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NOUVEAU

DICTIONNAIRE

D'HiSTOIRE NATURELLE,

APPLIQUEE AUX ARTS,

A. r Agriculture , à l'Economie rurale et domestique, a la Médecine , etc.

PAR UNE SOCIÉTÉ DE NATURALISTES ET D'AGRICULTEURS.

Nouvelle Édition presqu'entièrement refondue et considé- rablement augmentée ;

AVEC DES FIGURES TIRÉES DES TROIS RÈGNES DE LA NATURK.

TOME XXI L

Uk L'1WPH1M£K1£ U'ABEL LMiOE, llUK LÀ. nAlU-E.

A PARIS,

GuEz DETER VILLE, libkaire, rue hautefiiUille, w" ^.

M DGCC XVI IL

Indication pour placer les Planches du Tome XXII.

G 3i. Oiseaux , pag. qo. Molleux mâle. Mocqueur (merle). Musophage violet.

G 37. Oiseaux , pag. 199. Naudu •— Francolin perlé. Podargue.

G 3o. Crruiiles, pag. 235.

Stalice caurcne.— Nautile flambé. Nérile dunar. Nucule allongée.

Olive marbrée. Onguline laque. Orbiciile. Orbulile. Orlhocère

oblique. Oscabrion oursiné. Oscanc aslacaire. Ovule œuf.

G 33. Insectes, /ï/z^. 409.

îsabis guttule. TS'aucore cimîcoïde. Nébrie arénaire. !Nécrobie vio-

leiie. Necrophbie fossoyeur, Kemoplère coa. NemolMe uligineuse.

Nèpc cendré. î^itidule biponctuéc. î^omade de la Jacobée. JSo-

lonecle glauque. Noloxe raonoceros. Nyctéribie pédiculaire. - Né-

cydale fauve.

G 38. Oiseaux,;?/?^. 490" 5iémosie à coiffe noire. Pigeon de Nicobar. Pie bleu-de-ciel. G 35. PiîtrX.s , pr.l'. b02.

Nclumbo des Indes. -^ Kepenle dellude.— ^ Nicoliane tabac Nyssa aqua- tique.

:S-rrrri^:ia!iŒS

NOUVEAU

DICTIONNAIRE

D'HISTOIRE NATURELLE.

M U G

iVlU. En portugais, c'est le mulet mà\e ', la femelle porte le

nom tle jnuhi. (besm.)

MU-CaO-CAO. C'est , sur la cote orientale d'Afrique ,

un petit arbre que Loureiro nomme liepiaca afrir.ana. (ln.) MUCH A. Nom géorgien du Chêne roure. (ln.) MUCHEN STECHER. Nom autrichien de I'Engoule-

VENT. (V.)

MUCHOMORE. L'un desnoms russes de rAsPERGE.(i.N.) MUCILACjE. Substance végétale de nature visqueuse et nourrissante , très-miscible à l'eau , et qui , en étant privée , se transforme le plus souvent en une autre substance sèche et concrète, appelée Gomme (F. ce mot). Le mucilage , qu'on nomme aussi le muqucuv , est répandu dans presque tous les végétaux. Il est coummnément plus abondant dans les raci - nés et les semences, que dans les autres parties. V. au mot Plante, (d.)

MUCILAGO, Mucilago. Genre de plantes cryptogames de la famille des Champignotss , qui forme le dernier chaînon du règne végétal. !l est composé de plantes des plus simples; ce sont des filets fugaces colorés. Quelques botanistes les ont pris pour des commencemens de Moisissures ; mais d'autres , et principalement Haller, ont pensé que, ne prenant jamais de tête , elles dévoient en être distinguées.

Les mucilago se trouvent sur les plantes pourries , sur les fruits en état de décomposition.

On en compte quatre espèces, le Mucilago plumeux, qui est blanc et plnmeux ; le Mucilago cespiteux, qui est

XXII. 1

a M V C

plnmeux et jaune ; le Mucflago cendré , qui est simple ou raiTieux et gris , et le MuciLAGO miniate , qui est velu et très- rouge, (b.)

MUCIPETA. Nom d'une division des gobe-mouches, dans le Règne animal, (v.)

MUCKAOUISS. Nom que les aborigènes de TAméri- qve septentrionale donnent à I'Engoulevent wip pooR-wiL. 11 est tiré du cri de cel oiseau, (v.)

MUCKEN BAUM. L'un des noms allemands du Peu- plier ^iOlR. (ln.)

MUCKÊN-PULVERouMlGHENPULVER, Poudre à mouches. Nom que les Allemands donnent à Varsenic natif ou arsenic iestacé réduit en poudre , (|u'on mêle avec de l'eau pour tuer les mouches. L'arsenic sulfuré et les autres substan- ces arsenicales produisent le même effet. V. Arsenic, (pat.)

MUCOK. Nom latin des Moisissures. V. ce mot (desm.)

MUCU. Poisson du genre Trichure ^ Trichurus leplurus , Linn. (b.)

MUCUN\ et MAC UN A. Noms brasiliens du doUchos urcns. Les graines de celte légumineuse sont grosses, noires, orbiculaires et entourées, en grande partie , par un ombilic circulaire blanc. Ce caractère remarquable a porté Pierre Brown à faire de celle plante son genre zoophlhalmum, qu'A- dan on nomme mucuna en y rapportant le kaku-valli des Ma- labares (Do/ichos giganteus , Wiild.). Les auteurs de la Flore du Pérou ayant reconnu le même caractère sur les gr-^Ines du dolichos altissim us el snr celles de deux autres espèces nouvel- les, les ramenèrent au même genre qu'ils nommèrent negretiat Enfin Persoon considère \q stizolohium (D. pruriens) de Pierre Brown, comme devant appartenir au même ge are negre/ia, ou mucuna, ou zoophlhalmum^ qu'il présente avec le même nom de stizolohium. Il pense en outre que le citta de Loureiro pour- roit y être ramené. On ne pourroit môme pas en douter si le dolichos urens , L. , étoit vraiment le citta nigricans de Lou- reiro, comme il l'a avancé. F. Dolic et Stizolobium. (ln.)

MUCUS. On nomme ainsi une sécrétion d'humeur gluante à la surface de plusieurs organes du corps des animaux , soit pour les garantir des contacts trop rudes et trop immédiats, soit pour faire glisser, pour lubréfier et faciliter les mouve- luens des parties. Aussi le mucus abonde soit au nez, soit dans les bronches ou les conduits de larespiration, soii dans les voies urinaires et génitales, pour diminuer l'impression des liquides acres et stimulans comme l'urine, le sperme , soit dans le ca- nal intestinal jusqu'à l'anus , pour faciliter le passage des ma- tières solides. F. Membranes muqueuses.

U V G 3

Maïs ce sont siirtoiil les animaux à peau molle et sans écail- les ni défenses qui sécrètent le plus abondamment des mu- cosités -, tels sont les batraciens, grenouilles, crapauds , sa- lamandres , les poissons , surtout ceux sans écailles , comme les anguilles et la plupart des chondroptérygien:; , les lam- proies ; enfin , ce sont principalement les mollusques , ces êtres gluans, à peau nue et toujours baveuse ou visqueuse, JuGS limaces peuvent même sécréter une quantité étonnante de mucosité , lorsqu'on les pique et qu'on les force à des con- tractions répétées ; il en est de même des vers , des sangsues, et en général de toutes les races nues et comine écorchées, auxquelles la nature n'a donné pour défense que de s'enve- lopper ainsi dans ces humeurs glutioeuses Cela n'est point extraordinaire chez des espèces aquatiques , toujours impré- gnées de liquides et dont toute la contexture du corps semble n'être que de la mucosité plus ou moins concrétée.

Néanmoins , le mucus proprement dit n'est point la même chose que 1 albumine ou la gélatine composant le tissu propre des organes avec la fibre musculaire ; mais ce gluten viscide est le produit dune excrétion ; il est hors du corps même , et rejeté à l'extérieur. Aussi remarquez qu'il n'est cuère sus- ceptible de nourrir, et répugne au contraire, comme matière excrénientitielle. En effet , s'il est desséché , il devient une substance dure , cornée , absolument comme la corne des bœufs , le sabot du cheval , etc. Il est fort analr.gue à Tépi- derme ; car 1 épiderme , avant son dessèchement -n écailles, étoit un mucus. Il n'y a donc d'autre différence entre un lé- zard qui se dépouille de son épiderme et une salamandre qui se nettoie de sa mucosité , que celle du plus ou moins d'hu- midité ; car le lézard vit en lieu sec , et la salamandre dans l'eau.

Le mucus animal, une fois desséché , devient indissoluble à l'eau. 11 ne ressemble point à la gélatine à cet égard et à plu- sieurs autres humeurs ; ainsi il ne fait point gelée comme elle; ni la noix galle ne le concrète comme elle , ni le sublimé corrosif ne le précipite comme l'albumine ; il est au contraire précipité par raeétate de plomb qui n'agit pas sur la géla- tine ; il n'est point concrète par la chaleur comme le blanc de l'œuf. Le mucus se rencontre aussi en dissolution dans plu- sieurs humeurs , telles que les larmes, l'urine ; il paroit être le lien de plusieurs concrétions, comme des pierres de la ves sie. 11 suinte des pores de la peau avec la sueur. Les animaux muqueux ont des pores ou des cryptes mucipares ; les pois- sons portent surtout ces glandules à mucus , sur la tête et le front, de sorte que par l'action même de la natation , cette mucosité se répand sur leur corps ou enduit leurs écailles

4. M TT E

pour les rendre plus glissantes et inattaquables à Teau. Telle est la précautioi; àc la uaîuie. F". PoissJN. (virey.)

MUDE, Amia. iTC.ire de poissons de la division des Abdominaux, dont le caractère consiste à avoir la tête os-* seuse , noe , rude au iruchcr , avec les sutures peu visibles ; des dfiils aij^uësel nombreuses aux mâchoires et au palais ; deuK bai-biitans auprès des narines ; le corps couvert d'é- caillfs.

Ce geore es. fort voisin des Silures, et ne contient qu'une* espèce, le MuoE CHAUVE, qui a la tête aplatie, Topercule des br^n -bies -isseux et oblus ; deux osselets striés à la gorge; le corps près jue cylindrique ; la ligne latérale droite ; les n gejires pectorales plus courtes que les ventrales, qui sont situées au milieu de Tabdomen; la dorsale allongée; iacau- da'e arrondie et précédée d'une tache noire.

On trouve ce poisson dans les eaux douces de la Caroline, on le mange rarement. 11 porte le nom de mude ou de mutlfisrh. (b.)

MU DU AN. Nom arabe du bubon macédonien, (ln.)

MUE (M«/fl//o ). C'est un changement qu'éprouvent la plupjrt des animaux , comme la délloraison et reffeuillaison des végétaux. Ce sujet se rattachant à l'histoire très-curieuse des Métamorphoses des corps organisés , et surtout des in- sectes , nous y renvoyons, (virey. )

MUE. On u*iet des oiseaux en mue pour deux motifs et de deux manières: l'une pour les faire chauler dans la saison oui ils se taisent ordinairement ( Foyez Pinson, article Frin- gslle) ; l'autre pour les engraisser ( Voyez Ortolan , article Bruant). (,v. )

MUE. Nom du Pavot en Norwége. (ln.)

MUE (vénerie). Changement du bois de la tête des cerfs , qui alieu au comrnencement du printemps. Une mue est le bois d'un seul côté de la tête que Tanimal a mis bas ; lorsque les deux côtés en sont dégarnis , on les nomme alors les deux mues.

Dans un autre sens, le mot de mue s'applique aussi aux chiens courans. Les mettre à la mwe , c'estles en)pêcher de chasser, (s.)

MUEl-XU. C'est, en Chine , le nom du Prunier. Voy. Cay-moi. (ln.)

MUEL/V. Nom espagnol de la Pierre meulière, (ln.)

MUEL-SGK V.VJ. C'est, dans Rhéede, la Cacalie a feuille:» de lmtron. (b.)

MUELLE ou MOLLE et MOLY de Fragosa. C'est le Molle ou Poivrier d'Amérique ( Schinus moùé). (ln.)

IM U F 5

MUERDAGO. Nom^du Gui, en Espagne, (ln.) MUER MER A. Ç'esi, en Espagne , la Clématite com- mune ( Clemalis vUalba ). (ln.)

MUET. Serpent qui avolt été placé parmi ks crotales^ quoiqu'il n'eût pas de sonnettes à la queue. C'est le Scytale A CHAÎNE de Laircille. (b.)

MUFELN. L'un des noms allemands de la rose canine ( Cynorhodon ). (LN.)

MUFFQLI des Italiens. C'estle mouflon, type originaire de l'espèce du Mouton domestique, (desm.)

MUFIONE. Nom du même animal en Sardaigne et en Corse. V. l'article Mouton, (s.)

MUFLAUDE , viufle de chien ^ mufle de hcriif ou de veau , viouron violet , œil de chat , gueule de lion , gueule de loup , etc. Ce sont les noms vulgaires du Muflier des jardins (y^/«^/tr- rhinum rnajus , Linn. ). A Montpellier on l'appelle Cucalaca. V. Muflier, (ln.)

MUFLE. On doiane ce nom à la partie antérieure et nue de latête de quelques quadrupèdes etnotamment des ruminans. Parmi ces derniers, ceux qui n'ont pas de mutie Sont: l'o- vibos, le renne , l'élan, les chameaux, les chèvres et la gi- rafe ; tous les autres, c'est à-dire , les bœufs, les antilopes, les cerfs , daims , chevreuils, les muscs ou chevrotains , etc. ,_ en ont un. (desm.)

L'on donne encore le ïioxnàemufle à lextrémité de certaines corolles de fleurs personnées, qui semblent imiter des mufles, d'animaux. Voyez Mufle de veau ( Antirrhimim ). (yirey.) MUFLE DE BOEUF. Voyez Muflaude. MUFLE DE CHIEN. V. Muflaude (ln). MUFLE DE VEAU. V. Muflaude et Muflier, (b.) MUFLIER , MUFLE DE VEAU, Antirrhinum, Linn, ( Didynamie angiospermie'). Genre de plante de la famille des personnées, auquel Linnseus a réuni la ïinaire et Vasa- /YnwdeTournefort. 11 présente pour caraclères : un calice per- sistant à cinq divisions ovales ou oblongues ; une corolle mo- nopétale, irrégulière, dont l'entrée est fermée par une espèce de palais , le limbe partagé en deux lèvres , la supérieure bifide , l'inférieure trilobée , le tube ventru , terminé par un éperon ou une bosse; quatre étamines , dont deux plus courtes, quelquefois le rudiment d'une cinquième; un ovaire supérieur presque rond , surmonté d'un style à stigmate obtus.

Le fruit est une capsule ovale - oblongue ou arrondie . à, ieux loges et polysperme ; dans plusieurs espèces, elle se fecà^

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en décnnpures réfléchies ; dair; d'antres, elle s'ouvre par di-r.x ou trois trous placés à son sommet. Les semences sont alla- chées à un réceptacle central, et ont souvent leurs bords mem- braneux.

Les mufliers ont des rapports avec les Digitales et la Cym- BAiRE. Mais dans les digitales^ le limbe de la corolle n'est point à deux lèvres ; et dans la cymhaire,\e calice est profondément découpé en six dents.

Ce genre , qui diffère à peine de celui appelé NémÉ- siÉ , comprend environ cent espèces qui sont des herbes et des arbustes à feuilles ordinairement alternes ou épar- ses » quelquefois opposées ou verlicillées înférieurement, et à fleurs axillaires , ou plus souvent disposées en épis ter- minaux y et njunies de bractées. L'éperon et la bosse , qui terminent ces fleurs divisent naturellement le genre en deux sections. Dans la première , sont les mu ffliers linaires , dans la seconde, les mufjliers proprement dits.

Desfontaines a séparé de ce genre cinq espèces pour en former celui qu'il a appelé AnarRHINE , et dont il fonde le caractère sur le défaut de lèvre supérieure saillante et concave.

Parmi les mufliers dont les corolles sont prolongées en éperon , on distingue :

Le Muflier CYMBALIER , Antîrrhinum cymbalaria ^ Linn. , plante annuelle de l'Europe , qui se trouve ordinairement dans les fentes des vieux murs. Elle a une lige rampante , des feuilles alternes en cœur à cinq lobes.

Le Muflier alriculÉ, Aniirrhinum elatine^ Linn. , vulgai- rement Velaiine, \a } inaire or cillée , la velooie mdle. Sa tige est couchée ; ses feuilles varient dans leur forme et leur position; elles sont tantôt ovales, tantôt en fer de (lèche ou avec des oreil- lettes à leur base , communément opposées inférieurement , et alternes sur le reste de la lige. Cette espèce est annuelle , et croit aux environs de Paris dans les endroits cultivés. On la distingue de la suivante à ses feuilles moins grandes, à ses tiges moins velues , et surtout à ses rameaux qui s'ouvrent à angles droits.

Le Muflier bâtard ou Violette femelle , Antîrrhinum spurium , Linn. Il est annuel , eJ vient à peu près dans les mêmes lieux que le précédent, auquel il ressemble beau- coup. On lui suppose les mêmes vertus.

Le Muflier triormtophore, ^«/iV/7//rt«m triomilophorum^ Linn. , originaire d'Amérique et de Portugal. C'est une des plus belles espèces du genre. Ses feuilles, de forme lan- céolée, sont disposées quatre à quatre par vertlcilles; ses fleurs sont de couleur pourpre et pédonculées.

Le Muflier pourpre, AiUirriuuunt. purpureum, Linn. Il a

l\ï U F 7

un port qui lui est parliculier. Ses tfges sont droites, et quand elles sont garnies de (leurs, elles représentent une pyramide. Ses feuilles sont linéaires, lancéolées et sessiles. On trouve ce muflier au pied du mont Vésuve.

Le Muflier réticulé, Anllrrhlnum retlculatum , Smith, ainsi nommé à cause des stries ou lignes croisées qu'on re- marque sur sa corolle , lesquelles imitent assez bien les mailles d'un réseau. Il croît en Barbarie , d'où il a été rap^ porté par Desfontaines. C'est un des plus beaux.

Le Muflier oes Alpes , /hitirrhinum alpimim , Linn. , est annuel , croit en Suisse , en Autriche , dans les Pyrénées ; a des feuilles verticillées , une tige diffuse , presque tombante, et des fleurs disposées en épis courts et serrés.

Le Muflier linaire , Antirrhinum linaria , Linn., vulgai- rement la linaire^ le lin sauoage. Cette espèce, dont la racine est vivace et la lige droite, se distingue des autres à ses feuilles linéaires , lancéolées , éparses et serrées contre la tige , et à ses (leurs comme imbriquées et formant des épis sessiles et terminaux. Elle est très-commune en Europe , et se plaît dans les terrains incultes , parmi les décombres et jusque sur les murailles.

On peut encore citer dans cette section , le Muflier m- TARNAT ou à fleurs rouges , rapporté d'Espagpe par Antoine de Jussieu. Le Muflier jaune de Barbarie. Le Muflier py- ramidal qui croît en Arménie. Le Muflier Dalmatien , originaire de Crète , et dont les (leurs , dune belle couleur Jaune, sont plus grandes que celles de V antirrhinum majus. Le iVIuFUER BIGARRÉ du Mont-d'Or , à corolle jaune , à palais safrané , à éperon violet. Le Muflier a trois feuilles, qu'on trouve dans les montagnes de la Sicile. Ses fleurs sont jaunes , avec les lèvres couleur de safran. Il offre une variété fort belle , à fleurs pourpresT Le Muflier de Montpellier, à (leurs bleues et odorantes, Antirrhinum m onspessulanum , Linn. Le Muflier d'Alep , à tleurs petites et blanches, munies de très-longs éperons. Il croît en Sicile et aux envi- rons de Montpellier.

La section qui renferme les mufliers dont les corolles sont terminées par une protubérance obtuse , est beaucoup moins nombreuse que la précédente. Les espèces remarquables qu elle offre , sont :

Le Muflier des jardins ou Mufle de veau , Antirrhi- num maJus, Linn. C'est celui qu'on cultive le plus communé- ment dans les parterres , à cause de la grandeur de ses tleurs el des variétés de couleurs qu'elles offrent. Ce muflier a des tiges droites, des feuilles entières , pétiolées , lancéolées , un îM'u obtuses, d'un vert foncé , alternes sur la lige, opposées^

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sur les rameaux; des fleurs disposées en é[>i, droites, grosses, pédonculées , communément d'une couleur purpurine , avec un palais jaune et des capsules oblongues , presque cylindri- ques , percées à leur sommet de trois trous , et imitant à peu près la télé d'un veau; de petites semences noires et angu- leuses : tels sont les caractères spécifiques de cette plante qui aime les lieux pierreux, qui vient facilement de graines, et qui subsiste plusieurs années dans les jardins, lorsqu'elle se trouve placée dans un sol médiocre , et qu'on a soin d'en couper sauvent les fleurs. Ces fleurs ont beaucovîp d'appa- rence , et se succèdent pendant tout l'été. 11 y a une variété de ce mulller à feuilles plus longues et une autre à feuilles panachées ; celle-ci se multiplie par boutures.

Le Muflier tortuelix , Antlnhinum tortuosum , Bosc. Il ressemble beaucoup au précédent par la grandeur , la forme et la beauté de ses fleurs , communément de couleur pour- pre ; mais ses tiges sont tortueuses et entièrement lisses ; ses rameauif penchés et comme sarmenteux ; ses feuilles très- étroites et canaiiculées. Ce muflier, dont Bosc a donné la description en 1788, dans une des séances de la Société Lin- néenne , croît naturellement en Italie , et se cultive dans nos jardins.

Le iVluFLlEH RUBICOND , Antînhinum oronthim^ Linn. ; An- liirhinum awense majiis, ïourn. On le dislingue du muflier des jardins , à ses feuilles linéaires , lancéolées , opposées dans le bas des tiges , allernes partout ailleurs ; à ses fleurs presque sessiles , éparses et axillaires ; à la corofle pourpre et plus petite; aux folioles du calice, pins longues que la corolle, et à la capsule représentant assez, bien la tête d'un singe, lors- qu'elle a versé ses semences. Cette plante est annuelle , croît en France, et passe pour vénéneuse.

Le Muflier asarin , Antirrhinnm asarina, Linn. C'est une plante vivace qui n'a point de beauté , et que je ne cite que parce qu'elle appartient au genre <75a/7W de Tournefort. Elle est basse , a des tiges tombantes et des feuilles semblables à relies du lierre terrestre. Elle croît sur les rochers , en Ita- lie , et dans le midi de la France.

Les mufliers de nos climats , tels que celui des jardins , la linaire , etc., se mullipiient de boutures ou de graines. lisse sèment d'eux-mêmes , croissent à peu près dans tout terrain, à toute exposition , et demandent à être peu arrosés, (d.)

MUGAN. Le Ciste blanchâtre , Cis/us albidus , reçoit ce nom dans !e Midi de la France. (i-TS.)

MUGE. Poisson du genre Mugil, Mugil cephalus^ Linn. Lacépède adonné le même nom au genre entier, (b.)

MUGE VOLANT. C'est I'Exocet volant, (b.)

Il V G g

MUCxEL. V. MUGIL. (DESM.)

MUGERA. Nom du Palma-Christi ^ en Espagne, (ln.)

MUGGENKRUID. C'est un des noms hollandais de la Persicaire. (ln.)

MUGGERT. Nom allemand de 1' Armoise, (ln.)

MUGGI etMUGURA GUSSOW. Noms japonais d'un Gaillet , Galium uliginosum , Thunb. (LN.)

MUGHË. Les Languedociens donnent ce nom à la Jacin- the, et non pas à notre Muguet, lequel est fort rare en Lan- guedoc, (ln.)

MUGHETTUS. V. Muguet, (ln.)

MUGHO ou MUGO. Espèce de Pin, Pmws miighus, qui croît dans les Alpes et en Tyrol. Il ne faut pas le confondre avec le Pin nain (^pùius pumilio), beaucoup plus commun, et que , dans quelques ouvrages , on trouve décrit sous le nom de Mugho. (ln.)

MUGIL, Mugil. Genre de poissons de la division des Ab- dominaux , dont les caractères consistent à avoir deux na- geoires dorsales , la mâchoire inférieure carinée en dedans, point de dents, la membrane des branchies composée de sept rayons , les écailles striées.

Ce genre renferme sept espèces , dont une est très-connue. C'est

Le MuGiL mulet, ' Mugil ccphalus,'Lmn., qui a cinq rayons aiguillonnés à la première nageoire dorsale , et des lignes noires, longitudinales et parallèles , de chaque côté du corps. Il se trouve dans toutes les mers; il est surtout très-abondant dans la Méditerranée et sur les côtes d'Espa'gne. Il remonte par milliers à l'embouchure de la Garonne et de la Loire , pendant le printemps et l'été. Il peut vivre constamment dans l'eau douce , et n'en devient que meilleur. On le prend avec de grands filels d'enceinte , auxquels on adapte supérieure- ment un prolongement extérieur et assez large , en forme de sac , parce que , lorsque ce poisson se voit entouré ', il saute par-dessus la corde. Il a été connu des anciens , qui estimoient beaucoup sa chair, et il n'a pas perdu de sa réputation à cet égard. On en fait une grande consommation dans toutes les parties méridionales de l'Europe. F. pi. G i , il est figuré.

La pêche de ce poisson est quelquefois si abondante, qu'on ne peut le consommer frais ; alors on le sale et on le fume comme les harengs. Il perd , par ces opérations , une partie de ses bonnes qualités ; mais il en conserve assez pour être en- core recherché par la classe peu fortunée, dans les pays catho- liques , pendant le carême. Presque toujours on lui a enlevé les œufs, avec lesquels on fait une espèce de caviar appelé

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poiifargve ou boxitarf^ue , qui forme un très-bon manger , et qui t'sl le lot des gens riches des mêmes pays.

Pour faire la poulargue , on oie les œufs, appelés resure par les pêcheurs, sussilotque le poisson est pris. On les met pendant cinq à six heures dans une forte saumure ; ensuite on ies presse pour en faire sortir leau, el après les avoir la- vés dans une nouvelle saumure, on les fait sécher an soleil, (^omme ces opérations se font pendant lété, il ne fùut que dix à douze jours pour les terminer. Une précaution impor- tante à prendre , c'est de mettre les œufs en dessiccation a l'a- bri de la pluie et de la rosée de la nuit. Ils peuvent se conser- ver plusieurs années dans un lieu ?,^ç ; mais, en général , on ^'en fournit au commerce que ce qui est nécessaire à la con- sommation de la saison.

La tête du mugil mulet , qu'on appelle aussi menille , mvgeo et mvjou^ est large par en haut, comprimée des deux côtés y et toute couverte d écailles ; l'ouverliire de la bouche est pe- tite ; les mâchoires sont égales et garnies de très-petites dents ; la langue est rude , et deux os , rudes au toucher, se voient à l'entrée du gosier; fouverture des ouïes est large, et 1< ur membrane est libre ; l'anus est une fois plus éloigné de la têle que de la nageoire de la queue. Sa longueur ordinaire est d'un pied.

Le MlJGlL ALBULE a quatre rayons aîguillonnés à la pre- mière nageoire dorsale. Il est figuré dansCatesby. vol. 2 , pi. 6. il se trouve dans la mer qui baigne les côtes de la Caroline, et remonte les rivières à chaque niarée pendant tout l'été. U diffère fort peu du précédent; mais il ne constitue pas moins nne espèce, ainsi que je m'en suis assuré. On le prend au fi- let et à la ligne , en aussi grande quantité que l'on veut , car quelquefois il couvre la surface de l'eau. Sa chair est aussi bonne et a le même goût à peu près que celle du précédent : on l'accommode de même. C'étoit ma ressource pendant les grandes chaleursde l'été, lorsqu'iln'étoit paspossible regarder la viande une journée entière; il ne me falloit souvent que jeter deux à trois fois la ligne pour avoir mon dîner.

Le Mugil A lèvres grenelées a quatre rayons tlexibles à la première nageoire dorsale , les lèvres crénelées , et l in- férieure bicrénelée. 11 se trouve dans la mer Rouge, et four- nit trois variétés qui portent les noms arabes de schelî ^ onrei iad, au rapport de Forskaël.

Le Mlgil tang a quatre rayons aiguillonnés à la pre- mière nageoire dorsaie, la bouche petite et les opercules dénués d'écaillés. Il est figuré dans Bloch et dans le Biij^un de Deterville , vol. 6, p. 186. On le trouve sur les côtes d'A- frique et de l'Inde.

M U G

Le MuGiL PLUMIER a quatre rayons aiguillonnés à la pre- mière nageoire dorsale , et une bouche très-fendue. Il est fi- guré dans Bloch et dans le Buffon de Deterville , vol. 6 , p. i86. On le trouve dans les rivières des Antilles , il porte le nom de mulet doré.

Le MuGiL CHAisos a une seule nageoire sur le dos et deux ailes de chaque côté de la queue. Il habile la mer Rouge, et sert de type au genre Ghamus de Lacépéde.

Le MuGlL CHILIEN a une seule nageoire sur le dos, et la queue simple. Il se trouve au Chili ; c'est le MugiloÏde de Lacépéde.

Les MuGiLS DORÉS , sauteur et PROVEisçAL sont des es- pèces nouvelles que Risso nous a fait connoître dans son Ich- ifologie de Nice, (b.)

MUGILOÏDE , Mugildides. Genre de poissons introduit par Lacépéde , pour placer le Mugil ï)U Chili. Ses carac- tères sont : mâchoire inférieure carénée en dedans ; têle re- vêtue de petites écailles ; écailles striées, une seule nageoire dorsale, (r.)

MUGILOiMORE, Mngilovwms. Genre établi par Lacé- péde , pour placer un poisson que j'ai rapporté des côtes de la Caroline, et que j'avois nommé vm^il appendiculé. Il offre pour caractères : mâchoire inférieure carénée en dedans , ainsi que la supérieure , dénuée de dénis', mais garnie de petites protubérances ; plus de trenle rayons la membrane des branchies; une seule nageoire du dos, avec un appen- dice à chacun de ses rayons.

Le mugilomore atteint près de trois pieds de long. Sa chair est très-agréable, et sa couleur très-brillante. Lacépéde lui a donné pour nom spécifique celui de son estimable épouse , Anne Caroline. (B.)

MUGNx\JO. Nom italien des I^.Iouettes. (.s.)

MUGO et MOUJHES. Le Ciste ladanifère est ainsi nommé en Languedoc, (ln.)

MUGOU. C'est, à Nice, le nom général des poissons du genre Muge. Le mugou carido est le muge provençal de Risso; le mugou daurin, le muge doré ; Je mugou flaveioiin , le muge sauteur ; le mugou labni , le muge céphale ; le mugou rnmado^ une variété de ce même muge céphale ; et le mugou sabouniéy une variété du muge provençal, (desm.)

MUGUET , Convallaria ^ Linn. (^ Hexandne monogynie). Genre de plantes à un seul cotylédon , de la famille des aspa- ragoïdes, et qui comprend des herbes indigènes et exotiques, dont les fleurs sont axillaires ou en épi terminal. Ces fleurs n'ont point de calice. La corolle est monopétale, en cloche

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ou en grelot , avec les Lor<îs découpés pfus on moins pro- iondément en six parties ; elle renferme six étamines , dont les filets en alcne portent des anthères oblongues et érigées; dans le centre est placé un germe globulaire qui soutient un style mince plus long que les étamines , et couronné par ua stigmate obtus e* à trois côtés. Le fruit est une baie ronde , tachetée avant sa maturité, et à trois loges, renfermant cha- cune une semence : souvent une de ces semences avorte par le renflement des deux autres.

.. Desfontaines, Annales du Muséum^ a divisé ce genre en quatre; savoir: Muguet, Smilacina et Mai anthème. Depuis on a encore établi à ses dépens celui appelé Ophiopogue , Flugée , Slaterie et Evaterie,

La plupart des muguets ont leurs feuilles sessiles et alter- nes; une espèce les a verticillées ; dans une autre, les feuilles embrassent la tige en forme de spalhe ; elles sont assez souvent unilatérales , ainsi que les fleurs. Les espèces les plus remarquables sont :

Le Muguet de mai , Lis de mai. Lis des vallées, Conval- laria majab's , Linn. Cette jolie petite plante , qui ne s'élève qu'à cinq à six pouces , croît naturellement en Europe , dans les bois, dans les vallées, et à Tonibre des buissons. Ses (leurs paraissent au mois de mai , quand les violettes com- iraencent a se flétrir. Les bergères et les villageoises s'empres- , sent alors de les cueillir pour en parer leur sein ; l'odeur suave qu'elles exhalent approche de celle de la fleur d'orange; et leur blancheur jointe à leur petitesse contraste agréablement avec te vert luisant des larges feuilles qui les accompagnent. C'est du milieu de ces feuilles que s'élève la tige qui les porte ; cette tige est grille, anguleuse, nue et courbée sous le poids des Heurs qui sont disposées par intervalles vers son sommet, et tournées du même côté. Leur forme est celle d un petit grelot : les bords de la corolle sont légèrement découpés en six segmens obtus et réfléchis : chaque fleur est inclinée et portée par un pédicelle. Les feuilles , ordinairement au ïiombre de deux, partent immédiatement de la racine : elles sont ovales , pointues et marquées de veines longitudinales ; elles s'embrassent l'une et l'autre à leur base, en enveloppent la tige. Les baies qui succèdent aux fleurs mûrissent lente- ment : elles sont rouges, remplies de pulpe , et contiennent trois semences amères , presque aussi dures que la corne.

Cette espèce est vivace , et offre deux variétés , l'une à fleur double , l'autre à fleur rouge. Elle se nvulliplie elle- même abondamment par ses racines fibreuses qui rampent sous terre, et s'y étendent à de grandes distances. Elle aime Tombre , se plaît dans une terre légère , et ne demande au^

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cune culture ; il suRit de l'arroser dans les sécheresses, poai' empêcher ses racines de périr.

L'odeur des fleurs du muguet est pénétrante ; son action se porte violemment sur les nerfs , et peut oecasioner des vsyncopes aux personnes délicates. On retire une belle cou- leur verte des feuilles de muguet macérées avec la chaux.

Le Muguet anguleux , Sce\u de Salomon, Gowallaria polygonaium. , Linn. Cette espèce est vivacc , ainsi qv.c la pré- cédente , et croît spontanément dans les bois de l'Europe. Son nom vulgaire lui vient des empreintes de cachet ijue sa racine offre sur ses nœuds. Celte racine est grosse connue le doigt , longue , fibreuse , blanche , et située transversale- ment à fleur de terre. La tige est anguleuse , courbée , et garnie dans toute sa moitié supérieure de feuilles alternes qui l'embrassent à demi , et qui sont toutes rangées an même côté. Les fleurs sont opposées aux feuilles et unilatérales , tantôt solitaires, tantôt réunies deux à deux sur un pédoncule bifurqué et axillaire. Les jeunes pousses de cette plante sont tendres et nourrissantes ; on les mange apprêtées comme les asperges.

Le Muguet a plusieurs fleurs , ConoaHana multi/lwa , Linn. Il vient sur les Alpes , et au milieu des bois sur les rochers.

On distingue encore parmi les autres espèces :

Le Muguet VERTICILLÉ , Conmllaria vertidllata , Linn. Cette plante est vivace et croît dans le Mirli de l'Europe.

Le Muguet a grappes a les feuilles ovales , aiguës , sessi- les, et la panicule terminale et nue. 11 est originaire du Ca- nada , et se cultive dans nos jardins.

Le Muguet quadrifide , Conmllaria hifoïia, Linn. , dont la corolle est à quatre divisions, et ne renferme que quatre étamines. Il est vivace , et on le trouve dans les bois monta- gneux , surtout du côté des Alpes, (b.)

MUGUET DES BOIS ou PETIT MUGUET. C'est

l'AsPÉRULE ODORANTE, (b.)

MUGWORT. Nom de T Absinthe, dans le Yorskhire; c'est aussi le nom anglais de l'armoise, (ln.)

MUHLENBERGIE ,71/M///ert/^f/-^/a. Genre de plantes de la triandrie digynie et de la famille des grauiinées , qui a été établi par Schreber, et qui offre pour caractères : une balle calicinale d'une seule valve très-petite et latérale ; une balle florale de deux valves ; trois étamines ; un ovaire superiejir , surmonté de styles plumeux ; une semenceovale.

Ce genre renferme trois espèces propres à l'Amérique septentrionale , dont une est le Dilepyre de Michaux, et

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l'autre \e Brachyélitre de Palisot <îe Beauvols. Elles ne présentent rien Ae remarquable, (b.)

MUHLENSANDSTEIN. Nom allemand du grès ou quarz arénacé agglutiné (ln.)

xMUfiLENSTÈlN (pierre à meules, en allemand). V. Pierre meulière. Ce nom désigne en général toute pierre à faire des meules de moulin, (ln.)

MUHLSTEIN. F. Muhlenstein. (ln.)

MU-HO/VN-XU, C est , en Chine, le nom d'une espèce de Savonier, Sapindus abruptus ^ Lour. , dont les fruits ser- vent à décrasser le linge et à le blanchir, (ln.)

MUl-HON. Nom donné, en Chine, à la Rose cannelle, Rosa cinnamomea , qui y est très-cultivée ainsi qu'à la Co- chinchine. Ta-mui-hoa , est le nom de laKosE à cent feuilles.

(LN.)

MUIRE. Nom qu'on donne dans les salines à l'eau salée des sources , lorsqu'après avoir passé par les bâiimens de graduation , elle est parvenue au point de pouvoir être mise en évaporation dans les chaudières, (pat.)

'MUI VA. Nom que les Portugais du Brésil donnent à une espèce de Melastome ( M. holosericea , L. ). (ln.)

MUCAGO-NISEN. Nom japonais du Chervi (5/um sisarum ). (LN.)

MUKEICA et METHECA. Noms arabes du Sebestier, Cardia mixa , Linn. (LN.)

MU-KELEGU. C'est IIsgname cultivée, figurée dans Rhéede , lab. 71. (b.)

MUKÈSE et MUKNÈZE. V. Morusel. (ln.)

MU-NO-KI. Nom qu'on donne , au Japon , à une es- pèce de Prunier , Prunus aspera^ Thunb. (ln.)

MUKSON. Synonyme de MouKSOUN. (b.)

MUKUNGE. Au Japon, c'est le nom d'une espèce de Ketmie que Thunberg dit être la même que celle de Syrie , Hibiscus syriacns, que nos jardiniers nomment alihea fruiex.Ç^LVi.}

MULACCHIA, MUNACCHIA, MOUNACGHIA. Noms italiens de la Corneille jiantelée, (v.)

MULALE. Nom donné , sur la côte orientale d'Afrique , à un Do/m/er qui paroît être une espèce de Coryphe, Corjpha Africana , Loureiro. (ln.)

MULAMBE1R.A. Nom donné, sur la côte orientale d'Afrique, à un grand arbre dont Loureiro fait un genre qu'il appelle o/?/tc/Ms sitularim ^ L. C'est peut-être une espèce de Baobab. Les fruits de cet arbre , longs d'un pied et plus , sont employés, par les naturels, en guise de seau et de bouteille , et de plus servent de pot pour conserver des li- queurs, des graines , des légumes. V. Ophèle. (ln)

MUL\R. Célacé du genre physetère de M. Lacépède. V, ce mol. (DËSai.)

MUL V r. Poisson du genre Holacanthe. (b.)

MULATRE. On a coaîurne d'appliquer ce nom, analogue àceluldii mulet, au's individus de l eàpi.e hum-^ine engendrés dune race blanclie et d'une noire. Gl'S mélanges sont fiéquens dans les pays qui réunissent ces deux sortes d'iiommes. Les blancs se font rarement scrupule d'abuser de leurs négresses esclaves, et celles-ci succombent d'aulant plus tôt à la séJuc- tion, qu'elles en espèrent quelque avanfage ou quoique adou- cissement dans leur esclavage. Il seroit digne de la sagesse des lois de réprimer cet abus , d'autant plus nuisible, qu'il est la source d'une foule de désordres civils, que les in lividus qui en sortent n'ont ni l'intelligence perfectionnée des blancs , ni la soumission laborieuse des nègres, et qu'étant mal élevés, pour l'ordinaire ils sont plus dangereux qu'utiles aux colonies euro- péennes. On lesy distingue sous le nom d hommes de couleur.

Dans les différens mélanges des races et des espèces hu- maines , on peut établir quatre degrés ou générations. La première est celle des mélanges simples : par exemple , un blanc européen avec une négresse produisent un véritable mulâtre , qui tient également des deux espèces par la cou- leur , la conformation, la figure , les habitudes, le carac- tère, etc. Si ces mulàires se marient entre eux, Ils engendrent des individus semblables à eux , qu'on nomme casques.

Les blancs, avecles Indiens asiatiques, donnent des indi- vidus mixtes , qu'on appelle plus particulièrement métis ; avec les Américains originaires , Ils produisent des mesdces oa jnesf-inJiens. Le nègre avec l'Américain caraïbe engendre un zambi ou lobus , et ces mélanges simples peuvent tous se per- pétuer entre eux ou avec d'autres races, et former une caste.

La seconde génération comprend les produits des mélis précédens , mélangés avec une race primitive. Dans ces li- gnées , une tige forme les deux tiers , et l'autre tige n'y tient plus que pour un tiers , ce qui fait varier les individus suivant cette proportion. Ainsi , un blanc uni à un mulâtre donne des terrerons ou morisques; si c'est à un mélis, l'individu est un castisse indien ; si c'est à un mestice , on obtient un quatrahi ou castisse. Si un nègre engendre avec une mulâtresse , on a des griffes o\x cabres. Si un caraïbe se marie à un zambi , le pro- duit est un zambaigi; à un mestice , on obtient un trésahe ; à un mulâtre , on a un mulâtre funcé. Les carierons ( mélanges du mulâtre ou mulâtresse avec la blanche ou le blanc ) ont une lé- gère teinte basanée de peau ; les femmes ont les lèvres de la bouche et celles du vagin violettes; les hommes carierons ont

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le scrotum noir. En général, celle teinture noire se conserve davantage dans les organes sexuels et nutritifs que dans les autres parties.

Dans la troisième lignée ou génération , le blanc avec le terceron donnent un quarteron ou albinos ; avec le caslisse in- dien , un poslisse; avec le qualralvi , un octavon. Dans ce cas , il n'y a plus qu'une partie d'un sang sur quatre d'un autre sang; mais les mélanges se compliquent encore davantage quand les castes mélangées s'unissent entre elles. Ainsi, un terceron avec un mulâtre engendrent un salkdras ; un mestir e avec un quarteron forment un coyote ; un griffe avec un zambi donnent un gweros; un mulâtre avec un zambaigi produisent un camhuj'os. Dans cette seconde division de la troisième li- gnée , tous les produits sont au moins de sept à huit sangs dif- férens. A mesure que ces complications se multiplient , toutes les grandes différences de chaque sang s'effacent et se modi- fient les unes par les autres, de telle manière que ces pro- duits n'ont aucun caractère bien marqué.

Nous avons encore une quatrième génération. La race blan- che unie au quarteron forme un quinteron ; avec un octavon caraïbe , c'est un pur.huelas ; avec un coyote , on a un harnizos. Un mulâtre avec un cambujo donne un alharassados ; avec un albarassados , on obtient un barzinos. On n'a pas décrit tous les mélanges qui peuvent se faire , soit qu'ils n'aient pas été remarqués , soit qu'on ait négligé de les tenter. Mais on sent bien que ces variétés peuvent se multiplier en progression géométrique et former une multitude de modifications ; cha- cune d'entre elles conservera plus ou moins ses traits origi- naires , en raison des différentes affinités qu'elle aura avec sa tige primitive. {Voy. rHist. natur. du Genre hum., tom, i.^"^ )

Tous ces termes donnés aux divers mélanges des races , si souvent confondues ensemble et sans ordre dans les auteurs et les voyageurs ; presque tous ces termes , dis-je , appartien- nent aux langues portugaise et espagnole , parce qu'on a d'a- bord observé ces castes dans les colonies de ces nations. Sui- vant quelques observateurs, et surtout Ulloa , Twiss, ces mélanges se perpétuant chacun dans leur propre caste, re- tournent , à la troisième génération , à leur race primitive , les sangs étrangers disparoissant et s'épurant successivement d'eux-mêmes. Si ce fait est constant , c'est une preuve que la nature tend à ses formes originelles, qu'elle ne transige point avec nos unions adultères qui semblent contrarier ses fins, et qu'elle revendique toujours ses droits lorsque nous cessons de lui faire violence. Ce seroit aussi une preuve que chaque race primitive d'homme est essentiellement différente d'une autre race , ou plutôt qu'elle forme des espèces véritables , outre

IST U L ,j,

les modifications des climats , des nourritures , des habi- tudes, etc. V. Homme.

Les diverses castes mélangées qu'on remarque dans près-' que toutes les colonies , sont regardées comme la lie du genre humain par la plupart des blancs ; car ce sont ordinairement des bâtards , des produits d'une union furtive et repoussée par la société policée et les lois. Cependant, comme les mariages réguliers sont possibles entre les diverses castes , les individus qui en proviennent ayant reçu uue éducation soignée de- viennent en général robustes et bien conformes ; ce qui jus- tifie l'opinion que le croisement des races perfectionne les in- dividus. Pour ce perfectionnement, il n'est pas besoin toute- fois de recourir à des unions de races différentes et éloignées mais seulement à celles des familles diverses de la même race. Par exemple , il n'est pas nécessaire , pour avoir des enfans robustes et d'une bonne complexion , de marier un blanc avec une négresse , mais seulement d'unir un Européen avec une Européenne d'une autre famille ou dua pays voisin. Par ces mélanges depuis long-temps usités, les caractères nationaux se sont preque entièrement effacés ; les migrations des peu- ples du Nord, les conquêtes , les colonies, les révolutions des empires ont multiplié le croisement des familles sans utilité réelle pour l'espèce humaine , puisque les nations modernes , si confondues entre elles , ne sont pas plus robustes et plus vigoureuses que leurs ancêtres. Au contraire, c'est une ob- servation générale , que les mœurs se perverlîssent en pro- portion des mélanges. Les lumières deviennent, à la vérité, plus générales ; mais les maladies se répandent au loin parla même raison , comme nous l'avons vu pour la petite-vérole , la lèpre et la maladie vénérienne, (virey )

MULBERKY TREE. Nom anglais du Morier. (ln.)

MULDVARP. Nom danois de la Taupe; Mullvaden en est le nom suédois, (desm.)

MULE. C'est la femelle du Mulet, (desm^

M ULET. Voyez MuLLE. (s.)

MULET ou MULE. Quadrupède produit par l'union des espèces de l'âne et du cheval.

Le mulet qui provient de l'accouplement de l'âne et de la jument, est le mulet proprement Aïi{mulus) ; il a la tête plus grosse et plus courte que le cheval; ses oreilles sont presque aussi longues que celles de l'âne. Comme ce dernier, il a les jambes sèches et la queue presque nue ; mais il tient davan- tage de la jument par la grandeur et la grosseur du corps , par l'avant-main , par l'encolure , par l'arrondissement des cotes, par la croupe , la hanche , etc.

Le mulet qui est le résultat de l'union du cheval avec Tâ-

XXII. n

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nesse , porte le nom de haràeau (hinnus ) ; sa têle est plus longue et plus petite , proporlions gardées , que celle de l'âne ; ses oreilles sont aussi plus courtes , ses jambes plus fournies , sa queue plus garnie de crins que celle de l'âne. 11 est plus petit que le mulet proprement dit ; son encolure est plus mince , son dos plus tranchant , sa croupe plus pointue jCI plus avalée.

C'est à tort que l'on a prétendu que les mulets étoient «absolument inféconds. Ils ont, comme les autres animaux , tous les organes propres à la génération , et Ton a des exem- ples qui prouvent que le mulet peut engendrer et que la mule peut produire: cependant, « ils n'ont jamais produit, dit Buffon , dans les climats froids ; ce n'est que rarement qu'ils produisent dans les climats chauds , et plus rarement encore dans les climats tempérés : aussi leur infécondité , sans être totale , peut néanmoins être regardée comme positive , et cette infécondité est beaucoup plus grande dans le bardeau que dans le mulet proprement dit; car celui-ci lient de son père l'ardeur du tempérament à un très-haut degré , tandis que le bardeau provenant du cheval et de l'ânesse , est moins puissant en amour et moins habile à engendrer ».

Le mulet proprement dit est fort estimé; presque aussi fort que le. cheval, il est aussi adroit que l'âne ; il bronche rare- ment; aussi il est employé avec beaucoup d'avantages dans les pays montueux. En Espagne , en Italie , et en général dans presque tous les pays méridionaux de l'Europe , on s'en sert comme de bête de somme , et il remplace très-bien le cheval dans le service des routes.

Les Espagnols ont multiplié tes mulets au Paraguay ; ils y sont très-petits et ne sont pas employés au labourage. Ils forment une branche importante de commerce de cette pro- vince avec le Pérou ; chaque année , soixante mille mulets sont exportés pour ce dernier pays , ils sonttrès-estimésv les Indiens des Cordilières les préfèrent même aux chevaux.

Dans cette partie de l'Amérique , on ne connoît pas du tout le bardeau.

Aristote a donné le nom de mulet fécond à I'Onagre ou I'Ane sauvage.

On appelle yuma/-^ le prétendu produit du cheval avec la vache , ou du taureau avec la jument. Voyez Cheval et JUMARÏ. (desm.)

MULET. Ce mot se prend aussi pour le métis des ani- maux. Voyez ce mot. (Virey.)

MULET BARBET. C'est le Mulle rouget, (b.)

MULET FÉCOND DE DAOURIE. Dénomination sous laquelle Messerchmidt a parlé du dzigithai , es-

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pèce de cheoal des déserfs de la Daourie , vers les frontières de la Tartarie chinoise. Foyez l'arlicle Cheval, (desm.)

MULET-HINî^US ou GINNUS. C'est ainsi que les anciens distinguoient le Bardeau ou le Mulet engendré par le cheval et l'ânesse (s.)

MULETS. On donne ce nom aux individus neutres de certaines espèces d'insectes hyménoptères ou névroptères, comme les aheilles , les fourmis, et les termes. On les appelle aussi soldats , tels que ceux des ternies et des fourmis ; ou bien oiu>rières, tels que ceux des abeilles. Il paroît que ces derniers ne sont que des femelles , dont les larves ont été nourries avec une pâtée différente de celle qui est employée pour les reines ou vraies femelles , et qui ont été placées dans des avéoles plus étroits, (desm.)

MULETTE (^fauconnerie'). C'est le gésier ou estomac des oiseaux de vol. Lorsqu'un de ces animaux a le gésier embar- rassé et malade, les fauconniers disent qu'il a lat^ivlette. (s.)

MULETTE. Unio. Genre de testacés de la famille des Bivalves, qui offre pour caractères: une coquille transverse, ayant trois impressions musculaires ; une demi-dent cardi- nale, irrégulière , calleuse , se prolongeant d'un côté sous le corselet, et s'articulantavec celle de la valve opposée.

Les coquilles de ce genre étoient des Myes dans Linnseus. Elles ont étéconfondues avec les ANOnONTESquifaisoient par- tie des moules du même auteur; on les appelle vulgairement moules d eau douce. C'est à Bruguières qu'on doit de les avoir distinguées.

Léach , dans ses Mélanges de Zoologie , a établi le genre DiPSAS intermédiaire entre celui-ci et les anodontes.

Les animaux qui habitent les muleit^s ne font saillir aucun tube. Ils ont un pied musculeux qu'ils font sortir en forme de lame transversale , et qui leur sert à se transporter d'un lieu dans un autre , et à s'enfoncer dans la boue ou dans le sable pendant l'hiver pour échapper au froid, et pendant l'été , pour se soustraire à l'effet du dessèchement des eaux. J'ai ob- servé , en Amérique , qu'ils restoient en vie dans des vases assez durcies pour ne pouvoir être entamées avec la bêche, et ce , pendant trois ou quatre mois de l'été ils n'avoient que des pluies momentanées pour se rafraîchir.

Beudant est parvenu, en procédant graduellement , a ac- coutumer les espèces de ce genre à vivre dans l'eau salée.

Poli, dans son ouvrage sur les testacés des deux Siciles, a donné l'histoire et l'anatomie d'une espèce de ce genre , ac- compagnée d'excellentes figures. M r'n résulte que l'animal qui l'habite forme parnw les mollusques un genre nouveau, nt

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qu'il est vivipare à la manière âes anodonics dont il est congé- nère. V. AisoDONTE et Coquillage.

Une espèce de ce genre, la Mulette margaritifère , est célèbre à raison des perles qu'elle produit , et dont on lire un certain parti sous ce rapport, dans le nord de l'Europe et de l'Asie.

Les perles n'étant qu'une cxiravasation de la matière qui sert à former l'intérieur de la coquille, toute coquille qui est nacrée en dedans, peut en donner, soit qu'elle habite la mer ou les tleuves. Or , la mulette en question est dans ce cas , mais encore plus souvent que I'Avicule perlière : au lieu de perles rondes et détachées du test, on n'y trouve que des tubercules nacrés adhérens, et rarement d'une certainevaleur. Linnœus, qui avoit remarqué que l'animal formoit à vo- lonté de ces tubercules , pour mettre obstacle au percement de sa coquille par les vers qui vivent à ses dépens, avoit pro- posé d'en faire produire artificiellement en la perçant avec une tarière. Ce moyen, dont le gouvernement de Suède a fait un secret , a réussi jusqu'à un certain point ; mais le nombre des perles marchandes qu'il fournissolt étoit si peu considérable à proportion des tubercules nacrés , dont la vente n'étoit pas avantageuse , que la dépense Temportoit sur la recette , et le projet a été abandonné.

Une autre espèce de mulette est très-connue, parce qu'elle est très-commune dans les rivières , et qu'elle sert aux pein- tres à mettre les couleurs préparées.

Les coquilles des mulettes sont, en général, épaisses, d'une couleurbrune, presque uniforme en dehors, et plus oumoins nacrée en dedans. Elles sont assez difficiles à distinguer par la description , parce que leurs différences résident presque uniquement dans leur forme.

Il y a seize espèces de mulettes gravées pi. 24.7 et suivantes de V Encyclopédie , dont les plus importantes à connoître sont :

La Mulette margaritifère, qui est ovale, avec le devant plus large, et le sommet rongé. Elle se trouve dans les lacs et les étangs boueux de l'Europe ; c'est elle qui fournit des perles.

La Mulette carolusietsne est ovale , allongée , et a les sommets rongés. Elle est représentée au quart de sa grandeur naturelle, pi. 23 , n." 2 de Ihistoire naturelle des coquilles , faisant suite au Buffon de Déterville. Elle se trouve dans les eaux dormantes de la Caroline , je l'ai observée, décrite et dessinée.

La Mulette des peintres est ovale , et a les sommets entiers. Elle se trouve dans les rivières , elle est très-com-

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mune dans la Seine. On la mange à Naples , au rapport de Poli. Vuyez , pi. G i4 elle est figurée, (b.)

MULIN, MuUnum. Genre établi dans la penlandrie di- gynie et dans la famille des ombelllfères , pour placer quatre plantes d'Amérique qui diffèrent extrêmement peu des Sélins. Il a pour caractères : ombelle simple à involucre poîyphylle ; calice dentelé; pétales jaunes ; fruit très-renllé , ovale , pro- fondément sillonné , à angles arrondis. (B.)

MUUNUM. V. MuLiN. (LN.)

MULION , Mulio. Genre d'insectes de l'ordre des diptè- res, famille des tanystomes, tribu des anlbraclens, distingués de ceux de némestrine et à'anihmxe, appartenant à la même tribu , par les caractères suivans : palpes retirés dans la ca- vité buccale ; trompe pas plus longue que la tête , saillante ; les deux premiers articles des antennes presque de la même longueur; le dernier allongé , d'abord cylindrique , puis ter- miné en forme d'alêne courte ; stylet du sommet peu dis- tinct.

Fabricius a établi ce genre ; mais l'ayant appelé cytherea , nom qui ne diffère que par une lettre de celui de cythere, dé- signant dans Muller un genre à^ eniomosiracés , nous avons été obligés de rejeter cette dénomination, et de lui substituer celle de million. L'illustre entomologiste de Kiell a donné en- suite ce dernier nom à un genre qu'il a formé de plusieurs syrphes. Il en résultera qu'à la fin on ne pourra plus s'en- tendre.

Les millions ont le corps court ; la tête assez grosse , pres- que globuleuse ; le corselet un peu bossu ; les ailes grandes , horizontales, écartées; les balanciers petits; l'abdomen plus long que le corselet , conique; les pattes longues, menues, les tarses sanspelotes distinctes. Leur antennes sont très-écarlées l'une de l'autre , caractère qui distingue ce genre de ceœ: de la tribu des bombyliers ; elles sont de moitié au moins plus courtes que la tête, de trois pièces , dont les deux premières presque également longues , et dont la dernière se termine en alène,avec un stylet très-petit au bout. Les petits yeux lisses sont écartés.

Ce genre est peu nombreux; la seule espèce connue que l'on trouve en France , est le MuLiON obscur. Il a environ cinq à six lignes de longueur. Tout le corps est noir , mais couvert d'un duvet cendré ; la trompe , les antennes et les pattes sont d'un brun noirâtre à la base. Cette espèce est la cyihérée obscure de M. Fabricius. Elle a été figurée par M. Co- quebert, dans la seconde décade de ses Illustrations icono- graphiques des insectes , pi. 30, fig. 6.

On ne latrouve que dans les départemens les plus méridio-

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natix. Voyez ^ quant aux mulions de M. Fabricîus , les genres Chrysostoxe et Aphrite. (l.)

MULLA. Dans Rhéedece nom se trouvera lasnitede ceux qu'on donne au Malabar à diverses espèces de jasminées , et paroît être , en conséquence , synonyme de notre mot jas- min. Ainsi \e f:aiu pitsjegam-mul/a désigne le mogorhim tiiflo- riim , LK , et le caiu-tsjiregam mulla , le mogorium miiliiflonun ,

LK. ClN.)

MULLE ou MULET, MuUus. Genre de poissons de la dlvisioti des Thoraciques, dont les caractères consistent à avoir le corps couvert de grandes écailles, qui se détachent facilement-, deux nageoires dorsales, plus d'un barbillon à la mâchoire inférieure.

Ce genre , qu'il faut bien se garder de confondre avec celui du MUGIL comme le font beaucoup de personnes , à cause de la similitude des noms, renferme quatorze espèces, dont plusieurs sont célèbres à raison de la bonté de leur chair.

Le MuLLE rouget , Mullus harhatm , Linn. , a le corps et la queue rouges, point de raie longitudinale, les deux mâ- choires également avancées. ( F. pi. G. i, il est figuré.) Il se trouve dans toutes les mers d'Europe , il parvient à huit à dix pouces de long. C'est le barbei et le surmulet Ae quel- ques auteurs. Il ne faut pas le confondre avec le Trigle ROUGET, Trigla cuculus.

La tête de ce poisson est tronquée, large , comprimée et couverte d'écaillés qui se détachent facilement, et qui sont transparentes. Les mâchoires sont d'égale longueur et armées d'une grande quantité de petites dcnis ; le palais est rude , !a langue lisse et le gosier garni de quatre os en forme de lime. IjC menton est orné de deux longs barbillons. Le*; narines n'ont qu'une ouverture. Les yeux sont pourvus d'une mem- ])rane. Les opercules sont unis , et les ouïes grandes. La ligne l.itérale est près du dos. Tous les rayons de la première dor- sale sont aiguillonnés, ainsi que le premier dans la seconde, dans la ventrale et dans l'anale. Le ventre est argentin et les nageoires jaunes.

C'est de crustacés et de petits poissons que vit- le muUe rouget. On le prend au filet et à la ligne. Il a la chair blan- che , ferme et de très-bon goût. Il a été connu des Grecs et des Romains , qui en font souvent mention dans leurs ou- vrages. Ces derniers, dans le temps les vertus républi- caines avoient cédé la place aux vices de toute espèce, le luxe le plus effréné et la gourmandise la plus grossière étoient les seuls moyens de se distinguer parmi les esclaves ram- pans à la cour du despote , ont payé ce poisson des sommes énormes ; Suétone en cite trois qui furent vendus So.ooo

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sesterces , c'est-à-dire , 6000 francs. Ce n'étoit pas seulement comme manger qu'on les recherchoit avec tant d'ardeur, ce n'étoit pas seulement pour les nourrir dans des bassins l'onpouvoit admirer l'éclat de leur robe, c'étoit encore pour s'y donner le barbare plaisir de les faire expirer entre les mains , pour jouir de la variété des nuances pourpres , vio- lettes ou bleues qui se succédoient depuis le rouge du cinabre jusqu'au blanc le plus pâle , à mesure que passant par tous les degrés de la diminution de la vie, et perdant leurs forces , le sang de ces poissons se concentroit dans les gros vais- seaux. L'âme se révolte, à l'idée d'une barbarie aussi futile, qui heureusement n'est plus dans nos mœurs.

Le MuLLE SURMULET a le corps et la queue rouges ; des raies longitudinales jaunes ; la mâchoire supérieure un peu plus avancée que l'inférieure. Il se trouve dans les mers d'Eu- rope, et dans celles d'Asie et d'Amérique ; il a été assez gé- néralement confondu avec le précédent, dont il diffère fort peu. On le connoît, sur les côtes de France ,sous le nom de barharln , de rouget barbé et de mulel barbé. Les anciens , qui l'estimoient autant que le muUe rouget , l'avolent consacré à Diane, et faisoient beaucoup de contes à son sujet. Sa gran- deur est ordinairement d'un pied. 11 va par troupes faire au printemps sa ponte sur les rivages de la mer, à l'embouchure des rivières , on le prend au filet ou à l'hameçon.

Le MuLLE JAPONAIS a le corps et la queue jaunes , et point de raies longitudinales. On le trouve dans les eaux du Japon il a été observé par Houttuyn.

Le MuLLE ORIFLAMME a le dos bronzé ; une raie longitu- dinale , large et rousse, de chaque côté du corps; une tache noire vers l'extrémité de la ligne latérale ; la nageoire de la queue jaune et sans taches; les barbillons blancs ; les dents petites et nombreuses. Il est figuré dans Lacépède, vol. 3, pi. i3. On le voit dans la mer Rouge et dans celle des Indes.

Le MuLLE RAYÉ est blanchâtre , a cinq raies longitudi- nales de chaque côté , deux brunes et trois jaunes , les na- geoires de la queue rayées obliquement de brun ; les barbil- lons de la longueur des opercules ; les écailles légèrement dentées. Il est figuré dans Lacépède , vol. 3 , pi. tl^. Il habite la mer Rouge.

Le MuLLE TACHETÉ a la tête, le corps , la queue et les nageoires rouges; trois taches grandes, presque rondes et noires de chaque côté du corps ; huit rayons à la première nageoire du dos; dix à celle de l'anus. Il est figuré dans Bloch , pi. 348, et dans le Buffon de Deterville , vol. 5 , paç. 87. Il se pêche sur les côtes du Brésil.

24 INT V L

Le MuLLE DEOX BA^TDES a une bande très-foncée , trans- versale et terminée en pointe à l'origine de la première na- geoire du dos ; une bande presque semblable vers l'origine de la nageoire caudale, divisée en deux lobes très-distincts; la tête couverte d écailles semblables à celles du dos ', les barbillons épais à leur base et déliés à leur extrémité. 11 est figuré dans Lacépède , vol. 3 , pi. i4.. Commerson l'a ob- servé , décrit et dessiné dans la mer des Indes.

Le MuLLECYCLOSTOME n'a point de raies, de bandes ni de taches; l'extrémité de ses barbillons atteint à l'origine des nageoires thoracines; l'ouverture de sa bouche représente une très-grande portion de cercle ; sa ligne latérale est parallèle au dos; il a huit rayons à la première dorsale. Il est figuré dans Lacépède, vol. 3 , pi. i4, et se trouve avec le précédant.

Le MuLLE TROIS BATSDES a trois bandes transversales , larges , très-foncées et finissant en pointe ; la tête couverte d'écaillés semblables à celles du dos ; l'extrémité des barbil- lons atteignant à l'extrémité des nageoires thoracines. Il est figuré dans Lacépède , vol. 3, pi. i5. On le pêche avec les précédens.

Le MuLLE MACROTSÈME a une raie longitudinale de chaque côté du corps ; une tache noire vers l'extrémité de la ligne la- térale; sept rayons à la première dorsale; l'extrémité des barbillons atteignant l'extrémité des nageoires thoracines. Il est figuré dans Lacépède , vol. 3 , pi. i3. On le trouve avec les précédens.

Le MuLLE BARBERIN a une raie longitudinale de chaque côté du corps ; une tache noire vers l'extrémité de la ligne latérale ; huit rayons à la première dorsale ; lextrémilé des barbillons n'atteignant que jusqu'à la seconde pièce des oper- cules ; cette seconde pièce garnie d'un piquant recourbé. Il est figuré dans Lacépède , vol. 3 , pi. i3 , et habite les mêmes mers que les précédens.

Le Mulle rougeâtre a le corps et la queue rougeâtres ; une tache noire vers l'extrémité de la ligne latérale ; la se- conde nageoire dorsale parsemée , ainsi que la nageoire de l'anus et celle de la queue , de taches brunes en forme de lentilles, il habite les mers des Moluques.

,Le MuLLE ROUGEoa, MuUus chryserythrosj a le corps et la queue rouges; une grande tache dorée entre les nageoires dorsales et celles de la queue ; des rayons dorés aboutissant à 1 œil ; les opercules dénués de piquans , mais non d'écaillés ; les barbillons atteignant jusqu'à la base des nageoires thora- cines, et se recourbant ensuite ; quatre rayons à la mem- brane des branchies. Il se trouve avec le précédent.

Le MuWiE CORDON JAUKE a le dos bleuâtre ; une raie laté-

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raie e* longitudinale dorée ; la nageoire de la queue et le sommet de celle du dos, jaunâtres ; trois pièces à chaque oper- cule; un petit piquant à la seconde pièce operculaire ; les opercules dénués d'écaillés semblables à celles du dos ; quatre rayons à la membrane des branchies; les barbillons recour- bés et n'atteignant pas tout-à-fail jusqu'à la base des nageoires thoracines. Il se trouve avec les précédens; et c'est encore à Commerson qu'on en doit la connoissance. (b.)

MULLE. Nom de la plus mauvaise qualité de Garatsce.

(B.) MULLEIN. Synonyme anglais de Mollène. (ln.) MULLER, Miillera. Genre de plantes établi par Linnseus. C'est le couBLANDiE d'Aublet. (b.)

MULLER-GLAS et MULLERISGHES-GLAS. Nom allemand du quarz hyalin concrélionné. ( Voy. cet article et Hyalite.) (ln.)

MULLET. Nom du macareux, dans la province d'Yorck.

(V.) MULLEYH. Nom arabe d'une espèce de Soude , salsola fœlida , Delil. (ln.)

MULLEYH etA'DBEH. Noms arabes du reaumunaver- miculata , L. (ln.)

MULLI de Garcillaso. V Murlle. (ln.) MULLI ou MOULLL Nom péruvien du Poivrier du Pérou, schînus molle ^ L. (ln.)

MULM. Les mineurs allemands nomment ainsi un mine- rai quelconque effleuri, décomposé, friable ou en poudre.

(ln.) MULOT , Mus sybaticus , Linn. Mammifère rongeur du genre des Rats proprement dits. V. ce mol. (desm.) MULOT (grand). V. Rat surmlulot. (desm.) MULOT BLEU DU CHILL C'est un animal fort peu connu, qui a été décrit imparfaitement par Molina , sous le nom de Guangue , Mus ryaneus. (desvi.)

MULOT A COURTE QUEUE. Dénomination appli- quée au Campagnol. V. ce mot. (s.) MULOT YOLANT. Voyez ûIyoptère Rat-volant.

(desm.) MULOTTER {terme déchusse). C'est l'action Au sanglier qui fouille les caveaux du mutai, pour se repaître du grain qu'il y trouve amassé, (desm.)

MULTINERVI \. L'on a nonimé ainsi autrefois le ;;/a/î- tain^ à cause de sas feuilles marquées de plusieurs nervures longitudinales, (ln.)

.6 ^T 11 L

MULTIPLIANT. Les Français de Pondîchérî appellent ainsi le figuier des pagodes (b.)

MULTIVALVES. On appelle ainsi tous les coquillages qui ont plus de deux valves. Quoique cette classe semble être bien caractérisée, on n'est pas d'accord jusqu'à présent sur les coquilles qui doivent en faire partie. Lamarck, par exemple, pense que les pholades ^ les tareis et les fistulanes , doivent être regardés comme des bivalves qui ont des pièces accessoires , et que les oscabrions sont des mollusques nus , dans le dos desquels sont encaissées de petites lames testacées. En adoptant cette opinion , qui est très-certainement fondée sur des bases solides, il faudroit supprimer la classe entière des multivalves; car les deux seuls genres qui y resteroient , les anatifs et les balanites , sont formés par des animaux étran- gers aux mollusques , et qui pourroient faire seuls une classe voisine des radiaires de ce naturaliste , classe qu'on dit que Lamarck a en effet éf^ablie dans son dernier cours.

On compte buit genres dans les muhîvahes , dont les ca- ractères se tirent tantôt de la position des valves , tantôt de leur nombre , tantôt de leurs rapports ; savoir : Oscabrion, Anatif, Balanite , Pholade, Taret, Fistulane, Ats(o- MiE et Calc.éole. (b.)

MULTUN(iUL\ (^plusieurs sabots). Nom donné par llli- ger aux mammifères pachydermes. Il est en opposition avec celui de solidungida ^ appliqué à l'ordre qui renferme le genre du cheval , et qui forme notre famille des Solipèdes. (desm.)

MULU. Suivant d'anciennes relations , les Chinois don- nent le nom de mnlu à une race de cerfs , qui paroît être Vhip- pelaphe ou cerf des Anîennes. V. au mot Cerf. (s.)

MULUS. Nom latin du midet. (desm.)

MUMIE. V. Momie, (v.)

MUMINAHl. Nom qu'on donne en Perse au Naphte. V. Bitume, (lis.)

MU-MINFO. C'est, à Canton, en Chine, le nom d'une espèce de SarrÈte, Serratula multijlora^ Lour. (ln.)

MUNACGHIA. Nom de la corneille mantelée en Italie, (s.)

MUNCHAUSIER, Munchausia. Très-bel arbrisseau de rinde , dont Linnœus avoit fait un genre particulier , mais que Lamarck a réuni au lagerstrome dont ilne diffère que parce qu'il a les élamines inégales, (b.)

MUNCHUSIA de Heister. Ce genre de plante est rentré dans celui des Ketmies , Hibiscus, (ln.)

MUNCOS. Dans Rumphius , c'est la Mangouste de l'Indl. V. ce mot. (desm.)

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MUNDA-VALLI. Nom malabare d'une espèce de Lise- ron , Conwlmlus grandiflorus , L. C'est aussi le nom de Vipo- meahoîia nox, espèce de Quamoclit. (ln.)

MUNDHOLZ. L'un des noms du Troène en Alle- magne, (ln.)

MUNDIC. Nom que l'on donne, en Allemagne, au Fer

ARSENICAL. (LN.)

MUNDICK des Anglais. V. Pyrite, (ln.) MUNDOURE. Nom du spare mendole. (b.) MUNDUBL Nom brasilien de Varachis hypogœa, selon Marcgrave et Pison; le mundubi d' Angola ou pois d'Angole, est le glycine suhierranea ; enfin, le MUNDUBl GUAÇU, est le jatropha curcas. Quelques auteurs écrivent manduhi au lieu de mundubi. (LN.)

MUNDUI-GUAÇU de Pison. F. Mundubï-guaçu, à l'ar- ticle Mundubi. (ln.)

MUNGO. Dans le Systrma naturœ de Linnseus , la man- gouste porte le nom de viverm mungo. V. Mangouste; (desm.) MUNGO. Nom indien d'une espèce de Haricot , pha~ seoltis mungo. (ln.)

MUNGOS. C'est sous cette dénomination indienne que Ton connoît depuis long-temps les graines de Vophîonhiza mungos , L. , que Garcias nomme mungo , et Avicenne messe.

(ln.) MUNGUL. V. Gros-bec mungul. (v.) MUNIS et NESCHASCH. Noms arabes de Vinuleodo- ra«fe, suivant F orskaè'l. Elle est cultivée dans les jardins de TArabie-Heureuse , à cause de son parfum. On mange ses feuilles crues, et les femmes les mêlent dans leurs cheveux. Les Arabes l'appellent également Chaa. (ln.)

MUNISTERou MUNÏSTIER. Jonsion et Gesner rap- portent ces noms au honasus ^ race de bœufs de Paonie , dont parle Aristolp , et qui paroît se rapporter à l'espèce de V aurochs. Voyez ce mot. (desm.^

MUNNOZE, MunuGzia.ijexïVQ de plantes de la syngé- nésie polygamie sup -iilue , et de la famille des corymbifères , fort voisin des Golomellies, qui offre pour caractères : un ca- lice commun campimulé, imbriqué d'écaillés membraneuses^ dont les exlérieures sont plus larges, et les intérieures trifides ; un réceptacle convexe creusé de cellules ciliées enleursbords, et garni de fleurons hermaphrodites dans son disque , et de demi-fleurons tridentés, femelles fertiles, à sa circonférence ; des semences ovales , tronquées , striées , et surmontées d'une aigrette velue.

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Ce genre renferme quatre espèces. Ce sont des arbrisr seaux du Pérou, à feuilles opposées et velues, (b.)

MUNSTER-PLUMBS. L'un des noms anglais de la Batate. (ln.)

MUNTINGIA. Genre de plantes établi par le Père Plu- mier , et consacré à la mémoire d'Abrah. Munting, méde- cin-botaniste hollandais, qui vivoit vers la fm du dix-seplième siècle. Plumier rapportoil à ce genre plusieurs plantes , qui rentrent dans le genre celtis ( MicO(;oulier). Le genre mun~ iingia de Linnaeus ne contient qu'une espèce ; c'est le cala- luraalba de Plumier. V. Calabure. (ln.)

MUNTJAC. C'est le nom d'un quadrupède ruminant du genre des Cerfs, (desm.)

MUOLLO. Nom nicéen àa poisson lune oncèphale. (desm.)

MUONG-CHUONG-CHUM. C'est en Cochinchine le coccoloha cymosa, Loue, espèce de Raisinier. (ln.)

MUOP-DANG. Nom donné en Cochinchine au momor- dica charantia^ Lour., plante de la famille des cucurUtacées. (lw.)

MUOP-KHEN, Une espèce de Concombre, Cucumis acutangulus ^ Tw. , est cultivée sous ce nom en Cochinchine. (ln.)

MUOP-NGOT. En Cochinchine , on nomme ainsi le Soqua des Chinois. V. ce mot. (ln.)

MUOP SAOC. C'est en Cochinchine le nom du tricho- santhes anguina , L. , qu'on y mange et qu'on y cultive à cet effet , comme en Chine, (in.)

MUOU. Le Mulet des Provençaux.

MUOU. C'est I'Uranoscope rat à Nice, (desml)

MUQUA. V. MuEM xu. (ln.)

MUQUEUSE. Nom spécifique d'une Couleuvre, (b).

MUR d'un filon. V. Filon et Salbande. (pat.)

MURADA. Nom du Spare à bec pointu, Sp. acutirostrù^ de Laroche , aux îles Baléares, (desm.)

MURAENA. Foy. Murène, (desm.)

MURAJES et MURUGES. V. Morujes. (ln.)

MURALTA. Genre de plantes établi par Adanson pour placer quelques espèces de clematisy tel que le clemaiiscirrhosa , que Sibthorpe regarde comme le demalilis de Dioscoride y et qui diffère des autres espèces. Ce genre est le même que le viorna de Persoon. M. Decandolle , qui en fait une section du genre clematis , l'appelle cheiropsis ; ce qui le caractérise est un involucre caliciforme , composé de deux bractées sou- dées , situé immédiatement sous la fleur, (ln.)

MURA-NURA. Nom de I'Ail au Japon, (ln.)

MUR 29

MURAPA. Nom d'une plante de la famille des Aroïdes et du genre Carludovicea, 6'. ietragona , Kmith. ^ qui croît proche de la Cuesla-de-Folima , à la hauteur de sept cents toises, (ln.)

3IURARIA. Nom du Violier jaune ou Giroflée jaune ( Cheiranthus cheiii) chez les Romains, (ln).

MURASAKI. C'est au Japon le nom du Gremil des CHAMPS , suivant Thunberg et de la Baselle rouge ou GandolE , Basella rubra , L. (ln.)

MURBERSANDSTEIN(me/ax//e, Hauy). Nom qu'on donne en Allemagne au Grès des houillères ou Psammite

(LN.)

MURCIELAGO,MORCIELAGO,MURCIEGALO, MURCEGUILLO. Divers noms espagnols des Chauve- souris, (desm.)

MURDADSCHA. Nom du Cornouiller sanguik en Turquie, (ln.)

MURE. C'est le Buccin ouvert, (b.)

MURE. C'est le murex mancinella , Linn. ; la MuRE AILÉE est le murex neritdideus , L. Ces coquilles ne font plus partie du genre rocher (murex). V. ces mots, (ln.)

MURE. Dans l'acceplion vulgaire du mot , il désigne les fruits du MuKiER et ceux des RoNCES. Les derniers, s'ap- pellent mures sawages. (ln.)

MURE AILÉE. C'est le nom marchand d'un Rocher, (b.)

MURE, MUREGRiESS. Noms de 1' Argentine {Poten- tilla anserina, L. ) en Norwége. En Islande , on lui donne les noms de mura et de mumsoley. (LN.)

MURE. V. Mûrie, (pat.)

MURENE, Murœna. Genre de poissons de la division des Apodes, dont les caractères consistent à avoir des nageoires pectorale, dorsale, caudale et anale; les narines tubulées;i les yeux voilés par une membrane ; le corps serpentiforme et visqueux.

Ce genre renfermoit , dans le Sjsiema naturœ , édition de Gmelin, plusieurs espèces ({ui ne lui appartenoient réelle- ment pas, et qui en ont été séparées par Bloch et Lacépède pour former les genres Gymnothorax, Ophisure et Sirène. L'espèce surtout qui portoit parliculièremcnt le nom de mu- rène chez les anciens , et qui le porte encore dans une partie de l'Europe, le murena helena de Linnseus, n'en fait plus par- tie. Elle entre dans le genre Gymnothorax de Bloch , qui appartient au vingt-neuviè^ne ordre de Lacépède, c'est-à-dire des poissons osseui qui n'ont ni opercules ni membranes des

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brancbies. Depuis , Cuvier a formé trois sous genres ; savoir : Anguille , Congre et Alabès.

Les espèces qui restent dans le genre Murène , selon La- cépède , sont au nombre de quatre.

La Murène anguille , qui a la mâchoire inférieure plus avancée que la supérieure ; cent rayons ou environ à la na- geoire de Tanus; le dessus du corps et de la queue sans taches. On la trouve dans les eaux douces et salées des quatre parties du monde. V. au mot Anguille.

La Murène tachetée, Murœna ophis, Linn. , qui a la mâ- cboire inférieure plus avancée que la supérieure ; trente-six rayons ou environ à la nageoire de l'anus ; la couleur ver- dâtre ; de petites taches noires ; une grande tache de chaque côté et auprès de la tête. Elle habite la mer du Sud. Elle devient fort grande. Sa chair est de mauvais goût.

La Murène myre a le museau un peu pointu , deux petils appendices un peu cylindriques à la lèvre supérieure ; la na- geoire du dos toute cendrée ou blanche, et liserée de noir. Elle se trouve dans la Méditerranée.

La Murène congre a deux appendices un peu cylindriques à la lèvre supérieure, et la ligne latérale blanche. V. pi. G. i, elle est figurée. On la trouve dans les mers d'Europe et d'Amérique. Elle parvient à une grandeur considérable , et a plus de dix pieds de long. V. au mot Congre.

Les Murènes des îles Baléares et a larges lèvres ont été observées, décrites et dessinées par Delaroche, dans son Mémoire sur les poissons de ces îles , inséré dans les Annales du Muséum,

Les Murènes cassini et none ont été découvertes par M. Risso dans la mer de Nice.

Lesueur, compagnon de Péron dans le voyage aux Terres Australes, dirigé par le capitaine Baudin, a décrit , dans le Journal de l'Académie des sciences naturelles de Philadel- pbie, de septembre 1817, cinq espèces nouvelles de murènes propres aux eaux douces et salées de l'Amérique septentrio- nale. 11 les a appelées Murène rostrale , Murène de Boston , Murène serpentine , Murène argentée et Mu- rène microcéphale, (b.)

MURENOBLENNE, Murœnoblenna. Poisson observé par Commerson dans le détroit de Magellan , et qui fournit, par ses pores , une matière gluante , très-analogue à celle des Gastrobranches , et si abondante que le corps en est presque entièrement composé.

Ce poisson forme un genre dans la division des Apodes , qui offre pour caractères : point d'apparence de nageoires ; le corps et la queue presque cylindriques. Il parvient à un ou

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deux pieds de long, sur deux à trois potices de diamètre, (b.)

MURÈNOÏDE, Murœnoides. Genre de poissons de la division des Jugulaires , établi par Lacépède pour placer une espèce qui avoit mal à propos été rapportée aux Bi.ennies.

Cuvier a fait un sous-genre des Blennies , et a changé ce nom en celui de (ioTSNELLE. Ce genre offre pour caractères: un seul rayon à chacune des nageoires jugulaires; trois rayons à la membrane des branchies; le corps allongé, comprimé , en forme de lame.

lî'espèce qui compose ce genre a été appelée Murèîsoïde SUJEF, du nom du naturaliste russe qui l'a fait connoîlre. On ignore sa patrie, (b).

MURÉNOPHIS, Murœnophis. Genre de poisson , de la division des apodes , établi par Lacépède , pour placer douze espèces de Murènes qui n'ont point de nageoires pectorales. C'est le même que le Gymnoïhorax de Bloch , augmenté de trois espèces nouvelles.

Le MuRÈNOPHis d'utse SEULE COULEUR est une espèce nouvelle, observée par Delaroche aux îles Baléares, et qu'il a figurée dans son Mémoire sur les poissons de cette île , imprimé dans les y^n««/« du Muséum, l[ y a encore les Mu- RÈNOPHis Pauve, DE Cristini et SouRCiÈRE , observés par Risso dans la mer de Nice, (b.)

MURENOT. Nom donné, aux îlesBaléares, à une nou- velle espèce de MuRÈNOPHis, décrite par Delaroche {Annales du flïuséum) sous le nom de Murenophis unicolor. (desm.)

MURER. Le Giroflier jaume porte ce nom. (b.)

MUREX. Nom sous lequel Burmann a figuré ( Ind. , tab. 4-5 , fig- 2 ) le pedalium murex , plante dont la fleur sent fortement le musc, et dont le fruit est tétragone , et garni sur les angles d'épines , comme cela est fréquent dans les co- quilles du genre Murex, (ln.)

MUREX. Nom latin des coquilles du genre Rocher. V. ce mot. (b.)

MURFAÏN. Nom de I'Hyène dans le royaume de Dar- Four, en Afrique , au midi de l'Egypte , au rapport de W.-Q, Browne. (desm.)

MURIACIT. Werner donne ce nom à l'espèce miné- rale que les minéralogistes françaisnomment Ch aux anhydro- sulfatée muriatifère. (ln.)

MURIATES. Combinaisons du chlore (acide muriatique- oxygéné) ou de Tacide hydrochlorique (acide muriatique) avec une base. Les minéralogistes ne connoissent qu''un très-petit nombre

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de muriates dans la nature , et à l'exception de la soude mu-

riatée ou sel marin , ils sont très-peu répandus.

Les uns sontsolubles dans V eau {hydroMorafes) tels que la chaux nturiaiée, la magnésie muriulée, 1 ammoniaque muriaté^ les autres sont insolubles ( chlorures ) comme V argent muriaté; le mercure muriaté^ le ciiiore muriaté, le plomb muriaté et \e fer muriaté. V. ces mots. (LN.)

MURICAIRE , Muriraria. (ienre de plantes établi par Desvaux pour placer la Bcniade couchée de Desfontaines. 11 ne paroît pas suffisamment distinct de celui appelé LjELie par Persoon. (b.)

MURICALCITE de Kirwan. C'est une variété de la Chaux carbonatée magnésifère, dite Bitterspath. V. vol.VI, pag. i8o. (ln.)

MURICIER. Animal des Rochers. Il a un opercule ; deux tentacules pointus portant des yeux à leur base ; un pied sessile , allongé , et pourvu d'appendices, (b.)

MURICIER, Muricia. Grand arbrisseau grimpant, à vrilles solitaires, à feuilles alternes, pétiolées, veinées, glabres, di- visées en cinq lobes, dont les trois du milieu sont aigus, et les deux latéraux obtus el couris; à fleurs jaunâtres, latérales, solitaires et longuement pédonculées, qui forme , selon Lou- reiro, un genre dans la monoécie syngénésie.

Ce genre offre pour caractères : une spathe renflée , obtuse , uniflore et très-grande ; un calice divisé en cinq parties su- bulées, striées, colorées, égales ; une corolle de cinq pétales ovales, lancéolés et nervés ; dans les fleurs. mâles trois éta- mines à filamens courts, épais, trigones , réunis par leur base ; à anthères bilobées etdivariquées dans deux seulement, la troisième n'ayant qu'une fossette longitudinale farinifère, dans les fleurs femelles, *in germe ovale-oblong, velu, in- termédiaire entre la spathe et le calice, à style épais et à trois stigmates sagitlés ; une grande baie ovale , épineuse, unilo- culaire et polysperme.

Le muricierse trouve dans la Chine et dans la Cochinchine. wSes baies sont d'un rouge pourpre et d'une saveur fade. On les emploie pour teindre les boissons et les alimens en rouge Ses feuilles et ses semences sont apéritives et astringentes, bonnes dans les obstructions du foie et de la rate , dans les ulcères et les tumeurs malignes, (b.)

MIIRIE, MURE. Nom que quelques naturalistes don- nent aux eaux et aux terres naturellement imprégnées de sel marin. Dans les salines , on donne à Teau qui est saturée de sel, après qu'on lui a fait subir l'évaporation convenable, le nom de muire, qui est sa véritable dénomination, (pat.)

MUR 33

MURIEU. C'est en Lorraine le nom des GbBE-MouciiEs NOIRS dans leur plumage (V automne, et connus ailleurs soas celui de ber.-fis^ie. On donne la même dénoinination , dans le midi de la France, nnxfam^elfes, rossignols, frotjiieis, tan'ers., mol/eux, pipis , et généralement à tous les petits oiseaux à bec Gn qui , lors de leur passage aux mois d'août et de sep- tembre , ont la chair succulente, (v.)

MURIER, Monts, LiîiB. {Monoéine tétrandrie). (iênre de plantes de la famille des urticées , qui a de grands rapports avec le Jaquier. Le mûrier a les fleurs unisexuelles et mo- noïques, rarement dioïques. Les fleurs mâles et les femelles viennent communément sur le même individu; Elles sont portées sur des chatf>ns oblongs ou ovoïdes, mais séparés- Les unes et les autres, privées de corolle, ont un calice découpé en quatre segmens , ovales-concaves dans [ks mâles, arrondis au sommet et persistans dans les femelles; les pre- mières renferment quatre étamines, dont les filets en alêne et courbés avant le développement de la fleur , se redressent ensuite et dépassent le calice. Les secondes contiennent un ovaire en cœur , surmonté de deux'longs styles un peu rudes, réfléchis et à stigmates simples. Le calice de celles-ci , après leur fécondation , devient une petite baie charnue, succu- lente et monosperme; et c'est la réunion, en assez grand nom- bre, de ces baies groupées , qui forme le fruit connu sour le nom de mûre , lequel est globuleux ou ovale , plus ou moins gros, et assez semblable à celui de la Ronce.

Tels sont les caractères génériques des mûriers. Ces arbres lactescens, à feuilles simples, alternes, quelque- fois opposées et toujours accompagnées de stipules. Leurs chatons sont solitaires el axillaires , et leurs fruits communé- ment bons à manger.

On en compte quinze à seize espèces , dont quelques-unes sont mal déterminées et d'autres peu connues. Toutes ont une origine étrangère; plusieurs ont été depuis long-temps naturalisées en Europe. Celles-ci ont donné naissance à beau- coup de variétés, qui portent différens noms, suivant les pays, ^ qui en rend la connoissance an peu embarras- sante.

L Espèi^et Variétés.

Le Mûrier blanc, Moms alba ^ Linn. Arbre monoïquç, devenant plus grand que les cerisiers, 11 a Técorce épaisse et gercée, le bois jftone, les branches éparses et confuses.

U M TJ R

les feuilles pétiolées , dentées, lisses, un peu rudes, iamiot entières et obliquement taillées en cœur, lanlôt à deux oa trois lobes; les fleurs vertes, et les fruits blancs, fades et à peu près ronds. 11 offre beaucoup de variétés que je fe- rai connoître tout à l'heure , avec celles des espèces sui- vantes. C'est le mulrier qui est le plus généralement cul- tivé en Europe pour la nourriture des vers-à-soie.

Le Mûrier noir, Morus nlgra, Linn., plus élevé que le pré- cédent , lui ressemble beaucoup; mais il est souvent dioïque et porte un fruit beaucoup plus gros , d'une forme plus allon- gée , constamment noir, et rempli d'un suc vineux et abon- dant. Ses branches longues , forment une forte tête ; ses feuilles sont luisantes , communément découpées en cinq lobes, quelquefois entières, en général grandes, plus fer- mes et plus nerveuses que celles ànmûrier blanc.

Le Mûrier ROUGE, Morus rubra , Linn. Arbre dioïque plus fort et plus élevé que les autres mûriers. Une écorce noire ; des chatons pendans et cylindriques; des fleurs lâches et écar- tées; des feuilles ovales, en cœur , grandes, larges, entières et quelquefois palmées, très-rudes, dentées à leur circon- férence, terminées en pointe allongée, et velues en dessous dans leur jeunesse : tels sont les caractères qui distinguent cette espèce, originaire de Virginie , et recherchée pour les bosquets à cause de son feuillage.

Le Mûrier du Camada, Morus canaâensis, Lam. Il est dioï- que comme le précédent et s'en rapproche beaucoup ; mais sa taille est médiocre ; son écorce d'un brun jaunâtre ; ses chatons sont plus gros ; ses fleurs très-rapprochées ; ses fruits comme réunis en faisceaux ; ses feuilles divisées en trois ou cinq lobes. On le croit originaire du Canada.

Le Mûrier des Indes , Morus indira , Linn. ; Mûrier de TaRTARIE, Morus tafarira , Linn. Poiret soupçonne que ces deux mûriers cités par Linn?pus comme formant chacun une espèce distincte, ne sont que deux variétés de la même es- pèce; il n'y trouve aucun caractère spécifique qui puisse les distinguer. En effet , le premier livré à lui-même , conserve à la vérité la forme d'an buisson : mais étant émondé, il ac- quiert une hauteur assczconsidérable, ainsi que le secftid. L'é- corce du premier est d un noir cendre , celle du second est jaunâtre. Celui-ci a ses pédor^jfces et ses pétioles plus longs , et les découpures de ses feuilles plus distinctes ; mais, pour tout le reste , ces deux prétendues espèces se ressemblent. Il découle , pcu incision , de l'un et de l'autre arbre , un suc lym- phatique et visqueux. L'un et l'autre ont des feuilles inégale-

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ment dentées , et des fruits d'un rouge noirâtre qui se man- gent ; enfin leurs feuilles sont également estimées dans l'Inde pour la nourriture des vers-à-soie. On les regarde comme plus délicates , et plus propres à fournir à ces ir>sertes une plus grande quantité de substance soyeuse. Quand elles sont jeunes, on les emploie aussi dans les cuisines comme plantes potagères. Voyez dans Rumphius et dans Rhéede la descrip- tion du mûrier des Indes , et dans Miller celle du mûrier de Tartane , dont il dit avoir reçu les semences de Rombay.

Le MURIERDES TEINTURIERS, Moriis finfturia, Linn.; MuRlER A RAMEAUX ÉPINEUX, Morus zaïit/ioxylum , Mill. Ces deux es- pèces semblent encore n'en devoir constituer qu'une seule. .Voici comment Miller a décrit l'un et l'autre de ces mûriers.

Le bois du premier, dit-il, sert aux teinturiers. Il est plus connu sous le nom àefustique appliqué au bois, que par son fruit qui n'est pas fort estimé. 11 croît naturellement dans presque toutes les îles de l'Amérique, et en plus grande abon- dance à Campeche que partout ailleurs. On exporte ce bois de la Jamaïque , on le trouve plus communément que dans aucune autre des îles britanniques. Cet arbre , dans son pays natal, s'élève au-dessus de soixante pieds de hau- teur. Son écorce est d'un brun clair, et quelquefois .sillonnée; son bois est ferme , solide , et d'un jaune brillani. 11 pousse de tous côtés plusieurs branches couvertes d'une écorce blanche, et garnies de quatre feuilles de quatre pouces de lon- gueur, larges et arrondies à leur base, et plus larges d'un côté que de l'autre, demanièt>î quellesparoissent placées oblique- ment sur les pétioles; leur largeur diminue par degrés vers l'ex- trémité, qui se termine en pointe aiguë. Elles sont rudes comme celles du mûrier noir^ d'un vert foncé , et supportées par de courts pétioles.Vers l'extrémité des jeunes branches sortentles chatons courts , et de couleur pâle herbacée ; le fruit qui sort sur de courts pédoncules dans d'autres parties des mêmes branches, est de la grosseur d'uns grosse noix-muscade, d'une forme ronde , couvert de protubérances , vert en dedans et en dehors , d'une saveur douce et sucrée lorsqu'il est mûr.

Le second mûrier , morus zanthoxylum {c esX. toujours Mil- ler qui parle), se trouve a la Jamaïque et dans les îles de Ba- hama , d'où ses semences m'ont été envoyées. On vend son bois, et on l'emploie aux mêmes usages que celui du morus iinctoria , duquel les botanistes ne l'ont pas trop bien distin- gué.Cette espèce ne parvient pasjjune grosseur aussi considé- rable. Ses branches sont plus qBces ; ses feuilles sont plus étroites, plus rondes à leur b aïe , dentées en scie sur leurs

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bords et terminées en pointes aiguës. Du pétiole de chacfue

feuille sortent deux épines aiguës qui , dans les plus vieilli-&

branches ,ont jusqu'à deux pouces de longueur. Le fruit a

ia même forme que celui du morus tinctoria; mais il est plus

petit.

MuRiEK AïTSTRAL, Morus oustrah's ^ Lam., soupçonné dioï- que. Il a ses feuilles portées sur de longs pétioles et de très- petits fruits barbus, moins pulpeux que dans les autres es- pèces , et plutôt secs que charnus. On le cultive à l'ile-de- Bourbon. Ses feuilles varient et sont souvent laciniées.

Mûrier RÂPE, BJorusradula, Lam., à feuilles très-entières, ovales et coriaces , et à fruits cylindriques , verts et succu- lens. Son nom lui vient des tubercules petits et nombreux qui recouvrent ses rameaux et ses feuilles. Ils sont très-apparens sur les rameaux, mais à peine visibles sur les feuilles. Ce sont des aspérités semblables à cellesdes râpes, sirudesautoucher, qu'on ne peut faire glisser ces feuilles entre les doigts. On s'en sert à l'île de ^ladagascar pour donner un beau poli aux ouvrages en bois.

Il y a encore le Mûrier de l'île Maurice, Morus mau- ritia , Jacq. ; le Mûrier a larges feuilles , Morus latifolia , Lam.; le Mûrier a feuilles laciniées, Moi-us laciniala, Lam. Le premier est un arbre grand et fort qui croît à l'Ile- de-France ; les deux autres ont été peu observés.

Le Morus laciniata de Miller et celui qu'on cultive au Jar- din des Plantes de Paris sou« le même nam, sont vrai- semblablement des variétés du mûrier blanc ou noir.

L'arbre connu sous le nom de mûrier à papier n'appartient pointa ce genre; il en constitue un particulier qu'on trouvera décrit au mot Broussonetie.

Les mûriers cultivés varient beaucoup, non-seulement par les feuilles qui offrent des formes et des découpures diffé- rentes, mais aussi par les fruits plus ou moins gros, plus oit moins ovales ou ronds, et diversement colorés. De toutes les espèces que je viens de décrire , les deux premières sont celles qu'on cultive le plus en France et dans le reste de l'Europe, l'une pour sa feuille , l'autre pour son fruit. Ces deux mûriers , assez mal nommés mûrier blanc et mûrier noir ^ ont produit par la culture un grand nombre de variétés. Mais rien de plus confus que la nomenclature de ces variétés ; chaque pays a la sienne ; et parmi le gran^iombre de cultivateurs , même éclairés, qui s'occupent d^ipls arbres , à peine en est-il un qui puisse vous dire quel est le véritable type de ceux qui font l'objet de ses soins. Selon Rozler, le mûrier sawageon est le

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type de tous les mûriers cultivés en France. Mais qu'est-ce que le mûrier sauvageon ? d'où vient-il ? quel est son pays natai ?

En rénéral , dans la culture des végétaux utiles et agréa- bles, on cherche moins l'avancement de la science qu'à satisfaire son intérêt ou son gùût , et quelquefois son amour -propre. La plupart des grands jardiniers et des amateurs recueillent beaucoup d'espèces d'un même gen- re, élèvent grand nombre de variétés et sous-variétés, et enrichissent kur collection d'une foule de plantes plus ou moins rares , sans s'inquiéter de les bien classer et coordon- ner , et sans chercher' suitout à connoître la souche primi- tive à laquelle chacune d'elles doit être rapportée ; ce qu'il seroit essentiel néanmoins de savoir pour éviter toute confu- sion dans les livres, et pour prévenir les fausses applications de caractères et de propriétés d'une plante à une autre.

Rozier établit deux races de mûriers blancs , l'une qu'il appelle mûriers sauvageons , dont les feuilles sont découpées, minces et de couleur claire : l'autre qu'il nomme mûriers- roses, parce qu'ils ont des feuilles entières, épaisses, d'un vert foncé , et les fruits rouge-pâle. Les fruits de ces deux sor- tes de mûrier varient, dit-il, également par leurs couleurs, tant dans le sauougeou que dans le mûrier-rose. Ils sont tan- tôt blancs, tantôt d'une teinte jaunâtre, et d'autres fois il approchent de la couleur noire. En lisant dans Rozier même les principes sur lesquels il appuie cette distinction et les développemens qu'il leur donne , on trouvera que ce qu'il dit à ce sujet n'est ni clair, ni suffisamment prouvé.

Le Mûrier d'Italie, Morus italica, Lam. Le rédacteur de l'article Mûrier dans Lam arck ( iVoMf. EncycL), a détaché celui - ci du grand nombre des variétés du mûrier blanc pour former une espèce , parce qu'il se montre constam- ment le même , et parce que ses fruits sont de couleur rose et très-petits , sa .hauteur médiocre , ses rameaux courts ej diffus, ses feuilles presque toujours divisées en deux ou trois lobes, avec la surface supérieure d'un vert plus clair que <lans le mûrier noir , et l'inférieure plus obscure et garnie de quelques poils. Cet arbre se cultive en Italie. Il ne faut pas le confondre avec la variété du mûrier blanc , nommée mûrier rose, dont nous parlerons bientôt.

Le Mûrier de Constantinople, Motus constantinopolitanusy Jard. des Plantes. Espèce monoïque reconnoissable à sou tronc rabougri, élevé au plus de dix à douze pieds; à ses grosses branches ; à ses rameaux très-courts et gros ; à ses iéuilles en cœur, toujours entières, crénelées, luisantes aux

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deux surfaces, et formant, quoique éparses, (\e grosses touf- fes par leur rapprochement; à ses chatons mâles réunis cinq ou six au même point , et garnis de fleurs péJonculées; en- fin à ses fleurs femelles, solitaires aux aisselles des feuilles, presque sessiles, et offrant un pistil très -blanc. Cet arbre , se cultive au Jardin des Plantes de Paris. Il est vraisembla- blement originaire des environs de Constantinople.

Constant duCastelet, dans un traité sur les mûriers b/ancs, publié en 1760 , distingue ainsi les variétés cultivées en Pro- vence,

« Mûriers sauvages. Il y en a quatre espèces : la première est celle qu'on appelle feui/le- rose. Ce mûrier porte un petit fruitblanc , insipide; sa feuille est rondelette, semblable à celle du rosier , mais plus grande. La seconde est la feuille dorée; elle est luisante et s'allonge vers son milieu; le fruit en est de couleur purpurine et petit. La troisième , le reine-bâ- tarde ; fruit noir, feuille deux fois plus grande que celle de la feuille-rose, dentée à sa circonférence ; la dent de l'ex- trémité supérieure s'allonge plus que les autres. La quatrième est appelée /^me//e; l'arbre est épineux; il pousse son fruit avant sa feuille qui a la forme d'un trèlle.

« Mûriers greffés. La première est la reine à feuilles lui- santes., et plus grande qu'aucune des sauvages ; son fruit est de couleur cendrée. La seconde , la grosse reine , à feuilles d'un vert foncé et à fruit noir. La troisième , la feuille d Es- pagne; cette espèce est extrêmement mate et grossière, a les feuilles fort grandes , le fruit blanc et très-allongé. La qua- trième , \a feuille de flocs., est d'un vert foncé ; à peu près semblable à la feuille d'Espagne , mais moins allongée ; elle est à bouquet sur ses tiges. Son fruit est très-multiplié , et ne vient jamais au point de maturité. »

« Ces définitions sont aussi exactes qu'elles peuvent l'être , o dit Rozier; mais ces espèces jardinières sont-elles inva- »f riables ? C'est autre chose. J'ai vu ce que l'auteur appelle mûrier sauvage à feuilles roses , donner des fruits noirs et « assez gros : et la même singularité a lieu sur celui qu'il « nomme feuille d'Espagne. Les mûriers du Languedoc ap- « prochent beaucoup des espèces des environs d'Aix. J'ai « comparé les uns aux autres, et cette comparaison m'a <c fait reconnoître beaucoup de variétés secondaires de ces " espèces qui sont déjà elles-mêmes des variétés. »

A ces observations de Rozier on peut ajouter: i." que la di- vision de Constant du Castelet est imparfaite , en ce qu'elle semble ne pas comprendre les mûriers cultivés venus de graine et non greffés ; 2.° que ses définitions sont trop courtes, n'é-

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tant surtout ni précédées, accompagnées de caractères indi- catifs de l'espèce dont il s'agit ; 3." qu'enfin les noms qu'il donne aux variétés qu'il décrit, quoique reçus en Provence, n'en sont pas moins mauvais , parce qu'on ne les a point adop- tés ailleurs. Chaque auteur ou cultivateur s'entend fort bien sans doute, lorsqu'en parlant d'une plante il la désigne par le nom trivial qu'elle porte dans le pays il se trouve : mais cela ne suffit pas; il faut qu'il soit aussi entendu par tous ceux qui le lisent ou qui cultivent la même plante que lui. Autre- ment on est exposé à confondre tous les objets. C'est à préve- nir cette confusion que servent les noms scientifiques , quand toutefois la jalousie des botanistes ne s'en mêle pas. Car il est quelquefois arrivé que l'un d'eux a changé le nom d'une es- pèce ou d'un genre de plantes, uniquement par caprice, ou par humeur contre celui de ses rivaux dans la science , qui avoit nommé cette plante avant lui.

Il me semble que dans la science de la botanique , comme dans toutes les autres , au lieu de chercher à connoître super- ficiellement un très-grand nombre d'objets , il vaudroit mieux s'attacher à bien connoître ceux qui peuvent frapper chaque jour nos sens et notre attention. Combien , par exemple , en cultivant chaque végétal , ne seroil-il pas agréable et avanta- geux d'en savoir parfaitement Thisloire naturelle , et de pou- voir , en le décrivant , remonter de génération en génération jusqu'à la souche originaire dont il descend! Celte partie de la science ne seroit ni la plus frivole ni la moins curieuse. Les Anglais et les Arabes ont et conservent la généalogie de leurs chevaux de belle race. Pourquoi les botanistes de tous les pays n'auroient-ils pas la généalogie des plantes (j'entends les plus intéressantes ) .'' Ce seroit , à mon avis , le meilleur moyen d'assurer la connoissance des véritables espèces , et de s'entendre un peu mieux sur les variétés.

Voici les noms donnés par Lindet aux mûriers de Syrie , avec les différences qui les caractéris^ent.

« L'onneconnoît, dit-il, dans la Syrie que quatre variétés de mûriers, qui sont le calmouny ^ le hamiin ^\& merselly ,\ç: mllani ^ le sauvagenon compris.

« Ces quatre variétés sont distinguées chacune dan^ son espèce. Chez nous on les distingue en blancs et eii noirs. Ici , cette distinction est plus commune ou plus naturelle ; elle est de mâle à femelle. Le fruit du mâle, en mûris- sant , rougit un peu ; le fruit de la femelle est toujours blanc. La feuille du mâle est plus arrondie ; celle de la fe- melle vient un peu en pointe , ou en forme de pyramide.

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« Le mhnouny, ainsi nommé dans ce pays, est la qualité la plus précoce.

" Le harutin vient immédiatement après , quelquefois en même tentps que l'autre ; mais ordinairement il rie pousse qu'après. Ces deux qualités sont les plus estimées, parce qu'elles produisent le plus de feuilles, etqu'elles conviennent mieux aux vers que toutes les autres.

<f Le merselfy est plus tardif que les deux précédens. L'ar- bre est à peu près de la même grosseur que les autres, mais il pousse beaucoup plus de branches el donne moins de feuil- les : comme celles-ci ont beaucoup de lait , il faut les laisser séchera l'ombre plus de douze heures avant que d'en nourrir les vers.

« Le suUany est celui de tous les mûriers qui parvient à une plus grande hauteur et grosseur; il ne pousse qu'après tous les autres. Sa feuille ne vaut pas grand' chose ; on ne l'em- ploie que faute d'autres. Il ne sert guère que pour le fruit , que les gens du pays mangent volontiers , quoiqu'il soit très- fade : ils prétendent qu'il est rafraîchissant.

" fja feuille du mûrier sammgc convient assez aux vers dans le temps seulement de la bâfre; mais on a l'attention de ne jamais leur en donner pendant le jeûne : on a aussi cette attention pour les jeunes arbres encore sauvages et destinés à être entés, de ne pas en ôler la feuille, autant que l'on peut, afin de leur laisser prendre plus de force. *>

En parlant tout à l'heure de la culture en général du mû-, rier, je citerai la partie du mémoire de Lindet qui traite de cell^e des mûriers de Syrie.

<t En réunissant, dit Duvâare (Mémoires divers d' Agnculture')^ tout ce que les auteurs anciens et modernes ont transmis sur l'origine du mûrier , il paroît incontestable que les Chinois sont le premier peuple qui ait-cultivé ce beau végétal , et élevé les vers-à-soie. De chez eux , la culture de cet arbre a passé en Perse , et de dans les îles de l'Archipel , sous l'empereur Juslinien. Des moines portèrent dans la Grèce les semences du mûrier , et successivement les œufs de l'insecte qu'il nour- rit. Environ vers Tan i4-4^ ^ on commença à cultiver cet ar- bre en Sicile et en Italie ; et sous Charles VI I , quelques pieds seulement en furent apportés en France. Plusieurs seigneurs qui avolenl suivi CharlesVlll dans lesguerres d'Italie, en i494» transportèrent d€ Sicile plusieurs pieds en Provence , et sur- tout dam le voisinage de IVlontelimart. Charles Vlll créa des pépinières, il en fit distribuer les arbres dans les provinces, et accorda une faveur et une protection distinguée aux manu- factures de soieries de Lyon et de Tours. Henri IV s'occupa

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également à multiplier les mûriers ; il établit aussi des pépi-

nières.

Sous Louis XÏII , continue Duvaure , cette partie d'agri- culture fut négligée : sous Louis XIV, Colbert qui pensoit que la prospérité d'un état étoit dans le commerce , comprit tout l'avantage qu'onpouvoitretirer du mûrier ; il rétablit les pépi- nières , il distribua les pieds qu'on en retiroit , ou les fit planter aux frais de l'étatsur les berges des chemins. Ce procédé, aussi généreux que violent, ne plut pas aux habilans de la campagne , parce qu'il alloitcontre les lois de la propriété; desorteque ces plantationspérissoientannùellement. On fut doncforcéd' avoir recours à un moyen plus efficace , et surtout moins arbitraire ; on promit et on paya exactement 24 sous par pied 4' arbre qui subsisteroit trois ans après la plantation ; et ce moyen réussit. Ce fut ainsi que le Languedoc , la Provence, le Bauphiné, le VivaraJs , le Lyonnais , la Gascogne , la Sainlonge et la Touraine , furent plantés de mûriers. Enfin , Colbert , après avoir porté la culture du mûrier au plus haut degré , tourna ses soins du côté de la fabrication des soies ; il fit venir le sieur Benais, de Bologne , pour établir un tirage de soie et des moulins. Benais remplit parfaitement les vues du ministre; les soies de son tirage furent bientôt au pair avec celles de sa patrie. Le roi lui accorda des gratifications con- sidérables avec un titre de noblesse ; il accorda également , par un arrêt du conseil , du 3o septembre 1670 , des privilè- ges considérables aux entrepreneurs de la fabrique des soies et organsins , façon de Bologne.

Louis XV ne perdil^oint de vue l'objet important qui avoit occupé son prédécesseur ; il reudit plusieurs arrêts pour fa- voriser l'établissement des maniïfactures de soie. Des pépi- nières furent également établies dans plusieurs provinces, particulièrement en l'j^S, sous M. le Nain, Intendant du Poitou ; en lySG , en Gascogne , sous M. de Ligny , inten- dant. Ceux de Tours, de Moutauban et de Grenoble imitè- rent les premiers : les arbres de ces pépinières furent gratui- tement distribués. Telle a été en général la progression de la culture du mûrier.

Les feuilles de mûrier servent, comme on sait, à nourrir les vers-à-soie; il est donc bien intéressant de connoître la cul- ture de cet arbre. Le point essentiel dans cette culture est de faire produire au mûrier beaucoup de feuilles et de bonnes feuilles. Par bonnes feuilles on n'entend pas les plus larges ni les plus succulentes , mais celles dont les sucs nourriciers ont les qualités convenables à l'éducation du ver et à la beauté ue la soie. Ces sucs doivent être en général et sont en effet plus raffinés et plus abondans dans les climats cha\^t> que dans

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les pays tempérés ou froids. Ainsi, qu'on puisse en Europe élever le mûrier depuis les bords de la Méditerranée jusqu'en Prusse , la feuille des mûriers du. Nord n'égalera jamais celle des mûriers du Midi , et par conséquent la soie qu'on en reti- rera sera toujours inférieure en qualité relativena-nt à l'autre.

Les mûriers doivent être plantés de préférence dans des endroits élevés et bien abrités, à l'exposition du midi. ou du soleil levant. Si on n'a pour but que la vigueur de la végéta- tion de l'arbre , la grande abondance de belles et larges feuil- les , on peut choisir les meilleurs fonds. Mais ces feuilles ont peu de sucs et sont peu nourrissantes ; elles le sont beaucoup moins encore , lorsque Tarbre qui les donne a crû sur un sol aquatique , marécageux ou humide. Par cette raison les sols crayeux et argileux qui retiennent l'eau ne conviennent point aux mûriers. Les terrains âpres, ferrugineux et tous ceux qui s'opposent à l'extension des racines , ne leur sont pas propres non plus ; cependant la feuille en seroit très-bonne , mais en trop petite quantité. Si le sol est graveleux, sablonneux et mêlé d'une certaine quantité de bonne terre , le mûrier y prospérera, et sa feuille sera excellente. Dans un pareil ter- rain, les racines s'étendront au. loin, au grand avantage de l'arbre. Il seroit pourtant plus convenable que le sol eût beau- coup de fond, et que les racines s'étendissent moins en sur- face , et plus en profondeur, parce qu'elles ne dévoreroient pas les récoltes voisines qu'on doit compter pour quelque chose, puisque celle du mûrier ne doit être qu'une récolte accessoire , à moins que la nature du terrain se refuse à toute autre production , ce qui est rare. " ,

Quand on veut faire un bon semis de mûriers, on doit choi- sir avec attention les graines. La mauvaise graine donne de mauvaise pourrette (i) , et une pourrette défectueuse produit rarement de beaux arbres. On doit rejeter la eraine des mû- riers trop jeunes ou trop vieux , des arbres cariés , des arbres plantés en terrains gras ou humides, et rigoureusement celle des arbres à feuilles découpées, petites ou chiffonnées. Il ne faut point effeuiller le mûrier Sur lequel on se proposera de récolter la graine. L'époque on doit la cueillir est indiquée par la nature ; c'est celle le fruit tombe de lui-même. Les caractères d'une bonne graine sont d'être grosse , pesante , blonde , de répandre beaucoup d'huile quand on l'écrase, et de pétiller lorsqu'on la jette sur une pelle rouge.

Le moment des semailles dépend de la saison et du climat. Dans les parties de laFrance l'on cultive les oliviers, on peut et on doit semer les graines de mûrier aussitôt qitt la baie est

(,t) Oa appelle pourrette les jeunes plantes du mûrier.

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iîîefi mAre et desséchée ; on gagne ainsi une anne'e , parce que la pourrette sera en état d'être mise en pépinière après l'hiver. Dans les provinces du centre et du Nord , il convient de semer dès qu'on ne craint plus les fortes gelées. En géné- ral , la fin de février, les mois de mars et d'avril, sont à peu près les époques des semis , suivant les quatre climats de la France, qu'on peut distinguer par climats à oliviers, climats à grenadiers , à vignes et sans vignes.

Chacun sème a sa manière ; la meilleure de toutes est de tracer, avec un bâton, de petites rigoles de deux pouces de profondeur , de les aligner au cordeau , et de les recouvrir après le semis. La dislance entre chaque raie doit être de six pouces au moins, et il faut semer épais.

Lorsque les jeunes plants ont acquis une certaine hauteur, il y a deux sortes de sarclages essentiels , celui des plants surnuméraires , et celui des mauvaises herbes. Le premier demande à être fait à plusieurs reprises ; on commence par les endroits les plus fourrés , on éclaircit successivement jusqu'à ce que le meilleur pied reste , et soit éloigné d'un pouce de son voisin. Il convient d'arroser après chaque sar- clage , afin de serrer la terre contre les racines.

Quand l'époque de la transplantation- arrive , on fait la levée des jeunes plants , pour les placer à demeure ou en pépinière. Si le cultivateur veut former une pépinière, il en défoncera le sol à deux pieds de profondeur, ouvrira de pe- tites fosses de âouze à quinze pouces sur toute la longueur , et y plantera la pourrette avec soin , traçant les rangs au cordeau, et laissant quatre ou cinq pieds de distancé en tous sens entre chaque plant. Dans les pays méridionaux le printemps est sec , il est prudent de planter la pépinière à la fin de novembre, si toutefois les feuilles sont déjà tom- bées. Les arbres plantés alors , supportent très -bien l'hiver dans ces climats , et commencent à végéter quinze jours ou même un mois plus tôt que des arbres semblables , c'est-à-dire, en février ou en mars. Au centre de la France, il seroit possible de suivre la même méthode , mais en pre- nant des précautions contre les gelées. Au Nord, on ne peut prescrire d'époque fixe pour cette transplantation ; elle doit se faire lorsque les grands froids sont passés. Quand, dans les hivers rigoureux, la gelée détruit la tige des jeunes mûriers , surtout le premier hiver, on n'a qu'à les couper rez terre, et ils repoussent des tiges aussi belles et aussi vigoureuses que les premières.

Le jeune plant mis en pépinière , ne demande plus que quelques labours faits de temps à autre. Si , après la pre- mière année de pépinière , il se trouve des tiges qui ne soient

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pas assez fortes pour recevoir la greffe , on doit les recepor près de terre. Cette opération augmente le nombre et la force des racines ; et il est rare qu'à la seconde année on n'ait pas des tiges d une belle venue. Ce retranrhement doit avoir lieu en février ou mars, lorsqu'il ne gèle plus.

Le mûrier est susceptible de toutes les espèces de greffe. Colle à écusson est aujourd'hui la seule employée dans les pépinières. On greffe ainsi au bas de la lige de l'année , à six pouces au-dessus du sol , pourvu que dans cet endroit la lige ait au moins six lignes de diamètre ; sans quoi elle est trop foible pour recevoir l'écusson. On ne doit greffer que lorsque la sève commence à être en mouvement. On peut égalemenl faire cette opération à la seconde sève.

Si quelque circonstance a empêché de greffer dans la pé- pinière , on laisse l'arbre s'y fortifier, et, quand il a acquis une grosseur raisonnable , on le transplante à demeure ; on arrêle son tronc à cinq ou six pieds de hauteur ; on lui laisse pousser, pendant Tannée suivante, un certain nombre de branches; diuis le cours de l'été , on supprime les surnumé- raires ; les trois , quatre ou cinq que l'on conserve comme les mieux disposées et les nùeux venantes , sont greffées en flûte.

Dans le Midi de la France, on transplante le mûrier en tout temps , et principalement au renouvellement dès deux sèves. Je ne crois pas que cette transplantation fûl avanta- geuse dans lesprovinr.es du Nord. En. général , c'est quinze jours ou trois semaines après la chute entière des feuilles qu'elle doit avoir lieu. On gagne beaucoup à transplanter de bonne heure. Le mûrier, dit-on, est le plus prudent des ar- îjres , parce qu'il pousse fort tard ; c'est que sa végétation ne peut avoir lieu que lorsque la chaleur de l'atmosphère est à un certain point. Dans la Provence et le Bas-Languedoc, ses feuilles paroissent un mois plus lot que dans le Nord , et rei pendant elles tombent presque en même temps dans Tun et l'autre climat. Ainsi on peut choisir partout la même époque , e'esl-à-dire , le commencement de l'hiver pour le trans- planter,

La profondeur et l'ouverture des fosses doivent être pro- portionnées à l'étendue et au volume des racines. La dislance de 1 une à l'autre fosse ne sauroit être fixée ; elle dépend de la qualité du sol , du climat et de la destination de Tarbre. Le mûrier ( à plein vent) est destiné à border les champs et les grands chemins , ou à couvrir un champ. Le sol est bon , mé- diocre ou mauvais , sec ou humide. Six toises sont à peine suffisantes dans un bon fond, les arbres sont placés en li- sières ; quatre dans le médiocre et trois dans le mauvais.

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Le mt!b'ier est un des arbres qui souffrent le moins de la re- plantation , quoique son tronc ait déjà acquis une certaine grosseur. Rozier a fait replanter des mûriers âgés de plus de vingt-cinq ans, qui ont très-bien repris.

Durant la première année , cet arbre n'exige aucun travail particulier, sinon quelques labours donnés tous les trois mois, et plus souvent si l'on peut. A l'entrée de Thivcr , ou après qu il sera passé , on le taillera ; les branches gourmandes et surnuméraires seront supprimées ; on n'en laissera que trois ou quatre au plus, et on recouvrira les plaies. Le point essen- tiel, d'où dépendent parla suite la beauté et laprospérité delà tête du mûrier , est de conserver dans ses branches un équi- libre tel , que la sève ne se porte pas plus à l'une qu'à l'auire. Si une branche est trop forte et sa voisine Iropfoible, la pre- mière demande une taille longue , et la seconde une taille courte , à un , deux ou trois yeux, suivant sa vigueur. En rava- lant celles qui sont trop vigoureuses, on les oblige à pousser des bourgeons, qui se mettront ensuite en équilibre avec les autres branches ; et jusqu'à ce moment, les branches foibles acquerront une bonne consistance. La taille du mûrier doit se faire depuis la chute des feuilles jusqu'à fin de Ihiver.

La récolte des feuilles force la sève à refluer dans le corps et les branches de l'arbre ; s'il ne se hâloit d'en pousser de nouvelles , ses canaux seroient bientôt engorgés , la sève sV putréfieroit, et la mort seroit la suite de cette stagnation con- tre nature. N'est-il pas évident qu'en taillant à cette époque on diminue le nombre des couloirs , dont la sève a alors le plus grand besoin .'' Le même raisonnement peut être appli- qué à la taille faite avant le renouvellement de la seconde sève. Celte taille a des suites aussi fâcheuses que la première. Toutes deux produisent ces chancres , ces gouttières et la carie qu'on remarque sur beaucoup de mûriers. Si l'on suit , au contraire , l'indication de la nature , et qu'on taille le mû- rier huit ou quinze jours après la chute ^s feuilles, lorsque toute végétation a cessé , quand tous les Foutons qui doivent former les bourgeons au printemps suivantont acquis leur per- fection , alors l'arbre n'est exposé à aucun accident , et son tronc reste sain , sans cavité ni gouttltre.

Les arbres qui ne sont point contrariés par la main de l'homme ^poussent leurs branches suivant des angles régu- liers ; et ces angles varient selon les différens âges de l'indi- vidu , depuis dix degrés jusqu'à quatre-vingts. Lorsque l'arbre est dans toute sa force, ses branches font communément, avec la tige, un angle de quarante à quarante - cinq degrés- On doit donc tailler le mûrier de manière à conserver ou à

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faire prendre à ses branches cette direction , qui est reconnue

la plus avantageuse , et qui perpétue et ménage sa force.

Si on laisse subsister la branche verticale au sommet de la tige, la sève y afflue ; et cette branche enrichie d une sève surabondante, appauvrit et desséche les inlérieures. Si la taille est parallèle , suivant la coutume d'une grande partie da Bas- Languedoc , on a, pendant quelques années, beaucoup de jeune bois , et par conséquent des feuilles larges et bien nourries; mais Tarbre s'épuise , et on est obligé de revenir souvent à de fortes tailles.

Je ne vois aucun avantage dans la taille parallèle ou hori- zontale , pas même pour la facilité de la récolle , puisqu il faut que Téchellede celui qui cueille la feuille, soit promenée sur toute la longueur des branches, qui sont très-allongées et parallèlement étendues. D'ailleurs cette taille amène plus promptement l'arbre vers sa décrépitude , nuit au tronc , et occasione une perte considérable au sol recouvert par les branches, qui forment des espèces de parasols. Au contraire , l'arbre dont la taille a été dirigée vers l'angle de quarante- cinq degrés, étant maintenu dans sa position naturelle, n'in- tercepte point l'air et le soleil aux grains semés dessous; il ne perd pas chaque année autant de bois , et il se garnit d'un plus grand nombre de branches du premier et du second or- dre , qui sont autant d'échelons ou de points d'appui , à l'aide desquels, une fois monté sur l'arbre , on peut en cueillir très- facilement les feuilles jusqu'au sommet. Enfin il fournit une grande quantité de feuilles , ainsi que feroit le mûrier qui au- roit été livré à lui-même depuis le moment de sa plantation ; et ces feuilles recevant toutes à peu près les regards du soleil , leur suc se trouve plus également et mieux élaboré. Les habi- tans du royaume de Grenade ne taillent jamais leurs mûriers , et leur soie est la plus fine de l'Espagne; ce qui prouve que dans la taille de ces arbres il faut se rapprocher le plus qu'il est possible delà nature.

ïiu Mûrier naîn.,*- La culture du mûrier nain ^ préférée à celle du mûrier àhauie tige, a été soutenue et contredite par des auteurs respectables et des cultivateurs instruits. Parmi les uns et les autres, onpeutciterM. Sauvages qui l'improuve , et M. Payan qui l'adopte. Ce dernier, dans une lettre adres- sée à M. Faujas de Saint-Fond , insérée dans son Histoire nature/le du Dauphiné , développe les principes qui l'ont guidé dans cette culture, qu'il a suivie pendant plus de trente ans, et en présente les avantages qu'on peut réduire aux suivans : i." Les mûriers nains réussissent ceux à haute tige ne végè- tent qu'avec peine. 2." Ils donnent des feuilles plus préco- ces, ressource précieuse au moment le ver-à soie rient

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d'éclore , surtout dans les pays chauds , l'éducation de ces vers ne réussit qu'autant qu'elle est avancée. 3.° Des femmes , des enfans en ramassent la feuille sans peine , sans risque , et plus promptement que les hommes les plus adroits ne le fe- roient sur des grands arbres.4-° Leur feuijle est aussi bonne que celle des autres mûriers ; mais il faut observer que les feuilles des plantations nouvelles doivent êlre données dans les pre- miers temps de Téducalion; qu'il faut réserver celles des vieux pieds pour l'époque de la/r<;c«.(r.lemolVER-A-soiE).5.''Dans la culture des mitriers nains, tout le terrain est mis à profit. 6.° Le propriétaire est plus tôt remboursé de ses avances.

M. de Sauvages , auteur d'un excellent traité sur l'éducation des vers-à-soie et sur le miirier ^ n'est pas du même avis que M. Payan sur le produit du mûrier nain , comparé à celui qu« donne le milrier à haute tige. Voici comment il s'explique.

« Il n'est pas douteux que dans les preuiières années de la plantation , le champ de miîriers nains ne rende beaucoup plus de feuilles que celui des mûriers de tige ; mais celui-ci en re- vanche en donnera beaucoup plus que l'autre, lorsque les mûriers des deux champs auront pris leur entier accroisse- ment.» La raison de celle dernière assertion est évidente. Les mûriers nains doivent toujours laisser de grands vides entre eux ; si leurs branches qui s étendent de côté se touchoient, le pende hauteur qu'elles ont au-dessus de terre ne permettroit pas aux ouvriers d'y aborder pour les cultures. D'ailleurs leur tête d'une taille déterminée, n'est jamais plus haute que de cinq à six pieds , et ne peut donner de feuilles qu'à propor- tion de celte masse ; au lieu que celle des mûriers de tige s'élève le plus souvent au dessus de deux toises ; et les branches de deux mûriers voisins venant à se toucher dans quelques an- nées , remplissent les grands vides qu'elles laissoient d'abord entre elles , sans gêner cependanlles ouvriers dans les labours qu'ils font par-dessous. «

Des Haies de mûriers. Les haies de mûriers donnent une clô- ture impénétrable , et procurent une feuille précoce. Pour les former, on ouvre sur toute la longueur proposée, une tranchée de trois pieds et demi de largeur sur deux pieds et demi de profondeur, et avec les précautions indiquées ci- dessus, pour la plantation, on dispose les pourrettes sur l'un des bords de la tranchée , en leur conservant quatre pieds d'intervalle ; l'autre bord est garni pareillement de sujets , mais disposés de manière que les pourrettes de l'un des bords se trouvent vis-à vis le milieu de l'intervalle qui sépare celles An bord opposé. On les recèpe à deux pouces au-dessus du terrain , et on n'y touche plus jusqu'à la fin de la seconde an- née. A cette époque , on ravale les plants à quatre pouces de

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hauteur ; les branches latérales sont alors conservées ; on les incline vers Thorizon ; de ces branches inclinées s'élancent de nouveaux bourgeons qu'on incline encore , en les forçant de former les uns avec les autres des losanges très-allon- gées par les deux bouts, et même en les greffant par appro- che au point de leur réunion. On ne doit permettre à aucune branche de croître en ligne droite , parce qu'elle absorberoit la sé'^e des branches inférieures.

Les soins annuels que cette haie exige, sont d'être taillée au ciseau, ou au croissant, ou à la serpette , après la chuie des feuilles et avant la seconde sève. Quand sa hauteur aura été conduite de cette manière Jusqu'à cinq ou six pieds d'élé- vation , on pourra l'y assujettir , et arrêter en même temps son épaisseur.

Après la haie plantée en sureau , celle de mûrier est la plus tAt venue. Elle ne laisse pas que de donner un assez bon nombre de fagols pour le four. Ceux qui veulent en cueillir la feuille pour la première, et même pour la seconde éduca- tion du ver-à-soie , peuvent conserver les pousses de la se- conde sève , et les tailler aussitôt après que la feuille a été recueillie.

Dans le Tonquin, les mûriers sont plantés en palissades, h hauteur d'homme , irès-peu éloignées les unes des autres, et par conséquent privées de l'influence du soleil. Si on les disposoit de même dans les parties moyennes de la France , les feuilles seroient trop aqueuses , et par conséquent influe- roient d'une manière nuisible sur la santé des vers et la qua- lité de la soie.

Des taillis de mûriers. On peut considérer le mûrier en taillis sans sa feuille, quoiqu'elle soit presque aussi abondante et aussi aisée à cueillir que celle du mHr/>//îo?rt; envisagés ainsi, les taillis de mûrier présentent plusieurs avantages. Ils sont propres à garnir les terrains montueiîx et rocailleux , dont on ne sauroit tirer presque aucun parti ; ils peuvent couvrir ceux que leur éloignement ou leur pente trop rapide ne pennet pas de cnltiver en grain ; par le moyen de ces taillis, on peut mettre en valeur d'immenses bruyères , dont l'utilité se borne à un simple parcours de troupeaux ; ils fournissent du bois de chauffage et des échalas ; enfin leurs vastes souches et leurs racines superficielles soutiennent et arrêtent les terres contre les efforts des pluies d'orage.

Tous les arbres de pépinières , qui ne pourront servir aux plantations de mûriers à plein vent ou nains , seront utiles dans les taillis. On doit les planter dans des fosses espacées en tout sens de six ou neuf pieds.

On laissera chaque touffe s'étendre à droite et à gauche, de

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manière pourtant k ne pas gêner la culture ; il en résultera un plus grand produit de rameaux et de feuilles. Les jets qui s'élèveront en pyramides seront taillés tous les deux ans. M. de la Gardette propose de planter les mûriers taillis à intervalle de six à sept pieds , sur la même file , et en sépa- rant les files de trois toises.

« L'entrée de ces taillis , dit Rozier , doit être interdite aux troupeaux , excepté pendant l'hiver ; encore faut-il que la feuille tombée ait eu le temps de se dessécher , parce qu'elle sert d'engrais. Ce n'est donc que depuis le mois de janvier jusqu'au commencement de mars ou d'avril , suivant le climat, que le parcours sera permis. Après les premières années , les brebis y trouveront une herbe fine et abondante. Il n'existe point de taillis d'un produit égal, et dont l'accroissement soit aussi prompt

Je ne parlerai point de la propagation des mûriers par boutures ou marcottes; ces sortes de productions ne donnent jamais que des arbres dégénérés. D'ailleurs, il est si aisé de se procurer des sujets par la voie du semis, et il est si avanta- geux, que les autres moyens de multiplication peuvent être négligés.

il est difficile d'assigner l'âge fixe auquel un jeune mûrier peut être effeuillé, La première cueillette dépend de la force du sujet; elle a ordinairement lieu la troisième ou la qua- trième année après la plantation. Comme ces jeunes arbres seront les premiers garnis, c'est par eux que doit coniiiiencer la récolte , afin qu'ils aient le temps de pousser des jets longs , bien nourris et devenus ligneux avant la chute des feuilles. La feuille des jeunes mûriers est en générai trop aqueuse et peu nourrissante; elle ressemble en ce point à celle des mûriers plantés dans des fonds bas et humides.

De la manière de la cueillir dépend la prospérité de l'arbre. On doit prendre la petite branche d'une main , et glisser l'au- tre de bas en haut, SI, au contraire, on prend de haut en bas, l'effort de la main fait sauter les yeux ou boutons , et leur rupture entraînant souvent une partie de Técorce , forme des plaies sur l'arbre. Si, pour avoir plus tôt fait, on arrache le petit bouquet de feuilles qui se présente , on détruit les bour- geons à venir ; la sève se porte alors entièrement vers ceux du sommet ; il n'en pousse plus dans la partie inférieure des branches : ce qui oblige à les ravaler souvent , d'où résulte l'épuisement de l'arbre. On doit donc cueillir feuille à feuille , et laisser les deux plus élevées du bouquet, afin qu'elles fa- cilitent le prolongement de Toeil en bourgeon.

A mesure qu'on effeuille un arbre ; on doit séparer les mûres , et ne pas les mêler avec les feuilles dans les sacs. C'est

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augmenter le fardeau en pure perle ; d'ailleurs l'odeur ou l'aîr qui s'exhale des fruils , se communlquanl a la feuille , 1 allere et la rend nuisible au ver-à-sole. Aussitôt que les charges de feuilles sont arrivées au lieu de leur destination , il taut les ôter des sacs, les étendre dans un lieu bien aéré, et achever d'en séparer les fruits , qu'on jette à la volaille. Elles ne doi- vent jamais rester amoncelées , pressées ou serrées , elles s'échaufferolent alors , fermenterolent cl donneroient des maladie aux vers.

Un point essentiel dans la récolte des feuilles , est dV'n dé- pouiller complètement l'arbre , une fols qu'on a commence à cueillir. Si on en laisse sur quelques branches, la sève suivra son cours ordinaire, et ne nourrira qu imparfaitement la par- tie offeuillée. Mais c'est une erreur de croire qu il taille ej- feuliler l'arbre chaque année-, quand sa feuille est attaquée par la rouille , quand elle est jaune et languissante , c est une preuve qu'il souffre , et on augmenterolt alors son mal-elre ; au lieu de le dépouiller, il faut chercher à le rétablir par des labours , par des engrais , ou par tout autre moyen.

Aussitôt après avoir cueilli les feuilles du mûrier , on l'é- monde. Emonder n'est pas tailler, mais c'est supprimer tous les bois morts, les chicots , les ergots, le bout des branches cassées , réparer les déchirures, et tout au plus enlever quel- ques petites branches chiffonnées qui nuiroient a l accroisse- ment des bourgeons, ou qui leur feroienl prendre une nou- velle direction La taille , différente de 1 émondage , n a heu qu après la chute naturelle des feuilles, c est-a-dire, lorsque l'arbre n'est plus en sève.

Toutes choses égales d'ailleurs , la feuille du mûrier doit varier en qualité selon le sol et le climat , et donner par con- leWmdes qualités de soie différentes Les mûriers plantes dans un sol léger, substantiel et nature lement sec, ou dans un sol rocailleux; pierreux , et qui a du fond , fournissent un. feuille moins abondante en sucs , moms ^^Y'^^^'ll mais dont les principes sont mieux assimiles entre eux , et le. parties nutritives plus élaborées.

Les mûriers, au contraire, qui croissent dans un sol nche en terre végétale , et formant un excellent champ a blé , a 1^^ onl chfnvre , ont une feuille plus large , plus épaisse et «lus aqueuse Le ver y trouve une ample nourriture , mais Eu iosslTre 11 est rare, dans les années pluvieuses, de voir FTofeT belle qualité. Quelle peut donc être -l e ^ui aura été filée par des vers nourris avec la feuille de l '-^«-brc plan e dans un bas-fond, dans un terrain aquatique , ou dont la crchTinf,^ricurc st de l'argile ï elle sera à coup sur medio-

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cre , et rarement les vers seront exempts de ces maladies qui en détruisent la moitié.

II. Propriétés économiques et d'agrément des Mûriers.

La feuille du mûrier employée à la nourriture et à l'édu-* cation des vers-à-soie, fait sans doute la plus grande richesse de cet arbre. Mais il présente en même temps aux arts, à la médecine et à l'amateur des jardins, d'autres avantages. Son écorce préparée comme le lin, donne de la filasse. Cette pro-' priété éloit connue très-anciennement, el cependant les journaux l'ont annoncée il y a quelques années , comme une découverte nouvelle. Ecoutons ce qu'en dit Olivier de Serres, dans son Théâtje d agriculture. Ce fragment de son ouvrage ne peut être omis dans cet article. Afm qu'il fut entendu de toug les lecteurs , je me suis permis d'en rajeunir un peu le style.

« Le revenu du mûrier blanc , dit Olivier de Serres , ne consiste pas seulement dans la feuille pour en avoir la soie , mais aussi dans l'écorce pour en faire des cordages , des toiles grosses , moyennes , fines , déliées comme l'on voudra ; en quoi il paroît être la plante la plus riche dont nous ayons eu connoissance. J'ai déjà parlé de la feuille du mûrier.^ de son utilité , de son emploi , et de la manière d'en retirer la soie , je vais maintenant faire connoîlre les propriétés de son écorce , et, comme il a plu au roi me l'ordonner, publier les moyens de la convertir en cordages , toiles , etc.

» Voici comment j'ai acquis la connoissance de ces pro- priétés. L'écorce du mûrier blanc se séparant facilement de son bois, quand l'arbre est en sève , j'en fis faire des cordes, à l'imitation de celles d'écorce de tilleul qu'on façonne en France. Ces cordes ayant été mises à sécher au haut de ma maison , furent jetées par le vent dans un fossé. Après y avoir séjourné quelques jours, elles furent retirées de l'eau boueuse, et lavées en eau claire. Quand elles furent tordues et séchées, je vis paroître la teille ou poil , matière de la toile comme soie ou fin lin. Je fisbattre ces écorces à coups de massue pour en séparer le dessus, qui, s'en allant en poussière , laissa la matière douce et molle , laquelle broyée , sérancée, peignée, devint propre à être filée, et ensuite à être tissue et réduite en toile. Plus de trente ans auparavant j'avois employé l'é- corce des tendres rejetons de mûriers blancs , à lier des entes à écusson , au lieu de chanvre dont on se sert communément. » Voilà la première preuve de la valeur de l'écorce du mûrier blanc. (5n peut tirer un grand parti de cet essai réduit en art. Plusieurs plantes et arbres rendent aussi du poil , mais en petite <]^uantitc , ou de foible qualité. 11 n'eu est pas ainsi

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du mûrier blanc. L'abondance de son branchage, la facilité de l'écorcement , la bonté du poil qui en procède , rendent le profit très-assuré ; avec peu de dépense le père de famille retirera des avantages infinis de ce riche arbre, do'it la valeur, inconnue à nos ancêtres , a demeuré comme enterrée jusqu'à présent.

« Mais pour rendre ces avantages durables , c'est-à-dire , pour écorcer le mûiier sans l'offenser, ceci soit noté que , pour le bien de la soie, il est nécessaire d'émonder, d'élaguer, d'étêter ces arbres inissitôt après en avoir cueilli la feuille pour la nourriture des vers , selon toutefois les distinctions requises. Les branches provenant de ces coupes serviront à notre invention, parce qu'étant alors en sève (car dans tout autre cas il ne faut jamais mettre la serpe aux arbres) , elles s'écorceront facilement, et l'on tirera ainsi parti d'une chose perdue , car aussi bien faudroit-il jeter ces branches au feu ; et même dépouillées de leur écorce , elles pourront égale- ment être brûlées, si on n'aime mieux les employer aupara- vant en cloisons de jardins, vignes , etc. , à quoi ce branchage est très-propre étant sec, parce qu'il est dur et ne pourrit pas de long-temps.

« Comme les diverses qualités des branches diversifient la valeur des écorces, dont les plus fines procèdent des tendres sommités des arbres, les grossières des grosses branches déjà endurcies , les moyennes de celles qui tiennent l'enlre-deux, lorsqu'on taillera les mûriers , soit en les émondant, élaguant ou étêtant , le branchage en sera assorti, et l'on en mettra chaque sorte à part et en faisceaux , afin de pouvoir retirer et manier, sans confusion, toutes les écorces selon leurs pro- priétés particulières. On les séparera sans délai de leurs branches, profitant pour cela de la fleur de la sève qui passe vite , sans laquelle on ne peut faire celte opération ; ensuite les ayant botlelées, chacune des trois sortes à part, on les tiendra dans l'eau claire ou trouble , trois ou quatre jours , plus ou moins selon les qualités et les lieux l'on est ; c'est à l'expérience à limiter le terme. Mais en quelque endroit qu'on se trouve , on ne doit pas laisser tremper les écorces minces et tendres aussi long-temps que les grosses et fortes. Retirées de l'eau à l'approche du soir, elles seront étendues sur r herbe de la prairie, pour y demeurer toute la nuit , et pour y boire les rosées du niatin. Puis, dès que le soleil commencera à s'élever, elles seront amoncelées jusqu'à l'heure de son coucher, remises alors au serein, le lendemain retirées du soleil comme il a été dit, et ainsi de suite pendant dix à douze jours , à la manière des lins , et jusqu à ce que la matière paroisse suffisamment rouie , ce qu'on reconnoîtra

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en séchant et battant une poignée de chacune de ces trois «corces.

« Le bois des taillis de mûriers est employé utilement comme perches à soutenir des treillages , comme tuteurs pour les arbres. Celui du tronc et des grosses branches fendu et scié en planches d'un à deux pouces d'épaisseur, sert à la fabrication des vaisseaux vinaires. Ce bois est particulièrement avantageux pour les vins blancs ; il leur communique un petit goût agréable et approchant de celui qu'on appelle violette. Dans les pays de vignobles , on apprécie le bois de mûrier pour les échalas. Il dure infiniment plus que les autres bois blancs» moins que le chêne à la vérité, mais autant que celui des taillis de châtaigniers , surtout si on a la précaution de l'écorcer. Le bois du mûrier hlanci^èse, selon Varennes de Fenille , 4-^ ii^- i3 onces 3 gros par pied cube ; et celui du mûrier twir, 4-1 ^iv. i4 onces 7 gros.

« La culture des mûriers ne nuit point à celle des blés dans nos provinces méridionales, la chaleur du climat permet des plantations en plein de ces arbres à six toises de distance les uns des autres, sans que leur ombrage fasse tort aux blés: l'on en garnit les bords des chemins , l'on en fait des haies , de^ bois taillis dans les mauvais terrains les grains ni les prés artificiels ne sauroient végéter avec succès.

« Le mûrier^ dans ces contrées , devient encore un arbre très-précieux pour les décorations des jardins , puisque la charmille, le hêtre, ne sauroient y croître sans être largement arrosés , et que l'eau y est trop rare pour être consommée en objets de pur agrément. Le mûrier craint peu la sécheresse ; ses branches se prêtent volontiers à la forme qu'on veut leur donner ; et si on sait les conduire , les incliner à propos, et supprimer le canal direct de la sève , on peut en faire des berceaux agréables et des palissades semblables à celles des charmilles, et dont les feuilles seront d'un vert plus gai.

c< La culture de cet arbre est avantageuse aux troupeaux ,1. parce qu'on en ramasse avec soin la seconde feuille , qu'on ifait sécher pour nourrir les moutons en hiver, La litière des vers-à-soie sert aussi à la nourriture du bétail , surtout des ^ cochons ; ou bien elle est convertie en un excellent engrais , Irès-actif , propre à la vigne , auxbJés et aux jardins. »

Le fruit du mûrier noir est nourrissant et rafraîchissant. On en fait un sirop simple ou composé , propre à calmer la toux et à diminuer l'inflammation des amygdales dans les maux de gorge.

On retire des mûres , après qu'elles ont fermenté , ua vinaigre très-fort et très-agréable. Le procédé consiste à trai- %«c ces fruits , pour en avoir du vinaigre , comme on traite

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les raisins pour en obtenir du vin. Lorsqu'ils sont parvenus à leur degré de niaturllé , on les récolle soit sur l'arbre, soit à mesure qu'ils tombent, ce qui est plus économique. On en remplit un tonneau qu'on foule le plus possible , ainsi qu'on fait des raisins lorsqu'ils sont mis dans la cuve ; la fermenta- tion vineuse s'établit. Quand elle est arrivée à son plus haut degré , on tire la liqueur du tonneau, on la mêle avec celle que contiennent encore les mûres qu'on exprime. Cette liqueur est mise dans une barrique ; quoique douce dans son principe , elle s'aigrit au point que , dans l'espace de deux années, elle est convertie en un excellent vinaigre. C'est sur des mûriers blancs qu'il convient de récolter des mûres pour faire du vinaigre ; mais il faut avoir soin de n'en pas récolter la feuille. Vuy. les mots Soie et Bombyx, (d.)

MURIER DES HAIES. C'est une Ro^CE, Rubusfruii- rosus. (ln.)

MURIER DE RENARD. C'est la Ronce a fruits

ELEUS, Riibiis cœsiiis. (lTS.)

MURINGUl-RINGUE. Nom donné , sur la côte orien- tale d'Afrique , à un grand arbre qui constitue un genre par- ticulier ; c'est Vallasia payas de Loureiro. Ce naturaliste trouve qu'il a des rapports avec le jaracatia de Pison. (Bras., pag. i6o. V. Allasie. (ln.)

MURINS, Muriiiî. Famille de rongeurs que nous avions établie d'aprèsVicq-d'Azyr dans les tableaux du 24.^ volume de la i.f^ édition de cet ouvrage. Elle ne renfcrmoit que le genre des rats dont la queue est longue, nue et écailleuse. Illîger {Prodr. sysf. mam. et iw.') forme aussi une famille de MURINS, murina, caractérisée ainsi : pieds de devant penta- dactyles ou tétradactyles, avec un pouce court en forme de verrue ; molaires tuberculeuses , au nombre de 10, 8, 6 à la mâchoire d'en haut, et de 8 ou 6 en bas; queue allongée , poilue ou nue et annelée , ou courte. Elle renferme les genres arc/o/«^5 ( marmotte ) ; criceiiis ( hamster) ; mus ( rat ) ; spalax ( rat-taupe , Cuv. ) ; et lathyergiis (marmotte du Cap ).

(DE.SM.)

MURIO - CARBONATE de plomb de Thompson. Kof. Plomb muriaté. (ln.)

MURMÉCOPHAGE ou MYRMÉCOPHAGE. Voyez Fourmilier, (desm.)

MURMENTLE, MURMELTHIER ou MISTBEL- LERLE, Gesner rapporte ces noms à la Marmotte. V. ce

mot. (DESM.)

MUROK. Nom de la Carotte , en Hongrie, (ln.) MURRA, MORRHA, Murrina , Myrrhiina. Ce sont

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îcs diverses dénominations qu'on a données aux vases nmr- rhins. F. MuRRiHN. (ln.)

MUIaPiAÏ , Mwm/ra. Arbrisseau à feuilles ailées avec im- paire, à folioles alternes, presque ovales , légèrement cré- nelées , à fleurs disposées en pnnicules terminales, qui cons- titue seul un genre dans la décandric monogynie, et dans la famille des hespéridées.

Chaque Heur consiste en un calice très-petit, persistant et à cinq divisions pointues; en cinq pétales oblongs , ongui- culés , beaucoup plus grands que le calice , et disposés en manière de cloche ; en dix élamines inégales; en un ovaire supérieur , entouré d'un anneau urcéolé , et chargé d'un style dont le stigmate est on télé vcrrnqueuse.

Le fruit est une baie ovale-oblongue , rouge dans sa matu- rité , et qui contient une ou deux semences jointes ensemble et un peu cartilagineuses extérieurement.

Le murraî croît dans les Molnques. On le cultive pour la bonne odeur de ses fleurs. Son bois est propre aux ouvrages d'ébénisterie. Il se voit au jardin du Muséum de Paris. 11 a été reconnu que c'est la ntême plante que le Calchas pani- rxLÉ du mautissa de Linnseus , la Marsa>;e ou Bois de la. CiiiNEde Sonnerat. Il se rapproche infiniment de I'Aglaia de Loureiro. (B.)

MURREYR. Nom arabe de la Ptcride élevée, Picris ahissima , Delille. segypt. , pi. 4-1 ■> f'g- 2. (ln)

MUPxRHIN {vases-mnirhins'). Les anciens donnoient ce nom à des vases dont ils faisoienl un très-grand cas , et qu'ils liroient de diverses contrées de l'Orient , de la Carmanie ( contrée d'Asie au nord ouest du Golfe persique ) , du pays des Parthes ( aujourd'hui la Perse ) , et particulièrement de l'Egypte. Ces vases étoicnt de deux sortes : les uns se fabri- quoient avec une matière naturelle, et les autres avec une matière artificielle. Ceux-cis'apporloientd'Egyple, ilsétoîent les moins estimés.

La matière mjwv/j/ne naturelle se trouvoît en masses assez volumineuses , pour pouvoir en faire de petites tables et des vases qui continssent trois setiers. Ce n'étoit même que la très-petite partie des morceaux de minrhin qui pouvoit ser- vir à faire des vases à boire , d'où il faut croire que le mur- iliin n'étoit pas rare ni d'un grand prix , mais seulement les blocs d'un grand volume : aussi , observe M. Rozière , n'a- t-on jamais cité un seul objet d'un petit volume ayant quelque valeur.

^La matière murrhine étoh assez fragile , médiocrement dure et même susceptible d'être attaquée par l'action des dents. Ella avolt l'aspect vitreux ; son éclat, quoique brillant , n'é^

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toit pas celui des gemmes. Elle en offroit rependantla rariélc, la richesse et la vivacité des couleurs. C'est de la beauté de ces couleurs que les vasas murrhins tiroient tout leur prix. Les couleurs dominantes étoient le pourpre (ou le violet foncé ) et le Liane disposé par bandes ondulées ou contournées de diverses manières , et presque toujours séparées par une troi- sième bande qui, participant des deux autres , imitoit aux yeux la couleur de la flamme. On admiroit encore certains reflets irisés quiajoutoient à la beauté delà matière murrhine. Celle-ci n'étoit cependant pas toujours pure , et Pline lui re- proche d'être souvenlsalie à l'intérieur pardes matières étran- gères. La transparence parfaite étoit un défaut plutôt qu'une qualité dans les vases murrhins.

£n réfléchissant sur l'ensemble des caractères et des qua- lités attribuées à la matière murrhine., on est surpris de leur similitude avccles caraclères et les qualités de la chaux fluatée; £t nous ne doutons pas, avec M. Rozière, que la chaux tlualée en masse , qu'on nomme vulgairemenl spath fluor., spath vitreux , albâtre vitreux , ne soit la matière des vases murrhins naturels. M. Rozière, dans un excellent Mémoire (inséré dans le Journal des mines , vol. 36 , pag. igS) , d'où nous avons extrait ces lignes, fait voir qu'on a cru , mais à tort, que la matière murrhine étoit une sorte d'albâtre calcaire ou gyp- seux , ou une sorte de gomme , ou même une coquille , soit encore de la porcelaine ou même lasardonyx., ou lagathe, l'obsidienne , et la pierre de lard de la Chine. En comparant les caractères de ces substances avec ceux de la matière des vases murrhins , on voit aussitôt que tous ces rapprochemens sont inexacts.

La fragilité du spath fluor , son altérabilité au feu , et plu- sieurs autres circonstances qui tiennent à sa nature explique- roient pourquoi aucun vase muirhin naturel n'est parvenu jusqu'à nous. M. Gillet - Laumont , inspecteur général des mines, possède un vase de spath fluor que, à sa forme et à ses caractères de vétusté on n'a pu méconnoîsre pour un vase an- tique , c'est , sans doute , ajoute M. Rozière, un des anciens vases murrhins. Nous ajouterons aussi que ce vase fit soupçon- ner à M. Gillet-Launiont que le spath fluor pouvoit bien être la matière des vases murrhins. Mais Deborn a indiqué le pre- mier le rapprochement de ces deux substances. L'on sait qu'en Angleterre on travaille le spath fluor, et qu'on en fa- brique des vases et d'autres objets d'agrément. Cet usage pou- voit donc bien exister chez les anciens. ( V. Chaux fluatée.)

Quant à la matière des vases murrhins ârlificleh ou du faux murrhin qui se fabriquoit dans les anciennes manufactures de Thebes, ce devoit être une matière vitreuse , colorée par

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bancles et par nuances. On sait ç[ue les Egyptiens ont ex celle de tout temps dans Tart de colorer le verre et dans la fabrication des émaux, (ln.)

MURRINA. V. MuRRA. (ln.)

MURTA etlMURTERA. Noms du Myrte, en Espagne; myrtinos et murtones sont ceux des fruits de ce même arbuste.

(LN.)

MURIE etMURTRE ouMEURTE. V. Myrte, (ln.)

MURTIA de Pline. V. Myrtus. (ln.)

MURTILLE. C'est la même chose que I'Airelle. (b.)

MURTRO. C'est le Myrte, en Languedoc. Cet arbris- seau , consacré à Vénus , élolt le symbole de l'amour et da mariage, suivi le plus souvent de chagrins , et toujours de soucis. C'est ce que signifie le nom herbe des chagrins que l'on donne encore au Myrte, en Languedoc, (ln.)

MURTUS. V. Myrtus. (ln.)

MURUCUIA, Miirucuia.Genre de plantes établi par Jus- sleu. Il ne diffère des Grenadilles que par l'absence de la couronne frangée , à la place de laquelle on trouve un tube conique et tronqué. (B.)

MUR CJ GUTL Nom malabare de Vhedyoiis auricuïaria , L.

(ln.)

MURUME. Sur la côte orientale d'Afrique, on cultive, sous ce nom , le borassusfiabelUfonnis. Ce grand et magnifique palmier s'y trouve également sauvage. 11 est aussi répandu dans toute l'Asie; c'est le ainpana ou carïrti pana des Mala- bares , et le ial ou ialghala de Ceylan. Les Indiens nomment sura la liqueur vineuse qu'ils en retirent, tl j agora le sucre qu il produit. V. Rondier. (ln.)

MURUO. Nom du LEPTOCÉPHALESPALLANZANideRisSO, i Nice. (DESM.)

MUS. Nom latin des mammifères du genre des Rats. Sous celte désignation collective, Linnaeus a décrit une foule de pe- tits rongeurs qui sont divisés en un assez grand nombre de gen- res dont les caractères sont tirés de la forme et du nombre des dents molaires, du défaut ou de l'existence d'abajoues ou sacs propres à contenir les alimens , de la longueur relative , ou du manque absolu de la queue, de la quantité de poils qui couvrent cette partie lorsqu'elle existe, etc. V. les articles Rat, Mus; Loir , Myoxus ; Gerboise , Dipus; Gerbille; Campagnol , Lemmns ; Hamster, Cricetus ; Marmotte, Arctomys ; On- datra , Fiber; Rat-Taupe , Aspalax^ H ydromys , Eciiimys , Bathyergus et Pedetes.

Quelques animaux assez éloignés des rats par leur organisation , mais leur ressemblant par leur petite taille et

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leurs formes extérieures, ont aussi été appelés du nom de mus^ par certains auteurs. Ce sont notamment les Musaraignes. F. ce mot. (desm.) MUS ALPINUS. Nom latin de la Marmotte. V. ce mot.

(s.) MUSA. Nom arabe qui désigne les bananiers^ ainsi que miiZf mauz , mauze^maum el musa. Musa., latinisé par les bo- tanistes, indique le genre Ban amer. F. ce mot. (ln.) MUSANGÈRE. Nom vulgaire des mésanges, (v.) MUSARAKiNE , ^-omr , Linn. , Erxl. , Schreb. , Cuv. , Lacép, , lllig. ; Mu.saraneiis , Brisson, Genre de mammifères carnassiers de la famille des insectivores, présentant les ca- ractères suivans : Deux incisives supérieures à double crochet, au moyen dun éperon situé à leur talon ; deux incisives in- férieures allongées sortant droites de Talvéole et ne se cour- bant que vers rextrémllé; canines , surtout les supérieures, beaucoup plus petites que les incisives, au nombre de six ou huit à la mâchoire d'en haut et de quatre seulement à celle d'en bas ; huit molaires supérieures et six inférieures, toutes à couronne large, hérissée de pointes, les supérieures étant les plus grandes et ayant leur tranchant oblique ; télé très- allongée; nez prolongé et mobile ; oreilles courtes , arrondies; yeux petits, mais visibles; corps couvert de poils fins et courts ; queue plus ou moins longue , tantôt tétragonc , tan- tôt comprimée dans une partie de sa longueur , tantôt léré-^ tile , etc. ; mamelles situées sur la poitrine et le ventre au nombre de six à dix; pieds pentadaclyles courts, à doigts foibles , munis d'ongles crochus mais également foibles ; tarse postérieur appliqué sur le sol.

Ce genre renferme les plus petites espèces connues de la classe des mammifères. Elles sont assez nombreuses et plu- sieurs sont de nos climats. C'est principalement à Dauben- lon, au docteur Gall , à feu Hermann de Strasbourg el à M. Geoffroy Saint -Hilaire, qu'on en doit la distinction précise.

Plusieurs mammifères placés avec les musaraignes par Linnœus et Pallas , ont en être retirés pour former des genres nouveaux , ou rentrer dans des gem-es connus ; tels sont : i.o le sorex aqiiaiicus^ qui est le scalope , différant des musaraignes par ses mains semblables à celles de la taupe , ,et ses incisives inférieures qui sont séparées par deux autres dents plus petites; 2.°\e^ sorex cristatus, que tous ses caractères rapprochent des taupes; 3.° le sorex brasiUensis, dont la taille et les organes extérieurs de la génération du mâle , se rap- portent plutôt au didelphetricolor ou touan, qu'àlout autre; |..'> le soreji auratus , dont M. Lacépède a formé son genre

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CHRYSOCHLORE, et qui a les dents conformées comme les sca- lopes elles mains comme les taupes', à cela près qu'elles n'ont que trois doigts seulement au lieu de cinq ; 5." le :iorex mos- chatus , qui a servi de type au genre DESMaN , mygale^ parti- culièrement distingué par son nez prolongé en trompe , ses pieds palmés , sa queue comprimée et ses dents incisives semblables à celles des scalopes et des chrysocblores.

Tous ces animaux misa part, il reste encore dans le genre musaraigne onze espècesbiencaraclériséesetqutoffrent toutes les caractères que nous avons reconnus à ce genre. Acelles-ci, il faudra peut-être, lorsqu'on les connoîtra mieux, en joindre six autres sur lesquelles on n'a que desdescriplionstrop abré- gées ou trop vagues pour qu'il soit possible de se décider à cet égard , dès à présent. Ces espèces sont : i.° le sorex mini* mus, Pallas, Voyag., tom. 2, pag. 664; brune, à queue ronde et étranglée à la base ; 2." le sorex cœculiens , Laxmann , Act. petrop. lySS, p. 285; très-voisine de la musaraigne de Daubenton; 3." \e sorex exilis de Sibérie, qui a la queue ronde, très-épaisse, et qui passe pour la plus petite de toute» les musaraignes ; 4-° le sorex pusîllus , Gmelin , Voy. tom. 3, pag. 499 , qui habite le nord de la Perse et qui se rapproche surtout des desmans par la forme de ses dents; 5.» le sorex pygmœus de Laxmann , qui , ainsi que le remarque M. Geoffroy, s'éloigne des musaraignes à cause de son man- que de queue et de ses narines très-petites et extrêmement allongées; 6.» le sorex indiens , indiqué comme étant de Java y sans détails suffisans sur ses caractères pour le faire distin- guer de la musaraigne de l'Inde.

11 paroît qu'il existoit autrefois en Egypte une espèce de musaraigne que les naturalistes français n'ont point retrou- vée pendant leur séjour dans cette contrée avec l'armée- Olivierenavoitdécouvertdesmomies, préparées à la manière de celles des ibis , et placées avec celles de ces oiseaux, dans les catacombes de Sakkara , elles étoient réunies en assez grand nombre dans un même pot ; car on en retira six têtes entières, indépendamment de quelques autres qulse bri- sèrent, La taille de celte musaraigne éloit beaucoup plus considérable que celle de nos espèces d'Europe , puisque la tête avoit seulement un pouce à quinze lignes de long, sur six lignes à peu près de large à sa partie postérieure ; la queue paroissoit à peu près aussi longue que le corps ; le poil qui s'éloit conservé étoit roux et très-fin, etc. Oliv. , Voyage en Egypte , tome 3 , page 164 , plane. 33 , fie. i , A , B , C , D , E.

Les musaraignes de nos pays se nourrissent d'insectes , de chair pourrie, et, dit-on, de grains j elles creusent rare?

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ment la terre comme les taupes, mais elles se cacîient fe plus souvent dans les trous abandonnés par celles-ci ; ordinaire- menl on les renconire dans les herbes, sous la mousse, etc. Elles sont peu acllves , se laissent prendre ai_sémenl , mais pullulent beaucoup. Elles exhalent une odeur très-forte qui tient de celle du musc. Cette odeur est celle d'une humeuF sécréJée par des glandes dont M. (Geoffroy , a reconnu l'existence ", et qu'il a décrites dans le premier volume des Mémoires du Muséum. << Elles sont situées, dit-il, sur les (lancs, un peu plus près des jambes de devant que de celles de derrière ; leur forme est ovalaire. Elles se manifestent extérieurement par un bourrelet en biseau , qui se compose de deux rangées de poils courts et roîdcs. Chaque rangée en cherchant à se renverser sur l'autre y est retenue et adossée. Ces poils , constamment enduits de la viscosité fournie par l'appareil intérieur ont un aspect gras et huileux; une auréole autour, produite par le nu des par- ties, contribue à rendre encore plus distincte cette singulière disposition des poils. Toute fois cet arrangement n'est bien visible que dans les individus revêtus de leur robe d'été; alors le poil est assez court pour que le cercle nu et la saillie da milieu puissent être aperçus ; mais en hiver, ces parties sont masquées . le poil ayant à cette époque la longueur néces- saire pour les recouvrir entièrement ».

M.Geoffroy, présume que les glandes sont plus tuméfiée* dans les mâles que dans les femelles, et encore plus dans ceux- aux approches du rut , c'est-à-dire vers la fin de février au le commencement de mars.

On attribue àl'odeurdes musaraignes de natre pays, la répu- gnance que les chats manifestent pour manger leur chair; mais cette odeur n'est presque pas à comparer pour sa force avec celle desespèces des pays chauds. On assure même qu'au Cap de Bonne-Espérance, les caves sont fréquentées par ces animaux, elle empêche de conserver le vin.

Première Espèce. MuSARAlONE VULGAIRE, Sx)rex araneus » Linn. , Gmcl. Daubenton , Mem. de T Acad. des Sciences de Paris., année ijSô, pag. 212 , pi. 5 Buff. tome YIII, pi. 10, fig. I Geoffr. Jnn. du Mus. , lom. 17, pag. 1^4^, pi. 2, fig. 2; Schreber , Saeugih. tab. i6o. V. pi. G 3.7 de ce Dictionnaire.

La musaraigne vulgaire, bien décrite par Daubenton , est, dit ce naturaliste , à peu près aussi grosse que la souris : elle a environ deux pouces et demi de longueur depuis le bout du museau jusqu'à l'origine de la queue ; elle pèse pour l'ordinaire trois gros; elle a li- poil plus fin, pkis doux et

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|)lirs court que celui de la souris, et d'une couleur appro- chante , mais un peu plus brune sur la tête et sur le corps, cl d'un gris plus foncé sur la face inférieure de l'animal ; tous ses poils sont de couleur cendrée sur la plus grande partie de lenr longueur, et leur pointe est de couleur brune mclcc d'une légère teinte de fauve sur le dessus et sur les cotés de la tête et du corps, et de couleur grise mêlée d'une légère teinte de jaunâtre sur le dessous du corps , depuis le bout de la mâchoire inférieure jusqu'à l'extrémité de la queue, qui n'est guère plus longue que celle du campagnol et qui n'a pas plus de poil ; sa longueur est d'un pouce qua- tre lignes.

A ces caractères M. Geoffroy joint celui qu'offre la forme de l'oreille externe , qui ne se retrouve dans aucune des au- tres musaraignes d'Europe. La conque est ample , nue , et l'on remarque en dedans deux replis ou lobes placés l'un au- dessus de l'autre , dont 1 inféri'eur correspond à l'entrée du méat auditif, et a sans doute pour usage de le fermer entière- ment à la volonté de l'animal. Le même naturaliste fait re- marquer aussi que la queue est assez renflée , demi-arrondie ou plutôt légèrement carrée ; les quatre faces en sont bom- bées , et Ton aperçoit très-bien les lignes en angle qui les séparent. Les lèvres , les pieds et la queue sont couleur de chair; quelquefois la dernière de ces parties est d'une teinte brune.

Il existe quelques variétés dépendantes des couleurs plus ou moins foncées du pelage ; de la longueur plus ou moins consi- dérable de la queue qui peut varier d'unquart; de la taille, qui est quelquefois moindre d'un douzième, etc. On a trouvé aussi des musaraignes atteintes de la maladie albine, et d au- tres qui avoient seulement sur les côtés du corps des taches blanches de forme elliptique.

On rencontre la musaraigne assez communément , surtout pendant l'hiver, dans les greniers à foin, dans les écuries, dans les granges , dans les cours à fumier; elle se nourrit d'insectes, de matières animales en décomposition, on dit même de grain. Elle est aussi très-commune dans les bois oii elle se lient cachée sous les troncs d'arbres , sous \a mousse, sous les feuilles, elc, et quelquefois dans les trous abandon- nés par les taupes , ou dans d'autres trous plus petits qu'elle se creuoe elle-même en fouillant avec les ongles et le mu- seau. C'est elle particulièrement qu'un préjugé accuse de causer aux chevaux une enflure subite par ses morsures ; mais outre que cet animal n'est point venimeux, la trop petite ouverture de sa gueule ne lui permeltroit pas de saisir la dou-

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ble épaisseur de la peau d'un animal quelconque, et à plus forte raison , colle des chevaux qui l'ont fort épaisse. La musaraigne habile dans toute l'Europe.

Seconde Espèce. Musaraigne de Daubenton, Sorex I>aubentonii,Èï-x[eh. , Blumenb. , Boddaert., Geoffr. Ann. du Mus. , toui. 17 , pag. 176; Musaraigne d'eau , Dauben- ton, Mémoires de l'ylcad. roy. des Se. , 1766 , pi. 5 , fig. 2 Buff., tom. YIII, pi. 10; Sorex fodkns^ Pallas, Grael. Sorex carinalus ^ Hermann, Ofjseroationes zoologicœ j ^a^. 4-6.

Cette espèce, confondue pendant long-temps avec la pré- cédente , en a été distinguée par le célèbre Daubenton. Elle est plus grande que la musaraigne , puisque sa taille est inter- médiaire à celle de la souris et à celle du mulot. Elle a trois pouces un quart de longueur depuis le bout du museau jus- qu'à l'origine de la queue, qui a deux pouces deux lignes de long. Elle pèse pour Tordinaire une demi-once ; elle a le museau un peu plus gros , la queue et les jambes plus longues et garnies de poil, et les pieds , principalement ceux de derrière , plus grands que ceux de la musaraigne vulgaire. Les couleurs de la musaraigne d'eau sont aussi différentes de celles de la musaraigne; car la partie supé- rieure du corps, depuis le bout du museau jusqu'à la queue , est d'un noirâtre, mêlé d'une teinte de brun; et la partie inférieure est d'un blanc pur. La queue a une couleur grise ; elle est presque nue , à l'exception du côté intérieur , qui a d'un bout à l'autre un poil court et blanchâtre ; les doigts ont aussi sur leurs côtés des poils disposés en forme de nageoires, qui ne sont pas sur ceux de la musaraigne vulgaire.

Daubenton n'attribue pas à sa musaraigne deau la couleur blanche pure que M. Geoffroy assigne aux parties inférieures de la musaraigne de Daubenton , qu'il considère néanmoins comme ne différant pas de la musaraigne d'eau. Selon Dau- benton, cet animal auroit sur le dessous du corps des teintes de fauve , de gris et de cendré , parceque l'extrémité des poils seroit fauve ou grise, et le reste de couleur cendrée jus- qu'à la racine.

Outre les caractères rapportés ci-dessus pour distinguer cette espèce de la précédente, il en est encore d'autres re- connus par M. Geoffroy. Ainsi , le blanc des parties infé- rieures du corps s'étend sur les flancs en s'élevant presque par-dessus les cuisses; derrière chaque œil est une petite ta- che blanche ; l'extrémité des dents incisives est ferrugineuse ; lesorelUes ont une conformation particulière (commune d'ail- leurs à toutes les espèces de musaraignes aquatiques ) ; c'est qu'elles sont couvertes de longs poils et qu'elles peuvent se

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fermer au besoin, au moyen de l'antitragus, ici très-grand, et qui vient se placer au-devant du conduit auditif.

Cette espèce habite le bord des eaux ; on la prend à la source des fontaines, au lever et au coucher du soleil; dans le jour elle reste cachée dans des fentes de rochers ou dans des irous sous terre, le long des petits ruisseaux; elle met bas au printemps, ©t ordinairement elle produit neuf petits.

Troisième Espèce. Musaraigne carrelet, Sorex tetrago" nums, Hermann, Ohs. zoo/.^i*. ^S l^oàdaerl Elench. animcn lium, pag. 123, n.o 3 Geoffroy, Jnn. du Mus., tom. 17 , pag. 1 77 , n.o 3 , pi. 2 , fig. 3 ; Schreber , pi. CLIX. B.

Cette espèce , que le docteur (xall trouva aux environs de Strasbourg, en 1778 , fut communiquée par ce savant à Her- mann , qui la décrivit sous le nom de sorex tetragonurus. De- puis, Boddaerl, Zimmerman et Pennant en parlèrent ; et Daubenion , en lui appliquant le nom français de carrelet^ en donna une très-courte description dans le Tableau métho- dique des quadrupèdes qui précède le Système anatoniîque des animaux de Vicq-d'Azyr.

Cette musaraigne est fort voisine de l'espèce vulgaire ; ce- pendant elle est un peu plus petite. Son corps et sa tête réu- nis ont deux pouces trois lignes de longueur, et la queue seulement un pouce et demi. Cette dernière partie est sur- tout remarquable en ce qu'elle est tout-à-fait carrée et termi- née subitement en pointe arrondie comme le sont les aiguil- les appelées carrelets; sa base est nue et le restant est cou- vert de poils verticillés ; à sa face inférieure on observe un léger sillon.

Son pelage est d'un brun noir en-dessus, plus pâle en dessous.

On trouve celte espèce en France , et notamment dans la ci-devant province d'Alsace , dans les mêmes lieux que la musaraigne vulgaire. M. Risso l'a aussi rencontré dans les environs de Nice.

Quatrième Espèce. MUSARAIGNE PLARON, Sorex constric- tus , Hermann , Observ. zoolog. , pag. 4/ Boddaert , Elench. animalium, pag, laS, sp. 4 Geoffroy , Ann. du Mus. d^Hist. nat,, tom. 17 , pag. 178 , sp. 4 ? P^- 3 , fig. i Sorex cunicu- larius^ B echstein Zoo/o^/« Musaraigne plaron^ \icq-d'Azyr, Syst. anat. des animaux , Tabl. méihod.

Cette musaraigne a deux pouces sept lignes de longueur , et sa queue seulement un pouce et demi. Le museau est plus fort que celui de l'espèce ordinaire , la tête est plus large et le chanfrein plus arqué , le boutoir semble plus gros et plus

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court , ce qui est dA à des poils roldes qui garnissent les narines ; les oreilles sont couvertes en entier par le poil ; la mâchoire supérieure a deux petites canines de plus que dans les autres espèces. La queue, dit M. Geoffroy, est, à l'ori- eine , plate , étroite et comme étranglée , tandis que dans le reste, spécialement au milieu, elle est épaisse, comme ren- flée , et ronde , excepté à son extrémité , on la retrouve aplatie et les poils se réunissent en pointe comme ceux d'un pinceau. Le poil, ajoute ce naturaliste, est très-fourni, assez long et fort doux au toucher; noirâtre dans sa plus grande longueur et roux à sa pointe. Le ventre est gris brun et la gorge cendrée. Les pieds sont velus.

Cette espèce a été trouvée par le docteur Gall, dans une prairie qu'on venoit de faucher, aux environs de Strasbourg. MM. Marchand et Bâillon l'ont aussi observée , l'un dans le département de l'Eure , l'autre dans celui de la Somme au- près d'Abbeville.

Cinquième Espèce. Musaraigne leucode , Sorexleucodon , Hermann , Obsejv. zooleg., pag. 49 Boddaert, Elench. ani- malium , ]^ag. 12 j , sp. 2 Geoffroy, ylnn. du Mus. d'Hist. nat., tom. 17 , page 181 , n.oS— Musaraigne leucode., Vicq- d'Azyr , Syst. anat. des anim. , ï abl. mcth.

La musaraigne leucode est de la taille de la musaraigne de Daubenton, c'est à-dire qu'elle a deux pouces dix lignes de longueur mais sa queue est plus courte proportionnellement puisqu'elle n'a qu'un pouce quatre lignes. Son pelage est brun endessuselblanc en dessous ainsi que surles flancs. Sa queue, qui n'est pas exactement arrondie , ressemble en cela à celle de la musaraigne vulgaire ; en dessus elle est brune et en des- sous elle est blanche. Tous les poils sont gris à leur base.

Le nom de Leucode (qui signifie dents blanches), a été donné à cette espèce par Hermann, qui n'avoil observé que de jeunes individus, lesquels avoient leurs dents incisives toutes blanches. Mais, ainsi que le remarque M. Geoffroy , ce nom est fort mal appliqué , attendu que dans les individus adultes la pointe de ces dents se colore en brun.

Elle a été trouvée dans un jardin de Strasbourg.

Sixième Espèce. Musaraigne rayée, Sorex lineatus , Geoffroy, Ann. du Mus. d'Hisi. nat. , tome 17, page 181 , sp. 6.

Cette nouvelle espèce , décrite pour la première fois par M. (ieoffroy Sainl-Hilaire , existe dans la collection publi- que du Muséum d'Histoire naturelle de Paris.

Elle a deux pouces dix lignes de longueur , et sa queue dix

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huit lignes. Sa forme est plus élancée, etson museau plus long et plus fin quecrluides espèces précédentes. Tout son pelage est d'un brun noirâtre, à l'exception du ventre, qui est plus pâle, et la gorge qui est cendrée. Une ligne étroile, blanche, s'étend sur le chanfrein depuis le front jusqu'aux narines. Les oreilles sont marquées d'uue tache blanche for- mée par les poils qui recouvrent les deux lobes intérieurs de la conque. La queue est ronde et fortement carénée en des- sous , ce qui fait soupçonner à M. Geoffroy que cette espèce est aquatique. Les deuts incisives sont brunes à leur pointe.

Septième Espèce. Musaraigne porte-rame , Sorex remi- fer^ Geoffr., Ann. du Mus, , tom. 17 , page i8a , pi. 2 , fig. i.

La connoissance de cette espèce, la plus grande qui ait été observée en France , est encore due à M. (Geoffroy. Deux individus lui ont été adressés, l'un de Chartres, par IVL Marchand, l'autre d'Abbeville, par M. Bâillon. Tous les deux avoient été pris sur le bord des eaux.

La musaraigne porte-rame est particulièrement caracté- risée par sa queue carrée dans sa première moitié, ayant chaque face parfaitement plane , hors celle de dessous qui est marquée d'un sillon de la fin duquel naît dans l'autre moitié une carène qui se prolonge d'autant plus en dessous, que la queue s'amincit davantage. Cette queue finit par être comprimée et tout-à-fait plate, de manière à figurer une es- pèce de rame. Le corps de cette musaraigne a quatre pouces de longueur, et sa queue a deux pouces sept lignes. Comparée à la précédente, elle en diffère par ses proportions plus trapues, et par son museau plus gros et plus court. Les couleurs de son pelage sont à peu près les mêmes, si ce n'est qu elles paroisscnt un peu plus foncées en dessus. Le ventre est brun cendré, la gorge cendré clair; le chaufreia n'a pas de rayure blanche longitudinale,

Huilième Espèce. MUSARAIGNE A COLLIER BLANC, Sorex collaris^ Geoffr. , Mémoires du Muiéuin , tom. i, p. Sog.

Cette espèce n'est qu'indiquée par M. Geoffroy dans son Mémoire sur les glandes odoriférantes des musaraignes. Il faut, dit- il, ajouter aux espèces que j'ai fait connoître , tom. 17 des Ann. du Mus. , une musaraigne noire à collier blanc. Il tient ce fait d'un naturaliste , M. l'abbé Manesse , qui a eu souvent l'occasion de la voir en Hollande , elle est très-abon- dante, dans les îles comprises entre l'embouchure de l'Es- caut et la rivière de Meuse.

XXII. 5

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Jf Neuvième Espèce. Musaraigne de l'Inde , Sorex indiens, Geoffroy, Ann. du Mus. d'Hist.nat.^ tom. 17, page i83, sp. 8; Ejusd. , Mém. du Mus.., tom. i, pag, 3og, pi, i5 , fig. i. Buff. , suppl. , tom, VII, pag. 281 , pi, 71, ; Sorex murinus, Boddaert , Gmelin , Erxleb. ;

Cette musaraigne ,1a plus grande de toutes, a six pouces de long , et sa queue en a trois. Ses formes générales sont absolument semblables à celles des espèces de notre pays. Ses oreilles sont apparentes , nues et aussi grandes compa- rativement que celles de l'espèce vulgaire. Ses dents sont blancbes ; son pelage est d'un gris brun assez clair, ondulé de légères teintes roussâtres ; sa queue est ronde, ce qui la rapproche des espèces qui vivent éloignées de l'eau. Aussi Buffon rapporte-t-il , d'après Sonnerat, qu'elle habite dans les champs, et qu'elle vient aussi dans les maisons de Pon- dichéry, elle se rend fort incommode à cause de son odeur extrêmement forte.

C'est particulièrement sur un individu de cette espèce, envoyé de Tranquebar au Muséum d'Histoire naturelle , que M. Geoffroy Saint-Hilaire a observé les glandes odoriféran- tes des musaraignes. Depuis il les a retrouvées dans les es- pèces de nos pays.

Dixième Espèce. Musaraigne du Cap, Sorex capensis , Geoffr. , Ann. du Mus. d'Hist. nai. , tom. 17 , pag. 184. , sp. 9, pi. 4 •) fig- 2 ; Sorex araneus maximus capensis., Petiver, pi. 28 , fig. g ; Valentin, Musée des musées , tom. 2, pag. 27 , fig. 2 , (d'après Petiver) ; Burmann, Animaux du Cap.

Un individu rapporté du Cap de Bonne- Espérance, par Péron et Lesueur, a fourni à M. Geoffroy, le moyen de donner une description de cette espèce jusqu'alors impar- faitement connue.

C'est la plus grande après celle de l'Inde. Sa longueur est de trois pouces huit lignes , mesurée depuis le bout du nez jusqu'à l'origine de la queue ; et cette partie a un pouce trois quarts environ. Son museau est très-long et très- effilé; ses oreilles sont grandes et nues comme celles de Fes- pèce de l'Inde , et sa queue est proportionnellement aussi longue que la sienne, et également ronde. Son pelage est cen- dré; il est sur le dos lavé d'une légère teinte de fauve, les côtés de la bouche sont roussâtres, et la queue est d'un roux qui tranche avec la couleur du dos.

Cette musaraigne est fort commune au Cap de Bonne- Espérance; elle habite les caves et y répand une odeur ex- trêmement forte. Les habitans lui font une guerre très-actlve.

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Onzième Espèce. Musaraigne a queue de rat , Sorex tnyosuriis , Pallas , Acta Pctrupol. , 1781 , tom. 2 , pag. 387 , pi. 47%- I ; Geoffroy, Ann. du Mus. d'Hist. t:at.^ lom. 17 , pag. i85 , sp. 10 , pi. 3 , fig. 2 et 3.

Cette espèce, qui n'est connue que par ce qu'en a dit Pallas, et par la figure qu'il en a donnée, est fort rapprochée, ainsi que le remarque M. Geoffroy, de la musaraigne du Cap, surtout par sa taille et par la forme ef la grandeur de ses oreil- les.. Cependant sa queue est plus longue d'un tiers, et surtout beaucoup plus épaisse ; son museau paroit plus court et plus renflé sur les côtés, ses pieds sont plus épais, les poils de sa queue plus rares, ce qui la fait ressembler à celle d'un rat, etc.

L'un des individus décrits par Pallas étoil tout blanc et paroissoit atteint de la maladie albine ; un autre , figuré par ce naturaliste sur la même planche, comme en étant le mâle présentoit dans ses formes et surtout dans la cou- leur de son poil , d'un brun noirâtre , des différences assez considérables, pour paroître à M. Geoffroy ne devoir pas être considéré comme appartenant à la même espèce.

Le squelette du sorex myosiims diffère de celui de la mu- saraigne vulgaire , en ce qu'il a deux vertèbres dorsales et deux côtes de plus.

On ignore quelle est la patrie de cette espèce, (desm.)

MUSARAKiNE CUNICULAIRE de Bechslein. C'est la Musaraigne plaron. V. cet article, (desm.)

MUSARAIGNE DORÉE. F. Chrysochore. (desm.)

MUSARAIGNE DE PERSE, Sorex pusiUus. V, les gé- néralités des Musaraignes, (desm.)

MUSARAIGNE DU BRESIL, Sorex hrasiliensis. V. les généralités de l'article Musaraigne, (desm.)

MUSARAIGNE D EAU. Voy. Musaraigne de Dau- benton. (desm.)

MUSARAIGNE DE VIRGINIE, Sorex aquaticus. Voy. l'article Scalope. (desm.)

MUSARAIGNE (petite) , Sorex minulus. V. les généra- lités de l'article Musaraigne, (desm.)

MUSARAIGNE SOURIS, Sorex murmus. V. MUSA- RAIGNE DE l'Inde, et les généralités de l'article Musarai- gne, (desm.)

MUSARAIGNE MUSQUÉE. Voy, Desman de Mos-

COViE. (DESM.)

MUSARAIGNE À QUEUE EN CARENE , Sorex carinatus., Hermann, {thc carinuted lail shrew, Penn. ). Voy. Musaraigne de Daubenïon. (desm.)

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MUSARAIGNE À QUEUE À REBOURS (^Ihe rei>er- sedtail shrew). Nom donné par Pennant à la MusARAlG^E PLARON, Sorex coustridits ^ Linn. (desm.)

MUSARAIGNE A QUEUE CARREE {square taû shrea>), Pennant, Quadr. , p. 482. C'est notre Musaraigne CARRELET, OU Sorex teiragonunis à' Uermann. (desm.)

MUSARAIGNE DE TERRE. Voy. Musaraigne vul- gaire, (desm.)

MUSARAIGNE À DENTS BLANCHES {the ^t^/i/V iheeih shrew). F". Musaraigne lEucode. (dêsM.)

MUSARANEUS. Nom latin des Musaraignes. Brisson l'a employé pour désigner le genre qui renferme ces petits animaux ; mais celui de sorex que lui a imposé Linnaeus a pré- v^u. V. Musaraigne, (desm.)

MUSARANHO , MURGANHO. Noms portugais des Musaraignes, (desm.)

MUSC ou PORTE-MUSC, Moschus, mosrhiferus, Linn. Mammifère ruminant du genre Cuevrotâin , figuré pi. G 29 de ce Dictionnaire. V. l'art. Cuevrotâin. (desm.)

MUSCA.Nom latin des Mouches, (desm.)

MUSCADE. Fruit du Muscadier. T. ce mot. (desm.)

MUSCADE (la). C'est la huila ampulla de Linnaeus. Voy. Bulle, (b.)

MUSCADE DU PARA. On appelle de ce nom la se- mence d'un arbre de Cayenne dont on ne connoît pas le genre, (b.)

MUSCADIER, Myristica, Linn. {Polyandrie monogy nie , Linn., Bioécie monadelphie ^ Lam.). Genre de plantes de la famille des laurinées, qui renferme des arbres ou arbris- seaux étrangers toujours verts , dont les feuilles sont entières et alternes, et dont les fleurs petites et axillaires sont réunies plusieurs ensemble sur des pédoncules divisés, et plus longs que les feuilles.

Lamarck est le premier botaniste qui ait bien décrit ce cenre , dont voici les principaux caractères.

Les fleurs sont dioïques, c'est-à-dire , toutes mâles sur cer- tains pieds, et toutes femelles sur d'autres. Les unes et les autres manquent de corolle , et sont pourvues d'un calice en grelot et à trois divisions. Les [leurs mâles ont de six à douze étamines , rarement neuf, avec des filets réunis en un faisceau et couronnés par de longues anthères droites et à deux loges. Les fleurs femelles sont sans styles ; elles contiennent uu ovaire libre , supérieur , ovale ou oblong , terminé par deux Stigmates.

Le fruit est un drupe arrondi , ovale ; il renferme une

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seule semence, grosse, solide, huileuse , quelquefois aroma- tique , et toujours parsemée à l'intérieur de veines rameuses et diversement colorées. Cette semence est défendue et re- couverte par trois enveloppes distinctes, qu'on nomme le brou , le macis et la coque.

Le brou ou l'enveloppe extérieure est ordinairement charnu, quelquefois desséché et coriace.

Le macis placé entre le brou et la coque , est une mem- brane colorée , très-découpée , comme réliculaire et appli-" quée fortement contre la coque.

La coque ou l'enveloppe immédiate de la semence est mince , dure , fragile , sillonnée extérieurement par les im- pressions des ramifications du macis.

Ce genre , dont celui appelé Knema par Loureiro se rap^ proche beaucoup, comprend environ vingt espèces. Les plus intéressantes sont : le MuscAniEa aromatique et le Musca- dier PORTE-SUIP.

Le Muscadier aromatique , Myrislica aromaiica , Lam. , figuré pi. (t 26 de ce Dictionnaire, est un bel arbre, élevé de trente pieds , remarquable par le beau vert de son feuillage et par la disposition de ses branches. Quand il jouit d'une forte végétation , il s'orne alors d'une grande quantité de rameaux grêles, qui lui forment une tète arrondie et si touffue, qu'il est impossible de voir au travers. Dans cet état , il ressemble beaucoup à nos plus beaux orangers, lorsqu'ils viennent de de se couvrir de nouvelles feuilles.

Le tronc de cet arbre est droit , garni circulairement , se- lon M. Céré , de branches disposées quatre et cinq ensemble par étages ou verlicilles , écartés les uns des autres de deux ou trois pieds : ces branches s'étendent beaucoup et presque horizontalement; elles ont des ramifications alternes. L'é- corce qui revêt le tronc est d'un brun jaunâtre au dehors , blanche et pleine de suc intérieurement , assez unie , peu épaisse ; celle des jeunes rameaux est luisante et d'un beau vert. Les feuilles sont ovales , lancéolées, très-entières, fort lisses , et soutenues par des pétioles ; leur surface est marquée de nervures latérales, obliques , simples et presque parallè- les , qui parlent à droite et à gauche de la côte moyenne ; la surface supérieure est d'un beau vert , l'inférieure d'un vert blanchâtre : ces feuilles varient sur le même arbre dans leur forme, et surtout dans leur grandeur : elles ont, en général, depuis deux pouces et demi jusqu'à six ou sept pouces de lon- gueur, sur une largeur d'un pouce et demi à trois pouces ; leur pétiole est long de cinq à six lignes.

Les fleurs naissent en petits corymbes aux aisselles des feuilles , le long des petits rameaux ; elles sont petites, jau-»

nâîres, péjonculées et pendantes- Dans les individus nlâles les pédoncules communs soutiennent deux à sept fleurs , qui ont chacune leur pédoncule propre , long de six à sept lignes, avec une bractée à son sommet. Dans les individus femelles il y a quelques pédoncules simples et uniflorcs ; mais la plu- part portent deux ou trois Heurs , un peu plus courtes que les fleurs mâles, et attachées à des pédoncules propres , moins grêles, de trois à cinq lignes de longueur, et munis aussi d'une bradée placée à la base du calice.

Le muscadier aromatique croit naturellement aux Molu- quos , et particulièrement dans les iles de Banda. Il est con- tinuellement en fleurs et en fruits de tout âge , et n'éprouve qu'une effeuillaison si foible , qu'elle est comme insensible, îl est impossible , suivant M. Géré , de distinguer l'individu mâle de l'individu femelle, à l'inspection de la feuille et même au port de l'arbre ; il faut , pour les reconnoîlre , les voir l'un et l'autre en fleurs. Il y a des muscadiers qui donnent des noix rondes et longues , et d'autres qui les donnent toutes rondes. Cet arbre commence à rapporter à l'âge de sept ou huit ans. 11 est plus avantageux de planter la noix muscade nue ou dé- pouillée de sa coque , qu'avec elle , parce qu'elle germe beau- coup plus vile, comme en trente ou quarante jours, et que les vers n'ont pas le temps de la dévorer,

Lors(jue celle noix germe , la radicule sort du bout le plus £TOS, c'est-à-dire, de celui auquel étollaitaché le pédoncule; elle se développe à la manière de celle du gland , et pointe e!> terre. Quand cet individu naissant a sept ou huit pouces d'a\ccrolssement et de longueur, sa tige alors sort iminédia- temenl au-dessus de la radicule : elle se montre d'abord sous la forme de deux petites feuilles séminales , et son sommet est d'un rouge- de sang, iiienlôt celte tige a atteint cinq ou six pouces de hauteur; alors elle a l'air à une asperge naissante , excepté qu'elle esld'un brun foncé et luisant. La noix reste à nourrir l'une et l'autre (la radicule et la jeune tige) , quelque- fois une année entière.

On cultive depuis cinquante ans le muscadier à l'île de la Réunion. Dans les semis qu'on en fait , il lève tou- jours beaucoup plus de mâles que de femelles ; et comme, ainsi que je l'ai dit , on ne peut distinguer les uns àes autres qu'à l'époque de leur fleuraison , il en résulte l'impossibillié absolue d'en faire un triage dans leur enfance, pour suppri- mer l'excédant des maies et ne conserver que les femelles. C'est un Inconvénient dans cette cuUure ; car quel moyen em- ployer pour ne pas se trouver surchargé, au bout de quelques années, d'arbres superflus .^ Un habitant de cette ile, M. J. Hubert, en a trouve un. Ne pouvant deviner le isccret de la

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nature , il a imaginé de la faire dévier de sa marche , et a pris le parti de greffer le muscadier femelle sur tous les jeunes muscadiers dont le sexe ne pouvoit lui être connu , conser- vant à chacun deux branches , Tune pour recevoir la greffe , et l'autre qu'il abandonnoit à la nature. 11 s'est ainsi procuré d'une manière certaine plus de 3o mille pieds de muscadiers femelles, dont plusieurs se sont trouvés réunir les deux sexes. Il y a un€ variété de muscade qui est allongée , et que par cela seul on estime moins dans le commerce. On doit au même M. J. Hubert, un très-bon mémoire par lequel il prouve que celle variété ne diffère pas de l'autre en qualité. Ce mémoire est imprimé dans les Annales d'agriculture, année 1818,

En incisant l'écorce du muscadier , en tranchant une bran- che , ou en détachant une feuille, il en sort un suc visqueux assez abondant , d'un rouge pâle , et qui teint le linge d'une manière durable.

Le bois du muscadier est blanc , poreux , filandreux , d'une extrême légèreté. On peut en faire de petits meubles. Il n'a aucune odeur.

Les feuilles vertes répandent une légère odeur de muscade lorsqu'on les froisse; mais sèches et écrasées dans le creux delà main, elles ont l'odeur de celles du Kavensara, às'y tromper. Le fruit, comme l'observent Valentlni,Rumphe etM.Céré, ne parvient à l'état de maturité qu'environ neuf mois après l'é- panouissement de la fleur qui le produit. Il ressemble alors à une gouyave blanche , ou à une pêche -brugnon de grosseur moyenne. Sou brou a la chair d'une saveur si acre et si as- tringente , qu'on ne sauroit le manger cru et sans apprêt. On le confit , on eu fait des compotes et de la marmelade. L'em- ploi de la muscade est suffisamment connu, ainsi que ses qua- lités. On en fait un plus grand usage dans les cuisines qu'en médecine. Cependant l'huile essentielle qu'on en retire est très-utile , lorsqu'on veut faire des onctions sur les membres paralysés.

Le Muscadier porte-suif, Myn'stîcasebifera, Lam. Quoique Aublet, et aprèslui Jussieu , aient fait un genre particulier de cette plante sous le nom de Virole , elle n'en a pas moins, soit dans la fleur, soit dans le fruit , tous les caractères essen- tiels d'un muscadier. On en jugera par la description sui- vante qu' Aublet en donne lui-même , et qui est très-exacte. « Le tronc de cet arbre , dit-il, s'élève à trente , quarante , cinquante et jusqu'à soixante pieds , sur deux pieds et plus de diamètre. Son écorce est épaisse , roussàtre , gercée , ridée. Son bois est blanchâtre , peu compacte : il pousse à son som- met un grand nombre de branches tortueuses et rameuses^

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qui s'élendent en tout sens ; les unes droites , d'autres incli- nées, etd'autres pr^-sque horizontales. Les rameaux sont gar- nis de feuilles alternes , entières, obiongues , aiguës, échan- créeS à leur naissance , terminées par une pointe ; elles sont vertes en dessus, et couvertes en dessous d'un duvet court et roussâlre. Les plus grandes ont huit ponces de longueur sur trois et demi de largeur ; la nervure longitudinale qui les par- tage est fort saillante , ainsi que les nervures latérales qui en parlent.

» Les fleurs sont de deux sortes , les unes mâles , les autres femelles , naissant sur des individus séparés, hes fleurs mâles sont ramassées p.tr petits bouquets de cinq à six fleurs sessi- ies, sur de grosses grappes qui naissent de l'aisselle des feuil- les et à rextrémilé des rai leaux. Le pédoncule de la grappe, ses branches et ses Fleurs sont couverts d'un duvet roussâtre.

« Le calice est d'une seule pièce en foruje de coupe , à trois dents. Il n'y a point de corolle. Les étamines sont au nombre de six, attachées au fond de la fleur sur un disque ; leur filet est court ; Tanlhère est très-petite , et a deux bour- ses -, le contre du disque est couvert de plusieurs petites émi- nences arrondies , et que l'on découvre à l'aide d'un verre len- ticulaire.

<f L'arbre qui porte la fleur femelle ne diffère que par ses fleurs qui sont plus petites, à trois dents, dont le centre est occupé par un ovaire sphérique , surmonté d'un stigmate charnu et obtus.

« L'ovaire devient une capsule sphérique, pointue, ver- dâlre , coriace , marquée de sa base à sa pointe, de chaque côté, d'un arête saillante. C'est par-là qu'elle s'ouvre en deux valves, et laisse voir une coque couverte d'un réseau fie fibres rouges , aplaties (le macis). La coque est très-mince, fragile et noirâtre ; elle contient une graine couverte d'une membrane grisâtre. Cette graine coupée en travers, est par- semée de veines roussàtres et blanches. Elle est fort huileuse.

" Lorsqu'on entaille l'écorce du muscadier porle-suif, il en sort un suc rouge qui est plus ou moins abondant, selon la saison. Ce suc est acre. On s'en sert dans le pays pour guérir les aphthes , et apaiser la douleur des dents cariées , en les couvrant d'un peu de colon imbibé de ce suc.

<f On tire des graines un suif jaunâtre avec lequel on fait des chandelles dans le pays. Pour cet effet, l'on sépare les graines de leur coque, en passant un rouleau dessus, après Jes avoir fait sécher au soleil ; ensuite on les vanne , et étant nettoyées, on les pile et réduit en pâte , que l'on jette dans de l'eau bouillante pour en séparer le suif, qui se ramasse à la surface, et s'y durcit lorsque l'eau est refroidie. Enfin on

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le fond encore sépare'ment , et on le passe à travers d'un tamis. L'on en forme des chandelles , dont on fait usage à la ville et dans les habitations. Ce suif est acre , et ne con- vient pas pour être appliqué extérieurement sur les plaies et les ulcères, parce qu'il y cause de l'inflammation. »

Les autres muscadiers sont peu connus. Ce sont ceux qui suivent:

Le Muscadier des Philcppiîjes , Myristica phUippensis , Lam. , Act. Acad. Par., à feuilles ovales-oblongues, très- grandes ; à fruit rond et cotonneux

Le Muscadier de Malabar , Myristira malahan'ca Lam. ; très-ressemblant au précédent, mais dont les feuilles sont simplement ovales, et le fruil oblong.

Le Muscadier GLOBULAIRE, Myristica glohutaria^ Lam., à feuilles étroites et lancéolées ; à anthères libres, et' au nom- bre de neuf.

Le Muscadier de Madagascar , Myristica madagascarien- sis ^ Lam,, dont les feuilles sont ovales , les bourgeons des feuilles d'une blancheur éclatante avant leur développement, les pédoncules et les fleurs roussâtres et cotonneuses, et les fruits revêtus d'un duvet ferrugineux. Il est cultivé au Jardin de Botanique de l'Ile-de-France.

Le Muscadier ACUMI^É, Myristica acuminata ^ Lam,, à feuilles ovales , blanches en dessous, sans être cotonneuses, et terminées par une pointe.

Le Muscadier uviform'e , Myristica iipiformis,hsm. , des Moluques, espèce douteuse , rapportée à ce genre par Lam., d'après les caractères de ses fruits. Ils sont très-petits, de la grosseur d'un grain de raisin, ettéunls en grappes latérales fort courtes, (d.)

MUSCADINË. Nom qu'on donne, au Canada, à une vigne sauvage, décrite je ne sais par qui, sous le nom de vitis verrucosa. (b.)

MUSCADINS. V. Muscardins. (desm.)

MUSCARDIN , Myoxus muscardinus , Linn. Mammifère rongeur du genre des Loirs. V. ce mot. (desm.)

MUSCARDIN VOLANT de Daubenton. C'est un chéi- roplère qui appartient aa genre nommé Vespertilion , par M. Geoffroy. V. ce mot. (dlsm.)

MUSCARDINS. Vers-à-soie morts des suites de la mala- die appelée Muscardiî^e, qui les dessèche et les rend blancs. V. Bombyx, (desm.)

MUSCARI. Nom d'une espèce de Jacinthe qui formoit genre dans Tournefort.

Desfontaines a rétabli ce genre dans sa Flore atlantique , cl

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lui a donné pour caractères: corolle ovoïde, enflée, à six dents; six étamines; ovaire supérieur à style simple; capsule triangulaire, trivalve, triloculairc et poiysperme. Il suffit en effet de regarder le muscari à côté d'une jacinthe, pour s'a- percevoir que ces deux plantes ne sont pas dans le cas d'être réunies ; mais lorsqu'on considère en détail toutes leurs par- ties, et qu'on les compare à plusieurs autres plantes du même genre, on trouve des difficultés pour les séparer, (b.)

MUSCAT. Six sortes de Poires portent ce nom à cause de leur saveur agréable. Ce sont: le peiil muscat, petite poire hâtive; le muscat fleuri , très-petite poire d'été ronde-com- primée, lisse, mi-partie vert jaunâtre et roussâtre; le ijtus- cat royal , poire d'élé moyenne , turbinée , à peau rude , et d'un gris-fauve ; le muscat robert^ poire d'été moyenne, pyri- forme , lisse et d'un vert-jaunâlre; le muscat d'' Allemagne , grosse poire d'automne et tardive, conique et nn-parlie cen- drée et rouge ; le muscat vert ou la cassolet/e^ petite poire d'été pyriforme , mi-partie verte , un peu jaunâtre et d un rouge terne, (ln.)

MUSCAT ( Vitis apiana ). Plusieurs sortes de raisins d'un goût exquis portent ce nom. Les plus remarquables sont : le muscat blanc, le muscat rouge, le muscat violet et le muscat d'Alexandrie , dont le grain est fort gros et ovale. On fait d'excellens vins avec les raisins muscats. F. au mot

VlGlSE. (LN.)

MUSCAT£LL\ et MUSGATELLINA de C. Bauhin.

V. MoSCHÂTELLiîS'A. (lN.)

M use ET. Un des noms anglais de I'Épervier. (v.)

MUSCHELBRUGH, Nom allemand qui désigne une coucbe composée de débris de coquilles ; il répond à notre mot Falun. V. ce mot. (l.n.)

MUSCHELlvALK. Nom allemand de la Chaux carbo- NATÉE compacte et coquillère. (ln.)

MUSCsil RUMl. Nom oriental du Muscari, qui joue, dans la Turquie d'Europe et d'Asie , un rôle important dans le langage symbolique des fleurs, (b.)

MÙSCICAPA. C'est, dans Llnnœus , le nom générique des Gobe-mouches ou Moucherolles. F. ce dernier mot. (v.)

MUSCrDES,M«5aV/55. Tribu d'insectes de l'ordre des diptères, famille des aihéricères , et qui a pour caractères : antennes de deux ou trois articles, mais ordinairement de trois; le dernier en forme de palette , inarticulé , avec une sole simple ou plumeuse sur son dos, près de sa base ; une trompe membraneuse, bllabice , coudée , retirée entière- ment , lorsqu'elle est en repos, dans la cavité buccale , et ren-

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fermant dans une gouttière supérieure un suçoir de deux soies.

De ce que j'ai donné à cette tribu d'insectes le nom de muscides, dérivé de celui de miisca , il ne faut pas conclure qu'elle embrasse tout le genre ainsi désigné par Linnœus. Elle n'en comprend qu'une partie , et qui correspond , à peu de différence près , au genre musca de Fabricius , tel qu'il l'a- voit d" abord limité.

Les muscides ont en général le port de l'insecte connu sous le nom de mouche domestique. Leur tête est hémisphérique, avec les yeux grands et à réseau, et trois petits yeux lisses distincts; le front est communément plus membraneux que le derrière de la tête , et d'une couleur différente , avec un sillon longitudinal de chaque côté , ou une fossette pour recevoir les antennes, qui le plus souvent sont inclinées et plus courtes que la lêle ; leur dernier article presque toujours beaucoup plus grand que les deux autres, a la fû.me d'une palette de figure variée, avec une soie on une aigi cite dor- sale, et située près de la jointure de cet r,rhclc. Le corselet est cylindrique , et d'un seul segment apparent ; les ailes sont grandes, horizontales; les balanciers sont courts ; les cuille- rons sont fort grands dans plusieurs ; Tabdomen est triangu- laire , ou ovalaire , ou oblong , quelquefois presque cylin- drique ; les pattes ont deux crochets et deux pelotes; les jambes de plusieurs sont épineuses.

Les larves des muscides sont apodes ou sans pattes allongées, et ordinairement cylindriques; elles sont moiies et flexibles ; le devant de leur corps est pointu et conique ; leur derrière est gros , arrondi ; leur tête , qui est molle et charnue, est garnie d'un ou de deux crochets écaillc^ux , qui leur servent à hacher les substances dont elles se nourrissent ; ces crochets, par leur rc raclion ou leur saillie, rendent la forme de la (ête variable. Ils sont accompagnés , du moins quelquefois, de mamelons, et probablement dans tous , d'une sorte de lan ue propre à recevoir les sucs nutritifs. On n'a- perçoit point lUyeux; les parties qu'on pourroit prendre pour ces organes, ne sont que des stigmates ou des ouy,M^tures pour 1 entrée de l'air dans les trachées. Le nombre de ces stigmates est ordinairement de quatre , dont deux situés sur le premier anneau , et qui sont ceux dont je viens de parler, et les deux autres placés au milieu d'une plaque circulaire , souvent écailieuse, terminant le dernier anneau; les chairs de son contour peuvent envelopper comme une bourse ces organes, et empêcher l'introduction des humeurs ou des matières nuisibles. Quelquefois chaque stigmate est composé de trois petites fentes rapprochées.

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Ces larves se nourrissent de différentes matières , tant ani- males que végétales ; les unes dévorent la chair des animaux morts, dont elles accélèrent la corruption; d'autres vivent dans les excrémens, dans le fumier et la terre grasse: quel- ques espèces mangent le fromage ; quelques autres liabitent dans le corps des chenilles et de différentes larves , qu'elles rongent et consument. Parmi celles qui se nourrissent de substances végétales , les unes vivent dans les feuilles , qu'elles minent intérieurement ; les autres vivent dans des galles, dans des champignons, dans les graines des plantes, dans les fruits. Les larves à queue de rat, qui habitent les eaux bourbeuses et marécageuses, et qui se nourrissent de frag- mcns de feuilles pourries et de beaucoup d'autres matières , appartiennent aux insectes d'une tribu voisine, celle des syr- phies. L'uiililé des larves carnassières du genre des mouches, paroîl donc être de consumer les cadavres des animaux qui se trouvent dispersés dans les bois et les campagnes , et que les bêtes féroces ont épargnés ; par leur nombre , elles sont capables de manger un cadavre en fort peu de temps. Celles qui vivent d'excrémens , semblent être faites pour purger la terre de ces immondices.

Les larves des muscides ne quittent point leur peau pour se métamorphoser; celte peau extérieure se durcit, devient écailleuse , et forme comme une coque oblongue , d'un brun-rougeâtre ou marron , qui renferme toutes les parties de l'insecte. Dans cette espèce de coque, la larve y prend d'abord la figure d'une boule allongée , à laquelle on ne voit aucune partie distincte ; elle n'est que comme une simple masse de chair molle : ensuite cette boule se développe et prend la figure d'une nymphe , à laquelle on voit toutes les parties extérieures de l'insecte parfait. Dans la larve , l'ex- trémité antérieure de son corps éloit la partie la plus menue, tandis que l'autre étoit la plus grosse. C'est ordinairement l'inverse dans la nymphe.

Parmi les diptères de cette tribu, il y en a une espèce qui dépose ses œufs sur le fromage ; il en sort des larves dont l'extérieur n'a rien de bien remarquable; mais elles of- frent un phénomène qui surprend , ce sont les sauls qu'elles exécutent en s'élevanl et s'élançant en l'air quelquefois à plus de six pouces. Ces sauls étonnent d'autant plus dans un in- secte aussi pelit, qu'il paroîl n'avoir aucun organe qui puisse l'aider à les faire. Pour découvrir sa manœuvre , on peutre^ garder attentivement une larve qui se dispose à sauter; on la verra se dresser sur sa partie postérieure , et se tenir dans cette position au moyen de quelques tubercules qui sont au 4ernier anneau de sou corps : ensuite elle se courbe , fprni«

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une espèce de cercle en amenant sa tête vers sa queue , enfonce les deux crochets de sa bouche dans deux sinuosités qui sont à la peau du dernier anneau , et les tient aussi for- tement accrochés : toute celte opération est Taffaire d'un instant. Alors elle se contracte et se redresse si prompte- ment, que les deux crochets, en sortant des deux enfoncemens dans lesquels ils étoient retenus , font entendre un petit bruit ; par ce mouvement vif, le corps frappe avec force la terre, et rebondit en même temps très-haut. C'est à Swainmerdam qu'on doit les premières observations sur ia manœuvre de ces larves ; on les trouve souvent en grande quantité sur les vieux fromages à demi-pourris.

Après avoir resté plus ou moins de temps sous la forme de nymphe , selon que la saison est favorable à leur déve- loppement, ces diptères sortent de leurs coques : pour cette fin , ils brisent et font sauter une portion avec leur tête, qui se gonfle dans celte opération ; à la sortie , leurs ailes sont plissées , chiffonnées , et si courtes , qu'elles paroissent être des moignons ; mais bientôt elles se développent , s'étendent, deviennent planes et unies, comme cela arrive aux autres insectes.

Ces insectes , pour être féconds , ont besoin de s'accou- pler ; leur accouplement n'offre rien de singulier , à l'excep- tion de celui de la mouche domestique. La femelle de cette espèce , au lieu de recevoir l'organe du mâle , introduit au contraire , dans le corps du sien , un long tube charnu , par une fente qu'il a au derrière. Assez ordinairement on voit les mâles monter et s'élancer sur le corps des femelles, les sol- liciter à l'accouplement; mais il n'a lieu que quand celles-ci y sont disposées. Alors on les voit voler joints ensemble , la femelle emportant le mâle sur son dos.

Celte espèce de mouche et quelques autres sont sujettes à une maladie assez singulière , et dont la cause est inconnue : leur ventre enfle extraordinairement , ses anneaux se déboî- tent, et les pièces d'ailleurs qui les couvrent s'éloignent les unes des autres ; la peau est très-tendue et parfaitement blanche ; si on leur ouvre le ventre , on le trouve rempli d'une matière grasse , onctueuse, de couleur blanche , qui pénètre la peau et s'accumule sur la surface du corps. Dans cet état , ces mouches s'accrochent avec leurs pattes sur les murailles, sur les fenêtres et sur les plantes, dans les prairies, on les trouve mortes.

Les fleurs du laurier rose {nerium oleander) et quelques au- tres nous offrent aussi souvent les cadavres de plusieurs pe- tites mouches et d'anlhomyies, qui sont suspendus aux fi- lets de leurs étamiaes. Mais, dans celte circonstance, ces in-

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sectes n'ont point été empoisonnés. Une liqueur très-vîs- queuse a collé rextrémité de leurs trompes contre ces parties, de manière qu'ils n'ont pu se débarrasser et qu'ils y ont péri. Ce fait ayant eu lieu plusieurs fois sous mes yeux, je suis cer- tain de cette explication. D'autres diptères peuvent encore périr dans les corolles de quelques fleurs {dionœa muscipuld), par la suite de l'irrilalion qu'éprouvent alors les corolles, et <jui les oblige à se fermer et retenir captifs ces mêmes in- sectes.

Peu de temps, et souvent même peu d'heures après leur fécondation , les femelles ne tardent pas à faire leur ponle et à placer leurs œufs dans les lieux leurs larves doivent vivre. L'odorat , dans un choix aussi important pour la prospé- rité de leurs générations, est leur guide. Il les trompe quel- quefois : c'est ainsi qu'on a vu le gouct serpentaire {arum dracuncuhis) , plante exhalant une odeur cadavéreuse , rece- voir, bien inutilement, les œufs de la mouche à viande. Fé- lix d'Azara rapporte , dans son Voyage au Paraguay , qu'un essaim de mouches, et d'une espèce probablement analogue à la précédente , rassaillit , ainsi que son cheval , dans une de ses courses, et Taccabloit d'une multitude innombrable d'œufs. L'autre espèce de mouche que j'ai citée précédemment place aussi quelquefois les siens sur le corps de l'homme , puisqu'on en a quelquefois retiré des larves.

