera EE denegabit. Si quis Dei fidelium apud imperatorem intercedat ut haec scelera inter- dicat ne Lot animae colidie pereant, magnam profecto a Deo remune- rationem sibi donandam sperare poterit. Adulterium in culpam non ducunt. Quamdiu uxor tacuerit, virum per nefaria scelera sordescere licitum habent et talia agentem neminem praeter uxorem in synodo interpellere debere. Summo mane potationibus student, et quisquis ibi altiori voce turpes sermones ad excitandum risum et ad vinum indocile vulgus provocandum protulerit, magnam apud eos fert laudem. Siqui- dem ob hoc pecuniam simul co gees unt, et hanc partitam singulis ad lucra distribuunt et ex his quoscunque polus certis temporibus in anno cernunt et in celebrioribus pes Hae sollempniter ebrietati inserviunt. (18) Bondam Ur p. 20). — Les ducs de Basse-Lotharingie ou de Bra- bant, qui exerçaient au nom des empereurs l'autorité sur une partie de la Basse-Allemagne, devinrent les possesseurs de Thiel , à condition de payer un cens annuel de 7 mares aux chanoines de l'église d’Aix-la-Chapelle, Comme le duc Henri Ier le reconnut, en l'an 12925 (Quix,l. c., p. 98). lls conservèrent, jusqu'en 1554, le domaine direct de cette ville et la suze- raineté du Veluwe, que les comtes de Gueldre tenaient d'eux en fief et qu’eux-mêmes relevaient des évêques d'Utrecht. (19) J'en at publié le précieux texte, qui était encore inédit, dans le volume intitulé : De l'origine et des premiers dors nu des insti- lutions communales en Belgique, dans le nord de la France, etc., preuves, pp. 259 et suiv, ; il se trouve aussi De - ouvrage de M. Cellier : Une commune flamande. Recherches sur les Larry politiques de la ville de Valenciennes (1875, in-8°), pp. 285 et suiv. (20) Cet Anselin n'est autre que le zg Anselme de Ribeaumont, Châtelain de Valenciennes, qui joua un grand rôle à cette époque et mourut en Syrie, pendant la première croisade. ( 728 ) (21) Une Charité semblable à celle de Valenciennes a existé à Arras, ville qui eut pour seigneurs les comtes de Flandre jusqu’à la fin du dou- zième siècle. Elle avait été fondée par la gilde des marchands, qui se confondait si bien avec le municipe même, que C'étaient les échevins qui donnaient les 24 sous dits de la chandelle, payés tous les ans à l'autel de Saint-Vaast pour la gilde. Les monnayeurs et les métiers avaient aussi leurs Charités particulières; mais, dès le milieu du XII siècle, celles des métiers allaient en déclinant, sauf les Charités des « parmentiers » ou tapissiers et des cordonniers : Verum, dit un ancien chroniqueur d'Arras, appelé Guiman, sunt uaedam in ecclesiis beneficia et consuetudines, quae propriè ac specia- liter carilatis nomen retinent, ut sunt illae quae dicuntur ministeria- lium , quibus de suå devotione obligant caritates, quià singulis debent annis sancto Vedasto de sud caritate et confraternitate : parmentarii quatuor solidos , sulores decem, qui utrique suum debitum solempniter allare gece Vedasti deferunt. Porro guilda mercatorum debet viginti quatuor solidos qui dicuntur de candelå, quos scabini solvunt. ando mercatores ad suam consident caritalem, si cellerarius vel thesaurarius illùc mittunt, uterque ex consuetudine debet habere dimi- dium vini sexlarium. In caritate vero monetariorum thesaurarius dimidium vini sextarium Multae fuerunt hujus modi caritates , sed quos in aliis refrixit in his viget (Tailliar, Recherches pour servir à l'histoire de l’abbaye de Saint- Vaast, p. 439). On remarquera qu'à Arras comme à Valenciennes il s'opérait, par les soins de la gilde ou de la charité, des distributions de vin; mais, dans la première de ces villes, le trésorier de l'abbaye de Saint-Vaast en obtenait e part. Toutes ces institutions bourgeoises, moitié commerciales, moitié charitables, s’altéraient déjà au XIIe siècle, preuve évidente que leur existence datait de longtemps. (22) On se tromperait étrangement si l’on supposait qu'après les vic- toires de Robert le Frison sur Richilde,et après les deux séjours d’Arnoul de Soissons en Flandre, le calme s’est établi en Flandre. Des faits et des textes nombreux attestent, au contraire, que le pays continua à être très-agité. C'est alors que l'institution des communes, amitiés, paix, fit le plus de progrès; c'est à cette époque notamment que la commune de Cambrai, déjà établie et supprimée une première fois, reparut plus forte et plus puissante. (23) Augustin Thierry, Récits des temps mérovingiens, t. I, p. 195. (24) A Gand la commune possédait un pré nommé le Minnemersch (729 ) (Diericx, Mémoires sur la ville de Gand, t. IL, p. 205); à Bruges un étang conserve encore le nom de Minnewater (Delpierre, Album pittoresque de Bruges, p. 42). (25) La charte de Fribourg est imprimée dans Gaupp, Deutsche Stad- rechte des Mittelalters, t. Il, p. 19. — Croirail-on que Raepsaet, qui était cependant un flamand de la vieille roche, ne voulait pas admettre que la Comannen gulde, à Gand et à Audenarde, n’était autre chose qu'une association de bourgeois voués au commerce? Il ajoute, sur un ton triomphant ( c., p. 548) : « Jamais les corps de métiers n’ontété com- » pris en Belgique sous le nom de Coopmans gulde ou gilde des mar- » Chands et bien moins été confondus avec la poorterye.. » Il ne s'aper- coit pas que c’est lui qui est dans l'erreur, qui confond deux fractions bien distinctes de la bourgeoisie : les marchands et les corps de métiers. Mais, avec une légèreté qui étonne chez un homme si grave, il soup- conne ce nom de Comannen de venir des Coumains, o peuple Hun établi dans la Moldavie, » et d’avoir été apporté en Flandre par les croisés qui avaient suivi Saint-Louis dans sa malheureuse expédition en Égypte (l. c., p. 547). Et cela pourquoi? Parce que les Coumains, d'après le sire de Joinville, avaient l'habitude de mêler leur sang avec celui de leurs amis, qui devenaient dès lors leurs « frères de sang, » et que la commune était une institution dont la principale base était l’aide mutuelle que ses mem- bres devaient se porter. Voilà la base fragile sur laquelle Raepsaet édifie Son systèm Ge Annalista saxo, cité par Ernst (Histoire du Limbourg, t. H, 217) (27) Voyez la lettre remarquable écrite à ce sujet par le chapitre d'Utrecht (Miræus et Foppens, Opera diplomatica, t. IEE, p.567 (28) Hic Balduinus cum Richilde uxore propria órai con- fraternitatem phalae Valencenensis, quae per magna duravit tempora, et eam propriis sigillis firmaverunt, prout patet in chartis phalae Valencenensis (Jacques de Guyse , Annales du Hainaut, t. XI, p. 24, édit. de Fortia d'Urban). Ce passage curieux nous apprend que l'on conserva longtemps les statuts de la Charité de geste munis des sceaux de Baudouin et de ver: et que cette gilde, la confrérie de la Halle comme Jacques de Guyse l'appelle, avait existé (duravit) pendant une longue période; elle n'existait donc plus du temps de cet écrivain (29) Ordonnances des rois de France de la troisième race, t. IV, D. Zon. H est évident que le mot ghildhalle ici ne représente pas un édifice, la Halle de la er, mais l'association qui se réunissait dans cet édifice , la gilde de la halle Fm a Ëm Ki dree \ Ze H N Se SEN 5 E #° LE ` 3 Has GE ET £ NEDLA 77 WARNETOY. IV H d Lë { © AA ONE? \ Sn \ Ps IX \ \ SEN LK H E à i d As Ki A H Ki BS i Kg l y Li l ÊN. | 3 LÉGENDE DU PLAN. ——"—.— Limite de l'ancien Warneton, qui, depuis 1849, forme deux communes : | WARNETON et PLOEGSTEERT. limite E LE tla ege? au sud de la Lys nom depuis que la Lys forme de ce we S eat eech réunie à ep Fran la Ge nce réuni D Reebrouck g XII. P Jinghien et de Houplines qui ont été HI. Sien! jasa à Warneton en 4665 (?). F a Gent ghilde. 1. Bas-Warneton, dans la châtellenie de pie eyerbeijerlijne gh 2. Wytschaet S VI. Wapperlijnek ghitde. 3. Messines. S VIF, Houtte ghilde. é. Wuive en i 1 VII. Wemaer ghilde. 5. Neuve- vele ' ac F IX, Seigneurie de la Grande Haie, relevant de la châtellenie | 6. Partie pr ral jadis eg de Nieppe, e pres. réunie à Neuve Église X. Partie de la Reebrouck ghilde, | 7. Houplines XI Portis de Toni ani é H d 8. Frelinghien. 9. Deulemont. ( 751 ) L'assemblée a répondu également par ses applaudisse- ments à cette troisième lecture. — M. de Borchgrave est venu ensuite lire le travail sui- vant intitulé : Les premières relations diplomatiques entre la Belgique et les États-Unis, d’après des papiers inédits. Un des premiers soins de Léopold fr. après son avéne- ment au trône de Belgique, fut de faire reconnaitre par les puissances étrangères l'existence politique du pays qu'il était appelé à gouverner. Comme conséquence de cette reconnaissance, la Belgique devait accréditer et recevoir des agents chargés d'établir et d'entretenir entre les divers États et nous des rapports de bonne entente et d'amitié. Ce but ne fut pas atteint immédiatement et il ne le fut pas sans quelque difficulté. Il y avait presque partout des défiances à vaincre, des préventions à dissiper. Les Pays- Bas n'avaient pas désarmé. La diplomatie hollandaise s'efforçait de faire accroire que les succès que nous avions obtenus n'étaient qu’un accident, le résultat du hasard, que la vitalité dont nous avions fait preuve n’était que factice, que nous ne parviendrions pas à nous organiser d'une manière stable et définitive, que nous serions amenés tôt ou tard à refaire avec les Pays-Bas le pacte que nous avions brisé. Là où ce langage était tenu, on ne se mon- trait pas pressé de nous envoyer des représentants diplo- matiques et d'agréer les nôtres. Toutefois ces dispositions passives ne se rencontrèrent point partout. Il y eut des nations qui nous témoignèrent dès les premiers temps une sympathie marquée; parmi celles-ci, il faut citer avec gratitude les États-Unis. La virile République américaine qui avait, elle aussi, conquis D ( 732 ) son indépendance au prix de sacrifices énormes , accueillit avec empressement les ouvertures que lui fit le Gouver- nement belge de nouer avec elle des relations officielles. Le cabinet de Bruxelles envoya aussitôt à Washington le baron Behr, comme ministre résident de Belgique; le président de la République s’empressa d'accréditer M. Le- garé comme son représentant à Bruxelles. Le choix de M. Behr n'avait pas été fait au hasard. H était dù à l'initiative personnelle du roi. Léopold I‘, dont la sagacité pénétrante mesurait à première vue la valeur des hommes qui aspiraient à servir leur pays, jeta de bonne heure les yeux sur lui et eut l’occasion de mettre plus d'une fois ses talents diplomatiques à Fépreuve. Attaché d’abord au conseil d'État, M. Behr avait fait partie de l'administration supérieure de 1814 à 1850, et, après la révolution, il avait rempli, non sans bonheur, Jeux missions, l’une à Londres, l’autre à Berlin, lorsqu'il fut désigné, le 9 février 1832, pour le poste de Was- hington. Les connaissances variées de M. Behr , son coup d'œil exercé, la fermeté de son caractère, les ressources de son esprit fin et délié le rendaient apte plus que personne à remplir les délicates fonctions que le Roi et le Gouverne- ment lui avaient confiées. Aussi, sa mission aux États-Unis réussit-elle, à beaucoup d'égards, d’une manière complète. Je désirerais entretenir un instant la Compagnie de plu- sieurs particularités qui se rattachent à cette mission et qui sont peu ou point connues. Je les puise dans les pa- piers mêmes du baron Behr que sa famille 3 mis obli- geamment à ma disposition. U ne saurait paraître oiseux, du reste, de raconter les efforts que faisaient des hommes de la trempe du baron Behr pour assurer à leur pays, à l'étranger, une position que le temps n’a fait que raffermir ( 735 ) et, aussi bien, certains détails de l'histoire d'une nation aussi intéressante que les États-Unis ne peuvent, même à quarante ans de distance, nous être indifférents aujour- d’hui. Arrivé à Washington le 3 juin 1832, le baron Behr eut, le surlendemain, une première entrevue avec M. Living- Stone , secrétaire d'État, et, le jour suivant, il remit ses lettres de créance au célèbre président Andrew Jackson , celui que ses contemporains ont surnommé le Marius de l'Amérique ,l’Annibal de l'Ouest, e: o vainqueur des vain- queurs de Napoléon. » Ilétait d taccrédité et les relations cordiales qu'il entretint dès cet instant avec la Maison-Blanche ne se démentirent pas un instant. Toutefois les premiers temps de son séjour ne furent pas sans lui donner des soucis. L'agent diplomatique qui, il y a un demi-siècle , était accrédité près d'une puissance européenne, pouvait, sans se donner trop de peine, acquérir des connaissances exactes sur le gouvernement, l'administration et la politique extérieure de ce pays. Tout y était connu depuis longtemps. Quelques livres suffi- saient pour le mettre au fait. Quant à la politique inté- rieure , son séjour dans une capitale où tous les intérêts se croisent et se rassemblent, le mettait à même de S’ini- tier rapidement au jeu des partis et aux mouvements de l'opinion. H n’en était pas ainsi aux États-Unis. Jusqu'en 1852, aucun ouvrage publié par un Américain n'avait donné des détails sur les institutions et les intérêts réciproques des vingt-quatre républiques qui constituaient l'Union amé- ricaine. Quelques étrangers avaient soulevé un coin du voile ; mais comme leurs assertions dépendaient du degré de sympathie que leur inspirait le régime politique qu’ils ( 754 ) appréciaient, on ne pouvait les accepter que sous bénéfice d'inventaire. Il ne suffisait pas d’être à Washington pour combler cette lacune. Washington n'était pas encore une capitale dans la véritable acception du terme. Le chef du Gouvernement y résidait; mais le Gouvernement était dis- séminé dans différents États , exerçant chacun le pouvoir exécutif, judiciaire et administratif de la manière la plus absolue. Washington était un terrain neutre où les mem- bres du Congrès venaient voter sur les affaires publiques conformément aux instructions qu'ils avaient reçues de leurs commettants. C'était à Washington, dit M. Behr, que s’appliquait le pouvoir de cette machine si compliquée composée de vingt-quatre appareils différents ; les rouages étaient au loin, et pour pouvoir les examiner, il fallait se transporter sur les lieux. ‘était donc un terrain tout nouveau que celui où M. Behr était appelé à se mouvoir et il eut d'autant plus de mérite d'en être maître au bout de peu de temps que là aussi certaines hostilités se faisaient jour contre la Bel- gique. En arrivant aux États-Unis, notre Ministre s'était aperçu avec surprise que, malgré l'attitude amicale et bienveillante du Gouvernement à son égard, il existait contre la Belgique et la révolution de 1830 des préventions secrètes répandues plus ou moins dans toutes les classes de la société. En cherchant les motifs de ces préventions, il découvrit que des journaux de New-York nous faisaient une guerre sourde, mais continuelle. Des extraits de let- tres soi-disant écrites d'Europe, des articles tirés des journaux tories de Londres, quelques réflexions perfides jetées comme au hasard, telles étaient les armes qu'on employait contre nous, armes d'autant plus dangereuses ( 735 ) que les journaux de New-York étaient, en général, les plus influents et les mieux rédigés de l'Union et que leurs colonnes étaient comme des arsenaux où les autres rédac- teurs venaient s'approvisionner pour toutes les nouvelles étrangères. De cette manière, un article publié contre nous à Londres était reproduit successivement dans tous les principaux journaux de l'Amérique. La raison de cette antipathie était facile à expliquer. New-York fut fondé et peuplé primitivement par les Hol- landais. Beaucoup de familles hollandaises y existaient et y existent encore, conservant un grand attachement pour la patrie de leurs ancêtres. En outre, le chargé d’affaires des Pays-Bas, M. Martini, résidait dans cette ville et son influence y servait naturellement la cause de son pays tou- jours en état d'hostilité avec la Belgique. Le baron Behr eut à cœur de désarmer cette opposition. Afin d'r parvenir, il jeta les yeux sur les deux journaux les plus influents de New-York : le Courier and Inquirer, le principal organe du parti de la Banque, et l’Albion qui jouait là-bas le même rôle que le Court Journal à Londres. Il résolut de se mettre en rapport avec eux et de les séduire à force de politesses. Il fit donc connaissance avec leurs rédacteurs en chef, les engagea à aller le voir et les invita plusieurs fois à diner. Quand le terrain eut été ainsi préparé, il discuta les griefs faux ou exagérés qu'on arti- Culait contre nous et ce qu’il avait prévu arriva : le ton de ces deux journaux changea insensiblement; il changea si bien que les louanges succédèrent bientôt aux critiques et la correspondance particulière du Courier and Inquirer saisit toutes les occasions pour payer au Gouvernement belge le tribut d'éloges qu'il méritait à si juste titre. J'ai dit que le Gouvernement de l'Union se montrait on ( 756 ) ne peut plus favorable à la Belgique. Quelques hommes distingués, frappés des analogies que présentait la révolu- tion de 1830 avec celle de 1776, partageaient ces sym- pathies. De ce nombre était M. Gallatin, chef du parti modéré, doyen des diplomates américains et une des per- sonnalités les plus éminentes des États-Unis. M. Gallatin soutenait notre cause en toutes circonstances. ig © Chargé par son Gouvernement de négocier dans un délai rapproché un traité d'établissement et d'amitié entre la Belgique et les États-Unis, M. Behr vit accueillir ses ou- vertures avec une extrême faveur. Le général Jackson et M. Livingstone lui déclarèrent qu’ils désiraient vivement conclure avec nous un arrangement conforme aux intérèts des deux pays. Le secrétaire d'État demanda en même temps une liste des principaux produits industriels de la Belgique, afin de pouvoir la communiquer au Départe- ment des finances et recevoir ses observations. M. Behr avait reçu des instructions positives en vue des négociations à entamer. Ces instructions , datées du 2 avril 1852, lui enjoignaient « de régler le plus tôt possible les points préliminaires qui devaient servir de base aux rela- tions des deux pays, savoir : « 1° Les droits des Belges en Amérique et ceux des Américains en Belgique et la protection que leurs Gouver- nements respectifs étaient tenus de leur accorder; > X L’abolition du droit d’aubaine; » 5° Les attributions consulaires et l’extradition réci- proque des matelots déserteurs ; > 4° La protection du pavillon belge. » Les trois premiers points étaient assez explicites pour ne guère exiger de développements ultérieurs; quant au ( 757 ) quatrième, la protection du pavillon, « il devait être réclamé comme une conséquence immédiate de la recon- naissance de notre neutralité. » Ce texte était clair, Il est évident que la protection dont il s'agissait était une pro- tection du pavillon belge considéré comme neutre; car sinon , on n'aurait pu le faire dériver de la reconnaissance de notre neutralité. Une considération qui était indiquée comme devant « plus que toute autre nous faire obtenir la préférence et consolider nos bons rapports aupres des États-Unis, » c'était notre « caractère de puissance neutre maritime. À Fabri de ce caractère, qui ne pouvait être violé sans faire surgir une guerre continentale, et dont ne jouissait aucun autre peuple navigateur de l’Europe, les Américains pouvaient, au milieu des conflits les plus com- pliqués, venir débarquer leurs marchandises dans nos ports, en soigner l’expédition avec la plus grande sécurité et, couvrant de la neutralité de notre pavillon leurs impor- tations et leurs exportations, parcourir les mers avec béné- fice et sécurité. » En présence de ces instructions formelles, le but prin- cipal du traité devait être de fixer de la manière la plus claire et la plus étendue les droits du pavillon neutre. Chaque stipulation en sa faveur servait d'acheminement Pour faire obtenir des avantages commerciaux à la Bel- gique. Les négociations furent entamées sans retard; mais elles n’aboutirent pas immédiatement, par suite de causes multiples inhérentes à la situation intérieure des États- Unis et qu’il peut être de quelque intérêt, semble-t-il , de rapporter ici brièvement. Au moment ou M. Behr débarquait en Amérique, deux questions principales agitaient l'Union : la nomination 2° SÉRIE, TOME XXXVII. ( 738 ) d'un président et la réduction du tarif des douanes. Ces deux questions, qui semblaient indépendantes l’une de l’autre, avaient été tellement enchevêtrées et embrouillées par l'esprit de parti qu’il fallait les examiner de près pour pouvoir les démêler. Depuis 1789, époque où la constitution fut mise en vigueur, jusqu’en 1825, la présidence fut toujours déférée à des hommes dont la réputation politique remontait au jour de la proclamation de l'indépendance américaine. Washington, Adanel, Jefferson, Madisson et Monroe furent successivement placés à la tête de la république, et personne get osé leur disputer un poste qui semblait appartenir de plein droit aux vétérans de la liberté. Mais la race des vieux hommes d'État s’était éteinte avec Monroe, et aussitôt quiconque se sentait ou se croyait la force ou le talent nécessaire pour être chef de parti aspirait à la présidence. La première lutte s'établit, en 1895, entre John Quincy Adams, chef des fédéralistes, et le général Jackson, chef des républicains. Aucun des deux candidats n'ayant obtenu la majorité absolue des suffrages, la Chambre des représentants dut décider entre eux. Elle choisit Adams, quoiqu'il eût obtenu moins de suffrages électoraux que son concurrent. En 1829, Jackson fut nommé directement par les électeurs à une très-forte majorité et une opposition prononcée se manifesta dans le Sénat. Le chef de cette opposition était Henry Clay, homme du plus grand mérite, qui signa à Gand , en 1815, le traité de paix entre les États-Unis et l'Angleterre, qui fut six fois président (speaker) de la Chambre des représentants, qU remplissait, du temps d’Adams, les fonctions de secrétaire d'État et qui, lors de l’arrivée de M. Behr, s'était mis Sur les rangs pour la présidence. ( 759 ) Jusqu'au commencement de l'année 1832, l'opposition évita de contrecarrer ouvertement le Gouvernement ; mais elle lui jeta le gant dans l'affaire du prétendant van Buren, ont la nomination fut annulée à la majorité d’une voix. Dès lors, il y eut guerre ouverte. Le général Jackson, qui aspirait à être réélu président pour un second terme de quatre ans, voyant que ses adversaires se fortifiaient de jour en jour, recourut à deux grands moyens pour aug- menter le nombre de ses partisans. D'abord, il présenta M. van Buren comme une victime de la haine que le Sénat lui portait, à lui, Jackson, en sa qualité de républicain, d'où il tira la conséquence que la nation américaine devait dédommager van Buren en le nommant vice-président. De cette manière, tous les partisans de van Buren, et ils étaient nombreux, devenaient les auxiliaires obligés du général Jackson qui leur promettait, de son côté, l'appui des voix dont il pouvait disposer. En second lieu, il pro- posa le nouveau tarif. Cette question étant assez compli- quée, et se rattachant d’une manière indirecte aux négo- ciations que notre représentant avait commencées, je dois, pour être sûr d’être compris, entrer dans quelques déve- loppements. Pendant la dernière guerre avec l'Angleterre, beaucoup de fabriques s’élevèrent dans les États de Maine, New- Hampshire, Vermont, Massachusetts, Rhode-Island, New- York et Connecticut. Le Gouvernement américain favorisa leur établissement en frappant l'industrie étrangère de droits élevés. Cette mesure toute naturelle et populaire dans son origine, puisqu'elle atteignait spécialement les produits de l'ennemi, était, d’ailleurs, commandée par la nécessité. Il s'agissait de faire face aux frais de la guerre. L'établissement d'un impôt foncier, tel qu'il existe en ( 740 ) Europe, était impossible dans un pays où des millions de bonniers étaient à vendre à raison de 5 francs l’acre, et où des terrains grands comme la Belgique étaient encore à la merci du premier occupant. Quant aux impôts indirects, ils ne pouvaient guère être perçus là où les habitations étaient clair-semées à deux ou trois lieues de distance, car il aurait fallu autant d'agents qu’il y avait de maisons. Restait donc la ressource des douanes. On en usa largement. Des droits de 30, 40 et même 50 p. °% furent établis sur tous les objets de grande consommation. Au rétablissement de la paix, la nation devait s'attendre à un dégrèvement. Il n’en fut pas ainsi. Les habitants du Nord, renommés de tout temps par leur habileté, en donnèrent une nouvelle preuve dans cette circonstance. Grâce à leurs orateurs et à leurs journaux, qui parlaient avec enthousiasme d'un système américain ei de la nécessité d'amortir le plus vite possible la dette, afin que l'Union fût la seule nation du monde qui půt se vanter de ne devoir rien à personne, ils parvinrent, en 1816, non-seulement à conserver, mais encore à faire augmenter les droits d'entrée, de sorte que jusqu’en 1832, les habitants du Midi et de l'Ouest payaient une prime de 40 à 50 p. °/, aux manufacturiers du Nord. Malheureusement pour ceux-ci, l'équilibre intérieur des États-Unis avait naturellement changé depuis quelques années. D’après le recensement de 1810, la population s'élevait à 7,240,000 habitants. Les sept États du Nord y figuraient pour 2,578,000. La Pensylvanie, le Maryland, la Virginie, Delaware et New-Jersey, avec une population de 2,486,000, étaient peu intéressés dans la question, la quantité de leurs produits manufacturés étant à peu près égale à leur consommation. Il restait done pour l'Ouest et le Midi environ 2,576,000 individus dispersés sur une ES CE EEE ( 741 ) immense étendue de terrain et dont un grand nombre n'avaient d’ailleurs pas de voix au Congrès, parce qu'ils habitaient des territoires (territories) qui n'avaient pas encore été élevés au rang d’États. En 1859, il n’en était plus de même. Le recensement de 1830 donnait un résultat de 12,850,000 âmes. Les six États du Nord y figuraient pour 1,950,000. Je dis six au lieu de sept parce que New- York, avec sa population de 1,900,000 âmes, avait séparé ses intérêts d'avec ceux de ses anciens confédérés, et qu’on devait le considérer comme neutre, ce qui portait la force des États du Centre à 5,500,000. Restaient pour l'Ouest et le Midi 5,600,000 dont 5,470,000 habitaient des États et étaient représentés au Congrès. Or, les intérêts de la plu- Part d’entre eux étaient diamétralement opposés à ceux des fabricants du Nord. En effet, les deux Carolines, la Géorgie, la Louisiane, l'Alabama, le Mississipi produisaient le coton, le riz, le sucre et n'avaient que très-peu de fabriques. Le tarif alors en vigueur leur faisait subir un double préjudice. D'abord, ils payaient très-cher les objets manufacturés qu'ils auraient pu recevoir à bon marché de l'étranger, et d'un autre côté, l'étranger exerçait un droit de représailles en imposant les produits américains, parmi lesquels ceux du Midi figuraient pour 9/10. La question des douanes devenait donc une question nationale dans laquelle les intérêts du Nord et ceux du Midi étaient diamétralement opposés. Le général Jackson, qui connaissait la faiblesse de son parti dans le Nord, proposa une réduction du tarif afin de s'assurer les nombreuses voix de l'Ouest et du Midi. I} y eut à ce sujet des discussions virulentes dans les deux Chambres. Les injures, les provo- cations, les voies de fait ont rendu cette session étrange- ment célèbre, ( 742 ) Le mot de séparation y fut prononcé pour la première fois. Une partie des États du Midi déclarèrent formellement qu'ils rompraient l’Union et se constitueraient en répu- blique séparée, si le Nord se refusait à une modification du tarif. L'issue était impossible à prévoir lorsque le cho- léra vint faire trêve à ces débats. Chacun désirant s’en retourner chez soi, un tiers parti, dirigé par John Quincy Adams, l’ancien président, joua le rôle de médiateur. Un compromis fut accepté et le tarif éprouva quelques modi- fications, bien légères, à la vérité, en comparaison des exigences primitives du Sud. La question fut donc ajournée, après avoir ébranlé la République et fait craindre la disso- lution de l'Union. Mais, ainsi qu'il arrive le plus souvent, la transaction intervenue ne satisfit personne. Le Midi trouva les changements insuffisants; le Nord se montra furieux des changements tels qu’ils étaient, non pas pour les conséquences immédiates, mais parce qu’il comprenait qu'une première modification en devait nécessairement entraîner une seconde. Tous les mécontents se rallièrent au chef de l'opposition. Les élections pour la présidence et la vice-présidence devaient avoir lieu au mois de novembre suivant. Dans l'intervalle, les deux concurrents ne négligeaient aucun moyen pour se procurer des voix. Le parti Clay travaillait la Pensylvanie qui penchait auparavant pour Jackson, mais qui menaçait de l'abandonner à cause du veto qu'il venait d’apposer au renouvellement de l'octroi de la Banque des États-Unis; car le siége de la Banque était à Philadelphie, ce qui procurait de nombreux avantages aux capitalistes pensylvaniens. Les détails qui précèdent suffisent pour permettre d’ap- précier quelle était à ce moment la situation intérieure des Re a a i ( 743 ) États-Unis. Jamais peut-être elle ne fut plus intéressante pour un étranger. Les négociations relatives à notre traité subissaient le contre-coup de ces événements. Le baron Behr avait eu de nombreux entretiens avec le secrétaire d’État pour régler les points préliminaires et déjà ils étaient tombés d'accord sur une série d'articles dont la réunion pouvait former un traité complet, lorsqu'une indisposition sérieuse de M. Livingstone vint arrêter les travaux. Puis survint le choléra. En outre, le général Jackson ne voulut rien conclure avant que la question de la présidence fût ré- solue. S'il n’était pas réélu au mois de novembre, le Ministère serait renvoyé par son successeur au mois de mars suivant. Enfin les intérêts commerciaux des différents États composant l’Union étaient tellement opposés qu'il était presque impossible de faire un traité qui n’en froissât Pas quelques-uns. Le Ministère était donc forcé d'être très-circonspect jusqu'à ce qu’il eût obtenu la majorité dans le Sénat. Pendant l'été de 1832, les membres du Gouvernement se dispersèrent, non-seulement pour éviter les chaleurs et l'épidémie, mais surtout pour e travailler les élections. » Désiranttirer parti de cette espèce d’interrègne, M. Behr se décida à parcourir les principaux États du Nord et les pos- sessions anglaises qui les avoisinent, afin de pouvoir observer à la fois la situation de l’industrie manufacturière des États-Unis et leur commerce par la frontière de terre. Il visita successivement la Pensylvanie, l'Ohio, le Michigan, le Maine, le New-Hampshire, le Massachusetts, le Connec- titut et New-York. Il parcourut , en outre , tout le Canada, le Nouveau-Brunswick et la Dee Rias depuis le lac Huron jusqu’à Halifax. Il fut de retour à Washington ( 744 ) vers la fin du mois de novembre. Dans ce long voyage, il recueillit des renseignements précieux sur les relations commerciales et politiques des deux pays, renseignements qui lui permirent d'envoyer au Gouvernement des rapports d’un haut intérêt. Sur ces entrefaites, les élections eurent lieu et le général Jackson fut réélu président à une immense majorité. Maine, New-Hampshire et Ohio, qui d’abord avaient promis leur voix à Clay, tournèrent subitement du côté de son compé- titeur. Même la Pensylvanie vota en faveur de celui auquel elle avait d’abord jeté l’anathème. Ce résultat inattendu était une conséquence de l’état critique des affaires du Sud. Au moment où l’Union semblait menacée de dissolution, tous les hommes raisonnables sacrifièrent leurs antipa- thies à leurs intérèts. Les ennemis les plus décidés du général Jackson ne pouvaient lui refuser une prudence consommée et une indomptable énergie, et ces qualités étaient plus nécessaires que jamais quand l’œuvre de Was- hington recevait de profondes atteintes. L’agitation pour la révision du tarif recommencçait. Le mot de séparation fut prononcé de nouveau. Un parti se constitua qui prit pour mot d'ordre ` « point de tarif ou point d'union. » Dans ce moment critique, on attendait avec anxiété le message d'ouverture du président. Le document s'occupa longuement de la question du tarif et de l'opposition de la Caroline du Sud. TI était difficile de s'expliquer plus claire- ment : le président voulait faire abolir le tarif protecteur et ne conserver les droits d'entrée que comme simple impôt. Un paragraphe d’une extrême modération consacré à la Caroline révélait que le général comprenait toute l'étendue du danger qui menacait la République et qu'il était loin de vouloir recourir aux voies extrêmes où les manufacturiers du Nord espéraient l’engager. ( 745 ) Un homme d'État américain, avec qui le baron Behr s’entretenait de celte situation, lui disait : « Je pense que la Belgique ne peut que gagner aux événements qui se préparent : ou bien le tarif sera réduit à un taux insigni- fiant et alors vos produits n'auront plus à lutter contre des droits de 40 à 50 p. °/, et contre la contrebande qui se fait par la frontière du Canada : ou bien le tarif sera maintenu et, dans ce cas, une nouvelle république va surgir et nos ports vous seront ouverts. » M. Behr accueillait des confidences de cette nature avec une extrême circonspection et les événements donnèrent raison à sa prudence ; car ce fut la première des deux alter- nalives prévues par son interlocuteur qui l'emporta, le pré- sident ayant déclaré, dans une proclamation solennelle, qu'il se croyait obligé de maintenir l'union par la force des armes, si les voies de la conciliation devenaient inutiles. Le Gouvernement belge s'étant occupé vers ce temps des localités où il serait utile d’avoir des consulats, M. Bebr en établit à Boston, New-York, Baltimore, Philadelphie, Charleston , Savannah et à la Nouvelle-Orléans. C’est égale- ment à son initiative que l’on doit la création de consulats ou de consulats généraux au Mexique et à Guatémala. Cependant, aussitôt que le général Jackson eut été réélu, M. Behr reprit les négociations avec le secrétaire d'État et, malgré de sérieuses difficultés, il parvint à conclure un traité des plus avantageux pour son pays. Ces difficultés provenaient de divers côtés. La Belgique était toujours en guerre avec les Pays-Bas et partout la diplomatie hollandaise s’ingéniait à paralyser l’action de nos agents; le chargé d’affaires néerlandais à Washington publiait des articles dans les journaux contre le Gouverne- ( 746 ) ment belge et ne cessait de répéter que la Belgique n'avait pas de chance de durée comme État indépendant; tel Mi- nistre, représentant une cour apparentée à la famille royale des Pays-Bas, parlait dans le même sens; tel autre sem- blait craindre de notre part une rivalité commerciale; un troisième représentait un pays ami de la Belgique, mais était l’organe d’un parti politique à qui notre cause était au moins indifférente; malgré ces influences hostiles ou peu favorables, le Gouvernement américain n’hésita pas à conclure avec nous un traité d’amitié et de navigation. L acte fut signé le 25 janvier 1855. C'était un succès diplomatique qu’on est encore heureux de pouvoir constater aujourd’hui. Ce traité était, en effet, le plus libéral, le plus étendu, le plus complet qui eût jamais été conelu par les États-Unis. Il posait pour principes : Que le pavillon neutre couvre la marchandise, même quand elle appartient à l'ennemi (art. 19)); Que le vaisseau neutre a le droit d'entrer avec sa cargai- son dans les ports ennemis qui ne sont pas en état de blocus effectif (art. 15); ue le vaisseau neutre, entré dans un port ennemi mal- gré le blocus, peut en sortir librement avec sa cargaison (art. 17); Que la propriété neutre est inviolable, même à bord d’un navire ennemi (art. 13). Je n’ai pas besoin de rappeler que la plupart de ces principes ont été consacrés par le traité de Paris du mars 1856; cependant il mest pas moins digne de remarque que le Ministre d’un petit État neutre avait pu les faire reconnaître près d’un quart de siècle auparavant. Sans doute une partie de ces principes avaient figuré dans les traités conclus entre les États-Unis et les puissances PRESSE) ( 747 ) européennes, immédiatement après la reconnaissance de leur indépendance. Mais, depuis lors, des conventions spéciales les avaient annulés, par suite du refus de l'An- gleterre de respecter les pavillons neutres. Il résultait du traité signé par le baron Behr que, si la guerre survenait entre les États-Unis et l'Angleterre, les navires "belges auraient seuls le droit de transporter des marchandises anglaises vers un pays quelconque et d'importer des den- rées étrangères dans la Grande-Bretagne, sans avoir à craindre aucune vexation de la part des vaisseaux ou des corsaires américains. Il ent été difficile d'obtenir une plus large reconnais- sance de la neutralité de notre pavillon. D'autres clauses étaient entièrement superflues pour les intérêts belges. Ainsi, les articles 27 et 28 furent insérés à la demande expresse de M. Livingstone qui désirait éta- blir un précédent afin de pouvoir proposer à des Gouver- nements voisins de l'Union une stipulation semblable; ces deux articles avaient pour but d'empêcher l'emploi des tri- bus indiennes comme troupes auxiliaires; leur insertion était done un hors-d'œuvre relativement à la Belgique, mais M. Behr ne crut pas devoir refuser au cabinet de Washington cet acte de complaisance auquel il Lu attacher beaucoup de prix. out en négociant le traité d'amitié qui définissait les rapports internationaux des deux pays, le baron Bebr, con- formément aux instructions de son Gouvernement, avait fait d’actives démarches en vue de la conclusion d’une con- vention commerciale. On se faisait, à cette époque, une idée fausse des prin- cipes suivis par les États-Unis relativement aux conven- tions de cette nature. Le Gouvernement avait adopté pour ( 748 ) système de n’accorder aucune faveur commerciale, le tarif des douanes étant le même pour tous. La seule et véritable manière de favoriser le commerce belge aux États-Unis devait donc consister à faire abaisser le tarif pour les ob- jets fabriqués à bon marché. En dépit de la lutte latente qui existait entre le Nord et le Sud, le baron Behr rencontra des dispositions favorables non-seulement chez le Gouver- nement, mais aussi chez les membres du Congrès. Bien qu’arrivé au moment où la session était déjà fort avancée et où le tarif était en pleine discussion, il parvint à faire adopter un amendement qui réduisait de 25 à 13 p. ‘ le droit d’entrée sur les toiles de lin, auxquelles personne n'avait encore songé et qui n'étaient pas même mention- nées dans le projet. Les députés du Nord lui promirent qu’à la prochaine révision du tarif ils proposeraient d’abo- lir entièrement les droits sur les toiles de lin et sur les armes de chasse. Quant aux étoffes de laine et de coton, qui étaient le principal sujet de querelle entre le Nord et le Midi, il était difficile d’influencer une décision dont dé- pendait le sort de l'Union, mais dans tous les cas nous étions certains d'obtenir une forte réduction sur ces deux articles. Le Gouvernement proposa, en effet au Congrès un bill tendant à modifier le tarif : mais le Nord savait que l'inten- tion du Ministère était de traîner les choses en longueur et de gagner la fin de la session sans qu'il y eût rien de terminé. Tout marchait dans ce sens, lorsqu'un incident imprévu déconcerta complétement la politique du cabinet. Henry Clay, cet homme d’État dont il a été question plus haut, saisit habilement une occasion d'augmenter son prestige personnel tout en portant un coup sensible à l'administra- tion