EDRELRIND DE LA SOCIÉTÉ LINNÉENNE DE BORDEAUX. # 4 : + ee ms Æ è EX 4 LE D + SOCIÉTÉ LINNÉENNE DB BOLDEAUS. TOME XVI. — Deuxième Série : TOME VE. À PAR, A BORDEAUX, CHEZ J.-B. BAILLIÈRE, | CHEZ TH. LAFARGUE, * Rue de l'École de Médecine, 175 LIRRAIRE j Fr Fe JImprimeur de La Soc £inn.; p D.: Je g C, P, PA LONDRES, -MÈME MAISON , 219, Rigent-Street. ” Mo. Bot. &ar9en, ; 1827. gi sr à . L2 si + ACTES DE LA SOCIÉTÉ LINNÉENNE j DE BORDEAUX. #2 ENTOMOLOGIE. | L. Sur la Circulation dans les insectes ; par M. Léon Dorour, docteur-médecin , correspondant de l’'Ins- La hitut, ete. (1). : a. 5 CN # éd à : > Nimium ne crede colori, La question de la circulation vasculaire dans les insectes, depuis longtemps traduite devant le jury de la science, de- meure encore l'éternel sujet d’éternelles controverses, bien - que les anatomistes les plus habiles, les savants du +4 grand renom se soient engagés dans le débat. Les uns tiennent qu'elle existe, les autres la nient se. 2 (1) Au commencement de Février Ni mon savant ami le pro- fesseur Duvernoy, présenta en mon ce Mémoire à l’Académie = ecaiht farprebenent Re permit se ’il en fût inséré un ex- d’hui à velles réflexions inspirées par une réplique insérée da comptes-rendus, c’est que pour résoudre une question aussi sérieuse aussi Brass: il m’a paru pentiel 3 n omaiiee aucune Photisnse tablir le rss primitif . mon travail en LE sRR de quelques nou- ns ces us + # ra us tb) tous invoquent le témoignage d des faits et du rélsoisié net chacun a la prétention d’un labeur consciencieux, de n'avoir d'autre but, d'autre intérêt que le triomphe de la vérité, et ce langage répété à saliété , tombe dans la banalité et le discrédit. Une recrudescence récente es cette même question est venue lui redonner une palpitante actualité. C’est une publi- cation de M. Émile Blanchard, d’abord insérée en extrait dans les Comptes-rendus de l'Académie des Sciences, de se 1 847, “ensuite développée dans les Annales des sciences urelles, ‘cahier de Juin 1848, qui n’a paru qu’en Octo- bre suivant. Cette publication avait été précédée de celle de M. Verloren, docteur en sciences à Utrecht consignée dans un mémoire couronné en 1844, par l'Académie Royale de Bruxelles. Et comme je suis gravement mis en cause dans le procès, les noms de ces deux auteurs tombent naturellement sous ma plume; qu'ils me permettent donc de les suivre anatomiquement ‘et physiologiquement sur ce terrain glis- sant, qu'ils me permettent de soumettre à un contrôle sin- cèrement rigoureux l'esprit et la lettre de leurs écrits. Je réclame instamment sur ce débat toute l'attention des physiologistes éminents qui siègent dans la savante enceinte de l'Académie. J'en appelle au scalpel indépendant des z00- nomisies qui, après avoir sondé ces organismes si admira- blement échelonnés depuis la la sublime complication de l'homme jusqu’à l'atome animé de la Monade, savent s’éle- ver à l'intelligence de fonctions identiques remplies par des organes très-divers et à celle de la décadence graduelle ou même de la disparition de certains appareils organiques, sans que la vie soit compromise. k M. Blanchard établit quant aux opinions sur la circulation D des insectes trois catégories représentées par @uvier, Carüsetilme fait l'honneur (que je décline ) de me désigner # # Aa (7) | aussi. Mon titre ci disciple de; {Cuvier n'a jamais engagé tous mes écrits sur le litige actuel j je me suis rangé sous la bannière de ce grand homme, si; ai cru pouvoir continuer, perpétuer ses idées, c’est que À s faits nombreux, “révélés à mon scalpel fun “+ da ent, mais de mesr à ches, je suis ee de me croire à l'abri del erreur. qui assiége notre espèce ; je peux, comme beaucoup d'autres, m'eni- vrer d’une illusion, enfant de mes œuvres, mais je suis tou- jours prêt à l’abjurer d’où que me vienne le rayon de la vérité, Mon culte, ma passion invétérée pour ces insectes dont l'étude est pour moi le pabulum animi, me portent naturellement à ambitionner pour eux un système complet de circulation qui leur assigne un poste plus élevé dans la série organique. Mais que dis-je ! je rends graces au Légis- lateur suprême d’avoir réservé exclusivement pour eux le beau privilége d’une circulation vasculaire aérifère d'un poumon universellement ramifié qui appelle au bénéfice de la respiration ne l'élément le plus impalpable de lor- ganisme. Les esprits P SE des conformités d’or- ganisation dans les animaux supérieurs et inférieurs de l'é- chelle, ne sont pas à l'abri de la séduction. Nous verrons bientôt si je dois m'incliner devant des expérimentations qui ont des résultats différents des miennes. L'opinion que j'ai émise sur la circulation dans les in- _ sectes est loin d’être ma propriété exclusive , c'est celle de Cuvier et voilà pourquoi j'ai décliné Fhon qu’on me fesait d'associer mon nom à ceux de de Carus. Libre à M. Blanchard d'assurer que : ne fut jamais paciagégipar d'autres (1. €. ë ti + (8) site point à y rallier Malpighi, Swammerdam, Lyonet et d’autres anatomistes que je revendiquerai plus tard. Tous ont refusé au cœur dorsal des vaisseaux qui pussent auto- riser une véritable circulation. La réserve des deux illus- tres fondateurs de l'anatomie entomologique, Malpighi et Swammerdam , fut telle que dans leurs vénérables écrits sur cette matière, le mot de circulation n’est même pas pro- noncé. . M. Blanchard (p. 564) tombe dans une inadvertance lorsqu’à l’occasion de Cuvier il: dit : « selon notre illustre » anatomiste le fluide nourricier n'avait aucun mouvement, »*suivant son expression il était en repos ». La mème ac- cusation m'a été intentée aussi par cet auteur. J'ai lu, relu vingt fois et je consulte encore actuellement le remarqua- ble mémoire de Cuvier et je déclare que nulle part, il n’a dit que le fluide nourricier était en repos, mot que le lec- teur aura cru textuel et il ne l'est pas. Cuvier dit positive- ment que le chyle se répand dans toutes les parties du corps; que chaque partie en attire les portions qui lui conviernnnent, etc. { p. 44 et suivantes de son mémoire) (4). (4) Dans sa réplique { Compte-Rendu, Janvier 1849), M. Blanchard a pu faire naître dans l'esprit de l’Acadérnie la pensée que ma cila- tion de Cuvier relative au Le Suis En du fluide nourricier était ou erronée ou + On n st point à Vabri du reproche de déloyauté lorsque pour combattre une assertion on tronque ou on mutile les phrases. J’ai s 7% et je l’affirme encore parce que c’est l’exacte vérité, que dans le Mémoire de Cuvier sur la nutrition dans les insectes, il n’est nulle part question du repos du fluide nourricier. Voir mon texte Voyons si les arguments de M. Blanchard sont eux-mêmes solide- pen: établis. Je reproduis la citation ne de Cuvier ( Leçons anat. comp.) do nt M. Blanchard s’étaie : « Des naturalistes qui ont » observé au microscope les parties REC ATE des insectes n’y » ont vu qu'un liquide en repos qui les baïgne de toutes parts ». Et 9) En me faisant nier tout mouvement du fluide nourricier , M. Blanchard me prête une hérésie physiologique. Peut-on, en effet, concevoir la nutrition sans ce mouvement et ne l’ai-je pas toujours proclamé ? Oui j'ai refusé une circulation aux insectes, mais dans mes écrits j'ai attaché à ce mot l’ac- ception admise par les physiologistes de tous les temps, et pour ne point prêter à l’équivoque , j'ai eu le soin de lui ajouter l’épithète significative de vasculaire. C’est donc con- tre cette circulation vasculaire que je me suis élevé et nul- lement contre le mouvement du fluide nourricier. J'expo- qu'est-ce à dire? Ces lignes sout-elles l'expression de l'opinion «1% pre de Cuvier ? Non. 11 n’est là qu’historien. Plus loin, dit M. B chard , Cuvier parle encore du sang comme « égale ro » ment et tranquillement toutes les parties qui doivent y puiser les » molécules qu’elles ont à s’approprier ». Remarquez-le bien, ce mot tranquillement dont on prétend faire un argument n’était dans l’es- prit de l’Aristote de notre époque, qu’une antithèse de circulation. Ab! que M. Blanchard se garde bien de citer ce qui précède et ce qui suit cette phrase amputée, il aurait trop mis en évidence l'opinion négative de Cuvier sur la circulation! Quant à la prétention de M. Blanchard de combattre par des cita- tions prises dans mes propres ouvrages mes assertions relatives au mouvement du sang ,ie lui en dem ande pardon; mais ces cilations ne prouvent pas autre chose que ma négalion d’un mouvement circu latoire. I] eût été plus su 05 ” _— convenant, ce me sehiilé: que pour apprécier la valeur défin de mon opinion sur ce point, il eût consulté le Menu ouvrage académique où j'ai traité d’une manière plus spéciale et plus détaillée de la circulation en litige et dans lequel j'ai dù naturellement résumer et modifier les idées émi- ses dans mes précédents écrits, sur cette re or pe agé Or, cet ouvrage , antérieur de plusieurs années à celui de M. Blan- chard, ve partie du Tome 9.me des Mémoires as ants si à de l’Académie , 1845. S’il s'était donné la peine d'y jeter les yeux, il y aurait clairement vu ma façon de penser sur le mouvement du sang , il se serait convaincu, que dans l'écr H'combat , j'ai reproduit ces mêmes idées avec plus de d (10) serai plus tard ma manière d'envisager la nutrition et l’on verra si elle est conforme aux principes d’une saine physio- logie. Si M. Blanchard eût suivi avec plus de soin la succession des idées de Carus touchant la circulation dans les insectes, il aurait su qu'en 1844, ce célèbre anatomiste avait abjuré pour ceux-ci, au moins à l’état parfait, cette circulation qu'il avait préconisée dès 1826, c’est-à-dire pendant vingt- cinq ans; il aurait pareillement su que j'avais pris acte de cette opinion modifiée, de cette sorte de conversion dans le compte-rendu de notre Académie en Juillet 4844; enfin il se serait dispensé de dire dans sa réplique de 1849, que » depuis les observations de Carus, le phénomène de la cir- » culation dans les insectes est devenu pour ainsi dire vul- » gaire et ne prête plus matière à discussion ». Quand on se pose en historien, il faut être scrupuleux pour les faits et pour leur enchaînement. Et d’ailleurs, qu'a de commun la circulation telle que l’entendait Carus avec celle que M. Blanchard. s'efforce de faire prévaloir ? Puisque M. Blanchard semble s’étayer de l'opinion de M. Verloren sur la circulation qui nous occupe, voyons s’il à convenablement apprécié les idées de celui-ci. M. Verloren paraît appartenir à l’ordre des entomotomistes .qui dédai- gnant le scalpel et les ciseaux, se vouent presqu'exclusive- ment à l'anatomie par transparence, c'est-à-dire qu'ils soumettent au foyer du microscope des insectes vivants à téguments plus ou moins diaphanes, de manière qu’ils peu- vent voir ou entrevoir quelques organes intérieurs, quelques mouvements. Mais la pellucidité tégumentaire est le plus souvent PE ne se rencontre guère que dans les su- jets tendres ou récemment éclos, comme par exemple dans les, jeunes larves ; et quand ces transparents ne dévoilent qu'une Pari #4 qu'on a intérêt à voir, l'esprit impa- . dominale est garni d’une double série (M4) tient s’évertue à deviner le reste. Puis on hasarde des des: sins appelés schématiques, ce qui veut dire des dessins imaginés (sinon imaginaires). M. Verloren qui a attaqué avec des armes peu courtoises ma négation d’une circulation vasculaire a bien constaté un cœur dorsal palpitant, mais il lui a vainement cherché des branches, et parvenu dans la tête, il l'a complètement perdu pour s’abandonner aux courants, aux fluctuations, aux ondes, en s’efforçant de les régulariser. Alors il s’est cru autorisé à destituer sans pitié le cœur multiloculaire de Straus , à révoquer le système vasculaire de Newport et de Bowerbank. Enfin sa logique, peu conséquente à ses pré- misses , le ramène à l'opinion de Cuvier qui est la mienne et il s'exprime en ces termes : « Le raisonnement de Cuvier » reste donc vrai. Dans les insectes, le système vasculaire a » été donné à l'air pour qu'il püt se porter dans toutes les parties du corps et du fluide nourricier , etc. ». Je n'au- rais pas moi-même parlé autrement. Et pourquoi done me combattre ? M. Blanchard semble étonné que j'aie appelé le vaisseau dorsal ici un organe, là un cordon. Et qui n’a pas eu occa- sion de voir dans une longue expérience son opinion se modifier à mesure que les faits qui l'ont fondée se mul- tiplient , ou se diversifient ? Dans mon mémoire académique précité j'ai effectivement désigné sous le nom d'organe., le vaisseau dorsal de la sarcophage. Je tiens à justifier la légi- timité de cette dénomination. M. Blanchard, au moins s'il accorde quelque confiance à mes travaux, aurait dù être frappé de la structure , de la composition de l'organe dor- sal de ce diptère dont le tiers postérieur de la portion ab- latérale et symétrique és. Comment essentiellement ” est-il resté muet devant une s Là 12) différente de celle de tous les autres vaisseaux dorsaux con- nus? Ne pourrait-on pas croire qu’il n’a pas daigné, ou qu’il n’a pas osé y arrêter son attention et encore moins en signaler l'existence? Dans ce siècle du microscope, qui nous a révélé un sixième sens et un nouveau monde, qu'il permette à un homme qui a la très-longue habitude de la microtomie de déclarer qu'il n’y a là aucune illusion d'opti- que. C’est un fait matériel dont j'ai vingt fois constaté l’exis- tence dans les diverses morphoses d’un insecte que j'ai à dessein choisi parmi les espèces les plus communes dans toute l’Europe. J’ignore sans doute les attributions physio- logiques précises de ces sphérules, mais je les crois peu favorables à la circulation. C’est cette complication de structure qui m'a fait adopter le nom d’organe. Que l'on compare cet organe ou ce vaisseau dorsal à celui du Penta- toma grisea à celui de la larve du frêlon ( Vespa crabro) qui est simple, filiforme, d’un même calibre à l'abdomen et au thorax, et on se convaincra combien il est imprudent de s'élever à des généralisations sur un organe dont on a à peine effleuré la forme et la structure dans une classe d’a- nimaux qui compte des espèces si nombreuses et si variées. C’est cette dernière sorte de vaisseau dorsal que j'ai pu appeler cordon (1). (3) A l’occasion de mes doutes sur l'existence d’une cavité dans le vaisseau dorsal , que j'ai parfois désigné sous le nom de cordon, M. Blanchard s’écrie dans sa réplique : « 11 y a deux siècles pourtant, » que Swammerdam ( Histoire générale des insectes) annonçait avoir » fait passer une injection dans ce prétendu cordon sans cavité inté- » rieure». Souffrez, M. Blanchard, que je vous oppose l’opinion de Cuvier relative précisément au passage de Swammerdam que vous invoquez. Je laisse le lecteur éclairé et impartial, juge de l'opportu- nité et de la valeur de votre citation. » Swammerdam , à la vérité , a dit qu’en insufflant une liqueur ( 143 Un autre fait dont M. Blanchard semble aussi ne point tenir compte parce que sans doute il ne se prête point à la doctrine de la circulation et qu'il susciterait quelque em- barras physiologique , c’est l'insertion , la fixation du -bout antérieur du vaisseau dorsal à l’origine du canal alimen- taire. J’affirme encore que ce n'est point là non plus une illusion d'optique. Non-seulement j'ai très-positivement constaté ce mode d'insertion dans les trois âges de la sar- cophage, mais aussi dans les grandes larves de l’Aeshna grandis et de la Libellula depressa, dans les Melolontha vulgaris et Cetonia aurala, dans les Platystoma umbra- reum, Odontomya furcata et tigrina, dans le Sphinx con- volvuli, dans le Pentatoma grisea. Et ce qui vient prêter un puissant, un authentique appui au fait de cette fixation, c'est sa confirmation par le célèbre l’oculatissimus Lyonet. Dans son livre posthume publié par Dehaan, il dit qu’en dis- séquant la chrysalide du Cossus ligniperda. il s’assura que le bout de ce prétendu cœur se fixait à l’œsophage. Mais n’est- » colorée dans celui (vaisseau dorsal) des sauterelles, au moyen d'un » tube de Ds a, à la pee io rome on Ven pee se colorer les dont la pa- » autres p dont la = » tience dans les choses utiles, est ms fois plus étonnante que ce » qu’on admire dans les auteurs cités de bagatelles cree » cette autorité suffirait s’il avait sr son assertion dans ses der- » niers mémoires ; mais il ne l’a dit qu'en passant , dans son petit et » imparfait ouvrage, qui sous le titre pompeux d'Histoire générale » des insectes, n’était qu’une espèce de prospectus ou de catalogue de » son cabinet ; il ne l’a dit qu’à _ de la sauterelle, dont il ne » donne point l’anatomie ; et il n’a rien avancé de semblable dans ces » belles monographies, dont le Sr AR par Boërhaave, après » la mort de l’auteur , entre les divers chapitres de cette prétendue » histoire générale, constitue le curé ouvrage du iblia naturæ ». ( Cuy VER Mém. sur la manière se _ des insectes, p.38, (1798 la nutrit. dans (14) il pas bien singulier et en même temps bien significatif que M. Verloren , si amer dans sa critique envers moi et qui n’a pas daigné prendre en considération ce mode d’inser- tion , malgré l'égide respectable dont je la couvrais, ait lui- même constaté cette adhérence intime, pour me servir de son expression, dans la chenille du Sphinx Ligustri ! Cette vérité ne semble-t-elle pas s'être échappée furtivement de la plume de M. Verloren ; pour confirmer à son insu mes assertions et pour venger la science de son ee à mon égard ? Avant d'aborder la circulation, telle que l'entend M. Blan- chard, j'essaierai une classification, un petit cadre statistique des opinions émises sur la circulation dans les insectes, avec les noms des auteurs tant anciens que modernes disposés chronologiquement. Voici ce cadre sauf réclamations : 4.0 Vaisseau dorsal saps ouvertures ni divisions bien éta- blies; fluide nourricier épanché et infiltré. nulle. © 1. Malpighi. Circulation 7. Tréviranus. - 8. Lyo 9. Audouin 4. Cuvier 10. Carus ? . Duméril. 41. Muller. 6. Marcel de Serres. 2.0 Vaisseau dorsal percé d'ouvertures latérales et ouvert à son extrémité antérieure : mouvement impulsif. € Tape tion de courants. 1. Straus : 3. Duvernoy. 2. Burmeister. 4. Verloren. 5.° Vaisseau dorsal avec un système de vaisseaux plus ou moins complet. Circulation vasculaire. 1. Newport. 4. Bowerbank. Dugès. 5. Blanchard. 3. Brants. 6. Milne Edwards ? ui QE 5 2 lames - : dominé dut à ce Sd (15) Suivant M. Blanchard : « Les trachées sont formées, » comme on le sait, de deux membranes entre lesquelles » se trouve interposé un fil solide contourné en spirale. » Puisque c’est entre les deux membranes que pénètre le » liquide sanguin, celui-ci se trouve ainsi de toutes parts » en contact avec l’air contenu dans l’intérieur des trachées. » L'usage du fil spiral se montre maintenant sous un dou- » ble rapport, il ne sert pas seulement à donner la résis- » tance et l’élasticité nécessaires aux tubes aérifères , il sert » encore à maintenir écartées l’une de l’autre, les deux » tuniques trachéennes et à les tenir béantes près des ori- » fices respiratoires pour livrer passage au fluide nourricier. » La membrane interne seule se continue avec le tégument » qui borde les stigmates ». (p. 577 ). Ces lignes textuelles fidèlement transcrites, sont la subs- tance, l'expression fondamentale de la circulation inter membranulaire ou péritrachéenne que M. Blanchard dit exister dans les insectes. Avant de disséquer ce passage, exposons en peu de mots, dans l'intérêt du lecteur qui n'aurait pas la pratique de ces fines anatomies , la structure intime des trachées au point de vue du fil spiral qui joue ici un si grand rôle. L’expres- sion de fi! contourné en spirale ne doit point représenter à l'esprit l’image d’un tire-bouchon; car dans le fil trachéen, les tours de spire, fort rapprochés entr'eux, et comme con- tigus, formeraient par leur ensemble, si celui-ci pouvait être isolé , un tuyau, un cylindre creux , comparable à ce qu'on appelle un élastique de bretelle. Toutefois, ce fil élastique ne serait pas dans tous les insectes un fil continu, car Cur- tins Sprengel observe que dans les trachées de la Cétoine dorée, ce fil est manifestement interrompt (G: Sprengel , (16) p. 15, pl. 2, fig. 19). Dans la doctrine de M. Blanchard, ce fil serait libre de toute adhérence (1 ). (4) Je me pique de franchise et de sincérité dans l'exposition de mes idées, comme dans le contrôle des opinions d'autrui, et je ne re- cule point quand il s’agit de désavouer une erreur démontrée, ps sa réplique, M. Blanchard, dit : « D’après cet anatomiste (L. Du- » a ] Er monté le < be rire. À bd toute nm ol Aucun mot, » see mon méme ne justifie Le _—. de M. L. Dufour ». J'avoue qu’en citant ce passage de M. Blanchard, transcrit plus j'avais compris que ce fil solide et pis était libre, et plus d’u lecteur sans doute a pu se laisser aller à cette interprétation. de. Blanchard, nous déclare que cette interprétation est erronée. « Ce » fil, dit-il, adhère partieulié Li $ re No prie, sinon pour mon enlière-justification , du moins comme circonstance fort atténuante , que nulle part dans son mémoire, que ses l’acquit de ma conscience, je viens de relire encore, il n’est estion de celte adhérence du fil à la membrane interne. Cette es était donc sous- pese par l’ ma Qt ee ’ilen puisse être, je l’accepte. V ce fil pour maintenir tetes les deux tuniques dans l'intérêt de la circulation inter-membranulaire. Les tours de spire de ce fil par leur adhérence au tuyau trachéen pressent incessamment celui-ci par leur élasti- cité et ce tuyau réagit, à son tour, par la présence de l’air respira- toire, qui est un fluide élastique. Jusque-là, je comprends à mer- veille l'utilité de ces piernatires d'acilon et de péactian pour l'acte mécanique d ntenant en admettant la doctrine de M. Blanchard, ce fil n’a aucune liaison anatomique , aucune connexion de tissu, avec la tunique extérieure, puisqu’une colonne de sang en circulation est sensée les sépar l’une de Pautre. Comment donc ce fil peut-il remplir la mission phy- siologique que lui attribue cet auteur? Comment enfin peut-il, dans a condition anatomique que je viens de signaler, tenir écartées les deux membranes constitutives de ces canaux ? Vous le voyez, j'arrive forcément à cette conclusion, que tout en agréant , sans réserve au- cune , les organes établis et défendus par M. Blanchard, je ne par- ? » (17) Je ne connais que M. Blanchard qui ait avancé que le fil spiral était simplement interposé entre les deux tuniques de la trachée sans adhérence à l’extérieure. Lyonet dont l'habile, l'intelligent scalpel a sondé tous les replis de la chenille du saule, dont il a fait une célébrité, n’a rien vu de semblable, non plus que Curt. Sprengel qui a traité spé- cialement et iconographiquement la question des trachées et des stigmates , non plus que Réaumur qui a donné de si intéressants détails sur cette structure dans la larve du Stra- tiomys (Tom. 4, p. 314). Et moi, si familiarisé avec les autopsies et les vivisections des insectes , combien de troncs trachéens de tous les calibres n’ai-je pas dévidés en saisis- sant et tirant le fil spiral soit dans l’eau soit dans l’air ! Si ce fil était tel que le dit l’auteur que je combats , s’il n'avait aucune adhérence avec la tunique externe , une fois ou autre j'aurais vu une portion quelconque du tube extérieur per- sister après ce déroulement, et jamais cela ne m'est arrivé. Récemment encore, j'ai renouvelé ces tentatives sur deux insectes, puissamment riches en grandes et belles trachées, la Courtilière ( Gryllo-talpa vulgaris), et les larves-nym- phes des Aeshnes. La destruction complète du cylindre tra- chéen s'effectue constamment au fur et à mesure que l'on tire le fil spiral. Ce dévidement est parfaitement comparable à celui qui s'opère en tirant le fil d’un bas tricoté. Ce fil trachéen déroulé soumis au microscope , m’a toujours offert cà et là d'imperceptibles lambeaux membraneux adhérents viens jamais à les voir fonctionner par une physiolologie tant soit peu rationnelle. Ms J'ai donc, dans un bien de paix, supprimé dans ma publication actuelle, tous les raisonnements qui prennent leur source dans l’iso- lement du fil spiral, et je fais abnégation entière de ceux exposés à ce sujet dans le compte-rendu de l’Académie. Tome XVI. ds (18) que Sprengel a aussi représentés. Eh quoi ! le même gros- sissement optique qui me permet de poursuivre jusque dans ses dernières limites , l’admirable texture des branchies rec- tales d’une larve d’Aeshne et de mettre dans une parfaite évidence le cannevas trachéen primitif et élémentaire de leurs lames les plus exigues, de leurs capillicules les plus déliées , ce même grossissement, ces mêmes yeux, cette même ardeur pour la recherche du vrai, deviendraient “impuissants en face de la composition anatomique d’un gros tuyau trackéen comme celui de l’Aeshne ou de la Courtilière ! Je l'avoue , ma défiance de moi-même , ne saurait aller jus- qu'à révoquer le témoignage de ma longue pratique des lentilles amplifiantes. Je dirai plus, et mon opinion ne sau- rait manquer d'être partagée par les physiologistes qui auront bien étudié les trachées et compris leurs fonctions , ce n’est précisément que par l’adhérence du fil spiral aux deux tuniques trachéennes que l’on peut concevoir sa fonc- tion d’élasticité dans l'acte de la respiration. Voici maintenant une question sur la composition de cer- taines trachées qui me semble assez embarrassante pour le partisan de la circulation vasculaire intrà-trachéenne. Les trachées se distinguent, comme on sait, en deux ordres : les tubulaires ou élastiques pourvues du fil spiral, et les utriculaires ou membraneuses privées de ce même fil. Les unes et les autres sont dans la dépendance du même système vasculaire aérifère ; elles font partie des divisions d’un même tronc trachéen , elles communiquent entre elles et se parta- gent l'air atmosphérique fourni par le même stigmate. Les trachées tubulaires existent dans tous les insectes ; les utri- culaires ne se rencontrent que dans les espèces qui volent, mais non pas dans toutes, et leur nombre ou leur volume est en général proportionné à l'énergie, à l'activité du vol. Les larves n’en ont pas, même celles qui appartiennent aux # D mon 1 2 EN id de 5 ASE En Un did es ed onda dé) ( 19 insectes ailés qui en ont le plus. Ainsi les trachées utricu- jaires sont, comme je l'ai dit ailleurs, des organes volatoi- res, de véritables aérostats. Je transcrirai textuellement les seules lignes de M. Blanchard relatives à cette question : « Quand les trachées des insectes deviennent vésiculeuses » leur fil spiral disparait. Les deux tuniques se rapprochent » l'une de l’autre. Alors on distingue entre elles des canaux » extrêmement nombreux et d'une très-grande finesse qui » les parcourent en tous sens ; mais ils ne m'ont jamais » offert rien de bien régulier » ( p. 377). Comme on le voit, l’auteur tourne la difficulté ou glisse sur elle. Sa dernière phrase, si vague, si décousue est là comme un remplissage ou comme un symptôme d’embarras. Que devient donc le vaisseau circulatoire de M. Blanchard, dans ces ballons sphéroïdaux dont les deux tuniques rap- prochées ont perdu le fil élastique si nécessaire à leur écar- tement? Hélas qui pourrait le dire ? L'auteur parait peu soucieux de cette solution. M. Blanchard prétend ( p. 376) que c’est le sang qui donne aux trachées la couleur ou grise ou jaunâtre ou rou- geâtre. Erreur ! erreur ! Je me contenterai de citer le fait suivant parmi beaucoup d’autres. Dans la larve-nymphe d’Aeshna grandis, sur les trois paires de canaux traché latéraux, les supérieurs, dont le calibre est énorme, ont une couleur d'un cuivre pourpré intense, tandis que les intermédiaires et les inférieurs sont d’un blanc nacré pur. Or, ces trois paires de canaux aboutissent toutes aux bran- chies rectales où s'opère la sécrétion , la fabrication de l'air respirable extrait de l'eau. Il y a plus, c’est que les canaux supérieurs purpurins envoient au rectum des bran- ches excessivement nombreuses lesquelles sont purpurines à leur origine et blanches dans leurs infinies divisions. En supposant, d’après M. Blanchard, que ce riche appareil ( 20 ) irachéen récèle sous sa fine tunique externe , du sang en circulation, celui-ci, il faut bien en convenir , ne saurait changer de couleur dans les divers troncs et les diverses branches, puisqu'ils sont sensés puiser à la même source. Suivant moi, jusqu'à preuve du contraire, c'est exclusive- ment la tunique trachéenne qui dans notre larve, est le siége de cette couleur. J'ai même trouvé des individus de la même espèce moins adultes où ces troncs purpurins étaient tout aussi nacrés que leurs branches. En avançant qu’à l’origine des troncs trachéens, c’est-à- dire , près des stigmates , le vaisseau sanguin inter-mem- branulaire est béant pour donner entrée au sang , M. Blan- chard a omis de nous dire comment il à constaté cette bouche béante , et s’il existe là une disposition particulière , une structure spéciale qui, en permettant au liquide d'y pénétrer , lui défende aussi d’en ressortir. En un mot, y aurait-il là une soupape , une valvule ? Et quand même il aurait accordé cette valvule, ne serions-nous pas en droit de lui demander un tissu à faculié impulsive pour concevoir la progression du sang ? Or, les partisans de la circulation ne nous ont-ils pas constamment répété que dans la tête de l'insecte le sang s'échappe du cœur , lequel cœur n’a aucune 1 continuité avec les vaisseaux circulatoires intra-trachéens ? | Ce sang s’épancherait dans les lacunes interviscérales pour être repris par les bouches béantes des susdits vaisseaux. La faculté impulsive du cœur ne saurait donc venir en aide à ces derniers qui sont sans connexions avec lui ! M. Blanchard cherchant à compléter son système de cir. culation sanguine a imaginé et dit (p. 377 ), que le sang des vaisseaux intrà-trachéens « est ramené dans le vaisseau » dorsal par des canaux efférents qui s’étendent sous la » paroi supérieure de l'abdomen depuis la base des vais- » seaux trachéens jusqu'aux orifices auriculo-ventriculaires Le : Ê RE | - » du vaisseau dorsal. Ces canaux déjà aperçus par M. New- » port sont formés presque exclusivement de tissu cellulaire » aggloméré ; ils ne sont par conséquent que peu ou point » isolables par la dissection ». Pénétrons-nous bien du sens de ces paroles. Cette base des faisceaux trachéens dont l'interprétation m'avait d’abord jeté dans de grandes incertitudes n’est pas autre que la bouche béante des vaisseaux intermembranu- laires (p. 382); ce qui est loin de dilucider la question phy- siologique. Ces canaux efférents (ou afférents) qui rappor= teraient du sang veineux au cœur , auraient donc la même origine que les vaisseaux inter-membranulaires auxquels M. Blanchard donne un sang artérialisé (1. c.) : pesez bien, je vous prie, la valeur de ces mots. Mais outre que cet auteur ne nous fait pas connaître les dispositions anatomiques de cette double origine, il témoigne assez de son hésitation à l'encontre du tribut circulatoire respectif de ces canaux et de ces vaisseaux (1. c.), pour que nous n'insistions plus sur cette sorte d’incompatibilité organique. Les embarras physiologiques se pressent de toutes parts lorsque le scalpel n’a pas nettement établi -les faits maté- riels , lorsqu'on se laisse aller à l'entraînement, à la séduc- tion de l’anatomie par transparence ! Quoi, ces canaux effé- rents peu ou point tsolables et formés, dites-vous , d’un tissu cellulaire aggloméré, s'étendraient néanmoins jusqu'aux orifices auriculo-ventriculaires du cœur ! Et quel serait donc , je vous le demande , leur mode de connexion avec ces orifices ? Comment leur transmettent-ils le sang ? Si cette transmission est réelle , il doit y avoir continuité de tissu de ces canaux efférens avec ces orifices! Or, vous avez ditet vous êtes d'accord sur ce point avec tous les entomotomis- tes tant anciens que modernes, sans m'en exclure ÿ que « le » vaisseau dorsal ne présente point de branches dans son 22 » trajet » (p.374 ). Vous tomhez donc dans une contradic- tion flagrante avec vous-même , puisque vos canaux efférents s’abouchent au vaisseau dorsal par les orifices latéraux de celui-ci et doivent être, par conséquent, en nombre égal à ces derniers ! Faut-il dire toute ma pensée sur ce point liti- gieux ? Je ne sais, mais il me semble que la conviction de M. Blanchard sur l'existence de ces canaux efférents, lui a été plutôt inspirée par sa foi dans l'autorité du savant ana- tomiste anglais M. Newport dont il s’étaie, que démontrée par son propre scalpel. Que M. Blanchard veuille Den nous apprendre encore par quelles voies, dans les insectes privés de stigmates, le sang s’introduit dans le vaisseau intermembranulaire, puisque d’après lui les bouches béantes de celui-ci sont placées à la partie interne de ces orifices respiratoires ? Or, il sait, aussi bien que moi, que ces insectes sans stigmates sont les lar- ves aquatiques à branchies. Celles des Aeshnes et des Libel- lules ont ces branchies dans les parois internes du rectum où elles offrent la plus élégante symétrie. Celles des Agrions, des Éphémères, des Phryganes, du Sialis, des Stratiomes, des Éphydres sont externes , tantôt sous la forme de lames assez larges , tantôt sous celle de pinceaux , de houppes , de scies ou de lamelles. Et quelle bonne fortune vient encore tout récemment s'offrir à mes regards surpris ! Depuis le célèbre De Géer personne, que je sache, n'avait observé directement cette singulière chenille aquatique de l Æydro- campa stratiotella, qui lui a inspiré un si intéressant mé- moire. Et bien, cette chenille en apparence vélue quoique constamment immergée, a em même temps des branchies piliformes et des stigmates ! Je ne cite là que les larves dans lesquelles j'ai moi-même porté le scalpel et qui seront sous peu le sujet d’une publication spéciale. Toutes ces larves ont une richesse prodigieuse de trachées et de tuyaux aéri- {ts fères qui, dans les Aeshnes surtout, l'emportent en calibre sur ceux de tous les autres insectes. En un mot, ces larves ont une somme considérable de respiration. Leurs bran- chies , qui offrent avec celles des poissons une si admirable, si piquante analogie , extraient l’air de l’eau au moyen de lamelles et de capillicules d’une finesse qui surpasse tout ce que l’on peut imaginer et dont cependant mes lentilles mi- croscopiques m'ont démontré la si merveilleuse disposition. Comment donc, je le répète, les vaisseaux sanguins de M. Blanchard puisent-ils, dans ces larves sans stigmates ou à stigmates coexistants avec des branchies , le liquide nourri- cier si abondamment épanché dans les cavités splanchniques pour le livrer à la circulation? L’objection me semble des plus graves. En présence des grands lacs nourriciers , en présence d’une façon de cœur dont les connexions avec le système vasculaire sanguin sont si mal établies, je ne vois, en admettant la doctrine de l’auteur précité, aucun moyen d'échapper à l'impossibilité d’une solution physiologique rationnelle. M. Blanchard a directement injecté le vaisseau dorsal d’un insecte vivant en pratiquant une ouverture dans lune de ses chambres postérieures (p. 373). J'admets et j'admire le fait. L'habile expérimentateur ne nous dit point si cette plaie au cœur, si cette transfusion d’une solution délétère de bleu de Prusse ont entrainé la mort soudaine de l'animal. Si celle -ci n'avait pas lieu, ce que je ne présume pourtant pas, quelle importance physiologique pourrrait-on accorder à cet agent central de la circulation ? Et puisque j'ai abordé la question de la valeur vitale de ce cœur , je rappellerai que dans mon mémoire académique, dont l'extrait seul a subi la critique de M. Blanchard , j'ai rapporté les expériences de M. Marcel de Serres qui prou- vent que l’on peut déchirer, extirper le vaisseau dorsal sans (24) entrainer la mort. Récemment, J'ai pris une larve-nymphe d’Aeshne d'environ 6 cent. de longueur , et dont le vaisseau dorsal offrait distinctement à l'œil nu ces alternatives sub- isochrones de contraction et de dilatation si hasardeusement décorées des noms de systole et de diastole. J'ai fait à ce cœur palpitant trois sections transversales, complètes en trois endroits différents et dans le même instant. Eh bien cette même larve a continué de vivre sous mes yeux dans l'eau et avec son agilité des semaines entières. Je livre au lecteur physiologiste ce fait, afin qu’il en déduise l'appréciation vitale de cet organe. LE En poussant une injection bleue par une lacune abdomi- nale, M. Blanchard à rempli le cœur, demeuré intact, par la voie des canaux efférents dorsaux (p. 377 et suiv. ). Qu'on y réfléchisse un peu sérieusement et l’on se convain- cra de quelles difficultés s'accompagne la constatation de ce double fait. Je suis loin de le nier quoique de nombreuses injections ne m'aient jamais rendu témoin d’un semblable résultat. Mais j'ai le droit d'exiger qu’il soit rationnellement possible , et pour le revêtir de ce caractère, la tâche est plus que difficile. M. Blanchard adopte, et célèbre le vais- seau dorsal de M. Straus avec sa portion cardiaque et sa portion aortique, avec ses ouvertures , ses chambres et toute sa structure. Mais quand il s’agit de faire fonctionner ce cœur adoptif, il le complique de canaux eflérents dont M. Straus n’a pas dit un mot, en sorte que la physiologie de ces deux partisans de la circulation est totalement dis- semblable, Je me suis déjà expliqué sur les connexions anatomiques de ces canaux avec les orifices cardiaques : je n’y reviendrai pas. Comment ceux-ci, que M. Straus dit munis de valvules propres à permettre l'entrée du sang et à empêcher sa sor- lie, peuvent-ils fonctionner à l’abord du liquide injecté, si D nd É É Éd td dé celui-ci n’a pas éteint le principe vital? Comment la sensi- bilité de ces ouvertures si adaptée , dans l’état normal, à l'impression du sang vivant et circulant, s’accommoderait-elle du contact brusque d’un liquide inerte, irritant et délétère ? Et si l'animal a été mortellement asphixié , comment ces soupapes qui ne peuvent plus jouer à cause de la perte de leur ressort vital, se prêtent-elles à l'introduction du liquide injecté et s’opposent-elles à sa rétrocession ? Et qu'on n’arguë point d’une circulation vasculaire par la présence des globules du sang soit dans le corps même des trachées , soit dans les fibres du vaisseau dorsal, soit dans les appendices les plus déliés ( p. 376). L’objection ne saurait être sérieuse. En effet, est-il nécessaire de répéter que tous ces tissus organiques ou plongent dans la grande piscine nourricière, ou sont en contact de toutes parts, avec les éléments nutritifs et réparateurs, avec le sang épanché ou infiltré? N’avez-vous pas toujours dit que dans la tête de l’insécte, le cœur laisse échapper le sang qui s’épanche dans les lacunes splanchniques , que de ces lacunes il se porte aux vaisseaux circulatoires par les bouches péristigma- tiques et au vaisseau dorsal par les canaux efférents ? Ce liquide est donc sang partout, et quel miracle qui soit partout composé de globules sanguins ! Jusqu'ici, comme on a pu s’en convaincre, j'ai accepté, toutefois à bénéfice d'inventaire , l'appareil circulatoire de M. Blanchard, son cœur et ses vaisseaux tels qu’il nous les a donnés. Ma critique s’est principalement exercée sur le mode des fonctions , sur les résultats des expérimentations, sur la manière de les interpréter ; elle a été pre vement physiologique. C’est avec les propres armes A / teur que je l'ai combattu. J'exposerai maintenant des faits qui sont miens et des (26) raisonnements inspirés par eux, en mettant les uns et les autres en regard de ceux de mon savant adversaire. Suivant M. Blanchard « on n’a pas eu recours au procédé » des injections colorées , ou, si on y a eu recours, on n’a » pas réussi à en tirer parti » ( p. 372 ). Et comment en traçant ces mots n’a-t-il pas reculé devant la protestation des grandes ombres de Swammerdam et de Cuvier ? Ces deux illustres anatomistes ont mis en usage les injections colorées, et s'ils n’ont pas vu comme M. Blanchard, à qui la faute ? Sans infirmer les assertions de ce dernier insvestigateur, je puis aussi parler des injections que j'ai pratiquées à l’ai- de d'instruments semblables aux siens et avec une solution térébenthinée de bleu de Prusse analogue à celle qu'il a em- ployée. Serait-ce donc uniquement parce que j'aurais moins d’habileté que lui dans ces expérimentations, que nous n’au- rions pas vu les choses du même œil? Quoi qu'il en puisse être, quand j'ai injecté le liquide coloré dans la grande la- cune abdominale d’un insecte vivant, je n'ai pas manqué d'obtenir le plus souvent des arborisations bleues, mais, je l'avoue, toujours partielles. Quelle qu’ait été ma persévé- rance à multiplier les injections, je n’ai jamais été assez heureux pour voir en même temps le vaisseau dorsal et les grands canaux trachéens latéraux colorés en bleu. ainsi que l'affirme M. Blanchard. Déjà cent fois dans des préparations entomotomiques de- meurées quelque temps en macération dans l'eau, j'avais vu dispâraître la couleur nacrée resplendissante des trachées après le départ de l’air contenu, et j'avais positivement cons- taté que l’eau remplissait ces canaux. Ceux-ci étaient alors pellucides, beaucoup moins élastiques sous la pince. À des yeux peu pratiques ou prévenus ils pouvaient et ils ont pu en imposer pour des vaisseaux sanguins , surtout dans leurs fines ramifications où les fils spiraux sont peu sensibles si (27) même ils y existent, surtout encore dans ces canaux dor- saux d’une assez grande ténuité qui flanquent à droite et à gauche le vaisseau dorsal dans plusieurs insectes, et que dans cet état d'infiltration, on aura pu prendre pour les ca- naux efférents. Quiconque a l'habitude des dissections d’in- sectes sait qu’il n'est pas d’organe, pas de membrane, pas de tissu que ne pénètrent les ramuscules infinis des tra- chées , en sorte qu'il est rare de ne pas blesser une ou plu- sieurs de ces trachéoles lorsqu'on introduit dans les cavités du corps l'instrument le plus délié, l'injection la plus inof- fensive. Or, la conséquence de ces blessures est d’abord l’e- xhalation par ces dernières de l’air en continuelle circula- tion, puis l’infiltration du liquide ambiant dans ces ramus- cules et de là dans leurs troncs successifs lorsque l'air s’en est dégagé. Y a-t-il là rien qui ne soit conforme aux lois organiques et physiques? Ainsi s'expliquent dans ma ma- nière de voir les arborisations partielles bleues que j'ai si fréquemment obtenues par les injections. M. Blanchard dit (p. 375) qu'en examinant les trachées injectées en bleu, il a vu s'échapper de leur intérieur non du liquide mais de l'air, et qu’en tirant le fil spiral, il s’est assuré alors que le liquide coloré s’est écoulé, d’où il conclut que celui-ci était placé dans la périphérie du vaisseau aéri- fère. Sa conclusion eût été plus probante , s’il avait cons- taté qu'après le dévidement du fil spiral, la tunique exté- rieure à laquelle il dit que ce fil n’adhère point, avait sur- vécu , était demeurée saillante et exserte. Son silence donne au contraire plus de valeur à ce que j'ai dit sur ce point à l'occasion de la structure intime des trachées et de line tration aqueuse. Celle-ci, dans mes innombrables dissections, était Le nue pour moi un fait positif qui dès longtemps m'avait tenu en garde contre les assertions des partisans de la circula- (28) üon vasculaire, Comme je pensais que cette infiltration ca- davérique pouvait s’opérer non-seulement par les branches déchirées ou rompues des trachées, mais aussi par les stig- males eux-mêmes immergés et rendus béants par la mort, j'eus l’idée de l'essayer par ces orifices respiratoires seuls. En conséquence , en Novembre dernier, je pris pour sujet de mes expérimentations l’insecte le plus haut placé peut- être dans cet ordre des articulés par son organisation viscé- rale, puisqu'il est le seul qui possède un foie circonscrit muni d’un canal hépatique commun, je veux parler du Taupe grillon ou Courtilière. Je Vasphixiai par l'éthérisa- tion sans le blesser en aucune façon et je le laissai ainsi pendant plusieurs heures afin de donner à l'air des trachées le temps de s’exhaler par les stigmates. Je le plongeai en- suite dans la solution bleue où il demeura quatre heures ; puis je procédai à la nécropsie. Je trouvai un certain nombre de troncs et de branches des trachées injectés de bleu. Il était clair que cette couleur avait pénétré dans ces trachées par les stigmates restés béants par le fait de la mort et voilà tout. Rien , du reste, dans cette expérimentation fort simple qui püt infirmer la circu- lation péritrachéenne de M. Blanchard, puisque d’après ce savant, les bouches béantes de ses vaisseaux sanguins sont indépendantes de la membrane intérieure qui constitue le tube aérifère et que cette membrane seule entoure immé- diatement le stigmate tégumentaire et fait corps avec lui. Dans ma pratique des injections bleues j'avais eu bien des occasions d’accuser d'infidélité ce moyen. Je m'étais convaincu que le bleu de Prusse était en simple suspension dans l'essence de térébenthine et quand le mélange restait en repos, on voyait le prussiate gagner le fond du vase et l'essence reprendre sa limpidité. J'ai donc cherché une ma- tière colorante soluble dans l'eau commune , par conséquent id dus a te ÉD cn ntéond éclats “hétdion tes mnsts (29) plus facile à injecter et je l'ai trouvée; c'est l'encre de la Chine. ; Je continuai à l’aide de cette dernière, mes injections. Il s'agissait de faire pénétrer sans le secours de l'injection lacunaire le liquide dans le vaisseau circulatoire de M. Blan- chard. Voici l’expérience que je tentai. Je pris une grande Courtilière éthérisée à mort depuis la veille. J’enlevai tous les stigmates d’un côté de l'abdomen seulement en prati- quant avec de fins ciseaux une incision circulaire au tégu- ment qui est le siége de ces ostioles pneumatiques. J’espé- rais par cette ablation ou conserver les bouches béantes du vaisseau circulatoire ou, en tranchant le corps même du tronc trachéen qui récèle ce dernier, mettre celui-ci à même de se pentes je liquide coloré. Pour objet de com- paraison, les stig côté opposé d èrent dans leur intégrité : je l'y laissai cinq heures. Voici ce que la dissec- tion m'a démontré. 1.0 Du côté où les stigmates existaient, les troncs nais: sants de ceux-ci et leurs premières branches étaient parfai- tement noirs ; mais cette couleur s’arrêtait court à l’en- droit où les trachéoles remplies encore d'air conservaient un brillant nacré. 2.0 Du côté de l’ablation des stigmates, les choses se sont passées autrement. Quelques troncs trachéens étaient inco- lores ou diaphanes, les autres au lieu d’être noirs comme dans l'expérience précédente, avaient une teinte enfumée ; mais dans les premiers comme dans les seconds, cette teinte s’arrêtait brusquement , ainsi que du côté opposé , là où les trachéoles argentées témoignaient de la présence mu de l'air. Soumettons maintenant ce double ou ce eine Hait-à un une explication rationnelle. Vous le voyez , à la mort de Lissente les troncs trachéens + (30 ) s’abouchant aux stigmates expirent l'air qu’ils contenaient et l'encre remplace celui-ci, ainsi que le prouvent la pre- mière expérience avec du bleu et la moitié de la seconde avec l'encre. Rappellons qu’en excisant le tégument stigmatifère, j'ai dû inévitablement couper le tronc trachéen primordial; mais celte excision n'a pas pu s’opérer simultanément ; j'ai dù la répéter autant de fois qu'il y avait de stigmates , par consé- quent huit fois : ce qui a siet quelques pis Le pre- miers troncs coupés se s0 u fluide nourrricier épanché dans l'abdomen et n'ont pu admettre plus tard l'encre soit à cause de la différence de densité des deux liquides, soit parce que la coupure du tronc s’est fer- mée après la réplétion de celui-ci. Je m'explique ainsi le fait des troncs incolores. Quant aux troncs enfumés , ils n’ont vraisemblablement cette teinte que par l'infiltration d’un mélange du fluide nourricier avec la solution d'encre, On comprend que dans ce cas, ce mélange est inévitable tandis que du côté des sti- gmates intacts, il est impossible. Il y a ici dans les troncs noirs comme dans les troncs en- fumés, un fait qui leur est commun et qu'il importe dans la question de la circulation de mettre en relief, c’est l'impé- nétrabilité ou l'imperméabilité des trachéoles aérifères par le liquide coloré. Ce fait quoique simple et en apparence insignifiant est loin de l'être à mes yeux. Du côté des stigmates intacts , l'encre péséirant par ces orifices extérieurs dans des canaux vides, car l'expiration en avait chassé l'air, rien de plus naturel que de voir l’in- filtration noire s'arrêter aux trachéoles distendues par l'air; c'est là de l'hydraulique toute pure. Du côté des stigmates excisés n’y a-t-il pas lieu de croire, en supposant l'existence des vaisseaux sanguins de M. Blan- ” « RASE et dé LS Gé de de ! (51) chard si facilement pénétrables suivant lui, qu'une partie au moins de l’encre aurait dû s'infiltrer dans ces vaisseaux ? Or, comme ceux-ci occupent, toujours d’après cet auteur, l'intervalle qui sépare le canal aérifère de la tunique exté- rieure , le liquide , n'ayant aucun obstacle à éprouver de la présence immédiate de l'air, aurait dù pénétrer d'autant mieux dans les fines ramifications vasculaires, qu’il était fa- vorisé par les lois de la capillarité. Qu'on veuille bien se pénétrer de ce raisonnement ! Dans l’idée de cette infiltra- tion inter-membranulaire, je prévoyais bien que la nuance devait être encore plus pâle que la teinte enfumée des troncs. J'ai donc apporté dans cette exploration, le soin le plus scrupuleux et cependant je n’ai pas trouvé la moindre différence entre le nacré des trachéoles du côté des stigma- tes intacts, et celui des trachéoles du côté des stigmates excisés. Ce fait négatif, minime en apparence, a pour- tant sa valeur physiologique. Il témoigne à mes yeux d’a- bord de la présence de l'encre dans le véritable canal aéri- fère et puis de la présence de l'air dans les divisions de ce canal d’où l'encre n’a pas pu le déloger. Il m'est arrivé plusieurs fois d’injecter soit avec le bleu, soit avec l'encre des courtilières de manière à remplir, à distendre l'abdomen et le thorax sans qu’une seule trachée, le moindre rameau aient été pénétrés par le liquide coloré. Or , les individus injectés à l'encre ont, malgré cette hy- dropisie artificielle, survécu plus d’une heure. Ce défaut de coloration des trachées tient probablement à ce que l'in- troduction de la canule dans la lacune abdominale a eu lieu sans blesser ni trachées, ni trachéoles de quelqu’ pr tance. Si pourtant les vaisseaux cireulatoires de Lr chard existaient, comment leurs bouches béantes resp dans cette injection, n’auraient-elles pas aspiré le iquide coloré dans un orthoptère si riche en belles trachées ? J'en- ( 32 tends d'ici M. Blanchard se retrancher derrière le peu de valeur des faits négatifs pour infirmer des faits positifs. Je ne saurais admettre la rigueur de cette sentence. Et de ce qu’un fait est donné comme positif, s’en suit-il qu'on ne puisse pas lui contester ce caractère ; est-il donc déclaré inébranlable et inattaquable ? Quand l'établissement de ce fait est le résultat de l’expérimentation et du rai- sonnement, ne peut-on pas le combattre par l'épreuve des mêmes moyens ? Dans le cas actuel, l'absence d'infiltration vasculaire dans des conditions favorables à son effectuation a néanmoins , quoique fait négatif sa portée physiologique ! Ce même fait négatif ne confirme-t-il pas puissamment le fait positif des infiltrations colorées partielles dont j'ai parlé plus haut et qui s'expliquent per la rupture ou le déchire- ment de trachées ou de trachéoles ? Faut-il le dire sans détour ? ces arborisations bleues ou noires, tant partielles que plus ou moins générales, ont dans mon esprit peu de signification physiologique quant à la circulation vasculaire. Ce sont des images qui peuvent halluciner des yeux prévenus, complaisants ou peu compé- tents. Elles justifient l’hémistiche du poète latin que j'ai pris pour épigraphe. Les orthodoxes de la circulation vasculaire dans les in- sectes n'ont pas, je crois, convenablement apprécié cette prodigalité de trachées, ce luxe, cette somptuosité de ca- vaux aérifères dont les divisions infinies, semblables à celles des vaisseaux sanguins des animaux supérieurs vont insinuer partout le fluide respiratoire. L'insecte est sous ce rapport un poumon universalisé. C’est là, sans contredit, le trait anatomique le plus caractéristique de ce groupe tran- sitionnel des articulés. Les partisans de la circulation ont tous, sans doute, lu le célèbre mémoire de Cuvier, mais l'ont-ils bien médité? La providence , aussi sublime que (38) conséquente dans ses œuvres, n’a étalé sur et dans tous les tissus ces resplendissantes broderies trachéennes qu'avec la mission toute vitale de faire jouir du bénéfice de l'air le li- quide nourricier partout épanché, partout infiltré. Voilà une vérité qui saute aux yeux de quiconque a l'habitude de porter le scalpel dans les entrailles des insectes ; mais je crois qu’on l’a mal interprétée. Si le génie créateur eût voulu accorder aux insectes un cœur et des vaisseaux san- guins , pourquoi ne les aurait-il pas dotés en même temps d’un organe respiratoire circonscrit destiné à l’oxygénation du sang? Comment n’aurait-il pas été conséquent à lui- même lorsqu'il a organisé les choses ainsi dans les arach- nides qui ne précèdent que d’un degré les insectes dans l'échelle zoologique ? Ces mêmes orthodoxes ont trop isolé leur sujet ; ils ont méconnu ou mal apprécié la filiation organique qui existe entre les insectes et les animaux qui les dévancent dans la série. S'ils avaient consulté la marche si savamment gra- duée des créations ; s’ils s'étaient mis sous les yeux cet ad- mirable enchaînement des faits anatomiques, ils seraient ar- rivés par le plus simple, le plus naturel des raisonnements, la plus logique des inductions à refuser aux insectes une véritable circulation. Cette opinion négative se serait fon- dée , indépendamment de l'absence d'organes circulatoires bien conditionnés, soit sur la circulation moitié vasculaire, moitié lacuneuse des mollusques établie d’abord par Cuvier, plus généralisée ensuite par M. Milne Edwards , soit sur celle des crustacés, animaux intéressants dans la question par leur position classique entre les mollusques qu'ils sui- vent et les insectes dont ils ne sont séparés que par les Arachnides. Ils auraient retrouvé dans ces crustacés, une interruption manifesté dans leur appareil vasculaire, mise en évidence par les belles recherches d’Andonin et de M. Tome XVI 3 (54) Milne Edwards. Ces faits si éminemment significatifs, les au- raient amenés à comprendre toute la portée de ce passage de Cuvier où il disait à l'occasion du liquide nourricier épanché dans l'abdomen de l’Aplisie par le fait de l’inter- ruption vasculaire : « Cette vaste communication est sans » doute un premier acheminement à celle bien plus vaste » encoré que la nature a établie dans les insectes où il n’y » à pas même de vaisseaux particuliers pour le fluide nour- » ricier ». L’Aristote de notre époque s’exprimait ainsi, en 1817 (Ann. du Mus., tom. 2, p. 13), tout juste vingt ans après le mémoire où il avait nié la circulation dans les in-- sectes et plusieurs années après la première publication de ses leçons d'anatomie comparée par MM. Duméril et Duver- noy. Treize ans plus tard, en 1830, lorsque j'eus l'honneur de soumettre à Cuvier mes recherches anatomiques sur les hémiptères, son opinion sur cette circulation n'avait pas été ébraniée par les nouveaux systèmes. Ces idées d'un si profond anatomiste, d’un si vaste cer- veau, ces paroles , ces dates ont à mes yeux une immense valeur d'actualité. Mais qu’on le sache bien, je ne suis point de ceux qui jurent in verbo magistri. Mon scalpel a formé mon opinion, mon scalpel la défend. Deux faits anatomiques aussi importants que positifs et incontestés, dominent toute la question de circulation dans les insectes : ce sont le système vasculaire trachéen ou aéri- . fère et l’épanchement dans les cavités et les insterstices du corps du fluide nourricier ou sang ou chyle , comme vous voudrez l'appeler. Les partisans de la cireulation en ont-ils tous calculé, pesé la valeur, ont-ils tous bien compris l'ori- gine et la destination de ce fluide nourricier ? C’est de ces faits que doivent découler les conséquences physiologiques, c’est là le nœud du problème que depuis Cuvier on s’efforce (35) de compliquer. Essayons donc encore une fois d'exposer en termes clairs et concis la nutrition des insectes. J'ai toujours pensé, j'ai toujours dit que par l’acte diges- tif, le fluide nourricier se formait dans cette portion du canal alimentaire, que ses hautes fonctions m'ont fait désigner, depuis plus de vingt-cinq ans, sous le nom de ventricule chylifique. Ce ventricule physiologiquement comparable à l'intestin gréle des grands animaux est séparé, comme dans ceux-ci, de l'estomac ( jabot ou gésier), par une valvule pylorique, et de l'intestin stercoral par une autre valvule analogue à l'ileo cœcale. Le chyle , à la formation duquel concourt puissamment la combinaison de la bile, s’élabore par une chimie organique ou vitale; puis il sort à travers les parvis de l'organe, non par une transsudation qui ex- prime mal un acte présidé par la vie, mais par une légitime perspiration. Cette rosée, c’est l'expression de Cuvier, ne s’exhale point par des pores mécaniques et inertes compara- bles aux trous d’un crible, mais par des ostioles animés, doués de propriétés vitales exquises , d’une sensibilité intel- ligente et électrice qui les fait s'ouvrir ou se fermer suivant les exigences de l'organisme. Telle est la véritable , la seule source de ce fluide nourricier épanché dans les cavités splanchniques. Les lois tant physiques qu'organiques concourent , ou ensemble où séparément, à la fluctuation, aux oscillations : à l'impulsion, à la progression aux courants, si l’on veut, du liquide réparateur. Ainsi, la contractilité active des vis- cères, celle surtout des parois tégumentaires doublées de nombreux muscles peaussiers, les pulsations de l'organe dorsal, le déplacement des grands canaux aérifères durant l'acte respiratoire , les changements de niveau déterminés par l'attitude du corps pendant le repos ou lors de la loco- motion , les lois de la capillarité, enfin certaines affinités où 36) attractions moléculaires mises en jeu pour l'assimilation ; toutes ces conditions, tous ces agents sont propres à déter- miner , à entretenir, à activer les mouvements généraux ou partiels du liquide nourricier. Celui-ci oxygéné, complète ment vitalisé par l'air que les brillantes arborisations tra- chéennes partout épanouies lui distillent, s’incorpore aux organes, aux tissus, suivant l'expression de Dugès. Voilà ma physiologie sur ce point. Tous les faits, tous les raisonnements exposés dans cet écrit, me ramènent ayec une sincère conviction à cette idée inscrite dans mes précédentes publications que la nature, qu'on ne surprend jamais en défaut, a pu, a voulu main- tenir l'existence des insectes sans le secours d’un appareil de vaisseaux sanguins, comme elle a voulu que dans le Puceron, la digestion s’opérât sans vaisseaux hépatiques, comme elle a décidé qu’une seule fécondation suffisait pour plusieurs générations de ce dernier insecte. Je le répète donc, l'organe appelé vaisseau dorsal est le cœur des Arachnides, déchu d’une véritable fonction circulatoire, un vestige de cœur. Est-il besoin de dire que les organes vesti- giaires se rencontrent de toutes parts dans la chaine zoolo- gique ? Leur seule nomenclature remplirait de nombreuses pages. [ls sont les représentants rudimentaires ou fragmen- taires plus ou moins infonctionnels d'organes qui , dans les # L 4 | PA : 1 + À Lu Afie P : des sexes ou même dans certaines phases d’un même orga- nisme , jouissent d’attributions physiologiques importantes. La nature semble les avoir conservés, maintenus comme des jallons dans l’immensité des successions organiques pour nous mettre sur la voie des analogies ou des transitions. Si je ne me nourris pas d’une illusion, et j'ai fait de bonne foi tous mes efforts pour l’éviter, je crois avoir ré- futé, le scalpel à la main et le microscope à l'œil, les argu- | (37) ments et les objections relatifs à la circulation vasculaire dans les insectes. Si c’est un parti pris de répéter impertur- bablement que cette circulation ne saurait être révoquée en doute et que je suis le seul à la nier, quoique j'aie fait connaître mes nombreux complices , je ne sais plus à quel- les armes recourir, à quels raisonnements me livrer. J'ai confiance dans un avenir moins préoccupé. Que l'appareil circulatoire proposé par M. Blanchard se prête à l'exercice rationnel de sa fonction, et il pourra ébranler ma foi dans mes propres observations , je cesserai d'être un mécréant, mais jusqu'alors ma conscience me dit de ne pas croire et je proteste. NOTE ADUITIONNELLE. Depuis la remise de mon manuscrit à l’imprimeur , deux publications qui contestent l'existence de la circulation pé- ritrachéenne de M. Blanchard, sont venues confirmer ma négation de ce mode de circulation. Elles ont paru dans les Comptes-rendus de l’Académie des Sciences en 1849; l’une de M. Nicolet dans un cahier d'Avril, l’autre de M. Félix Dujardin, à la fin de Mai. M. Nicolet, se bornant malheureusement aux | explore tions par transparence sur des larves plus ou moins pellu- cides, s’est exercé sur la petite larve du Cyphon pallidus. La portion cardiaque du vaisseau dorsal serait pyriforme et présenterait en arrière deux valvules concaves superposées pour le passage du sang. La portion aortique qui, dans toutes mes autopsies , occupe constamment le thorax. pren- drait dans cette larve son origine vers le sixième segment dorsal de l'abdomen. Ce serait donc là une disposition ex- ceptionnelle. Je ne la conteste point et j'en laisse toute la (‘38 ) responsabilité à son auteur. M. Nicolet refuse à ce vaisseau dorsai les chambres préconisées par M. Straus-Durkein dans le hanneton , et admises, ou plutôt subies, par d’autres ana- tomistes. Il explique la circulation ou du moins le trajet du sang dans le vaisseau dorsal par- un mécanisme de torsion qui ne me paraît pas aussi simple qu'à lui, j'avoue même que je ne le comprends guère. Cet auteur s'élève contre mon opinion, qui envisage ce vaisseau comme un organe déchu d’une véritable fonction circulatoire. Observez bien que je n’ai jamais nié les mouvements alternatifs de con- traction et de dilatation de cet organe ; c’est là un fait pa- tent à tous les yeux ; mais je n'ai point accordé à ces mou- vements la signification physiologique que lui donnent beaucoup d'auteurs et je ne saurais encore rétracter la dé- nomination de vestige de cœur , par laquelle je l’ai désigné. Il serait oiseux de justifier ici une opinion que je crois avoir suffisamment étayée dans le mémoire qui précède cette note. Suivant M. Nicolet, le sang après avoir reçu l'impulsion du vaisseau dorsal , s’épanche tout simplement dans les cavités splanchniques. Voilà tout son système de circulation. Il repousse explicitement l'appareil circulatoire péritrachéen de M. Blanchard , et son existence lui semble- rait contraire au phénomène de l’oxygénation. Quant à la question physiologique de la nutrition, il rentrerait dans les idées de Cuvier, conséquemment dans les miennes. M. Dujardin, professeur à la Faculté des Sciences de Ren- nes , scrutateur consciencieux et savant fort habile dans le maniement du microscope , a étudié avec une rare sagacité la structure intime des trachées. C'était là dans la ques- tion de la circulation inter-membranulaire de M. Blan- chard , le point anatomique fondamental à éclairer. M. Du- jardin n’admet, avec Sprengel et d’autres auteurs anté- rieurs à ce dernier, que deux tuniques dans les tubes + (3) trachéens , l’une externe, l’autre interne, mais ces tuni- ques loin d’être séparées par un espace libre, sont étroite- ment contigües et connexées. Il nie formellement l'existence d'une cavité intermembranulaire. Ainsi, voilà du premier coup , j'allais dire la théorie, mais j'écris la doctrine de M. Blanchard, si haut proclamée, complètement ruinée. Sui- vant le Professeur de Rennes, le fil spiral n’est point inter- médiaire aux tuniques; il ne consisterait qu'en des plis épaissis de la membrane interne. Swammerdam aussi pour- suivant la comparaison de ces tubes aérifères avec la tra- chée artère des grands animaux , les considérait ainsi. Sans infirmer cette structure, qui n’est point explicitement ad- mise par Réaumur , Sprengel, etc., j’observerai que la fa- cilité avec laquelle ce fil se déroule, se dévide intégrale- ment entrainant après lui des lambeaux membraneux lui fait supposer une texture serrée comme tendineuse ou cor- née , ainsi que le dit M. Dujardin , et évidemment très-élas- tique, texture qui n'existe point dans la membrane dont il ne serait pourtant que l’enroulement, le pli transversal Mais ce pli est continu dans toute la longueur du tube et incontestablement spiral, de manière à représenter dans son état normal , ainsi que je l'ai déjà dit, un élastique de bretelle. — Un fait aussi curieux qu’intéressant par les în- ductions qu’on en peut tirer et dont la découverte appar- tient exclusivement à M. Dujardin, c’est que ces fils spi- raux ou ces plis internes présentent dans diverses espèces d'insectes, si heureusement disséqués par ce savant mi- crotomiste , des poils simples ou rameux, très-analogues à ceux qui se développent sur les surfaces tégumeutaires de ces articulés. Déjà les stigmates ou orifices extérieurs de ces trachées m'ont offert, ainsi qu’à Malpighi, à Lyonet, à Sprengel , d’élégants spécimens de semblables villosités. Ainsi, je ne désespère point de voir l'opinion des ento- (40) motomistes armés du scapel et d’un microscope intelligent, mais affranchis de préventions , se rattacher en définitive à la doctrine négative de Cuvier sur la circulation vasculaire dans les insectes, doctrine’ dont j'ai depuis si longtemps embrassé la défense. Il n’est pas difficile de prévoir que par un mezzo-lermine , lamour-propre de l'opposition laissera quelque temps flotter ses idées dans les courants, sans ca- naux , du fluide nourricier ou du sang. Peut-on s’empêcher de convenir que, même avec cette concession, ce n'est là qu’un simulacre de circulation , une circulation vestigiaire , une circulation invasculaire ? Post-Scriptum. C’est pendant la correction des épreuves de mon actuelle publica- lion, que m'est arrivé le Compte-rendu de l’Académie des Sciences du 18 Juin 1849, où M. Blanchard descend encore dans l’arène de la circulation vasculaire des insectes pour croiser le fer avec le profes- seur Dujardin et moi, sans avoir l’air de tenir compte des observa- tions de M. Nicolet, insérées pourtant dans le même recueil. d'aborder mes objections nombreuses et graves contre son appareil circulatoire, loin de soumettre à un contrôle sérieux, les faits anatomiques et les inductions physiologiques qu'on lui oppose, M. Blanchard ne saurait démordre de son vaisseau inter-membra- nulaire ; il trouve plus commode de guerroyer en tirailleur [pour se retrancher, en définitive, derrière son infaillibilité. Faut-il donc lui redire que son appareil circulatoire, accepté peine À 4 moi, se refuse net à fonctionner lorsqu'on le met rationnellement dns — NE es sp dE s'émeuvent wi sig nent i e ses œuvres! Quoi, M. Blanchard dans ce dernier écrit, vient nous dire senten- tieusement que les trachées remplies d’air ne sauraient admettre le liquide injecté , etc., etc. Et qui donc s’est jamais avisé de contester une telle simplicité ? — Et comment cet auteur réussit-il à couper dans un insecte, injecté à sa façon, une trachée pleine d’air, sans que celui-ci s’en exhale? Et dans l’affaissement des parois de la trachée, comment constater que c’est dans l'intervalle des deux tuniques, ’est-à ans son vaisseau sanguin qu'est logé le liquide coloré ? Il prétend que si celui-ci se trouvait emprisonné dans le canal aéri- (A) fère , ainsi que je l’ai Er cent fois, il devrait ressortir par les sligmates. Mais , si M. Blanchard avait daigné me lire avec u d'attention, il se serait convaincu que dans mes expériences, cm incontestablement prouvé, qu'après la mort de l’insecte par un éthérisation prolongée, le liquide peut s’introduire par les sr es seulement , et qu’il peut aussi ressortir par ceux-ci. Quant aux rigoles latérales, que cet auteur dit exister à son vaisseau inter- membranulaire lors de l’affaissement des parois trachéennes, M. rainures qui séparent à la face interne des trachées les tours du fil spiral. Ce sont-là , il faut en convenir , de ces subtiles constatations où l’œil et l’esprit peuvent bien prendre le change. — Que penser de cette seeertion de M. Blanchard qui, après avoir habilement percé le r à un insecte vivant, cœur regardé comme un organe central pres er après y avoir dyetent une Pee re vient nous dire que les seuls P liqueur dans les vaisseaux sanguins ! !!... Les bornes d’une note tracée un peu à la hâte, me commandent d'arrêter ma plume et j'en appelle, pour d’autres réfutations , à mon mémoire OBSERVATIONS. — Je terminais ces lignes lorsque les professeurs Dujardin et Joly, dont j'avais provoqué, sollicité le scalpel pour me venir en assistance dans la grave et difficile question en litige, m'ont transmis quelques documents épistolaires à ce sujet. L'un et l'autre de ces nus. gr gd: Re Hitler Dement rexsinee 3 ar me bien loin l’idée qu’il pourrait y avoir de leur part ‘la moin- dre concession d'amitié, Ainsi que moi, ils ont pour la science cet amour , ce respect qui lui défendent de loffenser. Je ne reviendrai pas sur l'opinion de M. Félix Dujardin relative à la structure des trachées ; opinion qu’il maintient de nouveau dans une note insérée dans le compte-rendu de l'institut du 9 du présent mois de Juillet, à la suite de son savant mémoire sur le prétendu système nerveux des Tænia. Je me contente de faire mes réserves sur ce qui concerne le fil spiral des trachées. Est-il besoin de dire que M. Joly , de la Faculté des Sciences de Toulouse, est un savant haut placé par de nombreuses publications et qu’il offre les plus positives garanties par son habilude des re- (4) cherches anatomiques les plus subtiles ? M. Joly a étudié la com- position intime des trachées sur un grand nombre d’espèces d’in- sectes et surtout dans la larve de l’'Hydrophilus piceus où ces canaux sont énormes. Il a confirmé l’opinion généralement accréditée qu'il n’y existe que deux membranes, maïs celles-ci sont contigues et or- ganiquement adhérentes. — Il n’existe pas d'espace intermembra- nulaire.—Et quand bien même ce dernier existerait, la grosseur pro- portionnelle des globules sanguins ne leur permettrait pas d'y cir- culer.—Dans des injections Ris pratiquées sur des espèces ou vi- vantes ou mortes , il a positivement constaté dans l’intérieur des trachées, la présence du es bleu et par une pression modérée, il l'en a vu sortir. — Ce liquide s'arrête lorsque l'air inclus lui fait obstacle, — Après la sortie du liquide par la pression, la trachée de- meure ou incolore ou avec une légère teinte bleue. Dans ce dernier cas, les lois de la capillarité déterminent linsinuation, l’infiltration du liquide dans les fines rainures des tours du fil spiral. — Dans de semblables injections l’endosmose et la capillarité jouent un grand rôle. — Cet ingénieux expérimentateur a plongé une Nepe cendrée vivante dans le liquide bleu de manière à y faire immerger son tube respiratoire caudal ; il a obtenu un système trachéer injecté. —Il est aussi parvenu à ce dernier résultat dans la Sauterelle verte en déposant une gouttelette du liquide bleu sur les stigmates.—J'expli- que le succès de ces injections par l'expiration préalable de l'air contenu pe les trachées. — M. Joly a plongé dans le liquide bleu e larve vivante d’Aeshna en laissant émergée l’ouverture de la banc rare A RE an n’a trouvé paies bi rératRie- de scie en activité de service dans ces larves. — Ce professeur est parvenu à injecter complètement les trachées d’une cuisse Lip rieure de la Sauterelle verte en tenant simplement t la base de membre plongée dans la solution du prussiate Ainsi de toutes parts, vous le voyez, la réal intermembra- nulaire de M. Blanchard éprouve des répulsions , reçoit de formelles dénégations. Saint-Sever ( Landes ), 26 Juillet 1849. Léon DUFOUR, ds (45) GÉOLOGIE AGRICOLE, IT. ExPLICATION de la nécessité, plus grande aujour- d'hui qu'autrefois, d'amender les terres en géné- ral et en particulier celles du département de la Gironde (1); par M. AuG. Perit-LAriTTE , Profes - seur du Cours d'Agriculture de Bordeaux, ete. L'art d’amender les terres n’est pas une invention mo- derne. Les anciens le connaissaient, le pratiquaient sou- vent et leurs auteurs géoponiques en font mention et en exposent les règles. Toutefois il est facile de se convaincre que ni les Grecs, ni les Romains qui furent des agriculteurs habiles, ne com- prirent cet art parmi ceux auxquels les cultivateurs devaient recourir, comme moyens ordinaires d'exploitation. De nos jours encore, dans nos contrées, ce n’est que sur quelques points et à titre d'essai que nous le voyons pratiquer , et la grande majorité de nos cultivateurs, ou l'ignore complètement, ou n’en fait que très-peu de cas ; fidèle en cela aux traditions qu’elle a reçues et qui consti- tuent presque tout son savoir. Cependant l'art d’amender les terres a aujourd’hui une grande importance, une importance toute nouvelle, ainsi (1) Ce travail a été lu, par l’auteur, devant la Société Linnéenne , à La Sauve , le jour de la séance solennelle du 28 Juin 1849; il fera partie ( chapitre VII), d'un ouvrage ayant pour titre : De l'Amen dement des terres dans le département de la Gironde et les autres départements du bassin de la Garonne. 44 ) que le prouvent , et les grands développements dans les- quels entrent à son sujet les auteurs modernes, et les appli- cations très-nombreuses et souvent très-considérables qui en sont faites dans des pays plus avancés que le nôtre , dans la voie du progrès agricole. Trois raisons principales peuvent être données de cette différence sensible, entre l’agriculture ancienne et celle de nos jours. 4.0 C’est que maintenant des populations plus nombreu- ses, ayant des besoins plus grands et plus multipliés, forcent le cultivateur à attaquer des terres restées jusqu'ici, à cause de leur médiocrité, hors du domaine agricole ; 2.0 C'est que, parmi les terres dès longtemps cultivées, plusieurs , soit parce qu’elles n’ont pas été convenablement traitées , soit par tout autre motif, ont notablement perdu de la force productive qu'elles eurent autrefois ; 3.0 C’est qu’enfin les changements qu'a dù subir la Société, à la suite des temps, ont rendu impossible l'application de plusieurs moyens , de plusieurs méthodes dont fit longtemps usage l’agriculture. Entrons dans quelques explications sur ces trois points, ils en valent la peine. Toutes les fois qu’un pays s’est pourvu d'habitants qu’il n'avait pas encore eus, il est évident que ces derniers ont dû choisir, pour fixer leur séjour, les lieux les plus agréa- bles, les plus commodes, les plus sains et surtout les plus fertiles. Partout les choses se sont passées ainsi ; l'histoire et les débris que laissent après elles des populations nombreuses sont là pour le prouver. De nos jours encore nous voyons les mêmes faits se reproduire dans le Nouveau-Monde ; dans ces vastes contrées où les planteurs peuvent encore, comme Abraham et Lot, se tenir mutuellement ce langage : Si la (45) gauche te plait, j'irai à la droite : et si la droite te plait, je m'en irai à la gauche. Ainsi ce sont les bonnes terres qui ont été les premières exploitées : celles qu'ont formées les cours d’eau et qu'ils continuent à fertiliser. Puis, à mesure que les populations se sont accrues, à mesure qu'elles ont eu plus de besoins, l'exploitation agricole a gagné , s’est étendue, toujours en recherchant ce qu'il y avait de mieux parmi ce qui n'avait pas encore été exploité. Cette manière de procéder, qu’avouent également la na- ture et l’histoire, nous fait voir combien on raisonne faux quand on prétend que les terres encore incultes doivent cette circonstance au défaut de communications : routes et canaux. ; Sans doute, de tels avantages sont de nature à favoriser beaucoup l’agriculture. Mais, qu’on ne s'y trompe pas, dans le principe , la culture devança de beaucoup tout cela et en France, il n’y a pas bien longtemps encore, que des pays fertiles et très-peuplés se trouvaient presque complè- tement privés de moyens de locomovité. Ne connaît-on pas cette sentence d'Olivier de Serres : Grande rivière, grand seigneur, grand chemin. trois mauvais voisins. Si donc encore aujourd'hui il est des terres qui n'ont pas été comprises dans le domaine agricole, c’est parce que, relativement , elles sont de qualité inférieure. Si l’on sent la nécessité de les attaquer, c'est parce que les autres, par rapport à leur étendue et à leur produit, ne sont plus en harmonie avec le nombre d'hommes qu'elles doivent nourrir, ni avec les besoins de ces hommes. Des chiffres feront parfaitement comprendre cela. La population de la France était par kilomètre carré : ( 46 ) En 1700, de 39,2. En 1826, de 60,4. 1762 — 41,3 1831 — 61,7 1784 — 47,0 1836 — 63,6 1801 — 51,8. 1841 — 64,9. 1806 — 55,2. 1846 — 67,0. 18921 — 57,8. Mais quand une terre est médiocre ou mauvaise, et que néanmoins on est forcé de la cultiver, et surtout de lui imposer les mêmes produits qu'à celles qui sont de meil- leure qualité ; il est clair que le plus sûr moyen à employer, c’est de chercher à changer sa constitution, c’est de l’amé- liorer foncièrement, en un mot, c’est de l’amender. Un auteur ancien, connu par la hardiesse de ses opinions, Lucrèce, a prétendu que la terre, comme tout ce qui fait partie de notre monde, était sujette à vieillir. Voici ses paroles sur ce sujet, on en a trop souvent parlé sans les citer. _ » Ne regarde pas, à Memmius, comme une prétention hasardée d'avancer, comme je l'ai fait, que la terre et le feu soient mortels, l'air et l’eau sujets à périr, pour naître et s’accroître de nouveau. D'abord une partie de la terre brûlée par l’ardeur continuelle du soleil et foulée sans cesse aux pieds, se dissipe en tourbillons de poussière que le souffle des vents disperse dans les airs, comme des nuages légers. La pluie résout en eau une partie des glèbes et les rivages des fleuves sont sans cesse minés par le courant. Enfin, tout corps qui en nourrit un autre de sa propre sub- stance, essuie des pertes nécessaires : puis donc que la terre est à la fois la mère commune et le tombeau de tous les êtres, il faut que tour à tour elle s'épuise et se ré- pare (1 )». (1) La nature des choses , Chant V.— Traduction de Lagrange. (47) L'idée qu'émet Lucrèce a été vivement combattue par les auteurs agronomiques et notamment par l’abbé Rozier, le- quel reconnaît néanmoins que le mot amender ou changer en mieux suppose que la terre perd continuellement de ses principes , et que si l'industrie humaine ne les renouvelle pas, et n’en prépare de nouveaux , elle deviendra stérile. De son côté, l’auteur du poème de l’agriculture, que nous devons considérer comme ayant exprimé, sur ce sujet, les opinions agricoles admises durant le dernier siècle, après avoir chanté les bienfaits de la marne et autres matières analogues , ajoute : Ces remèdes puissants , réglés avec sagesse, Peuvent rendre à la terre nne longue jeunesse. Il est donc vrai que l'application des amendements à la terre emporte l’idée de vieillesse de la part de cette der- nière ; puisqu'elle a pour but de la rajeunir, de lui donner de nouveau une vigueur qui a cessé d’être son partage. Sans doute, comme le fait encore remarquer Rozier, une longue habitude de mauvaises cultures, des travaux, ou mal entendus, ou faits à contre-temps, sont bien capa- bles de nuire à une terre et de la conduire à un état d’éput- sement équivalent pour elle à la vieillesse qui atteint les ani- maux. Néanmoins il est impossible de ne pas admettre aussi qu’une longue production, une production restreinte à un très-petit nombre d’espèces de plantes, souvent même à une seule, le froment , ne soit capable d’épuiser une terre. Ge fait est d'autant plus facile à admettre aujourd’hui que la chimie, révélant les relations des plantes avec la terre, a appris que c'était de cette dernière que prove- naient les matières minérales que l'analyse signale dans les à ( 48 ) cendres des végétaux : chaux , silice, fer, etc... ainsi que nous aurons à le signaler d'une manière plus précise. Qu’ainsi elle a pu donner l'explication de la nécessité où l'on se trouve de répéter à certaines époques, comme nous le verrons également, les chaulages , les marnages, etc. Qu'ainsi elle a pu dire pourquoi des terres, naguère très-fertiles, très-productives de certaines denrées, ont vu arriver le temps où elles ne les ont plus accordées. Sans remonter aux temps anciens pour trouver des exem- ples de ce dernier fait, sans rechercher les causes de l’é- puisement des terres de la Babylonie, de la Judée, de la Grèce, etc... nous pouvons en citer un qui appartient aux temps actuels, puisqu'il s’est passé au Nouveau-Monde , à Ja Virginie. Dans cette contrée si fertile de 1750 à 1770, les anciennes plantations, trente ans après, ne rendaient plus que le tiers du tabac qu’on y avait récolté autrefois et il n’était pas possible d’en former beaucoup de nouvelles, les cultivateurs ayant été réduits à tourner leurs travaux vers d’autres objets (1). En France il serait faciie de constater de pareils faits. Ainsi, nous tenons d'hommes vieillis dans les travaux agricoles que les produits en blé et en chanvre de la riche plaine de la Garonne, entre Marmande et Tonneins, ont fléchi depuis cinquante ans dans une proportion assez sen- sible : pour le chanvre, dans la proportion de 6 à 9 : pour le blé, dans celle de 18 à 20 ou 24. Autrefois, au dire des anciens vignerons , les vignes du Médoc n'avaient pas besoin d’être fumées ; aujourd’hui ce n'est qu'à cette condition qu’on en obtient des produits sa- tisfaisants et très-sensiblement réduits. (1) 6. TT. Raynal : Mist. philosophique des deux Indes. (49 ) Enfin nous avons vu, dans un des cantons de l’arrondis- sement de La Réole, des terres que l’on n’ensemençait plus, parce qu’elles ne pouvaient donner de quoi payer leurs frais de culture. Pour ces dernières terres, il est évident que le système suivi sans interruption : blé et jachère, a beaucoup influé sur le résultat que nous signalons et qu'il y a ici ce que Rozier qualifie de longue habitude de mauvaise culture. Cependant il faut remarquer que la plus grande partie des terres à blé de l’Entre-deux-Mers sont dues aux défri- chements des vastes forêts qui couvrirent jadis presque en entier cette contrée. Que ces terres, essentiellement com- posées d'argile et de sable, ont pu d’abord se montrer fertiles , à cause des détritus végétaux accumulés sur leur surface ; mais que leur défaut de chaux leur a bientôt im- primé le caractère de faiblesse qu’elles présentent aujour- d’hui en général. Or la culture des céréales, ainsi que nous le verrons, est essentiellement destructive du principe calcaire , et, sa longue application, dans de telles circonstances, est bien de nature, sinon à faire vieillir un tel sol, au moins à le fati- guer , à l’épuiser. Nous savons quelles sont les transformations successives qu'a subies l’agriculture pour arriver au point où nous la voyons aujourd'hui. C'est-à-dire, pour une grande partie de la France, au système des assolements raisonnés, et, pour nos provinces méridionales , aux tentatives faites pour passer du système biennal à tout ce qu'il nous est ce d'emprunter à celui des assolements. Ce système biennal : blé et jachère qui nous fut ensei- gné par les Romains : Tome XVI. % Mo. Bot. tarden, 1827 ; (30) Qu’un vallon moissonné dorme un an sans culture, Son sein reconnaissant Le paye avec usure. (Vincise ). était loin d’être aussi défectueux que se plaisent à le dire aujourd’hui tant de personnes, qui ne se sont jamais donné la peine, ni de l’étudier, ni de se rendre compte des né- cessités qui le firent adopter et qui l'ont si longtemps maintenu (1). Son désavantage, c’est qu'il n’est plus en harmonie, ni avec le chiffre de la population de la France, ni avec ses besoins plus nombreux et plus variés, ni avec les progrès de la science. C’est que, par tous ces motifs, il faut tra- vailler à le modifier successivement, à le rapprocher de plus en plus de celui qui devra le remplacer. Avec le système biennal, la moitié des terres restait, chaque année, dans un repos absolu. Or, ce repos leur pro- curerait un gain : cette idée des anciens, justifiée par l’ex- périence, est aujourd'hui parfaitement expliquée par la science. Sur les simnité demeurés en guérêt , des troupeaux nom- (1) Pour le temps, en effet, où ce système fut établi, il était ex- trêmement remarquable et la jachère , le repos de la terre, consi- dérée d’une manière absolue est bien loin d’être sans valeur. Les anciens le savaient bien, car nous lisons dans Théophraste que les conséquences de la jachère étaient « de permettre à la terre de » sentir le froid de l’Hiver et le soleil de l’Été, de retourner le » sol et de le rendre franc, léger et purifié de mauvaises herbes, » de manière à ce qu’il fournisse la nourriture la plus aisée pos- » sible aux semences qu’on lui confie ». (De Caus. plant., lib. HI, ch. 25). M. Louis de Villeneuve, dans son Manuel d Agriculture , estime que, sous notre climat, la valeur de la jachère doit être portée à six charrettées de fumier. (Tom. 1 , p.84). - 1 nes (51) breux trouvaient leur nourriture , et l’on sait même que la vaine pâture avait été motivée par le désir de ne point dimi- nuer ces troupeaux, alors que des besoins plus nombreux avaient déjà forcé de réduire les communaux. Enfin , chaque exploitation s’appuyait en outre sur une étendue de prairies naturelles qui a été presque partout considérablement réduite. On comprend qu'avec un tel système il ne pouvait guère se rencontrer de mauvaises terres, et que la nécessité de les amender ne pouvait avoir la même importance qu’au- jourd'hui. Notre département nous offre la facilité de faire l'appli- cation de ces observations. Tout le monde connaît les deux vastes contrées qu’il ren- ferme et que l’on désigne : l’une , par le nomd’Entre-deux- Mers, Y'autre par celui de Landes. De part et d'autre , la base de l'exploitation était et est encore les céréales. Dans l'Entre-deux-Mers, c’est avec le fumier de mouton, le plus alcalin de tous les fumiers, que l’on parvenait à en- tretenir en état de production des terres argilo-siliceuses. Des terres qui avaient pu être fertiles lors de leur défriche- ment primitif, mais que leur nature dut bientôt ramener à l'état où nous les voyons aujourd'hui ; c’est-à-dire à l’état de terres froides, paresseuses et ne produisant que par le secours des fumiers les plus chauds et les plus actifs. Dans les landes , c’est encore par le même secours que l’on pouvait espérer d’obtenir du seigle de sables siliceux, à sous-sol imperméable et à principe acide. Quand les troupeaux n’ont plus été possibles dans l'Entre- deux-Mers , et de communs qu'ils y étaient, ils n’y forment plus aujourd’hui que de rares exceptions. Quand la culture n’a plus eu à sa disposition cette source de l’engrais qui lui (52) convenait, qui s’harmonisait avee ses terres. Quand, en ou- tre, il a fallu renoncer au repos de la jachère, forcer la pro- duction en joignant, à ce qui nourrit les hommes, ce qui nourrit les animaux : le blé aux fourrages ; alors la néces- sité de corriger les défauts du sol, d'ajouter à ses qualités s’est manifestée; alors on a senti l'opportunité des amen- dements. Partout, dans les landes , où l’on s’est borné à ne mettre en culture qu’une très-petite quantité de terre, eu égard à celle dont se composent ordinairement les propriétés dans cette contrée , eu égard même aux vastes communaux que l'on y rencontre, cette culture a été possible, lucrative même ; parce qu’on à pu réduire le sol à un état purement passif et ne réclamer de concours , pour la production, que des engrais dont on les recouvrait (4). Mais lorsqu'il s’est agi de défrichements nouveaux, opé- rés sur une échelle telle, que la source ordinaire de l’en- grais devenait insuffisante ; alors on a vu qu'il n’y avait que des pertes à essuyer et l’on a compris que la seule chose qui pourrait autoriser une telle manière de procéder, ce serait l'amélioration du sol lui-même, si c'était possible, son changement au moyen des amendements. Tel est l'exposé sommaire des causes qui se réunissent pour donner aujourd’hui aux amendements un degré d’uti- lité et d'opportunité qu’ils n'avaient pas autrefois. (1) « Dans la Lande, a dit M. de Meètivier, on sème presque sur couche ». (55) HI, De la FLore pu CENTRE, de M. Boreau; discours prononcé par M. Cnarres Des Mouuiss, Président, à la Séance de la 32% Fête Linnéenne ( 28 Juin 1849 ). Messieurs , A l'approche de la solennité qui nous rassemble, j'ai dû chercher, dans nos études communes, un sujet d’entre- tien. Je n'ai pas voulu le demander à une spécialité trop restreinte , afin d'éviter l’aridité qui sied si mal dans une fête; mais je n’ai pas voulu non plus remplir, par des pa- roles vagues et oiseuses , les quelques minutes que je viens dérober à l’objet essentiel de notre réunion. Cet objet qui nous appelle, ce nœud qui nous unit et qui relie toutes les heures d’une journée encore trop courte, c’est l’excursion, Messieurs, c’est le travail, qui sied si bien aux fêtes de l'étude. Aussi, n’ai-je pas eu de peine à atteindre le but de mes désirs. Un livre vient de paraitre auquel l'attention du monde botanique était promise par le nom de son auteur, auquel un intérêt puissant se trouvait acquis d'avance, par l'immense succès dont a joui sa première édition. Huit années d’études incessantes, ajoutées à toute une vie de labeur intelligent et consciencieux, que n’auront- elles pas amassé de précieux résultats pour en enrichir la Flore du Centre, publiée en 1840 par M. Boreau ! C'est de la nouvelle édition de cet ouyrage, livrée au public vers la fin d’Avril dernier, que je viens, Messieurs , vous dire quelques mots ; mais ce n’est point sous la forme + (54) de Rapport que je vous parlerai du livre de mon savant ami : je n'ai pas qualité pour le juger, et je n'ai reçu au- cune mission pour le soumettre à un examen méthodique. Je ne vous dirai rien de la circonscription territoriale qu’il embrasse, et qui, s'étendant cette fois jusqu’à la mer de l'Ouest, enlèverait au titre de l'ouvrage quelque chose de sa justesse, si l’auteur n’eût pris soin d’y mentionner son intention de suivre la Naïade de la Loire, jusqu'aux lieux où elle se perd dans la foule bruyante des Néréides. Je réserverai pour une autre occasion l'exposé des motifs ” qui me portent à approuver cette nouvelle et large circons- cription , bonne parce qu’elle est toute naturelle et non ad- ministrative, et aussi l’exposé des motifs qui me porte- raient mieux encore à lui préférer l’ancienne délimitation, pourvu qu'elle rentrât dans un système général de Flores partielles, que je crois être le seul vraiment utile, et qui mènerait à l’exelusion de nos étroites Flores départemen- tales. Je ne vous parlerai pas non plus du mode de description employé par l’auteur. À part quelques notes ajoutées à l’ex- position des plantes les plus litigieuses, ces descriptions concises et presque privées de synonymie, rappellent plu- tôt le plan d’un Prodrome que celui d’une véritable Flore ; et la condescendance avec laquelle l’auteur se plie à la re- grettable répulsion que fa génération actuelle éprouve pour la langue latine, me semble avoir de graves inconvénients. Une Flore est un ouvrage classique, fait pour durer tou- jours , pour être lu et compris partout : je crois qu’elle de- vrait rester étrangère à la mode, à ses caprices, à ses exigences, et surtout ne jamais fléchir le genou, lorsque l'usage, la paresse ou des intentions bien pires encore s’in- surgent contre les lettres classiques. Je m’abstiendrai également de vous présenter le détail “ (55) des éléments qui constituent le premier volume. La clef analytique des genres et des espèces, qui en remplit la très- majeure partie, est un travail effrayant d’immensité, admi- rable de précision, et qui épargnera immanquablement aux conscrits de la science un grand nombre d'erreurs. Ce vaste labeur , à mon sens, présente un danger : il rend la déter- mination trop facile peut-être. En cela , il favorise la pa- resse et jette un voile sur l’inintelligence , en la dispensant de la réflexion et de la comparaison , ces deux bases fonda- mentales de l’art d'observer. Par conséquent, il n’habitue pas assez à la critique, ce nerf de la science , et il sera cause qu’on négligera trop souvent le second volume où sont dé- posés les véritables matériaux de l’étude sérieuse. En vous offrant ainsi, Messieurs, une énumération négative des éléments qui devraient entrer daus un véritable rapport, je vous prouve surabondamment que je n’ai pas l'intention d’en faire un; mais avant d’en venir à l’objet spécial sur lequel je veux attirer votre attention, je ne puis pas me priver du plaisir de louer une fois encore le talent que le savant auteur a déployé dans toutes les parties de sa rédac- tion. Dans la préface et dans l'introduction , le bon, l'ex- cellent esprit qui le dirige, se pare de tous les charmes que la grâce du style ajoute à la justesse de la pensée et à la netteté de l'expression. Dans les vues scientifiques qui inspirent à l’auteur ses principes d'appréciation, il y a sans doute de la hardiesse et une tendance prononcée à s’engager dans une voie nouvelle ; mais cette tendance est contenue dans de justes limites par un esprit véritablement et sagement philosophique , en sorte que, marchant appuyé sur les faits et sur l'observation directe , l’auteur, s’il venait à commettre quelque erreur de détail, ne compromettrait pas pour cela la valeur réelle de la pensée génératrice qu'il a prise pour guide dans tout son labeur. (56 ) Me voici arrivé au but auquel je tendais : c’est cette pen- séé génératrice que je voulais vous faire connaitre ainsi que la manière dont-elle a été suivie dans le détail , et c’est son opportunité , Messieurs , que je voulais vous conduire. à apprécier. « Ce n'est plus, » dit M. Boreau ( préface, p. VIII, en note }, « ce n’est plus sur la considération d’une seule par- » tie, qu'une plante peut être classée et distinguée, c'est » sur l’ensemble des organes. Telle espèce que Linné ne » pouvait reconnaître spécifiquement est admise aujour- » d’'hui, parce qu'elle présente plusieurs caractères organi- » ques dont on ne pouvait alors saisir les rapports. Voilà » pourquoi le nombre des espèces reconnues s’augmente et » s’augmentera toujours... » Et plus loin (p. XI) : « Si » j'ai supprimé quelques espèces .