Certaines mouches , mais en petit nombre , nous offrent cela de singulier , qu'elles donnent naissance à des larves vivantes ; mais elles sont moins fécondes que celles qui pon dent des œufs, puisque ces larves occupent plus de volume dans rintéricur du ventre ; elles ne font que deux petits à la fois. Nous invitons nos lecteurs à recourir pour ces faits et plusieurs autres , aux beaux mémoires de Pvéaumur et de Degéer.

J'ai esquissé à grands traits , à l'article Mouche , le ta- bleau des progrès qu'a faits , à cet égard, depuis quelques années, l'entomologie. Je me bornerai donc ici à présenter la distribution méthodique que j'ai adoptée pour cette divi- sion de Tordre des diptères. Les personnes qui voudront se livrer à une étude particulière de ces Insectes , jouiront bien- tôt de l'ouvrage de M. Meigen , et peut-être de celui que M. Jurine nous avoit annoncé sur le même sujet.

I. Cuillerons grands , recouvrant entièrement ou en majeure partie les balanciers. ( Port toujours semblable à celui de la mouche domestique. )

A. Palpes filii'ormes ou grossissant vers le bout, mais point dilates on iTianicre de spatule, à leur extrémili-.

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"• Longneur des antennes égalant presque celle de la face antérieure de la tête , depuis leur insertion jusqu'au bord supérieur de la cavité buccale.

Les genres : Échinomye , Ocyptère, Mouche , Achias.

** Antennes très-courtes ; leur longueur n'égalant guère que la moi'- tie' de celle de la fare antHri(-ure de la tèie.

Les genres : Phasie, Métopie, Mélanophore.

B. Palpes dilatés en spatule à leur extrémité.

Le genre : Lispe.

IL Cuillerons petits ou de grandeur moyenne; balanciers nus ou découverts en majeure paiiie. ( Corps et pattes allongés dans plu- sieurs. )

A. Yeux situés aux extrémités de deux prolongemens en forme de

cornes ou de pédicules, des côtés de la tète. Le genre : Diopsis.

B. Tète point prolongée de chaque côté; yeux sessiles. * Antennes de la longueur de la tète ou plus longues.

Les genres : Loxocère, Lauxanie , Sépedon, Tétano-

CÈRE.

** Antennes sensiblement plus courtes que la tête.

■}■ Corps long, étroit, presque cylindrique ou filiforme.

Les genres : Calobate, Micropèze.

ff Corps court ou simplement oblong , et dont le port est presque semblable à celui de la mouche domestique.

«» Ailes écartées l'une de l'autre dans le repos, vibratiles; extrémité postérieure de l'abdomen prolongée en une queue {oviducté) écailleuse, dans les femelles.

Les genres : Platystome , Téphrite.

«« «» Ailes couchées l'une sur l'autre dans le repos ; extrémité postérieure de l'abdomen sans prolongement en forme de queue.

Les genres : Scénopitme, Pipuncule, Oscine, Anthomyie

OcHTHÈRE , SCATHOPHAGE , ThYRÉOPHORE , SpH^ROCÈRE

Phore. V. ces articles, (l.)

MUSCIPULA. On a donné ce nom à plusieurs espèces de Silène, de cucuhalus^ dont les calices glanduleux et velus retiennent les mouches et autres insectes qui se sont reposés dessus; l'une de ces plantes a conserve le nom àemuscipula, c'est un silène. Dans la singulière plante nommée dioncea

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muscipula^ si un insecte vient se reposer sur une de ses feuilles, elle se ferme aussitôt, les cils qui la garnissent se croisent, et l'insecte demeure prisonnier, V. DiONÉE. (l.)

MUSCLE. Nom languedocien des Moules, (desm.)

MUSCLtLS , Musculi. Ce sont les parties charnues el fi- breuses du corps liiis animaux , once qu'on nomme particu- lièrement la chair. Chaque muscle est un faisceau de fibres , dont la direction est communément droite , elqui se contrac- tent en même temps. Chacune des fibres est entourée d'une gaine de tissu cellulaire ou nourricier , aussi bien que chaque muscle et chaque organe. Prochaska et d'autres anatomistes ont observé que les fibres musculaires a\ oient plus ou moins de grosseur, selon les espèces des animaux ; elles sont fort grosses en de petits animaux à sang froid , comme les repti- les. Presque tous les muscles s'attachent aux os qu'ils sont destinés à faire mouvoir , excepté le cœur, les sphincters, et les fibres musculaires de la vessie , des intestins , des artè- res , etc. La disposition des muscles est symétrique dans la plupart des animaux. Leur nombre , leur forme, sont varia- bles suivant chaque espèce ; mais leur destination a toujours pour bul le mouvement. ( Voyez l'article Mouvemens des ANIMAUX. )

Tout muscle ou faisceau de fibres peut être considéré comme une corde qui, ayant son attache à un point , et son insertion à un autre point, les rapproche en se contractant. Cette con- traction est un froncement, une crispation , un raccourcisse- ment du muscle dont le ventre ou le milieu se grossit et se durcit. Les attaches des muscles aux os sont toutes désavan- tageuses pour la production du mouvement ; d'où il suit que l'emploi des forces est proportionnellement plus considérable que les effets qu'elles produisent. Cetle remarque a surtout été faite par Alphonse Jjorelli, dans son Traité rie Moiu Ani- malium. Les muscles sont pour l'ordinaire antagonistes entre eux; c'est-à-dire, que deux muscles ont une action opposée, et qu'ils tirent également chacun de leur côté , afin que l'or- gane demeure en équilibre el en repos ; mais si l'un d'eux tire plus fortement que l'autre , il y a production de mouve- ment. Cette partie de l'économie animale est presque la seule qui soit sountise aux lois de la mécanique et de la physique ordinaire ; on peut la soumettre aux mêmes calculs.

La contraction musculaire est produite par faction immé- diate des nerfs qui reçoivent l'impulsion du cerveau. Si l'on coups le nerf qui se r^jnd à un muscle , on paralyse sur-le- champ ce dernier. En irritant un nerf , on d'termine des convulsions dans le domaine des muscles auxquels il se rend. l^a source des mouvemens musculaires émane donc des nerfs

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qni la prennent au cerveau , prlncîpaJement à la moeile r-îllongée. Celui-ci agit de trois manières principales sur les nerfs des muscles : i.° par la volonté , comme dans toutes nos actions volontaires ; 2." sans la participation de la vo- lonté , comme dans l'acte de la respiration , dans la con- traction du cœur , et dans les passions telles que la colère , le désespoir , etc. ; 3." par quelque cause d'irritation contre nature. Telle est la manie , le délire furieux des fièvres in- flammatoires , ou le déchirement des fibres du cerveau , des nerfs , etc. L'état de spasme des muscles indique ainsi l'état des nerfs et du cerveau. La présence du sang artériel est né- cessaire à la contraction musculaire ; le sang veineux la sus- pend. Aussi les animaux qui respirent beaucoup , et qui ont un sang très-chargé d'oxygène , comme les oiseaux , ont des contractions musculaires très-fortes. Quelle vigueur ne faut-il pas , en effet , à l'oiseau pour mouvoir ses aiies pendant un grand nombre d'heures , sans la moindre lassitude et sans in- terruption ? On rencontre quelquefois des oiseaux frégates à cinq cents lieues au large au milieu des mers, sans qu'ils aient le moindre rocher pour se reposer, hes grues et les cigo- gnes qui traversent les mers et les continens au milieu de l'at- mosphère , n'ont -elles pas besoin d'une extrême vigueur musculaire ? Il en est de même des insectes qui sont tous très-robustes à proportion de leur taille. Un gros scarabée un hannf.ton , sont , eu égard à leur grosseur , six fois plus forts que le cheval , et Linnaeus dit que si Vélèphant étoit aussi fort à proportion qu'un cerf-oolanl , il seroit capable de déraciner les rochers, et de culbuter les montagnes. Cette grande force des insectes vient sans doute de la disposition de leurs muscles , mais surtout de leur contractilité excitée par l'étendue de leur respiration ; car on sait que lintérieur du corps des insectes est tout rempli des ramifications de leurs trachées aériennes , de sorte que l'air les pénètre partout comme des éponges. Les animaux qui respirent peu n'ont presque pas de contractilité musculaire ; tel est le fœtus dans le sein de sa mère , le poulet dans l'œuf; tels sont \<t% ani- maux qui s'engourdissent pendant 1 hiver , et qui respirent très-peu dans cet é(at. On peut juger du degré de l'activité musculaire d'un animal par la couleur de ses njuscles; pâles et décolorés dans les espèces et les individus folbles et peu actifs , ils sont rouges et foncés dans ceux qui sont forts et agiles ; mais la cuisson dénature ces couleurs. D'ailleurs les terapéramens influent sur la vigueur des muscles et leur coloration. Ainsi , les tempéramens flegmatiques dans l'homme et les animaux , présentent des muscles mous dis- tendus , blanchâtres ; ces êtres sont lents, pesans et foibles XXII. a

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le moindre travail les accable ; au contraire, les conslitulîon» bilieuses et athlétiques montrent des muscles tendus , roides , prononcés, de couleur brune, des formes carrées , des mou- vemens brusques et vigoureux. Le tempérament sanguin est remarquable par la vivacité de sesmoovemens musculaires, par leur légèreté , et surtout par la facilité avec laquelle ils sont excités; mais en même temps ils sont très-inconstans et très - variables. On trouve un semblable caractère dans le système musculaire des femmes et des enfans, parce que la constitution sanguine prédomine chez eux ; mais la com- plexion bilieuse est surtout appropriée à Thomme et aux animaux mâles. Il est encore un autre tempérament qui com- munique aux muscles des mouvemens circonspects , mais assurés , une contractllité tenace , opiniâtre -, c'est le tem- pérament mélancolique dont le système musculaire est sec, fibreux , rigide , et profondément irritable.

Ainsi, le système musculaire du flegmatique a pour carac- tères : un état spongieux , humide , pâle ; ses contractions , difficiles à mouvoir , sont molles, impuissantes, et prompte- ment épuisées. Celui du sanguin est remarquable par son état d'embonpoint agréable , sa résistance élastique , sa couleur rosée, par ses contractions extrêmement faciles à exciter,

ftromples , légères , mais inconstantes. Le système muscu- aire de l'individu bilieux et athlétique , est le plus robuste de tous ; ses contours sont rudes et anguleux , sa coloration vive et foncée , et son activité rapide , violente , inf;iligable. Celui de la complexion mélancolique est caractérisé par un état d'aridité, de tension, de roideur, par des formes âpres, tranchantes , par une excitabilité explosive , soudaine , et surtout permanente , immuable.

Ces quatre constitutions, considérées dans le système mus- culaire des individus de chaque espèce , se remarquent aussi aux diverses époques de la vie du même être , quel que soit d'ailleurs le tempérament fondamental; ainsi dans la tendre enfance , le caractère des muscles est analogue à celui de la complexion flegmatique ; dans la jeunesse , au tempérament sanguin ; dans l'âge fait , à l'athlétique et au bilieux ; enfin , dans la vieillesse , au mélancolique. Les âges sont pour ainsi dire des tempéramens passagers qui influent sur l'état des muscles, et qui sont en rapport avec les caractères des êtres. Les tempéramens se compliquent presque tous en se mélan- geant entre eux; ils sont rarement dans leur pureté, et une foule de circonstances les modifient ; à mesure qu'on avance en â^e les fibres se durcissent , et les formes des muscles se prononcent davantage.

Il est une complexion différente des quatre précédentes ,

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et qui est plutôt maladive que naturelle -, on la nomme rons- îlhttion nerveuse. Elle lient des tempérainens mélancolique et sanguin , sans toutefois leur appartenir. Les personnes de cette compiexion sont maigres, svelles, délicates; leurs fibres musculaires sont grêles, minces, et excessivement suscepti-' blés d'irritation par les plus foibles causes. Tous leurs mouve- mens semblent être spasmodiques , impétueux, mais bientôt énervés. Ainsi leur inégalité est extrême; tantôt ils surpassent l'activité bumaine , tantôt ils sont dans un affaissement inca- pable de la uiolndre action. Leur excitabilité s'épuise d un premier effort. Personne n'est plus sensible ou plus sus- ceptible d'émotions pbysiques et morales que ceux de ce tem- pérament nerveux, qui est particulier aux peuples de la zone-Torride ; mais personne n'est plus facilement épuisé.

On trouve un tempérament tout contraire cbez d'aulres individus. Une compiexion épaisse , massive , grossière ; des muscles robustes , rendes , de grosses fibres détendues et pâ- teuses, presque incapables de se mouvoir et de sentir, carac- térisent ce tempérament qui tient du (legmalique et de l'atblétique : Temperamentiim musculoso-iorosuni., de Haller. Il entre difficilement en action; ses mouvemens sont lents, mais durables, forts, et presque inépuisables. Ce caractère du système musculaire est approprié aux babitans des zones froides de la lerre, excepté les régions gl.iciales.

Il paroît ainsi que la chaleur et la froidure donnent une disposition particulière aux muscles. La grande cbaleur les affolblit, les dessècbe , les énerve , comme nous l'éprouvons dans l'ardeur de la canicule ; mais un froid modéré tel que celui de nos blvers , mais non excessif comme en Laponie , nous donne plus de vigueur et de force. Il en est de même des peuples du Nord , robustes , grands , actifs, comparés à ceux du Midi , foibles , minces , et énervés. Les septentrionaux ont aussi plus de courage que les méridionaux , par cette même raison ; car le courage n'est que le sentiment de ses forces , et la lâcheté, une conscience de sa foiblesse. On re- connoît ici la cause qui a rendu le Nord conquérant et le Midi esclave , qui a fait sortir tant d'essaims de guerriers des froides réglons , pour vaincre et asservir ies ardentes contrées de l'Asie et de 1 Inde. Mais le séjour des conquérans dans les pays chauds les affoiblit à leur tour , et les abaisse au niveau de ceux qu'ils ont opprimés par la force.

Une autre cause contribue d'ailleurs , avec la cbaleur et la froidure , à énerver ou à fortifier le système nmsculaire dans l'homme et les animaux ; c'est le repos et l'exercice. Tout le monde sait combien le travail modère et continuel des mus- cles augmeiite leur vigueur, en y appeiaiil plus de nourriture ,

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de chaleur et de vie ; et combien la paresse, l'inacliori , le5 énerve par une disposition contraire. Comme les hounnes sont actifs et laborieux au Nord , ils deviennent aussi plus robustes ; et comme les habitans du Midi sont conleniplatifs et fainéans , ils perdent leurs forces de plus en plus ; car le travail est pénible à la chaleur, tandis que le mouvement est nécessaire dans la froidure. .^

Cependant, l'excès du froid produit un affoiblissement très-considérable dans la puissance contraclive des muscles. On sait qu'il engourdit et rend incapable d'agir. Autant une froidure modérée favorise le développement des forces mus- culaires , autant son excès leur est contraire ; ainsi les mains s'engourdissent souvent pendant l'hiver. Plusieurs espèces d'animaux restent à cette époque dans une entière immo- bilité , sans cesser de vivre ; ils n'existent plus qu'à l'intérieur, tous leurs muscles sont dans un état de sommeil ( car l'en- gourdissement n'est qu'un sommeil musculaire ) ; leur vie extérieure est toute suspendue. Tels sont les animaux à sang froid, les reptiles, lesserpens, les poissons, les mollusques, les insectes et les zoophytes. (f^. H [vernation et Tart. Sommeil.) Tels sont encore quelques quadrupèdes de la famille des rongeurs et des camwores. Les habitans des régions polaires de la terre , comme les Lapons , les Samoïèdes , les Jakutes , les Kamischadales , etc. , ont par celle raison le système musculaire affoibli et les fibres mobiles , comme les peuples des régions ardentes. Ainsi, les extrêmes se rencontrent.

Mais cet affoiblissement de la^puissance musculaire par le froid vif, dépend d'une cause particulière au système ner- veux, source première du mouvement des muscles. Le froid n'agit pas autant sur la fibre charnue , que sur la sensibilité nerveuse qu'il suspend ou éteint; il en est de même des subs-. tances narcotiques, telles que l'opium, le vin, les spiritueux. En ôtant la cause du mouvement, le muscle cesse d'agir; cet effet s'opère par deux moyens.

Premièrement, chaque individu a une quantité déterminée de contractilité musculaire, ainsi que de sensibilité ; il peut la dépenser plus ou moins promptemenl , mais non pas en sur- passer la somme. Or , quand un muscle a épuisé toute sa fa- culté contractile, par quelque effort, il est fatigué. Il se repose nécessairement jusqu'à ce qu'il ail repris de nouvelles forces. Son action est donc perpétuellement intermittente ; il ne peut agir que suivant la dose de sa faculté contractile ; au-delà , il demeure immobile malgré les sollicitationsextérieurespourle faire mouvoir. Or , l'opium , le vin , les spiritueux , engour- dissant la faculté excitable que les nerfs apportent aux muscles, «sant cette portion d'influence du cerveau ou de la moelle

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épiulcre qui est destinée à les faire agir ; les muscles tombent dans raffaissement , comme une fontaine se tarit lorsqu'on emploie toute l'eau à sa source. Ainsi , les narcotiques et les spiritueux , qui sont des excilans , usent toute rexcitabilité des muscleslorsqu onen prend trop, maisl'augmententquand on en prend modérément; de même trop de travail accable, mais un ouvrage modéré fortifie.

En second lieu , la force musculaire peut être suspendue , changée et reportée sur une autre fonction. Par exemple , un repas copieux affaisse la vigueur musculaire ; on est lourd , porté an sommeil , parce que la portion de vie qui anime les muscles est rappelée dans l'estomac pour concourir à la digestion ; la vie du cerveau est aussi ramenée dans la région abdominale ; on ne peut plus réfléchir et méditer ; on dirolt que toutes les facultés se rassemblent dans l'estomac, et aban- donnent les autres organes pour parvenir à digérer une grande masse d'aliaiens. U y a aux Indes et en Amérique de gros serpens qui , ayant avalé une proie considérable , de- meurent quelques semaines à moitié endormis etgisans im- mobiles dans leur trou , jusqu'à ce que la digestion de leurs alimens soit entièremept achevée ; on peut, dans ce cas , les approcher impunément; ils ne peuvent ni attaquer , ni mêm« se défendre , et se laissent souvent prendre et assommer. Pendant le sommeil toute la vie des muscles et du cerveau est ramassée dans l'intérieur du corps ; dans la veille , elle est au contraire épanouie au-dehors , et moins forte au-dedans. Or, le froid exfrêine a la propriété de causerie sommeil , c'est-à-dire, de repousser la vie au-dedans da corps, et de la chasser des muscles. Ce que nous appelons un engourdisse- ment , n'est donc que le sommeil des parties dont le froid a chassé la puissance contractile et la sensibilité.

D'ailleurs , plus un organe musculaire emploie de forces , plus les autres organes saffoiblissenl; ainsi les singes exerçant J)eaacoup leurs bras , ont les jambes foibles, etc. En outre » la vie des aulres parties du corps peut se reporter sur le sys- tème musculaire. On en voit des exemples dans les. passions^ La colère augmente extrêmement les forces , parce que les, facultés vitales du cœur et des parties précordiales se répan- dent dans les muscles, et affoiblissent momentanément ces parties, pour fortifier celles destinées à repousser l'insulte , ou qui servent à la défense. Ainsi la vie se transporte princi- palement où le besoin l'exige , comme feroit une garnison vigilante dans une ville assiégée. Ce transport de forces est aussi remarquable dans la manie ; les muscles prennent une vigueur extraordinaire aux dépens des facultés ducerveau , qui servent à l'intelligemce ; car il est nécessaire qu'une partie

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reçoive ce qu'nn,? aulr^' perd. Ainsi les reptiles , les poissons, les insectes qui ont pou de sensibilité', ont, en revanche ,unc grande irritabilité ou faculté conlraclile musculaire. Plusieurs heures après la mort de ces animaux , leurs muscles sont en- core susceptibles de se mouvoir. Quand on coupe la queue à Tin lézard, elle frétille encore long-temps. Un ver coupé en morceaux s'agite beaucoup; m.iis dans les espèces les plus sensibles , comane les quadrupèdes, les oiseaux et toutes les espèces à sang chaud, lirrilabilité s éteint assez promplement. On avoit prétendu que dans le supplice de la guillotine , les contractions des différens muscles de la tête annonçoient encore la souffrance ; mais il est plus vraisemblable que la sensibilité est éteinte, et tîu'cMjJa perçoit plus que les der- Eièrcs traces de la faculté coflPRtile qu'on peut exciter en- core par des moyens galvaniques, tant que la chaleur vitale se conserve.

Plus la vie se porte aux muscles et aux antres parties fxté- rienres , plus les organes internes sont affoiblis ; c'est ce qu'on observe dans les animaux carnivores comparés aux herbivores. Les premiers ont des muscles très-robustes pour atteindre , vaincre ou déchirer leur proie ; ils sont rapides à la course, indomptables au combat , ardens à la curée ; mais autant leurs muscles sont vigoureux , autant leur estomac est niin«:e , membraneux , et leur digestion laborieuse. Au contraire , les herbivores ont des muscles foibles , une ardeur moindre, un courage moins élevé. Quelle différence en! re un lion et un âne, un aigle et une dinde , quoique ces animaux aient des tailles correspondantes Mais si les premiers sont robustes à l'exté- rietlr , les seconds le sont à l'intérieur et dans leurs organes digestifs. Les quadrupèdes herbivores et ruminans ont des es- tomacs et des intestins grands et forts pour digérer des ali- niens grossiers; les oiseaux granivores ont des jabots , des gésiers musculeux, pour attendrir et broyer ensuite les grai- nes les plus dures , tandis que les quadrupèdes et les oiseaux carnivores ont de petits estomacs membraneux et des intes- tins courts. Le développement des muscles est en raison in- verse de celui des panies intérieures, et réciproquement; ainsi le moyen de fortifier les uns , est d'affolblir les autres. V. Herbivore.

La nature a bien sagement combiné tous ces rapports, car nous voyons que si une grande force musculaire étoit néces- saire aux carnivores, la nouniiure de chair ne leur éloitpas moins nécessaire pour conserver cette force. Les herbivores sont plus foibles, par une raison contraire. Il est certain que la nature des alimensiiiflue extrêmement sur la force des mus- cles. En effet , paisque le travail use beaucoup les organes et

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tes anbiblit, il fant donc les réparer par des alimens ; et plu* cette réparation sera complète ou même supérieure à Téta* aniérieur , plus Torgane reprendra de vigueur. Si le cheva vlvoitde chair , sa force seroit presque double , et il devien- droit presque infatigable , tandis qu'il ni> peut pas travailler continuellement au-delà de huit jours sans quelque repos ; mais l'homme, qui vil de nourritures plus substantielles, peut se livrer à de grands travaux et sans interruption , pendant des mois entiers. Il est inconcevable jusqu'à quel point la vi- gueur des animaux carnivores peut être portée ; aussi la na- ture n'a pas voulu rendre carnivores les éléphans, les rhino- céros, les hippopotames , ni tous les vastes quadrupèdes, de peur qu'ils n'envahissent et ne dépeuplassent la terre. On a vu un tigre se défendre contre trois éléphans plastronnes , quoi- qu'il fùl lié et circonscrit dans une enceinte , et l'on jugea que s'il eût été libre et ses adversaires sans plastron , il les auroit très-maltraités. Les loups , les hyènes , les chacals , sont aussi des animaux très- robustes , infatigables à la course, indomptables au combat; mais la vigueur des herbivores est bientôt éteinte ; on fatigue aisément un liè<>re , un cerf dans un jour; on les abat promptement , lorsque leur feu est passé; il leur faut ensuite plusieurs jours de repos pour se rétablir ; il faut qu'ils mangent chaque jour , mais un seul repas peut suffire pendant cinq à six jours à un Carnivore ; sans être ac- cablé par ce défaut de nourriture , il en devient même plus terrible , rien n'égale la rage et la fureur d'un Hun ou même à'un loup affamés. Les frugivores , quoique moins robustes que les carnassiers , le sont cependant davantage que les herbivo- res , parce que les semences et les fruits sont plus substantiels que 1 herbe. Les peuples du Nord , qui ont besoin d'une grande vigueur de muscles , se nourrissent principalement de chair , tandis que les habitans du IMidi n6 vivent que de fruits et d'autres substances végétales. La nourriture de chair est même contraire à la santé , dans les pays chautîs, et le régime pythagoricien est trop affoiblissant dans les climats du Nord.

Une autre cause contribue au développement de l'action musculaire : c'est le rut chez les animaux , ou la sécrétion de la semence. C'est à l'époque des amours que les quadru- pèdes, les oiseaux, etc. sont les plus robustes et les plus bel- liqueux. Il en est de môme dans l'espèce humaine. La semence est un grand stimulant de la force des muscles ; elle commu- nique même à la chair une odeur et une saveur vireuse , désagréables. On ne peutmanger du taureau, dubouc,dube- lier , du verrai, au temps du rut ; leur chair soulève le cœur, et ne peut se digérer, comme si la nature avoit voulu cïnpê-

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cher la destruction des êtres , dans le temps qu'elle choisit pour leur niulliplication. Il en est de nicuie de la chair des poissons, des huîtres, des moules qui fraient ; et en général , les carnivores font plus rarement la guerre aux animaux en rut qu'a ceux qui n'y sont pas.

Voyez quelle distance prodigieuse met l'amputation des parties sexuelles , entre un chapon cl un coq , un bœuf et un taureau, un mouton et un bélier, et entre un eunuque et un homme ! Quelle différence de force ne se remarque-t-elle pas entre les mâles et les femelles des animaux! 11 semble que toute la vigueur des animaux soit située dans les organes du mâle. La force du rhinocéros ou héhémoth ( dans le livre de Job , c. 4-0 , V. 12 ), est caractérisée par l'entortillement des nerfs et des vaisseaux de ses testicules : nervi teslicitlomm eji/s perplexi sunt. 11 est dit encore que sa vigueur est dans ses lom- bes et sa verge, ce qui est vrai pour tous les animaux ; leurs fatigues , leurs combats leurs forces , sont incalculables à l'époque du rut , les plus timides deviennent même audacieux alors ; et les plus vigoureux sont toujours les plus aimés des femelles , par un instinct de la nature qui cherche , dans tou- tes ses œuvres , la plus grande perfection unie à la vigueur et à l'énergie. En effet, les combats que se livrent les animaux en rut sont Institués par la nature pour écarter les foibles et pour favoriser la race des vainqueurs. Cet instinct n'est pas même étranger aux femmes; l'homme robuste et le guerrier sont plus aimés que les hommes foibles et délicats. On sait que Vénus préféroit Mars à son \ulcain, et Hercule n'étoit pas moins vigoureux en amour qu'au combat. Pour conser- ver la force des athlètes , on les empêchoit d'approcher des femmes , en les infibulant , etc. V. Infibulatjon.

Le système musculaire est placé à l'extérieur des animaux comme une enveloppe de la vie intérieure , une écorce capa- ble de sentiment, de mouvement, et pour connoître et écar- ter tout ce qui pourroit nuire aux organes internes. Aussi les parties musculaires sont moins importantes que celles de l'in- térieur du corps , et leurs blessures moins dangereuses. En outre , les organes extérieurs sont soumis à la volonté ; leur activité, à des intermittences de sommeil et de veille, de mouvement et de repos ; mais les parties internes , comme le cœur , les poumons , l'estomac , les intestins et leurs fonc- tions , sont indépendantes de la volonté de l'animal ; elles sont permanentes dans leur action pendant toute la vie ; lors- qu'elles cessent , l'animal meurt. L'homme et les animaux sont donc doubles , et formés d'une écorce ou d'une enve- loppe extérieure , et d'une partie intérieure et vitale ; plus luce a de forces , plus l'autre est affoiblle. La partie corti-

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cale est composée des systèmes osseux et musculaires , des sens , des mem})res, etc.; toutes ses formes sont doubles oa symétriques, La partie interne est toute différente ou même opposée.

Nous traitons de la Locomotion ou du Mouvement des Animaux , à ces deux articles, (vire y.)

MUSCULÎTE. On donne fréquemment ce nom, dans les oiivr;<ges des oryetographes , aux Moules fossiles, (b.)

MUSCULUS. Nom latin de la souris, petit quadrupède du genre des Kats proprement dits, (desm.)

MUSCUS , Musci. Nom latin des mousses. Les corallines et certains varecs sont désignés par les auteurs sous le nom de musci viurini. (desm.)

MUSCUS SCHWEIN ou COCHON MUSQUÉ.

Qu.-lques auteurs donnent ce nom au Pécari. Voyez, ce mot. (desm.)

MUSE(v6^/jme). Le rut des cerfs dans son commencement ; c'est Tepoque à laquelle ils recherchent les biches, (s.j

MUSEAU. C'est le prolongement des mâchoires des ani- maux, et qui donne une plus grande étendue aux dents, aux moyens de mastication , tandis que l'homme , qui n'est point destiné à paître les herbes comme les quadrupèdes, quoi qu'en aient dit quelques philosophes, n'a point un museau. Chez tous les animaux, les lèvres et le nez formant cette ex- trémité, sont douées, pour l'ordinaire, d'un tactplus délicat , plus sensible , et quelquefois servent de moyens d'appréhen- sion , comme les trompes de l'éléphant, du tapir, la lèvre du rhinocéros, etc. Bien des animaux n'ont de tact très- marqué que par leur museau et leurs organes génitaux; aussi ces deux sens les entraînent fortement à la nutrition et à la génération.

Les rapports de l'étendue du museau avec l'étendue du

cerveau sont exposés au mot Face, (virey.)

MUSEAU LONG. Poisson du genre Gymnote, (b.) MUSEAU-POINTU. Nom d'une Raie, (desm.) MUSEHGUSGH. Nom persan de la Buglosse , anchusa

officinalis. (ln,)

MUSER AIN , MUZERAIGNE. Envieux français , c'est la Musaraigne. Voy. ce mot. (desm.)

MUSET ou MUSETTE. En Savoie et en vieux français , c'est la Musaraigne. V. ce mot. (desm.)

MUSETTli. C'est, en Pologne, I'Alouettelulu. (v.)

go M TT s

MUSGANO, MUSGANA, RATON PEQUENO.

!Noms espagnols des Musaraignes, (desm.)

MUSICIEN DE GAYENNE. C'est Varada. V. Tro- glodyte, (s.)

MUSICIEN DE SAINT-DOMINGUE. Voyez Orga-

KISTE. (s.)

MUSIMON. L'un des noms donnés au Mouflon, (s.)

MUSIQUE. Les marchands appellent ainsi plusieurs co- quilles qui, par la disposition de leurs taches, ressenihlent à du papier de musique. Ainsi la Volute musique, la Volute chauve-souris, portent ce nom. (b.)

MUSIQUE DES SAUVACxES, Coquille univalve du genre des Volutes , voluta hebrœa^ dont la robe est marquée de lignes que l'on a comparées à des notes de musique ou à des caractères hébreux, (ln.)

MUSKLEWER. L'un des noms allemands du Trèfle des champs. C^N.)

MUSMON, MUSIMON. Les anciens naturalistes don- nent ces noms au mouflon. V. l'art. Mouton, (desm.)

MUSOPHAGE , Musophaga , Lath. Genre de Tordre des oiseaux Sylvains , de la tribu des Zygodactyles et de la fa- mille des Frugivores {V. ces mots). Caractères : bec Tort , à base im peu triangulaire et glabre , comprimé latéralement vers le bout, caréné en dessus, dentelé sur ses bords, incliné à sa pointe ; mandibule supérieure quelquefois prolongée sur le front en forme de disque ; narines ovales , ouvertes , si- tuées à la base du bec ou vers le milieu; langue charnue, un peu épaisse, courte, entière; quatre doigts, les antérieurs réunis à leur base par une petite membrane ; l'externe versa- tile ; les première et deuxième rémiges les plus courtes , les cinquième et sixième les plus longues ; rectrices dix. Ce genre est composé de trois espèces qui ne se trouvent qu'en Afri- que où elles se nourrissent de fruits et se tiennent ordinaire- ment sur les arbres.

A. Base de mandibule supérieure prolongée sur le front; narines si- tnées \>ers le milieu du bec.

Le Musophage violet , Musophaga violacea , Lath. , pi. G !îi , fig. 3 de ce Dict. Cette belle espèce , décrite pour la pre- mière fois par Latham , a près de dix huit pouces de longueur, dont la queue en prend six; la base de la mandibule supé- rieure s'avance au-dessus du front , et s'élève sur le sommet de la tête , de manière qu'elle cache sa liaison avec le crâne.

G. 3i.

2 . MoUeucf 7tîâle

caiceur f^er/e ) . 3 . Mzùpovka^e violei:.

M TT S gi

(Cette forme n'est point apparente sur Tinàividu mort, il eembie qu'alors la mandibule supérieure adhère tellement au sommet de la tête, que Ion croiroit qu'el'e en fait partie; sans doute que Latham l'a vue caractérisée comme je l'ai dit ci-dessus, puisqu'il l'a décrite et fait figurer ainsi, 2.^ Suppl. to gen. synop. , pi. lao.) Cette partie du bec est terminée par un petit crochet et une dentelure plus grande et plus profonde que les autres, dans laquelle s'emboîte l'extrémité de l'infé- rieure ; toutes les deux sont d'un beau jaune. Une peau nue , rouge , qui s'avance sur le côté de la mandibule inférieure , de quatre lignes environ , couvre Tespace entre le bec et les yeux, entoure ceux-ci , et s'étend un peu au-delà. Latham î)e fait pas mention de ce caractère , et dans la figure qu'il a donnée , cette partie de la tête est couverte de plumes; l'iris est brun et les paupières sont pourpres ; des plumes courtes , fines et déliées couvrent la lêle et la nuque ; elles sont, ainsi que tout le plumage , d'un beau violet à reflets pourpres , verts sur les ailes, et moins apparens en dessous du corps; une Lande blanche part des yeux et passe au-dessus des oreilles; la queue est cunéiforme et assez longue ; les pieds sont noi- râtres et très-forts. Celte rare espèce se trouve en Afrique , à la côte de Guinée ; elle fréquente les plaines et les bords des rivières de la province d'Acra , elle se nourrit princi- palement des fruits du plantain , musa paradisiaca et sapienlum.

B. Base de la mandibule supérieure ne dépassant pas T origine du front ; narines situées près du capistnim.

LeMusOPHAGF. GÉATSï , Musophagn giganiea , Vieill. , pi. 19 dos promerops, g7V(?^ie/s, etc., de Le vaillant. Cette belle et rare espèce , <jue Ion trouve en Afrique , a vingt- cinq pouces de longueur ; le bec d'un jaune orangé ; la tête p.irée d'une hwppe assez longue d un noir lustré etqui prend naissance sur le front; les plumes de la base du bec , celles des janibos près du genou et des paupières sont blanches; celte couleurprendun Ion clair sur la gorge, le cou et les ailes, elle devient très-foncée sur les pennes intermédiaires de la queue dont la pointe est noire ; les latérales sont de celte couleur à l'origine et vers le bout ; d'un jaune citron dans le milieu, et d un bleu foncé à leur extrémité; toutes sont en dessous noirâtres et d'un jaune très- pâle. La teinte d'un verl-jaune, qui couvre la poitrine et le ven- tre , se change en roux sur les parties postérieures ; les ailes en repos ne dépassent pas l'origine de la queue qui est très- longue et très-large ; les pieds sont noirs.

Le MusOPH AGE VARIÉ , Musophaga variegata^ Vieill. Cette espèce n'^ point de parties dénuées de plumes sur les côtés

Cfz M TJ S

t?e la tele ; les phimes de Tocciput el de la partie supéi-renre «iu cou sont longues et étroites, et font i'efiV-t à'iiw huppe tomhanle sur la nuque ; le dessus de la tête , le cou , le dos et le croupion sont bruns; les plumes du bas du cou bornées de gris blanc , et celles du dos , de gris cendré ; les pennes ont ie même fond de couleur, et leur bordure extérieure est ar- doisée ; lescouveriuressontde celte dernière teinte; lagorge, la poitrine , le ventre , les jambes et les couvertures inférieu- res de la queue de couleur blanclie ; chaque plume a dans son milieu un Irait longitudinal brun , et ses bords d'un gris cen- dré ; la queue est pareille auM ailes ; le tarse brun ; laiiie du tmisophage viçlel. On le trouve au Sénégal.

\jit phasianus ufrkanus de Lalham , décrit dans l'édition de Buffon par Sonuini , sous la dénomination de faisan d'Afri- que ^ me paroit être au individu de celle espèce. 11 a le bec jaune ; les plumes de la huppe brunes dans le milieu et blan- ches sur les côtés ; le dessus de la lete noirâtre ; les plumes du dos d'un cendre bleuâtre , avec un trait noirâtre près de ^leur tige ; le menton et le devant du cou dame couleur de rouille rembrunie ; les côtés du cou blanchâtres et un peu bi- garrés de brun; la poitrine et le ventre blancs, avec des traits noirs le lorig de leur tige ; les ailes d'un. cendré bleuâtre et noirâtres à leur extrémité ; l'aile bâtarde noire ; les huit pre- mières pennes caudales blanches sur leur côié interne du mi- lieu à la pointe; en^uile d'une couleur de plomb rembrunie ^ el noires à lexlérieur; les deux intermédiaires de celte cou- leur à leur extrémité et brunes dans le reste ; la queue longue de neuf pouces un quart ; les pieds noirs, et dix-huit pouces de longueur totale, (v.)

MUSSKjNDE , Mussaenda. Genre de plantes de la pen- tandrie monogynie et de la famille des rubiacées, sur les ca- ractères duquel les botanistes ont beaucoup varié. Il a })ean- coup de rapports avec les gratgals, lesGARDÈNES, les MVcno- CNÈMES et les QUl^^QUlNAS, parmi lesquels on a pris ou ôfé les espèces qu'on lui altribuoit ou qu'on lui enlevoit. Ce genre seroitsans doute supprimé , si Gœrlner n'avoit remarqué que la capsule, d'abord divisée longitudin;ilement en deux, l'é- toit ensuite transversalement en quatre par un appendice en forme de T, appendice auquel sont attachées les semences. Linnajus avoit donné pour principal caractère à ce genre , d'avoir pour fruit une baie ; mais le passage des baies aux cap- sules est si insensible, qu'on ne sait fixer la limile. C'est cependant le caractère que conserve Wilidenow, et en consé- quence songenre nmssenda n'est composé que dedeux espèces. Lamarck donne toute autorité au caractère de Gtertner, el songenre contient dix espèces. C'est aussi l'avis de Venlenat.

MUS ^

Aujourd'hui, quelques Fjotanislcs pensent qu'on ne doit ap- peler miissende que les espèces dont une des divisions du calice grandit et prend la foruje d'une feuille , les MacrocnÈmes en font partie. V. ce mot.

Quoique toutes les espèces de mussendes autres que celle sur laquelle Linnseus a établi son genre , soient dignes d'at- tention , il n'y en a pas de remarquables par quelques quali- tés économiques importantes. Ainsi, on peut se dispenser de les citer.

On s'en tiendra donc sévèrement à l'expression du genre tel que Linnœus l'a publié , et on ne parlera que de la Mus- SENDE APPEISDICULÉE , Mussacuda frondosa , Linn., qui a pour caractères : uïi calice à cinq découpures étroites et eu alêne, dont une s'accroît et se change en une grande feuille pélioiée, ovale , de couleur différente des autres : une corolle mono- pétale infundibuliforme à tube long, gréie et velu, et à limbe divisé en cinq petites lanières, également velues, cinq étamines à anthères linéaires ; un ovaire inférieur ovale ; surmonté d'un style à stigmate bifide et épais ; une baie cou- ronnée par le calice, et dans laquelle les semences sont dis- posées sur quatre rangs.

La mussende appendir.idée forme un arbrisseau de six à neuf pieds , à rameaux remplis de moelle et velus , à feuilles op- posées , pétiolées, ovales et velues, et à Heurs rougcâtres disposées en cime à Texlrémité des rameaux. Elle croît dans les Indes et à l'Ile-de-France. Ses fleurs passent pour atté- nuantes et diurétiques. Elles conviennent dans la toux , l'asthme , les fièvres périodiques, les duretés du ventre. Ex- térieurement, ses feuilles sont employées dans les ulcères et les maladies de la peau.

Le genre Landje n'en diffère que parce que les divisions du calice sont égales dans ce dernier, (b.)

MUSSINÎE, Mussinia. Genre de plantes établi par Wiil- denow , pour placer quelques espèces de Gortères, qui dif- fèrent des autres. Il offre pour caractères : un calice mono- phyile , cylindrique et denté ; un réceptacle velu ; deux demi- fleurons linéaires; des semences à aigrette velue. Il renferme six espèces, toutes du Cap de Bonne- Espérance, et toutes figurées parThanberg, dans les Actes de la société des Scru- tateurs de la nature. La gortère uniflorede Linnœus peut être regardée comme lui servant de type. {V. aux mots (ioRTÈRE, Agripîiylle , Gazaisie Cupidie et Berkheye. (b.)

MUSSITE, de Bonvoisin. Variété de pyroxêne d'un })lanc verdàtre , en prismes grêles et fascicules , découvert d^iis la vallée de Mussa en Piémont. V. au mot Pyroxêne.

(LN.)

94 M TT T

MUSSOLA. Selon Delaroche, c'est le nom du Squale mus* TELE, Squalus mustelus^ à Iviça, Tuiu; fîesilcs B.)lé;tres. (T)ESM.)

MTJSSOLE. Adanson appelle ainsi TArcue de Noé , Arca Noe. (B.)

MUSSONI. Nom du Cousin dans les îles ioniennes, (b.)

MOUSTAX ou MYSTAX. Variété de Laurier meu- lionnée par Pline. F. Laurus. (ln.)

MUSTELA. Nom laiia de la Belette, appliqué par Linnœus au genre qui renferme cet animal , et tous les maui- mlfères carnassiers vermlformes appeléj marie, fouine , putois ^ furet , hermine, etc. V. Marte.

Quelques espèces de mustela de Linnceus sont aussi placées dans le genre des (iLOUTONS. V. aussi ce mot. (desm.)

MUSÏELIE,Mj/5/e/m. Genre de plantes établi par Spren- gel , dans la syngénésle égale , et dans la faiTiille des corym- bifères, sur une plante fort voisine des Eupatoires, des AgébAtes, et encore plus des Stevies, dont le pays natal est inconnu. Ses caractères sont: calice commun, simple , de cinq folioles égales, renfermant constamment cinq fleurs à cinq divisions; réceptacle nu; aigrette double , l'une écail- leuse et l'autre soyeuse, (b.)

MUSTELINS, Mustelini. Famille de mammifères car- nassiers, comprenant les suricaies , les mangoustes , les martes , les moufettes et les loutres , que nous avions formée dans le Tableau systématique inséré dans le a^-.* volume de la pre- mière édition de cet ouvrage.

Tous ces animaux ont une manière de vivre analogue, et beaucoup de ressemblance dans la forme de leurs molaires. Ils ont particulièrement cela de commun , que leur seconde incisive de chaque côté , à la mâchoire d'en bas , est rentrée en dedans. Leur corps est généralement allongé , vermi- forme ; leurs ongles sont à demi-rétractUes, etc. (desm.)

MUSTELLE , Mustella. Sous-genre proposé par Cuvier, pour placer le Gade de ce nom , dont la nageoire dorsale antérieure est si peu élevée , qu'on a peine à la voir. V. Lotte, (b.)

MUSTELTJS. Nom latin donné par M. Cuvier à un sous- genre de Squales, celui des Emissoles. V. cesmols. (desm.)

MUSTERON. Nom donné par les anciens à l'une des plantes qu'ils appeloient Conyza. (ln.)

MUTAO PINIMA. C'est, selon M. Temminck, le nom brésilien du Hocco mituporanga. V. ce mot. (v.)

MUTEL. Coquille placée parmi les Moules, sous le nom de mytilus duhius. (b.)

M O L ^5

MUTELLINA. Nom qu'on donne dans les Alpes au plieUanditum miitellina. (LIS.)

MUTER , MUTERICH et MUTTER KAMILLE.

Deux noms allemands de la Matricaire des jarditss. (ln.) MUTHUSUSA. Les sauvages de quelques contrées du nord de TAmérique appellent ainsi le Bison. Voyez l'article Bœuf, (s.)

MUTILATION. V. Castration et Eunuque, (virey.) MUTILLAIRES, Mulillunœ, Lai. Parmi les insectes de l'ordre des hyménoplères , et dont les femelles, ainsi que les neutres , sont armés d'îin aiguillon , les formicaires et les mutillaires , composant la famille des hétcrogynes , sont les seuls Ton trouve des individus constamment aptères ou sans ailes. Les formicaires vivent en société, et offrent trois sortes d'individus; savoir, des mâles et des fe- melles ailés et des neutres aptères. Leurs antennes , du moins dans les deux dernières sortes d'individus , sont fortement coudées, et ordinairement plus grosses vers leur extréâniîé ; la longueur de leur premier article égale au moins le tiers Je leur longueur totale , et le suivant, dont la forme est celle d'un cône renversé , est presque aussi long que le troisième. Ces hyménoptères ont un labre corné , grand et vertical ; les ailes caduq es , et le premier anneau de l'abdomen tantôt Al forme d'écaillé , tantôt en forme de nœud, et suivi même d'un second , l'anneau suivant ayant la même figure. Les mutillaires vivent solitaires , et ne nous présentent, comme la plupart des autres insectes, que deux sortes d'individus. Les femelles sont dépourvues d'ailes, et celles des mâles sont persistantes. Les antennes sont filiformes ou sélacées, vibratiles , avec le premier et le troisième articles allongés; mais la longueur du premier n'égale jamais le tiers de celle dcvl'antenne. Le premier anneau de l'abdomen n'a jamais la forme d'une écaille , ou n'est que noduleux.

J'ai observé un très-grand nombre de mutillaires , et même dans leurs lieux d'habitation. Je les ai très-souvent suivies des yeux, sans les inquiéter, afin de découvrir quelques-unes de leurs habitudes. Elles m'ont paru occupées à chercher les pe- tites cavités des terrains chauds et sablonneux on les ren- contre ; je les ai vues y entrer et y demeurer quelque temps ; mais je n'ai jamais aperçu qu'elles y portassent des provisions pour leurs petits; et d'après cela , je suis porté à croire que ce sont des insectes parasites. M, Jurine m'a assuré que M. Eaure-Biguet , très-bon observateur, avoit surpris \ts deux sexes dans l'accouplement, et qu'il étoit certain que les individus aptères étoient des femelles , tandis que les mâles seuls étoient ailés. Un examen anatomique m' avoit, depuis

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long-temps, convaincu de cette vérité, sur laquelle des na- turalistes qui ont plus étudié les insectes dans les cabinets que sur le vivant, avoient élevé des doutes.

Quelques mulillaires , toutes exotiques , et dont nous ne connoissons encore que les mâles, ont les antennes insé- rées très-près de la bouche ou du bord antérieur du chape- ron ; les palpes labiaux composés seulement de deux articles, dont le premier fort long ; l'abdomen étroit et allongé, presque cylindrique , avec le premier anneau tantôt en forme de selle de cheval, tantôt arrondi en dessus et séparé du sui- vant par une incision -, leurs jambes sonl grêles et sans épines; leurs ailes supérieures ont moins d'aréoles que celles des au- tres mulillaires. Les espèces qui offrent ces caractères se rap- prochent des formicaires et constituent les genres : LabiD£

et DORYLE.

Dans les autres mutillaires , les antennes sont insérées à une distance assez notable de la bouche ; les palpes labiaux ont de trois à quatre articles ; l'abdomen est tantôt ovalalre ou ovoïde , tantôt presque conique, et son pren)icr anneau^ lorsqu'il a une forme particulière , ressemble à un nœud ou à une poire tronquée ; les jambes sont épaisses et épineuses. Ces mutillaires composent les genres : Apterogyne, Mu- TiLLE , Myrmose, Méthoque, Scléroderme et Myrmè- CODE. V. ces articles, (l.)

MUTILLE, M«////a, Linn., Fab. , Oliv. Genre d'in- sectes, de Tordre des hyménoptères, section des porte-ai- guillons, famille des hétérogynes , tribu des mulillaires, et distingué des autres genres qui y sont compris, aux carac- tères suivans : abdomen des deux sexes , ovoïde et convexe ; le premier anneau plus étroit , en forme de nœud ou de poire ; le second grand , presque en cloche ; corselet des femelles cubiques, point noueux et sans divisions.

Les mutilles femelles ressemblent , au premier coup-d'œil , aux fourmis ouvrières -, elles sont aptères ainsi qu'elles; la forme générale de leurs corps et leurs couleurs sont presque identiques ; de même encore que la plupart des fourmis , elles se tiennent à terre , et c'est dans son intérieur qu'elles habi- tent. Mais des caractères particuliers et des din'crences de mœurs , dont on trouvera l'exposition aux articles FoRMl- CMRES et Mutillaires, établissent enire ces insectes une ligne de démarcation très-prononcée.

Les mutilles femelles ont le corps allongé , souvent velu , ordinairement varié de noir et de fauve , ou noir et tacheté de blanc ; ces taches sont presque toujours formées par un duvet soyeux. La tête est arrondie , épaisse , convexe , ob- tuse en devant , avec les yeux ronds ou ovales et entiers : les

g

M UT 97

petits yeux lisses manquent ; les antennes sont filiformes , vibratiles , presque de la longueur de la moitié de celle du corps, avec le premier article allonfi;é, cylindrique et courbe ; le second article est petit, mais découvert. Le labre est pres- que membraneux et transversal. Les mandibules ont des formes très-variées , selon les espèces ; mais , en général elles sont fortes, arquées, pointues, plus ou moins dentées, et quelquefois éperonnées. Les palpes maxillaires sont plus longs que les labiaux , filiformes et composés de six articles iné- gaux; les labiaux en ont quatre. Le corselet a la forme d'un cube , et ne présente ni nœuds , ni sutures transverses. L'ab- domen a une forme assez analogue à celle qu'offre la mêine artie dans plusieurs guéplaires , celles notamment du genre

UMÈNE. L'aiguillon est ordinairemeni iort long ou très- fort.

Les mutilles mâlps diffèrent des femelles non-seulement parce qu'ils sont ailés , mais encore en ce qu'ils sont pourvus de trois petits yeux lisses ; que les yeux ordinaires soct échancrés; que leur corselet est conformé de la même manière que celui de la plupart des autres hyménoptères ; que son segment antérieur est distinct et arqué. Ces individus , enfini^ sont souvent autrement colores que ceux de l'autre sexe. Les ailes supérieures offrent une cellule radiale , petite , arron-^ die , et trois cellules ciibitales presque de la même grandeur, et dont les deux dernières reçoivent chacune une nervure ré- currente; la troisième , ainsi que l'a observé M. Jurine,''est presque hexagonale, et donne naissance , postérieurement , à d îux petites nervures , mais qui ne vont pas jusqu'au bas de l'aile. Les individus mâles sont encore remarquables par la grandeur de ces petites pièces en forme d'écaiUes ou de coquilles , que l'on voit à l'origine de leurs aileS supérieures. M. Jurine les désigne sous le nom XépauleUes. Dans l'ordre naturel, ces insectes avoisinent les ///>A.i« et les 5co//«. lueurs habitudes sont peu connues. On les trouve dans les sablon- nières, ils courent avec vitesse, ou cachés sons des pierres, et même sur des fleurs. Les femelles ont un aiguillon caché dans l'abdomen , avec lequel elles piquent très-fort quand on les saisit.

Olivier a décrit, dansl'Encyclopédie méthodique, soixante- neuf espèces de mutilles. On en trouve une partie en Eu- rope , et quatre seulement aux environs de Paris. J'ai donné un Mémoire sur celles de France , dans les Actes delà Sur.iété dldstoîrc naturelle de Paris. Mon ami Antoine Coquebert en a ligure un grand nombre dans la seconde décade de ses Iliust rations iconographiques des insectes. Nous renvoyons à ces ouvrages, ainsi qu'à celui de M. Jurine , sur les hyménoptères.

XXil. 7

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MUTILLE EUROPÉENNE , Mutilla europœa ^ LiDn., Fab.Elle a la tête noire; le corselet roux , un peu noir à sa partie an- térieure v l'abdomen noir, avec la base et le bord des an- neaux d'un blanc brillant un peu doré.

MuïiLLE ITALIQUE, Mutillu italica , Fab. Elle a le corps velu, noir peu brillant; le second segment de Tabdomen fer- rugineux; les ailes obscures. On la trouve en Italie.

MuTiLLE MAURE , Mutîlla maura^ Linn. , pi. G, 28, i3de cet ouvrage. Elle est noire , avec le corselet fauve, et quatre tacbes blanches, soyeuses, sur l'abdomen.

MuTiLLE R\J¥ivÈDE , Mutilla rufipes , Fab. Elle est noire, et velue ; l'abdomen a un point à sa base , et deux bandes très- rapprocbées , presque contiguës , blancs ; les pattes sont fauves. On la trouve quelquefois aux environs de Paris.

L'Amérique septentrionale en a une superbe espèce. Elle est fort grande, couverte d'un duvet soyeux d'un beau rouge écarlale , avec une bande noire transverse sur l'abdomen. C'est la MuTiLLE écarlate, Mutilla coccinca. (l.)

MUTISIE , Mutisia. Genre de plantes de la syngénésie superflue, et de la famille des corymbifères , qui réunit une douzaine d'espèces toutes originaires du Pérou et du Chili. Ce sont des arbustes ou des arbrisseaux à feuilles simples ou ailées , terminées par une vrille , et à fleurs solitaires d'un très-bel aspect. Aucun ne se cultive dans les jardins d'Eu- rope.

Les caractères de ce genre sont : calice cylindrique, imbri- qué de larges écailles ; corolle du disque trifide ; réceptacle nu ; aigrette plumeuse.

Le genre ïrichlocline de H. Cassinis'en rapproche beau- coup, (b.)

MUTONDO. Grand arbre de la côte orientale d'Afrique, dont Loureiro fait un genre dans la monadelphie polyandrie.

Voy. CoRDYLE. (LN.)

MUTONHA. Sur la côte orientale d'Afrique , vers Mo- zambique, on appelé un grand arbre que Loureiro a nommé iriphaca africana. (ln.)

MUTOU ou MOYTOU de Jean-de-Laet et de Lery. C'est le Hocco noir, (s.)

MUTTERBLUME. L'Anémone pulsatille et le Poly- GALA COMMUN portent ce nom en Allemagne, (ln.)

MUTTERHARZ. C'est, en Allemagne , le Bubon galba- num. (in.)

MUTTERHOLZ. C'est un des noms que les Allemands donnent au Camerisier , Lonicera ocylosteum. {\JS.)

MUTTERKRAUT. Ce nom s'applique à la fois en Al-

. M U Y gg

lentagtie , à fa matrîcmre des jardins , à la w<?/mg officinale , au calament^ au marrube commun , au l^de des marais > à Vagri- paume et à Valchi'mille commune, (ln.)

MUTTERNAGELEIN. C'est , en Allemagne , le GÉ-

ROFLE. (LN.)

MUTTERWURZ. C'est, en Allemagne, onV Amique de montagne , ou V Athamanie Meon. (lN.)

MUTUCHI de Gmelin. F. Moutouchi. (ln.)

MU-TUM. Trois espèces de plantes sarmenteuses sont décrites sous ce nom dans les livres de botanique chinois. L'une d'elles est le clematls sincnsis de Loureiro , appelé Mouc-THUONG en Cochinchine. (ln.)

MUTZCHEN. V. Musklewer. (ln.)

MUURBLOEM. Nom vulgaire hollandais de la Giro- flée JAUNE, (ln.)

MUWAKITYA. Nom ceylanais d'une espèce d'Eu- PH0RBE( Euph. tim-calH, L. ). (LN.)

MUXOEIRA. Les naturels de la côte orientale d'Afrique, vers Mozambique , appellent ainsi une espèce de graminée dont les graines leur servent de nourriture. La description que Loureiro donne de cette plante , qu'il nomme phleuw africa- num, peut faire soupçonner que ce n'est point celle d'un pjileum , mais sans doute celle d'un panicum. Ce n'est point le Tef des Abyssins , ni le Dora des Arabes, (ln.)

MUYS-HOND. C'est le nom que les Hollandais du Cap de Bonne-Espérance donnent généralement à tous les petits quadrupèdes carnassiers. Les Hotlentots l'appliquent principalement à un animal dont le genre ne sauroit être dé- terminé, attendu qu'on n'a aucun renseignement sur le nom- bre et la forme de ses dents. 11 y a tout lieu de croire, ce- pendant , qu'il appartient à celui des mangoustes ou à celui des suricates , si Ion en juge par la disposition des couleurs du pelage. Cependant le nombre de ses doigts ne convient ni aux unes ni aux autres , les mangoustes en ayant cinq, et les suricates , quatre seulement . à tous les pieds.

Il a la taille d'un chat de six mois , le museau fort allongé, la mâchoire supérieure débordant l'inférieure de près de huit lignes, et formant tine espèce de groin mobiie absolu- ment semblable à celui du loati de la Guyane. Les pieds de devant ont quatre grands ongles arqués et ircs-poinlus; ceux de derrière en ont cinq , courts et émoussés ; des bandes transversales d'un brun foncé rayent le dessus du corps , sur un fond brun clair , mêlé de blanc ; le dessous du corps et le dedans des jambes sont d'un blanc roussâtre ; la queue , très- charnue et plus longue que les deux tiers du corps , est

loo M Y A

noire à son extrémité , et d'un brun mêlé de blanc sur tout le

reste.

Le muys-hond se creuse des terriers très-profonds , dans lesquels il demeure pendant tout le jour : il n'en sort qu'au soleil couchant , pour chercher sa nourriture.

Cet animal , décrit par Levaillant, est , au dire des Hot- tentnts, très-commun dans plusieurs quartiers de la colonie du Cap de Bonne-Espérance, (desm.)

MUZ. V. Musa, (ln.)

MUZERAIGNE. V. Musaraigne, (desm.)

MUZARRUBA. Les naturels de la côte de Zanguebar, en Afrique , désignent par ce nom un arbrisseau que les por- tugais nomment Parrei'ra brava, mais qui n'est pas le Cissam- p.e(os pareira que les portuguais d'Amérique appellent Parrei- ra-hraoa. La plante d'Afrique appartient à un genre très- différent ; c'est le hotria- a f ricana ^ Lour. (lis.)

MWYR-COK. Nom écossais du Lagopède d'Egosse. (v.)

MYACAlSTHA. Chez les Grecs ce nom sappliquoil à plusieurs plantes épineuses. Le ruscus est dans ce cas. Le myacanthos de Théophraste seroit , selon Dalechamp , notre chausse-lrape ( centaurea calcitrapa, L. ) ; et le myaconiha de Dioscoride , ['asparagus acutifuUus , L. , etc. D'après Pline , il paroît que les Grecs nommoient orminon et myaraaihon les asperges sauvages que les Latins appeloient corruda. (lts.)

MY /V(tRE , Myagrum. Genre de plantes, de la tétradyna- mie siliculeuse et de la famille des crucifères , qui a pour caractères: un calice de quatre folioles concaves et caduques; une corolle de quatre pétales à onglet étroit et à sommet arrondi ; six élamines , dont deux plus courtes ; un ovaire supérieur ovale , chargé d'un style à stigmate obtus ; une siiiculc terminée par le style qui persiste, et contenant plu- sieurs loges à une seule semence.

Ce genre , aux dépens duquel on a établi les genres Nés- lie, Yogelie, DiDESME, EUCLIDIE, CaLEPITSE, MoEISCHIE et Rapistue , renferme douze à quinze espèces , dont les plus communes sont ;

Le MYAGRt. viVACE, qui a les silicules de deux articles, les feuilles sinuées et denliculées. Il est vivace , et se trouve dans les parties méridionales de la France , le long des champs.

Le Myagreriidé, quia les silicules sillonnées , velues et rugueuses, et les feuilles oblongues et obtusément dentées. 11 est annuel, et se trouve dans les mêmes contrées que le précédent.

Le Myagre perfolié , qui a les silicules presque sesslles ,

M Y A loi

presque en cœur, et les feuilles amplexicaules. îî est annuel , et se trouve à peu près par toute la France, dans les champs et les jardins.

Le Myagre aquatique , qui a les silicules ovales , et les feuilles oblongues , dentées , quelquefois pinnatifides. Il se trouve par toute la France , sur le bord des eaux , dans les marais. Il est vivace. C'est le Sisimbre aquatique de Linn., et de la plupart des botanistes. On l'emploie en médecine comme antiscorbutique.

Le Myagre oriental donne ses graines à la teinture sous le nom àtfaux chouan, (b.)

MYAGROIDES. Barrelier figure ( dans ses Icônes, pi. 8i6) sous ce nom la Drave des murailles {draba muralis, L.),

(LN.)

MYAGRON ou MYAGRUM. Il n'est pas complète- ment démontré que cette plante des anciens soit notre Cameline ( Myagrum saimim). Ce que Pline et Dioscoride en disent , prouve qu'il est très -douteux qu'ils aient voulu parler de la cameline. Suivant eux , le myagrum étoit une herbe haute de deux coudées, garnie de feuilles semblables à celles de la garance , et qui produisoit des graines huileuses et pareilles à celles du fenugrec. L'huile servoit pour les lampes , et pour amollir et lisser les peaux. 11 est plus pro- bable qu'ils ont voulu indiquer la na\>etie , dont les graines sont oléifères, comme celles de la cameline, et contenues dans des siliques allongées , comme les légumes du fenugrec. Quelques auteurs ont cru qu'il s'agissoit du sésame, mais ce n'est pas probable. Dioscoride nomme aussi le myagron, me- lampyron ; mais il paroît que ce nom a été mal copié , et qu'il falloit melanpycnon. Quelques plantes se trouvent décrite* sous le nom de myagrum , dans le Pinax de C. Bauhin , ou dans les autres auteurs de la même époque. Par exemple : les myagrum satwum, L. ; myagr. dentatum , W. ; myagr. perfoliatum, L. ; myagr. paniculatum , Linn. ; bunias cochleanoïdes , Willd. ; eiysimum cheirantoîdes , L. ; saponaria vaccaria, L. , etc.

Le genre Myagrum de Tournefort ou Bricour d'Adanson, a pour type le myagr. perfoUatum , L. ; le myagrum d'Adanson répond au camelina, Mœnch. , et comprenàhs myagr. satimm et paniculatum , L. ; \e myagrum Linn. est composé de toutes ces plantes et de plusieurs autres , qui sont très-voisines des crambe et des bumas, deux genres dont les espèces, comme celles du myagrum Linn. , peuvent, à cause de la variabilité de leurs caractères , former presqu' autant de genres qu'on n'a pas manqué d'établir. Il en résulte une grande confusion dans celle partie de la famille des crucifères. 11 seroit même 1res- difficile de faire connoître en peu de lignes, tous les

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changemens qu'ont subis les genres myagrum et bumas , et tous les genres qu'on a faits à leurs dépens. On peut consul- ter à cet égard Tartlcle crucifère de la nouvelle classification proposée par Desvaux, pour les crucifères siliculeuses ; et les articles Myagre., Camelene , Rapistrum, Schrankia, Kernera, Mœnchia , Crambe, Buniade , Calepine, Sorie , DiDESME , Neslie , VoGEtiE et Euclide. (ln.) MYAGRUM. T.Myagron. (ln.)

MYASPilON. Nom que les Mages donnaient à Therbe que 1^-s Grecs et les Latins nommoient Cyclaminos et Cy- CLAMEX. Voyez ces mots (ln).

MYCASTRE , Mycastrum. Genre de champignons , fort voisin des Ves.seloups établi par M. Rafinesque. Ses caractè- res sont : champignon sessile à enveloppe s'ouvrant en étoile, et à corps se déchirant dans sa partie supérieure pour l'é- mission des bourgeons séminiformes.

Ce genre, qui se rapproche infiniment de l'AsTRiQUE, ne contient qu'une espèce qu'on trouve en Sicile , dans les terrains siliceux, (s.)

MYCENE , Mycena. Genre de champignons établi aux dépens des Agarics de Linnaeus , auquel on peut donner pour type 1' Agaric fistuleux, figuré par BuUiard.

Son caractère est : point de coiffe ni d'anneau ; pédicule central ordinairement fistuleux ; chapeau non ombiliqué ; lames qui ne noircissent pas en vieillissant, (b.)

MYCES. Théophraste donne ce nom aux Champignons à tige et à chapiteaux, (b.)

MYCETES. Nom tiré du grec /j-v^nTuf {Mugîens)^ appliqué par lUiger aux singes d'Amérique du genre àes Alouattes , et que M. (xeoffroy appelle Hurleurs (Stentor). Le premier de ces noms étant reçu depuis long-temps , nous avons cru devoir le conserver. (Desm.)

MYCETOBLES. Familled'insectes de l'ordre des coléop- tères , de la section des hétéromères. Voyez Fongivores.

(o.) MYCETOPHAGE , Mycetophagus. Fab., Oliv. ; Tn/oma , Geoff. Genre d'insectes de l'ordre des coléoptères , section des tétramères , famille des xylophages , tribu des trogossi- taires , ayant pour caractères : quatre articles à tous les tarses , entiers, et dont le premier beaucoup plus long que le sui- vant ; antennes de onze articles , plus ou moins perfoliécs , grossissant insensiblement vers leur extrémité, ou terminées en massue de trois à quatre articles ; mandibules bifides à leur extrémité ; palpes maxillaires , beaucoup plus grands que les labiaux , plus gros vers leur pointe ; ceux - ci petits , presque filiformes; mâchoires à deux lobes; langueite en-

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tière ; corps ovale , déprimé , avec le corselet transversal , plus large postérieurement , et les jambes allongées , grêles, presque cylindriques , sans épines au côté extérieur.

Une des espèces principales etdesplus connues de ce genre, le myceiophage quadrimaculé ^ fut décrite , pour la première fois , par Linnaeus , dans la seconde édition de sa Faune suédoise, et placée avec les chrysomèles {^-pustulata), et avec les carabes {^-pusiulatus). Geoffroy fit de cet insecte un genre particulier qu'il nomma tritome , qui signifie trois pièces , ses tarses luiayantparun'avoirque ce nombre d'articles. Ne con- noissant point cette édition de la Faune suédoise, il ne cita point Linnaeus. Fabricius , dans son premier ouvrage général sur l'entomologie (^Systema eniom. 1775), ayantprispar erreur une autre espèce, et formant même un genre propre, pour l'insecte de Geoffroy, fit une fausse application du nom de tritome. Une adoption presque générale l'ayant , en quelque sorte , légitimée , ce naturaliste a depuis distingué le genre tritome de Geoffroy par la dénomination de mycétophage. Les mêmes insectes sont des silphdides pour Herbst , et des bolétaires pour Marsham. Dans les plus grandes espèces, les antennes vont en grossissant dès le troisième ou quatrième article ; mais dans les petites , les trois ou quatre derniers seuls sont plus gros et forment une massue. Quelques-unes de ces dernières ont été rangées , soit avec les cryptopha^es d'Herbst , soit avec les dennestes et les ips.

Les mycétophages se trouvent au printemps et en été dans les bolets et sous les écorces des vieux arbres. Nous ne con- noissons point la larve de ces insectes ; mais il est probable qu'elle vit dans les bolets et dansles troncs pourris des arbres.

Parmi les mycétophages des environs de Paris , la plus grande espèce esl le Mycétophage quadrimaculé, il^c<rfo- phagiis quadrimaculaius , Fab. ; pi. G, 1 7, 9 de cet ouvrage , la Tritome de Geoffroy. Elle a deux lignes et demie de long; le dessous du corps et la tôle sont fauves ; les antennes sont noires dans leur milieu, fauves à la base et à l'extrémité ; le corselet est noir , avec deux enfoncemens postérieurs ; les élytres sont striées , noires , avec deux taches rouges , presque carrées, sur chacune, l'une vers la base , et l'autre à l'extré- mité ; les pattes sont fauves.

Voyez, pour les autres espèces , l'article MycÉTOPHAGf: de l'Encyclopédie méthodique. Celles qu'on a nommées bifascîatus^ atomarius^ multipunctatus ^ appartiennent à la divi- sion dont les antennes se terminent en massue, (o.l)

MYGÉTOPHILE, Mycetophila, Meig. ; Sciara , Fab. Genre d'insectes de l'ordre des diptères, famille des némo- cères , tribu des tipulaires, ayant pour caractères : trompe

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très-courte ; trois petits yeux lisses, écartés ; ailes couchées l'une sur l'autre; antennes de seize articles, simples , fili- formes , arquées, courtes; yeux ovales, entiers; hanches grandes ; jambes postérieures épineuses; tête basse ; cor- selet élevé . comme bossu.

Ce genre, établi par M. Meigen , et que Fabrlcius avoit confondu avec celui des Rhagions, est très-naturel. ] .e premier met au nombre des caractères qu'il lui assigne, l'absence des yeux lisses ; mais il m'a paru que ces injectes en avoient , et qu'ils éloient seulement plus petits et plus écartés que dans les sciures et les macrocères <le cet auteur. Il les refuse aussi à ces derniers tipulaires , quoiqu'ils y soient très-distincts, et qu'il les ait même exprimés dans une de ses figures de détails.

' Réaumurnous avoit appris {Mém. , tom. 5 , p. aS et suiv. ) que la larve d'une lipulaire , formant aujourd hui le genre réroplate , très-voisin de celui de mycétophile , vivoit sur des champignons parasites du chêne. L'on pouvoit dès-lors présumer que les larves desmycétophiles avoient une manière de vivre analogue , et c'est ce (jue les observations de Degcer ont confirmé , par rapport aux deux espèces suivantes.

Mycétophile obscure , Mycetuphila fusm ^ Meig., Oliv. ; Tipula fungoriim, Dcg. Mêin. insecl. , tom. 6 , pi. 22 , fig. i-i3. Son corps est long de deux lignes, d'un brun un peu jau-- nâlre , garni de quelques poils , avec des ail'.^s sans taches et teintes uniformément de brun ; le dessus de l'abdomen de la femelle a des taches plus foncées; l'extrémité postérieure de celui du mâle est aussi plus obscure. Elle est plus grosse que dans l'autre individu; si on la presse , on en fait sortir deux espèces de tenailles, ayant quelque ressemblance avec les mandibules des araneïdes, et composées chacune de deux pièces écailleuses , mobiles ; 1 inférieure est grosse , ovale , et sert de manche à la supérieure , qui est allongée, un peu courbée en crochet , et terminée en pointe obtuse. Elle est appliquée, dans l'inaction, contre la pièce précé- dente; à la base du crochet sont deux éminences arrondies. Ses deux serres sont velues ; Ton voit entre elles deux lames écailleuses , velues , courbées en haut , et se rencontrant avec les crochets des serres ; l'organe sexuel présumé Est situé dans leur entre-deux, d'une forme conique et blanchâtre. En pressant aussi le bout de l'abdomen de la femelle, Ton voitparoître deux parties allongées, écailleuses, plajcées l'une sur l'autre, formant une sorte d'étui, dont le dessus est fortifié par une lame écailleuse, ayant la forme d'une coquille ; la pièce supérieure se compose de deux , qui se terminent en pointe mousse , tandis que l'inférieure

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ai un crochet au bout; celle-ci est concave et un peu courbée; elles sont toutes garnies de poils. Une plus forte compression fait sortir d'entre elles une autre partie qui est longue , blanchâtre , terminée en pointe mousse , et au bout de la- quelle est l'ouverture de l'anus. Les œufs renfermés dans le corps de la femelle sont blancs et oblongs.

Degéer a trouvé les larves de cette espèce dans le cham- pignon nommé par Linnaeus( Flor. suec. ) boletiis luteus. Elles y vivent en très-grand nombre , mangent sa substance inté- rieure et le criblent de petits trous ; leur corps est long d'un peu plus de trois lignes; blanc, cylindrique , un peu aminci aux deux bouts , toujours couvert d'une matière hu- mide et gluante , avec la peau transparente , de sorte que les trachées et les intestins paroissent à travers. La tcle est noire , écailleuse , arrondie et pourvue de deux petites an- tennes coniques. Ces larves n'ayant point de pattes , mar- chent; ou glissent dans l'intérieur du champignon , en con- tractant et allongeant alternativement les anneaux de leur corps. Sur chacun d'eux, les second , troisième , onzième et douzième exceptés , on voit , de chaque côté , «n petit point noir, élevé en forme de tubercule , et qui est un stigmate , communiquant, par des conduits ou des branches, avec deux trachées principales très-déliées , parcourant latéralement, en zigzag, la longueur du corps et même toute son étendue, au moyen de leurs ramiMjjB^lons. Le nombre des stigmates est de seize , huit de chaque côté.

Degéer a eu beaucoup de peine à obtenir l'insecte par- fait, les champignons qu'il reofermoit avec ces larves dans des vases, se corrompant très-vile , et les faisant périr. Comme ces animaux entrent d'ailleurs en terre pour subir leurs mé-i tamorphojcs , il faut qu'elle ail un degré d'humidité conve- nable , et souvent elle se dessèche trop vite. L'insecte par- fait éclôt hiit jours après que la larve s'est établie dans ce nouveau domicile , pour passer a l'état de nymphe. Il donne plusieurs générations par annlNlt

MYCËioPdiLE DE l'agaric, MycetophUa agarici ^ Oliv. ; Tipula agaridsdicornis , Dèg. ( Ibîd. pi. 2 1 , fig. 6 13). Cette espèce est très vive et très -agile ; elle est noire ou d'un brun noirâtre , avec le corselet d'un jaune brun , les cuisses et les jambes d'un jaune d'ocre , les balanciers d'un jaune ci- tron, et les ailes légèrement teintes de noir. Degéer trouva sa larve , vers la lin du mois de mal , sur un agaric du bou- leau ; son corps est long, cylindrique , un peu noirâtre aux deux bouts , sans pattes , composé de douze anneaux d'un blanc sale et grisâtre , avec la peau humide et gluante comme celle de* limaces ; sa tête est écailleuse.

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Ces larves se placent sur le dessous ou la surface blanche de l'agaric ; elles s'établissent et se réunissent au nombre de quatre à cinq , dans rendrolt concave ou inégal de cette surface , tapissent le fond de cette cavité d'une couche de matière blanche , semblable à de la soie, et se font , en outre, une couverture ou une espèce de tente, en construisant, d'une élévation à l'autre , au-dessus d'elles , une autre toile. Degéer s'est convaincu, par plusieurs observations , que cette toile , ainsi que la couche du fond de l'habitation , sont ourdies de fils soyeux très-déliés , et entièrement sem- blables à la toile de V araignée domestique. Ils ne sont nulle- ment le produit d'une liqueur gluante semblable à la bave visqueuse que les limaces laissent sur leur passage, quoique ces toiles en aient l'éclat dans quelques endroits la soie est plus épaisse. Degéer a reconnu que ces larves avoient deux filières semblables à celles de la chenille , et d'où il a vu sortir à la fois deux fils de soie. Lorsqu'elles furen;, sur le point (le se transformer, elles s'établirent dans un enfon- cement de l'agaric , à côté de leur nid , et tapissèrent cette retraite d'une toile blanche , si épaisse et si serrée , qu'elle les déroboit à la vue. Elles se filèrent ensuite , sous cette toile , une coque entièrement dégagée , ovale et si mince , qu'on pouvoit y distinguer l'insecte. Elles se convertirent en nymphes avant la fin du mois de mai. Ces nymphes sont de moitié plus courtes que les larvM. d'un blanc sale grisâtre, avec les yeux d'un brun jaunâtre^e corselet bossu , et les antennes placées sur les deux côtés. L'insecte parfait parut le 3 juin.

MycÉTOPHILE LUNULÉE , Mycetophila lunata , Meig. ( Dipt.^ i.f^part. , tab. 5 , fig. 2 3. ) ; Sciara lunata., Fab. Elle est jaune , avec une rangée de points noirs de chaque côté de l'abdomen; les ailes ont un point et une tache en croissant noirâtres. On la trouve en Allemagne, sur les fleurs du lierre en arbre. Sa larve vit dans les bolets. Voyez Olivier, Encyd. méth. , article MYCÉ#ft»HlLE. (l.)

MYCOGONE, Mycogone. Gejire déplantes de la classe des anandrcs, deuxième ordre, ou section des moisissures , proposé par Link. Il ne diffère du Sépédomion que par ses sporidies globuleuses, et portées sur un court pédoncule. Une seule espèce , la mycogone rose . est décrite. (B.)

MYCONIE, Myconia. Genre de plantes établi par Ruiz et Pavon pour placer trois arbres du Pérou. Il est de la dé- candrie monogynie et de la famille des mélastomes ; ses ca- ractères sont : calice à cinq dents; cinq pétales ; cinq écailles ; dis clamines inclinées, à anthères plissées , éperonnécs ; une

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capsule à cinq loges , renfermant un' grand nombre de petites semences.

Le même nom a été donné à un genre établi sur la Mo- LÈNE A TIGE NUE ; genre qui a été aussi appelé Chaixie et Ramondie. (b.)

IVIYCTÈRE , Mycterus. M. Clairville , dans le premier volume de son Entomologie h ehé/içue , ayant voulu conserver le nom de rhinomacer à un genre de coléoptères, formé d'un dé- membrement de celui que Geoffroy désîgnoit ainsi , nomme mydère le genre que Fabricius avoit appelé rhinomacer , et très-différent du précédent.

Il le place , par erreur , avec les pentamères. Olivier, dans son entomologie des coléoptères, a adopté la dénomination de myctère et son application; mais il a fait un genre parti- culier , sous le nom de rhinomacer ^ de quelques espèces que Fabricius avoit placées dans sa coupe générique, ainsi dési- gnée. Ces variations perpétuelles dans la nomenclature nuisent singulièrement à la science. V. Rhinomacer. (l.)

MYCTERIA. C'est, dans Linnseus , le nom générique du Jabiru, (v.)

MYITIS des anciens. V. Thlaspi. (ln.)

M YDAS. Nom latifl de la Tortue franche, (b.)

MYDAS, Mydas , Fab. Genre d'insectes de l'ordre AQ& diptères , famille des tanystomes , tribu des mydasiens.

Fabricius , en instituant le genre mydas , l'a composé de quelques diptères exotiques, raueés par Degéer avec ses né- motèles ^ par Linnœus , avec les mouches , et remarquables à raison de leurs antennes allongées, rapprocbées etterminées en une massue ovoïde et comprimée. Mais toutes ces espè- ces , quoique analogues , sous le rapport de la forme des an- tennes , ne se ressemblent point quant au nombre des pièces du suçoir de leur trompe. Les mydas qu'il nomme illucens et hilineaia, appartiennent, sous ce rapport et quelques autres, à la famille des notacanihes , tandis que le mydas effilé est voisin , sous les mêmes considérations , des ihérè^es^ des rhagions^ etc.

C'est à cette espèce que j'ai conservé le nom générique de mydas ; les précédentes ont formé un nouveau genre , celui d'HERMETiE, que Fabriciuf. .i ensuite adopté. Les mydas dif- fèrent des thérèoes et des rhagions par leurs antennes plus lon- gues que la tête , et dont le troisième et dernier est ovoïde, fort allongé -et terminé en massue , avec un stylet peu distinct, renfermé dans un ombilic de son extrémité. Les habitudes de ces insectes sont inconnues; mais je présume qu'elles sont carnassières.

Mydas effilé, TMidas Jilaius. Fab.; pi. G. 17. 7, de cet ou- vrage. Il a le corps noir, avec les cotés du second anneau de

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l'abdomen transparens ; les ailes d'un bleu obscur ; les cuisses postérieures dentées en scie. On le trouve dans l'Amérique septentrionale , d'où il a été rapporté par M. Bosc.

On trouve en Portugal , dans l'île de Corse et en Egypte , une espèce de ce genre , décrite par Olivier ( Enc. mélh. ) , sous le nom de Rayé , Uneatus. Elle est noire , avec quatre raies cendrées sur le corselet, et les bords des anneaux de l'abdomen blancs, (l.)

MYDASIENS , Mydasii. Tribu ( auparavant famille ) d'insectes de l'ordre des diptères , famille des tanystomes , ayant pour caractères: suçoir de quatre soies ; trompe cour- te , rétractée et terminée par deux lèvres saillantes , grandes , relevées , et faisant un angle avec elle ; palpes point saillans ; ailes écartées; dernier article des antennes, soit en massue ovoïde , et paroissant divisée transversalement en deux , soit ovoïdo-conique ; un stylet au bout.

Cette tribu comprend les genres Mydas et Thérève. (l.)

MYDION de Théophraste. V. Quercus. (m.)

MYDUZÀ, de Dioscoride. C'est la même plante que I'Anchusa du même auteur, c'est-à-dire, la Buglosse. (ln.)

MYE, Mya. Genre de testacés de la classe des Bivalves, qui offre pour caractères: une coquille transverse, bâillante aux deux bouts, dont le ligament est intérieur, et dont la valve gauche est munie d'une dent cardinale comprimée , arrondie , perpendiculaire à la valve , donnant attache au ligament.

Ce genre est de Linnôeus; mais Bruguières et Lamarck l'ont considérablement restreint , en en tirant la plus grande par- lie des espèces pour former lesgenrcs Vulselle , Mulette , PA^"opE et Glycimère.

Ainsi donc les myesnt comprennent plus que des coquilles marines qui ont les caractères ci-dessus, et leur nombre est peu considérable.

Les Myes sont habitées par un acéphale, dont le manteau est fermé par-devant , et qui fait sortir, par une des extré- mités de sa coquille , un pied court suborbiculaire ; et par l'autre extrémité , un tube double très-grand, qu'il forme avec son manteau. Il s'enfonce dans le sable , d'où on le tire aux basses-marées pour le manger.

Les deux espèces de myes les plus importantes à connoître , sont :

La Mye des sables , qui est ovale , arrondie postérieure- ment , et qui a des stries transverses se changeant en rides. ( Voy. pi. G. 14, elle est figurée). Elle se trouve dans la mer du Nord, et se mange.

La Mye tronquée , qui est ovale , tronquée postérieure-

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ment, avec des stries transverses, irrégulières. On la trouve dans les mers d'Europe.

Les Myes d'Espagne et de Nicobar, de Chemnitz , servent aujourd'hui de type au sous-genre Lavignon , établi par Cuvier dans celui de Mactres. (b.)

MYER. Animal des Myes, 11 a le devant du manteau fermé ; un tube respiratoire unique , mais à deux tuyaux uu pied cylindrique, (b).

MYGALE. ( ^yyoiA;; d'jffilien. ) C'est la Musaraigne. Ce nom a été imposé par M. Cuvier au Desman , animal très-remarquable par l'allongement de son nez en une petite trompe très-mobile , et qui avoit été placé précédemment avec les musaraignes, sous le nom de Surex moschatus. (desm.)

MYGALE , Mygala , Walck , Lalr. , Lam. ; Aranea , Lin. , Fab. (ienre d'arachnides, de l'ordre des pulmonaires, fa- mille des fdeuses ou des araneïdes , tribu des territèles , ayant pour caractères : mandibules horizontales , ayant leur cro- chet terminal fléchi en dessous ; deux des filières beaucoup plus grandes , saillantes , presque cylindriques , à quatre ar- ticles , les autres très-petites ; yeux au nombre de huit, pres- que égaux , groupés sur une élévation , et disposés ainsi : trois de chaque côté, formant, réunis, un triangle renversé et dont la pointe est en devant ; les deux autres situés sur une ligue Iransverse , entre les précédens ; deux pieds-palpes grands, avancés , insérés chacun à l'extrémité d'une mâchoire scia- tique ou formée par leur premier article ; lèvre sternale très- pelite, carrée.

Dorthes, dans un bon Mémoire sur V araignée anculaire de Linnaeus et sur V araignée maçonne de Montpellier, inséré dîTns les Actes de la Société Linnéenne de Londres , avoit aperçu le premier l'organisation particulière de leur bouche, et en avoit pris occasion de faire observer l'éloignement des ca- ractères qu'elle fournit de ceux que Fabricius assigne aux araignées. Dans un Mémoire sur les araignées mineuses, que j'ai publié il y a quelques années , et sans avoir connois- sance du travail de Dorthes, puisqu'il avoit été adresse à une société de savans étrangers, et qu'il n'étoit pas encore imprimé , je remarquai aussi des différences entre les palpes, les mandibules , la situation des yeux de ces araneïdes , et les mêmes parties considérées dans les autres espèces de cette famille.

Je m'attachai surtout à faire connoître cette sorte de râ- teau ou de carde que la nature a donnée aux araneïdes mi- neuses , pour la confection de leurs travaux , instrument que ces naturalistes n'avoient point remarqué. M. Walckenaè'r , qui avoit conçu le projet de publier une histoire générale des

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animaux de cette famille , et qui les étudioît avec cette saga- cité et ce zèle persévérant qui nous ont valu un si beau tra- vail sur cette partie de la science , revit et confirma quelque temps après ces observations , et forma un genre particulier, sous le nom de Mygale , de l'araignée aviculaire de Linnaeus , des autres espèces analogues , et des araignées mineuses d'O- livier.

Les Grecs ayant, à ce qu'il paroît, désigné nos musarai- gnes sous la dénomination de mygale, une critique sévère condamneroit l'applicalion qu'en a faite M. Walckenaè'r ; mais un abus semblable et presque général , que l'on pour- roit même reprocher aux plus grands maîtres de la scie*nce , commande l'oubli pour le passé , et la réforme , à cet égard , seroit pire que le mal.

Dans un Mémoire sur une nouvelle distribution métho- dique des araignées , que je communiquai à la Société philo- mathique , et qui fut imprimé en 1802 , à la suite de mon Histoire des fourmis , je partageai les mygales en deux sec- tions : les mygales à brosses et les mygales mineuses. Les pre- mières ont sous l'extrémité de leurs pieds-palpes et de leurs pattes une brosse épaisse; leurs mandibules n'offrent point, au-dessus de l'origine de leurs crochets, de râteau ou de dents parallèles. Les secondes ou les mineuses en sont pour- vues ; mais elles n'ont point , comme les premières , de brosse au bout de leurs pieds-palpes et de leurs pattes. Dans les ta- bles qui composent la majeure partie du dernier volume de la première édition de ce Dictionnaire d'Histoire naturelle, je fis une troisième section avec une espèce de mygale de la Nouvelle - Hollande ; ici les crochets des tarses sont dentelés en dessous; le tubercule portant les yeux est beau- coup moins élevé que dans les précédentes. Ce genre et celui d'ATYPE, que j'établis alors, composèrent une première di- vision générale , celle que M.Walckenaëra nommée depuis Ihéraphose^ ou ma tribu des territèles ^ de ce Dictionnaire. J'a- vois d'ailleurs présenté dans la première édition du même ouvrage , l'histoire des mygales.

Ces araneïdes, les atypes et les eriodons nous offrent dans la forme de leurs mandibules et la direction de leurs griffes ou de leurs crochets, un caractère commun, qui les distingue des autres fileuses. La pièce principale de ces organes , celle qui porte les griffes , a la figure d'une pyramide tronquée à son sommet , composée de trois faces , dont la supérieure convexe et arquée, et dont les deux autres presque planes, et formant au-dessous , au point de leur réunion , un angle aigu ou une vive arête.

Appliquées exactement l'une contre l'aulre par leurs faces

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internes et perpendiculaires , les deux mandibules s'avancent horizontalement et parallèlement. Les griffes se replient en dessous et sont couchées le long de chaque arête inférieure et respective ^ en se rapprochant un peu du côté interne ; de cette manière , elles se dirigent en arrière , dans le sens de la longueur du corps, et non transversalement comme celles des mandibules des autres araneïdes. Le nombre des filières ne paroît être qu,e de quatre , dont deux inférieures très- petites , et quelquefois à peine sensibles , et dont les deux supérieures longues, souvent très-saillantes , cylindriques et de quatre articles. Cette caroncule charnue et velue , qui forme une sorte de langue, au lieu d'être siluée immédiate- ment derrière la lèvre , ainsi que dans les autres araneïdes , s'étend longitudinalement entre les mandibules. Enfin , le nombre des yeux et leur disposition, indiqués ci-dessus, pré- sentent un dernier caractère , qui fortifie les précédens. De toutes les araneïdes territèles , les mygales sont maintenant les seules le premier article des pieds-palpes , quoiqu'en faisant l'office de mâchoire , ait néanmoins la forme d'une hanche , et s'articule avec le suivant, à la manière ordinaire, ou par son extrémité supérieure ; aussi ces araneïdes sem- blent-elles avoir dix pieds, dont les deux premiers sont seulement un peu plus petits que les autres. Leur organisa- tion extérieure générale est d'ailleurs semblable à celle des autres fileuses. Le dernier article des pieds-palpes des mâles est cependant plus court que le précédent , le plus souvent en forme de bouton , avec les organes de son sexe toujours à nu , écailleux , très-simples en apparence , ordinairement ovoïdes ou pyriformes , et terminés en pointe , caractère que l'on observe rarement dans les mâles des autres fileuses. Le corselet des mygales offre encore dans son milieu un enfon- cement ou une espèce d'ombilic , que l'on ne retrouve guère que dans les lycoses et quelques autres araneïdes.

Les mygales ont de grands rapports , quant à leur forme, arec les araignées-loups et les araignées tapissières des au- teurs ; corselet grand ; abdomen ovale , et pourvu de filières saillantes ; des pattes moins allongées que dans les filandières et les tendeuses, mais beaucoup plus grosses, plus robustes , en un mot plus propres à la course , et retenant avec plus de force les petits animaux dont ces insectes se saisissent pour leur nourriture ; des yeux ayant des différences de grandeur très-remarquables, tout nous constate ces degrés d'affinité. Je pense néanmoins que dans une série naturelle , les my- gales , auxquelles la nature paroît avoir accordé la préémi- nence sur les autres animaux de la même famille , se lient plutôt avec les araignés tapissières, qu'avec les araignées-

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loups. Les atypesm'avolentparu conduire par les filastres et les drasses, aux autres espèces qu'on avoit rangées parmi les araignées tapissières ; mais » suivant une observation très- importante de M. Léon Dufour , les dysdères ont , ainsi que les mygales, quatre poumons ; et l'on devrolt passer des aty- pes et des ériodons aux dysdères.

M. Walckenaër divise le genre mygale en trois familles : i.o \es plantigrades ; leurs pattes sont obtuses à leur extrémité, charnues et veloutées en dessous, à ongles non pectines, insérés eu dessus et cachés dans les poils. Leurs mandibules sont dépourvues de râteaux. 2.° Les dii^iligrudes inerm/^s; elles ressemblent aux précédentes quant aux mandibules; mais leurs pattes sont minces à leur extrémité , avec des ongles terminaux, apparens et pectines. 3." \j^?, digitigrades mineuses ; leurs pattes ont les ongles terminau.x, apparens, non pecti- nes. Leurs mandibules ont à l'extrémité de Jeur pièce des pointes cornées, droites, formant un râteau. Ces trois fa- milles répondent à mes trois divisions , avec cette différence que la troisième devient la seconde , dans la mélbode de ce naturaliste. Je me suis peu écarté, soit dans mon Histoire générale des crustacés et des insectes , soit dans mon Gênera des mêmes animaux , de la méthode que j'avois adoptée précédemment; mais j'ai donné, dans le dernier, quel- ques nouveaux détails sur les caractères distinctifs des espèces. Olivier a, depuis, traité le même genre dans rÊncyclopédie méthodique. Il voudrolt que Ton déta- chât des mygales celles qu'on nomme mineuses^ et dont il âvoit déjà lui-même indiqué la coupe , à l'article Araignée du même livre. Mais l'introduction de ce nouveau genre est d'autant moins nécessaire , que l'on n'a encore observé qu'un petit nombre de mygales ; que l'onpourroit, d'après le même motif, transformer en une nouvelle coupe générique une des deux autres divisions des mygales , et que les divisions se nuancent tellement que je connois aujourd'hui deux espèces, formant autant de nouvelles coupes, et dont l'une unit les mygales plantigrades de M. A¥alckenaër à ses digitigrades mineuses , et dont l'autre fait le passage de celles-ci à ses dir gitigrades inermes.

Les mygales paroissent être des animaux nocturnes ; leurs couleurs sombres et peu variées, et quelques observations autorisent cette conjecture. Elles établissent leur domicile dans des cavités, ordinairement souterraines, qu'elles se pré- parent ou que le hasard leur fournit , et dont elles tapissent l'ouverture à la manière des araneïdes tubicoles , égale- ment nocturnes.

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J'exposerai, en traitafnt de»^espéces , leurs habitude^ par- ticulières.

1. Extrémité supérieure de la première pièce des mandibules dé- pourvue de pointes cornées , droites et avancées.

A. Extrémiles inférieures îles pattes garnies d'une drosse épaisse et serrée, cachant en majeure p?irtie les crocliets.

Nota. L'extrémité des tarses est large et obtuse -, la brosse inférieure est ordinairement divisée en deux par un sillon longitudinal; les onglets du bout n'ont, au plus, que deux ou trois dentelures , situées à leur base et peu distinctes.

Cette division comprend ces araneïdes monstrueuses, qui peuvent occuper un espace circlaire de sept à huit pouces de diamètre, et qui saisissent t[ue!quefois de petits oiseaux. Ces espèces , que j'avois nomaiées collectivement mygales à brosses^ sont généralement propres aux contrées équatoriales et à celles qui avoisinent les tropiques. Elles sont très-re- doutées aux Antilles et dans l'Amérique méridionale , et on les y appelle araignées- crabes.

Mygale AVîculaire, Mygale avicularia \ Aranea aoicularia ^ Linn. La grandeur et la couleur de cette espèce varient. Les individus les plus grands ont environ deux pouces de longueur depuis le bord antérieur du corselet jusqu'à l'extrémité de Tabdomen ; on en trouve qui n'ont que seize lignes de lon- gueur; la couleur est ordinairement d'un brun très-foncé ou noirâtre. Tout le corps est très-velu, particulièrement dans les jeunes individus; le corselet est grand , ovale, tronqué postérieurement , déprimé , marqué vers le milieu d une pe- tite cavité transversale, et ayant tout autour des enfonce- mens disposés en rayons; l'abdomen est ovale et a deux filières longues et cylindriques; les pattes ont des poils plus longs, et en dessus quelques raies longitudinales plus claires; celles de la première et de la dernière paire sont les plus longues; les jointures sont en dessous d'un rouge pâle ; les deux derniers articles ont inférieurement une brosse , formée par des poils très-courts et très pressés ; celle de l'article terminal est ar- rondie au bout, et cache deux crochets petits et simples, Linnaeus n'en avoit vu qu'un ; les poils qui bordent mtéiieu- rement les mâchoires , ceux qui sont à la base des griffes des mandibules et les brosses de l'exIréTr^té des pieds-palpes et des pieds, sont rougeâtres. Les griifes sont fortes , coniques et très-noires; elles ont évidemment une peiite ouverture longitudinale sur le côté extérieur, près de '«-ur extrémité. Le mâle 'de cette espèce a ses palpes ttrinioés par un bouton écailleux, replié en dessous, et finissant en un crochet fort, long, arqué et très-pointu.

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La meilleure de toutes les figures de cette espèce est celle que Klééman a publiée dans son supplément à Rocsel , tom. 5 , pi. II et 12 ; il donne plusieurs détails qui font bien con- noitre les yeux, les parties de la bouche et les organes de la génération des mâles de cette espèce. Mademoiselle Mérian a représenté un individu du même sexe , comme on le voit par la figure du bouton terminé en crochet, qui est au bout des palpes. Plusieurs des autres figures citées par Linnœus et Olivier , doivent probablement se rapporter à la même es- pèce; mais il est impossible de dire lesquelles , parce qu'on a confondu avec cette mygale quelques autres des mômes contrées , très-analogues , mais distinctes spécifiquement, à raison des organes sexuels masculins , et de quelques autres caractères.

Mais comme les habitudes de ces mygales sont probable- ment les mêmes , ou ne diffèrent que très-peu , je présente- rai ici les faits les plus importans que les naturalistes et les voyageurs ontrecueillis sur ces araneïdesdu nouveau Monde. Celle que Pison, dans son Histoire naturelle du Brésil, nomme nhamdu i , ou nhamdu-gunçu (grande araignée), est une espèce très-voisine de Vmnculaire. Suivant lui, elle nidifie, à la manière des oiseaux, dans les décombres et les cavités des vieux arbres. Elle vit très - long - temps et supporte de grandes abstinences. Des individus que fauteur avoit renfermés dans des boîtes y ont vécu quelques mois sans prendre de nourriture. Cette espèce construit , quoi- que rarement, avec les deux filières saillantes qu'elle porte à l'anus , des toiles semblables , par leur disposition , à celles que font , dit-il , toutes les autres araignées. Mais la généralité de cette assertion et la description que cet auteur donne de la toile de ces mygales , semblent nous prouver qu'ilne parle point ex visu, mais qu'il s'abandonne à des rai- sonnemens ou à des conjectures. Telle estencore sa conduite, lorsqu'au sujet de l'accouplement de ces animaux, il avance que leurs corps sont alors opposés l'un à l'autre {ai>ersis clu- nilfus). Les femelles portent leurs œufs sous le ventre. On en - châsse dans de l'or les griffes de leurs mandibules, pour s'en servir en guise de cure-dents , et même comme d'un très-bon odontalgique. Non-seulement la piqûre de ces animaux', mais la liqueur qui distille de leur bouche , et même ,- dit-on , leurs poils , sont réputés venimeux. La partie du corps que l'animal a piquée s'engourdit, devient livide et noirâtre, s'enfle considérablement , et le mal augmente quelquefois à un tel point qu'il est , suivant Pison, incurable. On cicatrise la plaie ; mais le meilleur antidote, au rapport de cet au- teur, est fourni par la préparation du crabe qu'il nomme

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aratu (^grapsns pictus). On le pile , et on en fait un breuvage ou une potion avec du vin. 11 agit comme vomitif.

Les anciens ont ée;alemenl vanté les vertus antivénéneuses des crustacés, et leur emploi peut, en effet, être salutaire -lans les circonstances qui nécessitent l'usage des alkalis. M. Ar- thaud a donné la mort à des poulets, en les faisant piquer par la grosse araignée-crabe du Cap , ou notre mygale crabe. Celte espèce fréquente , suivant lui , les lieux humides , tue et suce de gros insectes , des kakerlaques , et souvent ses semblables. 11 prétend qu'une sorte de taon la fait périr , en la piquant sous le ventre , probablement aux orgnnes de la respiration. L'attouchement de celte dernière araneïde , ou plutôt ses poils, produisent des démangeaisons urticaires, et semblables à celles qui résultent de l'introduction des poils de certaines chenilles dans Tépiderme.

Si une saine critique nous autorise à révoquer en doute ou à soupçonner d'exagération et de partialité les témoignages de quelques voyageurs ou de quelques historiens au sujet des effets du venin de ces araneïdes , une prudeijB éclairée par l'observation nous défend de nier l'existence cie ce venin, et nous tiendra en garde contwî les périls d'une fausse sécurité. Ici, comme dans bien d'autres incertitudes, elle attendra que de nouvelles expériences assurent son jugement.

Les poils de ces mygales font aussi, dit-on , sur la peau la même impression que ceux de quelques chenilles. « Un malin comme je me levois , un des voyageurs espagnols fil une ex- clamation , en voyant sur mes habillemens , depuis les pieds jusque vers les épaules, une trace brune , occasionée par le passage d'une de ces araignées-crabes, et d'une liqueur acre et caustique qui distille sans cesse de sa bouche et de ses pattes. Heureusement elle éloit passée innocemment pendant que je dormols profondément, et s'étoit contentée de me laisser ce billet de visite (Lescallier, Notes sur la traduct. franc, du Voyage du capitaine Sledman , tom. 3, p. 24.0.)

Pison rapporte que la mygale, dont nous avons parlé plus haut d'après lui , se dépile avec l'âge, et que la peau de son ventre est alors d'un rouge incarnat pâle.

Mademoiselle Merlan nous dit avoir trouvé plusieurs indi- vidus de la mygale aviculaire sur l'arbre nomme guajaoe , y faisant leur domicile et se tenant à l'affût dans le cocon que forme , pour se changer en chrysalide , une chenille du même arbre ; elle assure formellement que cette mygale ne fiie point de cocons longs , comme quelques voyageurs ont voulu , suivant elle , nous le faire accroire. La plupart des autres té- moignaiges que nous pourrions alléguer ici,ne nous semblen pas d'une grande autorité, soit parce qu'ils ne sont pas ex

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visUf soit parce qu'il est difficile de savoir à quelle sorte d'aranéïdes il faut les appliquer. L'auteur de l'Histoire natu- relle de la France équinoxiale place Thabilation de la my- gale aviculaire , ou celle de l'espèce suivante , dans les fentes des rochers. Dans le Voyage ii la Guyane, du capitaine Stedman , cet insecte y est appelé araignée de huisson^ et sa toile , y est-il dit , est de peu d'étendue , mais forte. La my- gale aviculaire est pourvue de deux longues filières; ainsi point de doute qu'elle ne puisse filer ; mais lorsqu'on examine la forme des crochets de ses tarses , lorsqu'on les voit si petits et presque sans dentelures, et si différcns ainsi de ceux dés aranéïdes industrieuses , on est tenté de refuser à cette my- gale les facultés qu'ont la plupart des autres aranéïdes et de supposer que sa force lui suffit. Elle vil, suivant mademoi- selle Mérian , de fourmis , qui échappent difficilement à sa vigilance et à ses poursuites ; à leur défaut , elle tache de surprendre dans leur nid de petits oiseaux, dont elle suce le sang avec avidité. Ce changement de nourriture est un peu différent, m A n'importe. Les fourmis se vengent quelquefois des maux qu™les éprouvent de la part de leur ennemi , et tombent sur lui en si grande quantité , qu'il est hors d'état de se défendre , et finit par être dévoré.

M. Moreau de Jonnès , chevalier de l'ordre de la légion d'honneur , correspondant de l'académie des sciences , et qui a fait une étu^e spéciale des productions natu- relles de la Martinique, il a fait un séjour de plusieurs années, a bien voulu, sur mon invitation , rédiger les obser- vations qu'il avoit recueillies au sujet d'une espèce de mygale commune dans cette île. Mes lecteurs me sauront, j'espère , gré de leur offrir ici le Mémoire il a réuni ces faits inté- ressans , et qu'il a eu l'amitié de me donner, après en avoir fait la lecture à la même académie.

« La mygale aviculaire (i) porte aux Antilles le nom d'a- raignée crabe. Elle garde encore celui de matoiUou , que lui donnoient autrefois les Caraïbes. Cette espèce est la plus grande des deux cents , qui sont connues des naturalistes. Sa longueur est d'un pouce et demi ; lorsque ses pattes sont étendues , elle couvre une surface de six à sept pouces. Elle fuit les lieux habités , et je ne l'ai jamais trouvée dans les villes V araignée chasseuse de Linnœus et six autres espèces du même genre se sont, au contraire, très-multipliées.

Amsi que M. de Latreille l'a reconnu par la seule inspec- tion de l organisation de QCt animal , il ne file point de toile

(i) Cette mygale dont M. Moreau de Jcnnès m'a donne un indi- vidu, n'est point Vaficalaire , mais celle que j'ai nomme'e craie ( cancerides).

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qui lui serve de demeure ; il se terre et s'embusque dans les fentes de la paroi dépouillée des ravins creusés , dans les tufs volcaniques , ou dans les laves décomposées. 11 chasse souvent au loin , et se tapit sous des feuilles pour surprendre sa proie , ou il grimpe sur les rameaux des arbres pour dé- vorer les petits du colibri et du sucrier {certhia flaveoia, L. ). 11 profite ordinairement de la nuit pour attaquer ses ennemis , et c'est communément à son retour, vers son terrier, qu'on peut le rencontrer le matin , et l'enlever quand la rosée , dont les plantes sont chargées, ralentit sa marche. »

« La force musculaire de la mygale est très-grande , et l'on a beaucoup de peine à la faire lâcher les objets qu'elle a saisis, même lorsque leur surface ne donne prise ni aux crochets dont ses tarses sont armés , ni aux fortes tenailles qui lui ser- vent à tuer les oiseaux et les anolis. L'opiniâtreté, l'achar- nement qu'elle montre en combattant ne cessent qu'avec sa vie ; j'en ai vu qui , percées vingt fois d'outre en outre à tra- vers le corselet, continuoient d'assaillir leurs adversaires, sans montrer la moindre envie de leur échapper par la fuite. Au moment du danger , cette arachnide cherche ordinaire- ment un appui contre lequel elle puisse se dresser et épier l'occasion de se jeter sur son ennemi. Ses quatre pattes pos- térieures sont alors fixées sur la terre ; mais les autres, à demi étendues , sont prêtes à saisir l'animal qu'elle va attaquer. Quand elle s'élance sur lui , elle se cramponne sur son corps avec tous les doubles crochets qui terminent ses pattes, et elle s'efforce d'atteindre la base supérieure de sa tête pour enfoncer ses tenailles entre le crâne et la première vertèbre ; j'ai reconnu , dans d'autres insectes américains, le même ins- tinct de destruction.

« Lorsque la mygale applique ses tenailles sur un corps dur et poli , on y voit aussitôt les traces d'un liquide qui doit être le venin qu'elle injecte , et qui rend sa piqûre dan- gereuse ; cependant je n'ai pu découvrir l'issue par laquelle se fait rémission de cetJe liqueur , dont les effets passent pour redoutables dans les Antilles ; je n'ai point vu non plus la mygale se servir, comme on l'assure , d'une autre liqueur sécrétée par des glandes situées à l'extrémité de l'abdomen , et qu'on prétend être lancée par elle contre ses adversaires pour les aveugler par sa puissance corrosive. Les individus de cette espèce que j'ai conservés long-temps , et en grand nombre , n'ont jamais eu recours à ce moyen dans les com- bats qu'ils se livroient pour s'emparer de leur proie ; mais j'ai reconnu l'existence de cette liqueur qui est lactescente , et d'une singulière abondance pour le volume de l'animal. »

« La mygale porte ses œufs renfermés dans une coque de

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soie blanche , d'un tissu très-serré , formée de deux pièces ar- rondies , unies par leur limbe. Elle maintient celte coque sons son corselet au moyen de ses antennules, et elle la transporte avec elle ; quand elle est très-pressée par ses ennemis , elle l'abandonne un instant; mais elle revient la prendre aussitôt que le combat a cessé.

'c Les petits éclosent par une succession rapide ; ils sont entièrement blancs ; le premier changement qu'ils éprouvent est l'apparition d'une tache noire triangulaire et velue qui se forme sur le centre de la partie supérieure de l'abdomen.

« J'en ai conservé , de iBoo k 2000 , qui provenoient de la même coque ; ils furent tous dévorés dans une seule nuit par des fourmis rouges , qui , guldéespar un instinct dont la fmesse mit en défaut tous mes soins, découvrirent la boîte je les avois renfermés, et s'y introduisirent au moyen d'une ouverture presque imperceptible , par laquelle des myriades passèrent une à une dans l'espace de quelques heures. C'est très-vraisemblablement à la guerre destructive que ce genre d'insecte fait aux araignées aviculaires qu'on doit les bornes étroites dans lesquelles est renfermé le nombre de ces arach- nides, qui ne répond point à leur prodigieuse puissance de re- production, a

Mon ami et mon confrère à l'Académie des sciences , M. le baron Palisot de Beauvois, m'a dilque la mygale avicu- laire , représentée dans son bel ouvrage sur les insectes re- cueillis par lui (icins ses voyages en Amérique et en Afrique, aptères ^Y\. 3 , fig. i , habite les campagnes et s'établit dans les cavités que le sol lui présente. Elle revêt les bords de l'ou- verture de son domicile d'une toile , ainsi que le font les sé- gesiries et autres araneïdes tubitèles.

Mygale jambes-épineusls, Mygale spinicrus. Cette espèce, dont je n'ai vu que le mâle , et qui a été rapportée du Brésil par M. Delalande fils , ressemble beaucoup à Vaviculaire. Son corps est long d'environ un pouce et trois quarts , d'un noir mat et tout couvert de poils assez longs, d'un brun fauve foncé. L'organe sexuel a la forme d'une larme batavique , se terminant en une pointe assez longue et assez forte, se diri- geant d'abord en bas, et faisant ensuite un crochet en de- hors ; l'extrémité de cette partie est ainsi contournée : les deux jambes antérieures sont terminées en dessous par deux pointes cornées , aiguës, fortes, recourbées, et dont l'interne plus grande.

Celte espèce est peut-être le nhamdu de Pison , dont j'ai parié ci-devant.

Mygale de le Blond , Mygale Blondiî , Lat. , Gêner. .^ Cfust. et Insect. , tom. i , tab. 5 , fig. 1 ; Palis.-de-Beauv. ,

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iiisect. âtAfriq. et d Am. ; aplères , pi. 3 , fig. 2 ; Aranea spini - moUlis F Linn. Son corps est long de deux pouces et demi , tout garni d'un duvet d'un brun minime ou roussâlre , avec quelques raies plus foncées sur les cuisses , et des poils plus longs sur les pattes et sur l'abdomen. Le premier article des tarses est parsemé de piquans noirs et mobiles; les deux on- gles du bout sont un peu dentelés à leur base. Les organes sexuels du mâle sont presque coniques, courts , épais et creusés à leur extrémité supérieure en façon de cure-oreille.

Elle m'a été donnée par feu le Blond, médecin'et correspon- dant de l'Institut , qui l'avoit trouvée à Cayenne.

Mygale crabe, Mygale cancerides, Lalr. Elle est un peu plus petite que la précédente , d'un brun foncé et un peu rous- sâlre, avec la poitrine et le dessous de l'abdomen noirs. L'or- gane sexuel du mâle, finit en une pointe arquée , comprimée au bout , unA()eu plus longue seulement que sa base.

On la trouve à Saint-Domingue, à laMartinique , etc. EU» est connue sous le nom à' araignée crabe.

Mygale fasciée , Mygale fasdata. Cette belle espèce est figurée dans Séba , tom. i , pi. 67 , fig. 7. M. AValckenaër l'a aussi représentée dans son histoire des aranéïdes , fasc.^ , tab. I. (la femelle). Elle est de la taille àe Y aviculaire ^ mais bien distincte par une bande grise, large et festonnée, qui occupe le milieu de la longueur de l'abdomen ; le fond de sa couleur est d'un brun rougeâtre. Elle est de l'île de Ceylan.

Mygale très-noire. Mygale atra. Elle ressemble beau- coup à la mygale articulaire ^ mais elle est un peu plus petite , d'un noir plus foncé , avec les poils moins longs ; ceux du dessous des mandibules et des bords des mâchoires sont d'un roux assez vif. L'organe sexuel du mâle est presque globu- leux, avec une pointe très-fine et arquée à son extrémité ; l'extrémité des premières jambes offre en dessous, dans le même sexe , une épine fort avancée, courbée , et accompa- gnée de poils.

Cette espèce a été trouvée , par M. Cattoire, dans les en- virons du Cap de Bonne-Espérance. Elle y fait son domi- cile sous les pierres et les saillies des rochers.

M. Dumont a observé, dans l'Île-de-France, une mygale de la même division , mais dont la taille ne surpasse pas celle de la lycose tarentule. Son corps est d'un brun ferrugineux , et légèrement couvert d'un duvet cendré.

Celte espèce sera désignée sous le nom spécifique de Brunne , brunnea. M. La Billardière en a apporté une aulr« et assez grande de son voyage en Syrie.

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h. Exiiémitcs inférieures des pâlies çans brosses et simplement ve- lues ; ciochets terminaux découverts , saillaus ( Ires-dislincle- ment pertinés en dessous ).

Mygale calpéiène, Mygale calpeiana , Walck, , Hist. des aran. , Fasc i , pi. 8 et 9 ; le maie. Elle est d'un brun ro«- geâlre uniforme , très-velue, avec deux éminences carrées sous le ventre , au-dessus des organes de la respiration. Les nian<!)bules sont plu> allongées et plus comprimées lalérale- meftl que dans l'avicnlaire ; 1 extrémité de 1 abdomen offre deux filières cjuadriarticulées , dont la longueur surpasse sen- siblemeni ©«ile de la moitié de cette partie du corps ; les

f>altes sont garnies de piquans ; les palpes du mâle sont al- ongés et terminés par mi article en massue ovale , ayant en dessous un appendice ovale , rouge , et qui se prolonge en un fiict irès-grêie, et guère plus court que le palpe.

Cette espèce a un peu plus de deux centimîlres de lon- gueur. Elle est très-commune aux environs de Gibraltar, on la confond avec la tarentule. Elle y a été observée par M. Durand, de Montpellier.

Mygale noïasiène , Mygale nota^iana , Walck. ; tab. des Aran. , pi. i , fig. 5 (pour le dessin des yeux). Elle n'a guère plus de sept à huit lignes de longueur ; son corps est d'un brun clair, luisant, peu velu, si ce n'est sur les pattes; les deux premières paroissenl être aussi grandes que les deux der- nières ; le tubercule sur lequel les yeux sont placés est peu élevé.

Elle a été rapportée de la Nouvelle - Hollande par feu Péron et M. Lesueur..

1 1 . Exlrémité supériewe de la première pièce des mandibules , armée de pointes cornées , droites^ ai>an(:ees ., et dont qucli^ues- uncs forment ordinuircmenl une sorte de m/^a«. ( ARAIGNÉES MtNEtI^ES d'Olivier. )

A. Bout des tarses gnrni en dessons d'une brosse épai^.se et serrée, «.-(icbant , en majeure partie, les crochets.

Mygale herseuse , Mygale cratiens. Je n'ai qu'un individu niulllé de celte espèce. Son corps est de la taille de la précé dente , et noir; mais il conserve des restfîs d'un duvet cendré, <jui forme deux ou trois raies longitudinales sur chaque man- dibule; I cxlrén^ité supérieure de la première offre un assez grand nombre de pointes avancées et parallèles, plus peliles que celles des espèces suivantes ; j'en ai cependant distingué de plus fortes.

Celle arangïdc a des rapports avec la Mygale becluse,

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Mygale nidulans de M. Walckenaër, décrite et figurée avec son nid , par Brown , dans son Histoire Naturelle de la Jamaïque , tab. 4.4 , fig. 3. Fabricius l'avoit d'abord distinguée de ïarai- gnée venatoria de Linnseus , sous le nom de nidulans; il l'a ensuite mal-à-propos confondue avec celle-ci , qui est du genre des thomises.

La mygale recluse construit son nid de la même manière que la mygale maçonne. Elle l'établit dans les lieux pierreux ; sa piqûre, suivant Brown , cause une douleur très-vive , qui continue pendant plusieurs heures, et qui est même quel- quefois accompagnée de fièvre et de délire. Les sudorifiques ordinaires , des liqueurs spiritueuses , telles que le tafia, le rhum, dissipent bientôt, en provoquant les sueurs et le som- meil , ces accidens, Badier a souvent vu , dans l'île de la Gua- deloupe , la même espèce ; mais il l'a toujours rencontrée dans les sols argileux , et en pente douce. Retiré de son nid, l'jnlmal, ainsi que la mygale maçonne, ne donnoit pres- que aucun signe de vie.

B. Bout des tarses sans hroisse , et simplement velu en dessous ; cro- chets découverts et saiiiaris.

* Crochets des tarses très-distinctemeot pectine» en dessous.

Mygale cardeuse, mygale carmînans ^ Latr. Elle m'a été envoyée d'Espagne par mon ami M. Léon Dufour; et des environs d'Aix, par M. Boyer de Fon-Colombe.

Le corselet est plus aplati que dans les précédentes. Le corps est d'un brun fauve , pâle, mêlé de cendré ; les mandi- bules sont noires ou noirâtres , garnies de duvet cendré et parosssanl avoir chacune deux raies noires, formées par l'ab- sence du duvet. Le râteau est de quatre dents ; les pointes du côté interne , si elles existent, ne sont pas au premier coup d'œil apparentes. Les mâles ont une forte épine à l'extrémité postérieure du cinquième article de la première paire de pat- tes. L'organe sexuel est arrondi inférieurement et se prolonge à son extrémité en form ; d alêne très-aiguë et bifide.

Olivier a observé aux environs de Saint-Tropcs et aux île» d'Hyères, le nid d'une mygale qui, par sa position et sa cons- truction, seroit très-dislinçt des autres , et annonceroit dans l'animal qui le fait , des moeurs particulières. Ce nid étoit si- tué dans un terrain horizontal. Sa porte , quoique de terre , et se fermant d'elle-même par une espèce de ressort , res- sembloit à un cercle dont on auroit retranché une petite portion. Elle étoit attachée à un des côtés de l'ouverture , et l'entrée élolt libre. L habitant étoit absent, et ce naturaliste çonjeeLura qu'il ne la ferme que dans les momens il l'oc-

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cnpe. Je suis porté à croire que ce nid est celui de la my- gale que je viens de décrire.

M. Boyer de Fon-Colorabe ne l'a jamais surprise dans sa demeure ; mais il a observé avec un peu plus de détails le nid dont j'ai parlé d'après Olivier. 11 est formé d'un tuyau de soie , enfoncé verticalement en terre , et recouvert à son orifice par deux baltans placés d'une manière horizontale, à la surface du terrain ; une cloison solide coupe cette porle extérieure, un peu au-dessus d'elle. Des personnes ont dit à ce naturaliste , avoir vu l'animal en sortir j-et y rentrer en fermant sa porte.

"** Crocliels des tarses sans dentelures sensibles à leur partie infe'- rieure.

Mygale maçonîsie , Mygale cemenlaria , Latr. , Mém. de la Soc. d'Hisl. Nui. de Paris -, an 'j ^ pag. 121 , pi. 6 , fig. i , A F; Walck., Hist.des aran. , fasc. 3 , tab. lo. Le mâle ;— Dor- thès , Trans. ihe linn. sociel. , tom. 2 , pi. 17 , fig. 6,

Elle a environ dix-sept millimètres de longueur ; son corps est d'un brun fauve, avec la carène du tronc , ses bords et les pattes plus pâles. Les mandibules sont noires ; leur pre- mière pièce est armée, vers l'extrémité de son bord inlerne, et au-dessus de l'origine du crochet , de petites épines cornées, , droites , avancées et aiguës ; les terminales ou celles qui sont ;^i!uées au-dessus de la base du crochet, forment un râteau composé de cinq dents presque égales et toutes pointues. L'abdomen a, au milieu du dos, une suite de taches trian- gulaires , brunes, et des points plus foncés sur les côtés. Les denx filières inférieures sont à peine apparentes; les deux auires ouïes grandes , ne dépassent point, ou dépassent de très-peu , l'extrémité de l'abdomen.

Elle se trouve aux environs de Montpellier.

Presque toutes les aranéïdes ayant les deux crochets supé- rieurs de leurs tarses pectines ou en forme de cardes , Ton conçoit qu'elles trouvent dans la disposition de ces parties , des moyens propres à l'exécution de leurs travaux. Mais les crochets de la mygale maçonne , par leur simplicité , n'y sont guère propres, quoique son industrie ne le cède en rien à celle des autres aranéïdes et qu'elle la surpasse même. Il faut donc que la nature y supplée par d'autres instrumens. Ces réflexions me conduisirent à un examen très attentif de leurs organes, et je découvris, au-dessus de leurs mandibu- les i, des pointes dures, cornées, dont les antérieures rangées sur une série transverse , imitent une sorte de râteau. Sans avoir vu ces animaux dans le moment de leurs manoeuvres,

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je ne puis guère douter que cet însfrumenf particulier ne leur soit très-utile pour la confection de leur nid. J'ai exposé le fruit de mes observations sur les mygales mineuses , dans le nouveau recueil des Mémoires de la Société d'Histoire natu- relle de Paris ( an 7 ) ; et par extrait , dans le Bulletin de la Société Philomalhique.

En cachant si soigneusement leur retraite , en la prépa- rant et la construisant avec tant d'art, ces aranéïdes ont moins en vue leur propre conservation que celle de leur postérité. Rossi a trouvé dans le nid de l'espèce qu'il a fait connoître sous le nom d'araignée de Sauvages , sa nom- breuse famille. Ces deux espèces se creusent dans les sols argileux un terrier ou boyau cylindrique , ayant partout le même diamètre. Ses dimensions relatives peuvent varier suivant l'espèce et l'âge de l'animal. Celui de la mygale ma- çonne, espèce dont les mœurs ont été le mieux observées, a de deux à sept décimètres de longueur. Son ouverture a un peu plus d'un centimètre à la superficie , et environ deux millimètres de moins au-dessous de l'évasement. Elle choisit ordinairement les terrains en pente ou coupés verticalement , afin que les eaux pluviales ne puissent s'y arrêter , et qui , en outre, sont arides et composés d'une terre forte , sans mé- lange de rocaille ni de petites pierres. Elle a soin d'unir les parois intérieures de son habitation , et de les tapisser d'une pellicule soyeuse , afin de les consolider ou d'éviter ainsi les éboulemens. Cette toile peut encore contribuer à la facilité de ses mouvemens et à l'avertir, par les commotions qu'elle éprouve , de ce qui se passe à l'entrée. Une porte ou espèce de trappe plaie , mais assez épaisse , circulaire , composée de différentes couches de terres détrempées et liées ensemble avec de la soie, unie , un peu convexe , et recouverte de fils très-forts , et formant un tissu serré en-dessous , raboteuse et inégale , concave même en-dessus , ferme l'ouverture de ce terrier. Les fils dont est tapissé le plan intérieur de ce cou- vercle , se prolongent du côté du bord le plus élevé ou supé- rieur de l'entrée , y fixent et attachent le couvercle , en for- mant une penture ou charnière , de sorte qu'étant incliné , à raison de la direction du terrain, il retombe par sa propre pesanteur , et que l'entrée de l'habitation est toujours natu- rellement fermée. Le contour de la porte correspond si bien à celui de l'ouverture, qu'il ne la déborde en aucun endroit , qu'il n'y a pas le moindre vide dans les joints , et que-les proportions n'auroient pas été mieux observées , quand elles auroientété prises au compas. L'entrée, par son évasement, forme une sorte de feuillure , contre laquelle la porte vient battre, et n'a que le jeu nécessaire pour y entrer et s'y ap-

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pliquer hermétiquement. La convexité postérieure de la porte favorise encore la justesse de la fermeture.

L'abbé Sauvages , auquel nous sommes redevables de ces observations sur la M. maçcnne , n'a pu découvrir la manière dont elle construit sa demeure , dont elle se nourrit et pro- page son espèce. Les individus qu'il a pris vivans ont tous péri malgré les soins qu'il a employés pour les conserver dans cet état.

La mygale maçonne emploie une force et une adresse sin- gulières, lorsqu'on essaye d'ouvrir la porte de son domicile. L'observateur que je viens de citer ayant voulu la soulever, par le moyen d'une épingle , éprouva une résistance à laquelle il ne s'attendoit pas. Il vit l'animal dans une altitude renver- sée, accroché par les jambes, d'un côté aux parois de l'en- trée du trou, de l'autre à la loile qui revêt le derrière de la porte , tirer à lui celte porte, de sorte que dans cette lutte , elle s'ouvroit et se fermoit alternativement. La mygale ne céda que lorsque la trappe fut entièrement soulevée ; elle se préci- pita alors au fond du trou. Toutes les fois qu'on répète les même tentatives , au moindre mouvement même l'animal ac- cou4-t sur-le-champ, afin d'empêcher qu'(in n'ouvre sa porte, et ne cesse d'y faire la garde. SI elle est fermée , on peut tra- vailler aux environs , cerner la terre pour enlever l'habita- lion, sans que le péril dont elle est menacée lui fasse aban- donner sort posle ; mais dès qu'on l'a expubée de ses foyers, on croiroit qu'elle a perdu toute sa vigueur. Elle paroît lan- guissante, engourdie, et si elle fait quelques pas, ce n'est <}u'en chancelant. On ne Ta jamais vue sortir d'elle-même de son habitation , et la clarté du jour semble lui être contraire. On a conclu de ces faits que cet animal pourroit bien être nocturne. Olivier dit , en effet , que la mygale ariane qu'il a trouvée dans l'île de Naxos, se tient constamment dans son nid pendant le jour, et qu'elle n'en sorl que la nuit.

L'abbé Sauvages avoit découvert la mygale maçonne aux environs de Montpellier, sur les bords des chemins et les berges de la petite rivière de Lez. Mais la description qu'il en avoit donnée étoit très-insuffisante. Dorlhès y a suppléé par un mémoire qui fait partie du second volume des Tran- sactions delà Société Linnéenne.

Piossi a trouvé , en Toscane , dans les terrains formés de débris de couches schisteuses , humides, également en pente ou coupés à pic, dépourvus aussi de végétation et de pier- res , une autre mygale qu'il avoit confondue avec la précé- dente. Son industrie et ses habitudes sont d'ailleurs les niêmes. llossi dit seulement que lorsqu'on la force à reconstruire son opercule, ce qu'elle fait dans un peu plus d'un jour, cet oper-

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cule n'est plus mobile. Il est possible que celte expérience ait eu lieu aux approches de l'hiver, et qu'à cette époque la mygale fixe sa porte.

IJorthès a ajouté quelques observations à celles de Sauvages : Si on fixe avec une épingle l'opercule qui ferme Tenlrée , ou si on l'enlève, on en trouve un nouveau le lendemain à l'ou- verture. 11 paroît constant que ce n'est que de nuit qu'elle bu- tine et qu'elle travaille à la construction de son habitation. Son fond contient souvent des débris de divers insectes et même de coléoptères assez gros. C'est en août que cette aranéïde a atteint toute sa grosseur , qu'elle est provoquée à l'amour et qu'elle est plus timide. La fécondité semble changer le carac- tère de la femelle. Mère en septembre , elle ne fuit plus , de- vient méchante et plus vorace. Les filets qu'elle étend sur les inégalités des terres voisines de sa demeure lui procurent pour nourriture différens insectes, particulièrement des dip- tères. Elle vit alors en société avec son mâle, etDorthès a trouvé une trentaine de petits avec eux.

On voit, dans la collection du Muséum d'Histoire natu^ relie de Paris , un petit bloc de terre , taillé en forme de parallélipipède , et dont un des côtés offre , à chacun de ses quatre angles, un nid de mygale de l'espèce suivante, à ce que je crois. On peut en conclure que ces ani- maux ne craignent point la société ou le voisinage de leurs semblables , et qu'ils ne se nuisent point mutuellement.

Mygale de Sauvages , Mygale Sauvagesii , Latr, , Mém. de la soc. d'Hisi. nat. de Paris , an Vil , pag. I25 , pi. 6 , fig. 2 , A D ; Mygale fodiens ^ Walck. ; Aranea Sauvagesii ^ Koss.; Faun. etmsc. , tom. 2, tab.g , fig. 11 ; ejusd. Act. soc. iial. , tom. 4 1 P- 122 134. , fig. 7 , 10.

Elle est d'environ un tiers plus grande que la précédente; d'un brun foncé et luisant. Son corselet est plus large , plus carré et élevé en devant, ce qui rapproche cette espèce de mes énodons , ou des missulènes de M. AValckenaër. La première pièce des mandibules est forte et très-obtuse ; son extrémité supérieure offre ,. au bord interne , quatre pointes cornées , aiguës et disposées sur une série longitudinale ; le bout interne en a deux autres plus fortes et obtuses ; on en voit une troisième, plus extérieure, isolée et pointue. Les yeux sont plus espacés que dans aucune autre espèce du même genre; les deux latéraux postérieurs sont surfout beaucoup plus éloignés des deux latéraux antérieurs. Les extrémités inférieures des pieds-palpes delà femelle et le des- sous des quatre tarses antérieurs sont très-épineux ; les deux filières supérieures , ou les plus apparentes, sont beaucoup plus longues que dans la mygale maçonne , et se prolongent

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notablement au-delà de l'anus. Elle se trouve dans l'île de Corse ( Foyirz l'espèce précédente). La femelle se loge quel- quefois au pied des murs , et porte ses petits sur son dos. Son nid a jusqu'à deux décimètres de long.

M. Olivier a rapporté de l'île de Naxos une autre mygale de cette section (Ariane ^ariana ) , et qu'il a décrite dans l'Encyclopédie méthodique.

J'avoisdéjà mentionné dans mon mémoire sur les araignées mineuses , la découverte qu'on avoit faite , dans l'île de Candie, d'un nid de mygale; c'est peut-être la même es- pèce. Mouffet représente ( Theat. insect. ^ pag. 219) une grosse aranéïde du mêrtie pays. Il lui attribue des habitudes inconciliables , comme celles des épeïres ou araignées ien- deuses , des lycoses ou des araignées loups ^ et même des my- gales. Elle creuse , suivant lui , des trous en terre , qui ont jusqu'à deux pieds de profondeur, et dont elle ferme l'entrée avec de la paille ou du chaume. (1..)

MYGINDE , Myginda. Genre de plantes de la tétrandrie tétragynie , dont les caractères offrent un calice Ircs-petil, persistant, partagé en quatre parties ; une corolle composée de quatre pétales arrondis , très-ouverts ; quatre étamines à anthères arrondies; un ovaire supérieur arrondi , surmonté d'un style si court qu'il est regardé comme nul , et qu'on croit qu'il y en a deux ou quatre ; un drupe globuleux à une seule loge , renfermant un noyau ovale et monosperme.

Ce genre se rapproche beaucoup des Hartoges. 11 ren- ferme des arbrisseaux et sous-arbrisseaux à feuilles opposées et à pédoncules axillaires. On en compte six espèces , toutes de l'Amérique méridionale et des Antilles , dont la plus importante est :

La Myginde diurétique, qui a les feuilles ovales, aiguës, dentelées, presque sessiles. C'est un arbrisseau de moyenne grandeur, qui croît très-abondamment aux environs de Car- thagène et dans d'autres lieux de l'Amérique. On emploie la décoction de ses racines comme diurétique , et ses feuilles jouissent de la même propriété , mais à un degré inférieur.

Il faut encore citer la Myginde rhac.ome , dont on a fait un genre particulier. Elle a les feuilles lancéolées , dentées , et les fleurs monogynes. (b.)

MYGRAINE. Vieux nom français du Grenadier, (lm.)

MYIOÏHÈRES , Myioiheres. Famille de l'ordre des oi- seaux Sylvains et de la tribu des Anisodactyles. Voyez ces mots. Caractères : pieds médiocres , grêles ; quatre doigts , trois devant, un derrière; les extérieurs ou soudés jusqu'au milieu, ou seulement à leur base ; le postérieur mince; bec très-fendu, dilaté horizontalement, garni de soies à son ori-

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gîne , courbé vers le bout , échancré à sa pointe chez les uns ; mandibules glabres à la base , entières , aplaties dessus et dessous , droites et obtuses chez les autres. Celte famille contient les genres Platyrhynque, Todier, Conopophage,

GaLLITE , MOUCHEROLLE , TyRAN , BÉCARDE , PlTHYS ,

Ramphocène. Foyez. ces mots, (v.)

MYITIS de Dioscoride. C'est une espèce de Cauca-

LIDE. (LN.)

MYLABRE, My/ahn's, Fab. Genre d'insectes , de l'ordre des coléoptères , section des hétéromères , famille des tra- chélides , tribu des cantharides.

Ces insectes avoient été réunis aux meloës par Linnseus, et aux cantharides par Degéer. Fabricius les en a séparés , pour former le genre mylabre, dénomination que Geoffroy avoit déjà donnée à un autre genre de coléoptères très-différent, celui qu'on appelle généralement aujourd'hui Bruche.

Les cérocomes^ les tétraonyx , les hyclées et les mylahres sont les seuls de celte tribu dont les antennes se terminent en massue ou par un renflement bien marqué. Celles des myla- hres sont régulières et composées de 1 1 articles dans les deux sexes , ce qui distingue ces insectes des cérocomes et des hyclées. Dans le tétraonyx^ le pénultième article des tarses est bilobé , tandis qu'il est entier, ainsi que tous les autres , dans les my- lahres. Les organes de la manducatiou de ces derniers hété- romères ressemblent d'ailleurs beaucoup à ceux des meloës proprement dits et des cantharides. Leurs jambes sont termi- nées par deux épines étroites et allongées ; mais dans les deux genres précédens, ainsi que dans les cémcomes ^ les jambes postérieures ont une de ces épines creusée à son extrémité , en manière d'un demi-entonnoir.

Les mylahres ont le corps oblong , la tête plus large que le corselet et inclinée , les antennes plus courtes que le corps, terminées en une massue arquée, et finissant plus ou moins en pointe ; les yeux ovales et presque entiers ; les man- dibules cornées, sans dentelures ; les palpes terminés parua article un peu plus grand, en forme de cône renversé et com- primé ; le corselet petit , plus étroit que l'abdomen, presque carré , assez convexe et arrondi aux angles ; l'écusson très- petit ; les élytres oblongues , un peu flexihles, un peu incli- nées latéralement et formant un toit arrondi ; l'abdomen mou , et les tarses terminés par deux crochets bifides à leur extrémité. Leur corps est noir, velu , avec ses élytres, soit jaunes ou jaunâtres , et plus ou moins tachées de noir, soit mélangées de ces deux couleurs. Ils sont particuliers aux contrées chaudes et sablonneuses de l'ancien monde; ils abon- dent surtout en Afrique et au Levant. On les trouve sur les

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fleurs ou les feuilles de divers ve'gétaux, et partîcullèreiïienl sur ceux dont les fleurs sont composées. Dès qu'on les saisit, ils replient leurs antennes et leurs patles contre le corps , à la manière des dermesles , des lyr.us^ et de plusieurs autres in- sectes peu agiles , qui cherchent à tromper les regards de leurs ennemis en feignant d'être morts. Leurs larves sont in- connues.

11 paroît, d'après des passages de Pline et de Dîoscoride , que les anciens désignoient ces insectes sous le nom de ran- tharides; car ils disent que les meilleures canûèurides sont celles dont les étuis sont marqués de bandes jaunes transverses , caractère qui convient très-bien au mylùbre de la chicorée , très- abondant dans le midi de l'Europe et dans l'Orient.

On l'emploie encore aujourd'hui dans les pharmacies de l'Italie, et particulièrement à Naples , à la place de noire cantharide , ou du moins mêlé avec elle. Les Chinois font aussi le même usage médical du tnylabre pustule d'Olivier, qui se trouve dans leur pays.

Il est difficile d'établir des limites bien précises entre les espèces, parce que les taches des élytres varient beaucoup. Olivier {Encyclop. méthod. ) en a décrit soixante. On trouve communément dans les départemens méridionaux de la France les suivantes :

Mylabre de la chicorée , Mylahris cichorii, Fab., Oliv. ; pi. G. 23, 14. de cet ouvrage. Le corps et les antennes sont noirs ; les élytres ont , vers la base , près de la suture , une tache jaune, presque ronde, et plus bas, deux bandes de la même couleur, transverses et ondées , ou dentées irréguliè- rement sur les bords.

J'ai trouvé quelquefois cette espèce dans des plaines sa- blonneuses et exposées au soleil des environs de Paris, sur les chardons ; mais elle se tient plus particulièrement sur les chicoracées.

Le mylabre variable, que Rossi a pris pour celui de la chi- corée , en diffère , en ce que les élytres ont de plus une tache jaune et ovale à leur extrémité , ainsi qu'une autre de la même couleur, mais plus petite, prés de l'angle extérieur de leur base.

Mylabre huit-points, Mylabris octopunctala , Oliv.; Col- tome III , n.° 47i pi- i^ fig- 4? et pi. 2 , fig. 18. Il est noir, avec les élytres rouges ou d'un jaune fauve , et marquées cha- cune de quatre points noirs , rangés deux par deux , sur deux lignes transverses.

Mylabre dix-points , Mylabns decempunclata , Fab> , Oliv. 11 diffère du précédent en ce que les élytres sont d'un

M Y L j,ç,

jaune testacé , et qu'elles ont un point noir de plus ; il est situé à quelque distance de leur extrémité, (l.)

MYLASIS, Myhisls. Pallas , dans ses /^wie* , donne ce nom à un nouveau genre d'insectes de l'ordre des Coléop- tères , dans lequel il fait entrer le tenebriu gigas de Fabri- cius. F. Tjînébrion. (o.)

MYLETE , Myletes. Sous-genre de poissons établi par Cuvier aux dépens des Saumons. Les espèces qui le com- posent , dont une est figurée pi. lo de l'important ouvrage du naturaliste précité , et dont une propre au Nil est appelée Raii, se font remarquer par leurs dents très angulaires et creuses au sommet. Ces dents sontsur deux rangs à la mâchoire supérieure et sur un seul à l'inférieure, qui en offre cependant deux isolées en arrière.

Ce sous-genre renferme trois espèces, outre les deux pré- citées. Ce sont des poissons d'une assez forte taille , dont la chair est très-recherchée, (b.)

MYLIOBATfS. Nom proposé par M. Duméril et adopté par iVI. Cuvier, pour désigner les espèces de raies appelées vul- gairement IVlouRiNEs ei Aigles, et celles qui en approchent par leur têfe saillante hors des nageoires pectorales, celles- ci étant pins larges transversalement que dans les autres raies.

V. MOURINES. (DESM.)

MYLLOPHYLLON, Dioscor. F. Myriophyllok (ln )

MYLOCARION , Mylocarium. Arbrisseau de l'Amérique septentrionale, à feuilles éparses , réunies au sommet des rameaux, à fleurs disposées en grappes terminales , qui seul constitue, selon Piirsh, Flore de l'Amérique septentrionale, un genre dans la décandrie monogynie.

Les caractères de ce genre sont : calice à cinq denîs; cinq pétales; style persistant à trois divisions; capsule à trois ou quatre ailes, à trois loges.

Le Mylocarion a feuilles de troène est figuré pi. iGaS du Bofanical magazine de Curtîs. C'est la ^Valterie de Fraser, (b.)

MYLOC/VRPE , MyJocarpum. Arbrisseau de l Amérique septentrionale , à feuilles alternes, simples , et à fleurs blan- ches disposées en grappes terminales , qui seuJ , selon Will- denovv, constitue un genre dans la décandrie monogynie et dans la famille des Bicornes , fort voisin du Clethra.

Les caractères de ce genre sont : calice à cinq découpures profondes; cinq pétak's ; dix étamines à fibmens dilatés et anguleux ; un ovaire supérirur à stigmate sessile et en tête ; une noix à quatre ailes et à trois loges, (b.)

MYLŒQUE , Mylœchus, Latr. , Oliv. Genre d'insectes de l'ordre des coléoptères , section des pentamères , très-

XXII.

y

,3o V. y o

voisin des cltvleoes (^caiops ., Fab.), et n'en difîérant géncri- quement qu'en ce que leurs antennes ont leurs premiers ar- ticles sensiblement plus grands que les suivans , et que les quatre avant-derniers , qui , avec le onzième , forment la massue , sont presque égaux , tandis que le huitième est plus petit que les contigus dans les cholèi^es. Le port et les organes de la manducalion sont d'ailleurs identiques dans ces deux genres.

Le Mylœque brun , Mylœchus brunneus, Latr. , Gen£r. Crust. et Insect.^ tome I, tab. 8, fig. ii , et tome II , pag. 3o , est long d'une ligne , ovoïde , d'un brun châtain , pubcscent , finement et vaguement pointillé , avec une dent peu distincte aux cuisses postérieures. 11 paroît avoir de grands rapports avec leca/t»^>s hrevicorne de Paykull, le catops agile de Panzer. J'ai trouvé cet insecte dans le bois de Yincennes , aux envi- rons de Paris, (l.)

MYLOICOPHORON de Pluknet {Alm., tab'. 32 , fig. 6) de Catesby {Can.c. iQ, t. Sa). C'est une graminée du genre Paiuriîn' (Poa)^ suivant Adanson. (ln.)

MYRMECITIS. C'éloit, chez les anciens, une pierre qui pi'ésenlolt la figure d'une fourmi rampante. Il se peut que ce l"ûl du succin , substance dans laquelle on trouve fréquem- ment des insectes, ou bien une pierre figurée. Pline ne donne aucun détail au sujet du my/mecitis. (LM.)

MYRMECIUM. Nom que les (irecs donnoientà Voriiey parce que celte plante fait naître , lorsqu'on la touche , des ampoules sur la peau ; myrmccium. signifiant en général tous boutons ou pustules qui démangent, (ln.)

MYODE, Myades (forme de mouche) , Latr; Rîpiphorus^ Fab. Genre d insectes, de l'ordre des coléoptères , section des hétéromères, famille des trachélides , tribu des mor- dellones.

Olivier et Fabricius placent avec les ripiphures ( V. ce mot.) un insecte qui, parla forme des antennes, celle des palpes et la physionomie générale, présente, en effet, les caractères de ce genre , mais qui s'éloigne cependant des autres espèces par la brièveté de ses élytres , de sorte que ses ailes sont presque entièrement découvertes ; de l'origine de sa déno- mination spécifique subdipterus. Dorthes ( Voyez son éloge par ÏJuinas), qui découvrit le premier cette espèce , en donna la description ainsi que la figure , et fut d'avis qu'elle devoit for- r.icr un nouveau genre à côté des nétydales de Linnceus. Les naturalistes anglais nommèrent ce genre dorthesia , dénomi- lïation que M. Bosc a depuis appliquée à un nouveau genre d'hémiptères, ayant pour objet le coccus caraccias découvert et

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décrit encore par Dorthes. Il paroît que le premier àt ces genres répondoit à celui que Ton appelle nialulenanl n'jji- phore. Mais l'espèce décrile par Dorllies , comme lype de cette coupe , offre plusieurs différences essenliclles qui me sem])lent devoir l'en fuire déiaclier : i." Les antennes, quoique semblables à celles des ripipliores par leur forme en éventail , sont insérées de chaque côte du sommet de la tête, près de l'extrémité supérieure et interne des yeux, et dans une fos- sette : les trois premiers articles sont si courts et si serrés, qu'ils paroisscnt former ensemble un tubercule radical ; les huit derniers articles jettent chacun une {femelle) ou deux (jnâle) branches, longues et linéaires, foimantun peigne oa un grand panache , ainsi que le font les mêmes articles des antennes du ripiphore paradoxal. Le labre est grand , forte- ment échancré ou bifide , et s'attache par sa base inférieure à celle de la lèvre qu'elle recouvre. Les mâchoires se ter- minent par un seul lobe et très-petit. La languette s'avance , entre ses palpes, en forme d'une petite pièce presque conique, entière et obtuse : il m'a paru qu'elle se plaçoil dans l'échan- crure du labre , ou du moins immédiatement au-dessous. Les palpes ont d'ailleurs la forme et les proportions de ceux des ripiphores ; il en est de même des mandibules. Mais les autres parties de la bouche , ou celles que je viens de décrire , ont une autre forme dans les ripiphores. Les crochets des tarses présentent des dissemblances; ici, leur extrémité est bifide ou bidentée, et sans dentelures le long de leur côté inférieur. Dans lesmyodes, ces crochets sont garnis, en dessous, d'une rangée de dentelures très-fines et se terminant en une pointe simple. Enfin , les élylres de ces insectes sont très-courtes et ont la figure d'une écaille triangulaire et voûtée. Elles sont étroites , un peu courbes et pointues dans le mâle: celles de •la femelle sont plus courtes , plus larges , obtuses ou tron- quées au bout, et se rapprochent de la forme carrée. Les ailes sont étendues dans toute leur longueur.

Myode de Dorthes, Myodes Dorihesii; Ripiphorus suhàipterus , Fab. ; OUv. , Culéopt. , tom. 3 , n." 65 , pi. i , fig. i. Cet in- secte n'a guère plus de trois à quatre lignes de long. Le mâle a le corps d'un noir luisant , avec les antennes , \tts pattes et une grande partie de l'abdomen jaunâtres ; les an- tennes forment un beau panache, qui s'épanouit en manière de gerbe ; les élytres sont d'un jaunâtre pâle , presque testa- cées; le milieu des ailes a une teinte brune ou roussâlre, en forme de tache. Les antennes de la femelle n'ont qu'un seul rang de lames ou de feuillets, ceux du côté interne ; elles sont tantôt jaunes , tantôt noires ; les pattes sont enlièremeut jaunes ou entremiilées de noir.

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Dans l'un et l'autre sexe , les antennes sont courtes. Celle espèce se trouve au midi de la France et en Espagne, (l.)

MYODOQVE , Myodocha, Latr., Oliv. Genre d'inseclos, de l'ordre des hémiptères, section des héléroplères, famille des géocorises , tribu des longilabres , très-raJ>prochés des tygées et des miris, mais en élanl distingués par la forme ovoïde etallongée de leur tête, qui se rétrécit postérieurement en ma- nière de col, comme dans les redwes. Leurs antennes vont un peu,en grossissant vers leur extrémité, et sont composées de quatre articles , dont le dernier ovale. Le corps est oblong , avec le corselet presque conique , plus étroit en devant , et comme divisé transversalement en deux par une impression linéaire. Les cuisses antérieures sont renlléeset épineuses en dessous. J'ai établi ce genre sur l'espèce suivante.

Myodoque SERRIPÈDE, Myodocha scrripes. Corps long d'en- viron quatre lignes , noir ; élytres d"un brun clair , bordées extérieurement de blanchâtre ; pattes pâles , avec l'extrémité antérieure des cuisses obscure.

Dans l'Amérique septentrionale. Deux punaises de Degeer (^tipuloides ^ trîspinosus') paroissent former deux autres espèces du même genre. Voyez Olivier, Encyclopédie méthodique, (l.)

MYOKTONON etMYOCTYNON. Synonymes d'Aco- NiTUM, chez les anciens. V. ce mot, suppl, (lts.)

MYON. L'un des noms des Asperges, chez les anciens.

(LN.)

MYONIME, Tkfyom'ma. Genre de plantes de la tétrandrie monogynie et de la famille des rubiacées , dont les caractères consistent : en un calice très-petit et presque entier ; en une corolle monopétale à tube très-court et à limbe à quatre divi- sions obtuses; en quatre étaminesà anthères saillantes; en un ovaire inférieur arrondi, supportant un style simple astigmate un peu épais ; en une baie sèche, globuleuse, déprimée , à qua- tre loges, dont les semences, renfermées dans un noyau, sont solitaires, concaves d'un côté et convexes de Taulre.

Ce genre , établi par Lamarck , comprend deux arbris- seaux à feuilles entières et opposées , et à fleurs axillaires ou terminales, et presque solitaires.

Le Myonime ovoïde, dont les feuilles sont presque ovales et obtuses, et les baies obtusément tétragones , est un bel arbrisseau, qui se fait distinguer par le luisant de son feuil- lage. H se trouve à l'Ile de France, et y est connu sous le nom de hois de rai^ parce que les rats sont très-friands de son fruit.

Le Myonime \ feuilles de myrte a les feuilles ovales , lancéolées, aiguës, et les baies sphériques. 11 se trouve dan? le même pays, (b.)

M Y O i33

MYOPE , Myopa. Genre d'Insectes de l'ordre des dip- tères, famille des alhéricères, tribu des conopsaires. Ses caractères sont: suçoir de deux soies au plus , reçu dans une trompe saillante , cylindrique , coudée à sa base et au milieu ; antennes à palette ; soie latérale.

Les myopes ont la tête plus large que le corselet, grande ; la face revêtue d'une membrane molle , blanche, comparée à un masque; les yeux grands; trois petits yeux lisses; le cor- selet presque cylindrique, un peu convexe; deux points éle- vés aux angles huméraux ; les ailes couchées; l'abdomen sessile, presque cylindrique, un peu renflé à l'extrémité, arqué; les pattes fortes , avec les cuisses un peu renflées, et les tarses à deux crochets et deux pelotes.

Les myopes ont beaucoup de rapports avec les conops et les asiles , dont ils diffèrent par la forme des antennes et par les parties de la bouche; on les trouve sur les (leurs; leurs larves ne sont point encore connues. Ils forment un genre peu nombreux , dont la plus grande partie habite l'Europe ; les plus remarquables sont les espèces suivantes :

Myope ferrugineux , Myopa ferruginea , Fab. , Conops fermginea^ Linn. ; Asile, Geoff, ; pi. G 17 , 10, de cet ou- vrage. Il a environ quatre lignes de long ; les antennes ferru- gineuses ; le devant de la tête d'un jaune citron; les yeux bruns; le corselet varié de noirâtre et de ferrugineux ; l'ab- domen d'un brun ferrugineux; les ailes noirâtres ; les pattes ferrugineuses; les balanciers jaunâtres.On le trouve en Euro- pe , aux environs de Paris.

Myope testacé , Myopa testacea , Fabric. Il est fauve » avec l'anus cendré , et un point noirâtre au milieu des ailes. M. Meigen y rapporte le conops buccala de Linnseus , et le Myope joufflu { myopa buccata) de Panzer, Faun. insecL ^ Germ. , fasc. 12 , tab. 24.

On trouve quelquefois, aux environs de Paris, sur les char- dons, le Myope dorsal, ikfjo/>a Jor^w/a de Fabricius, figuré par Schseffer , Icon. Insecl. ratisb, tab. 49» fig- ^3. Cette espèce est une des plus grandes du genre, d'un fauve rouge , très- vif, lorsqu'elle est vivante, avec le devant de la tête blanc et le dessus du corselet noirâtre ; on voit du blanc sur les bords des anneaux de l'abdomen, (l.)

MYOPORE , Myoponim. Genre de plantes delà didyna- rnie angiospermie et de la famille desprimulacées, ou mieux de son nom, établi par Forster. Il a pour caractères : un calice divisé en cinq parties ; une corolle campanulée, dont le limbe est ouvert et divisé en cinq parties presque égales; quatre étamines, dont deux plus petites ; un ovaire supérieur

il; M O Y

Surmonté (Vun style simple: un drupe à une ou deux noix à

deux loges et à deux semences.

Ce genre, qui ne paroît pas suftisamment différer deTAN- DREUSIE de Venlenat, et de la Pooome d'Andrew, renferme huit espèces, qui sont des arbres exlrémemont voisins des C TiLhTS, ei qu'on trouve à la Nouvelle-Zélande et autres îles de l;i mer du Sud.

Le myopuir déhile est figuré, n." i83o du Bulanical maga-' tins de Curlis (b.)

MYOPORIMÉF.S. Famille de plantes éîaWie par Rob. Brown. Elle a pour type le genre de ce nom. (b.)

MYOPOTAM E, Myopotamus ou ratdesflem>es.^ovn donné par Commerson à un rongeur à pieds palmés de l'Amérique méridionale , qui fait partie du genre hydromys de M. Geof- froy. C'est r Hydromys coypou ou le Quouiyia de d'Azara. Voy. ces mots, (desm.)

MYOPTÈRE , Myoptenis , GeofTr. ; VesperliUo , GmeL Genre de mammifères carnassiers, de la famille des chéïrop- téres, fondé par M. Geoffroy Saint-Hilaire , et ainsi ca- ractérisé :

Deux incisives et deux canines à chaque mâchoire ; quatre molaires de chaque côté à celle d'en haut, et cinq à celle d'en bas, toutes à couronne garnie de tubercules aigus; nex simple ; chanfrein méplat , sans feuilles , membranes ou sillons ; oreilles larges, isolées et latérales, avec l'oreillon intérieur ; membrane interfémorale moyenne; queue lon- gue , à demi enveloppée à sa base, et libre à son extrémité. On ne connoît qu'une seule espèce de ce genre de chauve- Souris , particulièrement voisin de celui des Molosses, et qui n'en diffère guère qu'en ce que les oreilles de ces derniers animaux sont réunies et couchées sur la face avec leur oreil- Ion extérieur, et en ce que leur chanfrein est convexe. Les Taphiens qui se rapprochent encore beaucoup du myoptère, offrent cependant tme autre combinaison dans le nombre des incisives et des molaires; une forme de tête différente, et une membrane inlerfémorale plus développée.

Espèce unique. Myoptère Rat-volant , Geoffroy , Mém. tV Egypte , Hisl. JSat. , tom. 2 , page ii3. Rat a'o- L\NT, Daubenton , Mérn. Je f Académie des Sciences de Pa- ris , 175g , page 386.

Le rat volant de Daubenton n'est connu que \ii\v la courte description qu'en donne ce naturaliste, et dont les princi- paux traits ont servi à l'établissement des caractères du genre dans lequel M. Geoffroy a jugé à propos de le placer. Ce chéïroptère a trois pouces un quart de longueur, depuis le

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bout Jes lèvres jusqu'à l'origine de la queue; ainsi il n'est guère pins grand que le Vespertilion noctule de notre pays , nul est long de trois pouces. Le museau est court et gros : les oreilles sont larges et ont un orelllon très-petit. dessus de la tête et du corps a une couleur brune, et le des- sous est d'un blanc sale avec une légère teinte de fauve ; la membrane des ailes et de la queue a des teintes de brun et de gris. Les deux incisives supérieures sont pointues et rap- prochées Tune contre l'autre ; celles de la mâchoire inférieure ont chacune deux lobes , et occupent tout l'espace qui est en- tre les deux canines. V. Dauhenton , loc. cit. (desm.) MYOPTEROS des anciens. T.Thlaspi. (ln.) MYORTOCHON. Ce nomse donnoit, chez les anciens, au Myosotis et à Valsine ou Mcrgeline. (ln.) MYOSOTA. V. Myosotis, (ln.)

MYOSCHILE, Myoschilos. Arbrisseau du Pérou, qui forme un genre dans la pentandrie monogynie et dans la fa- mille des éléagnoïdes. Il offre pour caractères: un calice de cinq folioles colorées et persistantes; point de corolle; un ovaire inférieur, à style et stigmate trlgones; un drupe oblong, couronné par le calice et contenant une noix unl- loculaire. (b.)

MYOSOTE, Myosotis. Genre déplantes de la pentandrie monogynie et de la famille des borraginces, dont les carac- tères consistent en un calice à cinq découpures profondes et persistantes; une corolle monopétale, hypocratériforme , à tube court , fermé par cinq écailles convexes , à limbe plane , partagé par cinq lobes échancrés ; cinq étamlnes cachées dans le tube ; quatre ovaires surmontés d'un style filiforme , terminé par un stigmate obtus ; quatre semences ou noix renfermées au fond du calice qui s'est agrandi.

Ce genre, aux dépens duquel R. Erown a établi celui qu'il a appelé Hexaruhène, renferme des plantes à feuilles alternes, souvent calleuses à leur sommet, et à fleurs dis- posées en épis terminaux et unilatéraux. On en compte une trentaine, dont un tiers appartient à l'Europe. Ces espèces sont :

La Myosote des marais , Myosotis sr.orpidides , Llnn,, qui a les semences lisses; le tube de la longueur de la corolle, et les feuilles lancéolées , est annuelle, se trouve dans les marais et les champs humides , varie beaucoup, et se fait remarquer par l'élégance de sa corolle bleuâtre à fond jaune. Lamarck, dans sa Flore française ^ l'appelle la scor- pionne.

La Myosoie des champs a les semences lisses; le calice aigu , hérissé , de la longueur du tube de la corolle ; le.«

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feuilles ovales, obiongues et velues. Elle est extrêmement commune dans les champs , et est en iicur toul Vêlé. Ses fleurs sont moins grandes et moins belles que celles de la précédente.

La MvosOTE A FLEURS JAUNES , Myosotis apula^ a les se- mences nues; les feuilles linéaires, lancéolées, hispides , et les grappes feuillées. Elle est annuelle , et se trouve dans le midi de la France.

La Myosote lapulle a les semences hérissées d'épines doublement crochues , et les feuilles lancéolées. Elle se trouve en France, sur les vieux murs, parmi les décombres, dans les lieux incultes et stériles, (b.)

MYOSOTIS ou MYOSOTA. Plusieurs plantes por- toient, chez les anciens, ce nom, qui signifie en grec oreille de souris ou de rat. Elles le dévoient à leurs feuilles que Ton avoit comparées aux oreilles de ces petits quadrupèdes.

Pline décrit ainsi l'une de ces plantes. C'est une herbe lisse , dont la racine produit plusieurs tiges , qui ne sont point rougeâtres et creuses ; dont les feuilles qui avoisinent la racine sont longues, étroites, noires, et à dos tranchant et aigu, tandis que les autres feuilles sont espacées deux à deux sur les tiges. Celles-ci se ramifient en petites branches qui sortent des aisselles et portent des Heurs bleues. La ra- cine de la grosseur du doigt et filamenteuse, est acre et corrosive. Aussi s'en sert-on dans le traitement des fistules qui viennent entre l'œil et le nez. Les Egyptiens croyoient qu'en se frottant les yeux avec le jus de cette herbe le 27 de leur mois Thiatin (août), on n'avoit point de chassie aux yeux pendant le restant de l'année.

Une seconde herbe myosotis ou myosota ^ est celle que les Grecs nommoient aussi alsine (du mot grec a/505, qui signi- fie hois^forét^ , parce que cette plante croissoit à l'ombre et au pied des buissons, des arbres, dans les bois touffus et dans les jardins. Ce myosotis poussoit dès le milieu de l'hi- ver, sa tige trainoit à terre et ses feuilles rappeloient parleur forme les oreilles des souris. Pline s'étend encore sur un myosotis qui ressembloit à la pariétaire (fielxine').

Le premier myosotis ne serolt-il pas une espèce de Véro- nique (veronica puria)] le second, la MorgÉLINE ( «/i/ne média, L. ); et le troisième une espèce de Céraiste ou notre myosotis des champs P C'est ce qui est probable et l'opinion de beaucoup de botanistes.

Le nom de myosotis a été traduit en latin par aun'cula maris et c'est sous ce nom latin que Brunsfelsius , Dodonée, Tragus , Joach. Camérarius, Columna , Lonicerus, Césal- piu , Lobel, ont décrit quelques espèces dliieraiium (nolain-

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ment le hieradum pilosella) , les myosotis aroensis et palus/ris , le meaicugo chcinaia , L. , le gnaphalium dioicum , diverses es- pèces de veionka {officinalis ^ spuriu , chamœdrys , etc.) ; les cerastiitm. et le ihaba vemu , toutes plantes qui ont été consi- dérées comme pouvant être les anciens myosotis.

Tournefort et Vaillant ont donné le nom de myosotis au genre que Linnseus désigne par cerastium. Adanson en l'adop- tant y ramenoit quelques espèces de sirMaria , et le nommoit centunculus. Le genre myosotis de Linnseus est tout diffé- rent, appartient à la famille des borraginées et rentre dans le lithospenniim de Tournefort et dans le iuglossum d' Adan- son.

C'est aux dépens du genre myosotis de Linnseus, que sont formés les genres echiodes et lappula de Mœnch. Li'exarrhena de Robert Brovvn paroît devoir être réuni au myosotis , n'en différant essentiellement que par les étamines saillantes, caractère regardé comme ayant peu de valeur et avec raison, ainsi que le prouvent les espèces du genre mentha. Le genre myosotis, Linn. , est mentionné dans ce Dictionnaire au mot Myosote. Quant au myosotis, Tournefort. Voyez Ce-

RAISTE. (lN.)

MYOSOTON. Ce genre , établi par Mœnch , a pour type le cerastium aquaticum, Linn. 11 ne diffère des cerastium que par sa capsule presque ronde , aussi longue que le calice et s'ouvrant au sommet en cinq parties ; dans le cerastium , la capsule est plus longue que le calice, cylindrique, et se di- vise au sommet en dix parties. V. Céraiste. (ln.)

MYOSUROS, de Gallen. Cette plante est, selon Adan- son , la même que celle que nous nommons queue de souris et ratoncule. Dodonée est le premier des botanistes mo- dernes qui lui ait donné le nom de myosurus , et il est resté au genre qu'elle forme. Ce genre a été établi par Dil- len et adopté par Linnseus. Ce naturaliste y avoit d'abord rapporté le ranunculusfalcatus, que depuis il en ôta , et qui, suivant Mœnch , doit faire un genre particulier ; c'est sou ceralocephala. Le ranunculus reptans a été rangé aussi dans le genre myosurus. Ray et Tournefort plaçoient le myosurus dans le genre ranunculus , et Petiver dans celui des adonis. V. Ra- toncule. (ln.)

MYOTERA. C'est dans le Prodomus d'IUiger et dans le Règne animal de M. Cuvier le nom générique de Fourmi- liers, (v.)

MYOTON et MORTOCHON. Synonymes àeMyosotis chez les anciens, (ln.)

MYOXOCEPHALE, Myoxocephalus, Genre de poisson

138 M y n

éîal>li par Steiier , mais qui ne diffère pas suffisamment des Cottes, (b.)

MYOXUS. Nom latin tiré du grec, employé d'abord par Gmelin, pour désigner le genre qui comprend les animaux rongeurs du genre des Loirs. Il a été adopté par la plu- part des zoologistes qui ont écrit sur l'histoire naturelle des mammifères. F. ce mot. (desm.)

MYRABALANUM. V. Myrobalanum. (ln.)

MYRABOLUS. C'est le nom que Ton donne à la myrrhe qui vient d'Arabie , mais que les Européens tirent souvent de Surate. V. Myrrhe, (d.)

MYRACANTHUS. Bontius, dans son histoire naturelle des Indes orientales (6, p. 55), nomme 7l^rac«n^/iU5i;W/cw5, l'A- ^A^THE à feuilles de houx , que Rheède figure sous le nom de PainasrhyUi (Hort. malab. ), et que Cammeli appelle De- Iharia, qui dérive d'un des noms que l'on donne aussi dans l'Inde à cette même plante , maintenant séparée des Acan- thes. VoY. ce mot. (ln.)

MYRACANTON. Chez les Grecs, c'étoit l'un des noms de la plante que Dioscoride nomme Eryngion. (ln.)

MYRCINES. V. Myrsiné. (ln.)

MYRE. Nom spécifique d'une Murène, (b.)

MYREPSICA. V. Myrobolan myrepsique. (ln.)

MYRHE. V. Myrrhe, (b.)

MYRIADÈNE, Myriadenus. Genre déplantes établi par H., Cassini dans sa famille des synanthérées, pour placer la Ver- GErolle glutineuse et autres. Il diffère de celui appelé Pu- LICAIRE par Gsertner , en ce qu'il n'appartient pas aux ra- diées ; ses caractères sont : calice commun composé d'é- cailles imbriquées, linéaires, terminées par un appendice bractiforme ; point de rayons ; réceptacle commun, plane , fovéolé ; semences hispides, inférieures et à aigrcHe double, l'intérieure squamiforme , l'extérieure filiforme barbulée.

MYRIADENE, Myriadenus. Genre déplantes établi par Desvaux , pour placer I'Ornithope tétraphylle , que la forme de son fruit écarte des autres, (b.)

MYRIANTHE, Myrianthns. Arbre d'Afrique à feuilles alternes , digitées, et à fleurs disposées en corymbe , qui , selon Palisot de Beauvois, qui l'a figurée dans sa Flore d'O- ware et de Bénin, forme seul un genre dans la monoécie monadelphie.

Les caractères de ce genre sont : calice à quatre divisions concaves ; point de corolle; un tube trifide portant une éla- mine à chaque division ; un péricarpe charnu à douze ou quatorze loges, contenant des semences allées, (b.)

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MYRTANTHETK, Mynanlhem. Arbrisseaux de Madagas- car , à feuilles allâmes, épaisses, et à fleurs en grappes axil- laires, qui consliluent , selon du Petil-Thouars, un genre dans la polyadelpliie polyandrie , et dans la famille des Ro- sacées. Les caractères de ce genre sont : calice à cinq décou- pures conniventes; cinq pétales onguiculés, insérés sur le ca- lice ; cinq paquets de quatre à cinq élamines ; cinq écailles ; un ovaire à demi inférieur , contenant quatre ovules , et surmonté de quatre stylets courts. Le fruit n'est pas connu.

(B.)

MYRIAPODES , Myriapoda , Lair. Ordre d'insectes ayant pour caractères: point d'ailes; un très-grand nombre de pieds , silués dans presque toute la longueur du corps, une paire par chaque anneau; mâchoires et les deux ou qua- tre pieds antérieurs réunis à leur base, au-dessous des man- dibules.

J'avois, depuis long-temps (^Préc. des Caractères génér. des inseci. ) , formé avec ces insectes un ordre particulier , et sous la même dénomination , mais en lui donnant plus d'étendue par l'adjonclion du genre onis'.us de Linnseus. M. de La- marck les a mis dans son ordre de arachnides antennistes.

Les myriapodes ressemblent à de petits serpens ou à des néréides, ayant des pieds très-rapprochés les uns des autres , dans toute la longueur de leur corps ; de le nom de mille- pieds^ sous lequel on les désigne communément. Leur corps, dépourvu d'ailes, est composé d'une série, ordinairement considérable , d'anneaux, le plus souvent égaux, et portant chacun généralement une ou deux paires de pieds , terminés par un seul onglet. 11 semble n'être formé que d'une tête et d'un tronc continu et très-prolongé , sans distinction d'abdo- men ; mais les premiers anneaux, d'après les motifs que nous avons exposés aux articles Chilognathe et Chilopodes, représentent le tronc et le corselet proprement dit des autres insectes.

Ils ont , i.° deux antennes courtes-, et soit filiformes ou un peu plus grosses au bout, et composées de sept articles, soit sétacées avec un grand nombre d'articulations; 2." deux yeux formés d'une réunion d'yeux lisses , et quelquefois , comme dans les 5ri///^èrcs, très-nombreux et presque à facettes, mais dont les lentilles sont néanmoins proportionnellement plus grandes , plus rondes , plus distinctes que celles des yeux composés des insectes ailés ; 3.** deux mandibules dentées, propres à broyer ou à inciser les matières alimentaires, di- visées transversalement par une suture , ou comme emman- chées, et même accompagnées, dans plusieurs, d'un petit appendice palpifbrme ; 4'* une sorte de lèvre , sans palpes ,

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divisée et formée de pièces soudées , que M. Savîgny consi- dère comme les analogues des quatre mâchoires supérieures des crustacés , mais réunies ; les deux ou quatre pieds anté- rieurs se joignent à leur base , s'appliquent ou se couchent sur la lèvre , et concourent , presque exclusivement , à la manducation, tantôt sans changer de forme, comme dans les ckilognathes , tantôt convertis les uns en deux palpes , et les autres en une sorte de lèvre, avec deux crochets articulés, mobiles, analogues même par leur destination aux griffes des mandibules des aranéïdes ; c'est ce que l'on voit dans les clù- Jopodes; ces parties semblent répondre aux pieds-mâchoires des crustacés.

Les stigmates sont souvent très-petits , imperceptibles même dans quelques-uns (^g/omeris)^ et leur nombre sur- passe ordinairement celui des stigmates des autres insectes qui en ont le plus, c'est-à-dire dix-huit.

Les myriapodes vivent et croissent plus long-temps que les autres animaux de cette classe , et donnent, à ce que je présume , plusieurs générations. Ils naissent avec six pieds , ou n'ont pas , du moins, dans les premiers jours de leur vie, tous ceux qu'ils offriront dans leur état adulte. Les autres pieds, ainsi que les anneaux qui les portent, et dont la quantité varie selon l'espèce, se développent avecTâge, sorte de métamorphose qne j'ai nommée ébauchée, et qui leur est propre ; car les autres insectes n'acquièrent plus de nouveaux segmens , et les pieds à crochets , dont le nombre est invaria- blement de six, ou existent dans la larve, ou se montrent tous à la fois dans la nymphe. Ainsi les myriapodes font réellement un passage des insectes aux crustacés. Leurs for- mes extérieures les rapprochent de ceux-ci ; mais leur orga- nisation intérieure, seule base essentielle de nos coupes clas- siques, les associe à ceux-là; c'est ainsi encore que les arach- nides trachéennes ressemblent à l'extérieur anx arachnides pulmonaires , et sont néanmoins plus près des insectes sous les rapports de l'organisation interne.

Les myriapodes font leur habitation dans la terre , sous les différens corps placés à sa surface , sous les écorces des arbresj, la mousse , entre les feuilles de quelques végétaux cultivés dans nos jardins , et beaucoup aiment l'obscurité.

Des animaux fossiles et très-singuliers, dont ou n'a pas encore découvert les analogues , et dont plusieurs , à raison de la constitution minéralogique des terrrains on les a trouvés , paroissent appartenir à des races totalement anéan- ties dans les antiques révolutions du globe , les irilobites , m'ont semblé remplirlevide qui sépare les myriapodes des crustacés. Du moins, s'ils. paroissent avoir de l'affinité avec quelques

Çrands branchlopodes , ils en ont aussi et de plus grandes , soit parle nombre des anneaux de leur corps, soit par leur division en trois parties , avec \es f;lomêris ^ premier genre de notre famille des chilognathes. Les tiilolnles , qu'on avoit con- fondus jusqu'à ce jour, sous la dénomination générale d'e«- tomolitbe paradoxal , ont été , pour l'un de nos confrères à l'Académie des Sciences , M. Brongniart, un sujet de re- cherches curieuses et d'un beau travail. L'un de nos collabo- rateurs, M. Desmarest , en a présenté ici l'analyse , et il y a joint plusieurs observations qui lui sont propres. V. Trilo- BiTES et Crustacés FOSSILES.

Les myriapodes forment deux familles, les Chilogna- thes et les Chilopodes. (l.)

MYRICAet MYRICE des Grecs. Voyez T km kmscvs. Le genre myrica , Linn. , ne comprend point les myr'ica des anciens , qui sont nos iamarix , mais des plantes très-diffé- rentes. Tournefort avoit nommé Gale le genre myrica de Linnaeus. Voyez Gale, (ln.)

MYRICITE ou TRILOBITE, ou Enthomolithus pam- fioxus, Linn. Voyez Trilobite et Parâdoxite. (ln.)

MYRIOMORPHON. Synonyme A'AchiUea chez les an- ciens. Voyez M£t>LEFOLLIUM. (LN.)

MYRIOPHYLHTM {jnille feuilles, en grec). Selon Pline, la plante connue des (irecs sous le nom de myriophyllon , et des Latins, sous celui (]ennllefolium^ avoit une tige tendre, semblable à celle des fenouils, et qui étoil revêtue d'une grande quantité de feuilles , d lui venoient ces noms. Elle crois- soit dans les lieux marécageux , et étoit très-propre à guérir les plaies. Infusée dans du vinaigre , on la recommandoit comme uiile dans les maux de la vessie. Suivant Dioscoride, les feuilles du myriophyllum sont semblables à celles du fe- nouil. Pline et Dioscoride ont ils voulu parler de la même , ou de deux plantes différentes ? On a indiqué pour elles le ranunndus fluoiatîlis , Vhotionia paluslris , le phellandrium aqua- iii uni et même le volanl-d eau ( Voyez ce mol ) , dont il y a deux espèces dans nos marécages.

C'est au volant-d eau que Vaillant a fixé le premier le nom de myriophyllon. Adanson y ramène \e myriophyllon de.'; Grecs et des Latins , qui étoit une plante connue des Cel- tes , si toutefois il est vrai que ce soit leur helioucandas. Voyez.

MlLLEFOLlUM , StRATIOTES et VoLANT-D EAU. (LN.)

ÂlYIxiOSTOME, Myriosioma. Genre de champignons établi ^df Desvaux, pour placer le Vesseloup figuré par Dickson dans' le premier fascicule de sa Cryptogamie brilan- iii(jue y sous le nom àe Lycoperdon coliforme. Ses caractères sont : chapeau presque sphérique , à- double ticorce , l'esté-

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rieure volviforme , fendue en rayons inégaux, tachetés à leur extrémité ; rinlérieure mince, percée au sommel de plusieurs trous ronds , ciliés , légèrement élevés ; plusieurs pédicules courts , rapprochés , comprimés , presque ligneux, (b.)

MYRIOTHÈQUE, Myriotheca. Genre'de plantes crypto- games , de la famille des fougères , dont la fructification est formée de capsules nombreuses, nues, ovales , s'ouvrant longitudinalement au sommet en deux valves percées cha- cune intérieurement de deux trous , et éparses sur le dos des feuilles.

Ce genre a été appelé maratiie par Swartz et Smith. II renferme trois espèces ; savoir :

La Myrothèque ailée , qui a le pétiole commun écail- leux , les partiels ailés, et les folioles dentelées. Elle se trouve à la Jamaïque.

La Myriothèque lisse , qui a le pétiole commun lisse ; les partiels ailés; les folioles obtusément dentelées. Elle se trouve à Saint-Domingue.

La Myriothèque a feuilles de frêne , qui a k pétiole commun lisse et simple ; les folioles lancéolées et dentelées, et toutes distinctes. Elle se trouve à Tîle de la Réunion, (r..)

MYRISTICA. Nomlatin du genre Muscadier. Ce genre est le komacon d'Adanson. Robert Brown pense qu'on doit y réunir le genre horsfieldia àe Willdenowet de Lamarck, et levirola^ d'Aublet. Peut-être le knema, de Loureiro, en doil- il aussi faire parjie. (ln.)

MYRISTICEES. Famille de plantes proposée par R. Brown , et dont le type est le genre Muscadier, (b.)

MYRLE. Voyez Merlin, (s.)

MYRMECOPHAGA. Nom tiré du grec , et appliqué aux mammifères , du genre des Fourmiliers. Eniployé d'abord par Linnseus pour désigner des animaux assez différens , il a depuis été réservé pour les fourmiliers d'A- mérique, c'est-à-dire, les myrmecophaga jitbata ^ ietra- 'dadyla et didadyla. Le viyrmecophaga capensis en a été séparé pour former le genre Oryctérope. L'Echidné , quadrupède de la Nouvelle-Hollande , a reçu des auteurs anglais , qui les premiers en ont parlé , le nom de myrmecophaga aculeata,

(desm.)

MYRMÉCOPHAGES , Myrmecophaga. Sous ce nom , nous avons désigné ( Tubl. jneth. des mammij. , prem. édit. de ce Dict. ) une famille de quadrupèdes édentés , renfermant ceux qui sont absolument dépourvus de toutes sortes de dents , et qui ne présentent pas d'ailleurs Tes caractère* particuliers aux Monotrèmes. Ces genres sont ceux des Pan- golins et de» FouRMi! iers. (desm.)

M Y R 143

MYRMÉCIE , Myrmecia. Nom donné, par SchreLer, au genre établi par Aublet , sous celui de Tachie. (b.)

MYRMÉCIE, Myrmecia. Y ahricins nomme ainsi un genre d'insecles hyménoptères , de notre tribu des formicaires , et distingué plus spécialement des autres genres de celle division , par la forme et la grandeur des mandibules. Celles des neutres sont avancées, grêles , dentelées ati côté interne, parallèles et pointues à leur extrémité.

Ce naturaliste n'ayant pas égard à la forme du corps , dans le caractère essentiel du genre , le compose d'espèces qui ont le pédicule de leur abdomen composé tantôt d'ane écaille , tantôt d'un ou de deux nœuds. Ces caractères , l'absence ou la présence d'un aiguillon , m'ont paru devoir servir de première base aux coupes génériques que j'ai établies dans cette tribu. Voyez, les articles Formicaires et Myrmice. (l.)

MYRMÉCODE. Myrmecodes , Lalr. Genre d'insectes de l'ordre des hyménoptères , section des porte-aiguillons , famille des hétérogynes , tribu des mutillaires.

Les myrmecodes diffèrent des autres insectes de cette tribu, et particulièrement des mutilles et des myrmoses , dont elles se rapprochent davantage , à raison de leurs palpes , qui sont très-courts. Les maxillaires sont à peine distincts , presque coniques ; les labiaux ont une forme cylindrique ; on n'aperçoit aux uns et aux autres que trois à quatre articles. Les antennes ne sont guère plus longues que la tête , et leur second article est reçu dans le premier ; caractère qui rapproche ces insectes des myzines , particulièrement des femelles , auxquelles ils ressemblent beaucoup quant au por^. Les mandibules sont avancées , arquées , étroites et sans dents. Le tronc a la forme d'un cube allongé , un peu rétréci en avant ; il est divisé en trois segmens , dont l'antérieur beaucoup plus grand.

Ce genre est composé d'espèces propres à la Nouvelle- Hollaiide et aux îles voisines. Olivier le réunit à celui des myzines; mais ici les femelles sont ailées, et les palpes , ainsi que la languette , sont dlfférens.

Le iiphle pédestre, de Fabricius est probablement une myr- mécode , et qui semble très-voisine de la suivante. ^ Myrmécode a taches jaunes , Myrmecoda flaoo-gutlata. Grande , d'un fauve marron , avec des taches jaunes et rondes sur l'abdomen.

La myzine aplère., d'Olivier, Enrycl. méth. , paroît n'en être qu'une variété très-petite , et à taches moins nombreuses : de la Nouvelle-Hollande. ( L. )

MYRMÉLÉON,M/n7ïe/.ïort,Fab. Genre d'insectes de l'or-

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dre des névroptères, famille des planipennes, tribu des four- nùllons, ayant pour caractères : desmandihubjs; six palpes; tarsesà cinq articles; antennes courtes, grossissant et couchées en crochet vers le bout. LeJr corps est fort aiîongé, cylin- drique, glabre , ou peu fourni de poils. Leur tête est courte, de la largeur du corselet au plus ; leurs yeux sont gros ; les petits yeux lisses ne sont pas apparens ; le corselet est rond ou ovalaire ; le premier segment est court; les ailes sont allongées, transp jrentes, très-réticulées, en toit; l'abdo- men est fort long, cylindri jue ; les pattes sont courtes , avec deux forts crochets au bout des tarses.

Les myrméléons offrent beaucoup plus d'intérêt sous leur première forme que lorsqu'ils sont insectes parfaits. On a donné à la larve de l'espèce la pins commune en Europe , le nom àc formica leo ^ foiinni-Uon , par la même raii>on qui a fait donner aux larves d'héméro!>cs celui de Hun des puce- rons. Cette larve , qui est de coubmr grisâtre , a six pattes et une forme très-remarquable , en ce qu'elle a le ventre extraordinairement gros , par rapport au corselet et à la tête. Cette tête est très-petite , aplatie , étroite , et armée de deux cornes assez longues , mobiles , dentées intérieurement dans presque toute leur longueur , recourbées près de leur extrémité et terminées en pointe. Ces deux cornes lui servent de pinces et de suçoirs.

Cette larve est carnassière, marche très-lentement et à re- culons. Comme elle ne pourroit attraper à la course des in- sectes beaucoup plus agiles qu'elle , et dont elle a cependant le plus grand besoin pour pouvoir se nourrir , la nature lui a enseigné les moyens de leur tendre des pièges. Elle sait dis- poser le lieu elle se fixe , de manière qu'ils viennent tom- ber dans ses cornes qui les attendent. Elle se loge dans le sable , elle se tient tranquille au fond d'un trou fait en en- tonnoir; elle y est cachée entièrement, à l'exception de ses cornes qu'elle tient élevées au-dessus et écartées l'une de l'autre. Malheur alors à tout insecte Imprudent , à la fourmi qui, en cheminant, ose en approcher! Si un de ces insectes est assez éloigné pour que la larve ne puisse le saisir , elle fait, pleuvoir sur lui une si grande quantité de sable, avec sa tête, dont elle se sert comme d'une pelle, qu'il en est étourdi ; il achève de perdre l'équilibre qu'il avoit peine à conserver en marchant sur un terrain en pente, et vient tomber au fond du trou , entre les pinces meurtrières de la larve , qui le serrent aussitôt, et le percent en se fermant.

Quand la larve est maîtresse de sa proie , elle l'entraîne sous le sable pour la sucer à son aise , et après avoir tiré de

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rînsecle ce qu'il a de succulent , elle jette au-delà des bords de son trou le cadavre desséché , qui lui devient inutile.

On ne trouve ces larves que dans les terrains sablonneux et composés de grains fins. C'est au pied des vieux murs, dans les endroits les plus dégradés et exposés au midi , qu'elles s'établissent le plus ordinairement. Une larve n'habite pas toute sa vie le même trou ; elle en change quand celui qu'elle s'est fait a été dérangé , ou quand elle n'y fait pas assez de capture. Lorsqu'elle se détermine à Tab mdonner , elle se met en marche, parcourt les environs; le chemin qu'elle fait est marqué par une espèce de petit fossé d'une ligne oa deux de profondeur; arrivée à Tendroit qui lui convient, elle se creuse une nouvelle habitation avec une ardeur infati- gable. Pour donner de justes proportions à son entonnoir , elle en trace l'enceinte en faisant un fossé semblable à celui qu'elle forme en ntarchant. Ce fossé entoure un espace cir- culaire plus ou moins grand. Les larves qui sont prés d'avoir tout leur accroissement, habitent quelquefois dans des trous dont le diamètre de l'entrée a plus de trois pouces : la pro- fondeur de l entonnoir nouvellemenlfait, égale les trois quarts environ du diamètre delà grande ouverture. Dès que la larve a fini son trou , qu'elle commence cl achève quelquefois en une demi-heure, elle se cache au fond pour y attendre sa proie , et 1 attend souvcnl très-long-tcmps ; mais comme elle est capable de supporter un long jeûne , elle peut rester plu- sieurs mois privée d'alimens, sans mourir ; elle n'est cep-^n- dant pas difficile sur le choix : tous les insectes lui convien- nent , même ceux de son espèce.

Toute la nourriture que prend cette larve est employée utilement pour la faire croître ; ou s'il reste quelque résidu, il ne s'échappe du corps que par l'insensible transpiration , car elle ne rejette aucun grain sensible d'excrémens ; aussi n'a-l-elle point, à ce que l'on croit , d'ouverture analogue à l'anus.

Les larves de ces insectes sortent des œufs en été ou en au- tomne , et ne se changent en nymphes que l'année suivante. Elles subissent leurs métamorphoses dans leur Irou , ou cherchent dans le sable un endroit commode pour y faire la coque dans laquelle elles se renferment. Cette coque est ronde ; l'extérieur est composé de grains de sahle qui tiennent ensemble par des fils de soie que la larve lire des filières qu'elle a à l'extrémité du corps ; l'intérieur est tapissé dune soie d'un blanc satiné On trouve de ces coques qui ont quatre on cinq lignes de diamètre ; celles-ci renferment les femelles. Quinze ou vingt jours après que la larve a subi sa métamorphose ,

xxn. lu

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l'insecte parfait sort de sa coque par une ouverture qu il y fait , et laisse l'enveloppe de nymphe à l'entrée.

On peut facilement élever de ces larves dans du sablon, en avant soin de leur donner des fourmis , des mouches ou autres insectes.

Bonnet a trouvé , aux environs de Genève , une larve de myrméléon^ qui différoit de celles qui sont connues, en ce qu'elle ne marchoit pas à reculons , ne faisoit point d'en- tonnoir , et se cachoit seulement afin de saisir les insectes qui passoient auprès d'elle. C'est peut-êire une larve à^asca- laphe. ( Voyez ce mot. )

Ces insectes volent peu. Olivier ( Encyd. méth. ) en a décrit trente-huit espèces, parmi lesquelles je citerai :

MyrmÉLÉON libelLULOïDE , Mymeleon libelluldides , Linn. , Fab. ; Drur. lllust. -of. ins. , tom. i , lab. 4^6. Cette espèce , la plus grande de celles qui sont connues , a un peu plus de quatre pouces d'envergure ; son corps est long d'environ un pouce et demi , jaune , rayé de noir ; les antennes sont noires ; les ailes sont transparentes , avec un très-grand nombre de taches et de points noirâtres ; deux de ces taches sont plus grandes , et presque en forme de bandes près du milieu des ailes inférieures.

Cette espèce se trouve dans l'Europe méridionale , dans l'Asie mineure et au nord de l'Afrique.

On confond avec elle une espèce du Cap de Bonne- Espérance , qui lui ressemble beaucoup pour la taille et les couleurs ; celle-ci a le sommet de la tête noirâtre ; le seg- ment antérieur de son corselet a une tache noire transverse ; la partie supérieure de l'abdomen est entièrement jaune. Dans la précédente , le dessus de la tête et du corselet est jaune , avec une raie noire et longitudinale au milieu ; elle se prolonge tout le long de l'abdomen. Les ailes pré- sentent aussi quelques différence dans la grandeur de leurs taches.

MyrmÉLÉON FORmicaiue , Myrmeleonformicanum , Linn. , Fab. ; pi. G. 17 , 12 de cet ouvrage ; Fourmilion ^ Geoff. Il a tout le corps de couleur grise, avec des lignes jaunes sur la tête et le corselet ; les ailes transparentes , et quelques pe- tites taches brunes ; les pattes grises , avec des taches jaunes. Sa larve est très-commune aux environs de Paris ; on la trouve plus fréquemment que l'insecte parfait. Nous ren- voyons aux généralités pour les habitudes et la manière dont cette larve se nourrit. Voy. , pour les autres espèces , l'ar- ticle Myrméleon de l'Encyclopédie méthodique, (l.)

MYRMIGE, Myrmica, Latr.; Formica; Linn., Manica ,

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Jur. Genre d'insectes de Tordre des hyménoptères, section (les porte- aiguillons , famille des hétérogynes , tribu des for- micaires , ayant pour caractères distinctifs dans cette divi- sion: un aiguillon; pédicule de Tabdomen , formé de deux nœuds ; antennes enlièrcment découvertes ; palpes maxil- laires longs, de six articles distincts.

Jusqu'à l'époque je publiai mon Histoire naturelle des fourmis , et la nouvelle distribution que je fis de ces hymé- noptères, soit dans mon histoire générale des crustacés et des insectes , soit dans les tables du vingt quatrième volume de la première édition de ce Dictionnaire , les entomolo- gistes avoient conservé le genre formica àe Linnœus dans toute l'étendue que Linnseus lui avoit v^onnée. Fabricius , dans son Système des piézales, déniembra re genre en quatre; savoir ; lasiuSfCryptocenis^ ai/a etmyrmecia. Leurs caractères distinctifs posent sur les antennes et les parties de la bouche , mais plus particulièrement sur la forme et la direction des mandibules. Sans examiner la valeur et l'exactitude de ces caractères , il n'en est pas moins vrai que cesgroupes , à l'exception de celui descryptocèresquej'avois établi avant lui, sont très disparates sous la considération du port des espèces qui les composent, et souvent même quant à leurs habitudes ; c'est ainsi que nos myrmices dont les neutres et les femelles sont armés d'un aiguillon , dont tous les individus ont le pédicule de l'abdomen formé de deux nœuds , dont les nymphes sont nues , etc. , se trouvent associées dans un même genre, celui des fourmis , à des espèces privées d'aiguillon , ayant le pre- mier anneau de l'abdomen en forme d'écaillé , et dont les nymphes sont renfermées dans une coque. Mais si nous pre- nons pour première base de notre distribution méthodique de ces insectes , les moyens de défense que la nature leur a donnés , les différences les plus importantes et les plus géné- rales qu'ils nous présentent dans la forme de leur corps , de leurs ailes , et si nous recourons ensuite aux organes, d'après lesquels Fabricius a établi son système, tous les contrastes auxquels il a été conduit par une suite de l'emploi de ces caractères exclusifs, disparoitront, et nos groupes seront en harmonie avec les mœurs de ces petits animaux. Je pense néanmoins qu'il seroit arrivé aux mêmes résultats que les nôtres , s'il avoit observé avec plus de soins et de détails les parties dont il fait usage pour signaler ses genres.

Nos myrmices se trouvent ainsi dispersées dans les genres formica, a/tu et myrmecia de ce naturaliste. Si l'on. en excepte quelques espèces que j'ai rapportées au second de ces genres ( Voyez OEcodome), elles répondent à celui des maniques de M. Jurine. Les ailes supérieures n'ont , suivant lui , que

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(iexix cellules cubitales , clont la première grande , en forme d'hexagone irrégulier, reçoit la première nervure récurrente, t;{ dont la seconde , pareillement grande , atteint presque le bout de l'aile ; la seconde nervure manque. Sous ces rap- ports , les maniques s'éloignent peu des fourmis de ce natu- raliste composant sa seconde famille , et si on n'avoit pas égard au caractère tiré de l'absence ou de la présence d'un aiguillon , l'on pourroit aisément se méprendre dans la dé- termin-ition des deux genres. J'ajouterai cependant, avec M. Jurine , que les antennes des maniques sont un peu plus grossesversleboutque cellcsdes fourmis, et presque grainées. 11 me paroît que cet auteur n'a vu qu'un petit nombre de maniques ailées ; quelques espèces , comme celles que j'a- vois nommées, dans mon Histoire des fourmis, capîîa/a ^ struclor ^ suhleri anea^ etc., ont trois cellules cubitales; les deu.^

Îremièresque j'aiplacées^dans mon Gênera^ avec les altes de 'abricius , en sont distinguées à cet ég?rd , puisque ces der- niers hyménoplcres n'ont que deux cellules cubitales et sans nervures récurrentes, la cellule ordinaire du milieu du disque manquant. D'après les principes de M. Jurine , les espèces que je viens de citer formeroienl un genre propre. 11 faudroit aussi séparer des myrmices ou des maniques , les myrmécics , gulosa ^forjicala et quelques autres espèces analogues ; celles- ci ont aussi trois cellules cubitales ; mais la seconde , et non la première, reçoit la nervure récurrente; ces fonnicaires ont en outre Its mandibules fort longues , très-étroites , et les antennes filiformes ; le pédicule de leur abdomen offre aussi des différences ; le second anneau est plus grand que le premier , un peu en cloche , de sorte que le pédicule a une forme intermédiaire entre celui de l'abdomen des ponères et celui des autres myrmices. Peut-être faudra -t-il rétablir le genre édton, dans lequel j'avols d'abord compris ces espèces particulières.

Les ntyrmices ont la tête grande , le corselet long, étroit , noueux ou gibbeux en dessus , et souvent armé de dénis ou d'épines. Elles couchent leur abdomen en dessous , et don- nent à leur corps la forme d'un arc. Les neutres et les fe- ' melles sont munis d'un aiguillon , dont la piqûre est assez vive et même un peu venimeuse. Ces insectes font leur ha- bitation dans la terre, sous les pierres, et s'y creusent des galtîries plus ou moins profondes et soutenues par des puiers. La myrmice rouge se loge aussi, mais moins souvent; dans les vieux arbres, et y pratique de petites loges , dis- posées sur plusieurs étages , et qu'étayent de petites co- lonnes ; les parois de ces tases sont très-minces. Ainsi cette myrmice , suivant M. Huber fils , qui nous fournit ces ob&er-

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valions, est sculpteuse et maçonne ; elle montre une adresse

})articulière à saisir les goulleletles sucrées ou mielleuses que es pucerons laissent échapper de rexlrcmilé postérieure de leur corps. Elle emploie alternativement les bouts un peu rendes de ses antennes , et lorsqu'ils sont humectés de la li- queur , elle les porte à sa bouche , les y fait entrer et les presse entre ses parties. Ses antennes sont donc pour elle des sortes de doigts. Elle a eu pour historiens Leuwenhoeck et Swammerdam , et leurs observations sont même les premières qu'on ait recueillies à l'égard des insectes de cette famille. Les myrmices nous présentent dans l'économie et le ré- gime de leurs sociétés , dans leurs métamorphoses , les mêmes faits essentiels que les autres formicaîres. On remarquera seulement que leurs larves ne se filent point , pour passer à l'état de«nyinphe , une coque comme le font celles des for- tnicaires dépourvues d'aiguillon. Quelle est la cause de cette anomalie? C'est ce que l'observation ne nous a pas encore appris. Ces insectes ne subissent guère leur dernière meta morphose que vers la fin de l'été et en automne.

L'espèce la plus commune et la plus grande , parmi les in- digènes , est la Myrmice rouge , Myrmica ruhra; Formica ru- era , Fab. ; Lalr. Hisi. nat. des fourmis , pi. lo , fig. 62. L'ou- vrière est noirâtre , finement chagrinée , pubescente , avec deux épines à l'extrémité postérieure du corselet , et une^ plus petite , sous le premier nœud da pédicule de l'abdo- men ; cet abdomen est luisant , lisse , avec le premier anneau brun. La femelle a les mêmes couleurs ; ses ailes sont d'un jaune-brun 'obscur , avec le stigmate d'un brun jaunâtre. Le mâle est d'un brun noirâtre , avec les antennes et une grande partie des pattes d'un brun jaunâtre ou roussâtre.

La Myrmice des gazons , Myrmica cœspitum ; formica cœs- piliim , Fab. ; Latr. , ibid.i, pi. 10 , fig. 63. L'ouvrière n'a guère que deux lignes de long ; son corps est d'un noir-brun, avec les antennes et les mandibules d'un rouge-brun , et les pieds d'un brun rougeâtre; la tête et le corselet sont striés; cette dernière partie est terminée par deux épines courtes. La fe- melle est noire et luisante , avec les ailes blanches ; leur stig- mate est d'un brun jaunâtre clair. Le mâle est d'un noir-brun et luisant , avec les antennes d'un brun jaunâtre.

Cette espèce fait son nid dans la terre , entre les racines du

gazon. De petits monticules ou de petites traînées de terre

réduites en particules très-fines. Indiquent leurs fourmilières.

Souvent aussi l'habitation est recouverte d'une pierre , avec

de la terre auiour. (l.)

MYRMOSE , Myrmosa , Latr. , Jur. Genre d'insecles, de

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Tordre des hyménoptères , section des porte-aiguillons, fa- mille des hétérogènes , tribu des mutillaires.

Comparés aux nmtilies sous les rapports des antennes et des organes de lamanducation, ces insectes ne paroissentpas en différer génériquement; mais il n'en est pas ainsi, si on étend ce parallèle aux autres parties du corps. Les mâles ont le segment antérieur du corselet en forme de carré trans- versal , 1 abdomen ovale ou elliptique, déprimé , et dont le second anneau n'est guère plus grand que les autres ; leurs ailes supérieures offrent quatre cellules cubitales , dont la quatrième atteint le bout de l'aile; la précédente est carrée , et la cellule radiale est plus grande que celle des mutilles. Les femelles ont bien le corselet cubique ; mais son segment antérieur est distinct ; l'abdomeii a la forme d'un cône al- longé, avec le premier anneau tronqué en devant.

On trouve les myrmoses dans les mêmes lieux que les mu- tilles.

Nous en connoissons deux espèces : l'une est la Myrmose TîOiRE , Myrmosaatra^ pi. G 17 , ii de cet ouvrage ; Panz. , Faun. insect. Germ. , fasc. 85, tab. i4., le mâle. 11 est tout noir; la femelle est la mutille têie-noire (^melanocephala^ de Fabricius. Elle est fauve , avec la lête et les derniers anneaux de l'abdomen noirs ; on la trouve auprès de Paris et dans le midi de la France. La seconde espèce est la Myrmose DOS ROUGE , Myrmosa ephifpium , Jur. , Hym. , pi. g. Le mâle est noir avec la partie supérieure du corselet rouge. La femelle est inconnue. Cette espèce se rencontre dans les départemens méridionaux de la France , en Italie et en Espagne, (l.)

MYRMOTHERA. Nom générique des Fourmilliers. V. ce mot. (V.)

MYROBALANOS. De deux mots grecs qui signifient gland parfumé. Les Grecs donnoient ce nom , suivant Pline , à des fruits qu'on faisoit entrer dans la composition des onguens. Le plus utile de ces fruits étoit le hen ou noix de Ijchen ( V. Ben ) qui est le balanos myrepskè de Dioscoride , et le mvrobalanos de Pline. Le meilleur se tiroit de l'Arabie, on le cultive encore, ainsi qu'en Egypte. Suivant Bello- nius , les habitans du mont Sinaï nomment ce myrobalanos , pharagon , et Rauvvolfms l'appelle macalep blanc.

Ce nom de myrobalanos a "été étendu par les Grecs moder- nes à divers fruits , i>ropres au même usage , ou qui sont purgatifs, V. au mot Mvrobolan , manière vicieuse d'écrire ce nom , m.nis consacrée par l'usage , car il (aut myrubalan.

Ccsalpin est dans l'erreur , lorsqu'il avance que notre

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Marronier d'Inde peut être le myrohaîanus à feuilles d'hé- liotrope , cité par Pline , qui est peut-être un Badamier.

(LN.)

MYROBATINDUM. Ce genre de plantes établi par Vail- lant, est le même que le lantana de Linn. V. Camara. (ln.j

MYROBOLAN MYREPSYC^UE. F. Ben. (ln.) MYROBOLANS. On donne ce nom à plusieurs fruits desséchés qui viennent des Indes orientales et de l'Amérique. On les vend chez les droguistes comme purgatifs , astringens. Ils étoient autrefois très-célèbres, mais on les emploie beau- coup moins aujourd'hui.

Les myrobolans chebules , citrins et indiens , ne sont que dif- férens âges du même fruit , et appartiennent au Badamier

CHÉBULE.

Les myrobolans bellirics sont les fruits du Badamier de ce nom. Ces deux arbres sont figurés, pi. 197 et 198 de l'ou- vrage sur les plantes du Coromandel, par Boxburg.

Les myrobolans d'Amérique sont ceux de la Trichilie SPONDfOïDE et de I'Heç^nandier sonore.

Les myrobolans emblics sont les fruits du Phyllânthe de ce nom.

Il paroît qu'on appelle souvent , en général , myrobolans , tous les fruits qui viennent des pays étrangers et qui purgent.

(B.)

MYROBOLANS A FEUILLES DE FRÊNE ( Mjro- halunus folio fraxini'). C'est le nom sous lequel Sloane figure^ dans son ouvrage sur les plantes de la Jamaïque , deux espè- ces de mombin ( spondias mombin et myrobalanus ). (ln.)

MYROBROME , Myrobroma. Genre de plantes établi par Salisbury , Paradisus londinensis , tab. 82 , pour placer TEpidendre rouge de Lamarck. Ses caractères sont : six pétales , dont cinq ouverts ; lèvre inférieure formant un tube qui embrasse le style ; anthère insérée sur le dos da style : fruit à deux loges et à quatre valves, (b.)

MYRODENDRUM. C'est ainsi que Schreber, WiUde- now , Persoon , etc. , nomment le genre houmiri d'Aublet. ( V. ce mot ) qui est le houmiria de Jussieu , et le werniseckia. de Scopoli. Ce genre a quelques rapports avec les Tiliacées.

(LN.)

MYRODIE , Myrodia. Nom donné par Svvartz , à un genre de plantes établi par Aublet sous le nom de Quara- ribea. V. ce mot. (b.)

MYROSME , Myrosma. Genre de plantes de la monan- drie monogynie , et de la famille des drymyrrhisées, qui a

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pour caractères: un calice double; l'extérienr de trois folioles luembraneuses , égaies et entières ; Tintérieur partagé en trois découpures égales et oblongues; une corolle monopét.ale inégale , à tube très-court , à limbe partagé en cinq parties , dont les deux supérieures plus courtes , oblongues , inégale- ment échancrées ; les trois inférieures plus longues , trilobées; le lobe du milieu plus court ; une seule étamiue insère sur le bord de la découpure intermédiaire inférieure ; un ovaire in- férieur à trois côtés, surmonté d'un style épais, courbé, fendu longitudinalement, hérissé k sa partie anlérieiire , à stigmate en forme de vulve , dont les lèvres sont dilatées ; une capsule à trois loges , à trois valves , à trois côtés , qui renferme des semences nombreuses et anguleuses.

Ce genre ne contient qu'une espèce originaire de Surinam. C'est une plante à racine charnue , rampante , divisée en anneaux, à feuilles ovales , glabres, veinées; les inférieures àpélioles allongés parftint de la racine , à hampe. cylindrique, presque velue , terminée par une articulation d'où sort une feuille et un pédoncule solitaire , cylindrique , termi- né par un chaton formé par des bractées ou des écailles imbriquées, dont chacune porte deux fleurs et deux folioles.

(B.)

MYROSPERMUM (graine parfumée ^ en grec). Ce genre déplantes créé par Jacquin, est le mênrie que celui nommé myroxylon par NVilldenow et Persoon. Voyez LiNGOUM et

MiROSPERME. (LN.)

MYROXYLON. V. Myrospermum. (ln.)

MYROTHÉCIE , Myrcthecium. Genre de champignon» établi par Tode. Il est composé de champignons sessiles , en forme de coupe , couvert d'un volva , et contenant des se- mences un peu visqueuses. On en compte cinq espèces ,dont aucune n'est connue en France. Ces espèces font partie du genre Pézize de Linnœus, ou mieux du genre Nidulaire de RuUlard. (B.)

MYRRHA. Mittchell ( Gen. i8 ) donne ce nom à un genre de plantes qui ne diffère pas du cicuta^ Linn. , et qui a pour type le cicuia maculata , plante vivace , aquatique, et de Virginie, (ln.)

MYRRHA. V. myrrhe et myrrhis. (lm.)

MYRP\HE. Gomiae-résine qu'on emploie fréquemment en médecine , et qui a été célèbre chez les anciens , mais dont on ne connoîl cependant pas encore l'origine. Bruce , qui, dans son Voyage eu Abyssinie^ lui a consacré un chapitre , assure que l'arbre qui la produit , ne vient que dans la partie

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cle l'Afrique qui est au sud du détroit de Babel -Mandai , d'où elle est envoyée en Abyssinie et en Arable , et de dans le reste du monde. Ce voyageur a fait plusieurs tentati- ves inutiles pour se procurer des échantillons de l'arbre dont elle provient.

On trouve dans les boutiques plusieurs sortes de myrrhes , dont la différence peut être considérée comme le fruit de la falsification; cependant Bruce assure, d'après le rapport des Abyssins , que sa qualité dépend de l'âge de l'arbre , de sa santé , de la manière de faire l'incision , du temps on la recueille, etc. En général elle contient, selon Cartheuser, sept parties de gomme contre une de résine. La plus belle est en larmes ou morceaux plus ou moins gros, de couleur jaune ou rousse , veinée de blanc , un peu transparente. Son goût est amer, un peu acre. Son odeur est aromatique, forte etnau- séabonde. Quand on la pile ou qu'on la brûle , cette odeur est bien plus agréable.

La myrrhe s'emploie principalement dans les obstruc- tions de la matrice, pour exciter les règles, les lochies, contre l'asthme, la toux, la jaunisse et les affections scorbutiques. On la donne en substance depuis un demi -gros jusqu'à un gros. On l'emploie aussi extérieurement dissoute dans l'eau-de- vie, pour les ulcères et la gangrène. Elle entre dans plusieurs préparations pharmaceutiques , telles que lathériaque, la con- fection d'hyacinthe, etc. Son usage demande à être dirigé par une main exercée , car il est sujet à plusieurs inconvéniens , surtout à augmenter la disposition à l'avortement , au pisse- ment de sang , etc.

Il est très-possible que la myrrhe provienne d'un Balsa- MIER ; mais il n'est pas probable que ce soit , comme l'a avancé Loureiro , l'espèce de Laurier qu'il a décrite sous le nom de laurus myrrha , qui fournisse celle du commerce, (b.)

MYRRHE ou MYRRHIDE , Myrrhis. Genre de plantes établi par Tournefort , et rappelé par Venlenat. Il comprend plusieurs espèces du genre Cerfeuil de Linnseus, celles dont le fruit est oblong , aminci au sommet , en une pointe courte , striée ou sillonnée , glabre ou hérissée. On doit lui rapporter les ceif euil s odorant ^ bulbeux^ à fruits jaunes ^ à fleurs jaunes , penclté et aquatique, (b.)

MYRBH IDA. Herbe citée par Pline , et que Lobel croit être le géranium moschatum , Linn.; mais il n'est pas proba- ble que cela soit, (ln.)

MYRRHINEetMYRRHINON.LesGrecsdonnoientce nom au Myrte, qu'ils nommoient aussi Myrtos , myrsine etmyr- sinos. (.LN.)

MYRRIN. V. MURRHIN. (ln.)

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MYRRIIIS , MYRRHA ou SMYRRHIZA. ( Rarme par- fumée, en grec), et coniiè, plante mentionnée par les anciens. Le MyrrJiis , selon Dioscoride , ressemble au riciUa par sa tige et par ses feuilles ; sa racine est oblongue , tendre , odo- ranle , et nullement désagréable à manger. On trouvoit le myrrhis dans les jardins et les lieux cultivés. Sa racine, d'tme douceur et d'une odeur agréables, passoit pour échauffante. L'usage de son infusion dans du vin , éloit utile pour se ga- rantir des maladies contagieuses ; pour guérir les morsures des araignées et autres animaux venimeux de cette classe. Pline donne au myrrhis le nom de ricutaria, le dit entièrement semblable au cicitlu , excepté qu'il est plus bas et plus menu; il ajoute qu'il excite l'appétit.

Le Srandix odorata ou Cerfeuil musqué , est le myrrhis des anciens.

Ce même scamdix odorata est le type du genre myrrhis de Tournefort , supprimé par Linnaeus , et rétabli par Adanson, Haller, Gseriner, Moench et Persoon. V. Myrrhe. Dans les ouvrages de botanique, antérieurs à ceux de Linn. , on trouve plusieurs plantes orabellifères indiquées et décrites sous le nom de myrrhis. Ces plantes appartiennent aux genres 5wo«, athumanta , caucu/is, et surtout scandix ti chœropJiyllum. (ln.)

MYRRIIITES. Cette pierre^ selon Pline, a la couleur de la myrrhe ; lorsqu'on la frotte , elle exhale une odeur par- fumée analogue à celle du nard. Ce naturaliste la compare à une petite pierre précieuse , ce qui suppose que le myrrhiies ne se trouvoit pas en gros morceaux. Il est probable que c'étoil une variété de succin , de couleur noirâtre, ou une résine fossile, (ln.)

MYRRHOIDES d'Heister. Ce genre rentre dans le Chœ- rophyllum de Linnœus. Il n'a pas été adopté, (ln.)

MYPiSEN , de Kirwan. C'est la magnésie carbouatée , dite Ecume de mer ou Meerschaum. V. ces mots, (ln.)

MYRSIDRUM. En 1810, Rafmesque Smaltz a établi sous ce nom un genre de végétaux acotylcdons marins , dont le type est Valcyonium bursa , rangé jusqu'ici et même tout récem- ment , auprès des éponges , c'est-à-dire , dans le règne ani- mal , par les naturalistes qui se sont le plus occupes de dé- crire les productions de la mer.

Avant M. Rafmesque, néanuioins , Cavolini et Olivi avoient soupçonné que cet alcyon étoit un végétal. Voici les caractè- res qu'ils lui assignent: corps solide, composé d'une base cen- trale , fibreuse , à laquelle est attachée une grande quantité de petites vessies allongées qui forment très-souvent, par leur réunion , une masse solide dont la surface est granulée , le reste étant , comme dans un genre voisin , formé par

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l'auteur , sous le nom de Physidrum. V. ce mot. Le genre myrsidrum en diffère encore , ainsi que de celui appelé Phyo- TRis par M. Raûnesque, par ses petites vessies allongées et attachées à une base fibreuse. Le JNIyrsidrum bourse (myr- sidrum bursa ), alcyon Lursa, Linn. ; lawarckia hursa, Olivl , est simple, arrondi, déprimé, voûté, et présente dans son intérieur des filainens fibreux. Le Myrsidrum vermiforme (^lumnrckia veimUara^ (^)livi; fucus tumentosus ^ Stackh. ;yuc«s fungasus , Desf. , FI. atlanl. ; uha iumentosa , Lam. et Decan- dolle , n. fr. , est rameux , dichotome avec les rameaux cy- lindriques obtus, et les ramifications obtuses. Le Myrsidrum DILATÉ ( myrsidrum dilatatum ) est rameux , dichotome ; les rameaux sont un peu comprimés, obtus, avec les bifurcations larges , dilatées , comprimées , arquées. Il est beaucoup plus grand que le précédent. Le Myrsidrum en massue est com- posé de lobes ovales, inégaux, simples, groupés entre eux. Le Myrsidrum répandu (myrsidrum effusmn ) , est simple , lobé, difforme, étalé. Le Myrsidrum rameux (77/j'r5iV//7/mramo5«A«) est rameux , avec des branches éparses , cylindriques , obtu- ses , entières ou bifurquées. Il diffère du myrsidrum bursa , parce qu'il est plus petit et que ses rameaux sont épars,

Ce genre , appelé Lamarckia par Olivi, a été adopté paf Stackhouse {Néréide hritannique) , sous le nom de codium ; et par M. Lamouroux {Essai sur les thalassiophites) , qui le place dans son ordre des alcyonldées , sous celui de Spongodium. V. Alcyon, (desm.)

MYRSINE. Nom que les Athéniens donnoient au Myrte* V .myrlus. Linnseus a transporté ce nom à un autre arbrisseau dont il a fait un genre particulier. Adanson , pour éviter cette fausse application du mot myrsine , appelle ageria le genre de Linnœus. (ln.)

MYRSINÉES. Nouvelle famille proposée parR. Brown , et qui rentre dans celle appelée Ophiosperme parVentenat. V. MiRSiNÉ et Ardisiacees. (b.)

MYRSINEON des Grecs et MYRSINEUM des Latins- Noms du tenouil sauvage appelé aussi Hippomarathrum, dénomination qui s'élendoit à plusieurs plantes ombelli- fères. (ln.)

MYRSINITE. Pierre qui a la couleur du miel et l'odeur du myrte. Cette pierre, mcntiotinée par Pline, pourroit bien être de I'Ambre ou Succin. (ln.)