du président Jackson. RER EE CS TE ( 749 ) A l'insu des Ministres, il se concerta avec les principaux sénateurs et députés du Midi et de l'Ouest; il s’assura d’une majorité imposante dans le Sénat, certain qu'il était d'entraîner la Chambre des représentants, si les sénateurs prenaient l'initiative; assumant alors le caractère d’un médiateur entre le Gouvernement et la Caroline du Sud, il proposa dans la Chambre haute un bill de réduction basé sur un principe entièrement nouveau et qui pouvait être considéré comme un compromis entre le Nord et le Sud. Les Ministres, pris au dépourvu, ne firent aucune résis- tance, Par une manœuvre sans exemple peut-être dans les fastes parlementaires, la Chambre des représentants sub- stitua le bill de Clay au bill du Gouvernement, sous la forme d’amendement, et l’adopta au bout d’un quart d'heure, sans aucune discussion préalable, de sorte que le Sénat, qui avait engagé l'affaire, se vit gagné de vitesse. Ce bill était éminemment favorable aux intérêts belges. Outre les diminutions graduelles des droits sur les étoffes de laine et de coton, un de nos principaux produits était déclaré entièrement libre. On avait promis au baron Behr de faire abolir les droits sur les toiles de lin. On lui tenait parole. Après avoir expédié en Belgique, par une voie sûre, le traité d'amitié, M. Behr visita le Sud des États-Unis, au milieu des ardeurs de lété; mais il voulait tout voir de ses propres yeux, il voulait pouvoir se rendre compte des mo- tifs secrets de cette opposition violente qui mettait en question jusqu’à l’existence des États-Unis. Plusieurs mois furent consacrés à cette excursion, qui fit l’objet de plu- sieurs rapports du plus haut intérêt adressés par le diplo- mate belge à son Gouvernement. Dans un de ces rapports, que nous ne pouvons repro- ( 750 ) duire ici qu'en partie , il pronostiquait avec une claire vue remarquable, la guerre de la sécession, telle qu'elle de- vait éclater un quart de siècle plus tard. Voici comment il s'exprimait au début de son travail : « Déjà à plusieurs reprises, j'ai parlé des dissensions qui se sont élevées entre le Nord et le Midi à l’occasion du tarif, et j'émettais l'opinion qu’elles pourraient amener avant peu la dissolution de l'Union. b Cette opinion était basée sur des faits dont j'étais journellement témoin, sans pouvoir me rendre compte des causes qui les produisent. » Je voyais une haine et une animosité trop violentes pour être occasionnées seulement par une question de douanes. » Il me semblait reconnaître les symptômes d'une anti- pathie nationale dont les motifs m'étaient inconnus, mais qui devait être enfantée par de nombreux griefs et de lon- gues injures. » À Washington, il m'était impossible de rien appren- dre. Chacun y est sur ses gardes. La réserve naturelle aux Américains y est encore augmentée par le contact immé- diat des partis ennemis, et je ne pouvais me lier avec les chefs de l'opposition, sans paraître, jusqu'à un certain point, hostile au Gouvernement près duquel je suis accré- dité et des procédés duquel je mai qu’à me louer. » Je résolus donc de voir par moi-même. » Aussitôt après la clôture de la session, je me mis en route pour le Midi. Je viens de parcourir la Virginie, les deux Carolines, la Géorgie et les Florides, traversant le pays dans tous les sens, et m’arrêtant partout où je pouvais obtenir des informations. Ce long et pénible voyage n'a pas été infructueux. Je puis maintenant vous donner des ( 751 ) détails qui méritent P äer seulement il faut repren- dre les choses d’assez haut pour remonter à la source du mal. » Relativement aux intérêts politiques, les États-Unis peuvent être considérés comme divisés en quatre sec- tions : » Le Nord qui comprend les États connus jadis sous le nom de Nouvelle-Angleterre, savoir : Maine, North-Hamp- shire, Vermont, Rhode-Island, Massachusetts et Connec- ticut; > Le Centre qui renferme New-York, North -Jersey , Delaware, Maryland et la Pensylvanie ; » Le Sud qui commence au Potomac, et s'étend jusqu'au golfe du Mexique ; il se compose de la Virginie, des deux Carolines, de la Floride et de l'Alabama; » Les autres États ou territoires, savoir: Mississipi, Louisiane, Arkansas, Tennessee, Kentucky, Ohio, Michi- gan , Illinois, Indiana et Missouri forment l'Ouest. > Dans la querelle qui s'agite en ce moment, le Sud et le Nord sont les parties actives; l'Ouest et le Centre ne s’en mêlent que faiblement. » Si l'on en venait à une scission complète, il est pro- bable que Tennessee, Mississipi, Louisiane et Arkansas s’uniraient au Midi... » Il expose ensuite la manière dont on lui a expliqué dans le Sud les causes de l’inimitié qui régnait entre le Midi et le Nord. Ces eauses, les voici. On voudra bien remarquer que ce sont les sudistes qui parlent : » L’inimitié entre le Sud et le Nord résulte de deux causes principales : différence de races, différence de pro- duits agricoles. » Les États du Nord furent primitivement peuplés par ( 752 } des Anglais et des Écossais, qui abandonnèrent la Grande- Bretagne après la restauration de Charles H et pendant le règne de son successeur. » Les niveleurs, les indépendants, les hommes de la cinquième monarchie, les puritains, les caméroniens, vinrent chercher dans le nouveau monde un abri contre les réactions qui les menaçaient dans l’ancien. » Ils apportèrent en Amérique un fanatisme intolérant dont l'empreinte se retrouve encore aujourd’hui dans les lois et dans les mœurs de leurs descendants. » Croirait-on qu’au dix-neuvième siècle la législation du Connecticut défend de travailler, de voyager, de chanter et embrasser sa femme le dimanche? Croirait-on qu'il y a six mois la Chambre des députés de Rhode-fsland adopta, à l'unanimité, une loi qui défendait, sous peine de 500 dol- lars d'amende, de prêter ni de recevoir aucun serment de franc-maçonnerie ? » Ces réfugiés s’établirent sur un sol montueux et peu fertile, en comparaison des riches contrées de l'Ouest et du Midi. » Les hivers y sont longs et rigoureux, les récoltes de peu de valeur; les propriétés très-morcelées , conséquence nécessaire du partage des terres à chaque génération. » Le caractère de la population se ressentit de ces diverses circonstances. » Les habitants de la Nouvelle-Angleterre sont générale- ment économes, actifs et industrieux ; habiles à tirer parti de tout pour s'enrichir, peu scrupuleux sur les moyens; il n’est pas de métier qui ne leur soit bon. » On les trouve partout, sous toutes les formes, faisant bande à part, se soutenant les uns les autres, affectant une grande sévérité de principes religieux , affectant le ( 755 }: démocratisme, et regardant le reste des Américains comme une proie qui leur est dévolue. » Bien différents sont les habitants du Midi. Cette partie des États-Unis fut colonisée par des émigrants d'une classe supérieure. Walter Raleigh, Grenville, Ogle- thorpe étaient accompagnés dhommes riches, dont plu- sieurs appartenaient à l'aristocratie anglaise. » Plus tard, quand on apprit que la Géorgie et la Caro- line du Sud étaient susceptibles de produire le riz, le Coton, le sucre, l’indigo, des planteurs des Indes occiden- tales vinrent s’y établir avec leurs nègres. » L’esclavage des noirs, le système des grandes pro- priétés et par conséquent du droit d’ainesse prévalurent; tandis que l'habitant du Nord labourait lui-même le peu acres de terre qu'il pouvait mettre en culture, le riche planteur du Midi, servi par ses esclaves, s’entourait des jouissances du luxe européen. » Fier, hospitalier, indolent, il prodiguait lor pour satisfaire ses goûts ou ses caprices. » Survint la guerre de l'Indépendance. » Ces deux peuples de mœurs si opposées, et qui n'avaient eu jusqu'alors que très-peu de communications, se réunirent contre l'Angleterre; quand leur indépen- dance fut reconnue, ils s'unirent sous une même forme de gouvernement. A mesure qu’ils apprirent à se mieux Connaître, le Nord envia le Midi, le Midi dédaigna le Nord. Des nuées d'aventuriers, sortis du Connecticut et du Mas- Sachusetts, vinrent s'abattre sur la Virginie, la Caroline et - la Georgie, maîtres d'école, marchands forains, aubergistes, prêcheurs, gens de toute sorte. > Bientôt les méridionaux s’accoutumèrent à regarder les Yankees (sobriquet des natifs de la Nouvelle-Angle- 2° SÉRIE, TOME XXXVII. 49 ( 754 ) terre) du même œil que les Juifs sont regardés dans une partie de l'Europe. » Une invasion plus destructive fut celle des Squat- ters. > On appelle ainsi les agriculteurs errants, qui s'établis- sent sur des terrains vierges, les épuisent par des récoltes continuelles du même produit et les abandonnent ensuite pour recommencer ailleurs la même opération. On ren- contre des individus de cette catégorie, venus du fond du Nord, établis successivement dans la Virginie, la Caroline, la Géorgie et la Floride; ils ont cultivé tour à tour le tabac, le coton , le riz et la canne à sucre, sans jamais acheter un acre de terre, au grand détriment des véritables plan- teurs. » Ces nomades d’une espèce inconnue dans l’ancien monde se dirigent ensuite vers l'Ouest, laissant derrière eux une bande de terrain qu’ils ont rendue stérile. » La question de l'esclavage des nègres ouvrit un champ plus vaste encore aux haines réciproques. » Quand on visite les plantations dans le Midi, l'habi- tant vous affirme qu'il est impossible aux blancs de culti- ver ce pays. Depuis l'extrémité de la Péninsule floridienne, jusqu’à la rivière Pedee dans la Caroline, le climat, dit-on, nous est mortel, Aucun blanc ne peut passer la nuit dans une plantation de coton ou de riz sans y prendre la fièvre. Les rechutes sont des arrêts de mort. Que l’on, juge avec quelle colère, avec quelle indignation les méridionaux doivent accueillir les déclamations des prédicateurs et des philan- thropes du Nord qui tendent à faire abolir l'esclavage” C’est absolument, me dit-on, comme si le Midi voulait défendre au Nord d'employer la charrue et d’ensemencer les terres. ( 755 ) » L'abolition du droit d’ainesse, et le partage égal des successions ont fait d’ailleurs un mal irréparable aux plan- teurs. Quand ils consentirent à ce changement de législa- tion, les idées de liberté et celles d'égalité semblaient des synonymes. Ils se laissèrent entraîner par les discours spé- cieux de quelques orateurs, sans considérer que les mêmes lois ne peuvent pas convenir à tous les pays. En effet, qu'on suppose une plantation de sucre ou de riz de deux cents acres ` quarante nègres suffiront pour tous les tra- vaux de la culture, pour la distillation du rhum et pour la besogne intérieure de l'habitation. Le propriétaire meurt et ses biens sont partagés entre quatre enfants. » Dès lors une partie du terrain doit rester en friche, car dix nègres ne suffisent pas pour le ménage et pour la culture de 50 acres. Qu'un accident survienne , tel qu’une épidémie, le choléra, par exemple, ou le vomito-negro, les grandes plantations souffriront sans doute, mais elles pourront réparer leurs pertes à force de soins et d’écono- mie. Le petit planteur, au contraire, sera ruiné de fond en comble et de la condition d’un gentleman il descendra à celle d’un paysan. » La Virginie était jadis le pays le plus riche de l’Union. Depuis les nouvelles lois de succession, elle dépérit de Jour en jour. Il en est de même, aflirme-t-on, de la Géorgie et de la Caroline. » Ces iles magnifiques, qui produisent le coton long connu sous le nom de Sea Island, sont à vendre à vil prix. >` Une des plus belles, l'ile d'Osseban, appartenait, il y a vingt ans, à un seul planteur qui en retirait d'importants bénétices. Maintenant elle est partagée entre une demi- douzaine de petits propriétaires hors d'état de la cultiver, faute de capitaux. Cette ile, d’une superficie d'environ ( 756 ) 6,000 acres, dont les forêts sont remplies des plus beaux chênes pour le service de la marine (live oak), et qui d’ail- leurs est traversée par un bras de mer navigable, està vendre pour 24,000 dollars; ce n’était pas le quart de sa valeur, il ya vingt ans. Tel est, dit-on, le résultat du système de nivellement. Appliquer à des régions tropicales les idées et les principes qui régissent les pays tempérés, c’est vou- loir leur ruine. » Le Midi s’est enfin aperçu de cette vérité! Il com- prend maintenant que dans son association avec le Nord d a tout a perdre, et l’autre tout à gagner. Indigné d’avoir été dupé pendant si longtemps , il veut changer les condi- tions du contrat, ou le rompre tout à fait. » Telles sont, au point de vue des habitants du Sud, les causes cachées, mais incessamment agissantes, des dissen- sions de l'Amérique... » Si la perspicacité politique du Ministre belge à Was- hington se révèle dans les considérations que nous venons de résumer, son sens pratique et observateur ne se montre pas moins dans l'appréciation de faits d’une importance secondaire, mais qui servent à peindre le milieu à la fois grand et étrange où il vivait. Quelques Belges, des Wallons aventureux, attirés sans doute par la réputation de richesse de certaines provinces de l’Union, s'étaient fixés au commencement de ce siècle dans le Missouri, où ils avaient fondé une petite colonie, appelée Nouvelle- Liége, probablement du nom de leur patrie d’origine, Parmi eux se trouvait un M. E. de Rési- mont, qui cessa de donner de ses nouvelles à sa famille à partir de 1817. Chargé de recueillir des renseignements sur le sort de son compatriote et sur la localité où il avait vécu, le baron Behr fit remarquer que les établissements ( 757 ) de ce genre s’élevaient et disparaissaient si rapidement que souvent après un petit nombre d'années il n’en restait ` plus aucun vestige. Dans l'État de Missouri, il wy avait plus d'endroit appelé Nouvelle-Liége. U était done à pré- sumer que la colonie dont il s’agit avait cessé d’exister et que, à moins de retrouver un des habitants qui en avaient fait partie, il serait difficile, sinon impossible , de se pro- curer les informations désirées. Dans ces pays, disait-il, où la population se déplace continuellement, où l'on ne lient aucun registre de l’état civil, — nous sommes en 1833, — un événement aussi peu important que la mort d'un étranger ne pouvait être remarqué. Il raconta en même temps à ce propos l'anecdote sui- vante qui venait de se passer presque sous ses yeux, dans la ville de St-Louis de Missouri ` « Deux individus s'étaient pris de querelle à table d'hôte. Chacun tira un pistolet de la poche et fit feu sur son adversaire. Dans tout l'Ouest et une partie du Midi, personne ne sort de sa maison sans être armé de deux pistolets et d’un poignard. A Little- Rock, capitale de Arkansas, les hommes vont au bal avec une carabine qu'ils déposent pendant la danse, mais Sans jamais quitter le poignard ni les pistolets. Les deux antagonistes dont je viens de parler se manquèrent; mais op d'eux, dont le pistolet était chargé à balle et à lingots, atteignit un voyageur qui dinait fort tranquillement et le tua sur place. Aucune poursuite ne fut intentée contre celui qui avait tué le voyageur. C'était un malheureux acci- dent. Les journaux saisirent cependant cette occasion pour dire à leurs lecteurs qu’il est inconvenant (ungenile- manlike ) de tirer des coups de pistolet à table d'hôte; mais personne ne se préoccupa du malheureux assassiné. » Quant à M. de Résimont, M. Behr apprit par M. l'abbé ( 758 ) de Theux, missionnaire belge dans l'État de Missouri, qu'il était mort en 1818. Citons un autre exemple de l'esprit observateur et par- fois amèrement caustique de notre premier Ministre à Washington. Une Société de médecine belge avait employé l'intermé- diaire du baron Behr pour obtenir certains renseigne- ments sur les mesures prises par le Gouvernement des États-Unis à l'effet d'empêcher la propagation de cette maladie affreuse que certains savants prétendent avoir été importée en Europe par les conquérants du Nouveau Monde. M. Behr répondit : « Toutes les réponses que j'ai re- çues sont invariablement de la même teneur : Il n'existe aux États-Unis aucune mesure administrative quelconque pour arrêter ou modérer la propagation de la syphilis et l'administration n'oserait intervenir dans cette branche de l'hygiène publique. » En effet, la liberté absolue qui règne aux États-Unis n’admet aucune mesure préventive de police, quelle qu’en puisse être l'utilité. Chacun peut disposer comme il len- tend de sa personne et de ses biens. Une fille a le droit de se donner pour de l'argent, comme le marchand de faire une spéculation en coton ou en bœuf fumé. » Les résultats de ce système sont faciles à deviner. » Une jeune fille de quinze à seize ans est libre de faire ce qu’elle veut. Jamais, depuis son enfance, elle wa éi à personne. Devenue nubile, elle cherche à se ma- rier, n'importe comment. Si elle tombe entre les mains d’un séducteur, elle est perdue pour toujours. Elle quitte la maison paternelle pour habiter avec son amant. A vingt ans, elle a passé par une douzaine de mains. A vingt-trois, ( 759) elle est vieille, flétrie, usée par la débauche et les boissons fortes. A vingt-cinq, elle s’empoisonne avec de l'arsenic ou de la morphine. Telle est en peu de mots l’histoire de milliers de malheureuses qui périssent annuellement sans que les journaux ou même la police daignent s'occuper de leur sort. » Ce tableau est d'un réalisme désolant; mais hélas ! où sont les grandes villes de la vieille Europe auquel il ne puisse s'appliquer ?... De retour à Washington en juillet, après quatre mois d'absence, M. Behr apprit que le traité qu’il avait transmis à Bruxelles au mois de janvier n’était pas encore arrivé à destination ; cependant il ne fallait à cette époque pas plus ‘un mois pour faire la traversée. Par une singulière fata- lité, l'instrument ne parvint à Bruxelles qu'au mois d'août. Comme, d’un autre côté, les ratifications n'étaient pas encore reçues à Washington, M. Bebr fut interpellé sur le point de savoir d'où provenaient ces retards. Le Ministre belge, qui n'avait pas d'instructions à ce sujet, donna les raisons qui lui paraissaient les plus plau- sibles, savoir l'absence du Ministre des Affaires Étrangères, général Goblet, dont les journaux anglais lui avaient appris la mission à Londres et le fàcheux contre-temps qui avait retardé de cinq mois l’arrivée à Bruxelles de l'ori- ginal du traité. M. Mac Lane s'était contenté de ces raisons, tout en laissant entrevoir qu'il avait lieu de croire que d’autres motifs encore occasionnaient ce délai. Il n'avait pas tort : le représentant d'une grande puissance près la cour de Bruxelles avait demandé des explications au Mi- nistère belge sur les clauses d’un traité qui nous étaient au moins inutiles et la puissance dont il s'agit faisait des ( 760 ) démarches actives pour empêcher la ratification d'un traité dont plusieurs stipulations pouvaient, le cas échéant, con- trarier sa politique en Amérique. M. Legaré avait reçu à cet égard des communications confidentielles et il en avait écrit à son Gouvernement. Par un sentiment de déférence pour notre Ministre, M. Mac Lane convint avec M. Behr que le discours du président ferait mention du traité pour exposer, conformément aux explications du représentant de la Belgique, les circonstances qui avaient empêché jusqu'alors l'échange des ratifications. Mais lorsque M. Behr annonça au secrétaire d'État que le Gouvernement belge désirait une prorogation de six mois, M. Mac Lane parut vivement contrarié. Il fit ob- server que le traité du 25 janvier ayant déjà été approuvé par le Sénat et ratifié par le président, il était impossible d'r rien changer ` que, partant, toute modification devenait un nouveau traité lequel devait à son tour être soumis à l'approbation du Sénat. M. Mac Lane aurait pu ajouter que la grande majorité du Sénat était en opposition avec le Gouvernement; qu’il était même incertain que sa propre nomination comme secrétaire d’État recevrait la sanction de ce corps; que son collègue le nouveau Ministre des Finances avait encore moins de chances de durée ; que l'affaire de la Banque allait donner lieu à des discussions où le cabinet menaçait d’avoir le dessous dans les deux Chambres; qu'alors la retraite des Ministres deviendrait une nécessité, que par conséquent ils devaient éviter tout ce qui pouvait fournir de nouvelles armes à l'opposition. Après un entretien assez long dans lequel les deux inter- locuteurs s’abstinrent de toucher au nœud de la question, ils tombèrent d'accord sur certains points qui conciliaient tout et qui furent ponctuellement exécutés. ( 761 ) Le message parut le lendemain 5 décembre; le passage relatif à la Belgique était conçu dans les meilleurs termes. Quelques jours après, M. Behr exposa par écrit au Dépar- tement des relations extérieures le désir de son Gouverne- ment d'obtenir une prolongation de six mois pour les ratifications et M. Mac Lane fit connaître officiellement que la proposition belge était acceptée. M. Legaré, Ministre des États-Unis à Bruxelles, fut chargé de soumettre au Gouvernement du Roi un article additionnel, par lequel la ratification du traité était prorogée au 1° juillet 1834 et l'échange au 3 mars 1835. Il aurait été impossible au Gouvernement de l’Union de se montrer plus gracieux et plus conciliant. Le vrai motif de ces atermoiements était qu’à Bruxelles on désirait voir adopter quelques modifications au traité. M. Behr reçut à ce sujet de nouvelles instructions et il fut Chargé bientôt après de sonder le Gouvernement de l'Union sur l'accueil que ce désir pouvait rencontrer. M. Behr en Conféra avec M. Mac Lane; mais l'honorable secrétaire d'État évita de se prononcer, parce qu’il comptait donner sa démission et qu'il valait mieux, disait-il, que la révision de l'affaire fût entamée par celui qui la terminerait. Le président émit également l'opinion qu'il était préférable d'attendre la formation du nouveau cabinet. La situation était délicate. Le Gouvernement était aigri par les échecs successifs qu’il avait éprouvés et l’on pouvait appréhender que la Belgique ne ressentit cette fois le contre-coup de ces dispositions. M. Behr craignit même un instant qu’il n’eût pas pu convenablement rester accrédité auprès du Gouvernement des États-Unis. Ces prévisions se réalisèrent bientôt, mais en partie Seulement. Un nouveau Ministère arriva au pouvoir et ( 762 ) M. Fortyth fut nommé secrétaire d'État. Dans une des premières entrevues qu'il eut avec lui, M. Behr lui an- nonça officieusement que le cabinet de Bruxelles ne pou- vait proposer la ratification pure et simple du traité, mais qu’il demanderait ultérieurement certaines modifications. Le Gouvernement de l'Union prit acte de cette notifica- tion, tout en déclarant qu’il ne partageait pas l'interpréta- tion du Gouvernement belge sur les points qui faisaient obstacle à la ratification. Ces incidents finirent par transpirer. La presse des États-Unis comme celle de la Belgique s’en occupa. Il en fut question dans les assemblées législatives des deux pays. A la Chambre des Représentants de Bruxelles, M. le comte Félix de Merode exprimait l'espoir qu’on parviendrait à « aplanir sans secousse les difficultés qui s'étaient éle- vées entre la Belgique et les États-Unis. » A Washington, M. Behr craignait que la partie du message relative au refus de ratification ne contint des réflexions désobli- geantes dirigées contre le cabinet de Bruxelles ou bien contre le Ministre belge signataire du traité. Ses relations personnelles lui permirent encore une fois de tourner cet écueil. Le secrétaire d'État lui assura que la partie du message consacrée aux relations extérieures serait rédigée de manière à ne pouvoir blesser la susceptibilité du Gou- vernement belge. Il tint parole, Le retard apporté à la ratification était qualifié seulement d’inattendu (unex- pected ) et aucune observation désagréable n’accompagnait l’'énonciation du fait. La proposition de négocier un nou- veau traité n’est pas encore acceplée, disait le message, ce qui pouvait signifier que les négociations s'ouvriraient prochainement. Ce succès diplomatique fut presque immédiatement (763) suivi d’un autre. Le message du président ayant été ren- voyé par le Sénat et la Chambre des Représentants à leurs comités respectifs pour les affaires étrangères, M. Behr obtint de ses amis du Congrès que la non-ratification du traité serait passée sous silence dans leurs rapports. C'était au mois de mars 1835; plus de deux ans s'étaient écoulés depuis la signature de l'acte. Au commencement de l’année suivante, le 9 février 1856, le secrétaire d'État notifia officiellement au baron Behr l'intention du Gouvernement américain de négocier avec lui un nouveau traité destiné à remplacer celui dont certaines circonstances n’avaient pas permis la ratification. Les pourparlers eurent lieu immédiatement. On tomba vite d'accord pour la suppression des articles 42, 13, 15, 16, 17, 19,21, 97 et 98 du traité non ratifié (1). Quant à l'insertion de l’article spécial par lequel la république des États-Unis reconnaissait la neutralité du royaume de Belgique, le cabinet de Washington fit observer que cet article occasionnerait probablement le rejet du traité par le Sénat. En envoyant un chargé d’affaires à Bruxelles, l'Amérique avait reconnu la Belgique avec toutes les con- ditions de son existence. L'insertion d’une reconnaissance Spéciale, chose inouïe, disait-on, dans les traditions de la diplomatie américaine, fournirait un excellent prétexte au Sénat, dont la majorité était opposée au Gouvernement, Pour humilier le président en rejetant le traité. On ne désirait pas non plus l'insertion dans Pacte d’une dispo- sition générale relative aux droits des neutres en temps ke (1) Nous jugeons inutile de reproduire ici ces articles. On en trouvera le texte dans le tome I, pp. 23-25 des Traités el conventions concernant la Belgique, de M. de Garcia de la Vega. | ( 764 ) de guerre, ni l'addition demandée aux objets considérés comme contrebande de guerre. Il résultait de ce qui précède que les propositions du cabinet de Bruxelles étaient acceptées, sauf quelques légères exceptions, lesquelles ne portaient d’ailleurs sur aucun point essentiel. Ces dispositions si favorables du cabinet de Washington provenaient de son désir de se concilier la Belgique dans l'éventualité d’une rupture avec la France. Après l'avéne- ment du roi Louis-Philippe, le Gouvernement de l'Union réclama du Gouvernement français une indemnité de vingt- cinq millions de francs pour les bâtiments américains saisis par la marine française en conséquence des décrets qui avaient déclaré en état de blocus les îles Britanniques et dénationalisé Lout navire qui serait soumis à la visite d'un bâtiment anglais. Or, comme personne ne pouvait prévoir l'issue du conflit, le Gouvernement du général Jackson comprenait que, le cas échéant, les produits américains devaient passer par Anvers pour être introduits dans le pays ennemi. Le baron Behr profita de ces dispositions pour négocier définitivement un nouveau traité de navigation, pour terminer l'affaire relative aux droits d'entrée et faire res- tituer l'argent payé pour la cargaison de l Antonius. Ce dernier point exige quelques explications. Lorsque le traité d'amitié fut conclu entre les deux pays, il fut convenu que jusqu’à l’époque des ratifications et de la signature d’un traité de commerce, les navires des deux nations entrant réciproquement les uns dans les ports des autres, seraient trailés sur un pied de parfaite égalité; or, lorsqu'il fut constant que le Gouvernement belge ne rati- fiait pas le traité du 25 janvier 1833, le premier navire belge ( 765 ) entrant dans un port des États-Unis — c'était P Antonius — fut frappé d’un droit additionnel de 10 p. °/,. Ce droit s’éle- vait à plus de dix mille francs en dehors des impositions ordinaires. L’armateur du vaisseau fit entendre d’amères doléances et M. Behr, plaidant la bonne foi de son compa- triote, demanda au Gouvernement américain de restituer la somme indûment perçue; mais il fallait pour cela une décision de la part du Congrès. Au bout de plusieurs mois de démarches incessantes, M. Behr eut la satisfaction de voir présenter au Congrès un bill tendant à restituer les droits additionnels payés par T Antonius et à faire assi- miler les navires belges aux navires nationaux, jusqu’à ce que le président reconnût l’urgence de rétablir les droits additionnels. Au mois de septembre 1856, le diplomate belge put écrire à Bruxelles que l'affaire de l’ Antonius était arrangée. Le receveur des douanes à New-York avait reçu ordre de restituer à l’armateur la somme de 1,426,07 dol- lars pour le montant des droits additionnels perçus sur la cargaison et le tonnage de ce navire. Notre Ministre fut en même temps assuré que désormais les navires belges seraient traités sur le même pied que les Hollandais, c’est- à-dire, comme ceux des nations les plus favorisées. Mais après avoir donné ces satisfactions au Gouverne- ment belge, le Gouvernement de la Maison-Blanche se crut en droit de faire valoir auprès du cabinet de Bruxelles une réclamation d’une autre nature. Depuis que M. Behr était arrivé aux États-Unis, les secrétaires d'État, MM. Livingstone et Mac Lane, l'avaient entretenu plus d’une fois de l'indemnité due à des mar- Chands américains pour les pertes qu'ils avaient éprouvées par suite de l'incendie de l’entrepôt d'Anvers en octobre ( 766 ) 1850. Le Ministre belge répondait invariablement, et avec raison, que cela ne pouvait nullement concerner la Bel- gique. « Les bombes hollandaises , disait M. Behr, avaient embrasé un quartier de la ville d'Anvers; l'Entrepôt était situé dans ce quartier ; il a partagé le sort des bâtiments environnants dont les propriétaires n’ont reçu aucune ` indemnité de la part du Gouvernement belge. C’est un cas de guerre et l’on sait que ces sortes de cas forment excep- tion. » Ces arguments étaient sans réplique, mais il fallait les renouveler souvent. C’est en effet une des qualités do- minantes de-la race anglo-saxonne que la ténacité qu'elle met à revendiquer ce qu’elle considère comme un droit. Une réclamation est rarement abandonnée; elle passe comme un héritage de génération en génération et le Gou- vernement est presque toujours forcé de s’en occuper. En 1855, on discuta , pour la vingtième fois au moins , une pétition concernant un cheval tué pendant la guerre de Findépendance. Au mois d'octobre 1836, quelques jours après le règle- ment de affaire de l’Antonius, M. Behr reçut du secré- taire d'État une dépêche au sujet des réclamations dont nous venons de parler. Le contenu de cette dépêche donnait à entendre que le Gouvernement des États-Unis s'adresserait à la fois à la Belgique et à la Hollande pour obtenir l'indemnité dont il s'agissait. En envoyant à Bruxelles une copie de la note américaine, M. Behr émettait l'avis que la Belgique pou- vait se borner à déclarer que le dommage devait être payé par ceux qui l'avaient causé et non par ceux qui en avaient le plus souffert ` dans l'espèce, la perte essuyée par les Américains était une légère fraction du dommage total, ( 767.) pour lequel le Gouvernement belge n’allouait à ses natio- naux eux-mêmes aucune indemnité. En s'exprimant ainsi, le baron Behr rendait hommage au sens pratique de la nation américaine et il était persuadé qu’une réponse de ce genre ne serait pas accueillie défavorablement par le Gouvernement de l’Union. Ce dernier, du reste, ne s’en tint pas à la note adressée au baron Behr. Le message du pré- sident relatif aux relations extérieures renferma un para- graphe concernant les réclamations des sujets américains pour des marchandises détruites à Anvers et constata l'intention du cabinet de Washington d'adresser simulta- nément ses réclamations à Bruxelles et à la Haye. M. Behr ne vit pas la fin de cette négociation. Depuis quelque temps déjà, le soin de sa santé et des affaires de famille lui avaient fait solliciter un congé pour revenir en Belgique. Après cinq ans de séjour dans un poste lointain, celle faveur ne pouvait lui être refusée; mais il ne re- tourna plus à Washington ; les nécessités du service l’appe- lèrent à Constantinople. M. Legaré, nommé membre du Congrès pour la Caroline du Sud, avait quitté Bruxelles peu de temps auparavant : il fut remplacé comme chargé d'affaires en Belgique par M. Heywood , ancien président de la Législature de la Caroline du Sud et ami particulier du nouveau président M. van Buren. L’avénement de van Buren à la plus haute magistrature des États-Unis marquait une nouvelle évolution dans la Politique intérieure de ce grand pays qu'il ne peut pas paraitre inopportun de signaler ici. Le Gouvernement établi par Washington avait des éléments et des formes aristocratiques. Virginien de naissance, le « législateur » ( 768 ) resta fidèle aux mœurs et aux opinions d'un pays où il exis- tait des maîtres et des serviteurs. De là le cens électoral, le maintien du droit de primogéniture pour les États à esclaves et surtout le pouvoir conféré au Sénat des États- Unis, pouvoir établi sur des bases tellement larges qu’il fallut, pour l'ébranler ,trente ans de lutte et l'influence du président Jackson. Jefferson se constitua l'apôtre d’un prin- cipe nouveau. La démocratie américaine, cette théorie vague et obscure, dont il serait difficile de donner une définition exacte, fut inventée par Jefferson comme un instrument propre à remuer les masses qui devaient le porter au pouvoir. Pendant les huit années de sa prési- dence, le principe d'égalité absolue et de liberté sans frein se développa de plus en plus. André Jackson, adversaire déclaré des fédéralistes , exagéra encore ce principe. Vain- queur des Anglais, quand la fortune des États-Unis sem- blait perdue à toujours, apparu tout à coup pour sauver l'honneur national, il jouit d’une popularité qui lui rendit tout possible. Il se déclara hautement l’homme du peuple et déploya la bannière de la démocratie avancée. Ce fut van Buren qui signala à Jackson le secret de sa force en lui enseignant le pouvoir des places et de largent. Jusqu'alors les présidents m'avaient pas employé la destitution des fonctionnaires publics comme un moyen de « persuasion » en fait d'opinions politiques. Poussé par van Buren, le géné- ral Jackson adopta ce système nouveau qui lui montrait en perspective une autorité absolue et l’humiliation de ses adversaires. A ppelant à son aide tout le parti démocratique, invoquant les souvenirs et les sympathies de ses anciens compagnons d'armes, destituant les opposants sous pré- texte d’arislocratie et de fédéralisme, déclarant la guerre ( 769 ) à la Banque des États-Unis afin de pouvoir promettre ses dépouilles aux banques locales, il parvint à une seconde présidence pendant laquelle il gouverna presque en souve- verain absolu. Telles étaient, au surplus, les dispositions de la majorité aux États-Unis que Jackson eût été main- tenu une troisième fois dans sa présidence, si le refus de Washington — de Washington, le « père du peuple», the man first in peace, first in war, first in the hearts of his countrymen — d’être l’objet de la même faveur n'avait fait admettre, à titre de principe, que le pouvoir ne doit pas rester plus de huit années entre les mêmes mains. M. van Buren se flattait d’administrer d'après les précédents du général Jackson. Mais allait-il se montrer capable de Supporter le même fardeau? Bien des personnes en dou- taient, et M. Behr était du nombre. M. van Buren était sans contredit adroit et habile; mais s’il était parvenu à la présidence, c'était grâce à l'influence du général qui l'avait lui-même désigné au suffrage populaire. C'était une tâche énorme que de succéder à un homme comme le général Jackson, lequel, malgré d’incontestables défauts, restera une des grandes figures de l’Union américaine. M. Behr m'assista pas au développement des conséquences du système inauguré par M. Jackson. Il quitta définitive- ment Washington au mois de septembre 1837. Sa mission avait profité largement à sa patrie. H n’avait pas seule- ment établi avec le Gouvernement de l’Union des rapports officiels sur le pied le plus cordial, aplani les difficultés que Certaines hostilités avaient semées sur sa route, conclu un traité tellement avantageux qu'aucun autre pays ne Pouvait se flatter d’en avoir fait un semblable; mais il avait surtout travaillé à entourer le nom belge d’un pres- tige que le temps n’a fait que grandir et noué des relations Me SÉRIE, TOME XXXVII. ( 770 ) personnelles dont le souvenir n’est pas encore perdu aujourd’hui (1). L'auditoire a accueilli cette dernière lecture par ses applaudissements. D’après l’ordre du jour, M. le secrétaire perpétuel donne lecture des résultats suivants du concours de 1874, ainsi que des élections faites en séance ordinaire du lundi 4 mai. CONCOURS ANNUEL DE LA CLASSE. La classe avait inscrit cinq questions à son programme de concours de cette année. Elle a reçu, en réponse à la première question , deman- dant un Essai SUR LA VIE ET LE RÈGNE DE SEPTIME SEVÈRE, trois mémoires. Us portent respectivement pour devise : 1° Payez bien les soldats et méprisez le reste; 2 Labo- remus; 3° Peu empereurs ont montré une individualité plus forte et laissé dans l’histoire de Rome une trace plus profonde. Conformément aux conclusions des rapports des com- missaires chargés de l'examen de ces mémoires, la classe tg titudes diverses du baron c ZK: Bebr et CS ses excellentes relations avec le Gonvernenent et la société des États-Unis, nous a été confirmé par un juge compétent en fait de diplo- ët M. els iam qi sous-secrétaire d'État depuis près d’un demi- | étrangères à Washington. M. Hunter a passé récemment quelques jours à Bruxelles. Rien n’est plus intéressant que de l'entendre, dans l’épanchement de la conversation intime, apprécier les hommes et les choses qu’il a pu observer pendant sa longue et féconde carrière. H d | 2 | CFA a voté la médaille d'or de six cents francs au travail ayant pour devise ` Laboremus. L'ouverture du billet eacheté qui y était joint a fait connaître comme en étant l’auteur, M. An.