… j'en ai ajouté un grand » nombre d’autres, dont plusieurs ne sont pas généralement » admises par les botanistes. Je ne me suis décidé à les » distinguer qu'après les avoir longtemps étudiées, et avoir » acquis la certitude qu’elles constituent des êtres distinets. » J'ai mentionné, dans de courtes observations, les princi- » paux caractères de celles pour lesquelles je n’ai pu avoir » la même certitude ; je ne doute pas cependant que, plus » tard, elles ne viennent prendre rang parmi les espèces » légitimes. Enfin, j'ai conservé un assez grand nombre de « formes, sous la rubrique de variétés, ne possédant au- » cune donnée qui me permit de me prononcer sur leur » identité ». Voilà la clef, Messieurs, la clef toute entière de ce qu’il y a de vraiment nouveau dans l'ouvrage du célèbre botaniste angevin. Il compte, dans le rayon de sa Flore, 2332 pha- nérogames , dont 250 environ sont comprises dans l’allusion que vous venez d'entendre. 250 espèces de valeur litigieuse dans une Flore qui n’embrasse pas le quart de la France ! chimiste biens ns debit tenons à (:57 ) Au premier abord, cela paraît prodigieux ; mais en y regar- dant de plus près, on aperçoit un certain nombre d'espèces entièrement nouvelles, décrites depuis peu soit en France soit à l'étranger , et dont la légitimité n’a pas été, ne peut pas être contestée. On voit, ên second lieu , que le nombre de celles aux- quelles M. Boreau attache son nom est excessivement res- treint, ce qui démontre qu'il n’est pas poussé à admettre des distinctions spécifiques par la passion immodérée du pro- nom possessif : rarement on rencontre des novateurs aussi désintéressés , et c’est déjà une prévention bien favorable. En troisième lieu, qui ne sait qu’il est des genres, tels que Callitriche, Poterium et Chara, des sections de genre, telles que les Renoncules batraciennes , dans lesquels on entassait jadis, sous un ou deux noms spécifiques, sans examen, sans analyse, des formes presqu'innombrables, et qui, soumis aux consciencieuses investigations d’un Kutzing, d'un Ed. Spach, d'un Alexandre Braun, d’un Godron, ont offert des caractères aussi nets , aussi tranchés, aussi faciles à exprimer que les diagnoses les plus incontes- tées des espèces linnéennes ? Quatrièmement , il ne faut pas perdre de vue qu'il est deux genres hors ligne sous tous les rapports, Rubus et Rosa, au sujet desquels je ne crains pas de dire que tout accord définitif est impossible , parce qu'ils ne présentent pas de caractères précis dans la forme de leurs organes, et que leur spécification dépendant uniquement de la combi- naison de caractères de mince importance avec les phéno- mènes de la végétation, on ne pourra jamais amener tout le monde à se mettre au même point de vue pour les juger. Weihe et Nees d’Esenbeck ont pris deux espèces linnéen- nes du premier de ces genres, et les ont hachées, pour l'Allemagne seulement, en une cinquantaine de morceaux à chacun desquels ils ont délivré un brevet d'autonomie. Tous les botanistes qui, depuis lors, se sont occupés des Ronces , ont pris parti entre les deux extrêmes ; chacun, se plaçant à son point de vue, a pris ou laissé plus ou moins, à son gré, dans ce monceau d'espèces proposées. De magni- fiques travaux ont été publiés à ce sujet par M. Babington, en Angleterre, par M. Godron en France; et il en est ré- sulté cette opinion maintenant générale, que deux espèces sont trop peu, mais que cinquante sont beaucoup trop. Là s'arrête l'accord, et je le répète, il doit s'arrêter là : nul n’a le droit de poser des bornes que son voisin doive res- pecter, parce qu'il n’y a, dans ce genre, aucun caractère d’une valeur consacrée par l’assentiment universel. M. Boreau admet vingt espèces dans sa Flore , et sur ces vingt espèces 1l en prend une seule à son compte. J'en pourrais dire autant, sous tous les rapports, du genre Rosa, si ce n’est que quatre ou cinq botanistes au plus se sont occupés à fond des Ronces , tandis que tous les auteurs en renom ont apporté leur contingent numéri- que au catalogue des Roses. Dans ce tribut consacré au culte de la reine des fleurs, les Angevins et leurs voisins se sont toujours fait remarquer par la multiplicité de leurs offrandes. Sur les 43 espèces de Roses spontanées que M. Boreau admet dans sa Flore, Bastard en fournit quatre, Des Vaux trois : cinq autres auteurs de l’Anjou, du Maine et de Paris en fournissent sept : ici encore, M. Boreau ne s’est permis d'en ajouter qu'une seule, Vous le voyez, Messieurs, en mettant de côté ces deux genres pour lesquels je proclame le fait d’une liberté illimi- tée , en d’autres termes d’une anarchie inévitable, — en fai- sant également abstraction des trois genres et de la section de genre que j'ai signalés comme ayant été complètement débrouillés à l’aide de caractères carpiques inconhus jus- ( 59 qu'alors, — en soustrayant enfin du total les espèces qu’on pourrait nommer illustres, tant leur nouveauté absolue saute aux yeux les plus inexpérimentés , telles que l’Amman- nia Boræi, le Carex, Mairi , Y Orobanche Ulicis, Odon- tiles Jaubertiana, Y Epilobium Lamyi, V'Arenaria contro- versa, le Barbarea intermedia, etc., nous formons déjà un groupe de cent espèces au moins , sur lesquelles la critique la plus avare de sympathie en faveur des nouveaux noms, n'a aucun compte à demander à M. Boreau. Restent 150 espèces environ , dont un bien petit nombre ressort uniquement des travaux de cet investigateur éclairé ; quant aux autres, à force de recherches et d’études, il en a fidèlement rapporté l'honneur aux auteurs qui les ont, les premiers , distinguées et nettement décrites. Remarquez, Messieurs, que ces 150 espèces se trouvent réparties dans 650 genres, ce qui, statistiquement parlant , n’introduit qu'une espèce nouvelle dans 4 ‘/, genres, Remarquez aussi qu’en appliquant la même méthode aux espèces, on trouve que les 150 nouvelles ajoutées à 2200 anciennes, n’offrent qu'une augmentation d’un peu plus d’un quinzième ( 1 es- pèce nouvelle pour 14 */, ). Remarquez enfin , que cet accroissement s'applique à tout le bassin d’un grand fleuve, aux stations et aux natures de terrain les plus variées, à une Flore, en un mot, dont la circonscription s'étend sur le tout ou bien partie de vingt-neuf départements de notre riche France. De toutes ces considérations, vous conclurez, à priori, qu’au point de vue rationnel, il n’y a rien que de modéré dans les appréciations du savant directeur du jardin d'An- gers. Puis vous me permettrez de vous exprimer mon avis sur l'examen à posteriori qui, en définitive, doit être le véritable élément d’une opinion consciencieuse. Les espèces adoptées par M. Boreau sont dues en ma- ( 60 jeure partie au célèbre botaniste Villars, puis à M. Des Vaux, à divers auteurs allemands, enfin à Reichenbach et, pour certains genres , à M. Jordan, de Lyon. Ces deux derniers botanistes sont de grands travailleurs , mais les es- pèces qui leur sont propres ne jouissent en général et avant tout examen, que d’une confiance extrêmement limitée. Les maîtres de la science ont eu trop souvent à casser leurs arrêts pour que cette prévention défavorable n'ait pas dû prendre racine dans l'esprit du plus grand nombre des bo- tanistes. Mais est-ce à dire qu’ils n’aient proposé que de mauvaises espèces ? Assurément non; et la haute intelligen- , la critique consciencieuse et délicate dont tous les tra- vaux de M. Boreau fournissent la preuve, sont de sûrs ga- rants de la sévérité éclairée qu'il a prise pour guide dans ses adoptions. Sans doute, en une matière où il ne peut exister de lois obligatoires , on doit prévoir que quelques-unes des auto- nomies proclamées par notre auteur seront contestées par d’autres. Moi-même , dans le nouveau travail que je viens de publier sur la végétation périgourdine , j'ai été conduit par des motifs qui m'ont paru graves, à élever des doutes sur la validité du Stellaria neglecta Weïhe, à répondre . négativement sur la distinction des Anthyllis vulneraria L., et Dilleni Schultes, à refuser enfin positivement d’éle- ver au rang d'espèce ma variété rupicola du Galium palustre, à laquelle j'ai vu, ver pi — — a cru pouvoir l’accorder. Mais} iale sur cette considération sréoiléante dans l'examen qui nous oceupe, à savoir que la vulgarisation des caractères carpiques, dans l'étude approfondie desquels on ne marche à grands pas que depuis quelques années, devait nécessairement avoir pour résultat d'augmenter considérablement le nombre des es- pèces vraiment légitimes, fondées sur des caractères sou- ( 61 ) vent difficiles à observer, mais d’une valeur et d’une cons- tance irréfragables. C’est ce qui est arrivé, et M. Boreau est, en France, l’un des premiers Floristes qui aient eu l’occa- sion d'appliquer , sur une grande échelle, les conséquences qui ont dû le jour à ce grand principe. On ne doit donc pas s'étonner de ce que cette occasion a été saisie par un homme d'un talent si élevé, ni regarder comme surpre- nants , quant à leur nombre, les résultats qu’elle a mis en lumière. Mais, dira-t-on, tous les caractères employés comme spécifiques par M. Boreau ne sont pas tirés des graines et des fruits : ils sont donc de moindre valeur et doivent ins- pirer moins de confiance. — Je réponds que non, parce que les caractères ne sont pas soumis , dans toutes les fa- milles, à une hiérarchie uniforme : l’ordre de leur subor- dination et le degré de leur valeur intrinsèque , varient dans les diverses familles et quelquefois dans les divers genres d’une même famille. Ainsi les graines, qui, en général, ont une importance de premier rang dans la majeure partie des phanérogames , les graines qu’on est récemment parvenu à utiliser comme ‘caractère spécifique jusques dans les Épi- lobes où elles sont si menues , n’offrent rien qui vaille en ce genre dans les Orchidées et les Orobanches. Les poils ne signifient rien chez les Renonculacées et les Caryophyllées, non plus que la viscidité chez ces dernières; ils ont une haute importance chez les Onagraires, et plusieurs bota- nistes leur en attribuent beaucoup chez les Rosacées. Les feuilles n’ont pas de caractères certains chez les Chicoracées et les Artocarpées; elles en ont d’incontestables chez les Euphorbiacées, les Labiées, les Légumineuses, etc., etc. Toutes ces considérations touchent à l'immense question de la délimitation de l'espèce, question qui, à mon sens, reste réservée si on l’examine au point de vue général, et (62) doit le demeurer Loujours , car je ne pense pas qu’on arrrive à lui donner des solutions plus larges que les limites des familles. Quant à l'importance intrinsèque des caractères, je crois avoir été rigoureusement dans le vrai, lorsque j'ai écrit qu’elle peut être compensée par la constance de carac- tères moins forts en eux-mêmes : Vilitas non obsistat, ubi constantia aderit. Enfin, Messieurs, ce plaidoyer en faveur des principes de philosophie botanique émis et prêchés d'exemple dans un ouvrage qui porte un cachet vraiment magistral, va se terminer par une preuve expérimentale , et si j'osais le dire, empirique. Pendant mes derniers travaux botaniques, j'avais sous les yeux les Notes de M. Boreau sur quelques espèces de plantes françaises. J'y trouvais, divisées en six espèces dis- tinctes , deux espèces linnéennes du genre Malva ( alcea et moschata ). Je ne possédais aucune de ces plantes provenant des localités citées par l’auteur ; et cependant, avec la plus grande facilité, avec la plus évidente certitude , je suis arri- vé à reconnaître ce que j'avais et ce qui manquait à mon herbier. L'aurais-je pu , s’il n’y avait pas quelque chose de vrai partout, d’uniformément constant, de clairement carac- térisé , dans la délimitation assignée par M. Boreau à ces six espèces si voisines ? Non sans doute, et j'ai trouvé fins cette expérience , comme vous trouverez vous-mêmes dans son simple récit, un motif entre mille pour accorder une nouvelle confiance à la rectitude de vues comme au talent d'observation et de description dont a été doué l’érudit et honorable auteur de da Flore du Centre. (65 ) IV. Feuilles du NYMPHÆA et du SCIRPUS LACUSTRIS. Nous avons trop souvent, en France, le tort de faire dater la botanique de l'ère Linnéenne , et de ne pas recher- cher, dans les ouvrages de nos anciens , s’ils n'auraient pas fait déjà les observations dont nous sommes tentés de nous attribuer la priorité. Les feuilles extérieures du Nuphar lu- tea et les feuilles flottantes du Scirpus lacustris m'ont sem- : blé des nouveautés, et plusieurs de mes contemporains les ont accueillies comme telles. Mon savant ami, M. Boreau, directeur du Jardin des Plantes d'Angers, vient de m'’adres- ser ( Octobre 1849), une note que je m’empresse de trans- crire en lui rendant grâces pour cette nouvelle preuve de sa consciencieuse érudition et de son obligeante amitié, qui me montre la vanité de mes défuntes prétentions à l’hon- peur d’une découverte. Je ne possède pas ces rares et pré- cieux ouvrages de nos anciens , qu’il faudrait feuilleter sans cesse. CHarLes Des Mouuins. « Gaspard Baux, dans son Pinaæ ( in-4., Basle, 1671), p. 193, après avoir énuméré les synonymes du Nymphæa alba, ajoute : « Nympheæ folia D. Sigfridus » Helmstadio ad me misit, quæ latissima, tenuissima, pal- » lidè virentia : an talia sint prima Nympheæ folia et quæ » sub aquà latitant, quæ dein extra aquam duriora et cras- » siora reddantur , ut cum maritimis fit, considerandum ». » Ainsi, bien qu’il ne connût ni la cuticule, ni les sto- mates, Bauhin n’en avait pas moins deviné le phénomène , observé récemment par M. Des Moulins. (64) » d. ScnEUCuZzER , dans son Agroslographia | in-4, Zurich, 1719 }, décrit, p. 354 à 556, le Scirpus lacustris, qu’il nomme Scirpus paniculatus. Après avoir donné tous les détails relatifs à la racine et aux chaumes ( calami) , ajoute : « Hi ad basin vestiuntur tunicis aliquot pleraque » sui parte quasi membranaceis, hinc indè fluctuantibus et » 0b marcorem fuscis, pedalibus sesquipedalibus, im et » ferè bipedalibus frequenter in recenti plantä et ad basin, » ex fusco rubentibus aut purpurascentibus..…... Juxtà ca- » lamos autem seu scirpos communiter etiam surgunt qui- » dam foliorum fasciculi, quæ folia cubitalia sunt et bicu- » bitalia, angus!a , lineam unam cum dimidiä aut duas » lata, sensim in mucronem atlenuala , valdè flexilia, LEvI- » QUE AQUARUM MOTU HUC ILLUC FLUCTUANTIA , ad basin vagi- » nis suis tenuibus, pleraque sui parte membranaceis , dia- » phanis, ad uncias circiter duas tresque se mutuù ample- » xantia, dilutè viridia, veluti spongiosa , et prout ipsa me- » dula per canaliculos suos cellulis frequentibus distincta. » Calamorum tandem attenuatorum summitati insidet pani- N OUR. ME (65) V. FAUNE entomologique, où Histoire naturelle des Insectes qui se trouvent dans le département de la Gironde ; par MM. J. L. LAPorTE aîné et Ernest LAPorTE fils. ( Suite ). NEUVIÈME FAMILLE. LES SERRICORNES. Analyse des Genres. Sternum s’avançant en pointe jusque sous la He et ayant deux rainures pour loger les a OR NS Re 2 ge non à ne en pointe, sans rainure, pour loger Lé AOORR Evo 3 Point de cavité à la poitrine pour recevoir la pointe du sternum; mandibules entières à l'extrémité. Première tribu. Les BuPRESTIDES. . . . . . .. eos 2\ Une cavité à kr poitrine sea recevoir la pointe u sternum ; mandibules échancrées ou fen- dues en ail dents à | Aer tribu. Les ELATÉRIDES. ..: : , . ., 10 PRES CE dy n { rit FA - 31 Dito échancrées ou fendues à l'extrémité. 5 . Palpes de la même grosseur ou plus grêles à | leur extrémité; corps arrondi et bombé, ou 4 Jrapes maxillaires au moins ns __ à leur extrémité ; corps droit et déprimé rième LARRURIDEE 5. : 5. 15 Tête plus ou moins enfoncée dans le corselet. . 6 Tête corselet par un étranglement 5( ou un cou; mandibules courtes et épaisses: corps linéaire. Septième tribu. Les Limr-Bois. , . . . . . . . . » Tome XVI. 5 (66) ao ovale ; corselet presque carré , plat ou lé- ! convexe en dessus; corps souvent «A 0 ç { Cinquième tribu. Les MÉLYRDES. 19 Tête arrondie; corselet très-cintré, en ferme de capuchon; corps ovoïde ou cylindrique, arrondi ou convexe en dessus | Sixième tribu. Les PrTiNIORES. . .. . . . . . . . 22 Première Tribu.— Les BUPRESTIDES. AntehDes On MAS... ...,. g. APHANISTIQUE. Antennes en scie, ou en peigne, ou branchues dté 6 -Q 89 0 #6 406 + + s se 8 ticle presque te" je SR S ed dau g. Burresre. pre terminées par un Ans Er plus gros, presque: globuleux: &::. 75 5:20 2 Mâchoires entières; articles des tarses entiers; 9 Corps Cylndrique. + "5 res à à à » à de + Mérasis. 8. Mâchoires à deux lobes; MES article des tarses bifide ; corps ovale. . . . . . . .. +. &. CÉROPHYTE. Deuxième Tribu.— Les ELATÉRIDES. 10 } Un seul genre, célul Qu, . . : . 5... .. g. Taurix. Troisième Tribu. — Les CésrioNtTes. { Tête saillante hors du corselet. . . . . . ... 12 | Tête enfoncée jusqu'aux yeux dans le corselet. . : 13 sant ennes en massue ou filiformes ; pas de 12. lotes aux articles intermédiaires des ai g. CÉBRION. Mandibules entièrement découvertes... . . .… . g Dascire. Mandibules cachées en grande partie sous. le 11 F0 RE 5... +... 14 Pieds postérieurs non propres à soient ah % Erove. 14 | Pieds postérieurs propres à sauter. . Sorr Quatrième Tribu.— Les LAMPYRIDES. ! Antennes rapprochées à leur base. . . . . . .. 16 5 Antennes écartées à leur base . . ....... 18 16! Tête étroite, prolongée en museau | Tête non prolongée en museau. . . . . . ... DER 19 67) Tête en grande partie découverte; dernier ar- .°e 3.e articles des antennes très-courts. . . . . g. Omauise. 17 | Tête cachée par le corselet, 2 article des Palpes maxillaires, finissant e selet en demi € ointe , ercle ou en rte bmethceel) g. LamPyre. PA go terminés par un article en forme de che. Fred . g. TéLépnore, M Palpes tétrminés ser: un Riot ovoïde DATE 24 g. MALTHINE. Cinquième Tribu.— Les Mécvribes. Palpes filiformes ; une espèce de petit museau. 20 Palpes maxillaires en massue, tête brusque- ment L Frans en avan FC MRC g. DriLe. ou à peine aussi pa que le suivant ; anten- nes seulement un peu plus longues que la Premi me: des tarses plus long que le rt de la rs de la tête NS Er Me; assez écartées; pas de véiales: rou- ges au corselet ni au ventr 21 ( Antennes peu écartées, deux vésicules ss 263 sous les angles Er du corselet È | A deux à la base du ven Sirième Tribu.— Les Printones. a Maracure. aussi longues we le corps ; corselet plus étroit que l'abdomen, . . . . . ntennes nes plus courtes que le corp corselet aussi large à sa base que l’abdom LL. | lants 0 ou u convexes ; £orps oblong. . > ++ s KL PTE, pe très-petits et aplatis', men presque globu ; nt cd Court à x sr... , 8 Gisnie, Antennes en scie depuis le troisième article, quelquefois ponctuées dans les mâles . . . . g. Priuix. s du sep- “ia ntennes jamais en LAS scie au-dessou tième article. . 5... 25 Races + 68 Antennes de neuf articles terminées par trois plus smash dont les deux avant-derniers en dents du scie. :.......iisiurs 202.44 + &g. DorRCATOME. 25 \ Antennes de onze p'rtiéhés, terminées er trois | plus’grands, dont les deux avant-derniers en cône-renversé et allongé ...:.:: :: 3412" ge VRILLETTE. Septième Tribu.— Les LIME-BoIs. pra pp: “4: très-grands ss ie 2 27 26 BOB Ru NT Se g. Hycécorre. | antennes a un pen pins grèles : au haut, ou légè- en 27 } g or- Se us do ses.essses se... 8. LIMEXYLON. Caract. Quatre palpes : antennes filiformes ou sétacées, mais ordinairement dentées en scie, en peigne ou en pana- che. Élytres couvrant l'abdomen. Première’ Tribu.— Les BuPRESTIDES. Sternum s’avançant jusque sous la bouche , se terminant postérieurement en une pointe , et ayant deux rainures pour loger les äntennes ; point de cavité à la poitrine pour rece- voir le sternum ; mandibules entières à l'extrémité. Ces in- sectes se reconnaissent aisément à leur corps ferme , ovale ou elliptique , droit ; à leur tête engagée verticalement dans le corselet jusqu'aux yeux; antennes courtes, logées dans les rainures du corselet pendant le repos; dernier article des palpes cylindrique , ou ovoïde , ou globuleux. Ler Genre.— LES BUPRESTES, BUPRESTIS. Palpes filiformes ou légèrement plus gros vers leur extré- mité, terminés par un article presque cylindrique ; anten- nes en scie ; avant-dernier article des tarses profondément échancré ; extrémité des élytres souvent dentée ; mâchoires divisées en deux pièces , à l'extrémité. . Les Buprestes marchent lentement, mais ils volent très- bien et plus particulièrement la nuit. On les trouve endor- (9) mis durant la journée, sur les arbres, arbrisseaux, etc., d'où ils tombent facilement à la plus légère secousse. + A. Pas D'ÉCUSSON. Corps conique ;”bord postérieur du corselet droit. 1. BupresrE 18 PoINTs, Buprestis 18 punctata. Herbest. Noir bronzé ; strié, ponctué, couvert d’un léger du- vet; huit taches jaunes sur chaque élytre, une à l'an- gle postérieur du corselet. Long. 13 millim. — Environs de La Teste , sur les bar- rières de pins, rare. Trouvé par M. Souverbie. 2. BUPRESTE BANDÉ , B. tœniata. Latr. Noir ; couvert d’un duvet blanchâtre; élytres striées, ponctuées , avec trois bandes transversales jaunes ; les deux antérieures réduites le plus souvent à un point et manquant même quelquefois. Long. de 8 à 11 millim. — Environs de La Teste, sur _les ombellifères. 3. BUPRESTE BIPONCTUÉ, B. bipunctata. Latr. Noir ; pubescent ; élytres noires, en scie à l’extré- mité, avec un point jaune sur chacune. Long. 3 millim.— Sur les ombellifères. B. Ux écussox. Côtés du corselet arrondis et dilatés ; corps conique plus ou moins CONnVexe. 4. BUPRESTE TÉNÉBRION , B. tenebrionis. Latr. Noir ; corselet marqué de taches variolées très-noi- res ; élytres entières, très-dures, couvertes de petits points enfoncés. Long. 21 millim.— Sur l’aubépine. (70 ) 5. BUPRESTE TÉNÉBREUX, B. tenebricosa. Latr. Plus déprimé que le précédent; d’un noir bronzé; élytres entières, avec des stries de points enfoncés ; des points enfoncés et dorés sous le corps. Long. 20 millim. — Sur le poirier sauvage. Corps ové-oblong, un peu tronqué antérieurement , ordinaire- ment pointu postérieurement. _ 6. BUPRESTE BRONZÉ, B. œnea. Latr. Raboteux ; bronzé en dessus, cuivreux en dessous ; éltres striées, bidentées à l'extrémité; tête et corselet chagrinés.— Long. 20 millim.— Il est désigné partout : ailleurs comme fort rare. Nous le trouvons communément sur les peupliers- trembles, au bas des côteaux de Cenon. On le fait tomber en assez grand nombre en frappant avec le pied la tige de ces arbres. 7. BUPRESTE ÉCLATANT, B. rutilans. Latr. D'un vert bleuâtre très-brillant ; élytres striées, en scie à l'extrémité, d’un beau vert métallique, à disque parsemé de points violets, et bord doré. Long. 19 millim.—Sur les arbres fruitiers et sur r orme. 8. BUPRESTE AGRÉABLE , B. festiva, Linn. Buprestis 10 punctatus. Fab. Vert brillant, ponctué, strié; cinq sr noires sur chaque élytre et deux sur le corselet, Long. 11 millim. — Entre-deux-Mers, sur le Genièvre. 9. BUPRESTE DÉCASTIGMATE, B. decastigmata. Latr. Déprimé ; noirâtre ; élytres entières , avec des stries élevées et dix points d’un jaune clair. Long. 19 millim. — Sur les chênes. (A) 10. BUPRESTE HUIT TACHES, B. octoguttata. Lair. Bronzé ; tête pointillée, noirâtre, marquée de quel- ques points jaunes antérieurement ; élytres d’un noir bleuâtre, ayant huit taches jaunes, striées, quadri- dentées à l'extrémité ; corselet noirâtre , à bords laté- raux et antérieurs jaunes. Long. 18 millim. — Sur les arbres fruitiers et sur les pins. 11. BUPRESTE DE BERLIN, B. berolinensis. Latr. Obscur, bronzé en dessus, brillant en dessous ; ély- tres striées, raboteuses, un peu acuminées ét biden- tées à l'extrémité ; trois dentelures à l'anus. Long. 17 millim. — Sur les arbres fruitiers en fleurs. 12. BUPRESTE MACULÉ, B. flavo-maculata. Latr. Elytres d’un bleu noirâtre, terminées par trois den- telures ; tête et corselet pointillés. Long. 16 millim. — Sur les haies. Corps ellipsoïdal et déprimé, un peu aplati en dessus. 13. BUPRESTE MARIANE, B. mariana. Latr. Raboteux, d’un cuivreux brillant en dessus, d’un rouge cuivreux en dessous; plusieurs enfoncements inégaux sur les élytres, qui sont en scie à l'extrémité. Long. 31 millim. — Sur les troncs des vieux pins. 14. BUPRESTE CHRYSOSTIGMA, B. chrysostigma. Latr. Bronzé ; élytres avec trois lignes longitudinales éle- vées, deux points enfoncés dorés, dentées en scie à l'extrémité. —Long. 44 millim. Dans les bois de chêne. 15. BUPRESTE voisin, B. affinis, Fab. Cuivreux , à reflet bronzétou verdâtre ; élytres den- (72) tées en scie à l’extrémité. Quatre lignes longitudinales élevées sur chaque élytre avec le commencement d’une “cinquième sur l’écusson. Trois taches dorées sur cha- que élytre, la première humérale entre la première et la deuxième stries entières ; la deuxième, petite, sur la deuxième strie ; la troisième plus grande sur la troisième. Long. 12 à 45 millim. — Sur le chêne. 16. BuPRESTE sOLIER, B. solieri. Laporte et Gory. Plus allongé que le précédent. Cuivreux, à reflet légèrement pourpre. Même nombre de stries, de côtes, de taches et mêmes situations. La seconde tache s’é - tendant de la première côte à la troisième. La troi- sième placée sur la deuxième et troisième côte et attei- gnant parfois la quatrieme. Long. 10 à 15 millim. -- Dans les pins. Il est très-com- mun à La Teste. 17. BUPRESTE RUBIS, B. manca, Latr. Déprimé ; d’un rouge cuivreux; corselet avec deux lignes longitudinales obscures; élytres de la même couleur que les lignes du corselet, entières à l’extré- mité. : Long. 11 millim. — Sur les buissons. 18. BuPRESTE DU sAULE, B. salicis. Latr. D'un vert brillant ; élytres d’un beau rouge cuivreux, vertes à leur base, entières à l'extrémité. Long. 10 millim. — Sur les saules. 19. BUPRESTE DE LA CHICORÉE, B. cichorü. Latr. Il ressemble au précédent ; tête, corselet et corps (75) d'un vert bronzé; élytres chagrinées, entières, cui- vreuses. — Long. 10 millim.— Sur les chicoracées. 20. BUPRESTE DES OMBELLIFÈRES, B. umbellatarum. Lare. D'un noir bronzé; élytres un peu chagrinées , entiè- res ; corselet n'ayant pas de points enfoncés Long. 10 millim.—Sur les ombellifères et les chicoracées. 21. BUPRESTE NIGRITULE, B. nigritula. Anthaxia nigritula. Ertcusox. Semblable au précédent, mais beaucoup plus petit et se trouvant près de deux mois avant que cette pre- mière espèce paraisse. Long. 6 millim.— Sur le pissenlit et les fraisiers en fleurs. Signalé par M. Souverbie. 22. BUPRESTE NITIDULE, B. nitidula. Latr. D'un vert doré, sans taches ; élytres vertes entiè- res, légèrement chagrinées. Long. 3 millim. — Sur les chicoracées. Corps allongé et cylindrique. 93. BUPRESTE ONDÉ, B. undata. Latr. Bleu métallique en dessous; tête et corselet d’un bronzé verdâtre en dessus, ainsi que la partie anté- rieure de ses élytres ; celles-ci ayant chacune trois ban- des ondées, transverses et d'un gris cendré, et leur extrémité d'un bronzé noirâtre. Long. 22 millim. — Dans les haies d’aubépine. 94. BUPRESTE DE LA RONCE, B. rubi. Latr. Noir; cylindrique ; élytres d’un noir bronzé, ayant quatre bandes transversales ondées et grisâtres. Long. 18 millim. — Sur les feuilles de ronce. (4) 25. BUPRESTE NEUF TACHES, B. novem-maculata. Latr. D'un noir bleuâtre luisant ; quelquefois des petites taches jaunes sur la tête et le corselet : celui-ci bossu, ayant un enfoncement longitudinal dans le milieu ; ély- tres déntées à l'extrémité, ayant chacune trois ou qua- tre taches jaunes. Long. 19 millim. — Sur le prunelier. 21. BUPRESTE BLEU, B. cyanea. Latr. Tête d’un vert bleuâtre , ainsi que le corselet ; ély- tres d’un bleu métallique, sans taches. Long. 9 millim.— Sur les lilas et sur les pins. 22. BUPRESTE VERT, B. viridis. Latr. Bronzé ; corselet chagriné, sinué postérieurement ; élytres un peu chagrinées , en scie à leur extrémité. Long. 9 millim.— Sur différentes fleurs. 28. Buprestis deraso-fasciatus. Tiégler. Semblable au viridis, mais plus petit, avec une bande fugace obscure. Long. de 5 à 7 milllim. — Sur les graminées. 29. BuprestE ATRE, B. atra. Oliv. Buprestis linearis. Schrank. Corps d’un noir un peu bronzé, corselet et élytres légèrement chagrinés. Long. 7 millim. — Sur les graminées. 30. BUPRESTE DES GRAMINÉES, B. graminis. Latr. D'un vert bronzé , opaque en dessous , très brillant en dessus ; élytres entières, corselet d’un vert obscur. Long. 6 millim.— Sur les graminées. (75) 31. BUPRESTE SINUÉ, B. sinuata. Latr. Tête, corselet, et dessous du corps bronzé ; élytres d'un rouge violet obscur , entières à l'extrémité. Long. 6 millim.— Sur les arbres fruitiers. Corps raccourci, triangulaire. 32. BUPRESTE MINUTE, B. minuta. Latr. Elytres entières, noirâtres , ayant des bandes trans- versales et ondées d’un blanc grisâtre. Long. 2 millim.— Sur les ombellifères et les renoncula- cées. 33. BUPRESTE PYGMÉE, B. pygmæa. Latr. Bronzé ; tête et corselet d’un cuivreux brillant ; ély- tres bleues , pointillées , entières. Long. 2 millim.— Sur les malvacées. 34. BUPRESTE MANNERHEIM, B. Mannerheimii. Buprestis œnea. Manner. Bronzé; luisant ; élytres plus légèrement pointillées que dans le pygmæa. Long. 2 millim. — Sur l’herbe aux chats. IL. Genre. — LES APHANISTIQUES, APHANISTICUS. Ils offrent les mêmes caractères que les Buprestes, mais leurs antennes sont terminées en massue , et leur forme est plus ou moins linéaire; du reste, leurs mœurs sont les mêmes. 1. APHANISTIQUE PUSILLE , Aphanisticus pusillus. Boit. Buprestis pusilla. Latr. Bronzé ; élytres d’un noir bronzé, __—s en- tières ; front sillonné. Long. 5 millim.—Sur- les ambélilères . à Salles. (76) 2. APHANISTIQUE ÉMARGINÉ, À. emarginatus. Boit. Buprestis emarginatus. Latr. Linéaire ; d'un vert bronzé ; tête sillonnée, presque échancrée ; élytres de la couleur du corps, entières Long. 5 millim.— Sur les joncs. Il se prend en grande quantité en fauchant sur cette plante. IL.we Genre.— LES MÉLASIS, MELASIS. Palpes terminés par un article beaucoup plus gros que le précédent , presque globuleux , antennes pectinées dans les mâles, en scie dans les femelles ; mâchoires entières, non divisées à l'extrémité ; tous les articles des tarses entiers ; corps cylindrique ; tête presque aussi large que le corselet, celui-ci l’emboitant en grande partie ; leurs pattes sont courtes et comprimées. 1. MÉLASIS FLABELLICORNE, Melasis flabellicornis. LaTr. Hispa flabellicornis. Fab. Noir ; strié; antennes et pattes d’un brun ferrugi- neux ; tarses simples. — Long. 9 millim. Dans les prés. IV. Genre. — LES CÉROPHYTES, CEROPHYTUM. Palpes comme les précédents, mais antennes branchues dans les mâles, en scie dans les femelles ; mâchoires bilo- bées à l'extrémité ; avant-dernier article des tarses bifide ; corps ovalaire. 1. CÉROPHYTE ÉLATÉROÏDE, Cerophytum elateroïdes. Borr. Melasis elateroïdes. Latr. Noir; strié; antennes très-fortement pectinées. Long. 8 millim.— Sur les pelouses arides. (: 3) Deuxième Tribu. — LEs ELATÉRIDES. Leur corps est plus étroit que dans les insectes de la tribu précédente ; les angles postérieurs de leur corselet se pro- longeant en pointes aiguës, et les articles de leurs tarses sont toujours entiers ; la pointe avancée de leur sternum s'enfonce, à la volonté de l’animal, dans une cavité située au-dessous de la naissance de la seconde paire de pieds. Lorsque ces insectes sont sur le dos, la briéveté de leurs pieds les empêcherait de pouvoir se retourner s'ils n’avaient la facilité (étant dans cette position) de sauter en l'air jus- qu'à ce qu’ils retombent dans leur position naturelle. Ces insectes se trouvent sur les fleurs, sur les gazons, et sur les arbres. V.ne Genre.— LES TAUPINS, ELATER. C'est le seul genre de la 2.ve Tribu. En général, tous Les Taupins volent avec facilité et n’ont pas par conséquent (à l'exception de quelques espèces), un habitat particulier ; nous ne désignerons alors que les espèces qui exigeront une mention spéciale , pour faciliter leur re- cherehe. 1. Taupin Roux , Elater rufus. Latr. Ferrugineux en dessus; d’un brun marron très lui- sant en dessous ; corselet chagriné ; élytres fortement striées. Long. 33 millim.— A La Teste, dans les bois de pins. M. Souverbie a trouvé le premier de ceux que nous avons observés. 2. TAUPIN RHOMBIFÈRE , Ë. rhombeus. Latr. Etroit ; allongé ; brun ; à pubescence soyeuse; deux traits fugaces, plus foncés et rhombiformes, placés vers le tiers postérieur des élytres. (78) Long. 18 à 20 millim. — A La Teste, sous les écorces de pins. M. Souverbie l’a trouvé à Bordeaux, dans son jardin. 3. TAUPIN FERRUGINEUX , E. ferrugineus. Latr. Ferrugineux en dessus, noir en dessous; corselet bordé de noir. — Long. 24 millim. 4. Taupin CuIvREUX , E. cupreus. Latr. Il ressemble au Taupin pectinicorne, par s1 forme et ses antennes; dessous du corps bronzé, ainsi que la tête et le corselet ; élytres jaunes, striées , à extré- mité d’un noir bronzé. — Long. 23 millim. 5. TaupPiN NÉBULEUX , E. murinus. Latr. Obscur , mélangé de cendré en dessus ; d’un cendré roussâtre et uniforme en dessous ; antennes et tarses rougeâtres ; deux tubercules peu élevés sur le corselet. Long. 21 millim 6. TaupIN MARQUETÉ , E. tessellatus. Latr. Noirâtre, cuivreux; corselet et élytres ayant des taches peu marquées, formées par des plaques de poils d’un cendré roussâtre ; pattes d’un noir cuivreux ; ongles roussätres. — Long. 20 millim. 7. TAUPIN PECTINICORNE, E. pectinicornis. Latr. Bronzé ; antennes pectinées dans le mâle seulement ; élytres striées et pointillées. Long. 18 millim. — Dans les landes. 8. Taupix o8scur, E. obscurus. Latr. Noirâtre ; peu luisant ; élytres striées ; pattes noires ; antennes et tarses d’un brun testacé obscur. Long. 18 millim 9. Taupin INÉGAL, E. inæqualis. Latr. Noir; corselet raboteux; élytres striées de rouge brun. — Long. 18 millim. (79) 10. TAUPIN CHARBONNIER , Æ. carbonarius. Latr. Elater atomarius. Fas. Raboteux , d’un noir mat et terne , parsemé de quel- ques écailles blanches. Long. 16 mill. — A La Teste, dans les vieux pins pourris. 11. TAUPIN ÆRUGINEUX , E. œruginosus. Latr. Noir luisant en dessous et bronzé en dessus ; élytres striées ; écusson jaunâtre. — Long. 16 millim. 12. TauPiN SANGUIN, E. sanguineus. Latr. Antennes en scie; corps, tête, corselet et pattes d’un noir luisant; élytres rouges, striées. Long. 15 millim. — Dans les troncs des vieux pins pour- ris. Il y vit en société et ne vole que la nuit. 13. TAUPIN THORACIQUE, E. thoracicus. Latr. Corps, tête et pattes noirs; corselet globuleux, d'un roux fauve ; élytres noires et striées, Long. 9 millim. 14. Tavrin Noir, E. niger. Latr. D'un noir luisant ; pattes noires ou brunes; corse- let lisse ; élytres striées, un peu recouvertes d’un du- vet cendré. — Long. 15 millim. 15. TaupiN ATRE, E. aterimus. Latr. Noir foncé ; prothorax pointillé; élytres pointillées et striées. — Long. 15 millim. 16. TAUPIN PORTE-CROIX , E. cruciatus. Latr. Noir en dessous , ainsi que la tête; pattes rouges , à extrémité des cuisses noire; bords de l'abdomen rou- ges ; corselet noir , rayé de rouge de chaque côté; ély- tres striées, jaunes, ayant leur suture noire, ainsi ( 80) qu'une bande transversale située un peu au-delà du milieu , et le bord extérieur depuis la bande jusqu'à l'extrémité. Long. 15 millim. — Dans les pignadas. 17. TauPIN LINÉÉ, E, lineatus. Latr. Elater striatus. Fa. Corselet presque globuleux, noiràtre, ainsi que la tête, couvert d’un duvet cendré; dessous du corps et pattes noirâtres; élytres obscures, avec des lignes longitudinales un peu élevées et plus claires ; entre chaque ligne deux stries pointillées se rejoignant pos- térieurement. — Long. 44 millim. 18. TAUPIN GERMANIQUE, E. germanus. Latr. Elater œneus. Fa. D'un bronzé luisant en dessus, d’un noir bronzé en dessous ; antennes du mâle légèrement en scie, non pectinées ; élytres striées et pointillées. Long. 14 millim. 19. Taupin soyEUx , E. holosericeus. Latr. Noirâtre ; corselet couvert d'un duvet soyeux, ainsi que les élytres, qui sont marquées de quelques bandes obscures. — Long. 41 millim. 20. TaupiN BRUN, E. brunneus. Latr. D'un brun ferrugineux ; tête et antennes noires, a:nsi que la poitrine ; corselet noir bordé de fauve , en dessous ; d’un brun rougeâtre, avec une grande tache noire au milieu, en dessus ; pattes ferrugineuses ; ély- tres d’un brun ferrugineux, striées.— Long. millim. 21. TAUPIN CEINT, E. balteatus. Latr. Prothorax noir et luisant ainsi que la tête et le des- (81) sous du corps. Élytres striées pointillées, rougeâtres dans les deux tiers antérieurs ; le tiers postérieur noi- râtre. Pattes d’un rouge brun foncé. Long. 8 à 12 millim. — A La Teste. Il vit probablement 22. dans le pin. TAUPIN HARNACHÉ , E. ephippium. Latr. Absolument semblable au Taupin sanguin , mais une tache noire commune , placée vers le milieu des ély- tres. — Long. 13 millim. . TAUPIN DU CHÈNE, E. quercüs. Latr. Noir; base des antennes et pattes fauves ; élytres striées, d’un noir bronzé luisant. — Long. 12 millim. . TAUPIN VARIÉ, E. varius. Latr. Noir, un peu mélangé de roussâtre ; élytres noires , légèrement chagrinées, quelques points courts à la base et une bande d’un gris roussâtre vers l'extrémité. Long. 7 à 9 millim. 25. No) er © = TAUPIN SPECTATEUR , E. spectator. Latr. Corps, tête et corselet noirs; ce dernier luisant ; élytres d’un brun marron; antennes d’un brun fauve ; pattes noirâtres ou fauves. — Long. millim. . TAUPIN ALLONGÉ , E. elongatulus. Latr. Il ressemble au Taupin sanguin, mais il est une fois plus petit; élytres d’un rouge testacé, noires à l'ex- trémité. — Long. 8 millim. . TAUPIN BIMACULÉ, E. bimaculatus. Latr, Corps, tête, antennes et corselet d’un noir luisant; élytres striées, rouges antérieurement, noires posté- rieurement , ayant chacune un point blanc, et vers le Tome XVL 6 * 28. ( 82 ) milieu, une tache noire, dentelée , adhérente au bord; pattes fauves et cuisses noires. — Long. 5 millim. TauPIN RUFIPÈDE , E. rufipes. Latr. Entièrement noir , luisant, pattes fauves. Long. 7 millim. 29. co © Co — 32. TAUPIN RIVERAIN, E. riparius. Latr. Elater politus. Fas. D'un noir bronzé ; antennes, pieds et bord extérieur des élytres , roux. — Long. 7 millim. . TAUPIN SANGUINICOLLE, E. Sanguimicollis. Latr. Corps, tête, antennes -et pattes noirs; corselet dé- primé et d’un beau rouge sanguin sans taches ; élytres noires et striées. — Long. millim. . TAUPIN BORDÉ , E. limbatus. Latr. D'un noir luisant ; élytres testacées, bordées de noir, — Long. 6 millim. TauPIN GENTIL, E. pulchellus. Latr. Noir; élytres jaunâtres, ainsi que les pattes. Long. 3 millim. 33. Tauwpin PALE, E. palleus. Latr. Noir; pattes et élytres testacées. —Long. 3 millim. . TAUPIN MINUTE , E. minutus. Latr.. D'un noir luisant; élytres testacées, bordées de noir. — Long. 3 millim. . TAUPIN LONGICOLLE, E. longicollis. Latr. Testacé; corselet fauve, allongé ; vx baise striées ; pubescentes ; pattes testacées. — Long. 6 m Troisième Tribu.— Les CÉBRIONITES. Sternum non avancé en pointe , sans rainures pour loger (:85) les antennes; mandibules entières, non échancrées à la pointe ; palpes de la même grosseur ou plus grêles à leur extrémité, corps arrondi et bombé dans les uns , ovale ou oblong et arqué en dessus dans les autres. Leur corps est ordinairement mou et flexible; leur corselet plus large à sa base et transversal, a ses angles latéraux aigus, ou même quelquefois prolongés en épme; leurs antennes sont plus longues que la tête et le corselet pris ensemble. VI.me Genre. — LES CÉBRIONS, CEBRIO. La tête saillante hors du corselet, mandibules étroites, très-arquées , fort crochues , saïllantes ; pas de pelotes aux tarses ; antennes filiformes, de onze articles, dilatées en dents de scie à l'angle intérieur de leur extrémité ; corps ferme , ovale-oblong. Ces coléoptères se trouvent en été sur les feuilles des arbres, et surtout sur celles des plantes aquatiques. Ils vo- lent très-bien. 1. CÉBRION GÉANT, Cebrio gigas. Latr. (Le mâle). Cebrio brevicornis. OLiv. |{ La femelle ). Tête et corselet noirâtres, pubescents ; élytres tes- tacées , pointillées, pubescentes , presque striées ; poi- trine noirâtre, ainsi que les pattes ; abdomen et cuisses testacés. La femelle diffère du mâle par ses antennes très-courtes, en massue, de dix articles. Long. 28 millim. — On le prend facilement la nuit à la lanterne qui est fixée pour la chasse aux Lépidoptères. VIL.®° Genre. — LES DASCILLES, DASCILLUS. Tête enfoncée jusqu'aux yeux dans le corselet ; mandi- bules entièrement découvertes; dernier article des palpes tronqué ou très-obtus; corps ovale. Pénultième article des tarses bilobé ; antennes longues , filiformes , insérées devant ( 84) les yeux; mandibules cachées par la lèvre supérieure ; mà- choiïres avancées, comme laciniées ; tête large ; angles pos- térieurs du corselet très-peu saillants. Ils se trouvent sur les fleurs. 1. DASCILLE CENDRÉ, Dascillus cinerus. Latr. Atopa cinerea. Fas. Livide; élytres et pattes brunes. Long. 12 millim. — Dans les prairies. 2, DaAsciLcE CERF, D. cervinus. Latr. Atopa cerrina. Fas. Noirâtre et soyeux en dessous ; d’un brun cendré en dessus ; élytres rebordées. Long. 12 millim. — Dans les prairies. VIIL.we Genre. — LES ÉLODES , ELODES. Mandibules en grande partie cachées sous le labre; palpes maxillaires pointus à leur extrémité, les labiaux fourchus ; pieds postérieurs presque semblables aux autres, non propres à sauter. Leur corps est presque rond, de consistance peu solide; leur tête petite; leurs antennes sont à articles simples, dont le second et le troisième plus courts. On les rencontre souvent sur les feuilles des arbres qui croissent dans les lieux aquatiques. 1. ÉLone PALE, Elodes pallida. Latr. Cyphon pallidus. Fab. D'un fauve pâle, ainsi que les pattes; antennes brunes ; tête et extrémités des élytres d’un brun obscur. _—.. Long. 10 millim.— Le bord des Jalles, dans les marais. 2. ÉLonE LIVILE, E. livida. Latr. Cyphon lividus. Fabr. Livide, lisse, glabre ; antennes obscures. (85 ) Long. 9 millim. — Les lieux aquatiques. 3. ÉLODE GRIsE, E. grisea. Latr. Cyphon griseus, Fab. Noire; bouche livide; pattes pâles ; élytres pubes- centes, lisses, latérales. Long. 9 millim. — Dans les marais. À. ÉLODE BORDÉE, E. marginata. Latr. Cyphon marginatus. Fas. Noire ; bords du corselet et premier article des tarses roux. — Long. 7 millim.— Les prairies marécageuses. IX.ve Genre. — LES SCIRTES, SC/RTES. Elles ne diffèrent des Élodes que par leurs pieds posté rieurs dont les cuisses sont grosses, renflées, et les jambes terminées par une longue épine , ce qui leur donne la faculté de sauter. 1. SCIRTE HÉMISPHÉRIQUE, Scirtes hemispherica. Boit. Cyphon hemisphericus. Fas. Corps presque orbiculaire, déprimé, d’un noir foncé. Long. 2 millim. — Sur les plantes aquatiques. Quatrième Tribu.— Les LAMPYRIDES, Sternum non avancé en pointe, sans rainures pour loger les antennes; mandibules entières, non échancrées à la pointe ; palpes maxillaires au moins plus gros à leur extré- mité; corps droit et déprimé. Ils ont en général le corps très-mou, le corselet presque carré ou en demi-cercle, recouvrant la tête en tout ou en partie; leurs élytres sont molles et flexibles ; tous ont l'avant- dernier article des tarses divisé en deux lobes. Ils se con- tractent et font le mort quand on les prend ; quelques-uns sont phosphorescents. (86 ) X.me Genre. — LES LYCUS, LYCUS. Antennes rapprochées à leur base; palpes maxillaires beaucoup plus longs que les labiaux ; bouche très-petite ; tête retrécie et prolongée en avant en forme de museau ; antennes très-comprimées ; élytres souvent très-élargies vers leur extrémité postérieure ; corps étroit et allongé. Leurs mâchoires sont simples et non lobées, et le dernier article de leurs palpes maxillaires est comprimé, tronqué, presque sécuriforme ; leur corselet est aplati, trapézoïdal ou carré, arrondi en devant. Ils se trouvent sur les fleurs. 1. Lycus saNGuIN, Lycus sanquineus. Latr. Noir, avec les côtés du corselet et les élytres d’un rouge de sang. Long. 10 millim. — Dans les champs et sur les ombelli- fères. 2. Lycus AURORE, L. aurora. Latr. D'un rouge sanguin en dessus, d’un noir foncé en dessous ; côtés du corselet et élytres réticulées. Long. 9 millim. — Dans les jardins. XIL.w Genre. — LES OMALISES, OMALISUS. Ils ressemblent assez aux précédents, mais leur tête n’est pas prolongée en museau, et le dernier article de leurs palpes maxillaires est tronqué ; second et troisième article des antennes très-courts. Leur tête est en grande partie découverte; leurs antennes très-rapprochées à leur base, sont formées d'articles courts et cylindriques; leurs yeux sont écartés ; les angles du corselet prolongés et très poin- tus , et les élytres assez fermes. Ils se trouvent sur les plantes, dans les prairies, etc. (87) 1. OMALISE SUTURAL, Omalisus suturalis. Latr. Corps, tête, antennes, corselet et pattes, noirs; élytres d’un rouge obscur, à suture noire, ayant des points enfoncés assez nombreux. Long. 7 millim. — Dans les prairies. 2. OMALISE NoëR, O. niger. Boit. Semblable au précédent, mais entièrement noir. Long. 6 millim. — À Bourg, sur les ombellifères. XIL. me Genre. — LES LAMPYRES, LAMPFYRIS. Corselet en demni-cercle et cachant la tête, ou en carré transversal ; bouche très-petite; palpes maxillaires terminés par un article finissant en pointe ; extrémité postérieure de l'abdomen phosphorique ; yeux très-gros. Leurs antennes sont écartées à leur base, insérées très-près des yeux, comprimées, quelquefois pectinées ou en scie, à articles courts. Leur corps est très-mou, oblong, ovale, déprimé ; leurs pattes sont comprimées ; simples et courtes. Quelques femelles n’ont ni ailes ni élytres, mais simplement les ru- diments de ces organes. Les Lampyres, vulgairement con- nus sous les noms de vers luisants, mouches à feu, ont une partie de l'abdomen qui est lumineux et brille avec plus ou moins d'éclat pendant la nuit : ils peuvent, à volonté, aug- menter ou diminuer cette singulière lumière, qui disparaît lorsqu'ils sont morts, mais seulement par le dessèchement. 1. LAMPYRE MAURITANIQUE, Lampyris mauritamca. Larr. Jaune; élytres d’un jaune légèrement grisâtre, avec trois lignes longitudinales élevées. Femelle beaucoup plus grande que le mâle, d’un fauve plus ou moins rougeâtre.— Long. mâle, 19 millim.; femelle, 42 id. (88 ) Cette. espèce, quoique rare a été trouvée assez fréquem- ment par M. Besson, dans la commune de Mérignac. 2. LAMPYRE SPLENDIDE, L. splendidula. Latr. Semblable au suivant, mais plus grand; corselet Jaunâtre, avec le disque noiràtre, et deux taches trans- parentes en devant; élytres noirâtres ; dessous du corps et pieds d’un jaunâtre livide; premiers anneaux du ventre, tantôt de cette couleur, tantôt plus obscur. La femelle est aptère. Long. 15 millim. — Dans les garennes. 3. LAMPYRE VER LUISANT, L. nocticula. Latr. Mâle noirâtre; antennes simples; corselet demi- circulaire, recevant entièrement la tête, avec deux taches transparentes, en croissant ; ventre noir , à der- niers anneaux d'un jaune pâle. La femelle est aptère. Long. 12 millim. — Commun le long des haies. 4. LAMPYRE HÉMIPTÈRE, L. hemiptera. Latr. Noir , allongé ; élytres courtes; extrémité de l’abdo- wen jaune. — Long. 8 millim. — Dans les environs de Libourne et Sainte-Foy. MM. Souverbie et Dart l'ont trouvé assez fréquemment dans les jardins de la ville, contre les murs, au mois de Mai. XHL.we Genre. — LES TÉLÉPHORES, TELE PHORUS. Antennes écartées entre elles à leur base ; palpes termi- nés par un article en forme de hache, les maxillaires pas plus longs que les labiaux. Ils ressemblent assez aux Lampyres, mais leur corps est plus allongé, plus linéaire, et leurs élytres sont plus molles ; leur tête est de la largeur du corselet, ou plus large, dé- couverte, un peu retrécie postérieurement ; leur corselet est carré, à angles arrondis. (89 ) On les trouve au printemps sur les fleurs des prairies. 1. TÉLÉPHORE TESTACÉ, Telephorus testaceus. Latr. Cantharis testacea. Fas. Noir; corselet bordé de jaune ; élytres et pattes tes- tacées. — Long. 19 millim. — Sur le sureau en fleurs et diverses ombellifères. 2. TÉLÉPHORE MÉLANURE, T1. melanurus. Latr. Cantharis melanura. Fas. Entièrement d’un jaune testacé; antennes noires, ainsi que l'extrémité des élytres. Long. 15 millim. — Sur les fleurs. 3. TÉLÉPHORE PALE, TT. pallidus. Latr. Cantharis pallida. Fas. Semblable au T. pallipes, mais plus petit, et élytres n'ayant pas de tache noire à l'extrémité. Long. 15 millim.— Sur les fleurs. 4. TÉLÉPHORE LIVIDE, T. hividus. Latr. Cantharis livida. Far. D'un jaune testacé ; corselet sans taches, rebordé. Long. 14 millim. — Sur les ombellifères. D. TÉLÉPHORE ARDOISÉ, T. fuseus. Latr. Cantharis fusca. Fas. Derrière de la tête, élytres, poitrine et grande partie des pieds, d’un noir ardoisé ; les autres parties d’un rouge jaunâtre ; une tache noire sur le corselet. Long. 14 millim. — Sur les fleurs et dans les prairies. 6. TÉLÉPHORE ABDOMINAL, 7. abdominalis. Latr. Cantharis abdominalis. Fa. Tête noire; bouche et corselet rougeâtre, ce der- ( 90 ) nier bordé de noir; élytres d’un noir bleuâtre; abdomen d’un jaune rougeûtre. Long. 14 millim. — Sur les fleurs et les graminées. 7. TÉLÉPHORE THORACIQUE, 7. thoracicus. Latr. Tête , poitrine et élytres, noires ; corselet rougeâtre, ainsi que l'abdomen et les pattes. Long. 12 milim — Sur les fleurs. 8. TÉLÉPHORE PALLIPÈDE, T7. pallipes. Latr. Cantharis pallipes. Fas. Noir; base des antennes et pattes d'un jaune pâle; élytres testacées, noires à l'extrémité. Long. 12 millim. — Sur les graminées. 9. TÉLÉPHORE PONCTUÉ, T. bipunctatus. Latr. Cantharis bipunctatus. Fas. Noirâtre ; corselet testacé, marqué de deux points noirs ; élytres testacées, ayant du noir à l'extrémité. Long. 12 millim. — Les côteaux élevés de l’Entre-deux- Mers, sur les chicoracées. 10. TÉLÉPHORE BICOLORE, TT. bicolor. Latr. Corselet bordé de testacé ; tarses postérieurs, base de l'abdomen , antennes et poitrine, obscurs. Long. 10 millim. — Sur les haies en fleurs. 11. TÉLÉPHORE LATÉRAL, T. lateralis. Latr. . Cantharis lateralis. Fa. Noirâtre ; corselet rouge ; élytres obscures, à bord extérieur jaunâtre. Long. 10 millim. — Sur les fleurs, dans les prairies. 12. TÉLÉPHORE o8scuR, T. obseurus Latr. Cantharis obscura. Fas. D'un noir foncé ; une petite marge rouge au corselet. Long. 6 millim.— Sur les renonculacées, dans les marais. (91) XIV.we Genre.— LES MALTHINES, MALTHINUS. Ils ressemblent beaucoup aux précédents ; mais leurs palpes sont terminés par un article ovoïde, et dans plu- sieurs , les étuis sont plus courts que l'abdomen. 1. MALTHINE BImMoUCHETÉ, Malthinus biquttatus. Boit. Cantharis biguttata. Fas. Testacé; corselet noir, à bords jaunes ; élytres cour- tes, obscures, jaunes à l'extrémité. Long. 7 millim. — Sur les ombellifères. 2. MALTHINE FASCIÉ, M. fasciatus. Boit. Noirâtre ; bords extérieurs du corselet jaunes, ainsi qu'une bande sur les élytres et une tache vers leur extrémité. —Long. 4 millim.—Sur les ombellifères. Cinquième Tribu.—Les MèLyripes. Sternum non avancé en pointe, sans rainures pour loger les antennes; mandibules échancrées ou fendues à leur extrémité ; tête plus ou moins enfoncée dans le corselet, ovale; palpes maxillaires terminés par un article rétréci vers son extrémité et s’avançant au-delà de la bouche; cor- selet presque carré , plat ou légèrement convexe en dessus ; corps souvent oblong. Ces insectes sont très-agiles, et se trouvent sur les fleurs et sur les feuilles; leurs élytres sont molles, leur bouche avancée , et leurs tarses longs. ‘ XV.ne Genre. — LES MÉLYRES, MELYRIS. Palpes filiformes ; tête avancée antérieurement en une espèce de petit museau; premier article des tarses rieurs plus court ou à peine aussi long que le second; corselet presqu’en trapèze, un peu plus étroit en devant; antennés seulement un peu plus longues que la tête ; une (9%) simple dentelure sous les crochets du dernier article des tarses. 1. MÉLYRE FLORAL, Melyris floralis. Oki. Corps pubescent , noir , un peu luisant , sans taches; antennes en scie, un peu plus longues que le corselet. Long. 5 millim. — Sur les fleurs. 2. MÉLYRE vVELU, M. villosus. Oliv. Corps noir, velu ; antennes presque en scie, un peu plus longues que le corselet ; élytres un peu plus fle- xibles ; tarses simples. Long. 4 millim. — Sur les ombellifères. XVLme Genre. — LES DASYTES, DASYTES. Palpes et devant de la tête comme dans les précédents ; premier article des tarses plus long que le suivant ; corselet presque carré, antennes de la longueur de la tête et du corselet , insérées devant les veux et très-écartées de leur base ; un appendice membraneux ou une dent très-compri- mée sous les crochets du dernier article des tarses. Leur - corps est étroit et allongé, presque linéaire, assez mou; leur tête est en carré transversal , le plus souvent inclinée ; les élytres sont longues, linéaires. Ils se trouvent sur les plantes, plus particulièrement dans les prairies sèches , et ils contrefont le mort dès qu’on veut les prendre. 1. DASYTE BLEUATRE, D. cœruleus. Latr. Pubescent ; vert, ou d’un vert bleuâtre ; antennes et pattes, noires. — Long. 12 millim. — Sur les fleurs. 2. DASYTE A QUATRE TACHES, D. quadrimaculatus. Lare. Noir; un peu velu; deux taches rouges sur les ély- (95) tres, l’une à la base et l'autre au bout opposé. Long. 12 millim. — Sur les fleurs et les arbrisseaux. 3. DASYTE FLAVIPÈDE, D. flavipes. Latr. Velu ; noirâtre ; base des antennes et pattes roussà- tres. — Long. 12 millim. — Sur les ombellifères. À. DASYTE HÉMORRHOÏDAL, D. hœmorrhoïdalis. Latr. Velu ; noir; une tache rouge à l'extrémité des élytres. Long. 12 millim. — Sur les fleurs et les graminées. 9. DASYTE NIGRICORNE, D. nigricornis. Latr. Velu; d’un bronzé foncé, très-ponctué ; tarses et jambes roussâtres. Long. 11 millim. — Sur les fleurs. DASYTE PLOMBÉ, D. plumbeus. Latr. Légèrement velu , allongé , plombé. Long. 10 millim. — Sur les fleurs. 7. DASYTE A POINTS NOIRS, D. nigro-punctatus. Latr. Pubescent ; bronzé; plusieurs rangs de pointsmnoirs sur les élytres. — Long. 9 millim. — Sur les fleurs. 8. DasyTE ATRE, D. ater. Latr. D'un noir luisant, très-velu; deux enfoncements rugueux, avec leurs contours un peu élevés et unis, sur le devant de la tête. Long. 8 millim. — Sur les graminées. 9. DasvTE BIPUSTULÉ, D. bipustulatus. Latr. Hispa bipustulata. Fas Noir ; velu ; une tache rouge à la base de chaque élytre — Long. 5 millim. — Dans les prairies sèches. (94) 10. DasyTE Noir, D. niger. Latr. Velu ; noir; élytres presque lisses ; tarses antérieurs sans appendices à leur base. Long. 5 millim.— Sur les fleurs. XVIL.me Genre. — LES MALACHIES, MALACHIUS. Il ne diffèrent des Dasytes que par leurs antennes moins écartées et plus intérieures, et par quatre vésicules rouges rétractiles, qu'ils font sortir et rentrer à volonté de leur corps , dont deux sous les angles postérieurs du corselet, et deux à la base de l'abdomen. Le corps de ces coléoptères est très mou, et leurs élytres excessivement flexibles. On les trouve sur les fleurs, dans les prairies, etc. 1. MALACHIE ROUGEATRE, Malachius rufus. Latr. Tête noire, bronzée; bouche jaune; poitrine et pattes d’un noir bronzé ; abdomen rougeûtre , avec un peu de noir bronzé sur les bords; élytres rougeûtres ainsi que le corselet, qui a une large tâche noire au milieu. — Long. 9 millim. — Sur les fleurs. 2. MALACHIE BRONZÉ, M. œneus. Latr. Cantharis ænea. Lin. D'un vert bronzé; élytres rougeâtres, ayant leur base et une partie de la suture d’un vert bronzé. Long. 9 millim. — Dans les prairies. 3. MALACHIE BOUT-BRULÉ, M. prœustus. Latr. Noirâtre ; extrémité des élytres jaunâtre. Long. 8 millim.— Sur les fleurs. 4, MALACHIE MARGINELLE, M. marginellus. Latr. Cicindela cœæruleo-viridis. GEOFF. Verdâtre ; bords du corselet et extrémité des élytres rouges. — Long. 6 millim. — Sur les ombellifères. + (95) 9. MALACHIE BIPUSTULÉ, M. bip ustulatus. Latr. Cantharis bipustulata. Lux. D'un vert métallique assez brillant; bords latéraux du corselet rouges, et une tache de la même couleur à l'extrémité de chaque élytre. Long. 6 millim. — Dans les prairies sèches. 6. MALACHIE VERT, LL. viridis. Latr. D'un vert bronzé, bouche d’un beau jaune. Long. 6 millim. — Sur les fleurs. 7. MALACGHIE ÉLÉGANT, M. elegans. Latr. D'un vert métallique; corselet de couleur uniforme; chaque élytre terminée par un point jaune. Long. 6 millim. — Sur les fleurs. 8. MALACHIE SANGUINOLENT, M. sanguinolentus. Latr. D'un noir bronzé ; côtés du corselet et élytres d’un rouge sanguin. — Long. 5 millim.— Dans les prairies. 9. MALACHIE BLEU, ML. cyaneus. Latr. Bleu ; corselet et abdomen rouges. Long. 5 millim. — Swr les ombellifères, 10. MALACHIE FASCIÉ, M. fasciatus. Latr. Cantharis fasciata. Linx. D'un noir bronzé; une bande transversale rouge vers le premier tiers de la longueur des élytres ; cel- les-ci rouges à l'extrémité, Long. 5 millim. — Sur les fleurs. 11. MALACHIE ÉQUESTRE, M. equestris. Latr. D'un vert bronzé noirâtre ; élytres rouges , avec une tache bronzée à la base, et une bande arquée de la même couleur vers le second tiers de leur longueur. Long. 5 millim. — Sur les fleurs. (96 ) 12. MALACHIE PÉDICULAIRE, M. pedicularius. Latr. Cantharis pedicularis. Linx. Noir ; corselet rebordé, sans taches ; extrémité des élytres sans taches. — Long. 4 millim.— Sur les fleurs. 43. MALACHIE THORACIQUE, M. thoracicus. Latr. Cicindela thoracica. Fourc. D'un noir bleuâtre ; corselet rouge ; élytres sans taches. — Long. 4 millim. — Sur les fleurs. 14. MALACHIE PALLIPÈDE, M. pallipes. Latr. Cantharis pedicularia. Linx. Convexe ; glabre, bronzé, sans taches ; pattes noi- res, à jambes d’un jaune pâle. Long. 4 millim. — Dans les prairies. 15. MALACHIE PULICAIRE, M. pulicarius. Latr. Malachius niger. Fas. Noir ; bords du corselet rouges , ainsi que l’extré- mité des élytres Long. À millim. — Dans les prairies. 16. MALACHIE LOBÉ, M. lobatus. Latr. Noir; extrémité des élytres jaunes ; corselet lobé , à bord postérieur jaune.— Long. 3 millim. Sur les fleurs. 17. MALACHIE TÊTE BLANCHE, M. albifrons. Latr. Noir; tête blanchâtre, ainsi que l'extrémité des élytres et le bord antérieur du corselet. Long. 3 millim. — Sur les fleurs. 18. MALACHIE FLAVIPÈDE, M. flavipes. Latr. Entièrement noir, à l'exception de la base des an- tennes et des jambes , qui sont fauves. Long. 3 millim. — Sur les fleurs et les graminées. een (97) XVIIL.we Genre. — LES DRILES, VRILUS. Les palpes maxillaires en massue; tête brusquement tronquée en avant ; antennes pectinées au côté intérieur, plus longues que la tête et le corselet ; palpes maxillaires avancés ; corselet transversal ; pénultième article des tarses cordiforme. 1. DRILE JAUNATRE, Drilus flavescens. Latr. Prilinus flavescens. Fas. Un peu velu ; noir; élytres flexibles et jaunâtres. Sa larve vit parasite dans la coquille de l’Helix nemora- lis, dont elle mange l'habitant; après avoir passé à ‘état de nymphe dans cette coquille, il en sort à l'état parfait. La femelle est toujours aptère et au moins six fois plus grosse que le mâle. Long. 7 millim. — Sur les fleurs. Sixième Tribu. — Les Priniorss. Sternum non avancé en pointe, sans rainures pour loger les antennes ; mandibules échancrées ou fendues à leur ex- trémité ; arrondie ou presque globuleuse ; palpes très-courts terminés par un article toujours plus gros, qui s’élargit vers son extrémité; corselet très-cintré, en forme de ca- puchon ; corps ovoïide ou cylindrique, arrondi ou convexe en dessus, ordinairement ferme et de couleur obscure. Mandibules épaisses et courtes , presque triangulaires ; ar- ticles intermédiaires des tarses courts, larges , souvent garnis de pelotes en dessous, et le dernier ordinairement petit. Ces insectes sont très-petits, habitent nos maisons, se contractent quand on les touche, et font le mort. Leurs larves font beaucoup de dégâts, en attaquant et rongeant les draps, les pelleteries ; etc. D’autres s’attaquent aux bois Tome XVI. 7 it { 58 ) et détruisent en peu d'années les planchers et tous les ou- vrages de menuiseries. XIX.m° Genre. — LES PTINES, PTINUS. Antennes au moins aussi longues que le corps : corselet plus étroit que l'abdomen ; antennes insérées entre les yeux, ceux-ci saillants ou convexes ; corps oblong. Leurs antennes sont terminées uniformément, simples, insérées près du bord interne des yeux, et filiformes, à second et troisième articles pas plus grands que les suivants. Ces insectes se trouvent dans les herbiers, les collec- tions d'histoire naturelle , etc. 1. PTiNE PUBESCENT, Ptinus pubescens. Latr. Pubescent; noir; antennes et pattes noires ; corselet bossu postérieurement. Long. 9 millim. — Sur les bois morts. 2. PriNE IMPÉRIAL , Pt. imperialis. Latr. Noirâtre , à duvet cendré ; corselet caréné, se ter- minant postérieurement en forme de dent ; élytres cou- vertes d'un duvet plus obscur, ayant chacune une tache blanche sinuée ; les deux taches réunies formant une sorte d’aigle impériale. Long. 7 millim. — Dans les pelleteries. 3. PTINE VOLEUR, Pt. fur. Latr. Couvert d'un duvet plus ou moins cendré ; quatre dents au corselet, formant une couronne transversale ; élytres noires , ayant deux bandes grises transversales, et des stries ponctuées. : ; Long. 6 millim. — Attaque les collections. À. PTriNE TESTACÉ, Pt. testaceus. Oliv. Testacé ; yeux noirs : élytres avec des stries pointil- (99 lées, Il ressemble beaucoup au suivant , dont peut-être il n’est qu’une variété. Long. 5 milim. — Dans les pelleteries. 5. PTINE GERMAIN, Pi. germanus. Oliv. Semblable au précédent, mais pas de bandes aux élytres ; abdomen oblong ; antennes et pattes testacées. Long. 5 millim. — Dans les maisons. 6. Prine 8IDENTÉ, Pt. bidens. Latr. D'un brun testacé; élgtres striées, noirâtres; cor- selet bossu , bidenté en dessus. Long. 5 millim. — Dans les maisons. XX.me Genre. — LES GIBBIES, G/BBIUM. Semblables aux Ptines, mais antennes insérées au de- vant des yeux ; ceux-ci aplatis et très-petits; corps court, à abdomen presque globuleux; élytres soudées. Les an- tennes sont sétacées, à second et troisième articles plus grands que les suivants ; leur corselet est très-court, ar- rondi, ne formant point de capuchon, et sans étrangle- ment postérieur ; l’écusson manque, et se trouve remplacé par un avancement du milieu du bord postérieur du corse- let. Pas d'ailes membraneuses sous les élytres. 1. GiBBIE scoTIAS, Gibbium scotias. Latr. Ptinus scotias. Far. Corps globuleux , lisse ; brun ; élytres lisses, polies, d’un brun marron, enveloppant une partie du dessous du corps ; antennes et pattes claires, velues. Long. 3 millim. — Parmi les plantes desséchées. XXI.®° Genre, — LES PTILINS, PTILINUS. Antennes plus courtes que le corps; corselet aussi large ( 100 ) què l'äbdomen , à sa base; antennes en scie depuis le troi- sième article, quelquefois pectinés dans les mâles. Corps presque cylindrique; corselet à peu près de la même lar- geur que les élytres ; antennes implantées devant les yeux, à articles triangulaires ou en dents, ce qui les fait parai- tre en scie ou pectinées. Ces coléoptères habitent les troncs des vieux arbres, qu'ils percent comme comme les vrillettes. £. PriLIN FLABELLICORNE, Ptilinus flabellicornis. Latr. D'un brun noirâtre; élytres ayant des lignes distine- tes formées par des points enfoncés. Long. 5 millim. — Dans les saules creux, 2. PTILIN PECTINICORNE , Pt. pectinicornis. Latr. D'un brun foncé, noirâtre ; antennes et pattes fau- ves ; élytres vaguement et finement pointillées. Long. 4 millim. — Dans les bois secs , de charpente. XXIL®° Genre. — LES DORCATOMES, DORCATOMA. Ils ne diffèrent des précédents que par leurs antennes fi- nissant brusquement par trois articles plus grands et dont les deux avant derniers en forme de dents de scie ; elles ne sont , d’ailleurs, composées que de neuf articles. 1. DoRCATOME DE DRESDE, Dorcatoma Dresdensis. Fab. Dorcatoma bi-striata. Payx. Noir brunâtre ; un peu velue; antennes testacées ; pattes rougeâtres ; élytres lisses, finement striées, Long. 3 millim. — Dans les bois de charpente. XXIIL.w° Genre.— LES VRILLETTES, ANOBIUM. Comme dans les précédents , leurs antennes sont termi- ( 101 ) nées par trois articles plus grands ou plus longs, mais les deux avant derniers sont en cône allongé et renversé, et ce- Jui du bout, ovale ou presque cylindrique ; elles sont de onze articles. Plusieurs espèces habitent nos maisons, et, dans l’état de larve, rongent les planches des boiseries , les meubles, les livres , les collections , les pains à cacheter, les farines, eic. 1. VRILLETTE OPINIATRE, Anobium pertinax. Latr. Anobium striatum. Fa. Noirâtre; quatre lignes élevées sur le corselet, et une tache roussâtre vers chaque angle postérieur ; ély- tres à stries formées par des points. Long. 4 millim. — Dans les boiseries. 2. VRILLETTE MARRON, À. castaneum. Latr. Pubescente ; d’un brun marron; yeux noirs; corse- let relevé, marqué d’une petite ligne longitudinale en- foncée ; élytres avec des stries pointillées. Long. 4 millim. — Dans les vieux planchers. 3. VRILLETTE MARQUÉE, À. tessellatum. Latr. Brune ; antennes fauves; corselet peu élevé, mé- langé de cendré formé par un duvet, ainsi que les élytres : celles-ci sans stries. Long. 4 millim. — Sur les vieux bois. 4. VRILLETTE STRIÉE, Anobium striatum. Latr. Anobium pertinax. Fa. D'un brun foncé ou noirâtre, avec un léger duvet grisâtre ; élytres à stries composées de points ; corse- let comprimé, ayant postérieurement une bosse ou une carène terminée en pointe. Long. 4 millim, — Dans les vieux troncs d'arbres. ( 102 ) 5. VRILLETTE BIDENTÉE, À. bidentatum. Latr. Obseure ; corselet échancré, presque bidenté pos- térieurement ; antennes et pattes fauves. Long. 3 millim. — Attaque les vieux livres et les collec- tions. à 6. VRILLETTE DE LA FARINE, À. paniceum. Latr. D'un fauve marron clair; yeux noirs ; corselet peu élevé , sans bosse ; élytres avec des stries pointillées. Long. 3 millim. — Dans les farines. 7. VRILLETTE TRICOLORE, À. tricolor. Latr. Noirâtre ; corselet peu élevé, obscur ; élytres striées, d’un brun châtain. Long. 3 millim. — Dans les boiseries. 8. VRILLETTE MOLLE, À. molle. Latr. Brun testacé ; yeux noirs, élytres lisses. Sur les palissades de pins. Septième tribu. — Les Lime-Bois. Sternum non avancé en pointe , sans rainures pour loger les antennes ; mandibules échancrées ou fendues à leur ex- trémité; tête séparée du corselet par un étranglement ou un cou; mandibules courtes et épaisses ; corps de forme linéaire. Ces insectes ont la tête entièrement dégagée du corselet. Ils vivent dans le bois, qu’ils percent en tous sens, et dont ils font un grand dégât. XXIV.w Genre. — LES LYMEXYLONS, LYMEXILON. Palpes maxillaires beaucoup plus grands que les labiaux, pendants , très-divisés, comme en peigne ou en forme de houppe dans les mâles; élgtres recouvrant la plus grande ( 103 ) partie du dessus de l'abdomen ; antennes simples, un peu plus grèles au bout, ou légèrement en fuseau. 1. LyYMExYLON NAVAL, Lymexylon navale. Latr. Lymexylon luteum. Fas. D'un fauve pâle, avec la tête, le bord extérieur et l'extrémité des élytres , noirs; cette dernière couleur dominant un peu plus dans le mâle. Long. 14 millim. — Dans les chantiers de Paludate et ceux de Lormont. Nous le trouvons également chez M. Haug. 2. LyMExYLON MUSELIER, L. proboscideus. Latr. Lymexylon nigrum. Fan. Tête et corselet noirs ; élytres lisses, d’un jaune testacé, avec l'extrémité noire ; dessous du corps noir, avec l’extré- mité de l'abdomen et les pattes jaunûtres. Long. 12 millim. — Sur les bois morts. XXV.me Genre. — LES HYLECŒTES, HYLECOETUS. Ils ne diffèrent des Lymexylons , que par leurs antennes en scie. 1. HYyLÉCOETE DERMESTOÏDE, Hylæcetus dermestoïdes. Borr. Mâle , noir ; à élytres tantôt noirâtres , tantôt rous- sâtres, ayant l'extrémité noire ; femelle d’un fauve pâle, avec les yeux et la poitrine noirs. Long. 14. millim. — Dans les garennes, où il attaque les vieux chènes et ormeaux. 2. HYLECOETE PRINTANIER, H. marci. Melæ marci. Linx. Antennes d’un jaune fauve ; tête noire ; corselet noir, un peu rebordé; élytres noirâtres, flexibles à leur ex- 104 ) = trénmté; dessous du corps et extrémité de Fabdomen fauves ; pattes d’un jaune fauve ; cuisses postérieures obscures. Long. 14 millim. — Nous n’en avons trouvé que deux individus dans les magasins de bois de construction. 3. HYLÉCOETE BARBU, H. barbatus. Boit. Re AVIS. Dans notre introduction à la Faune entomologique, tome XIV, 5.e et 6.e livraisons, nous avons annoncé qu’afin d’aplanir les diflicut- tés de la science aux jeunes naturalistes de notre département , qui tères des familles , des genres et des espèces d’après la méthode de M. Boitard Nous reconnaissons aujourd’hui qu’en continuant à suivre cette marche , nous retarderions la publication des nombreux mémoires qui attendent leur tour d'impression dans les Actes de la Société enne, et qu’il nous faudrait un Red beaucoup trop long, pour dns notre publication. supprimerons donc à l'avenir , les deseriptions des genres et des pra , et cela abrègera de beaucoup notre travail, qui conser- vera néanmoins, nous en sommes certains, un caractère assez spécial d’utilité pour aider les personnes qui se livrent à la recherche des insectes dans la Gironde. Elles pourront consulter pour la descrip- tion des espèces, les divers ouvrages déjà publiés sur ce sujet, et particulièrement le Manuel entomologique de M. Boitard. AGAVE GEMINIFLORA (er DRE A ET PRET M gs Aer MP RS TE RES PR DT SR NT UE TS ER Re RSR ST En VU A Ve nee NEbe nie Sn e ÉTU VT EE CNER APS NS PES ÉNRE LT US D ie QER ITS 2 A et 2 RS EE EN TN) EE ie —w (405) VL. Osservarions sur l'Agave geminiflora (Ker.) qui a fleuri pour la première fois à Bordeaux, au Jardin Botanique de cette ville, en Novembre 1849 (1), par M. CHARLES LATERRADE. 0 Messœurs, à; ASE Be Si nous n'étions pas des enfants gâtés de la nature, notre enthousiasme grandirait pour elle à chacun de nos pas. Ne sommes-nous pas placés chaque jour, en effet, devant mille merveilles qui ont cessé de nous étonner parce que nous pouvons les contempler à toute heure. L'organisation des êtres dont nous sommes environnés est prodigieuse sans doute ; néanmoins nous considérons avec une sorte d’indiffé- rence ses admirables ressorts; notre esprit et nos yeux ont également soif de spectacles nouveaux, et la vue d’un phé- nomène qui ne nous était pas encore apparu, nous frappe toujours profondément. A peine fixons-nous un instant nos regards sur le chêne si majestuenx qui peuple nos forêts, et nous nous arrêtons longtemps silencieux devant les plus modestes plantes qui décorent les serres de nos amateurs. De là, Messieurs, la satisfaction qu’éprouve le botaniste quand il voit fleurir une espèce qui lui était inconnue, quand il voit s’accomplir des phénomènes auxquels la végé- tation qui l'entoure ne l'a point habitué. Pour nous, qui n’habitons que des régions tempérées , (1) Lue à la Société Linnéenne, dans son Assemblée générale du 2 Janvier 1850. ( 106 ) le spectacle que présente la vie de certains végétaux nous impressionne vivement. Je me rappelle avoir vu à Talence en 1828, les magnifiques fleurs de l’Agave americana ; celte plante extraordinaire après un siècle d'existence donna naissance à une hampe qui crût pendant plusieurs jours de 12 à 13 centimètres toutes les vingt-quatre heures et qui s’éleva bientôt à une hauteur d'environ cinq mètres. Vingt ans se sont écoulés depuis le jour où je vis cette belle plante , avec ses dix-huit rameaux chargés de fleurs : j'étais bien jeune alors et cependant j'éprouvais en contem- plant cette végétation grandiose, une impression qui ne s’est point encore effacée de ma mémoire. La plante dont je viens vous entretenir aujourd'hui, appartient aussi, Messieurs , au genre des Agave. Depuis environ douze ans , il y avait dans l’une des ser- res du Jardin botanique de Bordeaux , une endogène dont la tige haute d'environ trois décimètres , avait dans sa plus grande largeur un diamètre d'environ dix à douze centimè- tres ; des différents côtés de cette tige sortait une masse de feuilles jonciformes de quarante à quarante-quatre centi- mètres ; Les inférieures étaient recourbées vers la base de la plante, les supérieures avaient une direction opposée ; ces feuilles au nombre d'environ six-cents, étaient toutes termi- nées par une épine. Cette plante avait été envoyée au Jardin , par l'honorable et savant agriculteur M. Ivoy père , sous le nom de Bona- partea juncea ( Ruiz et Pavon). C’est le 19 Octobre dernier qu’elle commença à montrer au centre de sa tige, une hampe qui dès lesurlendemain 21, avait atteint quarante-cinq centimètres de hauteur. Curieux de suivre avec attention le développement d’une espèce qui nous était tout-à-fait inconnue nous résolûmes , mon père et moi, d'observer chaque jour les progrès de ce développe- ( 107 ) ment. J'ai donc mesuré toutes les vingt-quatre heures la longueur de cette hampe qui croissait pour ainsi dire à vue d'œil , et j'ai consigné le résultat de mes observations dans le journal suivant : FLORAISON DE L’AGAVE GEMINIFLORA. Hauteur | Progrès JOURS. de la depuis OBSERVATIONS. hampe. | la veille. 24 Octobre 1849, 02,45 | 0m,05 22 — 0, 50 | 0, 05 23 — 0, 58 | 0, 08 24 — 0, 65 | 0, 07 {Therm. 21° centig. 25 — 0, 755 | 0, 105 |Therm. 21° centig. 26 — > 84 , 085 27 = > 90 0, 06 28 —_ » 99 > 09 29 = » 09 | 0, 40 {Therm. 170,25. 30 — »18 | 0, 09 3 25% » 0, 05 Novembre » 21 0, 04 is 1, 345 | 0, 075 ; ES 1, 385 | 0, 04 4 — » 44 | 0, 055 ! — » 905 | 0, 065 ( » 99 y 045 — s 61 , 06 À — » 66 , 05 ] — , mi Fin 1 | ) Fr ’ » 095 . 17. as ? 82 065 Therm un » 85 5 08 ta ; 915 | 0, 065 me » 955 | 0, 04 — , 01 | 0, 055 ; un 2, 11 » 10 |Therm. 17°. — ;- 15 » 04 ] — » 19. | 0, 04 |On a chauffé la serre. pus ; 275 | 0, 08 É _ , 32 | 0, 045 os , 40 0, 08 du . é 0, 04 ; — , 0, 10 ge 4 ss 54: | 0: 00 Therm. — , 55 0, 01 4 ru d’élévation. sh 6 étam. fi- d + 4 55 # 00 st le LS Der. { De » 95 » 00 es éumÿ rs trifide, se - sions du périg. un peu révolu- tées (108 ) FLORAISON DE L'AGAVE GEMINIFLORA ({ suite ). Hauteur Progrès JOURS. de la depuis OBSERVATIONS. hampe, la veille, . Novembre 1849, rs 55 |0»,00 |Les premières fleurs entiè-|| me 0, 0 "55 ; rement épanouies. Eta- 30 — > 55 | 0, 00 mines dépassant de Où, 1 Décembre. 2, 58 | 0, 03 03 les divisions du péri- gone; sty è es étam € Les premières fleurs sont € . rain solaire : autres ( e sont ouvertes, immé- ( diatement au-dessus des ( première ( 1: © en à 09 19 Ad ) NO 19 NO NO 11060 00% es EE pale Val bain oi NE Pendant ces vingt derniers jours , les fleurs se sont Oo ste de la hauteur des Un grand nombre de feuil- les ont perdu leur épine terminale et présentent, … Ars ents à leur ex- = 10 em =) LS S 6 + MN D NN ee © SO © 6.0 % NN FIRE LIT DE SOS En jetant les yeux sur le tableau qui précède, on voit que l'accroissement de notre plante a été fort rapide, puisque le 21 Octobre, sa hampe avait seulement quarante-cinq centimètres de hauteur, et que le 31 du même mois, elle atteignait 1,23. La moyenne de son accroissement journa- lier avait donc été de 0,078. En Novembre, cette moyenne a êté d'environ 0,043 ; en Décembre, de 0,015 environ. L'ac- manon ( 109 ) croissement le plus rapide a été de 0,"105 du 24 au 25 Oc- tobre , jours pendant lesquels le thermomètre s’est élevé à 21° centigrades. Dès l'apparition des premières fleurs, je m’empressai d'en faire la description et je voulus comparer cette des- cription avec celle de quelques auteurs ; malheureusement le species de Linné ne fait pas mention de cette plante, et le Prodrome n’est pas encore arrivé aux endogènes dont elle fait partie. Aussi, mon embarras a-t-il été grand pour cette détermination. Depuis longtemps, en effet, il n’est plus question du nom de Bonapartea juncea, sous lequel M. Ivoy nous avait envoyé notre plante. Les uns en ont fait un Jucca, d'autres, un Tillandsia , d’autres un Littoca, d’autres enfin un Agave. M. Poiret, dans l'Encyclopédie (1), prétend que le genre Bonapartea de la Flore du Pérou , doit rentrer parmi les Tillandsia , d’où il n’aurait pas dû sortir; il appelle donc Tillandsia juncea, le Bonapartea juncea de Ruiz et Pavon, et il en fait une description qui ne saurait nullement conve- nir à notre espèce. Dans tous les Tillandsia , d’ailleurs, le calice est parfaitement distinct de la corolle ; l’un et l’autre ont trois divisions (2), tandis que dans notre plante il ny a qu’une seule enveloppe florale à six divisions parfaitement égales. La conséquence de cette première recherche était évi- dente : si notre plante est réellement le Bonapartea de Ruiz et Pavon, M. Poiret a complètement erré en la plaçant dans le genre Tillandsia. Existe-t-il véritablement une plante de l’hexandrie mono- (1) ExcycLorénie , Botanique (Supplément) , t. V , p. 309.— 1817. (2) Linnéïfrançais, par Vieq-d'Azir ,t. HE, p. 8. ( 110 ) gynie assez différente des espèces anciennement connues pour former un genre nouveau qu’on appellera Bonapartea, ou qu’on désignera par toute autre dénomination ? c’est ce que nous ignorons. Mais quant à nous , il nous a été impossible de ne pas reconnaître immédiatement à l'inspection des fleurs de notre Bonapartea, que cette plante appartient au genre Agave, si bien décrit par Linné, et les auteurs qui sont venus après lui. Aussi, nos investigations se sont-elles bornées à chercher. parmi les Agave décrits dans les livres que nous avons à notre disposition, une espèce dont les caractères s’accor- dassent avec ceux de notre plante. Mais, nous sommes tellement pauvres de livres scientifi- ques en province, que nous n’avons guère eu d'autre res- source que le Bon Jardinier, ouvrage plus horticole que botanique , pour nous sortir d’embarras. La Flore de Van-Houtte, si remarquable à plus d’un titre, ne renferme rien de relatif aux Agave. Nous avons donc consulté diverses éditions du Bon Jardinier et nous avons été assez heureux pour y trouver dans les éditions de 1838, 1839 et 1840, la description suivante d’un Agave geminiflora. « Agave geminiflura , Ker. de l'Amérique du Sud. Tige ligneuse , courte , de la grosseur du bras, terminée par un faisceau de feuilles nombreuses, les anciennes rabattues, les jeunes droites , lancéolées, linéaires, raides, longues : du centre de ces feuilles s'élève une hampe très-simple, haute de quinze à dix-huit pieds, couverte de fleurs gémi- nées, verdâtres , lavées de brun, a fleuri au Jardin du roi, en 1825 (1) », (4) Bon Jardinier 1840 , p, 548. CRE ) Évidemment , cette description convient en très-grande partie à la plante dont j'ai l'honneur de vous entretenir ; sans doute, nous n'avons pas obtenu une hampe aussi éle- vée; sans doute, l’épine qui termine la feuille aurait dû ne pas être omise ; mais tout le reste de la description s’accorde si bien avec le sujet de nos observations, qu’il estimpossible de ne pas nommer la plante qui a fleuri cette année à Bordeaux , pour la première fois, Agave geminiflora. Cependant après 1840, on chercherait vainement dans le Bon Jardinier, V'Agave geminiflora de Ker. Il a fait place au Littæa geminiflora de Brig, dont voici la descrip- tion , toujours d’après le Bon Jardinier (1 ). « Littæa geminiflora de l'Amérique septentrionale. Tige courte, terminée par de nombreuses feuilles en lanières, tronquée obliquement (2 ), renversée sur la tige. À un âge avancé , il sort du centre des feuilles une hampe simple, qui en vingt jours, s'élève à douze ou quinze pieds et se couvre dans la partie supérieure, de fleurs géminées , d’un blanc verdâtre. Il y a une variété dont les feuilles ont les bords filamenteux ( 3 ) ». Nous avons dû nous demander pourquoi quelques au- teurs avaient cru devoir séparer notre plante du genre Agave et créer pour elle un nouveau genre Litiæa. Nous devons déclarer qu’il est tout-à-fait impossible d'admettre ce nouveau genre qui ne nous parait reposer sur aucune base scientifique. (1) Bon Jardinier 1843 , p. 60 (2) Tronquée se rapporte sans FER à la tige , et renversée a que au singulier , se rapporte aux feuilles. Les horticulteurs ne de- vraient point être dispensés d'écrire en bon français quand ils pu- blient des ouvrages (3) Peut-être sont-ce les filaments qui se montrent à l'extrémité des feuilles, après la disparition de l’épine. ( 112) Voici, en effet, ce que nous lisons dans l'ouvrage de M. Noisette (1 ) : « Littée, Littæa ( Thaliab ) de l’hexandrie monogynie de » Linné, famille des liliacées de Jussieu (2). Corolle de » six parties relevées; étamines à filaments érigés, plus » longs que la corolle, à anthères versatiles. Du reste, » mêmes caractères que les Agave. » Littée à fleurs géminées. Littæa geminiflora (Thaliab); » Vucca Boscü ( Desf. ); Dracæa filamentosa ( Hort. ital. ) » du Brésil, feuilles très-nombreuses , étroites, longues, » pendantes, roulées , filamenteuses , hampe de huit à dix » pieds ; fleurs géminées, vertes en dehors, violettes en » dedans (3), avec les filets des étamines de la même » couleur ». Si la description de l'espèce est assez satisfaisante, celle du genre est au moins singulière ; que nous dit, en effet, M. Noisette : que les Lititæa ont une corolle divisée en six parties ; que leurs étamines ont des filaments érigés, plus longs que la corolle, et que les anthères sont versatiles. Mais tous ces caractères, sans en excepter un seul, appar- tiennent aux Agave. Je les trouve tous dans le Linné fran- çais de M. Vicq d’Azir ( 4), et on ajoute à l'énumération de ces caractères : Du reste, mêmes caractères que les Agave. En vérité, il faut que le désir d'innover soit bien fort chez certains auteurs, pour leur inspirer d'aussi futiles créations. (1) Supplément au Catalogue des plantes cultivées dans les jardins, (2) C’est une erreur; cette plante appartient à la famiHe des Nar- cisses, puisqu'elle a l'ovaire infère et que celui des liliacées est supère. (3) Ce caractère n’appartient nullement à l'individu que nous ayons observé. 5.2. (115 ) Si l’on s’en rapporte au Dictionnaire classique d'histoire naturelle, c’est le botaniste Brunhof qui aurait donné le premier au Bonapertea de la Flore du Pérou, le nom de Littæa geminiflora (A ). Telles sont, Messieurs, les recherches dont j'ai cru utile de vous faire connaître les résultats. Il suit de ces recher- ches que le Littæa geminiflora et V'Agave geminiflora, et peut-être plusieurs autres prétendues espèces, ne sont -qu'une seule et même plante. — Que cette plante a été rarement observée et mal décrite parka plupart des auteurs, qu'il convient en conséquence d’en publier une description complète ; c'est par là que je vais terminer, en plaçant sous vos yeux, un dessin dû au crayon exercé de M: Gérand aîné. Agave geminiflora Ker. Littoca geminiflora de (Brunhof, de Thaliab, de Brig) hexandrie monogynie de Linné ; endo- gènes phanérog., famille de Narcissoïdes. GENRE. — Périgone à six divisions profondes , légèrement révolutées, lancéolées, d’un jaune verdâtre en dehors. et brunâtre au dedans. Etamines : Six filaments filiformes, droits, s’élevant d’en- viron 0,03 au-dessus du périgone ; anthères plus courtes que les filaments, sillonnées, versatiles ; ayant environ 0,02 de longueur, supportées horizontalement par le filet. Pistil : Un seul, ovaire oblong, infère ; siyle beaucoup plus gros que les étamines, imparfaitement cylindrique , (presque triangulaire), plus petit que les étamines dans les premières fleurs, et aussi grand qu'elles , lorsque la florai- son est plus avancée ; stigmates en tête et trifides. Inflorescence : Fleurs en épi terminal, très-nombreuses (de 6 à 700 environ), géminées s’épanouissant d’abord à (1) Dict. classique d'Hist. naturelle, t. EX, p. 465. Tome ] (114) environ 4." 12 du sommet de la tige et s'épanouissant suc- cessivement au-dessus des premières quand celles-ci sont tries. Espèce.— Tige, haute d’environ 0®,25 d’un diamètre d’en- viron 0,12 dans sa partie la plus développée ; formée d’écail- les imbriquées, provenant de la base des feuilles; feuilles très-nombreuses, jonciformes, les extérieures pendantes, les intérieures droites , présentant à leur extrémité supérieure une épine qui, lorsqu'elle est tombée, laisse paraître des fila- ments provenant des filets que renferme la feuille; ces feuilles ont de 40 à 45 centimètres de longueur. Après un certain nombre d'années , une bampe s'élève avec rapidité du centre de ces feuilles ; cette hampe atteint dans l’espace d'un mois, une élévation d'environ 3 mètres ; son diamètre toujours le même , ne dépasse pas 0,03 centi- mètres environ. Cette plante remarquable a fleuri deux fois à Paris, et à Bordeaux, pour la première fois, en Novembre en 1849, dans une des serres du Jardin botanique. Au moment où nous terminions cette notice, M. Ranton- net, horticulteur à Hyères ( Var), nous écrit que le Littæa geminiflora, vient aussi de fleurir pour la première fois à Hyères où elle supporte un froid de 3 degrés Réaumur au- dessus de zéro. Sa hampe a atteint en sept semaines une hauteur de 5 à 6 mètres. Les fleurs du Littæa étaient entiè- rement épanouies le 25 Novembre à Hyères, précisément le lendemain du jour où elles se montraient à Bordeaux dans toute leur beauté. di (115 ) VII. ExrRaiT d'une Lettre de M. CAZENAVETTE, Secrétaire-général de la Société Linnéenne, à M. LATERRADE père, Directeur de ladite Société. Monsieur LE DIRECTEUR , La Société dans son avant-dernière séance générale m'a chargé de lui faire un rapport sur un mémoire que lui a transmis M. H. Brochon fils, concernant une nouvelle Pyrule fossile qu'il a trouvée dans les faluns de Léognan, et qu'il a dédiée à notre honorable Président, sous le nom de Pyrula Moulinsii. Aujourd'hui que la Géologie a fait de si grands pro- grès, que les divers terrains, et surtout celui de Léognan, ont été explorés avec tant de soin et de persévérance , c'est vraiment une découverte des plus intéressantes que celle d’une coquille aussi remarqua- ble par sa taille que par sa bonne conservation. C’est une véritable bonne fortune pour la science en même temps qu’un grand bonheur pour celui qui a trouvé cette pièce, et je ne doute pas que la Société Lin- néenne ne soit désireuse de porter ce fait à la con- naissance de ses nombrenx correspondants en votant l'impression dans ses Actes, du mémoire de M. H. Brochon. Outre l'attrait attaché à la constatation d’une espèce nouvelle , les personnes qui lisent les Actes de notre Société jouiront du plaisir que ne pourra manquer de leur procurer une dissertation intéressante sur les (416) deux genres Pyrule et Fuseau. Toutes n’adopteront pas sans doute les conclusions de l’auteur , car plu- sieurs auteurs pensent, en effet, que ces deux genres n’en doivent former qu'un seul, et que les Pyrules peu- vent tout au plus être considérées comme une subdivi- sion des Fuseaux. Ils s'appuient surtout sur ce que les animaux se ressemblent dans un grand nombre d’es- pèces appartenant à l’un et à l'autre genre , et c’est là très — certainement une considération puissante dont , malheureusement, le géologue ne peut tirer aucun : parti. On pourrait peut-être dire que pour toutes les Pyrules, excepté celles qui constituent la division des Ficoïdes, il existe un sinus particulier qui ne se trouve pas dans les Fuseaux; mais il est difficile de se prononcer quand on songe que Lamarck avait placé dans les Pyrules des coquilles dont on fait aujourd'hui des Fuseaux , telles que les Pyrula ternatana, elon- gata, etc., et que même il avait mis dans les Murex quelques espèces que lon fait aujourd'hui rentrer dans le genre Fusus. Quelle que soit l'opinion qu'on adopte à ce sujet, on ue pourra s empêcher de rendre justice à la sagacité avec laquelle l'auteur du mémoire dont il s’agit ici a fait ressortir les motifs qui le portent à considérer ces deux genres comme essentiellement distincts. On y verra jusqu'où peut aller l'intelligence jointe à un tra- vail constant, dans un âge encore tendre, et l’on ne pourra qu'applaudir à l'écrit de M. H. Brochon. L'in- sertion de ce mémoire dans nos Actes pourra d’ailleurs être un puissant stimulant, je ne dis pas pour ce jeune adepte des sciences naturelles auxquelles il se Le Fe L'Coustade adnat del Lyrule de des Moulins. Pyrula Moulinsii. 4641. de la Montagne S*Cermeviève, 6. (417) livre avec ardeur, malgré les études littéraires nécessi- tées par son âge et la carrière qu'il veut parcourir ; mais pour d’autres naturalistes qui pourront nous faire jouir ainsi du fruit de leurs travaux , en même temps qu'ils seront assurés de les voir portés à la connais- sance du monde savant. NOTE sur une Pyrule nouvelle de Léognan. | P. de Des Moulins. — P. Moulinsii. Nob. ). — Quelques mots sur le (renre. — Description et figure de l'es- pèce. Le conchyliologiste ou le géologue qui explore aujour- d'hui la commune de Léognan, rencontre à chaque pas d'anciennes fouilles dirigées avec autant d’habileté que de bonheur, et quand il arrive à la localité classique , au Mou- lin du Coquillard, il ne marche plus que sur un sol remué par la bêche des Basterot et des Jouannet. Après de si lon- gues et de si laborieuses recherches , que peut-il lui rester à découvrir ? Il comprend alors que sa seule ambition doit être de recueillir les plus belles espèces déjà décrites, sans se bercer de l'espoir téméraire d’ajouter aux catalogues quelque nouvelle richesse. Depuis plusieurs années en effet, une espèce nouvelle , une seule, a été trouvée dans la com- mune (4), et l’excessive rareté de la coquille explique (1) C'est un Murex que M. : a dédié à M. D, den bre de la Société Linnéenne, auteur d'importants mémoires les terrains tertiaires du Sud-Ouest de la France. Le seul it. lon connu existe, si je ne me trompe, dans la collection de M. Delbos. (118) comment elle à pa échapper si longtemps à l'œil avide des collecteurs. Je ne pouvais donc songer qu’à trouver les trop nombreuses espèces qui me manquent. — Mais le hasard, cet auteur de tant de découvertes, servit mieux l’éiève qu'il n'avait servi les maîtres : — Il est aveugle. Désireux d'ajouter de nouvelles espèces à celles que je possédais déjà des faluns de Léognan, je me rendis en Septembre 1847 , dans un taillis de chênes, situé aux bords de l’eau blanche, près du moulin du Coquillard. M'écartant des lieux précédemment fouillés, j’ouvris une petite tran- chée, et, à deux ou trois décimètres de profondeur, je trouvai une coquille incomplète, fracturée, mais qui , malgré son détestable état de conservation, me parut digne d’être re- cueillie avec soin. Je mis donc à part ce fragment qui ne me rappelait aucune coquille fossile ou vivante, et bien- tôt, à trois décim. plus bas environ, je rencontrai un autre individu de la mème espèce, d’une grosseur et d’une taille très - remarquables , comme on peut le voir par la figure qui accompagne cette note. Je le montrai à plusieurs grands amateurs de coquilles , et entre autres à M. Seurin, curé de Léognan, qüi a fait dans la commune des fouilles énor- mes; aucun ne put reconnaître mon espèce ; je consultai le mémoire de Basterot sur les fossiles du Département ; les invertébrés de Lamarck, les mémoires de M. Grateloup sur les fossiles du bassin de lAdour; enfin Deshayes ; — ce fut inutilement. Je parcourus toute la collection des Actes de la Société Linnéenne de Bordeaux, qui renferment de si nombreux et de si précieux documents sur l’histoire na- turelle de la Gironde; — je ne trouvai nulle part un seul mot sur ma coquille. Je la plaçai alors dans ma collection sons le nom de Pyrula..…., car c’est ainsi que de prime-abord j'appelai mon espèce une pyrule, avec une audace que le succès seul pouvait légitimer. Quant à : (119) mon premier fragment, sachant que l'espèce manquait aux collections du Musée , je le promis à M. H. Burguet. Mais ce fragment s'était perdu. Alors, en Septembre 1848, je repartis pour Léognan, et j'en revins avec un troisième indi- vidu , recueilli dans le même lieu que les précédents, mais très fracturé ; — je le déposai au Cabinet de la Ville. Cependant le temps s’écoulait ; consacrant mes rares ins- tants de loisir à faire des excursions botaniques et à en pré- parer les produits, j’oubliai ma Pyrule. Il y a seulement “quelques jours, en visitant mes fossiles , je la revis, et je résolus, pour la classer définitivement, de n’épargner aucun travail, aucune recherche : je visitai d’abord la belle collection de M. Delbos; ce fut en vain; je me présentai alors chez M. Grateloup , qui, avec une bienveillance dont je le remercie vivement, me montra son magnifique cabi- net, sa nombreuse et savante bibliothèque ; nous fouillà- mes ensemble tous les ouvrages écrits sur les fossiles des terrains tertiaires d'Angleterre, de Norwège , de Belgique, d'Amérique ;..….. sur les fossiles du terrain sub-apennin d'Italie, des faluns de la Tourraine, etc..…..; Sowerby, Nyst, Brocchi....., aucun auteur enfin ne disait rien de ma coquille. Je devais donc la regarder comme nouvelle , et il fallait lui donner un nom. Mais alors je dus réfléchir sérieusement ; j'avais vu dans la collection de M. Grateloup deux belles espèces que leur analogie avec la mienne m'avait fait remarquer. Ces deux coquilles, dont je ferai plus tard ressortir les rapports et les différences avec mon espèce de Léognan, étaient l'une un Fuseau ( Fusus quadricostatus. Wagn. ), l’autre une Pyrule ( Pyrula Jauberti. Grat.). Or, ces deux espèces appartien- nent évidemment au même genre : toutes deux sont ou des Pyrules ou des Fuseaux. Classer mon espèce dans les fusus, ( 420 } c'était donc rompre en visière avec M. Grateloup ; en faire une Pyrule, c'était déclasser du mème conp le fusus de Wag- ner. L’alternative était effrayante pour un élève en conchy- liologie comme moi : mon oplion était nécessairement une censure ; aussi, je me serais renfermé dans mes doutes ou mes convictions , sans oser me prononcer , si je n’avais eu pour m'étayer l’assentiment de MM. Delbos, Burguet, Grate- loup et Des Moulins. Sans doute, dans ma conviction première, spontanée , J'appelai ma coquille une Pyrule ; mais je ne pouvais m'en tenir à un premier mouvement qui, en science , bien en- tendu , est loin d'être toujours bon. I fallait donc réfléchir et étudier. Après de consciencieuses recherches, je erois devoir maintenir mon espèce dans le genre Pyrule : l'étude était difficile, et j'ai besoin de beaucoup d’indulgence dans l'examen des motifs sur lesquels j'ai fondé mon opinion : Je regarde mon espèce | comme une Pyrule : 1.° Parce que les auteurs anglais, peu partisans des in- novations récentes introduites dans la classification lin- néenne, ont pu maintenir, sinon dans les murex de Linné, du moins ( comme M. Alcide d’Orbigny (1) ), dans les fusus de Bruguières , une espèce dont Lamarck et la plupart de nos auteurs français eussent fait une Pyrule. 2.° Parce que la description que donne Lamarck de son genre Pyrule, convient beaucoup mieux à ma coquille que les caractères génériques de son genre Fusus. 3.