MYRSINITES, qui ressemble au Myrte. C'est la se- conde espèce de iiihymale citée par Pline , et que les com- mentaleurs rapportent à notre Euphorhia myrsinites. Ce nom demyrsiniles ou de myrtifolius a été étendu à plusieurs autres es-

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pèces d'euphorbes. Myrsinites , étoit aussi, cher les anciens, synonyme de Myrtitks. (î.n.)

MYRSINOS. L'un des noms grecs du Myrte. Galien le donne encore au chèvrefeuille. Il y avoit encore le myrsine saumge ou Voxymirsine qui est notre Fragon ÉPINEUX , ruscus aculeatns. T. Myrtus, Peuiclymenon, etRrscus. (ln.)

MYRSlPHYLLE,i)/;ra>/iy//Mm. Genre établi pir Will- denow , pour placer la Médéole asparagoïde, qui diffère en effet beaucoup des autres. Ses caractères consistent : en une corolle à six divisions recourbées; en trois styles rappro- chés ; en un ovaire pédicellé ; en une.baie à trois loges, con- tenant chacune deux semences, (b.)

MYRSIPHYLLUM. Arbrisseau de quatre à cinq pieds de hauteur, qui croît à la Jamaïque , et dont les feuilles ont quelque ressemblance avec celles du myrte ; car elles sont opposées , ovales, pointues , dures et brillantes. Cet arbris- seau doit , selon Pierre Brown , constituer un genre particu- lier; mais ce genre diffère très-peu àxxpsychotrophum du même botaniste , et les deux ont été réunis par Swartz , au PsYCHO- TJ\IA, Linn. V. ce mot.(LN.)

MYRSIPHYLLUM de Willdenow. F.MEDEOLAetMïR-

SIP.HYLLE. (LM.)

MYRTAKANTHA {Myrte épineux, en grec). C'est l'un des anciens noms du Fragon ( ruscus aculeahts). V. Rus- cus. (ln.)

MYRTAKIA etMYRTARIUS. Plante citée par Théo- phraste et par Pline , au nombre de celles qu'on regardoit comme des espèces de tithymalus. ( V. ce mot). Elle se dis- tinguoit par ses feuilles semblables à celles du myrte. Plu- sieurs Euphorbes sont dans ce cas. (ln.)

MYRTE , Myrlus , Linn. , Icosandrie monogynie. Genre de plantes de la famille des myrloïdes. Un calice d'une seule pièce , partagé en quatre ou cinq découpures persistantes; une corolle composée de quatre ou cinq pétales entiers, in- sérés au calice ; des étamincs nombreuses , dont les filets ca- pillaires, et de lalongueur de la corolle, portent de petites an- tiières arrondies ; un ovaire inférieur ; un style mince ; un stigmate obtus ; une baie sphérique ou ovale , couronnée par le calice, et à deux ou trois loges , renfermant chacune une semence réniforrae et presque osseuse : tels sont les carac- tères de ce joli genre qui a beaucoup de rapports avec les Jambosiers et les Gouyaviers ; mais dans ces derniers , la baie est polysperme, et dans les jambosiers, elle est h une seule loge.

Les genres Calyptranthe , Sisygie et Chyatraculif. ont été formés aux dépens de celui-ci. Les myrtes sont des

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arbrisseaux ou des arbres de moyenne grandeur, la plupart étrangers, à feuilles simples, presque toujours opposées, perfo- rées comme celles des millepertuis, et munies, ainsi que dans les gouyaviers, de deux pointes en forme de stipules; à fleurs tantôt solitaires, garnies de deux écailles à leur hase etaxil- laires , tantôt disposées en corymbe ou en panicule , et alors axillaires ou terminales.

Les bolanisies comptent aujourd'hui plus de cinquante es- pèces de myrtes, dont les plus intéressantes à connoîlre sont:

Le Myrte commun, Myrtus commuais ^ Linn. , jadis consa-; cré à Vénus , et chanté par tous les poêles. C'est un char- mant arbrisseau , d'un port agréable , plus ou moins élevé , selon le climat , et dont le feuillage toujours vert et touffu , procure un ombrage épais dans les pays il croît naturel- lement. Il a des rameaux nombreux et tlexibles , chargés de feuilles lisses et luisantes , formant avec ses fleurs blanches un joli contraste. Lorsqu'on froisse ces feuilles , elles exha- lent une odeur suave qui fait une impression vive sur le cer- veau. Elles sont entières , opposées , très-rapprochées ei por- tées par un court pétiole ; leur forme est ovale-lancéolée , leur consistance ferme , et leur surface également verte des deux côtés: elles diffèrent de grandeur, suivant les variétés. Les fleurs naissent aux aisselles des feuilles , solitaires et op-

Îtosécs , soutenues par de longs pédoncules cylindriques; eur calice est à cinq divisions avec deux bractétrs au-dessous , leur corolle a cinq pétales. Elles donnent naissance à des baies ovales et à trois loges, d'un pourpre foncé, couronnées par les bords du calice.

Cet arbrisseau croît en France, dans les provinces méri- dionales , en Italie , en Espagne , sur les côtes de Barbarie , et dans les contrées chaudes de l'Asie et de l'Afrique. La cul- ture lui a fait produire un assez grand nombre de variétés , qui ne diffèrent entre elles que par la forme des feuilles , et par quelques légers changemens dans le port. Le fruit d'une de ses variétés , qui se cultive dans l'Asie mineure , est blanc , gros coinme une prune moyenne, et se mange.

Le myrte commun se multiplie très-facilement par mar- cottes et par boutures. La marcotte n'a rien de particulier. Pour la bouture, on choisit les jeunes pousses de Tamiée pré- cédente , on les effeuille jusqu'à la moitié , ensuite tor- dant la partie inférieure sans détacher l'écorce , on la plante. Le nombre des boutures doit être proportion- né à la grandeur du pot , qu'on place à l'ombre dans un lieu découvert, et qu'on arrose au besoin. C'est lorsque lar- bre est en sève qu'on doit faire cette opération. La bouture reste en terre jusqu'à la fin de l'hiver. A cette époque on l'en-

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lève avec toutes ses racines pour la planter , soit dans un pot , soit en pleine terre , suivant le climat. Si dans les pays chauds on la place contre un mur pour en former des palissades , on doit faire en sorte que pendant six semaines ou un mois , elle ne soit point frappée directement par les rayons du soleil ; mais il ne faut pas le lui ôler entièrement, et encore moins la priver d'air. Quelques labours légers, et des arrosemens donnés au besoin , sont dans la suite les seuls soins qu'elle exige. En semant la graine de myrte , on jouit beaucoup plus tard, mais on peut obtenir de nouvelles variétés.

Les myrtes placés dans des pots ou des caisses doivent êlre traités comme les orangers; on doit les garantir des premières petites gelées blanches , dans une bonne orangerie. Pendant rhiver il faut les arroser un peu , car s'ils n'étoient pas en- tretenus dans Une médiocre humidité, ils perdroient leurs feuilles et périroient même. On doit leur donner de Tair autant qu'il est possible.

Toutes les variétés du myrte commun se multiplient et se cultiveVit de la même manière. On conserve par la greffe cel- les à feuilles panachées qui , à raison de la folblesse de leur constitution, réussissent rarement de boutures.

Le bois de cet arbrisseau est dur ; son écorce , ses feuilles et ses baies sont propres à tanner les cuirs ; dans le royaume de Naples on emploie les feuilles à cet usage. Les baies ser- vent dans la teinture. Les merles en sont très -friands: cette nourriture leur donne un goût délicat ; les anciens met- toient ces baies dans leurs ragoûts. Elles sont astringentes. Les feuilles et les fleurs de myrte ont une odeur très-douce. On en retire, par la distillation , une huile essentielle aro^ matique, qui entre dans les parfums.

Les autres espèces intéressantes de myrte sont celles qui suivent.

Myrte pimetst ou toute-épice , Myiius pimenta , Linn. ; Cariophyllus pimenta^ Mill. n." 2. C'est un arbre d'une très- belle apparence , qui s'élève à plus de trente pieds avec une tige droite , revêtue d'une écorce unie et brune , et divisée en plusieurs branches opposées , garnies de feuilles oblongues , semblables par leur forme , leur couleur et leur texture à cel- les au laurier, mais plus longues. Ces feuilles, lorsqu'elles sont froissées , répandent , ainsi que le fruit , une odeiu' forte et aromatique. Les fleurs, suivant Miller, sont dioïques. Les mâles , dont les pétales sont très-petits , renferment un grand nomhre d'étamines de la même couleur que la corolle , aveq des anthères ovales et divisées en deux parties. Les femelles, dépourvues d'étamines , ont un germe ovale , surmonté d'un style mince à stigmate obtus. Ce germe , après avoir été fé-

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condé , devient une baie globulaire et charnue , dans laquelle sont contenues deux semences réniformes.

Cet arbre , dont on voit la figure pi. (x 26 de ce Diction- naire , est originaire de la Jamaïque et se trouve plus abon- damment dans le nord de cette île que partout ailleurs. Il fleurit ordinairement en juin , juillet et août. Comme il con- serve ses feuilles pendant touie Tannée , les babilans en abri- tent et en ornent leurs possessions. D'ailleurs , il forme pour cette colonie une branche considérable de commerce par son fruit , qui , desséché avant sa maturité , fournit la toute-épice , si connue en Europe ; et comme il croît sur des terres rem- plies de rochers, la canne à sucre ne réussiroit point , il est cultivé avec avantage par les planteurs qui tirent ainsi parti des mauvais terrains.

Dans son pays natal, ce myrfîfe se multiplie de graines trans- portées au loin par les oiseaux. En Europe , la serre chaude est nécessaire à l'éducation et à la conservation de cet arbre ; mais il n'exige qu'une chaleur modérée. Pour le propager , on sème sa graine dans une terre douce et légère , ou on marcotte ses jeunes branches, en les fendant à un nœud, comme on le pratique pour les œillets. Si cette dernière opé- ration est faite avec soin , et que les marcottes soient légère- ment efrfégulièrement arrosées , elles pourront , au bout d'un an , être séparées des vieilles plantes. La disposition des feuil- les de cette espèce indique qu'elle s'écarte du genre.

Myrte biflore, Myrtus bîjlora , Linn. Arbrisseau d'un as- pect très -agréable, qui croît naturellement à la Jamaïque, et qui mérite d'être élevé dans nos serres pour la beauté de son feuillage. Ses feuilles n'ont point d'odeur , mais elles sont d'un vert brillant durant toute l année -, et produisent un bel effet. Leur forme est lancéolée , et leur tissu plus ferme que dans les espèces précédentes. De l'aisselle de chacune d'elles sort un pédoncule lissé et cylindrique qui se divise en deux, et soutient deux fleurs auxquelles succèdent des baies rondes couronnées par le calice , et d'une couleur très-brillante.

On multiplie ce myrte par ses semences , et on le traite comme le myrte piment.

Myrte a feuilles rondes de fustet, Mydus cotinî- folia , Lam. , Plum. On le trouve à Saint-Domingue et à Car- thagène dans l'Amérique méridionale. C'est un arbre haut de douze à quatorze pieds, qui a des tiges irrégulières, des feuilles fermes, ovales et opposées, des fleurs blanches pla- cées aux côtés des rameaux , au nombre de deux , de quatre ou de cinq ensemble , et des baies rondes, dont la plupart ne contiennent qu'une semence en forme de rein. Cette es- pèce n'a point de goût aromatique , mais elle conserve sts

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feuilles toute l'année. On la multiplie comme la dernière ;

et elle exige le même traitement.

Myrte musqué, Myr-tillus ugni , Molin. ; Myrliis buxi fulio , fructu rubro, vulgàmurtilla^ Fenill.3, tom. 3i. Petit arbrisseau du Chili, de trois à quatre pieds de hauteur, dont les ra- meaux sont opposés deux à deux, et garnis de feuilles assez semblables , pour la grandeur et la forme , à celles du buis ou du petit mj/'/e commun. Ses baies rouges , grosses couune une petite prune , et couronnées par le calice , ont une odeur aro- matique très-douce qui se répand au loin. Les naturels du Chili en font un vin agréable , stomacal , qui excite l'appétit , et que les étrangers préfèrent aux meilleurs vins muscats.

Myrte LîTMA , Myriusluma, Molin.; Myriusjîon'ôus soiilan'is, foins suhorbiculalis , Molin., Hist-nat. Chil. , p. lyS. Ce myrte ^ dit Molina , diffère du myrte osdinaire par ses feuilles presque rondes , et par sa hauteur, s'élevant à plus de quarante pieds. Ses fleurs sont solitaires dans l'aisselle des feuilles; son bois est le plus propre que l'on connoisse pour la fabrication des voitures; aussi tous les ans on en embarque une très-grande quantité pour le Pérou. Les Indiens font avec les baies un via savoureux et stomacal.

Molina cite encore une autre espèce de myrte, sur lequel il nous donne peu de détails ; il l'appelle myrtus maj^ma pe— dunculis miiltifloris , folils alternis subovalihus. C'est un arbre qui s'élève à plus de soixante pieds , et dont le bois est également très-estimé. (d.)

MYRTE BATARD. Nom du Gale odorant (b.)

MYRTE DES BOIS ou DES MARAIS. C'est le Gale {^Myrira gale , Linn.). (ln.)

MYRTE ÉPINEUX. C'est le Houx frelon ( Ruscus aculeaiiis^ Linn.). (LN.)

MYRTE JUIF. Variété du myrte ordinaire , dont les feuilles sont verticillées trois par trois , circonstance très-rare qui faisoit rechercher cette variété par les Juifs, principale- ment pour leurs cérémonies religieuses, (ln.)

MYRTE DE MARAIS. C'est le Gale. {Myrica gale).

(LN.)

MYRTE PIMENT. V. Maniguette et Myrte, (ln.) MYRTE SAUVAGE C'est le Fragon, (b.) MYRTICOCCUS. Espèce de galle-insecte, observée en Orient par Belon , sur les petites branches du Myrte, (ln.) MYRTIDANUM, Hippocrate donne ce nom au poivre , ou pluiôl aux baies du myrte , qui servirent long-temps chez les Grecs en guise de poivre, avantque celui-ci fût connu. C'est avec les graines du myrte que Ton composoit cette sauce exquise, appelée myrtatum. Hippocrate nomme aussi myrii'^

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danum les rejets et les pousses du myrte. C'est dans le mémp sens que Galien fait usage de ce mot ; mais Dioscoride l'ap- plique à une excroissance qui naît sur le tronc du myrte, et qui Tenveloppe comme feroit une main. Pline dit que le myr- tidamim est un vin dans lequel on avoit fait infuser des graines de myrte sauvage. On l'obtlboit aussi par l'infusion, dans le vin, des fruits, des fleurs et des feuilles à la fois, ou en les pilant et les arrosant petit à petit avec du vin ou de Teaude pluie. Le liquide clarifié donnoit un myrlidanum qu'on em- ployoit pour teindre les cheveux en noir, nétoyer la peau de ses taches et rousseurs , et pour la guérison des ulcères à la bouche , au fondement , etc. Il paroît que Pline a entendu par viyrte saumgç le vrai myrte , et non pas le fragon , qu'il appelle aussi myrte sawage et oxymyrsîne ^ dont on faisoit éga- lement, et par les mêmes procédés , une liqueur vineuse et médicinale , utile pour guérir de la jaunisse, etc. (ln.)

MYRTILLE. Espèce d' Airelle, (b.)

MYRTILLUS. Nom que les Latins donnoient au fruit du Myrte et à celui du Fragon épiîseux (ruscus aculeatus)\ il est resl« au Myrtille, espèce du genre Airelle {vaccinium myrlillus). Tragus appeloit grand myrtille ( myrtillus grandis^, V^K^OVSIEK P^LV\^ {arbutiisalpina); et Wlyrtille nain (myr- tillus exiguus) ; 1' Airelle ponctuée (vacciidum vitis idœà). (ln.)

MYRTITES des anciens, f^. Myrtidanum, Sorte de vin fait avec le myrte, (ln.)

MYRTOCISTUS. Thomas Pennseus, médecin de Lon- dres , qui vivoit en i58o , paroît être le premier botaniste qui ait découvert Vhypericum balearicum. Les fleurs de cette plante sont d'un jaune d'or, et analogues , pour la grandeur, à celles de quelques cistes ; ses feuilles ont la disposition et à peu près la forme de celles du myrte , et offrent de même des glandes. C'est d'après ces considérations que Pennseus et Clusiùs ont nommé myrtocisius cette espèce de Millepertuis, (ln.)

MYRTOGENISTA. Jac.Breyn(Cent. tab.29) dopnè ce nom à un arbrisseau du Cap de Bonne-Espérance, dont les fleurs sont papilionacées comme celles du Genêt, et le^ feuilles semblables à celles du myrte. Cet arbrisseau paroît otre le même que celui figuré par Plukenet ( Alm.ldh. i85, fig. 2 ) , et représenté par Hermann ( Lugdb. tab. 271); c'est- à-dire le sophora biflora , Linn. , qui fait maintenant partie du genre podalyria : c'est le pudalyria myrlifolia , Willd. (LN.)

MYRTOÏDES, Myrtdîdœ , Jussieu. Famille de plantes qui présente pour caractères : un calice monophylle, urcéolé ou tubulcux, tantôt nu, tantôt muni à sa base de deux écailles , €t persistant ; une corolle formée de pétales , dont le nombre

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déterminé égale celui des divisions du calice , aliachées au sommet de cet organe et alternes avec ses divisions; des éla- mines en nombre indéterminé , insérées sur le calice au-des- sous des pétales , le plus souvent libres , quelquefois polya- delphes; un ovaire simple, iq^rieur ou semi-inférieur à style unique , à stigmate simple ou très-rarement divisé ; une baie ou drupe , ou quelquefois une capsule à une ou plusieurs loges , et à loges contenant une ou plusieurs se- mences; périsperme nul; embryon droit ou courbé presque en demi-cercle ; cotylédons ordinairement planes , radicule supérieure ou inférieure.

Les myrtdi'dessont presque toutesexolîques , et remarquable* par la beauté de leur feuillage. Elles ont une tige frutes- cente ou arborescente ; des feuilles simples , le plus souvent opposées , rarement alternes , ponctuées dans plusieurs genres , ainsi que dans la famille des hespéridées , c'est-à- dire , qu'on y observe des points qui , regardés en face de la lumière , paroissent transparens. Les fleurs sont herma- phrodites et complètes, exhalent une odeur agréable et varient dans leur disposition. Elles sont tantôt axillaires et solitaires » tantôt disposées en grappes et alternes sur l'axe qui leur est commun.

Ventenat , de qui on a emprunté ces expressions, rapporte il cette famille , qui est la neuvième de la quatorzième classe de son Tableau du Règne végétal y et dont les caractères sont figurés pi. 30 , n." i du même ouvrage , treize genres sous deux divisions , saroir :

Les myrtdides à fleurs solitaires , axillaires , ou opposées sur des pédoncules multiflores, et à feuilles ordinairement oppo- sées et ponctuées : Angolan , Dodecas , Mélaleuque , GuAPURÉ , Catingue, Eucalypte , Métrosidkros , Lep-

TOSPERME , FaBRICIE, SeRINGA , GoYAVIER, MyRTE , Ca-

lyptranthe, Jambosier, Giroflier , Décumaire , Sonne- RATiE , Grenadier , et

Les Myrtdides à fleurs disposées en grappes et alternes sur commun , à feuilles presque toujours alternes et non ponc- tuées: Lagerstrome, Stravalie, Pirigara, Couroupite, Quatelier et Butonic.

Smith , dans le troisième volume des Actes de la Société Linnéetme de Londres, a fait une dissertation sur cette famille. Jussieu en a également séparé quelques genres pour les réunir aux Épi^OfiiENNES. (b.)

MYRTOÏDES de Linnaeus (^Hort. Cliff.). C'est le Myrte de Ceylan du même auteur, myrtus zeylanica. (ln.)

MYRTOxVIELlS. Selon G. Bauhin, Gesner proposoit ce nom pour I'Amelai^cuier {jnespUm amelanchier. Lion.), (ln.)

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MYRTOPETALON. L'un des noms du poJygonon mâle de Dioscoride , qui, suivant Matthiole, Fuchsius , etc. , est notre Renouée {polygunum avicu/are). (ln.)

MYRTOSIMILIS et JMYRTIi OLL\, Noms sous les- quels C. Rauhin et autres auteurs indiquent quelques arbres ou arbrisseaux. Dans leur nombre se trouvent le coca des Péruviens , le nyitunthes arbor irîsiis , quelques jasmins , proba- blement le champac , des espèces de tulipiers , le gale , des sumacs , etc. (ln.)

MYRTOSPLENON. Chez les anciens , ce nom désigne la plante que les Grecs nommolent Alsine , et qui est notre MoRGELiNE ( alsine média ). V. Myosotis, (ln).

MYRTUS et MURTUS des Latins. C'est le myrte des «nodernes. Les arbres furent les premiers temples consacrés à la Divinité. Le chêne fut dédié à Jupiter, le laurier à Apol- lon , l'olivier à Minerve , et le myrte à Vénus. Un feuillage parfumé , des fleurs élégantes et nombreuses , une verdure perpétuelle, ont sans doute fait consacrer le myrte à la mère des Amours. Chez les Athéniens, le myrte étoit connu sous le nom de myrsinè , du nom d'une jeune fille aussi célèbre par sa beauté que par sa force , brillantes qualités qui excitèrent la jalousie de Pallas, Cette déesse , dans «ne course de chars, fit périr l'infortunée Myrsinè. Mais elle fut changée en l'ar- brisseau qui porte son nom , et qui dès-lors devint aussi cher à la déesse que l'olivier. Au reste, chez les Grecs , le myrte s'appeloit aussi myrrinè et myrrhinon (Théoph. , Hipp. ) , et myrtos (Plat. , Aristoph.). Ces noms rappellent l'odeur agréa- ble de cet arbrisseau , et dérivent d'un mot grec qui signifie parfum.

L'Orient paroît avoir été le berceau du myrte. Chez le» Hébreux, il s'appeloit hdas. On avoit l'opinion, du temps de Pline , qu'il étoit originaire des monts Cérauniens , dans l'Europe occidentale. Les premiers myrtes qui furent vus en Italie ombrageoient le tombeau d'Elphénor, au promontoire de Clrcé. Cette circonstance et les noms du myrte . qui , chez les Latins, étoient les noms grecs, faisoient croire à l'ori- gine étrangère de cet arbrisseau.

Cependant Pline fait observer que, lors de la fondation de Rome , il existoit un petit bois de myrte dans l'emplacement l'on voyoit de son temps le temple de Vénus Purgatrice , ainsi nommé parce que ce fut sur ce lieu même que les Sa- bins , venus pour combattre les Romains , et après l'enlève- ment des Sabines , se purifièrent avec du myrte et de la ver- veine , en signe de réconciliation. L'on plantoit le myrte au-devant des temples des dieux ; l'on en voyoit à Rome deuxpiedi devant le temple <Jc guixinus. On leur supposoit

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le pouvoir de présager l'avenir. L'un de ces pieds s'appeloit le myrle des sénateurs, et l'autre le myrte plébéien. Le pre- mier conserva sa verdure autant de temps que les sénateurs surent maintenir leur autorité; mais il perdit sa fraîcheur lorsqu'elle déclina, tandis que le myrte du peuple , jusque-là desséché , reprit toute sa vigueur.

Le myrte ceignit le front des héros romains bien avant que le laurier eût conquis cet honneur.

Théophraste nomme le myrte plusieurs fois, mais n'en donne aucune description. Pline s'étend beaucoup sur cet arbrisseau , sur ses variétés , dont il en compte onze , sur ses usages et sur ses propriétés. L'on employoil de préférence en médecine les myrtes cultivés. On en tirolt une huile essen- tielle odorante; on. en confectionnoitune sorte de vin , qu'on nommoit myrtidanum. ( f^. ce mol). On faisoit usage des baies (^myiiilli) pour les sauces, en guise de poivre et de gérofle , bien avant l'introduction de ces épices en Europe. Le bois de myrte servoit à faire des cannes. Caton admet trois sortes de myrtes : celles à baies blanches, celles à baies noires, et le myrte conjugal. Pline distingue les myrtes, en myrtes cuU tivés et en myrtes sauvages , qui offrent chacun des variétés caractérisées parles dimensions de leurs feuilles. Quant à son myrte sauvage épineux, ou oxYmyrsme^ c'est le Fragon {ruscus aculeatus).

Le myrte a conservé son nom jusque chez les modernes ; et c'est du mot myiius que dérivent presque toutes les appel- lations européennes de cette plante. Tous les botanistes lui ont conservé ce nom , jusqu'à ce qu'il soit devenu celui du genre qui le renferme , et dans lequel on compte plus de quarante espèces, toutes, hormis le myrte, étrangères à l'Eu- rope. Ces espèces établissent des rapports entre le genre myrtus cl \ts genres leptospermum^ weirosideros ^ eiigenia ; et quelquçs-unes même y ont été placées , tan^iis que d'autres sont regardées comme type de genres distincts, qui sont; calyptranlhes , Jus,, ou syzygium ei chitraculia ^ Brown, Jam. Quelques botanistes, Adanson par exemple, rapportent le gé- roHier au genre myrte. V. Myrte, (ln.)

MYSADENDRE , Mysadendron. Genre de plantes établi aux dépens de celui du GuY. 11 n'a pas été adopté, (b).

MYSCOLE, A/y^5^o/j«.(ienre de plantes établi par H. Cas- sini pour placer le Scolyme d'Espagne , qui n'offre pas les caractères des autres scolyraes.

Ceux de ce nouveau genre sont : calice commun, composé d'écaillés coriacées, épineuses, dont les intérieures offrent, en dedans , une cavité fermée par deux lèvres , et contenant un ovaire; fleurs radiatiformes , hermaphrodites; réceptacle

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conique , chargé d'écaillés munies à leur face interne d'une cavilé semblable à celle des écailles du calice , et contenant de même un ovaire comprimé , muni de cinq côtes ; anthère» hérissées et appendiculécs ; graine pourvue d'une aigrette coroniforme. (B.)

MYSI ou MISY. Le jnysi est, suivant Pline, une subs- tance corrosive qui se présentoit en eftlorescences de couleur jaune sur le chalcitis , sorle de minerai cuivreux , après son grillage. Les fonderies de Tile de Chypre fournissoient le mysi de meilleure qualité. L'on admet assez généralement que le mysi est du fer sulfaté ou vitriol vert efflorescent, sem- blable à celui produit par les pyrites en décomposition. Dios- coride fait observer que le mysi de Chypre ressemble à l'or, qu'il est dur, et qu'en le rompant il brille en manière d'une étoile. N'a t-il pas voulu désigner la pyrite ou le fer sulfuré radié au lieu du sulfate de /^/-.^ Il ajoute que le mysi qu'on tiroit d'Egypte valoit mieux pour les maux d'yeux , usage auquel le fer sulfaté ne paroîl pas propre, (in)

MYSIS, Mjsw, Latr. , Léach , Oliv. Genre de crustacés , de l'ordre des décapodes, famille des macroures , tribu des schizopodes , qui a pour caractères : tous les pieds divisés , jusqu'à leur base, en deux tiges filiformes et très-grôles.

Trompé par la figure d'une espèce de ce genre, donnée par Olhon Fabricius, dans sa Faune du Groenland, figure le tesl semble être partagé en deux pièces, j'avois placé ces crustacés dans ma famille des Squillares. M. Léach m'en ayant envoyé une espèce , j'ai rectifié cette erreur dans le troi- sième volume du Règne animal de M. Cuvier,

Les mysis ont de grands rapports avec les salicoques ; ce sont des crustacés dont le corps est très-petit , allongé, étroit et mollasse. Les antennes latérales sont situées plus basque \qs mitoyennes, sétacées, très-longues, et recouvertes a leur base d'une grande écaille. Celles-ci se terminent par trois filets, ou soies, dont deux forts longs. Les deux yeux sont rapprochés à Texirémilé antérieure du test, à côté d'une sail- lie triangulaire , déprimée , plus ou moins avancée en forme de bec.

Les palpes des mandibules sont longs et saillans. Les pieds- mâchoires, ou du moins leurs divisions extérieures ( le palpe en forme de fouet') paroissent, à raison de leur forme et de leur allongement, servir, ainsi que les pieds proprement dits, à la locomotion ; ceux-ci sont formés de deux tiges, partant d'un support commun, en forme de tubercule ou d'article arrondi, offrant ensuite chacune un pédoncule de deux articles ; et terminées immédiatement après par un filet articulé, très- grêle , flexible , garni de quelques soies courtes et pointues

,BG M Y S

au bout ; la branche extérieure est plus forte; le second nrJÎ- cle de son pédoncule est grand et triangulaire ; le même de la division interne surpasse aussi le premier en grandeur ; mais il est moins dilaté et en carré long. D'après celle forme particulière des organes de la locomotion, il semble qu'il y en ait quatre rangs longitudinaux; en y comprenant les pieds- mâchoires , le nombre apparent de ces pieds paroît être de 24 à 26, ou même un peu plus. La queue est terminée par une nageoire de quatre à cinq feuillets. Les œufs sont ras- semblés à l'extrémité postérieure de la poitrine, près des dernières pattes, et renfermés entre deux valvules en forme de coquilles, dont le dessus m'a paru être appuyé par quel- ques appendices ou fausses pattes. Cet ovaire forme une proé- minence en manière de bosse.

M. Léach avoit d'abord désigné ce genre sous le nom de Praimus {Encycl. d'Edimh.'):, mais il a ensuite adopté celui que je lui ai donné. 11 en décrit trois espèces : le Mysis spino- SULE , Mysis spinosulus. La lame intermédiaire de la nageoire caudale a une échancrure aiguè* ; elle est garnie extérieure- ment de petites épines ; les feuillets extérieurs sont pointus , avec une frange trgs-large de cils. Il se trouve dans les mers d'Ecosse. Le Mysis de Fabricius, Mysis Falridi^^roTpre aux mers du Groenland , a ses feuillets extérieurs arrondis à leur extrémité , et celui du milieu obtusément échancré. 11 :a'y a pas d'échancrure dans le Mysis entier, Mysis inieger ^ qui se trouve sur les côtes de l'île Aran. La première espèfce a de grands rapports avec le cancer fle.xuosus de Millier , qui est bien un mysis, ainsi que le cancer oculalus d'Othon Fa- bricius , Fauri. Groenl.y tab. i , fig. A, B. Son cancer peâatus forme peut-être un autre genre voisin du précédent.

J'ai reçu de M. Edouard Richer un autre mysis , distinct des précédens par la saillie beaucoup plus forte de son mu- seau. Il l'avoit pris sur les côtes de Noirmoutiers. V. VAsta- cus harengiim de Fabricius,

Le Mysis bipède d'Olivier, dont la description est tirée d'Othon Fabricius, est une espèce de Nébalie. V. cet arti- cle. Je ne connois point le Mysis plumeux, décrit par M. Risso dans son Hist. nat. des Crustacés de Nice. Je doute qu'il soit de Ce genre, (l.)

MYSOPATHOS. Plante des anciens, qui est la même que Vorymdides de Dioscoride. V. Ocymastrum. (ln.)

MYSSUR. Nom tartare et arménien du Sorgho {hokus sorghiim , L. ). (lts.)

Wi^T S.lL{moustacJie^ enfrançais).Nom spécifique de l'HU' GOTSE , plante de 1 înde. V. ce mot et Modéra, (lm.)

MYSTE, Myshis. Genre de poissons établi pai' Lacépède

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aux cypens des Clupées. Il offre pour caraclères : plus de trois rayons à la membrane des branchies ; le ventre caréné ; la carène du ventre dentelée ou très-aiguë ; la nageoire de l'anus très-longue et réunie à celle de la queue ; une seule nageoire sur le dos."

La seule espèce que renferme ce genre, le Myste clu- PÉoïDE , se trouve dans la mer des Indes. Elle ressemble à une lame d'épée. Sa couleur est blanchâtre.

On donne le môme nom au Cyprin barbeau et au Pime- LOBE cous, (b.)

MYSTICETUS. Nom latin de la baleine^ formé du grec- mystikrtos. V. BaleIî^e. (s.)

MYSTIKETOS. V. Baleine, (s.)

MYSTUS. Ce nom a été donné par Artedi etLinnseus , dans ses premières éditions, à la division des Silures que M. Lacépède désigne parle nom de Machoirans. 11 l'a été aussi, par M. Lacépède, pour d'autres poissons que M. Cu- vier regarde comme devant former un sous-genre dans le genre des Harengs ou Clupées. V. Myste. (desm.)

MYTE- On donne ce nom , au Tonquin , à un fruit qui ne paroîtpar différer du Jacca. V. Jacquier, (b.)

MYTHKIDATION ouMYTHRIDATES. Plante men- tionnée par Pline , d'après Cratèvas , et dont on devoit la connoissance au roi Milhridate. Celte plante consistoit en deux feuilles radicales , d'entre lesquelles naissoit une hampe portant une seule fleur incarnate. On lui attribuoit de grandes vertus contre les enchantemens et, les poisons ; mais elle n'occupoit que le second rang, le moly étant l'antidote par excellence. Anguillara et Césalpin pensent que cette plante est noire ViOULTE {erythroniumdens canis).

Quelques auteurs ( C. B. Pin. 247 ) prétendent que le mythndatlon GSi notre scordium^ espèce degermandrée; mais la description de Pline ne lui convient en rien. Peut-être le naturaliste romain et Cratèvas , qu'il cite , ont-ils parlé de deux plantes différentes.

L'on trouve quelquefois ce nom de mythridaticn écrit mytridanum ou mytriàanium , noms qui sont également ceux du fameux contre-poison que Milhridate avoit découvert, et qui, d'après la recette que C. Pompée trouva dans les papiers de ce roi , se composoit de deux noix sèches, de deux figues et de vingt feuilles de rue, le tout broyé avec un grain de sel. En mangeant de ce contre-poison le matin, on n'avoitrien à craindre pendant vingt-quatre heures, (ln.)

MYTILENE. V. Bruant mitilène. (v.)

MYTILACES. Famille de mollusques acéphales pourvus de coquille. ïoules les espèces qui y entrent ont le manteau

,68 M y X

fendu par-devant , mais avec une onverlure séparée pour les excrémens; un pied servant à ramper, ou au moins à tirer , diriger et fixer le Byssus. Le genre moule lui sert de type. V. ce mot, ainsi que ceux de Mollusques , Bivalve et Coquille, (b,)

MYTILIER. Animal des Moules. Il a le devant du man- teau ouvert; un pied; point de tube propre à la respiration, (b.)

MYTILUS. Nom latin des coquillages du genre Moule.

(desm.)

MYTULITE. On a donné ce nom aux Moules fossi- les, (b.)

MYTYMYÏ. Nom de la Fumeterre bulbeuse , au Kamtschatka , selon Gmelin. (i.N.)

MYUKON. Les anciens Arméniens donnent ce nom à la Marjola^e. (ln.)

MYUROS d'j^ii/is. Selon Anguiilara, ce seroit la Sapo- naire ocYMOÏDE (^sop. ocymoïdes ^.lÀnn.^. Ce même nom de myuros , qui signifie queue de rat en grec , est celui d'une es- pèce de FÉTUQUE {festuca myuros ^ Linn. ). (ln.)

MYXA, MYXARIA, MYXAI et MYXON. Noms d'un fruit juteux comme la prune , et que produit l'arbre nommé myxos ou myxus. La pulpe, de ce fruit a la consistance mu- queuse et gélatineuse du mucus nasal, d'où lui viennent ces noms. D'après ce que dit Pline , Ton voit que cet arbre croissoit sur les collines de Damas, en Syrie et en Egyple ; qu'on étoit parvenu à l'acclimater en Italie , il se pro- pageoitpar la greffe sur l* Cormier {Sorbusy^ et que quoique !e myxa fût commun en Italie, on en apportoit de Syrie. Les Egyptiens en tiroient du vin. Dioscoride et Galien ne mentionnent pas le myxa; il en est souvent question dans les ouvrages de Paul d'AEgyne , d'TÏEtius et d'Actuarius. L'on est généralement d'accord pour regarder le myxa comme le sebesten actuel des Arabes qui croît encore en Egypte, en Syrie , etc. ; cependant, si l'on réfléchit que Pline prétend qu'on le greffoit sur le cormier et qu'il n'étoitpas rare à Rome, on doit croire qu'il a confondu plusieurs plantes. La greffe sur arbre de la même famille réussit; mais lorsqu'il s'agit de deux arbres de familles aussi différentes que celle du se- besten et celle du cormier (borraginées et rosacées) , il n'en est pas de même , et il est permis de croire que le myxus d'Italie est une autre plante que le mjicîw d'Orient. Plusieurs auteurs pensent que Pline a voulu parler d'un prunier.

Le Sebesten , ou plutôt les fruits auxquels on donne ce nom en Egypte ou en Orient , sont produits par deux petits arbres du genre Cordia {Voy. Sebestier). L'un est le cordia myxa ou lancien myxa, qu'on nomme aussi Prune sebes-

M Y Z 169

TÈNE : c'est le viài maram du Malabar ; l'autre est le rordia sebestena ou le wanzey des Abyssins , qui le cultivent en grande quamité pour leur agrément , à cause de la multitude de fleurs blanches dont il se couvre. Bruce fait observer que lorsqu'il est en pleine floraison la ville de (iondar et ses environs semblent cachées sous un voile de mousseline, ou plutôt sous un voile de neige nouvellement tombée. Cet arbre s'élève de dix-huit ou vingt pieds. Les Gallas, nation puissante voisine des Abyssins , lui rendent les honneurs divins. C'est sous le wanzey qu'ils élisent leur roi , et que ce prince tient son premier conseil, nomme les ennemis qu'il faut combattre, et indique le temps et la manière d'aller envahir leur pays. Son sceptre est un bâton de wanzey , qu'on a toujours soin de lui enduire de beurre.

On fait de la glu avec les fruits des deux cordia dont nous venons de parler. V. à Tarticle Sebestier.

IjC Myaa pyriformh de Rai , se rapporte au tsiem-iani des Malabares, c'est-à-dire au rumphia amboinensis , Linn. (ln.)

MYXINE , Myxim. Linnœus a ainsi nommé un animal qu'on trouve dans la mer, et qu'il avoit placé parmi les vers intestinaux, Bloch a prouvé, par des détails anatomiques , qu'il apparienoit à la classe des poissons. Il l'a, en consé- quence, rangé parmi enxsous le nom de Gastrobranche, (b).

MYXON, MYXOSet MYXUM. T. Myxa. (ln.)

MYXTAX de Rai. V. Hugone. (ln.)

MYXUS BLANC, de (iesner. C'est I'Azedaracii {Melia azedarach, Linn.), que Gesner croit être le Laurier grec de Pline, tandis que Césalpin soupçonne que c'est le zizypha du même naturaliste. V. MïXA. (ln.)

MYZINE, Wlyzine , Latr. , Oliv. ; Elis, Tlphia , Fab. ; Plesia , Jur. Genre d'insectes de l'ordre des hyménoptères , section des porte-aiguillons , famille de fouisseurs, tribu des scolièles , distingué des autres genres qu'elle renferme aux caractères sulvans : mandibules étroites , très-arquées , bi- dentées ; languette à trois divisions , dont la mitoyenne plus grande , arrondie et en capuchon ; antennes insérées au- dessous du milieu de la face antérieure de la tête , leur second article retiré dans le premier.

Si l'on compare les myzincs avec les scolies , les tiphies et lesmérics, quant aux formes générales du corps, quant aux organes de la mastication et du vol , et surtout quant aux différences sexuelles , l'on découvrira entre ces insectes des traits fappans de parenté , et qui nous rappellent , quoique d'une manière moins sensible , ceux qui caractérisent ie« niutillaires.

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Fabricius a placé dans le genre clés tiphies les myzîflff femelles, et les individus que je prends pour des mâles avec ses élis. Ils s'éloignent tellement des femelles par les yeux, la forme du corps, celle des antennes, et même par les ailes, qu'llligcr voit une erreur manifeste dans ces rapproche- mens. S'ilavoit suivi les différences sexuelles dans les genres mentionnés plus haut, il auroit vu des anomalies semblables. L'analogie, et le tact que j'ai acquis par une multitude d'-ob- servations faites sur le vivant , ont été mes guides.

Les myzines ont les antennes filiformes , composées ie douze ou treize articles serrés , et insérées un peu au-dessous du milieu de la face antérieure de la tête ; leur second article est presque entièrement caché dans le premier, ainsi que dans les méries et les myrmécodes- Les mandibules sont arquées, «îtroites et bîdentées ; les palpes sont filiformes et courts ; les maxillaires sont plus longs que les labiaux , et ont six ar- ticles : il y en a deux de moins aux labiaux; la languette est divisée en trois, avec le lobe du milieu plus grand et voûté en manière de coqueluchon ; le segment antérieur du cor- selet forme un carré transversal, ainsi que dans les tiphies et les méries ; les ailes supérieures ont une cellule radiale , quatre cellules cubitales , dont la dernière incomplète ; la seconde et la troisième reçoivent chacune une nervure récur- rente. Tels sont les caractères généraux propres aux indi- vidus des deux sexes.

Les femelles ressemblent beaucoup à celles des tiphies et des scolies ; leur tête est forte et arrondie postérieurement; les antennes sont courtes , épaisses et contournées, avec premier article beaucoup plus grand , épais , presque obco- nique ; elles sont insérées chacune sous une petite éminence; les yeux sont entiers ; le corselet est presque cubique ; l'abdomen est en forme d'ovoïde déprimé , tronqué en devant à sa base, avec le dessus du dernier anneau chargé de stries fines et très-serrées ; les cuisses et les jambes sont courtes et comprimées; les quatre jambes postérieures ont le côté extérieur épais, et sont garnies de petites épines; les tarses sont longs, comparativement aux parties précédentes, velus, avec des épines allongées, et dont plusieurs sontverticillées. La cellule radiale est détachée postérieurement du bout de l'aile , et se couche dans toute sa longueur sur la troisième cellule cubitale ; celle-ci s'avance au-delà et vers le bord postérieur de l'aile. Dans le mâle , la cellule radiale est jointe , dans toute la longueur, au bord externe. On voit entre elle et la troisième cellule cubitale, un angle ren- trant très-marqué. Le mâle diffère encore de sa femelle par plusieurs autres caractères ; son corps est presque linéaire;

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ses antennes sont plus allongée? , plus menues , presque droites ; ses yeux sont échancrés ; son abdomen est presque en forme de fuseau ; le dernier anneau se termine par deux dents, et offre en-dessous une épine forte et re- courbée ; enfin ses pieds sont plus grêles, avec les jambes peu épineuses.

Les niyzines femelles composent le genre VhtsiE ^ plesia , de M. Jnrine ; il trouve aussi que ces insectes ont les plus grands rapports avec les tiphies , mais qu'ils s'en distinguent en ce que leur corselet n'est pas sillonné postérieurement; que leur abdomen n'est pas épineux , cl surtout par le nombre des cellules radiales. 11 ajoute que les ailes supé- rieures des plésies offrent un caractère qui , parmi les in- sectes tétraptères , n'est propre qu'à eux; le contour anté- rieur de la cellule radiale est entièrement formé par une nervure particulière , indépendante de celle v^ui fait le bord de l'aile. Ce naturaliste rapporte au genre sapyge les hy- ménoptères que je regarde comme les mâles des myzine^ ; mais il dit qu'ils pourroienf former une division particulière.

Olivier , article MlziME de VEncyd. rnélh. , adopte , du moins provisoirement , l'opinion d'illiger, qui, avec Fa- bricius , distingue génériquement les élis. Les niotifs qu'il allègue sont les mêmes.

Panzer , dans un ouvrage il traite des méthodes de M. Jurine , de Linnœus et de Fabricius , relativement aux hyménoptères , a représenté avec détails , deux myzines fe- melles , dont il fait des tiphies, étrange avec les sapvges le mâle d'une de ces espèces , qu'il a pareillement figuré,

M. Bosc a recueilli dans la Car.dine plusieurs espèces de myzines femelles, qui ont élé décrites par Fabricius et Olivier, mais dont les caractc">:s ne sont pas bien tranchés, n'étant fondés que sur de légr>»'es différences dans les cou- leurs de quelques parties et s'ir le nombre des taches.

Myzine MACULEE , Myzuie macuJata , Latr. , Oliv. ; TipJii'a Tnanihfa, Fabric ; C'^queb. Il/i/st. i/on. , dec. 2 , tab. i3 , (ig. 2 , femelle. Son coips est lon^j; de sept h neuf lignes , noir , luisant, fortem?nt ponctue sur la tête et le corselet , et légèrement pubesn-ent ; les antennes sont fauves, avec le- premier article jaune: la tête aie bord antérieur du chape- ron, une ligne transverse au milieu de sa face , et deux autres de chaque côté , dont une derrière les yeux , et 1' autre le long de leur bord interne, jaunes; le corselet offre plusieurs lignes , et des taches de celte couleur ; deux transverses sur son premier segment , savoir : l'une à son bord antérieur et interrompue au milieu, et l'autre au bord opposé ; deux pa- reillement transverses et courtes , à Técus^on ; deux autres

,72 N A G

postérieures, une de chaque côté, le long des angles ; on voit de chaque côté , au-dessus de Torigine de la seconde paire de pattes, une tache oblongue ; il y en a aussi deux sur le dos , une de chaque côté de la naissance des ailes. Les cinq premiers anneaux de l'abdomen ont , en devant, une bande jaune transverse : la première est écbancrée au milieu de son bord postérieur; la seconde est divisée en deux , les trois suivantes sont resserrées ou plus étroites dans leur milieu ; les pattes sont roussâtres , avec les han- ches, la majeure partie des quatre cuisses antérieures et la face postérieure des deux dernières, noires ; cette face offre une tache jaune. Les ailes ainsi que leurs veines sont rous- sâtres.

Elle habite l'Amérique septentrionale. On y trouve aussi : i.o la Myzine flavipède , d'Olivier, figurée par Panzer , Entom. hymen. , pi. i , fig. « , A , c , sous le nom de Tiphia caruliniana ., et dont le mâle pourroit bien être la Stipyga maiorta du même auteur , ibid.^ tab. 2 , c?, e ; 2." la MyZ[NE SEREINE d'Olivier, Tiphia aerena^ Fab. ; Tiphia namea, Panz. ihid. , pi. I , fig. J, e, /•, 3.° les Myzitses obscuke et NAMÉE, d'Olivier. La'tiphie quinquecincAa de Fabricius est encore une myzine très-voisine des précédentes, mais qu'iUlit, par erreur, habiter l'Angleterre. Son élis sexcincia est proba- blement le mâle de la myzine namée , ou de quelque autre espèce très-voisine.

On trouve ., dans les départeiTÎens méridionaux de la France et en Italie , son élis (ylindricus. Son corps est noir , avec une ligne d'un jaune pâle et dilatée de chaque côté en forme de point , sur le bord postérieur et supérieur des an- neaux de l'abdomen. L'élis vobuhis n'en est , je présume , qu'une variété à taches plus nombreuses. Ce sont, à mon avis , des myzines mâles, dont les femelles nous sont incon- nues. Les élis iniemipta , senilis et seplemcincta , du même au- teur, sont des scolies mâles, (l.)

N.

NA. Nom languedocien du Navet, (i.n.) NA et NAGI. L'arbre auquel les Japonais donnent ces noms , suivant Kcempfer , a la grandeur et le port du cerisier. Ses fruils ressemblent aussi aux cerises, par leur gran- deur, leur forme globuleuse et leur couleur d'un rouge pour- pre. Tbunberg en a fait une espèce de myrica (^ V. (tALÉ) ; mais (iœrlner et Willdenovv , sur la considération que les fleurs offrent un calice de quatre feuilles et un slyle fourchu , en ont fait le type de leur genre nageia. Dans le myrica , une

N A B ,73

simple écaille ovale forme le calice , et il y a deux styles. Adanson avoil fait un genre de cet arbre , avant les botanistes précilés. C'est son Nagi. (in.)

N\AHVAL. C'est le nom islandais du Narwhal. V. ce

mot. (desm.)

NAANKTA. Nom que les Tartares Tungouses donnent au Sapin, (ln.)

NA ATIME. Nom du Jujubier commun , Rhamnus zizy- phus , Linn. , au Japon, (ln.)

NAATSJONI. C'est, dans les Indes orientales, le nom du CoRACAN , Cynosurus coracanus ^ Linn. Rumphius figure sous ce nom cette espèce de Cretelle( Amb.5, tab. 76, f. 2 ). Rhéede lui donne le nom malabare de Tsittî-Pullu ^ et "Vesling( AEgypt. , tab. 53) , les noms de noem etsabii. Cette belle graminée , haute de quatre pieds , est une plante cé- réale très-cultivée dans toute l'Jnde (ln.)

NABA et NABO. Ces deux noms désignent, en Espagne et en Portugal , le Cdou-rave et le Nayet, (ln.)

NABACH. r. Nabqah. (ln.)

NABATI. Nom que les Maures donnent à l'AiL des VIGNES , Allium vîneale. (LN.)

NABBAou TUABBA. Les Hottentots donnent ces noms au Rhinocéros. V. ce mot. (desm.)

NABBIMUS. Nom suédois de la Musaraigne com- mune, (desm.)

NABELSAMEN. Le Grateron, Galium aparîne^ reçoit ce nom en Allemagne. (LN.)

NABIROP. V. l'arlicle du Merle violet du royaume de Juida. (v.)

NABIS des Ethiopiens du temps de Pline. C'est la Gi- rafe. V. ce mot. (desm.) . ^ ^

NABIS , Nabis , Latr. , Oliv. Genre d'insectes de l'ordre des hémiptères , section des hétéroptères, famille des géo- corises , tribu des nudicolles.

Les nabis ont été confondus par Fabricius avec les redw oes, dont ils se rapprochent en effet beaucoup, à raison de leur tête rétrécie postérieurement , en manière de cou ; de leurs antennes sétacées ; de leur bec arqué et très-aigu à sa pointe; de leurs formes générales et de leurs habitudes car- nassières. Mais on les en distmgue aux caractères suivans : les antennes des nabis sont insérées plus bas que celles des réduoes , ou au-dessus d'une ligne idéale tirée des yeux à l'o- rigine du labre; l'extrémité postérieure de la tête n'offre point

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d'impression Iransverse ; le dessus du corselet forme un plan continu qui n'est pas divisé en deux parties ou lobes , comme celui des réduves.

Le Nabis guttule. Nabis gidlula , pi. G 33 , i ; Reduvius guitula , Fab. , est très-noir , luisant , avec les élytres et les pattes d'un rouge de sang ; les appendices membraneux des élytres sont noirs, avec un point blanc; les cuisses antérieures sont renflées et uniden(ées. On trouve cet insecte en France et en Allemagne , sous les pierres et sous la mousse.

Les habitans de rile-de-France redoutent la piqûre d'une grande espèce de ce genre , qu'ils appellent morpain , et qui est le reduvius gigas de Fabricius.

On trouve encore dans nos environs, deux autres espèces, le Nabis aptère ( redui>ius apterus, Fab. ), et le Nabis cen- dré d'Olivier ( Encycl. mélh. ). (l.)

NABKA. V. Nabqah. (ln.)

NABLAGRAS. C'est le nom du kœnigia islandica , en Is- lande. (LN.)

NABQAH. Selon M. Delile , ce nom arabe est, en .Egypte , celui du fruit d'une espèce de Jujubier , Rham- nus spina christi ^ Linn. L'arbre qui porte ce fruit s'appelle Sidr ou Nabfj. Prosper Alpin écrit nabca , et d'autres bota- nistes, nahach. Browne , voyageur anglais qui parcourut l'K- gypte et le Dar-Four , prétend qu'à Alexandrie on nomme ce fruit nebka , et lui attribue le parfum de la pomme. 11 ajoute que , dans le Dar-Four , on appelle nebbek deux es- pèces de nerprun; l'une est le nebka d'Alexandrie , l'autre, plus petite dans toutes ses parties, donne un fruit d'un goût différent. Les fruits de ces deux espèces, desséchés et réduits en pâte , ne sont pas désagréables , et servent de provision dans les voyages. Quelques auteurs ont écrit vicieusement Xiapeca pour nabqah. Foj. JuJUBiER et Paliurus. (ln.)

NACARONES. Nom que l'on donne , en Espagne , à toute coquille nacrée, (un.)

NACELLE. C'est la paitlla fomicaia de Linnseus. V. aux mots Patelle et Crépidule.

On appelle aussi quelquefoisde ce nom les Oscabrions. (b.)

NACHANI. Selon Garcias, c'est, dans l'Inde, le nom d'une très-petite graine noire qui a le goût du seigle, et dont la farine sert à faire du pain et entre dans la composition dut. cachou. Clusius la compare à la graine de moutarde , mais la dit plus noire. Il prétend que dans l'Inde on fait, avec sa fa- rine , des pains orbiculaires , qui servent de nourriture sur toute la côte d'Ethiopie. Cette graine est très-probablement, '«elle d'iHic graminée. (ln.)

N A C 1^5

NACHBERG. Selon M. Beurard , c'est une sorte d'argîle calcarifère , schisteuse et bitumineuse ,et spécialement ceilç qui forme le sol du schiste cuivreux dans le comté de Mans- feld , à Bottendorf. (ln.)

NACHL. Nom arabe du Dattier, (ln.) NACHTIGAL. Nom allemand du Rossignol, (v.) NACHTLIEBSTE , Arnica mcturna. Nom allemand de la Tubéreuse , dont les fleurs exhalent leur parfum, princi- palement le soir, (ln.)

NACHTMANTEL. L'un des noms allemands du Pied- ï)E-LiON , Alchemilla vulgaris , Linn. (ln.)

NACHT-RABL. Nom autrichien dei'ENGOULEVENT.(v.)

NACHTSCHATTEN. Ce nom allemand est celui de plusieurs plantes différentes qui aiment Tombrage , par exemple , la Belladone , Atropa belladona ; la Scrophulaire AQUATIQUE , la ViGNE BLANCHE , Clematis v'Ualha , L. , et la Douce-amère. (ln.)

NACHTVIOLE. L'Orchide à deux feuilles porte ce nom en Allemagne, parce que sa fleur exhale le soir une odeur douce , voisine de celle de la violette , mais plus agréable, (ln.)

NAGHTSCHWALBK C'est, dans Frisch , I'Engou-

LEVENT. (V.)

Nx\CHUT. Nom arménien du Pois cultivé , Pisum sa- iii>um , L. (ln.)

NACIBE , Naneltia. Genre de plantes de la tétrandrie monogynie' , et de la famille des rublacées , qui offre pour ca- ractères : un calice de quatre à huit folioles ; une corolle mo- nopétale a quatre divisions velues en dedans ; quatre étamincs ; un ovaire inférieur surmonté d'un style simple à stigmate quelquefois bifide ; une capsule à une seule ou à deux loges , à deux valves renfermant beaucoup de semences imbriquées , orbiculaires et ailées.

Ce genre a été établi par Aublet , et on y a réuni une espèce du genre Petesie de Linnaeus , et V uphionhiza lanceolata de Forskaël , plante dont Lamarck a fait un Mussende. Il a été de plus augmenté de trois nouvelles espèces figurées dans la Flore du Pérou. Ainsi il est aujourd'hui composé de huit es- pèces , dont les plus remarquables , sont :

Le Nacibe lygiste , qui a les feuilles ovales, aiguës , vei- nées ; la tige sarmenteus» et presque frutiqueuse. Il se trouve à la Jamaï^U€>

,76 N A C

Le Nacibe rouge, qui a les feuilles ovales , aiguës ; les grappes multifores , et la tige sarmenleuse et fruiiqueuse. 11 se trouve à la Guyane, il a été observé par Aublet. . Le Nacire blanc a été réuni au genre Cocipsile,

Le Nacibe récliné a les feuilles ovales , aiguës , velues ; les liges recourbées et herbacées. 11 est annuel , et se trouve au Mexique, (b.)

InACOUKY. Nom arabe et égyptien du Balbuzard.

(V.)

NACRE. C'est une matière blanche et brillante qui cons- titue l'intérieur de beaucoup de coquilles. ^lâisVaçicule per- lière dont, à raison de son épaisseur, on peut faire un grand nombre de petits meubles brillans , porte spécialement ce nom. Les perles elles-mêmes ne sont qu'une nacre isolée et plus pure. i^. aux mots Coquille , Avicule et Perle, (e.)

NACRÉS. Nom donné à plusieurs espèces de papi//i»is de Linnaus, à raison des taches argentées de leurs ailes. Voyez Argykne. (l.)

NACRITE {Talcite, K.'nw'.\Erd!gerialk, Wern.; Talc gra- nuleux^ Haiiy. Nacri/e, Brong. - Jam. Schiippiger-Thon^ Karsl., vulgairement, chtorile blanche^. Minéral long-temps confondu avec le talc et avec la chlorite , mais qui s'en distingue par des caractères assez importans. On le reconnoît aisément à son vif éclat perlé ou nacré ; ses couleurs sont le blanc de lait passant au jaunâtre ou au gris , et le vert blan- châtre ; il est léger, friable, et composé d'une multitude de petites écailles lâchement entrelacées, quelquefois curvili- gnes, mais le plus souventagglomérées en pelitesgranulosités; frotté sur la peau , il y laisse une trace blanche et brillante ; il est Irès-onctueux au toucher , et ce toucher est-plutôt gras que savonneux ; il donne une légère odeur argileuse à l'in- sufflation , et il se fond aisément à la llamme produite par le chalumeau. M, Vauquclin a fait la remarque que l'eau dans laquelle on fait macérer le nacnie , devient alcaline et verdit fortement le sirop de violette. Ce savant trouve dans cette pierre les principes suivans :

Silice, 5o; alumine, 26; potasse, 17; fer, chaux et une pe- tite quantité d'acide murialique, Al. John a reconnu, dans le nacritede Mérowilz , silice, 60.20; alumine , 3o,83 ; oxyde de fer , 3,55 ; eau , 5. 11 n'y trouve point de potasse , ce qui peut fort bien faire croire que le nacriîe de Mérowilz ne doit pas être rapporté à la pierre analysée par M.\auquelin.

Le nacrite se trouve dans les cavités et les fentes des roches primitives, et principalement dans celles le quarz domine. 11 est en paillettes disséminées ou bien en petites masses. Il y en a auprès de Freyberg , en Saxe ; à Mérowilz et Gieren ,

N A D I--

en Silésie ; en Bohème ; à Sylva , en Piémont; dans les mon- tagnes de rOisan, en Dauphiné , d'où Dolomieu en a rap- porlé de forl beaux échantillons ; au Brésil, dans les monta- gnes qui avoisinent Canla-Gallo et Las Tocayès : on trouve aussi dans ces montagnes des quarz amorphes , limpides , dont l'intérieur renferme des nuages de narri/eh\anc du plus bel effet. On est dans Tusage de tailler ces morceaux en cabochon comme objet de curiosité. Au Chili , près de S^int-Feiix, on trouve une variété de n.tcriie très-remarquable, en «e qu'elle est mélangée A' eiscnrham ^ sorte de fer oxyde ronge , ayant la légèreté et la structure écailleuse du nacrîte.

L on a rapproché le nanite de la lèpUolilhe. Nous avons fait voir que la lépidolithe est un mica. Ajoutons <|ue M. Pa- Irin a trouvé , en Sibérie , un mica jaunâtre , écailleux , sem- blable à de l'écume (T. à l'article Mica, mica spitmifurme) ^ ce qui rapprocheroit encore le mica du nacrîte , etc. (ln.)

]\ACUND/\. Nom d'un Engoulevent du Paraguay,

(V.)

NACUTUTU. Nom sous lequel d'Azara a décrit plu- sieurs oiseaux de nuit du Paraguay, (v.)

NAD. Nom hongrois des Roseaux , Anmdo. (i.n.) NADAOUEH(/îo5'7V/a). Nom arabe de la Cresse bs CftèiE, Cressa cretica ^ Linn , petite plante de la famille des liserons ou convolvulacées, (ln.)

NADELERS (mine en aiguilles , en allemand ). C'est le nom adopté par Werner et ses disciples, pour désigner le Blsmuth sulfuré plumbo-cuprifère. Torfz vol. 3, p;(g. 443. Le niidelers de la mine d'Eberhard, près d'Alfpirsbach, dans la foret Noire , est un cuivre sulfuré gris, bismuthifère et ar- gentifère. Ilparoit que le nndelers d'Allemont, en Dauphiné , est un cuivre gris analogue ; on l'a comparé au tellure natif, et même on l'a pris pour tel. (ln.)

NADELÎIAFER. Nom vulgaire allemand de I'Epiette joncée , Stipajuncea. (ln.)

NADELKOPFSPATHetNADELSPATH.Nomsdon-

nés , par les Allemands, à la Cuaux carbonâtée spicu- laireou ACir.uLAiRE. (ln.) *

NADELLE. Dans quelques cantons maritimes , on ap- pelle ainsi la Melette , petit poisson du genre Athékine.

(desm.) NADELO. Sur les côtes de la Méditerranée , on donne ce nom à la Sardine fbaîcîie. (dksm.)

NADEL-STEIN, c'est-à-dire, pierre en aiguille. C'est le nom que les minéralogistes allemands donnent à la subs-

178 N A E

lance qu'on appelle vulgairement sc//or/ rouge , et que "VVer- »ier a nommée depuis rhutile ; c'est*le titane oxydé , V. ce mot. Werner avoit transporté le nom de nadehtein à la Méso- type en masses, composées de cristaux fascieulaires et radiés.

V. MÉSOTYPE. (LTS.)

NADELZINNERZ. Klaproth a donné ce nom à l'étaia oxydé , en cristaux très-déliés , comme on en trouve en Gor-

nouailles. (ln.)

]NAD1R. C'est le point de la voûte céleste qui répond di- rectement au-dessous de nos pieds. Une ligne droite qui , étant perpendiculaire à notre horizon , seroit prolongée, en passant par le centre de la terre , jusqu'à la concavité de l'hémisphère inférieur du ciel , iroit aboutir à notre nadir.

Le nadir est diamétralement opposé au zénith. ( Vuy. ZÉ- NITH ). Le zénith et le nadir sont les pôles de l'horizon. Chaque individu sur la terre a un nadir différent, et conséquemment un horizon particulier. Toutes les fois que nous changeons de place sur la surface de la terre , nous changeons de nadir et d'horizon. Si la terre avoit une figure exactement sphérique , le nadir scro'it le zénith de nos antipodes. Mais la sphéricité de la terre n'étant pas parfaite, il n'y a que les lieux situés sous Téqualeur ou sous les pôles, dont le nadir soit le zénith de leurs antipodes, (lib.)

NADIUEL. C'est I'Anguis ORVET , dans le LangueTloc.

(desm.) N^AJM. Suivant Forskaël j on connoît sous ce nom, au Caire , en Egypte, une plante qu'il rapporte à ïachyranthes decumhens. Les Arabes l'appellent âussimahot , uokkes et hoel- Icm. (LN.)

N^-ffiOEISI. Selon Forskaël,les Arabes nomment ainsi et schudjara^ une espèce de Giroflée, qu'il rapporte au chei- ranthus iristis , Linn. (LN.)

NAEGHE. Les Ethiopiens appellent ainsi I'Éléphant , d'Afrique, (desm.)

NiSKMASPORE. Genre établi par Willdenow, aux dé- pens des SPliÉRiEsde Batsch. (b.)

NTSEM ATOTHÈQUES , Nœmatothecii. Nom du sixième ordre de la deuxième classe de la méthode des champignons, par M. le docteur Pcrsoon. Il comprend dix genres, iVsco-

PHORE , PÉRICONIE , ÏSAIRE , MONILIE , DeMATION , EuiNÉE ,

PvAComoN, Himantie, Mésentérie, Schizomorphe. (p. b.) N7*EPFCHENCOBALT et NiEPFELKOBALT.

Noms qu'on donne , dans les mines du Hariz , à I'Arsenic

NATIF. (^LN.)

N A G ,73

NjVESE, Nœsa, Léach. Genre de cruslace's. Voy. Spuje- ROME. (l.)

NAETTE. Les Lapons donnent ce nom à la Marte or- DIINAIRE, Muslcla niaiies, Linn. (desm.)

NAF, NARF et ALCiiEF. Noms ^ue les Maures don- nent aux Cressons. Avicennes écv'it alharf , alrascd, etc. , et Averrhoès , alcherf. (ln.)

Nx\FAH. Nom arabe d'une espèce de Luzerne {medicago inlertexla^ L. ). (ln.)

NAFAL et REQRAQ. Noms arabes du Mélilot des Indes ( melîlutus imlka , Desf. ). (ln.)

NAFVER. Nom suédois de TErable champêtre {^acer campestre'). (LN.)

NAGA-DANÏI des Malabares. J. Eurmann rapporte cette plante au Croton a feuilles de Morelle {aotoiL sohi- nifo/ium). (LN.)

NAGA-MUSADiE. Arbre des Lides orientales. Les Talingas emploient son écorce et ses racines contre les mor- sures du tîc/ga ou serpent à lunette Selon Roxburg, cet arbre a les feuilles réunies par une gaine stipulaire , et pourroit appartenir à la famille des rubiacées. Sa fructification n'est pas connue, (ln.)

NAGA-MU- \'ALLL Nom malabare d'un arbre figuré dans Rbéede (Malab. 8, tab. 29), et qu'on rapporte au bauhînia scandens ^ Linn. (ln.)

NAGA-SASAGL L'un des noms japonais d'une espèce de DOLIC (^doUchos ungw'culaius). (ln.)

NAGA-WALLL Nom de pays de I'O'phiorrhize. (b.) NAGAM. Arbre de la côte du Malabar, figuré dans l'ou- vrage de Rbéede (Mal. 6, tab. 21). C'est le Mollavi (Jieri- iiera lit/oralis, L. ). F. MoLLWi. (ln.)

NAGAS , Mesna^ Arbre de l'Inde, dont le bois porte le nom de bois-de fer ^ à raison de son extrême dureté. Ses feuilles sont opposées, très-longues et argentées en-dessous. Ses fleurs naissent dans l'aisselle des feuilles, vers l'extré- mité des rameaux. Elles sont presque solitaires, et répan- dent au loin une odeur fort agréable qui approche de celle du musc.

Cet arbre forme, dans la monadelphie polyandrie, et dans la famille des GuttifÊRES , un genre qui a pour caractères : un calice simple], de quatre folioles ovales, concaves, obtuses et persistantes, deux opposées plus courtes que les autres; quatre pétales ondulés et comnie tronqués à leur sommet; un Irès-grand nombre d'élamluos réunies en godet à leur base ; un ovaire supérieur arrondi ,

i8o N A G

snrmonlé d'un style épais à sligmale concave; une noix pics que ronde, remarquable par quatre sutures saillantes et ion- giludinales. Elle ne renferme qu'une seule semence.

Le nagas croît dans les Indes orientales, et sa fleur est employée dans la confection des sachets odorans. il découle dr son fruit, avant «a maturité , une liqueur glutineuse très- tenace, (li.)

NAGAS. Espèce de Baleine qui se pêche sur les côtes du J.ipon. (B.)

NAGtASSARI { Nagassaniim , Rumph. , Amh. vol. 7, tah. 2). Grand arbre qui croît dans les Indes orientales. Ses feuilles sont alternes; ses fleurs en épis terminaux sont munies chacune d'un calice à quatre folioles persistantes; de qua- tre pétales; d'étamines nombreuses; d'un style à uu stigmate; d'un fruit uniloculaire à deux ou trois valves , à une seule an»ande. Adanson en fait un genre distinct du nugfias, dont il diffère essentiellement par la structure du fruit. JNéanmoins Linnseus , Willdenow , Lamarck , etc. , attribuent au na- gJias le même fruit ; alors le nagassari pourroit être une se- conde espèce du même genre. (i.N.)

1SAGATAMPO. Nom brame du nughas , adopté par Adanson pour désigner ce genre de plantes. Voyez. Naghas.

NAGEI, Nageia. Genre de plantes établi par Geertner , pour séparer des Gales une espèce représentée , fig. 874. des Aménités de Kœmpfer , quia deux styles, tandis que les autres en ont un bifide. Cette espèce croît au Japon , et a ses fruits de la grosseur d'une cerise. F. au mot Gale, (b.)

NAGEIA. F. Nagi. (ln.)

NAGELEIN etNAGELKEN.Noms des Œillets, en Allemagne, (ln.)

NAGELEINBAUM. L'un des noms allemands du Lilas.

(ln.)

NAGELEIN-GRASS. Plusieurs plantes portent ce nom en Allemagne. Ce sont principalement quelques Laiches (rareiv); le Statice COMMUN ( ito//V;e armeria) ] une espèce de C ANCHE {aira caryuphyllea); I'Holosteum printanmek ( holosteum umbellatuin ). (LN.)

NAGELERZ des Allemands. C'est le Fer oxydé rouge arglllfère bacillaire. F. vol. xi , p. 384. (ln.)

NAGELFELS. F. Nagelfluhe. (ln.)

NAGELFLUHE ou NAGELFELS. On donne ces notiis, en Suisse, à un poudingue formé de fragmens de toutes sortes de formations, de grandeur et de forme variables; de quarz, de granité, de calcaire compacte ou coquillier.

N A G i8i

"nis par un ciment argilo-ferrugineux. Le nagelfluhe abonde dans les parties méridionales et occidentales de la Suisse ; tantôt il y forme des bancs , ou des masses qui s'élèvent en rochers et en colHnes. On y a observé des glossopètres.

Le nagelfluhc est une roche très-récente, qui avoisine et accompagne les chaînes de montagnes primitives. On ne connoît pas très-bien la nature et les espèces de roches sur lesquelles il repose. Cependant, la montagne dite le Rigi- berg, qui, il y a quelques années, engloutit tout un village et fit périr plus de 1800 personnes, est une masse de nagelfluke placée sur un terrain d'argile dont la mollesse permit à la montagne de glisser etde s'ébouler. Dans plusieurs points de ia Suisse et du Tyrol, on peut soupçonner que le nagel- fluhe repose sur le calcaire alpin. Les géologistes placent le nagelOnhe avec les roches déformation très-récente, avec les poudingues •, mais c'est un poudingue qui, par la grande hau- teur où il se trouve , doit être d'une formation très-ancienne. Cette roche esûe poudiiiguepolygénique deM.Brongniart(n«^e/- JluJie du Rigihi^rg).Le poudingue calcaire àa me me, est le nr.gcl- Jluhe de Salzbourg. M. Tondi étend le nom de nagelfluhe à tous les bancs d'alluvion des parties élevées d^ globe, qu'il nomme terrains de lavage et qui sont composés de sables , de caillouxroulés,c1e limon, etc., avec des pierres précieuses et de grains de substances métalliques que l'on obtient par un lavage particulier. Il se sert du nom de brèche pour désigner spécialement le nagelfluhe qu'il divise en trois, savoir : la brèche polygène , composée de fragmens de roches de toutes formations; la è/èc//e calcaire ; lu brèche qa^rzeuse. D'après cela, on voit qu'un très-grand nombre de brèches et de pou- dingues sont des nagelfluhe. Toutefois il y a des brèclies de terrains de transitions qui avoisinent les bancs de nageljluhe et qui n'en sont pas. Le nagelfl,uhe n'est pas susceptible de prendre le poli , tandis que les brèches de transition en peu- vent prendre un très-vif. V. Proches , Terrains, (ln.)

NAGELKRAUT. La Benoîte , la Pimprenelle sau- vage, la Drave PRI^TAlNflÈRE et la Piloselle portent ce même nom en Allemagne, (ln.)

NAGEOIRE, Pinna. Sorte de rame que la nature donne aux poissons, aux cétacés, et même à quelques mollusques» pour s'avancer au milieu des ondes.

Les nageoires des vrais poissons à branchies sont des.raem- branes soutenues par des rayons ou tiges osseuses, pouvant se resserrer et s'épanouir plus ou moins comme un éventail. Oe» rayons des nageoires, articulés avec quelques arêtes , mais adhérant rarement au squelette , ou à la colonne verte- Vraie (excepté ceux de la oueuc), sont parfois durs et roi de s^

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comnjc des épines, ou osseux el à tige simple , piqucintc , chez les poissons acaiitfioptérygiens , c'est-à-dire à n;igeoires épineuses ; telle est la perche , la vive , trachinus, le rasoir, etc., qui piquent fortement. »

(2hez les poissons malacoptérygiens ^ ou à nageoires molles, comme les carpes, les merlans, les harengs , ces rayons des nageoires ne sont point épineux, mais flexibles et formés de cartilages mous, souvent à lige fourchue ou dichotome.

Les nageoires des poissons , si Ton excepte celles qui cou- vrent les branchies, sous les opercules (ou les hranchiostcges ^ une de chaque côté , se pliant à volonté, et que Arlédi re- garde comme la première paire de nageoires); les autres sont au nombre de cinq vraies, et une fausse.

Les nageoires pedorales placées aux deux côtés du thorax du poisson, tiennent lieu de bras; elles sont toujours paires et manquent rarement; quelquefois elles deviennent si lon- gues que le poisson s'en sert pour voltiger quelque temps hors de l'eau. F.PoissoN, nous traitons des poissons volans.

Les ventrales^ situées sous l'abdomen, ou eglre la lêle et l'anus, sont toujours paires et représentent les pieds; elles manquent chez les apodes; mais leur diverse situation chez les autres dSnne les ordres des jugulaires , des thoraci- ques , des abdominaux.

La caudale^ nageoire terminale, perpendiculaire, toujours impaire, est la plus puissante pour la progression de r.'ini- mal; elle est tantôt échancrée, tantôt entière, ou arrondie, ou bifurquée , ou en forme de coin , ou de croissant, etc.

L'a«a/e, qui manque assez souvent , est toujours impaire, placée en dessous de la queue , derrière l'anus, est longitu- dinale et s'écarte peu du corps.

La dorsale^ qui ne se trouve pas non plus en toutes les es- pèces, est toujours impaire, mais a quelquefois deux ou même trois divisions, surtout chez les poissons bons nageurs, pé- lagiens ou de haute mer. Elle est placée longiludinalcment sur la carène dorsale , pour fendre les ondes.

Enfin une fausse nageoire est ïadi/jeuse, ou d'un tissu épais et graisseux qu'on remarque sur le dos de quelques poissons, tels que les saumons. Elle manque de rayons osseux propres à la soutenir.

Les poissons cartilagineux, comme les raies et squales . ont des nageoires à rayons également cartilagineux , articulés ; on les a nommés rhondropiéiygiens.

Les céiacésont leurs pattes antérieures pourvues de tous les os propres aux mammifères, mais tellement raccourcies et dis- posées, sous une peau épaisse, que ces menibies imitent des î!-;igcoires. Quelques-uns portent sur le dos une fausse na-

N A G i83

g€olre ou adipeuse ; mais celle qui termine leur queue est soutenue par des ossemens, restes en quelque sorte des jam- bes qui leur manquent; cette nageoire caudale est toujours placée horizontalement, tandis que les vrais poissons portent la leur verticalement, {F. Cétacés.)

Les mollusques pourvus d'espèces de nageoires, sont les ptéropodes ^ comme les clio, les hyales , etc. ; leurs bras ou ailes aplatis en forme de nageoires sont placés de chaque côté de leur bouche , et servent à la natation.

Beaucoup de crustacés et quelques insectes aquatiques ont des pattes en forme de rames ou de nageoires , pour s'avan- cer avec rapidilé au milieu des ondes ; on connoîl la vivacité avec laquelle le gyrin ou tourniquet décrit ses cercles à la surface des eaux; toutefois cesmoyensde natation diffèrent de ceux que la nature a distribués au Poisson. Voy. cet article.

(VIREY.)

NAGER {^fauconnerie ). Les fauconniers disent qu'un oi- seau de vol nage^ lorsqu'il s'élève beaucoup et qu'il plane.

NAGEURS, Nataiores. Cinquième ordre des oiseaux. Caractère!, : pieds trei-létradactyles , courts, posés à l'équi- libre ou à l'arrière du corps; bas des jambes nu , quelque- fois couvert de plumes : tarses plus ou moins comprimés la- téralement , réticulés, glabres , très-rarement à demi emplu- mcs; doigts palmés ou lobés , 3-i , 3-o, 4--o; pouce allongé et portant à terre sur toute sa longueur chez les uns , court ou élevé de terre ou ne posant que sur son bout chez les au- tres , simple ou pinné , le plus souvent libre , quelquefois réuni au doigt interne, seulement à la base , ou totalement engagé dans la même membrane et tourné presque en devant ; ongles ordinairement courts, ou comprimés et un peu poin- tus ou aplatis , larges et arrondis ; riutermédiaire pec- tine sur le bord interne chez quelques-uns; bec de diverses formes.

Cet ordre se compose des oiseaux qui sont dans la deuxième section des Palmipèdes de Laiham , de toutes les espèces qu'llliger a réunies dans ses NÂTATOR£s,de même que de celles quisontcomprises dans l'ordre des Palmipèdes de M. Cuvier. Les oiseaux d'eau que renferme cet ordre , se distinguent de tous les autres en ce qu'ils ont les tarses courts et des doigts lobés ou palmés ; leur corps est arqué et bombé comme la carène d'un vaisseau; leur plumage serré, lustré est imbibé d'huile , et garni d'un duvet épais qui les garantit de l'humidité et les fait flotter plus légèrement sur l'eau, que la nature leur a assignée pour leur demeure la plus ha- bituelle. « Ce sont aussi , dit M. Cuvier, les seuls oiseaux

i84 iN A I

le cou dépasse, et quelquefois de benucoup , la longueur des pieds , parce qu'en nage, ni à la surface de Tcôu , ils ont souvent à chercher dans la- profondeur. Leur sternum est très-long , garantissant bien la plus grande partie de leurs viscères, et n'ayant de chaque culé qu'une échancrure ou un trou ovale , garni de membranes. Ils ont généralement le gésier musculeux , les cœcum longs et le larynx inférieur simple. »

Cet ordre est composé de trois tribus , sous les noms de téléopodes , atéléopodes et pliloptères. V. ces mots, (v.)

NACtEUR. Serpent de Sardaigne, qui ne paroît autre qiiç la Couleuvre a collier, (b.)

NAGG-NADALY. Nom de la Consoude (syniphytam officinale^ Linn.), en Hongrie, (ln.)

NAGHAS. A Ceylan, c'est le nom du même arbre que, sur la côte Malabare, on nomme Le/hUa-tsian>parum , àécvit dans ce Dictionnaire , au mol nagas. Cet arbre est le nciga- iampo des Brames et le type du genre mesua , Linn. ; selon Adanson , il ne doit pas être confondu avec le nagassaii de Kumphius, comme on le fait, parce qu il en diffère essen- tiellement par son fruit qui est une capsule à quatre loges, à quatre valves, munies chacune d'une cloison et de quatre amandes, (ln.)

NAGI et NA. V. Galé du Japon, (b.)

NAGIAGEUZ des minéralogistes allemands. C'est le Tellure natif AURo-PLOMBtFÈRE. V. cet article, (ln.)

NAGI-BUROK. Nom de la grande Ciguë {conium ma^ cuhdum , Linn.) , en Hongrie. (LN.j

NACilL. Nom arabe du Labre bossu, (b.)

NAGMAXJL. On donne ce nom au Centropome san-

DAT. (B.)

NA(jOR, Antilope redunca, Linn., Gmel. Quadrupède d'Afrique du genre des Antilopes, figuré pi. G 82 de ce Dictionnaire, (desm.)

NAGY-FU. En Hongrie, c'est la Belladone ( a/ro/?a lelludoiia , Linn. ). (LN.)

NACiY-FtJLAK. Nom du Liseron des haies {conoolmlus sepium) en Hongrie. (LN.)

NAGY-NYAU-FA. Nom du Peuplier clanc en Hon- grie. (LN.)

NAHANAHA. Selon Matthiole, les Arabes appellent ainsi la Menthe, (ln.)

NAHWAL. F. Narhwal. (desm.)

NAL\. , Naiu. Serpent de l'Inde ; du genre des Vipères»

N A l i85

dont on a fait un genre parce qu'il a la faculté d'enfler son col. On l'appelle aussi serpent à lunette, (b.)

naïade , iV«?'5. Genre de vers aquatiques, dont l'ex- pression caraclérislique est : corps linéaire ou grêle, un peu aplati, transparent et garni latéralement de soies simples , rares, isolées ou fasciculées ; aucun tentacule près de la bouche.

Cuvier réunit à ce genre la Cristatelle de Lamarck. Les espèces de ce genre vivent les unes dans la mer, et les autres dans les eaux douces. Elles se rapprochent beaucoup des néréides par l'aspect ; mais elles en diffèrent essentielle- ment par le défaut de branchies externes , et parce qu'elles soûl privées de la faculté de filer des tuyaux. La plupart vi- vent sous les pierres, dans la vase, dans des trous qu'elles se creusent, ou qu'elles trouvent faits dans la terre de^ rivages. Elles nagent à la manière des serpens, c'est-à-dire, en inclinant alternativement leur corps en sens contraire aux deux bonis. Les poils, dont la plupart sont garnis , peuvent bien encore les aider dans celte opération; mais leur principal objet paroîtêtre d'arrêter les efforts que peuvent faire les courans ou leurs ennemis, pour les tirer de leur retraite. Ce dernier fait est prouvé par la disposition de ces poils et par l'expé- rience ; car on casse plutôt les articulations des naïades que de les faire sortir par violence de leurs trous.

Les naïades d'eau douce ne sont point rares dans les lacs, les étangs d'eau vive, et même dans les rivières; mais elles ne multiplient pas autant dans les eaux vaseuses et alté- rées par la décomposition d'une trop grande quantité de végétaux.

La bouche des naïades est tantôt une simple fente , tantôt un trou accompagné de deux lèvres, une supérieure et une inférieure ; tantôt une trompe plus ou moins longue. Les unes ont deux yeux placés sur la tête, dautrps n'en ont point. Leur intestin se voit presque toujours en entier sous une cou- leur différente, à travers du corps; leur anus est en général terminai; cependant, il est quelquefois un peu en avant de la pointe. Les soies dont leur corps est garni, sont plus ou moins nombreuses , plus ou moins longues , tantôt solitaires, tantôt géminées, tantôt fasciculées, suivant les espèces. Elles n'ont ni pieds ni tentacules.

Ces vers vivent d'autres vers plus petits , de daphnies et ZMirts entromnsirac es àe Muller, d'animalcules infusoires, etc. toujours très-abondans dans les eaux. Ils sont ovipares , et il y a tout lieu de croire qu'ils sont hermaphrodites. On trouve vers le mois d'avril, une masse alloni^ée en dessous de leur corps, vers les deux tiers de sa longueur, d une couleur dif-

,8G ^ A l

fércntc de l'ir.tcsiin , laquelle, regardée au niirroscopc , pa- roit conleiiir une immense quanlilé d'œufs. Celte masse se fait voir plus ou moins long-temps , suivant la chaleur de la saison; mais, en général, on n'en trouve plus aux individus qu'on observe en juin. Ce moyen de reproduction n'est pas le seul dont jouissent les naïades; elles peuvent êlre coupées <*n plusieurs morceaux, et chaque morceau devient un ani- mal parfait. Il est vrai de dire que celte expérience ne réussit pas toujours, comme je l'ai observé; mais sa réussite tient sans doute à des circonstances que je n'ai pas prévues, et en conséquence je ne nie pas, pour cela, les faits que rap- portent Trembley , Pxoësel , et autres observateurs dignes de foi.

Ce genre seroilpeut-être susceptible d'être divisé en deux et même plus; mais on ne connoîtpas encore assezbien les carac- tères de fa bouche des espèces , même les plus communes , pour entreprendre défaire de nouveaux genres en ce moment. Il n'y a encore que huit espèces de bien caractérisées dans les auteurs , parmi lesquelles les plus communes sont :

La Naïade vermiculaire , qui n'a point de soles latéra- les , mais qui a de longs poils au-dessous de la bouche. Foy. pi. G i8 elle est figurée. Elle se trouve dans les eaux stag- nantes , parmi les lenticules.

La Naïade serpentine qui n'a point de soies latérales, mais trois fascies noires sur le cou. Elle se trouve dans les mêmes endroits que la précédente.

La Naïade proboscidale qui a lessoies latérales solitaires; une longue trompe pour bouche. Elle se trouve dans les eaux stagnantes. Le genre Stylaire la reconnoît pour type.

La Naïade AURicuLAiREqui a une protubérance allongée de chaque côté des yeux , et point de soies latérales. Je l'ai obser- vée, décrite et dessinée dans la baie de Charlcston, en Ca- roline. V. sa figure pi. G i8. Sa description complète se trouve dans l'Histoire des vers, faisant suite au Buffon l'édition de Detervillc.

Les genres Branchiarie ciDiplote de Montagu se rap- prochent de celui-ci. (b.)

naïade, Nais. Plante qui croît dans l'eau. Elle pousse une tige longue, (iexible, herbacée , garnie de quelques dents épineuses , et qui se divise en rameaux nombreux et flexibles, garnis de feuilles opposées, vertlcillées , souvent au nombre de trois à chaque nœud. Elles sont engainantes, luisantes, iransparentes, ondulées, anguleuses et même épineuses par leurs angles. Ses fleurs sont très-petites, placées [dans l'ais- selle de feuilles. Cette plante forme dans la monoécie mo- nandrie, et dans la famille de son nom, un genre qui a pour

N A I 187

caractères, dans les fleurs mâles : un calice cylindracé, tron- qué à sa base , divisé en son limbe en deux découpures ; une étamine à filament long, à anthère quadrivalve, que Lin- nœus appelle la corolle. Dans les fleurs femelles, seulement un ovaire ovoïde, terminé par un style à deux stigmates; une noix ovoïde à une ou quatre semences.

Cette plante fleurit pendant les grandes chaleurs de Tété, est cassante , d'un vert obscur , et d'une odeur marécageuse. On Tarrache avec des râteaux, dans quelques endroits, pour en fumeries terres, ce à quoi elle est très-propre.

Bloch a publié quelques faits qui tendent à faire croire que plusieurs poissons, et surtout les carpes ^ mangent volontiers les feuilles et les graines de cette plante , et qu'il est par con- séquent très-utile de la multiplier dans les étangs.

Deux autres espèces, dont l'une a été établie en litre«de genre sous le nom de Caulinie, se réunissent à celle dont il vient d'être question.

Gmelin a appelé ce genre Ittnèke et en a donné une bonne ligure dans sa Flore de Bade.

Jussleu a donné le nom de cette plante à la famille que Venlenat a depuis appelée des Fluviales , dont elle fait partie, (b.)

jNAIAS. Nom donné par Linnœus, au ^enve flimalis de Vaillant, Micheli , etc. Willdenow a fait aux dépens du ndias , Linn., le caulinia, mais comme il existoit déjà un genre de ce nom, M. Persoon l'a changé en celui de flmualis. ?^. Naïade etCAULiNiE. Ce genre paroît avoir quel- ques affinités avec les Hydrocuarides. (ln.)

NAI-CORANA. C'est, dans Rhéede, le nom du DoLic

A POILS CUISANS. V. DoLIC. (b.)

NAIDES. Famille de plantes autrement appelées Flu- viale.s. (b.)

NAIN , Nanus. L'accroissement de tous les corps vivans est susceptible d'éprouver des altérations qui l'empêchent de parvenir à son point naturel de perfection. C'est en quelque sorte un marasme, un défaut d'assimilation dans les alimens, une diminution de la faculté nutritive et une foiblesse du prin- cipe vital. Tantôt elle peut dépendre d'un vice , tel que celui du rachitisme ou des scrofules , tantôt aussi de l'étroitesse de l'utérus chez les femmes, ce qui ne permet point au fœtus de prendrç un accroissement suffisant. Enfin, certains climats trop froids empêchent les végétaux , les grands arbres et les animaux d'acquérir une stature aussi développée que sous des cieux plus tempérés. C'est à celte débililation de la vie qu'on doit rapporter la cause de la petite taille des nations polaires,

i88 N A T

belles que les Groënlandais, les Lapons , les Ostiaques , Ju- Jcagres , Jakutes , Koriaques , Samoièdes , Esquimaux , el les habilaiis des îles Kuriles. Leur stature ne surpasse guère qua- tre pieds et demi ; car le froid excessif de leurs rigoureuses contrées resserre et contracte tous les muscles de telle sorte , qu'ils ne peuvent s'étendre autant que dans les pays tempérés, l^a grande chaleur affaisse aussi les corps et les empêche de prendre un entier accroissement. Aussi les Suédois , les Da- nois , les Russes , les habitans de l'ancienne Samogitie ou les Lithuaniens, sont-ils en général plus grands que les ItalieViS, ies Espagnols , les Maures , les Arabes , les Indiens , etc. D'ailleurs, la puberté trop précoce de ces derniers prévient le développement complet de leur taille.

Chez les animaux, la stature semble dépendre surtout de l'abondance des alimens. On connoît la petitesse des vaches qui habitent les pays secs , arides et peu riches en pâturages , tandis que les chevaux, les vaches de la Frise, des Pays— iiaS) de rUkraine,parviennent quelquefois à une taille énorme. Les bestiaux de la Lusace , du Holslein , qui se cachent dans les herbes succulentes et très-hautes des prairies de ces pays , acquièrent de grandes dimensions. Les peuples de la Suède, (!u Danemarck, de la Pologne, de l'Allemagne, mangent plus que les nations du Midi; c'est encore pour cela qu'ils sont plus gros, plus grands , plus forts et plus courageux.

11 n'y a point, au reste, de peuples entiers de nains. Les an- (iens Troglodytes, dont les auteurs grecs ont fait mention { Aristote , Hist. Anim. , 1. viii , c. 12 ) , sont fabuleux ; car ie pays qu'on disoit habité par ces nains, est peuplé d'hom- ïïîes de taille ordinaire ; c'est la contrée des Habeschs ou i Abyssinie (Ludolf, Comment. Mthiop. ^ p. 72.), d'où les Turcs tirent des recrues pour faire des soldats robustes el de bonne taille. Les prétendus pygmées des anciens paroissent avoir été des singes. V. Pygmee.

L'usage des liqueurs fermentées arrête l'accroissement de l'homme et des animaux ; aussi pour obtenir ces petits chiens carlins d'abord connus à Bologne , on leur fait boire dès l'en- fance de l'eau-de-vie, et on les lave dans de l'alcool afin de crisper leurs fibres La fréquence prématurée des plaisirs de i'amour le suspend aussi. C est pourquoi, en prenant succes- sivement les chiens nés des premières portées et les faisant accoupler de bonne heure , on obtient de petits chiens qui sont d'une puberté précoce et d'une vie courte. {Vn DégÉnÉ- iiATiON.) Les peuples montagnards, ceux des pays secs el ari- des sont beaucoup plus petits que ceux des contrées humides et basses. Cette observation est applicable aux animaux et aux plantes des mêmes lieux ; car c'est une loi générale.

N A I ,89

Ea effet, les G!)res sont plus molles , les mailles du tissu orj^misé sont plus lâches et se [)relenl davantage à l'exten- sion dans les individus (jui habitent un terrain mou , humide , gras et tempéré, qui dilate tous les organes ; tandis qu'on ob- serve le contraire dans les climats très-froids, les terres éle- vées et privées d'eau.

Les nains qui se voient assez fréquemment chez toutes les nations , ne forment aucune race distincte. Leur conforma- lion est fort irrégulière dans la plupart, car ils ont une grosse tête, l'esprit stupide , et le corps mal fait. Ils sont ordinaire- ment impuissans, soit entre eux (Louis V,nyoi\^ Lcçuiis dl\>er- ses, t. L, liv. i5, c. 6, p. 799; cl Jourit. de méd., t. la , p. 169), soit avec des individus d'une taille ordinaire. La nature re- pousse les monstruosités de son sein, et ne les laisse pas vivre long-temps ; le co'it énerve et tue bienick les nains.

Fabricius de Hilden a vu un nain de quarante pouces ; les T runsar /ions philosophiques ^ n.° 4-95 , en citent un de trente- huit pouces, pesant quarante -trois livres. G. Bauhin parle d'un nain de trois pieds ;on en a vu de trente pouces. {Foy. P/iilos trans. , n." 261). Le Journal de médecine en cite de vingt- huit pouces (t. 12 , p. 167). Cardan rapporte 1 exemple d'uu nain de deux pieds. De Maillet en a observé un de dix-huil pouces (Telliamed , t. 2 , p. 19,.) ; et Birch (Coll. , tom. 4 » p. 5oo.) en offre un de seize pouces, âgé de trente-sept ans : c'est un des plus petits qu'on ait pu voir. Bébé , ce nain si connu du roi de Pologne, Stanislas, duc de Lorraine , étoit plus grand; il avoit 33 pouces. La plupart de ces petites tail- les sont causées par quelque maladie du fœtus qui diminue l'accroissement ultérieur.

En général , les nains restent toujours analogues aux en- fans dans tout leur caractère; comme eux, ils dorment beau- coup, ont des mouvemens vifs, et l'esprit inconstant: comme le sang se porte avec force au cerveau , qui est volumineux, ils sont exposés au carus, à l'apoplexie.

Nous avons en ce moment (1818) sous les yeux une naine âgée de huit à neuf ans, qui n'a guère plus de dix-huit pou- ces de hauteur, ou la taille et le poids d un enfant naissant. Elle est vive et gaie cependant, et son intelligence est à peu près celle d'un enfant de trois à quatre ans. Son pouls bat environ quatre vingt-dix fois par minute ; elle n'a commencé à marcher et à parler que vers Tâge de quatre ans ; la denti- tion première ne s'est faite qu'à deux ans. La mère , qui a cinq pieds de haut (et le père cinq pieds cinq pouces) , avoit ou déjà un petit nain long de quelques pouces a sa naissance , m.iis qui mourut à un mois ; il étoit venu à terme , ainsi que celte jeune naine. Ceci semble annoncer que la cause pro-

iqo N A I

duclrice de ces individus à petite taille , est l'étroilesse de l'utérus. En effet , il y a des femmes qui avortent parce que leur matrice est trop serrée naturellement, ou parce qu elle est trop irritable et se crispe ; de viennent ces constric- ions spasmodiques qui expulsent avant terme le fœtus. Si pourtant l'avortement n'a pas lieu , l'embryon peut rester pe- tit, émacié, appauvri de nourriture, enfin nain dans toutes ses dimensions. On voit, au reste , des foetus nés à terme, fort petits, mais se développer à une taille assez grande par une bonne alimentation , et surtout à l'époque de la puberté ; ainsi, un nain de deux pieds est parvenu presque tout à coup à trois pieds et demi de hauteur à l'âge de quinze ans.

Tous les hommes d'une taille plus courte que de coutume, comparés à ceux de haute stature ( K. Géant), sont plus prompts , plus irascibles , plus turbulens que ceux-ci. Bona- parte, quiétoitde petite taille, faisoit la remarque, en Egypte , au sujet du général Kléber, dont la stature étoit très-élevée , que ces grands et gros corps étoient toujours menés par des hommes plus petits qu'eux. La force vitale agit avec plus de ressort, et le caractère montre plus de résolution dans des corps ramassés; la tête étant plus voisine du cœur, elle en re- çoit plus promptement du sang ; aussi ces individus ayant le concourt et gros, sont menacés fréquemment d'apoplexie, surtout dans leur irascibilité ( quoique, chez les nains , la force vitale soit trop énervée ou affoiblie). Toutefois, les corps allongés, détendus comme un ressort trop lâche , ont plus de peine à recueillir leurs forces et à faire des mouve- mens rapides. Une souris fera mille tours avant qu'une balei- ne ou qu'un éléphant se remuent avec leurs chairs énormes; et les gros arbres à bois fongueux , comme le baobab , le cei- ba, se coupent ou se brisent plus aisément que les petits ar- bustes d'un bols dur, comme les petits chênes. Au reste , les petits individus vivent moins long -temps que les grands et s'usent plutôt par la rapidité de leurs fonctions.

Si l'on désire de plus amples éclaircissemens au sujet des nains , on en trouvera aux articles Dégénération , Géant , Homme , et dans les auteurs suivans :

S aiioeur Morand ^ Obs. sur les nains , mém. acad. se, Paris, 1764, Hist. , p. 62.

FiiedrichlVilhelrnClauderus, Nanorum generaiio, Mise. acad. nat. cur. , déc. 2 , an 8 , 1689, p. 54.3.

Claud. Jos. Geoffroy , Descript. d'un petit nain nommé Ni- colas Ferry, Mém. acad. se, Paris, 1746 ? Hist., p. 44- C'est Bébé.

William Arderon, Extract of a letter concerning an account of a dvvarf; togcther vvilh a comparison ofhis dimensions with

N K I lot

those of a cbild under four years old. Phil. irans., lySo, p. 4.67.

Jufm Browning, Extract of a letter concerning adwarf., Phil. trans. , lySi , p. 278.

Frideiick V. JVurmh , Beschryving van kitip , cen klein en simeelrisch wanschaapen mensch, en dwerg. Verhandelvan het bataviaasch., genootsch.Deel. 3, bl. 33g.

Augusl. Christian. Kuhn, Kurze geschichte einer zwerg-fa- mllie. Schriften derberllnerges. naturf freunde , B. 1, S, 3<J7.

(VIHEY.)

NAIS. Nom latin des Naïades, (desm.)

NAISES. Nom qu'on donne aux Diamans bruts, en Es-

^^NAISSÀNCE DES ANIMAUX DOMESTIQUES

{Economie rurale). Ce résultat du part ou de l'accouchement de ces animaux , exige des soins particuliers , soit à l'égard des petits , soit pour la mère, afm d'en retirer tous les avan- tages qu'on doit en espérer.

Les principaux de ces soins se bornent : i.» à quelques at- tentions essentielles , qu'il faut avoir pour les mannnifères surtout , immédiatement après la naissance, et dont nous al- lons nous occuper ici ; 2.° à l'allaitement ; 3." au sevrage ; à la nourriture solide et liquide qui succède ; 5.° à l'exercice ; 6.^ au logement , et 7.'' à la castration , dans quelques cas , ainsi qu'à la marque et à l'attache. {K. ces mots.)

Une des premières attentions à avoir, après la naissance , dans les grandes espèces d'animaux domestiques , particu- lièrement pour les races précieuses, consiste à consigner sur nn registre destiné à cet objet , toutes les circonstances im- portantes qui y ont rapport, telles que l'époque de la monte , le nom , le numéro , et le signalement exact et détaillé du mâle et de la femelle qui y ont concouru, leur extraction, leur généalogie , la date de la naissance , le sexe des productions, leur signalement, et toutes les particularités qui peuvent ser- vir à les distinguer et à les caractériser par la suite. C'esl en suivant et en observant attentivement ainsi la filiation des gé- nérations dans les animaux distingués , qu'on parvient à se procurer des renseignemens fort importans sur la valeur réelle des races , sur les qualités et les défauts qui les distin- guent, et sur les principaux avantages ou inconvéniens des croisemens qu'on a cru devoir opérer. On peut encore en ob- tenir des résultats fort utiles aux progrès de la science ; tan- dis que l'oubli ou la négligence , à cet égard, peut entraîner dans des méprises fâcheuses , et contrarier ou retarder beau- coup les améliorations qu'on a en vue.

11 n'est pas moins avantageux de noter exactement toutes

92

N A I

les circonstances heureuses ou malheureuses qui ont précède' , accompagné cl suivi le pari ; el l'on peut souvent en tirer des inductions fort utiles pour Tavenir.

Il est des attentions d'un autre genre , qui doivent concou- rir avec celles-ci à rendre la naissance de ces animaux pro- fitable ; voici les plus importantes.

Il existe plusieurs espèces d'animaux domestiques carni- vores et voraces , telles que le cochon , le chat et le chien , dont les femelles , les plus jeunes surtout, dévorent quelque- fois leurs petits , lorsqu'elles sont réduites à l'état de domes- ticité. Cette action contre nature est souvent déterminée par le défaut de nourriture nécessaire , ou même par la crainte <[u'on ne leur enlève leur progéniture , ou par quelque autre contrariété. Il est essentiel de prévenir un pareil accident , par une nourriture suffisante , avant et après le part , par une surveillance rigoureuse, et par toutes les précautions propres à tranquilliser les femelles , qui ne se livrent souvent à cette extrémité que lorsqu'on touche à leurs petits , ou qui les aban- donnent au moins dans ce cas, comme nous en avons vu plus d'un exemple.

Ces actes d'une barbarie atroce , quelque étranges qu'ils puissent être , ne sont néanmoins, comme l'observe , avec raison Buffon, que le résultat d'un trop grand attachement , d'une affection excessive, ou plutôt <rune tendresse physique qui tient du délire ; car la nature, en chargeant les mères du soin d'élever leur famille et de la nourrir de leur lait, les a douées en même temps d'affection et de tendresse ; sans cela elle eût manqué son vrai but , qui esl la conservation cl la propagation des êtres , puisqu'en supposant les mères abso- lument dénuées d'affection pour leurs petits, ces derniers périroient, faute de soins, presque aussitôt qu'ils seroient nés. Onpeutdonc croire, avec quelque fondement, que ces jeunes mères ne font périr leur famille naissante que dans la crainte qu'on la leur ravisse , ou bien qu'elles veulent que ce dépôt précieux que la nature leur a confié, ne doive son bien- être qu'à leur propre soin.

Il est encore des femelles qui se couchent quelquefois sur leurs petits et les étouffent. Cela arrive surtout aux animaux qui sont très-gras , pesans et peu sensibles , comme la laie ; et l'on prévient ordinairement cet accident en leur enlevant toute la litière , avant ou immédiatement après le part.

Il est aussi des mâles qui profitent de l'absence des femel- les pour détruire leurs petits. Cette disposition s'observe en- core quelquefois dans les espèces que nous venons de men- tionner ; et on la remarque aussi dans celle du lapin et dans quelques autres.

N A I ,93

On en prévient les fâcheux effets en isolant les femelles avec leur progéniture , et en les mettant ainsi hors des at- teintes des mâles , ou en les surveillant et les nourrissant bien; car la privation d'alimens suftisans est généralement Ja grande cause de cet acte dénaturé , lorsqu'il n'est pas an désir immodéré qui tourmente le mâle pour jouir de sa fe- melle ; et , dans l'un ou l'autre cas , il est toujours prudeut de les séquestrer.

Dans les espèces multipares très-fécondes , c'est-à-dire , celles dont les femelles font habiluellement un grand nombre de petits , et lorsque cela arrive exlraordinairemenl dans d'au- tres , on ne doit jamais les laisser élever tous par la mère , quand elle n'a pas les moyens nécessaires pour le faire con- venablement. Dans ce Cas , on doit lui enlever les plus foibles et les moins bien conformés, en ne lui laissant absolument que ceux qu'elle peut bien élever sans se fatiguer.

Lorsque ces petits sont très-nombreux, il arrive souvent que quelques-uns, ayant été pressés et gênés par leurs voi- sins dans l'utérus, y ont pris peu de développement et sont chétifs; souvent aussi les derniers qui sortent des cornes de la matrice sont les plus foibles , et on les désigne vulgaire- ment sous la dénomination triviale de culots ^ comme les an- ciens les dlstinguoientsous le nom de chordes; ce sont ceux-là surtout qu'on doit réformer et détruire , ou faire élever par tout autre moyen, car ils deviennent rarement propres à sou- tenir la race , encore moins à l'améliorer.

Nous devons dire ici cependant que , quelque motif légi- time qu'on puisse avoir souvent pour retrancher ainsi à la mère la portion surnuméraire de ses productions , et quel- que assuré que soit le moyen de se procftrer de jeunes sujets vigoureux , en en réduisant le nombre de cette manière , cette réduction se trouve quelquefois basée sur la fausse sup- position que la mère , en quelque bon état qu'elle soit, ne peut jamais bien nourrir et soigner tous ses petits , lorsqu'ils sont nombreux. Cela ne peut être vrai qu'à défaut de vigueur, d'embonpoint et d'alimens suffisans ; et toutes les fois que ces moyens existent, quel que puisse être le nombre des petits , l'homme ne doit pas accuser la nature d'une erreur qu'elle ne commet pas, et il doit s'en rapporter à elle sur ce point , comme sur beaucoup d'autres, au lieu de détruire impitoya- blement ses productions , lorsque rien ne l'autorise à le faire.

Les préliminaires que nous venons d'indiquer doivent être suivis immédiatement de quelques autres attentions.

Il convient d'examiner si toutes les ouvertures naturelles des jeunes sujets, telles que celles des yeux, de la bouche, àQS narines , des oreilles , de l'anus, de la vulve , et de Tu-

XXII.

,94 N A I

rèthre, existent et sont assez étendues, et, dans le cas con- traire , ou celui de Texistence de toute autre monstruosité peu prononcée , par excès ou par défaut, il devient ordinai- rement facile d'y remédier à cette époque , en ne perdant pas de temps pour le faire.

La plupart des femelles des quadrupèdes lèchent ordinai- rement leurs petits dès qu'ils sont nés , et les débarrassent ainsi d'une sorte de crasse , souvent épaisse , qui les encroûte pour ainsi dire , et qui provient de la mucosité que les eaux de l'amnios ont déposée sur leur peau. Non-seulement on ne doit pas contrarier celte action naturelle et fort utile , comme nous l'avons vu faire plusieurs fois , sous le prétexte ridicule qu'elle peut incommoder la mère ; mais on doit, au contraire , la faciliter et la déterminer même , lorsqu'elle n'a pas lieu sur-le-champ , ainsi que nous l'avons fait souvent avec suc- cès , en saupoudrant les jeunes sujets d'un peu de sel égrugé, ou de son menuisé, ou de pain émielté, ce qui allèche la mère et rend plus prompte et plus complète une opération qui fortifie ceux qui l'éprouvent et les dispose plus tôt à se lever et à téter. Il paroît même que cette action , produisant une légère irritation sur leur peau, détermine, par sympa- thie, l'excrétion des premières matières contenues dans leurs intestins , car on les voit souvent se vider à mesure que la mère les lèche.

On voit aussi , fréquemment , la mère manger , peu de temps après la naissance , le placenta et les membranes de la cavité utérine et du vagin , qu'on désigne communément gous le nom d'arrière-faix ou de délivre. Quoique la nature de ces enveloppes du fœtus n'en fasse pas une substance qu'on doive regarder coriftne très-favorable pour aliment aux ani- maux herbivores , il n'en est cependant jamais résulté , que nous sachions, le plus léger inconvénient, malgré qu'on ait avancé à tort , selon nous , que rien ne feroit autant dépérir les vaches, et qu'elles en mourroientde consomption, ce que nos propres observations contredisent complètement. On a même remarqué, depuis long -temps, d'après un passage d'Aristole , que la biche , dans l'état de nature , dévoroit les enveloppes de ses petits , aussitôt après les avoir mis bas , ce qui annonce évidemment un goût naturel qu'il est au moins inutile de contrarier, (Arist. , 1. gGS).

Quelquefois encore , les mères mangent entièrement la queue de leurs petits , comme nous l'avons vu arriver plu- sieurs fois dans les bêtes à laine ; et Ton doit s'attacher à prévenir cet inconvénient , en les observant attenlivement dans les premiers momens.

Lorsque , par quelque circonstance qu'on n'a pu prévoir

N A L ,g.ri

ni prévenir , les jeunes animaux ont souffert du froid en nais- sant, il ne faut pas perdre de temps pour les réchauffer ar- tificiellement, par tous les moyens le plus à la portée et le plus expéditifs, comme en les couvrant de drap ou de linge chaud , en les exposant , s'il est possible , à une douce cha- leur , en les enfermant dans des étables , écuries ou berge- ries bien closes , en les enveloppant de foin bien fin , ou en employant quelque autre moyen équivalent.

Les mères doivent également être préservées , dans les temps rigoureux , de l'excès du froid et de 1 humidité , et être tenues dans un endroit commode , dont l'air renouvelé soit suffisamment sec et chaud. T. Part et Avortement. (yvart.) NAKED-LADIES. C'est, en Angleterre, le Colchique d'automne. (Lis.)

NAKEN-HUND. Les Suédois donnent ce nom au Chien TURC et au Chien TURC métis de Buffon. (s.)

NAKHLEH. Nom arabe du ï) attœk { phœnix daclyli- fera^ L.). El-dakar est celui du pied mâle ; el-enlayeh , est ce- lui du pied femelle ; zaaj\ le nom des frondes ; geryd désigne la côte de la fronde ; khous , les folioles ; /// , ie filet ou réseau qui est à la base des frondes ; zeJ^ah et a'rgoun , le spadix ; chamroiikh , ses rameaux ; halah et tamt\, la dalte ; 7otab , les dattes mûres ; à'goueh , les dattes qu'on conserve réunies en masse. Suivant M. Dellile, on compte en Egypte vingt-qua- tre variétés de dattes. En Nubie , le dattier se nomme feniigy, et la datte , benty ou beUy. (ln.)

NAKKEB AER. Une variété du Fraisier, Fragaria vesca^ porte ce nom en Danemarck. (ln.)

NA.KROT.Nomdela Ciguë aquatique, aWa W/wio, L., en Weslro-Ciotlilande, province de Suède, (ln.)

NALyVBI. Nom que ies Brames donnent à l'arbrisseau que les Malabares -appellent Neli-tali, qui est l'yVcATi de$ Indes , eschynomene indîra^ Linn. (LN.)

N ALA(tU. Arbrisseau figuré dans YHorlus malaharicus de Rhéede , vol. 2 , tab. 26 , et dont Adanson a fait son genre Nalagu qu'il caractérise ainsi : calice à cinq folioles cadu- ques ; corolle à cinq pétales; dix étamines touchant l'ovaire; un style à un stigmate cilié ; baie a dix loges monospernies ; fleurs en corymbe axillaire ; feuilles siiîiples et opposées. Linnseus a rapporté d'abord cette pianîe à son genre phyto- lacca (phytolacca a.uatica, L. ); puis il l'a considérée conunela même que son aralia chinensis ; rapprocIi'Mnent que WilJde- now a laissé subsister , bien qua les car,ictères énoncés ci- dessus ne soient pas ceux du phytoiacca oa cenx de Varalia. Doit-on la rapporter au genre aquiluia et nicuie a ïaquUida sambucina , Linn. .'* c'est ce qai ne peut pas être parles mêmes

igS N A M

raisons. On doit donc considérer le Nalagu comme un genre distinct , jusqu'à ce qu'un nouvel examen vienne nou» éclairer, (ln.)

NALA TIRTAVA des Malabares. Selon J. Burmann , cette plante seroit une espèce de Basilic qu'il nomme ocy- mum inodorum. (ln.)

jSALIM. On donne ce nom au Gade lote. (b.)

NALIME. Poisson des rivières de Sibérie , qui res- semble à la Morue pour la forme et le goût, (b.)

NALLA-APPELLA.Rhéede figure, vol. i, pi. 53 del'/ior- ius malaharicus , un arbrisseau que les habitans de la côte Ma- labare nomment a^/je/, appella^ einalla-appella. C'est le Kari- nefvolœ des Brames. Adanson en fait le type de son ge re appella qu'il place dans sa famille des Onagres, en lui assi- gnant les caractères qui suivent : calice de quatre folioles ; co- rolle à quatre pétales; quatre étamines ; un ovaire inférieur; «ne baie monosperme; fleurs en corymbes terminaux; feuilles opposées. Ce genre n'a pas été adopté, (ln.)

NALLA-iViULLA. C'est , sur la côte du Malabar , le nom d'un joli arbrisseau qui paroîl appartenir à la famille des jasminées et même ^ genre Mogorî ou Nyctanthes. Burmann le désigne par nyctanthes multiflora. (ln.)

jNAMi\ , JSama. Plante à tiges herbacées , inclinées ou couchées, un peu velues , garnies de feuilles alternes, ovales, plus étroites à leur base , élargies et arrondies à leur som- met , décurrentes sur leur péliole , ou paroissant sessiles , et à fleurs solitaires ou géminées et axillaires , qui forme un genre dans la pentandrie digynie.

Ce genre, que quelques botanistes ont réuni aux Coutar- DES , a pour caractères : un calice de cinq folioles aiguës , lancéolées , ciliées sur leurs bords ; une corolle monopétale , tubulée , cylindrique , à cinq dents aiguës à son limbe ; cinq étamines ; un ovaire supérieur ovale, surmonté de deux sfyles filiformes , de la longueur des étamines ; une capsule oblon- gue , sillonnée latéralement, bivalve , biloculaire , et conte- nant un grand nombre de petites semences attachées à un réceptacle plane, au milieu de la cloison attachée aux valves. Le nama croît à la Jamaïque , et est annuel. Une autre espèce de ce genre croît à Ceylan , et a servi à établir le genre Stéris ; mais Vahi le rapporte aux Cou- TARDES. (b.)

NAMAK. Nom persan du Sel. (ln.) NAJVIBOK et NAMBt)KU. Deux noms qui désignent Je Camphrier , laurus camphora ^ au Japon, (ln.)

JNAJMDIPvTA. Nom que les Tartares Tongouses don-

N A N ,57

ncnt à une espèce de Ros\GE , rhododendrum dauricum , Linn. {vs.)

NAMETARA. Nom de pays du Mombin. (b.)

NAMIDOU. C'est le nom que les Brames donnent au Kara-angolam des Mal ab ares. V. ce mot. (ln.)

NAMIERSTENSTEIN.Roche composée de très-petites parties de feldspath, de quarz et de mica, dans laquelle sont dispersés des grenats. Cette roche, qui se trouve en Moravie , rentre dans le Wdssteia des Allemands. Voy. ce mot. (ln.)

NAMIESTERSTEIN. Les minéralogistes allemands ont donné ce nom à un grès (?) mélangé de grenat., et à une va- riété de calcédoine grise ^ tachée de jaunâtre, contenant aussi des grenats, (ln.)

NAMNAM. On a donné ce nom à Viripa des Malabares , qui est lecynomeira i-ami/lora, Linn. (ln.)

NAM-SIE-LAC. Nom de la Bonducelle , guilandina bonducella , Linn. , en Cochinchine. (ln.)

NAM-TINH. Nom du Gouet trilobé, arum trilolaluiriy Linn, , en Cochinchine, suivant Loureiro. (ln.)

NAM-TINH-TAU. Une autre espèce de Gouet , arum penlaphYllum , Linn. , porte ce nom à la Cochinchine , au dire de Loureiro. (ln.)

NANA et NANAS. Noms hrasiliens de I'Anana.s , et sous lesquels les voyageurs Thevet et Garcias ont fait connoî- tre des premiers cette plante américaine, (ln.)

NANALSURI des Brames. C'est le Mala pœnna des Malabares. V. ce mot. (ln.)

NANARI-MINJAC. Nom que les Malais donnent à un arbre que Rumphius figure dans l'Herbier WAmboine^ fig. 2 , lab. 54, sous le nom de canarlum o/eosum^ seu minimum. Lou- reiro le rapporte à son pimeia oleosa. La4narck et Persoon le regardent comme une espèce de balsamier ( amyris oleosa ) ; mais ce nanari ainsi que plusieurs autres figurés par Rum- phius , même volume , planche 47 à 54 , sous les noms de nanarium , canarium et camakoan , rentrent tous dans le genro nanari d'Adanson ou canarium , Linn,, ou. pimeia^ Loureiro. V. Canari, (ln.)

NANARIUM. V. Nanari-minjac, (lïï.)

NANAS. V. Nana. (ln.)

NAMBOU, Nom japonais de I'Ambre jaune, (b,)

NANCA. Il paroît que Cameli a indiqué sous ce nom une espèce de Jaquier. V. Nanko. (b.)

NANCOUL. Synonyme de Nouna. (b.)

198 N A N

NANDAPOzV. F. le genre Ibis, (v.)

NANDI-ERVALA. WiUdenow écrit ainsi, mais fauti- vement , le nom du Nandi-Ervatam. V. ce mot. (ln )

NANDl-ERVAl AN. Sous ce nom malabare , on voit figurés, planches 54- et 55 de Vllortus de Rhéede, deux arbres de la presqu'île del'Inde, qui selon ^.'V'ilidenow, doivent être rapportés au ncrium coronarium. Adanson et plusieurs bota- nistes ont cru y reconnoître le gardénia florida , Linn. , ou cots- jopiii des Malais; ce qui ne peut pas être exact, si, comme le remarque WiUdenow, ces plantes dilfèrenl des ^wr/ema, par leurs étamines , par leur pistil et par la forme de leur ca- lice. J. Burniann les rapportoit à Tarbrisseau qu'il a figuré, Zeyl. , tab. 129 , qu'il place dans les jasmins , et qui se dis- tingiie par ses feuilles oblongues et ses (leurs blanches , et dou- bles, del'odeur la plus suave; circonstances qui ont pu le faire prendre aussi pour le gardénia florida. Burmann a cru ensuite que ce pouvoit être une espèce de nyctanthe qu'il nomme nyc' ianihes acuminata , et qui est le mogorium acuminatum , Lk ; mais Vahl ne rapporte pas à sonjasminum trineroe , le syno- nyme de Burmann ni celui de nandien'otum^ quoiqu'il indique celui de Lamarck. Enfin Loureiro , Flore rochinch. , ne cite pAsle )tandi-eri>afam à V article an gardénia florida. Il faut donc croire que ces deux plantes qui font l'ornement des jardins du Malabar , ne sont pas assez connues pour qu'on puisse re- connoître leur genre. L'uhe, le riandi-en>afan major, qui est un petit arbre , est le vallomanditu des Brames. L'autre , qui est un arbrisseau, est nommée dacolo-mandifu par les mêmes Brames, (ln.)

NANDINE, iVû«£?/«a. Arbrisseau dont les feuilles sont al- ternes , deux fois ailées, leurs folioles opposées cl lancéolées , et dont les fleurs sont disposées en panicule terminale.

Il forme un genre dans Thexandrie monogynie et dans la famille des berbéridées , qui a pour caractères : un calice de plusieurs folioles imbriquées; une corolle de six pétales; six élamiies; un ovaire supérieur surmonté d'un style à stigmate en tête et persistant; une baie sèche, à deux loges.

Cet arbrisseau croît au Japon , on le cultive dans l'en- ceinte et autour des villes , à raison de l'odeur suave de ses {leurs.

La Natsdine domestique est figurée pi. 1109 du Buianical magazine de Curtis , et pi. G 4o àe ce Dictionnaire, (b.)

NANDIROBE , FeviUea. Genre de plantes de la dioécie décandrie et de la famille des rucurbitacées , qui a pour ca- ractères : un calice campanule divisé en cinq parties ; une

G. 57

N A N .g,

corolle monopétale en roue , divisée en cinq lobes arron- dis, et fermée par des écailles; dix étamines dans les fleurs mâles , dont cinq sont stériles ; un ovaire inférieur chargé de cinq styles à stigmates en cœur, dans les fleurs femelles; une grosse baie ovale , obtuse , à trois loges, couronnée par le calice, et contenant plusieurs semences comprimées et or- biculaires.

Ce genre comprend trois espèces. Ce sont des plantes grimpantes, à feuilles lobées ou en cœur , et à fleurs axiUaires, qui sont originaires des îles de l'Amérique. On les appelle lianes contre-poison ou lianes à boîte à savonnette , à Saint-Do- mingue , et leurs graines, qui sont fort amères ^ noix de ser- pent , parce que pilées et appliquées sur les morsures des ser- pens, elles diminuent leur danger. Elles passent aussi pour alexitères et fébrifuges, (b.)

NANDSJOKF. Selon Kœmpfer , c'est le nom qu'on donne, au Japon , à un arbrisseau qu'on cultive pour l'agré- ment , à cause de la douce et agréable odeur qu'exhalent ses fleurs. C'est le nandina dpmesiica de Thunberg. Voy. Nan- dine.(ln,)

N AN DU, iî/iea, Lalh. Genre de l'ordre des Oiseaux échas- siERSet de la tribu dcsTRiDACTYLES. V. ces mots. Caractères: Bec garni à la base d'une membrane oblitérée, déprimée, robuste , médiocre , à pointe arrondie ; mandibule supérieure à arcle distincte et un peu élevée, plus longue que l'inférieure, onguiculée , échancrée et fléchie vers le bout ; narines ovales, ouvertes , situées sur les côtés vers le milieu du bec ; langue courte, grosse, charnue et formant une demi-ellipse allongée; yeux recouverts par un os saillant ; pieds robustes , très-longs ; jambes charnues et couvertes de plumes seulement sur leur partie supérieure ; trois doigts dirigés en avant, point der- rière; ongles presque égaux, un peu comprimés latéralement, arrondis , obtus ; tête parfaitement emplumée ; ailes armées d'un éperon très-court, sans véritables rémiges et impropres au vol ; queue nulle. Ce genre n'est composé que d'une seule espèce qui se trouve dans l'Amérique australe.

Le Nandu ou l'Autruche de Magellan, jR/zetfa/nm'cana, Lath. , pi. G 37 de ce Dictionnaire. La plupart des natura- listes ont placé le Nandus dans le même genre que ïau~ iruche. Bl. Latham en a fait , avec raison , un genre par- ticulier, auquel il a donné, d'après Brisson et Moehring , le nom latin de Rhea. Barrère, Brisson et Guenaud-de-Mont- beillard ont confondu cet oiseau avec le TouYOU ; j'avois fait, dans l'hist. nat. de Buffon, une erreur de nom et de. faits que je n'ai pas manqué de rectifier, pag. 29 du tom. I^q de mon édiliou , eu gubstituaut au nom mai appliqué de

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fouyou, ce\m à' auintche de Magellan ^ plus convenable et moins susceplihle d'équivoque , et en séparant ce qui devoit appar- tenir à l'une et l'autre espèce. En effet , le touyou ou iouyou you de la Guyane ou \e jaèiru du Brésil , est un oiseau de ri- v.ige qui vole aussi bien que le héron, et qui n'a d'autre rap- port avec celui dont il est question dans cet arîicle que par sa grande taille. Brisson, avant (iuenaud-de-Montbeillard, avoit déjà confondu le touyou ou le jabiru avec V autruche de Magel^ lan. L'on en prendroit donc une fausse idée , si l'on s'en rap- porloit aux ouvrages du plus grand nombre des ornilholo- gisles , el particulièrement à celui de Buffon , dans lequel ne se trouveroient pas les notes indispensables que j'y al ajoutées à ce sujet.

Au reste , la dénomination d'autruche de Magellan , que j'ai substituée à celle de touyou , n'est point nouvelle , et en l'a- doptant, je n'ai fait que conserver celle que quelques auteurs avoienl déjà imposée à cet oiseau. On la nommé aussi au- truche d'occident , autruche de la Guyane , autruche bâtarde , etc. ; et ces noms , quoique composés , ont été appliqués avec beau- coup de justesse , parce qu'ils indiquent en même temps , du moins pour la plupart , et la nature de l'oiseau et les contrées il existe.

De même que parmi les quadrupèdes du même continent, }e lama paroîl y remplacer le chameau , ainsi l'oiseau de cet article y représente l'autruche qui ne se trouve que dans l'Afrique et dans quelques cantons de l'Asie. Aussi les naïu- lalisles l'ont-ils désigné par la même dénomination oiseau chameau. Il n'a pas, plus que l'autruche de notre hémisphère, la faculté de voler; ses ailes sont également courtes et for- mées de plumes flexibles , à barbes désunies , qui les rendent inutiles pour le vol. Voilà , sans doute, de nombreux rapports îivec l'autruche proprement dite , et qui sont suffisans pour justifier la parité des noms , surtout lorsqu'on retrouve la ïiiême conformité dans les habitudes. Lé'autruche de Magellan compense en effet l'impossibilité de voler, par la légèreté de sa course , pendant laquelle on la voit déployer ses ailes; les chiens les plus vites ne peuvent l'atteindre, et les naturels de l'Amérique , qui font des parasols , des panaches et d'autres orncmens avec ses grandes plumes , sont réduits à user de ruse et à Lui tendre des pièges pour la prendre. Elle avale aussi tout ce q^u'on lui présente, même le féroce qui prouve ijue son organisation intérieure doit être à peu près la même. Les grains etles herbes composent te fond de sa subsistance , Vnais sa nourriture favorite sont les insectes qu'elle prend avec beaucoup d'adresse. Son naturel est simple et innocent ; elle n'attaque point les aulres animaux ; et si elle est forcée

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de se de'fendre , elle ne le fait qu'avec ses pieds , dont elle se sert pour se débarrasser de tout ce qui Tincommode. Cepen- dant à tant de traits de ressemblance avec l'autruche , se joi- gnent quelques disparités remarquables. \S autruche de Magel- lan a trois doigts en avant et un rudiment d'un quatrième doigt , c'est-à-dire , un tubercule calleux et arrondi en ar- rière. Il e.^iste encore une autre disparité dans le cri ; celui de V autruche de Magellan , lorsqu'elle appelle ses petits , est un sifflement qui ressemble à celui de l'homme. On verra ci-après que le mâle en a un autre à l'époque des amours.

Les autruches de Magellan se trouvent au Pérou ; mais seu- lement dans les régions froides des Cordillères ; au Chili , dansles vallées qui séparent leshautes montagnes des Andes; au Brésil et principalement aux Terres magellaniques ; mais on ne les voit point à la Guyane, pays qui ne leur convient point , puisqu'elles ne se plaisent que dans les contrées le.'y moins chaudes de l'Amérique. Barrère ne les range parmi les oiseaux de la France équinoxiale ou delà Guyane française, qu'à cause de la méprise qu'il a faite en les confondant avec les touyous ou les jabirus {Hist. nat. de la France equinox. ^ pag, 33 ) -, et Fermin, qui en parle comme devant se trouver à la Guyane hollandaise , convient qu'il n'en a jamais vu (^Description de Surinam , p. 14.2 ); ce dont on ne peut douter à la description fautive qu'il en fait , et qu'il emprunte de celle de l'autruche de l'ancien continent. Un autre voyageur dans la Guyane hollandaise, le capitaine Stedman , en donne une notice beaucoup plus juste ; il dit qu'on les appelle à Su- rinam toyou ou émou , et qu'oc les trouve principalement en remontant le MaronI etlaSaramua.Mais, quoiqu'il ait voyagé fort avant dans l'intérieur des terres, il ajoute qu'il n'a jamais rencontré un seul de ces oiseaux {^Voyage à la Guyane^; d'où il résulte qu'on ne les connoît à Surinam que par les rela- tions, (s.)

Nous devons à M. de Azara de nouvelles observations sur cette autruche, qui n'étoient pas connues de Sonnini, et qui compléteront la description et l'histoire de cet oiseau. Les. noms de nandu et de cliuri sont ceux que lui ont imposés les naturels du pays; nvais les Espagnols l'appellent aoestruz (au- truche), et les Portugais du Brésil le nommentema, dénomi- nation qui est consacrée au casoar. Celte espèce est présen- tement rare au Paraguay , mais elle est plus commune dans les plaines de Montevideo, dans les Missions et dans les campagnes de Buenos-Ayres. Elle ne pénètre jamais dans les bois, elle reste toujours dans les plaines découvertes, soit par paires, soit par troupes qui excèdent quelquefois trente individus ; dâjis les conlrces Tonne fait point la chasse à

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ces autruches , elles s'approchent des habitations champêtres , et elles ne se dérangent pas à la vue des hommes de pied. Mais dans les pays l'on a coutume de les poursuivre , elles fuient de loin , et elles son», toujours en défiance; si elles s'a- perçoivent qu'on cherche U les surprendre , elles se mettent à courir de très-loin et avec tant de vitesse, qu'il n'y a que d'excellens chevaux, montéspar de bons cavaliers , qui puissent les atteindre; les chasseurs, pour les prendre, leur lancent au cou une espèce de collet , formé de trois pierres , grosses comme le poing, et attachées par des cordes à un centre com- mun. Quand les nandus se trouvent arrêtés dans leur course par ce collet, on ne doit les approcher qu'avec précaution , car ils détachent des ruades capables de briser une pierre. Lorsqu'ils courent de toute leur force , ils étendent les ailes en arrière, ce qui est sans doute l'effet du vent; et pour tourner et faire de fréquens crochets, ils ouvrent une aile , et le vent les aide à exécuter très-rapidement ces voltes , qui mettent le chasseur en défaut. S'ils sont tranquilles, leur dé- marche est grave et majestueuse ; ils tiennent la tête et le cou élevés et leur dos arrondi : pour paître , ils baissent le cou et la tête , et ils coupent l'herbe dont ils se nourrissent.

Les jeunes que l'on nourrit dans les maisons deviennent familiers dès le premier jour, et ils entrent dans tous les ap- partemens, se promènent dans les rues et vont dans les cam- pagnes, quelquefois jusqu'à une lieue de distance , et retour- nent à leur logis. Ils sont très-curieux, et ils s'arrêtent aux fenêtres et aux portes pour regarder ce qui se passe dans l'intérieur. On les nourrit de grain , de pain el d'autres ali- mens; comme Wndruche d'Afrique, ils avalent des pièces de monnaie , àtia morceaux de mêlai, et quelquefois les petites pierres qu'ils renconlrenl'. Ce sont d'excellens nageurs, et ils traversent les rivières el les lagunes, même sans être pour- suivis. La chair des jeunes est tendre et de bon goût , mais on ne fait point de cas de celle des adultes. Le mois de juillet est l'époque des a niours du nandu; on entend alors les mâles pousser des mugissemens assez semblables à ceux d'une vache. Les femelles commencent à pondre à la fin d'août, et les premiers petits paroissent en novembre. Les œufs ont leur surface très-lisse, d'un blanc mêlé de jaune , et également gros aux deux bouts. Ils sont fort bons , et on les emploie principalement pour faire des biscuits. Le nid ne consiste qu'en un creux large , mais peu profond , fait naturellement dans la terre ; quelquefois les nandus le façonnent avec de la paille. Ils ne cherchent point à le cacher ; de sorte que Ton aptMçoll de loin les œufs et l'oiseau. Le nombre des œufs de chaque ponle n'est pas connu.

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Cependant M. de Azara a vu une femelle nandu qui vivoit en domesticité, et privée de mâle , pondre dix-sept œufs k trois jours d'intervalle l'un de l'autre , et les laisser tomber en différens endroits. C'est ainsi qu'agissoit une femelle que j'ai vue vivante dans un parc près de Rouen ; mais sous notre climat , la ponte avoit lieu au mois de janvier, époque de l'été dans l'Amérique australe. Elle a vécu pendant dix-huit mois; l'hiver elle couchoit de préférence sur la neige , et en tout temps elle se refusoit constamment aux soins qu'on voulait prendre pour l'enfernier pendant les nuits. Le mâle ayoit péri dans la traversée de Buenos- Ayres à Cadix, et l'on regrette que l'occasion de multiplier chez nous une espèce qui peut devenir utile , ait été perdue et ne se soit pas retrouvée de- puis. Dans l'état de nature, on voit quelquefois soixante-dix à quatre-vingts œufs dans un seul nid, et c'est sans doute le produit de la ponle de plusieurs femelles. En effet, on dit dans le pays que toutes les femelles du canton déposent leurs œufs dans le même nid, et qu'un seul mâle se charge de les couver. Il est certain, d'après les observations de M. de Azara, qu'un seul individu fait éclore les œufs , conduit et protège les petits , sans l'aide d'aucun autre. L'on assure aussi que si quelqu'un vient à toucher les œufs, l'oiseau les abandonne ; et s'il s'aperçoit qu'on le regarde pendant l'incubation, il les prend en horreur et les brise à coups de pied. C'est une opi- nion générale que le mâle sépare avec soin quelques œufs , qu'il casse quand les petits éclosent, afin qu'ils trouvent à leur naissance de la pâture dans la multitude de mouches qui s'y rassemblent. Les nandus paroissent ne pas connoître la jalousie , puisqu'ils se réunissent par bandes pour faire un nid toutes les femelles font en même temps leur couvée; mais cette espèce a cela de singulier, qu'un seul mâle se charge de couver les œufs et de conduire les petits.

Toute la dissemblance entre le mâle et la femelle consiste en ce que celle-ci est un peu plus petite , et qu'elle a moins de noir à l'origine du cou ; distinction qu'on ne peut saisir si on les voit ensemble.

Les nandus, dit IVl. de Aza^a, ont la jambe fort grosse en devant ; le tarse très-robuî^ie et revêtu de grandes écailles ; l'œil arrondi ; le croupion conique et pointu ; les plumes du corps longues , foibîes et décomposées ; celles de la tête ser- rées et rudes comaie des crins ; le fouet de l'aile terminé par un éperon long de six lignes et qui ne sert point à l'oiseau; cinquante-sept pouces et demi de longueur totale; vingt-sept de la dislance du bout du bec à la clavicule , et quarante et demi de l'extréaiilé de l'ongle au haut des épaules , les plumes du corps blanches, à lexcepliou de celles du dos,

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qui ont la couleur de plomb ; celles du dessus et du derrière de la tête sont noirâtres ; une bande noire commence à la nuque , descend sur la partie postérieure du cou , et s'élargit jusqu'à entourer le cou entier à son insertion dans le corps: le reste du cou et de la têle est blanchâtre ; les épaules et les plumes scapulaires sont cendrées ; les plumes des ailes ont à peu près la même teinte, mais les grandes ont du blanc vers leur origine et du noirâtre dans leur milieu ; parmi celles du dessous de l'aile, quelques-unes sont cntièreraeat blanches, et les autres n'ont cette couleur que jusqu'au tiers de leur longueur; le reste est noirâtre, (v.)

NANG-UAI-LOUNG. Nom cochiachinois d'une herbe que Loureiro nomme iniica pilosa , mais que sa capsule trilocu- laire éloigne du genre des Orties, de môme que Vuiiicagemina et Vurtica interrupia^ aussi de Loureiro. Peut-être doivent-elles former un genre à part, (ln.)

NANG-HAI-TLON-LA. Selon Loureiro, c'est en Co- chinchine le nom d'une espèce d'ÛRTiE ( unica gemimi). (lis.)

NAjNGUER ou INANGUEUR, Antilope dama , Linn. Gme!. Espèce de mammifère ruminant du genre des AiSTL-» LOPES. V. ce mot. (desm.)

NANGUEUR. V. Antilope nanguer. (desm.)

NANL Arbre figuré table 7 de VIlerLier d/imboiney par Rumphius. Il est bien remarquable par la nature de son bois , qui est si dur lorsqu'il est sec , qu'il ne peut être entamé par les outils. On est obligé de le mouiller pour le travailler. Il est presque indestructible , et se conserve dans l'eau aussi bien que sur terre. On en fabrique particulièrement des gou- vernails et des ancres.

Il paroît , par la figure citée , qu'il a un calice à quatre di- visions ; une corolle de quatre pétales ; un grand nombre d'étammes à filamens très-longs et inégaux; un ovaire supé- rieur, surmonté d'un style filiforme; une baie ronde, divisée en quatre parties , et contenant une petite semence membra- neuse.

Cet arbre a les feuilles opposées , ovales , entières, et les fleurs disposées en corymbe à l'extrémité des rameaux, (b.)

NANl DES RRAMES. Voy. à l'article Malî^aregam , par erreur typographique on a mis nain, (lis.)

NANI-FINAiN(;0. Nom qu'on donne au Japon à la. GALiiBASSE (rucurbita lagenaria , L.). (lî*!.)

NANI-HUA. Nom malais d'un arbre figuré par Rum- phius {Arnb. vol. m, pag. 21 , tab. 9), cl qui estlf; bac- caurea ratnijîom de Loureiro. C'est , d après Loureiro , un. petit arbre de la polygamie dloécie , à feuilles ovales , oblon- gaes , pointues , entières , éparses cl péliolccs ; ses Uouis ,,

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d'un Jaune verdâtre, naissent sur les rameaux mêmes en pe- tites grappes simples et pendantes : on en voit aussi aux extré- mités des branches. Les fruits sont des baies de la grosseur du pouce, couleur d'orange, inodores, aigre-douces, glabres ettriloculaires : on les mange. Rumphiusles dit lanugineuses, couronnées par le calice et à un seul noyau. Cet arbre, que Loureiro n'a vu que dans les jardins de Cochinchine , y est appelé giâu-tien^ et varie dans le nombre des loges de son fruit. D'après ce qui précède, on voit qu'on ne peut pas pren- dre le nani-kua pour une espèce de Caramboher (aQerrlioa) j nipour un Jambosier {eugenia). (LN.)

NANISTERSTEIN. Suivant Trebra , les Allemands donnent ce nom au porphyre lorsqu'il a la structure feuille- tée, (lis.)

NANK. et NIIG. Ce sont des noms du Mélèze {pinus lariiv, Linn.) chez lesWoguls et chez quelques autres hordes Tartares. (ln)

NANKA. F. Nanko. (ln.)

NANKAN. Arbre des Philippines, dont le fruit se mange. C'est un Jaquier, (b.)

NANKIN-MAME. Espèce japonaise de Dolic {DoUchos ///2ea^«5, Thunb.). (ln.)

NANKO et NANKA. Espèce de Jaquier ou arbre k pain {artocarpus) qui croît à Sumatra, de même que plu- sieurs autres espèces du môme genre , que les habitans de cette île nomment sookoon , calavée et oolan. Cette dernière espèce est la plus estimée. L'on mange leurs graines rôties comme des châtaignes. L'arbre fournit une glu blanche , et ses racines une teinture jaune. L'écorce du calavée sert à faire des vètemens. Ces espèces rentrent dans Vartocarpus incisa et Vartoc. ittiegrifolia. Voyez Jaquier, (ln.)

NAN-QUA et SAN-QUA. Noms chinois du yDey3on(Cf/rar- hita melopepo , L. ). Cette plante est très-cultivée en Chine , et en général dans toute l'Asie. Les marins emportent quan- tité de ces fruits dans les voyages de long cours, (ln.)

NANSCHERA-CANSCHABU. Rhéede (Mal. lo. pi. 5o ) donne ce nom malabare , à une herbe que les bota- nistes ne peuvent rapporter à aucun genre. Elle a quelques ressemblances avec une Véronique, (ln.)

NANSJERA-PATSIA. Nom d'une espèce d'asclépiade ( asclepias alexicaca , Jacq. ) , qui croît sur la côte Malabare et à Ceylan. (LN.)

NANSOO. Selon Kaempfer, c'est, au Japon, le nom d'une espèce de Gouet , que Thunberg avoit d'abord prise pour ïarum iriphyllum, et qu'il en a distinguée ensuite sous le

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nom de arum rtngens. Cleyer avoit observé cette plante Japon avant les botanistes ci-dessus ; et, selon lui , elle y est appelée din-nan-sch o . (ln.)

NANTI. Nom que les Egyptiens donnoient ancienne- ment au Pavot, (ln.)

NANTILLE et NENTILLE. V. Lentille, (lk.)

NAO-HIEN-HOA. Nom chinois du Métel iDaiura metel , L.) , selon Lourelro. (ln.)

NAOURKOU. Nom donné , en Nubie , à une espèce de Buchnère ( Buchnera hermontica, Delil. Mgypt. , pi, 34,

%3.). (LN.)

NAP-FUVE et NAPRA-NEZO-FU. Noms de I'Hé-

liotrope d'Europe , en Hongrie, (ln.)

NAP-KASA. L'un des noms du GrÉmil (^ Lîlhospermum officinale , Linn.) , en Hongrie, (ln.)

N AP , NAPC A et NAPEC A. C'est sous ces noms arabes que le Vicentin Honoré Bellus a connu le Nabqah. V. ce mot. (ln.)

NAPAUL. V. Faisan napaul. (v.)

NAPECA et NAPEKA. V. Nabqah (ln.)

NAPÉE, Napœa. Genre de plantes de la famille des malvacées , qui ne diffère des ahulilons que par des carac- tères extrêmement peu imporlans, et qui , en conséquence, leur a été réuni par Cavanilles et A'Villdenow. Ces carac- tères, selon Jussieu, sont de n'avoir point les pétales obli- ques et le pédicule articulé. V. au mot Abutilon.

On compte deux espèces de napées , dont une , la Napée GLABRE , a les pédoncules nus , unis , les feuilles lobées et glabres. L'autre , la Napée velue, a les pédoncules angu- leux, accompagnés de brzfclées; les feuilles palmées et héris- sées. Toutes deux croissent dans la Virginie, et se cultivent dans les jardins de Paris. Les fleurs sont souvent dioïques dans dernière, et la première pourroit être employée pour aliment, ses feuilles étant beaucoup plus nourrissantes et plus agréables que les épinards. Elles ne craignent le froid ni l'une ni l'autre, (b.)

NAPEL. Nom d'une espèce du genre AcoNiTE.C'est celle dont les fleurs sont les plus belles , et dont le poison est le plus dangereux, (b.)

NAPELLUS. Diminutif du mot latin napus^ jim^ct. On Ta donné anciennement à plusieurs espèces d'AcoNiTES , parce que leur racine a la forme d'un navet et la grosseur du doigt. Clusius est le premier qui ait bien distingué \es napelhis d'Europe, planies remarquables par leurs qualités

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délétères. U aconîhim napellus , Linn. , ou jmpel des jardins , est la plus commune. Voyez à l'article AcoNiTE. Uaciœa spieata a été considérée , par Daléchamp , comme une espèce de Napellus. C. Bauhin en faisoit une espèce d'a- conitum. (ln.)

NAPHTE. Bitume très-léger , très-fluide , limpide et d'une couleur légèrement ambrée , qu'on trouve dans diffé- rentes contrées de la Perse. K. Bitume liquide , vol. 3 , pag. 447. ( PAT. )

NAPI et NAPOU des Grecs. V. Sinapis et Napus.(ln.)

NAPIK. Nom de la Chicorée en Hongrie, (ln.)

NAPIMOGA, Napimoga. Arbre de la Guyane , à feuilles alternes, ovales , dentelées , à pétiole accompagné de deux petites stipules caduques, à (leurs sessiles sur un pédicule axillaire garni de bractées squamiformes , qui forme un genre dans la polyandrie trigynie , mais dont le fruit n'est pas encore connu.

Ce genre offrepour caractères: un calice d'une seule pièce, divisée en six parties ; une corolle de six pétales verdâtres , ovales, velus en dessous, et attachés par un onglet à un disque à six angles , qui couvre l'ovaire ; environ dix-huit étamines 1 dont les fîlamens sont insérés sur le disque ; un ovaire inférieur, surmonté de trois styles, terminés chacun par un stigmate, (b.)

NAPIUM des Romains. F. Napus.(ln.)

NAPO-BRASSICA. C'est le nom sous lequel C. Bauhin indique le Caov-lS WET^Brassica oleracea napo-brassica , L. ).

(LN.)

NAPOLEONE , Napoleom'a. Arbrisseau d'Afrique , à feuilles alternes , à fleurs bleues axillaires , ^ui seul cons- titue, suivant Palisot de Beauvois, qui l'a figuré pi. 78 de sa Flore d'Oware et de Bénin, un genre dans lapentandrie mo- nogynie et dans la famille de son nom.

Les caractères de ce genre sont : calice d'une seule pièce à cinq divisions coriaces, persistantes, accompagné de pe- tites écailles à sa base; corolle double, insérée sur le calice ; l'extérieure d'une seule pièce , plissée , membraneuse, co- lorée , chaque pli formé par un rayon subulé ; l'intérieure aussi membraneuse , découpée jusqu'au milieu en un grand nombre de rayons ; cinq étamines à fîlamens pétaliformes, insérées sur la corolle intérieure, rapprochées par leur som- met et portant chacune deux anthères biloculaires; un ovaire inférieur, à style court , à stigmate perlé, à cinq angles et sillonné , couvrant les anthères; baie molle , couronnée par les divisions du calice , monoloculaire et polysperme.

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Ce genre est voisin des Passiflores, mats en est si dis- tingué , qui! faut le placer dans une famille particulière. iJesvaux a appelé ce genre Belvisie. (b.) NAP()L1E1\. L'un des noms vulgaires de la Bardane^

(I.N.)

NAPPE (^vcneiie). Peau du cerf que l'on étend pour donner la curée aux chiens, (s.)

NAPPE VERTE. Espèce de Ricin des Indes iridnus mappa. ) (ln.)

jNAPPES ( chasse ). Sous cette dénomination on entend assez généralement un ouvrage fait de mailles de fil, qui porte ce nom , jusqu'à ce qu'on y ajoute quelques autres machines caractéristiques qui en déterminent la nomenclature. Par exemple , les nappes dun tramail ne se nomment plus nappes quand leurs piquets y sont attachés ; elles prennent le nom d'hul/iers ou tramail. 11 n'y a qu'un filet qu'on nomme nappe n aluueUes. On appelle nappiste celui qui fait la chasse avec ces nappes, (v.)

NAPUS. Pline , liv. XIX , chap. 5 , dans lequel il traite des espèces d'herbes des jardins , dit que les médecins ad- mettent cinq sortes de napus , et les cite d'après Théophraste qu'il copie, et chez lequel ce sont des Raphatsidon. V. aux mots Raphanus et Sinapis. Mais, liv. xx, chap. 4, Pline ou- bliant ce qu'il a dit précédemment , revient sur les napus. Selon lui , il y en a de deux sortes ; l'une est le hunion , et l'autre le hiinias ou hunladu des Grecs; il attribue à la pre- mière des tiges anguleuses , et compare la seconde au radis et àlarave. Lespropriétés qu'il leur assigne conviennent assez à notre Navette; aussi, la plupart des botanistes pensent qu'il a voulu parler de cette plante {^hrassîca nr.pus ') ^ de même que Di^scoride sous celui de bvnias , et Théophraste sous celui de napos. Au reste , cette dénomination de napus fut appliquée à des crucifères à racines fusiformes ou en toupie , qui croissoient sur les coteaux , et dont la racine était souvent creuse. C'est ce qu'exprime le mot grec napos. Le genre napus de Tournefort a pour type le brassira napus; il est caractérisé par la forme de sa racine , par ses (leurs en

Ïtanicules ou en épis , et par le calice de même couleur que a corolle ; il n'a pas été adopté par les botanistes , et de- meure réuni au genre brassira. V. Chou, (ln.)

NAR. Nom que les Egyptiens donnoient anciennement h I'Iris. (ln.)

NARAK. V. Narassun. (ln.)

NARANZARO. Un des noms italiens de I'Oranger,

(I.N.)

NARASSUN et NARHUN. Nomsdu Pin salvage chez

les Tartares-barates. Les Mongols appellent cet arbre

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narassu ; à Casan on le nomme narak. Les Kirguis le dési- gnent par NuRAT. (ln.)

NARAT. Les Africains appeloient ainsi anciennersent, une plante que Vom croit être une espèce de Chrysanthkmê ou de Camomille ( Anthémis.') (ln.)

NARAVELIA. Genre de plantes de la famille des re- nonculées et de la polyandrie poîygypie , établi par Adanson , sous le nom de naraœael , el reconnu par Decin- dolle. Ses caractères sont : involucre nul; calice à quatre ou cinq folioles; pétales six ou douz^e , linéaires, plus longs que le calice ; capsules nombreuses, oblongues, surmontées d'une queue pluiueuse.

Une seule espèce rentre dans ce genre , c'est le mirawael des naturels de l'île de Ceylan , arbrisseau grimpant qui a tout le port des clématites , et dont Linnaeus avoit fait une espèce d'alragène ( at. zeylanica )* Elle rappelle jusqu'à un certain point les gesses { laihyrus ). Ses feuilles opposées, ve- lues et tomenteuses en dessous , sont composées d'un pétiole terminé par une vrille rameuse , et de deux folioles entières, marquées de plusieurs nervures. Ses fleurs sont jaunâtres et en petites panicules terminales trichotomes. Cette plante croît dans les bois et. les haies à Ceylan , et au Coromandel près de Samulcoath. (LN.)

NARAWAEL. V. Naravelia. (ln.)

NARCAPHTE. Nom donné à l'écorce de l'arbre qm fournit Voliban , et qu'on emploie comme parfum dans les maladies des poumons. Foj^z à l'article BalsàMIER KAFAl , qu'on croît être cet arbre, (b.)

NARCAPHTON. V. NASGAPHTON. (ln.)

NARCE de Dioscoride , est rapporté à la Gentiane par Adanson , et au centaurlon niajas par les botanistes} qui l'ont précédé. V. ce mot. (ln.)

NARCISO-LEUCOIUM. Swertz , botaniste bollan- dais , auteur d'un ouvrage publié en 1612 , inliiu'é Floki- LEGIUM , figure sous ce nom quelques liliacces , et principa- lement les leucoium et gulamhus , Linn. , dorii les t|eurs opt la blancheur de la fleur du Narcisse, el la grandeur de Ct'.llsî$ de quelques Violiers ou Gikof.lees ( Isuco'wn de? .uic'ens), Tournefort a conservé cetic deriOminoiiun pour les mê-^ mes genres qu'il laisse réunis, aiiis* ^u'Adanson. sors le nom à! acrocorion y etHallersoos CQim àe galanllLus. (ln.)

NARCISSE, Narcissus , Lmn. ( Hexandrie monogynie). Genre de plantes bulbeuses , à un seul colylédor. , à fl'''ors in- complètes, appartenant à la famille des narcisso'ùles. S^s ca- raclèressont : une corolle ou calice cylindrique, eu entonnoir

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et à limbe double ; l'extérieur à six divisions profondes, oxi- rertesf l'intérieur en cloche ou en roue , crénelé ou deuié au sommet , représentant un godet ou une couronne ; six éla- mines insérées à la base du limbe intérieur , fk plus courtes;, un ovaire inférieur , arrondi, à trois cotés , portant un style mince, plus long que les étamines et couronné par un stig- mate divisé en irois; une capsule obtuse, presque ronde , à trois angles et à trois loges remplies de semences globulaires. Avant leur développement , les fleurs sont renfermées dans une spathe ou gaine membraneuse d'une seule feuille pliée en deux, qui s'ouvre latéralement et donne passage à une ou plusieurs (leurs.

Les (leurs de tons les narcisses sont grandes, belles, très-odorantes, paroissent de fort bonne heure au printemps, et doublent facilement; ils sont par ces raisons cultivés dans tous les jardins d'agrément.

Les botanistes comptent environ trente espèces de nar- cisses indigènes ou exotiques , dont chacune , ou du moins plusieurs , ont produit par la culture beaucoup de variétés. Le nombre de ces variétés , qui toutes ont des noms diffé- rens , augmente chaque jour. Les catalogues des Hollandais en prés;;atent plus de cent vingt, dont la description seroit étrangère à ce Dictionnaire , et trop minutieuse. Il suffit au lecteur de connoître les véritables espèces auxquelles il pourra rapporter les variétés qui s'offriront à lui , ou qu'il sera bien aise de cultiver.

En général , les narcisses aiment une terre légère et subs- tantielle, et craignent l'humidité, comme toutes les plantes bulbeuses. Leur ognon demande à être enterré peu pro- fondément , parce qu'il s'enfonce beaucoup , et alors il ne fleurit pas ; la profondeur de trois pouces est suffisante ; ou fera bien de l'incliner sur le côté, afin qu'il ne s'enfonce pas. L'époque à laquelle on doit le planter est indiquée dans tous tes pays par l'ognon lui-même ; c'est lorsqu'il commence à pousser. 11 est inutile de l'arroser après la plantation, pour peu que la terre soit humide. Mais quand les narcisses s'ap- prêtent à fleurir, on doit leur donner de l'eau assez souvent, et un peu moins lorsqu ils sont en fleurs.

On peut ou lever les ognons des narcisses après le dessé-» chement des tiges , ou les laisser en terre , suivant les espèces et les variétés, et aussi selon le climat.

Les narcisses végètent et fleurissent lorsqu'on les place il l'ouvertured'une carafe remplie d'eau. Si, dès que la (leur est passée , on met aussitôt les ognons en terre, ils se conser- veront , ne Heuriront point l'année d'après, mais s'y mulli- plieroul par leurs caïeux.

N A R an

Bans la courte description que je vais donner des espèces les plus intéressantes de narcisses , je ferai mention du trai- tement particulier que chacune d'elles exige.

Narcisse des poètes, Narcissus poetîcus ^ Linn. Cette es- pèce a été, dit-on , la plus connue dans l'antiquité ; les poètes en ont fait mention , et c'est sans doute à elle qu'il faut rap- porter la fable du beau Narcisse, qui , épris de ses charmes, et s'étaut laissé consumer de langueur , fut , après sa mort, changé parles dieux en une tleur qui porte son nom. On la trouve dans nos provinces méridionales, elle croît dans les prairies. Elle fleurit en mai; sa racine est plus petite et plus ronde que celle à\x faux-narcisse ; ses feuilles sont plus lon- gues, plus étroites et plus plates; elles sont radicales, faites en épée, et de la hauteur à peu près de la tige,qui s'élève à un pied. Ses fleurs , blanches et à couronne pourpre , exhalent une odeur forte , mais agréable ; elles sont simples ou doubles , et solitaires dans leur spathe.

Ce narcisse ne craint point la gelée. On en fait ordinaire- ment des bordures. Son ognon a la grosseur de celui d'une tulipe. Une terre commune lui suffit; on doit l'arroser, si le printemps est sec ; sans cette précaution , il fleuriroit diffici- lement. On peut le laisser plusieurs années en terre. Quand on veut le relever, on profite d'un temps sec en juillet , et on le met sécher à l'ombre. On le replante au mois d'octobre.

Narcisse des bois ou faux narcisse, Narcissus-pseudo- narcissus, Linn. , vulgairement aïauli, porion. il croît en An- gleterre , en France , en Italie, etc. , dans les bois; il a une grosse racine bulbeuse d'où sortent cinq à six feuilles plates, faites en lames d'épée , et une tige portant à son sommet une fleur solitaire, couleur de soufre et à couronne jaune, la- quelle est fort grande , faite en cloche, crépue , frangée , et aussi longue qne les divisions de la corolle.

Ce narcisse n'a point d'odeur. Son ognon fleurit au mois d'avril, peu de temps après le Safran printanier. Réduit en poudre , on l'emploie dans quelques lieux comme émétique. On le cultive comme le précédent. Parmi les variétés qu'il produit, on en dislingue principalement quatre : l'une à pé- tales blancs , avec un godet d'un jaune pâle ; l'autre à pétales jaunes , avec un godet doré ; la troisième double et jaune ; la quatrième à fleurs doubles , avec trois ou quatre godets l'un dans l'autre. 11 donne aussi une variété à fleurs beaucoup plus fortes. M. Caventon , à la suite d'une très-» belle analyse de la fleur de cette plante , imprimée dans le Journal de pharmacie, année 1816, a établi qu'on pouvoit, au moyen de procédés ordinaires , fixer sa couleur , avec

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économie , sur les tissjjs j et en fabriquer une laque propre à servir à la peinture.

Narcisse d'Orient , Narcissus onentalis , Linn. Il se rap- proche beaucoup du suivant , dont il est pourtant aisé de Je distinguer , puisque sa spathe ne renferme tout au plus que deux fleurs , tandis que dans le narcisse tazette la spathe en contient jusqu'à douze. Cette espèce, à cause de son odeur très-agréable , a été recherchée par les fleuristes , qui en ont un grand nombre de variétés ^ au milieu desquelles son caractère propre n'est pas aisé à reconnoîlre. Dans son état naturel, ses feuilles sont larges, et sa corolle est d'un blanc peige avec une couronne intérieure trois fois plus courte qu'elle , échancrée , de couleur jaune et divisée en trois. Cette plante vient naturellement dans les campagnes de l'O- rient.

Narcisse tazette ou a bouquets , Narcissm tazetia , LInn. Il est aussi appelé narcisse d hiver ^ parce qu ilfleuril dans cette saison et au premier printemps. Poiret dit en avoir rencon- tré sur les côtes de Barbarie, des plaines couvertes dès la fin de février. On le trouve également en Espagne, en Portu- gal, en Chypre , aux environs de Constantinople et dans nos provinces méridionales. Dans le temps des frimas, il orne et parfume nos appartemens. C'est enfin celui de tous qu'on cultive le plus dans les jardins de l'Europe , et qui donne un plus grand nombre de variétés.

Son caractère spécifique est d'avoir des feuilles planes, un peu moins longues que la tige , et larges de trois lignes ou environ; une tige à deux angles , lisse, épaisse , s'élevant rarement au-delà d'un pied, une spathe enveloppant plu- sieurs fleurs (de six à douze ), dont les pédoncules inégaux el presque triangulaires, partent d'un même point; une corolle à tul)e ouvert, dont le limbe extérieur est blanc ou jaune et à six découpures , et 1 intérieur fait en cloche, tronqué , trois fois plus court , et de diverses couleurs , tantôt blanc , tantôt jaune , tantôt soufre ou orangé.

Les variétés les plus distinguées de cette espèce, sont:i." le narcisse de Constantinople ; 2." le narcisse de Chypre; 3." le grand soleil d'or; 4.° le i^l blanc.

Ces quatre variétés ne se cultivent point en pleine terre , parce qu'elles sont sensibles à la gelée , et qu'elles fleurissent dans la plus rigoureuse saison. Il faudroit les tenir continuel- lement couvertes; elles se gâteroient, et l'on ne jouiroil pas de leurs fleurs. On les élève donc dans des carafes pleines d'eau ou dans des pots. Si Ton se sert de ce dernier moyen , on peut mettre trois ognons dans un pot de neuf pouces de diamètre, qu'on aura rempli de bonne terre ordinaire sans

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mélange de fumier. Il suffit que chaque ognon soit couvert de deux bons doigts de terre ; on les arrose , et on les laisse à l'air jusqu'à ce qu'il gèle. Alors on les retire dans une chambre exposée au midi, et on leur donne de l'air pendant une par- tie de la journée , si la gelée n'est pas encore assez forte pour entrer dans les maisons. L'air qu'on procure à la plante l'empêche de trop s'allonger, les tiges, à fleurs se fortifient et donnent un bouquet plus agréable. Il n'est pas nécessaire qu'il y ait du feu dans la chambre l'on mettra les pots , pourvu que la gelée n'y pénètre pas. Dans un lieu échauffé par un poêle ou de toute autre manière, les fleurs paroîtront plus tôt. On peut jouir pendant trois mois de la Heur du narcisse de Constant inople, en plantant une partie des ognons en octobre, une autre en novembre, et une autre en cTécembre. Si on les plante plus tard , ils. sont fatigués , et les fleurs qu'ils veulent donner avortent entièrement. Le narcisse de Chypre^ le soleil dor et le tout-blanc étant plus lents à fleurir , on doit les plan- ter en novembre au plus tard.

Le Narcisse douteux croît dans le midi de la France. Il ressemble au précédent avec lequel il a été long-temps con- fondu ; mais il est plus grand dans toutes ses parties et moins odorant. On le cultive fréquemment en pleine terre, dans les jardins de Paris.

Narcisse jonquille, Narcissus jonquilla , Linn, Tout le monde connoît et aime Ïa jonquille. Cette fleur plaît surtout aux dames, à cause de son parfum. On^a donné son nom à une couleur brillante et tranchée , et ce nom lui vient de la forme de ses feuilles, qui approchent de celles du jonc. Ceite plante croît naturellement en Espagne et dans l'Orient; on la trouve aussi dans le Bas-Languedoc. Son ognon est étroit, allongé et recouvert d'une pellicule brune. De son centre s'élève une lige tendre et sillonnée , au sommet de laquelle sont les fleurs réunies, depuis deux jusqu'à sept ou huit, dans une gaîne membraneuse, et soutenues par des pédoncules inégaux qui naissent d'un même point. Ces fleurs , plus ou moins grandes, deviennent doubles par la culture ; mais elles conservent tou- jours leur couleur jaune particulière à cette espèce.

Il n'y a que deux v atiéiés àcjoni/uille , Tune simple et l'au- tre double ; toutes deux se cultivent de la même manière. Leur ognon se plante en septembre , et se relève au mois de juin ou juillet. Pendant qu'il est hors de terre , il doit être tenu dans un lieu sec et aéré ; c'est le moment d'en séparer les caïeux.

Lorsqu'on veut avoir de nouvelles variétés de narcisses^ il faut semer les graines de semj-doubles dans des caisses de terre de bruyère mêlée arec du terreau de couche, et les ar-

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roser convenablement. Les caisses se rentrent dans l'oran- gerie aux approches des gelées. Au printemps de la troisième année, on relève les ognons et on les repique à trois pouces de distance dans d'autres caisses qu'on dispose de même. Ce n'est ordinairement qu'à la cinquième année que ces ognon* commencent à fleurir, (d.)

NARCISSE D'AUTOMNE. C'est l'AMARYLLisjAUTiE et le Colchique d'automne, (b.) NARCISSE INDIEN. V. Hémamhe. (ln.)

NARCISSE ou LIS DE MER. C'est ordinairement le Pancrais d'Illyrie , et quelquefois la Scille maritime.

(B.)

NARCISSITIS. Pline cite celte pierre au nombre de celles qui ont reçu leur nom par suite de leur ressemblance avec des parties des animaux ou des végétaux. 11 se borne à dire que le narcissitis a des veines comme le lierre. Dans quelques éditions de l'ouvrage du naturaliste romain , on lit que le Naucessitis avoit l'odeur du narcisse. Cette pierre nousesl entièrement inconnue, (ln.)

NARCISSOÏDES , Narcissi, Jussieu. Famille de plantes qui présente pour caractères : une corolle (calice, Juss.) ordi- nairement lubuleuse à sa base , et partagée à son limbe en cinq découpures presque toujours égales, quelquefois dou- blée intérieurement d'un second tube entier, que Linnœus a appelé nerfaîre , et qu'on ne doit pas prendre pour une co- rolle, puisqu'il est persistant; sixétamines, le plus souvent attachées au tube, rarement à la corolle, ou portées sur une glande qui accompagne l'ovaire , à filamens distincts , quelquefois réunis à leur base, à anthères vacillantes; un ovaire simple, adhérent, à style unique, h stigmate simple ou trifide; un fruit ordinairement capsulaire , triloculaire , trivalvc, polysperme, à semences attachées à l'angle interne des loges; quelquefois une baie triloculaire, éralve , à une ou plusieurs semences contenues dans chaque loge ; pérlspernie presque toujours charnu ; embryon droit.

Les plantes de cette famille ont des racines fibreuses ou bulbeuses, des tiges souvent herbacées, quelquefois frutes- centes, caudiciformes, toujours munies à leur base de feuilles alternes, engainantes, ordinairement succulentes, rarement fermes et coriaces. Ces feuilles préfcntent dans plusieurs genres, lorsqu'on les casse , une prodigieuse quantité de fila- mens en spirale, qui sont autant de trachées. Les fleurs, toujours hermaphrodites et spathacées, affectent différentes dispositions. Tantôt elles sont solitaires et terminales , tantôt elles forment un épi » une panicule , un corymbe ; tantôt ,

munies h leur base cl^une spathe commune , simple ou divi- sée, elles représentent une ombelle.

Ventenat, de qui on a emprunté ces expressions, rap- porte à cette famille , qui est la septième de la troisième classe de son Tableau du règne végétal, et dont les caractères sont figurés pi. i3, n.» 4^ du même ouvrage, dix-sept genres sou» trois divisions; savoir:

Les narcissoïdes qui ont les racines fibreuses, Ananas , PiTCAiRXE , FuacRÉE et Agave.

Les narclssoïdes qui ont la racine bulbeuse , NivÉOLE ,

GaLANTHE , H^MANTHE , EUSTEPHIE , AmaRYLLIS , Cai-

NOLE , Narcisse, Pancrais, Bulbocode, Hémérocallr,

TULBAGE et GeTHYLIS.

Les narcissoïdes qui n'ont pas complètement les caractère» de la famille , Hypoxis, Pontedère , Tubéreuse, Tacca. et Alstroémère. V. ces différens mots.

Jussieu a séparé depuis la première division de cette fa- mille , pour en faire une nouvelle sous le nom de Bromé- LOÏDES. r. ce mot. (b.)

NARCISSOLILIUM ou NARCISSOLÏRION. Nom que quelques auteurs ont donné à la Tulipe des bois (^tulipa syheslrîs , Linn. ). (ln.)

NARCISSUS des Laiins, Narcissos àes Grecs. Ces noms dérivent du grec narce etnatcosin, qui signifient 5<i//)/^ite', tor—

Çeur, qualités qui, au témoignage de Pline, de Dioscoride, de *lutarque,etc , appartiennent à la plante namwo.v.Théopbraste n'en indique qu'une espèce, de même que Dioseoride et que Pline. Le premier de ces deux derniers naturalistes attribue au narcissos : des feuilles semblables à celles du poreau, mais beaucoup plus petites et plus étroites ; une tige nue , creuse, haute de plus de six pouces, portant une (leur d'une odeur suave, blanche, dont le milieu est tantôt jaune safran (^narcissos rrocodes) , tantôt rouge ( n. porphyrodes) ; une ra- cine bulbeuse , ronde, blanche en dedans, et des graines dans une longue tunique noire (capsule). Pline reconnois- soit les mêmes différences dans la tleur, et il nomme calice ce que les botanistes ont nommé depuis, couronne , frange et nectaire. Il cite de plus un narcisse tout jaune. Le narcis" SOS étoit cultivé dans les jardins et crolssoit naturellement sur les coteaux. Ses bulbes avoient la douceur du miel-, leur décoction étoit vomitive , appesantissoit la tête et causoit une sorte de slupéfaction. Ces mêmes bulbes brûléset mêlés avec un peu de miel , servoient pour la guérison des brûlures, des écorchures et de différentes sortes de plaies. L'huile fleur de narcissos servoit à rendre leur souplesse aux partiel du corps affe ctées par la gelée.

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L'on ne sauroil douter que .plusieurs de nos î^^ARrjssES T)E& Jardins ne soient les anciens narcissos, cl surto<ii le nar- risse des poêles, ainsi nommé parce que les poètes grecs fei- gnicentquele jeune INarcisse avait été changé en celle plante dont la couleur blanche de la Heur étoit sans doute Temblème de la langueur dont il fut consumé.

Ce nom de narcissus a été étendu à un grand nombre de plantes qui ne rentrent pas toutes dans le genre nar- rissus. Ainsi l'on voit des amaryllis , des pannatium , les iu~ Upa , les leucoium , le galanthus , quelques omithogallum , Vhœ- manthus punie eus ^ ïanifiericum scrutiuum, L , le fenaria ondu- lata , L. , et plusieurs autres plantes non encore déterminées et des mêmes familles, décrites et appelées «ormsrAv dans les ouvrages des botanistes antérieurs à l'ournefort, fondateur du genre narcissus actuel. On doit à M. Loiseleur des Long- champs la connoissance d'un grand nombre d'espèces nou- velles de ce beau g«nre. V. Narcisse. (t,n.)

NARCKE. Nom de la Torpille vulgaire, à Nice.

(desm.)

NARCOBATE, Narmhatus. Snus-genrc établi par Biain- villc aux dépens des Raies. La Raie torpille lui sert de typc.(B.)

NARD , Na7-dus. Genre de plantes de la triandric mono- gynio, et de la famille des graminées , qui offre pour carac- tères: une balle de deux valves, dontl'extcrieure est lancéolée, linéaire, longue , mucronée, et embrasse l'intérieure , qui est pins petite; trois éi aminés; un ovaire supérieur, oblong , sur- monté d'un style filiforme, long, pubescenl, terminé par un stigmate simple ; une semence nue dans quelques espèces, et enveloppée dans une balle, qui fait corps avec elle, dans quelques antres.

Ce genre renferme cinq à six plantes , dont les plus com- munes ou les plus importantes, sont:

Le Nard serré , Nardus stiicla , qui a l'épi sélacé, droit et unilatéral ; il est vivace et se trouve très-abondamment sur les montagnes des parties méridionales de l'Europe.

Le Nard des Indes , qui a l'épi sétacc , unilatéral et un peu recourbé. Il est vivace , et croît dans les Indes. Palisot de Beauvois le fait servir de type à son genre Microculoa. S'il enfant croire Loureiro, cette plante seroitle vrai nard des Indiens, appelé par eux lavande mais Roxburg assure que c'est la Valériane JATAMANSI, fort peu différente de la Valériane OFFICINALE. C'est le colht de la racine qui fournil le meil- leur. On estime le nard^ alexitère , céphalique , stomachique , néphrétique et hystérique. On s'en sert dans les Indes pour

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assaisonner les poissons et les viandes , pour faire des pas- tilles et des sachets odorans.

On cultive au jardin du Muséum d'Histoire naturelle de Paris , une plante qui n'a pas encore (leuri , mais qui est dif- férente du nard indien et du barbon nard ; ses feuilles sont lon- gues de deux pieds et larges d'un demi-pouce: elles ont une saveur acide et une odeur approchant de celle des citrons. Elle vient également de Tlnde , et pourroit être mise au rang des nards. (b.)

NARD CELTIQUE ou NARD DE MONTAGNE.

C'est la racine de la Valériane celtique, (b.)

NARD COMMUN. On donne ce nom à la Lavamde

ASPIC , et à la «ftcino de l'AsARET d'Europe, (b.) NARD FAUX. Ognon de I'Ail victorial. (b.) NARD INLUEN ou DE LA MADELEINE. C'est le

Barbom Ts\\rd , And. nardus^ L. (ln.)

NARD DE MONTACiNE. C'est la racine de la Yalé-

iiiANE CELTiouE. V. ce mot. (lm.)

NARD DE NARROxNNE ou FAUX NARD. C'est la

racine d'une espèce de Fetuque , Fesiuca spadicea , Linn.

(LN.)

NARD SAUVAGE. C'est la racine du Cabaret, Asa- mm eurupœum. (ln.)

NARD , N ARON et VARD. Noms arabes de la Rose , selon Mallhiole. (r,is;.)

NARDUS. Plusieurs racines différentes , mais toutes trèi- odorantcs et qu on employolt dans la parfumerie et en mé-^ declne , ont été nommées narJos par les Grecs et nardus par les Latins. L'on donne à ces noms plusieurs étymologies. Suivant Pline , ils dé-^lvent de Naarda , ville de Syrie , voi- sine de lEuphrate, d'où les anciens tiroient le nard qu'ils es- timoient le plus. Suivant une autre étymologie , ces noms sont des altérations d'un mot hébreu ou arabe , qui signi- fieroit odorant ou épi. L'on peut distinguer les nardus en plu- sieurs sortes :

I." Le nardus indica. Pline dit que c'est un arbrisseau à racine massive , pesante , courte , noire et facile à rompre ; qu'il est garni d'un grand nombre de petites feuilles et pro- duit des épis à sa cime. Mais 1! paroît que Pline confond ici la lavande aspic et le vrai nardus indica dont les anciens ne con- noissolent que les racinco, Hippocrale,Théophraste etDios- corlde le nomment nardos et nardon stachys^spica nardi). Dios- coride reconnoît deux sortes de nardos , Ton qu'il nomme in- dien et l'autre syrien (^spica nardi, Pi.), qui croissoient tous les deux sur une montagne de Syrie; l'un smr le versant qui regar- doll l'Inde , ell'autre sur le versant qui rogardoit la Syrlti. Le

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nardus syrien est le meilleur, surtout quand il est frais ; le nardos gansillque , dit aussi Ozeniiis , éloit moins esiimé ,; croissoit plus haut, et produisoit de sa racine quantité d'épis son odeur approchoit de celle du souchet. Le nardos de sam- pharis étoitle moins estimé, fort petit, produisant de grands épis, et sentoit le bouc, etc. Tous ces nards essentiellement échauffans, provoquoient l'urine et éioienltrès en usage dans la médecine ancienne. Pline donne le prix que plusieurs d'entre eux se vendoient, et s'étend sur leurs qualités. Nous ne saurions dire quellessont les plantes qui donnoient aux anciens ces diverses espèces de nardus indica. De nos jours , plusieurs Barbons etVALÉRiANEsfournissentdes racinfs appelées nard indien; tels sont Vandropogon nardus et ïand. srfiœnanihus. L'on sait que les Asiatiques emploient encore plusieurs espèces de racines du même genre ; mais il ne paroit pas que ces plantes soient les mêmes que celles dont ont parle les anciens, et qui étoient si précieuses qu'on les falsifioit avec un nar- dus qui croissolt partout , et que l'on croit être \e festuca spa~ dicea. Voy. l'article Nard.

2." Le nardus cellica oa gallira. Il croissoit, selon Diosco- ride , sur les montagnes de la Ligurie , et portoit dans le pays le nom à'aliunga. On en trouvoit en Istrie , mais qui étoit moins estimé. Le nard celtique se falsifioit avec une herbe semblable, mais qui sentoit le bouc; d'où lui venoil le nom de iragos {hirculus en latin). Pline se borne à rapporter les vertus du nardgallique, sur quoi Dioscoride est plus éfendu. Diverses variétés de ces narÉ^/w ont été très-certainement les racines de quelques espèces de valérianes , et très-probablement celles des valeriana cellica ^ tuherosa^ sajcatilis elsaiiunca^ AU. Pline distingue Valiunga ou saliunca du nardus gallica.

3." Le nardus munlana. Dioscoride le distingue du précé- dent, et dit que quelques personnes le nomment thylacites. Il croissoit en Syrie et en Cilicie. Ses branches et ses feuilles étoient un peu plus grandes que celles de Veryngium , mais moins âpres et moins épineuses. wSes racines étoient noires et odorantes, plus petites que celles de l'asphodèle. C>n l'appe- loil aussi pyritis, parce qu'on en metloil surlesbrasiers pour parfumer et donner bonne odeur. Ce nard est inconnu. 4.° Le nardus rustica, que Pline dit être le même que l'asa- rum des Grecs. On donnoit aussi le même nom au baccharis. 5.0 Le nardus crelica ou syhestris , qu'on rapporte à la valé- riane grecque (Fa/. ;o/ïm).

Voilà quelles étoient les diverses espèces de nardus des anciens, et , par leur nombre, on doit voir qu'ils étoient en très grande faveur. Chez les modernes , ce nombre a di- minué. Le nardus indica est pour nous la racine d'une plante

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encore à peu près indéterminée. Le nard celtique est une ralériane , ainsi que plusieurs autres racines employées dans les mêmes circonstances.

Les botanistes, avant Linnseus, ont divisé les plantes nom- mées nardus , en

I." Nardus proprement dit, qui comprend sans doute la ra- cine qui nous vient de Tlnde , ou notre nard indien et le festitca spadicea , Linn.

2.° Nardus monlana et celtica et c.retlca^ se rangent plu- sieurs espèces de valérianes et \ arnica moniana. 3." Nardus italica^ qui est la lavande commune et ses variétés.

Linnseus a depuis transporté ce nom à un genre de grami- nées, qui ne renferme aucune des plantes nommées jusque-là norrfwi: l'application toute différente de ce nom vient de ce que l'on a cru que le nardus indica , Linn., étoit la plante qui pro- duisoit le nard indien ; ce qui est bien loin d'être prouvé. Cette application sera encore plus inexacte , si , avec M. Pa- lisot de Beauvois , on place le nardus indica dans le genre mi- crorhïoa de R. Brown.

Quelques autres espèces de nardus ^ Linn. , sont mainte- nant des espèces de rottloella.

Le Nard américain , Nardus americana^ Pluk. Alm. , tab. lOT , fig. 2 , est la Cacalie a feulles d'arroche , Cacalia alripIicifoUa , Linn. (ln.)

NARDUSKRUYD des Belges. C'est la nigdh. (l>'.)

NARE(tAN. Plante qu'on ne connoît que par la figure qu'en a donnée Rhéede dans son Horfus Malaharicvs , vol. 10, tab. 22 , et par l'imparfaite description qui y est jointe : ses feuilles sont alternes, ternées , portées sur des pélioles ailés et en forme de cœur. Les folioles sont sessiles, ovales, en- tières, épaisses et glabres. Les Heurs paroissent avoir cinq pétales de couleur blanche , et un ovaire pédicule ; ses fruits sont petits , ont trois côtés , trois loges et trois valves , et contiennent trois semences oblongues un peu courbées.

Les racines de cette plante sont amères , acres et aroma- tiques , ainsi que ses feuilles. On en fait une infusion , qui est bonne dans la fièvre des épileptiques , et on en tire un suc qui, mêlé avec l'huile de noix d'Inde , guérit la teigne, (b.)

NAREGIL et NAR(iEL. Le premier de ces noms est c«- lui que les Arabes donnent au Cocotier , et le second dé- signe le même Palmier chez les Persans, (lw.)

NAREL. Nom donné à la Volute fève, (b.)

NARF, NARFGRAES, NARVE etNATE.Noms sué- dois de la MORGELINE , Alsine média ^ L. (ln.)

NARGEL. V. Naregil. (ln.)

NARGIS. Nom arabe du Tazetta ou Jonquille blan-

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CHE, espèce de Narcisse (Narn'ssus tazetta, L.). Elle croît spontanément dans les jardins à Damiette en Egypte, (ln.) NARHUN. V. Nakassun. (ln.) . NARHWAL. V. Narwhal. (s.)

NARI. Au Madaré , c'est le CaACAL. V. l'histoire de cet animal à l'article CiiiEN. (desm.)

NAPil , Nari. Espèce de Raie du Brésil , peu connue, (b.)

NAUINAM-POULLI. Nom que les habitans de la côte Malabare donnent àîine herbe annuelle, haute de deux pieds, et figurée pi. 4-4- du sixième volume de l'ouvrage de Rhéede. Cette plante est la Ketmie de Surate {Hibiscus suraiensis ^ 'Linn.), qui croît dans toute 1 Inde, et dont les feuilles d'une saveur aigrelette et agréable, servent d'assaisonnement dans différens mets, (ln.)

NARINES , Nares {Ornithologie). La position des narines est à la base , dans le milieu , sur la cime , sur les côtés et rersleboutdubec. Elles sont ovales, orbiculées, oblongues, arrondies , linéaires , triangulaires , tubuleuses , glabres, pla- nes, ouvertes, perforées, coniques, saillantes, cylindriques, obliques , oblitérées, lunulées , elliptiques, voûtées , conca- ves, bordées , jumelles , épatées , totalement ou à demi cou- vertes par une membrane , tuberculées dans le milieu. Parmi ces diverses formes , il en est qu'on ne peut bien saisir que chez l'oiseau vivant ou immédiatement après sa mort ; car au- trement, les narines se déforment tellement par la dessicca- tion , ou sont tellement endommagées par les épingles que les empailleurs passent à travers pour tenir le bec fermé , qu'il en résulte souvent des méprises dont je ne suis pas plus à l'a- bri que les méthodistes qui s'en servent comme caractères gé- nériques, (v.)

NARINES. F. Nez et Odorat, (virey.)

NA RING. Un des noms arabes de rORATSiGER(Ci/'ru5 au- rantium , Linn); naring helou est celui de I'Orange DOUCE; iiaring meleh ^ celui de TOrange a MÈRE , QinaTyngyuusefef- fendy , celui d'une petite Orange amère. (ln.)

NARINGl des Rrames. V. Tsleru-katu-naregabi. (ln.)

NARINSGH. Nom persan et russe de I'Oranger, appelé narants par les Hongrois , et narendj par les Arabes , et naranjo ou naranjapav les Espagnols. Tous ces noms dérivent du nom latin auranlium donné à l'orange à cause de sa couleur, lors de l'introduction en Europe de ce bel arbre originaire de 1 Inde, (ln.)

NARI S LEGRQES et MARIS LEGROES.Noms qu'on donne, en Norwége , à la LiNNÉE boréale, (ln.)

N AHK/V. Nom il'un poisson rouge de la côte deKamls- chalka. (Jn ignore à quel genre il appartient, (b.)

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NARNETH. Nom arabe du Mercure sulfuré rouge ou Réalgar , selon Sérapion. (ln.)

NARON. Spalhe bivalve; corolle à six pétales ; trois éta-« mines conniventes à la base; un style trigone, à trois stigma- tes pétaloïiles, échancré parle haut; capsule ovale-oblongue, trigone, à loges poiyspermes; graines comprimées, trigones. Ce genre de plantes, établi par Médicus et adopté par Moënch a pour type la Morée iribiforme {Murœa irididides^ Linn,), que Thunberg rapporte au genre Iris. C'est son iris orienlalis. V. Moree. (ln.)

NARPHTE de Théophraste. V. Nâscaputhon. (ln.) NARRA. Nom que porte aux Philippines I'Esène rougb

VEINÉE. (B.)

NARRE NHEIIj. L'un des noms allemands du Mouron a fleurs rouges (<2/ifl^«///5 ar(JtY«/5, L. ). (ln.)

NARRIETJES. Nom japonais d'une variété de I'Oran- GER. (ln.)

NA'\T'HECE, Narthecium. Ce nom a été donné, dans les temps modernes, à Vorniihogallum ossifragum^VÀun., établi en genre. Adanson , en l'adoptant, lui doïjne le nom d'a^ama , qui i'a été depuis par Decandolle ; mais M. Persoon con- serve le premier nom donné. MM. de Jussieu, Lamarck» appellent narthecium un autre genre, fondé sur V anthericum caliriilaium , Linn. Mais ce genre existoitdéjà sous le nom de toffieldia^ imposé par Hudson, et adopté par Smilh et Per- soon. C'est aussi le même que Vheridera de Schranck , et y iridro-gahia de Ruiz et Pavon , selon Persoon. La plante qui lui sert de lype est rapportée auscfieuchzeria par Scopoli, au helonias par Willdenow , et au phalangium par Tour- ne for t.

Ces deux ç^cnves nar/kedum, faits aux dépens des anihericumy sont très -distincts , quoiqu'on les ait confondus. F. An~ THÉRic et Toffieldie. (ln.)

NARTHEX, NARTHECA et NARTHECION. Ces noms , qui signifient bâton en grec , sont donnés par Théo- phraste et par JDioscoride à des plantes que Pline nomme Jerula^ et dont les tiges s'élevoieut droites et servoient de cannes.

Le nariliex- , selon Théophraste , n'a qu'une seule tige gé- niculée , garnie de très-petits rameaux et de f.-îuilles grandes , molles , et tellement découpées, qu'elles semblent des che- veux, surtout les feuilles radicales. Cette lige se divise à l'ex- trémité en un certain nombre de divisions qui portent les fleurs. Les fleurs ont la couleur jaunâtre du coing , et les graines ressemblent à celles du fenouil. Suivant Dioscoride, le narihex a trois coudées de hauteur ; les feuilles plus âpres

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et plus étendues que celles du fenouil. La plante distille une liqueur nommée sagapenon. La moelle fraîche de la tige est utile dans les crachemens de sang, et pour arrêter les hémor- ragies nasales. La décoction de ses graines calme les douleurs d'entrailles , et mêlée 'avec de Thuile , elle provoque la sueur lorsqu'on s'en frotte le corps.

Pline traite du /«ru/a parmi les plantes étrangères à l'Italie. Le fentla croissoit dans les pays chauds et d'outre -mer (l'Orient). Ses liges étoient coupées par des nœuds d'où par- toient de grandes feuilles,

Pline en distingue de deux sortes. Dans l'une , les tiges sont fort grandes ; c'est le narUtex des Grecs : l'autre a les tiges basses; c'est le narthechia {ferulago'). Il n'y a pas de plante plus légère que \e ferula ; aussi, dit Pline, les vieilles gens en font des bâtons pour s'appuyer à leur aise. Les vertus de celte plante sont les mêmes que celles Vanethum. Ses grai- nes, semblables à celles de la même plante, étoient appelées, par quelques personnes, thapsia; et ici Pline assure que le ihapsia est une plante différente, bien qu'elle ait le port du ferula.

La description qu'il donne du thapsia et de la manière dont on s'y prenoit pour arracher ses racines ( V. Thapsia), con-, vient parfaitement à ce qui se pratique encore en Perse pour retirer Vassafœtida^ suc gommo-résineux produit par le ferula assa fœiida , Linn.

De ce qui précède , on ne saurolt douter que les narthex des Grecs ne soient nos Férules , de même que le ferula et le thapsia de Pline ; et il est probable que ce sont les jerula orientulis ^ commuais , ferulago ^ tingilana y glauca , etc., tous confondus par les anciens, puisque leurs propriétés et leurs usages actuels sont en grande partie ceux attribués par les Grecs et les Latins à leurs plantes narthex et ferula. Cette confusion est d'autant plus probable , que Pline parle du ferula dans plusieurs endroits de son Histoire naturelle , et qu'il semble avoir confondu plusieurs plantes différentes. Ainsi , liv. XXIV, c. i , qui traite des vertus des arbres sau- vages , il dit dafemla que les ânes en mangent avec délice, et s'en trouvent bien (ce qui avoit fait consacrer le ferula k Bacchus), tandis que c'étoit un poison pour toutes les autres bêtes chevalines. C'étoit donc une plante commune. Au livre XX, chapitre 22, Pline dit que le y^ro/a a les graines de Vanethum ; qu'on donnoit le nom de ferula femelle à un ferula dont la tige se divisoit au sommet ; que les tiges du ferula se mangeoieut, et leur meilleure sauce se faisoit avec du miel et du motlt de raisin. Cet aliment étoit stomachique; mais lors-

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qu'on en mangeoit irop, il occasionoit des maux de tête. La racine et les jeunes branches fraîches étoient employées à petites doses comme laxalives, et pour réprimer les sueurs immodérées; ce qui ne s'accorde pas avec ce que Pline dit ailleurs du ferula , et que nous avons rapporté plus haut. Nous sommes donc fondés à croire que plusieurs espèce^de plantes sont, chez les l^atins, confondues sous le nom de ferula.

Nous devons rappeler ici que les myihologues rapportent que ce fut dans de la moelle de la lige du nurthex ou ferula, que Promélhée transporta le feu qu'il avoit dérobé au soleil. Rappelons aussi qu'encore en Sicile on se sert de la moelle eu ferula cummunis ^ qui brûle très-lentement, pour conserver le feu et pour faire des mèches à canon, (ln.)

jSARTHICOÏDES. Thalius donne ce nom au Seseli ANNUEL ( seseli annuum , Linn. ) , dont il dislingue une grande et une petite variété. (i-N.)

NAI\U-C1LA. C'est sur la côte du Malabar une plante li- liacée que Linnaeus avoit prlsepour une espèce dePoNTEDÈRE {^pontederia wata , L. ) ; mais Loureiro , qui l'a obsei-vée en Cochinchine et en Chine , a fait voir qu'elle devoil constituer un genre nouveau , qu'il nomme phyllodes. Willdenow , eu l'adoptant, change ce nom en celui de Phrynium. V. Pery- NION. Adanson , qui pensoit comme Linnseus , a donné le nom de naru-kila au genre pontederia même, (ln.)

NARU FATSI-KAMl. Selon Thunberg , c'est un des noms qui désignent au Japon le Fagarier du Japon {Jagara piperita)y qu'on nomme aussi poimer du Japon, (ln.)

NARU-NINDI. Le Coulequin a feuilles étroites porte ce nom dans l'Inde, (s.)

NARUM. Ce nom est celui qu' Adanson donne au genre uvaria de Linnaeus. 11 y rapportoit , comme Linnœus , le Narum panel des Malabares (Rhéed. Mal. 2 , tab. 9), qu'on avoit confondu avec Vui>arïa zeylanica , Linn.), mais qui, selon Decandolle, est une espèce différente, et du genre unona (^unona narum^ Dec).

Le narum panel est un arbrisseau sarmenteux, qui s'entor- tille autour des arbres. Ses feuilles sont lancéolées , pointues , et ses pédoncules latéraux solitaires et uniflores ; les pétales sont ovales, arrondis, et les capsules slipitées. L'on relire de sa racine, par distillation , une huile odorante verdâire , dont les Malabares font usage dans certaines maladies , ainsi c[ue de la racine, (ln.)

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NAPiVAL. V. Naravital. (desm.)

NARVOLE. Arbre figuré sans fleurs ni fruits dans Rliéede el dans Ruaiphîus. 11 a les feuilles opposées , grandes , ovales, toujours vertes et odorantes. On fait cuire ces, feuilles avec la viande, non-seulement comme aromate, mais même comme plante potagère , pourvu qu'on les ait fait bouillir un mo- ment pour leur faire perdre l'amertume dont elles sont pourvues.

Poiret pense que cet arbre se rapproche des Myrtes, (b),

NARWHAL , Nanvlialas , Lacép. , Duméril , Tiedm. , ■Cuv. ; Ceratodon, Briss., lUig. ; Monodon ^ Linn. , Schreb. ; Diodan , Storr.

Genre de mammifères de Tordre des cétacés et de la fa- mille des cétacés proprement dits , ainsi caractérisé : teto proportionnée au corps ; formes générales des marsouins ; une ou deux défenses implantées dans l'os incisif, droites, longues et pointues, dirigées dans le sens de l'axe du corps; point de dents proprement dites ; orifices des évenls réunis et situés au plus haut de la partie postérieure de la tête ; point de nageoire dorsale.

On ne connoît encore bien qu'une seule espèce de ce genrp, laquelle habite les mers du Nord. M, de Lacépède, jdans son Histoire naturelle des Cétacés , en signale deux autres , qui nous paroissoient devoir être observées nouveau , avant d'être regardées comme bien certaines.

Les TiorwJials sont des cétacés Irès-voraces , dont la nata- tion est très-rapide, et qui, sous ces deux rapports, se rap- prochent particulièrement de ceux qui appartiennent au genre des Dauphins. V. ce mot.

Première Espèce. Narwh AL VULGAIRE, Nara'hulus vu/ganSy Lacépède , Hisf. nat. des Cétacés , p. i4-3 , pi. 4- ^ lîg- 3 ; Mo- tiodon monoceros , Linn. ; vulgairement licorne de rner ou uni- eorne.

Selon M. de Lacépède , les cafîictères distincifs propres à celle espèce consistent dans la forme ovoïde du corps, dans U longueur de la tête, égale au quart, ou à peu près, de la longueur totale de l'animal, et dans les défenses sillonnées en spirale. (DESM.)

Les Allemands nomment ce cétacé einhorn^ les (iroënlan- dais towack ou kernekfok , etc. Le nom de monodoti signifie vnidenté, animal à une seule dent, et celui de munocervs, uni- corne ; mais ces expressions ne sont pas exactes pour l'animal dont il s'agit, puisqu'il a naturellement deux longues dents à la Kiâchoire supérieure, et qu'il n'a point de corne. CepcH-

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dant on ne trouve guère que des nanvhals à une seule dent , ce qui a donné lieu à toutes ces dénominalions.

Le nanvhal est un cétacé dont le corps est de figure ovale, arrondie, dont la peau est nue et marbrée. Sa queue est pla- cée horizontalement , comme dans toutes les autres espèces de cette famille d'animaux. Sa tête est ronde , assez petite, et paroît confondue avec le corps, tandis que celle des haleines et des cachalots (orme une masse très-considérable. Le nar- whal n'a qu'une ouverture ou évent sur la tête pour respirer l'air ; une sorte de plaque frangée ou découpée en lamelles comme un peigne , ferme cet évent à la volonté de l'animal. Les yeux sont petits , placés fort bas aux angles de la gueule ; celle-ci est assez étroite; les mâchoires n'ont aucune autre dent que les deux longues incisives qui sortent de la mâ- choire supérieure. Ces deux dents sont coniques , très-dures, blanches , très-droites, et sillonnées de lignes spirales. Leur grandeur varie , et s'élève jusqu'à douze pieds ; leur grosseur est de trois à quatre pouces de diamètre à leur base ; elles finissent en pointe. Il faut remarquer que ces deux dents ne se trouvent guère que dans les jeunes individus, car dans ceux qui sont plus âgés on n'observe presoue jamais que Tune d'elles, l'autre étant ou cassée ou tombée ]pn* quelque accident.

Les trous des oreilles , placés derrière les yeux , sont fort petits; les lèvres sont minces; le museau est arrondi, et la longue défense de cet animal passe au travers de la lèvre de dessus. Les riSgeoires des côtés sont les seules qu'ait cet ani- mal avec celle de la queue ; il n'en porte point sur le dos, comme plusieurs autres espèces de cétacés; mais on remarque seulement une saillie ou crête qui semble en tenir la place. A mesure qu'on s'approche de la queue , la grosseur du corps est moindre. Les nageoires des Hancs sont longues de plus d'un pied et de forme ovale. La queue est échancrée en demi- lune ; la peau du corps est épaisse d'un pouce environ. Au- dessus on trouve un tissu cellulaire dont les mailles sont remplies d'une huile abondante, surtout sur le dos. La peau du ventre, qui est fort blanche et luisante, est molle et douce comme le velours. Cet animal est communément long de vingt à vingt-deux pieds ; mais on prétend en avoir vu de la taille de quarante à soixante pieds. Des auteurs assurent aussi que quelques nanvhals ont des dents lisses et non sillonnées en spirale (F. latroisième espèce de ce genre.); selon d'autres té- moignages, on trouve dans certains individus des bosses sur le dos.

Comme les autres cétacés, le narwhal esi vivipare ; sa fe- melle porte deux mamelles vers sa vulve , qui es^ placée au- près de l'anus. La verge du mâle est renfermée dans unegaîne.

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11 paroît que ces animaux ne produisent qu'un petit à la fois ; n n'a pas encore de dents visibles lorsqu'on le tire du sein de sa mère ; sa peau est grisâtre ; mais dans les vieux individus , elle devient noirâtre et marbrée en dessus du corps, et reste blanche en dessous. On ne tire pas beaucoup d'huile de ce cétacé, mais elle est plus claire et d'une meilleure qualité que celle de la baleins franche. Un de ces animaux , long de quarante pieds , et dont la dent avoit sept pieds , ne donna qu'un tonneau et demi de graisse. Wormius a reçu , d'un évêque d'Islande , la description d'un céracé de celle espèce, qui avoit soixante pieds de longueur; sa dent en avoit qua- torze. Un capitaine de Hambouig en prit un en 1684., qui avoit ses deux dents ; c'étoit une feuielle. Ses dénis enlroient de plus d'un pied dans sa tête , donl les os avoienl deux pieds de longueur sur dix- huit pouces de largeur. Zorgdrager {Pêche de Groënl.., p. 9) cite un autre exemple semblable.

Ces cétacés sont d'excellens nageurs, et se servent de leur queue comme dune forle rame , pour les faire glisser sur Teau avec une étonnante rapidité. Ils nagent toujours en troupes , et lorsqu'on les atlaque ils se serrent comme un bataillon carré , en plaç«É leurs dents sur le dos les uns des autres. « Ils s'empêchent ce cette manière, dit Anderson, de « plonger et de s'évader, ce qui fait qu'on en prend ordinal- « rement quelques-uns des derniers. » {Hist. du Groe'nl. , p. lie.) Ces animaux vivent de poissons du genre des soles , et surtout de coquillages univalves , rapportés , mais à tort, au genre àcs phinor les ^ qui sont très-nombreux dans les mers du Nord. La demeure des narcvhals est vers le 80.^ degré de latitude boréale , et principalement sur les côtes d'Islande , vers le détroit de Davis et les rivages de l'Amérique septen- trionale et du Groenland, Les nanvhals sont les avant-cou- reurs des baleines., si l'on en croit les pêcheurs groënlandais ; et aussitôt qu'ils les aperçoivent, ils préparent tous leurs ins- trumens pour harponner et tuer la baleine; mais il paroît plus vraisemblable que ces deux espèces d'animaux vivant des mêmes nourritures, suivent les mêmes bancs et se rencontrent dans les mêmes parages. Comme le nanvhal n'a point de dents mâchelières , il est très-probable qu'il ne se nourrit guère que de mollusques et de coquillages tendres et friables dont nou* avons parlé. Cherchez les mots Baleine et Cétacés,

On prétend que les rois de Danemarck possèdent un trône fait de dents de narwhal^ qui, comme on sait, ressemblent h de très-bel ivoire , qui est plus dur et ne jaunit pas. Cet ouvrage doit être remarquable. On montroll jadis, dans le fresor de l'abbaye de Saint-Denis, une dent de ni/;w'//fl/,

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qu'on regardoit comme la corne de Tanlmal fabuleux appelé licorne, (virey.)

Seconde Espèce. Narwhal microcéphale, Narvohalus microcephalus , Lacép., Hist. naUir. des Céiacés y page i5g, pi. S,fig. 2.

Cette espèce , distinguée par M. le comte de Lacépède , diffère surtout de la précédente par l'allongement assez con- sidérable de son corps et de sa queue , par sa forme presque conique , par sa tête fort petite , puisqu'elle n'égale guère que le dixième ou à peu près de la longueur totale. Du reste, elle a, comme le narwhal vulgaire ., les défenses sillonnées en spirale. Sa longueur moyenne n'est que de vingt-un à vingl- . quatre pieds. Ses défenses ont une longueur quelquefois égale à celle du tiers de l'animal. Sa peau est d'un blanc varié par des taches , petites, moyennes, bleuâtres, plus nombreuses et plus foncées sur la tête, au bout du mu- seau, sur la partie la plus élerée du dos, sur les nageoires et sur la nageoire de la queue. Le museau est très arrondi ; la tête, vue par-devant, ressemble à une boule; l'ouverture de la bouche est assez petite ; l'œil est très -petit et un peu éloigné de l'angle que forme la réunion des deux mâchoires , et à peu près aussi bas que cet angle. Les nageoires pecto- rales sont à une distance du bout du museau égale à trois fois ou environ la longueur de la tête. La saillie longitudinale, que l'on remarque sur le dos , et qui s'étend jusqu'à la na- geoire de la queue, relève assez vers le milieu de la longueur totale et auprès de la caudale , pour imiter, dans ces deux endroits , un commencement de fausse nageoire. La caudale se divise en deux lobes arrondis , et recourbés vers le corps de manière à représenter une ancre. L'ouverture des évents €St un croissant dont les pointes sont tournées vers la tête.

Telle est en entier la description que donne de ce narwJwl le célèbre naturaliste que nous venons de ciler; il l'a com- posée sur un dessin qui lui a été communiqué par M. Banks , et qui a été fait dans la mer de Boston (par 4o" de latitude nord) par M. Brand,

M. deCacépède pense qu'on doit rapporter à cette espèce les nanvhals vus dans le détroit de Davis , et desquels Anderson avoit appris , par des capitaines de vaisseaux, qu'ils avoient le corps très-allongé, qu'ils ressembloient , par leurs formes, à l'acipensère-esturgeon , mais qu'ils n'avoieut pas la tète aussi pointue que ce poisson cartilagineux.

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Troisième Espèce. Narwhal AndeSson , Nmwhahs an- âersonianus, Lacép. , Hist. natur. des CéLacés, page i63.

M. le comte de Lacépède fonde celte espèce sur la diffe'- rence que présentent ses défenses avec celles des deux précé- dentes. Dans ces dernières , elles sont striées en spirale ; dans celle-ci, elles sont absolument lisses. Du reste , l'animal est inconnu, Anderson n'en a vu que des défenses à Ham- bourg ; mais , avant lui , Willughby ( IchOiyol. liv. II , pag. 4-3 , pi. A, 2 ) avoit figuré des défenses de nanvhals sans spirales ni stries, qu'il dit plus rares que les autres, (desm.)

NAlRYSCHNIK. Nom russe de la grande Scrophulaire des bois {Scrophularia nodosa, Linn. ). (ln.)

NAS. Nom arménien de la Sarette ( Serratuïa tinctoria , Linn. ). (ln.)

NASALTS. Nom latin du genre de singe appelé en fran- çais Nasique par M. Geoffroy. Voyez Guenon nasique.

(desm.)

NASCAPHTHON ou NARCAPHTHON de Diosco- ride. Selon ce naturaliste , le nascuphthon étoit une écorce semblable à celle du mûrier , et qui venoit de Tlnde. On la brûloit pour la bonne odeur qu'elle exhaloit ; on la faisoit entrer dans la composition des parfums. Césalpin présume que c'est l'écorce extérieure de la noix muscade ; Amatus , que c'est le bois d'aigle ; d'autres étuteurs , que ce peut être l'écorce d un Bàlsamier, ce qui est probable. Le peu que Disocoride rapporte de cette écorce , ne suffit pas pour la faire reconnoître ; mais l'on ne peut douter que cène soit une de celles que l'on emploie encore dans l'Inde aux mêmes usages , tels que le bois d'aloès , d'aigle , etc. L'on a cru cependant que le Storax rouge, petite écorce fragile, encore en usage en Grèce, on la nomme maurucapno^ est le nascaphthon de Dioscoride , et peut-être le Narphte de Tbéophraste. Cette écorce est, dit-on , celle de l'arbre qui fournit l'oliban , espèce de Balsamier. Foyez ce mot. (ln.)

N ASE. Poisson du genre Cyprin, (b.)

NASEAUX. Se dit des narines des quadrupèdes. F. Nez et Odorat, (virey.)

NASENHORN ou NASHORN. Non allemaoidu Rhi- nocéros, (desm.)

NASEUS. Nom latin des poissonsdu genre Nason. (desm.)

NASHORN. F. Nasenhorn. (desm.)

NASICORNE.NomspécifiqueduneToRTUEDEMER. (b.)

NASICORNE. Nom d'un coléoptère du genre ScARABÉ, aussi désigné sous celuide MomnE (Scaraiiœus nasicomis, Fabr.)

(desm.)

NAS 239

NASICORNES, Nasicornia. Illîger établit sous ce nom une famille de mammifères qui ne renferme que le seul genre Rhinocéros, (desm).

NASIQUÈ. Espèce de singe des îles de l'Archipel des Indes , remarquable par la longueur démesurée de son nez. Placée d'abord par les naturalistes parmi les Guenons , elle en a été retirée par M. Geoffroy , pour former un genre particulier sous le nom de Nasique , nasicus , auquel il attri- bue les caractères suivans : Singes de Tftncien Continent , ayant le nez d'une longueur plus qu'humaine ; des callosités aux fesses ; une queue plus longue que le corps. Nous avons cru ne devoir considérer ce genre que comme une subdivision de celui des Guenons. V. ce mot. (desm.)

NASIQUE. Nom spécifique d'une Couleuvre, (b.) NASITOR. Nom qu'on donne , dans quelques cantons , au cresson alertais^ ou Passerage CULTIVEE. (B.)

NASMYTHIA d'Hudson. Ce genre est le même que Veriocaulon de Linnseus. (ln.)

NASON , Naso. Genre de poissons établi par Lacépcde , dans la division des Thoraciques , aux dépens des chœtodons de Linnseus. Il offre pour caractères : une protubérance eit forme de corne ou de grosse loupe sur le nez ; deux plaques ou boucliers de chaque côté de l'extrémité de la queue ; le corps et la queue recouverts d'une peau rude et comme chagrinée.

Ce genre renferme deux espèces qui vivent dans la mer des Indes , et qui ne présentent rien d'important à connoître. V. la figure du Nason licorne, pi. M. 4 de ce Dictionnaire, (b.) NASPËRSEGE, Nom du Pêcher à Venise, (ln.) NASSA. Nom latin des coquilles du genre Nasse, (desm.) NASSARIUS. V. Nassier. (desm.)

NASSAUVE, Nassauvia. Genre de plantes de la syngé- nésie agrégée , qui a pour caractères :un calice double , l'in- térieur composé de cinq , et l'extérieur , plus petit, de trois folioles. Un réceptacle nu , portant quatre à cinq fleurons hermaphrodites , chacun composé d'un tube partagé en deux lèvres, l'une à deux et l'autre à trois divisions; cinq étamines réunies par leurs anthères ; deux stigmates. Le fruit est une semence couronnée par une aigrette caduque et simple^

La nussume a une odeur très-agréable. Ses feuilles sont alternes, presque imbriquées, et ses fleurs disposées en épi simple et terminal , accompagné d'un grand nombre de bractées. Elle a été trouvée, par Commerson, dans les îles du détroit de Magellan, (b.)

NASSE , Nassa. Genre de testacés de la classe des Uni- valves , qui a pour caraclères : une coquille ovale se lecmi-

23o NAS

nant inférieureinenf; par une éehancrure oblique un peu ca- naliculée , et dont Ja base de la coliimelle cache en partie l'échancrure , et paroît tronquée obliquement.

Ce genre faisoii partie décelai des /;i/ca/jsdeLinnœus, dont ïl a été tiré par Lamarck. 11 est habile par un gastéropode à di.sque ventral élargi , tronqué intérieurement, et se termi- nant au-delà de la tête , qui a deux tentacules portant les yeux dans leur partie moyenne , et un tube au- dessus de la tête formé par le manteau. Il a pour type le Buccin casquillon ( huccinum arcularia, Linn. ), et le BucciN BOMBÉ (^buccinum gibhum^ Linn. ). (b.)

NASSI. Arbrisseau à feuilles alternes , ovales , pétiolées , Irès-enlières , légèrement lanugineuses , et à fleurs a.^illaires ou placées le long des branches , et disposées en ombelle sur ttn pédoncule commun.

La corolle de cet arbre est blanche , composée de quatre pétales , et son fruit est une petite baie un peu fade , mais bonne à manger, (b.)

]SAS.SIE1\. Animal des Nasses, Il n'a point d'opercule ; ses deux tentacules portent les yeux dans leur milieu \ la base du pied a une saillie lisse. (B.)

NASSO. L'un des noms italiens de I'If. (ln.)

NASTE , Nastus. Nom donné, par Jussieu, à une plante graminée , fort voisine des Bambous. V. ce mot.

Cette plante forme , dans l'hexandrie digynie, un genre qui offre pour caractères: desépillets de sept à huit balles uni- flores , placées des deux cotés opposés , et se recouvrant mu- tuellement ; les extérieures plus petites que les autres ; chaque balle calicinale composée de deux folioles accompagnées d'un filet velu ; chaque balle florale de deux valves, contenant six élamines et deux styles.

Le naste&c trouve à l'île Bourbon, il s'élève en arbre et jeîie de ses nœuds des rameaux en verticilles chargés de fleurs à leur sommet. Il y est appelé bambou. C'est un superbe arbre qui entoure la montagne du volcan d'une ceinture brillante , au rapport de Bory Saint-Vincent.

D'autres espèces ont été depuis réunies à celle-ci, et l'une d'elles a servi à établir le genre Stemm atosperme. (b.)

NASTOS. Nomdc l'une des cinq espèces de Calamosou Roseaux inodores, mentionnées par iJioscoride. Ce roseau .scrvoit à faire des flèches. On présume que ce peut cire une espèce de rulang , semblable à celui dont on fait des cannes. Peut-être est-ce une variété du bambou. Ce nom de naslos ou nastus est donné à deux autres plantes de ces genres par Lobel, Chabrée, etc. M. de Jussieu a novamé nastus une plante confondue avec Varundo bambusa^ Linn. , dont il a

NAS 23i

fait un genre distinct adopté par les botanistes , qui le nom- ment aussi Bambos etBAMBUSA. (lw.)

NASTURTIE, Nasturlium. Genre déplantes de la tétra- dynamie siliculeuse , et de la famille des crucifères, établi par Tournefort , supprimé par Linnaeus , et renouvelé par Jussieu, 11 a pour caractères : un calice de quatre folioles ouvertes ; une corolle de quatre pétales égaux ; quatre éla- mines, dont deux plus courtes; un ovaire supérieur surmonté d'un style simple ; une silicule presque orbiculaire , compri- mée , entourée d'un rebord échancré au sommet, dont les valvessontfaites enforme de nacelle et monospermes.

Ce genre est principalement formé aux dépens Ac5 passe- rages {lefjidium, Linn.), dont il ne ne diffère que par la silicule munie d'un petit rebord , échancré et monosperme. Il ren- ferme les espèces appelées Passeuage d'Alep , Médicatste , Cardamine, cultivée, de Virginie et autres. V. au mot Passerage. (b.)

NASTURTIOÏDES. Calice de quatre pièces ouvertes; point de pétales ; deux élamines ; point de glandules à la base de Tovaire ; un style à un stigmate obtus ; silicule mono- sperme , orbiculaire , émarglnée età bord aigu. Le passerage des décombres {lepldium rudera/e) est la plante qui rentre dans ce genre établi par Medicus et adopté par Moench. V. Passerage. C'est sous ce nom que l'on a cultivé autre- fois, au Muséum d'Histoire naturelle, 1^ velia annua , Linn. , dont Adanson fit son genre carrietera. (en.)

N ASTURTIOLUM. Medicus et Moench donnent ce nom à un genre de crucifères, appelé depuis SenneLiera ^ar M. Dé- candolle.

NASTURTÏOLUM de Gesner. C'est le Passerage des Alpes {lepidlum a/phium, Linn. ) (ln.)

NASTURTIUM des Latins, Cardamon des Grecs. Plu- sieurs plantes ont ésé nommées ainsi par les anciens, à cause de l'odeur et de l'acrimonie de leurs graines , qui portent à la tête ou fortifient le cœur, comme le signifie le nom grec , et qui excitent l'éternuement , comme l'exprime le nom latin ( a naribus torquendis'). Théophrasle dit qu'il y a plusieurs es- pèces de cardamon. Pline dit que le naslurtium le plus grand, vient en Arabie. Il en décrit un cultivé et un sauvage ; celui-ci, appelé noir , sans doute à cause de la couleur <le ses graines, l'autre blanc, par une raison opposée. Dioscoride ne cite que le cardamon babylonien, et le donne pour le meilleur , ainsi que Pline. Laverluéchauffante et l'acrimonie des nasturlium conviennent très-bien au cresson de fontaine ( si^mbrlum naslurtium ) , et au cresson alenois^ ou nasUort

232 N A s

{/epidi'um satimm, Linn. ) , et il n'y a pas <3e doute que ce dernier ne soit le nasturlium cultivé , mentionné par Pline. Les naturalistes ignorent le pays natal de cette plante ; il est très-probable que nous la devons à l'Orient.