-Auc. ne CEULENEER, étudiant à l'Université catho- lique de Louvain. En réponse à la deuxième question, relative à l'Exrosé DE LA PHILOSOPHIE DE SAINT ÂNSELME DE CANTORBERY, Un seul mémoire, portant pour devise : Aliter... quam priores, etc., a été reçu. La classe, sur les conclusions favorables des rapports de ses Commissaires, a voté la médaille d’or de six cents franes à ce travail. Il a pour auteur, ainsi que l’a fait connaître louverture du billet cacheté, M. A. Van WEDDINGEN, doc- teur en théologie, aumônier de la cour, à Bruxelles. La troisième question du concours concernait la THÉORIE ÉCONOMIQUE DES RAPPORTS DU CAPITAL ET DU TRAVAIL. Elle a donné lieu à sept mémoires, dont voici les devises : 1° Il faut beaucoup de philosophie pour observer les faits qui sont trop près de nous; 2 Als Beitrag zu einem Werke, zu einer That der Zukunft (Scuurze Decrrscn ); 5° Un pour tous et tous pour un; 4 Le capital est presque la vie matérielle des États, ete. (Rossi) ; 5 Mettre la lumière à la portée de toutes les intelli- gences, c’est le plus sûr moyen de détruire les sophismes; Primo vivere; T° Conscience et science font la devise de l'homme de bien. Conformément aux conclusions de ses rapporteurs, la (1120 classe a décerné la médaille d’or, de la valeur de mille francs, au mémoire n° 5 portant pour devise: o Mettre la lumière, ete. » L'ouverture du billet cacheté a fait connaître, comme étant l’auteur de ce travail, M. Josepa Daugy, régisseur du Moniteur belge, à Bruxelles. La classe a été au regret, à cause de la forme exception- nelle de cette œuvre, de ne pouvoir en voter l'impression dans le recueil de ses Mémoires, comme pour les autres travaux Couronne, Mais elle recommandera l’auteur au Gouvernement, afin de lui faciliter les moyens de publier son travail, de ma- nière à mettre celui-ci à la portée de toutes les classes de la société. CONCOURS HISTORIQUE SEXENNAL DE STASSART. La deuxième période sexennale du concours institué par le baron de Stassart, pour une question d'histoire na- tionale , avait été ouverte par le sujet suivant : Exposer quels étaient, à l’époque de l'invasion francaise, en 1794, les principes constitutionnels communs à nos diverses provinces et ceux qui étaient particuliers à cha- cune d'elles. Un mémoire a été reçu en réponse à cette question. Il a pour devise : Laboremus. La classe, après avoir entendu la lecture des rapports de ses commissaires sur ce travail, a décidé de lui décer- ner le prix habituel de trois mille francs. L'ouverture du billet cacheté a fait connaître que l’auteur est M. Emo PouLLer, professeur à l'Université catholique de Louvain ( 773 ) et correspondant de l’Académie, pour la cinquième fois lauréat de la Compagnie. La classe est heureuse, a dit M. le secrétaire perpétuel, de pouvoir adresser publiquement à M. Poullet ses vives félicitations, pour les beaux succès qu'il a remportés dans les concours académiques. CONCOURS TRIENNAL DE LITTÉRATURE DRAMATIQUE FRANÇAISE. Par arrêté royal du 29 juillet 1873, Sa Majesté le Roi, conformément aux propositions du jury chargé de juger le concours triennal de littérature dramatique française, pour la période de 1870-1872, a décerné le prix de cette période à M. CHarLes PorviN, pour son drame en quatre actes el en vers, intitulé : La mère de Rubens. CONCOURS TRIENNAL DE LITTÉRATURE DRAMATIQUE FLAMANDE. Par arrêté ministériel du 5 mai courant, M. le Ministre de l’intérieur, sur les propositions du jury chargé de juger le concours triennal de littérature dramatique flamande, Pour la période de 1871-1875, a décerné le prix de cette période à M. Désiré Dezcroix, chef de bureau au Minis- tère de l’intérieur, pour son drame historique en huit tableaux, ayant pour titre : Philippine van Vlaanderen, acht tafereelen uit de geschiedenis van ’t Vaderland. Tous les lauréats , à l'exception de M. Potvin, absent, sont venus recevoir au bureau, aux acclamations de l'as- semblée, les distinctions qu'ils avaient remportées. M. le directeur, en leur remettant à chacun leur prix, les a vivement félicités au nom de la Compagnie. ( 774 ) RÉSULTAT DES ÉLECTIONS. Dans sa séance dn 4 de ce mois, la classe a procédé à l'élection de deux correspondants , ainsi qu’au remplace- ment de trois de ses associés décédés, MM. Amédée Thierry, John Stuart Mill et le comte Manzoni. Elle a porté ses suffrages : Pour les deux nominations de correspondant, Sur M. G. RounN-JarquEemyns, avocat, directeur de la Revue de droit international , à Gand, et M. SranisLas BORMANS, archiviste de PÉtat, à Namur. Pour les trois places d’associé, sur MM. DESMAZE, conseiller à la cour d’appel de Paris, JULES OPPERT, pro- fesseur au Collége de France, à Paris, et le professeur JoxckBLoer, à La Have. theme (775) CLASSE DES BEAUX-ARTS. — Séance du 6 mai 1874. M. N. De Keyser, directeur, président de l’Académie. Sont présents : MM. L. Alvin, G. Geefs, A. Van Hasselt, Jos. Geefs, Ferd. De Braekeleer, C.-A. Fraikin, Éd. Fétis, Edm. De Busscher, Alph. Balat, Aug. Payen, le chevalier L. de Burbure, J. Franck, G. De Man, J. Leclercq, Ernest Slingeneyer, Alex. Robert, F.-A. Gevaert, Ad. Samuel , membres; Th. Radoux , correspondant. M. Éd. Mailly, correspondant de la classe des sciences , assiste à la séance. e CORRESPONDANCE. M. von Ferstel, de Vienne , remercie par écrit pour son élection d’associé de la section d'architecture. EE ÉLECTION. M. Edm. De Busscher , délégué de la classe auprès de la Commission administrative pendant l'exercice écoulé , est réélu membre de cette commission pour 1874-1875. EH (776) RAPPORT. Il est donné lecture du rapport collectif de MM. Fraikin, Franck, Leclereq et Robert sur le modèle du buste du commandeur de Nieuport, soumis à la classe par l’auteur, M. Ch. Geefs, sur l'invitation du Gouvernement. La classe approuve ce rapport, qui sera transmis à M. le Ministre de l'intérieur. COMMUNICATIONS ET LECTURES. La classe s'occupe de différents objets d'ordre intérieur relatifs aux élections. Elle ratifie ensuite la proposition, qui lui est soumise par le comité-directeur de la Caisse centrale des artistes > de continuer pour l’année actuelle le subside accordé à la veuve de l’un des membres souscripteurs. (777) Séance générale des trois classes. (Mardi, 5 mai 1874.) M. N. De Keyser, président de l’Académie. Assistaient à la séance : Classe des sciences : MM. E. Candèze, directeur ; A. Brial- mont, vice-directeur; J.-S. Stas, L. de Koninck, P.-J. Van Beneden, Edm. de Selys Longchamps, H. Nyst, Gluge, Melsens , J. Liagre, F. Duprez, G. Dewalque, E. Quetelet , H. Maus, M. Gloesener, F. Donny, Ch. Montigny, Stei- chen, E. Dupont, Ed. Morren, Éd. Van Beneden, C. Ma- laise , membres; E. Catalan, A. Bellynck, associés; Louis Henry, Éd. Mailly et J. De Tilly , correspondants. Classe des lettres : MM. R. Chalon, directeur; le baron Guillaume, vice-directeur; J. Grandgagnage, J. Roulez, Paul Devaux, J.-J. Haus, M.-N.-J. Leclercq, le baron J. de Witte, Ch. Faider, le baron Kervyn de Lettenhove, J. Tho- nissen , Th. Juste, Félix Nève, Em. de Laveleye, G. Nypels, Alph. Le Roy, Émile de Borchgrave, membres; J. Nolet de Brauwere van Steeland, Aug. Scheler et Alp. Rivier, associés, Classe des beaux-arts : MM. Balat, vice-directeur; L. Alvin, Louis Gallait, G. Geefs, Madou, Jos. Geefs, Ferd. De Braekeleer, C.-A. Fraikin, Éd Fétis, Edm. De Busscher, Aug. Payen, le chevalier Léon de Burbure, (778) J. Franck, Gust. De Man, J. Leclercq, Ern. Slingeneyer, Alex. Robert, F.-A. Gevaert, Adolphe Samuel, membres; F. Stappaerts , correspondant. Conformément à l’article 19 des Statuts organiques, les trois classes de l’Académie se sont réunies en assemblée générale afin de régler leurs intérêts communs. Avant de passer à l'examen des divers objets portés à l’ordre du jour de la séance , M. le président, s'exprimant au nom de la Compagnie tout entière, paye un dernier tribut de regrets à la mémoire de M. Adolphe Quetelet. Voici ses paroles : « C’est la première fois, Messieurs, que l’Académie se réunit en assemblée générale sans son regretté secrétaire perpétuel, M. Quetelet. Je crois être l'interprète des sen- timents unanimes de mes confrères en rendant ici un suprême hommage à l’homme qui, pendant plus de cin- quante années , s’est dévoué entièrement aux intérêts de notre Compagnie et dont le nom restera toujours attaché aux services qu’elle a pu rendre, durant cette longue période, aux intérêts intellectuels du pays et à la science. » Des acclamations prolongées accueillent eette motion. Le même accueil chaleureux est fait à une proposition de M. Montigny, contenue dans la lettre suivante, dont il est donné lecture : | | | | | (779) « Bruxelles, le 4 mai 1874. » MONSIEUR LE PRÉSIDENT, » Je vous prie de bien vouloir donner communication de la proposition suivante à l’Académie, lors de sa pro- chaine assemblée générale : « Pai l'honneur de proposer à l’Académie d'examiner, quand elle le jugera convenable, s'il ne lui appartient pas de prendre l'initiative d'ouvrir une souscription publique dont le produit serait consacré à l'érection d’un monument a Adolphe Quetelet dans la capitale. » Qu'il me soit permis de toucher ici quelques considé- rations que j'aurais demandé à développer de vive voix, à l'appui de cette proposition , si les questions qui figurent à l’ordre du jour de l’assemblée générale ne devaient nécessairement absorber la majeure partie du temps qui lui sera consacré. » Dans la supposition que ma proposition fût agréée par l’Académie, la pensée qui animerait la Compagnie, en prenant sous ses auspices cette souscription générale, serait , me paraît-il, l'expression du plus haut témoignage d'estime et de considération que ce corps savant püt donner à la mémoire de son regretté secrétaire perpétuel. » L'appel de l’Académie serait entendu, n’en doutons Point, par tous les amis des sciences, des lettres, des arts en Belgique, et, espérons-le, dans les régions élevées du Pouvoir, sans que nous en séparions cette noble cité où Adolphe Quetelet reçut le jour et qui se montre si soi- neuse de tout ce qui peut rehausser sa gloire et celle de ses enfants illustres. » Le concours de ces pensées, de ces actions géné- ( 780 ) reuses, dû à l'initiative de l'Académie, assurera l'érection d'un monument à celui qui fut, comme vous l'avez si bien dit, Monsieur le président, lors de ses obsèques, la plus incontestable illustration de la Belgique dans le do- maine des sciences et celui de ses savants qui avait su acquérir la réputation la plus universelle. » Alors notre capitale partagera avec la ville de Liége, qui a élevé une statue à André Dumont, l'honneur de posséder également un monument érigé à une illustration scientifique appartenant à l’époque actuelle. » Cet hommage public rendu à la mémoire d'un homme qui s’est distingué par de rares mérites pendant une exis- tence si utile et si laborieuse, sera toujours un stimulant et un haut enseignement pour les esprits d'élite; ils se rappelleront, à sa vue, les choses qu’il est accordé à de grands talents de pouvoir réaliser, lorsqu'ils sont secondés par une force de volonté et une persévérance remarqua- bles dans l’accomplissement de travaux dont l'honneur rejaillit sur la Belgique » Veuillez agréer, Monsieur le président, l'expression de mes sentiments les plus distingués. » Signé : CH. MONTIGNY, » membre de l’Académie. » L'assemblée décide que la commission administrative sera chargée de réaliser les intentions exprimées dans la lettre de M. Montigny , laquelle a reçu, comme nous l'avons dit plus haut, l’assentiment général. — On passe au premier objet inscrit à l'ordre du jour, c’est-à-dire la lecture du rapport suivant de M. de Bus- | ( 781 ) scher , secrétaire de la commission de la Biographie natio- nale, sur les travaux de cette commission pendant l’année 1873-1874 : COMMISSION DE LA BIOGRAPHIE NATIONALE. Treizième rapport annuel (1873-1874). Le rapport annuel sur les délibérations et les travaux de la commission chargée de publier la Biographie natio- nale, se restreint, naturellement, de plus en plus. Durant l'exercice 1873-1874, les délégués académiques n’ont pas û se réunir, aucun incident, aucune question urgente n'ayant exigé leur intervention officielle. Les pouvoirs attribués au bureau ont suffi pour la direction de l’œuvre et sa gestion, telles qu’elles ont été établies par les délibé- rations et les résolutions antérieures. Les travaux de rédaction sont en constante activité; ils s'effectuent avec régularité et nul ralentissement n’est à prévoir tant qu’on observera les dispositions qui ont été prescrites et acceptées. Les notices biographiques sont généralement remises aux termes fixés ou, du moins, au fur et à mesure que doit se faire leur examen par le sous- comité de révision, et du besoin de la composition typo- graphique. Si, parfois, un empêchement involontaire, de nouvelles études, des renseignements tardifs arrêtent'notre marche, ces arrêts, peu fréquents d'ailleurs, sont inhé- rents à toute entreprise littéraire collective, à toute œuvre ( 782 ) académique, pour lesquelles on a recours à la participation de nombreux collaborateurs. La plupart d’entre eux ont des devoirs à remplir; ils ne peuvent consacrer à celte coopé- ration spéciale que les loisirs que leur laissent l’accomplis- sement de ces devoirs et leurs travaux ordinaires. Ces circonstances ont été prises en considération et prévues dans les résolutions adoptées par la commission, aussi bien que dans les conditions soumises à limprimeur- éditeur de la Biographie nationale et dans les engage- ments qui en furent la suite. Si l'impression de la seconde partie du tome IV de la Biographie nationale n’a pas été terminée aussi prompte- ment que nous l'avions présumé, ce retard n’est point im- putable à la commission directrice : il a eu pour cause un chômage inattendu des travaux typographiques. Toutefois, l’époque normale n’a pas été de beaucoup dépassée. Dans nos rapports annuels antérieurs, nous avons, à plusieurs reprises, démontré que l’on ne pouvait s'attendre à voir notre publication marcher vile et régu- lièrement. Les quatre volumes aujourd’hui imprimés comprennent ensemble environ 1,650 articles; trois notices importantes, consacrées à de grandes figures historiques : Charlemagne, Charles Martel et Charles-Quint, y occupent plus d'un demi-volume. Nous sommes donc arrivés au tiers de la Biographie nationale; car, des onze mille noms inscrits dans nos listes provisoires, plus de la moitié seront, très- probablement, éliminés de ouvrage. On sait, du restè, qu’ils ne sont point éliminés définitivement, mais tenus en réserve, jusqu’à ce que des recherches ultérieures, des renseignements nouveaux leur donnent plus de notoriété, plus d'intérêt ,et permettent de les accueillir dans les Sup- ( 783 ) pléments à publier successivement et destinés à compléter l'œuvre académique aux époques décennales réglemen- taires. La crainte de voir la Biographie nationale prendre une extension démesurée disparaît à mesure qu’avance la ré- daction des notices. L'ouvrage ne comptera ni trente, ni vingt-cinq, ni même vingt volumes, comme on s’est plu à le supputer, à le reprocher , en quelque sorte , à la com- mission déléguée : il n’aura guère plus de douze volumes, ainsi que nous l'avons estimé, et inscrit dans le Rapport général inséré au LivRE DU CENTIÈME ANNIVERSAIRE DE L'Acanémie. Et lorsque l’on considère l'énorme quantité de faits, de données inédites, de rectifications historiques qui y Seront consignées pour plus de cing mille individualités, il faut bien convenir qu’il serait difficile, ou sans utilité, de les condenser davantage. Dans le tome IV a commencé la série des noms à Fini- tiale D. Le tome V sera entièrement absorbé par la suite de ces noms; mais il est à remarquer que les séries B et D sont les plus considérables de notre nomenclature alpha- bétique provisoire; malgré les nombreuses éliminations qu’elles ont subies ensuite, elles sont restées composées, respectivement, de sept cent trente-deux et de huit cent Cinquante noms. Pour les opérations préliminaires de la rédaction, nous en sommes arrivés aux séries G et H. La double liste des noms de ces séries, avec l'indication des livres ou recueils dont ils ont été extraits, est sous presse; ces in- dications des sources facilitent beaucoup les recherches des auteurs, et diminuent la correspondance du secréta- riat. Cette liste sera communiquée, incessamment, aux Collaborateurs déjà inscrits et aux membres de l’Académie ( 784 ) qui wont pasencorefait de choix, afin qu'ils y désignent les notices biographiques à leur réserver. Nous espérons que d'autres confrères se joindront à ceux qui nous ont prêté leur concours. La distribution entre les collaborateurs des noms choisis dans la série E a été effectuée. Plusieurs des articles en sont même déjà parvenus au secrétariat de la commission. Bientôt aura lieu la répartition des articles de la série sui- vante, Sauf quelques notices, que nous recevrons encore en temps utile, sans doute, nous sommes en possession, aujourd’hui, de la copie manuscrite du 5° volume de la Biographie nationale. Le nombre des rédacteurs a peu varié depuis que nous avons commencé la publication de notre œuvre patriotique. Nous en comptons soixante et dix : trente et un académi- ciens et trente-neuf écrivains belges étrangers à la Com- pagnie. Le nombre total a peu varié, disons-nous, et, cependant , la mort nous a enlevé, depuis 1866, sept de nos collègues de l’Académie : MM. Blommaert, Coemans, de Ram, baron J. de Saint-Genois , Fr. Fétis, Polain, Ad. Quetelet, Snellaert ; neuf confrères littéraires : MM. J. Borgnet, Britz, Broeckx, Ulysse Capitaine, Fréd. Hennebert, Kuyl, Lecouvet , Pol. Vander Meersch et H. Raepsaet. Les quatre premiers volumes de la Biographie nationale sont entre les mains de tous les membres titulaires et cor- respondants de l’Académie ; ils ont été distribués par le Gouvernement aux bibliothèques publiques et aux princi- paux établissements d'enseignement. De son côté , l’ Aca- démie a étendu , autant que possible, le cercle des insti- tutions scientifiques , littéraires et artistiques du pays et de l'étranger qui participent à l'échange ou à la répartition ( 785 ) des exemplaires dont elle peut disposer. Cette publicité gratuite est augmentée encore par l'intérêt et la curiosité croissante qu'excite le dictionnaire biographique belge- Mais nous avons à reproduire ici l'expression du regret éprouvé par la commission de voir que l’imprimeur-édi- teur de l’œuvre semble ne pas vouloir comprendre le prix qu'attachent le gouvernement et l'Académie à ce que la Biographie nationale soit largement propagée. De toutes parts continuent à arriver au secrétariat des demandes d'explications à cet égard. En effet, sans les distributions du gouvernement et de l’Académie, la publicité de la Biographie nationale serait presque nulle. Et non seule- ment l'éditeur s’obstine à ne pas mettre l'ouvrage en vente par demi-volume, comme le stipule le contrat de 1869, mais il se refuse, à ce qu'il paraît, à se conformer aux usages de la librairie en Belgique. Le public, celui de la province surtout, est ainsi privé des facilités que les édi- teurs lui offrent, d'ordinaire, en intéressant dans la vente leurs intermédiaires. Il reste à juger s’il est impossible de remédier, dès maintenant, à cet état de choses, ou s’il faut attendre l’époque de la nouvelle prolongation du contrat quinquennal (novembre 4874)? Quoi qu'il en soit, il est indispensable que les intentions du gouvernement et de ‘Académie ne soient pas méconnues plus longtemps. Le mode financier prescrit, en 1872, à la commission de la Biographie nationale, par le Département de l’inté- rieur et la cour des comptes, est suivi actuelle@ent par le secrétaire-trésorier. Les reliquats des subsides annuels alloués pour la publication sont , à la fin de chaque exer- cice, restitués au trésor ` pour 1872, la somme non em- ployée s’est élevée à 2,172 francs. Pendant l'année qui s’est écoulée depuis notre précé- 2° SÉRIE, TOME XXXVII. ( 786 ) dent rapport, la commission de la Biographie nationale à perdu , par le décès de M. Ad. Quetelet , un savant collègue, notre vice-président, et un zélé coopérateur. Dès l'institu- tion de la commission déléguée, il prit part à nos délibéra- tions, à tous nos travaux, et, en sa qualité de secrétaire perpétuel de l’Académie, il facilita les relations du bureau et du sous-comité avec les collaborateurs. Nul doute que la commission de la Biographie nationale ne rencontre chez son successeur au secrétariat académique le même sympathique et obligeant concours. La classe des sciences, appelée à remplacer M. Adolphe Quetelet par un autre de ses membres, a élu M. le colonel Liagre. Précédemment , la classe des lettres avait élu M. Alphonse Le Roy à la place de M. le baron Kervyn de Lettenhove, démissionnaire. Dans la réunion du 3 mai dernier , la commission 3 installé les deux nouveaux délé- gués et, procédant ensuite à la reconstitution partielle du bureau, a nommé, par acclamation , M. P.-J. Van Beneden, iacrobre de la classe des sciences, vice-président pour la période de 1874-1878. Nous n'avons plus à constater, seulement, que la Bio- graphie nationale se poursuit avec succès : nous pouvons, aujourd'hui, croire à sa réussite complète. La sympathie publique, aussi bien que l’impatience que lon montre par- tout de voir paraitre les volumes successifs de l'œuvre académique, est le signe certain de cette réussite. Les quatre premiers volumes de la Biographie nationale ont placé l'ouvrage au rang des plus utiles publications belges. Les applaudissements de l'assemblée accueillent la lec- ture du rapport précédent. Des remerciments sont votés à (HOr) la commission directrice de la Biographie nationale et à son secrétaire, M. Edmond De Busscher. — Il est ensuite donné communication des délibérations de la commission mixte des trois classes chargée d’exami- ner les questions soulevées par le remplacement de M. Que- telet commé secrétaire perpétuel. L'assemblée, consultée sur le point de savoir si elle entend apporter des modifications aux statuts, répond presque unanimement d’une manière négative. On pro- cède, en conséquence , au vote pour l’élection du nouveau secrétaire perpétuel : M. J. Liacre, membre de la classe des sciences, est élu. Cette nomination, conformément à l’article 13 des Statuts organiques, sera soumise à S. M. le Roi, Protecteur de l'Académie. M. Liagre, en remerciant l'assemblée, dit qu'il mou- bliera jamais le témoignage qu'il vient de recevoir de l’Académie. « Je serai toujours heureux, ajoute-t-il, que mes confrères maient jugé digne de remplir ce que je regarde comme une mission de confiance, et j'aurai con- Slamment à cœur d'être l’exécuteur fidèle et consciencieux des décisions de la Compagnie. » — L'assemblée s’est occupée en dernier lieu des autres objets portés à son ordre du jour , puis M. le président a z déclaré la séance levée. (TER OUVRAGES PRÉSENTÉS. Académie royale de Belgique : Commission pour la publi- cation d’une collection des grands écrivains du pays. — OEuvres de Froissart, publiées par M. le baron Kervyn de Let- tenhove : chroniques, tome XVII" , pièces justificatives (1319- 1599). Bruxelles, 1874; in-8°. De Witte (le baron J.) et de Longpérier (Adrfèn). — Revue de numismatique, nouvelle série, tomes XIV: et KN", années 1869,1870 et 1874. Paris; 5 cah. in-8°. De Witte (le baron J.). — Monnaies romaines de l’époque impériale. In-8°. Kervyn de Lettenhove (le baron). — Histoire de Flandre, 5° édition, tomes I à IV. Bruges, 1874 ; 4 vol. in-8°. (Envoi du Ministère de l’intérieur.) Volet de Brauwere van Steeland (UF J.). — West-vlaamseh Taal- Se In-8°. Crépin (Francois). — Manuel de la Flore de Belgique, 3° édit. Bruxelles, 1874; vol. in-12. De Ceuleneer (Adolphe). — Eenige woorden over het schoone in de kunst. Louvain, 1874; broch, in-8°. Lyon (Clément).— Humbles fleurs : Poésies. Charleroi, 1874; broch. in-8°. Mathieu (Ernest). — Rapport sur les travaux de la Société littéraire de l'Université catholique de Louvain pendant l’année 1872-1875. Louvain, 1875; broch. in-8°. Mourlon (Michel). — Observations sur le classement des couches tertiaires moyennes dans le Limbourg belge. Bruxelles; broch. in-8°. O’Kelly de Galway (Alp.). — Histoire des relations diplo- matiques et historiques des Pays-Bas et de la Belgique avec ( 789 ) la Perse. Bruxelles, 1873; vol. in-8°. (Envoi du Ministère de l'intérieur. Vluminck (Alph. de). — Notice historique sur les accises commerciales de Termonde. Termonde, 1875; cah, in-8. Gomzé (Corneille). — Plumes vapeur. Traité des plumes compas ou plumes de laiton sans fente. (rz édition. Verviers, 1874; vol. in-4° oblong. Les Rédacteurs du e Rond den Heerd ».— Lettre à M. le D" J. Nolet de Brauwere van Steeland au sujet de la note sur le particularisme linguistique flamand de la Flandre occiden- tale. Bruges, 1874; broch. in-8°. Royaume de Belgique. Ministère de l'intérieur. — Bul- letin du conseil supérieur d’agriculture : situation de lagri- culture, année 1872, tome XXVII; — Procès-verbaux du con- seil, session de 1874, tome XXVII, Arr partie. Bruxelles, 1874 ; 2 cah. in-4° (exemplaire en triple); — Rapports de l'enseigne- ment des arts du dessin. Bruxelles, 1874; vol. in-8°. Royaume de Belgique. Ministère des Travaux publics. — Annales des travaux publics, tome XXXI, troisième cahier. Bruxelles, 1875 ; in-8°. Académie royale des beaux-arts, à Anvers. — Rapport annuel et distribution solennelle des prix , année académique 1875-1874. Anvers; broch. in-8°. Académie royale de médecine de Belgique. — Bulletin, année 14874, IIe série, tome VIII, n° 3 et 4. — Mémoires couronnés, in-8°, tome II, 2° fascicule. Bruxelles, 1874; 2 cah. in-8°. Société malacologique de Belgique. — Annales, tome VII, année 1875. Bruxelles; vol. in-8°. Société royale de botanique de Belgique. -— Bulletin, tome CIE, n°5. Bruxelles, 1874; in-8°. Commission royale de pomologie. — Annales, Ve année, 1857, n% 7-12. Bruxelles, 18357; 2 cah. gr. in-4°. (Envoi du Ministère de l'intérieur.) ( 790 ) Société d Émulation pour l’étude de l’histoire et des anti- quités de la Flandre, à Bruges. — Annales, II: série, tome VIII, n°‘ 5 et 4. Bruges, 1875; cah. in-8°. Willems-Fonds te Gent. — Uitgave n° 76 : J. Martens, De lichtteekening of photographie op collodion en papier; — Uitgave n° 77 : Max Rooses, Brieven van Jan-Frans Willems. Gand, 1874; 2 vol. pet. in-8°. Société chorale et littéraire des Mélophiles de Hasselt. Bulletin de la section littéraire, 10° vol. Hasselt, 1875; ini-8°. Société littéraire de l'Université catholique de Louvain. — Statuts. Louvain, 1874; broch, in-8°. Analectes pour servir à l’histoire ecclésiastique de la Bel- gique, tome XI, Ire livr., 1874. Louvain; in-8°. Cercle archéologique de la ville et de l’ancien pays de Ter- monde. — Annales, Ile série, tome IH, 417°, 2° et 5° livr. Ter- monde , 1875-1874; 2 cah. in-8°. Sivering (Jos.). — Le bassin de la Sure. Étude hydrogra- phique. Luxembourg, 1874; broch. in-8°. Nederlandsch gasthuis voor ooglijders. — Veertiende jaar- lijksch verslag. Utrecht, 1873; vol. in-8°. amy (E.-T.). — Note sur quelques ossements humains découverts dans la troisième caverne de Goyet, près Naméche (Belgique). Paris, 1875 ; broch. in-8°. Hugo (le comte Léopold). — Une réforme géométrique. Introduction à la géométrie descriptive des eristalloïdes. Paris, 1874; broch. in-8°. Diez (Frédéric).— Grammaire des langues romanes, 5° édit., tome fe, 4°" et 2° fascicules. Paris, 1873-1874; in-8°. (Envoi du Ministère de l'instruction publique et des cultes de la Répu- blique française.) Hautcœur (l’abbé E.). — Cartulaire de l'abbaye de Flines, tomes I et II. Lille, 1875; 2 vol. in-8°. Le Blant (Edmond). —- Recherches sur les bourreaux du PP ces ie Len ce. + 1 smemanatRee entend été ee (TH ) Christ; — Lettre à M. l'abbé Corblet sur quelques observations de M. Naudet. Arras, 2 broch. in-8°. Terninck (M.-A.). — Études sur l’Attrébatie avant le sixième siècle , livr. 4 et 2; tome 2° et atlas. Arras, 1866-1874; 2 vol. in-8° et un atlas de 42 planches. Tremaux (P.). — Principe universel du mouvement et des actions de la matière, 2° édit. Paris, 1874; vol. in-12. Wiszniewski (le prince Adam). — Histoire de la Banque de S'-Georges. Paris, 1865; vol. in-8°. (Envoi du Ministère de l'intérieur.) Société linnéenne du nord de la France, à Amiens. — Bul- letin , n° 25 et 24, année 1874. Amiens; 2 feuilles in-8°. Société des antiquaires de Picardie, à Amiens. — Bulletin, n° I, 1874. Amiens , 1874; cah. in-8°. Société des sciences physiques et naturelles de Bordeaux. — Mémoires, tome IX, 4% et 2° cahiers; — Extraits des procès- verbaux des séances. Bordeaux , 1874; 2 cah. et 1 feuille in-8°. Académie nationale des sciences, belles-lettres et arts de Bordeaux. — Actes, 3° série, 54° année, 1872-1875, 5° et Är trimestres. Paris, 1875-1874; 2 cah. in-8°. Archives générales du département de la Côte-d'Or et lan- cienne province de Bourgogne, à Dijon. — Inventaire som- Maire des archives départementales antérieures à 1790, par MM. Garnier et Rossignol. Archives civiles , série B, tomes F, H et II. Paris, 1865, 1865 et 1875 ; 5 vol. in-4°. Société géologique de France. — Bulletin, Ulf série, t. 1°”, n“ 4 et 2, avril-mai 1874. Paris; cah. in-8°. Société nationale des antiquaires de France. — Mémoires, tome XXXIV"; 4° série, tome IV. Paris, 4875; vol. in-8°. Société des études historiques, à Paris. — L'Investigateur 40° année, février et mars 1874. Paris ; cah. in-8°. Revue des eege? Pais 8° année, 30° livraison , 1% avril 1874. Paris; Société d Niege. sciences et arts de Corroudissement ( 792 ) de Valenciennes. — Revue agricole, tome XXVII, 26° année, 1874, n° 5 et 4. Valenciennes; in-8° Becker (H.-A.). — Die Sammlungen der vereinten Fami- lien- und privat Bibliothek Sr. M. des Kaisers, 1. Bd. Vienne, 1875; vol. gr. in-4°. Hasert (Bruno). — Neue Erklärung der Bewegungen in Welt-System. Eisenach, 1874; broch. in-8°. Von Reumont (Alfred). — Lorenzo de’ Medici il Magnifico, 1e et 2° volumes. Leipzig, 1874; 2 vol. in-8°. Beckh-Widmanstetter (Leopold). — Ulrich’s von Liechten- stein, des Minnesängers , Grabmal auf der Frauenburg. Gratz, 4871; in-8°. Luschin (Dr.). — Uebersicht aller in den Schriften des historischen Vereins für Steiermark bisher verôffentlichten Aufsätze, ferner der historischen oder die Steiermark betref- fenden Artikel in der Steiermärkischen Zeitschrift. In-8°. Dingler’s polytechnisches Journal, Bd. CCXII, Heft I. Augsbourg, 1874; in-8°. Künigl. preussische Akademie der Wissenschaften zu Ber- lin. — Inhalts-Verzeichniss der Abhandlungen, aus den Jahren 1822 bis 1872. Berlin, 1875; cab. in-8°; — Monatsbericht, März 4874. Berlin, 1874; cah. in-8°. Physikalische Gesellschaft zu Berlin. — Die Fortschritte der Physik, XXV. Jahrgang, 1869. Berlin , 1875-1874; 2 vol. in-8°. Berliner Gesellschaft für Anthropologie, Ethnologie und Urgeschichte. — Sitzung, November und December, 1875. Berlin; 2 cah. in-8°. Deutsche chemische Gesellschaft zu Berlin. — Berichte, VU. Jahrg., n°: 5 à 9. Berlin, 1874; Š cah. in-8°. Verein von Alterthums Freunden im Rheinlande, zu Bonn. — Jahrbücher, Heft LIL und LIV. Bonn , 1875; vol. in-4°. Naturwissenschaftlicher Verein zu Bremen. — Abhand- lungen ` HI. Bd., IV. (Schluss —) Heft; IV. Bd., I. Heft; — Bei- lage n° 3. Brême, 1875-1874; 2 cah. in-8° et 4 cah. in-4°. ( 793 ) Verein für Erdkunde und verwandte Wissenschaften zu Darmstadt. — Notizblatt, III. Folge, XII. Heft., n° 153-144. Darmstadt , 1875 ; cah. in-8°. Ph “echolischer Verein zu Frankfurt am Main. — Jarhes- Bericht, 1872-1875. Francfort sur le Mein; in-8°. Oberlausitzische Gesellschaft der Wissenschaften zu Gör- litz. — Neues Lautsitzisches Magazin, 50. Bd., 2. Heft. Görlitz, 1875; cah. in-8° Justus Perthes’ geographischer Anstalt zu Gotha.— Mitthei- lungen, 20. Bd., 1874, II, IV und V; — Ergänzungsheft, Nr. 56 und 37. Gotha ; 5 cah. in-4°. Historischer Verein für Steiermark zu Grüz. — Mitthei- lungen, XXI. Heft; — Beitrage zur Kunde Steiermarkischer Geschichtsquellen , X. Jahrgang. Gratz , 1873; 2 cah. in-8°. Université de Heidelberg. — Thèses académiques pour les années 1873 et 1874; 10 broch. in-8°. Statistische Bureaus der kön. Freistadt Pest. — Unter- suchungen über die Einkömsten der Stadt Pest für das Jahr 1870. Pesth, 1875; cah. in-4°. | Verein für Natur- und Heilkunde zu Presburg.— Verhand- lungen, Jahrgang 1872-1875, neue Folge, 2. Heft. Presbourg, 1874; in-8° Entomologischer Verein zu Stetiin. — Entomologische Zeitung, 55. Jahrgang , n° 4-6. Stettin , 1874; cah. in-8°. Kaiserlische Akademie der Wissenschaften in Wien. — Sit- zung der mathem.-naturw. Classe, Jahrg. 1874, nr. VH — XII. Vienne; 6 feuilles in-8°. K. K. geologische Reichsanstalt zu Wien. — Abhandlungen, Bd. V, Heft Nr. 6 : Die Fauna der Schichten mit Aspidoceras Acanthicum, von Dr M. Neumayr. Vienne, 1875; in-4°; — Verhandlungen, Jahrgang 1875, nr. 44-48; — Jahrbuch, Jahrgang 1873, XXIII. Bd., IV. Heft. Vienne; 2 cah. in-8°. Zoologisch-botanische Gesellschaft in Wien. — Verhand- lungen, Jahrgang 1873, XXIII. Bd. Vienne, 1875; vol. in-8°. ( 794 ) Antropologische Gesellschaft in Wien. — Mittheilungen, Bd. HE, nr. 10. Vienne, 1875; in-8°. K. K. Universität zu Wien. — Offentliche Vorlesungen in Sommer-Semester 1874. Vienne, 4874; 2 cah. in-4°. Physicalisch-medicinische Gesellschaft in Würzburg. — Verhandlungen, neue Folge, VI. Bd., 1. und 2. Hefte; 3. und 4. (Schluss-) Hefte. Wurzbourg , 1874; 2 cah. in-8°. Margó (Tivadar). — Osszehasonlité bonctani Készitményck. Buda Pesth; feuille in-8°. Margó (Theodor).— Vergleichend-anatomische Praeparate. Buda Pesth, 1874; feuille in-8°. Reg. scient. Universitatis Ung., Buda Pesten. — Acta, anni 1872-73, Fase. I (I-V), Fasc. H; anni 1873-1874, Fasc. I (I-I); — A Magyar Királyi Tudomany-egyeteem : Almanachia, 1872-75 röl. ; Téli Szakára , 1872-75-74 Tanév; Nyári Szakára, 1872-1875 Tanév. Buda-Pesth ; cah. in-8°. K. Akademie der Wissenschaften zu S'- Petersburg. — Repertorium für Meteorologie , Bd. HI. St-Pétersbourg, 1874; vol. in-4°. Physikalische Central-Observatorium, S'-Petersburg. — Annalen, Jahrgang 1872; — Jahresbericht für 1871 und 1872. S'-Pétersbourg, 1875; vol. et cah. in-4°. Société de chimie de St-Pétersbourg. — Journal, tome VI, n” 5, 4 et 5. St-Pétersbourg, 1874; 5 cah. in-8° (En russe.) Institut impérial des mines de S'-Pétersbourg. — Relation de la fête du jubilé séculaire. St-Pétersbourg, 1874; vol. in-8°. (En russe.) Société impériale d'agriculture de Moscou. — Journal, année 1875, tome XIV, n° 4; tome XV,n® 5 et 6. Moscou; 3 cah. in-8°; — Recueil d'articles, 1872. Moscou , 18753; cah. in-8°. (En russe.) i : Société impériale des naturalistes de Moscou. — Bulletin, année 1873, n° 3. Moscou, 41874; in-8°. Université impériale de Kazan. — Bulletin et Mémoires, Benn Ti — . "2 nes ( 795 ) tome XL, n° 4, 5 et 6. Kasan, 1875; 5 cah. in-8°. (En russe). Société royale des sciences, à Upsal. — Bulletin météorolo- gique de l'Observatoire de l'Université d'Upsal, vol. IV, n° 1-12; vol. V, n° 1-6. Upsal, 1872-1875; 5 cah. gr. in-4°. Göteborgs kongl. Vetenskaps och Vitterhets Samhälles. — Handlingar, Ny Tidsföljd, 12. Häftet. Gothembourg, 1875; in-8°, Nordiskt medicinskt Arkiv, Bd. VI, n° 1-9, 1874. Stock- holm; in-8° Studer (B.). — Geologisches vom Aargletscher; — Die Gotthardbahn; 2 broch. in-8°. Nalurf{orschende Gesellschaft in Basel. — Verhandlungen , FE, SE ` Vote Bâle, HR in- ti ecologische Commission der Schweize) he Naturforschende eem in Basel. — Beitrüge sur OR Karte der Schweiz, Zehnte Lieferung. Berne, 1874; vol. in-4°; — Geo- logische Karte des Sentis RARE von Arnold Escher von der Linth; 4 feuilles in fol. Naturforschende Gesellschaft Graubündens zu Chur. — Jahres-Bericht, neue Folge, XVII. Jahrgang, 1872-1875. Loire, 1875; vol. in-8°. Genocchi (Angelo). — Intorno ad una lettera del sig. conte L. F. Menabrea ; — Breve risposta al signor conte L. F. Mena- brea. Rome, 1875 ; 2 feuilles in-4°. De Rossi (M.-S.). — Bullettino del vulcanismo italiano , anno I, 4874, Fasc. I, UHT. IV-V. Rome, 1874 ; 5 cah. in-8°. Lombardi (Paolo). — Catalogo delle fotografie fatte sui dipinti, monumenti, sculpture, integli, ed altre opere arta. Sienne, 1874; broch. in-8°. Luvini (Giovanni). — Di un nuovo strumento meteorologico- geodetico-astronomico, il dieteroscopio. Turin, 1874; br. in-8°. Settimanni (C.). — Supplément à la nouvelle théorie des Principaux éléments de la lune et du soleil (Florence, 1871). Florence, 4874; broch. in-4°. Accademia Pontificia de’ nuovi Lincei. — Atti : 24° année, ( 796 ) mars à août 1874; 25° année, décembre 1871, à juin 1872; 26° année, décembre 1872 à juin 1875 ; 27° année, décembre 1875 et janvier 1874. Rome; 22 cah. in-4°. R. Comitato geologico d’Italia. — Bullettino, n° 4 e 2, anno 1874. Rome, 1874; cah. in-8°. Revista scientifico-industriale. — Anno VI, février et mars 1874. Florence, 1875; 2 cah. in-8°. Corrispondenza scientifica in Roma. — Vol. VIH, n° 20 et 21. Rome, 1874; 2 feuilles in-4°. Ellis (Alexander J.). — Algebra identified with geometry in a series of Five Tracts. Londres, avril 1874; br. in-8°. Tommasi (Donato). — Researches on the preparation of organo-metallie Bodies of the C, Han series. Broch. in-8°, s. L n. d Royal geographical Society of London. — Proceedings, vol. XVIII, n° IL. Londres; in-8°. Meteorological Society of London. — Quarterly Journal, new series, vol. IE, n° 9. Londres; in-8°. Royal Society of Edinburgh. — Transactions, vol. XXVII, part I; — Proceedings, session 1872-73. Édimbourg; vol. Government Observatory, Bombay. — Magnetical and metcorological observations in the years 4865 to 1870. Bom- bay , 1872; vol. gr. in-4°. Asiatic Society of Bengal at Calcutta. — Bibliotheca Indica : old series, n° 253; new series, n” 268, 294, 295, 296, 501, 502-505, 504 and 305. Londres et Calcutta, 1874; 8 cah. in-8° et 1 cah. in-4°. — Journal, part I, n° 4,4873; — Proceedings ; n° 4, january 1874. Calcutta, 1874; 2 cah. in 8°. Geological Survey of Canada. — List of publications; — Report on the fossil plants of the lower carboniferous and millstone grit formations of Canada. Montreal, 1873; cah. et br. in-8°. BULLETIN DE L'ACADÉMIE ROYALE DES SCIENCES, DES LETTRES ET DES BEAUX-ARTS DE BELGIQUE. 1874. — N° 6. me er CLASSE DES SCIENCES. Séance du 6 juin 1874. M. E. Canoëze, directeur. M. J. Luet, secrétaire perpétuel, Sont présents : MM. J.-S. Stas, L. de Koninck, P.-J. Van Beneden, Edm. de Selys Longchamps, H. Nyst, Gluge, Melsens, F. Duprez, G. Dewalque, H. Maus, M. Gloesener, Ch. Montigny, Éd. Dupont, Éd. Van Beneden, C. Ma- laise, membres; Th. Schwann , E. Catalan, Aug. Bellynck, associés; Éd. Mailly, H. Valérius, F. Folie, J. De Tilly, FL Cornet, correspondants. 2 SÉRIE, TOME XXXVIL. 52 ( 798 ) CORRESPONDANCE. M. le Ministre de l’intérieur transmet l’expédition d’un arrêté royal du 5 mai dernier, qui approuve l'élection de M. Liagre en qualité de secrétaire perpétuel de l'Aca- démie royale des sciences, des lettres et des beaux-arts de Belgique. — Le même haut fonctionnaire adresse différents ou- vrages pour la bibliothèque de l’Académie. — Remerci- ments. — La Société hollandaise des sciences à Harlem , l'Aca- démie royale danoise des sciences et des lettres à Copen- hague, la Société dunkerquoise pour l’encouragement des sciences, des lettres et des arts envoient leur programme de concours pour 1874. — La Société mathématique de Bohême, à Prague, annonce sa fondation et offre l’échange de ses publications avec celles de la Compagnie. — L'avis favorable de la classe au sujet de cette demande sera transmis à la commission administrative. — La Société royale d'Édimbourg, la Société de phy- sique de Berlin, la Société impériale et royale zoologico- botanique de Vienne remercient pour les derniers envois de publications, Ces mêmes sociétés, ainsi que l’Académie pontificale des Lyncées de Rome, envoient leurs récents travaux. — M. Cavalier adresse le résumé de ses observations ( 799.) météorologiques faites à Ostende pendant les mois d'avril et de mai de cette année. — M. F. Terby communique l'observation suivante: « Le 11 mai dernier, vers 9 h. 49 m. temps moyen de Louvain, un bolide a passé près de la Polaire, allant du sud au nord. Son éclat était plus grand que celui de Vénus. Il s'éteignit un peu plus bas que la Polaire. » — La classe reçoit de ses membres les hommages sui- vants : 1° Mémoire sur un dauphin nouveau de la baie de Rio de Janeiro, désigné sous le nom de Sotalia Brasiliensis, par M. Éd. Van Beneden. In-4°. 2° Rapport sur l’excursion de la Société malacolo- gique de Belgique à Couvin (partie paléontologique ); par M. G. Dewalque. In-8°. 