° Enfin parce que mon espèce a une évidente analogie avec une section du genre Pyrule , de np - (1) : « Ce Fuseau ( fusus infracretaceus d’Orb. ), pourrait aussi bien être classé dans Le genre Pyrula, mais ce genre n’étant qu'artificiel, j'ai mieux aimé le mettre dans le grand genre Fusus ( de Brug. ). ( 121 } Je vais donc m'attacher à montrer que ma coquille est une Pyrule et qu'elle ne saurait être un Fuseau. Nous ver- rons plus tard si le genre Pyrule de Lamarck est un genre artifiriel qui ne doit pas être maintenu. J'ai dit que les caractères génériques que présente mon espèce , étaient ceux des Pyrules et non ceux des Fuseaux. Examinons les caractères distinctifs de ces deux genres, ainsi que Lamarck les à établis dans son grand ms des invertébrés. 4. G. FUSUS. — Testa fusiformis aut subfusiformis; me- dio aut infernè ventricosa ; spira elongata. Coquille fusiforme ou subfusiforme , ventrue dans sa par- -tie moyenne ou inférieure ; spire élevée et allongée. 2. G. PYRULA. — Testa subpyriformis, supernè ventri= cosa , Spira brevis, interdüum subretusa. Coquille subpyriforme, ventrue dans sa partie supérieure, ayant la spire courte , surbaissée quelquefois. De ces divers caractères quels sont ceux qui conviennent à mon espèce ? LE. — esta fusiformis aut subfusiformis. — Pt. sub- pyriformis. Ma coquille n’est ni fusiforme , ni subfusiforme. {voyez la fig.). Elle est plutôt subpyriforme, surtout si l'on se représente un individu à queue parfaitement intacte, ( ce qui n'existe pas dans l’unique échantillon que je possède, et dont la fidèle reproduction accompagne cette note). En effet, la queue complète, en donnant à la partie inférieure de la coquille plus de longueur , la ferait bien davantage pa- Î yriforme , et nous servirait beaucoup aussi dans l'appréciation: du caractère suivant (supernè ventricosa).— Ajoutons que ma coquille a la bouche parfaitement pyriforme (12) et le canal bien ouvert : ce qui est rare chez les Fuseaux vé- ritables. 2,me F._— Medio aut infernè...—P. supernè ventricosa — Le deuxième caractère générique consiste donc dans le ren- flement du test, selon qu’il se montre dans la partie supé- rieure, moyenne ou inférieure de la coquille. Cette distinc- tion est constante chez les diverses espèces décrites par Lamarek ( P. candelabrum, patula, papyracea , melongena, spirillus , clava, etc.). Or, cette forme existe chez ma co- quille, un peu moins sensible, il est vrai, que chez quel- ques autres espèces dont la spire est plus courte. Ce ca- ractère , qui donne à mon espèce un degré de ressemblance de plus avec la Pyrule de Jaubert et le Fuseau à quatre côtes , la rapproche beaucoup aussi de la Pyrula squamosa de Lamarck, cette pyrule à côtes squameuses, que l'on prendrait au premier coup-d’œil pour un Murex roulé. 3.me F, Spira elongata. — P . spira brevis.— La spire de ma coquille n’est certainement pas élevée et allongée ; elle serait bien plutôt courte, puisque des cinq tours dont elle se compose, les quatre premiers ne font guère plus du quart de la coquille. Aissi, malgré les difficultés qui arrêtent trop souvent dans la distinction des deux genres, et en nous servant des ca- ractères génériques mêmes de Lamarck, nous voyons que ma coquille est subpyriforme , ventrue plutôt dans sa partie supérieure que moyenne , et que sa spire ne peut être re- gardée comme élevée et allongée. Je suis donc en droit de la classer dans le G. Pyrule : mais le motif suivant est plus décisif encore : je vais comparer, en effet, ma oil. non plus à des caractères trop souvent difficiles, mais à des coquilles bien connues , et que des auteurs pris ont classées dans les Pyrules. ( 123) Ma coquille à les rapports les plus évidents avec la sec- tion Rapum du G. Pyrula. La bouche, le canal, la colu- melle, l'ombilic sont semblables dans les Raves et mon es- pèce. Dans le type de la section ( P. rapum). la spire est plus surbaissée; dans mon espèce, elle s’allonge un peu, et ressemble, ainsi que je l'ai dit à la Pyrule squa- meuse. Du reste, je ne crois pas qu'il faille réunir ma coquille à la section rapum; mais je dis qu’elle a de grands rapports avec les espèces, qui forment déjà cette section. Quiconque, en effet, les a vues une fois ne pourra s’em- pècher d’être ici de mon avis. M. Chenu à du reste, der- nièrement , classé dans les Pyruies une espèce { P. Deles- serti), qui avait les mêmes droits que la mienne à n'être pas un Fuseau; et il a figuré une autre -espèce fort rare ( P. fusiformis), que sa forme rapprocherait bien au- trement que les précédentes du genre Fusus. Ainsi ma coquille se confond avec les Pyrules-raves par plusieurs caractères essentiels ; elle ne s’en distingue que par sa spire mieux étagée. En me fondant sur ce dernier caractère , je crois qu’elle forme avec la Pyrule de Jaubert et le Fusus quadricostatus un petit groupe à part, intermé- diaire entre les véritables Pyrules, et les véritables Fuseaux, c’est-à-dire les Pyrules à spire courte, et les Fuseaux à spire élevée. Du reste, chacun sait quelles difficultés offre souvent la séparation de deux genres : mais si les caractères sont quel- quefois insuffisants, doit-on dire que le genre est artificiel, ainsi que l'a { . Alc. d'Orbigny ? Sans doute, le G. Py- remanié, et les vicissitudes qu'il a déjà sont pas encore finies; mais ne se distingue- ement des Fuseaux par sa forme elle-même, son oibilie, etc.…...? Il est vrai que certains Fuseaux sont (124 ) ; plus subpyriformes que certaines Pyrules (Fusus bulbifor- mis du calcaire parisien) ; mais Le type Fuseau n'est-il pas bien distinct du type Pyrule? Entre les deux genres il y a une certaine affinité qui peut quelquefois conduire le classifica- teur à les confondre; mais personne ne l'ignore : Natura non facit saltus; et c’est une preuve de plus en faveur de cette parole de l’homme qui étudia la nature entière. Bien des coquilles ont été tour à tour Pyrule et Fuseau; bien d’autres ont êté Fuseau et Fasciolaire. La Pyrula minax est le Fusus minax de quelques auteurs ; le Fusus Burdigalensis s'appelle aussi Fasciolaria Burdigalensis. C'est que les deux genres Py- rula et Fusus, dont la distinction ne date que de Lamarck, ont encore besoin d’être longuement étudiés pour arriver à une nette délimitation. Linné dans son unique genre Murer confondait toutes les coquilles canalifères : Basi canalicu- latæ ; et cette phrase , générique pour lui, distingue aujour- d’hui une famille tout entière, Bruguières, tout en sépa- rant les Fuseaux des Murex (les premiers n’ayant pas de bourrelets constants sur la spire), Caractère qui peut s'ap- pliquer aussi bien aux Pleurotomes, aux Fasciolaires , etc. ) confondait encore les Pyrules avec les Fuseaux, et ce serait encore l'opinion de quelques conchyliologistes; mais Lamarck se fondant sur une différence de facies , ordinairement très- considérable, institua son genre Pyrula, dans lequel il réunit tous les Fuseaux à spire courte, s'appuyant en même temps sur cet air de famille qu’il ne faut jamais mépriser, et qui, s'il ne sert pas tout seul, vient au moins à l'appui des preuves que les caractères essentiels peuvent fournir. Ainsi le résultat de cette étude est double pour moi : je crois, {.° que ma coquille est une Pyrule, et qu'elle fait dans ce genre un groupe distinct, avec le Fusus quadricos- tatus de Wagner , et la Pyrula Jauberti de M. Grateloup.— (125) Je déclasse ainsi le Fusus de Wagner pour le réunir avec nos deux espèces françaises dans le genre Pyrule. 2.0 Je crois que les deux genres Pyrula et Fusus sont tous les deux parfaitement naturels ; mais qu’ils ont besoin l’un et l’autre d'un complet remaniement, et ce résultat ne sera pas at- teint tant que les conchyliologistes, méprisant le genre de Lamarck, confondront pêle-mêle dans les Fusus de Bru- guières des espèces qui ne peuvent pas y rester. — Loin de regarder le G. Pyrula comme artificiel, il faut donc s’efforcer de lui donner des bases plus solides et surtout des limites plus tranchées. Si j'exprime aussi librement cette double conviction, c'est que je peux l’étayer sur l’assentiment de maitres dont l'autorité est la plus sûre garantie de la vérité. MM. Grate- loup et Des Moulins regardent ma coquille comme une Py- rule, et quant à l’opinion que je porte sur le genre lui- même , c'est celle de M. Chenu : « Le genre Pyrule, dit-il, se compose d'espèces qui présentent entre elles des diffé- rences si prononcées, que depuis longtemps on a senti la nécessité d'y faire quelques changements ».— C’est en effet en étudiant à fond les deux genres de Lamarck que lon pourra arriver à la vérité. Voici maintenant la description Linnéenne de ma Pyrule. Je l'ai accompagnée d'un excellent dessin que je dois au crayon vigoureux d’un ami, M. L. Courtade, qui a bien voulu faire servir son talent à la cause de ma nouvelle es- pèce. Qu'il me soit. permis aussi de remercier MM. Delbos , Burguet, Grateloup et Des Moulins de toutes les bontés qu'ils ont eues pour moi, et de l'extrême bienveillance de leurs conseils. (12%) PYRULE DE DES MOULINS.— PYRULA MOULINSI. (Nos.). P. tesla ovato-globosa, ventricosa , crassa, ponderosa , uliimo anfractu transversim 4 — cœteris 2-costatis ; costis approæimatis, subnodulosis, crassis, costulis minoribus striüsque numerosis interjectis ; apice obtusa; spira mediocri , anfractibus quinis, supra sub-planulatis ; apertura ampla, pyriformi ; canali profundo, subobliquo; labro simplici, crenulato, acüto, intüs lævigato; lamella columellari crassa; columella rectiuscula , lævissima ; cauda subobliqua , brevi, latè umbilicata. Dimensions. —Longueur totale. . . . .. 72 millim. M5 NOR 59 millim. Largeur du dernier tour de spire.... 5 centim. Coquille ovale-globuleuse, ventrue, épaisse, pesante ; le dernier tour de spire est marqné de quatre côtes, les autres n’en offrent que deux; — Côtes rapprochées , subno- duleuses, épaisses, entre-mêlées de côtes plus petites, et de stries nombreuses transversales et longitudinales ; —le premier tour de spire est obtus ; — Spire médiocre, formée de cinq tours, qui sont presque planes supérieurement ; — Bouche large, pyriforme ; — Canal profond, un peu obli- que; bord extérieur simple, crénelé tranchant, lisse à l'intérieur; bord columellaire épais ; — Columelle presque droite , très-lisse ; — Queue un peu oblique, assez courte, largement ombiliquée. Rapports et Différences. -- Cette belle espèce, d’un facies particulier et que je ne connais à aucune des coquilles fos- siles de nos terrains tertiaires, { excepté la Pyrule de Jau- bert), ressemble à cette dernière espèce ; mais elle est plus sr peer rene (127) ventrue, plus épaisse, fortement rugueuse, subnoduleuse au lieu d’être presque lisse; les tours de spire sont un peu convexes, et non pas concaves, canaliculés à leur partie supérieure ; les côtes sont très-nombreuses, et non pas seu- lement au nombre de trois; sa bouche est moins angu- leuse ; son labre, crénelé et non droit, présente une marge formée par la couche extérieure du test ; sa queue est moins large; mais l’ombilic est semblable dans les deux ‘espèces. La Pyrule de Des Moulins ressemble aussi, et bien plus encore , au Fusus quadricostatus (Wagn.), la taille, la forme, l'ombilic, la queue, la columelle sont semblables dans les deux coquilles ; mais dans le Fuseau, le test est moins épais, assez lisse, la bouche est plus anguleuse, et le bord est droit, comme dans la Pyrule de Jaubert; comme chez elle, les tours de spire sont supérieurement canaliculés ; ce Fu- seau se distingue au premier abord de ma Pyrule par les 4 côtes qu’il présente : ces côtes, d’une extrême hauteur, le font paraître 4-cariné ; elles forment en outre quatre sil- lons, étroits mais profonds, dans l’intérieur du labre, qui est très-lisse dans la Pyrule de Des Moulins. Ha8.— Fossile dans les faluns jaunes de Léognan (Gi- ronde).— T. miocène-inférieur. — RRR. ExPL. DE LA FIGURE. — Pyrula Moulinsii. Nob. 1. Coquille vue en dessus. Id. vue en dessous. Nota.— La coquille a, sur la figure , 73 millim. de lon- gueur ; mon échantillon n’en a que 72. La queue est frac- turée dans la figure comme dans l'individu de ma collection. Rapports géologiques. — Les deux espèces déjà décrites appartiennent à des couches supérieures aux faluns de Léo- gnan , où j'ai découvert l'espèce que je viens de décrire ; toutes trois appartiennent cependant aux terrains tertiaires. ( 128 ) La Pyrula Jauberti s'est rencontrée dans les faluns jaunes de Salles, que les géologues distingués rapportent au ter- rain sub-apennin d'Italie; le Fusus de Wagner provient des couches pliocènes de Virginie; ces deux coquilles ont donc une station géologique analogue. La Pyrule de Des Moulins appartient , au contraire , à la couche inférieure de la formation miocène du bassin de la Gironde. J'avais classé et décrit cette Pyrule ; il ne me restait plus qu'à lui donner un nom spécifique, avant de faire part de celte note à la Société Linnéenne ; — Je n'ai pas hésité. — J'ai dédié cette superbe espèce à son Président. — Puisse, M. Charles Des Moulins, qui me prodigua dans mes pre- miers efforts de si bienveillants encouragements , accepter cette faible marque de ma respectueuse affection ! Bordeaux , Janvier 1850. E. Hevry BROCHON. ans. ST nn SR: PPT (129) VU. De l'Origine des SILEX DE LA CRAIE ; Par M. Marcel de SERRES, Professeur à la Faculté des Sciences à Montpellier, correspondant. La forme tuberculeuse des silex de la craie est due à ce que la matière dont ces silex sont composés, a pris la place occupée antérieurement par des Zoophytes marins , proba- blement du genre des A/cyonium, ou de celui des éponges. — Les silex ne doivent donc pas leur origine à ces corps organisés ; ils les ont seulement remplacés dans la masse de la craie. I. OBSERVATIONS PRÉLIMINAIRES. Pour remonter jusqu'aux causes qui ont produit les silex si répandus dans la craie blanche, il faut avant tout se fixer sur les propriétés de la silice , dont ils sont essentiellement composés. Ces propriétés une fois connues, il deviendra facile de comprendre de quelle manière les silex qui en sont provenus, ont pu se former. Ce n’est pas seulement sur cette question que l’on a porté récemment l'attention des observateurs, mais sur plusieurs autres qui s’y rattachent d’une manière plus ou moins in- time. Il est encore essentiel de s'assurer si les silex peuvent être considérés comme des restes des êtres organisés qui, pendant leur vie, auraient absorbé la silice, et en même temps, si l’on pourrait en trouver des preuves dans les silex eux-mêmes ? On s’est également demandé, si les moyens à Tome XVI. 9 ( 130 ) l'aide desquels les animaux s’assimilent maintenant cette substance, sont suffisants pour expliquer des faits aussi particuliers. Il faut enfin reconnaître dans quel état de solubilité, de liquidité , de combinaison ou sous quelles autres circons- tances se trouve la silice, quand elle est assimilée par les organes des végétaux et des animaux. Si les faits ne per- mettaient pas de concevoir que les silex en rognons dissé- minés au milieu des bancs de la craie blanche, ainsi que les conditions particulières de leur gisement, ont été pro- duits par la silice qui s’y trouvait à l'état liquide, on serait alors forcé d'expliquer leur formation d’une tout autre ma- nière: Nous porterons donc notre examen sur les propriétés de la silice , mais uniquement sur celle dont l’étude pourra fa- ciliter l'explication des phénomènes qui vont nous occuper. Nous dirigerons ensuite notre attention sur la manière d’être des silex de la craie et les diverses circonstances de leur gisement. Cette étude nous conduira naturellement à dire quelques mots de la nature et du mode de formation de la craie, dans les masses de laquelle se trouvent les silex dont nous cherchons à reconnaitre l’origine. Nous passerons ensuite à l'examen des faits que l’on a supposés favorables à l’origine inorganique des silex de la craie. Nous verrons qu'ils annoncent bien que leurs nodu- les ont été produits par la matière brute, mais que celle-ci a pris la place des corps organisés disséminés dans la masse de la craie. Il y a eu ici remplacement par la substance inor- ganique, de celle qui formait les êtres vivants, sans que pour cela , il se soit opéré entre elles une substitution quelcon- que. C'est uniquement dans ce sens qu’il faut entendre lori- gine inorganique des silex de la craie, qui se sont formés (131) dans les parties de la ‘masse de cette roche, où il a existé des restes de corps vivants. Ces derniers, véritables centres d'attraction pour la matière siliceuse, ont été la cause de la forme en nodules ou en rognons, qu'ont pris les silex de la craie. Cette disposition toute irrégulière démontre que des moules dans lesquels la silice s’est logée, ne devaient pas présenter la moindre régularité. Lorsque les débris des êtres vivants n’existaient pas dans les masses crétacées , des molécules sablonneuses ou d’une tout autre nature ont servi de centres d'attraction à l’acide silicique, qui , en les entourant, a pris la forme de corps sphériques plus ou moins irréguliers. Mais, lorsqu'un centre d'attraction a manqué à cet acide, il s’est solidifié entre les interstices des couches crayeuses , dépôts dont l'étendue a été nécessairement en rapport avec sa quantité et sa liqui- dité. Enfin, comme certains dépôts siliceux, paraissent avoir été formés par des animaux , il importe de reconnaître com- ment ces êtres élaborent la silice, et comment cette sub- stance presque insoluble, pénètre cependant dans les mailles de leurs tissus. 11 en est de même pour les végétaux ; car non-seulement ils ont été transformés en matière siliceuse, mais celle-ci en a reproduit exactement la forme et jusqu’au moindre de leurs linéaments. Nous terminerons cet aperçu par l'examen des consé- quences auxquelles il conduit, et des réponses qu'il four- nit aux questions que soulève un sujet aussi délicat. IL. DES PROPRIÉTÉS DE LA SILICE. La silice toute formée est à peu près insoluble dans l’eau; cependant, les phénomènes qui se passent à la surface du globe , prouvent que cette substance acquiert dans certaines (132) circonstances une assez grande solubilité. En effet, les gra- minées en contiennent des quantités plus ou moins consi- dérables ; la présence de cette substance dans ces plantes, a porté tous les peuples à recouvrir leurs habitations avec des joncs et des roseaux. Ces végétaux , les moins attaqua- bles par les agents extérieurs et par conséquent les moins destructibles , doivent ces avantages à la silice qu'ils ren- ferment. Les plantes, n'ayant pas le pouvoir de former des corps simples de toutes pièces , tirent nécessairement cet acide du sol sur lequel elles végètent. Comme elles ne se nourrissent que d'éléments gazeux ou de corps solides dont la dissolu- tion est complète, il faut que la silice se trouve à cet état dans le sein de la terre; autrement, cette substance ne pourrait s’introduire dans les canaux étroits et s’y déposer en quantité plus ou moins considérable. La silice paraît y être en assez grande proportion, car les végétaux incinérés en fournissent presque tous, surtout les monocotylédonés. D'un autre côté, il suffit de frotter avec force dans l'obscurité des tiges de roseaux et de bambou, pour en faire jaillir des étincelles lumineuses. Ces étincelles dépendent de la silice que ces plantes contiennent : du moins Humpbhry Davy en a reconnu la présence dans l’épiderme de l’Arundo phragmites, de la canne à sucre, du bambou, et de tous les roseaux. Il en a également rencontré dans les tiges du froment , de l'orge, de l'Anthoæanthum , du Poa pratensis et dans plusieurs autres graminées. Ces faits sont si connus dans l'Inde, que l'on rapporte certains incendies au frottement des bambous les uns contre les autres. Il ne suffit pas cependant de prouver que la silice doit s'introduire dans les vaisseaux des graminées; mais il faut encore déterminer de quelle manière ce corps leur est fourni. te masse «um nds 0 par Béchet, ( 133 ) L'eau est l'agent à l’aide duquel les substances nécessai- res au développement des plantes, y pénètrent. Ainsi d'a- près M. Piobert, l'azote en dissolution dans l’eau toujours aérée, y arrive au moyen de leurs racines. Il en est dè même lorsque l'azote leur est fourni par les vapeurs am- moniacales qui existent dans l'atmosphère, à la vérité en très-petite proportion. Ces vapeurs, entraînées par l’eau des pluies dans l’intérieur du sol, seraient aspirées et élabo- rées par les vaisseaux des plantes. Si la sève de plusieurs végétaux dicotylédons , tels que le bouleau, le charme , le hêtre, le marronnier, l’orme et la vigne, ne paraît pas renfermer de la silice , il n’en est pas de même de celle du guaduas ( Bambusa gaduans) et du bananier ( Musa parasidiaca) (1). On sait que les monoco- tylédons sont généralement chargés d’une plus grande quantité de silice que les dicotylédons. Aussi ne serait-il pas impossible que les faibles propor- tions de cette substance , renfermées dans la sève des pre- miers de ces végétaux , eussent été négligées par les chi- mistes qui se sont occupés de leur analyse. Ceci est d’au- tant plus probable que, comme il existe deux sortes de sève, l’une ascendante et l’autre descendante , il est difi- cile , peut-être même impossible de les recueillir isolément. Aussi les résultats analytiques que nous en possédons, n'of- frent pas toute l'exactitude désirable, du moins aux yeux de plusieurs chimistes et entr’autres de M. Boussingault. On peut voir dans l'ouvrage de ce dernier (Tom. I, pag. 329), combien est grande l'absorption de la silice faite par les racines dans le sol sur lequel elles croissent. Cette ab: (1) Economie rurale considérée dans ses rapports avec la chimie, r M. PE - Tome 1.°", pag. 118 et suivantes. — Paris, ( 134 ) tion est plus considérable chez le froment que chez les di- cotylédons tels que les navets, les trèfles et les topinam- bours (1), quoique la proportion assimilée par ces derniers soit encore assez notable. Ces faits prouvent que l’acide si- licique, moins essentiel aux plantes que les principes salins, alcalis et phosphates , leur est cependant nécessaire. Les cendres des tourbes et du plâtre, dont on se sert comme amendement , sont riches en silice ; du moins cette substance en compose la plus grande partie, c’est-à-dire près de la moitié de leur poids. A l’aide de ces cendres, le” sol est pourvu des principes minéraux que peuvent exiger les récoltes. Le véhicule qui apporte dans l’intérieur des végétaux la silice nécessaire à la rigidité et à la solidité de certains d’entre eux, est donc l’eau, le plus grand dissolvant de la nature. Mais comment ce liquide peut-il dissoudre la silice, cette substance à peu près insoluble ? II le peut parce que cette insolubilité n’est point absolue, et qu’elle est modifiée par des circonstances particulières. En effet, la silice est soluble à l’état naissant ; aussi la plupart des eaux continentales en contiennent des propor- tions notables. Celles du puits de Grenelle en ont offert une certaine quantité à M. Payen; il en est de même des eaux de la Seine et de la plupart des autres fleuves. La faculté dissolvante de ce liquide disséminé à la surface du globe, et à plus forte raison des eaux souterraines, nous permet d'expliquer les diverses formations siliceuses, notamment celle des spicules dans les Spongilles. (1) Les graminées renf t si grande quantité de silice, que lorsque la foudre tombe sur des meules de paille, et les enflamme , il se forme constamment, par leur combustion, des matières vitreuses en quantités souvent considérables. ( 135 ) Si les eaux souterraines ont une faculté dissolvante plus prononcée que les eaux continentales, elles le doivent peut- être à l'augmentation de pression qu’elles éprouvent dans le sein de la terre. On sait l'influence que l’accroissement de la pression exerce sur la faculté dissolvante de l’eau sur les corps qui y sont plongés. Du moins, la dissolution du sous-carbonate de chaux et de plusieurs autres sels terreux ou alcalins est due en partie à cette cause. La silice est également soluble dans l’eau , lorsque ce li- quide est porté à une température élevée, surtout lorqu'il contient de la potasse ou de la soude. Aussi cette substance se trouve dans la plupart des eaux thermales qui contien- nent l’une ou l’autre de ces bases alcalines. Les eaux des Geysers de l'Islande en offrent des quantités si considéra- bles, qu’elles forment des dépôts étendus , auprès des lieux d’où elles s’écoulent. Une partie de cette silice est peut-être dissoute par le choc réitéré de la vapeur d’eau qui s’échappe des mêmes Geysers contre les parois échauffées de leurs réservoirs. S'il en était réellement ainsi, la silice pourrait être dissoute non- seulement par l’eau portée à une haute température, mais encore par sa vapeur. Il résulte du moins des recherches de M. Jeffrys que l'eau exerce une action très-puissante sur la silice et les minéraux siliceux , lorsqu'elle est portée à une grande chaleur. Alors sa vapeur dissout et enlève la plus grande portion de la si- lice qui se trouve combinée avec d’autres corps dans les différentes espèces minérales soumises à son influence. Cette vapeur a un effet si énergique sur cette substance, qu'il se fait aussi bien ressentir sur les minéraux compactes que sur ceux qui sont extrêmement divisés ou en poussière. Les explications de M. Jeffrys jettent du reste un grand jour sur les phénomènes que présentent les sources chau- 136 ) des des Geysers et d’autres semblables, ainsi que sur la présence d’enduits de silice dans les roches et les filons (4). On ne peut du reste rapporter à l’action de la vapeur d’eau, les dissolutions de la silice qui ont produit et pro- duisent encore les cristaux de roche. Ces cristaux ne se forment que lorsqu'ils ont été complètement dissous, et les phénomènes de ce genre s’opèrent dans des eaux dont la température est peu élevée. Les silex, surtout les agates et les calcédoines , paraissent le résultat de la solidification de la silice en consistance gélatineuse. Cette substance est aussi parfois restée en cet état ; elle forme pour lors des amas de silice pulvérulente dont les propriétés sont assez particulières. Ainsi, elle est soluble à la fois dans une lessive de potasse caustique et dans les acides. Cette substance à l’état d’hydrate a été désignée sous le nom de silice gélatineuse. La silice joue un rôle assez important dans la nature : on l’a rencontrée du moins dans plusieurs eaux thermales , ainsi qu’à l’état de mélange dans certaines roches. M. Sau- vage l’a reconnue dans les grès verts du département des Ardennes , qui en contiennent jusqu’à 56 centièmes (1). Ce qui est non moins remarquable, la silice gélatineuse s’y est mélangée avec le carbonate de chaux, preuve que ces deux substances ont été en même temps en dissolution dans les eaux des mers. _ La silice a été également trouvée à l’état gélatineux dans le département de l'Allier par M. Guillemin , et dans ceux du Puy-de-Dôme et du Rhône, par M. Fournet. M. Dufrénoy qui a soumis la silice terreuse au microscope a reconnu qu'elle est composée des mêmes infusoires (4) Statistique minéralogique et + du département des Ar- dennes, par MM. Savvacr et B., ( 437 ) qu'Ehrenberg a découverts dans le tripoli de Bilding. Elle n'a donc pas les analogies qu’on lui a supposées avec les tufs siliceux des Geysers en Islande , et ne peut être con- sidérée comme un dépôt des eaux thermales. Elle appar- tient au contraire, comme les tripolis que nous venons de citer, aux terrains tertiaires. La silice, l’un des acides les plus faibles, n'offre pas la saveur acide qui caractérise les autres corps de cette espèce, peut-être en raison de son insolubilité; elle ne jouit pas non plus , lorsqu'elle est cristallisée, de la propriété de se dissoudre dans l’eau. Du moins lorsqu'elle forme le quartz ou le cristal de roche qui la représente à son plus grand état de pureté, elle n’est soluble dans l’eau ni à chaud ni à froid. Ce corps est alors sans saveur et sans action sur les teintures végétales. Toutefois l'acide silicique réduit en pou- dre fine, se dissout par une ébullition prolongée avec des lessives alcalines. L’hydrate de silice paraît soluble dans l'eau ei peut être absorbé par ce liquide. Du moins, l’état dans lequel la solubilité de cette sub- stance est le plus prononcé, c’est lorsqu'elle est unie à une certaine quantité d’eau qui la constitue hydrate. Mais pour que cette solubilité ait lieu sous l'influence dissolvante de l’eau seule, il faut que la cohésion ne se soit pas trop exer- cée entre les molécules de la silice. D’autres circonstances, comme la présence d’une base qui en se combinant avec elle, produit un sel soluble , sont aussi favorables à sa com- plète dissolution. Ainsi, s'explique la présence de la silice en proportions assez considérables dans les eaux : telles sont les sources des Geysers de l'Islande, qui tiennent l'acide silicique en solution, à la faveur d’une certaine quantité d’aleali. (1) Bibliothèque universelle de Genève. Tom. LIX, pag. 399. ( 158 } D'après les recherches intéressantes de M. Ebelmen , la silice est également soluble dans l’éther ; mais le liquide éthéré où elle se trouve en solution, exposé à l’action pro- longée d’une atmosphère humide , finit par se solidifier en une masse transparente. Ce produit très-tendre et très-fra- gile dans les premiers jours qui suivent sa solidification, se contracte de plus en plus sous l'influence de l'air humide, tout en restant diaphane (1). L'hydrate silicique est assez dur pour rayer faiblement le verre ; il possède une grande cohésion. Son état, sa cassure et sa transparence sont comparables à ceux du cristal de roche le plus limpide. Sa densité est de 1,77. Le mêmé observateur a obtenu , en apportant une légère modification au-procédé de la préparation de l'hydrate sili- cique, une substance opaque, qui devient transparente quand on la met dans l’eau : elle forme alors un véritable hydrophane. On peut donc reproduire artificiellement cette variété de quartz si rare et dont les propriétés remarqua- bles ont fixé l'attention des minéralogistes. Les recherches de M. Ebelmen ont non-seulement de l'intérêt à raison de l'utilité que les plaques de silice hydra- tée pourront présenter dans la construction des instruments d'optique ; mais elles en ont un grand pour le sujet qui nous occupe, puisqu'elles prouvent que la silice est beaucoup plus soluble qu’on serait tenté de le supposer. D'ailleurs, elles nous ont fait connaître un nouveau composé organi- que silicifié. En admettant que les eaux continentales ou souterraines peuvent dissoudre et dissolvent tous les jours la silice, on (4) Note sur une production artificielle de silice diaphane et Ph drophane. Compte-rendu de l’Académie des Sciences, Tom. XX pag#50%, 503, 504, 505, 527 et 528 ( 139) se demande d'où elles en retirent assez pour fournir aux gra- minées celle qui leur est nécessaire, ainsi que la quantité exigée pour les autres phénomènes de la nature. Quelque soient les proportions de cette substance qu’ils puissent ré- clamer , il est facile de les retrouver dans la silice répan- due avec profusion sur la partie du globe qui nous est connue. La silice pure, ou celle qui constitue le quartz et les di- verses variétés des silex, est si abondamment disséminée dans les différentes couches terrestres, que l’on présume qu’elle en forme les 35 centièmes. En second lieu, ce corps qui fonctionne comme un acide forme avec les bases de nombreux silicates. Ces sels entrent pour /,,,*** dans les couches terrestres, ce qui fait les ”/,,,"* de la partie so- lide du globe en comprenant la silice. À la vérité, dans ces */,,,"°", la silice n’y est que pour 7/00", elle ne compose donc à elle seule que les */,,,"** de la portion solide du globe. Mais la silice étant composée d'après Berzélius de 48,4 de silicium et de 51,6 d’oxigène, ce métalloïide ne forme réellement que les *°/,,,"° environ de la partie endurcie de la terre, les autres °?/,,,"** l'étant par l’oxigène. Cet aperçu démontre que la silice est le composé solide le plus répandu dans la nature. Pour en être convaincu, on n’a qu'à se rappeler que les terrains primitifs sont essen- tiellement formés de silicates, à raison peut-être de la haute température dont ils ont éprouvé l’action. Une pareille température produit aussi la dissolution de cette substance, qui se prolonge d’autant plus qu’elle est douée d’une viscosité toute particulière. Cet état de surfu- sion est analogue à ce qui se passe dans une foule de dis- solutions salines, qui se maintiennent liquides au delà du terme auquel leur dissolvant a été saturé à chaud. Comme ( 1440 ) cette propriété de la silice paraît lui être commune avec d'autres corps métalloïdes et qu’elle n’a pas une relation directe avec les questions que nous nous sommes proposé d'éclaircir, nous ne nous y arrêterons pas plus longtemps. Nous verrons plus tard, que les silex pyromaques sont revêtus d'une couche plus ou moins épaisse de craie qui les enveloppe de toutes parts. Ce fait, à peu près général, an- nonce que la silice a dû être dissoute chimiquement avec le carbonate de chaux. De pareilles dissolutions communes aux deux substances ne sont pas très-rares dans les eaux thermales. En effet, les eaux chaudes de Saint-Michel dans les Açores, ainsi que plusieurs autres, contiennent à la fois de la silice et des carbonates calcaires. Sans doute, ces eaux ne pourraient pas tenir en dissolu- tion des masses de craie et de silex, comparables à celles qui se trouvent à la surface du globe ; mais l’on se demande pourquoi les eaux continentales de l’ancien monde n'au- raient pas eu ce pouvoir, par suite de leur température et des matériaux alcalins ou terreux qu’elles contenaient. Quelques faits qui se sont passés pendant les temps géo- logiques le font du moins présumer. On sait que bien des roches sont imprégnées de silice, tandis que d’autres se montrent altérées dans le voisinage des veines de quartz. M. Bischof a porté, récemment, l'attention sur ce der- nier effet, en rappelant combien il avait été sensible sur les granites de l'Angleterre , et nous ajouterons sur ceux de France (1). Il a été parfois si grand, que les granites ont été convertis en une roche dont l'élément constitutif prin- cipal est le quartz , et où le mica et le feldspath, assez ra- res sont remplacés par l'amphibole. (1) Édimb. New. philos. jour. Juillet 1845. 141 ) Une pareille altération ne peut guère s'expliquer qu’en admettant que le quartz a pénétré dans les fissures du gra- nite à l’état de solution aqueuse. On peut concevoir la pé- nétration d’une solution dans une roche compacte telle que le granite, tandis que l’on ne comprendrait pas aussi bien, comment elle pourrait s’opérer avec une masse fon- due, quelque liquide qu’on la suppose. La permanence de la solution à l’état liquide et l'effet de la capillarité expliquent sa pénétration, à la longue, dans les roches les plus dures, tandis qu’une matière fondue perd sa liquidité à mesure qu’elle se refroidit. D'ailleurs, elle fait dilater la portion solide de la roche par l’action même de sa température, et tendrait par là à rétrécir les pores par lesquels elle aurait pénétré. Dans le cas où cette tempéra- ture serait plus grande que le point de fusion de la roche envahie, et où des affinités chimiques existeraient entre les deux séries d'éléments minéraux, la conséquence ne serait pas une imprégnation, mais une fusion mutuelle. D'un autre côté, une dissolution aqueuse, en même temps qu'elle laisse déposer dans les roches , les éléments minéraux qu’elle contient, peut en dissoudre et en empor- ter d’autres avec elle. Si le contact est prolongé, l'échange peut être considérable. De grandes masses des éléments constituants peuvent ainsi disparaître et être remplacés par un volume égal du nouveau corps déposé. Or, un pareil changement est impossible avec une matière fondue qui ne peut que pénétrer dans les cavités d’une roche, sans en rien emporter. La silice a donc été en dissolution aqueuse pendant les temps géologiques, ce qui rend extrêmement probable qu'il en est de même aujourd’hui. On ne concevrait pas du reste qu’elle pût pénétrer dans un tout autre état dans les vais- seaux des plantes et des animaux. ( 142 ) ILE. DE LA MANIÈRE D'ÊTRE DES SILEX DANS LA CRAIE. Les silex les plus abondamment répandus dans la craie blanche, appartiennent à la variété nommée silex pyroma- que , parce qu’elle sert de pierre à fusil. Ces silex, le plus généralement noirâtres, sont rarement d’un blond pâle, ainsi que les oursins silicifiés , qui caractérisent cette for- mation. Ils sont aussi communément recouverts d’une couche blanchâtre qui paraît de la même nature que la craie blan- che dans laquelle ils sont disséminés. Ils contiennent par- fois dans leurs masses des sulfures de fer et des petits cris- taux de quartz hyalin limpide qui tapissent le plus ordinai- rement les petites cavités de l’intérieur de ces masses. Les silex se montrent dans la craie blanche en lits distincts, plus ou moins écartés les uns des autres eu interrompus. Quelquefois la distance qui les sépare est plus latest et les silex sont alors moins nombreux. Dans certaines circonstances on les trouve en lits très- étendus, souvent parallèles, quelquefois disposés en rayons irréguliers ; ils n’observent aucune sorte de symétrie dans leur position respective el se présentent comme placés au hasard (1). Quand ils sont isolés, ils se montrent sous la forme de rognons de figures bizarres, se terminant en tu- berecules arrondis plus étendus dans le sens horizontal que dans le sens vertical. Ils se montrent dans la craie, les uns à côté des antres, indépendants ou séparés, souvent liés en- semble et comme soudés par différents points. (1) Voyez les Nouvelles recherches géologiques sur la formation des silex de la craie , par M. l'abbé Bacheley, insérées dans les Observa- tions sur la physique et l sr naturelle, par M. l'abbé Rozter.— Paris 1782, tome XXI, pag. ( 145 ) Les silex des environs de Paris se rencontrent en pla- ques épaisses de plusieurs centimètres , conservant sur une assez grande étendue leur même épaisseur, le peu de pa- rallélisme de leurs deux surfaces , et leur horizontalité. Ces circonstances se reproduisent à Meudon, où l’on remarque comme ailleurs que les silex sont plus rares dans les pro- fondeurs des masses de la craie, que vers les couches les plus superficielles de cette roche ; ils disparaissent même complètement dans l’étage le plus bas de cette formation. Toutefois la craie inférieure, auprès du Hâvre, à l'endroit même où elle passe aux grès verts supérieurs, renferme une grande quantité de silex et de rognons siliceux. Dans d’autres parties de la même couche, les silex sont souvent fort rares. Les silex de la craie supérieure se présentent le plus or- dinairement sous la forme de tubercules ; quelquefois des filons siliceux rompent ces mêmes tubercules, ou du moins ils établissent entre eux de notables interruptions. Des cou- ches siliceuses partagent également les masses de craie et s’y prolongent dans des espaces plus ou moins considéra- bles. Les rognons siliceux de la craie, offrent souvent dans leur intérieur des Catillus, tout aussi bien que les bancs de cette dernière roche. Celle-ci offre de même des corps num- muliformes silicifiés. Ces faits annoncent que la matière siliceuse qui présente ces différentes manières d'être, doit _ provenir des infiltrations qui ont pénétré non-seulement les corps organisés ensevelis dans la craie, mais encore les fentes et les Sont de je ne Du moins la forme t être comparée aux gouttes d'huile répandues: à Ja surface de l’eau. Ces gouttes en sont distinctement séparées, à peu près comme le liquide siliceux qui s’est répandu au milieu Slhaste not (144) des masses de la craie dans l’intérieur desquelles il a péné- tré par les nombreuses fentes dont elle était traversée. Cet effet n’a pu se produire que parce que la silice était dis- soute, ou tout au moins dans un état gélatineux très- avancé. Il ne serait pas impossible que dans la craie formée par des infusoires , la silice des silex de la craie provint des dé- bris de ces mêmes infusoires, On peut d’autant plus le sup- poser, que ces infiniment petits composent les rognons dont la masse de la craie est remplie. On remarque du reste dans les fabriques de fayence et de porcelaine, lorsqu'on pulvérise les silex, que les parties si- liceuses, quoiqu’assez grossières, se pelotonnent peu à peu et se groupent en ganglions au milieu de l’argile : elles fi- nissent par y acquérir une assez grande dureté au bout de quelques mois. Les parties siliceuses si ténues provenant des débris des carapaces des infusoires fossiles, ont pu, à plus forte raison, se réunir et se grouper en noyaux, de manière à donner naissance aux rognons tuberculeux de la craie. : Rien de semblable n’a eu lieu lors de la formation des corps aciculaires assez nombreux qui existent dans un dé- pôt tertiaire des environs d'Oran en Afrique et qui ont été décrits par M. Guyon sous la dénomination fautive de craie. L'examen microscopique de la prétendue craie, a prouvé que ces corps n'étaient autres que des éponges : pulvérisées et soumises au microscope, de faibles parcelles de cette formation prises au hasard, ont présenté de petits corps spiculaires fort semblables à ceux des Spongilles, mais un peu plus longs : ce sont évidemment des haléponges. Leur nature est siliceuse, quoique celle de la roclie qui les renferme soit calcaire : divers corps organisés micros- copiques y sont mêlés avec eux. De même, les agates (145 ) mousseuses d'Oberstein en Allemagne, et celles de Sicile, doivent à la présence des éponges, la particularité qui leur a valu leur nom. Ce fait a été reconnu par M. Bowerbank, qui a trouvé des gemmes d’éponges , des fibres résultant de la matière cornée transformée en silex ,’et des spicules. Aussi, à l’aide de ce fait, il s’est assuré que les éponges ordinaires suppo- sées dépourvues de spicules, en avaient néanmoins. Il en est de même, d’après ses observations , des silex de plusieurs . localités, qui offrent aussi des débris d’éponges (1). Du reste, dans les altérations des roches ignées , l'acide silicique est un des principaux produits de ces roches : cet acide devient , pour lors, libre et dans un état d’hydrata- tion plus ou moins prononcé. S'il est hydraté et en dissolu- tion dans l’eau et qu’il pénètre dans certains terrains, des actions purement mécaniques déterminent l'accumulation de l'acide silicique sur quelques points seulement, comme cela est arrivé lors de la formation des silex des terrains crétacés. Cet effet pourrait encore avoir eu lieu, par la raison que les corps solides ne se laissent pas tous également pénétrer par les liquides. Ainsi, le vin renfermant de l’alcool-et de l’eau, devient de plus en plus spiritueux lorsqu'il se trouve dans des tonneaux. Le bois étant perméable à l’eau et im- perméable à l’alcool, il s'opère une véritable filtration du dedans au dehors du tonneau , qui produit la séparation de l’eau. Pour amener l'alcool à son maximum de concentra- tion, on le renferme dans une vessie dont le tissu est im- perméable à l'alcool et perméable à l’eau. Par un effet sem- blable, l’eau chargée d'acide silicique, en traversant les (1) 2. and Magas., of natur. History. Tom. X. Transac, geolog. Society. 2.me série, (om. IV, pag. 181. .. XVI. Tome 10. (146) bancs crétacés, a fini par produire les nodules de silex si abondamment et parfois si régulièrement disséminés au mi- lieu de leurs masses. Les silex pyromaques ne se trouvent pas uniquement dans les terrains de craie, car on en observe entre les couches du calcaire grossier parisien. Ils s’y montrent pé- nétrés et comme pétris par une infinité de coquilles : leurs cavités présentent cette particularité remarquable de conte- nir de l’eau. Il est facile de s’en assurer en les cassant ; on la voit sortir de suite dès que ces silex sont brisés. D'un autre côté, M. de Caumont a reconnu un banc de silex noir, semblable à ceux de la craie et qui se transforme peu à peu en un grès blanchâtre. Ce banc se trouve dans le calcaire de Blangy qui appartient aux groupes supérieurs des terrains jurassiques. La plupart des autres variétés des silex, appartiennent à des dépôts bien différents des formations crétacées. Ainsi les terrains d’eau douce iertiaires en renferment qui ont les plus grandes analogies avec les silex pyromaques. Téls sont ceux des terrains lacustres de la fontaine de Vaucluse, des environs d’Aurillac dans le Cantal , de Saint-Martin de Lon- dres, près de Montpellier. Les silex calcédoniens , cacholongs , résinites , agates et jaspoïdes appartiennent aux mêmes terrains d'eau douce, ainsi qu'aux formations d’épanchement basaltiques ou amyg- daloïdes. Les silex ménilites se rapportent uniquement aux premiers de ces terrains, tandis que les silex cornés se rencontrent depuis les terrains primitifs jusqu'au calcaire grossier des environs de Paris. Quant aux silex pyromaques bien caractérisés , ils se ren- contrent principalement dans les terrains de craie blanche, quoique l’on en observe de blonds dans les calcaires lacus- tres de Saint-Ouen et au pied Nord-Ouest de la Butte de # ., ie ( 147) Montmartre. Il en existe également de noirs dans le cal- caire lacustre supérieur de Montreuil à l'Est de Paris , et dans plusieurs localités du Cantal et du Midi de la France. Les autres espèces se rapportent aux silex résinites ou cor- nés, aux jaspes , aux phtanites , et à quelques autres va- riétés. Avant de se solidifier, les silex paraissent avoir passé par un état gélatineux , voisin de la liquidité. On le suppose du moins d’après la présence de quelques coquilles qui le plus souvent n'ont pas changé de nature, et qui sont encore dans leur état calcaire. Ces coquilles se rencontrent cepen- dant engagées en tout ou en partie dans quelques-unes de ces variétés. La liquidité de la matière siliceuse a dû être complète, lorsqu'elle a converti en sa propre substance , les corps or- ganisés qui s’y trouvent engagés. Elle doit surtout avoir été liquide, lorsqu'elle s’est répandue par les fentes horizon- tales si communes dans la craie et les a remplis de silex noirs ; ceux-ci en s’y étendant y ont formé des couches plus ou moins puissantes. Il devait d’autant plus en être ainsi, lorsque la silice suivant de haut en bas, les ramifications des fentes des masses de craie, y a formé de petits filons de silex pyromaques. Quelquefois les fissures de la craie sont remplies de silex en saillie. D’après cette circonstance, lorsque la silice s’est infiltrée dans les corps organisés dont elle a pris la place ou qu’elle à rempli les fentes où elle a pénétré , elle devait être dans un état de solution à peu pe complet. … Ces faits connus , il nous a paru nécessaire de savoir si es silex de la craie, comme ceux des autres terrains , Con- tiennent ou non de la matière organique. Nous avons placé à cet effet des fragments des rognons siliceux dans un petit lube fermé par un bout et nous y avôns introduit une petite ( 148 ) bande de papier rougi par les acides : en chauffant ces frag- ments, nous avons vu le papier bleuir. Nous avons répété la même expérience avec des silex appartenant à d’autres for- mations, par exemple à des terrains d’eau douce , et tous ont présenté les mêmes effets. Un seul a résisté à cette épreuve , ou du moins n’a donné que des traces de colora- tion inappréciables. C’est le silex ménilite de Ménilmon- tant, qui a paru ne renfermer que des quantités excessi- vement faibles de matières organiques. Ce premier essai est peu concluant , car presque tous les corps solides, à l'exception peut-être de quelques métaux, renferment de lammoniaque qu’ils ont pris à l’air dans le- quel ils sont plongés. Dès-lors il se pourrait que la colora- üon en bleu du papier rougi par les acides, provint de cet ammoniaque ainsi absorbé. Mais cette quantité toujours très-faible, n'aurait pas pu faire noircir d’une manière complète , la substance siliceuse pulvérisée à mesure qu’on la chauffait. Voici du reste le nom des silex qui ont présenté le double effet dont nous venons de parler. 4.° Silex cacholong-pisolithique de Carslbaden en Bohème, 2.0 Silex pyromaque des formations d’eau douce, des en- virons de la Fontaine de Vaucluse. 3.° Silex résinite des formations d’eau douce des envi- rons de Castellamonte en Piémont. 4.0 Silex résinite des formations d’eau douce du Cantal. 5.0 Silex nectique des formations d’eau douce de Saint Ouen, près Paris. 6.° Silex noir pyromaque des terrains crétacés de l’An- gleterre. 7.0 Silex calcédoine blanc de l'ile de Giglio dans la Médi- terranée. 8.0 Silex ménilite opale opaque, de Ménilmontant près ( 149 ) Paris : ce silex n’a pas noirci par la calcination, et son ac- tion a été à peine sensible sur le papier rougi par les acides. D’autres expériences faites avec le plus grand soin , nous ont prouvé que les silex de la craie ne renfermaient que de petites quantités de matière organique. En effet, cent par- ties n’ont perdu par la calcination que 2 parties et 2 dixiè- mes. Ces matières volatiles étaient composées d’eau et de faibles proportions d’ammoniaque. Mais, pour mieux en être certain, nous avons soumis di- vers rognons siliceux de la Champagne à d’autres épreuves. Après les avoir préalablement desséchés à une température de + 1000, + 120», et enfin de + 150°, nous les avons ex- posés à une chaleur encore plus considérable, Tous ont éprouvé une perte légère , et d’autant plus grande que leur coloration était plus prononcée. Il nous a été impossible de nous assurer si cette perte était due à la décomposition d’une substance organique ou à l’eau. Il est probable qu’elle dépend de ce liquide, car il a dû se volatiliser en premier lieu par l'effet de la violente chaleur à laquelle les silex avaient été soumis. Nous avons cherché également à apprécier la quantité d’eau que contenaient les silex ; elle nous a paru pr des variations : ainsi dans certains échantillons, elle ne s'élevait qu’à dix millièmes , tandis que chez d’autres, elle a paru être de quinze à vingt millièmes. La matière organique de ces silex a présenté des diffé rences sensibles d’un échantillon à l’autre. Ainsi elle a va- rié de un à trois millièmes dans certains fragments, tandis que chez d’autres elle s’est constamment élevée à cinq mil- lièmes. Klaproth en a également indiqué la présence dans les pierres à fusil. Il admet que jointe aux matières volatiles, la substance organique compose à peine un centième de ces silex. Les autres substances observées par cet habile chi- ( 1450 ) miste dans les silex pyromaques, sont la silice, la chaux, l’alumine et l’oxide de fer. Nous avons enfin voulu savoir, si la matière crétacée blan- châtre dont les rognons siliceux sont entourés et qui leur est adhérente, contenait des quantités notables de substance organique. Cette matière nous a paru essentiellement com- posée de carbonate et de phosphate de chaux, sels dont le premier forme à lui seul plus des quatre cinquièmes de la masse ; et quant à la substance organique, elle n’y est pas plus abondante que dans les silex. Le peu de matière organique que les analyses nous ont fait reconnaître dans les silex de la craie et ceux des autres terrains, mérite d'autant plus d’être signalé, qu'Ehren- berg a découvert de nombreux infusoires dans les silex et dans le tripoli qui est aussi siliceux. C’est autant dans l'en- veloppe blanche des silex que ces animaux accompagnés d’une multitude innombrable de spicules d’éponges en forme d’aiguille, sont le plus apparents. On les aperçoit d'une manière distincte daus les parties centrales de la craie, à raison de leur teinte généralement peu foncée Il en est de même de la craie qui, ‘comme #> silex, est composée en grande partie d’infusoires d'espèces variées et de débris de végétaux, principalement de fragments de petites corallines (1). Les tests de ces animaux sont tout cal- caires , et les corallines sont , même dans leur état de vie, encroûtées par des sucs lapidifiques de la même nature. Ces expériences terminées, notre attention s’est portée sur la composition des Ælcyonium vivants; nous avons cherché à reconnaître si ces corps organisés renfermaient, (1) Les expériences de MM. Decaisne et Payen, ont prouvé que les corallines n’appartenaient pas au règne animal, maïs bien au règne végétal, ( 151 ainsi qu'on l’a avancé, des quantités notables de silice. Nous avons donc recueilli sur le bord de la Méditerranée, plu- sieurs individus de l’Alcyonium domuncula de Lamarck, et nous les avons soumis à diverses épreuves. La matière qui les composait ayant paru inattaquable par l'acide chlorhydrique, en raison de la présence d’une grande quantité de substance organique, nous l'avons calcinée dans un creuset, afin de détruire cette dernière. Vingt-quatre grammes de cette matière calcinée au rouge pendant envi- ron une heure, ont laissé 14,2 de cendres. Ces cendres traitées par l'acide chlorhydrique , ont cédé à l’acide de la magnésie, avec des traces presque insensibles de chaux : le résidu de l’action de l'acide chlorhydrique a pesé 3 gram- mes 01. Ce résidu inattaquable par l’acide sulfurique bouillant, était formé par un mélange d’alumine et de silice. Il s’est produit de toutes pièces pendant la calcination de la ma- tière , résidu de l’action chlorhydrique , ainsi que cela a lieu toutes les fois que l’on calcine un mélange de silice et d’a- lumine. D'après ces ésériences. la matière qui forme l'Alcyo- nium domuncula est composée sur cent parties : 1.0 ue ce nd —— ” __—. ave .. 41,8 , Consis- o “. 2 tant en magnésie et traces de chaux. . . . . . . . . . 46,2 3. D'alumine . . - -| Des traces inappréciables. . . .. » 4.0 De silice. . ... 100,0 + IV, DE LA NATURE ET DU MODE DE FORMATION DE LA CRAÏE. On désigne sous le nom de craie ou de calcaire crayeux, plusieurs variétés de carbonate de chaux, à raison de ce que ces variétés surmontent la totalité des couches qui font par- ( 152) tie du groupe oolitbique. Mais on nomme proprement craie, minéralogiquement parlant , une variété particulière de carbonate calcaire, dont la couleur est presque générale- ment blanche. Elle est, en effet, rarement grise ou brune, ainsi que l’a fait observer Werner. Nous nous occuperons uniquement de la craie blanche, puisque cette roche est la seule des terrains crétacés qui contienne les silex pyromaques sur l'origine desquels nous devons porter l'attention. La craie toujours opaque et friable , a une texture lâche et un aspect mat; elle ne présente pas la moindre trace cristalline. Formée par des grains fins d’une grande ténuité et pour ainsi dire sans aucune cohérence, elle est rayée par l’ongle, et par conséquent fort tendre en même temps qu'elle est maigre au toucher : sa cassure est légèrement conchoïde. Cette substance happe à la langue dans son état de sécheresse, lorsqu'elle a perdu l’eau qu’elle contenait: Sa pesanteur spécifique varie de 2,31 à 2, 65. de carbonate de chaux. En effet, elle contiendrait , d’après quelques chimistes, sur 100 parties, 98 de ce carbonate, une partie de magnésie avec un peu de fer, et une partie d’alumine ; ce qui annoncerait que cette espèce minérale est à peu près pure. Il est pourtant un grand nombre de variétés de cette substance, qui sont loin de présenter la même composition. 556 Ainsi, la craie de Meudon offre à à ; l'analyse, 70 centièmes de carbonate calcaire, 19 centièmes de silice et 11 cen- tièmes de magnésie. La quantité de silice que retient la craie de col est une preuve que les mêmes eaux qui ont tenu en dissolution les sels calcaires offraient aussi cette substance dans le (153 ) même état de liquidité. Cette circonstance doit être prise en considération, lorsqu'on cherche à s’assurer dans quel état se trouvait la silice qui a formé les silex pyromaques de la craie. D'autres craies de la Champagne nous ont offert une composition assez analogue à celle des environs de Meudon. Nous y avons reconnu des quantités de carbonate calcaire qui variaient de 70 à 90 pour 100, de silice de 8 à 20, de magnésie en proportion encore plus variable, c’est-à-dire, de 1 à 20 , enfin d’alumine de 1 à 2 pour 100. Cependant M. Brongniart, dans sa description géologi- que des environs de Paris, cite deux analyses de la craie faites par M. Berthier, d’après lesquelles la craie de Meu- don et de Nemours paraîtrait ne pas contenir de silice; mais il faut observer qu'’elie avait été débarrassée par le lavage du sable siliceux qui s’y trouvait mélangé. D’après ce chi- miste, la craie de Meudon ainsi lavée, renfermerait 98 cen- tièmes de carbonate de chaux , un centième de magnésie et d'un peu de fer, enfin un centième d’argile. . La composition de la craie de Nemours lui aurait paru encore moins compliquée , puisque d’après ses expériences, elle serait formée de 97 centièmes de carbonate calcaire et de 3 centièmes de magnésie chargée d’ un | peu de fer. Cette simplicité s'explique du reste par le lavage qu'on avait fait subir à la craie avant d’en examiner la composition. Les analyses de M. Berthier ont une grande importance, puisqu'elles démontrent qu'il n’y a eu aucune sorte de com- binaison entre la silice et le carbonate de chaux qui consti- tue la craie. La première, quoiqu’ayant été en solution dans les mêmes eaux qui contenaient la matière calcaire , s’est départie de celle-ci sans aucune difficulté. Elle à pu dès- los prendre la place des corps organisés plongés dans la ( 154 ) mer crétacée, où se trouvaient en même temps les deux substances inorganiques dont nous nous occupons. On ne peut pas dire de la silice et de la craie, ce que l'on est en droit de supposer pour la eraie et l'argile plas- tique. Ces deux dernières matières n’ont pas pu être dépo- sées dans le même liquide ; puisque cette argile ne contient pas sensiblement de carbonate de chaux et que les espèces fossiles n’y sont pas les mêmes que celles qui se montrent renfermées dans ce carbonate. Elles n’ont donc pas été dé- posées dans le sein du même liquide ; comme il n’y a eu aucune transition entre le dépôt de l’une ou de l’autre, il a dù se passer un long espace de temps entre leur précipita- tion successive. Il en a été différemment des silex et de la craie ; ces deux substances appartiennent évidemment aux mêmes eaux et à une semblable époque, puisque confondues dans les mêmes masses, elles alternent ensemble. Indépendamment des substances inorganiques qui en- trent dans la composition de la craie, cette substance est encore formée par l'accumulation d’une quantité infinie de dépouilles de petits animaux, appartenant à deux familles distinctes, les Polythalamies et les Nautililes. Dans la craie blanche et jaune du Nord de l’Europe, tout comme dans celle de Meudon , le volume de la partie orga- nique égale ou dépasse peu le volume de la partie minérale. Les mêmes restes organiques sont plus abondants encore, etles formes mieux conservées dans la craie à nummulites de la Grèce, de la Sicile enfin dans celle de la plus grande partie du Sud de l’Europe. Les restes d’infusoires qui n’ont guère plus d’un 208» de ligne de longueur existent en si grand nombre dans les roches crétacées , qu'Ebrenberg suppose qu il y en : 17 plus d'un million dans chaque pouce rase à ( 155 ) cube et par conséquent plus de dix millions dans 500 prame mes de craie. Les infusoires fossiles trouvés par M. Ehrenberg dans la craie du Nord de l’Europe et dans le calcaire à nummulites du Midi sont analogues, de sorte que l’analysé microscopi- que de ces terrains semblerait les identifier. Les fossiles reconnus par le même observateur dans les calcaires ter- reux dépendant des terrains tertiaires, sont complètement différents. Ainsi des roches calcaires et même des silex que l'on pourrait croire purement inorganiques et homogènes , sont formés en grande partie par l'agglomération d’une im- mense quantité d'animaux microscopiques. Ces infusoires d'espèces différentes sont encore conservés dans leurs for- mes et les détails de leur structure. V. DES FAITS SUPPOSÉS FAVORABLES A L'ORIGINE INORGANIQUE DES SILEX DE LA CRAIE. Parmi les faits qui semblent assigner une origine inorga- nique aux silex de la craie, on a cité des dispositions ana- logues à celles que présentent leurs nodules , dans plusieurs circonstances où il paraîtrait difficile d’en expliquer la for- mation au moyen de leurs principes constituants. On a comparé ces nodules aux cherts, ainsi qu'aux chailles, aux septaria, enfin aux sphærosidérites. Pour reconnaitre ce qu’il en est de ces nodules siliceux, voyons ce que l'on entend par cherts, chailles, septaria ou sphærosidérites et dans quelles conditions ils se sont fe de cette formation. C , | elque cie par un suc siliceux concentré dans D c rties, où probablement ( 156 ) des corps organisés ont servi de centres d'attraction. Ces portions siliceuses ne se distinguent de la roche dans lin- térieur de laquelle elles se trouvent , que par une nuance plus foncée et un durcissement considérable. L'origine des cherts est évidemment postérieure à celle des masses au milieu desquelles ils se rencontrent ; car leur position est non- seulement inclinée, mais souvent verticale par rapport au plan des couches qui les recèlent. Les cherts n'auraient certainement pas conservé cette position, s’ils avaient été déposés à la manière des galets. On ne les ver- rait pas, non plus, au milieu des jaspes crétacés ou d’au- tres roches , occuper plusieurs bancs. Les inégalités que l’on remarque dans leur formation, confirment ces faits et leur donnent une plus grande force. Ainsi, au milieu des calcaires jurassiques des Cévennes, on aperçoit tantôt des parties siliceuses à formes tout-à-fait diffuses et nuageuses , tantôt des zônes concentriques sou- vent très-allongées et irrégulières , ce qui annonce que les molécules siliceuses ont été arrêtées dans leur marche vers le centre. Dans d’autres bancs, on observe à côté des no- dules à formes incertaines, des rognons plus complets et qui annoncent une opération entièrement terminée. Ainsi, un dépôt simultané des éléments constitutifs des roches calcaires avec un départ de la silice, affectant au milieu de ces roches des formes aussi bizarres que celles propres aux rognons siliceux, peut très-bien avoir lieu, par la force d'attraction de la matière quartzeuse sur les molé- cules de la mème matière. = Les phénomènes présentés par les cherts s'accordent avec ceux relatifs au dépôt des rognons siliceux. Les uns et Le” autres ont dû leur formation à ce que les substances qui (les composent ont été en dissolution dans les mêmes eaux et qu ‘elles ne se sont point précipitées en même temps, par ne ( 157 ) suite de la diversité de leur solubilité ou par tout autre cir- constance. La masse enveloppante a précédé sous ce rapport, les nodules qui par cela même ont suivi des centres d’attrac- tion autour desquels ils se sont groupés. Lorsque ces centres leur ont manqué, la substance sili- ceuse s’est étendue dans les fissures soit verticales, soit longitudinales qu’elles ont rencontrées dans les terrains ju- rassiques ou crétacés. Il n’est pas dès-lors étonnant, que ces nodules soient disposés en zônes régulières, puisqu'ils ont suivi les plans de stratification des argiles, des calcaires, des grès et des sables , entre les masses desquels ils se sont déposés. L'origine des chailles où des rognons calcaires, ou cal- caréo-marneux des terrains jurassiques, paraît la même que celle des cherts; seulement ici, ce sont Îles molécules calcaires qui ont subi le déplacement. Les chaïlles offrent souvent des fossiles dans leur intérieur, tels que des madré- pores : quelquefois silicéo-calcaires, ils prennent pour lors le nom de sphériles. Les masses ovalaires ou applaties, nommées septaria par les Anglais, et qui abondent dans l'argile de Londres, doivent également leur formation à un déplacement molé- culaire analogue à celui qui a produit les cherts et les chailles. Il en est de même des nodules que l’on ren- contre dans certaines marnes oxfordiennes. Il pourrait en être ainsi de quelques grès ou masses noduliformes que l'on remarque au milieu des sables incohérents des difiérentes époques géologiques. Tels sont les nodules des sables verts È de la craie inférieure, ou des sables mes n “ee 1 On doit attribuer à des causes | mation des sphorolliiiéies, évidem ( 158 ) des masses argileuses ou calcaires ou de toute autre nature qui les enveloppent. Ces rognons ferrugineux interrompent, en effet, les lits d'argile ou les petites couches de fer très- minces qui s'y montrent intercalées. On ne peut pas cependant les considérer comme des ga- lets ; car alors les couches , au lieu de se trouver interrom- pues, les auraient enveloppés en se déposant, ainsi qu’on l'observe dans les dépôts argileux, quand ceux-ci renfer- ment des fragments préexistants un peu volumineux. Les silex meulières des environs de Paris se sont formés de mème au milieu de la gangue argileuse dans laquelle ils se montrent irrégulièrement disséminés. Ils s’y sont déposés par le déplacement et la réunion des molécules siliceuses. La conservation des empreintes des coquilles ou la conver- sion en silex de leurs tests, que l’on y observe parfois , le prouve d'une manière assez évidente, pour qu'il soit inu-. tile d’insister plus longtemps. Le transport postérieur de la silice , du fer et des autres matières qui composent les nodules dont nous venons _de parler, est en quelque sorte démontré par les bois sili- cifiés que l’on rencontre dans diverses formations. On sait que les parties les plus ténues et les plus délicates de l’or- ganisation végétale y sont parfaitement conservées. Cette circonstance indique nécessairement une substitution lente, opérée peu à peu, de la matière inorganique à la matière organisée : une pareille substitution a exigé un transport de la dernière substance, qui n’a pu prendre la place et se mouler sur les linéaments des végétaux , qu'après un inter- valle de temps plus ou moins long. Aussi, le déplacement et le transport moléculaire de certaines matières dans les _ couches où elles se sont solidifiées, est probablement un phénomène plus général qu'on ne l’a supposé. Les cherts, les chailles, les septaria et les sphærosidé- 5 FR ETS ra RE À (159 ) rites, loin d’être un obstacle à l’admission de l’hypothèse qui considère les silex de la craie comme formés pendant que la matière enveloppante , encore molle, était arrivée à un état de consolidation presque M à om la confir- ment au contraire. La séparation de la matière siliceuse, calcaire, ou ferru- gineuse des roches où elles ont formé des nodules ou rognons , s'est donc opérée par suite ‘des forces attractives qui entrainaient ces diverses matières vers certains centres. Seulement, ce fait s’explique plus aisément pour les silex de la craie et les nodules qui ont pris la place des corps organisés, que pour ceux où l’on ne saurait reconnaître de noyau étranger. Si l’on ne peut pas toujours déterminer où se trouvaient les centres d'action et de quelle manière ils ont agi, le dé- part de la silice et du carbonate de chaux n’en a pas moins eu lieu : il permet de concevoir le mode de formation de ces nodules aussi différents par leur nature que par leur disposition, des roches au milieu desquelles ils se mon- trent enclavés. Le dépôt de ces roches et des nodules qui s’y trouvent engagés, n’ont pas dù avoir lieu d’un seul jet; ils ont probablement exigé une plus ou moins longue période de temps. Ainsi , lorsque la matière siliceuse s’est réunie en forme de rognons et qu’une pareille opération s’est répétée à plu- sieurs reprises , il en est résulté une série parallèle au plan de la stratification. Ces concrétions nodulaires indiquent néanmoins que les causes déterminantes de l’aggrégation ont été dues, dans certaines circonstances, à quelques rss d'animal ou de végétal ou enfin à quelques grains sab > neux plus ou moins visibles. S su s sors tree ce que l'expérience nous apprend de xt tallisation des matières, ee. Ft nas par la ( 1460 ) présence des corps étrangers au milieu d'un fluide dis- solvant. En supposant que les éléments des nodules ferrugineux , calcaires ou siliceux se sont réunis non-seulement au mo- ment où le dépôt était encore mou, mais ont pu le faire à toutes les époques, on admet en même temps que leur agglomération a eu souvent lieu par un déplacement molé- culaire. La formation par ségrégation de la massse enveloppante, en vertu des forces d'attraction qui ne sont que relatives, n'aurait pas pu s'effectuer d'une manière assez continue, pour opérer tous les effets dont nous avons rendu compte. On s’est demandé comment, si les choses se sont pas- sées ainsi, la matière siliceuse a pu se réunir dans les seuls points où se trouvent les silex, et n’a pas imbibé les cou- ches supérieures ou inférieures. On peut répondre que les bancs d'animaux marins, mollusques, ou zoophytes dispo- sés au milieu des couches calcaires marneuses ou de toute autre nature , ont été, en quelque sorte, les points de dé- part de cette substance qui, n'ayant été attirée que par eux, n’a dû pénétrer en aucune manière les bancs au milieu des - quels elle se trouvait. D'ailleurs, les corps de même nature paraissent tendre à s'agréger et à se réunir uniquement entre eux. Ceci nous explique pourquoi la silice de la craie s’est portée sur les fissures des corps unis aux éponges et aux A/cyonium, ou à tous autres zoophytes. Ce que nous disons des silex de la craie, des cherts, des chailles ou de tout autre genre de nodules a eu lieu d’une autre manière pour les corps organisés silicifiés qui se trou- vent dans les bancs calcaires de différentes époques. Ceux- ci se sont transformés en matière organique par l'effet d’une véritable substitution. ( 161 ) On ne saurait en douter, puisque métamorphosés en en- tier en substance brute , cette substance a pris le plus sou- vent les formes propres et'caractéristiques de la matière organisée. Seulement , les nodules siliceux précipités dans des circonstances analogues, mais qui ne présentent pas la structure propre aux corps organisés auxquels ils ont dû leur réunion, ont pris leur place. Leur formation a eu lieu par un simple remplacement , c’est-à-dire, qu’ils se sont logés dans les vides laissés par les êtres vivants qui ont disparu par l'effet de leur décomposition ou tout autrement. On s’est encore demandé, comment les bancs de craie percés d’un si grand nombre de cavités quelquefois conti nues pendant une certaine étendue , ne se sont point affais- sés ? Ils n’ont pas fléchi sous le poids des portions supérieur res, lorsqu'ils ont acquis une solidité assez grande pour résister à la pression qui tendait à les comprimer. Ils ont pour lors formé une voute assez solide pour opposer une résistance suffisante au tassement qui les menaçait. De pareils effets se présentent plus en grand dans les terrains calcaires eux-mêmes. En effet, on y voit souvent des cavités longitudinales se prolonger pendant plusieurs lieues, et n'être soutenues de distance en distance que par des piliers plus ou moins considérables, mais assez solides pour empêcher les éboulements. Il en est de ces vides de l'intérieur de la terre, comme de ceux de nos monuments. Les uns et les autres descen- dent des mêmes causes, quelque grande que soit la diver- sité des proportions sur lesquelles elles ont exercé leur in- fluence ° enr Il est tout aussi singulier de voir des silex, particulière- ment ceux des couches de craie de l'ile de Wight, brisés dans toutes sortes de directions sans pourtant être défor- més. Îl en a été ainsi, parce que les interruptions de leurs Toue XVI 11 ( 162 ) masses n’en ont pas déplacé des portions assez considéra- bles pour changer la forme des corps où elles se sont opérées. Les silex sont donc restés tels qu'ils étaient avant le brisement et la rupture partielle de leurs nodules. VI. DE L'ORIGINE ORGANIQUE DES SILEX DE LA CRAIE. L'origine animale des silex pyromaques formés de no- dules à contours arrondis, et disposés en lits parallèles mais interrompus , a été admise pour la première fois par Guet- tard. Cette opinion avancée à une époque où l'on connaissait peu les effets des substitutions ou des remplacements de la matière inorganique à la matière organisée à mesure que celle-ci se décomposait, dut paraître fort extraordinaire. Elle fut cependant adoptée peu de temps après par Faujas de Saint-Fond, et successivement par Deluc, par Dolomieu, enfin de nos jours par une foule d’observateurs. . Si l’origine des rognons des silex de la craie n’était pas plus difficile à reconnaître que celle des nodules du crag rouge de Londres et des grès verts, nous n’aurions pas beaucoup d'efforts à faire pour la démontrer. En effet, les noyaux du crag sont composés de 53,5 pour 100 de phos- phate de chaux, de 13 de phosphate de fer, de carbonate de chaux et de matières volatiles pour 33,5. Quant aux cailloux des grès verts, ils contiennent 61 pour 100 de phosphate terreux, 24 de carbonate de chaux et 45 de matériaux insolubles. Les premiers , qui proviennent du crag ou de l'argile de Londres, renferment parfois des débris de crabes et de poissons , tandis que l’on aperçoit dans les seconds, des ver- tèbres, des dents de poissons, des débris d’enveloppes de crustacés et d'autres substances animales qui n’ont été di- cérées qu’en partie. Se ES (163) Ces circonstances prouvent que les rognons et les nodu- les de ces formations sont de véritables coprolithes dont l'origine animale ne saurait être contestée, ainsi que l'avait pensé M. le professeur Henslow. Cependant M. Buckland qui le premier a fait connaître la véritable nature des co- prolithes , a élevé des doutes sur celle des nodules du crag, de l'argile de Londres et des grès verts. Il a fait observer que le phosphate calcaire, que ces corps présentent à l’ana- lyse, peut provenir des sables ferrugineux dans lesquels ils ont été rencontrés. M. le professeur E. Solly a dissipé ces doutes en faisant observer, que les rognons et les nodules des terrains ter- tiaires et secondaires ont tous les mêmes caractères, c’est- à-dire, de faibles dimensions, une densité uniforme et une complète absence d’aïumine dans leur composition. Ils offrent enfin sans exception dans leur intérieur, des restes de corps organisés plus ou moins complets, avec d’autres imparfaitement digérés , signe évident de leur nature ani- male ou coprolithique. De pareilles particularités ne se représentent pas pour les noyaux arrondis des silex pyromaques; ce n’est point par conséquent aux coprolithes qu’on peut les rapporter ; tout en admettant qu'ils ont pris la place occupée par les zo0o- phytes marins. Ces noyaux représentent en effet, avec plus ou moins d’exactitude , la forme des mollusques ou des zoophytes nus qui ont été convertis en une substance pier- reuse de la nature du silex. La matière inorganique intro- duite dans l’intérieur de ces animaux par infiltration , oc- cupe la place qu'ils avaient abandonnée par suite de one décomposition. Ces remplacements ont eu lieu à peu près comme — les autres corps organisés qui se sont empierris ou si l'on veut pétrifiés au milieu des couches terrestres. On observera ( 164 ) peut-être que , lorsque la matière siliceuse s’est substituée à un corps organisé quelconque , elle en a pris les linéa- ments et en représente fidèlement la forme , tandis que les rognons de silex pyromaques n’ont point une figure régu- lière ni constante. Si ces rognons ont des grosseurs et des formes extrêmement différentes , cette circonstance tient à ce qu’ils remplacent des animaux qui varient à l'infini sous ce double rapport. Du reste , il n’y a pas eu ici véritable substitution, mais simplement un échange de la matière inorganique à celle qui composait le corps organisé dont elle a pris la place. Les alcyons et les éponges qui abondaient dans le sein de l’ancien Océan , comme dans le bassin des mers actuel- les , varient encore plus dans leur forme que dans leur gran- deur , ce qui explique les dispositions aussi bizarres que variées des silex de la craie. Le carbonate calcaire n’est pas la seule espèce minérale qui offre de ces rognons ; on en voit, en effet, dans les argiles rouges déposées par voie d’alluvion au-dessus de la craie inférieure. Ces argiles ren- ferment une grande quantité de ces zoophytes à l’état sili- ceux. Il en est de même des sables de la craie dans les en- virons de Saumur. Ces sables se montrent remplis de corps organisés analogues aux A/cyonium et aux éponges. Les spicules fusiformes sont communes chez les éponges et plusieurs animaux rayonnés , comme dans les parties char- nues des Lobularia et de beaucoup de zoophytes , où ils for- ment une espèce de squelette destiné à supporter les tissus plus mous. Leur existence dans les polypiers charnus et dans les éponges a été considérée comme un des motifs principaux pour classer ces derniers dans le règne animal. M. J. E. Gray en a aussi trouvé chez quelques mollus- ques ; ainsi, le genre Phyllidia, dépourvu d'une vraie co- quille, a son manteau renforcé par un réseau régulier, formé ( 165 ) de chaînes de spicules simples, régulières, fusiformes et transparentes , qui ont deux millim. ou trois millim. de lon- gueur (1). Ces chaines de spicules forment des lignes qui rayonnent de la circonférence du manteau et qui sont cou- pées à angle droit par d’autres chaines parallèles aux bords de cet organe. Il en résulte un réseau dont les intervalles, de forme carrée, diminuent de grandeur en se rapprochant du bord, en même temps que les chaînes décroissent en épaisseur. Les spicules sont abondantes et plus grandes dans les intervalles musculaires du pied. Ce n’est pas seulement dans l’assise inférieure des ter- rains crélacés que l’on remarque parmi les silex pyromaques des Alcyonium et d’autres polypiers fossiles encore recon- naissables. L'assise supérieure offre de même des silex noirs dont l'intérieur est occupé par quelques-uns de ces corps organisés. Ceux-ci y sont dans un état de conservation assez parfait, pour permettre de les reconnaître sans hésitation. Peut-être doit-on attribuer à la présence de ces restes orga- niques les amas de silice pulvérulente qui remplissent les cavités d’un grand nombre ‘a silex pyromaques noirâtres. Ceci est d'autant plus p que M. Kardo de Chioggia -a soumis à l'analyse plusieurs Lreyonisis vivants, tels que les Alcyonium (2) lynceum et cydonium. et il y a trouvé une certaine proportion de silice. Les spicules qui en forment la substance centrale sont composées, non pas de matière cornée ou calcaire, comme on l'avait supposé , mais de ma- tière siliceuse. (1) Annal. and Magaz. of natural History. Janvier 1846.- ess universelle de Genève, tome Er, 4.me série, 1846. SE (2) Le genre des Alcyonium comprend déjà 80 ou 100 espèces vivan- tes, parmi pe il y en a 20 d'Europe. On connaît guère plus d’ane quinzaine à l’état fossile. x ( 166 | Elle y est si abondante qu'elle y est pour les 80 centiè- mes ; le réste ou les 20 autres centièmes sont formés par des matières animales. Quant à la portion corticale de l'Alcyonium cydonium , elle paraît composée, au lieu de spicules, par des globules siliceux. Les mêmes particulari- tés sont communes à plusieurs animaux rayonnés des côtes de la Manche, qui, d’après MM. H. Milne Edwards et Au- douin, contiennent également une grande quantité de silice. Lors même que les A/cyonium n’en renfermeraient pas d'aussi fortes proportions, ou n’en contiendraient pas du tout , il ne faudrait pas en inférer que les silex pyromaques de la craie n'ont pas eu l’origine que nous leur assignons. Les doutes qui peuvent s'élever à leur égard ne seraient pas fondés , si on les portait sur l’origine de la craie. En eflet, cette substance est formée de fragments de coraux, d’épon- ges et de valves de Cytherina, de coquilles foraminifères et d’infusoires plus petits encore, que l'on n’aperçoit qu'à l’aide nn nr (1). Ce: soins singulier , des dé- à < (1) Williamson, dans son travail sur la Véritable nature des corpus- cules des silex considérés comme des spicules d’éponges, fait observer que ces petits corps sont communs dans la craie. Ils se montrent particulièrement répandus dans la craie de Cambridge, de Kent et d’autres localités, ainsi que dans les couches du silex même, quand ce minéral ne contient pas des Xanthidies et des foraminifères. On voit dans la craie de Charing, où les organismes sont distincts, qu’une moitié des atômes qui la composent , consistent en corps iden- tiques à ceux que l’on découvre dans le silex; mais ces corps sont cal- caires et non siliceux, ce qui prouve qu’ils ne sont point des spicu- les d’éponges calcaires, mais des prismes séparés de coquilles désa- grégées appartenant à quelques genres du groupe des margaritacées. Les échantillons de Charing ont les tout-à-fait semblables à celles qui caractérisent Le prismes des coquilles et qui ne se trouveni jamais dans les spicules. D'ailleurs, au lieu d'être (1467 ) pôts analogues à la craie, s’opêrent encore dans ce mo- ment dans le sein de l'Océan. Le lieutenant Nelson en a cité des exemples aux Bermudes, et Darwin dans les iles de corail de la Mer Pacifique. Une terre à la fois siliceuse et calcaire formait donc le fond vaseux de la mer dans laquelle les terrains crétacés ont été déposés. Ces divers éléments furent-ils ou non le résul- tat des débris des corps organisés ? C’est ce dont il est diffi- cile d’être certain , quoique ce soit extrêmement probable , depuis que l’on sait que le tripoli, minéral siliceux, est composé de squelettes ou carapaces d’animalcules micros- copiques. Il n’est pas moins extraordinaire , de voir ces ca- rapaces adhérer les unes aux autres sans ciment visible. De même, les squelettes de plusieurs éponges vivantes consistent en aiguilles ou spicules siliceuses analogues à celles que l’on rencontre dans les silex de la craie. Les z00- ronds comme ceux-ci, ils sont anguleux et forment des prismes à plusieurs côtés, caractères propres à la structure des coquilles. ussi d’après ces faits, Pt regarde comme douteux ( SI d'é on n° certitude à cette classe d ir Ainsi, il a trouvé ces prismes en grande abondance —. la craie de Cambridge, où les éponges sont comparativement rares; on n’en a point aperçu dans les parties de la craie du Yorkshire, où l’on rencontre rarement des coquilles et où les éponges ( Alcyonia et Ventriculites ) abondent. M. Mantell a toutefois envoyé à l’auteur de cette note un échan- tillon de craie pris dans l’intérieur des silex creux , où les Rotalia, He Textilaria et les prismes calcaires abondent. Il y a également observ quelques spicu ponges bien définies à trois rayons , ainsi Fe diffèrent ex quelques petites formes siliceuses épineuses. Celles-ci ex- Mr se des prismes si communs dans le silex ordinaire. ( Annals and Mag natur. History, n.° 115, Juillet 1846. — Voyez la Bi- az of bliothèque Men dé Genève, n. 9,21 Octobre 1846 , tom. Ill pag. 90 , 4.me série , 2.n° année}. 168 ) phytes actuellement vivants, sécrètent des matières siliceu- ses, provenant des eaux de la mer, comme les mollusques y puisent les matériaux calcaires de leurs sécrétions. On peut donc attribuer la disposition parallèle des cou- ches siliceuses à la précipitation successive des matières dont elles se composent. Les espaces qui les séparent sont dûs aux intervalles de temps nécessaires à leur production respective. À la vérité, cette circonstance ne suffit pas pour expliquer le phénomène singulier de la division du silex en couches distinctes de la craie. Ce fait tient peut-être à ce que læ pesanteur spécifique des molécules siliceuses excède celle des molécules calcai- res. Cette plus grande densité dut, dans l’acte de précipita- tion, faire prendre à la silice la place inférieure , à chaque dépôt de limon qui s’opérait. Une expérience bien simple semble confirmer cette expli- cation qui rend raison, jusqu à un certain point, de la posi- tion particulière des silex ilieu des masses de craie, lesquelles ils sont mêlés. Dans les fabrique ac4 prépare la pâte que l’on va cuire avec de l'argile . une quantité plus ou moins considérable de silex en poudre. Si on laisse la pâte pendant plusieurs jours, sans l'employer, le mélange d'abord très-intime cesse bientôt de l’être ; les particules siliceuses s’attirent pour lors mutuellement et se groupent autour du centre. On peut se demander s’il n’en aurait pas été ainsi de la silice qui a formé les silex de la craie. Déposée d’abord par voie de sédiment entre les particules calcaires , le départ de la silice se serait opéré après comp sans mA y ait eu nouvelle dissolution et nte. On conçoit de cette manière, comment des masses SA tineuses organisées , comme les médusaires , les alcyons ou (169) tous autres zoophytes, ont pu laisser la place qu'elles oceu- paient à la matière siliceuse qui s’y est solidifiée et a formé des rognons en rapport avec la grosseur des animaux aux- quels elle s’est substituée. Cette hypothèse s'accorde avec la forme irrégulière des silex et leur disposition en lits conti- nus. Si la silice n’a pas été attirée par d’autres corps orga- nisés que par des Alcyonium, des éponges, ou tout autre zoophyte, c’est probablement parce qu'il n’y avait pes d’au- tres espèces dans les masses de craie. Aussi l'observation directe prouve que dans le voisinage des assises des lits, de silex, il y a généralement peu de fossiles , surtout en comparaison de ceux qui se trouvent dans les couches qui les recouvrent (1). La silice a , dans le premier cas, pris la place des corps organisés; par consé- quent elle ne peut que s’y rencontrer fort rarement. Les végétaux transformés en silex semblent annoncer que les matières inorganiques n’ont pas été toujours à l'état liquide , lorsqu'elles se sont substituées à des corps organi- sés. Les molécules qui composaient ces corps ont été rem- placées une à une, en sorte que les formes les plus délica- tes, l'organisation intime des tissus ont été conservées , tandis que les cavités les plus petites des vaisseaux et par- ticulièrement celles des trachées n’ont pas été remplies . Le liquide siliceux devait être dans un état pâteux ou visqueux tout particulier ; car s’il avait été complètement fluide et coulant , il aurait nécessairement pénétré dans es plus petites ouvertures des vaisseaux et les aurait obstruées, ce qui n’a pas toujours eu lieu (2). (4) re géologique sur Maëstricht. para 20 des Mines, Tr: #6, ge (2) mé trllotnsiilt des vé x en né: siliceuse a aussi bien lieu dans les temps see jee a été fréquente pendant les (470 ) Quoique la plupart de ces faits ne fussent pas connus de Faujas de Saint-Fond , il n’a pas moins considéré les silex de la craie, comme provenus de corps organisés de la classe des madrépores et quelquefois de celle des mollusques. Aussi M. Clerc, ingénieur des mines, a trouvé plusieurs de ces rognons siliceux qui ont si bien conservé la forme de di- verses espèces de coquilles, qu’il est facile de les reconnaître. Il a en outre observé dans le centre de quelques-uns de ces rognons , des coquilles entières, dont les tests sont ta- pissés de petits cristaux de roche à la manière des géodes. Quelques-uns de ces nodules présentent dans leur intérieur les tests de certains mollusques dont la surface extérieure est à l’état calcaire. Un noyau siliceux en occupe le centre et en remplit totalement la cavité. Ce fait a principalement lieu chez les oursins et les écailles de tortues (1). Cette circonstance, qui indique la présence du carbonate de chaux et de la silice en dissolution dans les eaux où de époques géologiques. Du moi mu es récemment dans les environs du Caire, et qui entièrement pseudomorphée en silex, paraît se rapporter à l'étue TT ee se trouve à peine recouverte par les sables que les vents accumulent sans cesse sur les 5 d'Égypte. Les arbres qui composent cette forêt ont leurs vais- ux, leurs rayons médullaires et même leurs fibres les plus ténues tr PSS distincts. Ils ont été perforés de trous laissés par les ani- maux lithophages. Cette circonstance ne prouve nullement que ces végétaux aient été pétrifiés sur place, et qu’ils appartiennent à l’épo- que géologique, à moins qu’on ne les rapporte aux dépôts les plus ré- cents de cette époque. ourrait le pr’sumer , de ce qu’au dessous de cette forêt, on découvre des bancs d’huitres dont la texture et la couleur sont aussi fraiches que si elles venaient d’être abandonnées par les eaux de la mer ( Voyez l’Institut, 1846, — page 42, Chronique). 1) Journal des Mines, Tom. 96 , n.o 314, second semestre 1814, p. = — (471 ) pareils dépôts ont eu lieu (1), est confirmée par un fait ob- servé dans les marbres de Carrare. On a trouvé dans la masse de ces marbres, près d'un kilogramme d’eau sili- ceuse , dans laquelle étaient libres de petites masses géla- tineuses ; dès que ces masses ont eu le contact de l'air, elles ont pris la dureté et l'aspect des calcédoines. Quoiqu'il en soit, les silex eux-mêmes contiennent sou- vent dans leur intérieur, un corps organisé distinct trans- formé en silice. Leur examen au microscope, décèle un tissu organique qui annonce que la plupart de leurs no- dules remplace des polypiers. Quant à leur position régu- lière, elle dépend de ce que, dans les terrains de sédiment, (1) Les infusoires élaborent la silice Ja ÉChauxe æ en construisent leurs carapaces. On n’a pas t l’hydrate de silice d'Alger, de Ceyssat et de Randau ï te ), qui a été formée par les infusoires de l’ancien mond Ce fait n’est pas sans intérêt; car si les animaux à charpente os- seuse élaborent M rs la chaux qu’ils absorbent et la dépo- sent, sous l'influence de MAL: animal , sous la forme de phos- hate de chaux , cette composition particulière et constante ne se reproduit guère NUM que dans de rares circonstances. De même ce infusoires qui empris Le silice, la déposent sous une forme invaria nstamment avec la même composition, qui jusqu'à présent n'a pu être obtenue nu les laboratoires. Enfin plusieurs polypiers ne sont pàs uniquement composés, comme on l'avait longtemps supposé, de phosphate de chaux, de ma- gnésie et de carbonate de chaux , maïs il em est qui sont essentielle- ment formés et en majeure partie de silice. Tel est l’Antipathes gla- berrima d’Es per. La présence de la silice chez ces animaux , ne prouve pas cepen- dant que cette substance y soit plus répandue que chez les végétaux. Elle est, au contraire, moins fréquente chez les êtres animés que chez ceux qui appartiennent au règne végétal ; ce qui le prouve, c’est que la silice est bornée chez les premiers aux espèces dépourvues de colonne vertébrale. (172) les fossiles sont généralement disposés par couches, quoi- que nous n'en connaissions pas la cause. Il semblerait, d’après ces faits, que les animaux ont fourni eux-mêmes une partie de la silice dont sont formés les silex de la craie ; ils ne prouvent point cependant, que la plupart de leurs nodules n’aient pas été opérés par un simple remplacement. Ces animaux ont été uniquement des centres d'attraction pour la matière siliceuse, comme les coquilles d’eau douce de l'Inde méridionale, qui se mon- trent tapissées de cristaux de quartz, quoique l’on n’en dé- couvre pas dans la roche calcaire où ces coquilles ont été déposées (1). De même on observe dans plusieurs de ces roches calcaires des géodes de calcédoine ou d'agate, et même des cristaux de quartz à peu près comme dans le marbre de Carrare le plus pur. Ces cristaux solitaires formés entièrement d'acide silicique limpide et cristallisé, indi- quent que la matière siliceuse se sépare constamment, en passant à l’état solide, des masses calcaires au milieu des- quelles elle se trouve disséminée. Si les observations de M. Bory de Saint-Vincent sont exac- tes , des silex semblables à ceux de la craie se formeraient tous les jours. Ce naturaliste a cité une localité des envi- rons de Bruxelles, où l’eau chargée de silice filtre goutte à goutte, et se durcit dans la profondeur du sable même, en corps comparables pour leur forme à des tronçons de branchages ou à des fragments de bâtons plus ou moins gros. : Leur cassure prouve que la matière siliceuse a été dépo- sée autour de corps étrangers, tels que le chevelu des ra- cines, des fragments de coquilles ou des parcelles de sable (1) Voyage souterrain ou description du plateau de Maestricht; par M. Bory de Saint-Vincent. (173 ) un peu plus grossières que celles qui se montrent agglu- tinées en petits canons, ou autour des racines , ou d’autres débris. Les sables ainsi agglomérés et encroûtés dans les pierres siliceuses d’une date récente, conservent la forme des corps auxquels ils se sont substitués , et restent les no- yaux reconnaissables des silex modernes (1). La formation récente du silex signalée par M. Trébra est encore plus incertaine. Elle ne repose que sur ce que des pièces d'argent du seizième siècle auraient été découvertes dans l’intérieur d’une pierre siliceuse. Mais qui nous assure que des pièces de monnaie n’ont pas été mises à dessein dans cette pierre dont l'ouverture a pu se fermer depuis lors (2)? Quoiqu'il en soit de ces formations siliceuses récentes sur lesquelles règnent les doutes les mieux fondés , il existe d’autres preuves de l'origine organique des silex de la craie. Depuis longtemps Donati avait décrit et figuré des alcyo- nites fossiles, lorsqu’en 1808, M. Parkinson, dans son inté- ressant ouvrage intitulé : Des restes organiques de l’ancien monde ( Organic Rencains of a former World), est revenu sur cet objet. Il y a indiqué des spicules aciculaires et les a considérées comme communes aux spongiles et aux alcyons fossiles. Il a figuré même dans cet ouvrage une espèce fossile d’alcyo- nite cruciforme assez analogue à l’Alcyonium cydonium de Linné (3). (1) Voyage souterrain ou description du plateau de nn rer par M. Bory de Saint-Vincent. (2) Journal des mines, tom.W, n.e 25, pag. 76.