C'est dans la famille des crucifères que les autres espèces <ie nasiurtnim , des Grecs et des Latins doivent être placées. Lobel pense que le cochlearia draba est le nasturtium de Eabylone ; mais on ne sauroit reconnoîlre ces plantes , les anciens ne nous ayant laissé de détails que sur leurs vertus et leurs propriétés. Du temps de C. Bauhin , le nom de nasturlium étoit étendu à un grand nombre de plantes ; C. Bauhin divisoit les nasturtium en :

I." NASTURTtUM HORTENSE, se rangentle cresson alenois ( Icpidium saiwum ) et ses variétés ;

2.0 Nasturtium pratense ; les cardamine pratensis , par- viflora et granulosa , de Linnaeus , rentrent dans celte di- vision.

3.0 Nasturtium AQUATicuM ; le cresson de fontaine (5/- symhrium nasturtium ) et les cardamine amara et hirsuta , sont classés dans celle-ci ;

4..0 Nasturtium montanum. Plusieurs plantes de genres différens rentrent dans celte division , par exemple , les car- damine tri/ulia, resedifolia et aipina ^ les lepidium alpinum et petrœum , Varuhis belïidijolia , etc.

5.0 Nasturtium sylvestre , le lepidium ruderale , le sisymbrium sophia et le vella annua , constituent cette cin- quième division ;

6.0 Nasturtium indicum , que C. Bauhin distingue des précédens, et qui ne renferme que la Petite capucine (^tropœolum minus, Linn.)

Dans celle classification , C, Bauhin ne comprend pas I iberis nudicaulis , qui est un nasturtium pour Tabernsemon- lanus; le cocldearia draba ou nasturtium babylonicum ^ de Lobel; la barbarée ou nasturtium palustre de Gesner; le bunias kakile ou nasturtium maritimum , de Daléchamps , etc.

Les botanistes qui suivirent C. Bauhin jusqu'à Tournefort, ont fait connoîlre, sous le nom de nasturtium^ diverses espèces de cardamine et de lepidium. Y^heliophylla integri- fulia , dont la première connoissancc est due à Plukenet , est un de ses nasturtium.

Tournefort fixa le nom de nasturtium à un genre qui avoit pour type le cresson alenois ( lepidium satii>um) , et il y rap- porloit quelques espèces de cochlearia. Le genre nasturtium , d'Haller, comprend une partie des lepidium, Linn. ; thlaspsi j Linn. , et cochlearia. Linnaeus a abandonné, avec raison , le nom de nasturtium , et la plus grande partie des plantes dé-

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crites sous ce nom se retrouvent dans ses genres îepidium , Voy. Passt.rage ; et cardamine , Voy. Cresson. (ln.)

NASrUKTlUM INniCUM. Dodonée , Lobel et C. iJauliiu ont donné ce nom à la petite capucine (Iropœoliim minus ) , à cause de son acrimonie , et parce qu'elle est ori- ginaire des Indes occidentales; c'est ainsi qu'on désignoit alors l'Amérique méridionnli^. C'est pour la première raison que Boerha;)ve avoil appelé acmnola noire capucine ordinaire ( i. iniijus ). La première espèce fut introduite en Europe en i58o, par Dodonée, et la seconde en 1684, par Bevverning.

(LN.)

NASUy\. C'est le nom spécifique donné par Linnaeus au Coati ; son ursiis nasiia. 11 a été employé, par Storr, coiimie désignation générique, (desm.)

NASU TA. llliger forme une petite famille de mammi- fères ongulés sous ce nom , et qui comprend seulement le genre des Tapirs. V. ce mot. (desm.)

NA-TANNK. Nom du Colsa , au Jaj)on (b.)

NATANÏIA. llliger donne ce nom à un ordre de mam- mifères , qui comprend les cétacés proprement dits, et de plus les lamantins , les dugongs et les rytina ou stellères ; en un mot tous les mammifères qui manquent d'extrémités pos- térieures, et qui sont éminemment organisés pour la natation. M. Cuvier , dans son Règne animal ^ adopte cet ordre et lui conserve la dénomination de Cétacés, (desm.)

NATATORES. C'est, dans le Pror/romzw d'IUiger, la dénomination de son septième ordre des oiseaux , lequel correspond aux amères de Linnaeus , et à notre cinquième ordre. F. Nageurs, (v.)

NATEN. hdi "çoAagraiVQ {^œgopodiumpodagraria^ porte ce nom en AUemn^ne. (ln.)

NA'r-(iAAL. Nom hollandais du Rossignol, (v.) '

N/VTICARIUS. V. Naticier. (desm.)

NATICE, iVi///ca. (xenre de testacés de la classe des Uni- valves, qui offrent pour caractères: une coquille presque glo- buleuse , ombiliquée , à lèvre gauche calleuse vers l'ombilic, à ouverture demi-ronde , et à columelle oblique et non dentée.

Linnaeus avoit confondu ce genre avec celui des nérites , quoiqu'Adanson eût bien caractérisé leurs différences. 11 a été rétabli par Lamarck et comprend les coquilles de la di- vision des nérites ombiliquées de Linnaeus.

Les natices ont généralement la forme et la contexture des nérites, mais elles sont cependant moins globuleuses, les tours de leur spire allant fréquemment jusqu'à sept. C'est dans la columelle que la différence des deux genres se fait le plus

a3^ N A T

senlir. Dans les natices , ce n'est qu'une cloison mince qui se développe iongitudlnalement ; dans les ncrites, c'est une co- lonne creuse qui soutient , comme dans la plupart des autres univalves , les spires de la coquille, et qui ensuite s'étend plus ou moins longltudinalemcnt à l'ouverture de la bouche. Cette columelle est extrêmement épaisse et luisante, comme dans les nérites, et le devient d'autant plus qu'elle est plus voF- sine des pas de la spire. Elle varie dans sa forme et dans sa position. L'ombilic varie égalementsous les mêmes rapports, selon les espèces , et 11 est quelquefois en partie , et même en totalité, rempli par une espèce d'apophyse ou d'appendice, qu'on nomme cordon ombilical^ et qui est tantôt lisse et tantôt ridé , tantôt étroit et tantôt large, quelquefois aplati à son extrémité , quelquefois contourné , etc.

Les lèvres sont les mêmes que dans les nérites, mais tou- jours calleuses du côté gauche.

Les natices ont toutes Touverlure exactement fermée par un opercule teslacé,de forme approchant assez généralement de celle d'une demi-lune , mais qui n'a jamais les entalllures ou les crans qu'on voit quelquefois à ceux des nérites. Cet opercule est ordinairement aplati ; sa surface supérieure est garnie de lames ou feuillets demi-circulaires très-serrés , et sa surface Inférieure offre un sillon qui décrit trois tours de spire fort peiils. Cette dernière est plus finement striée , et. couverte d'un périoste mince.

L'animal des natices est aussi voisin de celui des nérites que les coquilles mêmes. Sa tête est petite, cyllnùrique , de moitié plus longue que large, et légèrement échancrée à son extrémité, d'où part un petit sillon qui n'a pas toute sa lon- gueur en dessus. La bouche est un petit sillon situé dans la partie opposée.

Les cornes sont deux fols plus longues que la tête , et co- niques; elles portent chacune, à leur racine, un appendice charnu et carré, qui flotte librement sur la tête , et derrière lequel sont placés les yeux.

Le manteau consiste en une simple rhembrane fort mince, qui tapisse les parois inférieures de la coquille.

Le pied est fort petit , presque rond , aplati en dessous , et assez épais.

Les natices sont , comme les nérites, répandues sur toutes les côtes de l'ancien et du nouveau continent. Comme ces dernières, elles s'attachent aux rochers, et restent volontiers à l'air lors des basses-marées.

On compte une trentaine d'espèces de natices connues, parmi lesquelles les plus communes ou les plus remarquable* sont :

G . 3o.

,'i . .,. A,iii/ih' j/,r>,i/>c . y^ . ù. A'e/'i/i' i/riiiir/- . t) . . iXld-Ilh' Il /oui/ et' . 7 . . . (>/ii',' //i,ri'/>/'i-i'

J2 (h-/n//ifi' j3 . 0/ f/ioce/e oMi/z/r J^ . lO- CKrctt/>/lO/l 0/f/\r//n' jù\/-u'i iKfCir/it' ir,i/<n-i!//'C j() . . . . (hni/c ii'/if

N A T 235

La Natice caurène , qui est unie , dont la spire est un peu pointue , el l'ombilic à apophyse bossue et bifide. Elle se trouve dans presque toutes les mers. V. pi. G. 3o , elle est figurée. Sa grosseur n'excède guère un pouce de diamètre, et elle varie depuis le blanc jusqu'au bleu , avec des taches et des lignes de toutes les couleurs. On ne voit pas deux indi- vidus semblables. On la mange ; mais la difficulté de tirer l'animal de sa coquille est cause qu'on n'en fait que rarement usage.

La Natice crotte de mouche est unie, blanche , ma- culée , et ponctuée finement de roux. L'apophyse de son ombilic est bossue et bifide. Elle se trouve dans la Méditer- ranée et sur les côtes de l'Amérique.

La ISatice grolet est unie ; a la spire obtuse , l'ombilic à demi-fermé , el la lèvre bossue et à deux couleurs. Elle se trouve dans la Méditerranée et la mer des Indes.

La Natice blanc d'œuf est convexe ; a l'ombilic presque en cœur, et le sommet de l'apophyse aplati. Elle se trouve dans la mer des Lides.

La Natice barrée est ovale , comprimée , ondulée trans- versalement , striée longiliulinalement ; elle a les côtes planes, obliques, semiiunaires, et la spire en mamelon. On la trouve fossile à Courtagnon et ailleurs, (b.)

NATICIER, animal des Natices. 11 a deux tentacules portant les yeux à leur base externe; son disque ventral est très-court, (b.)

NATIF (MÉTAL), ou MÉTAL VIERGE. C'est celui qui se trouve naturellement dans son état parfait. Les métaux qui se rencontrent le plus ordinairement dans cet état, sont: l'or , l'argent , le mercure , le platine , le cuivre , le tellure et le bismuth. Il est fort rare de trouver du /er natif , cl l'on doute qu'on ait véritablement rencontré du plomb et de l'é- tain à l'état de métal vierge. V. Métaux, (pat.)

NATI SCHAMBU. Nom malabaredu JambosierdeMa- LACCA {^Eugenia malaccacensis^ L.) Il ne faut pas le confondre avec le Malacca srJiamhu^ qui est le Jambosier proprement dit (f-iigenia jamhos, Linn. ), (ln.)

N.\'L'OMISSE. Nom tiré de Natowokey omissew, que les naturels de la baie d'Hudson ont imposé au lllBOU DES Pins. V. ce mot à l'article Chouette, (v.)

NATOWOKEY OMISSEW. Nom que les naturels de ia baie d'Hudson donnent au Hibou des pins, (v.) NATPEL. Nom allemand, de la Nèi le. (i.N.) NATRAGULYA et NADRAGULA. Noms hongrois de Mandragore, (ln.)

NATRIX de Pline. Herbe dont la racine fraîche sentoit

236 N A T

le bouc ; on s'en servoit pour dissiper les visions du cerveau, Lobei et Rivin pensent que c'est une espèce de Bugra>'E (jjiionis nalrix). Anguiiiara prend pour elle laFRAXiNELLE {^Dictamnus a/bus, Linn. ) (ln.)

NATKNJK.Nom de la Tormentille droite, en Bohème.

(LN.) .

NATROLITE et NATROLI THE. Cette pierre , que Klaproth nomme ainsi , parce qu'il y découvrit une assez {grande quantité de soude, est VhœgauHe de Selb, et une variété de mésulype. F. ce mot à l'article Mésotype natrolithe.

(m.) NATROLITE DE SUÈDE. V. Fettstein. (ln.) NATROLITHE DE HESSELKULLA. V. Ekeber-

CITE, suppl. (lN.J

NATRON ( soude carbonatée nfl//ce). Matière saline qui se forme journellement àlasurface des terrains sablonneux, sur- tout dans les contrées méridionales, telles que l'Egypte , la Perse, le Bengale, la Chine , etc. Il est tantôt sous une forme pulvérulente, et tantôt en masses solides et compactes, comme la pierre. Sa couleur estd'un blanc grisâtre, et communément il est mêlé de parties terreuses et de sel marin.

La contrée qui produit le plus de natron, et d'où l'on en tire anuuelleinent une immense quantité , c'est l'Egypte. A vingt lieu,.*s au nord-ouest du Caire, est la vallée des lacs de natron. Ces lacs occupent, dans le milieu de cette vallée , un espace de six lieues en longueur sur une largeur de trois à quatre cents toises : la vallée elle-même a deux lieues de large.

Elle esL séparée du Nil par un plateau de dix lieues d'éten- due, dont le sol est en général une pierre calcaire coquillière, qui souvent se montre à découvert.

Pendant trois mois de l'année, de nombreuses sources d'eau douce coulent dans la vallée des lacs par sa pente orientale , qui est du côté du Nil. La pente opposée n'en fournit point du tout , et il est probable que celle qui coule de la pente orientale vient du Nil à travers le sol du plateau. Cette eau s'évapore ensuite , et plusieurs de ces lacs demeurent entiè- rement à sec. Ils n'ont , en général, que très-peu de profon- deur : celui qui a été le plus spécialement observé n'avoit qu'environ un pied et demi d'eau vers son milieu.

Ces lacs contiennent trois espèces de sels, du carbonate de soude ( ou natron ) , du muriate de soude ( ou sel marin ) , et du sulfate de soude ( ouselde Ghinber); et il est remarquable que quelquefois le même lac contient ces selsséparément. Sa partie orientale fournit du natron , sa partie occidentale n'a que du sel marin.

N A T .3;

Et lorsque ces deux sels se trouvent dissous dans les mêmes eaux , c'est le sel marin qui cristallise le premier , ensuite le natron ; de sorte qu'au bout de quelques années, il devroit y en avoir plusieurs couches alternatives.

J'ai observé précisément les mêmes phénomènes dans les lacs salés de Sibérie; mais comme chaque année les sels étoien t complètement dissous , il ne pouvoit se former plusieurs cou- ches du même sel ; et soit qu'on enlevât ces sels ou qu'on n'v touchât pas, la quantité n'en étoit jamais ni moindre ni plus considérable.

Quoique le carbonate de soude soit très-sujet à tomber en cfflorescence , ce qu'on attribue à la perte de son eau de cris- tallisation , néanmoins en Egypte , l'extrême sécheresse devroit enlever plus qu'ailleurs l'eau de cristallisation de ce sel , on voit, au contraire , qu'il forme des masses tellement solides, qu'on en bâtit les maisons du pays, comme si c'éloit de la pierre. Il existe même un ancien fort dont l'enceinte , flanquée de tours, est construite avec ces singuliers matériaux. ( Journ. de Phys.y prairial et messidor an 7. ) Voyez Lacs et Soude. (Pat.)

NATRON. C'est par ce nom et par celui d'alcali minéral, que les Allemands, les Anglais, etc., désignent la Soude , parce que cet ancien alcali, considéré maintenant comme un oxyde métallique, est la base du natron d(.'s anciens , c'est-à- dire de la Soude carbonatee. F. ci-dessus Natron , et ci-après Natrum. (ln.)

NATRUM. Avant que la chimie eût une nomenclature régulière , et qu'éclairée par l'expérience elle fût parvenue à distinguer exactement les substances , on voit que la même dénomination avoil été donnée à plusieurs substances très-dif- férentes ; ainsi , le nom de nairitm , particulier à la Soude carbonatee^ a été appliqué à beaucoup de variétés de rhaux carbonatee cristallisée , de haijte sulfatée , de chaux sulfatée , et de magnésie sulfafée. C'est principale nnent Linnseus qui a con- tribué à augmenter la confusion. Il nommoit natrum terrestre , la soude carbonalée , et natrum de fontaines la magnésie sulfa- tée. Son natrum suillum est la pierre de porc. V. ce mot. (LN.)

NATSIATUM. Il est probable que c'est le M en i sperme COQUE LEVANT, qui esl figuré sous ce nom dans Rhéede.(B.)

NAT'l'BLACKA. En Smolande on appelle ainsi les Chauve-Souris, (desm.)

NATTE b'ITA.LIE. L'un des noms marchands d'une co- quille du genre Cône, Conus iessulatus. (desm.)

NATTK DE JONC. Coquille du genre Telline , la ieliine verge, (b.)

a38 N A T

NATTER BLUME ( fleur de couleuvre ). Nom alle- mand du hMiiF.T\. (^polygala vulgaris) {l^.)

NATTERKRAUT. (Herbe à vipère ). L'OrPin dseflufn telephium ) , une ScoRZONÈRE ( scorzonera kumi'lis') , la NuMU- ■LMVxE (^/ysimar.hiu numularia), et la ViPÉRINE (ec/««/ra pulgare} portent ce noui en Allemagne, (ln.)

NATTER WURZ. Nom allemand, commun à la Bfs- TORTE, au GouET commun et à d'autres plantes dont les ra- cines ont élé comparées à des serpenspour leurs formes, (ln.)

NATTIER. C'est le nom des Baroottiers {imhricana , Linn. ) , réunis aux Mimusops par quelquesbolanistes. (b.)

NATURALISTE. L'on a long-temps considéré le natu- ralisle comme un de ces hommes fuliles , toujours courbé sur une mousse , ou examinant un insecte au microscope , enjpaillant un oiseau , et remplissant ses poches de cailloux. On s'est imaginé qu'il suflisoit, pour acquérir ce titre , d'en- tasser une foule de pierres , de coquilles , de plantes et de peaux rembourrées sur des rayons, de débiter quelques mol» grecs et latins sur chaque objet , d'avoir beaucoup de mé- moire sans jugement, de savoir exactement la forme des pattes d'une mouche ou la longueur des pennes d'un oiseau , et rien de plus. Le vulgaire des hommes , et même la popu- lace des savans, ne voit rien au-delà, parce qu'elle n'iroit jamais plus loin elle - même dans l'étude de la nature. Ce n'étoit pas ainsi que la considéroient jadis les Aristote , les Théophraste et les Pline ; ces hommes de génie ne bor- noient pas uniquement leurs regards à des objets d'un aussi foible intérêt. Ce n'étoit pas aussi sous ce point de vue que Jean Rai, Charles de Linnseus , et le sublime Buffon , con- temploient l'Histoire naturelle ; ils sentoient trop combien il éloit nécessaire de s'élever à la hauteur de la nature , de pénétrer ses grandes et profondes lois, d'envisager son ensemble , et de borner l'extrême multiplicité des détails lorsqu'ils ne conduisent à aucun résultat utile. 11 ne faut accorder à chaque objet que l'importance qu'il a dans le système du monde , le voir tel qu'il est, et ne point l'appré- cier au-dessus de sa véritable valeur.

L'homme lui-même , sacrifiant sa raison à son orgueil, se regarde comme le rival de la nature. Dans Tintempérance de son amour-propre , il se met hors de rang , et distribue arbi- trairement les places à tous les êtres ; il s'arroge le droit de classer leur mérite , et prétend tout dominer avant de se connoîlre lui-même. Mais l'homme n'est , dans le vrai, que le premier , et peut-être le plus malheureux des animaux. Est-ce d'une foible lueur de raison , qui s'éteint au vent des passions, que nous pouvons nous enorgueillir ? A quels litres

N A T ,39

oserions-nous donner à la nature toute-puissante les entraves de nos méthodes , et borner, dans nos étroites combinai- sons , son immensité? Sachons donc reconnoître toute notre foiblesse , avant d'apprécier le rang de chaque être ; appre- nons à régler nos vues d'après notre propre position ; car , si nous sommes presque anéantis devant la majesté de la nature, que seront pour elle les êtres moins parfaits que nous ?

Suspendus entre l'abîme de l'immensité et du néant , et épouvantés de notre foiblesse, qu'est l'homme, en effet, être microscopique jeté au milieu des soleils qui peuplent l'empyrée ? Que sont les sociétés humaines , leurs humbles grandeurs, la fortune , ou même cette rumeur qu'on appelle renommée, en comparaison des mondes , des cieux et de ce fleuve intarissable de générations qui renouvelle tout sur la terre ? Nous ne voyons pas que nous ne sommes rien dans cet univers ; qu'un instant nous crée , un instant nous détruit pour l'éternité.

Quand, du haut d'une montagne , on contemple nos habi- tations , nos villes , nos palais , et toutes ces fourmilières hu- maines , auprès des vastes campagnes , des rochers gigan- tesques , de l'étendue des mers , de l'immensité des cieux , que nous sommes nuls en présence de lanaîure! Nos plus hauts édifices ne sont que des taupinières à côté des Alpes , des Py- rénées; nos domaines, nos provinces , nos empires, sont de bien petits espaces en comparaison du globe. Nous cultivons à grands frais dans des serres les plantes étrangères les plus curieuses , nos ménageries possèdent à peine quelques ani- maux , et nos viviers quelques poissons ; mais les serres, les ménageries , les viviers de la nature sont bien autres: la zone torride est une vaste serre pleine de végétaux rares , et ré- chaulTée par le soleil au lieu de nos foibles fourneaux ; ie.s quatre parties du monde sont une assez grande ménagerie d'animaux de toute espèce; et l'Océan est le vivier immense dans lequel la nature se plaît à nourrir des millions de pois- sons et de coquillages. En place de nos cabinets de minéra- logie , de minces cristaux sont rangés , étiquetés , placés sur des rayons , la terre nous ouvre ses larges entrailles se forment l'or et le diamant , les chaînes de montagnes nous offrent d'assez beaux groupes de cristaux , les vol- cans, les rochers, les couches terrestres, les profondes mines nous présentent d'assez riches échantillons, tout n'est pas mis sous verre et hors de la portée de la main comme dans les musées , mais chaque homme peut choisir à son gré. Voilà la nature; elle ne s'emprisonne point dans la boutique d'un savant ; elle ne se cache poiul dans les livres , les journaux ,

a4o N A T

les dictionnaires ; mais elle est en tous lieux , elle se dévoile aux yeux de quiconque la cherche dans ses demeures étt;r- nelles , dans les solitudes profondes et ignorées elle aime à conserver ses secrets et à enfouir ses mystères. Cen'estpoint en examinant les animaux empaillés, les plantes collées dans unherbier, lespoissons plongés dans de l'esprit de vin , qu'on pourra reconnoître tous les êtres animés , qu'on pourra s'ins- truire de leur vie , de leurs mœurs, de leurs amours , de leurs charmantes harmonies entre eux. C'est ainsi qu'on éleindroit au contraire dans les cœurs l'amour de la nature , en ne nous montrant que des cadavres.

Si Ton veut approfondir lapuissance et la grandeur de cette nature , il faut donc connoître combien nous sommes foi- bles et petits devant elle, combien nos œuvres sont mesquines et misérables devant les siennes , combien nous somaies pas- sagers, et combien elle est durable. Que pouvons-nous lui opposer ? Quel homme organisera jamais un seul ciron vivant avec tous ses rtiembres, ses veines , ses jointures , ses yeux , ses viscères? Qui de nous fera lui même croître , engendrer le moindre brin d'herbe que nous foulons aux pieds ? Malgré tant de recherches et d'efforts pour prolonger notre exis- tence, de combien de jours pouvons-nous accroître notre vie? Les rois meurent et pourrissent aussi bien que les plus im- parfaits des animaux. Combien de millions d'hommes , jadis si puissans dans ce monde, sont ensevelis aujourd'hui dans la terre , et foulés aux pieds sans être connus ! Tous les hom- mes de notre âge, toute la multitude qui peuple actuellement nos cités, nos campagnes, et les diverses régions du globe, seront, dans peu d'années, couverts de terre, sans que les générations futures s'inquiètent d'eux ; et cependant la na- ture subsiste toujours ; elle nous voit couler sur la terre comme l'eau d'un fleuve qui va s'engloutir dans l'Océan. Mais on ne jette pas l'ancre dans ce fleuve de vie ; les générations ne sont rien , les espèces seules soût intarissables : l'individu s'évapore comme la goutte d'eau ; ses élémens rentrent dans le commun réservoir de la matière vivante , pour former d'autres êtres ; noire vie ne nous appartient pas , nous n'en sommes que les usufruitiers ; nous la léguons à nos descen- dans , comme nous l'avons reçue de nos pères.

C'est donc en se plaçant sous ce vrai point de vue qu'il faut considérer la nature , toujours immense , majestueuse, souveraine de tout , gouvernant tout , donnant la vie et le mouvement à la matière , brillant sans cesse de jeunesse et de fécondité, également intelligente et sage dans ses œuvres, et régnant moins par la contrainte delà violence que.par l'at- trait du plaisir.

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Cependant , cet aspect de grandeur et d'infinité qui ter- rasse si puissamment l'orgueil humain , sera-t il une source éternelle d'humiliation et de découragement pour le natu- raliste, le véritable philosophe? Tout au contraire. Sil fut donné, sur ce globe , une destination haute, ou, pour mieux dire, héroïque et céleste à la première des créatures, on n'en trouvera nulle autre plus fortunée et plus glorieuse que la conlemplalion de la nature , que l'élévation de riuteliigence vers son sublime auteur. Quel noble spectacle , en effet , de voir l'homme relevant de la poussière de la terre , ce front rayonnant de génie , parcourant de ses regards Timmensité de l'horizon .P C'est un être passager, sans doute , au milieu de tant de splendeur et de jouissance , sous le soleil ; mais un être capable d'élancer sa pensée jusqu'aux abîmes , jus- qu'à I'Etre hscompréiietssible! Quelle magnanimité à cette créature si foible , si nulle , de percer les voiles éclalans des cieux, et de dérober dans ses profonds calculs, les secrets de l'avenir! Quel triomphe , pour un être si borné , de se voir un instant de sa vie. le brillant miroir vient se réllé- chir l'univers; le roi couronné , devant lequel tous les êtres de la création doivent s'abaisser et fléchir ? Qu'il seroit indi- gne de notre rang , de méconnoître notre empire et les augustes devoirs que la nature nous propose ! Oui , s'il est dans ce monde et pendant cette courte vie, une oc- cupation vraiment haute et glorieuse pour l'homme , c'e§t celle de connoître et nous-même et ce vaste univers qui nous environne ; c'est de sortir de cette bassesse originelle et purement animale nous fûmes placés à notre nais- sance ; c'est de nous élever sur le trône nous appelle la nature , en nous offrant pour sujets tous les êtres qu'elle prodigue avec tant de magnificence , sur ce globe , notre antique conquête et notre perpétuel héritage.

Et que seroient, auprès de ces ravissantes contemplations, les misérables intérêts de la société , dans laquelle chaque homme se trouve empilé , froissé , contraint en tous sens , et souvent avec tant d'injustice .'' Si une âme un peu élevée ne dédaigne pas l'estime de ses contemporains ; si elle aspire aux suffrages désintéressés et équitables de l'avenir, elle ne place pas son bonheur dans les dons de l'opulence ; elle ne s'abaisse point à mendier lâchement les décorations futiles de la vanité. On peut croire sans orgueil que le génie de Linnseus étoit supérieur à ces titres honorifiques trop sou- vent avilis sur la poitrine des hommes médiocres. La vraie science , comme la vertu , au défaut des récompenses exté- rieures , en trouve d'Immanquables dans sa propre con- science ; elle n'a pas besoin de trône; mille rois obscurs sont

XXII. ,(j

a4a N A T

ensevelis dans la poussière de l'oubli , et des noms éternels de simples amis de la nature traversent les âges , par la seule puissance qui ne soit pas empruntée. La nature , à la longue , détruit et renverse les pyramides et les palais , monumens d'un pouvoir qui ne vient pas d'elle; mais chaque printemps, elle renouvelle ses fleurs parfumées , fidèles au nom de quel- ques anciens admirateurs de ses ouvrages ; sans cesse on verra fleurir avec gloire la plante de Tournefort ou de Césalpin ; les frères Bauhin vivront unis d'une éternelle amitié dans le feuillage de l'arbre qui leur fut consacré ; tandis que les arcs de triomphe des conquérans écroulant de vétusté , vont cacher sous la fange la honte de leurs fureurs guerrières , et le sang des peuples massacrés qui les cimente à regret.

Les sciences naturelles demandent à quiconque veut em- brasser leur étude avec un heureux succès , l'esprit de patience et d^ observation , F amour ardent et infatigable de la vérité. Bientôt le sincère ami de la nature se verra récompensé de son zèle ; ses idées s'agrandiront ; de nouvelles vues s'ouvrant devant lui , dévoileront à ses regards enchantés une carrière infinie de merveilles, comme s'il entroit dans les sanctuaires célestes resplendit le trône même de la Divinité. Heureux à l'as- pect de tant de prodiges, marchantsurla terre comme dans cet Eden délicieux, l'on dit que vécurent nos premiers pères , il retrouve dans chaque fleur un agréable souvenir et un doux tribut ; en chaque animal , une créature qui lui rappelle ses instincts curieux, son utilité, ses harmonies avec d'autres êtres ; en chaque minéral, soit un bienfait , soit une combi- naison précieuse , soit un objet intéressant pour la société humaine. Le naturaliste ne sauroit faire un pas sur ce globe ^ sans recevoir en quelque sorte l'hommage de toute la créa- tion ; il s'avance comme en triomphe au milieu de ses heu- reuses conquêtes , et de son Immense empire, Connoissant tout, il ne redoute plus rien , puisqu'il sait éviter ou prévoir le danger. Il semble que Virgile ait tracé , d'après le philoso- phe naturaliste , le plus beau des portraits :

Félix qui poluit rerum cognoscere causas, Atque mctus omnes et inexorable fatum Subjecil pedibus , strepitumquc Acheronlis avari 1 Illum non populi fasces aut purpura regum Flexit

Qu'un tel génie me paroît au-dessus des grands du monde, dans sa modeste destinée ! Comme il s'élève au faîle , en

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se dégageant des intérêts qui tourmentent les malheureux humains !

Sed nil dulrius est cjuàm benè munifa tenere Edita doctrioâ sapienlum templa serena : Despicere undè qiieas alios, passimque videre Errare , atque viam palantes quaerere vitae : Certare ingenio , conlencJere iiobilitate ; Noctes atque dies niti prseslante îabore Ad summas emergcre opes rerumquu poliri.

LucRET. Rer. nat. Ub. 2.

Que les autres hommes se prosternent devant la puissance et la fortune ; que dans des chars dorés ils se diiputent à la course les honneurs et les rangs , comme dans la carrière olympique ; l'ami de la nature leur envie-t-il quelqu'une de ces faveurs ? Non , sans doute ; il préféra toujours de cultiver les hiens de l'âme et les dons de Tintelligence ; iis peuvent seuls relever cette condition mortelle , en elle même foible et basse jusque sous la pourpre et les couronnes , quand elle n'est point ornée de vertus ou d'une raison épurée. Toujours l'étude de la nature eut l'heureux privilège de favoriser le développement du génie , parce qu'elle est la source de tout ce qu'il y a de grand et de vrai dans le monde. L'on a tou- jours vu la sagacité ou l'art de découvrir les rapports éloi- gnés, s'accroître nécessairement par les recherches d'his- toire naturelle ; l'esprit de méthode indispensable pour con- server dans la mémoire une infinité d'objets , acquiert une facilité merveilleuse par cette étude ; aussi la plupart des na- turalistes deviennent les plus savans entre les hommes qui s'occupent des sciences, pour l'ordinaire. Ils passent de bien loin ceux-ci , lorsqu'il s'agit d'apprendre , à cause de l'art des classifications qu'ils possèdent. De plus , l'esprit du na- turaliste étant sans cesse occupé de contemplations d'objets variés , extrêmement curieux et agréable? par eux-mêiaes , il s'élève , non moins que l'astronome , à des ywc?, qiài l'en- chantent , qui l'écarlent de toute .:tction ou passion ignoble. Aussi , trouve-t-on rarement le naturaliste nicié .aus les tempères de la société et du monde ; son caractère, fût-il difficile et âpre , s'adouciroit en se remplissant d'une noble fierté dans de si pacifiques recherches ; tandis que l'histoire ci- vile, au contraire, fouillant Timpurjcloaque des vices et des' crimes de l'humanité , aigrit , indigne notre âme par le spec tacle continuel de l'injustice , de la scélératesse , et par l'infortune de la vertu sur la terre. On deviendroit méchant et machiavélique par l'élude approfondie de l'histoire poli-

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tique ; on ne peut que se rendre meilleur dans le sein de l'histoire naturelle , au milieu des amours des animaux et des fleurs. Qu'il est doux de se tresser d'immortelles couron- nes en récompense des découvertes que nous promet cette merveilleuse science !

Juvatque novos decerpere flores însîgnemque meo capiti peler e inde coronani , Uiidè priùsnulli velarint tempora niusae.

Dans l'histoire naturelle , comme dans toutes les science» de faits , il y a deux ordres de connoissances : le premier ordre est celui qui se borne à la simple description des objets physiques , qui fait l'exacte énumération de toutes leurs par- ties, qui détaille leurs formes, leur couleur , l'arrangement de leurs pièces , etc. ; il est d'abord indispensable , puisqu'il faut connoîlre les objets avant tout. Le second ordre est ce- lui qui cherche à expliquer les effets de tout ce qui existe , à remonter aux causes des mouvemens et de la formation des différens êtres de l'univers. Ces deux genres de connoissances ne peuvent point être séparés sans que la science soit détruite ; car le simple descripteur ou nomenclaleur, ne s'occupant poivit des principes des êtres, manque le but de la science , comme celui qui établit des systèmes d'explication , sans les fonder sur des faits. Celui qui se contente d'accumuler les cbsei-valions, de décrire les objets, d'en donner un catalogue exact et détaillé, d'après une méthode quelconque , ressem- ble à un homme qui consumeroit sa vie à rassembler une multitude de pierres , de bois de charpente et d'autres maté- riaux propres à construire un édifice, mais qui ne le bâtiroit point, faute de se reconnoître au milieu de tant de choses , et faute de temps pour ordonner son édifice. Au contraire , ce- lui qui voudroit créer des hypothèses pour expliquer la na- ture , sans l'avoir observée, ressembleroit à ces architectes <jni proposent de beaux plans , mais qui , manquant de ma- thiaux pour l'exécution, élèvent leurs édifices avec du plâtre et d'autres substances incapables desoutenir l'effort des temps. Enfin , le seul moyen d'établir un monument durable , c'est de rassembler d'abord une quantité suffisante d'observations solides -, de rejeter celles qui , étant trop minutieuses , ne sont propres qu'à faire perdre du temps , et fonder un vaste édi- fice , sur unebase inébranlable. Mais il faut avouer qu'il n'est donné qu à peu d'hommes de réussir dans ces deux genres , la plupart des autres tombant dans l'un de ces extrêmes, sans s'inquiéter de ceux qui pensent autrement. Ainsi , les noraen- clateurs regardent crux qui veulent expliquer les effets, comme des visionnaires, et les esprits philosophiques méprisent pour

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ïa plupart ceux qui se bornent aux simples faîls. Tous les deux s'écartent également du but qui se trouve dans la réu- nion (le ces deux genres de connolssances.

En effet, la nature agissant pour une fin déterminée , si le naturaliste perd de vue ce but , il méconnoît le principe d'or- dre , d'équilibre et d'harmonie qui anime cet univers , pour ne s'inîéresser qu'aux apparences passagères et périssables des formes de,s créatures : il s'attache donc à l'ombre plutôt qu'à la lumière. Sans doute il est agréable d'arrêter ses yeux sur la brillante peinture des papillons ou des fleurs; sans doute on peut se délecter dans la variété des formes de tant de créatures qui peuplent la terre , les airs et l'océan ; mais seroit-ce donc la décoration d'un vain spectacle, pour le seul charme de nos regards ? Nous bornerons-nous à l'as- pect des surfaces , et n'essaierons-nous jamais de soulever ces voiles qui nous dérobent tant de mystérieuses magnificen- ces ? Serionf-nous enfin placés sur ce globe un jour, afin de végéter tristement à la manière des animaux, pour consumer les fruits de la terre et nous reproduire , puis périr dans une ignoble destinée , sans avoir relevé nos pensées vers la source éclatante de toutes les merveilles qui nous entourent ? S'il n'est pas donné à notre condition ^mortelle de s'élancer , de notre séjour terrestre, à la pure essence de toute lumière et de toute vérité , ne négligeons pas du moins ces rayons épars qui viennent frapper et comme éblouir nos yeux. Cherchons au sein de la (leur, cette force qui l'épanouit et qui l'anime dans ses amours; interrogeons les cieux et la terre; ils reten- tiront partout d'un commun écho de la Divinité qui remplit ce vaste univers.

Ainsi le naturaliste est l'homme métlitatif et simple , qui cherche à découvrir et admirer les lois de la nature et de son auteur ; qui , s'élevant par de sublimes pensées à la cause première de tous les êtres, adore la main puissante qui peu- pla le monde, qui fit naître le blé et le raisin, qui créa les es- pèces vivantes et détermina les règles de leur reproduction , de leur conseroalion et de leur destrurtion ; il va cherchant par toute la terre, les rapports, les harmonies des êtres, la grande chaîne qui les unit , les facultés qui les distinguent , leurs élon- nantespropriétés et leur admirable organisation; il examine leur utilité par rapport à ses besoins , à ses misères, à ses maladies, pour embellir sa vie , pour lui servir d'alimens, de vêtemens , pour accomplir enfin sa félicité. Sans l histoire na- turelle , point d'économie domestique et rurale , point de vé- rliable utilité dans le monde. Les champs ne seroient ., sans elle , qu'un vain appareil de gloire et de magnificence , un spectacle bientôt fatigant , s'il ne nous inléressoit aussi par

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notre propre utilité, et qui flatteroit seulemeiit Tâme, sans la remplir d'une douce satisfaction. Le commerce lui-même ne peut subsister sans les productions de la nature ; ce sont elles qui font vivre une foule d'infortunés qui périroient exténués de faim, sans les jouissances duluxe, qui font circuler l'argent, qui le tirent de la bourse de Topulent , pour acheter le pain du pauvre. C'est la nature qui nourrit le genre humain , c'est sa première mamelle , et s'il savoit profiter de fous ses dons, s'il étudioit toute sa fécondité , s'il approfondissoit toutes ses intentions bienfaisantes , et sa sagesse , et sa douceur, et sa simplicité , il vivroit content et vertueux, au sein de l'abon- dance et d'une heureuse sécurité. Voyez l'article Cabinet n'HiàTOJRE Naturelle, et les mots Méthode naturelle, Nature , Histoire Naturelle, (virey.)

NATURE (i). Le spectacle des cieux et de la terre ne peut pas être long-temps indifférent aux regards de ^'homme. La parure des continens, la profondeur des mers , les explosions des volcans , l'aspect de la voûte azurée , et ces astres innom- brables parsemés dans son étendue , ont commandé à l'esprit humain l'admiration et le respect; il a se demander les causes de cet univers qui l'entoure , et dont il est partie ; il a voulu remonter à l'origine de tous les êtres , et ses premiers pas l'ont précipité dans l'abîme se perd l'esprit humain.

Que suis-je en effet sur ce globe imperceptible à l'égard de tant de mondes, et perdu dans l'immensité? Si j'interroge la profondeur des deux, qu'est-ce que notre système plané- taire , quelque vaste qu'il soit, auprès de ces milliards de sys- tèmes tout aussi vastes , et que rien ne borne dans l'espace ? Toutes les étoiles fixes que vous découvrez dans une belle nuit d'été, sont autant de soleils entourés peut-être de pla- îièles qui circulent comme dans notre système solaire ; ajou- tez à ces mondes Innombrables, tous les millions qu'on dé- couvre au télescope, et jugez de notre vraie place dans l'uni- vers. Considérez encore que si nous étions dans syrius ^ ou toute autre étoile éloignée , notre vue soulagée par la souslrac- »ion de quelques milliards de lieues , nous offriroit encore des multitudes de mondes nouveaux , par-delà l'infini qui s'étend sans cesse et nous accable de son Immensité ; car la folblessc

(i) Natura qui vient de nasci , ii.iitre , comme q,ijg-t( àe ç-j^ '^f'")-, je suis lu-oduil. La Nature e'ianl runiversalité absolue de tu. lies choses visibles ou invisibles, dans laquelle la Divinilé même ùoit ètie considérée , il ne peut rien y avoir de surnaturel ; il n'y a point de mé(apftjrsiijue , à proprement parler, puisque la nature em- bras.îc tout le possible, tique l'impossible n'existe pas. Mais on nonxrnc métaphybiquc , le monde intellectuel , ou ce qui échappe aux sens mafcriels, quoif^i'il .■.oit récllemeut dans la nature , ou ion produit.

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de nos organes et l'imperfection de nos instrumens nous em- pêchent d'apercevoir ces lointains univers , de cet atome de boue sur lequel nous rampons un instant, pour nous perdre à jamais dans l'océan de la mort.

Et cependant , orgueilleux de nos destinées , nous nous promenons en dominateurs à la surface de la terre , nous nous proclamons les rois du monde et le centre de l'univers, comme si les- astres et ces abîmes de l'espace dont nous avons à peine l'idée, étoient formés pour nous! Un atome qui brille un jour pour se dissiper éternellement dans le com- mun réservoir des élémens, peut- il se persuader que le so- leil qui dispense sa chaleur et sa lumière à tant de globes, soit exprès formé pour embellir son séjour? Cependant les générations s'écoulent comme l'eau à l'aspect de l'astre du jour, et il voit, dans son existence démesurée, les siècles comme des points imperceptibles au sein de l'éternité. A l'aspect de tant de prodiges qui nous environnent, l'homme frappé d'étonnement , tel qu'un ange précipité des cieux , qui aspire à reconquérir son héritage , demande ce qu'il est, d'où vient tout ce qui existe , pourquoi et comment il se trouve lancé dans cet épouvantable abîme de l'infini , à cette époque de l'éternelle durée et à ce lieu de l'immensité des espaces. Ce monde est-il éternel:' Est-il donc nécessaire, l'ouvrage fortuit du hasard ou de la fatalité.'' Mais par quelle bizarrerie étrange , le même homme, honteux d'affirmerque l'aile d'un papillon soit foriyiée sans dessein, pourroit-il sou- tenir que le monde soit le résultat des chances d'un aveugle mouvement? Si l'absurdité de méconnoître un but devient palpable dans les plus petits objets, ne seroit-ce pas immen- sément déraisonner, que de clore les yeux à tant de mer- veilles qui remplissent l'univers ? Combien l'homme s'agran- dit , au contraire , dans leur contemplation !

Ainsi la grandeur de l'esprit humain a racheté cette éton- nante foiblesse du corps par les conceptions de la pensée. Le corps n'est rien , mais l'esprit est devenu en effet le roi de l'univers, et comme s'il étoit une portion de la divine intelli- gence , il a su démêler bientôt plusieurs rapports des lois de tout ce qui existe.

En jetant un coup d'œil sur les objets qui nous environ- nent, au travers de ce désordre apparent qui semble tout confondre, il est facile d'apercevoir l'ordre, l'harmonie, le concert ineffable des êtres qui se prêtent une mutuelle assis- tance , qui suivent des lois invariables , éternelles, et qui , placés chacun dans le lieu qui leur convient, exercent perpé- tuellement les mômes actes et concourent sans relâche au même but. Bien que nous n'apercevions pas toujours la fin

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poi^r Inqueile ils existent et ils agissent, nous reronnoissons un plan raisonné et profondément sage dans tout ce qu'il nous esl permis de connoître.

C'est ainsi que nous remontons à une cause première infi- niment int<'lligenJe, qui adAloul coqrdonneret arranger dans cet univers; car le hasard peut-il offrir jamais des exemples constans de prévoyance et de sagesse semblables à ceux que je découvre dans les animaux et les végétaux, dans les orga- nes de la vie , de la reproduction, de la sensation, du mou- vement , etc.? S'il éloil besoin de démontrer l'existence d'une supretne intelligence, la face de la terre et le dôme céleste l'annoncent à tous les peuples et dans tous les âges. Si Ion ne se rend pas à Tasjx'Cl du grand spectacle du monde el de l'organisation de ses élres vivans, l'on n'est point capable de céder à la voix de la vérité.

Article I.*"" Que V ordre merveilleux de runivers manifeste partout son sublime AUTEUR.

Touiefois dans cet accablement profond nous plongent tant de ténèbres sur l'origine de toutes choses, qui ne s'est pas queh|uefois interrogé avec un secret effroi sur ces éton- nans mystères P Le monde a-t-il toujours subsisté , soit tel que nous le voyons, soit autrement? Doit-il durer éternel- lement, ou bien a-t-il pris naissance à une époque quelcon- que el doil-il disparoîlre t n jour, tel qu'un grand spectacle dont toutes les scènes seront terminées, ou telle que s'éteint la vie des créatures? Il ne nous fut pas accordé de pénétrer dans ces gouffres de ia pensée avec le seul (lambeau de notre raison. L'ne fourmi mesureroit-elle la durée des pyramides égyptiennes?

JNous oserions croire néanmoins que l'existence de l'uni- vers, soit infinie comme la divinité, soit temporaire et pas- sagère, par la volonté d'un créateur, a eu pour but la mani- festation de sa bonté suprême, ainsi que de sa toute-puis- sance. Seroit-il trop téméraire de penser que l'auteur de toute existence a faire participer tous les êtres possibles à la félicité que chacun d eux comportoit , et former nécessai- rement tout ce qui étoit parfait, dans l'espace et dans la durée qui sont ses attributs indestructibles? L'être universel n'a rien pu produire sans raison et rien omettre jamais de ce qui étoit faisable et non contradictoire. Ce n'est pas limiter son pouvoir que de le croire exempt de l'absurde ; ce n'est pas l'accuser d injustice que de reconnoître qu'il dut coor- donner toutesles créatures les unes par rapport aux autres , les faire succéder de la vie à la mort, et de celle-ci à de nouvelles vies, à d'autres métamorphoses, pour que chaque

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êlre profitât à son tour des bienfaits de la reproduction et de l'existence.

On représentera peut être que si la puissance suprême agit toujours nécessairement, si son activité est éternelle et im- muable , ainsi que l'annonce l'uniformité des grandes lois par lesquelles se meuvent les astres et se perpétuent les gé- nérations, cette première force de Tunivers, même en opé- rant tout ce qui est parfait, n'est donc que la nécessité , qu'une faialHé à laquelle tout obéit, comme la pierre qui tombe ou l'homme qui meurt irrévocablement. Or, n'étoit-ce pas, ajoutera- t-on , une condition forcée, que les divers élémens matériels se coordonnassent dans le monde , suivant l'ordre que nous y découvrons, par leur pondération , tout de môme que des particules de fragmens de diverses sortes, agités dans un vase, s'entassent de telle ou telle manière suivant leur conformation .'' Donc le hasard auroit pu constituer aussi né- cessairement qu'un Dieu, un système universel quelconque.

A cette objection ancienne des atomistcs tels que les épi- curiens , les stratoniciens , et d'autres philosophes plus mo- dernes qui n'admettent pas une intelligence ordonnatrice de l'univers, la réponse devient de jour en jour moins embar- rassante, à mesure qu'on approfondit davantage l'étude de la nature. Soutenir qu'il n'y a point de divinité formatrice du monde et de ses créatures, c'est affirmer, comme fai- soient les anciens, que des animaux pouvoient s'organiser spontanément dans la fange ou la corruption; c'est préten- dre aujourd'hui , malgré l'anatomie et le progrès des scien- ces , que l'œil n'est pas construit exprès pour voir ; c'est croire qu'en fondant par exemple tous les rouages d'une hor- loge dans un creuset , il en sortira naturellement des mon- tres étonnamment travaillées et indiquant les heures et les minutes, par quelque force plastique inconnue et spontanée.

Notre intelligence est surtout une démonstration évidente d'un être intelligent ; car , ou l'univers est créé par le hasard , et d'où vient alors que nous ne raisonnons pas au hasard , que nous ne sommes pas formés , en toutes nos parties , avec le désordre du hasard .? ou le monde est créé avec sagesse et raison, et par cela même qu'on raisonneroit pour prouver qu'une intelligence suprême n'existe pas , ce pouvoir de rai- sonner seroit la preuve la plus victorieuse du contraire : s'il n'y avoit point d'intelligence comment raisonneroit-on ? Une fleur se peut-elle former sans germe , et l'homme avoir un esprit sans Dieu '^

Il est de l'essence d'un souverain architecte de n'agir que par des principes uniformes et universels; il seroit contraire à ses attributs de démentir ses propres lois , de ne pas faire

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nécessairement ce qui est le meilleur ou le plus parfait , do n'opérer pour aucune fin , quoique notre foible entendement ne puisse pas connoître toutes celles que s'est proposées le grand Etre. Il n'y a donc nulle dérogation possible à ces lois éternelles, ni miracles réels(i). Les monstruosités, les anoma^

(i) Beaucoup de gens du commun, qui voient certains effet* dont ils n'aperçoivent point les causes , crient au miracle , et calora- nient du nom d'alhe'e , ceux qui , moins crédules, veulent examiner de près les choses, avec doute.

Mais d'abord , pour décider qu'un événement est miraculeux , il faut approfondir les lois et les puissances de la nature ; il faudroll cire parfaitement instruit de la physique, de la chimie, de l'histoire na- ture.Ie , de la médecine ou physiologie, pour soutenir , avec quelque apparence de vérité , que ce/a surpasse les lois ordinaires de la nature; autrement c'est témérité ridicule ; c'est se donner l'alr de connoître que certainement la nature ne peut pas opérer telle chose : langage impertinent, dans quelque bouche que ce soit, d'oser borner la nature, dont nous connoissons si peu la puissance.

Quels sont , en effet , ces crleurs de miracles ? Les plus ignares des hommes, de pauvres vieilles, ou des bigots crédules, qui, n'ayant jamais rien étudié que leur chapelet, prétendent décider, de leur autorité privée, que la nature e>t incapable de guérir telle maladie, de produire tel phénomène, ou tout autre pareil effet. Il n'y a jamais de miracle devant une académie des sciences ; mais il y en a beaucoup dans les taudis de la sottise et les huttes des Lapons; les pays de sorciers et les temps miraculeux sont proportionnés à la stupidité qui y règne, car on n'admet du surnaturel que par ignorance de ce qui est naturel.

Sans doute , beaucoup d'effets nou<i sont inexplicables dans leurj principes , et il est une infinité de causes occultes; mais les traiter de miracles seroit une marque d'imbécillité pareille .i eelle de ces Américains, qui, voyant les Espagnols se communiquer des nou- velles au loin , par des lettres , s'imaginolent que ces carrés de papier éloient ensorcelés par quelque prodigieux art de nécromancie , pour annoncer ainsi, à plusieurs centaines de lieues, ce qui s'éloit passé ailleurs. Les anciens nesavoient pas pourquoi le succin frotté attiroit des pailles; aujourd'hui, par cette science de l'électricité, nous faisons tomber le tonnerre, ou nous le conjurons de dessus nos édifices. Com- bien d'expériences surprenantes de chimie , maintenant vulgaires pour le moindre élève apothicaire, étaient jadis des merveilles qui élonnoienl les Arislote et les Démocrite , ou les plus vastes génies de I antiquité! Qu'aurolent-ils dit des ballons aéroslatiques?

Mais en thèse générale, peut-il exister des effets miraculeux dans .e monde? S'il ne s'agit que de phénomènes, nouvellement observés, oud'événemens singuliers, qui paroissent prodigieux, tout le monde pourra rencontrer des millions de miracles, à proportion de son ignorance ; le savant sera peut-être encore plus frappe que le vul- gaire, dos sublimes merveilles que lui présente toute la nature, parce qu'il saura mieux admirer et mieux voir. Loin cependant de se laisser éblouir, il reconnoitra dans ces faits, de nouvelles ressour-

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lies de forme , ou toute autre déviation de la nature , se rat- tachent encore à d'autres lois générales qui rentrent néces- sairement dans la composition de l'harmonie de l'univers, ainsi que la mort, les maladies, les poisons et tout ce que nous jugeons , par rapport à nous , mal et désordre de la nature.

Nous reconnoissons donc un principe d'intelligence et de prévoyance dans l'univers ; nous le reconnoissons à sesinef-

ces de la nature, d'atlmirables propriétés dans les corps; il élargira le domaine des srierices par des découvertes , ou ramènera ses obser- vations à des faits analogues, antérieurement Connus. Ainsi, les pres- tiges du Magnàf/sme animal sont , pour tout médecin philosophe et instruit, des effets évidens de l'influence de la sensibilité sur l'ima- gination , et de l'empire de l'autorité morale.

Pour qu'il y eût de vrais miracles , il faudroit que la nature inter- rompit ses lois, ou que leur cours pût se déranger, soit au gré d'un homme puissant , soit spontanément. Mais n'est-ce pas un délire que de croire, avec des paroles, ou la simple volonté, transporter des montagnes, et faire tomber la lune sur la terre? Il faut beaucoup de foi pour admettre de tels prodiges , et ce n'est pas sans raison , je l'avoue, que l'on peint cette vertu théologale avec un épais bandeau sur les yeux. On n'en pouvoit pas faire une plus vive satire.

Si l'on comprenoit toute la grandeur et la majesté de cette nature, .si haute et si magnifique , qui, sortie du trône éternel de Dieu, dirige la course des astres et des soleils, dans l'immensité de l'empyrée, selon les lois immuables calculées pendant tant de siècles, on seroit un peu moins prompt à s'imaginer que des patenôtres puissent faire crever dans les champs, des chenilles et des hannetons. La marche éternelle de l'univers se déraugera-t-elle pour que Mahomet grimpe au ciel sur la jument Borak? Il ne seroit pas permis en chaque pays, de douter publiquement des miracles qu'on y admet comme fonde- ment des plus puissantes institutions ; c'est l'unique moyen qu'on ait cru pouvoir employer pour soumettre les esprits, comme si le spec- tacle sublime de l 'univers ne manifi-stoit pas lui-même un témoignage de la divinité, bien au-dessus de tous les prestiges imaginables! Qu'arrive-t-il de cette fausse route? Si !e dévot, pour peu qu'il étudie la physique , vient à douter de la réalité d'un prodige, il se précipite, de dépit, dans l 'athéisme ; car toute sa religion, uniquement fondée sur une base si mouvante qu'est la foi, croule avec elle : au contraire, l'homme qui ne voit point de miracles, mais partout l'ordre magnifi- que du monde , est pénétré sans cesse de la présence d'un être su- prême et créateur, dont il adoie les décrets éternels, dans une profonde soumission d'esprit et de cœur. Aussi, la superstition ca- lomnie et repousse les sciences ; mais la véritable religion avec les sciences, dans les Ne^vton les Linnaeus, prosternoit ces sublimes génies devant les œuvres de la divinité.

Ce seroit trop imiter la lâche philosophie de nos jours, que de ne pas oser déclarer un Dieu et des causes finales manifestes, devant les athées, comme il y auroit une pareille foiblessc à méconnaitrela puis- i-tucede la nature et ses luisinviolabies, devant les Ligolssuperstitieux,

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f;)])îes ouvrages, à sa loutc-puissance , à cette éternelle vo- loiilc qui gouverne l'univers dans le calme, qui, du sein de rinvisiîjiliié, préside à toutes les existences, règne partout, est présente en tous lieux, et à laquelle rien ne peut échap- per dans limmensité de ses lois. Celte première cause ,nous l'appelons Dif.u en la considérant comme principe cl intelli- gence ; nous l'appelons Nature, lorsque nous l'examinons sous les rapports de la production . de V existence et du mouoe^ ' ment de tous les corps de l'univers.

La nature est donc une émanation de la divinité par la- quelle elle gouverne le monde ; c'est en quelque sorte la maia de Dieu, le ministre de ses volontés immortelles. Obéissant aux lois qui lui sont prescrites, elle les suit sans contrainte et sans relâche , ne fait rien en vain , prend toujours la voie la plus simple et la plus courte, travaille sans cesse sur le iTieme plan qu'elle diversifie à l'infini, comme poui' faire preuve de sa prodigieuse fécondité ; elle commence toujours par les plus petites masses et successivement , ne se presse jamais pour parvenir au but qu'elle est bien sûre d'atteindre , puisque le temps ne lui coûte rien; enfin elle ne détruit rien que pour créer de nouveau , elle ne perd aucun de ses avan- tages et aucun des objets qui lui sont confiés. Toujours sim-r pie, toujours variée, toujours féconde, sa marche est cons- tante et uniforme: elle cherche la vie , l'union, la concorde et le plaisir, et cependant elle a besoin de deslruciion pour alimenter son activiié ; elle change et bouleverse tout , elle construit pour abattre , elle anime pour tuer, elle alimente pour faire périr; principe de concorde et d'amitié dans les mondes, elle se repaît de haine et de discordes; elle modifie perpétuellement pour rester toujours la même ; elle finit sans cesse pour recommencer sans cesse : le mouvement est sa vie , le repos est sa mort.

Ce principe de vie anime toute la matière et la gouverne avec une sorte de nécessité ordonnée par le maître des mondes. Soit qu'on s'élance par la pensée dans le domaine des cienx , soit qu'on se promène sur la terre, ou qu'on descende dans les profondeurs du globe et les abîmes de l'Océan, on y ren- contrera la main de la nature , souveraine de tous les êtres.

Toutefois nous n'avons connoissance de ce pouvoir uni- versel qui anime tout, que par ses seuls effets , ses attributs et sa profonde sagesse suivant lesquels il régit l'univers. C'est un centre unique tout se rapporte . dit Pascal ; c'est un cercle dont la circonférence étant infinie , a son centre en tous lieux ; c'est par la foiblesse de l'esprit humain que nous ne pouvons embrasser toute son immensité. Atomes placé*

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entre le néant et le grand tout , nous ne pouvons apercevoir que le milieu des choses, tous les extrêmes fuient et échap- pent à noire vue. L'univers ne nous présente qu'une portion extérieure de sa circonférence ; tout le reste se dérobe à la foibie lueur de rintcUigence. Nous appelons discorde l'har- monie des êtres dont les liens imperceptibles de concorde nous sont inconnus; nous nonmions hasard la direction ina- perçue des choses ; nous prenons pour bornes de la nature , les étroites limites de nos conceptions. Les diverses modifi- cations des mêmes lois nous paroissent autant de lois diffé- rentes ; mie vue dérobée à la nature nous semble expliquer toutes ses opérations. Cependant nous devrions comprendre que le système de l'univers forme un tout unique dont chacune des branches a des rapports mutuels, de telle sorte que, pour connoitre un seul être , il faut les étudier tous, et pour connoître l'ensemble , il faut savoir tous les détails, ce qui est impossible à l'esprit humain.

En effet , dans le monde visible , il existe un ordre , une gradation non interrompue de perfections, une subor- dination hiérarchique, entre toutes les créatures; elles se lient entre elles par des équilibres multipliés ; elles forment une chaîne dont chaque anneau tient à tout, de telle sorte que le moindre dérangement dans «ne partie de l'univers entraîne une foule d'altérations successives, car les effets deviennent causes à leur tour , et les causes ne sont souvent que des effets primitifs qui s'engrènent réciproquement comme les rouages d'une horloge. Rien ne sauroit s'anéantir ni suspendre sa marche sans que le total en souffre. C'est pourquoi tout est nécessaire , tout se concerte et s'appuie ; la partie sert à l'en- semble , et l'ensemble à la partie. La foiblesse particulière fait la force générale, et le mal de l'un est le bien de l'autre.

Ainsi , toutes les natures particulières, comme celles des animaux et des plantes de notre globe , celles des matières brutes ou minérales , ne peuvent être que des systèmes de lois coordonnés d'après l'équilibre plus général de notre sys- tème planétaire, lequel à son tour doit tenir son rang, d'a- près sa pondération, dans le grand ensemble de l'univers. Il faut comprendre ainsi , que toutes choses se proportionnent avec harmonie , soit entre les sphères célestes, soit parmi les productions terrestres" qui en reçoivent l'existence ; celles-ci ressentiroient, par les variations des températures, par le choc des élémens et des saisons , les moindres contre-coups des perturbations de notre système planétaire. L'univers repré- sente donc un corps immense dont les astres constituent des parties ou des membres et dont nous composons les moindres particules. On peut donc concevoir qu'il règne dans leurs

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correspondances une sorte de solidarité, de nécessité fatale, et en même temps une providence réglée dans toute la chaîne des générations et des autres événemens dont le concours maintient la vie de l'univers.

La nature ne peut avoir qu'une seule fin , mais elle y arrive par différens moyens. Chaque membre de Tunivers est formé pour cette fin ; il n'existe pas pour lui-même , mais pour le tout; la nature ne voit que son but , elle n'agit que par des lois toutes générales , et jamais par des principes détournés ou particuliers , comme nous nous l'imaginons par rapport à nous. C'est une illusion mensongère de notre amour-propre de nous donner de l'importance dans l'univers ; nous devrions considérer au contraire que nous ne sommes qu'un foible instrument dont la nature dispose à son gré pour des fins inconnues à notre foiblesse. Comme elle opère avec unifor- mité et constance ; nous pensons qu'elle agit par une néces- sité inévitable , sans connoissance , sans volonté , et par l'ef- fet de la fatalité, sans songer que ses bornes sont assignées par la toute-puissance , et qu'elle n'est que l'instrument de ses volontés et de sa haute sagesse.

On peut donc dire avec raison qu'une puissance animée et parfaitement intelligente a pénétré dans tous les membres de l'univers. Toutes les portions de ce corps universel , du grand Ijout , n'ont d'existence , de mouvement et de vie que par cet esprit général qui anime l'ensemble. Si quelque partie pou- vait se séparer , elle seroit privée de cette force générale , de cette âme céleste et intérieure, de même qu'un membre qu'on sépare du corps humain se putréfie et se décompose.

On peut même comprendre que s'il se trouvoitdans l'uni- vers un seul atome privé absolument de cette force de vie , il seroit éternellement inaclif, incommunicable ; il ne se prê- teroit à rien , ne se combinerolt à rien , et porteroit obstacle à toute la nature. Sans rapport avec quoi que ce soit , on ne pourroitni le voir , ni le toucher, ni le sentir; il serait isolé, indépendant , incompréhensible ; il n'appartiendroit qu'à Dieu seul de l'animer. Mais puisque rien de mort ne peut émaner de la source de vie , tout étant émané de Dieu , doit participer de ce principe.

En effet, la matière, c'est-à-dire cet assemblage de tous les corps qui composent la masse du monde , nous semble par elle seule dépourvue d'activité et privée d'énergie. S: nous supposons un espace vide au-delà de l'univers, et que nous y placions de la matière, à l'abri de toutes les lois de la na- ture ; il nous semble qu'elle restera éternellement dans le même état , sans action, sans vie , sans ressort. Le repos est «le son essence, tout mouvement lui vient des chocs esté-

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rieurs, ou de Tâme du monde; elle n'a d'autres propriélés essentielles, indestructibles, que l'étendue, l'impénétrabi- lité , la figurabillté et l'inertie ; toutes les autres lui sont étrangères. La pesanteur elle-même ne paroît pas inhérente àla matière, puisque cette force de gravitation qui s'accroît à proportion de la proximité des corps entre eux , diminue et devient nulle enfin à de vastes distances. Ainsi le globe ter- restre, placé hors des attractions de toutes les autres sphères dans un éloignement extrême, ne peseroit plus , puisque toute sa pesanteur étant dirigée au centre de ce globe, tout tendant à ce point unique, il n'y auroit ni dessus , ni dessous , et au- cune raison pour que cette sphère tombât ou se remuât en quelque sens que ce fût. Mais l'existence de toute matière nous semble contemporaine de celle de la nature , et peut- être même antérieure, car son anéantissement , comme sa création, nous paroissent des actes qu'il n'appartient qu'à Dieu seul d'opérer.

Article 1 1. Des principes des choses , ou de la matière et du mouoemeni.

Si nous formons une masse unique de tous les corps de l'univers, un chaos de toutes les substances et de toutes leurs propriétés ; si nous considérons abstractivement l'ensemble de tous ces principes , nous aurons l'idée de la matière. Cette idée est très-complexe , obscure, à cause de son étendue ou plutôt de notre foiblesse, et de Tinnombrable variété des prin- cipes dont elle est le résultat; de vient que la philosophie l'a autant illustrée par ses erreurs et ses écarts que par la sublimité de ses découvertes.

La matière est ainsi un assemblage confus , un mélange hétérogène des propriétés les plus dissemblables , des élé- mens les plus ennemis, des objets les plus disparates , de;s principes de vie , et des semences de mort , enfin de toutes les contrariétés de la nature. Il est donc nécessaire de classer et de séparer ce chaos en substances similaires et homogènes entre elles, que la science humaine n'est point encore parve- nue à décomposer, s'il est possible toutefois de les décom- poser. Ces matières simples et homogènes sont les élémens ^ non pas ces quatre grandes classes de matières que l'ancienne physique désigna sous les noms de terre ^ d'eau^ d'air et de feu ; car on est parvenu à découvrir que ces prétendus élé- mens étoient encore composés de matières plus simples qui seront peut-être décomposées à leur tour en élémens dans la suite des âges.

Il est donc impossible aujourd'hui de fixer le nombre des élémens qui composent la matière en général , et cette con-

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noissance surpassepeut-être les forces de l'esprît humain; maïs du moins nous reconnoissons quelques lois Irès-générales dans la nalure , et qui gouvernent lous les corps de l'univers.

Les premières de toutes, celles qui semblent inhérentes à la matière, bien qu'elles soient un présent de la nature , sont les lois de l'allraction oude la pesanteur. Tantôt agissant à de grandes dislances, elles font circuler les mondes autour du soleil, et déterminent l'étendue de leurs ellipses ; tantôt cir- conscrites dans les bornes des afiinités chimiques ou des aggré- gations, la masse des corps entre comme élément, et doit être évaluée dans la masse totale des forces; ainsi ces lois s'étendent généralement dans toute la matière de l'univers.

La seconde loi est celle de la raréfaction qui contrarie sans cesse la précédente en écartant les molécules des corps que l'attraction tend toujours à rapprocher. La chaleur ou le feu est le principe de celte force universellement répandue dans le monde; peut-être se lie-l-elle par des rapports inconnus aux premiers actes de la matière; peut-être devient-elle le germe secret de la vie des corps organisés. Au moins elle semble se confondre avec la lumière et le (luide électrique (i) qui jouent sans doute un très-grand rôle dans l'univers , qui allument la foudre , qui pénètrent la terre, la vivifient, et sont les prin- cipaux instrumens des métamorphoses d^ tous les corps. Peut- être le magnétisme dépend-il originairement des mêmes cau- ses , mais modifiées et qui tiennent aux lois fondamentales du inonde. Il se fait un échange perpétuel de lumière dans tout l'univers; car celle qu'envoie le soleil aux planètes se réflé- chit sur d'autres astres , ou se disperse dans l'étendue. Rien ne pouvant se perdre dans un système tout est soumis à l'at- traction, tous les rayons que le soleil lance doivent revenir à quelques astres; car s'il en envoie jusque vers les autres so- leils ou étoiles fixes , elles lui en rendent aussi tout autant. La lumière , ou pour mieux dire l'élément du feu , est donc le principe le plus abondant , le plus perméable de l'univers ; il remplit tous les espaces beaucoup plus que nos yeux ne nous le font voir, puisque les animaux nocturnes trouvent beaucoup de lumière encore dans les ténèbres mêmes.

Les autres lois générales de la matière sont celles du mou-. veinent.Par la première: chaque coqys persévère de lui-même et par sa propre inertie , dans son état de repos ou de mouvement rectiligne uniforme , à moins que des causes étrangères ne le forcent à changer de direction ou délai de repos. Dans la seconde loi , tout change- ment qui arrive dans le mouvement est toujours proportionnel à la force qui le produit , et agit dans la direction suivant laquelle cette force opère. Par la troisième loi, la réaction est toujours cun-

(i) Le fluide galvanitpje n'eu est (ju'une niodificalioa»

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tfdtre et égaie à faction ; ou pour s'exprimer avec plus «l'exac- titude, les actions de deux corps lun sur Vautre sont mutueiiement égaies, et de directions contraires. Enfin , les propriétés géné- rales de toute matière, outre celles dont nous avons déjà parlé, sont la divisibilité , la porosité, la condensabilité , la compressibilité , l'élaslicité et la dilatabilité.

Lorsque nous voulons remonter aux causes de la formation des êtres, la plupart des faits positifs ne nous sont connus que par leurs résultats et par les inductions qu'on en peut ti- rer , puisque nous n'avous aucun témoin contemporain de ces grands événemens. Les causes premières sont d'ailleurs obscures par elles-mêmes , quoiqu elles soleïit les plus impor- tantes de toutes. Ce n'est certainement pSs Tétude d'une fouie de détails minulieuxqui avance l'histoire naturelle, ils la sur- fchargent plutôt d'un luxe inutile ; mais combien sont plus di- gnes d'être observées les grandes lois qui ont formé cet uni- vers ! Que nous serviroil de nous traîner sans cesse dans le m^me cercle de connoissances, sans chercher à sortir de celte prison terrestre , sans nous élever vers le bras tout-puissant qui donna la vie et le mouvement à la matière! J'avoue qu'au défaut de plusieurs connoissances précises que nous ne pour- rons jamais acquérir, il faut bien recourir à quelques induc- tions philosophiques , et admettre les principes les plus rai- sonnables que nous puissions découvnrpar la pensée. Mais ou- tre que ces inductions et cesprincipes ileviennenl des raisons admissibles quand il faut pénétrer par les seules voies de la mé- difalion'dans le sanctuaire mystérieux des causes premières, il n'y a point d'autre moyen pour s'élever à leur connoissance : il faut donc en user si Ton veut hâter les progrès dans l'élude delà nature. On doit faire observer encore à ceux qui rejet- tgroient ce moyen, qu'ils se privent d'une ressource très- puissante pour l'avancement de la science , et qu ils dimi- nuent leurs forces sous prétexte de donner moins de prise aux erreurs. On ne doit prendre les hypothèses que comme des moyens approximatifs , des lâtonnemens pour parvenir à la connoissance , tout comme on n'établit des méthodes que pour tâcher de saisir la chaîne naturelle des êtres. Il ne faut pas même conclure que toutes les hypothèses soient fausses, puis- qu'elles approchent plus ou moins des hautes vérités ; el- les présentent aussi dans un plus grand jour la masse de nos connoissances, et les font envisager sous de nouveaux points de vue. Les vérités qu'elles offrent se prouvent d'elles- mêmes par l'impression vive et lumineuse qu'elles font sur notre âme. L'on ne doit point les juger isolément , mais con- sidérer la chaîne qui les lie entre elles et qui en forme un édi- fice où tout doit se tenir , parce qu'en présentant une à une

XXII. 17

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les pierres d'un Larnttcnt démoli, Ton ne pourroit jartiais

donner à l'esprit Tidée de son ensemble.

Article IH. De rUniocrs en gênerai.

Nous concevons deux principes dans l'univers ainsi que dans l'homme, V esprit al \a. matière. De'rfteme qu'un corps d'homme n'agiroit point s'il n'avoit pas un principe intérieur de vie qui le fit mouvoir , ainsi la matière demeure inerte et passive sans cette âme qui lui communique son aciivilé Kt tomme c'est la force vitale qui organise 1 homme ou l'animal, c'est aussi l'àuie du mon<ie qui organise l'univers. Chaque membre d'un homme ou d'un animal ayant donc sa somme de vie , de sensibilité, qui préside à sa nulrilion et à sa répa- ration , il est nécessaire aussi que chaque partie de l'univers possède une quantilé suffisante d énergie pour la faire subsister; autrement elle scroil frappée de mort, comme un membre de- venu paralytique, et se dissoudroitdans les abîmes de l'espace.

La matière , dans le principe des choses , éloit morte , comme on le peut croire, avant qu'elle eût reçu la semence de vie , ou plutôt avant qu'elle se fiU imprégnée de la divi- nité. Elle devoit former un amas vaste d'atomes élémentaires qui remplissoient tout l'espace. C'étoit un océan infini de poussière presque invisible et de nature simple , comme la ma- tière éparse des nébuleuses de la voie lactée , <jui demeu'oit dans un calme éternel, puisqu'il n'avoit encore reçu aucune propriété , et Ton n y trouvoit sans doute ni terre, ni eau, ni air, car ces substances sont déjà des corps composés. L'es- prit de vie, qui est Dieu, pénétrant dans ce chaos, put y établir l'attraction. Alors il dut se former des combinaisons entre les diverses parties de matière ; elle dut se déposer au- tour de plusieurs centres de pesanteur , les plus grandes mas- ses attirant à elles les plus petites. C'est ainsi que durent se former les astres, et d'abord la substance lumineuse des soleils et des étoiles fixes au sein d'une vaste mer d'atomes, onde Uuides à létat de gaz, de vapeurs. La force de gravitation établit autour de ces centres de la matière lumineuse , ou de ces soleils, des espèces de courans circulaires , comme ces trombes électriques ou tourbillons qui agitent notre atmo- sphère. Alors chaque planète voyageant dans l'espace , se grossit de toutes les matières éparses qu'elle renconiroit dans sa route, de même que ces avalanches de neige qui, se déta- chant du sommet dune montagne , s'attachent toute la neige qu'elles trouvent dans leur chute. Les grandes planètes ont même entraîner dans leur course les petites planètes, et en ont formé autant de satellites; ceux-ci paroissent être plus nombreux à mesure que l'ellipse décrite par la planète pria-

f-ipale est plus vaste ; ainsi , la terre n'a qu'un satellite; Ju- piter en a quatre; Saturne sept et un double anneau; Uranus plusieurs, etc. D'ailleurs les planètes doivent être plus grosses à niesure qu'elles décrivent de plus grands cercles , parce qu'elles ont trouver plus que les autres de ces matières éparses dont elles se sont augmentées; c'est eu effet ce qu'on remarque dans notre système planétaire ; et comme entre Mars et Jupiter, il se trouvoit un espace double de celui qui existe entre les planètes inférieures, ou la place d'une sphère, on a découvert, aucommencement de ce siècle, quatre petites planètes ou astéroïdes (Cérès, Pallas, Juaon et Vesîa), qui tournent dans la même orbite, etmôme s'entrecoupent pardes nœuds ; ainsi elles équivalent aune seule planèie , dont elles semblent être les fragmens. Leur petitesse ne les rt^iul visibles qu'au télescope, et l'attraction de Jupiter cause des pertuba- tions dans leur orbe, d'ailleurs grand et excentrique.

Si l'on suppose que parmi cette atmosphère infinie d'atomrs primitifs dans l'espace, et réduits en vapeur ou en gaz , le lluide électrique a établi des trombes d'une très-vasle éten- due , comme on en voit de petites dans notre atmosphère , la matière aura reçu un mouvement circulaire dans la mêa;e direction , et aura formé le système planétaire. Au centre f'.e ce système, il doit donc se trouver un foyer d'éjcctricité , comme il en existe dans les tourbillons. Ce foyer est le soleil: .car nous pouvons reconnoître, avec de célèbres physiciens et plusieurs astronomes , que cet astre est une masse énorme de feu électrique , qui a le même éclat et qui est peulclre seul capable de produire tous les effets que nous voyons opérer à l'astre du jour, tels que l'attraction et la répulsion. Cette rotation de toutes les planètes dans un même sens et dans le même plan , autour d'un soleil, annonce certainement qu'elle est le résultat d'une impulsion unique ; et si l'on veut s'en tenir aux causes physiques , nous ne connoissons guère dans toute la nature que le (luide électrique qui soit capable d'impri- mer ce mouvement. Le principe de l'attraction s introduisant ainsi dans l'atmosphère des atomes qui composent celte grand*; trouibe solaire, agrégea ces atomes , les coagula, pour ainsi dire , en masses qui durent nécessairement s'arrondir par le mouvement circulaire qui leur fut imprimé. Ces globules se rencontrant en chemin, durent se réunir en sphères plus con- sidérables, jusqu'à ce que leur éloignement et leur attraction propre eussent établi un équilibre entre eux.

Ainsi se groupèrent, dans l'immensité des espaces , autour de chaque centre d'une vaste trombe solaire, une multitude de planètes et de comètes , matériaux plus grossiers , s'écartant plus ou moins du foyer aux cxlrémiiés dij leur tourbillon. De

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cette sorte, l'élément le plus subtil, tel que le feu ou la lumière, fut réuni au centre , au foyer de chaque système planétaire, en un globe étincelant et radieux, autour duquel s'étend une astmosphère de fluide, connu sous le nom de lumière zodia- cale ; puis les planètes en général, deviennent d'autant plus volumineuses, soit par elles seules , soit avec leurs satellites, qu'elles décrivent des orbites plus amples et plus éloignées du foyer ardent du soleil.

Cet astre central et fixe de notre monde, tournant sur son axe dans l'espace de vingt-cinq jours et demi , présente un océan de matière éblouissante à nos yeux mortels , incapables d'en soutenir la splendeur : à sasurtace, et au milieu des plus vives flammes , s'étendent souvent des taches variables , mo- biles , plus ou moins passagères. Cet astre lui seul, plus vo- lumineux que les onze sphères principales de son système, est le moyeu de la roue immense qui les entraîne à tourner au- tour de lui d'occident en orient , et presque dans un même plan. Les satellites roulent autour de leur planète principale , selon le même sens et presque le même plan , de sorte que dans cette effroyable machine , le soleil , ses planètes et leurs dix-huit satellites , avec l'anneau de Saturne , roulent perpé- tuellement dans un seul sens età peu près dans le même plan, comme s'ils eussent tous été lancés par une projection uni- que, chacunàune distance proportionnelle qui les maintient dans l'équilibre.

Les orbes de ces planètes et de leurs satellites , quoique elliptiques, ne sont pas très-excentriques au foyer solaire, ni irès-inclinés dans leur plan ; mais au-delà de ces astres régu- liers, s'étendent, dans des orbites paraboliques immenses, des comètes dont la route très-excentrique au foyer solaire , les ramène parfois des déserts obscurs de i'empyrée , près de cet astre central qui les embrase de ses feux. La marciie de ces comètes est souvent dans un autre plan que celui des pla- nètes ; elle est môme inclinée par fois jusqu'à cent degrés , de sorte que leur mouvement devient alors rétrograde ou opposé à celui qui emporte les autres astres errans , et ne subit point ainsi l'impulsion générale du système solaire. Ces co- mètes , dans leur course au travers de notre univers, peuvent apporter des perturbations dans le mouvement elliptique des planètes près desquelles elles passent ; peut-être sont-elles destinées à renouveler les mondes, en y versant de nouveaux élémens , au moyen de leur immense atmosphère ou de cette brillante 'chevelure qui les environne de son pâle éclat.

Les satellites décrivent autour de leurs planètes principales les mêmes circuits que celles-ci doivent subir, en de plus longues périodes, autour du soleil, comme si elles devenoient

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à leur lour ses salellhes. C'est ainsi que les quatre lunes de Jupiter représentent en peu «le temps toutes les variations que notre système planétaire peut éprouver dans plusieurs millions d'années. Si, comme les observations télescopiques paroissent l'indiquer , notre soleil appartient à un groupe de nébuleusesetàune constellation d'éloilesdefoiblesgrandeurs, il doit circuler lui-même dans un orbe immense , autour d'un plus grand soleil , ou centre de gravité , à la manière des pla- nètes, pendant une durée prodigieuse de siècles, et avec une lenteur que nous avons peine à comprendre , tant il doit dé- crire une orbite spacieuse. C'est ainsi que des observations commencent à nous indiquer que notre soleil est entraîné vers la constellation d'Hercule. Que de siècles prodigieux ne faudroit-il point pour qu'il achevât son cercle incalculable ! -En effet, ces groupes d'étoiles si pressées, dont le nombre in- iini compose la lumière diffuse de la voie lactée, dans le champ d'un télescope, sont cependant si écartées entre elles, malgré la distance énorme qui semble les confondre, que leuréloigne- ment est au moins de cent mille fois les 33 millions de lieues formant la moyenne dislance du soleil à notre terre. Ainsi, tout l'orbe que nous décrivons autour de noire système planétaire ne monlrant aucune variation dans l'écartement des étoiles fixes, n'est qu'un point insensible , par rapport à ces espaces incommensurables. Les étoiles fixes, loin d'être placées à des éloignemens égaux, sont plus ou moins dispersées , ou en- foncées dans les abîmes célestes, et à de si effroyables distan- ces, que leur lumière, qui parcourt des millions de lieues par minute, emploie un grand nombre de siècles pour atteindre jusqu'à nos yeux. Il y a des milliards de ces soleils entassés dans la voie lacléo surtout, et en outre, par places , de la matière lumineuse diffuse, comme des élémens de nouveaux soleils ou de mondes non encore réunis.

Parmi ces innombrables soleils qui peuvent être les centres d'autant de systèmes planétaires analogues au nôtre , on en voit qui s'éteignent et d'autres qui resplendissent tout à coup d'un éclat merveilleux-, comme celle fameuse étoile, obser- vée en iSya , dans la constellation de Cassiopée. Sans doute il existe aussi des corps opaques immenses , dont les mouve- mens nous dérobent parfois des étoiles, puisque nous les re- voyons ensuite ; ces globes doivent décrire des orbites d'un diamètre épouvantable , auprès desquels ces comètes, dont le retour ne s'acliève que dans cinq cents ans , n'est presque rien. Mais que penser encore de ces espaces ténébreux, ou d'un noir profond, que le télescope fait remarquer dans quel- ques régions célestes vers le pôle austral? Seroient-ce des déserts du néant , des lacunes de l'univers qui attendent de»

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soleils et (le nouvelles créations ? Qu'est-ce que notre frôle niachine dans ces abîmes! Ainsi notre imagination écrasée sous le faix de cette immensité, découvrant au télescope tou- jours de nouveaux soleils par-delà ces lointains univers ^ ne peut plus y concevoir des bornes, et tombe anéantie d'épou- vante devant les espaces elle s'englouîit.

Que si nous revenons à noire monde planétaire, nous ver- rons ses différcns astres osciller régulièrement autour du loyer ardent qi>i leij,r verse sans cesse la lumière et la vie. Mais par-delà leurs orbites, ceux des comètes , excessivement excentriques, semblent devoir errer , dans leur course hy- perbolique, d'uu systèuje planétaire en d'aulres voisins, soit pour faire ainsi couimuniquer les mondes , soit afin d'y réta- blir ou d'y changer périodiquement l'équilibre à de longues époques séculaires.

A l'égard des mouvemens propres à noire globe, ils parois- senl osciller dans un état moyen dont ils ne s'écartent guère; leurs inégalités séculaires se compensent et sont périodiques «n telle sorte , que ré(iuilibrc se maintient uniformément. S il existe des causes de chnng-imens, elles s'opèrent dans des pé- riodes tellement lentes, qu'ellesdeviennent insensibles. Ainsi fi'après les anciennes observations de Pythéas, à Marseille ^ d'liipparque,çonfrontan}. celles de Timocharis cl d'Aristillus, des Cliinois, tels que Tcliéou-kong, et des Arabes, EbnJunis et Ulug-îîeig, comparées à celles des modernes, l'obliquité 4e Téçliptique diminue manifestement , mais non pas assez pour produire jusqu'à présent de grandes variations dans la, longueur des jours solsliciaux et dans la température des sai- sons. Il ne paroît pas que jamais l'écliplique devienne paral- lèle à l'équateur, et produise, comme on l'a pensé , un prin- temps perpétuel sur la terre , puisque dans ce cas , au con- ifaire , la Torride seroil sans cesse trop embrasée ; les pôles n'étant plus visités du soleil, s'encroûleroient de glaces im- menses; le printemps ne régneroit qu'entre les zones tempé- rées; l'équilibrç des mers cbangeroit enfin, si les pôles de la terre éprouvoienl d'autres ébj-anlemens que ceux qu'ils éprou- vent insensiblcmer.t dans leur nutation.

Quel concert admirable de sphères qui célèbrent la toule- puissance du Créateur, dans leur révolution perpétuelle et innnense ! Pourquoi notre terre seule seroit-elle honorée des bienfaits delà divinité par l'existence de l'homme et des autres créatures vivantes .'' Comment la lumière et la chaleur de l'astre central ne feroient-ellespas, éclore des germes d'autres organisations sur chaque planète , en rapport avec leur tem- pérature, leur constitution , leurs rotations diverses et an- nuelles ? Pourquoi n'y auroll-il pas d'aLilre> natures propres

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h chaque sphère dans tous les univers possibles, répandus avec tant de profusion dans rempyrée? La toufe-puissance peut-elle êlre bornée dans son immensité!. O existence, quelles étranges et inexplicables merveilles nous environnent dans l'abîme des espaces de l'éternité !

L'Univers a-t-il eu une origine et doit-il avoir une fin? En- fans de quelques jours sûr cet atonie perdu dans un recoin de l'immensité, que savons-nous et que pouvons-nous savoir ? Pourquoi le monde ne seroit-il pas éternel et coexistant avec l'être qui l'organise ? Si le mond£ éprouve des changemens dans la durée des âges, ce ne sont, sans doute, que des mc- lamorphoses ou des passages à d'autres équilibres. Ainsi , notre terre perd sensiblement de son excentricité dans sou orbe annuel, selon les anciennes observations des Arabes ; l'accélération générale des niouvemens des astres autour du soleil , counne des satellites ou lunes autour de leur planète principale, est démontrée, soit par d'anciennes observations, soit par la théorie de la gravitation universelle. Donc toutes les planètes purent être , dans l'origine , très-eMcenlriques et très-éloignées du soleil , comme des comètes à révolutions séculaires ; nous nous rapprochons ainsi par une spirale im- mense du forer enflammé qui paroît devoir engloutir les sphères de son système ; peut-être aussi , à cause de la résis- tance de l'étherou du milieu dans lequel roulentles planètes, qui ralentit leur cours ou l'oblige à se resserrer plus prèsda soleil. Ainsi, la constitution actuelle de notre globe ne sauroil avoir été la même de louteéiernité, et ne peut pas persévérer éternellement dans un pareil état. Il y a donc eu, et il y aura donc des changemens dans Torbe infini de la durée des mon- des. Nous ne sommes que des phénomènes passagers , des iuslrumens momentanés d'un I le but et les causes.

Prenons la terre pour exemple. Ce fut d'abord un atome qui, s'étant réuni aux atomes circonvoisins, se grossit peu à peu en s'altacharkt toutes les molécules qu'il approchoit dans sa route circulaire. La force de gravitatlorb de ce globe aug- mentant d'autant plus que sa masse devenoit plus considéra- ble , les atomes se précipitoient depuis une hauteur détermi- née , comme une pluie de poussière à sa surface. Après avoir attiré à elle toutes les molécules de matières solides ou les plus grossières, et en avoir balayé, épuré son orbite, la terre dut attirer les vapeurs aqueuses à sa surface, et les condenser en eaux par leur propre pesanteur; ainsi se sont formées les mers. Ensuite furent attirées les molécules d'air qui foriuenl- autour du globe terrestre un occ^n almospUérique.

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Article IV, De la Terre et des agens qui opèrent des cuml^i- naisons à sa surface.

Si, nous (détachant de ce globe par la pensée , nous le con- sidérons dans son entier , nous verrons d'abord une enveloppe aérienne , dautanl plus dense qu'elle est plus voisine de Ja surface terrestre, puis une couche d'eau inégalement répan- due à sasuperficie, et qui en comble toutes les profondeurs; enfin nous trouverons la terre elle-même formée presque partout de couches superposées qui semblent annoncer un accroissement graduel, comme les couches de bois dans le tronc des arbres. Le cœur du globe terrestre étant comprimé par toutes les couches supérieures , doit être progressivement (îlus dense, comme les couches de la terre doivent être à peu «le diversité près, plus poreuses successivement, à mesure qu'elles sont plus voisines de l'écorce externe. Car supposons que la force de gravitation vînt à s'affoiblir dans la terre, bien- tôt l'atmosphère se dissiperoitdans lescieux; les eaux cessant «^ être comprimées , se répandroieut en vapeurs comme sous la cloche pneumatique. Enfin la gravitation ditninuant tou- jours, les couches supérieures du globe s'éleveroient dans i'espace céleste en atmosphère poudreuse , en vapeurs plus ou moins épaisses. Si la force de gravitation s'augmentoit dans la lune , elle pomperoit tout ce que la terre perdroit ; devenue alors plus grosse que cette planète principale, elle la déplaceroit nécessairement en en faisant son satellite à son tour. Si, au contraire, la lune , la lerre et toutes les autres planètes avec leurs satellites perdoient peu à peu ieuv force d'attraction , il est visible que toutes les matières qui les composent se rép.mdroient une seconde fois dans l'éten- due des cieux, et reformeroicnt un nouveau chaos; mais, pour rétablir toutes choses , il suffiroit que la main de Dieu re- donnât à la matière plusieurs centres de gravitation, pour qu'elle reconstruisît de nouveaux mondes comme auparavant. C'est peut-être ce qu'avoit soupçonné le grand Newton , lorsqu'il a dit que l'univers, perdant par le long cours des siècles SQs forces de gravitation , toi^s ses ressorts se dérange- roient, et 11 faudroit que le suprcmearchitecte y apportât une jnain réparatrice, nianuni emendatrlcern.

Autant qu'il nous est permis de conjecturer, si les mondes vieillissent et perdent leur faculté attractive, ils doivent di lulnuer de volume ; déjeunes mondes doivent se reconstruire et s'augmenter de leurs débris. Peut-être les satellites sont- ils ces mondes nouveaux qui s'accroissent aux dépens des anciens près desquels ils vivent , et qui se grossissent de» va peurs que les comèies répandent diwri» Uk cieux.

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On peut croire encore que , dans le principe des choses , la terre n'avolt pas une atmosphère aussi étendue que celle d'aujourd hui , mais qu'elle l'augmente conlinuellenient par sa transpiration insensible. En effet , nous savons que la terre exhale une grande quantité de vapeurs ; et celles qui sont aqueuses retomhent en pluie ; mais les plus légères remontent dans l'atmosphère.

Lorsque les globes planétaires se coagulèrent^ pour ainsi dire , dans le champ des cieux , ils reçurent par la rotation une figure ronde , mais d'autant plus renflée vers leur équa- teur, qu'ils tournoient sur leurs pôles avec plus de vitesse. Laterren'avoit probablement alors ni montagnes, ni vallées; elle ctoit àpeu près plane partout. Mais comme sa densité ne pouvolt point être uniforme dans toutes ses parties , la pres- sion des eaux et de l'atmosphère dut faire enfoncer les cou- ches les plus poreuses , et former ainsi diverses excavations que le mouvement des mers, le sillonnementdes fleuves et des rivières augmenta encore davantage. Ainsi se creusa le bassin de l'Océan, ainsi fut sillonnée la surface du globe, et l'aspect descontinens fut diversifié par des vallées, des collines , de» plaines et des montagnes primitives. Les sommets des plus grandes élévations du globe ne sont donc que sa surface ori- ginelle ; et lorsque , placés dans les vallées , nous nous ima- ginons que les montagnes sont des renflemens , des exhaus- semens du sol , cette erreur vient de notre position. L'on conçoit au reste que les montagnes ne peuvent point être toutes de la même hauteur , parce que leurs terrains ont plus ou moins cédé à la pression des eaux et de l'atmosphère. Nous voyons arriver encore chaque jour de semblables affais- semens plus ou moins remarquables dans beaucoup de cpntrées.

En effet, l'écorce de la terre nous présente des terrains de diverse nature ; tantôt durs et compactes, tantôt spongieux <>l mous; les premiers demeurent élevés, tandis que les sç- conds s'affaissent. Il paroît que dans la formation du globe , les matières qui s'y sont déposées se trouvoient être de di- verse nature , ou du moins elles ont formé des composés de plusieurs sortes , comme nous l'expliquerons ci-après.

D'ailleurs les mers ont couvert pendant long-temps , soit successivement, soit par des balancemens de Taxe du globe , loule la surface de la terre , comme on en voit mille preuves dans ces bancs immenses de coquillages dont les continens sont jonchés , et qui se trouvent même sur les plus hautes montagnes. Ces masses d'eaux ont donc travaillé la croule du •^lobe, et lui ont ôté , de concert avec Talmosphèrc , ses qna- liles et ses fornii^s originelles, C'est à ces eaux que nous de-

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vous toutes les cristallisations, tous les sels , toutes les pier- res gemmes, les quartz, les silex, les sables , etc. , que nous rencontrons dans les entrailles de la terre. Les granités qui ne contiennent jamais de débris de corps organisés, ont sans doute été crislallisés au sein des eaux avant la formation des êtres vivans. Nous ne connoissons point la nature intérieure de notre terre ; tout ce que nous voyons de son écorce ou de sa surface a été changé par les eaux, transformé, remué décent manières différentes jusqu'à une grande profondeur. On con- «}Oit en effet que les eaux venant d'abord à se répandue sur une terre dont les molécules éloierit encore peu unies, du- rent la détremper, la ramollir, et former une espèce de li- mon épais à sa surface.

1 ransporié par le mouvement des mers , par les courans , les marées, entassé par couches en différeiis lieux, ce limon forma des collines, des montagnes secondaires , que l'Océan laissa ensuite à sec , à mesure qu'il se relira , ou que ses eaux diminuèrent sur la terre.

Comme l'atmosphère est agitée par des vents, des oura- gans impétueux , ainsi la mer a ses tourmentes et ses tempê- tes. La plupart des mouvemens qui s'opèrent au sein des airs ne sont produits que par des changemens d'équilibre dans la chaleur ou réiectricité. Ainsi l'air froid étant plus dense, et par conséquent plus pesant que l'air échauffé , doit le chas- ser et prendre sa place; ainsi l'air des pôles descend vers la zone lorride , et l'air des hauteurs de l'atmosphère retombe dans les vallées. De même que la lune occasione, avec le so- leil , les marées de l'Océan, l'atmosphère a pareillement des marées aériennes. Il y a des vents réguliers , tels que ceux des tropiques, les vents alizés, qui régnent couslanuiient pendant }>lusieurs mors ; les moussons varient ensuite. A l'époque des cliangemens de saison , comme vers les équinoxes , l'atmo- sp'ière est troublée parce que les températures ont varié.

Mais la principale cause de tous les mouvemens de l'atmo sphère vient des révolutions d'équilibre dans l'éleclricilé. Ainsi , à l'approche des orages , il s'élève presque toujours des vents mugissans ; et l'on en voit d'assez violens pour dé- raciner des arbres , renverser les maisons , disperser au loin les moissons, et exciter de furieuses tempêtes sur l'Océan ; mais lorsque l'électricité de l'atmosphère a repris son équi- libre , tout redevient calme à l'instant. La foudre est toujours accompagnée d'un violent courant d'air, de même que l'é- tincelle électrique. Les typhons, les trombes, ces vents tour- billonnans si terribles, sont des phénomènes semblables, ainsi que ces bouffées brûlantes d'air qui étouffent souvent les ca- ravanes de voyageurs au scia de l'AlVique. Les monlagues

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étant des pointes électriques pour la terre, établissent un échange d'clecîriciié entre le globe terrestre et l'atmosphère; «•'est pour cela qu'elles attirent les nuages sur leurs cimes , font naître des vents, et excitent souvent elles-mêmes les tem- pêtes qui les foudroient. Les vents irréguliers ne nous pa- roisseiit donc être rien autre ciiose, pour la plupart, que des masses d'air électrisées, soit en plus, soit en moins, qui cher- chent à se mettre en équilibre avec un air chargé de quantité différente d'électricité ; c'est pourquoi la direction des vents ne change pas seulement selon les obstacles qu'ils rencon- trent , mais encore suivant l'électricité de l'air qu'ils trou- vent dans leur route.

La dissolution de Tcau dans l'aimosphère , sa suspension en nuages, en brouillards, sa précipitation en pluies fécon- des, en grêles dévastatrices , en neiges , en frimas , sont en- core les résultats de l'électricité. Pendant l'hiver , l'atmo- sphère refroidie et électrisée en moins dans ses bauteurs , abandonne} plus d'eau qu'elle n'en dissout; électrlséeen plus pendant Tclé qui la réchauffe, elle en dissout plus qu'elle n'en laisse tomber sur la terre.

Notre atmosphère est un vaste champ la nature exerce en liberté sa toute-puissance. Quelquefois on voit dans un ciel très-pur se former peu à peu dus, nuages , et d'autres se fondre et disparoîlre par degrés dans l'atmosphère. L'air a la propriété de sécréter des nuages , de suer, pour ainsi dire , <les brouillards ; il peut, par une opération inverse, les ab- sorber et les fondre. Les vapeurs aqueuses sont plus ou moins dissolubles dans l'air, selon qu'il est plus ou moins éleclrisé, et qu'il est plus chaud ou plus froid. La terre fournit à l'air diverses exhalaisons , comme l'air en donne aussi à la terre : de viennent les différences qu'on remarque dans la nature de l'atmosplière en chaque pays eten chaquesaison. Au'prin- temps, en été , et sous les tropiques surtout , la terre trans- pire beaucoup, et exhale ainsi une grande quantité de feu électrique ; en hiver et dans les contrées polaires, l'air sé- crète beaucoup de brouillards clde vapeurs condensées-, il ra- mène les exhalaisons vers la terre , et lui rend ainsi Félectri- citc qui féconde ses entrailles. C'est pour cela que les frimas, les neiges de l'hiver engraissent et fertilisent la terre, comme les pluies du printemps. Voyez connue les plantes abattues par les chaleurs de 1 été et altérées par la sécheresse , re- prennent tout à coup, après une ondée, la fraîcheur et la vie! Les pluies d'orage sont même beaucoup plus profitables aux végétaux que toutes les autres, par^ qu'elles apportent avec elles un principe vivifiante! électrique ri^i rayîi-iie l'exis- Icncc de lo-jij, ks êlri-s.

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Les varialions subites de chaleur et de froid qui se remar- quent dans l'air , dépendent encore en très-grande partie de l'électriciié. On sait qu'elle augmente l'évaporation de l'eau, ce qui produit du froid, puisque la chaleur est employée par la vaporisation. Par une cause contraire, la diminution de l'éleclricilé arrêtant la faculté dissolvante de l'air, la cha- leur n'est point employée , et devient très-sensible ; aussi un air renfermé est toujours plus chaud qu'un air agité , parce que le premier dissout moins prompteraent notre transpira- tion. C'est encore par ce moyen que la nature opère le dé- gel et cette fonte si rapide des glaces et des neiges de l'hiver; alors l'air , loin d'avoir la propriété de dissoudre l'eau et de produire ainsi du froid , se décharge par une pluie fine de l'eau qu'il tenoit en dissolution. Les temps de gelée sont donc plus électriques que les temps de brouillards , de pluie ou de dégel , comme on le remarque à l'électromèlre. Les vents du nord , qui sont froids et secs , sont plus électriques que les vents du midi, presque toujours pluvieux et rendant les corps lourds, parce qu'ils relâchent les fibres par leur chaude hu- midité, et peut-être par leur défaut d'électricité : aussi les peuples de la zone torride sont en général plus folbles et plus abattus que les haLitans des contrées polaires, et nous som- mes même plus vifs pendant l'hiver que dans les chaleurs de l'été ou lorsque l'air n'a presque point d'électricité.

Ces révolutions électriques ne sont pas étrangères à l'em- pire des eaux ni même aux entrailles du globe. Ses diverses couches manifestent des capacités diverses pour l'électricité , et l'on en remarque des preuves manifestes dans les érup- tions volcaniques. Celles ci sont peut-être môme suscitées , ainsi que les embrasemens des terrains pyriteux et ceux de houille, par le développement de l'électricité quia lieu dans la décomposition de l'eau , sur ces matières inflammables. Le fluide électrique agit sans doute aussi dans les tourmentes que l'océan éprouve par des volcans sous-marins. De plus, la mer a ses courans comme l'atmosphère a ses vents ; car îiue masse d'eau recevant de l'électricité en plus, cherche à la rendre à des eaux moins électrisées. Ainsi , dans une li- queur saline , l'acide et l'alcali se recherchent pour s'unir mu- tiiellement sans toucher à ces mêmes substances déjà com- binées antérieurement.

Les phénomènes qui s'opèrent dans l'océan aérien s'exé- cutent aussi dans l'océan aqueux. Les poissons sont les oi- seaux de la mer, comme les oiseaux sont i^s poissons de l'at- mosphère. Les courions d'air sont représentés par des cou- rans d'eau qu'on peut regarder comme des espèces de vents aqa. cliques. Le {'oad de l'Oeéan a se^ vallées, ses collines^

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ses montagnes peuplées (l'animaux et de planles , ainsi que le fond de l'atmosphère. Cel!o-ci dissout des vapeurs aqueuses , se cUarge de nuages qu'elle transporte dans son sein et qu'elle précipite en pluies; de même la mer dissout l'air, s'en im- prègne, et eiiîraîne dans ses profondeurs une pluie de mo- lécules aérieiî.i's puur porter la fertilité et la vie dans ses abîmes. De même que nos plantes ont besoin d'eau pour vé- géter et nos animaux pour vivt-e , les habitans des mers ont aussi besoin de rosées d'air ; celles-ci purifient l'atmosphère aqueuse , comme les pluies purifient l'atmosphère aérienne. La mer a ses tempêtes intérieures , comme Tair a ses orages; elle éprouve de soudaines agitations et semble réceler la fou- dre dans ses vastes eaux , comme l'atmosphère qui s'embrase dans ?,ts ciiamps aériens.

Mais le fluide électrique ne se borne point à l'air et à l'eau, il pénètre aussi dans le sein du globe. De même que l'atmo- sphère et l'Océan , notre planète a aussi ses tonnerres inté- rieurs qui la secouent jusque dans ses abîmes ; car ses trem- blemens de terre et même ses éruptions volcaniques ne sont que des ouragans souterrains , des explosions qui font frémir le sol, qui l'ouvrent en larges cavernes, qui le crèvent en tout sens , de même que l'éclair fend l'atmosphère et rétablit l'é- quilibre entre le ciel et la terre. Nous voyons encore que les tremblemens de terre sont plus fréquens en été qu'en hiver, et vers l'équateur que vers les pôles; de même les volcans sont plus nombreux près des tropiques que sous les zones gla- ciales. C'est par une semblable cause que les ouragans , les tempêtes atmosphériques, les trombes, sont plus communs entre les tropiques et pendant l'été , que vers les régions froi- des et pendant l'hiver. Le feu électrique tend davantage , vers l'équateur, à s'exhaler du globe terrestre dans l'atmo-phère, et vers les pôles à s'approcher de notre planète. Cette circu- lation de l'électricité est peut-être aussi la cause qni dirige le fluide magnétique vers le nord d'une manière posit'Yf, et^'ers le sud d'une manière négative ; car on sait combien l'élec- tricité indue sur le magnétisme , qui n'en est peut-être qu'une modification.

La puissance de lagravitation s'accroissant à mesure qu'elle s'approche de son centre , il est probable que les m.^tières les plus denses et lespluspesantes sont lesplusvoisines du centre du globe. La terre est, danssa totalité, environ quatre fois et demie plus dense que l'eau, ce qui exclut l'idée d'énormes cavités dans son intérieur, et celle d'un feu central qui pro- duiroit nécessairement une dilatation considérable. W paroît donc que toutes les substances se sont disposées autour du noyau de la terre , suivant l'ordre de leur gravité, et peut'

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Olre ce noynu esl-il mctalliqueet de la nature du fer, comme le feroit soupçonner le magnétisme du globe. Nous voyons , à la vérité , dans les couches superficielles , un arrangement quelquefois différent; nous ne pouvons l'atliibuer toutefois qu'aux ciiangemens opérés par les mers ou par quelque ca- tastrophe, tantôt soudaine et tantôt lente , telle que des cn- foncemens du sol , des chutes de montagnes , des transports de terrains , des éruptions volcaniques , des tremhlemens de terre, etc. ; [mais ce sont seulement des modifications très- superficielles , puisqu'elles ont à peine quelques centaines de toises d'épaisseur, ce qui n'est rien en comparaison du g'ooe.

Nous observons aussi que l'atmosphère est composée d'une matière très-rare elfort légère à son sommet, 'et plus compri- mée à mesure que ses cou( hes sont plus voisines du globe ; elles sont altjrs bien plus chargées d'eau, de nuages , de va- peurs et de brouillards ; ensuite on trouve la zone aqueuse, qui recouvre en grande partie la superficie de la terre. Celle- ci est enveloppée à sa surface sèche de couches légères de ter- reau, de craie , de sablon mêlé d'argile , de schistes ; à me- sure qu'on s'enfonce dans son sein , on rencontre des granl- les, des roches très-dures. Si nous pouvions pénétrer plus pro- fondément, nous trouverions sans doute des masses encore plus compactes , et le noyau du globe est peut-être d'une du- reté et d'une gravité excessives. 11 ctoit sans doute nécessaire que l'intérieur du globe fût formé de matières extrêmement solides, parce que foulant avec rapidité sur lui-même autour du soleil , sa masse énorme eût été sujette à se fendre jus- qu'aux abîmes , si elle n'eût été affermie par des ossemens et une charpente intérieure capables de soutenir toutes ses parties.

Il paroît même que l'almosphère se dépouille de plus en plus, et à mesure que le monde vieillit, des parties les plus grossières qu'il contient, c'est-à-dire de l!eau et des autres vapeurs : les mers déposent lentement aussi les molécules lerreuses, salines et calcaires qui se forment dans leur sein ; ainsi la terre s'accroît sans cesse du dépôt de l'air et de la mer (i). Quand nous retrouvons les débris des anciennes

(i) Intlépendamment des poussières qui tomhent journellement de ratiriosphère , seroit-il impossible <|u'une certaine combinaison des diverses espèces d'air, un épaississemeiit des matières gazeuses prit iormer , non -seulement de l'eau, mais môme des corpuscules plus denses? Cette opinion, que nous émettions au conjmencement de ce siècle, eloit en même temps développée par MiNl. Marschall, en 1802 , à Giessen , dans leurs recherches sur l'origine et le dévcloppc- nieni de C ordre nclueldu monde (en allemand). Et pourquoi ces cor- puscules ne pourroient - ils pas se réunir , former des concrétions, des espèces de pl-ulus terreuics plus ou moins cousidérables ? Certai-

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villes, ensevelis sous ries couches épaisses de terrain; quand Je soc de la charrue déterre les frontispices de grands palais et les sommets de vieux temples , nous sommes étonnés : mais nous recherchons rarement pourquoi ils sont aujourd'hui cachés sous la terre. C'est cependant le dépôt des siècles qui les a recouverts; car il se précipite en tout temps de l'almo- sphère une espèce de poussière imperceptible ; en outre les productions végétales et animales semblent composer de la terre avec Teau et Tair qui entrent dans leur organisation. De même que les coquillages, les vers marins composent au sein de l'océan beaucoup de terre calcaire , en forment des bancs énormes et même des îles entières, ainsi les plantes, les animaux , les hommes augmentent continuellement la sur- face des continens par le terreau "et la multitude de leurs dé- bris , de sorte que la superficie actuelle, la croûte du globe semble être uniquement le produit des corps organisés. Il s'opère donc une dépuration générale depuis le sommet de l'atmosphère jusqu'au centre du globe , tout retombant au sein de la terre , et devenant terre ou pierre par degrés.

Article Y. Des eaux de notre planète , eL des combinaisons minérales.

C'est une vérité hors de doute aujourd'hui , que la mer inonda jadis tout notre globe ; ce déluge fut successif s.ans doute par le balancement de l'axe de la terre , car rien ne montre qu'il existât dix ou même vingt fois plus d'eaux jadis

iiemeiit l'eau dt; pluie n'e^t pa^ toujouii Ues - putu ; elle dépose souvent des mole'cules terreuses, quoique recueillie en plein champ. Qu'on n'obj«cfe point que ces corpuscules terreux ont ete' emportés par les vents et entraînés par ies vapeurs ; ce seroit donner une trop petite cause pour un efiet très-considérable et Irès-général. L'atmo- sphère est peut-être le premierateiier dans le(]uel se sont engendiées toutes les choses de ce monde. Combien de {germes l'air ne recèle- t-il pas dans son sein? N'est- ce point par lui que s'accroissent en grande partie les plantes, et que vivent les animaux? C'est réiénient nourricier et conservateur de tous les êtres, et ses qualités apportent les plus grands changcmens dans leur constitution.

Je devrois peut - être encore rapporter ime sorte de concrétion atmosphérique, ces corps pierreux qui paroissent s'engendrer dans les airs, et qu'on affirme avoir vu tomber dans maint endroit. Telles sont \cs pierres Je foudre , les aé'rolilhes , qui tombent tout enflammées avec l'éclat du tonnerre etla promptitude de l'éclair. On sait que toutes celles qu'on a pu recueillir en dilfc'rens pays , ayant été analysées par des chimistes anglais et français, ont toutes offert absolument les mêmes résullats , qui sont du 1er, du nickel , du soufre , de la silice et de la magaésie. Certes, il n'est pas besoin de dire combien la na- ture est puissante; et il sera toujours absurde de soutenir que telle chose r.e peut point arriver, parce que nous u'ea concevons point Ki possibilité.

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pour envahir les cimes des plus hautes montagnes, que dans l'Océan actuel. Les lois physiques ne permettent pas de sup- poser, comme on l'a fait, que ces eaux soient recelées dans des abîmes du globe et qu'elles en sortirent. Il est manifeste , à considérer la disposition des mers actuelles, que le pôle austral estgénéralement submergé, ou montre moins de con- tinens que l'hémisphère boréal. Tous les caps, ou promon- toires, soit d'Amérique, soit de l'Afrique, soit de la Nou- velle-Hollande , enfin de toutes les régions de la terre, sont tournés vers le midi. Rien ne paroit mieux annoncer que Tir- ruplion des ondes, dans ces submersions antiques, s'avançoit des contrées australes. C'est aussi ce que témoignent tant d os- semens et de cadavresd'animaux monstrueux , de grands vé- gétaux ensevelis sous le limon des couches terrestres, et qui paroissent avoir été balayés du midi vers le nord. Ainsi les dépouilles d'innombrables éléphans et de rhinocéros , des zones ardentes, se sont accumulées en Sibérie; ainsi, ôes fou- gères et des palmiers, des forêts entières furent couchés dans des liJs schisteux suivant la direction du midi au nord ; ainsi lesbancs de coquillages se sont amoncelés par des courans im- menses; ainsi des golfes ont été creusés par les irruptions vio- lentes de l'océan austral, se précipitant vers le pôle boréal; elles ont percé des mers intérieures ou méditerranées, dans les grands continens. Mais qui enfla les mers méridionales de tant d'ondes mugissantes et de vagues furieuses capables d'en- gloutir le globe ? Qui souleva dénormes tempêtes , pour faiire déborder ces effroyables marées sur des continens habi- tés , pour envahir jusqu'au sommet des monts , et renverser les antiques barrières de la nature .•' L'ouragan fut-il préparé dan.s les entrailles du globe , par des feux sous-marins , des foyers volcaniques dont les vastes fournaises s'étendent sous les abîmes , en creusant et déchirant les rochers r" En vomis- sant par mille éructations de leurs entrailles, des ondes bouil- lonnantes, leurs embrâsemens bouleversent, soulèvent des montagnes en îles fumantes et calcinées, affaissent et préci- pitent d'autres portions de continens, qu'ilsmorcèlent et en- vahissent, qu'ils ébranlent par leurs commotions. Sans doute, les innombrables archipels des mers de l'Inde, ces terres désolées des Moluques, des Philippines, de la Nouvelle -Càui- née , déchiremens informes d'un continent dévoré par les volcans et englouti par les ondes, attestent de combien de fu- reurs et de bouleversemens notre globe fut le théâtre. Mais il ne s'agit pas seulement de ces tortures des élémens qui se combattent , il s'agit d'une catastrophe immense ; il faut comprendre l'universalité duglobe, enseveli sous les flotsavec les règnes vivans des animaux et des végétaux qiti peuploient sa surface 4 pendant ces vieux âges de notre planète.

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Nous pensons que rien ne peut rendre raison de tels évé- «emens (car l'état de notre globe atteste leur réalité indubi- table), qu'une révolution du système astronomique de notre jplanète.Son équilibre actuel nepermettroitpas d'aussi étranges oouleversemens. Que le mouvement des mers avançant lente- «lent d'orient en occident par la rotation diurne du globe, ronge et creuse des continens pour en laisserd'autresàsec; que l'O- céan rejette sur ses bords des montagnes sablonneuses, en creu- sant les abîmes de ses profondeurs , par l'action du flux et reflux; ces hypothèses , ou vraies ou fausses, n'expliquent pas l'existence, sur nos continens, de ces immenses débris de coquillages en bancs épais. Leurs coquilles entassées sont encore parfaitement entières , preuve irréfragable que des mollusques marins ont vécu (i) dans une longue suite de siècles sur les contrées que laous habitons aujourd'hui. Des animaux monstrueux, maintenant inconnus la plupart , ont laissé leurs étonnantes reliques dans nos terrains ; ils peu- plèrent un inonde antérieur aux générations et aux autres races qui leur ont succédé ; comme s'il y avoit eu dans la na- ture plusieurs créations successives d'espèces vivantes après diverses alluvions. Tous ces faits n'attestent-ils pas que notre planète dut être jadis différemment constituée que dans soa système actuel? Des éléphans, des rhinocéros, s'ils vécurent sur les rivages de la mer Glaciale , l'on découvre encore de leurs cadavres avec leurs chairs et leurs peaux , n'y durent- ils pas rencontrer un climat plus doux , plus favorable à 1^ végétation nécessaire pour leur existence i' Il falloit donc que ces contrées ne fussent pas alors si voisines du pôle : le globe rouloit-il alors sur un au^re axe? Alors aussi tout 1 équi-

(i) Le séjour de la mer, ou de grands lacs d'eau sale'e sur nos con- tinens, pour expliquer la formation des bancs de coquillages, lut l'opinion de beaucoup de philosophes anciens et modernes. Aristoîe l'a entrevu, Météorologie , lib. i , c. 14 ; Strabon, Geogr. 1. i. £ra- tosthène, Straton le physicien, Xanthus de Lydie, ont jadis soutenu te sentiment, ainsi que Plutarque, De Isid. et Osirid. Dans nos temps modernes, il a été' renouvelé par Bernard de Palissy, par André Césalpln, Fracastor, Columna, Scilla, Boccone, Vallisuerl, Leibnitz, Bernard de Jussieu, Kéaumur, Mairan, Demaillet , Bourguet, etc. (^uant à l'esistence d'un ancien monde détruit par le déluge , outre la Genèse, celte opinion a été d'abord celle des Egyptiens et de Pla- ton (/« regnd). Elle fut 'suivie par François Patiizio , par Thomas Burnet , VVhistou. Nicolas Sténon , Halley, Hartsœker, Butiner, etc. ; enfin, l'hypothèse delà dissolution d'un premier monde, par le déluge, lut soutenue par Jean Woodward, Scheuchzcr, Monti, etc. Nous ne parlons pas ici des hypothèses qui fout émaner notre globe «.l'un soleil enrroûté , selon Descartes et Leibuiiz, ou de la ri»aliere du soleil , avec Buffon , ou qui établissent un feu centrai, avec Kir- ther, Hutton, Playfoir , Hall , etc.

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libre des mers éloit autre à sa surface, et d'épouranlaUes déluges durent résulter d'une immense commotion.

Mais qui auroit pu faire pencher tout à coup le globe et dévier son axe de rotation au milieu de l'uniformité du sys- tème planétaire, depuis tant de siècles d'observation? Nous n'en trouvons pas d'autre cause, hors de notre sphère, si ce n'est par l'approche d-'une comète dont l'attraction a pu dé- ranger l'équilibre de la terre. Seroit-il improbable que s'ap- prochant des régioUs australes, une ardente comète ait versé sur la terre une partie des vapeurs composant sa vasle cheve- lure? Celles-ci, condensées en flots d'eaux , se seront pré- cipitées , par l'effort de la pesanteur , en un effroyable déluge , jusque vers les régions boréales; en même temps le poids énorme de cette masse d'eaux aura faire pencher le globe qui aura commencé de rouler sur un autre axe, en changeant ses climats et ses saisons en chaque contrée.

Si, parmi ces grands événemens de la nature, il étolt per- mis de s'élancer dans l'avenir par des conjectures, pourquoi le retour de ces comètes à longues périodes , descendant des abîmes de l'empyrée , ne ramèneroit-il pas de nouvelles combinaisons sur les globes qu'elles peuvent aborder dans leur course ? Seroit-il hors de probabilité que , poursuivant leur immense parabole , les mêmes comètes retournassent, après plusieurs milliers d'années, autour de leursoleil; qu'elles fussent destinées , parles sublimes lois de l'éternel architecte, à renouveler les mondes , en y apportant de nouveaux équi- libres? Si notre terre fut autrement jadis, et les débris qui la jonchent en offrent d'irrécusables témoignages, elle peut , elle doit devenir autre pajr la suite des siècles. Etres d'un moment auprès de ces immenses durées, que pourrions- nous objecter de certain contre ces formidables révolutions qui ont renouveler la face de notre terre, et changer, sans doute, les différens mondes qui peuplent les cieux?

Les hommes ont conservé par tradition, dans tous les temps et tous les climats (i) le souvenir d'un ou de plusieurs déluges antiques. Des observations non moins probables nous montrent que la mer diminue de volume chaque jour , qu'elle ne couvre plus une foule de terrains qu'elle inondoit autre- fois , et que le peu de contrées qu'elle a envahies de nos jours , ne répond nullement à ce qu'elle avoit jadis usurpé sur les continens. La quantité des eaux diminue donc sur notre planète enmême temps que les terrains s'accroissent et

(i) Laffiteau, Charlevoix, le rapportent des différens peuples d'Auicricjue ; les Indiens, les Egyptiens, les Chinois, le témoignent dans jours histoires.

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s'exhaussent. Nous ferons voir dans la suite que ceJle grande consoinmalion d'eaux est due éminemment aux végétaux et aux animaux qui en composent, selon toute apparence, des matières plus solides. L'eau est si indispensable à la vie des corps organisés, que nul d'entre eùxne peut s'en passer. Ainsi les arides déserts de la Libye n'ont aucun habitant , au lieu que les pays fécondés par les eaux sont encombrés de végé- taux de toute espèce , d'animaux et d'hommes. Ces lieux sont même d'une fertilité incroyable , et les générations s'y succèdent sans interruption. La mer est un empire bien plus fertile que la terre, et la moindre goutte d'eau fourmille souvent de plusieurs millions d'animalcules microscopiques. A voir cetle perpétuité de générations qui consomment l'eau du globe terrestre , il est {)ermis de penser qu'ils épui- seront à la fin des siècles le bassin des mers, et que la terre deviendra entièrement aride, si elle ne reçoit pas de nou- velles eaux d'ailleurs. Lorsque la sécheresse du globe ne sera point tempérée par l'humidité, le principe de la chaleuf agissant seul prodinra peut-être une destruction générale. Cetle opinion vulgaire, que le monde doit périr un jour parle feu, émane des anciennes philosophies de TOrient. Les grands hommes qui étudièrent la nature dans ces vieux âges du monde, avoient pu apercevoir la vérité; ils purent la pré^ senîer aux peuples sous le voile mystérieux des religions, ou la déguiser par des emblèmes mythologiques : coutume établie de tout temps parmi les Orientaux et les Asialiqnes. Mais de quelque part qu'elle vienne, l'observation lindiquc lorsqu'on étudie la nature.

Le globe terrestre , formé dans le principe de plusieurs matériaux élémantaires , présenloit un mélange hétérogène. Lorsque la main divine doua ces élémens primitifs d affinités électives entre eux, il dut s'opérer de grands changemens dans la nature des globes. En effet, si Ton se représente une mul- titude de substances différentes, mises en contact entre elles et pourvues d'affinités chimiques , telles qu'on les observe aujourd'hui, on se convaincra bientôt combien durent s'opé- rer de grands changemens. D'ailleurs , les eaux détrempant la surface de la terre , durent faciliter les nombreuses com- binaisons des corps. se cristallisoient les quarz , les masses granitiques; ici se,combinoient les gypses, les spaths ; ailleurs se déposoicnt les schistes, les talcs, les marnes, les albâtres, les marbres; ailleurs encore se concrétoient les silex, les agates, etc. La terre, agitée de mouvemens inté- rieurs jusque dans ses abîmes, étoit dans une fermentation générale , ses élémens cherchoient partout à s'unir ; ainsi dans les liqueurs préparées par le chimiste, il s'élève des effervcÊ-

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cences impétueuses qui changent la nature de ces fluides , et donnent naissance à de nouvelles compositions. Le mé- lange des éiémens discordans occasiona donc des ébulli- lions effroyables dans le limon de cette terre encore virgi- nale ; les gaz, les moffettes, les exlialaisons qui se dévelop- pèrent sous les couches du globe ^ en soulevèrent des por- tions, formèrent de profondes cavernes, les rompirent en fentes, en précipices , en noirs abîmes, de même que nous voyons le levain introduit dans la pâte , la remplir bientôt de cavités, de boursouflures, et lui communiquer un bouil- lonnement intestin qui altère ses qualités primitives.

On ne peut pas douter que les diverses matières qui com- posent aujourd'hui notre terre , ne soient le résultat de ces mêmes attractions , et que celles-là même que nous trou- vons simples, ne soient encore des combinaisons plus inti- mes , que l'art de l'homme ne peut pas détruire ; mais la nature disposant à son gré du teujps , des masses, et de ses forces les plus énergiques, a tellement changer les ma- tières primitives , que l'homme ne peut plus connoîlre aujour- d'hui que des substances composées. Chaque jour la nature compose et décompose encore, comme le prouvent les volcans et les autres combinaisons minérales dans les couches terres- tres , de telle sorte que nous ne pouvons point savoir elle doit s'arrêter; la croûte du globe étant surtout exposée aux influences de l'eau, de l'air, de la chaleur et de l'électricité, a se combiner d'une infinité de manières jusqu'à une cer- taine profondeur. Tantôt se soulevant en montagnes fuman- tes, la terre a vomi ces laves embrasées dont regorgent ses entrailles ; tantôt des murmures souterrains font frémir le sol sous nos pieds et renversent nos édifices > au sein des mers on voit soudain des îles agiter au-dessus de l'onde mugis- sante leurs têtes volcanisées; ici jaillissent des sources d'eaux brûlantes-, là, des monts qui se cachoient dans la nue, s'é- croulent tout-à-coup sous terre et sont remplacés par des lacs profonds; ailleurs des mers morcèlenl les continens, et sub- mergent de vastes contrées, détachent la Sicile de l'Italie , l'Angleterre de la France, Madagascar de l'Afrique, le Japon de l'Asie, etc. Quelque jour l'Océan percera peut- être les isthmes de Suez et de Panama , et changera en îles de grands continens.

D'autres combinaisons s'opèrent au sein de la terre. Des exhalaisons soulevant le sol , y produisent àes fentes sont déposés ces principes minéralisateurs qui transforment en métaux précieux les plus viles matières. se présentent l'or, l'argent en végétations brillantes que cherche la main avare du mineur i ici se mûrissent l'airain et le fer que l'homme

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doit façonner en instrumens conservateurs ou en armes meurtrières : ailleurs, le diamant et l'arsenic, la simple pierre et le rubis , se cristallisent également. La plupart des con- crétions se forment par une exsudation du suc pierreux des terres circonvoisines, et les filons métalliques sont non- seulement produits par des exhalaisons souterraines, mais par une sorle de fermentation locale. On peut croire que certaines roches sont propres à former des matières particu- lières , telles que des métaux, des pierres précieuses, des sels, etc. De même , les diverses humeurs du globe , si l'on peut s'exprimer ainsi, ses vapeurs ou moffettcs, et tout ce qui circule dans ses entrailles, peuvent se métamorphoser en plusieurs substances , suivant la nature des terrains et le tra- vail particulier des matières qui les constituent.

Tout nous démontre en effet que le globe terres! re a été imprégné dans toutes ses parties d'une espèce de vie inté- rieure par Dieu, qui est cette grande âme du nionde de la- quelle tout émane dans l'univers. Car ces affinités chimiques qui agitent la matière , ne sont rien autre chose que cette puissance vivifiante dont l'Etre Suprême est la source. Elles laissent des traces ineffaçables de l'état ancien de notre monde. Ces archives de la nature , empreinles sur les rochers et les montagnes , sont des monumens irréfragables offerts à tous les regards, et non pas des témoignages mensongers de l'histoire humaine , puisqu'elles sont antérieures , la plu- part, à Texistence de notre race. Sans doute, dans l'ori- gine des choses, ces combinaisons du globe durent s'opérer avec d'extrêmes bouleversemens ; au moins il est probable que ses élémens s'associèrent dans le principe avec d'au- tant plus de violence qu'ils étoient plus simples. A mesure que les combinaisons se compliquent davantage, l'énergie des attractions est moindre, parce que les élémens sont plus voi- sins de leur saturation. C'est ainsi que toutes les fermenta- tions s'apaisent peu à peu d'elles-mêmes , à mesure que l'équilibre des diverses attractions s'établit de plus en plus. Aujourd'hui la terre ne nous présente que rarement ces grandes scènes de discordes entre les élémens: elle semble fatiguée de ses anciens combats, et s'avancer vers la foiblesse de la décrépitude.

Quoique nous devions accorder à la matière une sorte de vie infuse, ou des affinités particulières pour chaque genre de substances , nous sommes loin d'admettre qu'elle soit un grand animal, comme l'ont cru les philosophes pythagoriciens et stoïciens de lantiquifé. C'est parce que nous n'avons point de terme propre, pour exprimer ces forces cosmiques de la matière , et ces mouvemens perpétuels qui la modifient. Na*

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reconnoissons bien que cette sorte de vie émane de l'Élre Suprême , principe de toutes les existences ; elle ne nous pa- roit être quuue portion de lui-inênje qui imprègne la ma- tière ; car celle-ci n'a par elle seule aucune activité, et, comme un membre reirancbé du corps de l'homme, est pri-- vée de la vie lorsqu'on l'isole de la divinité.

La matière a donc été impré£;née d'un germe de vie qui communique à toutes ses parties 1 activité que nous lui voyons : Mens agilut tnolcm et magno se corpore miicet. Cette portion même de la divinité qui y est infusée , est ce que nous nom- mons LA Nature. Ce mot est tiré du verbe naître^ parce que ia nature est la source commune de tout ce qui est produit dans l'univers; c'est un des attributs de l'âme du monde oa de Dieu même, par lequel tout s'exécute suivant des lois éternelles.

La première opération de ce principe de vie dans la matière chaotique, a été la génération desmondes parTattraclion; et lorsque les globes ont été iormés , cette force vitale qui ne pouvoil pas demeurer oisive , a produit dans chaque substance une fouie de combinaisons chimiques par des affinités spé- ciales. L'esprit de vie n'opéroit dans le principe que sur la masse en général ; mais peu à peu chaque particule de la matière s'est pénétrée d'une vitalité particulière qui émanoit de cette faculté générale. C est ainsi que l'enfant ne jouit d'abord que d'une existence foible et végétative , et chacun de ses organes ne reçoit que graduellement son activité pro- pre, qu'il tire du principe qui anime tout son corps. Telle fut la seconde époque de notre monde.

Article VL De V action du satellite de la terre à la surface de notre globe.

La lune soulève chaque Jour vers elle les eaux de l'Océan , comme le démontre la correspondance des marées avec les mouvemens de ce satellite. On sait pareillement que le soleil y concourt à peu près pour le quart , puisqu'on observe que dans les syzygies ou conjonctions de cet astre avec la lune , les marées deviennent plus hautes que pendant les quadra- tures. Cette élévation du flux est surtout plus grande aux éauinoxes , lorsque le soleil se trouve «lans Téquateur avec le satellite terrestre, et moindre aux solstices, par la raison de l'éioignement de ces astres l'un de l'autre.

11 y a toute apparence que la lune doit attirer de même toutes les autres substances de la surface de la terre , mais d'uu mouvement imperceptible pour l'ordinaire. L'atmo- sphère paroît également éprouver des marées, dans ses hau- teurs , comme l'Océan. Ces attractions ne s'impriment bien

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sensiblement, en effet , que sur des fluides , puisque la mobi- lité de leurs parties se prêle plus facilement à l'effort combiné de ces astres que les molécules des corps solides , trop adhé- rentes entre elles.

On ne sauroit douter néanmoins, et la cause en est cer- taine , bien que l'effet en soit invisible pour nous, que l'a- grégation de toutes les matières solides de la terre ne soit en partie diminuée par l'attraction que les astres exercent sur notre planète , et que sa masse soHde n'éprouve également ses marées, ou ses flux et reflux.

Pourquoi notre globe est-il un sphéroïde aplati vers les pôles et renflé vers l'équateuri' Si cette forme a pu résulter du mouvement de rotation diurne de la terre , et de la force centrifuge qui en résulte , il ne faut pas négliger d'y compter l'attraction de Son satellite, ainsi qu'on semble Tavoir oublié. De même , si par une cause inconnue quelconque , des parties de notre globe, encore mou dans son origine, ont été soule- vées ou renflées en montagnes , l'attraction lunaire a favo- riser cet exhaussement irrégulier, surtout entre les tropiques , elle s'exerce plus immédiatement, et par cette raison avec plus d'empire ; aussi toutes les plus hautes montagnes ter- restres sont situées entre les tropiques. Mais parce que la puissance de la pesanteur, ou l'attraction centripète de la terre, est toujours prédominante , ces sortes de pustules de sa sur- face n'apparoissent, à l'égard de son volume , que comme de très-légères rugosités. La lune étant beaucoup plus petite et moins dense que notre globe , celui-ci exerce une plus forte attraction sur son satellite que ce dernier n'est capable d'agir sur sa planète principale; aussi les montagnes de la lune sont éva- luées à une hauteur double de celles de la terre ; hauteur d'autant plus remarquable par rapport à ce satellite , qu'il est quarante-neuf fois moindre que notre globe. L'élévation des montagnes de chaque planète paroît être en rapport avec sa densité propre, la rapidité de sa rotation , et relative à l'at- traction que les astres les plus voisins exercent sur elle. Jupi- ter, par exemple , doit avoir non-seulement de hautes mon- tagnes, mais même il porte des bandes exhaussées dans le plan de son équateur, parce qu'il a une révolution diurne très- rapide et quatre lunes. Saturne doit être hérissé de très-hautes alpes , parce que ses sept satellites et son anneau exercent nécessairement une attraction très-puissante sur sa masse , qui a peu de densité d'ailleurs.

Or, si ces planètes sont peuplées, de même que la terre , de productions vivantes , en rapport avec leur monde , la grandeur, la conformation de toutes ces créatures doivent être proportionnées soit à la masse de la planète, soit à l'altrac-

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lion (le ses satellites , lorsqu'elle en es! accompagnée, soit -h la rapidité de ses révolutions diurnes ef annuelles , et à son éloignement du soleil. Si l'on supposoit qu'une seconde lune vînt tourner à l'entour de la terre, on pourroit aisément cal- culer comijien les marées aériennes et celles de l'Océan deviendroient plus considérables; on évalueroit davantage les influences de ces satellites sur tous les corps terrestres; de même, si la terre avoit élé jadis sans lune, comme les Arcadiens le prétendT)ient , d'après une tradition fabu- leuse, nos mers n'auroient pas été journellement soulevées ; les plus orgueilleuses cimes des Cordilières aurolent été à peine d'humbles collines ; probablement les végétaux ne se seroienl pas plus élevés de terre que les champignons et les mousses ; et les animaux, l'homme même, se seroienl traînés comme des reptiles à la surface de notre globe.

En effet, l'attraction solaire d'abord est remarquable par elle-même, puisque les dissolutions salines qu'on expose à la cristallisation , dans des vases , grimpent et s'attachent particulièrement sur les parois les plus exposées à la lumière ; ce qu'on ne peut attribuer qu'à son attraction exercée sur les molécules salines. De même , les plantes renfermées dans des souterrains obscurs s'élancent vers les rayons du jour qui y pénètrent; ou pour mieux dire, celui-ci les attire, car il n'est pas nécessaire de recourir à une sorte d'intelligence ou d'instinct pour diriger ces plantes , si raltraction de la lu- mière suffit pour produire cet effet sur elles, comme sur des dissolutions salines.

L'attraction de la lune et des astres, en général , ne peut guère s'opérer, il est vrai, que sur de grandes masses; car s'exerrant à d'énormes distances, elle n'atteint pas les molé- cules intimes , comme l'affmité chimique ; mais on doit con- sidérer que le règne végétal en entier, les animaux et le genre humain en total , qui vivent à la surface du globe , présentent , par rapport aux astres , des masses sur lesquelles ceux-ci agissent d'un effort universel uniformément plutôt qu'indi- viduellement. Tous les corps organisés, végétaux , animaux, sont non-seulement composés de beaucoup de liquide^, mais même leurs parties solides ont toutes commencé par l'état lluide, qui s'est progressivement consolidé et durci. Tous ces êtres appartiennent donc plus à la portion liquide du globe terrestre , qu'à ses élémens solides ou pierreux ; c'est pour- quoi ils doivent participer eu général, autant que leur con- texture le permet , aux oscillations de leur principe origi- naire. Cependant ces résultats ne peuvent se manifester que sur les masses ; car , de même que chaque goutte d'eau dans l'Océan n'a pas son flux et son reilux particuliers , bien

qu'elle fasse partie des mers ; ainsi , un homme , nn arbre , étant si peu de chose dans la masse immense des êtres orga- nisé* , ils n'éprouvent des influences particulières , que comme parties aliquotcs d'un grand tout.

En se considérant à p^rt , les individus ne sauroient donc ressentir presque aucune influence spéciale de l'attraction Junaire et solaire. Néanmoins l'expérience a montré que cette action , si manifeste sur les mers , n'est point telle- ment obscure sur le mercure du baromètre qu'on ne l'ait en- trevue. Cette force assez prodigieuse pour soulever la masse des eaux et de l'atmosphère de tout le globe, doit être bien capable de produire quelques mouvemens sur les sèves et les humeurs des plantes ; aussi des observations vulgaires en agriculture apprennent que la lune ne paroît nullement étrangère à l'ascension des sèves dans les arbres et le$ herbes ; que le renouvellement ou le décours de cet astre accélère ou retarde plus ou moins sensiblement la crois** sance des végétaux, influe sur la hauteur et la coupe des bois, qui ne doit point s'exécuter indifféremment à toutes leB époques.

La seule attraction des vaisseaux capillaires, dans les végé- taux , ne p,ourroit élever leur sève qu'à la hauteur de trente- deux pieds , qui fait équilibre à la pression de la colonne d'air atmosphérique ; mais les physiciens sont embarrassés d'explr- quer l'élévation de plusieurs arbres à cent, à deux cents pieds même, et davantage encore chez quelques palmiers, euterpe^ delà zonetorride. Cependant il falloit considérer que tous les corps organisés les plus exposés aux libres influences des astres, tels que les végétaux fixés sur le sol, doivent grandir par l'attraction que le soleil et la lune impriment sur leurs sèves. Vers les pôles, la lune ne passe jamais , le so- seil ne lance que très-peu de rayons obliques , les végétaux sont rapetisses , non-seulement par la froidure , mais par défaut d'attraction de ces astres ; c'est tout le contraire entre les tropiques. Aussi les sèves soulevées , pompées par le so- leil , aidées d'ailleurs par l'impulsion vitale , par le mouve- ment centrifuge du globe dans sa rotation diurne, élèvent .perpendiculairement la plupart des plantes, impriment à leurs cimes une attitude droite ; et plus cette action est con- tinue, plus aussi la sève attirée allonge le végétal; c'est pourquoi les arbres qui vivent plusieurs siècles, comme le cèdre , parviennent à cette procérité majestueuse qui inspire l'admiration pour ces antiques patriarches de la terre.

Soit doncque l'attraction soli-lunaire s'opère immédiate- ment sur les corps org.inisés, comme sur toute autre subs- tance terrestre, soit qu'elle ne s'exerce sur eux que par Tin-^

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tcrmède de l'atmosphère ou des eaux , elle indue évidemment sur leur accroissement. Comme les vapeurs sont plus allirées, par la chaleur solaire et l'influence de la lune, dans les hau- teurs de l'atmosphère entre les tropiques ; comme l'air y est ^généralement plus humide, puisque les pluies, en chaque Jiivernage , y retombent par lorrens plus abondamment que d.ins nos climats froids qui sont plus secs ; de même les sèves des plantes, sous les tropiques , s'y élèvent avec plus de ra- pidité et ujoins d'efforts et d'interruptions qu'en nos contrées. Aussi leur .iccroissement s'opère avec une promptitude mer- veilleuse, et presque toutes s'élancent perpendiculairement ; au contraire , les herbes rampantes et couchées se rencon- trent plutôt dans des pays situés au-delà des tropiques, la sève n'est pas si fortement soulevée par l'attraction ; c'est pourquoi nous voyons , au contraire, tant de végétaux hum- bles , s'incliner et comme ramper à la surface du sol dans nos régions, et surtout vers celles des pôles Tatlractioa des astres est si peu active , et la force centrifuge trop affoi- blie pour contre-balancer la pesanteur.

Aussi les plantes de l'équateur, cultivées dans des serres, en Europe , avec tout le soin imaginable , dans une terre excellente , sous une température aussi chaude e^ plus uni- forme que celle de leur pays natal , ne parviennent jamais à la même élévation de taille pour la plupart , faute de ces influences luni-solaires.

Il n'en sera pas ainsi, en général, pour les animaux ; d'a- bord parce qu'ils sont moins constamment exposés que les végétaux à l'influence directe des astres , à cause de leur fa- culté de se mouvoir et de se mettre à l'abri ; ensuite la direc- lion de leur croissance est plutôt horizontale que perpendi- culaire. Néanmoins celle influence s'exerce encore sensible- ment sur eux, puisqu'on ne rencontre guère que sous les tropiques, les plus vastes quadrupèdes, tels que les éléphans, les rhinocéros , les hippopotames, lesgiraffes, les chameaux, ou d'énormes oiseaux , tels que les autruches , les casoars , le condor, ou des crustacés et insectes dégrandes dimensions, comme le limule gigantesque, les grosses araignées , de très- grands papillons et scarabées , etc.

Sous les régions polaires , la plupart des animaux n'y sont pas moins rapetisses que les hoinn>es, par les mêmes causes qui restreignent le développement des végétaux. L'on sait aussi, d'après les observations de ^Vahlenberg et de Cuch, que les montagnes y sont plus basses et comme rabougries , ainsi que les productions vivantes. Ce n'est pas tant par dé- f.uit de chaleur que les Lappons, les Samoïèdes, les Esqui- uiaux sont gênés dans leur accroissement , que par défaut de

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cette attraction soli-lunaire , qui ne permet pas leur élonga- tioâ. En effet, habitant presque toujours dans des cases sou- terraines Irès-échauffccs, tous 'eurs membres deviennent fort épais et pbjs volumineux à proportion que les nôtres, parce qu'ils ramassent dans leur courte largeur, ce qui leur manque en hauteur. Les peuples des climats chauds , dès leur première jeunesse , auconlraire, deviennentélancés, minces; et si la puberté ne tennlnoil pas trop tôt, pour l'ordinaire, la végétation de leur croissance , ils acquerroient une taille plus haute que celle des peuples des zones tempérées qui, plus tard pubères , croissent long-temps et mieux. L'espèce humaine , par sa station droite , se trouve , à l'égard de l'attraction soli-lunaire, dans un cas analogue aux végétaux.

L'expérience a même fait voir combien notre espèce étoit assujettie à cet empire des astres, dans les mouvemens de nos fluides, "^l'out le monde sait que pendant les équinoxes, temps s'opèrent degrandes révolutions atmosphériques,et les plus fortes marées , il se déclare plus de maladies graves , il s'o- père plus d'émotions d'humeurs qu'à toute autre époque , surtout entre les tropiques, comme l'ont remarqué les mé- decins européens. Dans les Indes , ceci est généralement re- connu par le grand nombre de fièvres printanières et autom- nales, mais encore par la plus grande mortalité que l'on observe dans les tableaux comparatifs du mouvement de la population. L'agitation des humeurs, chez les mélancoliques, à ces époques , a paru assez remarquable aux anciens pour qu'on ait donné le nom de lunatiques à ces atrabilaires , dont l'organisation plus délicate et plus irritable que toute aytre , ressent plus vivement ces influences. Enfin, quoique l'éva- cuation périodique des femmes ne corresponde pas régu- lièrement à des points fixes de la révolution lunaire, cepen- dant le retour du même flux chaque mois , et ces menstrues devenant plus copieuses qu'à l'ordinaire pendant les équi- noxes et le solstice d'été, sous les climats intertropicaux principalement, on doit en conclure que les mouvemens lu- naires exercent toujours une action quelconque sur les corps animés.

Il résulte de ces faits que notre existence est tellement coordonnée à l'état du globe terrestre, et proportionnée à ses relations avec les astres qui l'entourent, que le moindre changement bouleverseroit l'économie de la nature, telle qu'elle existe , et nous rendroit tout différens de ce que nous sommes. Mais avant de pénétrer plus avant dans cette im- portante étude , revenons sur nos pas, et cherchons com- ment tous les êtres vivans purent prendre naissance , en ad- mellant Vuriginc des choses et non leur éiemité.

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Article VII. Bêla Création f Je s corps organisés, et Eechetrhes sur Vorigine de la vif de tmis les êlres.

Jusqu'alors la terre , l'air et l'eau éloieut<les empires sté- riles; aucun animal, aucune fleur , n'avoient orné le monde. La nature , occupée de la constitution des corps primitifs , n'avoit produit que des matières brutes. Il lui falioil une force de vie surabondante pour créer les corps organisés ; elle avoit besoin auparavant de prendre toute sa vigueur et d'ar- river à une sorte de puberté; car, de même que l bomme n'engendre qu'après avoir reçu le développement de ses forces, de même le monde ne dut rien prof-luire avant d'avoir pris le complément de ses facultés. Les forces vitales de l'en- fant étant occupées entièrement à faire croître et perfec- tionner son corps, elles ne peuvent pas être surabondantes pour engendrer de nouveaux êtres; le globe terrestre éloit de même dan^ sa jeunesse. Il ne put donc rien créer à sa surface avant que d'avoir mûri et perfectionné toutes ses par- ties ; car les matières primitives de la terre , ses montagnes granitiques, ses rocbes quarzeuses, ses grandes profondeurs , n'offrent aucuns débris de corps organisés , et ont être formées long-temps avant eux. Les masses brutes étant d'ail- leurs plus simples que les végétaux et les animaux , elles ont été les premières créées , parce que la nature marcbe tou- jours du simple au composé.

De même quependantnoire enfance, nosforces vilales'sont d'abord concentrées dans nos organes intérieurs pour les perfectionner, et ne s'épanouissent dans les organes exté- rieurs qu'à l'époque de notre puberté ; ainsi la puissance vi- vifi:î!ite de notre terre, ou sa force cosmique, étoit rassemblée premièrement dans son intérieur, pour y sécréter et enge?^- drer toutes les substances minérales ; elle s'est mise ensuite en expansion à la superficie du globe. Nous voyons cette même concentration et celte dilatation de la vie dans tous les corps animés ; car l'arbre, la plante, l'insecte , le reptile, engourdis par le froid de Tbiver , ramassent en eux-mêmes toute leur vie et paroissent morts au-dehors , mais la cbaleur rappelant leurs forces vers les organes extérieurs, rend tous ces êlres à la plénitude de leur existence.

Les élémens organisables sont préparés. Il falioil d'abord de l'eau, ou une substance habituellement fluide, pour être le premier moyen d'union et d'assemblage d'un corps (lexible , et pour que ces parties solides s'entretinssent, se nourrissent au moyen d'un licjuide propre à les pénétrer ; aussi nous verrons qu'il n'y a point de créatures vivantes sans humidité, sasns liqiîcar, soit sève , ou s.'mg, ou lymphe nourricières. Il

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falloit, en outre, des matériaux plus solides, pour com- poser des membres et construire des organes. Le carbone cxistoitausein de la terre ou dans son écorce superficielle (i)j la nature y sut joindre des substances gazeuses , telles que l'azote et l'oxygène de l'alniosphère , susceptibles de se soli^ difier en passant dans des combinaisons. Aussi ces élémcns , le carbone , l'oxygène , 1 hydrogène de l'eau , constituent la masse des substances vègélaies , et l'azote se joint aux com- l>inaisons de tout le règne animal , indépendannnent de quelques autres matériaux qui paroissent servir d'auxiliaires, tels que le phosphore, le souire , le 1er, quelques terres , comme la craie, etc., qui entrent dans diverses créatures plus ou moins compliquées.

Mais qui imprimera le sceau de la vie à ces substances mortes par elles-mêmes l' Quel est ce mystérieux mouvement, cet être fugace et incompréhensible qui constitue Texistence passagère de tant de corps organisés , végétaux et animaux?

Sans doute rien de pareil ne sauroit s'opérer spontané- ment, avec tant de sagesse et une si profonde science d'or- ganisation , sans le concours spécial d'une suprême intelli- gence ; toutefois il est manifeste que celle-ci s'est servie des agens naturels pour exécuter de si merveilleux ouvrages. Il appartient donc à la philosophie naturelle d'eu rechercher les causes.

Contemplons la surface du globe sur lequel se multiplient sans cesse tant de races vivantes d'animaux et de végétaux, sur les continens , dans les airs et les ondes. leurs géné- rations pullulent-elles avec plus d'affluence et de prodigalité, qu'entre ces zones enflammées de la torridc , sur lesquelles le soleil verse sans cesse sa splendeur et son ardeur féconde.'* la vie s'arretera-t-elle , sinon vers ces plages désertes et glacées des pôles , derniers confins de la lumière et delà chaleur, asiles sombres et inabordables du froid, que jamais la témérité humaine n'osa franchir sans y rencontrer la lé- thargie et la mort ?

Sans le soleil ou la chaleur qu'il dispense avec sa lumière aux planètes , tous ces globes se couvriroient donc d'une épaisse nuit, et de l'éternel silence des régions polaires; il n'y auroit aucune eau fluide, aucune existence possible avec nos élémens actuels. Le soleil est donc l astre delà vie aussi bien que celui du jour. Voyez-le dissipant , au retour du printemps , les glaçons qui couvroient le sol , faire éclore

(i) DoloiTiieu, dans le Journal des Mines , établit <)ue l'aiilbracite, le carbone , se trouvent au»si clans les terrains prjiiiilifs , (juoJiju'ils soient plus abondans parmi les terrains de transition , le Gneiss, le Grauwacke ou Psammitçs , selon MM, Brochant et Hçcif art «le Thury.

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les germes des plantes ,re'veillcr les animaux engourdis dans leurs asiles souterrains, ouvrir le sein des fleurs, et couver, de ses douces influences , les œufs et les graines de mille créatures dont le froid suspendoit tout le développen:ieul : tant le feu imprime et soutient le mouvement de la vie !

La chaleur seroit-elle donc elle-même le principe de l'existence ? Qui peut donner le premier branle à l'organi- sation et le perpétuer, sinon ce qui possède le mouvement autocratique ? Or , nous ne connoissons rien dans Funivers qui jouisse de cette propriété , si ce n'est l'élément du feu , le calorique.

Sans nous occuper ici des moyens par lesquels la nature conserve la caloricilé dans les corps vivans, en les établis- sant comme des foyers de combustion ( car la respiration soit pulmonaire , soit branchiale , soil trachéale des animaux et des plantes, est une vraie combustion) , nous observerons que la vie est une chaleur infuse. On a éprouvé que des œufs fécondés résistoient mieux , par exemple , au froid , sans se glacer , que des œufs non fécondés. Les arbres soutiennent aussi davantage la froidure des hivers , sans que la sève fasse éclater leurs vaisseaux en se gelant , que ne le font des bois morts. L'homme , bien qu'il ressente à l'extérieur les attein- tes du froid et d'une chaleur supérieure à celle de son corps, a la propriété d'y résister jusqu'à certaines limites, tant la force vitale est une quantité déterminée de chaleur, qui n'admet dans son essence ni le plus ni le moins !

Les fonctions de la vie constituent un cercle qui s'entre- tient, et dont le mouvement subsiste perpétuellement, parce qu'il retourne sur lui-même et ne se perd pas. En effet , aucun mouvement spontané ne peut être recliligne , car il auroit un commencement et une fin ; il cbangeroit inces- samment de lieu , comme font les corps ; de vient que cette sorte d'impulsion se communiquant et se dispersant par le choc , n'est pas inhérente aux corps , et ne sauroil donner l'organisation et la vie : il faut donc remonter à un autre mobile.

Un principe se mouvant de lui seul dans l'animal et le vé- gétal vivant, ne peut donc être autre que celui de révolu- tion, comme le tourbillon circulatoire ; ainsi, en retour- nant sans cesse sur lui-même , il rentre tout en lui , et s'engendre toujours , parce qu'il possède son principe d'ac- tion , et ne disperse pas ses forces. En se maintenant dans l'équilibre en tout sens, il se rend perpétuel («utov/;c;;7^.) ; émanant seulement du point central , il ne suppose aucune étendue nécessaire ; il est indivisible comme le point mathé- matique , et tel qu'un principe immatériel , il ne présente

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qu'une force pure : c'est un être oniquc , persistant par !i;i - même, privé de tout nombre ou évaluation quelconque, sans terminaison et sans fin comme le cercle. Tous ces caractères sont propres au calorique comme à la vie ; en se mouvant perpétuellement d'elle-même, pourvu qu'on lui fournisse des nourritures convenables; elle demeure , dans son centre , indivisible , parce qu'elle n'est pas corps , mais susceptible de se propager comme le feu , seul principe du mouvement perpétuel.

La rotation centripète rentrant continuellement en elle- même , ne se fatigue donc pas , parce qu'elle se pénètre ton- jours. Elle centralise sans cesse les élemens qu'elle absorbe, et qui entrent dans son tourbillon. C'est ainsi que la vie lend à ramasser, par l'effort de la nutrition , de la circu- lation , de l'absorption , les divers matériaux , pour les appliquer au corps qui s'accroît , qui se développe et s'or- ganise ; tout ce qui s'écbappe par la tangente hors de ce tourbillon , telles que les matières cxcrémenlitielles , sort en se désorganisant. Au contraire , la vie , ou le tourbillon centralisant , compose cl mélange, tandis que la mort, oti la cessation de ce mouvement circulaire , laisse disgréger , par la putréfaction , tons les principes qu'il retenoit pnchai- nés. Si l'homme étoit capable de produire un mouvement perpétuel , ce ne pourroit être que celui de rotation , tendant à un centre; il animeroil des créatures, donneroit la génération et l'immortalité. Mais nous ne pouvons com- muniquer, par l'ouvrage de nos mains , que des impulsions en lignes droites, ou un mouvement , par l'extérieur, sut des corps ; tout cet effort se perd par les tangentes, tout re toinbp, en dernier résultat, vers le centre de la terre, et s'amortit dans la sphère du monde.

Le cycle de la vie des êtres organisés , plantes et animaux , se coordonne manifestement avec celui de la terre sur laquelle ils existent. Ainsi , la révolution diurne de noire globe sur son axe , dans l'espace de vingt-quatre heures , expose tous les êtres vivans et végétans , à la lumière comme aux ténè- bres ; elle détermine en eux une succession habituelle de fonctions, de veille , de sommeil et d'autres actions vitales , qui retournent chaque jour dans ce cercle régulier et néces- saire.

En effet , que l'on considère les différens états de l'air, de la chaleur , de l'humidité , de l'électricité aux diverses épo- ques du jour et de la nuit, et l'on connoîtra les principales sources de ces influences sur la vie de toutes les créatures. D'abord, la présence ou l'absence du soleil règle, en géné- ral , raclivlté et le repos chez presque tous les animaux et

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les végétaux , puisque ceux-ci peuvent éprouver également une sorte de sommeil.

Il s'établit ainsi , dans tous les corps doués de la vie , un mouvement du dedans au dehors pendant le jour, et un re- foulement du dehors au dedans pendant la nuit. Cet état d'expansion journalière et de concentration nocturne, devient ane habitude nécessaire à l'existence ; par-là, les fonctions de la vie extérieure s'exercent avec touie leur énergie dans la première circonstance , et la vie intérieure ou réparatrice dans la seconde.

Si les autres planètes sont habitées, comme il faut le pré- sumer par analogie , tous les êtres qui vivent à leur surface , doivent nécessairement avoir aussi leur existence coordonnée avec le mouvement de ces globes. Dans Jupiter, par exem- ple , dont le jour et la nuit se succèdent en moins de dix heures , la vie doit être singulièrement coupée et prompte en ses cycles journaliers ; mais l'année tropique de cette planète égalant près de douze des nôtres ( onze ans trois cent quinze jours quatorze heures et demie ), peut rendre l'exidtence de ses créatures d'autant plus prolongée.

En effet , la révolution annuelle de notre globe imprime une action toute puissante sur les plantes , les insectes et d'autres animaux , en déterminant les phases et la durée de l'existence de toutes les espèces annuelles, et en mesurant les périodes des plus vivaces. 11 résulte manifestement, chez le$ grandes races, des correspondancesintimes ou des modifica- tions profondes de leur vie par chaque saison , telles que le rut, la mue , etc., chez l'animal; la floraison , l'effeuillai- son , etc., dans le végétal.

Ainsi, le grand astre de vie promène autour du globe le réveil et la force ; son absence plonge la nature dans le repos et l'abattement. Ce puissant moteur met en jeu toutes les espèces créées, au temps, à l'heure fixée par leur structure particulière ; il excite leurs chants de joie et leurs hymnes d'amour ; ouvre et ferme tour à tour le sein des Ilcurs ; balance les élémens, y ordonne des oscillations diverses ou plutôt de nouvelles harmonies. Aussi les périodes de notre existence , comme celle des autres créatures , correspon- dent aux mouvemens sidéraux de l'astre que nous habitons, et au soleil autour duquel nous circulons. Tel est ce grand orbe du temps , qui nous entraîne dans son tourbillon rapide , qui, mesurant nos;destinées, dévide continuellement les fils (le notre vie autour du fuseau de la nécessité , pour s'expri- mer à la manière de Platon.

Quoique les liens qui ratiacheiil notre vie au globe et à la révolution 4e la terre dans sou ellipse autour da soleil, soient

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plutôt compris par la pensée qu'aperçus par les yeux, qui ne voit pas les espèces annuelles de plantes et d 'animaux se succéder et mourir à chaque cercle que la terre décrit dans son orbite ? Qui ne voit pas Thomme veiller de jour et dormir de nuit par cette rotation journalière du globe ter- restre , qui donne le branle à toutes nos fondions successives de vie ? Qui ne voit pas les périodes de nos âges se me- surer, d'après un certain nombre d'années ou de mois et de jours , depuis le sein maternel jusqu'à la marche des mala- dies, jusqu'aux époques déterminées de la puberté , du déve- loppement et de la cessation des menstrues chez les femmes, etc. ? Notre vie , dans son ensemble , ne compose-t-elle pas uTie cycloïde ou une sorte de roue sur laquelle nous montons insensiblement, de l'enfance à l'époque de la vigueur héroï- que , puis d'où nous descendons graduellement dans la vieil- lesse et le tombeau ?Tous les êtres décrivent ainsi un sorte de jet ou de parabole plus ou moins vaste , dans le cours de leur durée; plus l'impulsion en est rapide, plus elle est promplement parvenue à son terme fatal , comme on l'ob- serve sous les régions ardentes de la torride, l'intensité de la chaleur solaire , et sans doute aussi le mouvement centrifuge du globe, dans sa rotation, porte bientôt toute croissance des animaux et des plantes à leur faite , et les use par cette extrême énergie de vitalité. Aussi c'est sous les tro- piques que s'élève la végétation la plus haute et la plus ma- gnifique ; c'est que s'élancent les palmiers superbes, l'é- norme baobab, et que les simples graminées se développent en immenses bambous. C'est entre ces plages fécondes que de plus grands cercles de l'existence déploient des structu- res plus vastes chez les animaux ; et que jusqu'aux papillons, aux scarabées et aux autres insectes , tous acquièrent des -di- mensions extraordinaires et un luxe de couleurs éblouissanles, tandis que le froid et l'affoiblissement du mouvement centri- fuge du globe , près des pôles , amoindrit et resserre les membres des Lapons , des Eskimaux, comme il raccourcit tous les arbres, rend les plantes naines et rampantes à terre, à la manière des mousses et des lichens.

11 nous paroît donc que la même cause qui fait circuler les astres dans les cieux, imprime également le branle de la vie aux créatures , et nécessairement dans un rapport exact de correspondance avec le mouvement propre de chaque planète qu'elles habitent. Si ce mouvement changeoit , il seroit force que la combinaison des élémcns, et , par consé- quent , que noire structure et notre mode d'existence chan- geassent dans les mêmes proportions. Nous recevons l'Im- pulsion de la vie à peu près tomme la pierre , mue dans.

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le tour (l'une fronde , acquiert une force impulsive propor- tionnelle à la rapidité et à l'aniplilude <lu cercle dccril par cette fronde. De ineme la force expansive ou centrifuge du globe terrestre, favorise Taccroissement et la vie de toutes ses créatures à sa surface.

Elle est surtout favorisée dans cette production par'Ja cha- leur du soleil , ainsi que nous l'avons fait voir.

Article VIII. De la coordinalion des Créatures organisées ^ et de rélaljorutiun vitale.

Pour manifester encore mieux la différence entre les subs- tuices inorganiques et les créatures organisées, considérons qu'elles reçoivent des impulsions toutes différentes de la nature. Le seul mouvement circulaire est capable de produire la nutrition, Tintus-susccption, ou les formes organiques d'un corps individuel ., parce qu'il est congrégatif ; il amasse ou in- corpore la plus grande quantité des matériaux divers pour les mixtionner et les unir en un individu d'ordinaire de formes arrondies. Au contraire, le mouvement en lignes droites est séparatif, il ne peut former des masses que par apposition extérieure ou juxtà-position; il ne compose que des figures planes ou droites , ou angulaires.

Telle est en effet, la véritable distinction entre les miné- raux et les corps vivans. Les premiers, formés par des in'.pul- sions en lignes directes, ne constituent que des cristaux an- guleux par Tacccssioii de molécules superposées suivant cer- taines rangées , ou lames et assises , comme sont les sels. Mais dans un corps organisé, toutes les nourritures attirées dans l'intérieur s'y digèrent, s'y mixtionnent, s'y assimilent, s'y élaborent, puis sont distribuées aux diverses parties tout, par rapport à l'unité , au foyer central.

Aussi tous les corps organisés affectent la forme ronde , ou en dérivent généralement dans leur croissance. Tous com- mencent par la forme sphérique dans l'œuf, la graine, le germe, quels qu'ils soient, et en se déployant, ils fbrment l'ellipse, le cône, le cylindre, etc. , toutes figures engendrées de la sphère.

En effet, le seul moyen d'établir l'harmonie et l'équilibre des élémens pour constituer la vie, ou l'unité, ne pouvoit être qu'un mouvement central, circulaire, centripète qui les ratlachâten un corpsIndividuel.Dc vient la nécessité conll- nuelle d'absorber ou de se nourrir, tandis que d'autres mo- lécules, s'échappant de ce tourbillon vital, après avoir subi des décompositions qui les rendent impropres à soutenir ce concert d'action, deviennent les excrétions naturelles. Ainsi

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s''opère, parla continuité de ces actes, rarcroissement d'une part et le décroissement de l'autre , de telle sorte que si l.i révolution vitale ou centralisante est plus rapide et plus forte comme dans la jeunesse, l'animal et le végétal s'accroissent , tandis qu'ils décroissent par une raison contraire quand ce mouvement organique diminue.

Il est donc tout naturel que l'être vivant tende sans cesse à son agrandissement, car ce mouvement centripète inspire nécessairement Tampur de soi, de sa conservation, cet égoïs- me natal qui est de l'essence de toute créature, le ressort sans lequel elle ne sauroit subsister. Plus ce tourbillon se res-, serre comme dans la vieillesse, plus On devient surtout avare, intéressé à conserver ses acquisitions, tandis qu'il est plus ample , plus libéral dans la force et la chaleur de la jeunesse , car alors il répare plus facilement ses pertes.

Et la plus grande merveille qui résulte de ce mouvement centripète est l'équilibre nécessaire des élémens, dans leur concours , de telle sorte qu'ils se balancent sans cesse ; le Jeu de'la vie ne pouvant subsister sans ce système harmoni- que. Dans le minéral, tel que la pierre ou un métal, chaqi^e molécule placée l'une à côté de l'autre, n'a pour sa voisine qu'une cohésion de juxlà-posilion ; elle peut subsister isolée ; elle a sa force propre ou son existence dans elle seule. Une masse brute ou minérale est ainsi une république de milliers de molécules, toutes indépendantes, qui peuvent être rappro- chées ou séparées sans qu'il en résulte de changemenl essen- tiel dans leur état. Au contraire, dans le corps organisé, chaque molécule estétroitementassociée au tout et y exerceuu emploi quelconque ; elle faitpartie intégrante du système et le soutien de sa force; sans lui elle renlreroit dans la nullité , ou l'isolement, comme la molécule minérale. Ainsi c'est donc le concours central et uniforme d'une multitude de molécules combinées en une étroite communauté, par le moyen de ce niouvement circulaire , qui constitue l'organisme. Une partie séparée d'un corps vivant meurt et se décompose, pour l'ordinaire , tandis qu'un fragment de roche subsiste quoique séparé. Les molécules d'un corps vivant ne possèdent donc pas leur vie en propre, mais elles l'ont cédée au tout et n'o- béissent plus aux attractions, aux lois de la matière brute. Elles sont tellement entrelacées , mixtionnées , rattachées au foyer vital qui les gouverne, ([ue toute leur force est cédée à ce centre. 11 en résulte unité d'action et de vouloir, comme dans un gouvernement monarchique absolu, toutes les vo- lontés se trouvent réunies dans la personne qui tient les rênes de l'état, et chaque sujet ne reçoit son emploi et ses attribu-

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lions que du gouvernement, chacun selon son rang et sa su- bordination.

Par ce moyen, toutes les parties du corps vivant sont rete- nues, comme au moyen de fils, au centre qui les meut; il s'éta- blit une hiérarchie de fonctions, et des systèmes ou déparle- mens coordonnés par rapport au total. Par-là, tout conspire et s'entretient l'un à l'aide de l'autre ; nulle partie ne vit pour elle seule, mais rapporte son existence au centre. Le sang , la sève, ou ce qui en tient lieu, traversant- sans cesse l'économie , répand partout l'unité, la vitalité ; il falloit cet accord et ce consentement universel pour maintenir l*exis- tence de l'individu.

N'est-ce pas , en effet , le résultat de cette tendance à l'unité , suite du mouvement circulaire , qui aspire néces- sairement à se rétablir lorsqu'il est gêné, ou dérangé ? Tout de même que des balances agitées, reviennent spontanément à l'équilibre parce que leurs plateaux se contre-pèsent égale- ment ; il faut aussi que les divers systèmes d'organes du corps vivant, dérangés par quelque effort qui les rend maladçs, qui trouble leurs correspondances harmoniques, retournent, par leurpropre tendance, à leur équilibre antérieur. C'estce qu'on observe dans les crises des maladies ^ dans les directions sa- lutaires de la vie qu'on attribue aux forces médicatrices de la nature , à un instinct conservateur.

De quelque part qu'émane le mouvement vital , on ne peut pas s'empêcher de reconnoître toutefois qu'il est pro- duit ou assisté par une intelligence très-sage, sollpour accom- moder avec tant de génie les diverses pièces de l'organisa- tion des animaux et des plantes relativement au tout, soit pour diriger les actes de leur vie sur la terre par des Instincts innés, des impulsions autocratiques très-surprenantes. Toute explication de ces phénomènes , sans une intelligence direc- trice, seroit non-seulement insuffisante, mais même absurde, puisqu'il faudroit faire émaner cet esprit de sagesse et de prévoyance,pour la création etla perpétuité des êtres, de maté- riaux bruts, insensibles. Aussi quoique la chaleur nous paroisse être le principe excitateur de la vie et de ce mouvement circu- laire qui la maintient dans les corps organisés; quoiquedes in- ductions portent à penser que l'électricité joue un rôle dans le système nerveux des animaux, relativement à leur mobilité et à d'autres phénomènes (comme dans la torpille , les expé- riences galvaniques, etc.), il faut nécessairement l'econnoî- tre une intelligence providenle, directrice de l'organisation , qui connoît les voies et les moyens pour atteindre son but, bien au-delà de ce que pourroient faire nos débiles et obs- cures conceptions. Elle conduit et gouverne avec une science

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infinie les actes vitaux en santé et en maladie, selon des voies qui nous sont inconnues. Aussi les anciens philosophes, les stoïciens par exemple, et Hippocrate suivant l'hypothèse d'Heraclite , n'hésitoient pas d'admettre un feu intelligent^ di- recteurde l'économie animale et de toute organisation, comme il paroît être la source de tout mouvement dans l'univers.

Quelques opinions qu'on adopte sur la production des ani- maux et des plantes, elles se réduisent à deux principales. Il faut que la terre en ait développé les germes, ou qu'Usaient été apportés d'ailleurs sur le globe. Nous ne parlons point ici de la création de ces germes par la main de l'Etre Suprême , car elle ne peut pas être contestée dans tous les cas. En effet , soit que la terre , l'air, l'eau , ou les cieux, etc., aient produit ces germes , leur organisation si suhlime et si par- faite ne peut être que le résultat d'une puissance tout-à-fait intelligente et divine. J'ensuis tellement convaincu, que rien ne me paroît plus absurde et extravagant que d'attribuer au hasard la formation des plantes et des animaux.

Il me paroît plus raisonnable de penser que tous les corps vivans ont pris naissance de la terre, plutôt que de les faire tomber soit des cieux, soit de quelque sphère , telle que la lune, lesoleil, une comète , ou d'autres corps célestes; hypo- thèse qui n'a nul besoin d'être réfutée aujourd'hui.

Nous voyons que de l'eau exposée à une douce température, fourmille bientôt d'une multitude d'animalcules visibles au microscope ; ensuite il se forme de petites végétations ver- dâtres ([ul s'agrandissent peu à peu. Ainsi cette eau qui étoit Irès-limpide d'abord, devient tout à coup un monde peuplé de végétaux et d'animaux. Il faut donc que la nature soit remplie de germes qui ne demandent pour pulluler que des conditions favorables, c'est-à-dire que de l'humidité et de la chaleur.

Si l'on refusoit d'admettre ces faits, nous demanderions comment pourroit s'expliquer autrement la population des végétaux et des animaux de tant de contrées, telles que les vastes solitudes de l'Amérique, de la Nouvelle -Hollande, et ces terres isolées, long-temps inconnues au sein de l'Océan; toutes sont pourtant peuplées de végétaux et d'animaux, qui étoient parfaitement ignorés du reste de l'univers. Chaque région a donc développé ses germes de vie , qui s'étoient for- més sur le lieu même; car ils sont si évidemment autochlho- nés, que plusieurs ne sauroient subsister sous d'autres climats»

Or ces germes infinis et invisibles qui sont répandus par toute la terre, ne sont que des particules de matières em- preintes d'une force vivifiante , laquelle émane de la vie pro- pre du globe terrestre. Seulement ces particules, ou germes j

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possètlenl cette faculté vitale dans un plus haut degré que la niasse brute : elles ont pour ainsi dire une exis- tence particulière ; elles renl'erinent sous un petit espace pins de cet esprit de vie ; de vient que ces germes sont susceptibles d'organisation et capables de perpétuer leur durée par la reproduction, au moyen de la chaleur, de l'hu- ïjiidité et d'autres circonstances favorables.

Si l'on considère donc que la terre couverte d'eau , a été exposée aux rayons du soleil pendant une multitude de siè- cles , ses substances les plus échauffées par ses rayons et favo- risées par l'humidité se seront peu à peu figurées; à l'aide de cette vie interne do la matière, elles auront donné naissance à une sorte d'écume ou de liu)on gélatineux qui a reçu graduel- lement une plus grande activité par la clialeur du soleil. Sans doute on vit paroitre des ébauches informes , des êtres im- parfaits que la main de la nature perfectionna lentement, eu Jes imprégnant d'une plus grande quantité de vie. D'ailleurs la terre dans sa jeunesse , devoil avoir plus de sève et de vigueur végétative que dans nos temps actuels, nous la voyons épuisée de productions. Le soleil et toutes les puis- sances actives du monde physique , avoîenl aussi plus d'éner- gie, parce qu'elles s'exerçoient pour la première fois et pour ainsi dire dans toute leur jeunesse.

Nous observons cette exaltation graduée de la vie dans les corps divers que nous présente la nature. La pierre brute passe par des nuances a la pierre cristallisée ; celle-ci re- înonte aux pierres fdjreuses comme Vamiante; plus loin , nous trouvons les végétations minérales , telles que iejlos fcrri ^ ou les, ludiis Helmontii^ les stalactites , ou même les dcndrites , etc. Tout auprès , on peut placer les productions marines , telles que les madrépores, les coraux, les éponges ; ouïes végétaux, lels que les champignons, les algues ,elc. La nuance est donc bien prononcée, et montre une augmentation dans les facul- tés vitales.

Considérons, en effet, ce mouvement centralisant Kjue ïious avons dit être le principe de la vie ; il a pour objet d'a- gréger, de combiner, de mixlionner divers élémens , ou de les organiser inilincmcnt dans une sorte d'équilibre ou d'har- irionie. Que ce mouvement centripète ou assimilateur cesse de rattacher en un corps individuel , les principes qui nous composent; aussitôt ceux-ci tendent à se disgréger, à s'écar- ter dans des combinaisons moins compliquées ; c'est ce qu'on observe dans la putréfaction plus ou moins rapide qui s'éta- Llit en tous les corps organisés, et cessant de vivre.

Ainsi le principe vital consiste donc dans cette force cen- tralisante ; le cœur, par c>;eiîipio , rappelle à lui tout le san^

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des extrémités du corps, puis le renvoie ensuite à ces mêmes extrémités, pour les nourrir, les accroître, les réparer; il remplit la même fonction que le soleil, tlans le système de notre monde; car cet astre dispense à toutes les sphères qui l'entourent , la clialeur et la vie ; et les attirant à lui , il les retient, les attache dans leur orbite ; il domine ainsi dans tout son système planétaire.

Mais nos règnes organisés sont en rapport avec les élémcns de notre globe , qui étoient susceptibles de recevoir le mou- vement centralisant ou vital. Il est évident que le règne végé- tal n'emploie guère que trois éiémens , tels que le carbone , riiydrogène et Toxygène , ou Veau et V anthrarile de la nature primordiale. Par l'accession d'un quatrième élément, savoir l'azote, la nature s'est élevée à la production du règne ani- mal; de sorte que s'il n'exlstoit point d'azote dans notre sphère ou dans l'air qui l'environne, les animaux n'auroient paspu être produits ; mais s'il existoit un cinquième élément organisable, ou d'autres principes, nous aurions un règne de plus, des organisations plus compliquées encore qu'elles ne le sont.

Par-là , nous pouvons comprendre que la nature s'élève graduellement, du simple au plus composé , et qu'en d'autres planètes ou tout autre monde , elle emploie les éiémens , et les coordonne relativement à l'astre qui les fournit.

Nous observerons encore que plus les combinaisons natu- relles sont simples et formées seulement d'un ou deux princi- pes, comme les substances minérales, les sels , etc., plus elles sont adhérentes ou fixes et déterminées, et par consé- qiient durables. Aussi les minéraux restent presque inaltéra- bles pendant une longue série de siècles. Les végétaux cons- titués déjà de trois principes , ont une existence moins per- manente, ils meurent et se désorganisent; mais les animaurc composés au moins de quatre éiémens, sont les plus destruc- tibles ; ils périssent aisément , et à peine sont-Us morts , qu'une prompte putréfaction sépare to^ltes leurs parties : ainsi le lien des combinaisons organiques est d'autant moins solide qu'il comprend un plus grand nombre d'élémens , et forme ime structure plus complexe.

D'ailleurs, les fonctions vitales deviennent d'autant plus xtn- nifestes ou mieux développées^ à mesure qu'elles composent une organisation plus perfectionnée. La pierre est insensible et Inactive ; la plante a déjà quehjue activité spontanée dans sa croissance , dans les phases de sa végétation ; certains végé- taux manifestent même de l'irritabilité , comme la sensltivc et les élamlnes de plusieurs fleurs ; enfin l'animal devient d'autant plus sensible, plus délicat, plus susceptible d'inleiJi-

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gence , que son organisation est plus accomplie. On en re- marque d'admirables nuances de progression , depuis le po- lype jusqu'à l'homme.

Or, de quelle manière peut s'établir cette gradation mer- veilleuse qui fait sortir du sein de la terre des germes déli- cats de vie, pour les porter au faite nous voyons que la nature est parvenue ?

Certes , il paroît bien évident que la continuité du mouve- ment centralisant ou vital , produit une plus haute élaboration organique, favorisée parl'influence du soleil ou de la chaleur.

Voyez cette plante qui germe et sort de terre, elle n'offre qu'une substance inerte et insipide ; elle n'est propre à rien encore, mais peu à peu le travail centralisant de la vie accu- mule vers son extrémité des principes plus élaborés et plus viviûans; sa substance médullaire donne naissance à des ger- mes; il se développe une fleur et des fruits savoureux, des semences contenant les élémens de nouvelles créations.

Pareillement dans les animaux , le faîte de leur élaboration vitale, et leurs organes les plus empreints de la puissance ac- tive de la vie, qui sont le système nerveux, sont situés à la partie supérieure et antérieure de leur corps , à la tête et au dos , tout comme les organes de la fructification chez les vé- gétaux, sont placés à leur sommet.

Qui détermine donc cette situation des organes les plus élaborés ou les plus vivifiés, vers les parties supérieures du végétal, et la tête de l'animal? N'est-ce point àr cause qu'elles sont les pins immédiatement exposées aux influences vivifian- tes du soleil.'' Il exalte, et en effet, favorise extrêmement l'é- laboration organique , comme il développe aussi les qualités sapides et odorantes, comme il colore plus fortement les par- ties des végétaux et des animaux, qui lui sont soumises ; enfin comme il exalte à l'excès l'imagination des hommes , sous les climats chauds.

Or, par la continuité de ces influences, les êtres organisés doivent aspirer à s'éla3>orer successivement; car toute pro- duction organique se développe par degrés. CertaiuiMUcnt , l'existence des animaux suppose celle des plantes qui picpa- rèrent dînis l'origine la première nourriture à ces êtres ani- més , puisqu'ils avoient besoin de tirer de quelque part leur subsistance. Pareillement l'existence du végétal présuppose celle de la terre et de l'eau, sans laquelle rien ne végète. La première élaboration des matériaux bruts du règne minéral dut donc être la végétation , et celle-ci présentant ses com- binaisons au règne animal , celai-ci dut porter plus haai le de- gré d'organisation , par la continuité du travail centralisant et asslrailateur de la vie. L'on ohsttrve même que le^ auiimaut

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vivant d'autres animaux, s'élèvent à un ordre de perfection- nement supérieur à celui des races herbivores dont ils font leur proie ; enfin , l'homme profitant de tout ce que les deux règnes présentent de plus élaboré , soit dans les fruits et se^ menées des végétaux , soit dans les chairs et les sucs des ani- maux, perfectionnés encore par l'art culinaire, devient l'être le plus accompli de toute la nature , dans son organisation , dans le déploiement de son système nerveux et cérébral, ou dans sa sensibilité et son intelligence.

C'est ainsi que U nature a àà s'élever graduellement au faîte auquel nous voyons qu'elle est parvenue depuis long- temps ; mais comme elle ne possède point un plus grand nom- bre d'élémens organisables ; comme le lien circulaire de la vie étreintàpeine les principes constituans du corps humain, lorsqu'ils acquièrent le faîte de leur élaboration organique , il paroît que la nature, surnotre terre, ne sauroit s'élever désor- niais au-delà de la production de l'homme, dans son espèce blanche, surtout. En effet , il est déjà l'être le plus maladif, le plus prompt à se détruire et à se corrompre ( au moral aussi bien qu'au physique ) , de toutes les créatures. Plus il se per- fectionne , plus il devient délicat , frêle , susceptible de se consumer de fièvres malignes et nerveuses, par cet excès d'é- laboration vitale et de développement intellectuel qui en est le résultat.

On peut donc considérer notre globe comme une sorte de grand polypier dont les êtres vivans sont les animalcules. Nous sommes des espèces de parasites , des cirons, de même que nous voyons une foule de pucerons , de lichens , de mousses , {•t d'autres races qui vivent aux dépens des arbres. Nous som- mes formés de la fange même de la terre. Les facultés que J3ieu a données à cette matière , se sont exaltées et modifiées successivement , jusqu'à la production terminale de l'espèce humaine ; ainsi nous tirons notre vie et nos forces de la lerre (i).

La génération des êtres les perpétue suivant lés lois de leur l)iinaiion originelle ; car, de même que la nature passe gra- dacllement d'une ébauche imparfaite à un corps bien perfec- tionné , ainsi les élémens destinés à un nouveau corps , ne sont d'abord qu'une liqueur plus ou moins épaisse , et douée d'une certaine faculté vitale ; mais cette liqueur s'organise peu à peu, s'enrichit de nouveaux organes, et s'empreint par nuances successives de Tesprit vivificateur. »

(i) Dixit quoque Deu» : producat terra aniniam viventem in gé- nère suo, jumenta et veptilia, etbestias tcirœ, i;:curidùxn speciessua». Et factuui est ita. Gènes, c. 1 , vers. 24.

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Article IX. De la Formation successwe des créalures vwanies.

Tons les animaux, toutes les plantes ne sont que des nio- dlfications d'un animal , d'un végétal originaires. On peut suivre, dans la composition de leurs organes, toute la chaîne de leurs ressemblances. Prenons l'homme physique, l'arbre le plus parfait , pour exemples. Si nous dégradons le premier , couche par couche , si nous déformons peu à peu toutes ses parties, nous en tirerons toute la série des aniniaux , et nous le réduirons entin au terme le plus simple , au type primitif de l'animalité. Nous en ferons de même dans le végétal. Il est donc visible que cette complication d'organes qu'on ob-- serve dans les êtres les plus parfaits , n'est produite que par une progression successive, une espèce de maturité organique, un développement continu. Le règne animal n'est, en quel- que sorte, (pi'un animal unique, mais varié et composé d'une multitude d'espèces, toutes dépendantes de la mC*me origine. De même le règne végétal ne forme (pi'un végétal unique; et l'c n peut dire que les animaux sont tous frères, comnie les plantes sont toutes sœurs (i).

Cette chaîne admirable d'organisation dans les animaux et les plantes, s'observe de même dans la génération de cha- que individu. L'embryon du quadrupède , par exemple , dans

(i) Antoine Vallisneri ayant fait ses beaux travaux sur la ge'ne'ra- tioii, n'osoil pas les publier (quoique dédiés à l'empereur des Romains, et approuvés par lui); il craignoit, d'aprèsl'exemple de Galilée, qu'on ne lui permit pas d'avancer l'idée , alors nouvelle, qu'aucune géné- lalioii n'éloit spontanée, et que les plus vils insectes même éloient créés par Dieu. Bieu ijue ce seuliment lût Irès-rcligieux en lui-même, il s'adressa à un savant théologien de Pavic , l'un de ses amis, le P. Tonti , pour qu'il lui découvrit quelque moyen d'éviter rinquisilion. Ce bon religieux lui dit qu'il trouveroit dans les Pères de l'Eglise, tout ce qu'il lui laudrolt. En effet, il prit plusieurs passages de St. Augus- tin, dans lesquels il semble que cet élo-iuent évèque d'Hippone , ait reconnu la préformation originelle de tous les germes des créatures vivantes. Ainsi, ce Père écrit sur la Genèse: Unde Deus nul/ara aniplius crcaluram instituons , scJ ea , qute omnia siniul fecit , admi— nistratorio actu gubernans et movcns , sine cessaiione opcratur , simul rcquiescens et operans. De là, le P. Tonti conclut que St. Augustin a reconnu que tout avait été créé dans l'origine, et que tout ce que nou^ voyons depuis ce teinps , n'est que le résultat du développement du plan primordial. El le P. Tonti s'étonne même que St. Augustin, par Ja force de son génie, ail pu prévoir les belles découvertes de Leu- Aveuhoëk etdes autres micrographes, sans avoir l'idée du microscope; car l'évèque d'Hippone s'explique ensuite en ces termes : Sicut enin in ipso grano invisibilia crûnt omnia simul , (/uœ per iempora , in arbo- rem surgcrent ^ ità et ipse mundus ccgilandits est, fjuiiin De us omuia simul creavit.

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le premier moment de la fécondation, n'est qu une gelée vi- vante fort approchante de la substance des polypes, et de la glaire organisée dos zoophyles. Quelques jours après , les premiers rudimens de ses membres le rendent semblable aux vers et aux autres animaux de celte famille. Bientôt il acquiert des facultés vitales analogues à celles des larves d'insectes, ou des mollusques. Il passe ensuite à un état semblable à ce- lui d'un poisson, et il nage de même dans une liqueur. Dan* les premiers momens de sa naissance , il n'a guère que la vie lente et obscure d'un reptile , et comme lui, le jeune animal se traîne à peine sur la terre ; enfin , il monte au rang que lui prescrit la nature. Il en est de même des végétaux Les jeunesanimauxet les plantes nouvelles sont d'une complexion molle , humide , spongieuse ; et les vieux végétaux , comme les animaux âgés , sont d'un tempérament aride et dur. De même, les animaux les plus imparfaits, tels que les polypes, les vers, les mollusques, etc. , ainsi que les plantes les plus simples , comme Il-s champignons, les mousses ; les liliacéea, etc. , sont d une constitution fort humide et mollasSe. Au contraire , les oiseaux et les quadrupèdes , les arbres et les arbrisseaux sont d'une consistance ferme et solide. Les ani- maux et les végétaux les plus simples représentent ainsi la j<ninesse de la nature vivante , tandis que les animaux et les végétaux les plus compliqués en représentent la vieillesse. Chacune des classes de ces deux règnes organisés nous oi- fre l'échelle de la vivifjcation de la matière. En effet, la vie, si obscure dans les premiers des êtres, se développe et s'a- grandit à mesure qu'on passe dans des espèces plus perfec- tionnées. Les plantes n'ont qu'une vie végétative, les animaux imparfaits semblent plus végéter que sentir; enfin , les races les plus parfaites vivent, sentent et connoissent. Plus la puis- sance vitale se concentre et ne forme qu'un tout absolu, plus elle se perfectionne , plus elle s'enrichit d'organes. Les êtres tendent tous à leur perfection vitale. ; ainsi chaque individu reçoit un plus grand développement de facultés, à mesure qu il s'avance en âge. De même les êtres les plus imparfaits aspirent à une nature plus parfaite ; c'est pourquoi les espèces reuiontent sans cesse à la chaîne des corps organisés, par une sorte de gravitation vitale. Par exemple , le polype tend à la nature du ver ; celui-ci tend à l'organisation de l'insecte ; l'in- secte aspire à la conformation du mollusque ; celui-ci tend à se rendre poisson, et ainsi de suite jusqu'à l'homme ; comme peut dire que le singe aspire par des modifications succes- sives, à l'organisation du nègre , et le nègre tend à celle du blanc. Chez les plantes , on observe la même gravitation , parce que laaalurc aspire toujonrs àla perfection de sas œuvre.<

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11 paroît donc manifeste que les êtres les plus parfaits sor- tent les moins parfaits, et qu'ils ont seperfectionner parla suite des générations. Les animaux tendent tous à l'homme, les végétaux aspirent tous à l'animalité ; les minéraux cher- chent à se rapprocher du végétal. Mais plus la matière devient vivante, plus elle retombe aisément dans lamort, parce qu'elle a plus d'unilé , et qu'on peut la détruire d'un seul coup. Au contraire , les animaux très-imparfaits , comme les polypes, les vers, sont les plus féconds de tous. Ils ont même des for- ces vitales si adhérentes, qu'ils vivent encore après avoir été partagés , qu'ils reproduisent leurs parties retranchées par le fer, qu'ils se multiplient même en autant d'individus qu'on les divise , témoins les hydres, les actinies, etc. Les végé- taux eux-mêmes ont une vie très-tenace.. Ils se reproduisent par boutures, par surgeons , par caïeux, et par une foule d'autres moyens, outre la greffe et les semences. Les espè- ces d'êtres les moins favorisés du côté de l'intensité de la vie, en sont dédommagés par sa fécondité. L'homme est bien plus facile à tuer que le ver de terre , toute proportion gardée. SI nous avons plus d'intelligence et de sensibilité que le pois- son , il est mille fois plus prolifique et plus vivace. Les ani- maux ijnparfails , les végétaux ont plus de vitalité physique ; nous avons plus de vie sensitive et morale. Nous usons prin- cipalement notre vie par les nerfs et le centre cérébral; les animaux usent la leur par la génération et la nutrition.

Chaque être a donc une dose égale de vie , mais chacun la consomme à sa manière. Plus la vie s'emploie à l'extérieur ])ar la sensibilité et rintelllgence , plus les organes intérieurs s'amortissent ; les animaux vivent beaucoup dans l'inté- rieur , aussi sont- ils plus robustes, plus féconds, plus exempts tic maladies et d'infirmités que l'horume. A mesure que celui- ci existe davantage par la pensée, le sentiment, les affections extérieures , ses organes internes s'affoiblissent et ses forces physiques diminuent.

On observe ainsi plusieurs ordres de vie : i.° Celle de l'in- telligence qui appartient à l'homme ; 2." celle des sensations qui est l'apanage des animaux ; 3." celle de nutrition ou des facultés végétatives qui est particulière aux plantes , quoique les animaux en soient aussi pourvus. Mais toutes ces sortes de vies émanent d'une source commune , de l'âme du monde ou de l'esprit de Dieu; c'est pour cela qu'on a dit qu'il remplis~ soit le monde, qu'il exisloit en tous lieux; que nous vivions et respirions en lui seul. Nos âmes ne sont même que des par- celles de cette âme de l'univers , qui établit partout la con- corde et l'harmonie.

il est évident que la nature ayant créé une série de plantes

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et d'animaux, et s'étant arrêtée à l'homme qui en forme l'ex- trémité supérieure , elle a rassemblé en lui seul toutes les fa- cultés vitales qu'elle avoit distribuées aux races inférieures. L'homme possède donc l'extrait de toute la puissance organi- satrice ; c'est dans son cerveau que vient aboutir l'intelligence divine qui a présidé à la formation des cires. C'est pourquoi l'homme est capable de connoîlre tout ce qui est au-dessous de lui ; car il n'a besoin alors que de faire retourner l'intelli- gence sur la roule qu'elle a suivie dans l'organisation des corps. Ce n'est en quelque sorte qu'une réminiscence de l'âme , puisqu'elle a passé successivement par toutes ces fdières animales pour arriver Jusqu'à l'homme. Nous n'avons donc besoin pour connoîlre, que de développerla faculté pen- sante qui est en nous ; elle contient en elle-même tous les élé- mens des sciences humaines. Ce développement régulier est ce que nous nommons raison , qui se trouve dans tous les hommes, bien qu'elle ne se développe point également chez tous.

Si c'étoit ici le lieu, nous montrerions encore que l'âme aspirant à s'élever , le corps à se rabaisser , toutes les parties inférieures des animaux tendent principalement à la vie phy- sique et brutale , telle que la nutrition et la génération ; tandis que les parties supérieures, contenant l'arbre des nerfs , les sens et le cerveaa, tendent surtout à la vie morale et intel- lectuelle. Je représenterois encore que les animaux l'em- portent par la vie brute , et les hommes par la vie intelli- gente ; que les animaux diminuent d'autant plus la première de ces vies, à mesure qu'ils se rapprochent davantage de l'hu- manité. Il seroit facile de concevoir encore que si la nature créoitunjour des êtres au-dessus del'homme, ils auroient né- cessairement plus d'énergie intellectuelle et moins de vitalité brute , de même que nous voyons l'inverse dans les êtres in- férieurs à nous , en commençant même par le nègre. Il peut exister dans les pensées de la nature, de ces êtres supé- rieurs à l'homme, que toutes les nations du monde ont admis sous le nom de génies , de démons , d'esprits , d'anges , etc. ; ce qui nous annonce que l'âme humaine aspire par toute la terre vers un état plus parfait , et cherche à remonter la lon- gue chaîne des existences possibles jusqu'au trône de la Divi- nité. Nous ne sommes , en effet , que des ébauches d'un type plus parfait , tout comme les animaux ne sont que des ébau- ches successives des hommes imparfaits , et les plantes ne sont que des ébauches d'animaux, ou la trame première de leur organisation.

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Article X. Des espères créées ;, si elles sont immuahles ; el de leurs relations réciproques.

Nous avons reconnu que tontes les parties de Tunivers, se coordonnant nécessairement l'une par réciprociié avec l'au- tre , dévoient composer un système qui s'enchaîne par des connexions mullipliées. Notre globe , en parliculicr , ne pos- sédant qu'un nombre déterminé d'élémens organisables , ne devoit donc donner naissance qu'aux seuls règnes susceptibles d'en être constitués. De plus , il ne pouvoil subsister que des formes de créatures parfaitement coiTespondantes avec les mi- lieux comme l'air ou l'eau que présente la surface terresire. Enfin , il étoit également indispensable que les créatures se proportionnassent avec les climats, les saisons et les autres influences générales qui dépendent de la constitution de notre splière , dans ses rapports avec noire système planétaire.

On voit donc que rien ne peut être le résultat du hasard ou d'une volonté arbitraire , mais tout est l'enchaîncmenl né- cessaire de plusieurs causes , puisque la vie, la composition des êtres organisés, dépendent du nomlirc desélémens el <}e leur correspondance avec les puissances cosmiques de notre planète.

Et de plus , cette nécessité qui a déterminé les formes des créatures , manifeste tant d'intelligence et de sagesse pour leur coordination , qu'on reconnoît surtout dans elle les lois d'un suprême artisan.

11 faut comprendre , en effet, que tous les êtres vivans et végétans , ne pouvant être considérés que comme des para- sites du globe , doivent se mettre en rapport avec les lieux dans lesquels ils sont placés, sous peine dépérir. Or, les es- pèces se maintiendront constantes et dans leurs limites et leur genre de vie , tant que les circonstances elles subsis- tent continueront de rester les mêmes. Nous ne parlouspas ici des petites variétés que la culture des végétaux , la domes- ticité des animaux, introduisent en quelques races; nous ne traiterons pas aussi des diversités de taille , ne couleurs et de quelques autres modifications superficielles résultantes d'un changement de sol et de climat. Ces légères altérations ne dénaturent pas le type originel de l'espèce, puisqu'elle re- tourne d'elle seule a sa forme primordiale , lorsqu'on ce^se de la contrarier, comme une branche pliée qui se redresse par son propre ressort.

11 y a donc des espèces déterminées , parce qu'il existe, dans la* constitution de notre globe , une série régulière et ordonnée de forces et de mouvemens entre les principes qui le composent. Mais par la même raison, si ces clémens et

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leur action venoient à changer , ou s'ils ont jamais changé dans la lonj^ue carrière des siècles , force fut ou serolt que les espèces créées se missent en harmonie avec l'état du monde qui les nourrissolt , et elles ont s'étendre. Certes , trouverolt-on aujourd'hui des allmens pendant neuf mois de rigoureux hiver, chaque année, en Sibérie, pour les éléphans -dont cette contrée recèle tant d'ossemensl'Que sont devenues ces racesétranges d'énormes quadrupèdes dont on a, de nos jours, exhumé les squelettes , et que nuls regards humains n'ont contemplées vivantes dans les profonds abîmes des âges de noire globei* Q.iand même l'empire de la vie n'auroit subi aucun ravage du temps et des révolutions de notre planète, ne pourrolt-il pas recevoir des atteintes ? N'avons-nous pas montré (article Espèce) que l'homme avoit exterminé plu- sieurs races d'animaux; que d'autres, trop mal armées ou trop lentes , comme l'aï ou le paresseux , éloient sur le point de disparoîlre ; que des irruptions de l'Océan , que des îles englouties et submergées sous les ondes pouvoient anéantir à jamr^is dès espèces de plantes et d'animaux rares et incon- nues partout ailleurs ?

Mais si la population de la nature éprouva de formidables catastrophes, ne pourroit-elle pas ressaisir un jour sa floris- sante fécondité , recréer des races pleines de vivacité , de jeunesse pour bondir surla terre et peupler ses solitudes , loin de l'empire malfaisant de l'homme, leur éternel oppresseur? C'est ^nsi que les hippolames , les giraffes vont se dérober à nos déprédations dans le cœur de l'ardente Afrique , comme les baleines cherchent des asiles de paix entre les glaces inac- cessibles des pôles.

Toutefois , nous voyons bien la possibilité des destruc- tions , mais non pas celle de la création actuelle de nouvelles espèces, tant que les circonstances nous vivons ne chan- geront pas. Il peut s'établir des races mixtes ouhybrides, à la vérité, parle mélange des espèces voisines; mille variétés peuvent devenir plus profondes et plus durables par la con- tiiiuilé des causes qui les ont produites ; les modifications in- icrmédiaires , surtout parmi de petites espèces multipares et voisines , peuvent se diversifier indéfiniment dans la longue course des siècles , mais toutes seront arrêtées entre certaines limiles par ce concours réglé des causes premières qui ne per- met ni aux monstres de subsister, nia la nature d'outre- passer sa sphère d'organisation.

En s'élevant jusqu'à la production de l'homme, la nature nous semble avoir accompli toutes ses œuvres compatibles avec le système actuel de noire globe. Il est facile d'obierver dxns ruaiversallté des créatures, des rapports :rvutucls qui

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les réunissent en une sorte de confédération ou de républi- que , de sorte qu'ils paroissent évidemment ordonnés , les uns relativement aux autres. Le règne végétal , préparateur des substances terrestres , semble les approprier à la nour- riture d'êtres plus perfectionnés dans l'échelle de la vie ; il offre des alimens simples aux animaux herbivores; ceux-ci pré- sentent une proie plus élaborée pour la subsistance des car- nivores ; enfin , l'homme choisit , au milieu de la création , les nourritures les plus délicates et les plus exquises pour sa sustentation; comme étant le chef et le roi de tous les êtres, il a droit égal sur chacun d'eux.

Et d'ailleurs chaque créature s'entretient par d'autres ; l'a- nimal quimeurtlègue ses dépouilles comme une restitution de justice , à ces mêmes herbes dont il fit sa pâture. Si l'on de- mande à quoi servent tant de vermisseaux rampans dans la vase des mers , nous y reconnoîtrons la nourriture inépui- sable des poissons qui viennent ensuite honorer nos tables ou servir aux festins de tant d'autres êtres. Les débris putréfiés de tous les végétaux deviennent l'opulente pâture de millions d'insectes ; ceux-ci à leur tour sont la manne que la prévoyante nature multiplie pour l'existence des oiseaux ; il n'est pas une mousse, pas un chardon qui n'aient ainsi leur destina- tion dans l'engrènementdes rouages de l'univers. Tel être in- férieur qui nous paroît superflu, devient ainsi l'utile élabora- teur de matériaux qui , sans lui peut-être, fussent restés inactifs sur le globe ; ce qui eût été imperfection ou impuis- sance de la nature.

Il est donc manifeste que tel puceron destiné à pomper le superflu de la sève de telle plante, doit nourrir telle sorte de coccinelle qui sera la proie, à son tour , d'un autre animal insectivore , lequel fournira l'aliment d'une autre créature. Ainsi les êtres qui nous paroissent nuisibles sont utiles sous des rapports différens. La nature a-t-elle créé, dira-t-on , ce globe plutôt pour des ronces ou la ciguë, ou pour les serpens et les scorpions que pour l'homme ? Nous répondrons que la nature a se montrer équitable ou proportionnée pour tous les êtres , puisqu'elle les a tous créés également. Elle les a trouvés , sans doute , chacun nécessaires en leur genre , bien que nous ne voyions pas toujours le pourquoi ni le comment de chaque chose. Donc elle devoit veiller à l'existence de la ciguë et à celle de l'homme , chacun suivant son rang , sa des- tination , c'est-à-dire , selon l'intérêt du bien total auquel doivent concourir toutes les créatures.

Nous trouvons fort bon que le froid vif d'un hiver fasse périr force chenilles et hannetons qui rongent nos arbres frui- tiers ; mais les animaux ne pourroient-ils pas également, et

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à aussi bon droit , trouver fort équitable^ ces famines , ces pestes, ces guerres qui retranchent celte nnulli(ude d'hommes rapaces et féroces devenus la désolation , la ruine de toutes les autres créatures qu'Us ravagent sans pitié? Notre destruc- lion est un répit , un bénéfice pour elles ; car plus la race hu- maine est nombreuse, plus elle fait la guerre, pour subsister elle-même, aux animaux et aux végétaux; elle h-s affame , les extermine, en sorte que dans celte république universelle, plus rhoinme, tyran et dominateur, se multiplie , plus il est force que le bas peuple des autres espèces pâtisse et diminue.

Or, moissonner une grande partie du genre humain, qu'est-ce autre chose, pour la nature, que rétablir l'éq^silibre des droits nationaux, cette liberté originelle dont jouissoit jadis chaque citoyen du globe , dans ses asiles solitaires , avant qu'il fût opprimé sous notre empire? Jamais la hache n'avoit frappé ces vénérables géans des forêts; jamais le fer et la flamme n'avoient été portés dans le cœur des animaux pen-^ dant les premiers âges du monde. On verra donc , à bien examiner, que la ruine ou du moins la répression de notre espèce ne fait que rendre une justice distributive équitable, et par-là même , conforme aux lois éternelles du Créateur.

L'homme en murmure , on doit s'y attendre; mais la na- ture impassible , et équitable mère , ne devoit-elle pas avoir égard aussi aux tourmens du bœuf misérable , de la brebis innocente que nous égorgeons pour vivre? Doit-elle être tou- jours^pour l'oppresseur contre la victime? A-telle donc à ja- mais créé tous les êtres pour nous les immolersans cesse? seroit sa bonté, sa justice? N'en reconnoissons-nousque dans ce qui fait notre bien , ou que pour nos seuls intérêts ?

Oui , la peste devient elle-même une sévère , mais équi- table justice , une compensation manifeste, le rétablissement nécessaire des droits de tous, puisque les autres créatures sont impuissantes contre nous. Les fléaux des guerres, ces révo- lutions sanguinairesqui s allument au sein des grands peuples , qui renversent les plus tlorissans empires, sont des événemens d'une fatalité nécessaire, comme des maladies de pléthore dans les corps trop nourris : 1 homme , suprême arbitre des êtres vivans , sait bien porter le ravage sur les races qui s'ac- croissent trop,quimenacent d'envahir le domaine et la nour- riture des races voisines ; mais ce maître de la terre, qui ré^- frénera sa puissance , aspirant , de même que toutes les autres , au despotisme, (juandellc ces'îe d'être contre-balancée?!! faut donc que ce soient la famine , la fuite ou la dispersion de tous les êtres destinés à notre sustentation ; enfin , ce seront les maladies contagieuses, ces affections d'autant plus multipliées et plus funestes qu'elles sévissent dans les populations les plus

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nombreuses , les plus entassées au milieu des villes opulente» et policées. Que l'homme se plaigne de voir la peste mèma entrer comme élément dans les desseins de la nature , qu'il se révolte contre cette idée , en scra-l-on surpris? Les maux le frappent ; c'est la verge qui le corrige , et comme tous les maîtres , il ne peut supporter le châtiment; mais plus on exa- minera ces faits, plus on les irouvera conformes h la loi uni- verselle qui doit maintenir l'équilibre , ou une sorte de droit proportionnel à vivre, pour tous les êtres émanés du Créateur. Il sera facile de reconnoître , dans l'établissement des ve- nins ou des êtres empoisonnés , encore une loi d'équilibre qui maintient les limites entre les créatures ; ils deviennent, dans la république universelle, ce que les prohibitions et les défenses de certaines consommations sont dans la plupart des états les mieux civilisés. Nos téméraires désirs, ne considé- rant que nous seuls pour centre, nous font ainsi méconnoître ces desseins profonds qui maintiennent l'harmonie de tous les êtres par des voies que nous blâmions ; mais elles ne sont pas moins les seules convenables à l'ordre général de la nature.

Article XI. Des rapports d organisalion des espères entre elles ^ ou des familles^ des genres nalureh ; inipossihilité des géné- rations par hasard.

On ne peut douter que les êtres n'aient eu une commune origine, quand on considère leurs ressemblances. Voyez toutes les espèces de rats , de souris, de loirs, de campagnols , de muscardins , etc. ; à quelques nuances près de grandeur , de couleur, et d'autres caractères superficiels, ce sont absolu- ment les mêmes animaux dans l'intérieur, et même par leur genre de vie. On conçoit que ces légères différences ont pu être produites par mille circonstances dans le principe de la formation de ces animaux; c'est ainsi que Tabondance de la nourriture aura pu donnerplus de grosseur à certaines races; la lumière , le froid, la chaleur, l'humidité, les climats au- ront pu faire varier beaucoup toutes ces générations primi- tives. De même le chat, le lynx , la panthère , le léopard, le tigre , le lion , appartiennent absolument à la même tige ori- ginelle ; ils ont les mêmes caractères ; tous voient clair de nuit; tous ont des ongles crochus, rétractiles ; tous ont les mêmes intestins, la même vigueur, la même souplesse de membres, le même instinct sanguinaire et violent. Parmi les oiseaux , on observe de pareilles analogies ; car les moi- neaux, les pinsons, les verdiers, les serins, les chardon- nerets, etc., n'ont rien de différent entre eux que les couleurs du plumage , la taille , et quelques habitudes particulières ; au . fond ce sont les mêmes oiseaux. ÎSous voyons cette ressem-

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blance aussi bien prononcée parmi les végétaux ; en effet le* graminées, telles que les poa^ les (rriza , les avena^ les hordeum^ les aira^ les liolcm , etc., se ressemblent si fort, que la plupart des hommes les confondent sous les noms communs A^herhe et &Ç. foin. Tous les champignons, toutes les papMionacées , tous les becs-de-grue, toutes les ombellifères, les liliacées, les composées, les labiées, offrent encore la preuve la plus com- plète de cette vérité ; et parmi les insectes , tous les papillons, toutes les familles de punaises , de mouches, d'araignées , etc.

La nature n'a donc eu besoin que de varier un peu les di- verses générations d'une même plante, d'un même animal, pour en créer une multitude d'êtres voisins que nous nom- mons espèces. Les variations les plus remarquables sont pour nous des genres , des familles, des classes, et tout cet écha- faudage de méthodes inventées par Tesprit humain pour lui fa- ciliter la connoîssance des objets , mais qui ne sont nullement l'ouvrage de la nature. Avec un seul oiseau , la nature a pu créer par des modifications successives tous les autres oi- seaux: Une seule graminée a pu être transformée par la puis- sance divine en tous les gramens possibles, dans la suite des îemps et rinfluence des circonstances. Nous en dirons autant pour toutes les races de plantes et d'animaux qui peuplent notre monde. La nature n a produit d'abord qu'un animal, qu'un végétal très-simple, quelle a variés à l'infini, et com- pliqués par nuances jusqu'aux plus parfaites créatures.

Cette filiation , si bien manifestée par leurs ressemblances fraternelles , sert encore à démontrer qu'aucun animal ni au- cune plante n'est créé au hasard, mais qu'ils sont tous en- fans d'une même origine , coordonnés les uns par rapport aux autres, comme les diverses pièces d'un immense édifice. De se prouve évidemment l'impossibilité desgénérations fortuites ou résultantes d'un hasard équivoque, sans prévoyance. Cette vérité capitale si souvent contestée, même aujourd'hui, par quelques naturalistes, n'a besoin que d'être mise en son jour ici , pour qu'elle éclate à toutes les intelligences.

Si un animal pouvoit être produit parles matières putré- fiées, qu'auroit besoin la nature d'employer tant d'appareil»; pour l'acte de la reproduction? Pourquoi ces deux sexes, ce merveilleux artifice de tant d'organes et de vaisseaux pour sé- créter, préparer, verser des liqueurs fécondantes .? D'où viendroit la nécessité de ces méandres, de ces labyrinthes, pour élaborer, approprier, perfectionner ce liquide vivifiant l'extraire du sang, l'imprégner du fluide nerveux afin de lui imprimer le plus haut degré d'énergie vitale.? Que sert donc toute cette pompe superflue, tous ces organes consacrés à la reproduction .•' la chose se fera bien plus simplement et p'us

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brièvement avec un peu de poussière délaye'e dans de l'eau , d'où naîtront des grenouilles, ou avec des débris d'une cha- rogne, d'où pulluleront des légions d'insectes.

Quelle inutilité donc à la nature , ou, s'il est permis de le dire, à son sublime auteur même , d'avoir cherche de si longs détours sans nécessité ! Rejetons ces axiomes reconnus an- ciennement des sages : la nature ne fait point de délouvs ; ellena- bonde point en choses superflues et ne manque point au nécessaire.

D'ailleurs , considérons s'il n'est pas réellement absurde et contre la raison commune , de prétendre qu'une matière ina- nimée , ou d'un ordre inférieur et plus ignoble que la matière animée , puisse produire celle-ci quoique plus noble, plus per- fectionnée.Comment ce qui a moins donnera-t-il plus qu'il n'a.** Il faut donc que ce cadavre invente les plus sublimes combi- naisons de figure , d'instinct, d'organisation, d'industrie dans l'insecte qui ea sort ; car ces chairs putréfiées qui se désorga- nisent forment de merveilleuses structures qu'elles-mêmes perdent : le fromage composera l'œil de la mite pour qu'elle aperçoive le soleil et qu'elle sache se guider sur la terre! voilà , je l'avoue , une puissance incompréhensible dans cette masse caséeuse.

Il est superflu de rapporter toutes les expériences aujour- d'hui bien constatées et reconnues de JRédi, de Vallisneri , de Svvammerdam , qui toutes prouvent l'existence antérieure des œufs ou des germes déposés dans ces matières putrides par d'autres insectes. Marcell. Malpighi a de même éprouvé que la terre privée de toute semence ne donnoit aucune plante. Antoine Leuvvenhoeck( Lift. ad. reg. soc. londinens. 1686) , qui le premier découvrit les animalcules infusoires , déclare qu'ayant pris de la chair de veau fraîche , et l'ayant herméti- quement renfermée dans un vase de verre, pendant quelques mois, il s'en écoula une sérosité infecte ; celle-ci, examinée maintefois au microscope , et à diverses époques , toujours en refermant exactement le vase, n'apasmontréle moindre ani- malcule. Depuis ce temps , Spallanzani et d'autres observa- teurs ont répété ce^s expériences, soit dans des vaisseaux clos , soit en plaçant des substances en décomposition sous des gaz privés d'oxygène. Aucun insecte n'y a pris naissance , et les molécules qu'on a pu voir n'étoient pas plus évidemment animées que ne le sont quelques particules d'un liquide en fermentation. Donc, il faut des germes primitivement.

Ilnousparoît aussi impossible qu'un ciron ou une puce s'or- ganisent parfaitement d'eux-mêmes dans des matières putres- centes , que de voir sortir un cheval ou un taureau bondissant d'un grand tas de fumier. Car mettons suffisamment de ma- tière en décomposition, pourquoi n'en naîtroit-il pas un élc-

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pbant, un homme, plutôt que des mouches? Celles-ci ont également des sexes comme nous pour se propager , et n'ont pas moins de muscles et de nerfs dans leur contexlure.

Mais pourquoi ne voyons-nous sortir de la putréfaction que des animalcules? N'est-ce point parce que leurs germes se dérobent à nos regards pas leur excessive ténuité? Et ne pouvant observer comment ces germes sont apportés ou in- sinués , soit par Tair, soit par l'eau, etc. , nous imaginons que ces animaux se composent , s'organisent habilement au moyen de cette agitation de la fermentation putride.

Une autre preuve de la fausseté des générations équivo- ques , de la foiblesse , ou , s'il est permis de le dire , de la pulridité d'une telle opinion, c'est le peu de probabilité que le hasard ( qu'on dit leur présider) combine pourtant tou- jours des espèces bien distinctes, bien conformées. Il n'est pas croyable que le hasard, s'il étoit le père de ces animaux, ne formât quelquefois des ébauches imparfaites, des mons- truosités , les races les plus bizarres et les plus extraordi- naires, des androgynes , des hybrides ou métis; car si la chaleur ou le soleil soulève une matière en pourriture dans un cadavre, je ne vois nulle raison pour qu'elle se combine plutôt de telle sorte que de telle autre , et qu'elle ne cons- truise pas une foule de nouvelles espèces d'infusoires, de mille vermisseaux protéiformes impossibles à décrire. Pour- quoi toujours des vibrions , par exemple, dans la colle de farine ou le vinaigre , et non pas toute autre espèce imagi- nable ? Est-il défendu à cette matière de se constituer plutôt en poissons , en crustacés , ou toute autre figure , puisqu'en elle mille circonstances du hasard sont si variables ? Loin de , ce sont toujours exactement les mêmes formes , les mê- mes espèces de vers intestinaux, ou d'infusoires qui se propa- gent régulièrement; et tandis que nous voyons sur terre des races se mélanger comme le cheval et l'âne, ou donner par- fois naissance a des fœtus monstrueux , la putréfaction , par le plus rare privilège, quoique soumise au hasard, est celle qui conserve religieusement au contraire les formes d'a- nimalcules précises, constantes, parfaites des cysticerques , des vorticelles ou des volvox. Ainsi c'est lagénération sexuelle qui fournit des monstres, et c'est le prétendu hasard de la pu- tréfaction qui donne les espèces les plus pures et les plus per- manentes ; c'est la déraison qui forme la raison , et au con- traire c'est la loi de sagesse qui se détraque.