5° On the tertiary brachiopoda of Belgium; by Thomas Davidson. In-8°. M. Gloesener présente, au nom de M. J. Graindorge, les deux ouvrages suivants ` 1° Traité d’algèbre élémentaire, par MM. V. Falisse et J. Graindorge, Jr" partie, 5° édition. In-8°; 2 Théorie des intégrales et des fonctions elliptiques, par M. le Dr Oskar Schlæmilch, traduit de l'allemand par J. Graindorge. In-8°. M. Catalan présente, au nom des auteurs, les ouvrages suivants : Démonstration de quelques théorèmes , au moyen de la considération d’une rotation infiniment petite, et Construction directe du rayon de courbure, etc., par M. A. Mannheim; ® Petit essai sur quelques méthodes Probables de Fermat, par M. E. Laporte. In-8°. La classe vote des remerciments aux auteurs de ces dons. ( 800 ) . Malaise , le bureau procède à louverture du billet cacheté suivant, déposé par cet académicien le 3 juin 1871, billet dont le pli porte en sus- cription ` Sur l’âge de quelques couches du terrain ardennais des environs de Spa. « Jusqu'à présent les couches anciennes de Ardenne constituant le « terrain ardennais » de Dumont n'ont donné lieu qu'à des travaux stratigraphiques. J'ai eu autrefois l'occasion de signaler à la Classe lexis- tence de débris organiques en mauvais état, qui ne m'avaient pas permis de dire s'ils appartenaient au silurien ou au cambrien (1). Il serait donc très-intéressant de trouver des fossiles qui permettraient d'établir le synchronisme de ces couches. J'ai eu le bonheur de rencontrer en 1870, aux environs de Spa, des exemplaires de Dictyonema en meilleur état que ceux que J'y avais trouvés précédemment. J'ai mis à profit un voyage scientifique que j'ai fait en Angleterre, sous les auspices de l'Académie, pour contrôler ces exemplaires. Le Dictyonema de Spa est identique au Dictyonema sociale, Salt., que l’on rencontre dans le pays de Galles, dans le Lingula Flags, qu'il caractérise et où il constitueun niveau très-remarquable. Il résulte donc de ceci que cer- (1) C. Malaise, Sur des corps organisés trouvés dans le terrain arden- nais de Dumont. BULLETINS DE L'ACADÉMIE ROYALE DE BELGIQUE, 2° série, t. XXI, pp. 566 et 567. J. Gosselel et C. Malaise, Observations sur le terrain silurien de l'Ardenne. BULLETINS DE L'ACADÉMIE ROYALE DE BELGIQUE, 2° sér. p. 115. ( 801 ) taines couches des environs de Spa représentent en Bel- gique le Lingula Flags, et qu'il y a lieu d'y rechercher d’autres espèces de cette formation. J'ajouterai que j'ai trouvé aux environs de Fumay des traces en très-mauvais état, que j'ai tout d'abord pris pour des Graptolithes. C’est peu de chose, il est vrai, mais cela donne le courage de chercher et l'espoir de trouver. » Comme suite à la communication qu’il vient de faire, M. Malaise dit qu'il a trouvé des traces de corps organisés dans les phyllades de Revin, de Fumay et de Deville du terrain ardennais de Dumont, massif de Revin et dans le salmien et le revinien, massif de Stavelot, du même terrain ardennais. Le mauvais état de ces fossiles et l'espoir d'en trouver d'autres sont la cause qu'il a différé d'en donner Connaissance à la Classe. Il rapporte les espèces trouvées aux crustacés, aux mollusques et aux bryozoaires. M. Dewalque annonce avoir déterminé depuis un cer- tain temps diverses espèces du terrain eambrien de lAr- denne. Il croit, notamment, avoir reconnu Protospongia fenestrata, Salt., des traces laissées par Hymenocaris ver- micauda, et un À gnostus qu'il a rencontrés dans le système revinien et qui caractérisent les Lingula Flags du pays de Galles; puis Oldhamia radiata, avec un petit crustacé bivalve (Primitia ?), qui provient du système devillien et qui caractérise le cambrien inférieur des iles Britanniques. Cette dernière espèce est particulièrement intéressante; elle confirme la classification de Dumont, contredite par MM. Gosselet et Malaise dans leurs Observations sur le terrain silurien de P Ardenne (Bull. de l’Académie, 2° sér., t XXVI, p. 61) pour des raisons stratigraphiques que M. Dewalque n’a jamais pu admettre (1b., t. XXV, p.413). ( 802 ) — Les travaux manuscrits suivants seront l’objet d’un examen : 1° Note sur les tremblements de terre en 1871, avec suppléments pour les années antérieures, de 1843 à 1870 (XXIX* relevé annuel); par M. Alexis Perrey, professeur honoraire à la Faculté des sciences de Dijon. — Commis- saires ` MM. J. Duprez, Ern. Quetelet et Mailly; 2° ARÉOGRAPHIE ou étude comparative des observations faites sur l'aspect physique de la planète Mars, depuis Fon- tana (1656) jusqu'à nos jours (1873); par M. F. Terby, D" en sciences, à Louvain. — Commissaires ` MM. Ernest Quetelet, Mailly et Liagre; 9° Essai théorique sur l'équilibre d’élasticité des massifs pulvérulents et sur la poussée des terres sans cohésion; par M. J. Boussinesq, professeur à la Faculté des sciences de Lille. — Commissaires : MM. De Tilly, Maus et Folie; 4° Considérations générales sur la détermination, sans calcul, de l'ordre d’un lieu géométrique; par M. L. Saltel, membre de la Société mathématique de France. — Com- missaires : MM. Catalan et Folie; 9° L’électricité statique exerce-t-elle une influence sur la tension superficielle d’un liquide? par M. G. Van der Mensbrugghe , chargé du cours de physique mathématique à l’Université de Gand. — Commissaires ` MM. J. Plateau et Duprez; G° Remarques sur la variabilité de certaines espèces du genre Laus: par M. Alph. Dubois, conservateur au Musée royal d'histoire naturelle de Belgique. — Commis- saires ` MM. de Selys Longchamps et P.-J. Van Beneden ; T° Sur la détermination de la parallaxe du soleil; par M. Wouvermans. — Commissaires : MM. Ern. Quetelet et Liagre. ( 805 ) RAPPORTS. MM. Catalan et Folie donnent lecture de leurs rapports Sur le travail de M. Simons, intitulé : Quelques réflexions sur le problème de Malfatti. La classe décide que communication de ces rapports sera faite à l’auteur avant de prendre une décision à l'égard de ce travail. Remarques sur la théorie des courbes et des surfaces ; par M. E. Catalan , associé de l'Académie. Rapport de M. Liagre, « Le mémoire de M. Catalan se compose d’une série de Propositions qui se rattachent toutes à la théorie des cour- bes et des surfaces, et dont plusieurs se trouvaient déjà énoncées dans une note déposée par l’auteur, sous enve- loppe eachetée, dans la séance du 5 février 1872. Ces propositions, au nombre de treize, forment un ensemble de nature à intéresser vivement les géomètres, et elles sont exposées avec une élégance et une concision telles, que je ne pourrais que leur faire tort en essayant d'en donner une analyse. Un premier travail de M. Catalan sur la théorie des surfaces gauches a déjà été publié dans le t. XVIII de la collection in-8° des Mémoires de l'Académie. Le travail ( 804 ) actuel se rattache au précédent, et me paraît digne en tous points de figurer dans la même collection. Je propose en outre à la classe d'adresser des remerciments à l’auteur, pour son intéressante communication. » Rapport de M. De Tilly, « Le remarquable travail de M. Catalan, que la classe m'a chargé d'examiner, et dont un extrait avait déjà été déposé par l'auteur, sous enveloppe cachetée, dans la séance du 5 février 1872, se divise en treize paragraphes, dont je vais analyser succinctement le contenu. I. A toute surface gauche en correspond une autre, qui touche la première suivant la ligne de striction commune à ces deux surfaces. L'auteur appelle ces dernières : surfaces gauches conjuguées. L'interprétation algébrique du théo- rème précédent le conduit à quelques relations simples. IT. Si, par les génératrices consécutives G, G’, G”, s. d'une surface gauche S, on mène des plans P, P’, P”, …, respectivement parallèles à G’, G”, GT, chacun de ces plans est normal à la surface au point central de la généra- trice qu'il contient et tangent à la même surface aux deux points à l'infini sur cette génératrice. Les plans P, P’, P”, …. Sont aujourd'hui appelés asymptotiques. Leur enveloppe est une surface développable x, dont les génératrices suc- cessives sont évidemment parallèles à G, G’, G”, ...., et que M. Catalan appelle la développable accompagnatrice de S. Les surfaces S et z sont asymptotiques, c’est-à-dire que leurs sections par un plan quelconque, parallèle à une génératrice, ont une asymptote commune, intersection du plan sécant avec le plan asymptotique correspondant à la génératrice considérée. WE ( 805 ) En observant que la ligne de striction d'une surface gauche ne peut être en mème temps une trajectoire ortho- gonale des génératrices que si ces dernières sont les binor- males {*) de la ligne en question, l’auteur trouve que l’'accompagnatrice du lieu des binormales d'une courbe quelconque coïncide avec la surface polaire de cette courbe (enveloppe de ses plans normaux ou lieu des axes des cercles osculateurs). La perpendiculaire commune à deux génératrices paral- lèles prises, l'une dans une surface gauche, l'autre dans son accompagnatrice, coïncide avec la normale à la surface gauche, au point central de la génératrice considérée. L'auteur calcule la distance des deux génératrices paral- èles, R II. Le troisième paragraphe est consacré à l'étude d'une surface osculatrice qui serait, en un point d'une surface quelconque, le lieu des circonférences oseulatrices aux sections normales (**). IV. Si, par tous les points d’une hélice tracée sur un cylindre droit à base quelconque, on mène des tangentes à cette hélice, ces tangentes seront les génératrices d'une surface développable à pente constante. Réciproquement, ©) La binormale d'une courbe, en un point, est la normale perpendicu- laire au plan osculateur, ou à la normale principale, qui est située dans ce dernier plan. (**) Pour les lignes, le cercle osculateur est un excellent type de la courbure, parce que c’est une ligne simple et usuelle et qu'en outre sa Courbure est la même en tous ses points. Pour les surfaces, ces deux Conditions paraissent incompatibles. Les surfaces du second ordre rem- plissent assez bien la première et les surfaces à courbure constante pour- raient remplir la seconde. Mais, à ce point de vue, je ne saisis pas l'utilité de l’osculatrice proposée. arête de rebroussement, une hélice tracée sur un cylindre dont la section droite est la développée d’une ligne de niveau. L'auteur démontre plusieurs autres propriétés parmi lesquelles je citerai la suivante : Dans le développement d’une surface à pente constante, son arète de rebroussement se transforme suivant une courbe semblable à la base du eylindre sur lequel elle est tracée, et le rapport de similitude est BH représentant l'angle de la génératrice avec le plan de la base du cylindre. V. Après s'être servi des résultats précédents pour compléter un énoncé de M. Serret, relatif aux surfaces à lignes de courbure planes (le long desquelles la surface développable formée par les normales est nécessairement à pente constante), l'auteur démontre que, deux surfaces S et S’ étant parallèles (c’est-à-dire qu’elles ont leurs normales communes), les lignes de courbure de la première sont respectivement parallèles aux lignes de courbure de la seconde (c’est-à-dire que ces lignes ont leurs plans normaux communs). VI. Soit une ligne C, située dans un plan P. Si ce plan s'enroule autour d’une développable S, la ligne G engen- drera une surface remarquable z, dont les surfaces de r'évo- lution sont un cas particulier, et que l'on peut appeler surface d'enroulement. De cette définition, l'auteur déduit plusieurs propriétés presque évidentes, mais en même temps curieuses, des surfaces en question. Je citerai les suivantes : Tousles plans tangents à S coupent = suivant des courbes égales à C (done planes), qui constituent un premier système de lignes de courbure ; le second système se Com pose des trajectoires orthogonales du plan mobile P. Si ( 806 ) , toute surface à pente constante est développable et a, pour ( 807 ) l’on considère, dans le plan P, deux systèmes de trajec- toires orthogonales, les surfaces d'enroulement qu'elles engendreront seront aussi orthogonales et constitueront, avec les positions successives du plan P, l’un des systèmes triples orthogonaux les plus simples que lon puisse ima- giner. Alors, aussi, chacune des deux séries de surfaces d'enroulement admet une infinité de systèmes de trajec- toires orthogonales, chaque système étant composé d'une infinité de lignes égales entre elles. VII. M. Catalan démontre, dans ce paragraphe, un théorème général relatif aux surfaces d’enroulement, dont il avait déjà fait connaitre l'énoncé dans les Bulletins (*). D'après ce théorème, pour trouver les trajectoires ortho- gonales des sections d’une surface par des plans ayant une enveloppe, il suffit de construire, dans un plan donné, les trajectoires orthogonales d'une série de lignes données. L'auteur présente plusieurs applications de cette idée. VII. Dans les surfaces à ligne de striction rectiligne, le cône directeur est de révolution autour de cette ligne, et les trajectoires orthogonales des génératrices sont détermi- nées par des cônes de révolution égaux au còne directeur, et que l'on obtient en faisant glisser celui-ci le long de son axe. Les développables accompagnatrices de ces surfaces gauches sont à pente constante. IX. Dans ce paragraphe, l’auteur indique quelques pro- priétés non encore remarquées des surfaces conchoïdales, c'està-dire, telles que deux quelconques de ces surfaces interceptent des parties égales sur toutes les droites issues d'un certain point. (©) T. XXXIII, 1872; p. 107. D ( 808 ) X. La cyclide est une surface qui admet deux systèmes de lignes de courbure circulaires. Le paragraphe X est con- sacré à l'étude d’une eyclide particulière à directrices recti- lignes, engendrée par une circonférence variable, qui se meut en restant toujours tangente à une droite, en un même point, et en s'appuyant sur une autre droite, perpendieu- laire à la première, mais ne rencontrant pas celle-ci. XI. Quelques théorèmes sur les courbes gauches. XII. Lorsque laxe d’un cylindre de révolution roule sur une courbe, la surface cylindrique elle-mème a pour enve- loppe une surface composée : 1° D'une surface-canal , enveloppe d'une sphère inscrite au Cylindre donné et dont le centre décrirait la courbe ; 2° De deux développables, engendrées par les deux génératrices du eylindre passant aux extrémités du dia- mètre binormal à la courbe donnée. L'auteur indique encore d’autres propriétés de ce mode de génération. XHI. Le dernier paragraphe du Mémoire est relatif aux centres de courbure d’un ellipsoïde. Parmi les résultats obtenus par M. Catalan, je citerai celui-ci : Le long d’une ligne de courbure, les rayons des deux sections principales, dont l’une est tangente et l’autre nor- male à cette ligne, varient respectivement en raison inverse du cube et de la première puissance de la distance du centre au plan tangent, d'où résulte : 1° que la courbure de l’ellipsoïde, en un point quelconque, est proportionnelle à la quatrième puissance de la distance du centre au plan tangent; 2 que le lieu des points de contact d'un plan qui roule de manière à toucher à la fois l'ellipsoïde et une sphère concentrique avec celui-ci est une ligne à courbure constante (c'est-à-dire le long de laquelle la courbure de Ki états ( 809 ) l'ellipsoïde est constante). Ce lieu est précisément la polho- die * de Poinsot, laquelle se projette sur les trois plans principaux de l’ellipsoïde suivant des sections coniques. Y aurait-il une raison simple pour laquelle l’ellipsoïde, retenu par son centre, ne pourrait rouler sur le plan fixe que suivant une portion de surface à courbure constante? Comme on vient de le voir par ce résumé, le nouveau Mémoire de M. Catalan traite d’un assez grand nombre de questions différentes, qui cependant se rattachent les unes aux autres et aux travaux antérieurs de notre savant con- frère (**). Par des méthodes toujours claires et élégantes, le plus souvent purement géométriques et intuitives, l'au- teur arrive à un grand nombre de résultats dont plusieurs sont nouveaux, curieux, et importants au point de vue de la théorie des courbes et des surfaces. En conséquence, j'ai l'honneur de proposer à la classe de voter l'impression du travail de M. Catalan dans le recueil des Mémoires in-8°. » La classe a adopté les conclusions des rapports de ses commissaires. (*) Trace des positions successives de laxe instantané de rotation d'un Corps libre sur l’ellipsoïde central. (**} Surtout à ses Recherches sur les surfaces gauches. ( 810) Note sur la similitude mécanique, et, en général, sur le mouvement d'un corps solide de révolution, par M. De Tilly, correspondant de l’Académie. Rapport de M. Liagre. « La note actuelle est la troisième que M. De Tilly pré- sente au sujet de la belle et difficile question du mouvement des corps solides. La première a paru dans notre Bulletin du mois de janvier 1875; elle était relative à la détermina- tion des axes instantanés glissants et des axes centraux dans un corps solide en mouvement. La deuxième note de M. De Tilly, publiée dans le Bul- letin du mois d'août suivant, traitait de la similitude méca- nique dans le mouvement des corps solides , et se composait de deux parties: l’une, très-détaillée, était relative à la similitude parfaite ou complète; l’autre s'occupait de la similitude incomplète, mais d’une manière accessoire seu- lement. Ce second travail a provoqué des observations de la part de M. F. Siacci. Par suite de ces observations, la seconde note de M. De Tilly peut être considérée comme annulée; les parties originales qu'elle renfermait sont reproduites dans le travail actuel, lequel renferme en outre plusieurs observations curieuses et importantes, notamment sur la similitude imparfaite des mouvements de rotation. On sait que deux mouvements sont dits imparfaitement semblables, lorsque certaines conditions de la similitude parfaite sont réalisées dans ces mouvements, tandis que d’autres ne le sont pas. La similitude parfaite dans le mou- vement de rotation exigerait que trois conditions fussent H Re merite ninres ( 811 ) remplies simultanément; si l’une d'elles seulement est remplie, on tombe sur un cas de similitude imparfaite, et l’auteur traite en détail deux de ces cas, savoir : 1° Celui où les axes des couples d'impulsion des mobiles sont parallèles en deux points correspondants des trajec- toires : c’est le plus important des deux; 2° Celui où le parallélisme a lieu pour les axes de figure. La nouvelle note de M. De Tilly me parait un complé- ment utile, je dirai même indispensable , à ses précédents travaux; elle est écrite avec la clarté et la netteté habituelles à l’auteur, et j'ai l'honneur d'en proposer l'impression dans le Bulletin de la séance. » M. Catalan, second commissaire, ayant adhéré aux conclusions du rapport de M. Liagre, la elasse les a adop- tées également. COMMUNICATIONS ET LECTURES. H Extension des théorèmes analogues à celui de Pascal à des courbes tracées sur une surface quelconque; par M. F. Folie, correspondant de l'Académie. Le théorème de Pascal est peut-être, de tous les théo- rèmes de la géométrie supérieure, celui qui se prête au plus grand nombre de généralisations, parce que son expression ne renferme que des relations purement deserip- tives. On pourra done chercher cette expression dans un système de coordonnées tout à fait arbitraire, quand bien ( 812 ) même la distance de deux points s’exprimerait dans ce sys- tème par une fonction excessivement compliquée de leurs coordonnées, la connaissance de cette fonction étant com- plétement inutile à la démonstration du théorème. Il est vrai que quand nous avons découvert l'extension du théorème de Pascal aux courbes et aux surfaces d'or: dres supérieurs, Ca été en partant d’abord d’une relation métrique analogue à celle qui caractérise l’involution de trois couples de points, relation que nous avons trouvée pour des systèmes de figures inscrites à des courbes ou à des surfaces du 2° ordre, et que nous avons donnée sous le nom d'extension du théorème de Desargues (1). Mais du moment que l’on avait déduit de cette relation les théorèmes analogues à celui de Pascal, il n’était pas ma- laisé den trouver une démonstration qui ne s’appuyât sur aucune relation métrique, et c'est ce que nous avons fait d’une manière très-simple dans une Addition à notre travail (2). Ces démonstrations des théorèmes analogues à celui de Pascal, indépendantes des théorèmes analogues à celui de Desargues, présentent mème sur celles qui en dépendent l'avantage d’être plus directes et plus évidentes ; mais sur- tout elles offrent celui de se prêter à une généralisation qu'on ne peut pas attendre de ces dernières, parce que celles-ci, fondées sur une relation métrique, ne s’appli- quent qu'à des systèmes de coordonnées dans lesquels cette relation est aisément exprimable. Si le lecteur veut bien se donner la peine de lire l'Addi- tion citée plus haut, il se convainera au contraire aisément (1) Fondements d'une géométrie supérieure cartésienne. Bruxelles, Hayez, 1872. (Extrait du t. XXXIX des Mémoires in-4° de l’Académie.) (2) Ibid , pp. 50 à 62. ( 815 ) que les démonstrations que nous y avons données des théorèmes analogues à celui de Pascal sont absolument indépendantes du système de coordonnées choisi, et peu- vent par conséquent s'étendre à un système de coordonnées curvilignes tracées sur une surface quelconque. Nous ne croyons pas devoir reprendre ici ces démonstra- tions, auxquelles il n'y aurait, du reste, pas un mot à changer pour leur donner cette extension considérable, et nous nous bornerons à montrer par un simple exemple la manière dont on peut appliquer nos théorèmes à des courbes tracées sur une surface quelconque. Prenons pour coordonnées eurvilignes d’un point tracé sur une surface de révolution sa longitude x et sa lati- tude y; appelons ligne du premier ordre une ligne tracée sur cette surface, et dont l'équation est du premier degré en x et y; polygone du n° ordre l’ensemble de n de ces lignes; lieu ou courbe du n° ordre une courbe tracée sur la même surface et dont l'équation est du n° degré en x et y. Ces définitions étant jointes à celles que nous avons don- nées dans le mémoire cité, nous n’aurons qu’à transcrire les théorèmes que nous avons trouvés pour les courbes planes, et nous obtiendrons autant de théorèmes nouveaux appli- cables à des courbes tracées sur une surface de révolution. Voici ces énoncés : 3 EXTENSION DU THÉORÈME DE PascaL. — Dans un système de deux polygones conjugés du (n + 1)° ordre inscrits à une Courbe du n° ordre, les côtés opposés se coupent en n +1 Points situés sur une ligne du premier ordre (4). (1) Mémoire cité, pp. 18 et 54. 2e SÉRIE, TOME rt, 55 ( 814 ) Ce théorème est applicable, d’une manière générale, jus- qu'au cinquième ordre. SECONDE EXTENSION DU THÉORÈME DE Duscht, — Dans un système de deux polygones conjugués du (n+p) ordre inscrits à une courbe du n° ordre, les côtés non adjacents se coupent sur un lieu du p° ordre (1). Ce théorème est applicable jusqu'au quatrième ordre inclusivement, relativement à n. Les suivants ne sont soumis à aucune restriction. Tuéorème. — Si n— 2 transversales sont communes à deux systèmes de figures conjuguées du n° ordre inscrites à une courbe de même ordre, ces deux systèmes se couperont en tous points situés sur cette courbe (2). PREMIÈRE GÉNÉRALISATION DU THÉORÈME DE Pascal. — Si n—5 transversales sont communes à deux systèmes de figures conjuguées du n° ordre inscrites à une courbe de même ordre, les points d’intersection de ces figures, qui n'appartiennent pas à celle courbe, se trouveront sur un lieu du premier ordre (5). SECONDE GÉNÉRALISATION DU THÉORÈME DE PAscAL. — Si p transversales sont communes à deux systèmes de figures conjuguées du n° ordre inscrites à une courbe de même ordre, les points intersection de ces figures, qui n’appar- tiennent pas à cette courbe, se trouveront sur un lieu de Pordre n—p—2 (4). (1) Mémoire cité, p. 55. (2) et (5) Zbid., p. 57, (4) Ibid., p. 58. RAR ( 815 ) Il est à peine nécessaire d'ajouter que nous avons sim- plement pris la surface de révolution comme un exemple destiné à faire pénétrer aisément l'esprit de ces extensions nouvelles données à nos théorèmes, et que ceux-ci sont de mème applicables à des courbes tracées sur une surface arbitraire, pourvu que leurs équations, dans un système déterminé de coordonnées tracées sur cette surface, soient du mème degré que celles dont il est question dans les énoncés précédents. Pour que ees théorèmes offrent plus qu’un intérêt pure- ment spéculatif, il faut qu'ils s'appliquent à des courbes qui ont déjà éveillé, par d'autres propriétés, l'attention des géomètres ; et ce résultat ne pourra s’obtenir que par un choix judicieux de coordonnées. Dans l'application que nous ferons de notre méthode aux courbes gauches, nous montrerons le parti que l'on peut tirer de l’idée que nous venons d’esquisser. e | Note sur la similitude mécanique, et, en général, sur le mouvement d’un corps solide de révolution; par M. J.-M. e Tilly, correspondant de l’Académie. Dans le Bulletin du mois d'août 1875, j'ai publié une Note sur la similitude dans le mouvement des corps solides, ete. Cette Note comprenait deux parties, dont l'une, traitant de la similitude parfaite ou complète, était fort détaillée, tandis que l'autre, relative à la similitude impar- faite (que je considérais comme tout à fait accessoire), était réduite à quelques lignes. ( 816 ) Mon travail ayant provoqué des observations de la part de M. Siacci, j'ai jugé nécessaire de reprendre ce sujet. Je dirai d'abord que M. Siacei a fait observer que mes formules sur la similitude parfaite, dans le mouvement des projectiles, avaient été données par lui dès 1868. L'un de nos confréres écrivait récemment ces lignes: « Il est parfois bien difficile de connaitre tout ce qui se publie; les chimistes sont très-excusables lorsqu'ils publient des faits connus. » Ce que notre savant confrère disait des chimistes , je crois pouvoir l'appliquer aussi aux géomètres, Je tiens cependant à prouver à la classe que j'avais pris certaines précautions, lesquelles se sont trouvées insuflisantes. La Note actuelle est en réalité la troisième que j'ai l'hon- neur de lui présenter au sujet de la belle et difficile ques- tion du mouvement des corps solides, sur laquelle les écrits de Poinsot ont projeté tant de lumière. Dans ma première Note (janvier 1873), relative aux axes instantanés glissants et aux axes centraux, dans un corps solide en mouvement, je déclarais ignorer si la méthode extrèmement simple et naturelle que je proposais avait ou non été publiée déjà : sa simplicité même provo- quait mes doutes à cet égard. Cependant aucune réclama- tion ne m'a été adressée jusqu'aujourd'hui et j'ai eu la satisfaction de voir ma méthode adoptée dans un cours très-important de Mécanique. Dans la deuxième Note (août 1873), je n'ai pas fait de mention semblable, mais je venais de lire le Traité récent de Balistique de M. le général Mayevski, dans lequel l'auteur (Tun des artilleurs les plus compétents et les plus érudits de notre époque) renvoie, pour la similitude des trajec- toires (p. XIL), aux écrits de MM. de Saint-Robert et Martin de Brettes, et ne cite point M. Siacei, dont le travail m'a ( 817 ) ainsi échappé et qui aujourd'hui réclame avec raison (*). Enfin, dans mon travail actuel, je présente encore des observations qui me paraissent curieuses et qui ne sont pas sans importance; bien que les croyant nouvelles, parce que je ne les at rencontrées dans aucun des ouvrages que j'ai consultés, je ne les présente que sous toutes réserves, prèt à rendre à chacun ce qui lui est du. L'intelligence parfaite de ce qui suivra exige que je revienne d’abord sur des faits connus. La similitude mécanique des mouvements de deux corps solides géométriquement et matériellement semblables peut être plus ou moins complète; et les limites auxquelles il faut s'arrêter, en plus et en moins, dans l'énumération des conditions à remplir, sont quelque peu arbitraires ou conventionnelles. Si on les exagère, la similitude n'est plus réalisable que par l'identité; si on les réduit outre mesure, la similitude devient insignifiante. On admet ordinairement, comme conditions de la simi- litude parfaite (considérée indépendamment des moyens de la réaliser), qu'après des temps correspondants (**) : 1° Les centres de gravité des mobiles possèdent des vitesses parallèles entre elles et proportionnelles à leurs valeurs initiales. 2 Les lignes homologues des deux mobiles soient parallèles. (*) Par suite de cette priorité, ma deuxième Note (août 1875) doit être considérée comme annulée, les parties qui subsistent étant repro- eng avec de plus amples explications, dans celle-ci **) Les temps T et {, se rapportant respectivement aux deux mobiles, sont dits SRE NE lorsque l’on a toujours T = {T, + étant une constante , arbitraire, mais choisie une fois pour toutes. ( 818 ) La première condition disparaît si, par la nature même des expériences, les centres de gravité sont immobiles, comme dans les expériences de Magnus. En revanche, si les centres de gravité se meuvent, on introduit quelquefois (et par exemple dans le mouvement des projectiles sur leurs trajectoires) une condition supplé- mentaire, consistant en ce que les forces nécessaires pour la similitude doivent se produire automatiquement, si l'on peut s'exprimer ainsi; que, par exemple, dans le mouve- ment des projectiles , elles doivent coïncider avec celles qui résultent de la gravité et de la résistance de Pair. D'après ces conditions, M. de Saint-Robert a indiqué, le premier, les moyens à employer pour assurer la similitude parfaite dans le mouvement des projectiles allongés, en sup- posant la résistance de lair proportionnelle au carré de la vitesse. J'ai donné, dans ma Note du 2 août 1875, déjà citée, les moyens à employer pour réaliser cette même similitude dans le cas plus général où la résistance serait proportion- nelle à la puissance n de la vitesse. Ils peuvent se réduire, pour deux projectiles géométriquement et matériellement semblables, lancés sous le même angle, par des bouches à feu dans lesquelles les pas des rayures sont proportionnels aux calibres, à prendre les densités des projectiles propor- tionnelles aux puissances 4 — 1 de ces calibres, et les vitesses initiales proportionnelles aux racines n"* des produits des calibres par les densités. Mais, comme je l'ai dit déjà, M. Siacci, capitaine de l'artillerie italienne, a fait observer, dans une lettre adressée à l'Académie, qu’il avait publié ces mêmes résultats dans le Giornale d’Artiglieria de 1868. Je m'empresse de le reconnaître et je reconnais en outre, avec M. Siacci, que ( 819 ) la question ne présentait pas de difficultés sérieuses. Je n'avais été conduit à m'en occuper que par le désir de rec- Her, ou tout au moins de compléter, une autre solution donnée dans la Revue de Technologie (1% volume de 1868) et dont je reparlerai tout à l'heure. Si j'avais connu la solu- tion exacte et complète de M. Siacci, je me serais naturel- lement abstenu d'y revenir. J'aborde maintenant la question de la similitude impar- faite. | On dit que deux monvements sont imparfaitement sem- blables lorsque certaines conditions de la similitude par- faite sont réalisées dans ces mouvements, tandis que d'autres ne le sont pas. En combinant entre elles, de toutes les manières, les conditions qui sont simultanément réalisées dans une simi- litude parfaite, on trouverait donc tous les genres de simi- litude imparfaite, mais je me bornerai ici à en considérer deux. Je remarque d’abord que toute similitude, dans le mou- vement des corps solides dont le centre de gravité se déplace, implique deux similitudes séparées , l’une dans la translation, l’autre dans la rotation, et que, d'autre part, si l'on peut réaliser séparément, pour deux mobiles géo- métriquement et matériellement semblables, la similitude des translations et celle des rotations (avec une même valeur de +), on pourra aussi en déduire une similitude (plus ou moins parfaite) des mouvements combinés ; mais il n'est pas certain qu'on puisse la réaliser automatique- ment. En vertu de cette remarque, je m'occuperai exclusive- ment du mouvement de rotation, sauf à introduire après les conditions de la similitude des mouvements des centres ( 820 ) de gravité, lesquelles ne sont point sujettes à contestation. Si, dans le mouvement de rotation, la similitude était parfaite, il y aurait, en deux instants correspondants, trois systèmes remarquables de deux droites parallèles : les axes de figure, les axes instantanés de rotation, les axes des couples résultants des quantités de mouvement, ou des cou- ples d'impulsion. | Dans la similitude imparfaite des rotations, on peut se borner à exiger le parallélisme des deux droites qui consti- tuent l’un de ces systèmes, en abandonnant cette condition pour les deux autres systèmes. J'écarterai encore l'hypothèse du parallélisme des axes instantanés et je me restreindrai aux deux autres : parallé- lisme des axes de figure, parallélisme des axes d'impulsion, en commençant toutefois par cette dernière. PREMIER CAS. Parallélisme des axes d'impulsion. Lage d'impulsion, ou axe du couple d'impulsion, au bout du temps {+ dt, s'obtient en composant le couple existant après le temps £ avec celui qui est dù aux impul- sions des forces extérieures pendant le temps dt. Ce prin- cipe est une conséquence immédiate de celui de l'équilibre entre les impulsions des forces extérieures et les quantités de mouvement gagnées par les points matériels, prises en sens inverse. Ainsi, pour que les axes des couples d'impulsion, sup- posés parallèles entré eux à l'origine, continuent à être parallèles pendant toute la durée du mouvement , il suffit qu’à chaque instant les axes des couples dus aux impulsions nouvelles soient parallèles entre eux et que leurs moments A in E EST RE E e, ( 821 ) soient proportionnels à ceux des couples préexistants. Or, les moments des couples initiaux sont représentés respec- tivement, dans les deux mobiles, par Cr et Cr! (les r représentent les vitesses angulaires et les C les moments d'inertie par rapport aux axes de figure) ; done, en appe- lant f, œ, ò, l, les rapports respectifs des forces, des vitesses angulaires initiales, des densités et des dimensions linéaires, on devra avoir : fete uat; ou: (1) fr= oct. Telle est done la seule relation numérique nécessaire pour la coïncidence rigoureuse des axes d'impulsion pen- dant toute la durée du mouvement, pourvu que les forces déterminées par cette équation soient appliquées dans la direction voulue. D'un autre còté, la relation unique et suffisamment évidente par elle-même de la similitude absolue dans le mouvement des centres de gravité est : dir 2) [==> avec la même restriction relativement au mode d’applica- tion des forces (LÉI représente le rapport des forces agissant Pour la translation et v celui des vitesses de translation). En réunissant les conditions (1) et (2), on obtient done une similitude bien définie dans les mouvements combinés, <. (*) C'est conventionnellement que je prends ? pour le rapport des bras de levier. II suffit que les moments soient dans le rapport voulu. ( 822 ) mais elle n’est pas automatique et c'est pour la rendre approximativement telle qu'il faut introduire une hypo- thèse supplémentaire, consistant en ce que les rotations initiales sont supposées assez énergiques pour que l'axe de figure ne s’écarte jamais sensiblement de l’axe d’impulsion. Alors, les axes d'impulsion restant parallèles , les axes de figure le seront aussi sensiblement, les projectiles seront semblablement placés après des temps correspon- dants, et les actions de la résistance de lair seront sensi- blement parallèles. Dès lors il suflira de poser : (5) Te Ëss d'Par, pour rendre les mouvements automatiques. La combinaison des équations (1), (2) et (3) donne : Geck éi, a=7; c'est-à-dire que, pour deux projectiles géométriquement et matériellement semblables, lancés sous le mème angle, par des bouches à feu dans lesquelles les pas des rayures sont proportionnels aux calibres, il suffirait de prendre les vitesses initiales proportionnelles aux racines ar" des produits des calibres par les densités, c'est-à-dire de satis- faire à la seconde des deux proportions nécessaires pour la similitude parfaite, proportions énoncées à la page 818. Ce résultat est loin d'être nouveau : il a été donné , sous cette même forme, par MM. Martin de Brettes et Siacci, mais on voudra bien reconnaitre que le raisonnement qui m'y conduit diffère complétement de ceux qui ont été pré- sentés par ces deux savants artilleurs et indique nettement le sens de cette similitude imparfaite : elle provient d'une ( 8253 ) similitude rigoureuse dans le mouvement de rotation , mais relative aux axes d'impulsion seuls; quand on passe alors aux mouvements combinés, on voit clairement pour- quoi la similitude doit se maintenir approximativement, si la rotation initiale est assez énergique pour que les trois axes (de figure, de rotation, d'impulsion) ne puissent jamais s'écarter sensiblement l'un de l'autre. C'est done la considération des axes d'impulsion qui vient, me semble-t-il, éclairer la question, parce que, si l'on voulait considérer directement le mouvement de lun des deux autres axes, il faudrait tenir compte des forces centrifuges, tandis que pour l'axe d'impulsion, les forces extérieures suffisent. Une observation SE est applicable aux théorèmes donnés par M. de Saint-Robert, en 1861, et reproduits dans le tome I° de ses Mémoires scientifiques (pp. 280 à 285). Ces théorèmes, pris d'une manière absolue, sont inexacts, Parce que l’auteur y néglige les forces centrifuges; mais ils deviennent rigoureux, si l'on y remplace partout : 1° L'axe instantané, dont parle l’auteur, par l'axe d'im- pulsion (ou laxe du couple des quantités de mouvement qui existent à l'instant considéré). 2 L'axe autour duquel la force perturbatrice, ou le couple perturbateur, tend à faire tourner, par l'axe mème de ce couple. 3° Les vitesses angulaires V etv par les moments du couple existant et du couple perturbateur (Cr et M). La vitesse angulaire trouvée à la page 285 v yra à Vsina ( 824 ) devient alors, avec mes notations : M Cr sind” ò représentant, bien entendu, l'angle de la normale au plan fixe avec Taxe d'impulsion. On voit ainsi pourquoi le moment d'inertie autour de laxe doit figurer au dénominateur, au lieu du moment d'inertie équatorial , que l’auteur y avait d’abord introduit. Cette rectification a été faite, en 1865, par M. le général Mayevski, mais, dans la théorie de ce dernier géomètre, le résultat n'est qu'approximatif, et même la vitesse angu- laire de précession n’est que périodiquement uniforme, tandis qu'ici le résultat est rigoureux, mais applicable uni- quement à laxe d'impulsion. Rappelons toutefois que les données ne sont pas identiques; et, en particulier, que, dans la théorie inexacte de M. de Saint-Robert, l'axe auxi- liaire de rotation devait être perpendiculaire à l'axe instan- tané; que, dans la théorie approximative de M. le général Mayevski, cet axe devait être perpendiculaire å l'axe de figure et enfin, que dans mon explication, l'axe du couple perturbateur est perpendiculaire à l’axe d'impulsion. es mêmes considérations conduiraient à la détermina- tion du còne décrit par l'axe d'impulsion , dans tous les cas où les forces agissantes seraient complétement données en fonction explicite du temps, ce qui n’est pas applicable au mouvement du projectile. Elles peuvent également servir à indiquer le sens précis des équations différentielles du mouvement de rotation du projectile, trouvées par M. le général Mayevski ( Balistique, pages 175 et 174) et sur l'exactitude desquelles j'avais émis U j E A ( 825 ) quelques doutes (*), qui n'étaient pas sans fondement, je pense, eu égard à l'explication que l’auteur donnait de ses formules, mais qui disparaissent devant l'explication sui- vante, laquelle montre clairement dans quel sens et moyen- nant quelles hypothèses les formules deviennent rigou- reuses. Il faut d'abord que la loi du mouvement conique elle- même devienne rigoureuse (et sans période), c'est-à-dire que tous les raisonnements doivent s'appliquer à l'axe d'im- pulsion et non à l'axe de figure, Mais il faut admettre, de plus : 1° Que la résistance de lair soit comprise, à chaque instant, dans le plan de l'axe d'impulsion actuel et de la parallèle au courant d'air menée par le centre de gravité (axe du courant d'air ou tangente à la trajectoire) CH, puisqu'alors l'axe du couple de la résistance sera perpendi- culaire à l'axe d'impulsion et situé dans un plan invariable (perpendiculaire au courant d'air) si celui-ci est lui-même invariable. Donc alors l'axe du courant sera bien l'axe du cône, Si le courant d'air varie, tout se passera évidemment, pendant le premier instant, comme si ce courant devait rester constant de direction et de grandeur (***), puisqu'ici U) Mémoires de la Société des sci physiques et naturelles de Bor- deaux, t. IX. (**) Tandis qu’il est plus naturel de la prendre dans le plan de l'axe de figure et de l'axe du courant d'air, bien qu'il y ait à cet égard un certain doute et une certaine latitude (***) L'idée d'un mouvement conique qui se continue pendant un temps fini, autour d'un même axe, n’est pas nécessaire pour déterminer ce qui se Passe au premier instant, mais elle relie le cas weg à un cas particu- lier très-connu et, en faisant image, aide à voir le mou t du projec- ( 826 ) le mouvement conique existe rigoureusement, done les équations différentielles du mouvement de laxe d’impul- sion pourront être établies, tandis que je ne conçois pas bien l'établissement d'une équation différentielle, quand le mouvement conique n'existe qu'approximativement ou en moyenne. 