— Voyez la cription d'une collection de minéraux, formée par Trebra, publ en 1745, à Clausthal. (1) Tom. IT, p. 87. (174) Postérieurement à Parkinson, on a reconnu qu'une grande partie des silex de Witis, d'Oxon et de Buck eonte- paient au milieu d’une enveloppe extérieure de silex gris d'épaisseur variable, un noyau de silex translucide, souvent de couleur pourpre. Cette translucidité permet d’apercevoir distinctement un réseau et un assemblage de tubes sembla- bles aux alcyons modernes. On supposa d’abord, que ces alcyonites avaient servi de centre ou de noyau d'attraction , et qu'ils avaient été enveloppés par une croûte de silex gris qui ne présentail aucune trace d'organisation. D'après la même idée, on admit que les corps organisés avaient été pénétrés par du silex calcédonien rouge ou pourpre, qui était venu remplacer les molécules de la matière animale à mesure que celle-ci se décomposait. Telle fut la première explication que l’on donna de ces faits ; mais cette explication a été singulièrement modifiée par les observations de M. Bowerbank. Ce naturaliste s’est d’abord attaché à confirmer par les observations microsco- piques, que la forme tuberculeuse des silex de la craie était due à des corps organisés. D’après lui, les spongiles parasi- tes se seraient attachés aux alcyons, ainsi qu'aux échinides et aux coquilles, et auraient ainsi formé une enveloppe à ces noyaux organiques. Ce mode d'accroissement explique à ses yeux les formes tuberculeuses , irrégulières , des rognons de la craie; mais pour mieux faire saisir combien son hypothèse est fondée, il cite les habitudes parasites de quelques spongiles vivants, qu’on observe enveloppant des coquilles et d’autres corps étrangers. Le même M. Boot a encore supposé que la matière organique des spongiles et des zoophytes avait fourni des centres d'attraction plus puissants à la silice que les spicules siliceuses des spongiles. Il lui a même paru, que cette con- | (F3) sidération géologique confirmait puissamment l'hypothèse d’après laquelle la matière siliceuse des silex aurait été ségrégée de la masse enveloppante composée de calcaire et de silice, pendant qu'elle était encore molle et par F'attrac- tion des corps organisés. On peut dire à l'appui de cette manière de voir, que la craie tendre de la région supérieure en Angleterre , chargée d’une grande quantité de silex, est composée de carbonate de chaux presque pur. La craie compacte des régions plus basses, habituellement privée de silex, contient au contraire de la silice disséminée dans sa masse. On peut toutefois observer avec M. Buckland que l’hypo- thèse de M. Bowerbank est beaucoup trop exclusive, en n’admettant pas que des alcyons, des éponges ou d’autres corps étrangers aient pu se trouver dans la craie, sans que des spongiles soient venus coopérer à la formation des silex gris qui les enveloppent. À part ce fait, qui probablement est loin d’avoir eu la généralité qu’on lui a supposée, les obser- vations de M. Bowerbank ont ramené la question de l'origine des silex à son véritable point de vue. Elles ont presque démontré que les éponges, les alcyons et d’autres zoophytes ont été pour la matière siliceuse des centres d'attraction, autour desquels elle s’est groupée et qu'elle à fini par remplacer entièrement. Cette matière ainsi attirée a donc pris la place des corps organisés, à mesure qu'ils se décomposaient. Lorsque ces êtres animés n'exis- taient pas au milieu des masses de la craie, la silice qui s’y trouvait comme cette terre en solution , s’est groupée autour d’un centre d'attraction quelconque ; mais lorsque ce centre lui a manqué, elle s’est disséminée dans les vides des cou- ches crétacées et s’y est étendue en raison de leur grandeur et de leur puissance. Lorsqu'il y a eu réellement substitution , le changement ( 176 ) d’un corps en un autre s’est opéré molécule à molécule , et par conséquent avec une lenteur extrême. Ce changement à dù avoir lieu postérieurement au dépôt de la masse et des corps organisés qu’elle contenait. Les êtres animés ont ainsi servi de centres d’attraction pour l’intercalation moléculaire qui s’est produite entre la silice et la substance dont ces êtres étaient composés. On conçoit de cette manière comment certains fossiles de la craie se prolongent aussi bien en de- hors, qu’en dedans de l'enveloppe siliceuse ; seulement, comme ces prolongations non empâtées ou pénétrées par la silice sont souvent très-friables , il faut user de précautions pour les obtenir intactes. Cette circonstance explique égale- ment la texture schisteuse qu'ont conservée les nodules fer- rugineux ou calcaires des autres formations , et même les nuances par zônes des masses de même nature qui les ren- ferment. Le remplacement d'un corps organisé par une matière inorganique , n’a pas exigé un long espace de temps , puis- qu’il n’a pas eu lieu molécule à molécule, comme dans le cas d’une véritable substitution. Tout s’est borné ici, à ce que la substance brute a pris la place de l’être animé , sans pour cela en reproduire la forme ni la figure exacte. Seulement les restes organiques ont dû exercer une forte attraction sur une matière inerte quelconque , pour que celle-ci se séparât de la masse pierreuse avec laquelle elle était mélangée, et püt s’introduire dans l’espace occupé par ces mêmes débris organisés. Une pareille séparation entre deux substances inorgani- ques plongées dans le même liquide , n’a pu avoir lieu , que lorsqu'une d'elles a eu moins d’affinité pour la matière qui s’y trouvait en plus grande masse, qu’elle n’en a eu pour les molécules organiques qui l’attiraient. Lorsque cette force attractive a été plus puissante que l'affinité qu’elle pouvait l (177 ) avoir pour l’autre substance au milieu de laquelle elle était disséminée , les matériaux qui en ressentaient l'influence , ont pris la place du corps organisé qui les attirait. C’est aussi ce qui est arrivé à la silice mélangée au milieu des masses de la craie ; en remplaçant les Alcyonium , les épon- ges ou tout autre zoophyte, eïte a pris la forme de nodules ou de rognons, qui rappellent jusqu'à un certain point la figure et les dispositions propres à ces animaux. Lorsque les débris de ces êtres ne se trouvaient pas au milieu des couches crétacées, le départ de la matière sili- ceuse d’avec la matière calcaire , s’est opéré quelquefois par d’autres centres d'attraction , comme par exemple une molé- cule sableuse déjà solidifiée, ou par l'effet de tout autre corps. Ces centres d'attraction ont souvent manqué; alors la silice s'est étendue entre les masses de la craie en cou- ches plus ou moins considérables, et celles-ci ont été en rap- port avec les intervalles de ces mêmes masses et la quantité de silice qui s’y trouvait disséminée. La séparation de la silice et de la craie peut aussi, indépen- damment des causes que nous venons de lui assigner , avoir dépendu de l'attraction mutuelle que les molécules de la même matière paraissent exercer les unes sur les autres. Lorsque cette attraction a agi sur de petites masses , elle a formé des amas, des nodules, ou des concrétions, tandis que lorsqu'elle s’est fait ressentir sur des matériaux plus considérables , elle a produit des couches plus ou moins épaisses et plus ou moins étendues. Un troisième mode de fossilisation ne nous est guère pré- senté que par les végétaux. Les arbres ou les plantes des temps géologiques ont laissé dans les couches de la terre des traces de leur existence , et par suite de circonstances à nous inconnues , ils ont été convertis en houille et en lignite. Quelque soit la cause d'un pareil phénomène, cause que Tome XVE. 12 (178 ) nous n’avons pas intérêt de reconnaître dans cet écrit, ces végétaux ont été transformés en une matière inorganique, qui en est dérivée d'une marière immédiate ; celle-ci a par- fois conservé la forme et la structure des arbres ou des plan- tes dont elle est provenue. On peut donner le nom de conversion au mode de for- mation des charbons de pierre et des lignites, aux dépens des arbres et des plantes ensevelies dans le sein de la terre. En eflet, dans ce genre de transformation , des anciens végétaux d’une organisation plus ou moins avancée ont été métamorphosés en une matière nouvelle qui a souvent cer- tains caractères des minéraux proprement dits. Les charbons de bois que nous fabriquons de toutes pièces peuvent jusqu’à un certain point nous donner une idée de la conversion des arbres et des plantes de l’ancien monde en charbon de pierre, en lignite, ou en toute autre matière charbonneuse. Il est enfin un dernier mode de fossilisation différent des substitutions, des remplacements , et des con- versions d'une matière organisée en une matière brute et inerte. Ce mode de formation dont les observations d'Ehren- berg ont fait saisir l'importance , n’a pu avoir lieu que chez les animaux composés en partie de matériaux solides, cal- caires ou siliceux. Lorsque des espèces animales ont eu des parties solides, elles ont pu composer des roches, et même des roches d’une grande étendue lorsqu'elles ont été en grand nombre. Aussi les infusoires par leur immense quantité, et leurs carapaces calcaires ont composé, ainsi que l’a démontré Ehrenberg, une partie des terrains crétacés. Ces infiniment petits n’ont donc pas été sans influence, sur la formation des couches qui occupent de si grands espaces à la surface du globe ; ce qu’il y a de non moins étonnant , ils préparent à l'abri de la lumière du soleil des matériaux considérables qui seront (479 ) peut-être un jour des sujets de surprise et d'observations pour nos descendants. Les infusoires qui sécrètent de la matière siliceuse desti- née à construire leurs carapaces, forment comme ceux qui ‘la composent avec le carbonate de chaux, des couches plus ou moins étendues. Sans doute, peu puissantes, ces cou- ches se prolongent sur des espaces moindres que les cou- ches crétacées. Cependant certaines d’entr’elles, qui n’of- frent dans leur masse que des carapaces siliceuses , ont dans quelques localités, comme le bailliage d’Ebstorf, jusqu’à six mètres d'épaisseur ; cette circonstance annonce assez qu'elles ne sont pas sans importance. Ce mode diffère des deux autres, en ce que les corps organisés eux-mêmes composent les couches terrestres , non par l'effet d’une substitution opérée molécule à molécule , et encore moins par le remplacement de la matière inorgani- que à la matière organisée. Un pareil mode ne peut pas se présenter chez les végétaux ; ceux-ci n’ont point de parties solides, soit siliceuses , soit calcaires, ou, lorsqu'elles y exis- tent , elles y sont en trop faibles proportions pour exercer quelque influence, et composer des masses considérables. Ainsi les restes des végétaux ne peuvent produire en per- dant leur substance organique, des bancs pierreux, puis- qu’ils ne contiennent rien en eux-mêmes de solide et que leurs éléments, par suite de leur décomposition, sont tous destructibles. Il en est différemment des animaux qui ont des tests s0- lides et en partie minéralisés. Aussi, certains calcaires de sédiment sont presque entièrement composés de dépouilles de corps organisés. Il en est de même de plusieurs variétés de silex, ainsi que l'ont démontré les observations d’'Ebren- berg qui les à trouvés en grande partie formés par des my- riades d'infusoires, dont la petitesse est si grande qu'on ( 180 ) ne peut les apercevoir qu'à l’aide du microscope. Ce qui est non moins extraordinaire , ces infiniment petits se (rou- vent non-seulement dans les silex du Nord de l'Irlande, qui semblent avoir été soumis à l'influence d’une température élevée, mais dans la substance terreuse qui sert d’aliment aux Tartares Tongouses des environs d’Okhoish et que l’on suppose d'origine volcarrique. Il en est de même encore des rochers de la butte volca- nique de Hochsimmer près du lac de Laachen. Le schiste à polir de cette localité en est entièrement composé ainsi qu’un grand nombre de tufs et de conglomérats ponceux. Les infusoires siliceux des deux dernières roches semblent , en s’en tenant à leur apparence , avoir subi l’action du feu. Le même M. Ehrenberg a observé des infusoires dans la pierre ponce de Kammerbühl, dans le trapp ou tuf volca- nique de Broblthal, ainsi que dans les pierres ponces de Tello, près de Santiago au Chili. Une roche d’Aréquipa au Pérou , regardée par Meyen comme un porphyre décomposé, a paru au microscope, n'être qu’une roche à polir formée d'infusoires. D’après Meyen, le volcan de cette localité re- jette seulement des pierres ponces, mais jamais de laves (1). Les matériaux terrestres , excepté ceux qui appartiennent aux âges les plus anciens, sont donc en partie formés d’in- fusoires , aussi bien ceux qui se sont précipités dans un li- quide aqueux, que ceux qui sont rejetés au dehors par les foyers volcaniques. Cet aperçu suffit pour faire juger à quel point la vie s’était multipliée pendant les temps géologiques, pour laisser d'aussi immenses produits. (1) Edemb. New. philos. journ. Juillet 1845. ne É (181) VII. DES ANIMAUX ET DES VÉGÉTAUX QUI ÉLABORENT LA SILICE, Les êtres des deux règnes dont l’organisation est le plus avancée, ont presque tous la propriété de s’assimiler la chaux en proportion plus ou moins considérable. Les ani- maux les plus simples en jouissent également, mais elle n’est pas aussi générale chez les classes qui en font partie, ou que composent les espèces dépourvues de colonne verté- brale. L'assimilation de la silice est une faculté dont sont douées plusieurs espèces animales et végétales ; le plus ordinaire- ment , elle est plus prononcée chez les moins compliquées que chez celles qui appartiennent au terme le plus élevé de la série animale. Les Alcyonium , les éponges et le plus grand nombre des infusoires, jouissent à un haut degré de cette propriété. Néanmoins , il existe parmi ces derniers, une classe entière rentrant dans la loi commune, ou ayant des tests calcai- res, par conséquent la faculté de sécréter la chaux. Ces infuscires ont formé la craie. À part ces exceptions , le plus grand nombre des espèces animales s’assimilent la chaux, soit qu’elle se montre unie à l'acide carbonique, soit que l'acide phosphorique la tienne en combinaison. Le premier de ces sels calcaires est soutiré par les z00- phytes, les annélides , les crustacés et les mollusques des mers ou des eaux douces dans lesquelles ils vivent. De même, certains vertébrés trouvent dans leurs aliments une quan- tité de phosphore suffisante pour former l'acide phosphori- que nécessaire à la saturation de la chaux qu'ils s’assimi- lent. Par suite de cette assimilation , les animaux sans ver- tèbres peuvent construire leurs polypiers, leurs tuyaux pierreux, leurs carapaces ou leurs coquilles, tout comme (182) ceux qui offrent une colonne vertébrale, les matériaux de leur charpente cartilagineuse ou osseuse. Nous n’aurons pas à nous occuper de quelle manière les animaux soutirent la chaux des corps dans lesquels ils sont plongés ou de ceux qui leur servent de nourriture , cet objet n’entrant pas dans le plan de notre travail. Nous en dirons pourtant plus tard quelques mots ; nous nous bornerons pour le moment , à faire observer, qu’ils trouvent dans l’eau des mers, oules eaux continentales , la substance nécessaire à leurs sécrétions, tout comme les oiseaux et la plupart des mammifères terrestres puisent la chaux qui doit composer la matière de leurs œufs ou de leurs charpentes solides, dans leurs aliments. Il s’agit donc de savoir si les éttéptiois que nous avons signalées pour les Alcyonium , les éponges et les infusoires, sont réelles et si les preuves sur lesquelles elles reposent, sont établies sur des faits certains. M. Ebrenberg nous a fait connaître les couches de silice que certaines espèces d’infusoires ont sécrété pendant leur vie. Ces couches au nombre de deux et à ce qu'il paraît d’une certaine épaisseur, ont été rencontrées dans le bailliage Hanovrien d’Ebstorf. La première a une puissance de 6 mètres, et la seconde de 3 mètres 4, D'après les essais chi- miques dûs au docteur Wiggen, la couche blanche ou la plus épaisse est composée exclusivement de silice dans un état presqu'aussi volumineux et aussi léger que la silice ob- tenue par la décomposition du gaz fluo-silicique dans l’eau. Cette substance contient de huit à dix parties d’eau hygro- métrique ; elle n’est soluble dans eucun acide, et n’est point par conséquent à l’état gélatineux. La portion grise, ou la couche la plus mince , renferme indépendamment de la silice, une substance organique rési- neuse, que l’on suppose être le pollen d’une espèce de pin. | FESSES ( 183) Malgré la grande épaisseur de ces couches, elles n’en sont pas moins composées à peu près exclusivement de dé- pouilles d’infusoires. M. Ehrenberg en a signalé une quin- zaine d'espèces particulières. Ainsi, puisque les infusoires composent des couches pré- cipitées dans les eaux douces, ces animaux ont dû trouver en solution dans leur sein, les matières siliceuses qui leur ont servi à former leurs carapaces ; et comme les éponges et les A/cyonium en renferment des quantités plus ou moins considérables , les mers actuelles doivent en contenir égale- ment. Du moins les zoophytes aussi bien que les infusoires des couches d'Oberohe, en offrent dans leur propre subs- tance. Il paraît qu'il en a été ainsi de certains animaux de l'ancien monde ; en effet, plusieurs zoophytes et mollusques des divers âges géologiques, ont souvent passé à l’état sili- ceux. ë La silice doit être un des éléments essentiels de l’eau de mer, quoique l'analyse chimique ne l'y ait point encore constatée , puisque les infusoires siliceux sont les formes les plus nombreuses parmi celles qui existent dans l'Océan. La silice s’y trouve probablement à l état de simple mélange ou de suspension. Ce n’est pas seulement en quelques points isolés de l'Océan , ou près des côtes, ou dans les mers inté- rieures, que les eaux salées sont peuplées de corpuscuies doués de vie et invisibles à l'œil nu, mais dans tous les parages. Il est peu, en effet, de phénomènes plus généraux que celui de la présence des animalcules dans l’eau salée. Les recherches de Schager sur l’eau puisée dans la mer . au Sud du cap de Bonne-Espérance ( par 57.° de latitude }, et au milieu de la zône tropicale dans l'Océan atlantique , ont démontré que la mer, dans son état normal et en l'absence de toute coloration accidentelle , contient d'innombrables orga- nismes microscopiques. Ces organismes sont Lout-à-fait dis- ( 184 ) tincts des filaments siliceux du genre Chætoceros, flottant à l'état fragmentaire , comme les oscillatoires des eaux douces. Les végétaux élaborent également les matières calcaires et siliceuses, comme certaines espèces prennent au sol la potasse et la soude qu'il contient. Ils s’assimilent ces subs- tances par suite de propriétés dépendantes de leur organisa- tion, propriétés auxquelles on a donné le nom d’absorptions, et à leurs résultats, celui de sécrétions. Ainsi, tandis que les uns puisent dans les terrains où ils sont disséminés, les pre- miers de ces matériaux, les autres n’en séparent que les deux alcalis dont nous venons de parler. Ces matériaux inorganiques ne sont point isolés, ni répandus au hasard dans leur intérieur : ils se déposent toujours dans les cellu- les des corps vivants qui déterminent et limitent leur agglo- mération. Les varechs enlèvent également à l’eau de la mer, l'iode qu'elle contient, et se l’assimilent de manière à ce que ce corps ne retourne plus dans le milieu qui les entoure. Ce métalloïide s’y trouve combiné avec les métaux alcalins for- mant un sel soluble, dont les proportions sont si minimes que les iodures forment à peine un millionième du poids de l'eau de mer. Les varechs recueillent néanmoins cette faible portion comme les plantes terrestres recueillent les alcalis. ls nous fournissent des quantités d’iode qui, pour être extraites directement de l'Océan , exigent l'évaporation préa- lable de l’eau qui les renferme, La cause de ce choix ou de cette préférence, est un des secrets les plus impénétrables de la vie végétale ou animale. En effet, sans que l’on puisse apercevoir des changements . sensibles dans la structure des êtres organisés, des causes accidentelles et à nous inconnues , altèrent ou modifient les substances qu'ils forment dans leur état normal, ou quelque- fois en augmentent la quantité. Ainsi, nous avons amené mt aim (185 ) les betteraves à donnér de plus fortes proportions de sucre, que celles que ces plantes abandonnées à elles-mêmes, pourraient fournir. Aussi la détermination faite par M, Payen, au moyen de l'analyse directe des proportions de carbonate de chaux et de silice contenus dans les plantes du même genre, mais d'espèces différentes végétant sous l'influence de circons- tances semblables, a prouvé, contre l'opinion de certains physiologistes, que les végétaux ne puisent pas indifférem- ment dans le sol les substances minérales qui s’y trouvent. Elles n'en retirent pas toutes les matières solubles à ja por- tée de leurs racines ; mais elles y choisissent celles qui con- viennent à leurs conditions d'existence. De même , une foule de produits animaux s’aceroissent ou diminuent par suite de notre influence ou peut-être par celle des agens extérieurs. Ainsi les mêmes vaches qui en Europe donnent du lait toute l’année, n’en ont en Amérique que tant qu'il est nécessaire aux veaux qu’elles allaitent. Nous- mêmes, nous sécrétons dans certaines circonstances des liquides sucrés, et nos organes préparent à notre insu des calculs biliaires, urinaires ou stomacaux. Des sécrétions aussi insolites ont cependant lieu sans qu'il y ait rien de changé dans la confection ou la forme des tissus et des vaisseaux. L'influence du climat n’est pas moins sensible à cet égard ; ainsi des brebis transportées dans les contrées brülantes du Nouveau-Monde ou dans la plaine de la Méta, y ont perdu de leur fécondité, et les agneaux qu'elles produisent sont d’une éducation difficile. Les poulets importés depuis plusieurs siècles à Cusco, où ils se sont perpétués sous l'in- fluence d’une température qui n’est jamais au-dessous de + 20° centigrades , n’offrent plus de leur vêtement ordi- naire qu'un léger duvet qui tombe bientôt pour laisser l'ani- ( 186 ) mal entièrement nu, sauf les plumes de l’aile qui croissent comme à l'ordinaire. Le chat n’a plus de saison marquée pour la reproduction à la Nouvelle-Grenade , et ce qui est non moins remarqua- ble , il ne miaule plus depuis qu'il y a été importé par Chris- tophe Colomb. D'un autre côté, certains végétaux produisent avec le mêmes substances alimentaires et quelquefois sur le même sol, les uns des sucs narcotiques qui nous portent au som- meil, les autres des sucs amers à l’aide desquels nous com- battons les fièvres qui nous tourmentent , ou des liqueurs auxquelles nous devons une partie de nos forces ou de no- tre énergie. De même , la Fumeterre prépare aux dépens du sol dans lequel elle végète, l'acide fumarique tout aussi constamment que les lichens forment l'acide oxalique , les quinquinas l'acide quinique , et les raisins l'acide tartrique. Les lichens empruntent aux milieux dans lesquels ils vi- vent, les éléments nécessaires à la formation de l'acide oxa- lique. Cet acide s’y trouve combiné avec la chaux , particu- lièrement dans le Parmelia cruciata et des différentes es- pèces de lichens de la tribu des variolariæ. Le lichen nom- mé Roccella tinctoria y puise également les éléments de l'acide rocellique. L'acide phosphorique qui entre dans la constitution chi- mique d’un assez grand nombre de lichens, est pris par eux dans les rochers sur lesquels ils croissent, ainsi que l'ont prouvé les recherches du docteur Thomson. Sans doute la culture augmente la quantité d'acide phosphorique qui se trouve dans le sol ; mais il n’en existait pas moins dans la roche ancienne qui en est la base. Ainsi les grauwackes et les autres roches de transition, de même que les roches ( 187 primitives sur lesquelles croissent différentes espèces de lichens contiennent également de l'acide phosphorique. Les calcaires d'Irlande et les calcaires magnésiens de Ber- wickshire et de Boyban dans le comté de Stirling, ont pré- senté à l'analyse , comme les précédentes , de l'acide phos- phorique. Il en a été de même de la cornéenne de Barnégo près Denny, qui consiste en amphibole mêlé de quartz et d’un peu de calcaire. Cependant le docteur Thomson n’a pu découvrir aucune trace d’acide phosphorique, sur 1500 grains du calcaire magnésien de Sunderland. Cette excep- tion est la seule que ce chimiste ait reconnue ; autrement il a trouvé dans toutes les formations même les plus an- ciennes , des indices de cet acide. Ces faits ne laissent pas que d’avoir une certaine impor- tance, à raison de ce que les phosphates sont indispensables à la formation de la graine des céréales et surtout à celle du froment. Aussi des recherches ont été entreprises de toutes parts pour découvrir des moyens économiques de la fournir au sol en grande abondance. Pour y parvenir, M. Sthenhouse a récemment proposé de précipiter au moyen de l’eau ou du lait de chaux , l’eau des égoûts, recueillie à cet effet dans des réservoirs. Cette eau laisserait ainsi précipiter en combinaison avec la chaux, l'acide phosphorique que lui ont apporté les excréments li- quides dont elle est imprégnée. Ce précipité séché au soleil, donne ensuite un excellent engrais ; une certaine portion de l’eau surnageante peut être enlevée au moyen d’un siphon, l'on facilite la filtration du reste et sa séparation du précipité, par le mélange avec un peu de charbon de bois en poudre(1). De même, si les indigotiers fournissent une brillante ma- (1) Philosophic. Magaz. Octobre 1845.— Lg universelle de Gendus ; Novembre 1845, n.o 119, tom. LX , pag. ( 188 ) tière colorante, c’est qu'ils en puisent les matériaux dans le sol sur lequel ils croissent, tout comme ils le font de la silice et du carbonate de chaux que leur incinération y dé- montre. En effet, 100 parties d’indigo donnent 33 parties de cendres dont le tiers est formé par la silice, et les deux autres tiers par la terre calcaire (1). Il faut en convenir , les motifs d’une pareille élection au milieu des nombreuses substances que l'air, l’eau et la terre peuvent fournir aux plantes , tiennent, ainsi que nous venons de le dire, aux conditions d'existence des indigo- tiers, et sont un des effets les plus merveilleux de la vie. Il en est de même des sécrétions si abondantes de ma- tière calcaire , qui ont lieu chez quelques espèces de lichens et qui constituent souvent plus de la moitié de leur poids. Aussi, lorsqu'on détruit par la combustion l'organe sécré- teur de l’oxalate de chaux ou les cellules faisant l'office de gangue , elles laissent sur des lames de verre un squelette siliceux qui, placé sous le microscope , rappelle parfaite- ment les formes du tissu organique (2). Ces cryptogames absorbent ce sel, de la même manière que les cannes éla- borent du sucre et de la silice. Les graminées, famille à laquelle appartiennent les cannes, s’assimilent également cette dernière substance , et lui doivent leur solidité et leur rigidité qui les ont rendues propres à des usages particu- liers. La silice est en partie fournie aux végétaux par tes mar- nes, qui leur donnent encore les bases alcalines nécessaires (1) Sennebier, Physiologie végét., tom. IV, pag. 274. Genève, 1800. Paschoud, libraire. (2) Vovez le rapport de M, Mirbel sur un mémoire de M. Payen 24 7 to À 5 #1 PA Annalne À . +. Une eur our tom. XVI, pag. 325, année 1841 et tom. XVIII, pag. 366. (1) ° à leur développement, et cela dans un état favorable à leur assimilation. Cette circonstance n’explique pas comment, parmi les végétaux placés sur le même sol, les uns sont tou- jours composés d’oxaläte de chaux ( Les lichens ), tandis que les autres , tels que les cactus, les trèfles, les fèves, les pois et le tabac, contiennent constamment une quantité no- table de tartrate de chaux. Ceci ne fait pas que généralement la nature des matières minérales contenues dans les végétaux ne diffère avec les variations du sol; car une plante peut élaborer du même terrain de l’oxalate de chaux, là où une autre espèce puisera des tartrates ou des carbonates de la même base. On conçoit plus facilement que le froment, l’avoine et le seigle qui croissent sur des terrains marneux, puissent ÿ trouver la silice qui leur est nécessaire ; mais ce qui en ap- parence est plus singulier, c’est de voir les mêmes espèces plantées dans les terrains calcaires , renfermer néanmoins des proportions plus ou moins considérables de matière si- liceuse. IL n’est pourtant pas au pouvoir des êtres organisés de former des corps élémentaires de toutes pièces ; il faut donc que ces terrains fournissent assez de silice à ces végétaux pour suffire à leurs besoins. Il n’y a, du reste, d'étonnant dans ces faits qui se renouvellent à chaque instant, que le motif de la préférence de telle ou telle espèce végétale pour une substânce déterminée, et le choix qu’en font toujours leurs organes , quelque soit la nature du sol, où elles se trouvent disséminées. Ainsi les soudes ( Salsola soda et kali) et les plantes ma- rines choisissent toujours de préférence les chlorures, plu- tôt que les autres sels disséminés ou en dissolution dans les eaux où elles sont placées : tout comme les plantes qui ha- bitent au milieu des décombres en soutirent Fammoniaque s ( 190) et les nitrates qui y abondent. De même, les céréales absor- bent les phosphates alcalins et terreux du sol sur lequel elles croissent. Ces sels leur sont fournis par les engrais que l'homme a tant d'intérêt d'y entretenir. Les fumiers, sur- tout l'urine des animaux les leur donnent. C’est seulement lorsque les graminées les rencontrent dans les terrains où elles végètent, qu’elles peuvent produire de la farine. Certains principes sont donc nécessaires au développe- ment des végétaux, mais ils sont loin d’être les mêmes pour les différentes espèces. C’est là le motif qui les porte à choisir dans le sol où elles se trouvent ceux qui conviennent le mieux à leurs conditions d'existence. Parmi ces matières élémentaires , il en est de plus indispensables les unes que les autres. Les sols qui renferment le plus de matériaux essentiels à une espèce végétale déterminée, sont par cela même, plus favorables à son développement, tandis que par des raisons contraires , il n’en est pas de même pour les autres plantes. L'on attribue généralement la grande fécondité ù ter- rain des environs du Vésuve, aux substances alcalines , aux sels et à la silice qu’ils renferment. Ces matériaux de- viennent peu à peu, par la décomposition des roches volca- niques où ils sont engagés, aptes à l'assimilation végétale. Le règne minéral est donc presque l’unique source d’où les plantes tirent les éléments qui les constituent. Les prin- cipales substances nutritives dont elles s'emparent en les soutirant de l’atmosphère ou du sol avec lequel elles sont en contact, se bornent à l’acide carbonique , à l’'ammonia- que, et à l'eau. Ce véhicule fait pénétrer jusque dans les plus petites parties de leurs vaisseaux, les substances qu'il dissout dans son cours souterrain. A son aide, l'acide sulfurique et l'hydrogène y parvien- nent ; c'est par ce dernier acide qu’elles reçoivent du sou- 191 fre ; en outre, le sol leur fournit des phosphates alcalins et terreux ainsi que du peroxide de fer, qui forment une des parties les plus essentielles des graines. L’eau approvisionne également les plantes des alcalis et des terres alcalines qui s’y combinent avec les acides organiques ; elle leur fournit enfin les sels calcaires et la silice qui entrent aussi dans leurs tissus. Outre ces principes qui leur sont fournis par le sol, les végétaux soutirent de l'atmosphère l'acide carbonique , l'a- zote et l’'ammoniaque toute formée , ainsi que l’eau néces- saire à leur accroissement. Les plantes terrestres sont donc sous la dépendance de deux milieux : l'atmosphère et le sol; ce dernier leur fournit les éléments que l’on ne découvre pas dans la couche aériforme où elles sont plongées. En effet, à part quelques légères traces d'hydrogène sulfuré à peine appréciables, l'air atmosphérique ne renferme pas de corps sulfuré. Comme il en existe dans les végétaux, il faut que le sol leur fournisse le soufre nécessaire à leur dé- veloppement. Il dérive des sulfates qui y sont fort abondants et qui, dissous dans l’eau, sont absorbés par les racines des plantes. A l’aide de ces deux milieux , les espèces végétales des terres sèches et découvertes, acquièrent leur entier dé- veloppement, tout comme celles qui vivent dans l'eau, le doivent à l'influence de ce liquide et des diverses circons- tances sous l'impression desquelles elles se trouvent. Les racines des plantes se comportent avec les substan- ces solubles déposées dans le sein de la terre, à peu près comme une éponge qui s'imbibe des liquides qu’elle ren- contre. Il suffit, pour qu’elles absorbent un corps quelcon- que, que ce corps soit en dissolution dans l’eau. Ainsi la plupart des végétaux contiennent de la chaux , comme cer- tains d’entr'eux de la silice. De Candolle admet générale- ment la dispersion de la première de ces substances dans 1 (192 ) les plantes ; il n’en excepte que le Salsola soda (1). En sup- posant qu'il y en eût d’autres qui n’en présentassent pas par leur incinération, la chaux n'en serait pas moins très- répandue. ? J Il n’en est pas ainsi de la silice dont il nous importe de découvrir l’origine dans le règne végétal. Elle s’y présente d'une manière assez générale, du moins dans l’une des classes qui en font partie. Les parties extérieures et inté- rieures des végétaux monocotylédons en contiennent sou- vent en proportions assez considérables. Les expériences de Fourcroy et de Vauquelin prouvent que les concrétions du bambou sont formées par de la silice presque pure. Gette substance en compose du moins les soixante-dix centièmes. Quoique les Prèles n’en renferment que 4 pour 100 dans leurs tiges , elles servent pourtant à polir les corps durs et à donner aux métaux leur brillant et leur éclat. Il en est de même des feuilles, des tiges et des graines de la plupart des céréales, telles que l'orge, le froment, l’avoine et le seigle. On sait combien la paille des deux dernières est ri- che en silice. Leurs cendres donnent un poids de 68 à 69 livres de silice par quintal. L’orge en fournit 63 livres et le froment 48. Le trèfle rouge, qui en donne le plus parmi les plantes dicotylédones , en contient 37 livres sur un quintal de cendres. * La silice est beaucoup plus rare chez les végétaux dicoty- lédones ; on l'y reconnait pourtant dans leurs feuilles et leur écorce. On prétend que celles du müûrier en contiennent 15, 25 pour 100. Il en existe également dans quelques racines , telles que celles du Colombo , du Polygala seneca, ainsi que dans les pétales de la Rosa gallica, Yabsinthe, (4) Physiologie végétale, Tom.T, pag. 382. — Paris, 1832, % o # (195) les écorces du bouleau et du Simaruba, le suc de la chéli- doine et la graine de lin. D’après Théodore de Saussure , il existerait dans les feuilles de chêne 45 de silice, 11, 5 dans celles du peuplier noir, 11, 3 chez le noisetier, et 3, 5 chez la verge d’or. La silice, comme toutes les matières minérales terreuses et alcalines ainsi que les oxides métalliques ou métalloïdes susceptibles de se dissoudre dans l’eau, est déposée par la sève dans les organes où s’opère l’exhalaison de ce liquide. On sait que l’on entend par sève , les liquides pompés par les racines et portés rapidement dans la tige et le tronc qui l'envoient et la distribuent dans toutes les parties de la plante. La sève doit donc contenir les principes constitutifs, puisqu'elle les introduit dans leur intérieur. Du moins, les malières solubles d’origine végétale, animale ou minérale introduites dans les végétaux par la sève , servent par l'effet des décompositions et des recompositions , à former les di- vers matériaux qui s’élaborent dans l’organisme végétal. Ces matériaux sont absorbés souvent en quantité si consi- dérable, qu’ils forment dans les plantes de véritables concré- tions ; aussi après leur incinération , une sorte de squelette reproduit tous les détails de l'organisme. La silice presque seule, marque les linéaments des membranes périphériques, _ tandis que le carbonate de chaux prédomine aux points où = s’est opérée la combustion des cellules situées au-dessous de l’épiderme , ou engagées encore plus profondément dans les tissus. La silice d’une part, et un composé calcaire de l'autre, sont interposés dans + eneets de chaque mem- brane durant la vie des plantes. Il est même des graines presqu’entièrement composées de silice ; nous citerons à cet égard , celle du Coïx lacryma, graminée qui, quoique de l'Inde, réussit assez bien en France. Les trois quarts des cendres qu’elles ont fournies par la Tome XVL. 13 & LA ( 194 ) calcination ont été reconnues composées de silice. Du moins le résidu que nous avons rapporté à cette substance était insoluble dans l’eau et les acides; fondu au chalumeau avec la soude , il a donné un globule vitreux d’une assez grande limpidité. Le reste se composait de soude, de chlo- rures alcalins, de phosphates et d’oxides de fer. Ces graines se font remarquer par leur dureté et leur solidité, lorsqu'elles sont arrivées à leur maturité. Malheu- reusement nous n'avons pas pu nous en procurer une assez grande quantité pour en faire une analyse exacte. Seulement les épreuves auxquelles nous avons soumis celles que nous avons incinérées , nous ont prouvé qu'elles contenaient une grande quantité de silice. Il s’agit maintenant de savoir dans quel état et sous quelle forme la silice arrive , et est contenue dans les végétaux. Cette question, d’après M. Liebig, serait insoluble ; car l’on ignore de quelle manière cette matière inorganique s’y trouve ainsi que les oxides de manganèse et de fer (1). On sait seulement qu'on peut en extraire la potasse, la soude et la magnésie à l'état de sels organiques, en épuisant les parties végétales par l’eau. Il en est de même de la chaux, lorsque cette substance n’y est pas contenue à l’état d’oxalate insoluble. L'acide silicique parait quelquefois se trouver dans les plantes à l’état de silicate de potasse. Ce sel déposé dans les lisières des feuilles et les tiges, est fourni aux graminées par les irrigations et les eaux continenteles. Il en est de même de celui que l'on découvre dans les jones, les ro- seaux et les équisétacées, végétaux qui eroissent de préfé- rence dans les lieux où les éléments de l'argile sont main- (1) Chimie appliquée à la sn mise par Liebig, traduc- tion de M. Gerhardt, T.}, — 84. + (1%) tenus en dissolution par le mouvement des eaux. Aussi y découvre-t-on de notables quantités de silice ou de silicate de potasse, matières qui leur sont fournies par les terrains marneux et argileux. D'un autre côté, d’après les expériences de Fourcroy et de Vauquelin , la silice existerait souvent à l’état de pureté dans certaines graminées, comme chez le bambou, les prêles et le seigle. Ainsi cette substance se rencontrerait dans les vé- gétaux de deux manières différentes , à l'état de liberté et à l’état de sel ou de silicate de potasse. La silice existe également chez certaines espèces de végé- taux marins qui, avant la détermination organographique de M. Decaisne et les analyses de M. Payen, avaient été rangées par Lamouroux au nombre des polypiers. Ces pré- tendus zoophytes se rapportent aux algues, ainsi que l'ont prouvé les belles recherches de ces observateurs. Ils sont composés non-seulement de 76,1 de carbonates de chaux et de magnésie, mais encore de 1,05 de sulfate de chaux et de silice. Le reste est formé par la matière organique ; abstraction faite de l'eau hygroscopique , le tissu organique de ces plantes se réduit à 3,8 pour 100, en sorte que plus des 96 centièmes de leur poids consiste en substances minérales. À la vérité, la silice y est en petite quantité, mais elle ne s’y trouve pas moins comme chez un grand nombre de phanérogames, dans des positions déterminées de l'organisme. La proportion de ces substances minérales dépend plutôt des facultés des êtres vivants, que de la com- position véritable des milieux qu'ils habitent (1). Si l’on examine au microscope les pousses de la Coralline officinale ; on remarque le tissa orpasiqe ce au (4) lati des animaux et aux sécrétions minérales dans les plantes; par M. Rays. Annales des Sciences naturelles , t. 20, pag. 65. ( 196 ) dehors des concrétions et précédant partout la substance minérale. Celle-ci appliquée contre les parois des cellules, reliée par la matière organique , offre dans son mode de dé- veloppement une certaine analogie avec les incrustations des substances végétales qui donnent une grande consistance aux parois dures des plantes ligneuses. Quelques conséquences d’une assez haute portée sem- blent résulter des faits que nous venons d’énumérer, afin de faire comprendre de quelle manière les substances miné- rales s’introduisent dans les organes des végétaux , et s’as - similent à leurs tissus. Ces substances leur sont fournies par les terrains où ils croissent ; aussi leurs proportions sont sensiblement en rapport avec leur abondance dans ces mê- mes terrains. Il serait difficile en effet de concevoir la for- mation de ces matières au moyen des faibles actions chimi- ques dont quelques plantes sont douées. Il en est si peu ainsi, que quelques espèces végétales donnent des produits différents , lorsqu'elles croissent dans des terres très-diverses. Les mêmes plantes qui au bord des mers produisent des sels à base de soude , n’en four- nissent plus, transportées à des distances plus ou moins considérables. Les sels de potasse remplacent pour lors les premiers qui ont disparu. Les cendres des végétaux qui ont pris leur développement dans les terrains calcaires ou si- liceux, ne contiennent pas les mêmes principes constituants; elles en offrent de tout différents, parce que la nature des matières minérales contenues dans les végétaux varie avec les variations du sol (1). Le carbonate de chaux dont s'emparent les animaux et (1) Voyez le mémoire de M. Berthier sur l'Analyse des cendres des végétaux , inséré dans le volume XX XII.me des Annales de chimie, pag. 240. (197) qui entre dans leur charpente solide, leur est fourni par les eaux continentales. L'eau de la mer qui en renferme ‘/,,,6 de son poids, quantité à peine appréciable dans une livre, est cependant la source où existe la matière première des coquilles et des polypiers pierreux, qui composent des ré- cifs d’une étendue souvent considérable. Le phosphate de chaux, autre sel non moins essentiel aux animaux, particulièrement aux mammifères, s’y trouve en quantité plus ou moins grande. On présume qu’en terme moyen, il n’en forme guère plus du cinquième de leur poids. Néanmoins, ce sel est nécessaire à la formation du système osseux. Ce qui est non moins digne de remarque, on le découvre dans les cendres de toutes les plantes, et d’après l'observation de M. Théodore de Saussure , il n’y a aucun motif de supposer qu'elles pourraient exister sans lui. D'après Muller, les sels calcaires qui entrent dans la composition des os, dépasseraient un peu la moitié du poids de ces organes (1). Les canaux qui les contiennent sont formés par un réseau épais et serré, entre les mailles duquel ils sont dispersés, plus ou moins mélangés avec les molé- cules cartilagineuses. La matière inorganique qui compose les dents, paraît logée dans des tubes parallèles qui ont été observés par Leeuwenhoeck, Purkinje et Retzius. Cepen- dant, d’après le physiologiste de Berlin que nous venons de citer, la plus grande partie de la matière calcaire ne serait point enfermée dans les tubes, mais seulement dans leur partie intermédiaire. Les sels calcaires unis chimiquement à la substance même des cartilages, s’y présentent sous une forme granulaire toute particulière. (41) De 57" péé nm ossium, atque de mudo quo terrea Berolini, 1836 , in-4.° Voyez également l'ouvrage de Mieschet , intitulé : De inflammatione ossium eorumque anatome general, ( 198 ) Enfin, l'analyse microscopique est venue ajouter un carac- têre particulier à la structure des os. Ce sont les corpus- cules rayonnés qu’elle permet d'y distinguer et que l’on ne retrouve pas dans les parties des animanx souvent compa- rées avec ces organes proprement dits, comme les écailles des poissons osseux ordinaires. On observe toutefois ces corpuscules osseux radiés dans les écailles du Lépidostée et du Polyptère , ainsi que dans les plaques d’autres poissons qui n'appartiennent pas aux ganoïdes. La plupart des sels que l'on rencontre chez les animaux se retrouvent chez les végétaux, seulement ils n’y sont pas dans les mêmes proportions. Ainsi parmi les 20 parties de substances solubles dans l'eau et l'acide chlorbydrique que M. Frésénius a observées dans les cendres du seigle, il a découvert 2,50 de phosphate de chaux. Le résidu insoluble dans les deux liquides , des cendres de la même graminée, a fourni à ce chimiste jusqu’à près de 64 parties de silice. La proportion de cet acide a paru moins considérable à M. Berthier dans les végétaux dicotylédons ; mais la plupart des cendres provenues de la combustion de ces plantes en ont toutes présenté. Les quantités de l'acide silicique y ont varié de 1,1 à 38. Ces végétaux comme le seigle ont offert aussi à peu près constamment les acides phosphorique, carbonique, chlorhydrique et sulfurique , ainsi qu’un grand nombre de bases parmi lesquelles nous mentionnerons la chaux, la magnésie, les oxides de fer et de manganèse, la soude et la potasse. ILen a été de même des analyses des Diese des pois jaunes et sauvages, du froment et des fèves de marais, provenant des environs de Solm (Hesse électorale) exécutées par M. Thon au laboratoire de Giessen. Quant à celles dues à Théodore de Saussure, elles ont présénté une base qui n'a pas été signalée par les chimistes précédents. Cette base Î ( 499 ; est l'alumine; mais les végétaux desquels provenaient les dernières cendres avaient crà dans un sol granitique riche en cette matière. Enfin d’après Liebig, les cendres des végétaux contien- nent généralement, soit celles des dicotylédons, soit celles des monocotylédons , un assez grand nombre de matériaux inorganiques qui n’y diffèrent que sous le rapport de leurs proportions. Ainsi il a reconnu : 1.° du carbonate de potasse, 2.0 du phosphate et du sulfate de la même base, 3.° du chlorure de potassium , 4.0 des phosphates terreux, 5.° des carbonates terreux, 6.° de la silice, 7 o des oxides mé- talliques. Les vesces en fleur seraient, parmi les plantes qu'il a soumises à l'analyse, celles où existerait la plus grande quantité de carbonate de potasse, elle n’y est pas moindre; dans leurs cendres, de 57,25 ; tandis que le son du froment ne lui en a offert que 14 pour 100. D'un autre côté, les graines d'orge ont fourni jusqu'à 35,5 de silice, les vesces en fleur 2 pour 100, et les fruits du marronnier d'Inde 0,5 seulement (1). Ces analyses prouvent que les matières minérales néces- saires au développement de certains organes destinés à des fonctions particulières, spéciales pour chaque famille, s’y retrouvent dans la cendre des végétaux, mais dans des com- binaisons quelquefois nouvelles et qui n’ont plus rien d'or- ganique. Sans doute leurs proportions varient suivant la nature du sol; mais il en faut toujours une certaine quan- tité , pour que les plautes prennent tout leur accroissement. Les végétaux aussi bien que les animaux absorbent la silice (1) Chimie appliquée à la physiologie végétale et 2. l'agriculture, par M. Justin Liebig, traduite par M. Charlés Gerhardt ; Paris 1844, pag. 354. ( 200 ) comme la matière calcaire ; du moins plusieurs de leurs es- pèces; car cette propriété n’est pas générale chez toutes celles des deux règnes. Ce n’est pas seulement dans l'intérieur du végétal que se font les dépôts de matières inorganiques. Il est facile de s’assurer de la présence des concrétions calcaires à la sur- face des tiges des Charu hispida et vulgaris. Le cambium est l'agent nécessaire à leur formation (1 ). Probablement, lursque les êtres vivants s’assimilent Ja silice ou le carbonate de chaux , ces deux substances sont pour lors à l’état liquide. 11 serait du moins difficile que des êtres infiniment petits, comme les infusoires, pussent intro- duire dans leurs organes la silice à l’état solide pour si ténue qu’on la suppose. 11 paraît nécessaire pour qu'elle puisse y pénétrer, qu’elle soit dissoute et à l'état liquide, parce qu’alors ces molécules divisées au dernier point, sont aussi petites que possible. Il en est ‘probablement ainsi de celle qui arrive dans les vaisseaux exigus des plantes ou des animaux. Les végétaux se nourrissent uniquement de substances liquides ou gazeuses ; la silice, un de leurs éléments cons- tituants, doit donc être dans l’un ou dans l’autre de ces états, lorsqu'elle est absorbée par eux. L’exiguité de leurs vaisseaux l’exige, et la forme cristalline qu'ont pris souvent les raphides siliceux eontenus dans leur intérieur, le prouve. Cette circonstance est en effet démonstrative, car les corps bruts, à quelque classe qu’ils appartiennent, ne peuvent cristalliser que lorsque leurs molécules sont assez écartées pour se mouvoir et s'arranger en toute liberté : {1) Voyez le mémoire de MM. Mirbel et Payen sur la composition du cambium. Annales des sciences naturelles, tome XIX, seco série, page 199. em BRIE RE ( 201 ) or, elles ne sont assez distantes pour le pouvoir sans obs- tacle , que lorsque elles se trouvent ou à l’état liquide ou à l'état gazeux. À Comme il n’est pas présumable que ces molécules se montrent dans le dernier état , la silice n'étant pas volatile, elles doivent être liquides, pour pouvoir pénétrer dans les tissus animaux ou végétaux. Ces êtres n’absorberaient et ne s’assimileraient cette substance , que lorsqu'elle serait dans une liquidité parfaite. Du moins, les radicelles des végétaux absorbent les molé cules de toute nature mises en contact avec leurs bouches- absorbantes , pourvu qu'elles soient suffisamment dissoutes dans l’eau, ou dans tout autre liquide. Seulement , elles ne paraissent avoir aucun moyen organique ou chimique d'agir sur les substances qu’elles ont absorbées, en les atténuant ou en les dissolvant par des sucs digestifs , et en préparant leur introduction dans l'organisme végétal. Le sol est chargé de cette opération préliminaire ; la permanence de son contact avec les racines qui le pénètrent et qui y restent fixées, permet l’action lente, mais plus ou moins continue de l'absorption alimentaire. Un pareil mode de nutrition, qui suppose la fixité, ne pou- vait avoir lieu chez les espèces animales ; il s'opère ici au moyen de leur peau extérieure ; celle-ci, repliée sur elle- même , forme une cavité intérieure qui reçoit et tient en réserve une provision d'aliments ; ils s’y élaborent et s’y préparent jusqu’à ce que leurs molécules ainsi dés nes puissent servir à composer le fluide nutritif. Cette action digestive des parois du sac alimentaire est propre à l’organisme animal; aussi ce sac paraît exister même chez les infusoires qui sécrètent la matière siliceuse ou calcaire. Lorsqu'il manque chez ces animaux ou chez { 202 ) d'autres espèces inférieures , leurs téguments en tiennent leg Les animaux comme les plantes, introduisent dans l'in- térieur de leurs organes des substances minérales, et se pé- uètrent ainsi principalement de matières salines. Un pareil fait ayant lieu dans leur état normal, on doit l’envisager comme une condition de leur organisation. La silice et les sels calcaires que les animaux élaborent ou absorbent, sont des matériaux qui paraissent être étrangers à leur constitu- tion primitive. En effet, quoique les matières inorganiques ne puissent nourrir seules les animaux ni même les végé- taux, certaines d’entre elles entrent à titre d'éléments es- sentiels dans la composition de leur organisme. Les maté- riaux que les animaux s’assimilent et incorporent à leurs tissus , à quelque classe qu’ils appartiennent, sont pour eux des aliments en quelque sorte essentiels, du moins dans un sens relatif. En effet, un aliment en particulier est insuffisant pour nous substanter : l’ensemble des éléments qui forment notre régime est seul capable de nous nourrir. Ceci n'empêche point que la qualité d’aliments propre- ment dits n’appartienne qu'aux substances animales ou végétales susceptibles de se dissoudre facilement dans les liquides organiques, et dont les éléments sont réunis en proportions peu dissemblables de celles qui composent les matériaux organisés. Il faut encore que ces substances n'aient point de propriétés chimiques saillantes , ni aucune propension à produire des composés chimiques binaires aux dépens des combinaisons organiques déjà formées. Les corps qui, avec une composition hétérogène, ont une pareille tendance et des affinités chimiques spéciales , ne sont plus des matières alimentaires. On peut seulement les considérer comme des poisons ou des médicaments La silice ou le carbonate de chaux que les animaux et les étés, ntm ON mm ( 203 ) végétaux s’assimilent , et le phosphate de chaux élaboré par les premiers, sont des substances pour eux nécessaires , du moins dans un sens relatif. Si les sécrétions ne sont qu'un mode particulier de métamorphoses que le sang et la sève subissent en circulant à travers les organes , les matériaux inorganiques dont nous venons de parler doivent s'y trou- ver. En effet, le fluide nourricier des animaux, principalement celui de l’homme et de l’oie, a une composition très-com- plexe ; il n’offre pas moins de quinze corps différents dont aucun ne s’y trouve à l’état de simplicité. Parmi ces com- posés, on y découvre non-seulement la silice, mais l'acide carbonique , l'acide phosphorique et la chaux, en un mot, les éléments inorganiques dont nous cherchons à reconnaitre l'origine ( 1 ). Dès-lors, il est infiniment probable que ces deux matières sont également contenues dans le liquide nu- iritif des animaux inférieurs, puisque en définitive elles font partie de leur propre substance. Quoiqu'il en soit, on ne doit pas considérer les substan- ces minérales contenues dans les végétaux et les animaux comme fortuites et nullement nécessaires à leur existence , par cela qu’elles ne s’y rencontrent qu’en petite quantité. En effet, lorsque leur présence y est constante, ces matériaux doivent être essentiels à ces corps organisés, quelque faibles que puissent en être les proportions. On pourrait supposer d’après ce qu’il en est de la bile, de la bourse à encre du Loligo sagittata et des organes qui (1) Muller, dans son Manuel de physiologie ( tom. 1 A 100 ), admet que le sang est composé 1. d’eau, 2.0 de glo .° d’albumine , 4.0 de fibrine , 5.° de graisse, 6.° de RE a 7,0 ve us sodique, 8.0 de me alcalin, 9. de 10. d’oxide de de eo de chaux, 12 rs: rie” 13.0 d’acide sulfurique, vi ° de magnésie , 15.0 de silice. ( 204 ) sécrètent la pourpre dans la Janthina fragilis, ou les calculs biliaires et stomacaux, qu'il devrait exister, du moins chez les animaux, quelque appareil propre à l'assimilation de la silice ou des sels calcaires. Il ne paraît pas cependant en être ainsi. Les recherches que nous avons faites jusqu’à présent pour en découvrir ont été infructueuses , et nous n'avons pas su trouver d'appareil spécial destiné à opérer cette sécrétion. Seulement , à raison de la diversité de la conformation organique , telle portion des appareils qui la constituent doivent exercer de préférence leur attraction sur tel ou tel principe en dissolution dans les liquides qui les parcourent. Ces sécrétions auraient lieu par les organes eux-mêmes aux dépens des parties constituantes de ces liquides, de la même manière que s'opère la formation de tous les solides organisés. Il n’en est pas de ces derniers comme des fluides ani- maux et végétaux, qui se modifient à l'infini par l'effet de circonstances plus ou moins accidentelles, dans les organes chargés de les préparer. Souvent même ceux-ci n’en con- tiennent pas le principe constituant, comme par exemple la substance rénale qui, d’après Berzélius, n'offre pas durée. Le foie ne contient pas non plus les matériaux es- sentiels de la bile. Dans le cas qui nous occupe, la silice existe au contraire dans les liquides chargés de la déposer chez les corps vivants, tout comme les sels calcaires que ceux-ci s’assimilent. La séparation de ces substances ebitliis , des liqui- des qui les charrient , est beaucoup plus simple que ne le serait celle de la silice et du phosphate calcique dont l’urine est formée avec un assez grand nombre d’autres sels, dont deux ont aussi l'acide phosphorique pour principe cons- tituant. { 205 ) VIII. RÉSUMÉ. Il résulte de l’ensemble des faits que nous venons de rappeler , plusieurs conséquences propres à mieux faire ap- précier les causes du phénomène dont nous avons étudié les conditions. Les rognons siliceux de la craie, quoique contenant par- fois dans leur intérieur des corps organisés, n’en sont pas cependant formés. Ces corps ont seulement servi de centre d'attraction au dépôt de la matière siliceuse qui en a pris la place à mesure qu’ils se décomposaient, et en a reproduit plus ou moins exactement la figure et les dispositions géné- rales. Jamais cette matière ne parait en avoir suivi les linéaments, ni retracé la structure propre aux corps organi- sés qu'elle a remplacés. Aussi pour expliquer leur formation, il n’est pas nétes- saire de savoir de quelle manière les corps vivants élabo- rent ou sécrètent la silice; mais seulement s’ils peuvent être transformés en cette substance. Quant à un pareil rem- placement , il est facile de comprendre qu’il est toujours possible ; car il suffit, pour qu'il ait lieu , que les corps or- ganisés soient susceptibles de décomposition et qu'ils deviennent, pendant qu’elle s'opère, des centres d’attrac- tion, pour la substance inorganique. Attirée par les produits de la vie, la silice les remplace peu à peu, presque molécule à molécule. Aussi en conserve- t-elle pour lors la structure. Mais lorsque ce phénomène s'opère brusquement , comme lors de la formation des silex de la craie, la substance brute ne retrace que grossière ment la figure et l’ensemble des dispositions pipes corps organisés dont elle a pris la place. La manière dont se passent ces deux modes de substitu- ( 206 ) tion, ou pour mieux dire, le phénomène de remplace- ment qui nous occupe, nous est tout-à-fait inconnu , et se dérobera longtemps à nos recherches. On peut cependant présumer que lorsque de véritables substitutions se sont effectuées, c'est-à-dire, lorsque la matière brute s’est sub- stituée à la matière organique, molécule à molécule, de façon à en remplir les linéaments , une pareille opération a dû exi- ger un repos plus absolu et un plus long espace de temps que lorsqu'elle s’est bornée à un simple remplacement. Les bois et les coquilles silicifiés ou pétrifiés en toute au- tre matière, sont des exemples vulgaires de substitution. Les silex de la craie, ainsi que les cherts, les chailles et les septaria, nous en présentent de formés par un autre mode, c’est-à-dire, par voie de remplacement. Durant la substitution , il y a eu pénétration intime dans les mailles et le tissu organique par la matière siliceuse, calcaire ou argiteuse, de manière à en reproduire fidèlement la struc- ture, tandis que tout s’est borné, dans les remplacements, à prendre en gros la forme du corps organisé dont la matière inorganique a occupé la place. D’après cette différence qui existe entre les substitutions et les remplacements, les premières ont exigé ainsi que nous venons de le faire observer , un repos plus complet et même un temps beaucoup plus long. Cependant certaines conditions semblent avoir été communes aux deux ordres de phénomènes. Ainsi, pour que les substitutions ou les remplacements puissent s’opérer avec facilité, les corps organisés OU Inor- ganiques devaient être tous deux immergés ou plongés dans une masse liquide plus ou moins considérable. Du moins, les substitutions ou les remplacements qui ont eu lieu dans les temps géologiques, comme ceux qui se produisent de nos jours , se présentent constamment avec cette condition. ( 207 ) En effet, les coquilles abandonnées par les mollusques qui les habitaient dans le sein de la Méditerranée, se pétri- fient et passent à un état plus complètement pierreux que celui qu’elles offraient pendant leur vie. Cette pétrification à lieu par une véritable substitution. En effet, au carbonate de chaux cristallin, souvent même complètement cristallisé , il s’en substitue un autre compacte ou feuilleté qui composait les coquilles pendant leur vie. Un pareil échange de princi- pes s’est effectué dans le bassin de cette mer, comme dans celui de l’ancien océan, où se sont produites les nombreuses substitutions du même genre , dont les couches des terrains de sédiment nous offrent tant d'exemples. Ce n’est pas seulement dans les eaux salées , que se sont passés de pareils phénomènes, dans les temps géologiques et dans les temps historiques. Les formations d’eau douce en fournissent des exemples remarquables. Il suffit de les rappeler pour faire comprendre que de pareilles substitu- tions ont été fréquentes dans les eaux douces des deux grandes époques de l'histoire de la terre De pareils effets, quoique plus rares à l’époque à laquelle nous appartenons, n’en sont pas moins réels. En effet , les graines de la cha- raigne d’eau (Chara) qui tombent au fond des lacs d’Ecosse s'y pétrifient, comme les gyrogonites dans les eaux lacus- tres de l’Europe. Comme ces gyrogonites sont les graines du même genre de plantes que celles qui se transforment en matière calcaire dans les lacs d’'Ecosse, l’analogie des deux phénomènes est telle, que probablement ils ont dû se passer sous l'empire des mêmes conditions. C’est encore dans le sein des eaux douces que les pou- _tres du pont bâti sur le Danube, du temps de Trajan, se sont transformées en pierre dure et se sont silicifiées. La substitution de la matière inorganique s'est opérée ici dans de grandes masses liquides , ce qui confirme ce que nous ( 208 ) avons dit de leur influence, pour que de pareilles substitu- tions puissent s'effectuer. De pareils phénomènes semblent pourtant avoir lieu sans cette condition. Le fait que nous allons citer le fait du moins présumer. Des vases en forme de tonneau ont été décou- verts auprès de l’ancien temple de Janus, par les soins de la Société archéologique d’Autun. Ces vases en grande partie pétrifiés et incrustés par du carbonate de chaux, avaient conservé les empreintes des cercles et des douves. Ces empreintes indiquaient qu'ils avaient dû être confec- tionnés avec des végétaux dicotylédons. M. l'abbé Laudot qui a décrit ce curieux phénomène dans une note imprimée et communiquée à la Société Eduenne, n’a rien dit qui puisse faire supposer que ces vases se soient pétrifiés dans de grandes masses d’eau. Nous igno- rons si cette circonstance s’est ou non présentée dans le fait d'Autun ; elle pourrait toutefois avoir eu lieu , quoiqu'on ne l'ait pas mentionnée. S'il en avait été ainsi, la pétrifi- cation de ces sortés de tonneaux aurait eu lieu, comme dans la plupart des circonstances qui nous sont connues , c'est-à-dire, dans l’eau. Le troisième mode de fossilisation ou celui qui a converti les arbres et les plantes de l’ancien monde en houille et en lignite , paraît avoir dépendu de la température élevée dont le globe jouissait à l'époque où de pareilles métamorpho- ses ont eu lieu. La pression exercée sur les végétaux par les dépôts terrestres qui les ont recouverts , ne parait pas avoir été sans influence sur la conversion de leur substance en matière charbonneuse plus ou moins minéralisée. Il faut encore ajouter à cette influence , celle de la nature des eaux dans lesquelles les matières végétales étaient plongées. Du moins, d'après les expériences de M. Persoz, des bouleaux abandonnés pendant plusieurs années dans une ( 209 ) dissolution de sel marin , ont été convertis en une matière de nature bitumineuse (11. D'un autre côté, les bois retirés du fond des lacs, et qui y ont séjourné pendant un temps assez long, y prennent l'aspect et les propriétés du lignite. En défaisant, en 1841 , le petit pont du Rhin entre Stras- bourg et Kiel, construit en 1811, la portion des piliers qui était plongée dans l’eau, était en grande partie transformée en lignite. Cette conversion parait avoir été produite par l'action de l’eau douce sur ces bois ; ce qui indique que les houilles doivent probablement les différenees qu’elles pré- sentent-avec les lignites, à ce qu'elles se sont formées sous l'influence d'eaux chargées de chlorure sodique et de sul- fate de la même base. Le dernier mode de fossilisation, et pent-être le plus simple, a eu lieu lorsque les êtres organisés composés en partie de tests ou de carapaces solides et pierreuses, ont été en si grand nombre, que leur agglomération a suffi pour former des roches d’une étendue considérable Les maté- riaux qui sont le résidu organique de ces êtres vivants, nous témoignent de leur ancienne existence et @e leur immense quantité dans les temps géclogiques. Ce qui est non moins remarquable, les couches de sédi- ment entièrement composées de débris organiques , ont été à peu près uniquement produites par les espèces animales des plus faibles dimensions. Les infusoires , ces infiniment petits de la nature animée, paraissent avoir eu seuls ce pouvoir. Les roches d’une grande étendue, dont ils ont composé la masse avec leurs carapaces calcaires ou sili- ceuses, montrent assez dans quelles proportions immenses devaient être leurs espèces et les individus en faisaient partie. e, 1839, Tower XVI. 14 ai) Introduction à la chimie pattinetls par Persoz. Paris, Bail- pag. 60, ( 240 }) Les genres des infusoires de l’ancien monde présentent une constance de forme que les animaux des classes supé- rieures sont loin d’avoir offert, En effet, les espèces de l'o0- lithe ou des terrains crétacés sont souvent les mêmes que ceux qui vivent de nos jours dans les climats les plus di- vers. Ces infusoires à carapace siliceuse ou calcaire habitant les fleuves et les mers, ont persisté depuis lors avec des caractères identiques. Leurs races ont joué un rôle impor- tant, près l’Équateur ou vers les pôles, dans la formation des dépôts terrestres et l’arrangement de la surface du globe. Sans doute, des animaux d’un ordre plus élevé que les infusoires , entrent aussi pour beaucoup dans la formation de certaines couches sédimentaires ; mais il n’en est pas qui les constituent en entier. Les infusoires nous présen- tent ce degré de fossilisation à son complément. En consi- dérant l'étendue et la puissance des masses minérales qu'ils ont produites, on est réellement étonné de la surabon- dance de vie des temps géologiques. Aussi a-t-elle laissé des traces partout dans les dépôts postérieurs à l'apparition des êtres qui jouissaient de ce bienfait. Le dernier mode de fossilisation nous présente la sub- stance minérale qui faisait partie intégrante des corps or- ganisés lorsqu'ils jouissaient de la vie. Comme la substance qui les composait pour lors, constitue maintenant les roches ou les matériaux terrestres , tels par exemple que la craie, on pourrait donner à ce mode de pétrification , le nom de minéralisation. Le phénomène des remplacements a eu lieu, lorsqu'un corps inorganique s’est borné à prendre la place d’un corps vivant, sans pour cela se montrer on s’introduire dans les mailles et les tissus qui en font partie. Lorsque cette der- nière circonstance s’est présentée, la substance brute ne ( 2 ) s'est pas bornée à occuper la place du corps organisé ; mais elle en a suivi tous les linéaments et lui a été substi- tuée en quelque sorte molécule à molécule. On peut donner à ce mode de pétrification le nom de substitution ; il s'opère aussi bien dans les temps historiques qu’il a eu lieu dans les temps géologiques ; seulement , il a exercé son action, à ces anciennes époques , sur une plus grande échelle. Les effets de la minéralisation qui se rapportent aux temps historiques sont encore imperceptibles ; mais les in- fusoires actuellement vivants préparent en silence, dans l’é- corce la plus superficielle de la terre, de nombreux matériaux qui auront aussi à leur tour leur importance. Il n'est pas cependant probable qu'ils soient jamais comparables aux immenses dépôts qu'ont formés les zoophytes et les infu- soires de l’ancien monde. ‘ Les silex des terrains crayeux n’ont donc pas une origine animale, comme la craie au milieu de laquelle ils sont dis- séminés. Ils ont seulement occupé la place des corps orga- nisés qui s’y trouvaient; en les remplaçant, ils en ont pris jusqu’à un certain point la forme extérieure, mais sans en représenter la structure et l'organisation. On ne saurait dès-lors apercevoir en eux-mêmes des preuves de ce mode de formation; seulement les rognons siliceux offrent souvent dans leur intérieur, des corps orga- nisés ou des noyaux pierreux. La silice attirée par ces corps, s’est moulée autour de leur surface, et en a plus ou moins conservé la forme. Il en a été de même, soit qu’elle ait rencontré un noyau solide, soit que des alcyo- nium , des éponges ou tout autre zoophyte lui aient servi de centres d'attraction. Cependant, pour que la silice pût remplacer ces corps organisés , il n’a pas été nécessaire, comme dans le cas des substitutions, qu’elle fût dans une liquidité parfaite. I à (222) suffi pour qu'un pareil remplacement eût lieu, que cette substance fût dans un état pâteux, presque gélatineux. Si cette substance attirée par des corps organisés avait été réellement fluide, elle se serait substituée à ces corps. Elle en représenterait non-seulement la forme , mais les linéa- ments et jusqu'aux moindres détails de leur structure. Cette dernière circonstance parait du moins avoir eu lieu- toutes les fois que la silice se trouvait dans cet état. Il n’en à pas été ainsi, lorsque cette substance a pris la place des corps organisés disséminés dans la masse de la craie, ce qui semble annoncer que la silice n’était pour lors ni liquide ni coulante. Elle les a bien remplacés, mais elle ne s’est point substituée à leur propre substance et n'a point pris la forme de leurs mailles et de leur tissu. La matière siliceuse est restée, après ce remplacement, ce qu'elle était auparavant ; rien n’a été changé dans sa tex- ture ; mais ses rognons rappellent la forme particulière aux corps organisés dont elle a pris la place. TS PC — IX.OusERVATIONS sur la fécondation des Guépes com- munes, Vespa vulgaris, Lin. Les insectes qui habitent près de nous, que nous voyons tous les jours, que nous foulons aux pieds, ont été les moins observés. On a pensé que leur histoire était écrite avec assez de détails, pour qu'il ne fût plus nécessaire de s’en occuper. Le défaut d'observations a laissé subsister une foule d'erreurs qui se répètent chaque jour et qui sont accréditées par des hommes qui portent un nom distingué dans les sciences naturelles. Je conviens qu'on rie voit pas autant qu’on le voudrait; mais combien de naturalistes plus portés (2145 ) à croire qu'à examiner , dédaigneraient revenir sur ce qui à été dit, et croiraient rétrograder , s'ils cherchaient à vérifier les curieuses observations des Réaumur, des Degées , etc. La fécondation des abeilles et des guêpes est demeurée complètement ignorée, enveloppée d’ombres et de mystères ; les soins et la persévérance aidés du hasard, pouvaient la faire découvrir, et cependant aucun auteur jusqu’à ce jour, n'a rien dit de plus que ce que nous ont fait connaître Swamerdam et Réaumur. Swamerdam avait remarqué , entre les organes de la génération des mâles et ceux des femelles, une disproportion qui lui avait fait regarder comme impossible, l’accouplement entre les deux sexes. Réaumur avait été témoin d’une sorte d’accouplement, qui était si court chez les abeilles, qu'il lui paraissait insuffisant pour donner aux œufs le germe de leur fécondité. Hubert, de Genève, plus ami du merveilleux que de la vérité, s’en rap- portant à la déclaration de François Burnens, son domesti- que , ne craignit pas d'avancer que les mères-abeilles étaient fécondées dans leur vol par les faux-bourdons. D’autres répétèrent après lui, que la jeune abeïlle étant sortie de la ruche, s’abandonne au mâle qu’elle rencontre dans l’atmo- sphère , que si cette sortie est infructueuse une autre la suit, que la fécondation opérée , le mâle meurt après l'accouple- ment et qu’il est privé des parties de la génération, qui restent fixées dans celles de la femelle et que celle-ci se hâte de les en extraire avant la ponte (1). (1) Nouveau ca sr d mers vanerale de Mere T. Le, p. 14. 1817. — Tir, p. #, colonne 2.e— Mister midersll d'Histoire naturelle, T. Ler, p. 8, colonne 3.°, 1841. — Dictionnaire universel d'Histoire naturelle, T. X, p. 552, colonne 1°, paragraphe Ier. 1848, — LarreiLce, Règne animal de Cuvier, T. NI, page 532.— 1817. (214) Si ces auteurs eussent voulu réfléchir , auraient-ils cru et répété dans leurs écrits des faits aussi érronés. Quelque prompt que soit l’accouplement, peut-il avoir lieu en l'air ? Chez les insectes où il a le moins de durée, la Mouche domestique , Musca domestica, un point d'appui devient nécessaire pour que le mâle se place convenablement sur la femelle. Le vol ne cesse-t-il pas , dès l’instant où le mâle s'accroche au dos de la femelle et la chute n’en est-elle pas la suite ? En faut-il davantage pour empêcher une union, que le moindre bruit et le plus léger mouvement fait sou- vent évanouir ? La disproportion qui existe entre les organes mâles et femelles, ne suffit-elle pas pour faire rejeter l’idée, que ceux du mâle peuvent être introduits dans la vulve de la femelle immédiatement, sans aucun prélude et dans un espace de temps aussi court ? Ces mêmes organes sont-ils attachés si faiblement, qu'ils soient enlevés sans effort et qu'ils restent fixés, dans ceux de la femelle ? Lorsqu'on cherche à les arracher, loin de céder aussi facilement , ils entrainent avec eux les anneaux de l'abdomen qui les re- couvrent et une partie des viscères qui les avoisinent. La- treille Jui-même, dit : « Si on fait sortir de force ces orga- » nes, l'animal périt sur le champ » (1). N'est-il pas plus vraisemblable de penser, qu'Hubert qui crut retrouver dans la vulvc de la femelle, l'organe copulateur du mâle qui y adhérait encore , aura pris pour une femelle, un mâle dont le penis encore dans un état de turgescence considérable , était resté en partie hors de l'abdomen après l’accouplement , ce qui à liea même après la mort (2). Ces auteurs auraient bien (4) LarreiLce, Règne animal de Cuvier, T. IX, page 530. 1817.— Nouveau Dictionnaire d'Histoire naturelle, de Déterville, T. I Paragraphe , 1er, 1817. (2) Sur la fin d'Octobre 1845 , ine promenant le soir à la campagne , Del » (215 } dù nous faire connaître les moyens que la femelle employait pour se débarrasser des parties génitales du mâle. Je suis surpris de n’avoir pas encore vu paraître quelque prévo- yante et obligeante matrone , que la nature toujours si sage, aurait fait naître dans chaque ruche , accourant pour déli- vrer la patiente. Réaumur n'avait pas été plus heureux pour découvrir la fécondation des guêpes que celles des abeilles. Pensant que l'accouplement, avait lieu dans l'intérieur du guëpier , il en plaça sous des ruches vitrées. Ce fut alors qu'il observa tous les préludes d’une union, qu’il ne put voir accomplir, et qui lui fit croire, sans en acquérir la certitude, qu’il pou- vait y avoir un accouplement réel. Ce n’est point au sein d’une colonie turbulente et peuplée de mâles animés d’ar- deur , que s'opère la fécondation ; c’est à l'écart, sur une plante , sur un arbre , où ces insectes sont allés à la picorée, qu'ils se recherchent et qu'ils remplissent le but que se pro- pose la nature. La guêpe, femelle à neuf lignes ( deux centimètres } de longueur ; les antennes noires et longues de trois lignes ( sept millimètres ) ; la tête noire avec le tour des yeux et la lèvre supérieure d’un jaune obscur ; le milieu marqué de trois points noirs en triangle : les mandibules jaunes , noires à l'extrémité ; le corselet noir légèrement pubescent avec le bruit occasionné par le mouvement des aîles d’un insecte qui cher- che à s'envoler, fixa mon attention. J'aperçus parmi des feuilles . sèches deux Guêpes accouplées. La femelle se tenait debout forte- ment accr it en vain à pendant le trajet. Le gs mourut dans la nuit conservant à l'exté- rieur rques de son sexe. Un aulre mâle que je Lea vÀ 1847 et une » Ge frelon tn je pris à la même époque, présentaient le êm . L'organe générateur sorti par les efforts de sm oneRen d'au pas rentré dans l’abdomen. (216) une tache au-devant des ailes, un point calleux à leur ori- gine ; une tache au-dessous et quatre sur l’écusson , jaunes; l'abdomen jaune avec la base des anneaux noire et un point distinct de chaque côté ; le premier anneau a une tache noire en losange au milieu , les autres ont une tache pres- que triangulaire continue au noir de la base , les pattes sont d'un jaune fauve avec la base des cuisses noire. La guêpe mâle est moins grosse et moins grande que la femelle ; les antennes sont plus minces et ont quatre lignes ( neuf millimètres } de longueur ; l'abdomen est jaune avec la base des anneaux noire ; le premier à une tache noire en losange au milieu et un point distinct de chaque côté; les autres présentent trois taches triangulaires réunies, cou- vrant la moitié de chaque anneau ; le second présente une tache triangulaire au milieu, contiguë au noir de la base avec un point noir de chaque côté uni à chaque angle de la base du triangle. Les organes générateurs du mâle occupent les trois der- niers anneaux de l'abdomen ; ils sont très-volumineux par rapport à la grosseur de l’insecte et composés de deux corps bruns, dont la base , en forme de cône, terminée par une double corne hérissée de poils, se recourbe sur le penis. Le penis formé de deux conduits, qui se réunissent en pa- lette à l'extrémité, prend naissance entre les deux corps bruns. La figure 1.'° représente les organes sexuels de grandeur naturelle , tels que je les ai observés sur un indi- vidu desséché La figure 2.me, ces mêmes organes grossis- Les figures 17 et 18 sont celles que Réaumur a données dans les mémoires de l'Académie des sciences , pages 276, année 1719. Je transcris la description qu’en donne Réaumur , p. 263 (loc. cit ). « Dans la classe de nos guêpes souterraines, la partie (217) » qui occupe la place de l’aiguillon est d'une figure sin- » gulière, fig. 17 et 18, g et k. Si on presse le ventre » de l'insecte, on fait sortir cette partie comme on ferait » sortir l’aiguillon. Elle est brune et écailleuse comme lui ; » on ne saurait la comparer à rien de plus ressemblant » qu'à une petite cuiller en cuilleron rond , telles que l'ont » les cuillers à pot. Le manche de cette petite cuiller est » rond , il a un canal qui va depuis son origine jusqu'où » commence la convexité du cuilleron. Le canal s’élargit et » forme une plus grande cavité, une espèce de réservoir. Si » On presse le canal près de son origine ou vers le commen- » cement du manche, on voit une petite partie blanche qui » sort de cette cavité. Près de la racine , près du bout de » ce manche, il y a deux petits corps longs tortueux que » l'on prendra si l'on veut pour des vaisseaux spermatiques » ou les testicules. » Outre la partie qui a la forme de cuiller, le mâle en a » encore deux qui lui sont particulières ; elles sont aussi de » matière écailleuse, brunes et neu sensibles dans les actions » ordinaires de l’insecte. Quoiqu'’elles soient assez grosses » (fig. 17 ), elles ont plus de longueur chacune qu’un des » anneaux , elles sont au bout du dernier , on , si l'on vent, » elles composent ensemble le dernier anneau écailleux. » Ces deux parties semblent unies , elles s’écartent cepen- » dant l’une de l’autre comme les deux branches d'une » pince (1). La guêpe qui doit, au printemps l'année suivante, don- (4) La différence que l'on remarque entre les figures que je joins à ces observations et celles is font partie des mémoires de Réau- mur, peut venir de ce que unes ont été dessinées sur un insecte mort depuis aiiil nr et … les autres l'ont probablement été sur un individu frais (218 ) ner naissance à une nombreuse postérité , s’accouple dans le mois d'Octobre. Placée sur une plante ou sur une feuille d'arbre, elle attend dans l’immobilité que quelque mâle vienne la féconder. Si celui-ci l’aperçoit , il voltige de droite à gauche par un mouvement ondulé, sans s'éloigner beau- coup, s'approche , se retire tour à tour et paraît hésiter à s’avancer sur sa femelle; mais il finit par se poser près d'elle, et après quelques caresses auxquelles elle ne paraît prendre aucune part, il grimpe sur son dos et en descend pour y monter encore. Il s'accroche au corselet avec ses deux pattes antérieures qu'il tient tendues et reporte peu à peu son corps en arrière pour que ses organes copulateurs soient en contact avec ceux de la femelle. L'appareil génital paraît alors en entier, les deux cornes qui sont de chaque côté du penis, tâtonnent pour s’introduire dans la vulve et la femelle est très-indifférente aux désirs du mâle qui n’en est que plus empressé. Enfin excitée par tous ses préludes, elle place son abdomen plus horizontalement. Le mâle, après quelques efforts , parvient à introduire l'extrémité des deux cornes dans l’orifice vaginal, il les ouvre et les ferme alter- nativement pour en dilater l'ouverture et faire pénétrer l'or- gane générateur. Cet acte accompli, il reste quelque temps dans sa primitive attitude ; mais soit que les efforts qu'il a faits l’aient affaibli, soit que cette position le fatigue, il se renverse en arrière et reste attaché à sa femelle pendant tout le temps nécessaire à la fécondation. Cette union dure tant que l'organe maseulin est dans un état d’excitation et jusqu'à ce que l’émission du sperme ait lieu. Dès que l'orgasme cesse chez le mâle et que la contractien de l'ori- fice vaginal n'existe plus, les deux individus se séparent. Le mâle, devenu libre, va se poser sur une plante et après quelques instants, il prend l'essor pour aller mourir plus loin, car il survit à peine un jour. - (219) Les femelles qui ont été fécondées sentant l'approche des frimats, cherchent un refuge dans les greniers et dans les trous des murs de l’intérieur des maisons. On les voit par un beau temps, voltiger çà et là pour trouver un lieu com- mode où elles passeront l'hiver. L’ont-elles trouvé, elles s'y blottissent jusqu’à l’arrivée des beaux jours, où elles s’occuperont alors à jeter les fondements d’une nouvelle colonie. Après avoir formé des cellules propres à recevoir sa nou- velle famille, la guêpe femelle y pond des œufs qui ne tar- dent pas à éclore. Elle nourrit les larves qui en sortent , avec une espèce de pâtée ou bouillie qu’elle leur prépare. Lorsque celles-ci ont pris tout leur accroissement, elles bouchent l'ouverture de leur cellule d’un couvercle soyeux , et lorsqu'elles sont devenues insectes parfaits, pour faciliter leur sortie, elles coupent circulairement ce couvercle avec leurs mandibules, le laissant cependant adhérer par un point de la circonférence. Les nids des polistes qui se trou- vent sur diverses plantes, en offrent de nombreux exem- ples. Ces insectes ne cherchent point à se servir de leur aiguillon , on peut les emporter chez soi, les toucher et les examiner sans crainte. L'analogie qu'il y a entre la famille des abeilles et celle des guêpes, composée l’une et l’autre de trois sortes d'individus ; la ressemblance qui existe entre leurs organes sexuels (1), prouve à n’en pas douter que l'accouplement des abeilles, loin d’avoir lieu avec toutes les circonstances fabuleuses et conjecturales dont on l'avait enveloppé jusqu’à ce jour, s'opère de la même manière que celui des guêpes, hors de la ruche et à l'écart ; que la femelle ne reçoit point deux fois les approches du mâle, qu’une seule suffit et n’est ja- FT (1) Mémoire de Réaumur — Nouveau Dictionnaire d'Histoire naturelle de | 1 (Z es. bp. 7, paragraphe 1°, 1817- ( 220 ) mais infructueuse puisqu'il y a un accouplement parfait, et que le mâle après l’accouplement n’est pas privé des parties de la génération, qui ne restent pas fixées à celles de la femelle. Ce n’est point, comme je l’ai dit, dans les ruches et dans les guèpiers qu'il faut chercher à connaître la fécondation des abeilles et des guêpes. La quantité de mâles qui s’y trouvent se nuisent les uns et les autres : c’est dans la cam- pagne qu'il faut surprendre le mystère de la génération de ces insectes; mais que l'observateur y prenne garde, un pas, un geste suffisent pour le priver quelquefois sans re- tour de ce qu’il croyait déjà lui appartenir. Chez quelques hyménoptères de la famille des mellifères, les préludes de l’accouplement se font d’une manière très - différente. La femelle du Bourdon des mousses, Apis mus- corum, se pose sur une plante pour recevoir le mâle. La Xilocope violette, Xilocopa vialacea. vole en rodant autour de sa femelle suspendue à une feuille et cherche à saisir le moment favorable pour s’élancer sur elle. La femelle d’une espèce d'Osmie , se tenant sur un plan horizontal , attend le mâle qui vient se placer sur son dos et s’y accrocher : par un mouvement de friction d'avant en arrière, il cherche à exciter sa femelle au plaisir, il l'abandonne , revient plu- sieurs fois , renouvelle le même manège, et finit par la féconder. J'ai étudié et examiné, avec l'attention la plus scrupu- leuse , les faits que je rapporte. Je n’ai rien omis de ce qui pouvait me faciliter les moyens d'arriver à la vérité. J’ose donc espérer que mes observations sur la fécondation des guêpes serviront à jeter quelque jour sur leur histoire et sur celle des abeilles. Angoulême, Septembre 1843. A. TRÉMEAU DE ROCHEBRUNE. PROD EL SES PRE (224) X. OBSERVATIONS sur l'accouplement des Lombrics terrestres, M. Ant. Dugés, dans ses recherches sur la circulation, la respiration et la reproduction des Annélides abranches, dit : « qu'il lui a été impossible de continuer ses investiga- tions sur leur génération et ses diverses phases (1) ». Un heureux hasard m'’ayant mis à même de faire quel- ques observations sur l’accouplement du lombric trapézoïde, j ai cru devoir les soumettre à la Société Linnéenne. Lombric trapezoïde, Lombricus trapezoïdes. Ce lombric long de huit pouces {22 centimètres ‘/, ) est brunâtre en- dessus, pâle en-dessous quelquefois noirâtre en avant; la queuc est plus décidément quadrilatère, plus étroite et moins obtuse que chez le lombric géant ( Ducés, loc. cit. ). Organes masculins. Ces organes sont placés sous le douzième anneau après la Lête et en occupent cinq; seize anneaux les séparent de l'organe générateur femelle De petits corps blancs, longs d'environ une ligne ( 2 millimètres ), et que je regarde comme autant de penis, sortent de chaque côté des cinq anneaux à l'époque du rut de ces annélides et correspondent à de petits testicules hémisphériques, de la grossseur d'un grain de millet , situés dans la cavité thora- chique. La partie de l’anneau d’où sortent ces penis, a la forme d’un petit mamelon dont l’orifice produit l'effet d’une ventouse. Organes féminins. Ces organes paraissent sur le trente ou trente-troisième anneau ; ils en occupent cinq. On les reconnait à des espèces de pelites vulves, placées comme les organes mâles, à l'extrémité d’un petit mamelon. Ils (1) Annales des Sciences, année 1828. sont si fortement gonflés que dans cette partie, le corps du lombric a un tiers de plus en grosseur et forme un renfle- ment considérable de couleur de chair (1). Cette couleur s'étend sur toute la circonférence de l’organe femelle et le fait facilement distinguer. La partie sexuelle mâle, n’est d'une teinte rosée que sur la face inférieure : le dos conserve sa couleur brune. Lorsque le printemps anime , d’une nouvelle existence, tous les êtres vivants et que le soleil réchauffe la terre, les lombrics se recherchent pour se livrer à la reproduction. C’est dans le mois d’Avril ou de Mai, suivant la tempéra- ture, qu’a lieu leur accouplement. Pendant cet acte, ils sont placés dans un sens tout-à-fait opposé, c’est-à-dire que la partie antérieure de l’un est tournée vers la partie posté- rieure de l’autre, pour que les organes mâles correspondent aux organes femelles. fig. I. Les lombrics adhèrent forte- ment l’un à l'autre et sont dans un état de torpeur dont rien ne peut les tirer. Un tiraillement assez vivlent, ne les sé- pare pas et montre l'union intime qui existe entre les orga- nes générateurs. Retirés de terre et exposés à un soleil ardent , ils n’en restent pas moins longtemps accouplés : leur corps est enduit d’une humeur visqueuse très-abon- dante. Après la fécondation ils deviennent mous et indolents, et paraissent comme épuisés par un acte qui, en les excitant à un très-haut degré, a anéanti leurs forces et une partie de leur vitalité musculaire. Le repos et une abondante nour- riture leur deviennent nécessaires pour se rétablir. Ceux ue j'avais séparés de force et remis dans la terre deve- naient tellement mous, qu'ils n’avaient plus aucune consis- tance. Habitant dans la terre , vivant toujours dd une obscurité profonde , il est bien difficile de découvrir quels sont leurs préludes amoureux et de quelle manière ils parviennent à (4) Ce renflement a été nommé LA sezLE ou le Bar ( Bardella) par Reddi , et La cRINTURE par Savigni (225 ) s'unir, Ce ne peut être qu'après bien des tätonnements qui me semblent cependant facilités par leur position respec- tive. Parcourant les longs conduits souterrains qu'ils se sont creusés, arrivant d’un côté opposé , ils peuvent se placer convenablement et mettre en contact leurs organes copulateurs. Je serais d'autant plus porté à adopter cette opinion, que les lombrics que j'ai observés, remplissaient exactement le diamètre de leur galerie, ils n'avaient pu se replier sur eux-mêmes, pour aller à la rencontre des indi- vidus qui arrivaient par derrière. L'accouplement des lombrics n’a pas lieu la nuit en plein air et sur la terre, et le mâle n'y vient point chercher sa femelle. Ce ne pourrait être qu'après une forte pluie ou dans des prairies couvertes d’une herbe épaisse et humide qu'on en aurait vu, ce qui me paraît fort douteux. Je n’en ai jamais trouvé d’accouplés que dans un terrain qui n'avait pas été labouré depuis l'automne. Ce terrain exposé au Sud- Ouest , avait assez de consistance pour empêcher l’affaisse- ment des galeries formées par les lombrics. Ces galeries étaient à six pouces ( 16 centimètres ) au-dessous de la su- perficie du sol. Lorsque j'enlevais avec la bêche une motte de terre qui contenait des lombrics, je pouvais la briser sans ménagement, le contact d’un corps étranger ne pro- duisait sur eux aucun effet. Les lombrics pour se soustraire à un froid intense ou à une trop grande sécheresse, se consiruisent chacun sépa- rément une retraite sphéroïde en terre (fig. 2), à laquelle ils donnent une certaine consistance, en l’enduisant de l'hu- meur glaireuse -dont ils sont humectés. Ils s’y tiennent blottis et roulés sur eux-mêmes et entrelacés comme si on les avait uoués plusieurs fois ( fig. 3 ). On peut les prendre et les tenir quelques instants dans la main sans qu'ils se déroulent. Cette retraite se trouve à une profondeur un peu plus grande l'hiver que l'été. Comme ils n'ont pas des instru- ments propres à faciliter et à polir leur ouvrage, l'exté- rieur de leur cellule a toujours un aspect raboteux , ils ne la = quittent que lorsqu'une douce chaleur ou une pluie bienfai- sante vient les tirer de ieur léthargie. L’accouplement et les habitudes sont à peu près les mêmes chez toutes les espèces de lombrics terrestres ; mais l’habi- tation est différente. Les uns, comme le lombric géant, veu- lent une terre humide et très-substantielle ; les autres, comme le lombric aplati et le-lombric trapézoïde , se tien- nent dans la terre des jardins. Le lombric anatomique préfère les endroits très-frais, sous la mousse et surtout sous les matières végétales en décomposition. Ce sont eux qui pullulent dans ces verminières tant recommandées par Olivier de Serres pour engraisser les volailles des basses- cours (1). Angoulême , Septembre 1848. A. TRÉMEAU DE ROCHEBRUNE. Explication des Fiqures relatives au 1° Mémoire. Fi6. 1.— Organe générateur de la As mâle de grandeur naturelle. Fi. = — Le même, vu au micro FiG. 3. — Organe générateur de n. Eine frelon mâle. 17 et ME Fe données par Réaumur Re les Mémoires de l’Aca- démie des Sciences, années Fig. 17 est ÿ partie écailleuse qui Las ne le corps “des Guêpes mâles. Cette partie est représentée rossie par le microscope. e par- tie brune et écailleuse qui tient au dernier des anneaux. f} les pinces nération. Me e bout de cette partie fait en cuiller et vu du côté creux Fi ig. 18 ni les mêmes parties plus grossies et vues du côté opposé. es deux pinces, k la cuiller dont on voit 4 cet du côté se ot ä sont peut- être des vaisseaux spermatique Explication des Figures relatives au + Mémoire. Fig. 1. — Lombrics terrestres accouplés. a organe générateur mâle. organe générateur femelle. Fi. 2. — red terre que se construit le lombric. c partie caye Fr sphéroïde. Fic. 3. — Lost voies bb enroulé et dans la position qu’il occupe ans sa retrai (4) Théâtre d'Agriculture Mage de Serres, Tom. I, in-8.°, an XI, 1802.