Je ne sais si un tel renversement d'idées ne prouve pas la prodigieuse erreur d'admettre des générations équivoques. Je n'ajouterai pas que l'athéisme et le matérialisme en ont besoin pour étayer leurs systèmes ; la plus mauvaise manièrt

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d'argumenter est celle de jeter de l'odîeux sur l'opinion des personnes que l'on combat ; c'est recourir au croc en jambes , au lieu de renverser de vive force; c'est trahir la foiblesse de ses autres moyens , et mettre Tinlérêt des hommes cherchant la vérité, du côté de ses adversaires. Olons donc toute idée théologique et ne prenons que les faits réels en eux-mêmes; car s'il y avoit, en effet, de vraies générations par hasard, il faudroit bien les admettre avec toutes leurs conséquences , quelles qu'elles puissent être.

Mais les herbes les plus viles elles-mêmes, abandonnées au milieu de la fange impure des maréc;;ges, gardent constam- ment leurs formes , le nombre de leurs étamines et de leurs pétales, ou des graines de leurs capsules. D'où vient que cette semence de raényanlhe élève perpétuellement ses tiges à trois feuilles et sa jolie corolle panachée d'incarnat, de ce cloaque de boue dans lequel fermentent tant de débris de vé- gétaux? Pourquoi dans ce même limon croupissant, éternel empire du hasard et de la destruction, les œufs du dytisque , d«; l'hydrophile ou de mille aulres insectes , développent-ils invariablement leurs espèces de larves avec le môme nombre de pieds, d'articulations et d'autres parties, toujours parfaites, et d'une régularité tellenient rigoureuse qu'on ne l'a jamais vue encore se démentir i" Certes voilà une obstination d'ordre bien extraordinaire au milieu du plus étrange désordre qu'on puisse imaginer.

Les théologiens , cependant , ont jadis admis avec toute l'école péripatéticienne , les générations spontanées, et saint Thomas , dans maint endroit de la Somme thcoiogi- que Çparl. i, qu. 45, ari. 8, et qu. 78, art. 3, et qu. 71, art. i, elqu. gi , art. 2, etc.) établit que la vertu du ciel, ou ce qu'on a nommé de nos jours les forces cosmiques, suffisent pour en- gendrer des animaux imparfaits, tels que des insectes , non des parfaits comme les quadrupèdes ou les oiseaux. Mais la théologie n'a pas osé décider qu'il se créât par ce pro- cédé des espèces toutes nouvelles ou des races inconnues ; car au contraire l'ange de l'école établit que ces espèces, qui sont le fruit journalier de la putréfaction , furent originaire- ment produites en leurs principes dans les jours de la création du monde, par l'auteur suprême (^«mwa , ^«r/. i , qu. 74., art. i et 3. ); ce qui reviendix)it à dire que leurs germes , ou leurs formes primitives , furent assignés selon des lois générales desquelles ils ne peuvent s'écarter. Voilà donc la main de Dieu placée sur les prétendues générations par hasard.

La vraie science de la nature prêtera ainsi en tout temps le plus ferme appui aux sentimens religieux sur toute la terre , en manifestant un Dieu préformaleur.

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A^ourd'hui la nature se borne donc à conserver, à repro- duire ce qu'elle a jadis organisé. Les modifications que lui fait éprouver la main de l'homme, ne sont que superficielles; lorsqu'il cesse de les maintenir, elles disparoissent et retour- nent à leur type originel ; ainsi le lion qui s'échappe de ses fers , retrouve dans l'indépendance son audace et sa force première.

Les modifications d'animaux ou déplantes que nous appe- lons genres et familles , me paroissent avoir aussi une progres- sion particulière ; si, par exemple , la famille des singes ne formoit dans le principe qu'une seule espèce; parvenue au plus haut point de sa force, ou pour mieux dire, à sa puberté, elle a pu engendrer toutes les espèces de singes que nous voyons -aujourd'hui; ces espèces devenues pubères à leur tour, ont formé des variétés qui seront pour nos descendans de nou- velles espèces ; et cette subdivision se ramifiera de plus en plus; de sorte qu'à la fin des âges, les différences entre les- individus deviendront presque imperceptibles, au lieu que, dans le principe des choses , elles ont être extrêmement frappantes. C'est ainsi que les premières branches d'un arbre sont grosses et remarquables ; mais à mesure qu'elles se di- visent en rameaux plus déliés et plus nombreux , on aperçoit moins leurs variations.

Il n'y a point d'espèces et de genres absolument invariables dans la nature ; ce que nous regardons aujourd'hui comme tel , ne peut pas être constant pour tous les âges du monde ; il n'existe partout que des modifications plus ou moins cons- tantes. Puisque la nature a changé, elle peut bien changer encore. A la vérité, ses opérations sont graduées, insensi- bles pour l'homme qui vit si peu de temps ; mais elles ne se montrent pas moins dans le long cours des siècles. Deux ou trois mille ans sont trop peu de chose pour d'aussi grands chaogemens; car si un individu qui vit un siècle emploie tant d'années à se former , combien de milliers d'an- nées doivent employer les espèces, les classes des corps vi- vans .'' Depuis quarante siècles environ que l'espèce humaine conserve quelques annales de son existence, nous y trouvons fort peu de changemens au physique ; il y en a pourtant au moral : ces anciens Egyptiens , ces Grecs si célèbres , ces il- lustres Romains étoient d'autres hommes que nous , leur his- toire est celle desgéans; auprès d'eux, la plupart des mo- dernes ne sont que des pygmées. Je veux bien que les anciens n'aient été ni plus robustes , ni plus grands , ni plus coura- geux que les hommes d'aujourd'hui , et leurs tombeaux , leurs itatues, leurs monumens nous l'attestent, mais leurs âmes

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étoient certainement plus sublimes et plus fières pour lli plu- part ; elles avoient une trempe plus mâle , et ce qui est le vrai caractère de li force, elles avoient plus de siinplicilé. S'ils n'avoicut ces avantages qu'à leurs constitutions politiques , pourquoi nos modernes ne savent-ils plus se gouverner <le même? On ne disconviendra pas d'ailleurs que les Gaulois nos ancëlrt-s, les (rermains , les Cimbres , ne fussent des hommes plus robustes et plus vigoureux , selon le témoignage unanime des historiens, que leurs descendans. La dégénéra- tion de l'espèce est visible en plus d'un endroit de l'Europe. Qui sait si les arbres , les plantes , les animaux n'ont pas aussi dégénéré? Certainement, si nous considérons les ossemens fossiles des éléphans, des rhinocéros, les débris des anti- ques baleines , les dents pétrifiées des requins ou les glosso- pèlres, il nous sera facile de reconnoître que ces animaux éloienl bien autrement gros et grands que ceux d'aujourd'hui. Nous n'avons plus que des éléphans de dix à douze pieds de haut ; mais les moindres ossemens des anciens en ont jusqu'à vingt ou vingt-deux. Les plus fortes dents de nos requins sont à peine le huitième de nos grands glossopètres. Nos pêcheurs sont étonnés lorsqu'ils rencontrent des baleines de soixante à quatre-vingts pieds de longueur ; qu'auroient-ils dit de celles de cent vingt à cent cinquante pieds qui passoient autrefois pour les plus petites?

La dégénération se montre d'une manière très - marquée chez certaines races humaines , moins encore dans leurs qualités corporelles que dans les facultés de leur esprit ; car toutes les dégradations commencent toujours parles choses les plus délicates, avant de parvenir aux parties plus grossiè- res. L'esprit de l'homme est bien plus sujet à se détériorer que son corps ; Ton voit même que ce dernier gagne en ma- tière ce que le premier perd en facultés. Aussi les hommes les plus bruis , les corps les plus épais , ont bien moins d'in- telligence et de sensibilité que les autres. A mesure donc que l'homme s'enfonce dans la matière, son esprit devient obtus et s'appesantit ; il se rapproche de la classe des brutes , il re- descend vers la pure animalité. Tels sont les imbéciles. En même temps que les corps organisés montent par degrés jus- qu'à liiouime , celui-ci retombe par nuances vers la bêle, et complète ainsi le cercle des vicissitudes de la nature.

L'homme est le nœud qui unit la Divinité à la matière , qui rattache le ciel à la terre. Ce rayon de sagesse et d'intel- ligence qui bi llle dans ses pensées , se réfléchit sur toute la nature. Nous sommes la chaîne de communication entre tous les êtres , le corps intermédiaire entre Dieu et les créatu-

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res (i). Nous naissons mioîstres et inlerprèles cle ses volon- tés sur tout ce qui respire ; mais nous sommes desinstrumens qu'il brise , lorsque nous outrepassons ses lois. C'est par les mains de l'homme que la Divinité fait régner Tordre , l'harmonie entre les animaux et les plantes ; le sceptre de la terre nous a été confié. Ne voyons nous pas que nous dispo- sons à notre gré des générations, que nous détruisons les in- dividus surabondans, que nous établissons un juste équilibre entre eux? 11 falloit pour cela que nous fussions composés de deux natures; d'esprit , pour connoître et suivre les volontés du Maître suprême des mondes , et de matière , pour agir sur les substances matérielles.

Il y a donc deux mondes pour l'homme , le monde physi- que et le monde intellectuel , puisque nous sommes de deux substances. Nous portons le monde matériel vers Dieu, et nous rapportons la Divinité vers le monde matériel; nous sommes la voie d'exaltation pour les corps, et d'abaissement pour l'esprit divin. Les matérialistes ne considèrent que la pre- mière de ces voies, les spiritualistesne s'attachent qu'à la se- conde ; d'où il suit que chacun d'eux ne connoît que la moitié de cet univers. Pour le bien connoître il faut donc réunir ces deux branches , parce que chacune d'elles réagit mutuelle- ment sur son antagoniste.

Article XII. De la production et de la destruction perpétuelle des corps organisés.

Les seuls caractères permanens des animaux et des plan- tes , sont leur génération ou leur naissance, leur destruction ou leur mort. Prenez pour exemples , une plante , un in- secte ; toute leur vie n'est qu'une suite de changemens non interrompus ; leur existence est même si passagère , qu'on n'a presque pas le temps de les étudier ; à peine ont-ils paru sur la scène du monde , qu'ils engendrent et meurent. Quoi- que la durée des grands animaux , des arbres , nous paroisse fort considérable, ce n'est pourtant qu'une foible fraction de l'éternité des âges. Si nous examinons ces vicissitudes per- pétuelles de tous les êtres , en ne considérant leur durée que comme un point dans la durée infinie àa monde , nous ver- rons qu'il n'existe en effet qu'une matière vivante modifiée à chaque instant, et passant tour à tour de la vie à la mort, de la mort à la vie. Parce que nous sommes sujets a lamort, le temps

(i) Quis cœlum posset , nisi cœli munere , nosse? Et reperire deum , nisi qui pars ipse deorura est?

Manil. astroa. , Lib. II . ii3.

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nous paroît tout ; mais pour la nature qui ne meurt point , le temps n'est rien. Si nous voulons remarquer combien de gé- nérations humaines sont déjà passées sur le globe , et que nous passerons bientôt comme elles , nous reconnoîtrons aisément qu'un royaume est peu dans le monde ; car , au moment vous lisez ceci, combien de vos semblables meu- rent par toute la terre , et combien d'autres naissent pour ptirir à leur tour? S'il en est de même à chaque instant, si rien n'est stable , la puissance de génération et de destruction est la seule chose durable ; l'homme , les animaux , les plantes , ne sont donc qu'une matière que la nature pétrit sans cesse , pour créer et détruire encore ; les individus ne sont donc rien pour elle , puisqu'elle les immole tous également.

Mais, loin de l'accuser de cruauté, nous devrions peut-être la remercier de cette marche uniforme , puisqu'elle nous ra- niène sans cesse à la vie par le chemin de la mort. Les corps de nos aïeux ne sont pas demeurés inertes dans la terre , ils ont accru sa fécondité ; ils ont fourni aux plantes des sucs ré- parateurs , aux animaux des substances nourricières; ils ont repassé à l'existence dans de nouveaux êtres. Ce cadavre in- fect est entré dans la fleur brillante, le papillon, l'oiseau, le robuste quadrupède ; il s'est transformé en parenchyme sa- voureux dans la pêche , l'orange , l'ananas , etc. Ces campa- gnes arrosées, dans les combats, du sang des guerriers , en- graissées de leurs dépouilles , se couvrent chaque été de ri- ches moissons. L'agriculteur mange sans répugnance la chair, le sang et la graisse des soldats , transformés en pain. Les plus vils excrémens sont eux-mêmes un excellent engrais , et tel qui savoure avec délices le suc du raisin, reporte souvent dans l'homme ce qui est sorti de l'homme.

il s'opère donc une perpétuelle métamorphose de tous les corps vivans ; ils se résolvent les uns dans les autres par deux voies ; la nutrition et la génération. Nous ne devons point accuser la nature d'injustice, lorsqu'elle détruit tous les êtres, puisque rien ne pourroit vivre sans ce moyen. Nous ne sub- sistons que par la destruction des animaux et des végétaux , et ceux-ci ne peuvent nous fournir de nouvelles nourritures qu'en s'emparant de mille débris. Si l'homme ne r endoit rien à la terre, épuisée par ses déprédations, elle le laisseroit bien- tôt périr de faim ; si rien ne pouvoit mourir, nul être ne pourroit trouver d'alimens. Il faut que l'homme mange la mort pour conserver sa vie.

Cependant qu'on ne pense pas que cette terre soit l'affreux cloaque de tous les crimes, un repaire de monstres et de leurs fureurs. Hommes qui créez vous-mêmes toutes vos misères , si vous pouviez interroger les êtres de la nature, et entendre

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l<>urs réponses , combien ils démentiroient vos reproches! Voyez-la, cette terre, aux jours du printemps, brillante des fleurs qui Témaillent, et des animaux qui la peuplent. Quels hymnes de joie et d'amour relenlisscnt dans les campagnes et au sein des forêts? Séjour délicieux se préparent les allian- ces perpétuelles des fleurs, les plus tendres harmonies ap- pellent les sexes sur le lit nuptial, mystérieux asiles témoins de tant d'hyménées , jusque dans le fond des abîmes de rOcéan , ou sur les âpres rochers des Alpes et du Caucase. Amour, âme de la nature , qui exhales un parfum ravissant sur toute la création , dans quel doux enchantement tu plon- ges les êtres émanés de la prodigue puissance ! Oui, la na- ture , en ordonnant leurs destinées , leur devoit le bonheur: ils le trouvent dans sa source , en se confiant à ces impul- sions sacrées qu'elle leur inspire pour accomplir la perpé- tuité de leurs espèces , jusque-là que les peines maternelles se transforment encore en de nouvelles jouissances.

Si des matières organisées deviennent nécessaires pourré- parer les organes , c'est que rien ne peut nourrir que ce qui est le résultat de la nourriture ; ainsi , les seules substances végétales et animales sont capables de fournir desalimens, de soutenir Texislence. Nous assimilons en notre chair , en notre sang, et en nos propres humeurs , le pain, la viande, les fruits que nous mangeons ; mais les minéraux n'étant pas organisés , et n'ayant point une vie analogue à la nôtre , sont incapables de nourrir. En effet , la vie ne peut subsister que par 1^ vie ou ce qui a vécu.

Le besoin de la nourriture dans les animaux et les plan- tes , dépend de deux causes. La première , est que , faisant continuellement des pertes , ils ont besoin de réparation , puisque tous les corps vivans s'usent par les frottemens réci- proques de leurs diverses pièces, de sorte que la nutrition doit s'opérer en raison des destructions. C'est pourquoi les hom- mes de peine , les animaux qui travaillent beaucoup , les es- pèces qui se donnent de grands mouvemens , comme les bêtes féroces , ont besoin de manger en proportion de l'affoiblisse- ment de leurs corps , tandis que les individus qui perdent peu , les animaux , les arbres , qui passent l'hiver dans l'en- gourdissement , n'ont presque aucun besoin d'alimens. 11 arrive même que , par cette déperdition graduée des anciens organes et par leur réparation continuelle au moyen des ali- mens, l'animal , le végétal, parviennent à renouveler entiè- rement le corps ; de sorte que le vieillard n'a plus la même peau, les mêmes fibres qu'il possédoit dans son jeune âge ; il a dépouillé sa jeunesse pour revêtir le triste habillement de la décrépitude. Cette mue successive est très-apparente dans les

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arbres , les reptiles , les insectes , qui changenl plusieurs fois de vêtemens extérieurs pendant leur vie , surtout au renou- vellement des saisons.

La seconde cause qui n'est qu'une suite de la précédente , c'est que tout corps vivant est attiré vers son aliment propre par la faim. Celle-ci ne diffère peut-être nullement de la puissance qui attire entre elles les molécules d'un sel lorsqu'il se cristallise ; car c'est par une sorte d'affinité que les élé- mens d'un corps vivant cherchent à s'accroître , ou bien à réparer leurs pertes. Chaque partie de l'organisation a même une faculté attractive qui lui est propre ; ainsi l'os attire l'os , la chair compose la chair, la membrane organise la membrane, le nerf engendre le nerf: dans le végétal il en est de môme ; il s'opère des digestions successives dans tout corps vivant; la première débarrasse seulement l'aliment des parties les plus grossières ; les digestions suivantes font subir à la matière nutritive d'autres dépurations , et la vivifient peu à peu , afin de la rendre capable de remplacer les parties qui se détério- rent. La faim n'est donc qu'un défaut des élémens qui com- posent le corps , et qui tendent à se réparer. L'existence de tout animal, de toute plante, ne se soutient même que par un certain équilibre entre les puissances de destruction et de réparation qui agissent pendant toute la durée de leur car- rière. Dans la jeunesse, la force réparatrice est dominante , c'est pourquoi les corps vivans s'accroissent et parviennent à la plénitude de leur vigueur ; mais lorsqu'elle s'est épuisée par la conlinuilé même de son action, celte force est rempla- cée par celle de destruction qui agit toujours d'une manière inverse à la précédente; ainsi, plus un corps vivant est jeune, plus il s'accroît rapidement , plus il lui faut de nourritures ; à mesure qu'il vieillit il prend moins d'alimens , et ses orga- nes récupèrent moins de forces qu'ils n'en dépensent , de sorte que l'individu doit nécessairement s'affoiblir et périr.

Ce sont même les différences introduites par la nutri- tion qui caractérisent les âges. Dans leur jeunesse , les êtres vivans sont d'une texture molle , spongieuse , dilatable ; mais à mesure qu'ils vieillissent , leurs organes acquièrent plus de solidité , ils deviennent même durs et rigides avec l'âge. On conçoit facilement que les mailles d'un tissu lâche se remplissant peu à peu par l'effet de la nourriture qui s'y accumule , doivent en acquérir plus de dureté , et aug- menter en densité. Cet endurcissement successif doit même parvenir au point de rendre plus difficiles les mouvemens des organes , et d'en obstruer les vaisseaux. Alors, ne pou- vant plus recevoir de nourriture , et faisant toujours des per- tes , il est nécessaire qu'ils périssent. Nous voyons dans

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l'homme , que tous ses organes se de'gradent peu à peu avec la vieillesse ; la vue baisse , l'ouïe devient dure , le goût se perd avec l'appétit , les dénis tombent ainsi que les che- veux, les genoux fléchissent , la tête tremble, la peau se ride ; tout meurt par degrés.

Il y a donc une gradation d'endurcissement des corps vî- vans, depuis leur naissance Jusqu'à leur vieillesse; et comme nous en avons remarqué une pareille depuis les polypes jus- qu'aux plus parfaites espèces d'animaux , nous trouvons que la nature suit dans la série de ses œuvres , la même loi qu'elle s'est imposée pour chaque individu. Le polype est au qua- drupède ce qu'est l'embryon au vieillard , la plantule à un vieux chêne. Il suit de que les espèces naturellement hu- mides el mollasses, doivent vivre plus long-temps, ou manger davantage que les espèces naturellement sèches et rigides , toute proportion gardée ; aussi les poissons vivent bien plus long-temps que les quadrupèdes , et sont beaucoup plus vo- races. Si certaines espèces d'une texture humide ne jouissent pas d'une longue vie, c'est qu'elles sont extrêmement fé- condes , et qu'elles épuisent leur propre existence pour la transmettre toute entière à leurs descendans.

De la nécessité de se nourrir, la nature a tiré encore une loi très-importante pour faire régner l'équilibre entre toutes les espèces vivantes. Sans les animaux herbivores , la terre surchargée de plantes qui s'étoufferoienl entre elles parleur nombre , n'offriroit bientôt qu'un spectacle de destruction. Les petites espèces seroient anéanties parlesplu^ puissantes qui les surmonterolent , et tout s'encombreroit faute de con- sommateurs. Il a donc été nécessaire de créer des familles d'herbivores pour retrancher cette excessive exubérance de la vie végétale. Mais comme les animaux herbivores auroient pu se multiplier à l'excès à leur tour , et détruire jusque dans ses racines tout le règne végétal , il a fallu créer des carnivores qui détruisissent la tropgrande abondance des her- bivores. Enfin , pour contenir les carnivores dans de justes limites, l'homme a été créé sur la terre , et le sceptre lui a été confié sur tout ce qui respire. C'est par lui que le monde se maintient en paix, et puisqu'il devoit régner sur les plan- tes comme sur les animaux, il lui a été donné la faculté de se nourrir en tous lieux de ces deux règnes. C'est ainsi qu'un sage législateur tempère également les différens ordres d'un état les uns par lesaulres, établit cette hiérarchie de pouvoirs et ces pondérations mutuelles qui font régner le calme, l'har- monie et le bonheur au sein des nations.

Le même équilibre de vie subsiste dans l'enipire des eaux, bien qu'il ne s'exécute guère qu'entre des animaux, puisqu'il

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y en a beaucoup plus que de plantes dans TOcéan, C'est ainsi que plusieurs espèces de poissons étant très-carnivores , dé- truisent la surabondance des espèces très-fécondes; celles-ci compriment à leur tour la multiplication excessive d'uneinul- titude de races inférieures.

En instituant une guerre mutuelle entre tous les animaux, la nature n'a cependant pas été cruelle , puisqu'elle donna la ruse au foible pour triompher à son tour de ses tyrans ; puisqu'elle protégea l'innocent par des armes défensives , ou lui donna le moyen d'éviter la mort. Si elle a distribué âes griffes acérées au lion , des serres puissantes à l'aigle , un bec crochu au vautour, des dents cruelles^ au tigre, elle a donné des jambes agiles aux cerfs, àes cornes menaçantes aux taureaux, des nageoires rapides au poisson, des coquilles aux mollusques, un test plus ou moins solide aux crustacés et aux insectes les plus foibles. Elle a défendu les plantes par des épines, des crochets, ou même en a imprégné plusieurs de sucs empoisonnés. Elle a voulu que la terreur suspendît la sensibilité dans les animaux , parce que son dessein est de détruire , mais non pas de faire souffrir.

Encore cette destruction n'est-elle qu'une autre manière die vivre, parce que rien ne meurt en effet. La mort n'est qu'une vie cachée, un minimum d'existence qui retourne par nuances à son maximum, qui est seul apparent pour nous. La matière a sans doute besoin de celle pause, de ce sommeil pour se réveiller avec plus de vigueur, pour puiser dans l'âme vivifiante du monde une nouvelle énergie. C'est ainsi que le sommeil répare nos sens fatigués , et fait couler dans nos veines le feu qui nous ranime chaque matin , et nous remplit d'une exubérance de vie.

Article XUL De la chaleur et de rhumiditéy agens nécessaires à la vie.

Puisque tous les êtres vivans se détruisent, ils doivent en reproduire d'autres à leur place ; car , comme nous l'avons vu, les matériaux des corps organisés tendent à repasser à la vie ; la matière ne peut pas demeurer oisive , puisqu'elle est perpétuellement sollicitée au changement par ses diverses attractions. La procréation est donc toujours proportionnelle k la destruction. Voyez ces terres ardentes de l'équateur, les plantes et les animaux ne vivent qu'un instant, parce qu'ils s'entre-détruisent sans cesse, la chaleur extrême précipite leur existence, leur corruption est si rapide et leur mort si multipliée , Ton est déjà vieux dès la naissante; c'est que les générations sont étemelles et se prodiguent sans inter- ruption , parce que les nourritures ne manquent jamais aux

êlres vivans. En effet, cette profusion de matières alimen- taires permet à tous les germes de se développer , de s'ac- croître , d'engendrer avec toute la latitude possible ; et plus il naît d'animaux et de plantes , plus ils donnent lieu à de nouvelles générations, puisqu'ils leur fournissent en abon- dance tous les moyens de subsister. D'ailleurs la chaleur aug- mente l'activité de la vie, et communique aux facultés pro- pagatrices une sorte d'impétuosité; elle use plus rapidement l'existence. L'homme, Tanimal, la plante, ressemblent par leur vie à un flambeau allumé , dont la mèche enflammée est analogue auxfacultés vitales, comme la matière grasse qui ali- mente la flamme , ressemble au corps de ces différens êtres. Or , plus la mèche brûle fortement et rapidement, plus elle consume promptement le flambeau; de même plus la vie est énergique , moins elle est durable.

Comme la chaleur imprime à tousles êtresune activité per- pétuelle , ils vivent d'une manière plus intense , plus destruc- tive; ils engendrent davantage, ils s'épuisent plus tôt, et meu- rent au bout d'une courte carrière. Dans les climats froids des pôles , les êtres ont, au contraire , de longues intermittences de vie , des sommeils, des engourdissemens , des langueurs dans toutes les fonctions; de vient que leur vie coule plus lentement , semblables à ces lampes-veilleuses qui ne don- nent qu'une foible lumière, mais qui la prolongent beaucoup. Ils végètent plutôt qu'ils ne vivent ; de vient encore que leur puissance reproductive est affoiblie ; et comme ils trou- vent peu de nourritures sous un ciel aussi avare de produc- tions , les générations nouvelles ont peine à s'y multiplier. C'est pour cela que nous rencontrons tant de matière vi- vante sous les tropiques, et si peu vers les pôles. La chaleur n'est pas seulement un grand excitant de la vie ; elle a mul- tiplié encore la matière organisée vers l'équateur ; elle y a pour ainsi dire concentré toutes les substances de vie. On conçoit, en effet, qu'il doit s'établir un écoulement conti- nuel de matière animée des contrées polaires vers les pays chauds qui en sont comme le grand réservoir.Tout de même que les fleuves sortant des montagnes , vont ensevelir leurs eaux dans l'Océan, ainsi les peuples du Nord descendent vers le Midi, et des bandes d'oiseaux, de poissons, de qua- drupèdes émigrent souvent dans les régions chaudes. Mais comme il arriveroit bientôt un épuisement total de la matière animée vers les pôles , la nature y a refoulé des êtres vivans pour remplacer ceux qui en sortent. Ainsi l'Océan est bien plus fécond près des pôles que vers l'équateur; il semble que les habitans des mers renaissent incessamment dans les zones froides. Nous voyons les harengs , les morues , les saumons ,

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les esturgeons, les baleines, et une multitude d'espèces pul- luler à l'excès sous les zones glaciales; tandis que les chau- des mers des tropiques sont , à proportion, bien moins fé- condes. Cet effet est peut-être produit par la diverse salure de l'Océan , car dans les pays froids il doit tenir moins de sel en dissolution; mais sous le brûlant équateur, ses eaux doi- vent en dissoudre en plus grande quantité; ce qui, joint k leur évaporation , peut augmenter leur salure. De même que nous fuyons un air chargé d'émanations désagréables , les poissons doivent préférer les ondes moins amèrcs des con- trées glaciales. D'ailleurs, le fond de l'Océan conserve, môme vers les pôles , une température assez douce qui fa- vorise la multiplication des poissons , et ils n'y sont peut- être pas si troublés que dans les mers des tropiques , tou- jours peuplées de races sanguinaires, telles que les requins, les liburons, les dorades, etc. Si les continens sont plusslériles dans les pays froids , les mers sont au contraire plus fécondes vers les pôles, et plus dévastées entre les tropiques.

Ainsi les eaux réparent aux pôles ce que perd la terre. Nous voyons même que les productions vivantes se multiplient prin- cipalement où l'eau arrose le plus la terre. Considérez ces terrains arides de rx\rabie , ces effrayantes solitudes de l'Afri- que; entièrement privées d'eaux, elles ne présentent qu'une mer immense de sable rien ne vit, rien ne végète. On ne rencontre pas même une touffe de gazon dans l'espace de plu- sieurs lieues de circonférence; on n'y trouve aucun animal , aucun arbre ; le sol entièrement nu est couvert d'un sa- blon mouvant le voyageur s'égare et périt de soif; les vents déchaînés sur ce sol aride élèvent et détruisent mille monticules de sable , ou transportent dans les airs d'épais nuages d'une poussière brûlante. S'il se trouve au milieu de ces déserts quelque foible source , quelque marre d'eau sau- mâtre, le petit terrain qu'elles arrosent est couvert de verdure, d'arbres, de fleurs, et peuplé d'animaux.C'est une île entourée d'une vaste mer de sables stériles, les caravanes viennent se reposer et se désaltérer.

L'eau est ainsi le fondement principal de l'existence des corps vivans , puisqu'ils ne peuvent point subsister sans elle , et qu'ils en reçoivent l'aliment et le mouvement orga- nique. La plupart des mousses périssent par la sécheresse ; mais il suffit de leur rendre de l'eau pour les faire reverdir et revivre, même après plusieurs années. L'on a trouvé quelques espèces d'animalcules que la sécheresse falsoit mou- rir et que l'humidité ressuscitoit tour à tour; tels sont les rotlfères ^ les tardigvades {yihriones) ^ les gordius , etc.

Non-seulement l'eau communique aux animaux et aux

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planios le mouvemetil vital , mais encore il n'est aucune es- pèce qui ne commence son existence dansun état de liquidité, et qui ne se nourrisse par le moyen d'alimens rendus fluides , de sorte que rien ne s'opère dans les corps vivans que par le moyen de l'eau. Les humeurs, telles que le sang, la lymphe dans les animaux , la scve et les sucs dans les plantes , ne re- çoivent leur fluidité que par l'eau qui tient en dissolution les matières qu'elles contiennent. La liqueur séminale qui est la quintessence vitale de toutes les parties du corps , est de même. La nutrition et la génération, ces deux genres de fonctions si importantes dans l'économicvivante, ne peuvent donc s'exécuter que par l'intervention des liquides , parce que ceux-ci tenant les molécules de matières dans un élat de division et de mobilisé extrême, facilitent leurs conibi- naisons. Des corps solides, au contraire, ne pourroient point agir (i).

Il est même visible que l'eau ne sert pas seulement d'exci- pient aux molécules organisées, qu'elle ne se borne pôs à les charrier , à faciliter leur arrangement, mais qu'elle y entre même comme principe constituant. C'est ce que démonîre l'expérience des arbres, des graines qui s'accroissent dr.ns l'eau seule et y acquièrent un grand développement. L'eau n'est point un empire stérile , l'Océan est même beaucoup plus peuplé que la terre; son sein est rempli d'une multi- tude innombrable d'animaux de toute espèce. Nous voyons aussi que les contrées aquatiques et profondes sont infiniment plus fertiles en productions vivantes que les terrains aride?. On remarque encore qu'un animal , un végétal , nés dans un sol bas et humide, sont beaucoup plus gros, plus grands que les mêmes espèces nées dans leslieux secs et élevés. Com- parez , parmi les hommes, ces gros et gras habitans de la Hollande , avec les Arabes Bédouins , si décharnés, si sers , ou les bœufs épais de la Flandre avec le bétail maigre et ner- veux des stériles montagnes.

D'ailleurs les générations sont plus fécondes et plus miilii- pliées dans les lieux aquatiques. C'est que fourmillent des millions d'insectes, de yers , de champignons, d'algues, de graminées , et tous ces êtres qui semblent n'exister que pour engendrer et mourir. Comme la putréfaction y est pionipte et générale, la multiplication des êtres qui se nourrissen! di; substances corrompues y devient excessive. C'est leur élé- ment naturel, puisque la reproduction se met toujours \n

(i) Corpora non agnri! , nisi sint solula, XXII.

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rapporl avec la corruption. Cette réunion de deux agens contraires avoit fait admettre aux anciens l'existence des gé- nérations par la putréfaction , parce qu'ils les Irouvoient tou- jours ensemble , et toutes deux opérées parla chaleur et rhumidilé.

Rien n'est moins prouvé que ce mode de génération, comme nous l'avons montré; car, pour qu'elle soit produite , il faut qu'il existe des germes de vie, des œufs ou des em- bryons de nouveaux êtres, et qui aient la puissance de recons- truire ce que la putréfaction désorganise. Celle-ci n'est si fa- vorable à la reproduction qu'à cause qu'elle divise les molé- cules des corps organisés et qu'elle les met dans une condi- tion plus propre à se réunir. La chaleur et l'humidité sépa- rant les principes constituans des animaux, des plantes, ren- dent à ces mêmes principes toute leur tendance naturelle à la combinaison ; cette tendance n'est entièrement sallsfaile que dans le corps organisé. Ainsi , les molécules vivantes con- servent une attraction entre elles comme les molécules des substances brutes, et ne se reposent qu'après avoir été com- binées. Nous observons celte atlraclion des molécules vivan- tes , dans la nulrilion ; car plus un animal ou une plante sont jeunes, plus ils appâtent la nourriture; à peu près comme une molécule de sel qui se crislalllse dans une liqueur , attire à elle les molécules de même nature pour s'en accroître. A la vérité , celte attraction chez les minéraux ne forme qu'une simple accumulation à l'extérieur, au lieu que chez les corps organisés cette attraction se fait dans l'intérieur des corps, et par inlus-susceplion; mais le principe est le même. Comme en chimie l'on ne sépare les élémens d'un composé qu'en for- mant d'autres composés, de même un corps vivant ne se dé- compose que pour entrer dans de nouveaux corps. 11 suit de que ces deux agens si puissans sur les matières organisées , la corruption et la génération , reviennent au môme but par deux voies opposées , puisque tout ce qui est engendré se corrompt, et tout ce qui se corrompt engendre. C'est par ce* forces inverses que la nature renouvelle tout ce qui vil sur la terre.

Ces modifications de la substance animée ne s'exécutent que par l'intervention du principe aqueux. Tout être prend naissance dans rhumidilé , et l'eau est la matrice générale de tous les animaux et les végétaux. La multitude des coquil- lages marins répandus par toute la terre , et déposés même sur les plus hautes montagnes à une élévation de quinze cents ou deux mille toises au-dessus du niveau actuel des mers, nous apprend que rOcéan a jadis couvert notre globe. Le

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décrolssement de cette grande masse d'eaux est même devenu sensible depuis plusieurs siècles ; mille terrains submergés , et laissés à sec aujourd'hui , en fournissent la preuve; à cha- que pas nous en trouvons des témoignages dans cette foule de débris de coquilles , dans cas pélrificalions , ces dépôts , ces Jits de terre, ces cristallisations que notre sol recèle partout.

Vidi ego quod fiierat quondam solidissima lellus Esse (retum ; vidi factas ex aequoie terras ; El procul à pelago conchae jacuêre marinse.

Article XIV. De f organisation graduelle des germes vége- taux el animaux.

La terre ayant été presque toute noyée d'eau dans son ori- gine, elle ne pouvoit donc créer et nourrir que des êtres aqua- tiques; et comme la nature s'élève des corps simples aux corps composés , elle donna d'abord naissance à ces ébauches de vie, à ces animalcules microscopiques, à ces moisissures in- formes que nous voyons se multiplier dans toutes les eaux croupies. La puissance vitale essayoit ainsi ses premières forces ; elle s'exerçoit, pour ainsi dire , par divers tâtonne- mens, à de plus sublimes ouvrages. Elle ne forma dans le prin- cipe que des molécules gélatineuses, une sorte de limon glu- llneuxque la chaleur vint animer peu à peu , et qui se résol- voit en putrilage pour se changer bientôt en un essaim d'ani- malcules vivans. Nous observons encore aujourd'hui des faits à peu près semblables dans ces mares d'eau stagnante , Ton rencontre mille germes de vie (i) , qui s'y développent par l'influence d'une chaude température.

Il y a donc des agens principaux dans la génération de tous les êtres; i." l'eau épaissie en mucosité et chargée d'un limon empreint des germes de vie par la suprême intelligence; 2.0 la chaleur solaire , ou cette puissance active et stimulante qui communique le mouvement auxmatlères disposées à la vie.

Comme l'action vitale, dans ces matières simples, y déve- loppqit peu à peu de nouvelles facultés , la continuation de cette action vitale dut y opérer des perfeclionnemens succes-

(i) Les anciens, qui avoienl observé ce fait , iVrnèrent des char- mes de la poe'sie. Ils disoient que Ve'nus e'Ioit née de l'écume de l'Océan et des parties naturelles de Saturne, qui étoit l'allégorie du Temps. Ils avoient aussi placé dans la mer , Protée , dieu marin qui prenoit toutes les formes, et qui représentcit ainsi l'admirable fccoa- dilé de l'eau.

3.4 N A T

sifs. Il se forma donc des êtres plus compliqués: les ébauches d'abord imparfaites se rectifièrent insensiblement. Alors du- rent prendre naissance les polypes, les zoophytes qui com- posent les madrépores, les coraux , les cératophytes, les éponges , etc. Comme le règne végétal s'organisolt en même proportion , Ton vit aussi se former des algues , des conferves^ et une foule d'autres plantes encore peu perfectionnées.

On doit considérer le phénomène de la procréation des êtres comme une évolution successive du principe vital que ia terre a reçu de la Divinité , comme une germination sol- licitée par l'eau et la chaleur du soleil; de même que nous voyons les arbres développer auprinteujps leurs tendresbou- tons, faire sortir leurs feuilles et leurs (leurs dans les beaux jours, les corps organisés sont pour la terre ce que sont les feuilles , les (leurs elles fruits pour les arbres ; ils naissent et tombent de même , mais à diverses époques et non pas tous à la fois. Les corps vivans nous paroissent ainsi une produclioa du globe terrestre , un sédiment de la mer et de l'air, aniu é par la chaleur du soleil.

La différence entre les molécules animales et les molécules végétales , tient à peu de chose chez les plus simples de ces corps vivans, et il y a grande apparence qu'elles étoient d'une nature presque semblable dans le principe. Nous sa- vons mçme par l'expérience que les plantes les plussimples, telles que les algues , les champignons , sont formées à peu près des nsêmCs élémens que les zoophytes et les autres aiii- îTiaux primitifs, puis^]u''elles fournissent également, à l'analyse chimique, des prodnils animaux. Il paroît que les substances végétales sont une dégénérescence de la matière animale ; car lorsque la nature créa les êtres primitifs, elle les doua tous sans doute des mêmes propriétés. Peut-être que certai- nes circoasfançes ayant empêché, dans une partie de ces êtres , le développement des facultés sensitives et contracti- les , il s'établit uu règne secondaire au premier , qui en suivit cependant toutes b's nuances. C'est ainsi que le règne végétal se rapproche par beaucoup d'analogie du règne animal, et prend dans ses diverses produclions une marche parallèle.

La mer, ce grand atelier de la vie , ayant multiplié dans son sein les corps organisés primitifs ou les zoophytes , ils formèrent une gr.ande quantité de terre calcaire. C'est ainsi que nous trouvons aujourd'hui des bancs énormes de n)adrépo- res , des montagnes, des îles entièrement calcaires qui se sont élevées au sein de l'océan dans une longue suite d'âges, et qui doivenl toutes leur origine aux zoophytes. La plupart de nos terrains calcaires ne sont même que le rcsullal de 1 a- nimaiilé. ()\>. i^uoro par quels moyens les zoophytes et les»

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coffuillages transforment l'eau en terre calcaire; cependant, nous en sommes témoins chaque jour. C'est ainsi que le globe terrestre dut prendre de rarcroissement , et les eaux de l'O- céan durent diminuer peu à peu de volume.

Telle fut sans doute la première époque des corps vivans de notre planète. Les zoophytcs en peuvent être regardés comme premiers habilans, et comme ils sojit les plus ^impies, ils doivent elre aussi lesplus naturels de tous les êtres, les plus, voisins des corps élémentaires. , ,

Un degré de plus dans l'organisation produisit la famille des vers, et l'innombrable tribu des coquillages. Un seul coup d'œil sur la plus grande partie du sol que nous habitons, suffira pour nous le montrer couveOs * lits immenses de co- quilles fossiles, dont les analogues vivans ce se retrouvent plus aujourd'hui que dans la profondeur des mers et Sur- des plages lointaines. Quand l'on envisage combien d'années il a fallu pour amasser des quantités si prodigieuses de ces coquillages , on ne petit s'empêcher de croire que la terre ne soit d'une antiquité à peine imaginable. Les pierres des py- ramides de quatre mille ans coiiliennent déjà des coquilles ^ des nummulites.

La terre ferme s'augmentant toujours aux dépens du prin- cipe aqueux, on vit naître sur les confins des deux éléiiiifens, dans la fange inabordable , cette multitude de végétaux impar- faits qui ne vivoient que pour se pourrir et se reconstruire ensuite. Telles furent les races impures des champignons, des algues , des mousses qui préparèrent un terreau fertile pour nourrir dans la suite de plus brillantes colonies de végé- taux. C'est ainsi que la terre sortant lentement des eaux et se couvrant d'un limon marécageux, se dessécha peu à peu et fournit des terrains propres à faire croître lés graminées, k'sfou - gères et mille autres plantes d'une organisation plus composée.

A mesure que la mer laissoit à sec une partie des conti- nens , une foule d'êtres marins furent exposés pendant une longue suite d'âges à vivre sur la terre , et obligés de se passer d'eau. Il falloit donc que ces êtres périssent ou qu'ils devins- sent terrestres, en changeant leur première manière d'exister sous les eaux avec l'habitude de vivre dans l'air. Les vers durent se changer en larves d'insectes, et se métamorphoser en habitans de la terre. Nous voyons aussi les larves des éphé- mères , des dytisques , des hydrophiles , des libellules, et d'une foule d'autres insectes , passer leur première existence dansl'eau, etn'ensorlirque sous leur dernière métamorphose. N'est-ce pas un reste de l'habitude primitive qu'avoient ces animaux de vivre dans l'eau? I! y a même beaucoup de co- quillages univalves qui vivent également bien dans l'eau et sur

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la terre. On voit encore des crabes sortir des eaux et y ren- trer à volonté , comme pour s'essayer peu à peu à la vie ter- restre.

La même modiGcation se remarque parmi les plantes; cap plusieurs familles qui furent enlièrement aquatiques dans le principe , s'apprennent à vivre en partie dans l'eau oi dans l'air: telles sont la prèle, les nénuphars ^ ]es potamogetons ^ le trèfle d'eau, etc. D'autres, plus avancées dans cette habitude , se tiennent seulement près des eaux , comme les salicaires, les lisymachies , les scrophulaîres , les saules , les renoncules , et une foule d'herbes de nos prairies. Quelque jour, selon toute ap- parence , elles seront entièrement accoutumées à la vie ter- restre. ,

Les espèces d'animaux primitifs qui avoient moins de faci- lité pour se mouvoir, furent les plusexposéesà demeurer à sec sans pouvoir retourner dans les eaux. Elles furent donc obli- gées de se rendre terrestres ou de périr ; mais les animaux qui restèrent dans les eaux, y reçurent aussi des modifica- tions successives. Les gastrobranches devinrent peu à peu des poissons, ou l'habitude de nager développa chez eux des organes, et les façonna en rames ou en nageoires. V. Poissons.

La nature marche ainsi de degré en degré , et par la conti- nuité de son action perfectionne ses ouvrages. Des poissons, elle s'éleva à la classe des reptiles. Les anguilles , par exem- ple , sortent souvent des eaux pendant la nuit, et rampent dans les humides prairies à la manière des serpens. La nature tira sans doute de cette manière la classe des reptiles du sein des eaux. Plusieurs de ces dernières espèces , telles que les salamandres , quelques tortues , les crocodiles et plusieurs autres lézards , se ressouvenant encore de leur origine aquatique , vivent tantôt dans l'eau et tantôt sur la terre. Les grenouilles et les crapauds, dans leurs premiers âges, sont même des espèces de poissons appelés têtards ; mais ils changent leur nature aquatique pour prendre une vie mitoyenne entre l'air et 1 eau. Voy. Reptiles.

C'est de celle manière que les animaux se ierrestrisent peu à peu , à mesure que la nature perfectionne davantage leurs organes et leur vie. Elle marque ainsi ses époques de vie. Si les animaux d'abord aquatiques deviennent habitans de la terre; les plantes, à plus forte raison, ne pouvant pas suivre de même qu'eux 'e décroissement des eaux, et se retirer avec elles , ont été obligées de s'accoutumer plutôt à la vie terres- tre : de vient que les eaux contiennent plus d'espèces d'a- nimaux que de plantes. Cette combinaison étoil encore avan«

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tagcnsc , en ce qu'elle présenta d'abord aux animaux qui de- venoient terrestres, des nourritures végétales toutes prêtes pour leur subsistance. Il étoit donc nécessaire que le règne végétal fût assez inuUipllé pour leur fournir une quantité suf- fisante d'alimens.

Les animaux terrestres ont une plus grande complication d'organes que les tribus aquatiques; car la vie aérienne est plus difficile à supporter que l'aquatique , à cause des chan— gemens brusques et considérables que i'atmospîière fait éprou- ver aux êtres dans cbaque saison , et par les variations des températures , de lumière et de ténèbres qui influent beau- coup sur les corps vivans. Les eaux sontmoins exposées à ces thangemens subits et profonds, tout s'y opère d'une manière plus lente et plus graduée -, il leur falioit donc des habitans moins compliqués dans leur organisation : aussi les espèces terrestres sont-elles plus sujettes aux maladies que les races aquatiques.

De la classe des reptiles , la force organisatrice de la na- ture remonta aux oiseaux. De même que le règne animal en- tier paroît émaner d'une seule tige , chacune de ces classes sort d'un seul être primitif, qui se modifie par nuances suc- cessives; car la nature ne s'écarte jamais de ses lois premières et de l'unité de son plan. Une seule espèce d'oiseaux créa toutes les autres espèces ; et de même que nous avons vu tous les êtres tirer leur origine de l'eau , il est vraisemblable que les oiseaux aquatiques furent aussi les premiers de cette classe. En effet, si nous prenons les manchots {aptenodyies ), les pingouins pour exemple , nous verrons qu'ils ne sont encore que des oiseaux imparfaits, à peine ébauchés, quin'ontpour ailes que des moignons , et au lieu de plumes qu'une sorte de duvet court. Leurs pattes sont très-petites , leur démarche est boiteuse , et ils vivent si constamment sur Teau , qu'ils semblent ne point appartenir à la terre. De ces esquisses grossières d'oiseaux , la nature s'avance progressivement aux races mieux conformées; ainsi, des algues tt des manchots ï on remonte à la famille entière des oiseauyi palmipèdes , aux pé- licans , aux guillemots , a.ax plongeons , aux oies et aux canards ; de aux grèbes, aux poules d'eau; et l'on passe à la tribu des scolopaces , tels que les grues , les hérons , les courlis , les bé- casses , les vanneaux et les autres oiseaux de rivage. En remon- tant encore l'échelle de perfection , l'on arrive aux gallinacés, tels que \g.s paons , \es faisans ^ les perdrix , les pigeons ; ceux- ci font le passage à la famille des petits oiseaux granipores , comiue les alouettes., les merles , les fauvettes , etc. ï)e ceux-ci l'on entre dans l'ordre des oiseaux demi-rapaces jiar les mésarr»

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ges , \qs pics giicrlies ^ les roUiers , les huppes ^ les corbeaux , les pies cl 1 on passe à la famille des oiseaux de proie , comme nnliiiis , rpenn'ers, faucons, vaulours, aigles et liibuux. En suivant toujours la gradation, nous trouvons les oiseaux grimpeurs , tels que lcs;?zVs , les guêpiers, les iourans , les anis , enfin , la belle famille Aes perroquets. Voyez Oiseaux.

La même marche que nous avons observée dans les oi- seaux , doit être encore suivie dans la classe des animaux vi- vipares; tant la nature est constante dans celte loi de grada- tion. Ainsi, les cétacés, au premier coup d'œil , sont des animaux informes qui paroissent avoir été originairement poissons , de même que les oiseaux palmipèdes ; mais ils ont reçu des dcveloppemens dans certains organes dont les vrais poissons manquent. Les cétacés sont en quelque sorte les grands embr^onsde la classe des quadrupèdes; car, de la ha- leine , du cachalot et àes dauphins , qui n'ont que des rudimcns informes de membres dans leurs nageoires , on passe par de- grés au lamantin , aux veaux marins , chez lesquels tous les membres se développent peu à peu ; de ceux-ci aVhippopo- tanie , au rhinocéros^ à V éléphant^ a.\i tapir ^ au cochon. De ces animaux l'on remonte à la famille des ruminans , tels que les diameaux ^ les cerfs ., les bœuf s , les chèi'res ., les brebis ; nous entrons ensuite dans l'ordre des édentés , comme les tatous , l'^s four ndliers ; et de dans la famille des rongeurs , comme les porc- é pics ^ les marmottes , les rats , les castors , les lièi'res , les écureuils , etc. On passe des hérissons et des taupes a la tribu des espèces canwores , tels que les ours , les iclineumous, les martes et putois., enfin les cldens , les lions , les chats., les cicettes., etc. Nous remontons ensuite par les galéupiihèques aux charnue-souris ; de celles-ci aux phalangers., aux didelphes , qui font un passage aux makis, cl de aux singes.

On peut voir dans cet arrangement comment les oiseaux palmipèdes correspondent aux cétacés, les oiseaux de rivage aux races des quadrupèdes aquatiques , les gallinacés aux ru- minans, les oiseaux de proie aux mammifères carnivores , les oiseaux granivores aux quadrupèdes rongeurs, et les per- roquets aux singes. Voyez Quadrupèdes.

11 V a même une gradation de Ihumidilé à la sécheresse, depuis les oiseaux palmipèdes et les cétacés jusqu'aux perro- quets et aux singes , ([ui sont à la tête de ces deux classes «l'animaux. Ainsi, ces premiers ordres d'animaux sont aqua- tiques; viennent ensuite les mauunifères et les oiseaux qui se tiennent seulement dans la boue , tels que les scolopaces et les bêtes brutes; on trouve après, les gallinacés e les ru- minans, qui fréquentent les champs , les prairies; puis les quadrupèdes ron^jeurs et les oisillons granivores , qui aiment

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les terrains un peu plus élevés ; puis les oiseaux <le proie , les carnassiers, qui préfèrent les lieux secs et chauds ; enfin les singes et les perroquets ne se plaisent que sur les arbres, comme s'ils fuyoient encore plus 1 humidité.

Ar.ïiCLE XV. De l'influence de la chaleur et de la sécheresse sur les corpj vi^ans.

\ mesure que les êtres se perfectionnent davantage, ils ont une compiexion plus aride , plus maigre ; au lieu que les espèces inoins parfaites sont d'une nature plus molle, plus humide et plus grasse ;' d'ailleurs les facultés intcllec- luclles diminuent en même progression. Comparez une oie, nn cochon , qui recherchent toujours la fange et l'humidité , avec l'écureuil el la fauvette , espèces grêles et délicates , qui désertent les lieux aquatiques : vous trouverez les premiers gros , lourds , stupldes ; les seconds , plus maigres , vifs , sensibles et spirituels. Plus un être tient d'humidité dans sa constitution, plus il est porté aux fonctions brutes et tout ar.lmales, telles que la nutrition et la génération; au con- traire , plus un être est doué d'une compiexion sèche , plus il est porté aux opérations de la sensibilité , telles que la vivacité, l'esprit , la délicatesse. Lorsqu'un genre de fonc- tions devient fort actif dans l'économie vivante , les autres «liminuenl en même proportion; il arrive de que les fonc- tions génératives et nutritives contrebalancent les fonctions de la^ensibllité et de l'inielligence. Dans les classes les plus simples du règne animal, telles que les zoophytes, les co- quillages , les poissons , etc. , les systèmes nutritif et géné- ralif ont une grande prépondérance : de vient que ces animaux sont tous très-voraces , très-féconds et fort peu in- tcUigens. Dans les classes les plus compliquées, telles que les mammifères et les oiseaux , le système sensitif est nu contraire le plus actif; d'où il suit qu'ils sont plus intel- iigcns, plus sensibles, plus vifs, mais en général bien moins féconds et moins voraces.

On observe la même analogie parmi les végétaux ; car les espèces qui vivent dans les terrains humides , ont une tex- ture molle , spongieuse , qui n'a guère qu'une saveur fade , insipide , et des propriétés presque nulles ; en revanche , les plantes nourries dans un soi aride et brûlé du soleil , ont une texture sèche , fibreuse , des saveurs très-fortes et des propriétés extrêmement actives.

Ainsi, une folble chaleur excite déjà la végétation ; la Jiédeur soutient la vie tempérée des espèces à sang froid ; l'ardeur développe la sensibilité et l'amour. De mêine la pré- icuce de iii lumière éveille , son absence fait dormir ; un peu

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de froid engourdit; le grand froid lue, tandis que le soleil atlire toujours vers la vie. L'homme est surtout un animal solaire; les individus les plus chauds sont aussi les plusmâles, les plus capables d^'amour; et cette ardeur de tempérament se déploie manifestement dans l'âge le plus bouillant de l'existence.

L'humidité communique aux animaux et aux plantes l'iner- tie, la mollesse du tissu, la simplicité dans l'organisation , avec des fonctions nutritives et reproductives fort étendues. La sécheresse ou la chaleur communiquent, au contraire, de l'activité , de l'aridité au tissu organique ; elles compliquent les fonctions vitales , dévelrppent dans les animaux la fa- culté sensilive et intellectuelle ; dans les végétaux , les pro- priétés sapides et énergiques , mais diminuent leurs forces nutritives et génératives. Les classes les plus compliquées et les plus parfaites de ces deux règnes tiennent donc plus de la sécheresse , et les classes plus simples , plus imparfai- tes, reçoivent davantage les influences de l'humidité ; aussi voyons-nous que les quadrupèdes et les oiseaux , dans le règne animal, les arbres et les arbrisseaux, dans le règne végétal , sont terrestres ; tandis que les classes inférieures d'anintaux et de plantes recherchent plus ou moins l'humi- dité et les lieux aquatiques.

Cette différence est la même que celle observée sur chaque individu aux deux extrémités de sa vie. Dans l'enfance de l'homme , des animaux et des plantes , l'organisation est humide, imparfaite et peu développée, comme parmi les clas- ses inférieures des créatures vivantes ; pendant leur âge mûr, l'organisation est sèche, parfaite et entièrement développée, comme dans les classes supérieures des animaux et des végé- taux. Leszoophytes et les vers sont toujours d une nature mu- queuse , comme l'enfance : les insectes et les mollusques sont glutineux , comme l'adolescence; les poissons, les rep- tiles sont cartilagineux, comme la jeunesse ; enfin, les oi- seaux et les quadrupèdes sont osseux, de même que l'âge mûr. Les premiers sont donc toujours jeunes , les derniers pour ainsi dire toujours vieux.

Puisque l'élément humide est par excellence le principe de la reproduction et de la nutrition , les espèces qui tien- nent plus du tempérament humide que de la nature sèche, seront aussi les plus fécondes et les plus voraces. Rien n'est plus destructif qu'un insecte et plus goulu qu'un poisson ; rien aussi ne pullule davantage que ces animaux. 11 en est de même des plantes les plus simples qui se multiplient à fin- fini ; c'est que l'élément humide domine dans tous ces êtres.

Nous observons encore que chez les animaux , les organe»

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destinés à la nulritioh et à la reproduction , sont plus humi- des que ceux qui servent aux sensations , au mouvement et à la reproduction des idées. Ainsi le ventre et les parties géni- tales sont d'une complexion molle , aqueuse, au lieu que la tête , les parties supérieures du corps sont sèches et osseuses. Nous voyons que les plumes , les poils , la peau du ventre des animaux sont d'une couleur plus pâle que les tégumens delà tête , du dos et des membres. Les nuances ternes et pâles sont l'indice de l'humidité et de la foiblesse , tandis que les couleurs vives, foncées, sont la marque de la vigueur et de la sécheresse; de vient que les espèces qui dégénèrent par la domesticité , ou que les maladies affolhlissent , ont des teintes plus blanchâtres, plus lavées, plus ternes que les espèces robustes ou sauvages.

Cette considération est surlout frappante dans la comparai- son du sexe mâle au sexe femelle. Le premier montre un tem- ' péramentplus aride , plus musculeux , des formes plus an- guleuses, une sensibilité plus ardente et plus profonde , une intelligence plus étendue , des couleurs vives et foncées , une force vitale plus active et plus vigoureuse que le sexe féminin : il tient davantage du principe de la chaleur et de la sécheresse. Au contraire , la femelle a la complexion plus molle , des formes plus arrondies , une sensibilité plus va- riable et plus superficielle, une intelligence moins grande ,' des couleurs lavées, fades, ternies, une puissance vitale leute et inerte : elle tient plus du principe humide.

Comme le principe humide est surtout approprié à la géné- ration , la nature a donc confier au sexe femelle la con- ception et la nutrition des nouveaux êtres, puisque la com- plexion du mâle leur eût été très-contraire. Comme le prin- cipe humide a besoin , pour être fécondé , de Télément chaud , la nature a ordonné que la femelle recevroit du mâle l'impression vivifiante.

Le principe humide est tellement nécessaire à la multi- plication , que les femmes d'une complexion sèche, fibreuse et d'un caractère hommasse , sont ordinairement stériles ; tandis que celles d'un tempérament sanguin et humide sont très-fécondes pour l'ordinaire. La fonotion des mâles étant de fournir au germe le principe de la chaleur vitale (i), ceux qui possèdent le plus de cet élément sec et chaud sont aussi les plus ardens. Tels sont les hommes bien membres , d'un

(i) Cette chaleur vitale n'est pas seulement le degré de tempe'ra- ture du corps sensible an lliermomèlre , mais une certaine portion du feu principe qui nous anime et qui est surtout mis en mouvement par le calorique ordinaire ; car nous vivons plus intensivement en e'is qu'en hiver , au midi qu'au nord , etc.

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tempérament aride, vigoureux, d'une peau brune , couverle de poils , d'un caractère irascible , impétueux. Une rudesse courageuse convient à Ihomme et aux animaux mâles qu'on dt'sline à la propagation ; une certaine mollesse tendre , ef- féminée, convient à la femme et aux animaux femelles ; car elle indique une constitution favorable à la génération.

La beauté des formes , dans la femme, n'est qu'une plus gr.inde proportion du principe bumide. C'est celui-ci qui donne aux membres la rondeur et la grâce, qui dessine mol- lement tous les contours , qui entretient la fraîcheur , la souplesse de toutes les parties ; aussi lorsque les femmes maigrissent et que leurs muscles et leurs os se prononcent avec l'âge, elles perdent toute leur beauté. La beauté de I homme , au contraire , consiste dans la mâle âpreté de ses traits , dans ses muscles robustes , tendus , dans les saillies de son ossature , dans ses membres nerveux et velus , ses épaules larges, ses cuisses fortes, sa barbe épaisse , etc. Un homme d'une constitution efféminée n'est pas beau, et une femme trop hommasse révolte les sens.

lia femelle est donc dominée par le principe humide, et le mâle par le principe de la chaleur. Voyez dans la femme ce grand développement de son tissu spongieux et cellulaire , cette ampleur de hanches , du bas-ventre , cette proéminence des mamelles, tandis que ses parties musculaires , ses mem- bres, sa poitrine, sa tête, sont minces et petits. Au contraire, tout ce qui est développé chez la femme , est resserré, obli- téré dans l'homme; et tout ce qui est grêle et délicat chez la première , est grani, robuste et prononcé dans le second. Ainsi l'homme a la poitrine elles épaules larges, la tête et le cou forts , à la manière du taureau , les membres fermes et charnus. Toutes les parties supérieures de son corps sont plus développées que les inférieures ; dans la femme , au contraire , toutes les parties inférieures sont plus étendues que les supérieures. Il en est de même dans les sexes des autres animaux. Les mâles vivent plus par la tête , le cœur et les membres; les femelles par la niatrice , l'abdomen , le tissu cellulaire. Comme la femelle est d'une nature humide et molle , toutes les forces vitales descendent vers les régions inférieures ; comme le mâle est d'un tempérament sec et chaud , toutes les parties remontent vers les organes supé- rieurs. Nous observons la même chose parmi tous les indi- vidus des pays secs et élevés , comparés aux habitans des lieux bas et aquatiques. Un Flamand , un Hollandais , ont les hanches larges, le ventre gros , les jambes massives, mais leur tête est petite , leur poitrine serrée ; ils sont plus larges en bas qu'en haut. Leur slalure est comme pyrami-

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i3ale. tJn monlagnard sec, un homme vivant toujours sur un terrain aride et chaud, a la tête grosse, les épaules fortes , mais un ventre rentrant , des reins secs et des jambes grêles ; il est plus gros en haut qu'en bas. C'est que le prin- cipe humide tend à tomber vers la terre , et le principe de la chaleur aspire à s'élever: de vient que les organes secs sont supérieurs, et les parties humides sont inférieures dans tous 1^ animaux.

Mais , comme le principe humide forme la trame première de toute organisation , le radical de toute fonction nutritive , il est donc le plus essentiel de tous les élémens du corps , ani- mal ou végétal. Il est le fondement essentiel de toute vie , puis- qu'on ne meurt dans la vieillesse que par l'entier épuisement de cet humide radical. La nature l'a placé dans le centre du corps vivant, comme la portion la plus précieuse de toutes. C'est aussi par ces organes humides que tous les animaux se ressemblent, parce que tous sont pourvus des fonctions de la vie nutritive et de la vie reproductive. Les organes exté- rieurs qui entourent comme une écorce ce système humide de vie, sont d'une nature plus sèche et plus chaude : ils sont chargés de la vie sensitive , de celle-là qui établit des com- munications entre tous les êtres par le mouvement , le senti- ment et la pensée. Les mâles sont mieux pourvus des organes de la vie sensitive , les femelles de ceux de la vie nutritive et reproductive. Les premiers vivent davantage par l'extérieur, ou la tête : ils sont plus robustes, plus actifs, plus inlelli- gens, Lesecondes vivent davantage par l'intérieur, ou le cœur : elles sont aussi plus douces, plus aimantes, ^lus sédentaires, plus attachées à leurs" petits.

Si tous les êtres se ressemblent par ces organes fondamen- taux et intérieurs , ils diffèrent tous principalement par les or- ganes extérieurs ou l'écorce. Nous avons même fait voir à l'ar- ticle Animal, que plus ces organes extérieurs se perfection- noient et se compliquoient , plus les animaux étoient élevés dans l'échelle des corps vivans. Nous pourrions ajouter ici qu'ils tiennent encore davantage de la nature mâle , tandis que les animaux qui ont moins de celte écorce sensitive et mo- trice, sont aussi plus simples, plus imparfaits, et tiennent davantage de la nature femelle ; c'est pourquoi ils sont plus humides et plus féconds , au lieu que les autres sont plus secs et moins féconds , quoique plus amoureux.

Le principe femelle ou les organes nutritifs et ge'néralifs étant donc plus imporlans , ils sont , pour ainsi dire , le germe de tout ce qui existe. La mère est la tige centrale de toutes les espèces , le père n'en est que le modifi^cateur , la portion extérieure. C'est la femelle qui fournit la matière de tous les

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êtres qui sont engendrés; le mâle ne donne que h forme et l'excitation vitale. Dans les animauxcllesplantes cryptogames on ne découvre à l'exléricur aucun sexe ; mais il est certain que CCS corps vivans sont tous, par leur lissu mou, humide , leur grande fécondité et la simplicité de leur organisation , d'une nature plus femelle que mâle. Les espèces le prin- cipe mâle domine sont plus compliquées, plus intelligentes, plus sensibles qne les espèces domine le principelemelle. lin effet, parmi les animaux et les végétaux les plus impar- faits, il y a plus de femelles que de mâles ; c'est tout le con- traire parmi les êtres les plus parfaits. Nous voyons que chez les phoques on veaux marins^ les rumlnans et parmi les oi- seaux palmipèdes et les scolopaccs, il y a beaucoup plus de femelles que de mâles ; ce qui établit la polygamie dans ces races. En revanche , dans les familles des singes , des quadru- pèdes carnivores , des perroquets, des pics , des oiseaux de proie , le nombre des mâles égale ou même surpasse qnelque- fois celui des femelles; ce sont aussi des espèces très-parfai- tes et les plus intelligentes, les plus robustes du règne animal, La même chose a lieu dans le genre humain : car leshabitans polygames delà zone torride sont bien plus foibles, plus ef- féminés que les peuples du Nord, chez lesquels il naît plus d'hommes que de femmes. (^Consultez l'article Homme.) Les animaux les plus parfaits tiennent donc plus du principe mâle, et les plus imparfaits , du caractère femelle; de sorte que la dégradation de l'échelle de vie est pour ainsi dire, une effé- mination graduée. En effet , les organes qui dépendent des fonctions mâles se détériorent davantage , à mesure qu'on des- cend l'échelle des corps organisés; de sorte qu'il ne reste plus à la fin que les parties femelles. C'est pour cela que les sexes , toujours séparés dans les races les plus perfectionnées , com- mencent à s'oblitérer dans quelques espèces , telles que les aheilles , \es fourmis , les termites neutres , ou bien à se réunir dans les familles hermaphrodites , à se confondre dans les an- drogynes ; enfin ils disparoissent entièrement dans les races les plus simples , telles que les zoophytes. Dans le règne vé- gétal , on passe des dioïques aux monoïques , aux hermaphro- dites , puis aux agames.

Article XVL De la reproduction des corps vivans et des mons- tmosités.

Il n'y a point de fonction , dans les corps organisés , la nature ait déployé plus de grandeur et de magnificence que dans la reproduction des espèces ; quand on voit que les mo- rues, les esturgeons prodiguent chaque année de sept à huit millions d'œufs, et que les moindres insectes pullulent avec

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tant d'Immensité , de même que les plantes jettent un nombre infini de graines ou de semences, il paroît bien que la Divi- nité y imprima le caractère de sa propre immensité pour éter- niser les races créées. Voy. Génération.

Toutes les fonctions des corps vivans se succèdent par une sorte d'évolution, et de transport ou métastase d'un appareil organique sur un autre système d'organes dans l'économie. D'abord, l'animal naissant n'est qu'un sac digestif; il mange et dort beaucoup ; il a les intestins très-volumineux par rapport aux autres organes ; en un mot, il ne vit guère que dans son estomac. De même la larve d'insecte n'est qu'un gros tube digestif; elle dévore étonnamment. A cette époque , la chenille ou toute larve, comme tous les jeunes animaux, sont des pelotes de graisse; celle-ci est la nourriture mise en ré- serve, ou le résultat de la première digestion (surtout dans des épiploons, chez les animaux dormeurs en automne). Les organes génitaux sont encore oblitérés et inactifs ; néanmoins, ils préexistent, même dans la chenille , comme les a vus Hé- rold, en germes ou petits boutons. De même , le jeune végétal ne fait encore que s'accroître avec rapidité.

La seconde digestion ( ou si l'on veut la métamorphose animale , qui a lieu en effet chez les insectes) , est celle du développement des organes externes , du système musculaire , locomoteur, soit dans la grenouille sortant du têtard, soit dans la chenille à l'état de chrysalide. La matière digestive a passé à la seconde filière d'élaboration vitale ; l'animal de- vient pubère , ses humeurs sont moins gélatineuses ; mais plus tôt il s'opère un développement du système fibreux , et celui des organes respiratoires chez les mammifères la poitrine s'élargit à la puberté, chez les têtards les bran- chies tombant, les poumons vésiculeux ou celluleux entrent en fonction , enfin chez les insectes , les trachées de la larve et de la chenille, qui étoient enveloppées de paquets de graisse , s'étendent par la résorption de celle-ci dans l'é- conomie pour servir à d'autres fonctions. Aussi , de l'enfance molle et muqueuse , on passe à la jeunesse vive , mobile , ar- dente , et les insectes parfaits acquièrent des membres bien plus déployés, plus agiles , des ailes pour voler, des pattes pour courir , tous organes qui etoient emmaillottés dans l'é- tat de larve ou chenille. De plus, l'oxygénation ou respiration plus forte accroît l'énergie, soit nerveuse, soit musculaire. La plante, à pareille époque de développement, montre ses bour- geons à fleurs et son feuillage.

3.0 Enfin la troisième digestion , ou le faîte de l'élabora- tion vitale est la production du sperme et de l'œuf chez les scxc$ , ou de la graine dans les fruits des plantes. Pour cet

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effet, les organes digestifs ont diminué de leur aclîvité pro- pre. Chez les animaux à métamorphoses, le tube intestinal se rétrécit étrangement et se raccourcit beaucoup ; ainsi , dans la grenouille , ces circonvolutions spirales des intestins deviennent au contraire un canal seulement replié , mais court. Chez laplupart des larves d'insectes , leur large boyau ou plutôt l'énorme estomac avec des cœcums, un vaste colon et d'autres intestins , se rapetisse , se fronce , se resserre on diverses manières, suivant les espèces, et enfin devient un canal plus court et beaucoup plus étroit. De même , la nourriture , à l'état de larve , étoit abondante ; les mâchoi- res fortes cl dévorantes des chenilles et d'autres espèces , se transforment , soit en une trompe délicate pour sucer les sucs des fleurs , comme font les papillons et diverses mouches. D'ailleurs beaucoup d'espèces qui vivoient , à l'état de lar- ves, de substances végétales assez grossières, comme du bois, des feuilles, etc., qui fournissent peu d'alimens, ne pren- nent plus , à l'état parfont , que des nourritures plus compli- quées ou de nature plus élaborée , comme de la chair, de la sève ou du sang , ou le parenchyme des fruits et semences , etc. De plus , il y a des espèces d'insectes qui ne prennent même aucune nourriture sous leur dernière forme ; tels sont des oè'stres , des éphémères ^ des bonsbyx, etc., qui n'ont plus que des rudimens d'une bouche. Pareillement les sucs végétaux ont été élaborés dans les feuilles et les autres parti-^s de la plante pour composer les fruits et les semences.

Il en résulte alors que la substance organique . d'abord di- gérée dans reslomac des animaux, avoit produit la gélatine, la graisse , chez les animaux jeunes , avant leur puberté , leur métamorphose , dans l'état de larve , parmi les insectes.

En second lieu , raiiment de celte première élaboration a passé au second état, qui est celui du développement des or- ganes extérieurs, aidé concurremment par la fonction res- piratoire qui s'agrandit et prête son secours à rélaboraiioii vitale.

Troisièmement enfin , l'aliment passe à l'élaboration gé- nérative ou \e suminiini de l'organisation; mais alors les v.n~ très foncliotis, telles que la nutritive d'abord , puis les facul- tés extérieures des organes, diminuent et se fanent. Ainsi, poiir la génération , la graisse est résorbée , retravaillée et repor- tée, sous forme de sperme, aux organes reproducteurs. On voit cet effet manifestement chez les animaux dormeurs , les loirs , marmottes, hérissons, etc.; car, en automne, ce sont des pe- lotes de graisse ; ils ont la cavité abdominale farcie d'énor- mes épiploons graisseux dans lesquels sont enfouis les orga- nes génitaux, alors presque nuls ou oblitérés. Mais au prin-

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temps , celte graisse , aliment de réserve , ayant été résor- bée dans l'économie, a repassé à une parfaite élaboration ; aussi ces animaux sont très-maigres , tandis que leurs orga- nes génitaux, leurs testicules, canaux déférens , vésicules sperinatiques sont gorgés de sperme , et les ovaires de la fe- melle sont turgescens d'œufs prêts à élre fécondés (ou pon- dus chez les oiseaux, les poissons, etc.)- De même, les larves d'insectes, si grasses , sivoraces, deviennent, à Tétat par- fait , des animaux plus maigres , plus secs , plus énergiques , et tout consacrés à la fonction reproductive.

Parmi les végétaux , de même la plantule naissante n'a en- core pour fonction que de s'accroître et pomper abondam- ment les sucs nourriciers de la terre ; ensuite elle déploie son feuillage . qui est son appareil respiratoire ; ces organes élaborent les sucs de la plante, et bientôt se développent les fleurs, les pistils et étamines, enfin les semences dans To-

vaire.

La graine du végétal, comme l'œuf de l'animal, sont ainsi les produits de la plus haute élaboration organique de ces deux règnes des créatures. La substance médullaire de la plante sert immédiatement à la production de ses graines , car elle aboutit au placenta ou réceptacle de la Heur. De même , chez les animaux , les fonctions génératrices sont ac- compagnées d'une action essentiellement nerveuse. Leurs or- ganes sexuels reçoivent les principales exti-érnités des ra- meaux nerveux de la moelle épinière , parmi les animaux vertébrés, et des branches analogues du système nerveux ab- dominal dans les classes des mollusques , des crustacés , des insectes et vers. Il en résulte aussi que les fonctions nerveu- ses employées à l'acte de la génération , s'épuisent alors vers la tête et les autres organes des parens ; elles semblent pas- ser en grande parîie dans les embryons produits et fécondés, pour les animer. Aussi plusieurs animaux meurent après le coït , ou même dans le coït. Donc le faîte de l'élabora- tion vitale étoit la reproduction ; les parties les plus élabo- rées dans les êtres animés sont la moelle centrale et les ger- mes ou graines pour les végétaux , et la pulpe nerveuse , les ovules et le sperme chez les animaux.

Ce qui démontre encore cette vérité, c'est l'analogie que l'analyse chimique a découverte entre la substance de la laite et des œufs des poissons , par exemple , et la matière médul- laire du cerveau et des nerfs qui contiennent également du phosphore avec un principe albumineux particulier , tout de même que le sperme. Foy. QEuF.

Comme le mâle domine par ses organes extérieurs, et la fe-

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melle par les inldrieurs (i) , il s'ensuit que chacun d'eux con'^ tribue davantage, dans la génération, à la formation des par- ties sur lesquelles ils influent le plus. Si le principe mâle est surabondant au principe femelle, il doit produire des indi- vidus maies; et s'il est moins abondant, on obtiendra des produits femelles. Aussi les mâles robustes unis à des femel- les foibles engendrent ordinairement des individus mascu- lins ; et dans un cas contraire , il arrive communément l'in- verse. C'est pour cela que la polygamie engendre plus de fe- melles, parce qu'un seul mâle a plusieurs femelles; la po- lyandrie produit plus de mâles , parce qu'une seule femelle a plusieurs mâles.

D'ailleurs les mâles Influent davantage sur les organes ex- térieurs , et les femelles sur les parties centrales. L'expé- rience a fait voir que des béliers à belle laine accouplés avec des brebis à laine commune, ont produit des agneauxà toi- son longue et soyeuse ; tandis que des béliers communs avec des brebis à laine fine, n'ont donné que des agneaux à laine commune. Les individus métis retiennent plus à l'extérieur de la ressemblance paternelle , et davantage de la maternelle à l'intérieur. Les plantes hybrides , qu'on fait naître en cou- vrant le pistil d'une fleur avec la poussière fécondante d'une autre Heur , ressemblent surtout au père par les feuilles et par les autres parties extérieures, et à la mère par les orga- nes internes , suivant les expériences de Kœlreuter.

Il paroît surtout remarquable que les animaux métis et les végétaux hybrides qui peuvent se reproduire , remontent in- sensiblement d'eux-mêmes à la lige maternelle ; ce qui prouve bien qu'elle a une plus grande influence dans la géné- ration que la tige paternelle ; car celle-ci n'agit qu'à l'exté- rieur , au lieu que la première tient aux parties les plus in- tiuies de l'organisation. Si toutefois on augmente l'influence du mâle à chaque génération , l'on parvient enfin à surmonter l'ascendant maternel. Voy. Génération.

(i) Les parties femelles sont toujours centrales , et les parties mâles toujours à la circonférence , dans les plantes comme dans les animaux. On observe chez toutes les fleurs, que les pistils sont placés au milieu, et entourés des étamines qui sont, comme on sait, les parties mâles. Linnaeus pensoit même que l'ovaire et les semences étoient formés par la moelle, les étamines par le bois, les pétales par le liber, et le calice par l'écorce. Comme les parties centrales sont toujours les plus importantes (puisque la nature a eu soin de les sous- traire aux chocs extérieurs), il s'ensuit que le principe femelle est aussi le plus nécessaire dans l'acte de la génération; les animaux et les plantes, sans sexes visibles, ou les cryptogames et agames , peu- vent être considérés comme femelles plutôt que mâles, puisqu'il y a tles femelles capables seules d'engendrer, tels que les pucerous.

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La puissance maternelle a donc dans la génération une plus grande influence que la fonction paternelle. Il y a même des cas elle supplée enlièremcnt celle dernière. Par exemple , il y a des pucerons femelles qui peuvent engendrer sans le concours des mâles. Chez les arbres dioïques (c'est-à- dire , qui ont leurs sexes séparés sur deux pieds différens ) , l'individu femelle peut se reproduire de bouture , ce que l'in- dividu mâle refuse parfois de faire. Enfin les animaux et les végétaux les plus simples , tels que les zoophytcs, les algues, les champignons, me paroissent devoir appartenir plutôt au sexe femelle qu'au sexe mâle , quoiqu'ils n'aient aucun or- gane apparent de génération.

La cause pour laquelle la nature a placer les parties femelles au centre des corps vivans et les organes mâles vers la circonférence, c'est que les preniières étant les plus néces- saires à de foibles existences, et les plus délicates, il Cloit utile qu'elles fussent protégées par des organes piiîs robustes et moins importans. La femme est formée pour demeurer sé- dentaire au milieu de sa famille qu'elle échauffe dans son sein, qu'elle nourrit de son lait, qu'elle soigne avec une tendre sollicitude ; l'homme est pour la protéger, la dé- fendre , lui chercher au loin les choses nécessaires à sa sub- sistance. La mère est comme le cœur de la famille, l'homme en est la tête et le bras ; c'est pourquoi il falloit à la pre- mière une vie plus intérieure, au second une vie plus exté- rieure. Chez les animaux fie mâle apporte aussi à manger à la femelle qui allaite ses petits ou qui couve ses œufs. i)e môme , dans les végétaux , le lois , Técorce, qui sont des parties mâles et d'une nature staminale , protègent les parties centrales ou femelles, comme la moelle, et lui transmettent l'aliment ou la sève nourricière.

Dans l'acte de la génération , la mère fournit les premiers rudimens du nouvel être, ce (jui est très-visible chez les es- pèces ovipares; car les œufs existent déjà tout formés dans le sein maternel avant l'acte de la fécondation. C est ainsi que la poule et les autres oiseaux ont leurs ovaires remplis d'œufs qui n'attendent plus que la fécondation du mâle. Les grenouilles mâles ne fécondent même leurs femelles qu'à Tinslant de la sortie des œufs ou du frai. Les œufs des pois- sons ne sont vivifiés par la laite des mâles qu'après leur sortie du sein des femelles. Dans les plantes, 1 ovaire ren- ferme aussi les rudimens des semences , avant même que la poussière séminale des élamines se soit développée. On observe donc dans toutes les espèces vivantes que les femelles donnent la matière prem.ière ou l'élément cor- porel, que le mâle vient ensuite animer. Le nouvel animal

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la jeune plante, ne sont , pour ainsi dire , qu'une extension du corps maternel , une sorte de bouture qui se forme dans la matrice ou les ovaires , et à laquelle le mâle imprime le mouvement de vie.

11 existe même une foule de végétaux qui ^se reproduisent sans le concours des sexes , mais par rejetons , par caïeux , par surgeons, etc. Tous les zoophytes , les polypes , qui n'ont aucun sexe, se reproduisent aussi par bouture , par des espèces de bourgeons qui se forment sur le tronc maternel, et se détachent ensuite d'eux-mêmes, comme un fruit mur qui tombe de la branche , et qui porte en lui-même les rudi- mens d'un nouvel être. Dans tous ces cas, le sexe mâle est, pour ainsi dire , confondu et incorporé avec le sexe femelle. On a remarqué encore que les arbres qui donnoient beaucoup de boutures ou qui se reproduisoient par rejetons, porloient souvent des (leurs stériles , ou des fruits dans lesquels les se- mences étoient avortées , parce que toute la force de repro- duction s'étoit écoulée par une voie difiérente.

Puisque l'embryon d'un animal ou d'une plante ressemble surtout à la mère, 11 est probable qu'il est comme moulé sur elle, à l'exception des attributs extérieurs qui tiennent à l'induence du sperme mâle. Il est donc vraisemblable que tous les organes de la femelle déposent dans la matrice ou les ovaires un extrait , une essence délicate de chacune de leurs parties ; l'os fournit les rudimens de l'os , le muscle les élé- mens du muscle, la membrane c^x de la menjbrane , etc. l)e plus, chacun des otj, des nmscles , des vaisseaux, doit donner son contingent particulier pour former en petit le même organe que celui dont il sort. L'œuf de la femelle con- li'-iitdonc un abrégé, une miniature de louîcs les parties de son corps, et qui s'arrangent par degrés dans le même ordre. En effet, les organes les plus importons sont les pre- iiiii^rs formés , et les moins essentiels se composent ensuite. Coumie ce travail n'est encore qu'une ébauche facile à modi- fier , le sperme du nsale vient imprimer le sceau de la vie à cette esquisse d'organisation : il opère surtout des change- mens dans les parties extérieures, et s'il est plus acîiîque la force primordiale du germe, il produit un individu rnâie. On voit anisi pourquoi les enfans tiennent pour la plupart de la physionomie de leurs parens et de leur tempérament, surtout lorsque celui-ci est très-prononcé. C'est encore de celle ma- ni.<M-e (jue plusieurs njaladies deviennent héréditaires.

On deriiraidera comment il se fait que des personnes es- tropiées produisent cependant des individus bien coiiformés. C est que la puissance vitale qui organise le fœtus, ne prend pas seulement son modèle sur la mère et le père , mais elle

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suit le type origine! de l'espèce (fue les parens portent em- preint dans eux-mêmes, puisqu'ils viennent d'individus bien conformés. Celn est si vrai , que si la déformation n'est pas seulcmenl individuelle, mais remonte à plusieurs généra- tions aniérieures , elle se propage alors. C'est ainsi que les chiens auxquels on a coupé la queue pendant plusieurs géné- rations , engendrent ensuite des chiens à queue courte; et j'en ai actuellement sous les yeux un exemple. Mais comme la nature tend toujours à reprendre sa direction originaire , il se trouve parmi les portées de ces chiens , des individus à queue plus ou moins longue ; de sorte qu'en abandonnant ces déformations au cours ordinaire de la nature , elles finis- sent par disparoîlre à la suite de plusieurs générations. Nos chiens , nos poules, nos lapins , nos pigeons , et même nos arbres fruitiers , nos fleurs doubles , enfin tous ces êtres dont nous avons modifié la consîltulion , tendent toujours à ren- trer dans leur forme primitive ; car nous avons contrarié leur nature (i). Nos plus belles (leurs ne sont que des monstruo- sités , puisqu'elles sont toutes stériles , et puisque leurs éta- iiaines se sont changées en pétales. H arrive à ces végétaux la même chose qui survient aux hommes et aux femmes énor- mément gras ; ils deviennent incapables d'engendrer, toute leur senjence s'étant , pour ainsi dire , tournée en graisse ; c'est pour cela que les eunuqiîes sont fort gras, et qu'on fait su- bir la castration à tous les animaux qu'on veut engraisser.

Ce changement des étamines ou parties mâles en pétales , tandis que les parties ferneiies ou les pistils restent dans le même état , prouve encore bien , comme nous l'avons dit ci- devant , que les organes extérieurs ou mâles étoient plus mo- difiables que les organes internes ou femelles. Il est facile de voir encore que les eunuques prennent une nature efféminée , parce que le sexe mâle étant détruit chez eux, toute son in- fluence est enlevée : c'est pourquoi les organes femelles do- minent et apportent dans tout le corps rimniidlté, la mol- lesse etrarfoib"iissemenl,qui sont la sniie de leur tempérament.

Les monstruosités sont des aberrations du principe organi- sant, des maladies de la faculté gcnérative. On en connoît de deux sortes , car il y a des monstres par défaut et d'autres par excès. Lorsque la matière manque, ou que la nutrition de l'embryon ne s'opère pas également dans chacune des parties, par quelque empêchement que ce soit, celles-ci de- meurent petites , oblitérées ; c'est ainsiqu'ou voit des hommes

(i) Par une rause inverse , certains organt.s surabondans , comme les hommes à six doigts, peuvent au.ssi se propager, cl ils disparois- .«ient de la même manière que les autres reparoissent. Voyez DÉ6K- nération et Monstres.

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avoir , dès leur naissance , un bras ou une jambe moins nour- ris, moins grands et moins foris que l'autre. On remarque un effet à peu près semblable dans quelques poulets qu'on fait éclore par la chaleur artificielle ; car si les œufs dans lesf|uels ils éloienl n'ont pas été partout également échauffés, les parties dii poule! qui l'ont été le moins demeurent impar- faites et mal développées; tandis que les plus échauffées sont devennes fort grandes , et ont attiré à elles toute la nourri- ture destinée aux autres organes. Le même effet se remarque dans les végétaux; ainsi certains fruits ont quelques parties plus développées que d autres.

Plusieurs caiises physiques peuvent aussi suspendre l'évo- lulion de certains organes; ainsi la compression, l'état ma- ladif d'un membre, dans son état d'embryon, doivent ea arrêter Taccroissemeiit ; car les diverses parties d'un animal ne se forment pas dans la matrice ou dans l'œuf par une superposition de substance, mais elles s'étendent, elles grandissent par une espèce de germination. Par exemple , les br.is, les jambes s'accroissent sur le corps comme des bran- ches qui sortent du tronc d'un arbre, et ils poussent des doigts, des orteils, comme celles-ci se partagent en rameaux. L'embryon animd ressemble au bourgeon d'un arbre ; il est allaché à la matrice et au cordon ombilical, comme un re- jeton greffé sur un tronc. Les quatre membres d'un animal sont autant de rejets, et se développent de la même ma- nière ; aussi les branches des arbres sont des espèces de bras le plus souvent irrégallers , mais placés quelquefois symétri- quement co.mnie dan*? les animaux. La déformation des or- ganes peut être pradiîile dans la mjuice p:ir des chocs, des co.npressions , pir 1 inégalité des forces vitales de chaque partie ; de vi .'nnent plusieurs déformations fnonstrueuses. Il arrive encore que l-> posiilon des parties est quelquefois inverse ; ainsi l'on a trouvé des hommes et des animaux chez lesquels les viscères du bas ventre étoient transposés , le foie étant porté à gauche, la rate et le cœur à droite, etc. Cette erreur peut être causée par un trouble survenu dans le temps delà structure de ces organes. Les taches de naissance, appe- lées émues , parce qu'on les croit produites par certains désirs bizarres des femmes grosses, ne sont autre chose que des maladies locales de la peau , des portions qui n'ont pas éprouvé la même impression vitale que le reste du corps. On pourroit les comparera ces excroissances, ces rugosités, et autres inégalités qui se trouvent sur l'écorce des arbres. D'ail- leurs il peut se rencontrer dans les eaux de l'amnios qui en- tourent le fœtus humain, des substances hétérogènes qui, s'attachanl à quelques parties de sa peau encore très-molle ,

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s'y incorporent et en détériorent le tîssn ; voilà ce qui produit les taches, car il est reconnu que l'imagination de la mère n'a aucune influence sur une partie déterminée de l'embryon ; elle ne peut agir que sur l'individu entier, en troublant les humeurs nourricières qui s'y portent, et en précipitant ou modérant le cours du sang dans la matrice. Comme il n'y a de communication directe entre l'enfant et sa mère que par les humeurs, c'est le seul moyen qu'ils puissent avoir d'agir l'un sur l'autre.

Les monstres par excès sont ordinairement formés par deux embryons qui se sont collés lorsqu'ils étoient encore dans un grand état de mollesse. On trouve quelquefois aussi réunies des cerises , des prunes et autres fruits , parce que naissant très-rapprochés , ils se sont soudés ensemble. De même on voit des œufs à deux faunes, et lorsqu'ils sont cou- vés , les poulets qui en sortent sont doubles et monstrueux. Quelquefois les deux germes ou embryons se sont tellement réunis, qu'un seul a pu se développer entièrement, et que l'autre n'a produit que quelques parties. C'est ce qui se re > marque dans les monstruosités humaines à trois bras , à quatre pieds , etc. Les individus qui naissent avec six doigts aux mains et aux pieds , tiennent cette difformité de la sura- bondance du principe nutritif dans ces parties; comme l'on voit certaines branches d'arbres pousser avec plus de vigueur que les autres , et produire un plus grand nombre de ra- meaux ou des pétales surnuméraires.

Certaines femelles ont contracté une habitude de créer des monstres, ce qui paroît venir d'une constitution maladive de la matrice. Ce sont surtout les espèces d'animaux les plus compliquées ou les plus parfaites. 11 est assez naturel de croire que des êtres si composés sont plus sujets à se déran- ger que des races plus simples ; car à in<;sure qu'une machine est plus compliquée , elle est aussi plus facile à détraquer^ C'est pour cela que l'homme qui est bien plus délicatement organisé que les animaux , est aussi exposé à un bien plus grand nombre de difformités, tandis queles espèces très-sim- ples ne sont presque jamaismonstrueuses. Ce qui arrive dans le sein maternel , peut aussi avoir lieu au dehors ; c'est donc pour cela que les quadrupèdes y les oiseaux et l'homme sur- tout , sont infiniment plus sujets aux maladies que les ani-^ maux des classes inférieures.

Il y a même àes raisons qui font soupçonner que les or- ganes sexuels des femelles peuvent être dans un état d'aber- ration vita'a , tout coiiime l'estomac l'est dans les pâles cou- leurs. Les femmes hystériques , les filles chlorotiques ont le goût dépravé , et mangent des matières incapables de noui:r

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rir, telles que du charbon, des cheveux, de la cendre , du plâtre , de la cire , etc. De même la matrice de ces femmes délicates étant dans un état analogue de dépravation , doit intervenir l'action de la puissance organisante- C'est aussi ce qu'on observe chez les femmes grosses, qui ont le plus de ces envies absurdes, et c'est ce qui a donné naissance à l'o- pinion qu'elles Influoienl sur le fœtus. La matrice a donc, comme l'estomac , une espèce de pica ou de malar.la^ espèce de maladie qui déprave les fonctions de la sensibilité et de la vie.

Les femelles les plus sensibles , les plus délicates, sont, par cette raison , les plus exposées à toutes ces irrégularités dans les produits de la génération ; tandis que les personnes les moins sensibles , les plus robustes , n'y sont presque ja- mais sujettes. Telle est encore la raison pnar laquelle les bctes produisent moins de monstruosités que l'espèce humaine , et les aniinaiix sauvages , moins que les animaux domestiques , et même les végétaux champêtres , moins que les arbres ou les herbes de nos jardins. C'est que nous détournons la puissance vitale de son objet, nous la forçons à se porter vers d'autres régions, nous troublons son action organisante, en voulant rapporter à nous-mêmes ce que nous devons commettre aux soins de la nature. L'homme détourne vers lui les animaux, les végétaux ; la femme elle-même , qui devroit s'oublier pour le nouvel être qu'elle porte dans son sei« , rapporte tout à son propre individu, et néglige celui que lui a confié la na- ture. En reportar.t ainsi dans les autres organes la vie qui s'é- toit concentrée dans son utérus , il est nécessaire que le tra- vail de la génération soit interrompu , et même interverti.

Les changemcns que la domesticité opère sur les animaux et les végétaux sont donc contre nature; ce sont des maladies de dégénération que la puissance de l'homme a rendues hé- réditaires. Pour plier les êtres à notre domination , il a fallu les détériorer , leur ôter les qualités qui les rendoient indé- pendans sur la terre ; le joug de l'esclavage que nous leur avons imposé est devenu uiie sorte de maladie , puisqu'on ne trouve la vraie santé du corps et de l'âme q::'avec la liberté. Notre civilisation n'est qu'une maladie d'affoibli<sement , car il est certain que les peuples sauvages et libres sont infiniment plus actifs , plus sains que nous ; et plus les homm-es se civili- sent, plus le nombre de leurs maladies se multiplie.

Article XVIL Recherches sur les causes prcmlcres dans la reproduction des créatures.

Tous les germes animaux et végétaux qui ont existé ou qui existeront jamais , ont-ils été créés au commencement des

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choses, ou Lien s'en produit-il de nouveaux de jour en jour ,

p.-M' la génération ? Cette question se rattache nécessairement

à celle de la reproduction générale , chez les êtres organisés.

Plusieurs auteurs, avant Charles Bonnet, ont soutenu To-

^pinion d'une création primitive et unique , de laquelle les

* propagations actuelles ne sont que le développement et la

manifestation successive.

Jean-Conrad Peyer ( Mcrycologia , I, i , c. 5 ) , dit , par exemple , que dans cette génération des animaux par des œufs, Ton peut soutenir qu'en chaque œuf, même avant la féconda- tion , il existe un nomhre d images, ou représentations, ou idées ' formatrices , en si grand nombre , que son espèce se puisse multiplier de là, dans toute la série des siècles.

Et celte hypothèse n'est pas si destituée de fondement , ajoute cet auteur, qu'il n'y ait les raisons les plus solides pour la maintenir ; car l'organisation des animaux se montre si extraordinaircmcnt merveilleuse , qu'elle ne peut être qu'un ouvrage de la divine sagesse. C'est démence d'ail rihuer aua animaux eux-mêmes, dit-il, la faculté de procréer leur fœtus; c'est une insigne extravagance des atomistes ou des auteurs qui admettent l'épigénèse, de supposer je ne sais quel con- cours fortuit de molécules particulières qui s'assemblent, s'attirent, se cristallisent ou se concrèlenl aveuglément, et j'ignore, dit-il, comment, avec cet art inconcevable qui sur- passe toute compréhension humaine. Il y a plus , c'est impiété criminelle à des créatures , de ne pas remonter à la Divinité pour cet acte, ou d'aller chercher plutôt des moules plasti- ques, d'imaginer des facultés abstruses ou occultes, des es- prits formateurs , un archée , etc.

Reconnoissons sans doute que toute la structure des ani- maux et des plantes offre des merveilles qui décèlent l'arti- fice le plus sublime d'un être créateur : mais pourquoi ce su- prême artisan n'auroit-il pas pu accorder à chaque individu la faculté de se représenter par des images de soi-même , <lans un nouvel être dans son propre sein ? Que ce soit par une force plastique, comme l'a soutenu Radulphe Cud- %vorlh , dans son système du monde , ou par un moule inté- rieur, comme le dit Buffon , ou par toute autre supposition qu'on peut faire , comme du mélange des semences (i) ou

(i) A l'eg-iid de ceux qui supposent , avec Leeuwenboeck, l'exis- tence du jeune animal flans le sperme du mâle , et qui ont de'cril comment le ver spermaiique s'insinuoit dans l'œuf de la femelle , it y a une foule d'expe'riences qui contredisent cette hypothèse. On sait que Spallanzani a fe'condë des œufs de grenouilles avec du sperme des grenouilles mâles prives d'animalcules spermatiques. Ce f.^it a

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de l'émanaiion des diverses parties du corps," de principes

subtils , etc. : peu importe ici.

Car si l'on suppose que la Divinité soit immédiatement oc- cupée à élaborer des organes de nouveaux êtres , dans l'utérus des feui^'llcs , il s'en suivra plusieurs choses peu probables. Ce n'est pas comme on l'a dit , toutefois , qu'il y ait peu de dignité et de décorum à la première cause , à s'occuper de si petits détails, qu'à former des vermisseaux et des pucerons, aussi bien que des hommes et des baleines ; il n'y a, selon nous , rien d'ignoble et de bas dans la nature, et il convient au contraire , à son souverain Auteur, d'être la source do

tout, «ûroopysTy usrcDiru.

Néanmoins , il paroît évident que le premier être laisse agir les ciuses secondes ; car comme il ne pourroit rien sor- tir que d pa fait de la source de tout ordre et de toute per- feciton , il n'y auroit jamais d'erreurs et de monstruosités, ainsi ({'ic nous voyons des irrégularités , M/^ospr>?'^«rû!, comme les nomme Aristote. Pourroit-on supposer que la matière est un principe revêche ou résistant et opiniâtre aux volontés suprésnes , ou que celles-ci se tro:np(înt ([uelquefois, ou que le grand arcliiiecte peut se troubler et s'écarter de son but? Il est donc plus pro])ab!e que ces anomalies naissent des causes secondes oa de certains étals contre nature.

Q le chai| IL" femelle forme en elle-milme la quantité d'œufs qu'elle sera siiscopiib'e de pondre , ou de germes et semences

lieu p.iieillemeat chez les vivipares. On trouve dans les Transact. philosoph. n.o 1^7 , sect 4 , i histoire d'une chienne qui , portant des petits, reçut un coup violent qui les tiia dans son sein ; elle rendit par la vulve des malièr*^s purulentes et des débris de fœtus, ou d'au- tres parties charnues, assez abondamment. Quelque temps après, elle reçoit le mâle, et son ventre grossit, mais d'une manière difforme. Elle meurt , on la dissèque; à l'ouverture de l'utérus, on trouve dans les deux trompes nn amas d'os, de chairs, ou muscles, avec des membranes et peaux assez solides, qui éioient les résidus, et même des squelettes encore entiers , des chairs de fœtus précédemment tués; ils fermoient si exactement les deux trompes, que non-seule- ment l'eau ou toute autre matière n'y pouvoit pas pénétrer ; mais même une vapeur, oj aura scminalis , ne paroissoil pas capable de traverser ces masses charnues. C-ependanlil y avoitdcs œufs fécondés par cette seconde geslation ; mais ces œufs ne trouvant pas les trom- pes ouvertes et libres pour descendre dans l'utérus, à l'ordinaire, furent repousses dans la cavité de l'abdomen, ils s'attachèrent au mésentère et aux niins ; ils n'étoient séparés de l'utérus que par deux petits follicules minces qui les entouroienl ; ces œufs étoient au nombre de trois, et les petits embryons (|u'ils contenoient ont sans doute péri , faute de nourriture, en tombant ainsi hors de l'utérus. (Voyez les détails, Éphein. nat. car. an. i; obs. \io, et Philos. Trans^ n.» J92,p. 479.)

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qu'elle pourra produire clans tout le cours de sa vie ; cela pa- roît très- vraisemblable , surtout chez les femelles d'oiseaux; on trouve dans leurs ovaires le nombre de vésicules ou d'œufs qu'elles doivent donner pendant tout le temps de leur fécon- dité. Il en sera probablement de même des autres classes d'animaux ; car si de nouveaux œufs dévoient se développer dans les ovaires , à quoi bon les former d'avance ? Ne seroit- il pas plus à propos qu'ils prissent naissance à mesure qu'il en seroit besoin , au lieu d'en avoir tant en réserve d'avance, qui peut-être n'auront jamais l'occasion de se développer; puisque ces femelles sopt exposées à tant de chances de pé- rils p Tous ces fails semblent établir que les germes de tous les animaux sont sortis, dans l'origine, de la main du Créateur.

Si l'on peut présumer que les œufs ou germes soient connés avec les femelles , comment prouver que ceux- ci recèlent les images ou idées, ou les linéamens excessivement ténus , de tous les fœtus à naître ? et qui sait, d'ailleUrs, si l'animalcule ne seroit pas dans le sperme mâle, qui certainement modifie le germe dans les races mélangées ?

Sans prétendre nier ce dernier sentiment, on sait néan- niolns que Malpighi observa, même dans les œufs clairs ou non fécondés, et près du centre , un globule blanc ou cendré , petite masse ou môle qui représente les rudimens du poulet, avant le coït {Ub. de FormationepuUiin oqo ). Haller a remarqué pareillement les chalazes, les membranes de l'œuf, apparte- nant aupoulet; et Spallanzaniobserva le têtarddéjà forn»é dans le frai non fécondé de la grenouille. Or, cette préexistence du germe avant la fécondation, ne peut-elle pas également faire admettre successivement les premiers rudimens ou idées de tous les fœtus nés et à naître , jusqu'à la consommation des siècles? Tel est le système de l'emboîtement des germes, ex- posé par Charles Bonnet.

Brunner et d'autres anatomistes, en combattant ce système, disoient qu'en ce cas les ovaires de notre grand'mère Eve dévoient être terriblement volumineux, pour contenir tous les germes , si petits qu'on les suppose , du genre humain alors à naître.

A la vérité , la matière, réplique-t-on, est capable d'une division incroyable , comme Bob. Boyle en a donné divers exemples (demira SubUlil. cfflmior. ) , puisqu'un grain de musc, sansperdre de son poids sensiblement , imprègne de son odeur de vastes espaces d'air , et même pendant des années. La finesse de l'odorat du chien sent le lièvre de loin. (3n ne sauroit cependant admettre avec la plus saine partie des philosophes, ,que la matière soit divisible à rji:lîni. S'il en étoit ainsi, cha- [^cune de ses parties seroit acluellemeut infinie i or , la matière

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n'est pas <llvlsîble en plus de parties qu'elle n'en contient réellement en acte , comme il .jst facile de le prouver.

Supposons toutefois que rc.uboîfcment des germes soit admis, comme Thypollièse la plus probable aujourd'hui, puisqu'il est certain que les germes préexistent à la féconda- tion dans les fetnclies; cet emboîtement successif demande nécessairement une division de la matière, à l'infini. En ef- fet , une morue pond jusqu à neuf millions d'œufs chaque an- née ; un chêne produit bien 3oo mille glands ; un pavot , 3o à 4-0 «nille semences; or, chacune de ces graines, ou le moindre de ces œufs <loit contenir, d'après celte hypothèse , tous les milliards de milliards degraines ou d'œufs, en germes, qui doivent écîore ou être produits dans l'espace de plusieurs siècles. Je dis que quand on mettroit des chiffres en une ran- gée si longue qu'elle entoureroit le globe terrestre , ils ne suf- firoient pas pour dénombrer l'immensité de germes que de- vroit contenir un seul grain de moutarde. (]'est l'infini conte- nu dans le fini ; c'est l'immensité de l'univers visible , ra- massée dans un point imperceptible, ou plutôt, c'est la plus complète incompréhensibililé, comme l'a démontré de reste God. Ploucquet ( de corpor. orgarJsalor. Générât, disf/uis. philos.., Stufgard, 1749? i't-^.° ) , puisqu'après toutes les générations imaginables , celles-ci ne serolcnl pas plus épuisées qu'au commencement.

La plupart des philosophes, tels que Ch. Bonnet , Spal- lanzani , etc. , effrayés des conséquences de ce système , se contentent de dire que si la matière n'est pas divisible à Vin- fini ., en germes dont chacun doit contt'uir encore des parties hors les unes des autres, et par conséquent doit être plus compliqué que ne le seroient les ato^Ties ou molécules insé- cables d'Epicure, elle peut être divisible d'une manière indé- finie. Si la divisibilité de la matière a d>;s bornes , celles-ci ne sont pas assignables , selon ces philosophes , tant elles s'étendent loin. Quand on admeltroit cette explication, en- core faut-il reconnoître des bornes à la divisibilité.

Alors il s'en suivra un singulier effet. Si Eve a contenu datis son ovaire tous les germes des hommes nés el à naître jusqu'cà la consommation des siècles ( s'il y a une consomma- lion des siècles,) des blancs , des nègres , des Kalmouks , Lapons , etc. , sans doute les femmes de nos jours ne con- tiennent plus chacune qu'un moindre nombre de ces germes qu'elles transmettent à la postérité, et d«jà les femmes sté- riles n'en ont plus. Il sera donc naturel que la provision , à force de s'employer chaque jour, s'épuise. La fin des espèces est donc une suite nécessafi'e de cette hypothèse , à moins qu'on ne fasse intervenir de nouvelles créations. On pourroil ,

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à la vérilé , s'autoriser , pour soutenir l'épuisement progres- sif des germes et la fin du uioiide , de ce que rapporte Clé- ment Alexandrin {S/romat. , l. 4-); iJésus , dil-il , inter- rogé par Marie Salomé , quand le inonde finiroil , répon- dit : quand tes feviines cessewul (Vètre jèrondes. 11 est probable en effet, que la cause de la génération lieiil à la même cause qui conserve l'univers ( Voy. aussi notre Art de perfectionner Vliomnie ^ t. 1 , p. 265 ) ; mais il faut convenir qu'en admet- tant scuienicut cinq à six mille ans de durée déjà passés, à notre espèce et à celle des animaux et des plantes , le nombre des générations eraboîiées seroit déjà bien extraordinaire , sans compter que le monde peut ne pns finir de sitôt.

On voit donc à quelles bizarres conclusions nous condui- sent lonles ces bypothèscs , pour peu qu'on les examine , et combien elles choquent les règles ordinaires et la raison hu- maine. N'est-il pas plus simple d'admettre que ces germes préexistans s'organisent d'avance dans les femelles, par une sécrétion particulière, comme il est probable que les germes des feuilles se forment dans les bourgeons des arbres, chaque printemps, pour réparer celles que l'automne précédent a fait tomber? De mêùae la pince cassée à un crabe ou à une écrevisse , se reproduit; la tête coupée à un ver de terre, se répare ; un polype divisé en morceaux , régénère les por- tions amputées, sans qu'il soit nécessaire de supposer en ces créatures des germes préexistans de toute antiquité ; une naïde ( nais prohoscidea 1 L. ) , qui pousse à son extrémité pos- térieure une autre naïde, comme le rejet d'un fraisier va implanter à quelques pieds un nouveau fraisier , offre des exemples de reproduction qui ne sont rien qu'une extension de l'individu , par 1 accroissement et la nutrition. Supposez qu'au lieu de ces rejets, ce ne soient que de simples gemmules comme les bourgeons à fruit des arbres, ou des germes plus petits encore , ramassés ou concentrés dans des enveloppes de l'œuf, de la graine, dans les ovaires d'animaux ou de vé- gétaux, et qui n'attendent plus que \ai fécondation du mâle pour se réveiller ; vous aurez exactement tous les élémens du nouvel être. La génération ne sera plus qu'une conséquence de la nutrition , dont les matériaux seront plus élaborés, passés dans les dernières filières , soit végétales , soit anima- les , de manière à en recevoir la même disposition organique.

Ce qui renverse d'ailleurs l'hypothèse de remboîtement à l'infini des germes, est la difficulté invincible d'expliquer par-là les monstres et les hybrides oumuleis nés du n)élange de diverses espèces; car si tous les êti"es sont parfaitement formés et emboités par iamain de l'être souverainement puis- sant et sage, comment arrive-t-il que des fœtus naissent avec

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des membres tout transposés, déformés, une tête de veau,^ ou avec les organes sexuels au milieu du visage , ou telle au- tre monstruosité horrible , dont tant de livres renferment les descriptions ? Et qu'on n'attribue pas cela à la prétendue ima- gination maternelle ; car, bien certainement , Timagination d'une poule n'entre pas dans les œufs qu'elle couve , et ce- pendant on voit des poussins monstrueux : même en Egypte, l'on fait éclore des œufs dans des fours , par milliers , on trouve également des poulets difformes , comme le disent les voyageurs. Comment, d'ailleurs, agiroit l'imagination ma- ternelle sur celle du fœtus ? La glande pinéale du fœtus , se- lon l'explication de Descartes , est ébranlée par les impres- sions que lui transmet la passion de sa mère , et de les esprits animaux vont frapper la région du fœtus , à laquelle correspond l'idée transmise par la mère. Mais Wepfer {Eph. nat.cur. an. 3 , ohs. 129) et d'autres auteurs , rapportent les histoires de fœtus humains nés sans cervelle ; or tous ces acé- phales n'ont pu recevoir à leurglande pinéale, ni même dans les autres parties qui leur manquent , les impressions suppo- sées de l'imagination maternelle.

Il faut donc amener sur la scène un architecte spécial du nouvel être , pour le former , l'organiser même quand l'œuf est séparé de la mère chez les ovipares , une âme propre à maintenir la vie du fœtus des vivipares, encore lorsque la mère est malade ou morte.

Quel sera cependant cet architecte qui se fabrique sa mai- son ou son corps? Est-ce, comme dans nos arts mécaniques, par le moyen de l'art ou de la science , d'une haute pré- voyance, que cet être coordonne une structure si merveil- leuse et tellement surprenante que toute notre intelligence n'y sauroit atteindre ? car il nous seroit évidemment impos- sible de former les nerfs et les muscles d'un bras, de manière à le faire mouvoir spontanément : mais , d'où cet architecte a-t-il conçu cette étrange science? du suprême créateur de toutes choses , qui lui imprima les règles si sûres , si éton- nantes de l'édifice animal. Or certes , toute cette science ne reste point dans nous-mêmes, puisque nous ignorons naturel- lement les profondeurs de l'anatomie de nos viscères les plus importans, et l'usage de la plupart des parties de notre cer- veau. Seroit-ca la mère qui communiqueroit cette science à son fœtus , pour que l'âme ou le principe formateur, privé de vue , d'ouïe , au milieu de ce sang , de ces humeurs , de cette lymphe , dans l'obscurité de l'utérus , se représentât une image si nette de l'homme , en distribuât sans erreur tous les membres , les muscles , les nerfs , les moindres fibres , avec cette inconcevable industrie ? Cela paroît encore plus incom-

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prëhensible que le moyen que j'ai de mouvoir précisément le gros orteil aussitôt q-te je le veux.

Il est donc de toute impossibilité d'expliquer la génération des corps organisés , sans recourir à l'intervention cl à la présence même de la Divinité. C'est en quoi Tliisloirc natu- relle est admirable , puisqu'elle ramène perpétueilcmenl nos regards vers ce soleil des intelligences, sanslequcltoule chose seroit incompréhensible, comme sans le soleil physique, tout l'univers nous resteroit éternellement voilé.

Article XVIII. De Vllannowc des créatures organisées^ par rapport à leur destination.

Chaque espèce d'animal et de plante reçoit du principe organisateur , qui est une émanation de la Divinité , une di- rection particulière qui déiermine son mode d'existence , ses mœurs et ses habitudes. \J abeille , par exemple, ti(;nt de ce principe toute son activité naturelle pour amasser soa tiiiel , toute son industrie pour fabriquer ses cellules hexagones , puisque ce même principe a pour but sa propre conservation et la multiplication de chaque espèce. Comme les êtres vivans se sont répandus dans les différentes provinces de la nature, il a fallu qu'ils fussent modifiés de manière à tirer le plus d'a- vantages possibles de leur position; en effet, toutes les créa- tures animées ayant été formées dans Thumldité , leurs corps ont du être dans rorigine très-flexibles et Irès-modifiables.

Ils ont reçu le genre d'équilibre le plus convenable à leur destination naturelle , et d'ordinaire ce qui est attribué ea plus à une partie , se trouve en moins dans d'autres. C'est ainsi, par exemple, que les oiseaux qui volent le mieux, ne peuvent presque pas faire usage de leurs courtes jambes,; comme l'hirondelle; au contraire, l'autruche qui court si rapi- dement, manque de moyens pour le vol. Le lourd colimaçon, privé de défense , en est dédommagé par sa solide coquille qui le protège; et si le serpent fut abandonne sans mem- bres et rampant sur la terre , il reçut un venin redoutable , chez plusieurs espèces, pour le venger de ses agresseurs.

Le principe organisant de toutes les créatures a donc porté ses forces et son développement vers les choses qui lui étoient les plus favorables ou les moins contraires. C'est ainsi que nous voyons les racines des arbres s'étendre dans les bonnes veines de terre , se détourner des mauvaises , éviter une mu- raille , un fossé , une rivière , et leurs branches chercher la lumière. Dans les animaux , cette direction de Tinstinct est bien plus marquée encore , car ils sont attirés vers leur nour- riture, vers leurs femelles; ils ont une industrie particulière dans tout ce qu'ils exécutent. Les manœuvres de mille petits

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insectes sont extrêmement surprenantes, aussi Men que leurs diverses métamorphoses. Cependant toutes ces opérations de l'instinct s'exécutent machinalement , c'est-à-dire , sans rédexion , sans examen de la part des individus. Tous ces mouvemens organiques viennent du principe vital , ou de cette source divine qui gouverne tous ie'o êtres. L'esprit de vie des animaux et des végétaux opère tout en eux ; c'est une lampe veilleuse qui les guide intérieurement dans les obscurs sen- tiers de cette vie. Us ne sont rien pour ainsi dire par eux- mêmes, puisqu'ils ne présentent qu'une masse inanimée, inerte , lorsque la vie les a abandonnés. C'est lui seul qui raisonne pour eux , et qui met tout en mouvement dans leurs différens membres. Voy. Instinct.

Dans l'homme et les autres créatures bien organisées, la vie se subdivise même dans chaque partie, et quoiqu'elle dé- pende de celles de toute la machine , elle conserve cepen- dant des fonctions particulières. Ainsi, l'estomac a sa sensibi- lité particulière; les parties sexuelles ont leur volonté; le cœur a la sienne , aussi bien que les membres , les os , les nerfs , les muscles , les membranes. Tout est vivant dans le corps animé. Ces vies particulières , qui sont des émanations de la vie générale , ont leur existence particulière , leurs fonctions déterminées ; ce sont autant d'animaux dans un seul animal , et qui correspondent tous entre eux. C'est ainsi que l'estomac est tantôt actif, affamé ; tantôt abattu , dégoûté : il sait dis- cerner les alimens convenables, et se soulever d'horreur con- tre les matières empoisonnées ou contraires au corps. La ma- trice a de même ses fonctions bien marquées par ses mens- trues, ses affections , ses diversappctits, et par des irrégularités inconcevables de sensibilité , qui dérangent tont le corps de la femme. Nous sommes composés de plusieurs individus ; il y a l'homme du système osseux , l'homme musculaire, l'homme nerveux, l'homme membraneux, sanguin , celluleux , etc. La perfection des animaux et des végétaux est d'autant plus grande , que le nombre de ces appareils se multiplie et se complique davantage. Ce qui fait la différence d'un homme à un autre homme , c'est que ces divers systèmes organiques ont plus ou moins de force, de grandeur, de puissance vitale > etforment les tempéramens. La plupart des maladies ne sont "même que des inégalités de forces vitales entre les différentes parties du corps; c'est la rupture de l'équilibre de leurs fonc- tions ; de sorte que pour ramener la santé , il est nécessaire de rétablir cotte liarmonie par des secousses en sens con- traire. Les tempéramens sont aussi des maladies constitu- tionnelles, puisqu'ils dépendent tous d'une inégalité radicale entre les différens systèmes organiques du corps ; mais comme

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ils sonl peu considérables , et que rëCt)nomie vivante s'y est habituée , ces maladies sont insensibles. Les animaux et les plantes 1rès-simpl€S,ayant moins d'organes, sont doncmoins exposés aux maladies, et moins sujets aux différences d'équi- libre entre les forces vitales de chacune de leurs parties.

Lors(jue les créatures vivantes se multiplièrent sur le globe terrestre , elles furent organisées relativement à leurs habi- tudes par la suprême intelligence ; car comment un animal aquatique auroit-il pu vivre dans les airs ou sur la terre, sans avoir reçu une conformation capable de s'y maintenir et de s'y reproduire ? Nous voyons que la grenouille garde la forme dun poisson (le té(ard) tant qu'elle demeure dans l'eau; en- suite elle quitte cette forme pour habiter sur terre. Il paroît que certaines circonstances déterminent le développement des organes qui leur sonl les plus favorables, et empêchent > celui des autres. C'est ainsi que les arbres des pays chauds qui tt- n'ont aucune écaille pour recouvrir leurs tendres bourgeons * «J voient se développer ces écailles , dans les pays froids , pour ^ préserver de la gelée les rudîmens délicats de leurs fleurs. De ,a^ même les quadrupèdes, les oiseaux du nord sont plus garantis \J du froid par leurs chaudes fourrures ou leur épais plumage , "* que les espèces du midi. ISéléphanL ayant une tête extrême- ij ment grosse, ne pouvoit pas avoir un long couqui auroit été "Z- incapable de la soutenir ; mais comme sa bouche n'auroit pas '*** pu, avec son cou très-court, s'abaisser jusqu'à terre pour brou- ter Therbe, la nature intelligente lui a donné une trompe trèst -^ mobile pour la cueillir et la porter à sa bouche. La chouette^ la chaiwe-souns ayant des yeux d'une sensibilité extrême à la |s4 lumière , sont offusquées par l'éclat du jour; et comme la dé- licatesse de leur vue les rend capables de s'en servir pendant la nuit, ces animaux sonl devenus nocturnes.

Dans l'organisation des espèces vivantes, la nature a eu pour but d'établir tout ce qui étoit possible et en même temps tout ce qui étoit nécessaire. Elle a voulu peupler toutes les régions du globe habitable. L'Océan reçut dans ses larges abîmes des nations innombrables de poissons , de coquillages , de vers ; l'air fut traversé par les hordes vagabondes de grues ,, de cigognes, d'hirondelles et autres oiseaux de passage ; mille espèces éclatantes de volatiles animèrent les bocages de leurs chants d'amour , des familles de quadrupèdes établirent leur demeure sur la terre. Le bouquetin , léger enfant des monta- gnes , vécut indépendant au sommet des glaciers ; le bœuf pesant se promena gravement dans les humides pâtijrages; le zèbre et la gazelle , semblables aux solitaires de l'Orient , s'é- tablirent dans les déserts africains; ï hippopotame^ ce patriar- che des fleuves , chercha lyi ajUe champêtre parmi les ro-

XXII. 5.3

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(seaui, et le sombre chameau partagea sa demeure ave6 l'Arabe-Bedouin. F. Cheatures.

La prévoyance de la nature, pour maintenir Texistence de ses œuvres , est surtout admirable. La ioriuc qui est si lente et si peu capable de se défendre de ses ennemis, a été cuirassée partout; la torpilie) qui est pesante et incapable, d'atteindre sa proie à la nage, reçut le don de la foudroyer. Les insecles les plus foibles ont obtenu une industrie singulière qui les met souvent à l'abri de leurs tyrans. Le carabe fulminant les épou- vante par des explosions soudaines ; une espèce de crabe couvre son dos d'une production marine appelée alcyon , comme d'un coussin propre à parer les coups de ses ennemis ; le Bernard- rtlermite insinuant sa queue molle dans un coquillage , res- semble au cynique Diogène dans son tonneau. Les oiseaux de rivage êlanl destines à vivre dans la Vase , la nature leur a donné de longues jambes nues , comme des échasses pour s'y promener ; elle a proportionné aussi la longueur de leur bec et de leur cou à celle de leurs jambes , et elle a distribué un rameau nerveux à l'extrémité de ce bec afin de lui donner la faculté de sentir au fond d'une fange épaisse, les vermisseaux et les autres nourritures. Enfin, tous les êtres sont pourvus de rapports merveilleux avec leur destination naturelle. L'oiseau d'eau a été taillé pour fendre l'onde, ses pieds ont été façon- nés en larges rames, son plumage serré et huilé a été rendu impénétrable à l'humidité. Le poisson a reçu une vessie pleine d'air qu'il gonfle et comprime à volonté , afin que changeant sa pesanteur spécifique , il puisse descendre , remonter à son gré dans les eaux. Le sapin obtint une vie dure , une écorce résineuse , un feuillage toujours vert pour résister au climat rigoureux du Nord, tandis que la plante délicate des Indes a des feuilles larges et humides pour mieux supporter la cha- leur et abriter ses fleurs. Tel végétal est forme pour croître dans les sables arides , et tel autre pour élever ses tiges aa milieu des eaux stagnantes ; Tun se plait au sommet des mon- tagnes, l'autre dans les vallons parfumés.

Et contemplez encore comment cette sage nature réunit plus de prédilection sur les plus parfaits des êtres comme sur ses enfans chéris. Elle a mis au cœur des mères , dans l'es- pèci; humaine, une tendresse infatigable pour leur fils; elles ne l'abandonnent pas lorsqu'il peut se passer de leur ma- melle et de leur secours après l'enfance. Parmi les qua- drupèdes , les petits , après l allaitement, s'éloignent bientôt de leurs parens ; les oiseaux nouveau-nés , essayant leurs ■petites ailes , prennent peu à peu leur essor ; déjà les rep- liies , les poissons, tous les cires froids et imparfaits aban-

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flotittent souvent leur progéniture à elle-même, et si beau- coup de ces foibles orphelùis sont exposés à périr, la nature compense du moins cette perte en augmentant extrêmement leur pullulation. 11 en est ainsi des insectes et des graines de* plantes , comme si ces êtres inférieurs ^ par leur organisa- tion ^ méritant moins d'intérêt ou de prévoyance pour leur conservation, pouvoicnt être plus impunément prodigués; au contraire, tous les soins malernelsparoissenl surtout réservés et rassemblés avec amour auprès du berceau de ces créatures plus nobles et plus intelligentes, qui semblent être les cbefs- d'œuvre de la Divinité sur la terre* ' .

Pourquoi cette Providence , qui veille avec une si tendre sollicitude jusque sur la moindre plante j en effet , auroil elle deshérité ses plus humbles créatures , comme s'il lui étoit impossible d'embrasser toutes les existences de l'univers dans le détail! Certes, une tige de ble ne sauroit supposer sans extravagance qu'une aussi étonnante machine que le soleil n'ait aucune autre fonction dans le monde , que de faire mûrir ses sucsi Mais la lumière de cet astre , également ré- partie sur tous les végétaux, fait monter leur sève et épanouir leurs fleurs, de telle sorte que chacun peut se croire un objet spécial de prédilection. De même les lois éternelles et infinies d'une haute Providence, répartie dans toute la nature, veil- lent également à déployer le papillon dans sa chrysalide ^ connue la rose dans son calice et le fœtus dans ses enveloppes natales. Elle n'est pas plus absorbée par les détails que la chaleur du soleil, insinuée dans les plantes , ne sauroit négli- ger une de leurs parties en s'occupant dune autre. Les struc- tures étant ordonnées dans Torigine, leurs développemens stf succèdent avec la plus merveilleuse prévoyance harmonique, dans toutes les phases de leur existence, par la même puis- sance I) et un monde à régir ne coûte pas plus ^ sans doute , dans l'immensité de la nature ^ que la production d'un mou- cheron. Puisque tant d'êtres inférieurs, que nous croyons si mal à propos inutiles, ont été créés comme nécessaires , la Providence leur devoit tout ce qui est indispensable a la vie<î

En créant des êtres pour toutes les régions de cet univers^ la Providence suprême a développé les organes qui leur é toient les plus favorables et a modifié leur vie de telle manière qu'ils préfèrent leur état à tous les autres. 11 paroît mêuie que cer- tains milieux sont plus propres que les autres au développe-' ment de certains appareils; ainsi les lieux froids, secs et hauls,, donnent aux animaux et aux plantes qu'ils nourrissent , plus de poils , de duvet , de villosités , que les lieux bas et chauds n'en communiquent aux niêmes espèces. Les oiseaux babituésf À s'élever dans l'atmosphère sont plus pénétrés par l'air «u<

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les quadrupèdes ; ils ont des poumons plus vastes , une respî-» ration plusélendue. Les poissons, toujours plongésdansl'eau, en sont perpétuellement imbibés ; aussi leur complexion esl- elle fort humide ; tandis que les animaux vivant dans les lieux Becs , sont plus durs , plus osseux.

Ce n'est donc point la plante, Tanimal, qui donnent lieu à leur conformation par leurs habitudes, puisque ces habitudes sont le résultat de leur configuration organique. En effet , l'oiseau ne pouvoit passe donnerl'habitudede s'élever dans les airs , s'il n'avoit pas reçu des ailes. Le lion, le tigre , ne sont carnivores qu'à cause de leur organisation; ôtez-leur ces dents terribles, ces griffes crochues , celte vigueur de muscles; changez la figure etles fonctions deleursintestins, deleuresto- mac; vous leurôtez ce besoin de chair et de sang ; organisez- les comme le doux agneau , la timide gazelle , vous les verrez bientôt brouter innocemment l'herbe des collines. Donnez à la souris des ailes membraneuses et la conformation interne des chauve-souris, elle en prendra sur-le-champ toutes les habitudes. Les preuves en sont bien évidentes dans les méta- morphoses des insectes et d'autres espèces d'animaux, puis- que l'on voit la chenille changer de goût et de genre de vie en devenant papillon ; et tel insecte qui , comme l'anthrène à l'état de larve , vivoit de charognes infectes et corrompues, devient , sous sa forme parfaite , un convive délicat qui cher- che le nectar et l'ambroisie parmi les fleurs. On conçoit que nos nerfs étant ébranlés d'une certaine façon , nos muscles , et nos os disposés par un arrangement particulier, nous ne pouvons sentir et agir que conformément à la manière dont nous sommes organisés ; c'est pour cela que les uns sont d'un tempérament vif, les autres lents ; ceux-ci sensibles , ceux- impassibles aux mêmes impressions. On auroit donc tort de prétendre que c'est l'habitude qui a présidé à la formation de tous les êtres , puisque cette habitude n'en est que le ré- sultat nécessaire.

« L'oiseau que le besoin attire sur l'eau pour y trouver la « proie qui le fait vivre, dit un ingénieux naturaliste (i), « écarte les doigts de ses pieds , lorsqu'il veut frapper l'eau « et se mouvoir à sa surface. La peau qui unit ces doigts à « leur base , contracte par ces écartemeus sans cesse répétés « des doigts , Thabilude de s'étendre. Ainsi avec le temps, « les larges membranes qui unissent les doigts des canards , « des oies, etc., se sont formées telles que nous les voyons. « Les mêmes efforts faits pour nager , c'est - à - dire , pour « pousser l'eau afin d'avancer et de se mouvoir dans ce li-

(i) Lamarck, Recherch. sur V organisai, des corps divans t pag. 56.

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,m quiJe , ont étendu de même les membranes qui sont entre « les doigts des grenouilles , des tortues de mer , etc. »

En admettant cette explication , elle nous paroît insoute- nable dans une multitude de cas ; par exemple, la plante privée de toute volonté, n'aura pas pu modifier sa forme, connoîlre la saison de développer ses fleurs, la manière d'or- ganiser ses feuilles , de donner à ses semences tantôt des ai- grettes , des ailerons pour être transportées dans les airs , tantôt des crocbetspour adbéreraux corps environnans ; elle n'aura pas pu choisir telle exposition plutôt que telle autre , s'élever sur les montagnes comme la plante alpine , descen- dre dans les eaux comme le végétal aquatique, à moins qu'on ne prétende que tout germe végétal forme une plante alpine sur les montagnes et sylvestre dans les bois ; ce qui seroit don- ner l'effet pour la cause. On est mieux fondé à prétendre , daccord avec l'observation , que tel végétai a été organisé ])ar la nature pour donner des noix plutôt que des raisins. Quelle cause auroit pu faire naître plutôt la pomme sur le. pommier que sur le cerisier .f" Quelles circonstances auroient îorcé le sexe mâle à se séparer du sexe femelle dans les ani- maux, dans les palmiers, etc.? Quelle force d'instinct auroit pu apprendre à la balsamine la manière de lancer au loin ses graines , par le moyen des fibres élastiques de ses péricarpes ? (^omuient, avec des circonstances et du temps, l'animal se- roit-il parvenu à se faire venir des yeux pour apercevoir la lumière .'' L'organisation de l'oreille , des parties sexuelles , du cœur, etc., a-t-elle pu s'opérer par le simple désir ou par quelque habitude de l'animal? Est-il plus difficile à la nature de présenter une proie facile au fourmilion , que de lui ensei- gner l'art de creuser un trou dans le sable mouvant pour y faire tomber la fourmi ?

Il est donc impossible de concevoir comment tant d'or- ganes si bien disposés dans l'animal et la plante , comment tant de science et de sagesse ont présidé à leur formation et à leur vie , sans être forcé d'admettre pour cet effet une Cause SUPRÊME iiNFiNiMETST INTELLIGENTE. Quand j'examine le moin- <!re brin d'herbe , le plus mince fétu , l'insecte le plus vil, je ne les trouve pas moins étonnans dans leur petitesse que le* baleines , les éléphans , les crocodiles, et que tous les êtres les plus prodigieux de notre univers. Certainement je serai athée, quand on me prouvera , clair et net, que la matière peut d'elle-même organiser des yeux , un cerveau pensant , des parties de la génération , et perpétuer conslammentles mêmes êtres. Qui ne voit pas que dans l'œil , la cornée , l'iris , le cris- tallin , l'humeur vitrée , la rétine sont en tel rapport avec la lumière , e-t disj^osés avec un art si sublime , qu'il faudroit

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avoir perdu la raison pour prétendre que tout cela est 1er seul produit des circonstances et du temps ? L'homme , mal-r gré toute son intelligence, pourrart-il jamais rendre la lumicro ttn faisant de nouveaux yeux à celui qui a les siens crevés ? Nousobseryons tous |ps organes se développant peu à peu par l'âge et la nourriture; mais il y a ijne force intelligente qui les pousse , qui les travaille , qui Ips arrange ; autrement il ne se feroit rien du tout. Si celte force intelligente ne s'offre point (elle-même à nos regards , elle se montre aux yeux de Tintel- ligence ; el|e se dévoile taute entière dans la magnificence de ses sublimes ouvrages,

Le monde et tous les êtres qu'il nourrit dans son sein pe se maintiennent aujourd'hui dans un état constant que par les mêmes iois qui les ont jadis formés et établis. Si la nature change par nuances, elle retourne aussi par des transitions successives au même point dont elle est partie. La parfaite disposition de tous ses ouvrages annonce à tous les hommes qu'elle procèt|e d'une puissance souveraine et intelligente.

Akticle XIX. Que toute beauté comme tout génie érjianeni des œuores de ta nature et de f observât îun de ses lois.

Plus une créature est formée et développée dans toute sa, naïveté naturelle, plus elle est belle et digne de notre admi- ration. L'homme mutile ce noble coursier qui , fier et libre , frappant du pied U terre , s'élançoit en bondissant dans la prairie , l'œil ardent , la crinière échevelée. Il le déshonore en lui enlevant ces parures simples et originelles, pour y substituer le frein et les fers qui humilient l'un des plus génér reux quadrupèdes dont le Créateur avoil fait présent à la race humaine.

L'auteur de la nature est ainsi la source de toute beauté. Ktre admirable par excellence , tout ce qui est sublirne et digne d'amour émane de tes œuvres ! La vie , qui est un mou- veinent selon la nature, est belle dans toute sa jeunesse (Ct le feu de sa vigueur, de sa santé ; tandis que la mort , les. plaies , les douleurs , et surtout les monstruosités, les diffor-r înités inspirent de l'horreur ou m\ secret déplaisir , parce qu'elles sopl contre la règle de la nature. Plus une créature est conforme à son type régulier de vie et de génération , plus elle devient brillante d'attraits et ^e ces charmes vainqueurs qui enflamment l'amour, chacune selon son espèce. La lai- deur, au contraire, accompagne l'impuissance et le vice |5oiieu5ç;ou contrefait, lesquels viennent de foiblesse, d'Inéga- lité , de désqrdre ou défaut d'harmonie des organes; tandis que toute beauté , tout ce qui ravit d'admiration et d'amour, çésultq çles proportiqus de Tprclre qu d'une parfaite liarmQ-

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nie de l'organisation. Tel est le charme des êtres que la nature prépare dans ses jours de magnificence pour Tunlon sexuelle, pour l'éternelle reproduction des espèces; c'est ainsi qu'elle épanouit le sein des roses et des plus ravissantes (leurs; qu'elle couronne le papillon et le paon de brillantes ai- grettes, comme elle déploya leurs ailes, leur plun^age peint de pierreries resplendissantes, au temps de leurs noces et de leurs jouissances.

L'amour ouTharmonie, ce principe de toute concorde , de toute symétrie , émanant ainsi de la nature et de son sublime auteur , est le créateur de toute beauté , de toute régula- rité. De lui résultent également et la vigueur du corps et celle de l'âme ou la vertu , parce que de lui découlent la vie et le bonheur. Au contraire , la discorde ou la haine est la cause delà laideur, de la difformité ; d'elle naquit l'impuissance, la monstruosité du corps, comme le vice, l'imperfection des penchans de l'âme, parce que d'elle découlent tout mal , toute douleur, toute haine et méchanceté.

Ainsi tout principe de concorde , établi dans l'organi- sation des créatures, produit la beauté , la régularité des for- mes dans les fonctions vitales; il procure une santé, une vi- gueur parfaites, et dans les fonctions génératives, l'amour^ la fécondité. Tout élément de discorde, au contraire , est la source de l'imperfection , de l'inégalité , de la difformité ; s'il atteint les facultés vitales, il cause la maladie, la mort, dis- grégation universelle de l'être organisé ; s'il agit dans les fonc- tions génitales , il amène des dépravations, des monstres.

D'où vient qu'ayant construit cette colonnade à l'une des ailes de votre édifice, pourroit-on demandera Vitruve, vous en élevez autant à l'autre.'* L'architecte répondra, que c'est pour la symétrie. Pourquoi cette symétrie vous paroit - elle nécessaire? Parla raison que cela plait. Mais, quiêtes-vous ^ dit saint Augustin , pour vous ériger en arbitre de ce qui plaît ou déplaît , et d'où savcz-vous que la symétrie charme ? -r— J'en suis certain , parce que les choses ainsi disposées ont de la grâce , de la justesse , de la décence , en un mot , parce que cela est beau. -^ Dites-moi donc , pourquoi cela est - il beau ? ou si ma question vous embarrasse, vous conviendrez sans peine que la similitude , l'égalité , la convenance des proportions et des parties de votre édifice, réduit tout à cette espèce d'unité ou d'ensemble (jui satisfait l'esprit çt la raison. ( de verâ Relig. , c. 3o , 3i ).

Dans la structure de l'homme et des animaux , dans celles de ces charmantes fleurs que vous foulez sous vos pas , et jusque dans ces brillans cristaux de pierreries et de diamans «u de riches mélaux que vous arraçhe2; aux entrailles de U

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terre , n'y découvrez-vous pas de magnifiques symétries ? De quels ornemens plus gracieux et plus délicats une jeune beauté peut-elle composer sa parure , que de ces fleurs , aimable dé- coration de la terre en son printemps? Que la peinture ap- prête l'éclat de ses couleurs , que le génie invente les formes les plus enchanteresses, encore sera-t-il surpassé par la sim- ple nature dans sa naïveté et dans sa fraîcheur.

Quelle est donc cette mystérieuse source de tout ce qui est beau , de cette pure et sublime harmonie (jui ravit notre âme dans les contemplations de la nature? Quel est le moule pre- mier , l'archétype originel de ces étonnans modèles qui cap- tivent notre admiration ^Sans doute il est au-dessus de ce monde matériel, derrière ces voiles et ces empreintes cor- porelles , un type éternel d'ordre ineffable ; il existe un principe constant d'harmonie, de concorde , d'unité souve- raine et universelle , règle essentielle du beau et de laquelle tout émane dans ce monde; ce module primordial est un rayon de la Divinité elle-même, créatrice de tout ce qui est.

S'il existe un moyen d'élever notre intelligence ou le génie de la première des créatures, reine de toutes les autres et héritière des dons de la Divinité, n'est-ce pas d'étudier et d'imiter ces ravissans modèles, de s'imprégner des lois qui les ont formés , de s'élancer au foyer resplendissant de toute vérité et de toute lumière? La beauté morale est pour l'intel- ligence ce que la beauté physique est pour le corps; le vice , le crime, sont des dépravations, des monstruosités de lame, comme l'imperfection et la difformité font la laideur repous- sante pour les organes du corps.

Notre esprit recherche et admire la beauté morale , la vertu, la concorde, l'harmonie, le bien, qui fait la force et la vie ; il y trouve sa perfection et sa félicité, comme en se re- plongeant dans sa source et son essence.

La nature est savante elle-même dajis des actes qui , pour nous , seroient art. Toutes les productions du génie humain ne sont que 1 imitation de la nature. Le ver-à-soie qui se file une coque , l'abeille qui construit ses gâteaux , le fourmilion qui creuse une trémie dans le sable mobile pour y faire rouler les fourmis , le castor qui élève ses digues et ses bâtimens aquatiques, sont l'art de la nature, par l'intermédiaire d'un foible animal, instrument de l'instinct, car celui-ci est inspiré par elle. De même , nous ne pourrions rien comprendre et exécuter sur cette terre sans la haute intelligence et les mains que la nature divine nous avoit attribuées. Ce que nous ap- pelons art , étude , ouvrage et génie de l'homme , n'est donc en réalité que l'opération même de la nature par notre mi- niilère et selon ses lois ; puisque rien , à proprement parler, lie sauroil absolument venir de îiousmçmes et cotre fond?.

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Nous opérerons , au contraire , d'autant mieux que nous suivrons davantage ces dons de la nature, et que nous y met- trons moins de nous. Les diiïérens taiens qu'elle départit aux hommes se perfectionnent surtout encore par l'élude de la nature, selon l'expérience de ses œuvres; tous les mé- tiers , les arls que nous exerçons , ne sont pour nous qu'un développement de ces présens naturels , tout comme les di- vers travaux qui s'exécutent dans une ruche; la seule diffé- rence est que l'abeille, instruite par l'instinct dès sa naissance à cause de sa courte vie , agit toujours parfaitement du pre- mier jet , tandis que l'homme , confié à sa propre destinée et à son libre arbitre , comme fils émancipé de la nature , de- vient susceptible de se perfectionner par l'exercice et l'é- tude ; il a le mérite de mettre sa volonté dans ses œuvres , et d'imiter le bien par ses propres efforts.

Cependant tout ce que nous exécutons est d'autant plus beau et plus voisin de la perfection, que nous y mettons plus de naturel et de vérité ; nous sentons alors je ne sais quel transport d'enthousiasme qui nous élève à la source pure de l'intelligence. Cette suprême puissance qui , ayant organisé les membres des animaux, s'en sert comme d'instrumens vi- vans pour accomplir ses œuvres , cette lumière de raison su- blime , nous guide, nous illumine dans les sentiers de la vie, quand nous voulons la suivre dans ses sages directions. Ce se- roit bien en vain que l'homme prétendroit atteindre au faîte de la raison , d'après lui seul , si la puissance suprême n'avoit pas déposé en son sein un rayon d'intelligence , si nous ne cherchions pas à suivre ces voies xl'unilé , d'harmonie , de beauté , d'ordre et de proportions que nous observons dans les plus merveilleuses productions de la Divinité. Aussi , comme l'âme n'est jamais mieux réglée que par l'harmonie de la justice , par l'équilibre d'un jugement sain dans sa ba- lance , la beauté, la régularité , la parfaite symétrie et les plus nobles attributs du génie sont le résultat de cette recher- che du vrai, du beau dans la sublime nature.

Soit que l'univers ait été créé, soit que, dans l'origine, toutes choses fussent dans le désordre du chaos , si l intelli- gence suprême le débrouilla suivant l'ordre magnifique qu'on y admire, il faut regarder l'harmonie , les proportions, toute espèce de régularité et de perfection comme un attribut et une partie de la Divinité. Notre intelligence , qui se plaît dans ce même ordre , qui s'enthousiasme de la beauté , telle qu'un rayon émané de cette source éternelle de lumière et de vérité, manifeste qu'elle participe à la nature première et organisatrice du monde. Ainsi Tesprit humain n'est pas d'un àu^cp genre que le grand esprit qui coordonne toutes choses^

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puisque la raison de l'homme se montre capable de pénétrer dans cette élude, et que la nature se dirige par des voies sem- blables à celles qui gouvernent notre propre entendement.

Grand Etoe ! source ineffable de toutes les existences, commencement et fin de toutes choses , vos œuvres confon- dent nos foibles pensées. Depuis Tétoile du matin jusqu'à l'astre du jour, depuis 1 éléphant jusqu'au ciron , et depuis le chêne jusqu'à la mousse , j'ai vu votre sagesse suprême ; le monde est rempli de votre nom. Que suis - je sur celte terre r" J'ai cherche à vous connoître ; j'ai étudié quelques- uns de vos vestiges ; je vous ai entrevu , et j'ai été frappé d'é- pouvante.

Jetés dans ce monde rempli de merveilles sans nombre « quels sont nos devoirs et notre fin ? Pourquoi vivons- nous .'* Est-ce pour passer sur la terre comme les animaux, et pour nous laisser doucement charrier sur ce fleuve de vie ? Je vois à chaque instant les hommes tomber autour de moi , et d'au- tres les remplacer sur ce théâtre du monde pour succomber à leur tour. Pourquoi cette éternelle circulation de tous les êtres ? Notre vie n'est qu'un point dans l'immensité des âges , tout périt, la terre dévore toutes nos grandeurs. Devons- nous quitter l'existence sans avoir levé les yeux sur ce qui nous entoure , sur les abîmes du passé e-t de l'avenir entre lesquels nous sommes placés pour nous y précipiter à ja- mais ? Dieu seul reste grand au milieu de ces ruines du monde.

Cependant les œuvres de la nature sont magnifiques et plei- nes de charmes pour l'homme. Les bois lui présentent leurs ombrages et leurs fleurs, les prés étendent sous ses pas des tapis de verdure , les peuples de l'air le délectent par leurs hymnes d'amour , la génisse vient lui offrir son lait et la brebis sa chaude toison , l'arbre courbe jusqu'à sa main ses branches couvertes de fruits. Que lui manque -t- il sur la terre, lorsqu'il sait se contenter des bienfaits de la siuiple nature ? Pourquoi répandre ses désirs dans tout l'univers pourtant de faux besoins qui le tourmentent.^ Content de son humble destinée , l'homme simple se repose dans la na- ture , et laisse le monde s'agiter eu tumulte pour ses vaincs grandeurs. Errant près des rives fleuries des ruisseaux, et dans les doux asiles des bois , il contemple en pai.\ les beautés de cet univers, et attend tranquillement sa dernière heure. Bien- heureux est celui qui recueiUc gaîment le fruit de sa vigne , et qui se repose au milieu de ses guérets ! Plus heureux e»- core s'il connoît tout le prix de sa tranquillité ! Elle est la récompense de quiconque aime l'étude de la nature , et pré^ (ère la vie chaujpêtre au fracas élourdissaot des cités.

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Voyez surtout les mots Homme, Animal , Génération, Alimens , Corps organisés , Nutrition , Sexes , Mons- tre , IxsTtNCT , etc. On pourra consulter aussi les articles Atmosphère , Volcans , Filons métalliques , Mer , Géo- logie, Géographie naturelle, Mines ou Minéraux, etc.

Les articles Histoire naturelle, Cabinet d'Histoire

NATURELLE, PlANTE , VÉGÉTAL, ARBRE , GrAINE , SEMEN- CE , Quadrupèdes , Oiseaux , Créatures , Espèces , Règnes, etc. , et plusieurs autres , pourront être lus avec fruit , ainsi que le discours préliminaire, (virey.)

NATURE (la). Nom du plus grand sujet que l'homme? puisse embrasser dans sa pensée , dans ses études ; d'une puissance toujours active , en tout et partout bornée , qui fait les plus grandes choses , et qui , dans chaque cas particulier , agit constamment de la même manière , sans jamais varier les actes qu'elle opère alors ; d'une puissance créée , inalté- rable , la seule , parmi tout ce qui a eu un commencement « qui ne puisse avoir de terme à son existence , s'il plaît à son suprême auteur de la laisser subsister ; enfui , de Vordre de choses qui existe dans toutes jes parties de l'univers physique.

Relativement au grand sujet dont il est question , il ne s'agira point ici de celte expression particulière que nous employons , en parlant d'un corps ou d'un objet dont nous voulons déterminer ou citer ce que nous en nommons la na- ture ; mais de l'expression dont nous faisons usage dans un sens général, à la fois vague et absolu; de ce mot si souvent employé à cet égard, que toutes les bouches prononcent si fréquemment, que l'on rencontre presque à chaque ligne , dans les ouvrages des naturalistes, des physiciens et des mo- ralistes ; de ce mot , enfin , dont on se contente si générale- ment, sans s'occuper de l'idée que l'on peut et que l'on doit réellement y attacher.

« Il importe maintenant de montrer qu'il existe des puis- sances particulières qui ne sont point des intelligences , qui ne sont pas môme des êtres individuels , qui n'agissent que par nécessité , et qui ne peuvent faire autre chose que ce qu'elles font. >< Inlroduct. à l'Hist. nat. des aiiimuux sans verlèbrcs , 6.*^ partie , p. 3o4. Or , voyons si ce qu'on nom'ne la nature ne seroit pas une de ces puissances particulières dont je viens de parler; si ce ne se» oit pas la première et la plus grande des puissances de cette sorte ; si ce ne seroit pas même celle qui a amené l'existence de toutes les autres ; celle, enfin, quia produit généralement tous les corps qui existent , et qui seule donne lieu à tout ce que nous pouvons observer. Nous exami- î^erqns ensuilc ce que peut cire celte puissance singulière ,

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capable de donner l'existence à tant d'élrcs différens , dont

la plupart sont pour nous si étounans , si admirables !

Qui osera penser qu'une puissance aveugle , sans inten- tion, sans but , qui ne peut faire partout que ce qu'elle fait, et qui est bornée à n'exercer son pouvoir que sur les parties d'un domaine tout-à-fait circonscrit , puisse être celle qui a fait tant de choses ! Montrer l'évidence de celte vérité de fait , est cependant l'objet que nous avons ici en vue. Pour y parvenir , nous croyons qu'il suffit de présenter les considéra- tions qui vont suivre ; et , sans doute , nous serons entendu , si elles sont examinées et suffisamment approfondies. Posons d'abord la question suivante; car c'est pour l'homme la plus importante de toutes celles qu'il puisse agiter; et voyons si nous avons quelque moyen solide pour en obtenir la solution.

La puissance intelligente et sans bornes , à laquelle tout ce qui est doit réellement son existence , qui a , conséquem- ment , fait exister tous les êtres physiques , les seuls que nous puissions connoître positivement , a-t-elle créé ces derniers immédiatement ou sans intermédiaire, ou n' a-t-elle pasétabli un ordre de choses ^ constituant une puissance particulière et dépendante, mais capable de donner lieu successivement à la production de tous les corps physiques , de quelque ordre qu'ils soient ?

Si la puissance suprême dont il s'agit a livré le monde phy- sique à l'observation et aux discussions de l'homme , celui-ci peut et doit examiner cette grande question , et nous allons montrer que le résultat de cet examen peut être pour lui de la plus grande importance.

Certes , le sublime auteur àq toutes choses a pu faire comme il lui a plu ; sa puissance est sans limites , on ne sau- roit en douter. Il a donc pu, relativement aux corps physi- ques, employer le premier mode d'exécution cité , comme il a pu se servir du second , si telle fut sa volonté. Il ne nous convient pas de décider ce qu'il a faire, ni de prononcer positivement sur ce qu'il a fait. Nous devons seulement étu- dier , parmi celles de ses œuvres qu'il nous a permis d'obser- ver, les faits qui peuvent nous apprendre ce qu'à leur égard il a voulu qu'il fût.

Sans doute , la pensée qui dut nous plaire davantage , lorsque nous considérâmes quelle avoit pu être l'origine de tous les êtres physiques , de tous les corps soumis à notre observation, fut celle d'attribuer la première existence de ces êtres à une puissance infinie , qui les auroit créés immé- diatement, et les auroit faits, tons à la fois ou en divers temps , ce qu'ils sont chacun dans leur espèce. Cette pensée nous fut commode, en ce qu'elle nous dispensa de toute élude , de luule recherche à i'egard de ce graud sujet ; aussi

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fut-eîle généralement admise. Elle est juste, cependant, sous un rapport ; car rien n'existe que par la volonté suprême ; mais, quanl aux corps physiques, elle prononce sur le mode d'exécution de cette volonté, avant de s'être assurée des lumières que l'observation des faits peut fournir sur cet objet. Or , comme les fails observes et constatés sont plus positifs que nos raisonnemens , ces faits nous fournissent maintenant des moyens solides pour reconnoître , parmi les deux modes d'exécution présentés dans la question ci-dessus , ([uel est celui qu'il a plu à la suprême puissance d'employer pour faire exister tous les corps physiques.

A la vérité , nous fûmes en quelque sorte autorisés à per- sister dans notre première pensée , et à l'admettre à l'égard de l'origine des corps physiques ; car , quoique ces corps , vivans ou autres , soient assujettis à des altérations , des des- tructions et des renouvellemens successifs , tous nous paru- rent être toujours les mêmes.

« En effet , tous les corps que nous observons , nous of- frent généralement , chacun dans leur espèce , une existence plus ou moins passagère ; mais aussi , tous ces corps se mon- trent ou se retrouvent constamment les mêmes à nosyeux , ou à peu près tels , dans tous les temps ; et on les voit toujours , chacun avec les mêmes qualités ou facultés , et avec la rrvêrne possibilité ou la même nécessité d'éprouver des change- mens. »

« D'après cela, dira-t-on, comment vouloir leur supposer une formation , pour ainsi dire ^'extrasimiiltanée; une formation successive et dépendante ; en un mot , une origine particu- lière à chacun d'eux, et dont le principe puisse être détermi- nable ! Pourquoi ne les regarderoit-on pas plutôt comme aussi anciens que la nature^ comme ayant la même origine qu'elle-même , et que tout ce qui a eu un commencement i* » « C'est , en effet , ce que l'on a pensé , et ce que pensent encore beaucoup de personnes d'ailleurs très-instruites: elles ne voient dans toutes les espèces , de quelque sorte qu'elles soient, inorganiques ou vivantes; elles ne voient, dis-je , que des corps dont l'existence leur paroît à peu près aussi ancienne que la nature ; que des corps qui , malgré les changemens et i'existence passagère des individus , se retrouvent les mêmes dans tous les renouvellemens, etc. » Introduct. , p. 3o5 et suiv. <f Toutes ces considération? parurent et paroissent encore aux personjies dont j'ai parlé , des motifs suffisans pour pen- ser que la nature n'est point la cause productrice des différens corps que nous connoissons; et que ces corps , se remontrant les mêmes ( en apparence ) dans tous les temps , et avec les mêmes qualités ou facultés , doivent être aussi anciens que la.

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nature , et avoir pris leur existence dans la même cause qui

lui a donné la sienne. »

<f S il en est ainsi , ces corps ne doivent rien klà nature; ils ne sont point ses productions ; elle ne peut rien sur eux ; elle n'opère rien à leur égard ; et, dans ce cas, elle n'est noinl une puissance ', des lois lui sont inutiles; enfin, le nom qu'on lui donne est un mol vide d^ sens , s'il n'exprime que lexislence des corps , et non un pouvoir particulier qui opère et agit immédiatement sur eux. » Introd. , p. 3o8.

Telle est la conséquence nécessaire de cette pensée qui attribue l'existence de chaque espèce de corps physiques , à une création particulière de chacune de ces espèces, qui leur accorde la même origine que celle de la nature , et les sup- pose aussi anciennes ^ aussi immutables que cette dernière i'est elle-même*

Sans doute , le puissant auteur de tout ce qui existe à pu Touloir que cela lût ainsi; mais, si telle fut sa volonté ^ qu'est-ce donc que cette nature qu'il a créée i' qu'est-elle , si elle n'est point une puissance , si elle n'agit point , si elle n'opère rien , si elle ne produit point les corps ? à quoi lui servent des lois ^ si elle est sans pouvoir , sans action ? Celte question resteroit nécessairement sans réponse, c'est-à-dire, sans solution , si l'on éloit fondé à la faire , et si ^ effective- ment , la nature n'étoil pas elle-même la cause immédiate qui donne lieu à l'existence de tous les corps physiques.

C'est assurément ce que l'observation nous motïtre de toutes parts ; car , si nous examinons tout ce qui se passe journellement autour de nous, ainsi que ce qui nous est re- latif, si nous recueillons et suivons attentivement les faits que nous pouvons observer, nous reconnoîtrons partout le pou- voir de la nature ^ et l'idée si spécieuse citée ci-dessus , con- cernant la création primitive et l'immutabilité des espèces , perdra de plus en plus le fondement qu'elle sembloit avoir.

A la vérité , par les suites de la foible durée de notre exis- tence individuelle , nous ne remarquons jamais de change- mens dans les circonstances de situation et d'habitation des espèces vivantes que nous observons; conséquennuent. quoi-' que nous suivions celles-ci dans les renouvellemcns des indi- vidus , elles nous paroissent rester toujours les mêmes. Si nous changeons de lieu d'observation , nous rencontrons des es-^ pèces qui avoisinenlles premières, qui s'en distinguent néan- moins , et qui se trouvent , effectivement , dans des circons-* tances différentes. Or , ces espèces nous paroissent en- core rester les mêmes dans leur situation , et les renou- vellemens des individus n'amener parmi elles aucune diffé- rence , sinon accidentellement. Ainsi , ne voyant point chai>-

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gei* teâ espèces Virantes , en quelque Heu que nous les obser- vions , nous leur attribuons une constance absolue , tandis qu'elles n'en ont qu'une relative ou conditionnelle. En effet, tant que les circonstances de situation, d'habitation, etc., ne varient pointa l'égard des espèces vivantes, ces dernières doivent subsister les mômes. /^. le mot Espèce.

Ne tenant aucun compte de ce qui s'opère réellement partout , avec le temps , parce que nous n'avons pas les moyens de le voir et de le constater nous-mêmes , tout nous paroît avoir une constance absolue, et cependant tout change sans cesse autour de nous. 11 nous semble que la surface de notre globe reste dans le môme état , que les limites des mers subsistent les mômes ^ que ces immenses masses d'eau liquides se conservent dans les mêmes régions du globe , que les mon- tagnes conservent aussi leur élévation, leur forme , que les (leuves et les rivières ne changent point leur lit , leur bassin , que les climats ne subissent aucune variation , etc. , etc. Me^ surant tout et jugeant tout d'après ce qu'il nous est possi- ble devoir, tout encore nous paroît stable, parce que nous regardons les petites mutations. que nous sonunes à portée d'observer, comme des objets sans conséquence.

Cependant, à mesure que nous étendons nos observations, que nous considérons les monumens qui sont à la surface du globe , que nous suivons une multitude de faits de détails qui se présentent sans cesse à nous de tous côtés , nous sommes forcés de reconnoîlre qu'il n'y a nulle part de repos parfait ; qu'une activité continuelle , variée selon les temps et les lieux , règne absolument partout ; que tous les corps, sans exception , sont pénétruhles et pénétrés par d'autres ; que des agens de diverses sortes travaillent sans cesse à altérer ,, changer et détruire les corps cxistans ; enfin, qu'il n'est rien qui soit absolument à l'abri de ces influences constamment actives. Nous voyons , en effet , que. les roches les plus dures s'exfolient peu à peu, et que les alternatives de l'action solaire, des gelées, des pluies, etc., en détachent insensiblement des parcelles,d'où résultent des changemens dans leurforme et leur masse ; que les montagnes se détériorent , s'abaissent même continuellement , les eaux pluviales les creusant , les sillon- nant , et entraînant vers les lieux bas tout ce qui s'en trouve détaché; que les fleuves , les rivières et les torrens empor- tent tout ce qui peut céder à l'effort de leurs eaux ; et que , çà et , des développcmens souterrains de fluides élastiques divers , suivis souvent d'inflammations considérables , tantôt excavent et soulèvent le sol, l'ébranlent , l'entr'ouvrent , le culbutent, renversant et confondant tout, et tantôt, abou- tissant à certaines issues particulières, ou s'en ouviant de

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cette sorte , fonnent au dehors des éruptions terribles , dé- vastatrices, suivies de déjections qui abîment tout ce qu'elles peuvent atteindre, et dont les cumulations élèvent des mon- tagnes énormes.

Si nous considérons nos habitations mêmes , nous y re- marquons les produits continuels , quoique presque insensi- bles, de l'activité des agens cités ; et, en effet , nous con- Hoissons assez les ravages qu'à l'aide du temps ces agens peu- vent leur faire subir. Les faits qui se passent sous nos yeux étant ici des témoignages utiles à citer, qui ne sait que quel- que soin que l'on prenne dans un appartement, pour y en- tretenir la propreté, l'on a continuellement à combattre une poussière qui se dépose partout ! D'où provient donc cette poussière , si ce n'est des parcelles infiniment petites que les agens en question détachent sans cesse de toutes les parties de l'appartement , et en constituent les atomes dont 1 air est toujours rempli. Quelque temps qui soit nécessaire , on peut dire qu'un édifice quelconque , abandonné aux agens dont il s'agit, sera à la fin détruit par leur action.

C'est donc un fait évident , incontestable , qu'il n'existe nulle part, dans le monde physique, de repos absolu , d'ab- sence de mouvement, de masse véritablement immutable , inaltérable , et dont la stabilité soit parfaite et sans terme , au lieu d'être relative , comme l'est celle de tous les corps quels qu'ils soient.

Ainsi , nous observons des changemens lents ou prompts , mais réels , dans tous les corps , selon leur nature et les cir- constances de leur situation ; en sorte que les uns se détério- rent de plus en plus, sans jamais réparer leurs pertes, et sont à la fin détruits ; tandis que les autres , qui subissent sans cesse des altérations , et les réparent eux-mêmes , pendant «ne durée limitée, finissent aussi par une destruction entière.

Je n'ai pas besoin de dire que si le pouvoir général qui constitue les agens dont je viens de parler , parvient sans cesse , par celte voie , à opérer la destruction de tous les corps physiques individuels, le même pouvoir, par une autre voie déjà indiquée dans mes ouvrages, parvient aussi à les renou- veler perpétuellement, avec des variations relatives. Je m'é- ioignerois de mon sujet, si je m'occupois ici d'établir de nou- veau cette vérité de fait.

Pouvons nous donc méconnoître , d'après cette exposition rapide de faits généralement connus , l'existence d'un pouvoir général^ toujours agissant , toujours opérant des produits ma- nifestes en changement, selon les circonstances favorables; produits qui amènent sans cesse , les uns la formation des corps, les autres leur destruction 1 Ne voyows-nous pas nou*T

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mêmes plusieurs de ces corps se former presque sous nos yeux , et plusieurs autres se détruire de même !

A l'égard du pouvoir dont il s'agit , nos observations, bien constatées, nous font connoître un fait de la plus haute im- portance; un fait qui décide la question présentée au com- mencement de cet article, et qu'il est nécessaire de prendre en considération ; le voici :

« Nos observations, en effet, ne se bornent point seule- ment à nous convaincre de l'existence dun grand pouvoir tou- jours agissant , qui change , forme , détruit et renouvelle sans cesse les différens corps ; elles nous montrent , en outre, que ce pouvoir est limité , tout-à-fait dépendant, et qu'il ne sau- roit faire autre chose que ce qu'il fait ; car il est partout assu- jetti à des lois de différens ordres qui règlent ses opérations ; lois qu'il ne peut ni changer , ni transgresser, et qui ne lui permettent pas de varier ses moyens dans la même circons- tance. »

Certes , si les faits qui constatent la dépendance de ce pou- voir sont réellement fondés , leur découverte est bien impor- tante ; car ces faits décident de la nature de ce même pou- voir ; et dès-lors , la connoissance de ce dernier, et celle des lois qui l'assujettissent dans chaque cas particulier , sont des objets dont l'intérêt est pour nous du premier ordre : ce que je montrerai bientôt.

Quelque progrès que j'aie pu avoir fait faire aux sciences naturelles, en embrassant, dans mes études, un plan géné- ral, lié dans toutes ses parties; et, dans ce plan, quelque avantage que j'aie pu procurer à l'une de ces sciences , parti- culièrement en instituant l'ordre le plus naturel que l'on puisse établir parmi les animaux sans vertèbres, et en mon- trant que cet ordre prend sa source dans la production suc- cessive de ces animaux ; je ne crois pas avoir fait , dans tout cela, une chose aussi utile à mes semblables, que celle d'a- voir rassemblé les observations essentielles qui constatent l'existence et la nature du pouvoir dont il vient d'être ques- tion. Poursuivons-en donc l'examen; essayons de montrer ce qu'il est positivement, et le parti que nous pouvons tirer de sa connoissance.

Le grand pouvoir dont il s'agit embrasse le monde physÎJ que , et est général à son égard, La matière est son unique domaine; et quoiqu'il ne puisse ni en créer, ni en détruire une seule particule, il la modifie continuellement de toutes les manières et sous toutes les formes. Ainsi, ce pouvoir gé- néral agit sans cesse sur tous les objets que nous pouvons apercevoir, de môme que sur ceux qui sont hors de la portée de nos observations. C'est lai qui, dans notre globe, a donné

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iramédialeraent l'oxislonce aux végélaus:, aux animaux, ainsi

qu'aux autres corps qui s'y trouvent.

Or , le pouvoir dont il s'agit , que nous avons tant de peine à reconnoîire , quoiqu'il se manifeste partout ; ce pouvoir qui n'est certainement point un être de raison , puisque tout nous fournit des preuves de son existence (ce dont nous ne saurions douter, puisque nous observons ses actes , que nous le sui- vons dans ses opérations , que nous voyons qu'il ne fait rien qu'avec du temps , que nous remarquons qu'il est partout soumis à des lois, et que déjà nous sommes parvenus à con- noitre plusieurs de celles qui le régissent); ce pouvoir qui agit toujours de même dans les mêmes circonstances, et qui, sitôt que cellos-ci viennent à changer , est obligé de varier ses actes; ce pouvoir, en un mot, qui fait tant de choses et de si admirables , est précisément ce que nous nommons la Nature.

Et c'est à cette puissance aveugle , partout limitée et assu- jettie , qui, quelque grande qu'elle soit , ne sauroit faire autre chose que ce qu'elle fait, qui n'existe, enfin, que par la volonté du suprême auteur de tout ce qui est ; c'est à cette puissance, dis-je, que nous attribuons une intention , un but, une détermination, dans ses actes!

Quelle plus forte preuve de notre ignorance absolue à l'é- gard de la nature, des lois qui la concernent , de ces lois qu'il nous importeroit tant d'étudier , leur connoissance étant la seule voie qui puisse nous faire parvenir à juger convenable- ment des choses , et à rectifier nos idées sur tout ce qui en provient ou en dépend! Comment qualifier notre insouciance envers cette mère commune dont néanmoins , depuis un temps immémorial , nous avons eu le sentiment de l'exis- tence , puisque nous avons consacré un mot particulier pour la désigner! Mais , comme si tous les actes qu'elle exécute n'aboutissoient qu'à faire exister tous les êtres physiques, sans influer sur leur durée , sur leur état , pendant cette du- rée , sur tout ce qui les concerne ou qui est en relation avec eux, le mot dont nous nous servons pour la désigner, nous tient lieu de tout, et nous ne nous inquiétons nullement de savoir ou de rechercher ce qu'il exprime.

Il imporle assurément de fixer à la fin nos idées, s'il est possible , sur une expression dont la plupart des hommes se servent communément; les uns par habitude , et sans y atta- cher aucun sens déterminé ; les autres dans un sens absolu- ment faux.

A ridée que l'on se forme d'une puissance , l'on est porté naturellement à y associer celle d'une intelligence qui dirige ses actes; et, par suite, l'on attribue à cette puissance une

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intenlion , des vues, un Lut , une volonlé. Ondoit sans doujtip reconnoître qu*'il en est ainsi à l'égard du pomoir suprême ; mais il y a aussi des puissances assujetties et bornées , qui n'agissent que nécessairement, qui ne peuvent faire autie chose que ce qu'elles font , dont les moyens sont plus ou moins compliqués , et qui ne sont point des intelligences.

Les puissances assuielties, dont je viens de parler, ne sont à la vérité que des causes agissantes ou qui peuvent agir. Aussi, comme il y «n a , parmi elles, dont les moyens ex-r trêmement compliqués amènent des effets très-variés, tandis que d'autres, plus simples , ne produisent que des effets de même sorte ou semblables , j'ai cru devoir donner à ces der- nières le nom usité de causes, et désigner les premières par l'expression d'ordres de choses: or , les ordres dont il est ques- tion sont plus communs qu'on ne pense.

Par exemple , tout ordre de choses animé par un mouve- ment, soit épuisable , soit inépuisable , est une véritable puis- sance dont les actes amènent des faits ou des phénomènes quelconques.

Lao^fg, dans un corps en qui l'ordre et l'état de choses qui s'y trouvent lui permettent de se manifester , est assuré- ment , comme je l'ai dit , une véritable puissance qui donne lieu à des phénomènes nombreux. Cette puissance cependant n'a ni but , ni intention , ne peut faire que ce qu'elle fait , et n'est elle-même qu'un ensemble de causes agissantes, et non un être particulier. J'ai établi cette vérité le premier , et dans un temps la vie éloit encore signalée comme un principe, une archée , un ^'//^ quelconque. Voy. Barlhez, Nouv. méca- nique.

J'ajouterai que la nahac ayant institué dans certains corps un ordre de choses, qui, concurremment avec une source d'activité qu'elle y a jointe, yconstitue la vie, celle-ci, à son tour, est parvenue à établir, dans certains animaux, diffé- rens ordres de choses distincts , qu'on nomme systèmes d'or- ganes , lesquels en ont amené eux-mêmes plusieurs autres , qui donnent lieu chacun à autant d'ordres de phénomènes particuliers : d'où il résulte que , dans un corps animal , les systèmes d'organes dont il est question, quoique assujettis, par leur connexion avec les autres organes , aux influences et à la destinée générale de ces derniers , sont eux-mêmes autant de puissances particulières , qui toutes donnent lieu à de,» phénomènes qui leur sont propres.

Or, il s'agit de montrer que la nature est tout-à-fait dan5 le même cas que la vie; qu'elle est de même constituée paruu ordre de choses entièrement dépendant et assujetti dans lou>; ses actes ; mais qu'elle eu diffère infiniment en ce que . tenant

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son existence de la volonté suprême , elle est ine'puisable dans ses forces et ses moyens d'aclion, tandis que la j^/g, instituée seulement par la nature , épuise nécessairement les siens.

La justesse de ces considérations ne pouvant être solide- ment contestée , il nous sera facile de mettre en évidence deux sortes d'erreurs assez communes, dans lesquelles nous paroissent tomber beaucoup de personnes qui veulent atta- cher une idée au mot nature, si fréquemment employé dans leurs discours ou dans leurs écrits.

En effet , parmi les diverses confusions d'idées auxquelles le sujet que j'ai ici en vue a donné lieu , j'en citerai deux comme principales ; savoir : celle qui fait penser à la plupart des hommes, que la nature et son Suprême auteur sont une seule et même chose , et celle qui leur fait regarder comme synonymes les mots nature et unwers , ouïe monde physique.

Je montrerai que ces deux acceptions sont l'une et l'autre absolument fausses , que les motifs sur lesquels elles se fon- dent ne sauroient être admis , et qu'on peut réfuter ces der- niers : ce que je ferai, effectivement, en commençant par ceux de ces motifs qui ont donné lieu à la première des ac- ceptions citées.

4< On a pensé que la nature étoit Dieu même : c'est, en effet, l'opinion du plus grand nombre ; et ce n'est que sous cette considération que l'on veut bien admettre les végétaux, les animaux , etc. , comme ses productions.

« Chose étrange ! l'on a confondu la montre avec l'horlo- ger, l'ouvrage avec son auteur ! Assurément, cette idée est inconséquente , et ne fut jamais approfondie. La puissance qui a créé la nature n'a, sans doute, point de bornes, ne saurolt être restreinte ou assujettie dans sa volonté, et est in- dépendante de toute loi. Elle seule peut changer la nature et ses lois; elle seule peut même les anéantir ; et, quoique nous n'ayons pas une connoissance positive de ce grand objet, l'idée que nous nous sommes formée de cette puissance sans bornes , est au moins la plus convenable de celles que l'homme ait se faire de la Divinité , lorsque , par la pen- sée , il a su s'élever jusqu'à elle.

« Si la nature étoit une intelligence , elle pourroit vouloir , elle pourroit changer ses lois , ou plutôt elle n'auroit point de lois. Enfin , si la nature étoit Dieu même, sa volonté se- roit indépendante , ses actes ne seroient point forcés. Mais il n'en est pas ainsi : elle est partout , au contraire, assujettie à des lois constantes sur lesquelles elle n'a aucun pouvoir; en sorte que , quoique ses moyens soient infiniment diversi- fiés et inépuisables , elle agit toujours de même dans chaque circonstance semblable , et ne sauroit agir autrement.

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« Sans cloute , toutes les lois auxquelles la naturee il assu- jettie dans ses actes , ne sont que l'expression de la volonté suprême qui les a établies ; mais la nature n'en est pas moins un ordre de choses particulier, qui ne sauroit vouloir, qui n'agit que par nécessité , et qui ne peut exécuter que ce qu'il exécute.

« Beaucoup de personnes supposent une àme nnwerseUe , qui dirige vers un but qui doit être atteint , tous les mouve- mens et tous les changemens qui s'exécutent dans les parties de Vunioers.

<f Cette idée , renouvelée des anciens , qui ne s'y bornoient pas , puisqu'ils attribuoicnt en môme temps une âme parti- culière à chaque sorte de corps , n'est-elle pas au fond sem- blable à celle qui fait dire à présent que la nature n'est autre que Dieu même ? Or , je viens de montrer qu'il y a ici con- fusion d'idées incompatibles, et que la nature n'étant point un être, une intelligence, mais un ordre de choses partout assujetti, on ne sauroit absolument la comparer en rien à l'Etre suprême , dont le pouvoir ne sauroit être limité par aucune loi.

« C'est donc une véritable erreur que d'attribuer à la na- ture un but , une intention quelconque dans ses opérations ; et cette erreur est des plus communes parmi les naturalistes. Je remarquerai seulement que si les résultats de ses actes paroissent présenter des fins prévues, c'est parce que , diri- gée partout par des lois constantes , primitivement combinées pour le but que s'est proposé son suprême auteur^ la diversité des circonstances que les choses existantes lui offrent sous tous les rapports, amène des produits toujours en harmo- nie avec les lois qui régissent tous les genres de changemens qu'elle opère ; c'est aussi parce que ses lois des derniers or- dres sont dépendantes et régies elles-mêmes par celles des premiers ou des supérieurs.

« C'est surtout dans les corps vivans , et principalement dans les animaux , qu'on a cru apercevoir un but aux opéra- tions de la nature. Ce but, cependant, n'est là, comme ailleurs , qu'une simple apparence et non une réalité. En effet, dans chaque organisation particulière de ces corps , un ordre de choses, préparé par les causes qui l'ont graduellement établi , ne fait qu'amener , par des développemens progres- sifs de parties , régis par les circonstances , ce qui nous pa- roît être un but, et ce qui n'est réellement qu'une nécessité. Les climats , les situations, les milieux habités, les moyens de vivre et de pourvoir à sa conservation, en un mot, les circonstances particulières dans lesquelles chaque race s'est rencontrée, ont amené leurs habitudes; celles-ci y ont

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plié et approprié les organes des individus; el il en est résulté que l'harmonie que nous remarquons partout entre rorganisation et les habitudes des animaux , nous paroîl une ftii prévue , tandis qu'elle n'est qu'une fin nécessairement amenée (i).

« La nature n'étant point une intelligence, n'étant pas Tïiême un être , mais un ordre de choses constituant une puissance partout assujettie à des lois, la nature, dls-je , n'est donc pas Dieu même. Elle est le produit sublime de sa volonté toute puissante; et, pour nous, elle est celui des objets créés le plus grand et le plus admirable.

« Ainsi , la volonté de Dieu est partout exprimée par l'exé- cution des lois de la nature , puisque ces lois viennent de lui. Cette volonté , néanmoins , ne sauroit y être bornée , la puissance dont elle émane n'ayant point de limites. Cepen- dant, il n'en est pas moins très vrai que, parmi les faits physiques et moraux , jamais nous n'avons occasion d'en ob- server un seul qui ne soit véritablement le résultat des lois dont il s'agit. »

Passons à la seconde erreur que nous avons citée , en parlant des confusions d'idées auxquelles la considération de la nature a donné lieu; à celle qui consiste en ce que beau- coup de personnes regardent comme synonymes, les mots nature et unwers, ou monde physique ; et tâchons de la dé- truire.

« Ces deux mois , nature et unwers , si souvent employés et confondus, auxquels on n'attache , en général, que des idées vagues, et sur lesquels la détermination précise de l'idée que l'on doit se former de chacun d'eux, paroît une folle entre- prise à certaines personnes , me semblent devoir être distin- gués dans leur signification , car ils concernent des objets es- sentiellement différens. Or, cette distinction est tellement importante que , sans elle, nous nous égarerions toujours dans nos raisonnemens sur tout ce que nous observons. » . Pour moi, la définition de Vunwersne peut être autre que la suivante ; et la seule considération de ce qu'est la matière, suffira pour en montrer le fondement ; la voici : .Uunwers est l'ensemble, sans puissance propre, de tous

(i) Qu'est-ce donc que ce ni'sus formaleur dont on s'eit servi pour expliquer, à IV-gard des corps vivans, soit les faits généraux de développement et de variation de ces corps, soit les faits particu- litis que présente l'histoire physique de Xhommâ dans les variétés reconnues de son espèce; qu'est ce , dis- je , que le nisus formateur dont il s'agit, si ce n'est cette puissance même de la nature que je viens de signaler i

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les c" 1res matériels, essenliellement inactifs et passifs, qui exislent.

« C'est donc du monde ou de Vunwen physique dont il s'a- git uniquement dans cette définition. Ne pouvant parier que de ce qui est à la portée de nos observations , c'est seule- ment de celles des parties de l'univers que nous apercevons qu'il nous est possible de nous procurer quelques connois- sances , tant sur ce que sont ces parties elles-mêmes , que sur ce qui les concerne.

» , se borne tout ce que nous pouvons raisonnable- ment dire de l'univers. Chercher à expliquer sa formation , à déterminer tous les objets qui entrent dans sa composition, seroit assurément une folie. Nous n'en avons pas les moyens; nous n'en connoissons que très-peu de chose ; nous savons seulement que son existence est une réalité.

» Cependant , la matière faisant la base de toutes ses par- lies , je puis montrer qu'il est en lui-même inaclif et sans puissance propre, et que ce que nous devons entendre par le mot nature , lui est tout-à-fait étranger.»

C'est une pensée incontestable , et effeclivement admise par les philosophes de tous les temps, que celle qui nous fait regarder la matière comme étant inerte , incapable d'a- voir en propre aucun mouvement, aucune activité, mais pouvant seulement recevoir et transmettre du mouvement, sans jamais en produire elle-même : la matière est donc un objet essentiellement passif.

Celte vérité, de toute évidence , tant qu'il ne s'agit que de la. madère ^ ne paroît pas généralement applicable aux corps qui , néanmoins , en sont uniquement formés; car, parmi ces corps, qui tous ne sont que des assemblages de particules de matière , et particulièrement parmi ceux qui sont fluides , on en remarque beaucoup qui semblent jouir en propre d'une véritable activité. Mais il est facile de faire voir que si les corps fluides paroissent doués d'une activité quelconque , ils la doivent , soit à des causes hors d'eux , soit à un état accidentel qui les éloigne de celui qui leur est pro- pre , état qu'ils reprennent, ou tendent à reprendre, dès que la possibilité de le faire se présente. Je me suis déjà con- vaincu du fondement de ces faits à l'égard du calorique et de quelques autres fluides , actifs accidentellement , quoique 1 état passager qui leur donne cette activité nous paroisse durable , parce que les causes qui le renouvellent ou l'entre- tiennent, sont telles aussi relativement à nous. Uatlruction elle même n'est qu'un fait constaté , mais qui ne prouve rien contre l'inactivité de la matière, et conséquemment contre ccll:; qui Cil naturelle à tciis les corps. Elle porte Êeulemeuî;.

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à penser qu'une cause , trop générale pour que nous ayons les moyens de la saisir, donne lieu à ce fait.

Ainsi , en approfondissant ce grand sujet , je crois pouvoir assurer , à l'égard de rensemble de malières et de corps qui consliluc Tunivers ou le inonde physique, que cet en- semble n'est point et ne peut être une puissance ; qu'il ne peut avoir aucune activité qui lui soit propre , et qu'il n'en sauroit avoir conséquemment sur ses parties , la source de toute activité lui étant tout-à-fait élrangère ; enfin , je crois de même être fondé dans celte assertion, que toutes les par- tiesdeTuniversphysique n'ont réellement paspar elles-mêmes plus d'activité que l'ensemble qu'elles composent-, que toutes sont véritablement passives , quoique certaines d'entre ellts soient circonstanciellement douées de la puissance d'agir; et que ce sont toutes ces parties qui constituent l'unique et vaste domaine de la nature.

Quant à l'ensemble dont je viens de parler, en un mot, à cet unio ers physique qui forme pour la nature un domaine si étendu , je ne doute pas qu'il ne soit indeslructif , immutable , quoique toutes ses parties soient continuellement modifiées et changeantes-, et je pense qu'il subsistera tel qu'il est, tant que la volonté de son Sublime auteur le permettra.

Maintenant , je vais montrer que la nature n'est nullement dans la catégorie se trouve l'univers physique ; que si celui-ci a la matière pour base de toutes ses parties , la ma- tière n'entre dans aucune des parties de celle-là ; et qu'en effet, la nature n'est ni un corps, ni un être quelconque, ni un ensemble d'êtres , ni un composé d'objets passifs; mais qu'elle offre, au contraire , un ordre de choses particulier , consti- tuant une puissance toujours active , laquelle est , néanmoins, assujettie dans tous ses actes.

C'est, effectivement, la nature qui fait exister, non la matière, mais tous les corps dont la matière est essentielle- ment la base ; et., comme elle n'a de pouvoir que sur cette dernière , et que son pouvoir à cet égard ne s'étend qu'à la modifier diversement , qu'à changer et varier sans cesse ses masses particulières, ses associations, ses agrégats, ses combinaisons différentes; on peut être assuré que, relative- ment aux corps , c'est elle seule qui les fait ce qu'ils sont , et que c'est elle encore qui donne aux i:ns les propriétés , et aux autres, les facultés que nous leur observons.

Qu'est-ce donc , encore une fois, que la nature, puisque ce n'est point une intelligence ? En quoi consiste cet ordre de choses qui a tant de puissance, et qui, lui-même, en établit d'autres? Et, si ce même ordre de choses est immaté- riel dans toutes ses parties , pa^- quelle voie pouvons-nous

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parvenir à le connoîlre , puisque toutes nos connoissances positives proviennent originairement de nos sensations ? Par l'exposition suivante , je crois donner la solution de toutes ces questions :

Définition de la nature , et exposé des parties dont se compose r ordre de choses qui la constitue.

La nature est un ordre de choses composé d'objets étran- gers à la matière, lesquels sont délerminables par l'observa- tion des corps , et dont l'ensemble Constitue une puissance inaltérable dans son essence , assujettie dans tous ses actes, et constamment agissante sur toutes les parties de l'univers physique.

Si l'on oppose cette définition à celle que j'ai donnée de l'univers , qui n'est que Vensemlle de tous les êtres physiques et passifs , c'est-à-dire , que Vcnscmhle de tous les corps et de toutes les matières qui existent^ on rcconnoîtra que ces deux ordres de choses sont extrêmement différcns , tout-à-fait séparés, et ne doivent pas être conf indus.

En ayant eu, presque de tout temps, le sentiment in- time , quoique nous ne nous en soyons jamais rendu compte , nous ne les avons pas effectivement confondus; car, pres- sentant cet ordre inaltérable de causes s;'us cesse actives, et le distinguant des êtres passifs qui y sont assujettis , nous l'a- vons en quelque sorte personnifié , en lui donnant le nom de nature ; et depuis , nous nous servons habituellement de cette expression , sans nous occuper des idées précises que nous devons y attacher.

Nous allons voir que les objets, non physiques, dont l'en- semble constitue la nature , ne sont point des êtres, et con- séquemmentne sont ni des corps, ni des matières; que , ce- pendant, nous avons pu les connoitre , à l'aide de l'observa- tion des corps ; qu'ils se sont trouvés à notre portée , par celte voie ; que ce sont même les seuls objets étrangers aux corps et aux matières dont nous puissions nous procurer une connoissance positive, lixaminons doue ces objets singuliers, et considérons le grand pouvoir qui résulte de l'ensemble qu'ils composent.

Objets mélaphYsiques dont l'ensemble constitue la nature.

Si la définition que j'ai donnée de la nature est fondée , il en résulte que cette dernière n'est qu'un ensemble d'objets métaphysiques , tous étrangers par conséquent aux parties de l'univers ; que la source de cgs objets ne sauroit nous être connue , et doit être attribuée à une création particulière , à la volonté du puissaist auteur de toutes choses; et que cet

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«ensemble d'objets forme un ordre de choses continuellement actif et muni de moyens qui permettent et régularisent tous ses actes. Ainsi, la nature se compose :

« i." Du mouùemeni , que nous ne connoissons que comme la modification d'un corps qui change de lieu , qui n'est es- sentiel à aucune matière, à aucun corps, et qui est cepen- dant ine'puisable dans sa source , et se trouve répandu dans toutes les parties des corps ;

<c 2.° De lois de tous les ordres, qui, constantes et immuta- bles , régissent tous les nTouvemens , tous les changemens que subissent les corps , et qui mettent dans l'univers , toujours changeant dans ses parties et toujours le même dans son en- semble , un ordre et une harmonie inallérables. »

« La puissance assujettie qui résulte de l'ordre des causes actives que je viens de citer, a sans cesse à sa disposition :

« i.° LU-space, donlnous ne nous sommes formé l'idée qu'en considérant le lieu des corps , soit réel , soif possible ; que nous savons être immobile , partout p-nélrable et indéfini ; qui n'a de parties finies que celles des lieu:i: que remplissent les corps , enfin , que celles qui résultent de nos mesures d'a- près les corps , et d'après les lieux que ces corps peuvent suc- cessivement occuper en se dépla<;ant ;

« 2.° Le temps ou la durée, qui n'est qu'une continuité, avec ou sans terme , soit du mouvement , soit de l'existence des choses , et que nous ne sommes parvenus à mesurer , d'une part , qu'en considérant la succession des déplacemens d'un corps , lorsqu'étant animé d'une force uniforme , nous avons divisé en parties la ligne qu'il a parcourue , ce qui nous a donné l'idée des durées finies et relatives ; et , de l'autre part, lorsque nous avons comparé les différentes durées d'existence de divers corps , en les rapportant à des durées finies et déjà connues. »

Ainsi, l'on peut maintenant se convaincre que l'ordre de choses qui constitue la nature , et que les moyens que cette dernière a sans cesse à sa disposition, sont des objets essen- tiellement distincts de l'ensemble d'êtres matériels et passifs dont se compose V univers physique ; car, à l'égard de la nature , ni le mouvement , ni les lois de tous les genres qui produisent et régissent ses actes , ni le temps et l'espace dont elle dis- pose sans limites , ne sont le propre de la matière ; et Ton sait que la matière est la base de tous les corps physiques dont l'ensemble constitue Vunioers.

Ce qui prouve que la nature n'est point une puissance su-^ prême, mais un pouvoir assujetti, quoique très-grand, c'est que le temps, pour elle , est une condition de rigueur, et qu'elle ne fait rien , absolument rien , sans l'eniploi de ce-

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lui-ci. L'idée , au contraire , que nous avons nous former de la toute^pm'ssance divine , est qu'elle ne peut être aslreinle par aucune impossibilité. Elle ciée un f^V;"+ , selon sa vo- lonté , et le fait exister sans qu'aurj^e durée quelconque soit nécessaire pour sa formation. Ce n'est assuréinent pas le propre du pouvoir de la nature. Aussi , nous pouvons conce- voir les moyens de celte dernière , et jamais notre foible m- teliigence ne pourra comprendre la puissance iafinle qui a donné lieu à tout ce qui existe , cr. un mot, créé la nature elle-même.

Puisqu'à l'aide de l'observation des corps nous avons pu apercevoir ce qui constitue réellement la nature^ et nous en former une idée ; que nous avons pu de même nous en for- mer une de Vunioers ou du monde pliysique , en considérant ce que sont essentiellement ses parties ; il en résulte que la définition que j'ai donnée de l'un et de l'autre de ces deux or- dres de choses , étant réduite à sa plus grande simplicité présente de chacun l'idée la plus précise et la plus exacte que nous puissions avoir. Pour la nature , activité , lois et moyens sans terme , mais partout assujettis ; pour Ximioers , ensemble immense d'objets passifs et essentiellement inactifs , ensem- ble qui constitue et borne l'unique domaine de la première.

Que l'on excepte la plus grande des pensées de l'homme, celle qui l'a élevé jusqu'à la connoissance de I'Etre suprême, et qu'on me dise s'il peut exister pour lui un plus grand sujet que celui dont je viens de traiter , un sujet surtout qu'il lui im- porte le plus de considérer, sous tous les rapports! Loin donc qu'il puisse se réduire à un simple objet de curiosité , je pour- rois prouver que de tout ce dont l'homme peut s'occuper , ce même sujet est celui qui mérite le plus son attention ; que presque tous ses maux , dans ce monde , lui viennent de ce qu'il le néglige ; qu'enfin , c'est uniquement de la connois- sance de la nature , et de l'étude suivie de celles de ses lois qui sont relatives à son être physique , qu'il peut retirer, pour sa conservation , pour son bien-être, et pour sa conduite, dans ses relations avec ses semblables , les seuls avantages réels qu'il puisse obtenir de l'observation.

Quant à la nature^ considérée dans ses rapports avec Vu- nivers , ou avec les parties du monde physique , c'est , sans doute , un objet de curiosité , mais qui est vraiment philoso- phique , et digne des grandes pensées de l'homme qui seul a le pouvoir de l'embrasser. Reprenons-en donc la considéra- tion , afin d'en acquérir, s'il est possible , une juste idée ; nous examinerons ensuite celles des parties de cette considération qui nous concernent immédiatement , les avantages immen- ses que nous pouvons obtenir de leur élude , et l'application

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que nous pouvons faire des lumières que cette étude nous procurera , pour diriger convenablement et utilement toutes nos actions.

« Pour l'homme qui observe et réfléchit , le spectacle de l'univers, animé par la nature , est sans doute très-imposant , propre à émouvoir, à frapper l'imagination, et à élever l'es- prit à de grandes pensées. Tout ce qu'il aperçoit lui paroît pénétré de mouvement, soit effectif, soit contenu par des forces en équilibre. De tous côtés , il remarque , entre les corps, des actions réciproques et diverses, des réactions, des déplacemens , des agitations , des mutations de toutes les sortes, des altérations, des destructions, des formations nouvelles d'objets qui subissent à leur tour le sort d'autres semblables qui ont cessé d'exister; enfin , des reproductions constantes , mais assujetties aux influences des circonstances , qui en font varier les résultats ; en un mot , il voit les géné- . vtions passer rapidement , se succéder sans cesse , et en quel" que sorte , comme on l'a dit , « se précipiter dans Vainnie des temps. »

« L'observateur dont je parle , bientôt ne doute plus que le domaine de la nature ne s'étende généralement à tous les corps. Il conçoit que ce domaine ne doit pas se borner aux objets qui composent le globe que nous habitons, c'est-à- dire , que la nature n'est point restreinte à former , varier , multiplier, détruire et renouveler sans cesse les animaux ^ les végèUiu'jc et les corps inorganiques de notre planète. Ce seroit, sans doute, une erreur que l'on commettroit, si l'on s'en rapportolt à cet égard à l'apparence ; car le mouvement ré- pandu partout , et ses forces agissantes , ne sont probable- ment nulle part dans un équilibre parfait et constant. Le do- maine dont il s'agit embrasse donc toutes les parties de l'u- nivers, quelles qu'elles soient; et, conséquemment , les corps célestes, connus ou Inconnus, subissent nécessaire- ment les effets de la puissance de la nature. Aussi , l'on est autorisé à penser que , quelque considérable que soit la len- teur des "changemens qu'elle exécute , dans les grands corps de l'univers, tous , néanmoins , y sont assujettis; en sorte qu'aucun corps physique n'a nulle part une stabilité absolue.

« Ainsi , la nature , toujours agissante , toujours impassi- ble, renouvelant et variant toute espèce de corps , n'en pré- servant aucun de la destruction , nous offre une scène impo- sante et sans terme , et nous montre en elle une puissance particulière , qui n'agit que par nécessité.

<f Tel est l'ensemble de choses qui constitue la nature , et dant nous sommes assurés de l'existence par l'observation ; ensemble qui n'a pu se faire exister lui-même, et qui ne peut

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rien sur aucune de ses parties ; ensemble qui se compose de causes ou de forces toujours actives , toujours régularisées par des lois , et de moyens essentiels à la possibilité de leurs actions; ensemble , enfin , qui donne lieu à une puissance as- sujettie dans tous ses actes , et néanmoins admirable dans tous ses produits.

« La nature reconnue, atteste elle-même son cmfeur, et présente une garantie de la plus grande des pensées de l'hom- me, de celle qui le distingue si éminemment des autres êtres qui ne jouissent de l'intelligence que dans des degrés infé- rieurs , et qui ne sauroient jamais s'élever à une pensée aussi grande.

« Si l'on ajoute à cette vérité la suivante ; savoir : que le terme de nos connoissances positives n'emporte pas néces- sairement celui de ce qui peut exister, on aura en elles les moyens de renverser les faux raisonnemens dont l'immora- lité s'autorise.

« Reprenons la suite des développemens qui caractérisent la nature , et qui montrent le vrai point de vue sous lequel on doit la considérer.

« Puisque la nature est une puissance qui produit , renou- velle, change, déplace, enfin, compose et décompose les différens corps qui font partie de l'univers ; on conçoit qu'au- cun changement, qu'aucune formation, qu'aucun déplace- ment ne s'opère que conformément à ses lois ; et quoique les circonstances fassent quelquefois varier ses produits et celles des lois qui doivent être employées, c'est encore, néanmoins, par des lois de la nature que ces variations sont dirigées. Ainsi , certaines irrégularités dans ses actes , cer- taines monstruosités qui semblent contrarier sa marche or- dinaire , les bouleversemens dans l'ordre des objets physi- ques , en un mot, les suites trop souvent affligeantes des pas- sions de l'homme , sont cependant le produit de ses propres lois et des circonstances qui y ont donné lieu. Ne sait-on pas, d'ailleurs , que le mot de hasard n'exprime que notre igno- rance des causes ?

« A tout cela, j'ajouterai que des desordres sont sans réa- lité dans la nature , et que ce ne sont , au contraire , que des faits, dans l'ordre général, les uns peu connus de nous , et les autres relatifs aux objets particuliers dont l'Intérêt de conservation se trouve nécessairement compromis par cet or- dre général {Philos, zoo/..., vol. 2 , p. 465). » Il résulte de la considération de ces derniers faits , que nous appelons désor- dre tout ce qui nous nuit ou peut nous nuire ; supposant pré- somptueusement que notre bien-être est le but pour lequel la nature fut Instituée.

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De la nécessité d'étudier la nature , c'est-à-dire Pordre de choses quila constitue , les lois qui régissent ses actes , et surtout parmi ces lois celles (fui sont relatives à notre être physique.

L'homme , placé à la surface du globe qu'il habile, consi- dérant d'abord qu'en quelque lieu qu'il soit, il est entouré d'une multitude de corps divers, dont plusieurs sont sans cesse en relation immédiate avec son être physique , que ces cor[>s sont tous desproduits de la nature , et que tous sont assujeilis à ses lois dans leurs mutations variées -, ne pouvant ensuite douter que son propre corps ne fasse , ainsi que tous les autres, partie de l'univers, puisqu'il est pareillement nialé- riel, et qu'il ne soit aussi, comme eux, soumis au pouvoir de la nature^ aux lois qui régissent les corps vivans, et plus particulièrement à celles qui concernent le corps animal ; enfin, étant forcé de reconnoître que toutes les facultés dont il jouit sont des produits évidens de ses organes (conséquem- ment des phénomènes physiques) et subissent effectivement le même sort que ces derniers; peut-il donc regarder avec indifférence la connoissance de la nature^ de celles de ses lois qui sont relatives à son être physique , en un mot, de tant d'agens divers qui influent sans cesse sur ses organes , sur la validité ou l'affoiblissement de leurs fonctions , ainsi que sur les différentes mutations d'état qu'il éprouve conti- nuellement ! Comment co»icevoir que l'homme , qui peut être infiniment supérieur, dans ses facultés d'inlelligejjce, à ceux des autres êtres du règne dont il fait partie, qui est par conséquent bien plus capable qu'aucun d'eux de reconnoîlre ses véritables intérêts; comment concevoir, dis-je, qu'il soit néanmoins tellement insouciant à l'égard de la puissance dont il dépend d'une manière si absolue, sous le rapport de son être physique, qu'il ne daigne jamais s'occuper d'elle ! Au lieu de s'appliquer constamment à l'étude de la nature^ à celles de ses lois qui sont relatives à lui, ainsi qu'à ses inté- rêts dans chaque circonstance , afin de n'être jamais en con- tradiction avec elles dans ses actions, il préfère son igno- rance à leur égard, conserve les préventions qu'on lui a ins- pirées, se livre à des désirs inconsidérés, s'abandonne à des penchans, à des passions qui compromettent ses plus grands intérêts , sa conservation même : en sorte que, toujours en- traîné et sans guide, toujours dominé , toujours esclave et même victime, l'homme , en général, est très-misérable.

J'ose le dire ; l'homme connoissant mal ce qui lui est essen- tiel à savoir relativement à la nature de son organisation, au po^voir de ses organes , à leur dépendance, ainsi qu'à celle des phénomènes qu'ils peuvent produire , enfin , à la source

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des facultés dont il jouît, comme auxmoyeiîsde les perfection- ner graduellement; connoissanlplus mal encore ce qui doit le guiderdansses actions avecsessemblables, et la partquiappar- tient aux lois de la nature, soit dans ses propres actions, soit dans celles des autres individus de son espèce ; en outre, trop souvent abusé par nn faux-saQoir qui, lui montrant sous un faux jour quantité de sujets qu'il considère , et lui faisant donner une confiance absolue aux jugemens qu'il porte, soit sur ses propres actions, soit sur celles des autres, le trompe souvent dans son attente, et sembleroit faire douter si l'usage de ses facultés intellectuelles ne lui est pas plus funeste qu'a- vantageux; enfin, attribuant toujours ses malheurs à un sort contraire , à la/ato///e, tandis qu'ils ne sont dus qu'à ses faux calculs, qu'à son ignorance des lois de la nature, avec les- quelles il se met presque toujours en opposition; on le voit persister dans son insouciance , relativement à la puissance dont il est partout si dépendant , et subir les maux qui doivent résulter de sa négligence et de son inconséquence.

Qu'il sache donc que tous les corps sans exception , soit ceux qui sont inorganiques , soit ceux qui jouissent de la vie sont assujettis aux lois de \ai nature dans tout ce qui les con- cerne; que, conséquemment, les phénomènes que produi- sent ces corps ou certaines de leurs parties sont dans le même cas : en sorte quetout ce qu'il peut observer est absolu- ment dans la même dépendance. Alors, il concevra l'impor- tance , pour lui, de reconnoîlre et d'étudier sans cesse la puissance qui exerce sur sa durée, son état, ses penchans ses pensées , ses actions , un pouvoir si absolu.

Hommes qui l'emportez sur tous les autres êtres vivanspar une aussi grande supériorité de facultés et de moyens mais que la nature a placés, comme eux , dans un immense torrent qui vous entraîne; considérez donc le cours de ce torrent- étu- diez et reconnoissezlesnombreuxécueils qui se trouvent dans son sein, si vous ne voulez être victimes des fausses directions que , par votre ignorance de ces écueils , vous pouvez donner à vos actions, en les mettant en contradiction avec l'ordre de choses auquel vous êtes assujettis.

Montrons actuellement les principaux objets qui doivent attirer l'attention de l'homme, dans son étude de celles des lois de la nature qu'il lui importe le plus de reconnoître , parce qu'elles sont relatives, les unes à son être physique, et les autres à sa tranquillité et à son bonheur.

Si, distinguant, à son égard et par sa pensée , le physique de ce qu'il appelle le moral ^ l'homme entend, pa?-là dis- tinguer les organes mêmes des phénomènes que leurs fonc- tions produisent, et applique plus particulièrement cette

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distinction aux organes et aux fonctions organiques qui lut donnent des idées, le font comparer, juger et penser, alors il reconnoilra que l'un et l'autre de ces deux objets sont en- tièrement du domaine de la nature. 11 les trouvera effective- ment régis par ses lois, et il remarquera que l'un et Tautre sont également susceptibles de déveioppemens, d'acquérir une éminence , un perfectionnement plus ou moins considé- rables, enfin, de subir des altérations plus ou moins grandes dans leur intégrité , et cela , de part et d'autre , dans des rap- ports parfaits. Cette considération , toujours et partout cons- tatée par les faits, lui fera sentir l'importance de régler , par l'observation des lois de la nature, d'une part, tout ce qui concerne son corps physique ou qui se trouve en relation avec lui, et, de l'autre part, ce qui est relatif aux actes de sa pensée.

Relativement a son être physique , deux ordres de consi- dérations doivent partager l'attention de l'honmie, parce qu'à l'égard de l'un et de l'autre , la connoissance des lois de la nature lui est d'une nécessité absolue.

Par le premier de ces deux ordres, il s'occupe de l'étude de sa propre organisation , des lois qui dirigent ses différens actes , de celles qui concernent les fonctions de ses divers organes, des causes qui peuvent troubler leur harmonie, al- térer leurs facultés; et il entreprend d'y remédier, sans se mettre en opposition avec les lois de la nature. Sauf une com- paraison plus étendue avec les autres organisations animales dont il peut obtenir beaucoup de lumières, je n'ai rien à lui proposer sur ce sujet important, parce qu'il ne l'a point négligé.

Par le second ordre de considérations, il doit s'appliquer à l'étude des agens extérieurs et divers qui exercent sur son corps des influences variables, souvent considérables, in- fluences qui altèrent sa santé , lui donnent des maladies , et compromettent fréquemment sa conservation. Malgré l'im- portance de ce sujet, on peut lui reprocher le tort de l'avoir jusqu'à présent négligé, et j'aurois à cet égard bien des ré- flexions à lui présenter ; mais je me bornerai à la simple in- dication de l'étude dont il est enfin nécessaire qu'il s'oc- cupe.

En effet, plongé continuellement dans la base de l'almo- sphère, dont il supporte le poids ainsi que la pression de toutes parts , et en outre sans cesse entouré de différens fùiides actifs , qui se meuvent dans le sein de cette atmosphère , tous invisibles^pour lui , les uns n'agissant sur lui qu'à l'extérieur, tandis que les autres le pénètrent plus ou moins rapidement , l'homme est de temps à autre diversement affecté, quelque-

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.fois môme très-fortement, par les influences variables de taal d'agens qui lenvironnent ; agcns (;ui subissent, dans leurs agitations, leurs déplacemens, leurs densités et leur puissaï>ce d'action, des variations souvent très-considérables. Les résultats de ces influences diverses , do;, t les aniir-aux éprouvent aiîssi les suites, sont , pour rbouuMe, tantôt d'af- ioibiir l'activité de ses mouveniens vitaux, ainsi que celle des fonctions de ses organes , de faire varier en iuï les secréiions et les excrétions, «rinterrornpre quelquefois le cours de cer- taines d'entre eUes, de préparer ou de donner lieu à diverses maladies; et tantôt de ranimer lénergie vitale, d'accroître le ton des solides réagissans , en un mot, d opérer des effets très-opposés aux premiers, mais qui, dans certaines cir- constances, peuvent être encore tres-nuisibles.

Les déplacemens et les agitations des fîuides environnans dont je viens de parler sont presque toujours en rapport dans leurs variations avec celles de l atmosphère qui les contient. Or, comme les variations de celle-ci sont elles-mêmes exci- tées par différentes causes dont les principales sont recon- noissables par l'observation, réglées dans le cours de leurs paroxismes, déterminables dans leurs retours, il nous es.t donc possible, à l'aide d'une étude convenable et suivie, d'assigner les époques nous serons exposés à supporter au moins les plus grandes influences sur nous de ces causes d'action.

Ici, je ne considère que les effets immédiatement relatifs au corps de l'homme , de la part des grandes variations de l'atmosphère , ainsi que de celles des fluides divers qu'elle contient; effets qu'il lui importeroit de mieux connoître sous tous leurs rapports, parce qu'il j^ourroit alors leur opposer des mesures de précaution , afin d'en être moins victime. Mais son intérêt à cet égard ne se borne pas à s'efforcer d'y échapper lui-même ; les grandes variations de l'atmosphère affectent et détruisent trop souvent ce qu'il a de pluT luécieux* et qui ne sait que les pluies, les grêles , les o;a; ti, les ou- ragans et les tempêtes ravagent ses habitations, anéantissent ses propriétés , lui causent des torts souvent incalculables , et même exposent sa vie dans diverses circonstances?

Cependant, il reste indifférent à l'égard de causes qui, amènent pour lui des effets si dangereux, et, quoiqu'il ne puisse douter que ces causes ne soient nécessairement régies par des lois et qu'elles n aient un ordre effectif, il ne fait au- cun effort , ne tente aucune recherche pour parvenir à con- noître les temps i! peut y être exposé. J'en ai dit un mot à l'article Météorologie. F. cet article.

Je viens d énoncer les deux ordres de considéra ions rui doivent attirer rattenllon de l'homme , relativement à sar*

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e/rc physique; savoir : îa connoissance de tout ce qui concerne s.'i propre orgarâisalloii , et celle des causes extérieures nui peuvent l'affecter oa en troubler l'harmonie. 11 lui imporrc assurément de connoîtrc les lois de la nature a l'égard de tout ce qui se rapporte à ces deux sujets. Maintenant , je vais pas- ser à un objet moins connu encore , plus délicat, et qui , re- lativement à riiomme social, ne le cède nullement en inté- rêt aux préccdens.

11 s'agit de reconnoître l'importance de considérer les /o/'s de Li nature à l'égard de ce qui concerne ce qu'on nomme le moral de l'homme ^ et de ce qui constitue la source de ses actions.

Je ne me propose pas de traitera fond ou dans son entier ce vaste sujet; mon objet ici et surtout mes moyens ne me per- mettent point de l'entreprendre. Mais, convaincu delà néces- sité d'en reconnoître les bases , c'est-à-dire, de signaler les ■jïoints essentiels de départ qui seuls peuvent fournir les moyens de le développer d'une manière utile, j'ai cru devoir exposer ici ma pensée sur cet objet important.

L'homme a reçu de la nature des penchons qui se dévelop- pent plus ou moins, selon les circonstances de sa situatioii. J'en ai fait l'exposition dans l'introduction de Vlllstaire na- turelle des animau.v sans vertèbres (vol. i , p. aSg ) , et j'y renvoie.

Tantôt la presque totalité de ces pencbans se trouve comme iinéantie , dans tel individu , par les suites d'une position misérable, pénible et de toute part dépendante; tantôt, dans tel autre individu , moins jnal partagé, tel ou tel de ces pen- cbans parvient à se développer, à se transformer même en passion; enfin , souvent, dans tel autre, dont la situation so- ciale est plus avantageuse encore , plusieurs de ces pencbans acquièrent des développeniens remarquables; mais presque toujours l'un d'entre eux devient dominant, et, s'il se change en passion, il affoiblit ou semble affoiblir les autres. C'est surtout dans les hautes situations que le «léveloppement des pencbans naturels de l'homme se faille plus fortement remar- quer.

C'est assurément dans ces penchons développés qu'il faut chercher les causes qui influent le plus sur la direction des actions de l'homme. Mais cette direction reçoit des modifi- cations plus ou moins grandes de la part du jugement de cha- que individu , selon que ce jugement a plus ou moins de rec- titude, c est-à-dire , selon qu'il est le résultat de plus ou moins de connoissances acquises et de plus ou moins d expé- rience mise à profit.

Ce sont là, pour moi, les points de départ les plus pro-

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près à montrer la véritnble source des actions humaines qui sont généralement si varices , si diverses, si conlrastanles , si singulières niême.

La tendance continuelle de Thommc vers le lien-être ou vers un meilleur- être , lui faisant sans cesse désirer une situa- tion nouvelle , et toiij.)ars fonder ses espérances sur Tavenir , rend les individus, privés de lumières, proportionneJlemcnt plus crédules, pins amis du n»erveilleux , plus indlfférens pour les idées solides, pour les vérités mêmes, leur donne un grand attrait pour des illusions qui les flattent , enfin, les porte à des craintes et à des espérances Imaginaires.

Cette manière d'être et de sentir, étant le propre de l'im- mense majorité des individus de toute population, a fourni aux plus avisés qui en font partie , les moyens d'abuser et de dominer les autres. Il leur a e^é facile, par-là, de changer en pouvoir absolu , les institutions originairement établies pour la conservation et l'avantage de la société. C'est donc principalement à l'ignorance des choses, au très-petit cercle d'idées dans lequel vivent les individus de cette majorité , qu'il faut rapporter la plupart des maux moraux qui affligent dans tant de contrées l'homme social.

Considérons maintenant comment et p.ir quelle voie il peut s'affranchir des illusions qui lui sont plus nuisibles qu'utiles.

Si l'homme se fût appliqué à distinguer les vérités qu'il peut parvenir à connoîtrc, des illusions qa lise forme, c'est-à- dire de celles de ses pensées qui ne s'appuient sur aucune base, ou autrement à distinguer ce qui est positif, comme les faits, de ce qui n'est que le résultat de ses raisonnemens, même d'après les faits ; s'il eût en outre considéré qu'il ne lui est possible d'acquérir des idéesque par la voie de 1 observation, que parles conséquences qu'ii en tire ; enfin, s'il eût reconnu que toute idée qu'il ne tlendrolt pas directement de l'obser- vation, ou qui ne seroit pas i;ne conséquence déduite de faits observés, doit être absolument nulle pour lui ; alors il n'eût pas été exposé à tant de prestiges , à tant d'erreurs , qui lui furent souvent si funestes.

L'intérêt le plus pressant de l'homme , celui qu'il lui im- porte le plus de considérer, doit donc lui faire reconnoïtre la nécessité de circonscrire clairement , dans sa pensée , le champ des connoissances réelles qu'il peut se procurer , et de s'en formerune idée juste, afin de ne pas s'exposer à la ten- tation, toujours infructueuse, d'en sortir, et se mettre, par- là, dans le cas d'être la dupe de ceux qui auroient des motifs pour l'égarer. Or, la culture du champ dont il est questiou lui apprendra que les connoissances auxquelles il peut par-

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venir sont de deux ordres; savoir : i."lcs faits constalcs par robservatlon , qui tous sont pour lui des vérités positives ; 2." les conséquences tirées des faits observés, lesquelles peu- vent être encore des vérités, mais aussi , le plus souvent , peuvent être erronées, puisqu'elles dépendent de sonjugenient. ( Voyez ce mot. ) Cependant, à l'aide de Tétude et de la jnédilation , il peut opérer le redressement de ces dernières, et se procurer aussi , par elles , la connoissance de beaucoup de vérités. Ainsi il n'y a, pour l'homme, de vérités saisissahles, de connolssances certaines , que celles des faits qu'il peut observer , et que celles qu'il peut obtenir des conséquences qu'il lire de ces mêmes faits , lorsqu'il possède tous les élé- mens qui doivent servir au fondement de ces conséquences. Hors de , iiors du rhciwp des rralilés , le seul qui r.oit à sa disposition, il ne peut y avoir, pour lui , que des illusions , et il lui est , en clfel , facile de s'en former plusieurs qui lui soient agréables , et dans lesquelles il se plaise , mais qui peuvent avoir , pour lui , plus d'inconvéniens que d'a- vantages.

Néanmoins, quoiqu'il soit réduit à ne pouvoir se procurer des connoissances positives que relativement aux objets phy- siques qui sont à sa portée, il ne sauroit douter qu'il ne puisse exister d'autresobjels qui constituent des vérités auxquelles il ne peut atteindre ; car, ne pouvant raisonnablement assigner aucune direction à la volonté du5?//7/e«2eoi//fî//de toutes choses, dont la puissance est sans doute infinie , il ignore nécessai- rement ce que Dieu a voulu , ce qu'il lui a plu de faire , et , à cet égard , ne peut rien assurer , rien nier. Enfin , comme il ne lui est pas donné de pouvoir connoïtre aucune des vérités dont il s'agit , mettre ses suppositions à leur place , seroit évidemment une folie. Pénétré du fondement de ces considérations, et voulant lui faciliter la détermination du champ des connoissances auxquelles il peut aspirer, connois- sances qui lui sont toutes utiles et laplupart très-importantes, je lui propose donc la circonscription suivante, qui renferme les sources de toutes les vérités auxquelles il peut parvenir.

Exposition des sources ou P homme a puise les connoissances qu'il possède^ cl dans lesquelles il en pourra recueillir quantité d'ouii es; sources dont f ensemble constitue^ pour lui , le champ des réalités.