2° Que le moment de la résistance, pour un courant de vitesse donnée, ne dépende que de l'angle 3 formé par l'axe du courant avec laxe d'impulsion. Ces conditions suffisent pour l'établissement des équa- tions rigoureuses, et c'est uniquement pour simplifier celles- ci que l’on peut admettre de plus, avec le général Mayevski, que le courant d'air (ou la tangente à la trajectoire) ne se déplace que dans un même plan vertical. SECOND CAS. Parallélisme des axes de fiqure. On a vu que, pour assurer le parallélisme rigoureux des axes d'impulsion, dans le mouvement de rotation des projectiles, il n’est pas nécessaire d'admettre toutes les formules relatives à la similitude complète du mouvement; et qu'en particulier le rapport œ des vitesses angulaires initiales peut être arbitraire, bien que + soit déterminé nd tile. En tous cas, l'application pure et simple du parallélogramme des couples, au couple neg qui existe à un instant quelconque et au couple perturbateur, suffit r démontrer immédiatement les trois lois relatives au déplacement Ge de l'axe d'impulsion (mouvement conique, constance du moment, vitesse angulaire). Cette théorie, à la fois la plus simple et la plus rigoureuse, ei pos GES ee puisse donner du mouvement de rotation des projectiles I a Conférence sur la Balistique , actuellement sous presse, ( 827 ) d'avance. Cela est vrai aussi pour le parallélisme absolu des axes de figure, comme les équations d'Euler le font voir. En appelant, comme dans les traités de Mécanique, 0, l'angle formé par le plan Oxy, renfermant deux axes prin- cipaux d'inertie, Ox, Oy, qui suivent le mouvement du corps, avec un plan fixe OXY; OA, l'intersection des deux plans OXY, Oxy; v, l'angle formé par OA avec OX ; 9, langle formé par Ox avec OA ; on a les équations : do dy p= cos p + — sin 0 sin ọ, dt do dy i = sin o + — sin ô cos dt ? dt Fe dr... di cos 9, ea dt aP, (C — B) qr =P, d B + (A— C)rp =Q, C Da (B — A)pq =R dans lesquelles P, Q, R sont les moments des forces exté- rieures, par rapport aux trois axes principaux Ox, Oy et Oz, et A, B, C, les trois moments d'inertie du corps, par rapport à ces mêmes axes. Nous pouvons supposer que les valeurs initiales de 9, A et D soient les mêmes pour les deux projectiles. Le mouvement du premier étant complétement déter- miné, adoptons pour le second des valeurs de 6 et de p, en fonction du temps, déduites de celles du premier projec- tile, en y remplaçant t par =. Alors les axes de figure ( 828 ) seront toujours parallèles. Prenons maintenant pour +, dans le second corps, une fonction arbitraire de {, uniquement assujettie à cette condition que les valeurs initiales de 9 et de Sé coincident gent celles qui sont données pour ce second corps (celle de © -est la vitesse angulaire, si le mou- vement commence dun de l'axe de figure). Les trois premières équations permettront de calculer p, q et r en fonction du temps, puis les trois autres donneront les moments P, Q, R , aussi en fonction du temps. Donc cette similitude est réalisable d’une infinité de manières, puisque ọ est une fonction arbitraire. Elle était mal expliquée dans ma Note du 2 août 1875, où je disais : « Ayant réalisé une similitude complète, dans le sens des déductions précédentes, on pourra changer la vitesse initiale de rotation de l’un des projectiles autour de son axe de figure, sans altérer en rien le mouvement de cet axe de figure lui-même dans la suite du temps, si l'on n’apporte aucune autre modification aux conditions du système. » Il faut lire : e aux conditions iNITIALES du système », mais les forces doivent changer, car il serait absurde de sup- poser qu'avec les mêmes forces on ferait décrire le même còne à l'axe de figure, quelle que fùt la vitesse angulaire initiale, même si celle-ci était nulle ou infinie. Je remercie M. Siacei de m'avoir, par une objection fondée, fourni l'oc- casion de faire cette rectification. | J'ajoute que la question de savoir si, parmi le nombre infini de systèmes de forces répondant aux conditions de l'énoncé , il en est un ou plusieurs que l’on puisse réaliser d’une manière simple, reste une question à résoudre: du moins je ne l'ai pas résolue. Mais la combinaison d’une pa- reille similitude dans les rotations avec la loi connue de la ( 829 ) similitude des translations, ne donnera jamais lieu à une similitude automatique des trajectoires (à moins que a ne se trouve déterminé par cette combinaison, comme on l'a vu plus haut pour l’autre similitude imparfaite), car alors les forces seraient les mêmes que dans la similitude parfaite, résultat impossible, si les rotations initiales sont arbitraires. Une similitude des trajectoires qui n’est point réalisable automatiquement semblera peut-être assez insignifiante. Je l'accorde volontiers, mais je fais observer à cet égard : 1° Qu'en parlant de similitude imparfaite, dans ma Note du 2 août 1875, j'avais uniquement pour but de faire pré- sumer que de légalité des angles y et D on ne pouvait déduire celle des angles ọ, puisque je disais ` « les angles d et Ü restant toujours égaux de part et d'autre, on ne peut en conclure l'égalité des dọ, ni moins encore celle des angles ©. Et, en effet, cette similitude imparfaite est réali- sable... (*) 2° Que je mai nullement confondu la similitude impar- faite, dans laquelle les axes de figure restent parallèles, avec l’autre similitude imparfaite, dont les formules avaient été précédemment données et qui correspond, comme on l'a vu plus haut, au parallélisme des axes d'impulsion. Le laconisme de la fin de ma Note citée précédemment a pu le faire croire, mais cela n’est jamais entré dans ma pensée. Č) Les mots qui suivent (si l’on admet que les vitesses de rotation n'influent pas sur la résistance de l'air) , ne peuvent évidemment se rap- Porter qu’aux mouvements combinés. On peut dire que cette condition est inutile si le mouvement ne doit pas être automatique, et insuflisante s’il doit l'être. Mais si elle n’était pas observée, le mouvement de translation lui-même ne serait plus automatique. Ze: SÉRIE, TOME XXXVII. 54 ( 850 ) Note sur la transformation de la contraction musculaire tonique en contraction rhythmique; par M. Gluge, membre de l’Académie. Monsieur le professeur Goltz a récemment inséré dans le Ser: volume des Archives de Pflüger (1) un travail inté- ressant sur les fonctions de la portion lombaire de la moelle épinière du chien, Il a observé qu'après la section de la moelle à la limite entre la portion pectorale et lombaire, des mouvements rhythmiques du sphineterde l'anus se produi- sirent chaque fois qu’il y introduisait le doigt ou un corps étranger. M. Goltz s'étonne que ce phénomène si curieux ne soit pas mentionné par MM. Gianuzzi et Masius, dans les recherches faites avec soin que ces auteurs ont publiées. Je me crois obligé de rappeler que j'ai observé, il y six ans, ce phénomène réellement remarquable, et que j'en ai donné communication à l’Académie, à la suite d’un rapport qu'elle m'avait chargé de faire sur le Mémoire de M. Ma- sius, intitulé : Recherches expérimentales sur l’innervation des sphincters de l’anus et de la vessie. Mon observation est, sans doute, restée inconnue à M. Golız. Voici la note qu'on trouve à la suite de mon rapport (Bulletin de l’Académie royale de Belgique, 2° sér., t. XXV, p. 408. « Je suis cependant obligé de mentionner que j'ai vu » l'évacuation de l'urine se faire régulièrement chez un SES (1) Bonn, 1873-74, p. 479. x E KI ( 851 ) lapin qui a vécu trois jours avee une paralysie des mem- bres postérieurs après la section de la moelle dans la région entre la deuxième et la troisième vertèbre lom- baire. A l’autopsie, la quantité d'urine qu'on rencontrait dans la vessie ne dépassait pas la mesure ordinaire, et la vessie n'était nullement distendue. Chez un autre lapin paralysé, qui avait été blessé accidentellement à la même région, à l’occasion d'une expérience physiologique, j’ai vu de véritables contractions et des dilatations rhythmi- ques, semblables à la diastole et à la systole des ventri- cules se suivre dans le sphincter du rectum, le lendemain de l'opération, sans qu’une évacuation des matières fécales eut lieu. » Il ne s’agit pas seulement ici d’une réclamation de prio- rité, je crois devoir répéter que dans mon observation faite sur le lapin il ne se rencontre pas un mouvement réflexe, dans le sens ordinaire du mot, mais bien un mouyement rhythmique spontané, indépendant de l'irritation de la mu- queuse du rectum par un corps étranger, et mème du pas- sage des matières fécales. C'était en un mot la transforma- tion d’un muscle tonique en un muscle rhythmique. Je crois que cette observation peut servir comme point de départ à de nouvelles recherches pour trouver une théorie acceptable des contractions rhythmiques du cœur ; car on ne peut considérer comme sérieuses les hypothèses profes- sées jusqu'à présent sur ce point. ( 832 ) Les Baleines de la Nowvelle-Zélande; par M. P.-J. Van Beneden, membre de l'Académie. Depuis quelque temps des naturalistes actifs et intelli- gents recueillent dans les parages de la Nouvelle-Zélande les ossements de Baleines; il est à espérer qu'ils parvien- dront à réunir assez de matériaux pour esquisser l'histoire de ces cétacés avant leur destruction complète. Le D" Gray a fait connaitre, en sa qualité de directeur du British Museum, la plupart de ces ossements, et comme ces animaux sont peu ou point connus des naturalistes, il leur a imposé des noms tantôt spécifiques, tantôt généri- ques. D'après le savant directeur , il existe dans les parages de nos antipodes une petite Baleine n'ayant pas plus de quinze pieds de longueur, qu'il a appelée Neobalæna mar- ginata , et deux grandes Baleines, la Caperea antipodum et la Macleayius australiensis. Il soupçonne l'existence d’une troisième grande espèce établie d’après des os d'oreille, ou caisses tympaniques, que j'ai figurés dans l’Ostéographie que je publie avec M. Paul Gervais. Plusieurs erreurs s'étant glissées dans la détermination de ces espèces, je demande à l'Académie la permission de lui exposer le résultat de quelques observations, d'autant plus que, dans la notice que j'ai publiée sur la distribution géographique des Baleines, je n'ai admis qu’une seule espèce à Fest de la Nouvelle-Zélande. Parmi ces erreurs, il y en a une toute matérielle qui a été commise par le professeur Lilljeborg d'Upsal et qu'il importe de ne pas laisser plus longtemps sans réponse. (855 ) Il y a quelques années déjà, le professeur Lilljeborg fit une étude du squelette monté au milieu de la cour des galeries d'anatomie comparée, au Muséum de Paris; à son passage à Londres, il fit part de ses observations au Ir Gray. Los de l'oreille n'étant pas en place dans le squelette, il le crut perdu et cette perte fut signalée dans plusieurs publications du savant directeur du British Mu- seum. Cet os de l'oreille existe fort heureusement et c'est bien celui dont nous reproduisons le dessin dans notre Os- téographie. Voici ce qui est arrivé : m'occupant depuis 1855 de l'importance de l'os de l'oreille pour la détermination des Baleines, j'avais obtenu, en 1856, du professeur Serres, qui était alors directeur des galeries d'anatomie compa- rée, l'autorisation de détacher cet os, avec le concours du D" Gratiolet, qui était son aide-naturaliste. Après en avoir fait une étude complète, et après l'avoir comparé aux nombreuses caisses tympaniques que possède le Muséum, je pris le dessin de cet os et le remis entre les mains de Gratiolet. Je suppose que la maladie du jeune et savant naturaliste l'aura empêché de faire remettre cet os en place et j'ai été bien aise d'apprendre de M. Paul Gervais, le directeur actuel, que cet os est retrouvé. En publiant la description et le dessin de ce squelette, J'ai fait naturellement reproduire un des dessins que j'avais en portefeuille et j'ai fait ajouter à cette caisse tympanique adulte le dessin d’une caisse de jeune animal, rapportée par le D" Dechange de la Nouvelle-Zélande et dont il a fait don au Musée royal de Bruxelles. e D" Gray, s'en rapportant au professeur d'Upsal, fait diverses conjectures et propose de faire encore une ( 854 ) nouvelle espèce avec les caisses que nous avons figurées. M. Van Beneden, dit le savant directeur, « who speaks of this skeleton as complete, under the name of Balæna antipodarum , not saying a word as to the skeleton being without the ears bones, but giving three figures of two ears bones, evidently derived from other sources (1). » Il est inutile de faire remarquer combien le reproche qu'il nous adresse de faire figurer ensemble des os d'ori- gine différente est peu fondé. Nous avons admis pour cette espèce de Baleine de la Nouvelle-Zélande, dont le squelette figure au Muséum de Paris, le nom de Balæna antipodarum ou mieux antipo- dum, proposé par le D" Gray, dans le voyage de Dieffen- bach (2). En 1864, le British Museum reçut de la Nouvelle- Zélande une caisse tympanique de Baleine, que le D" Gray rapporta d'abord au même animal et qu'il a em devoir ériger depuis en genre sous le nom de Caperea. Dans les Proceedings de la Société zoologique de Lon- dres, le D" Gray établit la même année une nouvelle espèce de Baleine, Western australian Whale, sous le nom de B. marginata, d’après trois fanons, complétement différents des fanons connus, et dont mon savant ami a bien voulu me donner un exemplaire. Dans le Supplément de son catalogue publié en 1871, le D" Gray reproduit la figure de la tête de cet animal, publié par M. Hector, dans les Proc. and Trans. of the New-Zealand Institute (1869), et l'érige, avec raison, en genre, sous le nom de Neobalaena. (1) Proceed. Zool. Society of London , 1875, p. 5 e Ern. Dieffenbach, Travels in Nao-Zealand; à weg in-8°. Londres, ( 855 ) C'est aussi en 1864 que M. Krefft envoie la photogra- phie d'une région cervicale de Baleine, du Musée de Syd- ney, et le D" Gray, croyant l'atlas séparé des autres ver- tèbres , établit le genre Macleayius (1). En publiant les additions et corrections de son cata- logue, le savant directeur reconnait, après avoir reçu de nouvelles photographies, qu'il s’est trompé, que l'atlas n’est pas plus séparé que dans les autres Baleines, mais il n’en conserve pas moins le genre Macleayius. Depuis lors le Dr Haast a envoyé en Angleterre, en 1872, un squelette de Baleine des côtes de la Nouvelle- Zélande, et, à en juger d'après l'os de l'oreille, dit le Dr Gray, ce n'est pas de la Balæna antipodum qu'il se rapproche le plus, comme on le supposait, mais de la Balæna australis. Le Dr Gray conserve le nom de Mac- leayius australiensis et décrit le squelette en l’accompa- gnant de figures représentant la tète, la région cervicale, le sternum et l'omoplate. Si nous considérons que le nombre total des vertèbres est le même que dans le squelette de Paris, que les côtes se comportent de la mème manière, que les deux sternum se ressemblent et que la présence de l'apophyse acromion est pour ainsi dire la seule disposition qui les éloigne, nous n'hésitons pas à nous rallier à opinion des naturalistes de la Nouvelle-Zélande et à regarder l'animal dont provient ce squelette comme la Balæna antipodum. L'apophyse acromion n’a pas une si grande importance, puisque nous voyons des différences dans les deux omo- plates du même animal. (1) Proceed. Zool, Society of London, 1864. ( 856 ) A notre avis ce Macleayius doit être supprimé comme genre et comme espèce, et l'animal appartient à la mème espèce que le squelette monté au Muséum de Paris. Quand ce squelette est arrivé à Londres, on lui a trouvé des ressem- blances avec la Balæna australis, comme cela était arrivé pour le squelette de Paris. Le genre Caperea doit subir le même sort que le genre Macleayius. La caisse tympanique sur laquelle ce genre a été établi provient du mème animal qui fournit les fanons, et la Neobalæna a pour synonyme, — c’est le D" Gray lui- mème qui nous l'apprend, — la Caperea antipodum. Transporter maintenant le nom de Caperea à un animal qui ne présente pas les caractères pour lesquels il a été établi, nous semble trop arbitraire pour que nous puissions l'adopter. Le squelette du Muséum de Paris doit prendre le nom de Balæna antipodum , comme celui que vient d'en- voyer le Dr Haast à Londres, et la caisse tympanique du premier est aussi bien connue que celle du second. En résumé les noms des Caperea et de Macleayius doi- vent être rayés des catalogues comme celui de Hunterius établi sur une anomalie, et il ne doit rester, à notre avis, que le genre Balæna parmi les Right Whales. La Balæna antipodum reste done seule dans ces régions, comme nous l'avions admis dans notre notice, sur leur dis- tribution géographique, et nous attendons avec la même impatience qu'en 1868 des renseignements sur l'espèce de Baleine , probablement nouvelle, qui visitait naguère en Si grande abondance les parages de l'ile Saint-Paul et d'Ams- terdam (1). (1) Cap. Tinst, Ann. de marine, t. X, Ze sem., 1853. NEES D “unpodque wuart op ambruluua) oss? ECKE . | po. p mg eo ( 837 ) D'ici à quelques jours nous connaitrons plus eompléte- ment le genre Neobalæna, puisqu'un squelette est expédié de la Nouvelle-Zélande depuis le mois d'octobre dernier, et que le professeur Hutton , qui envoie ce squelette, a pu envoyer également un dessin de l'animal (1). Tout ce que l'on peut en dire, Cest que les fanons, la tête, la caisse tympanique, et l'on peut ajouter Ja taille de l'animal, indiquent un type distinct, aussi bien que le Rachianectes ou le Devilfish des côtes de Californie. Qu'il nous soit permis, en finissant, d'exprimer au D” Gray notre gratitude pour l'ardeur et le zèle qu'il dé- ploie dans ses nombreuses publications, et si nous n’adop- tons pas sa nomenclature, nous ne lui sommes pas moins reconnaissant pour les importants matériaux qu'il ne cesse de faire paraitre sur les cétacés. EXPLICATION DE LA PLANCHE. Les trois figures sont de grandeur naturelle, Fig. 1. — Caisse tympanique du côté droit de Balæna antipodum , provenant du squelette du Muséum de Paris, rapporté par le à Berard, commandant de la corvette le Rhin, et par le Dr A Fig. 2. — La même vue P côté opposé. Pour gagner de la place, le dessinateur a reproduit la figure renversée de manière à représenter la caisse du côté gauche du squelette, Fig. 3. — La même vue de profil. En A etes à (1) Ann. and Mag. of nat. hist., april, 1874. ( 838 ) Notice sur les gisements de phosphate de chaux dans le ter- rain crétacé de la province de Hainaut; par MM. F.-L. Cornet et Alph. Briart, correspondants de l’Académie. Le but que nous nous proposons d'atteindre par cette lecture est de faire connaître l'importance géologique de certains gisements de phosphate de chaux qui existent dans notre pays, mais qui n'ont attiré, jusqu'à ce jour, que très- peu l'attention de personnes s'intéressant aux progrès de l'agriculture. Ces gisements se trouvent dans le terrain cré- tacé à quelques kilomètres au sud de la ville de Mons. La partie supérieure du terrain crétacé du Hainaut cor- respond au système maestrichtien du Limbourg ou tufeau de Maestricht. Elle est constituée par une roche calcaire, à texture grossière, blanche ou légèrement jaunâtre, souvent friable, connue dans la localité sous le nom de pierreblanche ou de tufeau de Ciply. Cette roche, qui ne possède pas la faculté de résister aux intempéries, n’est utilisée que pour des constructions peu importantes, lorsqu'elle doit être ex- posée à l'air; mais de nombreuses et assez importantes caT- rières furent ouvertes aux environs de Ciply pour fournir des moellons de fondations et de remplissage aux fortifica- tions récemment démolies de la ville de Mons. La même roche fut aussi employée il y a plusieurs sièeles, pour la construction des fondations d'anciens édifices , tels que les églises Saint-Germain et Sainte-Waudru. Le tufeau de Ciply se montre en affleurement sur une partie des territoires de Cuesmes , Hyon, Ciply et Mesvin. ‘Il repose sur d'autres assises crétacées en stratification transgressive, de sorte qu'on le voit à Cuesmes recouvrir directement la craie blanche de l'assise de Nouvelles, tandis RE dese, dl. EN ( 859 ) qu'il en est séparé à Mesvin et à Ciply par une épaisseur considérable formée par la craie grise et par l'assise de la craie de Spiennes. Le dépôt du tufeau de Ciply a été précédé par une dé- nudation qui a produit des ravinements sur la surface des roches crétacées sous-jacentes dont les débris roulés ont servi à former le conglomérat auquel nous avons donné le nom de Poudinque de la Malogne. A ces débris sont mé- langés de nombreux nodules arrondis ou irréguliers, de la grosseur d'un pois à celle du poing, constitués par une sub- stance brune, très-dure, qui n'est autre qu’un mélange de phosphate et de carbonate de chaux. Ils sont assez souvent empàtés dans de la craie pulvérulente et cette circonstance en facilite beaucoup l'exploitation , mais quelquefois ils sont réunis par un ciment calcaire si cohérent qu'il est impos- sible de les extraire (1). On rencontre dans le poudingue de la Malogne de nom- breuses coquilles de gastéropodes, de lamellibranches or- thoconques, de brachiopodes, d'oursins et de spongiaires moulées intérieurement par une substance brune identique à celle qui constitue les nodules. Le poudingue de la Malogne se rencontre presque par- tout à la partie inférieure du tufeau de Ciply; mais sa puis- sance est très-irrégulière et trop faible généralement pour que l'exploitation industrielle soit possible. Des épaisseurs assez considérables n'ont été rencontrées jusqu'à ce jour (1) Nous croyons devoir rappeler ici que l'existence du phosphate de Chaux dans les nodules du poudingue de la Malogne fut pour la première fois signalée par feu Charles Lehardy de Line Së? l'École des mines du Hainaut, dans son Guid le Hainaut et halte Sombre eue (iinom n° ET PUBLICATIONS DE LA IÉTÉ DES SCIENCES pu Hainaur, Ze sér., t. VII, 4860.) ( 840 ) que dans la partie sud-est du territoire de Cuesmes , sur le versant occidental du ravin qui donne passage au ruisseau du Grand-père et en face sur le versant opposé qui fait par- tie du territoire de Ciply. Les exploitations qui ont eu lieu en ces endroits pendant les années 1872 et 1875 ont montré que le poudingue y remplit des poches peu éten- dues creusées dans la craie blanche ou dans la craie grise. Mais partout ailleurs où des recherches l'ont fait décou- vrir, il ne présente que quelques décimètres d'épaisseur maximum, Aussi nous sommes d'avis que ce dépôt ne pourrait pas fournir à l'industrie, pendant plusieurs an- nées, de notables quantités de phosphate de chaux. Il nen est pas de même de l'assise crétacée immédiate- ment inférieure au poudingue de la Malogne et connue sous le nom de craie grise ou craie brune de Ciply. Elle est con- stituée par une roche à texture grossière, très-friable, d’une teinte brunâtre plus ou moins foncée et formée d'un mé- lange de grains blancs de carbonate de chaux et de grains bruns qui renferment une proportion assez considérable de phosphate de chaux. Ces grains bruns abondent dans les bancs supérieurs de l’assise, et sont relativement assez rares dans les bancs inférieurs; cependant ils ne diminuent pas en raison directe de la profondeur, mais ils se pré- sentent sensiblement avec la même abondance sur 10 mètres environ de hauteur. La craie grise de Ciply peut principalement être obser- vée dans le chemin creux qui longe le bois à l'est du vil- lage. Elle forme une assise continue qui affleure, suivant une ligne dirigée à travers ce bois, du sud-ouest au nord- est. Inclinée faiblement vers le nord-nord-ouest, cette assise s'enfonce, à partir de l’affleurement, sous le tufeau recou- vert lui-même par des épaisseurs variables, mais peu con- | | ( 84 ) sidérables, de dépôts tertiaires et quaternaires. A une cer- taine profondeur la craie grise passe sous le niveau de la nappe aquifère que l’on rencontre partout dans le bassin crétacé de Mons. L'exploitation de la craie grise en dessous de la nappe aquifère serait certainement très-dispendieuse, car elle ne pourrait se faire sans l’aide d’une machine d’épuisement. Mais la partie qui se trouve au-dessus de cette nappe peut être exploitée avec la plus grande facilité. Dans beaucoup d'endroits l'enlèvement de la roche s'opérerait à ciel ouvert. Sur les points où l'existence du tufeau ou du terrain ter- tiaire ne permettrait pas de pratiquer ce simple mode de travail, la craie grise serait atteinte par des puits peu pro- fonds et exploitée à l’aide de galeries. La partie de l'assise de la craie grise qui git au-dessus de la nappe aquifère, forme une bande de plusieurs cen- taines de mètres de largeur qui s'étend parallèlement à laffleurement, au travers des territoires de Cuesmes, Hyon, Ciply, Mesvin, Nouvelles et Spiennes. Nous estimons à 180 hectares environ la surface de cette bande et à 8 mè- tres l'épaisseur de craie phosphatée que l'on pourrait en enlever. L'assise renfermerait done, au-dessus de la nappe d'eau souterraine, environ 14 !/2 millions de mètres cubes de roche en place. On voit par ces chiffres quelle impor- tance pourrait acquérir la production du phosphate de chaux dans notre pays, si l'on parvenait à éliminer indus- triellement, de la craie grise de Ciply, la plus grande partie du carbonate de chaux qu'elle renferme. ( 842 ) CLASSE DES LETTRES. Séance du Jr" juin 1874. M. R. Cuaron, directeur. M. J. LrAGRE , secrétaire perpétuel. Sont présents : MM. Steur, J. Grandgagnage , J. Roulez, Gachard, Paul Devaux , P. De Decker, J.-J. Haus, M.-N.-J. Leclercq, le baron J. de Witte, Ch. Faider, J.-J. Thonissen, Th. Juste, le baron Guillaume, Félix Nève, Alphonse Wauters, Em. de Laveleye, G. Nypels, Alp. Le Roy, Émile de Borchgrave, membres; Aug. Scheler, Alp. Rivier, asso- ciés; Ferd. Loise, G. Rolin-Jaequemyns, Stan. Bormans, correspondants. Avant de donner la parole à M. le secrétaire perpétuel, pour la lecture du procès-verbal de la dernière séance et de la correspondance, M. le directeur présente les com- pliments de bienvenue de la classe à M. J. Liagre. Il propose ensuite de voter des remerciments à M. Edmond Marchal, secrétaire adjoint, pour les soins qu’il a apportés dans la gestion des affaires du secrétariat pendant l'intérim. Des applaudissements accueillent ces motions. M. Liagre remercie la classe, tant en son nom qu'en celui de M. Marchal. M. le directeur signale ensuite la perte que la classe ( 845 ) vient de faire de l’un de ses membres les plus éminents, M. Jean-Sylvain Van de Weyer, décédé à Londres le 22 mai dernier. M. Van de Weyer était né à Louvain, le 19 janvier 1802. Il fut nommé correspondant de l'Académie le 10 octobre 1835 et membre titulaire le 7 mai 1840. M. Chalon rappelle que le nom de M. Van de Weyer se rattache à l’un des événements les plus importants de l’histoire de la Compagnie, la réorganisation de 1845 et la création de la elasse des beaux-arts. M. Van de Weyer occupe une place des plus marquantes dans les annales académiques et il s’est acquis des titres de reconnaissance que ses confrères n’oublieront point. M. le secrétaire perpétuel donne lecture de la lettre de condoléance qu’il s’est empressé d'écrire à M" Van de Weyer. La classe s’occupera, dans une prochaine réunion, des dispositions à prendre concernant la notice biographique du défunt. CORRESPONDANCE. MM. G. Rolin-Jaequemyns et S. Bormans, élus corres- pondants, ainsi que MM. Ch. Desmaze, Jules Oppert et Jonckbloet, élus associés, remercient la classe pour la dis- tinction dont ils ont été l’objet. — M. le Ministre de l’intérieur transmet l'expédition d'un arrêté royal du 5 mai dernier, qui approuve l'élection de M. Liagre en qualité de secrétaire perpétuel de l’Académie ( 844 ) royale des sciences, des lettres et des beaux-arts de Bel- gique. — Le même haut fonctionnaire envoie, pour la Biblio- thèque de l'Académie, plusieurs ouvrages qui seront men- tionnés au Bulletin de la séance : entre autres, la 3° édition de l'Histoire de Flandre, par M. Kervyn de Lettenhove. Des remereiments sont votés pour ces dons, ainsi que pour les ouvrages offerts par le ministère de l'instruction publique à Paris, la bibliothèque de l’empereur d’Autriche, les archives de la Côte-d'Or, à Dijon, la Société historique de Styrie, à Gratz, et l'Université de Pesth. La Société de Gratz remercie en même temps pour le dernier envoi de publications académiques. — MM. Edmond Poullet et J. Dauby remercient au sujet du prix qui leur a été décerné en séance publique de la classe. — Il est fait hommage des ouvrages suivants : 1° Lorenzo de Medici il Magnifico, 2 volumes in-8”, par M. Alfred de Reumont, associé de l’Académie; 2 Coup d'œil sur les colonies belges qui s’établirent en Angleterre pendant le moyen doe, brochure in-8°; par M. Émile de Borchgrave, membre de l’Académie. Remerciments. — M. J. Roulez communique les trois inscriptions sui- vantes, qui lui ont été demandées pour les médailles des lauréats du dernier concours : ( 845) A.-A. DE CEULENEER OB DISSERTATIONEM - HISTORICAM DE : IMPERATORE SEPTIMIO - SEVERO 1874. A. Van WEDDINGEN QUOD : DE S. ANSELMI - DUROVERNENSIS PHILOSOPHIA - DISERUIT 1874. Josepno. DAUBY QUOD OECONOMICAM-DOCTRINAM DE : CAPITIS - CUM + OPERA SOCIETATE POPULARI + SERMONE EXPOSUIT 1874. La classe exprime ses remerciments à M. Roulez. — Une notice manuscrite, Sur l’origine des magistrats communaux et sur l’organisation de la Marke dans nos contrées, au moyen åge, présentée par M. Léon Vander- kindere, est renvoyée à l'examen de MM. de Laveleye, Faider et Wauters. | Ze: SÉRIE, TOME XXXVII. 55 ( 846 ) PROGRAMME DE CONCOURS POUR 1876. Conformément à l’article 19 de son règlement intérieur, la classe procède à la formation de son programme de concours pour 1876. Elle maintient les questions suivantes du programme de 18724, à la solution de chacune desquelles un prix de mille francs est attribué. 1° Faire l'histoire de la philologie thyoise jusqu’à la fin du xvi° siècle. 2 Faire un exposé des négociations qui aboutirent au traité de Westphalie (1648). Indiquer le caractère et les résultats de cet acte célèbre, par rapport aux Pays-Bas. La classe nomme ensuite trois commissions de trois membres, chargées de présenter chacune , pour la séance du mois de juillet, trois sujets parmi lesquels seront choi- sies les questions à mettre au concours. Ces commissions seront composées ` 1° de MM. Faider, Thonissen et Nypels pour les sujets de Législation; 2° de MM. Wauters, Nève et Le Roy pour les sujets relatifs à l'Histoire nationale; 3° de MM. Grandgagnage, Paul Devaux et De Decker pour les sujets de Littérature française. MM. Gachard, Th. Juste et Wauters acceptent la mis- mission de présenter une question pour le troisième grand concours sexennal historique de Stassart. | ( 847 ) COMMUNICATIONS ET LECTURES. EE Le coup d'État du 18 juin 1789 (suite); notice par M. Th. Juste, membre de l’Académie. JI. M. de Trauttmansdorff, ayant reçu l’ordre de se rendre à Vienne, se mit en route le 43 janvier 1789 , et se diri- gea vers Mons. Mais il était à peine descendu depuis quel- ques heures chez sa sœur, chanoinesse du chapitre noble de Sainte-Waudru, qu'un courrier vint lui remettre une autre dépêche avec injonction de retourner à Bruxelles Pour y exécuter les nouvelles instructions de Joseph H. De retour à Bruxelles le lendemain, M. de Trauttmans- dorff communiqua immédiatement à la députation perma- nente des états de Brabant la dépèche impériale qui portait la date du 7 janvier. Elle était conçue en termes me- naçants. Joseph H défendait au gouvernement des Pays- Bas « de convoquer encore en assemblée générale tant les » états de Hainaut que ceux du Brabant et de faire la » moindre tentative ultérieure pour obtenir le consente- » ment refusé. » Il ordonnait de rétracter l'oubli général et voulait que Fon agit avec la dernière rigueur contre tous ceux qui pouvaient avoir manqué, tant par les faits que par les paroles, et il exigeait que ces poursuites fussent exer- cées par la justice militaire. H déclarait enfin que, par leurs refus, les provinces de Brabant et de Hainaut avaient rompu tous les liens par lesquels il était tenu vis-à-vis ( 848 ) d’elles; et en conséquence, qu'il se voyait déchargé de toute obligation vis-à-vis du pacte inaugural. En même temps Joseph IT avait écrit au général d'Aan: « Les démarches des états de Brabant et de Hainaut » m'ont engagé à expédier au ministre les dépèches dont » ce Courrier est porteur, J'attends de votre zèle et de » votre intelligence et de la fidélité déjà éprouvée du » militaire aux Pays-Bas que vous épaulerez en toute oc- » casion le ministre dans toutes les choses qui pourront » être de mon service, en ne faisant ni trop ni trop peu, » et vous réglant de concert avec lui selon les circonstances qui exigent modération , mais aussi fermeté. » La députation permanente du Brabant, après avoir pris connaissance de la dépêche impériale, avait demandé que l'assemblée générale fùt de nouveau convoquée pour le 26 janvier, et le ministre y avait consenti, malgré la dé- fense de l'empereur. Les états se réunirent donc de nou- veau à l'hôtel de ville de Bruxelles qui était gardé par deux compagnies de grenadiers avec un détachement de dragons et deux pièces de canon. La séance s'ouvrit par la lecture d'un diplôme impérial qui suspendait la Joyeuse entrée et relevait du serment prêté aux états, conformément au pacte inaugural, les membres du conseil de Brabant ainsi que les receveurs de l'assemblée provinciale. Les deux pre- miers ordres n'accordèrent que difficilement un nouveau consentement à la levée des subsides. Cinq membres contre sept dans l'état ecclésiastique et vingt contre vingt-deux dans l'état noble s'associèrent à l'opposition du tiers. Mais une très-plate requête de la majorité satisfit le ministre , et il promit de tenir en suspens l'exécution des ordres de l'Empereur. M. de Trauttmansdorf se réjouit de ce résultat, et dans son apologie il se félicitait de n’avoir pas dù en venir déjà x ( 849 ) à cette époque à l'extrémité qu'il lui fut impossible d'éviter quelques mois plus tard. « Tout le monde, ajoutait-il, me » rendra le témoignage que je n'ai épargné ni peines ni » Soins pour n'y être pas obligé; il n’y a pas un membre » des états qui n'attestera que, si j'ai réussi alors, c'est » parce qu'ils se laissèrent diriger d’après les conseils » qu'ils vinrent me demander individuellement, et même » cn députation, au nom de tout le corps, tant avant leur » assemblée du 26 janvier que pendant sa durée. » M. de ‘Frauttmansdorff eut moins de succès dans le Hainaut. Ici la résistance fut invincible. Les états, réunis le 25 janvier, ayant persévéré dans leur refus antérieur, les dernières instructions impériales furent suivies à la lettre. Un édit dn 50 cassa la charte fondamentale du Hainaut, et le lendemain cette ordonnance était mise à exécutirn avec l'appui de trois escadrons de dragons et d'un bataillon d'infanterie. Des commissaires se rendirent dans l'assemblée des états, la déclarèrent dissoute et ap- posèrent les scellés sur les trois salles de réunion ainsi que sur le bureau de la recette. Plusieurs députés ayant pro- testé contre cet abus de la force, ayant soutenu que les états existant de droit, aucune puissance légale ne pouvait les dissoudre, le gouvernement répondit que l'empereur entendait exercer désormais dans le comté de Hainaut l'autorité de conquérant. « Je suis bien sùr, écrivait le général d'Alton, qu'on » aurait réussi dans le Brabant avec autant de facilité qu'en » Hainaut, si on avait voulu marcher en avant (1).» (1) Joseph témoigna néanmoins sa satisfaction M. à de Trauttmansdorff. Le 10 février il l'informe lui-même « qu’il a chargé le prince de Gavre de lui donner comme chevalier, en sa place, le collier de la Toison. » ( 850 ) Mais déjà, dans le Brabant, la constitution était suspen- due de fait. Elle exigeait l'accord des trois ordres pour l'octroi des subsides; en présence du refus persistant du tiers état, que fit Joseph II? « Je vous ordonne, écrit-il » aux états le 15 février, je vous ordonne, comme je vous » y autorise, sans qu'il soit ou puisse être question, à cet » effet, d'autre expédition que cette présente dépêche, » de procéder au recouvrement et à la perception de ces » impôts et subsides, sur le pied accoutumé, suppléant » directement, en vertu de ma pleine et souveraine puis- sance, à tout ce qui pourrait être requis pour compléter » le consentement des états... » Au surplus, l'empereur annonçait encore une fois l'intention de réformer la con- stitution qu'il trouvait « également ténébreuse, incompré- hensible, et mème, à bien des égards, inexécutable. » Les états de Brabant ayant été de nouveau réunis au commencement du mois de mars, M. de Trauttmansdortff fit connaitre aux députés par quels moyens l'empereur espérait rendre la constitution moins ténébreuse ; il s'agissait de modifier la composition du tiers état et d'obtenir des subsides permanents. Le ministre était grand partisan d'une nouvelle repré- sentation du tiers état; mais il prétend, dans son panégy- rique (1), que, s'il avait essayé de modifier la constitution comme le voulait l'empereur, la révolution se serait faite d'autant plus tôt. Quant au général d'Alton, il faisait, selon les expressions du ministre, rouler des brochures où étaient louées les réformes de Joseph H et mème la conseription militaire, innovation qui inquiétait et mécontentait le peuple. x (1) Fragments, etc., pp. 24 et suivantes. ( 851 ) Il faut dire aussi que, dans sa correspondance avec l'em- pereur, le général d’Alton se montrait très-mécontent de la pusillanimité de M. de Trauttmansdorff. Il écrivait à Joseph H, le 4 mai 1789 (1): «.... Je suis » fàché de n'avoir que des nouvelles désagréables à donner ; mais la fermentation recommence visiblement : tous les » rapports que je reçois sont remplis de mauvais propos » que les malintentionnés se permettent et des menées » sourdes de la prètraille; cette inquiétude semble avoir » sa source dans les délais que l'on met à rétablir le nou- » veau système, délais qui n’ont pour but que de laisser » les choses sur l’ancien pied, et dans l'incohérence qu'on affiche dans le traitement des affaires : je crains bien » que tout ceci n’amène la nécessité des moyens violents, et qu'il ne faille de nouveau frayer au gouvernement le chemin pour ses opérations... » M. de Trauttmansdorff n’était point aussi prudent qu'il le dit dans son apologie, écrite après coup et pour rejeter sur d’autres la responsabilité de la révolution. Par une lettre du 11 mai, il prévint le prince de Kaunitz qu'il croyait nécessaire de publier, encore avant la prochaine assemblée générale des états de Brabant, un édit d'après lequel le troisième ordre serait composé, outre les arrière- membres des villes de Louvain, de Bruxelles et d'Anvers, de députés de douze