— Cours complet d'Agriculture de l'abbé — Tom. Vill, page 248, Liens 2,e, in-4.0 3. = GUÈPES 1 (295 ) XL. Mémoire sur le siège de l'Odorat dans les articulés; par M. ÉpouarDn PERRIS, chevalier de la Légion- d'honneur, membre de plusieurs Sociétés savantes. Les insectes ont le sens de l’odorat. Non-seulement on s'accorde à leur reconnaître la faculté de percevoir les odeurs, d'apprécier, au moyen des émanations des corps, les conditions favorables à leur bien-être, à leur alimenta- tion , à la propagation de leur espèce, mais même on est forcé de convenir qu'aucune classe d'animaux ne paraît pos- séder cette faculté à un aussi haut degré. Une femelle de Bombyx, transportée au centre d’une ville, loin des lieux où vivent ses pareils, attirera auprès d’elle des mâles impa- tiens d'obtenir ses faveurs. Le cadavre d’un rat, d’une taupe, etc., abandonné en plein air, sera bientôt envahi par les Hister, les Silpha, les Necrophorus, les Sarcophaga, les Cal- liphora et plusieurs autres diptères, qui arrivent on ne sait d’où ; il y a même des insectes de cette dernière classe qui recherchent exclusivement les cadavres des chevaux ou des chiens , et qui doivent nécessairement les sentir à de gran- des distances. Les Lamellicornes et les Diptères coprophages fournissent encore des preuves incontestables et très-inté- ressantes de la puissance olfactive des insectes... Mais à quoi bon multiplier les exemples , chercher des démonstra- tions ? L'existence de l’odorat n’est contestée par personne; c’est un fait depuis longtemps acquis à la science, et pour lequel il n’est plus besoin ni de raisonnements, ni de preuves. Mais quel organe est le siège de ce sens si subtil et si merveilleux ? C’est ici que commencent les incertitudes de la science, les divergences des auteurs, et malgré tout ce Tome XVI 15 (226 ) qu'on a écrit sur cette matière, on ne parait pas plus avancé que le premier jour. Cette circonstance et quelques faits dont le hasard m'a rendu témoin, m'ont donné l'idée d'étudier sérieusement cette question. Je lai fait sans prévention aucune ni pour ni contre tel ou tel système, et comme s’il s'agissait de résoudre un problème entiè it neuf. Mes observa- tions et mes expériences m'ont conduit à une conclusion qui satisfait mon esprit, qui ne répugne pas à ma raison ; je me décide dès-lors à dire quel est mon sentiment et com- ment il s’est formé. Avant tout, cependant , j'éprouve le besoin d’analyser et de discuter succinctement les théories des savants dont j'ai pu lire les écrits, ou dont l'opinion est consignée dans les ouvrages entomologiques. Rosenthal (1) assigne pour siège de l'odorat, dans la mouche à viande, une pellicule finement plissée en dedans qui existe à la partie antérieure de la tète, entre les anten- nes. Dans quelques insectes (Welolontha, Anoplognathus), les bords latéraux et antérieurs de l’épistome se replient ver- ticalement en dessous, de manière à former, vers l’inté- rieur de la bouche, une large cavité fermée par une mem- brane mince , et qui constitue le palais. MM. Kirby et Spence ont nommé ce rebord Rhinarium , et en consultant l’/ntro- duction à l’Entomologie de M. Lacordaire , je vois que c’est dans cet organe que les deux eee en question ont mis le siège de l’odorat (2). #, Comparetti, toujours d’après M. Lacordaire , place l’odo- (1) Reil’s archiv für die Physiologie , tome X, pag. 427. (2) Zrtroduction to the Entomology, tome IV, page 263 et tome III, page 454. ( 227 ) rat dans des parties différentes suivant les familles ; selon lui, la massue des antennes en est le siège dans les Lamel- licornes, la trompe chez les Lépidoptères, et chez les orthop- tères, certaines cellules frontales que personne n’a revues depuis lui (1). Tréviranus , dont Carus dans son anatomie comparée (2) cite l’opinion , pense que la faculté olfactive pourrait bien résider dans l’œsophage. Reimarus , Baster (3), Lehman (4), Cuvier (5), M. Du- méril (6), M. Burmeister (7) croient que l'olfaction se fait par les trachées , soit à leur ouverture , soit dans toute leur étendue. M. Strauss (8) incline pour cette manière de voir, tout en avouant qu'il n’a pu découvrir, aux environs des stigmates, des nerfs assez gros pour qu'on puisse les sup- poser destinés à un sens spécial. Le savant auteur de l’/n- troduction à l'Entomologie, ainsi que M. Brullé, dans l'in- troduction de l'Histoire naturelle des insectes coléoptères, par M. de Castelneau, considère comme la plus rationnelle l'opinion des auteurs qui se prononcent pour les trachées. Lyonnet, Bonnsdorf (9), Marcel de Serres (10), croient que la perception des odeurs se fait au moyen des palpes. Cette opinion est partagée par Knoch, mais pour les palpes (1) Schelver, Versuch einer naturgeschichte der sinneswerk- zeuge bei den insecten, pag. (2) Tome 1 , pag 426 de la traducEtié de Jourdan. (3) Lehmann, de Sensibus externis. . (5) Lecons d anatomie comparée , tom. IT, pag. 675, (6) Considérations générales sur les insectes, pag. 25, (7) Handbuch der entomologie , tom. 1, $ 196 et 277. (8) Considérations générales , pag. 422. (9) De fabrica et usu palporum in insectis. (10) Annales du Muséum , tom. XVII, pag. 426. (228 ) maxillaires seulement , les palpes labiaux étant, d’après lui, le siège du goût (f). Roesel, M. de Blainville (2), M. Robineau Desvoidy (3), M. Dugès (4) et Carus (5) considèrent très-formellement les antennes comme organe d’olfaction. Latreille (6), Olivier (7) et Bonnet (8)‘inclinent vers cette opinion qu’ils considèrent comme la plus probable. M. Alexandre Lefebvre à publié dans les Annales de la Société Entomologique (9), une no- tice sur des expériences tendant à prouver que, chez les Hyménoptères , l’odorat réside dans les antennes. Cette opi- nion est aussi celle de M. Pierret (10). Quant à Réaumur que M. Lacordaire , M. Dugès et Carus citent comme favo- rable au système d’olfaction par les antennes , je ne sais ce que je dois en penser. Voici, en effet, ce que je lis dans le tome [°° de ses Mémoires (11) : » seraient-elles (les anten- » nes) l'organe de quelque sens à nous connu , comme de » l'odorat ? Plusieurs insectes semblent l'avoir exquis, et on » ne sait pas où en est l'organe chez eux; mais c’est sur » quoi nous n'oserions hasarder même des conjectures ». (1) Lehmann, De Sensibus externis animalium exsanguium. (2) Principes d'anatomie comparée, tom. 1, p. 339. (3) Recherches sur l’organisation vertébrale des crustacés et des insectes. (4) Traité de physiologie comparée , tom. 1, pag. 156, (5) Traité d'anatomie comparée , tom. 1, pag. 425, (6) Histoire naturelle des crustacés et des insectes, tome II, (7) Encyclopédie méthodique , art. Antennes et Antennules. (8) Œuvres complètes , tome VII, page 124. (9) Tome VII, 1838, page 395. (10) Annales de la Société entomol., tome X, 1844, bulletin, page X. (11) Page 283, édition d'Amsterdam. ( 229 ) Comme je n’ai pas su trouver autre chose dans l’ouvrage de cet illustre observateur , je considère son opinion comme à peu près sans intérêt en cette matière. Voilà, si je ne me trompe, toutes les théories qui ont été émises sur l’odorat des insectes; discutons-les l’une après l'autre. 1.° L'odorat réside-t-il dans la pellicule finement plissée en dedans, vésiculeuse et exsertile que Rosenthal et Robi- neau Desvoidy ont vue entre les antennes des Muscides ? L'opinion exprimée à cet égard par Rosenthal n'étant ap- puyée d'aucune preuve, d’aucune expérience , n'ayant été confirmée ou admise par personne , et n’ayant pu être justi- fiée par aucune de mes observations , je pourrais, je crois, de prime-abord, la révoquer en doute , surtout en présence des systèmes beaucoup plus rationnels, beaucoup plus pro- bables qui lui font concurrence. Je la réfuterai cependant par l'observation suivante : La nature, dans son admirable et prodigieuse fécondité, a varié à l'infini la forme des organes des insectes. Sous ce rapport sa toute-puissance semble s'être complue à dédai- gner toutes les règles pour ne s'exercer qu'au gré de mille caprices, et cependant lorsque l’anatomiste pénètre au fond de ces organismes si variés , ou même qu'il en examine sé- rieusement la structure extérieure, il aperçoit, à travers ces formes diverses, un type commun, un plan uniforme. Il n’y a pas, que je sache du moins, un seul fait qui per- mette de penser que, dans des conditions identiques, une même fonction s'exerce dans un insecte par tel organe et dans un autre par un organe différent , lorsque l'organe du premier ne manque pas dans le second. Il y a même plus, c’est que lorsque cet organe fait défaut, la fonction n’a pas lieu, à moins qu’il ne soit suppléé par quelque chose d’analogue, comme, par exemple, les mamelons ambula- ( 230 ) toires qui, dans beaucoup de larves, remplacent les pattes des chenilles et ont la plus grande analogie avec elles. Ainsi, il est, selon moi, tout-à-fait irrationnel et contraire aux lois de la nature de supposer que la perception des odeurs se fasse dans une famille d'insectes par une membrane fron- tale, dans une autre par les stigmates, dans une troisième par les palpes , dans une quatrième par les antennes, etc. s’il y à odorat, le siège doit se trouver dans un organe commun à toutes ces familles, stigmates, antennes ou pal- pes ; mais il m'est impossible de l’admettre dans un organe de superfétation et qui ne serait l'apanage que d’une seule famille, puisqu'il manque aux Coléoptères, Hyménoptères, Hémiptères , etc. L'opinion de M. Rosenthal ne me semble donc pas sup- porter l'examen. 2.0 L'odorat réside-t-il dans le Rhinarium, comme le veulent MM. Kirby et Spence ? Le Rhinariun ne se manifestant que dans quelques genres d'insectes, et l'opinion des deux savants entomologistes anglais n'étant appuyée d'aucune preuve, je me crois auto- risé à repousser leur manière de voir par les motifs déjà déduits. 3.° L'odorat réside-t-il, comme le pense Comparetti dans divers organes , selon les genres et les familles des insectes ? Je reproduis toujours la même réponse , c’est-à-dire que cette opinion est anti-rationnelle et qu’elle n’a aucun fonde- ment sérieux. 4.0 Faut-il, avec Treviranus , placer l’odorat dans l’œs9- phage? Je ne comprends pas comment la nature aurait donné ce sens à un organe qui a par ailleurs des fonctions si importantes, et qui, étant souvent obstrué, n’est pas toujours prêt à recevoir les émanations des corps. Je ne vois pas non plus comment et par quel mécanisme ces éma- QE ( 251 }) nations seraient sollicitées à pénétrer jusque dans l’œso- phage , et j'ajoute enfin qu'aucune expérience , aucun rai- sonnement plausible . aucune adhésion recommandable ne justifient cette opinion. Je crois donc ne devoir pas m'y arrêter. 5.0 L'odorat s’exerce-t-il, ainsi que le prétendent plu- sieurs naturalistes, au nombre desquels est Cuvier, par l'organe respiratoire ? Cette opinion se recommande de deux manières : par le nombre et l'autorité des savants qui l'ont adoptée , et par ce principe que, dans les vertébrés , l'odorat se lie intime- ment à l'acte respiratoire. Quant au mérite des savants que j'ai cités, il est complè- tement hors de cause; nul ne le conteste, et je suis, sur ce point, de l’avis de tout le monde. C’est une raison de plus d'examiner si l’analogie sur laquelle on se fonde, ren- ferme la solution de la question. En matière d'organisation et de fonctions, il y a une bien grande distance entre les vertébrés et les insectes, et ce serait s’exposer à bien des erreurs que de vouloir argumen- ter sur les lois de l’analogie. Essayons, en effet, sur quelques points, une rapide comparaison. Le squelette des vertébrés est interne ; il est externe dans les insectes. Le système nerveux des vertébrés (je parle de celui qui préside à la vie de relation ou sensitive), a pour centre le cerveau; c’est de cet organe que partent une multitude de nerfs et que dérive la moëlle allongée qui elle-même donne paissance à des nerfs; mais c’est au cerveau que toutes les sensations répondent ; c’est là qu’elles se concentrent. Le cerveau seul est la cause de tout mouvement, la source de toutes les sensations. Dans les insectes, le système nerveux ( 232 ) se présente sous la forme d’un cordon muni de renflements ou ganglions plus ou moins nombreux, dont chacun parait être le centre d’une action et d’une sensibilité spéciale pour les parties du corps vers lesquelles il envoie des ramifications ; de sorte qu'il y aurait autant de cerveaux que de ganglions. Le système respiratoire des vertébrés consiste dans un crane limité appelé poumon ou branchies , avec une ou- verture unique pour l'introduction de l'air. Dans les insec- tes le nombre des ostioles respiratoires va jusqu'à dix-huit, et à chacune de ces ostioles vient s’aboucher un tronc tra- chéen qui se ramifie à l'infini, de sorte que l’air se répand dans tout le corps à l’aide d’un réseau inextricable de tra- chées constituant un organe qui n’a aucun rapport avec le poumon et qui n’a d'autres limites que la capacité du corps lui-même. Le fluide nourricier, le sang circule dans les vertébrés ; il ya dans ces animaux, sous l'influence du cœur et avec l'intermédiaire du poumon , un vrai système de circulation. Dans les insectes, quoiqu’on en ait dit, il n’y a pas de cir- culation , parce qu'il ne doit pas y avoir circulation de sang là où il y a circulation d'air, parce qu'il ne doit pas y avoir de cœur là où il n’y a pas de poumon; parce que le sang trouvant partout l'air qui doit le revivifier, l’oxygéner, ne doit aller le chercher nulle part et n’a besoin que de se ré- pandre dans les cavités. Cette vérité, car je suis convaincu que c'en est une, sera le plus beau titre de gloire d’un sa- vant qui en a déjà tant, de mon illustre ami M. Léon Dufour, qui a consacré bien des journées et de bien beaux mémoires à la soutenir et à la démontrer. Les vertébrés entendent ; on sait où réside chez eux le sens de l’ouie. Ce sens existe aussi chez les articulés ; les araiguées notamment en ont donné des preuves incontesta- bles. Où est donc chez eux l'organe de l’ouie ? On ne l'a pas encore trouvé. ( 233 ) On le voit donc, les lois de l’analogie sont bien peu de chose quand il s’agit de comparer les insectes et les verté- brés ; ou plutôt ces lois n’existent pas ; toute comparaison dans Les faits les plus importants à la vie, dans les organes et les fonctions les plus essentiels, montre des disparates plutôt que des similitudes. A-t-on bien réfléchi aussi quand on a dit que l’odorat est nécessairement lié à l'acte de la respiration ? Cette opinion n'est-elle pas beaucoup moins le résultat du raisonnement et de l'observation que d’une préoccupation produite par notre organisation et celle des animaux qui ont des rap- ports avec nous ? L'air, je le reconnais , est nécessaire à la transmission des odeurs; il tient en suspension et trans- porte au loin les particules odorantes qui s’échappent des corps ; l'organe de l’odorat doit donc être accessible à l'air, il ne fonctionne que quand il est mis en contact avec lui; mais est-il nécessaire que ce contact s'opère par l'acte de la respiration? Chez nous les choses se passent ainsi, cela est vrai; mais ne concevons-nous pas qu'elles auraient pu se passer autrement ? Serait-il absurde de prétendre, par exemple, qu’on aurait pu placer le sens de l’odorat à la surface d’un de nos organes, ou bien qu’on aurait pu, fer- mant toute communication entre le nez et l’arrière-bouche, rendre , par un moyen quelconque, les fosses nasales ac- cessibles à l'air? Ne comprend-on pas qu’une combinaison différente de celle que la nature a choisie aurait également rempli le but? Que faisons-nous, d’ailleurs, quand une odeur nous incommode ? Nous bouchons notre nez, nous empêchons l'air de venir frapper les nerfs olfactifs ; cela nous réussit, et pendant ce temps néanmoins nous conti- nuons à respirer ; mais comme ni la trachée artère, ni les bronches ne sont organisées de manière à percevoir les odeurs, nous ne sentons rien. Ainsi, il n'est pas vrai que ( 234 ) l'odorat soit tellement lié à la respiration qu'on ne puisse concevoir l’un sans l’autre , et que les organes qui président à ces deux fonctions ne puissent être rendus indépendants. Il est seulement vrai de dire que , dans les vertébrés, l'odo- rat s'exerce avec l’aide de la respiration, ce qui est le sim- ple énoncé d’un fait, d’une combinaison tout-à-fait arbi- traire de la nature, et non d’une loi nécessaire , immuable comme celle-ci, par exemple, que l'air est nécessaire à la vie. Mais poussons plus loin le raisonnement. Nous avons vu que, dans les vertébrés, l'organe respiratoire proprement dit, est insensible aux odeurs; celles-ci n’agissent que sur un organe intermédiaire qui a son siége dans les cavités nasales. S'il y a analogie entre les vertébrés et les insectes, je me crois autorisé à déclarer que les trachées , qui consti- tuent l'organe respiratoire de ces derniers, sont également dépourvues de la faculté olfactive. Il faut donc aussi un or- gane intermédiaire ou distinct; mais où est cet organe ? qui l'a vu? où sont les nerfs qui le constituent et que n’ont ee apercevoir ni Lyonnet, ni Strauss, ni personne ? Mais il y a plus ( car pour rendre ces observations …. complètes je dois les appliquer à toutes les classes d'arti- culés } les crustacés ont aussi le sens de l'odorat. « On sait, » dit M. Brullé (1), que l’on se procure des homards en » plaçant dans l’eau de la mer des morceaux de poissons » ou de crustacés que l'on renferme dans des paniers. » D'autres espèces de crustacés se laissent attirer de même par cet appât que l’on cache sous le sable de la mer ». Les crustacés apprécient donc les odeurs , et cependant ils n’ont pas de stigmates, puisqu'ils respirent par des branchies ; où (4) Introduction à l'histoire nat. des Ins. coléopt., par M. de Cas- télnau , page LXX VIII. ( 235 ) est donc chez eux le siége de l'odorat ? Il n’y a plus moyen de le savoir. Les uns le placent dans deux poches membra- neuses situées au-devant de la cavité buccale ; d’autres dans une cavité que présente la base des premières antennes ; d’autres dans une expansion membraneusé qui accompagne leurs branchies ; c’est-à-dire qu’on ne sait pas où il est. Ainsi, ni les lois de l’analogie, ni le raisonnement ne démontrent que l’odorat des insectes réside dans les tra- chées. Voyons si l'expérience fournit des ee plus con- cluantes. M. Lacordaire, dans son {ntroduction à l’Entomologie(1), cite deux observations faites l'une par Lehmann, l’autre par F. Huber. Lehmann se proposait de prouver que les antennes ne sont pas le siége de l’odorat, mais qu'il réside dans les orifices stigmatiques. « Après avoir pratiqué dans » une bouteille de verre une ouverture arrondie entourée » de cire, et au centre de laquelle était un diaphragme en » papier, il perçait ce dernier avec une épingle plus ou » moins grosse, et faisait entrer dans l'appareil les antennes » ou la tête entière des insectes, sur lesquels il voulait expé- » rimenter. Il introduisait ensuite dans la bouteille les sub- » stances dont l'odeur est la plus forte, telles que des plu- » mes brulées, du soufre en combustion, etc. ; aucun indi- » vidu soumis à ses épreuves n’en paraissait affecté ; mais » quand il approchait de la partie du corps restée en de- » hors de l'appareil, les mêmes substances , l'animal se » livrait à des mouvements violents qui témoignaient de » l'impression qu’elles exerçaient sur lui ». Voici l'expérience d'Huber. Il présenta successivement à° toutes les parties du corps d’une abeille un pinceau trempé dans l'essence de térébenthine ; lorsqu'il l'approcha du tho- (2) Tom. IE, pages 230 et 231, 236 rax, de l'abdomen ou de Ja tête, l'animal ne parut y faire aucune attention ; mais aussitôt qu’il dirigea le pinceau vers la cavité buccale, près de la base de la trompe, l'abeille recula avec vivacité, battit des ailes, se mit à marcher d’un air agité, et ne rentra dans son premier état que lorsque le pinceau eut été retiré. Pour compléter son expérience, Huber saisit plusieurs abeilles, les força à étendre leur trompe, et leur boucha l'orifice buccal avec de la pâte. Quand celle-ci fut sèche il les rendit à la liberté, et dans cette situation il approcha tour à tour de leur bouche des substances dont l'odeur leur plait ou qu’elles ont en aversion. Aucune ne produisit d’effet et elles se mirent même à marcher sur les pinceaux qui en étaient enduits. Voilà deux expériences faites à peu près de la même ma- nière, qui ont eu des résultats tout-à-fait opposés , et qui conduisent à des conclusions inverses. D’après Lehmann, la tête n’est pas le siége de l’odorat, ce sont les trachées; d’après Huber, les trachées ne sont pour rien dans cette fonction ; elle réside dans l’orifice buccal, c’est-à-dire que ni Lehmann ni Huber n’ont rien prouvé, et qu'après eux la question est aussi neuve qu'avant. L'expérience de Lehmann a été renouvelée par M. Dugès- « J’exposai, dit cet auteur (1), au goulot d’une fiole conte- » nant de l'alcool, de la térébenthine , de l’éther, la tête » d’un scolopendre ; les antennes à l'instant se contractè- » rent, se roulèrent en spirale ». Et, moi aussi, j'ai fait bien des fois cette expérience sur .une foule d'insectes de genres et de familles différents ; tantôt j'obtenais le même résultat que M. Dugès, tantôt je n'obtenais rien du tout; et cela avec le même individu, à (1) Traité de Physiologie comparée, Tom. 1, page 160. mm Let fie né ( 237 ) une demi heure d'intervalle; mais le plus souvent les an- tennes ou les palpes exprimaient une sensation plus ou moins violente. J'ai aussi bien souvent, à l'exemple d'Huber, obstrué la bouche de divers insectes à odorat très-fin, avec du pain à cacheter , de la colle, de la gomme, et lorsqu'ils ont été libres, je n’ai jamais vu chez eux que la manifestation d’une grande gêne , d’une impatience extrême, d'où résultait évidemment une inattention absolue pour les choses qui les offusquaient avant. C’est ainsi qu’une douleur aiguë nous rend inattentifs et presque insensibles à une incommodité béaucoup moindre ; que, dans un moment d’impatience ou de préoccupation, nous éprouvons certains accidents, nous subissons certaines souffrances sans presque nous en dou- ter. Mais ces mêmes insectes ainsi masqués, je les ai piqués, en choisissant les espèces qui résistent longtemps à cette opération, tels que les nécrophores, les cétoines, les longicornes, etc., et lorsque, après un, deux, trois jours, ils s'étaient habitués à leur nouvel état, j'obtenais ailleurs que près de la bouche, la preuve du sentiment olfactif. Quant à l’action des odeurs sur l'organe respiratoire , elle est incontestable quoiqu’en dise Huber, qui l'aurait consta- tée, s’il avait répété l'expérience assez souvent et dans des conditions favorables. « J'ai fait, dit M. Dugès (1), une expérience qui paraît » au premier abord assez parlante, sur des scolopendres » décapités et même sur des tronçons d’un géophile. En » approchant du flanc, sans le toucher , une des substances » fortement odorantes que nous avons mentionnées ci » sus, l'animal ou le tronçon se recourbait pour s'éloigner » et s'’infléchissait ainsi tantôt à droite, tantôt à gauche, (1) Loc. cit. page 163. ( 238 }) » selon le côté où nous lui présentions l’effluve spiritueux. » Il y a donc là aussi quelque chose; mais parce que les » vapeurs âcres nous font tousser, ou excitent, dans les » bronches une sensation désagréable, s’en suit-il que l’ol- » faction siège pour nous dans la poitrine » ? Je n'ai point répété l’expérience de M. Dugès dont je n'ai pu consulter l'ouvrage que ces jours derniers seulement, mais j'ai bien souvent promené un pinceau imbibé de téré- benthine, ou d’éther, ou d’essence de serpolet tout près des stigmates des insectes, et souvent aussi, surtout quand je prolongeais le séjour du pinceau aux abords de ces orga- nes, j'ai vu ces insectes , s’agiter, se débattre sous l'empire d’une impression incommode ; mais, comme M. Dugès, je n'ai vu là qu'une action analogue à celle qu'exerce sur nos poumons l'acide sulfureux, par exemple, produit par une allumette en combustion, qui détermine une toux plus ou moins violente. seit Ainsi l'expérience ne nous dit pas non plus, d’une ma- nière suffisante, que la faculté olfactive réside dans ee gane respiratoire. ” 6.° Faut-il avec Lyonnet et autres, chercher cette faculté dans les palpes ? 7,° Faut-il, avec M. de Blainville et autres, l’attribuer aux antennes ? L'une et l’autre de ces deux opinions est appuyée par des savants du plus haut mérite ; quant à moi, je suis de l'avis d'eux tous , et je dis que l’odorat réside principale- ment dans les antennes et, jusqu’à un certain point aussi, dans les palpes. Telles sont mes conclusions; il faut que j'essaie de les prouver de manière à ne plus laisser la question indécise. Avant tout, cependant, déblayons le terrain des systèmes qui diffèrent de celui que je viens d’énoncer. : ( 239 ) Latreille, M. Dugès et plusieurs autres auteurs considè- rent les palpes comme un organe de goût et de tact. Koch place le goût dans les palpes labiaux seulement , les palpes maxillaires étant pour lui le siège de l’odorat. Je n'ai aucun motif de contredire ces opinions, car alors même que le goût et le toucher s’exerceraient par les palpes, je ne vois pas de raison pour leur refuser le sentiment des odeurs , sentiment qui s'allie fort bien avec celui des sa- veurs; car nous jugeons bien souvent par l’odorat du goût d'un mets, d’une liqueur. Quant à la faculté tactile, je n’ai non plus aucune raison de la refuser aux palpes ; je l’ad- mettrai partout où l’on voudra; je crois même qu’elle réside dans tous les appendices des insectes ; mais cela ne fait rien à l'odorat. Chez les grands animaux, en effet, le toucher est allié à tous ms és sens dont il n’est même, à la rigueur, qu’une mo: En ce qui concerne les antennes un grand nombre d'auteurs les ont considérées comme des organes de tact. Je ne le conteste pas plus que pour les palpes, mais je ferai remarquer cependant qu'il y a beaucoup d'insectes pour lesquels ces appendices ne semblent pas pouvoir servir à cet usage, soit à cause de leur briéveté comme dans les diptères brachycères , les gyrins , les parnus , les bostri- ches , etc., soit à cause de leur immobilité presque com- plète, comme dans les hémiptères homoptères , les libellu- les, etc. Quoiqu'il en soit, je ne conteste pas le tact aux antennes , mais je crois que l’odorat peut s’y trouver en même temps. Dans un mémoire qui a pour titre : Notice sur l'usage des antennes chez les insectes, M. Newport exprime l'opi- nion que chez tous les insectes, les antennes sont des orga- nes auditifs, et que, chez quelques espèces, elles sont aussi douées du sens du toucher. M. Goureau partage cette ( 240 ) manière de voir , et d’après lui, l'antenne serait une oreille extérieure dont la tige forme le tympan et le pédicelle la chaîne acoustique (1). MM. Kirby et Spence, Strauss, Oken et Burmeister ont également considéré les antennes comme des agents acoustiques. C’est aussi le sentiment de M. Lacordaire, Les insectes entendent-ils ? Il n’est pas permis d’en dou- ter, parce que cela est très-naturel et qu’on a obtenu, de la part de quelques-uns du moins, la manifestation de ce sentiment ; mais toutefois ce que l'on sait à cet égard, se réduit à peu de chose. Comme démonstration de cette faculté, on fait remarquer que beaucoup d'insectes, cigales, criquets, vrillettes, longicornes, etc., produisent certains bruits que l’on con- sidère comme des appels d’un sexe à l’autre ; on attache aussi une grande importance, pour les relations d'individu à individu, au bourdonnement de certains diptères et hyménoptères. J'avoue que je ne suis pas excessivement touché de ces considérations , et je me sens assez porté à croire qu'il y a des insectes qui chantent, qui stridulent, qui bourdonnent, comme il y en a qui volent, qui courent, qui sautent, qui nagent. L’éternelle chanson de la cigale mâle, par les jours de grandes chaleurs , ne prouve pas plus, à mes yeux, en faveur du sentiment musical de sa femelle, que ne le prou- vent, pour la campagne , les mélodieux accents nocturnes du rossignol. Quant au bourdonnement des bombus, au piaulement des cousins, des bombyles, des saropodes, des anthophores, je n'y vois guère non plus qu’un jeu de la nature. Les insectes ont d’assez bons yeux et un odorat assez fin pour savoir se retrouver quand ils le veulent, (1) Ann. de la Soc. entom., tome X , 1841 , Bulletin , page 12. LL. tips ( 241 ) puisque ces organes leur suffisent pour découvrir la plante qu’ils aiment ou sur laquelle ils doivent pondre leurs œufs, D'ailleurs le plus grand nombre des insectes est muet, et cela ne serait pas , si la facuité de produire un bruit quel- conque avait une véritable importance au point de vue de la conservation des espèces ; or, cette importance me sem- ble bien problématique , car je ne sache pas que, parmi les espèces les plus silencieuses, les femelles demeurent dé- pourvues de mâles. Ceci n’est qu’une digression , et c’est pour cela que je m'abstiens de la développer. Au surplus, que la stridula- tion et le bourdonnement des insectes aient un but ou qu'ils soient indifférents , je reviens à dire qu’ils possèdent à un degré quelconque le sens de l’ouïe ; mais comme , généra- lement, ils ne paraissent pas sensibles aux bruits qui se font autour d'eux, comme dans les actes de leur vie, ils semblent obéir assez peu aux sensations que l’ouïe peut apporter , il serait peut-être permis de penser que ce sens n'est pas très-développé chez eux. Mais où sont, d’ailleurs, les expériences qui prouvent que le sens de l’ouïe réside dans les antennes des insectes et par induction dans les palpes des araignées qui n’ont pas d’antennes et que M. Walkenaer (1) signale comme étant sensibles à la musique ? pour ma part je n’en connais pas, ou plutôt je ne connais que celles que j'ai faites, et je dé- clare qu’elles ne m'ont rien appris du tout. J'ai fait bour- donner des diptères, grincer des corselets de longicornes , etc., à quelque distance d'individus de même espèce et de sexe différent, je n'ai rien constaté de particulier. J'ai fait vibrer des cordes de guitare et de violon, tous mes eflorts (1) Histoire naturelle des insectes aptères, tome 1, p. 110. 16, ; ( 249 ) d'harmonie ont été perdus ; je n’obtenais quelquefois des mouvements que lorsque les cordes vibraient énergique- ment très-près des insectes; mais alors, eussent-ils été sourds, ils auraient été sensibles au mouvement de l'air. C’est ainsi que j'ai vu des sourds-muets discerner le pas- sage des voitures et les éclats du tonnerre. Ainsi rien ne prouve que le sens de l’ouiïe réside dans les antennes ; j'aimerais mieux croire que ce sens qui, chez les crustacés, se trouve à la base des antennes de la seconde paire, et quelquefois dans leur article basilaire, est placé, chez les insectes, dans la cavité où s’insèrent les antennes ; car entre les crustacés et les insectes, il est permis de con- sulter , jusqu’à un certain point, les lois de l’analogie. Je ne donne cependant cette idée que pour ce qu’elle vaut, car je ne puis l’appuyer sur aucun fait, aucune observation. Quoiqu'il en soit, j'ai peine à comprendre que la nature ait pu affecter exclusivement à un sens aussi obtus, aussi peu utile en apparence, des organes construits avec autant de soin et d’un usage aussi général que le sont les anten- nes. À vrai dire , il se pourrait que le sens de l’ouïe résidât dans les antennes concurremment avec celui de l’odorat, et j'avoue que je n'aurais aucune répugnance à admettre cette combinaison qui concilierait, sans conflit aucun , deux opi- nions rivales; mais comme je me suis placé sur le terrain des raisonnements et des expériences, et qu’en ce qui con- cerne le siége de l'audition , les preuves logiques et expéri- mentales me manquent, je m’abstiens de me prononcer sur cette question préjudicielle. Lehmann, dans une dissertation imprimée à Leipsig en 1799 et qui est intitulée : De usu et fabrica antennarum , cherche à prouver que les antennes n’ont été données aux insectes que pour leur fournir les moyens, dans l'intérêt de leur propagation , de prévoir les variations atmosphériques. ( 245 ) M. Duponchel partage cette idée et l’a développée dans un mémoire spécial (1). Ici encore pas un fait, pas une expérience, pas une seule observation, si ce n’est celle-ci de M. Duponchel « que tous les insectes disparaissent à la fois, comme par enchantement , s'il survient quelque changement dans l’at- mosphère, et cela longtemps avant que l'observateur se soit aperçu lui-même de ce changement » ; observation er- ronnée , car lorsque, en Été, le temps se met à l'orage, lorsqu'il devient lourd, étouffant, je prends beaucoup plus d'insectes que durant les journées à la fois très-pures et très-chaudes. C'est alors que les diptères et les hyménoptè- res s’agitent, que les buprestes, les xylophages circulent le plus. J'admets cependant que les insectes perçoivent les varia - tions atmosphériques; mais à quoi bon pour cela un or- gane spécial? Est-ce que les oiseaux ne prévoient pas l'hiver et le printemps? Est-ce qu'ils ne devinent pas un jour à l'avance , et quelquefois plutôt, un changement de temps ? Leurs émigrations m'en ont plus d’une fois averti. Est-ce qu'un observateur attentif ne trouve pas dans les animaux domestiques des pronostics à peu près certains ? Ne som- mes nous pas nous-mêmes, par ce malaise, par ce je ne sais quoi que nous ressentons, par nos vieilles blessures, nos rhumatismes , nos affections nerveuses, de véritables baromètres vivants ? Ce sentiment commun à tous les êtres animés , les insectes l’éprouvent, c'est une chose incontes- table ; mais il est bien difficile d'admettre qu'ils aient seuls besoin pour cela d’un organe spécial, et qu'ils soient excep- tionnellement assez intéressés à prévoir les phénomènes météorologiques pour que la nature les ait doués, dans ce (1) Revue zoologique . de M. Guérin Méneville, 1840 , page 75. ( 244 ) but, d’un organe tel que les antennes. Il faut convenir, aü surplus, qu'ils en feraient un assez mauvais usage, car ils se laissent bien souvent surprendre par le mauvais temps. Je repousse donc à tous égards l'opinion que je viens de discuter. Je ne puis m'empêcher de laisser tomber sur le papier une réflexion qui se présente en ce moment à mon esprit. Je ne m'étonne pas de ce que tant de sentiments divers se sont produits sur les sens des insectes ; mais ce qui me surprend, c’est de voir à quel point des opinions arrêtées, des idées préconçues peuvent détourner de bons esprits des voies de la logique et de la vérité. Ainsi, M. Lacordaire, pour prouver qu'il est rationnel de considérer les antennes comme des organes auditifs , fait remarquer qu’à l'exception des cigales, dans les in- sectes qui font le plus de bruit, comme les criquets, les grillons , les longicornes et certains diptères , l'étendue de la surface des antennes est en rapport presque constant avec leurs facultés vocales. Or, ce devrait être le contraire, car plus un insecte est bruyant, moins il semble nécessaire que son mâle ou sa femelle ait l'organe de l’ouie développé. Mais, d’ailleurs , il y a une foule d'insectes qui produisent une stridulation, un bourdonnement , un bruit quelconque, et dont les antennes sont courtes ou n’ont rien d’anormal : tels sont le Melolontha fullo, les Lema, les Bembex, les Bombylius, VAcherontia atropos; tandis qu’il y en a d’au- tres tels que le Drilus flavescens, les Ichneumons , les Fri- ganes, les Ctenophora, les Tanypus, qui ont les antennes longues ou rameuses, et qui ne produisent aucun son. Quant à M. Duponchel, qui veut que les antennes soient des organes barométriques, comment explique-t-il que cer- tains mâles aient les antennes plus longues ou d’une strue= ture plus compliquée que celles des femelles ? II dit que les (245) mâles ayant l'humeur plus voyageuse que les femelles, sont plus intéressés à prévoir les varia ions atmosphériques , et qu'alors la nature a dû leur donner des organes en rapport avec ce besoin. En vérité, cela ne me paraît pas sérieux. Pour me préserver de pareils écarts, je me suis toujours efforcé de me tenir en garde contre tout jugement prémé- dité. Je suis parti de cette question : à quoi servent les an- Lennes ? J'ai observé tant que je l'ai pu, j'ai multiplié les expériences , j'ai lu tout ce qui, à ma connaissance , a été publié sur les sens des insectes, et c’est alors seulement que je me suis prononcé sur l’usage des antennes comme organe d’odorat, parce que rien ne m'a paru aussi conforme à la raison et aux faits. La raison d’abord. Les auteurs qui ont refusé aux anten- nes la faculté olfactive se fondent sur ce que ces organes sont plus ou moins cornés, que leur surface est dure et souvent même raboteuse. Parmi les naturalistes qui pensent ainsi , il y en a qui croient que les antennes sont des organes auditifs et qui placent le sens du goût dans les palpes, non moins cornés ordinairement que les antennes. Or, si l'air, qui est l'intermédiaire des sons comme le véhicule des sa- veurs, peut exercer son influence sur les antennes et les palpes, je ne vois pas pourquoi il demeurerait sans effet lorsqu'il est chargé d’odeurs. Qu'on examine d’ailleurs les antennes au microscope, on les verra couvertes, sauf le scape dans certaines espèces, d’une villosité très-courte et très-épaisse, d’une sorte de duvet analogue à celui qui sert aux E/mis et aux Parnus.etc., à retenir l'air peus à leur respiralion. On gaik. aussi que de l'air atmosphérique pour renouveler Re qu'a de l' acte respiratoire. Les antennes sont donc organisées de manière à retenir l'air à leur surface, que cet air soit pur, ou qu'il ( 246 ) soit imprégné d'odeurs, de miasmes quelconques. Or si l'air se trouve en contact avec les antennes, est-il bien difficile d'admettre que les odeurs pénètrent dans l'intérieur soit par les poils du duvet, soit par les pores dont l'enveloppe serait percée , soit peut-être { mais ceci est plus douteux) par les membranes ou entre les ligaments qui relient les ar- ticulations? Et si les odeurs pénètrent dans l’intérieur qui est parcouru par des nerfs provenant du ganglion cérébral, et qui est rempli d'une substance molle et pulpeuse , ne rencontrent-elles pas toutes les conditions nécessaires à un organe olfactif ? Je sais bien qu'en ne peut pas prouver tout cela à priori; mais une pareille preuve échappe aussi aux adversaires de cette opinion. Il me suffit, d’ailleurs, que les idées que j'exprime ne soient pas contraires à la raison, qu'elles aient une apparence de vérité, qu’elles paraissent seulement plus probables que celles qui attribuent l'odorat aux stigmates, à l'œsophage et parce que l'expérience viendra leur impri- mer un caractère de certitude qui manque complètement dans les autres hypothèses. D'un autre côté, il faut convenir que les antennes sont admirablement placées comme organe olfactif. Dirigées en avant du corps, elles le précèdent, en quelque sorte, comme pour avertir l'insecte des dangers qu’il peut courir et des jouissances qui l’attendent, et pour lui révéler la présence des objets qu'il repousse ou qu'il désire. C’est ainsi que les animaux , chez qui l’odorat réside ordinaire- ment dans la partie la plus avancée , la plus saillante de la tête, allongent en outre le cou lorsqu'ils veulent percevoir d’un peu loin les odeurs. Insérées très-près de Ja bouche, et susceptibles, dans un grand nombre de familles, de se mettre en contact avec elle, elles peuvent être un auxiliaire très-utile pour aïder ( 247 ) l'insecte à reconnaître par l’odorat la qualité des aliments qui se présentent à lui. L'importance des antennes est telle, qu’elles existent dans toute la grande famille des articulés , à l’exception des Aranéides qui, précisément aussi, semblent privées de la faculté olfactive, ou n’en jouir que dans des limites très- bornées. Or, si elles n'étaient que des organes auditifs (sans compter la faculté tactile que je ne leur refuse pas), pour- quoi les crustacés en auraieut-ils quatre , dont deux seule- ment présentent les caractères d’un organe acoustique? Pourquoi les araignées , qui entendent cependant, en se- raient-elles dépourvues ? Pourquoi la nature en aurait-elle donné à tant d'insectes qui paraissent complètement insen- sibles aux sons, qui du moins ne semblent se laisser jamais guider par eux, n’avoir aucun intérêt à entendre, tandis qu’ils se laissent tous guider par l'odorat ? A quoi bon, si elles n'étaient destinées qu’à l'audition, ces mouvements vibratiles si remarquables, et qui s'explique lorsqu'on les considère comme servant à la perception des odeurs ; car ces mouvements, en agitant l’air, suppléent à l'avantage que présente, pour les vertébrés, la dépendance de l'organe olfactif de l'organe respiratoire. Et s’il est vrai que les antennes ne puissent être qu'un organe auditif, ou barométrique , ou olfactif, car leur usage est circonscrit dans l’une de ces trois facultés, à moins qu’elles ne les cumulent, ce qui n’est pas impossible ; quel est le naturaliste sérieux et de bonne foi, qui n’admette que l'hypothèse la plus raisonnable, est celle qui les présente comme le siége de l'odorat ? Passons maintenant à l'expérience. Il y à dix ou douze ans, le Cinips auratus Foure., me fit prévoir qu’un jour , si je n’étais devancé , je publierais une notice pour prouver que le sens de l’odorat réside dans les ( 248 ) antennes. Ayant remarqué, aux branches inférieures d’un chêne , de ces galles en forme de pommes que produit au printemps le Diplolepis pallidus, Oliv., je m'en appro- chai, et je vis, se promenant à la surface de l’une d'elles, deux individus du Cinips dont j'ai parlé, qui étaient ve- nus évidemment là comme ennemis du Diplolepis, et pour pondre leurs œufs dans le corps de ses larves. Ma présence ne les effrayant pas , je me mis à les observer. Ils palpaient très-attentivement et très-posément la surface de la galle avec l’extrémité de leurs antennes coudées qu'ils faisaient mouvoir alternativement. De temps en temps, les antennes s’arrêtaient , se rapprochaiïent sur un seul point , et demeu- raient immobiles pendant quelques instants, comme si l'in- secte réfléchissait, où comme s’il avait trouvé ce qu’il cher- chait, car les antennes cherchaient incontestablement quel- que chose. Parfois, après ces quelques instants de médita- tion et de repos , l’insecte reprenait sa marche, ses recher- ches et le mouvement vibratile de ses antennes ; mais le plus souvent je le voyais faire un tout petit pas, se dresser sur les pattes, baisser son oviducte et le plonger dans la substance molle de la galle, à l'endroit méme où les an- tennes s'étaient arrêtées. I] avait fait ce raisonnement : Il y a ici une larve de celles que je recherche, elle est à telle profondeur, je vais essayer de l’atteindre. Je demeurai une bonne heure à observer les Cinips qui finirent par se trouver au nombre de quatre. Je ne pouvais me lasser de voir leurs manœuvres, je les suivais avec le plus vif intérêt; et comme je connaissais alors les dissenti- ments qui existent entre les savants sur le siége de l’odorat dans les insectes , je regrettais de ne pas voir autour de cette galle, qui avait été pour moi l'occasion d’une révéla- tion subite, tout un congrès chargé de résoudre la question. Jaffirme qu'après avoir vu l'usage que les Cinips faisaient ( 249 ) de leurs antennes , après avoir constaté le succès et les sui- tes de leurs explorations, on aurait unanimement proclamé que l’odorat seul pouvait leur servir de guide et que, par conséquent, l'odorat réside, du moins chez eux, dans les antennes. Une autre fois, en traversant un sentier sablonneux très- propice aux travaux des hyménoptères fouisseurs, je vis voltiger des Dinetus pictus, Fab., en très-grand nombre et quelques Bembex rostrata, L. Ces insectes, lorsqu'ils quit- tent leur nid pour aller chercher, le premier des phytocoris, le second des fabanus destinés à leurs larves , ont l'habitude d'en fermer l'orifice en y ramenant avec leurs pattes une petite couche de sable. Je m’assis à portée de quelques-uns de ces nids, que leurs auteurs m’avaient déjà révélés, et j'attendis , afin de voir comment ils s’y prenaient pour re- trouver l’orifice. Un Dinetus arriva bientôt chargé de sa proie ; il se posa à vingt centimètres environ du nid et se mit à marcher rapidement en frappant le sol avec ses an- tennes. Arrivé à l'endroit voulu, ce qui fut vite fait, il s’ar- rêta un instant, imprima à ses antennes une vibration plus rapide, puis, sûr de son fait , il déblaya vivement le terrain et se précipita dans son trou. Dix fois, en un instant, je fus témoin du même manège. Je voulus savoir si la facilité avec laquelle le Dinetus re- trouve son nid est une affaire de mémoire ou d’odorat. Je fis choix de deux nids dont la position m'était bien connue ; je bouleversai très-légèrement la surface de l’un avec une petite branche de bruyère, et j'appliquai ma main sur l'au- tre jusqu'à ce que le propriétaire revint, c'est-à-dire, pen- dant environ cinq minutes. Le premier Dinetus s'étant présenté, me parut s’apercevoir peu de mon travail; il erra cependant un peu plus que de coutume, agitant toujours ses antennes qui frappaient sans cesse Le sol; mais il finit ( 250 } bientôt par retrouver le domicile de ses petits. Le second se trouva, de prime-abord , beaucoup plus embarrassé : ma main, dont l’état de moiteur avait rendu les émanations beaucoup plus actives, avait laissé sur le sable une odeur qui semblait l’étonner et qu’il cherchait à reconnaitre; car lorsqu'il arrivait à l'endroit que ma main avait couvert, il ralentissait sa marche, et ses antennes palpaient rapide- ment le sable. Le pauvre insecte s’épuisait en marches et contre-marches ; il passait par dessus son nid sans s’en douter ; il creusait çà et là avec les pattes de petites fosses dans lesquelles il plongeait ses antennes pour explorer les couches inférieures ; il s’arrêtait pour brosser ses antennes, comme on se frotte les yeux quand on se sent ébloui, rien n'y fesait. Découragé , il prit son vol, mais il revint quel- ques instants après, et recommencça ses recherches. Cette fois, soit qu’il fut mieux disposé et que ses antennes, qui étaient évidemment l'agent explorateur , fussent plus pers- picaces , soit plutôt que le soleil, qui était ardent, eut fait évaporer les émanations de ma main, il parvint à retrouver sôn nid; mais il y mit bien du temps et de la patience. Je voulus faire une dernière expérience et je m'adressai au même Dinetus que les difficultés antérieures avaient dû rendre un peu plus roué, ainsi qu’à un Dinetus voisin. Je préparai deux carrés de papier d’environ trois centimètres de côté, je les glissai sous le sable au-dessus de l'orifice des deux nids, et les cachai de manière à ce qu’on ne püt les voir. Les Dinetus eurent beau courir et faire jouer leurs antennes , ils ne purent retrouver leur nid. Ils s’aperçurent cependant de la présence d'un corps étranger sur leque mes doigts avaient laissé une odeur quelconque, car ils s’y arrêtaient quelquefois en appliquant sur le sable leurs an- tennes devenues immobiles. J'avais pris un Dinetus, et après l'avoir tué, je l’avais enfoui entre les deux nids à une ( 251 ) très-faible profondeur. Leurs antennes l’éventèrent , car ils s’y arrétèrent deux ou trois fois ; mais après, ils n’y firent plus atteution. Je fis aussi pour le Bembex l'expérience du papier ; ses démarches furent vaines. J’enlevai l'obstacle, il finit par retrouver son nid. J'ai décrit trop longuement , peut-être, ces observations, et cependant je n’ai point fait comprendre. comme je le voudrais , le rôle que jouaient les antennes au milieu de toutes les manœuvres dont j'ai parlé. Pourquoi ces organes toujours en mouvement , toujours frappant le sol, s’y appli- quant quelquefois ? Comment donnaient-ils à l’insecte les moyens de reconnaître son nid, car ils lui servaient très- positivement à le retrouver ? Était-ce par l'audition ? mais que peut-on entendre dans un nid où il n’y a qu'un œuf et des cadavres ? C'était donc par l’odorat, Je ne résiste pas à l’envie de signaler un autre fait dont j'ai été témoin l'été dernier. Je travaillais dans mon cabinet devant une fenêtre ou- verte dont l'encadrement est en bois de chêne. Un insecte, passant devant mes yeux, attira mon attention, et l'ayant suivi du regard, je le vis se poser sur un des côtés de l’en- cadrement ; c'était une femelle du Leucopsis dorsigera. A peine cet insecte parasite se fut-il posé, qu’il se mit à mar- cher lentement et avec précaution, et frappant légèrement le bois avec ses antennes. Évidemment , il cherchait à s’as- surer s’il n’y avait pas dans le bois quelque larve qui pût se charger de nourrir un de ses petits. De temps en temps, il s’arrêtait pour explorer plus sérieusement , toujours à l’aide de ses antennes , un point qui lui semblait sans doute digne d'attention, puis il recommençait ses explorations. Sa pa- tience fut enfin couronnée de succès, el ses antennes lui ayant signalé la présence d’une larve , il fit un pas , se dressa ( 252 ) sur ses pattes, dégaina son oviducte et le plongea lente- ment et avec précaution dans le bois pour introduire un œuf dans le corps de cette larve. Je vis, en un mot, se re- produire les manœuvres dont le Cinips auratus m'avait rendu témoin. Cela fait, le Leucopsis reprit ses recherches, toujours avec les mêmes précautions et par les mêmes moyens, et ayant trouvé une nouvelle occasion de pondre un œuf, il se mit en devoir d’en profiter ; mais pendant qu'il introduisait : son oviducte, je me levai et m'approchai pour l'observer de plus près, ce qui le mit en fuite. Quelques minutes après, il revint et se remit en quête. Le hasard fit qu’il repassa sur l'endroit même où il avait la première fois enfoncé sa tarière ; la sensation qu'il avait déjà éprouvée se renouvela sans doute , car il s'arrêta tout court, fixa ses antennes sur le bois, et satisfait de son examen, fit de nouveau usage de son oviducte. Ce fait de deux œufs pondus juste au même point, à des intervalles différents, me convainquirent que le Leucopsis, loin d'agir étourdiment , ne se laissait guider que par des faits bien connus et bien appréciés d'avance ; qu'il avait les moyens de constater très-positivement ces faits , et que ces moyens lui étaient évidemment fournis par les antennes. Consistent-ils dans la faculté d'entendre les larves qui ron- - gent le bois, ou dans celle de les sentir ? J'aime mieux voir ici un effet de l’odorat que de l’ouïe , et j'ai lieu de penser que mon opinion paraîtra la plus probable. Je n’en finirai pas si je voulais citer tons les faits du même genre que je retrouve dans mes notes ou dans mes souvenirs et que les hyménoptères parasites m’ont fourni l'occasion d'observer, Je me borne donc à faire remarquer que lorsque des Odynères, des Crabonites, des Cerceris, des Collètes, qui ont creusé leurs nids presque côte à côte, ( 253 ) dans le même talus, le même escarpement, veulent recon- naître leur domicile, ils se bornent à introduire leurs an- tennes dans leurs divers terriers qui se présentent à eux. Si celui qu'ils abordent n’est pas le leur, ils s’envolent bien vite; dans le cas contraire , ils se précipitent dedans ; que lorsque des guëêpes , des frêlons se promènent sur des fruits qu'ils cherchent à attaquer, ou lorsqu'ils se présentent pour en ronger l’intérieur, ils les tâtent constamment avec leurs antennes; que les Bostrichus, les Apate explorent avec leurs antennes , les arbres auxquels ils veulent confier leur postérité, afin de reconnaître les endroits les plus favora- bles à la ponte; que les Nécrophorus , les Silpha, les Geo- trupes se dirigent toujours les antennes en avant vers les substances qu'ils recherchent, et qu'ils aiment à reposer ces organes, pour savourer sans doute les odeurs qui en émanent; que les Zammaticherus, dont les antennes sont souvent dirigées en arrière dans le repos , les portent tou- jours en avant lorsqu'ils s’avancent vers quelque objet, et qu'elles leur servent à reconnaitre les écoulements sanieux des vieux chênes, dont ces longicornes, ainsi que les Lu- canes, paraissent friands; que d’après M. Mittre, qui a pnblié d'excellentes observations sur l’accouplement des Cebrio, les mâles, pour trouver les femelles cachées sous terre, promènent leurs antennes sur le sol. Enfin , je recommande à toute l'attention des naturalistes les curieuses expériences faites par M. Alex. Lefebvre sur une abeille, expériences qui ont donné lieu à une notice insérée dans les Annales de la Société entomologique (4) et qui concordent parfaitement avec mes propres Les faits que j'ai constatés, m'ont depuis longtemps donné (1) Tome VIE, 1838 , page 395. ( 254) la conviction que l’odorat des insectes réside dans les an- tennes ; mais je devais essayer de faire passer cette convic- tion dans l'esprit des autres, et j'ai compris qu'il fallait pour cela d’autres expériences. Je me suis d'abord attaché à rechercher quel organe est le siége du sens dont il s’agit. Je prenais des insectes de toutes les familles , je les traversais d’une épingle fine et les piquais sur des plaques de liége. Tous ceux qui ne vivent pas longtemps après avoir été ainsi blessés, j’employais les épingles les plus déliées, et je n’entamais pour ainsi dire que la peau. J'avais remarqué, en effet, et cette observa- tion n’est pas inutile pour ceux qui seraient tentés de re- nouveler mes expériences ; j'avais remarqué que lorsqu'un insecte était piqué depuis peu, et qu’il était sous l'influence de la douleur , il demeurait presque toujours indifférent aux odeurs que je lui présentais; il n’y devenait sensible que lorsque les tissus traversés par l’épingle s'étant figés autour d’elle, la plaie se trouvait ainsi cicatrisée. Lors donc que l’insecte était dans ces conditions et que son immobilité me permettait de penser qu’il était maître de ses sensations, j'imbibais un petit pinceau d’essence de térébenthine ou d’essence de serpolet, ou d’éther, et je l'approchais de son corps. Si je le présentais aux stigmates, je n’obtenais la plupart du temps aucun résultat; mais si je le laissais séjourner longtemps aux abords des orifices res- piratoires , si je donnais ainsi aux odeurs le temps de péné- trer avec l'air dans les trachées, l’insecte s’agitait, se tour- mentait et manifestait un malaise évident. Si je promenais le pinceau parallèlement aux antennes , tantôt ces organes se relevaient ; s’abaissaient , s’écartaient lentement ou brus- quement, comme pour fuir l'odeur incommode qui agissait très-évidemment sur elles, car la vue n’était pour rien dans ces mouvements, puisque la présence d’un pinceau sec n’en Re. ee S ( 255 déterminait aucun; tantôt l’insecte s’agitait comme lorsque l’odeur avait pénétré dans ses stigmates ; tantôt il recevait une commotion comme celle d’une décharge électrique, et un tressaillement subit parcourait tout son corps. Quelque- fois cependant , mais rarement, il n’éprouvait rien, en ap- parence au moins , soit que la douleur lui causât des distrac- tions, soit qu’il fût réellement endormi. Si j'approchais le pinceau de la bouche , presque toujours les palpes se mettaient en mouvement et l'insecte entrait en convulsion. Il résultait pour moi de ces expériences que, par les an- tennes , les palpes et les trachées , les insectes deviennent sensibles aux émanations des corps, et ces expériences avaient été assez nombreuses et faites avec assez de soin pour ine convaincre, alors même que l’odorat devrait être attribué aux trachées , que ce sens appartient aussi aux an- tennes et aux palpes, puisque ces organes ne donnaient des signes de sensibilité que lorsque le pinceau était imbibé de la liqueur odorante. Cependant une objection se présenta à mon esprit : comme je n’avais opéré qu'avec des insectes à antennes courtes ou moyennes , il était permis de supposer que le pinceau se trouvant assez près du corps, les émanations pénétrantes de la térébenthine et de l’éther pouvaient former autour de l'insecte une atmosphère dont l’action agissait sur l'organe respiratoire, et que les mouvements des antennes et des palpes n'étaient que la conséquence des sensations olfac- tives recueillies par les stigmates. Ne voulant pas laisser cette objection sans réponse, je recueillis des insectes à longues antennes, tels que des Sauterelles, des Hamma- ticherus Heros, des Ergates faber, des Astynomus ædilis mâles, remarquables , surtout ces derniers, par la lon- gueur de ces appendices. Je les piquai comme les précé- (256 ) dents , et le lendemain et jours suivants je les fis servir à mes observations. Lorsque j'approchais le pinceau du thorax ou de l'abdomen en le maintenant à la distance de un à deux centimètres, je ne produisais aucun effet; si, au contraire, je l’approchais de l'extrémité des antennes, ce qui le plaçait quelquefois à plus de dix centimètres du corps , les antennes s’agitaient presque aussitôt et l’insecte entraif en convulsions. L’Ergates faber se montrait surtout très-sensible : à un centimètre de l'extrémité des antennes le pinceau lui occasionnait des frémissements et des com- motions aussi caractérisques que curieuses à constater J'ajoute que, dans ces insectes, les palpes se montraient aussi sensibles que dans les autres ; souvent même l'effet s’y produisait plus vite que dans les antennes. Il demeure donc constaté que les antennes sont, par elles-mêmes, ainsi que les palpes, sensibles aux odeurs, et que, par les stigmates, les insectes ne peuvent recueillir que ce malaise dont j'ai déjà donné l'explication. Je voulais aller plus loin encore; j’aspirais à être témoin des embarras et des erreurs auxquels devaient naturelle- ment être exposés des insectes que j'aurais privés des an- tennes ou des palpes, ou même de tous ces organes à la fois, ces expériences ont porté sur des Necrophorus, des Silpha, des Calliphora, des Sarcophaga , des Bombyx et surtout du Bombyx mori, dont j'ai sacrifié un grand nom- bre; mais j'avoue qu’elles ne m'ont satisfait qne médiocre- ment. Sans doute les Necrophorus s’éloignaient souvent des charognes et les mouches de la viande; sans doute aussi les Bombyx ne savaient plus retrouver leurs femelles ou du moins ne se dirigeaient vers elles qu’accidentellement et par hasard; mais quoique leurs incertitudes et leurs er- reurs soient favorables à ma thèse, parce qu’on peut , jus- qu’à un certain point, les mettre au compte de leurs souf- rer 257) frances. Les insectes, d’ailleurs, ont leur indépendance et leur libre arbitre , et alors même qu’ils possèdent tous leurs organes, ils font, lorsqu'ils sont blessés ou effarouchés , tout autre chose que ce qu'on serait en droit d’attendre d'eux. J'ai mieux réussi en les piquant après les avoir mutilés et en laissant sécher leurs plaies. Voici tout simplement les faits que j'ai observés. 1.0 En amputant l'extrémité des antennes , la sensibilité olfactive n’était pas détruite, mais elle était affaiblie, et d'autant plus que le nombre des articles enlevés était plus grand ; de sorte que , vers la base, la sensibilité était nulle ou à peu près. Dans les antennes à massue, l’amputation de celle-ci m’a paru détruire l’odorat. 2.° Le vernissage des antennes, avec une couche de gomme a rendu ces organes insensibles. 3.0 L'’amputation des palpes m’a permis souvent d’ap- procher le pinceau äe ‘a bouche sans que l'insecte en fut affecté ; mais quelquefois i; se manifestait un peu de sensi- bilité, parceïqu'il est très-d'=cile d’enlever radicalement ces organes. De ce qui précède il résulte selon moi, de la manière la plus incontestable, que, chez les articulés, le sens de l'o- dorat réside dans les antennes et dans les palpes; mais, à mon avis, les antennes sont destinées à percevoir les odeurs de loin comme de près, tandis que les palpes n'auraient pour mission que d'apprécier, par l'odeur comme par le tact , la qualité des alimens , et n’exerceraient leurs facultés olfactives qu’à de faibles distances. Deux*mots’maintenant sur deux questions qui se ratta- chent à celle que je viens de traiter et qui ne sont pas tout- à-fait dépourvues d'intérêt. Tome XVI. 17 (258 ) 4.0 Quelle est la partie des antennes et des palpes qui est le siége de l'odorat ? | 2.0 Comment pourrait-on classer, au point de vue de l'odorat, les divers ordres d’articulés? La première question ne me parait pas susceptible d’une solution uniforme et absolue ; mais la raison et mes expé- riences m'’autorisent cependant à proposer les principes ci- après, dont l'application est soumise aux règles de l’ana- logie : Dans les antennes plumeuses , flabellées ou pectinées , comme celles des Drilus, des Ptilinus, des Ptilophorus, des Cladophorus, de certains Sternoxes, des Lophyrus , des Cladius, des Ctenophora , des Tanypus, des Bombix , etc., l’odorat réside dans toute la partie rameuse. Dans les antennes simples et sétacées ou filiformes, comme celles des Carabiques , des Longicornes , des Chry- somélines et d’un grand nombre d'Hyménoptères, la faculté olfactive est d'autant moins vive qu’on s'approche plus de la base , et c’est principalement dans les derniers articles que réside l’odorat. Dans les antennes terminées par une massue, que celle- ci soit formée d'articles perfoliés comme dans les Necro- phores, feuilletés comme dans les Lamellicornes, serrés comme dans les Curculionites, l’odorat réside exclusive- ment dans la massue. On doit aussi probablement le placer dans le bouton terminal des antennes des Lépidoptères divrnes. Dans les antennes en massue comme celles d’un grand nombre d’hyménoptères ( chalcidites , odynères , guèpes , andrènes , etc. ), le siége de l’odorat est à l'extrémité. Relativement aux diptères, j'avoue que je ne puis rien préciser, Je crois cependant que l’odorat réside dans l’an- tenne tout entière , mais j'ignore quel est l’usage du style ( 259 ) | plumeux, ou tomenteux, ou glabre, ou globifère qui s’in- sère sur le dernier article ; j'ai lieu de croire pourtant qu'il sert à la perception des odeurs. Quant aux palpes, je suis tenté d'affirmer que c’est dans le dernier article que réside l’odorat. En ce qui concerne la seconde question, voici, je crois, ce qui approche de la vérité : Les diptères, et surtout les brachycères , étant parasites ou phytophages , ou recherchant les substances en décom- position , ont, généralement parlant, l’odorat le plus fin. Vient ensuite l'ordre des hyménoptères qui comprend un grand nombre d'espèces parasites et fouisseuses , et dont les instincts supposent une grande délicatesse d’odorat. Je placerais en suivant l'ordre des coléoptères, où je trouve les Aphodius, les Geotrupes, les Charansonites , les Xylophages , les Dermestes , etc., qui sont doués d’un odorat fort subtil. Puis viendraient les lépidoptères, dont quelques-uns et surtout les Bombyx, ne le cèdent à aucun autre insecte pour la finesse de l’odorat. Après les lépidoptères, les hémiptères dont la plupart vivent sur les plantes et ont besoin, dès-lors, de pouvoir les discerner par l'odorat. Après eux, les orthoptères qui m'ont paru avoir générale- ment l’odorat assez émoussé. Après les orthoptères , les névroptères , chez lesquels je n'ai recueilli que de faibles preuves de sensibilité olfactive. Je n'assigne pas la place des crustacés parce que les observations me manquent. Il paraît cependant que les homards , les langoustes et autres, ont le sentiment des odeurs, et peut-être cet ordre irait-il avant les orthoptères ou même les hémiptères. Quant aux araignées , je crois dur les inscrire au der- ‘ ( 260 ) nier rang. Quoique leurs palpes soient sensibles aux odeurs, ce dont je me suis assuré, leurs habitudes indiquent que l'odorat est chez elles fort peu développé, ce qui, du reste, semble leur être commun avec les insectes chasseurs et car- nassiers , avec cette circonstance aggravante qu'elles sont dépourvues d'antennes. Aussi, les voit-on se borner ou à chasser à vue, comme les mygales et les lycoses, ou à atten- dre leur proie sur leurs toiles, comme les tégénaires et les épeires. Mont-de-Marsan, 5 Février 1850. XIL. Quelques mots sur l'organe de l'Odorat et sur celui de l'Ouie dans les Insectes ; par Léon Durour, mem- bre correspondant. M. Edouard Perris, en habile et ingénieux observateur, a confirmé par les faits comme par le raisonnement, que chez les insectes , le siége principal de l’odorat est dans les an- tennes. Inspiré par la lecture de son mémoire, je viens étayer son opinion par des faits anatomiques et des consi- dérations physiologiques. Ce même savant a aussi effleuré la question du sens de l’ouie dans ces articulés ; je l’abor- derai pareillement. Les bornes d’un écrit improvisé , d’un essai ou plutôt d'un fragment de dissertation sur ces deux sujets, ne me permet- tent point de sortir des généralités et m'interdisent toute érudition, toute citation. L’entomologiste versé dans Ja connaissance des insectes de tous les ordres, trouvera sans peine dans ses souvenirs l'application des exemples à ces généralités. RS ( 261 ) 1.0 Odorat. — I n’est certainement qu’une modification du toucher. Des atômes odorants , ou recherchés ou impro- visés, viennent s’apposer sur une surface d’une texture spé- ciale où s’épanouissent les ramuscules nerveux. L'impres- sion de ces atômes est transmise au cerveau par un nerf olfactif qui y prend son origine. La fonction s'exerce dans l'insecte par une disposition anatomique analogue à celle des animaux le plus haut placés dans l'échelle. Or, les insectes ont un cerveau dont les fonctions sont bien distinctes des ganglions auxquels il se rattache anato- miquement, et ce cerveau émet des nerfs qui président à l'exercice des sens. Je vous le demande , en est-il autre- ment dans les animaux vertébrés ? Tous les entomotomistes , tant anciens que modernes, ont constaté au cerveau des insectes des nerfs qu’ils ont appelés antennaires, parce que leur tronc s’introduit dans les antennes. Mais que signifie ce mot antennes dont l’éty- mologie est si obscure ? Il se traduit vulgairement et même scientifiquement par celui de cornes, parce qu’elles s’im- plantent sur le front comme les cornes de certains animaux. Ce terme technique est donc dépourvu d’une positive signi- fication ! Comme siége d'un ou de plusieurs sens, les antennes ont été imparfaitement étudiées dans leur texture intime. Cest pourtant de celle-ci que l’on peut rationnellement dé- duire les attributions physiologiques. Leur forme articulée non-seulement s’accommode à mer- veille aux mouvements généraux et partiels de ces organes, mais nous allons voir que certains de leurs articles sont plus spécialement organisés pour l'impression sensoriale. Dans les longues antennes , dans celles dites filiformes ou sétiformes, un certain nombre d'articles basilaires ont une consistance évidemment plus dure , plus cornée qui les rend ( 262 } presqu’insensibles aux agents extérieurs. Je dirai bientôt pourquoi ils ont été ainsi fabriqués. Les autres articles sur- tout à mesure qu'ils approchent de l'extrémité de l'antenne, ou bien ont surface pubescente soyeuse, veloutée, luisante et une texture finement spongieuse , ou bien ils deviennent insensiblement d’une petitesse, d’une multiplication infinies. C’est cette partie de l’antenne , ce sont ces articles dont je viens de parler, qui constituent essentiellement l'organe de l'odorat , eux seuls sont pénétrés des ramifications du nerf olfactif ( ou antennaire }, c'est à leur surface que les molé- cules odorantes sont perçues et que leur impression est transmise au sensorium commune. Les articles basilaires cornés et plus ou moins glabres, font l'office d’un étui qui renferme et protège le tronc du nerf olfactif avant ses divisions. Dans les antennes courtes, ou droites ou coudées , c'est au bouton , ou capitule , au croissant, à la palette, à la mas- sue , aux feuillets, aux dents en scie ou pectinées, aux pana- ches, aux articles plumeux , etc., que réside le sens de l’ol- faction. Une loupe tant soit peu scrupuleuse constate aux articles ou prolongements qui constituent ces diverses con- figurations, cette finesse de texture, celte spécialité d’or- ganisation, cette trame nerveuse dont je viens de parler , tandis que le scape proprement dit, ou les articles basi- laires , demeurent étrangers à l’olfaction. M. Perris, pour nous faire apprécier la finesse de Fodorat et le prodigieux discernement des insectes , a tracé une histoire saisissante d'intérêt des Hyménoptères parasites qui inoculent leurs œufs aux larves enfoncées dans les profondeurs du bois ou des galles. Cet observateur nous a aussi initiés aux surpre- nantes manœuvres d'Hyménoptères fouisseurs, dont les mères intelligentes guidées par le sens de Fodorat , retrou- vent par le tâtonnement, le flairement de leurs vibratiles ( 265 ) antennes, la piste de leur progéniture confiée aux entrailles de la terre. Voilà de ces histoires piquantes , simulant le roman, qui vengent la science entomologique de l’ontrecui- dance de certains nomenclateurs qui tendent à la plonger dans le chaos et l’anarchie. Remarquez encore à l'appui d'une plus grande exquisité de l’odorat, que les mâles de beaucoup d’insectes ont des antennes bien plus développées que celles des femelles et souvent d’une configuration tellement différente, qu'il en est résulté dans la science, des erreurs flagrantes de classifica- tion et que plusieurs doubles emplois y subsistent encore. Mais n'allez pas imaginer, ainsi qu’on le croit en général, que ces antennes du mâle ne soient qu'un ornement, une parure privilégiée, un apparat de séduction. Non , la na- ture ne descend pas à ces puérilités. Ce luxe de développe- ment, cette élégante végétation du tissu antennaire , n'ont été créés que pour multiplier la surface olfactive afin de saisir les émanations de la femelie à l’époque du rut, dans le but définitif et harmonique de la conservation de l'espèce. 2 o Quie. — Bien peu d’entomologistes refusent aux in- sectes le sens de l’ouïe. Il est certain qu'ils perçoivent les sons. On sait, de temps immémorial que lorsqu'un essaim d’abeilles quitte la ruche-mère et prend son essor dans les airs pour chercher au loin un nouveau gîte, un nouveau domicile , on réussit à suspendre son vol et à le déterminer à se poser en produisant un bruit discordant une sorte de charivari par des coups redoublés sur des pincettes , des tringles de fer, des casserolles , etc., quel observateur un peu patient n’a pas surpris le grillon des champs à demi enfoncé dans sa tanière appeler sa femelle par son amou- reux cri cri? Combien de fois ne m’est-il pas arrivé d'inter- rompre brusquement cette stridulation-en frappant du pied le sol à la distance de deux ou trois mètres du grillon qui ( 264 ) ne pouvait pourtant pas me voir! Les sauterelles , la cour- tilière, les criquets, dans ce même but amoureux font vi- brer leurs cimbales, racler leurs archets et leurs femelles ne sont ni sourdes ni eruelles. La cigale au temps de l’ar- dente canicule, immobile sur un tronc d'arbre y fait réson- ner ses accents rauques et monotomes pour attirer et sé- duire sa muette femelle. Quel savant dans le silence du ca- binet n’a pas prêté son oreille étonnée au tic-tac, au tapote- ment de l’anobium ; qui n’a point remarqué que le moindre déplacement d’une chaise suffit pour suspendre subitement ce singulier bruit de pulsation ! Je me borne à ces exemples incontestables d’audition di- recte. Les entomologistes -pratiques se seront convaincus maintefois, combien le bruit, même à faible ton, peut éveiller la sensibilité acoustique des insectes dont ils cher- chent à s'emparer. Mais où se trouve le siége de l’ouie; quel organe recoit l'impression des ondes sonores ; quelle trame nerveuse les transmet au centre des sensations ? Ce sont là des questions sur lesquelles on à émis des opinions fort diverses sans avoir fixé la science sur sa solution définitive. Des auteurs préoccupés de la complication de l'appareil acoustique des vertébrés, préoccupés surtout de l'existence d'une membrane du tympan comme condition anatomique , essentielle pour la transmission des sons, semblent s’être abeurtés à trouver des dispositions analogues dans les in- sectes, comme si la nature devait s’astreindre rigoureuse- ment à cette conformité organique qu’on prétend lui impo- ser, comme s’il ne lui était pas |licite d'arriver au même but par des moyens très-dissemblables, comme si nous étions encore initiés dans tous ses secrets. Cette préoccu- pation a même été portée si loin, que des savants fort re- commandables ayant découvert dans quelques insectes ex- ( 265 ) ceptionnellement et dans des points du corps peu concilia- bles au point de vue physiologique des dépressions des ca- vités des amincissements circonscrits du tégument, en ont aussitôt induit l'existence d’un organe auditif. L’un, aper- cevant au visage de la Blatte deux taches blanches d’une texture plus fine, y voit un tympanis; l’autre, portant ses regards empressés dans une excavation, une conque des flancs du criquet ne manque pas d’y colloquer le sens de l'ouïe , il y trouve un tympan, un labyrinthe membraneux, etc.; un troisième, en étudiant les jambes antérieures des grillons , des sauterelles, y remarque des dépressions des espèces de diaphragmes membraneux unis et tendus, et il ne balance pas à proclamer un organe acoustique avec son tympan, ses capsules auditives, que sais-je ! Vous le voyez, d’après ces savants, certains insectes en- tendraient qui par la tête, qui par les flancs , qui par les pattes, et ces espèces privilégiées ne forment pas la mil- lième partie de la nation entomologique, exclueraient impli- citement d'une semblable faveur anatomique, je ne dis pas l'immense majorité, mais la presque totalité des insectes malgré la constatation irréfragable du sens de l’ouie dans ceux-ci. Ce n’est point ici le lieu de porter un contrôle sé- rieux sur ces diverses hypothèses. Je partage avec MM. Goureau et Newport l’intime convic- tion que dans les insectes le siège de l'audition est dans les antennes comme celui de l’odorat. Et où se trouve donc l'incompatibilité physiologique pour l’existence simultanée de l’ouïie et de l’odorat dans un même organe commun à toutes les espèces de cette populeuse classe d’animaux? L'air n’est-il point dans ces deux fonctions sensoriales le véhicule des agents qui impressionnent l'organe ? quelle sé- rieuse difficulté y a-t-il à ce que le même nerf qui prend son origine au cerveau, puisse transmettre à celui-ci ou 266 j l’atomeimpalpable de l’odeur, ou l'élément plus impalpable encore du son? Qui nous dit que les ramuscules nerveux épanouis dans les derniers articles antennaires n’ont pas recu les uns la faculté spéciale de l'impression sonore , les autres celle de l'impression olfactive ? Qui nous dit encore que le tronc nerveux qui résume ces ramuscules, n’a pas dans sa composition intime, ainsi qu’on pourrait l'induire des savantes recherches de l’anatomiste anglais précité, des filets dont les uns provoquent la perception des odeurs et les autres celle des vibrations sonores ? Je ne crains pas de le dire, il ne me répugne nullement de croire à ce cumul physiologique de l’odorat et de l’ouïe dans les antennes. XII. NoTE sur la collection d’OEufs, de M. MAYRAND, lieutenant d'armement au 74." de ligne. La collection d'œufs que nous avons visité avec votre Commission, et sur laquelle vous m'avez chargé de vous présenter un rapport, est l'une des plus intéressantes, des plus complètes que l’on puisse citer dans ce genre, — Elle se distingue non pas seulement par le nombre des espèces qu’elle renferme , mais encore, par le goût qui a présidé, à leur arrangement, l’admirable fraicheur et la parfaite in- tégrité de tous les œufs qui s’y rapportent ; ajoutons enfin, qu'elle est classée suivant la méthode scientifique du célè- bre professeur Temminck. Cette collection est appelée à marquer dans la science et à contribuer à ses progrès. L'étude des oiseaux d'Europe avait été longtemps négli- gligée. Les naturalistes s’attachaient de préférence à con- naître les espèces exotiques , que recommandaient des for- mes étranges ou de brillantes livrées. | Re 267 ) Quelques observateurs, dans ces derniers temps, ont ouvert une voie nouvelle. — Le plus célèbre d’entr’eux, M. Temminck, a publié, sur les oiseaux d'Europe une excel- lente monographie , dans laquelle il a décrit avec une rare sagacité, les différences qu'ils présentent aux différents âges de la vie, les différences propres à chagne sexe; enfin, le nid et les œufs particuliers à chaque espèce. Mais il n’est Jamais donné à un seule personne de tout voir, de Lout con: naître. Temminck a laissé quelques lacunes, surtout dans la partie ovologique. : Ce sont ces lacunes que la collection de M. Mayrand, est appelée à faire disparaitre ; cet habile observateur se pro- pose de publier prochainement la description de sa collec- tion accompagnée de dessins représentant chaque œuf avec ses principales variétés. Nous avons vu quelques planches de ce beau travail, et nous pouvons affirmer que leur per- fection ne saurait être comparée à aucune publication du même genre dans les annales scientifiques. La collection de M. Mayrand a été commencée à Mont- médy (département de la Meuse), en 1842. Elle a été con- tinuée et enrichie par d’incessantes recherches dans tous les départements français et aussi par des échanges avec des naturalistes ou des amateurs. Elle se compose aujour- d’hui de 252 espèces sauvages bien déterminées, et de 4 qui sont encore inconnues. Elles comprennent 75 genres, ap- partenant aux ordres ci-après, SAVOIR : OnDne 1. Rapaces. 5 Genres. 20 Espèces. — J.me (mnivores. — 10 — — 3me Insectivores..…… 10 — 54 — — 4.me Graniyores..………. — D — — b5.me Zygodactyles. …… 3 — 7 _— — 6.me Anisodactyles..… #% — T7 — — us AICTONS... 2 2 _ — S8.me Chélydons..….…. 3 — 6 — ( 268 ) OnpRe 9.me Pigeons.........…. 1 Genres, 4 Esréces. — 10.me Gallinacées.……… — 1 —- — dime Alectorides...….… 1 — A — — fÂ2.me Coure “ 1 — 1 — — 1Â3.me Gralles 18 — 30 a — éme Pinnatipèdes. … 3 — 8 — — 1Â5.me Palmipèdes..……… 10 — 37 — M. Mayrand croit que les quatre espèces encore non déterminées appartiennent, SAVOIR : à :à l'Ordre: :1:" Les Genres complets , sont : Cathartes percnopterus. OEdicnemus. Gypaëtus barbatus. Himantopus, Coracias gurrula. Phænicopterus. Oriolus galbula. Platalea. urnus MH ct achetes. Yunx torquilla. Grallus aquaticus. biere familiaris. Fulica. Tichodroma, Phalaropus. Upupa Podiceps. Phasianus. Cygnus. Les 256 espèces donnent un effectif de 1596 œufs. M. Mayrand dont nous ne saurions trop apprécier la mo- destie s’est livré à des recherches et à des études qui té- moignent de son zèle pour le progrès de la science ornitho- _ logique. Il serait à désirer qu’il voulût faire connaître le résultat de ses longues et patientes observations , et nous nous estimerions heureux de les er dans notre bulle- tin scientifique. “+ SEE ( 269 ) XIV. FAUNE entomologique , où Histoire naturelle des Insectes qui se trouvent dans le département de la Gironde; par MM. J. L. Laporte aîné et Ernest LAPoRTE fils. ( Suite ). DIXIÈME FAMILLE. LES CL A VICORNES. Première Section. L+ Genre. — LES TILLES, Z/LLUS. F. 1. TiLLE MUTILLAIRE, Tillus mutillarius. Latr. F. Clerus mutillarius. Oliv. Thanasimus mutillarius. F. Latr. Long, 12 millim.— sur les bois cariés ou coupés. 2. TILLE FORMICAIRE, 7. formicarius. Latr. Clerus formicarius. Fab. Thanasimus formicarius. Fab. Long 8 millim. Sur les bois morts. 3. TILLE ALLONGÉ, T. elongatus. Latr., F. Tillus hyalinus. Sturm. Long. 8 millim.— Sur diverses fleurs. 4. TILLE UNIFASCIÉ, T. unifasciatus. Latr. Clerus unifasciatus. Fab. Long. 7 millim.— Dans les bois taillis. IL®° Genre. — LES ÉNOPLIES, ENOPLIUM. F. 1. me à LSERRATIGONNE Enoplium serraticorne. Ti rs serraticornis. Fab. Pa Long. 8 millim.— Sur les chicoracées. Tome XVI. 18 re ( 270 ) IE.me Genre. — LES CLAIRONS, CLERUS. Orrv., Dés. 4. CLATRON À auIT POINTS , Clerus octopunctatus. Latr. Trichodes octopunctatus. Fab. Long. 15 millim.— Dans les bois taillis. 2. CLAIRON ALVÉOLAIRE, C. alveolarius. Latr. Trichodes alvearius. F. Schh. Long. 14 millim.— Sur les fleurs et les bois morts. 3. CLAIRON DES RUCHES, C. apiarius. Latr. Trichodes apiarius. Fab. Schh. Long. 14 millim.— Sur les fleurs. Sa larve vit dans les ruches. 4. CLAIRON MoL, C. mollis. Oliv. Notoxus mollis. Fab. Opilus domesticus. Sturm. Long. 12 millim.— Dans les maisons. 9. CLAIRON PALE, C. pallidus. Latr. Opilo mollis. Lin., F., Oliv. Long 11 millim.— Sur l’épine blanche. Lo CLAIRON QUADRIMACULÉ, C. 2 mnt à Latr. Clerus niger. Fab. Thanasimus A-maculatus. F., Panz. Long. 6 millim.— Sur les fagots de chêne. 7. CLAIRON VIOLET, C. violaceus. Latr. Corynetes violaceus. Fab., Paykull. Long. 6 millim.— Sur les fleurs. ( 27 ) 8. CLAIRON RUFICOLLE, €. ruficollis. Oliv. Corynetes ruficollis. F. Necrobia ruficollis. F., Latr. Long. 7 millim.— Sur les bois de construction et dans les matières animales en décomposition. 9. CLAIRON RUFIPÈDE , C. rufipes. Latr. Necrobia rufipes. Oliv., Latr., F Long. 7 millim.— Sur les ombellifères et dans les ma- tières animales en décomposition. 10. CLarRoN BLEU, C. cœruleus. Latr. Corynetes cœruleus. De Geer. Long. 6 millim.— Sur les fleurs. 11. CLAIRON UNIBANDR , C. univittatus. Fab. Tarsostenus univittatus. Spinola. Notoxus univittatus. Rossi. Sur les bois morts. IV.me Genre. — LES ESCARBOTS , HISTER. F. Payx., Lartr., Ericus. 1. ESCARBOT MASIEUR, Hister major. Latr., Lin. Long. 43 millim.— Dans les fumiers. 2. EScARBOT QUADRIMACULÉ , H. quadri Latr., Lin., Payk. Hister lunatus. F. Long. 13 millim.— Dans les bouses. 3. ESCARBOT SILLONNÉ, H. sulcatus. mé Ok. Hister striatus. Fab. Onthophilus striatus. F. Long. 2 millim.— Dans les crotins de dev. ( 272 } 4. ESCARBOT GLOBULEUX, H. globulosus. Latr., Oliv. Onthophilus sulcatus. F. Long. 4 millim.— Dans les bouses. 9. ESCARBOT BIPUSTULÉ, H. bipustulatus. Latr. Long. 14 millim. — Dans les bouses. 6. ESCARBOT QUADRINOTÉ, H. quadrinotatus. Illig. H. A-maculatus. F. Long. 12 millim.— Dans les fumiers. 7. ESCARBOT DES CADAVRES, H. cadaverinus. Payk. Long. 8 à 40 millim. — Dans les matières animales. 8. ESCARBOT DÉPRIMÉ, H. depressus. Latr. Platysoma depressum. F. | Long 4 millim.— Sous les détritus végétaux. 9. EscARBOT INÉGAL, H. inæqualis. Latr. H. lœris. Panz. Long. 16 à 18 millim.— Dans les bouses. 10. ESCARBOT SEMIPONCTUÉ , H. semi-punctatus. Latr. Saprinus semi-punctatus. F. Sapr. cyaneus. Rossi. Sapr. caspius. Ménétries. Long. 6 à 10 millim.— Dans les bouses. 11. EscarBor À 12 STRIES, H. 12 striatus. Latr., Payk. Long. 6 millim.— Dans les bouses. 12. EscARBOT ALLONGÉ, H. elongatus. Oliv Platysoma oblongum. F., Payk. Long. 5 millim. — Sous les écorces des vieux troncs de pins morts. re mt Se I EN es ( 273 ) 13. EscarBor Noir, H. unicolor. Latr., Lin., F. Long. 10 millim.— Dans les bouses. 14. ESCARBOT BRONZÉ, H. œneus. Latr., F. Long. 3 à 5 millim.— Dans les bouses. 15. EscARBOT BIMACULÉ , H. bimaculatus. Latr. Long. 6 millim. — Dans les bouses. 16. EscarBor PURPURIN , A. purpurescens. Latr. Long. 5. millim.— Dans les fumiers. 17. ESCARBOT DES EXCRÉMENTS , H. stercorarius. Payk. Bister gibbulus. Foldermann, Long. 8 millim.— Dans les bouses. 18. EscARBOT BRILLANT, H. nitidulus. Panz. Saprinus acuminatus. Fab. Sap. semi-striatus. Falder. Long. 5 millim.— Dans les bouses. 19. EscarBoT À Miroir, AH. speculifer. Latr., Payk. Saprinus speculifer Latr., Payk., Ex. Sap. pulcherrimus. Weber. Sap. personnatus. Iliger. ici Long. 4 à 6 millim.— Dans les bouses. 20. ESCARBOT FRONT RUGUEUX , À. rugifrons. Payk. Saprinus rugifrons. Ent., Heft. Sap. metallicus. Steven. Long. 3 à 5 millim.— A la Teste, sous les algues. Si- gnalé par M. Souverbie. | 21. EscaARBOT ARRONDI , H. rotundatus. Saprinus rotundatus. Iig. Long. 3 à 5 millim.— A la Teste; dans les bouses. ( 274 ) 29. EscARB8OT siINUÉ, H. sinuatus. Fab. Hister fimetarius. Herbst. Long. 7 à 9 millim.— Dans les bouses. 23. EScARBOT À 12 STRIES, bisex striatus. Hlig. Hister duodecimstriatus. Payk. Long. 5 millim. | V.we Genre. - LES NÉCROPHORES , NECROPHORUS. F., Ouiv., Lar. Les Nécrophores se trouvent sous les cadavres en putréfaction et y déposent leurs œufs. 1. NÉCROPHORE GERMANIQUE , Necrophorus germanicus. Latr. Silpha germanica. Lin. Long. 30 millim. — Dans les cadavres 2. NÉCROPHORE FOssoyEUR, N. vespillo, Latr. Silpha vespillo. Fab. Necroph. sepultor. Gyllenh. Long. 15 à 22 millim.— Dans les cadavres. 3. NÉCROPHORE INHUMEUR , N. humator. Latr., F. Silpha humator. Illig. Long. 20 millim.— Dans les cadavres. 4. NÉCROPHORE MORTUAIRE, N. mortuorum. Latr., F. Long. 21 millim.— Dans les cadavres. 5. NÉCROPHORE INTERROMPU , N. interruptus. Déj., Steph. Necrophorus investigator. Mac-Leay. Long. 20 millim. — Dans les poissons pourris, à la côte d'Arcachon. Assez rare. (2% ) 6. NECROPHORE ENSEVELISSEUR, JV. sepultor. Latr., arpentier. N. abruptor. Erichs. Long. 20 Millim.— Dans le cadavre des Taupes. VI.®< Genre. — LES BOUCLIERS, S/ZLPHA, Lin. Far. 1. BOUCLIER LITTORAL , Silpha httoralis. Latr. Necrodes littoralis, Lin., F. Necr. clavipes. Sulzer Long. 21 miliim.— Dans les nes, 2. BOUCLIER GRANULÉ, S. granulata. Latr. Oliv. Long. 17 millim. — Sous les détritus des végétaux. 3. BoucuiER LiSSE, S. lœvigata. Latr. S. polita. Sulzer. Long. 17 millim. — Dans les lieux boisés. A. BOUCLIER RÉTICULÉ, S. reticulata. Latr. F. Panz Long. 16 millim. — Dans les cadavres. 5. BoucLIER oBsCUR , $. obscura. Latr. Lin. F. Long. 16 millim. — Dans les champs. 6. BouUcLiEr ATRE , $. atrata. Latr. Lin. F. Long. 16 millim. — Dans les champs. 7. BOUCLIER DISPARATE , S. dispar. Latr. Herbst. Long. de 10 à 14 millim. — Dans les champs. 8. BOUCLIER THORACIQUE , S. thoracica. Latr. Lin. F. Long. 14 millim. — Dans les cadavres. 9. BOUCLIER À QUATRE POINTS, S. quadripunctata. air. in... Long. 13 millim — Dans les bois taillis, sous les détri- tus végétaux. ( 276 ) 10. BOUCLIER RABOTEUX , S. rugosa. Latr. Lin. F. S. para maribou. Herbst. Long. 12 millim.— Dans les champs sablonneux. 11. BOUCLIER SINUÉ , $. sinuata. Latr. F. Oliv. Long. 10 à 12 millim. — Dans les ordures et principale- ment dans les cadavres: 12. BOUCLIER FERRUGINEUX , S. ferruginea. Latr. Long. 9 millim. — Dans les champs arides. Assez rare. 13. BOUCLIER TRISTE, S. tristis. Illig. Dans les cadavres, 14. BouCLIER CARÈNÉ , S. carinata. Illig. Silpha opaca. Herbst. Long. 18 millim. — Dans les champs. VIL®e Genre. — LES AGYRTES, AGYRTES. FrœLicu. 1. AGYRTE MARRON, Agyrtes castaneus. Frælich. Mycelophagus castaneus. Fab. Long. 5 millim.—Nous n’en avons trouvé que deux in- dividus , le long des murs, à Pessac. VIE =< Genre.—LES NITIDULES , N/TIDULA. F. Heer. 1. NiTiDULE BRONZÉE , MNitidula œnea. Latr. Meligethes æneus. F. Er. Luc. Long. 11 millim. — Sur les fleurs. 2. NiTIDULE BIMACULÉE , N. bimaculata. Latr. Long. 11 millim. — Sur les dunes à La Teste. (277 ) 3. NITIDULE VERDATRE , N. Viridescens. Latr. F. Meligethes viridescens. His. Er. Long. 11 millim. — Sur les fleurs. 4. NiTIDULE CoLon , N. colon. Latr. Omosita colon. Lin. 0. hæmorrhoidalis. F. Long. 10 millim. — Sous les écorces d'arbres. 9. NITIDULE QUADRIPUSTULÉE, N. quadripustulata Latr. Long. 9 millim -- Dans les ordures. 6. NiTIDULE QUADRIPUNCTUÉE, N. quadripunctata. Latr. Long. 9 millim. — Sous les écorces d’arbres. 7. NITIDULE RUFIPÈDE , N. rufipes. Latr. Long. 9 millim. - Sous les détritus végétaux. 8. NiTIDULE RAYÉE, N. strigata. Latr. Long. 8 millim. — Sous les détritus végétaux. 9. NITIDULE HÉMORRHOÏDALE, N. hœmorhoïdalis. Latr. Long. 8 millim. — Dans les cadavres. 10. NiTiIDuLE misCoïpE, N. discoidea. Latr. Ostoma discoidea. Laïc. Long. 3 millim.— Dans les cadavres. € 11. NiriDuLE PÉDICULAIRE , N. pedicularia. Latr. Long. 2 millim. — Dans les fumiers. 12. NiribuLE ESTIVALE, N. æstiva. Latr. Long. 7 millim. — Dans les ordures. 13. NITIDULE VARIÉE, N. varia. Latr. Long. 8 millim. — Sur les fleurs. ( 278 ) 14. NITIDULE QUADRIMOUCHETÉE , N. quadriguitata. Latr. Long. 7 millim. — Sous les écorces d'arbres. 15. NItTIDULE JAUNATRE, N. lutea. Latr. Sphæridium luteum. Fa. Long. 7 millim. — Sous les détritus végétaux. 16. NiTibuLE ATRE, N. atra. Latr. Long. 3 millim. — Sous les écorces d'arbres. 17. NitiDULE oBsoLÈTE , N. obsoleta, Herbst. Nitidula ochracea. EricusoN. Long. 3 millim. 18. NiTIDULE IMPÉRIALE , N. imperialis. Fab. Nitidula nebulosa. MarsHAM. | Cryptarcha imperialis. F. Long. 3 millim. Que SOUS-GENRE. LES BYTURES, BYTURUS. 1. BYTURE TOMENTEUX, Byturus tomentosus. Latr. F. Long. 6 millim.—Dans les marais, sur les renonculacées. 2. BYTURE DU CAREX, B. caricis. Latr. Long. 7 millim. — Sur les graminées. 3.100 SOUS-GENRE. LES CERQUES , CERCUS. Lame. Er. 1. CERQUE PÉDICULAIRE, Cereus pedicularius. Latr. Linn. F. C. truncatus. F. C. spireæ. STEVEN. Long. 2 millim.— Sur les fleurs. (279 ) 2, CERQUE BICOLOR , C. 2-color. Lucas. Long. 5 millim. Cette espèce n'avait encore été trouvée qu’en Algérie. Deux individus seulement trouvés en 1848 à La Teste, par M. Souverbie. 4.0e SOUS-GENRE. LES THYMALES, THY MALUS. Lare. F. 1. THYMALE OBLONG, T'hymalus oblongus. Latr. Peltis oblonga. Fas. Lin. Long. 8 millim. — Sur les arbres morts, 5.16 SOUS-GENRE. LES DAGNÉS , DACNE. Lars. 1. DACNÉ LUNULÉ, Dacne lunata. Latr. Engis lunata. Fas. Long. 5 millim. — Dans les champignons. 2. DACNÉ HUMÉRAL, D. humeralis. Latr. Engis humeralis. Fas. E. scanicus. Panz. Long. 4 millim. — Dans les champignons. G.me SOUS-GENRE. LES IPS, ZPS. F. 1. Ips siLLONNÉ, ps sulcata. Latr. Long. 7 millim.— Sous les écorces d'arbres. 2. Ips cou ROUGE , 1. sanguimicollis. Latr. Engis sanquinicollis. Fab. Long. 5 millim.— Sous l'écorce des bois morts . ( 280 ) 3. Ips CYLINDRIQUE , I. cylindrica. Fab. Long. 4 millim.— Sur les bois cariés. 4. fps OBLONG, 1. oblonga. Oliv. Dermestes oblonga. Geoff. Long 4 millim.— Sur le bois mort. 5. [ps PALE , I. pallida. Latr. Long. 3 millim.— Sous l'écorce des bois morts. 6. Ips CÉLÉRIER, I. cellaris. Latr. Dermestes cellaris. Fab. Long. 3 millim. — Dans les troncs des vieux arbres. 7. TPS FERRUGINEUX , L. ferruginea. Lin. 1ps linearis. Latr. Long. 6 millim. - Dans les troncs des vieux pins. 8. [PS QUADRIPUSTULÉ, 1. quadripustulata. Lin. Jps quadripunctata. De Geer. Long. 6 millim.— Sous les écorces. 9. Tps cRBLÉ, I. cribrata. Gyll. Rhizophacus cribratus. Herbst. Sur les bois morts. Coteaux de Bouillac. IX.ve Genre.— LES SCAPHIDIES, SCAPHIDIUM. Or. L. SCAPHIDIE SANS TACHES, Scaphidium immaculatnm. Latr. Scaphium immaculatum. Oliv. Long. 3 millim. — Dans les champignons. 2. SCAPHIDIE DES AGARICS, S. agaricinum. Latr. Scaphisoma agaricinum. Lin. Scaphis. pulicarium. Rossi. Long. 2 millim, — Dans les agarics. A . cm je mr (281) 3. SCAPHIDIE QUADRIMACULÉE , S, quadrimaculatum. Latr., Oliv. Long, 2 millim.— Dans les agarics. X. Genre. — LES CHOLÈVES , CHOLEVA, Lame. 1. CHOLÈVE morio, Choleva morio. Latr. Catops morio Fas. Long. 4 millim. — Dans les champignons. 2. CHOLÈVE ROUSSATRE, C. rufescens. Latr. Catops rufescens. Fas. Long. 4 millim. — Dans les bois pourris. 3. CHOLÈVE ALLONGÉE, C. angustatus. F. Catops angustatus. F. Cat. agilis. F. Cat. elongatus. PAYkULL. Long. 5 à 6 millim. — Dans les bois pourris et les fu- miers. XL®e Genre. — LES DERMESTES, DERMESTES. Lin. 1. DERMESTE pu LARD, Dermestes lardarius. Latr. L. Long. 8 millim. — Dans le lard corrompu. 2. DERMESTE RENARD, D. vulpinus. Latr. F. D. maculatus. DE GEERr. Long. 7 millim. — Dans les cadavres. 3. DERMESTE NÉBULEUX, D. tessellatus. Latr. Long. 6 millim. — Dans les cadavres. À. DERMESTE ATRE , D. ater. Latr. Long. 6 millim. — Dans les cadavres et principalement sur les fleurs ( 282 | 5. DERMESTE souris, D. murinus. Latr. Long. 6 millim. — Dans les cadavres. 6. DERMESTE PELLETIER, D. pellis. Latr. Attagenus. PezLio. Lin. Attagenus cylindricornis. SCHRANK. Q Attagenus macellarius. F. Long. 4 millim. — Sur les fleurs. 7. DERMESTE DESTRUCTEUR , D. macellarius. Oliv. Long. 3 millim. — Dans les pelleteries. 8. DERMESTE PIEDS NOIRS, D. nigripes. Fab. Hadrotoma rufitarsis. Panz. Lare. Las Dans les pelleteries. SOUS-GENRE. LES ATTAGÈNES, ATTAGENUS. Larr. 1. ATTAGÈNE ONDÉ, Attagenus undatus. Latr. Dermestes undatus. Fa. Megatoma undata. Lan. Long. 6 millim. — Dans les cadavres. 2. ATTAGÈNE TRIFASCIÉ, À. frifasciatus. Latr. Dermestes trifasciatus. Fas. Long. 5 millim. — Dans les pelleteries. 3. ATTAGÈNE A ANTENNES EN SCIE, À. serra. Latr. Dermestes serra. Far. Tiresias serra. F. Long. 4 millim. — Dans les pelleteries. 4. ATTAGÈNE 20 POINTS, À. 20 guitatuis. F. Long. 7 millim. — Sur les plantes et les clôtures en bois de pin. RÉ CE © ÉÉÉÉÉNé EE ( 283 ) XIL.we Genre — LES THROSQUES, THROSCUS. Larn. 1. THROSQUE DERMESTOÏDE, T'hroscus dermestoides. Larr. Trixagus adstrictor. ScaœN. Long. 3 millim. — Sur différentes plantes et sous les écorces , principalement en Mars. XIHIL.w° Genre. — LES ANTHRÈNES, ANTHRENUS. = GEOFFROY 1. ANTHRÈNE DE LA SCROPHULAIRE, Anthrenus scro— phulariæ. Latr. Long. 6 millim. — Dans les collections d'animaux. 2. ANTHRÈNE FASCIÉ, À. verbasci. Latr. Byrrhus verbasci. Lan. Long. 4 millim. — Dans les plantes pourries. 3. ANTHRÈNE DESTRUCTEUR, À. musæorum. Latr. Anthrenus nebulosus. Fas. Long. 3 millim. — Dans les collections d'animaux. À. ANTHRÈNE BRODÉ, À. pinpinellæ. Latr. Long. 3 millim. — Sur les fleurs. XIVae Genre.—LES NOSODENDRES, NOSODENDRON. Larr. 1. NosoDENDRE FAsCICULÉ , Nosodendron fasciculare. Mare F..Panz. Sphæridium fasc: - Fas. Long. 5 millim. — Dons Pi diibres des ormes. ( 284 ) XV.ve Genre. — LES BYRRHES, BFRRHUS. Lan. 1. BYRRHE PILULE, Byrrhus pilula. Latr. Lin. Dermestes pilula. DEc. Long. 10 millim. — Dans les lieux sablonneux. 2. BYRRHE VARIE, B. varius. Latr. Citillus varius. F. C. maculatus. HerBsr. Long. 10 millim. — Dans la grande forêt de La Teste. 3. BYRRHE STRIÉ, B. striatus. Latr. Long. 9 millim. — Sur les pelouses. À. ByRRHE ONDULÉ , B. murinus. Fab. Byrrhus undulatus. Panz. Long. 7 millim.— Dans les bois sablonneux. 9. BYRRHE FASCIÉ, B. fasciatus. Latr. F. Cistila atra. Foure. Long. 7 millim. — Dans les champs sur les pelouses. G. BYRRHE BRILLANT, B. nitens. Fab. Byrrhus punctatus. STURM. Morichus nitens. Er. Long. 5 millim. — Dans les champs. 7. BYRRHE SEMISTRIÉ , B. semistriatus. Latr. _ Simplocaria semistriata. F. Long. 4 millim. — Dans les terrains sablonneux. XVIL.*° Genre. — LES GEORISSES, GEORISSUS. Larr. 1. GEORISSE PYGMÉE, Georissus pygmœus. Boit. Trox dubius. Panz. Long. 2 millim.— Au bord des mares à Saint-Estèphe et à La Teste. ( 285 ) XVIL.®° Genre. — LES ELMIS, £LMIS. 1. Ezmis pE MAUGÉ, Elmis Maugetii. Latr. Long. 2 millim. — Sous les pierres, dans les ruisseaux. 2. Ecmis DE Perris, E. Perrisi. Duf. Long. 3 millim. — Dans les jalles, sous les er. M. Souverbie l'a pris au Pont de la May. 3. Ecmis DE DarGeLAs, E. Dargelasi. Latr. Elmis tuberculatus. Muzz. E. variabilis. Leacn. Long. 1 millim.— Dans les eaux courantes, sous les pierres. 4. Ecmis BRONZÉ , E. æneus. Steph. Muller. Elmis Megerlei. Durr. Long. 2 millim. — Dans les eaux courantes, sous les pierres. 9. ELMIS TUBERCULÉ , E. tuberculatus. Müller. Steph. Stenelmis canaliculatus. L. Durour. Long. 4 millim. — Dans les eaux courantes, sous les pierres. fu 6. ELms Â-TuBERGULÉ , E. quadri-tuberculatus. Müll. Macronychus tuberculatus. Izxic. Long. 3 millim. — Dans les eaux courantes, sous les pierres. 7. Ecmis DE Vorkmar, E. Volkmari. Latr. Long. 2 millim. — Dans les eaux courantes, sous les pierres. Deuxième Section. XVIIL.** Genre. — LES DRYOPS, DRYOPS. Ouiv. Lan. 1. DryYoPs AURICULÉ, Dryops auriculata. Latr. Parnus haetirs Fas. Pawz. Tome XVI. 19 t 286 ) Long. 4 millim. — Dans les eaux courantes, sous les pierres. 2. Dryoprs SUBSTRIÉ , D. substriatus. Müll. Illig. Parnus Dumerilii. Latr. Parn. longipes. Lin. REDTENS. Long. 5 millim. — Dans les eaux courantes, sous les pierres et sur.les plantes aquatiques. XIX.»< Genre. —LES HYDÈRES, HYDERA. 1. HYpÈRE ACUMINÉE, Hydera acuminata. F. Parnus acuminatus. Fas. Potamophisus acuminatus. F. GERMAR. Long. 5 millim. — Sur le bord des ruisseaux. XX.»° Genre, —LES HÉTÉROCÈRES, HETEROCERUS. Bosc. F. Lare. 1. HÉTÉROCÈRE BORDÉ, Heterocerus marginatus. Lat.F. Long. 5 millim. — Dans les sables submergés, le long _ des ruisseaux. 7,77. XV. Études sur la FLORE DE TOULOUSE ; monographie du genre ROSA , par E. T. ARRONDEAU. » Species —. Hhepmienens limitibus cireum- » scribuntur (Einx., Sp. mé: 705). Depuis l’époque où Linné s’exprimait ainsi, les rosiers n’ont pas cessé de faire le désespoir des botanistes, par le peu de constance des caractères sur lesquels on a successi- vement essayé de baser la distinction des espèces. Relative- ment à celles qui croissent aux environs de Toulouse, je ne me flatte pas d’avoir complètement débrouillé ce chaos ; mais en ayant égard simultanément aux caractères offerts = EL 0, ( 287) par les aiguillons, les feuilles, les calices, les styles et les fruits, je crois avoir défini clairement les diverses formes que j'ai observées jusqu'ici. Presque toutes sont considé- rées comme espèces distinctes par les auteurs des travaux les plus récents sur la Flore française; c’est ainsi que je les ai décrites, sans vouloir par là rien préjuger sur une question qui se rattache aux plus hautes considérations de philosophie botanique. À mon avis, ce n’est qu'aux auteurs d'ouvrages généraux, à ceux du moins qui écrivent la flore d'un grand pays, qu’il appartient de réunir ou de séparer les formes qui doivent constituer les espèces. Quant au bo- taniste qui étudie une flore locale, son devoir est de recon- naître et décrire scrupuleusement les types réellement dis- tincts et constants qu'il a eu occasion d'observer parmi les végétaux de sa contrée. C’est la tâche que je me suis im- posée relativement au genre Rosier, et je dois dire à cet égrd, que mes descriptions résultent de l'examen de plus de 300 échantillons, que j'ai recueillis en divers points des environs de Toulouse , et que j'ai comparés soit à ceux que je possède d’autres contrées de la France, soit aux nom- breuses espèces qu’il m'a été donné d'étudier dans le riche herbier de M. Moquin-Tandon. ROSA (Tourn. Juss.). Calice à limbe divisé en 5 lanières persistantes ou caduques, à tube charnu urcéolé, resserré au sommet et retréci à la gorge par un anneau glanduleux qui laisse passer les styles plus ou moin allongés , libres ou soudés. Corolle à 5 pétales ; étamines nombreuses, insérées, ainsi que les pétales, sur le bord extérieur de l'anneau. Car- pelles nombreux , indéhiscents, osseux, hérissés, renfer- més dans le tube du calice, insérés sur ses parois, sessiles ou stipités. — Tiges munies d’aiguillons ; es ailées avec impaire ; stipules longuement soudées au pétio — Toutes les espèces mode 3-0 du 15 Mai à la fin de Juin. *DSOJUAWOL “08 * * "+ * * * *AHINO]) NB $99N0P ‘S2SN9INPUEIS UON }, . . , “DOIDYPUIQUIBL GT + tester: “SoSNOnDS1A SgSno (NUL) $998J XN9pP S9[ ANS S2NJ9A HNAYdRYIDAT ST" Ne nr 1,0 ire see + + + * *SNOSS9p-U9 S9pnA ‘ SNSSOP-U9 SA1QPIT) *DSOLOWON * LT * De et Mont: *D07J9qUn ‘OT id satin *SOIr) ‘DsourBIQNE *£F *SOPUOA SA1ONIO I * a Eee ie” à “umidos *"YT * eee PAT * * * 01q0]3 9[8AO LINUX ‘S91qUI9) *SATIINA TX "81101 | "SLT "SOPIASIAT, . -syinonoaxg *sosnognpue(9 *SKOTHAITY SHTTIQN,] *S9q1N 07) sisuoanbopuy ‘Er ° **S29]09 URI] ‘ PP A sq Sr EL 2 “yo ‘+ + *SO8N9JUAMOT, “onhydhingd ‘Ot + **""": ** " ‘snossop- -U9 SONPOA }. ge : ‘DUIUD) "6 OT 0 OU ONE 2 : . * *Sa4qu[") : S410110 4 Sa1qe[) sorte 4 *sopidsiH *SW'ININOQIA *SOSNOIMPUE]S UON *sa4q0 Sols ‘q -psohus ge ns torrers Sd à UT 6 OUR HONTE US Mot e 0 o » so "SR *sapnos soph3s D: “SAILVTIO SHMAAMHANS STINAILG ÉSHLIATIS XAVHLNAD SAIIVAQ — ‘If ‘199$ *D919901) à + de en eh ovlield es. 