I." La considération du monde physique , dont les parties observées, offrant partout une activité, un ordre et une harmonie inaltérables, ont élevé la pensée de l'homme jusqu'à la connoissance du suprême auteur de tout ce qui est ;

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a." De la nature , c'est-à-(lire, de cet ortlre âe choses im- mutable, qui répand et conserve racllvlté dans les parties <la inonde physique, y régit, par des lois, tous les niouvemens, tous les changemens qui s'y observent, et qui exerce un pouvoir absolu sur tous les corps quelconques , ainsi que sur les phénomènes qu'ils peuvent produire ;

3.<> Des lois de tous les ordres qui dirigent tous les moa- vemens , tous les changemeus qui s'observent à 1 égard des corps ;

Des portions finies de l'espace , mesurées par les lieux qu'occupent les corps, par les distances qui les séparent, et par celles qu'ils parcourent , lorsqu'ils se déplacent ;

5." Des durées limitées , mesurées par les déplaccmens. que subissent des corps mus par un mouvement uniforme, ou par les durées mêmes de certains de ces corps ;

G.» Du mouvement répandu partout, inépuisable dans sa source , reconnoissable par l'observation des corps , opérant les déplaccmens des uns, des agitations dans les parties des autres , et des changemens divers;

7." De la matière dont toutes les parties de Tunivers ou monde physique sont composées , et des corps qui tous en sont formés , leur ensemble constituant le domalue exclusif de la nature ;

8." De la forme extérieure âes corps, de leurs qualités, de la structure interne de ceux qui ne sauroient vivre, et de l'organisation de ceux qui jouissent de la vie ;

9." Des propriétés générales des corps , de celles qui sont particulières à chacun d'eux, et des suites des relations qu'ils- ont ou peuvent avoir les uns avec les autres ;

10." De la composition des corps, distincte de l'agrégatiatt ou de la réunion des molécules qui forment les masses , des faits qui appartiennent à la combinaison des principes dans toute molécule intégrante composée , et de l'individualité des espèces ;

II." Des changemens, décompositions, combinaisons , re- nouvellemens, et reproductions qui se remarquent à l'égard de beaucoup de corps , et qui ont probablement lieu , soit les- uns , soit les autres , pour tous;

12." Des quantités, en nombre ou en dimensioa, appll^- eables aux corps , au temps fini de leur durée ou de leur changement de lieu, à l'espace limité qu'embrassent ceus qui se déplacent, enfin aux éaumérations q^ui les concernent, ou à des quantités abstraites ;^

iS.oDes phénomènes qui apparirennentr à l'organisation des corps vivans , soit à son ensemble , soit à des fonction* d organes spéciaux; phénomènes parmi lesquels les plus émi-

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liens , qui s'observent dans cerJains aninftaux et surtout dans l'homme, avec une extension sans limites assignables, cons- tiluent, pour chaque individu, son senlimeiit intérieur , ses penchans , sa faculté d acquérir des idées , d'exécuter des o[tcrations avec ces idées , causes diverses qui entraînent ou excitent ses actions ;

i4..° Des ensembles particuliers de corps divers, distin- gués par des rapports qui les réunissent ; ensembles qui constituent, parmi les corps observés , i]es distinctions parti- culières, comme celles des règnes , des classes, etc , objets, «oit des parties de l'art en histoire naturelle, soit de nos sciences astronomiques et de physique générale ;

iS.o Enfin, des résultats des penchans, des affections et «les besoins de 1 homme ; résultais qui donnent lieu à ses mœurs , variées selon les temps , les climats et ses divers degrés de civilisation ; à ses opinions , ses croyances , ses institutions diverses; à ses actions les plus mémorables. Delà son histoire recueillie plus ou moins fidèlement; les monu- inens de ses entreprises , de ses travaux ; ses ouvrages d'ima- gination , sa philosophie , ses sciences , etc.

Telle est la circonscription positive du champ des rèalllés pour rhoMime ; de ce <hamp qui renferme les diverses sources il puise toutes ses idées , même celles qui sont du domaine de son imagination ; de ce champ qui seul lui fournil les connoissances réelles qu'il possède , et pourra toujours lui en procurer une infinité d'autres; de ce champ, enfin , il peut recueillir les seules vérités qu'il lui soit donné de pouvoir découvrir.

Ce même champ, embrassant dans ses limites les seules portions de l'Univers que l'homme puisse apercevoir , ainsi que la nature qui anime et régit partout les objets qui com- posent ce grand ensemble , est sans doute infiniment vaste pour lui : aussi n'en épuisera-t-il jamais la fertilité à son égard. Peut-être , cepend^mt, qu'il est encore fort restreint relativement à tout ce qui est ; mais il est interdit à l'homme d'en sortir, et de rien connoître de ce qui n'en provient pas. Ce sont des vérités du premier ordre et des plus impor- tantes à considérer pour lui, parce qu'elles seules peuvent l'empêcher de s'égarer. Ces mômes vérités ont cependant échappé aux piùlosophcs de tous les temps.

Toutes k's connoissances que 1 homme peut se procurer par la culture du vaste champ dont il s'agit , c'est-à-dire par l'observation des faits qu'il lui offre , et même par les conséquences qu'il peut tirer de ces faits , lui sont assuré- ment utiles , soit directement , soit indirectement. Aucune des vérités qu'il y petft recueillir, nou-seulcnientue sauroit

N A T Sqe

lui nuire , mais tnême ne peut que lui être profil aîile. L'er- reur seule est dangereuse pour lui. Aussi, quoique, par les(^ conséquences qu'il tire de Tobservation des fails , il puisse parvenir à la découverte d'un grand nombre de vérités , il doit être très-réservé dans Teniploi de ces mêmes consé- quences , qui ne sont que le résultat de son jugement , et il doit l'être d'autant plus , que ses connoissanccs de la nature sont moins avancées.

Or, si la matière créée est le domaine exclusif de la naliire^ et que , par suite de l'activité inépuisable qui fait essentiel- Jement partie de cet ordre de choses, tout corps quelconque, de quelque taille , forme ou nature qu'il soit , et dans quel- que lieu qu'il puisse être placé, en soit réellement le pro- duit ; si ensuite les corps lui doivent généralement , soit les inouvemens de leur masse , soit les actions de leurs par- ties , soit leurs changemens d'état ^ soit leurs destructions et leurs renouveilemens , soit les agitations que les uns exercent sur les autres, soit encore les phénomènes qui en résultent et ceux que certains d'entre eux produisent , et que partout ces différens faits soient dirigés par ses lois ; si enfin le corpshumain lui est entièrement assujetti comme les autres , et que tout ce qui appartient à ce corps , ainsi que ce qui en provient , lui soit pareillement soumis , et qu'il le soit particulièrement à telles de ses lois qui régissent ses déve- loppcmens , ses changemens d'état , les phénomènes de sou organisation , son sentiment intérieur, ses penchans , la di- rection des pensées qu'il exécute , de quelle importance ne doit donc pas être , pour l'homme , l'étude ou la connois- sance de celte même nature^ dont 11 est si dépendant \

Quelle autre science pourroitlui être plus directement uliie^ en effet, que celle que constitue ïhistoire naturelle , que celle science, quia pour objet la connoissance de la nature, de ses lois, de ses opérations, de ses produits ; que celte science, qui- considère non-seulement les corps perceptibles , de quelque règne et dans quelque situation qu'ils soient, mais, en outre^ les mouvemens qu'on obsei-ve dans beaucoup d'entre eux , Jes agitations qu ils éprouvent dans leurs parties , les ré- sultats des relations qu'ils ont les uns. avec les autres , les. changemens lents ou prompts qu'ils subissent, les phéno- mènes produits, soit hors d'eux, soit en eux-mêmes, par les. suites des relations citées, enfin, les lois qui dirigent ces mouvemens , ces agitations , ces changemens , en un mot , ces phénomènes , dans tous les cas !

Si c^est Tobjek de Vliistoiiv nafurelle , l'homme est forc«î de reconnoître que la science dont il s'agit est assurément la plus grande et la plus importante de toutes celles dont il gulssc

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s'occuper; car, sous le rapport de son être physique , se trou- vant, comme les autres corps, tout-à-fail dépendant des actions <jui rcsuhent de ses relations avec un si grand nombre de ces derniers, ainsi que des diverses agitations excitées dans ses pjrlies, des clianj^emens qui s'y produisent, et des lois qui ré- gissent, soit les phénomènes de son organisation, soit ce qu'il éprouve sous quantité de considérations, il a le plus grand intérêt d'étudier et de connoître ces différens objets , afin de rie point se mettre en contradiction , par ses actions, avec un ordre et une force de choses auxquels il est entièrement assujetti.

Que l'homme , le pins éminemment distingue , par .ces facultés , de tous les êtres qui comme lui habitent ce globe , ne dédaigne donc pas d'étuflier les lois de la nature, môme à l-'égard de son sentiment intérieur^ àes pt^nc/ians qu'il en reçoit génér.'tUunenl , et de son inlell i genre ; \its faits observés de- vant lui montrer jusqu'à l'évidence que ces phénomènes, qui lui paroissent si singuliers, si merveilleux , sontparfaitement fjrgr.niques , toujours en rapport avec Télat de ses organes , nécessairement soumis au pouvoir et aux lois de la nature , et que , par conséquent, la connoissance de celles de ces mêmes lois qui donnent lieu à ses penchans , qui provoquent le développement des uns ou des autres , selon les circons- tances de sa situation , lesquelles influent si fortement sur ses actions , lui est devenue d'une nécessité absolue, dans son état actuel de civilisation.

En vain les moralistes ont fait de grands efforts pour re- monter à la source des actions de l'homme , dans l'immense diversité de circonstances il se trouve dans la société qu'il forme avec ses semblables, surtout si la civilisation du pays dans lequel il habile est fort avancée ; n'ayant pas suffisam- ment étudié la nature , ni ce qui appartient à ses lois dans ces mômes actions , qui étoient l'objet de leurs recherches , ni les modifications qu'ont dît y apporter les circonstances particulières à chaque individu, ils les ont trouvées très- souvent inexplicables , et n'ont pu donner les lumières propres à les diriger dans le véritable intérêt de ceux qui les ccécajent.

Pour de plus amples développemens à ce sujet , et afin de saisir l'enchaînement des causes qui dirigent constamment l.s actions de l'homme et leur donnent tant de diversité, à raison des circonstances dans lesquelles se rencontrent les individus , je renvoie de nouveau mes lecteurs à ÏHistoire naturelle des animaux sans vertèlires{^ introd. , vol. i , p aSg), j'ai exposé les penchans naturels de Ihomiue , penchans

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ses actions prennent généralement leur source, ainsi que la force qui les excite.

Ici j'ajouterai seulement qu'il me semble que le plus grand service que Ton puisse rendre à l'homme social , scroit de lui offrir trois règles , sous la forme de principes ; îa première , pour l'aider à rectifier sa pensée , en lui faisant <Vislinguer ce qui n'est que préjugé ou prévention, de ce qui est ou peut-être, pour lui, connoissance solide; la seconde, pour le diriger , dans ses relations avec ses semblables , confor- mément à ses véritables^ intérêts ; la troisième , pour borner utilement les affections que son .srnfimrnt ndèneur eiV'miérèt personnel qui en provient peuvent lui inspirer. Or, les rè- gles dont il s'agit , et que je lui propose , résident dans Ics^ trois principes suivans.

Premier principe. Toute connoissance qui n'est pas le pro- duit réel de l'observation ou de conséquences tirées de l'observation, est toul-à-fail sans fondement et véritablement illusoire.

Second p^'iiicipe. Duos les relations qui existent, soit entre les indivilus , soit entre les diverses sociétés que for;nent ces individus , soit encore entre les peuples et leurs gouverne- mens , la concordance entre les intérêts réciproques est le principe du bien , comme la discordance entre ces mêmes^in- térêts est celui du mal.

Troisième principe. Relativement aux affections de riionime social , outre celles que lui donne la nature pour sa fa- mille , pour les objets qui l'ont entouré ou qui ont eu des rapports avec lui dans sa jeunesse , et quelles que soient celles qu'il ait pour tout autre objet, ces affections ne doi- vent jamais être en opposition avec l'intérêt public, en un mot, avec celui de la nation dont il fait partie.

Je suis bien trompé , ou je crois qu'il sera difficile de rem- placer ces trois principes par d'autres qui soient plus utiles, plus fondés et plus moraux que ceux que je viens de pré- senter pour régler la pensée, le jugement, les senlimens et les actions de l'homme civilisé. Je suis même très-persuadé que plus ce dernier s'écartera, par sa pensée , ses seniimens et ses actions , des trois principes exposés ci-dessus , plus aussi il contribuera à aggraver la situation , en général mal- heureuse , il se trouve dans l'état de société ; les actions qui sont en opposition avec ces principes donnant lieu à des vexations, des perfidies, des injustices et des oppressions de toutes les sortes, qui occasionent des maux nombreux dans le corps social , et y font naître quelquefois àcs dé- sordres incalculables.

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Aux causes «les maux que je viens de signaler , il me pa- roît nécessaire d en ajouter d'autres, qui sont plus grandes encore ; savoir :

i.° Uignoronra des principes, de Tordre et de la nature des cboscs.J'en ai déjà dit un mot, et j'ai montre que dans les individus très-nombreux qui sont dans ce cas, parmi toute po- pulation , elle donnoit lieu à une crédulité presque sans îi- miles, dont savent habilement tirer p.-^rti , pour maintenir lamultitude dans leur dépendance, des hommes qui, parla nature de leur position , soûl intéressés à favoriser cette cré- dulité et à en profiter;

2." he fa II x-suooir , lequel estua produit de demi-connois- sances et de consé(juences erronées qui résultent de juge- mens sans profondeur et sans rectitude; qui est le propre, particulièrement, d'un assez grand nombre de personnes qui se croient en é!at de raisonner sur tels ou tels sujets avant de les avoir suffisamment approfondis, avant même d avoir reconnu quelle pouvoit être leur identité avec les principes ou la nature des choses énoncés plus haut ; qui , en un mot, entrave continuellement le progrès des connoissances humai- nes, et apporte des obstacles pres(juc insurmontables à la découverte de la vérité , en mettant a sa place de spécieuses erreurs qu'il lui oppose toujours. Par lui, la philosophie des sciences perd déplus en plus la simplicité qui lui est si es- sentielle , ses connexions intimes avec les lois de la nature disparoissent insensiblement , et les théories de ces mêmes sciences, encombrées par une immensité de détails dans lesquels elles continuent de s'enfoncer , obscurcies par les fausses vues dont elles sont remplies, deviennent de jour en jour plus défectueuses. Aussi est-ce un fait incontestable que lefaux-snooir dont il est question , en introduisant, par suite de son inllucnce malheureusement trop puissante , une iimllitude d'erreurs de tout genre, et de vains aperçus , les- quels nuisent à l'étude de la nature, et empêchent de par- venir à la connoissance des vérités les plus utiles , prive l'homme social de lumières qui , par leur acquisition , pour- roient diminuer bien des maux <[ue celui-ci éprouve ;

3.° lÀcihus du pouvoir que commettent , en général , ceux qui sont les dépositaires de l'autorité ; abus qu'il n'est guère possible d'éviter , les hommes ayant tous les mêmes pen- chans et ne pouvant que difficilement se soustraire à celui qui les porte à tout sacrifier à leurs passions particulières , si l'occasion s'en présente. Cette cause me paroît avoir le plus contribué aux maux qui pèsent sur Ihumanité, en ce que, par la raison que je viens d indiquer, les institutions, publiques qui , daïis leur origine , n'a/oient d'autre objet

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que le kicn <le tous , n'ont servi le plus souvent qu'à assurer celui d'un peiit nombre , au préjudice ou au délrimcnt de la majorité , pour 1 intérêt de laquelle, cependant , ces mê- mes institutions avoient été créées.

En effet, il est maintenant reconnu que , dans tout pays civilisé , des lois ^yant été nécessaires pour la conservation de Tordre établi , et ces lois ayant exigé l'institution d'au- torités proieclrices, nmnies de moyens pour assurer et sur- veiller leur exécution, il est reconnu, dis-je, que le bien de la société entière dut cire but unique de l'institution dont il s'agit. Si donc une institution si salutaire , dans sou principe, manque ce but; si, dans ses eftels , l'influence de l'arbitraire se fait trop souvent ressentir , à quoi faut-il Tal- Iribuer, sice n'est à lacause même que je viens de cilerr" Sans cette cause toujours agissante, sans les penclians que Thomuie a reçus de la nature , parmi lesquels le plus remarquable est sans contredit celui qui le porte à dominer , à ne considérer que son intérêt particulier, exclusivement à tout autre , les diverses autorités qu'il a établies, toujours bienveillantes et tulélaires, ne perdroient jamais de vue l'objet pour lequel e'ies furent instituées ; ce même objet , bien loin de tomber en oubli, seroit partout reconnu; enfin, la sûreté et le bien-être des membres qui composent la société , ainsi que l'ordre qui en résulte , ne seroient jamais compromis.

La recherche continuelle des vérités auxquelles l'homme social peut espérer de parvenir, lui fournira seule lesmoy-ns d'améliorer sa situation , et de se procurer la jouissance des avantages qu'il est en droit d'attendre de son état de civi- lisation. Plusieurs de ces vérités sont déjà reconnues. Les lu- mières , maigre les nombreux obstacles que leur opposent sans cesse 1 ignorance et parliculièrement \e faux-saooir , se répandent peu à peu , et font de jour en jour des progrès remarquables. Tôt ou tard, en etïet » le temps amène inévi- tablement la destruction de l'erreur; tandis que la vérilé ^ immuable et indestructible, perce les ténèbres qui l'envi- ronnent , dissipe insensiblement les illusions , les prestiges , et finit par triompher de 1 ignorance et de la barbarie. Aussi^ vorons-nous la raison publique ^ éclairée par l'expérience, se rectifier graduellement; et les principes d'une saine philoso- phie qu'ont reconnus et consacrés tant d'illustres écrivains, se propager jusque dans les contrées les plus lointaines , in- fluer puissamment sur les destinées des nations , et préparer la seule voie qui puisse , par la suite des temps , affranchir l'humanité de nombre de maux qui l'accablent, autant, du moins , que peut le permettre l'ordre de choses qu'a éiablî l*; SUPREME AU lEUK de tout ce qui existe.

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Pnrml les vérités que llion;me a pu aperrc%'oir , l'nne des plus iuipoiinnles est , s;tns doule , celle qui lui a fait re^ connoîdc , ainsi (ju on 1 a vu plus liaut , que le premier tt Ift principal objet de toute instihiiion publique devoit être le Lien de la totalité Aiis membres de la société , et non uniquement celui diine portion d'entre eux: l'intérêt de la minorité étant en discordance avec celui de la majorité, de même que ricterêt individuel l'emporte ordinairenunt sur tous h s autres. IVÏais il y a encore une vérité qu'il ne lui importe pas ntoins de re- connoître, s'il ne doit même la placer au-dessus de celles qu'il a pu découvrir , par l'extrême utilité dont elle peut être pour lui. (?est celle qui, une fois reconnue, lui montrera la nécessité de se renfermer, p;;r sa pensée , dans le cer- cle des objets que lui présente la nature , et de ne jamais en sortir, s'il ne veut s'exposera tomber dans l'erreur, et à en subir toutes les conséquences. Certainement, il ne seroit pas difficile de lui prouver que , hors du cercle des objets dont il vient d'être question , objets qui tous lui attes- tent la puissance infinie qui les a fait exister, et qui seuls constituent pour lui ce que j ai nommé le champ des icalités^ il ne peut ar^juérir aucune connoissance solide , ne peut que se former des illusions (jui, quelque agréables qu'elles lui soient, lui sont presque toujours nuisibles, et qu'enfin , faire reposer l'intérêt général ou particulier sur des objets autres que ceux qui viennent d'être cités, c'est, de sa part, risquer de le compromettre gravement.

Nous avons dit précédemment que les vérilés à la connois- sance desquelles 1 homme pouvoil atteindre , par le moyen de l'observation, dévoient être partagées en deux ordres bien distincts, savoir :les faits observés, qui sont toujours des vé- rités positives lorsqu'ils ont été constatés-, et les conséquen- ces déduites de ces faits, lesquelles peuvent être considérées encore comme des vérilés , si , dans les jugemens qui les ont établies , l'on a employé tous les éléniensqui y dévoient en- trer , et suivi une marche convenable ; mais qui , dans le cas contraire , ne peuvent que se trouver absolument fausses.

Maintenant , nous allons faire remarquer que le nombre des vérités dont la connoissance nous est indispensable, s'ac- croît considérablement à mesure que la civilisation devient plus ancienne et fait plus de progrès.

En considérant chaque société huoiaine dans son degré de civilisation , on peut dire que la somme des vérités dont la connoissance est nécessaire au bonheur des individus , doit être proportionrielle au nombre des besoins que l'on s'y est formes. iJans les temps et les lieux régnoit une grande simplicité dans les besoins , ainsi que dans les jouissances ,

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«!i pelit nombre de vérités bien connues pnnvoit suffire au bonheur ; tuais dans ceux l'avancemenl de la civilisalioa a lïiulliplié considérablemenl ces besoins et ces jouissances , la connoissance d'un plus grand nombre de verilés devient nécessaire pour prévenir des abus et des supercberics de tout genre, dans l'état social. Or, dans-Tétat de civilisation dout il s agit , si le nombre des vérités dont la connoissance est nécessaire, est resté inférieur aux besoins , ou n'a pu se répandre ; si ce qui passe pour connoissance solide dans 1 opinion n'est qu'erreur , ou n'est in^ un faux-saooir ; le bon- lietir individuel y deviendra proporiionnellement plus difficile plus rare. Alors on dira qv»e les lumières sont plus nuisi- bles qu'utiles à l'homme, tandis que ce ne sont réellement que l'erreur et le faux-savoir qui lui nuisent.

Un homme célèbre prenant en considération les maux nombreux qui afiligent l'humanité, s'est persuadé que le bonheur ne pouvoit se rencontrer que dans un étal très- borné de l'intelligence , et que le savoir étoit plus nuisible qu'utile à l'homme. Le sens absolu de cette opinion, est, selon moi, une véritable erreur , quoique jusqu'à un certain point l'apparence lui soit favorable.

C'est assurément l'ignorance qui est la première et la principale source de la plupart de nos maux , depuis sur- tout que nous vivons en société; c'est aussi 1 extrême iné- galité d intelligence, de rectitude de jugement et de connois- sances acquises , qui s'observe entre les individus d'une p!)pulatioh quelconque, qui concourt sans cesse à la pro- duction de ces maux. Ce n'est en effet (jue relativement que certaines vérités peuvent paroîlre dangereuses •, car elles ne le sont point par elles-mêmes. Elles nuisent seulement à ceux qui sont en situation de se faire un profit de leur ignorance.

Ainsi , quant à l'opinion qui considère les lumières comme plus nuisibles qu'utiles à l'homme, l'apparence de fondement qu'elle semble avoir ne provient que de ce que ces lumières ï)'i. sont pas assez généralement répandues, et que de ce que l'on confond Xn faux-savoir avec la connoissance de la vérité, au moins à l'égard des sujets qui sont pour Tliomme d'une grande importance.

il résulte de ces considérations que si ce que nous appe- lons notre ^mw, n'est pas toujours un savoir réel , eu n'est borné qu'à un p'etil nombre d'individus dans une population nombreuse , il n'y a rien d'étonnant qu'il nous soit si peu utile. Rousseau s'est douté de l'état de nos sciences ; mais î\ les a condamnées et en quelque sorte proscrites d'une ma- nière trop absolue. Cet auteur, justement célèbre, revient souvent à la nature dans ses ouvrages , et i'oa voit qu'il avoit

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le sentiment de l'importance de son étude , ainsi que ceint <lcs inconvéniens , des dangers même de se mettre en ron- tradiclion avec ses lois. Plus passionné pour la «a t/rg qu'au- cune des personnes qui me soient connues, les cuconslances de sa vie ne lui permirent pas de la suivre dans sa marche, de bien saisir ses lois, de s'en instruire suffisamment. C'est sans doute ce qui a donné lieu à la seule partie foilde de son Emile; mais les résultats il tendoil partout , quoi- qu'en indiquant des voies impropres , quelquefois contradic- toires , sont toujours bons , justes et utiles à considérer.

Partageant donc le sentiment de Thomme célèbre que je viens de citer , du plus profond de nos moralistes , j'ose dire que, de toutes nos connoissances , la plus utile pour nous est celle de la nature^ celle de ses lois, en un mot, de sa marche dans chaque sorte de circonstances. Aussi peul-on assurer que chaque individu de l'espèce humaine fournit sa carrière plus ou moins complètement, plus ou mouis heu- reusement , selon que la direction quil donne à ses actions Se trouve plus ou moins conforme aux lois de la nature , selon qu'il s'en éloigne plus ou umins et selon qu'il tire un paili plus ou moins avantageux de tous les objets qui sont en relation avec lui , ou qui peuvent le servir. Ce sont » je crois, les vérités les plus importantes pour nous , celles qui doivent, plus que toute autre, attirer notre attention et même la fixer.

D'après les considérations qui .viennent d'être exposées, et les réflexions qui les accompagnent, je conclus :

i.*^ Q"*^ 5 pour 1 homnie , la plus utile des connoissances est celle de la nature , considérée sous tous ses rapports ;

2." Que, conséquemment, la plus importante de ses éludes est celle qui a pour but l'acquisition entière de celte connoissance ; que cette étude ne doit pas se borner à l'art de distinguer et de classer les productions de la nature , mais qu'elle doit conduire à reconnoître ce qu'est la nature elle- même , quel est son pouvoir, quelles sont ses lois dans tout ce qu'elle fait, dans tous les changemens quelle exécute, et quelle est la marche constante qu'elle suit dans tout ce qu'elle opère ;

3.0 Que, parmi les sujets de cette grande élude, celles des lois de la nature qui régissent les faits et les phénomènes de l'organisation de l'homme , son senlimcHit intérieur , ses penchans , etc. , et celles aussi auxquelles sont soumis les agens extérieurs qui l'afiÉectent, ou ceux qui peuvent compro- mettre tout ce qui l'intéresse directement , doivent attirer son attention et exciter ses recherches avant les autres ;

4.° Qu'à l'aide des connoissances qu'il peut obtenir par

N A U 3ç)9

CCS éludes, il se conformera plus aisément aux lois de la nature , dans loules ses ad ions ; il pourra se sousiraire à des maux de tout genre ; enfin, il en retirera les plus grands avantages.

Fuyez nos articles Homme , Idée, Intelugetsce, Ins- aiNCT , Imagination, eic. (t.am.).

NATU[\E DE BALEINE. Dénomination impropre- ment appliquée au f/ianc de haleine ^ qui n'est point le sperme de cet animal, quoiqu'on Tait aussi appelé en i-ilin spermn cet!. For. les articles Blaxc de Baleine et Cacitalot. (s.)

NAU. Fruit de la Cochinchine , qui se mange el qui sert à la teinture des étoffes eu brun rouge. L'arbre qui le porte grimpe comme le lierre. On ignore à quel gen^'e il se rap- porte, (b.)

NAUCLEE , Nauclea. Genre de plantes de la pentandrie monogynie , et de la tamllle des rubiacées, qui ne diffère presque des Cépiialantes que par le nombre de ses étami- nes et des divisions de sa corolle. Il a pour caractères : un ca- lice très-pelil h cinq dents ; Hne corolle monopclale infundi- buliformc, à tube long et grêle, et à liuibe divisé en cinq par- ties ; cinq élamines ; un ovaire inférieur, surmonté parmi style plus long que la corolle , el terminé par un stigmate en tête ; une petite capsule oblongue , presque à quatre côtés, à deux loges, et qui contient une ou deux semences oblongues dans chaque loge.

Ce genre renferme une douzaine d'espèces connues , en y comprenant celles qui avoient été décrites par Willdenow , sous le noui générique d'UNCARiE , et par Aublet, sous celui d'OuROUPARiE. Ce sont des arbres ou des arbrisseaux dont les feuilles sont simples et opposées; les ileurs réunies en tcte , et dont les plus connues sont :

La Nauclée d'Orient , dont les feuilles sont écartées , et les pédoncules très longs. Elle croît aux Indes et à la Chine- Son bois est jaune , très-beau et très-solide. On en fait fré- quemment des meubles dans les pays il se trouve ; mais il ue peut être employé en construction , car il pourrit promp- tement à l'air.

La Nauclée a feuilles de citronnier , qui a les feuilles rapprochées, presque terminales, et le pédoncule court. \{ se trouve dans l'Inde, ses fruits sont employés pour apaiser les coliques.

La Nauclée de la. Guyaîîe , qui est garnie d'épines re- courbées , et dont les têtes de (leurs sont ternées. C'est l'Oc- FiOUPARiE d'Aublct, et TUncaire épineuse de Willdenow. Jitle se trouve à Cayennc.

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La Nauclfe gambier dont les feuilles sont peu écartées , et jcs pédoncules courts. C'est le funisunralus duun ^altaf^am- hir àa Rumphius. (Jn en voit une helle figure «^ans le neuviè- me volume des rransactions de la Société llnnéenne de Lon- dres.

C'est des feuilles et des jeunes pousses de cotte plante que s'obtient par décoction ce qu'on A^i^tWi: gamhir ^ fécule très- employée comme astringente , dans les mal.u'.ies de la gorge , dans les dyssenteries et dans lesarls de la tannerie et de la teinture , efifin dans tous les cas le cachou est employé. Il passe pour beaucoup plus riche en tannin que ce dernier.

INAUCORE, Naucoris. Genre d'insectes, de l'ordre des hémiptères^ section des héléroplères , famille des hydroco- rises , trihu des ravisseurs, ayant pour caractères : antennes très-courtes , cachées sous Jes yeux, de quatre articles sim- ples, dont I PS trois derniers presque cylindriques, et dont le terminal un ^oeu plus grêle -, jambes et tarses des pieds anté- rieurs réunis , formant un grand crocliet , se repliant sous les Ciiisses ; hîs quatre autres pieds ciliés et natatoires ; leurs tarses à deux articles distincts ; bec très-court, conique , à trois articles; labre saillant , grand, triangulaire ; corps ovale-, déprimé,

LinnfiPus avoit placé ces insectes parmi les nepa. Geoffroy les en a séparés et avec fondement.

Les naumres ont le corps ovale , déprimé ; la tête appliquée exactement contre le corselet, arrondie, concave en dessous; les veux allongés ; un écusson triangulaire; les quatre pattes postérieures , allongées, frangées , agissant en forme de ra- mes ; les antérieures courtes , appliquées sous la tête avec les cuisses renflées ; les bords de l'abdomen ordinairement dentés.

Ces insectes, qui sont aquatiques, ont beaucoup de rap- ports avec les rorises et les notonedes; mais leurs pattes anté- rieures les en distinguent ; elles ressemblent en quelque sorte aux serres que les uruiiéides ont au-devant de la tête ; ils s'en servent comme de pinces pour saisir et retenir les insectes dont ils se nourrissent pendant qu'ils les sucRpt. Ce caractère est commun , il est vrai , aux autres nèpes de Linnœus ; mais les naucores en diffèrent soit parce que leurs tarses antérieurs n'ont qu'un seul article , soit parce que les autres pieds sont propres à la natation. Le labre des nèpes proprement dites et des lunaires n'est point , en outre , découvert. Les naucores ^ont très-agiles et nagent avec beaucoup de vitesse , au moyen de leurs pattes postérieures qui font l'ofGce d'avirons ; sou- vent elles sortent de l'eau pendant la nuit pourvoler dans la

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campagne. Elles sont très-voraces : de tous les insectes aqua- tiques , ce sont ceux qui font le plus grand carnage dans les eaux. La larve et la nymphe ne diffèrent de l'insecte parfait que parce qu'elles n'ont pas d'ailes. Les larves ont seulement sur la poitrine deux pièces très-plates , qui sont les fourreaux renfermant les élytres el les ailes , qui se développent après la première mue. Ces larves et ces nymphes sont aussi car- nassières que l'insecte parfait. Ce genre est peu nombreux en espèces.

Naucore cimicoïde, Naucoris cimkdîdes ^ Geoffr. , Fab. ; pi. G 33 2 de cet ouvrage ; Nepa , Linn. Elle est de couleur verdalre, avec des taches brunes sur la tête et sur le corselet; elle a la tête large , aplatie ; le corselet large -, i'écusson grand ; l'abdomen en scie sur les bords ; les élytres croisées , recou- vrant les ailes. On la trouve en Europe dans les eaux stagnan- tes.

Nai;core estivale , Naucoris esiwalls, Fab. : Coqueb., Il- lust. ir.un. insect. , déc. i , tab, lo , fig. 4. Elle ressemble à la précédente par la forme , mais elle est de beaucoup plus pe- tite; sa tête et son corselet sont blancs, sans taches. On la trouve aux environs de Paris.

Remarq. On lit au même article , dans le Biclionnaire His- toire naturelle de Bomare , Naucore ou Mouche-scorpion , panorpa , musca-scorpiura : on déduit de que ces noms appar- tiennent au même insecte ; ce qui est une erreur. Les nauco- res sont des insectes de l'ordre des Hémiptères, et vivant dans les eaux ; la mcfUche-scorpion ou panorpa , est un insecte de l'or- dre des Névroptères, et bien différent des naucores.

La description de la naucore , que Bomare donne d'après M. Gayeu de Valernod , ne doit s'appliquer , à ce qu'il me paroît , qu'à la notonecte glauque, (l.)

NAUCRAÏE^S. Genre de poissons établi par Rafinesque Smaltz , en 1810 , renfermant le centronote conducteur de M."^ de Lacépède , et une espèce des mers de Sicile, appe- lée par les pêcheurs des rivages de cette île , pesce fanfaro.

Ce genre a pour caractères : corps allongé , un peu com- primé, anguleux sur les côtés, près de la queue ; une na- geoire dorsale, avec des rayons séparés en avant; nageoires pectorales réunies à leur base.

M. Rafinesque est le seul ichthyologiste qui ait remarqué la réunion des nageoires thoraciques ducentronote conducteur; et ce caractère est le principal , qui distingue le genre nau~ crate de celui des Centronotes.

Le Naucrate fanfaro , N ancrâtes farifarus ., Rafm. Car. di aie. nuov.gen. e nuov, sp, di anim, e piant, délia Sicilia ., p. 4'(-,

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Tav. XII, f. I., a trois rayons séparés en avant de la nageoire dorsale. Sa mâchoire inférieure est plus longue que la supé- rieure. Sa ligne latérale est courbée dans le milieu. Son iris est dorée. Sa longueur est d'un pied environ.

Ce poisson, qui est peut être le centronote conducteur de la Méditerranée, de certains auteurs, a, comme l'espèce dé- crite sous ce nom par M. Lacépède , le corps marqué de fas- cics brunes et transverses. Celle-ci en diffère cependant en ce qu'elle a quatre rayons séparés à la dorsale, les mâchoires égales et la ligne latérale droite.

Le Fanfaro se trouve abondamment en automne dans la mer de Sicile ; et il y a lieu de penser qu'on le pêche aussi sur les côtes d'Espagne, (desm.)

NAUENBURGIE , Nauenburgia. Plante annuelle de l'Amérique méridionale , à tiges tétragones , à feuilles oppo- sées , et à fleurs solitaires dans les aisselles de feuilles , qui forme seule, danslasyngénésie agrégée, un genre appelé Bro- TÈRE par quelques botanistes.

Les caractères de ce genre sont : calice commun foliacé ; calice propre de deux folioles; réceptacle garni de soies; semences non aigrettées. (b.)

NAUFAR. Nom égyptien du Nénuphar Lotus, «jm;?/?tKrt lotus , (, Linn. ) , (ln.)

NAUPLIE, Nauplîus. Genre de crustacés établi par Mul- 1er, mais que Degéer anciennement, et Jurine dansces der- niers temps, ont prouvé n'être composé que des individus nais- sans du genre Cyclope. (b.) ,

NAUPLIUS. L'un des noms des Argonautes chez les anciens, (desm.)

NAUK. Nom de I'Érable champêtre en Danemarck.

(LN.)

NAURIS. Nom de la Rabioule ( brasska rapa^ L. ) , en Finlande. La même racine est appelée naum dans la Laponie suédoise, (ln.)

NAUTARIUS. V. Nautilier. (desm.)

NAUTES. L'un des noms latins des coquilles du genre Argonaute, (desm.)

N VUTILE, Nautilus. Genre de testacés de la classe des Univalves , qui offre pour caractères : une coquille en spi- rale, presque discoïde, dont le dernier tour enveloppe les autres , dont les parois sont simples , et qui est partagée en loges nombreuses, formées par des cloisons transverses, sim- ples , perforées par un tube.

Ce genre est très-remarquable , tant par sa disposition in- térieure que parce que le dernier tour de spire enveloppe

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les autres , de manière à les laisser plutôt deviner que voir ; ce qui donne, aux coquilles qui le composent, un aspect par- ticulier qu'on peut difficilement décrire.

La coquille des nautiles est beaucoup plus épaisse que celle des argonautes, avec laquelle on peut la comparer. Elle est toujours nacrée à l'intérieur. Les cloisons sont transversales et voûtées , et leur parlie concave est tournée vers l'ouver- ture. Le nombre de ces cloisons varie dans la même espèce ( depuis trente jusqu'à quarante et plus, dans le nauti/e flam" ^(2 ). Toutes laissent entre elles des chambres vides, régulières, diminuant proportionnellement jusqu'à l'extrémité de la spire, placée ici au centre de la coquille. Ces cloisons sont trans- percées par un petit tuyau cylindrique , épais , creux , imper- foré latéralement , qui paroît composé de petits tuyaux plus évasés d'un côté, implantés les uns dans les autres, grossis- sant avec les cloisons , et quelquefois liés par une simple membrane. Il n'y a pas de doute que ce tuyau ne serve à conduire la queue de Tanimal à l'origine de la spire elle s'attache. Ce tuyau, qu'on appelle si/jJion, ne communique point avec les chambres qui sont fermées à des époques ré- glées, probablement une fois chaque année , lorsque le corps de l'animal est devenu trop gros pour celle dont il remplit la capacité. Nous n'avons, au reste , aucune donnée sur le mode de sa formation.

On ne connoissoit l'animal de la plus grande espèce de ce genre , que par la description et une figure informe de Rum- phlus ; mais Denys de Montfort, dans son Hist. des Mollusques , faisant suite au Buffon de l'édition de Sonnini, nous fournit, à son égard, des notions très-précieuses. Il résulte du texte de l'ouvrage et des figures qui l'accompagnent, que cet ani- mal est fort voisin des sèches ou mieux Poulpes, mais qu'il en diffère par des caractères très-tranchés.

Son corps est arrondi comme celui des poulpes , et renfer- mé dans un sac musculeux , qui n'a pas d'autre ouverture que celle du canal excréteur. La peau dorsale se prolonge par derrière la tête , en un large capuchon qui sert de voile. Des bras très-nombreux et digités à leur extrémité , sont placés autour de la bouche ; et ils sont d'autant plus longs qu'ils s'éloignent du bec crochu et corné dont elle est armée. La tête est enfoncée dans les chairs, et n'est indiquée que par la bouche et les yeux, qui sont inférieurs aux bras et la- téraux. Le corps est terminé à sa base par un ( quelquefois fdusieurs) filet nerveux très-allongé, qui passe par la ( ou es ) tubulure de la coquille , pour aller s'attacher au som- met de la spire.

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On volt par-là que l'habitant du nautile a quelques rap~ ports à celui du madrépore ramé (Voyez au mot Madrépore) , et qu'il est disposé pour saisir sa proie , qui consiste en petits poissons, en crustacés, en mollusques, etc., à la mai.icrc des actinies. Ses bras, en effet, sont susceptibles de s'allonger plus ou moins , selon sa volonté ; et les digitations qui les termi- nent sont d'autant plus nombreuses , qu'ils sont plus longs.

Lorsque la mer est calme , le nautile fait sortir sa tête et ses bras hors de sa coquille; il élève et étend perpendiculai- rement la peau de la partie postérieure de son manteau , et il vogue sur la surface des eaux , sans employer les moyens de direction que fournissent aux Argonautes ( Voyez ce mot et celui Sèche ) , les longs bras dont ils sont pourvus. Dans les temps ordinaires , il se tient au fond de la mer , il marche sur le sable avec assez de vitesse , dans une posi- tion renversée.

Il paroît , par le dire de Rumphius , que ce nautile est très- abondant dans la mer des Indes, qu'il vit en troupes, qu'on en mange la chair, et qu'on fait un grand usage de sa coquille dans l'économie domestique , soit comme vase à boire , soit pour ornement , etc.

Autrefois , on recherchoit de même cette coquille en Eu- rope. On sculptoit , on gravoit sa surface ; on la moatoit sur des pieds d'or ou d'argent ciselés; on la garnissoit de pierres précieuses , et elle faisoit l'ornement des buffets de nos pères , dans les jours d'apparat. Aujourd'hui, on n'en voit plus guère que dans les cabinets des curieux.

On trouve très-fréquemment des nautiles fossiles et très- Lien conservés , dans les sables de Courlagnon, de Grignon et autres lieux de France , ainsi qu'en Italie , en Angleterre , etc. Quelquefois ils sont changés en silex, en mine de fer, etc.

Linnœus avoit divisé ce genre en trois sections, savoir : les nautiles à tours contigus , les nautiles à tours écartés , et les nau- iiles presque droits.

Lamarck l'a divisé en trois genres , d'après les mêmes mo- tifs : ce sont , outre celui des nautiles proprement dits, ceux des Spirules et des Orïhocères.

Denys de]VIontfort,plus hardi, a depuis établi, aux dépens de ces trois genres , ceux qu'il a appelés Angulithe , Oréade, Phonème , Hélénide , Elphide , Archidie , Florilie , Géopone, Cancride , Chrysole , Lampadie , Aganide,

LlNTHURIE , PhARAME , CeLLULIE , ANDROMÈDE , NoNIONE,

Sporulie, Licophre, Bellerophe, Thémeone,Bisiphite,

POLIXÈNE , OCÉANIE , IlOTE , PÉLAGUSE , PÉNÉROPLE ,

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MÉLO^^IE , Anténore, Êponide , Pelore , Cantîirope, TiNOPORE et AsTACOLE, Ce qui a fourni moyen à ce n.Uura- liste d'augmenter aussi considérablement le nombre de ces genres, c'est qu'il a pris en considération toutes les espèces microscopiques , soit marines, soit fossiles, qui ont été dé- crites parPlancus, Gualtieri , Leder , Muller , Soldani , Schroëfer , "Wan-Moll , Faujas , etc. , coquilles plus abon- dantes que les grosses , et présentant des organisations fort remarquables.

Cuvier regarde la Spirule comme un sous-genre de ce- lui-ci,

La plus commune des sept à huit espèces de nautiles, est le Nautile flambé , Nautilus pompilius, Linn. , dont Toiiver- ture est cordiforme , et qui a des fascies brunes , en forme de flammes, à l'extérieur. Il se trouve dans les mers des Indes et de l'Afrique. Il a ordinairement un demi-pied de diamètre dans sa largeur , et deux à trois pouces dans son épaisseur. ( V. pi. G 3o il est figuré, (b.)

NAUTILE'-CORNET- DE-POSTILLON. Voy. Spi- rule. (oesm.)

NAUTILE DÉPRIMÉ. Denys de M ont fort, dans l'édi- tion de Buffon , dite de Sonnini, avoit appelé de ce nom un fossile assez rare , de l'Eiffel , qu'il a nommé depuis Bel- LÉROPîiE , Bellerophon. (desm.)

NAUTILE A DEUX SIPHONS. Denys de Montfort avoit d'abord décrit sous ce nom une coquille fossile qu'on trouve en Bourgogne , aux environs de Bruxelles . et dans le marbre noir de Barbançon. Le même naturaliste , dans sa Conchyliologie systématique , en a formé depuis un genre nou- veau, sous le nom de Bîsiphite. (desm.)

NAUTILE ENCAPUCHONNÉ. Coquille fossile des roches calcaires , noires , fétides , des environs de Namur , d'abord décrite sous ce nom par Denys de Mon (fort , et en- suite distinguée par le même, comme devant foraier un genre particulier, sous les noms d'AcANiDE, Jqanides. (desm.)

NAUTILE OMBILIQUË (Petit) , de Pavanes. Cette coquille d'Ainboine forme le genre OcÉanie, 0/;t'a/77/5 de De- nys de Montfort, dans sa Conchyliologie systématique, (desm.)

NAUTILE DE PvVPIER ou NAUTILE PAPYRAC É. V. l'arricle Argonaute, (desm.)

NAUTILE A SPIRE (Grand). Cette belle coquille des mers de la Chine forme maintenant le genre Ammonik de Denys de Montfort. (desw.)

NAUITLIER. AniuKil des Nautiles. Il a des tentacules étalés, et un capuchon membraneux. (6.)

NVUTILITE ONDULi:. ^'oyez iSAUTiLirE pfr- sillé. (desm.)

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NAUTILITE PERSILLÉ des Vaches Noires, en Nor- mandie. Cette pétrification est le type du genre PÉLAGUSt. , Pelagiis de Denys de Montforl. 11 y réunit aussi le naulilile on- dulé de son Histoire des mollusques, (desm.)

NAUTILITE TRIANGU LAIRE. Fossile des environs du Havre , décrit d'abord par Denys de Montfort , sous ce nom , et ensuite sous celui d'A>GliLnHE, onguliihes. (desm.)

NAVARRETIE , Naoarretia. Plante feuilles pinnées et multifides , qui se trouve au Chili , et qui forme un genre dans la pentandrie monogynie.

Ce genre présente pour caractères : une corolle infundibu- liforme ; cinq étamines ; un ovaire à style terminé par un stig- mate bifide ; une capsule membraneuse , à une loge et bi- valve, (b.)

NAVAU. Synonyme de Navet, (b.)

NAVAU BOURGE. Nom vulgaire delà Bryoke, aux environs d'Angers, (b.)

NAVET. On donne vulgairement ce nom à plusieurs co- quilles univalves de genres différens ; ce sont : le lulla râpa , ou Pyrule, le voluta pyrum , etc. , L. (ln.)

NAVET. Coquille du genre Cône, Conus miles de Lin- nœus. (b.)

NAVET. Espèce de cJwu, dont la racine est fort grosse , et qui se cultive pourlanourriture delhommeoudesbesliaux. V. aux articles Chou et Rave, (b.)

NAVET A LONGUE QUEUE. Le Rocher canali- CULÉ , Murex canaliculatus , a reçu ce nom. (desm.)

NAVET DU DIABLE. C'est la racine de la Bryone.

(B.)

NAVET SAUVAGE. V. Navette, (s.)

NAVETTE, Radius, (ienre de Coquilles établi par Denys de Montfort , aux dépens des Bulles de Linnœus. Ses caractères sont : coquille libre , univalve , à spire inîérieure et voûtée: ouverture allongée, étirée ; columelle lisse , ainsi que la lèvre extérieure ; canal de la base plus long que celui du sommet.

L'espèce qui sert de type à ce genre , est la Bulle volve de Linnœus, connue des marchands sous le nom de navette de tisserand., qui vit à quinze brasses de profondeur, dans la mer des Antilles. Elle est très - blanche ; sa longueur est quelquefois de six à sept pouces. L'animal qui la forme a deux tentacules qui portent les yeux à leur base antérieure ; un pied long et étroit ; un manteau qui recouvre toute la co-

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quille , et qui de plus se prolonge en tube au sommet et à la base, (b.)

NAVETTE. Espèce de Chou que Ton cultive pour la graine, dont on retire une huile propre à brûler et à être employée dans plusieurs arts.

La navette grosse est le Colsa. (b.)

NAVETTE DES SERINS. C'estle Sénevé des champs, Slnapis awensis ^ L. (ln.)

NAVETTE DE TISSERAND. Nom de la voluta spelta de Linnœus , et de la BuLLE volve. V. aux mots Volute, Bulle et Navette, (b.)

NAVETTE TUILÉE. On donne ce nom à une Pho- LADE : Pholas cosiata. (desm.)

NAVEW.'-Nom anglais du Navet, (ln.)

NAA^IA. Nom imposé à la Foulque, (v.)

NAVIARSOAK. Nom générique du Plongeon, au Groenland, (s.)

NAVIAT. Nom vulgaire des goélands et des mouettes, (v.)

NAViCELLE. Synonyme de Ciember et de Septaire, Voyez Cambry. (b.)

NAVICULARIA, d'Heister. Ce genre, adopté par Adan- son , est fondé sur le stachys ghéiinosa, Linn. Ses caractères sont : calice tubuleux, long, à cinq dents égales ; corolle la- biée, à lèvre supérieure fendue ; étamines médiocres ; quatre graines ovoïdes; fleurs en verticilles sessiles , triflores; feuilles florales en nacelle. Il n'a pas été adopté, (ln.)

NAVONE. Nom du Navet en Italie, (ln.)

NAVUCE ROUGE. La Moutarde noire porte ce nom aux environs d'Angers, (b.)

NAWA-SIRO-GOMI des Japonais. C'est une espèce de Chalef {elœagnus macropJiylla , Thunb.). (ln.)

NAWAGA. Nom de pays du Gade callarias. (b.)

NAXIUM et NIXIA, ou PIERRE DE NAXOS. Les anciens, au rapport de Pline, se servoient, pour polir le marbre et façonner les pierres précieuses, du naxium^ préfé- rablement à toute autre pierre à aiguiser. Le nuxium se pré- paroit à Naxos. Ou lui préféra ensuite une autre pierre qu'on tiroit d'Arménie. C'est encore aujourd'hui de l'île de Naxos que nous tirons, par la voie de Marseille, l'émeril qui est employé pour user et polir les pierres dures. On sait que cette pierre est une roche micacée remplie de petits cristaux ou grains de fer oxydulé et de corindon , substances qui sont la cause de sa grande dureté. V. Corindon granulaire , à l'article ConiNDON. (ln.)

NAYADE. Vers annelides. V. Naïade, (desm.)

NAYXDE , plante. V. Naïades, (desm.)

/^o8 ^' E B

N,\Y,\3. V. Naïas. (ln.)

NAY-LELLI. C'est, à Ceylan, VOpluoxlllum gerpenti- num , L. , arbrisseau décrit au mol Ophiose. (ln.)

N\'YM-EL-S\LYB , Gramen cmàs. C'est le nom arabe de ia ^laETELLE d'Egypte , Cynosums œgyptlus , L. V. Éleu-

SlNlv (LN.)

NAYOURIVI. On donne ce nom, dans Tlnde, à une planîi; Irès-rommune , employée à la teinture en rouge. Il p.iroif, pnr la description incomplète qu'on en trouve dansles Lellirs p(Vfidntes t qu'elle appartient au genre Irésiné ou au gcHi-e Cadrlari. (b.)

N VZ V M!) XmS. Cette pierre avoitla couleur rouge du sang, et éîoit v(!inée de noir. Pline laclasse avec les pierres précieuses, et ne s''cxplique pas davantage. Ne seroit-ce pas un jaspe rouge veiné de noir, qui probablement se trouvoit chez les TStazamons , peuple d' Afrique? (ln.)

NAZÎvV. Adanson donne ce nom à un genre de graminée qui comprend le f^/2r/;ra5 rar.emosus^ L. On l'a nommé depuis trag'is et hfppago. (LIS.)

N \Z1QITÉ F. Nasique. (desm.)

NEANTHE. Calice tubuleux , à cinq dénis; corolle à trois laies, dont un, deux fois plus grand, enveloppe les deux autres ; élamines diadelphes ; un style subulé , à un sfig- raale; fleurs en panicules terminales; feuilles ailées avec im- paire. Une seule espèce de planle rentre dans ce genre , établi par Pierre l>rovvn , et adopté par Adanson. C'est un arbre dont P. Brown n'a observé qu'un seul individu à la Jamaïque , près le Port Saint-Antoine. Il appartient à la fa- mille des légumineuses. (E^^)

NEBBE HAUL on BEAKED AVHALE , Pontoppl- dam , INorw. i , pag. i33. M. de Lacépède rapporte cette ci- tation à son hypéroodon butskopf, que nous avons fait con- noîire à Tarlicle Dauphin , lome g, pag. 176. (desm.)

NEBBE MUUS et iMUSESKIiEK. Noms norwégiens des Mus^RAIG^'ES. (desm.)

NEBBEK. Voyez Nabqah. (ln.)

ISEBEI. Nom A' un faucon noir (T Amérique ^ à pieds et bec roux , selon flernandez. (v.)

NEBKA et NEBBEK. V. Nabqaii. (ln.) NÉBIvlE, iVfi/vna , Latr., Clairv, Oliv. ; Carahus ^ Linn. , Fab. Genre d'insectes de l'ordre des coléoptères, section des pentamères , famille des carnassiers , tribu des carabiques. Très-rapprocbées des carabes proprement dits, à raison de leur port , de leurs janibes antérieures non écbancrées , et de quelques rapporis dans les parties de la boucbe , les nébries en sont cepcudant distinguées par plusieurs carac-

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tères : leur corps est très-aplali ; leur labre est entier ou légè- rement sinué ; les palpes extérieurs sont filiformes et termi- nés par un article en forme de cône renversé, mais allongé ; celui qui termine les palpes labiaux est surtout très-remar- quable sous ce rapport ; sa longueur égale presque celle de larlicle précédent, quiest lui-même fort long ; le bord exté- rieur et inférieur des mandibules est avancé et très-aigu près diî leur base ; le côté extérieur des mâchoires est dilaté et birbu , près de son origine. Les nébries diffèrent d'ailleurs <\t;s pogonop/iores^ genre très-voisin, en ce que leur languette est courte , presque carrée , et simplement unidenlée ou avancée en manière d'angle au milieu de son extrémité supé- rieure ; que leurs palpes sont beaucoup plus courts , et que la dilatation extérieure de leurs mandibules est bien moins prononcée.

Les nébries sont des carabiques de moyenne taille, dont le corps est ovale-oblong et aplati , avec les antennes fili- formes ousétacées; la tête un peu plus étroite que le corselet; le corselet transversal, en forme de coeur, de lalargeur de l'ab- domen, en devant; plus étroit et largement tronqué à sa partie postérieure ; l'écusson petit ; les élytres entières et souvent striées , et les pattes assez longues et grêles. Leurs mandibules n'ont point de dentelures, et la dent située au milieu du bord supérieur de Téchancrure du menton est bifide.

Ces insectes n'offrent point les couleurs métalliques et brillantes qui distinguent la plupart des carabes; lis sont, pour la plupart , noirs ou bruns ; les autres ont le fond jau- nâtre et plus ou moins varié de noir. Le plus grand nombre des espèces habile les lieux froids et élevés , et en général humides. Leurs métamorphoses sont inconnues.

Les uns sont ailés et forment seuls , dans la classification de cette sous-famille qu'a donnée M. Bonelli,le genre nebria. Tels sont les suivans :

La iSÉBRlE ARÉNAlPiE, Nebria arenaria , pi. G.,33 , fig. 3 de cet ouvrage; Carabus cowplanaius , Llnn.; Carabits arenariiis , Fab. Son corps est long de huit lignes, jaunâtre ouroussâtre, avec les élytres striées et traversées par deux bandes noires , formées de plusieurs taches, plus ou moins grandes. On la trouve sur nos côtes maritimes : les individus qui habitent relies de la Méditerranée ont , en général , les taches plus f^randes et plus nombreuses , et sur un fond d'un roussâtre plus vif.

La NÉBRIE LIVIDE, Nebria Im'da ; Carabus Iwidus^ Linn. ; Carabus sabulosus, Fab.; Clairv. Entom. lieh. ^ tab. 22, fig. a, est noire, avec le corselet, le limbe extérieur des élytres ,

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les antennes elles pâlies d'un jaunâtre roussâtre. On la trouve au nor<i de l'Europe et en Allemagne.

La Nebrie psammode , Nebria psammodes; Carahus psam- modes, Ross. , est noire, avec la tête, le corselet et le bord extérieur des élytres , d'un fauve pâle. Elle habite l'Italie.

La NÉBRJE BRÉVICOLLE , Nebria brei'kolh's , Clairv , ibid.^ iab. 22 , fig. B 6 , est d'un noir luisant , avec les antennes , les jambes et les tarses d'un brun ferrugineux ; ses élytres ont des stries poinlillées. C'est la seule espèce de ce genre (jue l'on trouve aux environs de Paris.

Les autres espèces sont aptères ou sans ailes , et compo- sent le genre Alpée , Alpens de M. Bonelli.

La plus connue de toutes est la Nébrie de Helwig , ISebria Hehvigu, Panz, , Faun. insect. Gerni.^ fasc. 87 , fig. 4- Elle est d'un noir luisant , avec les antennes , les palpes et les pattes, et quelquefois même la suture , d'un fauve obscur; le corselet a , en devant , une ligne enfoncée , transversc , courbe , qui s'unit avec une autre placée au milieu et lon- gitudinale ; les élytres ont des stries simples ou foiblement ponctuées. Elle se trouve en Allemagne.

Voyez , pour les autres espèces de ces deux divisions , les obseivutions entomotogiques de M. Bonelli , faisant partie des Mémoires de l'Académie des sciences de Turin , et l'article Nébrie de l'Encyclopédie méthodique. Le /7a7'«Â^ vmltiponrtnéj qu'Olivier range avec les nébries , est plutôt un élaphre. (l.) . NÉBRINA. Nom des Baies du genévrier, en Espagne.

(LN.)

NEBRIOIS de Diosconde , est rapporté aux Panais par Adanson. (ln.)

NEBRITES. Nom d'une pierre citée par Pline , et qui éloit consacrée àBacchus , parce qu'elle avoit la couleur de la peau de biche dont ce dieu étoit revêtu. Pline ajoute qu'il y avoit des nébriles noires. Cette pierre nous est Inconnue, (ln.) NEBULEUSM On nomme ainsi une Couleuvre, (b.) NEBULEUSE. On a donné ce nom à une coquille du genre Cône , le comts magus. (desm.) NÉBULEUX, r. l'article Promerops. (v.) NÉBULEUX. Poisson du genre Labre, (b.) NÉBU NOKI ou NÉMU NOCKl et Nébu«a wocki. Ces trois noms appartiennent à I'Acacie en arbre , Mimosa arborea , au Japon, (ln.)

NECBOUG. Sorte de Palmier qui croît à Sumatra , et avec le bois duquel on fabrique les arcs. J'ignore le genre au- quel ce pal:nier doit cire rapporté, (b.)

NECKEH , Nerkrra. (ienrc de plantes établi par Hedwig

NEC 4i5-

dans la famille des mousses , et dont les caractères consistent à avoir un péristome externe à seize dents; un péristome in- terne muni «l'un nombre égal de dents semblables , libres à la base , très-entières. Il a pour type la Fontinale PENNÉE , la Sphaigne des arbres, etl'HYPNE A'ésiculeux. V. Eleu-

TÉRIE. (B )

NECtLERIE , Neckerîa. Nom donné par Gmelin au genre établi par Ailon sous celui de Poluche. (b.)

NECKSTEIN. Les mineurs saxons désignent , par nerk- stin , un minerai d'étain , riche en apparence , mais qui rend peu à la fonte, (ln.)

NECROBIE Ae^roè/a, Latr., Oliv. ; Corynetes, Payk. Fabr. Genre d'insectes , de l'ordre des coléoptères , section des pentamères , famille des clavicornes , tribu des clai- rones.

Presque tous les insectes qui attaquent les substances ani- males , ainsi que la plupart de ceux qui vivent dans le bois mort, ou qui détruisent nos meubles et nos provisions, ont été pendant long-temps désignés sous le nom générique de dennestes. Linnseus, qui créa , pour ainsi dire, la science en- tomologique, n'ayant à nous présenter qu'un petit nombre d'insectes , crut devoir les réunir dans des cadres peu nom- breux , faciles à distinguer. Les genres que ce célèbre na- turaliste établit, étant clairs et précis, suffirent pendant quelque temps aux recherches qu'on avoit à faire ; mais, depuis que cette science est plus généralement cultivée, depuis que les mœurs et la manière de vivre des insectes nous ont offert une infinité de merveilles qu'on ne soupçon- noit pas auparavant ; depuis qu'on a eu le bon esprit de voir que l'étude de ces petits animaux avoit ses applica- tions dans les arts et dans la médecine , et qu'elle se lioit à l'économie végétale et animale : depuis sur tout que leur nombre surpasse dans nos collections celui des plantes , on a été obligé de former de temps en temps de nouvelles subdivisions, et de multiplier les genres en raison des dé- couvertes que l'on a faites.

Geoffroy avoit bien saisi les rapports naturels des insectes dont il s'agit ici , en plaçant une de nos esnèces indigènes, et la plus commune , le dermesie violet àe Linnœus , dans un nouveau genre , celui des clairons, qui se compose , en majeure partie , de plusieurs attelabes du naturaliste sué- dois; mais celte espèce et quelques autres analogues of- frant néanmoins quelques caractères particuliers, je les ai réunies dans une autre coupe générique , que j'ai appelée Nécrobie , nom formé du mot grec necros, qui signifie un mort , un cadavre , et bius , vie , parce qu'on trouve ordi-

^12 N E C

iMireinenl ces insoclcs d.Tns U-s ciiarogiu's, M. Pavkull ne connoissant point l'ouvrage {Préc. des caract. génér. des inseci.') , je l'avois élaWi, a fait la même distinction, mais en dési- gnant ce genre sous le nom de corynetes^ que Fabricius et \g?, entomologistes étrangers ont adopté. Olivier , dans son beau travail sur les coléoptères et dans l'Encyclopédie mé- thodique , a conservé ma dénomination.

Les nécrobies ne paroissenl avoir que quatre articles aux tarses; ellavant dernier même, plus petit que le précédent, et entier, est caché entre les lobes de celui-ci. Ellessont, avec les énopUes , les seuls insectes de cette tribu qui offrent ce dernier caractère; mais, dans les nécrobies , les trois der- niers articles des antennes sont transversaux et se réunissent pour former une massue qui a la formé d'un triangle ren- versé ; le dernier article leurs quatre palpes est en massue obconique, traits qui distinguent ce genre du précédent. Les nécrobies ressemblent d'ailleurs aux autres insectes de la même tribu. ( Voyez Clairoises. )

Les nécrobies sont ornées de couleurs assez belles ; leur démarche est lente cl leur vol est peu rapide. On les trouve quelquefois sur les fleurs et sur les feuilles des plantes; mais elles fréquentent plus particulièrement les charognes et les dépouilles desséchées d'animaux. La larve qui se nourrit de ces dernières substances , a le corps allongé , mou,. formé de plusieurs anneaux; elle a six patles écailleuses et deux crochets vers l'anus , également écailleux. Elle prend son accroissement assez vite , et subit sa métamorphose dans les mêmes lieux elle a vécu.

La NÉCROBIE VIOLETTE. NecruLiu violocen, Y>\. Vt. 23. 4, de cet ouvrage , est bleue, luisante, velue; ses antennes et ses pattes sont noires. Elle se trouve en Europe , et ne diffère de la NÉCROBIE rufipÈde , Necrobia riifipes , qu'on ce que celle-ci a les pattes et la base des antennes rougeâlres. Elle se trouve au midi de la France , au Sénégal , au Cap de Bonne- Espérance. La Nécrorie ruficolle, Nccmhin mfi- rollis, est violette et a le corselet et la base des élytres fauves. Elle se trouve en Afrique et aux Indes orientales.

Foyezles Coléoptères d'Olivier, tome 4, genre NÉcrobïe, n." 76 bis, et le même article de l'encyclopédie méthodique.

(O.L.)

NECRODE, JSecrodes. Genre d'insectes coléoptères, éla- bli par M. Wilkin , et qui comprend les boucliers ou silplui dont le corps est en ovale allongé , avec le corselet orbicu- lairc, les élytres tronquées obliquement à leur extrémité, et dont les antennes vont graduellement en grossissant. C'est ce que l'on observe dans le huudlcr lUloral ( Silpha lUlondh ,

NEC 4,3

Linij.). J'avois incliqué celte coupe dans le second volume Ue mon Gênera Cnist. et InsecL Elle est la première du genre silpliu; ces insectes semblent le lier avec celui des nécrophores. Foya Léach , Mèlang. de zool.^ tom. 3 , p;!g. 74- (l.)

NÉCROPHA(i£S, Nccrophagi. Nom que j'avois donne, dans mes ouvrages précédens sur les insectes, à une famille de coléoptères pentamères , composée de ceux qui forment, dans la méthode que je suis ici , la tribu des Pelioïdes et celle des DermestiîsS, de la famille des Ci.AVicuRJSts. Vaycz ces mots, (l )

NECP^OPHORE, Nccrophonis. (ienre d'insectes de l'or- dre des coléoptères , section des pentamères , famille des tlavicornes , tribu des peltoïdes.

Les nécFophores ont été placés, par Linn^eus et la plupart des entomologistes, parmi les boucliers. Scopoli et Geoffroy les ont rangés parmi les dennestes. Gleditsch avoit donné à «in de ces insectes le nom latin vespillo , qui û^mîw. fussuyeur, parce qu'il l'avoit trouvé occupé à cacher dans la terre les cadavres des petits animaux qu'il destine à sa nourriture ; et Fabricius ayant trouvé des caractères propres à établir un genre , lui a donné le nom de nécroplwre , d'un ujot grec qui signifie -dnsû fossoyeur , et qui se rapporte de même aux ha- bitudes de ces insectes.

Des palpes filiformes et très-apparens ; des mandibules avancées , fortes, triangulaires et terminées en pointe , sans cchancrure ; des mâchoires dépourvues d'onglets écailleux ; une languette profondément échancrée ; dc-s antennes guère plus longues que la tête , terminées brusquement en un bouton perfolié ; un corps en forme de carré long, avec la tête inclinée ; le corselet presque orbiculaire ; les élytres tronquées ; les jambes fortes , et les trochanters des cuisses postérieures terminés en forme d'épine , sont des caractè- res propres aux nécrophores, et dont la réunion les distingue des genres avec lesquels ils ont le plus d'affinité.

Ces coléoptères sont assez grands. Us ont le corps oblong, ordinairement velu, avec la tête grande, inclinée et distincte du corselet ; les antennes sont composées de onze articles , dont les quatre derniers forment une masse assezgrosse, pres- que arrondie, perfoliée; les yeux sont oblongs et point du tout saillans. Le corselet est un peu aplati , rebordé tout au- tour , plus ou moins éc-hancré antérieurement. Les élytres sont ordinairement plus courtes que l'abdomen, et cachent deux ailes membraneuses repliées , dont l'insecte fait quel- quefois usage. L'écusson est assez grand, triangulaire. Les pattes sont grosses et assez fortes ; les cuisses postérieures sont un peu renflées ; les jambes antérieures ont une forte

/^i4 NEC

dent latérale , et sont terminées par deux épînes assez fortes; les tarses sont filiformes, composés de cinq articles.

Les nécruphores sont des insectes dont l'odeur forle et désa- gréable annonce les lieux qu'ils habitent et les matières dont ils se nourrissent. Us servent , comme bien d'autres insectes , à absorber les chairs pourries, les substances excrémenti- tielles dont l'air pourroit être infecté. L'instinct, toujours d'accord avec l'organisation, leur fait rechercher avec em- pressement les corps morts des petits animaux, pour en faiie leur curée ; et un spectacle vraiment intéressant , c'est de les voir attirés d'assez loin par une odeur cadavéreuse ; s'associer dans leur entreprise, combiner leurs efforts, et jouir paisiblement du fruit de leurs travaux. Ainsi, à peine la corruption d'une taupe oudune souris se fait sentir, qu'ils accourent en plus ou moins grand nombre, et creusent avec beaucoup d'activité la terre en rond sous l'animal , qui s'en- fonce insensiblement; et sans voir les ouvriers , on voit l'ou- vrage s'achever, et tout disparoître. Quatre ou cinq de ces insectes peuvent ensevelir, de cette manière, une taupe dans l'espace de vingt-quatre heures. C'est alors qu'à l'abri de toute espèce de crainte , ils entrent dans le corps qu'ils ont enterré , et s'en repaissent à loisir. C'est aussi dans ces cadavres qu'ils déposent leurs œufs et que leurs larves doi- vent vivre.

Les larves desnécrophores sontlongues, d'un blanc grisâtre, avec la téle brune. Leur corps est composé de douze anneau.^ garnis antérieurement, à leur partie supérieure, d'ime petite plaque écailleuse d'un brun ferrugineux; les plaques des derniers anneaux sont munies de petites pointes élevées. Leur tête est dure , écailleuse, armée de mandibules assez fortes et tranchantes. Elles ont six pattes écailleuses , très- courtes , attachées aux trois premiers anneaux du corps. Par- venues à toute leur croissance , elles s'enfoncent dans la terre à plus d'un pied de profondeur, se forment une loge ovale, qu'elles enduisent d'une matière gluante pour en con- solider les parois , et s'y changent en nymphe. L'insecte parfait en sort au bout de trois ou quatre semaines.

Ce genre est composé de huit espèces, dont quatre se trouvent aux environs de Paris. Ce sont :

Le Nécrophoke fossoyeur , Necrophorus vespillo , pi. G. 33. 5 , de cet ouvrage. Il est noir ; ses élytres sont courtes, avec deux bandes ondées ferrugineuses ; la masse de ses an- tennes est d'un roux ferrugineux. Quelques auteurs distin- guent spécifiquement les individus dont les jambes postérieu- res sont arquées , au lieu d'être droites.

Le Négrophore des morts , Necrophorus morluorum. Il est

N E c 4.,:,

pluspelîtque leprécédcnt, et n'endiflcre que par la masscdes antennes qui est noire ; il se trouve dans les champignons gâtés.

Le NÉcaCiiHORE germanique. Necrophoms gcrmunicus. C'est le plus grand de tous ; il a souvent plus d'un pouce de longueur ; il est noir , avec le bord extérieur des élytres et une tache triangulaire sur le front, d'un jaune ferrugineux.

Le NÉCROPHORE iishumeur , Necrophoms humator. il res- semble beaucoup au précédent , mais il est une fois plus petit et entièrement noir; ses élytres présentent trois lignes longitudinales élevées.

Les autres espèces sont exotiques , et se trouvent pour la plupart en Amérique. (OL.)

NP2CTAIRE. Neciarium. Nom donné par Linnœus à certaines productions renfermées dans la fleur, étrangères à la corolle , ou en faisant partie , et destinées à contenir une liqueur visqueuse plus ou moins douce, dont les abeilles composent leur miel. La plupart de ces productions n'ont aucun rapport entre elles, et varient beaucoup parleur forme et leur situation dans les différentes fleurs. Tantôt ce sont des cornets, des écailles, des glandes ou des espèces de poils ; tantôt des enfoncemens , des fossettes ; des sillons ou rainures; quelquefois c'est une protubérance de la corolle, ou un prolongement d'une de ses parties en corne ou en éperon. Celte diversité de figures dans ces organes , placés les uns sur les pétales , les autres sur le réceptacle ou ail- leurs, ne permet pas qu on leur donne le même nom. Aussi, à l'exemple des botanistes modernes, avons-nous, dans ce Dictionnaire , désigné chacun d'eux par un nom con- forme à la cbose qu'il représente. Voyez Fleur, (d.)

NECTANDRA. Il y a deux genres de plantes établis sous ce nom ; mais ils n'ont pas été adoptés. Le premier est le neclandra de Bergius , Burmann et Jussieu. Ses quatre espèces sont disséminées dans les gejires gnidia et slruthîola. Ses caractères sont: corolle infundibuliforme, divisée en six parties intérieurement velues; point de calice; neuf écailles presqie ovales, situées au fond de la corolle, et donnant at- tache à optant de faisceaux de quatre élamines ; un ovaire surmonté d'un style simple ; un drupe turbiné et tronqué.

Le second ne^/««(/m est celui de R.ollboel; il est le même que l'o^o/ea d'Aublet , ou porostoma de Schreiber, réuni au laurus, V. Laurier et Ocote. (lm.)

NECTAR. Nom que les anciens donnoient à la liqueur dont s'abreuvoient les dieux. Aujourd'hui on l'applique à un suc mielleux que distille l'intérieur de la (ieur de beaucoup de végétaux, par un organe que l'on a appelé Nectaire. F. ce mot et le mot Plante, (b)

^i6 N E C

NECTAPJNIA. Genre des oiseaux du Prodromus d'IUi- ger, lequel se compose des Souimangas, des Guit-guit, etc.

(V.)

NECTARION. L'un des noms donnés, chez les Grecs, à I'Helenium. V. ce mot, (ln.)

NECTOPODES ou RÉMIPÈDES. M. Duméril dési- gne ainsi (^Zool. ana/.) une famille d'insectes coléoptères, correspondante à noire division des coléoptères carnassiers aquatiques , ou à notre tribu des IiYDROCA^'THARES et à celle des Tourniquets. 11 la compose des genres suivans : lourniquet^ hyphydre , haliple et dylisque. (L.)

NECTRIS. C'est ainsi que Schreber , Willdenovv, Persoon, nomment le genre Cabomba d'Aublet.F. Cabombe.

(LN.)

NECYDALE, Necydalis. Genre d'insectes de l'ordre des coléoptères, section des tétramères, famille deslongicornes , tribu des cérambycins.

Dans les Actes d'Upsal, le nom de nécydale fut appliqué vaguement à des insectes de plusieurs genres très-différens les uns des autres. Le célèbre Linnœus en restreignit la dé- nomination; et si l'on en excepte un seulinsecle , notre lélé- phore nain {V. Malthine), ses nécydales furent d'abord les mêmes que les nôtres; mais, trompé par quelques ressem- blances dans les élytres et dans la forme du corps , il joignit aux vraies nécydales des insectes d'un autre genre, ceux que nous avons décrits sous lenom à^œdémères. Ses nécydales fu- rent divisées en deux sections: i.° élytres beaucoup plus courtes que les ailes et l'abdomen ; 2.° élytres subulées de la longueur de l'abdomen: c'est a celle-ci qu'appartiennentlesa;<fèmèr^5, notre nécydale fauve , ainsi qu'un autre coléoptère (èrmcornw) for- mant un genre propre, celui àatraclocère.

Geoffroy ne connut des nécydales de Linnœus que deux espèces : le iéléphore^ dont nous avons parlé ci-dessus , et la nécydale fauve , qu'il avoit placée parmi les leptures.

Les nécydales de la seconde division de Linngeus furent, aux yeux de Fabricius , les seules nécydales ; et les véritables, celles dont Linnceus avoit d'abord formé son genre , trou- vèrent leur place parmi les lectures. Cette réunion disparate a cessé d'avoir lieu dans la dernière édition de son Systema eniomologiœ , ces nécydales à élytres très-courtes foruient le genre molorchus. Il n'a d'ailleurs rien changé à celui qu'il avoit désigné sous la première de ces deux dénominations.

Mais pourquoi appelle-t-ilmo/orc/^wce qU''Linnœusnomme nécydale ? Pourquoi ne pas respecter l'autorité de ce grand naturaliste ? Pourquoi se permettre de charger, sans néces- sité , les noms qu'il a employés ? Quant à nous, fidèles au principe de conserver religieusement Itg de.iominalions des

N E C 4,7

premiers entomologistes , nous avons appelé nécydales les insectes que Linnseus a fait connoitre comme tels, ou ceux qu'il a eu particulièrement en vue.

Le corps des nécydales est étroit, allongé ; la tête est ua peu plus étroite que le co'-selet, pointue et inclinée en de- vant; les antennes sont filiformes, un peu plus courtes que le corps; elles sont insérées sur une échancrure ou entaille formée en avant des yeux; les mandibules sont cornées, courtes , déprimées , triangulaires ; la lèvre inférieure est courte, membraneuse, très-évasée au bord supérieur : son support est coriace, large, arrondi postérieurement; lesanten- nules , au nombre de quatre , sont courtes, égales, filifor- mes ; les yeux sont en forme de reins. Le corselet est arrondi , presque cylindrique , inégal , un peu moins large que la base de l'abdomen. Les élytres sont ou très-courtes et arrondies , ou rétrécies et terminées en pointes divergentes. Dans quel- ques espèces, les ailes sont presque à nu et légèrement plis- sées à leur extrémité; dans les autres, elles ne sont décou- vertes que vers le bout et dans Tentre-deux des élytres ; la poitrine est forte ; l'abdomen est allongé , rétréci à son ori- gine , quelquefois presque en fuseau ou en massue.

Les pattes ont leurs cuisses allongées, portées sur un long pédicule , et terminées par un renflement arrondi et très-sen- sible ; les pattes postérieures sont plus grandes , avec la mas- sue des cuisses plus allongée; les tarses ont quatre articles» dont le premier est allongé , le troisième bifide , et le dernief muni de deux crochets de grandeur moyenne.

Nous n'avons point d'observations sur les métamorphose» des nécydales ; nous présumons cependant qu'elles s'opèrent dans l'intérieur du bois. Le tuyau conique que Degéer a remarque à l'anus d'une espèce, rend plus vraisemblable l'induction que l'on peut tirer de l'analogie.

On trouve ces insectes en été sur les fleurs; ils forment un genre composé de dix espèces, dont deux se trouvent aux environs de Paris.

La Nécydale majeure , Necy-dalis major ^ pi, G 28 , i5 , ^t ctX o\iyr3i^c.\ Molorchus abbrenatus ^ Fab., est noire; ses élytres sont très-courtes, roussâtres ; ses antennes et ses pattes sont de la même couleur; l'extrémité des cuisses pos- térieures est noire.

La NÉCYDALE FAUVE , Necjdalis rufa , Linn. , Fab., a élé décrite par Geoffroy sous le nom àelepture étranglée. Cet insecte est beaucoup plus petit que le précédent; s(m corps est noir, couvert d'un duvet obscur; ses élytres sont fauves, subuJée^;

^,8 NEF

les côtés de l'abdomen et de la poitrine sont tachetés de blanc. (o.L.)

NEDEL-AMBEL. Le Ményatsthe de l'Inde ( menyan- ihes indica ) porte ce no*n dans Rhéede. V. Villarsie. (ln-)

NEDERLASDCHE (petit roi). Nom hollandais du Fni-

QUET. (V.)

NEDOSOBOU Nom russe de la Marte zibeliî^e.

(desm.)

NEDUM SCHEÏTI ou PUA SCHETTI des habitant delà côte ^ïaXahare, o\x punda-pada-galli àçs Brames. Suivant Adanson , cet arbre seroit le Santal (^santalum alfjum , Linn. ). (ln.)

NÉEA , Neea. Genre de plantes de l'octandrie monogynie , de la famille des nyctaginées, qui offre pour caractères: un calice formé par deux ou trois écailles ; une corolle lubuleuse, allongée , à limbe garni de quatre à cinq dents ; huit étami- nes alternativement grandes et petites ; un ovaire inférieur à style courbé à son sommet et à stigmate simple ; un drupe oblong, monosperme, couronné par la corolle, les étamines et le style qui persistent, et contenant une noix striée dont Tamande est enveloppée de trois tuniques.

Les deux arbustes qui constituent ce genre croissent au Pérou. Ils se rapprochent beaucoup du Bougainvillé et du Tricycle, (b.)

NÉEDHAME, Needhamîa. Petit arbuste à feuilles oppo- sées, à fleurs disposées en épi terminal, qui, selon R. Brown, constitue un genre dans la pentandrie monogynie et dans la famille des épacridées.

Les caractères de ce genre sont : calice accompagné de deux bractées; corolle hypocratériforme, à limbe à cinq divi- sions dont les angles sont saillans; étamines incluses; drupe gec. (B.)

NEEBLE FURZE des Anglais. C'est le Genêt anglais X^genista anglica, Linn.), arbuste hérissé d'épines aiguës comme des aiguilles, (ln.)

NEEMAH. Nom arabe de 1' Autruche, (v.)

NEFEBACH. Nom arabe des Bovckges {pimpinel/aX

NEFFACH. Nom arabe d'un limon à chair spongieuse et à écorce raboteuse (Ferrar., lab. 3oi). Foy. Oranger.

(LN.)

NEFL. Ce nom arabe appartient, selon Forskaël , à la Luzerne polymorphe ( medkago polymorpha , Linn, j. (ln.)

NÈFLE. C'est, en France , le fruit du NÉFLIER , et à rile-de-France , celui du Parinari. (b.)

N E F 4i9

NÈFLE D'INDE. C'est le fruit de la Stramoine métel Ç^datura metel). (lN.)

NEFLIER , Mespilus , Linn, ( Icosandrie penlagyiiie. ) Genre de plantes delà famille des Rosacées, dont les carac- tères sont d'avoir: un calice persistant et à cinq découpures; cinq pétales arrondis , insérés sur le calice ; environ vingt étamines et un ovaire supérieur surmontés de deux styles. Cet ovaire, après sa fécondation, devient une baie presque ronde , couronnée par le limbe du calice, et dans laquelle sont contenues deux à cinq semences osseuses , un peu allongées.

Les néfliers ont de très-grands rapports avec les Poiriers, les Sorbiers et IcsAlîziers. Cependant leurs semences os- seuses, et les épines dont la plupart des espèces sont pour- vues , les séparent de ces trois genres, qui ne sont point épineux , et qui ont les graines cartilagineuses. D'ailleurs , dans les néfliers , le nombre des styles varie de deux à cinq, tandis qu'il est constamment de trois dans les sorbiers , et de cinq dans les poiriers.

Ce genre comprend un grand nombre d'espèces , tant indigènes qu'exotiques , dont les plus communes et les plus intéressantes à connoître sont :

Le Néflier commDn , le Néflier des bois , le Mes lier , Mespilus germanica , Linn. Cet arbre , de grandeur médiocre, croît en France et en Allemagne, dans les haies et dans les bois. Il n'a point d'épines , et se garnit de grandes feuilles alternes , lancéolées , entières, cotonneuses en dessous. Ses fleurs, sessiles et solitaires, naissent à l'extrémité des ra- meaux. Le fruit qui leur succède est plus gros que dans le» autres espèces , et bon à manger.

Cette espèce est cultivée dans les jardins. Il en existe deux variétés principales: l'une , dont parle Miller, connue en Angleterre sous le nom de néflier de Nottingham , à fruit très- gros , ayant une saveur plus forte et plus piquante que le fruit de notre néflier commun ; l'autre à fruit sans noyau. Ce sont celles qu'on doit cultiver de préférence. On les perpétue et les multiplie par la greffe en fente et en écusson , sur le poirier, le cognassier ou ic néflier saui^age-lLes autres variétés sont le néflier à fntit précoce et à chair délicate , à petit fruit , à petit fruit un peu allongé.

Les graines du néflier commun restent deux ans en terre avant de lever. On peut en accélérer la germination en les faisant macérer dans une terre humide. On peut aussi multi- plier cet arbre de marcottes. La greffe du pommier sur un néflier réussit très-bien.

Le fruit du néflier est astringent. Avant jsa maturité, il a

420 NEF

une saveur acerbe et austère. Il est assez doux quand il est

mûr , mais indigeste pour les estomacs délicats.

« Le bois du néflier est très-dur, le grain en est fin et égal ; il est susceptible d'un beau poli , et résiste aussi bien que le sorbier aux frottemens répétés.

Le NÉFLIER DU Japon , Blespilus japonica , Thunb. , Linn. C'est un des plus beaux de ce genre. Il est sans épines , et plus élevé que les autres néfliers. Il croît en Chine et au Japon. Lorsqu'il est en fleurs , il répand au loin une odeur très-agréable. Son fruit se mange : il a une saveur douce et acide.

Le NÉFLIER ARDEÎST OU BuissON ARDENT, Mespilus pyra- caniha , Linn. C'est un arbrisseau presque toujours vert , quicroît naturellementdans les haies aumidide TEurope. lia des tiges très-épineuses, des feuilles petites , alternes, allon- gées et crénelées , et des fleurs d'un rouge pâle , disposées en gros bouquets au sommet des rameaux. Il est cultivé dans les jardins , et recherché surtout pour l'éclat de ses fruits, qui sont d'une belle couleur de feu. On se sert avec avantage du buisson ardent pour garnir les murs : on en fait aussi des haies. Il se multiplie par semences , par marcotte* et par boutures.

Le NÉFLIER DE Virginie ou I'Azeroher de Virginie , Mespilus crus ,^a///,Lam. ; Cratœgus crus galli ^ Linn. On l'ap- pelle aussi épine luisante. Il s'élève environ à quinze pieds. Ses branches sont irrégulières et armées d'épines très- longues; ses feuilles sont luisantes, étroites à leur base, larges à leur extrémité, et profondément dentées en scie sur leurs bords; ses fleurs blanches et larges ; ses fruits gros et de couleur écarlate. C'est un arbrisseau d'ornement , originaire de l'Amérique septentrionale. Il fleurit en mai.

Le Néflier aubépine , Mespilus oxyacantha ; Lam. , Cra- tœgus oxyacantha, Linn. Grand arbrisseau d'Europe, à feuilles obtuses , dentées en scie , découpées profondément , et deux fois divisées en trois. Il varie dans ses feuilles, dans ses fleurs et dans son fruit. F. Aubépine.

Le Néflier azerole , Mespilus azarolus, Lam.; Craiœgus aiarolus , Linn. Quelques auteurs en ont fait une variété du précédent , auquel il ressemble beaucoup. Cependant on peut l'en distinguer à ses feuilles découpées en trois ou cinq lobes, profondément dentées , assez épaisses, plus grandes que celles de Vaubépine , et d'une couleur pâle. V. Azerolier.

Le Néflier a fruits écarlates, Mespilus coccinea , Lam.; Cra/œgus coccinea , Linn. Arbre de vingt pieds de hauteur , qui a le port de nos arbres fruitiers , et qu'on cultive dans

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les bosquets , à cause de la belle couleur écarlate de ses fruits. Il est indigène du Canada et de la Virginie , el fleurit en mai. Ses feuilles sont lisses , larges , ovales , anguleuses et dentées.

Le Néflier cotonnier , Mcspilus cotoneaster , Linn, On trouve ce néflier dans les Alpes , dans les Pyrénées , au Puy- de-Dôme , et sur les montagnes un peu élevées de l'Europe; quelquefois il croît dans les fentes des rochers. C'est un arbrisseau non épineux , très-peu élevé ; ses feuilles sont blanchâtres et cotonneuses en dessous; leur disque est entier, leur forme ovale , arrondie , et leur surface supérieure lisse et verte. On donne quelquefois à ce néjlier le nom de cognas- sier nain, (d.)

J'avois entrepris, pendant que j'etois à la tète des pépi- nières de Versailles , d'y réunir toutes les espèces de néfliers qui se cultivent dans les jardins des environs de Paris ; et outre celles indiquées plus haut, on y voyoit les suivantes , décrites par Wiildenow et par d'autres botanistes :

Néflier elliptique , Néflier odorant ,

glanduleux , linéaire ,

jaunâtre, à feuilles de prunier ,

à petites feuilles, de Caroline,

ponctué , à fruits velus ,

ergot de coq , hétérophylle ,

spalhulé , noir, à feuilles de tanaisie,

Et celles encore non décrites , que j'ai nommées :

Néflier à feuilles fendues , Ntflier bège ,

à feuilles en éventail, à feuilles de prune-

à feuilles lobées , lier ,

à feuilles obovales , purpurin ,

d'Olivier , à cinq lobes ,

d'Orient , à trois feuilles.

Toutes ces espèces étoient multipliées par la greffe sur l'aubépine , et tous les ans il en étoit distribué des collec- tions aux établissemens d'instruction et aux amateurs , de sorte qu'elles sont très-répandues.

Le projet que j'avois formé de rédiger une monographie de ce genre intéressant , n'a pu s'exécuter par suite des événemens. (b.)

NÉFLIER DES BOIS. V. Néflier commun.

NÉFLIER DES CRÉOLES. C'est , àla Guyane , l'ar- bre Parinari ( F. ce mot ), décrit par Aublct. (ln.)

^.3 N E G

ISÉFLIER DENOTTINGHAM. V. l'article Néflier

COniMUN. (B.)

NÉFLIER PETIT CORAIL. T. Aubépine corail, (b.)

NEFRIN. Nom arabe du Sureau sauvage , selon Avi- cerine. (lis.)

NEGA. C'est le Cerisier ragoumier, (b.)

NHLGABELHA et Nf.YABELHA. Noms portugais du Cor.hlearia coronopus , appelé vulgairement Corne de cerf.

(ln.)

NEGDEH. Nom arabe du Chalet d'Orient {Eiœagnus orientalis^ L. ). (ln.)

NEGEN , NEGIL. Noms bébreu et arabe, qui désignent les roseaux et les graminées en général, (ln.)

NEGEFAR des Egyptiens. C'étoit la plante ARTEMrsiA-

(LN.)

NEGERKOORN. Nom hollandais du Sorgho, (ln.) NEGHOBARRA, pi. g 34, % i deceDictionnaire. Tel est le nom qu'un HÉOROTAiREporte àla Nouvelle-Zélande.

V. HÉOROTAIRE NEGHOBARRA. (V.)

NliGLIKA et NEGLIKEROS. Noms suédois de

rOElLLET. (ln.)

NEGRAL. V. Linotte tobaque , article Fringille.

NÈGRE, Nigrita^ Mthiops, eiiêi'o^'. C'est, comme on sait, une race , ou plutôt une espèce distincte d'hommes de cou- leur noire , à cheveux frisés , à nez épaté , à grosses lèvres , avec des mâchoires prolongées en museau , et qui habite dans la plus grande partie de l'Afrique , de la Nouvelle- Guinée , et dans quelques autres lieux de la terre , elle a été transportée. Nous avons exposé, à l'article Homme , les principaux caractères de celle espèce , et nous avons détaillé ses diverses familles : elle composée peine le quart du genre humain. Nous allons examiner ici la constitution propre du nègre , la cause de sa couleur , la nature de l'esprit , des mœurs de ses diverses races , et nous le comparerons à l'es- pèce blanche d'Europe.

L'explicallon de la couleur des nègres, la plus générale- ment admise dès le temps de Boyle, est celle qui l'attribue à la lumière et à la chaleur des climats. On a dit que les habitans de la terre prenoient une couleur d'autant plus basanée et plus brune , qu'ils se rapprochoient davantage de la ligne éiiualoriale. On nous a montré l'Allemand plus coloré que le Danois et le Suédois , le Français plus hâlé que lAllemand ou r Anglais, l'italien et l'Espagnol encore plus basanés que le Français , le Marocain plus brun que l'Espagnol ; enfin le

N E G 4,3

Maure. TAbyssin, se rapprochant par nuances de la couleur noire des habitans de la (juinée.

Mais, quelque concluante que paroisse celte observation, elle n'est certainement pas suffisante , et d'autres viennent la contredire. Cette gradation de couleurs se remarque aussi chez d'autres peuples dans un ordre tout différent ; car , sui- vant l'explication , il faudroit que tous les peuples de la zone torride fussent noirs , tous ceux des zones tempérées , de couleur plus ou moins brunie, et tous ceux des zones froides « très-blancs : c'est ce qui n'existe pas. En effet , les peuples voisins du pôle arctique , tels que les Lapons , les Samoïèdes , les Esquimaux, les Groenlandais , les Tscbutchis, etc. , sont fort bruns 4 tandis que des peuples plus voisins des tropi- ques , comme les Anglais, les Français , les Italiens, etc., sont beaucoup plus blancs. En outre, tous les hommes n'ont point la même couleur sous le même parallèle , et dans le même degré de chaleur. Par exemple, le Norvvégien, l'Islandais sont très blancs, tandis que le Labradorien , Tlroquois en Améri- que , les TarlaresKirguis , les lîaskirks , les Burœltes , les Kauilschadales, sont bien plus basanés. Auprès des blanches Circassiennes et des belles Mingréliennes , on rencontre les bruns et hideux Kalmouks, et les ïartaresNogaïs au teint ba- sané. Les Japonais sont bien plus colorés que les Espagnols, quoique leurs pays soient situés à peu près sous la même lati- tude , et jouissent d'une chaleur assez semblable. Quoiqu'il fasse peut être aussi froid au détroit de Magellan que dans la mer Baltique , les Patagons ne sont pas blancs comme les Danois. On trouve à la terre de Diémen , vers le Cap méri- dional de la Nouvelle-Hollande , des hommes d'une couleur aussi foncée que les Hottentots ; cependant le climat y est aussi froid pour le moins qu'en Angleterre. La Nouvelle- Zélande , placée à peu près dans la même latitude méri- dionale , est peuplée d'hommes basanés. Les habitans de la Haute-Asie , situés sous le même parallèle que les Euro- péens, et exposés à la même température, sont beaucoup plus foncés en couleur. Si la chaleur du climat déterminoit les nuances de la peau , pourquoi verrions-nous les habitans des îles de la Sonde , les Malais, les peuples des Maldives, ceux des Moluques , enfin les habitans de la Guyane, et tant d'autres de la zone torride , beaucoup moins colorés que les nègres? Et cependant il existe des nègres hors de la zone tor- ride, comme les Hottentots du Cap de Bonne- Espérance. Comment pourroit-il se rencontrer à Madagascar une race d'hommes olivâtres et une race de nègres r Comment se trouve roit-il des peuples blancs entourés de peuples noirs, au sein même de l'Afrique , comme le lémoigneut les voya-

Ml, N E G

geins (i)? Pourquoi les nns demeurent-ils blancs ou seulement olivâtres , sur la môme terre que les nèe;res habitent , et au même degré de chaleur ? Si le climat noircit le nègre , pour- quoi ne noircit-il pas également les animaux, par exemple, les singes , les quadrupèdes , elc i' Pourquoi la même tem- pérature colore - t-elle différemment les hommes du même parallèle terrestre ?

Il y a plus : nous voyonsparmi nous, danslamême famille, des bruns et des blonds , des personnes à peau très - blanche , et d'autres plus basanées , quoique vivant ensemble d'une ma- nière uniforme et sous le même toit. Les nègres se reprodui- sent dans nos climats, dans les colonies américaines , sans perdre leur couleur noire. Les colons hollandais établis au Cap de Bonne-Espérance, etvivant presque à la manière des Hottentots, mais sans s'allier avec eux , conservent leur teint blanc depuis plus de deux cents ans. Ceux qui ont écrit que les Portugais établis depuis le xv.e siècle près de la Gambie et aux îles du Cap-Vert , y étoient devenus noirs , ne peuvent attribuer ce changement qu'aux mariages de ces Européens avec les négresses. On sait , en effet , que les Portugaises périssent presque toutes en Guinée, à cause de l'extrême cha- leur qui leur cause des pertes de sang très-dangereuses; et leur grossesse est souvent terminée par des avortemens funestes , ou leurs accouchemens sont suivis d'hémorragies utérines mortelles. Les Portugais n'ont donc pu se propager en ce climat qu'en s'alliant aux femmes du pays -, telle est la cause qui les a rendus presque nègres.

Les négrillons naissans sont d'une couleur blanche, ou seu- lement un peu jaunâtre. Quelques parties seulement , telles que le tour des ongles aux pieds et aux mains, et les parties génitales,, tirent sur le brunâtre. Peu à peu ils noircissent en- tièrement au bout de quelques semaines , soit dans les pays froids , soit dans les climats chauds , soit qu'on les expose à lumière , soit qu'on les renferme dans un lieu sombre. Pour- quoi ne restent-ils pas blancs dans les pays froids , et lorsqu'ils sont soustraits à l'éclat du jour? Si la noirceur de leur peau étoit l'effet d'une cause purement occasionelleel extérieure, pourquoi seroit-elle donc héréditaire en tous lieux, et cons- tante dans toutes les générations ?

Mais cette couleur noire ne se borne point à la peau du

(i) Voyez Adanson , Hisi. nat. du Sénégal ^ Paris, 1757 , in-4 o Les Mahométans établis parmi les nègres depuis plusieurs siècles , triais sans mêler leur sang , ne deviennent pas nègres : les Portugais non plus, selou Demanet, Jfriq. française , etc., tant qu'ils ne s'al- lient pas au sang éthiopien.

N E G 4=5

nègre. Les anatomisles ont observé, et nous Tavons vu nous- mêmes, que le sang de celle espèce d'hommes étoil plus foncé que celui du blanc , que ses muscles ou sa chair étoient d'un rouge tirant sur le brun. La cervelle , qui est grise ou cendrée à l'extérieur dans Thomme blanc , est noirâlre dans les nègres. ( Meckel, Mém. acad. de Berlin^ tom. Xlil, p. 69). Des observateurs ont même assuré que ces derniers avoient le sperme noirâtre, dès le temps dllérodote {Hàior. Thaï. n," loi). Toutefois, Arislole a reconnu formellement qu'il étoit de couleur blanche {H/j. 2 , Gsiier. animal, c. 2. ) Leur bile est aussi d'une teinte plus foncée que celle du blanc. Ainsi, le nègre n'est donc pas seulement nègre à l'extérieur, mais encore dans toutes ses parties, et jusque dans celles qui sont les plus intérieures , comme nous le prouverons plus en détail dans la suite de cet article.

Ce qui le démontre mieux encore , c'est que sa conforma- tion s'éloigne de la nôtre par des caractères très-essentiels. Sans parler des cheveux crépus et comme laineux des nè- gres , sans détailler tout ce qui distingue leur physionomie de la notre , comme leurs yeux ronds , leur front bombé et couché en arrière , leur nez écaché , leurs grosses lèvres , leur espèce de museau , leur allure éreintée , leurs jambes cambrées , ils présentent surtout dans leur intérieur des sin- gularités frappantes. Sœmmering, Ebel, savans anatomistes allemands , ont fait voir que le cerveau du nègre éloit com- parativement plus étroit que celui du blanc , et que les nerfs qui en sortoient étoient plus gros dans le premier que dans le second. Plusieurs autres observateurs ont remarqué , en outre , que la face du nègre se développoit d'autant plus que son crâne se rapetissoit ( V. Crame et Cerveau ); ce qui donne une différence d'un neuvième de plus , entre la capacité de la tête d'un blanc et celle d'un nègre , comme nous en avons fait l'expérience. M. le baron Palisot de Beauvois , qui a voyagé en Afrique , et moi, en comparant les quantités de liquides que peuvent contenir les crânes des blancs et ceux des nègres , nous avons observé que, chez ces derniers , il se trouvoit jusqu'à neuf onces de moins que dans les crânes des Européens. Consultez l'art. Homme.

Ces remarques sur les proportions entre le crâne et la face du nègre , entre la grosseur comparative de son cerveau et de ses nerfs , nous offrent des considérations très-importantes. En effet, plus un organe se développe, plus il obtient d'activité et de puissance; de même, à mesure qu'il perd de son étendue, cette puissance est diminuée. On voit donc que si le cerveau se rapetisse, et si les nerfs qui en sortent grossissent, le nègre sera moins porté à faire usage de sa pensée , qu'à se livrer ,

^r.6 N E G

à SCS appétiis physiques, tnndis qu'il en sera tout autrement dans le blanc. Le nègre a les organes de l'odorat et du goût plus développés que le blanc ; ces sens auront donc une plus grande influence sur son moral , qu'ils n'en ont sur le nôtre ; le nègre sera donc plus adonné aux plaisirs physiques, nous à ceux de l'esprit. Chez nous, le front avance et la bouche semble se rappelisser , se reculer, comme si nous étions des- tinés à penser plutôt qu'à manger; chez le nègre, le front se recule et la bouche s'avance , comme s'il éloit plutôt fait pour manger que pour réfléchir. Ceci se remarque à plus forte raison dans les bêtes : leur museau s'avance , comme pour aller au - devant de la nourriture ; leur bouche s'agrandit comme si elles n'étoient nées que pour la gloutonnerie ; leur cervelle diminue de volume, et se retire en arrière; la pensée n'est plus qu'en second ordre. Nous voyons à peu près la même chose ailleurs. Ces personnes si adonnées au plaisir de la table , ces énormes mangeurs, ces gourmands crapuleux qui semblent ne vivre que par la bouche , sont comme hébétés ; ils ne connoissent que la bonne chère , et digérant toujours , ils deviennent presque incapables de réfléchir. Caton l'an- cien disoit : A quoi peut être bon un homme qui est tout ventre depuis la bouche jusqu'aux parties naturelles ? Il est certain que les organes de la pensée s'affoiblissent d'autant plus que les organes de la nutrition se fortifient davantage ; aussi les hommes d'esprit ont tous un estomac foible.

De même , les membres et les sens ne se perfectionnent beaucoup à l'extérieur qu'aux dépens des facultés intellectuel- les. Il semble que le cerveau du nègre se soit écoulé en grande partie dans ses nerfs , tant il a les sens actifs et les fibres mo- biles : il est tout en sensations. Chacun sait que Ces hommes ont une vue perçante , un odorat extrêmement fin , une ouïe très-sensible à la musique ; leur goût est sensuel , et ils sont presque tous gourmands ; ils ressentent l'amour avec de vio- lens transports; enfin , par leur agilité , leur dextérité , leur souplesse et leurs facultés imitatives dans tout ce qui dépend du corps , ils surpassent tous les autres hommes de la terre. Ils excellent principalement dans la danse , l'escrime , la na- tation, l'équitation ; ils font des tours d'adresse surprenans ; ils grimpent, sautent sur la corde, voltigent avec une faci- lité merveilleuse et qui n'est égalée que par les singes , leurs compatriotes et peut-être leurs anciens frères , selon l'ordre de la nature. Dans leurs danses, on les voit remuer à la fois toutes les parties de leur corps; ils y sont infatigables. Ils distingueroient un homme, un vaisseau en mer, dans un tel éloigiiement , que les Européens pourroient à peine les aper- cevoir avec des lunettes à lonorue vue. Us sentent de très-loin

N E G 427

«n serpent , et suivent souvent à la piste , comme les chiens, les animaux qu'ils chassent. Le moindre hruit n'échappe point à leur oreille ; aussi les nègres marrons ou fugitifs savent très- bien sentir de loin et entendre les blancs qui les poursuivent. Leur tact est d'une finesse étonnante ; mais parce qu'ils sen- tent beaucoup, ils réfléchissent peu; ils sont tout entiers dans leurs sensations , et s'y abandonnent avec une espèce de fu- reur. La crainte des plus cruels châtimens , de la mort même , ne les empêche pas de se livrer à leurs passions. On en a vu s'exposer aux plus grands périls, supporter les plus étranges punitions , pour voir un instanl'leur maîtresse. Sortant d'être déchirés sous les fouets de leur maître , le son du tam-tam, le bruit de quelque mauvaise musique les fait tressaillir de volupté. Une chanson monotone, fabriquée sur-le-champ de quelques mots pris au hasard , les ainuse pendant des jour- nées, sans qu'ils se lassent de la répéter. Elle les empêche même de s'apercevoir de la fatigue; le rhythme du chant les soulage dans leurs travaux et leur inspire de nouvelles forces^' Un moment de plaisir les dédommage d'une année de peines- Tout en proie aux sensations actuelles , le passé et l'avenir ne sont rien à leurs yeux; aussi leurs chagrins sont passagers, et ils s'accoutument à leur misère , la trouvant même suppor- tcible quand ils ont un instant d'agrément. Comme ils suivent plutôt leurs sens et leurs passions que la raison , ils sont ex- trêmes en toutes choses ; agneaux quand on les opprime , ti- gres quand ils sont maîtres. Leur esprit va sans cesse , selon l'expression de Montaigne, de la cave au grenier. Capables d'immoler leur vie pour ceux qu'ils aiment (et on en a vu plu- sieurs se sacrifier pour leurs maîtres) , ils peuvent , dans leur vengeance, massacrer leur maîtresse , éventrer leurs femmes et écraser leurs enfans sous les pierres. Rien de plus terrible que leur désespoir, rien de plus sublime que leur amitié. Ces excès sont d'autant plus passagers qu'ils sont portés plus loin : de vient la facilité qu'ont les nègres de changer rapidement de sensations , leur violence s'opposant à leur durée. Pour ces hommes, il n'y a pas d'autre frein que la nécessité, et d autre loi que la force ; ainsi l'ordonnent leur constitution et la nature de leur climat.

Si les nègres ont entre eux moins de rapports moraux , tels que ceux de l'esprit , des pensées, des connoissances , des opi- nions rejigieuses et politiques ; en revanche ils ont plus de rapports physiques , ils se communiquent davantage leurs affections , ils se pénètrent mieux d'une même âme : plus facilement émus entre eux , ils partagent en un instant les sentimens de leurs semblables, et épousent leur parti sur-le- champ. Ce qui frappe leurs sens les subjugue, tandis que ce qui

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frappe leur raison la trouve indifférente ; aussi les ne'gresses s'abandonnent à l'amour avec des transports inconnus par- tout ailleurs : elles ont des organes sexuels larges , et ceux des nègres sont gros proportionnellement; caries parties de la généralion acquièrent autant d'activité dans les hommes , pour l'ordinaire , que leurs facultés intellectuelles perdent de leur énergie. ÇVoyez Jefferson , notes sur la Virginie , etc.)

Comme la foiblesse de l'âme est la suite d'une semblable complexion , le nègre a être naturellement timide ; et la petitesse de l'esprit engendre la fourberie , le mensonge , la trahison, vices ordinaires des esclaves et des caractères pusil- lanimes. Ne pouvant pas agir par la force , ils se dédomma- gent par de ténébreuses machinations et par des complots. Ils volent , parce qu'ils n'ont pas le droit de jouir de beaucoup de choses; ils sont envieux, jaloux et orgueilleux, rampans dans l'adversité , insolens dans la prospérité ; c'est une suite de l'esprit de servitude. Ils aiment aussi le faste , la dépense, le jeu , la bonne chère ; ils recherchent surtout les vêlemens lesplus brillans, et poussent le luxe à Texcès quand la fortune les a émancipés. Ces vices sont communs à la plupart des méridionaux et aux esprits foibles. Ce qui le témoigne encore mieux, c'est que les Africains sont très-superstitieux; ils n'ont, dans le vrai, aucune religion, si ce n'est une crainte puérile des mauvais esprits^ des sorciers, des devins ; et un culte ri- dicule de quelques marmousets , Appelés fétiches , gri-gris , ou l'adoration de certains animaux, tels que des serpens , des crocodiles , des lézards , des oiseaux , etc. Quelques peupla- des nègres ont reçu la circoncision des Arabes , et se croient de la religion mahométane sans la connoîfre. Pour une bou- teille d'eau-de-vie , on va faire embrasser toute religion pos- sible à un habitant du Sénégal , sauf à l'en faire dédire le lendemain pour la même rétribution : ils ne connoissent pas de plus sûr argument. On ne prouve rien à un nègre de ce qui n.e le frappe pas immédiatement ; il répétera tout ce que vous voudrez. Son esprit a trop peu de portée pour songer à l'ave- nir, et trop d'indolence pour s'en inquiéter.

Cette insouciance naturelle est encore une suite de la cons- titution du nègre ; car, bien qu'elle se trouve chez tous les hommes peu civilisés, elle est cependant plus frappante dans celui-ci. C'est en effet la civilisation qui, avivant nos désirs et multipliant nos- besoins, nous inspire cette éternelle inquié- tude , cette démangeaison de l'ambition qui nous pousse à nous surpasser tous les uns les autres, et qui nous rend tou- jours mécontens de noire destinée présente. Le sauvage, au contraire , désire très-peu, et borne ses besoins au seul né- cessaire. L'Africain pousse encore plus loin l'apathie et l'im-

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prévoyance de l'avenir. Les vaisseaux nëgricrs qui font )a traite des esclaves ont toujours quelques musiciens à bord, pour faire oublier aux nègres toute la misère de leur état. Certainement , qu'un Européen songe si la musique pour- roit lui plaire lorsqu'il se verroit enchaîné à fond de cale , maltraité , mal nourri , et exposé à finir ses jours dans l'es- clavage et la misère II y a plus , c'est que les nègres qu'on emmène sont très-persuadés que les blancs les doivent man- ger; et cependant ils s'y résignent. L'avenir n'est rien pour eux, ils ne voient que le présent, et pourvu qu'ils ne soient pas réduiîs au désespoir, ils supportent leurs maux : heureuse insouciance, qui ôte aux misérables les tristes pensées de leur malheur ! C'est ainsi que le vin , l'eau-de-vie , et quelques nourritures, font oublier à nos pauvres la plupart de leurs in- fortunes , tandis qu'il faut de grands efforts de courage aux riches et aux puissans du monde pour soutenir le poids de ieurs adversités.

On a beaucoup agité , dans ces derniers temps , la ques- tion du degré d'intelligence des nègres; il nous paroît que quelques auteurs l'ont trop exagérée, et d'autres trop dépré- ciée dans le système que chacun d'eux avoit embrassé. Pour mieux découvrir, à cet égard, la vérité, détachons celte question de tout rapport avec l'esclavage ou la liberté des noirs; et en effet , fussent-ils nés stupides, il ne s'ensuivroit aucunement qu'on dût les asservir, puisque les rangs des sociétés humaines ne sont pas relatifs au degré d'intelligence de chaque individu , et puisqu'un prince peut tomber dans l'idiotisme ou la démence sans perdre ses titres et ses droits héréditaires. Combien de grands deviendroient petits , si l'on devolt classer chacun d'après son esprit ou ses mérites !

Les amis des noirs , par des sentimens philanthropiques qui honorent leur cœur, ont pris à tâche de rehausser le génie du nègre ; ils soutiennent qu'il est dune capacité égale à celui des blancs, mais que le défaut d'éducation et l'état d'a- brutissement dans lequel croupissent de malheureux esclaves sous le fouet des colons, compriment nécessairement le dé- veloppement de leur intelligence. Placez de jeunes nègres , disent-ils , dans nos collèges avec tous les secours qu'une for- tune et une éducation libérale prodiguent à nos enfans, et vous jugerez ensuite. En attendant, divers auteurs ont re- cueilli les exemples des nègres qu'un talent naturel avoit créés poêles, philosophes , musiciens , artistes plus ou moins distingués. Blumenbach assure avoir lu des poésies latines et anglaises dues à des nègres , et que des littérateurs européens eussent été jaloux d'avoir produites {Magaz. fur. physik. und.

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liât. hîst.<, Gotha, tom. iv, Band. m, p. 5 et 8; et Gotttng,

Magaz. , tom. iv, p. 4-2 1 ) _

Brissot a vu dans l'Amérique septentrionale des nègres libres , exerçant avec succès des professions qui réclament beaucoup d'intelligence et de savoir, telles que la médecine ; un noir faisoit sur-le-champ , de force de tête seule , des cal- culs prodigieux. Le célèbre évêque Grégoire a .composé un Traité sur la littérature des nègres , et parmi les preuves multi- pliées qu'il offre de leurs travaux dans toutes les carrières du savoir , il cite aussi plusieurs négresses ; on remarque sur- tout dans ce nombre Philis Weathley, qui, transportée dès l'âge de sept ans de l'Afrique en Amérique, puis en Angle- terre, y apprit bientôt les langues anglaise et latine. A 1 âge de dix-neuf ans, elle publia un recueil de poésies anglaises estimées. Le docteur Beattie {Essay on irufh , etc.), ne trouve le nègre inférieur en rien aux blancs , ainsi que Clarkson. Le Suédois Wadslrom, quilesobservasurles côles d'Afrique, les reconnut susceptibles de diriger des manufactures d'indigo, de sel, de savon , de fer , etc. Leurs vertus sociales , ajoute le docteur Trotter, sont au moins égales aux nôtres; on les voit constamment hospitaliers et sensibles pour ces mêmes blancs qui les tyrannisent.

Quoiqu'il paroisse toujours quelque air d'injustice à poser la limite de l'esprit , surtout à l'égard d'infortunés que l'on s'autorise à condamner à l'esclavage , sous prétexte de cette infériorité d'intelligence , le devoir du naturaliste lui impose cependant l'obligation de discuter une question aussi impor- tante. Hume (£$50^5, xxi , p. 222, note M), Meiners et beaucoup d'autres ont soutenu que la race nègre étoit fort in- férieure à la race blanche par rapport aux facultés intellec- tuelles. Ils sont en cela d'accord avec les observations des anatomistes déjà cités; (Sœmmering, et aussi MM. Cuvier, Gall et Spurzheim) , comme avec les nôtres , puisque la ca- pacité du cerveau, chez tous les nègres qu'on a pu examiner, se trouve généralement moins considérable que chez les blancs. Blumenbach a reconnu que les crânes de la race kal- mouke ou mongole, et ceux des Américains , quoique déjà plus étroits que ceux des Européens ( Voyez ses Decad. cranior. dii>ers. gent.), étoient encore plus étendus que ceux des Afri- cains.

Mais, indépendamment de ce fait constaté, dont l'em- preinte est même manifeste sur le front abaissé du nègre , consultons l'histoire de son espèce sur tout le globe.

Quelles sont les idées religieuses auxquelles il a pu s'élever de lui-même sur la nature des choses? Elles sont l'un des plus sûrs moyens d'évaluer la capacité intellectuelle. Nous le

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voyons partout prosterné devant de grossiers fétiches , ado- rant tantôt un serpent, une pierre, un coquillage, une plume, etc. , sans s'élever même aux idées théologiques des anciens Egyptiens ou d'autres peuples adorateurs des ani- maux, comme emblèmes de la Divinité.

Dans les institutions politiques, les nègres n'ont rien ima- giné, en Afrique, au-delà du gouvernement de la famille et de l'autorité absolue, ce qui n'annonce aucune combinaison.

Par rapport à l'industrie sociale , lis n'y ont jamais fait d'eux seuls les moindres progrès ; Ils n'ont pas bâti de villes, de grands édifices, comme l'ont exécuté les Egyptiens, même pour se soustraire aux ardeurs du soleil ; Ils ne s'en garantis- sent nullement par des tissus légers , comme font les Indiens ; ils se contentent de cabanes et de l'ombrage des palmiers. Ils n'ont donc point d'arts , point d'Inventions qui charment les ennuis de leurs loisirs sur un sol si riche. Ils n'ont pas mêgie les jeux Ingénieux des échecs Inventés par les Indiens, ni ces contes amusans des Arabes, fruits d'une imagination féconde et spirituelle. Placés à côté des Maures , des Abys- sins^ peuples de race originairement blanche , les nègres en sont méprisés , comme stupides et Incapables ; aussi les trompe-t-on toujours dans les échanges commerciaux; on les dompte, on les soumet en présence de leurs compatriotes même, sans qu'ils aient l'esprit de s'organiser en grandes masses , pour résister, et de se discipliner en armée ; aussi sont-ils toujours vaincus , obligés de céder le terrain aux Maures. Ils ne savent point se fabriquer d'armes autres que la zagaie et la flèche , folbles défenses contre le fer, le bronze et le salpêtre.

Leurs langages très-bornés manquent de termes pour les abstractions. Ils ne peuvent rien concevoir que des objets ma- tériels et visibles ; aussi ne pensent-ils guère loin dans l'ave- nir , comme Us oublient bientôt le passé ; sans histoires, ils n'avolentpas même une écriture de signes ou d'hiéroglyphes; les Arabes mahométans ont enseigné à plusieurs l'alphabet ; cependant leurs langues n'ont presque point de combinaisons grammaticales.

Leur musique est sans harmonie, et quoiqu'ils y soient très-sensibles , elle se borne à quelques intonations bruyan- tes , sans former une série de modulations expressives. Avec des sens très-parfaits , ils manquent de cette attention qui les emploie, de cette réflexion qui porte à comparer les objets, pour en tirer des rapports , en observer les proportions.

Des faits particuliers d'intelligence remarquable chez des nègres (comme tous ceux cités par les auteurs), ne prouve- vQQl que des exceptions, tant que des nations nègres ne se ci-

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viliseront pas d'elles seules , comme Ta fait d'elle-même race blanche. Le temps el l'espace ne manquent point à l'Africain; cependant il est resté brut et sauvage, lorsque le» autres peuples de la terre se sont plus ou moins élancés dans la noble carrière de la perfection sociale. Aucune cause poli- tique ou morale ne relient l'essor du nègre en Afrique , comme celles qui enchaînent l'esprit du Chinois; le climat de l'Afrique a permis un assez grand développement irtel- lectuel aux anciens Egyptiens; il faut donc conclure que la médiocrité perpétuelle de Tesprii, chez les nègres, résulte de leur conformation seule ; car dans les îles de la mer du Sud, oh ils se trouvent avec la race malaie , également sauvage , ils lui restent encore inférieurs, sans en être asservis. {Voyez Forster, Obs. sur l'espère hum. , dans les Foy. de Cook.)

Les auteurs qui veulent expliquer cetle infériorité par une prétendue dégénéralion que l'espèce humaine auroit subie en' Afrique d'un excès de chaleur, et par des nourritures gros- sières, peuvent contempler des nègres très-robustes, très- bien constitués, soit en Afrique, soit dans les colonies ou partout ailleurs , sans que la dimension de leur cerveau et leurs facultés y gagnent davantage.

Tout annonce donc que les nègres forment non-seulement une race , mais sans doute une espèce distincte de tout temps, comme la nature en a créé parmi les autres genres d'êtres vi- vans. On a élevé avec soin des nègres, on leur a donné la même éducation dans des écoles et des collèges , qu'aux blancs, et ils n'ont pas pu cependant pénétrer dans les con- noissances humaines au même degré que ceux-ci.

Les nègres sont de grands enfans : parmi eux il n'y a point de lois , point de gouvernement fixe. Chacun vit à peu près à sa manière ; celui qui paroît le plus intelligent ou qui est le plus riche, devient juge des différends , et souvent il se fait roi; mais sa royauté n'est rien, car bien qu'il puisse quel- quefois opprimer ses sujets , les faire esclaves, les vendre, les tuer , ils n'ont pour lui aucun attachement, ils ne lui obéissent que par force , ils ne forment aucun état, ils ne se doivent rien entre eux. Seulement, comme ils sont glorieux, ils aiment à se distinguer par la parure ; ils créent entre eux des rangs , ils recherchent les fêtes , les cérémonies , ils veu- lent briller, paroître avec éclat ; ils sont jaloux de leurs or- dres, et ravis d'attirer sur eux les regards de la multitude. C'est la marque ordinaire des esprits qui n'ont pas d'autre mérite que celui conféré parla richesse ou le pouvoir. Les pe- tites guerres qu'ils se font en Afrique se réduisent à quelques batteries à coups de bâtons, de piques et de flèches; el sou- vent la campagne commencée le matin, est terminée le soir

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parla paix. Les nègres aiment les appareils guerriers, ils sont fanfarons; mais quand il en faut venir à l'effet, ils sont les plus timides des hommes, à moins qu'on ne les réduise .tu désespoir, ou que la vengeance ne l*s rende furieux; alors lis se font hacher plutôt que de céder; ils poussent la férocité a une rage effrénée et inconnue dans nos climats plus tenipe- rés; heureusement c'est un feu de courle durée. Au reste, ils attachent peu de gloire aux conquéies, parce que le vain- queur est aussi simple , aussi ignorant qae»le vaincu , et qu'ils restent toujours dans la même sottise qu'auparavant.

Un nègre, courtier d'esclaves pendant sa jeunesse, avoi fait, dans un âge plusmiir, un voyage en Portugal. <■ Ce qu'il « voyoit, dit Raynal, ce qu'il entendoit dire , enflamma son « imagination, et lui apprit qu'on se faisoit souvent un grand u nom en occasionant de grands malheurs. De retour dans « sa patrie, il se sentit humilié d'obéir à des gens moins « éclairés que lui. Ses intrigues l'élevèrent à la dignité de « chef des Akanis , et il vint à bout de les armer contre leurs c< voisins. Rien ne put résister à sa valeur, et sa domination « s'étendit sur plus de cent lieues de côtes , dont Anamabou « éloit le centre. 11 mourut, personne n'osa lui succéder, « et tous les ressorts de son autorité se relâchant à la fois, « chaque chose reprit sa place. » Ilist. philos. , 1. xi.

Ces peuples des côtes d'Afrique, chez lesquels se faisoit la traite , ont divers gouvernemens. On y voit tantôt une mo- narchie absolue , tantôt une sorte d'aristocratie. Le pouvoir illimité des chefs a droit sur la vie même ; mais dans l'exer- cice des jugemens au criminel, les condamnations alloient plutôt à l'esclavage qu'à la mort , par commutation de peine, à cause du profit qu'ils tiroient des ventes d'esclaves aux Européens (Edwards, Hisiory of the west Indies , t. a). Si l'imperfection des nègres empêche l'établissement d'un des- potisme durable parmi eux, comme chez les Indiens, c'est encore un avantage qu'ils tiennent de la nature , puisque la science et la plus grande capacité d'esprit des autres hommes sont employées si souvent à fonder des institutions tyranni- ques et à ourdir un réseau de lois multipliées, pour enlacer plus habilement les peuples.

On ne peut agir sur les nègres qu'en captivant leurs sens par les plaisirs , ou en les frappant par la crainte ; ils ne tra- vaillent que par besoin ou par force. Se contentant de peu de chose, leur industrie est bornée et leur génie reste sans action, parce que rien ne les tente que ce qui peut satisfaire leurs sens etleurs appétits physiques. Comme leur caractère a plutôt de l'indolence que de l'activité, ils paroissent plus pro- pres à être conduits qu'à conduire les autres, et plutôt nés

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pour Tobéissance que pour la domînallon. TI est rare d'ail- leurs qu'ils sachent bien couimander, et l'on a remarqué qu'ils se monlroient alors despotes capricieux, et d'autant plus jaloux de Tautorité , "qu'ils étoient plus esclaves. Ce der- nier caractère n'est point exclusif aux nègres, car il est re- connu par expérience que les meilleurs esclaves deviennent toujours les plus mauvais maîtres en tout pays, parce qu'ils veulent se dédommager en quelque sorte sur les autres de tout le mal qu'ils ont souffert. C'est ainsi qu'on a dit de Cali- gula , empereur romain , qu'il avoit élé le meilleur des valets et le pire des maîtres. Ce caractère est donc surtout l'effet de leur esclavage , et non pas celui d'un mauvais naturel ; le propre de la servitude est de dégrader les âmes. Les miséra- bles sont sensibles, généreux, hospitaliers entre eux, mais durs et impitoyables envers les heureux qu'ils regardent comme autant d'ennemis. Un pauvre nègre partagera son pain , son lit avec son semblable ; il s'exposera aux plus grands périls pour sauver la vie à un esclave fugitif ; il dé- fendra jusqu'à la mort un inconnu dont l'infortune l'aura touché: mais ce nègre si sensible sera peut-être cruel , im- pitoyable envers son maître ; c'est l'instinct de tous les mal- heureux ; il leur semble que le bonheur des autres soit fait à leurs dépens. Au reste, le nègre, lorsqu'il n'est point soumis à cet odieux et avilissant esclavage qui le dégrade , a le cœur excellent ; rempli de générosité , d'attachement sincère et de sensibilité : ses chaînes ne lui ôtent pas toutes ses vertus. Quand il aime , il ne se borne point à des démonstrations extérieures, il le prouve parles effets; il est capable de don- ner son sang pour ceux qu'il chérit. Rarement il est avare ; au contraire , il partage le fruit de ses travaux avec ses amis ; il a toutes les vertus des âmes simples. Naturellement doux, prévenant, fidèle, quand on ne le révolte point par dinfâmes traitemens , il s'attache à ses maîtres , il les soigne , il prend leurs intérêts ; rien ne le rebute , il chérit leurs enfans comme les siens propres ; il s'exposeroit'*ttfeu et à l'eau pour les pré- server du danger. On a ru des exërirtples héroïques de leural- tachement; plusieurs ont donné leur vie pour sauver celle de leurs maîtres; plusieurs n'ont pas voulu leur survivre. Qui- conque est aimé des nègres peut tout attendre d'eux : il en est même qui ont pratiqué le plus difficile précepte de \a morale , celui de faire du bien à ses ennemis ^ de confondre l'ingrat par de nouveaux bienfaits. Combien n'en a-t-on pas vu qui, déchirés sous le fouet de leur barbare maître, ve- noient encore lui offrir le reste de leur sang et de leur vie pour garantir ses jours? Combien d'eux n' jnl-ils pas payé les toui-mens qu'on leiu: fait subir, par des preuves d'undévoue-

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ment intrépide ?Ils savoient pardonner l'offense et répondre à la dureté du cœur par la n»agnaniinilé. Dans la dernière des conditions, ils donnoient aux puissans l'exemple des plus su- blimes verlus ; ils montroient que si la fortune les avoit pri- ves de ses dons , ils ctoient dignes de les obtenir. Contenu d'avoir pratiqué le bien sur la terre, ils mouroicnt pauvres rt sans gloire, mais fiers de leur destinée, cl ne laissant à leurs enfans que l'exemple de leur vie , au lieu du pain qu'ils ne pouvoient leur donner.

Tels sont les hommes que les Européens ont opprimés , et qu'ils calomnient, aujourd'hui même encore, que les progrès universels de la vraie philanthropie ont fait abolir chez plu- sieurs nations la traite de ces malheureux. Ils sont paresseux , dit-on : et de quel droit les forcez-vous à des travaux dont ils n'obtiennent pour profit que des coups ? Ils sont intempé^ rans , débauchés , soit ; mais quel mal en résulte pour vous? Ils n'ont point de religion , point de lois chez eux: est-ce un motif pour lés asservir, pour les aller dérober au sein de leur patrie, les arracher des bras de leur famille, pour les enchaî- ner , et les traînant dans de lointains climats , les forcer à se courber sous le fouet menaçant, à engraisser de leurs sueurs une terre brûlante, et y multiplier, sans récompense, la canne à sucre , le café , le coton , l'indigo , qui ne sont pass pour eux ? Vous abusez de la force pour tyranniser le foible , et l'intérêt invente des sophismes pour justifier cet abus du pouvoir. A peine est-il permis d'élever la voix en faveur dti misérable, et c'est devenir presque criminel que de réclamer pour le nègre un peu d'humanité. Sans doute, il n'est pas pour être entièrement libre , son caractère physique et moral l'a suffisamment démontré; sans doute , en demandant l'a- doucissement de sa misère , on est loin de vouloir justifier les crimes horribles qu'une licence effrénée lui a fait commettre , quoiqu'ils n'aient été peut-être que les représailles de ce qu'il avoit souffert ; mais, du moins , pourquoi ne pas rendre sup- portable la destinée de ces infortunés ? Quelle idée nous don- nent de leur cœur ces hommes si sensibles en apparence , qui remplissent le monde de leurs cris quand on les égratigne, et qui ferment les yeux quand on massacre des milliers d'A- fricains 1*

De r esclavage de T espèce humaine en général. Puisque par toute la terre et chez tous les hommes, il existe une telle différence de rang et de pouvoir que les uns sont maîtres et les autres plus ou moins assujettis ou es- claves ; puisque l'espèce nègre en particulier s'est constam- ment soumise aus races blanches partout elle & «st trouvée

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t;n relation avec elles , cherchons si la servitude des hommes et celle des animaux peut être conforme à la nature. Une telle question n'appartient pas moins à la zoologie qu'à la •poliiique , si l'on veutl'envisager philosophiquement.

Les partisans de l'esclavage soutiennent, avec Aristote, Pci/iV., /. I, cJi.i^ qu'il y a des esclaves parnaitirc, des cires infé- rieurs en intelligence ou incapables de se gouverner, comme sont les enfans, et par cette raison, condanmés naturellcmenl à la subordination envers leurs parens ou leurs tuteurs. Solou à Athènes, Romulus, à Rome, avoientmeme donne aux pères "droit de vie et de mort sur leurs enfans ; il en fut ainsi c1h>z ies Perses, bien qu'Arlstole llélrisse celte coutume du nom <le tyrannie {Bloral. nicotn. l. viïi, c. 12). 11 en étoit encore ainsi chez d'autres peuples dont la législation fut estimée. (Dion. Pnisseus, o/a/. xv.)

A quel litre , ajouteront des naturalistes , posséderions- nous l'empire sur des animaux , si ce n'étoit par celte supé- riorité d'inlelligence et d'adresse que nous accorda la nature manifeslement , comme à des maîtres pour gouverner toutes les créatures i* si noire empire est légitime , si l'ordre éternel «i voulu que les- foibles, les incapables d'esprit se soumissent aux plus forts et aux plus intelligens, leurs protecteurs nés, la femme à l'homme, le jeune au plus âgé; de même le nègre moins inlelligent que le blanc, doit se courber sous celui-ci, tout comme le bœuf ou le cheval, malgré leur force, devien- nent les sujets de l'homme : ainsi l'a prescrit la destinée.

Et ne voyez-vous point, parmi diverses espèces d'animaux, les mâles se faire obéir des femelles et de leurs petits ? Mais de plus , chez diverses petites républiques d'insectes , n'y trouvez-vous pas des guerriers, des défenseurs, et en même temps des maîtres, comme chez les termites {termes fatale)^ et les fourmis amazones , dont M. Huber a décrit les conquêtes, les victoires ? Leurs nombreux ilotes ou les prisonnières de guerre ne sont-elles pas condamnées à nourrir leurs domina- teurs , à leur élever des édifices , ainsi qu'à prendre soin de leur progéniture ? La nature admet donc , ou plutôt elle éta- blit même l'inégalité des races et des espèces; elle soumet la brebis au loup, comme elle place au-dessus du chien et d'au- tres animaux, l'homme, leur modérateur suprême. Le monde est une vaste république les rangs de chacun sont assignés; les êtres fmissent nécessairement par s'y caser et s'y coor- donner d'après le«r valeur relative, leur puissance réciproque; comme dans un mélange d'élémens de pesanteurs diverses , chacun d'eux tombe ou s'élève au degré qui lui appartient.

Que prétendent donc, poursuivront ces mêmes philoso-f

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phes, les défensenrs d'une égalité chimérique? Que si elle exisloit, le monde même ne pourroit pas subsister. Olez-nous tout empire sur les animaux, voilà l'agriculture détruite ;. voilà 1 homme réduit à vivre dans les bois, de racines sauva- ges. Otez toute différence entre les individus, partagez éga- lement tous les biens, personne ne voudra plus travailler Tun- pour l'autre ; tout demeure anéanti , faute de mobile, soit de richesse, soit de distinction; car qui voudroit exceller, s'il n'est pas possible de jouir des avantages que procure la supériorité de l'industrie et du travail ? Ainsi une parfaite et constante égalité est impossible, ou ne promet que l'inertie du tombeau. La nature , plus sage , a donc voulu qu'il y eut des foibles et des forts, afin qae ceux-ci protégeassent tes premiers , ou s'en servissent pour l'ulililé commune. Dites- nous si aucun peuple, si aucun homme pourroit s'élever à un degré de perfection et de civilisation fort avancées , sans le secours de ces instrumens animés tels que les bestiaux, et îa domesticité deshommes ou leur esclavage? Ces merveilleux monumens des Egyptiens , des Romains et d'autres grands peuples, étoient-ils exécutables, sans des milliers de bras es- claves? et l'Europe ne doit-elle pas la splendeur et l'étendue de sa puissance moderne à ces colonies , à ces travaux de tant de nations exploitées par nous dans les diverses parties du monde , pour que le citadin riche de Paris ou de Lon- dres jouisse de louLes les délices de la vie civilisée ?

Qu'un tel arrangement semble injuste , cela se peut ; mais est-il moins injuste au lion de dévorer l'innocente gazelle , et à l'homme d'immoler le bœuf laborieux après tant de fati- gues pour cultiver nos campagnes ? Cependant la nature n'a- t-elle pas sanctionné pour ainsi dire ces atrocités ?

On voit que nous n'affolblissons pas les objections qu'on peut élever contre la liberté de l'homme.

TSous devons répliquer que quoique la nature ait établir «ne hiérarchie d'animaux, l'homme ou la créature supérieure, étant la première , la maîtresse d'elle et des autres , se trouve essentiellementlibre et souverainede ses volontés. Elle ne peut relever que de la Divinité; elle a tout empire sur les brutes , sans doute; mais par cela seul que rien n'est aa-dessus* de nous que Dieu, l'homme peut naître abso- lument subordonné ou esclave, comme l'est l'animal.

Ce n'est ca effet que par une fiction , ou par une absurde concession, qu'on a osé dire servi nascuntur , on que des enfans naissent esclaves , leurs parens fussent-ils esclaves de leur propre gré. Quelle contrée barbare que celle le sein ma- ternel est frappé de servitude ! Pxien au monde peut-il justi- fier l'attentai de donner des fers à cet innocent qui en sort?

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Grolius dit qu'il doit le salaire de la nourriture à son maître, et qu'il ne peut du moins s'y soustraire à l'avenir, sans le rembourser {^De jure pacis an helli ^ 1. 2 , c, 5); mais quelle transaction cet enfant avoit-il faite i* et doil-il aussi le prix du sang et du lait empruntés à sa mère '^ car enfin c'est une partie de la possession du maître. Jeune infortuné , aviez- vous demandé la vie ? Payez, s'il le faut, par le travail, votre nourriture; mais cjuelles lois divines et humaines peuvent en- suite vous retenir dans les chaînes ?

La guerre , ou la misère, dira-t-on', vont réduire bientôt à la condition servlle cet être indépendant, s'il veut conser- ver sa vie. JN'y a-t-il donc pas d'autre loi entre les hommes que la force ? Mais alors la force lui répond et la parité des périls el des chances exclut toute puissance de droits civils. Le Spartiate, prisonnier de guerre , se dit captif ti non pas eschwe ; vtimcu aujourd'hui , il peut triompher demain; or l'abus de la force n'imprime aucune validité aux transactions obligées ; elles sont cassables par la même .violence qui les impose. Ce droit d'esclavage que tous les anciens faisoient «lériver de la guerre , n'a donc aucune autorité légale, comme l'ont remarqué Montesquieu (£!s/?/7Vt/(?5io/5, liv. XV, ch. 2, sq.) et Blackstone {^Comment. , Book i , c. 14., etc.).

Mais enfin vous naissez sans fortune , il n'y a point pour vous d'existence possible sans travail. J'y consens; le sort de l'homme est de s'occuper. L'on peut louer ses bras : celte servitude est du moins volontaire; c'est l'état de domesticité des modernes ; toutefois un maître injuste ne peut me rete- nir. Chez les J uifs , on s'engagcoit pour sept ans, ou le jubilé délivroit; un œil crevé, une dent cassée par un maître bru- tal, valoit l'affranchissement à l'esclave.

Il y a des inégalités naturelles entre les hommes ; et il en faut d'artificielles dans la société: qui le nie.»* mais elles se < ompensent les unes par les autres : l'homme fort a été un en- fant, et la nature lui dicte d'en respecter la foiblesse ; il a été ou peut être malheureux; et la fortune est-elle si constante qu'on doive , en toute si\reté, être insolent dans la pros- périté ? Quelle que soit la haute naissance , n'est-ce pas le hasard qui nous y place et qui doit empêcher deVy enor- gueillir? Que l'esclave Tamas-Kouli-Ivhan, élevé sur le trône de Perse , nous apprenne s'il fut plus heureux et plus libre au milieu des conspirations et des embûches ; que Sixte-Quint nous dise s'il n'a point acheté assez la tiare pontificale par quarante armées d'hypocrisie et de contrainte : pour moi, je trouve préférable le sort de l'esclave Epictète à celui de Né- ron sur un trône , regorgeant d'or c4de pouvoir , mais souillé

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des crimes les plus noirs et les plus infâmes, qoi font sa honle ëlernelle dans la postérité.

L'esclave et le maître sont dans un état d'ailleurs si peu conforme à la nature , qu'ils se corrompent mutuellement, l'un par l'abus de toutes ses volontés, 1 autre par sa bassesse, pour captiver les passions de son dominateur. Au contraire, une plus grande égalité retient les actions ou les prétentions des autres hommes dans de justes limites.

Le christianisme , à cet égard , d'accord avec la philoso-^ phie ( Paul , Epist. ad Coloss. IV , i ; et Epïies. vi , 9) présente la Divinité comme égale pour tous les hommes, et comme dit Sénèqu^ , Epist. XLVii : Servi siint, irriè hotnines ; servi sunl, imà £ontubernales ; seroi sunt, inib umici ; servi sunt , imà cons&nù. Ne sommes-nous pas tous plus ou moins co-serviteurs les uns des autres sur la terre ?

Le terme A' esclave vient, parmi les modernes , de slaviis , esclavon, peuples originaires de Tartarie ou ancienne Scythie que Charlemagne , leur vainqueur , condamna à un perpétuel emprisonnement, disent Vossius et Ménage. De même les servi des Romains n'étoient que des prisonniers de guerre- conservés (^servus , de servure) ; on les nommoit aussi mancipia (^quasi manu capli) pris à la main. Jure gentium servi nosirisunt (juiab hosli/jus capiuntur , dit Justinien, 1. i , tit. 5,5, i , et institut,, 1. 3 , 4.. L'origine de l'esclavage parmi les hommes émane ainsi de la captivité dans la guerre ; l'Ecriture la fait remonter à Nemrod ; Abrakam avoit <le nombreux servi- teurs -, les Hébreux devinrent un peuple asservi parles Egyp- tiens {Gènes. , c. 4-7 1 et Levitic. , c. aS) , et le trafic d'esclaves étoit si commun , que Joseph fut vendu par ses frères.

Chez les Grecs et les autres nations maritimes de la Mé- diterranée, la piraterie fut toujours le principal moyen de se procurer des esclaves (Thucydid. ,1. 1) ; la fameuse guerre de Troie en donna un grand nombre qu'on vendoiten Chypre et en Egypte ( Homère , Odyss. , 1. xvji , vers. 448 , et 1. xxvi ). Chez les Grecs, tout étranger étoit appelé barbare et consi- déré comme esclave ou digne de l'ôtre ; aussi ce commerce éioit habituel , et Ton voit, dans une comédie d'Aristophane ( Plutus , act, II , se. 5 ) , des marchands de Thessalie qui viennent vendre leurs esclaves. Rien n'étoil plus dur que l'as- servissement des ilotes chez les Spartiates , tandis que la con- dition des esclaves à Athènes, étoit souvent plus heureuse que celle des citoyens en d'autres contrées , selon Démos- îhène ( Philippiq. 2 ).

Les conquêtes des Romains durent multiplier à l'excès les esclaves dans leur immense empire, comme s'ils avoient pris à tâche d'asservir tout l'univers ; aussi eurent-ils besoin de les

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conlenir par les lois les plus atroces; ils les punissoient ^e niorl à volonté, et se jouoient de la vie des hommes. De ces soulèvemens redoutables et ces guerres serviles qui mirenk en péril leur république, au temps de Spartacus.

Plus les nations sont opulentes et corrompues par le luxe, plus elles ont d esclaves , et les traitent avec une barbarie iilrocc ; il en est de même de plusieurs peuples conquérons , tels que les Spartiates, les Komains, et parmi les modernes, Jes Anglais, Au contraire , les Athéniens étoient humains er.*-ers leurs esclaves ; d'après des recensemens cités par les historiens, il y avoit,à Athènes, trois esclaves pour une per- sonne libre ; dans les colonies européennes, le nombre des nègres., par rapport à celui des blancs , est bien plus consi- dérable ; il est de six au moins sur un , et parfois de huit ou mcuie douze sur un ; n»ais ces disproportions deviennent d'au- tant plus dangereuses que les esclaves peuvent mieux con- iioîfre le nombre et la force des hommes de leur couleur. Les esclaves blancs , ne pouvant pas autant se distinguer de leurs oppresseurs parmi les anciens , ne se sont pas soulevés autari.t de fois que leur nombre auroit pu leur doimer la victoire.

Outre la servitude par le fait de la guerre et de la violence , il y avoit aussi la servitude volontaire. Ainsi les anciens Ger- mains étoient si passionnés pour le jeu , dit Tacite , qu'après avoir tout perdu, ils alloient jusqu'à jouer leur liberté et leur personne. La servitude volontaire fut aussi autorisée à Home jpar décret du sénat , sous l'empereur Claude , mais abrogée çnsuile par Léon.

Cependant, à l'établissement du christianisme, les mœurs s'adoucirent ; car cette nouvelle loi considérant tous les liommes , comme égaux devant la Divinité, tempéra l'escla- vage , dont la sévérité avoil été déjà bien modérée par l'em- pereur Adrien : toutefois les vieux Fionialas croyoient voir dans cette nouvelle religion , embrassée en foule par les es- claves qu'elle appeloit à un meilleur sort, la ruine de leur empire et le déchaînement de l'anarchie. Ce ne fut point le système féodal qui eut l'honneur d'abolir Tesclavage , comme «n l'a supposé. Sans doute après que les Barbares du Nord curent déchiré l'empire romain , eurent soumis les babitans «le tant de provinces à la servitude de la glèbe , la soif des rapines et de la nouveauté , non moins que le fanatisme re- ligieux , entraîna de nobles barons à la conquête de la Terre- Sainte. Pour ce grand voyage d'outrc-mer , il leur fallut de l'argent; ils cédèrent de leurs terres à leurs serfs, qui se li- bérèrent ainsi au moyen de quelques sommes ; mais la ser- vitude de main-morte fut surtout abolie peu à peu par le clergé qui s'assurait ainsi' tout l'appui de la masse des nations.

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C'éloit un acte de piété que d'affranchir des ser(s ^ pro amore Bd et mercede anwiœ, à l'article de la mort; et le p^spe Alexandre 111 surtout déclara que la nature n'avoit pas créé d'esclaves (Voyez Hist. Ang/icunœ scn'ptores, de Raoul de Diceton, Lond. iGSa , in-fol. , toni. i.", pag. 58o). SI nous voulons toutefois scruter un point si important de l'histoire de notre espèce , nous verrons que les prêtres tiroient telle- ment parti de ces affranchissemens, que l'Eglise lançoit ses anathèmes contre les maîtres qui ne permettoient pas à leurs esclaves de disposer de leur pécule , par testament , pour des legs pieux (Potgiesser, De siahi servormn , 1. 2 , c. XI , § 2) ; et ce qui démontre surtout que l'intention du clergé n'étoit pas si généreuse qu'on Ta proclamé, ce sont les différens dé- crets des conciles, et les règlemens ecclésiastiques, en France et en Allemagne , qui prescrivent à tout évêque ou prêtre, voulant affranchir un esclave du domaine des églises , d'en acheter deux autres d'une valeur égale, pour les substituera sa place. (^0/. les preuves et documens tirés des conciles pap Potgiesser , Siat. sewor. , 1. iv , cap. 2 , § 4 » 5. )

L'affoiblissement du Bas-Empire, par les guerres et le luxe, avoit déjà porté Constantin à rendre trois édits célè- bres pour l'affranchissement des esclaves; en quoi il fut imi'.é par Juslinien et Théodose. Il falloit repeupler l'empire de c\\oy(i\^s ingénus avec les mamwiissi ; mais le christianisme, auquel on a souvent attribué la cause de l'affranchissement d»^ l'ancien esclavage, parce que celte religion regarde tous les hommes originairement comme égaux et conmie frères , ne s'est point proposé de l'abolir. Saint Paul veut qu'Onésime, malgré sa conversion, reste esclave dePhilémon , aussi chrc- trcn. Voy. son épîire à Philémon et Vepître aux Romains , ch. Mil , aux Ephésiens, ch. vi , aux Co/ossiens , ch. III, i^ 23 et i , à Tinwili. ch. VI , à Tite , ch. H ; la première aux Co/inih. ch. vri , § I , etc. ). Enfin l'esclavage subsista sous la loi du chris- tianisme durant tout le moyen âge.

Mais il étoit dans les destinées que la race humaine blan- che sorlîtpeu àpeu de ses fers, tandis que l'antique anathèmé ])rononcé sur la tête des descendans de Chain (seloh l'Ecri- ture ) ixe leur promettoit qu'un esclavage éternel.

De la traite des nègres et de son ahoUdon.

Dès le temps des Carthaginois, et même long-temps au- paravant, les nègres ont été achetés, réduits en esclavage et chargés des travaux its plus pénibles. Il paroît en effet que les anciens Egyptiens avoient des eunuques à leur service, ainsi que les Assyriens et les Perses ; Tyr et Sidon trafiquoient aussi d'esclaves , selon le témoignage du prophète Joël ^

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ch. iir, § 3 et 6. Mais les Carthaginois les employèrent sur- tout dans les travaux du commerce q^iiils enlretenoient avec tout l'univers connu , et les firent exploiter leurs mines. Le fameux Périple d'Hannon, navigateur carthaginois chargé de faire des découvertes au sud de l'Afrique , nous apprend que les nègres étoient, dans ces époques reculées , ce qu'ils sont encore aujourd'hui , de misérables peuplades vivant sans lois sous des cabanes, trouvant difficilement leur nourriture , éle- vant quelques bestiaux , cultivant à peine quelques champs de mil , et soumises à de petits despotes.

Les conquêtes des (irecs, ensuite celles des Romains, en Afrique, rapportèrent, en Europe, de l'or et des esclaves, inslrumens de luxe et de la perte des peuples. Les Nègres ou Ethiopiens furent fréquens à Rome sous les empereurs, et à Constantinople, au tems même du Ras-Empire. Les conquêtes des Sarrasins, les irruptions des Maures et des Arabes , au sein de l'Afrique , à la naissance du mahouiétisme , dissémi- nèrent dans tous les lieux de la domination musulmane les peuples brûlés de l'Ethiopie ; mais on n'en tiroit qu'un ser- vice domestique , soit comme eunuques , soit comme hommes de peine. Il paroît que dès la fin du quatorzième, au commen- cement du quinzième siècle , les navires portugais ayant dé- couvert quelques îles vers les côtes d'Afrique , en rapportè- rent des esclaves qu'on employa ensuite à la culture des terres, soit sur le continent, soit aux îles Canaries. En i^Si, les Portugais bâtirent le fort d'Elmina sur la côte d'Afrique, et quarante ans après, Alonzo Gonzalès fit, l'un des premiers, le commerce régulier de sang humain , qui a subsisté jusqu à nos jours. Ce fut en i5o8 que les premiers nègres esclaves furent transportés d'Afrique à Saint-Domingue par les Espa- gnols , dit Anderson {History of commerce , tom. i.^'-, p. 336), de sorte que l'exploitation du sucre et la traite , ou ce qu'il y a de plus doux et de plus amer au monde , commença l'un avec l'autre. La découverte de l'Amérique, vers la fin du quin- zième siècle , ouvrit donc ce nouveau champ de spéculations ; et la canne à sucre , le coton, transportés dans ces climats lointains, y furent bientôt cultivés par les malheureux nègres, qu'on arracha de leur patrie pour engraisser leurs oppresseurs, et pour fertiliser un sol brûlant auquel les corps des Euro- péens ne pouvoicnt pas travailler ; car l'habitant du Niger et ûu Sénégal soutient bien mieux la chaleur que les peuples des autres contrées de la terre , parce qu'il y est habitué dès Ten- fance, et surtout parce que sa constitution s'y prêle facile- ment.

On sent combien les peuples d'Europe, se trouvant supé- rieurs aux nègres, purent aisément les soumettre au joug de la

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servitude. Les blancs sont naturellement plus courageux, plus enlreprenans , et surtout plus habiles , plus industrieux que les noirs : ils conçoivent leurs projets d'avance , prévolent les obstacles, parent aux accldens, exécutent avec prudence leurs desseins, les poursuivent avec persévérance, savent mi- ner peu à peu ce qu'ils ne peuvent entreprendre de force, em- ploient la violence et la ruse, et profitent enfin des foiblesses de ceux qu'ils veulent soumettre. Le nègre , au contraire , n'a que de l'imprévoyance : il ne forme aucun projet pour l'a- venir, ne considère que le présent, s'endort sur les projets de ses ennemis, se laisse conduire par les sens , et mailriser par la crainte. S'il a l'esprit de ruse et de tromperie , il man- que d'audace, d'habileté , de persévérance pour venir à bout de ses desseins. Par toute la terre, la race des tyrans est plus habile à opprimer que la race des foibles pour leur résister; et nous voyons même parmi les animaux, que les carnivores sont plus actifs, plus robustes et plus Industrieux que les doux et simples herbivores qui deviennent leur proie. Le nègre n'est qu'un enfant timide près du blanc ; lorsqu'il s'agit de combattre, il cherche le plaisir; l'esclavage et la tranquillité lui parolssent préférables à une liberté achetée par la vigi- lance et le courage , bien qu'elle ne se trouve qu'à ce prix par toute la terre. C'est pour cela que les hommes sensuels , les peuples adonnés aux plaisirs ne peuventpas être libres ; aussi lous les méridionaux, voluptueux et délicats, vivent sous le despotisme, tandis que les hommes austères des pays froids sont plus portés à l'indépendarjce.

Les Européens ont fait la traite en Afrique, au nord, au sud de la ligne équalorlale , à la côte d'Angole qui a trois points principaux, Cablnde, Loango , Malimbe, S. Paul-de-Loando et S. Philippe de lienguela. « Ces parages, dit Raynal, four- « nissent à peu près un tiers des noirs qui sont portés en Amc- « rique ; ce ne sont ni les plus intelllgens , ni les plus labo- « rleux, ni les plus robustes.» Parmi les peuplades des nègres jadis exploitées dans la traite , on avolt remarqué que les Mandingues élolent les meilleurs, c'est-à-dire, les plus do- ciles. On trouvolt aussi les Papaus très patiens au travail. Les Eboës sont les plus stupides, et dune timidité ou d'une lâcheté extrême de caractère ; ils se dégoûtent tellement de la vie, par un fonds de mélancolie, qu'ils se tuent la plupart à la m'oindrè contrariété qu'ils éprouvent. Au contraire , les nègres , nommés Koromantyns , du royaume de Juida , sont fiers, sauvages et rebelles.

La Côte-d'Or fournit les meilleurs esclaves, et en plus grande quantité. On les achète par échanges, en donnant du fer en barre , de l'eau-de-vie , du tabac, de iapoudre à canon ,

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des fusils , des sabres , des quincailleries , telles que couteaux , haches , serpes, scies, clous, etc. , et surtout des étoffes de laine rayées et bariolées de diverses couleurs; les nègres ai- inent beaucoup aussi les toiles de coton des Indes, d'Europe , teintes en rouge , les mouchoirs , elc. Au Congo , un père fait argent de ses enfans ; il les cède à l'instigation des Euro- péens , pour un collier de corail ou pour quelques bouteilles d eau-de-vie. Les nègres de certains cantons reçoivent comme monnaie des canris , sorte de coquillage appelé vulgairement jnicelage {^cyprœa moneia , Linn.) , et qui se trouve aux îles Maldives ; sur d'autres côtes on donne en échange des espèces de pagnes , ou des tissus de paille larges d'un pied , et longs d'un pied et demi. Quarante de ces pagnes valent une pièce qui coûte ordinairement une pistole ; toutes ces marchandises s'évaluant par pièces ou par pistoles. Un nègre coûtoit de trente-six à trente-huit pièces, ou 4^oofr.,en y comprenant les présens et les droits qui sont d'usage sur les côtes , et les ré- tributions exigées par les rois du pays , les courtiers d'es- claves, les comptoirs européens, etc. On porte à soixante mille au moins le nombre des esclaves que les Européens enîevoient chaque année des côtes d'Afrique, ce qui coule à peu près vingt-quatre millions a l'Euj^ope. Quelquefois on en exportoit un bien plus grand nombre; ainsi , en 1768, on tira d'Afrique 104., 100 esclaves, dont les Anglais seuls pri- rent plus de la moitié pour leurs îles , et pour revendre avec profit aux autres peuples, les plus mauvais et tous ceux dont iisne pouvoientpas ilrergrand parti. En 1786,1a traite enleva 100,000 nègres, car la guerre d'Amérique l'avoit fait dimi- nuer; les Anglais seuls en avoient enlevé 4-2rOoo , sur cent trente bâtimens, celle même année.

Il est certain que les colonies dévorent les nègres et que roux-ci ne s'y reproduisent pas suffisamment pour remplacer ceux qui périssent; soit que le climat s'oppose à leurmulli- plicalion , soit plutôt que la servitude , la misère elles peines dont ils sont accablés, les minent insensiblement.

La traite fut légalement autorisée pour l'Espagne, d'abord à l'époque du ministère du cardinal Ximenèsel de l'empe- reur Charlcs-Quint , sous le pontificat de Léon X; et sous le règne d'Elisabeth , en Angleterre ; de Louis XIII ,, en France. Tous ces princes l'adoptèrent, sous le prélexle que les Noirs n'étant pas chrétiens , ils ne pouvoient prétendre à la liberté d'homme. Les étranges barbaries dont on use dans ce commerce , n'ont été dévoilées que de notre temps, et l'on en trouve l'extrait dans V Essai de. Thomas Clarkson , sur VeidiH^age ci le commerce, de r espèce humaine ( Essay on ihi

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slai>ery and commerce on the human species). Les détails en font frémir.

Que l'on se représente des compagnies de bourreaux dé- barquant, avec des armes, des chaînes et quelques marchan- dises, sur les côtes de la Gambie, ou au Sénégal, à Gorée, à Sierra-Léone et autres stations. L'on avance, par caravanes, chez des peuples simples , généreux , qui ouvrent leurs ca- banes , et offrent des alimens avec l'hospitalité à ces étran- g'ers. Cependant ceux-ci engagent ^\es querelles entre les chefs de tribus ; ils excitent de petits rois à faire des prison- niers de guerre à leurs voisins , et à les livrer pour l'appât de quelques aunes de toile , de quelques colliers de verro- terie , ou de mousquets ou de barils d'eau-dc-vle. On pé- nètre jusqu'à douze cent milles dans les terres; on enivre quelques malheureuxqu'on enchaîne, on surprend des enfans, des individus écartés et sans défiance ; on séduit des femmes, ce sont des esclaves de plus ; on attaque, on pille de pelils hameaux trop foibles pour résister à des armes à feu ; on attise mille disputes, pour acheter à peu de frais les captifs; on enlève tantôt une mère pour attirer son fils , tantôt un fils pour avoir sa mère. A-t-on fait une bonne chasse .'' a-t-on subtilement extorqué des pauvres innocens à leur famille ? on les attache à une chaîne , on leur saisit le cou dans une fourche dont la queue , longue et pesante , les empêche de fuir avec rapidité. Ces bandes , semblables à celles des galé- riens , sont ramenées de deux à trois cents lieues de l'inté- rieur des terres, aux négocians qui les attendent ; elles tra- versent d'affreux déserts en portant l'eau, la farine, les graines ou racines nécessaires pour subsister. ,

Arrivés sur la côte , ces malheureux sont entassés , par bandes ou chaînes, dans les vaisseaux négriers ; ils sont jetés à fond de cale , chacun gur des cadres si étroits , qu'il leur est impossible de se retourner avec leurs liens , et qu'ils se touchent. On en accumule jusqu'à quinze cents sur un étroit bâtiment. Qu'on juge de la vapeur épaisse de trans- piration et d'odeur infecte qui s'exhale bientôt de tant de corps échauffés dans l'air méphitique de ces saules , surtout pendant la nuit , et lorsqu'on ferme les écoutillos ! Aussi ces malheureux hurlent, de toutes parts , qu'ils étouffent ; les femmes se trouvent mal à chaque instant , et il périt sans cesse des individus faute d'air , outre le chagrin , la terreur et la nourriture insalubre qu'on leur donne.

Eu effet , on ne leur distribue qu'avec parcimonie des haricots , des ignames, du riz et de l'eau ; bientôt la plupart êont saisis d'une diarrhée et d'une dyssenterie , et , pour comble de misère , chaque fois qu'ils ont besoin d'aller à la

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^arde-robe , il faut que toute la chaîne de leurs compagnons dinforlune se lève avec eux, de sorte que nuil et jour ces nègres n'ont point de repos ; continuellement occupés à se lever , à se coucher , l'appareil lugubre «le leurs fers et de ces marches de galériens dans leurs étroites demeures , em- pêche tout sommeil. Joignez-y les cris effrayans des souf- frances, et qu'on pense ce qui résulte des retards, des besoins pressans de ces malheureux , dont les déjections infecte» salissent et leurs voisins et ceux placés au-dessous d'eux! liicnlôl le mal se communique , la fièvre s'allume , et la contagion accrue par le croupissement de l'air, des malpro- pretés, des excrémens putrides , produit une sorte de peste qui moissonne en peu de jours une multitude de ces nègres. Un pauvre moribond , gisant à côté d'un compagnon de sa misère , demande en vain quelques gouttes d'eau pour se rafraîchir; il faut qu'il se lève avec la chaîne ; ne pouvant marcher , on le force , on le frappe , il périt sur la place, on de maladie ou de mauvais traitemens.

Qu'on ne croie pas que les auteurs, en citant ces faits , les exagèrent -, leurs résultats en font foi. Un vaisseau négriev qui a chargé douze à quinze cents esclaves sur la côte d'A- frique , met quarante-cinq jours ou deux mois au plus pour le trajet aux colonies d'Amérique. Dans cet espace si court , il perd plus des deux tiers , et n'amène guère que trois à quatre cents nègres , tant il en meuii en peu de temps à son bord. Aussi esl-il plus avantageux de charger moins d'esclaves à la fois ; on peut mieux les soigner ; ils ont plus d'air et de liberté , et il en périt beaucoup moins.

Frappée , en effet, de ces pertes d'hommes , qui renché- rissoient trop les esclaves, la cupidité des négocians de chair humaine a senti qu'il valoit mieux prendre moins de nègres à la fois, et les traiter plus doucement , quoique ce procédé coule plus. On n'a pas trouvé de moyens plus efficaces pour leur faire oublier leur malheur, que de les conduire respirer sur le pont un air plus pur , et de les régaler de temps eu temps d'une mauvaise musique , en les faisant quelquefois danser avec les négresses. Mais ces malheureux , séparés pour l'éternité de leurs femmes, de leurs enfans, de leur patrie ; persuadés , en outre , que les blancs les achètent pour les dévorer , tombent dans une noire mélancolie, que redou- blent encore les mauvais traitemens qu'ils essuient , les fers dont ils sont chargés. Aussi , lorsque le désespoir les saisit , et si l'on n'y prend garde , ceux qui le peuvent se précipitent à la mer. On les lient donc soigneusement enchaînés , soifi dans la crainte des révoltes , soit pour les empêcher de se détruire. Ceux qui montrent moindre résistance sont aUa~

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chés à des barres de fer; enfin , on distrait le plâs qu'on peut, par des exercices violens, ces malheureux ; ceux qui refusent sont frappés impiloyablemen* ; aussi la plupart, écorchés par leurs fers, poussent des cris lamentables , deshurlemens de douleur qui se répètent sur le vaisseau, et qui remplis- sent pendant la nuit, surtout en pleine mer, l'âme de leurs bourreaux eux-mêmes , de la plus affligeante mélancolie sur la perversité humaine.

On a prétendu excuser l'esclavage des nègres en disant que leurs rois les fyrannisoient, et qu'ils vivoient d une manière si précaire et si misérable chez eux, qu'il leur éloit avanta- geux d'être réduits en servitude : mais qui ne sait pas que le bonheur et le malheur sont relatifs , et que Ton peut être heureux dans la pauvreté et le dénuement i' Ce ne sont pas les biens qui font le bonheur , mais c'est le contentement du cœur , et il n'en est point sans l'indépendance. Quoique le nègre nous paroisse misérable en son pays , il s'y trouve heu- reux , comme le Lapon dans sa froide patrie , le Suisse dans SCS montagnes.

Arrivés dans les colonies , les nègres sont examinés par les colons, marchandés, troqués, vendus comme les bestiaux dans les foires. On* considère leur langue, leur bouche, leurs parties naturelles , pour connoître s'ils sont sains ; on remar- que la couleur de leur teint, la fermeté de la chair de leurs gencives , qui dénote qu'ils n'ont pas de mal d'estomac , ou d'autre cachexie Inlerne; on les tait courir, sauter, lever des fardeaux, pour estimer leur agilité , leur force. Les né- gresses, nues, sont examinées dans le plus grand détail ; leur jeunesse, leurs charmes, sont mis à l'enchère. Mais telles sont la consternation et la terreur qui régnent dans ces af- freux marchés de chair humaine , que les nègres se croient à une boucherie , et qu'on doit les dévorer : on a vu des né-

fresses mourir sur la place, tant elles sont glacées de frayeur. jC prix de ces esclaves augmente de plus en plus, parce que l'Afrique n'en fournit plus en aussi grand nombre , et profite de la concurrence des Européens pour faire des ventes plus lucratives , de sorte que les colons ne pouvant pas avoir des esclaves sans de grands frais, doivent renchérir peu à peu ies denrées coloniales.

Il existe entre le colon et le nègre une distance immense. Tout blanc est regardé dans les Indes comme d'une race in- finiment supérieure aux noirs ; à lui seul appartiennent les biens , l'autorité , l'indépendance , et les nègres ont adopté ce préjugé ; les lois l'ont consacré dans le code noir et le rode blanc ^ sorte de contrat civil imposé parles colons à leurs esçLaves. Geu.t-ci sont obligés d'exécuter tous les travaux

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qu'on leur impose , et forces par des châlimens lorsqu'ils s'y refusent; ils n'ont qu'un jour pour eux dans la semaine, afin de se procurer leur nourriture et celle de leur famille , s'ils sont mariés; mais comme ils ont trop de peine à faire subsister leurs enfans , ils se marient rarement ; de vient que l'espèce ne se reproduit pas suffisamment. Si les colons facililoient les mariages , en rendant la vie de leurs es- claves plus commode , ils ne seroient pas obligés d'acheter de nouveaux nègres ; et comme les négresses sont très-fé- condes , ils deviendroient plus riches; mais une avarice mal entendue , et qui se ruine elle-même, est toujours compagne de l'inhumanité.

Chaque nègre rapporte à son maître environ un écu par jour ; et les nègres charpentiers , serrurriers , cuisiniers , etc., lui rapportent; bien davantage : aussi sont-ils les plus mé- nagés et les mieux traités. On a coutume de baptiser les nègres qu'on amène d'Afrique , et de leur enseigner les prin- cipaux dogmes de la religion chrétienne , en leur recom- mandant surtout Tobéissance et en les menaçant de l'enfer. Les protestans aiment mieux les laisser vivre dans leur re- ligion , parce qu'en les rendant chrétiens ils n'oseroient tenir leurs frères en Jésus- Christ dans l'esclavage. Le Français tient le nègre moins éloigné de lui que l'Anglais ; aussi en est-il moins haï et peut-être moins craint : d'ailleurs, les mulâtres , qui résultent du mélange des races blanche et nègre , semblent les rapprocherentre elles par des alliances. V. MuLÀiRE et Métis, relativement à ces mélanges de races. Depuis longtemps les hommes les plus recommandables par leur amour de l'humanité manifestoient leur horreur pour l'esclavage des nègres et pour les infamies de la traite. 11 faut convenir que les Quakers censurèrent les premiers ce conmierce , à Londres, dès 1727, et les premiers ils l'abolirent dans la Pensylvanie, en 1774-1 par les plus hono- rables motifs du christianisme. Ce fut une grande victoire de la religion sur l'intérêt privé , mais qui n'est pas due au ca- tholicisme, s'il est vrai qu'il tienne le plus à maintenir encore aujourd hui , chez les Espagnols et les Portugais , l'escla- vage et linquisilion. Une foule d'hommes émlnens par leur génie , se déclarèrent hautement contre l'odieux marché des nègres ; il faut placer parmi ces auteurs surtout les noms de-Montesquieu, de Voltaire , de J.-J. P^ousseau , en France; et dans des temps voisins du nôtre, Necker , Condorcet , Mirabeau , MM. Larochefoucauld , Lafayette , Grégoire et plusieurs autres véritables amis de l'humanité. En Angle- terre, on compte les Pope, Thompson, Shenslson, Covvper, Hutchinson , Wallis, Edmond Burke , Thomas INovton ,

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Dillwyn , Harll-'îy, Beaitîp, le révérend Baxter , révéquc Warburlon, Millar, Wakcficld , etc. . i

C'est surtout dans ce parlement Lritani,iique. , qu'on pour- rolt appeler la tribune du genre humain, que furent débattus, de notre âge, ces grands intérêts. Le célèbre WilberforcQ s'illustra le premier dans cette noble lutte , qu'il soutint avec tant de persévérance et pendant tant d'années.

D'abord les tentatives en furent faites Tannée 1787 ; mais l'abolition entière du commerce des nègres ne fut obtenue qu'en 1807, la majorité se trouva de cent votes conire trente-six. Elle fut plus complète encore en 1808, car il y eut deux cent quatre-vingt-cinq votes contre seize seulem,ent. C'est dans le cours de ces mémorables débats pour l'éman,- cipalion de la grande famille du genre humain , que se si- gnalèrent les talens et la, brillante éloquence des Pilt , des Fox , desBurke , Grey, Sliéridan, ^Vyndham, Whitbread, Francis, Courlnay , Rider, Thornton , W. Smith , etc. Quel hommage éternel n'est pas à ces hommes génércuç qui, dédaignant les calculs vulgaires de l'intérêt privé , stipu- lèrent pour les droits immuables des nations et de Thuma- nité ! Combien se réjouiroientl'ombre durespectable Franklin et celle de ce premier des philanthropes modernes , La? Casas , qui défendit avec tant de périls et d'ardeur la cause des Américains ! En vain les calomnies de ses détracteurs lui ont imputé d'avoir introduit l'esclavage des nègres dans les c'olonies , pour garantir les malheureux Américains ; cet échange du joug de l'oppression sur d'autres têtes pouvoit- il venir à la pensée d un ami de l'humanité ? Non , sans doute; et rien ne démontre la vérité d'une pareille imputa- tion , de laquelle M. Grégoire a vengé la mémoire de l'illustre évêque de Chiapa.

L'abolition de la traite des nègres firt consacrée par la France en i8i5. Elleavoiteu lieu de fait long-tempspendqnt la révolution , ainsi que l'émancipation des nègres dans les colonies; en sorte que lanalion française devança long-temps l'Angleterre en générosité , plus même que ne l'auroit pres- crit la prudence. En effet, il étoit naturel que les noirs op- primés eussent à venger d'anciennes injures de leurs maîtres, qu'ils ne pouvoient considérer que comme d'injustes tyrans. Aussi , dès-lors qu'on eut fait tomber le joug odieux do dessus leurs épaules , tel qu'un ressort qui se détend av.ec farce , ils réagirent contre les blancs avec toute la rage qu'un climat brûlant inspire aux passions de haine et de vengeance. Ces mêmes hommes , humiliés par l'avilissement de l'escla- vage , ne purent s'élever à la dignité qu'inspire la liberté. Ils s'enivrèrent de barbarie et du sang des massacres ; le fer et

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la flamme à la main , on les vit insatiables de carnage , par la crainte même de rentrer sous le joug des blancs justement exaspérés à leur tour de tant de fureurs. On va même jusqu'à douter que le nègre ait l'âme assez ferme et assez élevée pour êlre jamais capable d'une vraie liberté; car celle- ci exige, pour ôtre conservée , cette force de caractère qui sait immoler ses passions à l'intérêt public et à sa patrie.

Le nègre, dit- on, est trop apathique pour conserver son indépendance, et cependant trop furieux dans les transports de ses passions , pour se modérer dans Texercice du pouvoir. Il n'est jamais en un juste milieu : s'il ne craint , il opprime ; et sHl n opprime ^ il craint. Trop bas dans Tadversitc , il s'enivre d'insolence dans la prospérité; aussi, chez les peuplades africaines , ne le voit-on jamais libre , quoique la foiblc capacité d'esprit de ses rois le garantisse heureusement d'un trop lourd despotisme.

Sans nier ces observations fondées, nous ne désespérons pas toutefois de cette race d'hommes que la nature n a pu frapper d'un malheur irrémédiable. S'ils ne sont pas nos égaux , sans doute , pourquoi de plus heureuses circons- tances dans leur élal politique et leurs moyens d'édu- cation , n'allumeroient-elles pas chez eux le flambeau de la civilisation jusqu'au degré de lumières et de félicité auquel ils peuvent prétendre ï Ne déshéritons aucun membre de la grande famille du genre humain, de ces nobles et glo- rieuses espérances ; tendons plutôt au foible un main pro- tectrice, pour l'aider à s'élever à un rang honorable dans Té- chelle de la civilisation. C'est par ces mutuels services que tous les peuples de la terre, échangeant leurs productions et les objcîs de leur industrie , ciu»enteronl de plus en plus leur bonheur; ils multiplierontles gages réciproques de leur amitié, au heu de s'entre-déchirer par des guerres, ou de s'opprimer l'un l'autre par des violences qui perpétuent les querelles et les motifs de vengeances.

Delà conformation particulière du Nègre , des causes de sa couleur; sa comparaison ai>ec Vhomme blanc et F orang-outang.

Nous avons considéré le nègre sous les rapports moraux. Si sa couleur ne dépend pas de la chaleur et de la lumière de son climat, comme on l'avoil prétendu , il convient d'en rechercher ici les causes.

Le docteur Mltchill , de Virginie {Phil. Tram, n." 4^76^) , établit d'abord que le degré de noirceur de la peau des nègres correspond aux degrés de densité et d'opacité que la chaleur produit sur ses tégumens. Selon Barrère, l'ardeur du climat épaissit et concentre la bile , laquelle , en s'épanchant dans

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les tissus comme par la jaunisse , rend les lïiérîdionatrx de plus en plus bruns , hâlés et noirs ; cette bile colore même en jaune la tunique albuginée des yeux; enfin, les nègres ont , selon lui , les capsules atrabilaires plus volumineuses, plus gonflées que les blancs. Cette hypothèse a été défendue aussi par Lecat.

L'antique opinion que la couleur noire est due surtout au climat et au genre de vie des nègres , a été suivie par Buffon, Robertson , de Paw , Zimmermann, etc., d'après les an- ciens philosophes, mais combattue avec de forts argumenset des faits par d'autres auteurs, et surtoutpar R. Forster, qui a voyagé atec Gook ( Retnarq. à la irad. allem. de l'Hist. nat. de Ba£fon , etc. ); car les Maures, depuis un temps immé- morial sur le terrain de l'Afrique , ne sont pas devenus noirs; et des nègres placés hors de l'Afrique et des tropiques depuis des temps qui se perdent dans la nuit des siècles, ne sontpoint redevenus plus blancs ; de même les Banians, les braminés de l'Inde, sous un climat aussi brûlant que celui de l'Afrique, restent essentiellement blancs , quoique hâlés ; c'est qu'ils rie s'allient jamais en mariage avec des nègres , tandis que les Portugais de Goa et des Indes noircissent par suite de ces alliances (Niebuhr, Voyage en Ambie , t. i, p. 55B ). Sous tous les climats d'Amérique , les originels de cette partie du globe conservent également leur teint cuivré ( lord Kaimes , Sketches ofthe histoiy onman. , t. i , p. i3 ). Il y a dans les îles, de la mer du Sud des hommes de race basanée et des nègres qui se perpétuent séparément.

Blumenbach établit pour cause delà teinte des nègres, que leurs humeurs abondant en carbone , celui-ci est sécrété avec l'hydrogène dans le tissu de Malpîghi; l'oxygène atmo- sphérique se combine à l'hydrogène pour former de l'eau , laquelle se dissipe par la transpiration , tandis que le car- bone reste seul déposé sous le derme ( de Gêner, hum. variet. nat. , édit. 3 ).

Il est évident que les raisons tirées du climat ou de la chaleur et de la lumière ne suffisent pas , puisque ces agens n'opèrent pas de même sur beaucoup d'autres animaux qui restent blancs, ou de nuances peu foncées , en Afrique.

A la vérité , Will. Hunter , Stanhope Smith , Zimmer-r mann , après Buffon , soutiennent qu'une atmosphère tou- jours brûlante , un soleil toujours ardent , dessèchent , con- centrent, brunissent toutes les substances végétales et ani- males , en dissipant la lymphe qui humectoit et délayoit tous les organes. Le froid, au contraire, empêchant la trans- piration, accroît l'humidité des corps, laquelle rend lapeau, les poils plus blancs, plus lisses et longs. Ainsi , les Danois

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les Allemands et les Apglais sont blonds ; ainsi, les lièvres , les renards, les ours et plusieurs oisoiiux , prennent des couvcrlurcs blanches dans le nord^, ou blancliissent dans l'hiver, mais se colorent en été. L'on peul donc conclure., ajouteni ces auteurs, que les peuples septentrionaux à grande slalure , à cheveux blonds el lisses , aux yeux bleux, sont diamétralement opposés aux habltans de la zone torride , à courte taille , à complexion sèche , brune , aux cheveux crêjMis , noirs comme leur teint. Les ha bilans des réglons intermédiaires formeront la nuance mitoyenne. \oilà donc les se.ptenlrionaux placés aune extrémité , comme les nègres léseront à l'autre dans les races humaines (Aristot. /, 2. elMe- ieor. c. 2. comm. Averroës). Aussi nous remarqueronsjjue les nations brunissent successivement en se rapprocnanl de Xç;t[uateur; que leurs cheveux desséchés, comme s'ils éloient tournis à la vive chaleur, se crispent ainsi que la laine (notons ^ependï^nt que la laine des moutons , en Afrique , devient diire et presque roide comme le crin ). Il n'est pas surpre- .jflant, poursuit-on, que les nègres, abandonnés désTenfancç, «us el perpétuellement exposés sous un ardent soleil , à l'air .libre,n'é tant presque jamais protégés par des habitations, aient acquis, par la suite des siècles , cette couleur foncée. De même les moutons , les chiens , en Afrique, deviennent bruns et noirs. ï)e résulte aussi celte disposition aux épanche- mens bilieux, comme dans l'iclère, , les fièvres bilieuses et fiurlout la fièvre jaune ou typhus iclérode , qui attaque si violeunnent les habitans des climats chauds. Toutefois les jaègres ne sont pas sujets a, celle dernière maladie. .:■

Il est impossible de conlestcr ces faits; les auteurs qui dissertent avec les raisohnemens les plus spécieux à cet égard , nous peignent ces nègres tout ;desséchés , avec des .cheveux qui se tordent et se crispent par l'excès de l'aridité.; enfin, briilés et carbonisés dans leur constitution , par un climat qu'ils comparent à une ardente fournaise. Ainsi , les Troglodytes, au rapport des anciens, étoientde petitshommes noirs , tout racornis et à moilié brûlés , qui , détestant les ardeurs du soleil , fuyoieat ses rayons en se cachant dans des cavernes , tandis que

L'astre poursuivant sa carrière , Verse des torrens de lumière Sur ses obscurs blasphéma leurs.

Mais on se fait de fausses idées sur la constitution du climat qu'habitent la plupart des nègres. Les déserts arides de l'Afrique sont inhabitables , et l'on ne trouve des nations ^ue dans les terres fertilisées par les eaux, surtout le long du

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cours des fleuves , tels que le Se'négal , la Gambie , le Niger, le Zaïre , elc, , dans le voisinage des bois et des marais ; on conçoit toute Tévaporation que la chaleur du climat doit pro- duire sans cesse sur les terrains bas, humides , marécageux , tandis que toute région élevée est constamment stérile et inca- pable de productions, comme sont les Karrous, les solitudes sablonneuses de Barca, du Biledulgérid , etc.

Les nègres les plus noirs, ceux des côtes occidentales d'Afrique, plus chaudes que les orientales ( parce que les vents alises des tropiques traversent le continent d'Afrique d'orient à l'occident , et s'échauffent en passant sur des ter- rains ardens ) ; les peuples d'Angola et du Bénin ; aucun , enfin , ne doit sa couleur noire à une dessiccation extrême , comme on suppose qu'elle y concourt. Au contraire , l'hu- midité excessive que la plupart éprouvent, détrempe , relâ- che sans cesse leur compiexlon , au point que tous les nègres sont plus ou moins d'un tempérament lymphatique , inerte, mollasse, que plusieurs ont des glandes engorgées ( Mungo Park en a vu porter des strumes ou goitres, comme les crétins des gorges du Valais). Il ont souvent aussi les jambes infiltrées d'eaux , le scrotum gontlé par des hydrocèles ; des femmes deviennenthydropiques, leurs mamelles, toutes leurs parties, s'affaissent étrangement par cette humidité prédominante.

C'est même celte humidité chaude qui rend le nègre si pa- resseux,si Indolent, et qui, favorisant sans cesse une végétation riche et abondante, n'oblige ces peuples à aucun travail pour vivre. De vient que les nègres ne s'évertuent en rien et pas- seront des milliers de siècles sans se perfectionner, accroupis ou sommeillant sous un ajoupa de feuillages, tandis que croissent auprès d'eux les ignames et le bananier.

11 ne faut donc point admettre la sécheresse comme une cause de la coloration du nègre. La chaleur et l'éclat du soleil , quoiqu'on ne puisse nier leur intluence , ne suffisent point pour expliquer toute sou économie particulière ; car sa structure interne et externe le rapproche évidemment de l'orang-outang , ainsi que l'avancement de son museau , le rétrécissement de son crâne. 11 a pareillement des muscler crotaphltes plus robustes , à cause du prolongement plus considérable de ses mâchoires , que celles du blanc (d'après Sœminerlng, ueier korperliche die negers, etc. Melners, Magasin hisL GoUingische , Band. VI , part. 3 ). M. Volney met en question si le gonflement que la chaleur détermine dans les parties de la face , en y attirant le sang et les humeurs , n'a pas pu contribuer à produire cette moue des nègres et leurs grosses lèvres ; mais, quand celle explication seroit admise , il faudroit dire comment les os propres du nez sont si peu

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développés chez ces peuples , et pourquoi leur trou occipital est reculé.

Nos paysans , ajoute Stanhope Smith , n'ont-îls pas une figure ignoble et basse , en comparaison de nos citadins , élevés et nourris d'une manière plus libérale? On peut voi^r, en Irlande et en Ecosse, l'cnorme différence entre les nobles et les serfs des clans; cette distinction de figure n'existe-t-elle pas partout entre le plèbe et les chefs des nations ? Pourquoi donc les nègres , si abrutis , si mal nourris , et sans éduca- tion, neseroient-ilspas encoreplus déformés dans leur figure, surtout lorsque abandonnés à Tétat sauvage , ils se livrent à toutes sortes de grimaces et de contorsions ? Ceux , au contraire, qu'on élève pour le service intérieur des maisons dans les colonies , mieux nourris et disciplinés , prennent une figure plus distinguée. Mais si cette raison étoit fondée , elle aurolt également lieu pour les autres sauvages; ils n'ont cepen- dant pas la conformation du nègre , lors même que les uns et les autres habitent les mêmes contrées , comme les îles de la mer du Sud , et vivent de la même manière.

On sait que cette teinte brune foncée du nègre réside dans le tissu muqueux et rétlculaire de Malpighi, placé sous l'épi- derme.(^. le molPEAU.) Celte couleur n'est encore, dans le négrillon naissant, qu'une nuance jaunâtre qui brunit peu à peu au bout de quelques semaines, qui se fonce à mesure qae le nègre grandit , qui devient d'unbeau noir luisant dans' l'âge de la force, enfin qui se ternit et pâlit lorsqu'il devient fort vieux et que ses cheveux grisonnent. Dans ses mala- dies, le nègre se décolore, devient livide, de même que l'homme blanc pâlit lorsqu'il est incommode. Quoique toutes les races nègres ne soient pas également noires, les indi- vidus de chacune d'elles qui deviennent plus noirs que leurs compatriotes, sont aussi les plus robustes , les plus actifs et les plus mâles. Ceux qui sont brunâtres ou couleur de marron sont dégénérés. Les négresses ont aussi une couleur inoins foncée que les nègres. Les colons européens .savent fort bien reconnoître à la couleur si un nègre est sain et vigoureux , puisque la moindre maladie altère féclat et la pureté de son teint. Les cicatrices de sa peau ne reprennent jamais la cou- leur noire du reste du corps ; elles demeurent grises.

Lorsque les nègres sonlechaurfes., leur peau se couvre d'une sueur huileuse et noirâtre, qui tache le linge et qui exhale , pour l'ordinaire, une odeur de poireau fort désagréable. Les Cafres ne répandent pas cette odeur, comme les Joloffes, les Foules , etc. Ceux-ci puent quelquefois si fort , que les endroits ils ont passé restent imprégnés de cette odeur pendant plus d'un quarl d'heure ; les femmes rendent beau-

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coup moins «l'odeur y et les nègres les plus robustes sont \nênie ceux qui puent davantage ; car les enfans et les vieil- lards de la même race n'exhalent presque point celte odeur. Il y a des hommes blancs q,ui répandent aussi des exha- laisons assez fartes ; tels sont les roux lorsqu'ils suent. Les honmies les plus mâles ont une odeur ammoniacale , et tjui saisit surtout les femmes dont le genre nerveux est très- sensible , jusqu'à leur causer des affections hystériques. Cette odeur de bouquin se dissipe lorsque l'homme se livre beau- coup aux femmes, parce qu'elle dépend surtout de la ré- sorpiion de la semence dans l'économie animale. Aussi les animaux ont une chair fort désagréable au goût à l'époque de leur rut ; elle soulève même l'ealj^mac , comme on peut s'en assurer en mangeant de la vache, de la brebis , de la chèvre, au temps de la chaleur de ces animaux. La chairdu taureau, du bélier , du bouc, du verrat , etc. , est même fort mauvaise en tout temps; elle est empreinte d'une saveur sau- vage et insupportable. Les fenmies ont aussi leur odeur de femme , qui agit plus qu'on ne pense sur les hommes qui les approchent. Oa a rapporté qu'un religieux de Prague avoit l'odorat si subtil et si exercé , qu'il distinguoit à l'odorat une femme chaste de celle qui ne l'étoit pas. L'extrême propreté des hommes et des femmes , l'habitude de se baigner et de changer souvent de linge, diminuent ou même font disparoître ces odeurs génitales-,mais il faut avouer aussi que cessoins affol- Wisscnt l'activité des organes de la génération et efféminé nt beaucoup ; c'est pour cela que nos petits maîtres , nos hom- mes délicats, ne sont jamais aussi vigoureux en amour que Iji plupart des gens du bas peuple , qui prennent moins de soiu d'eux-mêmes. On doit aussi remarquer que la haire des cénobites , la robe dure des capucins , le froc des moines , les vêtemeiis rudes et assez malpropres de diverses corpo- rations religieuses, exposoient ceux qui les portoient à de fortes tentations, à cause de la qualité stimulante et de la sneur acre dont étoienl bientôt empreintes toutes ces sortes d'habiUemens. Ces religieux ayant d'ailleurs fait vœu de chasteté , répandoient une odeur d'homme d'autant plus excitante , qu'il leur étoit défendu expressément d'être houmies.

Au reste, la virilité et la négligence de la propreté ne sont pas les seules causes des odeurs qu'exhalent les hommes et les animaux. Le genre de nourriture y contribue beaucoup.; car les espèces qui vivent de chair répandent des exhalaisons plus fortes et plus désagréables que les frugivores. On ob— -■ierve surtout que les tempéramens chauds et bilieux trans- pirent des vapeurs très-virulentes; ceux qui sont attaqués de

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inol.idics bilieuses en offrent de si remarquaLles , qu'ils en remplissent les chambres ils restent. Comme leshabitans de plusieurs pays chauds se nourrissent d'alimenstrès-échauf- fans, par exemple l'ail, l'ognon, les poireaux et autres herbes très-odorantes, leur transpiration en prend Todeur; tel est le bas peuple du Languedoc, de la Gascogne et de la Pro- vence; tels sont en général les Juifs , les Bohémiens , etc.

Les peuples sauvages ont presque tous une odeur forfé , principalement dans les pays chauds. Les Caraïbes exhalent une odeur de chenil; les Hottentots , celle de V assii-fœtida mêlée de celle de chair morte ; les wSamoïèdes , les Oslia- ques qui vivent de paissons , de lard rance do baleines et de veaux marins , cxnllent la même odeur que leur nour- riture.

II paroîtquela même cause qui colore les Ethiopiens, leur communique aussi cette odeur forte qu'ils répandent. On doit surtout l'attribuer à râcrelc de leur bile ; car il est certain que les humeurs des hommes sont plus douces, plus aqueuses dans les pays du Nord que sons les cieux brAlansde Téquateur. Nous trouvons au Nord , comme en Suède , en Islande, en Danemarck, des hommes d'un tempérement flegmatique et'humide , d'un teint très-blanc ; dans les pays tempérés, tels que la France , l'Italie , les hommes y sont d'une complexion sanguine , d'un teint rouge , animé. Plus on s'approche des tropiques, plus les hommes deviennent d'une constitution bilieuse et d'un teint naturellement jaune. La même transition s'observe dans les saisons de l'année : ainsi l'hiver , qui correspond aux froides contrées du Nord, donne lieu à des fluxions humorales , à des catarrhes qui annoncent la surabondance de la pituite ; le printemps, qui ressemble aux pays tempérés , développe des héniorragies et des péripneumonies qui dépendent souvent d'une pléthore de sang ; l'été , semblable aux pays chauds , produit des fiè- vres ardentes , des hépatilis, etc. , qui viennent d'un excès d'humeur bilieuse. C'est par la même progression que les inaladies d'hiver attaquent principalement la tête, et donnent un teint mat ou fort blanc ; celles du printemps se portent snr la poitrine, et produisent un teint rouge, enflammé; celles de l'été descendent dans le bas-ventre , et donnent une couleur jaune , livide.

Les septentrionaux vivent sous l'empire du flegme comme les enfans, les Européens tempérés sous celui du sangconmie les jeunes gens, les méridionaux sous celui de la bite comme les adultes. Le caractère bilieux domine donc chez les peuples des pays chauds et secs; aussi sont-ils iujpélueiîx, irascibles, actifs, comme les Maures, les Abyssins, les Arabes, les

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Marocains, les Barbaresques ; c'est encore pour cela qu'ils sont féroces , implacables , adonnés à la vengeance.

Quoique les noirs soient une autre esjTèce d'hommes que nous , et que leur tempérament soit naturellemrnl flegmati- que , ils n'en éprouvent pas moins vivement l'influence du cliuiat. Aussi leur système biliaire et hépatique est extrême- ment développé. L'exaltation de l'humeur bilieuse est donc la pi«ncipale cause de leur mauvaise odeur , et se répand dans toute leur économie.

Chez tous les peuples de la zone torride , le sy stème bi- liaire à cause de cet état particulier d'exaltation, com- munique à toutes leurs passions , à toutes leurs cnaladles , une énergie extraordinaire*. Les regards ardens de l'Africain, sa figure sombre, son aspect ténébreux et farouche ., annon- cent la férocité de son âme ; et son sein est dévoré du feu des passions. L'atrocité des Marocains, des Maures, est connue ; ils portent des mains sanguinaires jusque dans cœur de leurs maîtresses , de leurs enfans et de tout ce qu'ils ont de plus cher sur la terre. Chez eux lavengence est îa plus douce des voluptés; ils aiuient le sang et la cruauté jusque dans les plaisirs de l'amour ; avec cela leur fierté, leur or- gueil, vont jusqu'à l'extravagance; ils déploient ausuprême de- gré le caractère bilieux; aussi leur peau est d'un jaune brûlé, leurs yeux sont teints de bile; leurs amours, leurs haines sont furieuses, etils se montrent jaloux jusqu'à l'emportement. Les femmes elles-mêmes sont dévorées des plus ardentes pas- sions ; l'amour excite chez elles des transports inconnus par- tout ailleurs , et elles poussent l'audace du plaisir jusqu'à la rage la plus effrénée.

Un pareil état d'exaspération ne pouvoit pas s'élever au- delà sans délruire l'économie vivante; aussi les nègres , pla- cés dans un climat encore plus ardent que les Maures et les Marocains , n'auroient pas pu subsister si la nature n'avoit amolli leur tempérament en le rendant flegmatique , indo- lent et apathique. Ce n'est pas toutefois que les nègres ne soient d'un naturel fort ardent et extrêmement passionné ; mais il est mitigé par la mollesse de leur constitution. Ils ont l'àme ardente d'un Maure dans le corps insensible d'un paysan russe; delà viennent les étonnantes contradictions du caractère de l'Ethiopien, tant de paresse de corps et d'ardeur dans les passions , tant d'insensibilité et d'impétuosité, d'in- souciance et de désespoir; il touche ainsi aux deux extrêmes parce qu'il est pétri d'élémens discordàns.

Le temj^rament flegmatique l'emporte dans le nègre sur le tempérament bilieux ; le premier est placé à l'extérieur du corps, pour soustraire luatérieur à ces secousses trop vives,

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qui le délrulroieiit en le portant continuellement aux excès. C'est encore un bienfait de la nature , surtout dans ces cli- mats brûlans toutes les affections sont extrêmes.

C^est sans doute encore pour la même cause que la nature a empreint tous les organes du nègre^ soit intérieurs soit ex- térieurs , d'une humeur noire et huileuse, qui semble garan- tir toutes les parties et ralentir leur activité. On remarque en effet qae le foyer de cette sécrétion noire n'existe pas seulement dans la peaudel'Klhiopicn, mais plutôt vers le foie, et de elle se répand par toute l'économie du corps; c'est pour cela que la chair du nègre est , comme nous l'avons dit, d'un rouge noir , qui est encore plus remarquable dans son sang. Ses membranes, ses tendons , ses aponévroses, dont le tissu est blanc et brillant dans l'Européen , sont ici d'une nuance livide; c'est ce que n'ont pas suf.isamment dé; montré , avant Soemmering , les auteurs qui ont écrit sur l'anatomie des nègres, tels que MicPechlin, Je C«/e ^ihiop, Àlbinus, et Dissert, de sede et causa coloris Mthiopum^ etc. Les os du nègre paroissent aussi plus blancs que ceux de l'Européen , parce qu'ils sont plus chargés de phosphate calcaire , plus compactes, et parce qar- L'ur portion gélatineuse est d'une couleur grise qui rehausse la blancheur de Ja iorre calcaire : mais dans les Européens, au contraire , les os , moins char- gés de phosphate de chaux , contiennent plus de gélatine qui jaunit à l'air.

Toutes les humeurs du nègre ont des couleurs plus foncées que les nôtres ; il s'y trouve de cette teinture noirâtre qui empreint tout leur corps , et qui se remarque même jus- que dans leur liqueur séminale. Tous les alimens dool ils se nourrissent sont métamorphosés en chyle brunâtre , tan- dis que l'homme blanc a un chyle blanchâtre; ainsi le nègre crée lui-même le noir qui le colore ; il ne lui vient pas du dehors, puisque son cerveau, ses nerfs en sont même em- preints dans leur intérieur, comme l'anatomie le démontre. On a donc eu tort de prétendre que cette couleur lui ve- nolt de l'influence de la lumière et de la chaleur ; car, bien que celles-ci puissent brunir une peau blanche , comment pourront-elles noircir aussi le dedans du corps , les muscles, le sang, le chyle , le cerveau , les nerfs, enfin toutes les hu- meurs et tous les organes? Il faut donc que cette qualité soit innée et radicale.

Ne voyons-nous pas parmi nous des hommes de race blan- che , être cependant plus bruns que d'autres, et avoir des cheveux et des yeux très-noirs? Lorsqu'on dissèque ces in- dividus , toutes leurs parties intérieures sont d'une nuance plus foncée que celle des hommes pourvus d'un tempérament

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plus blanc , comme les blonds, les roux , etc. On observe que les filles brunes ont la membrane de l'hymen d'une cou- leur plus foncée que les blondes , chez lesquelles celte mem- brane a une couleur de chair. Certainement ce n'est pas Tin- fluence de la lumière qni établit ces différences, mais bien plutôt la nature propre de chaque corps.

Il en est de même dans les autres races humaines; car les Mongols , les Kalmouks , placés dans des contrées encore plus froides que les nôtres , sont cependant bien plus bruns que nous , et leur tempérament est plus bilieux ; de même qu'un homme flegmatique est plus blanc que le mélancoli- que , soit à l'extérieur, soit à l'intérieur, quoique dans le même pays, et quoique exposés également à la chaleur, à la lumière , et vivant des mêmes nourritures: le nègre est donc ra- dicalement différent de l'Européen.

Ce n'est pas qu'il ne se trouve aussi parmi les nègres des tempéramens différons entre eux, comme parmi la race blan- che; caries nègres les plus Cegmatiquessont aussi moinsnoirs que les bilieux ; de sorte que l'espèce noire se comporte comme l'espèce blanche dans toutes ses constitutions orga- niques.

Il y a beaucoup de considérations qui démontrent que cette espèce est fort différente de la nôtre , indépendam- ment de cette couleur noire de la peau et des parties inté- rieure^ de son corps , car sa configuration n'est pas la même que celle de l'espèce blanche. Supposons même que , par une dégénération particulière qui se remarque quelquefois , un nègre soit blanc , ou de cette couleur de lait ordinaire aux Dondos, aux Kakerlaksj aux Albinos, enfin à tous les blafards ; certainement la conformation du visage du nègre, son museau prolongé , ses grosses lèvres, son nez épaté, ses cheveux laineux , le reculement du trou occipital de sa lête, son allure déhanchée , et, plus que tout cela , son ca- ractère prononcé d'animalité , ses penchans lo.U physiques, la supériorité de ses sens brutaux sur son sens intellectuel, tout cela, dis-je, contribuera à caractériser son espèce. De plus , il faut observer que plusieurs maladies dans le nègre ne sont nullement semblables à celles du blanc , ce qui nous indique certainement une différence radicale. Tout de même que les maladies contagieuses d'une espèce d'animal ne se communiquent pas à une autre espèce , quoique voisine , parce que leur complexion est fort différente , de même le pian des nègres, sorte de maladie contagieuse entre eux, n'at- taque point les blancs qui les fréquentent. On voit souvent des négresses attaquées de ce mal, alaiter des enfans de blancs sans le leur comimuniqucr ; cependant le pian se

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contracte de ncgre à nègre par la seule transpiration ou l'at- touchement, comme la petite vérole parmi nous (i). Une autre maladie propre aux seuls noirs , surtout aux îles d'A- mérique , est le mal d'estomac. H jaunit la peau du nègre; on dit alors qu'il a le visage patate ; sa langue paraît blanche, chargée ; il devient d'une langueur, dune apathie insurmon- tables, et tombe dans une espèce de torpeur ou de sommeil qui l'affaisse entièrement. Il prend en dégoût tous les alimens sains et doux , et recherche avec une sorte de fureur toutes les nourritures acres , échauffantes , salées , acides , même une espèce de terre argileuse ; enfin les jambes enflent , le ventre se gonfle , la poitrine s'emplit , et presque tous meurent au bout de quelques mois. C'est une espèce d'ady- namie viscérale ou cachexie, et de prostration nerveuse des forces vitales, ( Voyez (ieorg. Albert Stubner , de Nlgrilarum Adfectlonibus y Wittemb. , 169c,, in 4-", et dans les Mis- cellanea physico-medica ex acad. Germ. , an 174-8 , in -4-°, tom. I , n.° 2 ). Les autres maladies communes chez les nè~ grès , sont les abcès, les furoncles , les fluxions , les engor- gemens des glandes, l'érysipèle , la fausse péripneumonie, les vers, l'œdème, les fièvres inflammatoires, comme les gastriques bilieuses, l'hépatile, la dyssenterie et les obstruc- tions viscérales. Cependant ils n'éprouvent pas , ou du moins très - rarement , le typhus iclérodes , cette funeste fièvre jaune qui dévore tant de blancs dans les colonies ; mais leurs autres maladies sont plus fortes et plus compli- quées que les noires , selon Dazille , Obs. sur les malad. des nègres., Paris, 1776, in-S," ; et Pouppé Desportes , Hist. des malad. de Saint-Domingue , Paris, 1770 , 2 vol. in-12. Galien avoit aussi remarqué que le pouls des nègres est presque tou- jours accéléré ; que leur peau est fort échauffée naturelle- ment: que leurs lièvres s'allument avec plus de violence que celles des hommes blancs. Leurs moindres blessures donnent souvent lieu aux accidens spasmodiques les plus graves, tels que le tétanos. En général, comme l'a fait voir Meiners , d'après une foule de témoignages, les nègres montrent une extrême disposition aux désordres convulsifs ; la moindre provocation suscite chez eux une rage épileplique , ou une lureur de désespoir si Inconcevable , qu'ils se tuent pour de foibles motifs de contrariété. Dans la plupart de leurs mala-

(i) Le pian est une soile de maladie éruptive ou culanee , fjui a quelque resseiublance avec la maladie ve'ne'rienne , pai- les gales purulentes dont il couvre la peau; cependant les nègres ne l'e'prouvent i^iière qu'une lois i-u Uur vie, de même que la petite vérole; c'est îdénie u\\(t espèce de ^(?W/w<f qu'ils jettent, surtout dans leur première jeunesse.

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«lies, lés poumons sont sujets à des congestions parliculières. ( Dazille, p. ii5 et i32.) Leurs dyssenteries se transforment eu fièvres adynamlques , bien qu'ils soient moins sujets aux maladies inflammatoires que les blancs, qu'ils aient des crise» plus difiîciles, etc.

Voilà donc des caractères physiques, des maladies et des penchans moraux bien différens de ceux des hommes blancs ; et à considérer tous ces faits, il me semble naturel de croi«:a que le nègre forme une espèce bien distincte de la nôtre ; mais aucune induction tirée de la seule histoire naturelle ne peut nous apprendre qu'il dérive originairement de l'espèce blanche. A cet égard, nous ne pouvons nous en rapporter qu'aux traditions primitives de Thistoire du genre humain , ou bien à de simples conjectures qui n'équivaudront jamais à une entière certitude.

La dégénération des albinos on nègres fjlancs, dont nous avons déjà parlé ( art. de l'HoMME et Dégénération ), n'est point particulière à l'espèce noire ; et l'on trouve également des blafards dans toutes les autres races humaines, aussi bien que chez une foule de quadrupèdes et d'oiseaux. Les nègres-pies ou tachés de blanc sur diverses parties de leur corps, res- semblent à ces panachures des feuilles et des pétales de cer- tains végétaux cultivés. Cette blancheur contre nature est tou- jours maladive et innée, quoiqu'elle ne se propage point or- dinairement , parce que les individus blafards sont d'une cons- titution foibie , efféminée , qui se reproduit rarement. Dans l'examen anatomique qu'on a fait de ces albinos , on a remar- qué que le. réseau muqueux et sous-cutané de Malpighi , siège de la coloration de la peau, n'existolt nullement, de sorte que le derme et l'épiderme n'avoient que cette blan- cheur terne et mate qui leur est propre. Ces individus sont, par la même raison , privés de cette teinture noire qui peint la membrane choroïde de l'œil, et quicommunique sa nuance à l'iris ; aussi les albinos ou blafards , ont des yeux rouges commeJ^s lapins blancs, les pigeons blancs, qui sont dans le même cas. Cette rougeur dépond du lacis des vaisseaux san- guins , qui , se ramifiant sur la choroïde , paroît à nu ; mais comme le défaut de cette peinture noire laisse pénétrer trop de lumière dans les yeux pendant le jour, il arrive que tous les blafards^ les dortdos^ les albinos, etc., ne peuvent point sou- tenir le grand éclat du jour , et voient beaucoup mieux pen- dant le crépiiscule et même la nuit, lorsqu'elle n'est pas trop obscure; ils sont ainsi tous nyctalopes, ou clairvoyans de nuit : de est venue la fable des hommes nocturnes ou kakerlaks, Linnaeus , qui n'avoit pas reçu de son temps des renseigne- meas assez exacts , les avoit regardés comme formant une

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espèce particulière d'hommes ; il assuroit qu'ils avoîent un sifflement au lieu de voix articulée ; qu'ils ne sortoient que de nuit , cherchant leur nourriture , pillant à la manière des voleurs , se retirant de jour dans des cavernes ténébreuses ; n'ayant qu'une étendue de conception très-bornée , etc. 11 les croyoit des animaux intermédiaires entre le singe et l'homme, à peu près tels que ces faunes, ces satyres et ces lutins fantastiques que l'imagination vive des anciens se plai- soit à créer, et dont elle faisoit des divinités champêtres. Voy. Oraisg et Nocturnes.

Nous remarquons que les hommes dont l'iris est bleuâtre et cendré , tiennent un peu de la nature des blafards par la grande blancheur de leur peau; et, comme eux, la lumière trop vive les offusque , mais dans un moindre degré. 11 n'en est pas de même des hommes à iris noir et à peau brune. Au reste, lorsque les hommes vieillissent, leur iris se décolore , et leurs yeux ne supportent plus aussi bien l'éclat des rayons du soleil. Les nègres sont destinés par la nature à soutenir le grand éclat du soleil; aussi leur iris est toujours imprégné d'une couleur brune foncée , et même leur conjonctive est plus brunâtre que celle des Européens. Us ont le champ de la vue moins large en étendue que celui du blanc , et leurs yeux se rapprochent beaucoup de la conformation de ceux des singes. En effet, la membrane clignotante, on. plica lunarîs du grand angle de l'œil, est déjà avancée comme celle de l'o- rang-outang (Samuel Thom. Sœmmering, Iconesoculihumani y Francof. ad Mo^n. iBo4. fol. p. 5 ).

Une autre particularité naturelle aux blafards^ c'est que leurs cheveux sont extrêmement fins, soyeux , blancs et comme argentés. Leur peau est aussi d'une mollesse et d'une douceur singulières au toucher ; elle est d'ailleurs recouverte d'une espèce de duvet très-léger et .très-délicat. Ces carac- tères se remarquent en partie chez les individus très-blonds , à peau pâle et blanche , comme nous en voyons plusieurs dans nos contrées ; mais ils paroissent surtout plu^équens clans les pays froids du Nord , ou parmi les habilans aes hau- tes montagnes. Ce sont au reste des individus très-foibles , petits , maigres et sédentaires , que le moindre mouvement fatigue et fait suer ; ils sont aussi très-timides , sujets à des affections spasmodiques, presque incapablesde penser, de ré- fléchir, et n'ont que folblenient les qualités nécessaires pour se reproduire ; aussi la plupart sont-ils incapables d'engendrer.

On observe, au contraire, que les individus les plus co- lorés , les hommes bruns à cheveux noirs , ont le tempé- rament plus chaud, plus amoureux que ces corps blancs et mous, dont le caractère iui^pulssant , fade, efféminé, tient

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de la nature des blafards. Les nègres sont , pour la plupart , très-ardens en amour , et les négresses portent la volupté jus- qu'à des lascivetés ignorées dans nos climats. Leurs organes sexuels sont aussi plus développés que ceux des blancs. Cette lu- bricité des négresses les fait rechercher de la plupart des blancs, aux Indes ; la répugnance que ceux-ci éprouvent d'abord à l'approche d'une négresse, se détruit bientôt par l'habitude, et celle-ci est toujours Hattée de conquérir 1 amour de ses maî- tres , quoiqu'elle soit, au reste , fidèle et chaste dans le ma- riage. « Ceux qui ont cherché, dit Kaynal, les causes de ce « goût pour les négresses , qui paroîl si dépravé dans les Eu- « ropéens, en ont trouvé la source dans la nature du climat , « qui, sous la zone torride , entraîne invinciblement à l'a— «c mour; dans la facilité de satisfaire sans contrainte et sans « assiduité ce penchant insurmontable ; dans un certain at- « trait piquant de beauté qu'on trouve bientôt dans les ué- « gresse* , lorsque l'habitude a familiarisé les yeux avec leur « couleur, surtout dans une ardeur de tempérament qui leur « donne le pouvoir d'inspirer et de sentir les plus brûlans « transports. Aussi se vengent-elles, pour ainsi dire, de la « dépendance humiliante de leur condition , par les passions « désordonnées qu'elles excitent dans leurs maîtres ; et nos « courtisanes en Europe n'ont pas mieux que les esclaves « négresses , l'art de consumer et de renverser de grandes u fortunes. Mais les Africaines l'emportent sur les Euro- if péennes en véritable passion pour les hommes qui les achè- « lent , etc. » Hist. philos. 1. xi , c. ag.

Les adresses sont très-fécondes ; cet effet doit peut-être s'attribuera leur tempérament flegmatique, bien que l'in- fluence nerveuse y soit aussi fort considérable ; mais comme leur constitution tient beaucoup d'humidité, elle tempère ce y^ue leur sensibilité sexuelle a de trop violent, ( Consultez la fin de l'article Nature à ce sujet. ) Toutefois l'impétuosité de leur genre nerveux causant de vives secousses à l'organe uté- rin , surtout lorsqu'elles éprouvent quelque chagrin , quel- que passion immodérée , elles avortent assez fréquemment. D'ailleurs la chaleur de leur climat qui précipite le cours du sang, les travaux pénibles qu'elles supportent , font souvent décoller le fœtus; et c'est faute d'avoir considéré ces causes, qu'on les a souvent accusées de se faire avorter elles-mêmes. Je sais que le malheur d'être surchargée d'une nombreuse fa- mille qu'on ne peut nourrir, la haine pour des maîtres cruels, la jalousie des nègres et la crainte de dégrader sa beauté na- turelle , portent plusieurs négresses à se faire avorter. Elles connoissent pour cet effet une foule de moyens , et usent surtout déplantes fortement emménagogues. Mademoiselle

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Mérian prétenrl qu'elles se servent à cet effet de la belle fleur

de pomcil/ude^i'), dans la colonie de Surinam.

SI les négresses cherchent à conserver par des moyens aussi criminels la beauté qui les rend chères à leurs maîtres, elles savent quelquefois aussi se venger d'eux cruellement, lorsqu'ils lesméprisentoulesabandonnent. Comme l'Africain est extrê- mement jaloux, son maître doit se défier de celui dont il a corrompu la femme ; car tous savent l'art d'empoisonner avec la plus grande adresse , et les plus cruels tourmens ne leur arrachent point l'aveu de leur crime. Ils connoissenl les pro- priétés d'une foule de plantes vénéneuses, et pour n'être pas soupçonnés, ils font souvent l'essai de ces poisons sur leurs femmes et leurs enfans , tant est violent le désir de se venger de leur maître. On les livre aux flammes pour ce crime.

Bien que la lubricité, qui est extrême dans la plupart des négresses, soitcontraire, en général, à la multiplication de l'es- pèce, cependant leur fécondité est favorisée sans «loute par leur genre de vie simple et presque animal; car on observe que plus les houames et les femmes se civilisent, perfectionnent leur esprit et développent leurs facultés intellectuelles ou sensitives, moins ils sont propres à la propagation, parce que toutes les forces de la vie sont détournées vers le cerveau etlessensj auxdépensdespartiessexuelles. Lesnegres peuplent donc beaucoup lorsqu'ils ne sont pas chagrinés et tourmentés par l'esclavage; et ceci est très-visible, si l'on considère que l'Afrique cédant chaque année une multitude de ses habi- tans qui vont périr dans les Deux-Indes , elle n'en paroît pas moins peuplée , quoique la traite y soit établie depuis près de quatre siècles.D'ailleurs beaucoup de peuplades denègressoiit polygames, et les chefs peuvent prendre autant de femmes qu'ils en désirent. La plupart des noirs , en Afrique, peu- vent à volonté répudier leurs femmes et prendre des concu- bines selon leur gré. C'est à la vérité un crime à la femme de commettre un adultère, et si elle est surprise en flagrant dé- lit, elle peut être punie de mort; mais, hors de ce cas, il paroît que tout s'accommode à l'amiable ; la plupart des femmes sont même fidèles à leurs époux et peu jalouses iCntre ell-es.

Les négresses menant une vie laborieuse et travaillant comme les hommes, accouchent très-facilement. H est vrai que les os de leur bassin sont naturellement plus écartés que chez les Européennes , et qu'ils tirent sur la conformation de ceux de labrule; de làvicntla grandelargeur de leurs parties sexuelles. Deux principales causes contribuent à faciliter l'accouche-

(i) Poinciana pulche rima, Linu.

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ment des négresses; L^l'élargissement de leurs hanches etl'ou - verliire de leur bassin; 2.° la moindre grosseur de la tête du négrillon que celle de Tenfant. blanc. Parmi les Européen- nes, l'accouchement est devenu difficile et dangereux par des causes contraires. On ne sait peut-être pas combien noire éducation , notre perfection sociale et l'exaltation du système nerveux et cérébral de la femme , s'opposent au libre travail de la nature dans les organes sexuels , et à l'entier dévelop- pement de son bassin ; car nos paysannes , simples, igno-^ rantes et grossières , enfantent avec la plus grande facilité ; tandis que les dangers de l'accouchement se multiplient dans les villes à mesure que les femmes s'y livrent davantage à des occupations qui exaltent leur sensil)ilité et développent leurs facultés pensantes aux dépens des fonctions que la na- ture leur avoit attribuées. En second lieu, les enfans blancs ont naturellement la tête plus grosse que les jeunes nègres; aussi l'Auteur de la nature a laissé ouverte la partie qu'on nomme la. fontanelle, afin- que le cerveau pût se rétrécir en sortant de la cavité du bassin ; mais dans le négrillon, la fon- tanelle est bien plus petite et plust6t fermée ; enfin Jdans les quadrupèdes elle ne se trouve pas. C'est un fait incontesta- ble que la vie purement animale est plus favorable à la mul- tiplication des hommes , et plus capable de faciliter l'accou- chement que la vie policée ; aussi les naissances sont propor- tionnellement moins nombreuses dans les grandes villes que dans les villages. , ,

On sait que les négresses ont toutes de longues et grosses mamelles ; c'est pourquoi elles peuvent allaiter assez long- temps leurs enfans ; ceux-ci se cramponnent sur leur mère de telle manière , qu'elle peut travailler sans avoir le soin de les tenir. Cette habitude est commune à tous les singes; ils savent de même s'attacher sur le dos et aux hanches de leur mère, et ne l'empêchent point de grimper sur les arbres. Les né- gresses rejettent quelquefois leurs mamelles par-dessus leurs épaules , pour les offrir à leur nourrisson placé sur leur dos.