autres villes ou franchises de cette province. Il croyait, en outre, convenable et nécessaire , pour assurer d'autant plus l'exécution des dispositions de cet édit, de le faire publier par le conseil de Brabant. Or le conseil refusait de prêter son ministère à cette publica- = (1) Mémoires pour servir à la justification de feu Son Excellence le général comte d Alton, p. 126. ( 852) tion sans le concours des trois ordres des états, ce qui de- vait rendre le tiers état, qu'il s'agissait de punir, juge dans sa propre cause. Comment M. de Trauttmansdorff vou- lait-il trancher cette difficulté? Il estimait « qu'il ny avait d'autre parti à prendre que de casser le conseil, » et il de- mandait pour cela des diplômes, « dont il pourrait se ser- vir selon les circonstances. » Sur le rapport qui lui fut soumis par son chancelier, le prince de Kaunitz, Joseph H écrivit apostille suivante : « Dans les circonstances présentes, ilw’y a pas d’autre parti à prendre que celui que propose le ministre, qui est de casser le conseil de Brabant; en conséquence de quoi il faudra, dès que les minutes des lettres patentes qu’il a promises seront arrivées, en faire l’expédition le plus tôt que possible et Penvoyer par un homme exprès au ministre; car plus les choses trainent, plus le mal acquiert de force et de vigueur, et l’on ne finira jamais, si l’on ne donne un bon coup de collier. » Le 5 juin le prince de Kaunitz mit sous les yeux de l'empereur un nouveau rapport de M. de Trauttmansdorff, daté du 22 mai. Le chancelier le résumait en ces termes : e Le ministre y expose d’abord que les esprits ne sont plus si disposés à l’obéissance qu'ils l'étoient passé quelques mois, vu que les insinuations des malintentionnés et surtout des ecclésiastiques , la résistance du conseil de Brabant et même ce qui se passe en France en faveur du tiers état avoient de nouveau fait tourner la plupart des têtes. » Quoi qu'il en soit, le ministre a cru dans cet état des choses, pour abréger la longueur des délibérations ordinaires , et tenir la chose d'autant plus secrète, ne devoir consulter sur le parti à prendre que le président et le conseiller Van der ( 853 ) Fosse du grand-conseil et le conseiller du conseil du gouverne- ment de Berg, le cadet. » Les deux premiers avisans avoient d'abord proposé de tâcher d’engager les états à racheter la constitution en consen- tant à un subside permanent, en leur prescrivant pour règle, qu'ils ne pourront plus insérer de clause quelconque dans leurs actes de consentement , et que le consentement de deux ordres seroit censé être le vœu de la généralité; après que cela auroit été établi, ils croïoient que le reste seroit ou indiffé- rent ou moins difficile à exécuter. » De Berg, de son côté, étoit en dernier résultat d'avis de ne rien entreprendre sans avoir entendn au préalable les états, et de trainer l'affaire jusqu’à ce qu’on pùt avoir assez de troupes aux Pays-Bas pour en imposer aux renitens. » Mais le ministre, regardant comme impossible que les états prissent, sur telle proposition qu'on leur feroit, une résolution satisfaisante , surtout dans la disposition actuelle des esprits, pense qu’on ne sauroit rien effectuer sans un coup d'autorité, et que d’ailleurs il falloit venir au secours de ceux des états qui pensent bien, et qu’au lieu de les embarrasser par des propositions ou par des démarches qui les expose- rojent à concourir et à coopérer aux vues de Votre Majesté, et à devenir par là l’objet de la critique et du mécontentement du publie prévenu, indocile et entreprenant, on devoit tout exiger par voie d’ordre ou d'injonction, en éclairant au reste les états par une dépêche détaillée et motivée, dont la publi- cation même pourroit être utile et ouvrir les yeux dans le païs et même dans l’extérieur. » Il ma envoyé les minutes , tant de cette lettre que d’un diplôme qui comprend ce qu’il croit nécessaire de statuer dans ce moment-ci, et dont je crois devoir présenter à Votre Ma- jesté une analyse succincte. ( 854 ) » Le proème du diplôme en retrace les vues générales et les circonstances qui les ont fait naître. » L'article 4, 2, 3 et 4° rend fixes et permanens les sub- sides qui se payent, tant au trésor roïal, que pour l'entretien de la cour de LL. AA. RR. (1) sur le pied de leur montant actuel, sans qu’il soit nécessaire de demander pour cela le consente- ment des états qui en feront néanmoins le recouvrement et le payement au Trésor roïal sur le pied accoutumé. I y est dit, de plus, que les états seront convoqués, du moins une fois chaque année, pour régler les affaires de la généralité et de leur administration , et qu'ils le seront aussi dans tous les cas de propositions extraordinaires. » Le ministre dit dans sa lettre que, si le tiers état avoit pu être réformé d’abord, il auroit espéré d’emporter du moins un subside fixe à long terme, comme de vingt-cinq années, avec une augmentation même plus proportionnée à ce que contri- buent les autres provinces, et un don gratuit, et qu'il auroit cru que cela pourroit suffire, vu qu'il est plus qu'apparent que le délire s’usera, et qu’au bout de quelques années la confiance, comme la soumission et la subordination , se rétablira ; mais, dans la situation présente des choses et des esprits, il a re- gardé comme impossible de réussir dans une proposition quel- conque qu'on feroit à cet égard, vu qu’il n’existe pas dans ce moment-ci un tiers état, et que les deux premiers membres ne prendroient certainement aucun engagement sur un objet pareil. » L'article 5 annonce que Votre Majesté a résolu de pres- erire une nouvelle forme de représentation du tiers état par un édit, dont le projet sera joint au diplôme ; c’est let même qui à rent (1) Les gouverneurs généraux, l'archiduchesse Marie-Christine d'A: triche et le duc Albert de Saxe-Teschen. ( 855 ) été déjà mis sous les yeux de Votre Majesté à l'occasion du refus du conseil de Brabant de le publier. » L'article 6 statue que dans toutes les délibérations des états sur les affaires de la provinee la pluralité formera la ré- solution du corps entier; que cette règle doit être observée tant pour les assemblées de chaque ordre en particulier que pour les cas que les trois ordres ne seront pas d'accord en- semble, où deux vœux seront également censés représenter le vœu de la généralité et qu'il ne sera plus permis aux deux Premiers ordres d'ajouter à leur consentement la clause : Pourvu que les autres membres suivent et autrement pas, ni autre condition ou restriction quelconque; au moyen de cela le tiers état, tel qu’il pourra être composé, ne pourra plus rendre illusoires les résolutions des deux premiers ordres. » L'article 7 porte que quoi que Votre Majesté eût pu casser tout le conseil de Brabant pour le punir des excès scandaleux qu'il s’est permis depuis un certain tems, elle veut bien cependant ne faire ressentir les effets de son animadver- sioù qu’à ceux qu’une conduite soutenue a désignés pour être les vrais instigateurs de ces excès, et Lë doivent être ren- Yoyés de son service. > En même tems il y est ordonné qu’à l'avenir ce tribunal devra sceller et publier tout édit, règlement, ordonnance, disposition ou acte quelconque, émanés de l'autorité souve- raine, qui ne portent pas par eux-mêmes des preuves évi- dentes de surprise par des dispositions positivement contraires à quelque article exprès de la Joïeuse entrée, ete., et qu’en cas de doute il devra s'adresser au gouvernement général, qui, Ouïs les députés des états, portera le cas à la connaissance et décision de votre Majesté, à laquelle le conseil sera tenue. » Pai rappelé ci-dessus que le ministre avoit proposé dans son rapport précédent de casser tout le conseil de Brabant, et ( 856 ) que Votre Majesté avoit même approuvé déjà ce parti : mais le ministre, ayant de nouveau déliberé là-dessus, trouve à présent préférable de se borner à casser quelques membres de ce tri- bunal, et voici les motifs qu’il allègue à ce sujet : » Jl avoue que le conseil de Brabant en a fait assez pour être cassé; qu'il est plus grand de casser tout le corps qui a manqué; que dans le fond le souverain peut être censé avoir plus de droit de casser un corps entier que de casser quelques particuliers , et que même une cassation ou suspension par- tiaire prête plus à la personnalité, ce qui seroit un grand in- convénient ; mais il observe, d’un autre côté, que, tandis que la notoriété indique les instigateurs , on préviendra, par leur seule cassation, un autre grand et plus essentiel inconvénient, savoir, qu'on suspendra l'opinion sur l’anéantissement de la Constitution même. Opinion qui feroit impression sur les par- ticuliers, au lieu qu’en conservant une base du conseil de Brabant sur le pied actuel, on diminue au moins une partie de l’appréhension et les mauvais effets qu’elle produirait, tandis qu’en cassant tout le corps, on court un autre danger, étant possible que surtout les états ne se prétant à rien, il devient impossible, ou de conserver des gens en place, ou d’avoir des sujets convenables qui voudroient être d’un tribunal déjà avili par la cassation générale, ou qui voudroient être emploïés en manière quelconque à des charges en Brabant. » Cependant il croit qu’il seroit bon dans tous les cas d’avoir éventuellement à la main : 1° Le diplôme qui casse le conseil de Brabant; 2 Celui qui rendroit le conseil de Malines juge supérieur du Brabant. 3 » Le projet de ces deux diplômes, que le ministre me remet, ont été rédigés par le président et le conseiller du Grand-Con- seil, Van der Fosse, et il observe là-dessus que, puisque ce WT NET ( 857 ) seront les circonstances qui décideront , si on sera ou ne sera pas dans le cas de faire usage de l’un ou de l'autre de ces di- plômes, on ne peut pas se dispenser de se préparer, au cas de la nécessité, de renverser et le conseil de Brabant et peut-être à la fois la constitution méme, extrêmité qu'il voudroit néan- moins pouvoir éviter au moins quant aux états. » Du reste, le ministre expose dans sa lettre les inconvé- niens de la situation actuelle des affaires du Brabant, l'inutilité de chercher d'y porter remède par les voyes ordinaires et légales, etla nécessité qui en résulte d’avoir recours aux coups d'autorité, qui cependant ne sauroient être emploïés sans toucher plus ou moins à la constitution et à causer nombre Tembarras. Il ne se flatte même pas qu’au moyen des disposi- tions seules qu’il propose, l’ordre sera parfaitement rétabli, et comme les circonstances peuvent influer sur le parti final à prendre et à exécuter dans le Brabant, il croit devoir exposer les considérations suivantes : » 4° Qu'il est possible qu’on soit dans le cas d'en venir abso- lument à l'exécution de la roïale dépêche du 7 janvier dernier, qui portoit l'annulation de la constitution du Brabant; » 2° Que dans ce cas l’édit à émaner pourroit nous faire manquer de juges et d'employés et occasionner des résistances; » 5° Qu'on ne peut pas espérer que la chose se passera avec la même tranquillité en Brabant comme en Hainaut, vu que dans la première de ces provinces les états ont toujours été fort considérés et qu’on ne peut guères leur reprocher de la dila- Pidation, tandis qu'en Hainaut le peuple étoit contre les états et mécontent de leur mauvaise et onéreuse administration; » 4° Que dans le cas qu’on voulüt lever les subsides et im- pôts par les officiers roïaux, on pourroit craindre des refus de paiemens , et par conséquent de fréquentes exécutions mili- ( 858 ) taires et les suites qu’elles pourroient avoir. II a remarqué ailleurs, à l’occasion de l'inquiétude qu'avoit témoignée le conseiller de Berg sur la suflisance des forces militaires, que, quoi que l’on ne puisse pas calculer combien de troupes il faudroit pour la perception des subsides par la voie militaire, qui seroit la suite de la cassation des états , il regarde néan- moins comme impossible d'imaginer qu’on oseroit songer à une autre résistance qui cxigeroit main-forte. » Le ministre représente aussi qu’il sera probablement in- dispensable non-seulement dans le tems, mais aussi vers le tems de l’assemblée générale, de se saisir de certains boute- feux, et il désireroit en conséquence que, dans la dépêche ou le diplôme quelconque que Votre Majesté trouveroit bon d’expé- dier, on insérât qu’elle enjoint à son gouvernement général d’emploïer tous les moyens de soutenir l’obéissance et la tran- quillité, et de s'assurer même des boute-feux connus des troubles passés, à l'égard de qui l'oubli étoit révoqué. » Enfin le ministre représente que l'affaire du séminaire général influe toujours pour beaucoup sur les dispositions des esprits, et qu’il est par conséquent à désirer que cette pierre d’achoppement soit une bonne fois levée. » Après avoir analysé le rapport dans lequel M. de Trautt- mansdorff proposait de supprimer la constitution du Bra- bant, le prince de Kaunitz devait faire connaitre son opinion. Il l'exprima avec une grande réserve et une remarquable brièveté; il s’en référait aux lumières supérieures de Joseph IL. Voici textuellement le votum du chancelier de cour et d'État : | « Tels sont, Sire, les principaux points du rapport du comte de Trauttmansdorff, dont je viens de rendre compte à Votre ( 859 ) Majesté. Elle daignera y reconnoître que les choses sont encore dans le Brabant dans une crise dont les suites sont incalcu- lables, même au sentiment de ce ministre, ct j'ai l'honneur de soumettre ci-joint sub n° 5, aux lumières supérieures de Votre Majesté, les minutes qu'il ma envoyées dans cet état des choses, 1° D’un diplôme qui règle la manière d’être des états et du conseil de Brabant; 2° Dune lettre à écrire par Votre Majesté même à cette occasion aux états; 5° D’un diplôme pour casser, s’il le trouve nécessaire, le conseil de Brabant. Et 4° D'un autre diplôme qui substitue, en ce cas, à ce tri- bünal le Grand-Conseil de Malines. Lorsque Votre Majesté aura daigné agréer ces projets ainsi que le reste des propositions du ministre, ou ou Elle y aura ordonné des changemens, je présenterai tout de suite à sa roïale signature les expéditions qui résulteront de sa souve- raine résolution sur le tout. Je suis aux pieds de Votre Majesté, avec le plus profond respect, KAUNITZ. » Ces documents mirent Joseph I dans une grande per- plexité, N'étant point arrêté par le chancelier sur la pente qui devait conduire à une révolution, il eut confiance en Trauttmansdorff et fut d'avis de le laisser faire. Sur le rapport du 5 juin, et à la suite du votum du chancelier, Joseph écrivit l’apostille suivante : « Dans l'éloignement dans lequel on se trouve, dans L'in- cerlitude et les variations mêmes que ces rapports présentent, il y a autre chose à faire que de donner mesure pleine au ministre, et de lui envoyer toutes les dépêches et tous les ( 860 ) diplômes tels qu’il les exige, signés, afin qu'il en fasse l'usage pour le moment qu’il croira propre au service, et sur- tout finir une bonne fois cette odieuse besogne. » Pour cela faire il faut en même temps que ma réponse au cardinal sur la lettre qu'il m'a écrite soit également expédiée; j'en attends donc le plustôt possible la minute pour l’approuver. » Quand tout cela sera fait, à quoi il faut mettre le plus de presse que possible, ou expédiera avec ces pièces en cour- rier un certain M. Reul que l’on me dit être ici, mais que je n'ai point vu, et avant de partir il viendra chercher chez moi une lettre que je lui donnerai pour ma sœur et une pour le ministre. » Ce fut donc incontestablement M. de Trauttmansdorff qui prit l'initiative du coup d'État : il força en quelque sorte la main à l’empereur en lui expédiant les diplômes et décrets qui devaient détruire la constitution brabançonne. Malgré ses réticences ordinaires, il est d’ailleurs contraint d’avouer cette initiative dans son apologie où il s'exprime en ces termes : « … Le temps s'écoulait, les mauvaises dispositions augmentaient, la soumission manifestée à la dernière assemblée se dissipait et le besoin de terminer d'une façon définitive devenait plus indispensable; les personnes les plus instruites et les plus sensées se réuni- rent alors à dire : qu'il n'y avait pas d'autre moyen pour éviter les malheurs qui menaçaient le pays que de mettre aux états le marché à la main et de casser mème la consti- tution qui prêtait à de fausses interprétations plutôt que de prolonger la mésintelligence qui régnait entre le souverain et la nation, et rendait le malheur de l'un et de l'autre inévitable, — On convint des diplômes et des dépêches nécessaires à cet effet et tout le monde avoua en même A ( 861 ) temps que, en s'exposant à un éclat, il fallait être assuré d'une force suffisante pour le réprimer sur-le-champ. — Je représentais le tout à S. M. et j'y ajoutais la réflexion qu'on ne pouvait songer à suivre cette voie qu'autant qu'on était sûr de contenir l’intérieur du pays, et de n'avoir rien à craindre du dehors. — Le général commandant à qui j'en parlai me répondit ironiquement ` « Qu'il enverrait encore un bataillon par régiment à l'armée de Hongrie et introduirait le système de l'empereur, s'il le voulait, en moins de six semaines (1). » Les deux premiers ordres des états de Brabant avaient été convoqués pour le 18 juin afin de recevoir communication des décisions de l'empereur. M. de Trauttmansdorff prétend que, à la veille même d'exécuter ces résolutions souve- raines, « il s'était encore donné toutes les peines imagina- bles pour éviter d'en venir à cette extrémité. » Il avait eu à cet égard, dit-il, un entretien très-net et très-frane avec les princes de Grimberghen et de Gavre et avec le comte de Duras, représentants de la noblesse aux états de Bra- bant; le jour même de la réunion de ceux-ci, il ne les laissa, ajoute-t-il, aller à l'hôtel de ville « qu'après avoir expliqué la chose à toute la députation qu'il avait fait venir chez lui en corps , et après lui avoir fait prévoir toutes les Suites funestes auxquelles on s'exposait. » À neuf heures, les députés du duché se rendirent dans la salle ordinaire de leurs séances, à l'hôtel de ville, Bientôt ils reçurent communication d'un diplôme par lequel Joseph II leur demandait d'approuver les changements qu'il voulait introduire dans la constitution. La résistance ie (1) Fragments, etc., passim. Ze: SÉRIE, TOME XXXVII. 56 ( 862 ) fut inébranlable. Les états déclarèrent « qu'ils ne pou- vaient approuver des prétentions subversives de la Joyeuse entrée; que l'empereur ne devait point leur imputer cette déclaration à désobéissance, mais seulement au devoir impérieux du serment qui les liait à l'observation des lois constitutionnelles du pays. » A sept heures du soir, M. de Külberg, conseiller d'État et directeur de la chan- cellerie du conseil royal, se rendit à l'assemblée et y donna lecture d'un décret par lequel Joseph H cassait et annulait la Joyeuse entrée du Brabant, supprimait la dépu- tation des états, cassait et supprimait le conseil de Brabant et ordonnait l'arrestation arbitraire de ceux qui, à locca- sion des événements passés ou à venir, s'étaient rendus ou se rendraient coupables envers le souverain. Le lendemain le général d'Aen mandait à Joseph H : « L'opération qui a eu lieu hier s’est exécutée avec toute la facilité imaginable (et se serait effectuée pour le moins avec la même facilité il y a un an). Il n'y a pas eu la moindre opposition, pas le plus petit désordre; la troupe était sim- plement dans ses casernes et les réserves ordinaires prêtes à sortir. La matinée se passa avec de petites patrouilles. À deux heures les réserves consistant en quatre compagnies et un peloton de dragons se formèrent, sur la réquisition que m'en fit le ministre, vis-à-vis l'hôtel de ville pour le moment de la dissolution des états; après quoi la saisie des caisses et la cassation du conseil de Brabant eut lieu avec main-forte militaire. Le ministre m'ayant en même temps fait connaitre les noms de plusieurs individus qu'il s'agissait d'arrêter militairement, l'un d'eux, conseiller au conseil de Brabant, fut enlevé à la sortie du conseil et con- duit au château d'Anvers ; mais les autres ont trouvé moyen jusqu'à présent de se dérober aux recherches que l'on fait. ( 865 ) Les commandants de Louvain et d'Anvers ont aussi reçu les noms des individus à prendre. A huit heures les réserves rentrèrent et il fut continué des patrouilles de cavalerie et d'infanterie jusqu'au matin. Il ne s’est point fait le moindre mouvement; tout est du plus grand calme en apparence. Je prends dans ce moment des mesures pour prévenir le mal que les prêtres fanatiques pourraient faire, et j'ose espérer que rien ne bougera. » Pour rendre cette révolution heureuse, il serait néces- saire maintenant de purger le conseil du gouvernement et de rompre cette aristocratie qui gouverne sans réserve depuis Cobentzel, et enfin d'atterrer l'hydre monacale en réformant d’un coup toutes les abbayes dont les chefs se sont montrés si rebelles aux volontés souveraines. Si sur le nombre monstrueux de cent et huit de ces maisons qui existent aux Pays-Bas, on en diminuait un tiers, qu'on pourrait distribuer dans celles qui resteraient; si Ton trou- vait qu'il y eùt manque de prètres, et si en même temps on créait quelques établissements pour le soulagement de l'humanité, comme cela s'est pratiqué en Allemagne, bien loin d'accuser le souverain d'irréligion, on le bénirait et rendrait justice à ses vues éclairées et bienfaisantes : ces deux opérations feraient plaisir à la nation et seraient très- avantageuses aux intérêts du souverain... (1) » Le général s'était d’ailleurs émpressé de faire compli- menter le ministre, et il lui avait fait dire : « Le 18 juin est un jour heureux pour la maison d'Autriche, puisque c’est celui où la bataille de Kollin a sauvé la monarchie et où l'Empereur devient maitre absolu des Pays-Bas. » (1) Mémoires pour servir à la justification de S. E. le général comte d'Alton, p. 129. ( 864 ) Dans son apologie, M. de Trauttmansdorff invoque le rapport du général d’Alton du 19 pour rappeler que depuis plus d’un an ce dernier le pressait d'en venir au coup d'État. Il voyait bien, dit-il, par les dépèches de l'empereur, que le général d’Alton l'exeitait. « En de pareilles circonstances mon rôle, ajoute-t-il, était bien dangereux et la responsabi- lité qui retombait sur moi très-effrayante si je n’exécutais pas les ordres absolus que me donnait S. M., d’après de pareilles insinuations. » Triste défense! Si le général d’Alton avait fait des insinuations, M. de Trauttmansdorff, lui, était allé plus loin : il avait fait rédiger les ordonnances qui supprimaient la constitution brabançonne, et, pour obtenir l'approbation du souverain, il avait cherché à lui démontrer la nécessité du coup d'État. En apprenant ce qui venait de s'accomplir à Bruxelles, Joseph écrivit à son frère Léopold (2 juillet 1789) : « … Vous recevrez les pièces de la semaine et vous y » verrez qu'aux Pays-Bas il a fallu en venir, pour les états » de Brabant et le conseil, à la cassation : ee qui s'est très- » bien exécuté par Trauttmansdorff, qui est véritablement » à cette heure un des meilleurs sujets, pour être poussés, » que je connais... » Le grand due de Toscane, héritier des États de la maison d'Autriche, répondit à son frère : « J'ai vu par les » papiers que vous m'avez communiqués qu'enfin les » prêtres qui voulaient tout brouiller aux Pays-Bas ont » réussi à vous obliger de casser les états et le conseil de Brabant, malgré tout ce que vous avez fait pour différer d'en venir à de pareilles extrémités. Il est heureux, et on doit, je crois, à la marche suivie, bien réglée, pru- » dente. et ferme du comte de Trauttmansdorff d'avoir x S EIERE AR RE EE \ ( 865 ) » prévenu et évité tous les inconvénients, et que tout se » soit passé si heureusement et tranquillement, » Le 25 juillet, Joseph mande encore à son frère : « Aux » Pays-Bas tout est tranquille, et le grand coup porté a » fait un très-bon effet (1). » C'est ce qui résultait du moins de la correspondance de M. de Trauttmansdortff, Il avait reçu, dit-il, force compli- ments ; pendant plus de huit jours , son antichambre n'avait pas désempli; on lui témoignait de toutes parts de la recon- naissance et surtout de la joie de ce qu’à présent tout était fini. H cherchait cependant à calmer, à ramener les esprits. Il fit publier, le 20 juin, un édit qui rappelait les sujets égarés à leur souverain légitime et qui était une espèce d'amnistie. I conçut alors, ajoute-t-il, le plus grand espoir; mais à peine quinze jours s'étaient-ils écoulés que cet espoir fut détruit par la malheureuse révolution de France. Joseph H reprocha plus tard à M. de Trauttmansdorff de n'avoir point obéi à ses instructions qui lui prescrivaient de rétablir les états dans un très-bref délai, en d’autres termes, . Qui l'autorisaient « à rendre la constitution. » Dans la lettre qu'il adressait à sa sœur Marie-Christine, le 28 décem- bre 1789, après le triomphe des patriotes, Joseph H disait : « … Tout ce qui s'est écrit et tout ce qui s’est passé pour amener les choses à ce point sera à jamais incroyable, et si je ne pensais qu'à moi, je publierais cette corres- pondanee avec mes réponses, desquelles on n'a rien exécuté et où lon verrait par quelles assurances J'ai été conduit à làcher l'édit de la cassation des états et du x x = > Ee E, nn ae ae mom men emmener ne mp ee M a (1) Joseph 11 und Leopold von Toscana. Jhr Briefwechsel von 1781 bis 1790, pp. 260 et suiv. ( 866 ) conseil de Brabant, dont de Bruxelles on a envoyé la mi- » nute ici, comme on la voulait. Malade à Laxenbourg, la promesse que cela terminerait tous les embarras m'y détermina; mais j'ordonnais expressément en même » temps de restituer dès le lendemain les états et le con- » seil, avec les changements qu'on y aurait trouvé néces- saires à faire, et de rendre la Joyeuse entrée. Rien ne s’est fait, quoique je l'aie ordonné itérativement.….. » Les reproches de Joseph H n'étaient point restés ense- velis dans les archives de Vienne on de Laxenbourg. M. de Trauttmansdorff crut devoir y répondre. « I faut, » disait-il, « n'avoir pas connu l'empereur pour croire que quelqu'un eût osé agir ainsi contre ses ordres et qu'il leùt permis. Il est vrai qu'il m'a dit dans plusieurs de ses lettres qu'il fallait donner d'abord une nouvelle con- stitution; mais pouvait-ce être l'ouvrage de vingt-quatre heures? Et sur quelle base S. M. voulait-elle que cette constitution fùt établie (1)? » De l'aveu mème de M. de Trauttmansdorff, l'empereur Joseph H voulait done faire cesser le régime absolu par l'octroi d'une nouvelle constitution. D'autre part, il résulte aussi des révélations de l’ancien ministre dans les Pays-Bas x x S x S > (t) AP ee de ces E M. de Trauttmansdorff publiait quelques extraits d ` mais ces citations sont incom- plètes. ur voici : — Du 25 août 1789.. 2 Quant à la constitution, vous Con- naissez mes intentions et la manière d'y parvenir; cependant, à cette heure, ce n’est pas l’époque d'r songer. — Du 10 septembre... Pour le moment, il ne convient pas de rendre une constitution au Brabant ni de céder en rien aux demandes des états. — Du 13 septembre... Pour ce qui regarde le projet de constitution que vous m'avez envoyé, ce n'est pas le nt d'y penser. H faut de toute nécessité que le calme soit retabli et que les affaires de France aient pris couleur. » ( 867 ) que celui-ci ne s'était point empressé de fournir au souve- rain les moyens de restaurer ou de remplacer la Joyeuse entrée. Quoi qu'il en soit, le coup d'État du 18 juin 1789, conçu par un ministre vain et faible, encouragé par un général brutal, non désapprouvé par l'ancien conseiller de Marie-Thérèse, et accepté trop légèrement par un grand mais présomptueux souverain, ce coup d'État fut une faute capitale. L'Autriche perdit les Pays-Bas, et Joseph IE, dont la santé n'avait pu résister à tant de travaux et d’angoisses, s'éteignit après avoir dit à l’un des plus illustres représen- tants de la noblesse belge : « … Votre pays m'a tué; Gand pris a été mon agonie, et Bruxelles abandonné ma mort... » — M. Loise donne lecture de la continuation de son travail Sur la littérature allemande pendant la querre de Trente Ans, réservé pour le recueil des Mémoires in-8". | Sur la carrière administrative et militaire d’un légat pro- Dréteur de la Germanie inférieure; par M. J. Roulez, membre de l’Académie. Lan 16 avant J.-C., sous le règne d'Auguste, la Germa- nie inférieure, qui s’étendait, comme on sait, à une partie de notre pays, avait pour gouverneur M. Lollius (1), l'un des consuls de l'année 21. Plus tard (Fan 4 avant J.-C.), (1) Voy. mon Mémoire sur les magistrats romains de la Belgique, p. 12. (MÉMOIRES DE L'ACADÉMIE, t. XVIL; 1845). ( 868 ) l'empereur le nomma au gouvernement de la Syrie et le choisit pour conseil de son fils adoptif, C. Cæsar , à qui il avait confié un commandement important en Orient. Ce Lollius était un des amis d'Horace (1) et c’est à l’ainé de ses deux fils que le poëte a adressé deux de ses épitres (2). Sa fille ou petite-fille, Lollia Paullina, fut mariée à Caligula et après avoir été répudiée par cet empereur, serait proba- blement devenue la femme de Claude, si la jalousie d’Agrip- pine, sa rivale, ne l’eut fait périr. Cependant les membres de la gens Lollia, qui occupèrent dans la suite de hauts emplois sous l'empire, ne paraissent pas avoir été nom- breux. Les fastes consulaires en font connaitre deux seule- ment, M. Lollius Paullinus Valerius Asiaticus Saturninus, consul suffectus, l'an 93 après J.-C., sous Domitien, et Cn. Lollius Gallus, également consul suffectus l'an 150, sous Hadrien. Capitolin (5) en mentionne un troisième, Lollius Urbicus, vainqueur des Bretons sous le règne d'Antonin le Pieux. Une inscription latine honoraire, dé- couverte il y a une vingtaine d'années à Tiddis près de Constantine, donne la série des emplois publies remplis par ce dernier et parmi ces emplois se trouve celui de légat propréteur de la Germanie inférieure. Cette inscription, gravée sur un piédestal, fait le sujet du commentaire que j'ai l'honneur de communiquer à l'Aca- démie ; elle est de la teneur suivante (4) : (1) es zeg Comment. ad Horat. Epist. 1,2. pp. 150-154. (2) I, 18. (5) rä Pius. 5. (4) L. Benes, SAPE de l'Algérie, n° 2519, p. 276. Elle avait élé publiée précédemment, mais d’après une copie défectueuse, dans Orelli- Henzen , poser: latéphs: vol. HI, n° 6500, TTT ET O 869 ) Q-LOLLIO-M-FIL QVIR + VRBICO + COS LEG.AVG-:PROVINC- GERM INFERIORIS-FETIALI-LEGATO IMP-HADRIANI-IN-EXPEDITION IVDAICA-QVA:DONATUS:EST HASTA + PVRA - CORONA - AVREA - LEG LEG-X-GEMINAE-PRAET-CANDIDAT CAES-TRIB-PLEB-CANDIDAT-:CAES-LEG PROCOS-ASIAE-QVAEST:VRBIS- TRIB LATICLAVIO -LEG - XXII- PRIMIGENIAE ITI VIRO-VIARVM-CVRAND PATRONO A Quintus Lollius, fils de Marcus, de la tribu Quirina, Urbicus, consul, légat de l’empereur dans la province de Doris inférieure, fécial, légat de l’empereur Hadrien dans l'expédition contre la Judée, dans laquelle il reçut une haste pure et une couronne d’or, légat de la légion Kr GEMINA, Préteur candidat de l’empereur, tribun du peuple candidat de l’empereur, légat du proconsul d'Asie, questeur urbain, tribun laticlave de la légion XXII PRIMIGENIA , quatuorvir Pour Pentretien des voies, patron (de Tiddis cette inscrip- tion ou cette statue a été consacrée) par un décret des décu- rions et avec la permission du proconsul. Ce monument lapidaire nous apprend que le prénom de notre Lollius était Quintus et celui de son père Marcus. Nous aurions pu conclure de là qu'il était fils du consul M. Lollius Paullinus mentionné ci-dessus. H n’en est pour- tant pas ainsi. Son père s'appelait M. Lollius Senecio, ( 870 ) comme l'indique une autre inscription (1) répétée quatre fois sur un grand tombeau circulaire, situé à quelques kilomètres de Tiddis. Lollius Urbicus, parvenu à la pré- fecture de la ville de Rome, avait lui-mème élevé ce monu- ment funéraire à cinq de ses proches, notamment à son père, à sa mère, à deux de ses frères et à un oncle mater- nel. Cette circonstance autorise à supposer que sa famille, originaire de Rome, s'était établie à Tiddis, municipe fai- sant partie, comme beaucoup d’autres de la Numidie, de la tribu Quirina (2), dans laquelle notre inscription atteste que Lollius Urbicus était inscrit. Des inscriptions funé- raires de Lollii sont venues au jour non-seulement à Tid- dis (5), mais encore dans plusieurs localités de cette con- trée, à Cirta (4), au pied de l'Aurès (5), à Lambesa (6), à Berouaguya (7), à Bega ou Vaga (8). La mère de Lol- lius Urbicus était une Grania. Or une famille de la gens de ce nom avait aussi émigré en Afrique; car Apulée (9) fait mention de Grani, contre lesquels il soutint un procès devant le proconsul d’Afrique. Lollius Urbicus s'était-il rendu à Rome pour y achever ses études, comme plus tard un autre Africain illustre, E à (1) L. Renier, ouv. cit., n° 2520 : M. Lollio + Senecioni. patri || Graniae. Honoratae: Matri |] L. Lollio: Seni. fratri || M. Lollio. Honorato- fratri/| P. Granio + Paulo- Avonculo || Q. Lollius- Bëtong praef: Urbis. (2) Grotefend, [Imperium roman. AN descriptum, p. 161. (5) L. Renier c ouv. cit., m spaa (6) GE 95, 924, 926, 950. (7) 1 3666. He Gun, Voyage archéologique dans la régence de Tunis, L Il, p. 6, ge eg magia, Cap. 1. ( 871 ) Septime-Sevère, ou seulement pour aspirer aux emplois publics? Nous n'en savons rien, mais il est certain qu'il trouva de l'appui dans la capitale de l'empire. Peut-être les deux consuls suffecti, cités ci-dessus, étaient-ils ses pa- rents et l’auront-ils protégé. Hadrien occupait déjà le trône impérial quand il entra dans la carrière politique. Ceux qui suivaient alors cette carrière débutaient soit par le vigintivirat, soit par le tribunat militaire, le plus fréquem- ment par le vigintivirat, qui se composait de la réunion des membres de quatre petites magistratures. La charge de quatuorvir viarum curandarum, dont Lollius Urbicus fut investi en premier lieu, formait l'une de ces magistra- tures. Si elle est mentionnée la dernière dans l'inscription de Tiddis, c’est que les diverses charges y sont énumérées dans l’ordre inverse de celui où elles ont été gérées, à l'exception toutefois du consulat, qui, selon la règle, vient en première ligne. Après avoir été quatuorvir préposé à l'entretien des voies publiques à Rome, Lollius Urbicus fut nommé tribun lati- clave de la vingt-deuxième légion primigenia. J'ai déjà, dans une autre occasion (1), fait remarquer à la classe que le laticlave , insigne des sénateurs et que leurs fils étaient autorisés à porter, du moment où ils prenaient la toge virile, s’accordait aussi par l'empereur à de jeunes gens d'avenir de l’ordre équestre, que la gestion de magistra- tures devait faire arriver un jour au sénat. L’obtention préalable du latielave donnait à celui qui parvenait au tri- bunat militaire le droit de prendre le titre de Tribunus (1) Rapport sur les mémoires qui ont concouru en {870 pour un essai sur la vie et le règne de Septime Sevère, Bulletins de l'Académie, 2° série, t XXIX, p. 518. (872 ) laticlavius. Si ce titre a formé l'apanage exclusif de ces deux classes de jeunes gens, il en résulte que Lollius Ur- bicus appartenait à l'ordre équestre ou bien qu'il était soit petit-fils, soit fils de sénateur. A partir de sa création proba- blement par l'empereur Claude, la légion XXIe prèmige- nia (1) stationna dans la Germanie supérieure pendant deux siècles au moins, si l’on en retranche quelques an- nées de séjour dans la Germanie inférieure à la fin du règne de Trajan et au commencement de celui d'Hadrien. C’est done sur le Rhin, dans Tune ou l’autre de ces deux provinces, que notre tribun laticlave alla faire son appren- tissage du métier des armes, si toutefois l’on peut employer cette dernière expression par rapport à ces jeunes Com- mandants improvisés. Quoi qu'il en soit de la nature de ce tribunat militaire, le passage par ce grade était regardé comme suffisant pour satisfaire à la prescription légale, en vigueur depuis les temps les plus anciens, qui interdi- sait l'entrée du sénat à celui qui n'avait pas fait ses années de service militaire. Il fallait d’ailleurs y avoir passé pour arriver a la questure (2). (1) Voir sur la formation et l’histoire de cette légion les notes de Münter et Lehne, chez Creuzer, Abriss der röm. Antiq., pp. 356 et sv. éd. 2. Wiener, De legione Romanor. vicesima secunda Darmstadt, 1850. Pauly’s, Real Leen d. Alterthumsw. Bd. 1V, pp. 899 et sv. Brambach, Corpus f t. Rhen. Praefat., p. 4 vs i moins d’en être dispensé par l'empereur, Seplime Sévère paraît avoir joui de cette faveur, comme l'atteste le passage suivant de EE (Sever., 2) heureusement corrigé par M. Hirschfeld (Hermes, t. HI, p. 250) : Quaesturam diligenter egit omisso tribunalu ne Malgré son manque de critique, l'historien ‘romain m'aurait pas avancé un fait contraire à la règle, s’il meùt été puisé à bonne source, tandis qu'Eutrope (VIH, 18) a pu se laisser induire en erreur par cette même règle, lorsqu'il afirme, sans autre garantie peut-être, que Sévère fut tribun militaire. ( 875 ) Lollius Urbieus sollicita ensuite et obtint la questure, qui était le marche-pied indispensable pour parvenir régu- lièrement aux hautes magistratures et qui ouvrait au titu- laire la porte du sénat. H fut désigné pour remplir cette charge à Rome mème. Le minimum d'âge pour y être admis étant alors de vingt-cinq ans, nous devons en con- clure que Lolluis Urbicus avait au moins ce nombre d'an- nées. Au sortir de la questure, il fut envoyé en Asie en qua- lité de légat du proconsul qui se trouvait à la tète de cette province. L'Asie étant une province dépendante du sénat et le magistrat qui la gouvernait n'ayant point ou que peu de troupes sous son commandement, ses attributions princi- pales, comme celles de ses trois lieutenants, consistaient dans l'administration de la justice. Ceux qui passaient par toute la filière des magistratures ordinaires géraient, entre la questure et la préture, soit le tribunat du peuple, soit l’édilité, rarement l’un et l’autre. Lollius Urbieus fut nommé tribun du peuple sur la recom- mandation de l'empereur (tribunus plebis candidatus Cæsa- ris). Si l'on ne savait parfaitement que la gens Lollia était plébéienne (l'un de ses membres, le tribun M. Lollius Pali- canus, a joué un rôle assez important du temps de Sylla), s'il en fallait une nouvelle preuve, elle nous serait fournie par la nomination de Lollius Urbicus au tribunat; car, sous l'empire aussi bien que sous la république, cette place fut accessible aux plébéiens seuls. De même que pour le tribunat du peuple, Lollius Urbi- cus fut recommandé par l'empereur pour la préture, qui lui fut accordée (praetor candidatus Cæsaris). A cette époque il fallait avoir géré cette magistrature pour pouvoir obte- nir le commandement d’une légion. Au sortir de charge ( 874 ; done il fut nommé légat de la dixième légion gemina. Cette légion, après un long séjour dans la Germanie inférieure, où elle avait son quartier principal à Nymègue, fut trans- férée par Hadrien sinon déjà par Trajan dans la Pannonie supérieure (1). C'est done probablement dans cette pro- vince où elle stationnait à Vindobona ou Juliobona (Vienne en Autriche) que son nouveau chef alla la rejoindre. Après le commandement de la dixième légion, l'inserip- tion en l'honneur de Lollius Urbicus mentionne la part qu'il prit en qualité de légat de l'empereur Hadrien à Tex pédition contre les Juifs. Il avait certainement quitté le commandement de sa légion (2) quand il partit pour la guerre de Judée, car il n'existe, que je sache, aucun indice que cette légion ait fait partie des troupes romaines expédi- tionnaires. Au rapport de Dion Cassius (5), la révolte qui éclata en Judée sous Hadrien ayant pris de vastes propor- tions et les Romains ayant essuyé plusieurs pertes, l'empe- reur, qui s'était peu inquiété d'abord de cet événement, envoya contre les révoltés ses meilleurs généraux. Parmi ceux-ci l'historien ne cite nommément que Sextus Julius Severus, alors légat propréteur de la Bretagne, à qui fut confié le commandement en chef. Il était d'usage que lors- a (1) Voy. relativement aux diverses stations de cette légion, Grotefend dans Pauly’s, Real Encyclop. der Class. Alterthumsw., Bd. IV, p. 890. Brambach, }. c., Mommsen, Corpus Inscript. latin., vol. HE, p. 482. (2) Dans le cas contraire, notre inscription eùt sans doute fait con- naître qu'il l’avait conduite à cette guerre. C’est ainsi qu'une inscription , consacrée à M. Claudius Fronton, atteste que, lorsqu'il était légat de la première légion Minervia, il prit part avec elle à la guerre contre les Parthes, Orelli-Henzen, Inser. lat., vol. HI, no 5478 : Leglatus)-Auglus- torum). Legionis. primae. Minerviae.in. expeditionem. Parthicam. dedu- cendae. (5) Lib. LXIX , c. 15. ( 875 ) qu'un général était chargé de la conduite d'une guerre, il reçüt en même temps le gouvernement du pays qui en était le théâtre. Aussi Severus fut-il mis à la tète de la Palestine d’abord, puis de la Syrie (1) et eut pour succes- seur dans la première de ces deux provinces Tineius Rufus (2), qui prit également part à la guerre et fit périr le chef de la révolte. Lollius n'eut pas de gouvernement de province, mais seulement un commandement militaire. Son titre de legatus imperatoris Hadriani, sans l'adjonction du mot de comes (5), ne semble pas pouvoir être interprété dans le sens qu'il aurait fait l'expédition judaïque à la suite de l'empereur. Notre inscription ne peut done jeter aucune lumière sur la question de savoir si Hadrien s’est rendu sur le théâtre de la guerre (4). Des actes de valeur méri- tèrent à Lollius, dans cette expédition, des distinctions mi- litaires, à savoir une haste pure, c’est-à-dire non surmontée du fer et une couronne d’or. Notre inscription offre donc une exception à l'usage constaté par M. Henzen (5), que les légats légionnaires recevaient trois couronnes, trois hastes pures et trois vexilla, et les légats commandant en chef Quatre couronnes, quatre hastes pures et quatre vexilla. Je penche à croire que son consulat doit se placer entre (1) Mommsen, dans Borghesi, Œuvres, t. IV, p. 168, note 1. (2) Voy. les autorités citées par Barohect. Ibid., p. 167. (5) Comme, par exemple, dans une inscription pul Gruter.Cor Inscript , p.455: Legat(o) et comiti CIRE Cæsaris in nBr itannia, cf. Corp. Inscript. lat., vol. IH, 550 et 1457, ed. Mommsen 4) Voy. Flemmer, De Ae A SE gestis Hadriani imperatoris , -Pp. 158, seq. Gi Annales de l'instit. arch., vol. XXXI, pp. 209ets.. Cf. L. Renier, Sur le conseil de guerre tenu par Titus etc., pp. 277 et suiv. du tome XXVI des Mém. de l'Acad. des Inscript. et belles-lettres de Paris. ( 876 ) le commandement de la dixième légion et l'expédition de Judée. Dans cette hypothèse, il aurait été consul suffectus avant cette guerre, dont l'époque est fixée à l’année 155 ou 135 après J.