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Fleurs presque so- litaires, sur des pédoncules allongés un peu hispides. Calice glabre à divisions courtes entières. Styles soudés en colonne glabre. Fleurs blanches. Fruits elliptiques. AC. Chemin de l'Ardenne à Larramet, Tournefeuille, forêt de Bouconne , etc. 2. R. pisRacrEaTA, Bast; Dec. FL fr. VI, 537; Bor. F1. cent. p. 171. R. arvensis «. ramis erectis Lois. FI. gall. p. 539. R. arv. B. Gren. F1. fr. I, p. 555. Rameaux dress allongés. Aiguillons comprimés à la base, courbés, réfléchis. Feuilles à fulioles arrondies acu- minées , à dents écartées ; pétioles munis d’aiguillons qui se trouvent jusques sur la nervure médiane ; stipules acumi- nées dressées. Fleurs en corymbe sur des pédoncules allon- gés glanduleux, souvent munis au-dessus du point d’inser- tion de deux bractées opposées linéaires allongées. Tube du calice ovoïde très-allongé, glabre ou glanduleux ; divisions presque entières prolongées en pointe , plus ou moins glan- duleuses. Styles en colonne glabre plus courte que les éta- mines. Fleurs blanches, fruits ovoïdes. AR. Bords de l'Ausonnelle ; chemin de Larramet. ( 290 ) Obs. Ce joli rosier très-bien décrit par De Candolle (loc. cit.), sert de passage entre le R. sempervirens dont il a le port, et l’arvensis dont il a les styles glabres. Il diffère en outre du premier, par la forme de ses folioles arrondies dont la largeur égale les deux tiers de la longueur; du second, par la grandeur et la consistance de ces mêmes folioles ; de l’un et de l’autre par le tube de son calice beaucoup plus allongé. Si cette espèce n’a pas été maintenue, c’est qu’on l’a sou- vent confondue, ce me semble, avec une simple forme du R. arven- sis à fleurs rapprochées en ombelle. C’est, du moins, l’erreur dans laquelle sont tombés les auteurs de la Flore des environs de Paris, en attribuant ( p. 180 ), le synonyme de Bastard à une sous-variété à fleurs en ombelle entourée de trois bractées dilatées, tandis que dans notre plante, les bractées sont opposées et très-étroites. : 8. R. sempervirexs. Linn. Sp. 704; Dec. Fl. fr. VI, 533; Noul. F1. s.-pyr. 217; Koch, Syn. 255. Rameaux allongés, décombants, à aiguillons épars, courts, crochus. Feuilles persistantes, à folioles glabres, coriaces, luisantes sur les deux faces, elliptiques, acuminées , deux fois aussi longues que larges, simplement dentées, à dents du sommet conniventes. Stipules linéaires denticulées sur les bords, longuement acuminées. Fleurs nombreuses en -corymbe muni de bractées étroites, étalées ou réfléchies. Pédoncules , tubes et divisions des calices couverts de glan- des pédicellées noirdtres. Divisions du calice ovales, entiè- res, acuminées. Styles soudés en colonne velue égalant presque les étamines. Fleurs blanches. Fruits glabres, pe- tits, subglobuleux. CC. Chemin de Larramet, bords du Touch, etc. 4. R. PRosrRaTA. Dec. FI. VI, 536; Desv. Jour. Bot. 1813, p: 17: À. arvensis. 7 Ser. in Prodr.; Noul. F1. s.-pyr , p. 217. R. sempervirens. 6. Lagrèze, FI. T. et Gar., p. 124. Tige couchée; aiguillons comme dans les précédents. Feuilles persistantes, à folioles petites, coriaces . luisantes, ( 291 deux fois aussi longues que larges, à dents du sommet con- niventes. Stipules linéaires à oreillettes acuminées. Fleurs solitaires ou en corymbe muni de bractées. Divisions du calice entières ou légèrement pinnatifides. Styles en colonne gréle, glabre. Fleurs blanches. Fruits subglobuleux , petits. R. Bois de Larramet et chemin qui y conduit. Obs. Cette espèce a été établie par lillustre auteur de la Flore française sur des échantillons recueillis au bord du bois de Larramet. Elle est exactement intermédiaire entre le R, arvensis dont elle a le port ainsi que la colonne stylaire, et le R. sempervirens dont elle : a le feuillage, seulement sous de moindres dimensions. M. Seringe dans le Prodrome ( t. Il, p. 597 ); Duby, dans le Bot. Gall., p. 175, et, d’après eux, M. Noulet (loc. cit. }, la rattachent comme variété au R. arvensis. M. Lagrèze, au contraire, la réunit au R. semper- virens avec lequel elle me semble en effet avoir plus d’affinités, et quoique MM. Grenier et Godron ne citent pas le synonyme de De Can- dolle dans leur Flore de France, on peut déduire des caractères dis- tinctifs assignés par ces savants aux R. arvensis et sempervirens, que elle est aussi leur manière de voir. Ces divergences d’opinion me semblent une raison suffisante pour maintenir cette espèce, bien ca- ractérisée, du reste, et aussi distincte que beaucoup de formes qui ont été élevées au rang d'espèces depuis la publication de la Flore française. En résumé, les quatre rosiers que nous venons de décrire ont en- tre eux de grands rapports, et pour ménager toutes les affinités, il faudrait les ranger ainsi en cercle : 1. Arvensis. 2. Bibracteata. 4. Prostrata. 3. Sempervirens. De cette façon, chacun se rattache par quelques caractères à ceux entre lesquels il est placé, tandis que ceux qui sont diamétralement opposés sont les plus éloignés de l’ordre naturel. Peut-être les n.°5 2 et 4 sont-ils des hybrides des deux autres : ce qui justüferait cette lé c’est er n’ont été és, à ma pete , que dans es localités o iers Quoiqu'il en Soi it, : est certain que Ja confusion de ces formes intermédiaires avec Fa ( 292 ) deux types, 1 et 3 a pu seule conduire le savant auteur de la Flore du Bassin Sous-Pyrénéen à proposer la réunion en une seule espèce des R. arvensis et sempervirens : ces deux rosiers, tels que nous les avons décrits, se distinguent parfaitement, non-seulement par les styles ( seul caractère distinctif que je trouve mentionné dans les des- criptions de l’auteur, p. 216 et 217), mais aussi par les stipules et sur- tout par la consistance , la forme et la dentelure des folioles. b. Styles libres. 5. R. arviva. Rau enum. 106; Bor. FI. cent. n.° 661! Gren., FL fr. p. 534? galliea ; trunco erecto, floribus dilutè roseis. Koch. Syn. Arbrisseau toufin, de 6 à T décimètres, à rameaux dres- sés couverts d’aiguillons nombreux , inégaux , les plus forts courbés et un peu comprimés. à He hé ARR de soies glanduleuses.Pétiolesun} g ,couver de glandes qui se retrouvent sur la ner sdiane des pétiol glanduleuses , à oreillettes lancéolées, étvant divergentes; ; 5 à 5 folioles elliptiques, obtuses ou un peu acuminées, comme articulées sur le pétiole principal, fermes , nerveu- ses, blanchâtres et un peu velues en dessous, à dents lar- ges, arrondies, munies de quelques dents accessoires. Pé- doncules glanduleux , réunis, 2 ou 3 en corymbe muni de bractées lancéolées ; té et divisions du calice à peu près glabres, celles-ci munies à la base de quelques appendices linéaires , acuminées, mucronées au sommel ; styles velus, libres, rapprochés en faisceau plus court que les élamines ; fleurs roses, presque inodores , moins grandes que dans les deux suivantes. Fruit petit , rouge , subglobuleux. RRR. Lisière de la forêt de Bouconne , du côté de Mon- do nville. . stipules Obs. J'ai été longtemps indécis sur l'espèce à laquelle je devais rap- Vorter 3 ou 4 échantillons de ce rosier que j'avais recueillis à Bou — (293 ) conne, en 1844. Pour lever mes doutes, je le communiquai à MM. Grenier et Boreau. Sur le vu d’un exemplaire unique et peut-être peu complet, le premier de ces savants le rapporte avec doute à son R. MR le second à son R. pulchella. Mais l'ayant retrouvé depuis lors, j'ai pu l’étudier plus complètement et me convaincre que mes échantillons sont identiques avec ceux que je tiens de l’obligeance du savant Botaniste d'Angers, sous le nom de R. arvina avec la localité d'Angers en Saint-Sylvain. J'ai donc la certitude ee notre espèce est bien le n.° 661 de la Flore du Centre, 2.e éd. p. 174. Maïs ce n’est qu'avec doute que je la rapporte au R. arvina de s Grenier qui lui donne pour synonyme R. aæmanni, Gmel. Quoique ce savant cite pour sa plante les mêmes localités que M. Boreau, sa description ne convient pas entièrement à notre espèce, dont les folioles ont le plus souvent 3 à 4 centimètres de longueur, et dont les styles m'ont tou- jours paru rapprochés, mais non soudés. Elle n’a, du reste, aucune ressemblance avec l'arvensis dont M. Grenier croit devoir différencier la sienne. Ne résulterait-il pas de là que la description de la Flore de France, t. 1, p. 544, s’appliquerait exclusivement au R. aæzmanni, Gmel., qui dès-lors serait différent de l’arvina de Rau ? Cette der— nière conséquence est d’ailleurs conforme à l’opinion de Koch qui rapporte ces deux rosiers à deux variétés différentes du R. gallica, Syn., 2.e éd., p. 255 6. H. aygrina, Schleich; Gren., FI fr. p. 553; Bor. F1. centr., 2.° éd. n.° 660, R. gallica B. Ser. in Prodr. t. H, p. 603; Gallica y, Koch, syn. p. 255. Assez semblable au précédent dont il se distingue par sa taille un peu moindre, par ses folioles d’un vert foncé en dessus, moins coriaces, plus arrondies et toutes obtuses, par ses stipules à oreillettes un peu élargies, lancéolées, dressées, par les divisions de son calice prolongées en ap- pendice linéaire plus développé, enfin par ses séyles rappro- chés en colonne hérissée aussi longue que les élamines , et par ses fleurs aussi grandes que dans le À. gallica. La forme des folioles , la longueur des styles et la couleur des fleurs le distinguent du reste suffisamment de ce dernier. ( 294 } RR. Forêt de Bouconne, le long de la route de Mondon- ville à Pujaudran. 7. R. cazzica. Linn. sp. p. 704; Dec. F1. fr. V, 444 ; Noul. s.-pyr. 219. R. Pumila, Jacq. FL aust. t. 198. Arbrisseau à racine rampante, émettant des tiges de 2 à 4 décimètres. Aiïguillons gréles, nombreux, inégaux, ca- ducs sur les tiges, entremélés sur les rameaux de soies glan- duleuses. Feuilles à pétioles tomenteux, glanduleux, à folioles se réfléchissant par la flexion des pétiolules. Folioles e/lip-- tiques acuminées , coriaces , blanchätres et velues en dessous, à dents larges , arrondies, ciliées, glanduleuses. Stipules étroites, à oreilles élargies, lancéolées ou aiguës, divergentes. Pédoncules solitaires, axillaires et dépourvus de bractées, hispides, glanduleux ainsi que le tube du calice. Divisions du calice un peu pinnatifides à la base, prolongées au som- met en un appendice lancéolé denté, couvertes extérieure- ment de glandes noirâtres, réfléchies, caduques après la floraison ; styles courts, laineux. Fleurs grandes, odoran- tes, d’un rouge foncé intérieurement. Fruit petit, rouge, subglobuleux, étranglé au sommet. C. Très-commun dans la forêt de Bouconne, et autour des champs limitrophes, dans les lieux frais, surtout du côté de Mondonville. Il n’est pas rare de rencontrer des fleurs qui ont plus de cinq pétales. Section 31. OVAIRES DU CENTRE STIPITÉS , STIPULES SUPÉRIEURES DILATÉES. a. — Styles soudés. - 8. R. sryzosa, Desv.; Ser. in Dec. Prodr. Il, 599 ; Noul. FL s.-pyr., p. 218; Gren. F1, fr. 1, p. 555 R. systyla. Koch, syn., p. 254. D ( 295 ) Aiguillons crochus, courts, dilatés à la base. Feuilles à pétivles tomenteux munis de quelques aiguillons ; folioles ovales aiguës, velués en-dessous, d’un vert pâle, simple- ment dentées en scie, à dents acuminées conniventes au sommet. Stipules denticulées , à oreillettes lancéolées aiguës allongées. Fleurs en corymbe entouré de bractées dilatées. Pédoncules hérissés de quelques soies glanduleuses, plus rarement lisses. Calice à tube ovoide, lisse, divisions pinna- tifides à lanières linéaires, Styles en colonne glabre plus ou ” moins allongée. « R. Stylosa. Desv., Jour. Lot 1813, T. If, p. 113, fig. 14; Bor. F1. cent., 2.° éd n.° 656! Fleurs blanches en corymbes fournis ; pédoncules courts, hispides. Styles égalant à peu près les étamines. ©. Chemin de Larramet: Pibrac; environs de la forêt de Bouconne , etc. 8. R. systyla. Bast.; Bor. FL. cent., n.0 654. R. brevistyla y. Dec. FL fr. VE, 537. Fleurs roses à onglet jaunâtre , réunies 2 ou 3 en corymbe. Feuilles un peu moins velues. styles plus courts que les étamines. : P. C. Chemin de Larramet ; coteaux de Pech-David. Ors. Malgré l’exemple de M. Boreau, je n’ai pu me décider à sépa- rer ces deux formes qui n’offrent réellement de différence constante que la couleur des fleurs. Dans l’une et l’autre, les pédoncules sont tantôt hispides, tantôt glabres; et j'ai des échantillons à fleur rose qui ont les feuilles aussi velues que ceux à fleur blanche. Je n’ai pas encore rencontré autour de Toulouse le R. Leucochroa, Desv., autre forme qui se rattache au mème type et se distingue par ses feuilles à peu près glabres. : b.— Styles libres. 9. R. Canixa. Lion Sp., p.704; Bor., Fl; cent., 2.° éd. 178. { 296 ) R. canina et vulgaris, Koch. Syn. p, 251; Coss et Germ., F1. par., p. 178. — Canina et genuina, Gren. F1. fr.,p. 558. Je ne conserve sous ce nom que les rosiers à aiguillons robustes, crochus, dilatés et comprimés à la base ; à folioles glabres non glanduleuses, simplement ou doublement den- tées, à dents aiguës, celles du sommet conniventes ; à pédon- cules glabres ainsi que le calice, à fruit elliptique, coriace. Les pétioles sont d’ailleurs aiguillonnés et un peu glandu- leux vers la base, les stipules supérieures très-dilatées, les divisions du calice pinnatifides , les styles laineux , les fleurs roses ou blanches, le plus souvent réunies en corymbe en- touré de bractées. CCC. Cette espèce la plus commune de toutes, se ren- contre partout, dans les haies et les buissons : elle fleurit dès la fin de Mai. Parmi les formes les plus remarquables , je citerai seule- ment : 1 R. glaucescens, Desv. Folioles arrondies, glauques en-dessous, à dents simples. Fleurs blanches sur des pédoncules très-courts. Styles peu nombreux presque gla- bres. Je l'ai trouvé au-dessus de Tournefeuille. 2. R. malmundariensis, Lej. Bor. (loc. cit.), jeunes pousses rouges, glanduleuses; folioles vertes en-dessus, glaucescentes en dessous, doublement dentées à dents à peine conniventes ; fleurs d’un beau rose, Je l'ai cueilli à Bouconne et sur la route de Cornebarrieu. 10. R, pLaTyPyLLA, Rau; Bor. FI. cent. p. 178! À. canina À dumetorum, Ser. Prodr. IT, 614; canina B dumetorum, Koch. syn. 261 ; can. B, Gren. FI. fr.) 568: (297) À. collina , Dec. F1. fr. non Jacq. Caractères généraux du R. canina ; mais les pétioles sont tomenteux , les stipules à creillettes divergentes ; les folioles à dents simples sont pubescentes en-dessous sur les nervures. Les fleurs solitaires ou réunies en corymbe triflore , ont les pédoncules lisses ainsi que le tube du calice; celui-ci est d’ailleurs ovoide allongé; les fleurs sontd'un rose pâle. AC. Bords du Touch, chemin de Larramet , ete. Obs. A cette forme, la seule que j'aie recueillie à Toulouse, je crois qu’on devrait réunir les R. obtusifolia, Desv., R. leucantha, les variétés du R. canina à feuilles pubescentes simplement dentées, à pédoncules lisses, à fruits glabres ovoïdes. Quant au R. dumeto- rum, Thuil. F1. par., p. 250, il se distingue par son fruit sphérique. 11. R. cozzina, Jacq. FI. Austr. t. 197 ; Rau enum.; non Dec. R. canina } Koch Syn. p. 251; canina à Gren. F1. fr. p. 558. R. friedlænderiana, Besser , ex Bor. F1. cent. p. 180. Arbrisseau peu élevé, à aiguillons allongés, courbés, peu dilatés à la base. Pétioles pubescents, glanduleux ; stipules à oreillettes lancéolées divergentes ; folioles grandes , arron- dies, acuminées , un peu velues en dessus, b/anchâtres to- menteuses en-dessous, à dents larges, glanduleuses sur les bords. Pédoncules hérissés de soies spinescentes, solitaires ou en corymbes peu fournis entourés de larges bractées. Tube du calice hispide à la base, divisions pinnatifides à segments linéaires denticulés et glanduleux. Fruit gros, dres- sé, arrondi, sépales semi-persistants. Styles velus, fleurs d’un beau rose. R. Bois de Larramet. Obs. Ce rosier a quelques rapports avec le À. trochyphylla (n.0 18 { 298 | ci-dessous), mais il est moins Pi dans toutes ses parties; il + s’en distingue d’ailleurs par ses aiguillons courbés, par ses folioles blanchâtres en-dessous et offrant seulement sur la nervure médiane, quelques glandes noirâtres à peine perceptibles. 12. R. anpecavensis, Bast. Dec. F1 fr. VI, 539 ; Bor. FL. cent n°676 ! - R. canina y hispida, Ser. Prodr. IT, 614; canina y Gren. F1. fr. 1, 558 R. sempervirens, Rau ex Koch Syn. p. 251 (non Linn.). Glabre dans toutes ses parties. Aiguillons rares, grêéles allongés, substipulaires. Slipules étroites, à oreillettes ai- guës, divergentes. Pétioles grêles ; 5 folioles petites lancéo- lées aiguës, vertes en-dessus glauques en dessous , simple- ment dentées; à dents acuminées, conniventes au sommet. Pé- doncules hérissés de soies glanduleuses courtes et peu nom- breuses. Tube du calice, ovoide, hérissé à la base. Fleurs solitaires d’un rose clair. Styles un peu allongés, peu velus. PC. Bords du Touch, entre Saint-Martin et le pont de Blagnac. 13. R. suais, Wild. Ser in Dec. Prodr. II, 612? R. canina x Koch. Syn. p. 251. - Arbrisseau peu élevé, à rameaux étalés, à aspect géné- ral rouseâtre. Rameaux bruns, munis d’aiguillons peu dila- tés à la base, coniques, gréles, courbés. Pétioles grêles, munis de petits aïguillons et de glandes pedicellées. Stipules glan- duleuses sur les bords, à oreillettes élargies, lancéolées dres- sées. 5 folioles glabres, d’un vert noirâtre en-dessus, pâles et très-glauques en-dessous, orbiculaires, simplement den- tées en scie. Pédoncules solitaires , -hispides , glanduleux. Tube du calice ovoïde, glabre, glauque, bleuâtre ; divisions du calice, pinnatifides, égalant à peu près la corolie ; styles courts, Laineuæ ; fleurs d'un rose foncé. RE RO ee (299 ) RR. Bruyère sur la lisière de la forêt de Bouconne, au N.-0. de Pibrac. Obs. Ce rosier offre les caractères principaux du R. psilophylla de Rau (Gren. F1. fr. I, 558); mais il en diffère certainement par son port moins élevé, par ses folioles glauques tout-à fait arrondies, et surtout par ses aiguillons, ceux du R. psilophylla étant courts, ro- bustes, à base comprimée aussi longue que les aïguillons eux-mêmes (Gren. loc. cit.). Il a également quelques rapports avec le R. collina, dont il se distingue parce qu’il est entièrement glabre. Enfin la forme de ses folioles, ses aiguillons plus nombreux , son aspect glauque et rougeûtre , ainsi que la couleur de ses fleurs le font distinguer du R. andegavensis. Mais si je n’hésite pas à le séparer de toutes les for- | mes voisines , il n’en est pas de mème, je l'avoue quand il s’agit de lui donner un nom. Je n’ai pu consulter l’Enumeratio plantarum horti Berolinensis de Wildenow : toutefois, la phrase de M. Seringe, ( loc. cit. }, convient de tout point à notre plante, et Lt ’à preuve contraire, je crois devoir la rapporter au R. suavis rodrome. 14. R. serium, Thuil. FI. par. p. 252: Dec. FL fr. VI, 538 ; Bor. FI. cent. p. 181. R. rubiginosa. o. Ser. Prod. II, 617; 8. Gren. FI. 1. 2, D ZOU, R. canina. 5. Koch. syn. p. 252; Coss. et Germ. F1. par. p. 179. : Arbrisseau très-touffu, à aiguillons courbés, robustes, à feuilles glanduleuses sur les pétioles et la face inférieure des folioles. Voisin du R. rubiginosa, ce rosier s’en distingue cependant très-bien. 1.0 Par ses folioles glabres, aiguës au sommet, cunéiformes à la base, à dents glanduleuses, celles du sommet conniventes, 2. par ses pédoncules glabres ainsi que les calices. Les styles sont plus velus, les fleurs blan- ches, petites ; les fruits petits, ovoïdes. CC. Haies à l’Ardenne, Pech-David, etc. Obs. Ce rosier que les auteurs rapportent tantôt au rubiginosa , tantôt au canina, est un de ceux que son port fait le plus facile- ( 300 ment reconnaître au premier coup-d’œil. Je m'étonne qu’il ne soit pas indiqué, même comme variété, par l’auteur de la Flore du Bas- sin sous-pyrénéen. C’est en le confondant avec le vrai rubiginosa, que M. Serres (Cat. F1. toul. p. 30) donne à ce dernier des fleurs le plus souvent blanches 45 R. Rumicinosa, Linn.; Dec. F1. fr. V, 445; Bor. FL. œænt. p. 181; R. rubiginosa. à. vera. Desv. Jour. Bot. 1815, P- 17 Aiguillons inégaux, la plupart robustes , comprimés à la base, crochus, quelques-uns plus grêles , presque droits. Feuilles très-glanduleuses ; folioles assez petites, ovales ou arrondies, velues en-dessous et souvent en-dessus , double- ment dentées , à dents ouvertes. Pédoncules hispides, soli- taires ou en corymbe entouré de bractées. Divisions du ca- lice pinnatifides , égalant la corolle, non persistantes. Tube du calice, glabre, ovoïde ; fleurs petites, d’un rose vif; fruits lisses, subglobuleux, petits. A. C. Ce rosier que je regarde comme le type du R. rubi- ginosa de Linné , est moins commun ici que le précédent et le suivant. On le trouve çà et Ià à Pech-David , sur le che- min de Larramet , etc. 46. R. uupezzara, Leers. Dec. F1. fr. VI, 532. R. rubiginosa. «. fallax , Desv. Journ. bot. 1813, p. R. graveolens, Gren. F1. fr. I, p. 560. Arbrisseau peu touffu, à aïguillons plus allongés que ceux du précédent. Folioles glanduleuses, visqueuses à la face in- férieure, glabres en-dessus, ovales, plus grandes que dans le R. rubiginosa. Fleurs roses réunies, de 3 à 8 en corymbes, munies de larges bractées ; pédoncules courts, glabres ou hispides ; divisions du calice persistantes, étalées ou dres- sées , fruit glabre, gros, d'abord sphérique , puis oblong à la maturité. ë Re. 20 ( 301 ) A.C. Lisière du bois de Larramet , du côté du S.-E.; etc. Obs. Les fruits de cette espèce offrent des formes différentes sui- vant l’époque de la maturation à laquelle on les observe. Au moment de la floraison, le tube du calice est ovoïde : niais immédiatement après V'anthèse , le fruit se gonfle, devient sphérique, et les lanières du calice, d’abord réfléchies, se relèvent et s'étalent. Enfin, à la ma turité, les sépales se redressent ct leur base devenue charnue, forme un étranglement qui donne au fruit une forme allongée. R. neorosa , Libert ex Bor. FI. cent. p. 181. R. rubiginosa. 8. Dec. FL. fr. VI, p. 535. Très-voisin du À. rubiginosa, il a comme lui, les ai- guillons crochus , les folioles ovales, doublement dentées ; glanduleuses, et un peu velues en-dessous. Ses fleurs sont solitaires ou en corymbes peu fournis, ses pédoncules héris- sés de soies glanduleuses. Le tube du calice est ovale al- longé, hispide ; les divisions pinnatifides , terminées en ap- pendice linéaire , sont caduques à la maturité. La corolle est petite, d’un rose vif; le fruit ovoide allongé, glanduleux. A. R. Haies le long du chemin de Larramet. 48. R. TracayPayLLia, Rau enum.: Gren. F1. fr. I, 552! R. flexuosa. Rau, ex Koch Syn. p. 252 ; Bor. FI. cent. p. 176? R canina. y. Koch loc. cit. R. spinulifolia , id. p. 252 ex Gren.? Buisson peu élevé ; à aiguillons nombreux, inégaux, droits, subulés. Stipules glanduleuses ; les supérieures dila- tées; pétioles très-glanduleux; folioles grandes, ovales ai- guës , glabres en-dessus, glanduleuses, rudes en dessous et un peu velues sur les nervures , triplement dentées en scie, les dents principales aiguës, divergentes. Fleurs solitaires, ou réunies 2 à 3 en corymbe entouré de bractées lancéo- lées. Pédoncules , tube et laniéres du calice couverts de soies Tome XVI. ( 302 ) glanduleuses presque spinescentes. Styles un peu aflongés , rapprochés, stigmates en tête hérissée. Fleurs grandes, roses, odorantes. Fruit gros, arrondi, hispide à la base, couronné par les sepales étalés, semi-persistants. Obs. Ce beau rosier, qui n'avait jamais été signalé dans nos envi- rons, est cependant assez commun au bois de Larramet et à la forêt de Bouconne : on le trouve plus rarement à Pech-David. Il aura sans doute été confondu avec le R. gallica dont il se distingue cependant très-bien, mais à côté duquel le place M. Grenier (loc. cit.). Koch, au contraire , le range parmi les variétés du R. canina, et j'ai cons- taté qu’il a, en effet, les carpelles centraux brièvement pédicellés, ce qui le place dans ma 2.me section. D’un autre côté , les glandes qui couvrent ses feuilles, ses pédoncules et ses calices Jui donnent quel- que ressemblance avec le R. rubiginosa dont il se distingue par ses aiguillons droits, par la grandeur de ses folioles et de ses fleurs : ce dernier à d’ailleurs les carpelles centraux longuement stipités. Quant au R. spinulifolia, Dematra, que M. Grenier rapporte ici, la descrip- tion qu’en donne Koch pag. 250 du Synopsis, ne convient qu’en par- tie à notre espèce : car il lui donne un calice à lanières entières et surpassant la corolle , tandis que dans notre plante les lobes du calice sont pinnatifides et bien plus courts que la corolle. 19. R. TerepiNraacea, Besser. Bor. F1. cent. n.0 689. R. tomentosa, Koch. Syn. p. 253. Arbrisseau élégant, peu élevé, à rameaux bruns, glau- ques, munis d’aiquillons droits un peu dilatés à la base; feuilles velues, couvertes de glandes nombreuses, visqueuses, exhalant, quand on les froisse, l'odeur de térébenthine. Stipules étroites à oreillettes allongées , divergentes , Les su- périeures à peine dilatées ; folioles ovales , vertes et un peu velues en-dessus, pubescentes, grisâtres et glanduleuses en- dessous, doublement dentées. Pédoncules hispides, glan- duleux, solitaires, munis à la base de bractées lancéolées. Tube du calice, ovoïde, glauque, violet, hispide ; divisions pinnatifides , terminées par un appendice linéaire, couvertes * ( 303 j de soies glanduleuses. Styles courts, laineux. Corolle assez petite, d’un rose vif. RR. Bruyères sur la lisière de la forêt de Bouconne, en- tre Mondonville et Brax. 20. R. romenrosa, Smith. Gren. F1. fr. 1, 549; Bor. F1. cent. n.° 690. R. tomentosa et Smithiana, Ser. Prodr. Il, 618. R. villosa, Noul. F1. s.-pyr. p. 220? Arbrisseau un peu plus élevé que le précédent , à ra- meaux verdätres, munis d’aiguillons allongés, droits ou à peine courbés, ceux des jeunes rameaux géminés à la base des feuilles. Stipules glanduleuses , à oreillettes courtes, di- vergentes, pétioies tomenteux, glanduleux ; folioles ellipti- ques allongées, doublement dentées, à dents glanduleuses aiguës divergentes, douces au toucher, velues sur les deux faces, grisâtres en dessous. Pédoncules allongés, hispides, solitaires ou en corymbe peu fourni, muni de bractées lancéo- lées. Tube du calice ovoide, hispide à la base ; divisions glan- duleuses , pinnatifides , linéaires au sommet. Styles allon- gés, presque glabres, stigmates en tête. Fleurs roses à péta- des non ciliés. RRR. Je ne l’ai trouvé qu’une seule fois , à Bouconne du côté de Léguevin. . Nora. — Le R. villosa, Linn., R. pomifera, Herm. Koch. Syn. p. 253, se distingue du précédent par ses pétales ciliés à l'onglet, par ses fruits plus gros, penchés à la maturité et couronnés par les divisions persistantes du calice. Je ne l’aï pas encore vu aux environs de Toulouse. M. Noulet l'indique à Clermont sur les bords de l’Ariège; mais la description de la Flore du bassin sous-pyrénéen (loc. cit.), me porte à croire que c’est le R. {omentosa que l’auteur a eu sous les yeux. : ( 304 ) XVI. OBsERVATIONS sur les changements qui s’opèrent dans le plumage des Oiseaux, soit par l'âge, ou toute autre cause ; par M. MAuDuY, correspondant. A différentes époques, les naturalistes ont observé et signalé les changements que l’âge opère dans le plumage des femelles de certaines espèces d'oiseaux, lesquelles se revêtent en vieillissant, non-seulement, de la livrée du mâle , mais encore prennent par fois quelques-uns des at- tributs caractérisant le sexe masculin, tels que ergots, caroncules , collerettes et même jusqu'à la voix. C’est particulièrement sur les oiseaux de l’ordre des Gal- licinacés surtout sur ceux des genres Coq et Faisan, que l'on a d’abord observé ces anomalies ; cependant, elles se mon- trent aussi fréquemment dans les oiseaux de quelques au- classes, comme l’a prouvé M. Isidore Geoffroy-Saint- Hilaire, dans ses Suites à Buffon, où il en cite plusieurs exemples, pris dans l’ordre des Palmipèdes ; et dernière- ment encore , M. De la Fresnaye, Revue géologique, 2."° série, p. 177, cite une femelle de Canard sauvage ( Anas boschas, Lin. ), chez laquelle il a vu s’opérer le même phénomène. A l'appui de ces observations, auxquelles on pourrait en ajouter beaucoup d’autres , je vais en citer deux qui me sont personnelles ; la première , faite aussi sur une espèce du genre Canard , et la seconde sur un oiseau de la nom- breuse tribu des Passereaux de l’ordre Granivores , de Temminck. Le premier des oiseaux, qui fait partie de la collection ornithologique départementale du cabinet d'histoire natu- (305) relle de la ville de Poitiers, est une femelle de Canard macreuse ( Ana nigra, Lin. ), acheté pour un jeune mâle sur le marché, à la fin de Décembre 1848, mais dont le sexe fut reconnu en la dépouillant pour monter. Son bec est noir et surmonté à la base du caroncule, qui dans cette espèce, caractérise les mâles; le dessus de la tête et l’occiput sont noirs , et les plumes de ce dernier peuvent se relever en huppe ; le dessous du bec, la gorge et les joues de cet oiseau sont gris, légèrement nuancés de fuligineux ; le dessus de son corps est d’un noir fuligineux foncé , et, le dessous, d’une teinte plus claire , avec toutes les plumes lisérées de gris ; les tarses et les pieds sont noirs. Le sujet de ma deuxième observation, est un Pinson fe- melle ( Fringilla cœlebs, Lin. ) qui, pris jeune et élevé en cage, se revêtit, après sept ou huit ans de captivité, du plumage parfait du mâle, avec lequel, jusqu'alors elle avait vécu en parfaite intelligence ; mais dont on fut obligé de la séparer, parce qu’elle ne pouvait plus le souffrir, ayant cessé de pondre, ce ‘qui régulièrement avait lieu tous les ans , le printemps d'avant son changement de plumage. En outre des changements qui s’opèrent par l’âge, chez les femelles de certains oiseaux , il est encore d’autres va- riations dignes d’être signalées, qui ont aussi lieu dans le plumage des oiseaux, mais dont les causes tout-à-fait diffé- rentes, sont loin d'être encore bien déterminées. Nous allons décrire ici trois individus de l'espèce du ca- nard sauvage dont la bizarrerie du plumage nous a para assez remarquable pour être mentionnée. Ces trois oiseaux font partie de notre collection départementale. La première de ces variétés est un mâle, dont le plumage est d’une blancheur parfaite , avec le bec et les tarses d'un jaune pâle et l'iris bleu très-clair. La deuxième , qui est une femelle , a aussi le bec jaunä- ( 306 tre, mais la mandibule supérieure marquée , sur le milieu, d'une tache longitudinale noire, qui s'étend des narines à l'onglet, qui est noir comme dans la variété précédente, les tarses sont jaunes; mais en remarque, sur leur face postérieure , une petite bande noire , longitudinale, qui s’é- tend du genou au talon. Le plumage , dans cet individu , est assez remarquable : gris sur la tête, l’occiput et les joues ; au bas du cou, qui est blanc, se voit un joli petit collier de plumes noires, disposées en écailles et mélangées d’une lé- gère teinte de gris roussâtre ; le dessus du corps, les gran- des couvertures des ailes, les scapulaires, les côtés, ainsi que le dessus de la queue, sont variés de noir, de gris et de roussâtre. Le reste du plumage, dans cet oiseau, dont l'iris est bleu très-pâle, est blanc. La troisième et dernière variété , est un beau mâle, re- marquable en ce qu'il diffère du canard sauvage mâle ordi- naire , par £on collier blanc beaucoup plus large et par ses nombreuses mouchetures marron, dont est parsemée sa poitrine, au-C2ssous du plastron de même couleur qui en orne la pertie supérieure , lequel sur notre individu , s’etend de chague cêté, jusque et vis-à-vis le miroir de l'œil, en forme d’une large bande. Je suis porté à croire que la variété du plumage de ces trois oiseaux, n’est que le résultat de l’accouplement du canard sauvage avec quelques races domestiques, comme cela a souvent lieu. ( 507 ) XVII. Compre-RENDU des Travaux de la Société Lin- néenne de Bordeaux , pendant l'année académique 1819-1850 , lu dans la Séance publique du 7 No- vembre 1850 ; par M. CAZENAVETTE, Secrétaire- Général. Le Compte-Rendu de vos travaux pendant l’année , dont la séance de ce jour est la clôture obligée, peut vous offrir des objets aussi nombreux, aussi utiles, aussi importants que ceux des années antérieures. Toutefois, Messieurs , n’attendez pas ici des détails cir- constanciés ; car il y a dans toutes les Sociétés scientifiques une foule de faits qui contribuent à entretenir en elles la vie et l'activité, mais qui ne sont nullement du domaine de l’analsse et que l’on ne peut rappeler dans une solennité comme celle qui nous réunit aujourd'hui, sans s’exposer à fatiguer péniblement l'attention des auditeurs. Je me bornerai donc, Messieurs , à ce qu'il y a de plus essentiel dans vos travaux , et je me contenterai de parcourir rapidement les diverses branches d’études auxquelles vous vous êtes livrés. Et d’abord, la Botanique , objet bien légitime de vos pré- férences, vous a donné cette année des résultats bien plus satisfaisants que ceux qui vous avaient été accordés depuis longtemps. Vous vous en êtes bien sincèrement réjouis , car ils sont une suite du mouvement intellectuel que vos travaux et en particulier ceux de votre vénérable Directeur, ont im- primé autour de vous, ce qui a donné de si nombreux adep- tes à la science de Flore. Les naturalistes qui se sont formés sous vos auspices, et dont vous avez plus d’une fois encou- ragé le zèle, viennent vous soumettre le fruit de leurs recher- ches comme un hommage légitime , et c'est ainsi que vous ( 308 ) avez pu inscrire sur vos catalogues et ajouter à vos herbiers, soit des plantes que l'on croyait perdues parce qu’on ne les avait pas retrouvées pendant bien des années, soit des espèces nouvelles pour la Gironde et même pour la France. Parmi ces actifs et intelligents investigateurs, vous en avez remarqué quelques-uns qui seront de votre part l'objet de récompenses que vous leur accorderez avec autant de bonheur que de justice. N'oublions pas que notre bon collè- gue, M. Lespinosse, mettant à profit pour la science , les instants trop rares que lui laissent les occupations de sa charge, à été assez heureux lui-même, pour augmenter vos richesses botaniques , en même temps qu'avec votre Prési- dent et votre Directeur, il servait de guide et de conseil à ceux qui avaient trouvé quelques espèces difficiles à déter- miner. Je ne vous parlerai pas, Messieurs, des lettres, des mémoires, des ouvrages divers , des plantes plus ou moins rares que vous avez reçues des correspondants que vous avez dans toutes les parties du monde. Ce sont là des ma- tériaux que vous apporterez en temps utile à l'édifice de la science qui vous occupe et qui ne pourront manquer d'y figurer avec honneur. Je ne vous donnerai pas non plus les noms des plantes que vous avez enrégistrées dans les procès-verbaux de vos séances ‘générales , mais je vous rappellerai que vous avez promis par votre programme, une médaille d’encourage- ment et de satisfaction, au botaniste qui aurait découvert dans le département une plante qu’on n’y aurait pas encore signalée. Quelques candidats se sont présentés pour obtenir cette récompense, et il en est à qui vous avez eu le regret de ne pouvoir l’accorder , parce que sans suspecter le moins du monde leur bonne foi, vous avez cru qu’ils devaient, en précisant soigneusement la saison et la localité, vous four- ( 309 ) nir les moyens de constater par l'exactitude de la détermina- tion , la réalité de la découverte. Vous avez donc dù ajour- ner le témoignage public de satisfaction destiné à ces bota- nistes, mais vous vous êles promis de rendre plus solen- nelle la manifestation que vous ne pouvez manquer d’en faire plus tard. Les phénomènes de la vie se présentent sous les formes les plus variées et le parasitisme, qui est un des plus cu- rieux, est très-fréquent dans la nature. Dans ces derniers temps, un homme dont le nom est cher à la science, M. Léon Dufour, votre correspondant , a signalé quelques particularités de la plus haute importance. Vous avez, Messieurs , recueilli sur ce sujet quelques observations fort intéressantes et vous avez reconnu, entre autres choses, d’une manière positive , que ce que les anciens auteurs dési- gnaient sous le nom de guépes végétales, est l'effet d’une petite cryptogame greffée sur un insecte auquel elle em- prunte tous les matériaux nécessaires à sa frêle existence. Avant de finir ce que nous avons à dire sur la Botanique, n'oublions pas une plante fort rare et fort singulière par sa forme , FAgave à fleurs géminées, dont la floraison qui a eu lieu au Jardin de la ville, a fourni à M. Laterrade fils , le sujet d'un mémoire fort intéressant que vous avez inséré dans vos ACTes. Rappelons aussi un fait qui vous a été signalé et qui, bien qu’il soit en quelque sorte la reproduction de ce qu'avait déjà expérimenté votre honorable président, n’en est pas nos digne de fixer l'attention, puisqu'il prouve que des graines placées dans certaines conditions, conservent indé- finiment leur propriété germinative. Îl s’agit, en effet, de grains de blé qui ont été trouvés dans une momie égyptien- ne , et qui ayant été mis en terre, ont donné de nouveaux fruits pendant trois générations dont la dernière vous a été ( 510 ) communiquée. M. Ch. Des Moulins avait aussi fait germer des graines de l’Héliotrope d'Europe et de deux autres plan- tes trouvées dans un tombeau remontant aux premières années de l'ère chrétienne, et il avait recueilli des fruits qui avaient donné naissance à de nouvelles plantes. Vous avez pu tirer de ces faits une règle à suivre pour la conser- vation des graines destinées à l’ensemencement , et l'agri- culteur, l'horticulteur surtout, tireront un parti bien avan- tageux de ces observations et des conséquences que vous êtes parvenus à en déduire. La Zoologie vous a aussi payé son tribut ardidaire! non dans les espèces appartenant aux ordres d'animaux les plus élevés, mais dans les espèces si nombreuses que leur peti- tesse ou leur manière de vivre seinble vouloir dérober à nos regards. Les recherches de votre collègue, M. Laporte aîné, celles du D." Burguet, votre vice-président , celles enfin de plusieurs amateurs qui sont étrangers à votre Société, mais qui sont bien aises ss lui Ne les fruits de leurs excursions, VO t dans nos contrées, d’une foule d'animaux soit articulés, soit issertibr dé que l’on avait cru jusqu'ici appartenir, les uns, à des climats beau- coup plus chauds, les autres à la zône glaciale du Nord. Ces faits accumulés démontrent que, malgré les travaux constants des hommes les plus savants, la géographie z00- logique est encore à son berceau. Nous ne saurions oublier, Messieurs, à propos de la Zoo- logie, que dans le courant de l'été dernier, vous avez été appelés à examiner deux collections d'histoire naturelle dont l’une vous était complètement inconnue quant à sa forme et à son essence , et dont l’autre qui est toujours à votre por- tée, n’en mérite pas moins une mention particulière. La première de ces collections est formée des œufs ap- partenant aux diverses espèces d'oiseaux d'Europe. Elle est HA": cuve à eng bi Summit mm (514) le fruit de recherches faites par M. Meyran, officier au 54.+ de ligne, dernièrement en garnison à Bordeaux. Cet habile ornithologiste a fait, sur les mœurs et les habitudes des oi- seaux, des observations qu'il doit vous communiquer et qui ne pourront manquer de jeter un nouveau jour sur cette branche de l’histoire naturelle. En attendant, vous avez admiré l’habileté avec laquelle M. Meyran a disposé sa col lection et vous l'avez félicité du bonheur qu'il a eu de trou- ver, dans des conditions convenables, des espèces excessi- vement rares. Lorsque ensuite vous avez passé à l'examen plus attentif de ces produits de la nature, vous avez vu que les formes , les couleurs , les ornements n’offraient aucun caractère propre à distinguer les genres des oiseaux aux- quels ils appartiennent, nouvelle preuve que ces genres sont purement artificiels et que les espèces seules sont vrai- ment naturelles. L'autre collection sur laquelle vous avez été appelés à porter votre observation et votre examen, est celle du Cabinet de la ville. Là, Messieurs, vous avez pu vous con- vaincre des résultats brillants que peut obtenir avec de fai- bles ressources pécuniaires, un homme dévoué et toujours occupé du désir de satisfaire aux exigences de ses fonctions. Le directeur de ce Cabinet l'a, en effet, augmenté d’une manière étonnante , et ceux qui en ont parcouru les salles avant que la direction lni en fut confiée, ne le reconnaissent plus aujourd'hui. Nous ne vous dirons pas tout ce qui nous y a paru digne d'éloge, aimant mieux engager ceux qui ne connaissent pas ce Cabinet, d'aller j jouir e en le ns du plaisir qu’il nous a causé à nous-mêmes. Vous étiez sur le point d'insérer dans vos FR un mémoire important sur la zoologie de la Gironde, mais l'auteur n’a pu mettre la dernière main à cet ouvrage , fruit de longues et savantes recherches , et vous avez été forcés, ( 312 ) à votre grand regret, d'ajourner une publication qui, s’il faut en juger par les nombreux fragments que vous connais- siez déjà, ne pourra qu'obtenir l'approbation des natura- listes. La Géologie vous a fourni plusieurs faits intéressants à constater, mais nous nous contenterons de vous en rappeler ‘deux qui nous paraissent surtout importants ; l'un, parce qu’il se rapporte à notre localité, et l’autre parce qu'il établit un fait nouveau pour la science. — Vous connaissez tous, Messieurs, les faluns de Léognan et vous savez combien sont variées et bien conservées les espè- ces fossiles qu'ils renferment. Les fouilles multipliées qui ont été faites dans ces terrains et depuis un grand nombre d'années , semblaient faire croire qu’il n’y avait plus rien de nouveau à en attendre ; mais un fait qui s’est passé l’an dernier nous donne lieu d’espérer que ces faluns sont loin d’avoir donné le dernier mot de leurs richesses conchyliolo- giques. Un jeune amateur d'histoire naturelle, M. Brochon fils, y a trouvé une magnifique coquille appartenant au genre Pyrule ; il en a donné la description dans un mémoire remarquable et il l’a dédiée à notre honorable Président sous le nom de Pyrule de Des Moulins. Cette découverte, Messieurs, doit ranimer le zèle un peu refroidi de ceux qui se livrent à la recherche des fossiles dans notre département , car qui peut savoir ce qui se trouve encore de nouveau et d’intéressant dans ce dépôt, un des plus riches de France. Malheureusement , les légitimes en- _vahissements de l’agriculture sur ces terrains, en rendent chaque iour l'exploitation de plus en plus difficile, et malgré notre vif désir de voir s’augmenter les ressources alimen- taires de notre pays, nous ne pouvons nous empêcher de regretter que ces dépôts si curieux n’appartiennent pas ex- clusivement à la géologie. ( 313 ) Le second fait que je dois vous signaler, est celui de brèches à ossements fossiles découvertes dernièrement dans les Pyrénées où des dépôts de ce genre n’avaient pas encore été rencontrés. C’est votre correspondant, M. Philippe de Bagnères, qui a eu le bonheur de les découvrir , et il y à constaté l'existence de plusieurs espèces de mammifères , parmi lesquelles figurent en première ligne l’Aurochs et le Renne. L’Aurochs appartient à cette espèce de Buffles gigantes- ques qui ont fui devant la civilisation du Midi de l’Europe et le défrichement des forêts de la Gaule. Après s’être réfu- giés dans les marais boisés de l'Allemagne et de la Suède, ils ont fini par disparaître, et l’on n’en parle plus que dans des auteurs déjà bien anciens. Le Renne n’a jamais été connu que dans les régions les plus rapprochées du pôle Nord, en sorte que l'existence simultanée de ces deux espèces sur le penchant des Pyré- nées, n’est pas un des problèmes les moins embarrassants de l’histoire de la terre. Parmi les divers objets de vos études, l’agriculture est loin d’avoir eu le dernier rang , et, quoique vous ne vous en occupiez que relativement aux applications qu’elle peut faire des diverses branches de l’histoire naturelle ; toujours est-il que vous avez suivi avec sollicitude sa marche et ses pro- grès dans le département. Nous devons même dire ici que vous avez été merveilleusement secondés par les observa- tions qu'a faites, en parcourant les divers arrondissements de la Gironde, M. Petit-Lafitte, votre Trésorier et profes- seur du Cours d'Agriculture. Il vous a signalé tous les faits qu'il croyait propres à vous intéresser et vous avez cherché à en tirer des conséquences utiles à cette science la plus importante de l’ordre social ; et disons-le aussi, la moins (514 ) connue malgré tant d'ouvrages qu’on publie sur elle, mais où l’empirisme prend trop souvent la place du savoir et de l'expérience. Dans le mois d’Aoùût dernier , vous avez été invités à nom- mer une Commission pour examiner un système de ruches à miel inventé par M. Debauvois, d'Angers, système qui a valu à son auteur une brillante récompense de la part de la Société Philomathique de notre ville. Vous vous êtes rendus avec d’autant plus d’empressement à cette invitation qu'il s'agissait, non-seulement de ruches nouvelles et d’une com- modité incontestable , mais encore d’un fait physiologique sur lequel vous avez publié des mémoires rédigés par feu M. l'abbé Espagnet , curé de Saint-André et membre hono- raire de votre Société. Ces mémoires ont eu un grand re- tentissement dans le monde savant par la nouveauté des observations qu'avait faites leur auteur , et vous avez eu la satisfaction de voir que dans ce qui était exposé à vos yeux et expliqué par M. Debauvois , rien ne paraissait infirmer , malgré des assertions contraires , les faits constatés par M. l'abbé Espagnet. Votre Directeur vous a communiqué régulièrement les résultats de ses observations météorologiques , et vous a fourni ainsi de nouveaux matériaux pour une science qui deviendra, peut-être un jour, aussi sûre que celles qui offrent le plus de certitude dans leurs principes. Je pourrais vous parler aussi, Messieurs, des démarches que vous avez faites auprès de l’un des plus honorables né- gociants de Bordeaux , d’après les renseignements que vous a fournis sur divers produits de la Chine, M. le chevalier de Paravey, l’un des plus savants sinologues de l'Europe. Je pourrais dire que vous avez espéré doter notre-port d’une nouvelle branche de commerce, mais je eraindrais qu’on ne nous accusât de vouloir empiéter sur des privilèges qui sont (315 ) absolus et exclusifs ; et cependant il n’est encore question en ceci que d’une application heureuse de l’histoire natu- relle au commerce et à l’industrie. L'avenir nous apprendra si vous aurez pu acquérir de nouveaux droits à la reconnais- sance de la cité, et à la bienveillance de ses administrateurs. Vos relations avec les Sociétés savantes de la France et de l'étranger se sont toujours maintenues d’une manière bien propre à vous faire éprouver une douce jouissance. Vous avez même vu cette année ces relations s’augmenter au-dehors par la demande d'échange de vos publications avec les leurs que vous ont adressée, la Société géologique de Londres, les Sociétés d'histoire naturelle de Stockolm et de Philadelphie. A l'intérieur, des relations plus intimes se sont établies entre vous et l’Institut des Provinces de France qui vous a offert son concours pour la propagation de vos Actes, dont il apprécie vivement l'importance et la nouveauté. Votre Compagnie s’est accrue , cette année, de nouveaux correspondants désireux de se lier plus étroitement avec vous pour mieux connaître vos travaux et vous communi- quer ceux dont ils s'occupent. Vous avez donc délivré des diplômes d’association à MM. Philippe, à Bagnères, Turman, à Porentray, en Suisse, Arrondeau , à Toulouse, Irat, à Condom, et dans votre première séance générale, vous aurez encore à statuer sur d’autres demandes qui vous ont été adressées. Vous êtes assurés de voir ainsi les natu- ralistes de plusieurs contrées éloignées les unes des autres, et de produits si différents , venir vous apporter les résultats de leurs études, que vous propagerez au loin par le moyen de vos publications. Malgré le grand nombre de vos correspondants, vous n’avez eu qu’une perte à déplorer, mais elle a été grande et vivement sentie. C’est celle du savant Raffeneau-Delille, ( 316) professeur de Botanique , et directeur du Jardin des Plan- tes de Montpellier. Il était l'auteur justement estimé de la Flore Égyptienne , et il se trouvait l’un des derniers mem- bres survivants du célèbre Institut d'Égypte , d’où sont sortis tant d'hommes si distingués dans les sciences. Nous serions bien ingrats, Messieurs, si malgré la lon- gueur de ce résumé, nous quittions la parole sans exprimer publiquement la reconnaissance dont vous êtes animés pour les autorités de la ville, et, en particulier, pour M. le Préfet et le Conseil Général, qui vous ont donné dernièrement une preuve bien flatteuse de la sympathie qu'ils éprouvent pour vos travaux. Vous avez puisé dans ces témoignages de bienveillance un nouveau zèle pour l'avenir, et vous vous êtes bien promis de redoubler d'efforts pour mériter} de plus en plus l'appui favorable qui vous a été accordé. (317) TABLE DES MATIÈRES CONTENUES DANS LE XVI" voLumEe. > ZOOLOGIE. ; Pages. Sur la circulation dans les insectes; par M. Léon Durour , doc- teur-médecin , correspondant de linstitut, etc. Faune entomologique, ou Histoire Létustite des bte à qui se trouvent dans le département de la Gironde; par MM. J. L. Laporre aîné et Ernest Larorre fils ({ Suite). . ..... 65 et 269 Extrait HR Lettre de M. CazeNAvVETTE , secrétaire-général de la Société , à M. LaTerRADE père , directeur de ladite Société. 115 Note sur une AT He pa de Léognan (P. Moulinsii, Nob. ); FL BROCHONS sit ans wres:d. 7. s M7 e sur la Mésdutoù des Guêpes communes, dome aris, Lin.; par M. A. Trémeau DE ROCHEBRUNE. . . . ., 212 vu Observations sur l’accouplement des Lombrics terrestres; par Os es ee se RE à es + PT een ee Mémoire sur le ie de l'Odorat dans les articulés; par M. Évouaro Pernis, chevalier de la Légion-d'Honneur , membre de plusieurs As RIRE ec 7 Quelques mots sur l'organe de l'Odorat et sur il de l'Ouie dans les Insectes; par M. Léon Durour, membre correspon- dant... ces... LINE. Pace Note sur la collection d'OEufs, pa M. ri : iéiseunt d'armement aù 74.0 Tigne 5.5... OCR 266 Observations sur les changements qui s’opèrent dans le plumage des Oiseaux , soit par l’âge , ou toute autre cause; par M. Maupuy , correspondant. . . . . .. .......... : 304 BOTANIQUE. De la Flore du Centre, de M. Boreau; discours prononcé par M. Cuances Des/Mouzis , président , à la séance de la 32. Fête Linnéenne ( 28 Juin 1849 ). , .... ., .... . . . . . . .. 53 (318) Feuilles du Nymphæa et du Scirpus lacustris. Observations sur l’Agave geminiflora (Ker..) qui a Aéoet pour la première fois à Bordeaux , au Jardin Botanique de cette ville, por M. Cu. LATERNADES SN IR ES JDN te se ge ea la Flore de she a monographie du genre Rosa; A. E. T. ArronD MINÉRALOGIE, De l’origine des Silex de la Craie ; par M. MARCEL DE SERRES, Pages, 63 Professeur à la Faculté des Sciences de Montpellier , corres- 1 pondant . as à D'NRCOORIRMR e S e dv uete fois, d'amender les terres en généra l,et en D 2x celle Compte-Rendu des Travaux de la Société Linnéenne pendant l’année 1849-50 , par M. Cazena verre ; Secrétaire-général.. . 307 MÉLANGES. S. > Trente-deuxième Jet rt he. 5 DAME SE de Discours de M. J.- TERRADE, directeurs 55%... mn _ Queson mises au Concours pour et 1850 et suiva en ne e de à Saint_-Charl nr ol Lu (Année 1 +8 Le Discours Fonret e pr M. Cu. OULISS , Pons Aperçu des Travaux de la Société Linnéenne Geéont | académique 1848-49 ; par M. CAZENAVETTE, srétairesénérl Tableau de la 32me Fête Linnéenne et Observations sur quelque Plantes exotiques , par M. Larernane , directeur de la Société. Foire de Lubon ; par M. Aug. Perir-LariTTE Tren oisi Ca eo © en di Et cbr. $ . NUE we ec er ANT OrE Sn bot eu se 0 %e ©, 07 FSU ER ir Séance publique d'hiver. ( Année 1850 ). ave bird 6e: te MER Discours d'ouverture , par M. Cu. Des Mouuss, os RER “RE nrs le-hinméqune. par M. Larerrane , direc- teur D... - L'Entre-déur-Mers par M. ps ÉLaiiiee, trésori Pruis Excursion Msicole e et “Rsiique dans l'Anjou ; par w. Caaes LATE... 0 Programme des Questions mises au Concours pour FARRse rase et suivantes CR CE TT TR en TU, BORDEAUX. IMPRIMERIE DE TH. LAFARGUE, LIBRAIRE. 25 26 37 51 57 MÉLANGES. TRENTE-DEUXIÈME FÊTE LINNÉENNE. C’est au milieu des ruines de La Sauve et entourée de fleurs qu’elle venait de cueillir, que la Société Linnéenne, a tenu , le Jeudi 28 Juin dernier , sa trente-deuxième Séance . publique d’Été. A sept heures du matin, la Société est partie du bourg de La Bastide, rive droite de la Garonne, pour se rendre à Créon , d’où , après quelques instants de repos, les voitures se sont dirigées sur la Sauve. L’excursion a été faite principalement dans cette localité. Tout étant disposé pour la séance , le thermomètre mar- quant à midi, 29 degrés , le Directeur de la Société a occupé le fauteuil, Il avait à sa droite M. l'abbé Champion, direc- | teur du collège , et le docteur M. Æ. Burguet, vice-prési- dent ; à sa gauche, le président M. Ch. Des Mou ins, et le secrétaire du Conseil, M. le docteur Lafargue. Autour du bureau sur lequel s’élevait le portrait de Linné , étaient MM. ge Kercado, Dumoulin, Petit-Lafitte, Ch. Laterrade, jar, lilulaires de la Société et M. Dordet, pharmesien fils d’un ancien correspondant. Un auditoire ra aussi nombreux en pareille circonstance et dans lequel < on distin- | guait plusieurs dames , assistait à celte solennité. | Un charmant morceau d'harmonie a élé exécuté par les | élèvés du collège. i ES (2 } Immédiatement après, le Directeur de la Société, M. La- terrade , a ouvert la séance par un discours. ( Voyez p. 4 ). Lettres de MM. Cazenavette, secrètaire-général; De La- colonge, correspondant à Loupes (canton de Créon) et La- barrère, à Pau, qui s’excusent de ne pouvoir se rendre à la séance. M. Labarrère annonce une nouvelle espèce , le Sol- danella villosa (1), découverte par M. Darracq, pharma- cien, correspondant à Saint-Esprit, près de Bayonne. Le président, M. Ch. Des Moulins , présente avec autant de clarté que d’érudition l’analyse de la nouvelle Flore du centre de la France, par M. Boreau (2). M. le docteur Lafargue , secrétaire du Conseil , a traité de l'importance qu’offrirait la recherche du cowpox dans les localités du département. M. Petit-Lafitte, trésorier , s’est livré à des réflexions sur les divers amendements utiles aux terres de Ja Gironde (3). Le vice-président, M. le D." Æ. Burguet a lu une notice sur les avantages qu’offrent les mondes en histoire na- turelle. +: Sur l'invitation du Directeur , M. Ch. jé Montine; a fait un rapport verbal sur la partie botanique et M. le docteur H. Burguet, sur la partie entomologique de l’excursion. Eafñia le Directeur a adressé des remerciments à M. l’abbé Champion pour la bienveillante hospitalité qu’il venait d’ac- corder à la Société, et aux élèves de l’établissement qui ont fait entendre de nouveau leur musique harmonieuse. (1) Le Soldanella villosa, Danr., se trouve sur une montagne peu élevée, dite Pas de Rolland, près Cambo, dans les Pyrénées basques. Cette Soldanelle, ajoute M. Labarrère, ressemble beau- coup à celle des Alpes, mais elle est plus re dans toutes ses parties et velue. è (2) Voir p. 53 du sé volume des Actes. (3) Voir p. 43, id (3) Peu après, les veitures sont parties pour revenir à Créon, mais les élèves de l’école de Botanique invités à la fête, comme ayant obtenu l’année dernière les premiers prix de physiologie végétale et de description, MM. Ramey (Eugène), Lafont et H. Brochon , et un lauréat des années précédentes, M. Eugène Panel, interne à l’Hôtel-Dieu Saint-André , ont demandé, ce qui leur a èté accordé par le Directeur, de faire le trajet à pied , afin de se livrer à une nouvelle excursion. Le banquet a eu lieu à Créon. Quelques recherches ont encore été faites dans cette localité, et vers six heures, la plupart des membres sont partis sous la direction de M. Ch. Des Moulins, pour faire une excursion dont le principal ob- * jet était l'examen des argiles de Sadirac, A sept heures, le Directeur et les membres qui étaient restés avec lui sont allés rejoindre leurs collègues qui termi- naient Ja dernière excursion de la journée , et la Société est rentrée à Bordeaux à dix heures et demie du soir. Parmi les plantes recueillies dans les excursions, nous nous bornerons à citer. l’œillet, Dianthus cargophullns. à fleurs, le Kæleria phleoïdes, le Lolium arvense, Matricaria chamomilla, seulement gares dans le Baza- dais par. la Flore, et l’Âyssopus offaina is, commun sur Îles murailles. À Les principaux insectes trouvès dans la journée sont : Lep- tura hastata, scarata et tomentosa, sema asparagi, Tri- codes alveolarius, Apate capucina , Saperda virens el sca- laris, OEdemera ruficollis et ri Telephories tree lanurus, Etater hemorroidalis, L ornatus , Fe angustatus, Brachinus re Melolontha solstitialté"e et rufescens ( femelle) , Perse biguttatus , ontophaqus schreberi, Lucanus parallelipipedes, Eumenis pyriformis, Pentatomus pe (4) DISCOURS prononcé à La Sauve (Gironde), le 28 Juin 1849, jour de la Trente-deuxième Fête Linnéenne, par M. LarerrAne , membre des Académies des Sciences de Bordeaux, de Médecine de Madrid, professeur directeur du Jardin des plantes de la Ville, directeur de la Société Linnéenne , etc. Messieurs, Au milieu des évènements qui se succèdent depuis quel - ques années, avec tant de rapidité, autour de nous, il y a cependant des choses qui restent stables ; parce que elles ne dépendent ni de la politique de quelques hommes, ni de la volonté si souvent aveugle des masses. Telies sont les insti- tulions scientifiques, et telle est par conséquent la solennitè qui nous rassemble en ce jour. -Le même esprit qui animait ses fondateurs, en 1818 , sous le saule de la plaine d’Arlac, préside aujourd’hui à cette réunion qui, comme toutes celles _qui l’ont précédées, n’a qu’un but et qu’un objet, la cul- ‘ture, les progrès, la propagation des sciences naturelles. Toutefois lorsque la patrie souffre , les institutions les plus pacifiques , ces réunions qui sont comme autant de pe- tites patries au sein de la mère commune, souffrent aussi dans l’ordre et surtout dans le nombre de leurs travaux. Voilà pourquoi, Messieurs, l’année dernière, après les commotions politiques qu’éprouvèrent la France et l’Europe entière, notre solennité fut remplacée par une simple ex- cursion , et voilà pourquoi aussi sans doute nos relations ex- térieures ont été moins étendues. Je serai donc nécessaire- ment bref dans le compte que je dois vous en rendre. Votre arrêté du 5 Décembre 1848, ayant pour objet de donner une plus grande extension à la Fête Linnéenne et aux travaux qui en sont la conséquence , a êté publié en Fé- 5) vrier dernier et expédié à ous ceux de vos correspondants qui peuvent être en mesure de s'y conformer. Peu nous ont répondu encore, Cependant d’après l’élat de notre corres- pondance au 25 de ce mois, nous avons l'espoir que la fête est célébrée en ce moment à Loupes, à La Teste, à Bazas, dans la Dordogne , dans l’Aude , dans plusieurs localités des Basses-Pyrénées et à Sant-Yago de Cuba. Nous ne pouvons vous parler aujourd’hui que des excur- sions qui ont eu lieu cette année , dans la Dordogne et dans la Gironde. Le premier de ces départements a été exploré de nouveau, par notre savant président, par notre corres- pondant M. de Dives et autres zélés botanistes. Nous ne vous parlons pas des résultats; ils ne peuvent être que précieux pour la science, et ils sont consignés dans les deux cahiers des Actes qui viennent de paraître, 5. et 6.me livraisons du tome XV , presque entièrement remplies par les addi- tions au premier Fascicule (publié en Mars 1846 ) du Supplé- ment au Catalogue raisonné des plantes phanérogames de la Dordogne, par M. Ch. Des Moulins. Dans la Gironde, le jeune Comme que vous ayez couronnè dans votre séance publique d'Hiver , a trouvé en Avril, en- tre Ambès et Montferrant , le Leucoium æstivum. 1 l'y avait vu, me dit-il, il y avait déjà quelques années. Je l’engageais à s’assurer du fait, et aujourd’hui nous pouvons affirmer que la plante est très-commune et assurément spontanée dans la localité précitée. Le jeune Lafont , élève de l’école, l’un des trois que leurs succés ont fait appeler à cette fêle, nous a rapporté de Madère , il n’y a que peu de jours , l'Otrhis di- varicata. Notre honorable collègue, M. Lespinasse a trouvé dans les marais de la Chartreuse, le Polygonum mite. Quelques plantes rares de notre Flore ont été observées, ce qui est heureux, dans de nouvelles localités, savoir : le Doronicum pardalianches, sur les confins d’Eyzines et de 6) Blanquefort et le Colchicum autumnale, à Bègles par le jeune Comme , que nous avons déjà cité ; le Cyclamen eu- ropæum , à Saint-Laurent dans le Médoc, par des amateurs; V'Helianthemum umbellatum, à Pessac, par M. Lespinasse, et le Polypogon monspeliense, à Facture, par M. Petit- Lafitte. Dans la séance du 2 Mai, de mon cours de Botanique, je démontrai un Polyporus juglandis qui avait près d’un mè- tre de circonférence et dont la surface supérieure était agréa- blement mouchetée de petites écailles d’un fauve rembrani. M. Nathaniel Johnston avait eu la bonté de m'envoyer cette belle fongosité de son bien de Lescure, où elle avait été cueil- lie sur un peuplier de la Caroline. Dans la séance du 12, je démontrai un champignon assu- rément bien commun, trop commun dans nos environs, l’Agaricus vernus, dans lequel je reconnus le mets funeste qui venait d’occasionner l’empoisonnement de plusieurs per- sonnes dans la commune de Caudéran. Si nous ne vous disons rien des excursions faites à Gujan et à La Teste, c’est que nous attendons très-prochainement le Supplément au catalogue des plantes de La Teste par notre correspondant M. Chantelat. Nous ne vous entreliendrons aujourd’hui que d’une plante, d’une seule plante exotique, mais qui mérite bien de fixer noire attention. Il s’agit de cet arbre monocolylé dont la moëlle abondante, fournit la substance tout à la fois nutri- tive et légère que l’on désigne sous le nom de Sagou, du Sa- gouer ou Sagoulier, Sagus raphia de Lamarck. Je reçus le 18 Novembre dernier , une lettre datée du 26 Août, de Batavia, par laquelle un amateur dont on ne saurait trop loner le zèle, M. J.-A, Chaulan, m’annonçait qu'ayant appris que le Jardin de Bordeaux manquait de l’ar- bre dit Sagoe ou Sagou des forêts, il désirait remplir ce + # | (27 vide, en m’expédiant un arbre de cette espèce sur le navire l’Archibald, parti pour notre port (1). Le 9 Décembre suivant, M. Chaîne, négociant, membre de la Société d'Agriculture, consignalaire de l’Archibald et qui a largement contribué au cadeau fait à la ville, m’en- voya cet arbre. Il fut d’abord déposé dans la salle des démonstrations, puis rencaissé et placé le 15, dans la serre chaude , n.° 5. Dès que les premières chaleurs se sont fait sentir, la caisse a été entourée d’une masse de fumier , remplacée une quin- zaine de jours après par une masse de tannée. Bien que, grâces à la surveillance de M. Chaulan, cet arbre eût été parfaitement emballé, bien qu’il n’eùt pas souffert dans la traversée, et que pendant l'opération du rencaissage on se fùt assuré du bon èlat des racines, néan- moins et malgré les soins bien entendus que lui a prodigués _le jardinier de l’établissement , M. P. Comme, ce n’est pas sans une joie mêlée d’un peu d’agréable surprise que nous l'avons vu dans les premiers jours de Juin , donner signe de vie par une pousse qui a aujourd’hui plus d’un dèécimètre de . longueur. . Ce beau Sagouier dont la lige, qui s’élève en colonne , a plus de deux mètres sur une circonférence d’un mètre sept centimètres, est au Jardin de Bordeaux et pour la France, le digne représentant de la végétation grandiose de l'Asie. - (1) Là, ne s’est pas borné le zèle de M. Chaulan. Il a expédié par l'intermédiaire du Jardin de Bordeaux au Muséum d'histoire naturelle, six Sagoutiers de moindres dimensions qui sont arrivés dans notre port, sur le navire le Cardinal de Cheverus. Débar- qués, le 2 Mai , nous les avons trouvés dans un état de décompo- sition tel, qu'après avoir consulté à ce sujet MM. Brongniart et de Jussieu , nous avons choisi les deux qui étaient les moins alté- rés, pour les envoyer au Muséum, comme pièce d'étude. 2 SOCIÉTÉ LINNÉENNE DE BORDEAUX. PROGRAMME QUESTIONS MISES AU CONCOURS POUR L'ANNÉE 1890 ET SUIVANTES. = hd) ES : Æ NE Es dr du r > ss? AVIS. D ®—————) Æ— La SOCIÉTÉ LINNÉENNE de Bordeaux , invite toutes les personnes qui pourront avoir ce Programme à leur dis- position, à vouloir bien lui donner toute la publicité possible. Elle les invite particulièrement à vouloir bien le communiquer aux naturalistes et agronomes s'OCCu— pant des matières dont il y est fait mention. Bien que presque toutes les questions proposées , puis- sent devenir l'objet des méditations des naturalistes et ugronomes de tous les pays, et plus particulièrement de ceux d’entr'eux qui habitent, soit la Gironde, soit quel- qu'autre département du bassin de la Garonne ; néan- moins , la Société recommande d'une manière toute spé- ciale, à ces derniers, les questions B et C, de la deu æième partie : Histoire naturelle appliquée. … Société Linnéenne de Bordeaux. PROGRAMME des QUESTIONS UISRS AU CONCOURS Pour l'Année 1850 et suivantes. ————0 KB) © — La Société Linnéenne de Bordeaux, fondée en 1818 et sanctionnée par Ordonnance royale en date du 15 Juin 1828, s'occupe d'histoire naturelle : Géologie, Zoologie, Botani- que, etc., etc... , et des applications de ces sciences aux Arts utiles et à l'Agriculture. Les moyens de publicité de la Société sont ses ACTES , qu’elle échange avec les autres Compagnies savantes de la France et de l’Étranger et qui sont également fournis , à titre d'abonnement, aux savants et aux autres personnes s’occupant des matières qui viennent d’être indiquées (1). Chaque année , la Société Linnéenne met au concours un (1) La collection complète des Actes de la Société Linnéenne de Bordeaux , compte aujourd’hui quinze volumes. Cette collec- tion est du prix de 100 fr. L'abonnement annuel lau volume en publication est au prix de 10 fr. Les livraisons sont adressées franco , par la poste. On souscrit , à Paris : chez Baillière, libraire ; à Bordeaux, chez Ch. Lawalle, libraire, et Th. Lafargue, imprimeur de la Société. (12) certain nombre de questions, en rapport avec le mode de ses travaux, et choisis parmi celles dont la solution lui semblerait plus capable d’intéresser tout à la fois, et la science et la localité dans laquelle se trouve établi son siège principal. En outre, elle reçoit avec empressement, examine avec soin, et récompense selon son mérite, toute communica- tion qui lui est faite dans l’une ou plusieurs des branches de sa spécialité ou toute découverte nouvelle en histoire naturelle et ses applications; toute indication susceptible de conduire en ce genre à quelque heureux résultat. Les prix accordés par la Société, en séance solennelle et publique , sont : 1.0 Des médailles d’or , d'argent et de bronze ; 2.0 Le volume de ses Actes en cours de publication (1). 3.° Des mentions honorables. #” à — PREMIÈRE PARTIE. HISTOIRE NATURELLE PROPREMENT DITE. $ I. — GÉOLOGIE. FORMATION DES LANDES, elc... Des faits récemment constatés, par les recherches géolo- giques , étant de nature à modifier peut-être les idées ad- mises en ce moment sur plusieurs formations particulières (1) Cette récompense est plus ordinairement le prix des com- munications diverses qui peuvent être faites à la Société, en dehors des questions qu’elle met au concours, US D —"— (15): au bassin de la Garonne , la Société Linnéenne appelle d’une manière toute particulière l'attention des hommes s’occu- pant de ces sortes de matières, sur les trois points sui- vants rs » Quelles ont été les causes et les phénomènes divers des » formations géologiques de la plaine des landes ; de l’agré- » gat qui lui sert de sous-sol et que l’on désigne dans le » pays sous le nom de /appa, alios, etc... , et des cailloux » roulés dispersés depuis les Pyrénées jusqu’à la mer ? » Prix, à décerner jusqu’en 1851 : Médaille d'argent, grand module. : $ IL. — Z0OOLOGIE. Unio DESHAYESIH. Parmi les espèces d’Unio qui vivent dans les eaux de notre département la plus remarquable de toutes, sans contredit, est celle qui a été décrite par M. Michaud , sous le nom d’Unio de Deshayes (UV. Deshaysi) et dont M. Ch. Des Moulins a recu quelques exemplaires provenant des étangs de nos landes et plus particulièrement de celui de Cazeaux. Depuis cette époque, l'Unio de Deshayes n’a plus été rencontré. Cette espèce se distingue de ses congénères par son allon- gement et le peu d'épaisseur de sa coquille. Elle est à l’exté- rieur d’une couleur jaune verdâtre, et à l’intérieur elle pré- sente une belle nacre d’un blanc bleuâtre. « La Société Linnéenne récompensera , par une médaille » de bronze, les soins de celui qui lui fera parvenir, en » 4850, une certaine quantité de ces mollusques , en lui » faisant connaitre en même temps, les lieux , l'époque où » il l'aura rencontré ainsi que toutes les observations capa- » bles de concourir à son histoire naturelle ». (14) ) $ IE — BOTANIQUE. A. CATALOGUES D'ARRONDISSEMENTS OU DE CANTONS. Indépendamment de la Flore Bordelaise, et de la . Gironde, par M. Laterrade, nous avons le catalogue des plantes de la Teste, publié par M. Chantelat, et le catal - gue des plantes phanérogames de l’arrondissement de Bazas, par M. le D.r Ardusset. « La Société désirant que l’on s’occupe aujourd’hui des » parties du département qui n’ont pas été explorées avec » autant de détails, sous le rapport de la Botanique, de- » mande le catalogue raisonné des plantes de l’un des quatre » arrondissements de Lesparre, de Blaye, de Libourne et » de La Réole ; ou seulement d’un ou plusieurs cantons de » Ces arrondissements ». Prix, à décerner jusqu’à 1851 { selon l'étendue du tra- vail) Hédaille d'argent ou de bronze. B. ÉTUDES CcARPOLOGIQUES. Les travaux carpologiques du célèbre Gœrtner ont puis- : samment servi l'application de la méthode naturelle en four- nissant des caractères certains pour la délimitation des genres. Des botanistes éminents ont commencé, depuis quelques années, à poursuivre cette étude jusques dans les graines ou semences proprement dites , afin d'y trouver des caractères solides pour la distinction des espèces. Le succès répond à leur attente, ainsi qu’on peut s’en convaincre par les progrès qu'a faits, grâce à eux , l'étude des espèces dans les genres Euphorbia, Vicia, Lathyrus, Epilobium, etc. La Société Linnéenne , désirant favoriser cette utile ten- dance , distribuera des Médailles d'argent , petit et grand (45) modules, dans ses séances publiques de 1851 et 1852, aux auteurs qui lui présenteront d'une manière satisfaisante, la description spécifique et comparative des GRAINES MURES des phanérogames qui croissent spontanément ou qui sont communément cultivées comme plantes utiles où même d'agrément, dans une circonscription déterminée ; et ce, aux conditions suivantes : 1.0 Si le travail présenté embrasse toutes les phanéroga- mes , il sera admis au concours, quand bien même il n'y serait question que des plantes d’une seule commune. 2. Si ce travail embrasse seulement un certain nombre de familles d’une Flore locale quelconque, il faudra que le nombre des espèces de graines décrites s’élève au moins de cent à cent cinquante , et que les familles qu’il embrassera , soient troitées complètement ( quant à la circonscription de cette Flore ). La Société entend que cette étude soit portée sur les familles nombreuses en genres et en espèces (grami- nées, Cypéracées, Labiées, Cariophyllées, Crucifères, Com- posées , etc. ). 3.0 Si ce travail embrassait /outes les plantes phanéro- games d’un département, ou même d’un arrondissement sous-préfectoral, la médaille pourrait être en or. C. STATION MINÉRALOGIQUE DES PLANTES. La Société Linnéenne , par suite de communications importantes qui lui ont été faites, sur ce sujet, par son président et des discussions auxquelles elle s’est livrée, ayant reconnu combien il serait avantageux de pouvoir dresser, pour chaque localité de la France , des catalogues indiquant la station minéralogique des plantes, etc., arrête : « Qu'’elle décernera à Y’avenir, selon le cas, des Médailles » de bronze où d'argent, petitou grand module, aux per- » sonnes qui lui auront remis le plus de documents précis , Gi} » recueillis dans le département de la Gironde ou les autres » départements environnants, sur cetie importante ques- » tion ». Nota.— Ces documents étant destinés à l’édification d’un ou plusieurs Catalogues régionnaires dont les éléments ont été dé- terminés par la Société, les prétendants aux médailles ci-dessus , pourront relirer de chez M. Aug. Pelit-Lafitte, président de la Commission spéciale, nommée pour eet objet, une instruction imprimée destinée ï lé diriger dans leurs recherches et qui leur sera délivrée gratuitement Se ane) ‘DEUXIÈME PARTIE. HISTOIRE NATURELLE APPLIQUÉE. $ 1.— BOTANIQUE RURALE. A. DESTRUCTION DE LA CUSCUTE. Le développement que prend la culture du trèfle de Hol- ande ( Zrifolium pratense ) dans la Gironde, et les avan- tages marqués qui peuvent résulter de ce développement, tels sont les motifs capables de fixer l'attention publique sur cette plante utile et d’exciter les naturalistes à rechercher et à signaler avec soin les accidents ou maladies auxquels le trèfle est sujet, et les moyens à employer pour l’en pré- server. Or, parmi ces accidents ou maladies, l’envahissement de la Cuscute , est sans contredit, ce qu’on doit le plus redou- ter, ce qui à produit jusqu'ici le plus de ravages. En conséquence , la Société Linnéenne demande : « 1.0 Qu'on fasse la descripion précise et complète de » l'apparition , du développement et des progrès successifs # (17) » de la Cuscute ( Cuscuta europæa ) dans les champs de » trèfle ou autres légumineuses ; » 2° Qu'on indique les moyens, sanctionnés par l’expé- » rience, soit de prévenir cette apparition, soit d'y mettre » un terme, lorsqu'elle a été signalée ; » 3.0 Enfin, qu'os fasse connaître une méthode simple, » usuelle et sûre pour distinguer les graines de Cuscute, » qui peuvent être mêlées à celles du Es et pour les ex- » traire de ce mélange ». Prix, à décerner jusqu’en 1850 : une Médaille dhdédi B. FLORE DES PRAIRIES NATURELLES. Utiles partout , les prairies naturelles, ces pièces glorieu- ses du domaine, comme le dit le vénérable Olivier de Serres, acquièrent une plus grande importance encore là où le cli- mat , comme parmi nous, est inconstant et sujet à des sé- cheresses extrêmement hostiles à la production des her- bages. Malgré cela , très peu d’études ont encore été faites sur ces sortes de prairies, en ce qui touche à leur composition botanique, aux moyens à employer pour y favoriser les bonnes espèces, pour en bannir les mauvaises. La Société croit donc servir tout à la fois les intérêts de la botanique et ceux de l’agriculture, en signalant aux per- sonnes que leurs études antérieures et leur position mettent à même de pouvoir s’en occuper, le sujet exprimé dans la question suivante (1). PR Rs ET (1) Comme propres à fournir de précieux dre sobres pou ce genre de travail, on peut citer : Les prairies naturelles de l'Alsace, par M. Napoléon Niclès, 1839; Traité des plantes fourragères ou Flore des prairies naturelles, etc., par M. H Lecoq , 1844. Deux articles de M. Laterrade publiés dans l Ami des!Champs , 1849, p. 65 et 161. ( 18 » Faire la description botanique et la classification agri- » cole, des plantes composant les prairies naturelles, tant » du département de la Gironde que des autres départe- » ments du bassin de la Garonne, suivant leur position, » la nature de la terre et les autres circonstances capables » d'établir des différences entr’elles ». Prix, à décerner jusqu’en 1851 (et selon que la question aura été traitée d’une manière générale ou restreinte à des localités plus ou moins bornées), Médaille d'argent ou de bronze. C. FLORE DES MOISSONS. Un grave inconvénient du climat particulier aux contrées méridionales, c'est de pousser avec une énergie désespé- rante à la production des plantes spontanées , ou comme on le dit dans la pratique agricole, des mauvaises herbes. Cet inconvénient, c'est surtout dans les moissons qu’il se fait sentir : soit parce que les terres, pour la production du blé , reste livrée à elle-même pendant près d’un an : soit par tout autre motif, tiré du système de culture qui nous est particulier. La Société Linnéenne, désirant encore fixer l’attention des hommes compétents sur cet important sujet, met au concours la question suivante : « Faire la Flore des moissons ; signaler le mode de pro- » pagation et de croissance des plantes qui viennent dans » les blés; signaler aussi les moyens qui peuvent être em- » ployés pour réduire le nombre de ces plantes ou pour les » détruire radicalement ». Prix, à décerner jusqu'en 1851 (et selon l’étendue donnée à la question), Médaille d'argent ou de bronze. (19) D. NOUVELLE GRAMINÉE POUR LES PRAIRIES NATURELLES. Le Panic digité (Panicum digitaria, Later.), est une plante très-certainement bien acclimatée dans le département. Cette graminée aime un sol humide ; il est facile de la multiplier à l’aide de ses racines, car elle est vivace et croît à la ma- nière du chiendent. C’est un fourrage tardif, sa plus grande végétation ayant lieu de Juillet en Octobre. Il est excellent, surtout pour les vaches laitières. ; » En conséquence, la Société croit que ce Panic doit être » introduit dans la grande culture , et elle récompensera , » en 1852, le propriétaire ou le cultivateur qui en aura » fait venir une notable étendue ». Prix : Une Médaille d'argent. Nora. — Voir le travail publié sur cette plante par M. Ch. Des Moulins, T. 15.e des Actes de la Société; l'Ami des Champs, 1848 ; l'Agriculture, 1848, pag. 485. E. SYNONYMIE DE LA VIGNE. Les beaux travaux de M. Fauré, sur les vins de Bor- deaux ; ceux de M. le professeur Filhol, sur les vins de la Haute-Garonne , etc... , les ouvrages remarquables sur la Vigne que l’on doit à M. le comte Odart ; les études sur les Cépages de la Bourgogne récemment publiées par M. Bou- chardat, tout cela constate une attention toute particulière accordée à la plante qui fait la base des cultures de la Gi- ronde et la nécessité que l’on éprouve d'arriver à la solution de tous les problèmes auxquels donne lieu cette culture et les différentes opérations qui en sont les conséquences. Par ces motifs , la Société Linnéenne met au concours les questions suivantes que l’on pourra résoudre soit dans leur ensemble , soit séparément. ( 20 ) » 1.0 Quels sont les cépages ou variétés de vignes cul- » tivés dans la Gironde, comme bases essentielles des vins » que l’on y récolte ; dire leurs noms et les variations qu’é- » prouvent ces noms suivant les localités ; faire de chacun » d'eux une description capable de les faire connaître ; y » joindre l'historique de leur origine, de leur introduction, » de leur propagation successive ? » 2.0 Indiquer les avantages et les inconvénients de cha- » cun de ces cépages, tant sous le rapport de la culture, » du sol, du climat, que sous celui de la quantité et de la » qualité du vin que l'on en obtient. » 3 ° Indiquer avec soin les époques relatives de leur pre- » mier développement au Printemps, de leur floraison, de . » la formation du verjus, de la coloration du fruit, de la » maturité. 4. Signaler les modifications culturales particulières à » Chacun d’eux, principalement sous les rapports du genre » de conduite à donner à la vigne, de la taille, de l'effeuil- » lage, etc. » 5,0 Enfin, autant que possible, dtermines par des » expériences faites sur le produit particulier de chacun » d'eux, le degré de coloration du vin qu’on obtient, sa » richesse alcoolique, etc... ». La Société ne se dissimule pas tont ce qu’a de difficile cette question , surtout en ce qui touche les demandes con- tenues dans le cinquième et dernier paragraphe : — deman- des qui supposent des connaissances chimiques qui ne sont pas encore très-répandues ; aussi s’empresse-t-elle de dé- clarer que la question lui paraîtra complètement traitée alors même qu'on n'aura répondu qu'aux quatre premiers paragraphes qu’elle présente. En outre , elle accordera des médailles en argent ou en bronze, selon le cas, aux personnes qui lui auront remis (24) des travaux tendant à la satisfaire sur un ou plusieurs de ces paragriphes , pris isolément ; soit que ces travaux em- brassent la totalité du département , soit qu'ils.n’aient en vue qu'une de ses divisions. Le Prix de la question résolue en entier sera , selon le cas, une Médaille d'argent, grand module, ou une Médaille d’or à distribuer jusqu'en 1850. $ IL. — BOTANIQUE MÉDICALE. PROPRIÉTÉS MÉDICALES DE LA SALICAIRE ET DE L’INULE. La Salicaire ( Lythrum salicaria ) qui donne de Juillet en Octobre ses longs épis de fleurs rouges , dans les lieux hu- mides et l’Inule congrière , herbe de Saint-Roch ( /nula dys- senterica), à fleurs jaunes et qui vient aussi sur les bords - des fossés, sont deux plantes connues depuis longtemps, sous le rapport de leurs propriétés astringentes. Il paraît même qu'elles ont été employées avec succès dans le cours de l'épidémie qui vient de régner à Bordeaux et dans nos campagnes. » D’après ces considérations , la Société récompenserait » avec empressement l’auteur d’un mémoire qui prouverait, » par l'observation et l'expérience clinique, les propriétés » réelles de ces deux plantes ». Prix à décerner en 1850 : une Médaille d'argent. $ IL. — CHIMIE AGRICOLE. ACTION DU SULFATE DE CHAUX. D. L'action bienfaisante du plâtre (sulfate de chaux) sur les légumineuses fourragères, est un fait aujourd'hui démon- tré d’une manière générale. Toutefois , il résulte d'observations pnolnbiétes et dignes de foi, que cette action n’est pas partout la même ; que dans # (2) certaines localités même, elle est d’une application telle- ment peu sensible, que quelques cultivateurs paraissent avoir renoncé à l’emploi du plâtre. La Société Linnéenne, désirant éclairer cette question importante , la met au concours dans les termes suivants : » 1.0 L'action avantageuse du plâtre sur les fourragères » légumineuses est-elle subordonnée à la nature de la terre » dans laquelle ces plantes sont cultivées ? » 2.0 Dans ce cas, quelle est la nature de la terre favo- » rable à cette action? Quelle est la nature de la terre au » contraire, qui ne lui est pas favorable ? Prix à décerner jusqu’en 1850 : une Médaille d'argent. TROISIÈME PARTIE. ee | AGRICULTURE. PROVERBES. Les proverbes eñ agriculture méritent une attention d'autant plus grande, qu'ils sont le moyen le plus sûr auquel la tradition ait pu recourir pour conserver le fruit des ob- servations et de l'expérience des siècles passés. Répétés d'âge en âge, ils ont reçu ainsi la sanction de tous ceux qui les ont invoqués et sont devenus tout-à-fait dignes de l'inté- rêt des hommes qui veulent s’adonner à l’agriculture , dans la localité où ils ont cours. Déjà, sous le titre de : Proverbes agricoles du Sud-Ouest de la France, on doit en ce genre, à un agronome distin- gué, M. Anacharsis Combes , de Castres (Tarn), un ouvrage qui devrait servir de modèle à un semblable travail, dans chaque département. (25) En conséquence, la Société met au concours le travail suivant : » Recucillir et classer avec soin les différents proverbes » agricoles , tant français que patois, qui ont cours dans le » département de la Gironde et joindre autant que possible » à ce travail, des explications capables de bien faire com- » prendre le sens et la valeur de chacun de ces proverbes ». ‘ Prix : selon le cas, une Médaille d'argent ou une Mé- daille de bronze, grand module, à décerner en 1850. QUATRIÈME PARTIE. RÉCOMPENSES ACCORDÉES. Un arrêté pris par la Société, établit que, chaque an- née , elle décernera une récompense à l'élève en Botanique, dont les recherches auront abouti à la découverte d’une ou plusieurs plantes cotylées nouvelles pour la Flore de la Gi- ronde , Le jeune L. Lafont , élève de l’École de Botanique de Bordeaux, a trouvé et distingué cet Été, dans ses excursions le Sedum micranthum souvent confondu avec l'album. Le premier n'étant pas mentionné dans la Flore, la Société lui accorde une Médaille d'argent. Elle rappelle avec plaisir une semblable médaille, décer- née dans sa séance publique de 1848, à M. Jean Comme, qui depuis, a rapporté d’Ambès, le Leucoium æstivum, nou- veau aussi pour notre Flore. sé (24 | DISPOSITIONS GÉNÉRALES. 1.° Les Mémoires envoyés au concours doivent porter une épigraphe et un billet cacheté renfermant cette même épi- graphe , le nom du concurrent et son adresse. 2.° Les billets ne seront ouverts que lorsqne les Mémoires auront été jugés dignes du prix, ou de toute autre récom- pense académique. 3.° Toutes les personnes, hors les membres résidants de la Société, sont admises à concourir. 4.° Les Mémoires couronnés par la Société , devenant sa propriété, ne pourront être publiés sans son autorisation. 5.° Ils devront être écrits en français ou en latin, et remis au Secrétariat-Général de la Société , avant le ter Septembre. Délibéré et arrêté, en séance générale, à Bordeaux, hôtel du Musée de la Ville , le Mercredi, 24 Octobre 1849. J.-F. LATERRADE, directeur. Cnances DES MOULINS, président. H. BURGUET , vice-président. CAZENAVETTE, secrétaire-général. SÉANCE PUBLIQUE ANNUELLE DELA HARNPGBRARBLIES. (7 NOVEMBRE 1849 ). ’ Cette séance qui a eu lieu ordinairement le 4 Novembre jour de saint Charles, patron de Linné, avait été renvoyée cette année au 7 du même mois, pour des motifs particu- liers. Elle a été ouverte à sept heures et demie, devant un nombreux auditoire, sous la présidence de M. Ch. Des Mou- lins. ; Par les soins des Commissaires qui avaient été nommés , la salle était ornée d’arbustes variés, éclairée brillamment, et tout y offrait l'aspect d’une véritable fête. Le Président avait à sa droite M. Dosquet , Secrétaire-général de la Pré- fecture, et à sa gauche, M. Valat, Inspecteur de l’Académie, le premier remplaçant M. le Préfet et le second M. le Rec- teur qui n'avaient pu se rendre à la séance. Les autres Membres dela Société se sont placés suivant l'ordre de leurs fonctions. . - La lecture des diverses pièces adopt es | a eu lieu conformément au programme imptiné qui avail été distribué à toutes les personnes présentes. = 9 ( 26 ) Pendant la lecture du programme des prix, le Président a appelé au bureau M. Lafont, élève de botanique qui ayant découvert une plante nouvelle pour la Flore de la Gironde, avait obtenu une médaille d'argent aux termes d’un arrêté pris par la Société. Ce jeune lauréat a reçu sa récompense des mains de M. le Secrétaire-général de la Préfecture, après quoi la séance a été levée à neuf heures et demie. DISCOURS D'OUVERTURE Prononcé par M. Cn. Des Movuxs, Président. Messieurs , Les Académies dont le ressort embrasse toutes les bran- ches des connaissances humaines, jouissent d’une faculté bien précieuse. Lorsqu’elles convient un public d'élite à leurs solennités , et qu’elles cherchent les moyens de l’intéresser en l'instruisant, et en le remerciant de la sympathie qu'il leur témoigne , elles ont le choix entre les sujets si divers de leurs doctes entretiens : tous les genres sont de leur do- maine, hormis un seul, parce que tous sont bons, disait Voltaire, à l'exception de gglu- là (1). Mais les corps savants ‘Q L.s’occupent d’études spécia- les, sont d'autant plus restreints dans l'exercice de cette faculté, que le ressort de leur spécialité est plus restreint lui-même. S'ils annoncent une séance publique, on s’attend à bon droit à ce que les haranguës qu’on écoutera portent quelques fruits dans la mémoire qu’on vient bénévolement ouvrir à leurs impressions ; mais on veut (et, encore une fois, on a raison), on veut des fruits du terroir sur lequel . (a Tous les genres sont bons, hors le genre ennuyeux ». (VOLTAIRE ). ii (AT ) on a pris la peine de se transporter: En d’autres termes, on veut apprendre quelque chose sur la spécialité qui est comme le souffle et la vie de la réunion à laquelle on assiste. Com- mentateurs d’une science au nom de laquelle ils ont réuni leur auditoire , on n'admet guère que ses orateurs lui par- lent d'autre chose, et là commence pour eux une difficulté qui renaît ue pressante chaque année , et plus malaisée à vaincre... à tourner. Telle est, Pre la position de notre Be au moment où elle se présente devant vous. : Et pourtant, notre spécialité n’est pas assurément des plus étroites. Ce qu’on appelait jadis le grand livre de la nature, c'est le champ sans bornes de nos études. Pour avoir rempli complètement notre mission, nous n’aurions rien de moins à faire qu'à savoir par cœur toute la Création. L'Histoire naturelle! — C'est-à-dire la connaissance de toutes les plantes , de tous les animaux, de toutes les sub- stances minérales; et, outre leurs noms , leur organisation. leurs rapports, leurs harmonies, leur histoire. La Géologie ! —. C'est-à-dire la combinaison et l'agence- ment, dans le temps et dans l’espace, des matières miné- rales modifiées par les agents physiques, réglées par les lois mathématiques , compliquées par l'introduction des phénomènes de la vie; — c’est-à-dire la chronologie com- parée des Flores et des Faunes si diverses qui se sont suc- cédé les unes aux autres ; — c’est-à-dire enfin, l'histoire com- plète du monde matériel, depuis qu’il est sorti du néant à la voix toute-puissante de Dieu, et que ses éléments cons- tituants ont reçu du souverain Maitre, les lois dont le déve- loppement a amené l’état actuel des choses. L’Agriculture! — C'est-à-dire Héiséoire oh et Ja géologie appliquées à la nourriture, au vêtement , à lo santé, à la civilisation, au bien-être de l'homme. (28 } Voilà tout ce que nous devons étudier : voilà tout ce que nous devrions savoir... Ah ! Messieurs, vous ne serez pas surpris, vous ne nous accuserez pas d'une orgueilleuse et fausse modestie, si nous vous supplions de ne pas nous de- mander trop rigoureusement nos comptes ! Cependant (et nous sommes loin de nous en plaindre), nous avons quelques considérations à faire valoir, desquelles il résulte que le choix des sujets de nos entretiens ne doi, pas s’exercer sur une étendue aussi vaste qu'on le éolfait d'abord. Sans parler de l’Académie de Bordeaux, dont l’an- cienneté vénérable lui vaut le titre de mère de toutes les Sociétés savantes de notre Ville, et dont le ressort légitime embrasse toutes les spécialités , — sans parler des Sociétés médicales dont les savantes veilles sont consacrées exclusi- vement au soulagement de nos maux si nombreux, — la Société Linnéenne a des sœurs qui vivent comme elle de l'étude des choses de la nature, en tant qu’elles reçoivent les modifications de l'art; et ces sciences d'application for- ment autant de spécialités nouvelles , qui restreignent bien légitimement les limites beaucoup trop étendues de la nôtre. La Société Philomathique nous montre, dans ses bril lantes expositions, toùt le parti que la science, l’industrie et l’art proprement dit, ont su tirer de ces matières premiè- res que nous étudions, nous, dans leur état primitif d’in- dépendance et d’indiscipline. La Société d'Agriculture , qui court de plus sr sur nos brisées, qui manœuvre sur notre terrain et nous em- prunte, sans les dénaturer, les meilleurs objets de nos études, nous les rend encore améliorés , souvent embellis , toujours utiles , presque toujours nécessaires. L'agriculture, élevée au rang de science, nous paie, avec une prodigalité toute maternelle, la location du champ que nous avons dé- friché pour elle. (29) La Société d'Horticulture, enfin, reçoit des mains de nos voyageurs des bouquets de fleurs sauvages, des sachets de graines et des corbeilles de fruits acerbes. Elle se met à l'œuvre et cache dans le silence ses longs essais , ses tenta- tives quelquefois infructueuses, puis reprises avec plus de succès par des moyens plus délicats. C’est à ses heureuses mains qu'a été départi le privilège de changer le cuivre en or : non pas toujours sans doute, car il y a dans le désert des fleurs que Dieu a faites si belles, des fruits auxquels il a donné tant de saveur, qu’il n’a pas voulu permettre à l'art humain de les doter d’une perfection de plus. Mais enfin, souvent, bien souvent, comme l'Agriculture, l'Hor- ticulture améliore, embellit ce qu’elle touche. Elle n’est pas, comme son aînée , la fille du besoin : c’est le goût des jouis- sances honnêtes, l'instinct d'élégance de l’homme civilisé, qui lui ont donné le jour. Sa mission ne l'appelle jamais à produire le nécessaire, mais elle donne parfois l’utile et toujours l'agréable. Sa spécialité, c'est tout ce qui charme, non pas seulement les gros sens comme le goût ou les sens plus déliés comme l’odorat, mais encore et surtout ceux qui, comme la vue, sont en communication incessante avec l'intelligence et le cœur. — Et vous ne voudriez pas que Jj'omisse de dire qu'elle sait aussi charmer l'oreille ; car Bor- deaux n’a pas oublié cette solennité récente, où il lui fut parlé des fleurs avec tant de finesse , de grâce et de distinc- tion (1). - Que me reste-t-il donc, Messieurs, à moi qui veux au- Jourd’hui vous dire quelques mots (quelques mots seule- ment) sur les fleurs? Il me reste les fleurs sauvages, les fleurettes des champs, cet inépuisable et charmant objet (1) Voir le discours de M. Francisque, secrétaire-général de la Société d’Horticulture , prononcé le 12 Septembre 1849. | (30 ) des labeurs du botaniste. Et certes, je ne trouverais pas mon lot trop modeste, si les courts instants que je puis demander à votre attention me permettaient d'en déployer les richesses : ce serait un fardeau si lourd que je n’oserais même y toucher. Je me hâte d’en détacher une parcelle pour vous l’offrir pendant que vous êtes réunis à portée de ma voix, Car c’est une recommandation que j'ai à vous pré- senter en faveur de notre Flore départementale. Vous le savez tous, Messieurs ; le vénérable et savant professeur auquel nous devons cet inventaire de nos riches- ses végétales, et qui va, dans peu d’instants, proclamer devant vous les noms des nouvelles plantes dont la présence dans la Gironde a été récemment constatée, M. Laterrade , dis-je, dans chacune de ses quatre éditions successives, s’est rapproché de plus en plus du but commun à tous les floristes. Ce but, c’est la publication d’une Flore complète, et nous nous sommes quelquefois laissé aller au doux es- poir de le voir atteint. Mais les découvertes de chaque été nous montrent qu'il recule et fuit devant nous, à mesure que nous faisons plus d'efforts pour franchir les derniers pas qui nous en séparent. Pourquoi cela ? Et ne devons-nous pas reconnaitre , dans eette suite de déceptions , l'existence de quelque règle dont il n’est pas donné au zèle des observateurs d’affranchir les résultats de leur travail ? — Précisément , Messieurs : toute Flore est en effet sujette à des modifications successives dans sa composition ; et ce sont ces modifications dont je vais vous.exposer très-brièvement les causes. Et d'abord, on a parfois’ quelques appauvrissements à déplorer. Une plante, observée jadis, aura disparu com- plètement du rayon de la Flore. Sa disparition tient néces- sairement à des causes qui sont la contre-partie de celles auxquelles les accroissements numériques sont dûs. Dans (4) ce cas , la Flore doit toujours mentionner la plante dispa- rue, en faisant remarquer qu'on ne la retrouve plus. En effet, il y a ici droit de possession, et ce droit est impres- criptible ; il y a fait historique, et la mémoire n’en doit pas être perdue. Les accroissements numériques proviennent de diverses causes : j'en distingue trois principales , et j'invoque , pour constater ces accroissements, le concours de trois classes d'observateurs. Considérée dans son ensemble, la composition d’une Flore locale est invariable, parce qu’elle a pour raisons d'être des éléments qui ne changent pas, — le climat, l’al- titude, l'exposition, la nature physique et chimique du sol. Mais cette composition générale peut et doit subir des mo- difications accidentelles, et ce sont là les éléments de varia- bilité dont je considère en ce moment les effets. Premièrement , légères et transportables comme elles le sont presque toutes, souvent même aussi bonnes voilières que certains oiseaux, les graines sembleraient devoir , par une dispersion à laquelle on n’aperçoit pas de bornes, équi- librer peu à peu les espèces végétales sur toute l'étendue d'un même continent. Mais c’est ici que viennent s’inter- poser la nature du sol , la climature, la destruction opérée par les animaux, et toutes ces mille causes dont l'influence, admirablement balancée par la sagesse du Créateur, cons- titue ce qu'on appelle si justement les harmonies de la nature. Il arrivera parfois que ces divers empêchements ne suffi- ront pas pour mettre obstacle à l'établissement, à la pro- pagation d’une espèce réellement étrangère à la végétation primitive du pays; et c’est ainsi que la Vergerette du Canada ( 1 } s’est propagée sur toute la surface de l'Europe (1) Erigeron canadensis. Linn. (32) qu'elle a escaladé les pics des Pyrénées, et qu'elle a con- quis, à force de persévérance et de vigueur, un titre bien pénible à donner à une voyageuse qui nous vient de si loin, le titre de mauvaise herbe, qu’elle justifie d’ailleurs parfai- tement. ; Quelquefois aussi, une plante réellement nouvelle pour la Flore locale se sera développée isolément, mais n'aura pu résister aux influences contraires à sa uaturalisation. Ce sera alors un oiseau de passage , dont il faudra noter pré- cieusement Fapparition. Ces introductions naturelles , ainsi que la reconnaissance des espèces non encore cataloguées , sont ordinairement du ressort des botanistes de profession. Ils doivent, comme des officiers vigilants , passer fréquemment leurs troupes en revue, tenir leurs contrôles à jour en inscrivant sans retard les nouvelles recrues qui rejoignent le corps, et ne pas ou- blier surtout qu’un naturaliste étranger peut venir, à l'im- proviste, passer une inspection générale !..