En Ethiopie , plusieurs nègres font subir la castration à leurs enfans dans le jeune âge , et les vendent aux Turcs , aux Marocains, aux Persans, pour servir d'eunuques et garderies sérails ; on estime surtout les plus laids dans c&s pays , afin que les femmes ne soient pas tentées de les séduire. D'ailleurs ces eunuques noirs sont extrêmement attachés à leur maître , et deviennent de vigilans et sévères argus pour leurs femmes , sur lesquelles ils ont beaucoup de pouvoir, jusqu'à les frapper et même les fouetter. Les eunuques qui n'ont été privés que des testicules , éprouvent encore quelquefois des irritations amoureuses et entrent en érection; aussi les Turcs ne veu-

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lent que des eunuques entièrement privés de tout organe ex- térieur de génération. F. ÏIunuque.

Les nègres vivant presque toujours nus, exposés sans cesse à l'ardeur brûlante du soleil, aux intempéries de Tatmo- sphère, ont aussi la peau plus épaisse et plus huileuse que la nôtre; c'est pourquoi les maladies éruptives ou cutanées leur sont fatales, parce qu'elles ne se développent qu'avec peine. La petite vérole , par exemple, enlève chaque année une mul- titude de nègres , soit en Afrique ,.soit dans les colonies eu- ropéennes , et fait des ravages extraordinaires chez tous les peuples sauvages, ou les habitans du Nord dont la peau est compacte, parce que la maladie ne pouvant pas prendre sod^ cours au dehors , se refoule dans les organes intérieurs les plus importans. Il est remarquable que la petite vérole , chea les nègres placés au nord de la ligne , en Afrique, ne se dé- clarepas, comme on l'assure, avantl'âge de puberté ou environ quatorze ans ; il faut probablement que le corps soit dans un certain état d'irritabilité pour faire développer le germe de celte maladie comme celui de plusieurs autres. De même que les yeux du hibou sont assez sensibles à quelques rayons de lumière pour voir clair pendant la nuit , tandis que nous ne pouvons voir clair que pendant le jour; ainsi les Européens sont assez sensibles au virus de la petite vérole pour le déve- lopper chez eux dès l'enfance, au lieu que ces nègres ne peuvent le faire sortir qu'à l'âge de puberté. Les nègres qui naissent en Afrique au sud de la ligne équatoriale, n'éprouvent, dit- on, jamais de petite vérole; mais ils sont sujets à une sorte d'ulcère virulent et très-malin, de nature scorbutique , dont le caractère devient encore plus funeste sur mer , et qui ne se guérit jamais complètement. SI cet effet estgénéral parmi ces sortes de nègres, il annonce que leur tempérament est atra- bilaire ou mélancolique ; car il est de l'essence de ce tempé- rament de se refuser , en général, aux maladies inflanmia- toires et éruptives , mais d'être sujet aux affections chroni- ques, telles que les ulcères , le scorbut, etc.

De même que tous les peuples qui vont nus , les nègres onC la bizarre coutume de se ciseler la peau, d'y faire des en- tailles , des gravures , et d'y empreindre diverses lignes co- lorées par le tatouage. On appelle ainsi l'art de pointillef' la peau et d'y graver différentes figures. 11 est vrai que la chaleur et l'extrême sécheresse font quelquefois gercer leur peau dans les endroits les plus épais , et la couvrent de petites fentes eu tout sens , comme l'écorce raboteuse des arbres; aussi, pour prévenir cet inconvénient ,' les nègres ont soin de se frotteP d'huile ou de graisse pour ramollir leur épiderme. Les animaux à peau presque nuei qui habitent les contrées ârdenttis des

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tropiques, tels que les éléphans ^ les rhinocéws, les hippopota- mes , ont coutume de se baigner et de se vautrer souvent dans la boue pour entretenir cette souplesse de 1 organe cutané ; et Ton est obligé d'oindre avec de Ihuile, de temps à autre , la peau des éléphans domestiques.

11 paroît que l'usage de ces gravures ou de ces stigmates sur la peau , usage si général parmi toutes les nations sauvages de la terre , est un moyen de distinguer les qualités des hommes entre eux. Parmi nous, les tatouages des rangs, des for- tunes, se marquent par des vêtemcns, des décorations exté- rieures , des ornemens de diverses natures , ou de couleurs particulières ; les sauvages qui n'ont point d'habillemens, et que la chaleur du climat oblige à rester nus , ont besoin pour se reconnoître de porter des distinctions sur leur peau. Les chefs, les guerriers n'ont, pour se faire remarquer parmi leurs compatriotes, que ces ciselures sur la peau; elles sont le témoignage , soit de leur sagesse dans les conseils, soit de leur valeur dans les combats ; elles annoncent le rang qu'ils tiennent dans leur petite société; ce sont leurs livrées , leurs uniformes , leurs titres de noblesse. Nos caractères distinclifs ne sont point inhérens à la personne ; le roi, le berger , le prince , le laboureur, dans l'état de nudité, sont les mêmes hommes ; les seuls habits établissent nos différences sociales. Habillez le berger comme un roi , avec tout le faste qui l'en ; vironne , et un roi comme nos simples laboureurs ; le vul- gaire, c'est-à-dire le plus grand nombre , adressera ses hom- mages au gardien de troupeaux, et négligera la majesté de- venue rustique. Comme les hommes regardent plus à l'habit qu'à la personne , chacun s'efforce de briller à rcxtérieur , se souciant fort peu du reste , auquel on ne prend pas garde ; aussi la plupart des hommes n'ont de mérite que par leur ha- billement ; ils ne valent précisément que l'argent qu'ils por- tent , et lorsqu'on les en dépouille , ils ne sont plus rien. De vient encore que ceux qui n'ont aucun mérite par eux- mêmes , sont précisément ceux qui recherchent le plus avi- dement les ornemens extérieurs, et les mauvais peintres met- tent à leurs tableaux de superbes bordures. Henri iv, ce grand roi, vêtu d'un petit habit de laine grise, disoit qu'î7 étoit tout gris au-dehors , mais tout d'or au-dedans^ et un père de l'Eglise se plaignoit que quand les calices étoient d'or, les prêtres étoient de bois ; tandis que dans les anciens temps , les calices étoient de bois et les prêtres d'or.

Moins les hommes ont de décorations extérieures , plus ils ont besoin , pour se distinguer , de ces qualités intérieures qu'on n'acquiert que par les talens , le courage ou les vertus. Combien de pauvres ne payent point de figure et d'ostenta-

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lion , mais d'effet ; s'ils savent mal parler , ils agissent bien » et s'ils ne sont pas beaux , ils cherchent à être bons ; les grands hommes sont simples ; les hommes de peu d'esprit tiennent le plus aux choses extérieures. Dans les empires despotiques de l'Asie, c'est usurper la puissance du souverain que de se vêtir comme lui; c'est ainsi qu'on a vu des hommes devenir princes tout à coup , et renverser du trône le souverain qui le possédoit. L'empire étoitdans l'habit et non dans la personne- Ceci n'est nullement une exagération , puisqu'on lit dans toutes les histoires du Bas-Empire romain, que quiconque prenoit la pourpre étoit aussitôt salué empereur ; c'est pour- quoi ceux-ci défendirent, sous des peines très-sévères , de teindre des vêtemens en couleur pourpre autre part que dans leurs seuls palais et sous leurs yeux, tant ils craignoient que le moindre teinturier ne vînt à créer de nouveaux empereurs. Lorsque les croisés s'emparèrent de Constanlinople , et eu- rent mis en fuite l'empereur grec , Alexis iv , un de ses valets surnommé Murtzuphle , ayant chaussé les brodequins et mis le manteau impérial, fut aussitôt salué empereur. Lorsqu'il n'est plus besoin de mérite pour se tirer du néant , il suffit de l'habit. Beaucoup d'hommes n'ont pas fait autrement en plu- sieurs pays -, car enfin , si nous jugions chacun d'après ses seules qualités intrinsèques , combien d'hommes puissans se- roient inférieurs au plus misérable paysan.''

Le nègre , comme nous l'avons dit ci - devant , est plein de vanité pour l'ordinaire , et très-porté à se targuer de ces attri- buts superficiels qui annoncent l'impuissance et la nullité du caractère. ( V. l'article Bracelet.) Si la femme aspire na- turellement au même but , si elle est plus disposée que rhomme à se parer , à s'embellir ; c'est qu'elle est destinée à plaire et à séduire les cœurs. La nature ou son suprême Auteur a voulu lui donner cet art de coquetterie , ce désir inné de captiver par les plus doux senlimens tous ceux qui l'entourent; il a moins fait pour la force du corps et de l'es- prit de la femme , que pour ses grâces et pour ses charmes mystérieux. S'il a diminué ses qualités intellectuelles, c'etoit pour rendre son cœur plus aimant et son âme plus tendre ; ce quil lui ôta en force , il le mit en agrément et en lou- chantes frivolités. VoY. Femme.

Mais la nature , en rabaissant le nègre au-dessous du blanc, le dédommagea dune autre manière. Sans doute nous jouis- sons plus par l'esprit , mais le nègre jouit plus par les sens ; nous trouvons nos plus douces voluptés en nous élevant par la pensée à la connoissance des choses, et en nous livrant aux cliarmes de la vie sociale : les nègres trouvent leurs plus vifs plaisirs en se rabaissant entièrement vers les objets m;>té- ricls. Si nous recherchons la gloire , les grandeurs , la for-

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tune , les noirs préfèrent l'indolence , la vie obscure ; il» croient les richesses trop chèrement achetées au prix de leur paresse naturelle, l^e travailleurest encore plus insupportable que la misère, et ils ne se mettent à l'ouvrage qu'à la der- nière extrémité. 11 faut à un Européen des biens , de la con- sidération , mille objets de luxe et de commodité particulière; il cherche toute sa vie à jouir , et jamais il n'est satisfait : le nègre , au contraire, reste comme il se trouve , aime mieux se passer d'un avantage que de le poursuivre , et au lieu de chercher ce qu'il n'a pas, il jouit de ce quil possède. Nous avons besoin de mouvement , le nègre de repos ; nos plaisirs sont pour lui des peines , et l'apathie, qui est un malheur pour nous , fait toutes ses délices. Si l'Européen étudie les cieux , mesure le cours des astres, parcourt la terre , rapporte l'or , le diamant et les épiceries de l'Inde , le sucre d'Amérique , le flegmatique Hottentot se couche à terre , fume sa pipe , mange et s'endort ; notre agitation lui paroît une folie et un état de misère excessive ; il nous croit poursuivis en tous lieux par le démon de la nécessité. Ce qui fait le plus de bruit et d'éclat en Europe , est le plus estimé des hommes ; au con- traire , ce qu'on prise le plus sur les plages africaines est la tranquillité, l'insouciance dans toutes les choses de la vie. Si cette différence tient à la diversité de l'organisation de la race blanche et de la race nègre, elle dépend aussi de la nature des climats, puisque nous voyons que la chaleur, abattant excessivement toutes les forces du corps et de l'esprit, nous fait aspirer au repos ; tandis que le froid , augmentent la vi- gueur des fibres et exaltant l'audace, porte les hommes à un éternel mouvement : c'est ainsi que l'emprisonnement , qui est une grande peine pour un Européen , n'est pour le nègre qu'un asile de paix , il goûte en toute liberté le plaisir de ne rien faire.

On voit donc très-clairement que Tintelligence du nègre a moins d'activité que la nôtre ; à cause de la diminution de ses fonctions cérébrales. D'ailleurs, le nègre s' aJjandonne bruta- lement aux excès les plus crapuleux; son âme est, pour ainsi dire , plus enfoncée dans la matière , plus encroûtée dans l'animalité , plus entraînée par des appétits tout physi- ques , comme nous l'avons montré. SI l'homme consiste principalement dans les facultés spirituelles , il est incontes- table que le nègre sera moins homme à cet égard ; il se rap- prochera davantage de la vie des bêtes brutes , puisque nous le voyons obéir plutôt à son ventre , à ses parties sexuelles , enfin à tous ses sens , qu'à la raison. Cette dégradation est encore plus visible dans le Hottentot ; car il n'est sur terre aucun bemme aussi stupide, aussi brut, aossi apathique que

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lui. Si nous le comparons aux plus parfaits des singes, certai- nement la distance entre eux sera bien peu considérable, et il est même très-reconnoissable que son organisation s'en rap- proche ; témoin le museau du Hottentot , le rétrécisse- ment de son cerveau , le reculement du trou occipital , la courbure de son épine dorsale , la position déjà oblique de son bassin , les genoux à demi - fléchis , récartement des doigts du pied , et la position oblique de la plante (i) , comme chez les singes. Déjà le Hottentot ne parle qu'avec difficulté , et il glousse presque comme les coqs- d Inde, ce qui otfre un rapport manifeste avec V orang-outang ^ qui jette des gloussemens sourds , à cause des sacs membraneux de son larynx sa voix s'engouffre. Les nègres savent bien re- connoître cette espèce de parenté, si l'on peut ainsi parler, qui se trouve entre eux et les singes , puisqu'ils les prennent pour autant d'hommes sauvages et paresseux , au rapport de tous les voyageurs. Quand on considère, en effet, les extrê- mes ressemblances des singes avec les Hotientois et les nègres , ressemblances telles que Galien donna Tanatomie du pi/fiè- aue pour celle de l'homme ; quand on remarque combien Vorang- oufang donne de signes d'intelligence, combien ses mœurs, ses actions , ses habitudes, sont semblables à celles des nègres , combien il est susceptible d'éducation , il me semble qu'on ne peut pas disconvenir que le plus imparfait des noirs ne soit très - voisin du premier des singes. Je suis très-loin de prétendre , au reste , qu'ils soient de même genre, quoique les femelles à' orang-outang éprouvent des évacuations menstruelles , portent sept à neuf mois leur petit dans leur sein, comme dans notre espèce , et qu'elles aiment autant les hommes que les singes sont amoureux des femmes. Il y a sans doute beaucoup de distance entre le singe et le Hottentot, Celle qui existe entre le Hottentot et le Cafre , entre celui-ci et le Malais , le Malais et TEuropéen, est bien moindre; mais la transition est incontestable. Tous les natu- ralistes l'ont reconnue et admise , puisqu'ils ont classé le singe immédiatement après l'espèce Immaine , et le sage Lin- nœus lui-même en a montré l'exemple.

L'espèce humaine est-elle sortie de la race des singes , ou l'homme s'cst-il dégradé peu à peu pour redescendre dans la classe des brutes? Ce seroit , il nous semble, une grande

(i) Les Holtentots eux-mêmes reconnoissenl queleur pied est différent de celui des hommes blancs ; car, au rapport de Barrow , ils devinent au vesllf;e d'un pied d'iiomme sur le sable , si c'est celui d'un Européen ou d'un Hottentot. 11 faut donc que celle différence »oit bien sensible.

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lémérîté de borner la puissance divine, en assurant qu'elle n'* pu faire un homme d'un singe , ou un singe d'un homme. Dieu a voulu que le singe nous ressemblât par le corps ; mais il nous a rendus bien supérieurs à lui par l'esprit ; il nous en a sur- tout séparés par le don d'une âme raisonnable , immortelle ; il nous a rendus parlicipans de cette lumière de suprême in- telligence dont il est la source ; il nous a élevés jusqu'à lui par la pensée. Nous sommes le lien qui unit la Divinité à toutes les créatures ; nous rattachons la terre au ciel : c'est par notre communication que le grand esprit se dissémine par toute la nature ; nous le transmettons au nègre , le nègr» au singe , celui-ci aux autres animaux , les animaux aux plan- tes , et les plantes à la terre ; c'est nous qui rétablissons l'équilibre dans toute la nature , et le sceptre du monde nous a été donné sur toutes les créatures. Voyez surtout l'article Homme , celui de TOrang - outakg , des Singes , etc.

(VIREY.)

NÈGRE. Poisson du genre des Scombres, Scomherniger.

(B.)

NEGRE BLANC. T. Albinos et Kakurlako. (virey.)

NEGRE, Cercopilhecus maiinis. C'est le nom d'un SiNGE de Java , qui appartient au genre des Guenons, (desm.)

NEGRE (sAjouî). Espèce de singe d'Amérique, du genre Sapajou, (desm.)

NÈGRE (tamarin). Autre singe d'Amérique, beau- coup plus petit et du genre Ouistiti. F. ce mot. (desm.)

NEGRES. Engramelle désigne ainsi plusieurs papillons de Linnœus , qui appartiennent à notre genre Satyre. Voy. ce mot. (l.)

NEGRES-CARTES ou MORILLONS. On donne c€ nom à des émeraudes de rebut ou de peu de valeur, qu'on laisse au profit des nègres qui font, dans le royaume de la Nouvelle-Grenade , la recherche de ces pierres précieuses. Le débit de ces émeraudes rebutées étoit assez considérable autrefois; alors la pharmacie croyoit que les pierres pré- cieuses pouvoient servir en médecine. C'étoit par Carlhagène que l'Amérique versoit , en Europe , les nègres-caries, et c'est qu'on mêloit aux émeraudes, pour augmenter le poids , des cristaux octaèdres épointés de chaux fluatée bleu ver- dâtre. L'on dit que ces cristaux se trouvent au Mexique. Maintenant ce genre de commerce est très-peu de chose, et Ton taille presque toutesles émeraudesqui peuvent avoir delà transparence ou de la couleur; on rejette les mauvaises. Voy. Émeraude et Morillons. Les nègres-cartes se vendoient à l'once et à la livre. Les belles émeraudes se vendent aukarat qui , comme on sait, ne vaut que quatre grains; une Irès-bclie

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émeraude parfaite 6e six karats (24. grains) peut valoir jusqu'à deux mille quatre cents francs, (ln.)

NÉGRESSE, y. aux mots Volute et Olive, (b.) NÉGRESSE. C'est aussi le nom d'un Cône , Comisfu- viîi^alus. (desm.)

NÉGRETIE , Negretia. Genre de plantes établi dans la Tlure du Pérou , pour placer quelques espèces du genre DoLlC r!e Linnseus , entre autres le DoLic A POILS CUIsans et le ÎJuLic TRÈs-ÉLEvÉ. Il offre pour caractères différentiels: un étendard ovale, sagitté , plus court que les ailes; des anthères difformes; des semences orbiculaires entourées jusqu'au-delà de la moitié d'une saillie dentelée.

Ce genre a aussi été appelé Stizolorio?^. (b.) NE(iRILLA. Sorte de Raisin très-doux, et dont on fait, en Espagne, un bon vin. (ln.)

NÉGRILLO et JNIGRILLO. Les Espagnols désignent ainsi l'argent antimonié sulfuré noir et ierreux, silherschtvarze «tes Allemands, qui est commun dans les mines d'argent du Mexique et du Pérou. Les Espagnols donnent aussi ces noms t'i celui de negritios au FahlerZ des Allemands, c'est-à-dire , au cuivre gris argentifère, (ln.)

NEGRILLON. C'est le nom du jeune Nègre. Voyez ce dernier mot. (virey.)

NEGRITA. Nom portugais des Mélampyres , plantes qui noircissent en se desséchant, (ln.)

NEGRITE. Nom vulgaire , aux environs d'Alby , de I'Al- TiSE qui mange les feuilles du Pastel, (b.)

NEGRO.Nomque les Hollandais, qui habitoienl autre- fois le Brésil, ont donné au Jabiru proprement dit. V. ce mot. (V.)

NEGROFISH, C'est I'Holocentre négrillon et le Scombre noir, (b.)

NEGUÎLLA. Nom espagnol desNiELLEset des Nigelles.

(ln.) NEGUNDIUM. V. Negundo. (ln.) NEGUNDO. Garzias, Acosta, Fragose , etc., ont dé- r.rit les premiers sous ce nommalabare de petites graines de l'Inde, de la grosseur du poivre , striées et acres. Elles sont produites par deux espèces d'arbrisseaux : l'un , le negundo mâle^ a, de loin, le port du sureau; l'autre, le negundo fe- melle^ a des feuilles semblables à celles du peuplier blanc. Les Brames de l'Inde, au rapport de Rhéede , nomment ce negundo le Gâtilier bécovvé (^vitex negundo) , dont les fleurs, les feuilles et les fruits passent pour propres à guérir beaucoup de maux et pour rendre apte à la conception ,

lorsqu'on se lave avec leur décoction. Ce negundo est le hemnosi {nosi blanc') des habilans de la côte malabare , et très proUabiemeiit le negundo mâle de Garzias. Il y a encore le yiiex trifolia ^ que Ion nomme au Malabar, caranosi (^nosi noir) dont les propriétés sont analogues. 11 ne paroîlpas dou- teux que ce ne soit le negundo femelle. Le fruit appelé hœrnia par Sérapion, est le même que celui de ce negundo.

Les botanistes modernes ont donné ce même nom de ne- gundo à une espèce d'érable qui diffère de toutes les autres espèces par l'absence de la corolle , le nombre des étamines (4.-5) et les feuilles ailées. Moënch en fait un genre qu'il nomme negundo^ et que Rafinesque-Schmaltz appelle ne§'H«- dium. C'est un bel arbre très-cuilivé , originaire des Etats- Unis , et commmunément désigné par le nom d'ERABLE

A FEUILLES DE FRENE. V. ErABLE, (LN.)

NEGUNDO. V. au mot Gatilier. (b.) NËGYL. Nom arabe d'une graminée que nous appelons Chiendent pied de poule {panicum dactylon , Linn. ).

V. DlGlTAlRE. (LN.)

NEÏDE, Neides, Latr. , Oliv. Genre d'insectes de Tordre des hémiptères, section des hétéroptères, famille des géoco- rises, tribu des longilabres.

Ce genre, que j'avois établi dans mon Histoire générale des crustacés et des insectes , sous le nom qu'il porte ici , et que Fabricius a changé en celui de heiyius^ dans son Sys- tème des rhyngotcs, est composé de petits hémiptères, très- voisins de ses corés et de ses lygées. Leur corps est menu , fili- forme , avec les antennes longues, insérées au-dessus d'une ligne allant des yeux à l'origine du labre , coudées vers leur milieu, de quatre articles, dont le premier très-long , en massue à son exirémité, et dont le dernier, un peu plus épais que les précédcns, est ovoïde, ou en ovale allongé. Ils ont la tête presque conique; l'écusson étroit, presque li- néaire et terminé en pointe ; et les pattes allongées , avec les cuisses en massue.

Ils s'éloignent des genres précédens, par leurs antennes coudées , et des plolères , ainsi que des zelus , dont ils se rap- prochent encore, parla manière dont se terminent ces orga- nes , la forme de la tête et la direction droite du bec.

On trouve les neïdes sur les feuilles des plantes, le tronc des arbres, etc. On n'en connoît encore qu'un petit nombre d'espèces. La plus commune est la Neïde tipulaire, Neides tipidaria ; cimex tipulariuSy Linn. Elle est d'un gris roussâtre, avec les antennes de la longueur du corps, noirâtres à leur ex- trémité; le<haperon est avancé en pointe; trois lignes élevées

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donldeux marginales se remarquent sur le corselet, les ély^

très sont chargées de nervures , et ponctuées de noirâtre.

On la trouve dans toute l'Europe, Voyez Schellenberg , Cim. , tab. 4 , fam. D , fig. i. (^L.)

, NEIGE. Eau congelée , qui , dans certaines circonstances , tombe du sein de l'atmosphère sur la surface de la terre , sous la forme d'une multitude de flocons séparés les uns des autres pendant leur chute , qui ont tous une blancheur éblouis- sante.

La neige affecte dans sa cristallisation la forme de petites étoiles hexagonales qui se terminent en pointes très-aiguës, et qui, se groupant les unes sur les autres, forment un grand nombre de figures régulières. S'il arrive quelquefois que la neige n'offre aucune trace de sa cristallisation primitive, il faut en attribuer la cause, ou à la vitesse de sa chute ou à l'abondance avec laquelle elle tombe, ou enfin à une tempé- rature trop élevée dans les couches atmosphériques qu'elle traverse. Ces circonstances réunies ou isolées doivent néces- sairement faire éprouver une altération sensible aux cristaux dont la neige se compose, et alors leur réunion ne doit pré- senter que des masses floconneuses.

La neige est beaucoup plus légère que la glace ordinaire. Le volume de la glace ne surpasse que d'environ un neuvième celui de l'eau qui a servi à la former, tandis que la neige qui vient de tomber a dix ou douze fois plus de volume que l'eau qu'elle fournil étant fondue. Musse mbroëk prétend avoir mesuré avec exactitude de la neige qui étoit en forme d'étoiles, et l'avoir trouvée vingt-quatre fois plus rare que l'eau.

Lorsqu'il n'est tombé qu'un ou deux pouces de neige , on la voit disparoître en moins de deux jours par un vent sec , et au plus fort de la gelée : d'où il résulte que l'évaporation de la neige est très-considérable ; et cela vient sans doute de ce qu'étant composée d'un grand nombre de particules de glace assez désunies, elle présente à l'air une infinité de surfaces.

La neige cède facilement à la compression, et lorsqu'elle est fortement comprimée , elle perd en partie son opacité et sa blancheur. Ce phénomène n'a rien qui puisse exciter de la surprise, car aux yeux d'un observateur attentif, chacun des petits glaçons dont la neige se compose , jouit de la transpa- rence : d'ailleurs dans une masse de neige, tous les petits glaçons sont séparés par des intervalles remplis d'air dont la réfrangibilité diffère beaucoup de celle de la neige. La lu- mière doit donc éprouver un grand nombre de réfractions

N E I lyS

qui doivent donner à la neige l'opacilié et la blancheur. Mais par une forte compression on rapproche beaucoup lés par- ticules de la neige , on chasse Tair qui , avant la compression, se trouvoit interposé entre les petits cristaux. Les milieux que la lumière a à traverser diffèrent donc moins en réfrangibi- lité , ce qui fait qu'elle souffre beaucoup moins de réflexions, et que la neige perd en partie sa blancheur et son opacité.

Puisque la neige réfléchit fortement la lumière , son aspect long-temps soutenu doit blesser des yeux foiblcs et délicats; ne soyons donc point surpris qne l'armée de Cyrus ayant marché quelques jours à travers des montagnes couvertes de neige, plusieurs soldats aient perdu entièrement la vue, et que beaucoup d'autres aient éprouvé dans cet organe une dangereuse inflammation,

Lorsque la neige paroît après quelques jours de forte gelée, on observe que le froid , quoique toujours voisin de la con- gélation , éprouve une diminution sensible ; c'est que d'une part le temps doit être sombre et couvert pour qu'il neige , et que de l'autre les vents du sud, d'ouest, etc., qui cou- vrent le ciel de nuages, diminuent presque toujours l'activité du froid. J'ai dit presque toujours , car personne n'ignore qu'il neige quelquefois par un froid très-vif et très-piquant, qui augmente ensuite après la chute de la neige. Mussem- broëk a observé que la neige qui tombe sous la forme d'ai- guilles est toujours suivie d'un froid excessif Celle qui tombe par un temps doux, et qui est mêlée de pluie, prend la forme de gros flocons.

La neige a une influence marquée sur la constitution de l'atmosphère. Les vents qui ont passé sur des montagnes cou- vertes dé neige refroidissent toujours les plaines voisines ils se font sentir. Les neiges qui couvrent sans cesse les som- mets des montagnes des Cordilières tempèrent beaucoup les ardeurs brûlantes du Pérou. Il en est de même de plusieurs autres contrées situées dans la zone lorride , ou hors de celle zone, au voisinage des tropiques,

La neige n'étant que de Teau congelée, il est visible qu'elle ne peut se former que lorsque l'air abandonne l'eau dans des couches atmosphériques refroidies au degré de la congélation ou au-delà. Si la neige traverse dans sa chute des couches d'air chaud, il est clair qu'elle sera fondue avant de parvenir à la surface de la terre. De vient sans doute qu'on ne voit jamais de la neige dans la zone toiride, ni, pendant les ar- deurs de Tété, dans les contrées que nous habitons, si ce n'est sur le sommet des hautes montagnes.

Il y a sur toutes les hautes montagnes du monde des neiges qui ne fondent jamais dans aucun temps de l'année. Nous ea

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avonsparlé spdcialement auxartîclesGLACiEaëlBAROMÈTRE, V. ces mots, (lib.)

NEIGKUSK. On trouve sous ce nom, chez les marchands, une coquille du genre Porcelaine {^cyprœa guttata , Linn. ).

(B.)

NEINEI. C'est, au Paraguay , le nom de la Bécarde a VENTRE jaune de Buffon (v.)

NEINSCHENA. Plante figurée parRhéede, et quiparoît ^re le (iouET divariqué. (b.)

NEIPSE, pour Nem.s. L'on trouve le nom arabe de la Mangouste écrit de celle manière dans quelques livres de voyages, (s.)

NEIT-SEK. V. Neit-soak. (s.)

NEITSERSOAK. Non» groënlandais du phoque à capu- chon. (DE.SM.)

NEITSIK-SIAK. V. Neit-soak. (s.)

NEIT-SOAK Çphoca hrspida) , Erxleben. Espèce de qua- drupède carnassier de la famille des Amphibies et du genre des Phoques, (desm.)

NEKLENN. L'un des noms russes de I'Erable de Tata- rie ( c/^e/* ta/an'.cHm , L.). (t.N.)

NEKO-NO-SANSIN. Nom japonais de la Bourse a pasteur , plante du genre Tïilaspi ( th. hursa pasiori's). (LN.)

NELA NAREGAM. Arbrisseau de la côte Malabare , qui, selon Adanson, doit faire un genre particulier intermé- diaire entre le mahagoni et le trichilui. Ses caractères sont: calice à cinq dents; corolle à cinq pétales; dis étamines réunies; un style à un stigmate; capsule à trois ou (jualre loges, avec autant de valves et de grain(^s ovoïdes ; (leurs soli- taires; feuilles ternées. V. Naregam, (lk.)

NELA-TSJERA. Petite plante de la côte Malabare (F". Rbéede lo, lab. 3i ), qui paroît être Voldenlandia depressa, Willd. (LN.)

NELAM-MARI(Rhéed., Mal., 9,1. 82). Plante annuelle herbacée du genre des Sainfoins ; c'est une variété de ihedy- snrum diphyllum , dont les folioles sont seulement au nombre de deux sur chaque pétiole. Ce caractère se retrouve dans une autre espèce de sainfoin (/i. conjugaium ^ W. ) figurée dans l'ouvrage de J. Burmann (Zeyl. , tab. 5o , f i ), mais qui en diffère par ses folioles ovales et la gousse glabre. Liu- naeus en avoit fait une variété de son hedysamm diphyllum , que Sloane, P. Brown et Swarlz ont observé aussi aux An- tilles et qui a été retrouvé en Cochinchine par Loureiro, (i/N.)

NELAM-PACA. Selon J. Burmann , cette plante , figurée

N K L /;77

«lans Fouvrage de Rhéede , vol. lo , pi. ^9 , est la même que Variemisla maderaspaiana ^ Linn. , et que celle qui estli^usee dans Burniann, Ind. 177, t. 58 , f . 3 , et qui c^X Variemiiid minium , Linn. Ces deux plantes sont eu effet très-voisines ; "Willdenow les rapporte au genre cotula^ et Lamarck au genre {;nutgea. (ln.)

NELAM-PARENDA (Rhéede, Mol. 9, t. 60). Jolie espèce de Violette , qui croît dans l'Inde : sa tige , très-ra- meuse du bas , est garnie de feuilles étroites; ses fleurs sont bleues, avec un calice sans bosse; ses fruits sont des capsules à huit ou neuf graines. Cette herbe vivace est le viola eimeas- perma , Linn. (ln.) \

NELEA. Plante citée par Théophraste , et qu'Adansou rapporte à la Herse ( /«^m/us). (l?J.)

NELEN TSJUNDA (Rhéed. Mal. 10 , t. yS). C est une espèce de Morelle, qui a des rapports avec la I>sorelle noire (io/fl/zi/m iiigrum) , mais qui estuoe espèce ditïiijente, selon M. Dunal , qui la nomme solanum incertum. Les baies de cette plante ont une saveur assez agréable; elle a é(é dé- crite par Loureiro dans sa Flore de Cotiiinchine. (ln.)

NELESCtlENA. Une espèce de ^jOUET {arum minuium^ W. ) qui croît dans les Indes orientales , est figurée sous ce nom par Rhéede ( Hort. Mal. 11 , tab. 17 ). (ln.)

NELL C'est , dans Tlnde, le Riz non encore dépouillé de ses Rai.les. C'est aussi le nom de la Balle florale du Riz , dont on se sert pour entretenir le feu. (b.)

NELICOURVÏ. V. l'article Tisserin, (v.)

I>(ELIFRiCON. Nom arabe du Millepertuis, dans Averrhoës. (ln.)

NEL5-POLI ou NELI-POULT. Arbrisseau des Indes orientales, ainsi nommé au iMalabar. C'est le cheramela ait Ruinphlus , Vuverih.ua acicJa , Linn., le pJiylluntlnis luiigifoUus de Jacquin , le carambolier à fruits ronds , le cicca disUcha de Linuseus , Lamarck , Willdenow , etc. (ln)

NÉLIPU. UUtriculaire a fleurs bleues {utrir.ulana cœru/ta), porte ce nom aa Malabar, (ln.)

NELI-TALI. TSom malabare de I'Agati ou Nelite des \^\iEs{œschynumene indien , Linn.), figuré dans Rhéede (Mal. 9 , t. 8 ). C'est le nalahi des Brames et le gajali des habitans ile I île de Java. V. Gajati. (ln.)

NELITRE, Nelitris. Genre de plantes établi par Gsertner pour séparer des Go"fAViERS une espèce que Forsler avoit

478 N E L

déjà ree;ardée comme en devant former un particulier. C'est le goyavier décasperme. Il paroît que ce genre sera adopté sous le nom de Décasperme. (b.)

NÈLITTE , JEschinomene. Genre de plantes de la diadcl- phie dccandrie , et de la famille des légumineuses, dont les caractères sont : un calice campanule, bilabié , à lèvre supérieure bifide , à lèvre inférieure bidenlée ; dix éra- mines , dont neuf réunies à leur base ; un ovaire supérieur velu, à style relevé , à stigmate simple. Le fruit est un légume oblong , comprimé, lobé ou crénelé sur un de ses côtés.

Ce genre , appelé agaty par quelques auteurs , renferme une trentaine de plantes dont les feuilles sont ailées avec une impaire , et ont des stipules fort petites ; leurs fleurs sont pé- donculées , axlllaires ou terminales , et leurs légumes sou- vent rudes.

Gsertner pense qu'il doit être supprimé, et que ses es- pèces doivent être réunies, les unes aux Sainfoiîss et les au- tres aUxGALEGAS et aux CORONILLES.

Les espèces les plus remarquables de ce genre sont :

La NÉLiTTE A GRANDES FLEURS. C'cst un arbre de l'Inde dont les fleurs sont extrêmement grandes et les légumes très- longs , mais filiformes. On mange ses fèves sous le nom d'a- gaty , et on tire de son tronc une liqueur gommeuse dont on fait usage dans les arts.

La NÉLITTE SESBAN , grande herbe qui croît en Egypte, et dont on emploie les semences pour fortifier l'estomac, et ré- tablir le flux menstruel. On en a fait un genre sous le nom de Sesban.

La NÉLITTE châNVREUSë , qui a la tige herbacée , les fo- lioles obtuses , aiguës , les pédoncules solitaires et les légumes aplatis. Elle est annuelle et se trouve dans les Indes , on tire de ses tiges une filasse semblable à celle du chanvre^ et propre aux mêmes usages.

La NÉLITTE GOURDE est herbacée , a plusieurs paires de folioles obtuses , et les légumes épineux. Elle se trouve dans les marais de la Cochincbine. Sa tige est spongieuse et élastique. On l'emploie habituellement pour faire des bou- chons.

La NÉLITTE POLYCARPE est une plante annuelle de six pieds de haut , dont l'aspect est fort différent de celui des espèces précédentes. Elle croît en Caroline, je l'ai observée, placée mal à propos parmi les Dalberges. Desvaux en a fait un genre sous le nom de Glotidion. (b.)

NELKE. Nom allemand des Oeillets, (ln.)

N E L iyg

NELKENVIOLE. C'est, en Allemagne , la Giroflée JAUNE {cheiranthuscheîri). (LN.)

MELKEN WURZ et NELKENKRAU f des Allemands. C'est la Benoîte, (ln.)

NELLA-MEKA(Rhéede , Mal. , vol. 8, lab. 19). C'est selon J. Burmann , la Bryone laciniée ( hryorda la dnîata ) ; mais c'est plutôt une espèce différente, encore trop peu con- nue pour lui assigner des caractères spécifiques, (ln.)

ISELLA-TANDALE-COTTI. C'est, au Malabar , d'a- près Rbéede ( Mal. 9 , tab. 127 ) , le nom d'une plante her- bacée amiuelle. Linneeus en a fait une espèce de Crotâlaire ( crotalaria labumifolîa ). (LN.)

NELLI-CAMARUM. Nom malabare deTEMBLic, espèce du genre phyllanthus , qui porte , à Java , le nom de myruho- lan^ et à Amboine celui de boa malacca nllikai. C'est le Nel— UKA de Zanoni ( Hist. 169 , tab. 61 ). (ln.)

NELLIKA. C'est encore la plante précédente, (b.)

NELLIKE. Nom de I'Œillet, en Danemarck. (ln.)

NELLUMULLA. Nom malabare d'un arbrisseau de la famille des jasminées, qui est très-voisin duSAMBAc(/no^oriWi sambac , Lk. ) , et peut-être une variété de ce joli arbrisseau auquel il ne le cède pas pour l'odeur suave qu'exhalent se» fleurs, (ln.)

NELMA. Saumon qui se pêche dans les rivières de la Sibérie. Il pèse quelquefois soixante livres. Sa couleur est blanche, (b.)

NELSONIE , Nelsonia. Genre établi par R. Brown , dans ladécandrie monandrie et dans la famille des acanthes, pour placer deux plantes vi/aces de la Nouvelle-Hollande , fort voisines des Èlytraires et des Carmantines, Ses ca- ractères sont : calice à quatre divisions inégales ; corolle à cinq lobes légèrement inégaux; les deux étamines fertiles, à anthères divariquées; capsule sessile , aiguë*, à loges poly- spermes. (b.)

NEL-TENDALE-COTTI. C'est, dans l'Inde , la Crg* Talaire a feuilles d'aubours. (b.)

NELUMBO , Nelumbium. Genre de plantes de la po- Ivandrie polygynie , et de la famille des renonculacées, que Jussieu a séparé des Nénuphars , avec lesquels Linnœus l'avoitmal à propos confondu.

Il a pour caractères: un calice coloré, de quatre à cinq grandes folioles persistantes; une corolle d'environ quinze pétales, sur plusieurs rangs; un grand nombre d'étamines ^ plus de soixante ) dont les filamens sont hypogynes,

4.<So N E L

planes , courbés et courts, et les anthères adnées et ter- minées par un appendice foliacé ; un réceptacle creusé à son sommet , de plusieurs fossettes qui contiennent chacune im ovaire dépourvu de style et muni d'un stigmate simple ; un réceptacle commun , alvéolé , tronqué , sont renfermées à moitié , de quinze à trente semences enforn:e de noix éval- ves, terutinées par un style persistant, qui contiennent une seule semence dont le germe est formé de deux lobes et muni d'une enveloppe. 4b

La fleur et le fruit du nelumho a donné lieu à de grandes discussions parmi les botanistes, chacun en considérant les diverses parties sous un point de vue différent. 11 est hors de mon pian , à raison de leur étendue , de rapporter ici ces discussions, auxquelles ont principalement pris part, MM. sieurs Venlenat , Corréa , Decandoile, Poiteau et Mirbel.

Smith a appelé ce genre , Cyame.

J'ai observé en Amérique , que les semences du nélumbo et d'autres plantes aquatiques , telles que Vomnce, gcrmoient dans leurs péricarpes, qu'elles brisoient par leur gonflement, pour ne tomber au fond de l'eau que lorsqu'elles avoient une radicule de plusieurs lignes de longueur , et des cotylé- dons très-pesans.

Les nelumbo , comme les nénuphars , ont de très-grosses ra- cines vivaces, charnues , rampantes au fond des lacs et des rivières dont le cours est tranquille ; des feuilles radicales, ombiliquées, entières, pourvues de très-longs pétioles, et flottantes sur la surface de l'eau ; des fleurs grandes , solitai- res , épanouissant hors de l'eau, portées sur des pédoncules semblables aux pétioles.

On en compte six espèces "dont les plus connues sont :

Le Nélumbo des Iisdes , Ndumhium speciosum^ qui a les feuilles orbiculaires , très - entières , et les pédoncules hérissés, ainsi que les pétioles. ( Voyez, sa figure, pi. (i 35. ) Il croît dans l'Inde , la Chine et la Perse, Il étoit autrefois très-abondant dans le Nil ; mais il ne s'y trouve plus, au rapport deDelisle. Cette plante, par ses grandes fleurs rouges et ses larges feuilles, orne beaucoup les eaux. On en mange les semences, qui sont blanches , tendres , et aussi bonnes que les amandes. On en mange aussi les feuilles et les racines. Si on coupe ses pédoncules ou ses pétioles , il en découle une liqueur qui s'épaissit à l'air , et qu'on ordonne dans les diarrhées, les vomissemens , et dans les cas il s'agit de rafraîchir.

Plusieurs auteurs ont regardé cette plante comme la Co- lOCASE des anciens ; mais il est reconnu que cette dernière est un GouET. Cependant le nelumbo étoit connu des an-

N E M ^8t

cîcns. Son fruit î qui a la forme d'une coupe , en portolt le nom chez les Grecs, et servoit d'emblème dans plusieurs cas. On le voit souvent sur les médailles et les pierres gravées , servant de siège à un enfant que Plularque dit être le Cré- puscule , et couronnant la tête des dieux et des rois.

Le Nelumbo jaune a les feuilles orbiculaires , très-entiè- res , et les pédoncules ainsi que les pétioles glabres. Il se trouve très - abondamment dans les eaux stagnantes de la Caroline et de la Virginie , je l'ai observé. Il est fort dis- tinct du précédent , quoiqu'il n'ait été regardé que comme une variété par la plupart des auteurs. Sa corolle est jaune et peu différente de celle du Nénuphar commun, (b.) NELY. Nom brame de I'Indigotier. (ln.) NÉMASPÈRE, Nemaspora. Genre de la famille des Hypoxylons , établi par Persoon , et qui rentre dans les variolaires du même botaniste, (b.)

NÉMATE, Nemaius. Nom donné , par M. Jurine , à un genre d'insectes de l'ordre des hyménoptères, de la tribu des ienihrédines , et qui comprend les mouches à scie ou ien~ ihrèdes de Linnaeus , ayant pour caractères : une cellule radiale très-grande; quatre cellules cubitales, dont la première, pe- tite , presque ronde; la seconde , grande, recevant les deux nervures récurrentes ; la troisième moindre et carrée ; la qua- trième atteignant le bout de l'aile; mandibules échancrées ; antennes longues, sétacées, simples, de neuf articles.

Ce genre est composé de plusieurs tenthrèdes de Fabricius , à antennes presque sétacées ou filiformes , telles que les sui- vantes : capreœ , jlaoa , salicis , sepientrionalis , etc. M. Jurine cite aussi quelques autres espèces représentées par Panzer , dans sa Faune des insectes à'yillemagne.

Je n'avois d'abord formé de ce genre qu'une division , dans celui des tenthrèdes; mais je l'ai ensuite adopté, soit parce que l'étude des insectes de cette sous-famille en devient plus facile, soit parce que les némates considérées aussi dans leur premier état, paroissent avoir plusieurs caractères communs. Leurs larves ou leurs fausses chenilles ont le corps allongé , cylindrique , ras ou peu velu , souvent de couleur verte , et muni de vingt-deux pattes. Elles vivent en société sur diffé- rens arbres , particulièrement sur les saules , le bouleau , l'aune , etc. , dont elles mangent les feuilles , en les entamant par leurs bords, et quelquefois aussi par leur milieu. La plu- part courbent ou redressent , en manière d'arc, Textrémité de leur corps, ne se tenant cramponnées qu'avec leurs pattes écailleuses, ou les six premières. Elles entrent en terre pour passer à l'état de nymphe et terminer leurs métamorphoses.

xxii. 3l

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JEiles s'y renferment dans des coques de soie , quelquefois

doubles , et dont l'intérieure est plus épaisse et plus forte.

La fausse chenille de la Némate mamelonnée , Nematus paplllosus, et que Degécr {Inseci. tom. 2, pag. 988) nomme mouche à scie à larve à mamelons , fait sortir, lorsqu'on la tou- che , d'entre les cinq premières paires de pattes membraneu- ses, cinq mamelons charnus, d'un jaune orangé, et qui ren- trent dans l'intérieur de son corps, quand l'allouchemerit cesse. Cette larve est d'un vert clair et livide, rayée de noir, avec les deux extrémités jaunes. Elle répand une odeur nau- séabonde, et qui reste long-temps aux doigls lorsqu'on l'a touchée. Les mamelons sont divisés iongitudinalement en deux parties égales , étroitement unies et terminées chacune par une espèce de léle arrondie et criblée de trous, en manière de télé d'arrosoir. Degéer pense qu'ils donnent issue au fluide qui répand cette mauvaise odeur.' On voit à lextrémllé pos- térieure du corps deux pointes cylindriques , écailleuses et d'un noir luisant.

La larve entre en terre vers la fm du mois d'août , s'y en- fonce bien avant et se fait une coque ovale, lisse , très-noire et luisante. L'insecte parfait ne paroît au jour que l'été sui- vant. 11 est noir, avec les antennes brunes; le dessous de la tète , une raie de chaque côté du corselet, l'abdomen et les pattes jaunes ; le long du milieu du dos de l'abdomen a une raie brune , formée par une suite de taches de cette couleur.

Le môme naturaliste a trouvé, aux mois de juillet et d'août, sur le saule à feuilles lisses , les fausses chenilles d'une autre némate , celle du Saule , salicis (Deg. , Und. , pag. 991) , qui y vivent en société. Ces larves sont longues de près d'un pouce , sur une ligne de diamètre , d'un vert céladon , avec de gran- des taches jaunes et des points noirs sur les côtés. Elles se tiennent le long des bords des feuilles qu'elles rongent con- tinuellement , et ont souvent le derrière de leur corps courbé en arc , de sorte qu'il repose sur le plat de la feuille ; tandis que les pattes écailleuses et quelques paires des membraneu- ses sont accrochées à son bord. Quand on les touche , elles se débattent avec cette partie du corps, Télèvent en haut et la remuent de coté et d'autre, mais sans lâcher prise des pre- mières pattes, avec lesquelles elles sont fortement crampon- nées. Lorsqu'elles ont dévoré les feuilles d'une jeune bran- che, elles passent aune autre et l'en dépouillent pareillement. Elles entrent en terre au mois d'août, et s'y fdent des coques ovales, d'une soie d'un brun obscur et presque noir. On y trouve, en les ouvrant, une seconde coque, entièrement dé- tachée de l'extérieure ; celle-ci est mince , très-flexible , et paroît, vue au grand jour, percée de petits trous ; tandis que

N E M 483

Tautre ou rîntérienre est plus épaisse et plus forte ; elle est très-lisse el luisante, surtout en dedans. L'une et l'autre sont élastiques. Ces insectes n'achèvent pas leurs transformations en même temps. Plusieurs individus (tous femelles) naissent au bout de trois semaines, tandis que les autres n'éclosent qu'au printemps de lannée suivante. Les femelles sont d'un jaune d ocre , avec les antennes , la tète, la bouche excep- tée , le milieu du dessus du corselet, les tarses postérieurs et deux taches entre la première paire de pattes et la seconde, noirs; le siigmate des ailes supérieures et leurs nervures sont bruns. Le noir domine davantnge dans le maie , la partie supérieure de son corps est presque entièrement de cette couleur; on voit simplement sur son abdomen quelques rai<;s jaunâtres. Il est en outre plus petit,

La NÉMATE DU SAULE MABCEAU , Nemaliis capreœ , Deg. ,' iUd. , pag. 4.4- 1 se nourrit encore , dans son premier état , sur le saule. Les larves de cette espèce y sont réunies en compa- gnie nouàbreuse , et y font un grand dcgat , en mangeant les feuilles , à l'exception des grosses nervures , elies tiennent or- dinairement le derrière courbé en dessous. Leur corps est d'un vert céladon, avec la tête noire , les trois premiers an- neaux et les deux derniers fauves, et six rangées de points noirs , en relief On l'a nommée la hedeaude du saule. Kéau- mur l'a trouvée sur le groseillier épineux. 11 dit (jue dans sa dernière mue , elle perd tous les tiibercules noirs ; que sa peau devient lisse, d'un blanc jaunâtre, avec les deux pre- miers et les deux derniers anneaux d'un jaune rilrcm. L'in- secte parfait est jaune , avec les yeux , le vertex de la tête , le dessus du corselet el de l'abdomen noirs; le stigmate des ailes supérieures est jaune. La femelle dépose ses ceufs à la file les uus des autres, le long des nervures des feuilles du groseillit-r.

X-Tne espèce de némate très-singulièie par la forme de ses pattes postérieures, est celle ({u'on a nommée septentrio- nale , septenttionalis\ la mouche à srieà larges pu Ites <le Dégéer {îhld. , pag. ygS) ; son corps est noir, avec le milieu de i <b- domen fauve ; les pieds postérieurs sont longs , avec les jam- bes déliées et blanches à leur origine , fort larges et très-apla- ties ensuite ; le premier article de leurs tarses est fort f rand et a la figure d'une palette ovale. Ces caractères son»- com- nmns aux deux sexes; mais les mâles ont les cuisses fauve.?, et les jambes intermédiaires moitié blanches et moitié noires. Toutes les cuisses sontnoires dans les femelles, et leurspieds intermédiaires sont de cette couleur ou d'un brun obs- cur. La fausse chenille vit en société sur le honleaa et sur l'aune. Elle est d'un vert céladon, à gran:les taches noires, avec les extrémités du corps jaunes. Klle recoLube just^ue sur

•4S4 N E M

«a têle rextrémité postérieure de son corps, et fait sortir, lorsqu'on l'inquiète, d'entre ses pattes membraneuses, des tubercules charnus et coniques, qui rentrent dans l'inlé- rieur de son corps, comme le font les cornes du limaçon dans sa tête. Elle se cache dans la terre au mois d'août, et y file «ne coque ovale , allongée, entièrement noire , mais simple. X*'insecte éclôl au mois de mai de l'année suivante.

Une fausse chenille de l'aune , toute verte, avec quelques points noirs sur les côtés , a donné à Degéer une némate en- tièrement semblable à celle que nous venons de décrire , mais dont les cuisses étoient rousses, dans les deux sexes.

Voyez, pour les autres espèces que M. Jurine rapporte à ce genre , l'article NÉivi\TE de l'Encyclopédie méthodique, (l.)

NEMA.TE, Haiiy. F. Obsidienne perlée, (ln.)

NÊMATOCÈRES ou FILICORNES , Dum. Famille d'insectes, de Tordre des lépidoptères, qui embrasse nos deux tribus des Bombycites et des Faux-Bombyx , famille des Nocturnes. M. Duméril y rapporte les genres : hépialey bom- byx et cossus, (l.),

NÉMATOÏDÉE, Nemafdidea. (xenre de vers intestins établi par Rudolphi pour placer la Filaire de Médine. Si, comme je l'ai rapporté, ce prétendu ver est le bourbillon d'un furoncle, ce genre ne peut être adopté, (b.)

NEMATOÏDËS. Ordre établi par Rudolphi dans la classe des vers intestinaux. Il renferme les espèces dont le corps est élastique , cylindrique , allongé. F. HelmiNTHo-

LOGIE. (B.)

ISÉMATOSPERME, Nematosperma. Genre de plantes établi par Richard. Il rentre dans celui appelé Lacis-

TÈME. (B.)

NEMATOURES ou SÉTICAUDES. Dénomination donnée par M. Duméril à une famille d'insectes aptères , composant noire ordre des Thysanoures. V. ce mot. (l.)

NEMEN. L'un des noms arabes du sisymbrium aquaticuni^ Linn., qui constitue le genre rorîpa d'Adanson. (ln.)

NEMER. Nom arabe de la Panthère, espèce de Chat.

(desm.)

NEMERTE, Nemerles. Genre de vers intestinaux établi par Cuvier, dans son important ouvrage intitulé : le Règne animal distribué (T après son organisation. Il est constitué par un ver très- grêle, c'est-à-dire de quatre pieds de long, qu'on trouve dans nos mers, dontBorlase avoit fait mention, et qui insinue son extrémité antérieure dans les Anomies qu'il suce ; cette extré- mité antérieure n'a pour bouche qu'un simple trou. La pos- térieure, par laquelle il se fixe , est évasée et offre l'anus à sa base, (b.)

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"NEMERTESIE , Nemertesm. Genre établi par Lamou- rouxaux dépens des Sertui.aires. Il offre pour caraclères:un polypier pliyloïde, corné, garni dans toute son étendue de petits cils polypifères recourbés du côté de la tige et yerti- cillés-, verticilles nombreux et rapprochés ; cellules situées sur la partie interne des cils.

Le naturaliste précité rapporte seulement trois espèces k ce genre. La plus commune est la Nemertesie, antennike {seiiulanaanlennina, Linn.),qui a la tige ordinairement simple, et les ramifications verlicillées, simples et sétacécs. Elle est figurée dans Ellis, pi. 9. a. A. On latrouve dans les mers de l'Eu- rope. La plus rare est la Nemertesie de Janin, qui est figu- rée pi. 4- 'le l'ouvrage de Lamouroux sur les polypiers coral- ligènes flexibles. On l'a pêcliée dans la baie de Cadix. (B.)

NÉMÉSIE , Nemesia. Genre de plantes de la didynamie angiospermie , et de la famille des Scuophulaires , établi par Venlenat, Jardin de la Malmaison, qui rassemble cinq, espèces, toutes du Cap de Bonne-Espérance , et dont une se cultive dans nos écoles de botanique. Il se distingue à peine des Mufliers.

Les caractères de ce genre sont : calice divisé en cinq par- ties ; corolle pourvue d'un éperon et d'un palais saillant ; capsule comprimée, tronquée, à deux loges^ à deux valves, et contenant un grand nombre de semences linéaires, (b.)

NEMESIS de Dioscoride. C'est la même plante que Van-

iirrhinon , suivant Adanson. 11 paroît que chez les Grecs on

nommoit aussi nenus'um la plante désignée par Dioscoride

sous le nom d'ocymoïdes , et qu'on croit être le lychnls didicOé

. . . (L^^)

"NEMESITE. Selon Louis Dulcis ,, c'étoil le nom de la. pierre dont étoil construit l'autel de la déesse Némésis et dont les Athéniens enlevoient des fragmcns pour se rendra sans doute la déesse favorable. Cette pierre nous est incon- nue, (ln.)

ISÉMESTRINA. C'est , dans Linnœus , la dcnominalioEt spécifique du Macaque maimon, V. ce mot. (s.)

NEMESTRINE, Nemesfrina, Latr. , Oliv. Genre d'in. sectes, de l'ordre des diptères, famille des tanystonies, tribu des anihraciens.

Les némestrines, par la forme générale du corps , ieurg ailes grandes et écartées, leurs antennes très-dislanles J'une de l'autre , le nombre quatre àcs pièces du suçoir de leur trompe, l'agilité de leur vol, ressemblent beaucoup aux anthrax, genre principal de la môme tribu. Mais leur trompe est longue et avancée, et l'on voit à sa base deux palpes fili- formes , qui se recourlxent au-dessus d'elle ; leur léte es^t a«»

486 N E M

niveau du corselet , de sa largeur, et les antennes sont écar- tées ; caraclères qui distinguent ces diptères des bombyliers. £nfin , les ailes de la plupart Ai?, nénjesfrines onl cela de par- ticulier, que leur extréij;ilc est chargée de nervures très-fines et très-nombreuses, couiposanl un réseau, tan<]is que le reste de leur surface est sinipliment veiné , comme dans les autres dipleies de la même faniiiie. L;^s antennes sont beaucoup plus courles que la léte , et insérées TmI près des yeux. Olivier dit qu'elles sont composées de six articles ; mais il y com- prend l'appendice en slylei , celui qui est analitgue à la soie ou à l'aigrette de la palette des mourhes, et autres athéricères. Le Cixps de l'anlenne n'est composé que de trois articles , dont le dernier plus grand, ovoïdo-conique, ou en poire , se termine par le slylet , qui a paru à Olivier divisé en trois ar- ticles. La gaine de la trompe est bifide au bout. Le dernier article des tarses offre , à son extrémité , trois palettes assez longues et égales, et deux crochets assez forts.

Les hémestrines volent avec la plus grande légèreté , se transportent à de grandes distances , et ne se reposent pas long-lemps sur les mêmes fleurs. Elles en retirent, avec promp- titude , au moyen de leur longue trompe, les sucs mielleux dont elles se nourrissent, et passent brusquement d'une fleur à une autre. Elles ne se reposent que sur celles dont le nectar n'a pas été épuisé par un autre insecte. Ces diptères sont propres aux contrées méridionales de l'Europe , de l'Asie et à l'Egypte.

Dans les Mémoires de la Société d'histoire naturelle de Moscou, ce genre a été établi sous le nom de Riiynchocé- PïiALE , sur une espèce qui se trouve sur les bords de la mer Casj»icniie , la némesln'ne anale d'Olivier. Ce naturaliste (^Encydop. mcih.) en décrit sept autres, dont une de Java, et les six dernières du Levant. Parmi celles-ci, je citerai la Né- MESTRINE RÉTICULÉE , fumcstrina reticiilafa , Latr., Gen. aust. eiînsect. , lom. I , tab. i5, fîg. 5-6. Elle est longue <!e sept lignes, noire , mais couverte d'un duvet cendré , avec quelques lignes plus claires s^ir le corselet. L'abdomen est noir, avec le premier anneau , le bord postérieur des autres, une tache au milieu au second anneau et une autre sur le troisième , mais manquant quelquefois, grisâtres. Les deux tiers de la longueur des ailes sont obscurs; le reste est vitré et réticulé.

Dans les îles de l'Archipel -, en Egypte et en Syrie.

M. Hippolyte Boyer de Fon-Colombe a découvert aux environs d'Aix , en Provence, une nouvelle espèce, (l.)

ISE-ME-ÏOUCHEZ-PAS. C\st la Balsamine des bois {^impatiens noîi me tangere'). (ln.)

N E IVT 487

KEMEYGHEL. Nom arabe d'une espèce de Fraîsquène {frankenîa revoluta , Forsk. ). (LN.)

NËMIE, Genre de plante que d'autres botanistes ont appelé Manule. (b.)

NEMNICA.Nom de la Belladone {airopa belladona) en Bohème, (ln.)

NÉMOCÈRES , Nemocera.Y amille d'Insectes, de l'ordre des diptères, et dont les caractères sont : antennes compo- sées de plusieurs articles (jamais moins de six , et de quatorze à seize le plus souvent).

Les insectes de cette famille , qui se compose des genres culex et tipnla de Linnœus, ont le corps allongé ; la tête petite et arrondie ; les yeux grands ; les antennes filiformes ou séta- cées, plus longues que la tête , souvent velues ; la trompe saillante, soit prolongée en forme de siphon ou de bec, soit, et le plus souvent, courte et terminéepar deux grandes lèvres; deux palpes extérieurs , filiformes ou sélacés , composés ordi- nairement de quatre à cinq articles; le corselet gros, élevé et comme bossu ; les ailes oblongues ; les balanciers dé- couverts ; les cuillerons nuls ou très-petits ; l'abdomen allongé, formé communément de neuf anneaux, terminé en pointe dans les femelles , plus gros au bout, et muni de pinces et de crochets, dans les mâles ; enfin les pieds longs , très- déliés , servant à un grand nombre de ces insectes à se balancer.

Plusieurs , surtout les petits , se rassemblent par troupes nombreuses dans les airs, et y forment, en volant, des sortes de danses. On en trouve dans presque toutes les saisons de l'année. Ils sont placés bout à bout dans l'accouplement , et volent souvent dans cette situation. Plusieurs femelles pon- dent leurs œufs dans l'eau , séjour de leurs larves et de leurs nymphes ; les autres les placent dans la terre , le tan, ou sur les plantes.

Les larves sont toujours allongées , semblables à des vers , avec une tête écailleuse, de figure constante, et dont la bouche offre des parties analogues aux mâchoires el aux lèvres. Elles changent toutes de peau , pour devenir nymphes. Ces nym- phes sont tantôt nues, tantôt renfermées dans des coques que leurs larves ont construites, se rapprochent, par leur figure , de l'insecte parfait , en présentent les organes ex^ térieurs, et achèvent leuVs métamorphoses à la manière ordinaire.

On leur voit souvent , sur la partie antérieure du corselet, deux organes respiratoires , en îorme de tubes , de cornes oti d'oreillettes.

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Cette famille est divisée en deux tribus , celle des Culi- CIDES, qui comprend le genre des cousins (ru/ex) de Linnseus, et celle des Tipulaires , formée de son genre des tipules (stipula), (l.)

NÉMOCTE, Nemoctiis. Genre établi par M. Rafinesque dans la classe des vers. Il offre pourcaractères: un corps fili- forme en collier; une tête nue, obtuse; une queue à plusieurs fileis en pinceaux.

Ce genre ne renferme qu'une espèce qui vit dans les eaux douces de la Sicile, (b.)

NÉMOGLOSSATES, Nom que j'avoîs donné à une division d'insectes, de l'ordre des hyménoptères, qui répond au genre des abeilles {apis), de M. Kirby, ou à ma tribu des Apimres. Voyez ce mot. (l.)

NÉMOGNATHE , Nemognata, Illig., Latr. , Oliv. ; Zo- nitis, Fab. Genre d'insectes» de l'ordre des coléoptères, sec- tion des hétéromères , famille des tracbélides, tribu des can- Iharidies.

Illiger a distingué ces hétéromères des zonitîs avec lesquels Fabricius les réunit , et avec lesquels ils ont, en effet , les plus grands rapports; mais les mâchoires des némognathes, ainsi que l'indique l'étymologie du nom (^mâchoires en forme de soie') ^ sont très-prolongées , étroites et sétiformes, du moins, dans l'un des sexes , les mâles probablement. Ce carac- tère est surtout très-apparent dans une espèce que M. Bosc a recueillie en Caroline , le zonitis rayé de Fabricius. Les mâchoires y forment une sorte de trompe qui se courbe et se prolonge sous la poitrine. Le second article des antennes est presque aussi grand que les suivans , autre caractère qui dis- tingue les némognathes des zonitis.

Outre le Némognathe rostre {zonitis rosirata , Fab. ) , et le Némognathe rayé {zonitis vitlata^ Fab. ) , cités par Oli- vier , il faut encore y comprendre le zonitis chrysoméline de Fabricius. Il est fauve ou jaunâtre, avec les antennes , la poi- trine , une tache ronde au milieu du corselet, une sur cha- que élytre et leur extrémité , noires ; l'abdomen est aussi de cette couleur dans l'un des sexes. M. Dufour a trouvé cette espèce en Espagne, (l.)

NEMOLAPATHUM. C'est le nom qu'on donne à une espèce de Patience qui croît dans les bois ( rumex nemola- pathum , Linn. ). (ln.)

NÉMOLITES. Pierres arborisées, dont les dendriles figurent des forêts et des bocages. (LN.)

NÉMOPTÈKE , Nemoptera, Lair. , Dum., Oliv. ; ^/>- ita , Hoffiu. ; ncnijpleryx , Léach ; panorpa , Linn. Genre

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d'insectes de l'ordre des névroptères , famille desplanipennes, tribu des panorpates , ayant pour caractères : cinq articles à tous les tarses, dont les trois intermédiaires fort cOiirls; bou- che située à l'extrémité d'un museau presque membraneux , conique , et incliné; six palpes filiformes; antennes filifor- mes ou sétacées , composées d'articles très-nombreux; aiies Irès-réticulées , les premières presque ovales , les secondes très-longues, linéaires, et contournées à leur bniil; point d'yeux lisses distincts ; jambes sans épines à leur exlré- inilé.

Si les némoptères se rapprochent àt?, parnrpes par le pro- longement antérieur de leur têle , ils s'en éloignent beaucoup à raison de leurs ailes inférieures longues et linéaires ; ce caractère les fait même aisément distinguer de tous les autres insectes. Je n'entrerai point dans d'autres dclalls sur leur or- ganisation extérieure; on les trouver?, soit dans le troisième volume de mon Gênera , soit à l'article Némoptère de 1 En- cyclopédie méthodique. Olivier y a décrit plusieurs espèces nouvelles qu'il avoit apportées de son voyage au Levant et en Perse. C'est à ces contrées, au midi de l'Europe et au nord de l'Afrique , que ce genre paroît être , jusqu'ici, restreint.

<f Ces insectes , dit Olivier , dont nous ne connoissons point les métamorphoses et la manière de vivre , volent fort mal , se transportent lentement et en agitant péniblement leurs ailes , à de petites distances , de sorte qu'on peut les saisir avec la plus grande facilité. Je les ai vus infiniment mul- tipliés, et ils m'ont paru avoir une existence fort courte. Huit jours après leur apparition , je n'en trouvois plus , si ce n'est lorsque j'ai été de Bagdad en Perse : comme j'allois d'un pays brûlant, vers une région plus tempérée , j'ai vu , pen- «lant plus de vingt jours de suite, presque toujours aussi abon- damment, la quatrième espèce (^étendue), que je décris. «

Il a pris celle qu'il nomme blanche , le soir , dans les mai- sons de Bagdad. Le nombre des némoptères décrits par cet auteur est de six ; mais il faut y en ajouter une de plus,, celle que l'on trouve en Espagne et en Portugal , et qu'on a con- fondue avec la ISÉmoptere coa des îles de l'Archipel, et représentée ici pi. G, 33, 6. Linnœus ( yOfl«w/pa /:oa) ne les distingue pas, à en juger d'après l'indication des pays d'ha- bitation. L'une et l'autre ont les ailes supérieures jaunes, avec des points et des taches noirs ; la plupart de ces taches forment trois bandes transverses et en zigzag ; les ailes infé- rieures sont blanches , avec une bonne partie de leur étendue supérieure obscure ou aoirâtre , et deux grandes taches uoi-

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res, transverscs , entre leur milieu et leur extrémité ^ qui s'é- largit un peu et s'agrandit.

Dans les nénioptères coa , le jaune des ailes supérieures est plus pâle , et tire sur le blanc ; la cote a deux taches noires ; immédiatement au-dessous sont deux rangées longitudinales de points noirs, et Ton en voit deux autres, mais plus courtes, à leur base , près du bord interne. Dans la némoplère d'Es- pagne ( nemopteryx lusitanica , Léach , Zool. miscell. , tab 85 ), le jaune est plus foncé et plus vif; près de la côle , jusqu'aux deux tiers de la longueur de l'aile , sont trois rangées de points noirs; on voit aussi trois aulres rangées de points noirs, et dont ceux de la dernière ligne allongés presque en forme de petites lignes , près du bord interne des mêmes ailes ; la troi- sième bande, formée par les taches , est coupée parle pro- longement des rangées supérieures de points. La partie obs- cure du haut des ailes inférieures est moins prononcée , ou se fond insensiblement.

On trouve en Barbarie et en Egypte la Némoptère a ba- lanciers, nemopteia hallerata d'Olivier. Eorskaël et M. Léach l'ont représentée : c est la panuifje à balanciers du premier , et la nemopteiyx africaine du second. Ses ailes supérieures sont transparentes, avec une raie jaunâtre près de la côte -, les in- férieures sont brunes depuis leur base jusqu'au-delà de leur milieu, blanchâtres ensuite, avec une bande obscure.

La Némoptère étendue , nemoplera extensa d'Olivier , est remarquable par les deux larges dilatations qui terminent ses ailes inférieures, (l.)

ÎNÉMOSIE, Nemosia , Vieil!. : ianagra , Lath, Genre de l'ordre des Oiseaux sylvaims, et de la famille des Pérical- LES. V. ces mots. Caractères : bec court, formant à sa base un petit angle dans les plumes du front , peu robuste , conico- convexe, effilé, un peu comprimé latéralement, pointu; man- dibule supérieure couvrant les bords de l'inférieure , un peu arquée du milieu à la pointe , légèrement entaillée vers le bout ; narines arrondies , situées vers la base du bec; langue cartilagineuse , étroite , pointue ; les premières rémiges à peu près égales , les plus longues de toutes ; quatre doigts , trois devant, un derrière , les extérieurs réunis à leur origine. La plupart des espèces dont se compose ce groupe, se tiennent dans les bois.

Quoique j'aie décrit particulièrement sous la dénomination de hec-en~poinçon , plusieurs ^tVos de punzon de M. de Azara , je soupçonne qu'ils ne seroient pas déplacés à la suite de ce genre : tels sont les becs-en-poinçun ^ bleu et roux , bleu cl bleuâ- tre , roux cendré , bleu et blanc.

La Némosie a coiffe noire , ]S emosia pileata , Vieil!.; ta-

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7, Ncnwô^e a coë/fe noire . 2 . Pi,i/co?i de A'ieû/ftïr . 3 . I^ie â/etf - </e - etel.

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nagrapîleata, Lath.; Desm.; pi. (i38, f, i de ceDict. Le mâle de celle espèce a cinq pouces environ de longueur lolale; les joues, le lunim^ la gorge el toutes les parties postérieures, d'un blanc pur; le sommet et les côtés de la lete , d'un beau noir qui se prolonge sur les côtés du cou , jusque près de la naissance de l'aile; cette couleur domine encore sur les pe- tites couvertures du bord extérieur des ailes; sur leurs pennes, et celles de la queue, qui sont bordées en dehors , du même cendré bleuâtre qui couvre l'occiput, le dessus du cou et toutes les parties supérieures; le bec estnoir ; Tiris , d'un jaune fon- cé ; le tarse , d'un jaune de cire, La femelle , dont Buffon fait une espèce pavliculicrc sous la dénomination de tangara cendré du Brésil , et Gmelin une variété du mâle , en diffère principalement en ce que la couleur noire est remplacée, sur la têle et sur les côtés du cou, par du gris bleuâtre clair, et par son bec brun en dessus et jaunâtre en dessous.

On trouve cette espèce à la Guyane et au Brésil. M. de Azara l appelle pùo de pun:iun nigro , azuli blanco. II paroit qu'elle est fort rare au Paraguay , car ce naturaliste n'a vu qu'un seul individu dans un bois de cette contrée.

La Nemosie a gorge jaune , Nemosia fladcollis , Vieill., se trouve dans l'Amérique méridionale. Elle a la tête , le dessus du cou et du corps , les ailes et la queue noirs ; la gorge et les couvertures inférieures de la quer-e , d'un beau jaune; la poitrine et le ventre blancs; le bec brun en dessus , blanc en dessous , si ce n'est à sa pointe; les pieds noirs el la taille de la uémosie à coiffe noire.

La JNemosie a gorge noire, Remania nigricollis ^ Vieill. ; tanagra nigricollis , Lath. ; pi. enl. de Buffon , n.° 720 , f, i , sous la dénomination Ait iangara olive.YWe. a la tête, le dessus du corps d'un vert olive ; la gorge noire ; la poitrine orangée ; les côtés du cou et tout le dessous du corps , d'un beau jaune ; les couvertures supérieures des ailes, leurs pennes el celles de la queue brunes , et bordées d'olivâtre; le bec noir en des- sus , gris en dessous , et les pieds noirâtres. On la trouve à la (iuyane,

Sonnini rapproche de cet oiseau le pico de piinzon amarllla y hurla nigra de M. de Azara ( le bec-en-poinron jaune , à barbe noire). En effet, celui-ci en diffère peu. Sa longueur est de cinq pouces deux lignes ; le dessus de la tête et du cou, la moitié du dos, les couvertures supérieures des ailes et le bord des pennes aiaires et caudales sont d'un jaune ver- dâlre; un trait d un jaune très-vif part du front, passe sur l'œil et descend , en sélargissant , sur les côtés du cou ; les couvertures inférieures de la queue sont de cette même cou- leur ; les cotés de la tcle cl la gorge , noirs ; le devant du cou,

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la poljrine et le Las flu dos, rVun orange vif; le dessous da corps est d'un jaune qui prend une nnince plombée sur les flaur< ; les couvertures inférieures des rilcs paroissent argen- tées : l'iris est brun ; le bec noirâlre en dessus, orangé en dessous et sur les bords ; les pieds sont couleur-<!(; plomb.

La femelle a la gorge tachée de noirâJre , sur un fond jaune ; le devant du cou et le croupion ( de ce même jaune), quelquefois variés de couleur de safian, et sans mélange sur les colés et sur le reste du dessous du corps ; les couvertures inférieures et le bord des pennes abires , blancs; la tête, la nuque, le dos, les petites couvertures supérieures de l'aile, le bord des pennes et de celles de la queue , d'un jaune verdàlre un peu rembruni. Les jeunes mâles ressemblent aux femelles. Ces oiseaux sont très-nombreux au Paragi^ay. Je crois qu'on doit encore rapprocher de cette espèce le gui" ra beraba , sybia gui/a , Lalh.

La JNÉMOSIt. GLIRA BERABA. Voy. NÉMOSIE A GORGE NOIRE.

La l^ÉMOSlEROVGE-ChV, Nem.giilaris^\ie\l\.;ùi}iagragiilaris, Lalh.; Desm. ; pl.enl. deBuff., n.° i55, f. 2. Cet oiseau a la tête le haut do la gorge d'un rouge vif ; le bas de la gorge d'un pourpre obscur; le derrière de la tète, ledessus du cou et du corps, les plumesscapulaires et les couvertures supérieures de la queue, d'un noir brillant; les côtés et le devant du cou, la poitrine et les parties postérieures , d'un très-beau blanc ; les ailes et la queue noirâtres ; le bec orangé en dessous , brun en des- sus et à sa pointe ; les pieds gris : six pouces et demi de longueur totale. Des individus ont le dessus du corps brun ; d'autres l'ont mélangé de bfunet de noir. Dans le grand nom- bre de sujets observés par M. de Azara, une couleur oran- gée remplaçoii sur quelques-uns le rouge carmin, et ils avoient la tète brune ; d'autres avoient du brun au lieu de rouge , el leur tête éloit rougeâîrc ; enfin , les jeunes qu'il a vus prêts à quitter le nid , avoient la moitié supérieure du cou rousse , et la tête noirâtre. Le jeune figuré par M. Desmarest, dans son Hlu. des TuHgnias , a la gorge d'un jaune fauve. On lei trouve dans l'Amérique méridionale.

Ces oiàeaux que de Azara a décrits sous le nom de ca- pîta ( lôle rouge ) , ne sont pas rares au Paraguay ni à la ri- vière de la Plala , se tiennent plus volontiers sur \e% bords des ruisseaux et des étangs ; ils ne pénètrent point dans les bois , et ne fréquentent pas les campagnes découvertes ; leur vol est court , leur instinct peu farouche , et leur démarche par sauts. Le mâle et la femelle sont pareils ; ils se tiennent par petites bandes pondant l'hiver, et s'approchent des ha- bitations champêtres. On les nourrit en cage , de toutes sortes de polîtes graines et d'insectes. Ils placent leur nid

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vers le milieu d'un grand buisson , le construisent d'hetbcs sèches, en dehors, et de crins bien arrangés, en dedans. Leur ponte est de quatre œufs.

La Nkmosie a tête et gorge rousses , Nemosîa riifica-' pilla , Vieill. Une belle couleur de cannelle couvre la tête et la gorge ; une grande tache d Un jaune jonquille est sur les côtés du CDU ; cette belle couleur se trouve encore sur le croupion et les couvertures inférieures de la queue ; mais elle est 1res fon-ée sur le devant du cou et le haut de la poi- trine , dont le has est, dans le milieu, d'un faune très-pâle,' de même que le milieu du ventre; les côtés du corps sont gris ; le dessus du cou, le dos, les scapulaires , les couver- tures supérieures et le hord extérieur des pennes alaires et caudales, d'un vert-olive très-vif; les pennes primaires bru- nes en dedans ; le bec est de celte teinte en dessus, et jaune en dessous. Taille de la némosie à cuiffe noire. Cet oiseau a été app )rié du Brésil par M. de Lalande fils, et est déposé au IMuséum d'Histoire naturelle, (v.)

NÉAIOSOME, Nemosuma , Lalr. , Ollv. ; colydium Herbst, Panz, Genre d'insectes, de Tordre des coléoptères, section des télramères, famille dos xylophages, tribu des tro- gossitaires, ayant pour caractères : quatre articles à tous les tarses, et tous entiers; corps long et cylindrique ou presque linéaire ; corselet et tête allongés ; antennes à peine plus longues que cette dernière partie, de dix articles, dont les trois derniers forment une massue perfoliée ; mandibules fortes , avancées, dentées sous rexlrémité ; palpes filiformes , pres- que égaux, dont le dernier article beaucoup plus long; mâ- choires et lèvres membraneuses ; mâchoires à un seul lobe ; languette courte , presque carrée , échancrée.

On ne connoît encore qu'une seule espèce , qui se trouve en France et en Allemagne, sous les ccorces des vieux or- mes; c'est le NÉMOSOME ALLONOÉ, nemosoma elongatum. Son corps est long de deux lignes, d'un noir luisant, pointillé , avec la base des élytres, une tache à leur extrémité, et les pieds fauves ; la tête a dans son milieu un sillon longitudi- nal. Voyez la figure que j'ai donnée de cet insecte , Gcn. crust. et insect. , tom. i , tab. 11 , fig. l^.\ et celle de Panzer, Fallu, insect. Germ. , fasc. 3i , tab. 22. (L.)

NÉMOTÈLE, Nemotelus, Geoff. , Fab. , Lat. Genre d'insectes de l'ordre des diptères , famille des notacanthes , tribu des straliomydes, ayant pour caractères : suçoir de deux soies, reçues dans une trompe rétractile, coudée à sa base et logée dans une espèce de bec; antennes Insérées sur le bec, de trois pièces, dont la dernière eu masse , articulée, ter- minée eu pointe.

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Nous devons l'établissement de ce genre à Geoffroy , qui Tavoit ainsi nommé de la forme des antennes de ces insectes. Némotèle signifie terminé par un fil. Degéer a depuis appliqué cette dénomination à d autres diptères. Fabricius les réunit dans ses premiers ouvrages aux s/ra</om«/ mais il a ensuite adopté ce genre.

Olivier, qui avoit d'abord désigné sous le nom de némo- tèles les diptères que celui-ci appelle anihrax , a fiai par suivre ( Encyrl. méùi. ) sa nomenciature et la mienne.

Les némutèles ont le port des stiatiomes ; mais leur écusson n'est pas armé de pointes. Elles en diffèrent d'ailleurs par l'insertion de leurs antennes et leur trompe allongée, à lèvres très-petites, ayant ainsi de la conformité avec celle des co~ nops. Si on retrancboit la saillie antérieure de la tète ou le hccy celle trompe seroit même en dehors. Les antennes des némo- tèlessontcourtes, detroispiècesprincipales, dont la dernière est composée elle-même de quatre arlicles , et forme une sorte de masse ovale , surmontée d'une pointe droite , grosse , courte et conique ; le su»^oir renfermé dans la trompe est de deux soies ; les deux antennules sont très-courtes ; la tête est hémi- sphérique , occupée presque entièrement par les deux yeux à réseau dans les mâles , et a trois petits yeux lisses , disposés en triangle , sur une élévation du vertex ; le corselet est presque cylindrique ; les ailes sont horizontales , couchées l'une sur l autre, et débordent le corps postérieurement; les balanciers sont découverts; l'abdomen est arrondi , terminé par une pointe dans lun des sexes ; les tarses sont terminés par deux crochets et deux pelotes.

Ces insectes sont lents. On les trouve sur les plantes qui croissentdansles lieux aquatiques, en France , en Suède, en Allemagne, en Barbarie.

ISemotele ULIGINEUSE , Nemotelus uliginosus , Fab , pi. G. 33 , 7 , de cet ouvrage, le mâle; ISémoièle à lande, Geoif ; Musca uUginosa, Linn. Elle a environ deux lignes; les yeux gran<1s , d un brun noirâtre ; le corselet d'un noir lisse ; l'ab- domen blanc en dessus, avec la base du premier anneau , et le bord inlerieur du troisième et du quatrième , noirs ; tout le dessous du corps noir ; les pattes de la même couleur. On ia trouve aux environs de Paris sur les fleurs.

La ISemuièle bordée (^nemoiclus maizjinaius ) de Fabricius , n'est qu'une variété de sexe; la femelle.

Le professeur Desfontaines a rapporté de Barbarie l'es- pèce appelée ponctuée , parce qu elle a tiois rangées de points jaunes sur l'abdomen. Elle est représeiitCL' dans la troisième décade des illustrations iconographiques des insec- tes de M. Coquebert, tab. 3 , fig. 5. (l.)

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NÊMOURE , Nemoiira , Lafr. , Olîv. ; Phij^ganea , Linn. ; Perla, Geoff.; Semblis , Fab. Genre d'insectes, de l'ordre des neVroplères, famille des planipennes, tribu des perlides.

Les nêmoures ne paroissent pas, aa premier coup d'œii , dlfférens des névroplères, avec lesquels Geoffroy a composé le genre perle, ou celui dus fausses friganes , de Degéer. , r,omrae ici, le corps est étroit , allongé cl déprimé, avec les antennes sétacées , le corselet carré , les ailes couchées horizontalement les unes sur les autres , et les tarses à trois articles. Mais lesnémoures ont le labre très apparent et pres- que demi-circulaire; les mandibules carrées et dentelées; les palpes filiformes; le premier et le dernier article des tarses allongés ; les deux soies qui terminent l'abdomen très-cour- tes ou même peu distinctes ; ces caractères distinguent les nêmoures des perles.

On trouve ces insectes dansles lieux aquatiques ou humides, au printemps ou au commencement de l'été. Leurs larves sont inconnues; mais elles doivent êire aquatiques , et ressembler teaucoup à celles des perles. Olivier en a décrit cinq espèces: i." La Nemoure nébuleuse , nemoura nebidosa ; semblis ne- hulosa , Fab. Elle est longue de sept lignes , noire , pubes- cente , avec les ailes grises ou cendrées , et dont les nervures sont, ainsi que les pattes , d'un brun obscur; 2.° la NÉ- MOURE CENDRÉE, nemoura cinerca; phiyganea jiebulosa ^ Linn.; elle est environ d'un tiers plus courte que la précédente, noi- râtre , avec les pattes d'un brun livide , les ailes d'un gris obscur, et à nervures noires ; 3.« la Némoure bigarrée, nemoura variegala ; elle a la tête et le corselet mélangés de noir et de jaune , et les ailes grises , avec les nervures noires ; 4.." la ÎSÉMOURE cylindrique , nemoura cylindrka ; perla cyîindrica , Deg. ; elle a le corps noir , avec le dessus de l'abdomen pâle , ponctué de noir latéralement, et les ailes obscures, à nervures noires ; 5.° la Némoure noîre , ne- moura nigra ; elle n'a que trois lignes de long. Son corps est d'un noir luisant , avec les ailes d'un gris foncé , irisé , elles pattes livides ; son corselet est plus étroit que dans les autres espèces. Olivier avoil trouvé cette espèce dans des prés aquati(jues des environs de \'ersailles. (L.)

IS'EMS. Nom égyptien de la Mangouste d'Egypte, (desm.)

IXEMU NOCkl. V. Nebu nocki. (ln.)

NENASî-KUSA. Nom que l'on donne au Japon au Gaillet jaune ( galium verum) , selon Thunberg. (ln.)

NENAX, Nenax. Genre établi par Gsertner pour séparer des CuFFORTES une espèce qui a le calice divisé en cinq parties, et dont !<• fruit est une baie sèche, creuse dans son milieu. C'est le clijuriia JillfoUa de Linnaeus. (b.)

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NENH-HOA -DO. Nom de pays d'un Psorm-IER (^psorulea rubescens , Lour. ) qui croîl dans les forcis <le la Cochinchiiie. (ln.)

JSENNOK. Au Groenland , c'est I'Ours blanc de mkr.

(DESM.)

NÉNUPHAR , Nymphœa. Genre de plantes de la polyan- drie monogynie et de la famille des renonculacées , qui pré- sente pour caractères : un calice à quatre ou cinq folioles per- fiislanles, colorées, très - grandes -, une corolle composée d'environ quinze pétales placés sur plusieurs rangs ; des éla- mincs nombreuses à filamens élargis et attachés autour de l'ovaire , et à anthères adnées ; un ovaire ovale , presque supérieur , sans style , couronné par un stigmate sessile en forme de chapeau , à quatorze rayons , et persistant ; une baie sèche , ovale , mutiloculaire , renfermant un grand nombre de semences nichées dans une pulpe. Ces semences sont ovales , et composées d'un très-gros périsperme et d'un petit germe muni d'une enveloppe propre , et composé de deux cotylédons et d'une plumule.

Ce genre avoit été placé par Jussieu , Gserlner et autres, parmi les mo7ioco/y/^6?o«s, Ventenat, le premier, a soupçonne qu'il étoit dicotylédon ( V. l'article Nélumbo), et Decandolle l'a confirmé par des observations positives.

Les nénuphars sont des plantes à racines charnues , très- épaisses et très-longues ; à feuilles radicales alternes, larges , et flottantes sur la surface des eaux ; portées sur des pétioles très-longs, à fleurs radicales, solitaires, portées sur des pédon- cules semblables aux pétioles, et s'épanouissanthors de l'eau, y rentrantpendant la nuit dans le temps de la fécondation, et n'en sortant plus après qu'elle est terminée. On en compte une quinzaine d'espèces , dont les plus communes ou les plus célèbres sont:

Le NÉNUPHAR JAUNE, qui a les feuilles en cœur , très- entières, à lobes rapprochés, et le calice de cinq folio- les plus longues que les pétales. On le trouve très-commu- nément et très - abondamment dans les étangs et les rivières peu rapides. On emploie sa racine dans les tisanes rafraî- chissantes qui conviennent dans les inflammations des reins et de la vessie , dans les fièvres ardentes , les insomnies ; enfin , dans tous les cas il est nécessaire de tempérer l'impétuosité du sang et des esprits vitaux. Cette racine passe surtout pour amortir les besoins physiques de l'amour, et en conséquence les religieuses en avoient toujours pour l'usage de leurs jeunes novices ; mais, comme elle agit comme nar- cotique , son usage trop fréquent use les facultés de Teslo- mac , et produit des maux irréparables. Combien de uiai-

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heureuses qui auroîent fait le bonheur d'un époux , sonf mortes par suite de l'abus (le ce remède! Elle contient une assez grande quantité de fécule qu'on en retire en Suède , dans les temps de disette , pour la nourriture des hommes. Chez les apothicaires, on tient une eau distillée , une conserve , un miel , un sirop et une huile pi'«parés avec ses fleurs. Cette plante sert de type au genre Gastalie.

Le Nénuphar blanc a les feuilles en cœur , très-en- tières , et le calice de quatre folioles. Cette espèce a les fleurs plus grandes et beaucoup plus belles que celles de la précédente. Ou l'emploie pour l'ornement des étangs et des pièces d'eau , sous le nom de lis d'eau. On la trouve dans les mêmes endroits , et sa racine a les mêmes propriétés que celles de la précédente.

Le NÉNUPHAR LOTUS a les feuilles en cœur et dentées. Il se trouve en Egypte et dans l'Inde. C'est le fameux lotos., dont les fleurs jouoient un si grand rôle dans la mythologie des anciens , et qu'on trouve si fréquemment employé dans leurs emblèmes. Il ne faut pas le confondre avec le lotus , qui est un Jujubier , rhamnus lotus , Linn.

Cette espèce ressemble beaucoup à la précédente par les Ceurs , mais elle a les feuilles dentées dans sa vieillesse ; ses racines sont oblongues, charnues , spongieuses , de la gros- seur d'un œuf de poule , et d'une saveur douce un peu as- tringente. On les mange en Egypte pendant trois mois de l'année , quoique leur saveur soit fade , terreuse , et peu agréable , au rapport de Savigny. On fait du pain avec les semences de ce nénuphar.

Les anciens Egyptiens, pour qui tous les phénomènes de la nature étoient importans , avoient remarqué que la fleur du nénuphar^ jusqu'après sa fécondation , sortoit de dessous l'eau au lever du soleil, et y rentroit à son coucher. De ils con- clurent qu'il y avoit des rapports entre elle et l'astre du jour, et ils la lui consacrèrent. C'est pourquoi on voit presque toujours dans les hiéroglyphes le petit Horus assis sur une fleur de lufos , la tête d'Osiris couronnée de cette fleur, etc. C'est pourquoi aussi elle est fréquemment figurée sur les monumens , sur les monnoies , etc.

Le Nénuphar odorant a les feuilles entières, en cœur, les lobes écartés et un peu aigus , et le calice de quatre folio- les. Il se trouve en Caroline , je l'ai observé ; il ressemble pour la fleur au nénuphar hlanc, et il répand une odeur suave^ forte , et qui , en conséquence , n'est agréable que de loin.

Le Nénuphar bleu a les feuilles bordées de sinuosités , arrondies , et les anthères terminées par un filet pétaloïde. On le trouve dans l'Inde , au Cap de Bonne- Espérance et en

XXII. . - 33

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Egypte , d'où 11 a été apporté par I)elîsle. ÎI a (Icurî au Jar- din du Muséum d'îlistoire nalureilc de Paris , et Savlgny ea a donné une superbe figure , dans les Annales de cet éla- blisseinonl. On mange sa racine comme celle du iiénup/inr iotits. On faisoit anciennement des couronnes avec sa fleur , qui est d'un bleu tendre.

J'ai observé en Caroline plusieurs ne'm//)7ims nouveaux , -entre autres deux, dont 1 un a la feuille veloutée en dessous, et l'autre ia feuille rouge en dessous ; mais les circonstances ne m'ont pas permis de lesétudierd'une manière convenable, (b.)

jN K,OMERÏS, Neomeris. Lamouroux, dans son important ouvrage sur les polypiers coralligènes flexibles, a donné ce nom a on genre qu il a établi dans la famille desTuBULAiilÉF.s, poiir placer nvut espèce qui est originaire de la mer des An- tilles , elle vit en société et elle s'élève à deux ou trois centimeires , et qu'il a figurée pi. 7 du même ouvrage.

Les caractères de ce genre sont ; polypier simple , encroû- té; encroûtement celhdeux dans la partie supérieure , buileux "dan^5 la moyenne, écailleux dans l'inférieure, (b.)

INRON^IA. La Pâquerette {Bellis perennis) porte ce nom en Cotnouaiiles. (i.is.y

NEOi*HI\ON. Nom du troisième genre des Vautours de iVÏ. Savigny.

Le ISkophron percnoptère du même auteur est le Petiot TAUTOUR de ButTon. (v.)

NEOPE rRE ou Pétrosilex secondaire de Saussure. V. HuRNSi'EiN et Pétrosilex. (ln.)

NEOPS. Nom composé du grec et imposé au genre Six- TiNE. y. ce mol. (v.)

N EOT rL\. Nom donné par Dodonée à une orchidée qui constitue le genre neotiia de Linnaeus (Flor. de Suède) , que ce naturaliste a placée ensuite dans le genre ophrys , sous le nom àuphijs nidus-uifis i et que Svvartz rapporte à son genre epi- paclis (_F. ce mol). Linnœus avoit rapporté aussi à ce genre neotliu, Voplirys spiralis. Cette plante et plusieurs autres espèces àu,>hijso\x dug;înre salyrium, forment legenre neotlîa deSvvarti (V. iNEorriE). Le neuttia d'Adanson ne comprend que Vophrys iiiilts-avls ; il est caractérisé par la lèvre inférieure de la co- rolle divisée en deux, caractère de la seconde division du genre ncollla de Svvartz. Quelques botanistes rapportent à ce genre le Guodyera de R.. Erown. Voy. ci-après. Clî^O

NF.OTriE, Neollia. (ienre de plantes de la gynandrie dianilrie cl de la famille des Orchidées, établi par Jacquin et adopté par Svvariz. il offre pour caractères: une corolle en gueule, a pétales extérieurs la téraux réunis ea devant autour

NE? ^ng

«îe base ventrue du nectaire du sixième pétale ; une an- thère parallèle au style et insérée par derrière.

Dans cegenre.sont placées TC^puride spirale de Linnreus , le Satyiuon RAMPAiST du même auteur; il renferme quinz.; espèces dans Willdenow.

On soupçonne que TAristotélée de Loureiro doit lui être réunie. Les genres Goodyère , Ponthiève et Tu.ssac ont été établis à ses dépens par il. Brown , et ceux Spirantue , Pi.E- XiE et Stenorymque par Richard.

Une nouvelle espèce de ce genre est figurée dans le bel ouvrage de MM. Huuiboldt, Jîon^landetRanth, sur lesplan- tes de l'Amérique méridionale, (b.)

NEOn OCRYPTES ou ABDÎTOLARVES. Famille d'insectes hyménoptères à abdomen pédicule , aplati ou ren- flé ; à lèvre inférieure de la longueur des mandibules ; à an- tennes non brisées , de treize articles au plus ; à cuisses sou- vent renflées.

Celte famille , établie par TV(. Duméril {Zoologie onalytiqui^') , correspond aux familles des Diplolépaires , des Cynipsères et des Proctrotrupiens de M. Latreille , et renferme les genres Chalcide , Diplolèpe, Cynips , Diaprie , Leulos- VIS et [{.ULOPHE. F. ces mots, (desm.)

NEOU.Arbre fruitier du Sénégal, cité par Adanson , mais dont ce botaniste n'indique pas le nom générique, (b.)

NEOUMATOS. L'un des ^oms donnés par les Grecs à lem- leontopodium^ rapporté à I'Alchimille par Adanson. (ln.)

NEP. r. Naeqaii. (ln.)

NEPA, Théopbraste. Cette plante mentionnée par ïheo- phraste est la même que celle nommée nlex par Pline, et pro- bablement celle. que nous appelons Ajonc, Ulex europccus , Linn. (ln.)

NÉPAPANTOTOTL. Caî^ard du Mexique, dont la des- cription incomplète dans Fernandès {HisL nov. Hisp. , pag. 36 , cap. i8 )ne permet pas de décider si c'est une espèce connue ailleurs. Elle y est sauvage , et on l'y rencontre fréquemment dans les marais. Son bec se termine presque en pointe; tou- tes les couleurs dont le plumage des autres canards est orné, se trouvent réunies sur celui-ci , et en font un très-bel oiseau ; c'est ce que signifie le mot mexicain népapantutotl, (s.)

NEPE , iVeyyfl!. Genre d'insectes, de l'ordre des hémiptè- res, section des bétéroplères, famille des hydrocorises, o\x des punaises aquatiques.

Linnœus nomme ainsi les hydrocorises dont les deux pieds

antérieurs font l'office de pince, ou ma tribu des hydrocorises

ravisseuses. Son genre noionccta comprend c«iles que j'appelle

' platydiictyles. Par l'établissement que fit Geoffroy de deux nou-

Soo N E P

velles coupes génériques , celles des naucores et des rorlses , genre desnèpesde Linnseus devint plus simple et plus naturel. Geoffroy, qui les désigna sous le nom de scorpions aquatiques , n'ayant pas découvert les antennes de cesinsecles, prit pour ces organes , les deux pieds antérieurs, et d'après celte erreur, ne leur donna que quatre pieds. Fabricius a , depuis , séparé des nèpes celles qui ont une forme linéaire , et qui consliluent son genre ranaire.

Mais le genre nèpe, quoique plus restreint, étolt cepen- dant susceptible d'être encore réduit. Ainsi la nèpe cendrée et d'autres espèces à forme ovale-oblongue , et toutes remar- quables par la longueur de leur queue , n'ont que trois arti- cles bien distincts à leurs antennes, et dont le second offre seul une saillie latérale , en forme de dent ; leurs tarses n'ont qu'un article , ainsi que Geoffroy l'avoit déjà observé. Les autres espèces , presque toutes exotiques , à formes plus larges , à queue très-courte ou presque nulle , ont leurs antennes com- posées de quatre articles distincts, et dont les trois derniers se prolongent extérieurement en manière de dent de peigne; tous leurs tarses sont formés de deuj^ articles et presque sem- blables. C'est avec ces espèces que j'ai établi le genre Bélo-

STOME.

Celui des nèpes est composé, dans ma méthode, des espè- ces suivantes de Fabricius : cinerea , fusca , grossa , nihra et ni^ gra. Olivier a suivi , dans l'Encyclopédie méthodique , ce na- turaliste.

Les nèpes ressemblent aux naucores et aux ranatres par la forme de leurs pattes antérieures , dont les jambes et les tar- ses se réunissent pour composer un grand crochet qui se re- plie sous les cuisses. Elles s'éloignent des naucores en ce que leurs tarses ne sont composés que d'un seul article ; que leurs quatre piedspostérieurs ne sont point ou ne sont que très-peu natatoires ; que leur corps est oblong et terminé par une queue de deux filets. Les nèpes diffèrent maintenant des ranatres par la forme elliptique de leur corps, leur bec courbé et la briè- veté des hanches ; les dents antérieures sont longues dans les ranatres.

Les nèpes ont le corps elliptique, très-déprimé ; la tête petite , logée en partie dans une échancrure du corselet , avec les yeux assez saillans , sans petits yeux lisses ; l'écussou fort grand ; l'abdomen terminé par deux filets sétacés , qui sont des tubes , que des auteurs prennent pour des conduits d'air; les quatre tarses postérieurs propres pour nager, et les cuisses antérieures ovales, grandes, ayant un sillon en dessous pour recevoir les jambes et le tarse.

Les nèpes sont des insectes aquatiques, dont les pattes an-

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térieures sont en fornie de pinces ; elles sont lourdes, nagent lentement, se tiennent ordinairement au fond des eaux dans la vase , mais volent très-bien , surtout le soir. Elles sont carnassières , ainsi que leurs larves , et se nourrissent de pe- tils insectes, qu'elles percent et déchirent avec leur trompe.

Les femelles pondent des œufs qui , vus au microscope , resseniblent à une semence couronnée de sept petits filets , dont les extrémités sont rongées; elles les enfoncent dans la tige de quelque plante aquatique. Les larves en sortent vers le ipllieu de l'été. Elles diffèrent de l'insecte parfait, en ce qu'elles sont dépourvues d'ailes et d'élytres, et qu'elles n'ont point de filets à l'abdomen ; elles nagent fort lentement , et marchent au fond des eaux sur les plantes aquatiques. La nymphe porte ses ailes enveloppées dans des fourreaux pla- cés de chaque côté du corps.

Ces insectes sont tourmentés par des hydrachnes de Mulle», On trouve souvent sur eux des œufs rouges , qui y tiennent par un pédicule ou un bec servant de suçoir , et qui y crois- sent.

Nèpe cendrée, Nepa cinerea^ Linn. , Fab.; pi. G 33 , 8 de cet ouvrage ; Scorpion aquatique^ (ieoff. Elle a huit à neuf lignes de longueur ; le corps et les élylres d'un brun noirâtre ou jaunâtre ; l'abdomen large , ovale , très-plat , rouge en dessus ; l'écusson grand, triangulaire ; les pattes antérieures dirigées en devant. On la trouve en Europe , dans les eauz stagnantes, (l.)

NEPENTÉ, Nepentlies. (ienre de plantjes de la dioécie polyandrie , qui a pour caractères : un calice dune seule pièce , divisé profondément en quatre parties très-ouvertes, planes et persistantes ; point de corolle ; dans les (leurs mâles, un pivot central droit, recouvert à son sommet d'environ douze anthères sessiles et rapprochées en tête ; dans les fleurs femelles , un ovaire tronqué au sommet , sans style , et à stigmate pelté , sessile et persistant ; une capsule oblougue , à quatre côtés, à quatre valves, à quatre loges, renfermant, «n grand nombre de semences oblongues attachées aux cloi- isons , ayant un périsperme charnu, un embryon monocoty- lédon filiforme, droit , et une radicule inférieure.

Ce genre renferme des plantes herbacées de l'Inde, à ra- cines épaisses, à tiges simples, feuillées à leur base , et flo- rifères à leur partie supérieure ; leurs feuilles sont alternes, semi-amplexicaules , surmontées par la nervure moyenne qui s'allonge en forme de vrille, et qui porte une urne mem- braneuse , oblongue , creuse , fermée à son orifice par une valve en forme d'opercule. Leurs fleurs sont disposées en grappes terminales. Elles semblent se rapproclier de la fa*-

5cî NE?

mille des Hydrocharidées et de celle des Orchidées; maïs leurs rapports ne sont pas encore suffisamment connus.

On connoît trois espèces de ce genre , dont une vient de l'Inde , et la seconde de Ceylan ; la troisième enfin , est celle qu'a fait dessiner Flacourt dans son Histoire de Madagascar. Elles sont fort peu différentes Tune de Tautre. On doit sans doute regarder également comme distincte celle que Lou- reiro a décrite sous le nom de Puyli.amphore , dans sa Flore de la Cochinchine. Voyez la f;c;ure de celle de l'Inde , pi.

Ces plantes peuvent , sans exagération , être mises au nom- bre des merveilles de la nature ; elles ont toujours fait l'ad- iniration de ceux qui les ont observées. L'urne qu'on remar- que à l'extrémité de leurs feuilles, est certainement un pVié- noinènerare parmi lesvégétaux ; mais les fonctions auxqurdes cette urne est destinée , sont Lien plus remarquables. Celte urne est creuse, comme on l'a dit, et ordinairement pleine d'une eau douce et limpide ; et alors l'opercule est fermé. Il s!ouvre pendant la cbaleur du jour , cl l'eau diminue de plus de moitié; mais celte perte se répare pendant la nuit, de sorte que chaque malin l'urne est pleine et l'opercule ferfué. Les habiîans de Madagascar, au rapport de Fl^icourt , croient que si l'on renverse l'eau d'une de ces urnes, il ne manquera pas de pleuvoir dans l:^ journée ; et par une su- perstition contraire, ils regardent cette même eau comme •spécifique dans les rétentions d'urine.

Au reste , il est sans doute bien agréable , dans des climats aussi cbauds que ceux croissent les népenles , pour des voyageurs altérés , de trouver ainsi sous leurs pas des moyens de rafraîchissemens sains et abondans ; car chaque urnecon- lient environ un demi-verre d'eau.

Népcnte est le nom qu'a donne Homère à un breuvage nar- cotique que formoit Hélène pour dissiper les soucis de Telé- inaque. Linnœus, en l'appliquantà celte plante, s'écrie : «Si elle n'estpas le népenle d'Hélène, elle le sera certaiucmentde tous les botanistes; car quel est celui d'entre eux qui, venant à la rencontrer dans une de ses herborisations, ne seroit pas ravi d'admiration , et n'oublieroit pas les fatigues qu'il a es- suyées ! » V. Sarracène.

Les racines des népenles passent pour astringentes , et leurs- feuilles pour rafraîchissantes, (b.)

NEPETA. Pline ne fait , pour ainsi dire , que citer cette plante. Selon lui , elle croît partout , et est utile contre la inorsure des serpens. Il paroît qu'elle porloil le nom d'une ville d'Italie, autour de laquelle elle se trouvoit en abondance, pioscoridc place le nepeta des Latins au nombre de ses ca-

G .35.

Aci)('/t//u' i/urff/ah'trc

Aliu-c/imit/ Ocu/o.

NE P Ho3

lamens. Des espèces de Menthes, quelques Mélisses {M. m/aminfha, nepeta, etc.), la Chataire commune , ont été re- gardées comme le nepeia de Pline. C.Rauhln, dans son Pinax^ ne fixe ce nom à aucune plante spécialement, et les espèces de nepeta de Linnseus , connues de son tenips, sont placées avec ses mentha sybestns et caitaiia. Le genre jNepeta de Linnseus €st le même que le catarla de Tournefort. Mocnch a fait à ses dépens le genre saiissiin'a ; et quelques espèces font mainte- nant partie des genres bistropogon et dracocephulum. V. CuA- TAIRE. (ln.)

NEPETELLA.Linnœus donne ce nom spécifique à une espèce de Chataire; mais depuis, les naturalistes parolssent avoir confondu sous ce nom plusieurs planies différentes. Besler a introduit le premier ce nom en botanique , pour wne plante labiée du même genre, nepeia italica, L. (ln.)

NÉPHÉLINE, Hauy, Werner, James; Schorl blanc hexagonal du Vésuve^ Ferber ; Sommité^ Lamélh., Karst. ; Wclcker-smaragd ^ Ocken. Cette espèce minérale est placée par M. Haijy entre ranalclme et Tharmatome. Jameson la rapproche de laméionile; cependant la néphéllne est Irès-dls- llncte de toutes ces substances. La néphéllne ne se trouve que mélangée avec d'autres substances primitives ou volca- niques : elle y est en petites masses ou veines grano-lamel- lalres, et en cristaux hexaèdres diversement modifiés pardes facettes additionnelles. Elle est blanche ou jaunâtre, rare- ment verdâtre. Sa cassure longitudinale est larnelleuse ; elle e5t vitreuse dans le sens transversal. Elle est assez dure pour rayer le verre. Elle se fond très-dlfncllement au chalumeau en un verre transparent et homogène. Mise dans l'acide ni- trique , elle perd sa transparence et devient nébuleuse ; mais si l'on chauffe l'acide , elle se résout en gelée Sa pesanteur spécifique est de 3,27 , selon Vauquelin. Ce savant chimiste a trouvé que la néphéllne est composée de

Silice. . . .

^5.

Alumine. .

49.

Chaux. . .

2.

Fer oxydé.

I.

^crle. . . .

2.

"La forme primitive de la néphéllne est , selon M. Haiiy , riiexaèdre régulier , dont la hauteur est à l'un des côtés de la base, comme 7 esta i5. L'on connoît les formes suivantes:

I. Pn'milù'e , Haiiy. L'hexaèdre ci-dessus.

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2. yinniilaùe, Haiiy. La précédente, dont les aré(a« des bases sont remplacées chacune par une facette.

3. Bîsannidaire , Nob. Chaque arête des bases rempla- cée par deux facettes plus inclinées sur la base que sur le prisme.

4. Péiidodécaèdre y Nob. Prisme à douze pans , avec les facettes de Tannulaire.

5. Surcomposée , Nob. Prisme à douze pans ; bords des bases répondant aux faces primitives du prisme, chacune remplacée par cinq facettes parallèles plus inclinées sur les bases. Ce cristal complet auroit 74. faces ou facettes. 11 eu cxistoitun semblable dans la collection de M. de Drée. Il avoit environ cinq lignes de longueur.

6. Raccourcie, Nob. Les formes précédentes, dont le prisme est tellement court qu'il est à peine sensible.

Parmi les formes indéterminables, il faut noter lanéphéline:

7. Granulaire ou granuliforme. En petites masses granu- laires ou en petits g'rains arrondis; commune au Vésuve.

8. Lamellaire. Composée de petites lames entrelacées , qui ne sont que des cristaux de la forme raccourcie. Cette néphéline nous semble être une variété de Yeisspaih de \Yer- ner. Elle est commune au Vésuve.

9. Capillaire. En petits filamens capillaires , ou en petits prismes filiformes et couchés, d'un gris blanchâtre. Se trouve d.ans la lave de Capo di Bove, dite selce-romuno.

Parmi les variétés données par la transparence , il faut distinguer les néphélines :

10. Limpide. Au Vésuve, à Albano.

11. Demi-transparente. Au V ésuve.

12. Nébuleuse. A Capo di Bove.

i3. Opaque et d'un hlanc de lait. A l'île Ponce.

La néphéline a été découverte au Vésuve , parmi lesbhocs rejelés par l'ancien volcan de la Somma. Ces blocs ne sont point des matières fondues. La néphéline y est associée au grenat , à la méionite , à l'idocrase , au pyroxène , au mica , à la haijyne, à la chaux carbonatée, auspinelle, etc. Il pa- roît que c'est à Ferber qu'on doit cette tlécouverie.

Dolomieu reconnut ensuite celte substance en cristaux lim- pides dans les blocs volcaniques qu'on trouve dans le Pepe- rino à Albano. Ces blocs sont dans le même cas que ceux du Vésuve, c'est-à-dire, qu'ils n'ont pas été fondus.

Dolomieu avoit observé également lanéphéline delà lave de Capo-di-Bove -, mais connue à cette époque on ne con- noissoit pas bien celte espèce minérale , il se contenta, sur les étiquettes de sa collection , de signaler cette substance comme

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digne d'être étudiée. C'est à M. Fleuriau de Bellevue qu'il étoit réservé de nous faire connoîlre la néphéliiie de Capo- di-Bove. Cet habile géologue saisit les rapports de cette né- phéline avec celle du Vésuve ; mais il crut y observer une différence assez importante pour l'en séparer; c'est celle de faire gelée à froid avec l'acide nitrique , lorsqu'on la projette en poudre dans cet acide. En conséquence , il la nomma pseudo-sonimite ou pseudo-néphéline.

Comme l'on a reconnu depuis que la néphéline du Vé- suve faisoit gelée , il n'y a plus de raison de séparer la pseudo- néphéline de la néphéline, et l'on doit, avec Delamétherie, les réunir en une seule espèce. La néphéline de Capo-di- Bove est en très-petits cristaux primitifs et annulaires , d'un gris sak, translucides, implantés et couchés confusément à la surface des fissures et des cavités de la lave très-curieuse de Capo-di-Bove , aux portes de Rome ^ et employée au pa- vage de celte ville, sous le nom de selre-romano. Dans ces mêmes cavités, se trouve la jMéhlite ,( autre substance dont nous devons la connoissance à M. Fleuriau de Bel- levue ) , des cristaux de pyroxène , de néphéline capil- laire, du mica, du péridot cristallisé , etc. Cette lave , qui nous paroit devoir constituer une espèce distincte entre les laves trapéennes et les laves pétro-siliceuses , forme une cou- lée, La néphéline appartiendroit donc aussi à des matière» volcaniques fondues ; et , à ce sujet , nous oserons avancer qu'il se pourroit bien faire que certaines laves qu'on dit être à base de feldspath, fussent à base de népliéline ; par exem- ple , la lave sortie du Vésuve en lyg^- ^" P^"'^ citer aussi des laves avec néphéline aux îles Ponces. J'ai vu parmi les laves lilhoïdes pétro-siliceuses de ces îles , rapportées par Dolomieu , une lave gris-rougeâtre , de la nature de celle qu'on nomme klingstein, dont les cellules et les petites fentes contenoient de petits cristaux hexaèdres d'un blanc de lait , aisément fusibles en verre blanc, et faisant un peu de gelée dans l'acide nitrique.

La néphéline est encore indiquée dans les laves de l'île de Bourbon. On avoit cru l'avoir trouvée parmi les matières volcaniques des bords du lac Lach, près d'Andernach. Un échantillon que j'avois reçu sous ce nom , m'a présenté un grand nombre de cristaux hexaèdres très-peliis, enlacés dans de l'amphibole. Ces cristaux sont absolun»ent infusibles au chalumeau , et se dissolvent lentement dans Tacide nitrique- A ces caractères, on ne sauroit méconnojlre la chaux phos- phatée. A leur aide , on pourra distinguer cette substance sa- line de la néphéline, qui du reste ressemble beaucoup à U

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chaux phosphatée , mais qui n'est point phosphorescente par la chaleur.

Le nom de sommile , donné par Delamétherie à cette pierre , rappelle le mont Somma , on l'a d'abord trouvée ; et celui de néphéline, imposé par M. Haiiy, fait allusion à la propriété qu'a cette substance , lorsqu'elle est transparente , de devenir nébuleuse dans l'acide nitrique. Ce nom dérive du grec , nèphélé ^ nuage, (ln.)

INEPHELION , Nephelliim. Arbrisseau à feuilles alternes, pinnées, sans impaire, et à quatre folioles opposées, ovales, aiguës, entières et lisses, à Heurs disposées en grappes courtes, qui forme un genre que Lablilardière a depuis peu réimi au Litchi.

Ce genre , qui avoil été placé par erreur d'observation dans la monoécie pentandrie, offre pour caractères, selon Labli- lardière: un calice de quatre à cinq dents; point de corolle ; cinqàsixétamines; deux ovaires supérieurs, chargés chacun de deux styles bifurques; deux baies rouges, uniloculaires, mo- nospermes , dont une avorte souvent, couvertes en dehors de longues épines flexibles, et s'ouvrant par leur bord in- terne.

Cet arbrisseau vient de l'Inde. La pulpe de son fruit est un peu acide, et sert, dans les Moluques , à apaiser la soif des malades attaqués de fièvres malignes. On l'a employé avec succès contre les dyssenteries. (b.)

NEPHRANDRA. Arbrisseau de la Jamaïque, à feuilles quinées, entières , et à fleurs en grappes rameuses, axillaires, dont Cothénius a fait un genre que Swartz a réuni aux Ga- TELIERS {viie.v umbrosa)^ ce qui est aussi le sentiment de Willdenow. (ln.)

NEPHRETIQUE {hoîs). C'est celui du Ben. Cb.) NEPHRETITE. M. Delamétherie comprend sous ce nom la. stéatileverie iransludde ^ et quelques variétés de la ser~ penilne noble , V. Talc , Stéatite et Serpentine, (ln.)

NEPHRIT. C'est le nom que Werner donne au Jadb NÉPHRÉTIQUE, qu'on nommoit AX\c\cxïncmeni pierre néphréti- (jue. Ocken a étendu ce même nom an jade usden ^ qui est .son néphrite de la Nouvelle-Zélande et le bielsteirt de Werner. F. à l'article Jade , vol. XVI , pag. 4^71 et 472. (ln.)

NEPHRODION, A'^e/jZ/rof/Zi//». Genre de plantes de la famille des Fougères , établi par Richard aux dépens des PoLYPODES de Linnœus , et mentionné dans la Flore de V Amé- rique septentrionale de Michaux.

Son caractère consiste en des points épars ou régulière- ment distribués sous les expansions des feuilles , d'abord cou-

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verts d'une membrane en forme de croissant , et ensuite nus.

Les polypodes marginal, en crête ^ fragile^ dryopière^ fougère femelle, et plusieurs autres, font pcfrlie de ce genre que Swariz a nonmié Aspidion , qui rentre dans ceux appelés Cétérac par Décandolle, et WooDSir. par K. Krovvn. (b.) NEPHROJE , Ncphroja. Arbrisseau grimpant, sans vrilles, velu, à feuilles ovales, planes , glabres, marginées , à (leurs blanches , qui forme , selon Loureiro , un genre dans la monoécie hexandric, et dans la famille des ménis- permes.

Ce genre offre pour caractères: un calice de cinq folioles ovales- aiguës, colorées, dont deux alternes plus petites; une corolle de trois pétales subulés, courbés ; six écailles petaliformes, fendues; six étamines dans les fleurs maies; un germe supérieur, ovale, sillonne, surmonté de sixstiguia- les oblongs , presque sessiles, dans les fleurs femelles; six petits drupes, presque réniformes , renfermant cbacun une petite noix liérissce et monosperme.

Le népliroje se trouve dans les forêts de la Cocbinchine. Ses fleurs mâles sont portées sur des grappes oblongues, et ses fleurs feuielles sur des pédoncules trillores placés sur des rameaux dlfférens. (b.)

Ce genre, très-voisin de Vepilaterhim de Forsler, est réuni, ainsi que ce dernier , au rorculiis , par Décandolle, qui, sous le nom de cocailus, a compris presque toutes les espèces de menispermiim des botanistes, (ln.)

NEPHROME , Nephroma. Genre de Lichen établi par Achard, et qui rentre dans ceux appelés Peltide, Peltigere et SoLORI^E. (b.)

NEPHROPS, iV<?/?A/o;7s. Genre de crustacés établi par , !!\L Léach , et qui est un démembrement de celui des écreinsses (^aslaci) de Fabricius. Il en diffère : i.° en ce que les yeux sont en forme de rein et brusquement beaucoup plus gros que leur pédicule; 2." en ce que l'écaillé de la base des antennes latérales s'avance au-delà de l'extrémité de ce pédoncule. Ce genre a pour type V ècreinsse de Norivége ( cancer norwegicus , Linn. ). F. l'ouvrage de M, Léach, ayant pour titre: Malacosiraca podophlhalma Britanniœ ^ fuse. 7, tab, 26. (l.)

NEPHROSTE , Nephrosta. Nom donné par Necker à

J'enveloppe des poussières des lycopodes. V. ce mot. (p.-b.)

NEPHROTOME, iVe/^Z/ro/oma, Meig., Latr., Oliv. ;

tipida , Linn. , Fab. M. Meigen nomme ainsi un genre d'in-

ficcles à deux ailes, formé avec une iipuk de Fabricius, qui

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ayant d'ailleurs, ainsi que les £;randes espèces , les aile^ écar- tées, les yeux ovales enliers, la trompe courte et terminée par deux lèvres grandes et relevées , et le dernier article des palpes très-long elnoduleux, a les antennespresquesélacées, simples, avec le premier et le troisième article cylindri- ques, et la plupart des autres arqués ou comme réniformes. La tipule qui a servi de type à l'établissement de ce genre est celle que Fabricius nomme dorsale {dorsalis). Elle est jaunâtre , avec le dos obscur , les ailes vitrées et ayant au bord extérieur une tache noire. Son corps est long de cinq lignes et demie. M. Meigen Ta représentée dans son ouvrage sur les diptères d'Europe , 1.^'= part. , lab. 4 , %■ 6-g. 11 ne cite que cette espèce. Olivier , Encyclop. nteth. , article néphrotome ^ comprend dans ce genre plusieurs autres espèces qui , par leurs caractères, me paroissent s'en éloigner. Fojcz l'article Tipulaires. (l.)

NEPHTYS, Nephlys. Genre de vers annelides voisin des laéreïdes , établi par M, de Lamarck , sur les notes manus- crites que lui a communiquées M, Savigny, et ainsi caracté- risé : trompe amincie à la base, partagée en deux anneaux: l'inférieur long , claviforme , hérissé à son sommet de petits tentacules pointus ; le supérieur très-court , ouvert longiludi- nilement , à orifice garni de deux rangs de tentacules ; mâ- choires renfermées, petites, cornées, courbées, très-poilues; quatre antennes petites , à deux articles ; l'impaire nulle. Les yeux peu distincts ; les trois premières paires de pieds ou mamelons sans branchies , les autres pourvues de branchies qui consistent en une seule languette attachée au sommet de chique rame dorsale.

Le Nephtys de Homderg , Nephiys Hombergii, a été trouvé au Havre. Son corps est tétraèdre , formé de cent vingt-cinq à cent trente-un segmens sillonnés des deux côtés en dessus. Ses soies sont jaunes, longues et fines; son ventre est mar-* que d'une bandelette longitudinale brillante, (desm.)

NEPTUNIE , Neptunîa. Plante aquatique , vivace , à tige longue , llexueuse , radicale , garnie de distance en distance de saillies spongieuses, blanches, à feuilles sessiles, bipin- nccs , à folioles oblongues , obtuses , entières , glabres , à ileurs jaunes réunies sur un pédoncule commun, filiforme, laquelle forme , selon Lourciro , un genre dans la polygamie inonoécie.

Ce genre, qui fait partie de celui àt?. Acacies de Linnœus," offre pour caractères: un calice divisé en cinq parties; point de corolle dans les fleurs hermaphrodites , mais une de dix pétales linéaires dans les luâlcs ; dix éuiuincs ; un ovaire iu-

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pdrleur o'jlong, à style filiforme et astigmate allongé; une sili- que presque cylindrique , bivalve et polysperme.

La neptunie se trouve dans les eaux dormantes de la Co* chinchine. Elle a les plus grands rapports avec les AcACiES. On mange habituellement ses feuilles en salade , quoi- qu'elles soient de difficile digestion. Leur saveur est douce et agréable.

Willdcnow a conservé ce genre sous le nom de Desman* THE , et lui a réuni neuf autres espèces, (b.)

NEPÏUNIENS. On donne ce nom aux naturalistes qui regardent la plupart des basaltes et quelques autres espèces de pierres, comme produites uniquement parla voie humide. On appelle Vulcanistes , ceux qui soutiennent que ces mêmes pierres sont des produits volcaniques. F. Amygda- LOÏDES et Basalte, (pat.)

NEQUAMETL. Marcgrave désigne , sous ce nom brasi- lien , une espèce d'agave qui croît dans l'île de Cuba (^agaoe cubensisj Jacq. Amer., tab. ijS, fig. 28). (en.)

NEP\ , en Perse , désigne un Chameau métis , provenant d'un chameau à deux bosses » et d'une femelle à une seule bosse, (desm.)

NEREGIL. Nom arabe du fruit du Cocotier , selon Matthiolc. (ln.)

NEREIDE, Nereis. Genre de vers marins qui présente pour caractères : un corps allongé , articulé, à anneaux nom- breux , garnis de chaque côté d'une ou deux rangées de houppes de soie , avec des mamelons courts, et en outre des branchies latérales en houppes et en pinnules; des mâchoires solides , et par paires à la bouche ; deux à huit filets simples à l'extrémité antérieure du corps.

Les espèces de ce genre ont été apipelées scolopendres marines par les anciens naturalistes français , et elles peuvent en effet être comparées à des scolopendres ; car elles sont longues et aplaties, composées d'un grand nombre d'anneaux, accompa- gnés, chacun, d'un , deux ou trois pieds de chaque côté. Comme les scolopendres, elles se contournent de toutes manières lors- qu'on les prend à la main , et courent ou nagent avec une grande vélocité. Comme elles enfin , elles se cachent habi- tuellement , et saisissent leur proie au passage. Mais les nê- jéides font plus que les scolopendres. Elles se filent un léger tissn de soie dans les inégalités des rochers, des madrépores , des coquilles à surface raboteuse , ou se font des trous dans la ferre qu'elles garnissent de même , et qu'elles prolongent quelquefois, au-dessus de la surface, en agglutinant à leur réseau des corps étrangers. C'est de ce$ retraites que les né-

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réidcs arrêtent leur proie, en faisant rapidement sortir, par chiacement, la partie antérieure de leur corps qui ctoit con- tractée. J'ai eu souvent occasion d'observer leur manœuvre.

Il y a tout lieu de croire que les anneaux des néréides aug- mentent en nombre à mesure qu'elles avancent en âge-, car j'ai remarqué de grandes variétés à cet égard dans la même es- pèce ; et presque toujours les plus grosses en avoient le plus.

Lorsqu'on coupe une néréide en trois ou quatre morceaux , les fragmens continuent de se mouvoir pendant quelque lems, mais meurent ensuite, excepté la tête <{ui est restée assez long-temps en action sous mes yeux, pour que je sois fondé à croire qu'elle peut se conserver et reproduire un animal complet.

Linnœus a divisé ce genre en deux sections: la première comprend les néréides qui ont des mâchoires ; ce sont les véritables néréides , celles dont j'entends traiter dans cet ar- ticle : la seconde, les néréides qui ont une trompe. Cette di- vision , portant sur des parties essentielles, semble com- mander l'établissement d'un second genre; mais les espèces en sont si imparfaitement connues , que les efforts de Pallas , Bruguières et Lamarck, pour le former ont été infructueux. Ce dernier, en conservantlesTÉRÉBLLLESde Linnceus, que le second avoit réunies aux néréides , a cru satisfaire aux vues des naturalistes; mais j'ai fait, sur le vivant, des observations qui ne me permettent pas de croire que les deux espèces citées comme type de ce genre puissent être séparées des Né- réides. Voyez TÉRÉBELLE , POLYDORE , OU Spto et EUNICE , genre fort voisin des néréides que j'ai établi dans ïllist. mit. des Vers , faisant suite au Buffon de Delerville.

Le genre néréide , en y comprenant les espèces dont la bouche n'a pas de mâchoires , renferme trente-deux espèces connues , dont les principales sont :

La Néréide crivRÉR , qui a les pédoncules antérieurs en panache, et cinq tentacules presque égaux. Elle est fi- gurée dans VHisl. nat. des Vers., faisant suite au Butfon , édi- tion de Deterviile, p, 5, fig. i 5. Voy. pi. (V i8. Cuvier la place dans son nouveau genre Eumice. La Néréide SA^- cujNE, figui'èe par Montagu, pi. 3 du onzième volume des transactions de la Société Linnéennc de Londres , et qui vit sur les cotes d'Angleterre , s'en rapproche infiniment.

Je l'ai trouvée sur les côtes d'Amérique. Elle fait dans la terre un trou garni d'un tube cartilagineux. Sa longueur est d'un pied , et sa couleur d'un bleu cuivré très-brillant.

La Néréide phosphorique est transparente , à peine visi- ble. Elle se trouve dans toutes les mers, et est phosphorique pendant la nuit. Je l'ai fréquemment observée.

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La Néréide PÉLASGIE^'^!E est convexe en dessus, et ses pé- doncules sont couverts de verrues. Elle se trouve dans touit- s les mers, et est phosphorique comme la précédente , ainsi que je m'en suis assuré plusieurs fois.

La Néréide frangée est aplatie; elle a les pédoncules filiformes , portant des tentacules en forme de lentilles. Eili* se trouve dans la mer du Nord.

La NÉRÉIDE isORwÉGiENî^Eest convcxc, et ses pédoncules portent une plumule. Elle se trouve dans la mer du Nord.

La NÉRÉIDE PiN>ÉE est convexe, et ses pédoncules porient deux plumules. Elle se trouve dans la mer du Nord (i).

La NÉRÉIDE FASCiÉE, est cylindrique , blanchâtre , fas- ciée de rouge, et a sept tentacules simples. Elle est figurée pi. G. i8.

La NÉRÉIDE FRONTALE est aplatie, pâle, ponctuée de brun , avec une grande tache sur la têle et huit pédoncule.* simples et pétalifères. Elle est figurée sur la même planche. J'ai observe ces deux espèces dans la baie de Charleston , Caroline du Sud. Elles se forment un léger fourreau dans les cavités des pierres , des coquilles, du bois. Je les ai décrites dans la partie des vers , faisant suite au Buffon , édition de Deterville.

La NÉRÉIDE CINCINNATE est figurée dans le troisième volume des nouveaux Mémoires de la Société de Copen- hague.

La NÉRÉIDE DES Lacs, de Linnœus, constitue aujourd'hui le genre Stylaire. (b.)

NERELDEE, Nereidea. Genre de plantes établi par Slackhouse, Néréide Biilanniqut ^ aux dépens des VaRLCs de Linnœus. Ses caractères sont: fronde cartilagineuse, très- rameuse, aplatie; rameaux sétacés à leur extrémité ; fruc- tification inconnue.

Ce genre renferme trois espèces, dont une est figurée pi. 12 du grand ouvrage sur les varecs , du même auteur, (b.)

NEREIS. Nom latin à&s Néréides. Ce nom a été appli- qué à quelques animaux qui ne font plus partie de ce genre. Ainsi le nereis cylindrariu de Pallas est une Terébelle, et le nereis conchylega est une Amphitrite. (desm.)

NEKEMIR. Avicenne donne ce nom arabe à la fleur et à la fane de la Pivoine, (ln.)

(i) Une très-belle figure de celle espèce sevoit pi. 6, vol. 9 et pi. 3, vol. Il, des Transactions de la Sociclé Linnéunne «lu Loiulrcs.

NERFS ( et Seî^sibilité , Sympathie , Passions ) , N£Ûp<«, Neivi. Ce sont des cordons ronds, blanchâtres, en- reloppcs d'une gaîne on tunique membraneuse commune à tous, appelée némlème par Reil , laquelle paroît émaner de la pie-mère, méninge qui recouvre le cerveau et enveloppe la moelle épinière. Ces cordons nerveux sont composés de plusieurs rameaux fibreux, chacun dans sa gaine , contenant dans leur intérieur une pulpe médullaire ; ils se rendent, la plupart, de toutes les réglons du corps , soit à la moelle épi- nière , soit au cerveau, chez les animaux vertébrés, soit enfin St des ganglions ou des centres nerveux plus ou moins consi- dérables, situés en diverses parties internes chez les animaux invertébrés (i).

Cet ensemble de ramifications composant le ou les sys- tèmes nerveux, est le premier ressort de la sensibilité , de l'activité des animaux, ou le principe excitateur de leur vie. Réservoir des sensations , il devient , surtout chez les espèces des classes supérieures , l'organe de l'intelligence , et mérite , à ces titres, un intérêt capital dans son étude ; il offre môme la base la plus essentielle pour leur classification naturelle.

Que seroient les êtres sans cette faculté de sentir, de con- noître les corps extérieurs , ou de sortir par la vue , par l'ouïe et surtout par la pensée , hors de la simple existence du végé- tal, de ce sommeil de la vie? Commeut agirions-nous sans ce principe d'énergie qui fait cooLracler nos muscles à vo- lonté , qui nous transporte à notre gré par toute la terre, comme il élève l'oiseau dans les champs de l'air r* Il falloit doncune source de vigueur, de sentiment, de passion qui nous rendît capables de jouir comme de souffrir; c'est cette faculté merveilleuse , encore plus que celle de l'aimant dans le fer, qui distingue un corps animé de son cadavre. Elle réside ma- nifestement dans la pulpe médullaire des cordons nerveux, et dans la moelle épinière , avec le cerveau , qui deviennent les centres de la sensibilité , des sensations et des idées. Ainsi le système nervcuxest le gouvernement de la machine animale, y,yiuo)iUci', les corps vivans ne sont plus ou moins perfec- tionnés ou développés dans toutes leurs facultés que par ce système. Le foyer principal , situé à la lete , comme dans une citadelle , imprime de ses volontés suprêmes à tout le reste de l'organisation , ainsi qu'un roi dans son palais envoie ses ordres jusqu'aux extrémités de son empire. Quel pouvoir

(i) Les anciens, romme encore le vulgaire aujourd'hui , conîon-' «]enl los tendons, les ligamens, les aponévroses et autres tissus blancs fibreux, avec les nerfs. M:^is ceux-ci ne sont pas contractiles par les slimulans, mînip par le î^alvanisme, quoique trcs-sensibles , tandis «|ue Ici liiéus fibreux et musculaires «ont éiuliiemnient contractiles.

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élônnant fijit sur-le-champ mouvoir notre orteil par une simple idée !

Kegis ad exemplar tolus coiiipoiiltur oibis !

Cependant le nerf lui-même n'est aucunement contractile sous quelque stimulant que ce soit, pas même par les irrita- tions du galvanisme, tandis qu'elles excitent des crispations spasmodiques si énei'giques sur la fibre musculaire vivante. P.ir-là se distingue le nerf de la fibre musculaire; il est pouf elle l'agent excitateur; il semble lui transmettre rélGCtricité galvanique. Cet effet paroît manifeste surtout dans la torpille et les antres poissons électriques; car leur batterie composée d'aponévroses et de divers tissus fibreux qui se frottent, n'est chargée d'électricité qu'à l'aide dés nerfs qui s'y rendent. Si l'on coupe ceux-ci , quand même tout le reste conserveroit son intégrité , la commotion électrique n'a plus lieu ; et , au contraire, si l'on circonscrit par une incision toute !a batterie électrique , excepté les nerfs qui s'y rendent, la commotioiï continue parfaitement. ( Voyez Todd , Phi/os. irons. , 1817 , partie /, article IV. ) La substance nerveuse paroît donc la conductrice d'un agent excitateur des autres organes de l'éco- nomie animale , dans l'état vivant.

Les Corps organisés ( Voyez cet article , ) végétaux et animaux , se composent de trois principales substances simi- laires ; savoir : la cellulosiié , {ajibre, la pulpe médullaire , qui entrent plus ou moins généralement dans les divers tissus de leurs organes.

La cellulosité domine dans l'enfance et compose la trame première de toute l'organisation végétale ou animale. Les tissus fibreux sont la partie ligneuse chez les végétaux , ou musculaire, tendineuse, etc., chez les animaux. La substance médullaire envoie des prolongemens du centre vers la cir- conférence, ou de la circonférence au centre , chez les végé- taux les plus complètement organisés, comme chez les ani- maux les plus accomplis dans leur structure ; cette substance est l'élément le plus précieux ou le plus vital de toutes ces créatures , et destinée au gouvernement de la machine orga- nisée.

Mais le végétal est distinct de I'AnimâI ( Voyez cet article), surtout parce qu'enraciné et immobile sur le sol, la sensibi- lité ne lui fut pas accordée , du moins à un degré bien mani- feste. Quoiqu'on ail soutenu que le resserrement du feuillage de la sensitive au moindre attouchement etoit l'effet de la sensibilité, on le rapportera tout aussi bien à cette contracûîn que la fibre vivante est susceptible d'éprouver, sans le con-, cours du nerf, et sans la sensation proprement dite. C'est par

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le jeu de ce mécanisme inconnu qu'on désigne Sôus le nom à^ ivrilablUlé , lequel s'opère dans des parties dépourvues de nerfs chez les animaux, et ne transmet aucun témoignage de plaisir ni de doul»!ur; il s'y exerce même par fois à l'insu de la volonlé et de la conscience.

j\ !a vérité , Robert Whylt et les autres antagonistes des Hailériens ont multiplié les expériences pour prouver que la sensation et l'irritation émanent de la même force nerveuse ; que ces deux forces se trouvent réunies et inséparables dans la fibre musculaire; qu'enfin, si celle-ci est insensible, eil« demeure inactive sous les excitans les plus énergiques. ÎN^éan- moins la séparation de ces deux propriétés, quoique rare chez les animaux, est remarquable dans plusieurs circonstances de paralysie, tantôt les seuls nerfs du mouvement cessent leur action , et tantôt ce sont , au contraire , le&jseuls nerfs du sentiment ; ainsi l'on voit des régions musculaires privées de sensibilité et non de contractililé volontaire ; et d'autres pa- ralysées dans leurs mouvemens, quoique conservant la sen- sibilité. Chez les plantes, l'on ne peut guère supposer rai- sonnablement le sentiujent moins de se servir du privilège ■des poêles, qui placent des dryades dans les troncs des chênes, ou qui transforment Narcisse en Heur) , il faut bien recon- noîlre l'existence de l'irritabilité jusque dans des parties qui n'en parolssent guère susceptibles. Ainsi , la piqûre d'un in- secte et le venin acre qu'il y répand, déterminent, dans les feuilles ou les tiges , des gondemens, des excroissances, fort analogues à celles que cause une piqûre de guêpe sur nous. Mais si les plantes sont en effet irritables , rien n'y démontre la présence des nerfs comme chez l'animal ; et il seroit cruel à la nature d'avoir donné la douleur à des créatures inno- centes, incapables de la fuir , à cause de leur immobilité et de leur implantation par des racines.

Au contraire , les animaux possèdent un ordre particulier de facultés qui leur attribue les sentimens de douleur ou de plaisir à l'occasion du choc ou de l'application des substances extérieures , ou non incorporées à leur organisation. C'est par ce moyen qu'ils discernent si ces substances leur sont utiles ou nuisibles, qu'ils peuvent s'approcher ou fuir, et se gouverner à leur volonté. Or, cette source de sentiment et de connoissance réside uniquement dans le système nerveux,

Eien qu'on ne connoisse guère les fonctions du canal mé- dullaire, et de sesutricules réparties en rayons du centre vers la circonférence de la tige des végétaux, il concourt évidemment à la formation soit des feuilles, soit des bourgeons, et sur- tout dos organes de la fructification. El ceux ci étant les plus iéiuiueuuucnt irritables chez un grand aombre de plantes, il

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paroît donc que cette substance médullaire , qui abonde sur- tout pendant la jeunesse , est rélénient le plus vital ou do- minateur du végétal, comme la pulpe nerveuse l'est pareille- ment chez les animaux. Si Ton objecte que des troncs de saales et d'autres arbres peuvent vivre sans moelle , du moins celle-ci subsiste nécessairement dans leurs rameaux pour leurs fleurs ou leurs fruits.

Toutefois, en laissant à part ce qui concerne le végétal, dans lequel on ne trouve pas de nerfs proprement dits, ni de sensibilité bien évidente , puisque nous en distinguons leur contraclilité (que Haller et d'autres physiologistes nomment irnlahililé') , venons au système nerveux qui dirige la vie elles fonctions du corps animal.

§ I, Ben formes du Système neroeuûc simple ou composé des animaux.

Le règne animal, dans toute son étendue et la variété presque infinie de ses espèces, présente trois principales divi- sions dans la forme du système nerveux; ce qui établit trois modes généraux de la vie de ses créatures. Les plus simples, les plus imparfaits des animaux, suivant l'ordre de l'organi- sation, n'ont point, à proprement parler, de système ner- veux, visiblement au moins; mais la prompte conlractilité qu'ils manifestent, le sens du tact qu'ils exercent pour saisii* leur nourriture , et sans doute aussi je goût qu'on leur doit supposer, puisqu'ils savent rejeter ce qui ne peut les alimen- ter, tout annonce en eux des lueurs de sensibilité qu'on ne sauroit méconnoître , quoiqu'un célèbre naturaliste ait cru devoir les désigner sous le nom d'animaux apathiques ; quali- fication injurieuse plutôt que vraie.

i.° Considérations sur V existence probable de ï élément nerveux chez leszoophytes. L'observation la plus attentive de la structuré interne de ces animaux de forme rayonnante , tels que les méduses ou acalèphes, les actinies et porpites, et surtout le^ échinodermes, comme les astéries, les oursins et les holothu- ries, présente en eux différens viscères, des sacs inteslinaujç ou des cavités creusées dans une chair plus ou moins glai- reuse, demi-transparente comme de la gélatine , et dont les fibres sont peu apparentes. Il y a des sortes de granulations un peu plus opaques dans ces masses charnues. M. Tiede-7 mann, qui a publié une anatomie des astéries, couronnée par l'Institut de France, est porté à croire que des lignes oa cordons blanchâtres , rayonnans, qui, partant d'autour de la bouche , parcourent l'étendue de chacun des cinq bras des étoiles de mer et des divisions des holothuries , sont une sorte de système nerveux, pulpeux ou peu consistant, de même

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que les chairs de ces zoophytes. En effet , si dans remLryon humain, jusqu'à trois ou quatre mois, l'intérieur du cerveau est rempli , au lieu de la pulpe cérébrale , d'une humeur gé- latineuse ou albumineuse comme du blanc d'œuf , lequel de- viendra plus opaque et plus épais ensuite (Harvey, de Générât. ^ p. 234. ) , tout comme la noix verte est gélatineuse avant d'ac- quérir l'élat d'amande , pareillement la matière médullaire Sera plus liquide chez des animaux si gélatineux, et plus solide chez les races de constitution plus sèche.

Les polypes, les hydres montrent aussi dans leurs chairs transparentes de petites granulations, qu'on peut considérer comme des molécules nerveuses, de très-petits ganglions ou centres de sensibilité et de vie, répartis, ou plutôt mélangés et comme fondus dans la substance même de ces animaux , pour Timprégner de seusibilllé et de vie. On doit remarquer aussi que ces êtres sont non-seulement sensibles au moindre contact des corps , mais même à la lumière qu'ils recher- chent , quoique privés d'yeux. De plus, chacune de ces gra- nulations semble être telleiiiont un germe de vie , un centre de vitalité , qu'elle bourgeonne souvent , qu'elle répare les parties de l'animal qu'on ampute , et que l'animal divisé re- forme un tout, de même qu'une racine contenant divers germes ou bourgeons (une pomme -de -terre, par exemple ), incisée en un grand nombre de portions, reproduit de nou- velles plantes entières, comme par boutures.

Il paroît donc très-probable que les zoophytes ne sont nul- lement dépourvus de l'élément nerveux, lequel, disséminé dans toute la masse de leur corps , le rend partout sensible, reproductible. Mais il n'y établit pas un centre unique, par cette disposition même , comme le fait le système nerveux coordonné des animaux dont l'organisation a plus d'unité , d'individualité , et présente des fonctions spéciales dans ses diverses branches, lesquelles se correspondent entre elles, ou se nouent l'une à l'autre, comme nous le verrons.

Et s'il semble difficile de comprendre comment des molé- cules nerveuses , sans être contiguës dans le corps animal , peuvent cependant agir de concert , nous en verrons des exemples dans des parties d'animaux bien plus compliqués , même dans le coi-ps humain ; les dernières ramifications ner- veuses qui se distribuent aux muscles et à la peau, quelque déliées qu'on les suppose , puisqu'on ne peut plus les suivre même au microscope, ne sont pas sans doute tellement voi- sines qu'elles enveloppent tous les points du corps, tel qti un réseau ; cependant toutes ces parties sont ou deviennent sen- sibles ; ce qui a fait penser à Keii que les nerfs avoientune sorte d'aluiosplicre de .sensibilité qui s'étendoit à quelque distance

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<l'eux(Joann. Christiani P*.eil, Exercilationum ana/om. (asc'ic. i, déstructura nervorum , Halee Saxon, 1796, fol. pag. 28; et du même : Archh. Jiir physiol. B. VI, pag. 267 ; opinion sou- tenue aussi par M. Humboldt) , tout comme l'électiicité galvanique de la torpille ou du gymnote agit jusqu'à certain éloignement.

Le tour de la bouche ou des orifices par lesquels les zoo- phytes prennent leur nourriture , paroît elre surtout la région la plus sensible : nous verrons , en effet , que c'est toujours vers Torigine du canal digestif que le système nerveux se dé- veloppe davantage parmi tous les animaux , -parce qu'ils doi- vent se diriger par-là pour chercher leurs moyens d'exis- tence.

2.° Des formes du Système neroeux- chez les vers ^ les insectes y les crustacés ^ les mollusques. Tous ces êtres si variés et si nom- breux ont un système nerveux ou directeur de leur économie , assez diversifié sans doute , mais qui présente un caractère commua à tous ; celui de porter des ganglions , de petits nœuds , ou centres , ou renforcemens nerveux , auxquels vien- nent aboutir divers rameaux, et d'où repartent d'autres bran- ches pour entretenir la communication harmonique ou les sympathies , et Tunllé dans le corps animal. De vient que nous désignons ces créatures en général sous le nom d'aw- maux à système nen>eu:JC gan^lionlque , qualité commune à tous ceux qui sont plus élevés dans Téchelle de Torganisalion que les zoophyles, jusqu'aux vertébrés, chez lesquels nous ver- rons ca outre un second système nerveux plus compliqué encore.

Ainsi, tous les animaux sans vertèbres, supérieurs aux zoophytes, ont des nerfs visibles, rattachés en un système unique par divers ganglions ; ce qui fait que les individus ne sont plus mullipliables ( à peu d'exceptions près) par bou- ture ou «livision , comme leszoophytes à molécules nerveuses dispersées dans leur économie. Il y a déjà des sexes séparés dans La plupart, et ainsi des accouplemcns; par cette raison, il faut quelques sens pour rcconnoilre d'autres individus de leur espèce, et une tête. H y a manifestement des instincts plus ou moins développés , c est-à-dire , des impulsions spon- tanées de l'organisation vers un but saluîaire à la vie et à la propagation de ces créatures. (F. Instinct).

Mais, quoique ce système nerveux compose un tout unique par le moyen des ganglions ou nœuds qui rattachent les di- vers rameaux de ces nerfs distribués à toutes les parties du corps, ses forces vitales sont disséminées dans les organes; ceux-ci opèrent leurs fonctions sans être dirigés par la volon- té , ni une inlelligence, à proprement parler. C'est ainsi que,.

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pendant noire sommeil, le cœur, les poumons, nos viscères digestifs ou élaboraleurs, exécutent des opérations très-com- pliquées, sans rinlervenlion de nos facultés volontaires , mais par le moyen de notre système nerveux ganglionique , ap- proprié à ces fonctions involontaires. ( Elles composent la Fie organltjue de Bichat ).

Ainsi , \ts, animaux invertébrés ne possédant que ce sys- tème ganglionique , ne jouissent que d'une vie involontaire , spontanée. Us sont régis par le seul instinct, et manquent de toute intelligence ou de faculté d'apprendre ; aussi sont-ils scwans dès leur naissance ; la nature les ayant construits de manière que leur système nerveux recèle toutes les directions <!es mouvemens que doit déployer leur économie dans le cours de leur existence et dans les diverses phases de leurs juctamorphoses. Mais comme ils ne sont ni libres , ni ca- pables d'apprendre , ils ne chang«nt jamais rien à leurs actes ; ils ne peuvent pas être instruits; c'est parce qu'ils manquent d'un véritable cerveau , bien qu'ils aient un ganglion principal qui en tient lieu, et qu'ils possèdent une tête; ce qu'on n'ob- serve en aucun des zoophyles.

Ce qui prouve, déplus, que toutes les facultés vitales des in- vertébrés sont encore foiblemcnt unies, ou se trouvent, aucon- Iraire, répandues entre les divers centres ganglioniques, c'est que l'amputation de quelques-uns de ces centres ne détruit pas l'organisme ; ainsi l'on enlève la tête à des lombrics ter- restres, à des naïdes, et ces vers en reproduisent d'autres ; Jes colimaçons réparent également les diverses parties qu'on leur ampute. Des mouches volent ou des sauterelles s'accou- plent même sans tête , etc. ; preuve que le ganglion antérieur Tj'est pas le siège principal d'où émanent des volontés et une intelligence directrice de l'économie, mais que la force vitale réside dans l'ensemble des ganglions ou du système nervcu.^ réparti dans tout leur corps.

Chez les plus simples des vers , tels que les intestinaux, le système nerveux, chez les espèces l'on â pu l'apercevoir, consiste ei) deux cordons latéraux le long du corps , et s'atta- chant près de la bouche à une sorte de ganglion circulaire qui environne l'œsophage comme un anneau. ( Foy. Intes-

11NAUX.)

Ces deux cordons et ce collier œsophagien sont des dispo- sitions communes à toute la série des animaux mollusques et articulés, avec cette différence que des ganglions ou nœuds plus ou moins rapprochés entre eux , réunissent les deux cor- dons en un seul , qui s'étend le long de l'abdomen , et non pas du dos, chez les articulés.

Ainsi , dans la sang^sue , le ver de terre , il y a d'abord un

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«îouMe ganglion tenant lieu de cerveau placé sur l'œsophago ; puis une branche nerveuse descend de chaque côté coumie vn collier, se rattache en-dessous de cet œsophage par nu second ganglion , descend le long du ventre ; et à chaque aiil re ganglion que porte ce double cordon de distance en distance , il en sort, pour l'ordinaire , deux ou quatre petits filels ner- veux , qui se distribuent soit aux trachées respiratoires de l'animal , soit à ses viscères, à ses organes génitaux, ou bien aux muscles de ses anneaux. En eCCet, il y a, pour l'ordinaire^ autant de ganglions que de divisions ou de segmens parlico- liers chez les insectes et les vers ; de sorte que chaque aili- culalion de ces espèces est vivifiée par son centre nerveux. Aussi le ver de terre porte un très-grand nombre de ganglions le long de son double cordon abdominal ; la sangsue en offre environ vingt-trois plus écartés, etc. Les aphrodites et am- phinomes ont une distribution analogue de te^irs nerfs.

Chez les insectes à métamorphoses plus ou moins com- plètes, le système nerveux subit souvent des déploicmens ou des resserremens particuliers. Ainsi,, chez la larve du scarabée iiasicorne, qui vit dans le tan , les ganglions de son double cordon nerveux abdominal sont tellement rapprochés, qu'ils composent une sorte de tige noueuse qui ne s'étend pas à la moitié de la longueur de celte larve ; néanmoins ils envoient , en rayonnant , des rameaux nerveux à toutes les régions infé- rieures et latérales, comme aux trachées, aux intestins, ciux parties destinées à former les organes génitaux. Il y a de plus un nerf particulier, récurrent, qui se porte à l'estomac, i-t qui vient du collierœsophagien. Lorsque l'insecte a subi sa dei - ïiière forme et déployé ses organes sexuels avec ses ailes, etc., les ganglions de son double cordon nerveux se sont éloignes et répartis plus également à chacun des anneaux du corps de ce scarabée. L'on peut conclure de ces changemens intérieurs, que le système nerveux (qui recèle, dans tous les animaux , les causes de leurs mouvcmens,ou de leur autocratie ) peut suggérer aux insectes leurs divers instincts si merveilleux, soit dans leur état de larve , de chrysalide , soit dans l'état parfait ou déclaré. De même que le cylindre noté d'un des orgues portatifs (ou iureîutaines') présente différens airs aux touches des tuyaux d'orgue , selon qu'il est avancé ou reculé de quel- ques crans ; l'on peut présumer de même, que le système nerveux ganglionique de ces petits animaux est susceptible d'indiquer différentes manœuvres à chaque individu , selon qu'il se trouve disposé à l'état de chenille ou de papillon. ( Voyez en outre les travaux de Swammerdam , de Lyonnet , de M. Cuvjer, etc. , pour les distributions des différens nerfs dans les insectes J

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Les crustacés, tels que les écrevisses, crabes, elles citrhi- pèdes, ces singuliers animaux qui habilent dans les balanîves, les conques anatifères, présentent également un système nerveux muni de ganglions, avec un double cordon longitu- dinal , ainsi que les insectes, à quelques variétés près. Néan- moins , Wlilis et d'aulres anatoiuistes ont remarqué que le ganglion cérébral des écrevisses étoit le plus gros , et formé de quatre lobes ou tubercules. Il envoie aussi des cordons de nerfs aux yeux , de même que cbez les insectes, et aux an- tennes , aux mandibules , aux autres organes des sens ; par-là il se rapproche de la nature du cerveau des animaux plus composés. Les crustacés ayant des branchies, et par consé- quent un cœur, un système de circulation , un foie et d'autres viscères plus compliqués que les insectes à métamorphoses , ont aussi leur système nerveux plus développé , et leurs gan- glions émellenL un plus grand nombre de rameaux de nerfs. Chez les crabes, par exemple , il y a, vers le milieu de leur abdomen , un anneau nerveux duquel partent divers rameaux pour animer les pattes , les pinces et autres organes ex- térieurs.

Dans les mollusques , le système nerveux prend les formes les plus variées de toutes, pour sa distribution, à cause des singulières conformations de ces espèces ; néanmoins il pré- sente les caractères communs au système des ganglions, ou sympathique, qui rattache ensemble les divers centres de vita- lité. Toute la différence entre ces animaux mollasses et les articulés , consiste en ce que leurs nerfs et leurs ganglions ne se disposent pas le long d'un cordon comme chez les insectes, les vers et d'autres animaux à segmens, parce que les mol- lusques, en effet, ne sont point articulés comme ceux-ci. Mais, à celte différence près qui a motivé la distinction éta- blie par M. Cuvler, entre les animaux articulés (crustacés, insectes, vers) et les mollusques , le système nerveux n'offre pas une plus grande perfection. Au contraire, il nous paroît évident que la série de ganglions le long d'un double cordon nerveux . chez les insectes et les crustacés , et les diverses ramifications qui émanent de cette sorte de moelle épinière, pour animer les membres et les organes des sens de ces ani- maux articulés, offrent plus d'unité et d'ensemble harmonique que des ganglions dispersés dans l'économie des mollusques. Aussi les insectes , en particulier, jouissent-ils d'instincts très- surprenans et exercent-ils des actions très-compliquées , tau'lis que les stupldcs et baveux mollusques végètent triste- ment, soit renfermés dans leurs coquilles, soit en rampant ou Uottant dans la vase des marécages. Il est doriC entière- ment contraire à la hiérarchie des êtres , de subordonner des

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créatures aussi perfectionnées que le sont les insectes et les crustacés, à la classe des mollusques» surtout de l'ordre des acéphales ou sans tête, comme le font la plupart des zoolo- gistes actuels, d'après l'autorité du célèbre M. Cuvier.

Et pour preuve, il est certain que les ascidies, les biphores, salpa^ etc., n'ont point de tele , point d'yeux , ni de moyens d'odorat et d'ouïe, ni même de membres, comme en ont les crustacés et les insectes. Ces mollusques n'offrent que quel- ques ramifications nerveuses fort imparfaites, avec un ou deux ganglions épars entre leurs deux ouvertures intestinales (Me- 77wlres du Mus. d'hisl. not., t. i,par M. Cuvier) ; car le gan- glion supérieur auquel on a la bonté d'accorder le nom de cerveau, ne présente aucun des caractères qui justifient celte dénomination ; aussi l'animal ne manifeste nul degré de sen- timent ou d'instinct supérieur à ceux de l'huître.

Celle-ci a bien , comme tous les animaux à système ner- veux sympathique , un ganglion situé au-dessus de la bouche, et un autre placé derrière la masse des intestins; les rameaux nerveux qui sortent de l'un et de l'autre se distribuent dans le manteau ou les branchies , et dans les viscères. Les autres mollusques acéphales de l'ordre des bivalves ou testacés, ont pareillement deux ganglions ; l'un sur la bouche tient lieu de cerveau , l'autre est situé à l'extrémité opposée du corps. Entre ces deux ceiJtres de vitalité , des branches nerveuses établissent une communication, et d'autres filets se ramifient dans les différentes parties du corps ; l'estomac, le foie, le cœur, sont ordinairement placés entre les deux ganglions , ou dans l'espace qu'entourent leurs deux branches communi- cantes.

Parmi les mollusques rampans sur le ventre (gastéropodes, soit nus, soit testacés, univalves), l'œsophage est toujours surmonté d'un ganglion en demi-lune , dont les cornes se lient en-dessous du col comme un collier; là, se forme un autre ganglion plus gros que ce cerveau semi-lunaire. De ces deux centres partent plusieurs rameaux nerveux , soit pour les tentacules, soit pour se distribuer aux différens viscères, à l'appareil génital et aux feuillets branchiaux. D'autres mol- lusques possèdent, en outre , des ganglions plus petits, mais toujours correspondans avec les principaux, par des rameaux nerveux intermédiaires.

Giiez les céphalopodes, comme les sèches, mollusques sans contredit les plus perfectionnés de tous, le système des nerfs se rapproche insensiblement de celui des animaux ver- tébrés : car il y a déjà une partie analogue au crâne. Ainsi , un cartilage creux de la forme d'un anneau large , contient un ganglion cérébral double ; il en sort , comme chez les autrça

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invertébrés, deux cordons latéraux qui entourent l'œsophage et viennent en-dessous de la gorge; mais ce collier médul- laire jelle quatre à cinq branches de chaque côté , pour se rendre dans les bras ou tentacules qui couronnent la tête de ces poulpes , sèches et calmars. En outre , ce double ganglion cérébral envoie des prolongemens nerveux aux yeux et aux organes de l'ouïe ; car on sait que ces mollusques en sont pourvus , ainsi que les crustacés , d'après les recherches de Comparetli et Scarpa. Les nerfs optiques traversent le carti- lage du crâne , et vont former un ganglion réniforme dans la sclérotique ; les canaux semi-circulaires des oreilles sont pla- cés vers la partie antérieure de ce cartilage , que les nerfs acoustiques traversent également.

Une autre paire de nerfs sort près de l'origine du collier, et se rend au manteau ou sac qui enveloppe les céphalo- podes ; elle descend obliquement de chaque côté, entre les viscères et les branchies, puis se divise en deux rameaux, dont l'un pénètre jusqu'au fond du sac , et l'autre se renlle en un ganglion rond , duquel sortent des rayons nerveux en grand nombre , et qui se rendent aux muscles du sac et des nageoires.

Au-dessous des canaux acoustiques sort une autre paire de nerfs qui , pénétrant dans la cavité périlonéale contenant les intestins , va se ramifier en un plexus remarquable près du cœur ; puis les nerfs émanés de ce plexus se dispersent dans les viscères jusqu'au fond du sac.

A l'égard des bras ou pieds de la tête de ces mollusques , un rameau nerveux pénètre dans chacun d'eux, en son axe ; il se renfle, d'espace en espace, en petits ganglions, desquels sortent des filets nerveux qui se rendent aux ventouses dont ces bras sont munis.

Ainsi, en jetant les yeux sur toute la série des systèmes nerveux chez les mollusques , et les articulés (crustacés, in- sectes , vers ) , on y trouvera plusieurs centres ou ganglions, desquels émanent des nerfs , ou auxquels se rattachent di- verses fonctions vitales des départemens organiques. Le gou- vernement de la machine, ou leur archée, semble être une république fédérative de plusieurs états concourant h un but total, mais possédant chacun néanmoins une activité spé- ciale, et à quelques égards indépendante. On voit bien chez eux le ganglion antérieur, tenant lieu de cerveau, affecter la suprématie , pour l'ordinaire ; toutefois il est des cas l'ani- mal peut se passer de lui , comme dans les circonstances d'amputation chez les vers, ou dans les individus naturelle- ment acéphales (les ascidies , salpa , etc.). Par-là, l'on com- prend que ces animaux dévoient être gouvernés selon des ins-

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tincls innés , et ne pouvoienlpas se diriger d'après leur ex- périence , leur volonté raisonnée , leurautocratie. Ils n'ont point de temps ni de moyens suftisans pour acquérir des con- noissances; la nature y supplée par les déterminations ins- tinctives qu'elle trace d'avance dans leur système nerveux tout entier.

Chaque ganglion, en effet, étant l'aboutissant d'un grand nombre de rameaux nerveux , doit recevoir les impressions de toutes les parties d'où partent ces rameaux; le voilà donc constitué petit cerveau , centre de sentiment et de sensations ; mais n'ayant pas assez de développement et des relations assez variées pour combiner un grand nombre d'idées, il se Jjorne aux fonctions plus modestes de faire correspondre les différentes parties du corps, d'associer les organes aux mêmes actes, de concourir, avec les viscères sous sa dépendance , à une synergie harmonique , pour mettre en jeu la machine animale simultanément. Mais nous allons voir le gouverne- ment de l'économie animale bien plus centralisé chez les animaux vertébrés , ou formant une vraie monarchie dans chaque individu.

§ IL Distribution des deux Systèmes nerveux chez les animaux doués d^un squelette osseux à V intérieur.

L'homme, les mammifères, les oiseaux, les reptiles et les poissons forment , comme on sait , l'élite du règne animal ; ce sont , si l'on veut , les princes ou les classes supérieures de la grande république des corps organisés.

Ils doivent cette souveraineté qu'ils exercent, en général , sur les créatures inférieures, non-seulement à leur charpente osseuse qui rassemble et affermit leurs membres, leur donne des moyens de progression et d'action si puissans , mais à ua appareil nerveux, source de vigueur qui met en jeu tous ces membres , qui fait bondir la monstrueuse baleine sur les flots, soulève l'énorme masse des éléphans et des rhinocéros, élève l'aigle dans les nues, et fait courir d'immenses crocodiles sur les rivages marécageux du Sénégal.

On comprend que des mollusques ou des vers , animés seulement par des branches nerveuses folblement associées, dans leurs opérations, par des nœuds ou ganglions, ne pou- voient pas développer un corps bien volumineux, capable de &e mouvoir simultanément et avec harmonie ; mais comme dans les grands empires il faut attribuer plus de vigueur et de centralisation aux forces du gouvernement , pour que son action s'étende rapidement jusqu'aux extrémités les plus éloi- gnées ; de mèuje les animaux supérieurs ont un système ner- veux prédominant : aussi les invertébrés restent tous de peUlG

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taille; car les plus p;ran(1s sont ceux qui possèrlenl déjà un syslènie nerveux plus développé , comme les céphalopodes cnire les mollusques, les crustacés parmi les espèces arti- culées.

Mais il ne suffisolt pas à la nature d'accumuler une plus grande puissance nei'veuse pour composer des animaux de plus fortes dimensions ; elle devoit faciliter ou soutenir l'ac- tion de ces animaux à l'aide de leviers solides ; c'est pourquoi elle lem' attribua un squelette osseux à lintérieur; et comme leur activité prend sa source la plus précieuse dans le système nerveux , il falloit garantir celui-ci avec un soin particulier. Aussi la pulpe médullaire et cérébrale , foyer de sensibilité , d'ardeur et de vie, a été renfermée dans les cavités les plus solides des vertèbres et du crâne. Ce n'est donc point parce que les animaux sont vertébrés qu ils sont plus parfaits que les invertébrés , comme on l'a cru , mais parce qu'ils possèdent un système nerveux médullaire plus cieiuîu , que la nature a garantir sous ces fortes enveloppes osseuses.

Tous les animaux vertébrés possèdent deux ordres de sys- icmes nerveux : i.° le sympathique on gangh'onîqïie inlesimal ^ commun aux mollusques et aux articulés , quoique plus com- pliqué ; ^\ 2. S'Xç, cérébro-spinal^ qui n'appartient qu'aux seuls vertébrés , comme nous l'avons fait voir le premier (article Animal, dès la i." édition, en i8o3).

1." Du Système ner\?eux intercostal ou tri-splanchnique des ver-' iébrés. Si l'on suppose, en effet, un mammifère, un oiseau, un reptile ou un poisson dépouillés, par la pensée , de leur cerveau et de leur moelle épinière , avec toutes leurs annexes, telles que les membres extérieurs, il restera le tube intes- tinal , avec les différens viscères , joints au système circula- toire et à l'appareil de la respiration. Ainsi, la digestion , les sécrétions et la nutrition peuvent s'opérer indépendamment des organes e;cternes des sens , du cerveau , des membres et autres parties symétriques ou doubles placées à la circonfé- rence du corps.

Mais ce qui gouverne ces fonctions intérieures est un sys- tème de nerfs particuliers nommés trisplanchniques^ ou des trois cavités viscérales, ou intercostal^ ou grand sympathique. Ce n'est point un nerf unique , mais une suite de centres nerveux anastomosés ou réunis. Chaque renflement ou gan- glion devient le point central de plusieurs cordons nerveux qui s'y entrelacent ; il y a , de plus , d'autres lacis moins serrés, composant des réseaux ou plexus fort irréguliers en diverses réglons ; il en part des prolongemens divers ou des branches qui , donnant des rameaux à divers nœuds ou gan- glions, communiquent et rallachcat ainsi , par une corrcs-

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pondance d'affections et de sensibilité, tous les viscères in- testinaux; par ce moyen d'entretien, ce qui en blesse un seul fait compatir en même temps tous les autres ; et, par exem- ple , une matière acre ou empoisonnante descendue dans l'estomac, qui est placé sous l'empire du plexus solaire ou opisto-gastrique , entraîne tout le reste de l'économie en con^ sensus , par le moyen des communications nerveuses. ( Voyez. la suite de cet article nous traitons des sympathies .)

Le système nerveux sympathique de l'homme et des ver- tébrés n'est point, comme l'ont pensé la plupart des physio- logistes jusqu'à Bichat , une dépendance du système nerveux cérébro-spinal , quoiqu'il s'anastomose par des ganglions , soit avec les trente paires de nerfs spinaux , soit avec la cin- quième et la sixième paires de l'encéphale, avec le glosso- pharyngien et lepneumo-gastrique, ou la paire vague. 11 pos- sède une existence tellement indépendante , qu'il conserve son action non interrompue dans le sommeil et la veille ; qu'il n'est même pas susceptible de paralysie , comme le système cérébro-spinal ; qu'enfin il agit sans le concours de la volonté , tandis que l'autre est exclusivement subordonné au libre arbitre.

Considéré par rapport au système .cérébro-spinal et à l'arbre circulatoire , l'appareil nerveux ganglionique n'offre que de petits rameaux extrêmement entremêlés dans les in- testins et autour des gros troncs artériels et veineux ; tandis que les nerfs cérébro-spinaux, en général , sont plus volumi- neux , ont des trajets plus réguliers , plus symétriques dans les membres ils se distribuent , et se trouvent en relation avec des vaisseaux sanguins d'un très-petit diamètre. Ils sont ainsi appropriés | davantage au système de la circulation capillaire des extrémités vasculaires ; tandis que l'appareil nerveux sympathique préside plutôt aux gros vaisseaux inté- rieurs, dont ils modifient peut-être le calibre et font varier l'écoulement. C'est ainsi que peuvent s'expliquer les troubles de la circulation dans les passions.

Ce système sympathique , si irrégulier dans sa distribution , est associé à tous les organes non symétriques des animaux, et le moteur premier de la vie interne, nutritive ou répara- tive. Il est si indifférent aux relations extérieures , qu il ne manifeste pas même de douleur vive quand on coupe ses filets ou qu'on arrache ses ganglions ; nulle irritation des nerfs du ce ur, du tube alimentaire, quelle qu'elle soit, sinon par ^.vers poisons, n'accroît le mouvement naturel de ces or- ganes; ce sont plutôt les passions ou dos matériaux alimen- t.'ires plus ou moins excilans (Caldani, Insfii. anaiom.^ tom.a, art. 34.7) qui mettent en action ce système nerveux; c est ainsi

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qu'il se montre violemment affecté dans les coliques, les em-

poisonnemens et autres irritations du tube intestinal.

Allons plus loin , le système nerveux sympathique nous paroît imprimer le branle de la vie au système nerveux céré- bro-spinal lui-même, quoique celui-ci soit plus volumineux. En effet, l'action persiste dans nos viscères, non-seulement pendant le sommeil, l'apoplexie (bien que le système céré- bro-spinal ait cessé d'agir), mais même quelque temps après la mort, au point que la conlractilité intestinale subsiste en- <;ore, et que la digestion s'achève. De plus, l'arbre artériel ou circulatoire est placé spécialement sous la dépendance du système nerveux sympathique , de telle sorte que les ramifi- cations artérielles en sont accompagnées jusqu'auxextrémités, et conduites jusque dans le cerveau , dans le centre des masses médullaires du second système nerveux ; mais jamais le sym- pathique ne pénètre dans les muscles volontaires. Puisque ce sympathique modère ou excite la circulation du sang , il régit en quelque manière l'activité du système nerveux cérébro-spi-» nal,quine reçoit sa vie que du sang artériel ou oxygéné trans- mis parla circulation : le cerveau tombe, en effet, en léthar- gie ou en collapsus, quand il reçoit du sang noir ou veineux. Une autre preuve eo existe dans les passions , telles que la colère, la joie excessive , la terreur, etc. ( Voyez Rahn, De miro inter r.aput etviscera ahdominis commercio ; (iotting. 1771 ; et dans Ludwig, Scriplores neurol. viinores , etc. ; Wrisbcrg, De JSeivu phrenico ; AVallher, Nervi ihor. et ahdominis , etc. ) ; elles troublentsur-le-champ la pensée et la volonté, accrois- sent ou abattent l'influence des nerfs cérébro-spinauic sur les muscles de la vie extérieure ; de plus, l'opium, les spiritueux dans l'estomac, transmettent au cerveau, par ces nerfs du grand sympathique, soit le sommeil, soit l'exallalion de l'ivresse : toutes preuves de son influence manifeste.

C'est donc , selon nous , l'appareil des nerfs tri-splanch- niques qui excite l'arbre nerveux cérébro-spinal dans le réveil ; et au contraire, si cette influence cesse , l'animal dort. Néan- moins , par une réciprocité d'action chez les animaux verté- brés , les nerfs de l'arbre cérébro-spinal réagissent sur les viscères intérieurs , et se rattachent aux tri-splanchniques , comme les nerfs cardiaques et pelviens , les phréniques et surtout les pneunm-gastriques (ou paire vague, 8.* paire), avec ses rameaux pharyngiens et pulmonaires, puis les trente paires de nerfs de l'épine; en sorte que l'action du cœur, des poumons, et sans doute de plusieurs viscères abdominaux , selon les expériences de Legallois , est entretenue aussi par celle de la moelle allongée et cpinière. Ainsi s'établit le cercle

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de la vie, ainsi se communiquent les deux systèmes nerveux pour l'harmonie de toutes les fonctions.

Dans l'homme et les autres vertébrés, le système nerveux ganglionique , considéré en général , se compose de deux principaux cordons, Tun à droite, l'aulre à gauche, s'éten- dant de chaque côté des vertèbres, dans les cavités thora- chique, intestinale et pelvienne , depuis la base du crâne jusqu'à l'extrémité du sacrum. Ces cordons sont tantôt £;rêles ou minces , ou plus renflés et subdivisés, et parsemés d'es- pace en espace de tubercules ou nodosités appelés Ganglioisis ( F. ce mot), qui reçoivent le plus ordinairement des ra- meaux de nerfs spinaux ou encéphaliques , et transmettent à leur tour des fdels ramifiés, et souvent divisés en lacis ou plexus, aux différens viscères de la poitrine , de l'abdomen et du bassin. Ce système très-compliqué embrasse non-seu- lement les viscères et les assujettit à des relations sympa- thiques très-intimes, mais encore il suit les troncs artériels et leurs divisions, pour modifier probablement la contracti- lilé de ces canaux et le cours du sang, comme on l'observe dans les troubles des passions. A la base du crâne est placé d'abordleganglioncervicalsupérieur, plus gros que les autres; c'est lui qui tient lieu du cerveau chez les animaux invertébrés. Au bas du col se trouve le ganglion cervical inférieur, qui souvent est double ; ces centres nerveux reçoivent beaucoup de filets des parties environnantes , et ce sont, à leur égard, de petits cerveaux.

Cette opinion sur les fonctions des ganglions a été soute- nue, surtout par Johnstone {^Essay on ihe use ofthe ganglions ^ Lond. , 1 77 1 , 8.0 ) , et remonte à Willls ; elle a été défendue par Lecat ( Traité de l'existence de la nature et des propriétés du jluide neiveux^ Berlin , 1765 , 8.") , par Soemmering et d'au- tres auteurs, jusqu'à Barthaz. Ces ganglions paroissent uni- quement appartenir au grand sympathique de la vie végétative ou interne des animaux (Ueil, Arrjiii>. fiir physiol. , Band. VII , part. 2, p. 2 10), et reçoivent , comme autant de centres, l'ac- tion nerveuse \ ils soustraient tout ce système organique à la sensibilité ordinaire dont on a la perception. Par la même cause , les ganglions défendent les nerfs qui y aboutissent de l'action de la volonté; aussi ces nerfs ne se rendent ils point aux organes volontaires. Les plexus ne sont que des ganglions à mailles très-lâches ou dilatées ; car le lacis nerveux , en se resserrant ou se pelotonnant , compose un nœud ou vrai ganglion, avec des vaisseaux sanguins et du tissu cellulaire.

Toutefois cette. structure interne du ganglion en fait surtout un centre de renforcement , duquel émanent de nouveaux rameaus aerveux , plutôt qu'un foyer cérébral proprement

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dit, comme l'observe Scarpa (De Nervomm gangliis et plexibus ^ Mutinae, 1779 , et Pfeffinger, Be Stmcturâ netv. , Argentor., 3782). Et, en effet, il y a des ganglions dans les nerfs de la moelle épinière et des sens, appartenant ainsi aux organes volontaires et au système des nerfs dont la sensibilllé esl Irès- perceptible au moi. Il existe pareillement des nerfs cérébraux qui n'excitent aucun mouvement volontaire, comme l'acous- tique, l'optique, l'olfactif, etc., bien qu'ils n'appartiennent point au système des ganglions. Mais nous ne parlons ici que de l'embranchement général , connu sous le nom de grand SYmpathique.

Parvenu dans le thorax, le cordon intercostal reçoit des rameaux anastomosés de chacune des paires des nerfs spi- naux , par autant de ganglions. Du sixième au douzième, on les voit fournir successivement chacun un rameau pour com- poser deux cordons qui passent à travers le diaphragme pour pénétrer dans l'abdomen. Le premier de ces cordons forme le grand splanchnique qui, derrière l'estomac et sous le dia- phragme , donne le ganglion semi-lunaire ou surrénal. De celui-ci partent, en rayonnant, une multitude de rameaux qui se subdivisent et s'anastomosent diversement en formant de plus petits ganglions rougeâtres pour répartir des rameaux vers le mésentère , le diaphragme et les reins. Enfin , il en résulte sur l'aorte et les piliers du diaphragme un grand lacis ou plexus , centre nerveux remarquable , nommé solaire à cause de sa forme un peu rayonnante , par Willls (le plexus médian oa opisto-gastrique de Chaussier), duquel partent en- core des trousseaux inférieurs pour des plexus secondaires.

Ce centre nerveux, situé près du cardia ou l'orifice supé- rieur de l'estomac, qui traverse le diaphragme, a été con- sidéré comme l'un des principaux ressorts de la machine animale , et le siège de toutes les affections que l'on rapporte au cœur. C'est au cardia et à ce centre phrénique (au creux de l'estomac), que Vanhelmont plaçoit son archée directeur de toute l'économie, que Buffon et Lacaze établissoient le foyer de la vie et l'âme , comme les anciens :

I tique sifuisi medià regione in pectoris haeret :

Hic exaultat enim pavor ac metus , haec loca circùm

Lsetitiae raulcent.

LrcRÈcE. Rcr. nat. 1/6. III.

En effet, on éprouve en cette région précordiale le contre- coup des passions : toutefois les oiseaux, les reptiles et \e& poissons manquant de diaphragme , leurs plexus nerveux sont tm peu différemment disposés que ceux des mammifères, et ils y doivent autrement ressentir l'effet des passions.

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M. Gall prétend, au contraire , que les passions rcsident dans le cerveau , et non dans le système des ganglions , qui existe déjà très-développé chez les animaux sans cerveau ,• dans lesquels il seroit difficile, dit cet auteur, de supposer des passions ( Anaiom. et Physiol. du Système neiveux^ Paris , 1810, fol, tom. 1); cependant qui ne sait que les moindres zoophytes , les vers, les insectes, ressentent la crainte, le désir, l'amour, etc.? Il y a donc des passions chez les êtres les moins capables même d'idées et de réflexions ; car les passions appartiennent à l'Instinct et non à la volonté.

Après le grand plexus du cardia , se rencontre le petit splanchnique , ou l'accessoire de Walther ; il émane de ra- meaux tirant leur origine des dixième et onzième ganglions thorachiques.

Dans la région abdominale , le grand sympathique y de- vient moins complexe ; il reçoit des rameaux des paires de nerfs lombaires et sacrés ; de naissent divers plexus, l'aor- tique , les deux sous-dlaphragmatiques , le coronaire stoma- chique , ceux de l'artère hépatique et de la splénique , enfin les mésenlériques supérieur et inférieur ou colique , les ré- naux et surrénaux ; les testiculaires dans le sexe mâle , ou ceux de l'ovaire chez les femelles ; les hypogastriques ou pel- viens, etc. Cette distribution , quoique se dégradant successi- vement jusqu'aux poissons , existe chez tous les vertébrés.

2.° Du Système nerveux cérébro-spinal des vertébrés. Ce grand appareil, presque uniquement destiné à mettre l'animal en rapport avec l'univers ou les corps extérieurs, a pour fonc- tions spéciales les sensations et les mouvemens volontaires des membres, ainsi que l'exercice des facultés intellectuelles propres à les diriger.

Il se compose donc du cerveau , du cervelet , de la moelle allongée et spinale dans le canal des vertèbres, puis des nom- breux rameaux de nerfs sortant soit de l'encéphale, pour se rendre aux organes des sens , soit de la moelle spinale , soit de l'un et de l'autre en môme temps , afin d'animer toutes les parties extérieures du corps , et surtout les muscles volon- taires.

Nous ne décrirons pas ici en détail les parties de l'encé- phale {Voyez Cerveau); il suffit de considérer qu'il est essentiellement formé , dans les plus simples des poissons , de tubercules placés lun après lautre comme des grains pairs de chapelet , hors le cervelet qui est toujours impair. Ainsi on voit en avant deux nœuds ou renflemens forniés par les nerfs olfactifs à leur origine, si volumineux quelquefois qu'on a pu les prendre pour le vrai cerveau chez les chondropfé- rygiens. 1,1 y a constamment deux hémisphères, mais irès- xxu. ^

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petits et sans circonvolutions à leur surface ; le ventricule àe chacun d'eux montre , dans son plancher, l'analogue des corps cannelés ; les couches optiques sont également situées au- dessous des hémisphères. Derrière le cervelet , à l'origine de la moelle allongée , apparoissent deux ou quatre tubercules donnant naissance à plusieurs paires de nerfs ; ces tuber- cules, et les nœuds du nerf olfactif, distinguent le cerveau des poissons , ainsi que la position des couches optiques vers sa base.

Celui des reptiles offre un cervelet qui ne contient point l'arbre de vie , non plus que celui des poissons ; il ne présente aussi des circonvolutions en aucune de ses parties. Les héml- sphèresne recouvrent point les couches opticjues placées der- rière eux, les tubercules quadrijumeaux manquent.

Dans les oiseaux , l'encéphale se compose de six proémi- nences principales : le cervelet , qui n'est point caché sous les hémisphères , a des stries transversales et un arbre de vie , mais moins composé que celui des mammifères ; en arrière , se voit la moelle allongée -, en avant , sont deux hémisphères très-renflés, en forme de cœur, doné^a pointe est vers le bec. On n'y voit point de circonvolutions ; les deux couches placées sous les héuiisphèrcs, n'en sont point en- veloppées; il n'y a ni corps calleux, comme dans les ovi- pares précédens , ni voûte , ni cloison transparente, mais les nates agrandis et de petites éminences arrondies existent entre les corps cannelés et les couches optiques, comme chez les poissons.

Les mammifères ont des hémisphères volumineux, avec des circonvolutions -, leur cerveau contient des parties qui ne se rencontrent point chez les ovipares (oiseaux , reptiles » poissons ) , tels que les corps calleux ou mésolobe, la voûte, les cornes d'Ammon, le ponldeVarole. Les couches optiques placées en dedans des hémisphères, manquent de ventricules; il y a des tubercules naies et testes entre ces couches et le cervelet.

Ce qui distingue les animaux vertébrés de toutes les autres classes , par rapport au cerveau , est la division constante en deux hémisphères , deux couches optiques et un cervelet. Les appendices des corps cannelés en forme de voûte, com- posent ces deux hémisphères dont le rendement ou le dé- ploiement plus ou moins considérable , attribue à l'animal plus ou moins de développement intellectuel ; aussi l'homme en possède de plus vastes que tous les autres animaux , et à mesure que ces hémisphères diminuent d'étendue , en des- jûendanl Téchelle de l'organisation , les autres tubercules ou

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lobes de l'encépliale , apparoissent plus distincts et plus sé- parés au premier aspect.

Dans l'homme ei les animaux vertébrés , le système ner- veux cérébro-spinal est svm*î'rique de chaque côté. Il sort du cerveau une moelle allongée, cylindrique , laquelle des- cend le long du canal pratiqué dan» les verlèbres, en s'amin- cissant jusqu'au sacrum. Elle transmet, ainsi que l'encéphale, un grand nombre de paires de nerfs à (ous les organes du mouvement volontaire ou des membres , de manière qu'en considérant dans son ensemble cet appareil , il semble com- poser une sorte d'arbre , dont le bulbe ra<lical est le cerveau, dont le tronc est représ«;nlé par la moelle rachidienne ou spinale , imitant une queue de cheval , et dont les nerfs qui vont s'implanter de toutes parts dans le corps , en se rami- fiant , composent les branches, mais dans une situation ren- versée.

Tout cet appareil est enveloppé sous une tunique qui lui est propre , la pie-mère , et le névrilème , qui suit les rami- fications des nerfs , jusque vers l'extrémité de leurs plus petits filets , et qui entoure les moindres de ces filets, dont les faisceaux composent les gros troncs nerveux. Ainsi , le système entier est isolé dans le corps de l'animal au moyen de cette enveloppe spéciale ; elle ne permet à la pulpe ner- veuse de communiquer avec les autres parties, que par l'ex- trémité de chaque nerf qui s'épanouit, soit sur la rétine pour la vue , soit sur la membrane nmqueuse des cornets ethmoï- dauxpourl'olfaction, soit dans le liquide des canaux semi-cir- culaires de l'oreille pour l'ouïe , ou se divise en houppes dans la membrane de la langue pour le goû.t, et dans la peau pour le tact ; er^fin qui se répartit à chaque muscle , pour le mettre en jeu par la volonté. Le névrilème paroit donc avoir une propriété coercitive; il empêche que le principe sentant, dont la moelle nerveuse est le siège, ne se dissipe autrement que par les extrémités des nerfs. C'est ainsi que les corps rési- neux ou vitreux étant idio-électriques , retiennent i'électri- cité dans les corps.

La nature de la pulpe médullaire est identique dans toutes les parties du système nerveux ; elle paroit, au microscope , composée d'une multitude de petits globules agglomérés et jnxta-posés. ÎM. Vauquelin l'a trouvée composée d'eau , 80 parties; d'albumine dans un état de demi-coaguiation, 7,0; de phosphore, i,5o ;d'osniazone, 1,12; de matière grasse , blanche et cristalline, /^,Si:, d'une semblable matière grasse, ïnais rouge , 0,75 ; d'un peu de soufre et de quelques seis , comme des phosphates de chaux, de potasse, de magnésie et de œuriate de soude , donnant ensemble 5,i5. La moelle

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r.llongée et spinale est formée des mêmes principes , ainsi que le cervelet, quoique celui-ci donne beaucoup plus de matière grasse, mais moins d'albumine, d'osmazone et d'eau; il présente aussi du phospbore et du phosphate de polasse. Les nerfs , composés des mêmes élémens que le cerveau y montrent moins de matière grasse et plus d'albumine ; ils ont très-peu de la substance bleue ou verdâtre , qui teint la |)artie corticale du cerveau , et contiennent de la graisse or- dinaire, qui n'existe pas au cerveau ( ylnnal. du Muséum d llist. nat. , tom. XVIII, p. 212, 287 , et Annal, de Chimie , lom, 81, janvier 1812 ).

Cette substance médullaire ne se dissout bien que par les alcalis ', ainsi le névrilème ou l'enveloppe des nerfs est mis à mi, et celui-ci n'est dissoluble que parles acides, parce qu'il est de nature gélatineuse, comme les autres membranes; la pulpe nerveuse et l'enveloppe qui la contient sont donc dénature très-différente; la première jouit seule de la faculté de sentir, comm-e l'ont prouvé Zinn et Heuermann , contre l'ancienne hypothèse de Vanhelmont , de Pacchioni et de Baglivi , qui plaçoient le sentiment dans les méninges du cerveau et les prolongemens de la pie-mère ( Voyez aussi Lancisi et Fréd. Hoffmann ).

Cette unité de l'élément nerveux , dans toutes les réglons du système , fait qu il possède partout les mêmes facultés de sensibilité ; car même si l'on coupe un nerf, il ne reçoit plus du cerveau ou de la moelle spinale , les déterminations de la volonté ; néanmoins si l'on irrite encore ce nerf séparé du grand centre de la vie , il communique inférieurement l'exci- tation aux muscles dans lesquels se rendent ses rameaux , ainsi que l'ont démontré Reil, et Prochaska ( Opéra minora , Vienn. 1800, in 8.", 2 vol. ). La même substance médullaire du cerveau se remarque si manifestement dans les nerfs , qu'on peut l'en exprimer dans le nerf optique, par exemple, ainsi que l'a fait Fallope ; ils sont donc le cerveau rontinué , comme disoit un ancien (Nemesius), ou plutôt le cerveau n'est que le nerf énoruiément développé. Les nerfs ne grossissent pas tous en s'approchant du cerveau , et l'intercostal , par exemple, offre des cordons plus rendes en descendant au thorax (Monro, on ncives ^ p. 3g5 ).

Le grand arbre nerveux, centre de la volonté et des sensa- tions, est composé de deux moitiés symétriques oudoubles, comme les organes dessenset lesmembresauxquels ilpiésidc; ces moitiés viennent se souder , ou plutôt s'onlrc croiser à ia ligne moyenne, qui rapproche les deux héntisphères du cerveau et les deux j.'imbes de la moelle épinière. On distingue non- seulement le lieu de réunion de ces masses médullaires par

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un sillon, mais même l'entre croisement peul s'apercevoir en plusieurs cas : il esl évident pour les nerfs optiques , surlout chez les poissons. Cet entre-croisenicnl se manifeste encore dans la plupart des phénomènes pathologiques; ainsi un coup, une lésion quelconque , un épanchcment à l'un des hémi- sphères du cerveau, produisent leur contre-coup, la paralysie dans les nerfs du côté opposé. ( W'^inslovv, niéin. ac. se. I73q, p. 22 , Lieutau;i, Petit, etc. )

Jusqu'ici nous avons considéré cet arbre nerveux comme étant renversé , ou comme descendant du cerveau ou de la moelle épinière dans toutes les parties extérieures ; mais , dansla vérité, les filets nerveux sont les racines qui viennent, au contraire , composer les troncs ; ceux-ci , la moelle épi- nière , dont le cerveau est comme la fleur plus ou moins volumineuse, selon le rang de l'animal. Par exemple, chez les poissons , la moelle épinière est Lien plus considérable que le cerveau, et cen'estpas sansfondementque jadis Praxagoraset ]*listonicus, au rapport de Gaiien, considéroienl l'encéphale comme un appendice de cette moelle. Le cerveau forme à peine un trente-sept millième du poids ducorps dans le thon, et un douze millième dans lessquales. Il est encore extrême- ment petit chez les reptiles, même dans les grands crocodiles {Ohs.phys. et maihéin. des Jésuites à Slam, p. 4-4)- Eïi général, ce viscère développe plus d'étendue, à mesure que l'on remonte jusqu'à l'homme. Il semble néanmoins être en raison inverse de la masse du corps. Ainsi on trouve plus de capacité encéphar lique chezles petits quadrupèdes, tels que lessouris,.les rals,oa les petits oiseaux, comme les moineaux, les serins, qu'au bœuf et à l'éléphant, et qu'aux oics,aux autruches. Elle est aussi plus considérable dans les jeunes Individus^ les fœtus surtout, que chez les mêmes êtres adultes; mais il faut remarquer, toute- fois, que la pulpe cérébrale, de même que les autres organes, devenant plus sèche ou plus friable à mesure qu'on l'examine chez les individus plus âgés , elle contient alors plus de ma- tière médullaire sous le mêïne volume. La masse du cerve- let ne diminue pas autant chez les animaux , que celle du cerveau lul-uiêiue.

L'encéphale reçoit une grande quantité de sang artériel , que Ton évalue , chez l'homme , au sixième de la masse totale de ce li(julde ; il en est partout abreuvé et nourri, s'il est vrai que sa substance cendrée ou corticale , dans laquelle se ramifient tant de vaisseaux sanguins , soit la matrice de la pulpe médullaire proprement dite. Cette matière cendrée en- toure la moelle du cerveau de tous les animafPc , même chez les insectes; d'ailleurs, le sang artériel est l'excitant unique et nécessaire dii cerveau, puisqiie le sang veineux ou noir le plonge,

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comme nous l'avons dit, dans l.i torpeur elle sommeil. De même le système nerveux accompagnant dans tout le corps l'arbre artériel , el se subdivisant perpétuellement de môme que lui, jusque danslesplus petits rameaux capillaires, ilreçoit Tin assez grand nombre de fines arlérioles , qui se ramifient dans le tissu fibreux du ncvrilème , qui paraissent y déposer ou bien y sécréter la matière médullaire , en tous les points de ces innombrables rameaux de nerfs. Cbaquc nerf vit donc de lui-même en toute région du corps; il s'y nourrit et s'y accroît ; il jouit, par lui seul , de sa propre énergie , et répare les perles de cette faculté sensitive et irritable , avec laquelle il remplit les fonctions que lui assigna la nature.

Comment comprendre , en effet , que des monstres acé- phales, et ceux même qui sont privés de moelle épinière , aient pu exister quelque temps , si les rameaux nerveux ne vivoîent point par eux-mêmes.'' Des tortues et d'autres animaux à sang froid , peuvent exister pendant plusieurs semaines après qu'on leur a enlevé le cerveau ; ils exercent encore beaucoup de mouvemens volontaires en cet état, et leurs fibres musculaires se contractent pendant long temps; elles conservent leur cxcitabililé ou une sensibilité locale , lorsqu'on les stimule, quoique séparées du corps de T animal et hors de l'influence cérébrale ou spinale. Leur circulation capillaire persévère quelque temps aussi, quoique le cœur soit arraché avec ses gros troncs artériels, il paroît donc s'établir un commerce intime entre l'arbre de la circulation ,fetceluidela sensibilité, puisque tous deux se divisent et s'accompagnent jusque dans leurs moindres subdivisions , par une société perpétuelle ( Reil, ExenÀl. analom.fasnc. i , p. IQ. Scarpa, Tabulœ neurologie, ad illustr. hîstor. nervor. cardia- cor. , :îc. , Ticini, 179^ •» § XIU et XIV). On observe aisé- ment chez les foetus et les enfans nouveau-nés, les veines qui rapportent le sang des nerfs (Pfeffinger, de Stn/r/urd navar. dans C. F. Ludwig, Scn'ptor. neurol. miiior. Lips. 1791 , tom. i ,

Plus les nerfs auront d'énergie , plus ils exciteront le cœur el le mouvement circulatoire, lequel , à son tour, envoyant plus de sang oxygéné à l'arbre nerveux , le nourrira , l'agran- dira davantage. Aussi remarquons-nous que les animaux à sang chaud , à respiration vaste , à système circulatoire très- complet ou double, comme les oiseaux el les mammifères , ont un système nerveux bien plus développé et plus éner- gique que les classes à sang froid , à respiration et circu- lation lentes, imparfaites, comme chez les reptiles et les çoissons ( Voyez Circulation et Poumons ).

Mais si l'arbre nerveux prend racine en toutes les régions

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du corps par ses rameaux; s'ils s'y enrichissent de la malière médullaire, ils paroisscnt donc recueillir celle-ci et latrans- metlre au grand tronc de l'épine dorsale et au cerveau , plutôt que de la recevoir de ces centres. Tel est le senti- ment des plus célèbres anatomisfes et physiologistes moder- nes ( Reil , nrchw. filr die physiologie , Halle , iJQb ; Band. i , p. io4 ; et Exerdl. unat. de siruct. nen'. fascic. i , p. 7 ; aussi Alex. Monro, Obsetv. on ihe sînictiire and functions ofthener- oous System. , Edinhurgli , lySS, p. 26; Scarpa, Talndœ neu- rolog. ^ XXI J ; Flnwer, ueùer die thieriscJie eiectn'cilœt. l^eipzis,. 1796, p. II ; MM. Gall, Cuvier, etc. ),

Il est manifeste que les animaux présentent des troncs nerveux d'autant plus considérables à mesure que leur cer- veau est moins volumineux. Ainsi les poissons n'ayant qu'un très-petit cerveau, leur moelle éplnière se montre plus forte, et les cordons nerveux qui y aboutissent sont fort gros à proportion. Chez les reptiles , Tencéphale est un peu plus épais que le diamètre de leur moelle spinale ; enfin , parmi les oiseaux , les uiammifères , et surtout chez l'homme , le cerveau s'accroît, déploie une vaste étendue , d'autant plus que la moelle rachidienne et les nerfs , soit encéphaliques , soit spinaux , sont plus minces ou plus grêles, selon les belles remarques de Soëinmering et Ebel.

Or, cette disposliion explique merveilleusement plusieurs phénomènes vitaux de ces classes; car les poissons, les reptiles survivent long-temps à la décapitation , à l'enlèvement du cerveau et d'autres masses de nerfs ; l'irritation de leurs par- lies persévère plusieurs jours , même dans les tronçons de leur corps que l'on a mutilé, d'est que toutes les fonctions nerveuses et sensldves sont beaucoup mieux dispersées dans leurs organes , que chez les races plus pcrfecilonnées des oiseaux et des mammifères. Dans ceux-ci, l élément nerveux refoulé , accumulé vers le cerveau , pour l'enrichir , et à la moelle spinale pour les mouvemens volontaires , laisse moins persister d'irritabilité, d'énergie vitale en toutes les parties du corps. Aussi ces animaux vivent davantage par le cerveau et la moelle spinale, au point qu'ils périssent lorsqu'on tran- che ces centres nerveux, et toute l'énergie vitale s'éteint bientôt dans les organes auxquels se dispersent leurs rameaux.

Ainsi, à mesure qu'un animal est plus accompli dans son organisation, I élément nerveux se centralise davantage, se ramasse vers la moelle spinale et le cerveau, y déploie plus de sensibilité, de moyens d'Intelligence , mais laisse moins d'énergie dans le reste du corps. La brute vit plus par ses membres que l'homme ; ses fonctions animales de sensibilité, d'irritabilité , s'y trouvent mieux réparties et éq^uilihrées j

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riiommc, au contraire, existe davantage dans son cerveau, pour la pensée et la direction intellectuelle do ses mouve- jnens cxlérieurs. La brûle avoit, en effet , besoin de résister davantage, par la vigueur corporelle, à l'intempérie des saisons , aux chocs extérieurs pour son existence rude et sau- vage ; mais elle avoit moins de nécessité de réfléchir , de «onibiner ses actions , puisque l'instinct la guide suffisam- jDent dans tout ce qui lui convient; Thomnie seul est capable de recueillir de vastes acquisitions de science dans son cer- veau , et de combiner une suite immense d'opérations pour la vie civilisée. 11 n'a pas la vue, l'ouïe , l'odorat , le goût pi développés et si intenses que beaucoup d'autres animaux; sa force nuisculaire eslbien moindre que celle des carnivores; jnais il a plus qu'eux une sensibilité très-exquise et très-pro- londe,une source inépuisable d'intelligence, qui le rend ïiiaî!re de toutes les créatures de cet univers. Aussi est-il le Seul être susceptible de concentration cérébrale de la sensi- bilité , pour la méditation , au cerveau ; il peut s'isoler de telle sorte qu'il n'r.perçoit plus le monde extérieur. 11 ra- masse toute son existence en lui , jusque-là même qu'il ne sent pius alors ce qui le frappe ou le blesse avec douleur dans tout autre moment que celui de l'extase. On verra qu'en meine- teuips la nature a lui attribuer une station droite, et qu'elle a raccourci successivement le museau chez les animaux , à proportion qu'elle amplifie leur cerveau et déploie leurs iarnltés intellectuelles. F. Quadrupède.

Bîstrilmtion des principaux ironcs des nerfs encéphalo-rachidiens , destinés aux sensations et aux jnoui'er/iens volontaires de la vie extérieure.

On les a divisés en trois genres : i.° des nerfs apparlenans au cerveau, et sor(ans par dilférens trous de la baSe du <ràne: ils sont au nombre de douze paires chez l'homme; 2." des nerfs qui émanent de la moelle cpinière ou du rachis: leur nombre est de trente paires chez l'homme et les mam- mifères, mais varie beaucoup chez les oiseaux, les reptiles et les poissons, h cause du nombre varié de leurs vertèbres, et de l'absence des os du bassin chez les serpens et les pois- sons ; ce qui fait que les nerfs du sacrum et de la queue ne sont pas distincts dans ces derniers ; 3." les nerfs composés sont ceux qui , ne naissant immédiatement ni du cerveau , ni de la moelle épinière , sont cependant formés de branches accolées de ces cordons primitifs, lesquelles s'unissent in- timement pour donner un nouveau tronc de nerfs. Celui-ci tantôt est unique, tantôt il présente un enlre-croisement , un plexus, ou des mailles anastoiiaosées de différens rameaux,

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associés, ou un renflemenlen forme de ganglion , composé de fibrilles de plusieurs origines, qui s'enlacent ou se iissent ; puis elles distribuent des branches aux organes du niouve- menl volontaire , tels que les membres, et aux appareils de la respiration , de la voix , de la. génération , etc. Dans ces derniers cas , ces nerfs se marient souvent à des filamens du système du grand sympathique , pour concourir aux mêmes fonctions.

Les nerfs encéphaliques émanent uniquement du cerveau ou de sa prolongation , mais non du cervelet. Ce sont , i." la paire olfact'u-'e ou ethmoïdale , qui se distribue dans la mem- brane pituitaire étendue sur les cornets du nez et le vomer. (vhez les cétacés , le nerf olfactif, extrêmement petit, se ramifie près de l'oreille interne et non de leur ethmoïde , qui n'a point de trous: aussileur nez , servant de canal pour expulser l'eau salée , n'est pas propre à 1 odorat. Tous les autres vertébrés possèdent ces nerfs. 2.° Uoptique ou oculaire s'entre croise chez tous , et ce croisement se manifeste sur- tout chez les poissons l'on peut en opérer la séparation. 3y L'ociilo-muscutaire ou moteur commun. Le pathétique ou l'oculo-musculalre interne, et l'abducteur ow Voculo-musculalre externe, formant la sixième paire, se distribuent à peu près de même que dans l'homme, chez les vertébrés. II n'en est pas ainsi des trois branches de la cinquième paire, Au trlj a cial on tri- jumeau, nm prend racine vers les jambes du cervelet; sa branche opbthalmique ou orbito-frontale, envoie un rameau qui forme le ganglion lenticulaire avec un rameau de la troisième paire, et donne naissance aux nerfs ciliaires;il s'y joint un filet du nerf trisplanchnique. La branche moyenne du trifacial ou le sus- maxillaire produit aussi le ganglion sphéno-palatin , remar- quable chez les ruminans et les carnivores ; et ses rameaux palatins contribuent peut-être à aiguiser leur goût et leurs appétits. La branche maxillaire inférieure, plus considérable, sert puissamment au goût, par ses rameaux qui se distribuent à la langue et s'épanouissent dans ses papilles; d'autres se répartissent aux racines des dents. Chez les oiseaux, ces branches maxillaires supérieures et inférieures distribuent des rameaux aux parties latérales du bec , de telle sorte que les canards , les bécasses et autres espèces qui fouillent dans la vase des marais, y sentent fort bien , par l'extrémité de leur bec, les vermisseaux et d'autres substances nutritives. Les reptiles et les poissons conservent des distributions analogues du nerf trifacial; mais sa branche opbthalmique a, chez les derniers , la fonction particulière d'exciter une sé- crclioii muqueuse au front. Ainsi le poisson , en nageant y

m

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fait glisser sur tout son corps une couche de mucosité qui

suinle des pores de son front.

Le ncri facial on petit sympathique ^ de Winslow , est la septième paire , qui se repartit sur divers points de l'os tem- poral, à la conque de l'oreille , à la glande parotide , et compose une sorte de réseau, embrassant presque la totalité du visage; on l'observe aussi chez les autres vertébrés, quoi- que bien moins ramifié ; car aucun d'eux n'a cette mobilité de physionomie que possède le seul visage de l'homme , pour peindre toutes ses passions. Aussi les oiseaux , les reptiles , ne peuvent manifester aucune affection, et n'ont point , à proprement parler , de face. V. Face.

^U acoustique ^ que l'on a long-temps confondu avec le pré- cédent à son origine , sous le nom de la portion molle, forme la huitièmepaire aujourd'hui; ilse distribue à l'oreille interne ou aux canaux semi-circulaires , au limaçon et au vestibule, ce qui forme le labyrinthe. Chez les poissons, ce nerf paroît être une branche de la cinquième paire.

Un petit cordon formé de divers filanicns séparés et se ré- parîissant sous la langue , aux muscles de sa base , est la 9.* paire de nerfs, désignée sous le nom àe pharyngo-glossien , maintenant.

Le ncrï pneumo-gosiriquc ou la paire vague, comptée pour ia 10/ (jadis la 8.« ) , est l'une des plus importantes par sa ramification à l'organe respiratoire et à l'estomac. Dans son trajet , ce long et épais cordon , émanant du cerveau par plu- sieurs filamens, distribue des branches sur le cou, au larynx et au pharynx, puis dans la poitrine , plusieurs filets pour les plexus supérieur et inférieur du cœur. En outre , une bran- che récurrente à la trachée artère va se ramifiant sur le la- rynx ; c'est ce nerf qui concourt à la production de la voix, sa section rend muet ; d'autres rameaux se propagent à l'œso- phage , se contournent diversement en lacis qui l'embrassent ainsi que l'estomac , par plusieurs anastomoses , avec des fi- lets du grand sympathique. Un autre cordon cylindrique ré- current , du canal vertébral , est composé de plusieurs filets qui se répartissent aux muscles du cou. Ce nerf appelé spinal ou trachélo-dorsal ^ distinct du nerf vague avec lequel on l'a long-temps confondu, comme accessoire, forme la 11."= paire. Les mammifères , les oiseaux, les reptiles , ont une distribu- tion à peu près analogue du pneumo-gastriquc et du spinal ; mais il n'en est pas ainsi chez les poissons , qui n'ont plus de poumons. Ainsi la paire vague , aussitôt qu'elle sort du crâne , se répartit à leurs branchies , par quatre rSïneaux de chaque côté , puis envoie des filets aux niuscles de la lan- gue ; une autre branche plus considérable fournit un gros

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nerf, unique de chaque cAté , qui parcourt toute la longueur du poisson, au-dessous de la ligne latérale de ses flancs , sans doute afin d'exciter les mouvemens de flexion pour la nata- tion. La branche œsophagienne du nerf vague descend aussi jusqu'à l'estomac , chez les poissons.

Enfin, la la.** paire ou le nerf gustaiif-hypoglosse ^ après avoir fourni des rameaux vers l'os hyoïde , s'enfonce par plu- sieurs autres filets , dans les muscles de la langue ; on ne l'a point rencontré chez les poissons, qui, du reste , paroissent peu jouir du sens du goûl.

Les nerfs de la moelle épinière exigent moins de détails pour suivre leur distribution. Tous en naissent par plusieurs filets , se partageant en deux faisceaux dont le postérieur forme un ganglion; les deux branches envoient des filets pos- térieurement aux muscles spinaux et à ceux des membres, antérieurement , par une anse qui s'anastomose au nerf tri- splanchnique ou granJ sympathique.

Les nerfs cervicaux, au nombre de 8 paires, chez l'homme elles auires mammifères, sont plus nombreux chez les oi- seaux qui ont beaucoup de vertèbres cervicales ; il y en a bien moins dans les poissons, puisqu'ils manquent de cou à proprement parler. Les nerfs dorsaux et lombaires se dis- tribuent à peu près de même dans les muscles du dos et du prolongement coccygieu, chez les divers animaux vertébrés, pourvus d'une queue. Les nerfs sacrés et caudaux ne sont pas fort distincts entr'eux dans les reptiles et les poissons.

A l'égard des nerfs composés , les diaphragmai! ques nais- sent des 4- j 5 et 6.<= paires cervicales, avec des filamens du grand sympalhique et du pneumo-gastrique , chez tous les mammifères , ils se distribuent par irradiation dans le diaphragme; ces nerfs phréniquesne se trouvent pas chez les autres vertébrés qui manquent de véritable diaphragme ; au reste , il y a des branches nerveuses analogues , soit dans les muscles de la gorge des batraciens qui remplissent la fonction de diaphragme , soit dans la membrane musculeuse , qui sé- pare les branchies des poissons , de leur cavité abdominale.

Les nerfs hyoïdiens et ceux qui forment le plexus ceivical ,, émanant des 2 , i> et 4.« paires cervicales , sont distribués à peu près de même chez tous les mammifères.

Dans riiomrae , le concours des quatre dernières paires de nerfs cervicaux et la première dorsale forment le plexus bra- chial , dont les faisceaux donnant neuf séries principales, se dislribuent au bras et aux muscles circonvoisins. Chez les autres mammifères , la cinquième paire cervicale ne concourt point a tonner ce plexas , et dans les oiseaux, il n'y a plus que U dernière paire cervicale et deux dorsales qui compo-

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sent cet enlrelacement en un seul faisceau pour l'aile. Chez les reptiles et les poissons , le bras et la nageoire pectorale reçoivent également des paires de nerfs vertébraux qui se ra- mifient fort diversement , selon le jeu de ces membres aux- quels ils se répartissent , et par exemple , chez les raies , qui ont des sortes d'ailes cartilagineuses, quarante paires de nerfs vertébraux concourent à former de gros cordons qui disper- sent autant de filets qu il y a de rayons dans leurs vastes na- geoires.

Les nerk crnroux, dans les mammifères, proviennent d'un plexus du concours des quatre dernières paires lombaires et des quatre premières du sacrum , comme chez l'homme ; ils forment deux faisceaux; la portion supérieure est la lom- baire, l'inférieure est la sacrée ; chacune fournit quatre sé- ries de rameaux qui se répar.issenl à tout le membre abdo- minal ou la cuisse et le pied. Quoique un peu moins compli- qué, le plexus crural des oiseaux suit une distribution analo- gue; leur nerf sciatique, ordinairement le plus gros du corps , d:\us tous les vertébrés, vient aussi des paires pelviennes, et suit la direction du fémur. Dans la grenouille qui a de fortes cuisses, trois paires lombaires et pelviennes forment h', plexus fémoral. Les poissons reçoivent , à leur nageoire ventrale , qui représente. leur pied , des nerfs provenant au>si des paires vertébrales, et qui se partagent selon le nombre Ats rayons.

Il devient peu important ici de poursuivre les détails de réparlillon d'une foule de rameaux nerveux , dans les muscles et les autres parties du corps, pour les animer selon la vo- lonté. ISous parlerons seulement plus loin de ceux qui concou- rent aux sympathies.

§ IlL De la. Sensibilité , ou du Système nerveux considéré en action.

Pour que le corps animal exerce sa sensibilité, il faut plu- sieurs conditions nécessaires :

D'abord, son ou ses systèmes nerveux doivent jouir de l'in- tégrilé de leurs parties , au moins dans l'organe qui éprouve l'impression , dans le nerf qui la transmet, et dans le cer- veau ; ou, chez les espèces invertébrées, dans le centre qui la reçoit. En effet , toutes les expériences prouvent que la sen- sation remonte vers le cerveau ou la moelle épinière , tandis que le mouvement de la volonté en descend , au moyen des cordons nerveux. On voit, dans plusieurs cas, les douleurs suivre le trajet ascendant d'un nerf, et l'irritation convulsive, dans l'épllepsie, se propager d'une extrémité jusqu'au cer- veau; ainsi la douleur héniorroïdalre ou crile d'une f..'lule à i'auus remoiilc par k- grand sympathique vers la tôle , cl les

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nffoclîons de l'utérus causent des resserremens spasmodiqiies à la gorge , etc. Le contraire n'a pas lieu.

Mais si l'on tranche le nerf, si seulement on le comprime par une ligature , s'il est pressé de quelque nodosité ou tu- meur , par un épanchemcnl de liquides entre ses enveloppes, comme dans les névralgies scialiques, il n'envoie plus au cer- veau l'impression. Quand le nerf cubital a été comprimé par un choc, nos doigts peuvent à peine sentir et se reuiuer, jus- qu'à ce que l'influence nerveuse se soit rétablie par des four- millemens incommodes. De même la cécité peut être due à la compression des nerfs optiques. Pareillement , la moelle' épinière gênée par quelque collection de sang ou de lymphe, rend insensibles et paralytiques toutes les parties inférieures au point de la compression, La ligature des nerfs récurrens , qui Se distribuent au larynx, rend les animaux muets, parce que les muscles de leur glotte en sont paralysés ; la voix re- naît si cette ligature est ôlée.

Quelquefois le nerf perd la faculté de sentir, en conser- vant celle de mouvoir qui semble être moins délicate. Ainsi , des paralytiques agitent encore quelque peu un membre qui déjà ne sent plus ( Deidier , Anaiomie , p. 232 , Scnac, Traité du cœur ^ tom. 2 , p. 292 ). Quand tout mouvement a cessé, la paralysie paroit plus incurable que si elle est bor- née à l'extinction du sentiment. De même , dans l'action du froid, qui est l'ennemi des nerfs , comme le remarque Hip- pocrate , le sentiment commence par s'engourdir ; puis , le mouvement qui survivoit ne s'arrête que quand le froid de- vient excessif. On sait que les nerfs , non-seulement compri- més , mais même coupés , se ressoudent comme des autres parties; alors le mouvement seul peut se rétablir quoiqu'ils ne puissent plus transmettre lesenllment( îlaigton , Philos, tnms.^ an 1795. ) ; ceci a fait soupçonner que le mouvement se pra- pageoit par le névrilème ou l'enveloppe nerveuse , et le sen- timent , par la pulpe médullaire intérieure , interrompue en ce cas par la cicatrice. On sait d'ailleurs que cette pulpe est la seule substance qui jouisse de la sensibilité. ( C'est ainsi que cette pulpe comprimée par l'infiltration d un suc aniuial, entre le tissu cellulaire de ses enveloppes , ou par une sorte d'hydropisie , éprouve une douleur vive comme dans la scia- tique , Cotunni, de hcfiiade nervosd ^ Commeutar. , Wianne y 1770 ). En d'autres cas de paralysie , le sentiment survit en- core à la faculté motrice qui est abolie. Il faut remarquer aussi que la circulation diminue beaucoup dans les membres pa- ralysés, qu'ils maigrissent , qu'on y ressent un froid morbide, tant la puissance nerveuse est le principal excitateur de la vie et des fonctions réparatrices !

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Divers physiologistes ont pensé toutefois qu'il y avoit des nerfs uniquement consacrés au sentiment, et d'autres , au seul mouvement ; si les nerfs optique, olfactif et acoustique n'ont que la fonction spéciale de sentir, beaucoup d'autres sentent et font mouvoir en même temps : tels sont ceux du bras , qui se distribuent aux doigts ; tel est le rameau de la cinquième paire qui sert au goûl et au mouvement de plusieurs muscles. Ces nerfs du mouvement ne tirent point les muscles eux-mê- mes, car jamais nerf ne se contracte, et d'ailleurs les mêmes troncs envoient souvent des rameaux à des muscles antago- nistes. Tous ceux qui transmettent les sensations ne se ren- dent pas également au cerveau directement , puisque ceux du tact de la peau, émanent la plupart de la moelle spinale, laquelle envoie ensuite ces sensations à ce grand foyer de l'intelligence.

On sait que l'homme et tous les vertébrés ont cinq sens ou portes extérieures ouvertes sur les objets de l'univers. Plu- sieurs mollusques sont privés de l'odorat, quoique quelques- uns conservent encore la vue et l'ouïe, avec les autres sens. Les crustacés paroissent les avoir tous , mais l'ouïe n'a point d'organe connu chez les insectes à métamorphose , quoique plusieurs en jouissent manifestement. Enfin les plus impar- faits des animaux ne possèdent plus que le godt et le tact qui ne manquent à aucun, ces sens étant les gardiens les plus in- dispensables à l existence. ( Voyez Seîns. )

Le tact est spécialement approprié aux corps solides; le goiîi , aux substances humides ou liquides; i odorat , aux va- peurs ou exhalaisons; Vou'ie, aux ébraniemens de l'air; la vue , à la luaiière : ainsi se fait une progression successive de plus en plus délicate d'objets apercevables à nos sens. Il en résulte (jue le taci et le goût n'aper<^oivent que des substances en contact immédiat, quoique le goût démêle déjà des mo- lécules plus fines ; l'odorat juge ensuite des corps plus éloi- gnés ; l'oreille en aperçoit par les bruits ou les sons , de plus écartés encore ; et la vue enfin , s'étend à la dislance im- mense des étoiles fixes , et par ce moyen agrandit infiniment la sphère de toutes nos idées. Ainsi , plus les sens devien- nent subtils et relevés , plus ils ont d'étendue dans leur ac- tion , surtout la vue et Touïe qui s exercent au moyen d'é- Lranlemens ; mais les sens qui ne s'opèrent que par des contacts sur des membranes , l'odorat, le goût et le tact, ont un champ plus resserré ; et même l'odorat, le goût ap- partenant plus spécialement aux fonctions internes de nutri- tion , ne concourent pas autant à la production de Tintelli- gence que les autres sens. De vient que le goût , surtout , prédomine cher les brutes et les hommes qui leur ressem-

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Lient. Il en est de même pour le tact vénérien. Les autres sens qui ont des rapports si immédiats avec le cerveau , comme la vue , l'ouïe, ou des relations variées et très-éten- dues , comme le tact , offrent les matériaux les plus précieux et les plus abondans à l'intelligence ; ils affectent davantage la sensibilité morale.

Parvenues au cerveau , les impressions n'y sont reçues et l'animal n'en a la conscience dans son moi^ qu'autant que ce centre jouit de toute son intégrité et de son énergie. En effet, pendant le sommeil, les sens extérieurs seroient en vain frap- pés ; il faut un état particulier d'activité dans ce centre ; il lui faut entière liberté dans ses fonctions. Ainsi lorsqu'il est comprimé par une trop étroite capacité du crâne , comme chez les idiots, les stupides crétins, dont Malacarne atrouvé les os de la base du crâne très-resserrés , de même que l'oc- ciput {Opuscoli scelli^ Milano 17S9, în-^."^ tom. 12 , part. 3, p. 14.8 , sq. ) ; lorsqu'il existe des concrétions de phosphate de chaux, soit à la glande pinéale, soit à d'autres éminences, ou des hydatides, ou un épanchcment de sérosités comme chez les hydrocéphales; s'il s'y rencontre une collection de pus ou de sang; si ce dernier liquide est injecté soit dans les plexus choroïdes , soit ailleurs , comme dans les apoplexies fou- droyantes; s'il y a quelque épine osseuse ou esquille qui dé- chire ou irrite sans cesse les méninges, ainsi qu'on l'a re- marqué chez des épileptiques ; si le cerveau est détruit par quelque érosion , s'il s'y forme un squirrhe , un abcès par suite d'un coup, d'une commotion vive, il est impossible que les sensations y soient nettement aperçues. Ces causes mor- bides rendent plus ou moins raison de l'état de stupidité , des délires maniaques et frénétiques , ou des divers degrés d'aberration mentale et d'hallucinations singulières qu'offrent beaucoup d'individus.

On a souvent expérimenté que la compression du cerveau plongeoit dans l'affaissement , la stupeur, le coma , et même jetoit dans l'apoplexie; puis le réveil et la faculté de penser renaissent quand la compression cesse. La paralysie peut être également le résultat d'un épanchement de sang ou de sérosité vers l'origine des nerfs, ce qui les empêche de trans- mettre l'activité aux membres. Les spasmes seront l'effet de quelque irritation, d'un tiraillement ou déchirement, soit des nerfs à leur origine cérébrale ou spinale , soit de leur enve- loppe pie-mère ou névrilème.

La condition de veille ou d'excitation du cerveau et de la moelle spinale paroît être d'abord le résultat de l'influence du système nerveux ganglionique , comme nous le dirons plus loin ; mais cet état d'excitation s'entre lient surtout au moyen

sa ^' T'- V.

d'un snng aiiéru'l ou oxygéné. En effel , l'on ne Inîsse ar-' river au cerveau que tlu sang noir ou veineux, dépouillé de son oxygène , Tanimal tombe dans l'asphyxie , le œllupsus , l'anaisiliésie la plus complète.- Il est ravivé , au conlraire, par du sang rutilant ou enrichi d'oxygène. Ce principe semble donc êlre l'excitateur le plus éminent de la puissance ner- veuse ousensitive. On remarque, en confirmation de cette opinion , que les animaux doués de poumons et d'une vaste respiration , les mammifères , les oiseaux qui ont le sang chaud, jouissent d'une sensibilité plus énergique , d'une ca- ' pacité cérébrale plus étendue que les espèces à sang froid , dont les poumons celluleux ne reçoivent qu'une petite partie de sang , tels sont les reptiles, ou dont les branchies ne sé- parent que peu d'oxygène au milieu de l'eau, tels sont les poissons. Enfin les animaux invertébrés n'étant arrosés que d'une lymphe blanchâlrc , peu oxygénée dans leurs branchies ou leurs trachées, ne peuvent communiquer, par ce fluide , qu'une foible excitation à lem- système nerveux.

Mais est-ce, au contraire, parce que ce système est natu- rellement imparfait , que les fonctions de ces animaux lan- guissent et que leur chaleur vitale est si foible ; car celle-ci devient plus élevée chez les espèces à système nerveux très- développé. En preuve de ce sentiment, on représente que la compression d'un nerf produit du froid dans les parties sous-jacentes auxquelles il se distribue; la circulation, la nutrition s'y ralentissent beaucoup, ainsi qu'on 1 observe dans les membres paralysés qui s'atrophient. Cependant on ne doit pas conclure , comme on a cru pouvoir le faire , que les nerfs éloient les conducteurs de la chaleur et du suc nourri- cier dans toutes les parties ; car il faudroit que les plus ner- veuses fussent les plus échauffées et les mieux nourries, ce qui n'est pas; les plantes se nourrissent bien sans nerfs, ainsi que les zoophyles qui n'en montrent guère ; enfin la ch.iKur animale paroît être surtout en rapport avec la quantité de respiration ; mais l'activité nerveuse accrue dans une région quelconque du corps , y augmente la chaleur, l'afllux des hu- meurs, la quantité des frotlemens, comme l'augmentation du sang artériel avive h son tour le système nerveux. Ainsi s'en- tretient le cercle réciproque de la vie.

D'ailleurs , la chaleur favorise autant le développement de la sensibilité générale , que le froid l'éteint au conlraire. Aussi les animaux à vaste respiration , ayant plus de trente- deux degrés de température , comme les oiseaux, sont-ils très-sensibles , très-vivaces , très-amoureux ; ils jouissent de beaucoup d'activité cérébrale et nerveuse. Les mammifères, favorisés en outre par une structure encéphalique , plus cou-

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venable au déploiement de l,'inlelligence , manlfeslent des facultés supérieures à toulesles autres classes. Ainsi, lorsque l'activité de la respiration et de la circulation est considéra- ble , comme dans la jeunesse , cette fièvre de la vie , la sensi- bilité est extrêmement exaltée. Partout le sang s'accumule comme en une partie enflammée , par exemple , l'œil dans rophlhalmif^, l'oreiile dans l'otalgie , le doigt dans le pana- ris , les organes génitaux par l'érection, la sensibiiilé s'y avive excessivement , et les moindres contacts y paroissent ou très-vifs, ou même douloureux. 11 n'y aurolt pas sensa- tion si les extrémités nerveuses n'étoient pas tendues, et, comme attentives à l'impression. C'est ce qu'on remarqua, pour les papilles de la langue qui se dressent ; elles ne irans- metloient pas les saveurs , par exemple , chez un somnam- bule occupé d'autres objets que des dragées qu'on mettoit en sa bouche et qu'il rejetoit. Ainsi le système nerveu'x est sus- ceptible d'érection ( Hebenstreit, De tiirgorc vilull , Leipz. , lygS, p. 7 ; Zollikofer, De sensu r.xterno , Hall. 1794^ ?• 4^ ». et surtout Ijordeu, dans son Traité des glandes.

Pareillement le cerveau peut être excité avec violence par une inflammation, comme dans la frénésie. On a vu des sols devenir alors hommes d'esprit (Pvobinson , Ofihe spleen,^. 71). Aussi les habitans des climats méridionaux voient beaucoup de fous parmi eux; ils ont l'esprit plus exalté que ceux des climats froids , et l'on observe que les Européens voyageant sous les tropiques , deviennent plus spirituels, lorsque le so- leil violent de la torride frappe à plomb sur leur tête. Les Crétins mêmes, si stupides,si indolensen touttemps, devien- nent furieux dans les gorges des Alpes les rayons solaires se concentrent, en été , comme dans une fournaise. Enfin ce qui prouve que la chaleur, par elle-même , indépendamment du sang artériel , devient nécessaire pour maintenir l'activité nerveuse, c'est que le froid vif plonge beaucoup d'animaux dans la torpeur, en hiver, comme les loirs, les marmo!- tes , etc. V. HtvERNATioN. Cependant leur respiration n'est nullement interceptée, mais elle se ralentit excessivement, ainsi que la circulation, parce que les fonctions nerveuses qui y présldoient sont abattues par la froidure.

Cette chaleur, néanmoins , si elle est trop considérable ou trop continue , dissipe la sensibilité. On en a la preuve chez ces individus pareisseux ou presque incapables de tra- vail pendant les grandes chaleurs , et sous les climats les plus ardens ; les habitans y font la sieste. De même il y a des ani- maux qui s'engourdissenlparaccablementdechaleur, comme les tenrecs de Madagascar (^ennace.as , Linn.). Ce n'est pss uniquement leur puissance motrice qui est affaissée , mais XXfi. 35

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aussi leur sensibilité propre ; car les méridionaux , par exem- ple , recherchent par besoin des saveurs , des odeurs , des impressions extrêmement énergiques , qui seroient doulou- reuses et insupportables pournous.Aussisont-iis blasés, épui- sés, vieux de bonne heure.

La qualité de la sensation varie encore suivant la délica- tesse des tissus qui reçoivent l'impression. ïl est évident que les individus encroûtés d'une peau épaisse , tels que les animaux pachydermes^ ont le tact fort obtus ; de même, les personnes trop grasses, celles à fibres musculaires grossières et comme racornies , telles que chez les forts de halle , ont des sensations obscures ; leurs nerfs sont , pour ainsi dire , ensevelis sous des chairs et du lard , ou détrempés dans des liquides trop abondans pour que les contacts soient immé- diats. Voilà pourquoi les gros animaux ont , en général , moins de sensibilité, de vivacité que les petites espèces (outre que des petits membres sont plus agiles et qu'il y a plus d'unité de vie); les géans, et particulièrement les indi- vidus à cou allongé , comme chez les oies , les autruches , ont une petite tête, le sang n'est pas envoyé abondamment , ni très échauffé au cerveau ; ils sont plus ou moins lents à s'émouvoir et souvent stupides , tandis que les personnes de courte taille et à cou presque nul ont la tête chaude , selon l'expression vulgaire, ou une irritabilité prompte à s'émouvoir. C'est particulièrement à chaque expiration que le sang est retenu le plus abondamment au cerveau ; on le voit se gon- fler alors dans les fortes expirations et les efforts de la toux qui accumulent le sang dans les carotides.

On observe encore que la sensibilité est plus vive sur les parties les houppes nerveuses s'épanouissent presqu'à nu, comme à la langue , à la membrane nasale , à l'urèthre et au pénis, ou au clitoris, au mamelon, aux lèvres, etc. Il est vrai qu'il s'y ramifie un grand nombre de nerfs et de vais- seaux sanguins. Les parties les moins sensibles en l'état de santé , telles que les os, les tendons etligamens capsulaires, deviennent impressionnables quand elles sont enflammées. En effet, partout le sang artériel afflue , y cause chaleur, rougeur, tension, s'accroît l'énergie nerveuse, au point que les yeux très-enflammés peuvent voir clair dans l'obscu- rité. Les dents elles-mêmes sont impressionnables , puis- qu'elles s'agacent.

Quoique tout le corps soit sensible , plus ou moins dans tout ce qui n'est point appendice de la peau, tels que les poils et cheveux, ou l'extrémité des ongles , des cornes , etc. Cependant il n'est pas tout nerveux , comme le disoient Wepfer et Bocrhaave. II est certain qu'on n'a trouvé aucun.

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nerf an placenta, au chorion , à toutes les autres enveloppes du fœtus, bien qu'un auteur en ait supposé l'existence ( Schœffer , De prœsentiâ neivor. in secundis, etc.) ; les ménin- ges , telles que la dure-mère et l'arachnoïde n'en montrent pas ; mais quoique insensibles dans l'état naturel , on doit croire qu'elles ne le sont nullement dans l'état maladif, pen- dant les migraines, les céphalalgies violentes. Enfin \gs organes n'ont pas toujours une sensibilité correspondante à la quan- tité de leurs nerfs ; car les viscères , le mésentère , le tube intestinal , quoique embrassés de toutes parts d'une multi- tude de nerfs , sentent fort peu ; il est vrai que ce sont ceux des ganglions , les moins soumis à l'influence cérébrale , ou au foyer des impressions ressenties.

D'ailleurs , si les nerfs sont , comme nous l'avons dit , sus- ceptibles d'érection pour mieux sentir, l'attention , la vo- lonté , l'imagination peuvent plus ou moins diriger l'influence sensitive sur tel ou tel organe. Par exemple, un homme affamé voit un met appétissant , Veau lui vient à la bouche , c'est-à-dire , que ses glandes salivaires entrent en jeu, les papilles du goût se redressent et appellent la saveur. De même le mammelon maternel se dresse et fait quelquefois jaillir le lait dans la bouche du nourrisson qui s'en approche. L'habitude , le travail , l'exercice appellent encore plus ou moins un grand degré de {finesse soit dans l'ouïe du musi- cien , l'œil du peintre , la main de l'artisan habile , etc.

De plus, les extrémités nerveuses ne sentent point de la même manière tous les agens ; chaque tissu organique jouit d'une modification de sensibilité qui lui est propre. Pourquoi la vessie qui ne peut supporter sans douleur une collection de sang, quoique ce liquide n'ait rien d'acre , garde-t-elle sans peine Turine la plus chargée de sels irritans ? Pourquoi la bile qui déplaît tant sur la langue, convient-elle au duodé- num ? L'eau la plus pure irrite excessivement la trachée- artère , tandis qu'elle glisse sans action dans l'œsophage à côté. L'émétique qui soulève l'estomac , se place impuné- ment sur la conjonctive de l'œil, quoiqu'il y rencontre un même genre de membrane , et l'œil ne supporte pas le suc de l'ognon , qui descend dans nos viscères , sans inconvé- nient. SI l'ipécacuanha opère sur l'estomac, le séné agit sur les intestins grêles ; tel remède se porte aux reins et à la vessie comme les cantharides , tel stimule spécialement le foie ou tout autre viscère, ou les vaisseaux hémorrhoïdaux, comme l'aloës. Il y a des saveurs qui prennent à la gorge; d'autres ne piquent que l'extrémité de la langue. Chaque nerf, ou chaque partie a donc une aptitude, un département spécial de sensibilité, pour tel ou tel objet; et qui dira pourquoi le»

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inercuriaux affectenl les vaisseaux lymphatiques et les glandes sallvairesl* pourquoi l'opium engourdit l'arbre nerveux céré- bro-spinal, et non les nerfs du grand sympathique ? Il y a donc dans toutes les parties du corps diverses susceptibilités à re- cevoir tel ou tel genre de douleurs , de plaisirs , d'irritations , ou d'impressions quelconques, avec le même arbre nerveux. Pareillement , il y a des venins , des maladies qui ne peuvent agir spécialement que sur les organes qui leur conviennent ; toute autre partie y seroit presque invulnérable.

En outre , telle espèce d'animal résiste à un poison qui en feroit périr beaucoup d'autres; comme le chien ou le loup sont seulement purgés et mis en appétit par une dose d'arse- nic capable de faire périr plus de vingt hommes ( F. Poisons), Combien d'animaux recherchent avec délices telle nourri- ture , qui seroit un affreux venin pour nous , comme des charognes pestilentielles , des plantes caustiques et escarro- tiques , telles que l'euphorbe , etc.

Et pareillement, combien les impressions des sens sont diverses! Cet assa-fsetida qui nous paroît d'une puanteur si détestable , n'est-il pas le mets des dieux pour les Persans , comme l'était chez les anciens F\omains le laser cyrénaïque ? L'horrible putrilage de poissons corrompus dans la saumure ou le garum n'offrait-il pas une saveur délicieuse au palais des Apicius et des Nomentanus ? Combien de personnes déli- cates ne supportent pas le fromage passé qui plaît si fort à d'autres i" Ne cite-t-on pas des hommes d'un goût assez dé- pravé pour rechercher même les excrémens humains? Nous passons sous silence les délires d'un autre genre, et nous ver- rons plus loin à quoi tiennent plusieurs idiosyncrasies bi- zarres de la sensibilité.

De Vhabitiide el des diverses quantités de la sensibilité.

Celle-ci jouit de la singulière propriété de se mettre en rapport avec les objets qui la consomment régulièrement. Prenons l'exemple de cet homme renfermé dans un obscur cachot pendant vingt années; d'abord sa santé souffrit beau- coup d'un changement de vie libre en cet état d incarcéra- tion , mais peu à peu sa faculté de sentir se proportionna avec ce nouvel état ; ses yeux consommant moins de faculté visuelle s'enrichirent tellement de cette puissance , qu'ils apercevoient au travers de la sombre lueur les insectes, les plus petits animaux de ce souterrain. Ses poumons et son corps se façonnèrent à un air humide , mais toujours uni- forme et égal dans sa température; des alimens toujoiirs les mêmes; une vie aussi sédentaire, une solitude aussi conti- nue , le repos, le sommeil et l'apathie qui viennent enfm au

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secours de la constance dans les longs malheurs, tout avoit concouru à exercer très-peu la faculté sensllive de ce pri- sonnier ; rendu enfin à la liberté , se sentant soudainement ébloui du grand jour, ébranlé par un air vif, assailli par des sons devenus trop assourdissans pour son oreille , agile de la présence et des questions de tant de personnes, rappelé trop brusquement à l'usage d'autres alimens, le voilà tout-à-coup épuisé , malade ; son système nerveux ne peut plus suffire à tant de secousses; il faut reporter désormais ce malheureux dans sa prison , pour qu'il y retrouve sa santé ou le rhythme desdépenses journalièresde sa faculté de sentir. Au contraire, tel voyageur ou marin , bouillant de l'agitation des voyages et des révolutions atmosphériques, toujours bravant la mort au travers de l'océan ou des contrées barbares, tantôt élevé au comble de ses désirs par l'acquisition d'immenses riches- ses , tantôt précipité dans l'abime de l'infortune, jeté nu et naufragé sur un rocher désert ou peuplé de cannibales, quel!e vigueur de caractère , quelle insensibilité ne doit pas déployer ce nouvel Ulysse au milieu de ces tempêtes de l'existence? Cependant , arrivé au port, déjà l'uniformité d'une vie casa- nière le fatigue d'ennui ; de fortes émotions lui sont devenues nécessaires , et il se rengage sur des flots mille fois maudits dans le travail de ses misères.

Voilà donc des proportions de sensibilité acquises et déterminées par l'effet d'une longue habitude , au point qu'à. L'heure fixée par une action constamment journalière, comme celle de manger ou de se mettre à l'ouvrage , un be- soin nous recherche, nous oblige à dépenser régulièrement la portion de sensibilité accoutumée. Tout autre moment de- vient moins favorable ; l'on voit des gens si parfaitement ré- glés , qu'ils ne sont amoureux qu'à certaine heure , comme ils n'ont de l'esprit au travail de tête qu'à telle autre ; passé ces époques , ils ne sont plus bons à rien. Tout cela montre que nous possédons, en général, une quantité quelconque de sensibilité que nous sommes maîtres de dépenser habituel- lement à telle ou telle action, et qui, comme le rouage d'une horloge , revient à temps fixe.

Pour preuve de cette somme, c'est que l'action en moins d'un sens , se reverse en plus sur l'autre. Tous les aveugles ,. par exemple , ont l'ouïe plus fine et plus délicate ; l'attention s'y porte pour suppléer à la perte des yeux ; ils exercent aussi plus habilement le tact. Un homme peut ainsi se spécialiser et cultiver une branche de son organisation , aux dépens des- autres , comme on voit des membres très-exercés se fortifier et grossir à côté d'autres desséchés de langueur et d'atrophie ^ faute d'emploi. Qui doute que rexerçi^e continuel de la ré^,

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exion ne développe mieux le cerveau du philosophe qne ce- lui de l'idiot ou du misérable sauvage, qui passe son lemps à dormir sous sa hutte ! Mais cet idiot , ce sauvage , ont en re- vanche d autres prépondérances, telles que la vigueur , soit musculaire, soit génitale , qui dépense le surcroît de leur sen- sibilité , qualités dans lesquelles notre philosophe pourra se trouver fort peu vaillant.

Enfin , quelle que soit la sensation éprouvée, la puissance de sentir s'useet se consomme par la continuité de son action; elle renaît ou se répare après une intermission ou un som- meil. Ce fait est non-seulement évident pour les organes des sens , mais même pour des douleurs internes , puisque le gra- vier des reins ou un corps étranger dans notre économie de- vroient, par leur présence , irriter continuellement les parties voisines; cependant ces douleurs ont leur lassitude , elles s'endorment et se réveillent par divers momens. On a vu des malheureux criminels s'assoupir au milieu des longues tor- tures , et des canonniers s'endormir profondément près des batteries les plus foudroyantes , par excès de fatigue.

Ceci nous découvre donc le secret des accoutumances et de l'insensibilité à laquelle on parvient pour les maux de la vie , comme pour les plaisirs dans la vieillesse ; puisqu'on va même jusqu'à s'habituer aux poisons. En effet, l'enfant est neuf aux impressions ; la sensibilité de la jeunesse n'est si impétueuse que parce qu'elle est encore pleine, florissante; elle déborde sur tout avec profusion. Les senlimens d'amour , par exem- ple , s'exaltent alors jusqu'à la fureur ; mais tout s'épuise par la durée, et l'on ne ressentira que trop ensuite les désirs sur- vivre au pouvoir des jouissances. Enfin l'indifférence, l'in- sensibilité arrivent, de tristes dégoûts remplacent les dé- lices; mais par une équitable compensation, les souffrances cl les misères elles-mêmes s'amortissent, leurs épines les plus déchirantes s'émoussent, et l'homme s'approche de la tombe, également désenchanté des prestiges de la vie, et inat- taquable désormais à ces profondes passions qui poignar- daient l'âme et le corps en même temps.

Comment se produit ce grand changement ? Qui fait res- susciter et mourir tour-à-tour nos facultés de sentir.'' Nous traitons ailleurs du SoMiviEiL ( F. cet article ), qui est le ré- sultat de l'épuisement de la sensibilité animale, et le temps nécessaire à sa réparation. Mais il est une expérience com- mune qui montre comment les sens se blasent. Un enfant au- quel on fait boire pour la première fois du vin , y trouve une saveur forte et enivrante ; plus on s'habitue ensuite à cette boisson , moins elle semble agir; alors l'homme recourt à l'eau-de-vie , qui gratte d'abord plus agréablement son palais;

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1)ientôt celle-ci ne suffisant plus , et les fibres se racornis- sant , il faut ajouter des aromates piquans , un alcool plus concentré , plus brûlant ; mais l'organe se durcit davantage encore , et Ton a vu des orientaux blasés par des épiceries , chercher à dégourdir l'inerlie de leur palais en mâchant Jus- qu'à du sublimé corrosif et de la chaux vive , tant leurs nerf» étoient crispés, oblitérés ! Le moyen de mieux sentir seroit, au contraire, de cesser l'usage des impressions fortes , de re- venir aux objets insipides afin que la faculté nerveuse ait le temps de se réparer. Le secret de rester sensible est donc celui de ne pas beaucoup ni souvent sentir; d'être avare d'une si précieuse faculté , pour s'en ménager davantage au vieil âge., ,

D'où pense-ton que vienne quelquefois ce profond ennui , ce besoin de s'occuper et d'éprouver des émotions fortes au spectacle ou ailleurs, qui se remarque chez les personnes oisives? C'est, au coritraire, de la trop grande accumulation de sensibilité chez elle. Une femmelette délicate , tout le jour mollement étendue sur des coussins , ne dépensant aucune de ses forces , rassemble en elle les élémcns de toutes les pas- sions ; bientôt la plus petite contrariété va lui causer une ex- plosion vive de sensibilité. Dans son désœuvrement, il s'en- gendre en elle mille caprices divers , mille volontés bizarres, pour consumer cet excès de faculté sentante qui agite ses nerfs , la distend de spasmes , suscite des vapeurs , des mi- graines et tout le cortège des maladies nerveuses des gens du monde. Mais que cette femme si délicate soit plongée daqs la misère , réduite au sort rigoureux des vljlageoises , et obligée dès le matin de saisir la pioche ou la houe : vous la verrez bientôt guérie de ses maux , revêtir les formes mas- culines avec les fibres dures et insensibles des laborieux ha- bitans des campagnes.

Ainsi , quelque nature qu'on suppose au principe sentant , il s'use et se reproduit comme les corps matériels ; un exemple le prouve bien manifestement. Fixez la vue sur un objet très- éclatant environné d'obscurité, et portez ensuite vos regards sur une surface uniformément éclairée; la partie de votre ré- tine qui étoit frappée d'un grand éclat, ne pourra plus voir qu'une image noire, tandis que les régions de la rétine, qui n'ont pas dépensé leur faculté visuelle en regardant l'obscu- rité , verront en plus alors. Donc la sensibilité visuelle s'use plus ou moins; donc les impressions épuisent la puissance de sentir. Voilà pourquoi la vieillesse n'en conserve plus que les débris. Elle se consomme principalement par les jouis- sances non moins que parles douleurs. En effjt, les plaisirs de l'amour causent surtout une extrême déperdition de ieu-*

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sibilitc, au physique comme au moral. Rien ne devient plus apathique que l'animal épuisé par le coït répété, puisque plu- sieurs y perdent la vie. De même, les grandes émissions de sang ou des Muides nourriciers affoiblissent extrêmement la sensibilité. L'on conçoit que de trop longs jeûnes empêchent aussi la réparation système nerveux, et , par exemple , des hommes violenset crimineb deviennent fort tempérés , ou même incries , par un régime végétal et une diète d'alimens peu substantiels â laquelle on les astreint dans les prisons, aux Etats-Unis d'Aniérique. Les complexions flasques et hu- mides des lymphatiques sont, en général, moins sensibles que les tempéramens secs, sveltes , tendus et nerveux, dont la fibre paroit constamment mobile et agacée. Les femelles étant plus communément grêles, ayant des fibres plus min- ces , pitis excitables par les moindres stimulaus, sont pres- que toujours agitées de quelque impression : tout ébranle leurs nerfs ; de vient qu'elles paroissent plus passionnées , qu'elles sont plus craintives, plus affectueuses, ou plus aisé- ment touchées que les individus masculins chez toutes leses- pèces d'animalîx. En effet, la forblesse rend beaucoup plus impressionnable encore que la force , parce que la première expose le système nerveux à toutes les causes d'émotion. Dès lors , l'individu n'est occupé qu à sentir sans cesse; il faut qu'il piie et s'assoupliise à tout, tandis que l'être robuste , aperce- vant peu ou point les foibles impressions, se trouve monté et préparé pour les chocs vigoureux; ses explosions sont plus rares, mais volcaniques et foudroyantes. 11 en est de même pour les maladies; la femme éprouve mille incommodités passagères; l'homme uiâle, moins attaquable, conçoit aussi les plus funestes maladies.

[ De ractmté spéciale du cetveau comme centre de la sensibilité , eljoyer intellectuel.

Les rapports de Tericéphale avec le reste du système ner- veux , chez les animaux vertébrés principalement , devien- nent de la plus haute importance , puisque le cerveau dirige leurs actions volontaires , et mesure leur intelligence.

Les qualités nécessaires à l'exercice de ses fondions, outre l'intégrité de ses parties , sont : d'avoir aussi ses deux hémis- phères égaux, ce qui n'a pas toujours lieu ( (iunz , Mém. des saoaiis élrung. , pag. 280); car de même qu'un œil ou une oreille, plus forts que l'autre , rendent la vue louche ou Touïe fausse , il paroit aussi qiie les opérations intellectuelles ont besoin d'une parfaite symétrie dans les organes eiless' exé- cutent. A la vérité , 6n ne sait pas s'il existe un siège spécial dans la masse encéphalique , pour l'àuie ou l'esprit qui pense

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en nous. Tout le monde sait que, ni la glande pînéale qui est souvent encroûtée de calculs de phosphate calcaire , ni le corps calleux qui n'existe que chez lesmammifères , ni le cen- tre ovale de Vieussens, etc., ne peuvent en être spécialement le siège à l'exclusion d'autres parties. La portion corticale ne sent pas leshlessures , et on peut en enlever d'assez grandes portions, sans que la faculté intellectuelle ensoit troublée or- dinairement. Ce sont seulement les parties profondes dont les blessures deviennent très-périlleuses. Le plus ouïe moins de sécheresse, de friabilité de la moelle cérébrale, quelques gra- nulations ou concrétions , et même 1 hydrocéphale ne dé- rangent pas toujours l'intelligence. Néanmoins , la trop grande mollesse du cerveau paroîl disposera l'hébétatlon , à la stupidité, l'enfance surtout pendant laquelle l'encéphale est si humide qu'il contient plus de huit dixièmes de parties aqueuses ou susceptibles d'être évaporées par dessiccation. Chez les vieillards, il est plus sec ; il l'est aussi beaucoup dans la plupart des maniaques , des ccweaux bnUés. Le nom- bre des lamelles du cervelet ou des circonvolutions des hé- misphères aparumoindre chez les idiots que chez les hommes plus intelligens. On a dit, sans preuve , que le cervelet étoit consacré aux mouvemens spontanés et aux affections instinc- tives des brutes, comme aux fonctions involontaires de res- piration , de digestion , de circulation pendant le sommeil; d'autres auteurs ont placé l'instinct dans les tubercules, ««/«, de l'encéphale , et ils croient les avoir trouvés plus petits chez léS animaux pourvus de beaucoup de sagacité , comme l'élé- phant , que chez les brutes les plus stupides(Wiliis , aninici brulunim , pag. 222 ). D'autres admettent que chaque région du cerveau qui reçoit un nerf, a son département propre; par exemple , les couches optiques pour la vue , les éminences mamillaires pour l'odorat , le cervelet pour l'ouïe , selon Ya- role. Cette opinion a été développée par M. Gall, qui sup- pose en chaque proéminence cérébrale, une faculté ou dis- position naturelle et innée (i). Selon Sœramerring et Eve- rard Home , le liquide séreux qui se remarque dans les ventricules du cerveau est l'organe propre de l'âme , tout comme la vue s'exerce par un liquide, et l'ouïe par l'humeur des canaux semi-circulaires de l'oreille ; cependant il ne pa-

(i) De même, M. Cuvier el d'autres auteurs trouvent les na/es du cerveau plus grosses chez les animaux herbivores que parmi les carnivores; ils pensent qu'on peut de'couvrir ainsi plusieurs usages des parties de l'encéphale. Cependant les insectes qui ont desinslincts si étonnans et si varie's , jouissent-ils d'un cerveau^ d'un cervelet, ou de proéminences telles qu'on en observe chez les animaux verleljrés?

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roîtpas qu'il existe de sérosité épanchée dans les ventricules cérébraux naturellement, carl'onn'ena point trouvé chez un homme qui venolt d'être décapité (Verduc, Usag. des parties , lom. 2 , pag. 65. )

Toutefois , on a douté que le siège de l'âme fù^ uniquement dans le cerveau , puisque des animaux décapités manifestent encore des volontés et ressentent des impressions , comme les tortues , les lézards, les insectes; aussi Hartiey suppose que l'âme s'étend dans la moelle épinière; on voit cependant des hommes conserver leur raison intacte malgré la com- pression de cette moelle ; car les rachitiques , les bossus chez lesquels cette moelle est fort amincie, tandis que le cer- veau est plus considérable et les carotides plus larges à pro- portion que chez les autres hommes, ont d'ordinaire de l'es- prit. Mais nous avons vu qu'il falloit bien distinguer les actes qui viennent de l'instinct , et qui tiennent à l'appareil ner- veux sympathique , de ce qui émane du cerveau ou de l'intel- ligence proprement dite.

L'encéphale, et sans doute aussi la moelle épinière, per- çoivent les impressions reçues à l'extrémité des nerfs , pourvu que la communication soit libre. On demande toutefois, comment des individus , privés d'une partie , se plaignent pourtant de douleurs , qu'à certaines époques, ils éprouvent, comme s'ils l'avoient encore. Mais il faut comprendre que l'extrémité du moignon d'un bras ou d'un pied amputés con- tient le nerf qui se rendoit à ce membre ; or ce nerf peut se sentir affecté , par les changemens de temps , de la même manière qu'il l'étoit chez le membre alors subsistant; il n'est donc pas surprenant qu'il transmette au cerveau l'impression douloureuse qui fait dire à un manchot , mon bras méfait mal. De même l'aveugle , en frottant ses yeux et comprimant ainsi le nerf optique , peut apercevoir des éliacelles , des lueurs comme l'homme qui voit clair ; l'impression paroît donc être un ébranlement nerveux.

Ajoutons encore que l'animal ne reçoit au cerveau des sensations que conformément à l'état de son organisation ; tel objet agréable au goût et à l'odorat de l'un, sera nuisible ou déplaisant pour l'autre. Ainsi nous pouvons ne point aper- cevoir la nature des choses telle qu'elle est en réalité , mais suivant la modification de notre structure ; rien ne démontre que telle couleur paroisse la même absolument aux yeux si différens de toutes les créatures; ne voit -on pas des hom- mes pour lesquels la musique la plus suave est insupportable et que des sons foibles agacent plus que des forts ?

De plus , le centre cérébral peut apercevoir des impres- sions qui ne sont nullement ressenties aux extrémités ner-

veuses, quoiqu'il les y rapporte. Les effets des songes appar- tiennent à cet ordre de phénomènes ; ainsi les rêves volup- tueux présentent des images qui réagissent sur les organes sexuels comme dans la réalité. D'autres faits analogues s'exé- cutent même pendant la veille chez des fous qui se voient sans cesse obsédés par une idée fixe dans le cerveau; tel étoit Oreste poursuivi par les Furies. La crainte, l'amour impri- ment surtout des images persistantes. On peut les comparer h ce qui se passe dans les organes de la vue ou de l'ouïe frappés long-temps ou fortement d'une lumière ou d'un son très-écla- tans; l'ébranlement se perpétue plus ou moins après l'impres- sion elle-même. Ces profondes images, chez les maniaques, leur dérobent même le sentiment des objets réels ; car celui qui croyoit avoir des jambes de paille, les voyoit très -bien pourtant en chair et en os.

Dans les phénomènes intellectuels , tantôt l'action des sens extérieurs prédomine, tantôt le centre cérébral réagit prin- cipalement. De sont nés deux modes d'existence philoso- phique pour l'homme : la vie , soit active , soit contempla- tive, le péripalétisme ou le platonisme chez les anciens; et parnii les modernes, la doctrine de Locke , de Condillac, qui fait émaner des sensations extérieures tout le système in- tellectuel, et la philosophie de Leibnilz, de Kant qui tire tout notre être moral du dedans et des formes propres de la pen- sée abstraite , par des spéculations transcendantes. Locke procède par analyse et décomposition ; il reconnoît , avec Aristote, que rien n'existe dans l'esprit , qui ne soit entié par les organes extérieurs, et qu'à la naissance , le cerveau, privé de toute idée innée , est comme une table rase. Les platoni- ciens de l'antiquité et les idéalistes modernes, se concentrant dans la contemplation , et fermant, au contraire , tous leurs sens extérieurs dans l'abstraction absolue et l'isolement, cher- chent à reconnoître , à priori, les formes essentielles de l'en- tendement, ses directions primitives , l'existence indépen- dante du moi , sans le corps , dans l'espace et le temps. Par sont entraînés à l'illuminisme , à Texaltation de l'enthou- siasme , les philosophes qui suivent ce mode de contempla- tion ; comme il arrive aux Orientaux, dont la vie indolente , sous leur climat chaud, favorise extrêjnement cet état de con- centration cérébrale , au point qu'ils se plongent dans des extases ou des ravissemens d'esprit pendant lesquels ils ces- sent de seniir les chocs extérieurs. Au contraire, la philoso- phie analytique ou qui procède à l'aide des sensations et des expériences , exerçant lesmouvemens corporels, et jugeant d'après les rapports des objets extérieurs qui nous frappent, constitue le réalisme , philosophie plus matérielle qui peut

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souvenl conduire à nier tout ce qui ne tombe point sous les sens, tandis que Vidculisine finit par dédaigner le monde phy- sique pour n'en reconnoître qu'un purement intellectuel.

Ainsi l'homme peut ne pas accepter au cerveau les im- pressions actuelles des sens ; il peut, au contraire, ne vivre que par elles et sans la réflexion, comme les individus réduits à un rôle uniquement passif. Si notre corps est un instrument dont les cordes sensitives sont diversement ébranlées selon la nature des objets qui nous affectent, nous résonnons à Tunisson de ces impressions , nous nous réglons , pour ainsi parler , sur le même rhythme et la même mélodie -, notre in- telligence est donc toute formée par le concours de ces sensations , disent Locke , Condillac et les autres réalistes. Cependant, répliquent les idéalistes, c'est l'âme, le principe intelligent du cerveau qui reçoit ces sensations , qui les ar- range et les combine , car l'impression qui se passe dans l'or- gane du sens ne seroit rien sans un inielleci agent et intérieur qui la convertit en pensée ; il tire de son propre fonds loute la série des raisonnemens et des jugemens qui construisent l'édifice de la raison humaine avec ces matériaux bruts , ar- rivés du dehors. Supposez même l'absence de ceux-ci, l'âme active par elle-même , s'étend dans le temps et Tcspace ; elle a ses attributs propres dans chaque animal , puisqu'elle le dirige par des instincts bien antérieurs à toute connoissance du dehors ou acquise parles sensations. Enfin, l'âme modifie en nous par l'imagination ces, impressions extérieures , de sorte qu'elle peut transformer ceile de l'absinthe en celle du sucre. Ainsi, quoique nos sens nous donnent une connois- sance des objets extérieurs, c'est l'architecte interne qui les dispose à sa manière , de sorte que nous pourrions vivre dans un monde enchanté, comme en songe, ou croire éprouver dc-s sensations qui n'auroient rien de réel ; ainsi la vie peut n'être qu'une illusion. 11 n'y a de réel que notre âme ou les subs- tances spirituelles , indépendantes et essentielles dans leur existence.

Il faut un état de concentration cérébrale pour s'élancer à des vérités intellectuelles d'un ordre très-élevé , ou pour combiner leurs élémens épars en un seul corps de doctrine ; en cet état , on cesse d'apercevoir les corps extérieurs. Le soldat de Marcellus immola ainsi Archimède. 11 existe un état inverse , c'est celui des individus très - évaporés , très- mobiles à toutes les impressions actuelles les plus fugaces , et qui n'en conservent, n'en réfléchissent aucune ; pluribus inieniusminorest ad iingula seimis; elles se succèdent au cerveau avec la rapidité des représentations qui glissent devant un miroir ; ce vice qui lient à une excessive sensibilité externe,

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re remarque surtout chez les individus grêles, très-excitables qui effleurent toute chose sans réfléchir. Les oiseaux parois- sent également tenir de cet état de mobilité, aussine peut-on rien leur apprendre , sans les fixer dans des cages , et quel- quefois on les prive de la vue pour empêcher leurs distrac— . lions perpétuelles. Uaticniîon est donc nécessaire.

Dans l'état régulier , V impression reçue au cerveau y forme une image qui peut s'y conserver par la mémoire pendant plus ou moins long-temps , et se représenter par un acte de la vo- lonté. Les impressions du jeune âge plus vives, plus simples, se conservent le plus longuement , ainsi que celles qui pénè- trent fortement à l'aide des passions, comme la rancune : Manet altâ mente reposium.

Les images analogues entre elles ou reçues simultanément, ont coutume de se rapprocher , comme de se réveiller l'une l'autre par une association naturelle. Souvent les mêmes se confondent, et les plus rebattues se reproduisent d'elles seules par l'effet de l'habitude. Celte connexion des idées fait que les moins enchaînées tombent les premières hors de la mé- moire , comme les substantifs qui ne se rattachent à rien ; aussi, après une attaque d'apoplexie ou une maladie grave qui a suspendu l'action cérébrale , les adjectifs se rappellent plus aisément à l'esprit que les noms propres , et l'on a vu des hommes oublier ainsi jusqu'à leur nom , tandis qu'ils dé- signoienl fort bien les objets par leurs qualités, au moyen de ces affinités des idées.

Quand les images ou les idées reçues sont différentes l'une de l'autre, l'organe pensant les discerne, les compare , distingue plus ou moins exactement leurs rapports ou leurs diversités. Celte puissance de juger et combiner, constitue le raisonnement ou le jugement , qualité très-importante qui rend l'homme infiniment supérieur aux animaux, et même tel homme plus intelligent que tel autre. Aussi cette faculté est la première qui s'altère, soit par les passions, ou par l'ivresse, la folie ; elle manque dans les idiots.

En outre , la sensibilité cérébrale a le pouvoir de repro- duire des images , des impressions vives par Vinmgination , et sans la présence des objets ; elle jouit de la faculté de séparer certains attributs de ces impressions ou de ces images simples, pour les combiner avec d'autres ou pour les abstraire. Si le jugement ou l'intelligence choisit , abstrait les qualités communes à plusieurs objets différcns , et les rattache à un signe ou une idée, celle-ci devient complexe, et plus ou moins générale. C'est par cette précieuse faculté aussi que riiomme s'élève bien au-dessus des brutes. Il a reçu l'avan- tage d'un langage articulé , et d'attacher à chacun des sons

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convenus qu'il forme pour luî-même ou pour communiquer avec ses semblables , une image , une idée plus ou moins abstraite. Par cet heureux privilège , il sait coordonner plus sieurs séries d'idées , selon les lois du raisonnement, et s'élancera toutes les vérités les plus générales. Il embrasre donc , par ce moyen , le plus vaste horizon intellectuel ; î^il en dessine les proportions et l'étendue , il en trace l'immense tableau par l'écriture , traits hiéroglyphiques convenus , dout la permanence fixe le langage et la pensée fugitive.

Les animauxne peuvent guère transmettre leurs idées, d'un individu à l'autre , que par des signes ou gestes naturels, des cris résultans de leurs impressions, et des passions qu'ils res- sentent. Us ne paroissent point capables de généraliser leurs idées par l'abstraction, ni de former une chaîne de raisonne- mens un peu compliqués. Cependant les animaux d'ordres supérieurs , tels que les mammifères surtout et les oiseaux , savent acquérir plusieurs connoissances, et sont susceptibles d'éducation ; ils se gouvernent avec un certain degré de pru- dence , surtout les vieux, plus mûris par l'expérience que les jeunes. Cependant, comme ils n'ont que des idées très-limitées et peu de signes auxquels ils puissent les attacher, toute leur instruction acquise périt avec eux. Les pères ne transmettent nullement , chez les chiens, les perroquets , par exemple , ce qu'ils ont recueilli de la société de Ihomme, à leurs enfans. Ces animaux ne peuvent donc pas s'avancer dans une car- rière de civilisation de même que nous , qui héritons de la riche expérience de nos ancêtres , et nous élevons à une noblesse intellectuelle, bien supérieure à celle de la simple nature.

Les impressions que nous recevons et les idées qui en résultent , causant du plaisir ou de la douleur , et nous mon- trant soit du dommage , soit du bien-être dans nos actions ; le jugement nous porte à nous gouverner avec prudence , pour chercher le bien et fuir le mal. 11 en est ainsi des ani- maux les plus intelligens; toutefois ceux auquels la nature n'avoit pas accordé assez d'étendue d'intelligence , auroient bientôt cessé d'exister faute de prévoyance , pour éviter les causes de destruction, s'ils n'avoienl pas hérité , de tout temps , d'un ordre prédisposé d'actions savamment coor- données, dès leur naissance, pour leur conservation et leur reproduction. Voilà pourquoi les animaux jouissent de Vins- tijir.i; ils l'ont d'autant plus parfait ou mieux développé , qu'ils sont plus foiblos , plus incapables d'apprendre ou d'une vie pins courte -, tels sont les insectes : aussi les animaux supérieurs ont moins d'inslincl à inesiiie qu'ils acquièrent pluji d inteiligeucc , et si l'enfant manifeste encore quelques

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directions instioclives , ainsi que le malade , l'homme intel- ligent et fort n'éprouve presque plus ces impulsions internes.

Aussi les êtres intelligens se déterminent par la volonté j résultat d'un jugement libre , même quand il s'agit de sa- crifices douloureux , comme celui de la vie , dans Kégulus , retournant à Carlhage mourir dans les supplices pour sa patrie ; ou Caton d'Utique , se tuant pour ne pas survivre à la liberté. Mais l'animal se détermine , soit par l'impression externe de volupté ou de peine , soit par ses impulsions inté- rieures , comme la mère qui s'expose au danger pour sauver sa famille. L'homme veut , parce qu'il sait ou croit savoir ce qui convient ; la brute est mue par un besoin, une passion quelconque ; cela est si manifeste , que l'homme, sans l'acti- vité du cerveau , ne peut nullement agir , tandis qu'on a vu des animaux décapités , comme des souris et des lapins , sur- tout des reptiles , des insectes , se mouvoir encore avec ins- tinct. Donc notre vouloir émane de notre penser; mais chez la briite , l'action précède même la réflexion. Ce n'est que dans certaines impressions subites et imprévues, telles qu'une chute ou un coup , que notre instinct déploie les moyens de défense avant le temps nécessaire pour la volonté réfléchie. Voilà ce qui se passe habituellement chez la brute ( Voyez Instinct , Imagination , Jugement ).

Heureusement pour elle, l'instinct est un domaine inalié- nable, inhérent à la forme et à la constitution de chaque es- pèce, et qui , aussi développé dès la naissance jusqu'à la mort, n'est susceptible ni de diminution , ni d'accroissement , parce qu'il est complet et parfaitement approprié à chaque créature.

Par la plus merveilleuse prévoyance , il n'y a nulle imi- tation chez des êtres naissant orphelins et solitaires , tels que les insectes ; mus comme des instrumens de la nature , plutôt qu'ils n'agissent par le libre arbitre de la volonté , ils n'inventent et n'imaginent rien , et pourtant ils ne sont pas copistes ; mais leur machirffe joue spontanément par l'in- fluence de leur système nerveux gangîionique, tout de même que chez l'homme endormi ou somnambule. Voyons les influences de cet appareil nerveux dans d'autres phéno- mènes.

§ IV. De l'influence du système nerveux gangîionique sur le cerveau^ et des PASSIONS , des SYMPATHIES.

Nous avons vu que la sensibilité du cerveau , des sens et des membres se fatiguoit , s'usoit , se consommoit par son emploi , et que les organes extérieurs doubles et symétri- ques f tomboient alors dans le sommeil. Il n'en est pas ainsi

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du domaine intérieur des nerfs trîsplanchniques ; ils ne ces- sent jamais de présider à l'aclion du cœur pour la circula- tion du sang , à la respiration , aux fonctions digestives, et continuent toujours à réparer les pertes de l'économie ; aussi tandis que le système nerveux cérébro-spinal a suspendu ses actes pendant le temps du repos , il a reçu une nouvelle somme de forces , par le concours des nerfs trisplanchniques ou du travail de la nutrition , résultant de leur activité.

Si Ton en veut des preuves encore plus évidentes , on les trouve dans ce qui se passe sur-le-champ en diverses occa- sions. Un homme tombe de foiblesse et d'épuisement ; on lui fait avaler un verre de vin ou d'eau-de-vie , aussitôt il se ranime avant même que le torrent de la circulation ait pu envoyer à l'encéphale un nouveau sang réparateur ; mais soudain les nerfs trisplanchniques suscités par cette boisson, transmettent une nouvelle énergie vitale soit à la moelle épinière , soit aux autres parties du système cérébro-spinal avec lesquelles ils ont des communications si multipliées. Qu'un individu prenne intérieurement un poison , aussitôt toute l'économie est bouleversée pareillement.

Il est donc vrai de considérer le système ganglionique ( ou trisplanchnique ) , comme le régulateur de toutes les autres fonctions sensitives extérieures ; il leur envoie ou leur retire la vie, en quelque sorte à sa volonté ; il les anime , les ébranle par sympathie , au moyen de nombreux filets de cor- respondance, qui se nouent et s'anastomosent avec l'arbre cérébro-spinal ; il leur transmet ce qu'il éprouve , et ici nous allons voir combien les métaphysiciens , qui ne tirent que de nos sens extérieurs tous les élémens composant l'intelli- gence , connoissent peu l'homme.

Un Hollandais se farcit de laitage et de pâtes parmi les marécages du Zuyderzée ; ces pesantes nourritures , au mi- lieu d'un air épais et des humides brouillards , qui d'ailleurs amorlissoient sa sensibilité, ne lui inspiroient que des goûts simples , des idées bornées. M%is si , déblayant ces amas de mucosités qui gorgent ses viscères intestinaux , qui envelop- pent, engourdissent ses extrémités nerveuses, vous soumettez ce bon Batave à un régime plus stimulant ; si vous rem- placez sa fade bierre par des vins généreux de Porto ou de Xérès; si les épicesde l'Orient sont substituées au beurre; si le café , les liqueurs alcooliques et les plus ardens aromates, viennent secouer , agacer celte inertie du système nerveux, vous verrez bientôt cet homme , d'abord si humble et si flegmatique , relever fièrement sa tête , ses yeux bleus étin- cèlerontd'un feu plus brillant, ses membres se déploieront avec plus de vivacité et de grâce; enfin , son esprit s'élevant

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«îans son essor , piarief a au-dessus de la sombre atmosphère dans laq?iflle il croupissoit.

Qui donc a dissipe 1rs nunges de son intelligence et avivé tous ses sens j* Une simple excilalion du système nerveux ganglioni(iue , tandis que des impressions fortes de rexlérieur consommeroient , épuiseroient les facultés sensitives. Le» effets des alimens et des boissons se remarquent tellement chaque jour, soit par livresse, l'emploi du café et du thé, soit dans la pesanteur d'esprit qui accompagne les pénibles digestions après un grand repas, qui appelle à l'estomac tou- tes les forces, etc. , qu il est inutile de s'arrêter sur ce sujet. Aussi , les peuples ne diffèrent pas seulement dans leur sen* sibililé , par Teffet de la chaleur ou de la froidure des cli- mats , comme on le répète d'après IMontesquieu ou Hippo- crate , mais surtout encore par le régime et la nature des alimens que le sol leur fournit , ou que les échanges commer- ciaux leur apportent.

Qu'on nous dise pourquoi , d'ailleurs, l'ellébore chez les anciens, ou une purgaiion forte nettoyant le canal inteslinai de certaines matières dontla présence stimuloil vicieusement le système nerveux ganglionique , rappelle l'ordre, la netteté' du jugement au cerveau de plusieurs m miaques et mélanco- liques!' d'où Tenoient donc ces idées bizarres qui Iroubloient leur intelligence ? Comment une bile noire et épaissie ins- pirc-t-elle ces pensées tristes et sombres , ces goûts misan- Ihropiques, celle haine profonde de la société, ou ces terreurs de la mort , ces désirs affreux du suicide ? Des fous n'ont présenté à leur mort aucune lésion des organes encé- phaliques , mais tantôt des calculs biliaires, des squirrhes un abcès au foie ou à la rate , tantôt des varices au mésen- tère , une accumulation d'un sang épais et stagnant dans les rameaux de la veine porte , etc. ( Foyez Bonnet , Séoul- chrelum ; Morgagni , Sedib. et caus, morb. ; Lieulaud , Pr'ost Oiwert. des cadavres , et les observations de Robert Whyft on nervous disorders ^ pag. 2o3 ; Lorry , de Melancholid tom. 2 , p. 164.. sq. , etc. )

Les agacemens particuliers des nerfs intestinaux peuvent porter le délire au cerveau ou des convulsions dans le;i membres: le fait est évident chez des femmes chlorotiques à goûts dépravés , chez desenfaus remplis de vers, pmsqu'aus- fiilôt qu'on les en débarrasse , leur système iferveux reprend son état de santé ; et tel enfant à qui l'irritation vermineuse avivoit beaucoup l'intelligence, retomba dans son état de médiocrité primitive lorsqu'on expulsa ses vers (Van Phel- Sum , Hist. verm. asrarid. paihul ^ p. 2a8, sq ). ,

En règle géaéraiïj ia Ueiicate^sse desiwjgaues intcsliuaux xxii. 3^

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est un accroissement de vigueur pour le système cérébro-* spinal. Tous les hommes de grand esprit ont l'estomac folble : Imbecilli slonnicho , pcnè uinnes cup'idi litlerarum sunt, dit Celse ;

I h >mme qui a besoin de cuire et de choisir ses nourritures est plus délicat, plus sensible que les autres animaux-, les êtres voraces et grands mangeurs , les herbivores à large pause sont plus stupides que les espèces sobres. P^nfin, les hypo! hondri^quïs, toutes les personnes à viscères débiles ou facihînient irritées , sont plus Intelligentes que toute autre.

II en est de même pour Tor^ane ulérin des femmes , puisque sa foiblesse , dans l hystérie , reporte une activité surabon- dant'' au cerveau, d'où naissent cette vivacité d'esprit, cette lucidité des i^lées , avec des anomalies incompréhensibles

et soudaines qu'on observe chez les hysléri(jues. La trans- mi'^sioa des alTeclions utérines, soit au cerveau , soit aux autres organes , est évi l,;nte par les nombreuses sympathies qui se manifestent alors, comme des gonflemens, des spas- mes, des resserremens à la gorge, à l'abdomen , etc. Tout ce qu un organe perd en sensibilité se reporte nécessaire- menl sur quelque autre partie: au contraire , si l'estomac , après le repas, et Tutérus , dans la gestation, concentrent les f acuités sensilives à ces viscères , le système cérébral en conservera moins.

Qu'au lieu de se faire ressentir sur le trajet intestinal, ces irriialions du système nerveux ganglionique ne s'opèrent que datts ^"e région plus bornée, aux vaisseaux hémor- roïMaux , pi»' exo<n[)le , la transmission au cerveau ne s'en fera pas moins. On a vu des manies à la suite de la réten- tion du flux héinorroïdal , cesser par son rétablissement (Hippo craie , Epidem. , 1. IV , texte 5i , et ApJior. sert. "VI, Aph. 21 , ou par des varices ouvertes aux jambes, selon Yan-Svvieten, Aphor. Buerhaiw. , \ou\.\\\ ^ p. 5of) ; Schenc- kius , Oliseiv.^ 1. I , p. 14.2, etc. ). Combien de femmes de- viennent non -seulement capricieuses et bizarres, mais même folles au temps menstruel, si leurs règles coulent \x\^\{Eph. mit. air. , et Journal de médec. , etc. )! il en est de même de beaucoup de personnes dans leur grossesse.

Qu.'lles modifications n'impriment pas les organes sexuels sur le cerveau, par le concours des nerfs sympathiques i* Ci't adolescent, rempli de légèreté et d'insouciance, ar- rive à répo(]ue de la puberté; bientôt ses organes génitaux se développent, s ombragent de poils; une liqueur stimu- lante, nimvellement sécrétée , élance un feu inconnu dans tçute. l'économie ; mais ,c>'St surtout le cerveau, l'arbre nerveux qui reççjt les plus vlolenJes secousses.

Ce ii'c^î plus une aiir)t;ur.'(lai]s ses'veities rachce j C'est V*nu^ toute entière à sa proie attachée.

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Le jonr , la nuit , au sein des forets comme au milieu des bruyriiiles cités , mine pensées d amour s é'èv nt s.iiis relâche dans Tespril. agitent l.-sotnuu'il de leurs volupîueuses images. Vai vain on occupe, on deiourne uu amant par tout autre obji'l, la seusilion interne du sp''ruie surabondant vi«;nt à tout instant renouveler les idées et les désirs de la jouissance; ce liquide sliuulant agace , échauffe , avive élo.inanunent le syslèiU' nerveux, el lui iiupriaie une énergie héroïque. C'est alors que s'inspirent toutes les hautes pensées, les seiilunens généreux , un courage à toute épreuve , le génie le plus su- bii-ne. Ce qui le prouve , est létal de foiblesse physique et morale, de détente, ou l'ibjection pusillanime, de stupi- dité , dans lequel retombent les individus épuisés par d'ex- trêmes jouissances , ou privés d'humeur fécondante par la castration , coui:ne on l observe dans les eunuques.

Pour bien connoilre encore l inHuence du système ner- ve'ix gaiiglioniqu ,', il faut le considérer dans le jeu des émo- tions qu on attribue au cœur.

Des passions et affections Internes et morales.

Excepté certaines modifications de l'attention suscitées par la p ésence d'obj-ts extraordinaires, les affections et les p iv-iioiis propr-.*ment dites appartiennent au système nerveux symoathique ou tii-s[)lanL!;nique.

Nous eu séparerons doue les dispositions du cerveau qui ne ressent aucune p 'ssion proprement dite ; car la curiosité est une stM'te d apfiélil de l'organe pensant, analogue à ce!ix ((ue ressentent 1 organe sexuel ou l'estomac, pour accomplir leurs fonctions naturelles; ainsi, elle n'est pas plu> passion que la faim, la soif , l'appelil vénérien , qui sont des besoins plus ou moins pressans et qui n)eltent en jeu le (i"str, manifestation commune de tous les appétits et les besoins.

De même, la vue ou le sentiment d'un objet peut pro- duire dans notre cerveau V admiration ^ élever cet etit jus- qu'à V enthousiasme , à V engouement , ou se borner a Veslinte^ ou au contraire , descendre au mépris qu inspire le ridicule; tous ces états appartiennent plus a l'organe pensant qu'au do- maine du cœur. Aussi l'admiration est froide, ou même fa^ tigue bientôt , parce qu'elle ne remue pas le cœnr. Les ani- maux peuvent être surpris, étonnés, éblouis; mais ils îie parolssent point susceptibles d'éprouver raduiiration , de ressentir de l'estime, de l'enthousiasme, ou de connoïtre le ridicule : eussent-ils la faculté de rire , ils n en connoi- Iroient pas les nuitifs. ïl fi^ut aussi d;:ns l'homme , l'idée du noble et du sublime, pour coinprcudrc l'inverse, qui est

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l'abject et le risible ; tous ces états concernent donc principa- lement l'esprit.

Les passions proprement dites appartiennent aux ani- maux aussi bien qu'à riiomme , parce qu'elles résident plus spécialement dans le système nerveux gangiionique , ou émeuvent le cœur. Nous en compterons six principales, dont les unes n'étant que des états inverses des autres , se com- battent par leur contraire : telles sont l'amour et la haine^ la colère et la crainte^ foie et la ùistesse. Elles offrent deux dis- positions générales dans l'organisation : ainsi l'amour , la colère , la joie , déploient un excès de vie et de sensibilité à l'extérieur ; aussi la faculté contractile des muscles , l'éner- gie des mouvemens, sont prodigieusement excitées , au point que la colère , par exemple , a rendu l'activité à des para- lytiques ; que l'encéphale et les nerfs ne tombent point dans le sommeil tant que ces émotions sont vives et flagrantes. Au contraire , on voit la tristesse , la crainte , la haine , amortir le jeu de la puissance nerveuse , cérébro-spinale surtout, 11 semble que la vie se refoule à l'intérieur pour la conservation de l'individu, dans les maux qui le menacent ; ces affections vont même jusqu'à rendre immobile et à plonger dans la stupeur, le sommeil , l'insensibilité , bienfait de la nature dans les extrêmes infortunes, avant-courrières de la destruction.

Le besoin du plaisir inspire de l'amour , comme la dou- leur excite la haine. On entre en colère contre quiconque veut blesser notre amour-propre ounosintérêts; maison éprouve de la crainte d'un danger imminent. La joie résulte de la possession d'un bien ou de son attente sûre et prochaine ; comme la tristesse , au contraire , s'aggrave par une perte ou par la menace d'un mal inévitable. Or , toutes les impres- sions n'affectent pas seulement le cerveau comme feroient des sensations des nombres mathématiques , mais descen- dent au cœur, parce qu'il s'agit de notre existence. Si nous nous détachions de tous ces intérêts, comme l'essayoit la phi- losophie stoïcienne, nous serions exempts des passions; mais peu d'hommes sont parvenus à cet état parfait d'alaraxie , qui permettroit de juger impartialement de toutes choses.

i.° Dans I'amour , la sensibilité semble s'exhaler vers l'objet désiré ; elle l'aspire avec ardeur et s'élance au-devant de lui ; aussi le sein semble s'entr'ouvrir , comme les bras s'étendent pour embrasser un objet chéri; le cœur palpite ; un feu léger erre dans les regards , sur la bouche à demi-ou- verte ; on languit, on brûle tour à tour, la vie semble s'é- puiser et renaître. Tous les sentimens tendres et généreux coiicourant à celle ardente et délicieuse passion ; elle en-

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traîfle le délire et l'exlase dans ses ravissemens , et s'élance jusqu'aux espaces célestes en imagination. C'est la seule pas- sion que l'on ait crue digne de la Divinité. L'amant meurt dans lui pour revivre dans ce qu'il adore; son bonheur est de s'immoler , il fait sa gloire des périls auxquels il se dé- voue pour Tobjel de ses transports ; aveugle sur tous les défauts de la personne idolâtrée , il y trouve toutes les per- fections. Par lui, l'avare devient prodigue, le timide , au- dacieux, le superbe s'humilie. La chaleur d'amour porle à toutes les actions grandes et hautes; elle allume le génie de l'éloquence , de la poésie et de la musique. L'cgoïsmc est contraire à l'amour. On est porté h aimer les foibles , les jeunes, les êtres doux, faciles, et ceux qui acceptent nos bienfaits , plus que ces derniers n'aiment en retour. Les en- fans , les femmes, tout être délicat, désire d'être aimé et pro- tégé ; tout généreux et fort aime davantage , parce que l'a- mour est un don de soi, et qu'il émane d'une chaleur de vie boudante.

2." La Haine présente un étal opposé , et rend aussi misérable que l'amour rend heureux. Haïr est souffrir, c'est souvenile partage duméchant; et naissant de froideur, la haine se trouve surtout dans les lâches , les craintifs et soupçonneux qui frappent tout, parce qu'ils redoutent tout. De vient la férocité extraordinaire des tyrans. La haine est froide et durable, tandis que la colère est chaude et peut s'exhaler. La haine n'a point de compassion , elle s'irrite des bienfaits qui l'humilient encore plus ; elle est souvent dissimulée et hypocrite ; d'autant plus dangereuse alors qu'elle se concen- tre et s'accumule comme un abcès de malignité qui s'agran- dit en rongeant le cœur. Aussi les envieux , les avares, les mélancoliques , les humiliés, ou les hommes trop pauvres et trop malheureux , deviennent haineux. L'envie, la jalousie, la malveillance cruelle , les noirceurs de la calomnie , la cruauté inflexible sont le funeste cortège de cette maladie mo- rale. On comprend qu'elle appartient aussi aux eunuques , à tous les êtres disgraciés plus ou nioins et qui se croient mé- prisés. La haine s'attache aussi à ceux qu'on redoute, à l'or- gueilleux, à l'insolent, à quiconque le paroît être dans une fortune fastueuse et insultante à la misère , et dans la supé- riorité d'un rang qu'on affecte. On doit haïr à juste titre le méchant ou son Injustice ; car les philosophes qui préten- dent que rien n'est bien ni mal sur la terre, se voient con- damnés par ce sentiment inné du cœur de l'homme et de.s animaux qui se soulève de détesiation et dhorreur contre le mal et l'Injure ; ce n'est que le vœu de l'équité.

3." L'explosion de la Colère est aussi un sentiment con-

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servaiour ; c'cs! pourquoi l'influonce du système garglionîquc envoie dans larhrc nerveux cérébro-spinal un surcroît subit d'énergie, doù vient que les yeux élincellent, la gorges^enHe, la voix s élèvi' , les dents se grincent, les muscles se roidis- senf, se lordenl , le sang bouillonne : il peut causer Tapo- plexie ou un anévrisme ; la fureur se peint en traits allumés et effrayans sur la face, donne au corps une altitude mena- çante, rine vigueur formidable. La colère peut sVxalter jusqu'à la rage , iuipriuier des qualités funestes à la salive chez les anim.iu- , et même à 1 nomme; elle détériore subitement aussi les humeurs les plus douces, telles que le lait dans la ma- mi'lle , au point qu il devient vénéneux pour le nourrisson. Les complexions sèches, maigres, tendues, vives, les indi- vidus fatigués ou affamés , cqii\ qui souffrent , sont en géné- ral irascibles; il en est de même des personnes trop louées , ou trop accoutumées à leurs volontés , qui ne supportent plus la conlrariéié. Il y a des courroux concentrés qui crèvent le cœur, comme le dépit, et qui conservent plus longtemps le ressentiment de la vengeance ou la rancune. Les tolères vives ou explosives se dissipent plus lot , disposent à la témé- rité et à 1 audace, anintent le courage , chez les mâles sur- tout, et à l'époque àr T, mour, d'où naissent les principales querelles entre les animaux. Le système hépatique est parti- culièrement affecté dans cette passion , et produit des cva- cualions bilieuses, ou quelquefois la jaunisse.

4-."' La Crainte, conservatrice des foibles, agit en sens inverse de la passion précédente ; car elle porte f^es ef- fets vers les organes inférieurs, et refoule, comme dit Ho- Tncre , lame dans les jambes pour fuir ; aussi le ventre se lâche, ainsi que l'urine et même le sperme ; un froid glacial couvre le front et la poitrine , le visage pâlit, les yeux s'é- teignent , la lèvre inférieure tremble ; l'extrême terreur stu- péfie même, fait manquer le pouls et la voix, les sens restent perclus ; les poils se dressent par le resserrement de la peau, <lans l'horreur, et peuvent blnnchir bientôt faute de nourriture , parla rétropulsion des humeurs à la suite d'une vive frayeur. L'épouvante est commune cliez tous les êtres débiles, les en- fans, les vieillards , les femelles surtout , les ten»péramenshu- mides ; elle g-igne aisément aussi les gens trop prudens ou dé- lians ; elle est plus grande à jeu.i et dans l'obscurité ou l'igno- rance. La timiiii:é et la douceur des animaux herbivores, mal armés, les rend et plus viles à la course et susceptibles d'être domptés ou apprivoisés, comme on voit aussi les individus énervés et peureux devenir les plus serviles adulateurs; les plus lâches sont pareillement les plus hypocrites, cl la même timidité rend superstitieux, avare, parcequ'on cherche dessoii-

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tiens dans la fortune et les croyances aux puissances surnatu- relles. Si Tappréhenslon modérée aide à la prudence , la cons- ternation abat extrêmement les facultés intellectuelles. Les animaux timides ont d'ordinaire de fortes jambes de derrière j)0ur mieux fuir; ils sont aussi plus prolifiques que les courageux et les colériques ; ceux-ci sont mieux armés pour l'attaque , et présentent des armes redoutables soit à la tête soit aux or- ganes antérieurs du corps. ( V. la différence entre les MÀles elles Femelles, à leurs articles,)

5." La Joie, affection familière à la jeunesse , à la santé florissante ou à la croissance, tend en effet à déployer la vie et Torganisme ; elle cause une expansion favorable à la trans- piration , à l'exhalation; le visage s'étale et rayonne de con- lentcment, la bouche s'ouvre du rire, dilatation spnsmodique (du diaphragme chez l'espèce humaine seule ; une agréable rougeur colore et échauffe modérément la surface du corps, qui devient pléthorique et gras par cet état de délectation; la vive .'allégresse fait même trépigner de plaisir; elle épa- nouit le sang vers la circonférence, avec tant de force quel- quefois , que retournant avec peine vers le cœur, on se pâme, on peut mourir de joie. Aussi celte passion est bablilarde, elle excite au chant, à la danse , aux jeux ; elle inspire de la franchise, une cordialité ouverte , une pleine insouciance; elle dore l'avenir des plus riches espérances , rend libéral , prodigue, sociable, et quelquefois vain d'ostentation, de bonne opinion de soi. Rien aussi de plus favorable que cetto passion aux fonctions dlgestlves ; mais elle détend et diriii; nue. l'esprit ou le rend imprudent.

6.0 Au contraire, la Tristesse, sévère apanage de la vieillesse et des douleurs, rétrécit la vie ou la concentre au dedans, amoindrit, dessèche , use et vieillit l'organisation. On se sent comme suffoqué d un poids énorme qui contraint de soupirer souvent ; le teint se fane et devient blême, la peau resserre ses pores et n'exhale presque rien ; la puis- sance musculaire ralentie , tombe en langueur ; les affiicllons portent à la retraite , à l'obscurité des solitudes; les fonc- tions intellectuelles, ou tombent découragées dans le som- meil et l'abandon de la résignation, ou se rongent de nou- veaux soucis. On se déplaît à soi-même dans cette morosité inquiète, au milieu des alarmes et de continuelles solli- citudes , qui font aspirer quelquefois h la mort de déses- }>oir. Devenu âpre et taciturne, ou même farouche et im- piioyable, on ne peut supporter la joie d'autrul : Oderuut liluirern liistes ^ irislcmqiie jocosî. Le corps s affaisse dans le iqarasrne , tandis que l'esprit s'aiguise en creusant et inedi- lanl sans cesse. Si le cuagiia gagne des personnes a fibres

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molles , comme les enfans , les femelles chez; tous les ari>î- maux , il peut se délendre par Taltendrisseinent elles lar- jnes qui ramènent la sensibilité à rextérieur.

Toutes les affections se peuvent ainsi ranger sous ces pas- sions-mères , et se composer des unes avec les autres. La pudeur naii de crainte et d'amour; Va jalousie comprend p!u* d'envie, espèce de haine, que d'amour; \ espérance née de la joie, se balançant parla crainte, donne \ irrésolution ; Tor- g'u«7paroîl sortir de cette vaniténée du conteniement de soi- même, avec une teinte à^ arrogance qui résulte de la disposi- tion colérique , etc.

On peut dire seulement que V ennui , le plus insupportable peut-être des étals de la sensibilité , naît de l'absence d'im- pressions nouvelles , soit que Ton se rassasie de dégoût de tout, soit que rien de piquant ne vienne dégager de l'apathie insipide dans laquelle on se trouve plongé. Nous avons mor> tré ci-devant qu'il résultoit d'une accumulation du principe sentant qui éprouve un besoin irrésistible de s'exhaler, fût-ce même dans les périls et les douleurs. Tant d'oisifs riches et blasés , son! poussés à des extravagances et à des fureurs par cet éiat , et parsèment l'univers de leur spleen , faute de sa- voir occuper leur vie ! Ils gagnent à se suicider.

Di.s SYMPATHIES OU forresponrlances nerveuses du corps, et de ses relations extérieures at.-'ec d'autres individus.

Comme l'associ-Tlion ou plutôt la république des organes ne pourroient pas jouer de concert , dans leurs fonctions, sans un principe uiiicjue de gouvernement établissant entre eux une relation d harmonie , le sysième nerveux , au moyeikde ses rarnlficalions, est destiné à les faire communiquer.

C est surtout par ces embranchemens variés des nerfs Iri- splanchniques , pai leurs lacis ou plexus et les nœuds ou gan- glions qui rattachent tant de fiîs presque inextricables , que s'opère crtie corrélation générale dans l'économie animale.

Les principaux centres de tous ces ressorts sont situés vers reslom.îc; ils s'étendent dans les méandres des viscères et les parties adjacentes; aussi presque tous ces organes forment un vaste appareil dont le jeu devient simultané ou successif, se- lon les bi'soins de l'individu , sans qu il soit nécessaire que sa volonté y coopère.

De vient que si l'animal a faim ou soif, s'il a reçu un poison dans l estomac , s il existe quelque saburre dans ses

f Meulières voies, toute l'économie en est affectée ; la langue, a bouche , les orgr.nes des sens, les mouvemens des membres se coordonnent selon l'état de l'intérieur, par celte .synipa- thic. Les frissonnemens des fièvres, la cause des nanibrcusi

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symptômes hysle'riques qui rensonlenl, commis une boule, de Tutérus jusqu'à la gorge , et suffoquent ; les vor.iissemens qui accompagnent les vlolens accès de la népl.rile , résallent de cet ébranlement du système nerveux intcrcoslal, dans ses di- verses ramifications.

Nous avons vu cet appareil nerveux accompagnant pres- que tout le trajet des artères abdominales et entburant leurs troncs de tant de rameaux .ou de liens, qu'il peut exciter di- versement la contraction ou la dilatation des tuniques mus- culaires de ces artères, et par-là fermer et ouvrir plus ou moins les passages du sang, d'où résulteront tous les trou- Lies de la circulation, toutes les nuances du pouls qu'on ob- serve dans les passions et les maladies. Les ganglions de ce système nerveux sous la lele , à la gorge , à la poitrine , à l'abdomen, au bassin, établissent des centres de communica- tion pour chaque appareil de ces régions.

Que le nerf sympathique soit coupé au col, la pupille se contracte et l'œil s'affoiblil (Petit , Mém. acad. se. 1727). Un rameau du sympathique qui se rend aux nerfs de la cmquième paire fait que la pupille se dilate , le nez démange , et les dents sont agacées chez les enfans dont les vers se remuent dans leurs intestins.

Les connexions du sympathique avec le nerf diaphragma- tique produisent Téternuement quand le nezpicote; et les com- munications de Tinlercoslal avec les nerfs de Tœil et du dia- phra";me sollicitent aussi réternuement lorsqu'on regarde le soleil.

Si le hoquet s'arrête par l'éternuement , si la toux excite le vomissement et si l'envie de vomir fait tousser, si la réplé- tion extrême de l'estomac produit le même effet , tous ces actes s'expliquent parles anastomoses des nerfs grands syn»- paîhiques avec les rameaux de la paire pneumo-gastrique , ou vague. Les animaux , les idiots sont plus inertes à toutes ces sympathies.

Par les autres connexions de l'intercostal avec le nerf va- gue , avec ceux de la cinquième paire , ou ceux de l'épine dor- sale , on explique les divers symptômes résultans soit de l'é- pllepsie originelle du bas-ventre , soit de la colique de plomb , comme la raucité de la voix, la surdité, la cécité, les con- tractions ou résolutions des membres inférieurs , l'affaisse- rsient du rectum , ou les débordemens de bile par haut et bas après une violente colère , ou le vomissement qu'excite la ti- tillation de la luelle , ou les hoquets et vomissemens qui sur- viennent à une' douleur aigae du foie , de la rate , ou du co- lon , ou par un calcul de la vésicule du fiel , etc.

C'est encore par ces connexions des nerfs que les convul-

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sions peuvent remonter ou gagner de bas en haut vers le cer- veau (l;ins l'épilepsie , par une irritation des nerfs de la jambe, par exemple , ou uv.e blessure. Le chatouillement vif des ais- selles ou delà plante des piedspeul entraîner encore des spas- mes universels, et on a fait périr ainsi des personnes dan» l'excès des chatouillemens ; ils vont aisément jusqu'à la syn- cope. La compression des testicules abat so;idain 1 homme le plus féroce ; et il semble que la nature indique ce secret aux animaux, car les chiens qui alt3»juent un taureau furibond, le mordent aux testicules pour ie faire jvauouir. Enfin les con- vulsions ou la roideur du Irismus , de Teniprosthotonos et au- tres spasmes tétaniques si fréquens sous les climats ardens des tropiques, résulunl de Tentraîncment simultrné des nerfs spmaux qui se distribuent aux muscles volontaires. Ce con- sensus commence souvent par une douleur aiguë au scrobi- cule du cœur ou au lieu par lequel le diaphragme s'unit avec la plèvre et le péritoine; de il se répand comme une va- peur glaciale dans les muscles (Hillary , Di'seas. of Barhad. ^ p. 2J8 ). et remonte l'épine dorsale. Combien de fois n'a- t-on pas vu une simple épine fichée dans un doigt, causer une vive douleur sur le trajet des nerfs brachiaux, gagner le coi et la télé, puis faire tomber l'homme en lipothymie, sous c(ts régions la chaleur développe tant la sensibilité ? Un durillon placé sur un rameau nerveux de la jambe, au bas des muscles gastrocnémiens , faisoit remonter une sorte de vapeur qui entraînoit des convulsions épilepliques générales. On enleva ce durillon et le mal cessa. (Boerhaav. , Morb. nermr. , p. 84.5.)

(^n voit donc que l'arbre nerveux interne et externe ne for- mant qu'un immense système, peut être ébranlé universelle- ment , même par une simple idée frappant fortement l'ima- gination , comme la vue d'un précipice Ton va tomber, l'appareil d'un supplice menaçant, qui fait trembler tous les menibres. La seule pensée d'un objet dégoûtant ou hideux soulève l'estomac ou bouleverse tous les viscères par sympa- thie. Tel est aussi le coup d une nouvelle désastreuse , qui fait couler une sueur froide , présage de défaillance.

Comme les nerfs des reins correspondent avec des troncs du sympathique , et les nerfs splanchniques avec la paire va- gue, on voit que, dans lanévraigie, ouïe gravier desrtins, les douleurs lombaires , la rétraction des testicules , le spasme lies jambes, les nausées et les vomissemens accompagnent cette maladie. S'il existe, au covtraire , un calcul daris la vessie seulement, ces effets n'ont pas lieu , parce qu'elle ne reçoit pas des nerfs splanchniques , mais d'autres rameaux du sympathique.

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Pourquoi le froid aux pieds peut-il causer la colique avec lénesme et la dysurie ? c'est par les correspondances du sym- pathique avec le nerf sciatlque. Ce sont les anastomoses de ces sympathiques entre eux qui excitent ces nausées et ces vomis- ceniens des femmes enceintes , de celles qui accouchent , ou après l'extraction du calcul vésical. Par la même cause , les ixiensirues supprimées resserrent Tœsophage et produisent des étonffemens; les femmes qui accouchent, éprouvent des con- vulsions et l'horreur de l'eau , parfois , au moyen de ces cor- respondances ; comme on voit les mélancoliques atrabilieux sentir des conslrictions à la gorge , un désir violent de la so- litude, verser des pleurs ou jeter des regards languissans, par les émotions de leur système norveux intercostal.

Pour quiconque n'ignore pas ces connexions, l'utilité des vésicatoires placés à la nuque pour enlever une toux ner- veuse spasmodique , ou entre les épaules, contre le hoquet, les palpitations, ou sur l'abdomen dans une inflammation des intestins, est bien appréciée.

Les odeurs vives raniment les personnes tombées en syn- cope , ou ébranlent puissamment 1 économie , parce que les nerfs sympathiques s'unissent avec ceux du nez ; aussi des poudres acres placées sur la membrane pituitaire excitent l'é- ternuemenl par cette raison. La paire des nerfs vagues ayant des alliances avec les nerfs sympathiques , il en résulte que la colère et les autres passions excitent divers trémoussemens dans le cœur. La jaunisse dépendant quelquefois du spasme des nerfs du foie près du canal cholédoque , elle cède à l'o- pium qui les engourdit.

Mais il y a bien d'autres correspondances entre nos orga- nes , par divers intermédiaires ; ainsi les parties sexuelles sym- pathisent avec la gorge , de sorte que le gonflement , les irri- tations de l'une peuvent se transporter à l'autre , comme on l'observe dans la maladie vénérienne, dans les oreillons, dans l'état de la voix par la puberté , par la castration , etc.

Les organes dont les fonctions sont analogues, sympathi- sent entre eux, sans que leurs relations nerveuses soient pourtant immédiates; ainsi le tissu érectile et spongieux du mamelon et ceux du clitoris ou du gland tendent à se gon- fler simultanément , parla titillation de l'un d'eux; aussi les lèvres jouissant d'une sensibilité analogue , la propagent à ces organes dans les baisers voluptueux.

De même , les mamelles correspondent avec l'utérus, se gonflent dans la grossesse et l'aménorrhée; par l'allaitement, au contraire , les règles sont suspendues , comme on arrête les ménorrhagies , au moyen de ventouses appliquées aux ma- Vielles.

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A '.icnnc raison physi/i'.îc n'a démonlré parfailement pour- quoi un coup reçu à la têt« détermine un abcès au foie , ni pourquoi les aftections du foie troublent l'action du cerveau.

C'est sans doute par l'analogie des tissns que la peau sym- pathise avec l'eslomac , ou celui-ci avec la peau ; ainsi cer- tains poisons pris iniéneuremect font tomber l'épiderme, et même les cheveux ; si l'Wn mange des moules malsaines au temps du frai , la peau se couvre souvent de rougeurs sur-le- champ. La similitude des tissus est sans doute aussi la cause pour laquelle l'orifice des viscères creux sympathise avec leur intérieur ; ainsi la titillation du gland excite l'envie d'uriner, comme l'agacement de la gorge cause des nausées; par la rai- son inverse, la titillation de l'estomac par des vers, picote le nez, agace le bout de la langue , comme Tirritation de la vessie par des calculs cause une démangeaison h l'extrémité du gland , en se propageant le long de la même membrane muqueuse.

Il suffit d'une condition toute pareille des tissus pour que Ja sympathie se puisse communiquer; ainsi rinflammation de la conjonctive d'un œil passe souvent à l'autre , à cause de leur égalité de fonctions. C'est ainsi que dans les mouvemens spasmodiques d'un bras ou d'une jambe , son antagoniste 1 i- mite involontairement. Les deux bras ou les deux jambes fe- ront bien les mêmes actions, mais très-difficilement des ac- tions différentes en même temps. Cette imitation naît du seul consensus et spontanément.

De même , les douleurs trouvant des organes analogues pour la structure et pour l'état de leur sensibilité, elles peu- vent passer avec la rapidité de l'éclair d'un bras à l'autre, ou ceux-ci aux cuisses, etc. ; comme on l'éprouve dans les rhu- matismes vagues, les douleurs vénériennes nocturnes, etc.

Celte similitude de structure et de sensibilité conduit à l'examen de la transmission des sympathies et des affeclions d'un individu à un autre, dans les mêmes organes surtout.

En effet, pour que celles-ci puissent se communiquer , de môme que les contagions et les nialadies , il faut un rapport d'égalité , tel que celui de l'âge, de la complexion, du genre de vie et des autres habitudes. C'est par cette sympathie des organes que nous éprouvons du mal aux yeux, en regardant des yeux enllammés d'une ophthalmie , ou que nous sommes entraînés à bailler, à vomir, parTimitation forcée qu'excitent ces actes d'autrui. C'est parce même r.unsensiis que lesconvul- sions , l'enthousiasme, le jeu des passions vives, se propagent dans les grandes assemblées , surtout entre les individus los plus sensibles et les plus mobiles , tels que des personnes maigres et grêles , des enfans , des jeunes personnes. Rien

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n'est plus contagieux , à cet ^gard , que les scènes lu- briques qui suscitent des passions faciles à s'eullannner. Telles sont aussi ces danses tourbillonnantes l'agitation , la chaleur , rébranlement simultané que produit le rhyilune musical , entraînent les sens , et font perdre la raison. De vient quelquefois l'impossibilité de résister à des séductions auxquelles la nature conspirq, de tout son effort, et dont on ne se garantit qu'en se dérobant à ces causes de sympathie.

Plus il y aura d'égalité ou d'analogie entre les corps , et de concert de senriblîité euLre leurs organes, plus l'unisson sym- pathique sera prompt et facile ; de naissent l'accord sou- dain , les liaisons secrètes entre des personnes qu'une pa- reille manière de voir, d'être affecté, rapprochent dans la société comme par instinct ; de se nouent les amitiés les plus durables par la conformité des sentimens, des mœurs , des hahiludes. Similis simili gaudeL Cet effet est si général, qu'il s'opère même entre les corps non sensibles. Ainsi, les cordes tendues à l'unisson , frémissent toutes dans le voisinage de celle qu'on fait vibrer. Voilà pourquoi les habiles législa- teurs , pour former une association compacte d'une nation , la soumettent à des rites et des habitudes uniformes , dis- tinctes de celles des autres peuples; et c'est ainsi que les Juifs se conservent, malgré leur dispersion , ou s'entendent d'un bout de l'univers à l'autre , dans leurs relations.

Les systèmes nerveux de divers individus sont donc capa- bles de s'établir en rapports directs pour que le plus fort transmette au plus délicat son influence et son harmonie. C'est ainsi que s'opèrent les prestiges du fanatisme , ou les transmissions de prétendus fluides magnétique , sympathi- que, etc. Dans ces circonstances, ce sont presque toujours des hommes à imagination forte ou exallée, qui agissent sur des personnes foibles , sur l'enfance , le sexe féminin , la vieillesse débile , et tout ce qui succombe facilement aux impressions. L'analogie de la communication "magnétique au fer, a conduire à supposer un effet semblable , quoique rien ne démontre le passage d'un fluide réel ( quelque subtil qu'on le suppose ) entre les individus. Cette communication s'exerce principalement par l'influence de l'imagination , même à la distance de plusieurs lieues , sans intermédiaire , et malgré l'interposition d'une multitude de corps. Ce n'est donc qu'en élevant le système nerveux cérébro-spinal d'au- tres personnes à un certain degré d'excitation , que l homme puissant en ccui>res et en paroles , sait leur imprimer telle ou telle commotion morale. C'est de même aussi qu'on peut exorciser les prétendus démoniaques , et que d'habiles fri- pons abusent des dupes.

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§ V. De t origine et de la formation primili^e de T élément neivcujG ou sensilif.

La substance nerveuse est, chez les êtres animés , la por- tion la plus élaborée, le principe souverainemenl aniinalisé; aussi, plus un animal est perfectionné dans 1 échelle Hc l'or- ganisation, plus il déploie son système nerveux , et toutes les richesses de la sensibilité. Cette vérité se manifeste plei- nement en parcourant loule la série du règne animal, depuis lés zoophytes ayant à peine quelques molécules nerveuses éparses , jusqu'à l'homme , qui recueille dans son cerveau un trésor immense de sensibilité et de pensée.

Chez les végétaux pareillement , le summum d'élaborntion de leur organisme est leur fructification ; c'est à ces pariies que se rassemble la substance médullaire, la nourriiurc la plus délicate et la mieux préparée , pour former les fruits et les semences. C'est à diverses parties de la fleur que se dé- ploie le plus dévie, d'irritabilité dans les étamines, ou dt- < lia- îeur organique , comme dans la fécondation de plusieurs arum , enfin que se manifestent les signes les plus évidens de la vie.

Dans les animaux, quoique l'élément nerveux soit princi- palement rassemblé vers la tête, pour diriger les sens el les fonctions de rindividu , cet élément si vital et si élaboré , n'est pas moins destiné à la fonction la plus importante , la plus auguste pour la nature , la reproduction des espèces. Les preuves en sont faciles , car rien n'affoiblit el nénewe plus spécialement l'animal que l'abus du coït, au point que plusieurs en périssent , même sur-le-champ, comme les in- sectes à métamorphose , mâles; les autres espèces languis- sent et muent , comme pour recommencer une nouvelle carrière de vie , en mettant une longue intermission entre les époques du rut. Les êtres qui font le plus usage de leurs fa- cultés intellectuelles et sens^tives extérieures , sont les moins capables de coït fréquent , tandis que les individus les plus brutes, tels que des idiots, des crétins, l'exercent bien davan- tage; et les animaux à petit cerveau sont très-féconds comme les poissons. Enfin , il existe un antagonisme complet entre les facultés génitales et les cérébrales , comme entre les deu.-î pôles d'une pile galvanique. La substance nerveuse aboutit à ces deux extrémités de l'organisme animal , plus elle se con- somme par l'une , moins il en reste à l'autre. Par le cer- veau , elle sent et pense; par l'organe sexuej, elle engendre ou féconde. Le mâle domine par la tête ou les régions anté- rieures , parce qu'il est destiné à la supériorité ; la femelle, par le bassin et les organes éducateurs ; auissi elle survit d'or-

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dinalre au mâle, car elle dépense moins d'élément nerveux dans racte de la reproduction.

L'énergie du cerveau et du système nerveux est donc for- tifiée, accrue par la conservation du sperme, et détruite aa contraire par son émission, quand elle est surtout cKcessive. La résorption du sperme sa rccohobation , pour ainsi dire, augmenle , agrandit héroïi[uement toutes les forces vitales , puisqu'elle conduit même à lexallalion et à la fureur. L abus du coït affoiblit la vue, fane le cerveau ; ce (fui faisoil penser aux anciens philosophes et médecins que la semence éloit un écoulement de l'encéphale par la moelle épinière , stllla. cerebri.

11 est nrésumable, en effet , que le don de la vie , qui di- minue la nôtre , ne sopère qu'aux dépens de cet élément si élaboré qui nous anime ; qu'il s'en détache des moléctiles pour présider à la vie de 1 individu naissant. Le principe nerveux est l'élément générateur , si l'on s'en réfère même à l'analogie que la chimie découvre entre la substance mé- dullaire cérébrale et le sperme, la laite de poissons, par exemple. L'une et l'autre de ces matières animales contient du phosphore et une sorte d'albumine dans un état particu- lier. Les œufs de toutes les femelles sont formés aussi de principes à peu près uniformes chez toutes les espèces , d'après les analyses chimiques.

Nous sommes donc induits nécessairement à considérer les organes sexuels comme les antagonistes du cerveau ; la semence de celui-ci est la pensée ou la sensibilité, comme la sensibilité voluptueuse de ceux-ci sécrète l'œuf ou le sperme. Ainsi, l'élément nerveux exerce nécessairement ces deux hautes fonctions , les plus impénétrables et les plus sublimes dans les mystères de la vie.

En effet, commentée qui nous anime ne se transmettroil-il pas pour animer un nouvel être? Pourquoi cet œuf qui se pu- tréfieroit, s'il étoit couvé sans être fécondé, donne-i-i! le j')ur à un jeune animal agissant et sensible, par cela seul qu il a reçu un atome d'un liquide du mâle ? Ce principe si viviîiant sera-t-il autre qu'un extrait de la même substance nerveuse ou vivifiante de ce mâle .'*

Considérons d'ailleurs ce fœtus naissant, ou l'emhryon du poulet dans l'œuf. Qu'aperçoit -on dès les pru'miers jours ? . Une tête , une carène dorsale , même avant que le cœur, le punctum saliens se soit parfaitement développé. ( V. 1 article Génération. ) Ainsi , l'organisation du système nerveux est apparente dès les premiers temps du développement du fœtus, chez les animaux vertébrés principalement. Ce système ner- veux est môme beaucoup plus considérable ^ relativement aux

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autres organes, qu'il ne le sera par la suite ; tcns les fœlus ont une tête , une épine dorsale énormes ; et les enfans ont proportionnellement la tête bien plus grosse que 1 homme. La raison nous en paroit évidente -, le système nerveux étant réiément excitateur de la vie , il faut qu'il prédouiine pour faire accroître et développer le jeune animal; a mesure que ce principe nerveux s'épuise , dans le cours de la vie et de la génération, il se fane, se dessèche, Tanimal vieiilll el meurt. Or, plus l'embryon sera petit, plus la proportion de son système nerveux sera considérable ; elle le sera , dans 1 ori- gine , au point de composer presque toute l'essence du germe animal. 11 nous paroît ainsi très- probable que le principe vivifiant , communiqué à l'œuf parle mâle , n'est qu'un ex- trait fort élaboré de son système nerveux, lequel emploie les iiumeurs nourricières de l'œuf et de la mère, pour s'accroître. 11 y auroit encore bien d'autres inductions à tirer de celle sensibilité voluptueuse si vive qui accompagne la copulaiion chez les animaux , et qui agite si violemment tout i'arure nerveux de ses secousses , comme pour en exprimer la plus pure essence. Nous pourrions demander encore avec \an- helmont et Stahi , si l'âme , ou si des idées structiices ne pas- sent pas ainsi dans le sperme pour la formation ou le déve- loppement du jeune animal , soit que son organisation se trouve prédisposée naturellement dans le germe de la fe- melle , soit que la puissance organisante émane du mâle. Mais ces suppositions paroissent trop hypothétiques ou trop difficiles à vérifier; il suffit de reconDoîtrc que c'est le système nerveux qui transmet le principe vivifiant à l'embryon , et qu'il agit le premier dans le nouvel être.

C'est ainsi que pourroient du moins s'expliquer les trans- missions héréditaires des instincts chez les animaux, et de certains penchans violens chez l'homme , comme des tempé- rainens ; mais nous nous contentons de ce complément au tableau général des fonctions et de la distribution du système nerveux , ou vital et fondamental des animaux. C'est par lui seul que se déploient ces prodiges de lintclligence , du senti- ment et des actions qui embellissent la scène de l'univers. Par lui ^ l'homme pense , et dès-lors il est supérieur à la terre , au soleil môme qui l'éclairé ; il s'élève jusqu'au trône de la Divinité. V. Nature et Vie. (virey.)

NERF DE BOEUF. On nomme ainsi les tendons de cet animal que les bouchers font sécher pour servir de forte cour- roie. On prend ordinairementpour cela les tendons de la jarnbe et du calcanéum , qui correspondent au tendon J'yVchille dans Ihomme. Ces parties sont extrêmement fortes. En gé- néral, le vuls-aireappelle nerfs ^ les tendons, les li.;auieu5 et

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les aponévroses des animaux. Les anciens confonclent aussi les tendons avec les neifs. (VIREY.)

NERF. Nom que 1 on donne , dans les mines de houille du déparlement do T Allier, aux masses et veines de pyrites (^ fer sulfure ) qui se ren'^onirent dans la houille, (lis.)

NERIAM-PULLI. Plant:; figurée parRhéede, et qui pa- roît érrc rAcHli UàMPANT ( . />5«s refjens). (B )

3SERIETTE. JNo/n qu'on donne aux Epilobes. (b.)

NÉRION ET RHODODENDRON ou RHODO»; DAPHNE. Les Grecs donuoient ces noms à un arbrisseau qui , suivant Dioscoride , croissoit dans les lieux humides : il a lesfeuilles semblables à celles de Tamandier, mais plus longues et plus épaisses ; les fleurs roses, et des fruits assez voisins de ceux de l'amandier, qui sont remplis d'une espèce de duvet qui rappelle les aigrettes de ïaranthion, espèce de chardon. Pline ajoute que le neriuin est toujours vert, sembla- ble à la rose, et à tiges frutiqueuses. Apulée l'appelle rosa'^ laurea ^ el nous lui donnons vulgairement le nom de laurier rose ou de laurose , à cause de ses feuilles coriaces comme celles du laurier et de ses (leurs couleur de rose. Selon Pline , le nerium ou rhododendron ( arbre à roses) des Grecs , est Vo- leander et Vherbasabina des Latins., bien qu'ailleurs il dise que cette plante des Grecs n'avoit point de nom en Italie. Il nous apprend que c'éloit un poison pour les bestiaux qui en man- geoient, etc. On ne peut méconnoîlre ici notre laurier rose; aussi tous les botanistes anciens l'ont nommé neriun ou. nerium ^ (humide , en grec), rhododendron et rhododaphne (Laurier ROSE, en grec) et oleander. Tournefort a conservé au genre de cette plante le nom latin de nerium^ adopté par les bota- nistes. Linnœus augmenta ce genre de quelques espèces exo- tiques. Brown, dans son Histoire naturelle delà Jamaïque^ rap- portoit au nerium trois plantes qui sont des Ecrites. Sloane (^Hist. de la Jam.) avoit placé avec les nerium les plumiéa ru~ hra et alba^ et le tabernœmontana laurifolia^ L. Cupani désignoit l'aspérule de Calabre , ^diV nerium suffrutex.

Quant au genre nerium de Linnseus , M. R. Brown n'y rapporte que les nerium oleander et odorum. Il croit que les nerium coronarium et dii>aricatum sont des espèces de taber- nœmontana , et que le nerium obesumde Forskaël doit former un genre. Les N, antidyseniericum et zeylanicum forment son genre JVrightia. V. Laurose, Rhododendron et Wrigthie.

(LN.)

NERITARIUS. V. Néritier. (desm.)

NÉRITE , Nerita. Genre de testacés de la classe des Uni- valves , qui est composé de coquilles demi - globuleuses , aplaties en dessous, non ombiliquécs , à ouverture entière,

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demi-rontle , et à columelle sub transverse tranchanle et sou- vent dentée.

Ce genre, dans les ouvrages de Linnseus , étolt composé de coquilles ombiliquées et non ombiliquées. Lamarck en a séparé les premières, et les a réunies sous un nouveau genre qu'il a appelé Natice d'après Adanson , Gualtiéri , Fa- vanne et autres. Ainsi, il n'est plus question ici que des né- rites imperforées, qui comprennent les fausses nérkes de Fa- vànne.

Les nériles sont ovales et voûtées, et d'une contexture très- solide. Le nombre des spires varie selon l'âge, de trois à cinq , et elles vont toujours de gauche à droite. Leurs tours sont plus ou moins bombés , suivant les espèces. Le premier tour qui constitue le corps de la coquille est d'un volume très-considérable , si on le compare aux autres , qui sont des plus petits parmi les coquilles.

Non-seulement les nérites n'ont point d'ombilic, mais môme de véritable columelle. Une simple cloison en tient lieu. Cette cloison est aplatie , mince , longitudinale. Elle prend naissance sous le sillon de la première spire , et s'é- tend obliquement vers la partie opposée. On a donné le nom de palais à la pirlie visible de cette cloison, qui est toujours lisse, luisante , et plus épaisse que le reste, tantôt plane, tantôt un peu concave , tantôt un peu convexe , plus ou moins oblique , plus ou moins ridée , plus ou moins dentée à son bord.

L'ouverture delabouche forme presque toujours un demi- cercle avec une lèvre cintrée , lisse ou dentelée. Un renfle- ment souvent fort saillant suit la direction de cette lèvre à une certaine distance du bord interne, et sus extrémités fi- nissent en un petit appendice sous lequel s'adapte l'opercule. Un peu au dessous du renflement est un talus pourvu de dents, communément assez nombreuses, plus ou moins grosses , mais toujours plus remarquables dans l'angle supé- rieur.

Toutes les nérites sont operculées ; leurs opercules sont ou teslacés ou cartilagineux, plus ou moins approchant de la forme semi-lunaire , toujours entaillés ou crénelés. L'inté- rieur est lisse, luisant, peu aplati , l'extérieur lisse ou gra- nuleux , décrivant un tour de spire peu prononcé.

La robe des nérites est ordinairement blanche , mélangée de gris, de verdâtre , d orangé , de citron , de violet , de rose, et fasciéede brun , de noir ou de fauve , etc. ; elle est quel- quefois entièrement noire, verdâtre ou grisâtre.

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L'animal des hdriles a une tête fort aplatie , faite en demi-lune , un peu échancrée aux deux extrémités , de la base de laquelle sortent , de chaque côté , deux cornes coniques , fort minces , une fois plus longues qu'elle. Les yeux sont deux petits points noirs placés sur un tubercule trièdre à la base extérieure des cornes. La bouche est placée à la partie inférieure de la têle , et formée par une lèvre épaisse et ridée. Le manteau couvre entièrement lintérieur de la coquille, et est légèrement crénelé sur ses bords. Le pied est presque rond, aplati en dessous, convexe en dessus , et de moitié plus court que la coquille.

Les nériles sont répandues en très-grand nombre sur toutes les côtes pierreuses de l'ancien et du nouveau conti- nent. Elles s'attachent aux rochers, et restent souvent hors de l'eau aux basses marées , sans inconvénient pour elles. Il

Len a aussi plusieurs espèces qui vivent d*ns l'eau douce, cur petitesse et la dureté de leur test les rendent peu pro- pres à la nourriture de Thomme ; aussi n'en mange-t-on que faute d'autres alimens.

On en trouve de fossiles à Courtagnon , Grignon et au- tres lieux de la France , en Italie , en Allemagne, etc.

Ce genre se divise en deux sections , renferuiant en tout environ cinquante espèces , dont les plus remarquables ou les plus communes sont :

Parmi les nérites sans dents :

La JNérite fluviatile, qui est rugueuse et variée de blanc, de brun, de rouge et de jaune. Elle se trouve dans la plupart des grandes rivières de l'Europe , et varie extrê- mement dans ses couleurs. Elle est très -commune dans la Seine. Pendant l'hiver, elle s'enfonce très-profondément dans la vase. Elle constitue aujourd'hui le genre Théodoxe.

La Nérite littorale est unie , et a le sommet rongé ou carié. Elle se trouve Irès-abondamment sur les côtes de l'Océan , et varie extrêmement dans ses couleurs.

Parmi les nérites à lèores dentées :

La Nérite verte , qui est unie , et dont la lèvre n'est cré- nelée que dans son milieu. Elle se trouve dans la Méditer- ranée et aux Antilles.

La Nkrite polie , qui est unie , dont le sommet est obli- téré , et l'une et l'autre lèvres dentées. Elle se trouve dans la mer des Indes.

La Nérite caméléon est sillonnée de vingt stries pro- fondes, et ses lèvres sont dentées , l'inférieure est rugueuse «t tuberculeuse. On la trouve dans la mer des Indes.

La NÉRITE PERVERSE a la spire tournée à gauche , et huit

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dents aux lèvres. Elle se trouve fossile à Courtagnon et ail- leurs. Elle constitue aujourd'hui le genre Velate.

La NÉRiTE TOUR est alternativement fasciée de blanc et de noir; son sommet très-saillant; sa lèvre aiguë, et son in- térieur blanc. Elle se trouve dans les eaux douces , aux An- tilles.

La NÉRITE DUNAR cst Ovale , obtuse , solide , noire , fas- ciée de blanc et striée ; ses lèvres sont dentées des deux cAtés. Elle se trouve sur la côte d'Afrique, F. pi. G 3o, elle est figurée.

La NÉRITE ÉPITSEUSE est noire , striée transversalement ; les stries sontépineuses ; la lèvre est aplatie, unie, peu dentée. Elle se trouve dans les fleuves de l'Inde. Elle forme au- jourd'hui le genre CuTHO^f. (b.)

La NÉRITE MAMILLÉE constitue aujourd'hui le genre Pon- NICE. (b.)

NERITIER. Animal des Nérites. Il a deux tentacules à yeuxpédiculés , et son opercule est en croissant, (b.)

NERIUM. V. NÉRioN et Laurose. (ln.)

NERIUMDES ALPES, Nerium alpinum, Gesner. C'est le RoSAGE VELU (^ Rhododeiidrum hirsu/um ^ Linn, ). (LN.)

NERO-DI-PRATO. Sorte de Serpentine d'un vert noir, bariolée de jaunâtre, qui s'exploite à Prato, en Toscane.

(LN.)

NEROLL Les parfumeurs donnent ce nom à Vhuile essen- tielle d orange qui leur vient d'Orient. Voy. au mot Oranger.

(B).

ÎSERPA. En Sibérie, c'est le Phoque a crinière {plwca jubata). (BESM )

NEPvPISKL Poissons des rivières de Sibérie , dont le genre n'est pas connu, (b.)

NERPRUN, BOURGÈNE, Rhammis. {Pentandne mo- nogynie. ) Genre de plante de la famille des rhamnoïdes, fort Toisin des Céanothes, dont les caractères sont d'avoir : un calice à quatre ou cinq divisions ; une corolle formée de quatre à cinq pétales écailleux, très-petits, plus étroits, et plus longs que les divisions du calice ; quatre à cinq étamines à anthères arrondies; un ovaire supérieur; un style ; un stig- mate divisé en deux , trois ou quatre parties ; une baie char- atiue , contenant un nombre de loges égal à celui des stig- «nates , et dans chacune desquelles est nichée une semence cartilagineuse.

Linnseus avolt compris dans ce genre, non-seulement le»

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genres Bo^jRGÈ^^E et ALATER^■E de Tournefort, mais encore le JujuiiiLR et le Paliure du même auteur. Depuis , ces deux derniers genres ont été, avec raison, rétablis par Jus- sieu , et le genre OEnoplie a été constitué pour placer le IVerprun voluble, qui a latlear des véritables nerpruns et les fruits des Jujubiers.

Malgré cette division , le genre nerprun, tel qu'il existe dans les auteurs les plus modernes, est mal déterminé , et denianderoit à être encore réduit; i.° parce que les parties de la fructification varient dans les espèces ; 2." parce qu'il y a plusieurs espèces dioïques; telles sout \t nerprun purgatif , ccu\ des telnlurtcrs ^ des Alpes, de Ténériffe , celui à bois rouge ^ le nerprun daourien. Enfin, le n^/^n/n //j^nVe est simplement monoïque. Comment peut-on réunir dans un même groupe, et regarder comme congénères des plantes qui diffèrent aussi essentiellement, malgré la ressemblance qu'elles peuvent avoir d'ailleurs ? Rien ne prouve mieux le vice des méthodes. Pendant que l'homme classe à sa manière les objets natu- rels , la nature se joue de ses systèmes , en lui présentant chaque jour un objet nouveau qui en dérange l'ordre et les combinaisons.

Les nerpruns sont des arbres de moyenne grandeur ou des arbrisseaux à feuilles simples et alternes , et à fleurs axil- lalres. Ils comprennent environ cinquante espèces de tous les pays. Je ne présente ici que les plus intéressantes, et dont les caractères sont reconnus ; ce sont:

Le Nerprun purgatif, Rhamnus cathatiicus , Linn. Déjà cette espèce forme comme une exception au genre , puis- qu'elle est le plus souvent dioïque , et quau lieu d'avoir, comme la plupart des autres, les parties de la fructification au nombre de cinq , elle a quatre pétales , quatre étamines, quatre divisions au calice et au stigmate , et par conséquent quatre semences. Ces caractères spécifiques suffisent pour la faire reconnoître. C'est un arbrisseau qui croît en Europe dans les haies, les bols elles lieux incultes. Son écorce teint en jaune, et ses baies avant leur maturité donnent la même couleur ; mais lorsqu'elles sont mûres, elles fournissent une couleur verte, appelée vert de vessie , parce que c'est dans des vessies qu'elle est mise pour être livrée au commerce. Les peintres en font un grand usage surtout en miniature. Son fruit est fréquemment employé en médecine, comme alté- rant et comme purgatif.

Le Nerprun des teinturiers, Rhamnus infeclorius, lAxiiA Il ressemble beaucoup au précédent, a comme lui des fleurs dioïques , quadrifides , et des rameaux terminés en épine -,

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mais il en diffère par son port , et parce qu'il est plus petit

dans toutes ses parties.

Les baies de ce nerprun sont aussi purgatives ; elles por- tent le nom de graine d'Aoignon; pulvérisées avant leur ma- turité, elles donnent une assez belle couleur jaune, appelée si il de grain ^ dont les teinturiers et les peintres font un grand usage , et qu'on emploie suriout pour teindre la soie.

Cette espèce croît en abondance aux environs d'Avignon et dans toui le Comtat Vcnaissin : on la trouve aussi en Lan-* guedoc , en Provence et en Dauphiné.

Le Nkrpun BOURDAINIER , Mfl!m«H5/m/?,o'MZ(?, Linn. , vul- gairement bourdaine ou huurgène. l. 'est un grand arbrisseau de l'Europe tempérée , qui croit dans les fonds humides. 11 a «ne tige unie , des feuilles très-entières , ovales et veinées , des fleurs hermaphrodites , de couleur verdâtre , et des baies sphériques , long-temps rouges , et qui ne noircissent que dans leur parfaite maturité.

Son bois donne le charbon le plus léger , employé dans la composition de la poudre à canon. On n'a sur un quin- tal de bois que douze livres de charbon, L'écorce donne une teinture jaune.

Les Nerpruns des Alpes , Saxatile, Nain et de Bour- gogne , sont des arbrisseaux à peine de deux pieds de hau- teur , qui croissent abondamment sur les montagnes de l'est de l'Europe , et qu'on cultive dans les écoles de bo- tanique. Ils jouissent des propriétés des espèces précédentes.

lie Nerprun de la Chine, Rhnmnus iheezans ^ Linn., ar- brisseau sannenteux , dont les rameaux sont écartés et ter- minés en pointe épineuse , les feuilles ovales et finement dentées, et les ileurs composées de cinq pétales, de cinq clamines , et d'un court style à troi.s stigmates. Celle plante croît en Chine , les pauvres habitans . au rapport de» voyageurs, font usage de ses feuilles en guise et en place de thé.

Le Nerprun a feuilles glauqufs , Rhamnus rossino'idf , Lam. ; arbrisseau tout à-fait joli , qni croît à Saint-Domin- gue, remarquable par ses fcnilles glauques , d'un blanc ti- rant sur le bleu.

Le Nerprun a vrilles, Rhamnus mystacinus Ait. 11 est originaire de l'Afrique , d'où il a été apporté en Anglel<Mrf par Bruce, en lyyS. Il croît jusqu'à dix pieds, ne se soulionl ijue par ses vrilles, a des feuilles en cœur et des Heurs her- maphrodites , blanches, dont le stigmate est divisé en trois.

Le Nerprun hybride, Rhamnus liybridus, l'Iîér, On l»i

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donne pour père le nei-prun alaierne mâle , et pour mère le nerprun des Alpes femelle. Ses feuilles participent de celles des deux espèces auxquelles on attribue son origine. Il y a lieu de croire cependant qu'il a été apporté du Canada à la pépinière du Roule. Ses fleurs sont dioïques.

Les nerpruns se multiplient de semences et par marcottes Quelques espèces étrangères exigent l'orangerie et la serre

Les deux premiers et le dernier se placent souvent dans les jardins paysages, qu'ils ornent par leur feuillage d'un vert foncé, (b.)

NERSE JENDARU. C'est, dans Avicenne, le nom arabe de la Cardère. (ln.)

NERTÈRE , Ner/eria. Nom donné par Gœrtner et Smith au genre établi par Linnseus sous celui de GowoziE. (s.)

NERVULES. Vaisseaux du Pistil. Ils varient en nom- bre. Il y en a six dans le Lis , et un seul dans le Froment. V. ces mots et celui de Fleur, (b.)

NERVURES. Saillies ou creux qui se remarquent sur les feuilles. Le plus souvent elles partent de la côte ou nervure principale, d'autres fois elles sortent, comme cette côte, en plus ou moins grand nombre, directement du Pétiole, et res- tent parallèles entrc-elles. V. Feuille, (b.)

NESARNAK. Cétacé du genre des Dauphins. Voyez ce mot. (desm.)

NESBER, NESCHRERou NESCABERG et NES- PERIG. Selon M. Beurard , ces noms allemands indiquent la baryte sulfatée compacte , qui contient du minerai de fer disséminé, (ln.)

NESCHASCH. F. Mums. (ln.^

NESE. L'un des noms allemands du Néflieh. (lu.)

NESEE , Nesœa. Genre de polypiers établi aux dépens des CORALLINES, par Lamouroux. Ses caractères sont : polypier en forme de pinceau; tige simple, terminée par des ra- meaux articulés , cylindriques , dichotomes, réunis en tête.

Ce genre ne diffère pas de celui appelé Pinceau par La- marck. Il renferme six espèces :

La plus commune est la Nésée pinceau, dont la tige est cylindrique ; les rameaux filiformes , nombreux et réunis en tête. Sol. et Eli. l'ont figurée pi. aS , n." 4- ^" la trouve dans les mers d'Amérique.

La plus rare est la Nesée en buisson, que Lamouroux a figurée pi. 8 de l'ouvrage qu'il a publié sur les polypiers corailigènes flexibles. Elle provient de la même mer. (R.)

NESÉE, Nesœa. Genre de Commerson qui rentre dans

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celui des Saucaires. La Salicaire a trois fleurs lui sert de type, (b.)

NESER. Nom hébreu de 1' Aigle, (v.)

NESLIE, Neslia. Genre élabli par Desvaux, pour une plante qui avoit été placée par Linnseus parmi les Myagres (myogrum panlculatnm) et successivement parmi les Cram- BEs , les Cressons, les Buniades et les Alysses. 11 ne dif- fère pas du VoGELiE de Médicus. Ses caractères sont : silicule sphéroïde un peu déprimée dans le sens de la cloison , indé- hiscente , un peu brodée, chagrinée et à loges monospermes.

(B.)

NESNAKI. Espèce de Salmone qui se trouve dans les rivières de Sibérie, (b.)

NESPEREIKO et NESPERA. Noms portugais du NÉ^ FLiER et de la Néfle. (ln.)

NESPOULIE. Nom languedocien du Néflier. V. Mes- PiLus. (ln.)

NESR. Nom égyptien et arabe du Vautour fauve. V. ce mot. (v.)

NESSATUS ( Rumph. Amb. 3, tab. aS). Arbrisseau des Indes orientales , que Loureiro croit être une espèce de Céphalante. (ln.)

NESSEL et NETTEL. Noms allemands des Orties.

(LN.)

NESSELBAUM. Le Micocoulier reçoit ce nom en

Allemagne, (ln.)

NESULA. A Brescia , en Italie , c'est le nom du Noise- tier, (ln.)

NESUSAGL L'un des noms du Genévrier commun , au Japon, (ln.)

NESWl. Nom géorgien du Melon, (ln.)

NETECH. V. FoRREiCH. (ln.)

NETHER. Nom donné par les historiens juifs au Na- TKON d'Egypte, (ln.)

NETIL et NOJAN-BURA. Noms que lesKalmoucks donnent à la Viorne {^vibumum lantona ). (ln.)

NET NET. Les Nègres du Sénégal donnent ce nom au Vanneau armé de leur pays, (s.)

NETOPYR. Nom russe des Chauve-souris, (desm.)

NETRESKA. Nom de la Joubarbe des toits (icw^cm- Viim tectoTum, Linn. ) , en Bohème. (LN.)

NETTA. Nom grec du Canard, (v.)

NETTASTOME , Neltasloma. Genre de poissons mala- çoptérygiens apodes , très-voisin de celui des anguilles , éla^. bli par M. Rafinesque-Smallz et ainsi caractérisé :

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Corps allongé, presque cylindrique; ouvertures branchiales situées sous le cou, transversales , allongées, garnies d'une membrane sans rayons et sans opercule ; deux arcs bran- chiaux; mâchoires allongées, déprimées, dentées, la supé- rieure étant plus longue que l'inférieure ; anus plus rappro- ché de la tête que de la queue; une nageoire dorsale, une anale et une caudale réunies; point de pectorales ou de ven- trales.

Par ce dernier caractère, lesnettastomes se placent natu- rellement auprès des Anguilles proprement dites et des Congres que M. Rafinesque nomme echelus , et la longueur considérable de leur dorsale les rapproche particulièrement des premièies ; d'un autre côté, la situation des ouvertures branchiales sous la gorge et le manque de nageoires pecto- rales les font surtout ressembler aux Sphagebrancues de Bloch.

Ce genre peut donc être considéré comme formant un chaînon de plus , destiné à lier entre eux les genres de la famille des poissons anguilliformes.

Une seule espèce le compose; c'est le NettastomemÉ- LANURE , Nettastoma melanura. Il est long de deux pieds ; ses mâchoires sont obtuses, garnies chacune de trois ran- gées de petites dents aiguës; son corps est d'une couleur fauve olivâ'.re, ses nageoires dorsales et anales, noires pos- térieurement, la caudale allongée, obtuse et noire. La ligne latérale commence derrière l'ouverture branchiale, (desm.)

NETTLE. Nom anglais des Orties, (ln.)

NEUDORFIE, Neudoifia. Genre établi par Adanson sur la Nolâne COUCHÉE. 11 n'a pas été adopté. C'est le même que le J^f"«/A'ma d'Elire t, le Zivingera {Arta hebeticd)^ le tega- nium de Schmidel, et enfin le nulana de Linnseus. V. No-

LANE. (LN.)

NEUMANNSKRAST. La Molène lyohnite {verbas- cum lychniiis ) reçoit ce nom en Allemagne, (ln.)

NEURACHNE, Neurachne. Genre de graminées établi par R. Rrown. Ses caractères sont: balle callcinale de deux valves coriaces, aiguës, nerveuses, hérissées , renfermant deux fleurs dont l'inférieure est neutre et pourvue de deux balles florales, et dont la supérieure est hermaphrodite et pourvue de deux écailles.

Une seule espèce originaire de la Nouvelle-HçUande cons- titue ce genre, (b.)

NEURADE, Neunida. Plante annuelle, tomenteuse , dont les tiges sont diffuses , couchées , un peu ligneuses à leur base; les feuilles simples, alternes, pétiolées, ovales, ron-

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gées, sinuées en leurs bords, munies de stipules subulëesç les fleurs solitaires, axillaires et pédonculées.

Celte plante forme dans la décandrie décagynie et dans la famille des rosacées un genre qui a pour caractères: un ca- lice très-petit et divisé en cinq parlies persistantes, avec dix folioles intérieures ; une corolle de cinq pétales; dix étamines insérées sur le limbe du calice ; dix ovaires renfermés dans les fossettes du calice, chacun surmonté d'un style court et d'un stigmate arrondi; une capsule formée par le calice, déprimée, orbiculaire , évalve, à dix loges, muriquée sur sa partie supérieure , inerme sur la surface inférieure , à loges monospennes , à semences ovales et presque osseuses.

La neurade croît en Egypte et dans l'Arabie. Lorsqu'on sème une de ses capsules , il n'y a ordinairement qu'une seule semence qui lève ; el la jeune plante entraîne avec elle sa capsule , qui reste quelque temps à sa base sous la forme d"anneau. ({;.)

NKURAS et NEURADA. D'un mot grec qui signifie nerf. 11 a été donné à plusieurs plantes qu'on eniployoit pour la guérison des maladies nerveuses el pour cicatriser les nerfs coupés. Le neuras ou polerium de Dioscorideet de Pline est une de ces plantes. C'est un arbrisseau, et par conséquent ce ne peut être la plant herbacée à feuilles fortemv^nt nerveuses, nommée /2(?«raJt/ par Linuccus, comme le dit A(lanson.Le;;«ro- nychia a reçu aussi le nom de neuras. V. Neurade, Paro-

•NYCHIA et POTERIUM. (LN )

N^:iTRMELLK. Nom picard du Merle, (s.)

NEUROCAUPE, Nrurorarf/um. Genre établi par Des- vaux pour placer la Crotalaire de la (iuYA]SE, qui n'a pas rigoureusement les caractères des autres. (B.)

NEUPtODES de Dioscoride, est rapporté âuliniomum des Latins , c'est-à-dire , à un stali'ce. (ln.)

NEUROLEjNE, Neurolœna. Genre de planles établi par R. Brovvn ( IVansactions de la Société linnéenne de Londres) pour placer les Calées de la Jamaïque cl a feuil- les LOBÉES. Ses caractères sont : calice commun, composé de folioles imbriquées; réceptacle aplati , couvert de pail- lettes ; fleurons luhuleux, hermaphrodite ; anthères incluses à hase mufique; stigmate aigu, recourbé ; aigrette capillaire, denticulée , persistante, (b.)

NEUROPTERES. V. Nevroptères. (desm.)

NEURQS ou NEVROSBATOS. Ce nom et ceux de r.yivjshatitseXQt mbus cam's, cités par Pline, semblent indiquer lit Ronce des champs (ruhus cœsius) ou toute autre espèce de ce genre , mais non pas un rosier, comme on l'a également avancé, (ln.)

NF.UTA. Nom hotlentot de la Fabagelle herbacée c^ui est un poison pour les moutous. (b.)

N E V 587

NEUTRE. Se dit des animaux qui ne peuvent pas se re- produire faute de sexe. Quoiqu'on n'aperçoive pas d'organes sexuels à une foule de zoophytes et de plantes cryptogames, ces êtres ne sont pas neutres; ils se reproduisent soit par bou- ture , soit par gemmules , ou par des ovules ; mais on appelle neutres les animaux tels que les fourmis ouvrières, les abeil- les travailleuses, les tenriiles anaçonnes , des mulilles, etc., <jui n'exercent aucune fonction sexuelle. On n'en connoîtpas d'autres exemples chez les diverses classes des animaux ; car les hermaphrodites, loin d'êlre neutres.^ ont les deux sexes : tous les mulets formés de deux espèces différentes , quoique hors d'état d'engendrer, pour l'ordinaire, n'en sont pas moins pourvus de s^xes.

Les neutres parmi ces insectes sont reconnus aujourd'hui pour de véritables femelles dont les organes sexuels seulement ne sont pas développés, faute de nourriture appropriée à leur premier étal , celui de larve. C'est ce dont on a la preuve chez les abeilles ( V. leur article ). Nous croyons aussi toute- fois qu'il pourroit y avoir également des mâles avortés. Ces animaux, quoique dépourvus de sexe , n'en conservent pas moins l'inslinct de la maternité; de vient que ces abeilles, ces fourmis, ces termites manifestent un si tendre soin pourles larves produites par les vraies femelles ou reines. De même les eunuques artificiels , et les chapons , conservent la philo- j)é(lie ^ ou l'amour des petits, des jeunes, des enfans, de ma- nière à remplacer souvent les véritables mères. V. Sexes.

Parmi les plantes il y a des fleurs neutres^ c'est-à-dire , dans lesquelles avortent les étamines et les pistils, ou bien lorsque ces parties se changent en pétales, par excès de nutrition , comme dans les fleurs doubles. Il y a dans la syngénésie frus- jranée des fleurons à parties sexuelles avortées naturellement, faute peut-être d'espace pour se développer. Linn^eus compare les abeilles neutres dans les cellules de leurs rayons aux fleurs avortées de la syngénésie frustranée ; cette comparaison est i'iirt ingénieuse et paroîl fort juste, (virey.)

NEVADILLAl. C'est, en Espagne, le nom de la Paro-

: K^VE (^tl/ecebrum paronvr/iiay (l?<-) NEVEDA. Nom portugais qui signifie nrpeta ou Chatai-

r.E. F. ce mot. (lis.)

NEVRAPHOENICOS. Eun des noms donnés par les

Grecs à Vahn,fanurn ou l' AuRONE , espèce d'AaMOiSE (r.w.) NEVROPORE, Neyropora. (ienre de plante établi par

Commerson , mais qui rentre dans celui appelé Antidesmë

par Linnaeus. (b.)

NÉVROPTÈRES ou NEUROPTÈRES, iV«/royf?/^ra,

588 N E V

Linn. Ordre l.uilième de notre classe des insectes , et qui a pour caractères : quatre ailes nues ; bouche propre à la mas- tication ; mâchoires et lèvres droites, étendues, point valvu- laires ou tabulaires, et ne formant jamais une espèce de trompe; ailes le plus souvent réticulées et égales; les infé- rieures simplement plus étroites et plus longues , ou plus larges dans quelques-uns; jamais d'aiguillon et rarement de tarière dans les femelles ; nombre d'articles des tarses varié.

Linnceus, qui a établi cet ordre, le caractérise d'une ma- nière beaucoup plus simple : quatre ailes membraneuses ^ anus sans armes, ou privé d'aiguillon. Il ne distingue cet ordre de celui des hyménoptères que par l'absence de ce dernier organe. Mais comme il désigne sous le nom d'aiguillon aussi bien la farière des tenthrèdes , des irhneumons, etc., que l'arme offen- sive dont les guêpes ^ les abeilles, etc., sont pourvues , et que les femelles de quelques névroptères ont aussi, pour enfoncer leurs œufs , un instrument analogue à cette tarière ; ces ca- ractères distinctifs ne sont point absolus. 11 en est de même de celui que Linnseus avoit employé dans les premières édi- tions de son Systema naturœ , et qui est tiré de la réticulalion des ailes; car celles Aes/riganes et de quelques autres névrop- tè-res 8ont simplement veinées , ainsi que celles des hyménop- tères.

Ici les inférieures ou les secondes sont constamment plus petites que les supérieures ou les premières ; ce qui semble distinguer cet ordre du précédent ; mais ce caractère souffre lui-même des exceptions parmi les névroptères. Ces motifs ont déterminé Geoffroy à réunir ces deux ordres en un , sous les noms de léiraplères à ailes nues. M. Kirby a pensé qu'en détachant le genre phryganea de Linnseus, pour en former un ordre particulier, et qu'il appelle tricïi opteras , celui des névroptères serolt plus nettement terminé ; mais ce n'est qu'une exception de moins ; et sous le rapport des ailes, les éphémères, iesnémoptères, \qs psoques , lui offriront encore des contrariétés; de sorte que pour épurer rigoureusement l'ordre des névroptères de Linnœus, il faudroit singulièrement le restreindre, et former avec lui plusieurs autres coupes pre- mières. Cette idée s'étoit présentée depuis longtemps à mon esprit; mais je l'ai repoussée, dans Tappréhension que ce bouleversement ne devînt plus nuisible qu'utile à la science. Par l'ensemble des caractères que j'ai exposés , on ne pourra jamais se méprendre , dans les cas même les anomalies ont lieu.

L'ordre des névroptères se compose , dans le système de

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Fabricius, de sa classe des odonates et de la majeure partie de celle des synisiates.

Les ailes de la plupart de ces insectes so«t nues , réticu- lées , transparentes , et servent toutes au vol ; elles sont claires, transparentes, et présentent souvent des reflets très- vifs ; la plupart des hémérobes ^ des friganes ^ des myrméléons , des panorpes et des ascalaphes , les ont cependant chargées de différentes taches colorées , peu transparentes ; elles sont or- dinairement posées en toit sur l'abdomen comme dans les perles^ \es friganes ^ \cs psoques , les hémèrohes ; assez souvent elles sont écartées du corps, et étendues horizontalement comme dans les libellules, ou rapprochées verticalement l'une à côté de l'autre , ainsi que cela se voit dans les agrions. Ces ailes sont presque égales entre elles , excepté dans les nénwp- ières , chez lesquels les deux dernières sont quelquefois allongées en forme de languette, et dans les éphémères ^ ces deux ailes n'existent pour ainsi dire pas.

Les néoroptères ont la tête plus ou moins grosse ; les an- tennes placées à sa partie antérieure; elles sont filiformes ou sétacées dans le plus grand nombre , en masse allongée dans les myrméléons ; terminées par un bouton comme celles des papillons, dans les ascalaphes. ï^es libellules les ont très- courtes et en forme de soie. Les yeux à réseau sont placés sur les côtés de la tête; ils couvrent presque toute cette partie dans libellules et les aeshnes ; A^ns les agrions ., ils sont globuleux et écartés. Il y a ordinairement trois petits yeux lisses sur le front ; mais ils manquent aux myrméléons , aux hérné- Tobes , etc.

La bouche de ces insectes est armée de deux mandibules , et de deux mâchoires très-aiguës dans les libellules^ qui font la guerre aux autres insectes ; tandis que ces parties sont très- petites et presque imperceptibles dans les éphémères^ qui ne prennent aucune nourriture, qui ne passent à leur dernier état que pour s'accoupler, se reproduire et périr. Les palpes des libellules sont très-courts , tandis qu'ils sont assez longs dans le myrméléon. Le corselet est lisse , renflé , comprimé et tronqué dans le plus grand nombre ; les ailes sont attachées à chacun de ses côtés ou à sa partie supérieure. L'abdomen est très-souvent allongé, grêle, cylindrique, composé de plusieurs anneaux ordinairement distincts : celui de quelques mâles est terminé par deux crochets qui servent à saisir la fe- melle pendant l'accouplement {les libellules) ; dans d'autres espèces il est terminé par deux ou trois soies dans les deux sexes, ou par un appendice long et sétacé (la raphidie).

Les pattes sont au nombre de six ; elles sont ordinairement de moyenne longueur ; elles sont composées de quatre pièce*

Sgo N E X

qui sont la hanche , la cuisse, la jambe et le larse. Les tafses sont formés eux-mêmes d'un plus ou moins grand nombre d'articles ; ainsi les libellules n'en ont que trois , la raphidie en a quatre, et les hé/nérobes y les myrmélcons , les perles , les éphémères y etc., en ont cinq.

Leslarvesde cesinsectessonlmuniesde sixpattcs; plusieurs d'entre elles vivent dans l'eau, et n'en sortent que sous l'état d'insecte parfait (^libellule , frigane, éphémère); les autres sont terrestres ; parmi celles-ci, les unes habitent sous les écorces des arbres {raphidie); les autres font la guerre aux pucerons (hémérobe); d'autres cachées dans le sable sont occupées à tendre des pièges aux fourmis (^myrméléon). Ces larves sont généralement carnassières , et vivent uniquement d'autres insectes. Il en est d'omnivores, et telles sont celles des termes. Leur métamorphose n'est pas la même dans toutes les es- pèces. Quelques nymphes sont immobiles, et les autres sont mobiles et se nourrissent , comme leurs larves , d'insectes qu'elles attrapent par différens moyens.

Les larves qui vivent dans l'eau ont des organes qui pa- roissent d'abord analogues aux ouïes des poissons, mais qui ne sont que des appendices extérieurs et trachéens ; je les désigne sous le nom de fausses bram:hies. Quelques-unes se construisent des fourreaux à la manière des teignes^ avec dif- férentes espèces de matériaux , et les transportent partout avec elles ; elles y ménagent deux ouvertures qu'elles bou- chent avant de se changer en nymphe , et n'en sortent que sous leur dernière forme.

Quelques névroptères en état parfait , comme les éphé- mères , les friganes et les perles^ ne prennent point ou presque pas de nourriture, et ne vivent même que très-peu de temps; mais les autres ne sont pas moins carnassiers que leurs larves. On voit souvent les libellules planer dans les lieux elles peuvent espérer de trouver leur proie , et dès qu'elles l'ont aperçue , fondre dessus avec rapidité et s'en emparer.

Je partage cet ordre en trois grandes familles : les SuBU- LicoaNES , les Planipennes et les Plicipennes. Voyez ces articles, (l,)

NEWALGANG. Nom imposé par les naturels de la Nouvelle-Hollande à un oie de cette contrée. V. Oie newal-

GANG. (V).

NEKHOITZILLIN. Colibri du Mexique , indiqué et non décrit par Fernandès. (s.)

NEXPAYAN , NEXTALPE , NEXTLACOTLY- YACAPICHTLENSIS et NEXXIHUITL. Hernandex indique sous ces noms autant de plantes du Mexique ^ qu'il

NEZ 591

décrit très-imparfaitement, et que nous ne saurions rapporter précisén)eiit à ries planics connues, (ln.)

TS'EIIjT. Mom arabe de la Cuaraigne commujSE Qrhara pu/garh). (LN.)

NF.Z, Nasus. C'est, comme on sait, le double canal par lequel Tair pénètre dans la trachée-artère de la plupart des animaux vertébrés , poui-vus de poumons ; et c'est sur la membrane muqueuse et vasculaire qui tapisse les narines et les cornets internes du nez , ainsi que les sinus ouaufracluo- sités pratiqués , soit dans l'os frontal , soit dans le sphénoïde et rethujoïde , soit dans les os maxillaires supérieurs , ou an- tres d'Hi^mor, que réside éminemment le sens de l'olfaction. V. Odorat.

Entre les deux os maxillaires supérieurs et leurs apophyses montantes ou nasales, sont situés les os nasaux, os carrés et propres au nez , destinés à former sa voûte. En dessous , et toujours entre les maxillaires, est placé l'os ethmoïde qui sert en même temps par sa lame criblée à fermer l'os frontal, entre les deux orbites des yeux. Entre les apophyses nasales des os maxillaires se trouve , vers le grand angle de chaque œil , un os mince, appelé ungnis ou lacrymal. Dans le pla- fond de la cavité nasale , au milieu , s'élève le vomej- , ainsi appelé parce qu'il ressemble à un soc de charrue ; il divise eu parties égales le nez en deux narines ou naseaux , cl il est continué à son extrémité par un cartilage formant l'extré- mité du nez.

Le fond des narines est terminé par l'os sphénoïde , par ses deux apophyses en forme d'ailes ou ptétyguides.

Le nez , chez l'homme , offre des narines plus ouvertes à leur extrémité qu'à leur fond; ce caractère est plus manifeste encore chez les singes , et surtout les sapajous, singes d'Amé- rique à narines ouvertes sur les côtés du nez. Chez les ron- geurs , le nez est comme tronqué , et ces animaux peuvent mouvoir son extrémité. Le cochon a un nez très - avancé et finissant verticalement pour former le groin ; on trouve deux petits os , outre les intermaxillaires, pour renforcer, à cette extrémité, le boutoir, parce que ces animaux doivent fouiller la terre. Les taupes ont aussi des cartilages solides au bout du nez. Dans les rhinocéros , portant une corne sur le nez , les os propres sont très -forts et solides, ou épais pour la Bupporter ; il y a en outre six petits os vers 1 extrémité du nez , pour soutenir cette partie qui avance , soit chez les rhinocéros , soitchez les tapirs , qui ontdéjà comme une petite trompe. Dans l'éléphant, dont le nez s'allonge en proboscide ( voyez Eléphant ) , les fosses nasales s'ouvrent très-haut gur le crâne, et à plat sur les 0$ maxillaires , vient s'iai-

Sga NEZ

planter la prohoscide , dont nous avons donné la description

en traitant de l'éléphant.

Chez les mammifères aquatiques , les morses et laman- tins, l'ouverture des narines ne descend déjà plus si près de la bouche ; car ces animaux nageurs auroienl eu trop de peine à respirer , et il leur auroit fallu relever sans cesse la tête hors de l'eau , comme le fait l'homme qui nage ( aussi l'homme nage-t-il plus commodément sur le dos que sur le ventre , à cause de la situation de ses narines ). Mais la na- ture a relevé vers le sommet de la têle l'ouverture des narines de ces amphibies , et surtout des cétacés ; de vient que ceux-ci soufflent l'eau et la rejeltent. ( Voyez Cétacés ; Poissons souffleurs. ) Leurs os du nez sont donc très- petils. En outre , le nerf olfactif des cétacés ne se rend point dans leurs narines. V. Odorat.

Le nez des oiseaux est dans la mandibule supérieure du bec viennent aboutir les deux fentes des narines , entourées en quelques espèces , comme chez les rapaces , d'une peau nue , appelée cire. Chez les reptiles , comme les tortues, les crocodiles , les serpens , le nez s'ouvre plus ou moins près de Textrémilé du museau. Les mammifères portent souvent quelques poils à l'entrée des naseaux , et il y a quelques petites plumes chez des oiseaux:.

Les poissons ont aussi des naseaux , mais qui ne communi- quent jamais à l'arrière-bouchc, comme les narines des ani- maux à poumons , puisqu'ils ne respirent pas l'air. Ainsi, les sélaciens ou cartilagineux , poissons des genres des squales et des raies , ont des cavités nasales creusées dans les os maxil- laires supérieurs.

Après les animaux vertébrés , on ne sauroit dire que les invertébrés soient pourvus de nez , bien que plusieurs espè- ces , comme les crustacés et les insectes , jouissent manifes- tement de l'odorat, ainsi que les mollusques céphalopodes.

Les sinus du nez, chez les vertébrés , sont plus ou moins étendus dans les cavités des os frontal , sphénoïdal et les maxillaires. Les sinus frontaux sont considérables , surtout dans les quadrupèdes carnivores, comme le chien et le loup; mais ils manquent chez les civettes , et à quelques rongeurs , comme les rats et les lièvres. La plupart des ruminans, au contraire , en ont de si vastes , qu'ils s'étendent jusque dans les chevilles osseuses des cornes des bœufs et des béliers. Dans le cochon , ces sinus s'étendent jusqu'au derrière de la têle , ou à l'occiput. Enfin, l'éléphant en a de si considéra- bles , qu'ils pénètrent entre toutes les deux tables des os de leur crâne. On en pourroit dire autant des chats - huans , si

N G A 50.3

ces cavités àa diploë ducrâne ne communîquoîentpas pluioî avec leur oreille iiilerne.

Mais ce sont surtout les cornets inléiieurs du nez qui mul- tiplient les surfaces de la membrane olfactive. Ces cornets, sortes de lames osseuses , diversement repliées, sont de trois sortes ; les supérieurs sont un épanouissement de l'os ethmoiMe, les inférieurs sont des os particuliers , tantôt rou-> lés en spirale , tantôt d'une autre foruïe ; les différentes lames criblenses de l'ethmoïde donnent aussi des cellules ou an- fracluosités qui multiplient beaucoup les surfaces de la mem- brane mucoso-vasculaire se ramifient les nerfs olfactifs. Ces lames osseuses des cornets sont parfois percées de trous, principalement chez les ruminans. Chez les pois- sons, les lames ou cornets du nez sont membraneux comme chez les reptiles ; mais ces lames sont très-nombreuses et disposées régulièrement en forme de rameaux chez ces animaux aquatiques , afin ([ne les molécules odorantes char- riées pari eau agissent plus fortement. Chez les baudroies les cornets sont portés sur des sortes de pédicules, et prennent la fig'ire depetites coupes. Les esturgeons lesporteot en forme de branches d'arbres ; les autres espèces en ont d'une struc- ture encore plus variée.

Le membrane pituitaire qui tapisse toutes ces surfaces est extrêmement enlacée d'une infinité de vaisseaux sanguinâ qui la meltent dans une sorte de phlogose ou d'inflammation perpétuelle pour accroître sa sensibilité aux impressions, puis- que d'ailleurs une foule de rameaux nerveux de la prenuére paire de nerfs s'y ramifient , ainsi que quelques - uns de la cinquième paire. Mais sa surface est humectée d'une humeui* muqueuse , sécrétée par des cryptes qui enduisent conti- nuellement cette membrane , afin de la soustraire aux im- pressions trop immédiates des corps odorans. Aussi cette membrane , quoique très-irritable et susceptible d'hémorra- gie , devient moins impressionnable par ce moyen. Nous exposons à Tartide de I'Odorat , les autres considératiuuâ sur cet organe. (viREY.)

NEZ. Poissoii du genre des Squales, (b.)

NEZ. Nom hébreu de l'AuTOUR, (v.)

NEZ DE CHAT. Nom vulgaire de I'Agaric élevé ou Coulemelle, qu'on mange dans beaucoup de lieux, (fj.)

NEZ COUPÉ. On appelle ainsi le Staphylieii. (b.)

NGAI-GE. Nom qu'on donne, en Chine, aune AftiiJOrsE naturelle à cette contrée , et qu'on y cultive. Suivant Lou- reiro , ce seroit I'Armoise vulgaire {/h-temisia vit/gur/'s , L.) ; mais il convient qu'elle tient le milieu entre cette armoise

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et l'absinlhc , et que son odeur est balsamique : c'est Varie-

misi'a indicu., AYiUd. (l.N.)

]N(jAI-HOA^|G. Nom donne , en Cochinchine , au Ba- lisier DES Indes { Canna îndica, L. ), qui y croît spontané- ment, (ln.)

iS(iAl-M10. Nom Cocliinchinois d'une espèce de CuiicUMA {CuiTiima rollinda) dont les vertus sont les mêmes que celles du Ngé ( Curcuma longa ) , mais beaucoup plus exaltées. On ne mano;e point sa racine, (ln.)

N(iAI-XAN'ri et NGAl-MAT-TLOI. Noms que Ton donne, en Cochlncliine , au Zerimbkt, espèce de gingembre {^Jniovium zeiunihet') que l'on y cultive pour sa racine qu'on emploie en médecine , et qui n'entre pas dans l'assaisonne- menl des mets, (ln.)

NGANGÈ. Nom de ^I^'DIGOTIEU , au Sénégal, (ln.)

NGAOC-DIEP. Nom donné, en Cochinchine, à une espèce de CKRMKKrnsR {Juslicia pir fa , L.), dont on emploie les ("euilles en cataplasmes émolliens et résolutifs pour cal- mer l'indammation des mamelles. C'est \efolium bracleaium , Rumph. , Amb. 6 , t. 3o. (LN.)

N(iAOC-PHU-DUONG des Cocliinchinois etNGAAC FU YONG des Chinois. Deux noms d'une espèce â\irnioi.se qui croit en Chine et en Cochinchine, et dont les feuilles et les graines sont en usage coiimie stomachiques, toniques, an- thelminliqiies, etc. Loureiro l'a prise pour ï artemisia judaïca., Linn. ; mais c'est une espèce différente, (ln.)

NGAOC-THx\iVI-HOA. Les Cochinchinois donnent ce nom à une espèce de P RIMlyÈ^e , Prùnida sinensis , Lour. (ln.)

NGÉ etKUONG-HUYNH. Noms donnés, en Cochin- chine, au CuucuMA (^Curcuma longa ^ L.). Il est sauvage et cultivé dans ce royaume et en Chine. Le Ngé-Hoang est une autre espèce du même genre {Curcuma paUida , Lour. ; Cur^ cuma ugrestis de Rumphius. F. Kiam-HoaM. (ln.)

NGO-CHAU-DUN. Nom que porte le Sureau (6'amZ'Ma/3 nîgra ) en Cochinchine. (ln.)

NGO-KIAO ou IlOKI-HAO. Nom chinois de la colle de peau d'ÂNE. (s.)

NGU-(iIA-BL Nom qu'on donne, en Cochinchine, à une espèce (I'Aralie, Aralia palmata ^ Lour. (ln.)

NGUU RANG. Nom de la Lampourde {Xanihium stm- marium) en Cochinchine , suivant Loureiro. (ln.)

NGUYET-QUl-TAU. Petit arbre cultivé en Cochin- chine , liant de huit pieds, à feuilles ailées avec impaire, ovales-ohiongaes, entières, à (leurs blanches, odorantes, por- tées sur des pédoncules umltillores terminaux. Chaque iieur

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offre un calice à cinq divisions ; nne corolle camp.inulée à cinq pélales ; dis étaniiiies, dont cinq alternes plus longues : le fruit est une baie rouge, ovale pointue et mono;permc. Cet arbre est nommé chaltxis japimensis par Loureirj. Il y rap- porte le caniuniuni japonense de Rumphius ( Anib. , vol. 5 pag. 29 , l. i8 , fig. 2) , arbrisseau qui esf le murmya exotica , Linn.; ce qui est conforme à la vérité et à 1 opinion la plus généralement aduiise que ces deux genres chalccis et mumiya n'en doivent former qu'un. On ne doit pas confotidi e ce ca- muiiiuin de Piumpliius avec deux autres cumunium du mêuie au- teur. L un , le canutninni ou camuneng ^ lab. 17 , est le clialcas paniculala ^ Linn., appelé, en Cochinchine , Cay ngoyeï- Quio , et en Chine , Cao li yong. Le second est le carnunium sinense qui s'appelle uunbaiig'tsiuland bi Ccylan; il a beaucoup d'affinité avec Vuglaia de Loureiro, et annonce un genre très- distinct , qu'on propose ait nommuv camun! uni. (lts.)

NHA.Vlî5U-(iUACU. Nom donné , par les Brasiliens , au UlCtN {Ricimis commuuis) , suivant Pison. (ln.)

NHAMDIU. Nom souslequel les habitansdu Brésil dési- gnent, au rapport de Pison, diverses araneïdes. Le nhamtim I de cet auteur est une grande espèce de mygale {V. ce u'Ot.); son nhamdiu 1 est notre ihomhe chasseur ^ et le nhamdiu 3 est X'épéîie argentée , araitca argentala , Fab. (l,.)

NHANDIROBA. Fruit de la Feuillée a feuille en

CŒUR. (B.)

NHANDU de Pison. Pierre Brown rapporte cette plante brasilienne ^m piper anialago^ Linn. , qu'il a retrouvé en quan- tité à la Jamaïque. Le même naturaliste s'est servi pendant plusieurs mois des graines de ce poivre en place du poivre des Indes, et il n'y a reconnu aucune différence, (ln.)

NHAiNDU APOA. Nom toupinamboux du Jabiru. (v.)

NHANDU GUACU. Nom brasilien de Vautruchc de Ma- gellan. V. Nandu. (v.)

NHANH-GOI-LON. Nom qu'on donne, en Cochin- chine , à une orchidée remarquable par ses fleurs agréables. C'est le callisla amabilis de Loureiro. F. Callisie. (ln.)

NHANx4-GOl-NHON-LA. Nom d'une plante parasite (^Loranthus cochincliinensis , Lour.), qui croît sur les arbres des jardins de la Cochinchine. (ln.)

NHANH-GOI-RIT. Nom qu'on donne, en Cochin- chine, à une plante parasite. C'est \t ihrixspermwn ceniîpeda de Loureiro. (ln.)

NHA TAO et TAO GL\C. Noms Cochinchinois donnés à une espèce de oim/cA^« particulière au pays , et dont on fait des haies impéuéirabies par la quantité d'épines dont

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elles sont hérissées. Celte planle est le mimosa fera ^ Lour. Elle forme aussi un frès-grand arbre. (i-N.)

NHlT-BlEN-rUx\(;. C'est, en Cochinchine , le nom d'un Gemlvrier qu'on y cultive et qui est originaire de Chine. Il s élève à dix pieds; ses feuilles d'un vert bleuâtre sont dis- posées sur quatre rangées; les plus jeunes sont ovales et les anciennes pointues. Ce (iElNF.VRiER est , ou une variété du ge- nc\>rier de Chine {Junlpenis chinensis^ L) » ou une espèce nou- velle ; mais il ne paroît pas être le genévrier des Barbades , comme le dit Loureiro. (ln.)

NHON CUT DEE et FROUNG KH E. Noms de pays d'une espèce d'ÉRABLE qui croît en Cochinchine. C'est lacer ;^/«««/w/n, Lour. (ln.)

NHON-CUT-DÉE. Nom que les naturels de la Cochin- chine donnent à un arbre que Loureiro appelle dimocarjms in- furntis ^ et qui seroit par conséquent une espèce de LlTCm , Euphoria. V. DrMOCARPE. fLN.)

NtiON-FAM-PHU-YEN. On appelé ainsi, en Co- chincliine, un petit arbrisseau que Loureiro nomme axia corhinciiinr.nsis. V . au mot AxïE. (ln.)

NilO-RUNG CHIA-LA. Noms qu'on donne, dans les provinces australes de la Cochinchine, à une espèce de vigne \Vilis labrusca , L.) dont le raisin , ainsi que celui du vilis indi- en, L., qui est le NiiORUNOet le Nhon-la des habitans de la même contrée, donne , après la fermentation , un esprit-de- vin assez bon. La vigne proprement dite [yilis viniferu , L.) est rarement cultivée en Cochinchine ; le climat ne lui paroît pas favorable, (en.)

NHUC MOI etNUN MUEÏ.Noms chinois d'une espèce de Daj'HNÉ {Daphne odora , TlMinb.) cultivée avec grand soin dans les jardins de Canton , à cause de l'odeur agréable de ses {leurs, (en.)

NIA. yV Oihaïti , c'est le nom des jeunes Noix du Coco- tier des Indes {Coros nucifera). Ce palmier y est appelé ari selon Forster, et <?^//\?e suivant Parkinson. (en.)

NIAAMEL. Nom lapon du Lièvre, (desm.)

NIACMUK. Nom arménien etgéorgien du Persil, (ln.)

NIAIS (^Fauconnerie). L'oiseau niais est celui que l'on prend au nid. (s.)

NIAL. Nom lapon de I'Lsatis. (desm.)

N ï A LCA. Nom de la C ynoglosse officinale dans le nord de l'Italie, (ln.)

NI \LEL. Nom malabare d'un arbrisseau figuré parRhée- de (^ïal. 4 1 tf^in. 16), et qui selon Adanson doit faire un genre caractérisé ainsi : calice monophylle à cinq divisions et caduc;

NIC r,(^7

corolle à cinq pétales ; cinq étamines à un style et à «n stig- mate sphérique ; une baie à deux loges uionospermes ; fleurs en grappes; feuilles opposées. Quelques botanistes pensent que le nialel est une espèce de vigne. (i.M.)

NIARA. Nom malabare d'une espèce de JAMBOStER {Eu- genia corymhosa , Lk.). Le pciin-niara est le JamlongUE {Eug. caryophyllifoUa , Lk.). (L^^)

NIBORE, Nibom. Plante aquatique du Mississipi, à feuil- les opposées , sessïlcs , ovales, légèrement dentées, à fleurs axillaires , solitaires, pédonculées , accompagnées de brac- tées, qui seule, selon Rafinesque, Floride de la Louisiane ^ l'orme seule un genre dans la famille des acanthes.

Les caractères de ce genre sont : calice à quatre divisions persistantes ; corolle à tube courbé , velu en dedans, à limbe à quatre divisions dont la supérieure est plus large ; deux éta- mines à anthères presque sesslles ; un ovaire supérieur à un seul style ; une capsule globuleuse, sillonnée , uniloculaire , à quatre valves et à semences nombreuses , fixées à un axe central, (b.)

NIBUN. Nom malais du Caryote A fruits erulans {Caryota urens , L.), palmier qui porte, sur la côte Malabare, !c nom de schunda-panna. (LK.)

NICANDRE, Nicandra. Genre de plantes établi par Adanson, et rappelé par Jussieu. Il est formé par la bctla- donc physaldide , qui diffère en effet des autres ùclladones T^av son calice , dont les divisions sont en cœur hasté , et recou- vrent le fruit , et par le fruit qui est une baie desséchée à cinq loges. V. au mot Belladone.

Lanicandrc est une plante annuelle dont la tige est épaisse, très-rameuse , anguleuse , et haute de trois ou quatre pieds. Ses feuilles sont alternes, glabres, oblongues , décurrentes sur le pétiole , et obtusément sinueuses. Ses fleurs sont extra-axillaires , solitaires , et portées sur de courts pédon- cules. Elle vient du Pérou, et se cultive dans les jardins de Paris. C'est une très-belle plante, mais qui doit être suspecte comme toutes celles de sa famille.

Schreber a donné le même nom à la Potalie d'Aublet.

(B.)

Ce genre est consacré à la mémoire de Nicander, célèbre grammairien et poète grec , fréquemment cité par Pline , qui s'acquit une grande réputation par ses ouvrages , dont il ne nous reste que deux , intitulés , Thmaca et Alexipharmara.

(LN.)

NICARAGUA, C'est, en Espagne, la Balsamine des jardins , Impatiens balsamina , L. (LN.)

598 N I C

NICCOLANE, Kîcrvlanum.l^ichter avoit annoncé sous ce nom l'existence d'un nouveau métal magnétique. Mais Hi- singer el Gelilen ont reconnu que c'étoitun composé de nic- kel et de ro/j<i// avec une trace âtt fer el (^arsenic, (ln.)

]\ICCOLO. Nom que l'on donne, en Italie, aux Ag\- TUES ONYX à deux couches , l'une blanche et l'autre noire à l'aspect, mais d un rouge foncé ou brun à la transparence. Les frères TSicolo , célèbres graveurs italiens, se plaisoient à graver sur ce genre d'onyx auquel on adonnédepuis leurnom. On parvient , en Italie , à l'aide de divers procédés, à donner à certains onyx les qualités et les couleurs du nircolo ; on les nomme aussi pierres bridées. Les nircolo antiques , c'est-à-dire , les onyx noirs et blancs antiques sont les plus estimés, hts nir- colo sont généralement gravés en creux, (lis.)

KICCOLUM. Nom latin du Nickel, (ln.)

NICHEE (Ornilhologie). Nom appliqué aux petits oiseaux d'une même couvée qui sont encore dans le nid. (v.)

NICHET {Ornilhologie). On appelle ainsi l'œuf qu'on met dans les nids préparés pour la ponte des poules, (v.)

NICHOIR {Ornilhologie). On appelle ainsi une cage pro- pre à mettre couver des SERl^'S. (v.)

NIC H OULO.Nom languedocien des Chouettes, (desm.)

NICKEL, Nircohim. C'est un métal difficile à obtenir à l'état pur, et qui, comnie le fer, jouilde la propriété magné- tique, mais à un moindre degré.

Le nickel est d'un blanc argentin ; lorsqu'il n'est point par- faitement pur il a une légère teinte rougeâlre. H est Irès-duc- lile et peut se réduire en latnes el en lil; il est , après le fer, celui des métaux qui se lamine le plus aisément , et apiès le plomb, celui qui passe à la filière avec le plus de facilité, lise coupe sans se briser. Quand on le rompt, il présente un tissu grenu comme celui de l'acier. Sa pesanteur est de 8,279 lors- qu'il n'a été que fondu; mais elle est de 8,G66 lorsqu'il est forgé. En ayant égard à cette pesanteur spécifique , el à la ductilité du nickel, ce métal se trouve placé près du cuivre.

L'on n'a pas obtenu encore le régule de nirkel cristallisé ; le nirkel natif QSi en prismes capillaires qui m'ont paru des prismes à base rhombe , ce qui seroit assez remarquable , si le nirkel natif éio'il réellement pur; mais il contient un peu de cobalt. M. de Bournon présume que ces prismes sont des parallélipipède rectangulaires irès-allongés.

Lorsqu'on 0[>ère la réduction du nickel , ce qui n'a lieu qu'à une chaleur rouge de 160 degrés centigrades, il s'en vola- tilise une petite quantité qui s'attache sous foruie de petit,» grains au couvercle du cieuset.

Le nickel, quoiqu'aussi difficile à fondre que le manganèse, a l'avantage sur lui qu'on peut le réduire ; néanmoins il pa- roît qu'on n'est pas encore parvenu à le priver complète- ment du fer qu'il contient toujours. M. Laugier a entrepris dans ce but une foule d'expériences qu'il se propose de pu- blier incessamment. Elles feront connoître les moyens qu'on doit employer pour obtenir le nickel parfaitement pur. Le nickel exposé à l'air sec ou à l'oxygène sec, à la température ordinaire, ne subit aucune altération; à la température rouge il s'oxyde rapidement en vert et en laissant dégager de la cha- leur. Si cet oxyde vert contient une certaine quantité d'eau en combinaison comme l'oxyde vert natif, il doit être consi- déré comme un hydrate de nickel.

De Born a remarqué que le nickel ^rs.emc3\{kupfer nickel)^ poussé au feu, donne des végélalions vertes qui deviennent à la fin brunes. Ces végétations , observées également par Patrin dans la fusion du kupfer nickel de Daourie , ne sont point de l'oxyde vert de nickel, parce que ce n'est qu'en perdant l'eau qui y est combinée qu il passe à l'état de nickel pvu- taxydé ou brun.

Les oxydes de nickel sont de deux espèces : le protoxyde qui est brun et difficile à fondre , et le deutoxide qui est noir. On les obtient dans les laboratoires.

« On obtient le protoxyde, ditM.Thénard, en décomposant le proto-nilrate de nickel par la potasse ou la soude ; il se précipite d'abord sous la forme de flocons verts , parce qu'il tient de Veau en combinaison ; mais par la dessiccation il perd celle couleur pour prendre celle qui lui est naturelle ».

La dissolution de l'hydrate de nickel dans l'acide nitrique donne une belle couleur verte qui ne tarde pas à former un précipité de la même couleur.

L'ammoniaque est colorée en bleu pâle par l'hydrate de nickel.

Les oxydes de nickel com-muniquent au verre une couleur d'un brun-hyacinthe.

Le nickel s'allie au bismuth , à l'arsenic, à l'antimoine, au cobalt, au molybdène; l'on ignore dans quelles propor- tions on peut allier le nickel avec l'un quelconque desmétaux cassanspour obtenir un alliage ductile. Le nickel s'allie aussi avec les métaux ductiles, llala propriété remarquable d'aug- menter la ductilité du fer avec lequel il se trouve combiné. Proust a reconnu que le fer natif d'Amérique, dont il a fait l'analyse, contenoll unquantité notable de nickel, et qu'il étoit aussi ductile que le meilleur fer forgé. Bergmann avoit pa- reillement observé que la fonte de fer qui est ordinairement fragile , avois de la ductilité lorsqu'elle contenoit du nickel ;

6oo N ï C

onze parties «ror et une de nickel donnent un alliage cassant- L'on connoît encore des alliages de nickel avec le cuivre , le zinc et le plomb.

Le régule de nickel n'a e'té connu que vers le milieu du iècle dernier par les travaux de Cronstcdt et de Bergujann, <tijoique le nùnerai qui le contient fût Irès-anclennemcnt connu sous le nom de kiipferidckel ( F. INlCKEL arsenical). C'est un mélange plus ou moins intime de fer, de cobalt, d'arsenic et de nickel. Vaiiquelin , Proust, Bucbolz et sur- tout Richter et Tupputi, se sont beaucoup occupés de re- cherches sur le nickel. Le nickel est sans ulililé dans nos arts; quelques personnes ont proposé de s'en servir pour faire des aiguilles aimantées; mais, outre que la vertu magnétique du iiickel est beaucoup plus foible que celle du fer, ce mé- tal est exirêmemenl dlificile à réduire; on préférera donc toujours l'acier. La vertu magnétique du nickel est à celle du fer dans le rapport de i à 4-

On ne peut pas dire cependant que le nickel soll sans usage; car les Chinois, nul emploient un grand nombre d'alliages métalliques dont nous ne connoissons pas la com- position , y font entrer le nickel. Ils donnent les noms do pokfong et t\e pe-/oiig à im métal sonore qui ressenible assez à l'argent: ces noms signifient ruiore blanc ; le cuivre rouge ordinaire s'appelle /oh -/o/7f. Le cuivre uni intimement au aiickel, se rencontre en abondance dans quelques mines de la Chine, et notamment de la province de Yuu-Nan, d'où on l'ex- porte en petits pains ronds pesant trois livres. En faisant fon- dre ce minerai on obtient un pak-fong rouge briit ; c'est à cet état qu'on l'apporte à Canlon , sous la forme d'anneaux triangulaires de huit à neuf pouces de diamètre en dehors et d'un pouce et demi d'épaisseur. Une seconde fusion et Tad- dltlon du zinc , lui donnent sa blancheur et l'éclat argentin.

Le pak'tong brut est composé , d'après Kngstrœm, de cui- vre rouge et de nickel , uni à un peu de cobalt , sans urj aîome d'.irscnic; le nlrkel etle cuivre y sont dans la propor- tion de i3 à i^. La quantité de zinc qu'on ajoute varie selon îe degré et la valeur de l'alliage que l'on veut obtenir. Elle peut aller , à Canton, à la moitié du poids total. Il n'y a pas d'alliage plus utile et même plus agréable ; on en fait des;, ustensiles de toutes espèces , cuillers , vases à boire, taba- tières, chandeliers; il sert à décorer les meubles, mais il s'oxyde en vert-pâle par l'action des sels et des acides.

Les minerais de nickel ne sont pas très-répandus dans la na- ture ; ils accompagnent ordinairement les mines d'argent eS de cobalt. On n eu connoît point d'analyse e.\acte; ils méri-

N I C ooi

teroient d'alllrer raltenlion «les cliimlstes à cet égard. Son oxyde colore la chrysoprase en vert pomme, et communique ia même couleur à la pimélilc, substance terreuse qui accom- pagne la chrysoprase. Les minéralogistes admettent les es- pèces siiîvantes de nickel:

JSiC.KEL NATIF.

Nickel ferrifère. Nickel arsenical.

ÎSiCKEL OXYDÉ.

Nickel hydraté.

Nous allons considérer ces diverses espèces dans l'ordre alphabétique adopte dans ce Dictionnaire. Nous ferons ob- server ici seulement que le nicîccl anlimo«ial de M. Allan est le minerai décrit dans ce Dictionnaire à Tarlicle antimoine sulfuré nickelif ère ^ dans lequel Klaproth a trouvé par l'ana- lyse : antimoine , 47575 ; nickel , 25,25 ; arsenic, 11,75; soufre t5,25 rr 100.

NICKEL ARSENICAL, Cuprum niccoli, Wall. ; mine de cobalt arsenicale roiigeâire ^ Sage; kiipfer-nickel , Roraé-de— risle , Wern. ; sulphuraled 7»V,À;f/, Kirw. ; nickelerz , Suck ; copper nickel ^ Aik. , James. On le reconhoît aisément à sa cou- leur rouge de cuivre plus ou moins éclatante, qui lui a fait don- ner le nom de ki/pfernikel {nickel cuiore). Sa cassure est gre- nue et d'un grand éclat lorsqu'elle est récente ; elle est iné- gale ou partiellement conchoïde, et ses esquilles ou fractures angulaires ordinairenjcnt compacles et comme concrétion- nées. 11 est aussi en ircs-pelits grains disséminés ou agglomé- rés en veines inégales , quelquefois réticulaires ou dendri- tiques. Fourcroy en cile de cubiques : mais n'aura-t-il pas pris pour tel du cobalt arsenical nickelifère.'' On ne l'a point encore trouvé cristallisé dans la nature; cependant on en cite des cristaux en petites tables hexagones ; mais est-il certain que ce soient des cristaux Ae nickel arsenical? M. de Bournou possède des fragmens de nickel-arsenical cristallisés artifi- ciellement en petits cristaux octaèdres rectangulaires , dont les faces se rencontrent au sommet, sous Tangle de ^0° , et à la base , sous celui de 14^0". Il a observé encore l'octaèdre, dont l'angle solide du sommet est remplacé parun seul plan, ou bien par quatre plans, situés en opposition des faces de l'octaèdre, avec lesquelles ils font un angle d'environ 170."

On raye difllcilement ce minerai avec une pointe d'acier ; il donne des étincelles sous le choc du briquet, et répand alors Todeur d'ail : il se casse sous le marteau, ce qui le fait diS'- tinguer facilement du cuivre.

Sa pesanteur spécifique varie entre 6,64 et y, 56. Un frag- ment exposé à la liamine produite par le chalumeau , laissa

Co2 NIC

ilégagcr des vapeurs blanches arsenicales , puis fond en une scorie mclée de petits grains métalliques. Le nickel arsenical est soluble dans l'acide nitro-murialique qu'il colore en un beau vert ; puis il se dépose en poussière verdâtre.

Le nickel (irsenical est essentiellement composé de nickel et d'arsenic ; il contient toujours une petite quantité de fer dont il est fort difficile de le débarrasser; il est aussi fréquem- ment uni à du soufre, au cobalt arsenical , au cuivre gris, et quelquefois à l'argent ou au bismuth. D'après cela on voit, que c'est un minéral très mélangé. 11 n'en existe point d'analyse.

De tous les minerais de nickel^ celui-ci est le plus abon- dant; il se trouve dans les filons métallifères des terrains pri- mitifs et dans ceux de transition ; il accompagne le plomb , l'argent, le cuivre et les minerais de cobalt et d'arsenic. Ses gangues sont habituellement la chaux carbonatée lamel- ieuse, la chaux carbonatée ferrifère, la baryte sulfatée et le quarz.

Les localités se rencontre le nickel arsenical sont assez nombreuses et assez variées.

Il existe^ mais en petite quantité, dansles mines de plomb sulfuré de Lead-Iiills et AVanlocklead en Ecosse. Il forme des veines accompagnées de nickel hydraté, de plomb sulfuré, de zinc sulfuré et de baryte sulfatée, dans une couche de cal- caire compacté appartenant à la formation de la houille , à Linlilhgowshire.

Le gneiss et le schiste micacé de la Saxe présentent ce nickel dans leurs filons métallifères, à Schneeberg, Annaberg , Freyberg, Hohenstein et Johanngeorgcnstadt, 11 y en a égale- ment à Joachim-Stahl en Bohème et à Schladming dans la Haute-Styrie. 11 gîte dans une syénite porphyritique à Ora- ■wîcza dans le Bannat; l'or natif et des minerais de cuivre et de cobalt se rencontrent dans la même roche. A Andreas- berg, au Harlz, il est en veines dansles roches de transition. Dans le comté de Blansfeld , il forme des veines dans un schiste marno-bitumineux. 11 est dans le granité à Wittichia en Souabe. Il se trouve également à Riegelsdorf en liesse , à Salzbourg en Tyrol , dans le pays de Nassau-Siégen et à Biber près de Hanau en AVettéravie, il accompagne le cuivre et l'argent natif dans de la baryte sulfatée. A Saal- feld en Thuringe , le nickel arsenical est uni au cuivre gris et au cobalt gris. Dans cette métne mine, il est associé au cuivre carbonate vert, au cobalt oxydé brun, dans une gangue de baryte sulfatée lamellaire. C'est sur le nickel arsenical de Normarck (AVermelande) et de Loos (Helsingellande) en Suède, que Cronstedt a reconnu le premier, en lySi, i'exis*-

N T C 6o3

lence du nouveau métal nickel. Cronstcdt fait observer qu'il est fréquemment uni au bismulh ; bien avant lui cependant» Je nickel arsenical s'appeloil ktipfer nickel.

En France , on trouve du nickel arsenical à Sainte-Marie- aux-Mines dans les Vosges ; en Dauphiné , dans la mine d'argent d'AIIemont , et à Kiemau , dans la vallée de Barège; il est en petites veines dans le spatli calcaire. A Gistain , dans les Pyrénées espagnoles , il y est allié au cobalt, et s'y trouve en gros morceaux.

Les mines de cuivre du Kolywan et de la Daourie offrent: aussi ce minéral. 11 paroit trcà-abondant en Cbine ; on en fait la base de l'alliage dit pak foni^^ cuivre blanc.

llest peu de minerais qui aient plus excité de discussions en- tre les savans. On s'est long-temps obstiné à ne pas vouloir y reconnoîlre l'alliage naturel d'un métal nouveau avec le co- balt et l'arsenic : on penchoit pour le cuivre. La chimie a fait disparoîlre toutes les objections, et l'on ne doulç plus de l'existence du nickel.

NICKEL HYDRATÉ (mH-^/ oxydé, Haiiy ; nickel ter- reux et orre de nickel, Deb.; rurbomite de nickel, Daub. ; nic- ke/urker, \\ern. ; nickelorJire , Jamf s.). Il est en efilorescence, en croûtes minces et en petites masses terreuses. Sa couleur est le vert-pomme passant au vert d'herbe, et quelquefois au grisâtre ; ce qui lui arrive assez ordinairement lorsqu on l'ex- pose long -temps à l'air sec. Son aspect est généralement terreux ; quelquefois cependant il est compacte ; alors sa cas- sure est écailleuse , et ses écailles sont translucides sur les bords; lorsqu'il est massif, il happe à la langue, llest infusible sans addition , mais devient gris ou ; quelquefois il laisse dé- gager une très-légère vapeur arsenicale ; fondu avec le borax, il le colore en rouge hyacinthe.

L'analyse donnée parLampadius, d'un nikelocker, indiquer

Nickel 67.

Fer 23,20.

Eau i,5o.

Perte 8,3o.

Mais on ne doit considérer cette analyse que comme celle d'un nickel hydraté impur. Elle nous prouve seulement que ce minerai contient de l'eau.

Quelques personnes pensent , d'après la manière dont ce nickel se comporte au chalumeau , que ce peut être, soit du nickel hydraté , soit du nickel arseniaté. Ces deux opinions peu- vent être appuyées par des observations faites sur d'autres,

6o4 N I C

minéraux. Pnr exemple, le cuivre hyrlralë naturellement vert, perd au chiilimieau son eau, et sa couleur devient brun-noire; caraclère de i'oxyde de cuivre , qui est une de ses bases. D'un aulrecôlé, tous les arséniates mélaliiques natifs sont verls ; ce seroit une présomption en faveur du nickel arseniaié.

Le mV^f/ //jffra/c' accompagne toujours \c nickel arsenical ; il est dans le minerai d'argent dit ar^ciit-merdoîe ; il en colore la partie verle. Il est fréquemment associé avec le nickel oxydé proprement dil.

On le rencontre principalement à l\iegelsdorf en Hesse ; à Schneeberg en Saxe; avec le bismuth oxydé , à Joachim- stahl en Bohème ; à Willichin en Souabe ; avec le cobalt oxydé noir , l'argent sulfuré et Fargent natif capillaire ; à Schemnitz en Hongrie, et à Allemont dans le département de risère. Dans celte dernière localité , on en trouve des veines de plus de quatre lignes d'é^iaisscur. Le nickel sulfuré se trouve aussi à Barège et dans la vallée de Gislain ( Pyré- nées espagnoles).

« J'en ai trouvé dans quelques mines de cuivre de la Daourie , voisines du fleuve Amour ; et j'ai remarqué que son mélange avec le n.inerai de cuivre sain produisoit à la fonte un effet fort singulier. Quand on retire la mutte noire du four- neau, et qu'on la verse surfaire de la fonderie, à peine com- mence-t-elle à se figer , qu'on voit, d'espace en espace , s'é- îever sur sa surface des végétations de la grosseur du petit doigt qui ont la forme de branches de corail, et qui sont du plus beau vert démeraude (patrin. l^^e édit.). »

Il existoil dans le cabinet de M. de Drée , à Paris , une matle de nickel arsenical imparfaitement fondue , garnie de semblables cfiloresccnces. Klle provenoit de Wittichin en Souabe.

NICKEL NATIF (Gediegen nickel, Klap. ; Haarkies ^ Var. , W. ). On le reconnoît aisément à sa forme capil- laire et à sa couleur d'un jaune de bronze ou de laiton, qui ressemble assez à celle du fer sulfuré pour qu'on ait confondu le fer sulfuré et le nickel nalif, sous le nom de pyrite capit- laire. Néanmoins il y a du nickel natif d'un gris d'acier, qui a clé pris pour du bisuuuh sulfuré.

Le nickel nalif est telletnont délicat, que le soufile brise et détache aisément ses nombreux filamens. Ceux-ci sont des prismes qui , comme je l'ai dil , m ont paru avoir une base rhombe. Ils sont opaques , à surface brillante , pas trop dure, '"î brisent aisément , et jouissent d'une légère (iexi!)ililé. Au chalumeau , ce nickel se fond sur le charbon , et se réduit en un petit globule métallique , sans laisser dégager même une Irès-légèrc odeur de soufre ou d'arsenic, selon Jameson;

NIC 6

o:>

mais selon M. Lellèvre, lorsqu'on le p ace au l)Out d'une pince (le platine, il devient noirâtre et ne se fond p.is. Il co- lore légèrement en bleu le verre de borax. Il se dissout com- plètement dans l'acide sulfurique, et n'éprouve aucun chan- gement dans l'acide nitrique.

L'on n'a pas d'analyse de ce minerai, seulement on sait qu'il contient une très petite quantité de cobalt , et quelque- fois d'arsenic , qui lui font perdre sans doute la vertu magné- tique du nickel pur.

Le nickel nalifse trouve à Annaberg , Schnéeberg , et dans la mine dite Adolphe , à Johanngeorgensladt , en Saxe; à Joachimstahl, en Bohème , et à Andreasberg , au Harlz. Sa gangue ordinaire est le hnrnsiein inl'usible (quarz agathe gros- sier, H ). Au Hartz, il se trouve dans un fer sulfuré mélangé de plomb , et il forme , dans les fissures et les cavités de ces gangues, des houppes à fdamens entrelacés.

JSICKEL OXYDE , Nob. ; nùke/scfiivarze , Haussmann ; Blark ure of nickel , James.

Je ne connois qu'Haussmann qui nous ait fait connoître cet oxyde de nickel nallj. Cet habile minéralogiste pense qut; l'oxyde noir de nickel qu'il décrit, est une découiposition du nickel arsenical. Il est plus nalurel de croire que c'est le nic- kel Jiydralé vert, qui a perdu son eau , et qui est devenu ainsi un simple oxyde de nickel, comme cela a lieu dans nos labo- ratoires , lorsqu'on fait dessécher le nickel hydraté.

Le nickel oxydé natif ttsl terreux , d un gris ou d'an brun- noir ; sa raclure est luisante ; il est légt-r et tendre. 11 form-a de petites croûtes et de petits nids, dans un schiste mirneux et bitumineux , qui contient aussi du nic/u-l arsenical et du m- ckel hydraté , à Riegelsdorf , dans Kl mine dite Friedricij- "Wilhelm en Hesse; le nickel oxydé noir colore l'acide nitrique en vert pomme , en laissant déposer de Tacide arsenique ; d'où l'on peut conclure qu'il est composé de nickel oxydé et d'arsenic oxydé; mais on ne connoîl point la proportion de ces deux principes.

NICKEL NATIF FERRIFÈ3\E. Je crois devoir rap- pelericiles fers météoriques quiconliennent tous, sans excep- tion, une petite quantité de nickel en combinaison. Les chi- mistes ont également reconnu que ce métal se trouve allié au fer, dans toutes les masses pierreuses métalliques qui tom- bent de l'atmosphère , à la suite de météores enflammés. Cette circonstance ajoute à la probabilité d'une identité d'o- rigine de toutes les pierres. Fuy. Fer. natif et PiERaES mé- téoriques.

NICKEL ARSENIATÉ de Berzelius. F. Nickel hy- draté , nickdblume et nickel bluihe des Allemands, (ln.) '

Co6 IV I C

NÏCKEL-KALK et NICKEL-OCKER. V. Nickel

HYURATÉ. (LN.)

jNICKEL SILICTATÈ de Berzellus. T. Piméltte. (i.?j.) NICKEL VITRIOL ( Nickd sulfalé, en allemand ). Vel- tliL'im donne ce nom au Mic.KEi. hydraté. V. ce mot. (ln.) NICKELERS des Allemands. K. Nickel arsenical, (ln.) NICK-CORONDE. Sorle de cannelle de Ceylan , qui n'a ni odeur ni saveur. On s'en serl en médecine. L'arLre qui la produit ne paroît pas être connu des botanistes, (b,) TsiCKISK. Nom ail. d'une Laiche {carcjc arufa, L.). (LX.) NIGOTIANA. Du nom d'un habitant de Nismes, Jean Nicot, ambassadeur de France à la cour de Portugal, qui, en i55qoui56o, fit passer en France les graines du /cifjuc commun qu'un Flamand avoit apportées de la Floride. Celle plante éloit appelée , en Amérique , tuharka , lultak ou tuboc ftl peium ; et en Virginie , iippowoc. Loniccrus , Dalécbamp etTabernœ-Montanus furent les premiers botanistesqui men- tionnèrent le iahac sous le nom de niroUana , que C. Bauhin a rendu ensuite générique en y rappoitant le nù.uilaua rustica {niculionu minoi\ C. B.), et plusieurs plantes qui semblent être le tabac et des espèces voisines. Tournefort , Linnœus et tous les botanistes , ont laissé à ce genre son nom de ulcotiamt. L'une des espèces dites nicotiami glut'musa est le type du genre iahacus de Moench. V. ce mot et Nicotiane. (ln.)

NlCOTLVNE, Nicotiami^ Linn. (^pentuudrie mnnogyuu'). Genre de plantes de la famille des solanées, dont les carac- tères sont : un calice en tube , persistant , découpé en cinq parties; mie corolle en entonnoir, avec un tube beaucoup plus lon"^ que le calice , et un limbe à cinq divisions et à cinq plis ; cinq étainines à anthères oblongues ; un ovaire supérieur surmonte d'un style mince que termine un stigmate cchancré ; une capsule ovoïde , marquée de quatre stries , à deux loges et à deux valves , s'ouvrant au sommet , et remplies de petites graines réniformes , ridées et noirâtres. Ce genre a des rapports avec les MoLÈNESct les JusQUiA- MES. H comprend une vingtaine d'espèces, les unes vivaces, les autres annuelles , toutes originaires de l'Amérique , à l'exception d'une seule ( la nicotiane frutiqueuse ) qu'on trouve en Chine et au Cap de Bonne-Espérance.

Parmi ces espèces, il en est une très-connue , et dont on fait usage dans les quatre parties du monde, sous le nom de Tabac. Foyez ce mot, ella pi. (x 35 de ce Dictionnaire. Les autres uicotianes qui méritent d'être citées , sont : La NiCOTIATSE FRUTIQUEUSE , Nicotiana fnilicosa, lÀnu. ^ dont je viens de parler ; elle a de si grands rapports avec la nicotiane-labac , quelle pourroit biea n'en être qu'une va-

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rîété. Cependant elle en diffère par sa tîge vivacc, par ses feuilles plus aiguës , plus étroites et plus légèrement velues, par ses fleurs disposées en une panicule plus lâche , à calices plus serrés, découpés plus profondément, el à corolle d'un rouge approchant de la couleur de chair.

La NlcOTlANE RUSTIQUE , Nicotiana rustica, Linn. Ses feuilles , au lieu d'être sessilcs comme dans la précédente , sont pétiolées , ovales , ohtuses , très-cnsières , lisses et glutineuses ; ses (leurs sont obtuses et de couleur hcr- hacée ; elles paroissent en juillet , et produisent des capsu- les rondes. Elle est une des plus acclimatées parmi nous. Elle se multiplie sans le moindre soin , partout ses se- mences se répandi^nt ; de sorte que dans quelques endroils elle semble devenue indigène. Elle est annuelle. On croit que c'est la première espèce qui a été apportée en Europe.

La NicoriANE paniculée. Ses feuilles sont pétiolées, en cœur, très-entières; ses fleurs petites et disposées à pani- cule penchée ; elle est originaire du Pérou. C'est celle que l'on cultive le plus dans la Turquie d'Asie et en Egypte, pour l'usage de la pipe , parce que ses feuilles sont moins acres.

L\ NlcOTlANE A PETITES FEUILLES, Nicotiana minium, Mo- lina , Vuy. du Chili , pag. i53, cultivée au Brésil, et remar- quable par ses feuilles très-petites, pas plus grandes que cel- les Aa di clame de Crète ^ auxquelles elles ressemblent; elles sont ovales et sessiles , et les fleurs obtuses, (d.)

La NicoTiATJE A QUATRE VULVES , se caractérise par son nom. Elle esî originaire de l'Amérique septentrionale. Le tabac qu'elle fournit a été préconisé sous le nom de tabac de Missouri, (d.)

NiCOU. Nom spécifique d'une espèce de PtOBiTSlER , qui, à la Guyane , sert à enivrer le poisson. Pour cela, il suffit de battre l'eau avec ses branches nouvellement coupées et fendues, pendant quelques instans ; le poisson monte bien- tôt à la surface et se laisse prendre à la main. (b. )

NICTAGE et NICTAGL^ÉES. V. Nyctage et Nyc-

TAGINÉES. (LN.)

NICTANTË. Voyez Nyctanthe. (b.)

NICTÈRE. Voyez Nyctere. (desm.)

NICTERION. Fove^ Nycterio^. (b.)

ISID (^Ornith.). Espèce de petit logement que les oiseaux préparent pour y pondre , pour y faire éclore leurs petits et pour les y élever. On appelle aire le nid des oiseaux de proie.

Si l'ornithologiste n'a pour guide que la dépouille d un oi- seau , il ne peut avoir que des idées superficielles et conjec- turales sur son genre de vie , sur son naturel et même sur ia. race d't)ù il sort : il lui faut donc d^auties erreiacns pour

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asseoir son Jugement : ceux que donnent les nids et les œufs , ne sont pas les moins iinportans ; car, combien d'erreurs en ornilliologie n'eûl on pas évitées; combien d'espècesj com- bien de variëlés faites avec des mâles, des femelles et des jeunes de la même espèce , n'existoroient pas , si on eût connu leur berceau : si on les eût suivis dès leur premier âge ? Celle élude facilite le naturaliste observateur dans ses recherches , luiprocure lesrtmyens de distinguerle mâle de la femelle, et ceux-ci du jeune, dont la robe est presque toujours très-dissem- blable de celle du père , et très-souvent de celle de la mère ; elle l'aide à reconnoître le mâle dans les espèces il ne porte que momentanément son babil de noces; elle le met à poriéed'entendrelesdivers cris, la variété du chant, de distin- guer les habitudes et les mœurs. La connoissance des nids est pour rornilhologistede la plus grande utilité, puisqu'un nid au- trementconformé, composé de matcriauxqui diffèrent plus ou moins, posé sur un arbre ou dans un buisson, dans l'herbe , ou sur le sol à nu, construit dans un trou ou attaché conlre un rocher; puisqu'un œuf d'une forme plus ou moins dispa- rate, déteintes plus ou moins dissemblables, seront pour lui des guides certains qui l'empêcheront de former des alliances, de réunir des oiseaux , parce qu'ils ont, outre les caractères du bec et des pieds , la même taille et presque le même plu- mage, mais qui sont très-distincts les uns des autres par leur lang.'ige et leur naturel ; de séparer les mâles des feniclles , les jeunes de ceux-ci , parce que leurs couleurs n'auroient aucune analogie. Une pareille recherche exige beaucoup de zèle , de la persévérance et de la patience , puisque des es- pèces d'oiseaux choisissent des lieux et des foréls presque inaccessibles, les déserts et les contrées les moins habitées , pour procurer à leur famille un asile impénétrable à leurs ennemis. 11 est encore des oiseaux d Furope dod le berceau est inconnu ; mais combien est grand le nombre de ceux des pays étrangers habités par les Kuropéens , que l'on troUvc- roit facilement et que 1 on ne connoïl pas ! Peut-être a-l-on été arrêté dans ces recherches par le peu d'intérêt que l'objet inspire au premier abord ; mais leur utilité pour les progrès de la science doit être un aiguillon assez puissant pour déci- der le vrai naturaliste à s'en occuper.

Tous les oiseaux ne construisent point de nid ; il en est qui profitent de ceux qui sont abandonnés ; d'autres déposent leurs œufs dans des trous d'arbre , de mur , de rocher , dans des trous en terre ou sur le sol nu; les vrais coucous pondent dans un nid étranger, et laissent à une mère étrangère les soins de faire éclore et d'élever leurs petits. W ilson nous a fait connoître depuis peu un oiseau de l'Amcriquo septcn-

NID Co()

tfionale ( la passerîne des pâturages^ qui sfe conduit (le même que ceux-ci ; ce sont les seuls qu'on connoisse jusqu'à pré- sent pour déroger à la loi générale.

Le soin de construire le nid est plus souvent l'occupa- tion de la femelle que celle du mâle , qui ne fail guère que de ramasser les matériaux et les apporter, afin que ceiie-ci les mette en œuvre. D'autres ne s'en occupent nullemetil : c'est elle qui en pliant et entrelaçant avec son bec les brins de plantes desséchées , donne la première forme et la solidilé au nid, et qui, à mesure qu'elle le garnit, en pesant sur les matériaux qu'elle a accumulés, en les écartant et les arran- geant par les mouvemens de son corps, leur fait prendre ia forme convenable.

Uauiruche^ dil-on, laisse pendant le jour ses œufs exposés à l'ardeur du soleil , après les avoir couverts de sable. Les oi- seaux qui ne se perchent pas ou qui se tiennent le plus sou- vent à terre , y construisent aussi leur nid, qu'ils cachent au pied d'un arbre, d'un buisson, dans les halliers, et le plus souvent dans une touffe d'herbe. Les vautours , les afgles , font choix de la fente d'un rocher escarpé des plus hautes montagnes; et quelquefois ces derniers préfèrent la cime des arbres les plus élevés pour y construire un nid vasîe, entrelacé de petites branches, et dont 1 intérieur est tapissé d'un gramen posé sans art. Les oiseaux de proie nocturnes , auxquels la nature a refusé les moyens qu'exige la cons- truction d'un nid, pondent dans des trous d'arbre ou de rocher, ou s'emparent d'un nid abandonné par des oiseaux de leur taille. LiCS pics ^les grimpereaux , les siltelles^ les huppes y plusieurs mésanges., quelques gobe-mouches ^ etc., pondent dans des trous d'arbre et de muraille , sur des matériaux entassés sans art. Les guêpiers, les martin-pêcheurs ., se con- duisent de même dans un trou en terre; les rol/iers ., les ror- neil/es, les geais., les pies construisent leur nid sur les arbres, hii donnent de la solidité avec un tissu de racines , de fibres d'herbes et de mousse , et en garnissent l'intérieur avec de la laine et du poil en abondance. Notre pie fait du sic-n un fort inaccessible , en l'entourant et le couvrant de branches épineuses.

Il semble que l'industrie est le partage de la foiblesse ; car c'est parmi les petits oiseaux que se trouvent les plus adroiis. Oui n'admire les nids élégans et très-solides de nos pinsons., de nos chardonnerets;\espelils(onrs que construisent nos poinUot:; l'es- pèce de corneniuse du remiz, construite avec la bourre du peu- plier, du saule, du tremble, et dont l'oiseau forme un tissu épais et serré , semblable à une étoffe de laine , clos par en haut , suspendu à l'exlrémilé des rameaux les plus foibles , les plus

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tnobiîes et ppncViés sur !'<•?« ; <îont i'enfrée est sur les flancs, tantôl plus haut , tr.nlôl plus has, ci toujours tournée <^u côté fie cet clément! On ne voll pas, dans le nid de la m^sinif;e à lougneqaeue , un travail aussi fini ; mais elle 1 attache solidement sur les branches des arbrisseaux, lui donne une forme t)vale cl presque cylindrique, le ferme par-dt-ssus, laisse une entrée dans le côté, et se ménage quelquefois deux issues qui se répondent. C est aussi parmi ies syhoins ou pas- seiraux quese trouvent lesoiseaux étrangers les plus remarqua- bles. Qui ne voit avec surprise le nid des nelicuurvis^ composé de poille et de joncs artistement entrelacés, présentant par €n haut la forme d'une poche, à laquelle est adaptée, sur Tun de ses côtés, un long tuyau dirigé en en bas, à l'extrémité duquel se trouve rentrée du nid! tel est celui de la pre- Tniére année; mnis à la suivante ces oiseaux en construisent i;.n nouveau a-u bout de lancien, et Ton en voit ainsi jusqu'à sept ou huit attachés Tuu à Taulre ; c'est de même que se coiiiporleut encore les nip-mures.

Le {;nil gin'f sucrier donne au sien la forme d'un petit me- lon , suspendu à une branche, place l'entrée en dessous, et le divise à Tintérieur en deux comparlimens sép:!réspar une cloison; l'un sert de corridor, et c'est au fond de l'autre que la femelle dépose ses œufs. Combi.n d'autres oiseaux exoti- ques qui ne montrent pas moins d industrie que ceux ci

Le caraiif:e de la Ma r-ti nique confie ce qu il a de plus cher à une feuille de bananier; une des lranch(;s d'un globe creux coupé en quatre paris égales, présente la forme de son nid; et cet oiseau sait le coudre sous une feuille de bananier qui iui sert d'abri et qui en fait elle-même partie. Le figuier iaU se comporte à peu près de même ; car il choisit une feuille de l'extrémité d'une branche , et après s'être assuré de la solidiléilu pétiole, il apporte une autre feuille qu il a l'adresse de coudre a la première, avec des filanu-ns déliés et Hexi- bles tirés du jonc. Parlerai- je encore de la cucurbite étroi- te , surmontée de son alambic du rurique yi/puu ; de la bourse ouverte, large et profonde du /vw/Z/n/ore , suspendue aux ra- meaux par quatre cordons d'un tissu très-solide, et garnie sur le côté d'une petite fenêtre à claire-voie, par la femelle voit sans être vue ce qui se passe dans les environs ? Le /uur~ nier construit son nid avec de la teire, lui donne la loi nie d'im four à cuire du pain, partage Tintérieur en deux par- ties par une cloison circulaire à lac|uelle il laisse une ou- verture pour pénétrer dans celle sont déposés les œufs. Les gros //ers suciaiix se réunissent en troupes très nom- breus» s pour cons'ruire une habitation commune à tous, et divisée eu autant de cellules que de nids.

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SI nous jetons nn coup d'œil sur le nid de ccriaines hii ipfirs , nous voyons l'ouvrage d'un vannier dans celui de Vliiromhlle acutipenne de la Louisiane ; elle construit d'abord une cspècede plaie-forme avec des petits rameauxsecs etdesbrous- sailles, liés avec le styrax du liquidambar, sur laquelle elle pose un nid composé de petites bûcliettes collées ensemble avec la même gomme ^ et disposées à peu près comme les osiers d'un panier; elle donne a ce petit chef-d'œuvre, la forme d'un tiers de rercle, et le fixe par ses extrémités aux parois d'une cheminée. Qui ne reconnoît un maçon adroit et intelligent dans noire hirondetle de fenêlre? Enfin , parmi les oiseaux de rivage , la viamiietie construit un nid digne de remarque; ce nid a la forme d'une barque, flotte sur l'eair, et est attaché par une de ses extréuiilés à une lige de roseau. Quant à la conservation des nids pour les collections, V. l'article Taxidermie, (v.)

NID DE FOURMIS. Nom qu'on donne, à Cayenne, à un arbrisseau grimpant que les naturels appellent Tachi» (F. ce mot. ) C est le mynnecia srmuJens ^ Willd. (ln.) NID D'OISEAU. Nom spécifique d'un Opiiryoe. (b.) NID DE DRUSEN. V. (iirE i>es minéraux, (pat.) NIDUIAIRE, Nidiilaria. Genre de plantes de la famille 8esCHAMPlG^i0^s, que lîulliarda établi aux dépens des PÉ— ZlZES de LinuPRus. L'expression de ses caractères est : subs- tance coriace en forme de calice ou de cupule ; semences pëdiculées, fort larges, entoui-ées d'un suc gUiireax., et situées au fond du calice.

îjes nidu/aires ^ appelées Cyathes par plusieurs botanisfes^ ne diffèrent pas beaucoup des pézizes par leur fcu'me ; mais leurs bourgeons sénnuiformes sont ipcnfermés dai>s l'intérieur de leur substance au fond de leur calice , au lieu que les pé- zizes offrent les leurs , à la suiface supérieure de leur chapeau.

C'est Bulliard qu'il faut consulter toutes les fois qu'il s'agit des champignons de France; voici ce q[u'il dit :

Toutes les nidulaires sont remplies , dans leur jeunesse , d'un suc glaireux et limpide , et leur orifice est alors fermé par une membrane ; à une certaine époque, cette membrane se déchire , \a liqueur qu'elle recouvroit s'év^apore , se des- sèche en partie, et les graines restent à nu. Ces graines avor- tent lorsqu'on crève la membrane qui recouvre le Iluide elles sont noyées avant l'époque fixée par la nature , ou lors- que des chaleurs excessives dessèchent ce fluide. Elles n'ont pas , comme les autres clvampignons, des vésicaic^ sperina- tiques distinctes ; aussi ces prétendues graines ne sont-elles «^ue de petites nidulaires qui croissent tant qu'elles trouvent

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suffisamment de nourriture dans la cavité de leur mère ,mais qni ne preiioent un développement complet que lorsqu'elles soni Roriies di; cetle cavité , quelles ont été jetées sur la terre par l'effort des vents ou par quelques autres circonstan- ces. F oyez aux mots Champignon ou Truffe.

On trouve huit ou dix nidulaires décrites dans les auteurs; mais il n'y en a que trois qui croissent dans les environs de P.iris , savoir :

La NiDULAiRE VERNISSÉE , qui a sa surface extérieure ve- loutée , d'un jaune-brun , et l'interne lisse , luisante , blan- châtre dans sa jeunesse et plombée dans un âge avancé ; ses bourgeons séminiformes sont larges , grisâtres et glabres. Elle se trouve sur la terre et quelquefois sur le bois mort. Dans sa vieillesse , ses bords sont très-renversés en dehors.

La Nid LAiRE lisse , qui est d'un jaune foncé , unie , mais non- luisante en dedans , dont le bord est droit et les bour- geons séminiformes noirâtres. Elle se trouve exclusivement sur le bois mort.

La NiDULAiRE STRIÉE est d'un brun clair, constamment loineuse en dehors , et creusée de stries longitudinales en dedans. Ses bords ne se recourbent pas. Ses semences sont lisses en dessus , et tomenteuses en dessous. On la trouve sur la terre et sur le bois pourri.

C'est principalement dans les terrains sablonneux et au commencement du printemps, qu'il faut chercher les nidu- laires. (b.)

]VU)US AVTS. Lobel, et après lui Dodonée, Dalechamp et Rivin, ont donné ce nom à Vophrîde nid-d'oiseau (^ophrys nidiis avis , Linn. ) , dontrTournefort fit son genre nidus avis, queLiniireus n'a pas conservé. V. au mot Neottia. (ln.)

NIDUS AVIU M ( Nid des oiseaux ). Cest le Panais sau- vage, (ln.)

NIECE. Nom qu'on donne , au Sénégal, à une espèce de DoLiC , suivant Adanson. (ln.)

NiEBUHPxGIA. Nom proposé par Scopoli , pour dési- gner le genre Bultimora de Linnœus. Il est dédié à C. Nie- buhrg, Danois, qui voyagea en Egypte et en Arabie, (ln.)

NJECKE CORONDE. Nom de pays de l'écorce du/«M- rier-rassie, dont on se sert comme de celle du cannellier, pour los assaisonneinens. V. au mot Ca?înellier. (b.) -NIEIRO. Nom de la Puce, en Languedocien, (desm.)

NIELE. L'un des noms allemands de la Viorne. ( vibur- ri'im Janiana , Linn. ). (ln.)

NIELLE. Nom vulgaire de la Nigelle. V, ce mot. (b.)

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NIELLE DES B LÊS.C'est aussi I'Agrostemma githago, «îe Linnœus, ouliiTHAGE de Desfontaines, (ln.)

On appelle aus?i de ce nom , la Caiue , le Charbon, la Houille, T Ergot et le Blanc, maladies des plantes, dues à des Champignons parasites, (b.)

NIELLE DE VIRGINIE. Espèce de Mélanthe ( me- lanthium virginir.nm , Linn.). (LN.)

NIENGALA. V. Nienghala. (ln.)

NIENGH ALA. Leshabilans de l'île de Ceyian désignent par ce nom le Methonica des Malabares ( gîoriosa svperba , Linn. ). V. les mois Méthonique et Mendoni. (ln.)

NIEN-SÏ. Nom chinois d'une racine qui, au rapport de Clcyer, a une saveur acide, corrigée par un goût douceâ- tre. C'est, sans doute, une racine d'ombellifère. (ln.)

NIEREMBERGE , Nierembcrg'm. Plante annuelle à tige rampante, filiforme, noueuse , à feuilles pétiolées , ovales , oblongues, entières, velues, au nombre de cinq à six à chaque nœud , à (leurs blanches , solitaires , sessiles sur les nœuds , qui forme un genre dans la pentandrie monogynie.

Ce genre offre pour caractères : un calice à cinq divisions ovales et persistantes ; une corolle hypocratériforme , à tube cylindrique très-long , un peu courbé , à limbe à cinq divi- sions ovales , striées , plissécs ; cinq étamlnes inégales; un ovaire supérieur à style filiforme et à stigmate bilobé ; une capsule ovale , biloculaire , bivalve , renfermant plusieurs se- mences anguleuses, (b.)

NIERENSTEIN et NIERENHELFER. Synonymes allemands de néphrite. V. Gade. (ln.)

NIESEKRAUT. La gratiole officinale , le muguet, quel- ques ochridées, Tachillée ptarmica et l'orpin brûlant reçoi-r Tcnt ce nom dans diverses parties de l'Allemagne, (ln.)

NIESKRUID. C'est, en Hollande, 1 Herbe a éter- KUER ( ochUlea ptarmica , Linn, ). (LN.)

NIESWURZ. Les hellébores, les varaires, les sérépias^ l'adonis printannier , l'herbe Saint- Christophe , portent ce nom en Allemagne, (ln.)

NIESWURZEL. Nom de la mâche, valenana locus-^ ta , Linn. , en Allemagne, (ln.)

NIETOPERSZ. Les Polonais donnent ce nom aux chau- i>e-SGuris. (desM.)

NIEU-LI-SOI. Espèce de Laitron qui croît en Chine, différent du sonchus fioridaniis , L. , pour lequel Loureiro l'a pris. (LN.)

NIEU-SI, Nom qu'on donne, à la Chine , à eette petite

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plante queLoureiroappe'le cyaihulagenîculata. V. Cyathule €t Cadelari. (lis.)

NIFAT. C'est le murex pusio de Linnseus. V. au mot PvO- CHER. (b.)

NIGAUD. Nom appliqué à un cormoran , parce qu'on a remarqué qu'il étoil encore plus niais que les autres. Foy. pour tous les oiseaux décrits sous ce nom , l'article Cor- moran, (v.)

NIGELLA. Il dérive du mot latin m'ger, noir. Plante ainsi nommée par Pline et les Latins, à cause de ses graines noires. C'est la nigelle de Crète (^nigella salim , Linn. ). F. Melan- THION.

hes espèces du genre nigella et I'Agrostemme des blés ont élé appelés nigella par les botanistes qui ont précédé Linnoeus. Le genre nigella créé par Tournefort , adopté par les naturalises, comprend, d'après M. DecandoUe, onze es- pèces. Moench a fait à leurs dépens son genre nigellastrum , conservé comme sous-genre par M. DecandoUe. V. Nigel-

LASTRCM. (LN. )

NKiELLASTRUM. Nom donné , par Dodonée , à l'a- groslemme des blés; puis, par Magnol , à la plante qui conslilue le genre gavidella de Tournefort, consacré à la mémoire de Garidel;-, , auteur de la Flore d'Aix , qui a fi- guré cette pianle sous sonnom, pi. Sgde celle Flore. Linnœus nom. ne celle plante gandella nigellastrum. Sa fleura en effet beaucoup de ressemblance avec celle desnigelles. DecandoUe a fait connoître une seconde espèce de ce genre {garidella un- guicularis). Elle croît aux environs d'Alep.

Le genre nigellastrum de Moench est différent ; il a pour type le nigella urienialis^ Linn. , dont la (leur est jaunâtre , et munie d'étamines sur un seul rang. Les graines sont plates. V. Nigella. (lis.)

NIGELLE, Nigella. Genre de plantes de îa polyandrie pentagynie et de la famille des renonculacées , qui a pour caractères: un calice de cinq grandes folioles ovales, rétré- cies à leur base , très-ouvertes et colorées ; une corolle de cinq à huit pétales bilabiés en cornets courbés à leur base, dont la lèvre supérieure est plus courte et forme une fossette qui se trouve entre les deux divisions de l'inférieure ; un grand nombre d'étamines ; cinq à dix ovaires supérieurs, oblongs , convexes , comprimés , droits , terminés par de très-longs styles subulés , persislans , à stigmate aigu ; cinq à dix cap- sules oblongues, pointues, comprimées sur les certes, dis- tinctes ou réunies en une seule, à plusieurs loges, renfermant des semences anguleuses et fort petites.

Ce genre renferme des plantes annuelles, à feailles linéai-

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Tes , une ou deux fols ailées, et à fleurs terminales quelque- lois enveloppées (Vun iiivolucre de cinq folioles nmllifides.

On en compte onze espèces presque toutes, propre» aux parties méridionales de 1 Europe.

La NiGELLE DE Damas , Nige/Ia damasrma, a cinq pistils,' et les fleurs entourées d un involucre feuille. Elle croît en Europe et en Asie. On la cultive dans les parterres , sous les noms de nielle , barbiche , harbe de capucin , ioute-êpice et t.heoeux de F étuis , à raison de la beauté de ses fleurs, qui varient du bleu, qui est b'ur couleur naturelle , au rouge et au blanc, el qui doublent facilement.

La culture de cette plante n'est point difficile , puisqu'il ne s'agit que de la semer au printemps, en place et à la vo- lée , el éclaircir les endroits les plants seroieni trop ser- rés. Elle se resème toujours d'elle-même; ainsi, une fois qu'il y en a eu dans un parterre , il ne s'agit plus que de ménageries pieds aux labours du printemps.

En Egypte , au rapport d'Olivier, on cultive cette plante en grand , sous le nom àabsodé , pour en mettre la graine dans le pain, pour en faire des conserves , pour en tirer de 1 huile , etc.

Les semences de cette plante passent pour fortifiantes, carminatives et céphaliques : on s en sert en infusion dans les affections catarrhales, l'asthme piluileuxel la céphalalgie; elles augmentent le cours des urines, et rétablissent les rè- gles des femmes; elles entrent dans la composition du sirop d'armoise , dans lélectuaire des baies de laurier , dans les trochisques de câpres , etc.

La NiGELLE DE Crète , Nigella saiioa , a cinq pistils ; les capsules arrondies, épineuses, el les feuilles un peu velues. On la cultive comme la précédente ; mais elle lui cède de beaucoup en beauté.

La NiGELLE DES CHAMPS a ciuq pistils ; les folioles du ca- lice longuement onguiculées , et les capsules turbiuées ; sa fleur est petite , mais très-jolie.

La NiGELLE D'EsPAG^E a dix pistils égaux en longueur à La corolle. Elle se trouve en Espagne.

La NiGELLE d" Orien r a dix pislils plus longs que la corolle, et les semences ailées et aplaties. On la trouve aux environs d'Alep. (B.)

NKillT-JARR. Un des noms anglais de I'Engoule- "vent , à cause du cri qu'il fait entendre le soir, ^^v.)

NKiHSTHADE. Synonyme anglais de la Morelle elda inot allemand nachtsr.hatlen. (ln.)

^IGilTlNGALE. Nom anglais du PiOssignol. (y.)

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NIGRETA. Le Pavot cur^'u { cheîidonhtm glmicium; Linn., porte ce nom en Portugal, (ln.)

NKiKETTE. Un des noms vulgaire du Merle, (v.)

NIGRICA, Schisius ni'grica, Wall. C'est le Zeichensnhie- fer des Allemands , et ce que nous appelons crayon noir, et schiste à dessiner , que M. Haiiy désigne par argile srhisleme graphique ; M. Brongniart , par amp élite graphique ^ et de La- métherie , avant eux , par melantherite. V. ces divers noms, et Schiste, (ln.)

NIGRILLO. Nom que les Espagnols donnent à I'Ar- CENT SULFURÉ noir terreux et au Cuivre gris argentifère décomposé, (ln.)

JNIGRIN de Werner. C'est une variété du Titane oxydé FERRiFÈRE ( V. ce mot ) , qui se trouve en petits grains nolis, dans les roches granitiques et les gneiss. Son caractère es- sentiel est dans sa cassure très-inégale. Uiserin, qui est aussi une variété de Titane oxydé ferrifère, jouit d une cassure conchoïde éclatante; dans la. menakanile y elle est un peu la- melleuse ; ces trois variétés passent de l'une à l'autre. Les minéralogistes étrangers persistent à les regarder comme des espèces distinctes. Les Allemands nomment aussi le ni^rin , Eisentitan. Aikin et Jameson le décrivent sous le nom de nigrine.

Le nom de nigrin ou nigrine a été aussi appliqué au Titane SILICÉo-calcaire que Werner a désigné par Lraum mœuak-- erz. (ln.)

NIGRINA. Il y a deux genres de plantes sous ce nom. L'un est le nigrina de Linnaeus ou nielasma de Bergius , que Linnseus fils a rapporté ensuite augenre gerardia , en nomiîKsMt la seule espèce qui en fît partie, gerandia nigrina. Le second genre nigrina est décrit dans ee Dictionnaire au mol ISi- grine. (ln.)

NIGRINE. V. Nigrin. (ln.)

NIGRINE, Chloranlhus. Genre de plantes delà tétrandrie monogynie, qui a pour caractères : un calice entier en soa limbe , muni d'une dent sur le côté extérieur et d'une bradée à peine visible à sa base ; un seul pétale , inséré au côté extérieur de l'ovaire, squamiforme , ovale, arrondi, con- cave , trilobé , à lobes latéraux monandres, et à lobe inoyen plus allongé et diandre ; des anlbères adnées au pétale ; un ovaire semi inférieur sans style , à stigmate capile , pres- que bilobé. Le fruit est une baie ovoïde , marquée vci.s son sommet d'une cicatrice formée par la chute du pétale <{ de la dent calicinale. Cette baie est transparente à sa base, uui- loculaire et monosperme.

Ce genre esl composé d'une seule espèce , (pi est scusr'

NIL Gtf

arbrisseau glabre , stolotiifère , à rameaux opposés et noueux, poussant des racines dans les nœuds inférieurs ; à feuilles opposées, amplexicaules , et munies de stipules; à fleurs dis- posées en épis paniculés et terminaux , munies chacune d'une tractée qui persiste.

La nigrine est originaire de la Chine et du Japon. Elle se multiplie très-aisément dans nos serres , par marcottes ou boutures. On assure que les Chinois, pour donner aux feuilles de thé l'odeur agréable qu'elles exhalent , sont dans l'usage de les mêler avec celles de cet arbrisseau.

JLe genre Créode de Loureiro rentre complètement dans celui-ci.

La Nigrine de Linnaeus se nomme actuellement Melas-

WE. (b.)

NIGRITELLE , Nignïel/a. Genre de plantes établi par ïxichard . aux dépens des Orcuis de Linnaeus, et des Ha- Ienaires de R. Brown. Ses caractères sont : calice ouvert ; inbelle (nectaire , Linn.) postéricTire , en éperon arrondi et entier ; bursicule à deux demi-loges.

L'Orchis noire sert de type à ce genre, (b.) NIGROIL. C'est le spare oblade. V. au mot Spare. (b.) NIGUAS. V. NiNGAS. (L.) NIGUNDA. V. Negondo. (ln.)

NIHIALHINEM. Nom que les Hébreux donnoicnt à la Fumeterre. (LN.)

NIHIL-ALBUM. On a donné ce nom aux excrémens de rats, qu'on employoit autrefois dans les pharmacies, (desm.) NIHIL-ALBUM et POMPHOLIX. Noms donnés au- trefois au Zinc oxydé. V. cet article, (ln.)

NIIR PONGELION (Rheed., M«/. 6, t. 29). Très- grand arbre du genre des Bignones. C'est le hignonia spa- Ihacea de Linnaeus fils. Dans la langue tamoule , il se nomme Will-Padri. (ln.)

NIIRVALA. C'est le nom qu'on donne, au Malabar, (F. Rheed., Mal. 3, t. 4.2), à un bel arbre qui appartient au genre Tapier. C'est le cvaiœ^a religiosa , Forst. (ln.) NIKKEL. V. Nickel, (ln.)

NIKYLION. Nom tariare-koriak de I'Aune. (ln.) NIL ou NILE et ANIL. Divers noms arabes de I'Indi- r.OTlER DES Indes, indigofem tinctoria. La racine de ces noms paroît être le mot ni'a qui signifie bleu, dans les langues cln- ghalienne et malabare. (ln.)

NILA BARUDENA, Nom que l'on donne à 1' Auber- gine {solanum nielongena) au Malabar, selon Rhéede, qui en a donné une excellente figure (Mal. 10 , tab. 74 ). Ç}-^-)

XXII. 4*^

5,8 NIL

NIL\-HUMMATU {hummatu hleu de saphir). Nom ma- labare d'une espèce de Datura. a fleurs bleues, qui paroît voisine du dalura mélel. (ln.)

NILBEDOUSI. Petit arbre figuré tab. 28 du cinf|«ième volume de VHorlus malabaricus de Rhéede. Ses feuilles sont alternes, ovales-obtuses, épaisses, toujours vertes. Ses fleurs sont disposées en panicules à l'extrémité des rameaux, et composées chacune d^une corolle de cinq pétales oblongs , aigus, charnus, rougeâlres; de cinq étamines; d'un ovaire supérieur ovale, terminé par un stigmate sessile. Le fruits Kont des baies ablongues , noires quand elles sont mûres, remplies d'une pulpe douce, dans laquelle est plongé un os» selet blanc , rond et un peu plane.

Cet arbre croît dans l'Inde. Le &uc exprimé de ses feuil- les, mêlé avec le suc laiteux de la noix d'Inde, tue les vers intestinaux, (b.)

NILE et NILEM. Noms malabares du Saphir. Nîla-candi est le nom de la Topaze orientalje. V. à l'article Corindos VITREUX, (ln.)

NIL-GAUÏ ouNYL-GHAUT , Anûlùpe albipes , Erxl. , 'Antilope picta , Gmel. Quadrupède ruminant du genre des Antilopes, figuré pi. G 82 de ce Dictionnaire. V. Atsti-

lOPE. (DESM.)

NILHA des Portugais de l'Inde^ C'est le rumphia amboi- nensis. (lîc.)

NILICA D'INFERNO. C'est le nom que les Portugais de l'Inde donnent à un arbrisseau qui paroît être une espèce de Glutier {sapium), parce que son fruit, plein d'un Jaît acre , cause une inflammation douloureuse à la bouche, lors- qu'on a eu l'imprudence d'en manger. Les Malabares nom- ment cette plante eupborbiacée , carenoUi ei bengiri. (ln.)

NILIKAI {Boa malacca, Rumph. Amb. Auct. , tab. i ). Nom malais de I'Emblic, espèce de Phyllanthe (phyllan- ihus emblica , Linn. ). (ln.)

NILlKIESELetNILSTEIN. Noms allemands du caiV-j îou d'Egypte. V. Jaspe égyptien, (ln.)

FIN DU VINGT-DEUXIEME VOLUBtE.

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