-C. (1). Quand même son séjour dans la Pannonie ne se fùt pas prolongé au-delà de deux ans, il y aurait eu l'intervalle légal entre la préture et le consulat. H a pu arriver d’ailleurs que son élévation à la dernière de ces dignités ait eu lieu en son absence de Rome. Sous l'empire, la plupart de ceux qui parcouraient la car- rière des charges civiles et militaires tenaient à être aussi investis de l’un ou l’autre sacerdoce. Quand ils ne l'avaient pas obtenu avant le consulat, il leur était conféré immédia- tement après. Il est donc à supposer que Lollius fùt admis dans le collège des Féciaux, après avoir été consul, et avant d’être nommé au gouvernement d’une province, conformé- ment à l’ordre observé dans l'inscription de Tiddis. S'il en avait été autrement, sa qualité de fécial aurait été men- tionnée hors ligne, immédiatement après celle de consul, suivant la règle généralement suivie dans les inscriptions. La dernière charge dont notre incription fait mention est celle de légat propréteur de la Germanie inférieure. Comme cette province relevait de l’empereur, elle ne pouvait être gouvernée que par un personnage consulaire. Lollius Urbicus y aura été envoyé dans l’une des dernières années du règne d'Hadrien , mort Tan 158 de notre ère. C’est donc après qu'il eut pris possession de ce gouvernement ou au moins lorsqu'il y était déjà nommé que les décurions de (1) Sur la fixation de l’époque de la guerre de Judée consulter Tillemont. Histoire des empereurs, t. II, p. 11, p. 490. Eckel, Doctr. Num., t. VI, p. 496. Borghesi , OEuvres, t. V. p.412. Gregorovius, nero des Rom, Kaiser Hadrian, p. 52, Flemmer, l. c. | ( 877 ) Tiddis lui consacrèrent une inscription honoraire, et peut- ètre une statue, sur le piédestal de laquelle elle était gravée, en reconnaissance, sans doute, des services qu'il avait ren- dus en sa qualité de patron de ce municipe. Tout porte à croire, en effet, que lorsqu'il fut devenu un personnage influent à Rome par son entrée au sénat et par la gestion de plusieurs magistratures, les habitants de Tiddis s’em- pressèrent de mettre leurs intérêts sous sa protection. Un grand nombre d'exemples prouvent que le passage du gouvernement de la Germanie inférieure ou supérieure à celui de la Bretagne constituait un avancement régulier pour les fonctionnaires romains. On ne fit pas d'exception à cette règle pour Lollius Urbicus. Capitolin (1) raconte qu'étant légat de la Bretagne sous le règne d’Antonin-le- Pieux, il vainquit les Bretons et fit construire un rempart de gazon pour arrêter les incursions des barbares dans la province. Cette muraille dite aujourd'hui Grahams’ Dyke avait une longueur d'environ 57 milles anglais ; elle s'étend de Carriden sur la mer du Nord jusqu’à Old ou West Kilpatrick sur l'Océan. Elle était construite de terre, de gazon et de pierres. En avant on avait creusé un fossé et sur tout le parcours étaient échelonnés dix-huit ou dix-neuf forts (2). Un fragment d'inscription déterré à Bemulie sur l'emplacement de l'un de ces forts (3) confirme le témoi- (1) Vit. Anton. Pii 5: Per legatos suos plurima bella gessit, nam el Britannos per Lollium Urbicum vicit legatum, alio muro cespiticio summotis barbaris ducto. Deux inscriptions confirment le fait de la pré- sence de Lollius Urbicus en Bretagne en qualité de légat propréteur de l'empereur Antonin le Pieux, Hübner , Jnseript. Britannie latinae n" 1041 et 1195. (2) Voy. Hübner, ouv. cit., p. 191, sq. (5) Chez Hübner, ouv. cit., n° 1125. 2e SÉRIE , TOME XXXVII. 57 ( 878 ) gnage de Capitolin que Lollius Urbicus a présidé à la con- struction de ce mur. M. Hübner (1) a supputé que le temps de sa légation de Bretagne doit ètre fixé dans les années 140 à 145 après J.-C. Son départ de la Germanie inférieure a donc eu lieu probablement à la première de ces dates. La plus haute dignité à laquelle parvint Lollius Urbicus est, pour autant que nous sachions, la préfecture de la ville de Rome. Le titre de préfet lui est attribué par deux inscriptions, l’une trouvée à Tiddis (2) et l’autre dans la capitale de l'empire (5); elle lui est donnée aussi par Apulée (4). Cet écrivain, dans sa défense devant le pro- consul d’Afrique contre une accusation de magie, voulant faire apprécier la moralité de l’auteur de l'accusation, lui reproche d'avoir persisté impudemment à soutenir la faus- seté du testament de son oncle maternel, même après que Lollius Urbicus, préfet de la ville, eut prononcé, de Pavis de son conseil, une sentence qui le déclarait véritable et devant être tenu pour valable (5). L'action intentée à (1) L. c., p.121. Le même, Die Römischen Legaten'von Britannien dans le Rhein. Museum, B. XII, p. 60 fg. (2) Voy. ci-dessus, p. 870, not. 1. (3) Gruter, p. 38, 13 4) De Magia lib., cap. 2 : « Sicinius Æmilianus. qui avunculi sui » testamentum quod verum sciebat pro falso infamavit, tanta quidem » pertinacia, ut cum Lollius Urbicus V. C. verum videri et ratum esse » debere, de consilio consularium virorum pronuntiasset , contra clarissi- » mam vocem juraverit vecordissimus iste tamen, illud testamentum » fictum esse. e Ibid., c.5: e Quod is ut dixi, mentiens apud præfectum a urbi in amplissima causa convictus e (5) Dans la seconde moitié du lle size i préfet de la ville connaissait des faux testaments, comme le prouvent deux passages de Scævola (l. 24 D. de lege corn. de falsis , 48, 10, et l. 135 § 4 D. de verb. oblig. 45, 1), mais il n'était compétent que si le faux avait été commis à Rome ou dans le rayon de cent milles. Les gouverneurs avaient la même compétence Re 77" otugeeeen ve ( 879 ) Apulée a dù avoir lieu entre les années 154 et 138 de notre ère (1), mais l'affaire du faux testament était anté- rieure de plusieurs années. Il est en outre fait mention dans une lettre de Fronton (2) d’un jugement rendu par le préfet Lollius Urbicus en cause de Volumnius Serenus, décurion de la colonie de Concordia, dans la Vénétie, accusé d’avoir usurpé illégalement cette qualité que la peine de la relégation lui aurait fait perdre. Afin d’expli- quer l'intervention du préfet de la ville dans cette cause, Borghesi (5) a recours à la supposition qu’elle lui arriva en appel après avoir été jugée en première instance par les magistrats municipaux (4), mais pour cela il est obligé d'admettre que les deux instances ont eu lieu dans l'inter- valle de temps qui sépara la suppression par Antonin le Pieux (5) des Consulares d'Hadrien de l'institution des dans leurs provinces (Plin. Epist. X, 66 sq). I faut croire en conséquence que le testament attaqué par Sicinius Æmilianus avait été fait à Rome et non en Afrique, car dans le cas contraire l’action aurait dù être portée devant le proconsul de cette province (1) Voy. Hildebrand, de Apuleji À et scriptis, p. xviir, dans son édi- tion de cet auteur, Lips., 1842. (2) Ad amicos lib. IL, 5, p. 304, ed. Mai : « Delatus est Volumnius quasi = in curjam irrumperet, cum ei jus Deeg curiae non esset ut » relegato...... Quae cum longissimis temporibus forent prorata Lollius (5) Iscrizione di Concordia. OEuvres V, p. 419, sv. (4) Mais la colonie de Concordia étant située en dehors du rayon de cent milles dans lequel était circonscrite la juridiction du préfet de la ville (1.4, pr.§ 4 D. de officio praef. Urb. 1, 12), il faudrait expliquer en outre bise Lollius Urbicus a eu à s'occuper de cette affaire. (3) Cette suppression résulte des textes d’Appien , de Bello Civili 1, 58 et de Capitolin, Vita Marci cap. Hcf. Dodwell, Praelect. Camden , prael. 9 $8,sq.; mais l'autorité de ces historiens n’est généralement pas acceptée. On regarde comme plus vraisemblable que les consulares ont existé H ( 880 ) juridici de Marc-Aurèle. En définitive, si les passages d'Apulée et de Fronton nous apprennent que e’est dans la première moitié du règne d’Antonin-le-Pieux que Lollius Urbieus exerça la préfecture de la ville, ils ne nous per- mettent pas de fixer l’année de son entrée en charge ni celle de sa sortie. — Vue l'heure avancée, la classe remet à la prochaine séance, fixée au lundi 6 juillet, les lectures suivantes in- scrites à l’ordre du jour : 1° Le cardinal Bentivoglio. Sa nonciature à Bruxelles (fin); par M. Gachard; > Deux lettres inédites de Jacques de Molay. Lecture par M. le baron Kervyn de Lettenhove, 7 GES p aaor 5° Le de N las de Bı uxelle Ka e Lecture par M. Rivier; 4 Sur les guerres médiques. Lecture par. M. P. Devaux. M. Alph. Wauters est inscrit ensuite pour une lecture qu’il se propose de faire dans la même réunion. jusqu'au moment de leur remplacement par les juridici. Voy. Savigny, Geschichte des Bom, Rechts im Mittelalter. Kap. I1, 611, p. 55, 2" Ausg. Dirksen, Die Script. Hist. Aug., p. 79, fgg. Walter, Gesch. des R. Rechts, T. M, p. 572 (282), 2te Ausg. Puchta, Gesch. des R. Rechts. 1, §92,s. 405. 5te Ausg. Marquardt, Röm. Staatsverwaltung. B. I, s. 75. ( 881 ) CLASSE DES BEAUX-ARTS. Séance du 11 juin 1874. M. Azpnonse Bazar, vice-directeur, occupe le fauteuil. M. J. Liacre, secrétaire perpétuel. Sont présents : MM. L. Alvin, G. Geefs, A. Van Has- selt, H. Vieuxtemps, Jos. Geefs, Ferd. De Braekeleer, C.-A. Fraikin, Éd. Fétis, Edm. De Busscher, Jean Por- taels, Auguste Payen , le chev. Léon de Burbure, J. Franck, G. De Man, Adolphe Siret, Julien Leclercq, Alexandre Robert, EA. Gevaert, Ad. Samuel, membres. MM. Ch. Montigny , membre , et Éd. Mailly , correspon- dant de la classe des sciences , assistent à la séance. M. Balat annonce que M. De Keyser, directeur, a ex- primé par écrit le regret de ne pouvoir, à cause de la prolongation de son séjour à Paris, venir présider la séance. L’honorable directeur a demandé en même temps d’ajourner à la séance du mois de juillet la question du projet pour les lauréats des grands concours à Rome, porté à l’ordre du jour de la séance actuelle. La classe décide cet ajournement. ( 882 ) CORRESPONDANCE. La classe reçoit communication officielle de la dépêche ministérielle du 6 mai dernier , transmettant l'arrêté royal qui approuve l'élection de M. J. Liagre en qualité de secré- taire perpétuel de l’Académie royale des sciences, des let- tres et des beaux-arts de Belgique. — M. Alvin rappelle que, depuis la dernière réunion de la classe, l’Académie a perdu l’un de ses membres les plus éminents, M. Jean Sylvain Van de Weyer, qui, en 1845, a contre-signé, comme Ministre de l’intérieur, l'arrêté royal créant la classe des beaux-arts. Bien que M. le secrétaire perpétuel se soit empressé de témoigner par écrit, à la veuve du regretté défunt , les condoléances de la Compagnie, M. Alvin pense que le procès-verbal de la réunion actuelle devrait mentionner l'expression des sentiments particuliers de regret que la mort de M. Van de Weyer a excités dans la classe des beaux-arts; il propose que l'expression de ces regrets soit portée à la connais- sance de la veuve de l’illustre défunt. La classe approuve unanimement cette motion, qui sera actée de la manière suivante au procès-verbal : « La classe des beaux-arts, » Se rappelant qu'elle doit son existence à M. Sylvain Van de Weyer, qui a contre-signé , le 4° décembre 1845, en qualité de Ministre de l’intérieur, l'arrêté royal qui l'a en EE ` ( 883 ) introduite, en partage avec les sciences et les lettres, dans l'Académie, » Décide que, indépendamment de la lettre de condo- léance qui a été adressée , au nom de la Compagnie entière, à la veuve de l'illustre confrère qu’elle a perdu, l’expres- sion des regrets des membres de la classe sera insérée au procès-verbal de la séance de ce jour et portée, par les soins de M. le secrétaire perpétuel, à la connaissance de Me: Van de Weyer. » RÉSULTAT DU CONCOURS DE 1874. Le terme fatal pour la présentation des travaux en ré- ponse aux sujets littéraires du programme de concours de cette année expirait le 4°" juin courant. Un mémoire avec billet cacheté, portant pour devise : € C’est dans les édifices religieux de nos provinces qu’il faut rechercher l’histoire de la sculpture en Belgique pen- dant les dix-septième et dix-huitième siècles, » a été reçu en réponse à la première question ` Faire l'histoire de la sculpture en Belgique aux dix-septième et dix-huitième siècles. La classe désigne MM. Ad. Siret, J. Geefs et G. de Man Pour faire l’examen de ce travail. — La classe reçoit pour le second sujet d’art appliqué, relatif à la gravure, une médaille reproduisant le monu- ment de Charlemagne à Liége. Cet envoi est accompagné d’un billet cacheté, portant pour devise : Charlemagne. ( 884 ) Après mûr examen de l'esprit de la question, laquelle est conçue dans les termes suivants : « Un prix de six cents francs sera accordé à l’auteur de la meilleure gra- vure au burin, exéculée en Belgique pendant la période du 1” janvier 1872 au 1” janvier 1874, d'après l'œuvre d'un maître ancien ou moderne de l'école flamande, » la classe décide que l’auteur a mal interprété ces termes et qu’il ne s’agit dans le cas actuel que de la gravure au burin en taille-douce. D’après les articles 13 et suivants du règlement inté- rieur de la classe (insérés pages 45 et 46 de l'Annuaire de 1874), la gravure en médaille sera appelée, à son tour, à figurer comme sujet de concours. La classe exprime ses remerciments à l’auteur pour le double exemplaire qu’il lui a envoyé, et qui sera déposé dans les collections de l'Académie. COMMUNICATIONS ET LECTURES. D’après l’ordre du jour de la séance, la classe était appelée à donner son opinion définitive sur le projet qui lui avait été soumis par la commission pour les grands concours du gouvernement, dits prix de Rome. Il s’agit, comme on le sait, de soumettre à M. le Ministre de l'in- térieur un projet d'établissement pour améliorer la situa- tion fàcheuse des lauréats des grands concours durant leur séjour’ dans la ville de Rome. La classe adopte les amendements qui sont proposés à RE EE ( 885 ) ce sujet par MM. Alvin et Gevaert; puis, pour satisfaire au désir exprimé par son directeur, elle décide que le projet sera remis à l’ordre du jour de la prochaine séance et y fera l’objet d’un examen définitif. OUVRAGES PRÉSENTÉS. Dewalque (G.). — Rapport sur lexcursion, à Couvin, de la Société malacologique de Belgique (partie paléontologique). Bruxelles; broch, in-8°. Van Beneden (Éd.). — Mémoire sur un dauphin nouveau de la baie de Rio de Janeiro, désigné sous le nom de Sotalia Brasiliensis. Bruxelles, 1874 ; in-4°. Catalan (E.). — Sur addition des fonctions elliptiques. Mai 1874 ; feuil. in-4°. De Tilly (J.-M). — Notice sur deux traités récents de balistique et sur l’état actuel de cette science. Bordeaux; broch. in-8e. Falisse (V.) et Graindorge (J.). — Traité d’algèbre élémen- taire, 3° édition, 4"° partie. Mons, 1874; vol. in-8°. Graindorge (J.). — Théorie des intégrales et des fonctions elliptiques, par le D'Oskar Schloemileh (traduit de l'allemand). Liége , 1875; in-8°. Gilkinet (Alfred). — Recherches morphologiques sur les Pyrénomycètes. I. Sordariées. Bruxelles, 1874; broch. in-8°. Otreppe de Bouvette (Alb. Œ). — Naissances et décès (an- nexes aux tablettes liégeoises, 118° livr.). Liége, 1874; cah. pet. in-8°. Havrez (Paul). — Constitution et propriétés des houilles, pouvoir calorifique, dérivés immédiats. Liége; broch. in-8°. ( 886 ) Royaume de Belgique. Ministère des affaires étrangères. — Recueil des rapports des secrétaires de légation de Belgique, tome lI, 7° liv., mai 1874. Bruxelles; in-8°. Royaume de Belgique. Ministère de la justice. — Adminis- tration de la justice criminelle et civile de la Belgique. Justice civile , période de 1861 à 4870. Résumé statistique, 5° partie. Bruxelles, 4874; cah. in-4°. Société gece des sciences médicales et naturelles de Bruxelles. — Journal, 58° vol., 52° année, janvier à juin 1874. Bruxelles; 6 cah. in-8°. Société royale de pharmacie de Bruxelles. — Bulletin, 48° année, n° 4 à 6, avril à juin 4874. Bruxelles; 5 cah. in-8°. Société entomologique de Belgique.— Compte rendu, n°° 97 à 400, mars à juin 1874. Bruxelles; 4 feuilles in-8°. Société malacologique de Belgique. — Annales, tome VII, année 1875; — Procès-verbaux des séances, tome HI, année 4874, janvier à avril. Bruxelles; 4 vol. et 6 feuilles in-8°. Musée de l’industrie de Belgique. — Bulletin, tome LXV, n°®4 à 6, avril à juin 1874. Bruxelles; 3 cah. in-8°. Société royale de numismatique, à Bruxelles. — Revue de la numismatique, 5° série, tome VI, 3° livraison. Bruxelles, 1874 ; cah. in-8°. Le Moniteur industriel belge, vol. 1, n° 1 à 9. Bruxelles, 1874 ; 9 feuilles gr. in-4° Annales d'oculistique , tome LXXI, 5° à 6° liv. Bruxelles, 1874 ; 2 cah. in-8°. Annales de l’électricité médicale et Echo médical réunis, nou- velle série, 15° vol., 6° fase., juin 14874. Bruxelles; cah. in-8°. La Presse médicale belge, 26° année, 1874, n% 14 à 26. Bruxelles; 15 feuilles in-4°. Annales de médecine vétérinaire , 25° année, 4° à 6° cah., avril à juin 1874. Bruxelles; 5 cah. in-8°. L'Abeille, 26° année, 3° et 4° liv., mai et juin 1874. Bruxelles; 2 cah. in-8. ins. Lie net ados ( 887 ) Le Bibliophile belge, 9° année, 1874, t. IX, liv. 4, 5 et 6. Bruxelles ; 2 cah. in-8 Société de je nes d’Anvers. — Journal, 30° année, février à mai 1874. Bruxelles ; 4 cah. in-8°. Willems-Fonds te Gent. — Uitgave, n° 78. Gand, 1874; cah. in-42. Messager des sciences historiques, année 1874, Ar livrai- son. Gand ; in-8°. Revue de l’instruction publique en Belgique, 22° année, nouvelle sér., tome XVII, 2° liv. Gand, 4874; in-8°. Société royale des sciences de Liége. — Mémoires , Ze: série, tome V. Bruxelles, 1875; vol. in-8. Société médico-chirurgicale de Liége. — Annales, 15*année, mai, juin et juillet 1874. Liége; 2 cah. in-8°. L'Écho vétérinaire, 4° année, n° 9 à 4, avril à juin 1874. Liége; 5 eah. in-8°. Le Scalpel, 26° année, 4874 , n% 40 à 52. Liége; 15 feuilles in-4°, Journal des beaux-arts et de la littérature, 16° année, 1874, n°7 à 12. Saint-Nicolas, 1874; 6 feuilles in-4°. Société des arts et des sciences, à Batavia. — Tijdschrift, DI. XXI, Afl. I en Il; — Notulen, DI. XI, n” 2, 3 en 4; — Codicum arabicorum in bibliotheca societatis artium et scien- tarum quae bataviæ floret asservatorum catalogum. La Haye et Batavia, 1875-1874 ; 5 cah. in-8°. Laporte (E.). — Petit essai sur quelques méthodes proba- bles de Fermat. Bordeaux, 1874; broch. in-8°. Mannheim (4.). — Construction directe du rayon de cour- bure de la courbe de contour apparent d'une surface qu'on projette orthogonalement sur un plan; — Démonstration géométrique de quelques théorèmes, au moyen de la considé- ration d’une rotation infiniment petite; — Deux théorèmes nouveaux sur la surface de l'onde; — Construction directe du centre de courbure en un point de la section faite dans ( 888 ) une surface par un plan quelconque. Avril 1874; 2 feuil. in-4°. Académie des sciences de Puris. — Comptes rendus des séances, tome LXXVIII, n° 14 à 26. Paris, 1874; 15 cah. in-8°. Société de géographie de Paris. — Bulletin, mars et avril 1874. Paris; 2 cah. in-8°. Société mathématique de France, à Paris. — Bulletin, tome II, avril et mai, n° { et 2. Paris, 1874; 2 cah. in-8°. Société des études historiques, à Paris. — L'Investigateur, 40° année, liv. d'avril et mai 1874. Paris, 1574; cah. in-8°. L'Institut, nouvelle série, 2° année, 1874, mr 64 à 77. Paris; 14 feuilles in-4°. Revue politique et littéraire, 2 série, 5° année, n° 40 à 52. Paris, 1874; 15 cah. in-4°. Revue scientifique de la France et de l’étranger, 2° série, A" année, n° 40 à 52. Paris, 1874; 15 cah. in-4°. Revue britannique, avril à juin 4874. Paris; 5 cah. in-8°. Archives de médecine navale, tome XXI, avril à juin 41874, n= 4 à 6. Paris; 5 cah. in-8°. Le Progrès médical, 2% année, n° 14 à 26. Paris, 1874; 5 feuilles in-4°. La France médicale, 21% année, 1874, n™ 26 et 27. Paris; 2 feuilles in-4°. L'Union médicale, 28™° année, 1874, n° 75. Paris; feuille in-8°. Revue hebdomadaire de chimie, Ze année, 1874, n% 15 à 26. Paris, 1874 ; 12 feuilles in-8°. Indicateur de l’archéoloque , n°° 15 à 48, mars à juin 1874. Paris, 1874; 5 cah. in-8°. Journal de l’agriculture, 14874, tome IL, n° 260 à 269 et 272. Paris, 1874; 11 cah. in-8°. Bulletin scientifique, RUE A et littéraire du départe- ment du Nord, à Lille, Gs année, 1874, n° 2 à 5 . Lille; 5 cab. in-8° Société des amis des sciences naturelles de Rouen, 1X™ an- née, 1873, 2° semestre. Rouen, 1874; cah. in-8°. di € Von SR Le à D D s nf em mmmenen ( 889 ) Hantken (Max. v.). — Die Ausstellungs-Objecte der K. Ung. geol. Anstalt auf der Wiener Weltausstellung, 4875; — Die Kollektiv - Ausstellung ungarischer Kohlen auf der Wiener Weltausstellung, 1873. Pesth, 4875 ; 2 broch. in-8°. Hantken (Max. v.) et Madarasz (Segm. Ed. de). — Cata- logue des Nummulites exposés à l'Exposition universelle de Vienne en 1875. Pesth, 1875; broch. in-8°. Kön. Ungar. geologische Anstalt, Budapesth. — Mitthei- hingen, I. Bd., HJ.: Lief.; II. Bd., IL Lief. und DI. Lief.: — A magy. kir. fôldtani intezet evkönyve. Pesth, 1875; 4 cah. in-8°. Mag: yar Tudományos Akademia , Budapesth. — Almanach, 1872; — Értesitöje : VI, 9-47 sz.; VIL, 1-7 sz.; — Értekezések : a nyelv-és széptudomänyok kôrébôl, Il, 42 sz.; IHI, 4-7 sz.; a történetti... TI, 2-9 sz.; a bölcsészeti... II, 3 sz.; a társadal- mi... I, 6-7 sz.; a mathemat... II, 2 sz.; a természet... II, 4-14 sz.; IV, 1-2 sz., — Közlemények i nyelvetudomäni, X, 2 füz.; archacologiai, IX, 4° füz.; mathematikai, VI kötet; — Evkönyv, XII, 9-40; XIV, 4. darab; — Monumenta Hun- gariae historica, XXIV kötet, VIH kötet (30-55); — Török- magyarkori törtenelmi emlékek , VIII kötet; — Archivum: II. Rákóczi Ferenez Levéltára , 4 kötet, 4. oszt.; — Magyarorszag : Hártyagombáinok, I; helyrajzi története, Il kötet; a helyes magyarság elyei; — A hazai és külföldi is kolázás; — Monu- menta Hungariae archacologica , Il kötet, I Resz; — A Régi- pest. Budapesth; 20 vol., 55 cab., 45 feuilles in-8° et 6 cah. in-4°, K. Akademie der Wissenschaften zu Berlin. — Abhand- lungen, 1875. Berlin, 1874; vol. in-4°; — Verzeichniss der Bibliothek. Berlin , 1874; broch. in-8°. Senckenbergische Naturforschende Gesellschaft zu Frank- furt AIM. — Abhandlungen , IX. Bd., I. und I. Heft. Francfort S/M., 1875; cah, in-4°. ARTA Museum in Nürnberg. — Anzeiger, Neue Folge, Jahrgang XX , 1875. Nuremberg; 12 feuilles in-4°. ( 890 ) K. K. Sternwarte zu Prag. — Magnetische und meteorolo- gische Beobachtungen, 35. Jahrgang, 1872. Prague, 1873; vol. in-4°. Verein für Kunst und Alterthum in Ulm und Oberschwa- ben. — Verhandlungen, neue Reihe, VI. Heft. Ulm, 1874; cah. in-4°; — Ulmisches Urkundenbuch, I. Bd. Stuttgart, 1875; vol. in-4°. Kaiserl. Akademie der Wissenschaften in Wien. — Sitzung der mathematisch- naturw. Classe, Jahrg. 1874, Nr. 15 und 14. Vienne; 2 feuilles in-8°. K. K. geologische Reichsanstalt zu Wien. — Jahrbuch, Jahrg. 1874, XXIV. Bd., n° 1. Jänner, Februar, März, 1874; — Verhandlungen , n° 1-6,1874; — Mittheilungen, IV. Bd., Nr. I u. I. Vienne, 1874; 2 cab. gr. in-8° et 4 cah. petit in-8°. Archiv ns Mathematik und Physik, XLIX. Theil, 4. Heft; LVI. Theil, 2. und 5. Heft. Leipzig und Greifswald; 5 cah. in-8°. Académie impériale des sciences de Suint-Pétersbourg. — Bulletin, tome XVII, ns 5 à 5; tome XIX , n° 14 à 5; — Mé- moires , tome XIX, n° 8 à 10; tome XX, n° 1 à 5; tome XXI, n° 4 à 5. Saint-Pétersbourg, 1875-1874; 19 cah. in-4°. Académie royale de Copenhague. — Mémoires, classe des lettres, vol. IV, n° 40; — Bulletin pour 1875, n° 2 (avril- septembre). Copenhague ; cah. in-4° et cah. in-8°. Bureau de la recherche géologique de la Suède, à Stockholm. — Carte géologique de la Suède, accompagnée de renseigne- ments. Livraisons 46-49; — Algernon Bôrtzell : Beskrifning öfver Besier-Ecksteins Kromolitografi och Litotypografi; — Otto Gumælius: Bidrag till kännedomen om sveriges erratiska bildringar; — David Hummel : ôfversigt af de geologiska för- hällandena vid Hollands äs; A. E. Tÿrnebohm : Ueber die Geognosie der schwedischen hochgebirge; — J. G. O. Lin- narsson ` om några försteningar frān sveriges och Norges e Primordialzon »; — Ed. Erdmann : Description de la for- mation carbonifère de la Scanie; — Jakttagelser öfder morän- ( 891 ) bildningar; — Die Ausstellung der geologischen Landes-Unter- suchung SE Stockholm; 4 cartes in-f°, 2 cah. in-4° et 10 broch. i Bruzza D. Luigi). — Origine dei Lazzaretti e dei magistrati di sanita. Gênes, 1874; broch, in-8° Ellero (Pietro). — La questione sociale. Bologne, 1874; vol. in-8°. Società italiana di science naturali, Milano.— Atti, vol. XV, fase. II al V; vol. XVI, fasc. I. Milan, 1872-1874; 4 cah. in-8°, Academia olimpica di Vicenza. — Atti, vol. IV, secondo semestre, 1875. Vicence, 1875; vol. in-8°. Revista ro industriale, anno VI, maggio 1874. Florence ; cah. in-8 Société vaudoise ES sciences naturelles, à Lausanne. — Bulletin, 2° série, vol. XIII, n° 72 (pages 4 à 301), juin 1874. Lausanne; cah. in-8°. Davidson (Thomus). — On the tertiary brachiopoda of Belgium. April, 1875; broch. in-8°. Royal institution of Great Britain, at London. — Procec- dings, vol. VIL, parts I and Il, ne 58 and 59; — List of the members, officers, and professors, etc., 1875. Londres, 1875 et 1874; 5 cah. in-8°. Royal asiatic Society of Great Britain and Ireland, at London. — Journal, new series, vol. VII, part I. Londres, 1874 ; vol. in-8°. Meteorological Society of London. — Quarterly journal, Vol. If, new series, n° 40 , april, 1874. Londres ; in-8°. Statistical Society of London. — Journal, vol. XXXVII, Pt. 1, march, 4874. Londres; cah. in-8°. Numismatic Society of London. — Journal, vol. XIV , new series, n° LIH. Londres, 1874 ; cah. in-8°. Nature, ne 230 à 256, vol. IX; n° 557 à 242, vol. X. Londres, 1874; 15 cah. in-4°. Peabody Institute of the City of Baltimore. — Seventh ( 892 ) annual Report of the Provost to the Trustees , June 4, 1874. Baltimore, 1874; cah. in-8°. American Geographical Society, New-York. — D" David Livingstone, Memorial Bulletin, session 1873-1874, n° VII. New-York, 1874; broch. in-8°. Zoological Society of Philadelphia. — The second annual Report of the board of managers. Philadelphie, 1874; cah. in-8°. | United States naval Observatory, at Washington. — Astro- nomical and meteorological observations made during the year 4871. Washington, 1873; vol in-4°. American journal of science and arts , n° 12, vol. H, 1871; pr: 40 and 41, vol. VIE, 1874. New-Haven; 3 cah. in-8°. The Penn Monthly, vol. V, n° 54, june, 1874. Philadelphie; cah. in-8°. Revista de Portugal e Brazil, 4% vol., n° 11; 27° vol, n” 4 à 5. Lisbonne, 14874; 6 cah. in-8°. Fin pu Tome XXXVII DE LA Oms SÉRIE. BULLETINS DE L’ACADÉMIE ROYALE DE BELGIQUE. TABLES ALPHABÉTIQUES DU TOME TRENTE-SEPTIÈME DE LA DEUXIÈME SÉRIE. 1874. TABLE DES AUTEURS. | A. | Académie de législation et de jurisprudence de Madrid. — Demande l'échange des publications , 459. Agassiz (Louis). — Annonce de sa mort, Alvin (L à — Pioio prononcé aux funérailles & H. Penger, 147, 149; ar pt SO: rapport sur D situation financière de la Caisse centrale des euer 257; rend compte des résultats de l'Exposition Éverard, organisée au profit de ladite caisse, 525; s'associe à la motion de M. Gallait relative aux tableaux de Rubens qui se trouvent dans la cathédrale d'Anvers, 527, 472; annonce la mort de M. Van de Weyer et propose de témoi- gner , d’une manière spéciale, à la veuve du défunt, les regrets de la classe des beaux-arts, 882 Archives générales du département de la Côte-d'Or, à Dijon. — Demande l'échange des SE Axelkey. — Dem Geng ER Bulletin avec sa Revue, intitulée : Nordiskt “ape 2 B. Balat (Alph.). — Nommé directeur de la classe des beaux-arts pour 1875, 152; remerciments, 256. Becker (Charle es). — Élu associé de la classe des beaux-arts, 192: remerciments, 237. SÉ SÉRIE, TOME XXXVII. 58 894 TABLE DES AUTEURS. Bernardin. — deier Ee ses observations zoologiques faites à Melle en 1875 et en 1874,5, Blomme. — Envoie une pe Rss de son projet d'an de tri omphe, couronné en 1875, Borchgrave (Émile de). — Note sur un GE de MM. Feys et Van de asteele, 465; les premières relations diplomatiques entre la Belgique et les États-Unis, d’après des papiers inédits, 731 ; hommage d'ouvrage, 844. Borgnet (Ad.). — Hommage d'ouvrage, 290, Bormans (Stanislas). — Présente une notice intitulée : Doon de Mayence, deux fragments manuscrits de la fin du XIIe siècle, 203; rapports de MM. Scheler et le baron Kervyn de Lettenhove sur ce travail , 291, 295; impression, 307 ; élu correspondant de la classe des lettres, 774; remerci- ments, 845. Boussinesq (LI). — Présente un mémoire sur l'équilibre d’élasticité des assifs pulvérulents et sur la poussée des terres sans cohésion, 802. Braekeleer (F. De). — Remarques au sujet de la motion de M. Gallait relative aux tableaux de Rubens qui se trouvent dans la cathédrale d'Anvers, 472. Brialmont (Alexis). — Nommé directeur de la classe des sciences pour 1875, 5. Briart (4lph.). — Notice sur les zem de phosphate de chaux dans le terrain Crétacé de la province de Hainaut, 858. — Voir Corn Burbure (le chev. L. de ).— Remarques au ge de la motion de k Gallait relative aux tableaux de Rubens qui se trouvent dans la cathédrale d'Anvers , 471. Busscher (Edm. De). — Hommage d'ouvrage, 148; sp membre de la commission administrative, 775; treizième rappo nuel sur les tra- aux de la commission de la biographie nationale re 781. C. Candèze (Ern.). — Installé comme directeur de la classe des sciences pour l’année A e y (le prince Eugène de). — Hommage d'ouvrage, 290. Catalan (Eug.).— Nommé membre du jury chargé de juger la 5° E du concours quinquennal des sciences physiques et mathématiques , 2; commissaire pour une note de M. L. Saltel concernant la détermination, sans calcul, de l'ordre d’un lieu géométrique, 160 ; adhère au rapport de M. Folie sur ce travail, 273; commissaire pour une nouvelle rédaction TABLE DES AUTEURS. 895 de cette note , 802; commissaire pour une note de M. Simons, intitulée : Quelques réflexions sur le problème de Malfatti, 559; lecture de son rapport sur ce travail, 805; présente un mémoire sur la théorie des courbes et des pR: 484; rapports de MM. Liagre et De Tilly sur ce mémoire, 8 ; commissaire pour une note de M. De Tilly sur la similitude Skis, 484; adhère au rapport de M. Liagre sur ce travail, 810. Cavalier (J.). — Communique les résumés de ses paiT météorolo- giques faites à Ostende en 1873-1874, 5, 158, 85, Ceuleneer (Ad.-Aug. De). — Lauréat da: concours % la classe des lettres pour 1874, 619, 771. Chalon (R). — Bagage d'ouvrage, 117; discours sur la numisma- tique, 679. ` ist. — Communique ses } i étéorologiques faites à Chimay en 1875, 5. Colnet d'Huart (de). — Remercie pour son élection d’associé de la classe des sciences, e Cornet (F.-L.). — ie p élection d dant de la classe des sciences, 2; notice sur les gisements de phosphate de chaux dans le terrain crétacé de la province de Haïnaut, 858. — Voir Briart. Crépin (F.). — Hommage d'ouvrages, 485. D. Dauby (Joseph). — Lauréat du concours de la classe des | pour 1874, 656 , 772; remerciments, 844. Davidson == Hommes ge ES ouvrage, is Decker (P. De la théorie économique des rapports du capital et du travail , 289; ra port sur ces mémoires, 466, 653; nommé membre de la Ge mmission chargée de présenter des questions de littérature française pour le con- cours de 1876 de la classe des lettres , 846. Delcroix (Désiré). — Lauréat du concours triennal de littérature drama- tique flamande , 773. Desmaze. — Élu associé de la Cep vg ee? 714; goe Se Devaux (Paul). — Nommé memb i des questions de littérature française pour le concours de 1876 de la classe des lettres , 846. Dewalque (G.). — Sur la corrélation des formations cambriennes de la Belgique et du pays de Galles, 596, 801; hommage d'ouvrage, 799. 896 TABLE DES AUTEURS. Donny (EL, — Adhère aux rapports de M. Stas sur une note de M. Henry concernant les dérivés diallyliques, et sur une note de M. Walthère Spring concernant l'acide hyposulfureux et lacide trithionique, 7, 10; commissaire pour une gs de M. Éd. Dubois sur les camphres, 160; rapport sur cette note Dubois (Alph.). — D des remarques sur la variabilité de certaines espèces du genre Calliste, 802. (Ëd.). — Présente une note intitulée : Recherches sur les cam- phres, 160; rapports de MM. Donny et Melsens sur ce travail, 271, 275; impression, 281. Dupont(Éd.). — Note sur le terrain devonien , e Duprez (F.). — Commissaire pour une note de M. Alexis Perrey sur les tremblements de terre en 1871, 802; commissaire pour un travail de M. G. Van der Mensbrugghe nr l'influence de l'électricité stati- que sur la tension superficielle d’un liquide, 802. E. Éverard. — Annonce qu'il se propose de faire une exposition de sa collec- tion de tableaux au profit de la Caisse centrale des artistes, 148; résultats de cette exposition, 3 F. Faider (Ch.). — Commissaire pour les mémoires de concours concernant la théorie économique des rapports du capital et du travail, 205; rem- placé par M. De Decker dans ces fonctions , 289; commissaire pour le mémoire en réponse à la question du 2° concours sexennal de Stassart, 205; rapport sur ce travail, 466, 666 ; réélu membre de la commission administrative, 602 ; commissaire pour une notice de M. Léon Vander- kindere sur l'origine des magistrats communaux, efc., 845; nommé membre de la commission chargée de présenter dès questions de légis- lation pour le concours de 1876 de la classe des lettres , 846. eg (von). — Élu associé de la classe des beaux-arts, 471; remer- tss TIS. s (Éd.). — S'associe à la motion de M. Gallait relative aux T ES Rubeus qui se trouvent dans la cathédrale d'Anvers, 527, Feys. — Hommage d'ouvrage, 465; note de M. de gege sur cet ouvrage , ibid. Flandre (S. A. R. le comte de). — Fait exprimer ses regrets de ne pouvoir assister à la séance publique de la classe des lettres, 599, TABLE DES AUTEURS. 897 Folie (F.). — Commissaire pour une note de M. L. Saltel concernant la détermination, sans calcul, de l’ordre d’un lieu géométrique, 160; lecture de son rapport sur ce travail, 2753; commissaire pour une nou- velle rédaction de cette note, 802; aean de priorité en sn de M. Louis Pérard, 198; commissaire pour un travail de M. Simons, SE Quelques vélos sur le problème de Malfatti, 339; sn n rapport sur ce travail, 805; commissaire pour un mémoire de M. n Boussinesq sur 1 équilibre d’élasticité des massifs pulvérulents, 802; extension des théorèmes D à celui de Pascal à des cour tracées sur une surface quelconque, 8 Fraikin (C.-A.).— Rapport sur le buste ege Comet doute de Nieuport, 776. Franck (J.). — Rapport sur le buste du commandeur de Nieuport, 776. rt (Alph.). — Élu associé de la classe des beaux-arts, 152; remer- 257; accuse réception de son diplôme d'élection, 325. Den ` SCH -Powel). — Élu associé de la classe des beaux-arts, 152; remerciments, 237 ; accuse réception de son diplôme d'élection, 325. Fritsch (Charles). — Communique ses observations botaniques faites à Salzbourg en 1872 et en 1875, 159 G. Gachard (P.). — Hommage d'ouvrage, 460; lecture d’une notice inti- tulée : Le cardinal Bentivoglio; sa nonciature à Bruxelles, 467; nommé membre de la commission chargée de présenter une question pour le troisième grand concours sexennal de Stassart, 846. Gallait (L.). — Motion relative aux pojca de Rubens qui se trouvent dans la cathédrale d'Anvers, 526, Geefs (Ch). — Lecture Se ae collectif de MM. Fraikin, Franck, Leclercq et Robert sur son modèle du buste du commandeur de Nieu- port, 776 Geefs (J.). — Commissaire pour le mémoire de concours concernant l'his- toire de la sculpture en Belgique aux dix-septième et dix-huitième siècles, 883. Genocchi (A.). — Adresse deux lettres sur le développement de la fonction log. F (x) (réclamation de priorité), 160; rapport de M. Ern. Quetelet sur cette réclamation, 351. Gilkinet (4.). — Présente des recherches morphologiques sur les pyréno- mycètes. I. Sordariées, 270; rapports de MM. Éd. Morren et Éd. Van Béneden sur ce travail, 344, 546; impression , 426. Gloesener (M). — Loiti de son rapport sur une requête de M. Van Rysselberghe, 15 ; hommage d'ouvrage, 359. 898 TABLE DES AUTEURS. Gluge (Th.). — ` LE SE En VE E duc ions et installe M. Candèze, directeur pour 1874, 3; commissaire pour un travail de M. F Keel concernant des recherches sur les phénomènes de la digestion chez les insectes, 270; rapport sur ce travail, 485; commissaire pour un travail de M. le dis F. Putzeys sur les centres des nerfs vaso-moteurs , 270; adhère au rapport de M. Schwann sur ce travail, 341; commissaire pour un travail de M. le Dr F. Putzeys sur la geb de l’abiogenèse , 359; note sur la transformation de la con- traction musculaire tonique en contraction rhythmique, 830. Gosselet (LI). — Carte géologique de la dp Weer? des calcaires devoniens de l’Entre-Sambre-et-Meuse, 81. Grandgagnage (J.). — Notice sur Fer 117 ; nommé membre de la chargée de présenter des questions de littérature française ur le concours de 1876 de la classe des lettres, 846. Guillaume (le baron G.). — Nommé directeur ës la classe des lettres pour 1875, 117 Hansen (P.-A.). — Annonce de sa mort, 482, Hautcœur (l'abbé). — Hommage d'ouvrage, 601; note de M. Wauters sur cet ouvrage , ibid. Helmholtz (H.-L.-F.). — Remercie pour son élection d’associé de la classe es sciences, 269. Henry (L.). — Rapports de MM. Stas, de Koninck et Donny sur sa note concernant les dérivés os 6, 7; impression de cette note, 56; résente deux autres notes sur le même sujet, 160, 270 ; rapports de MM. Stas et de Koninck sur ces méi 271, 541, 545; impression, 274, 557; sur l'acide chloro-bromoprop ue, 401; sur le radical propar- gyle, 402; sur la lactide et la pres sèche dp l'acide lactique, 409; sur le chloral et les éthers éthyliques chlorés en général, 489; sur la production des hydrocarbures acétyléniques, 512; sur les dérivés ally- liques, 521. b D Institut impérial des mines de Saint-Pétersbourg. — Remercie pour l'adresse qui lui a été envoyée lors de son jubilé séculaire, 269. J. Jacobi (M. H. de). — Annonce de sa mort, 558. Jonckbloet. — Élu associé de la classe des lettres, 774; remerciments, 845. Juste (Th.).— Les œuvres complètes de François de Pouhon, 140 ; hom- TABLE DES AUTEURS, 899 mage d'ouvrage, 290 ` le coup d’État du 18 juin 1789, 294, 847; nommé membre de la Commission chargée de présenter une question pour le 3° grand concours sexennal historique de Stassart, 846. K. Kaulbach (Guill. de). — Annonce de sa mort, 470 Kervyn de Lettenhove (le baron). — Commissaire pour une notice de M. Stanislas Bormans , intitulée : Doon de Mayence, deux fragments manuscrits de la fin du XII: deeg 205; adhère au rapport de cheler sur ce travail, 295 ; hommage d'ouvrage, 600; discours prononcé aux funérailles de M. Ad. Quetelet, 261. Keyser (N. De). — Nommé président de l'Académie pour l'année 1874, 116, 148; installé comme directeur de la classe des beaux-arts pour 1874, 155; discours prononcé aux funérailles de t tribut de regrets payé à sa mémoire, 248, 778; remarques au sujet de la motion de M. Gallait relative aux tableaux de Rubens qui se trouvent dans la cathédrale d'Anvers, T Koninck (L.-G. de). — Adhère aux rapports de M. Stas sur une note de M. Henry, et sur quatre notes de M. De Wilde relatives à la chimie, 7, , 15, 14,15 ; commissaire pour deux notes de M. Henry sur les dérivés diallyliques, 160, 270; adhère aux rapports de M. Stas sur ces notes, 271, 545; communication au sujet de la commission géologique des États-Unis, 596. L. Laborde (le ve Henri de). — Élu associé de la classe des beaux-arts, 152; A, 257 ; accuse EE eg son Ren were De? Lanszweert. q Laporte (E.). — Hommage d'ouvrage, 799. La Rive (Aug. de). — Annonce de sa mort, 2. Laveleye (E. de). — Commissaire pour les mémoires de concours concer- nant la théorie économique des rapports du capital et du travail, 205; rapport sur ces mémoires, 466, 651 ; commissaire pour une notice de M. Léon Vanderkindere sur l'origine des magistrats communaux, etc., 845. Le Blant (Ed.). — Hommage d'ouvrages, 600. Leclercq (D.). — Communique ses observations météorologiques faites à Liége en 1875, 3. Leclercq (J.). — Rapport sur le buste du commandeur de Nieuport, 776. 900 TABLE DES AUTEURS. Lenormant (Fr.). — Hommage d'ouvrages, 202, 466. Le Roy (Alph.). — Commissaire pour le mémoire de concours mg la philosophie a) Saint-Anselme de Cantorbéry, 204; rapport sur ce mémoire , 630; nommé membre de la commission chargée de pa des questions d me nationale pour le concours de 1876 de la classe des lettres, 846 Liagre (J.). — Nommé membre du jury chargé de juger Ja 5° période du concours quinquennal des sciences physiques et mathématiques, 2; lec- ture de son rapport sur une requête de M. Van Rysselberghe, 15; adhère au rapport de M. De Tilly sur une note de M. Siacci concernant la simi- litude des trajectoires des projectiles oblongs, 160; discours prononcé aux funérailles de M. Ad. Quetelet, 264; nommé membre de la commis- M. Rodenbach sur la métrologie, 484; commissaire pour une note de M. De Tilly sur la similitude mécanique, etc., 484; rapport sur cette secrétaire perpétuel de l’Académie, 787 ; approbation royale de son élec- tion, ie 109,5, 882 AUS en SN de secrétaire perpétuel, les , 842; commissaire pour un mémoire de M. Terby, intitulé : mer serrés etc., 802 ; commissaire pour une note de e Wouwermans concernant la dtchalnatit de la: parallaxe du soleil, Loise (Ferd.). — ëch Res du commencement d’un travail intitulé : La littérature allemande au XVIIe siècle, sous l'influence de la guerre de Trente Ans, 145. M. Mailly (Éd.). — Discours prononcé aux funérailles de M. Ad. Quetelet, 1; commissaire pour un mémoire de M. Rodenbach sur la métrologie, so ee À se en note de M. Alexis Perrey sur les tremble- issai émoire de M. Terby, E uu WCU intitulé : bepéegeeg ie, $ ibi id. Malaise (C.). — Arrêté geed approuvant son ES be membre titulaire de la classe des sciences, 2; remercie pour : hommage d'ouvrages, 269; EE à à retirer des archives un billet WE 484 ; note que renferme ce pli , 800. Man (G. De). — Peer oe pour le mémoire de concours concernant l'histoire de la sculpture en Belgique aux dix-septième et dix-huitième siècles, 883. TABLE DES AUTEURS. 9301 Mannheim z wg = Hommage d AE, Mag Marchal (E É les soins qu’il a Sepp à i gestion des affaires du secrétariat de l "Écadémie, 842. Maus (H.-J.). — Nommé membre du jury chargé de juger la Ze période du concours quinquennal des sciences physiques et mathématiques, 2; Commissaire pour un mémoire de M. Boussinesq sur l'équilibre d’élasti- cité des massifs pulvérulents , 8 Melsens (L.). — Adhère aux rapports de M. Stas sur différentes notes de M. De Wilde relatives à la chimie, 12, 13,14, 15; commissaire pour une note de M. Dubois sur les Cingi; 160; adhère au rapport de sur cette note, 275. Ministre de la Justice (M. le). — Envois d'ouvrages , 289, 600 Ministre de l'intérieur (M. le). — Transmet les arrêtés royaux suivants : 1° nommant le jury chargé de juger la 5° période du concours quin- quennal des sciences physiques Fe RIRES wi Ze Berger l'élection de M. Malai ibid. ; 3° nommant M. De Keyser président de l’Académie pour 1874, 116, 148; 4° approuvant l'élection de M. Adolphe Samuel comme membre titulaire de la classe des beaux-arts, 237 ; 5° approu carant l'élection de M. Liagre en qualité de secrétaire perpétuel de l’Académ 78,7 845, 882 ; envois d'ouvrages, 116, 158, 269, 289, 459, 482, Wei 798, 844. Monteverde. — Élu associé de ge classe des beaux-arts, 152; remerci- ments, 257; accuse Dez de son diplôme d'élection , 525. Montigny (Charles). membre du jury chargé de juger la 5e période du concours peine des sciences physiques et mathé- matiques ,2; la fréquence des variations de couleurs des étoiles dans la scintillation est généralement en rapport avec la constitution de leur lumière, d’après l'analyse spectrale, 165 ; hommage d'ouvrage, 339; Commissaire pour un mémoire de M. Rodenbach sur la métrologie, 484; lettre au sujet de l'érection, à Bruxelles, d’un monument à Adolphe Quetelet, 779. Morren (Éd.). — Hommage d’ , 159, 359; note au sujet de Pun de ces ouvrages, 159 ; étre rés un travail de M. A. Gilkinet con- cernant les pyrénomycètes , 270; rapport sur ce travail, 344; deuxième note sur l'application de la théorie mécanique de la chaleur à la phy- Siologie des plantes, 424, N. Nève (F. a — Hommage d'ouvrage, 202; commissaire pour les mémoires de concours , 204; rapport sur ces mémoires, D 902 TABLE DES AUTEURS. H A = A tl hil ophie de forein de Busse, 204; adhère aux rapports de MM. Tho- nissen et Le Roy sur ce mémoire, 646; demande que le mémoire de M. C. Rodenbach, sur la ue, soit renvoyé à la classe des sciences, 602; nommé membre de la commission chargée de présenter des ques- tions d'histoire nationale pour le concours de 1876 de la classe des lettres, 846, Nolet E Brauwere van Steeland (J.). — Le particularisme linguistique flamand de la Flandre occidentale, 146, 206; réponse aux remarques de M. P. Willems sur cette communication, 667 ; hommage d'ouvrage, 602. Nypels (G.).— Commissaire pour le mémoire en réponse à la question du 2e concours historique sexennal de Stassart, 205 ; rapport sur ce travail, 656; nommé membre de la commission chargée de présenter des questions de législation pour le concours de 1876 de la classe des lettres, 846. o. Omalius d'Halloy (d'). — Note sur le terrain devonien , 191. nR Oppert (Jules). — Élu associé de la classe des lettres, 774; remerci- ments, 845 P. Paillard. — Hommage d'ouvrage, 461; note de M. Wauters au sujet de cet ouvrage, ibid. $ Partoes (H.-L.-F.). — Annonce de sa mort, 147; discours prononcé à ses funérailles dent M. Alvin, 1 Pérard (L.). — Communique ses s hist barométriques et thermo- métriques faites à Liége en 1873, 159; revendication de priorité en sa faveur, par M. F. Folie, 198 Perrey (Alexis).— Présente une note sur les tremblements de terre en 1871, 802 Plateau (F.).— Présente des recherches sur les phénomènes de la diges- tion chez les insectes , 270; rapports de MM. Gluge et Schwann sur ce travail, 485, 488. i Plateau (J.).— Hommage d'ouvrages, 2; commissaire pour un travail de M. G. Van der Mensbrugghe concernant l'influence de l'électricité sta- tique sur la tension superficielle d’un liquide, 802. Potvin (Charles). — Lauréat du concours triennal de littérature drama- tique française, 775. TABLE DES AUTEURS. 903 Poullet (Edmond). — Lauréat du concours de la classe des lettres de 1874, 667, 7725 geesde 8 Putzeys (F.).— P. I t aso-moteurs, 270 ; rapports de MM. Schwann et Gluge sur ce travail, 340, 541; impression, 450; présente une note sur la question de Gutégegbeg 9; demande à rentrer en possession de ce travail, 482. Putzeys (J.). — Discours prononcé aux funérailles de M. Ad. Quetelet, 258. Q. Quaedvlieg (L.). — Communique ses observations zoologiques faites à isé en 1875, 270. Quetelet (Ad.). — Présente le résumé des observations météorologiques wg à l'Observatoire royal de Bruxelles en 1875, 5; hommage d'ou- rages, 117; annonce de sa mort, 245, 268, 288, 524; relation de ses le 245; tribut de regrets payé à sa mémoire, 778; lettre de M. Montigny au sujet d'un monument à lui élever, 779; lettre de con- doléance adressée par l'Université de Kharkow au sujet de sa mort, 482; demande relative à son buste , 268. ` Quetelet (Ern). — Nommé membre du jury chargé de juger la cinquième période du concours periant des sciences physiques et mathéma- tiques, 2; hommage d'ouvrage, 159; note sur l'aurore he 4 février 1874, 160; annonce la mort de son père, , 288, eu remercie pour les témoignages de regrets qui lui ont été ees 268, 325; commissaire pour deux lettres de M. Genocchi sur le div: ment de la fonction log. Toi, 270; rapport sur ces lettres, 351; communique l'état de la végétation observé le 21 mars 1874 à l'Obser- vatoire royal de Bruxelles, 339; les observations météorologiques simul- tanées sur l'hémisphère terrestre boréal, 552; commissaire pour une note de M. Alexis Perrey sur les tremblements de terre en 1871, 802; issaire pour un mémoire de M. Terby, intitulé : Aréographie , etc., ibid. ; commissaire pour une note de M. Wouwermans sur la détermina- tion de la parallaxe du soleil, ibid. R. Radoux (J.-Th.). — Élu correspondant de la classe des beaux-arts, 152; remercîments, 257; accuse réception de son diplòme d'élection, 325, rd (A.). — Dépôt d’un billet cacheté, 338. Reumont (Alfred de). — Hommage d'ouvrage, 844. 904 TABLE DES AUTEURS. Rivier (Alph.). — Note sur la découverte de tables romaines à Ossuna, 144 ; hommage d'ouvrage, 290. Robert (Alex.). — Rapport sur le buste du commandeur de Nieuport, 776. Rodenbach. — Son mémoire sur la métrologie est renvoyé à l'examen de la classe des sciences, 484, 602. Roi des Belges (S. M. le). — Fait exprimer ses hiag de ne pouvoir assis- ter à la séance publique de la classe des lettres , 599. Rolin-Jaequemyns (G.). — Hommage d'ouvrage, 460; élu correspondant classe des lettres, 774; re 845 Rossi (M.-S. de). — Demande d’échan Roulez (J.). — Inscriptions pour les er de concours décernées à MM. Mansion, De Ceuleneer, Van Weddingen et Dauby, 158, 845; com- missaire pour les mémoires de concours concernant Septime Sevère, 204 ; rapport sur ces mémoires, 605; sur la carrière administrative et militaire d’un légat propréteur de la Germanie inférieure, 867. S. na mg Lai — Remercie pour son élection d’associé de la se des sciences , 2 Saltel Greg — Présente une sauté sur la détermination, sans calcul, de l'ordre d’un lieu géométrique, 160; lecture des rapports de MM. Folie et GE sur ce travail, 275; présente une nouvelle rédaction de cette note, 802. Samuel Cab — Élu membre titulaire de la classe des beaux-arts, 152; approbation royale de son élection, 237; remerciments , ibid. Scheler (Aug.). — Commissaire pour ane notice de M. Stanislas Bormans, intitulée : Doon de Mayence, deux fragments manuscrits de la fin du XIIe siècle, 205; rapport sur ce travail, 291; hommage d'ouvrage, Schwann (Th.). — Commissaire pour un travail de M. F. Plateau concer- nant des recherches sur les mëtten de la digestion chez les in- LL. 270; adhère au rapport de M. Gluge sur ce travail, 488; com- missaire pour un travail de M. le aech F. Putzeys sur les centres des Wee, vaso-moteurs, 270; rapport sur ce travail, 540; GEESS pour un travail du même sur la question de l'abiogenèse, 55 Selys Longchamps (Edm. de). — Additions au Synopsis des Cordolises, 16; commissaire pour un travail de M. Alph. Dubois sur la variabilité de certaines espèces du genre Calliste, 802. Siacci. — Lecture des rapports de MM. De Tilly et Liagre sur sa note con- cernant la similitude des trajectoires des projectiles oblongs , 160. S TABLE DES AUTEURS. 905 Simons. — Présente un travail intitulé : Quelques réflexions sur le p blème de Malfatti, 539; lecture des rapports de MM. Catalan et an? sur ce travail, 805. Siret (Ad.). — Commissaire pour le mémoire de concours concernant l’histoire de la sculpture en Belgique aux mp es et dix-huitième siècles , 8 Société dei sciences naturelles eg Strasbourg. — Fait connaître qu'elle a transféré son siége à Nancy, Société entomologique pet d Florence. — Demande l'échange des publications, 338. Société bolina de Bohéme, à Prague. — Demande l'échange des zerek 198. Spring (Wall). — Nouvelles synthèses de l'acide hyposulfureux et de l'acide trithionique, 45; rapports de MM. Stas el Donny sur cette note, H 10. Stang (Rud.). — Élu associé de la classe des beaux-arts, 152; remer- ciments, 257; hommage de sa gravure du Sposalizio, ibid. Stas LI. A1 — Rapport sur une note de M. Henry concernant les dérivés diallyliques, 6; rapport sur une note de M. Walthère Spring concernant l'acide hyposulfureux et l'acide tritionique, 7; rapport sur différentes notes de M. P. De Wilde relatives à la chimie, 10, 12, 15, 14; commis- saire pour deux notes de M. Henry sur les dérivés diallyliques, 160, 270; rapports sur ces notes, 271, 541 ; réélu membre de la commission administrative, 48 Së Tallois (le D"). — Discours prononcé aux funérailles de M. Ad. Quetelet, 262. Terby (Fr.). — Aurore boréale observée à Louvain dans la nuit du 15 au 16 janvier 1874, 164; observation du passage d'un bolide le 11 mai1874, 799; présente un mémoire intitulé : Aréographie, ete., 802. Terry (J.-H.}. — Élu correspondant de la classe des beaux-arts, 152; remerciments, 257; accuse réception de son diplôme d'élection, 525. Thonissen (J.-J), — Remercie comme directeur sortant de la classe des ettres et installe M. Chalon, directeur pour 1874, 115; commissaire pour le mémoire de concours concernant la philosophie de S'-Anselme ep E 204 ; a: vo sur ce mémoire, 620; commissaire pour oncernant la théorie économique des rapports du capital et du travail, 205; rapport sur ces mémoires, 466, 647; Commissaire pour le mémoire en réponse à la question du 2° concours 906 TABLE DES AUTEURS. sexennal historique de Stassart, Se rapport sur ce travail, 466, 664; un A de 1787, 690; nommé membre de la commission chargée de présenter des Kg de cer pour si concours de 1876 de la classe ue lettres, 846. Tilly (J.-M. De). — SRE pour deux lettres de M. Genocchi sur la fonction log. F(x), 160; Mr dans ces fonctions par M. Ern. Quetelet, 270; lecture de son rapport sur une note de M. Siacci concernant la similitude des trajectoires des Se oblongs , 160 ; hommage d'ou- vrage , 483; commissaire pour un mémoire de M. Catalan sur la théorie des courbes et des surfaces, +84; rapport sur ce aa 804; FER une note sur la similitude corps solide de réyolation, Sa rapports sde MM. SET et Catalan sur ce travail, 810; impressio D; commissaire pou mémoire de M. pi concernant dé We des teg, Er 802. U. Universilé de Kharkow. — Adresse une lettre de condoléance au sujet de la mort de M. Ad. Quetelet, 482. Y. Valérius (H.). — Nommé membre du jury chargé de juger la 5° période du concours quinquennal des sciences physiques et mathématiques, 2. Van Beneden LE). — Sur la capture dans l’Escaut, au mois de no- vembre 1875, d’un ME Opd on SES 35; commissaire pour un travail de M. À. Gilkinet concernan , 270 ; rapport sur ce travail, 546; de la distinction originelle du testicule et de l'ovaire; caractère ar des deux feuillets primordiaux de l'embryon ; herma- phrodisme morphologique de wer GES week essai d’une théorie de la fécondation, 530; mage d'ouvrage, 799. Van Beneden (P.-J.). — Hommage gran , 159 ; EE pour un travail de M. Alph. Dubois sur la variabilité "A certaines espèces du genre Calliste , 802; les baleines de la Nouvelle-Zélande , 852. Van de Casteele. — Hommage d'ouvrage, 465 ; note de M. de Borchgrave au sujet de cet ouvrage, ibid. Vanderkindere (Léon). — Présente une notice sur l’origine des magistrats communaux w sur l’organisation de la Marke dans nos contrées, au moyen âge, Van der nt (G.). — Présente un mémoire intitulé : L'électri- cité a zu exerce-t-elle une influence sur la tension superficielle dun liquide ? 802 TABLE DES AUTEURS. 907 Van de Weyer (Jean-Sylvain). — A ce de sa mort , 845, 882; motion de regrets exprimés par la classe des beaux-arts, 882. Van Praet (Jules). — Hommage d'ouvrage, 46 ja Rysselberghe. — Lecture des rapports de MM. Liagre et Gloesener ur sa requête concernant son météorographe universel, 15; remercie EEN à ce sujet, 358. Van Weddingen. — Lauréat du concours de la classe des lettres pour 1874, 647, 771. Varenbergh (E.). — Hommage d'ouvrage, 290. AN. Wagener (Aug.). — Commissaire pour les mémoires de concours concer- nant Septime Sevère, 204; rapport sur ces mémoires, 6 Wauters (Alph.). — Note sur un ouvrage de M. Paillard , 461 ; hommage ’ouvrages, 465; note sur ces ouvrages , ibid. ; note sur un ouvrage de M. l'abbé Hautcœur, 601; les gildes communales au XI: siècle, 704; commissaire pour une notice de M. Léon Vanderkindere sur lorigine des magistrats communaux, 845; nommé membre de la commission chargée de présenter des questions d'histoire nationale pour le concours 1876 de la classe des lettres, 846 Wilde (P. De). — Contributions à la théorie du blanchiment, 62; note sur la préparation de l’acétylène, 71; seconde note sur l’action de l'hydro- gène sur l’acétylène et l'éthylène sous l'influence du noir de platine, 75; note préliminaire sur l’action de l’effluve électrique sur quelques gaz et mélanges gazeux, 77; rapports de MM. Stas , de Koninck et Melsens sur ces diverses notes, 10, 15, 14, 1 Willems (P.). — CC fie 465; quelques dns à propos de la communication de M. J. Nolet de Brauwere van Steeland sur le particu pr re de la flandre occidentale, A Witte (le baron dej. — Hommage d'ouvrage, 600; demande que le mémoire i i C. Rodenbach, sur la métrologie, soit renvoyé à la classe des sciences, 602. Wouwermans.— Présente une note sur la détermination de ła parallaxe du soleil, 802, TABLE DES MATIÈRES. A. sd royaux. — ` Arrêté nommant le Aë du concours igan M. De Keyser président de l’Académie pour 1874, 116, 148; approba- tion de l'élection de M. Samuel en qualité de membre titulaire, 257 ; approbation de l'élection de M. Liagre en qualité de secrétaire e 78, ' } Astronomie. — La fréquence des variations de couleurs des étoiles dans la scintillation eat généralement en rapport avec la constitution de leur lumière, d’a Fausse acte par M. Ch. Montigny, 165; note sur un b ie gi à Louvain le 11 mai 1873, par M. Terby, 799; M. Terby présente un mémoire concernant les rm faites sur la planète Mars depuis 1636 jusqu’à nos jours, 802; M. Wouwermans présente une note sur la détermination de la parallaxe e soleil, ibid. Balistique. — Lecture des rapports de MM. De Tilly et Liagre sur la note de M. Siacci concernant la similitude des trajectoires des projectiles oblongs , 160. Bibliographie. — Note de M. Wauters au sujet d’un ouvrage de M. Paillard, 461 ; note du même au sujet de deux de ses ouvrages, 465; note de M. de Borchgrave au sujet d’une publication de MM. Feys et Van de Casteele, 463; note de M. Wauters au sujet d’un ouvrage de M. l'abbé Hautcœur, 601. Billets cachetés. — Dépôt d'un billet par M. Renard, 358; billet cacheté restitué à M. Malaise, 484; ouverture de ce billet, 8 Biographie. — Les œuvres complètes de François de gek. note par te , 140. Botanique. — M. Gilkinet présente une note intitulée: Recherches mor- phologiques sur les Pyrénomicètes. I. Sordariées, 270; rapports de M. Éd. Morren et Éd. Van Beneden sur ce travail, 544, 546; impres- sion, 426; deuxième note sur l'application de la théorie mécanique de la chaleur à la gier des plantes , par M. Éd. Morren , 424. TABLE DES MATIÈRES, 909 Bustes des académiciens décédés. — Buste de M. Ad. Quetelet, 268 ; lecture du rapport de MM. Fraikin , Franck, Leclercq et Robert sur le modèle du buste de M. de Nieuport, 776 C. Caisse centrale des artistes belges. — M. Éverard annonce qu'il se pro- pose de faire, au profit de la Caisse, une exposition de sa collection de tableaux, 148; résultats financiers de cette exposition, 325 ; exposé de la situation financière de la Caisse, par M. L. Alvin, 237 ; proposition du comité directeur ratifiée par la classe des beaux-arts, 776. Chimie. — Recherches sur les dérivés glycériques, par M. L. Henry, 56, 557, 525; rapports de MM. Stas, de Koninck et Donny sur ces recher- ches, 6, 541, 545; nouvelles synthèses de l'acide hyposulfureux et de l'acide trithionique , par M. Spring, 45; rapports de MM. Stas et Donny sur ce travail 7, 10; contributions à la théorie du blanchiment, par M. De Wilde, 62 ; note sur la préparation de l’acétylène, par le même, 71; action de l'hydrogène sur Zë et l'éthylène sous l’ Saa du noir de platine, par le même , 73; note préliminaire sur l'action de l'efluve électrique sur ZEN gaz et mélanges gazeux, par le même; 11; rapports de MM. Stas, de Koninck et Melsens sur les quatre notes de M. De Wilde , 10,12, 15,14, 15; M. L. Henry présente un travail sur les dérivés diallyliques, 160; rapports de MM. Stas et de Koninck sur ce travail, 271; impression, 274; M. Dubois présente une note sur les cam- phres, 160; rapports de MM. Dons uy et Melsens sur ce travail, 271,275; impression, 281 ; sur l'acide chloro-brômopropionique, par M. L. Henry, 401; sur le radical propargyle, par le même, 402; sur la lactide et la distillation sèche de l'acide lactique, par le même, 409; sur le chloral et les éthers éthyliques chlorés en général, par le même, 489; sur la production des hydrocarbures acétyléniques, par le même, 512. Commission administrative. — MM. ge y aider et De Busscher réélus membres de la commission, 484, 602, Commission de la Biographie e SR wem e Liagre élu membre de la commission , 538; treizième rapport annuel sur les travaux de la com- mission, par M. De Busscher, secrétaire, 781. E de publication des œuvres des grands écrivains du pays. — heler présente le poëme intitulé : Les Enfances Ogier, publié par Së commission , 460; M. le baron Kervyn de Lettenhove présente le tome XVIJI des Chroniques de Froissart , publié par la commission, 600. Commission perf d'histoire. — M. Borgnet présente le tome HI de la Chronique de s Preis, publié par la commission, 290 ; M. Gachard 2 Pr TOME XXXVII, t 910 TABLE DES MATIÈRES. présente le tome 11 des Voyages des souverains des Pays-Bas, publié par la commission, 460. Concours de la classe des beaux-arts. — M. Blomme envoie une repro- duction photographique de son projet d’arc-de-triomphe, couronné par la classe, 148; gravure et médaille reçues pour le concours d'art appliqué de 1874, 155, 885 ; mémoire reçu en réponse à la question concernant r ENG de la sijoi en Belgique aux XVIIe et XVIIe siècles, Concours de la classe des lettres. — Mémoires reçus en réponse aux questions du programme pour 1874, 203; rapports de MM. Roulez, Wagener et Nève sur les mémoires concernant Septime Sevère, 605, 615, 617; M. De Ceuleneer lauréat, 619; rapports de MM. Thonissen, Le Roy et Nève sur le mémoire concernant 5 Éppen de Saint- Anselme de Cantorbéry, 620, 630, 646; M. Van Weddingen lauréat, mémoires concernant la théorie du capital et du travail, 647, 651, 655; M. Dauby lauréat, 656; See de MM. Nypels , Thonissen et Faider sur le mémoire en réponse au concours historique de Stassart , 656, 664, 666; M. Poulet lauréat , Ca ; proclamation des résultats du con- cours de 1874, 770; inscriptions pour les médailles de MM. De Ceuleneer, Van Weddingen et Dauby, 845; formation du programme de concours pour 1876, 846 Concours de la classe des sciences. — Programme pour 1875, 4; inscrip- tion pour la médaille de M. Mansion, 158. Concours de Rome (grands). — Discussion au sujet du projet d’un éta- blissement pour les pensionnaires du gouvernement à Rome , 240, 527, 881, 884. Gent quinquennal des sciences physiques et mathématiques. — Ar: rêté royal nommant le jury, 2 pme sexennal de Stassart. — Mémoire reçu en réponse à la ques- n posée pour la seconde période de ce concours, 205; rapports de wë Nypels, Thonissen a Faider sur ce mémoire, 656, 664, 666; M. Poullet lauréat, Concours triennal de Httérature dramatique flamande. — Prix de la période de 1871-1873 décerné à M. Delcroix , 775. Concours triennal de littérature À ps — Prix de la période de 1870-1872 décerné à M. Potvin D. Discours. — Discours prononcé aux funérailles de M. Henri-Louis-François Partoes, par M. L. Alvin, 149; discours prononcés aux funérailles de M. Ad, Quetelet : par M. De Keyser, 248; par M. Mailly, 251; par TABLE DES MATIÈRES. HIR M. Putzeys, 258; par M. le baron Kervyn de Lettenhove, 261; par M. Tallois, 262; par M. Liagre, 264; discours sur la pumismatique » og M. Chalon, 679. — Ouvrages, par M. J. Plateau, 2; par M. le Ministre de l’intérieur, ju, 158, 269, 289, 459, 482, 599, 798, 844 ; par MM. ès Quetelet et Chalon, 117; par M. De Ruben, 148; par MM. P.-J, Van Beneden et Ern. Quetelet, 159; par M. Morren, 159, 559; par M. Nève, 202; par M. Lenormant, 202, 466; gravure, par M. Stang, 257; ouvrages, E M. Malaise, 269; par M. le Ministre de la justice, 289, 600; MM. Borgnet, Juste, Rivier, Varenbergh et le prince de eak y, 290; par MM. Gloesener et Montigny, 3559; par MM. Van Praet, SE Scheler et Rolin-Jaequemyns, 460 ; par M. Paillard, 461; r M. Wauters, 465; par MM. Willems, Feys et Van de Casteele, 465; Gs MM. Crépin et De Tilly, 485; par M. le baron de Witte, 600; par M. Hautcœur, 601; par M. Nolet de Brauwere , 602; par MM. Ed. Van Beneden, Dewalque, Davidson, Graindorge, Mannheim et Laporte, 799; par MM. de Reumont et de Borchgrave, E. Élections et nominations. — Nomination du jury du concours quinquennat des sciences physiques et mathématiques, 2; approbation royale de l'élection de M. Malaise comme membre titulaire, ibid. ; remereiments de M. Malaise, élu membre titulaire, de M. Cornet, élu correspondant, et de MM. de Colnet d'Huart et H. Sainte-Claire-Deville, élus associés, ibid. ; M. Brialmont élu directeur de la classe des sciences pour 1875, 5; M. De Keyser nommé président de l’Académie pour 1874, 116, 148; M. le baron Guillaume élu directeur de la classe des lettres pour 1875, 117; M. Samuel élu membre titulaire de la classe des beaux-arts, MM. Ch. Becker, W.-P. Frith, Monteverde, A. François, R. Stang et le vicomte de Laborde élus associés , MM. Terry et Radoux élus corres- pondants, 152; M. Balat élu directeur de la classe des beaux-arts pour 1875, ibid. ; remerciments de M. Balat , 256; approbation royale de l’élec- tion de M. Samuel comme membre titulaire, 257; MM. Samuel, Terry, Radoux, Becker, Frith, Monteverde, François, Stang et de Laborde remercient pour leur élection, 257; M. Helmholtz remercie au sujet de son élection d’associé de la classe des sciences, 269; M. Liagre élu membre de Ja Commission de la Biographie nationale, 338; M. von Ferstel élu associé de la classe des beaux-arts, 471 ; remercimeuts , 775 ; MM. Stas, Faider et De Busscher réélus membres de la commission administrative, 484, 602, 775; M. Liagre élu secrétaire perpétuel de 912 TABLE DES MATIÈRES, l'Académie, 678, 787 ; approbation royale de cette élection, 678 , 798, 82; MM. Rolin-Jaequemyns et St. Bormans élus correspondants de la classe ES lettres, MM. Desmaze, pere et Jonckbloet associés, 774; remerciments de ces nouveaux élus, E “pigraphie. — Inscriptions pour les tré de concours de MM. Man- sion, De Ceuleneer, Van Weddingen et Dauby, 158, 845. — Voir istoire. 3 G. Géographie ancienne. — Aduatuca, notice par M. J. Grandgagnage, 117. Géologie et paléontologie. — Carte géologique de la bande méridionale des - calcaires devoniens de l’Entre-Sambre-et-Meuse, par M. J. Gosselet, 81 ; notes sur le terrain devonien, par MM. d’Omalius d’Halloy et Dupont, 191, 196; communication de M. de Koninck au sujet de la Commission éologique des États-Unis, 596; note sur la corrélation des formations cambriennes de la Belgique et du pays de Galles, par M. Dewalque, ibid. ; communication de M. Malaise au sujet de cette note, 598; note sur l’âge de quelques couches du terrain ardennais des environs de Spa, par M. Malaise, 800; remarques de M. Dewalque au sujet de cette note, 801 ; notice sur les gisements de phosphatede chaux dans le terrain cré- tacé de la province de Hainaut , par MM. Cornet et Briart, 858. Histoire. — Le coup d'État du 18 juin 1789, notice par M. Th Juste, 294, 848; lecture, par M. Gachard, de la première partie d’une notice inti- tulée : le cardinal Bentivoglio; sa nonciature à Bruxelles, 467; rapports Je MM. Roulez, Wagener et Nève sur les mémoires de concours concer- nant Septime ege 603, 615, 617; rapports de MM. Nypels, Tho- nissen et Faider sur le mémoire de concours concernant l'Exposé des principes constitutionnels communs à nos diverses provinces en 1794, 656, 664, 666; les gildes ARTE ni au XIe siècle, par M. Wauters, 704; les premières relations diplomatiques entre la Belgique et les États-Unis, d’après des papiers inédits, par M. de Borchgrave, 751; M. Vanderkindere présente une notice sur l’origine des magistrats com- munaux , 845; sur la carrière administrative et militaire d’un légat pro- prêteur de la Germanie inférieure, par M. Roulez , 867. J. Jurisprudence. — Note sur la découverte de tables romaines à Ossuna , par M. Alph. Rivier, 144, TABLE DES MATIÈRES. 15 i L. Littérature. — M. Loise donne lecture du commencement dun travail intitulé ` La littérature allemande au XVIe siècle, sous l'influence de la guerre de Trente Ans, 145, 867, M. Mathématiques pures et appliquées. — M. Saltel présente une note sur la détermination, sans calcul, de l'ordre d’un lieu géométrique quelconque, 160, 802; lecture des rapports de MM. Folie et Catalan sur la première rédaction de ce travail, 273; M. Genocchi présente des BAREO sur le développement de la fonction log. F (x), ibid. ; rapport de Quetelet à ce sujet, 351; M. Simons présente une note sur le mar de Malfatti , 339 ; lecture des rapports de MM. Catalan et Folie sur ce travail, 805; M. Catalan présente un mémoire sur la théorie des courbes et des surfaces, 484; rapports de MM. Liagre et De Tilly sur ce mé- moire, 803, 804; un mémoire de M. Rodenbach, sur la métrologie, est renvoyé par la classe des lettres à l'examen de la classe des sciences, 484, 602; extension des théorèmes analogues à celui de Pascal à des Courbes tracées sur une surface quelconque, par M. Folie, 811. Mécanique. — M. De Tilly présente une note sur la similitude mécanique en général, et sur le mouvement d’un corps solide de révolution, 484; At de MM. Liagre et Catalan sur cette note, 810, 811 ; impression, ; M. Boussinesq présente un mémoire sur l'équilibre d’élasticité des Ste pulvérulents et sur la poussée des terres sans cohésion, 802. Re et physique du globe. — Rapports de MM. Liagre et Gloe- sener sur une requête adressée par M. Van Rysselberghe à M. le Ministre de l'intérieur, au sujet de son météorographe universel, 15; note sur l'aurore boréale du 4 février 1874, par M. Ern. Quetelet, 160 ` aurore boréale observée à Louvain dans la nuit du 13 au 16 janvier 1874, par M. Terby, 164; les observations météorologiques simultanées sur Phé- misphère terrestre boréal, note par M. Ern. Quetelet, 552; M. Perr présente une note sur les treibiehents de terre ressentis en 1871, e N. Nécrologie. — Annonce de la mort de M. Louis Agassiz, 2; de M. de la Rive, ibid. ; de M. Partoes, 147; discours prononcé à ses funérailles, par M. Alvin, 149; annonce de la mort de M. Ad, Quetelet, 245, 265, 288, 914 TABLE DES MATIÈRES. 524; relation de ses funérailles, 245; motion de M. De Keyser, en assem- blée générale, au ma de cette mort, 778; lettre de M. Montigny rela- live à un monume d M. Ad. Quetelet, 779; annonce de la mort de M. de Jacobi, 558; de ze Kaulbach, 470; de M. Hansen, 482; de M. ds de TS 845, 882; motion de la classe des beaux-arts à ce , 882. "mem — Discours sur la numismatique, par M. Chalon, 679. 0. Ouvrages presentés. — En janvier, 155; en février, 240 ; en mars, 528; en avril, 473; en mai, 788; en juin, 885. P: Peinture. — M. Éverard annonce qu'il se propose de faire une exposition de sa collection de tableaux, au profit de la caisse centrale des artistes belges, 148; résultats financiers de cette exposition, 525; motion de M. Gallait au sujet des tableaux de Rubens qui se trouvent dans la cathédrale d'Anvers, 326; renseignements donnés par MM. De Keyser, De Braekeleer et de Burbure à ce sujet, 326, 471, 472. Phénomènes périodiques. — Documents présentés, pour le recueil des énomènes périodiques, par MM. Ad. Quetelet, D. Leclercq, Christ et Lanszweert, 3; par M. Bernardin, 3, 485; par M. Cavalier, 5, 158, 1 jen, 270, 483, 799; par MM. Pérard et Fritsch , 159; par M. Quaedvlieg, 270; par M. Ern. Quetelet , 539. Philologie. — M, Stanislas Bormans présente une note intitulée : Doon de Mayence, deux fragments manuscrits de la fin du treizième siècle, 205 ; rapports de MM. Scheler et le baron Kervyn de Lettenhove sur celte note, 291, 293; impression, 307; notice sur le particularisme linguis- tique PE de la En us par M. J. Nolet de Brauwere van Steeland, 206; remarques de M. Willems au sujet de celle notice , 467 ; réponse à M. Nolet re Brauwere à ces remarques , 667. ege — Rapports de MM. Thonissen, Le Roy et Nève sur le mémoire de concours concernant la philosophie de Saint Anselme de rs 620, 650, 646; un déterministe de 1787, lecture par M. Tho- , 690. Ph, ass — M. Putzeys présente une note sur les centres des nerfs vaso-moteurs , 270; rapports de MM. Schwann et Gluge sur ce travail , 540, 541 ; impression, 450 ; M. Putzeys présente une note sur la ques- tion de l’abiogenèse , 339 ; ce travail est restitué à l’auteur , 482 ; note TABLE DES MATIÈRES. 915 sur la transformation de la contraction musculaire tonique en contrac- tion rhythmique , par M. Gluge , 850. Physique. — Revendication de priorité en faveur de M. Louis Pérard , par M. Folie ; M. Vander Mensbrugghe présente un mémoire inti- tulé : L'électricité "S exerce-t-elle une bierg sur D tension superficielle d’un liquide ? 802. Publications académiques. — Demandes d'échange, 2, 338, 459, 482, 500, 798; présentation de l'Annuaire de 1874, 3. 116, 148; présenta- tion du tome XXXVIJ des Mémoires couronnés inai , 485. R. . Henry concernant les dérivés glycériques, 6, 7, 541, 545; de MM. Stas et Donny sur un travail de M. W. Spring concernant l'acide hyposulfureux et l'acide trithionique , 7, 10; de MM. Stas, de Koninck et Melsens sur quatre notes de M. De Wilde, intitulées ` 1° Contribu- tions à Ja théorie du blanchiment, 10, 12; 2 sur la préparation de l’acétylène, 12, 13; 5° action de l'hydrogène sur l’acétylène et l'éthy- lène, sous l'influence du noir de platine, 13, 14; 4° action de l'effluve électrique sur quelques gaz et mélanges gazeux, 14, 15; rapports de MM. Liagre et Gloesener sur une requête adressée par M. Van Ryssel- berghe à M. le Ministre e l'intérieur , au sujet de son ro universel, 15; lecture des rapports de MM. De Tilly et Liagre sur la note de M. Siacci concernant la similitude des AE ea des projectiles oblongs , 160; rapports de MM. Stas et de Koninck sur la note de - Henry concernant les dérivés diallyliques , Set ; de Donny et Ce sur la note de M. Dubois, intitulée : Recherches sur les cam- 271, 7 lecture des rapports de MM. Folie et rarm sur le Rapports. — De MM. Stas, de Koninck et Donny sur deux notes de M d'un lieu RS Se 275; rapports de M. Scheler et le baron Kervyn de Lettenhove sur la note de M. St. Bormans concernant le Doon de Mayence, 291, 295; de MM. Schwann et Gluge sur la note de M. Putzeys concernant les centres des nerfs vaso-moteurs, 540, 541 ; de MM. Éd. Morren et Éd. Van Beneden sur la note de M. Gilkinet con- cernant les pyrénomycètes, 344, 546 ; rapport de M. Ern. Quetelet au sujet d’une réclamation de priorité de M. Genocchi, 351; rapports de MM. Gluge et Schwann sur un mémoire de M. F. Plateau concernant des recherches sur les phénomènes de la digestion chez les insectes, 485, 488; de MM. Roulez, Wagener et Nève sur les mémoires de concours concernant Septime Sevère, 605, 615, 617; de MM. Thonissen, Le 916 TABLE DES MATIÈRES. Roy et Nève sur le mémoire de concours concernant la philosophie de Saint-Anselme de Cantorbéry, 620, 630, 646; de MM. Thonissen, de Laveleye et de Decker sur les mémoires de concours concernant les rapports du capital et du travail, 647, 651, 653; de MM. Nypels, Tho- nissen et Faider sur fe mémoire en réponse au Ze concours sexennal de Stassart, 656, 664, 666; lecture du rapport de MM. Fraikin, Franck, Leclercq et Robert sur le modèle du buste du commandeur de Nieu- port, 776; treizième rapport annuel sur les travaux de Ja commission de la Biographie nationale, par M. De Busscher, 781; lecture des rap- talan et Folie sur une note de M. Simons concernant le problème de Malfatti, 805; rapports de MM. Liagre et De Tilly sur le mémoire de M. Catalan concernant la théorie des courbes et des sur- faces, 805, 804; de MM. Liagre et Catalan sur la note de M. De Tilly relative à la similitude mécanique et au mouvement d’un corps solide de révolution , 810, 811. ER Sciences morales et politiques. — Rapports de MM. Thonissen, de Lave- leye et De Decker sur les mémoires de concours ae la théorie économique des rapports du capital et du travail, 647, 651, 653. Z. Zoologie. — Additions au Synopsis des Cordulines , par M. de Selys Long- champs, 16; sur la capture dans l’Escaut, au mois de novembre 1875, d'un Hyperoodon rostratum, note par M. Éd. Van Beneden, 55; M. F. Pla- teau présente un travail sur les phénomènes de la digestion chez les insectes, 270; rapports de MM. Gluge et Schwann sur ce travail, 485, 488; de la distinction originelle du testicule et de l'ovaire; caractère sexuel des deux feuillets primordiaux de l'embryon; bermaphrodismeé morphologique de toute individualité animale ; essai d’une théorie de la TRE Zong M. Éd. des Beneden , 550; M. Dubois présente une note certa espèces du genre Calliste, 802; les baleines à e Bagger Zélénde, par M. P.-J. Van Beneden, 852.