…. Messieurs, je le dis bien bas : cela nous ” arrivé quelquefois ; un bota- niste agenais nous signala, à La Teste, une jolie Petite Centaurée à fleurs roses { 4 ), et le célèbre botaniste pari- sien Cosson retira deux autres plantes rares des prairies marécageuses d'Arcachon (2); comme pour nous prouver encore une fois qu’une sentinelle qui s’endort ne is man- quer d’être surprise. En revanche , le savant auteur de la Flore bordelaise n'a pas laissé à des étrangers l'honneur de trouver, les premiers, la charmante Lychnide de Corse (3 ) sur la terre continen- tale de France ; et la lecture du Programme va faire enten- HE à {1) Chironia spicata Lam., trouvée par M. Dumolin Paîné. (2) Trifolium Perreymondi et Scirpus translucens Le Gall. (3) Lychnis corsica. Lois. () dre, tout-à-l'heure , les noms de deux jeunes Bordelais à qui notre Flore doit de récentes et précieuses acquisi- tions ( 1 ). Je passe à la seconde cause des accroissements numéri- ques, et je la trouve dans les grands travaux d'utilité publique. On sait depuis PA PER et surtout depuis les beaux mémoires de M. Dureau de la Malle, combien peut se pro- longer la longévité des graines privées du contact de l'air et de la lumière. On sait que si l’on abat ou si l’on brûle une forêt , on la voit promptement remplacée par une végéta- tion toute autre que celle qui couvrait précédemment le sol. Ce sont les graines énfouies et dont la faculté végétative s'était trouvée longtemps comprimée, qui viennent à leur tour parer la terre; ce sont les soldats du second rang qui viennent remplacer le premier, moisssonné par le canon. — Mêmes résultats après le défrichement d’une terre vierge ; résultats auxquels il faut ajouter ceux que produisent l’'ameublissement du sol et la substitution du sous-sol à la couche épuisée qui le recouvrait. Ceci explique les changements, les bouleversements , pourrait-on dire, que font éprouver à une flore locale l'ouverture des routes , des canaux, des chemins de fer, la construction des ponts et des levées de tout genre. C'est ainsi que lors de la construction du pont de Bor- deaux et de la chaussée qui donne un si splendide accès dans notre belle cité, une graminée charmante à la vue, pré- cieuse comme fourrage (2), fut déposée en Es parmi PR EE RP (1) Sedum micranthum Desv., trouvé \ M. Lafont, et Leucoium æstivum Linn., trouvé par M. Comme (2) Panicum dr Laterr., F1. bord { Digitaria paspalodes Mich.r Am. Bor. ) ne (34) des sables de lest venus des États-Unis d'Amérique. I y a vingt-cinq ans de cela, Messieurs, et maintenant cette herbe excellente contribue à l'amélioration du lait des vaches rive- raines, depuis Pauillac jusqu'à Toulouse : et de plus, les bateaux plats du commerce l’ont inoculée aux bords de la Dordogne et de son canal latéral depuis le Bec-d’Ambès jusque dans le Farladais. Tous les habitants de Bordeaux ont parcouru la belle chaussée qui couronne la digue de la Garonne entre le pont de Bordeaux et La Tresne. Hé bien, Messieurs, une colonie de plantes étrangères à la localité est venue s’établir sur ce sol tout nouveau , tout meuble , et met à notre portée im- médiate des espèces qu'il nous fallait aller chercher au loin dans le département , ou même qui n’y croissaient jamais. Les unes sont remontées avec des délestages de la Breta- gne , de Blaye ou de Royan : les autres sont descendues de l’Agenais avec le flot où les bateaux du Haut-Pays, et ont trouvé dans le sable et les terres jectisses, des conditions de vie que leur refusaient les vases incessamment lavées et renouvelées des bords de la Garonne. Sont-ce des acquisi- sitions définitives pour notre Flore ? Je n’ose l'espérer, pour toutes du moins; mais il nous en restera certainement quelques-unes. Je ne vous dirai pas les noms de ces émi- grées si joyeusement bienvenues des botanistes bordelais ; ils vont trouver place dans les divers rapports que vous allez entendre : je veux seulement faire appel à la classe d’observateurs qui se trouve le mieux en position d'appor- ter à notre Flore de nouveaux accroissements en ce genre. Ce sont MM. les Ingénieurs, et les employés sous leurs ordres ; car les botanistes exclusifs ne sont pas nombreux à Bordeaux , et ne suffisent pas à veiller efficacement sur les modifications que peut recevoir la Flore de tous les points d’un si vaste département. Cet appel que je fais entendre , D à me fournit l’occasion de payer , au nom de la Société Lin- ‘néenne, un tribut de reconnaissance à l’un des plus savants et des plus honorés de ses membres, M. Billaudel, qui ne manquait jamais de lui communiquer les plantes dont il observait l'apparition sur le parcours des grands travaux dont la direction lui était confiée. La Flore bordelaise lui a dû , de la sorte, plusieurs additions intéressantes (1) Enfin , Messieurs , j'arrive au troisième moyen d’accroi- ire le catalogue de nos espèces. Nous avons beau faire, nous _ botanistes , et je l'ai déjà dit, nous ne pouvons visiter, sans exception, tous les recoins du département, et c’est parfois dans ces recoins les plus ignorés , les moins suspects de re- céler quelque trésor, qu’on a trouvé des nouveautés remar- quables autant qu'inespérées. Et qui, le premier , les a dé- couvertes et signalées ? Le propriétaire, étranger à l'étude de la botanique proprement dite, mais aimant les fleurs , ou s’occupant d'agriculture, le propriétaire qui dans ses promenades ou ses courses utiles, regarde, observe ce qu l'entoure, le compare à ce qu'il a vu ailleurs, et charme ainsi ses heures de travail comme celles de son loisir. — Il n'est pas bien difficile , quand la tournure insolite d’un vé- gétal frappe les yeux de l’habitant de la campagne , quand il aperçoit une fleur qui ne décore pas habituellement ses champs , il n’est pas bien difficile, dis-je , d’en envoyer quel- ques échantillons au Jardin des Plantes , et de ne pas lais- ser échapper la chance de faire ajouter un perfectionne- ment à un ouvrage dont l’auteur lui a déjà consacré tant de labeurs et tant de veilles. C’est ainsi qu'un savant et respectable professeur de no- tre ville, M. Larrouy , découvrit il y a peu d’années , dans l'Entre-deux-Mers , un Lin à fleurs jaunes qui n'était dé- (4) Scrophularia canina Linn., ete. (36) crit que par les auteurs allemands (1). Ainsi encore, et tou” Jours dans l’Entre-deux-Mers, un amateur étranger à la: Société Linnéenne retrouva cette Bruyère élégante que Linné nomma vagabonde (2), sans doute à cause de sa dispersion irrégulière et capricieuse : arbrisseau charmant qui se laisse voir comme la Galatée de Virgile, et comme elle aussi, ne se laisse pas prendre ; arbrisseau dont les parterres les plus coquets se couronneraient avec orgueil, s’il n’était plus rebelle encore à la culture que ses congénères , déjà si dif- ficiles à apprivoiser. Vous le voyez, Messieurs, je viens de quêter pour notre Flore. Tous ceux qui nous ont fait l'honneur de se rendre à l'invitation de notre Compagnie , magistrats , savants , lit- térateurs , agriculteurs , citadins même qui ne sont pas in- soucieux des plaisirs des champs, nous leur devons des re- merciments et nous les prions de les agréer avec bienveil- lance ; mais , de plus, nous leur demandons leur concours en faveur d’une des sciences que nous aimons. C’est une liste de souscription que je viens de mettre sous vos yeux : ne refusez pas de la revêtir de votre signature. En passant ma sébile dans tous les rangs, je n’ai pas oublié le vôtre, Mesdames; mais je l’ai gardé pour le der- nier, convaincu que si vous voulez aussi déposer votre offrande , elle ne sera pas la moins riche. En retour de ces fleurs que la Société vous deunande , elle vous présente aujourd’hui le tablean des acquisitions qu'elle à faites pendant l’année qui vient de s’écouler ; et comme c’est une grande nouvelle, un véritable évènement pour le botaniste , que la rencontre d’une espèce non encore (4) Linum corymbulosum , Reichenb. (2) Erica v agans. (37) constatée dans le pays , nous voulons espérer que nous au- rons éveillé vos sympathies. En vous indiquant les lieux où de nouvelles recherches pourraient amener de nouvelles conquê- tes, nous nous flattons même d’avoir accru la somme de vos connaissances utiles, ou du moins agréables. Cependant, ilme reste une crainte à exprimer , un soubait à former : permet- tez-moi, Messieurs, de les déposer tous deux, en termi- nant, devant vous. Du sublime au ridicule il n'y a qu'un pas, disait Napo- léon. Puissé-je être assez heureux pour vous avoir laissé oublier qu'il y a moins encore de l'instructif à l’ennuyeux ! APERCU DES TRAVAUX DE LA SOCIÉTÉ. LINNÉENNE PENDANT L'ANNÉE ACADÉMIQUE 1848-49, Lu dans la Séance publique du 7 Novembre 1849, par M. CazeNaAvErTTE , Secrétaire-Général Messieurs, # La notice de vos travaux pendant l’année qui vient de s’écouler, vous montrera, je l'espère , que vous vous êtes maintenus à la hauteur où vous avaient placés les études auxquelles vous vous étiez livrés dans les années antérieu- res. Elle servira à prouver que pour l’homme adonné à l’é- tude de la nature, il ne saurait y avoir d'interruption dans les observations ou dans les expériences ; qu'à chaque ins- tant des objets nouveaux s'offrent à ses regards et captivent assez son attention pour le tenir éloigné des folles distrac- tions du monde ou des discussions irritantes de la politique, en un mot, que ces études suffisent pour occuper son cœur 58 } et son esprit et lui proeurer des jouissances ineffables qu'il chercherait vainement ailleurs. Il est vrai que, cette année, des préoccupations assez gra- ves ont momentanément détourné quelques-uns d’entre vous de leurs travaux habituels. La réapparition d'un fléau dé- vastateur dont les ravages se sont fait sentir sur tous les points de notre belle patrie , ne pouvait manquer d’'absor- ber le temps de plusieurs membres, d’une Société qui compte dans son sein et parmi ses correspondants un grand nombre de médecins. Toutefois, Messieurs, si nous com- parons notre correspondance avec celle des années anté- rieures , et si nous examinons les résultats de nos relations, vous verrez que partout on a marché moins que nous et que les mémoires, les lettres, les journaux scientifiques qui vous sont ordinairement adressés , ont été moins nom breux cette année que les autres, tandis que vos publica- tions se sont maintenues dans leur état habituel et ont même assez augmenté pour vous mettre en avance dans l'impres- sion de vos ACTES ; que vos séances ont été aussi complète ment remplies , que vos recherches, vos observations, vos expériences n'ont pas un instant discontinué quoique sur une moindre échelle, en un mot, que vous n'avez pas cessé d’être ce que vous étiez déjà. Si nous voulions assigner la cause de ces résultats si satisfaisants, nous la trouverions dans le calme heureux dont à toujours joui notre belle cité; dans sa position topographique si propre à l’affranchir des terribles épidémies qui exercent ailleurs leur affreuse in- fluence , et dans les soins aussi actifs qu'éclairés des diver- ses administrations de la ville qui ne cessent de favoriser les avantages que nous procure le climat de Bordeaux. Aussi, grâce à toutes ces circonstances réunies , il nous est permis de vous offrir aujourd’hui une notice de vos travaux annuels , qui n'aurait besoin pour en faire ressortir (:39 ) l'importance que d’une plume exercée en ces sortes de ma- tières Je crains fort que la faiblesse de l'auteur ne nuise à la hauteur du sujet, mais j'ose espérer que vous pardon- nerez sa faiblesse en faveur de sa bonne volonté. Et d’abord, Messieurs, votre Conseil d'administration vous à proposé par l'organe de son honorable Directeur, une mesure que vous vous êtes empressés d'adopter et dont les conséquences ne sauraient manquer de vous donner les résultats les plus satisfaisants. Il s’agit de nouvelles divi- sions à établir parmi vos correspondants , afin de réunir plus facilement en un seul faisceau tous ces éléments épars qui viendront se grouper autour d’un centre provincial, si je puis m'exprimer ainsi, et qui de là, se mettront plus facile- ment en rapport avec nous. Vays établirez ainsi un réseau de travailleurs concourant tous au même but, la connais- sance des produits naturels de la France, et l’avantage que la publication de vos Actes leur procurera pour constater leurs observations ou leurs découvertes, vous assurera en quelque sorte le monopole de leurs travaux. Cependant ce n’est pas là le but que vous vous êtes proposé, car vous n'avez voulu que rendre plus intimes les relations avec vos correspondants qui sont en général des hommes livrés aux mêmes études que vous et qui ont les mêmes goûts. Si maintenant , uous entrons dans ce qui constitue vos travaux scientifiques proprement dits, nous trouvons d’a-- bord, que non contents de faire de la théorie en histoire na- turelle, vous ne laissez échapper aucune occasion de l'ap- pliquer à tout ce qui a un but d'utilité publique. C’est ainsi que vous vous êtes vivement préoccupés d'une maladie fort grave qui s’est développée dans les conserves alimentaires , fabriquées plus spécialement pour les usages de la marine. Dès que ce mal vous a été signalé, vous vous êtes empressés de vous procurer les renseignements néces- { 40) saires, afin d'en pouvoir découvrir la cause et y trouver un remède. Vous aviez pensé non sans quelque apparence de raison, que des circonstances atmosphériques avaient pu favoriser le développement de quelques mucédinées qui al- téraient profondément les produits sur lesquels elles s’atta- chaient , et le fait une fois bien établi, vous auriez pu trou- ver le moyen d’y remédier. Heureusement pour Bordeaux, il a été affranchi de ce fléau qui à causé tant de préjudice à des fabricants de Paris, du Hävre, de Nantes, de la Ro- _chelle même, et nous pouvons dire de plus que notre vilie a profité de ce qui faisait le malheur des autres. Vous êtes sans doute loin de vous réjouir de ce résultat, mais il vous a paru assez curieux d'observer que le pays, qui avait donné le premier naissaïte à ce genre d'industrie, füt aussi celui qui en retirait les plus grands avantages. C'est, en effet, à un de nos compatriotes que nous sommes re- devables des premiers essais tentés pour ce procédé qui à délivré nos marins d’une maladie horrible occasionnée par le régime alimentaire auquel ils étaient forcément soumis. dans le cours d’une longue navigation. Lasubstitution de viandes et de légumes frais aux salaisons qui formaient seules l'ap- provisionnement des navires a élé un grand service rendu à l'humanité , et nous ne saurions oublier le nom de Villaris, qui s’en occupa bien avant qu’on eut appelé la physique et la chimie au secours de cette invention. Il n’y a pas bien des années qu'on voyait encore à Sainte-Eulalie d'Ambarès les ruines des bâtiments qui avaient servi à l'établissement des chaudières et des fourneaux pour ce genre d'exploitation. Un autre fléau, car vous observerez que cette année a été vraiment désastreuse sous plusieurs rapports, un autre fléau, dis-je, avait envahi quelques communes du dépar- tement et notamment celle de Saint-Germain-du-Puy Il vous avait été signalé par M. Henry Burguet et à l'époque ( 41 ) ; où 1l vous en entretint, il était difficile d’assigner un terme à son développement. C'était l'apparition soudaine de myriades d’arachnides microscopiques s’attachant aux aliments, aux vêtements , aux meubles, qu'ils recouvraient d'une couche telle , que les habitants désolés entrevoyaient le moment où ils allaient être forcés d'abandonner leurs habitations. Heureusement la sécheresse excessive du Prin- temps a mis fin à cette plaie, et la Commission que vous aviez chargée d'aller l’étudier , n’a pu qu’indiquer quelques moyens préservatifs contre sa réapparition, moyens trop négligés par malheur dans les campagnes et fondés surtout sur une excessive propreté, sur le dessèchement des habita- tions , et l'éloignement de ces mares de fumier dont on ne comprend pas l’existence auprès de l'habitation de l'homme. Le fléau vraisemblablement ne se reproduira pas de sitôt; car , les influences atmosphériques dont il était le résultat, selon toute apparence, sont exceptionnelles et ne se succè- deront pas, il faut l’espérer , l’état de l'air se trouvant bien rarement dans les mêmes conditions. Les conférences auxquelles a donné lieu l'envahissement de ces acarus vous à portés à rappeler des faits analogues qui ont eu lieu dans d’autres localités où malheureusement les insectes destructeurs se sont perpétués , et particulière- ment à Rochefort où les thermites ont fait de si grands dégâts dans les bois destinés aux constructions maritimes. Ces insectes destructeurs s’y sont établis de manière à résis- ter aux diverses variations de la température , au transport de ces bois que l’on a opéré au loin, enfin au travail dont on les a rendus l’objet, ce qui a amené la destruction assez prompte des meubles, des planchers , des charpentes fabri- qués avec ces bois. On vous a même ces jours derniers fait connaître une maison de Bordeaux où ce phénomène s’est nm 42) produit d’une manière bien fâcheuse, et vous vous proposez d’aller y faire les études que ce sujet pourra comporter. La vaccine qui, pendant plus de cinquante ans, a délivré l'espèce humaine d’une de ses plus horribles et plus cruel- les maladies, ne paraît pas donner depuis quelque temps des résultats aussi satisfaisants. Il est à croire que la force du vaccin s’est éteinte par suite de l’immense division de cette substance, et lon se sent porté à douter que l'on puisse de nouveau la retrouver avec toute son efficacité. Ces considérations ont engagé l’un de vos collègues à faire des recherches auxquelles vous vous êtes associés en faisant imprimer à plusieurs exemplaires un mémoire de M. le D." Lafargue, et en les distribuant de manière à favoriser et à encourager les recherches qui pourront être faites sur ce sujet. Vous avez tout lieu d'espérer que vous serez assez heureux pour trouver dans le département la matière pre- L . mère du vaccin , le cowpozæ qui nous fera remonter à l'épo- _ que où la vaccine produisait des effets aussi bienfaisants qu’admirables par leur incontestable solidité. N'attendez pas de moi, Messieurs , que j'entre dans les détails de tous les sujets scientifiques qui vous ont occupés dans le cours de vos séances ordinaires. Vous n'ayez laissé échapper aucune occasion d'épuiser les questions que vos travaux faisaient surgir, et l’on aurait pu former divers trai- tés fort intéressants en recueillant tout ce qui a été déve- loppé devant vous. Je me contenterai de vous indiquer quel- ques-unes des questions les plus importantes que vous avez agitées. La vigne est le produit essentiel du département de la Gironde dont il fait la richesse. Vous avez donc porté une attention toute particulière sur cette plante. Vous avez étu- dié d’une manière spéciale les différentes natures du sol qui constituent le bassin de la Gironde , afin de mieux détermi- ner les causes qui peuvent influer sur les produits de la vigne et sur ses résultats si variés. Vous avez été puissam- ment secondés dans votre travail par votre honorable tréso- rier, M. Petit-Lafitte, professeur du Cours d'Agriculture. Il vous à fait divers rapports sur les observations qu’il a recueillies pendant ses courses agricoles dans le départe- ment ; il veus a soumis plusieurs faits d’une haute impor- tance qui ont rempli avec beaucoup de succès quelques-unes de vos séances, et qui ont donné lieu à des conférences d’où résulteront des mémoires qui ne pourront qu'être d’une grande utilité aux agriculteurs de la Gironde. Un de vos correspondants, M. le comte de Tristan, vous a fait part des observations auxquelles il s’est livré pour sa- voir jusqu’à quel point les émanations ou effluves terrestres peuvent être appréciées au moyen d'un instrument qui par sa forme a mérité le nom de Furcelle. Une Commission a été choisie dans votre sein pour opérer sous la direction de votre savant collègue M. l'abbé Blatairou, si versé dans les sciences physiques. Cette Commission est loin sans doute d’avoir obtenu tous les résultats signalés par M. le comte de Tristan ; mais ce sujet vous à paru si important, que vous vous proposez d'en approfondir l'examen. Il s'agit ici, en effet, d’une application nouvelle de la physique à la recherche des courants électriques dans l’intérieur du globe terrestre. Par là, sans doute, on parviendra à expliquer une foule de phénomènes dont la cause est encore inconnue, et peut- être y trouvera-t-on l’origine de ces fléaux qui sont venus à _des époques trop nombreuses décimer les populations. Ces phénomènes internes du globe se lieront peut-être avec les variations atmosphériques dont votre respectable Directeur fait depuis tant d'années une étude attentive, Ses observa- tions météorologiques -consignées dans des tableaux qu'il (44) vous soumet maintenant à la fin de chaque saison , offriront un monument que pourront consulter avec succès tous ceux qui veulent suivre l'étude des divers fluides qui circulent à l'intérieur ou autour de notre globe. Si nous passons maintenant des applications de l’histoire naturelle à l'étude proprement dite que vous en avez faite, que d’objets n’aurons-nous pas à vous rappeler ! La nomen- clature pourrait vous en paraître un peu trop aride, et je me bornerai à vous citer quelques-uns des faits dominants. Et d’abord, la Flore de la Gironde, grâce à vos incessan- tes recherches et à celles que vous avez provoquées , s’est enrichie cette année de plusieurs espèces, dont votre véné- rable Directeur va vous donner la nomenclature. Vous savez que cette Flore dont il est l’auteur, est citée avec éloge et confiance dans les autres ouvrages de Ja même nature, et qu'il les surpasse par le nombre des espèces dont il ren- ferme la description. Vous n’ignorez pas non plus que c’est la seule Flore départementale qui soit parvenue jusqu’à ce jour à sa 4.me édition, et pourtant , malgré les travaux qui ont commencé il y a plus de qnarante ans, malgré le zèle d'investigateurs exercés, infatigabies, consciencieux et qui jamais ne s'arrêtent, nous sommes loin d’avoir le dernier mot sur nos richesses végétales, avantage que nous devons aux dispositions si variées des diverses parties de notre dé- partement. M. Pédroni, que nous regrettons tous de ne plus voir à la place qu'il a occupée plusieurs années avec tant de dis- tinction, vous à communiqué un travail important sur la distribution en familles des individus qui composent le rè- gne organique, ainsi qu’un tableau dichotomique des ca- ractères génériques des mollusques pour arriver à la classi- fication des fossiles. M. Laterrade père vous a parlé de l'introduction au Jar- ( 45 ) - din de la Ville, d’un pied de Sagoutier venant de Batavia , et vous vous êtes tous empressés d'aller visiter ce rare végétal, le plus beau de son espèce qui se trouve en Europe. Vous aurez à étudier quelques espèces de plantes dont les germes se trouvaient déposés dans la terre qui enveloppait le pied de ce sagoutier, et qui s’y sont développées contre toute attente. Votre collègue, M. de Kercado , vous a présenté deux reptiles de la même espèce qu'il a tués à peu de jours d’in- tervalle sur sa propriété de Gradignan. Malgré notre amour pour l’histoire naturelle, ou plutôt à cause de cet amour même , nous regrettons bien vivement de les voir figurer parmi les productions de notre sol. Ce sont deux vipères parfaitement adultes, et nous nous empressons de faire con- naitre ce fait pour prévenir autant qu'il dépend de nous les accidents auxquels on s'expose dans la campagne en intro- duisant les mains avec trop d’imprudence soit sous des tas de fagots placés autour des habitations ou dans les bois, soit sous des pierres provenant de démolitions. On avait cru pendant longtemps la vipère fort rare dans nos contrées ; on y avait même contesté son existence. Gachet qui a réuni et publié tant de faits importants sur l'Erpétologie de la Gironde, fut le premier, si je ne me trompe, qui constata d'une manière certaine que nous étions malheureusement dotés de cet hôte si dangereux. La nouvelle preuve que nous venons d'en acquérir, donnera sans doute l'éveil, et l’on ne sera plus embarrassé pour l'application du remède quand des circonstances malheureuses pourront l’exiger. Votre honorable vice-président, M. le docteur Henry Burguet, conservateur du Cabinet d'histoire naturelle de la Ville, vous a présenté dans les diverses familles du règne animal plusieurs sujets rares et précieux dont il a enrichi l'établissement confié à ses soins. Parmi ces sujets, vous. ( 46) avez surtout fixé votre attention sur ceux qui appartiennent à la Gironde. Ainsi vous n’avez pu refuser votre admiration à un superbe Pelican, tué dans les palus de Saint-Loubès , aussi remarquable par sa rareté dans nos contrées que par son parfait état de conservation et le beau développement de tous ses organes. Vous savez que cet oiseau singulier est considéré comme l'emblème de l'amour maternel; mais il serait bien difficile de dire sur quels faits authentiques on a pu s'appuyer pour lui attribuer des qualités que la vue seule de son organisa- tion doit faire considérer comme fabuleuses, malgré l’Anti- quité qui ne les lui avait données sans doute que par suite de l'habitude qu’elle avait d'observer et d'étudier la nature à travers le prisme de l'imagination. Le même membre vous a présenté un magnifique poisson ( Lepisosteus gavialis ) dont il avait fait l'acquisition pour le Cabinet de la Ville. Vous avez pu vous convaincre encore une fois de la différence énorme qui existe, sous le rapport de la forme et de la variété des ornements , entre les ani- maux des climats tempérés et ceux de la zone torride où les couleurs et la vitalité sont si puissamment activées par la chaleur constante jointe à une humidité bienfaisante et productive. Un phénomène vtnithusbhe vous avait été signalé il y a quelque temps, sous le nom de guêpes végétales, par M. Hallié votre honorable collègue, M. Théoph. Laterrade , votre correspondant à l’île de Cuba, vous a annoncé l'envoi prochain de plusieurs échantillons de ces singuliers produits de la nature; mais déjà vous avez reconnu qu'il ne s’agit que d’une mousse s’implantant entre l'abdomen et le corse- let de quelques insectes après leur mort. Vous avez eu là une démonstration palpable de la rota- tion constante des molécules des corps , de l'échange conti- (47) nuel qui se fait entre tous les individus créés ; vous y avez vu la vie venant se greffer sur la mort, et lui servant en quelque sorte d'ornement comme pour en atténuer les rigueurs. | Ce phénomène des mousses végétant sur des insectes avant l'entière décomposition de ces derniers, paraît assez commun dans les contrées chaudes du globe; mais vous vous êtes rappelé avec intérêt qu'il avait été observé dans les Pyrénées, sur le corps d’un perce-oreille, par notre savant correspondant M. Durieu de Maisonneuve, qui prétend que c'est un de ces faits qu’un naturaliste en Europe peut tout au plus constater une fois dans sa vie. La mousse qu'il avait observée était le Sphæria enthomorkhiza. M. de Paravey, l’un de vos correspondants et des plus sa- vants sinologues de la Capitale, vous a communiqué une notice extrêmement intéressante sur une plante de la Chine dont les tubercules peuvent servir d’aliment et dont les tiges sont textiles. Vous avez fait tirer plusieurs exemplaires du dessin qui accompagnait cette notice, et vous avez pris les précautions nécessaires pour qu'il en fût remis aux capitaines de navire de notre port qui font les voyages de la Chine ; vous avez espéré que quelqu'un d’eux prendrait à cette communication un intérêt assez vif pour apporter en France des graines ou des tiges de cette plante, afin de la répandre parmi nous. Si vos vœux sont exaucés , vous vous estimerez heureux d’avoir doté notre pays de cette nouvelle conquête. Je ne vous parlerai pas, Messieurs, des nombreuses ob- servations relatives à l’art agricole ou à l'horticulture, que vous avez fait insérer dans l’Ami des Champs, et qui prou- vent combien vous vous occupez d'appliquer autant qu'il , dépend de vous la théorie à la pratique. Je me bornerai à (48) vous signaler les matériaux qui constituent le 15."° volume de vos AcrTes. Ce volume renferme trois mémoires sur la géologie. Le premier de M. Marcel de Serres qui a traité cette question si importante de la science : Ÿ a-t-il identité entre les es- pèces des terrains secondaires et tertiaires, et celles qui ap- partiennent aux créations actuelles. L'auteur, en admettant la persistance des types génériques, conteste celle des espè- ces. Il prétend que les races anciennes n’auraient pas de représentants dans ce moment sur la terre. Cette opinion, soutenue avec l'habileté qui distingue M. Marcel de Serres, ue manquera pas d’avoir des contradicteurs parmi les au- teurs nombreux qui ont tâché, à force de comparaisons, de constater précisément l'identité que nie le Professeur de Montpellier. Le second mémoire de Géologie est un rapport fait par M. Joseph Delbos, au nom de la Commission que vous aviez chargée d'examiner les terrains mis à nu à Lormont, par les travaux du chemin de fer de Paris à Bordeaux. Les membres qui formaient cette Commission, et la science bien connue du rapporteur, étaient pour vous une garantie de l’exactitude et du soin avec lesquels vous seraient signalés la composition et les fossiles de cette coupe. M. H. Burguet en vous donnant un petit mémoire sur des crustacés fossiles trouvés à La Réole et dans les calcaires de Bourg, vous a démontré que les produits paléontologi- ques de la Gironde sont loin d’être tous connus, malgré les recherches actives dont notre pays a été l’objet, soit de la part des naturalistes qui l’habitent, soit de la part des sa- vants étrangers qui viennent si souvent y puiser des termes de comparaison pour leurs travaux de géologie. La botanique a donné lieu à des mémoires nombreux. Pour que vous puissiez apprécier le mérite et l'importance (4) de ces mémoires, 1] me suffira de nommer leurs auteurs MM. Laterrade père , Ch. Des Moulins , Léon Dufour. M. le doc- teur Lafargue a récemment donné au 15.ve volume une notice sur les racines du Guy, et M. l’abbé Revel votre cor- respondant à ge , une note sur le Fumaria muralis, Fumeterre mura Je ne vous FRE point r ANA de ces mémoires que vous connaissez, mais je ne peux m'empêcher de vous dire que dans son Supplément au Catalogue de la Dordogne, M. Ch. Des Moulins s’est livré à la discussion de quelques espèces litigieuses, et il l’a fait avec cette clarté, cette con- naissance approfondie de la matière dont il vous à si sou- vent donné des preuves et qui, selon toute apparence, dissi- pera les incertitudes sur ces espèces. Dans ce même ouvra- ge, il a consigné des observations fort curieuses sur l’hété- romorphie des feuilles du Nymphæa jaune , laquelle était fort peu connue avant cette publication. Il vous a fait aussi hommage _. opuscule où il ro. # br les feuilles si s le Scirpus la- custris ou jonc des marais , “qu on n ’avait jamais cru jus- qu'ici être une plante foliacée. La Zoologie n'a pas manqué de fournir son contingent à ce 15 me volume, qui renferme : 1.° des observations très- détaillées sur un des mollusques les plus curieux du midi de la France , le Bulime tronqué, qui, vous vous le rappelez, fut trouvé vivant pour la première fois dans la Gironde, par M. Pédroni; c'était le jour d’une de vos fêtes annuelles d'Eté. Le mémoire que M. Gassies votre correspondant à Agen, vous a donné sur ce Bulime, prouve une sagacité, une patience et un esprit d'observation qui font l'éloge de l'auteur. 2.0 Un mémoire de M. H. Burguet pour servir à la Faune de la Gironde , et 3.° enfin, avec le titre modeste de : Quel- ques mots sur Fanaitie des mollusques terrestres et fluvia- tiles, une note édi r M. Moquin- Faso, professeur à à la Faculté des Sciences de Toulouse. (50) L'auteur a joint à cette note des dessins fort curieux sur la bouche de diverses espèces de mollusques ; il regarde avec raison cet organe comme le plus propre à distinguer les espèces par des caractères certains et invariables. Votre correspondance déjà si nombreuse s’augmente en- core chaque jour , et des demandes d'échange pour vos pu- blications vous sont incessamment adressées ; ce qui prouve l'estime dont vos Acres jouissent dans le monde savant. Pour qui connait ces Acres , il n’y a rien d'étonnant; car ils ne renferment que des mémoires inédits, indispensables à quiconque veut se tenir à la hauteur de la science dans l’une quelconque de ses nombreuses branches. e me garderai bien de vous soumettre le tableau de tous les ouvrages qui sont venus enrichir vos archives. L'histoire de ce dépôt vous a été faite dans une de vos dernières séances par votre archiviste, M. Dumoulin, et ce n _. pas le moins intéressant des mémoires qui ont été soumis à votre appré- ciation. Vos relations avec toutes les Autorités de la Ville sont empreintes d’un tel caractère de bienveillance de leur part, que nous ne pouvons nous empêcher d'exprimer publique- ment la reconnaissance dont nous sommes pénétrés. Je ne saurais oublier non plus que M. le Ministre de l’Instruction publique vous a spontanément accordé une subvention que vous avez regardée avec raison, comme une des plus flat- teuses distinctions dont vous pussiez être l’objet, pour les efforts que vous ne cessez de faire dans l'intérêt de la science qui vous occupe. Tel est, Messieurs , le résumé bien succinet et presque infidèle, à cause de sa brièveté, des travaux qui ont si- gnalé l’année dont la séance de ce jour est la clôture obligée. Je n'ai plus qu’à vous dire quelques mots sur les mutations qui se sont opérées parmi nous. Vous avez eu le regret de voir s’éloigner M. l'abbé de Langalerie, qui fut votre vice-président , et que la confiance de ses supérieurs a appelé à la cure si importante de Sainte- (5€) Foy. Cet honorable ecclésiastique vous dit dans une de ses lettres qu'il vous sera toujours vivement attaché par le cœur , et il voit avec plaisir qu’il tiendra encore à la Société par le titre de correspondant pus est une conséquence na- turelle de son départ de Bordeau Ce titre de correspondant vous L avez conféré dans le cou- rant de cette année à Messieurs : Loche, capitaine au 45.° régiment de ligne , ornitholo- giste distingué. oreau, directeur du Jardin des Plantes d'Angers, auteur de la Flore du Centre de la France L'abbé de Lalande, professeur de botanique au petit sé- minaire de Nantes. Vous avez eu la douleur d'apprendre le décès de M. Lesson , correspondant à Rochefort. Je ne peux rien ajouter à l'éloge qui a été déjà fait d’un homme dont les connaissances étaient aussi profondes que variées, qui a publié plusieurs ouvrages très-estimés sur diverses branches de l’histoire naturelle, mais plus particulièrement sur l’or- nithologie, et qui a fait connaître avec les plus grands dé- tails et la plus grande exactitude les monuments archéo- logiques du département de la Charente-inférieure. TABLEAU DE LA 32" FÊTE LINNÉENNE et Observations sur quelques Plantes exotiques , Par M. LarEnRane, directeur de la Société. Chaque année nous ramène d'abord avec le brülant sols- tice d’Été, la Fête Linnéenne , l'anniversaire de notre insti- tution que nous célébrons au milieu des campagnes fleuries ; puis, au début des frimats la séance véritablement linnéenne que nous tenons au centre de la cité, la fête de CHARLES Linné, ct l’usage a voulu que pendant celle-ci nous vous (52) rendions compte de celle-là. C’est ce que nous allons lâcher dé faire en nous bornant toutefois à vous citer ce qu’il y a de plus intéressant dans les diverses excursions et dans les différentes observations dont nous avons à vous entretenir aujourd’hui. Dans le DÉPARTEMENT DE LA DORDOGNE , département il- fastré par la Flore qu’en a faite votre savant président M. Ch. Des Moulins, notre zéelé correspondant, M. de Dives s’est transporté le 28 Join, jour de notre trente-deuxième fête, à Vallereuil , armé de toutes pièces, c'est-à-dire, muni de tous les instruments nécessaires à un naturaliste qui se prépare à une riche excursion ; excité par le désir de faire quelque découverte, mais plein de la triste pensée qu’il ne trouverait rien de nouveau daus une localité qu’il a si sou- vent visitée. Il s’est d’abord dirigé dans la forèt de Jaure qui êlait bien loio, nous dit-il, d’avoir été comme eu 1848, rava- gée par des myriades d'iusectes dégoûtauts, bien que l'Hi- ver dernier ait été fort doux. Aurions-nous, Messieurs, été assez heureux pour que les paroles que nous fimes entendre à ce sujet à pareille époque el dans celle même enceinte, enssent eu quelque retentissement, pour que l’échenillage eût élé pratiqué avec plos de soin el plus d'ensemble; nous le désirons et nous recommandons de nouveau cette opéra- tion tout à la fois si ulile el si nêgligée. Après avoir cheminé plus d’ane heure dans cette forêt, notre collègue a suivi le plateau qui sépare le bassin da Vergt de celui de Crempse, deux des principaux ruisseaux du dé- partement ; il a visité des fourrès , des pinadas , des fontaines d'où s’échappent des cours d’eau la plupart sans nom, et tout cela sans que son attention se trouvât autrement distrai- te que par les jolies fleurs bleues de la lobélie et la majesté du chêne-vert; arrivé à midi par une température de vingt- six degrès , rafraîchie par une légère brise du Nord-Est, aux aux fontaines des plagnes , à deux pas des landes si sauvages de Loupmagne et du hameau où naquit en 1517 , le savant paléographe , l'abbé de Lespine, M. De Dives se trouvait (55 ) dans une localité qui lui paraissait d'autant plus solitaire, que sa pensée se reportait alors sur nous, sur ses nombreux col- lègues qui exploraient en ce moment les campagnes de Créon et de La Sauve. Néanmoins, ajoute-t-il bientôt, mon isole- ment n’élait pas complet : des mésanges, des verdiers, des milliers d'insectes s’agitaient autour de moi; l’imprévoyante cigale faisait entendre son chant continu et monotone; des épinoches , des cyprins, des hydromètres se délectaient dans un pelit vivier dont les bords étaient tapissés de jolies mous- ses et d’élégantes hépatiques. Récolte faite du mourou déli- cat, anagallis tenella, et de la variation à fleurs roses de la bétoïne officinale . M. De Dives , s’est rendu après avoir fait une halte à Vaillereuil, dans des carrières où il n’a trouvé que des ostrea biauriculata et des terebratula difformis , et de là à Grignols où il a vu sur les ruines ou près des ruines du vieux château, l’œillet et le violier sauvage, la cataire ou herbe av chat, si rare dans la Gironde, la loute-bonne, la jourbarbe des toits, l’orobe noir, et le cerisier griottier. Il termine, en mentionnant dans un petit bois de Grignols, la jolie variété flava de l’agroslis cetarea, variété qu’il a déjà signalée à l’auteur du Catalogue raisonné des plantes phanérogames de la Dordogee , à notre honorable président, M. Charles Des Moulins. A Bazas, la division de la Société Linnéenne , division n.0 2, élablie d’après votre arrèté du 5 Décembre 1848, a pro- cédé à son installation pendant la fête. A six heures du malin, le correspondant délèguë, M. le D. Ardusset, président de la nouvelle division s’est dirigé , accompagné de tous ses collègues, de Bazas à Bolac, Les bords du Ciron ont été explorés sous le triple rapport de la bolauique, de la zoologie et de géologie. Les chaleurs de Juin avaient desséché et fait avorter beaucoup de plantes aussi la chlore perfoliée , le capillaire de Montpellier, l’hel- lébore felide et l’ancolie commune sont à peu près les seu- les espèces remarquables de l'excursion. Nos collègues ont vu \ avec plaisir chez M. Labrousse , deux grues sauvages èlevées en basse-cour. Un joli coléoptère l’ophia farinosa , à l'abdo- men argenté, aux élytres d’azur , brillait comme de petites perles sur le sommet des menthes et des eupatoires abritées par les saules qui bordaient la rive. Quelques échantillons de calcaire pétris de débris de coquilles marines, provenant de masses dont les dépôts sont presque à la surface du sol, furent mis en réserve pour le cabinet du Collège. Le président a ouvert la séance par la communication de- la lettre officielle du directeur , relative à la célébration de la 32,me Fête et par la lecture de l’arrêté de la Société portant création et organisation des branches ou divisions de la Société Linnéenne de Bordeaux. L'examen des plantes recueillies pendant l’excursion a êté l’objet d’une intéressante confé- rence , après laquelle le Secrétaire ; M. l'abbé Bacca-Nérac a prononcé un discours dans lequel il s’est attaché à prouver que la division Linnéenne de Bazas, n’atteindrait le but qu’elle se propose, qu’en se réunissant plusieurs fois chaque année. Ces paroles ne pouvaient manquer de porter leurs ose Aussi et ones mors; ila ad ses à l’unani- mitè qu’il bre spporterait le résultat de son (ravail et de ses réchisuhes. Le banquet lui-même a eu sa partie scientifique. On s’y est entreltena de fleurs disposèes avec goût sur Ja table, et on s’est livré à une leaspe et utile discussion sur l'éducation des abeilles, Pendant le retour, on a visité avec intérêt, la magnanerie naissante de M. Darquey, propriètaire-horticulteur , l’un des membres de la division , et nos collègues sont rentrés a Ba- zas à sept heures da soir. 1! en est, Messieurs, de la Tesre et de ses environs com- me de la plaine d’Arlac et des petites localités circonvoisi- nes, le botaniste attentif ne saurait guère y faire quelques pas, s’y livrer à quelques recherches , sans trouver quelques plantes rares ou même quelque chose de nouveau pour le (55) département. C’est ce qui est arrivé à notre zélé collègue , M. Chantelat dans l’excursion qu'il a si bien dirigée le jour de notre fête , de Gujan à Cazau et retour. Tout en explo- rant d’abord , de compagnie avec M. l'abbé Gabriel, vicai- re à Gujan , les bords de la commune du Teich, ils ont trou- vé pour la premiére fois la ruppie en spirale, ruppia spira- lis (Gay ) , rare sur les côtes de l'Océan, plus commune sur celles de la Méditerranée ( { } , et sur les bords des fossés, l’anthocère lisse, anthoceros lævis, l’ane des hépatiques les plus rares de notre Flore. Les bords de l’ètang de Cazau ont offert à nos collègues plusieurs plantes bien intéressantes par- mi lesquelles nous nous bornerons à citer la littorelle des lacs, littorella lacustris et la belle lobélie de Doritmann , lobelia Dortmanna. Enfin les rizières récemment élablies à Gujan ont fourni leur complément à cette riche excursion. puisque on a frouvè dans les fossès qui les entourent, le scirpe mu- croné , scirpus mucronatus qui vient ainsi PRE place dans Ja Flore de la Gironde. Nous avons, Messieurs , des correspondants d’an zèle in- fatigable et d’un dévoüment sans bornes à notre institution. Tel est M. Viramond, médecin vètérinaire , ancien président de notre ex-section de Narponne. Ce vénérable collègue , malgré ses quatre-vingts ans révolus et une température de trente-six degrés et demi, a eu le courage de diriger son ex- cursion dans les environs de Salèles. 11 a trouvé une malti- tude de plantes dont la plupart vous intéresseraient, mais parmi lesquelles nous cilerons seulement le petit arbuste con- nu sous le nom de camélée à trois coques, Cneorum tricoc- (1) Dans des localités beaucoup plus rapprochées , notre hono- rable collègue, M. Ah nor ‘a trouvé deux phanérogames / po- igonummile et cèrsium bulbosum) qui nous avaient échappé et M. paie: de nyéles 8, be naluralisté, nous a rapporté de notre honorable signes de Kereado, à Gradignan, deux (Weissa re Bryum elongatum ), nouvelles mousses pour notre Flore, (56) cum, indiqué par la Flore française dans les lieux pierrenx des départements méridionaux. Mais l’excursion a été courte, force èlait à notre intrépide collègue de sortir d’une atmos- phère brülante , oui bràlante , puisque deux infortunès mois- sonneurs sout tombés morts ce même jour dans les vastes plaines de Narbonne. D’après ses observations météorologiques que M. Viramond repreud le 22 Septembre 1848, depuis ce jour jusqu’au com- mencement de Mai, c’est-à-dire pendant plus de sept mois conséeulifs, toujours aux environs de Narbonne, le vent a soufflé constamment du Nord-Ouest, l’Hiver a été un véri- table Printemps , mais celui-ci a eu ses gelées tardives qui ont beaucoup nui à la vigne et aux oliviers. Les orages ont été assez fréquents et les fortes chaleurs ont commencé le 28 Juin. Une chose assez remarquable, c’est que les observations que me transmet votre correspondant, mon fils Théophile, à San-YaAgo-pbe-Cupa, observations faites le 28 et à la même heure donnent cette année , un résultat bien peu différent de celles de Saléles près de Narbonne, seulement un degré de plus de chaleur dans la colonie espagnole. Mais dans les deux localités le vent soufflait du Nord-Ouest et le temps était beau , serein à San-Y4Go où la hauteur du mercure était de 763 millimètres el uuageux aux environs de Narbonne où le baromètre ne marquait que 762. À la vérité, le thermomè- tre à San-Yago indiquait 30 ‘/, , dès les six heures du ma- lin, et il était encore à 33 ‘/,, à six heures du soir. La division numéro 1, des Basses PYRÉNÉES, a célébré sa fête à Coslèdäa. Les détails ne nous en sont pas encore par- venus. Nous savons seulement par le vénérable président M. De Vallier, qu'il a été obligé de se faire remplacer cette an- née, par notre correspondant M. le D.r Bergeret, fils de l’au- teur de la Flore des Basses-Pyrénées. A la Sauve , pendant que nous considérions au milieu des ruines de l’art, les merveilles de la végétation , je vous en- ( 57 ) tretins du beau sagouier que possède le Jardin des Plantes de Bordeaux, Je vais continuer à vous en donner des nouvelles en y joignant quelques observations sur d’autres plantes in- téressantes de ce Jardin, dont l’administration municipale m'a confié depuis bientôt sept ans, la chaire et la direction. Ma tâche est accomplie. Je vous ai présenté, Messieurs, et chers collègues , devant nos respectables magistrats et de- vant un bien honorable auditoire , un aperçu de ce qui s’est passé le 28 Juin, dans toutes les localités où des correspon- dants, religieux observateurs de nos institufs ont célébré la fête Linnéenne. J'y ai ajouté quelques observations sur les phénomènes da sommeil , des odeurs et de la croissance des plantes. Ici je ne devais qu’effleurer ce sujet que je me pro- pose de traiter plus tard et avec plus de détails, mais je crois en avoir assez dil pour montrer l’opportunité et l’uti- lité des travaux de la Société Linuéenne, de cette Societé qui la première a répandu à Bordeaux et dans le Midi, le goùt et l'amour de 1 étude des fleurs. - ( La seconde partie de ce discours est relative à des observa- tions qui ne sont pas encore terminées et qui doivent étre l'ob- jet d’un mémoire spécial). LA FOIRE DE LUBON, CANTON DE GABARRET, ARRONDISSEMENT DU MONT-DE-MARSAN, DÉPARTEMENT DES LANDES ; Lecture PES le T Novembre 1849, jour de la Séance publique d'Hiver , par M. Auc.te PETIT-LAFITTE. Si l’on se demande quelle a pu être l’origine des foires , de ces grandes solennités commerciales où se donnent ren- dez-vous, et ceux qui ont à vendre, et ceux qui veulen acheter , il est impossible de ne pas reconnaître que cette origine , il faut aller la chercher dans les fêtes religieuses : 5 (58) locales, dans les pélerinages, dans ces manifestations de la foi qui réunissaient, à un jour donné et dans un lieu déterminé , toutes les populations environnantes. Ainsi s'étaient arrangées les choses sous l'influence des croyances primitives, ainsi elles continuèrent quand le christianisme vint régénérer le monde; quand ses divines doctrines vinrent illuminer les esprits et embraser les cœurs, quand les propagateurs, les martyrs de la foi eurent pris la place des divinités payennes. La démonstration de ces faits, nous pourrions l’appuyer sur l'exposition de circonstances et d'opinions tirées des auteurs les mieux informés et les plus dignes de foi. Nous nous bornerons à la citation d’un écrivain de la localité, s’occupant de recherches relatives à cette même localité. En parlant de la commune de Saint-Sève et d’une cha- pelle que l’on y rencontrait, sous l’invocation de Saint- Antoine, l'abbé Beaurin, dans ses Variétés Bordelaises, dit : « La dévotion qu’on a envers ce Saint dans cette con- trée , attire à cette chapelle une affluence de peuple au jour de la fête de ce Saint, qu’on célèbre le 17.2 du mois de Janvier. Le concours y est si considérable, qu'il s’y rend plusieurs marchands qui y apportent diverses étoffes et quantité de marchandises de différentes espèces, de sorte qu'il s’y tient ce jour une foire. Les marchands y viennent avec d'autant plus de confiance, qu’il existe dans ce lieu, des halles pour y débiter leurs marchandises : il s’y tient même une seconde foire le 10° du mois d’Août, jour de la fête de Saint-Laurent, où il se rend à cette chapelle un concours considérable de peuple. C’est ce concours, au lieu de dévotion, qui a donné naissance à la plus part des foires. Il est naturel qu’on apporte des denrées et des mar- chandises partout où on a espoir de les vendre. Or, quelle occasion plus favorable de s’en défaire, qu’un concours consi- (59) dérable de peuple ? Chacun, après avoir satisfait à sa dévo- tion, n’est pas fâché de se pourvoir de ce dont il peut avoir besoin dans son ménage, et de profiter des occasions, qui ne sont pas fréquentes dans la campagne, d’acheter les choses dont on a besoin dans une famille ». Ces usages de temps où la foi, il faut bien le reconnaître, avait une simplicité et une naïveté qui ne sont plus le par- tage de nos jours, ont beaucoup perdu du caractère prin- cipal qu'ils accusèrent alors. Les solennités commerciales , les foires , les marchés, que réglementent aujourd'hui les lois et les ordonnances, ont dû aussi à la facilité des com- munications , et surtout à leur multiplication hors de toute proportion souvent avec les besoins qui les réclament, une décroissance sans cesse en progrès. Toutefois , il est encore des contrées que leur position particulière, les mœurs, les habitudes , les besoins de leurs habitants, maintiennent sous ce rapport dans un état d’au- tant plus remarquable, d'autant plus digne d’être étudié, que cet état contraste de la manière la plus tranchée avec celui des localités environnantes; qu’il semble un oubli des temps passés, un moyen de comparaison de la civilisation qui n’est plus avec celle qui lui a succédé. Assez généralement, ces positions particulières et de Le en plus rares, sont attribuées, par les hommes qui ne voient de bien et de raison que dans ce qui est nouveau, à ce qu'ils appellent les préjugés et l'ignorance : certes nous ne les chicanerons pas sur les mots, seulement nous leur dirons qu’en ces sortes de matières surtout, c’est aux résul- tats qu'il faut s'attacher, c’est le bien-être, le contentement assurés par l’un ou l’autre dns qu’il faut avant tout prendre en considération. Quoi qu'il en soit, nous, avons non loin de nous une vaste contrée sur laquelle nous retrouvons encore, en maintes (60 ) localités, ces usages d'autrefois, ces traditions d’un autre âge : cette contrée c'est celle que l’on qualifie de Landes et voici ce que nous y avons vu, ce dont nous avons été témoin, à la célèbre foire de la commune de Lubon, can- ton de Gabarret, arrondissement du Mont-de-Marsan, département des Landes. Tout le monde connaît le pays dont nous voulons parler, cependant s’il était, parmi nos auditeurs, quelques person- nes qui ne l’eussent pas visité, nous ne saurions mieux faire pour leur en donner une idée, que de leur dire, avec no- tre savant collègue l’auteur de la Flore de la Gironde : « C’est un spectacle tout à la fois triste et majestueux, grand et extraordinaire pour l’habitant des pays cultivés, que celui de ces landes, où la vue se perd dans un ho- rizon intercepté de distance en distance par quelques bou- quets de pins; de ces plaines immenses qui en hiver res- semblent à un grand lac, et qui, dans une saison plus douce, deviennent de vastes pâturages, où l’on voit çà et là des troupeaux nombreux, sur lesquels veille un pà- tre, revêtu de la toison de ses brebis, et monté sur de hautes échasses. Telle la mer dans un jour de calme, offre à l’œil étonné ses mouvantes plaines, dont la couleur glauque va se perdre dans l’azur des cieux ; tels ces espè- ces de déserts présentent à l'observateur surpris les ondu- lations de leur sol, dont la pâle verdure se marie ordinaire- ment avec quelques nuages, auxquels les rayons re semblent ne pouvoir atteindre a l'astre est à son zénith ». C’est au milieu de ces vastes solitudes, au Sud desquelles se dessinent dans un lointain vaporeux les montagnes des Pyrénées, que l’on rencontre, si l’on sait la trouver, si l'on connaît les chemins qui y conduisent, les hiots, comme (61) disent les habitants de la contrée (1), Fhumble commune de Lubon. C’est dans cette commune, du reste, autour de son église, que circulent , au fond de fossés fangeux, cachés sous d’épais roseaux, les minces filets d’eau qui donnent naissance au Ciron, la plus importante des rivières de cette partie des landes, celle qui porte, sur plusieurs points de leur vaste étendue, le mouvement et l’industrie, en même temps qu’elle sert de véhicule, par le moyen du flottage, aux bois qu’elles produisent. À cause d’une chapelle qui attirait jadis en ce lieu, le jour de saint Féréol, le 18 Septembre, un concours de fidèles venus des points les plus éloignés du pays, une foire célé- bre s’est établie à Lubon et s’y tient chaque année, ce même jour, avec une régularité et une solennité que sont loin de nous offrir d’autres institutions analogues , bien que celle-ci n’ait pour garant de tous ces avantages que la tra- dition et la coutume. Arrivé à Lubon la veille de ce grand jour, c’est-à-dire le 17 Septembre, nous pümes d’abord explorer les lieux qui devaient servir de champ de foire. Ces lieux ne sont autres qu'une portion des vastes communaux qui s’avancent jusque sous les murs de l’église, seule construction, avec la maison bourgeoise de l’un des plus habiles cultivateurs de la contrée (2), que l’on puisse y signaler. Quelques pins, quelques chênes épars projettent çà et là une ombre dont on profite, soit pour des cabarets improvisés, soit pour des jeux de billes (3), soit pour la danse, soit enfin pour ce divertissement barbare, mais très-commun dans ces contrées , comme dans une partie de l'Angleterre, qui consiste à prendre un malheureux oiseau de basse-cour (1) Ce nom de biots donné dans les taie aux petits sentiers 4 y servent de routes, est évidemment un diminutif du mot latin surtout quand on réfléchit à rebitade qu’ont ces populations à 44 duire le V, parle (3) Jeux de baley, selon l'expression locale. ( 62) appendu à une corde, pour point de mire de pierres lancées avec plus ou moins d'adresse. Entr’autres détails qui nous frappèrent dans les prépara- tifs de la foire, nous nous rappelons avoir vu s'installer sous un de ces ombrages, un danseur de corde tendue. Certes le fait était remarquable et c'était bien pour la première fois, au grand ébahissement des gens du pays, que pareille chose se voyait en pareil lieu. Le bateleur que l'excès de notre civilisation a ruiné, venait chercher un refuge au milieu des landes ; mais, à fatalité! son mérite, ne pouvait y gagner; car à des hommes qui n’ont plus foi dans ce mérite, parce qu’ils ont vu plus fort, parce qu’ils ont vu les funambules, il en substituait ss qui l’attribuaient tout entier à la magie et aux sortilège Mais déjà les ses qui doivent animer la foire de Lubon, qui doivent lui donner un caractère tout particu- lier , les pâtres arrivent de toute part, avec leurs bérets (1) à ganse rouge, avec leurs sabots à guêtres, avec leurs casa- ques ou dalmatiques en peau de mouton, avec les sonnettes de leurs troupeaux suspendues à leur ceinture. Ils s’abor- dent, ils se complimentent , ils se pressent, en affectant d’ébranler fortement leur retentissante ceinture et de pro- duire ainsi un bruit à nul autre pareil et que répètent les échos les plus éloignés. Enfin, le moment est venu où leurs échanges vont com- mencer ; le jour cesse, la nuit lui succède , des torches de résine sont allumées et suspendues aux chênes , du haut desquels elles projettent sur ce rassemblement une lueur rougeâtre qui achève de lui imprimer le caractère de res- semblance le plus frappant avec ce qu’on nous dit des fêtes (1) I fut un Géo où le landais n’aurait pas se montrer à la foire de Lubon autrement coiffé qu'avec le béret ! pr on lui : la lande , de plus en plus commun. Ainsi s’effaçeni les cneiree ocalités , ainsi disparaît , Dis, se place à une affadissante uni- formité, le pittoresque des cos (65) nocturnes des anciens Druides , ou avec ce que l’imagina- tion des poètes a prêté de plus extraordinaire , de plus fan- tastique , au sabbat des sorciers. Dans la foule sans cesse grossissante, au milieu de la mêlée, chaque pâtre en cherche un autre avec qui il puisse entamer une affaire; dès qu'il l’a rencontré, il détache de sa ceinture la sonnette qu'il veut lui vendre ou lui échanger, il la fait sonner à son oreille de manière à imiter le son qu’elle rendrait suspendue au cou de la vâche ou de la bre- bis et de manière aussi à dissimuler les défauts , les fêlures qu’elle peut avoir : l’autre partie, après examen suffisant, ou achète, ou troque avec ou sans retour, selon la valeur des objets donnés ou recus et tous deux se séparent pour nouer d’autres relations ; pour continuer ainsi, jusqu’à l’ap- parition du jour, au moins le plus bruyant, si non le plus lucratif des commerces. On comprend qu’à la faveur de l'obscurité, aidées par le mouvement et le vacarme qui ne cessent de régner, bien des tentatives indélicates s'effectuent. « Un pâtre adroit et consommé dans ce genre d'échange , dit un écrivain du pays, accoste un enfant, lui propose d'échanger sa sonnette, il la lui demande pour en vérifier lui-même le son ; l'enfant la lui confie , il reçoit aussitôt un coup sur son béret qui tom- be à terre; et tandis que l’enfant ramasse sa coiffure, le fripon disparaît et se perd dans la foule, emportant la son- nette du mal-avisé qui la lui a confiée (1 ) » C’est ainsi, soit dit en passant, que l’on dresse les en- fants à la méfiance et à la ruse, qu’on les mène à cet état d'intelligence précoce dont leurs parents tirent vanité et qui en font autant de petits roués auxquels ni l’âge, ni l'expéri- ence de la vie, n'ont plus ri rien + apprendre. » Il arrive aussi ;q , dit encore l'écrivain déjà cité, que des sonnettes Pts 0 ou cité de service, sont pré- ms Fe ) M de Métivier : De l'Agriculture et du Défrichement des Ian (64) sentées en échange , et auxquelles on a adapté une anse en bois , dans l’espoir qu’à la faveur de la nuit, la MOINE ne sera pas aperçue. Mais, malheur à celui qui s’en rend coupable, s’il la présente à quelqu'un qui ait de l’expé- rience, la fraude est aussitôt découverte et signalée aux cris de : braza, braza! À ces mots, se rassemblent nombre de pâtres qui sur-le-champ font raison de la tromperie , en mettant au feu la sonnette suspecte. Lorsqu'elle a été rou- gie, on la porte un peu au large, et alors chacun la frappe . à coups redoublés de bâtons, jusqu’à ce qu'elle soit com- plètement applatie et hors d’état d’être à l'avenir représen- tée. C’est ainsi que ce tribunal de pâtres rend la justice, sans frais, sans huissiers , sans procureurs. C’est en petit, le tribunal de la mesta, chargé de juger les délits que les bergers commettent dans leurs courses de l'Estramadure , en Galice et Asturies, etc... » Enfin le jour arrive, le soleil jette sa lumière sur ce champ témoin de tant d’exploits , les torches se sont étein- tes, les danses frénétiques au son de la cornemuse ont cessé, les buveurs ont quitté la table, les joueurs aban- donné leur partie, tout est rentré dans l’ordre et un silence complet a succédé au vacarme et au tumulte. Les sonnettes elles-mêmes ne tintent plus, si ce n’est à l'écart et par le mouvement accidentel que leur imprime l'examen attentif que font les spéculateurs de la nuit, des gains ou des pertes qu'ils ont pu réaliser. Alors commence la foire , la véritable foire ; les animaux que l’on veut y exposer arrivent de toute part; les vendeurs et les acheteurs s’y rendent également; les charrettes , les bœufs, les chevaux encombrent nues les avenues et des scènes nouvelles que nous n'avons | pas l'intention de dé- crire, mais qui, la pluspart, ne mériteraient pas moins cependant de fixer notre attention, viennent une seconde fois animer un paysage qui sera rendu demain au calme le plus profond , à la solitude la plus complète. 33. FÊTE LINNÉENNE. En vertu de l'article VI de ses statuts, la Société Lin- néenne el ses divisions françaises et étrangères ont célébré le jeudi 27 Juin dervier, la trente-troisième fête Linnéenne. A Borveaux, les voitures sont parties à sept heures du malin de l’hôtel du Musée et du Jardin des Plantes et sont arri- vées à huit heures sur le domaine de Lafontaine, commune d'Eysines, où tout avait été disposé pour la solennité par les soins de MM. Petit-Lafitte et Charles Laterrade , commis- saires de la Socièlé qui a êèté reçue par le propriétaire M. Lemotheux, membre de la Société d'Agriculture de la Gironde. Après quelques instants de repos, on a visité, dans une pièce à demi-obsecure , des champignons de couches, agaricus campestris cullivès avec le plus grand succès. Depuis la voileuss en jugeait par leur fraicheur et leur chapeau con- vexse, de nombreux groupes de celte délicieuse fongosile s’élevaient sur les couches. Tous ceux que nous avons exa- minés appartenaient à la variété à lames roses. Immédiatement après, la Société et les personnes invitées ont formé deux divisions. La première sous la direction de M. Ch. Des Moulins, s’est portée vers la jalle de Blanque= fort , et la seconde dite du copies à la tête de laquelle était le Directeur , est restée sur le bien de La Fontaine , d’où elle s’est bientôt dirigée sur le domaine de Boisgramond , tou- jours chez M, Lemotheux dont elle a va avec plaisir les divers moyens d'exploitation agricole. 6 ( 66 ) Là , tout avait été disposé pour la séance , sous de grands chênes placés dans une garenne voisine de l’orangerie. A midi, le thermomètre marquait 26 degrés, le ciel était nua- geux et le tonnerre commençait à gronder. Après une assez longue hésitation pour savoir si la séance aurait lieu en plein air ou dans l’intérieur des bâtiments, le temps s’est éclairei. Le Directeur M. Laterrade occupe le fauteuil , ayant à sa droite M. l'abbé Roche, curè d'Eysines, à sa gauche M. Lemotheux , et il ouvre la séance, par le discours suivant ( Voyez pag. 69 ). M. Labarrère, correspondant à Pau, M. Gassies, à Ado, MM. Micé et Fischer, comme ayant obtenu l’un le 1°7 prix de physiologie, l’autre celui de description au Jardin des Plantes , et plusieurs autres lauréats de la même école tous ayant eu des premiers prix, assistaient à la fête. M.n° Lemo- theux et quelques autres dames veoues de Bordeaux étaient à la séance. Autour da bureau au-dessus duquel s’élevait le portrait de Linné, avaient pris place MM. de Kercado, Lajard , ti- tulaires de la Société et M. Delbos correspondant. La correspondance offre les lettres de M. le PRÉFErT, de M. R. Giese, de M. Arrondeau, accompagnèe d’un mémoire qui est renvoyé au Conseil, de M. Odon Debeau, d'Agen, et de M. de Lacolonge, correspondant à Loupes ( Gironde ). Le prèsident, M. Ch. Des Moulins, prenant la parole s'exprime en ces lermes : Messieurs, J'ai le projet d'adresser aux Secrètaires généraux du pro- chain Congrès scientifique, de France , qui doit s’ouvrir à Nancy le 3 Septembre, une lettre relative à trois des ques- tions botaniques qui ont été insérées au programme et qui seront débattues dans cette assemblée. ( 67 ) Je serais heureux de voir mon opinion personnelle étayée de la vôtre, mes chers collègues , ou amendée par vos bons avis, ou encore fortifiée par les argaments que vous pourriez fournir en faveur de la thèse que je me propose de soutenir dans celte communication. J’ai donc espéré que vous vou- driez bien me permettre de vous en donner lecture; et la fête qui nous rassemble m'en a paru être la plus favorable occasion, puisque les soldats de la science devaient être groupès, au grand complet, autour du chef vènèrable et bien-aimé qui nous a tous précédés dans la carrière de l’é- : {ude, et qui y a introduit la plupart d’entre nous, IL vient de proclamer des conquêtes dues au zèle avec lequel vous avez imité ses exemplés : puisse-t-il confirmer par son assenli- ment les observations auxquelles je vais en appeler , et don- ner son approbation au choix des principes que je vais invo- quer à l'appui de mon opinion ! Nous ne pouvons publier ici la lettre de l'honorable président, puisqu'elle est destinée au Congrès de Nancy ). M. Ch. Des Moulins continue par la lecture de son pro- jet d’adresse, véritable et intéressant mémoire qui fixe l’atten- tion de tonte l’assemblée et excite souvent des gestes d’ap- probation. Mais vers le milieu de cette importante commu- pication , l’orage éclate, la pluie tombe, il n’est plus possi- ble de tenir la séance en plein air ; on passe dans l’orangerie où un bureau est instantanèment établi et où le Directeur an- nonce que la séance est reprise. La lecture du président ter- mivée , le Directeur l'accompagne de réflexions approbatives, et M. Ch. Des Moulins présente une Spongille fluviatile , Spongilla fluviatilis, avec ses œufs, trouvée il y a quelques jours au Pont de la Maye, par M. Eugène Panel , interne à l'hôpital Saint-André et qui assiste à la fèle comme ancien lauréat de l’École de Botanique. M. Laterrade rappelle que (68) le jeune Eugène Ramev aussi présent, avait trouvé il y a deux ans cette spongille à Bègles et à Arlac. M. Gassies, correspondant, d'Agen, donne lecture d’un mémoire de M. Debeau fils, dont le père est correspondant. Ce mémoire consiste en une discussion sur le Cuscuta has- siaca de Pféiff, qui selon de Candolle , Prodrome, tom. IX, pag. 456 et 565, paraît se rapprocher de la Cuscute en co- rymbe, Cuscuta corymbosa. Renvoi au Conseil avec un ca- talogue des plantes de Lot-et-Garonne , par le même auteur. M. Dumoulin , archiviste, consacre quelques pages à des considérations intéressantes sur les araignées et particulière- went sur une pelite espèce dont les toiles couvrent abondam- ment depuis peu quelques murs de certains édifices. M. le docteur H. Burguet, vice-président, entretient la Socièlé d’une espèce d’urédinée qui paraît appartenir au genre /saria, qu’il a observée sur des insectes vivants. Ch. Des Moulins présente un rapport sommaire des excursions de la journée, rapport dans lequel il signale : l’hydrodyction pentagonum, espèce de sac fermè par les deux bouts et formè par un réseau de mailles pentagones ; il élait avec un Chætophora formant des nodosités sur les fila- ments; le Chara fragilis de Desv., Capillacea de Thuillier; le Scirpus lacustris avec des gaines très-longues, mais sans véritables feuilles ; le Potamageton lucens avec sa forme acu- minatum, et une de ses congénères qui se rapproche de l’Hornemanni (Mayer); l Erysimum cheiranthoides etun pied excessivement touffu de l’Anthemis mixta, à odeur de ben- join, ce qui proyenait peut-être de l’élat orageux de l’atmo- sphère. M. Gassies succède à M. Ch. Des Moulins et entretient la Socièté de la partie conchyliologique de l’excursion dans la- quelle on a trouvé pour la première fois dans le départe- meol , la Paludina abbreviata de Michaux , dans la belle fontaine de M. Lemotheux. (69) Le banquet a eu lieu à Boisgramond , chez M. Lemotheus. On à ensuite visité le lieu dit Les Iles et quelques autres localités. Après avoir exprimé sa reconnaissance à M. et M.r: Le- motheux , pour la bienveillance affectueuse avec laquelle elle a èlè reçue sur leur domaine, la Société est rentrée à Bor- deaux à neof heures du soir. A NaRBonxe, l’excursion a commencé à quatre heures du malin ; grâces au zèle de M. Viramond, les détails en sont arrivés le 30 à la Societé. A Mawzac ( Dordogne), où l'orage n’a éclaté qu’à six heu- res du soir , nous marque M. De Dives, l’excursion a eu pour objet les plantes de Ia localité dite Bancherel. A Coscépaa (Basses-Pyrénées), M. le Baron de Vallier, président de la division n’ayant pa diriger l’excursion a dé- léguë, pour cet effet, M. le docteur Bergeret, correspondant de la Société. A Bazas, M. le docteur Ardusset, président de la division N.° 2, en a réuni les membres qui ont célébré sous sa di- rection la fête de la Société. Discours prononcé à Boisgramond, domaine de M. Lemo æ, commune d'Eyzines, le 27 Juin 1850, jour > membre des Académies des Sciences de Bordeaux, de médecine de Madrid, Pa TS PA -# l’Institut des Pro- vinces, professeur-directeur du Jardin des Plantes de la Ville, directeur de la Société EE et de ses divisions françaises et étrangères. Messieurs , À mesure que les institutions s’éloignent de leur origine, on perd de vue les bases sur lesquelles on les a établies. On (70 ) veut sonder pour examiner ces bases , et souvent au lieu de les consolider on les ébranle. Il y a ordinairement une loi fondamentale, une charte écrite. On en conserve la lettre, mais on en oublie l’esprit. On à vu une grande nation , au bout de quatorze siècles de gloire et de prospérité, se demander si elle était consti- tuée, et Dieu sait ce qu’elle a gagné à faire de nouvelles constitutions ! La Société Linnéenne , fidèle au règlement qu’elle s’im- posa lors de sa création en 1818, règlement approuvé par ordonnance royale du 15 Juin 1828 , quoique jeune encore, a passé par bien des vicissitudes , traversé plusieurs révolu- {ions , et cependant elle se montre aujourd’hui debout sur ses bases , la même qu'on la vit surgir il y trente-deux ans, sous le saule d’Arlac, toujours amie passionnée de la nature qu’elle observe, qu'elle étudie, qu’elle admire dans la richesse comme dans l’harmonie de ses produits. La Société Linnéenne trouve dans son nom, un souvenir illustre, un appel incessant à ses travaux, et dans son réglement fondamental, seulement composé de douze arti- cles, lout ce qui est nécessaire à son maintien et à son organisation. D’après cette loi fondamentale de son institu- tion , elle admet autant de membres titulaires qu’il y a de classes dans l’ingénieux système de Liuné; elle renouvelle son Bureau à l’époque où la végètation reprend vie dans nos climats ; elle a deux grandes solennités : l’une, celle de ce jour , qu’elle célèbre au milieu de nos campagnes fleuries, et l’autre au retour des frimats, au centre de la cité, le 4 Novembre, jour de saint Charles, en mémoire de Charles Linné ! Dans la premiére, elle rend compte de ce que les ex- cursions ont produit de plus remarquable, surtout dans le département, pendant l’année qui s’est écoulée depuis sa précédente solennité. C’est la tâche que j'ai à remplir en ce (A) moment auprès de vous, chers et zèlés collègues, devant cet honorable auditoire, en présence du respectable curé d'Eyzi- nes, M. l'abbé Roche, qui a pris quelquefois part à nos excur- sions, et en présence de M. Lemotheux, l’un des membres les plus distingués de notre Société d’Agricultare. Depuis le 28 Juin dernier où nous célébrions au milieu des ruines de La Sauve et d’une riche végétation notre fête d'Été, de nombreuses excursions ont été faites aux environs de Bordeaux et sur plusieurs autres points du département. Il en est résulté de nouveaux sites pour quelques espèces rares de notre Flore, et la distinction de plusieurs de ces espèces établies depuis peu et qui avaient élé souvent con- fondues avec leurs congénères. Le jeune Eugène Ramey nous a rapporté au mois de Fé- vrier dernier, du lieu dit le Tourne, route de Langoiran, à Créon le Perce-neige, galanthus nivalis, que M. l’abbè Lussac avait précédemment trouvé à Cadillac, dans un bois humide et couvert. Vous savez, Messieurs, que nous n’avions celte plante que des palus de Bouillac. M. l'abbé Lussac, aujourd’hui vicaire à Coutras, est ce même abbé que vous couronnâtes , alors élève du Grand- Séminaire, pour avoir trouvé le premier en 1846 , à la Réole le Senecio viscosus et en 1847, à Savyignac, l’oxalis aceto- sella. Xi a vu le thalictrum aquilegifolium dans les bois et les près ombragés de Coutras. C’est d'autant plus heureux , que nous n’avons pu retrouver depuis plusieurs années, cette espèce que nous avions indiquée à Libourne dans la 3° édi- tion de la Flore M. Testas, pharmacien , dont vous connaissez le talent et le zèle, nous a apportés venant de Bruges , et nous vous les avons montrès dans une de nos séances générales, des échantillons da Melampyrum arvense, jolie plante qui figure dans la 3.m* édition de la Flore, (page 310) et que nous (72) avions supprimée dans la 4."€ parce qu'elle nous avait été indiquée à La Teste, où M. Chantelat et moi n’avions pu la trouver, el que je n’en possédais aucun échantillon dans l’herbier. Vous avez couronné dans votre séance d’hiver, M. Lafont pour avoir trouvè ou distingué, le premier dans nos champs le Sedum macranthum de Bastard de l’album de Linné. Ua autre élève de l’Ecole de Botanique, le jeune Eugène Ramey que nous avons déjà cité , a cueilli ces jours derniers à Floi- rac, le Trifolium rubens, Force ayant été à notre honorable président de laisser en paix les plantes de Lanquais dans la Dordogne, il a reporté ses recherches sur celles de la Gironde où il n’a pas manqué de faire des conquêtes parmi lesquelles nous citerons : Le Diplotaxis muralis D.C. à Floirac, qui figure dans Ja 3e édition de la Flore; mais que nous n'avions pu retrouver depuis plusieurs années ; le Fumaria muralis aux Pins-Francs. Nous l'avons observé depuis à la pépinière départementale et au Jardin des Plantes ; Le Barbarea stricta qui doit être substitué au vulgaris avec lequel il ayait été confondu, mais dont il se rapproche cependant assez pour que De Candolle l’en ail considérè comme une varielé; Etle Raphanus maritimus ( R. landra Morett?) que nous pouvons maintenant citer et toujours, grâces à M, Ch. Des Moulins, comme fleurissant en Octobre, sur les pierres du talus de la digue de Lassouyes. L'un de nos honorables titulaires , M. Lespinasse, a trouvé à Pessac, le Neslia paniculata. Nous rappellerons aussi, puisque nous vous les avons déjà citées dans la séance publique d'hiver, les deux espèces Ruppia spiralis et Scirpus mucronatus dont notre actif et zèlé collègue, M. Chantelat, enrichit notre Flore pendens la fête de l’année dernière. Eaño, et c’est par là que je terminerai ce faisceau de plan- les rares ou nouvellement observées dans le département, (7%) ce faisceau de fleurs que vous avez recueillies et que je suis heureux de rassembler pour les offrir, au nom de la Société Linnéeone et le jour mémorable de son trente-troisième an- niversaire, comme un bouquet à la mémoire de l’immortel professeur d'Upsal ! Je vous annoncerai qu'une plante certai- nement nouvelle pour la Flore de la Gironde et même on pourrait dire pour celle de la France, une espèce bien remar- quable de Chara, le Stelligera (Baüer), a été trouvé en Août dernier dans le Libournais, et par une dame dont le nom est bien honorablement connu , par M."° Dufrénoy, en cherchant dans les eaux du Lary, à Chabreville, près de Guîtres, des Zanichellies destinées aux observations aoxquel- les se livre notre savant correspondant, M. Gay, sur ce genre de plantes, Je dois, Messieurs, ces intéressants détails et un échan- tillon de la plante rare dont il s'agit, à mon savant ami, M. Charles Des Moulins, qui me met ainsi à même de procla- mer dans celte solennité le nom de M."° Dufrénoy et de dé- sirer à l’honorable botanophile de nombreuses imitatrices de son zèle pour lés progrès de la science. Notre correspondant M. Labarrère qui plus d’une fois, comme aujourd’hui, est venu des Pyrénées sur les bords de la Gironde, pour y célébrer avec nous la fête de Linné, nous à apporté, et préparés, comme vous savez qu'il les prépare, des échantillons de l'Ophioglossum lusitanicum qu'il a recueillis ce Printemps , à un kilomètre de Pau, dans la plaine de Bilhières (1), et du So/danella villosa de notre collègue M. Darracq, provenant du Pas-de-Rolland , près de Cambo (Basses-Pyrénées). M. Gay, persiste à penser que cette Soldanelle n'est qu'une variété de la montana. Passons maintenant, Messieurs et chers collègues, et con- sacrons-leur ici quelques lignes , à ces belles étrangères q x RAT LE Q LU MES Ji "OR 1 La ARE (1) C’est de celte même plaine que provenaient les échantillons de cette plante que la Société avait reçus précédemment de son correspondant à Bagnères, M, Philippe. (7%) jours de l’Été quelques représentants de la végétation gran-. diose des pays qu’inondent des flots de chaleur et de lumière. Nous avons vu successivement fleurir au Jardin botani- que : les C'ereus peruvianus, var. monstruosus, le Spinulo- sus, le Grandiflorus, le Veronica speciosa, le Nymphæa cærulea, le Cereus triangularis, la Papaye, Carica papaya, le Gesneria mollis, V Amaryllis de Joséphine, Brunswigia Josephinæ, le Crinum amabile, seconde floraison en Octo- bre , la première avait eu lieu en Août; l’Agave geminiflora, objet du mémoire qui vous fut présenté le 2 Janvier dernier par mon fils Charles (1) ; le Strelitzia reginæ et \ Amaryllis reginæ. Rappelons pour les plantes qui ont figuré à l’expo- sition horticole de Juin, les beaux Catleya labiata de M. P. Coudert et la magnifique collection de calcéolaires de M.”° Baour , collection qui a valu à son jardinier la médaille d’or. Un mot sur la zoologie fossile , car je dois signaler ici cette nouvelle Pyrule trouvèe à Léognan et décrite (2) par M. H. Brochon fils, l’un des élèves de l’École de Botanique, et qu’il a dédiée à notre honorable président. D’après l’état de notre correspondauce au 26 du courant, nous avons l'espoir que la fête qui nous réunit, se célèbre en ce moment, à La Teste, à Bazas, dans la Dordogne, dans l’Aude, dans les Basses-Pyrénées et à Saint-Yago de Cuba. Tout-à-l'heure, Messieurs, M. Ch. Des Moulins voudra: bien nous donner un aperçu de ce que nous avons observé soit sur les bords de la Jalle de Blanquefort, soit dansle do- maine de La Fontaine et dans celui de Boisgramond , dont le propriélaire, M. Lemotheux, habile directeur de ses cultures, a obtenu dans l’exposition horticole du 5 Juin dernier la Médaille d’or. ue (1) Observation sur Énrisris mp PR FE (Ker ) qui a fleuri pour la première fois à Bordeaux, au Jardin Botanique de cette jus FE, pag. 105, et Ami des c champs , Mai 1850. Éstrat dus de: Avec planche coloriée, par M. Gérand ain (2) Pyrula Moulinsit. Avec Let he « de la Société Lin- néenne de Bordeaux. Tom. XVI, SÉANCE PUBLIQUE D'HIVER . ANNÉE 1850. Elle a eu lieu le lundi 11 Novembre, à sept heures du soir, dans la grande salle de l'Académie, et, malgré le brouillard épais qui dominait dans l'atmosphère, cette séance avait attiré un nombreux et brillant auditoire ; c'était comme une fête dont Flore semblait faire les frais au milieu des frimats. De beaux bouquets étaient distribués aux dames, des massifs d’arbustes exotiques remplissaient les angles du fond de la salle, et l’intérieur de l’hémicycle du bureau était orné de plantes vivantes et fleuries. M. Dosquet , secrétaire-général de la Préfecture était à la droite du Président, et M. Feytit, adjoint au Maire, à la gauche, le président de la Société Philomathique , le secré- taire-général de la Société d'horticulture et autres notabili- tés scientifiques avaient été placés au bureau. M. Charles Des Moulins, président de la Société a ouvert la séance par un discours qui réunissait les grâces de l’élo- cution à la hauteur des pensées. C'était une suite de remer- ciments et d'encouragements aux personnes qui s'occupent de recherches en histoire naturelle. (1) Cet article est extrait en partie du Mémorial et en partie de la Guienne. (%) Le secrétaire-général, M. Cazenavette, a lu la notice des travaux annuels, dans laquelle il a su allier l’exactitude à la briéveté. Le trésorier, M. A. Petit-Lafitte a présenté une descrip- tion attackante et instructive de l'Entre-deux-Mers , consi- dérée sous tous les rapports susceptibles d’intéresser le plus vivement un publie bordelais : constitution physique, aspect pittoresque, géologie , agriculture , industrie, monuments, état moral de la population, toutes ces choses ont eu leur place dans cet important travail. Le Directeur, M. Läterrade Le a présenté le tableau ‘de la 33%° fête Linnéenne. Enfin, M. Charles Laterrade fils, titulaire, a raconté avec beaucoup d'élégance et de charme, les circonstances de l’excursion agricole et scientifique qu'il a faite tout ré- cemment dans l’Anjou. La comparaison entre la condition des Ré Mer de cette belle province, celle bien moins avantageuse des culti- vateurs de la nôtre, a été présentée avec une ingénieuse sagacité. Les grands établissements horticoles d'Angers ont été décrits de manière à exciter notre émulation , et nous avons entendu les détails les plus curieux et les plus atta- chants sur l’industrie des ardoisières, détails qui pour les Bordelais avaient tout l'attrait de la nouveauté. La séance a été terminée par la proclamation des mé- dailles et autres récompenses scientifiques, accordées pour la découverte d'espèces nouvellement ajoutées à la Flore et à la Faune de la Gironde. ( Voir le Programme ). (77) DISCOURS D'OUVERTURE Prononcé par M. Cu. Des Mouuns, Président. MESSIEURS, L'an dernier, dans une solennité pareille à celle qui nous rassemble aujourd'hui, un appel était fait à tout notre au- ditoire en faveur de la Flore de la Gironde. Pardonnez-moi si, peu soucieux en apparence d’une variété qui peut seule répandre quelque charme sur les réunions académiques, je viens encore appeler en faveur du même sujet l'attention que nous promet votre présence. Mais cette fois, c’est moins pour demander de nouvelles richesses que pour se féliciter de celles qui lui ont été apportées, que la Société Linnéenne vous fait entendre sa voix. L’ingratitude est un défaut trop haïssable pour qu'elle veuille s’y laisser aller ; et quand une Flore qui depuis trente ans nous donne tou- jours de nouvelles preuves de sa fécondité peut-être inépui- sable, vient encore d’enrégistrer un bon nombre d’acquisi- tions précieuses , nous aurions bien mauvaise grâce à vous taire notre reconnaissance et notre joie. Des récompenses vont vous être décernées , jeunes Bota- nistes à qui nous devons les fleurs nouvelles dont l’Aqui- taine enrichira désormais sa couronne. Nous vous remer- cions au nom de cette vieille reine , première épouse du fils de Charlemagne (1), pour le soin que vous avez mis à mul- tiplier ses atours. Et c'est un soin pieux que celui dont vous vous êtes chargés, car, tous, vous êtes ses enfants , et il - (1) Louis-le-Débonnaire , que son père fit Roi d'Aquitaine ayant de lui laisser la couronne impériale avec le royaume de France. (78 ) n’est pas pour un fils, de devoir plus doux que celui de consacrer son temps , ses travaux, ses fatigues , à glorifier sa mère. Mais les succès que vous avez obtenus cette année ne devront pas marquer le terme de vos efforts. Écoutez la voix de l'expérience, que vos anciens dans la carrière où vous entrez, font retentir à vos oreilles. La Flore de la Gironde, si longtemps dédaignée parce qu’elle était inconnue, a pris sa place dans la science, comme les terres nouvellement découvertes prennent la leur sur la mappemonde. Cette Flore , je vous le disais tout-à-l’heure, est d’une fécondité peut-être inépuisable à toujours, à cause des naturalisations dont je vous parlais l'an dernier, à cause aussi des études cryptogamiques , qui font tous les jours de nouveaux pro- grès en France et qui sont à peine ébauchées dans notre département. Mais du moins et à coup sûr, elle est réelle- ment inépuisable pour nous tous qui vivons aujourd’hui et qui ne pourrons jamais défricher qu’un coin plus ou moins resserré de ce champ sans bornes. Et comment ai-je la hardiesse de renverser ainsi les bar- rières qui limitent l’espace, le nombre et la durée à tous les êtres créés ? Oserais-je, par des paroles impies , attri- buer l'infini à ce qui n’est pas Dieu ? Oh! non, Messieurs, non certes ! Dieu seul est infini, et il a limité le nombre des grains de sable de la grève comme celui des cheveux de nos têtes, le nombre des feuilles de la forêt comme celui des végétaux microscopiques qui vivent de leur substance mou- rante ou décomposée. Mais ce compte effrayant par son im- mensité, Dieu seul le sait, et il l'a caché à notre intelli- gence accablée. Il y a donc pour nous un infini relatif, un infini qui pour n'être pas mathématiquement réel, n’en est pas moins certain pour la mesure de nos forces. Voyez les sauvages : il est parmi eux des tribus plus dégradées que (7%) d'autres, qui ne savent compter que jusqu'à vingt, qua- rante ou cent. Pour ces arithméticiens si bornés, tout ce qui dépasse le nombre fatal reste innumérable, par consé- quent indéfini : cet indéfini est l’image saisissante de l’in- fini, et devient , si j'osais ainsi dire, l'infini pratique. Hé bien! nous hommes civilisés et si fiers de notre civilisation, sommes-nous donc en cela dans une autre condition que nos pauvres frères les sauvages ? Non sans doute. Nous sommes élevés de bien des degrés au-dessus d’eux, mais en fin de compte sur la même échelle : le nombre fatal est reculé, bien reculé assurément ; mais après avoir accumulé tant que nous voudrons de tranches de chiffres où se per- dront notre mémoire, notre nomenclature , notre imagina- tion même, nous n’aurons pas entamé l'infini, sur lequel la plus sublime science ne peut mordre que par abstraction, c'est-à-dire en avouant humblement que toute action définie, effective, lui est à jamais interdite dans ce trésor qui n’ap- partient qu'à Dieu. Travaillez done, jeunes élèves de l'École de Botanique de Bordeaux ! Travaillez , et, comme l'enfant qui vient en courant déposer sur les genoux de sa mère les pâquerettes et les boutons-d’or dont il a dépouillé les gazons, apportez vos récoltes en présence de votre maître vénéré. C’est lui qui vous a appris à savourer la jouissance que vous cause une conquête nouvelle : c’est à lui qu'est réservée la tâche, plus difficile souvent et plus pénible de la mettre en œuvre par la publication, et la tâche plus douce de faire honneur à chacun de vous, du mérite que son zèle et son activité lui ont acquis. Cherchez encore , jeunes élèves , et vous trou verez toujours. Ah ! s'ils avaient devant eux., comme vous , La + le temps qui se déroule en perspective non certaine mais probable , et la science qui s’étend chaque jour , et les forces qui s’ac- (80) croissent à tonte heure, vos anciens qui vous encouragent de leur suffrage, qui vous guident de leurs avis, vos an- ciens vous animeraient mieux encore de leur exemple; ils aimeraient à vous devancer dans la carrière des recherches et des découvertes. Mais le temps qui a marché pour nous, rétrécit chaque jour à nos regards ces belles perspectives de l'avenir ; il a marqué notre place sur le siége des juges du combat, comme pour nous consoler d’être plus lents que vous à parcourir la lice, plus fatigués d’en avoir parcouru une partie. Il deviendra chaque jour plus vrai de dire de vous que vous êtes nos yeux et nos bras, et c’est ainsi que, nous aidant d’abord, nous suppléant ensuite, vous vous metirez en état de nous remplacer un jour sur ces siéges d’où nous sommes si heureux de faire descendre vos cou- ronnes. Jusqu'ici je n'ai parlé que de celles que nous devons aux botanistes; mais les disciples de Linné en ont pour les di- verses branches de la science que cultivait leur maitre, et ils vont en décerner une pour une brillante découverte de paléontologie locale. J'oserais presque dire que je regrette en ce moment la preuve d'affection qui me fut si gracieuse- ment donnée à cette occasion , puisqu'elle me prive de faire ressortir aux yeux de notre auditoire et la beauté de l'espèce découverte et le talent que son jeune auteur a mon- tré dans la discussion de la valeur qui lui doit être attribuée. Messieurs , je reviens aux fleurs après une digression commandée par le droit de présence à Bordeaux des lau- réats dont je viens d’esquisser les titres. Maintenant , il nous reste encore une couronne à décerner , et celle-là, ül faut que nous la portions jusques dans la capitale de la France ; et celle-là, il faut que nous la déposions respec- tueusement aux pieds de la personne qui l’a méritée, car cette personne est une femme. = D ——— (81) Oui, Mesdames , quand, l’année dernière , je vous priais timidement mais avec confiance, de faire quelque chose en faveur de notre Flore , une de vous , loin de vous, mais une enfant aussi de notre belle province, enrichissait d’une plante rare le catalogue de la végétation bordelaise , et pour ainsi dire la science elle-même. Je dirai tout-à-l'heure quel est le prix de cette décou- verte pour la géogr aphie botanique; mais j'ai hâte de com- mencer par vous faire connaître le nom qui désormais pren- dra place parmi ceux des bienfaiteurs de notre Flore. Il est bien illustre, ce nom, dans le domaine des sciences, et la femme qui l’a reçu en s’unissant à M. Dufrénoy, l’un des membres de l'Institut de France, l’un des inspecteurs gé- néraux des mines , l’un des deux auteurs si justement célè- bres de la carte géologique de France, cette femme, dis-je, nous montre aujourd'hui combien un nom si cher aux sciences est venu à propos se placer sur sa tête. A peine l'écho des paroles qui, à pareil jour, venaient d’être prononcées l’an dernier dans cette enceinte , fut-il parvenu à Paris, que ces paroles reçurent une réponse inat- tendue et comme une confirmation rétrospective. Madame Dufrénoy, qui vient chaque année passer la fin de l'été et l’automne chez M. Jay, son père, membre de l'Institut de France , à Chabreville, près Guîtres , arrondis- sement de Libourne , y avait retiré des eaux du ruisseau le Lary, une plante éminemment singulière. Cette conquête inespérée, obtenue par le fait des recherches auxquelles Madame Dufrénoy se livrait pour trouver un autre végétal aquatique et très-peu connu, fut soumise à mon maître aimé et vénéré J. Gay, l’un des plus illustres botanistes qui aient fait de la Flore de notre patrie leur étude de prédi- lection. Il y reconnut le Chara stelligera Baüer, plante tellement rare que Paris, où elle ne figure que pour deux 7 (8) échantillons dans les herbiers et pour une image fort insuf- fisante dans la Flore de MM. Cosson et Germain, Berlin et Bologne, restaient jusqu'ici ses trois seules localités connues. « Singulière distribution géographique ! » m'écri- » vait M. Gay ;« quatre statiens seulement, à deux ou trois » cents lieues les unes des autres, en Italie, en Prusse, » et dans l'Ouest à Paris et à Chabreville ! De tout temps, » ces faits-là ont prodigieusement frappé mon esprit ». Et l'esprit qu'ils ont frappé, Messieurs, c’est celui- d’un des hommes les plus profondément versés, à notre époque, dans l'étude si curieuse et si obscure, de la distribution des végétaux sur la surface du globe. Voilà pour l'impor- tance scientifique de la découverte. Si nous voulons ensuite arrêter notre pensée sur la plante elle-même, nous y trouverons un nouveau motif d'intérêt dans la singularité de sa structure. Des filaments d’un assez fort diamètre, rameux, trans- parents et du plus beau vert, ont leurs nœuds de ramifica- cation ornés d’une étoile pierreuse, cassante, d’un jaune clair, et de 3 à 4 millimètres de diamètre. Cette étoile cal- caire et par conséquent assez fragile, est, lorsqu'elle se trouve bien conservée, d’une régularité et d’une élégance extrêmes. Que n’eussent pas écrit à ce sujet les botanistes du bon vieux temps, les Bellon, les Rondelet, les Gessner, qui décrivaient avec tant de formules d’admiration , le poisson- évêque, la Mandragore, et toutes ces formes animales ou végétales qu'ils ne se faisaient nul scrupule de régulariser, de compléter et d’embellir ; que n’eussent-ils pas écrit s'ils eussent trouvé sur de fragiles filaments végétaux, cette jolie petite étoile de pierre toute faite, et qui ne se prête- rait qu'à grand'peine à de nouveaux enjolivements ? Et si, parmi les personnes qui m'écoutent , il s’en trou- “ (85) vait qui fussent surprises d'entendre parler d’une plante or- née d'étoiles pierreuses , je n’aurai qu’à leur donner ren- dez-vous à la pharmacie prochaine , où toutes les mères de famille sauront reconnaître la mousse de Corse, ce vermi- fuge puissant, composé en grande partie de petites plantules fort élégamment buissonneuses, et uniformément recouver- tes, dans toutes leurs ramifications , d’un épais enduit cal- caire. s ME pardonnerez-vous, Messieurs, de vous avoir entre- tenus si longuement et sans profit direct pour la science , de nos petits bonheurs de botanistes , de ce que j'oserais appeler nos joies d'intérieur ? Oui, je l'espère, car, pour quelques-uns d’entre vous, ces couronnes vont tomber sur des têtes chéries, riches des espérances qu’elles donnent, comme des affections dont elles sont l'objet. Les uns trou- veront dans cette solennité, l’agréable souvenir de couron- nes autrefois obtenues ; d’autres y puiseront une légitime espérance d’en obtenir bientôt à leur tour ; tous s’intéres- seront enfin à la satisfaction des lauréats, à celle de leur famille, à celle plus grande encore, si je ne me trompe, des juges à qui il est donné de distribuer ces modestes palmes. Il me semble même que l'assistance à notre réunion ne sera pas dépourvue d'intérêt aux yeux des hommes éminents en dignité qui nous honorent de leur présence. Si nous sommes privés de voir siéger à cette place le premier des membres honoraires de notre compagnie, le Prélat illustre qui nous a si souvent donné des marques de son affection paternelle, nous avons droit d’espérer que les magistrats du département et de la ville, verront avec plaisir se multiplier les récompenses en faveur des bonnes et honnêtes études qu'ils encouragent de tout leur pouvoir. Dans le nombre ( 84 ) des couronnes que nous allons décerner, nombre moins restreint que dans les années précédentes , ils apercevront , je l'espère , un signe du repos plus grand des esprits, du loisir et de la sécurité que leur vigilante sollicitude , leur prudente fermeté, leur zèle dévoué pour tout ce qui est bon et utile, ménagent à notre belle cité. TABLEAU DE LA 33" FÊTE LINNÉENNE, Présenté à la Société dans sa Séance publique d’ Hiver , le 11 Novembre 1850, par M. LatTERRADE , Directeur. Tout est ancien, tout est nouveau dans la nature. Tout est ancien dans l'espèce qui de génération en génération remonte toujours jusqu’à ce premier type sorti des mains du Créateur au commencement des âges ; tout est nouveau dans l'individu : la vie elle-même et ses principales phases que distinguent des caractères physiques, des caractères intel- lectuels et quelquefois des formes si hétérogènes , qu'elles semblent appartenir à des êtres de classés différentes. Ce léger papillon aux aîles brillantes que nous avons vu voltiger au printemps de fleur en fleur, ne venait-il pas de la chry- salide formée par l’insecte imparfait qui se trainait si lente- ment sur les branches et sur les feuilles, peu après sa sortie de l’œuf qué les premiers beaux jours firent éclore ? Et si des phases de la vie nous passons à la considération attentive des individus, nous ne lrouverons pour ainsi dire que variétés, variations, changements qui tantôt éloignent et tantôt rapprochent plus ou moins ces individus du type de l’espèce, et si nous étudions les espèces elles-mêmes, les différences incontestables qui les séparent , les innom- brables rapports qui les unissent, et qui les unissent, non comme les fils d’un même tissu, mais comme les mailles imperceptibles d’un même réseau , alors , alors seulement, (85) nous aurons une idée des richesses et des harmonies de la nature. Aussi la vie du naturaliste est-elle une suite d'observa- tions continuelles et incessantes ; anssi la Société Linnéenne a-t-elle consacré son plus beau jour , sa fête annuelle, à des travaux , à des recherches qui, multipliées dans diverses localités forment un faisceau , un bouquet que nous offrons en ce jour à la mémoire du célèbre professeur d’Upsal ! Heureux, Messieurs et honorables collègues, si nous pouvions détacher de ce bouquet quelques fleurs ou pour parler sans allégorie, quelque chose qui füt digne d'inté- resser ce brillant auditoire. C'était au solstice d’été, et d’après votre règlement fon- damental , le Jeudi qui suit la fête de Saint-Jean-Baptiste, cette année le 27 Juin, qu'arrivait la solennité Linnéenne. De Borpeaux, nous nous dirigeämes dès le matin sur la commune d’Eysines où nous fûmes reçus par M. Lemo- theux dans son bien de Lafontaine. Là, cet habile agricul- teur nous fit visiter ses champignons de couches Agaricu, campestris. Ils étaient abondants, d’une très-bonne culture appartenant , tous ceux que nous avons examinés , à la va- riété à feuillets roses. Cette variété, même cueillie dans les champs , est celle que l’on peut manger avec le plus d’as- surance, car combien de fois n'a-t-on pas confondu la va- riété à feuillets blancs avec l’Agaric printanier ou avec le bulbeux, poisons terribles qui conservent leur blancheur bien des jours après qu’on les a coupés en morceaux? On a vu avec plaisir les divers moyens d'exploitation employés par le propriétaire sur ses deux domaines de Lafontaine et de Boisgramond. La Société s’est divisée en deux sections : l’une sous la direction du Président M. Charles Des Moulins, s’est portée vers a jalle de Blanquefort; l’autre à la tête de laquelle est (86) resté le Directeur, a parcouru diverses localités de la com- mune d'Eysines. Le résultat de ces excursions a été assez heureux bien qu'elles aient été contrariées par la pluie et par l'orage. Dans le département de La Dorvoexe, notre zélé. collè- gue, M. De Dives qui se proposait de faire une longue course , a été obligé par diverses circonstances, ce qui est toujours bien pénible pour un botaniste , de la réduire, en multipliant toutefois ses observations. 11 a été contraint de se borner à visiter la localité de Banchevel ( commune de Manzac) où il a vu diverses espèces de Rubus, d’autres plantes intéressantes et la belle Mélisse des Montagnes , Melittis melissophyllum, aux grandes fleurs d’un blanc pourpré, que la Gironde possède aussi à Guîtres et à Mar- camps, espèce trop peu commune et qui serait une acquisi- tion d'autant plus précieuse pour nos jardins, qu’elle eroit et se développe dans les lieux ombragés. Dans la même journée , notre honorable collègue a visité une plantation d’osiers, composée de Salix purpurea et fra- gilis, tous les ans ravagée par un joli coléoptère rouge. Ajoutons, ce qui peut être contrariant pour les entomologis- tes, mais à coup sûr très-heureux pour les cultivateurs , ajoutons que les yeux exercés de notre observateur n'ont point vu ce même insecte dans les oseraies des environs de sa localité. Il résulte des observations météorologiques de M. de Dives, qu’à midi le temps était beau à Manzac, mais avec une chaleur excessive , plus de trente-cinq degrés, prélude des orages qui éclatèrent dans la Dordogne , l’un à six heu- res du soir et les deux autres pendant la nuit. Le premier, il n’y a pas de doute , est le même qui contraria à Eysines nos excursions et notre séance en plein air. Notre collègue a si souvent trouvé dans les cours et le (87) voisinage des jardins, l’Anthomis parthenoides, Bernhg, qu’il la croit subspontanée dans son arrondissement. Il à beaucoup étudié les Vicia, particulièrement l’uncinata, (Ca- talague des plantes de la Dordogne), de Desvaux. Mais selon M. Ch. Des Moulins , cette espèce a les graines comprimées, tandis que d’après M. Boreau, Flore du Centre de la France, 2.me édit., les graines sont arrondies : ce qui porte à croire que la plante d'Angers n’est pas celle de Lanquais. A Bazas, chef-lieu de la division Linnéenne, N.° 2, les membres se sont réunis à cinq heures et demie du matin, sous les fraîches tonnelles de M. Burguet aîné. Les coteaux et les vallées de Saint-Come ont été le théâtre de l’excur- sion. Nous ne citerons pas ici l’intéressante série de plantes, de lépidoptères et de coléoptères dont le secrétaire M. l’abbé Bacca Nérac nous a fait passer la note. Nous nous bornerons à mentionner parmi les plantes : l'Androsème ou Toute- saine, Andresdemum officinale ; Y'Ortie royale, Galeopsis tetrahit ; le Grémil à fleurs pourprées, lithospermum purpu- ro-cœruleum ; la Scrophulaire noueuse, Scrophularia no- dosa et l'Elatérium momordica elaterium. La séance a eu lieu sous un vaste chêne qui couvrait de son ombre un cercle de 20 mètres de diamètre. Ce bel ar- bre offre une belle bille droite et régulière , de 12 à 15 mè- tres de hauteur et dont la circonférence est de cinq mètres, 10 centimètres. Il diffère peu de celui que nous avons me- suré à Pompignac et dont le tronc nous donna cinq mètres, 67 centimètres de circonférence (1). Après l’examen des produits de l’excursion , le président M. le docteur Ardusset a donné lecture de la lettre que lui avait adressée le Directeur , à l’occasion de la 33. fête. Puis on a entendu M. le docteur Dupont qui a traité du pin (4) Flore Bordelaise, p. 346. { 88 maritime , arbre précieux dont il a fait ressortir les avan- tages, et M. Touchard qui a présenté un rapport succinct des diverses observations auxquelles il s’est livré sur les vers à soje et les müûriers, pressant ses auditeurs de s’adon- ner à celte branche d'industrie dont on pourrait enrichir l'arrondissement. Nous avons appris avec plaisir, par le procès-verbal de la fête, que notre honorable collègue, M. le docteur Ardusset s'occupe d’un travail sur les champi- gnons comestibles. C’est le cas de vous annoncer que M. le docteur Léveillé , vient d’ériger en espèce notre Agaric des dunes de La Teste, dont nous n'avions osé faire qu’une variété du Sinué, Agaricus sinuatus, var. 8. arenarius (Flore bord. p. 534. Agaricus arenarius , Laterr. fragments myco- logiques, par M. le docteur Léveillé. Annales des Sciences naturelles, 5.m° série, Février 1848, tom. IX, pag. 119. Après le banquet, on s’est dirigé vers Bazas par le domaine d’Arbieu , propriété de M. Saige l’un des membres. Ce beau domaine offre une collection d'au moins 150 varié- tés de rosiers, des orangers qui le disputent en beauté et en fraicheur à la collection de Bourneau ; de beaux arbres étrangers dans les massifs, une élégante volière renfer- mant des oiseanx des deux mondes, parmi lesquels on re- marque l'oiseau travailleur si habile pour enlacer les fils dans les barreaux de sa cage et à les réduire en tissu symé- trique et pressé. Indépendamment des membres que nous avons cités, quatre autres , le frère de M. Saige, MM. Vallard, Tauzin et Ballereau, propriétaires et horticulteurs ont aussi partagé les travaux des excursions. À La Teste ( Gironde ), les botanistes et les amateurs se sont divisés en deux sections : la première dirigée par notre zélé collègue, M. Chantelat, est allée à Cazeaux où elle s’est augmentée de M. l'abbé Mouls , curé de la nou- 89 velle église qu'il vient de faire bâtir dans ce village. De là on s’est rendu au bord de l'étang C’est dire que l’excursion a été riche et qu’on n’a pas manqué d'y recueillir dans la seule localité où elle soit connue en France, la belle Lobé- lie de Dortmann (1) ; la littorelle des lacs et autres plantes rares auxquelles il faut ajouter la canche bicolore (2 ) de Thuillier , nouvelle pour la Flore de la Gironde, La seconde section qui s’est occupée de botanique et d'horticulture , et à laquelle plusieurs dames s'étaient join- tes, avait à sa tête M. Peyjehau, adjoint au Maire, dont on a visité le domaine de Braouet. On y a admiré ses plan- tations d'arbres fruitiers et ses belles cultures qui lui ont valu une médaille d'argent de la Société d'Agriculture. La renoncule de Lenormand , des carex, etc., ont été les pro- duits de cette excursion. Le temps était chaud et crageux. A midi le thermomètre marquait vingt-sept degrés et demi. A six heures un banquet a réuni les deux sections chez M. l’adjoint qui a fait servir de belles fraises-ananas , pro- venant de ses cultures. Notre infatigable collègue, M. Viramond ancien prési- dent de l’ex-section de NARBONNE a commencé dès les qua- tre heures du matin, aux environs de Salèles , une excur- sion dans laquelle on remarque parmi les plantes qu'il a observées la belle digitale à grandes fleurs, digitalis gran- diflora de Lamarck, et c'était agir prudemment que de commencer les recherches de bonne heure , puisque par un ciel découvert , le thermomètre placé à l'ombre et à l'expo- sition du Nord, marquait à midi trente degrés. Vous savez, Messieurs , avec quels soins, notre vénéra- (2) Lobelia Dortmanna. Flore bordelaise , 268, 4.e édit. (2) Aira Mc Weils ; discolor , de Thuillier. ( 90) ble collègue fait ses observations météorologiques dont il nous envoie exactement tous les détails. D'après ceux qu’il nous transmet dans sa lettre du 27 Août dernier , les cha- leurs et les beaux jours de l'Été de 1849, se sont soutenus à Narbonne, jusqu’au 11 Novembre, mais le 29 la terre était couverte de seize centimètres de neige; l'hiver a été froid, on y a eu souvent trois et même quatre degrés au- dessous de glace ; la gelée du 19 Mars a été bien funeste ; elle a fait périr, depuis Pézénas jusqu’à la ville du Pont- Saint-Esprit, presque tous les oliviers qu'il a fallu récéper. Vers la fin d’Avrill a sécheresse a beaucoup nui aux céréales ; celles des lieux secs étaient chétives , basses et mêlées de touffes de coquelicots également fort chétifs. Le 4 Mai, la vigne fut horriblement maltraitée. Il y eut , dit l’observa- teur, une forte gelée et une gelée blanche épaisse comme de la neige, en Mai, remarquons-le bien et sur une latitude où à l’époque dont iL s’agit, toutes les plantes sont fleuries ou bien développées. De fortes chaleurs ont régné du 5 au 20 Juin. On se souviendra péniblement dans l’Aude , ajoute notre collègue , des fléaux qui ont frappé notre agriculture en 1850. © Vous le savez, Messieurs , le corps vieillit, mais à quel- ques exceptions près , les facultés intellectuelles se conser- vent et même se fortifient quand on les cultive par l'étude et par l'observation ; notre honorable collègue, M. Viramond, en est un exemple frappant. Il a accompli sa quatre-vingt- unième année , et il est l’auteur de cet excellent mémoire que vient de couronner , en lui accordant une médaille d'or de six cents francs, l’Académie nationale et centrale, de médecine vétérinaire de Paris. Le vénérable président de notre division des Basses- PYRÉNÉES, que vous ayez appelé à succéder au savant Palassou , M. le baron de Vallier, empêché par son grand (#4 ) âge et par sa presque cécité, de diriger les excursions, a délégué pour cet effet notre honorable correspondant , M. le D." Bergeret, fils de l'auteur de la Flore de son dépar- tement. C’est vous dire, Messieurs , qu’elles ont été bien faites. Six communes, trois au Nord-Ouest et trois au Nord de la ville de Morlaâs , ont été visitées. Nous ne pouvons suivre M. le D. Bergeret dans les détails pleins d'intérêt qu'il nous donne de cette longue excursion, ni dans les observations qu'il y a faites, particulièrement sur le scérpus ovalus, Sur un cirse et autres plantes propres à enrichir la Flore locale qui sera aussi augmentée des espèces signalées par le vénérable président de la division auquel Ruiz et Parou, auteurs de la Flore du Pérou dédièrent le Va/tiera triplinervis. Les dernières nouvelles que nous avons reçues de Cupa sont datées du 2 Septembre. Notre correspondant, mon fils Théophile, l’un des fondateurs de la Société, n’a pas cru le moment favorable pour installer la division Linnéenne que nous désirons établir dans cette île, encore émue, quoi- que tranquille, de la commotion qu’elle a éprouvée par la descente de Lopez. Du reste , les objets d'histoire naturelle que nous attendions sont encore à Saint-Yago où l’on comp- tait pour nous les envoyer, sur le retour du navire Le Sé- vère qui n’a pas effectué cette année son second voyage. Voilà, Messieurs, l'exposé succinct de ce qu'ont fait pen- dant la trente-troisième -fête, ces divisions Linnéennes que vous avez établies depuis longtemps et qui semblent re- prendre aujourd'hui une nouvelle vie, ces divisions que l'on peut comparer à des rayons qui partent d'un même centre, à des ruisseaux qui, après avoir fertilisé les contrées qu'ils arrosent, viennent se Reis dans un même lit, ou plu- tôt à ces branches, qui, en échange de la sève que leur a fourni le tronc, lui Een un suc plus élaboré et propre , former des fleurs et des fruits, image, nous aimons à le ré- péter, image sensible , non de la centralisation qui dévore , mais de l'unité qui vivilie! (92) L'ENTRE-DEUX-MERS , Par A, Petit-Lafitte, Crooner. } >? A } Cnotit s À 1 Là F, plantu- 4 4 (Duruæix : Histoire de France }). Sur deux points de la France éloignés l’un de l’autre de plus de 350,000 mètres, au pied des Pyrénées et au pied des montagnes de l'Auvergne , deux cours d’eaux également importants, également renommés, la Garonne et la Dordo- gne prennent naissance. D'abord extrêmement variables dans leurs directions, comme s’ils manquaient encore de cette expérience que leur donnera bientôt une plus lon- gue existence, on les voit l’un et l’autre affecter dans leur marche une irrégularité que rien ne semble pouvoir expli- quer et qui laisse la plus grande incertitude sur la ligne dé- finitive qu'adoptera chacun d'eux. Mais enfin, après avoir admis dans leur sein un grand nombre d’affluents , après avoir acquis cette importance qui font qu'ils peuvent porter également la richesse ou la désolation dans les contrées qu'ils visitent, on les voit tendre tous deux vers un but commun , persister dans cette tendance et arriver ainsi au point de se confondre , de consommer ce que les poètes ap- pellent le mariage de leurs eaux. Les terrains que parcourent ces deux cours d’eaux dif- (95) fèrent successivement par rapport à leur mode de formation géologique et par rapport à leur nature. Eux-mêmes ont exercé et exercent encore sur ce mode de formation une in- fluence souvent capitale. C’est ainsi, surtout, qu’arrivés dans notre beau département et afin de se frayer un pas- sage sur le plateau qu’il dut former primitivement, ils l’ont attaqué, corrodé, évidé de manière à lui imposer les conca- vités et les reliefs qu’il présente aujourd’hui; à le doter de ces vallons, de ces plaines, de ces coteaux qui en font maintenant le charme et la richesse. Mais si cette action est apparente dans toute la Gironde, si elle est attestée par les deux longues et larges vallées qui commencent l’une à La Réole et l'autre à Sainte-Foy, pour arriver à se réunir et à se confundre au Bec-d’Ambès , nulle part il n’est plus facile et plus intéressant à la fois de l’étu- dier que sur ce vaste triangle qui a sa base aux limites Ouest du département, de La Réole à Sainte-Foy et son sommet à la jonction des deux rivières. Effectivement , la vaste contrée que nous désignons sous le nom d’Entre-deux-Mers, c’est-à-dire entre deux rivières participant auv flux et reflux de la mer; le territoire des cantons de Carbon-Blanc, Créon , Brannes, Targon, Pujols, Saint-Macaire, Cadillac, Sauveterre, Pellegrue, La Réole, Monségur et Sainte-Foy, occupent un pays que les eaux, suivant les directions principales qu’elles affectent encore aujourd’hui, ont dès longtemps remanié; auquel elles ont donné, tant ses lignes principales de niveau que les exca- vations nombreuses , les reliefs variés que nous lui voyons aujourd'hui. En attaquant ainsi les couches superposées qui consli- tuent le terrain de cette contrée et que les géologues ran- gent dans la formation qu'ils qualifient de tertiaire ; en y (94) faisant de profondes coupures , de vastes excavations , les eaux, agents formidables de cette érosion, ont mis à nu, sur une infinité de points , les matières diverses qui consti- tuent ces couches : sable, argile, marne, calcaire, etc..…; elles ont varié à l'infini la surface du sol et préparé pour la culture, soit des avantages , soit des inconvénients, qu’elle accepte et qui lui impriment à leur tour un caractère varié qu'elle ne saurait avoir partout ailleurs. On sait que le propre des montagnes anciennes est d’of- frir à l'observateur qui les parcourt de la base au sommet, toutes les formations principales que l’on suppose consti- tuer l'écorce solide du globe ; depuis les remaniements les plus modernes et les plus superficiels, opérés par les eaux contemporaines ; depuis les alluvions les plus récents , jus- qu'aux formations cristallisées, jusqu’au granite que l’on suppose représenter la plus ancienne de ces couches , que l'on suppose devoir servir de noyau au globe terrestre. Dans nos contrées tertiaires et plus particulièrement dans l’Entre-deux-Mers, des remarques analogues peuvent être faites. Il est facile à l'observateur qui part, soit de la rive droite de la Garonne, soit de la rive gauche de la Dordogne et qui s’avance verticalement au cours de ces deux rivières vers la ligne de partage de leurs bassins res- pectifs, de constater et de suivre les grandes assises au moyen desquelles la nature éleva dans nos contrées la for- mation dite tertiaire. Il lui est facile de reconnaître, sur ces assises , les durées comparatives qu'elle accorda à la confection de chacune d'elles , les circonstances au mitieu desquelles elle procéda à ce travail et jusqu'aux animaux et aux végétaux qui en furent successivement les témoins. Effectivement, dès que son pied a cessé de fouler le ter- rain riche et onctueux qui porte parmi nous le nom tout à la (95) fois historique et descriptif de patus (1), dès qu'il se trouve rendu à la base de ces masses, de ces coteaux qu'il a vus de loin borner son horizon , il peut, partout où les éboule- ments déterminés par les eaux ne les ont pas recouvertes , constater d’abord la présence de la couche calcaire, de la couche sur laquelle sont venues expirer les dernières forces des eaux érosives, et qui fournit à la construction de nos édifices. En montant sur cette couche dont l'épaisseur est très-variable, il la voit perdre progressivement de sa cohé- sion et de sa dureté et bientôt il est parvenu aux calcaires tendres, aux marnes plus ou moins friables qu’elle supporte immédiatement et auxquelles l'agriculture, instruite par de remarquables exemples, devrait accorder une attention toute spéciale. Des marnes , toujours en gravissant , il arrive aux argiles plus ou moins grasses, plus ou moins colorées en bleu , en jaune , en rouge. Celles-ci perdant à leur tour et de plus en plus de la plasticité qui les font rechercher pour la poterie , il n’est pas rare que bien souvent , il ren- contre sur son passage quelqu'un de ces bancs de sables ar- gileux et ferrugineux du rouge ou du jauue le plus vif, que l’on exploite pour les bâtisses, ou dans lesquels les pauvres de la localité vont s’approvisionner de cette matière qu'ils désignent sous le nom de sablon et qu'ils vendent dans les rues de Bordeaux pour nettoyer les ustensiles de cuisine. En- fin sa vue cesse d’être bornée, ses regards peuvent de plus en plus se projeter au loin ; les pentes qu’il gravit devien- nent plus douces, plus ménagées , il voit qu'il va atteindre un plateau , il y arrive en effet après avoir constaté quel- ques autres formations assez variées , assez difficiles à pré- ciser et dans lesquelles dominent tour à tour, soit les ma- tières principales qu’il vient de distinguer, soit même des (1) Le mot palus est emprunté au mot latin palus , marais. (96 ) cailloux roulés de formes et de volumes extrêmement di- vers; après avoir constaté que les bois et la vigne ont été, selon les circonstances , les deux modes de culture employés pour utiliser toutes ces pentes. Le plateau sur lequel il se trouve est d’une largeur variable, mais qui tend constamment à s’agrandir sui- vant la direction du Nord-Ouest au Sud-Est; quant à sa longueur, elle est la même que celle de la ligne faisant le partage du bassin de la Garonne et du bassin de ia Dordo- gne, dans toute l'étendue des terrains girondins que ces deux rivières renferment entre leurs cours. En outre, sa nature géologique a un caractère tout particulier et qui semble ne rien présenter de commun avec les assises qu’il couronne. Presque partout c'est une terre couleur de cen- dre, susceptible d’une grande division , sans graviers ni cailloux; c’est une association d’un sable siliceux extrême- ment fin, à une argile presque blanche : association dans laquelle l'agriculture a le mal au cœur de constater l'ab- sence presque générale du principe calcaire. Les céréales, la vigne , le bois que l’on a malheureusement trop réduits , sont l’emploi le plus général auquel se trouve soumis ce vaste plateau. ; Maintenant, pour avoir une connaissance plus précise du pays dont nous venons de signaler d’une manière générale et la situation et la formation, suivons nous-même cette ligne de partage des deux bassins; parcourons la crête qu’elle forme et sur laquelle est établie la route départe- mentale qui s’embranche sur celle de Bordeaux à Brannes, au lieu dit le Pavillon, commune de Fargues, pour desser- vir successivement et directement Créon, Targon, Sauve- terre, Castelmoron , Monségur , etc. En s’engageant sur cette route, en prenant subitement la direction du Sud-Est , le voyageur n’a pas de peine à (97) reconnaître qu'il parcourt une contrée élevée, du haut de laquelle il lui est presque toujours permis de promener ses regards sur celles qui l’avoisinnent et qu’elle domine à droite et à gauche. Rarement il lui est donné de rencontrer des ponts motivés par des cours d’eau de quelque impor- tance ; mais s’il est observateur, il reconnaît facilement que de nombreux ruisseaux prennent leur source au pied des contre-forts sur lesquels la route est établie, et sa vue, gui- dée par le luxe de végétation qu’ils motivent et par les val- lons qu’ils déterminent, peut facilement juger de leur diréc- tion , soit vers la Garonne , soit vers la Dordogne. Toujours favorisé par ce premier avantage, il reconnait en outre que les sites variés, les positions gracieuses de la contrée ont fixé l'attention des familles riches longtemps avant qu’on püût la parcourir avec autant de facilités : même à ces époques bien éloignées de nous, par les changements survenus depuis , où la cour de Louis XIII mettait toute une journée pour se rendre de Bordeaux à Créon (1). Il aperçoit au loin, dominant les bois, les tours et les toitu- res de plusieurs châteaux. A droite, c'est le château de la Ligue dans une charmante vallée qu'il décore et dont il augmente le pittoresque ; un peu plus loin, c’est Tustal, avec ses terrasses superposés, ses magnifiques garennes , ses bois touffus, ses châtaigneraies et ses souvenirs agrico- les ; car c’est à Tustal que furent fixés, par M. le sénateur Journu-Aubert , vers le commencement de ce siècle, les premiers mérinos introduits dans la Gironde ; c’est à Tustal (1) « Le lundi 17 mo audit an 1615, le Roi et la Reine et toute la cour partiren allèren en une Re ville appelée ss , à quatre limenile Bordeaux, avec grande mmodité , à cause des boues et rigueurs de l'hiver qui faisait jà ses eg ». {Chronique Bourdeloise). s (98) que le gendre de cet agronome, M. iLegrix de Lassalle, fit plus tard, sur le trèfle, des expériences qui furent signa- lées par Victor Yvart et qui n'ont pas peu contribué à répandre cette utile plante dans nos contrées. À gauche, c’est le château de Camarsac, remarquable par une position qui semble dégager de toutes bornes l'horizon qu'il embrasse. Plus loin, c’est celui de Cursent que distin- guent sa construction et les belles eaux dont il est environné. Sur la route même, où non loin de son trajet, ce sont des villages et des hameaux populeux; c’est surtout le hameau de Lorient presque entièrement formé par les ate- liers de poteries où se fabriquent toutes les formes à sucre réclamées par les raffineries de Bordeaux et la plus grande partie de la poterie grossière que consomme cette grande cité. Peu après ce hameau et avant d'arriver à Créon, on remarque à gauche de la route la matière première de cette fabrication : des monceaux d'argile bleuâtre que l’on extrait de puits et de galeries établis à une profondeur de six à dix mètres. Mais voici Créon , jadis fortifié, jadis pourvu de murail- les, de tours, de portes et de fossés, ainsi qu'il convenait à la capitale de l'Entre-deux-Mers ; au siége d’une prévoté s'étendant sur quarante-sept paroisses Cette petite ville, dans une situation agréable, quoiqu'un peu trop décou- verte, est bâtie sur un plan simple et gracieux à la fuis qui atteste, dit-on, l’origine anglaise et que l’on voit répété par un grand nombre d’autres villes de nos départements méri- dionaux. C’est une place carrée, entourée de couverts ou cornières, ainsi qu'on les désigne dans plusieurs autres localités, avec quatre rues droites, correspondant aux qua- tre angles de la place et une église ordinairement située à l'angle Est, formé par ces rues, et plus rarement à l’angle Sud, Dans le département de la Gironde, nous pouvons citer (99 ) comme plus ou moins établies sur le même plan : Libourne, Sauveterre , Monségur , Sainte-Foy, Cadillac, etc.; dans celui de Lot-et-Garonne : Villeneuve-sur-Lot,Damazan, Sos, c. ; dans celui du Gers, Fleurance, Mirande , etc... Tous les mercredis, un marché renommé et de temps en temps des foires non moins suivies, réunissent à Créon toute la population des communes environnantes et donnent lieu à des transactions animées , sur les bestiaux et sur les pro- duits de la contrée. À peine a-t-on fait quelques pas hors de Créon, dans la direction que nous suivons, que déjà se montrent avec toute leur majesté, avec tout leur pittoresque, les impo- santes ruines de La Sauve. Au douzième siècle, au temps où d’épaisses forêts couvraient encore tout le plateau que nos yeux ont aujourd'hui tant de facilité à parcourir, un pauvre religieux , saint Gérard, suivi de quelques compa- gnons cherchant comme lui le silence et la retraite, vinrent se fixer en ce lieu et y poser les fondements de ce qui fat plus tard l’abbaye de la Grande-Sauve. Les travaux auxquels ils se livrèrent et qui devaient tourner au profit de la contrée, au profit de son agriculture, sont ainsi racontés par un bis- torien contemporain : « C'était une chose merveilleuse de » voir des hommes accoutumés à porter des habits somp- » tueux, n'avoir que des vêtements communs et grossiers , » de vaillants guerriers défricher une forêt et en arracher » les ronces et les épines. On vit alors accomplie en eux » cette parole du Prophète : Z{s forgeront avec leurs épées des » socs de charrues et de leurs lances des faulx ! » L'abbaye moines, grâce aux témoignages de sympathie que lui don- nèrent plusieurs hauts personnages , ne cessa de prospérer jusqu’au moment de la suppression de ces sortes d’établis- sements. Abandonnée depuis cette époque , les vastes bâti- (100 ) ments qu'elle possédait avaient eu peut-être plus encore à souffrir des hommes que du temps, lorsque le pieux prélat qui administre le diocèse de Bordeaux conçut l'idée d’em- ployer ce qui restait à l'établissement d’un collége qui s’y est maintenu longtemps et qui se réouvre en ce moment, sur de nouvelles bases et avec de nouvelles chances de succès. Le voyageur qui visite La Sauve, qui étudie dans ses ruines la transition de l'architecture romane à l'architecture gothique, ne doit pas oublier de gravir l'escalier en limaçon qui conduit sur la galerie de son élégante flèche. Arrivé sur ce point, il oubliera toutes les fatigues , tous les dangers même qu'il aura pu craindre, en contemplant les deux magnifiques bassins au point de partage desquels il se trouve placé ; en comptant les villages, les hameaux qu'ils renferment ; en suivant de l'œil le cours des ruisseaux qui les fertilisent ; en supputant les bois , les champs, les prai- ries qu'ils offrent de toutes parts. Après être sorti de La Sauve, après s'être éloigné des maisons que les bourgeois de la contrée firent construire jadis autour et sous la protection du couvent , dans un lieu qui devait être considéré, selon le droit et les usages du temps, comme l'asile des malheureux et le refuge des opprimés , la route que l’on suit et qui s’avance vers Tar- gon parcourt un pays plus solitaire et peut-être aussi plus hostile aux procédés de l’agriculture et surtout plus boisé. Longtemps, effectivement, la vue est complètement arrêtée, à droite du côté de la Garonne, par la grande et jadis dange- reuse forêt de Targon qui garnit toute la pente Sud au-des- sous du plateau et s'étend même assez loin dans la plaine in- férieure. Mais à gauche, le tableau qui se déroule à ses yeux est de nature à satisfaire toutes ses exigences ; là , il n’a de limites à ses investigations que les coteaux éloignés qui bor- 101 dent la rive droite de la Dordogne et sur 1: sommet desquels se dresse avec élégance l’antique flèche de Saint-Émilion. Encore une œuvre de foi et de charité; encore une entre- prise qui donna lieu à une ville, qui conquit à la culture une vaste contrée et assura à la vigne un terrain et des expo- sitions dans lesquels elle réalise des merveilles. Cependant pour saisir toutes ces beautés, pour ne rien perdre du point de vue qui les résume , c’est auprès des rui- nes Montarouch qu'il faut se placer; c'est du haut des décombres résultant de cette commanderie de l’ordre de Malte qu’il faut contempler tout cela. Ainsi considéré, le pays gracieusement ondulé que le regard embrasse , s'étend jusqu'à la Dordogne , offrant ainsi aux investigations de l'observateur tous ses accidents, toutes ses cultures, tous ses villages , toutes ses habitations. A l'extrémité du tableau au point où les objets commencent à prendre les formes indécises que leur donne l'éloignement, une réunion plus nombreuse de maisons se fait remarquer ; une masse noire et arrondie les domine : c’est le charmant village de Rau- zan, situé non loin des rives de la Dordogne : c’est la gigan- tesque tour de son antique château. Mais le point où nous sommes parvenus nous permet de porter nos regards sur le bassin opposé, sur le bassin de la Garonne ; car la route en cet endroit suit tellement la ligne de partage des deux bassins, qu’elle déverse en même temps ses eaux dans l’un et dans l’autre et que, des deux côtés , naissent des ruisseaux dont les cours sinueux se diri- gent , à gauche vers la Dordogne , à droite vers la Garonne. Du côté de ce dernier fleuve, une vaste plaine aussi se déroule, avec des perspectives moins gracieuses peut-être ; mais quine laissent pas cependant de composer un tableau d’un très-agréable aspect. D'abord , l'œil est frappé par le village de Targon, dont il aperçoit l’église jadis fortifiée ( 102 ) et entourée de fossés, dépassant les bois qui durent autre- fois la dérober toute entière aux regards des voyageurs; mais qui ne purent cependant en 1562 soustraire aux re- cherches et aux attaques impétueuses de Montluc, les reli- gionnaires qui avaient cru trouver un refuge dans ce village. Dans cette affaire, le fougueux capitaine perdit son cheval turc qu'il aimait, dit-il, après ses enfants, plus que chose du monde. Du même côté encore, mais beaucoup plus loin, domi- nant les rives de l’Euille, ruisseau qui prend sa source à Targon et va se jeter dans la Garonne à Cadillac, se montre l'antique château d’Arbis ou de Benauge. Cette construction que l’on considèra autrefois comme très-forte, qui passa successivement de la main de Grailly au duc d’'Epernon; qui se rendit en 1453 aux troupes de Charles VIT, n'offre plus aujourd’hui que d’imposantes ruines, au milieu d’un parc clos de murs et comprenant près de 60 hectares d’é- tendue. Passons tous les autres détails de ce paysage, nous avons besoin de marcher , si nous voulons parcourir toute la route que nous nous sommes tracée. Laissons à droite le village de Baïigneau dont l’église n’est pas sans quelques mérites ; à gauche, mais beaucoup plus éloigné de la route, celui de Frontenac, dont la situation gracieuse sur les bords de l’En- grane n'a peut-être pas de pareille dans la Gironde ; traver- sons le délicieux vallon de Martres, jetons un coup d'œil sur St-Brice et sur Castelvieil : sur ce qui était naguère le curieux château de Semens (4 ), et demandons-nous ce ) Ce château, que sa construction rendait précieux pour l’his- toire de l’art, a été détruit il y a quelques années pour faire place à des constructions sans août et sans caractère. Nous-même , nous n'avons pu juger _ l’état de ce château que par une aquarelle que gap xe rec soin un homme de goût et d’érudition : M. Dasseau , uveterre. ( 103) que peuvent être ces masses de pierres que nous aperce- vons devant nous; ces murs dont nous pouvons encore sai- sir les projections ; ces portes dont les piliers, les arcades sont encore si bien conservés. Tout cela est une ville, un chef-lieu de canton ; c'est Sauveterre de Guienne, dont l’as- pect , selon la spirituelle remarque d’une Dame de la con. trée, rappelle les descriptions que nous font , de la Jérusalem moderne et de ses environs , les voyageurs et les pélerins. Sauveterre est, comme nous l'avons dit, bâti sur le mê- me plan que Créon, mais le plateau qu’il occupe tout aussi découvert, est plus plus élevé et donne lieu à des points de vue dont quelques-uns , comme celui de la porte de S. Lé- ger surtout, sont tout-à-fait dignes de l'attention de l’ob- servateur. Située au milieu de la Benauge, cette petite ville fut de tous temps le centre du commerce de tout le pays en- vironnant et un passage très-fréquenté par les tronpes. A ce propos, les habitants citent encore ce dicton que répé- taient les soldats, forcés pour y parvenir, avant qu'on eût fait les nombreuses routes qui y conduisent aujourd'hui, de lutter contre le délire de la boue : N'est pas bon soldat celui qui n'a pas passé par Sauveterre. S'il nous était permis de nous éloigner de la ligne que nous suivons et que nous devons suivre rigoureusement pour arriver enfin à la base du vaste triangle que nous vou, lons parcourir, nous sortirions de Sauveterre par la porte que nous venons de nommer et nous nous dirigerions , en passant près du château de Madaillan , vers Blazimont. Là, nous trouverions, dans une jolie position, les rudiments d’un bourg disposés d’après le plan déjà signalé et au bas de ce bourg, sur les bords de la Gamage, ce qui reste d’une abbaye de Bénédictins de la Congrégation des exempts , érigée en 721 sous l’invocation de S. Maurice, c’est-à-dire, les débris mutilés de l'habitation des religieux et l'église qu'ils avaient ( 104 ) élevée, que l'on a heureusement conservée et que les ar- chéologues se plaisent à visiter comme un des monuments les plus curieux ds son temps. Nous pourrions également aller à Pellegrue, examiner du haut de ses remparts les châteaux qui entourent ce chef- lieu ce canton ; surtout visiter son église, construite dans le style roman et ornée d’une coupole. Mais nous ne pouvons sortir de Sauveterre que par la porte Saint-Romain, pour suivre la route la plus directe qui doit nous conduire à Castelmoron et enfin à Monségur, terme de notre voyage. Castelmoron que nous atteignons bientôt est, sans contre- dit, une des localités les plus curieuses de la contrée : tant à cause de l’importance que lui donnèrent jadis ses murs, ses tours , ses portes et sa qualité de chef-lieu d’une des quatre grandes sénéchaussées de l’Albret, que par rapport à sa position des plus gracieuses et des plus pittoresques et à l'air moyen-âge qu’annonce son aspect et qui règne dans son intérieur. Lorsqu'on a gravi le sentier sinueux qui con- duit dans Castelmoron, lorsqu'on a passé près de la belle fontaine dont on a pu voir les eaux un kilomètre avant, circulant au fond d’une grotte calcaire, on est tenté de s'assurer si la porte de la ville est ouverte, si la sentinelle qui la garde en permettra l'entrée. On cherche du regard le mendiant officieux capable de faire connaître les noms et les qualités des bourgeois, des seigneurs, des hauts fonc- tionnaires qui occupent les maisons devant lesquelles on passe, pour arriver au centre de la ville, à la halle, où sont réunis ces habitants, où ils s’entretiennent des affaires du temps, où ils attendent les étrangers, comme jadis les patriarches, pour leur offrir l'hospitalité. A l’un des piliers de cette halle, contre lequel, dit-on, il suffisait de se frotter pour être ennobli, on voit encore incrusté et cloué l'étalon î (105) de l’ancien pied de Roi usité dans le duché d’Albret. Dans le rocher sur lequel se dresse la ville , au-dessous de ce qui fut autrefois le Palais de la justice criminelle et qui sert maintenant de Mairie et de salle d'école , on voit les pri- sons de la sénéchaussée. Nous avons visité à Castelmoron , avec une vive satisfaction, une de ces rares maisons bour- geoises avec cour en avant et galerie suspendue au-dessus du profond ravin qui entoure la ville et dans laquelle se trouvent encore les meubles sculptés, les tapisseries en toiles peintes et les autres ornements qui durent y être pla- cés il y a plusieurs siècles : au temps où une brillante société se trouvait réunie sur ce point, où le bourgeois y mangeait ses revenus et le fonctionnaire ses appointements ; où Castelimoron donnait MA ton à toute la contrée environ- nante. De Castelmoron, il serait facile, si nous en avions le temps , d'aller à Saint-Ferme. De visiter en passant la rési- dence de l'Abbé commandataire de l’abbaye des Bénédictins fondée dans cette commune au XI."- siècle, le Chateau du parc, ainsi nommé à cause d'un parc de 142 hectares entouré de murailles. Nous serions heureux de pouvoir en- trer dans l’église de l’ancien monastère qui est au milieu du bourg et qui, par sa grandeur, ses détails et sa belle con- servation est un des monuments les plus curieux de l'archi- tecture romane, dans la Gironde. Nous pourrions encore aller, dans la même commune, mais bien au-delà du bourg, jusqu’à la lande de Mougno , où mourut l'année dernière ce vieillard , J. Lapeyre, qui avait enrichi sa famille par l'em- ploi de la marne, légué à ses voisins un exemple qui fera également leur bien-être et à qui nous fümes assez heu- reux pour faire obtenir une double récompense, de la So- ciété d'Agriculture de Bordeaux et de M. le Ministre de l'Agriculture et du Commerce. Toutefois, en s’engageant (106 ) dans ces parages, il faut faire attention qu'il pourrait arriver qu'on ne pourrait ni comprendre les bonnes populations qui les habitent, ni se faire comprendre par elles. Effecti- vement, la commune de Saint-Ferme fait partie du pays que l’on nomme la Gavacherie , à cause du mélange burlesque de patois et de français que l'on y parle. En 1524 et 1525, une maladie pestilentielle ayant ravagé les rives du Drot, l'un des Seigneurs du lieu, Henry d’Albret, roi de Navarre, fit venir, pour la culture des terres, des familles de la Sain- tonge, de l'Angoumois et de l’Anjou : ce sont ces familles qui, mêlées à celles restées dans la contrée, ont donné lieu à un langage et à des mœurs qui décèlent encore les origines diverses de ces populations. Mais encore une fois, nous avons hâte d’arriver et voilà que nous apercevons Monségur, le terme de notre course, la ville la plus considérable que nous ayons encore rencon- trée. Après avoir gravi le tertre élevé sur lequel repose ce chef-lieu de canton , nous ne pouvons, pour y entrer , pas- ser par des portes, car elles ont été démolies il y a à peine quelques années ; mais nous pouvons nous engager dans des rues larges, parfaitement droites, conduisant toutes à une grande place carrée, entourée de couverts , voisine de l’é- glise et ayant à son centre une vaste halle. Monségur est aussi très-ancien; Monségur possède des souvenirs , parmi lesquels il convient de mentionner les éta- blissements qu’il dut à Éléonore de Guienne et aux Edwards d'Angleterre ; les sièges qu'il soutint; le stratagème dont fit ” usage Montluc pour s’en emparer en 1562 et les vengeances qu'il y exerça , notamment contre les officiers du Roi et les consuls qu'il fit pendre à l’un des piliers de la halle, ayant leur chaperon au cou. Voici par quelles réflexions Montluc termine le récit de cette expédition ; elles ne sont pas de nature à légitimer de *. (107) telles cruautés….. « Or, j'avais affaire, en Gascogne, avec » cerveaux si forts et gaillards qu'il y en aye dans toute l'Eu- » rope. Qui gouvernera bien le gascon, peut s’assurer qu’il » aura fait chef-d'œuvre. Car, comme il est naturellement » soldat , aussi il est glorieux et mutin ». A la mairie de Monségur, on conserve avec soin un petit livre désigné sous le nom d’Esclapot (1), à cause de sa cou- verture en bois et contenant les franchises, privilèges et rè- glements de la ville (2). Mais ce qui rend Monségur extrêmement remarquable, ce qui doit intéresser l'observateur, c’est la vue dont on jouit du haut de ses remparts ; c’est cette fertile et gracieuse plaine du Drot qu’ils dominent et que l'œil peut suivre sans peine dans un développement considérable : depuis les co- teaux du Puy et de Dieulivol jusqu'aux masses imposantes et aux tours élevées du vieux château de Duras. Le Drot qui suit dans cette plaine un cours extrêmement sinueux, (1) Du mot patois Esclapot, petit morceau de boi (2) Voici en quels termes, M. Lapouyade, ui da Tribunal civil de La Réole, parle de ce livre dont il a eu la bonté de faire pour nous quelques extraits relatifs à la police rurale. « L’Esclapot, » manuscrit ‘contenant les franchises, privilèges et règlements de la » ville de Monségur , forme un petit volume in-4.c de 25 centimè- » tres de haut, sur 18 de large. Son épaisseur est de 4 centimètres » Il est couvert de deux petites planchettes de bois, arrondies aux » angles et le tout est recouvert d’une forte peau de parchemin ca- » chant autrefois les dites planchettes, Le manuscrit se compose de » one cahiers en parchemin , assujeltis au moyen de deux chainettes _»et de trois nervures espacées sur le dos. L'on y compte 83 feuillets. des tra- » Le 77.e est à moitié décnire : les 40,41, 42 et 68.es portent » ces de ratures et l’on 5’ it que des lignes ont été effacées ou » retranchées. Cela avait été déjà vérifié en 1695. Sur les marges se » marre quelques notes insignifiantes. Enfin au dedans: de la pre- ière pirncbeile, on trouve sous un ne de pa em n, sur le- » Lt on d musique du X.ine siècle ». (108 ) a été, comme on sait, l’objet de tentatives nombreuses et anciennes pour être rendu navigable. La dernière de ces tentatives qui a eu recours aux barrages et aux écluses, a parfaitement réussi et Monségur aussi bien que Duras, Cas- tillonnez, Eymet, etc..., ont maintenant un port et des bâ- teaux qui transportent leurs denrées directement à Bor- deaux. Ici encore, si le temps nous le permettait, nous pour- rions, si non interrompre notre voyage puisque nous l’avons heureusement terminé, mais le continuer jusqu’à Roque- brune. Nous verrions là, dans une position des plus gra- cieuses l’église et la commanderie du lieu : deux débris des âges passés, également chers aux archéologues. Tout le pays que nous venons de parcourir et qui cons- titue, avons-nous dit, le plateau élevé séparatif des deux bassins de la Garonne et de la Dordogne, est principale- ment formé par ces terres argilo-siliceuses, dites boulbè- nes, que l’agriculture utilise par des bois, des céréales, des vignes. Cette agriculture longtemps languissante, à cause de la difficulté, ou mieux de l'impossibilité des com- munications, est entrée depuis quelques années, depuis que ce formidable obstacle a cédé devant un système de routes en grande partie réalisé, dans la voie des progrès. Les four- rages , tels que le trèfle de Hollande surtout , s’y sont ré- pandus et la facilité de nourrir ainsi un plus grand nombre d'animaux a réagi de la manière la plus heureuse sur tout le reste de la culture. En un mot, tant par rapport à sa formation particulière , à l'état et à la situation de ses centres de populations , aux monuments anciens et aux souvenirs historiques qu’elle pré- sente, que par rapport aux agréments, aux distractions que peut y rencontrer le voyageur et aux ressources qui . peuvent y être le partage de l'agriculture, nous ne croyons pas qu'il puisse y avoir dans le département de la Gironde une localité plus intéressante et plus digne d’attention que celle que nous venons de décrire. ( 109 ) EXCURSION AGRICOLE ET SCIENTIFIQUE DANS L'ANJOU ; Discours prononcé en séance publique de la Société Linnéenne , le 11 Novembre 1850, PAR M. CH, LATERRADE, PR | | ed FE EAN A PE PU | La membre de plusieurs Sociétés savantes. Messreurs, Les populations angevines offrent un spectacle curieux à l’habitant de la Gironde qui les visite pour la première fois. A peine le voyageur a-t-il mis le pied sur le département de Maine-et-Loire , qu'il se trouve au centre d’un monde qui n’a presque rien de commun avec nos contrées, surtout s’il arrête ses regards sur les cultivateurs dont il est bientôt entouré. Là , notre patois méridional a complètement dis- paru ; tout le monde parle un français assez correct; le paysan mieux vêtu, mieux logé, mieux nourri que chez nous , habille ses enfants avec un soin plus recherché ; les femmes et les petites filles mêmes sont coiffées d’un bonnet dont la blancheur contrasterait singulièrement avec le Ma- dras des habitantes de nos campagnes; une blouse de coton bleu donne au costume des hommes une modeste et élé- gante uniformité ; on rencontre rarement à pied les plus humbles familles ; presque toutes ont à leur disposition une petite carriole découverte, attelée d’un cheval. Ce qui frappe donc tout d’abord le voyageur qui traverse l’Anjou, c'est le bien-être général qui se montre de toutes parts ; il semble que dans cette belle province le problème si difficile de ( 110 ) l'extinction de [a misère ait été résolu ; du moins, le paupé- risme y est-il à peine connu. Une certaine aisance a péné- tré là, jusque sous les demeures les plus chétives. 1l est de toute évidence que la situation du paysan angevin, est infiniment préférable à celle du paysan des pays vinicoles. A quoi faut-il attribuer un tel résultat ? L’instruction , l’édu- cation publique ont-elles pris là-bas des développements plus étendus qu'ici; le voisinage de Paris qui met le cultivateur en contact avec beaucoup d'étrangers, l’universalité de l'em- ploi de la langue française qui facilite au paysan la lecture et la conversation; ces causes-là, auraient-elles contribué à l'amélioration des classes agricoles de ce pays ? Il ne nous parait pas possible de le méconnaître ; mais à nos yeux, la cause principale de cette plus grande somme de bien-être, c’est avant tout la mobilisation des capitaux. Dans nos pays vinicoles, des fortunes considérables restent souvent enfouies, durant des années entières, dans les celliers de nos grands propriétaires. Ceux-ci à bout d’argent se trouvent réduits à de pénibles expédients ; quand le bureau des hypothèques leur a fermé ses portes , ils se voient contraints de diminuer considérablement des dé- penses souvent indispensables ; ils achètent et font travailler à crédit; ils sont riches et souvent manquent du nécessaire. Tout se ressent autour d’eux de cette déplorable position. Le bien-être peut-il exister pour le paysan , là où le pro- priétaire se voit réduit aux plus cruelles privations ? Non sans doute. Il n’en est pas de même dans l’Anjou. Là, les cultures des céréales et l'élève des bestiaux occu- pent la plupart des agriculteurs ; or, l'écoulement de ces produits est toujours facile; le propriétaire et le fermier se contentent d’un bénéfice peu considérable; ils retirent sans doute de leur travail ou de leur sol un médiocre intérêt, (111) mais enfin, à peu d'exceptions près , ils vendent quand ils veulent vendre ; de cette manière l’argent circule, le capital se mobilise; chacun en a sa part, chacun peut traiter au comptant pour ses affaires, petites ou grandes. Telle est, Messieurs, selon moi, la raison de la prospérité qu’on re- marque non-seulement dans l’Anjou, mais aussi partout où le capital est mobilisé. Le cultivateur angevin peut s’enorgueillir à juste raison . du bien-être dont il jouit ; c’est lui qui l’a créé, c’est lui qui l'a fait après Dieu. Le sol sur lequel il opère ne se prête pas pas aisément à la culture ; il à fallu beaucoup d'intelligence et d’opiniâtreté pour vaincre les obstacles graves qu'il pré- sente presque partout. Nous n'avons pas autour de nous beaucoup d’exemples de la tenacité, de la force de cohésion de ces terres ordinairement labourées par un attelage de deux chevaux et de quatre bœufs. L'élément calcaire qui joue un si grand rôle dans la fécondité du sol, leur manque absolument. Heureusement , la nature a placé le remède à côté du mal; l’Anjou présente de vastes carrières de marbre et des mines de charbon. Avec du marbre et du charbon, on a fait de la chaux. La chaux est l’amendement indispensable des terres de l'Anjou ; aussi le plus petit fermier lui consacre-t-il chaque année , des sommes dont le chiffre élevé cau- serait un véritable effroi à nos cultivateurs si économes, si avares, quand il s’agit de modifier la nature de leur terrain. Sur plusieurs poinis de l’Anjou, des fours à chaux ont été construits ; l'établissement le plus remarquable de ce genre, est sans contredit , celui de notre honorable ami, M. Lemotheux, chez lequel nous récumes une hospitalité dont nous conserverons longtemps un agréable souvenir. C'est à Château-Neuf, sur les bords de la Sarthe, dont les flots sont si limpides et si purs, à côté de la tour du { 112) vieux château de Robert-le-Fort, que sont situés les fours de M. Lemothenx; ces fours n’ont pas moins de 23 mètres d’élévation ; ils fournissent de la chaux à un grand nombre de communes. Vainement quelques agronomes prétendront- ils que la chaux ne peut être employée longtemps durant plusieurs années sur le même sol sans l’appauvrir ou le ruiner ; il n'y a de champ ruiné dans l’Anjou que celui qu'on prive de chaux. La récolte du blé ayant une grande importance pour les Angevins, ils ont dû s'appliquer à rechercher les moyens de battage les plus économiques, les plus rapides et les mieux perfectionnés. Un de leurs plus habiles compatriotes, M. Houyau , a inventé à cet effet, une machine qui a obtenu à notre dernière exposition une médaille d'argent grand mo- dule. La machine Houyau est aujourd'hui employée dans presque toutes les fermes de l'Anjou ; contrairement à ce proverbe que nul n’est prophète dans son pays, M. Houyau a eu le rare privilège de faire adopter presque partout, autour de lui, l’ingénieuse machine dont il est l'inventeur , pour nous, qui nous sommes un peu efforcé de propager dans la Gironde ce moyen de battage , nous avons été vive- ment satisfait de voir une confirmation si éclatante et si. multipliée de tout le bien que nous en avions dit. Dans le rapport qu’il présenta récemment à notre Société d’Agricul- ture (1) sur la machine Houyau , M. Ivoy fils, disait avec raison qu’il croyait utile d’atteler au manège qui la fait mouvoir quatre chevaux au lieu de deux; nous dirons à l'appui de cette assertion, que partout où nous l'avons vu fonctionner dans l’Anjou, le manège de cette machine était mu, en effet, par quatre chevaux. Le batteur acquiert ainsi une vitesse suffisante et soutenue. (1) Annales de la Société d'Agriculture de la Gironde. 1850. p. 55. (115) Cependant, M. Houyau, il faut bien le dire, est mainte- nant menacé d’une rivalité devant laquelle il succombera probablement, quand il s'agira de grandes exploitations. La vapeur dont les applications admirables semblent devoir envahir le monde entier, la vapeur vient aussi en aide à l'agriculture, et non loin des fermes où fonctionnait la ma- chine Houyau , nous avons pu voir opérer à la vapeur le battage du blé. On ne se fait pas l'idée de la rapidité d’un tel battage qui n’occupe pas moins de 18 personnes et qui s'opère comme par enchantement. Quelques propriétaires nous ont assuré que ce mode de battage était préférable à tous ceux employés jusqu’à ce jour (4). Les Angevins, s'occupent beaucoup de l'élève des bes- tiaux ; nous avons vu dans différents comices de magnifiques produits de leurs étables ; cependant , n’en déplaise à ces honorables éleveurs, nous n‘échangerions pas notre belle race garonnaise pour les Manseaux qu'ils vantens d’ailleurs avec un légitime orgueil. La race manselle paraît avoir tiré son origine des montagnes de la Suisse; les bœuls qui appartiennent à cette race ont comme ceux de la Suisse, la colonne vertébrale fortement arquée à sa partie inférieure ; c’est une race agreste, donnant des produits très-élevés et très-propres à l'engraissement. Quelques éleveurs de lAn- jou ont croisé cette race avec des Durham; il ne nous appartient pas de décider du mérite de cette innovation qui (1) Depuis la lecture de ce discours, nous avons reçu de l’Anjou des renseignements positifs qui sont venus modifier notre opinion des expériences don sur le battage à la vapeur. Il suit en effet tles_ À résultats nous ont été © uniqués, que l’emploi de la machine Houyau doit 5 se 4 in de la machine à feu, maintenant surtout que l’habile ingénieur a inventé un arbre en Fonte mobile, à l’aide duquel la machine peut être aisément transportée d’un lieu à un autre. 9 « (114) | pourrait bien faire perdre aux Manseaux des qualités pré- cieuses sans offrir des compensations suffisantes ; nous de- vons toutefois reconnaître que les produits de ces croise- ments se distinguent très-facilement des Manseaux pur-sang dès le premier coup-d’œil ; par le croisement, les cornes sont devenues lus courtes, la tête a perdu de son volume, le sacrum s’est abaissé, les épaules se sont élargies et le jar- ret s’est accrü. C'est aux agronomes éclairés de l’Anjou qu'il convient d'examiner les avantages sérieux que présentent de sembla- bles croisements ; on doit comprendre toute l'importance de ce qui se rattache à l’amélioration des races bovines dans une contrée où la vente des bestiaux d’un seul département, celui de Maine-et-Loire, s'élève chaque année à 25 millions (1). La récolte du miel et de la cire figure pour un chiffre beaucoup plus modeste dans la statistique des produits de l’Anjou ; nous ne pouvions cependant pas traverser ce pays sans aller rendre une visite à M. de Beauvoys qui habite la commune de Seiches, et chez lequel nous reçcümes le plus obligeant accueil. Nous ne vous parlerons pas des ruches si ingénieusement perfectionnées par M. de Beauvoys ; tout Bordeaux a pu se convaincre , à l’époque de notre dernière exposition, des avantages immenses que présente l'emploi de ces ruches ; désormais, la récolte du miel et de la cire ne sera plus accompagnée de la destruction des abeilles, l’apiculteur pourra savoir ce qui se passe dans les ruches, y découvrir les animaux malfaisants qui s’y seraient intro- duits, y placer la nourriture qui leur manque quelquefois , _s’emparer aisément des essaims nouveaux et faire des es- saims artificiels avec la presque certitude de réussir. La Société Philomathique de Bordeaux, en accordant à M. de (1) Bulletin de la Société industrielle d'Angers, 1849 p. 6. x (115) Beauvoys la médaille d’or réservée à l'industrie , a prouvé le haut intérêt qui s'attache à cette utile invention. C'est avec un vif sentiment de curiosité que nous avons visité dans la commune de Trichet, tout près de Château- Neuf, la belle houblonnière cultivée par les soins de M. Monnier. Chaque pied de houblon est planté au bas d’une perche qui lui sert de point d'appui, et qui a 8 mètres, 53 cent. de hauteur; quand la volubile du houblon a atteint l'extrémité de la perche, elle en couronne le sommet par un bouquet de feuilles et de fleurs ; il serait difficile d'exprimer l'effet pittoresque que produit un champ de cette espèce. C’est en Septembre qu’on fait la récolte du houblon; les frais de cette culture sont considérables, mais les revenus _ qu’on en retire sont dignes de fixer l'attention des agricul- teurs de la Gironde. Des essais pourraient être tentés avec succès dans nos contrées , nous en avons l'assurance. Chaque tige de houblon doit rapporter en moyenne un demi-kilo de follicules qui se vendent de 1 fr. 80 à 3 fr. le kilog. Les agriculteurs qui élèvent des vers-à-soie, pour- raient se servir de leurs magnaneries pour faire sécher les follicules du houblon. . Je ne vous dirai que peu de mots, Messieurs, des éla- blissements horticoles de l'Anjou ; vous savez la juste célé- brité dont ils jouissent {1 ); M. A. Leroy a bien voulu nous faire parcourir avec lui ses magnifiques pépinières qui n’ont pas moins de 45 hectares d’étendue; nous avons vu dans ces immenses plantations une cinquantaine d'espèces appar- tenant à la riche famille des conifères ; non loin de chez M. Leroy, sur la promenade du Mail à Angers, nous avons visité les cultures de M. Cachet. Cet habile horticulteur se livre (1 ) On évalue à plus d’un million la vente annuelle des produits des pépinières d'Angers. (116 depuis longtemps d'une manière presque exclusive à la diffi- cile culture des Camellias. C’est chez lui qu’il faut entrer si Fon veut voir dans toute sa beauté ce précieux et indispen- sable ornement de nos serres. Au milieu de la riche végéta- tion du jardin de M. Cachet, on ne peut se lasser d'admirer un superbe camellia qui semble être le père de tous ceux qu'on a groupés autour de lui. Il est âgé de 26 ans; il a quatre mètres d’élévation et quoique en pleine-terre, il donne environ deux mille fleurs tous les ans. M. Cachet possède aussi une belle collection de fougères exotiques ; il a bien voulu nous offrir plusieurs de ses plus remarquables es- pèces pour le Jardin Botanique de Bordeaux. Le Jardin des plantes de la ville d'Angers est dirigé par un homme dont nous connaissions depuis longtemps les excellents ouvrages ; M. Boreau voulut bien nous accompa- gner dans la visite que nous fimes au bel établissement confié à ses sains. Le Jardin Botanique d'Angers est beau- coup plus grand que celui de Bordeaux. On y trouve de dé- licieuses allées qui sont le rendez-vous ordinaire des pro- meneurs ; l’eau y est abondante et des ponts élégants jetés sur les réservoirs dans lesquels elle circule, ajoutent encore au tableau pittoresque que présente l'ensemble du Jardin. Les serres nouvellement construites sont de toute beauté ; l’un des côtés et la charpente sont en verre ; celle-ci forme un demi cercle qui va prendre son point d'appui sur un mur qui a près de dix mètres d’élévation. Là, du moins, les bananiers en fleurs peuvent s'élever majestueusement à une assez grande hauteur. Au moment où je me trouvais à An- gers, la variété panachée de l’Agave americana était en plei- ne floraison ; je m'estimai heureux de pouvoir contempler pour la seconde fois de ma vie cette magnifique plante qui ne demande pas moins d’un siècle pour donner ses fleurs. Ne soyez pas surpris , Messieurs , si je passe sous sHence F1) les beaux magnolias du Jardin des plantes d'Angers et ceux des pépinières de M. Leroy; je suis revenu d’An- gers en passant par Nantes ; c'est vous dire que j'ai visité le magnifique Jardin de cette ville; c’est vous dire que Jy ai admiré cette majestueuse allée de 48 magnolias placés à 7 mètres de distance les uns des autres. Quand on s’est reposé à l'ombre de ces arbres superbes, quand on a joui du coup-d’œil imposant d’une semblable allée , il n’est plus permis de parler de magnolias que pour vanter ceux que possède le Jardin Botanique de Nantes. Combien il est à regretter, Messieurs, que Bordeaux, l’une des premières villes de France, n’ait pas comme Angers, comme Nantes, un Jardin Botanique en rapport avec son im- portance , avec les richesses scientifiques qu’elle possède, les monuments qui la décorent , les promenades qui en font un si agréable séjour. Nous pouvions lire ce matin, encore, dans un journal de cette ville , l'expression de ces regrets et de ces vœux , que la Société Linnéenne formula la pre- mière ; espérons avec l'honorable secrétaire de la Société d'Horticulture , que notre Municipalité n’abandonnera pas indéfiniment des projets qui furent développés si heureuse- ment, il y a quelques années par le magistrat qui est au- Jourd’hui à la tête de l'administration de notre cité. Nous ne pouvions nous éloigner de l’Anjou sans visiter l'établissement si remarquable des ardoisières du Grand- Carreau ; grâces à l’obligeant concours de M. Bordillon, ancien Préfet de Maine-et-Loire, qui nous accompagna dans cette intéressante excursion, nous pûmes voir dans tous ses détails une des exploitations les plus curieuses qu'il ait été donné au génie de l’homme de concevoir et d'exécuter. Après une demi-heure de marche, la voiture que nous avions prise à Angers , nous déposa au milieu de nombreux monticules , de véritables petites montagnes formées de (118 ) débris de schistes et d’ardoises ; au sommet de ces monti- cules qu'on ne gravit pas sans quelques difficultés, se trou- vent blottis dans de petites cabanes, des hommes et des enfants qui taillent l’ardoise ; le schiste qui leur est remis est divisé en grandes plaques minces , d’une longueur et d’une largeur assez considérables et d’une forme irrégulière ; à l’aide, d’un instrument tranchant , ils font une légère inci- sion à l’un des côtés de l’ardoise ; ensuite un coup de coin est donné et la feuille d’ardoise se sépare dans toute sa longueur comme une feuille de verre qui aurait été rayée avec un diamant. Ce travail est curieux sans doute; mais j'étais venu là pour autre chose ; j'avais hâte de faire une excursion souterraine. Deux actionnaires du Grand-Carreau se joignirent à nous et précédés d’un ouvrier qui portait une lampe, nous nous acheminâmes vers les sombres cavernes ; à peine avions-nous franchi le seuil de l'immense atelier , que le bruit étourdissant des marteaux, des pioches et de la mine vint frapper nos oreilles. Cependant nos yeux ne distinguaient rien encore si ce n’est la lueur faible et vacil- lante de quelques lampes placées de loin en loin pour rallu- mer au besoin celle qui s’éteindrait entre les mains du visi- teur; c'est à peine si nous pouvions voir la planche sur laquelle notre pied se posait, le garde-fou qui guidait notre main. Après avoir marché quelque temps , nous nous arré- tâmes ; alors nos regards purent contempler les principaux traits d’un des tableaux les plus beaux et les plus effrayants qu'il soit possible d'examiner : au-dessus de nous , un rocher _de 33 mètres de hauteur ; au-dessous, un abîime de plus de 66 mètres de profondeur. Entre ces deux abimes, de frêles planches à moitié pourries , suspendues par des fils de fer d’une solidité très-douteuse, et sur ces frêles plan- ches quatre ou cinq hommes qui pouvaient à peine échan- ger quelques paroles, à cause du vacarme épouvantable (119) qu'on ne cessait d'entendre. Cependant nous voulûmes tout voir ; nous voulümes descendre jusqu’au fond ; nous fran- chimes à pas lents et non sans une sorte de terreur , les galeries et les échelles , et bientôt à 100 mètres au-des- sous du sol, nous pûmes nous mèler à une population d'ouvriers travaillant dans cet abime avec la même ardeur , la même sérénité que s'ils eussent été occupés aux travaux les plus simples et à l'abri de tout éboulement. Cependant on ne saurait se faire l’idée de tout ce qu’il y à de lugubre et d’effrayant dans cet atelier souterrain ; il y a là des hommes qui travaillent suspendus par une corde , d’autres sur des échelles — et le moindre oubli, la moindre mala- dresse, le plus petit étourdissement causerait leur perte immédiate. Après avoir vu détacher du roc un bloc consi- dérable dont la chute fut suivie d’un bruit étourdissant , nous reprimes le chemin d’en haut. Cette fois-ci, nos yeux accoutumés à l'obscurité du souterrain, nous pe”mirent de considérer les galeries que nous traversions; je dois le dire en toute franchise, c’'eût été un mauvais moyen de nous rassurer si nous avions eu besoin de l'être ; les rochers lais- sent constamment échapper des gouttes d’eau qui tombent sur les planches de ces ponts suspendus ; le bois se dété- riore et les fils de fer s’oxident. Je fis observer cette cir- constance à notre guide : « j'aimerais mieux, comme les ou- vriers, me servir des échelles; ces ponts suspendus ne m'inspirent aucune confiance ». — « Vous avez raison , me répondit-il, ces galeries ont déjà causé de grands malheurs; le 4 Janvier dernier , l’une d'elles céda sous les pas de nos deux régisseurs qui tombèrent ainsi de 50 mètres de laut ; nous ramassâmes deux cadavres ». — Le guide en aurait dit davantage si l’un des visiteurs ne lui eût fait comprendre l'inopportunité de semblables récits. — Quelques moments ( 420 ) plus tard nous reprenions, par un soleil qui nous sembla plus éblouissant que jamais, la route qui conduit à Angers. Le spectacle dont nous venions d’être les témoins , nous avait fortement impressionnés ; et cependant ce n’est rien encore qu'un tel spectacle à côté de celui qu’offrent les mines de houilles, ou les merveilleuses salines des monts Krapaks. En vérité, quand on pense à toutes ces choses, l’esprit est confondu et comme le remarque un écrivain moderne (1), il est impossible de ne pas être frappé d’étonnement en comptant ces milliers d'hommes, de femmes et d'enfants qui pour satisfaire aux besoins ou aux plaisirs des autres hommes, passent sous terre la plus grande partie de leur existence ; quand on pense surtout, que ces ouvriers sont livrés aux plus pénibles travaux , exposés à des dangers sans cesse renaissants et recoivent à peine en échange de tant de sacrifices, de quoi soutenir une vie que la religion seule peut donner le courage de supporter. L: (1) M. de Lonchêne. Le monde souterrain. SOCIÉTÉ LINNÉENNÉE DE BORDEAUX. PROGRAMME QUESTIONS MISES AU CONCOURS POUR L'ANNÉE 1851 ET SUIVANTES. AVIS. La SOCIÉTÉ LiNNÉENNE de Bordeaux, invite toutes possible. Elle les invite particulièrement à vouloir bien le communiquer aux naturalistes et agronomes s'occu- pant des matières dont il y est fait mention. Bien que presque toutes les questions proposées puissent devenir l'objet des méditations des naturalistes et agro- nomes de tous les pays et plus particulièrement de ceux d’entr'eux qui habitent, soit la Gironde, soit quelqu’ autre département du bassin de la Garonne, néanmoins, la Société recommande d’une manière toute spéciale, à ces derniers, les questions B et e la deuxième partie : Histoire naturelle appliquée. Publications de la Société, La Re complète des Actes de la Socièté Linnéenne de Bordeaux. compte aujourd’hui seize volumes. Fo onant annuel au volume en publication est au prix de 10 fr. Les livraisons sont adressées franco , par la oste. On souscrit, à Paris : chez Baillière, libraire; à Bordeaux, chez sh + php libraire, et Th. Lafargue, imprimeur de la Soc Société Linnéenne de Bordeaux. PROGRAMME des QUBSMIONS USERS AU CONLOURS Pour l'Année 1951 et suivantes, ————0 F0 —— La Société Linnéenne de Bordeaux n’a jamais cessé de travailler , de tout son pouvoir et par tous les moyens dont elle à pu disposer, à la propagation et aux progrès des scien- ces composant le cadre de ses études. Parmi ces moyens, un des plus puissants a longtemps consisté dans la mise au concours de questions scientifi- ques, avec promesse de récompenses académiques pour la solution de ces questions. C’est ainsi qu'il lui a été donné plusieurs fois de provo- quer et de couronner des travaux qu'elle a été heureuse de publier, dans l'intérêt des connaissances auxquelles ils se rapportaient. Malheureusement , aussi bien pour elle que pour les au- tres compagnies savantes de la France, les évènements qui ont surgi, les questions politiques et sociales qui précecu- pent les esprits, ont uui considérablement à ce moyen de progrès, et diminué beaucoup le genre de manifestation qu'il était possible de lui emprunter. On comprendra même que, pour ce qui regarde la Société Linnéenne , ces résultats désavantageux ont pu être plus grands encore ; car les sciences dont elle s'occupe sont du r ( 124 genre de celles qui ne sauraient avoir aucune liaison avec la politique; de celles qui réclament, de la part de celui qui les cultive, la tranquillité d'esprit la plus absolue, l'absence la plus complète de préoccupations. Ces considérations dont le mérite, comme les circons- tances qui y donnent lieu, ne peuvent être, tout doit le faire espérer , que transitoires, ont motivé de la part de la Société deux résolutions qu’il lui importe de faire connaître. La première , c’est celle du maintien pour 1851 , du Pro- gramme des questions mises au concours en 1850. La seconde, c’est la détermination, non pas nouvelle, mais plus précise et mieux formulée, qu’elle prend de re- doubler de sollicitude et de soin pour rechercher, apprécier et récompenser s’il y a lieu , non-seulement tout travail accompli dans le but du progrès des sciences naturelles et de leurs applications; mais encore toute action, toute dé- marche , toute entreprise pouvant avoir plus ou moins direc- tement de semblables résultats. C’est surtout en ce qui touche à la localité dans laquelle elle se trouve placée ; en ce qui touche au département de la Gironde et au beau bassin dont il fait partie, que la So- ciété Linnéenne attache du prix à cette dernière résolution. Elle lui permettra effectivement d’adresser ses encoura- gements à des hommes qu'un goût naturel et prononcé, quoique n'ayant pas fait d’études préparatoires , a porté à réunir des collections souvent très-précieuses pour la scien- ce. Elle lui permettra d'imprimer au zèle de ces hommes, une nouvelle énergie, en leur révélant tout ce que ce zèle a de louable, tout ce qu’il peut avoir d'utile. Enfin , elle lui permettra d'étendre ses investigations jus- que sur les ouvrages qui pourront être publiés, dans la contrée qu'embrasse son ressort et sur les matières dont elle s'occupe ; d'attirer ainsi sur ces ouvrages l'attention ( F20:) dont ils pourraient être dignes:et que, bien souvent, on leur refuse. En adoptant de telles résolutions, la Société Linnéenne est persuadée qu'elle satisfait au devoir que lui imposent également ses traditions et la mission qu’elle s’est imposée. ET 4 PREMIÈRE PARTIE. HISTOIRE NATURELLE PROPREMENT DITE. $ IL. — GÉOLOGIE. FORMATION DES LANDES, etc. Des faits récemment constatés, par les recnerches géolo- giques, étant de nature à modifier peut-être les idées ad- mises en ce moment sur plusieurs formations particulières au bassin de la Garonne , la Société Linnéenne appelle d’une manière toute particulière l'attention des hommes s’occu- pant de ces sortes de matières, sur les trois points sui- vants : » Quelles ont été les causes et les phénomènes divers des » formations géologiques de la plaine des landes ; de l’agré- » gat qui lui sert de sous-sol et que l’on désigne dans le » pays sous le nom de Zappa, alios, etc.., et des cailloux » roulés dispersés depuis les Pyrénées jusqu’à la mer ? ». Peix , à décerner jusqu'en 1851 : Médaille d'argent, grand module. $ IL — ZOOLOGIE. Parmi les espèces d’Unio qui vivent dans les eaux de notre département la plus remarquable de toutes, sans contredit, est celle qui a été décrite par M. Michaud, sous g: 1426 ) le nom d’Unio de Deshayes ( U. Deshaysii) et dont M. Ch. Des Moulins a reçu quelques exemplaires provenant des étangs de nos landes et plus particulièrement de celui de Cazeaux. Depuis cette époque , l’Unio de Deshayes n’a plus été rencontré. Cette espèce se distingue de ses congénères par son allon- gement et le peu d'épaisseur de sa coquille. Elle est à l’ex- térieur d’une couleur jaune verdâtre, et à l'intérieur elle présente une belle nacre d’un blanc bleuâtre. » La Société Linnéenne récompensera , par une médaille » de bronze, les soins de celui qui lui fera parvenir, une cer- » taine quantité de ces mollusques , en lui faisant connaître » en même temps, les lieux, l’époque où il l'aura rencon- » tré ainsi que toutes les observations capables de concou- » rir à son histoire naturelle ». $ IL. — BOTANIQUE. A. CATALOGUES D'ARRONDISSEMENTS OU DE CANTONS. Indépendamment de là Flore Bordelaise, et de la Gi- ronde, par M. Laterrade, nous avons le catalogue des plantes de La Teste, publié par M. Chantelat, et le catalo- gue des plantes phanérogames de l'arrondissement de Bazas, par M. le D." Ardusset. » La Société désirant que l’on s’occupe aujourd’hui des » parties du département qui n’ont pas été explorées avec » autant de détails , sous le rapport de la Botanique, de- » mande le catalogue raisonné des plantes de l’un des qua- » tre arrondissements de Lesparre, de Blaye, de Libourne » et de La Réole; ou seulement d’un ou plusieurs cantons » de ces arrondissements ». Prix, à décerner jusqu’à 1851 (selon l'étendue du tra- vail) , Médaille d'argent ou de bronze. Me ; "+ de. me Lt Le * a #e Li » LS no (427) B. ÉTUDES CARPOLOGIQUES. Les travaux carpologiques du célèbre Gærtner ont puis- samment servi l'application de la méthode naturelle en four- nissant des caractères certains pour la délimtation des genres. Des botanistes éminents ont commencé, depuis quelques années , à poursuivre cetle étude jusques dans jes graines ou semences proprement dites, afin d'y trouver des caractères solides pour la distinction des espèces. Le succès répond à leur attente, ainsi qu’on peut s’en convaincre par les progrès qu'a faits, grâce à eux, l'étude des espèces dans les genres Euphorbia, Vicia, Lathyrus, Epilobium, etc. La Société Linnéenne, désirant favoriser cette utile ten- dance , distribuera des Médailles d'argent, petit et grand modules, dans ses séances publiques de 1851 et 1852, aux au eurs qui lui présenteront d’une manière satisfaisante, la description spécifique et comparative des GRAINES MURES des phanérogames qui croissent spontanément ou qui sont communément cultivées comme plantes utiles ou même d'agrément, dans une circonscription déerniois: et ce, aux Ps e suivantes : .* Si le travail présenté embrasse toutes les phanéroga- mes , il sera admis au concours; quand bien même il n’y serait question que des plantes d’une seule commune. 2.+ Si ce travail embrasse seulement un certain nombre de familles d’une Flore locale quelconque , il faudra que le nombre des espèces de graines décrites s'élève au moins de cent à cent-cinquante , et que les familles qu'il embrassera , soient traitées complètement ( quant à la circonscription de cette Flore ). La Société entend que cette étude soit portée sur les familles nombreuses en genres | et en espèces ( { Gra- minées, Cypéracées , Labiées , ds ; Crucifères , Composées, etc ). ( 128 ) 3.° Si ce travail embrassait toutes les plantes phanéroga- mes d’un département , ou même d'un arrondissement sous- préfectoral, la médaille pourrait être en or. C. STATION MINÉRALOGIQUE DES PLANTES. La Société Linnéenne, par suite de communications importantes qui lui ont été faites, sur ce sujet, par son président et des discussions auxquelles elle s’est livrée, ayant reconnu combien il serait avantageux de pouvoir dresser , pour chaque localité de la France, des catalogues indiquant la station minéralogique des plantes, etc., arrête : « Qu'elle décernera à l'avenir, selon le cas, des Hédail- » les de bronze ou d'argent, petit ou grand module, aux » personnes qui lui auront remis le plus de documents pré- » cis, recueillis dans le département de la Gironde ou les » autres départements environnants, sur cette importante » question ». Nota.— Ces documents étant destinés à l’édification d’un ou plusieurs Er RTE dont les éléments ont été dé- terminés par la Société, les prétendants aux médailles ci-dessus pourrént relirer de ces pr Aug. Petit-Lafitte, président de la Commission spéciale, nommée pour cet objet, une instruction imprimée destinée à les diriger dans leurs recherches et qui leur sera délivrée gratuitement. TO —— DEUXIÈME PARTIE. HISTOIRE NATURELLE APPLIQUÉE. $ I — BOTANIQUE RURALE. À. DESTRUCTION DE LA CUSCUTE, Le développement que prend la culture du trèfle de Hol- lande ( Trifolium pratense ; dans la Gironde , et les avan- tages marqués qui peuvent résulter de ce développement , Ne à : + ne ‘ Frs at. à à 3 RE a + # (129) tels sont les motifs capables de fixer l'attention publique sur cette plante utile et d’exciter les naturalistes à recher- cher et à signaler avec soin les accidents ou maladies aux- quels le trèfle est sujet, et les moyens à employer pour l'en préserver. Or, parmi ces accidents ou maladies , l’envahissement de la Cuscute, est sans contredit, ce qu’on doit le plus redou- ter, ce qui a produit jusqu'ici le plus de ravages. En conséquence , la Société Linnéenne demande : « 1.0 Qu'on fasse la description précise et complète de « J’apparition, du développement et des progrès successifs » de la Cuscute (Cuscuta europæa) dans les champs de » trèfle ou autres légumineuses ; » 2.0 Qu'on indique les moyens, sanctionnés par l’expé- » rience, soit de prévenir cette apparition , soit d’y mettre » un terme, lorsqu'elle a été signalée ; » 8.0 Enfin, qu'on fasse connaître une méthode simple, » usuelle et sûre pour distinguer les graines de Cuscute, » qui peuvent être mêlées à celles du trèfle, et pour les ex- » traire de ce mélange ». Prix, à décerner jusqu’en 1851 : une Médaille d'argent. B. FLORE DES PRAIRIES NATURELLES. Utiles partout, les prairies naturelles, ces pièces glorieu- ses du domaine, comme le dit le vénérable Olivier de Serres, acquièrent une plus grande importance encore là où le cli- mat, comme parmi nous, est inconstant et sujet à des sè- cheresses extrêmement hostiles à la production des her- bages. Malgré cela, très-peu d’études ont encore été faites sur ces sortes de prairies, en ce qui touche à leur composition botanique, aux moyens à employer pour y favoriser les bonnes espèces , pour en bannir les mauvaises e* L (130 ) La Société croit donc servir tout à la fois te intérêts de la botanique et ceux de l’agriculture , en signalant aux per- sonnes que leurs études antérieures et leur position mettent à même de pouvoir s’en occuper, le sujet exprimé dans la question suivante (1). » Faire la description botanique et la classification agri- » cole, des plantes composant les prairies naturelles, tant » du département de la Gironde que des autres départe- » ments du bassin de la Garonne, suivant leur position, » la nature de la terre et les autres circonstances capables » d'établir des différences entr’elles ». Prix, à décerner jusqu'en 1851 (et selon que la question aura été traitée d’une manière générale ou restreinte à des localités plus ou moins bornées), Médaille d'argent ou de ronze. C. FLORE DES Molssons. Un grave inconvénient du climat particulier aux contrées méridionales , c’est de pousser avec une énergie désespé- rante à la production des plantes spontanées, ou comme on le dit dans la pratique agricole , des mauvaises herbes. Cet inconvénient, c’est surtout dans les moissons qu'il se fait sentir : soit parce qe les terres’, pour la production du blé, reste livrée à elle-même pendant près d’un an : soit par tout autre motif, tiré du système de culture qui nous est particulier. La Société Linnéerne , désirant encore fixer l'attention des hommes compétents sur cet important sujet, met au concours la question suivante : (1) Comme propres à fournir de précieux renseignements pour ce genre de travail, on peut citer : Les prairies naturelles de l'Alsace, par M. Napoléon Niclès, 1839 ; Traité des plantes fourragères ou Flore des prairies Rattiretiéé , ete., par M. H. -Lecoeq , 1844. Deux articles de M Laterrade publiés dans l’'Ames des Champs , 1849, p. 65 et 161. à ‘ & # (131) » Faire la Flore des moissons ; signaler le mode de pro- » pagation et de croissance des plantes qui viennent dans » les blés ; signaler aussi les moyens qui peuvent être em- » ployés pour réduire le nombre de ces plantes ou pour les » détruire radicalement ». Prix, à décerner jusqu'en 1851 (et selon l'étendue donnée à la question }, Médaille d'argent ou de bronze. D. NOUVELLE GRAMINÉE POUR LES PRAIRIES NATURELLES. Le Panic digité (Panicum digitaria. Later.), est une plante très-certainement bien acclimatée dans le département. Cette graminée aime un sol humide ; il est facile de la multiplier à l’aide de ses racines, car elle est vivace et croît à la ma- nière du chiendent. C’est un fourrage tardif, sa plus grande végétation ayant lieu de Juillet en Octobre. Il est excellent, surtout pour les vaches laitières. « En conséquence , la Société croit que ce Panic doit être » introduit dans la grande culture, et elle récompensera, » en 1852, le propriétaire ou le cultivateur qui en aura » fait venir une notable étendue ». Prix : Une Médaille d'argent. Nota.— Voir le travail publié sur cette plante par M. Ch. Des Moulins, T. 15° des Actes de la Société; V'Ami des Champs, 1848 ; l'Agriculture , 1848, pag. 485. E. SYNONYKIE DE LA VIGNE. Les beaux travaux de M. Fauré, sur les vins de Bor- deaux ; ceux de M. le professeur Filhol, sur les vins de la Haute-Garonne , etc..…., les ouvrages remarquables sur la Vigne que l’on doit à M. Fr comte Odart; les études sur les Cépages de la Bourgogne récemment publiés par M. Bou- chardat, tout cela constate une attention toute particulière accordée à la plante qui fait la base des cultures de la Gi- ronde et la nécessité que l’on éprouve d'arriver à la solution * à (132) de tous les problèmes A donne lieu cette culture et les différentes opérations qui en sont les conséquences. Par ces motifs, la Société Linnéenne met au concours les questions suivantes que l’on pourra résoudre soit dans leur ensemble , soit séparément. « 1.0 Quels sont les cépages ou variétés de vignes cul- » tivés dans la Gironde, comme bases essentielles des vins » que l'on y récolte ; dire leurs noms et les variations qu’é- » prouvent ces noms suivant les localités; faire de chacun » d'eux une description capable de les faire connaître; y » Joindre l'historique de leur origine , de leur introduction, » de leur propagation successive ? » 2.° Indiquer les avantages et les inconvénients de cha- ». de ces cépages, tant sous le rapport de la culture, » du sol, du climat, que sous celui de la quantité et de la » qualité du vin que l’on en obtient. » 3.° Indiquer avec soin les époques relatives de leur » premier développement au Printemps, de leur floraison, » de la formation du verjus, de la coloration du fruit, de la » maturité. » » 4.0 Signaler les modifications culturales particulières à » chacun d’eux , principalement sous les rapports du genre » de conduite à donner à la vigne , de la taille, de l’effeuil- » lage, etc, . » 5.0 Enfin, autant que possible, déterminer par des » expériences faites sur le produit particulier de chacun » d'eux, le degré de coloration du vin qu’on obtient, sa » richesse alcoolique, etc... » La Société ne se dissimule pas tout ce qu'a de difficile celle question , surtout en ce qui touche les demandes con- nues dans le cinquième et dernier paragraphe : — deman- des qui supposent des connaissances chimiques qui ne sont pas encore très-répandues ; aussi s’empresse-t-elle de dé- clarer que la uso lui paraîtra ve AC Er traitée alors même qu'on n’aura répondu qu’aux quatre premiers paragraphes qu’elle présente. 4 à (7. , En outre , elle accordera-des médailles en argent ou en bronze, selon le cas, aux personnes qui lui auront remis des travaux tendant à la satisfaire sur un ou plusieurs de ces paragraphes, pris isolément ; soit que ces travaux em- brassent la totalité du 4 apres soit qu'ils n'aient en vue qu'une de ses divisions. Le Prix de la question résolue en entier sera, selon le cas , une Médaille d'argent, grand module, ou une Médaille d’or à distribuer jusqu’en 18514. $ IL. — BOTANIQUE MÉDICALE. PROPRIÉTES MÉDICALES DE LA SALICAIRE ET DE L'INULE. La Salicaire / Lythrum salicaria ) qui donne de Juillet en Octobre ses longs épis de fleurs rouges, dans les lieux hu- mides et l’Inule congrière , herbe de Saint-Roch ( Inula dys- senterica ), à fleurs jaunes et qui vient aussi sur les bi des fossés, sont deux plantes connues depuis longtemps , sous le rapport de leurs propriétés astringentes. Il paraît même qu'elles ont été employées avec succès dans le cours de l'épidémie qui vient de régner à Bordeaux et dans nos campagnes. » D’après ces considérations, la Société récompenserait » avec empressement l’auteur d’un mémoire qui prouverait, » par l'observation et l’expérience clinique , les propriétés » réelles de ces deux plantes » . Prix à décerner en 1851 : Une Médaille d'argent. $ III. — CHIMIE AGRICOLE. ACTION DU SULFATE DE CHAUX. D. L'action Débenee du Pis sl ue de chaux) sur neuses | g un fait aujourd” hui dé- les légumi montré d’une man . Toutefois, il résulte d is nombreuses et dignes de foi, que cette action n’est pas partout la même ; que dans _ certaines localités même, elle est d’une application telle- # “ (434 ) ‘à ‘emploi du plâtre. + &s | néenne , désirant échirer cétte question é, la met au concours dans les termes suivants : dans laquelle ces plantes sont cultivée # 9.0 Dans ce cas, quelle est la sn. de la terre favo- » rable à cette action ? Quelle est la nature de la terre au » contraire, qui ne lui est pas favorable ? Prix à décerner jusqu’en 1851 : Une Médaille d'argent. TROISIÈME PARTIE. ee PROVERBES. Les proverbes en agriculture méritent une attention d’autant plus grande, qu'ils sont le moyen le plus sûr auquel la tradition ait pu recourir pour conserver le fruit des ob- servations et de l'expérience des siècles passés. Répétés d'âge en âge, ils ont reçu ainsi la sanction de tous ceux qui les ont invoqués et sont devenus tout-à-fait dignes de l'inté- rêt des hommes qui veulent s’adonner à l’agriculture, dans la localité où ils ont cours. Déjà, sous le titre de : Proverbes agricoles du Sud-Ouest de la France. on doit en ce genre, à un agronome distin- gué, M. Anacharsis Combes, de Castres (Tarn), un ouvrage qui devrait servir RE èle à un ns travail, dans chaque département. si En conséquence, Le. Société met a concours le 3h suivant : » Recueillir et classer avec soin différents dite » agricoles , tant français que patois , qui ont cours dans le » département de la Gironde et joindre autant rs Re 4 qu quelques eltvateurs paraissent à là Se ineuses, est-elle subordonnée à “ nature de la terre LL ë 5 Ë es | té 4 de. + Re { + “ 2% E. œ. { FRS . » à ce travail, des explications capal ( * » prendre le sens et la valeur de chae + Prix : selon le cas, une Médaille d'argen je < Mé- daille de bronze, pacs module , à déceree ee Tu _ QUATRIÈME PARTIE. + | RÉCOMPENSES ACCORDÉES. Une décision prise par la Société établit que, chaque an- née, elle décernera des récompenses pour la découverte d’une ou plusieurs plantes cotylées, nouvelles pour la Flore de la Gironde, aussi bien que pour tout autre objet se rapportant à l’histoire naturelle. ”. Conformément à cette enr. à elle est heureuse, pou- voir, cette année es 41.0 À Madame Rs nn née Jay, de Paris, pour la dé- couverte qu'elle a faite dans les eaux du Larry, à Chabre- ville, commune de Lagorce, canton de Guiîtres, du Chara Stelligera Baüer , plante dont on ne connaissait encore que trois stations ( Paris, Berlin, Bologne ). *.. Une Médaille d'argent grand module, b, 2.° À Monsieur Eugéne Ramey , de Bordeaut , ancien “élève de: l'École botanique de la ville, pour la découverte "qu'il a faite à Floirac, du Zrifolium rubens, L., et à Arlac, du Centaurea paniculata , L. Une Médaille d'argent. En outre, la Société, voulant encourager et faciliter en même temps les recherches actives de ce jeune botaniste, joint à cette récompense les deux ouvrages sb © Flore du Centre de ia France, par Boreau. 5 as, par “ D ea Ptiement an- cien élève de l'École botanique de la ville, pour la décou- je vert e du æst ivum » Le “ is de la Médaille d'argent accordée en 1848. x ‘+ lis) °°: Et aussi l'ouvrage spécial suivant : 7 Flore d& Centre de la France, “par Boreau. à 4.0 Enfins, la Société, après avoir accueilli dans ses Ages (T. XVI ‘p 117), MS et la figure de la coquille fossile trouvée pour la première fois à Léognan, par M. Henry Brochon, de Bordeaux et nommée par lui Pyrula Moulinsii, est encore heureuse de pouvoir offrir à ce jeune naturaliste, comme récompense et bn encouragement : Une mure d'argent. DISPOSITIONS GÉNÉRALES. é 4.0 Les Mémoires envoyés au concours doivent porter une épigraphe et un billet cacheté DT cette même épi- æ graphe, le nom du concurrent et son a # 2.0 Les billets ne seront ouverts que Aa les Mémoires » auront été jugés dignes du. -prix, ou de toute autre récom- pense académique. 3.° Toutes les personnes, hors les membres résidents de la Société, sont admises à concourir. 4.0 Les Mémoires couronnés par la Sc é, ne pc être publiés < ns son autorisation. 5.0 Îls devront être écrits en français ou en latin, et remis au Secrétariat-Général de la Société, avant le 1°: Septembre. Délibéré et arrêté, en séance générale, à Bordeaux, hôtel . du Musée de la Ville, le Mercredi, 30 Octobre 1850. J.-F. LATERRADE, directeur. Cuarzes DES MOULINS, pr CE # iété, devenant sa KE & M 7 H. BURGUET , rs : rte mio ONENSAEETE phares "UN é + . . é k : + FETES : | *: F2 jé é “à # Fr. "6 + * é . wi si 4 Lo : ë é ; ! _. # sé. 4: