RSS : se à DIS ML RE RES un a. le 1 : » É LA : où è re : 0 : \ k h à a 4 r. 4 QE: BU ner, s rar" D ni . = Es a. a VS L'un, a) pl! 1U f Le l 15/8 Le ; : j } () V 1 , 4 h > * Al . ci * ns l E À ? } OBSERVATIONS LA PHYSI QUE, SUR L'HISTOIRE NATURELLE ETRSU RER SUARTS, AVECTDES PLANCHES EN TAILLE-DOUCE;: DÉDIÉES A Me BE COMTE" D'ARAOIS Par M. l'Abbé ROZIER, Chevalier de lEglife de Lyon , de l’Académie Royale des Sciences , Beaux-Arts & Belles-Lercres de Lyon , de Villefranche, de Dijon, de Marfille, de Nifines , de Fleffingue ; de la Société Impériale de Phyft- que & de Botanique de Florence , de Berne, de Zurich, de Madrid , Correfpondant de la Société des Arts de Londres, de la Société Philofophique de Philadelphie , &c. ancien Direëleur de PEcole Royale de Médecine - Vétérinaire de Lyon. TOME SIXIÈME. JUILLET, 175. AP AA RS Chez RU AULT, Libraire, rue de la Harpe. MD ICR CS MPEXECIVE APE" CEE RER IF ISLE G E DU RO E APS ES 1° CE Journal a commencé à paroître fous le format in-12 au mois de Juillet 1771. Le Cahier étoit de dix feuilles d'impreffion. Il a été ainfi continué jufqu'à la fin du mois de Décembre 1772, ce qui forme 18 Vol. in-12 , dont le prix eff de 36 liv. à Paris, & de 4$ liv. en Province , par la Pofle. A la demande de MM. les Soufcripteurs ; le format in-12 fut changé en celui in-4°. en Janvier 1773. IL fera tou- jours continué le même ; parce qu'il eff plus commode pour les Biblio- thèques , & que cet Ouvrage fait Juire avec les Colleitions Acade- miques. Le changement de format n’en a produit aucun pour le fond de l’Ouvrage. 2°. Il paroït chaque mois un Cahier de dix feuilles in-4°., enrichi de gravures en taille-douce. Ces Cahiers forment ; à la fin de l'année , 2 volumes in-4°. On fouftrit, pour ce Journal, à Paris , chez l'Au- teur, Place & Quarré Sainte-Geneviève ; chez RUAULT, Libraire, rue de la Harpe , & chez les principaux Libraires des grandes Villes & UT, des Pays étrangers. Le prix de la Soufcription eft de 24 div. pour Paris, LS È LE) & de 30 liv. pour la Province , franc de port. OV A 3° MM. les Souftripteurs font priés de recommander à leurs Suiffes , Eu Wa) Portiers , Laquais , Domefliques ; de ne pas égarer le Cahier qu'on 2 leur remet exaélement du 10 au 21$ de chaque mois , & ff MM. les ï Soufcripteurs ne l'ont pas reçu ,-le premier du mois fuivant, ils au- on ront la complaifance de porter leurs plaintes chez l'Auteur , ou de le faire demander au grand Bureau de la petite Pofle , rue des Dé- chargeurs. Il weft pas polfible que lexemplaire d'un feul de MM. les Soufcripteurs foit oublié, puifque ; lorfque les Cahiers font garnis de leur enveloppe , on en fait l'appel, le Regiftre à la main , de la même manière que l'appel des Soldats dans une Caferne , & ü faut , pour ainfi dire , que chaque Cahier réponde , adfum , o2 du moins on Le répond pour lui. 4°. Les perfonnes qui ont la bonté de nous communiquer des Mé- moires , des Differtations | Obférvations , &c. font priées de donner des manufcrits lifibles , & alors il y aura moins de fautes d’impreffion. s°. On n'a promis que dix feuilles d’impreffion pour chaque mois , même en y comprenant le Titre & la Table ; nous en donnons quelque- fois 31, 12 , 13. Comme ces feuilles furnuméraires demandent du cems pour être imprimées ; On prie ; dans ce cas , de pardonner s’il farvient un retard de quelques jours pour la publication du Journal. HAS ES E DMEON EE AUEROOT. TI "CL. ES. Contenus dans cette feconde Partie. E »rtrir NCES fur la pefanteur des Corps à différentes dif- tances du centre de La terre, faites aux Mines de Montrelay er Bretagne ; par M. le Chevalier de Dolomieu , Officier des Carabi- niers ; page 1 Eloge de M. Model , par M. Parmentier, Penfionnaire du Roi, Maitre Apothicaire de Paris ; Membre de l'Académie Royale des Sciences, Belles-Lertres & Arts de Rouen , &c. s Mémoire fur la découverte de la Sélénite dans la Rhubarbe , traduit de l'Allemand de M. Model, par M. Demorer fils, Apothicaire ; 14 Troifième Mémoire fur les Abeilles, où l’on expofe les principaux Réfultats des nouvelles Expériences qui ont été faires fur ces Mou- ches dans le. Palatinar ; par M. Bonnet , de diverfes Académies, 23 Recherches fur une Loi générale de la Nature, ou Mémoire fur la fu- fibilité & La diffolubilité des Corps , relativement à leur malle, où l’on trouve l'art de tirer facilement , & fans frais , une matière alimen- taire de plufieurs Corps, dans lefquels on ne reconnoiffoit pas cette qualité ; par M. Changeux. 43 Oëfervations fur plufieurs objets d'Hifloire Naturelle ; faites par M. Roume de Saint-Laurent, fur fes Terres , Quartier de Saint-Pa- trice , Ifle Grenade , S1 Obfervations & Expériences de M. Cadet , fur le Mercure précipité per fe ordinaire, & fur celui préfenté par M. Baumé à l Académie des Sciences , comme fublimable en entier & irréduétible , s5 Lettre de M. Romain , à l’Auteur de ce Recueil , 70 Mémoire en abrégé de l'exécution du Radeau qui a fervi de chantier à la Caiffe qu'on conflruit au Port de Toulon , de 300 pieds de longueur , & 94 pieds de largeur ; dans laquelle on doit bâtir une forme pour le Radoub des Vaifleaux ; par M. Romain, 71 Lettre de M. de Fouchy , Secrétaire perpétuel de l'Académie , à l Auteur de ce Recueil, 75 Suite de la Defcription des Poiffons de lIfle de France qui occafionnenc des maladies à ceux qui en mangent ; par M. Sonnerat , Correfpon- dant de l Académie des Sciences , 76 Nouvelles Expériences éleëlriques ; par M, Comus , 77 C4 Recherche pour augmenter la force de PEleëricité ; de toutes fortes de Machines , par le moyen d'une Armure adaptée au premier Conduc- teur ; par M. Detienne, Ecuyer , Avocat en Parlement , Huiffier ordinaire du Roi en fa grande Chancellerie de France, premier Huif- Jier en fon Grand-Confeil, 81 Nouvelles Litréraires ; 89 Fin de la Table. APE D RON BUANMTETEONENE TJ lu , par ordre de Monfeigneur le Chancelier , un Ouvrage ayant pour titre : Obfervations fur La Phyfique , fur l'Hifloire Naturelle & fur Les Arts, &c. par M. l'Abbé Rozier, &c. & je crois qu'on peut en permettre l'impreflion, A Paris, ce 30 Juillet 1775. GARDANE. OBSERVATIONS PTS NRA RS MOREL LEP AUEID EE LOL EDS SEE 20 RU OBSERVATIONS MEMOIRES SUR LA °P H:Y:SIOQ U E; SUR L'HISTOIRE NATURELLE ET SUR LES ARTS ET:MÉTIERS. F À nisvai L+ NS EE APN É ROUE N CES Sur la pefanteur des Corps à différentes diffances du centre de la terre, faites aux Mines de Montrelay en Bretagne. Par M. le Chevalier DE DoromiEu, Officier des Carabiniers. A ————_ ff PRE PA RE ANT T NO NS: Le fait fu/pendre un fléau dé balance très - jafte & très - mobile au deflus d'une foffe, ou puits perpendiculaire , qui fert à l'extrac- Tome VI, Parc, II, 1775. JUILLET, À 2 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, tion du charbon, & qui a 95 toifes de profondeur. Je fs recouvrif la moitié du puits par des planchages pour la facilité de mon opé- ration. Un des bouts de mon fléau éroir exactement au-deffus du centre de la foffe. J'ai préparé une corde bien filée , & d’un petit volume, afin.que la plus grande denfité de l'air lui fit moins perdre de fa pefanreur ab'olue, mais cependant aflez forte pour fupporter un poids confi- dérable : je la hs godronner pour qu'elle ne pür point s’impregner d'humidité, & qu'elle confervât toujours fon même poids. Les poids de fonte dont je me fuis fervi , furent rendus parfaite- ment égaux par des rares que j'ajoutai à ceux qui me parurent plus foitles. J'ai fait recuire le fl de fer que je voulois employer pour qu'il fût moins caflant & plus nerveux, &c. Fax PUR ÉEUNMCOLERS Faites fur le Puits dit d’Hérouville ; profond de 9$ toifes , le 10 Mai après mide. Première Expérience avec une corde pefant 2x livres ; attachée à un des bouts du fléau. Un poids de 106 livres 6 onces , fufpendu au bas de la corde fur une profondeur de 9$ 4oifes, fur mis en équi- libre par un poids de 127 livres 4 onces attaché iinmédiarement à l'autre bout du fléau. Excès de pefanceur du poids fupérieur fur linferieur de deux onces. a el 2: Dans cette expérience la corde s’allongea exceflivement , & je fus obligé de la retirer & raccourar plufieurs fois pour tenir le poids fufpendu. Seconde Fxpérience. J'ai fubftitué à la corde un fil de fer pefant 12 livres, qui, étant chargé dans le bas de la foile d'un poids de 106 livres 6 onces , fur renu en équilibre par :7 livres 10 onces, le poids fupérieur eur un excès de petanteur de 10 livres fur l'in férieur. Je voulus fufpendre des poids plus confidérables à mon fil de fer qui , furchargé de 200 hvres, cafla, & nut fin à mes opé- rations. 1 Je ne dois pas oublier de dire que ma corde , après ma pre- mière expérience , fut retirée du puits & pefée , & que je ne lui trouvai point d'augmentation de pelanteur. Le 11 Mai au matin fur le même Puirs, Première Expérience. Le fil de fer pefant x1 livres 6 onces , tint SUR L'HIST. NATURELLE ET LES ARTS. ; fafpendu un poids de 106 livres 6 onces, & fur mis en équilibre par 118 livres 2 onces; le poids inférieur l'a emporté de 6 onces fur le fupérieur. Seconde Expérience. Fil de fer pefant 11 livres 6& onces, & renant fufpendu 156 livres 10 onces » a été contrebalancé par 167 livres 14 onces ; le poids fupérieur a eu l'excès de deux onces fur l'in- érieur. Ces Expériences ont été faites avec route l'exactitude que pouvoit permertre la grande profondeur : à chaque expérience j'ai laide les poids en équilibre pendant plus d'un quart-d heure , & l'addition d’une once fur un des côtés de! la balance ; Ja faifoit toujours tré- bucher. Le baromètre, defcendu au bas de la foffe, monta de 8 lignes un quart, & fe tint à la même hauteur refpe&tive peadant les trois jours que durèrent mes opérations. EUXIP ER IE NC Ets Faites fur le Puirs de la Pegnerie ; profond de s7 toiles , le 12 Mai au MALI Pemière Expérience, Une corde pefant x3 livres , fourenant un poids de so livres, fur mife en équilbre par 62 livres $ onces ; excès de pefanteur du poids fupérieur fur l'inférieur de 11 onces. Seconde Expérience. Corde pefant 13 livres, foutenanc un poids de 100 livres , fut mife en équilibre par 112 livres 3 Onces ; Cxcès de pefanteur du poids fupérieur far l’inférieur de 13 onces. Troifième Expérience. Corde pefant 13 livres, foutenant un poids de 156 livres , fut mife en équilibre par un poids de 162 livres 1 once + ; excès de pefanteur du poids fupérieur fur l'inférieur de 14 onces +. Quatrième Expérience. Fil de fer pefant 6 livres 14 onces À, fou- nant un poids de ço livres, fur mis en. équilibre par $6 livres 1, onces À; excès d’une once du, poids inférieur fur le fupérieur. Cinquième Expérience. Fil de fer pefant 6 livres 14 onces À, fou- tenant un poids de 100 livres, fut mis en équilibre par 106 livres 16 onces +; excès de 2 onces du poids inférieur fur le fupérieur. Sixième Expérience. Fil de fer pefant 6 livres 14 onces À, foute- nant un poids de 150 livres, fut mis en équilibre par 156 livres 16 onces +; excès de deux onces du poids inférieur fur le fupérieur. Ces Expériences faices fur une moindre profondeur , ont été beau- coup plus faciles , & faites avec l'attention la plus minurieufe ; les différens poids furenr tenus en équilibre pendant long -tems pour s’aflurer des réfulars obtenus. 277% JUILLET. ‘A: » 4 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE; On objeétera peut être contre l'exaétirude de mes Expériences, qu'elles ont été faites ‘lans des Puits de mines où l'air , chargé de vapeurs , y doit avoir moins de refforr & plus de denfité qu’à la furface , & que cela doit avoir influé beaucoup far mes opérations. Je répondrai que dans le fond des puits , 1 y a des galleries qui communiquent avéc des puits d'aerrage , par où l'ai intérieur fe met prefque en équilibre avec l'air lupéricur. D'ailieurs , fi cela avoit inlué direétement fur mes Expériences, la diffeience de mes réfultats, fondée fur cette feule caufe , auroit toujours éré propor- tionnelle aux poids que j'ai employés , & c'eft ce qui n’eit point arrivé , ainfi qu'on vient de le voir. La variété des réfultars obrenus par tous ceux qui ont fair les mèmes expériences ; prouve combien elles font infufiiantes pour connoître la pefanteur des corps à différens éloignemens du centre de la terre. Les diftances fur lefquelles on peut comparer deux poids égaux, ne font pas affez confidérables pour donner des différences fenfbles dans la gravire. D'après les principes théoriques de New'on, l'attraction agit en raifon inverfe du quarré des diftances du centre, & par conféquent ; la vravité augmente en raifon inverfe du même quarré , & en raifon directe de la fomme des poids ou des maffes. Or, fuppofons le rayon terreftre pris de la furface de 1500 lieues, qui font 4500,0c0 toifes; retranchons de ce rayon 100 toifes, nous aurons pour rayon Moyen 449,920. Faifant des expériences fur ces deux diftances, nous devons avoir cette proportion ; le quarré du petit rayon eft au quarré du grand rayon, comme le poids {upérieur eft au poids inférieur : ainfi, pour rétablir la proportion, fuppofons le poids fupérieur de 200 livres que nous réduirons en grains pour {a facilité , nous trouverons le dernier terme qui, comparé avec le fecond moyen , donnera l’augmentarion de pefanteur que doit acqué- tir un corps rapproché de 100 toiles du centre ‘de la cerie. Quarré du petit rayon. |Quarré du grand rayon. Poids fupérieur Poïds inférieur. 20,249/1C0.010,000 : 10.2$0,000,000,000 : : 1,843:200 : 18,432,81 + Cette augmentation de pefanteur de 81 grins, doit être com- penfée par la denfité de l'air, dont la colonne étant augmentée , dot faire perdre une quastité quelconque au poids inférieur. La balance la plus jufte qu’on puifle fe procurer, chargée de 200 livres dans chacun de fes baïlins , ne pourra trébucher que urès-difiicile- ment d’un côté ou d’aurre par l’addinion d’un gros ; car la pietion au point d'appui de la balance devenant uès confidérable , le froc- tement de l’axe augmente à proportion , & demande une plus grande force pour le vaincre. SUR L'HIST. NATURELLE ET LES ARTS. $ Quand on fuppo‘eroit , d’après M. Berthier & S<étareurs, que la pelanteur augmente en raifon directe , des diftances du quarré des dillances , ou même du cube des diftances , ( ce qui eft contraire à la plupart des phénomènes de la nature , entr'autres à celui de l’accé- lérauon dans la chûte des corps ) la différence des poids fera éga- lement appréciable , à caufe des pe ites diftances qu'on peut fe pro- curer. Mais d’où vient donc cer excès de pefanteur qu'ont obfervé MM Berthier & David dans les poids fupérieurs , &K les aurres qui ont tenté les mêmes expériences tant dans les poids fupérieurs qu'inférieurs ? C’eft fûrement quelque accident ou quelques caufes qui n'ont point été apperçues , mais qui font indépendantes de la pefanteur. PROBLÉME A RÉSOUDRE. On a obfervé conftamment dans les mines , entr’autres dans les mines de charbon de Montrelay , mines de plomb de Pont- pean , & autres mines de Breragne , que les eaux & fources fou- terreines fonc plus abondantes & plus fortes la nuit que le jour, c’eft à dire, une quantité quelconque de feaux d’eau tirée pendanc le jour faifant bailler l’eau des fonds d’un ou deux pieds ; la même quantité tirée pendant la nuit , la fera baiïfler au plus de quelques pouces , & même le plus fouvent ne füflira que pour lentretenir à fon niveau. On demande aux Phyfciens les caufes & la théorie de ce phénomène ? ES SC Sd EADENO SIGNE DM MODEL Par M. PARMENTIER , Penfionnaire du Roi, Maëre Apothi- caire de Paris , Membre de l Académie Royale des Sciences ; Belles- Lettres & Arts de Rouen , &c. EL ANTAGE que j'ai en de faire connoître en France les diffé- rens travaux de M. Model , les bontés particulières dont il m’ho- noroit , leftime & lamitié qu'il m’a confervées jufqu'au dernier inftanc de fa vie , font des moufs aflez puiflans pour m'impofer le trifte devoir d’annoncer la perte que la Pharmacie vient de faire de 1775. JUILLET. 6 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, ce favanc Chymifte. Pourrions nous en mème-tems nous difpenfer de femer quelques fleurs fur fa tombe ? Pourrions-nous refufer de payer à fa mémoire le jufte tribut de reconnoifiance que nous lut devons , à tant de titres ? Pourtions nous enfin ne pas dépofer nos véritables regrets dans un ouvrage, où plus d'une fois fon nom a été cité avec éloge , & qui va encore publier le dernier fruit de fes veilles. Jean-Georges Model , Confeiller de la Cour , premier Apothi- caire de Sa Majefté l'Impératrice de Ruflie , Chef des Pharmacies Rules, Affeffeur du Collége de Médecine , Membre de l’Académie Impériale des Sciences de Pétersbourg , & de la Société Economique de la mème ville , de l'Académie Eleétorale de Bavière ; & de celle de Harlem, naquit à Neuftadt-fur l’Aifch en 1711 , d’une famille honnête, qui ne négligea rien pour fon éducation. La pureté & l’é- légance de fa larinité , l’érudition agréable répandue dans fes écrits, l'époque brillante de (on début dans la carrière pénible de la Chy- mie ; toutes ces circonftances en un mot font préfumer que le cours otdinaire de fes études finit de bonne heure, & avec beaucoup de diftinction. Une inclination naturelle pour la Pharmacie, détermina M. Model à embraffer cette profeflion; mais voyant d'un côté les connoiffances étendues qu’elle exigeoir, & de l’autre l'utilité réelle dont elle étoic au genre humain, 1l fentit que pour l'exercer d’une manière éclairée & avantageufe à fes concitoyens , il falloit nécefflairement aller l'étu- dier dans quelque grande ville. Obligé en conféquence de quitter la maifon paternelle , & de s’éloigner de parens qui le chérifloient , il parcoarut d’abord les Provinces d'Allemagne les plus voifines de la fienne, & vint enfuite à Nuremberg , où 1l féjourna pendant plu- fieurs années. Le delr exceflif de s'inftruire le conduifit comme par inftinét chez les plus fameux Apothicaires de cette Capitale du Duché de Wirremberg. Ceux-ci intéreflés à la gloire & aux progrès de leur art, dans lequel ils étoient diftingues , s’apperçurent bientôt que leur jeune élève étoic deftiné à jouer un rôle fur la Scène Chy- mique. Ils ne le perdirent pas de vue, & cherchèrent à développer fes talens naïffans , en lui fourniffant tous les moyens poflibles d'ac- quérir des lumières dans l’une & l’autre Pharmacie. Le tems en effet à prouvé que leurs conjectures étoient fondées , & que leurs foins ne furent ni infruétueux, ni oubliés de la part de celui qui en avoit été l’objet : car l’affe@ion & l’attachement de M. Model envers fes maîtres eftimables & généreux durèrent autant que fa vie , & lorqu'un tendre fouvenir retraçoir à fon cœur recon- noiffant l’image des obligations infinies qu'il leur avoir , il fe laifloit toujours entraîner à la douce impulfion de la gratitude la SUR PHIST. NATURELLE ET LES ARTS. 7 plus marquée : délicieufe jouiffance pour une ame fenfible & honnète qui pofsède cette qualité fi précieufe , & malheureufement fi rare, celle d'apprécier & de reconnoître la valeur du bienfait ! Né avec des difpoltions très-heureufes, & une ardeur fingulière pour l’érude , M. Model ne tarda pas à enrichir les Journaux de fes recherches & de fes obfervations. Le commerce littéraire de Nu- remberg , cetre feuille hebdomadaire autrefois fi renommée par la multitude des découverres importantes en tout genre qu’elle ren- fermoir , fur le recueil qu’il adopta de préférence pour publier fes premiers effais ; & il faut convenir que fes premiers eflais furent des coups de maître : armé de l’expérience , il attaqua d’abo d , & combattit avec fuccès des erreurs d'autant plus difhciles à détruire qu’elles éroient accrédirées par de grands hommes ; enfuite , il ofa hafarder une opinion fur la primordialité des acides minéraux ; que , 1 démontra l'inutilité & l'abus des rectifications employées pour es huiles animales : enfin, il propofa une théorie nouvelle & ingé- nieufe , concernant la formation des eaux minérales. En falloir-il davantage pour donner de fes talens l’idée la plus avanrageule , & faire delirer qu'il continuât de les cultiver ? Ù A peine M. Mod | avoit-il atteint 21 ans, qu'il s’étoit déja fai une réparation ; fon nom qui remplifoit route l'Allemagne, parvine jufqu’en Ruflie; dans ce vafte Empire où lon a un foin particulier de raffembler les Sciences de toutes parts. Plufieurs de nos Acadé- miciens François dont les noms feront immortels dans les Marhé- mariques , furent appellés pour les y faire connoître & les répandre. La Chymie & la Pharmacie demandoient également un Apôtre, & Je choix romba fur M. Model. On fair que Pierre - le- Grand , ce Prince étonnant qui eur le courage de virer fes peuples de la bar- barie , & d'introduire chez eux les Sciences & les Arts , avoit re- commandé à Catherine , qu’il lailloit fur le trône, de proréger les favans étrangers, & de les fixer dans fes Etats par la confidération & les récompenfes. Il faut avouer que fes intentions ont été tou- jours la bouflole qui dirige encore aujourd’hui fes auguftes fuccef- feurs. L'amour de la patrie empêcha M. Model de fe rendre aufli tôt aux vœux de l’Impératrice. Également indifférent pour les honneurs & pour la fortune , avide feulemencr de connotilances , 1l ne vou- loic qu’en acquérir , & fa paflion pour la Chymie lemporta. il fut nominé prefqu’en arrivant à Pérersbourg , Apothicaire- Major de PAmirauté : rien n’éroit plus convenable à fon penchant & a fon mérire qu’une place qui lui donnoit occafion de s’inftruire & d'inf- truire les autres. Le befoin d'éclairer l.s Elèves confiés à fes foins, & qu'il traitoit comme fes enfans , lui, parut indifpenfable , & 1l 1775. JUILLET. 8 OBSERVATIONS SUR L4 PHYSIQUE, fit des cours. La netreté de fes leçons, & l'envie qu’il infpiroit d'apprendre ce qu'il démontroir, atuirërenst une foule d'étrangers de toutes les parties de la Rullie’, pour avoir le plaifir de l'écourer. Jamais on ne l’entendit faire de réclamarion en faveur de fon opi- nion ou de fes difcours. {1 communiquoit fans peine fes découvertes & fes vues , au hafard de fe les voir enlever, parce qu'il defroit plas qu’elles fervillent à l'avancement & à la perfection de la fcience ; qu'à fa progre gloire : enfin, 1l faifoir part de fes connoiffances ; comme le dir l'ingénieux Fontenelle, en parlant de M. de Caflini, non pour les étaler, mais fenlement pour en faire parc. Dans le D'fcours préliminaire à la rête des récréarions Phyfiques, Economiques & Chymiques de M. Model , j'ai dit, en parlant des qualités elfentielles qu'il feroit à fouhaiter que poffédaifent rous ceux qui fe dévouenr à l’enfeignemenr public , que notre illuftre Profef- feur n'avoir jamais avili ni dégradé cette belle & noble fonétion par des perfonnalités indécentes , où des termes injurieux envers qui que ce foit ; qu'il connoiffoic trop bien le prix du tems pour em- ployer celui confacré à linftruétion à faire rire , ou à indifpofer l'afemblée qui l'écouroit , en infulrant à fes rivaux , ou en dépri- mant fes confrères ; que quand il difcutoit l'opinion d'autrui , 1l y mettoit tant de décence , de policelfe & dégards , que ceux qui étoient dans l'erreur n’avoient point à rougir d'etre décrompés par un homme aufli jufte, & auf éclairé ; enfin, pour abréger , que bien loin d’avoir la prétention de dépouiller ceux qui couroient la mème carrière, du mérite de leurs recherches, & de la gloire de leurs dé- couvertes , il les encourageoit au contraire en Aattant l'amour-propte, & les éclairant de fes confeils : j'ajourerai ici, puifque cer homme vertueux n’eft plus, que s’il oublioit de parler de lui, il n’oublioie jamais de parler des autres , & que fon zèle ardent à aider de fes lumières, de fon crédit & de fa fortune les Erudians dans lefqnels il découvroit une certaine aptitude , concourut autant à peupler la Ruflie d’Artiftes éclairés, que l’occafon de fes cours. L’Impératrice , pour donner à M. Model des témoignages authenti- ques de fa fatisfaction , le rapprocha de fa per'onne, en le nommant fon premier Apothicaire & Directeur. Général de la Pharmacie principale de fon Empire. On peut affurer avec vérité que jamais faveur ne fur plus méritée, & peut-être moins follicirée , car M. Model ne favoit faire fa cour que par fes talens, & sl parvint à rour, ce fut toujours par des moyens dont la vertu neut jamais à rougir, Catherine aduellement fur le tidne de la Rutlie , la Prorectrice des Sciences & des Arts, confirma M. Model dans fes places, en lui accordant la même confiance dont l’avoit honoré Elifaberh Pétrowna, fa rance , & le combla tant qu'il vécut d’honneurs & de bienfaits. La ER SPR L'HIST. NATURELLE ET LES ARTS. La diceion de la Pharmacie principale de Pérersbourg entraîne après elle des déraïls immenfes & dont on n’a aucune idée. C’eft-là ue fe préparent aux frais de la Cour, fous les yeux d’un chef éclairé, par des Artiftes inftruits, rous les médicamens galéniques & chymiques , pour fournir non-feulement les Troupes de terre & de mer, mais encore Les Hopiraux & les différentes Pharmacies de l'Empire. Cependant on a le plus grand foin de n’en confier le dépôt & la diftribution qu’à des Apothicaires confommés qui fe font livrés long-tems à l’étude de leur profeffion. Pourquoi donc certe branche elfentielle de la Médecine eft elle en France le domaine de tout le monde, & fouffre - t-on que des gens fans étude quelconque exercent un art falutaire qui , entte des mains ignorantes ou cu- pides, devient bientôt un art perfide & meurtrier ? Pourroit - on s'empêcher de frémic, en réfléchiffanc férieu’ement fur les maux compliqués , les morts précipitées, & les infirmités épouvantables qui doivent leur origine à cet abus dangereux de préparer au ha- fard , d'adminiftrer aveuglément aux malades, & de débiter fans fcrupule au Public des remèdes dont on ne connoît pas même la nature des fubitances premières qui entrent dans leur compofition ! Il eff certain que la mauvaife préparation des drogues eft un fléau aufi redoutable & aufli deftruéteur que les maladies contre lefqüelles on les emploie pour les combattre. Qui pourra difconvenir que c’eft du choix des médicamens & de la manière éclairée dont ils fonc faits, que dépendent en partie la nullité, le danger ou l'efficacité des fecours que la Médecine adminiftre. Quel eft le Médecin infe truit qui, attaché à fa profeffion & à fes malades, fera tranquille lorfqu'il faura que celui chez lequel on porte fa formule n’a fait aucune étude des règles qu’il invoque pour fon exécution. I eft bien étonnant fans doure que de fimples Marchands , non- contens d’avoir envahi rous les commerces , prétendent encore con- fondre les opérations délicates & périlleufes de la Pharmacie avec celles des différens ouvriers dont ils vendent & colporrent les pro- duits. Croira &-on bien qu'il y ait eu des hommes affez téméraires pour vouloir, au mépris de la sûreté de l’art de guerir, & contre toute équité , qu'on autorifât les Epiciers à faire la Pharmacie con- curremment avec les Apothicaires, fous le prétexte fpécieux des effets d’une liberté illimitée , comme fi un état qu'on n’acquiert que par des études & du tems, n’avoit pas été refpeété par les plus zélés Adverfaires des priviléges excluffs ; comme fi ce qui concerne la fanté & la vie des Citoyens pouvoit jamais devenir l’objet de cette liberté fi défirable, & qu'il eft dans les vues patriotiques d’un Miniftre fage & éclairé de rendre à l'induftrie & au commerce ? Mal- Tome VI, Part. II, 1775. NUTLLET,B 10 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, heur à ces ames dures, infenfibles & mercenaires qui refpectent aflez peu l'humanité, pour n'être pas jaloufes de fon bonheur & de fes droits. Le titre d’Apothicaire fuppofe toujours l'idée d’un homme inf truit , autrement que ne l'eft & ne doit l'être un Commerçant ow un Artifan. La Chymie eft cultivée pat les Pharmaciens , & perfonne ne difconvienr que d'un bout à l’autre de | Europe , les plus grands Chymiftes commencèrent par être Aporthicaires ; & pour nous rap- procher de la Capitale , tout ce que Paris contient de Chymiftes , c'eft à leurs lecons qu'ils doivent leurs conotffances dans certe partie de la Phyfque. Ce font eux qui ont follicité & obtenu lé- tabliflement de la plupart des Liboratoires où l’on enfeigne publi- quement la Chymie dans les plus belles Capitales du monde. Les: premiers Ouvrages élémentaires de cette Science , les meilleures Phar- macopées , ont pouf auteurs des Aporchicaires : enfin, ceux d’entreux qui. ont eu le tems de cultiver les Sciences, fe trouvent dans les liftes des Sociétés Académiques qui, en fe les aflociant & en cou- ronnant leurs travaux, fonc à la fuis l'éloge des Pharmaciens & de leur profeflion : & l'on prétendroit qu'un Art au fuccès duquel l'humanité a l'inrérèc le plus direct , für abandonné à des gens qui, fe jouant de la fanté & de la confiance des peuples , ne crai- gnent pas de l'exercer impunément, & avec d'autant plus de hardieffle qu'ils l'ignorent entièrement ! L'on prétendroit encore que les Membres d’un Corps d’Aruftes qui a , dans tous les tems , fourni des hommes célèbres, jaloux de leur répuration , & dont les ouvrages ont fait époque dans les Sciences, füc aflimilé avec une Communauté de Marchands qui , uniquement livrée au commerce & à fa fpéculation, ne fe font illuftrés que par la fortune qui les a toujours favorifés ! On penfe bien différemment en Allemagne & en Ruflie, où le nombre des Pharmacies eft li- mité pour chaque Ville, & les Phatmaciens extrèmement confidé- rés. 11 y a tout lieu d’efpérer que fous un Prince occupé du, bon- heur de fes Sujers & de leur confervation , le Gouvernement fage & bienfaifant prendra inceffamment les melures les plus convenables: pour arrêter le cours de ces excès. Je prie qu'on me pardonne ces réflexions ; je me crois d’autant plus en droit de les faire, que je n’exerce aucune des trois parties importantes de l’art de guérir. Les caufes de nos maladies & de nos infirmités fout déja aflez multi- pliées, pour qu'il foit pernus à ceux dépouillés de’ tout intérêt per- fonnel , de s’éleyer avec force contre l'ignorance & la cupidité qui les multiplient encore davantage. Les places que M. Model avoit à remplir, l’afujettiffoient à des obligations, très- nombreufes. Mais tour ce qu'elles lui laiffoient de < SUR L'HIST. NATURELLE ET LES ARTS. loifir, tour ce qu'il pouvoir dérober à fon fommeil, 1l le donnoic à la Chymie : enfin, 11 lui abandonnoit les momens qu'il avoit pour refpirer ; héureux pour cette Science s'il eût eu la liberté de s’y li- vrer tour entier. $es occupations continuelles ne l'empêchèrent cè- pendant pas de publier en 1762 beaucoup de Ditférrations qu'il réunit fous le titre imodefte de Récréarions. Elles éroient en effec le fruit de fes délaffemens , & rién ne prouve mieux que fes dé- Jafèmens furent un vrai travail. Après avoir traité les queftions les plus importantes de la Phi- fique, M. Model dirigea fes recherches vers un but moins brillant, mais beaucoup plus utile; car telle eft l'érendue de la Chymie , qu'elle fe porte fur tous les objets. Il appliqua les principes de cette fcience à pénécrer ,à dévoiler les fecrers de l'économie de la Nature ; d'abord il conftata fa falubrité & l'efficacité de plufeurs fubitances alimentai- tes, donc il décermina l’ufage : il analyÿfa & difeuta enfuite la mule- tude d'ouvrages & d'opinions concernant le feigle ergoré, fit difpa- roître fans retour les alarmes que le préjugé avoit cherche à infpi- rer fur les effets prétendus ‘pernicieux de ce grain diorme , ‘én le difculpant de toutes les déclatorts formées contre les dangers imagi- naires dont on le croyoit la fource ; puis ils’empréffa de répandre parmi le peuple desmoyens affurés pour décéler les fraudes paniflables employées fi fouvent parles Marchands de vin & les Vendeurs d'épices pour fophifti- quer lesboiffons & les Affaiffonnemens , en indiquant des remèdes poùr prévenir lears effets mortels & nuifibles. Après cela , ilinvita le Public, par des avis faluraires, à être plus ‘circonfpect , relativement à l'em- ploi des vailleaux de méral dans l'ufige économique, en recom- mandant de lés tenir fecs, propres, & de n'y point laifler féjour- ner les fubitances deftinées à notre noufriture. Il fic voir combien les manipulations ufrées & pratiquées dans le Nord pour purifier & évaporer le fel marin, éroient défeétueufes , & il rectifia les pro- cédés de cette opération. IL décrivit, dans une Differtarion très-fa- vante, tous les détails touchant la diftillation des eaux- de -vie de grains, propofa des réformés Économiques dans la vue de rendre cette liqueur plus parfaite : il éxamina tous les fpécifiques nouveaux pompéüfement vantés par les hommes à fecrer, il pourfuivit le Chatlätanifie , aufli entreprenanc à Pétérsbourg qu'à Paris : enfin, M. Model ft obrénir à la Chÿmie un nouveau degré de confidé- ‘ration , auprès de ceux fur-tout , qui n'eftiment les Sciences que pro- portiônnéllement aux avantages qu'elles procurent à la fociéré. Au imiliea de cet elfaim d'êtres oififs & de préfomptueux igno- tans fort habiles à déprifer les travaux dont ils font incapables , &c en quelque forte indignes, s’il s'élève de tems en tems des hommes 1775. JUILLET, "Br 2 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, affez généreux pour braver l'injuftice & l'ingratitude, & pour con- facrer leur loifir & leurs veilles à fervir leurs femblables , mème malgré eux; on croiroit que la jaloufie & l'envie devroient les ref pecter, mais ces deux tyrans du vrai mérite n'épargnent perfonne. Ainl , quoique les travaux de M. Model fuffent continuellement marqués au fceau du favoir , de l'humanité & du patriotifme, quoi- que fa fortune & fes dignités ne fuffent point l'ouvrage de l'intri- gue & de la cabale ; quoique le plaifir d'être utile, plaifir fi puif- Æanc fur un bon cœur , füt toujours la feule gloire capable de le flatter , on l’attaqua cependant avec aigreur & fans ménagement ; mais il répondit toujours avec tant de franchife , de modération , de vérité, que les Cenfeurs les plus difpofés à répandre le fiel & lamertume de la fatyre , s’adouciffoient en fa faveur, confidérant qu'un Auteur auffi plein de candeur & de politeife n’avoit befoin que d’être averti & non critiqué : tel eft l'effet impofant de la vertu fur tous les hom- mes, que les intriguans , méchans, &fripons, lui rendent rot ou tard Fhommage qui lui eft dû. M. Model, fi digne par fon favoir, fes talens & fes fervices, des bienfaits de fa Souveraine , s’en rendit encore plus digne pat l'emploi qu'il en faifoir. Il avoit un Laboratoire ouvert aux Etu- dians & à tous les Amateurs, dans lequel il n'épargnoïit rien & ne refufoit rien ;, foit pour inftruire ou fatisfaire la curiofité , foit pour fervir ou foulager l'infortuné fouffrant. La juftefle & la folidité de fon efprit fe montroient dans fes converfations les plus fami- lières ; timide à conjectnrer , il ne décidoit jamais ; officieux, affa- ble, défintérellé , il avoit cette ingénuiré & cette modeftie fi com- munes dans les grands hommes : avec des qualités aufli eftimables, comment M. Model ne fe feroit-il pas fait des amis! Il en avoit un crès-grand nombre dans tous les ordres. Les Chymiftes les plus recommandables d'Allemagne étoient en correfpondance avec lui : il prit un jour la défenfe du célèbre Margraf, fon confrère & fon ami , & repoufla viétorieufement fes dérraéteurs. Les Seigneurs Rulles, qui avoient du goût pour la Chymie , s'étoient empreflés d’êrre en liaifon avec un homme qui la poffédoit à un fi haut de- gré : le Grand-Duc lui fit l'honneur de le venir voir plufieurs fois , & daigna s'entretenir avec lui fur les Sciences en général. Le Comte de Beftuchef lui confia, fous le bon plaifir de la Czarine , la recette de quelques remèdes efficaces éprouvés contre des maladies rebelles ; enfin ce Chymifte refpectable & laborieux , aimé & eftimé univer- fellement, mourut le 22 Mars dans fa foixante - quatrième année. Deux heures avant ce coup fatal, l’efpoir de recevoir. bientôt la traduction de fes Œuvres, le réveilloit & le ranimoit encore ; SUR L'HIST. NATURELLE ET LES ARTS. 1; mais malgré tous mes foins , je nai pas pu la lui faire parvenir à tems, je n'ai pu lui apprendre le jugement favorable qu'en avoient porté nos meilleurs Chymiftes , & je fuis privé de fes Obfervations. Il étoit déjà languiflant lorfqu’il publia, à la fin de l’année der- nière , fon Mémoire fur la préfence de la félénire dans la rhubarbe, dont on va lire la traduction intéreffante qu'en donne M. Demoret le fils. Une découverte aufli fingulière , échappée à tant de perfon- nes, fous les yeux defquels cette racine eft perpétuellement , fuffi- roit feule pour démontrer combien M. Model étoit bon obferva- teur , sil ne nous en avoit donné les plus fortes preuves dans une infinité d’occalons. Il configna dans les Mémoires de l’Aca- démie de Harlem en 1773 , une Differtation dans laquelle il dé- montra que la plus grande partie de cetté moulle , ou production marine défignée ordinairement fous le nom de coraline , étoit une terre calcaire fubrile. Peur- être que M. l'Abbé Roubaud , cet Au- teur ineftimable , qui a tant contribué à étendre la célébrité de M. Model chez nos Compatriotes, par la voie de fes Feuilles & de fon Journal, Ouvrage regardé avec raifon comme un des plus précieux dépôrs que nous ayons en France de connoiflances écono- miques, voudra bien nous procurer cette Diflertation intéreffanre pour les Chymiftes & les Naturaliftes, & nous nous emprefferons de la faire connoître. On fait combien les Etrangers ont de vénération pour les Savans. Is les honorent mème après leur mort. Le corps du grand Newton fut porté avec pompe dans l'Abbaye de Weftminiter. L'Impératrice Reine, cette Princefle qui fait avec raifon l'admiration de l’'Uni- vers, vient de rendre, à la mémoire du célèbre Wan Swieten , fon Médecin, les plus grands honneurs : les obfèques de M. Model furent faires avec un cérémonial remarquable. Les Grands de l’Em- pire accompagnèrent fon convoi, ainfi que les Académiciens , les Profeffeurs & les Docteurs. S. A. S. la Princeffe de Curlande, le Prince Oronsbeskoy , Chambellan, le Sénateur Ulfhakoff, M. de Malifiono , Général d’Artillerie, qui l'appelloient tous, pendant fa vie, leur ami, & leur frere arrosèrent fes cendres de pese fin- cères & rouchantes ; & lorfque j'eus l'honneur d'aller faire part de la mort de M. Model à M. le Prince de Baratinski, Miniftre plé- nipotentiaire de la Cour de Rufie, & à M. le Comte de Stroga- noff, ces deux Seigneurs, connus par leur goût pour les Sciences & les Lettres, me témoignèrent à ce fujer tous leurs regrets. Le monde favant perd en M. Model un grand Chymifte ; la Pharmacie un de fes ornemens ; le Collége deMédecine un Affef- feur très-éclairé; l’Académie Impériale des Sciences & toutes les Compagnies Littéraires auxquelles il appartenoit, un Membre & 3775 -0 MULIPEL'ET;, 14 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, un colaborateur infatigäble ; la Société, un citoyen aimable, hon- nète & folide ; l'humanité un enthoufiafte & un protecteur ; & moi enfin , un maître & un ami. La poltérité placera le nom de M. Model à ébré de ceux qui feblent n'avoir vécu que pour le bonheur de leurs feinblables. On verra dans l’hiftoire de la Chymie , que les hommes qui posèrent les premiers fondemens de cette Science utile , furent des Aporthicaires , & que fi Gmelin , dansle ford de la Mofcovie , M. Model en Ruflie , Glaubert en Allemagne , Nicolas Lémery en France, Poli en Italie, firent goûter & aimer la Chymie , leurs facceffeuts, dans toutes ces contrées , font aujourd'hui fort nombreux. M. Model étoit d'une grande taille. Il avoir une phyfionomiè heureufe , où fe peignoiïent les qualités de fon cœur. Il étoit fobre, libéral , d’un comimerce facile & d’une probité parfaite. Il faifoit des extraits de tout ce qu'il lifoit, & ÿ ajoutoit fes réflexions ; ce qui fait croire à M. Sanchès, favant Médecin Portugais, avec qui il fut en liaifon pendant fon féjour à Pétersbourg ; qu'il doit avoit laifé des manufcrits précieux. Puiffent ces manufcrits être recueillis foigneufement par des mains qui en connoiffent le prix & les ren- dent publics ; car fuivant l'expreflion d'un excellent Orateur , c’eft prolonger la vie des grands hommes que de pourfuivre dignement leurs entreprifes. Fi: ie 00 ME à Me AU: 2 Sur la découverte de la Sélénite dans la Rhubarbe; Traduit de l Allemand de M. MoDEL, par M. DEMORET, fils, Apothicaire. D, l'analyfe que j'ai déja faite du fel de Perfe, & particuliè- sement de la coraline, inférée dans la quatorzième partie de la Collection de Harlem 1773, jai montré, d’après plufieurs expé- riences que la plus grande partie de cette fubftance qu'on appelle corraline , (ou mufèus corallin } , étoit une terre fubrile calcaire ; & comme depuis long-tems j'ai regardé cette terre trouvée dans plufeurs corps comme un principe particulier , ilne faut pas s’é- tonner fi dans le dernier paragraphe de l'ouvrage ci-deflus men- tionné, j'ai terminé par ces mots : » D'où vient - donc à préfent » certe terre calcaire? Où chercher fa matière conftituante ? D'où SUR L'HIST. NATURELLE ET LES ARTS. 15 » faire provenir fon origine. Cette terre feroir-elle par hafard la n bafe de tous les fels alkalins ? ou bien feroit-ce le fel qui conf- »titue la chaux«? Ce raifonnement en effet étoit encore appuyé fur l'idée qu'on m'avoit fait naître de la découverte d’un fel alkali naturel que j'avois trouvé dans le fel de Perfe; phénomène dont j'étois convaincu , ou qui me paroïiffoit au-moins vraifemblable , dans la perfuañon où j'étois qu'il pouvoit également fe trouver une terre alkaline fubrile dans le fel qui auroit pu avoir les mé- mes propriétés de l'alkali, foir fixe, foit volauil , & fur-rour à préfent que nous fommes affurés que la nature produit du fel am- moniac cryftallifé fans l’aide du feu, & comme il eft probable, feulement par le changement de la partie alkaline ; comme auf que les perites parties rerreufes les plus groflières qui s'y trouvenr, deviennent peut - être le principe de la rerre de Ja chaux ; d’autant plus que l’on rencontre cette mème terre dans routes les cendres des végéraux. 2. Les expériences répétées que j'ai faires fur luva-urf, le quin- quina , & fur d’autres aftringens , ou différentes fubftances , dites corroborantes , détaillées au long dans ma, deuxième lettre adreffée à un ami au fujet des Gourtes de Beftucheff, ( Tinéura - Tonica Beft. Lamothe Dit). en lui faifant part des travaux que javois entrepris en différentes fois fur l'argile & fur la terre de l’alun; toutes ces expériences mulripliées , dis-je, m'ont fait perfifter dans l'idée que je m'érois formée , que cette terre alkaline, principe du fel, donnoit naullance à beaucoup d’autres efpèces de fels, de pierres & de différentes terres. 3. Mais que penfer en voyant le favant Margraff nous démontrer l'exiftence d’une pareille fubftance fubtile, alkaline dans les raifins , & qu'avec le rems , elle fe féparoit du vin pour fe joindre au tartre avec une terre de chaux plus groflière , & que même il s’y trouvoit encore une félénite de la nature du gipfe , comme cela a été prouvé évidemment par Retzius dans la trente-deuxième partie des Collec- tions Savantés de Suèle 1769 , ainfi que Gaubius dans fes adver- Jariis a dit avoir trouvé de la félénité dans l'eau de mer; j'en ai trouvé moi même dans des eaux minérales. 4. Les différentes obfervations dont j'ai à faire part fur la félé- nite trouvée dans la rhubarbe, & qui eft une terre à chaux ana- logue au gipfe , mertront peut-être mes Leéteurs cans le cas de me faire cette objection ; comment 1l fe peur que depuis li long-rems que je connois cette fubftance , je n’ai point encore obferve ce pro- duit? J'avouerai que non feulement une, mais mme plufieurs fois, j'y ai remarqué de mes propres yeux , ainfi qu’à l'aide du microf- cope, des petites taches blanches ; mais jé ne me ferois, jamais ima- 1775. JUILLET. 4 16 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, giné qu'il pût exifter une auf grande quantité de félénire dans l'efpèce de rhubarbe , que tout le monde regarde comme la meil- leure ; d’ailleurs, les deux expériences détaillées au paragraphe cine quième concernant la fubftance faline crouvée dans les matières roborantes & aftringentes , m'’avoienc laiffé dans une fécuriré qui me rendoit moins attentif; combien de fois n’a-t-on pas vu les plus grandes découvertes ne dépendre que du fimple hafard. + Dans une circonftance , ou non-feulement relativement à la Chy- mie , mais même pour ma fanté, je me trouvai dans le cas d'em- ployer de la crème de tartre, il arriva que l’on piloit dans la prin- cipale Pharmacie de cette Ville, une certaine quantité de très belle thubarbe , (de laquelle poudre une partie qui étoit deftinée à un remède particulier , fut délayée dans de l'eau pure, pour être enfuite dé- cantée & verfée dans un vafe), l’Elève s’apperçut qu'il y avoit au fond du mortier une matière blanche , groilière , approchante du fable , il en fut étonné, & s’imagina que quelqu'un de propos dé- libéré auroit pu fubftituer du fable à un certain poids de rhubarbe qu'il auroit enlevé ; il me fit part de fon inquiétude; je lui demandai alors de cette prétendue matière fabloneufe ;"aufli-rôc que j'en eus dans la inain , l'idée que j’avois de la crème de rartre & de la félénite, fit difliper lé foupçon du fable , cependant , je mis un peu de cette poudre dans un petit mortier d’agathe bien poli, je la rendis plus fine aflez aifément , & fans que le mortier en parût rayé ; alors je remarquai , à l’aide du microfcope , que Les perites parties de cette poudre étoient effectivement de différentes figures, mais elles avoient été déja broyées par le pilon. Je l'ai regardée conime une terre calcaire jufqu'à ce que l'expérience fuivante m'ait prouvé le contraire. : 6. Je fis réduire quatre livres de rhubarbe choifie qui devoit fervir à faire l’extrait aqueux par trituration, en une poudre plus fine qu'il ne la falloit pour ce travail , après l'avoir délayée dans de l'eau, je la laiffai nager, par-là, j'obrins une terre indiffoluble dans l'eau, pareille à celle dont j'ai déja parlé , qui fe précipita au fond du vafe , & que je lavai plufeurs ee. avec de l’eau bien pure; après avoir fair deflécher à une chaleur très - douce, le produit fut de fix onces. 7. Je mis fix gros de cette terre mentionnée ci-deffus dans un petit creufet neuf, mêlé avec de la poudre de charbon, le rout bien lutté ; après une heure de feu je pouffai la calcination à une chaleur plus violente; il s’exhala pendant cetre opération une vé- ritable odeur de foufre , & quand la mafle fur refroidie je la fis diffoudre dans de leau chaude ; après l'avoir filtrée je jettai dans la liqueur du vinaigre diftillé, j’obrins un véritable magiftère de foufre | pendant SURILHIST NATURELLE ET: LES'ARTS. 1:17 pendant la précipitation duquel il fe répandit , comme à l'ordinaire, une odeur d'œufs couvés. 8. Je fis un mélange de trois gros de cette terre félénireufe avec neuf pros d’alkali fixe de tarue très- pur, je le mis dans un vafe de verre avec fix onces d’eau pour Île laïffer digérer | je conduifs enfuite la liqueur jufqu'au moment de l’ébullition , je la décantai la plus chaude poflible pour la filtrer , & j'en obrins par une évaporation convenable , des cryftaux de tartre vitriolé très-purs. 9. La même quantité de cette verre félénireufe méèlée avec l'al- kali minéral , ou fel de foude , à la dofe défignée au paragraphe précédent , donna du fel de Glauber. 10. Une once de cette félénite mife dans un petit creufet bien fermé, chauffé doucement , & entretenu rouge pendant une demi- heure , donna une mafle qui, parfaitement refroidie, n’a pefé que deux gros fept grains ; elle étoit fpongieufe, blanchâtre , & de na- ture calcaire ; elle fe diffolvoit pet/dans l'acide vitriolique , mais entièrement dans les acides nitreux & marins fans lailler le moindre dépôr. #1. Mais foupconnant que plus la rhubarbe éroit vieille, plus elle contenoit de félénice , ( car j'avois obfervé qu'avec le rems on y remarquoit davantage des cryftaux blancs), 1l me tomba alors entre les mains un morceau de très-bonne rhubarbe que j'avois confervée quelques années ; il pefoit deux onces cinq gros ; je m'en fervis pour mon expérience , je la fis piler & la laiffai macérer; j'en obrins une once de félénite , ( déduétion faite de la poudre la plus fubrile qu’il eft impoflible de féparer de la rhubarbe ), ce qui doit s'entendre également de ce qui en a été dir dans le paragraphe fixième. 12. Je me reflouviens à ce fujer d’une autre expérience qui ap- partient à cette analyfe : il y a quelques années qu'on envoya par ordre du College du Commerce une certaine quantité de rhu- barbe de Chine , appellée rhubarbe pierreufe ; elle avoit à l'extérieur un œil brun-foncé, elle étoit dure , ferme & pefante , en un mor la qualité en étoit fort mauvaife. Après l'avoir brûlée , on remarqua que les cendres éroient très-blanches & approchantes de la chaux ; celui qui éroit chargé de l'infpeétion de ce travail , envoya par curiofité un peu de ces cendres à la Pharmacie Impériale , elles étoienc fenfiblement alkalines au goût comme les expériences fuivantes vont le faire voir. 13. Où leffiva pluñeurs fois, avec de l’eau bouillante, fix onces des cendres dont je viens de parler; après la première lotion, elles parurent approcher de la couleur du gipfe , la liqueur décantée fikrée paroifloit jaunâtre , avoit un goût alkalin , faifoit un peu d’effervefcence avec les acides , & donna par l’évaporation du total Tome VI, Part, II. 1775. J'UILPEMEeC 18 OBSERVATIONS SUR LA PHFSIQUE, vingt- quatre grains d’un fel alkali très-fec , mais donc les petits cryftaux étoient un peu longs. RUE 14. L’acide vitriolique a diffout peu de ces cendres, & il en eft réfulté des petits cryftaux qui fe remarquoient à peine. 15. Les acides nitreux & marins, au contraire , ont diffout ces mêmes cendres entiérement & fans laifer rien précipiter , les dif- folutions confervoient la limpidité de l’eau ; la plus douce évapo- ration a laillé à peine appercevoir de véritables cryftaux , ce qui donnoit lieu de préfumer qu’elles contenoient peu d’alkali végétal ; mais ce qui a refté de liqueur éroit à peu près comme une gelée qui, après l'exficcation à une chaleur plus forte, a produit une maffe blanche & fans figure particulière. 16. Il eft à propos d'interpréter ici la fignification du mot de rhu- barbe de Mofcovie. Tout le monde fait que dans la plupart des anciennes matières médicales , la rhubarbe dire de Mofcovie , c’eft- à dire , celle qui eft apportée de Chine par la Ruflie, pafle pour la plus mauvaife ; mais à-préfenr nous avons entre les mains un Ou- vrage compofé par feu Jean-George Gmelin , Profeffeur & Docteur, homme célèbre qui , à fon retour de Pérersbourg à Tubingen , fa patrie, a prouvé dans une excellente differtarion qu’il a donnée à l'ouverture de fon Cours , fous le vitre , Rhabarbarum Officinale , année 1752, dans laquelle il fait part d'une defcriprion plus exaéte & plus certaine non - feulement de cette plante , mais particulière ment de la bonté & de l'avantage que mérite fur les autres la rhue barbe qui nous vient par la Ruflie ; on trouve aufli dans la feconde édition de l'excellente matière médicale de Cartheufer , imprimée à Francforr-fur-lOder, année 1767, un détail fait par feu M. de Fif- cher , premier Médecin du Prince, qui contient la méthode dont on cultive la rhubarbe dans toute la Ruflie ; on peur ajouter d’au- tant plus de foi à cette dernière, que l’érabliffement, les règlemens, & les prépararifs relatifs au tranfport de la rhubarbe, dépendoienc en grande partie de ce favant ; & je puis dire avec vérité, que depuis cette époque les précautions que l’on prend pour la culrure , la confervation & le choix de cette marchandife , ont été plutôr perfectionnées que négligées , & pour appuyer ce qui a été dir plus baur , on peut certifier que pour qu’il ne pafle de ce pays chez l’é- tranger aucune rhubarbe défectueufe , on a grand foin de la brüler la regardant comme très -inutile. 17. D'après routes mes expériences , j'étois parfaitement convaincu de la préfence de la félénite dans la rhubarbe : mais il s'agifloi de favoir fi elle fe trouvoit exiftante également dans toures les efpèces lorfque l’on tire certe racine de la rerre, ( ce dont je doute encore } ou bien fi elle s’y formoit ou s’y laifloit appercevoir avec le rems SUR L'HIST: NATURELLE ET LES ARTS. :9 par la préfence de la terre de la chaux dans cette fubftance ; c'eft une queftion à laquelle je ne puis fatisfaire avec certitude , d'au- tant plus qu'il faudroit-en avoir des nouvelles plus füres , & que nous manquons d'expériences faites fur les lieux , mais qui proba- blement pourroient être remplacées ici. Comme je defirois en faire un effai fur une quantité de cette rhubarbe cultivée à Pérersbourg , appellée Rhabarbara vera palmata ; j'en ai eu un morceau qui por- toit environ trois pouces d'épaifleur ; comme elle étoit fraîche , elle avoit l'odeur un peu plus pénétrante quoique tirée de la terre de- Pie nn an. Elle purgeoit bien, enfin elle pouvoit être regardée BANDES le monde cusame [a rhubarbe dite de l'Orient ou de Chine. Ce même morceau laiffoit apperceveie sny yeux , ainfi qu'au mi- crofcope , beaucoup de petites parties blanches que l'on ponsrair ra garder comme falines ; cependant , après en avoir pilé & lavé une partie , comme j’en ai fait mention aux paragraphes cinquième & fixième ; il ne paroifloit aucun veftige de félénire , le tout fe dif- folvoit dans l’eau , & quoique l’on vit une terre blanchâtre furna- ger , elle étoit trop légère pour qu'il füt poflible de la féparer de la rhubarbe. 18. Il réfulce naturellement de ce que nous venons de dire, cette queftion : D'où vient primitivement la quantité de cette terre cal- caire ? Se préfente-t-elle comme félénite, ou bien fe forme-t-elle en même-tems que la plante ? 19. Quant à la préfence de la terre calcaire dans les végétaux, mais en plus ou moins grande quantité dans une plante que dans Vautre , 1l n’y a pas à en douter ; car fi nous examinions avec at- tention les cendres de tous les végétaux , nous trouverions prefque dans toutes quelque chofe de calcaire, & particuliérement fuivant qu'elles ont été plus ou moins calcinées. J'avoue qu’en lifant quel- ques defcriprions étrangères fur la potafle de Ruflie, que l’on foup- çonne être mêlangée de beaucoup de chaux , il m'eft fouvent venu à l’idée que la violence du feu qui avoit fervi à fa calcination , pou- voit avoir donné en grande partie origine à certe fubftance calcaire ; mais il faudroit une analyfe plus exacte ou plus fuivie , pour favoir à quoi attribuer le premier principe de cette terre : qu'il me foie permis de dire à ce fujet ma façon de penfer ; & comme elle n’eft autorifée que par des conjeétures , je n'engage perfonne à y ajouter foi. 20. Je me fuis reproché à moi-même , au commencement de cette Differtation , d’avoir été pendant long-temps, porté à croire que la terre faline fur la première bafe de la terre calcaire ; en confé- quence , il m’a paru naturel de penfer que les alkalis , ou fels lexi- viels , pouvoient être exiftans par-tout , mais particuliérement dans 77 RU LIT EST ENCRES 20 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, les plantes, d’autant mieux que, d’après les moyens que M. Mar- graff nous a donnés de l'y reconnoître tout formé , on a adopté, comme chofe démontrée , que le véritable alkali ou fel lexiviel , exiftoit dans les plantes avant l’incinération ; mais il eft effentiel à ce fujer de confulter les traités uriles faits fur cetre matière par M. Brunweifer , Docteur & Phyfcien de la ville de Kellheim, qui - font inférés dans le feprième volume des Collections Académiques de l’Electeur de Bavière. Mon opinion, à l'égard de l’exiftence de l'alkali dans les végéraux , avoit pour fondement la confiance dans laquelle j'érois , que le fel commun , fe décompofant enriéreent, fe dépouilloit en premier lieu de fon 21H ñxe , qui eft propre- ment l’alkali minéral. & 4» celui-ci, paffant par plufieurs canaux où vaioaua , & fouffrant d'ailleurs différens changemens , fe débar- rafloit de plus en plus de fa terre calcaire groflière , qui , deve- nant alors plus fubrile , plus pure, fe rapprochoit ainfi de l’alkali végétal ; car, fuivant toutes les conjeétures , il en eft de ces deux alkalis comme des fels lexiviels trouvés dans les végétaux ; leur dif férence n’elt qu’en raifon de la terre, ou plus fubrile , ou plus grof- fière qu'ils contiennent : alors, la terre calcaire devenue libre, quoi- que reftée dans les plantes, leur fera ou plus intimément incot- porée , ou fera plus métamorphofée, fuivant leur firucture ou leur nature. 21. Mais il refte encore à éclaircir la queftion la plus difficile, favoir d'où vient l'acide vitriolique qui conftitue la félénite dans la rhubarbe ? On voit aifément que cette queftion ne peut être réfoute que par l’oracle ex sripode diälum. » C’eft ainfi que s'exprime le grand Haller : l’efprit humain ne » peur pénétrer dans l'intérieur de la Nature «. Cette fenrence conferve ici toute fa force ; du moins je ne me vanterai pas d’avoir dérobé à la Nature fes fecrets , mais qu'il me foit permis d'annoncer mes conjectures , fans forcer, comme je l'ai déja dir, qui que ce foit à y ajouter foi. E 22. Tous les Chymiltes qui appuient leur théorie fur les prin- cipes de la faine Phyfique, conviennent que plufieurs plantes con- tiennent les trois efpèces d'acides minéraux fous la forme d’un fel moyen, mais cependant que le fel marin s’y rencontre en plus grande quantité. Que ce foit erreur de ma part où non, j'aime encore mieux avouer ici que je ne me rétracke que jufqu'à un certain point de ma première opinion , dont j'ai fait mention , il y a environ quarante ans , dans le commerce litréraire de Nuremberg , qui éroir de croire que l'acide du fel marin pouvoir bien être l'acide uni- verfel , perfuadé fur-tout qu'il étoit celui que l’on regarde comme le plus commun , ou au moins celui qui en approchoit, parce que SUR L'HIST. NATURELLE ET LES ARTS. 21 la plupart du tems on le rencontroir fous cetre forme ; comme par exemple , ce même acide combiné avec un fel alkali de tartre très-pur, produit un tartre vitriolé ; mais de favoir fi l'acide marin ne fe trouve point altéré par les élaborations mulripliées qu’il fubit dans fes différens paffages , érant obligé de fe dépouiller de certai- nes parties qui lui font propres pour conftituer fon acide ; favoir , dis-je, fi ce même acide n'eft pas forcé de fe combiner avec d’autres principes , ce qui doit alors altérer fa nature ; c'eft ce dont je n'ai ja- mais douté, & c'eft même aufli ajourd'hui le” fentiment de plufieurs Chymiftes modernes ; d’ailleurs , où pourroit - on chercher l'origine des diférens fels & de leur acide , fi ce n’étoit dans les change- mens & métamorphofes qui fe font pendant la circulation dans des vaiffeaux particuliers, & qui font propres à chaque plante ? Pourquoi le bois de chène, ainfi que d’autres aftringens , donnent-ils des ap- parences d'acide vitriolique , d’autres plantes du nitre , & la plu- part des produits falins ? C’eft particuliérement ce qui a fervi de fondement à mes conjectures. Premiérement , je crois que le fel marin donne aux végétaux la terre calcaire, & que celle-ci, devenue avec le tems plus atténuée , elle devient plus foluble , ou que peut- être par une augmentation d'acide , elle forme un alkali minéral, comme Gaubius dit en avoir trouvé dans du poivre , adverfar var argument. De pipere ; mais fi ce changement eft porté au point que Ja terre calcaire groflière foit féparée , elle repréfente alors l’alkali végétal, comme on le remarque dans le tartre. Je faifois imprimer cette Differtation lorfque je trouvai , à la vingt-huitième feuille du paragraphe 21 dans le Traité excellent d’une nouvelle Minéralogie de Cronfted , imprimée à Copenhague en 1760, des Obfervations que je ne puis paller fous filence. Le fentiment de l’Auteur femble être différent du mien , ou du moins , il paroît douter qu'un fel puifle réfulter de la chaux , au lieu que je cherche à prouver que la chaux eft le pruduit du fel ; je ferois peut-être de fon avis s’il n'y avoit rien qui n’empêchât de croire que le fel a été plutôt formé que la chaux , & en allez grande quantité pour ne point entrer en comparailon avec elle ; d’ailleurs , fans faire mention des autres opinions , on fait que ce n'eft que peu-à-peu & par couches que la chaux fe forme. Cette obfervation mérite d’être rapportée toute entière , afin que le Lecteur indulgent en puifle porter fon jugement... Remarques fur le 21e paragraphe. » Peut-être y a-t-1l des pierres » à chaux qui renferment l'acide du fel commun en différentes pro- portions qui nous font inconnues ; il eft incroyable combien l’eau de mer contient de chaux ; c'eft même de cette chaux dont les » animaux teltacés fe fervent comme de matériaux pour former leurs » coquilles : il eft poflible que la Narure fe foit ménagé un moyen 1775. JUILLET. Ë ÿ$ » 22 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, » de compofer avec la chaux un alkali minéral, &que, foit la chaux » » foit l'acide du fel marin , fe trouvent mélés à certe fin dans l’eau de » mer, de façon qu’ils contribuent tous lesdeux , par leur combinaifon » mutuelle, à la formation du fel marin ordinaire «. 23. Mais fi je conviens maintenant que le fel commun, contenu dans les plantes , foit fufceprible d’altération & de changement , il s’enfnit naturellement que les acides des fels peuvent également pren- dre une autre nature , & avoir d’autres propriétés: Il y a long-rems que je fuis éloigné de croire que toutes les opérations de la Nature, foit dans la compoñtion ou décompofition des corps naturels, doi- vent fe faire par les moyens que nous fournit la Chymie , ou même par lation du feu : on fe contente feulement de nous expliquer & démontrer les effets particuliers de la force attractive combinatoire dans les végétaux ; mais on nous laiffe ignorer comment il arrive que fur un même terrein , il croifle des plantes falutaires , d’autres vénénenfes ; ne devroit-on pas en chercher la raifon dans la vertu particulière de la matière principe des plantes mêmes , autant que de l’attribuer aux différens vaifleaux qui fervent à leurs fécrétions ? 24. Mais tant que la terre faline , contenue dans les plantes, n'aura pas changé entiérement de nature, elle fera toujours foluble dans les menftrues aqueux, comme on l’a prouvé à l'égard du quin- quina & des autres fubftances aftringentes ; mais fi avec le rems, ou par d'autres circonftances , cette terre perdoit tout-à-faic fa fali- nité , elle pourroit alors ; en raifon de fon analogie avec celle de la chaux , fe combiner avec l'acide univerfel répandu dans l'air, & qui fe trouve même dans les plantes ftipriques, & former alors une félénite à l’aide de l'air ambiant , ainfi que de l'acide qu’elles con- tiennent ; car l'expérience, rapportée au paragraphe 11e, confirme que plus la rhubarbe eft vieille, plus elle contient de félénite ; ce qui fert encore à le faire voir , c’eft que la bonne rhubarbe, confervée dans un endroit fec, augmente toujours un peu de poids. 25. Dans tous les Traités de marière médicale , on attribue à la rhubarbe des vertus fingulières , je pourrois même dire toutes oppofées; on la dit purgative , enfuite aftringente , enfin corrobo- rante : cependant , on entend fouvent répérer que la rhubarbe , fnr- tout en fubftance, ne convient point aux perfonnes atraquées d’hé- morrhoïdes ; il faut néanmoins convenir que plufeurs ont cru qu'il y avoit dans la rhubarbe quelque chofe qui les empêchoit de la re- garder comme un remède univerfel & divin; effeétivement , la plus grande partie s'eft apperçue qu’elle contenoit quelque chofe d'indif- foluble qu'ils regardèrent comme une terre; d’autres crurent que ce qui la rendoit purgative , éroit très - volaul, & par conféquent ne reftoit pas dans les préparations où elle entroir , & fur-rout dans SUR L'HIST. NATURELLE ETLFES ARTS. 1; l'extrait : pour ce qui eft des vertus aftringentes & corroborantes , ils l’attribuèrent à une terre inconnue jufqu’à préfenr. 26. Mais, enfin, je laiffe aux Praticiens à décider fur les bons effets que doit produire la félénite dans l’économie animale ; elle ne convient point à la délicatefle de mon tempérament , quoique je fache bien que dans l’ancienne médecine on l'employoit communé- ment contre les dylfenteries, dans les diarrhées, & que même encore certains rempéramens fe trouvent très-bien de fon ufage (1). ——————_—_—_ (1) J'ai cru devoir donner la Traduétion de cette Differtation {ans y rien ajouter, parce que les différens principes qu’elle renferme, & qui pourroient être fufceptibles de quelques remarques, fe trouvent développés & difcurés d’une ma nière très-détaillée & très-favante dans les Obfervations & Additions dont M. Parmentier a accompagné les Récréations phyfiques , économiques & chymiques de M. Model ; le jugement favorable que le Public a porté, {ur ce Recueil pré= cieux, me difpenfe encore d'en faire ici l'éloge ; je me bornerai feulement à indi- quer l'endroit où il fe trouve. Chez Monory , Libraire de S. À, S. Monfeigneur le Prince de Condé, rue & vis-à-vis l’ancienne Comédie Françoife. re TROISIÈME MÉMOIRE SURUEES AB EE LES Où l’on expofe les principaux Réfultats des nouvelles Expériences qui ont été faires fur ces Mouches dans le Palatinac ; Par M. BONNET , de diverfes Académies. I L s’eft formé à Lauter , dans le Palarinat , une Socieré Œconomique fur le modèle de celle de Luzace , & que l’Electeur Palarin , par une fuite de fon zèle pour les progrès de l'Hiftoire Naturelle, vient d’autorifer en lui accordant des Lertres-Parentes, M. Riem, Maître en Pharmacie , digne Membre de la Sociéré naiffante , à répéré avec foin les expériences de M. Schirach » & ce que les abeilles lui ont offert eft fi contraire à tout ce que l'Obfervareur de Luzace m'avoit écrit, que rien ne confirme mieux ce que je difois en ter- minant mon fecond Mémoire : Que Le nombre des yérirés que nous polfédons fur ce Jajet eft bien petit en comparaifon du nombre de celles dont la découverte eff référvée à nos defcendans. Quel abime aux yeux du Sage ; qu'une ruche d’abeilles ! Quelle fageffe profonde Je cache dans 3775. JUILLET. 24 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, cet abime ! Quel Philofophe oféra Le fonder ! Je n’imaginois pas en écrivant ceci , que je touchoïs au moment où de nouvelles expé- riences viendroient appuyer cette réflexion, & me préfenter les faits les plus imprévus , & les plus oppofés à tout ce que les meilleurs Obfervateurs nous avoient appris fur la police des abeilles. M. Riem a bien voulu me communiquer très en détail fes dé- couvertes , les foumettre à mon examen , & m'établir juge entre lui & M. Schirach. On comprend bien que je me fuis abitenu de prononcer entre nos deux Ariftomachus : je les ai écoutés rous deux avec la plus grande attention, & j'ai renvoyé la décifion de la caufe à la Nature elle-mème , qui, s’expliquera , fans doute, quelque jour, par le miniftère de l’un ou de l'autre, où par celui de quelques au- tres Obfervareurs qui fçauront imaginer de nouveaux procédés pour lui arracher cette décifion. M. Riem avoit publié en Allemand la fuite de fes expériences des années 1769 & 1770. Il a eu la politeffe de. me les faire tra- duire en François ; mais il a été fi mal fervi par le Traduéteur, que je n’ofe me flatter d’avoir toujours parfaitement faif le fens de Auteur. Quoi qu'il en foit, je me bornerai ici aux principaux ré- fulrats , & j'avertirai que ce qu'on va lire eft le Précis d’un écrit de plus de cent pages. Réfultars des Obfervations de 1769. I. M. Riem aflure que M. de Réaumur fe trompoit , quand il penfoir que la reine-abeille favoit difcerner la forte d'œufs qu’elle al- loit pondre, & qu’en conféquence elle dépofoit cet œuf dans la cel- lule qui lui éroit appropriée (1): M. Riem s'elt convaincu que la reine-abeille pond indifféremment les trois fortes d'œufs dans des cel- lules communes , & que ce font les abeilles ouvrières qui tranfpor- tent chaque forte d'œuf dans la cellule qui lui eft appropriée. II. Notre Obfervareur croit ètre fondé à en inférer , que certe adreffe des ouvrières a trompé M. Schirach, & lui a donné lieu de penfer que des vers communs pouvoient donner des reines. HI. M. Riem a obfervé l’accouplement de la reine avec les faux- bourdons , & il eft dir que tout ce qui fe pafle dans cer accouplement a éré décrit avec exaétitude par M. de Réaumur. IV. Le Naturalifte de Lauter affirme , qu'il a vu fortir d’entre les anneaux des ouvrières de la matière a cire, que cette matière ———_—_—_—————_——————— ——— (1) Voyez l'Introduétion de mon premier Mémoire , Journal de Phyfique , Avril 1775 » page 327: : fembloit SUR L'HIST. NATURELLE ET LES ARTS. 5 fembloit sranfuder de l'intérieur , & que c’elt avec cette cire sranfpirée qu’elles forment les commencemens des celluless V. Il s'eft affuré que les œufs fe confervent dans les cellules pen- dant plufieurs mois de la mauvaife faifon, fans s’altérer & fans que le ver en éclofe. VI. M. de Réaumur n’avoit pu découvrir furquelle efpèce de plantes les ouvrières récoltoient la propolis : notre Obfervateur nous apprend que c’eft fur les pins & fur les apins. 11 dit qu'on voit des abeilles ouvrieres fe charger des pelottes de cire non vierge ou de cire qui à été exprimée des gâteaux par art, & qu'on expofe en vente dans les boutiques. Réfultats des Obfervations de 1770. I. M. Riem avoit renfermé quatre petits gâteaux dans quatre caiffes de l'invention de M. Schirach : il n’y avoit qu'un feul ver dans chaque gâteau. 11 donna l’effor aux abeilles le fecond jour. Elles ne récoltè- rent rien, & il trouva que le ver s’éroit defféché. Il revient à conjec- turer, qu'il étoic refté des œufs de reines dans les gâteaux mis en expérience par l'Obfervateur de Luzace, & que les ouvrières avoient foigné ces œufs, dont il étoit éclos des reines. IL, M. Riem a vu conftamment dans toutes ces expériences, que les ouvrières tranfportoient les œufs & les placoient relativement à un certain but qu’elles fembloient fe propofer. III. Il n’admet pas que les ouvrières détruifent les cellules com- munes pour élever fur la place une cellule royale, comme l’a décrit M. Schirach (1). Notre Obfervateur foutient que ce procédé n'eft oint du tout celui auquel les ouvrières ont recours , & qu’elles fe er à tranfporter au befoin , un œuf de reine d’une cellule com- mune dans une cellule royale. IV. Notre patient Obfervateur ayant renfermé de petits sâteaux avec des abeilles ouvrières , fuivant la méthode de Luzace , il virles œufs fe muriplier dans les cellules , fans qu'il püt découvrir au- cune reine. Il fut porté à en inférer, que les ouvrières pondoient au befoin , & qu’elles donnoient ainfi naifiance à des vers de l’un ou de l’autre forte. V. 11 rapporte fur ce fujet des expériences qui femblent déci- fives & dont les réfulrats renverfent un des principaux fondemens (x) Confultez la Lettre que M. Wi/helmi m'a écrite fur ce fujet , & que j'ai tranfcrite en entier dans mon fecond Mémoire. Journal de Phyfique , Mai 2775- Tome VI, Part, II. 1775. IOIELET. UE 16 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, de la Théorie Réaumurienne. Y avoit enlevé rous les œufs & tous les vers d’un gâteau, après l'avoir renfermé à la manière de M. Schi- rach. Il avoit approvifionné la petite ruche, & y avoit fait entrer un certain nombre d’ouvrières Le premier & le fecond jour , les abeilles travaillèrent diligemment. Sur le foir du fecond jour , il examina attentivement l'intérieur de la ruche :il affure qu'il n'y trouva que des abeilles ouvrières , & ce quiéroir bien étrange, il y avoit plus de trois cens œufs dans les cellules. VI. Plus le réfulrar de cette expérience étoit contraire à tout ce qu'on favoit fur les abeilles , & plus cette expérience demandoit à être répétée. Notre judicieux Obfervateur , qui le fentoit forte- ment, ne tarda donc pas à la répéter. Il purgea un gâteau de tous les œufs qu'il renfermoit, examina del nouveau les abeilles, & les replaça avec ce gâteau dans la même caifle. Les abeilles y éroïent ‘en petit nombre. Elles fortirent pour récolter , & apportèrent à la ruche de la cire attachée à leurs Jambes poftérieures. L'Obfervateur dic là-deffus, qu’il fit une férieufe attention , & à differentes reprifes , pour voir Ji aucune abeille n’entroit point dans la caiffe avec des œufs , mais qu’il ne put rien découvrir de femblable. Qu’ayant enfuite ouvert la caille, en préfence d’un ami intelligent, & ayant examiné foigneu- fement le gâteau, ils y crouvèrent de rechef plus d’une centaine d'œufs. VII. L'Obfervateur laiffa enfuire les abeilles à elles-mêmes, & il dit qu’elles couvèrent deux fois quelques vers dans des cellules royales qu’elles avoient nouvellement conftruites , qgw’elles couvèrent d’autres vers dans des cellules des mäles aufi nouvellement cohftruites , & qu’elles laifsèrenc lamas d'œufs fans y toucher. VIII L'Obfervareur prévoyant qu'on pourroit lui objeéter, que les abeilles de fa caille s’étoienr introduites dans des ruches étran- gères, & qu’elles y avoient dérobé des œufs qu’elles avoient tranf- portés dans leur propre habitation ; il tenta l’expérience fuivante. I mit en expérience deux gâteaux où il n'y avoit ni œufs ni vers, & il renferma avec eux un certain nombre d’abeilles ouvrières. A1 ferma l'ouverture ou la porte de la caifle avec une planchette à peuits trous & tranfporta la caïffe dans un poële où il la laïffa pendant la nuit : c'étoit en Oétobre. Le lendemain au foir , il ouvrit la caille & examina les deux gâteaux. 11 n’obferva rien de remarquable dans le premier, mais le fecond lui offrit plufieurs œufs, & les com- mencemens d’une cellule royale au fond de laquelle il n’y avoit en- core ni ver ni œuf. Je n'ai donné ici que les réfulrats des obfervations qui m'ont paru les mieux conftatées & les plus intéreffantes. Je me ferois étendu davantage , fi j'avois pu faifir par-cout le véritable fens de mon SUR L'HIST. NATURELLE ET LES ARTS 27 Auteur. Mais je ne faurois dire combien le volumineux Mémoire qui m'a été adreflé eft obfcur. Il fourmille de fautes de ftyle, qui n'accroiffent pas peu l’obfcurité. Je penfe bien que ces fautes doi- vent être mifes principalement fur le compte du Traducteur qui par malheur n’entendoit pas mieux la matière que la langue. Il eft fort à defirer que l'Ouvrage Allemand de M. Riem tombe un jour entre les mains d’un Traducteur plus éclairé & qui fache manier plus heureufement la langue Françoife. Je prie donc mes Leéteurs de ne juger'point des recherches de M. Riem par lagroflière efquifle que je viens d’en crayonner. Elle fuffira au-moins pour exciter la curiofité des Amateurs & les mettre fur les voies de perfeétionner l’hiftoire des abeilles, que nous ne devons regarder que comme légèrement ébauchée. Les nouvelles découvertes de Luzace & du Palatinat en érendant nos vues fur ce fujet, & en multipliant nos doutes, nous montrent avec quelle circonfpection le Naturalifte Philofophe doit procéder dans la recherche fi difficile des loix qui régiffenc les êtres vivans , & avec quelle fageffe il doit fufpendre fon jugement fur les premiers réfulrats de fes rentatives. Je lai fouvent répété dans mes écrits, & je ne pouvoiscrop y infifter ; l’Hiftoire Naturelle bien manice féra toujours la meilleure logique. » Les logiques les plus vantées, » difois-je dans la contemplation de la Nature (1), font trop dé- » pourvues d’exemples puifés dans la Nature : une meilleure logique » encore eft un Ouvrage d’Hiftoire Naturelle bien fait & bien penfé, » Là fe trouvent peu de préceptes, mais beaucoup d'exemples, qui » inftruifent davantage & fe gravent mieux dans le cerveau. La mar- : che d'un Réaumur, d’un Trembley, en dir plus que les Nicole & “les Wolf«. J'ajouterois que l’Hiftoire Naturelle eft une logique rduite en action. Je place à la faite de ce Mémoire la lettre que j'ai écrite à M. Rem, en réponfe à l'envoi de fes obfervarions. Elle aidera à faire jugr ce qu'on doit penfer des découvertes de cet Amateur. A Genthod , près de Genève, le 13 Juillet 1771. » Je réponds bien tard , Monfeur , à votre obligeant envoi: » mais’ | m’eft parvenu dans des circonftances qui ne me permet- » toient pas de donner à vos obfervations l'attention qu'elles méri- » tent. » Vos ‘Iraduéteurs me le pardonneront fi je dis, qu'ils n'ont pas oo (3) Part. VIN, Chap. XVI. 177$: JUPRPETMBD "2 28 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, » réuffi à vous rendre clairement. Notre langue eft peut-être la plus » difficile à manier : c’eft qu’elle eft la plus ennemie de l’équivoque » ou des contre-fens :c'eft qu’elle n’admet pas les inver/fons : c’elt » qu’elle veut la plus grande propriété dans les expreffions : c’eft enfin, » qu’elle a fon génie, qui n’eft celui d’aucune autre langue vivante. » Je ne puis donc me flatter de vous avoir toujours bien faifi. Je vous » ai la pourtant la plume à la main, & j'ai extrait vos réfultats prin- » cipaux. Ils vont me fervir de texte. » Vous croyez- donc , Monfieur , vous ètre bien affuré, que l'il- » luftre Réaumur s’éroir trompé, quand il a avancé que la reine- » abeille difcernoit l’æuf qu’elle alloit pondre ? Vous nous apprenez » qu'elle pond indifféremment les trois fortes d'œufs dans les cel- » Jules communes , & que ce font les ouvrières qui favent tranfporter » chaque œuf dans la cellule qui lui convient. Cette obfervarion eft » importante, & ne fauroit être trop vérifiée. » Si ce fair eft auffi vrai que vous le penfez, vous avez raifon » de dire qu'il a pu tromper M. Schirach, & qu'il a pu croire ainfi, » que des vers de neutres ou d’ouvrières pouvoient donner des 3 JEUNES. « » Je fuis bien aife que vousayez confirmé, ce que mon refpeétabe » ami Réaumut avoit raconté des amours de la reine abeille. » Il eft très-remarquable que les œufs des abeilles fe confervent » pendant la mauvaife faifon , fans s’alrérer & fans que le ver en édofe. » Cette obfervation eft très-nouvelle pour moi. Il éroit dans l’ordre » de la chofe qu’elle fe pafsâc ainfi dans une faifon qui fe refufe au: » travaux de nos mouches induftrieufes. » Je ne comprends pas crop bien, ce que c’eft que cette marièe » à cire qui ranfude d’entre les anneaux. Je comprends encore moin', » comment les ouvrières conftruifenc les cellules avec cette cire zræf° » pirée. M. de Réaumur avoit expliqué clairement certe conftructios à » l'aide de la cire que les ouvrières dégorgent | & qu’elles façonrænt >» avec leurs dents & leurs jambes antérieures. » Ce grand Obfervareur ignotoit le liez où les abeïlles recueilent » la propolis. Vous nous apprenez que c’eft fur les pins & fw les » fapins (1). Vous nous apprenez encore , qu’elles fe chargert de » la cire qui a paflé par les mains de nos ouvrières, & qu'n ex- Lacan (Gi) Mais il ne fe trouve pas par-tout des pins & des fapins , & par-tout les abeilles recueillent la propolis , fi néceflaire pour boucher les pertes ouvertures qui pourroienr donner accès dans la ruche à divers infectes. x faut donc que li abeilles fachent fe pourvoir de propolis ailleurs que fur les pins & fur les apins. SUR L'HIST. NATURELLE ET LES ARTS. 29 #pfe en vente dans les boutiques. Ce font des faits à ajouter à >» lhiftoire de nos mouches, & dont les Naturaliftes vous font re- »devables. » Voilà, Monfieur, ce qui a fixé mon attention dans vos Ob/ér- » vations de l’année 1769. Je viens à celles de 1770. » Vous vous êtes donc convaincu par de nouvelles obfervarions, » que les abeilles ouvrières tranfportent les œufs de cellule en cellule , » & les placent relativement à un certain bue qu'elles femblent fe pro- » pofer. Ce fait vous paroït donc bien prouvé, & je n'ai rien à oppo- » fer à une afferrion fi précife, & fondée fur des obfervations faites »avec foin , & répétées plufeurs fois. » Vous niez que les ouvrières détruifent les cellules communes pour … dore: fui la place une cellule royale , comme M. Schirach la décrir. » Vous aflurez que vous n'avez jamais vu cela, & que vous avez » obfervé conftamment, que les ouvrières tranfportent au befoin les » œufs dans les cellules royales qu’elles ont conftruires. Ceci eft, en » effet , direétement contraire à ce que M. Schirach atrefte avoir » obfervé, & que fon beau-frere M. Wilhelmi m'a raconté en dé- » tail dans une de fes lettres. Me voilà donc placé entre deux auto- à rités oppofées, & pour que je pulle décider entr'elles , il faudroic » que je pulfe répéter moi-même les obfervations ou qu’elles le fuf- » fent par d’autres Naturaliftes qui méritafflent route ma confiance. » Ainf , vous ne défapprouverez point, que je fufpende mon juge- » ment fur le fait dont il s’agit. Peut-être que les abeilles ont été » inftruites à recourir à l’un ou à l’autre de ces deux procédés , fui- » vant la nature des circonftances. » Mais rien ne m'a plus frappé dans vos obfervations de 1770, » que ces æufs qui vous ont paru avoiréré dépofés ou pondus par les: » abeilles ouvrières. Ce fait, le plus remarquable de tous ceux que » vous rapportez , eft auf celui qui choque le plus ce que les Swam= » merdam , les Maraldi , les Réaumur nous avoient enfeigné fur la » théorie des abeilles. Si donc vous avez rigoureufement démontré »la vérité de ce fair, je dis qu'il faut fe défier de tout ce que » les meilleurs Obfervareurs onc écrit fur les abeilles. Comment: » néanmoins réfifter aux preuves que vous m'en donnez dans votre » écrit. Vous aviez enlevé tous les œufs d’un gâteau : vous aviez » renfermé ce gâteau à la manière de M. Schirach : vous aviez ap- » provifionné la petite République : le premier & le fecond jour vous » examinâtes foigneufement le gâteau : vous y trouvâtes plus de 300 » œufs , & après avoir examiné toutes les abeilles avec la plus » grande attention , vous n’y rencontrâtes pas une feule reine. Vous: +» en concluez que ces 300 œufs avoient été pondus par les ouvrières, » & en vérité, je ne vois pas ce qu'on peut oppofer à votre con+ 1774 JUILLET. 3o OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, > clufon. Je fuppofe toujours que votre examen avoit été pouifé jufw'à » la plus fcrupuleufe exactitude ( 1 ). __ » Vous décrivez une autre expérience qui paroît confirmer ple: » nement la précédente, & par laquelle vous avez voulu vous affu- » rer que vos abeilles ne s’introduifoient point dans les ruches étran- » gères, pour en dérober les œufs & les tranfporter dans leur habi- » tation. Vous dires que vous renfermâtes dans une caille un gâteau »oë il ny avoit ni œuf ni ver, & que vous renfermâtes avec ce » gâteau un certain nombre d'äbeilles ouvrières. Vous ajoutez que vous »eûtes foin de fermer les ouvertures de la caifle avec une plancherce » à petits trous, & que vous tranfportâtes enfuite cette caïfle dans » un poële, où vous la laifsâtes pendant la nuit : c’éroit en Otto- » bre. Le lendemain au foir, vous examinäâtes le gâteau , vuus » y trouvâres plufeurs œufs & vous y obfervâtes encore les com- » mencemens d'une cellule royale , au fond de laquelle il n’y avoit » ni œuf ni ver. » Il femble donc , qu'il réfulte clairement de ces expériences, que »les prérendus neutres font de vraies femelles ; qui peuvent au be- » foin repeupler la ruche par des pontes plus où moins abondan- » res. Mais G ces prétendus seutres font de vraies femelles , ces fe- » melles ont des ovaires femblables ou analogues à ceux de la reine- » abeille. Et comment ces ovaires avoient-ils échappé au fcalpel & » au microfcope de l'habile & infatigable Swammerdam ? Pourquoi » encore les abeille, privées de reines, & mifes récemment en ru- sche, fe laiffent-elles mourir de faim, fans conftruire la moindre » cellule ni récolter la plus petite parcelle de cire ? Vous favez que » M. de Réaumur s'étoit affuré de ce fait par des expériences très- » décifives. Or , je ne concevrois pas pourquoi des abeilles qui peu- » vent conftruire des cellules, y pondre des œufs, & approvifionner ».la ruche de tout le néceffaire, fe laifferoient mourir de faim , plutôt » que de fe livrer à aucun travail , dès qu’on les prive de leur reine. » D'où vient donc qu'il n’en va pas de même des abeilles ouvrières » qu'on renferme dans une caille avec un petir gâteau fans œufs, » fans vers, fans meres. » Je m'abftiens de former des conjectures fur ce fait fi nouveau n & fi étrange : mais je ne faurois trop vous exhorter, Monfieur , à 0 (x) Je prie qu'on remarque cette réferve ; car je ne raifonne ici que fur la même fuppoñtion , d'après laquelle j'ai jugé des expériences de M. Schirach. Je ne garantis point les faits, & je defire toujours que quelque habile Obfervateur entreprenne de les vérifier. M. Riem ne m'a pas dit comment il étoit parvenu à s'aflurer qu'il n'y avoit dans fa caïfle que des abeilles ouvrières. J'aurois dû lui demander s'il avoit baigné fon petit effaim. | SUR L'HIST. NATURELLE ET LES ARTS. 3r » répéter ces expériences, & tâcher de mettre la chofe à l'abri de » toute cavillation. » Ceci doit acheminer les Naruraliftes qui favent difféquer les pe- » tits animaux, à s'exercer à anatomifer avec plus de foin qu’on ne » l'a fair encore, ces neutres ; que vos expériences ont transformés en » femelles. Is ne fauroient employer de trop fortes lentilles pour obfer- » ver l’intérieur de certe forte d'abeille. Apparemment que leurs ovai- » res font extrèmement petits ou peut-être fort déguifés (1), & que » les æufs qu’elles pondent font plus petits-que ceux que pond lareine- » abeille. Je ne me rappelle pas que vous ayez rien dit li-deflus dans » votre curieux écrit. Il faut bien que la chofe foit ainfi, pour que » ces-ovaires & ces œufs des abeilles ouvrières aient échappé aux re- cherchés aflidues des Swammerdam & des Réaumur. » Peut-être encore que chaque abeille ouvrière ne pond dans toure fa vie qu'un ou deux œufs très-perits. Le grand nombre d’ouvrières qui peuplent une ruche devoic fuppléer au petit nombre d'œufs que » chacun devoit pondre. } » Une autre queftion me vient à l’efprit : s’il eft bien vrai que » les ouvrières pondent des œufs, pourquoi ne les voit-on pas pondre » dans les raches vitrées pourvues d’une reine, comme on y voit » pondre fréquemment certe reine ? J'ai obfervé mille fois la ponte » de cette mouche , & je n'ai jamais furpris des ouvrières occupées à » pondre «, . » ÿ » è Cette lettre ne renferme pas toutes les idées que j'aurois pu offrir à la méditation de l’Ariftomachus de Lauter. Je me fuis refferré dans les bornes les plus étroités, Je ne devois pas me prelfer de former des conjeéures fur des faits qui demandent à être vus & revus bien des fois avant que d'être admis. Je n'ai aufli raifonné dans cette lettre que fur la fappoñtion très-équirable , que l’Obfervateur n'avoic négligé aucune des précautions qui pouvoient concourir à conftater Ja vérité de fes obfervations. Il en indique même plufieurs dans fon Mémoire, Je ne puis donc trop inviter les Naturaliftes à revoir après lui & après les Obfervateurs de Luzace. Au refte , i! auroit été fort à defirer , que M. Riem, au lieu de loger fes.abeilles dans des caiffes de bois , les eût loyées dans des caifles vitrées , 11 auroit ainfi été à portée d'obferver à chaque inftant les ouvrières , & de les furprendre dans ces nombreufes pouces dont il parle. 11 feroit bien étrange , que parmi tant de centaines ne ms (+) IL feroic poffible encore que ces ovaires des ouvrières ne fuffenr pas vifibles en tout tems, même avec le fecours du microfcope. On fair que ceux de la reine- abeille femblent difparoïtre lorfque la faifon de la ponte eft pallée. 77e HUTLLET, 32 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, d’abeilles, routes femelles, l'Obfervateur n'en furprit pas quelques- unes occupées à pondre. Ce fait eft affurément celui qui exige les preuves les plus rigoureufes, & je déclare que je ne l’admers que fous la réferve d’un nouvel examen plus fcrupuleufement approfondi. On pourroit eflayer de concilier les obfervations de Luzace avec celles du Palatinar. On a vu dans mon premier Mémoire que , fui- vant M.Schirach , les abeilles ouvrières appartiennent toutes origi- nairemenr au fèxe féminin , & que ce n’elt que . des circonftances purement accidentelles qu’elles perdent la faculté d’engendrer. On pourroit donc foupçonner que les ovaires ne s’oblitèrent pas entiè- rement dans cette forte d'individus, & qu'il y refte au moins quel- ques æufs propres à propager l’efpèce. Il eft aifé de comprendre que, quand iln'en refteroit que deux à trois, ce nombre feroit plus que fuf- fifant pour fournir aux portes que M. Riem a obfervées dans fes caifles. Mais , dans la fuppofition que les abeilles ouvrières font de vérira- bles femelles ; on demandera toujours , pourquoi on ne les a jamais vu pondre dans des ruches vitrées pourvues d'une reine, comme on y a vu pondre fi fouvent certe dernière? M. de Réaumur qui avoit tant & fi long-tems obfervé les abeilles dans des ruches d’une conf- truction fi favorable , n'avoir jamais rien vu de femblabletou d’ana- Jogue à ce que rapporte M. Riem. Si mon témoignage “étoit de quelque poids auprès de celui de cer illuftre Obfervateur , je répé- terois ce que je difois dans ma lettre à M. Riem que ; quoique j'aie fuivi les abeilles pendant plufeurs années dans des ruches de même conftruction, je n’ai jamais furpris d'abeille ouvrière occupée à pondre, & j'ai vu cent & cent fois la reine abeille dépofer en ma préfence un allez grand nombre d'œufs. Quelle feroit donc la caufe fecrère qui empècheroit les ouvrières de pondre tandis gwelles pofsè- deroient un rene féconde ? On voit bien qu’elle feroit la caufe finale d'un tel arrangement : Swammerdam a prouvé que les ovaires dela mere-abeille contiennent environ $o mille œufs. Si donc chaque ouvrière pondoit en même -tems au-moins deux à trois œufs, la ruche feroit furchargée d’habitans pendant la plus grande partie de l’an- née , & toute l'économie de la petite République en feroit troublée. Plus je m'occupe des nouvelles obfervarions fur les abeilles, & plus je me perfuade que le rems n’eft point encore venu où nous pourrons raifonner avec certitude fur la police de ces mouches. Ce ne fera qu’en variant & combinant les expériences de mille ma- nières différentes, & plaçant ainfi ces mouches induftrieufes dans des circonftances plus ou moins éloignées de leur marche ordinaire, qu'on pourra efpérer de connoître jufqu’à un certain point la portée de leur sffinéf , & les vrais principes de leur Gouvernement. RECHERCHES SUR L'HIST. NATURELLE ET LES ARTS. 33 | ER CERCLE SRE EREE PRE DNC CPS PRET BREST LES EX CREER ARE D Er Or HeE Re GES SUR UMN EL OI CÉNÉRALE D'FUILUATANTA EUU RE; O U M*É "M: O0. T R-F Sur La fufibilité & la diffolubilité des Corps relativement à leur maffe ; Où l’on trouve l’art de tirer facilement , & fans frais , une matière » > alimentaite de plufeurs Corps, dans lefquels on ne reconnoifloit pas cette qualité , &c. Par M CHANGEUX. CHAPITRE PREMIER. Expofition & développement de la Loi générale. Ur feu qui détruit un corps n'eft pas capable d'agir fur d’autres corps, ni de les altérer en aucune manière ; une chaleur qui eft extrème par raport à certains animaux , eft un froid extrème pour d’autres. La plupart des animaux microfcopiques qui fe développent à une chaleur déterminée, font détruits pour peu que certe chaleur augmente ou diminue ; le moindre changement dans le degré favo- rable à la vie de ces animalcules, produit pour eux le froid ou le chaud extrème. Ces obfervations & d’autres que nous aurons occa- fion de faire par la fuire , montrent à l’homme le moins inftruit , que le feu agit très-différemment fur les différens êtres. JL agit aufli ( & peut-être par le même principe ) , très-différem- Tome WI, Part, II. 1775. JUILLET. E 34 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, ment fur un même corps dans les différens états de divifion où ïül peut fe trouver , & l’objet de ce Mémoire eft de faire voir qu'à cet égard il exifte une loi genérale dans la Nature, à laquelle fonc foumifes routes les efpèces de matières ; c’eft que l’aétion du feu relative à la malle des corps, de telle force que de deux portions égales d’un même corps , l’une préfentera d’autant moins d’obftacles au feu, qu'elle furpañlera l’autre en furface (x). Cette loi eft féconde , & peut devenir très-utile dans fes confé- quences. Augmentez le feu à l'infini, la réfiftance des corps les plus foli- des fe réduira à zéro ; divifez les corps à l'infini, & le feu le plus léger les confumera avec la même facilité. L'action du feu ne peur donc être relative. Le feu, dit un vieux Proverbe , purifie l’or & confume la paille; mais poullez le feu au plus haut degré, il confumera & détruira également tous les corps; la progrefhon de fon aétion ne fera même alors plus mefurable. À ce plus haut degré d’intenfité du feu ; tous les corps ne lui faifanc plus d'obftacles fenfibles , il eft clair qu'il les détruira à nos yeux dans un inftanc indivilble , c’eft-à-dire , dans un tems qui deviendra incommenfurable. C'eft ainfi qu'au foyer d’un miroir ardent , l'or fe diflipe au moment mème qu'il y eft placé; il n’y de- meure pas plus que la paille : & fi nous avions l’art de conftruire un miroir plus parfait que ceux que nous poflédons, tous les corps, fans doute , s’y décompoferoient , s’y évaporeroient , & feroient réduits d’une manière plus inftantannée à leurs élémens (2). a —————————— — ————" —————“"—ÛÛÎÛ0ñû ET (1) M. de Buffon , d'après fes expériences , conclut que des boulles de diffé- rentes fubflances , s'échauffent en raifon de leur diamètre. L'on peut aflurer , dit-il encore, que le progrès de la chaleur dans toutes les fubffances minérales ; ef} 1ou- jours à-très-peu-pres proportionnelle à leur plus ou moins grande facilité à fe fon» dre ou à fe calciner. Mais il ajoute que quand leur calcination ou leur fufion font également dificiles, & qu'elles exigent un degré de chaleur extrême, alors de progrès de la chaleur fe fait fuivant l'ordre de la denfité. Ces principes utiles n'ont plus d'application quand il s'agit des corps réduits à une certaine divifione La fufibiliré 8& la calcinabiliré dont parle M. de: Buffon , n'ont plus alors de rer- mes fixes ; nous verrons que les matières que l'on croît exiger un degré extrême de chaleur, peuvent, par leur divifion extrême, être attaqués par le plus perit feu pofible. (:) L'on peut voir ici en paffant combien de Phyficiens & d’Aftronomes fe font trompés, quand ils one voulu calculer les degrés de chaleur qu'acquerroient les globes céleftes en raifon de leur approximation du foleil. Le calcul eft une opération abftraite à laquelle l'Aftronomie Phyfique ne doit pas être bornée ; il faudroir bien d'autres donnécs que celle qu'il fournit pour réfoudre le probième SURÆCHIST. NATURELLE ET LES ARTS. 35 D'un autre «ôté ; noùs avons dit que les corps; divifés à l'infini, cèdent à un feu le plus léger ; enforte que le mème corps qu, fous une telle malle ; demandoit le feu le plus violenr pour être décompofé ou diflous, cédoit , lots de fa divifñion extrême , au plus peut degré de chaleur , & c’eit ce que nous prouverons par plufeurs expériences faites fur les crois règnes de la Nature. Voyez les Cha- pires IV, V & VI. Les recherches à faire fur toute cette matière peuvent fe réduire à un problème, dont la folution doit être regardée comme un des fondemens de toute bonne théorie chymique , & conduire à l’art en queftion , & ces données une fois trouvées , il faudroic encore s'arrêter à des bornes fixes. Car, 1°, puifque l'action du feu eft en railon de la mafle des corps, l'on doit, avant de calculer de combien un corps peut s'échauffer en s’approchant du foleil, connoiître fa vraie denfité , & y avoir égard. J'avoue que les différentes denfiés des planètes ont été appréciées, & que le orand Philofophe Anglois a ofé peer les Aftres , mais encore falloit-il faire attention à ces denfités quand on a voulu raifonner fur la chalcur qu'éprouveroient les Comètes , en cotoyant le difque du folcil. 2°. En fuppofant que dans l'approche d'une Comète , lation du feu s'aigmen- tät de plus en plus, devoir-on fuppofer que (on incandefcence augmenteroit de plus en plus dans les mêmes proportions ? La denfité des corps oppofe des obita- cles à leur deftruétion , mais ces obltacles diminuent à melure que la force du feu s'accroît, & l’on peut crès-bien comparer ici ces obftacles à la force d'iner- tie , comme on peut comparer le feu au mouvement , c'efta dire , que de même que le mouvement détruit la force d'inertie , de même le feu détruit la cohéfion ‘des corps , & l'incandefcence n'a pas une progreflion croïflante & égale à l'aug. mentation du feu qui la caufe ; elle a un terme, paflé lequel le corps enflammé fe décompofe. A 3°. Le corps planétaire donc , après s'être approché aflez près du foleil pour recevoir tous les degrés de chaleur qu'il peur contenir, ne pouvant plus réffter 2 l'aétion folaite , il:fe diffipera entièrement. On peut dire aufli que fi un corps s'éloigne du foleil jufqu'à n'en plus recevoir de chaleur , il fe refroidira d'une manière relative à fa denfiré & à fa malle, car ce que l’on dit du chäud , s'applique d’une manière inverfe au froid ; ces deux qua- lités font relatives , & ne deivent jamais être confidérées d'une manière abiolue. Le rand Newton a prétendu que la Comète de 1680, s'étant approchée du foleil à à diftance d’un demi-diamètre , ce dernier Aflre avoit, par rapport à elle, une chaleur 28000 fois plus forte que celle qu'il a par rapport à la terre dans l'été ; d’après cela on a fait bien des calculs, & d'après d'autres fuppolitions ; mais plus fieurs de ces calculs font en pure perte. Une de ces Comètes fur lefquelles ils ont opéré , für-elle auf compacte que du fer, après avoir fubi l'inflammation à un certain degré de feu , pañleroit à un autre degré , à la calcination , enfuire à la vitrification ; & enfin le dernier degré de chaleur la difperferoit dans les efpaces, aériens en fumée, ou en parcelles infiniment petites , comme il arrive à un mor- ceau de fer foumis au foyer d'un grand miroit ardent. 75 MOMEMETEMREN2 36 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE! fi recherché & fi peu connu de mefurer le feu : ce problème peur être énoncé de la manière fuivante. Quelle eff la différence de l'aëlion du feu fur un même corps relati- Fe ! D LP vement à fa maffe , ou quels font les dégrés de la fufibilité & de la diffolution d’un corps dans [es différens états d'atténuation poffibles ? Il paroïît , avons-nous dir, que l'action du feu eft relative à la malle des corps. Suppofons qu'un corps foit atténué fuivant certe progreffion def- cendante , 9 » HORS S» 4» 3» 2; APN SEC l’action du feu auomentera fuivant une PRES afcendante qui ne peur être déterminée que pat la fomme des furfaces opérées par la divifion ; cette progreflion , très-utile à, connoître , doit , fans doute , avoir des bornes. Où commence cette progrefion , & où fe terminet elle ? Quant au premier point, il me femble très difficile à afligner. Certains minéraux , divifés en pieds cubes , ne paroiffenct Fe fubir la fonte beaucoup plus fenfiblement que lorfqu'ils ne le font qu'en parties beaucoup plus groffes , mais la fufñbilité eft fenfiblement augmentée s'ils fonc réduits en pouces cubiques. Si latrénuation eft pouffée plus loin , alors la promptitude de la fufon eft extrème. Ainf, quant au fecond point , c’eft-à-dire , quant au terme de la progref- fion , il n’eft pas douteux qu'il fe borne pour nous à un inftant où à la plus petite partie du tems que nous puiflions faifir. 11 eft une borne dans l’atténuation de chaque corps, & par conféquent , il en eft une dans l'augmentation de l’action du feu fur chacun des corps. Ain, les deux précédentes progreffions que nous laiffons indérer- minées, & dont l'une décroît toujours ; l’autre croiffant infiniment , ne feront des progreflions connues que lorfqu'on faura leur donner des termes, lefquels dépendent , fans doute , de la nature de cha- que corps. PTE La divifbilité phyfque de la matière à l'infini , ne fe conçoit pas plus que l'addition & la multiplication à l'infini. Le feu, quel- que puiffant qu'il foir , ne fair que décompofer les aggregats ; il fauc bien que fon aétion foit bornée , puifqu'il n'agit qu'en fépa- rant les élémens qui fe recombinent après avoir été féparés , & forment de nouveaux individus. La progreflion , fuivant laquelle les corps s’atrénuent , aboutit donc à zéro , & la progreflion ana- logue , fuivant laquelle l'action du feu augmente, fe termine audi à un point conftant. SUR L'HIST. NATURELLE ET LES ARTS. 3; CAE RTR ES TT Idée générale de luvilité de cette Loi. Cerre loi que la fufbilité & la diffolubilité des corps font rela- tives à leur malle, quoique purement générique , peut devenir utile par les conféquences qu’on en uirera. 1°. En donnant lieu à des expériences nouvelles , elle nous fera mieux connoître la nature des corps. 2°. En nous apprenant à les foumertre à des Agens qui n’a- voient point de prife fur eux, elle nous fera varier les analyfes à l'infini. C’eft ce qu'il faut expofer rapidement dans ce Chapitre en convenant d'ailleurs de quelques modifications que la nature des corps doit apporter à certe loi. 1; Quoique les individus du règne minéral femblent exiger le feu le plus violent pour être décompofés , cependant il eft différentes graduations à obferver dans l’adminiftration de ce feu , quand on prendra l'analyfe du fel , d'un métal ou d’un minéral; fans cette firution leurs produits fe confondent , & l’on n’en tire aucune umière fur leur nature. Qui doute que par la raïfon des contraires, en fuivant la route oppofée , on ne parvienne à des connoiffances fûres concernant la nature des corps. dont nous parlons. IL en eft de même dans l’analyfe végétale , à quelques degrés au-deffus de l’eau bouillante , les végétaux fe décompofent d’une ma- nière qui paroît confufe , & cette décompofition eft d’aurant plus prompre que le feu eft plus violent; mais fi l'on favoit quels font pour chacun de ces végétaux les termes fixes de chaleur où ils donnent leurs différens produits , dans leur ordre naturel, & dans la plus grande pureté , nul doute que l’on ne parvint à connoître mieux leur nature. Qui croiroit que le vinaigre peut , à force de cohobation , pro- duire de l’alkali volatil, & fe confondre par conféquent avec les corps qui paroiffent d’une nature abfolument oppofée à la fienne ? Voilà cependant un paradoxe que l’on démontre en Chymie. C'eft qu'il eft un degré de feu qui convient à la décompofition de chaque corps, & que ce degré pallé, ce corps fe confond par fes produits avec fes contraires. Tous les êtres ont des qualités , c’eft-à dire , des duretés , des efanteurs , des faveurs qui dépendent de leur male & du tiffu de Eu parties intégrantes. Entre la fleur dont l'odeur eft prefque in- fenñble , & celle qui bleffe l'odorat par fa vivacité ; entre l'orga- 3775. JUILLET, 33 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, nifation délicate de certains champignons & celle du bois de fers entre les émanationsique la moïndre chaleur faït.évaporer , & celles qui ne fe manifeftent qu’à l'aide du feu le plus violent , tous les degrés font remplis, & chacun de ces degrés font autant de rermes fixes fans la connoiflance defquels les menftrues ferviront plutôt à les dénarurer-qu'à les décompoler. En effer, fi l’action du feu & des autres menftrues eft relative à la mafle des corps, il me paroït que cette malle doit entrer comme élément dans les recherches que l’on fera pour afligner les mefures des diffolvans 3 & comme on n’a point procédé ainfi jufqu’à pré- fenc, eft-il étonnant que la décompofition des corps ait fourni fi peu de lumières fur leur nature, & que l'analyfe chymique n'ait point de loix. 11. La loi que nous établiffons fur la diffolubilité des corps nous apprendra d'autant mieux la nature des êtres, qu’elle paroît devoir étendre beaucoup les limites de la Chymie en foamettant les corps aux plus foibles jouiffances, & à celles qui n’avoient point de prife fur eux. : Choififlons le mercure en attendant que nous propofons d’autres exemples. Le mercure, quand il eft très-divifé , peut être diffous par le plus foible de tous les acides , je veux dire par l'acide végétal , acide auquel le mercure réfifte quand il eft en mañle. La crituration , la digeftion-, ou une précipitation contendente, font les trois procédés que les Chymiftes emploient pour réduire le mercure en particules prefqu’infiniment petites. Par le premier de ces procédés on expofe le mercure dans l'eau, & par le mouvement qu’on lui imprime , & que l'on continue long- tems, on défunit les parties du mercure, on rompt leur cohélon, & il fe réfout prefqu’entièrement en une poudre grife que le vinai- gre diffout avec la plus grande facilité. Par le fecond procédé on fait digérer le mercure fur le feu ; ce fluide en s’infinuant dans la maffe du mercure , agite fans celle, & fans la décompofer , il l’a réduit en poudre rougeñtre que le vinaigre diffout fans peine. Par le troifième procédé on fait diffoudre le mercure dans lef- prit de nitre, on le précipite par un alkali, on édulcore le préci- pité avec l’eau diftillée bouillante ; pour dépouiller le meïcure de l’alkali & de l’acide qu'il a entraînés avec lui. 11 devient alors d’une diffolubiliré qui le rend attaquable par le vinaigre. Ces manipulations & quelques autres qui fe rapportent aux trois méthodes précédentes, nous apprennent que tant que le mercure refte en malle , ilne donne aucune prife à l'acide végétal, mais que . SUR L'HIST. NATURELLE ET LES ARTS. 39 2 ce même acide devient fon diffolvant , & acquiert une aétion qui et proportionnelle à la divifion du myrcure. Nous rapporterons d’autres exemples par la fuite. OV APE TIRE: TEL Confidérations fur une claffe de corps qui femblenc faire exception à la Loi générale. : PLusieurs corps poreux, & d’un tiflu très-délicat, n’ont befoin. que d’être plongés dans une petite quantité d’un menftrue qui leur {oic approprié pour être diffous ; quelle que foit la mafle de ces corps doit approprié por 5 q ps» ils cèdent à l’aétion de ce menftrue. Ici la loi générale que nous avons établie, paroît totalement ren- verfée ; car , quelle que foit la malle de la matière à divifer & à dif- Soudre , elle n’en cède pas moins à une portion très-petite de dif- folvant. Cette expérience qui paroît faire exception à la règle que nous établiffons fur la diffolubilité des corps, ne fait que confirmer cette même loi ; pour le faire voir , choiliffons l'exemple de la folution du fucre , & de la diflolution de la chaux dans l’eau. Que l’on mette dans un vafe qui contiendra une petite quantité d'eau, une malle de fucre ; cette eau s’infinuera dans les pores du fucre , & en détruira le tiffu. Mais , pourquoi produira-t-elle ces effets ? ce ne fera que parce que le fucre étant un corps très-poreux , forme une aggrégation de tuyaux capillaires. Cette aggrégation eft très délicate ; l'eau montant dans ces tuyaux en vertu de l’attration , ou de quelqu’autre principe , agit fur les plus peutes parcelles du fucre, & les réfout en liqueur. L'action qui fe palle ici, & qui n’eft qu'une folution , rentre donc dans la claffe des effets que nous avons dit fe paffer routes les fois qu'un menitrue agit fur un corps réduit à une extrême divifion, L'exemple de la chaux prouve la même vérité. Quand le feu x fotmé par fon mouvement une foule de pores dans ure pierre cal- caire , quand il a brifé & détruit le ciment naturel qui la rendoit inattaquable à l'eau ; cette pierre devient un tiffu poreux & un affemblage de tuyaux capillaires. L'eau qui en eft alors le menf- true , fe porte avec vivacité dans ces tuyaux , & il n’en faut qu'une petite quantité pour ôter à la pierre toute fa folidité , parce qu'alors Ste ean agit fur des parties falines terreufes infiniment perites & ivifées. so OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, Je pourrois apporter d’autres exemples, mais ces deux-ci fuffifenc our faire voir que la claffe des corps qui font d’un tiffu poreux & très- délicat, loin de detruire la loi générale , ne font que la confirmer... C'H'AïP occupé par la mer, pallé cinq cens ans, & où oh a trouvé à quelque profondeur une très-grande quantité d'arbres, Suivant une tradition conftante, la mer venoit autrefois jufqu’à Dixmude, où elle faifoit un bras fréquenté par des vailleaux mar- chands attirés par les franchifes, que les anciens Comtes de Flan- dres avoient accordées à certe Ville. Ortelius & autres, croient que l'Océan s’érendoit autrefois jufqu'à Saint-Omer , & y formoit un port, dont parle Céfar. 122 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, Tous ces différens faits, dont l’Auteur cite au long dans fon Mé- moire les témoignages , & preuves tirées des Auteurs qu'il a conful- tés, paroïffent d'autant plus probables, après les preuves phyfques qu'il avoir accumulées, que même aujourd’hui il fubfifte encore de- vant nos yeux un combat continuel entre les deux élémens de la terre & de l’eau, dans lequel l’eau perd infenfblement du terrein, & la mer, malgré qu’elle multiplie fes attaques de tems en tems par de fortes inondations , pour tâcher de reprendre fon ancien em- pire, eft néanmoins obligée de céder pied-à-pied une partie de fon domaine. C’eft donc par une fuite néceffaire, que la Hollande, un des derniers pays que la mer doit avoir abandonné, n’eft évidemment qu'un terrein nouveau, où plufieurs endroits de la furface de la terre, garantis uniquement par des digues artificielles, entrerenues à grands frais, font encore prefque de niveau avec le fond de la mer qui eft proportionnellement moins profond là que plus avant dans l'Océan. C'eft auffi la Hollande , avec une partie de la Flandre , qui a fouf- ferc plus que tous les autres pays du monde, dont l’émerfion , hors des eaux, eft d’une bien plus ancienne date des inondations caufées par les débordemens de la mer , qui cherche encore à rentrer dans quelques-uns des endroits qui formoient autrefois une partie de fon ancien féjour. Un mot ici en paffant, d’après mon Auteur, de ces principales inondations, dont la mémoire eft encore fraîche, ne fera pas déplacé. L'Ifle de Zélande , qui faifoit autrefois partie du Continent, a été coupée en plufieurs ifles par une inondarion de la mer , accom- pagnée d'une tempête, l'an 18 de l’'Ere vulgaire. La même irrup- tion de ces deux élémens , en déchirant la terre, forma au Nord plufieurs embouchures au Rhin, qui n'en avoit auparavant qu’une feule, abimant en mème-tems une large érendue du terrein , d’où eft provenu le lac Fevum, connu des Romains. Pline aufli raconte que de fon tems la Zélande étroit continuellement ravagée par les eaux de la mer. Au commencement du douzième fiècle , du tems de Henri l, Roi d'Angleterre , une partie confidérable de la Flandre a été en- fevelie fous les eaux, par un débordement fubit de la mer. Vers lan 322$ , la mer forma avec le lac Æevum ou Flavon, un golfe de neuf lieues de longueur , & connu aujourd’hui fous le nom de Zuiderzée , ou Mer du muii. En 1277, la mer fubmergea trente-trois Villages entre Groenin- gues & Embden, & forma le golfe d'Oflaerr ou d'Offarr. L'an 1337, une pareille inondation abima dix-neuf Villages à J'Oueft de l'embouchure du Hondt, SUR'L'HIST. NATURELLE ET LES ARTS. 33 En 1421, la mer couvrit toute cette €rendue qui fe trouve entre le Brabant & la Hollande, forma le lac Bierbos en inondant tout le terrein depuis Dororecht jufqu'à Gertruydenberg, & abforba foi- xante-douze Villages. La mer s'eft enfuire retirée en partie, mais vingt-deux Villages & deux Monaftères reftent encore fubmergés. Il y eut, en 1682, une inondation dans la Zélande , qui fub- mergea plus de trente Villages. Ce fat un bonheur pour la Hollande que le vent de Sud-eft gagna fur celui du Nord-oueft ; car la mer étoir fi enflée, que les eaux fe trouvoient à dix huit pieds plus haut que les terres les plus élevées de la Province , à la réferve des Dunes. On voit affez , par ces combats fucceflifs , que la mer , alliée avec les vents, livre à la terre, fur les confins de ces. deux élémens, les changemens continuels & alternatits, qui arrivent par- tout où ils touchent fur les terres balles. La mer, comme les pañlions hu- maines dans la morale, en accumulant à chaque irruption des rou- veaux obftacles, pofe elle-mème un frein à fa propre fureur, qui la reftraint de plus en plus. C’eft donc ainfi en partie que la terre gagne infenfiblement fur la mer, & s'empare d’une portion de fon ancien baflin , & c’eft ainfi qu'on peut tracer leur champ de bataille par les dépouilles que les eaux ont laiffées fur tout le pays de Bra- banc jufqu’à la chaîne des terres les plus élevées, ou montagnes qui bornent le pays, en s'étendant bien plus loin vers le Nord, & pré- fente les rivages d’un ancien golfe, dont le refte forme actuelle- menñt la mer d'Allemagne. Quant aux limites que M. de Launay afligne à cet ancien golfe, en fuivant par-tout la chaîne des montagnes , ou terres élevées, que ces différentes contrées préfentent, je me contenterai de dire, fans en faire le dénombrement en détail, d’après mon Auteur , qu’elles me paroifloient à peu-près les mêmes, que Dom Mann afligne dans fon Mémoire, & dont il a tracé la ligne fur la carte qui l’accom- pagne. Pour la conclufon de ce Précis du Mémoire de M. de Launay, voici ce qui me paroît directement fuivre de toutes ces obfervarions prifes dans une vue générale. 1°. Que toute la terre a été autrefois couverte des eaux de la mer, fans en excepter les plus hautes montagnes, comme l’Hiftoire, tant facrée que profane, aufli-bien que les Obfervations des plus célèbres Naturaliftes, paroiffent le démontrer. 2°. Que les différens pays les plus méridionaux, & par conféquent plus élevés que les pays du Nord, tirant vers le pole, ont commencé les premiers à paroître , quand le Patriarche Noé, avec fa famille, en a pris poffeflion. 3°, Que les autres pays font fortis des eaux par degrés, à proportion que 124 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, , les hommes fe font mulcipliés far la terre, qui ont aufli de leur part concouru , avec les forces phyfiques de la Nature , à repoufler les eaux de la mer, & deffécher les terres qu'ils occupent fucceflivement. 47. Que les mêmes caufes Phyfiques qui repouffent la mer, en éten- dant peu-à-peu la verre habitable , ont agi en tout tems depuis le déluge général, & continuent encore à déployer leur puiffance na- turelle, mais avec beaucoup moins de force & plus lentement dans une certaine raifon qui décroit toujours, & qui n’eft fenfible qu’a- -près une fuite de plufieurs fiècles. Cela paroît très-évident par l’a- baiflement continuel de la mer Baltique , obfervé depuis près de 200 ans par les Phyficiens du Nord. $°. Que cette fuppofition, très-na- turelle & crès-conforme aux phénomènes, rend raifon de tour ce qui a jamais été obfervé par aucun Naruralifte, en mettant le baflin de la mer à découvert par degrés, pour le convertir enfuite en terre habitable. Enfin, que l’ancienne terre ante-diluvienne , placée où V'Afe fe trouve aujourd’hui, eft localement la même qu'elle eft ac- tuellement dans ces climats, mais non pas phyfiquement, & cela paroît clair, par les conféquences phyfiques qu'on doit attendre na- turellement d’un boulverfement rotal, cel que les eaux du déluge ont dû caufer , ainfi que par les paroles très-claires & frappantes de l’A- pôtre Saint-Pierre parlant de cet évènement : Later enim hoc volen« Les , quod cœli erant prius , G terra de aqu&, Ë per aquam confiflens Dei verbo ; per quæ ille tunc mundus aqua inundatus periit ; cœli autem gui nunc funt 6 verra eodem verbo repofiti funt , igni refervati in diem Judicii & perditionis impiorum hominum. Ep. Sancti Perri , Cap. 3, Ve S » G» 7e LEE De FRS UE Sur la Fontaine ardente du Dauphiné; par M, D. S$, Jravors efpéré, Monfeur , que votre invitation (1774,Tom.4.p.2$7.) avoit engagé l’Auteur de la Differtation fur les Cuves de Sallenage, à nous donner de la mème main , une defcription de la Fontaine ardente du Dauphiné; & quoique j'aie vu & examiné cette préten- due merveille, je fuis perfuadé qu'un Obfervateur aufli exact , au- roit mieux vu les chofes auxquelles je fis attention , & qu'il en au- roit vu beaucoup d’autres qui m'échappèrent ; mais fon filence me fait juger qu'il n’a pas eu occalon de voir cette fingularité du Dauphiné : pourrois-je cependant , Monfieur , fuppléer à fon défaut, en SUR L'HIST. NATURELLE ET LES.ARTS. 125 en vous marquant tout ce qu'un Mémoire de feize à dix- fept ans peut me rappeller au fujet de ce phénomène de la nature. Etant en garnifon à Grenoble, je fus curieux de voir ce qu'on appelle en Dauphiné la Fontaine qui brüle , & qui n'eft rien moins wune fontaine : je me rendis, à cer effet, à un villige nommé Saint-Barthélemy , qui eft à quatre lieues au fud de Grenoble , & à une portée de canon de la Fontaine ardente : j'y pris un guide qui étoit dans l’ufage d'y conduire les curieux , & qui ne me parut pas moins émerveillé du feu qu’il éroir accoutumé d'y voir , que peuvent l'être ceux qui le voyent pour la premiere fois : mon puide, avant de partir , me prévint qu'en artivant fur le lieu, je ñ’y ver- rois point la Aamme qui s'étoic éreinte depuis plus de quinze jours ; mais qu'il la rallumeroit avec un briquet & une allumerte dont il fe munit:il me propofa aufli d'y porter une poële & des œufs pour ÿ manger une omelerre , comme aifoient prefque tous les curieux qu'il y conduifoit : mon guide, muni de tout cet attirail , me con- duifr fur le lieu; & voici ce que j'y vis , autant du moins que la mémoire peut me le rappeler. Dans un terrein montueux & fort inécal, je vis un petit ruiffeau qui couloit au fond d’une efpèce de ravin, d'environ deux roifes d’enfoncement , & dont les pentes la- térales n'étoient pas roides : mon guide me montra, dans la pente qui éroir du côté du nord, & dans fa partie fupérieure , un petit efpace de terre, qu’il me dir être celui d'où fortoient les flammes qu'il alloir me montrer dans l’inftant : je crus devoir ralentir un peu ‘fon ardeur, & me donner le loifir d'examiner ce terrein avant qu'il l'enflammt : l'efpace de terre qu'il me dir devoir être couvert de flammes , me parut avoir environ une toife de long, fur 3 à 4 pieds de large ; & malgré mon attention pour tâcher d'y décou- vrir quelque ouverture qui püt donner iffue à la Aamme , je n’en rencontierai aucune : la main que j'appliquai en plufieurs endroits du terrein brûlant, ne m'y fit reconnoitre aucune différence de cha- leur d'avec l’autre terrein, & j'eus regret en ce moment, de ne m'ê- tre pas muni d’un thermomètre : l'eau du ruifleau qui couloit au- deffous & au fond du ravin, me parut au taét n'avoir pas plus de chaleur que toute autre eau courante, ni aucun goût bien diftinct; quant au terrein d’où fort la flamme , il me parut être une efpèce de roc mort, ou pour mieux dire , une terre endurcie, d'une vraie couleur de brique ordinaire ; j'en pris quelques échantillons , & l’e- xamen que j'en fis lorfque je fus de retour, me fit reconnoître cette pierre ou terre pour un fchifte altéré par le feu 5 elle contenoit des parties calcaires , qui ne faifoient que la huitième partie de fon poids , mais fuffifante pour donner lieu à l’eau forte de diffoudre la pierre avec effervefcence ; & la même diffolution ayant été précipi- Tome VIT, Part. II. 1775: t 3 126 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, tée par l’huile de rartre, me donna des indices certains d’une ma» tière graffle ou huileufe, qui provenoit fans doute du foufre dont la pierre étoit impregnée. Le terrein qui entoure celui d’où fort la flamme , eft un fchifte noir & fiflile, dont une partie eft réduire en pouflière , & principa- lement la partie fupérieure du terrein qui avoifine le plus celui d’où fort la flamnie : fur cette terre noire , on voit l'apparence d'une cen- dre , ou fuie blanche, que mon guide me dir être du falpètre , ainfi qu'il l'avoir oui dire à plufieurs des curieux dont il avoit été le conducteur : l’on trouve en effet, dans les Mémoires de l’Aca- démie des Sciences, année 1699. le rapport d’un Obfervateur , qui dit qu'il y a une efpèce de falpètre blanc & fort âcre aux environs de l'endroit où eft le feu : je ramaffai une petite quantité de ce fel , & l’obfervation ou‘examen que j'en fis à mon retour, me fit voir que ce fel n’avoit rien de nitreux ; il ne donna aucun figne de dé- ronnation fur les charbons ardens ; le feu ne le mit point en fufon, & fa faveur , ainfi que fa cryfallifation, ne furent point celles du nitre : je reconnus enfin ce fel pour une efpèce de fel ammoniac , qui mé parut être exactement le fel ammoniac des volcans, que Wallerius dans fa minéralogie a rangé dans le genre 34° efpèce 198, & qu’il dit contenir, outre un mélange de quantité d’autres matiè- res , béaucoup de parties fulfureufes, & des matières vitrioliques , felon l'obfervation de fon traducteur ; & c’eft en effet ce que j'ai cru reconnoître dans le fel que j'ai examiné. Tout le terrein enfin qui environne celui d’où fort la flamme, & principalement celui qui lui eft inférieur & latéral, eft un fchifte noir & fiflile, en lames ou feuillets qui lui donnent l'apparence d’une ardoife : on trouve fur plufieurs de ces feuillets, des emprein- tes de coquilles, & principalement des lames. \ Pendant que je ramaffois les échantillons dont je viens de parler, mon guide avoir préparé fes œufs, & rien ne le retenant plus pour allumer fon feu , il battit fon briquet, jerta l’alumertre embrafée fur le terrein d’où devoit fortir la flamme , & dans le mème inftant je vis tout cet efpace de terre couvert d’une flamme légère, & qui pa- roiffoit fotter fur cette terre , comme paroît la flamme que l’on voit fotter fur l’eau-de-vie que l’on brûle : ce fut fur cette flamme que mon guide fit cuire fa déteftable omelette : j’eus la curiofité d’en goûter , & c'elt tout ce que m'en permit un goût de foufre , qui n'étoit gueres fupportable : quant à la flamme en elle-même, je ne pus juger ni de fa couleur , ni de fa hauteur : un très- beau foleil qu'il faifoit ce jour-là, ne permettoit pas de voir ni l’une ni l’autre de la même façon qu’on les voyoit lorfque le rems étoit fombre ou couvert : j'avois jugé que la couleur devoir être bleuâtre ; & mon SUR L'HIST. NATURELLE ETIES ARTS. 127 guide me difoit qu'en. effet elle le paroifloit pendant la nuit ; mais au foleil , je ne voyois qu’une flamme roufle : mon guide me difoit aufli que la flamme s’élevoit de quatre à cinq pieds , & même plus lorfqu’il pleuvoit ; & je ne voyois cette flamme qu'à environ un pied, ou un pied & demi au-deflus de la terre : 1l me reftoit enfin un doute à éclaircir , & qui me faifoit reyretter l'oubli du ther- momètre : j'aurois voulu favoir quelle éroit la chaleur de la terre dans fon intérieur , ou du moins fous fa furface : pour y fuppléer, je fs un petit trou dans la terre, dans un endroit qu'aucune flamme ne couvroit, mais qui en étoit le plus près qu'il fût poflble ; j'y enfonçai le doigt, & je n’y reconnus aucune chaleur différente de l’autre terre; mais peu de minutes après je fus obligé d'en retirer mon doigt ; la flamme vint s'emparer du trou par une communica- tion fupérieure , & de la même façon exaétement qu'une chandelle nouvellement éteinte & encore fumante , fe rallume fi on l'approche, & qu’on dirige fa fumée vers une chandelle allumée ; la flamme vint ainfi remplir le trou que j'avois fait , & en couvrir tous fes en- virons. D'après ces obfervations , je crus que je pouvois en conclure qu'il fe fait continuellement une émanation d’exhalaifons fulfureufes & falines, qui traverfent cette furface de terre fans être dans un état de chaleur ni d’effervefcence , ni même de fermentation , comme s'élèvent les vapeurs d’un efprit-de-vin qu’on place dans un vafe dé- couvert ; qu'on enflamme ces exhalaifons du terrein brûlant , comme on enflamme celles de l’efprit-de-vin ; & quant à ce que l’on ob- ferve que ce feu fe rallume de lui-même, on obferve aufli que ce n’eft jamais dans un tems fec, mais dans un tems humide ou plu- vieux ; & l’on fait que des vapeurs émanées de matières froides , font en certaines circonftances , fujettes à s’enflammer par le moyen de l’eau Boerhave en cire divers exemples ; & rout le monde con- noît l'expérience du mélange d’une limaille de fer bien broyée avec une certaine quantité de foufre , qui, expofé à un air fec, refte froid aufi long-tems qu’on le préferve de toute humidité; mais qui pétri avec une égale quantité d’eau , s’enfle , s’'échauffe , produit des vapeurs, une fumée fulfureufe , & enfin de la flamme : les exha- laifons du terrein brûlant appellé Fontaine ardente, pourroient avoir quelqu’analogie avec les vapeurs de l'expérience que nous venons de citer : les vapeurs fulphureufes y font les plus manifeftes , & le fel ammoniac des volcans que nous avons reconnu contenir des matières fulphureufes & vitrioliques, forment un mêlange fufceprible d’in- flammation , comme l'obferve Bocrhave dans fes Elémens de Chymie. Telle eft , Monfieur , la prétendue Fontaine ardente du Dauphiné, 128 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, & que l’on cire comme une des fept merveilles de cette Province + merveille néanmoins qui n’eft, que femblable aux éruprions de flam- mes qui fe font en divers autres lieux où l’on n’a pas cru devoir les honorer de ce titre : telles font, par exemple , les flammes qui fortent fréquemment de la verre à Barigatia en Italie , & dont il eft fair mention dans les Mémoires de l’Inftitut de Bologne. M. Galeati, membre de cette Académie , qui les obferva en 1719, & avec les yeux d'un vrai Naturalifte, dit que ces flammes s’élevoient à la hauteur d'un pied , & quelquefois de deux ; qu’elles refflembloient par leur couleur , à la flamme ordinaire, qu’elles répandoient une odeur de foufre, & enfin que la chaleur des flammes ne fe faifoic fentir qu'à un tres-perit efpace, ce qui eft encore un effet des flammes de la Fontaine ardente du Dauphiné, dont j'avois oublié de faire mention, & qui montre ainfi une conformité parfaite : je crois donc pouvoir conclure fur la Fontaine ardente du Dauphiné, comme M. Galeati fur les Aammes de Barigatia , que ces exhalai- fons ne font point chaudes tant qu’elles font renfermées dans le fein de la terre , & qu’elles ne s'enflamment que par l'approche d’un feu, où par le contaét de l'air, ou par les impreflions des vapeurs aqueufes dont il eft chargé; & enfin qu'on ne doit pas être furpris, & moins encore ttouver merveilleux que la nature produife des flammes par un procédé analogue à l'expérience de Boerhave que nous avons cité ci-devant , ou à celui du pyrophore, qui ne s'en- flamme que par le contaët de l'air. NU PISE 2 AM A I A 4 Sur les Cogs & Poures de l'Amérique Méridionale ; Par M. SONNINI DE MANONCOUR. uorque tous les Naturaliftes fe foient accordés à faire du Coq un genre d’oifeaux, particulier à l’ancien continent & abfolument étranger au nouveau (1), il eft cependant affuré que dans quelques parties de l'Amérique Méridionale , il exifte une race de Gallina- cées, qui probablement eft connue des Sauvages du Pérou & du Bréfil, &c., puifqu’elle l’eft des Indigènes de la Guianne, fans que leur in- (1) Acoffa eft le feul qui ait dit le contraire , il foutient avec raifon que les Poules exiftoient au Pérou avant l'arrivée des Efpagnols, & qu'elles s’appeloient gans la langue du pays Gualpa, & leurs œufs Ponce, dolence SUR L'HIST. NATURELLE ET LES ARTS. 119 dolence leur ait permis de chercher à s’en approprier l’ufage & à les multiplier. Ces oïfeaux y font, à la vérité, très-rares, & n'ha- bitent que l’intérieur des défests ; aufli les habitans des côtes n’en ont aucune idée. Je peux joindre à mon témoignage celui des perfonnes qui ont pénétré avec moi dans les folitudes de la Guianne; nous avons fouvent entendu , vers le commencement du jour, un cri parfaite- ment femblable à celui de nos Cogqs, mais beaucoup moins fort; les Indiens qui nous accompagnoient, nous ont die qu'il étoit produit par les Coqs fauvages. Dans un de ces voyages, j'ai vu moi-même très-diftinétement fur une montagne, un oifeau de la groffeur d’un pigeon, de couleur brune, portant fur le fommer de la tête une crête de chair rouge, & ayant les aîles courtes & la queue difpofée comme celle de la poule , dont elle avoir le port & la démarche en fe promenant à terre ; j'ai eu le tems de l’examiner, car elle éroit peu Érbèke Le Nègre, qui por- toit mon fufl, s’étoit arrêté derrière moi, & lorfqu’il m’eut rejoint, elle s’étoit enfoncée dans le bois, & nous la cherchâmes inutilement. Ce fait dont j'affirme la vérité & l'exactitude , le chant des Cogqs, & la connoïffance qu’en ont les Naturels du pays , ne doivent laiffer aucun doute fur l’exiftence des Gallinacées dans quelques parties mé- ridionales de l'Amérique : de quelle manière on fuppofe qu'ils y foient pallés , ils ont dû néceffairement fubir l'effet de l'influence du climat, & différer de ceux qui habitent parmi nous : ainfi, de ce que l’on a tranfporté dans ces contrées des poules de l’ancien Con- tinent qui ont paru nouvelles pour les habitans qui n’en élevoient point , il fuit feulement que l’efpèce qui y eft naturelle, eft différente de celle que nous connoiflions, & que les Indiens, avec moins de be- foins que les Européens , & avec plus de dégoût pour tout genre de travail, peu fixés d’ailleurs dans leurs érabliffemens (1) , n'avoient fe plus cherché à rendre domeftiques les Poules de leur pays, que es Hoccos qui , avec autant de difpoñrion à s’apprivoifer , auroient été d’une plus grande utilité, Huiuiils auroient fourni une nour- riture plus abondante. 2m (x) Ces Sauvages doivent être regardés plutôt comme des peuples chafleurs ; que comme cultivateurs; auf lorfqu'ils ont diminué la quantité de gibier qui les entoure, ils quittent aifément leur demeure, & s'établiflent avec la méme facilité gens un autre canton, 130 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, EEE mme OBS ERA Ti NON D'une propriété fingulière de la Serpentaire; Par M. De MORVEAU. S ury ANT les Expériences de M. Prieftley , la végétation rétablit Pair vicié, & devenu nuifble par la vapeur des corps enflammés , ou par la refpiration des animaux: ce Savant paroît avoir employé à deffein différentes efpèces de plantes, telles que la menthe , la mélilfe , le feneçon, l'épinars; & le fuccès conftant l'a porté à croire que cer effet ne dépendoit pas des efiluves aromatiques, Mais uni- quement de la végétation, au moyen de laquelle les plantes ab- forboient probablement le phlogiftique dont l'air étoir furchargé. (Exp. fur différentes efpèces d'air, trad. de l'Anglois par M. Gibelin , page 63 € fuiv.) L'Arum m'ayant préfenté une forte d'exception à ce principe général , j'ai penfé qu'il pourroit être intéreffant d'en confta- ter l’obfervation. L'Arum appellée Serpentaire ( Dracunculus), porte une fleur dont le piftile entouré de fruits à fa bafe , eft rerminé par une efpèce de, colonne (fpadix); cette partie répand une odeur putride infuppor- table, qui me fit foupçonner que loin de rétablir l'air, vicié,, certe plante croit plutôt capable de le vicier elle-même, du moins pen- dant la durée de fa Aoraifon : pour vérifier cette conjeéture, j'ai fuivi la méthode que nous a donnée M. Prieftley pour déterminer le degré de qualité refpirable des différens airs ; en conféquence,, j'ai mis cette partie de la fleur récemment cueillie, fous une cloche de verre, dont les bords inférieurs plongeoïent dans l’eau , pour que l'air qu’elle renfermoit , s’impregnât de fon odeur ; je l'y ai laiffe pen- dant l’efpace de 24 heures , après quoi j'ai fait pañler $ pouces de cet air dans un cylindre où j'avois précédemment introduit un pa- reil. volume-d’air. nitreux; il. n’y-a-eu-ni effervefcence, ni-abforp- tion ; l’eau n’eft pas même montée d’une ligne, tandis que le mé- lange de deux pareilles mefures d'air nitreux & d’air commun , oc- cafonne une ablorprion de deux pouces 4 de hauteur dans le, même cylindre. | Pour connoître fi cet effet n’eft pas dû , au moins en partie, au progrès que la putréfaétion auroit pu faire fur cetre fleur ainfi dé- tachée de fa tige, j'ai enfermé d’autres fleurs cueillies dans un deu 1, ÉMARREE LS FE 4 SUR'DHISTENATURELLE ETILES ARTS, 131 gré plus avancé de matutité , fous des cloches de même capacité , pendant un tems beaucoup plus long, & l’abforprion avec effervef- cence a été encore très-fenfble : il y a plus, j'ai cueilli une autre fleur de ferpenraire, je l’ai laiffée à l'air libre l’efpace de 36 heu- res, pendant lefquelles elle a perdu prefque toute fa mauvaife odeur : au bout de ce tems je l’ai tenue aufli pendant 36 heures fous la cloche renverfée ; la dégénérefcence putride devoir avoir cette fois un effet plus marqué , maïs tout au contraire , l’air qui avoir été renfermé avec cette fleur , mis à l'épreuve du mêlange d'air nitreux , fe trouva beaucoup moins gâté , puifqu'il y eut ef- fervefcence ; vapeur rouge, & abforprion de près d’un pouce cy- lindrique. Je n'ai pas héfiré de conclure de ces expériences que l’air avoit été abfolument infeété la première fois par les émanations de certe partie de la fleur de ferpentaire, & qu’il l’auroit été également fi j'avois pu placer fous la cloche la plante même vivante, parce qu'il n'eft pas probable que la végétation eût corrigé ces émanarions , ou détruit leur effet avec une égale rapidité & prefque inftantanémenr. Il réfulte enfin de cette obfervation ; que le figne de l’odeur n’eft É auffi équivoque que l’on le penfe communément pour annoncer es qualités des corps odorans , que la Nature proëuit l'odeur pu- tride par voie de compoñtion ; comme par voie de defruétion, & qu'elle n’eft pas alors moins nuihble ni moins fufceprible de vi- cier l’air que lorfqu’elle vient de la putréfaction des fubftances ani- males ou végétales, AMENER EATTENENER D'une Lettre de M. DE MAGELLAN , relative au nouveau voyage autour du Monde fait par le Capitaine Cook , & à quelques expé- riences fur l'Air fixe. \ ous avez peut-être appris que le Capitaine Cook étroit déja arrivé de fon voyage autour du monde; c’eft une méprife de cenx qui l'ont avancé. Cet infatigable Marin eft feulement au Cap de Bonne- Efpérance , d'où je viens de recevoir une lettre de M. Forfter, datée du 22 Mars dernier. Le Capitaine Fourneaux arriva julqu’au 67e. degré de latitude au Sud, mais le Capitaine Cook a pénétré . » # 1 4 pc s # LA jufqu'au 71e degré 10” du Sud, & pailé jufqu'au 106€ degré 30" 532 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, à l'Oueft de Gréenwich. Il n'y a pas de terre ferme dans cette pofition ; mais il a trouvé plufieurs Îfles , dont quelques- unes ont jufqu’à So lieues de longueur. M. Forfter apporte environ 260 plan- tes nouvelles, & 200 efpèces d'animaux inconnus, en comprenant les poiffons dans ce nombre. Voici comment ce célèbre Naturalifte s'explique dans fa lettre : » Notre voyage a été fi heureux, que je ne crois pas qu'on fafle de nouvelles découvertes géographiques fur les prétendues terres auftrales. Nous pouvons nous flatter d’avoir fair de notre côté une collection confidérable, quoique nous n’ayons pas eu , à beaucoup près, les grandes reflources de M. Banks... . J'ai parcouru la relation publiée pat M. HAwWsKkEsWORTH, & au premier coup-d’œil elle m'a para remplie de faits exagérés & très-peu qui foient bien exacts... Il ne faut pas fe faire une idée trop défa- vantageufe de nos nouveaux Zélandois, quoiqu’ils ayent maffacré 11 Anglois de la chaloupe l’Aventure | & mangé le Capitaine François Marion avec vingt-trois hommes de fon équipage. Je puis vous affurer que ce font de bonnes gens qui ne traitent point mal les Etrangers. Je me fuis trouvé prefque feul au milieu d'eux , & ne puis que me louer du traitement que j'en ai reçu. On retrouve chez eux les témoignages d’honnêteté avec lefquels une Nation, qui n’eft point civilifée , peut vous accueillir. J'ai appris par d’autres du mème voyage, que la montre marine faite par M. Kendal, à limitation de celle de M. Hariffon, avoit eu le plus grand fuccès, donnant la longitude de ce vaifleau avec la plus grande précifion. On n’a pas perdu , pour caufe de maladie, un feul homme de l’équi- page pendant un voyage d’un fi long cours. On attribue cet heureux effer à l'nfage falutaire du /ourkrour( ou chou porté à 1 fermention acide), & à la boiffon du Wors ( ou malt de bière), qu’on diftribuoit à l'équi- page. Je ne fais fi on a fait également ufage d’eau imprégnée d’air fixe. J'avois, dans le tems, préparé pour ces voyageurs les chofes néceffaires à cet effer. Cette méthode étoit la plus expéditive alors ; mais aujour- d’'hui on a préparé à Londres un appareil en verre ou en cryftal, au moyen duquel on fait ce mêlange d'air fixe avec l'eau avec beaucoup plus d’aifance, cependant elle exige plus de tems, & il faut deux ou trois heures pour que l’eau foit bien chargée d'air fixe. Le Docteur Highius démontre , à ce que l’on prétend, par une grande variété d’expériences , 1°. que l'air fixe eft compofé d'air commun & de phlogiftique, maïs que fouvent d’autres marières entrent dans fa compofition ; 2°. que toutes les fois que le phloviftique eft mêlé avec l'air commun, alors cet air eft ce qu’on appelle air fixe. ( Voyez la note rapportée à la fin de ce Mé- moire). Le Docteur Prieftley, dans une lettre que je viens de re- cevoir s SUR L’'HIST. NATURELLE ET LES ARTS. 133 cevoir de lui, dit autrement, c'eft-à-dire, qu’il ne penfe pas comme le Doéteur Highius, fur la nature de cer air, & il avoue qu'il ne fait rien de certain là-deflus. 11 ajoute que fes expériences poftérieu- res lui ont donné des réfulrats finguliers, & qu'il prépare un fe- cond ouvrage qui contiendra des faits peut-être encore plus fingu- liers que ceux rapportés dans le premier volume. Revenons à la manière de penfer de M. Highius, & voici en abrégé quelles fonc fes affertions. 1°. Si on mer le pyrophore de M. Homberg , ( com- pofé , comme on le fair , avec l'alun & le froment brûlé & réduit en charbon) dans une phiole au-dedans d’un récipient, l'ait s'im- pregne du phlogiftique qui s'échappe du pyrophore & devient ait fixe. 2°. Lorfque le charbon brûle , le phlogiftique qui s'en dégage, mêlé avec l'air commun , fait l'air fixe. 3°. Une chandelle qui brüle dans un récipient, rend l'air qui eft dedans air fixe. 4°. La cal- cination des métaux où le phlogiftique fe dégage du corps métal- lique dans un vailleau fermé, en rend l'air fixe. 5°. Le foie de foufre qui conffte dans l’union de l'acide vitriolique avec le phlo- giftique & l’alkali fixe , étant expofé à l'air , eft décompofé , 1l ne refte qu'un carre vicriolé, c'eft-à-dire, l'acide vitriolique & l'air fixe ; mais l'air dans lequel le phlogiftique eft reçu, devient air fixe. 6°. Dans la fermentation végétale, c’eft l'air & le phlogifti- que qui s’en dégage, c’efl-3-dire, l'air fixe. 7°. Les peintures , huiles & matières odorantes qui, comme on Le fair , fe déchargent de leur phlogiftique, rendent l'air fixe. 8°. Le phofphore de Kunkel (ou d'urine), étant décompofé dans l'air lentement , rend cer air fixe par le phlogiftique qui s'en dégage. 9°. La terre calcaire ré- duite en chaux , exhale fon phlogiftique , en remplit air voilin , & par conféquent l'air qui environne les fours à chaux, eft phlo- giftiqué , ou eft air fixe. 10°. Enfin, lorfqu'on mêle de la limaille de fer avec le foufre, & qu'on pétrit ce mêlange avec de l’eau, le phlogiftique en fort , & ce qui refte eft l'acide vitriolique chargé de fer; mais l'air qui reçoit le phlogiftique devient air fixe. à On voit que dans toutes les matières dont on vient de parler, il ny a rien de commun que le phlogiftique ; & que toutes les fois qu’il fe dégage ces matières & qu'il fe mêle avec l'air, alors cet air devientsfixe. On voir encore dans l'expérience de M. de Laval fur le #/eu de Pruffe , que le fer réduit en petites particules, étant phlogiftiqué (ce qui fait le fond du bleu de Prufle }, étant une fois diffous par l'huile de vitriol , prend une couleur brune; mais aufli-tôt qu'on y mêle de l’eau, celle-ci s'empare de l'acide, &c alors le vrai bleu de Pruffe reprend fa couleur primitive. De même dans le foie de foufre , fi l’on n'y ajoutoit pas de l’eau, on fi l'air Tome V1, Parc, Il, 3775. É « 134 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, n'avoit pas d'humidité , il ne fe décompoferoit pas. En y ajoutant de l’eau, le phlogiftique fe dégage, & fe mêlant avec l'air, le rend air fixe. Qu'arrive-t-il dans la calcination des métaux ? À l’air libre, le phlogiftique s'empare de l'air & le rend fixe ; au lieu que fion travaille dans des vailleaux fermés , alors il n'y a que la petite portion du phlogiftique qui trouve de l'air libre pour s’unir à lui, ce qui fait que la calcination n’agit que fur une des plus petites parties. Tour le refte ne fe calcine point. L'expérience du Pere Beccaria de Turin, vient ici fort à propos. Ce Phyfcien prit de la limaille d'érain & la mit dans une phiole de verre, qu'il fit ca- cheter-hermétiquement avec un grand flacon de verre, en fondant les deux embouchures à la lampe. Il marqua avec un lime l’en- droit où ces deux flacons fe trouvoient en équilibre. Il mir le petit facon avec la limaille fur une flamme d’efprit-de-vin, & ob- ferva toujours qu'il y avoit une petite pellicule de calcination pro- portionnée à la quantité d’air du flacon , c'eft-à-dire, plus grande lorfque le flacon étoit plus grand. Le poids total éroit toujours le même (des deux flacons ainfi fellés hermétiquement } , tant avant qu'après la calcination ; mais le flacon d’air pefoit plus après , car il ne faifoit pas équilibre avec l'autre lorfqu'on les préfentoit devant la marque faite à la lime. Suivant les expériences du Doc- teur Prieftley & de M. Lavoiler , cet air contenu dans le grand flacon , étroit un ar fixe, & on voit en mêème-tems, fuivanc la théorie du Docteur Highius, que c'étoit le phlogiftique qui s’é- chappoit de la partie calcinée de l'érain qui rendoit cet air, air fixe ; car cet le phlogiftique qui, par la féparation du métal , le rend calciné. Enfin, qu’on confidère ce qui arrive dans l'eau de chaux. La terre calcaire qui y eft, fe trouve privée de fon air & de fon phlogiftique par la calcination ; qu'on y ajoute de l'air fixe, d'abord il s’unira avec fa partie verreufe , elle fe précipi- tera & deviendra trouble, &c. CEŸRD Fe } SUR L'HIST. NATURELLE ET LES ARTS. 135 CONSIDÉRATIONS OPTIQUES. IX. MÉMOIRE(:) Sur les Lifières lurmineufes. Par M. D. T. Correfpondant de l Académie. LÉ: phénomène, dont nous allons nous occuper, femble deftiné à rendre vilibles les armofphères optiques, du moins nous en trace- t-il une image exacte. Les lifières lumineufes en font la projection, comme l’ombre eft la projection des corps qu’elles environnent. L’om- bre & les lifières lumineufes , celles-ci produites par les rayons que les armofphères optiques tranfmettent, l'ombre due à l’abfence de ceux qe les corps interceptent , croiffent de mème à mefure qu’el- les s’éloignent de ce qu’elles repréfentent. Le Pere Grimaldi eft le premier , je crois, qui ait parlé de ces lifières lumineufes. M. Maraldi en fait mention aufli dans fes diver- fes expériences d'optique (2). I les a mème diflinguées en plein fo- leil, & illes qualifie de trait de lumière plus éclairé que celle qui croit reçue fur le reftant du papier qui étoit expofé au foleil. Il feroit difcile de fe perfuader que M. Newton ait manqué de les obferver. Cependant il ne les défigne nulle part dans fon Oprique , c'éroit le lieu de parler de cette apparence dans quelqu’une des huit premières Don du troifième Livre. Envain les y ai-je cherchées. Ce qu'il dir dans la feptième , que les rayons, qui for- ment les radiations, dont il eft queftion dans la cinquième & la fixième , paffent plus près du corps diffringent ( de la lame de cou- teau), que ceux qui forment les franges colorées , ne peut s’enten- dre des rayons qui formeroient les lifières lumineufes , lefquelles font affez étroites & bien déterminées , puifqu'il s’agit-là d’une gerbe de lumière diffufe qui embrafle quelquefois un angle de 12 à 14 degrés. 2. Les lifières lumineufes, immédiatement contiguës à l'ombre (x) Voyez le premier Mémoire 1773 , tome 1, page 368. Le fecond , troifième & quatrième , au tome 2 de la même année, pages 11, 271, 349. Le cinquième & le fixième 1774, tome 3, pages 27, 116. Le feptième & huitième 1775, tome $, pages 120, 230. - (2) Mém. Acad. 1723, page 123. S12 136 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, d’un corps expofé à un trait de lumière admis dans la chambre ob- fcure , font produites par des rayons qui traverfent fon atmofphère fans le rencontrer. Leur reinte eft ordinairement d’un blanc de lait, au moins quand le trait de lumière eft affez ample pour qu'il y en ait une portion qui pale en dehors de l’atmofphère optique, & qui n’effuie aucune déviation, tandis que celle qui la traverfe & va former les lifières lumineufes fur un carton, s'y réfraéte , tant à fon immerfion qu'à fon émerfion , dans un fens qui l’écarte de l'axe de la projeétion de l'ombre du corps diffringenr. Il en arrive que ces derniers rayons, à leur émerfon de l’atmof- phère, convergent avec les premiers, & les croifent enfuite plus ou moins loin du corps diffringent , & que le carton deftiné à les re- cevoir, étant placé à une certaine diftance , les mêmes endroits où aboutiffent ceux de ces rayons qui fe font pliés dans l’atmofphère de ce corps, en reçoivent en même-tems d’autres qui n’ont pas été infléchis , & qui, venant direétement du trou qui tranfmet la lumière , ont paflé en dehors & à côté de l’atmofphère (1). Ces rayons réfractés déterminent, par l’érendue qu’ils embrafflent fur le carton , la largeur des lifières lumineufes; & c’eft au mêlange des autres rayons qui ne font pas réfraétés, qu’eft due la blancheur de la ceinte des lifières lumineufes , qui diffère cependant de la teinte des endroits contigus où ces derniers tombent feuls, & dont diffère encore plus la teinte des lifières lumineufes qui ne feroient dues uniquement ou prefqu'uniquement qu'à des rayons réfractés dans l’atmofphère optique. 3. On peut fe rendre certain, par une épreuve affez fimple de ces différences , dans les deux cas où un endroit du carton, occupé par une lifière lumineufe, reçoit d’abord à la fois les rayons qui ont traverfé l’armofphère du corps diffringent, avec un grand nome bre d’autres qui n’ont paffé qu'à côté, & enfuite les premiers, ou feuls , ou mèlés feulement avec une très-petite quantité des der- niers. Placez le carton , où fe projette l’ombre d’une épingle em- ployée pour corps diffringent, à une diftance telle que les lifières lumineufes, qui accompagnent cette ombre, foient un peu larges. Faites enfuite avancer l’épingle peu-à-peu & perpendiculairement (x) Voyez la fig. 1, pl. 1, ou du trait de lumière admis par le trou N, il paffe 2 côté du corps X dans fon atmofphère , deux germes de rayons NBECD, & Nôecd qui y fonc.réfractés, & avec lefquels s'entremélent au-delà Les rayons dire@s, & non infléchis , des deux gerbes NAV, N au. Nous parlerons ci-après, n°. r6, de l'effet que produifent ceux de ces rayons dire@s qui tombent fur les portions A D, a d de l'ombre comprife entre les deux lifières lumineufes DE, de, ou HdétiEisE LA 4 ‘ { 0 SURVEUNS EN NAMURELLENETÉ LES ARTS) 137 au trair de lumière (admis par une fente affez étroite & terminée par des lignes droites) , jufqu'à ce que l’un des bords extérieurs de fon atmofphère rafe les limites du trait de lumière, ce qu'on reconnoît avoir lieu quand, fur le carton, le bord extérieur d’une des deux lifières lumineufes s'étend un peu en dehors de l’image folaire produite par le trait de lumière (1). On remarquera que cette lifière qui, moyennant cette difpolition, ne peut être teinte que par des rayons qui traverfent l’atmofphère de l’épingle , & à qui aucun de ceux qui viennent directement de la fente fans elfuyer de réfraétion, ne peut plus parvenir , change de teinte & devient d’un gris bleuâtre, tandis que l'autre lifière conferve toute la vi- vacité de fa blancheur. 4. De mème fi on place dans le trait de lumière deux groffes épingles à une certaine diftance de la fente étroite par laquelle il elt introduit, & l’une à environ une ligne plus loin que l’autre, & que dans le fens perpendiculaire au trait de lumière, elles éroienct tellement rapprochées de fon axe qui les fépare, qu'il ne pale entr'elles d’autres rayons que ceux qui peuvent fe tranfmertre par leurs atmofphères ( ce qu'on s’affurera avoir lieu quand, fur le car- ton tenu bien près des deux épingles, les deux lifières lumineufes correfpondantes s’entreroucheront), & qu’enfuite enfin le carton foit éloigné peu-à-peu , on verra bientôt que ces lifières contiguës qui augmentent de largeur & fe croifent de plus en plus, prendront une teinte bleue entière de la blancheur que confervent les deux autres lifières lumineufes ; les premières fe reffentent de la perte des rayons qui viendroient directement de la fente fans effuyer de ré- fraction , & dont les fecondes ne font pas privées (2). (1) Voyez la figure 2, dans laquelle l'épingle X eft placée de façon que le bord de fon atmofpère coincide fur les limites du trait de lumière, enforte qu'il ne peut parvenir de la fente N aucun rayon dire, & non refraëté , que [ur la portion BG du carton ( ceux qui fe dirigeroïent fur la portion G D, étant in« terceptés, foit par le corps X, foic par fon atmofphère), & qu'ainfi ceux qui produifent la lifière lumineufe E, ne font que de ceux qui ont été réfraétés dans l'atmofphère de l'épingle. Voyez aufli la figure 3, qui rend l'apparence produite fur le carton dans ces circonftances, & où la bande obfcure D D d d repréfente l'ombre de l'épinglez les deux bandes claires EE & ee, repréfentent les deux lifières Iumineules , & le cercle AR tout l’efpace que devroit occuper l'image folaire ; duquel cercle le fegment ALR, dont l'arc eft tracé par une ligne continué, repréfente celui fur lequel il fe rend alors, de la fente des rayons direëts, & le fegment APR, dont l'arc eft tracé par des points, celui fur lequel il n'aborde aucun de ces rayons direés, (2) Voyez la figure où felon, une coupe horifontale X , & Z repréfentanr les deux épingles éloignées, l’une un peu plus que l'autre, de la fente N , & 133 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, s. Il eft vrai cependant que dans l’une & dans l’autre de ces expériences , ce n'elt qu'à une certaine diftance des épingles qu’on diftingue ce changement de teinte dans les lifières lumineufes qu’on a ainf fait coincider avec le bord de l’image folaire., ou rendues conriguës entr'elles, & que fi le carton n’eft que peu éloigné des épingles , ces lifières lumineufes ne paroiffent point, ou guères moins blanches que les autres, Cela vient de ce qu'à cette proximité les rayons réfractés & décompofés qui les peignent, font encore trop repliés les uns fur les autres; leur développement, qui ne de- vient plus complet qu'à mefure que l'éloignement du carton aug- mente , étant nécellaire pour que leur décompolition foit rendue bien fenfible. Il arrive à peu-près ici ce qui arrive quand le carton, où s’eft étalé le fpeétre folaire produit par le prifme, en eft rap- proché bien près, & que par-là les belles couleurs du fpectre s’é- vanouiffent, & font remplacées par un ovale blanc. 6. Les lifières lumineufes , quand elles ont tout l'éclat dont elles font fufcepribles, toujours également continues dans l’efpace où abor- dent autour de l’ombre du corps diffringent les rayons réfractés dans fon atmofphère, doivent donc principalement cet éclat à des rayons qui n'ont pas été réfractés , & qui, ayant rafé de plus ou moins près cette atmofphère felon des direétions convergentes à celles des premiers, interviennent fur le même efpace qui en acquiert une teinte toute autre que celle de l’efpace où les autres aborderoïent feuls. Et pour mieux voir jufqu’où cette différence de teinte peur aller, il n'y a qu’à faire tomber un trait de lumière , qui aura été admis dans la chambre obfcure par un trou très-étroit N fur une carte D , fig. 6, percée d’un trou plus large (de douze lignes de diamètre , par exemple), à l'endroit où elle eft percée , & affez éloi- gnée pour qu'une partie des rayons foit interceptée par les entourg de ce fecond trou, & que le refte fe tranfmette au-delà. I] en par- viendra au-delà en T une image folaire qui aura une lifière lumi- neufe en forme de couronne ; dont la teinte tranchera, de la fa- çon la plus marquée, avec celle du cercle lumineux qu’elle em- bralfe. 7. Cette Obfervation nous indique de plus, que quand un trait de lumière s’introduit dans la chambre obfcure, les rayons, qui pañlent le plus près des bords de la fente qui leur livre pañfage, tellement difpofées, que féparées par une ligne N A, elles en foient affez rap- prochées pour qu'il ne pafle entre leurs atmofphères , point ou que très-peu de rayons. C C y repréfentent le carton placé à une diftance à laquelle les lifières lu- mineules internes des deux ombres ont une certaine largeur & s'entrecoupenr. SUR'L'HIST. NATURELLE ET LES ARTS. 139 * font auf réfraétés dans l’atmofphère dont ils font revèrus, dans un fens qui les fait converger vers ceux qui pallent plus loin d-« ià. vres de la fente. La lifière lumineufe ne fe fair cependant pas-dif- tinouer fur l’image folaire due aux rayons tranfmis par ce feul trou même fort large , & cela par la même raifon , fans doute, que l'ombre d’une épingle , expofée en plein foleil , ne feroir pas ac- compagnée de lifières lumineufes fenfibles , c’eft-à-dire , parce que la quantité furabondante de rayons non infléchis, qui interviennent fur les efpaces , auxquels fe dirigent les rayons réfraétés dans l'ar- mofphère du corps diffringent, effacent ou éclipfent totalement la teinte particulière que ceux-ci peuvent donner lorfqu’ils ne fonc combinés qu'avec un nombre proportionné de ces rayons non-in- fléchis. 8. Les endroits du carton , où fe projettent les liaifons lumi- neufes produites par les rayons qui traverfent l’atmofphère d’un corps cylindrique fans le rencontrer, peuvent encore, en certains cas , recevoir des rayons qui fe font réfléchis fur le noyau de l’at- mofphère, & qui font propres à produire des iris on bandes colo- rées. Il a été obfervé dans l'expérience du cerceau décrite au com- mencement du Mémoire fur la diffraétion de la lumière(1), que des iris dues aux rayons réfléchis fur la furface de l’épingle, celles qui étoient les plus prochaines de la projection de l'ombre de l’é- pingle, en étoient encore éloignés de 8 à 9 degrés. Ces rayons ré- fléchis fur l’épingle, formoient peut-être d’autres iris encore plus près de fon ombre , mais qui n’étoient pas fenfibles, étant effacées par la lumière diffufe qui aborde en grande quantité dans cet in- tervalle. Quoiqu'il en foit, il eft certain que les rayons qui fe ré- fléchiffent fur un corps cylindrique , doivent aborder fur le carron & y former des iris d’autant plus près de la projection de fon om- bre, que le cylindre fera plus menu relativement au diamètre du trou , & qu'il en fera plus éloigné, Cet éloignement peut même ère tel qu'il fe dirigeroit de ces rayons réfléchis à l’efpace occupé par les lifières lumineufes , où aboutiffent par conféquent les rayons qui ont été fimplement réfraétés dans l’atmofphère fans y efluyer de réflexion, & qu'ils s'y étendroient prefque jufqu'’aux limites de l'ombre. Et c’eft juftement ce qui avoit lieu dans l’expérience de M. Newton, où 1l plaçoit à douze pieds de diftance du trou, par lequel abordoit le trait de lumière, un cheveu dont il recevoir l'om- bre fur un carton (2). Il s’y manifeftoit des iris, & il réfulre de (tr) Mém. des Sav. Etrang. vel. $. (2)/Opt. Lib: 3Obf 1,2; 3. 540 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, la comparaifon des efpaces qui féparoient les bandes colorées in- ternes , & les largeurs de ces bandes & de l'ombre dont M. Newton a donné les mefures, que ces bandes colorées internes éroient pref- que contigués à l'ombre du cheveu, c'eft-à-dire ; qu'elles occupoient prefque route la place affectée aux lifières lumineufes qu'elles effa- coient. Ce qui montre que les rayons propres à former les lilières Jumineufes , & ceux qui formoient les iris, étoient méêlés enfem- ble. Mais il faur de plus, pour fe procurer ce phénomène , que le trou qui donne accès à la lumière , foit aflez retréci, & que les rayons qui , paffant à côté & en dehors de l’atmofphère , pourroient fe diriger directement fur l'efpace occupé par les iris , foient 1n- terceptés ; car autrement ces iris ferotenc à leur tour effacés par ceux - ci. 9. Pour ne point douter que ces iris étoient produites par des rayons réfléchis fur le cheveu , il fuffit de remarquer que les ban- des bleues de ces iris étoient tournées du côté de la projection de l'ombre (comme M. Newton le dit expreffément ), ainfi que dans les iris de l’expérience du cerceau , dont il eft démontré que les rayons auxquels elles font dues, ont été réfléchis fur la furface de l'épingle (1). Si celles de l'expérience de M. Newton euffent été produites par des rayons pliés feulement & réfraétés fans avoir été réfléchis fur le cheveu, la bande rouge des 1ris auroit dû être tour- née du côté de fon ombre , conformément à ce qui a aufli été érabli dans le Mémoire fur la diffraétion (2). 10. Les lifières lumineules ont communément , comme il réfulre de ce qui précède, une blancheur qui, quoique aifée à diftinguet de celle qu'a le carton aux endroits où il ne tombe que des rayons. non infléchis, n’y laifle diftinguer la teinte d'aucune des couleurs prifmatiques , malgré la décompofition des rayons qui contribuent à l’enluminer , & même la décompofition de la plupart de ces rayons réfraëtés n’eft pas généralement affez complette pour que, lorfque lon a écarté con que dans les expériences des nos. 3 & 4), de l'efpace occupé par les lifières lumineufes , les rayons non infléchis qui leur procurent cette blancheur, les premiers produifent des iris ou bandes colorées , puifqu’on n’y diftingue guères qu'une teinte uni- forme d’un gris bleuâtre, telle à peu-près qu'on l'obriendroit en mêlant enfemble diverfes poudres différemment colorées. ( Newt. opr. Lib. 1 ,p. 1, Exp. 15 ). Cependant, quoique la plupart de ces ES (1) Mém, des Sav. Etrang. vol. $, pages 641, 642. Voyez auffi le Mfm, je, n°, 13° (2) Jbid, pages 646, 6470 payons SUR L'HIST. NATURELLE ET LES. ARTS. xa4v rayons réfractés n’en acquièrent pas une décompoftion aflez forte pour cela , j'ai eu lieu de remarquer que du nombre des rayons qui traverfent l’atmofphère d'un corps cylindrique, ceux qui paf- fent le plus loin du noyau, c’eft-à-dire , ceux qui, à leur immer- fion dans l’atmofphère & à leur émerfon, fe dirigent le plus cbli- quement fur le plan qui la fépare de l’air ambiant , & qui dès lors font confidérablement plus réfraétés & infléchis que les autres, peu- vent être affez décompofés pour produire des bandes colorées. Une cpingle d’un tiers de ligne de diamètre , ou un corps cylindrique encore un peu plus gcos, étant placé à environ G pieds de diftance du trou percé dans une carte avec une aiguille, les lifières lumineufes qui accompagnoient fon ombre reçue fur un carton à 12 ou 1$ pieds au-delà , étoienc bordées elles-mêmes, du côté extérieur, chacune par deux filers contigus & très étroits, l’un orangé, & l'autre d'un gris bleuâtre , defquels l’orangé étoit en dedans relativement à l’om- bre du noyau. Je rendois ces filets un peu plus larges, en inclinant le carton où ils fe projettoient. Ces -filers ne pouvoient ètre dus qu'à des rayons fimplement réfractés & non réfléchis, puifque les plus réfrangibles s’écartoient plus de l’axe de la projection de l'om- bre que les moins réfrangibles, & que ç'eùr éte le contraire à leur fortie de l’atmofphère , fi ces rayons euflent été réfléchis fur la fur- face du noyau. 11. Cette obfervation ne fournit-elle pas une objection bien con- cluante contre la doctrine de M. Newron ? Car voilà des rayons qui, pliés en pallant près de l’épingle ( repoullés , felon cette doctrine , par l’action de l’épingle , réfractés felon les principes que j'ai adop- tés }, font décompofés de façon, que les plus réfrangibles s’en écar- tent davantage que les moins réfrangibles. Si ceux qui, dans la feconde Obfervation du troifième Livre de l’'Oprique , après avoir pallé près du cheveu , forment des iris dont la bande bleue eft tour- née du côté de l'ombre, & dont par conféquent les plus réfrangi- bles s’écartent moins du cheveu que les moins réfrangibles , éroient aufli fimplement pliés & écartés par l’aétion du cheveu, comme M. Newton le préfume, & n’étoient pas réfléchis fur la furface du cheveu , il faudra admettre qu’un corps diffringent eft fufceprible d'exercer bien différemment faépulfion far des rayons de lumière, & que ceux qu'il repouffe le plus loin , font tantôt, par préférence, les plus réfrangibles , & tantôt, par par préférence , les moins ré- frangibles. 12. Comme les rayons qui, traverfant l’atmofphère du corps dif- fringent fans en rencontrer le noyau, s'y plient dans un fens qui les Ccartent de l'axe de la projeétion de fon ombre, font les vé- Tome VI, Part. II. 1775. GB 142 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE; ritables limites de certe ombre; elle doit étre plus large que fi cette atmofphère n’exiftant pas, ces rayons rafoient la furface de ce corps fans ètre réfraétés m1 réfléchis. Sur quoi il y a à rappeller ici une remarque déja faire ci-devant, n°.2 , à favoir que les rayons ré- fratés , qui produifent les lifières lumineufes & les rayons non in- fléchis, qui paflent à côté & en dehors de l’armofphère , doivent néceflairement converger à la fortie des premiers de l’atmofphère, ainfi qu'on le voit dans la fig. 1 , où N repréfente le trou deftiné à donner paflage à la lumière; X la coupe de l’épingle & de fon atmofphère; N À, N a ceux des rayons qui, de part & d'autre, paflant en dehors de fon atmofphère , la rafeur de plus près; NC D, NBE,Ncd, Nbe, les rayons qui traverfent l’atmofphère fans en rencontrer le noyau , & s’y réfractent tant à l'entrée qu’à la for- tie dans un fens qui les écarte tous, & toujours de l’axe de la pro- jettion de l'ombre, & defquels NCD,Ncd, font ceux qui, de part & d’autre, paflenc le plus près du noyau , & NBE, Née, ceux qui, de part & d'autre, en paflent le plus loin. Si on pouvoit fuppofer quelqu'intervalle entre. l’épingle & une ligne GG, ou les rayons non infléchis NA , Na croifent les rayons. refrattés NBE, Née, les lifières lumineufes, qui terminent l’om- bre fur le carton placé dans cer intervalle, ne recevroient non plus que l’ombre aucun des rayons qui paflent en - dehors de l’atmo- fphère. Si le carton eft mis au-delà de la ligne GG , maïs en-deça de la ligne MM, où les rayons non infléchis NA, Na croifent les rayons réfractés NCD , Ncd, l'ombre de l’épingle projetrée fur Le carton, ne recevra encore aucun des rayons qui pallent en - dehors de l’at- mofphère ; mais il en tombera fur une portion de chacune des li- fières lumineufes qui la renferment , d'autant plus grande , que le carton fera porté plus près de la ligne MM, & fur la ligne MM ces lifières feront illuminées par ces rayons dans toute leur étendue. Enfin le carton étant porté au-delà de la ligne MM ; la projection de l'ombre recevra aufli de ces rayons tels que N A, Na qui paffenr en- dehors de l’atmofphère , lefquels y embrafferont des érendues d'autant plus confidérables , que le carton fera porté plus loin. 13. Tous ces effets , qui rélulrent de la déviation qu’efluyent les rayons qui paflent aflez près de l’épingle, & qui les écarte de l'axe de la projeétion de fon ombre , ne peuvent manquer d’être toujours analogues; mais le rapport du diamètre du trou , qui admet la lu- mière à celui du corps diffringent , & le plus ou le moins de dif- tance qui fépare celui-ci, foit du trou, foit du carton, peuvent oc- cafonner quelques différences dans Les réfultats. SUR L'HIST. NATURELLE ET LES ARTS. 14; 14. Les deux rayons NCD, NBE, qui renferment rous ceux qui concourent à former fur le carton une des lifières Iumineufes, doi- vent diverger néceffairement entr'eux, en conféquence de la cour- bure de la furface de l’atmofphère où ils fe Fe refraétés : aufli obferve-t'on que les lifières lumineufes font d'autant plus larges, que le carton où on les reçoit , eft plus éloigné du corps dif- fringent. 15. Comme les atmofphères optiques où ces rayons fonc ainfi réfraétés , n’ont qu’extrèmement peu d’épaifleur , les points où de tels rayons NCD, NBE acquerront leur degré conftant de divergence, peuvent être regardés comme n’en faïfanc qu'un fenfi- blement; & dès - lors les largeurs des lifières lumineufes doivent être fenfiblement dans la raifon des diftances du carton au corps diffrin- gent ; & il paroît que cela eft ainfi, par la quatrième Expérience du Mémoire fur la diffraction (N° 42.) 16, Le réfulrat dont j'ai parlé ci-devant (N° 12.) où les rayons non infléchis; tels que NA, Na, croifent même les rayons NCD, Ncd, & abordent fur l'ombre terminée par les lifières lumineufes, fe manifefte fenfiblement dans l’obfervation fuivante : fi les deux diftances, qui féparent, l’une l’épingle de la fente qui livre paflage au trait de lumière, l’autre le carton de l’épingle, font affez grandes , l'ombre du corps diffringenr D'4 comprife entre les deux lifières lumineufes DE , dé, perd de fa noirceur vers les bords D & d, qui contraétent une teinte claire & bleuâtre , & qui apparemment ne perdent pas toute leur noirceur , parce que les rayons direëts , tels que NÀ, Na qui y abordent , font en trop petite quantité , ou trop écartés les uns des autres à caufe de leur divergence na- turelle. | 17. Il y a deux chofes à remarquer au fujet de ces deux ban- des latérales AD, ad de l’ombre plas claires que la portion in- termédiaire À a: la première eft qu’elles exigent pour fe manifefter , que le carton foit mis à une diftance convenable de l'épingle, cat les rayons tels que NA , Na, auxquels elles font dues, n’entrent dans l’ombre que vers la ligne MM : un peu au-delà, les bords per- dent de leur noirceur , & enfuite , à proportion que le carton eft porté plus loin, la largeur des bandes claires latérales doit augmen- ter en effet. 2° Certaines différences relatives à cette augmentation. 13. Il eft des circonftances où cette augmentation de leur largeur pr toujours être égale à la quantité de l’accroiffement de l'om- re; (1) car j'ai obfervé dans une Expérience que j'ai faite, que la (1) J'entends coujours par l'ombre , non-feulement la portion qui conferve la 2 à 144 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, portion noire de l'ombre comprife entre les deux bandes claires AD, ad, laquelle je recevois fur un carton que j'éloignois peu-à-peu & de plus en plus de l'épingle , confervoit toujours fenfiblement la même largeur 4a. Ces circonftances font celles où la largeur de la fente , qui admet le trait de lumière, n’excède qu'extrèmement peu le diamètre de l’armofphère de l'épingle, & où les rayons directs NA, Na, fig.7, qui rafent de part & d'autre certe armofphère, s'avancent toujours parallèlement entr'eux , ou n'ont qu'une diver- gence ou convergence infenfible. 19. On conçoit aifément que fi la largeur de la fente excédoit à un certain point le diamètre de l’armofphère de l'épingle , les rayons NA, Na, fig. s , feroient convergens , & qu’à melure qu'à de plus grands éloignemens du carton au-delà de l'épingle , les bandes claires latérales AD, ad augmenteroient de largeur , la bande noire qui les fépare , décroîtroit , qu'elle deviendroit nulle à une certaine diftance (fur la ligne PP,) & qu'au-delà les deux bandes claires fe croiferoient & anticiperoient l’une fur l’autre ; c'eft ce que l'obfervation confirme : de-là en effet dérive une bande claire qui, dans ces circonftances , occupe le milieu de l'ombre de lépingle , lorfque la projeétion en eft accrue à une certaine diftance. M. de Mairan en à fait mention dans fes Obfervations fur la Diffrac- tion (1), M. Maraldi l’avoit même obfervé fur l'ombre des corps expofés en plein foleil(:2), & on verra ce phénomène fe produire de la façon la plus fenñble , en conféquence de certe difcuflion des rayons non infléchis, dans une Expérience qui fera rapportée dans le Mémoire fuivant (N° 24). 20. L’angle de convergence des rayons dire&sN A,Na, dansle cas dont il eft queftion au N° précédent , feroit naturellement égal à l’angle que mefure le diamètre du foleil , c'eft à-dire d'environ 32’; mais cet angle doit être plus grand, en conféquence de la réfrac- tion qu'en entrant dans la chambre obfcure, effuient dans l’at- mofphère , dont les bords, de la fente N font revètus, ceux de ces rayons qui traverfent l’atmofphère. J'ai éprouvé en effet, en ad- mettant un trait de lumière par un trou très-étroir percé dans une carte avec la pointe d’une aiguille , que l’image folaire qu'il pro- duifoit fur un carton tenu à 3r pouces 9 lignes du trou , avoie 4 lignes de diamètre dans ce qui en étroit fenfible : elle étoic due à des ————————————— , noirceur ; mais même les bords qui la perdent en païtie; en un mot tout ce qui eft compris entre les deux lifières luminenfes. (1) Mém. Acad, 1738; page 59. (2) Mém, Acad, 1723, page 111, SURIL'HIST\ NATURELLE ET.LES: ARTS. 145 rayons qui étoient prefque tous réfractés dans l’atmofphère qui re- vêtoit les bords de ce trou : l'angle de difperfon de ces rayons em- brafloir donc au moins 36° $”.(hg. 1). ‘21. Onconçoit de mème que, fi la largeur de la fente eft moindre que le diamètre de l’atmofphère de l’épingle , les rayons dire&ts NA ,Na, (fig. r.) feront divergens, & que tandis qu’à de plus grands cloigne- mens du carton , la largeur des bandes claires latérales A D, ad croîtra , la portion noire intermédiaire À a croitra aufli , comme on peur s'en affurer par lobfervarion , & comme la figure 1 le repréfente. 22. Les divers phénomènes que je viens de rapporter , nous fonc voir combien l’atmofphère d’un corps très-menu , & qu'’elle-mêème _eft peut-être plus mince encore, peut opérer d'effets finguliers par les déviations qu’elle procure aux rayons de lumière : ces mêmes phénomènes , & les idées que j'en ai données, fe repréfenteront fous un point de vue bien plus diftin@t & plus farisfaifant dans d’autres Expériences faites plus en grand , que je réferve pour le Mémoire fuivant. D ————@—@—@—@—@—— CPS IE RC HA MTL" O NES De M. Wi1rreMET , Doyen des Apothicaires de Nancy ; fur les Perles qu'on trouve en Lorraine. L, rivière de Vologne, dont les eaux font de la plus grande lim- pidité , fort du lac de Longe-Mere , fitué dans les montagnes des Voges. Cette rivière , après avoir coulé l’efpace de quatre lieues depuis fa fource, nourrit des moules , depuis un village du Joffarapt, jufqu’i fon.embouchure dans la Mofélle , au - deffous du village de Jarmenil : cer efpace peut être de quatre à cinq lieues de longueur : 1l y a que'ques endroits de cette rivière , où on trouve une fi grande quantité de moules, qu’on diroit , placé à une certaine diflance , que le fond de la rivière eft recouvert d’un pavé noir : les moules font enfoncées dans la vafe ou dans le fable fur la moitié de leur longueur , qui eft.de quatre pouces ; leur largeur en à environ deux : les coquilles de ces moules font fortes, épaifles d'une ligne environ , hffes & noires à l'extérieur ; leur intérieur eft terne. Pour diftinguer celles qui donnent des perles avec cellés qui n’en ont poine, il faut 146 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, faire attention à certaines convexirés , qui fe manifeftant à l’exté- rieur , forment des concavités dans l’intérieur : cette marque défigne qu'ily aou qu’il ya eu une ou plufeurs perles, car il arrive quelquefois que la perle fe perd ; lorfque l'animal ouvre fa coquille. Je me fuis afluré par un examen fuivi , que les coquilles liffes n’en contiennent au- cunes : ne pourroit-on pas dire , pour expliquer la formation de ces pierres, que lorfque l'animal travaille à fa coquille, il fait fortir du réfervoir la matière qui doit la former ; que lorfqu'il applique fur les parois intérieures cette efpèce de couche de vernis, s’il vient à être heurté par des corps durs, ou par des fecouffes un peu fortes, cette liqueur alors environnée par l’eau qui eft entrée par l’ouver- ture, forme, pour ainfi dire, un corps étranger , ce corps étranger fuit rous les mouvemens du fluide qui l’environne , & même ceux que l'animal lui imprime , ce qui, par un frottement continuel, lui donne de la rondeur & un beau poli. Ce raifonnement ne doit être regardé tout au plus que comme une fimple conjecture. Pour traiter cette matière, ainfi qu’elle l'exige, il faudroit faire l’anatomie de l'animal, confidérer avec attention fes différens organes , obferver la nature de la liqueur qui forme la perle & la coquille , & fur-tout fuivre l'animal dans tous les pé- riodes de fa vie, Lorfque les Hiftoriens ont dit qu’on trouvoit abondamment des perles dans les moules de la Vologne , ils ont fans doute parlé fur des oui dire : ils n’ont connu ni cette rivière, ni la manière dont on ÿ pèche les moules: rien de plus difficile & de plusrare, puifque fouvent fur vingt mille moules, à peine en trouve-t’on quelques- unes qui ayent les fignes caraétériftiques dont j'ai parlé : les grofles & de belle eau font très-rares ; celles de couleur brune le font moins. Prefque toutes les autres rivières de La Lorraine fourniffent des moules à perles, entr'autres, l’érang de Saint Jean près de Nancy ; mais elles font beaucoup plus petites & Plus colorées que celles de la Vologne. M. Villemet a eu la bonté de nous envoyér quatre perles de cette rivière , dont trois de la groffeur d'un pois, deux parfaitement rondes, iles, polies, de belle eau, une plus groffe , ovale, & comme formée par la réunion de deux fegmens d’une boule; la qua- trième enfin du quart de groffeur des premières , a une couleur noire très-foncée & crès-luifante , & elle a le mème poli que celles de l'étang de Saint - Jean de Nancy, & les autres n'excèdent pas en groffeur une tete d'épingle, quelques-unes celles d’un petit grain de plomb; SUR L'HIST. NATURELLE ET LES ARTS. ñ4y & il y en a deux réunies l’une à l’autre ; leur couleur ne peur être comparée à celles de la Vologne. Fa Nous fommes convaincus que fi l’on obfervoir plus atrentivement les moules d’eau douce qu'on rencontre dans différens endroits , on y trouveroit des perles : quelques moules des mers d'Ecofle & de Suède en fourniffenr. Rolfincius parle de celles du Nil; Kriger de celles de Bavière ; Velfch de celles des marais près d’Ausboure;: & on lit dans les Mémoires de l’Académie des Sciences > ANNÉES 1769 , Qu'on En a trouvé de femblables dans les foffés du château de Mauletre près Houdan en Beauce. Nous allons rapporter à l’occafion de la durée des perles , un fair fingulier dans toutes fes circonftances, cité dans les Ephémérides des Curieux de la nature, année 1687: L'Empereur Honorius étant fur le point de fe marier avec la fille de Stilicon ; cette jeune fille mou- rut fubirement avant les noces ; il demanda la fœur de la défunte ; il l'obtint , & elle mourut aufñli avant la confommation du mariage : Les parens de ces jeunes filles les inhumèrent avec beaucoup de pompe & de magnificence : lorfqu’on jetta les fondations de Saint Pierre de Rome, 118 ans après , on trouva le caveau où ellés avoieht éré dé- pofées : on porta au Pape les richelles qui y avoient été renfermées; toutes étoient en bon état, à l’exceprion des perles qui éroient fi tendres , qu’elles s’écrafoient facilement entre les doigts ; mais elles n’avoient rien perdu de leur forme, 148 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, ee ee M FM S OT RNTE Sur la modification de l’a@tion des MEensTRuEs, & fur-tout du Feu, par Jes qualités accidentelles des Corps, Où lon recherche : Quel eft l’art de mefurer cette action ? Par M CHANGEUX. CHAPITRE PREMIER, Objet de ce Mémoire. L.: phénomènes de la nature femblent fe réduire à des diffolu- tions , lefquelles donnent lieu à des recompoftions nouvelles. A l'exception des parties élémentaires des corps, tout , dans la nature , fe détruit & fe renouvelle : l’attrattion particulière qui donne lieu à la cohéfion de chaque corps, & l’attraétion générale qui fait ten- dre tous les êtres vers un centre, ont des forces antagoniftes & con- traires, qui donnent la vie & le mouvement à l’univers : il femble qu'en vertu de ces principes oppofés , tous les corps foient en même- tems diflolubles & diffolvans relativement les uns aux autres : c’eft donc une très-belle vue chymique que celle qui nous fait confidérer Ja fofbilité & la diffolubilité des corps ; c’eft peut-être la plus gé- nérale & la plus importante ; c’eft du moins la première à laquelle il faut s'arrêter, fi l’on veut trouver un fil qui nous conduife avec sûreté dans le labyrinthe de la nature. Le’ feu agit différemment fur tous les corps, fuivant leurs divers fes natures ; mais ce n’eft pas tout, il agit fur les mêmes corps d'une manière très-différente, eu égard à leurs qualités accidentelles, c'eft-à-dire aux qualités diverfes que ce même corps peut prendre fans changer de natüre : or un même corps peut , fans changer de nature , varier, 1°, par la malle: 29. par les différentes formes & s Le . SUR L’AIST. NATURELLE ET LES ARTS. 149 le plus ou moins de fuperñcie qu'on eft mairie de lui donner (1). 1©, Par la malle, car l'attraction ou la caufe quelconque de la côhéfion des parties , fait qu’un corps plus grand doit réfifker davan- rage à fa diffolution , qu'un autre plus perir. 2°. Par les différentes formes qu'on peut donner au même corps, car ces formes lui fonc préfenter des fuperfcies plus où moins éten- dues au diffolvant , & donnent plus de prife à l’un fur l’autre. J'ai râché de faire voir dans un Mémoire précédent, que l’action du feu & de tous les menftrues, n’eft pas feulement relative à la nature des corps, mais que cette action eft relative à l'état de di- vilion d’un mème corps, en forre qu'on ne peut pas dire en géné- ral , qu'un tel dégré de feu elt nécellaire pour fondre ou décom- pofer un tel corps 3 mais qu'il faut encore énoncer & fpécifer la malle de ce corps : je m'explique. . Un feu déterminé (de 30 dégrés, par exemple,) qui n'eft point capable de fondre une malle donnée d’or, la fondra dès que j'aurai réduit cette maille à une certaine divifon : on ne peut donc pas af- figner en général , quel eft Le feu capable de diffoudre de l'or; mais l'on peur & lon doit dire, tel dégré de feu eft capable de diffou- dre une telle maffe d’or; ainfi quand on veut afligner quelle eft l’action du feu fur un corps, il faut faire entrer la maffe de ce corps comme élément. s On en peut dire autant des diverfes figures ou des formes des corps ; il fuffic que la forme change, pour que l’action du feu varie : on ne peur donc pas dire en général , quel eft le feu capable de difoudre de l'or, ni même une telle mafle d’or ; il faut encore faire éncrer la forme, comme élément , dans la mefure que l’on cher- che : en un ‘mot, le même dégré de feu connu d’une manière abfo- lue, & par le moyen d’un inftrument tel que le thermomètre , ne nous apprend point quels font les degrés de l’action du feu; il nous inftruit fi peu à cet égard , que j'ai prouvé qu'un feu incapable d’at- taquer la paille ; peut fondre l'or; il ne s'agit que de divifer ce métal pour le rendre attaquable par le plus petit feu poflible. C'eft fur cette matière que l’on fe propofe de faire encore quel- ques recherches. On n’a pas toujours a{fez diftingué le feu de l’action du feu, ou fi l'on veut, le feu abfolu & le feu relatif : le feu abfolu eft très- (x) Si le corps changeoit à d’autres égards, c'eft-à-dire, dans la contexrure & la combinaifon de fes principes, il changeroit plus où moins de nature, ce ne feroic plus le même corps, & la plus ou moins grande fufbilité ou diffolubilité qu'il acquéreroit, n'eft point l'objet de nos recherches. Tome VI, Part. II. 1775. 4 > 150 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, bien mefuré par le thermomètre ; mais voilà tout : un feu de 3a degrés , par exemple , pourroit , fi on le vouloit, (c’eft-i-dire par le procédé de la divifion enfeignée dans le Mémoire précédemment cité ,) diffoudre tous les corps de la nature j mais on en concluroic très-mal , que tous les corps font également diffolubles par le même dearé de feu. Gr Ho AM BCTE TR: EEE Les divers états de divifion d'un corps influent-ils fur l’aëlion du feu ? Nous avons en partie répondu à ce beau problème dans un Mé- moire précédent intitulé: Recherches Jur une loi générale de la Na- cure , ou Mémoire fur la fufibilité & la diffolubilité des corps, relacive- ment à leur maf]e. Nous y avons fait voir que la fufñbilité & la diffolubilité d’un mème corps, font relatives à fa mafle. La divifion modifie telle- ment l’action du feu, qu'elle peut rendre un corps très réfractaire fafceprible d’être diffous à un degré de feu prefque infiniment pe- tic, ceft-à-dire, infenfible pour nous; vérité fingulière, mais prou- vée par un affez grand nombre d'expériences , & qui peut donner lieu à des tentatives & à des expériences bien plus nombreufes. Mais il s’agiroit de fpéciñer cette loi un peu plus que nous ne l'avons fait, & s'il éroit poflible, d’en donner l'énoncé géométrique & la démonftrarion rigoureufe. Un Mathématicien de mes amis prétend qu’il fuffit , pour cela , de connoître quelle eft la progreffion des furfaces dans Îles corps de mème forme; par exemple, dans les cubes pour en déduire en quelle raifon le feu agit fur un même corps dans fes différens états de divifion; c’eft donc aux deux problèmes fuivans qu'il réduis route cette matière. A P'RIENM ER OSP RO" B)LIE MIE; Quelle eff la progreffion des furfaces dans les corps de même forme à par exemple, dans les cubes © SORT URL AA ON UNE Prenons les cubes dont les racines cubiques fuivent l’ordre des nombres naturels, 1, 2, 3, 4, &c. ces cubes feron: 1, 8, 27, 64, &c Cela pofé , le cube d’un pied cubique , dont la re- SUR L'HIST. NATURELLE ET LES ARTS. xsr cine cubique eft 1 , aura 6 pieds de furface; favoir , un pied de furface fur chacune de fes fix faces. Le cube de 8 pieds cubiques , dont la racine cubique eft », aura 24 pieds de furface, favoir 4 pieds de furface fur chacune de fes fix faces. Le cube de 27 pieds cubiques, dont la racine cubique eft 3, aura $4 pieds de furface , favoir 9 pieds de furface fur chacune de fes fix faces. : © Le cube de 64 pieds cubiques , dont la racine cubique eft 4, “aura 56 pieds de furface, favoir 16 pieds de furface fur chacune de fes fix faces. Ainfi les cubes, fuivant la. progreflion 1 , 8, 27, 64, &c., leurs furfaces fuivront la progreflion 6, 24, 54, 96, &c. SMET CO ND APUR: O: BL Ë ME. En quelle raifon le feu agit-il [ur Les corps de même cfpèce & de même forme , mais de differentes groffeurs, par exemple , fur les differens cubes d'une même matière ? OORTMIURETOET OPEN: Les corps de même efpèce & de mème forme, mais. de diffé- rente grofleur , par exemple , les différens cubes d’une même ma- tière, fonc attaquables par le feu en raifon inverfe de leurs racines cubiques. * Prenons deux cubes différens de mème matière ; par exemple, lun de 8 pieds cubiques, dont la racine cubique eft 2, & l’autre de 1 pied cubique, dont la racine cubique eft 1, le premier aura 24 pieds de furface , favoir 4 pieds de furface fur chacune de fes fix sb le fecond aura 6 pieds de furface , favoir un pied de furface fur chacune de fes fix faces. Si l’on divifuit le cube de 8 pieds en 8 cubes égaux, l’on auroit 8 cubes qui auroient un pied cubique chacun, & 6 pieds de fur- face chacun, & qui par conféquent égaleroient chacun le fecond cube , fuppofé d’un pied cubique : le feu agiroit fur ces S cubes divifés comme il agit fur le cube fuppofé d’un pied cubique, puif- qu'ils feroient parfaitement égaux. Mais le cube de 8 pieds cubiques réunit ces 8 cubes d’un pied cubique chacun, & cependant il ne préfente à l’action du feu que 24 pieds de furface , tandis. que ces $ cubes féparés préfenteroient 4 pieds de furface en total, favoir 6 pieds de furface chacun ; donc la fomme des furfaces des 8 cubes divifés eft à la fomme des | V 2 152 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, farfaces du cube entier de 8 pieds cubiques , comme 48 eft à 24» & par conféquent comme 2 eft à 1. Donc le feu agit comme 2 fur le cube d’un pied cubique, tan- dis qu'il n'agit que comme 1 fur le cube de 8 pieds cubiques. Mais 2 eft la racine cubique du cube de 8 pieds cubiques, & x eft la racine cubique du cube de 1 pied cubique; donc le feu agit fur les deux cubes fuppofés en raifon inverfe de leurs racines cubiques. Il en eft de mème des autres cubes. Que l’on fuppofe un cube de 27 pieds cubiques, qui aura conféquemment $4 pieds de furface , favoir 9 pieds de furface fur chacune de fes fix faces , fi ce cube étoit divifé en 27 cubes égaux d’un pied cubique chacun, ces 17 cubes égaux donneroient enfemble la fomme de 162 pieds de far- face; mais ces 162 pieds de furface font à $4 pieds de furface qu'a le cube de 27 pieds cubiques, comme 3 eft à 15 donc le feu agit comme 3 fur le cube d’un pied cubique, tandis qu'il m'agit que comme 1 fur le cube de 27 pieds cubiques; mais 3 eft la ra- cine cubique d’un cube d’un pied cubique : donc le feu agit fur les deux cubes de 27 pieds, & de 1 pied en raifon inverfe de leurs acines cubiques. Remarque Jur les démonfiratious précédentes. J'avois repréfenté dans le Mémoire fur la fufibilicé & la diffolubilie ; que la progreflion de l’action du feu en raifon de la divifon des corps, étoit peut-être inafignable , du moins d'une manière gco= métrique ; j'avois même fait voir que l'expérience patoiffoit ne pas s’accorder bien parfaitement avec les calculs que l’on feroit tenté d'établir , & les règles générales à ce fujer. Il faur convenir que ces objections demeurent & font toutes con- tre les démonftrations précédentes. L'attraction ou la force qui re- tient les parties d’un compofé matériel entr'elles, eft, par exemple, une caufe de réfiftance qui eft plus confidérable dans un cube de 8 pieds cubiques, que dans 8 cubes d’un pied cubique chacun ; or certe caufe ne pouvoit être énoncée dans le calcul précédent. Il en eft de mème de plufeurs autres qualités des corps; mais mon ami répond, fi la règle que j'ai établie, fouffre des excep- tions dans l'application que l’on en fera, ces exceprions ou diffé- rences feront au moins connoître la quantité de la modification de l'action du feu par les autres qualités des corps que l’on ne peut faire entrer ni fpécifier dans le calcul. SUR L'HIST. NATURELLE ET LES ARTS. 153 CHA AG PT OR ES TIILTL La figure des corps modifie-t-elle lailion du feu ? BorRuHAvVE n'a pas méconnu cette vérité, que la figure des corps modifie l’aétion du feu, & par conféquent des autres diffolvans; il eft vrai qu'il n'en a point tiré de conféquences fur la mefure de l’action du feu. Plus les corps ont en même-tems de denfité fous un moindre volume, & plus leur figure approche de la fphériqe ou de la figure qui contient le plus de malle fous une moindre fuperficie , plus ils demandent de Le , & de feu long-rems continué pour parvenir au plus haut degré de chaleuridont ils font fufcepribles ; car ayez une livre de fer coulé en une plaque mince & parallèlépipédique , & une autre qui ait la forme d’une boule, plongez-les toutes deux dans l’eau bouillante , la plaque contraftera d’abord une chaleur égale à celle de l'eau, & la boule ne lacquérera que lentement ; la furface détermine donc le tems dans lequel un corps s'échauffe ou fe réfroidit. Boerh. Chymie. Traité du feu. Mais quel eft cerems? peut-il être déterminé ? 11 eft démontré en Géométrie que toures chofes reftant d’ailleurs égales , plus les corps font grands, moins leur fuperficie à d’éten- due à proportion de leur folidité ( voyez le Chapitre précédent ); deux parallèlépipèdes égaux , réunis &. formant un cube, perdent un tiers de leur furface ; deux hémifphères, réunis & formant une fphère , ont leurs furfaces diminuées de deux grands cercles. Boerh, loc. cit: Ainf, en fuivanc les figures différentes dans l’ordre de leur compofñrion , & déterminant leurs rapports, on aura la progreflion de l'action du feu fur les corps relativement à leurs furfaces. Enon- çons le problème , & nous verrons enfuite fi la folution eft facile ou même poflble. PR: :O: Bi.L .Ë. ME. > En quelle raifon le feu agir-il fur les corps de même efpèce € de même ‘ groffeur , mais de différentes formes ? 1 eft clair, 1°. qu'il faudroit déterminer & fixer la furface de tous les corps pour rendre la folurion de ce problème générale, mais les corps ont des formes infinies en variétés. Le problème fe- toit donc de la plus grande difüculté, & peut-être impoñlible à ré- foudre en entier. i54 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, 2°. La furface de la fphère n’eft point connue, & dépend de la connoiffance de la quadrature, à laquelle on.a fi peu d’efpérance d'atteindre même mathématiquement &. d’une mamière abftraite. Comment donc dérermineroit-on mathématiquement la différence de l'action du feu fur une furface fphérique & fur une furface mefu- table ? - On pourroit cependant , en divifant ce problème , en admettant, par exemple, différentes claffes de formes, parvenir à des folutions particulières ; les rapports des figures fimples, telles que le triangle & le cube, font afignables, & a différence de l'action du feu fur ces deux formes; réfulre de ces rapports connus : on en dira au- tant de plufeurs autres figures. CH OA PAL PU RATE 1E We Conféquence des Chapitres précédens. L'art de mefurer l'aëtion du feu Jur les mêmes corps. Si l'action du feu & des autres menftrues ou diffolvans étoit ab folue & parfaitement la mème fur une même efpèce de corps ; on pourroit mefurer fon action indépendamment & fans faire entrer en confidération les qualités de ces mêmes corps, il ne s’agiroit, comme on l’a prefque roujours pratiqué , que d’avoir un inftrument tel que le thermomètre qui , par fon mouvement ; fixeroit les de- rés de la chaleur depuis un point donné comme la congellarion, jufqu’à la chaleur la plus confidérable qu'il pourroit fupporter. À l'é- gard des degrés fupérieurs & extrèmes , il ne faudroit que donner au thermomètre une latitude plus grande, ou fe fervir d’un pyro- mètre rel à peu-près que l'inftrument que nous propoferons bientôt. Mais fi l’action du feu eft relative ; c'eft-à-dire, fi, comme on l'a fait voir, cette action eft modifiée par les qualités accidentel- les des corps, il faur faire entrer ces qualités comme élémens dans la théorie de la mefure du .feu. Nous avons confidéré les qualités les plus générales & qui fe trou- vent dans tous les corps, mais qui varient dans chacun d'eux, je veux dire la maffe & l'étendue figurée ou les formes, & nous avons trouvé que ces deux affections des corps modifient l’action du feu d'une manière quelquefois très-fenfñble; l’art de mefurer cette action du feu & des autres menftrues dépend donc des principes que nous avons tâché d'établir. ï Voulez-vous donc trouver les juftes degrés du feu , examinez-le relativement à fes effets fur les êtres, & confultez autant ces effers que les degrés de votre thermomètre, Cet inftrument ingénieux ,. SUR L'HIST. NATURELLE ET LES ARTS. 15, mais dont on fe fert fouvent fi mal, n’eft qu'une mefure qui refte indéterminée quand 6n ne connoïît pas tous les degrés & les rermes extrèmes du feu par rapport à chacun des êtres, car ces termes fonc les vraies donnces où commencent & finiffent les degrés du feu re- latif à chaque corps que l’on foumet à l’analyfe. Il eft vrai que nous avons à peine fait les premiers pas dans le grand art de mefurer le feu : fi les deux qualités générales & com- munes à tous les corps dont nous avons parlé, modifient l’aétion de cet agent, combien les qualités particulières , telles que la cohé- fion, la porofité , l’homogénéeité ou l'hétérogénéité, la plus ou moins grande pureté du feu & des autres diffolvans (1), ne doivent-elles © © ——————— ———————————_—— (1) C'eft une chofe évidente, & qu'il n’eft pas befoin de prouver que Îes corps font plus ou moins fufibles, le plomb, par exemple, n'eft pas attaqué auffi facilement par le feu que les graifles végétales & animales; il l'eft plutôt que le fer, le cuivre & les autres méraux. Il eft queftion ici du feu technique; mais le feu naturel ou de l'atmofphère attaque le fer beaucoup plus aifément & plus promptement que le plomb; la diverfité des principes des mivéraux, les propor- tions de la terre & du phlogiftique, l'ouverture & la quantité des pores, la na- ture de l'acide aërien, &c., caufent ces variétés. Le feu a une action très-marquée fur les végétaux , dont la texture eff très- délicate; il en a une moins vive & moins prompte fur ces mêmes végétaux quand ils font verds, c'eft-à-dire, Jorfque l’eau qui eft une fubftance minérale , eft interpofée entre leurs parties. On doit enfin avoir égard à la pureté du feu, pour évaluer fa force. Le feu s’unit aux différens corps, mais il femble avoir avec eux plus ou moins de rapports, il perd même par cette union une partie de fes propriétés & de fa force ; en cela il fuir la loi des affinités fi connue des Chy- Des, Le foyer d'un verre ardent volatilife les corps les plus apyres ; les rayons raffemblés à ce foyer, n'ont peut-être tant de force & de vivacité que parce que le feu, dans ces cas, eft très-purifié : les lentilles font des efpèces de cribles qui féparent les rayons de la lumière des marières hétérogènes en même-tems qu'ils les rafflemblent ; les miroirs de réflexion ne réfléchiffent que des molécules de la lumière : le feu, devenu plus pur au foyer commun , à aufli une ation plas marquée; l'on ne concevra jamais les effets finguliers des miroirs ardens , fi l'on n'a recours à la caufe que nous indiquons comme à une des plus puiffantes de la force du feu. . Quand donc l'on connoîtra le plus haut degré de pureté du feu, & fes effets à ce degré, on pourra partir, de points fixes, pour calculer les différentes pertes qu'ils fouffre quaod il eft uni aux différens corps, comme aux acides, aux huiles aux charbons , &c, ce ai femble prouver que la pureté du feu eft la caufe prin- cipale de fa force, c’elt que le mouvement des rayons lumineux & leur Vibra= tion concentrique ne font prefque pas fenfibles ; le mouvement qui a lieu dans le foyer d'un fourneau, eft bien plus confidérable. D'où vient donc que la force du feu docimaftique n'eft pas comparable au feu du foleil? On n'en peut trou- ver d'autres railons, finon que le feu du foleil eft non-feulement réuni par la lentille, mais encore purifié. Ne pourroit-on pas, sn on connoîtra la loi des affinités du feu, le purifier de pluleurs manières diftérentes , & s'en rendre en quelque forte maître > 156 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, pas opérer des modifications dans les effets des menftrues, puifque ces qualités varient à l'infini ? Il eft , au relte, très-effentiel de dé- terminer celles qui font dues à la malle & à la forme pour ne pas attribuer à la nature de ces corps ce qui n'appartient qu'à leurs qualités mobiles & accidentelles , & c’eft ce que nous avons tenté de faire. Cha AA SPA TE LR EME V: Trouver deux inftrumens , l’un pour mefurer le feu le plus foible , & Pautre le plus violent. . Pan le moyen de la divifion d’un corps, on peut le rendre dif foluble à tel degré de feu qu’on le voudra: il paroît audi qu'en augmentant la maffe de plufieurs efpèces de matières, leur réff- tance à l’action du feu augmente fuivant des proportions plus ou moins exactes. Il feroit donc à fouhaiter que l’on poflédât deux inftrumens, dont l’un indiquât les plus légères variations dans les degrés de chaleur , & l'autre püt mefurer les degrés du feu le plus violent, Le premier de ces inftrumens peut être le thermomètre ordinaire, dans lequel au lieu d’efprit-de-vin , on mettra de lécher : j’en-ai fait conftruire un avec cette liqueur, qui eft très-fenfble. Mais le chermomètre à air de Drebbel, fera encore beaucoup meilleur , fi on y fair quelques changemens qui le rendent d’un ufage commode. Ces changemens font faciles à imaginer : on trouve dans la Chymie de Boerhave & dans d’autres Ouvrages , que ce thermomètre eft d’une mobilité étonnante, que le vent, les nuages qui paffent fous le foleil, le fouffle ou l’haleine le font varier. Je fais que les Chymiftes ont négligé cet inftrument, & qu'ils l'ont cru inutile pour les opérations ordinaires; mais dans les re- cherches délicates & pénibles de la nature de celles qui font le fujer de ce Mémoire , il faudroic s’en fervir. J'en vais propofer un autre de la plus grande fimplicité, & qui ne fera probablement pas plus mis en ufage que celui de Drebbel : il conviendroir dans les opérations où il s’agiroit de mefurer le feu le plus violent. Les Chymiftes modernes fe contentent encore ici d’à-peu-près qui leur fuffifent ; mais fi quelqu'homme de génie , doué d’ailleurs d’une patience invincible & d’un grand amour du travail, vouloit étendre les bornes de la Chymie , & faire des expériences qui le conduififfent à des règles infaillibles fur les premiers prin- cipes & les fondemens de l’analyfe, peut-être s’en ferviroir-il avec avantage. Ce thermomètre eft un fiphon : le mercure ou autre liquide que l’on SUR l’HIST. NATURELLE ET LES ARTS. 157 lon y introduit, fe met au niveau dans les deux branches : on dé- terminera la hauteur à laquelle: fe tiendra le liquide ; ce fera le point fixe d’où l'on partira pour connoître le degré du feu. A l'extrémité d'une des deux branches, on adaptera un tube de métal très-long, & qui fera terminé par une boule ou vafe cylindrique, rempli d'air: ce vale peut êrre fait de métal ; & dans les opérations où on vou- dia mefurer les degrés du feu le plus violent, on le former: de terre apyre. Il eft évident que l'air contenu dans le ballon, fe raréfiant lorfque vous expoferez le ballon dans le centre d’un fourneau , fera defcen- dre le mercure dans une branche du fiphon, & le fera remonter dans l’autre : les degrés de certe afcenfon indiqueront les degrés du feu d'une manière très - précile , fi l'on fpécifie la capacité de l’inftru- ment dont on fe fervira , la divifion de l'échelle 1, 2, 2 A AINCUEE en lignes où en pouces, &c. & la chaleur de l’athmofphère dans le tems de l'opération. Je dis que les deorés d’afcenfon du mercure indiqueront les degrés du feu d'une manière très-précife , cat vous partez ici de points fixes & connus : on pourra donc calculer de combien l'air s’eft dilaté pat le feu, & de combien il a furpallé le degré actuel de la température de l’athmofphère. ; Au refte, on conçoit que Îa dilatation de l'air eft le feul moyen dont on puilfe fe fervir quand on veut mefurer un feu très-violent: on fair allez que les autres liquides feroient abfolument inutiles dans ces fortes d'opérations. Voyez la figure du thermomètre à air dont je parle , pl. 2. fig. 3. GER ANNE HE TRES LUE Conféquences des précédens Chapitres & remarques diverfes. Les Chymiftes ont détruit, recompofé, épuré Les métaux ; ils ont donné naiflance à des fubitances inconnues, fubitances fouvent auñi utiles que curieufes ; & fi les merveilles que le feu à opérées lentre les mains des hommes, n’ont pas encore été aufli grandes qu'elles pouvoient l'être , & que peut-être elles l'ont été chez les anciens Egypriens au tems d'Hermès , c’eft que l’on n’a point encore mefuré exattement les effers de ce grand créateur , de ce diffolvanc de tous les corps, & que par conféquenc on ne l’a prefque employé qu’au hafard & fans principes. J'ai dit que pour connoître l’action du feu, & pour parvenir à le mefurer , il faur confidérer cet agent relativement aux différentes Tome V1, Part. IL. 1775. X 158 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, fubftances fur lefquelles il s'exerce : l’examiner d’une manière abfo= lue , c’eft s’expofer à commettre mille erreurs. Les règles que l’on a prifes pour mefurer le feu , ont toujouts varié 3 & pour prouver qu'elles font incompletes , il fufit de les énoncer ici. Premier degré , ou degré favorable à la végétation, fuivanr Boerhave , depuis le nombre 1 du thermomètre de Fahrenhir, jufqu’au 80e degré ; fa preuve eft qu'entre ces deux extrèmes on trouve des plantes qui donnent des marques de vie & de végétation. Second degré déterminé par la chaleur du corps humain qui com- mence environ au 40° degré du mème thermomètre, & finit environ au 94€. Toifième degré , celui de l’eau bouillante , depuis le 94° juf- qu'au 212€. Quatrième , depuis le 211 jufqu’au 6c0., ébullition des huiles des lefives falines, du vif - argent , de l'huile de vitriol. Cinquième , depuis le 6ooe jufqu'à la fufion du fer. Sixième , le feu dioptrique, vitrification. M. Venel, dans l’article Feu , de l'Encyclopédie , ne veut admettre que quatre degrés de feu. Woyez cet Ouvrage. Le feu a été confidéré, eu égard aux différens medium par lef- quels on tranfmet fon action fur le corps à diffoudre , ou bien le feu eft immédiat : de-là, premier feu de digeftion ou de fumier , ou le ventre de cheval : deuxième, feu de bain-marie, du bain de cendres, de fable , de limaille, &c. troifième, feu nud ordinaire : quatrième , feu de lampe : cinquième , de roue : fixième , de fup- preflion : feptième , de reverbère clos : huitième , de reverbère ou- vert : neuvième , d'atteinte ou de fufñon & de calcination: dixième, alimpique , ou des grands verres ardens. Mefares hermétiques qui ne différent guères des précédentes que par l'obfcuriré & la fingularité des noms. Je paffe fous filence une foule d’autres divifions & de mérhodes, dans l'inexrricable variété defquels les Chymiltes fe font embarraffés, & je me contente de remarquer que, puifque l’on peur, par des tri- turations & des divifons , rendre les corps les plus indiffolubles at- taquables par les plus foibles menftrues ; on pourroit rendre cette parrie de la Chymie beaucoup plus fimple , moins difpendieufe & plus facile : en effer , à un mème degré de feu , tous les corps de la nature peuvent ètre analyfés ; il fuffit pour cela de leur faire fubir préalablement à chacun une divifion méchanique : il s’agit donc moins de proportionner le feu au corps que l'on veut diffoudre, que de SUR L'HIST. NATURELLE ET LES ARTS. 169 préparer ces corps eux-mêmes , c’eft-a-dire de proportionner leur di- vifion au feu que l’on veut employer. Cetre règle peut fouffrir quelques exceptions; mais elle eft cu- rieufe & plus générale qu’on ne le croit ;elle peur rendre la Chymie d’une grande facilité, & la fimplifier beaucoup. Il eft des claffes entières de corps que les Chymiftes trairent de la même manière avec les mêmes menftrues & au même deoré de feu; mais ce n’eft pas de la manière que nous le propofons ; pre- nons pour exemple les plantes aromatiques : on retire l'efprit de toutes ces plantes à l’aide de l’efprit-de-vin , & on les foumet au bain-Marie : cette pratique générale n’eft pas bonne , puifque l'on peut affurer que la partie odorante dans les plantes aromatiques, n'eft pas également diffoluble, ni également volatile , &c. elle de- mande donc un diffolvant & un feu différent , ou des prépara- tions préalables. Cela peut être appliqué aux minéraux , & nous montrer par quelle voie on parviendra quelque jour à recompofer prefqu’aufh aifément les corps qu'on les décompofe (1). Je n’apporterai que deux exemples qui me femblent prouver tout ce que l’on doit attendre de la méthode que je propole. $. I. Prefque tous les corps, & même les poifons , peuvent devenir alimentaires. OurTreE ce que j'ai dit pour prouver que par la divifion & des pré- parations analogues on pouvoit rendre prefque tous les corps ali- mentaires , j'ajouterai ici l'expérience que font tous les jours les fau- vages de l'Amérique, qui n’ont pas de laboratoires chymiques , n1 des fourneaux de réverbère. C’eft principalement à l’aide de la divifion que les Indiens font fubir au manioque, qu'ils métamorphofent cepoifon en nourriture: L2 (x) Pourquoi en Chymie décompofe-t-on & recompofe-t-on le foufre & le cinnabre ? C'eft parce que les vrais élémens de ces corps, les proportions de ces £lémens , font connus & ne font pas grofièrement confondus comme dans plu- fieurs autres prétendues analyfes. Mais s'il eft quelquefois poflible , dans le règne minéral , d'opérer des décom- poftions & des recompofitions , il n'eft jamais arrivé , dans le règne végétal & animal , qu'on foic parvenu à rien de femblable ; on n’a point encore vu de vé- ritable palingénéfie dans ce genre d'analyfe, ou de réfurreétions mêmes apparen- tes, quoiqu'ayent publié certaines vifionnaires dont on refpeéte moins que ja- mais les erreurs. Que penfer après cela d'une fcience que l'on ne craint pas de définir l'art de compofer & de recompofer ? D 160 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, ils trempent la racine de cette plante dans l’eau pendant plufiears jours, la dépouillent de fon écorce, la brifent , en extraient le fuc dangereux & les parties ligneufes, & ils obtiennent une efpèce de farine excellente. 4 On fairà peu-près dela mème manière un bon pain aveclaracinede brione ( couleuvrée ou vigne blanche ) ; la racine d’arum ou pied-de- veau, perd fes mauvaifes qualités par les lotions & par la deflica- tion : les parties amidonnées & gélarineufes que contiennent ces plantes vénimeufes , s’'épurent & deviennent un aliment doux & fuc- culent : on peut mème en faire des liqueurs comme les Indiens ti- rent la caflave du manioque. M. Morand préfenta l'expérience qu'il avoit faite à ce fujer fur la brione, à l'Académie Royale des Sciences. en 1772. Les corps dont le tiflu eft trop ferré pour que les fucs digeftifs puiffenc le pénérrer, font pour un animal , ou dangereux , ou pour le moins indigeftes : on conçoit qu'il eft poflible de corrriger certe qualité. Si ces corps contiennent des parties âctes, acides , &c. il eft poffible encore d’érendte, de délayer ou d’extraire en entier ces parties ; par-là vous rendrez à votre ufage ces corps fi dangereux : les animaux ayant des vifcères plus ou moins forts & actifs, ce qui eft un poifon pour les uns, eft un aliment pour les autres : les poifons ne font ni bons ni mauvais en eux-mêmes mais relativement. L'homme peut donc en faire ce qu’il lui plaî. Cet exemple démontre que tout ce qu’on enfeigne en Médecine fur les alimens & leurs qualités, fur l’action des médicamens & les fpécifiques , eft fondé fur des hypothèfes : 1l vaudroit mieux, dit à ce fujer un Phyficien moderne , avouer fon ignorance : il yauroit moins de raïfonneurs, il eft vrai; mais peut-être feroit-on plus près de la vérité. $. II. Ze diamant & les minéraux n’ont pas befoin, pour étre dé- compofés , du feu des Chymifles. * J'A1 rapporté pluñeurs exemples qui prouvent qu’on peut diffoudre, les matières les plus dures à un degré de feu prefqu’infenfible : les petites lames d’acier, d’or & d'argent, fe fondenr en grenailles à la foible flamme d’une bougie : la figure globuleufe que prennent les parties fondues, prouve que la fuñon a été complerte. J'admire avec tous les favans, les procédés ingénieux qu'ont employé les plus fameux Chymifles de nos jours, pour connoître & rermiher la célèbre quef- tion de la volatilité du diamant ; mais 1l me femble que l’on ne connoîtra la véritable action du feu fur les pierres précieufes , que lorfqu’on fera ufage de la méthode de la divifon : la dureté de ces SUR L’'HIST. NATURELLE ET LES ARTS. 161 -corps & leur nature feuilletée qui les expofe à! s'éclater, fon. deux raifons qui doivent engager les Chymiftes à les réduite en poudre avant de les expofer au feu. Je fuis fondé à croire , 1°. Que toutes les pierres précieufes réfifteroient d'autant moins à raifon de leur dureté qu’elles feroient plus parfaitement divifées. Ne pourroient- elles pas mème alors fe décompofer & fe détruire en raifon de leur divifon ? Pourquoi feroient-elles exception à la règle à laquelle nous avons vu que tous les corps font foumis? Pourquoi par con- féquent un feu même très-médiocre ne les attaqueroit-il pas com- -pletremenr, fi la divifion étroit extréme? 2°, Elles ne feroient plus fujettes à s'éclater en parcelles infini- ment tenues , parce que leurs.parties lamelleufes qui renferment de l'air, étant brifées, l'air contenu, ou s’échapperoit dans la divifion préalable à l’opération, ou n’agiroit que foiblement pendant l’opé- ration ; par conféquent on ne feroit plus fujer à l'erreur, on ne prendroit plus pour décompoftion & pour volatilifation ce qui n'eft peut-être qu’une décrépitation & la difperfion des parties in- tactes d’un diamant par le reflort de l'air renfermé dans fon tiflu. Il eft une infinité d'opérations -merveilleufes dont les Chymiftes ont parlé, & qui ne paroiffent impofñlibles que parce qu’on n’a qu’une manière de faire, L’infarigable opiniätreté des Chymiftes dans l’a- nalyfe végétale & animale , m'a toujours étonné. Je conçois ce que dans le règne minéral un génie folide & hardi peut fe flatter de faire, C’eft - là qu'il voir un vafte champ de grandes découvertes ; c'eft-là qu'il doit chercher à devenit le rival de la Nature, Les {els , les métaux , les méréores eux-mêmes & les élémens, font en quelque forte en fon pouvoir ; il les déxruit, les recompofe , les die agir les uns fur les autres, les foumet aux inftrumens que fon induftrie lui a fait imaginer : il fair en petit ce que la Nature fait en grand dans le monde. Mais il n'imite véritablement aucune des opérations de la Nature dans les deux autres règnes. Il ne con- noît pas les inftrumens qu’elle emploie alors. Les vaiffeaux , les filtres , les digefteurs dont elle fe fert, font bien différents de ceux qu'il peut employer. Elle prend, par exemple , certains, êtres organifés pour inftrumens dans, la, décompofition d’autres êtres, les plantes & les animaux font de vrais filtres, des digefteurs qui fé- parent, qui diflolvent , qui décompofent certaines matières, & qui, par leurs vaiffeaux excrétoires, les rendent dans le vafte dépôt de Patmofphère & de la terre pour fervir enfuite à la compofition d’autres individus. Le Chymifte pourra-t-1l ici imiter la Nature & trouver des équivalens à ces digefteurs & à ces filtres ? De quels fecours lui feront fes vaileaux & fes fourneaux ? 16: OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, Le règne minéral peut être foumis aux violentes analyfes chimy- ques ; la nature opére quelquefois avec des feux plus vifs & plus forts dans le fein de la terre , & des volcans pour donner naiffance à plufeurs individus de ce règne. Il eft d’autres individus qui fe forment par une chaleur moins confidérable, & quelquefois très- petite; mais c'eft dans un tems immenfe, & par des degrés peu com- pliqués , & aflez faciles à concevoir : le Chymifte femble ne faire fouvent qu'accélérer ces opérations ; mais dans le rèene végétal & dans le règne animal, la nature opère avec bien plus d’art & de myftère que dans le règne minéral : fon aétion n'eft plus aufli fim- ple, ni aufli facile à fuivre ; il faut donc ne pas lui faire violence, fe contenter fouvent de la voir agir, d’obferver fon action , & tou- jours quand on veut limiter , fe fervir des mêmes moyens qu’elle emploie ; il faut n’y rien fubitituer, & la prendre en mème-tems pour agent & pour modèle, Tout le fatras de compofñtions chymiques & oficinales tirées du règne végétal & animal, ne mérite le nom ni de décompoftions, ni de compoftions ; il n'y a que dans les opérations faites fur le règne minéral , que l'on apperçoit des corps réguliers, & qui méri- tent le nom de naturels; les fels , les pyrites , les méraux foumis à Fanalyfe , offrent des décompofirions & des recompofitions vérita- bles : on peur réduire une mine , & d'uñ métal réduit , refaire un minéral ; on peut analyfer des pyrires & en faire de nouvelles ; on peut décompofer & recompofer les fels, le foufre, &c. mais jamais on n'a rien vu de femblable dans les laboratoires des Pharmaciens; & lorfqu'ils ont opéré fur les végétaux & les animaux , ils n’one fait le plus fouvent que de mauvaifes drogues , & jamais des corps na- turels & réguliers. Si donc l'on purgeoit la Chymie des vaines chéories dont elle eft remplie, & fi à fes principes faux far l’analyfe des végéraux & des animaux, on en fubftituoit de plus fimplés & de plus foli- des, alors en diminuant & femblanr borner beaucoup la fphère de cette fcience, on la rendroit enfin fatisfaifante & urile. Jamais les compofitions groflières que l’on tire de l’analyfe pré- tendue des deux règnes dont nous parlons , n’ont été auf utiles qu'on l'a dit, & fouvent elles ont été dangereufes ; je n'examine pas l'avantage qu'il y auroit à les proferire prefque toutes, mais je fouriens que ce ne font pas des analyfes propres à nous faire con- noître les corps. . Un Agronome & un Botanifte qui examinent avec foin la nature & les progrès du développement des plantes, les terreins qui leur conviennent le mieux, & l’expoñtion la plus favorable à chaque M SUR L'HIST, . NATURELLE ET LES ARTS. 163 efpèce , nous donnent, à mon gré, une meilleure méthode pour parvenir à des connoïffances exactes fur l’analyfe des plantes, que les Chymiftes & les Pharmaciens. En effet, une étude pareille méne à l’art des combinaifons , des compoftions & des décompoñrions que ce genre d’analyfe comporte. La Nature n’apprend-elle pas la manière dont fe fait la décompofition fpontannée de ces efpèces de corps, & les combinaifons variées qu’elles éprouvent ? Les poufliè- res des étamines de différentes efpeces font beaucoup varier les plantes ; voilà donc des efpèces de menftrues ; l'air, la chaleur na- turclle , l’humidité & les fels de la terre, fonc des menftrues très- puilfans & très compofés qui influent beaucoup fur la produétion des plantes. I ne faut pas penfer en Chymie à imiter ces menftrues ou à leur en fubitituer d’autres; fi l’on veut connoître le myftère de la décom- pofiion & de la recompoftion dans le règne végétal , j'en dis au- tant du règne animal, & je ne doute pas que la Chymie, confi- dérée fur ce point de vue fimple & naturel, ne püt revendiquer, comme dépenilante de fon doinaine, routes les découvertes des Phy- fiologiftes fur le myftère de générarion (1). Peut-être, en fuivant exactement la voie de l'expérience , & en fe fervant des inftrumens &'agens naturels, trouveroit-on moyen d'opérer des prodiges ; l'Obfervateur ne toucheroit point aux indie vidus , il fe contenteroit de les faire agir les uns fur les autres. Le feu naturel entretient & produit la vie & la fanté chez les ani- maux; ce principe répandu d’une manière uniforme dans les diffé- rentes parties du corps animé, conferve & caufe la libre circulation de toutes les humeurs : c’eft lui qui donne lieu aux fécrétions dans les glandes, ainfi qu'aux excrérions dans les différens émunétoires. Sans cette diftribution merveilleufe , les humeurs ftagnent , forment des obftruétions de toute efpèce, & font naître le défordre dans l’écono- mie animale. Ces défordres eux - mêmes feroient irréparables fans le feu : c’eft lui , ce font les efforts que fait la nature , qui‘occalionnent un mou- vement violent , & des fièvres qui participent de la nature des hu- meurs accumulées & des obftacles que ces humeuts oppofent : le feu eft donc le grand réparateur, comme le confervareur de la vie. La chaleur l’un corps animé eft undes plus sûrsindices de l’érat où il fe trouve. On voit dans les différens âges d’un animal , cette cha- ——————— (x) Un Chymifte bel efprit, en me parlant un jour de la Génération, la définit ainfi : Manduce, bibe , diflille in vafe debito & fiat homo. S. A. 164 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, leur croître , augmenter & s'éteindre fucceflivement, & l’on peur certainement fuivre ce progrès. Dans l’étar de fanté , certe chaleur eft répartie dans les différens organes avec des mefures fixes & in- variables : cette mème chaleur devient excefive dans l'état de mala- die ; elle eft quelquefois uniforme , & brûle en quelque forte toutes les parties du corps ; quelquefois elle fe répand d'une manière irré- gulière ; elle devient prefque nulle dans certaines parties, & fe con- centre dans d’autres ; alors elle caufe la gangrène sèche , & elle eft également le principe de la gangrène humide , dans les endroits qu’elle a abandonnés : le feu devient ici le deftructeur , comme il étoic le produéteur de la vie. Les propriétés contraires du feu le rendent un inftrument univer2 fel auquel les Médecins habiles réduifent toutes leurs opérations & tout l’art de guérir til fuflit en effet, ou d'augmenter, ou de dimi- huer cer agent créateur , tantôr par de fimples frottemens , où des remèdes mobiles & actifs; les Médecins favent entretenir la vie, & ‘fouvenc la rappeller, tantôt en diminuant la chaleur, en la faifane repaller dans des corps plus froids ; ils donnent le jeu à des parties qui fans ces fecours , feroient tombées dans la morufñcation & le fphacèle. Prenez des animaux engourdis par le froid , approchez les avec précaution du feu , vous les verrez reprendre fucceflivement la vie qu'ils fembloient avoir perdue : la grenouille, par exemple , qui dans l'hyver eft engourdie dans le fond de l’eau & la vafe glacée des étangs , & qui n’a aucun mouvement, n'eft pas plutôt tranfportée dans une étuve, qu'on la voit s’agiter doucement , puis enfin fauter avec autant de légéreté que dans les rems chauds ; il en eft de même de certains vers, infectes & chenilles : le germe d’un poulet, tant qu’il n’eft point échauffé par le feu naturel de la poule, ou par le feu ar- tificiel d’un four , ne fe développe jamais. On peut donc diminuer ou rendre la vie aux animaux , en leur tant ou leur rendant une partie de Jeur chaleur. Si le feu eft le principe d’une foule de phénomènes naturels, de générations & de développemens, ce n'eft qu'a certains degrés rela- tifs à la nature des différens êtres : en effet, outre- pale - t'il ces degrés , bientôt il devient le principe de la deftruétion & de la cor- ruprion. Il n’eft pas difficile de conclure qu’en confidérant les degrés du feu dans vous les êtres, & en mefurant la quantité que chacun de ces tres peut en comporter, l’on apprendra l’art de détruire & de conferver , ou même de produire, att qui femble être réfervé à la pature, mais auquel l’homme peut atteindre, en fuivant exaétement la voie de l'analyfe & de l'expérience ; la nature employe tous les degrés SUR L'HIST. NATUREÉILE ET LES ARTS, 165 degrés du feu , depuis le plus petit jufqu’au plus violent : dans le règne végétal, ce feu eft très - peu fenfble ; il le devient beaucoup dans le règne animal, & eft quelquefois extrême dans le règne mi- néral : peut-on en effet, comparer les fourneaux chymiques aux vol- cans , qui pendant leurs éruptions | vomiflent à des diftances pro- digieufes, des torréns de laves, & à l’embrafement des comètes par leur chüce dans les foleils, d'où ils s'élancenr pour former des pla- nètes & des mondes nouveaux? Dans ces eas » les produits du feu ne peuvent-ils pas nous conduire à nous faire entrevoir quelle doit être la force de ces énormes fourneaux , fi nous fuivons la voie que nous avons indiquée , c'eft-à-dire , fi nous faifons attention à la ré- fiftance prodigieufe qui eft de la forme de la maffe des corps fon- dus & fcorifñiés , & de la quantité énorme qui fort.de ces gouf- fres ? En effec , fi la réfiftance des corps eft en raifon de la malle de ces mêmes corps, quelle activité a-c'il fallu pour vaincre certe réfiftance ? Je finis en rappellant le principe le plus effentiel de ce Mémoire. C'eft toujours par une décompoñrion préalable , que la nature tra- vaille à la génération , ou nème à l'entretien des corps : elle fe ferc dans fes ouvrages des particules , ou atomes impercepribles à nos fens, & lorfqu’elle détruit, elle divife encore & fépare les parties élémentaires , de forte qe nous ne pouvons l’imiter qu'imparfaire- ment , foit dans la génération , foit dans la corruption qu'elle fait opérer : la génération qu’elle produit, eft toujours quelque chofe de parfait ; la corruption qu'elle produit, eft aufli entière & complette : en vertu de ces divifons, fa force devient en quelque forte infinie. La manière dont fe font la plupart des productions naturelles, ne fe réduiroir-elle pas à ce point capital : » Le feu , l'ame du monde, » on fi l’on veut, la nature, agit fur des corps que la décompoftion » a préalablement difpofés, c’eft-à-dire , réduit à une grande fimplicité. En effet, nous avons vu qu’alors le plus petit degré de feu peut opérer les plus grands effets : or nous HER les maîtres du feu ; que n'employons-nous la divifion dont nous fommes aufli les mai- tres ? Je defire que l'expofition que j'ai faire de l’avantage de cette méthode , la At goûter & mettre én ufage. nt ERRAT À des Recherches , Ec. imprimées à la page 33 de ce volume, PAGE 37, ligne 16, prendra, lifez entreprendra. Page 38 , ligm 17, jouiffances , life; puifances. Ibid , ligne 124 , contendante, life; antécédente. Page 41 , ligne 38 , fur, 4 éz fous. Page 42 , ligne 11. à l'acide , lifez à l’aide. Page 45, ligne 13, écrouiflés, lifez rouiflés. Ibid, ligne 16, élémentaire , lifez alimentaire. Page 48, ligne 10, mieux , life; mème. Page so, lg. 34, l’'infufon, Zi ëz l’infolarion. Tome VI, Part. II. 1775. 166 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, CE PE EE EE I EP DEEE SUN EN ILE DU MNE" MOCO TRUE DE M MATHON DE LA COUR, De l’Académie de Lyon, Sur la Machine muë par la réaétion de l'Eau. L A première partie de ce Mémoire , imprimée dans le Journal du mois de Janvier 1775, contient une méthode générale pour cal- culer la force des Machines muës par la réaétion de l'eau ; j'y ajou- terai dans celle-ci une defcriprion plus détaillée de celle qui a été conftruite au Bourg Argental, & le réfultar d’une expérience qui prouve qu'on n'a point exagéré l'utilité de ce Méchanifme. M. l'Abbé Pupil a rendu fa Machine beaucoup plus fimple qu’elle n'avoir été projertée d’abord. Au lieu d'une roue pefante il n'em- ploye que deux volets Bc, BH, figure première, planche 2, qui confiftent en deux tuyaux ronds de fer-blanc de 3 pouces de dia- mètre. Hs reçoivent l’eau par-deffous au point HE, & ils font tor- tifiés par un encaiflement de planches qui les tiennent en raifon & les empêchent de plier. Deux plaques de méral attachées , l'une à la caille B, & l’autre à l’extrémité [| du tuyau de conduire, à chacune defquelles on à adapté un cercle, ou petit tuyau de mème métal de deux pouces de diamètre (qui tournent librement l’un dans l’autre fans laiffer échapper l’eau ), forment la communication entre le tuyau de conduite & les volets. Les ouvertures rondes c, par lefquelles l’eau s'échappe , ont 14 lignes de diamètre. Leur diftance du centre de mouvement B eft de 46 pouces, & la hauteur de la fource de 23 pieds. La forme circulaire des tuyaux Bc, BH, exige quelques chan- gemens dans les calculs du premier Mémoire qui les fuppofoit rec- tangulaires ou quarrés. Lorfque l'arc de cercle A B, feure 2 , eft mû horifontalement & prend la firuation ab, la virefle BA, avec laquelle il fuit l’action du reflort de l’eau, n’eft pas égale dans tous les points de cer arc. Par exemple, au point D, la furfae ne fuit que felon la ligne D EZ=r, perpendiculaire à la tangenre SUR'L'HIST. NATURELLE ET LES ARTS. 167 du point G, parce que une furface ne peut être frappée que felon la ligne perpendiculaire. Or x étant labcille prife du centre, y l'or- donnée & r le rayon, g la viteffe que le rellort de l'eau peur pro- . , fx A duire, on aurar: f—x:r, ce qui donner ——, & la moitié r z À UE 3 ENS : du quarré g—— , exprimera lation du reffort fur chaque petit r arc ds de la furface du cercle, (n°. 32). Cette action perpendicu- laire à l'arc ds doit être décompofée pour n’en prendre que la por- 12 fxt, xds r r tion horifontale ; ce qui donnera g — .Onaaufi x:r =dy:ds & ds = _ d y. En conféquence l’aétion fur chaque point L2 de l’arc a b fera exprimée par la moitié du quarré g —/* > dy; ou (af V P—y ). d'y. Si l’on fait, après avoir intégré cette formule, le quart de l'aire du cercle égal à + r*, & fi l’on écrit # au lieu du diamètre 2r, b ; ï à la formule (4 2 —igf + 510) = exprimera l’aétion horifon- tale fur la furface qui fuit du tuyau circulaire , au lieu de b d . LA , — (8 2— 28f+f) — que nous avions trouvé par lation fur une furface plane, (nos. 34. & 33). r étant dans ces dernières for- mules , l’expreflion de la diftance au centre du mouvement, fup- pofant 9=—0, c'eft à dire, que l’eau commence à circuler vers le centre de fa circulation , la formule du n°. 35 deviendra pour le cas des ruyaux circulaires. —1R.Ré&.7v/ A? + Vin puri Ar y: grutt ) Fu Ruu 5) HR nn? n° +R. Ré. Z'v'u* HR nE On y ajoutera comme dans le cas où les tuyaux feroient quarrés R?vu . 3 ; R qui 2e pour avoir la force totale d’un des volets horifon- 2 taux, AN 168 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, Quand on voudra avoir égard à la réfiflance de l'air , il faudra fe fouvenir que le tuyau horifontal eft encaiffé dans un tuyau de bois quarré , & calculer l’aétion de Fair fur la furface de cer encaif- fement. Dans le calcul des frottemens, on obfervera que la machine feule pèfe environ So livres, indépendamment de l’eau qu’elle contient, & que la méthode de faire entrer l'eau par-deffous, la foulève & diminue le frottement de la plaque À qui la fupporte, (figure première ). La machine, livrée à fon propre mouvement , fans avoir aucun autre effort à fupporter, & ne laiffanc échapper l’eau que par une des deux ouvertures c, parvient à faire environ 11$ tours par mi- nute, c'elt-à-dire, qu’elle acquiert une vitefle conftante d'environ 46 pieds par feconde à l'extrémité du voler. Examinant avec foin le réfultar de cette expérience , jai trouvé en premier lieu que la machine éprouvoit une réfiftance incompa- rablement plus grande que celle qui provient de l’inertie de l’eau, de la réfiftance de Pair & du frottement. Cet cffert ne peut donc être attribué qu'à l'inégalité du reffort de l’eau fur les deux furf: ces des volets. En fecond lieu , j'ai trouvé cetre inégalité beaucoup moindre, & la vielle de fuite plus petite qu'elle n'eft calculée au n°. 31 de la première partie de ce Mémoire, ce que je crois de- voir attribuer principalement à la vivacité du reffort de l’eau qui fait qu’à mefure qu’elle avance par fon mouvement progrefif felon la longueur du tuyau horifontal, elle eft repouffée contre la furface qui fuit, enforte qu’elle ne peut fuir réellement que environ avec les 12 de la vitefle indiquée au n°. 31. La forme circulaire des tuyaux peut auffi y contribuer de quelque chofe , les couches fupérieures & inférieures ayant moins de chemin à faire que celles du milieu pour atteindre la furface qui fuit. Cer effet peut aufli être occalionné en partie par la preflion qui pouife l'eau dans le tuyau le long de la furface qui fuit où la réfiftance eft moindre, ce qui peut faire regarder dans le calcul la longueur de certe furface comme plus petite. ÿ J'aurois fouhaité un plus grand nombre d’expériences faites avec des tuyaux de différentes groffeurs, de différentes longueurs, & avec des viteffes différentes , pour tâcher d'établir une loi pré- cife. Quoiqu'il en foit, j'ai calculé l'effet de la machine en fuppofant 10 . à vu que la furface fuyoit feulement avec 4 de la vitelfe — ayant égard à la réfiftance de l'air & au frottement. IL m'a paru que lorf- SUR L’HIST. NATURELLE ET LES ARTS. 169 que la vicelle de circulation x étroit un peu plus de la moitié de la virefle W/ due à la hauteur du réfervoir, on avoit l’effer le plus avantageux, ÂAlors on éléveroir avec certe vielle les 2 du poids d'une colonne qui auroit le double de cette hauteur, & pour bafe la groffeur > de la veine d'eau qui fort, ce qui furpañle le plus grand effet des machines muës par des courans. Do Es JET OR OR TT EN RES Lo i Sur les Roses rouges de Provins ; Par M. Oro1x, Apothicaire à Provins. Sola india nigrum Fert chenum. Nirgil. Gcorgiq. mm D E toutes les Rofes, celles qui font d’une utilité plus générale font les rofes pâles incarnates, ou rofes à cent feuilles, & les rofes rouges ou rofes de Provins. Les rofes pâles font affez connues ; elles font l’ornement de nos jardins : elles ont auf quelques VErtus mé- decinales ; cependant comme elles fonc plus particuliérement em- loyées pour les chofes de pur agrément, nous n'en dirons rien ici. Les rofes rouges, appellées rofes de Provins, feront feules la matière de cetre Differrarion. Ces rofes pollèdent des vertus qui les rendent bien précieufes à la Médecine. Les grands avantages qu’elle en fait tirer devroienc nous rendre moins .indifférens fur le choix de ce médicament 3 puifque c'eft de-là que dépend route fon efficacité. Nous avons d’au- tant plus d'intérèr & de facilité à nous procurer ces fleurs dans leur dernier degré de perfeétion, qu’elles fonc particulières à la France L & qu’elles font même une branche de commerce avec l'Etranger. C'eft donc prendre en main la caufe de l'humanité, .c'eft entrer dans nos véritables intérêts que d'apporter tous nos foins à encou- rager , à diriger la culture de ces rofiers , à leur choifir le terrein le plus favorable & à defcendre dans le dérail & la manipulation des préparations dont ces rofes font la bafe. Nous n approfondirons pas également routes ces queftions, parce que ce n'eft point un traité complet de ces fleurs que nous prétendons donner. 30 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, Le premier pas qu’on ait à faire dans ces recherches intérefan- tes , efl d'examiner parmi ces fleurs l’efpèce qui pofsède le plus de vertu, & à la culture de laquelle on doit s'appliquer particu- liérement. Le nom de rofes de Provins , que toutes ces rofes rouges ont toujours porté, & qui eft encore la feule dénomination fous laquelle on connoifle toutes celles qui font dans le commerce , indique affez que Provins a toujours donné les rofes les plus eftimées. Les rofes de cette ville , indépendamment de leurs vertus fupé- rieures , ont un caractère qui les diftingue , au premier coup d'œil, des rofes rouges qui croiffent ailleurs : elles font plus fimples que ces dernières, & d’une couleur rouge beaucoup plus foncée. Cette efpèce de rofe, qui croit aujourd’hui aux environs de Pro- vins , a étè célèbre de tout tems. Ce font , au rapport de nos an- ciens Naturaliftes, ces mêmes rofes qui étoient fi connues à Rome fous le nom de rofes milefiènes. En effet, la définition que Pline nous donne des rofes milefiènes , convient parfaitement & feulement aux vraies rofes de Provins. Les rofes miléfiènes , dir-1l, tirent leur nom & leur origine de la ville de Miler , dans l’Afie mineure, elles font les plus hautes en couleur , ardentiffimus color ef , & de plus très-fimples ; le nombre de leurs péralles n’excèdent guère ce- lui de douze. Il eft crès-probable que nos rofes étoient mème connues dans des tems encore plus reculés, car ce n’eft peut-être que de certe ef- pèce de rofe dont Homère a vanté les vertus , puifque la ville de Miler éroit peu éloignée de la fameufe Troie. C'éroit le fentimenc de Pline , a Trojanis temporibus , Homero tefle : mais comme l’an- tiquité d’origine n’eft pas , parmi les végétaux, un titre de recom- mandation , nous allons examiner, fans partialité , fi l’efpèce de tofe qu'on cultive aujourd’hui aux environs de Provins, mérite, par des avantages plus folides, la réputation & la préférence qu’elle avoit du tems de Pline & d’Homère. Les vraies rofes de Provins ont beaucoup plus d'odeur que les autres rofes rouges qu’on cultive ailleurs, & qu’on fait pafler fous le mème nom. Âu lieu d’être d’un rouge clair comme ces dernières, elles fonc d’une couleur très-foncée, d’un rouge plus intenfe & d’un velouté plus doux. D'une mème quantité de ces différentes rofes prifes au mème degré de deflicarion, & épuifées par plufisurs dé codions , les vraies rofes de Provins ont conftamment donné plus de matière extractive , d’un goût plus aftringent & plus amer, les aci- des en tirent une couleur beaucoup plus vive; enfin, à quelques épreuves qu'on ait fourmis ces différenres rofes, celles des environs ti SUR L’'HIST. NATURELLE ET LES ARTS. 171 de Provins fe font toujours diftinguées par des effets plus mar- qués. ; ; , Ye 19) Quoiqu'on puiffe aifément fe convaincre de la fidélité de ces expériences, cependant pour que ceux qui ne font pas à portée de les repérer, ne foupçonnent pas qu'un intérêt particulier nous engage à exagérer , aux dépens de la vérité, le mérite de nos rofes , nous allons rapporter ce qu’en dit Pomet dans fon Hifloire des Drogues ; ouvrage d'autant plus précieux & plus digne de notre confiance , qu'il eft le fruit d’une expérience de trente années, & qu'il eft du petit nombre de ces livres originaux fur lefquels ont été calqués tous ceux qui ont paru depuis fur la mème maucre,. » Les rofes de Provins, dit-il, furpaflent en beauté & en bonté » toutes celles qui viennent des autres endroits .. .. elles fe confer- » vent beaucoup plus long-tems que les autres, tant dans leur cou- »leur , que dans leur odeur. ... La plupart des Épiciers & Apo- » thicaires, ou autres perfonnes qui vendent & employent des rofes » de Provins , fe contentent aflez mal-à-propos , de nos rofes rouges , » foit de celles qui fe cultivent autour de Paris, où dans d’autres » endroits... néanmoins ceux qui font cetre fubltitution , n’en »ont pas plus de raifon , tant parce que celles des autres en- » droits n'approchent ni en beauté, ni en qualité , des véritables profes de Provins ; & de plus , c’eft qu’elles ne fe peuvent confer- » ver auf long-tems, malgré rous les foins que ces particuliers y » puiffent apporter pour les conférver .... Les véritables rofes de » Provins ; ajoute'il , font fi eftimées aux Irdes, qu'il y a des tems » où elles s’y vendent au poids de l'or, & qu’il leur en faut , a quel- » que prix que ce foit «, Si Pomet fe plaignoit de ce qu’on avoir introduit & fubftitué d'au tres rofes aux véritables rofes de Provins , que n’auroit-il -pas dir, s’il eñr vu ces nouvelles rofes non- feulement ufurper la place des véritables , mais même ruiner entièrement leur commerce ; C’eft ce- pendant ce qui eft arrivé : chacun a été jaloux de partager avec la ville de Provins, le bénéfice confidérable qu'elle faifoit fur le com- merce exclufif de fes rofes : on leur a fubftitué d’autres rofes rouges : peut-être même quelques-unes de ces rofes font-elles originaires de Provins ; ainfi qu'une ancienne tradition femble lindiquer. On aura, par l'appas de l'argent , tenté quelques cultivareurs des environs de Provins ; & la cupidité qui ne confulte que fon inrérèt particulier & Pintérèc du moment, aura confenti à vendre du plan de ces rofes . fans doute avec un bénéfice confidérable , mais toujours mal entendu, puifqu'il ne fe répète qu'une feule fois. Ce plan cultivé par des mains avides , a fourni au commerce des rofes en abondance : ces nouvelles sofes données fous le même nom, peut-être à plus vil prix ont dû 172 OBSERVATIONS SUR LA. PHYSIQUE, diminuer la vente des vraies rofes de Provins : ces dernières nant pa même foutenir la concurrence ; leur commerce a roujours confi- dérablement diminué , & eft enfin tombé dans l’état de langueur où 1! eft aujourd'hui ; mais foic que ces rofes vendues fous le nom de rofes de Provins, foient d’une autre efpèce que celles qu’on cul- tive aux environs de cette ville, comme le penfoir Pomer , foit qu'elles foient originaires de Provins , il eft conftaut qu'elles n’ont pas les mêmes qualités , & qu'elles n'ont pas confervé les mêmes vertus dans un terrein & fous un ciel étranger : c'eft ce que l’ex- périence & l'analyfe comparées , juftifient completement. Qu'il nous foit permis de former quelques conjectures, & de cher- cher fi, indépendamment de plufieurs autres caufes dont la narure fe réferve le fecrer, on ne trouveroit pas dans la difpoltion du ter- rein des environs de Provins , quelques raifons fenfibles , auxquelles on pourroit rapporter les vertus exclufives que l’on reconnoit dans les rofes qui y croiffent. La ville de Provins n’eft pas moins renommée par fes eaux mi- nérales, que par fes rofes:ces eaux martiales vitrioliques , (1) fonc produites par des pyrites qui fe trouvent abondamment dans le lit de glaife fur lequel s’appuye la terre labourable : certe terre labou- rable même, contient b:ancoup de ma-ières ferrugineufes, Il eft aifé de voir que cette difpolition de terrein eft fingulièrement propre à denner aux rofes qu'on y cultive, les vertus qui les diftinguent. Les propriérés de ces rofes fonce de fortifier l’eftomac , d2 donner en général , plus de reffort aux fibres, plus de ton aux différentes par- vies, & d'augmenter les ofcillations. Appliquées extérieurement elles fortifienr les meinbrés relâchés, & font un puiffant EN or ces Propriétés leur font communes avec les préparations martiales & vitrioliques. La belle couleur rouge de ces rofes eft due probable- ment à l’action de ces fucs minéraux; car on fait que l’acide vitrio- lique avive la couleur rouge des rofes, & le fer lui-même, quand il eft extrèmement divifé par les acides , & privé d’une grande pars tie de phlogitftique , prend une couleur rouge ; ce que nous nous propofons de prouver dans un Mémoire particulier fur les couleurs. Indépéndamment de [a nature du terrein, la manière fimple & grofhère de cultiver nos rofes, contribue encore à leur donner une grande fapériorité fur celles qu'on cultive ailleurs. Les terres où croiflent ces dernières narurellement plus légères, reçoivent une cul- ture plus foignée, & des engrais en abondance ; de-là il réfulre un a ——————— ————— (1) Voyez l'Analyfe de ces Eaux , Brochure imprimée à Paris chez Cailleau 770, bon Ouvrage de la même main, vegetation SUR L'HIST. NATURELLE ET LES ARTS. 173 végérarion plus prompte ; des boutons mieux nourris renferment une plus grande quantité de pétales, enfin une récolte plus abondante ; nos rofes, au contraire, croiflent dans des terres fortes, ferrugineufes, fur des hauteurs & dans un atmofphère chargé de vapeurs martiales- vitrioliques : elles ne s'élèvent pas à plus d’un pied de terre, & en reçoivent plus immédiatement les fucs minéraux ; c'eft ce qui fait qu'elles font plus fimples , que leur couleur rouge eft plus foncée : leurs pétales larges , mais plus nombreux , entourent les organes de la génération , qui fonc ici plus multipliés & plus développés , ce que la nature donne dans le phyfique comme dans le moral , la fim- plicité, Ja vigueur & la vertu : les autres doivent plus à l'art ; elles font doubles, pâles, & ont peu d'énergie. Non - feulement le territoire de la ville de Provins donne les meilleures rofes à la Médecine , mais les préparations de ces rofes faites dans cette même ville, ont coujours été les plus eftimées : ces préparations confiftent principalement en conferves sèches & li- quides. Nous ne fautions mieux faire pour prouver notre affertion, que de rapporter les propres paroles du favant Naturalifte déja cité, » Outre la grande quantité de rofes de Provins que nous vendons, » dit-il, nous en faifons venir les conferves sèches & liquides, &c » même quelquefois le fyrop, érant les lieux où ces fortes de com- » poñtions fe font le mieux ; & qui que ce foir ne doute que ces » conferves & fyrop ne foient beaucoup plus parfaites que celles qui » fe pourroient faire dans les autres endroits & avec d’autres rofes«. Ce qui contribue à donner aux conferves de Provins , fur tout à* la conferve liquide des qualités fi fupérieures à celles qu'on pourroit préparer ailleurs : c'eft 1°. l'attention que ceux qui la préparent, ont d'employer les rofes fi-tôt qu'elles font cueillies. À Paris , au con- traire , les rofes fe vendent en bouton fur la place; & lorfqu'il n'y a pas affez d'acheteurs, ou que le vendeur, qui fouvent ne fait pas fe borner , ne trouve pas le prix avantageux, elles font reflerrées, & elles peuvent paroître plufieurs jours de fuite avant d'être ven- dues : ces rofés doivent fouffrir alors des changemens fenfibles qui al- tèrent néceflairement la conferve qu'elles doivent compofer : 2°. en comparant les différens procédés que l'on employe par la confection de la conferve de rofes , on veira que la manière dont on la pré- pare à Provins , eft infiniment meilleure. L'expérience a démontié que quand il s’agifoit de conferver les médicamens tirés des végéraux avec toutes leurs vertus , on devoit préférer la méthode la plus fimple , les manipulations trop multi- pliées ne fervant qu'à les dénaturer : en cela la conferve de rofe li- quide de Provins a toutes les perfections dont elle eft fufcepuble , Tome VI, Part, LI, 1775. 174 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, puifque les rofes & le fucre qui les compofent , font fimplement mèlés & broyés à froid. La maniète ordinaire de préparer la conferve de rofe, eft au con- traire très-défedtueufe. La Pharmacopée de Paris prefcrit de verfer fur des rofes fraîches, de l’eau bouillante , d'exprimer enfuite cette eau, de piler ces fleurs, de les mêler enfuite dans du fucre cuit en confiftance d’électuaire folide avec l’eau -exprimée des rofes. On fait que l'action du feu caufe roujours quelqües altérations aux fubftances “végétales, fur-rour aux fleurs , dont le ciffu délicat n’admet que des fucs fort atténués , & par-là faciles à décompofer: ces rofes , après avoir trempé dans l’eau bouillante , font enfuite jettées dans du fucre cuit à la plume , où elles éprouvent encore un degré de chaleur bien fupérieur à celui de l’eau bouillante. Cette manipulation défectueufe entraîne encore d’autres inconvé- niens. Il eft rrès- difficile de faifir le véritable degré de cuitte du fucre , parce que les rofes peuvent avoir été plus où moins expri- mées, & retenir une quantité d’eau indéterminée ; ainfi le même artifte ne pourroit pas répondre de la faire deux fois de même con- fiftance : quelles différences ne doivent donc pas fe trouver entre ces conferves préparées par différentes mains ; aufli les unes fe defsèchenr, & les autres fubiffent un mouvement de fermentation qui en change toutes les propriétés ; à peine même les mieux préparées peuvent- elles fe conferver un mois fans altération , parce que quelqu’atren- tion qu’on ait dans ce procédé de bien incorporer les rofes & le facre lors de la mixtion, par le refroidiffement le fucre fe raffem- ble en petires maffes aggrégatives , ainfi qu'il arrive à un fel amené par l’évaporation au degré de cryftallifarion : le fucre fe trouve donc répandu inégalemenr dans cette préparation , & il peut fe faire que quoiqu'il y ait la quantité de fucre fufhifante, cette conferve fouffre un mouvement de fermentation à laquelle elle n’eft déja que trop difpofée par le degré de chaleur qu'elle a éprouvé , & qui a déve- loppé les agens de la fermentation. Nous aurions encore bien des chofes à dire fur la culture des rofers , fur la deflication de nos rofes qui feroient fufcepribles d'une plus grande perfection ; mais il nous fufir pour le préfent, d'avoir montré que nos rofes de Provins font de beaucoup préféra- bles à celles qu'on donne fous ce nom, & que le rerrein des en- virons de cette ville eft le plus propre à leur culture : nous n’en- tendons pas par-là , fuivant l'opinion commune , que ce foie le terrein où elles croiffent le mieux ; mais que c’eft celui dont la conftiturion locale contribue à leur fournir des fucs plus énergiques. Nous avons fait voir de plus, combien il importoit à la Médecine de faire revivre le commerce des vraies rofes de Provins ; peut-être SUR L'HIST. NATURELLE ET LES ARTS. 175 même cet objet mériteroir- il les regards du Gouvernement , qui veille incefamment au foutien des bonnes Manufactures , pour at- tirer la confiance & l'argent de l'étranger ; car nous avons rapporté combien les véritables rofes de Provins étoient autrefois eftimées des Indiens. La conferve qu'on en, prépare fur le lieu , a auflr , comme nous l'avons dit, un degré de bonté qu'elle n'a pas, & ne peut avois ailleurs : ce médicament fi fimple, fi naturel , lorfqu'il s’agit de forrifier & de donner du ton à l’eftomac relâché & affoibli, n’eit- il pas mème préférable à ces préparations compliquées, & où l'on fait entrer à grands frais les produétions brülantes & meurtrières de l'Inde, ee ——— © "SE QG CCC Sas Elaue s08 it E DES PE OMOAUAN CEE UE MES EXPÉRIENCES ELECTRIQUES, Faites par M. Comus. Ju fair paffer la commotion dans toutes les parties de l'animal à la fois, enfuite dans les parties féparées. Le témoignage des pet- fonnes commotionnées & mes fenfarions fe font trouvés les mêmes : cetre expérience connue -fous le nom de Leyde, que le hafard a fait rencontrer, préfente tant de variétés dans les fenfations des différentes parties qu’elle parcourt , qu’elle exige toute l'attention du Phyfcien : quel vafte champ l'électricité n’ouvre-t’elle pas au phyfologiite pour les connoïffances du fluide nerveux , que je crois être le même que le fluide électrique : les connoiffances conjecturales qu'on a fur le fluide nerveux , acquéreront un degré de probabilité, par l'applica- tion raifonnée & mulripliée de l’éleétricité aux différentes maladies du genre nerveux. Plus nous aurons de faits, & plus nous aurons de connoïffances fur un fluide que nous ne pouvons appercevoir par les fens. À combien de maladies chroniques & incurables l'homme n’eft- il pas expofé par le plus ou le moins de circulation du fluide ner- veux : toutes ces maladies cruelles, ne trouveront de guérifon que par l'adminiftration de l’éleétricité : on eft étonné que prefque routes les cures qu’on a tentées, n'aient pas réufli, mais à quelle maladie, & 7a 176 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, dans quel tems de cette maladie a-ron adminiftré ce remède ? cont- ment l’a-ton adminiftré ? le hafard n'a-t'il pas produit la guérifon , comme il a adminiftré le remède? On ne doit jamais attendre que l'éledtricité guérifle des maladies de plufieurs années ; lorfque la na- ture a contracté par le tems une mauvaife habitude, & qu’une cir- culation contre nature eft établie , il n’eft plus de guérifon ; c’eft dans le commencement de la maladie qu'il faut tenter la cure par l'électricité, & appliquer en même-tems les remèdes appropriés à cette maladie : l’éleétricité ne peut qu'établir la circulation inter- rompue du fluide nerveux , & cela par communication de vibra- tion : ce fluide feul ne peut apporter aucun remède aux parties que les obftructions des nerfs ont affecté ; ce n’eft qu'avec les remèdes pro- pres , adminiftrés à tems avec l’éleétricité, qu’on guérira ces fortes de maladies, en foutenant & entretenant la circulation que l'électricité a établie. J'ai tenté plufeurs de ces eures , aidé des per- fonnes de lart:il en eft très-peu qui n'aient été guéries : il refte toujours un doute fur ces guérifons ; favoir, fi la maladie a cefé , ou fi les autres remèdes qu’on a adminiftrés, ont produit la guérifon; ce ne fera qu'après plufeurs cures , qu'on pourra favoir la vérité, & virer des conféquences juftes de l'électricité. Effets de la commotion dans différentes parties du corps humain. Premiere Expérience. Faïfant pafler la commotion d’un orteil à l'autre, la douleur fe fait fentir aux deux orteils, à l'articulation du tarfe avec les os de la jambe, enfuite à l’articulation de la jambe avec le fémur : cetre fenfation eft très - douloureufe, & fe termine par un engourdiffement dans les os des hanches. Deuxième. Des orteils aux mains , la douleur fe fait fentir aux deux orteils , aux genoux, aux coudes & aux mains. Troifième. D'une main à l’autre , la commotion fe fait fentir à toutes les articulations du carpe & du métacarpe, & très-fortement de l'articulation de l’avant-bras avec l’humérus, & fi l’on employe une forte batterie pour cette expérience , on reflent la douleur juf- qu'au fternum. Quatrième. Lorfqu’on tient la perfonne qu'on éleétrife par le mi- lieu de l’humérus , la fenfation douloureufe eit très forte à l’articu- lation du coude , comme fi on faifoir pafler la commotion d’une main à l’autre : ce fair eft très-extraordinaire. Cinquième. Des orteils au crâne , ta douleur fe fait fentir au crâne, au “time le long des vertèbres , aux coudes, aux genoux & aux orteils, SUR L’HIST. NATURELLE ET LES ARTS. 177 Sixième. Des orteils à la langue , la douleur fe fait fentit à la langue , aux coudes , aux genoux & aux orteils. Seprième. Des orteils aux nez, la douleur fe fait fentir aux mêmes endroits , que quand on fait pafler la commotion des orteils à Ja langue. Huitième. Quand l'on fait paffer la commotion d’une oreille à l'autre, il fe fait un bruit fourd dans les deux oreilles, & fi la per- fonne eft fourde d’une, elle entend un fifflement du côté affecté, & elle reffent une douleur comme fi la cère étroit preflée vivement en- tre deux planches. Neuvième. Si vous faites paffer la commotion de l’atlas au coccix, la douleur fe fair fentir à ces deux endroits de même qu'à toutes les vertèbres du dos : cette douleur n’occafionne dans ces parties , qu'une efpèce d’engourdiflemenr. Dixième. En faifanc paller la commotion à travers des parties charnues, tel que d’une feffe à l'autre, il ne s’y fair qu’une douleur reflemblante à un pinçon fait aux endroits rouchés ; le réfultar eft le mème pour le ventre. Onzième. Si l'on fait paffer la commotion à travers le coude , elle occalionne une douleur qui fe propage foiblement jufqu'au carpe. Douxième, Si dans cette expérience , vous faites pafler la come motion fur la veine, elle devient fur-le-champ un peu plus pâle , & on fent une fraîcheur qui fe diflipe , fi-tôt que la veine reprend fa couleur, & devient un peu plus chaude qu'à l'ordinaire , ce qui dure pendant quelques minutes. Treizième, Les commotions tranverfales , données aux différentes parties du corps, ne font fenfibles aux endroits touchés, que comme une petite piquure. Comme en faifant pafler la commotion du fternum au dos, on ne reflent la piquure qu’au contatt, fans reffentir inté- rieurement aucune douleur. Quatorzième. En faifant pafler la commotion des deux orteils à [a vingt-unième vertèbre, on reflent la douleur dans toutes les verrè- bres qui vont jufqu’au coccix , dans l'os facrum, le baflin & dans les os des hanches : la douleur eft fenfible à larticulation de la hanche avec le fémur, & des plus fenfible dans l'articulation du fémur avec la jambe , & moins fenfible dans toutes les articulations des pieds : il faut, pour donner cette commotion dans différentes maladies des hanches, des cuifles & jambes , avoir une plaque de cuivre , qui prenne depuis la vingt-unième vertèbre jufqu'au coccix , & attacher une chaîne aux deux orteils, & tirer l’étincelle fur la plaque : on ref- fent dans l’inftant un mouvement involontaire, qui établit pendant uelque tems la circulation du fluide nerveux , & même à une per- he qui n'a aucun mouvement dans les parties, 193 OBSERVATIONS SUR LA. PHYSIQUE, Quinxième. J'ai remarqué que lorfque je fais paffer la commotion de la tèce aux pieds; elle eft toujours beaucoup plus forte lorfque je tire l’étincelle fur la future coronale , que fur une autre partie, & fur-tout fur la partie qui forme l'angle avec la furure lambdoïde. D'après mes obfervations , il paroît que de routes les fenfarions douloureufes que la commotion donne, celles du poignet, du coude , de la cheville & du genou font les plus fortes. Voilà mes conjeétures fur certe différence dans ces fenfarions : ces douleurs plus ou moins fortes ne viennent que du méchanifme des articulations des os : n'ayant au- cune difcontinuité dans les artères, veines, nerfs & mufcles, le mouvement, doit être continu dans toutes ces parties pendant la commotion : la douleur n’eft occafionnée que par la difconrinuité des parties. ù Les Electriciens favent que lorfqu’on fe ferr de chaîne pour faire pafler la commotion à quelque corps, chaque chaînon tire de celui qu'il rouche , une érincelle : plus le chaînon eft éloigné , & plus l’é- cincelle eft forte. Si on pofe la chaîne fur un papier blanc pendant cette opération, Ja trace de la chaîne fe trouve marquée fur le papier , d'un gros rouge foncé ; chaque étincelle d’un chaïnon enlève une petite partie de cuivre qu'elle réduit en chaux fur le papier. Si on fe ferc d’un morceau de métal continu, on ne voit aucune érincelle , & le papiec ne fe trouve pas marqué. Toutes les parties animales ayant conti- nuité, excepté les os, qui forment chacun un corps particulier féparé comme les chaînons, plus où moins avec celui avec lequel il s’ar- ticule ; cet donc aux os, & à leur plus ou moins d’éloignement , que nous devons le plus ou le moins de douleur dans la commo- tion ; l'expérience juftfie ce que j'avance. L’articulation par arrrodie , lorfque les extrémités des os font éloignées, occafionne de la douleur dans la commorion : nous avons cet exemple dans le poigner & le coude, où l'articulation du radius par une extrémité fe fait avec l’humérus , & latéralement avec le cubitus par artrodie, & de mème par l’autre extrémité avec le carpe & le cubitus. Comme cer os a double arricularion aux extrémités qui font très éloignées, 1l en part une double étincelle à chaque extrémité & très forte par l'éloignement de la tête des os ; la douleur du pied & du genou eft produite par la même caufe, le péronné s’articulant à-peu-près comme le radius. La douleur eft rrès foible dans l'articulation de l’omoplate avec Phumérus, ainfi que la hanche avec le fémur , quoique ces articula- sions, foienc par artrodie ; la raifon eft que la partie convexe ef SUR L'HIST. NATURELLE ET LES ARTS.-179 prefqu’en contaét avec la concave , ce qui ne produit point d’étin- celles, ou s'il y en a, elles ne font que très-foibles. Les articularions par ginglime ne font point douloureufes, par la raifon que les extrémités des os fe touchent en faifant à-peu-près la charnière, on ne reffent dans toutes les articulations , qu'une efpèce d’engourdiffement , tel que je le rapporte dans la commotion donnée le long des vertèbres & autres parties articulées de même. Si “A perfonnes inftruites, vouloient faire adminiftrer l'éleétricité à des maladies occafonnées par un défaut de circulation du fluide nerveux , il faut que la maladie ne foit pas vieille : je m'offre fous les yeux des Médecins d’adminiftrer ce remède avec toute la précau- tion pollible. La fuite de ces expériences dans Le cahier fuivant. OBS a BAR-PFUSAO TT: TON Sur un Article de l'Eloge de M. CommERSoN par M. pe LA Lanpe, de l'Académie Royale des Sciences, inféré dans le Journal de Phyfique , Tome V, Février 17755 Par M. BARRY, Commiffaire de la: Marine au Departement de , Toulon. M. de la Lande a rempli glorieufement les devoirs de l'amitié envers M. Commerfon, en faifant un Eloge public de cet étonnant Naturalifte laprès fa mort. Encouragé par ce ‘bel exemple , je vais -m'acquitrer d’une obligation à peu-près femblable envers ün ami, heureufement plein de vie,'en le juftifiant d’une impuration qui s’eft gliffée contre lui dans ce mème Eloge, & ‘dont j'ai va de fâcheux effets fur l’efprit de plufieurs Lecteurs honnêtes. Je veux parler de M. Maillart du Mefle , Commiflaire général de la Ma- rine, Ordonnateur à l'Ifle de France. » Après le départ de M. Poivre, dit M. de la Lande, page 111, » du Journal , qui avoit fait de notre Näturalifte rour le cas qu'il » méritoit , Celui-ci perdit tous fes agréméns ; M. Mhillart , fuccef- »feur de M. Poivre, faifoir peu de éas des fciences, M: Commer- # fon fur renvoyé de l’Inrendance où il avoit logé jufqu'alors |, & » obligé d'acheter une maifon ; il commença, à fentir le tort qu'il & 180 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, » avoit eu de refter; fes maux augmentèrent lors même que les fe- » cours diminuoient; enfin 1l fuccomba le 13 Mars 1773 «. Voilà affurément un reproche bien grave, Accufer hautement une perfonne en place, de faire peu de cas des ftiences ; de priver bruf- quement de l'hofpitalhité un Savant accablé de maux qui en avoit joui jufqu’alors par la bienfaifance du chef précédent , c’eft dénon- cer à la Société cette perfonne en place comme un efprit reflerré dans des bornes étroites, & comme un homme incapable d'égards & de pitié. Rien pourtant n’eft moins mérité que cette inculpation, malaré le délogement de M. Commerfon. M. Maillarr eft fils d’un ancien Intendant de la Martinique, dont la mémoire eft encore en vénération dans cetre Colonie. Hé- ritier des vertus & des talens de fon pere , cet Officier, après avoir affé par les différens grades du corps de ladminiftrarion de la Marine. fervi avec diftinétion dans trous les Ports, aflifté avec hon- neur à plufeurs combats navals, fut envoyé, en 1765, à la Mar- tinique en qualité de Commiffaire-général , & enfuire à Cayenne comme Ordonnateur , pour réparer, s’il ‘éroic poflible , les malheurs trop célèbres dont certe coleme avoit éré récemment accablée. C'eft à que M. Maillart juflifia completrement la bonne opinion que le Miniftère avoit conçue de lui, & qu'il acquit la réputation d’un Adimniniftrareur éclairé, jufte, défintérefTé, bienfaifant. Il feroit long & inutile d’expofer ici le tableau de fa geftion. Il me fufhra de dire qu'il concilia fi bien les intérèrs du Roi & ceux des Colons, que l'ordre général des Finances fut rétabli fans aucun moyen violent, & à la facisfaétion univerfelle. À fon retour de Cayenne , M. Mail- larc reçut de la Cour des 1écompenfes fatteufes; mais pour avoir fi bien fervi à la Guianne , il fut expofe à de nouvelles farigues par fa million à lifle de France, où les circonftances exigeoient des talens , un caraétère & des principes tels que ceux qu'il venoit de développer; & fon zèle lui hr oublier le befoin & l’efpoir qu'il avoit après tant de courfes & de travaux, d’être placé convenable- ment dans un Département de Marine, Son adminiftration à l’Ifle de France eft applandie , il eft révéré dans cette Colonie. Eh comment n'obriendrait-il pas un fuffrage unanime ? Il n’eft occupé qu'à bien faïfe , & c'eft de lui qu'on pent dire fans contradiétion , qu'il a, relarivement à fon étar, le bonum in voluntate , & le retlum in intelleétu, Ajoutez à ces qualités fondamentales un extérieur décent , un abord facile fans polireffe affectée , un ton de franchife qui infpire la confiance, une table ouverte bien fervie, fans oftentarion ni prodigalité, des mœurs honnètes , enfin tout ce qui conftitue dans le perfonnage le modus & decorum. Comme particulier , M, Maillart neft pas moins inté- reffant 3 SUR L’'HIST. NATURELLE ET LES ARTS. 151 reffant; je lui connois un efprit agréablement orné, un caraétère gai , même badin, lorfque dans une fociété, felon fon goûc, il peut dépofer le lourd fardeau de la gravité : il eft bon parent, bon ami, bon citoyen; peut-être n’eft-1l pas Naturalifte, du moins j'i- gnore s'il l’eft; mais fans pofléder l'hiftoire naturelle cu en être poffédé , on peut avoir beaucoup de mérite, & malgré le zèle ex- ceflif de M. Commerfon , qui auroit voulu rendre tout le monde bo- tanifle , un homme en place, toujours occupé d'objets & de devoirs bien différens, n'eft nullement obligé de le devenir : il lui fuffit, pour n'être pas regardé par les adepres comme un vil profane , d’a- voir quelques notions en ce genre, d’être fenfible à la magnificence du fpettacle de lunivers, & fur toutes chofes d'accorder des égards diftingués, une bienveillance affectueufe , une protection encoura- geante à ceux qui, à travers mille dangers & avec des peines in- finies , vont fouiller dans les Laboratoires les plus cachés de la Na- ture pour y dérober fes fecrets & fes productions au profit de l'hu- manité. Il eft vrai aufli que ces Savans, dignes de notre admira- tion & de notre reconnoiffance, doivent avoir les qualités de l'ame & du cœur propres à fe concilier un eftime fentie de la part des dépofitaires de l'autorité ; car un Savant , avec une ardeur & des lumières prodigieufes, peut d’ailleurs avoir bien des défauts , fine vitus nemo naftitur, & M. de la Lande convient de ceux de fon ami. À Dieu ne plaife que je veuille ici faire l'apologie de M. Mail- lart aux dépens de M. Commerfon. Je n'ai connu ce Botanifte ex- traotdinaire que fur la réputation, & par cet Eloge qui m'a mis la plume à la main , & dont un feul trait m’a déplu. Loin de penfer à élaguer le laurier que l'amitié a planté fur fa tombe , je voudrois, par un effet de mon goût pour l'Hiftoire naturelle , être digne d'y ajouter , s’il étoit poflible, de nouvelles branches; mais dans l'al- ternative de troubler la cendre des morts, ou d'abandonner M. Mail- larc , qui fe trouve à plus de trois mille lieues du tribunal privé où on l’a jugé fans l'entendre , à une cenfure d'autant plus cruelle qu'elle eft confignée-dans un recueil fait pour être répandu comme la lumière & durable comme le marbre, le feul parti que je puille prendre, c’eft de me bornét au portrait que je viens de faire de mon eftimable ami, afin que fur cette naïve peinture de fon caraétère & de fes principes, les connoiffeurs décident fi le procédé qu’on Jui re- proche envers M. Commerfon, peut partir à la fois d’une ridicule indiférence pour les Sciences & d’une odieufe dureté de cœur , ou s’il faut l’attribuer à une caufe innocente qui éclairciroit tout le myftère fi elle étoit connue. - Tome V1, Part. II. 1775. A à / 182 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, 6c. D'vEsreNE bre N- HE; E Relative au Probléme à réfoudre ; propofé par M. le Chevalier DE DoiomMIEU, Officier des Carabiniers , dans le Cahier de Jullee LAS PES ESS O N a obfervé conftamment dans les mines, entr'autres dans les mines de charbon de Montrelay, mines de plomb de Pompéan, & autres mines de Bretagne, que les eaux & fources fouterreines font plus abondantes & plus fortes la nuit que le jour , c’eft-à-dire , une quantité quelconque de fceaux d’eau tirée pendant le jour , faifanc baiffer l’eau d£s puits d’un ou deux pieds ; la mème quantité tirée pendant la nuit, la fera baifler au plus de quelques pouces, & même le plus fouvent ne fuffira que pour l’entretenir à fon niveau. On. demande aux Phyficiens les caules & la théorie de ce phénomène à LE Phyfcien, qui fe propofe de réfoudre ce Problème, prie M. le Chevalier de Dolomieu de vouloir bien répondre aux queftions fui- vantes , ou faire ces obfervations fi elles n'ont point été faites. SPAM AMONT: 1°. Si le tems où les fources fouterreines paroïffent plus abondan- tes, commence au coucher du foleil & finit à fon lever , ou fi le tems de la plus grande abondance n’anticipe pas fur le jour , de même que le rems de la moindre quantité anticipera fur la nuit ? 2°. Si le rems de cette plus grande quantité d’eau eft roujours déter- miné & conftant , comme 12 heures, par exemple, ou fi ce rems va- rie en raifon des longueurs des jours de l'année, où à-peu-près ? 3°. Si la plus ou moins grande abondance d’eau n’anticipe pas fur les faifons , c’eft-à-dire, fi le plus grand nombre de nuits où l’eau eft abondante ne prend pas far les mois d'Avril & de Mai, comme ke plus grand nombre de nuits où l’eau fera moins abondante , n’an- ticipera pas fur Oétobre & Novembre, & répète ainfi fur les faifons leffer que l’on préfume arriver fur les jours & les nuits, comme nous voyons les pleines lunes précéder de deux jours, ou à peu-près, les hautes marées qui en font l'effet ? Page 113. Fautes à corriger dans la Lestre de M. DE SA INT-AUBAN, Pace 113, ligne 12, Monfeur; Zifez, J'ai vu, Monfieur. Idem, ligne 16, n'aije pas; Life, j'avois. Page 11$,ligne 41, de mortiers; Afez, d'un tiers Page 116, ligne 28, le tire; lifez , le tir. Page 118, ligne 21 , après retranchement, ajoutez, du métal, Page 119, ligne 15, arme; lifez, ame. Jdem, ligne dernière, de la mienne; lifez, de l’ancienne, Page 120, ligne 11, pouvoir; lfez , pourroir, Page 121, ligne 3, &; lifez, ou. Page 125, ligne 28, on n'auroit; lifez, on n'avoir. Page 126, ligne 28, de lumière; lifez , de l'ancienne: A Eh) Qu t RP a dub Hs ED * Chma:s #5 Dulute x Les ni faute arm 1 AS Fasen Fri DS DHL #4 Re ser; POI À HP £ 4 HO | Bi Ed Dre. dat tune de nfiyid Fo 0 PRE ERMeN JU HR Ge MARNE pv RTE UT je (iur, RE TE Dan è La (CE ru Rp ie it he: TRE JL tes sis HR dns te te 1 RAP IRT + A ELUE Tue Fur AIT EE Le FH troll mn OUANMUE RIRE ft Na D'as ANRT fi MAUR rpaaet rt der he Paint at} 17 CE DT AIN IN TELLE anne rang ER ff finti Ai Robe ions MMA te. ui} spi! DL AA TT E AE 4h 4 Lu du As HR ARE 0 RE tea HN LE vaTet TEE le à Moule, 14 nt ri is! vo | nt. Nm: ST TN RUES ns 2 ge ES abs in 2e. tonte METRE EE y «pen jf Mu vit Satin 11 âp Sol Li | k Hat M AO IQ ES sstesss PPT CL ON LULRE Sstsssses +: 42, : dtsssretezrtiisre st ! MARS ET EE h corsa ssssrestaapttts #t4 passes ésirise «1 CREER PTE ENT PETTE - ass CFP LE ee or dl nee os vie À 7 BURN ICS EP CES PORTE +. patate Lans 7 # es Ro CL PERE ENS = eat dessert ass TO LP ES = 4, 4 Fig.3 pe Ù Allonges l Aoi E. 1775 Ex Eh SES À A 2 ,* 4! É N Mi; = Ÿ re 5 f : SE AT E 1 7 3 ie x = 3 k RE ere ÿ A Es du pa es rtf l de PS PA mtneiDe quaironme ru À RATES Ee So Vo 4 re - = 2 LR. SR : * e ce Ù n 4e: AT r & ’ . > A À Ÿ (s ; 1 dde ÉtaT : | Dés : A à | OBSERVATIONS. L'A-P'HY SIQU E, SUR : LIHTISTODRE: NATURELLE EF SS OMR YELIE START S, AVEC" DES PIANCHES, EN TAILLE-D@UCES DÉDIÉES À Mæ LE COMTE D'ARTOIS: Par M. l'Abbé RozIiER, Chevalier de l'Eglife de Lyon ; de l’Académie Royale des Sciences, Beaux-Arts & Belles- Lettres de Lyon , de Villefranche, de Dijon, de Marfèille , de la Société Impériale de Phyfique & de Botanique de Florence | Correfpondant de la Société des Arts de Londres , de la Soa. cité Philofophique de Philadelphie , &c. ancien Direleur de l'Ecole Royale de Médecine - Vétérinaire de Lyon. TOME SIXIÈME. SEPTEMBRE, 1795. A PUMA CRT SL Chez RU AULT, Libraire, rue de la Harpe, MD*E CL UX XVe AVE CPR IMILE GE DU RO: AL ETIRLONS: 1°. CE Journal a commencé à paroître fous le format i-12. au mois de Juiller 1771. Le Cahier étoit de dix feuilles d'impreffion. Il a eté ainfi continué jufqu'a la fin du mois de Décembre 1772 , ce qui fotme 18 vol. in-12, donc le prix eft de 36 liv. à Paris, € de 45 liv. èn Province , par la Pofte. A la demande de MM. les Soufcripteurs ; Ze format in-12. fut change en celui in-4°. en Janvier 1773. I [era toujours continué le même , parce qu'il eff plus commode pour les Bi- bliothèques, & que cer Ouvrage fait fuire avec les Collections Aça=. démiques. Le changement de format n'en a produit aucun pour le fond de l'Ouvrage. 2°. Il paroft chaque mois un Cahier de dix feuilles in-4° , enrichi de gravures en taille douce. Ces Cahiers forment , à la fin de l’année, 2 volumes in-4°. On foufcrir ; pour ce Journal , à Paris , chez l’Au- teur , Place & Quarré Sainte-Geneviève ; chez RuAULT, Libraire 5. rue de la Harpe , & chez les principaux Libraires des grandes Villes é des Pays étrangers. Le prix de la Souftription eft de 24 liv. pour Paris , & de 30 liv. pour la Province, franc de port. 3°. MM. les Soufcripteurs font priés de recommander à leurs Suifles, Portiers , Laquais, Domefliques, de ne pas égarer le Cahier qu'on leur remet exaëlement du 10 au 2$ de chaque mois; & f MM. les Sozfcripteurs ne l'ont pas recu, le premier du mois fuivant , ils au- ront la complaifance de porter leurs plaintes chez l’Auteur , ou de le faire demander au grand Bureau de la petite Pofle, rue des Dé- chargeurs. Il weff pas poffible que Exemplaire d’un feul de MM. les Soufcripteurs foit oublié, puifque lorfque les Cahiers font garnis de leur enveloppe, on en fair l'appel , le Repiftre à la main, de la même manière que l'appel des Soldats dans une Cafèrne , & il faur, pour aînft dire, que chaque Cahier réponde , adfum , ou du moins on le répond pour lui. 4°. Les perfonnes qui ont la bonté de nous communiquer des Mé- noires ; des Differtations ; Obfervations, Éc. font priées de donner des manafcrits Ufibles , & alors il y aura moins de faures d’impreffion. $*. On n'a promis que dix feuilles d'impreffion pour chague mois , même en ÿ comprenant le Tire € la Table ; nous en donnons quelque- fois 11, 12, 13. Comme ces feuilles furnuméraires demandent du zems pour être imprimées, on prie, dans ce cas, de pardonner S'il Jurvient un retard de quelques jours pour la publication du Journal. TAB EE ES Ru 1 CS La ES Contenus dans cette feconde Partie. E SSAI d'explication d’un Phénomène affez fingulier produit par la fonte de la glace ; par M, de Servières, Officier dans Orléans Cava- Lerie , page 183 Objérvation [ur un Poiffon fingulier , 191 Obfervations fur les Echos de la mer, 192 Lettre de M. de Morveau à M. le Comte de Buffon, fur la fufibilité , la malleabilité, le magnétifme , la denfité, la cryftallifation de la pla- tine, G fon alliage avec l'acier, 193 Etat dela Population de Paris, pendant l'année 1774, comparée à celui de 1773, 204 Lerre adreffée à M. de F***, à Montelimart, fur deux des plus petits Oiféaux de l'Europe , par le Révérend Pere * * *, 20 Remarque de M. l'Abbé Dicquemare, Citoyen du Havre, de plufieurs Académies Royales des Sciences, Gc. 210 Mémoire fur la nature du Spath pefant ; par M. Monnet, 214 Mémoire fur les Mines de Fer & fur Les parties étrangères qui S'y trou= vent; par M. Kringer, traduit de l'Allemand, 22$ Objérvations fur une efpèce particulière de Thermomètre ; par M. Pafumot , Ingénieur-Géographe du Roi , de l’Académie de Dijon, 230 Recueil de quelques nouvelles Expériences fur l'Eleëricité ; par M. G. Henkey, Membre de la Société Royale de Londres, 233 Nouvelles Expériences élettriques | faites par M. Comus, 258 Lerre de Madame de F***, à M. le Comte de M***, 261 Nouvelles Lirtéraires , 263 Fin de la Table, PPENEP RE ONE MA ETIETNOT NN, Ja: lu, par ordre de Monfeigneur le Chancelier, un Ouvrage ayant pour titre : Obfervarions fur la Phyfique, fur l'Hifloire Naturelle & fur Les Arts, &c. par M. l'Abbé Rozier, &c. & je crois qu'on peut en permettre l'impreflion, A Paris, ce 28 Septembre 177fe GARDANE, OBSERVATIONS SUR L'HIST. NATURELLE ET LES ARTS, 183 PE SN OU REALAL D'explication d'un Phénomène affez fingulier produit par la fonte de la glace. Par M. DE SERVIERES, Officier dans Orléans Cavalerie. L ORSQUE la glace fe fond, on voit s'élever de fa furface en forme de fumée une petite vapeur afflez confidérable. Cette vapeur croit à mefure que la fonte de la glace angmente. Si j'ofois hafar- der une conjecture à ce fujet, je dirois que c’eft là la caufe des bruines & des brouillards qui règnent perpétuellement dans les mers glaciales. Pour expliquer ce phénomène d’une manière phyfique & fatis- faifante , il faut d'abord remonter aux caufes de la formation de la glace & de fa décompoñtion. La glace eft un corps dur, tranfparent & élaftique, formé par l'eau privée de fa fluidité , & rendue folide par la perte du mou- vement en tout fens de fes molécules infenhbles. Ces molccules aqueufes ne perdent leur mouvement que par l'évaporation d’une grande partie des particules ignées renfermées auparavant dans l’eau, & par la diminution de mouvement dans celles qui reftenr. Certe évaporation des particules ignées de leau a pour caufe la diminu- tion des mêmes particules dans l’athmofphère & la loi de Péquili- bre des fluides. L'achmofphère, dans un tems froid, en hiver fur- tout , contient beaucoup moins de particules ignces que dans un tems chaud. Cela vient de ce que pendant l'hiver le foleil , qui eft la caufe première de la chaleur, quoique beaucoup plus près de nous qu'en été, envoie fes rayons beaucoup plus obliquement , & par conféquent en moindre quantité à la furface de la terre. Les particules ignées , contenues dans l’athmofphère, doivent avoir un moindre mouvement, puifqne les rayons du foleil , de qui elles re- çoivent ce mouvement , agiflent fons un moindre volume, & con- féquemmenr avec moins de force. Une autre caufe de la diminu- tion de ce mouvement, c'efl que l'athmofphère empêche non feule- ment les rayons du foleil de parvenir jufqu'à. nous, mais qu’elle caufe encore , dans eeux qui y parviennent , une réfraétion qui di- Tome VI, Part. IL. 1775, 584 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, minue leur mouvement. Les corpufcules de fel & de nitre qui fe mêlent à l'air, retardent le mouvement de la marière ignée , & font la caufe du froid exceffif que l’on éprouve dans certains pays. Il fait plus froid à Pekin qu'à Rome , quoique ces deux Villes ayent à peu-près la mème latitude, parce que le nitre abonde dans la première & eft très-rare dans la feconde. C’eft par la même raifon que l'Ukraine eft plus froide que la Normandie. Certains vents, ce lui du Nord fur-tout, apportent ces corpufcules falins & nitreux. On doit regarder encore comme une des caufes principales du froid , la fuppreflion totale ou partielle des exhalaifons & des vapeurs chau- des que le feu central envoie néceffairement dans l’athmofphère cerreftre. L’exiftence du feu central eft prouvée par l’expérience (1); car ceux qui travaillent aux mines éprouvent que plus on creufe, plus les vapeurs qui s’en exhalenr font chaudes. Les flammes & les éruptions du Vefuve, de l'Etna, & du mont Æécla , ainfi que les tremblemens de terre produits par l’évaporation des eaùx contenues dans le fein de la terre, en font une nouvelle preuve. L’athmof- phère contient plus de particules de fel & de nitre dans un tems froid que dans un tems chaud. L’eau contient aufli beaucoup plus de ces particules après qu'avant fa congélation. C'eft d’après ces principes phyfiques, dont perfonne ne peut douter, que M. de Mairan explique parfaitement bien la formation de la glace. Trois caufes principales , fuivant lui, concourrent à changer l’eau en glace. 1°. L’évaporation d’une partie des particules ignées ( 2 ) que l'eau contient , & qui par une loi à laquelle tous les Auides font foumis, cherchent à fe mettre en équilibre avec les particules ignées , conte- nues dans l’athmofphère. 2°. La diminution de mouvement dans les particules ignées qui reftenr dans l’eau. Cette diminution eft occafonnte par un moindre mouvement dans celles de l’athmofphère, & par les particules ni- treufes & falines que différens vents introdmifent en ligne droite dans rine eau prête à fe geler. 3°. Ces mêmes particules nitreufes & falines, entrant comme au tant de coïus dans les pores des molécules aqueufes , les bouchent (1) L'Auteur nouspermettra de lui dire que ces Expériences ne font pas encore en étar de fervir de preuves, qu'elles demandent à être répétées. (2) Une preuve certaine que l'évaporation des particules ignées eft la caufe principale de la congélation ; c'eft que plus une liqueur eft fpiritueufe, c'eft-2- dire, plus elle contient de feu, plus l'intenfité de froid , propre à la geler, eft grande. C’eft ce qu'a éprouvé M. Baumé, par une fuite d'expériences détaillées dans un Mémoire imprimé dans fe Journal de Médecine pour le mois d'Of&o- bre 1770. ( Voyez fa Chymie , tome 1, page 75 , note 1.) SUR L'HIST. NATURELLE ET LES ARTS. 185 hermériquement , & empêchent que les particules ignées ne s'y in- finuent & communiquent aux parties infenfbles de l’eau leur mou- vement en tout fens ; l’eau doit donc cefler d'être fluide & fe con- vertir en glace. On ne fauroit douter que ce ne foit aux particu- les ignées que l’eau doive fa Auidité (1 }, puifque lorfqu'on appro- che du feu un morceau de glace, elle fe réfout en eau, parce qu’on lui rend les particules de feu qu’elle avoir perdues, & qu'on redonne le mouvement à celles qu'elle avoit confervé. À ces caufes, M. Baumé ( Chymie, tome 1 , pages $2, 71 & 77), en ajoute une autre : il penfe que la congélation eft un commence- ment de fufon produite par le mouvement & la dilatation qui s’ex- citent entre les parties de la glace. Il croit que tous les corps & les métaux mêmes font fufcepribles de ce genre de fufion produite par le froid. Dans ce Jens , ajoute-t-il, La Jolidité de l'eau ne féroit pas plus fon état naturel que [a liquidité. Il eft certain , comme le remarque M. Baumé, (Chymie, tome 1, p. $2); que moins les corps contiennent de particules ignées, Rue ils diminuent de volume fans rien perdre de leur poids; par conféquenc ils augmentent en pefanteur fpécifique & en dureté, parce que leurs parties acquièrent une adhérence plus intime. L’eau , comme je l’at déja dir, contient beaucoup de parties de feu dans fon état de li- quidité; ces particules ignées empêchent le rapprochement & l'attrac- tion mutuelle de fes parties : donc lorfquelle elt dégagée d’une grande (1) C'eft au grand nombre de particules de feu élémentaire ou éleétrique que J'eau contient, qu'on doit attribuer, ce me femble , la propriété qu'elle a d'être un excellent conduéteur. (Selon Sauri, Math. t. , p. , Baumé, Chymie, tome 2, page 366, & Macquer , Diét. de Chymie, tome 2 , page 45), c'eft à la même caufe qu'il faut rapporter la fluidité du mercure qui peut devenir un corps folide en fe gelanr à un froid exceflif pareil à celui auquel MM. de l'A- cadémie de Pérersbourg foumirent ce fluide dans leur fameufe expérience du 2$ Décembre 1752. ( Bof , Hydrodinamique, tome 1, première Partie, Chap. 2, page 97. Walmont de Bomare, Di&t. d'Hift. Nat. Art. Mercure, tome 4, page 343 Edition 47-12). On peur voir dans la Chymie de Baumé, tome 2, page 39$» & dans le Diétionnaire de Chymie de Macquer , tome 2, page 44, les détails & le réfulrar de cetre expérience. Le froid rigoureux qui fe failoir fentir alors à Pétersbourg, avoir été augmenté par un mélange d'efprit de nicre fumanc & de neige. 11 fit defcendre un thermomètre à mercure (uivant la graduation de Délifle. jufqu'au 213e degré qui répond au 46e au-deffous de la congélation au thermomètre de Réaumur. La propriété qu'a le mercure de s'infinuer dans les pores de prefque tous les métaux & demi-méraux, mais finguliérement de l'or & de l'argent, dont il eft Je menftrue par excellence, celle de fixer l'érain fur les glaces & d'être phofphori- que, ne peuvent être attribuées qu'a la prodigieufe quantité de particules éleétri- ques, où de feu élémentaire qu'il contient, Bb 2 186 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, quantité de ces particules ignées, & que celles qu’elle conferve j ont perdu leur mouvement , fes élémens ne trouvant plus de réfif- tance , doivent fe rapprocher & former un corps folide. L'eau offre un phénomène aflez fingulier dans fa congélation. Elle angmente confiderablement de volume (1). Plus il gèle, & plus la glace augmente dé volume & diminue de poids; ce qui eft tout le contraire de ce qui arrive aux autres corps. L'augmentation de volume dans l’eau qui fe change en glace , a pour caufe, non feulement le grand nombre de parties nitreufes & falines qui s’infinuent dans l'eau avant fa congélation, mais fur-tout la dilatation de l'air in- térieur. En effet, l'air renfermé dans la glace, n'ayant plus de com- munication avec l’air extérieur, & n'étant plus par conféquent en (1) Lorfqu'on remplit un verre d'eau & qu'on la fait geler, a glace fe gonfie & s'élève en boffe vers le milieu fi les parois du verre réfiftent à fes eHorts; preuve certaine & évidente d’une augmentation de volume. » La glace (Baumé, # Chymie, tome 1, page 76), fe dilate fi confidérablement, qu'elle fait des » efforts incroyables pour rompre les obftacles qui lui réfiftent. Les Académiciens » de Florence, ayant pris une boule de cuivre fort épaifle dont la cavité avoit un pouce de diamètre , la remplirent d'eau & la fermèrent : lorfque cette eau » fut gelée, elle creva la boule de métal. Ils calculèrent enfuire l'effort qu'il fal- # lut pour produire cet effet, il trouvèrent qu'il eft égal à 27720 liv. ( Effai » de Phyfique de Mufchenbroeck, page 434, 8. 906) «. On peur voir le détaif & le réfulrat d'expériences femblables faites & rapportées par Mairan dans fon excellente Differtation fur la glace. Cette augmentation de volume dans l'eau qui fe gèle, me rappelle une obfer- vation que M. Baumé rapporte dans fa Chymie, tome 1, page 72. Il a éprouvé que l'eau occupe le moins de volume poffible à la température de 10 degrés au- deflus de la congélation au thermomètre de Réaumur. Un Académicien de Mont- pellier a étendu encore davantage cette découverte. 11 a montré dans un Mé- moire, compofé en 1773, quil eit un degré de température pour chaque fluide, où il occupe le plus petit efpace poffible. 11 a même déterminé ce dewré pour plufieurs fluides. Cette température doit être en raifon de la quantité de parties. de feu contenues dans chaque fluide ; enforte qu'il faut une intenfité de froid plus grande à l’efprit-de-vin qu'à l'eau. I! doit paroître bien fingulier que la chaleur & Îe froid, étant deux caufes oppofées, produifent , dans certains cas , le même effet, je veux dire l'augmen- tation de volume dans les fluides, mais cela s'explique d'une manière bien fim- ple. La chaleur, par la propriété qu'elle à de dilarer les corps , s'infinue dans les fluides, en écarte les parties, dérruit leur adhéfion, & y introduifanr beaucoup d'air, doit néceffairement leur faire occuper un plus grand efpace. Le decré de froid, capable de produire la glace, détruifant l'effet du fluide ban = Bu ef ne PE CL P TS À igné , donne à l'air intérieur , contenu dans les fluides, la liberté de fe dilater & de fe raréfier, parce qu'il n'eft plus contre-balancé par l'air extérieur, avec qui fa confommation, & conféquemment l'équilibre , eft détruit. D'ailleurs, les vents, comme je l'ai dit, introduifent des particules nitreufes & fatines dans les fluides; ces caufes réunies doivent donc produire une augmentation de volume. 5 1es ag £ SUR L’HIST. NATURELLE ET LES ARTS. 187 équilibre avec lui, commence à fe dilater ; en fe dilatant il foulève & écarte les molécules de l’eau prête à fe geler, leur fait occuper un plus grand efpace , & communique à la malle entière une aug- mentation de volume. La glace ayant plus de volume que l’eau qui l’a formée, doit diminuer de pefanreur fpécifique, & conféquemment être plus lé- gère que l’eau. C’eft ce que l'expérience nous prouve , la glace na- geant voujours fur l’eau. M. Baumé n’eft pas content de cette expli- cation adoptée par la plupart des Phyliciens , il l’attribue (Chymie, tome 1, page 78 ) à un arrangement différent des parties. » Tous » les corps, ajoute-t-il , qui peuvent pafler de l'état de folidité à » celui de liquidité, font dans le même cas, un métal figé nage fur » le méral de même efpèce qui eft en fufion. Du beurre figé nage fur » du beurre qui eft liquiéfié, &c. Il paroït même que c’eft un prin- » cipe général que les corps en fulion ont plus de pefanteur fpéci- » fique que lorfqu'ils n’y font pas «, ; Après avoir cherché les caufes de la formation de la glace, il faut voir quelles font celles de fa décompofition pour parvenir à ex- pliquer, d’une manière facisfaifante , le phénomène qui fait le fu- jet de cette differtation. ti: La glace étant placée dans un milieu plus chaud qu’elle, tel que l'air, les particules ignées de l’athmofphère , par la loi de l'équili- bre des fluides dont j'ai parlé ci-deflus , doivent pénétrer la glace, réparer l’évaporation des mêmes particules dont elle s’éroir dégagée, Au trefle, les fluides ne font pas les feuls corps dont la maffe augmente par la chaleur & le froid à un certain degré. » Les métaux, felon Baumé( Chymie , » tome f, pages $2 & 77), {uivenc la même marche; ils diminuent d'abord » de volume; mais lorfqu'ils font frappés de froid fufifamment, ils doivent de # même commencer à augmenter de volume, un peu avant d'être gelés. J'entends » par métal gelé celui qui eft tellement pénétré de froid, qu'il eft cafflant à un » choc médiocre. Le fer eft dans ce cas. Il faut peut-être un plus grand froid » pour faire parvenir les autres métaux au même point. Il doit y avoir entr'eux ma cet égard les mêmes différences qu'il y a entre les liqueurs qui éprouvent » une plus ou moins grande facilité à fe geler, comme je l'ai dit dans le même » Mémoire imprimé dans le Journal de Médecine pour le mois d'O&tobre 1770. » Je fuis même porté à croire, que s'il étoic poffible d'obtenir un froid fuffifant, » les métaux éprouveroient, comme l’eau congelée , cette forte de fufion qui ar- æ rive à la glace foumife à un grand froid : on parviendroit, par le moyen d'un » froid excefif, à liquéfier, fi j'ofe me fervir de ce terme, les corps les plus » durs, de même qu'on les fait entrer en fufion au miroir ardent. On obfervetoit » néceflzairement dans ce genre de fufñon, les mêmes différences que l’on remarque » entre les autres fufions opérées par le feu; il faudroit par conféquent pour les æ corps les plus durs, une plus grande intenfité de froid «, 188$ OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, & imprimer le mouvement à celles qui font renfermées dans fon fein ; alors les molécuies aqueufes fe féparent, recouvrent leur flui- dité , & l'air qu’elles rerenoient captif fe dégage & s’évapore. Les fels & les nitres fe volatilifent , & font entrainés par les vents. La fonte de la glace eft beaucoup plus prompte lorfqu'on la plonge dans l'eau , parce qu’alors deux caufes, l'air & l’eau, concourent à fa dé- compofition. L'air, felon MM. Roi, Baume, Duluc, & plufeurs autres Phyficiens célèbres, eft un menftrue ou diflolvant de l’eau. Lorfque la glace fe fond , l’air extérieur, & celui qu’elle contient, agiffant fur les molécules aqueufes dont elle eft compofée , les atrénuent & les divifent à l'infini. L'air fe fature de quelques-unes de ces par- ticules, fe les identifie & les entraîne dans fon évaporation , ce qui produit la fumée qu'on voit s'élever lorfque la glace fe fond. Telle eft, je penfe, la caufe de ce phénomène curieux, que perfonne, que je fache du moins, na encore obfervé. 11 n’eft pas inutile de remarquer , que la glace qui a peu de confiftance , telle que celle que font les Caferiers avec des fruits ou de la crème , fume beau- coup plus promprement que la glace naturelle. La raifon en eft que l'air extérieur , trouvant moins de réfiftance,. doit agir plus forte- ment & plus vite. Aufli à peine tire-t-on les glaces du moule qu'on Les voit fumer aufli-tor. Effers d'un froid très-rigoureux qui fe fit fentir Var 763 , aux environs de Conftantinople. » L’AN 763, fous le règne de Conftantin IV, furnommé Copro- » nyme (parce qu'il falic les Fonds Baptifmaux lorfqu'on le batifoit), » il fc un froid fi violent en automne, que le Bofphore & le Pont- » Euxin (1) furent glacés pendant l’efpace de 6o lieues, depuis » le Propontide ou mer de Marmora ( 2), jufqu’aux environs des em- » bouchures du Danube, La glace avoit, dans plufieurs endroits, 20 (1) On le nomme aujourd'hui Mer noire. Elle s'étend en longitude depuis 45° 22/— 60° 10°, & en latitude depuis 40° 12/— 45°. (2) Ou Marmara. On l'appelle auffi la Mer blanche. Elle a été ainfi nommée par oppofition à la Mer noire. C'eft un grand golfe entre la Mer noire & l'Hel- defponc (a). (a) L'Hellefpont eff le nom que les anciens donnoienr à ce que nous appellons maintenant le Détroit des Dardannelles, ou de Gallipoli , qui a une lieue = de darge dans l'endroit le plus refferré. ( Le Cointe, Comment. fur la Retraïte des Dix Milles de Xénophon , come 1, Préf. page 8 ), SUR L'AIST. NATURELLE ET LES ARTS. 199 » coudées (1) de profondeur, & elle fut couverte de neige à une » pareille hauteur, au dégel. Les mafles de glace , entaflées les unes » fur les autres comme des montagnes, pouflées par un vent furieux, » ébranlèrent les murailles des villes, & manquèrenc de renverfer n la Citadelle de Conftantinople (2) «. Les Auteurs qui rapportent ce fait fingulier , auroient bien dû nous dire dans quel Hiftorien contemporain ils l'ont puifé. Plufieurs anciens & quelques Phyficiens modernes, parmi lefquels on diftingue M. de Buffon ( 3), ont foutenu que les hautes mers ne fe gèlent poinr, ou que ce n'eft tout au plus que fur leurs côtes, & que les glaces qu'on peut y rencontrer font produites par les eaux douces des fleu- vés qui s'y déchargent. Ils ont raifon , car l'Océan & la Méditer- ranée , qi ont un mouvement rapide, ne fe gèlent jamais. Les mers qu‘ ont peu de mouvement, & qui font des efpèces de lacs, telles que la mer Balique & la mer Blanche, fe gèlent pref- que tous les ans , & les mers plus feprentrionales fe gèlent tous les “hivers (4). Le Zuiderçée fe gèle fouvent en Hollande (5). » Ce n’eft » que vers les côtes des Parages tranquilles , dans les golfes ou dé- » troits des Zones glaciales, & dans tous les endroits où les fleuves » verfent une grande quantité d’eau douce & de glaçons, que la » mer gèle, & les glaces continues ne s'étendent pas à une ving- (1) Je ne fçais de quelle coudée ils veulent parler; fi c’eft de celle des H£- breux , elle vaut, felon Erfen-Schmid, 19 pouces 10 lignes #® du pied de roi, ou 239 parties du même pied divilé en 1440 (4). Suivant cette évaluation, 2o coudées valent 33 pieds : pouce 4 lignes. (a) Condillac, Traité des Syflémes , page 45 , note A. (2) Ceci eft extrait du Diétionnaire par une Société de Gens de Lettres, en 6 vol. in-8, rome 2, page 286, art. Conftantin Copronyme, (3) Hiftoire Naturelle, (4) On peur voir, au fujet des caufes de la erngélation de la mer, le Dic- tionnaire d'Hiftoire Naturelle de #almons de Bomare, art. Mer glaciale, tome 4, pag. 29 — 31. (5) Voici ce que dit le Doëteur Marrine (dans fon Effai fur les Thermomc- tres, page 201 ), au fujer de la congélation des eaux de la mer. » L'eau de la mer fe glace, quoique l’on ait dit mal-à propos le contraire; » on en crouve des exemples dans tous les voyages du Nord (4) Le Zuid-Ergée » en Hollande eft fouvent glacé, quoique l’on ait dir mal-à-propos le contraire , » & la mer Baltique left routes les années M. Boile (c)a vu glacer l'eau » de la mer à Londres même, & j'ai trouvé des morceaux d’une glace amère & æ falée fur nos bancs de rochers où l'eau de la mer avoit croupi, après y avoir (6) Muffchenbroeck , ( Effai Phyfique, Se4. 9 , 15), (c) Boyle, exp. on Cold. p. uf. 147. 199 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, » taine de lieues des côtes (1). Kergelen (2) parle de quelques mets qu'il a trouvé glacées dans fes voyages fur les côtes d’Iflande, D'après ce principe il ne fera pas difficile d’expliquer comment le Bofphore , le Pont-Euxin & la mer de Marmara ont pu fe geler, Mais ii faut auparavant examiner quelle eft la fituation de ces mers, & quelle étendue elles occupent fur le globe terrettre. 1”. Le Bofphore eft un canal ou détroit qui joint le Propontide, ou Mer de Marmara , au Pont-Euxin , où Mer noire. A1 a environ 8 lieues de long, fur une demi-lieue de large dans le lieu le plus étroit. 2°. La mer de Mirmara eft un grand golfe entre la Mer noire & le détroit des Dardannelles, pat où elle communique avec lA4r- chipel. Elle eft fort ferrée dans cetre partie, puifque ce détroit n’a qu'une lieue & demie de large dans l’endroit le plus étroit. Elle doit donc avoir peu de mouvement; & en effec, c’eft plutôt un lac qu'une mer, 3° La Mer noire eft aufi une efpèce de grand lac, parce que la partie du Bofphore qui la joint à la mer de Marmara, eft fort étroire. | 4°. Le Danube, le Nièper, & les rivières de Bog & de Mefler fe jertenr dans la Mer noire. Le Ton, où Danais, s’y jette aufli par la mer d’Azof, ou Palus méotides. Ces Aeuves y apportent une grande quantité d’eau douce qui ne fe mêle point, ou du moins très peu avec celles de la mer, & qui par conféquent peur fe geler aifé- ment, » été portée par quelque rempêre : mais l'eau entièrement foulée de fel, ne fe » glace point facilement (a). & les diflolutions de différens els ont réfiflé aux » plus grands froids en Aneleterre, & ce qui eft plus éronnant, elles réfiftent æ même au froid des pays feprentrionaux , où l’on rapporte ( 6) qu'une diflolu- æ rion de (el gris ne s'éroir point glacée. Les fyrops, qui ne font qu'une diflolu= æ tion de fucre, ne fe congèlenc qu'à des froids extraordinaires ( c). (a) Boyle , exp. on Coll. abr. 1 p. $97, Meret an. of. fiéez, page 6. C6) Phil. cranf. abr. 11, pag. 152 À (ec) Meter, #bid, pag. $2 — 53. (1) Valmont ubi fupra. (2) Dans la Kelarion de fon voyage dans la mer du Nord fait en 1767 & 1768. Ele a été imprimée en 1772, : vol. in 4° , (ous le nom d'Amfterdam. On y crouve depuis la page 19 2$ une Diflercarion (ur la congélation des mers, & les caufes phyfiques du froid & de la glace. C'eft une analyfe de l'Ous vrage de Mairan. Nous SUR'L'HISTNNATURELLE ET LES\ ARTS. 197 Nous favons que les mers Noire & de Marmora font deux lacs ; fe Bofphore qui les joint eît fort étroit, Le Danube, le Niéper , le Nief- ter , le Bog, portent beaucoup d’eau douce à la Mer noire ; il n’eft donc pas étonnant que ces mers ayent pu fe geler. Il faut remar- quer qu'il eft dic qu’elles fe gelèrent depuis le Propontide jufqu’aux environs des embouchures du Danube. La glace ne s’étendoit pas probablement. fort loin des côtes de la Mer noire. C’eft ainfi que ce fait s'explique d’une manière bien fimple; & quoique le froid qui la produit dût être très-confidérable ; 1l n’eft pas tel qu'on n’en air reflenti de plus âpres (1). Il eft fâcheux que nous n'ayons pas des dérails plus circonftançciés fur la congélation de ces mers , & l’in- tenfité de froid qui la produifir, (1) Voici une Table des plus grands degrés de froid obfervés jufqu'ici en différens lieux de la terre : elle fe trouve à la fin d'un Mémoire de de Lifle, fur les grands froids de la Sibérie, inféré dans ceux de l'Académie 1749. Degrés au-deffous de La congélation, fuivant la divifion de Réaumur. 1/ AParis,en 1709. . . . … 152% |, 4 Torneao, 1737 + «+ - - © 37 À Affracan , 1746. . + . : 242 | À Tomfck en Sibérie, 173$. % 5$3* A Pétershourg , 1749. . . . 30 A Kyrempa en Sibérie, 1738: . 63; AOC UT TAG relie UNS 3 À Yenifeik en Sibérie, 1735. .« - 70 OBSERVE il ON UN Sur un POISSON fingulir. ,O*: pèche dans le Danube , dans un endroit près de la Mer » nôire, un petit poiflon qui étant mis dans une bouteille de verre » pleine d’eau douce avec un peu de fable au fond , annonce, par » fa tranquillité ou fon agitation, les divers changemens de tems, » beaucoup mieux que les thermomètres «. Ce fait eft rapporté par l’4bé ! Advocat dans fon Dictionnaire Géo- graphique, fous le nom de Wofgien , édition de 1772, page 208, art. Danube, On 2 découvert la mème propriété dans la fangfue. La Gazette de Littérature contient le détail de pluñeurs expériences faites à ce fujet. Elles y ont été inférées dans le courant de l’année 1774. IL Tome VI, Part. IL, 1775. C c 192 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, me femble aufi avoir lu dans votre Journal une Lettre du céle- bre M. Bonnet de Genève , où il dir, autant que Je puis m'en rap- peler , qu'on doit regarder les fangfues comme des thermomètres naturels, & non pas comme des baromètres. Cette propriété fingulière mérite toute l’attention & les recher- ches des Phyliciens. L'animal qui la pofsède doit ètre doué d'une fenfbilité fingulière aux impreflions de l’athmofphère. OBS *EVR:M A"TUT O"NSS Sur Les Echos de La Mer, O N croit communément qu’il n’y a point d’échos en pleine mer, puifqu'il ne s’y trouve point de rochers, d'arbres & d’édifices pout répercutet le fon. Cependanc l’expérience prouve que l’on peut y en entendre comme fur la terre. Voici quelques obfervations fur ce fujer. Des coups de fufñl tirés fur des oifeaux de mer , ont été répé- tés par des groffes vagues fous le vent de notre vaifleau. Chaque coup n’a été répété qu'une feule fois. Des paroles prononcées fortement dans un porte-voix, ont été répétées crès-diftinétement par le côté convexe des voiles de plu- fieurs vaifleaux qui palloient au vent, & affez proche de nous. Les vaiffeaux qui pafloient fous le vent, & qui par conféquent avoient le côté concave de leurs voiles tourné vers notre vaifleau, n’ont point occafñonné d’échos. . J'ai cru obferver que les échos font plus parfaits lorfque les voi- les fonc plus enflées où plus rendues par le vent. Il réfalte principalement de ces Obfervations , qu'il faut du vent pour occafonner des échos en pleine mer, parce que s’il n’y a point de vent, les voiles des vaiffeaux ne font point enflées, & la mer eft calme, ou du moins très-peu agitée. N,2* ax SUR L'HIST. NATURELLE ET LES ARTS. 193 JTE UP EN 9 SJ HR. re à DEN EM SD LES MALO RU, LE, 84 U À M. LE COMTE DE BUFFON, Sur la fufibilité, la malléabilité , le magnétifme , la denfité, la cryflal- lifation de la platine, & fon alliage avec l'acier. Mo SIEUR, tout ce que vous maniez prend une nouvelleface, êc produit un nouvel intérèr. Votre Mémoire fur la Platine a éveillé les Phyficiens & les Chymiftes : ils ont porté leurs recherches fur cette matière fi fingulière , fi digne d’être obfervée, & vous avez fans doute oui parler du procédé qui a été découvert depuis peu par M. Delifle pour la fondre : ce que j'en ai appris , & qu'il a bien voulu me confirmer lui-même, m'a engagé à profiter de quelques momens de loifir pour répéter fes expériences , & reprendre celles que j'avois négligé de pourfuivre depuis plus d’un an; j'ai recom- mencé à traiter ce minéral dont , grace à votre générofité , il me reftoit encore une affez grande quantité; & je me perfuade que vous verrez avec plaifir le récit exaét de tous les phénomènes curieux & intéreffans que m'a préfenté ce nouveau travail , quoiqu'il ne foit pas encore poflible de tous les concilier. La première nouvelle de la découverte de M. Delifle m'avoit été donnée par M. Lavoifier, & ce favant m'avoir écrit qu’il en avoit fait l'épreuve avec fuccès ; qu'ayant diffous la platine dans l’eau régale , l’ayant enfuite précipitée par une diffolution très-concentrée de fel ammoniac , ce précipité traité avec mon flux réductif , lui avoit donné au bout d’une heure, un beau bouton fufceprible de fe polir , de fe limer, mais non pas malléable; (le Aux dont parle ainfi M. Lavoifer , eft celui que j'ai publié, comme devant rem- placer éminemment le procédé fecret de M. Bouchu pour l’effai des mines de fer). M. Delifle m’avoit marqué poftérieurement , qu’il n'avoit employé aucun fondant , qu'il avoit fimplement traité fa platine dans un double creufet de heffe au feu d’une forge animée par le vent de deux foufflets, & qu’il avoit eu un bouton très-bien lié, brillant , qui s’étoit laiffé piler & limer, & de plus , fufhifam- ment malléable ; les deux petites plaques qu’il avoit joint à fa let- tre , en fournifloient la preuve la plus complette, GCc'2 194 OBSERVATIONS SUR, LA PHYSIQUE, J'ai d’abord cherché à connoître ce que la différence de ces deux procédés pouvoir produire, & pour cela j'ai fait diffoudre dans l'eau régale deux gros de platine , ayant décanté la liqueur pour la fépa- rer d’un peu de fable noir talqueux qui m’a paru réffter à l’action de l'acide, j'ai opéré la précipitation parune diffolution très concentrée de fel ammoniac , le précipité recueilli dans un entonnoir garni de fon filtre , s’eft trouvé pefer quatre gros , après avoir un peu été féché à l'air ; fon volume annonçoit une prodigieufe divifon , car il rem- pliffoit un cône de deux pouces de haut fur une bafe de 15 lignes de diamètre ; j'ai partagé ce précipité en deux portions égales , ob- fervanc de divifer le cône par une fection perpendiculaire, pour que chaque part fût compofée des couches corréfpondantes que la denfité pouvoit avoir duftribuée à différentes hauteurs , & je les ai em- ployées aux deux expériences fuivantes. PUIRNEM RE RUE LUE X PEUR ILE N'CE! J'ai mis l’une de ces portions de platine précipitée pefant deux gros , dans un creufet de hefe , placé lui-mème dans un autre creufet garni de fon couvercle lutté avec de l’argille, pour opérer à la mamère d: M. Delifle. SE GO IN D'EAUV EXP. ÉCRUMEMNICNE L'autre portion de précipité pefant aufli deux gros, a été mêlée à un Aux compofé de deux gros de verre blane, de douze grains de borax cal- ciné , & de fix grains de charbon; toutes ces matières bien pulvé- rifées, elle a été placée dans un fimple creufer légèrement brafqué, c'eft-à-dire, enduit de pouflière de charbon délayée à l’eau , pareille- ment garni de fon couvercle lurré avec de l’aroille , pour tenter la fufion par le procédé qu'avoit fuivi M. Lavoiher. DR O'EIS LE NM El E XI PRÉ ROMMIENNAIGRE Comme je me propofois d'opérer au fourneau de M: Macquer , dont le coup de feu m'a toujouts paru plus fort, plus égal & plus sûr qu'aucun autre ; la facilité d’y placer plufieurs creufets qui en rendent lufage plus économique , me décida d'autant plus aifément à tenter tout de fuite une troifième préparation que je prévoyois bien n'avoir pas befoin du dernier degré de chaleur qu'il pear don- ner à un feul vaifeau : voici en quoi confiltoit cette préparation. J'avois retrouvé fur mon Journal , que dans le nombre de plu- fieurs effais faits avec divers foudans fur des + gros de platine, au SRI HISTANNATMURELLE" ET, LESVARTS:;19$ mois de Septembre 1773 , le mélange de fel neutre arfénical & de pouflière d'os brülés au noir , m’avoit donné un grain métallique bien arrondi, de la groffeur de la tête d’une épingle adherant aux parois du creufet , ‘un peu au- dellus de la furface du flux, oùil avoit fans doute été lancé par le bouillonnement , ce qui in’avoir fait juger qu'il n'avoir peut- être manqué qu’un bain plus confidérable pour obtenir une fufñon plus complete ; dans certe idee, j'ai mis dans le même creufer de hetle qui avoit fervi à la premiere opération , deux gros de verre blanc pulvérifé, & je les ai enfermés dans un autre creufec plus granl , couvert & lurté. Cës crois préparations ont été expofées au mème feu pendant une heure , & routes les crois ont donné une fufon parfaite , mais avec les différences que je vais rapporter. Dans la premiere expérience ; la matière avoit prefque confervé la forme fous laquelle elle avoir été placée dans le creufer , à la ré- ferve que fon volume étoit confidérablement réduit , qu’elle ne pe- foit plus que $o grains +, & qu'au lieu d’une chaux rouge , elle avoit l'apparence d'un morceau d'argent mal fondu , mal moulé , point brillant , point arrondi , mais plurôt d’une couleur marte , d’un tiffu grenu & âpre au toucher ; au refte , nulle trace des fels que la platine avoit tenu en fe précipitant ; le creufet éroit ner, & au lieu qu’il y eût la moindre adherence , la matière mérallique ne paroifloit pas feulement avoir pris la forme du vafe; je jugeai à cette premiere infpection , que la platine étroit fimplement revivifiée, mais quil n'y avoit pas eu de fufñion completre , fans doute parce que le feu n'avoit pas été aflez vif, ou affez long tems continué : quelle fat ma furprife , lorfqu'ayant préfenté cette matière fur le tas, je la vis s'étendre, fe planer prefqu'aufhi facilement que l'argent, la lime & le couteau l’entamer de même; au refte, l’aimant n'eut pas plus de prife fur les lames que j'en détachai, quoique j'eulfe l’atten- tion de la mettre en contaét avec des pareilles qui ne pefoient pas + de grain, que fur celles que m'avoir envoyé M. Delifle. Dans la féconde expérience, la platine éroit bien fondue , mais ne s'étoir point réunie en un feul culot, je trouvai plufeurs boutons métalliques bien arrondis , dont le plus gros pefoit 33 grains, plüfeurs autres d’inégale groffeur , toujours également moulés & dé- capés, pefoient enfemble 14 grains, & il en reftoit encore beaucoup de très petites difféminées dans le Aux ; la lime a pris, quoiqu’avec peine , fur ces culots; ils ont abfolument refufé de s'érendre fous le marteau : à force de les frapper , j'en ai brifé quelques - uns par le milieu; ils ont fait voir dans leur caffure , un beau grain rrès-fin, fans cavité ni foufflure ; l’aimant a enlevé facilemenr les petites par- ties, agité les moyennes, & n’a manifefté aucune action fur les plus 196 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, pefantes ; tout cela cependant fans fuivre une proportion conftante; car le même barreau qui fourenoit ttès-bien un globule d’un grain &} demi, n'a pu en enlever un autre qui ne pefoit pas tout-à-fait le démi-grain , ni même les parcelles de ce globule brifé par un coup de marteau. Un autre phénomène que cette expérience m'a fait voir pour la premiere fois , eft la cryftallifation de la platine fondue ; tous ces boutons portoient à leur furface une forte de hachure régulière plus ou moins fenfible , & qui vue à la loupe, m'a paru d’un caractère différent de celle que j'ai obfervée conftamment dans la fufion du fer, quoiqu'il foit fort difficile de le déterminer. Dans la troifième expérience , j'ai trouvé fous un flux vitreux, verd- pâle à la furface, plus foncé vers le bas, un très-beau bouton par- faitement rond, brillant, couleur d’argent, du poids de 33 grains; il croit poli en quelques endroits , & préfentoit ailleurs une cryftalli- fation un peu plus prononcée que dans la précédente expérience ; mais ce qui étoit plus remarquable, c’eft que du milieu de ce bou- ton il s’élançoit une autre cryftallifation d’environ une ligne de haut de = ligne de diamètre, aflez femblable à ces flammes que l’on exé-- cute en bronze pour amortir des vafes ; on en diftinguoit même très-bien à la loupe les pointes faillantes & découpées ; elle étoic placée à la furface fupérieure , & logée dans une cavité ou foufflure du flux dont elle ne touchoit pas les parois; c’eft-là fans doute ce qui avoit laïffé aux parties conftituantes , dans le tems qu’elles na- geoient dans le fluide igné, la liberté de s’agrouper fuivant le fyf- tème d'attraction déterminé par leur figure , tout de mème que les cryftaux vitrifiables & fpathiques fe forment dans les géodes par l'évaporation infenfible de l’eau qui tenoit leur matière en diffolu- tion , le creufet s'étant heureufement caffé de manière à préfenter une coupe perpendiculaire au milieu du culot, j’eus le plaifir d’ob- ferver tous les détails de cer accident , & mème de le faire voir à plufieurs perfonnes avant de détacher le métal pour l’examiner ulté- tieurement. Les meilleurs inftrumens tranchans feront refoulés plutôt que de l’entamer : une lime très-fine d'Angleterre l’a cependant rayé ; mais ce qui paroîtra plus étonnant, c’eft que les parties infenfibles qu’elle a enlevées, ne fe font pas trouvées plus fenfibles à l’action du bar- seau aimanté , que le bouton entier. Q'U ATR L'E M'EU | ENXIPIÉ R ENNICIE La fufon de la feconde expérience avoit été fi différente de la pre- miere , qu'il n'étoit pas pollible de douter de l’action du flux , & MT 4 1 à SUR L’HIST. NATURELLE ET LES ARTS. 197 cette action paroifloit indiquer une nouvelle reffemblance avec la platine & le fer, fondée fur la puiffance de ce menftrue pour en dé- terminer la fufñon par la voie sèche ; il n’en fallut pas davantage pour m'engager à tenter de cette manière la fufñon de la platine même , fans «aucune préparation, quoique M. Baumé ait annoncé dans fa Chymie expérimentale (rom. 3 page 169.) que ce métal étoic forti fans altération , d’une expérience où il avoit émployé le caillou & le borax; en conféquence, je mis au fourneau dans un fimple creufer blanc brafqué, comme pour l’effai des mines de fer, z gros de platine crue avec un flux compofé de deux gros de verre blanc, de douze grains de borax, & de fix grains de pouflière de charbon, & le fuccès fur rel que je l’avois prévu ; la platine avoit été fondue en moins d’une heure & demie, & uoiqu’elle ne fût pas réunie en un feul culot , il étoit aifé de voir à la couleur où à la ualité du flux vitreux , que le mêlange de la brafque avec une trop rep proportion des fondans , avoir feul fait obftacle à cette réu- nion ; ce Aux formoit une malle compacte très-noire, dans laquelle la platine éroit difféminée en globules de différentes groffeurs , bien moulés décapés | & quelques-uns même cryftallifés : le plus confi- dérable étoit placé vers le bas ; il pefoit 16 grains : aucun de ces globules ne fe trouva malléable ; leur caffure préfentoit un grain fn, très-ferré, fans foufflure ; mais ce qu'il y eut de plus remarquable, ce fur le magnérifime que la platine manifeita dans cet érat au point que le bouton de feize grains fut facilement enlevé par le barreau aimanté, Je vous l'envoie , Monfieur, pour que vous puifliez juger par vous-même , quelle prodigieufe différence de celle que je vous pot- tai au mois de Septembre 1773. qu'il fallut réduire en poufière im- palpable pour retrouver quelque foible trace de fon magnétifme : je fais bien qu'il n'y à point de charbon qui ne contienne du fer, & la puiffance de mon flux rédudif eft telle, que ces atomes mé- talliques ne peuvent lui échapper , c’eft ce dont je me fuis convaincu par des expériences faites à deffein, où après avoir pouflé à la fu- fion une dofe de ce flux , comme pour un effai , dans un creufet brafqué de même, j'ai découvert à la loupe de très-perits globules bien réduits, qui s’attachoient au barreau aimanté, & qui ont pro- duit du bleu de Pruffe; mais qu’eft ce que le fer que peuvent con- tenir environ $o grains de charbon, compris la brafque , pour don- ner prife à l’aimant fur un culot de 16 grains ? Il eft bien évident u'il ne fufiroit pas pour communiquer, en quelque degré que ce fhe » le magnétifme à aucune autre matière, 198 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, C1 N QNUPISENM EN EUXUP ÉUR: I EMNICHÉ. L'action du fondant employé dans la troifième expérience, m'a paru mériter d’étre de nouveau obiervée , d’autant plus que MM. Margraf, Macquer & Baumé n'ayant pu réuflir à fondre la platine par l'intermède de l’arfenic, (Chymie expérim. tom. 3. p.173.) 1l yavoit lieu de penfer que le réfultat de ma troifième expérience étroit dû plutôt à l'action du fel formé de l’acide de l’arfenic, qu’à la partie régulière de ce demi-métal : j’ai donc mis dans un creufet un mè- lange d’un gros de platine crue, de deux gros de fel neutre arfeni- cal pulvérifés, & de deux gros de pouflière de charbon d'os brülés en vailleaux clos, le tout recouvert de deux gros de verre blancen poudre ; le feu ayant été le mème que dans l'expérience précédente, j'ai trouvé fous un beau flux verd, clair , opaque & homogène , trois boutons blancs bien moulés , dont le plus gros pefoit 67 grains à, le fecond quatre grains À, & le troifième un grain +, en tout 74 grains ; la lime à pris fur ces culots ,; la paume du marteau y a fait quelque impreflion ; mais ils fe font caflés plutôt que de s'étendre, & aucun des fragmens n’étoit attirable , feulement quelques parties infenfibles ont adhéré aux angles du barreau aimanté. L'augmentation de poids de deux grains femble indiquer que la terre métallique contenue dans le fel neutre arfenical , s’eft reviviñié par le contact des matières charbonneufes & alliées à la platine; j'ai voulu m'en affurer, en traitant ce fel de la mème manière & fans platine ; mais il ne s’eft formé qu'un flux noir, très- opaque, qui n'annonçoit aucune réduction. SE XIE MEME XIP'ÉTRL LE IN CE. Etant afluré de la puiffance de mon flux pour fondre la platine & le fer forgé, il étoit naturel de tenter cet alliage que M. Lewis dit avoir eflayé plufeurs fois fans fuccès , & qu'il jugeoit devoir être rrès-intéreffant , parce que les mélanges qu'il en avoit fair à diverfes proportions avec le fer de fonte, s’étoient trouvés duétiles à froid, ni aigres , ni caffans , approchant cependant de la dureté de l'acier trempé, & fufceptibles d’un poli qui fe confervoit depuis dix ans fans altération : il y a plus, comme il éroic indifférent pour la réufite de l’opération, d'employer le fer forgé ou l'acier, j'ai pré- féré ce dernier, pour n'avoir pas à revenir à la cémentation, (fup- pofé qu'elle fût néceffaire après une bonne fufon par mon procédé, ) & obtenir du premier coup tout ce qu’en défiroit M. Lewis. J'ai mis à cer effect, dans un creufec brafqué légèrement , un gros d'acier SUR:L'HIST. NATURELLE ET LES ARTS. 199 d'acier d'Angleterre en limaille, £ gros de platine, 3 gros de verre pilé, 18 grains de borax calciné , & 9 sains de pouflière de charbon; ce creufet défendu par un autre , a été expofé au feu le plus violent pendant deux heures. Lorfque tout a été refroidi , j'ai reconnu que l'appareil entier étoit confidérablement déformé, mème le creufer intérieur , cependant il n'avoir pas perdu fon flux, & le métal s’y éroit raflemblé en un beau culot parfaitement bien moulé & arrondi, du poids de 1 gros & +, moins 3 grains +, encore reftoit-il quelques petits grainsronds adhérens au creufet , qui pouvoient remplacer cette perte;-leculot n'étoit pas recouvert, mais fimplement environné du Aux, parce que l’inclinai- fon du creufet avoit étendu le bain fur l'an des côtés, & cet acci- dent avoit produit un effet bien remarquable’; la eryftallifarion qui étoit affez fenfble fur toute la furface , étoit tout autrement pro- noncée à la partie fupérieure non recouverte, & fe diftinguoit en- core par fa couleur plus blanche & plus brillante , tandis que le furplus avoit la couleur de l'acier revenu au bleu. J'ai répété cette expérience en employant au lieu de limaille d’a- cier, deux gros de rognures de refforts de montre, & un gros de platine; tous ces métaux fe font également bien fondus ; mais le creufers’étoit renverfé & découvert ; tour le flux avoit coulé , & le culot étroit mal moulé ; l'ayant mis dans un mortier de fonte pour le brifer & en féparer les parties hétérogènes interpofées, il s’eft trouvé f dur, qu'il a refoulé profondément en quelques endroits le pilon de fonte; il a cedé à la fin , & s’eft divifé préfentanc ‘dans fa caflure un beau grain très fin & blanc, qui s’eft laiffé limer & polir, J'ai raffemblé autant que je l'ai pu, la marière métallique de cet alliage ; je l’ai remis avec une nouvelle dofe de flux dans un creufet de helle, défendu de la violence du feu par un creufet de plomb noir renverfé, & j'ai trouvé cette fois après l'opération, un bouton parfaitement arrondi, du poids de 1 gros 33 grains, préfentant dans toute fa furface , la couleur du revenu bleu tirant au rouge , & une ctyftallifation forcement prononcée du caraétère de celle qui appar- tient au fer; ce bouton s’eft laiffé entamer, mais très - difiicilement à la lime ; les premiers coups de marteau ont affaiflé les parcies faillantes de fa cryftallifarion , & lui ont donné en cet endroit , un coup d'œil plané ; mais après cela , il a réfifté aux coups les plus violeus d’un marteau du poids de deux livres, & imprimoit à cha- ue fois Le tas d’acier ; je l'ai chauffé au rouge , & il a paru affez malléable pour s’applatir en fon milieu de près d’une ligne fans fe gerfer ; je l'ai chauffé une feconde fois au blanc, & pour lors le premier coup de marteau l’a fait éclater & gerfer profondément dans Tome WI, Pare. II. 1775, 200 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, toute fa circonférence ; en°cet état 1l s’eft encore laiffé découvrir, & même un peu fillonner par la lime. SNEMP UT IMEOM EME MP EE RIMSENNECÉE; Pour varier les proportions de l’alliage , j'ai fait une préparation toute pareille à celle de la précédente expérience , à la réferve qu’elle contenoit un gros de platine, & feulement + gros d’acier : la vitri- fication prefqu'entière du creufer, ne m'a laïflé à la première épreuve, qu’une forte de dentelle métallique mal réunie, qui cependant étoit un peu malléable; mais ayant répété l'opération avec toutes les pré- parations néceffaires pour prévenir tout accident, j'ai eu un très-beau bouton , pas tout-à-fait arrondi, mais bien terminé , de couleur d'argent avec une foible apparence de cryftallifation , qui vue à la loupe, n'avoit point de rapport avec celle qu’affeéte ordinairement le fer ; ce bouton pefoit 98 grains =; il s’eft laiffé limer & planer aifément fous le marteau , & ne s’eft brifé qu'après plus de trente coups très-forts : j’en ai chauffé un fragment , & j'ai reconnu qu’en cet état il fe forgeoit encore un peu ; je l’ai trempé rouge, & il n'y a eu aucun changement fenfible dans fa dureté. Quant au magnétifme, je n’ai pu obferver aucune différence en- tre cet alliage & le précédent, l'an & l’autre étant prefqu'aufli atti- rables que le fer pur ; mais le fecond m'a paru réfifter entiérement à l’action de l’eau- forte dans les parties même découvertes par la lime, tandis que le premier s’eft laiffé attaquer , quoique très-foi- blement , ce que j'ai vérifié par l'addition de l’alkali Pruflien qui m'a précipité une fécule bleue. Je ne vous ai point encore parlé, Monfieur, de la denfité de ces divers produits , parce que je me fuis propofé de réunir toutes les obfervations que j'ai faites à ce fujet , pour qu'il vous füt plus fa- cile de fair les différences vraiment étonnantes que préfente leur comparaifon. Je me fuis fervi d’une très bonne balance d’effai, qui m’a donné la pefanreur fpécifique de l’acier de reffort de pendule 7 , 260, & celle de mème acier fondu 7, 690. En opérant avec le même inftrument , après plufieurs vérifications très-fcrupuleufes , j'ai déterminé les pefanteurs fpécifiques. Lis SUR L'HIST. NATURELLE ET LES ARTS. 101 SAS M IOVAT RE De’hatphatine (en Igtains rm ot usine 164687 De la platine fondue à [a manière de M. Delifle. 10,045. De la même après avoir été très-malléée, . . . . 20,170. De la platine diffoute, & fondue avec mon flux. . 15,757. De la platine crue fondue avec le même flux. . . 17,684. De la platine crue fondue avec le fel arfenical, . 15,768. De l’alliage de + de platine fondue avec + d'acier. . 11,737. De l’alliage de ; de platine fondue avec + d'acier. . 9,314, La pefanteur fpécifique des deux alliages répond affez à la quan- tité & à la denfité propre des métaux employés dans l'un & dans l’autre, puifqu'elle différe peu de celle qui indique le calcul en fup- pofant la platine fondue dans ces alliages au même degré de den- fité que celle que l’on nous envoye d'Efpagne en grains ou galets , feule forme minérale que nous lui connoïlions jufqu'à préfenc (1); mais il eft difficile de concevoir pourquoi la denfité de cetre même matière varie aulli confidérablement fuivanc les procédés & la nsture des fondans employés pour en former des culots, lorfque d’ailleurs on a tout lieu de live qu'ils font également purs & non caver= neux ; c'eft Le premier exemple d’un fait aulli fingulier. J'avois jugé , à la première infpection, que la fufñon de la pla- tine à la manière de M. Delifle, c'eft-à-dire , après diflolution & fans flux, éroit très imparfaite, que les parties n'y étoient que ré- duites & foiblement rapprochées par la feule évaporation des pare ties falines du précipité , dont la préfence eft démontrée par fa dif- folubilité dans l’ean ; la balance hydroftatique confirme ce jugement, puifque le métal ne fe trouve pas même avoir les + de la denfité du minéral, pas même une denfité égale à celle de la platine cou- pelée par le plomb, qui fe trouva de 14,200 malgré plufieurs ca= vités qui s’y rencontrèrent; cependant de tous les produits des dif férentes fulons, c'eft la feule qui foit complettement malléable; fa De ANR ER ISERE PER CREEN AE AURAS NO TRUE TE (1) Suivant les informations qui ont été prifes à ce fujet par M. le Comte de Buffon , la platine fe trouve toujours dans le voifinage des mines d'or & d'ar- gent en grenaille plus ou moins mélangée de terre rougcâtre , & quelquefois de petits cailloux cryftallifés, . D d 2 202 : OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, denfité double fous le marteau, & en cer état il eft capable de s’é- crouir jufqu'au point de futpafler la denfité de l’or le plus pur. Si ces effets dépendoient de l’état de pureté & de divifion auquel le métal a été ramené par fa diffolurion dans l’eau régale, j'aurois dù les retrouver dans le produit de la feconde expérience ; néan- moins, 1l n’y a eu d’autre rapport qu'en ce que le premier n'a donné de figne de magñétifme que par quelques parties infenfibles déta- chéés par la lime ; le fecond guère plus; & la pefanteur fpécifique de.celui-ci excédoit d’un tiers de celle du premier. L'augmentation de poids de la platine fondue par le fel neutre arfenical, annonçoit l’alliage d’une partie quelconque de régule d’ar- fenic ; la denfiré devoir , ce femble, diminuer en proportion; elle eft'au contraite plus forre que dans aucun des produits précédens. Enfin, la platine crue , fondue par le moyen d’un flux qui déter- mine ff puillamment la fufon des particules de fer, devoit ètre d'autant moins denfe, qu’elle retiendroit plus du fable ferrugineux qui s'y rencontre ; le contraire eft arrivé , & elle l’emporte non-feu- lement far la denfité de tous les autres produits de la fufion, mais encore fur celle du minéral. Je réfume en peu de mots tous ces objets, & je dis qu’il réfulte des expériences précédentes : 1°. Que la platine a de mème que les métaux parfaits & le mer- cure, la propriété de fe reviviñier de l’état de précipité, qui eft une chaux produite par la voie humide, en l’état de métal , fans contact de matières charbonneufes. 2°. Que nous avons maintenant plufieurs moyens de fondre a platine en peu de tems, au feu ordinaite d’une forge ou d’un four- neau ; ce qui jufqu’ici avoit été fouvent tenté fans fuccès. 3°. Qu’après une bonne fonte & un refroidiffement lent, la pla- tine donne , comme la plupart des autres métaux, des fignes non équivoques d’une forte de cryftallifation , ou arrangement réoulier de fes parties, qui paroît lui ètre propre. 4°. Que fuivant le procédé & le choix des fondans , elle eft plus ou moins denfe , malléable ou non malléable, fenfible ou non fen- fible , à l'approche du barreau aimanté. 5°. Que fon magnértifme pourroit bien dépendre de l’arrangement de fes parties , puifque moins elle eft malléable après fa fufñon , plus elle eft magnétique & réciproque. 6°. Que le feul procédé , pour l'avoir parfaitement malléable , eft précifément celui où elle acquiert le moins de denfité, comme fi dans toute autre fufñon fes molécules, cédant plus librement à leur attraction réciproque , lui procuroient une forte d’écrouifflement na- turel qui la privât de toute dudilité. SUR L'HIST, NATURELLE ET LES ARTS. 203 7°. Que la denfité de la platine malléée peut atteindre & furpaf- fer celle de l'or. 8°, Que l’on peut allier la platine & l’acier dans toute propor- tion ; que ces alliages participent des proprictés qui appartiennent à chacune de ces fubftances quant à leur denfité, leur cryftallifa- tion & leur magnétifme, mais non point quant à leur duétilité. Si la platine devient un jour plus commune, ce que l’on doit ef- pérer & défirer, je ne doute pas que les Arts ne retirent quelques fruits de ces recherches; ils auront fur-rout obligation à M. Delifle; car celle qui eft fondue fuivant fa méthode, eft fufceprible d’être travaillée au marteau, à la lime , & par les oatils tranchans. Peut- ètre trouvera-t-on aufli une propottion pour allier ce métal avec l'acier, de manière à le façonner plus aifément , à lui faire prendre la trempe, & à fournir ainfi des outils moins aigres & moins fu- jets à s’altérer : en fuivant le procédé de la fixième expérience , il fera du moins facile de jetter en fonte des pièces que leur exceflive dureté rendra d’un ufage fort avantageux dans bien des circonftances. En vous expofant, Monfieur , ces nouvelles expériences fur la pla- tine, je me rappelle le jugement d’un Journalifte fur les premières que je vous communiquai il y a deux ans; il finit en ces termes le compte qu'il en rendit: Nous ajouterons que Les opufcules de M. Mar- Pr contiennent tout ce qu’il eff poffible, jufqu'a prèfent, à l'efprit hu- main de favoir, & 4 l'induffrie chymique de tenter fur la platine. C’éroit dire affez clairement que je n’avois rien obfervé que le célèbre Aca- démicien de Berlin n'eût annoncé avant moi : en voici un exemple. M. Margraff conclut, d’après fes eflais & ceux de M. Lewis, que quand la platine eff travaillée avec le plomb, il y demeure toujours quel- que chofe du plomb, & j'établiflois au contraire qu'il étoit poflible £ : FE LR de traiter la platine par le plomb , fans qu'il y reftär rien du plomb ; éroit-ce ignorance ou mauvaife foi ? Je ne me fuis pas mis en peine d'éclaircir le fair, un mot d'accueil de votre part à bien-tôr fait oublier les dégoùûts que de pareils jugemens pourroient répandre fur la culture des fciences. Je fuis, &c. ADij on, ce 18 Juillet 1775. 104 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, RD 2 EI APE RE AIN SA PSE ARENA EE De la Population de Paris ; pendant l'année 1774 ; comparée à celui 1774 Enfans - Trouvés. Garçons. . : Er DIN ANLT de 1773 (1). 1773: Enfans - Trouvés. 1 Spa TE Bass Se ue è 5989. Baptémes. Baptêmes. RE: Mer Some ANNEE TE Mariages. Mariages. SIl4 4810. Profeffions Religieufess Proféfions Religieufese 94e 71e Mortuaires. Mortuaires. Hommes... + 8470. è 661: Hommes. + 9752. gusrus. Femmes, « + 7591. Femmes. , « 8776. ETAT des Baptémes & des Mortuaires, fuivant les différens mois de l’année 1774. BAPTÈMES. MARIAGES, Garçons. Filles. MORTUAIRESe Hommes. Femmese Janvier s So. lo le ne B«2etel et abeliel 47e aile tonte M INBD3e le ete te 7LES Février , GLS elle nt en IRL Te Motte De Pellent778htertetrelie Lell727 eee RICUNe Mars , Sec tlure LUSBz ice ne sa toner Le le 1864 17 HITS f72te Avril , CET ENONCE CONNECT NE PONOO-U TELS Mai, BB ME lee 7708 le Melle te niS Lie elles al 50e Plelte ete RU OSS Juin, TAC Sr Ft ni ele ee eh 3Bre be Mate er 7640: Ks211 11635398 Juiller, 710 Mo lelle le HO Lelot elle lle AS) Ce tn Del SE Seite els 27» Août, Bars ete el 7) 7eme Meteo ee ee Ne T5 2e re rer. 079 Seprembre, Sog. + + + + 773 + + + + oo 377 + + + + + 644 + + + «+ <$8 Otlobre, ES RMANMNT E OMÉORMOMERET ONONE TONER BTS EST EL Novembres iRzse Mattel rErenteleLée ble MEN OL DT Re MT) MEN TES Ne RAT 36e Décembre, po he Me Szo- Merle lrelte Fe NN MN EME T0 TION 670 9891. 9461. $114 8470. 79e Profeffions morts en Religion pendant 1774. Honimes, 48. Hommes, 35. Filles , 46. Filles, $4. Novices, Penfonnaires & Domeftiques morts & enterrés dans Îles Couvens, 6 hommes 25 filles. Keligionnaires morts &c enterrés dans les Chantiers, 2 hommes 9 filles. Etrangers- Relipionnaires morts & enterrés à l’aris, 19 hommes 7 filles. nl (1) Pour trouver l'état de comparaifon de 1773 à 1772, voyez Tome 3 de ce Journal 1774 page 42$e SUR L'HIST, NATURELLE ET LES ARTS. 20$ Différence de l'année 1774 à 1773. Il ya cu, en 1774, 344 enfans-tiouvés de plus qu'en 1773. 506 Laprêmes de plus. 304 Mariages de plus. 23 Profefions Rehgieufes de plus. 2457 Morts de moins. Différence du nombre des Morts à celui des Baptêmes ; les Baptêmes excèdent de 3292 Janvier & Mars font les mois où il eft né le plus d'eufans, k Juin & Juiller font ceux où il en eft le moins né. Mars & Avril ceux où il eft mort le plus grand nombre de perfonnes, Juille: & Août ceux où il en eft mort le moins, PAPE Den RENE Adreffée à M. DE F***, à Montelimart , fur deux des plus peits Oïfeaux de l'Europe , par le Révérend Pere * * * (A EN Lettre , comme vous m'avez paru le défier , aura pour objet les deux plus petits oifeaux de l’Europe , le Roïteler, & celui qu'on appelle communément le Souci , ou Sourcicle. En vous retraçant , aufli-bien que je le pourrai , leur hiftoire , en vous en détaillant les mœurs , les habitudes ; les caraétères , la façon de vivre, je précindrai pour un moment, de toutes les connoiffances qu'auroient pu me donner les différens Auteurs que j'ai lus & com- parés fur cet article. Ne m'en tenant donc qu’à mes expériences perfonnelles, je vous rapporterai fidèlement ce que j'ai vu, ce que j'ai examiné de mes propres yeux , ce que l'attention la plus fcrupuleufe & la plus conf- tante m'aura appris: cette méthode , qui a pour moi des appas, je la fuivrai avec exactitude , fi dans d’autres circonftances il m'arrive encore de vous écrire relativement à cette matière ; après quoi ce fera à vous à voir fi je conviens avec les maîtres de l’art que vous confultez , & que vous avez entre les mains : vos obfervarions , quelqu’oppofées w’elles puiffent être à mes fentimens , je les recevrai avec plaifr: Au l’'impoflibilité de réfoudre vos doutes, les difficultés ou # ob- jections que vous voudrez bien me faire ; je prendrai le parti le plus fage , ce fera celui de reconnoître mes torts, de convenir tout fimplement de mes erreurs & de mon ignorance. Le Roiteler, dit en latin Regulus , eft un genre d’oifeau qui ne me paroîc renfermer qu’une feule efpèce, à moins que la groffeur 206 . OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE». plus où moins confidérable, ne fufhfe pour faire une différence fpé- cifique , ce,que je ne crois pas. Cet oifeau eft sûrement un des plus petits de l’Europe : mort & étendu , il a un peu plus de quatre doigrs depuis la pôinte du bee jufqu’à l'extrémité des pieds: la couleur de fon plumage fur le dos & fur la tère , eft nuancée d’un brun fauve fur un fond chätin, avec quelques taches d’un blanc peu diftinétes , remarquables aux deux guidons feulement ; le deffous du corps eft d’une teinte roufle, très-claire, avec quelques nuances tirantes fur le brun-foncé, le tout comme par ondulation , à commencer depuis le deffous de la mâ- choire inférieure , jufqu’au bas -ventre, & à l'anus inclufivement : en un mot, fon plumage, fans ètre bien riche , eft très - agréable ; on le compare à celui de la bécafle ; il faut convenir qu’il y a quel- que rapport. Le corps de ce petit animal eft bien pris ; il approche de la fi- gure ronde ; c’eft à raifon de fa petirefle que les gens de la cam- pagne l’appellent noufille dans quelques Provinces: fa tête fort petite, eft proportionnée en tout ; il a les yeux vifs & d’un beau noir, le bec fin, oblong, l’intérieur en eft jaune, avec la langue cartilagi- neufe , mince , défrangée ; les pieds font de couleur brune , aflez gros & aflez longs , pour ne pas paroître parfaitement rapprochés de fa peritelle; mais il faut obferver que ces contradiétions appa- rentes de la part de la nature, font quelquefois le voile dont elle fe fert pour dérober à notre œil curieux , les fecrets & les voies de fa fagelle, Quoique la Providence n'ait pas épuifé fes tréfors pour orner l’oi- feau que je décris, il eft toujours sûr de plaire : c’eft une beauté qui, pour étrenégligée dans fa parure , n'en eft pas moins piquante dans l'état de vie +’ il tient la queue élevée, ainli que la tête ; fes mouvemens font rapides & variés ; il s’infleéte prefque fans celle : par ce gefte, il femble éprouver, dit-on, fi le lieu où il fe trouve, ou la branche où il fe perche , font affez folides pour le fourenir : fes aîles concaves, peu étendues, font fufhifantes pour fournir à un yol très-courr, dire & léger ; il ne plane jamais, ce qu'il a de commun avecrune multitude d’autres oifeaux du genre infime ; fa queue eft compofée de douze plumes , peu longues & obtufes'à l'ex- trémité : quand il marche , ce qu'il exécute en fautillant , ou quand il eftpofé , fes aîles font pendantes & recouvertes par les plumes du croupion , felon la façon d’être des coqs. Cet animal vraiment folitaire, n’a rien du caractère trifte & f€- rieux que la folitude infpire : gai & fémillant, il remue prefque tou- jours : fes recraites ordinaires font les forèrs , les grands bois ; br choifig SUR L'HIST. NATURELLE ET LES ARTS. 3:07 choifit les lieux les plus épais, les plus fourrés , les plus obfcurs : on le voit encore dans le bas des buiflons , le long des vieux murs, fur le bord des ruiffeaux , quand ils font bordés de quelques at- buftes , de joncs ou de grandes herbes : il niche dans tous ces en- droits indifféremment , dans les uns cependant préférablement aux autres : les mouches, les arraignées , les coufins , quelques autres vermifleaux , les pucerons , dont les plantes potageres font char- gées , font fa nourriture & fon aliment favori , le feul mème qui puiffe fournir à fa fubfftance ; aufli fe rrouve-ril fouvent dans les jardins, près des choux , des cardons d’Efpagne , des artichaux ; là il a de quoi fournir abondamment à fon appétit, qui renaît pref- qu'à tous les inftans. Dans la mauvaife faifon & pendant les rigueurs de l'hiver , le Roiteler fe rapproche des maifons, où il fe retire quelquefois pour chercher un air plus tempéré , ainfi que les infectes dont il fe nout- rit; mais là il devient la proie duchat , de la belette, des enfans qui l’attrapent, & qui exercent fur lui tous les genres de cruauté dont ils font capables. Il m'a paru que ce petit oifeau n’en fouffroit pas volontiers de fon efpèce dans les cantons qu’il a choifis pour fa demeure. Par un cri qu'il fait entendre à Len reprifes , il éprouve s'il eft d’autres individus que lui dans les lieux qu’il habite, jugeant de leur pro- ximité par leur réponfe : quand il les croit fur fes terres, il les cher- che , les pourfuit, les chaffe de fon diftrict , après quoi il revienc triomphant , jouir du fruit que la viétoire lui a procuré. Sa voix eft agréable & forte; mais fon chant, d’ailleurs uniforme & très - court comme celui de la rougegorge, eft l'annonce des fri- mats & des mauvais tems. Si tous les oifeaux , où du moins la plupart du genre infime & mitoyen, occupés de leurs chanfons ref- pectives, célèbrent dans leurs accords mélodieux, le retour du prin- tems , le renouvellement de la nature & leurs tendres amours , le Roitelet alors paroïît taciturne , & fe fait peu entendre ; le foin de réparer fon efpèce , de fe bâtir un nid , de pourvoir aux befoins de fa femelle qui couve ou qui pond , femble occuper tous fes Joifirs. Le tems de la pariade pour lui eft le mois de Mars ; fon humeur amoureufe fe décide par les beaux jours ; dans les forêts, les troncs, les vieilles fouches de charmes ou d’autres arbres, font les lieux qu'il choific pour placer fon nid ; la mouille dont ils font recouverts , établit une uniformité trompeufe entre le local & fon ouvrage , & contribue à dérober fa retraite à l'œil du berger, qui ne la cherche que pour lui enlever fes nourriffons. Le long des murs ruinés, recouverts de lierre & de pampres fau- Tome VI, Part. II. 1775. E e d 203 COCBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, vages , il fe cafe à travers les branches de ces deux plantes, ou fuf- pend fa demeure à une pierre, fur le bord des ruifleaux qu'il fré- quente volontiers ; il la cache dans le bas des buiffons , & quelque- fois on la trouve attachée au parois latéraux des perits ponts que l'in- duftrie humaine y établir. . Quant à la forme, fon nid recouvert de tous les côtés, à l’excep- tion de la perite ouverture qui en fait l’entrée, approche affez de la figure ronde ; le mécanifme en eft fingulier, je l'ai fouvent admiré fans comprendre comment un oifeau de cette periteffe pouvoir , avec fi peu de forces & fi peu d'organes, faire un ouvrage de cette na- ture. La partie extérieure eft un compofé de mouffe & d’autres végé- taux, foutenus , entrelaffés avec des fils d’arraignée : l’intérieur eft un duvet, où il entre du coton, de la laine, des plumes, du crin, toutes fubftances très-molles, propres à affeoir des œufs de la plus grande délicareffe. La ponte fe fair au commencement de Mai, les œufs font d’un blanc de lait, & gros comme des poids chiches : on en trouve juf- qu'à neuf, & même davantage dans le mème nid : l’incubarion dure onze jours à peu-près ; au bout de ce terme les perits éclofent les yeux fermés , & reftent dans cer état jufqu’à ce que , fortifiés par Vâge, leurs paupières puiffent s'ouvrir à la lumière; au refle , cer aveuglement n’elt pas de longue durée. : Nourris également par le pere & la mere, qui ont le plus grand foin de tenir le nid propre, les petits, après deux femaines, font prêts à s'envoler, & s’envolent en effet, d’abord dans les lieux voi- fins de leur naiffance , où ils attendent le développement total de leurs plumes; là ils font encore quelque tems l’objer de la rendreffe & de l’amour paternels. Leurs talens une fois décidés, ils vont chacun , fuivanc l’inftin& & le caraétère que la Nature leur a infcrit, remplir, fans s’en écar- ter jamais , les fins que la Providence s’eft propofée dans la créa- tion. Il faut obferver que la chair du Roitelet eft bonne à manger ; cuite à propos, c'eft un aliment délicar; les gourmets lui trouvent un goût bien au-deffus de la Bécaffe , & des autres gibiers égale- ment recherchés ;, à raifon de la nourriture que prend cet oifeau ; je fuis perfuadé que l'excès en deviendroit funefte à la fanté ; mais il eft inutile de recommander la tempérance & la frugalité fur cer article; la peticeffe de l’animal, la difficulté ou l’impofbilité plutôt d’en trouver en abondance , perfuadent bien mieux les gourmands que tous les difcours qu'on pourroit leur faire. Voilà, Monfeur , tour ce que je fais de plus certain fur le Roi- 1 SUR L’'HIST. NATURELLE ET LES ARTS. 109 telet. Je viens aétuellement à cet autre petit oifeau, que l'on ap- pelle quelquefois de fon nom, que l’on range improprement fous fon genre, quoiqu'il n'ait avec lui que des rapports extrèmement éloignés, & un caraétère prefque totalement difparate; comme vous pourrez en juger vous-même par la defcription que je vais en faire, & mieux encore par l’infpeftion des fujets : vous en avez dans votre cabinet , il ne tiendra qu'à vous de les comparer. Le Roirelet couronné, diten latin, Repulus criflatus, nommé aufli plus exactement, peut-être, Souci ou Sourcicle, à caufe de la hupe jaune fafrané qu'il porte fur la tête, eft un oifeau plus petit que le précédent; il a de la pointe du bec à l'extrémité de la queue, tout-au-plus quatre doigts : la partie fupérieure de fon corps eft re- couverte de plumes d’un verd peu agréable, on voit quelques ra- ches claires aux aîles & aux fcapulaires, l’occiput a quelque peu de jaune aurore ; les tempes , la gorge, la poitrine , le bas- ventre, font d’un blanc vraiment fale; fes pieds, petits & déliés, font proportionnés à fa taille peu élégante, & moins gracieufe encore, ainfi que le bec qui eft crès-fin; ils fonc de couleur rembrunie, le deffous des doigts eft jaunâtre , fa tère eft ornée d’une hupe fort agréable par fon coloris, c’eft tout ce qu'il a de beau. On remarque aux deux parties latérales des raies noires qui fervent comme d’en- veloppe à la crête quand elle eft baiffée, & qui, furmontant les yeux de chaque côté, donnent à cer organe peu d'éclat, peu de vi- vacité, peu de faillie, parce qu'il fe trouve entre de mêmes teintes. Vivanc & en liberté, cet oïfeau eft toujours bourru, il paroît inquiet en cherchant fa nourriture; quoique fans cefle en mouve- ment, il na, pour ainfi dire, qu’une activité lente. Sa voix eft fans agrément , & fon chant fans mélodie; par un cri plaintif, fembla- ble à celui du Grimperau gris , il rappelle fa femelle qu'il ne quitte jamais felon toute apparence , puifqu'on les trouve dans toutes les faifons & dans tous les mois, appareillés deux à deux, & rarement trois. Les bois, les jardins , les vergers, les buiflons, font les lieux fréquentés par ce petit volatile. Il fe tient au fommert des grands arbres, fe pend à l’extrémité des branches, y cherche fur l'écorce & fous les feuilles , les infeétes prefque invifibles pour nous, dont il fait fon aliment; on l'entend long-tems avant de l’appercevoir , parce que fa couleur & fa petitefle le diftinguent peu des feuil- lages. Sa chair neft pas graffe ; sèche & aride , elle eft d’un goût amer & très-mauvais. Commun dans toutes les Provinces de France; Île moment de fa fécondité & celui de fes amours, eft la belle faifon. A l'exemple des moindres efpèces toujours plus nombreufes dans leurs reproductions, il multiplie beaucoup. C'eft dans les trous d'ar- Ee z “10 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, bres qu'il fabrique fon nid ; la facon de nourrir fes petits, de les foigner, de pourvoir à leurs befoins, n’a rien de particulier & de diftingué de tant d’autres oïifeaux du genre infime & vermivore. Quand les nourriffons ont pris tout leur accroiflement, quand leur plumage eft totalement expliqué, leurs talens , leur inftinét dans l'état de perfection convenable , ce qui n’eft pas long , alors ils fe féparent deux à deux, mâle & femelle, quelquefois trois, & vont ainfi chercher leur nourriture , fournir à leur fubfiftance , jufqu'au tems où le befoin de fe reproduire exige d'eux d’autres travaux. Telle eft la condition d’une multitude d'êtres, fur lefquels notre Philofophie jette quelquefois un regard de mépris, heureufement privés , fi j’ofe le dire, de cette liberté d'indépendance, qui fait le plus fouvent notre malheur : fans autres fenfations que celles de: leurs befoins , fans autres idées que celles de leur exiftence , fans autre directeur que leur inftiné, les' animaux, comme fous la main du Créateur qui les conduit, ne patoiflent occupés que des vues de la Nature, toujours brillante dans fes œuvres , toujours fage dans fes projets, toujours active dans leur exécution ; ah, Monlieur, que le tableau qu'elle nous offre eft majeftueux ! qu'il eft grand, qu'il eft riche aux yeux du Philofophe qui le contemple & l'admire ! Plus il s'en approche , plus fon imagination s’échauffe ; fes réflexions fe multiplient, fes idées fe fubliment , fon ame s'aggrandit , fon efprit s’éclaire. J'ai l'honneur d’être , &c. RE NPA ER ONE URRE De M. l'Abbé DICQUEMARE, Citoyen du Havre, de plufieurs Académies Royales des Sciences, 6c. Ox lit dans les Obfervations fur la Phyfque , l’Hiftoire Naturelle & les Arts, rome V. page $02, s03. la phrafe fuivante. » La fon- » dation du Havre par François premier , auroit eu des fuires rrès- » favorables pour la Marine, fi la mer avoir fourni une bonne rade #»au bas de la Seine , car on fait qu’un port eft prefque toujours » inutile quand il n’eft pas accompagné d’une rade «, Le Savant qui s'exprime ainf , fe ffaste (page $10.) que le Public voudra bien approuver la pureté de fes intentions , ce qu’affurément je fuis bien éloigné de lui refufer : fi donc je prends la liberté de re- lever certe phrafe, c’eft qu’elle pourroit être mal entendue par ceux SUR L'HIST. NATURELLE ET LES ARTS. 211 qui ne font pas bien au fait de la marine È ils pourroient penfer que la fondation du Havre par François [. n’auroit pas eu des fuites très favorables pour la Marine , & que ce port eft prefque toujours inutile , &c. ils en auroient alors une idée très - faufle , que fans doute on n’a pas eu deffein de leur inculquer. Les armemens de 1469 & de 1485. contre l'Angleterre, prouvent que le Havre étoit dès-lors un port utile & le plus avantageux de ceux de la Manche , ce qui dérermina François I, dès qu'il fur par- venu à la Couronne , à le choïfir, après les avoir fait tous examiner, à y faire des travaux confidérables (1), à donner à la ville fon nom (2), (ville Françoife, Francifcopolis) , fon cacher , & aux ci- toyens les plus beaux privileges ; aufli le regardons - nous comme fondateur. Il y fit conftruire de gros vaiffeaux, entr’autres la grande Nau Françoife, de plus de deux mille tonneaux ; »u1 homme , difene nos Mémoires manufcrits & notre tradition, ze pouvoir bouler d'un bout à l’autre. Nous favons que le commerce s’y accrut confidérable ment : les pêches des morues , Fernansbouc, le Maragnan, la Floride la Virginie , la Guinée en étoient l’objet : Jacques V Roy d’Ecoffe, Y débarqua un fecours de 16000 hommes en 1536. En 1545 on y arma 150 gros vaifleaux ronds , & 26 galères ou Houins : le Caraçon, vaifleau amiral de cette Aotte , conftruit au Havre, portoit cent gros canons de fonte : il fur brûlé aux yeux du Roi, en donnant une fère fur la rade : la lotte y vint défarmer après fon expédition : ce Monarque & fes fuccefleurs y entretinrent toujours douze gros vaif- feaux avec quelques galères commandés par fes Capitaines de Ma- rine , qui y amenèrent un fort grand nombre de prifes très-riches z tous les Rois depuis François 1. honorèrent le Havre de leur pré- fence , ou d’une protection particulière, & lui donnèrent pour Gou- verneurs les premiers hommes de l’Etat : Henry Il. y vint accom- pagné de la Reine, & y fit faire des travaux de conféquence , qui auroient pu être autrement difpofés : en 155$ On y arma trois vaifleaux : en 1562 les Calviniftes furprirent les citoyens , & livrè- rent la ville aux Anglois, qui méprifant les traîtres, les en chalè- ES (1) Le premier Août 1768, M. Gallomi, faifant fonction de Directeur des For2 tercfles de Haute-Normandie, m'ayant demandé des éclairciflemens folides fur l'état ancien du Port & des Forterefles, je lui remis, pour la direétion, dix plans avec autant de mémoires, en un livre qui, dit-on, ne s'y trouve plus. (2 ) Une ancienne Chapelle de Notre-Dame-de-Grace , maintenant Paroiffe fous la même invocation, donnoit fon nom au Havre, Havre-de-Grace : l'Hôrel-de- Ville met dans fes Aëtes, Ville Françoife du Havre-de-Grace, & dans Fufage or dinaire nous écrivons feulement le Havre, 12 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, rent : elle fut reprife un an après par Charles IX & Catherine de Médicis Régente : les Anglois y laifsèrent leurs vaiffeaux & muni- tions ; Elifabeth qui connoifloit l'importance de cette place, y en- voyoit 6o vailleaux, qui parurent en rade deux jours après fa reddi- tion : le Roi rendit des aétions de graces, fit de grandes réjouif- fances de ce que la Seine étoit libre , embellit & augmenta la ville par divers ouvrages : Henry IL ÿ vint accompagné de la Reine en 1576, & en fit prolonger les jerées : Henry IV y vint auflien 1693: la Reine Marie de Médicis y fit faire plufeurs travaux pendant la minorité de Louis XIII : le Cardinal de Richelieu , devenu Gouver- neur du Havre , le fortifia fur- tout contre les entreprifes des Cal- viniftes, en faifant, par ordre du Roi , conftruire une bonne cita- delle , une très-belle porte à la ville , & donna une meilleure forme au baflin , qui cependant ne fut achevé qu’en 1669. Il y fic conftruire plufieurs gros vaiffeaux , dont quelques-uns deftinés pour le fiege de la Rochelle : on continua d’y en conftruire jufqu'à la paix de Rifwick en 1697, & mème fous le dernier règne. Sous M. de Colbert , on creufa un canal de Harfleur au Havre pour l’améliora- tion du port &: du commerce : peu après , le Roi ayant envie , à limitation de François I, de conftruire un port dans la Manche , ce Miniftre eut ordre de vilirer les côtes de Bretagne , de Picardie & de Normandie , notamment Eftretat & la Hogue; mais il ne fe trouva point de lieu plus propre que le Havre , le terrein étant d’ailleurs tout difpofé : on fe contenta donc de faire creufer le baf= fin plus qu'il ne l'étoit, conftruire les corderies & les chantiers du Roi. Les habitans du Havre qui s'étoient en quelque forte aproprié les pèches des morues, y occupoient plus de cent navires, avoient impofé des noms à plufeurs lieux des côres de Terreneuve , entr'au- tres aux /fles du Havre- de- Grace dans la Baye de la Conception; au petit Havre, &c. Les pèches des baleines, le commerce du Nord, ceux d’Efpagne, de la Méditerranée , de la Guinée, du Canada, où, pendant près d’un fiècle, ils ont prefque feuls traité, n’étoient pas négligés ; les Compagnies des Indes orientales & occidentales , du Sénéoal & de Guinée , ont eu au Havre des établiffemens avant ceux du Port-Louis. La navigation & le commerce de la mer du Sud a fleuri dans ce port tant qu’il a été permis ou toléré. Une par- tie de l’efcadre du Maréchal de Tourville y arma & y rentra. La Marine commerçante qui, après les Sciences , l'Agriculture & les Arts, peut ètre regardée comme le nerf de l’Erat, eu égard au fyf tème actuel des Sociétés politiques , s’elt confidérablement accrue dans ce port depuis le commencement de ce fiècle ; indépendamment des autres commerces & en 1717, 1718, on y comptoit fepc à huit SUR L'HIST. NATURELLE ET LES ARTS. 213 navires pour celui des Ifles; en 1736 M. le Comte de Maurepas , alors Miniftre de la Marine, fur témoin oculaire de fes progrès &c les accéléra. En 1740, on y en comptoit cinquante , depuis cent cinquante jufqu'à quatre cens tonneaux. En 1749, jours heureux où Louis le Bien-Aimé, dont la mémoire nous fera toujours chère, nous honora de fon augufte préfence , & difoit avec tranfport dans nos murs, vive mon peuple , vive mon cher peuple , on y en voyoit plus de foixante , depuis deux cens cinquante jufqu’à fix cens tonneaux, en y comprenant quelques négriers. Il abordoit alors en ce port, année commune, 640 navires. Des Ifles de l'Amérique Go, de la Pêche du grand Banc 18 , de Marfeille 40, de Cette 20, du Golfe de Gafcogne & de la Bretagne 65, du Port-Maurice 10, d'Efpagne ss, de Lisbonne 15 , de Flandre & de Hollande 22, de la mer Baltique 6o , des Ifles Britanniques 265. Maintenant il y a pour les Ifles cent navires d’un grand port, & dont les cargaifons font beaucoup plus riches qu’elles ne l’éroient. Il y en a 20 pour la traite des Noirs, &c. En un mot, on peut regarder le commerce du Havre en général comme double de ce qu’il étoit au commencement de la Paix, & triple de ce qu'il étoit en 1749. Cependant.le Roi p'a pas ceflé jufqu’aujourd’hui d'y faire conftruire de grandes Fréga- tes, de belles Flûtes, des Corvettes de gabares, &c. En 1759 , on y vit, pour la conftruétion des Bateaux plats ( 1 ) , un atelier d’en- viron fix mille ouvriers. C'eft principalement pour la navigation du Havre qu’on établit des Phares fur les côtes de Normandie. Placé fur la rive droite de l'embouchure de la Seine & fur la mer, ce Port a de grands avantages ; il a deux rades où l’on ne peut être incommodé que des vents de la partie de l'Oueft ; le fond & la tenue y étant excellens , on y foutienr de très - grandes tempêtes avec de bons cables. Si notre propre expérience n'avoit pu nous en convaincre, nos voifins nous l’auroient prouvé plus d’une fois ; & dans le cas où on pourroit manquer l'entrée du port, qui eft ai- fée , onne feroit pas fans reflource. Il garde fon plein (2 ) pendant près de quatre heures, ce qui fair que fans confufon une efcadre, une flotte, peut en fortir d’une feule marée, & même y rentrer (x) Ceux qui étoient deftinés pour l'Infanterie avoient 91 pieds de long , fur 21, de largeur, & ceux de la Cavalerie la même longueur fur 24 pieds de lar= A. 300 äevoient armer au Havre; plus de la moitié y ont été conftruits. Les ennemis qui centèrent de bombarder la Ville, n’en purent brûler aucuns, & n'en prirent pas un (eul lorfqu'ils fortirenr. (2) Ty ai fait un grand nombre d’obfervations pour moi-même & pour un Savant qui m'y avoit engagé, 214 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, “quand les circonflances le requièrent ; avantage unique & ineftimas ble dans un port de marée. Quand on connoiït l’état ancien des rades & des rivages du Havre, qu'on voit en grand, & qu’on eft depuis une longue fuite d'années à portée d'en obferver les changemens, on s’apperçoit que la Nature favorife ce lieu , qu’il eft prêt à deve- nir un des plus avantageux de l'Europe , qu’on pourroit y feconder la Nature, ou en exécutant le projet qu'en avoit dreffé M. le Ma- téchal de Vauban, par ordre de Louis XIV, & qui doit exifter, ou en le réformant fur le local qui eft devenu plus avantageux, On lute quelquefois contre elle dans d’autres ports. Celui-ci n’eft pas feulément l’embarcadère de Rouen, de Paris, de Lyon, &c, Il à un commerce qui lui eft propre, qui procure à ces Villes & à un grand nombre de Manufactures de nos différentes Provinces, un débouché confidérable , & qui mer en valeur les pays qui l'a- voifinent. On doit donc conclure que la fondation du Havre par François Ï, a eu des fuites très-favorables pour la Marine en général , & en particulier pour la Marine commerçante; qu'il n’eft point refté inutile; que fon amélioration, fon agrandiflement , procureroient à coup für celui des Finances de l'Etat & de fa puiflance maritime, à caufe des avantages qu'il reçoit de la Nature & de fa polis tion. CR M É M OIRE Sur la nature du SPATuH pefant; Par M MONET. L'ivonwe pefanteur de cette fubftance , eu égard à celle des autres du règne minéral , l’avoit fait diftinguer depuis très-long- £ems parmi les mineurs Allemands : elle fut nommée d’abord pierre pefante ; & comme elle fe préfente fouvent fous la forme quarrée & fpathique , elle fur défignée par la fuite fous le nom de Spath pefant. Une autre circonftance qui avoit obligé les mineurs à n miliarifer avec cette fubftance , eft qu’elle fe trouve fouvent joiñte avec les mines, que fa pefanteur fait précipiter avec elles dans le Javaage ; mais tandis que les mineurs s'occupent à s’en débarraffer, les Minéralogiftes ; ou ceux qui écrivoient fur la connoiffance des minÉraUux 3 SUR L'HIST. NATURELLE ET LES ARTS. 215 Minéraux , la méconnoifloient , ou la confondoient avec des fpaths, ou pierres de nature totalement différente : on commence à trouver une lueur de connoiflance fur cette pierre dans la Minéralogie de Bromell, page 37:elle y et décrite fous le nom de marbre métal- lique ou de fpath. Cet Auteur la confidère comme de nature gypfeufe; cependant on ne trouve rien qui ait rapport à cette fubflance dans la Minéralogie de Wallerius, qui a tant profité de l’Ouvrage de Bromell, pour compofer le fien, ce qui doit paroître d'autant plus extraordi- naire , que Wallerius auroit pu apprendre aïfément à la connoître des Mineurs Suédois & Allemands, qui n’ont que trop fujer d’en faire mention en parlant du lavage des mines : d’un autre côté, il auroit pu s’en inftruire dans la Pyritologie de Henckel , ouvrage que M. Wallerius paroît avoir confulté plufieurs fois en compoñfant fa Minéralogie : il auroit pu y voir , page 219, (1) que c'elt une forte de fpath, fi pefant, dit-il, qu'on feroit tenté d'y admettre une fubltance métallique ; mais ce qui me paroît encore plus furpre- nant, eft que M. Valemont de Bomare n’en faffe nulle mention, nôn plus que MM. Lehmann, Gellert & Cromftedr : il eft vrai qu'il paroïtra encore plus furprenant à quelques-uns , que ces trois derniers Auteurs ayent méconnu cette pierre , attendu qu'ils éroient mineurs, & qu'ils avoient par-là plus d’occafon de s’inftruire dans la connoif- fance des minéraux : il fe peut d’ailleurs , que la fubftance que MM. Gellerc & Lehmann défignent fous le nom de fpath gipfeux ou fpéculaire, foit notre fpath pefant; car certainement 1l n'y a pas de gyps dans les mines , ni même dans les lieux à mines, ou de premiere formation ; je ferois mème bien tenté de croire que M. Gellert a connu en quelque forte le fparh pefant, lorfque je vois qu'il dit page 9, tome premier de fa Chymie mérallurgique , que fa pefanteur fpécifique eft quelquefois fi grande , qu’elle furpalfe celle de toutes les pierres; j'ai tout lieu de croire que cer Auteur ne péche que par la manière dont il envifage ce minéral, Mais il faut avouer qu’il n’y a jufqu'en 1757, que le feul M. de Jufti, qui ait fu faire une véritable diftinétion des pierres qu'on nomme fpath : il déligne formellement le fpath pefant à la page 223 de fa Minéralogie , comme ne devant pas être confondu avec les autres fpath; cette confulon eft d'autant plus blämable, que le mot fpath Allemand , n’a aucun rapport avec le genre ou l’efpèce : il dé- figne feulement une figure quarrée ou quadrangulaire ; cependant nos demi-favans en Minéralosie, n’entendant pas vraifemblablement ce . ee {z) Ce paflage répond à celui de la page 85 de Traduction Franc, Tome VI, Part. Il: 3775. FÉ 216 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE; que fignifie ce mot, ont tout confondu , & ont appliqué ce mot in diftinétement à toutes les fubftances calcaires cryftallines , qu’elles fuffent fpathiques ou non. A l'égard de M. de Jufti , je lui rends avec d’autant plus de fa- tisfaction la juftice qu'il mérite en ceci, qu’on eft plus rarement dans le cas de le citer avec éloge : fes jugemens hafardés , une élo- cution emphatique , là où il ne faut que de la juftefle & de l'expé- rience, ont décrié depuis long-temsen Allemagne , fes defcriprions minéralogiques & fes differtations chymiques ; à la vérité , cer Au- teur ne dit qu'un mot du fpath pefant dans fa Minéralogie ; mais il s'étend beaucoup plus à ce fujet dans fes Mtlanges chymiques , tome premier, page 333 , où l’on trouve une differtation affez éten- due, dans laquelle il examine fi le fpath pefant contient du métal. Comme M. Port, dans la continuation de fa Lithogéognofie, page131, dit un mot da fpath pefant, fans crop favoir fi c’eft une efpèce particulière, & qu'il dit en avoir retiré quelques grains de plomb, M. de Jufti le reprend , on peut dire aigrement, dans la differra- tion que nous citons , en lui faifant voir qu'il n'a pu tirer de métal d’une fubftance qui n’en contient pas; M. Port choqué de certe hardiefTe de M. de Jufti, lui répondit durement dans une nouvelle édition de fa Lichogéognofie , & M. de Jufti, en adverfaire déterminé de ce grand Chymilte, lui répliqua par une autre differtation fur le fpath pefant, qui fe trouve aulli dans le même recueil que nous venons de citer. Tant que cer Auteur foutient qu'il ny a pas de métal dans le fpath pefant , à moins qu'il ne s'y en trouve d’étranger , il a aflu- rément raifon, & il a pour lui en cette occafion , tous les Minéra- logiftes inftruits ; mais quand il vient à contredire ce cèlèbre Chy- milte fur fes autres effais, nous croyons qu'il eft mal-fondé : nous n’en dirons pas davantage fur cette difpure , qui eft étrangère à no- tre fujer ; nous reviendrons cependant fur les principales experiences de M. Pott , quand nous aurons établi les propriétés & les caractè- res extérieurs de cette fubftance fingulière ; difons auparavant un mot des lieux où elle fe trouve. Nous avons déja dit ci-devant , que le fpath pefant ne fe trouve que dans les mines , ou lieux à mines : nous citerons en premier lieu, Sainre-Marie-aux-Mines , comme le lieu où il s’en eft le plus trouvé & avec plus de variété. Roya , village près de Clermonc en Auvergne : il s’y en voit un filon entier, dans lequel on dé- couvre de tems en tems des grains de mine de plomb. J'en ai dé- couvert un autre près de la ville de Limoges , au lieu nommé Pré- Saint-Gervais : dans celui-ci j'ai obfervé quelque peu de mine de cobalt en fleur; mais le plus beau fpath pefant que j'aie vu , ef à SUR L'HIST. NATURELLE ET LES ARTS. 117 Volfach , à 14 lieues de Strasbourg : il y accompagne les mines d'argent , qui font aujourd’hui le fujer d’une des plus belles exploi- tations du monde. Le fpath pefant eft fans contredit, la pierre la plus pefante que nous connoiflions : non- feulement elle furpafle toutes les fubflances minérales pierreufes que nous connoiflens , mais encore plufieurs mines métalliques , telles que celles de cuivre & d'argent : elle égale prefque la pefanteur des mines de fer, ainfi que le remarque M. de Jufli dans la première differtation citée : quelques mineurs ont même cru qu’elle furpalloit certains métaux fous leur forme mé- tallique ; mais c’eft une erreur, comme nous le verrons plus loin. Cette fubitance eft ordinairement d’un beau blanc matte : elle pa” roît fouvent en criftaux quadrangulaires , ou en mafle , avec des facerres affectant la figure quarrée ou quadrangulaire ; c’eft , comme nous l'avons déja dit , le fujer de fa dénomination : 1l s’en voit d’à- demi tranfparens & de moins pefans les uns que les autres , en petits ou gros cryftaux : j'en ai eu un cryftal bien figuré , qui peloit plus d’une livre. Le fpath pefant n’eft pas d’une grande dureté: il s’écrafe facile- ment entre des corps durs; conféquemment , on ne s'attend pas qu’il fale feu avec le briquet ; il ne fait pas non plus effervefcence avec les acides. M. de Jufti dit, à la vérité, que l’eau forte en diffout quelque chofe , & cela eft très-vrai. J'en ai fait infufer dans un matras avec de l’efprit de nitre, & j'ai reconnu que cet efprit en étroit chargé jufqu'à un certain point; car ayant verfé deffus de l’al kali fixe en liqueur , bien net, j'ai eu un précipité affez confidéra- ble. 11 ne fe fond pas au feu le plus violent fans adition. J'en ai expofé un morceau, en préfence de M. Macquer, au grand miroir ardent du Jardin de l'Infante, & il y eft demeuré également intaé&t. Tenu longtems au grand feu , il s’y calcine de manière à fe ré- duire en poudre impalpable. Quand il eft mêlé, felon M. Port, avec une terre , il fe fond en un verre coloré en brun ; mais c’eft une expérience que M. de Jufti lui contefte, prétendant qu'il n’a pas employé de véritables fpaths pefans. Cependant le même M. de Jufti dit à la page 342 de fes Mèlanges, tome 1*%., avoir fondu le fpath pefant avec trois parties de fable, une demi-partie d’alkali fixe, & une demi-partie de borax , en un verre jaune ; en cela nous trouvons qu'il n’y a rien de bien extraordinaire. Quoique le fpath pefant foit fouvent très-blanc , il peut recéler quelques parties ferru- gineufes , & par-là colorer en noir le verre ou la fcorie qu’il forme en fe fondant , comme le dit M. Port , page 131 de la continuation de fa Lithogéognofie. D'ailleurs, M. Pott conclut d’après fes effais, que la terre du fpach pefant eft d’une nature toute particulière , & LÉ 238 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, qu’elle n’a aucun rapport avec celle qui conftitue le quartz , ce qui eft très-vrai. Voilà à peu près tout ce qui s’eft dir au fujet de cette fubftance fingulière , c’eft-à dire , jnfqu’en 1774, où M. Parent , Intendant de la Manufacture Royale de Sèves, crur qu’elle lui pourroit être utile dans fes travaux. Il m’engagea de lui en procurer de celle d’Au- vergne , où j'en avois obfervé fi abondamment. Mais M. Parent ne crut pas devoir la mettre en œuvre avant de la connoître plus par- ticulièrement. Il ft en conféquence des effais très-intéreffans fur cette fubftance , dont il m’envoya le réfultat : le voici. » Votre » fpath pefant, me dit M. Parent, réfifte au plus grand feu de la » porcelaine, fans mème s’affembler ou prendre de la confftance. » Après ce premier effai , j'en ai mis trois morceaux dans un creu- » fer que j'ai couvert fans le lutter. L’ayant placé dans un fourneau » à fondre , & ayant chargé ce fourneau de charbon, je l'ai laiflé » éprouvew toute la violence du feu qui dura cinq heures. Le len- » demain, je pris les morceaux de ce fpath qui éroient devenus jau- » nes en plufeurs endroits. Je crus que c’étoit des taches. Je les » gratai avec un couteau, & fur-le-champ il fe répandit dans le la- » boratoire une odeur très-forte de foie de foufre. Je jertai alors » ces morceaux dans un fceau de porcelaine avec de l’eau qui les » furnageoit de quatre doigts. L’odeur de foie de foufre fut encore » plus forte qu'auparavant, & l’eau parut laireufe. Après deux jours » je tronvai l’eau évaporée , & le fpath cryftallifé en petits cryf- » taux foyeux, femblables à peu-près à ceux que forme le ayps, quand » il a été noyé à grande eau qu’on décante & qu’on laifle évapo- » rer. La cryftallifation que je trouvai au fond du vafe, étoit en- ” core plus fingulière ; c’étoit une glace brunâtre, mais brillante » comme le marbre artificiel fait avec le gyps, & fur lequel on a » paflé 20 à 30 couches d’eau de gyps , qu’on polit enfuite à l'or- » dinaire. Cette glace fe rayoit avec l’ongle & avec la lame d’un » couteau ; elle étoit en un mot fi fine, que je la réduifis en pou- » dre. » L'odeur de foie de foufre parfaitement femblable à celle que » donne le plâtre cuit ordinairement lorfque les ouvriers le mouillene >» pour l’employer , la cryftallifation foyeufe , très-reffemblante à celle » du gyps, la croûte brillante au fond du vafe de porcelaine , tout » m'a conduit à penfer que votre fpath a quelque rapport avec le » gyps; cependant il faut vous obferver qu'il y a cette différence en- » tre le gyps ordinaire & le fpath pefant, que le premier fe vitrifie à notre grand feu de porcelaine , tandis que le fpath pefant y eft » parfaitement réfraétaire. Il faut encore vous obferver , que cette » odeur de foie de foufre n’exifte pas dans Le fpach lorfqu'il a fubi # è SUR L'HIST. NATURELLE ET LES ARTS, 219 »ce grand feu, mais feulement lorfqu’il a été à portée de le con- » tracter par le phlogiftique des charbons comme fait le plâtre, par » le contact immédiat de la flamme du bois avec lequel on le cuit. » Cette reflemblance. m’engagea à traiter un morceau de fparh pe- » fanc de la même manière que le plâtre, pour voir s’il produiroit » le même effet. Je le réduifis enfuite en poudre, & l'ayant mouillé » il abforba bien l’eau, mais il ne prit aucune confiftance ni liai- » fon «, Après ce détail , M. Parent, en m’apprenant encore que ce fpath, quoique très-pefant , n’égaloit pourtant pas en pefanteur aucun mé- tal, qu'il fe trouvoit même moins pefant d’un cinquième que le fer à volume égal , lorfqu'on les comparoit enfemble à la balance hydroftatique; M. Parent , dis-je , m’exhortoit à examiner moi-même la nature de ce fpath, & de donner une fuite à fes expériences, Voici comme je m'y pris. Je pris deux onces de fpath pefant, c’eft celui de Roya en Au- vergne dont il eft parlé dans ce Mémoire , l'ayant réduit en poudre , je le mêlai avec deux gros de poudre de charbon ; je mis ce mélange dans un creufer que je plaçai dans un fourneau de fu- fion; lui ayant fait éprouver la chaleur la plus vive pendant une heure & demie, j'enlevai le creufet tour rouge, & je jettai la ma- tuière qu'il contenoit dans de l’eau. Il fe répandit aufli-tôt dans mon laboratoire une odeur très-marquée de foie de foufre. Je remuai la matière , & au bout d’une demi-heure j’en féparai par le filtre une li- queur qui fe trouva être un véritable foie de foufre. Verfé fur une diffolution de vitriol martial, elle le précipita fur-le-champ en noir, elle noircifloit d’ailleurs les chaux métalliques, comme fait le foie de foufre ordinaire. Je ne doutai pas dès- lors que l’acide vitrio- lique ne für contenu dans le fparh pefant, & qu'il ne fe für com- biné, dans cete occafion , avec le phlogiftique du charbon, d’où étant réfulré du foufre , il s’étoit combiné avec la propre terre du fpath , & avoit formé un foie de foufre. Mais pour en être plus affuré , je verfai fur cette liqueur de l'acide du fel marin. Il fe forma un précipité peu abondant que je crus être du foufre. L’ayant ra- maflé fur un filtre & fait fécher, il ne fe trouva pourtant pas du foufre pur, il étoit mêlé avec beaucoup de terre. Car en ayant mis fur les charbons ardens, il s’enAamma , à la vérité, comme le foufre, mais il laiffa plus de la moitié en réfidu d’une terre grifâtre. On voit que j'avois eu la précaution de n’en pas faire la précipitation avec l'acide vitriolique , dans la crainte qu’il ne réfultât de cet acide avec la terre propre du fpath, un fel peu foluble, ainfñ qu’il arrive lorfqu'on précipite le foufre d’un foie de foufre fait par la chaux, fel qui, fe précipitant prefque en même-tems que le foufre, en 220 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, augmente confidérablement le volume ( 1). Cette terre, mélée avec le foufre précipité, me fit foupçonner qu'il y avoit une intime union entre ces deux matières. Quoiqu'il en foir, je préfumai que l'acide dont je m'érois fervi pour faire cette précipitation , devoir tenir en diffolurion de la terre propre du fpath , car ce n’éroit qu’en s'emparant de cette rerre que l'acide avoir fait précipiter le foufre. Je ramaflois en conféquence foisneufement l’eau de lavage dont je me difpofois d'en précipiter la verre lorfque je m'’apperçus qu’elle éroit encore très-fulfureufe, c’eft-à-dire , chargée encore de beau- coup de foie de foufre. J'en fus fort étonné, vu que la liqueur étoit acide , & qu'il y avoit par conféquent plus d'acide qu'il n’en falloit out faire précipiter entièrement le foufre. Cependant , en réflé- chiant fur l’état du foufre précipité, je crus reconnoître la caufe pour laquelle 1l éroir refté malgré l'acide du foufre uni & combiné avec la terre propre du fpath. Il étroit probable que la même caufe qui avoit empêché que le foufre ne fe précipirät parement & fimplement lorfque j'avois verfé de l'acide dans la leflive filtrée du fpath calciné avec le charbon, avoit empêché aufli que le foufre ne fût entière- ment féparé de la totalité de la terre. Cetre confidération me four- nifloit une nouvelle preuve de ce que je viens de dire, que le foufre éroit combiné fingulièrement & bien intimement avec la terre du fpath ; mais elle me donnoit lieu de conjecturer d’an autre côté , que le foufre que je voyois dans cette matière, n'étoit pas un pro- duit de l’opération dont je viens de parler, mais qu'il étoit préexif- tant dans le fpath; en en mot, que l’acide vitriolique n'éroit pas dans le fpath comme acide vitriolique , mais comme foufre. Voici encore comme je raifonnois. Nous n'avons pas d'exemple en Chymie; où après avoir combiné le foufre avec une terre pour en former un foie de foufre , le foufre tienne enfuite fi opimâtrement avec la terre. Ces réflexions m’ayant déterminé à vérifier fi c’étoit l’acide vitrio- lique ou le foufre qui étoit combiné avec la terre du fpath, & qui conftituoit avec elle cetre fubftance fingulière , je laiffai de côté l’eau dont je viens de parler. Mais en attendant je crus devoir me fervit d’un expédient que j'avois éprouvé autrefois pour féparer le foufre entièrement d’une pareille liqueur; c’étoit de la laiffer chauffer dou- cement dans une terrine verniflée. Ce vernis n'eft autre chofe, comme on fait, qu'une efpèce de verre de plomb. Peu-à-peu le foufre s’y attache, en formant deflus une poudre noire & laifle la terre feule avec l'acide. L’arr doit employer toutes fes reffources quand EEE (1) On uonve cette faute dans Jes Effais de Chymie de Mayer, page 176 SUR L'HIST. NATURELLE ET LES ARTS. 222 le cas l'exige. Je prie le Lecteur curieux , & l’Amateur de la Mi- néralogie , de ne pas perdre cet objet de vue. Les chofes étant donc ainfi difpofées , je pris, comme dans le premier procédé , 2 onces de fpath pefant réduit en poudre ; je le mélai avec une once de fel alkali fixe bien pur. Je fis fondre ce mélange dans un creufer bien bouché devant la tuyère de ma forge. Il s’y produifit une effervef- cence confidérable, au point qu'une partie de la matière pafla les bords du creufer. Le creufec ayant été enlevé du feu , je le verfai dans de l’eau. Il fe répandit aufli-tôt une vapeur de foie de foufre très-fenfible. Un moment après je filtrai la liqueur , & elle fe trouva un véritable foie de foufre , mais plus clair & plus blanc que le pre- mier , par la raifon, fans doute , qu'il n’y avoit rien eu qui avoit pu le colorer; au lieu que dans l’autre expérience une portion du charbon avoit pu être mife en diffolution ; car c’eft ; comme les bons Chymiftes le favent , une propriété du foie de foufre de dif- foudre le charbon. L’acide nirreux verfé deflus, n’en précipitoit pas non plus le foufre pur, mais mêlé avec beaucoup de terre, Je m'en convainquis en faifant bouillir le précipité que j'en obtins avec de l'eau forte affoiblie, qui en diffolvit totalement la terre , & laiffa le foufre feul d’un beau jaune. Venons maintenant à l'explication de cette expérience, & au but qui m'y avoit conduit : fi, me difois-je , le fpath contient de l’a- cide vitriolique, il doit pendant l’aétion du feu, paffer dans le fel alkali, & former avec lui le tartre vitriolé; mais au lieu de ce fel, je ne trouve dans l’eau qu’un foie de foufre ; il n’y a donc pas dans. le fpath d’acide vitriolique , mais du foufre : la démonftration me paroïffloit claire : à quoi donc devoit fervir le fel alkali dans cette circonftance ? à diffoudre le foufre , répondrois-je , & à s’en empa= rer au préjudice de la terre ; car c’eft un effet connu, que le foufre s’unit par préférence aux fels alkalis , à moins cependant qu'il n'y ait affez de ce fel pour diffoudre la terre elle-même, & que la terre ait de fon côté de la difpoftion à fe combiner avec le fel alkali; c'eft ce qui eft arrivé ici: l’alkali étoit joint avec le foufre & la terre en même -rems : on en voit une preuve. par la leflive qui étoit claire, & qui ne l'eût pas été , fi le foufre n’y avoit été renu en diffolution que par l’alkali feul; mais la meilleure conclufion que nous puiflions tirer de tout ceci , eft que notre fpath pefant efl une combinaifon du foufre avec une terre : voilà affurément un fujer crès-inréreffant; mais il n’eft pas fans exemple en minéralogie. J'ai démontré dans un Mémoire inféré dans les Actes de l’Académie Royale des Sciences de Suède pour l’année 1773, que la terre qui enveloppe la mine de charbon de Littry en Bafle - Normandie , étoit combinée avec le foufre ; j'ai enfuite fair mention de ce fait dans le Journal de Phy- 222 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, fique , tome 3, page 423. Cette terre, à la vérité, n'eft pas un corps folide & cryftallifé comme notre fpath. Le foufre n'y eft pas uni fi intimement, & c’eft en quoi ce fujet-ci doit paroitre bien au- tremenc intéreffant. Il n’y a pas de doute que la terre ne foir ici faturée entièrement de foufre , puifque nous avons vu au commen- cement que les acides n'y ont aucune aétion. C'eft par-là que les connoifleurs en Minéralogie trouveront que cette matière eft un nouvel être. Par quelle propriété ou par quelle fingularité le foufre , combiné avec une terre , peut-il former un corps cryftallin & réou- lier? Voilà une queftion que plufeurs feroient tentés de faire ainfi que nous; mais 1l ne nous elt pas poflible d'y fatisfaire, du moins quant à préfent. Tout ce que je pouvois faire , étoit d'examiner le fparh pefant en lui-même. Je réduilis en poudre une once de fpath pefanr. Je le fis calciner long-temps ; je jettai enfuite la matière qui étroit friable, dans de l'eau pure ; j'en obtins une forte de foie de foufre qui précipitoit auñi en noir les fubftances métalliques de leurs diffolvans. On voit que cette expérience confirme celle de M. Parent, & combien il difoit vrai, quand il difoit que l’eau dans laquelie il avoit mis fes morceaux de fpath calcinés , fentoit fortement le foie de foufre. On voit aufli par-là , que fi on ne peut pas dire que le fpath pefant eft un foie de foufre naturel, du moins peut-on dire qu'il contient en lui-même les matériaux pour le former. Il eft bon de dire encore RAT Re : que le fpath pefant , qui a été calciné, eft diffoluble , jufqu’à un certain point, dans l’eau forte, & que cet acide y produit un effer- vefcence confidérable , en dégageant une odeur de foie de foufre. On à lieu de croire par-là que la calcination, en brifant le tiflu de certe fubitance, en dégage un peu de foufre : cependant il faut avouer que je n'ai pu diftinguer bien décidément des vapeurs de foufre pendant la calcination. Ayant donc reconnu le foufre pour être un des principes confti- tuans du fpath pefant, il faut examiner quelle eft l’efpèce de terre qui, avec le foufre , forme cette fubftance fingulière. D’après ce que nous avons rapporté ci-devant, nous avons lieu de croire que cette terre eft difloluble dans les acides, & qu’elle eft mème calcaire. Voyons-en maintenant la preuve fur la terre pure, que je me fuis promis ci-devant de tirer de la leflive de la première matière. Que le Lecteur fe rappelle que je l’ai laiflée fe dépouiller de fon foufre. Je la prends maintenant; l'ayant filtrée pour en féparer la pondre noire qui s’y étroit formée ; je verfe deffus peu-à-peu de l’alkali fixe en liqueur, bien pur & bien net; il s'y forme un précipité blanc très - abondant & tel qu’on l’obrient de l’alun, après l'avoir érendu dans SUR L'HIST. NATURELLE ET LES ARTS. 213 dans beaucoup d’eau; je verfe le tout fur un filtre, & je pale plu- fieurs fois de l’eau deffus pour l’édulcorer. Cette terte érant sèche, je l'ai divifée en deux parties. Sur l’une j'ai verfé de l'acide vitrio- lique étendu dans beaucoup d’eau. L’effervefcence ne m'a pas paru d’abord fort fenfble , mais elle left devenue enfuite, Pour accélé- rer cette diffolution qui m'a paru fe faire très-lentement, j'ai pofé ce mélange fur un bain de fable chauffé , après l'avoir étendu d’un peu d’eau diftillée. Mais quelque tentative que j'aye pu faire, je n'ai jamais pu parvenir à faire difparoître radicalement cette terre, il me parut même que le réfidu s’augmentoit au lieu de diminuer. Je filtrai la liqueur & la fis évaporer ; il s'y forma quelques pelli- cules légères & fans confftance; je les ramaffai au moyen d’un filtre, au travers duquel je fis pafler cette liqueur. À l'infpeétion de cette cfpèce de fel que je pris pour une véritable félénire , je crus que ma terre étoit une véritable terre calcaire, Cette idée me développa pourquoi j'avois eu un dépôt très abondant pendant la diflolution. En effer, en confidérant cette terre comme une terre calcaire or- dinaire , je voyois qu'à mefure qu’elle étroit diffoure par l'acide vi- tiolique, elle devoir fe précipiter fous la forme de félénite, à moins qu'elle n’eût été contenue dans une très-grande quantité d’eau , & capable de la tenir en diffolution. Cependant il m'a femblé que cette efpèce de félénire ne fe cryftallifoit pas comme la félénite ordinaire; elle étoit toujours en Aoccons très-légers , & d’un beau blanc nacre de perle. Mais prenons de plus amples informations fur la nature de certe terre, en examinant fes rapports avec l'acide du nitre. Je mis l’autre partie de ma matière dans un vaiffeau convenable ; l'ayant étendue d’un peu d’eau diftillée , je verfai deflus peu-à-peu de l'acide nitreux. Elle fut attaquée aflez vivement , mais la liqueur ne s’éclaircit nullement. 11 fe forma un dépôt aufli confidérable que le volume de la terre que j'y avois mis. Je filrrai & je fus extrè- mement furpris de voir que ce dépôt étoit un véritable fel luifant & cryftallin, fous la forme de petites aiguilles. Ce fel fe diffolvoit dans l’eau , & craquoit un peu fous la dent. Ayant enfuite évaporé la liqueur , j'en obtins, par le refroidifflement, un fel qui, au lieu d'être aiguillé comme l’eft celui qui provient de la terre calcaire ordinaire, diffoure par l’acide du nitre, étoit cryftallifé en petits grains anguleux , mais fi petits que je n'en pus diftinguer la vérita- ble figure. Cependant ces cryftaux étoient ifolés dans la capfule où ils s’éroient formés. Ce fel mis fur la langue , ne s’y diffolvoit pas facilement. Il n’y imprimoit pas non plus le piquant du fel nitre calcaire. IL craquoir fous la dent. Voilà affurément des caractères fort diflérens de ceux que préfente le nitre calcaire. En outre je ne lui ai remarqué que très-peu de difpofition à attirer l'humidité de l'air, Tome VI, Pere. II. 1775. Gg 124 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, tandis que le nitre calcaire eft fi déliquefcent, qu'il n’eft pas poffi- ble de le conferver cryftallifé. Notre fel exige aufli beaucoup plus d’eau pour être diffout , que le nitre calcaire. Lorfque l’eau en eft faturée , il fe cryflallife très-promptement, pour peu qu’elle éprouve de diminution, Ce fel, expofé fur les charbons ardens , bouillonne d'abord un peu , & détonne enfuite; il fe rapproche par-là du ni- tre calcaire ordinaire; c’eft donc là une efpèce nouvelle de fel ? Ce- endant il eft bon de faire obferver que notre terre, diffoute dans RE en eft précipitée par l'acide vitriolique , comme la terre calcaire ordinaire en une félénite très- tenue & très - blanche. Voyons maintenant les relations de notre terre de fpath avec l’ef- prit de fel. Je combinai pareillement cette terre avec de bon efprit de fel bien pur. Elle n’en fut pas totalement diffoute. La diffolution qui en réfulta étoit fort jaune , quoique la terre que j’avois employée füt fort blanche. Cette liqueur évaporée fournit une matière faline à peu-près pareille à celle que donne la terre calcaire ordinaire avec Vefprit de fel, mais elle n’attiroit pas l'humidité de l'air aufli for- tement. Cette terre eft donc une terre calcaire, mais qui diffère à quelques égards de la terre calcaire ordinaire. Par-là nous nous inftruifons d'un principe bien important pour la Minéralogie , qui eft qu'il y a de la variété parmi les terres calcaires. C’eft ce que j'avois foup- conné depuis longetems, comme on peut le voir dans mon Traité des Eaux minérales, page 89. De pareils exemples ferviront peut- être à montrer la nécellité de divifer les terres en plufeurs efpèces. Je me propofe cependant d'examiner quelque jour cer objet en plus grand détail , & d’acquérir de plus grandes connoiffances fur les va- riétés des terres calcaires. Mais il nous refte encore quelque chofe de plus relatif à l’objet principal de ce Mémoire , c’eft de dérermi- ner la quantité de terre & de foufre qui conftituent le fpath pefant; mais nous en prévoyons la difficulté extrème, vu l’intime union qu’il y a entre le foutre & certe terre , & la difficulté de féparer l’un de l’autre. Il exifte encore une autre forte de fpath pefant , nitreux, jaune ou blanc. Il s’en trouve encore une veine très-confidérable à Roya, près de Clermont. C’eft un nouveau fujet à méditations pour les Miné- ralogiftes & les Amateurs des productions du règne minéral, MA SUR L'HIST. NATURELLE ET LES ARTS, 226 EM NO TO NRUOE Sur les Mines de Fer & fur les parties étrangères qui s’y | trouvent; Par M. KRENGER, traduit de l'Allemand. Cisr un aveu humiliant, mais néceflaire , quand on veut con- ferver la réputation d'un amateur de la vérité, que de reconnoître fes erreurs & de s’en rétracter publiquement : je ne puis mieux faire, qu'en adreffant mes nouvelles Obfervations fur les Mines de fer, à M. l'Abbé Rozier, pour qu'il les publie dans fon excellent Recueil, que je vois avec grand plaifir, devenir le dépôt général de toutes les parties des Sciences Phyfiques. J'avois cru avec beaucoup de Minéralogiftes , que le fer étoit mi- néralifé dans les mines de fer : féduit par leurs faux raifonnemens, je n'avois pas mème foupçonné que ces Minéralogiftes , ou plutôt ces Chymiftes, ne parloienc que d’après leur imagination , ou pour mieux dire , fans fondement : il pafloit pour conftant, qu'il n’y avoit pas de mine de fer fans foufre ; c’éroit des pyrites , quoiqu'il dût paroître une énorme différence entre les pyrires proprement dires , & les mines de fer; on foupçonnoit feulement que ces der- nières fubftances en contenoient beaucoup moins ; de-là il eft aifé de voir combien de conjectures les pauvres Chymiltes devoient faire , lorfqu’ils parloient de la nature des fers & de la fonte ; c'étoic le fufre qui faifoir fondre les mines de fer, & qui étoit caufe que la gueufe étoit plus fufñble que le fer forgé : d’autres ont avancé avec aufh peu de fondement, qu'il y avoit des parties vitrioliques dans les mines de fer. Je vois avec une extrême furprife , que M. Grignon a adopté cette idée dans le Recueil qu'il vient de publier fous le titre de Mémoires de Phyfique ; &c. mais fans donner la moindre preuve de cetre affertion, Cependant le témoignage de M. Cramer devoit être d’un grand poids dans une pareille décifion , & on voit que ce Savant dit à la age 238 de fa Docimañe , édit. de M. Gellert , que les mines de fe ne contiennent pas un atome de foufre ; que s’il y a quelques mines de cette efpèce qui donnent des vapeurs fulfureufes , elles doivent plutôt être attribuées à quelques parties de pyrites qui Gg 2 :26 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, peuvent fe trouver dans les mines de fer, qu’à ces mines même: c'eft fans doute d’après cette idée de M. Cramer, que plufeurs Métallurgiftes font partis pour aflirmer qu'il n’y avoit point de foufre dans les mines de fer. M. Monnet dans fon Traité des Eaux minérales , page 269, a donné un petit examen de ces mines, où il eft prouvé également que ces mines ne contiennent pas de fou- fre ; mais cet Auteur porte fes vues plus loin, il prétend que ces mines ne font la plupart que des chaux de fer folidifiées & pétri- fiées avec d’autres terres étrangères. Malgré l’amitié qui me lie avec ce Minéralogifte, je ne fus pas plus expofé à me départir de mes anciennes idées fur l'état de ces mines : je croyois toujours que ces mines étoient minéralifées par le foufre ; mais je penfois que le foufre y étroit uni avec le fer fous la forme de chaux, & que c'é- toit cetre circonftance qui établifloit l’énorme différence qu'il y à entre les mines de fer & les pyrites (1). Enfin j'entrepris de faire ce que j'aurois dû plutôt, l'examen de toutes les mines de fer que je pourrois me procurer ; j'en ai eu de rouges , de grifes, de brunes & de blanches de plufeurs pays; j'en mis une livre de chaque dans une cornue de grès lurtée ; je les ré- duifis feulement en petits morceaux. Ayant placé ce vailfeau au four- neau de reverbère , je lui ajoutai un ballon convenable, mais fans le lutter; je donnai le feu par degré jufqu’à la plus grande violence; je ne vis rien paroître que quelques gouttes d’eau ; je trouvai la mine à-peu-près comme je l'y avois mife ; elle paroifloit feulement un peu plus légère ; il faut cependant obferver que quelques morceaux de ces mines, fur-rout des brunes, étoient devenus attaquables par les acides ; l’aimant les attiroit aufli plus facilement. M. Monnet difant dans le mème Mémoire cité plus haut, qu’il fe trouve du zinc dans cesmines , & voulant vérifier cetre affection, je mêlai la mème quantité de ces mines avec de la poudre de char- bon, & je leur fis fubir la mème opération; les brunes & les grifes me donnèrent un fublimé en croûte , dans la voûte de la cornue, que je reconnus être du zinc , en le traitant avec du cuivre , & en le diffolvant dans les acides : les rouges , autrement appellés héma- rites , & les blanches ne donnèrent rien de pareil. En rendant toute la juftice qui eft due à M. Monnet , l’amirié veut aufli que je ré- clame pour lui l’antériorité de certe obfervation contre M. Grignon, maître de Forges , qui , dans le Livre qu'il vient de publier , parle de ce fait comme lui appartenant : pouvoit-il ignorer , ce mai- (1) C'eft une propriété reconnue aujourd'hui , que le fer réduit fous la forme de chaux eft combiné avec le foufre, SUR L'HIST.- NATURELLE ET LES ARTS. 227 tre de Forges, que de tout rems ce fait a été connu dans le pays de Liege , où les ouvriers vont vendre depuis un tems immémo- rial, la cadmie du zinc qui fe fublime dans le pourtour de leur fourneau : c'eft l’obfervation que fait M. Monnet dans fon Traité des eaux- minérales , page 276. Bien loin de fe l’attribuer , il en parle comme d’une chofe très-connue ; il ne parle pas même de la découverte du zinc dans les mines de fer , comme lui appartenant, parce qu'il a fuppofé que cette cadmie du pays de Liege, devoit en avoir fait la preuve par une infinité d’autres : il faut encore obfer- ver que ce qui rend M. Grignon blâmable vis à-vis de M. Monnet, eft que le Traité des Eaux minérales paroïfloit en 1768 , tandis que M. Grignon dit lui-mème dans fon Livre, n'avoir lu à l’Académie des Sciences qu’en 1769, le Mémoire où il s’agit de la cadmié du zinc retiré de fon fourneau : d’ailleurs , nous favons de M. Monnet lui-même , que M. Grignon n'avoit aucune connoiflance de l’exif- tence du zinc dans les mines de fer au commencement de l’année 3769, où M. Monnet pafla trois jours à la forge de Bayard , chez M. Grignon : c'eft-là où M. Grignon apprit pour la pre- mière fois, que les érincelles & la flamme bleue qui s'élèvent de a gueufe , aufli-bien que de la loupe lorfqu'on la frappe fous le gros marteau , font dues au zinc: en un mot, M. Monnet, dans la lettre qu’il m'a écrite à ce fujet, foutient avoir fait faire attention M. Grignon , qu'il s'élevoit dans les fourneaux à fer, des va- peurs de zinc , & qui y formoient un fublimé : M. Monnet fourient encore , que bien loin que M. Grignon eût de tout cela la moindre connoiffance , il s’obftina plufieurs fois à n’en vouloir rien croire , admettant toujours du foufre dans les mines de fer, & que ce ne fut qu'après fon départ que M. Grignon mit à profit ce que M. Monnet lui avoit dit. Je pris quatre onces de chacune des mines que je viens de nommer ;' je les fis griller fous la mouñle d’une coupelle, après les avoir bien humectées avec de l’huile d'olive ; c’eft à-peu-près l'expérience de M. Monnet , qu’on peut voir détaillée dans le Fraé des Eaux mi- nérales , page 272. Je répétai jufqu’à crois fois cette opération , afin de bien imbiber ces mines de phlogiftique. Ce fut après cela que je trouvai que toutes les mines étoienc atrirables à aimant, qu’elles étoient diffolubles dans les acides, Comme j'avoïs choïfi les plus purs morceaux de cette mine, ils ne laifsèrent que très- peu de réfidu, & ce réfidu faifoir avec ce qui avoit été enlevé par l’aimant, la to- talité de leur poids. On voir bien par-là que s’il y avoir eu des par- ties minéralifantes dans ces mines , elles auroient laiflé un décher propoitionné à elles dans leur poids. Il eft inutile également de rechercher dans ces mines de l’acide 2:28 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, marin, comme un fort habile homme fe l’eft imaginé, M. Bergman * Profeffeur en Chymie à Ufpal , qui a retourné de toutes les manières les mines de fer , blanches & fpathiques , non-feulement il n’y a rien trouvé qui pût y faire foupçonner le moins du monde qu'il y eût d'acide marin, mais encore il a vu très-clairement que ces mines n’étoient nullement minéralifées. À l'égard des parties étrangères & non métalliques, qui fe trou- vent dans les mines de fer, ce font ordinairement des terres ar- gilleufes, calcaires & quartzeufes. Ce font ces dernières qui font les plus ingrates à la fonte, les premières & les fecondes fe fondent très-bien , puifqu’elles portent une partie de leur fondant avec elles; car ceft, comme le favent aujourd’hui les bons Métalluroiftes, de l'union de la terre argilleufe & calcaire que réfulre la fonte com- plette de la mine de fer dans le fourneau. Les mines de fer du Pays de Liege font toutes argilleufes ; aufli exigent-elles l'addition de la caffine pour fe fondre. Celles au con- traire du Comté de Namur , font toutes calcaires ; on y voit même bien diftinétement dans quelques-unes des fragmens de co- quillage ; celles-ci portant leur caftine, n'ont befoin que de l'ad- dition d’un peu d’argille. Il en eft de même de nos mines d’Alface; & je vois avec plaifir , dans les voyages Métallurgiques de M. Jars, qu’en Suède les mines de fer peuvent fe divifer également en ar- gilleufes & en calcaires. Il y a cependant dans ce vafte Royaume une autre forte de mine de fer qui ne fe trouve pas ailleurs; c’eft l'efpèce grife & un peu luifante , qui eft attirable à l’aimant. Elle eft très pure, & n'exige mème que très-peu de fondant pour être fondue. Elle donne de très-bon fer, fans aucune forte de mêlange, il ne faut pas chercher non plus de minéralifareur dans cetre forte de mine. Elle eft atraquable par les acides, mais elle ne s’y diffout pas complertement, ce qui prouve que pour être artirable à l’ai- mant, le fer n'a pas befoin d’être entièrement pourvu de phlooif- tique. Il fuffit mème , felon mes obfervations, qu'une feule partie de ce métal en foit pourvue, pour que celle-ci dérermine les au- tres à être enlevées par l’aimant. Après cette efpèce de mine de fer, la plus pure que nous con- noiflions , eft celle qu'on nomme hematites. C’eft la chaux pure de fer, mais cryftallifée. Cette cryftallifation , comme on fair , eft rou- jours en aiguille, on en forme des rayons qui fe divergent fouvent du centre à la circonférence. Il y a , comme on voit, une énorme différence entre ces mines & celles qui font blanches & fpathiques. Ceux qui font roujours difpofés à raifonner par analogie, ne man- quent pas de faire beaucoup de fpécularions là-deffus. C’eft l'acide marin dans l’une qui lui donne cette forme cubique ; c’eft le foufre ati SURATHISTNNEÉ DURE LLES ET: LESVARTS. 229 dans l'autre qui lui donne cette forme aiguillée. Ce font deux agens que nos gens fyftémariques font agir felon leur manière de railon- ner , mais c'eft toujours fans confulrer la Nature qui a bien d’au- tres voies pour parvenir à fes fins. Si elle éroit obligée d'employer toujours des acides ou le foufre pour configurer es corps, il en réfulteroit qu'il n’y auroit aucun corps dans le règne minéral qui ne contint des acides ou du foufre. Le quartz, l’agathe , le fpach calcaire mème, par exemple , contiendroient des acides ou du foufre; ce feroit de vrais corps falins, car il y en a d’aufli-bien configurés que de vrai fel. Cependant , quand on les examine , on les trouve très-purs à cet égard. Il en eft de mème des deux dernières efpèces de mines dont nous venons de parler. C’eft l’eau vraifemblablement qui eit le feul inftrument que la Nature emploie pout la configura- tion de ces corps; peut-être aufli que c’eft elle qui forme celle des fels; car ne voyons-nous pas qu'un même fel prend , felon les dif férentes circonftances où il fe trouve , des formes totalement diffé rentes de fa configuration ordinaire , felon qu’il eft plus ou moins évaporé ; plus ou moins defféché. Ne feroit-il pas naturel de penfer que l'acide plus rapproché de lui-même, fon effet devroit être aufli plus fenfble ? - \ Pour ce qui eft des mines de fer de marais, dont nous n'avons pas encore parlé, elles ne peuvent pas plus tre confidérées comme minéralifées. Cependant ces mines terrifiées perdent beaucoup plus que toutes celles dont nous avons parlé ci-devant; mais certe perte n'eft due qu’à des parties aqueufes fi fouvent huileufes, qui fe mon- trent dans la diftillation. Cette marière huileufe provient vraifem- blablement du débris des végétaux qui font unis à la terre martiale pour conftituer ces mines. À Au furplus, nous devons faire obferver que toutes les mines de fer brunes, opaques & ocracées , contiennent toutes de la chaux de zinc, qu'il y a un paflage comme infenfible de ces mines à la pierre calaminaire , & réciproquement de la pierre calaminaire à ces mines de fer. On voit tous ces degrés dans le pays de Liege & dans le Duché de Limbourg. Nous nous croyons fondés à croire que c’eft la dofe de zinc, contenue dans les mines, qui leur donne la fa- culté de produire des fers de tant de qualités différentes que nous voyons. Mais certe dofe de chaux de zinc eft plus confidérable qu’on ne feroit porté à le croire. Non-feulement le zinc fe manifefte dans les fourneaux , comme nous l'avons dit ci-devant , & ainf que la obfervé M. Grignon, mais même dans les mafles énormes qu’on nomme loup, & qu'on retire lors du rétabliffement de ces four- naux. C’eft dans ces mafles qu'on trouve quelquefois, c’eft-à- dire, quand elles ont été bien bourfoufflées , une forte de laine philo- 230 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE; fophique , ferme & folide , fous la forme d’amyante , & que M. Grignon a cru être un fer détruit, ou une forte d'amyante de même nature que la naturelle. J'ai fait du cuivre jaune avec cette préten- due amyante comme on en fair avec la cadmie. Quant j'ai traité cette matière, comme M. Margraf le recommande pour la calz- mine, j'ai eu du régule de zinc, Il faut efpérer que M. Grignon examinera mieux qu'il n'a fait jufqu'à préfent, cette matière ; qu'il fe rétractera, & fur-tour qu'il rendra juftice à qui elle eft due. Peut- on voir un paffage plus formel fur l’exiftence du zinc dans les mi- nes de fer, que celui-ci contenu dans le Traité des Eaux minérales de M. Monnet, page 276? On fair, dit cet Auteur, qui! fe trouve fouvent de la mine de zinc dans les mines de fer, de même que L'on fait qu'il fe crouve de la mine de fer dans la mine de zinc. Si M. Grignon n'a pas lu ce paffage avant d’avoir fait fon Mémoire fur l'exiltence du zinc dans les mines de fer de Champagne, il n’elt pas plus excufable pour cela. Car c’eft une obligation impofée à tour homme qui veut donner du neuf, de chercher chez les Auteurs ce qu'il peuvent avoir dit fur le fujer que l’on traite. À DD PR TL ONE Sur une efpèce particulière de Thermomètre ; Par M. PASUMOT, Ingénieur-Géogrophe du Roï , de l’Académie de Dijon, Îc ef intéreffant de tout obferver en Phyfique , parce que l'obfer- vation d’un fait peut conduire à quelque découverte importante , & afouter à la fcience quelque degré de perfection. Une de ces bou- teilles de verre blanc, dans lefquelles on enferme des figures d'émail fufpendues à des bulles de verre, & dont les unes defcendent & les autres montent lorfqu’on renverfe la bouteille, m'a procuré quelques obfervations thermométriques que j'ai faites dans le courant des mois de Janvier & Février derniers : la bouteille dont il eft ici queftion , eft un bocal de 29 lignes de diamètre, de 8 pouces 4 lignes de hauteur, & fcellé hermériquement par le haut: de dix figures enfermées dans ce bocal ; il y ena une qui eft tantôt en haut, tantôt en bas, & tantôt ftagnante : elle eft faire de deux bulles de verre açcrochées l’une à l’autre ; la fupérieure , qui eft affez perite , ne contien£ SURNIHISTANATURETLLE ET LES ARTS, , 234 contient que de l'air, & l’inférieure qui eft prefque double en dia- mètre , renferme une matière blanchâtre qui lui fert de left. J'ai d'abord obfervé que le matin ces bulles étoient au haut du bocal , qu’elles defcendoient enfuite pendant le jour aflez impercep- tiblement , & qu’elles occupoient le fond le foir & pendant une par- tie de la nuit. Après m'être affuré que ces effets éroient conftans , il ne m'a pas été likicile de reconnoître qu'ils étoient produits par la variation de la chaleur : pour m'en affurer davantage , j'ai marqué le niveau de l'eau au fommet du bocal; mais foit que les bulles ayent occupé le haut ou Le bas, je n’ai pu m'appercevoir d’aucun changement dans ce niveau : j'ai expofé le bocal à l'air froid, enfuite à celui de l’ap- partement clos, & à la chaleur du foyer; par ces alternatives, j'ai fait monter & defcendre les bulles à mon gré ; mais je n'ai tou- jours trouvé aucune différence de niveau dans la furface de l’eau, quoique le bocal foit terminé par un col qui n’a pas plus de 8 lignes de diamètre. Perfuadé cependant que !a dilatation ou la condenfation opéroit l'afcenfon , la defcente ou la ftagnation des bulles, j’ai voulu con- noître le terme qui conftituoit leur jufte point de pefanteur fpéci- fique égale à celle de l’eau, & quel degré en plus ou en moins les faifoit monter ou defcendre : j'ai appliqué contre le bocal un ther- momètre à l’efprit-de-vin & de la graduation de M. de Réaumur: après avoirobfervé pendant environ quinze jours, j'ai trouvé que le terme de 9 degrés de dilatarion, eft celui de la ftagnation des bulles fans monter ni defcendre , & de leur fufpenfion foit vers le haut , foit vers le bas , ou dans le milieu ; qu'à 9 degrés un quart elles def. cendent tout-à fait au bas, & huit degrés trois quarts, & même un peu plus , eft le terme du commencement de l’afcenfion ; ainfi un quart de degré de plus ou de moins dans la dilatation ou la con- denfation de la liqueur, produit, augmente ou détruit la fufpen- fion des bulles ; j'avouerai cependant que j'ai trouvé quelquefois d'au- tres termes indiqués par le thermomètre : il n'y a pas lieu d’en être étonné ; il auroit fallu qu'il eût été plongé dans l’eau qui, en plu- fieurs circonftances , a acquis, plutôt ou plus tard , une température que linftrument appliqué contre la paroi extérieure du bocal, n’a pu toujours indiquer exactement. Ces obfervations peuvent être répétées : elles fe trouvent confr- mées par l'expérience commune d’un bouchon de liège lefté jufqu’à L] ce qu'il defcende au fond d’un vafe rempli d’eau , & qu’on faic : monter enfuite à la furface fous le récipient de la machine pneu- matique par la dilatation de l'air intérieur : ces faits peuvent four- Tome VT, Part. II. 1775. Hh 152 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, nir l'idée d’un thermomètre qui feroit fort curieux , fi on leftoit pat gradation , des figures fufpendues à des bulles de verre : la variation de condenfarion ou de dilatation du liquide dans lequel ces figures pourroient nager, les feroir monter ou defcendre les unes après les autres , ou bien les unes monteroient lorfque les autres def- cendroient. Mais l’obfervation fur l’état conftant du niveau de l’eau dans le col du bocal , eft une preuve de l’imperfection de nos chermomè- tres : qu'ils foient faits avec de l’e prit-de-vin ou du mercure , ils ne peuvent nous faire appercevoir les vrais termes de condenfation ox de dilatation : toute la mafle eft en mouvement en plus ou en moins , fans que la hauteur de la colonne varie : le verre éprouve, aufli-bien que les fubftances liquides , une condenfation ou une di- latation de fes parties, & ce n’eft que quand tous les efforts prin- cipaux font faits, que la colonne de liqueur commence alors à nous indiquer , non le changement qui s'opère , mais celui qui s'eft opéré, & qui continue. Quelques corpufcules qui , au moindre effet de va- xiation, furnageroient ou defcendroient à fond , nous donneroient un terme précis qui a échappé jufqu'ici, & ce feroit déja quelque chofe de moins défectueux dans le thermomètre. L’étar de ftagnation des bulles, lorfque la liqueur a acquis 9 degrés de dilatation, prouve qu'il arrive fouvent que, felon la variation de température , des corps qui auparavanr étoient plus légers ou plus pefans que l’eau , deviennent alors de pefanteur fpécifiquement égale, & réciproquement, qu’étant de poids égal à un pareil volume d’eau , ils peuvent enfuite furnager ou s’enfoncer : ce qui arrive dans l'eau peut avoir liéu dans l’air. Ainfi on peut fouvent fe tromper en attribuant à ces corps la caufe de ces effets qui leur eft alors prefque étrangère, & qui dépend davantage de l’état du liquide dans lequel ils fe trouvent, SUR L’HIST. NATURELLE ET LES ARTS. :;; 2 UP EN GET L'ENPE CRAOS PRES De quelques nouvelles Expériences fur Electricité ; Par M. G. HENLEY, Membre de la Societe Royale de Londres. SECTION PREMIÈRE. Recherches pour s’aflurer [£ La vapeur peut conduire la matière életfrique. P? PEUT p. E XPÉRIENCE I. J'ai ifolé un entonnoir de verre, (pl.I,fig. 1), dans lequel les courans, qui fortoient d’un tube capillaire , étoient dirigés par l'électricité. Les gouttes, paflant par la tubulure de l’en- tonnoir , tomboient dans un large plat de terre ifolé. 11 y avoit un long fil de fer , pofé en travers far ce plat, & muni de deux légè- res boules de liege fufpendues au bout. Dès qu'on eut donné une centaine de touts à la machine, & qu'il eut tombé environ foi- xante gouttes dans le plat, les boules fe féparèrent , en divergeant tout-à-coup de demi-pouce. Alors déséleétrifant toutes les pièces de l'appareil, j'ai évacué l’eau du cube capillaire par le moyen du fouffle. J'ai replacé ce tube dans un fceau, & l’ai pofté vis-à-vis l’entonnoir comme ci-deflus. On a enfuite fait agir de nouveau la machine, pour voir fi l'électricité, paffant par le fyphon & à travers l’air , ne fe communiqueroit pas fucceflivement aux différentes pièces, au point de féparer les boules , fans que l’eau formât le jer ; mais cela n’a pas eu lieu : ces expériences ont été répétées, & chacune a fourni refpec- tivement le mème réfultar. On déséleétrifa foigneufement l'appareil entre chaque opération. Je me fuis donc bien convaincu que le jet d’eau , reçu dans l’entonnoir , & tombant de là dans le plar ifolé, éroit un moyen par lequel les boules devenoient éleétriques. Une conféquence que j'en ai d’abord déduite , c’eft que la vapeur de l'eau bouillante pourroit également conduire l’éleétricité , quoique proba- blement moins à caufe de fon extrème diffipation. Ayant répété cette expérience , en recevant immédiatement le jet électrilé dans une large terrine ifolée, l'effet m'en a paru encore beaucoup plus grand. Exrérrence Il. J'ai placé fur une petite lampe (fs. 2), & deflus mon principal condu&teur, un vafe d’étain, femblable à une efpèce d’éoli- H h 2 234 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, pile ou de retorte, & moitié plein d’eau bouillante. Son bec étoit difpofé de manière que les gouttes qui en fortoient, romboient dans un plat ifolé , muni des mêmes boules que dans mes premières expériences. Lorfque j'y eus verfé de l’eau pendant quelque tems, préfumant qu'il s'en étoir affez évaporé pour former des gouttes dans le col, j'examinai par l’orifice s’il n’en defcendoit pas quelqu'une, mais il ne s'y en trouva point. Cependant , ayant donné une couple de tours à la machine, je fus fort étonné d’en voir fortir des cou- rans électriques, comme du tube capillaire. Après qu'il eut tombé quelques gouttes dans le plat, les boules devinrent éleétriques , & mon doigt les attiroit à trois quarts de pouce de diftance. Elles fe féparèrent d’un demi-pouce quand le globe eur fair quelques tours de plus. J'ai vuidé l’eau & difipé toute la vapeur du vafe. Je l'ai mis, dans cer état, deflus fon fupport, en l’ajuftant vis-à-vis du plat comme ci-deflus. C’étoit pour voir fi le bord du vaiffeau n'é- leriferoit pas l'air au point de faire écarter les boules , comme la vapeur aqueufe venoit de l’effeétuer. Ma machine a été long-rems tournée dans cette intention, fans que ces boules aient du tout di- vergé ; pour lors j'ai verfe une feconde fois de l’eau bouillante dans mon vailleau, & d’abord après l’apparition des premières gouttes, quatre tours ont fufli pour opérer la féparation des boules. Le di- xième les a fair diverger d’un demi-pouce. Elles ont même confervé cet état de répulfion long - tems après que la machine avoit celte d'agir. J'ai désélectrifé mon appareil avec le doigt, & ai vuidé toute Veau du vafe, &c.; puis l'ayant fitué comme c1- devant , j'ai fait aller la machine felon l’ufage. L'air s’eft enfin électrifé jufqu'à un certain point ; car en fept ou huit tours , les boules commencèrent à fe féparer, & au cinquantième on les voyoit diftantes entr’elles de ? pouces. Alors je difcontinuai l’action de la machine ; mais elle ne fur pas plurôt arrêtée, que les boules tendirent à fe rapprocher, & au bout de quelques fecondes leur contact fe trouva intime. Au contraire , dans ma première expérience ( celle où il y avoit dans le plat des gouttes électrifées ) , quoique j’euffe celfé de tourner le globe, ces boules n'offrirent aucun figne de convergence. Je préfume même qu’elles feroient refté long-tems écartées , ñ je ne les euffe désélec- trifées avec mon doigt. Or, je conjecture d’après cela, que /4 va- peur de l'eau chaude ef? un conduëteur de léleëlricité. Exrériences 11. J'ai fufpendu deux boules de moëlle de fureau à un cordon très-court , & atraché au lambris de ma chambre le plus près qu'il avoir été pofible. Après que la machine eut travaillé un tems confidérable , ces boules divergèrent de trois quarts de pouce, mais jamais davantage. Alors je dirigeai dans mon conducteur la fu- mée d'une allumette de fapin, & faifanr agir de nouveau la ma- SURMEURIS ON ATURELLE, ET.LES\ ARTS. 235 chine , elles fe féparèrent tout de fuite à deux pouces de diftance. L'allumerte, quoique tenue dans la mème fituation , n'eut point le même effer quand elle ne fuma pas. Exr£RIENCE IV. Ayant placé un petit pot de terre de de- mi-pinte deflus un fuppor: convenablement ifolé (fig. 3), j'ai fixé le bout d’un fil de métal, long de fix ou huit pieds, à une groffe boule de cuivre qui étroit au fond de ce pot. L'autre extrémité du fil a été atrachée au principal conducteur d’une petite machine élec- trique. Il y avoit au-deffus du pot deux petites boules de liege fuf- pendues au lambris de la chambre le plus près qu'il fut poflible. Pour lors, verfant de l’eau bouillante dans mon vaifleau , j'ai com- mencé à tourner la machine; & dans cinquante ou foïxante tours , les boules fe font diftinétement écartées de demi-pouce. J'ai dés- éleétrifé mon appareil, vuidé le vafe, & diflipé toure la vapeur qu’il renfermoit ; puis ayant difpofé les chofes comme ci-deflus, j'ai fait encore agir la machine plus long tems , mais fans aucun effet. J'ai remis de l’eau bouillante, & l'opération à réufli aufli-bien qu’à la première fois. Je fuis pourtant parvenu, dans certains momens , à faire diverger les boules par le feul intermède de l'air, mais cela a été peu fenfible ; & lorfque je verfois de l’eau chaude, la vapeur augmentoit tout-à-coup leur écartement d’un demi-pouce , plus où moins , felon l’état humide ou fec de l’athmofphère. Enfin, j'ai ré- pété fi fouvent ces expériences avec tant de fuccès , que je ne puis douter que Za vapeur ne foit un conduéteur de léleétricite. Expérience V. J'ai ifolé le frotroir de ma machine , & fuf pendu deux boules de M. Canton au - deflus du principal conduc- teur (fig. 4), J'ai fait jouer la machine, & ayant tiré une ou deux étincelles pour ôter l'électricité inhérente naturellement au frottoir, &c., les deux boules ont fi fort divergé , que les cordons en étoient tendus. J’approchai vers le dos du frottoir une bougie de cire verte récemment éteinte & fumant beaucoup, fans que la divergence des boules devint plus confidérable (1). Je recirai enfuite les boules & ajuftai mon éleétromètre à fon fupport placé deflus le principal conduéteur. Ayant tiré une érincelle ou deux comme ci-devant, je refis agir la machine, a£n de voir combien l'aiguille feroit repouffée de la tige, Ses vibrations fe bornèrent entre le cinquième & le di- xième degré d’un Cadran qui étoit divifé en cinquante parties. Alors (1) La fumée fut tour de fuite attirée par le frotoir. Obfervez qu'il feroie bon pour cette expérience que le dos du frottoir ifolé für parfaitement uni, Le mien eft de bois, garni d'un cuir qui lui eft collé, & qui en couvre route l2 furface, 136 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, je portai une bougie fumante à quatre ou cinq pouces du dos de mon frottoir comme ci-deffus ; fitôt que la fumée en fut attirée , l'aiguille commença à s'élever; de forte qu’en peu de tems elle fe mit à angles droits. L'expérience , traitée à diverfes fois, nous a conftimment offert le mème fuccès. Je l’ai répétée en avançant mon doigt à une égale diftance du frottoir, fon bout rourné contre lui. Mais après bien des tentatives , il n’en eft réfulté aucun effet. La bougie ne fervoit également à rien fi elle ne fumoit pas. Ainfi je fuis convaincu que /a fumée communiquoit l'électricité de ma main au frottoir ifolé. ExP£riENcEe VI. Jai ajufté à un fupport (fig. $), deffus mon principal conduéteur , un morceau de bougie fumante. Dès que la machine commenca à jouer, la fumée, qui formoit d’abord un am- ple volume , fe contraéta & monta avec beaucoup plus de célérité, Je déséleétrifai le conducteur & fufpendis deux boules de liege d’un quart de pouce de diamètre, à deux fils longs de quatre pouces , qui pendoient perpendiculairement fur la fumée. Je les avois attachés au plus haut que j'avois pu, de forte que les boules éroient élevées environ de cinq pieds & demi fur le principal conducteur. Après que la machine eut joué quelques fecondes , les boules s’écarrèrent à un demi-pouce l’une de l’autre. J'éloignai la bougie, & les bou- les reprirent leur premier état; mais en la rapportant à fa place, elles fe féparèrent comme ci-devant. Cette expérience a été plufeurs fois réitérée tant avec la bougie que fans elle, & les réfultats ont toujours paru conformes au cas. Je mis un vafe d’étain deflus le fupport , en plaçant deffus ce vafe un pot contenant demi- pinte d’eau bouillante (fig. 6). Les boules qui venoient de fervir pour cetre expérience avec la fumée , furent également expofées à la va- peur de l’eau. Dès que la machine eut parcouru quelques révolutions, les boules divergèrent d’-= de pouce. Lorfqu’on vint à ôter l’eau, les boulés ne fe féparèrent pas du tout, quoique je fiffe jouer encore plus long-tems Îa machine ; mais l’ayanc remife en fa place , elles divergèrent en quelques fecondes comme à la première fois. Ces expériences, traitées à plufieurs reprifes, ont conftamment offert le même fuccès. Ainf la fumée, dans le premier cas , la vapeur de l’eau chaude, dans ce dernier , communiquoient certainement aux boules l'élettricité du principal conduéteur. Je crois donc pouvoir prononcer avec confiance , que /a fumée & la vapeur de l'eau chaude Jont abfolument des conduüleurs de La matière éleétrique | quoique la va- peur pofsède cetre propriété à un moindre deoré que la fumée, & qu’elle foit très-foible dans les deux. Ÿ Obfervons ici que la curieufe expérience du docteur Franklin , qui çonhfte à rendre l’athmofphère vifible fous un volume circonferipr , SUR L’HIST. NATURELLE ET LES ARTS. 137 & comme un corps ifolé qu’on électrife , ne peut avoir lieu que dans un air très-fec; la raifon en eft évidente; jy aï fouvent réuffi dans une telle température , en préfence de plufieurs de mes amis, & en particulier devant MM. Marfham & Nairne. , . . : é. Pour y procéder, je place la boule ou le poids (1) d’une Romaine de deux pouces & demi de diamètre, deffus un fupport de cire à cacheter bien propre & fort fec ; puis ayant en ma difpofition une bougie de cire verte allumée , je tire avec le corps ifolé, une étin- celle du pommeau d’une bouteille , chargée pofitivement ou néga- tivement, car l'apparition eft la même dans les deux cas; je tiens la chandelle & la porte aufli-tôt très-doucement vis-à-vis la boule ifo- lée; celle-ci attire fur-le-champ la fumée avec une tas de violence, de façon qu’elle s’en trouve toute couverte ; cette fumée refte quel- ques fecondes dans cet état , après quoi elle recommence à difpa- roître en-bas, & s’avance fucceflivement jufqu’en-haut , où elle pa- roit tremblante comme la flamme d’une lampe , enfuite elle s'élève en formant une colonne longue & menue, qui fe raréfie & fe dif- perfe à fon fommer , jufqu’à occuper un grand efpace : remarquez qu'en tirant l’érincelle , & portant la bougie vis-à-vis le poids , il faut être très-attentif à agiter l’air le moins qu’il eft poflible. La bougie de cire verte, à raifon du verd-de-oris qu’elle contient, L2 eft fort- propre à cette expérience & autres femblables , où il faut de la fumée fans chaleur. SECTION ‘SECONDE Sur La direction de la matière éleélrique dans la décharge de la bouteille de Leyde, Expérience J. Mettez une perite bougie allumée exaétement au milieu de deux boules de cuivre À & B écartées d'environ deux pouces l'une de l’autre (fig. 8 ), puis ayanr fait recevoir à une petite bouteille 2 ou 3 tours du globe , en la chargeant poftivement ; enchaînez- en la couverture avec un fil de métal de la boule A ; alors fi vous ap- pliquez le pommeau du bocal au fil de la boule B , vous verrez très- fenfiblement la famme fe porter fur la boule À , au point de l’en- fumer & de la rendre toute noire ; mais les chofes reftant d’ailleurs les mêmes, ne faires d’autre changement au procédé, que de char- get négativement le bocal ; vous appercevrez auf - tôt la flamme prendre une direétion contraire, fe portant tour-à-fait du côté de B, (1) Ce poids cft de cuivre. 2338 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, ainfi que cela doit être d’après la théorie du doéteur Franklin fur la bouteille de Leyde : remarquez que dans cette expérience il eft nc- ceflaire de charger le moins aue faire fe peut; à peine faut-il pren- dre une révolution entière du globe ; au refte, l'expérience détermi- nera d’abord cela; car fi la charge fe trouve trop grande , la flamme fera également altérée & repouflée dans la décharge du bocal ; or dans ce cas, il n’eft pas poflible de tirer la moindre conféquence de l'opération. Expérience II. Ifolez une large jarte chargée pofitivement ; prenez enfuire un long fil de métal pointu aux deux bouts & recourbé ; vous le tiendrez par un manche de verre , de manière qu’une extré- mité fe trouve à demi-pouce du pommeau de la jarre , & l’autre bout à la même diftance de fa couverture, il paroîtra aufli-tôt une petite étincelle deffus la pointe qui regarde le pommeau , avec une fine aigrette à la pointe inférieure , qui s'étendra deflus la couver- ture de la jarre , & la déchargera tout-de-fuite paifiblement. Chargez au contraire la jarre négativement , ifolez-la , & rangez d’ailleurs les chofes comme on vient de le voir, les apparitions fe feront au point du fil dans uu ordre directement renverfé, ce qui dé- montre bien la direction de la matière électrique dans la décharge de la bouteille de Leyde. Une autre méthode très-fimple , & fort propre à développer les phénomènes de l’éleétricité polirive & négarive, tant au-dedans qu'au- dehors de la bouteille de Leyde , eft de paffer un chapiteau de mé- tal, muni d’une boule & d’un fil de la même matière, deflus la couverture extérieure (fig. 5); enfuite on monte horifonralement la bouteille deffus un fupport éleétrique ; ou bien fi le fond du verre rentre beaucoup dans fa cavité, on peut y ajufter un morceau de bois qui en aura la forme : on traverfera le milieu de ce bois avec un court tube de métal , dans lequel paffera le mème fil attaché à fa boule , & ce fil pourra toucher À volonté , la couverture de la jarre (1)3 par ce moyen, les expériences peuvent aifément fe faire à l’une ou à l’autre extrémité de la bouteille; on peut y appliquer, fans crainte, d’autres bouteilles chargées ou non chargées, des ru- bans électrifés, ou d’autres corps électriques , le fil de métal courbe & pointu , &c. &c. tous ces corps fourniront ou recevront l'érin- celle , feront attirés ou repouflés , felon l'efpèce d'électricité qui fe trouvera dans les deux pièces appliquées ainfi l’une contre l’autre : fi lon entoure une chaîne à l’un des fils , en l’attachant à un bout EEE ne (1) Dans plufeurs expériences il n'eft befoin que de l'attacher au métal re- çourbé ou au bois, fur lequel la boutcille chargée cft placée, d e SUR L'HIST. NATURELLE ET LES ARTS: 339 de la verge qui fert à décharger, & plaçant l’autre extrémité de certe verge de manière à laifler un efpaée convenable deflus le fil, entre elle & la boule , il n’y aura qu’à interpofer la flamme d’une bougie, &ç.& l'on verra la direction de l’éleétricité dans la décharge : on pourroit encore fubftituer à la bougie une boule de liège fufpendue Par dela foie, commie le doéteur Frazklin le recommande : {l’on fu p- prime, les boules des fils de-la-boureille, enjappointant:cés derniers; & plaçant l’un devant le globe , où devant le principal conduéteur éleétrifés poñtivement , les phénomènes qui fe préfenteront en char- geant la bouteille, paroîtront différens à l'extrémité des Gils (fig. 4), fi la bouteille eft mife ainfi devant, le conducteur éleétrifé négarive- ment, ou devant le frotroir! 1folé , les apparitions, qui furviendront aux bouts des fils , feront rénverfées ; cela eft une fuite.des principes du docteur Franklin , & développe;de plus en-plus fa théorie fur la bouteille de Leyde. Je ne crois pourtant pas qu'on ait donné de plus fimple, ni de plus belle analyfe de certe bouteille, que la fuivante : ayez une bou- teille de la contenance de pinte ; ayant un long gouleau d'environ un.pouce de diamètre, muni au bout d’une petite plaque , avec une foupape qui s’ajufte bien après que la bouteille a été pompée : de certe plaque doit pendre un fil de métal d'environ £ de :pouce de dia- mètre ; qui defcendra un peu au-bas du gouleau , & fe terminera par une extrémité moufle : il faur recouvrir le haut du gouleau d’un chapiteau de métal circulaire & bien afujetti , après quoi on fera le vuide ; en outre , le fond de la bouteille fera garni d’une feuille d'é- tain, qui en recouvrira tour le contour à la hauteur de trois poucés; cette bouteille fe chargera & fe déchargera plufeurs fois en une minute, & la garniture d’étain empèchera le choc de porter atteinte à la main de l'opérateur ( 1). Les phénomènes qui fe préfentenc au moment qu'on charge la bouteille de Leyde, {ont admirablement développés par cet artifice ; on les voir à l'extrémité du fl, où les apparitions varient , felon, que la boutejlle eft chargée pofitivement ou négativement ,: ou bien fuivant qu'on éleétrife le conducteur qui doit là charger. (Voyez pl. 2. fig. 5. la lettre À défigne certe bouteille chargée négativemenr par le moyen du conducteur qui l'eft pofitivement : la lettre B montre encore certe bouteille chargée po- fitivement au même conducteur). Dans la planche 2. fig. 6, la lettre C offre la bouteille chargée pofñtivement au conduéteur,, qui, eft éleérifé d’une manière néga- tive , ou au frocroir ifolé. D répréfente cette bouteille chargée néga- tivement au même conducteur, (x) Pour cela il doit fair Ja bouteille au bas du bord de la garniture. Tome VI ,.Part. II, 1775. Ji 149 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE; SELCUR L'O:N 4: TR O PSI Ê MIE Sur l’explofion latérale dans la décharge de la bouteille de Leyde. Expérience I. J'ai fait un double circuit à l’entour d’une jarre, que je déchargeai , & qui avoit cent pieds quarrés de furface : le premier de ces circuits étoit fait avec un gros fil de fer, d'un pouce & demi de diamètre, fur demi-pouce d’épaiffeur ; une petite chaîne longue de quatre pieds & demi, formoit les fecondes circonvolu- tions : l'électricité traverfa les deux circuits, & il parut des étin- celles en divers points de la petite chaîne. Faïfant la décharge de trois jarres, qui contenoient enfemble feize pieds quarrés de furface garnie ; j'ai vu dans toutes de brillantes érincelles, qui traverfoient à la fois trois différentes chaînes ; Je ne doute même pas du tout qu'on ne les eût remarquées dans un plus grand nombre ; les chaînes étoient de fer & de cuivre, & d’une longueur très-différente ; la plus courte avoit dix ou douze pouces de long , tandis que la plus longue alloït jufqu’à quatre pieds : lorfque je déchargeai ces jarres à travers le gros fil de fer, dont il a été parlé, & une petire chaîne longue de trois quarts de verge, celle - ci devenoit route lumineufe & entièrement recouverte de beaux rayons femblables à des foies de cochon, ou à des cheveux de couleur d’or : ayant mis une ample jarre en contact avec mon principal conduéteur , j'ai fixé à fa couver- ture une chaîne de fer, qui a été aufli attachée à une plaque de mé- tal, fur laquelle je me fuis mis en train de faire la décharge, (fig. 9, pl. 1), avec la petite verge deftinée à cet effet; enfuite j'ai accroché à la face oppofée de la jarre , une autre chaîne de cuivre plus longue, & dont le bout éroir à huit pouces & demi de la plaque de métal ; j'ai fait toucher à ce bout un petit bâton de chène long de huit pouces, que j'ai recouvert de fciure de bois de fapin , après quoi, faifant la décharge deffus la plaque , les deux chaînes ont paru lumineufes dans dans toute leur longueur , aufli-bien que la fciure., qui étroit couverte d’un trait de lumière fort agréable à voir ; l'expérience à été traitée à plufieurs reprifes ; peut-être que fi je me fufle fervi d’un fil de fer au-lieu de la chaîne dont j'ai d'abord parlé , il n’y auroit pas eu de lumière deflus la feconde chaîne, ou fur la fciure de bois, d’autanr que l'électricité devoir traverfer demi-pouce d'air avant d'atteindre le bout du bâton; néanmoins je crois qu’on peut affez connoître , d’après cette expérience, combien il eft néceflaire ue les conducteurs dreffés pour mettre les maifons à l'abri de la pu , &ec. foient faits de la meilleure matière, & en fuffifante quan- tité ; peut-être n'y a-t'il rien qui foic plus en état de répondre à SUR L’HIST. NATURELLE ET LES ARTS. 241 cet object, que le plomb, qui refte impunément dans la terre fans fubir d’altération confidérable ; le haut des cheminées en devroit être couvert (1), ayant foin de le munir d’une longue verge de cuivre fort pointue , ou même de fer avec du cuivre; il feroit bon que cette verge s’élevât au-moins de cinq ou fix pieds au-deflus du fom- met de la cheminée , ou de la partie la plus haute de l'édifice ; on la feroit communiquer par des plaques de plomb larges dé huit ou dix pouces, avec les dales, les goutrières & les canaux deftinés à conduire la pluie en-bas ; ces canaux devroient enfuite defcendre &c fe dégorger dans quelque puits , dans une mare, de la terre hu- mide , dans une citerne, &c. ou bien aboutir à quelqu'un de ces différens endroits , par le moyen d’une plaque de même métal. SECTION QUATRIÈME Déféription & ufage d'un nouveau principal conduëteur , inventé par M. Henley , & exécuté par M. Edouard Naine. PI. 2, fig. 7, À, tube de verre, long de dix-huit pouces, < à avec près de deux pouces en diamètre. BC, boules de cuivre, ayant chaque une petite férule (2) de deux pouces de long. Ces férules doivent s’ajufter au bout du tube, donc il faut vuider l'air. L'une des plaques de cuivre foudées aux férules, eft traverfée d’un petit trou, par lequel ou doit pomper l'air ; elle eft recou- verte d’une forte pie convenablement aflujettie , & cachée par lune des boules de cuivre B ou C. DE boules de cuivre d’environ £ de pouce de diamètre , & fixée à des fils de métal , qui dépaffent les plaques de cuivre de deux pouce & demi à chaque extrémité du tube. F petit fil de métal pointu , fervant à raflembler l'électricité du globe de verre qu'on électrife. G fupport de cire à cacheter , deffus lequel le conduéteur lumi- neux doit fe monter. N.B, Les points marqués fur le tube ; repréfentent la matière élec- (x) Lorfque je confeille de couvrir le haut des cheminées avec du plomb, je ne prétends pas que ce foit là une confidération eflentielle pour l'ufage du con- duéteur, Il eft vrai que ces plaques ferviront à fixer la verge pointue; mais leur rincipal avantage fera de mettre les plus hautes rangées des tuilles à l'abri de a violence des vents, (2) Ou virole. à JEUNES 242 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, ttique telle qu’elle paroît dans les expériences décrires pl: 2; -caf lorfqu'on décharge une bouteille où une large jarre à travers le conducteur de verre , le tube fe remplit entièrement de lumière. Ufage du Conduileur de verre. Le tube de verre, pourvu & monté de cette façon, bien privé d'air & parfaitement fec, peut opérer, à tous égards, comme un de métal ; un életromètre , placé defflus la boule:B , fervira à charger la jarre ou la batterie avec route la précifion poñlible. Mais le prin- cipal ufage de cer inftrument, eft de déterminer la direétlion de, la ma- tière électrique qui Le traverfe. | remplira complettement cet objer, fi l'on procède de la manière qui fuir. \ Préfentez le conducteur avec fa pointe LF devant le globe, & mettez le pommeau d’une bouteille non chargée dans un intime contact avec la boule B, ou bien fufpendez-y une chaîne , Ke. que vous attacherez à une table , puis faifant jouer la machine, la boule D deviendra tout-à-fait enveloppée d’une athmofphère d'électricité blanche & fort denfe : fi le point F touche de très- près le frotroir ifolé , tandis qu'on établira une communication entre la boule B & Ja table, l’athmofphère viendra entraîner la botle oppofée E. Si l’on préfente une bouteille chargée pofirivement , l'apparition fe fera dans Île tube , comme on le voit pl. 2. fig. 9; mais fi cette boureille fe trouve chargée négativement, l’athmofphère environnera la boule ESPN. Hot to Conjeitures fur ces’ Phénomènes. L'on fappofe qu’une force impulfive du globe ou du pommeau de la bouteille chargée politivement , lance avec beaucoup de vé- locité & en ligne droite ; des particules électriques qui paflent à travers la fubftance des boules, du fil d’archal, &c. l’on prétend encore que l’éleétricité étant entrée dans le vuide , ces particules fubiffent auffi:tôt une répulfon, &que le rube fe trouve ainfi tout- à-coup rempli de lumière : pour ce qui eft de l’athmofphère blanche qui-entoure la boule-oppofée*,-on dir qu’elle procéde de la réfif- tance que l’air offre dans le tube, parce qu'il en refte toujours quel que portion , malgré tous les foins qu'on fe donne de l’épuifer ; & comme chaque particule électrique eft fuppofée dans un état de ré- pulfon ‘pat rapport à cees qui l’avoifinent , on a imaginé que le vuide où elles fe rencontrent ,. leur laillé toute la Hbeïté de füuivre cette tendance, de s'éloigner beaucoup les unes des autres, & leur ôte conféquemment celle d'entrer dans la boule & dans le fil d'ar- il SUR L'HIST. NATURELLE ET LES ARTS. 143 chal par un feul point, ou par un petit efpace de l'extrémité op- pofée du conduéteur , comme elles le feroient à l'air libre ; il faut, d’après cette hypothèfe, qu'elles les entourent totalement, & les pénètrent par tous leurs points à la fois, dans l’ordre qu’elles y arrivent. S'il y avoit dans le tube des pointes en place des boules de cui: vre , ou bien fi l’on mettoit une pointe à une extrémité , & une boule à l’autre , le réfultar feroit précifément le même. N. B. Lorfqu’on veut exécuter les curieufes expériences du docteur Franklin avec un fil d’archal pointu & moufle , notre conducteur de verre l'emporte infiniment fur ceux de métal, parce qu’il retient beau- coup mieux l'athmofphère électrique ; par ce procédé aufli fimple que commode , on peut démontrer en tout tems , dans une chambre obfcure , & dans un air fec, la folidité de l’hypothèfe du Phyf- cien fur la bouteille de Leyde. SECTION CINQUIÉÈÉME. ÆExperiences mélées, faices principalement dans les années 1771 & 1772: Exrérience [: Si l’on mer un ruban de foie noire , ou quelque étofte de foie de la mème couleur , deffus une main de papier couchée fur une table, dès qu'on viendra à l’élerifer, en frottant fa furface avec de la cire à cacheter , du foufre, de l’ambre, ou bien avec un tube de verre ufé à l'émeri; fon électricité fera po- fitive , au lieu que fi l’éleétrifarion fe fait en frottant brufquement ce ruban entre les doigts feuls, ou mème avec un ruban blanc, elle fera toujours négative. — Si on le rient deflus le papier , en frottant fa furface avec un cylindre ou un tube de verre poli , fon éleétri- cité fera encore négative. Expérience Il. Electrifez un baflin ou un carreau de verre de dix à douze pouces en diamètre , placez-le deflus une boîte d’où pendront deux légères boules de moëlle où de liège ; la boëte étant elle-mème montée deflus un fapport de cire à cacheter:, aufli-tôr les boules. fe fépareront:, & refteront écartées l’une de l’autre environ deux heures dans un air fec, leur électricité fera pofitive ; dès qu’elles paroïtront fe toucher , 1l n'y aura qu'à éloigner le verre pour les voir diverger de nouveau, & s’éleétrifer négarivement; mais fi-tôr qu’on le rapprochera , elles reprenAront léur conta , & ainfi alrernative- ment, jufqu'a ce qu’elles ayent perdu toute leur -électricité.(1 ). (1) Pour l'explication de ces phénomènes, voyez les lexpériences de'M, Canton dans les Zranf. Lhilofi Vol, LVIIL, Part. 1, n°,153, 244 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, Si l’on place le baflin ou le carreau deffus un chaflis de bois , en mertant fur le verre les petites boules dont nous venons de pailer; il n'y aura qu'à leur préfenter le bout du doigt, la pointe d’une épingle , &c. elles fe fépareront très-brufquement , à-peu-près comme fi elles étoient fufpendues dans l'air, & qu’on leur préfentât un tube électrifé, ou bien le fil d’archal d’une bouteille chargée : les boules étant privées de leur électricité par le moyen de l'épingle, &c. fe portent auffi-tôt du côté du verre vers lequel elles font plus fortement attirées. Expérience III. J'ai attaché à mon principal conduéteur un petit bocal de deux pouces en diamètre, & garni ou couvert dans fon fond , à la hauteur du tiers : j'ai fufpendu deux chaînes à la garniture (pl.2, fig. 1); la première touchoit à un lourd poids fitué deffus une carte, où j'avois tiré des lignes à égale diftance ; la feconde formoit un citcuit avec un canal de plomb , un petit fil de cuivre, une pe- tite chaîne, &c. de 320 pieds de long ; la chaîne qui complétoir ce circuit, venoit s'attacher par fon bout , à une boule de ma verge de décharge , qui pofoit deffus un autre poids, (voy. pl. 2. fig. 1.) j'ai enfuite obfervé qu'en chargeant ma bouteille ou mon bocal, au plus haut comble, l’éleétricité pafloit dans le tems de la décharge , plutôt à cravers le long circuit, que deffus la furface de la carte, où les poids éroient diftans de 2 de pouce l’un de l’autre; mais fi je ne la chargeois qu'à demi , dès que la décharge fe faifoit, la matière électrique fuivoit le long circuit , fans s'étendre deflus la carte, quoi- que les poids n’y fuffent mis qu'à + de diftance réciproque. — Elt-ce- Ki, me demandera-t'on , une grande preuve du peu de réfiftance que le métal oppofe au pañlage de l'électricité , comparaifon faire avec Ja carte, le bois, &c. & peut-on conclure de cette obfervation en faveur des conducteurs métalliques pour la sûreté des maifons, des vaiffeaux , &c? Tout ce que je puis dire , c’eft qu’on à déja fait la même remarque fur les effers de l’éleétricité naturelle : on en a vu dernièrement un exemple bien authentique à l’Eglife de Saint-Jean. Wefimenfler ; le doéteur Warfon en à publié une relation très-exacte, dont jefpere que les Savans feront fort facisfaits : j'ai appris que la tour de cette Eglife ne fe rerminoit pas par une pointe de métal. Expérience IV. Voulant exécuter la curieufe expérience de M. Lane, j'ai difpofé un bocal à fa manière. Il s’agit de pañler un fil d’archal à travers le fond , un autre à travers le bouchon, & de les faire entrer affez avant dans la bouteille, pour que les deux bouts fe correfpondent dans fon milieu à demi- pouce de diftance Jun de l'autre. La bouteille doit ètre pleine d'eau. Ayant pris ainfi mes arrangemens, j'ai reconnu , comme ce Phyfcien l’a re- marqué, qu'il y avoir un petit choc électrique qui raverfoit la li- 'Ré SUR L’HIST. NATURELLE ET LES ARTS. 2145 queur , & venoit frapper le bocal. Alors j'ai introduit dans l’ori- fice de la bouteille, un petit fil d’archal qui fe continuoit jufqu’au fond en traverfant l’eau. Je m'en fuis fervi pour décharger trois larges jarres , contenant en tout feize pieds quarrés de Er gar- nie. Le fil d’archal a fubi une explofon dans toute fa longueur , mais la bouteille n’a éprouvé aucun choc. D'où je conclus que fi un conduéteur métallique venoit à être détruit par la foudre, à caufe qu'il fe feroit trouvé trop menu, l'édifice, &c. pourroit néan- moins échapper au ravage. : ExrériEeNce V. Quand jéleétrife beaucoup un gros principal conducteur, long de trois pieds, fur douze pouces de diamètre, fi quelqu'un tient à la main une verge de cuivre terminée par une boule de deux pouces en diamètre, en l’avançant à deux pouces de la parois du conduéteur ( fg. 2, pl. 2), il tire inceffamment de fi fortes éuincelles , qu'il éprouve une très-fenfible commorion dans les deux jambes. Mais fi une autre perfonne préfente en mème-rems devant le conducteur la pointe d’une lancette, ou un poinçon, long de cinq à fix pouces , fort pointu & bien acéré, quoiqu’elle s’en tienne écar- tée de deux pieds, & même davantage, elle fe charge paifiblement de toute fon électricité , fans en laifler paller une feule étincelle à Ja boule de cuivre. Il eft encore remarquable qu’en faifant toucher la pointe du poinçon ou de la lancette immédiatement au principal conduéteur , la perfonne qui opère n’éprouve aucune fenfation dans le bras, &c., ce qui démontre combien on doit préférer les pointes aux boules, ou aux extrémités tronquées, dans les rerminaifons des conducteurs dreffés pour préferver les maifons, &t., des dé- faftres de la foudre. Je préfume que la pointe aiguë du conducteur doit agir fur l’athmofphère électrique du nüage ; peut-être même en diminuer peu-à-peu & paifblement celle qui s’y rencontre , avant que la nuë ne fe foit afez approchée pour faire fon explofon. Par- là elle contribue au moins à en affoiblir le coup (1); mais quand même la pointe viendroit à ètre frappée ; la conféquence que je fuppofe , ne feroit pas fort grande : j'en ai actuellement un exem- ple très-frappant , qu'on me permettra fans doute de citer. » Nous » éprouvâmes , fur les neuf heures, une horrible tempête , accom- » pagnée d'éclairs & de pluie, pendant laquelle un navire Hollan- » dois, dit l'/Zrdien oriental, eut fon grand mât brifé & emporté de 2" 0 (1) Le Conduéteur du Capitaine Wäun ne laiffa pas de fatisfaire à cet objer ; quoiqu'il y eût deux chaînons rompus, 246 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUES ESS | »deffus le tillac (1). Le grand perroquet & le ‘grand hunies » furent mis en pièces. Il y avoit une efpèce de dard-ou de fufeau © » de fer au fommet du grand perroquet qui dirigea probablement » le coup. Ce vaifleau n'étoit éloigné des nôtres que de la portée n de deux cables, :& 1l y a:toute apparence que nous)autions fubi » le mème forc, fans une chaine téléétrique que nous avions atta= ; » che au haut de‘nos vaifleaux, & qui conduifit la foudre fur les Dh » cotés. Mais, quoique nous, ayons échappé au ravage de la foudre; nous éprouvâmes une explofion femblable à: un tremblement de » terre, & la chaîne parut en même-tems comme üne traînée, de » feu (2): Le fentinelle, occupé à la charger , éprouva une fe- £ » coufle qui lui fit gomber fon moufquet d’entre les mains, & brifa » même la baguette. Je ne peux donc trop recomimander de pas » reilles chaînes pour chaque vaiffeau, quelle que foit fa deftina- » tion 3 j'efpère que le malheureux deftin du ‘Hollandois fervira à. L » ceux qui liront cette relation, d’avertifflement contre ces pointes * : » de fer, qu'on fixe au bout du mâc «. Voyez le Voyage du Capis saine Cook. —Ce conducteur étroit de cuivre, & avoir -; de pouce en diamètre. Or il me paroït trop mince pour cet objet. , Je crois qu'il devroit avoir au moins un quart de pouce d'épaiffeur 3 & j'ai appris du Docteur Solander que la pointe qui appartenoïit origi- : nairement au conducteur , avoir été volée ; que celle deffus laquelle la foudre tomba , éroir d’un travail inférieur & moins aigue , ce qui étoit un autre grand défavantage ; peur-être” que fi le fl ou la chaîne euffent eu plus de groffeur, & que la pointe fe für trouvée 5 plus aiguë , le coup en auroit té plus foible , fuppofé qu’il n’eût pas été abfolument prévenu Si au lieu de ces chaînes on inféroit des plaques de cuivre , épailles de = de pouce, fur deux pouces de | el er Lan . . 16 . diamètre & bien arrondies à leurs bords dans une raïînure pratiquée tout le long du grand hunier ,. du grand perroquet, & dans une patie du grand mât; il feroit facile d'établir une communication entre le mar & le bas-coté de l’un des tillacs, par le moyen d’une plaque ou d’une verge de métal applatie à chaque extrémité; après quoi on continueroit le conduéteur depuis certe verge jufqu'au bas ‘de la quille, fi on le jugeoit néceffaire. En tenant ainfi un con- ducteur roujours prèt & bien en ordre, il eft à préfumer qu'on y: Pere (x) Les érayes, les aubans, &c. furent également mis en pièces, comme je l'ai appris du Docteur So/ander. (2) IL ne paroît pourtant pas que les petites cordes de chanvre , qui uniffoient es chaînons ies uns aux autres, aient été endommagées de la foudre. à 2 trouveroit LA sifhn: INRA TRS IE r LE en SUR L'HIST. NATURELLE ET LES ARTS. 247 tfouveroit de grands avantages fur les chaînes dont on ufe à pré- * fentwll faudroit bien prendre garde que les pièces du conducteur fe rouchaffent toutes d’aufli-près qu'il feroit poflible, & de fixer ” À fon fommet une petite verge de cuivre très-pointue. Deux cer- ceaux de même métal placés , l’un au bout du, grand mât , l’autre ; an haut du grand perroquet, tiendroient les différentes plaques À parfaitement aflujerties (1). Le favant Docteur Warfon à recueilli "% ans l'Hiftoire Ancienne, quelques paflages où il eft fait mention des apparitions électriques delfus les corps qui fe terminent en pointe, . tels que les lances des foldars, &c. &c. (2) M. Prieftley les a en fuice introduit fort judicieufement dans fon Hifloire de l'Eletricité(3). Ces palfages nous fourniffent un fort argument en faveur des con- J duéleurs pointus : car fi les corps, dont on y paie, euffent eu leurs ( Ç bours tronqués , ou terminés en boule , ils auroient été certaine 2°" frappés de la foudre, plutôt que d'en attirer tranquillement :® li mauère-: or ces cas, rentrant dans le commun des autres, ils w'euflent point paru dignes d'occuper l'attention de la poltériré. Si c'étoit le propre des corps pointus, d'attirer fur eux les coups de foudre ; je crois que la colonne, fituée dans la vue du poiflon, & qu'on appelle Z monument, n’auroit pas échappé long-rems à fa * violence. Sa bafe a quatre pieds fix pouces de diamètre ; elle eft faire de métal, & de plus, entourée de plufeurs bandes ou cerceaux de la même matière très - pointus, pour repréfenrer des flammes. Jl y a quatre otofles. barres de fer, plantées perpendiculaire ment & en rond , qui vont depuis la bafe jufqu'au plancher de la gallerie ; elles font entourées de vings-huit cerceaux très-forts, & de quatre fegmens de cercles du mème méral qui fervent comme d'échelle pour monter de la bafe à la gallerie ; une de ces barres ayant un pouce d'épaiffeur, fur cinq de large, fe joint à une rampe de fer, qui va de la gallerie au bas de la colonne, & forme dans route fa longueur un conduéteur dé métal aufli folide que régulier, Chriflophe Wren éleva ce monument en mémoire de l'incendie de Lon- dres, qui arriva en 1666 , & il fut achevé par cet habile Architecte, dans l’année 1677. L’'Urne, qui en forme le fommer, eft élevée de deux cens deux pieds au-deflus du pavé : cependant, malgré cette difpofition , elle n'a jamais été frappée de la foudre. Les antennes oo (1) On peut fixer ces cerceaux dans des rainures pratiquées autour du mâr & du grand perroquet, ou bien on attachera fermement les plaques à la furface de ces parties. (2) Traofa&. Philofoph, vol. 48, part. 1, page 210. (3) Hiftory and prefent ftate of Elétricity , féconde édition , page 371. Tome VI, Part. IL, 1775. K k “ vw das Tl Le >? OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, & les jambes de l’Ecrevifle, qu'on voit au haut de l'Echange Royal” de Cornkill, la langue & la queue du Dragon, fitué au bout de la pyramide de l'Églife de Chcapfide, font aufli des exemples bien remarquables (1). La plupart des grands édifices de cette Capitale, font généralement furmontés de girouertes qui fniflent en pointe. Je ne doute point que ce ne foic là un préfervatif contre la Lu qu'ils n’auroient peut-être pas long tems évité s'ils fe fuffent ter- minés par de groffes boules de métal. Je ne peux donc trop recom- mander de munir les édifices publics d’un bon conduéteur pointu. L'Architecte & l’Infpetteur doivent l'en regarder comme partie ef- fentielle. Expérience VI. J'ai cherché à m'aflurer de la force conduc- trice de divers métaux, en procédant de la manière qui fuit; j'ai tiré des lignes fur un morceau de carton, à un pouce de diftance les unes des autres; des fils de métal couchés enfuire tranfverfale- ment deffus ces lignes , y ont été aflujertis par des poids lourds, dont les bords ne faifoient que toucher les lignes (pl. 2. fig. 1.) laiffane uu pouce de fil entreux ; les méraux que j'ai choifis étoient de l'or pur, de Pargent, du cuivre, du cuivre argenté & du fer : les ls avoien® éré tirés par la mème filière , excepté celui de fer, qui étoic un pew plus gros que les autres; je les éprouvai avec deux jarres contenant onze pieds quarrés de furfice garnie, & je mefurai les charges par le moyen d’un éleétromèrre gradué, dont les divilions éroient de - de pouce ; voici les réfulracs : Or pur 4 Cuivre 6 Cuivre argenté Etoir fondu à 8 degrés, Argent pur 10 Fer 10 Si je donnois à quelque fil nn degré moindre que celui qui ef fpécifié ci-deffus , il ne fe fondoit pas; quand je le donnois plus fort, il y arrivoir explofñon ; la plus grande partie fe diflipoit même en fumée. Je recommande à ceux qui feront curieux de répéter cette expé- rience , de bien choilir leurs fils, de les prendre de bonne longueur & récemment traits; enfin d'opérer dans un jour très fec, au milieu d’une’cliambre obfeure & fans feu 3 avec ces précautions, il pourra (1) J'en pourrois citer bien d'autres , f le Docteur Franklin ne m'eût déja pré- venu. SUR L'HIST. NATURELLE ET LES ARTS. 249 furvenir quelque différence dans le réfultat ; & peut-être fera-ce an moyen de découvrir la vraie force conductrice des divers méraux. Le Docteur Lewis ina fait préfenc de fix échantillons de platine, qui étoient dans différens écats; j'ai choif les plus gros grains d’un morceau , que ce Phyfcien m'a dit avoir expofé plufieurs fois au feu le plus violent , & le plus long-temps continué qu'il avoic pu entretenir ÿ dans ces opérations , il n’y eut que quelques globules qui fe féparèrent du tout par la fañon. Ils étoienr probablement étran- gers au mélange; car d’ailleurs la platine ne fubit aucun change- ment. Il la diffolvit enfuire dans l'huile de vitriol, dans l’eau forte, & dans l’efprit-de-fel , afin d'achever de la purifier ; après quoi elle fe trouva aufi pure que cer habile Chynuft: fut capable de la rendre. Exrar:ence VII. Ayant donc creufé un filon, long de de- mi-pouce , dans un gâteau de cire blanche , je l'ai rempli légère. ment de grains de cette platine. Ces grains éroient dans un con- ta intime, & couchoient à chaque bout du fillon, un gros fil de métal , dont les extrémités étoient bien rondes & polies. J'ai cou- vert la platine d’un épais carreau de verre, & ai déchargé à tra- vers trois jarres contenant feize pieds quarrés de furface garnie. J'ai obtenu, par ce moyen, de très-beaux grains de platine. Plufieurs s’étoient enfoncés dans la cire & dans le verre ; 1l y en avoit fur les bords qui n'étoient formés qu'imparfaitement : mais cela prouve toujours que la fufion fe trouva parfaite. L'expérience a été faite devant MM. Fergufon , Guill. Canton, Bell & Marsham , qui en ont paru très-farisfaits. J'en ai parlé depuis à M. Naire, qui l'a répétée avec un égal fuccès. M. Thomas Canton , préparant du liege fec pour une expérience éleétrique , obferva quelques phénomènes qui lui firent préfumer que fon liege s’étoit électrifé en le coupant fimplement avec le canif. H examina la chofe attentivement, & cer examen le convainquit de la folidité de fon opinion. M. Guill. Canton , fon frere, m'ayant raconté le fait, je procédai à l'expérience fuivante. Exrénience VIII. J'ai cenu auprès du feu le bout d’un long morceau de liege, jufqu'à ce qu’il commençät à brûler. J'expofai une petite lime au mème feu, afin de la fécher parfaitement. Après quoi , ayant coupé le bout du liege avec ma lime, je l'appliquai à une légère paire de boules de moëlle fort propres. Ce liege les attira toutes deux, & les éleva perpendiculairement autant que les cordons purent le permettre. J’élecrifai les boules avec de l’ambre qui venoic lui-même de l’être ; mais alors le liege augmenta leur divergence de près d'un pouce, c’eft-à-dire , de moitié. Si je les électrifois avec un verre excité , les phénomènes Abies dans KK 2 150 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, un fens direétement renverfé. Il eft donc certain que le liege reçue fon électricité de la lime, & agit ici comme un corps éleétrifé né- gativement. le Exrértence IX. Ayant parfaitement arrondi les angles d’un léger morceau de talc, qui avoir trois pouces en quatré ; j'en ai couvert le milieu des deux faces avec une feuille d’érain que j'ai fait avancer jufqu’a à de pouce des bords. Les angles de cette feuille ont été également coupés, Ce tale, ainfi préparé , fe chargeoit promp- tement fans qu'il fût befoin d’effuyer ou de fécher la furface non couverte. Il eft mème étonnant combien le choc étoit violent per- dant la décharge. Fai appris de M. Canton, qu’en plaçant un morceau de bois poli au haut du fupport du conducteur, on pouvoit conftamment en ti- rér une étincelle d’une très belle couleur cramoifie , & que certains Phyfciens regardoient cela comme une lumière électrique qui fe ré- pandoir très-fuperficiellement deffus le bois. La nouvelle de ce phé- nomène me rendit curieux d'en pénétrer la véritable caufe; c’eft pour- quoi j'entrepris l'expérience qui fuit. Expérience X. J'ai fixé entre deux boules une pièce de bois bien polie, ayant deux pouces en diamètre, fur un quart de pouce d'épaiffeur. Ces boules éroient elles - mêmes renfermées dans le cir- cuit de la décharge éleétrique. Enfuite, déchargeant une très-large jarre , je me fuis apperçu que le bois étoit prefque couvert d’une lumière électrique. Ees parties extérieures, ou les bords de cetre lumière , paroiffoient extrémement minces, mais. la couleur étroit très-blanche. L'expérience a été plufieurs fois répétée , fans donner des réfultats différens. Pour lors , j'ai collé au bout du fupport de mon principal conducteur , un morceau de boëte colorée & circu- laire ; & voyant que je tirois de fortes étinceiles à travers ce bois, de quelle couleur qu'il für, il me parut d'abord évident que /z couleur de L'étincelle varioit felon qu’elle pénétroit plus ow moins profon- dément dans le bois. Par exemple , elle éroit blanche, quand elle ne faifoir que glitfer deffus ; jaune ou orangte, un peu au-dellous; écar- late, fi elle entroit davantage , enfin cramoifie , lorfqu’elle s’enfon- çoit le plus dans le bois. L'on fair que des Phyficiens ont pris la matière éleétrique pou celle de la lumière (r). L'expérience fuivante décidera peut-être à quoi l’on doit s'en tenir fur cet article. Exrémience XI. J'ai ifolé le frorroir de ma machine , & oo (1) Probléme. Les expériences électriques ne réuffiflent-elles pas le mieux ay plus beau foleil ? Le Loir ou la nuit ne leur font-ils pas très-défavorables ? SUR L'HIST. NATURELLE ET LES ARTS. 251 j'ai fitué de façon que les rayons du foleil qui entroient par la fenêtre de ma chambre , pouvoient tomber immédiatement RÉ mais cela n’a produit aucune éleétricité. Je n'ai pas micux réufi, en raffemblant les rayons dans un feul foyer , par le moyen d’une forte lentille, & Îles recevant ainfi tous raflemblés fur le dos de mon frottoir, qui s’en trouva noirci & comme charbonnifié. Alors je pris le parti de montrer l’éleétromètre de M. Canton, muni de deux légères boules deffus un fupport de cire à cacheter; & les ayant éleétrifé négativement avec de l’ambre excité , au point de les faire diverger d’un pouce , je ramaflai encore les rayons du fo- leil par le moyen de ma lentille, en mefurant la diftance de ma- nière que le foyer frappoit exactement une extrémité de la boëte , qui en fut prefque charbonnifiée , & la colle fondue dans les joints. Malgré tout cela, les boules ne parurent nullement affectées. Extrait de la continuation des Expériences Phyfico - Méchaniques d'Hauksbée , faites par Boyle. » Je pris, dans une matinée d'été affez fraîchie , un gros mor- # ceau de bon ambre qui ne pouvoit attirer les corps légers fans » être excité, L’ayant tranfporté aux rayons du Lleil » & l'y » tenant jufqu'à ce qu'il fût modérément chaud, je m'apperçus, » comme je my attendois bien , qu'il avoir acquis une vertu » attractive. Cette propriété ne fe remarquoit pas en un feul en- » droit, comme c’eft l'ufage quand on l’excite par frottement ; elle » s'éroit en même-tems communiquée à différens points de fa fubf- » tance ; quelques-uns attiroient promptement les mêmes fétus , lorf- » qu’ils s’en trouvoient à une diftance convenable ; tellement que » dans nos climats, un corps folide peut très-virefgcquérir une ath- » mofphère électrique lorfqu'on l’expofe au foleil; & même long- » tems avant la plus chaude partie du jour «. Autre. » J'ai tenu auprès du feu un petit vaiffeau de verre fort épais; je ne lui laiflai prendre qu’une chaleur médiocre, mais fupérieure à celle de l'ambre. Ce degré fur fufhifant pour lui communiquer » autant d’attraétion que l’ambre en avoit reçu du foleil «, e s: LE M ARNO T À Si M. Boyle, voulant connoître la chaleur de fon ambre, le preffa tant foit peu dans la main (quoique fans le frotter ) ; il l’électrifa 252 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, fur-le-champ. Sans cela il n'étoit point éleétrique, & n’auroit.py certainement le devenir en refioidifflant. Si l’ambre étoit trop chaud, l'air, échauffé autour de lui, put lui fervir de conducteur. Ce Phy- ficien auroit donc dû trouver un degré convenable de chaleur. L’ex- périence fuivante prouvera mon allertion. Exrérience XII. Mettez un morceau d’ambre devant la flamme d'une chandelle. Quand il fera chaud , appliquez-le à un fil fufpendu , & vous verrez qu’il ne l’actirera ni pour lors , ni quand il fe fera refroidi. S'il n’eft pas trop chaud , ferrez-le uniquement dans votre main, fans le frotter du tout , il deviendra électrique au degré le plus éminent. Chauffez-le encore à la chandelle , il y perdra route fon électricité ; mais en le ferrant de nouveau dans vos doigts ou dans la main, vous lui redonnerez toute fa force, Appliquez-le une troifième fois à la chandelle , il fe dépouillera de fa vertu, & ainf alternativement tout autre corps électrique agi- roit probablement de même que la flamme d’une chandelle , ou que l'air chaud , qui attirent très-fubirement l’éleétricité du verre, Exrérience XIII. Etant à répéter cette expérience devant M. Nairne, je pris lambre entre mon pouce & le doigt index, & l’avançcai très-près d’une table fans l'y faire toucher, afin d'éviter le moindre frottement. Ce Phyficien, qui m'aidoit dans mon opé- ration, pouffa trente bouffées de fouffler deffus l'ambre; après quoi, l'ayant préfenté à un fil, il lattira d’+ de pouce. M. Naïrne fouffla encore trente fois fur l’ambre , ce qui lui fit attirer le fil à demi- pouce de diftance, fans compter qu'en le reculant, il fit fuivre ce fil de huic pouces. L'expérience réitérée trois fois, a toujours offert le même fuccès. Nous vimes, avec beaucoup de fatisfaction, que L'ambre s’étoir éleëtrifé par Le frottement des particules aëriennes contre Je Jurface, & nullement par la chaleur. Ce procédé réuflit également avec le verte. SE CID TO NS TRUITE MUE: Expériences & Obfirvations fur l'Eleétricité des Brouillards , en conti« nuation de celles de M. T. Ronayne. 14 Novembre 1771, à huit heures & demie du matin, le brouil- lard n'éroir pas fort épais , mais rrès-éleétrique. Les boules fe fépa- roient de demi-pouce , & reftèrent ftationnaires. I1 faifoit peu de vent. 19 Novembre , l'air fut très-électrique; mais le vent étoit fi in- commode, que je ne pus déterminer précifément l’efpèce d’éleétri- ciné, SUR L'HIST. NATURELLE ET LES ARTS. 2; 2 Décembre, à huit heures & demie du matin, le brouillard étoit médiocrement épais. Il parut fort éleétrique. Les boules diver- gèrent de demi pouce. Si je les approchois de la maifon, elles fe joignoient, & fe féparoient de nouveau en les éloignant. Le mer- cure fe vint dans le thermomètre à quinze degrés au-deflus de la congellarion. 18 Décembre, à quatre heures après midi, le brouillard étoic médiocrement épais. Il parut très-électrique , immédiatement après fon apparition. Les boules, quoique divergentes de demi - pouce , fe joignoient régulièrement à l'approche d’un bâton de cire excité. Le venr fut importun; néanmoins les boules fe tinrent ftationnaires par intervalles. s Janvier 1772, le brouillard montra une forte électricité po- fitive. Les boules s’écartoient de demi-pouce. On fencit un air vif & glacial, 13 Janvier, à neuf heures du matin, le brouillard, fans être fort épais, parut très-éleétrifé pofitivement. Le mercure fe tint, dans le thermomètre, à fept degrés au-deflus de la congellation, Il n'y eut prefque pas de vent. 18 Janvier, à dix heures du matin, l’air éroit forr électrifé par une chûte de neige. * 21 Janvier, à neuf heures du matin, l'ai parut fit élc@riqne, pendant une chûte de givre, de neige & de pluie qui tombèrene à la fois. Les boules fe féparèrent de À de pouce, & perfiflèrent dans cer état. Il regna peu de vent. N. B. L'electricité de l'air étoit polirive. 29 Janvier, à neuf heures du matin , le brouillard étroit très- épais , & la gelée prefque infoutenable. L'air montra une électricité pofirive , fi forte, que les boules diveroèrent d’un pouce & 1 p. Ï y avoit peu de vent, & elles fe rinrent ftationnaires; de forte que je n'avois lieu de craindre aucune méprife dans mon expé- rience. À midi, les boules diveroèrent comme fur les neuf heures du matin. A trois heures du foir , le vent agira extrèmement les boules, Néanmoins elles fe vinrent toujours fort écartées l’une de l’autre. 1] geloit très-vivement. C'’en fut de même fur les quatre heures, A cinq heures & demie, les boules divergeoient de trois quarts de pouce. L’épaifleur des brouillards augmenta , & les baguettes fe trouvèrent toutes mouillées d’un bout à l’autre. Il éroic trop tard pour fuivre plus avant mes obfervarions dans cette journée. 30 Janvier, à neuf heures du matin, je trouvai l'air fort élec- œifé poñitivement. Il avoit un peu gelé, & les brouillards avoienr 254 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, de lépaiffeur. Les boules fe féparèrent de demi-pouce. Le vent les dérangeoit, mais il ne put les faire joindre. 11 furvint une petite chûre de neige , qui blanchit légèrement les toits des maifons. Je préfume qu’elle forme des pointes qui font avantageufes pour con- duire l'électricité. Les chofes perfiftèrent tout le jour dans cer état, 4 Février, à neuf heures du matin, il geloit rudement, & les brouillards étoient épais. L'air parut très-éle&trifé pofitivement : les boules divergèrent de + pouces. Sur les onze heures, elles éroient ftationnaires à un pouce de diftance, & fe joignoient fitôt que j'en approchoïis de la cire excitée. Sur les deux heures & demie, comme à onze. À trois heures, l'air éroit couvert & fombre. Les boules furent fort tranquilles , & n'offrirent prefque pas le moindre figne d'électricité. 11 Février, à huit heures du matin, le brouillard parut fort épais, & éleétrifé poftivement. Les boules divergèrent d’+ ou de + de pouce. Le vent fur S-O. & très-incommode. Le thermomètre mar- quoit 38; le baromètre 29, 94. 15 Février , à dix heures & demie, je trouvai le brouillard épais & fenfblement électrique. Les boules divergeoient de + pouc. D'a- bord, après que j'eus fixé ma verge, il tomba quelques gouttes de pluie. Au moment qu’elle tomboit , la divergence des boules augmenta d’+ pouc. Je n'ai jamais vu les brouillards plus électri- fés, dans des tems où la fimple chaleur de l’athmofphère faifoit monter le mercure de mon thermomètre au feptième degré par- deffus le terme de la glace. Or, je fuppofe que dans cette faifon la région fupérieure de l’athmofphère elt rarement froide. 11 neigea beaucoup vers les deux heures cinquante minutes de l'après-midi. L'air fe trouva alors fort électrifé pofitivement. Les boules fe féparoient de À pouc. Le venc fut S-O. Le petit nombre d’expériences que j'ai faites fur l’éleéricité de l'athmofphère , ne fuflit pas pour me faire penfer que les brouillards s’éleétrifent plus puifflamment pendant ou immédiatement après la gelée , que dans les autres rems ; maïs je regarderai déformais comme une règle certaine , qu'ils acquièrent une forte électricité poftive, quelle que foir leur épaiffeur , fi l’air fe trouve en même-tems vif & glacial. Quoique la pluie ne foit pas une fuite immédiate de l'électricité athmofphérique, je crois néanmoins qu’elle en dépend beaucoup. Je trouve, par les petites obfervations que j'ai recueillies à ce fujet, qu'il na jamais manqué de pleuvoir deux ou trois jours après avoir apperçu l'air fortement éle&rifé, fur-rout lorfqu'il left refté long-tems. S'il n’a tombé ni pluie , ni neige, &c., il eft tou- jours furvenu quelque autre intempérie chaude ou froide , & cela en proportion de la force & de la durée de l’életriciré. Si celle-ci nen |! 4 à | > 0 OS . Le S 4 LE Li ét LS SUR L'HIST. NATURELLE ET LES ARTS. 255 - n’en eft pas la caufe, au moins l'indique-r-elle toujours. Mais pour acquérir là-deflus toute la farisfaction qu’on pulle defirer, il n'y autoic qu'à établir un journal d’éleétriciré , dont je drefferai ici le lan. IL faudroit avoir un gros cahier femblable aux livres-de-compre des Marchands. Les colonnes qui y feroient tracées , contiendroient une fuite d’obfervations mifes dans l’ordre fuivanr, La date & le jour ; l'heure, la latitude -& la longitude , ou bien le lieu; la di- vergence des boules ; l’efpèce d'électricité; la variation de l'aiguille; fon humidité ; les obfervations accidentelles fur le baromètre, le thermomètre, l’hygromètre , le vent, l’athmofphère; à quoi l'on pourroit ajouter la mefure de la pluie, la force du vent, &c. En notant bien toutes ces particularités, & élevant fouvent dans l'air des cerfs-volans à la plus grande hauteur pofible, fans oublier un bon thermomètre- (1) pour marquer les divers érats de l’athmof- phère, nous obriendrions , fans doute, bientôt de nouvelles lumières fur ce point, & parviendrions peut-être à des découvertes dont nous n'avons pas la moindre idée. Les expériences & obfervations que j'ai faites fur l'électricité des brouillards, m'ont fair imaginer qu'ils l’avoient forte & pofitive, telle que für leur épaiffeur, fi Pair étroit en mêmetems glacial. Je mis pourtanc des exceptions à cette règle : car en Décembre , 24, 25, 26, 27, 28, 29, 1772, 1l regna des brouillards très - épais pendant tous ces jours , le thermomètre érant à 36 ou à 33, le vent conftamment N.-E, fans que j'apperçufle la moindre éleétri- ciré. Cependant je conjectarois que, malgré que je n’en eufle pu découvrir aucune par rapport à ma fituation , elle pouvoir fort bien s'ètre répandue dans le haut de l’athmofphère , & cerre préfomp- tion a éré vérifiée depuis par M. Nairne ; ce Phyficien à trouvé que l'air étoit électrique dans la gallerie d'or de Saint- Paul, pendant qu'il ne létoit pas dans la gallerie de Pierre, qui eft beaucoup plus baffe. L'obfervation de M. Nairne a enfuire été faite par d’autres & par moi-même, J'ai reconnu que les boules divergeoient davan- rage , lorfque je projertois la verge qui les fufpendoir dans la lanterne au travers d’un des luminaires. Certe lanrerne eft éncore plus élevée que la gallerie d’or. MM. Lind & Brydone ont fait de- puis la mème remarque avec leurs cerfs-volans (2). (1) Si celui de Milord Cavendif/h pouvoit s'élever convenablement , peut-être devroir-on lui donner la préférence. 3 (2) Hiftory of Elc&ricity , by Dr, Préefiley. Seconde édir. page 333. Espé: pignces de M. de Romag. Tome VI, Parc. II. 1775. EN L. # * A8 256 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, J'obferverai que, dans le cours de nos expériences fur l’éle&ricité des brouillards , les boules m'ont fouvent paru diverger de deux pou- ces; mais cela n’eft arrivé que dans un tems où ils étoient épais, le vent S. - O. & le mercure au-deffous de 40 ; d’autres fois je n’at pu découvrir aucune éleétricité dans un pareil brouillard , quoique le mercure für à 35 ou à 36, & le vent conftamment N.-E, L'ap- pareil, dont jai ufé, confiftoit en une petite verge d'environ fept pieds de longueur , âvec une boëte contenant deux légères boules de liege, fufpendues par des fils de chanvre longs de fept pouces. Cette verge étoit reçue dans une pièce de bois convenable , placée au haut d’une des plus élevées fenêtres d’une maifon très-ifolée. Le bout de la verge , qui fufpendoit les boules, éroit incliné d’en- viron quarante - cinq degrés à l’horifon. J'avois une autre verge d’é- gale longueur, munie d’une efpèce de couliffe d’étain, dans laquelle glifloit un long bâton de cire-à-cacheter des plus communes. En excitant ce bâton , & l’avançant hors de la fenêtre , à proximité des boules, il m'étoit très-facile de déterminer l’efpèce d'électricité de Pathmofphère. Si l’on opère à découvert comme en plein champ, cet appareil devient inutile. L’éleétromètre de M. Carton, muni de deux légères boules , réuffit parfaitement. Il faut le tenir à deux pieds du corps, l'opérateur tournant fon dos contre le vent. Certe méthode ferr également à connoître le genre d’éleétricité, lorfqu'il y en a dans l’athmofobhère d’une quantité énorme, qui fe commu- niqueroit tellement aux boules, fi on les tenoit au bout d’une lon- gue verge élevée dans l'air, que la cire excitée , &c., ne pourroit à fon approche, produire le moindre changement dans leur diver- gence. Malgré que je fois parvenu , en plein air, à faire diveroer de deux pouces les boules fufpendues au bout de ma verge dans un tems de brouillards, il m'a été impoñible de les faire feulement fé- parer , en les fufpendant à un conduéteur ifolé placé dans ma cham- bre; cependant j'avois eu foin de raffembler l'électricité d'un fembla- ble brouillard , par le moyen d’une longue ligne de pêcheur qui étroit entourée d’un menu fil d’archal pointu, & communiquoit avec le “conducteur. Le Docteur Franklin , à qui je fis part de cette civ- conftance, m'engagea à mettre un bout de mon conduéteur ifolé , dans une chambre remplie d’air éleétrique, de pafler dans une au- tre chambre , l’extrémité qui porteroit les boules, & de voir fi je ie parviendrois pas à les faire diverger. L'expérience a été exécutée dans deux chambres , féparées par un paffage long de neuf pieds, & voici comment. J'ai employé d’abord inutilement la charge d’une large jarre. Mais l'ayant rechargée & déchargée de nouveau, les boules , fufpendues au bout de la verge qui avançoit dans l’autre juil SUR L'HIST. NATURELLE ET LES ARTS. 257 chambre , fe font écartées d’un pouce. Je préfume que l’effer auroie même,été plus fenfble, s'il n’y eût eu du feu dans la chambre où fe faifoit l'expérience; car lorfqu'on ouvrit la porte pour introduire le fil d’archal pointu qui entouroit la verge ifolée , il fe déplaça pro- bablement beaucoup d'air électrique , que celui de dehors pouffa dans la cheminée , &e. Deux boules, qui pendoient à ma main dans l'air éleétrique , près du bout de la verge, fe font féparées d'un pouce & demi. Mais en les approchant de l’autre extrémité, dans l'air non élec- trifé, leur divergence n'a été que de demi - pouce. Pour lors j'ai ifolé le frottoir de ma machine, en y enfonçant par-dertière une longue aiguille très-pointue ; & ayant attaché une chaîne depuis mon principal conducteur jufqu’à une table, j'ai commencé à tour- ner le globe, Aufli-tôt , l’air de la chambre , le bout de la verge ». &c., ont paru affectés, & les boules , fufpendues à l’extrémité op- pofée dans la chambre voilne, fe font écartées bien au-delà d’un pouce. Pour fuivre ce fujer , comme il le mérite, je voudrois qu'on conf- truisir une machine électrique , capable d'admettre dans l'opération, depuis dix jufqu'à cinquante oros cylindres, fournis d’un principal conducteur, de batteries, & d’autres pièces d'appareil oroffes en proportion : le tout bien renfermé par des murailles de brique , en- tourées de plume ou de poil (comme les ferres de Botanique), afin d’entretenir l’air de la chambre dans une température propre à l'expérience. L’ufage bien entendu de cette machine pourroit con- duire à de nouvelles découvertes aufi intérelfantes qu'inattendues. Des carillons électriques, montés à deffein, ferviroient à faire con- noîrre l'électricité de l'athmofphère ; & une couple de petites bou- les de liege ou de moëlle, fufpendues à l'appareil par des fils de chanvre , en indiqueroient le genre , la durée & le changement, Néanmoins il y aura encore des occafions où l’on fe trouvera bien d’expofer en plein air un long bâton muni d'une boëre & de deux petites boules de licge qui feront fufpendues au bout ; elles feront découvrir les plus petits degrés de léleétriciré athmofphérique, qui ne fufirojent pas pour faire fonner les clocherres, LENS 158 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, emmener meimmmmmtaneur nm «pé N:O-:UuV Eu Bndinkes EXPÉRIENCES ELECTRIQUES, Faites par M. ComuUs. SLA MINEERE TE DePANALYSE DES SUBSTANCES ANIMALES par l’Electricité Subllances éleélriques par frottement Ou COMMUTICALION. £L E Rezeau du Placenta. Ea partie cafeufe du lait. Le Périofte. J'ai enlevé d’un inteftin les tu- niques membraneufes charnues & velourées. La tunique nerveufe, quoique mince & délice, m'a don- né des fiones éleétriques marqués, Les nerfs bien féparés dela graifle & des parties mufculeufes , ont donné des fignes éleétriques plus forts que l’ambre. Subflances qui ne reçoivent Péleéri- cité par frottement, ni ne tranf- mettent La commrotion. La partie fereufe du fang sèche. Les mufcles fecs dont on a bien enlevé la graifle. Les inteftins fecs. La gelée de viandesèche. Je lai fait avec veau , bœuf, & mouton féparé. J'ai eu foin d’en Ôter tous les nerfs , de mème que la graïlle. Réflexion fur cette Analyfe. Après avoir foumis à l'électricité les différentes fubftances que Panimal donne , & réfléchi fur les différens eflers qu’elles ent pro- duits par l'électricité , je range ces fubftances en deux clafles diflimi- laires , & crès-diftinétes dans l’analyfe éleétrique. L'une reçoit & donne SUR L'HIST. NATUREILE ET LES ARTS. 259 des fignes très-marqués d'électricité fans être ifolée, & l’autre n’en peut recevoir ni donrier dans le même cas. Les nerfs & autres fubf- tances analogues, propres à donner des fignes éleétriqués, quoique féparés de l'animal, ont toujours dans leurs filières le fluide igné ensourdi, il ne s’en fépare que lorfqu’on défunir ces parties par le feu ; les nerfs ne doivent leur éleétricité & leur union, qu'au fluide igné. Ce fluide recoit par communication le mouvement dé l'appareil élerique ; il fe dilate & donne enfuite des fignes ‘élec: triques ainfi que l’ambre ou le verre. Les nerfs, dans cet étar , attirent & tepouflenc des corps légers $ cer effet fe manifefte pen- dant que la dilararion dure ; lorfqu’elle commence à ceffer, & que l'air environnant condenfe ce fluide & le force à rentrer dans Îles filières du nerf, il ne donne plus de fignes électriques. Cette ex: périence prouve évidemment que la fubftance nerveufe eft l4 de- meure du fluide igné pur. En effet, leur compofé ligneux & ho mogène , eft très-propre à contenir ce Auide & à propager les dif- férentes imprellions dont les fens font fufceptibles. Aufli les nerfs font-ils les organes du mouvement & du fentiment; fentimenr & mouvement qui ne font produits que par communication de vibra- tion, & non par écoulement. L'expérience des nerfs féparés du corps ; qui deviennent auñli éléc- triques que l’ambre, prouve bien que les nerfs d’une partie para- lyfée , contiennent autant de fluide 1gné qu'avant la paralyfie; mais ce Auide manque de mouvement; on peut lui redonner dans le com mencement de la maladie par de foibles vibrations & commotions fouvent répétées. Les commotions doivent être adminiftrées avec beaucoup de circonfpection. L'opérateur doit faire atrention d’où partent les nerfs de la parrie affectée, & comment il doit commo- tionner ces nerfs. Les vibrations & les commotions doivent fe com- muniquer imperceptiblement à diverfes reprifes, depuis l'extrémité des nerfs obftrués jufqu’à leur origine , & bien prendre garde de ne point attaquer la fubitance corticale pour la médulaire , & faire ar- tention aux parties bifurquées des nerfs. Toutes ces précautions font de la plus grande utilité pour procurer des ouérifons. 11 eft très- poffible que l'électricité, mal adminiftrée , fafle périr le malade, Je donnerai inceflamment un Mémoire fur la manière d’admi- niftrer l'électricité aux différentes parties affectées , & aux différen- tes maladies. h 260 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, Effet fingulier de l'Eleétricité fur les Sourds. | ExPÉRIENCEZ. J'ai tenté l'électricité fur des fourds de naiffance, & fur d'autres par accident. J'ai électrifé les uns, & les autres ifolés, & les ai foumis à la commotion, en la faifant pañler d’un tympan à l’au- tre. J'en ai guéri deux qui étoient devenus fourds par accident. J'ai remarqué un fait conftant & fort extraordinaire, en répétant ces expériences ; lorfque ces perfonnes font électrifées , 1folées , elles en- tendent parfaitement; enforre que plufeurs fourds de naïflance ont entendu lorfqu’on a frappé derrière eux, d’une main dans l’autre, plufieurs coups ; ils ont répété & frappé dans leurs mains la même quantité de coups qu'ils avoient entendu ; cette expérience a été faire fur fept perfonnes fourdes de naiffance plus de vingt fois ; le réfulrat a toujours été le même. Is ont donné plufeurs autres preuves qu’ils entendoient, aufli frappantes que celles que je cite, Les fourds par accident, entendent aufli-bien que s'ils ne l'étoient pas ; ils confervent cette faculté d'entendre après l'expérience, les uus plufeurs heures, & d’autres l'ont confervée pendant plufieurs jours. Cette faculté eft moindre lorfqu’ils ne font plus ifolés, & va en diminuant par gradation, jufqu'à devenir nulle. Je viens d’adminiftrer l’éleéricité à un homme qu’une paralyfe avoirrendu muet, fourd , & les jambes & cuilfes fans mouvement ni fenfation. Il commençoit à parler lorfque je lui ai adminiftré l'électricité ; il n’entendoit nullement. Chaque fois que je l’électrife il entend auflibien qu'avant fa maladie. Cet homme n’avoit d’au- tre talent que de jouer du violon, talent qu’il ne peut plus exer- cer, n'entendant aucun fon. Chaque fois que cet homme eft élec- crifé, il eMfaye à jouer du violon qu'il entend très-bien; cette fa- alté lui dure préfentement vingt-quatre heures; dans les commen- cemens il n’entendoit que pendant très- peu de tems. Actuellement il eft moins fourd; pour les jambes & les cuiffes, l’éleétricité leur a procuré la circulation du fluide nerveux. Il reffent des douleurs fourdes dans toutes les articulations, & fenc les parties qu'on tou- che ou pince, comme celles qui ne font point paralyfées; quoiqu'a- vant l’éleétricité 1l ne reffentit aucune douleur , lors même qu'on le pinçoit fort, U La W-, SUR L’'HIST. NATURELLE ET LES ARTS. 261 ES da, oc ares ele Ce. te + MAR ZIP EUR ES AQU RO ART 5 De Madame de V***, à M, le Comte de M***, Le de vos amis, Monfeur, qui rend ainfi que moi , autant de juftice à routes vos vertus & à toutes vos qualités morales & fociales , qu’à la folidité & à l’érendue de vos connoiffances, n'a pas dédaigné de s’entretenir avec moi de vos idées fur la combi- naifon de l’acide de l'air avec la matière de la lumière , avec ce fluide primitif , le pere peut-être de toute élafticité, de toute vé- gétation , de toute minéralifation, &c. Ces idées m'ont paru fu- blimes, elles répondent, par leur étendue , à la nature de l’ob- jec qui les a fait naître, & qu’elles auront dévoilée lorfqu'elles feront confirmées par l'expérience, Je nai pas la prétention, Monfieur, de vous rien indiquer qui vous foit nouveau dans l'art, que vous poflédez fi bien , d’inter- roger la Nature, de la forcer à vous répondre , & de lier entr'elles fes réponfes pour en déduire fa théorie ; mais enfin, Monfeur, j'aime la Phyfque , je m'en occupe avec cette ardeur que l’on connoît à notre fexe dans fes goûts : attentive à cacher celui-ci plus que nous ne le fommes communément à en voiler d’autres’, le myltère qui couvre mes études, me permet d'en parler fans craindre d’être reconnue , même de vous. Il m'eft venu des idées, & je n'ai pu réffter au defir de vous les communiquer. La fubftance de la lumière n’eft pas compofée de parties fembla- bles en tout; ce fait eft certain. Le Auide primitif, dont quelques Phyficiens ne la croient qu'une fimple modification, fans combinai- fon , fe combine, felon vous , avec l'acide de l'air en traverfanc notre athmofphère, & devenu enfuite partie intégrante , principe conftitutif des corps, il leur communique des qualités qu'ils ne peu- vent tenir que de lui: ce foufre éthéré, les phlogiftiques; car , par vous , le phlosiftique , ce fylphe des Chymiftes, prend enfin un corps ; c’eft lui qui revivifie dans l'électricité les chaux métalliques, qui agit à la manière des acides fur les teintures végétales & fur le {el de tartre ; vous l'avez reconnu. Encore un pas, s’il vous plaîr, ‘262 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, . Monfieur ; la lumière eft un compofé de parties que l’on peut fépas rer , le prifme en fournit la preuve ; la raifon que les Phylciens oñt : donnée jufqu'à préfent de cette féparation , fera vraifemblablement place’ à une autre: mais pour notre objet, ne pourroit-on pas ten- ter des expériences fur les chaux , fur les teintures végétales, fur le fel de rartre, avec les différens rayons du faifceau lumineux; en : y en raffemblant plufieurs de même nature tondenfés par des mi- ; rois? Découvriroit-on dans eux des deorés différens de combinaïfon « acide? Le rayon rouge, par exemple , agiroit-1l le plus? D'autres nas giroieat-ils point du tout ? Mêmes obfervations fur les reintures vé- getales. Ne forceroit-ont aucun rayon à lâcher de l’acide dans le fima- -ple érar de lumière, comme le faifceau lumineux en fournit dans :érar d'électricité? L'explication que vous donneriez enfuite de la différente manière dont agit le feu , principe dans l’état d’éleûricité … -& dans l’état ordinaire de lumière , éclairciroit bien des faits & ré- foudroit bien des doures. . Je fens combien ces expériences font difficiles & délicares : mais c'eft à M, le Comte de M * **. que je les propofe, & je ne me per- mets que de les indiquer; il s’agit de raflembler fur un même point, . ou fur une très-perire furface, plufieurs rayons rouges tondenfés pat un. ou par plufieurs miroirs , de comparer la mafle formée par la réunion de ces rayons rouges avec une autre malle de lümière non démêlée, de comparer les effets aux maffes, d’en déduire en quelle raifon le rayon rouge agit relativement, tant au Paifceau lumineux qu'à chaque rayon, qui feroit enfuite mis en expérience ; enfin de les décompofer l’un après l'autre autanc qu'il feroit poflible, de les réduire à l’état de fixité cha- cun à part, afin de chercher en eux-mêmes la connoilfance de ce qui lear eft propre à chacun. Je mestrompe fort fi la différente pefanteur fpécifique des corpufcules qui les compofent, eft la véritable caufe des phénomènes que nous obfervons. Seroic-il pflible d'arriver à la con- nolflance des combinaifons qui colorent les différens rayons ? De dé- cerminer les caufes de l’afäinité de la lumière avec les corps onctueux où fulfureux dont la Force réfringente eft plus grande qu’elle ne de- vroir l'être ? Réfoudrions-nous enfin d’une manière clairele problème des accès de facile tranfmiflion & de facile réflexion ? &c, &c. Mais je m'arrète , Monfieur , ceci devient trop favant pour moi, ma tère s'échauffe , je me rappelle que je fuis femme, & que cet-inf- tant eft pour nous celui d’une retraite prudente. Agréez les affurances du fincère intérèt que je prends à vos fuccès & à votre gloire, & de Ja haute confidérauion avec laquelle je fuis, Monfieur le Corte ; &ç NOUVELLES SUR L'HIST. NATURELLE ET LES ARTS. 263 NOUVELLES LITTÉRAIRES. Coz LECTION précieufe © enluminée des Fleurs Les plus belles & des plus curieufes qui fe culuivent tant dans les Jardins de Chine que dans ceux de l'Europe, dirigée par les foins de M. Buc’hoz. Cet Ouvrage degoùr, & en même-rems d’inftruétion , fera d’une grande utilité aux Naturaliftes, aux Fleuriftes, aux Peintres, aux Deflinareurs, aux ireéteurs des" Manufactures de Porcelaine , de Fayance, d'Etoffes de foie, laine, coton, &c. Partie première. Cette Collection pré- cieufe , par les deffins, par la beauté du burin , fera inceflamment mife en vente. Quatrième Décade de la‘ première centurie des Planches enluminées, € non enluminées repréfentant au naturel ce qui fe trouve de plus intéref[ant & de Plus curieux parmi les animaux , les végétaux € les minéraux, pour fervir d'intelligence à l’Hifloiré fénérale des trois Règnes de la Nature ; par M. Buc’hoy, Médecin- Boranifte de Monfieur. On trouve ces deux Colleétions chez Lacombe , Libraire , rue Chriftine. La première gra- vure repréfente deux Singes d'Amérique , l’un le Diable des bois, ou le Singe volrigeur ; l’autre le Singe volrigeur , furnommé le fifleur; la deuxième , deux Béliers, l’un de Chine, nommé le Morvant, lautre d'Irlande-a quatre cornes, dont deux redeflces & deux for- mant le demi cercle , & rournées vers le bas; la troifième , deux Aigles allez rares ; là quatrième, repréfente vingt œufs de différens Oifeaux ; la cinquième , quatorze Infeétes très rares, la fixième, le Serpent à fonnerte très-bien caraétérifé ; la feprième, trois Poiffons finguliers ; la huitième, la Coquille nommée foulier, & un Murex fur lefquels” font attachés des éponges tubulées, des vermiffeaux, des coquilles, &c.; la neuvième, différentes Coquilles & les Ani- maux qu'elles’renferment ; la dixième enfin, une Urne antique de deux pieds de haureur chargée dé corail , de vermifleaux , de ma- drépores, &c...... La neuvième certurie des Planches de L'Hifloire Univerfille du Règne végétal, entreprife par le même Auteur , vient de paroître chez Brune, Libraire, rue des Ecrivains. On ne peur pas mettre plus de rapidité ni plus de zèle à farisfaire « l'empref- fement de ceux qui ont foufcrit pour ce grand Ouvrage. M. Buc’hoy fait efpérer que les trois dernières Centuries paroîtront avant Îa fin de cette année ,. & l’on peut dire que malgré les critiques qu’on a Gites de cetre entreprife, cer Ouvrage uendra une place diftinguce Tome VI, Part. II. 1775. M m 264 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, dans les plus grandes Bibliothèques , puifque les Planches qu'on a fait fervir font celles d’un ouvrage très-eftimé en Botanique, & célles qu'on y a ajouté pour le plus grand nombre, font beaucoup mieux deflinées, gravées & très-bien caraéttrifées dans routes les paities de la fleur. Recherches fur les Maladies chroniques, leurs rapports avec'les ma- ladies aiguës, leurs périodes , leur nature, & fur la manière dont on les traite aux eaux minérales de Barege, & des autres fources de l'Aquitaine; par MM. Antoine , Théophile & François de Bor- deux. Tome premier , 7-8, de plus de 600 pages. À Paris, chez Ruault, Libraire, rue de la Harpe. Ce volume contient la théorie générale des maladies & lanalyfe médicale du fang. Le nom des Auteurs fuffic pour la réputation de l'Ouvrage , & le mérite de 1 Ouvrage répond à celui des. Auteurs. Ce que nous en dirions ne fauroit rien y ajouter. ; Lupiologie , ou Traité des Tumeurs connues fous le nom de Loupes, avec des dérails fur les effets & la manière d’agir des cauftigques , des recherches fur le ganglion , le goître , les tumeurs enkiftées des paupières, la ranule, l’hydropifie de la moëlle épinière ,; & des ré- flexions fur les moyens de perfectionner l’art de guérir; par M. Girard, Correfpondant de la Société Royale de Montpellier, Con- feiller-Médecin ordinaire du Roi, Intendant des Eaux minérales de Bagnols & de Saint - Laurent, 1: vol.i7-r2 de $o0 pages. À Paris, chez Ruault, Libraire , rue de la Harpe. Prix 3 livres relié. La pre- mière partie de cet important Ouvrage renferme la théorie des Loupes, la nature & les caractères eflentiels de ces tumeurs, leurs différences, leur fiège, le méchanifme de leur formation, leurs caufes, leurs phénomènes , les accidens qu’elles peuvent produire , & le jugement qu’on en doit porter ; dans la feconde, font décrits les différens traitemens qu'elles exigent ; & la troifième enfin, à pour objet quelque tumeurs particulières, dont les unes doivent être rangées parmi les Loupes, & les autres forment une clafle à part. Phyfique du Monde, démontrée par une feule caufe & un feul principe commun à tous les corps en général, propre à chacun d'eux en particulier , & prouvé par l'expérience; par M. P. B. des Hayes, Docteur en, Médecine , Médecin ordinaire de la Maifon du Roi. À Verfailles, chez Blaizgot, & à Paris, chez Walade, Li- braire , rue Saint-Jacques , 1 vol. 47-8° de 244 pages. Prix 2 liv. 10° fols broché. - Nouvelle Table des. Articles contenus dans les Volumes de l’Academie Royale des, Sciences de Paris, depuis 1666 jufqu'en 1770 , dans ceux des Arts G Métiers publiés par cette Académie, 6 dans la Collétior SUR L'HIST. NATURELLE ET LES ARTS. :6$ Académique ; par M. l'Abbé Royier. Troifième volume. À Paris, chez Ruaule, Libraire, rue de la Harpe. Le quatrième paroîtra avant [a fn de certe année. L'Art de faire Le Vin rouge, contenant les premiers procédés pue bliés par l’Auteur, & les nouveaux qu'il a imaginé depuis pour façonner les Vins rouges. 1°. Dans les années de maturité; 2°. dans les années où les raifins ne font mûrs qu’en partie; 3°.’dans les années où ils font très-verds, & celles où ils ont gelé fur le cep; 4°. dans les années & les vendanges pluvieufes ; avec les expérien- ces qui en ont éré faites, le Décret dela Faculté de Médecine, & lAvis du Corps des Marchands-de-Vin à Paris; & encore avec des planches & la life des Soufcripteurs : à l’ufage de tous les Vi- gnobles du Royaume; par M. Mawpin. À Paris, chez Mufier, fils, Libraire , rue du Foin-Saint-Jacques. Tome premier, i7-8°. de fix feuilles & demie d’impreflion , en y comprenant le Décrer de la Faculré & l'Avis des Marchands-de-Vin. Prix 3 liv. broché. » Quoique jufqu'à préfent, dit M. Maupin , il ne me foit point » revenu qu'on fe foit plaint aucunement du prix que j'ai mis à » cet Ouvrage ; cependant comme il ne feroit pas impoflible que » quelques perfonnes trouvaffent ce prix excellif relativement à l’é- » paifleur du volume, je penfe devoir, en tant que de befoin, me » juftifier à cet égard, 1°. Qu'il me paroïît qu'en bonne règle, il de- » vroit en être des Livres comme de tous les objets de commerce » qui, quoique du même genre, fe vendent plus ou moins, fui- » vant leur plus ou moins de qualité. Quelle différence de prix, » par exemple, entre un papier même blanc &-un autre? Que mes » recherches & mes expériences, depuis 15 ans, fur la vigne, me » coûtant très-cher & plus de sille louis, le Public, qui ne pourroit » fe plaindre quand je lui vendrois mes découvertes avec profit, le » peut encore bien moins quand je les lui donne à ma perte & à » beaucoup moins qu’elles ne me coûtent. En fuppofant même au- » tant de Soufcripteurs que j'en ai demandé pour l’Art de faire le Vin (1500), je ne retirerai guère que le quarr de ce que j'ai » avancé, &c. « Maïs comme le nombre des Soufcripreurs n’eft pas complet, M. Maupin délivre en détail ce qu’il devoit leur don- ner en gros, à peu-près comme ce Gafcon qui avoit un fond de quarante mille écus d’eau dans la rivière de Seine , dont il avoit la bonté , pour fatisfaire l'empreflement du Public, d'en diftribuer généreufement quelques parties à 2 fols la voie. Ecoutons parler M. Maupin. » C'eft moi qui le premier ai découvert, fixé, raffem- » blé & enfeigné les vrais principes de l'art, & en ai donné une y -» pratique raïfonnée. On pourra étendre cer art, mais ce ne fera M m 2 266 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, » jamais que d’après moi, c’eft-à-dire , d'après mes principes. On » pourra en perfectionner les procédés , mais par leurs accords avec » les principes , ces principes , qui font les miens , n'en feront pas » moins les premiers, & les feuls, jufqu’à préfent, qui puiffent faire » époque dans l’art; mais ce ne fera qu'en confervant la plus grande » partie des opérations que j'ai imaginées ou perfectionnées. Ainf # il eft vrai de dire, comme je l’ai annoncé au commencement, » que c’eft à moi que la Chymie Françoife doit la manipulation » des vins, c’eft-à-dire , une de fes plus belles parties. ..... Après » la difcuflion dans laquelle l’intérèr public & le mien propre m'ont » forcé d’entrer, je ne fais ce que je puis me promettre de la part » de la Chymie Françoife. Mais s’il eft des diftinctions , des récom- » penfes pour les hommes qui perfettionnent les Arts, & à plus » forte raifon pour ceux qui les créent; fi, dis-je, il eft encore » un prix pour les travaux les plus utiles, j'ai lieu d’efpérer que » je ne ferai pas privé de celui que méritent les miens «. La fu- blime modeftie de l’Auteur eft fi pathétique & fait tellement image, qu’on croit voir tous les Vignerons du Royaume & les Chymiftes Fran- gois profternés à fes pieds pour lui payer le jufte tribut de leur recon- noiffance & de leur admiration. Er attendant que ce triomphe fe réa- life, nous annonçons à M. Maupin , 1°. que ce premier volume qu’il publie aujourd’hui, n’eft qu’une répétition de ce qu’il a fait imprimer & réimprimer plufeurs fois depuis 1772; 2°. qu'il ne fait pas la Chymie, ou du moins qu'il n’a pas entendu ce que M. Macquer a dit dans fon article de la fermentation, 3°. que dans cet Ouvrage, comme dans les précédens, il n’y a ni découvertes, ni procédés nou- veaux , que tout ce qui y eft imprimé a été déja dit & redit par tous les Auteurs qui l'ont devancé; en un mot, que fon ouvrage ne contient rien de neuf. Mais comme nier fimplement, c’eft ne rien dire, nous prouverons nos trois affertions , & nous en contractons l'engagement envers le Public. L'Art de compofer les Fufees volantes & non volantes, par l'Aureur de la manière d’enluminer l'Eftampe pofée fur toile, avec figures. À Paris, chez d’Houry , rue de la vieille Bouclerie, 47 - 3°. de 42 pages. Prix 1 livre broché. Catéchifme fur L'Art des Accouchemens , pour les Sages - femmes de la campagne , fait par l’ordre & aux dépens du Gouvernement, par M. Augier du For, Profefleur de l’Art des Accouchemens, Méde- cin- Penfonnaire de la Ville & Généralité de Soiflons, 7-12 de 100 pages. À Paris, chez Ruault, Libraire, rue de la Harpe. Il feroit à défirer que chaque Intendant de Province fit traduire dans l'idiôme ou patois de fa Généralité, cet excellent Ouvrage. C'ef SUR L'HIST. NATURELLE ET LES ARTS. 2:67 le moyen le plus für d'en tirer le parti le plus avantageux. Ce Ca- téchifme fe diftribue gratuitement dans les Provinces , & nos cam- pagnes doivent ce bien à M. Turzor, Contrôleur - Général des Fie rances. Prix extraordinaire propofé par l Académie Royale des Sciences, pour l'année 1777. L'Académie avoit accordé le titre de fon Ingénieur en Inftrumens de Mathémariques , à feu fieur Langlois , comme au premier Artifte du Royaume en ce genre ; elle lavoir accordé de même au fieur Canivet fon neveu , qu’elle avoit regardé comme l’hé- ritier des talens de fon oncle. À la mort de ce dernier , plufeurs Artiftes fe font empreflés de demander ce titre vacant , & l’Académie, toujours réfolue à ne l’ac- corder qu’au plus habile, & défirant que ce choix fût fait avec la plus grande connoiffance de caufe , a cru ne pouvoir mieux s'en aflurer, que par le moyen d’un concours. Mais comme il n’auroit pas été jufte d'exiger de ceux qui vou- dtont concourir, des inftramens qui demanderoient des avances con- fidérables , des foins & des attentions fcrupuleufes , l'Académie au- roit eu peine à fe dérerminer à annoncer ce concours , fi la bonté du Roi n'y avoit pourvu, en aflignant , fur la demande de l’Acadé- mie, pour cet objet, un prix de 2400 livres. Elle avertit donc ceux des Artiftes nationaux & regnicoles, qui fe fentiront capables d’entrer en lice , que pendant l’efpace de trois années , elle recevra les inftrumens qui feront préfenrés au concours: elle demande un Quart-de-cercle de trois pieds de rayon, garni de toures les pièces qui peuvent férvir à le rendre d’un ufage sûr 6 commode , & accompagné d'un Mémoire contenant le détail des moyens qui auront été employés pour le confiruire. Les Ouvrages ne feront reçus que jufqu’au premier Mai 1777 in- clufivement; mais le concours fera ouvert, & les pièces préfentées, feront examinées depuis la publication de ce programme jufqu'audir terme. Les ouvrages qui viendront après, ne feront pas admis au Concours. Les Inftrumens & les Mémoires feront remis entre les mains du Secrétaire de l’Académie, qui, après en avoir enregiftré la préfenta- tion, en donnera un récépiflé, & fe chargera de les remettre aux Comimiflaires nommés par l’Académie , qui les examineront, après quoi elles feront rendues aux Auteurs. L'Académie, à fon Affemblée publique de la Saint-Martin 1777, proclamera , dans la forme ufirée , celui auquel elle adjugera le Prix & le vitre de fon Ingénieur en Inftrumens de Mathématiques. L'Académie Royale des Sciences de Paris avoit propofé pour le fujer du Prix de l'année 1775 ; cetre Queltion : Quelle eff La meilleure 268 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, manière de fabriquer les aiguilles aimantees , de les fufpendre , de s'affurer qu’elles font dans le vrai méridien magnétique ; enfir | de rendre raifon de deurs variations diurnes régulières ? Elle propofe de nouveau le même fujet pour l’année 1777 : le prix fera double , c’eft-à-dire de 4000 liv. les Ouvrages ne feront reçus que jufqu'au premier Septembre 1776 exclufñivemenc. | La Société Royale de Gottingue propofe pour le prix écono- mique du mois de Novembre, cette Queftion : Comme, fuivant l'opinion commune , La morve des chevaux eff un mal contagieux ; mais que cette affertion ef} nièe par divers hippiätres modernes , on demande des expériences inconteflables ; & des effais qui fervent à établir ‘un de ces fèn- simens, 6 à détruire l'autre ? Pour le Prix économique de 1776 : Quelles font les plantes fauvages du pays de Hanovre qui pourroient étre mifes à profit avec une utilité con- fidérable , fur - tout par l'éconôme rural, fans que cela le détourne trop de Jès autres occupations , 6 qui méritent à caufe de cela qu'on les faffe con- notre : le prix eft une médaille de douze ducats ? Pour le Prix de la Claffe de Mathématique de Novembre 1776 : Inquirere in leges fecundum quas corporum motus retardatur ob friétionem : quod ft quid in his legibns a conditionibus diverfis fuperficierum | ‘earum fortè magnitudine, figurä , politur& antè maturarum differiminè profcif- cicur ut v.g. alia chalybis fuper chalybe , alia chalybis Juper auricalco Je movenris , feu cireumduëli friéfio fit : quid hæc efficiant, faltem unius alterius re earum fortè fuperficierum quæ maximè in rerum ufu adhibentur, exemplis illuffrare ? Le prix eft une Médaille d’or de $o ducats. Les pièces doivent être envoyées avant Septembre 1776. La Société des Sciences de Coppenhague propofe pour prix de Mathématique : {nvenire Machinam aut mecanicum quoddam artificium, cujus ope lacus, flagna , aliaque id genus aquileoia commodè & fine ma- gro \pretio repurgurt , 6 a limo, immunditie, fruélibufque aquaticis que fundum elevant interitumque lacuum accelerant liberari poffint, eo impri- mis caf ubi effluxus aquarum ad exficcandas & effodiendas ejufmodi aquarum colleëtiones nimio fferent impendio aliæ que circumftantiæ aquas dulces urbi necefflarias interé& perdi 6 inutiliter défluere had permittunr, Pour prix de Phyfique : Azaly/im metallorum in partes conflitutivas fecundura follicitè inftivuta experimenta. tradere. Elle propofe encore en Mathématique : fncurvationem bafis carinæ aquæ diutius innalantis fa- cili modo ad calculum revocare ; & demonftrare quenam ffrulura navis kuic vitio pre alüs fittobnoxia. Et pour prix de Phyfque : Experienti& docente | oculus hominis fa- aus objeëla vifa coloribus peregrinis' a ‘diverfa refrangibilitate ortis non enquinet , quandit pupilla integra radios excipit ; häc verd ad dimidium sela , objeëta vifa coloribus peregrinis cinguntur. Defideratur itaque ratio D. SUR: L'HESTN ATURELLE ET: LES "ARTS. 269 hajus phenomeni , &' difquifitio numnè ad normam oculi nova fpecies vitrotum objeëlivorum.achromatiorum: componi queat. Les Mémoires doi- vent être écrits en Danois ou en Latin, François, Allemand. Cha= que prix eft une Médaille d’or de cent rifdallers. Les écrits feronc Mrellés , franc de port, à M. Hiemflierne, Chevalier de l'Ordre de Dannebrog , Secrétaire de la Société. La diftriburion des Prix fe fera en Avril 1776, & le jugement de la Société fera publié in- continent après. M. Van Lelyveld de Leyde propofe un Prix ou une Médaille de 30 ducats, à celui qui, en établiffant la certitude de la propriété de l’huile pour appaifer les flots de la mer, aura indiqué l’efpèce d'huile la plus propre à produire le calme des eaux irritées, & qui joindra à certe difcufion des dérails intéreffans fur les variétés que l’expérience peut établir, relativement aux mers plus où moins pro- fondes , ainfi qu'entre les vaiffeaux plus ou moins vrands. Ce Prix fera délivré dans le mois de Mai 1776. Les Etats Généraux de la Province de Languedoc, toujours at- tentifs à favorifer le Commerce & les Arts, ont ananimement dé- libéré de donner un Prix de 1200 livres à celui qui, au jugement de la Société Royale des Sciences, aura le mieux expliqué: 1°. Pourquoi la même Mine travaillée avec de la Houille ou Charbon de terre, donne un fer de qualité inférieure à celui qu'on en retire lorf- gwelle ef? travaillée avec le Charbon de bois? 2°. Quels font les moyens d’approprier le Charbon de terre aux mi- néraux ferrugineux , quels qu’ils foient , pour en tirer du fer propre à tous Les ufages économiques, & pareil à celui qu'on retire au moyen du Char- bon de bois ? On donnera en outre un fecond Prix de 300 livres à celui qui, ayant déja traité avec fuccès ces deux premières queftions , aura le mieux réfolu celle qui fuit: Y a-1-il dans les Mines de Charbon ou de Fer du Languedoc, com- parées aux autres ÎVines des mêmes matières, quelques qualités qui ren- dent l'appropriation du Charbon de terre plus ou moins facile ? Toutes perfonnes, de quelques pays & conditions qu'elles foient, pourront travailler fur ce fujet & concourir pour le Prix, même les Affociés Etrangers & les Correfpondans de la Sociéré. Elle s’eft fait la loi d’exclure du concours les Académiciens Reonicoles. Les Etrangers qui, pour faire les expériences nécelfaires fur les différens points à traiter, defreront d’avoir des échantillons des principales Mines du Languedoc , pourront aifément s’en procurer en s'adreffant à M. de Ratre, Secrétaire perpétuel de la Sociéré Royale des Sciences à Montpellier , qui, de concert avec M. le Marquis L 4 + À: 14e 170, OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, de Moniferrif , Syndic général de la Province, & Directeur de la Compagnie, procurera aufli pour le même objet aux perfonnes qui habitent le Languedoc, des échantillons des principales Mines étran- ères. Les Etats ont pris dés meftires pour que ces divers échantil- Pons ne manquent point à ceux qui voudront faire des expérien- ces & concourir pour le Prix. Ÿn prie les perfonnes qui écriront à M. de Rate à cette occañon, d’affranchir le port de leurs lettres. Ceux qui compoferont , font invités à écrire en françois ou en la- tin. On les prie d’avoir attention que leurs écrits foient bien lifi- bles. 2 On adreffera les Ouvrages , francs de port, à M. de Rate, Secré- taire perpétuel de la Société Royale des Sciences à Montpellier. Les Ouvrages feront reçus jufqu'au 31 Août 1776 inclufivement. Académie de Rouen. » Yndiquer les progrès de nos Arts utiles, cultivés dans la Ville & Banlieue de Rouen, fous le règne de 5» Louis XV , & leur influence fur le Commerce de la Norman- -» die «, Les Mémoires feront adreflés , avant le premier Juillet 1776 , à M. L. À. Dambourney , Négociant à Rouen, Secrétaire perpé= cugl. 3 V2 g Ur Se - Septembre, 1778. | HALLE ER PIE AUStUEe dot it bo = = a y. eptembre 27 7É ibti 113 * Der spy vb ape pau ; + TU » Den I À EE "FE 1: 4 AN a OBSERVATIONS SOU R Ben H.Y ST OU.E, PECRSÉLCH LS ROME NATUREL LE POMAPSNUPR LES ARTS, BEC DESRETANCGHESN ENMTAILLE-D'OUCE, DÉDIÉES A NES AC OU MIE DA RAT OIS: Par M. l'Abbe ROzZIER, Chevalier de l'Eglife de Lyon ; de l’Academie Royale des Sciences, Beaux-Arts & Belles-Lertres de Lyon ; de Villefranche , de Dion, de Marfeille , de Fleffingue ; de la Sociéreé Impériale de Phyfique & de Bo- zanique de Florence , Correfpondant de la Socièté des Arts de Londres , de la Societé Philofophique de Philadelphie ; &c, ancien Direëteur de l Eçole Royale de Médecine - Vétérinaire de Lyon. DOME SX EME OCTO BR E; "x775. AA PIE DR AS Chez RUAULT, Libraire, rue de la Harpe DEEP ENTREE DEEE DCE I PE TELE MARDICIC EL EXEXAVE WU ECUPRIMINEElGC ES DV. KO TI. APT US. 1°, CE Journal a commencé à paroïtre fous le format in-12. ax mois de Juillet 1771. Le Cahier étoit de dix feuilles d’impreffion. Il & eté ainft continué jufqu’à la fin du mois de Décembre 1772 , ce qui forme 18 vol. in-12 , dont le prix eft de 36 liv. à Paris, © de 45 liv. en Province , par la Pofle. À la demande de MM. les Soufcripteurs s Ze format in-12. fur changé en celui in-4°. en Janvier 1773. Il [era toujours continué le même ; parce qu'il eff plus commode pour les Bi- bliothèques, & que cet Ouvrage fait Juice avec les Collethions Aca- demiques. Le changement de format n’en a produit aucun pour le fond de l'Ouvrage. à 2°. Il paroit chaque mois un Cahier de dix feuilles in-4° , enrichë de gravures en taille douce. Ces Cahiers forment , à la fin de l’année, 2 volumes in-4°. On foufcric, pour ce Journal, à Paris , chez PAu- teur, Place & Quarré Sainte-Geneviève ; chez RUAULT, Libraire, rue de la Harpe ; & chez les principaux Libraires des grandes Villes & des Pays étrangers, Le prix de la Soufcription eft de 24 liv. pour Paris ; & de 30 Liv. pour la Province, franc de port. 3°. MM. les Soufcripteurs font priés de recommander à leurs Suifes, Portiers ; Laquais , Domnefliques , de ne pas égarer le Cahier qu'on leur remet exaëlement du 10 au 2$ de chaque mois; 6 fi MM. les Souféripteurs ne l'ont pas recu, le premier du mois fuivant , ils au- ront la complaifance de porter leurs plaintes chez lAuteur , ou de le faire demander au grand. Bureau de la petire Pofle, rue des Dé- chargeurs. Il n’eff pas poffible que Exemplaire d’un feul de MM. les Soufcripeurs foit oublié, puifque lorfque les Cahiers font garnis de leur enveloppe , on en fait l'appel , le Repiftre à la main, de la même manière que l'appel des Soldats dans une Caferne , & il fau, pour ainft dire, que chaqué Cahier réponde , adfum , o4 du moins on le répond pour lui. 4°. Les perfonnes qui ont la bonté de nous communiquer des Mé- moires ; des Differtations ; Obférvations , &c. font priées de donner des manufcrits lifibles, & alors il y aura moins de fautes d’impreffion. s°. On n'a promis que dix feuilles d'impreffion pour chaque mois ; même en y comprenant le Titre & la Table ; nous en donnons quelque os O2 13. Comme ces feuilles furnuméraires demandent du remms pour être imprimées, on prie, dans ce cas, de pardonner S'il Jarvient un retard de quelques jours ponr la publicatior du Jourral. _ PAT DL -E ! DÉPENS" ART MCE ENS Contenus dans cette feconde Partie. M ren CHES © Obférvations fur Le Carpeau de Lyon ; par M. de Latourrette , page 271 Recherches Phyfiques Jur l'Air fixe ; par M. Fontana, Phyficien de S. A. R. l'Archiduc Grand-Duc de Tofcane , 280 Probléme de Combinaifons intérefant pour ls Ars € pour le Commerce ; par M. le C. de M. 289 Recherches fur Le moyen de perfeétionner les ifolemens pour toutes fortes de Machines éleëtriques ; par M. Détienne , Ecuyer, Avocat en Par- lement, Huiffier ordinaire du Roi en Ja Grande Chancellerie de France so premier Huiffier en fon Grand-Confiil , 290 Æxpofition des Analogies Les plus Jingulières & Les plus importantes du Froid & du Chaud , avec l'explication de ces ÆAnalogies ; par M. Chan geux, 299 Defcription de la conftruëtion d'un Four Pour recuire la Chaux qui doit être employée dans le Mortier - Lorior, 311 Lertre de M. le Chevalier Marfilio Lardriani, à l'Auteur de ce Recueil , 315 Obfervation fur un Fémur fraituré ; par M. l'Abbé Dicquemare, Pro- fefeur de Phyfiqu & d'Hifloire Naturelle, de pluffeurs Académies Royales des Sciences | des Belles- Lettres & des Arts EC 317 Obférvation fur la Lumière dont la Mer brille Jouvent pendant la nuit ; par M. l'Abbé Dicquemare , 319 Déféription d'un Infeële marin remarquable par les iris qui l’environnent ; par M. l'Abbé Dicquemare , 321 Rapport fair à Académie des Sciences , Jur le Fard, 322 Obfervation fur le Thermomètre ; par M. Blondeau , Profeffeur de Mathe- matiques , de l’Académie de Marine, à Bre l 32$ Lettre écrite par M. Le Duc de la Rochefoucauld , à l'Auteur de ce Re- cueil , 327 Nouvelles Littéraires , 332 Fin de la Table; € > EEE SRE ATP PR RU LON BR) AIRE (ONE i F {u, par ordre de Monfeigneur le Chancelier, un Ouvrage ayant: pour titre: Obfervarions fur La Phyfique, fur l'Hifloire Naturelle & fur les Arts, &c. par M. l'Abbé Rozier, &c. & je crois qu'on peut en permettre l'impreffions A Paris, ce 23 Octobre 1775« GARDANE, OBSERVATIONS 271 —— ———— ———— — Du C. ER CHERE S END D: BEIR A TEL, ON: 5 Sur le CARPE AU de Lyon; Par M DE LATOURRETTE. L, délicatefe de la chair du carpeau 2 rendu ce poiflon célè- bre parmi les gourmets; mais ils ne fe font pas occupés à déter- miner fa nature. Les Phyficiens Ichthiologiftes, n'ayant pas été à portée de l’examiner, l’ont paflé fous filence , ou ne l'ont annoncé que vaguement. Voici tout ce qu’en dit l’Auteur des Mémoires pour Jérvir à l'Hifloire Naturelle de nos Provinces (1), en parlant des Poif- fons qu’elles fourniffenr. » Le carpeau que l’on trouve dans le Rhône » & dans la Saône, & qui , au jugement de tous les connoiffeurs, » eft peut-être le poiffon le plus délicat qui foit en France, n’eft » pas encore connu. Le genre de ce poiflon eft un myftère de la » Nature , où la fagacité de l'homme n’a pu encore pénétrer. Doit- » on le ranger dans la claffe des carpes? En eft-il le mâle? ou bien » forme-t-il une efpèce particulière? A-t-il les deux fexes ? ou eft-1l » hermaphrodite ? C’eft ce que l’on ignore. Cet étrange poiflon, » ajoute l’Auteur , offre un vafte champ aux recherches des Natura- nliftes «, En effer, fi les objets de pure curiofité méritent leur attention, il paroît que les objets utiles, lors même qu’ils n'intéreflenr que la fenfualité , doivent avoir la préférence. Dans cette vue, & à la demande de M. Duhamel du Monceau, qui travaille au Traité gé- néral des Pêches , dont il a déja publié plufieurs parties qui en fon défirer la fuite , j'ai fait, fur ce poiffon, quelques recherches , dont voici le réfulrac. (1) Mémoires pour fervir à l'Hift, Nat. des Provinces de Lyonnois, Forez ; Bsaujolois, t. 1, p. 122, Tome VI, Part. II. 1775. Nn 272 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, Parmi les queftions qui fe préfentent, les principales font de favoir, sil doit être confondu avec le Carpione des lraliens (1), fi ceft une carpe, sil diffère de ce poiflon, sil eft mâle , femelle, her- maphrodite ou neutre; enfin, quels font les lieux où on le trouve, & quelle eft fa valeur. À l'égard du Carpiore , il n'a d'autre reffemblance avec notte cat- peau que le nom. Pour s’en convaincre, il fufht de confulrer les Auteurs qui l'ont décrit; Rondelet, Rai, Artédi, Lecher, Linné, &c. tous s'accordent à placer le carpione dans le genre des faumons, dont il a tous les caractères. Il fe pêche en Angleterre &en Italie, principalement dans le lac Guardia, où il eft fort eftimé. Mais on ne le connoîit point dans nos Provinces, ni peut-être même en France. Il n'a aucun rapport avec le carpeau de Eyon. Celui-ci eft un poilfon conformé à l'extérieur comme la carpe: Cyprinus nobilis autorum , telle que Ruifch (2) la décrit dans le Théatre des Animaux. On n'y trouve aucune différence véritablement caractériftique , foit que l'on ébferve fes écailles, leur couleur , leut grandeur , leur difpofition ; foir que l’on confidère la bouche, fes quatre appendices , les dents peu apparentes , prefque nulles, l’ai- leron du dos, celui de l'anus, les nageoires des oüies, celles du ventre, la forme de la queue, &c. Si quelques fignes extérieurs fufifent à faire diftinguer le carpeau de la carpe, ils font trop peu effentiels pour conftituer une efpèce diftinéte , & forment tout-au-plus une variété produite par un dé- rangement dans l’organifation interne ; cependant ces fignes font affez fenfibles pour faire difcerner le carpeau à la feule infpection. Nos Traiteurs & nos Cuifiniers, qui font en ce genre les obferva- teurs les plus expérimentés , ne s'y trompent pas. Le carpeau diffère, au dehors, de la carpe, en ce que, à poids égal , il a le corps en général plus court, la rère plus obrufe, l'os du crâne plus large, le bec (3) moins allongé, les lèvres plus épaif- fes, plus renflées, ce qui donne à la fupérieure, l’air d’une lèvre relevée; le dos eftpareillement plus élargi, plus charnu, & le ventre fingulièrement applati fur les côtés , fur-rour auprès de l’azus, que les pècheurs , fuivant Rondelet, appellent l’umbilic ; c’eft cette IE EEE TEE ER RSR TE TELE (x) Voyez le, Traité général des Pêches , feconde partie, deuxième Section , page 234 (2) Théâtr. anim., t. 1, p. 3« (3) On entend dans les poiffons, par Bec, roftrum , la partie qui s'étend an= térieurement depuis les yeux jufqu'à l'extrémité des mâchoixes. VAR FT Lan! SUR L'HIST. NATURELLE ET LES ARTS. 37; etite ouverture faillante, qui eft placée, près de la queue, entre e fillon du ventre. L’applatiffement du ventre eft le figne le plus certain qui carac- térife le carpeau ; les autres font moins conftans. Nos Traiteurs pré- tendent que fa tête n’eft pas toujours plus courte que celle de la catpe ; mais es carpeaux, à tête allongée, ajoutent-ils, font ceux qui ont fouffers, aufli font-ils moins eftimés & moins délicats. Je dirai ci-après pourquoi je préfume que ce ne font pas de vrais carpeaux. Si lon examine les parties intérieures, nulle différence dans la couleur & la nature des chairs, & l’organifation générale eft abfo= lument: la mème, avec cette feule différence que , de quelque grof- feur que foi le carpeau , on ne trouve , dans la: capacité de l’ab- domen, ni œufs, ni laites, ni ordinairement aucuns veftiges de ces parties, aux lieux qu’elles occupent dans la carpe. Dans intention de vérifier le fait, j'ai cru devoir d’abord exa- miner avec foin les parties internes d’une carpe mâle & celles d’une carpe femelle ; & pour m’éclaircir dans cet examen, j'ai fuivi feru- puleufement, le fcalpel à la main, l'excellente defcriprion que M. Petir, le Médecin, en a donnée dans les Mémoires de l’Aca- démie des Sciences , année 1733 (1), & les caractères précis afli- gnés par M. Gouan dans fon Hifloire des Poiffons (2). J'ai fair en- fuite la diffeétion d'un carpeau de deux livres ; & comparant fa ftructure interne avec celle de la carpe, je n’y ai réellement ap- perçu d'autre différence que l’abfence des parties de la génération. Les autres parties font les mêmes & difpofées dans le mème or- dre. Dans l’un comme dans l’autre, l’eftomac part du fond de la gorge, entouré des boyaux & du foie qui embrafle la veflicule du el. La rare s’atrache à l’eftomac. Les veflicules aëriennes qui, fe gonflant à volonté, font furnaget le poiflon, font placées entre les œufs (ou la laire } & les reins qui recouvrent le diaphragme & en- vironnent le cœur. La veflicule urinaire, ainfi que le dernier in- teftin, abouriffent à l'anus. I] comprend encore une troifième ou- verture, dont je vais parler, & qui n’eft pas dans le carpeau. On fait que la laite ou laitance, caraétérife la carpe mâle , comme les œufs font les attributs de la femelle. La laite & les œufs fonc vifbles dans les plus jeunes fujers. Ils rempliffent un efpace con- fidérable dans l’intérieur de l'abdomen. Les œufs , dans la femelle, font divifés en deux paquets , revètus d’une fine membrane qui, à droite & à gauche , entourent les inteftins & le foie, partant du diaphragme & fe réuniffant à l’anus en un feul canal. (1) Page 197. (2) Hif. Pifcium Argentoratis 1710. page 103. N n 2 274 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, Dans le mâle , la laitance, compofée de deux corps blancs, irrés guliers , inégaux, couverts d’une pellicule , remplis d’une fubftance blanchâtre , liquide , embrafle pareillement des deux côtés les in- teftins, depuis le diaphragme jufqu’à l’anus. Dans chacun de ces corps , on diftingne deux parties, dont l’une, fuivant les obferva- tions de M. Pezic, fait les fonctions de tefticule, & l’autre de vefficule féminale. La première, qui tient au diaphragme , eft la plus groffe , s'étend latéralement fur les vifcères dans le bas-ventre, prépare la femence & la communique à la feconde, dont le volume beaucoup plus perir, eft de forme prefque ovale. Avant d'arriver à l'anus, les deux veflicules féminales fe réunifflent & forment an feul conduit , qui aboutit auprès des ouvertures du rectum & de la vellie urinaire, pour donner iffue à la femence. Les parties, qui compofent la laite dans la carpe mâle, & les œufs qui conftituent la femelle , manquoient entièrement dans le carpeau que j'ai examiné; par conféquent l'anus ne comprenoit que deux petites ouvertures ; il m'a paru même que fon ouverture gé- nérale éroit plus petite , allongée, moins atrondie que dans la carpe. Les Pêcheurs ont donc raifon de dire, que le vrai figne diftinctif du carpeau eft l’abfence des œufs & de la laire, d’où fuit la juf- telle de lindication extérieure qui fe tire de l’applatiffement du ventre ; car le paquet d’œufs occupe un très-grand efpace dans Fab- domen. M. Perit en a compté (1), dans une carpe de dix-huit pouces de long, trois cens quarante-deux mille cent cinquante-quatre; & fi la lairance remplit un moindre efpace, elle eft néanmoins très- confidérable aufli, relativement à la capacité de l'abdomen. L’ab- fence de lun & de l’autre doit donc occafionner également au de- hors un reflerrement fenfible dans le ventie. Le carpeau, n'ayant ni laire ni œufs , doit-il ètre regardé comme un poiffon neurre ? Ce phénomène, quoique plus fréquent, ne pré- fenteroit rien de plus érrange que celui d’une carpe hermaphrodite. En l’année 1737, M. Morand montra à l’Académie des Sciences une monftruofté de certe efpèce; M. de Réaumur fit la mème ob- £ervation far un brocher, & M. Marchand fur un merlan(2); on voyoit diftinétement dans le ventre , d’un côté des œufs, de l’aue tre use portion de laitance; c'étoient donc de vrais hermaphro- dites. Une carpe neurre feroir en effec un monftre par défaut, comme les carpes hermaphrodites font des montres par excès. Les unes & les au- mm — (1) Mim. Acad. ibid, page 207. {2} Voyez l'Encyclopédie au mor Carpe SUR L'HIST. NATURELLE ET LES ARTS. 27; tres font néanmoins évidemment produites par la carpe ordinaires mais il n’en eft pas des carpes comme des abeilles, parmi lefquelles on diftingue de vrais eutres, deftinés par la nature à être tels. Les carpes neutres, ainfi que les hermaphrodites, ne peuvent être confidérées que comme des accidents fortuits, des jeux ou des er- reurs de la Nature : de-là vient qu'ils font rares, parce que la Na- ture s’écarte rarement de fes loix. _L’hermaphrodifme , chez les animaux , s'explique par la réunion accidentelle de deux germes, qui fe greffent, comme il arrive aux produétions végétales. Les neutres par accident, ont fouvent pour origine l’accouplement de deux individus d'efpèces différentes. Cet accouplement , parmi les quadrupèdes & les oifeaux , produit la va- riété que nous nommons ”zulet ; elle eit neutre, en ce qu’elle eft incapable de procréer fon femblable ; mais on trouve au rule l'ap- parence diftinéte de l'un des fexes, & 1l conferve toujours des rap- ports avec le pere & avec lx mere qui lui donnèrent naiffance, Or, nous avons vu qu’en général le carpeau n'avoit aucun veflige de fexe, & qu'il préfentoit uniquement les caractères de Ha carpe : ce n’eft donc pas un métif provenu de deux efpèces de poiffons, mais véri- tablement une carpe deftinée originairement à avoir un fexe, domt elle a été privée par accident. On pourroit le comparer à ces poules qui ne font point d'œufs, quoiqu’elles n'ayent certainement aucune des parties conftiturives da coq, avec cette différence encore que le carpeau me paroît avoir été deftiné à être un individu mâle. Ea délicateffe de fa chair fem- ble d’abord l'indiquer , parce que la carpe laitée eft toujours plus délicare que l’œuvée ; mais une obfervarion plus concluante vienc à, l'appui de etre conjecture. Un Cuifinier , que je queftionnois fur la mature des carpeaux , m'affura qu’il en avoit ouvert, dans lefquels il avoir appercu quel- ques portions laitées. Je l'invitai s'il en rencontroit encore de pa- reils , à me faire avertir à l'inftant. Dans le mois de Juin dernier, il me tint parole 3.3! venoit d'ouvrir un jeune carpeau d’une livre & demie, bien caraéérifé par la forme de la tête, du dos, du ventre, &c.; néanmoins il me montra dans l’intérieur des veftiges fenfibles qui, comprimés fous le doigt, rendirent une matière blan- che , abfolument femblable à celle que contiennent les Jaitances. J'examinai ces corps avec foin ; je reconnus parfaitement qu’on n’en avoit rien détaché, qu'ils n’avoient point été déchirés, & que c'éroit une portion de laitance , mais qui n'avoir point fa forme ordinaire. Ces corps étoient très-petits, en proportion de la gran deur du fuyec, applatis & d’une confiftance très-molle. Hs tenoient comme la laite au diaphragme, mais fe serminoient dans les. vif- 276 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, cères fans fe prolonger vers l'anus. C’éroir donc une forte de tef- cicule atténué, totalement dépourvu de la petite portion que nous avons nommée , avec M. Perit, vefficule féminale. Il fuir de-là que cet individu éroit un mâle , mais un male im- puiffant, puifque la femence n’avoit point de fortie au dehors: il eft à préfumer.que s'il eût vécu, & qu'il eur pris l’accroiflement dont il étoit fufceprible , ces veftiges de laite {e feroient entière- ment diflipés avec le tes; en effet, le cuifinier m'aflura qu'il n’en avoit apperçu de vels que très-rarement , & à de jeunes carpeaux ; mais qu'il ne leur avoit jamais vu d'œufs. Un carpeau eit donc une carpe, vraifemblablement mâle , & pri- vée en naiffant, des parties de la génération , ou née avec quel- que défaut, dans ces parties, qui les difpofe à devenir nulles, à difparoïtre dans tous les animaux ; l'impuiffance du fujet, fur-tout armi les mâles, donne lieu à fon développement en groffeur, & cela eft refpectif : un embonpoint excefMf & trop prompt, nuit au pouvoir de procréer. C'eft à cer état d’impuiflance originaire , ou bien à une difpoñ- tion à y tendre, que j'attribue la groffeur , la graifle , la fucculence qui diftinguent le carpeau ; je confidére cer état comme une caftra- tion naturelle qui opère dans lui Îles mêmes modifications que la caftration artificielle occalonne dans ces hommes qu'on deftine à chanter, & dans plufieurs animaux deftinés à notre nourriture : on fair que cette opération perpétue, pour ainfi dire , dans eux l’en- fance & les'caractères qui la diftinguent ; l’abfence de la barbe & le fauffet dans les uns, la délicatelfe de la chair dans les autres ; bar- bare invention , ignorée des Sauvages , & que la nature outragée Memble prévenir dans le carpeau, pour fatisfaire notre fenfualité. Mais ce poiffon une fois bien connu, s'il eft décidé , comme je le crois, que, né de la carpe ordinaire, ce n'eft autre chofe qu’un cunuque , un mâle impuiffant, qui nous dit que l'intérêt excité par cette mème fenfualité, ne trouvera pas le moyen de faire un car- peau, comme on fait un chapon ? À la vérité, l’organifation de la carpe ne s'y prète pas comme celle du poulet; mais la chofe n’eft peut-être pas impoflible. L’inté- sèr qui porte l’homme à être frippon , comme à être cruel, lui a déja enfeigné la manière d'extraire adroirement les laitances de la carpe morte, pour la vendre à des dupes comme vrai carpeau : l'arc fe perfectionnera peut-être affez pour opérer fur la carpe vivante, fans lui ôter la vie , l’engraiffer enfuite , & par-là doubler fa valeur : s'il s’agiMoit d'enlever la laitance entière , la mort du fujet fuivroit yraifemblablement ; mais peut-être fuffroit-il , dans de jeunes indi- vidus mâles, de parvenir à déçruire ou à obftruer l'embouchure de La he 11 ; 1 | SUR L'HIST. NATURELLE ETILES ARTS. 377 la veficule féminalé qui aboutir à l’anus? Gardonsinons nédntnoins de donner des leçons de cruauté à la cupidité humaïne (1 } ‘Côntentons-nous d'obferver que la cafpe paroît naturellement très- difpofée à éprouver du dérangement dans fes parties ,deftinées à la génération; l'exemple des carpes hermaphrodires poite a le croire. Si ce que racontent les pêcheurs de ‘la Breffe eft vrail, il ne refte aucun doute fur céla :1ls afürént!qué lorfque les porfons qu'ils en- voyént à Lyon fouffrent ‘dans le‘tranfpôrt , il arrive fouvent à de groffes catpes , mâles ‘ou fémelles | de, perdre entièrement dans la route leur laice ou leurs œufs; je préfume que ce font ces carpes que nos traiteurs appellent improprement, carpeaux à téte allongée ," qui ont foufferr, & qu'ils reconnoiffent pour lètré d’une qualité allez meé- diocre. FN LE PR x, Mais, quoique dépourvues d'œufs & de laites, ces carpes, n’ont point acquis l’état de vrais carpeaux 3 vaifemblablementmème elles ont dégénéré , comme carpes ; la forme de leur tête n’a: point changé, ne s’eft point raccourcie ; l’applatiffement de leur ventre n’eft point tel que dans le carpeau , parce arr les œufs ou les laites qui y étoient contenus pendant l’accroifflement du fujer, &. qu'il renfer- moit encore peu de jours, auparavant, ont, par leur volume, effen- tiellemenc. élargi la capacité intérieure de l'abdomen, & leur chair n'a point, confervé cette délicateffe du premier âge , que décruifent néceffairement la déperdition de la femence & les fonctions qu'ont rempli lés mâles ou les femelles. IL ef jaifé de concevoir que pour pouvoir devenir réellement:car- peau , ‘il faut que ce foit dans la première jeunelle- que‘la carpe éprouve les accidens qui alrèrent dans elle-les parties.de la. généra- tion ; çette altération qui fuir. & accompägne l’accroifement du jeuné fujer,, donne lieu au rérreciffement de l’abdomen ; qui caraétérife extérieurement ce poiffon : infuant en mèême-tèms fur la forme de fes parties offeufes , elle ocvafñonne, le raccourciffement de la tête , comme la caftration indue fur la conformation extérieure & fur-ute | —_—_—_—_————_——@ rt (1) Lorfque j'ai écrit ceci, je n’avois pas connoiffance des expériences rappor- tées dans les Journaux, Economiques , & de celles qui, font plus anciennement confignées dans l’Hiftoire de l'Académie des Sciences ( Année 1742, page 33 Les unes & les aures confirment ce que je n'avois avancé que par conjeture & par analogie Dans la Lettre _de M. Sloare ; communiquée à l'Académie , on voit qu'un Marchand de Poiflun, Anglois, avoir imaginé de châtrer de petites Carpes, pour les engraïfler & les rendre plus'délicats ;que pour cela :/ eher'ou2 vrou, l'ovaire. & rempliffoit la,plaïe avec un morceau de chapeai noir. Cer effet de la cafiraétion des Potfons’, ajoute M. Sloane, eff affez vraifemblable par fon andlogie avec ce qui arrive aux animaux terreffres, 278 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE; l'habitude du corps, dans les hommes & les animaux qui ont été foumis de bonne heure à cette opération. Terminons l’hiftoire de la monftruofité naturelle qu'on nomme carpeau : j'ignore abfolument pourquoi elle ne fe trouve pas par-tout où la carpe abonde ; mais on pourroit faire une pareille queftion fut une grande quantité d'animaux & de végéraux, auxquels la nature femble avoir afligné des lieux de prédilection , hors defquels ils ne fauroient profpérer; tout au moins peut-on s'étonner de ne pas ren-" contrer des carpeaux dans toutes les rivières, comme la Seine & le Rhin, où la carpe fe plaît & s’engraifle facilement, car la nature de l’eau & la nourriture fucculente qu’elle fournit, doivent être les caufes prochaines de cette production luxuriante. Quoiqu'il en foic , le carpeau paroît une variété particulière à nos cantons; on pourroit dire à la Saône avec quelques reftriétions : c'eft à tort qu'on appelle, par excellence, le carpeau , carpeau du Rhône : il y en a dans ce fleuve ; mais on en pêche bien plus fouvent dans la Saône , & ceux ci font incomparablement plus gros & meilleurs ; l’eau du Rhône paroît trop vive & trop rapide pour eux : ils grofliflent & s’engraiflenc plus facilement dans les eaux lentes & favonneufes de la Saône ; ainf il eft plus convenable de défigner ce poiffon, en général, fous le nom de carpeau de Lyon. La Saône en fournit principalement après les pluies & lors des grandes inondations : nos pêcheurs difent que ceux du Rhône re- montent alors la rivière, &, fuivant leur expreflion, is s’y font en peu de tems ; mais une plus grande quantité lui vient, dans ce mème moment , des étangs nombreux de la Breffe & de la Dombe, petites Provinces qui bordent fon rivage au levant, Les grandes pluies rempliffent quelquefois fubirement ces étangs ; leurs eaux s'élèvent au - deffus des chauffées , les rompent , paflenc d'un étang dans un autre, & vont s’écouler dans le lit des petites rivières qui fe jettent dans la Saône , particulièrement dans celle qui paffe à Toilley : en cet inftant , on entend tous les villages voilins fonner Le tocfn, pour avertir d'ouvrir les bondes , & faire écouler les eaux , fans perdre le poiffon ; néanmoins il en échappe beaucoup qui pañlent dans la Saône , dont l’eau leur plaît davantage : en peu de jours ils y perdent le goût marécageux , propre aux poiffons d’é- rangs; les carpeaux principalemeent y acquièrent très- vite une ex- cellente qualité. Les étangs de la Breffe en fourniffent encore plus que la Saône: la plupart de ceux qui fe confomment à Lyon, en font tirés direc- tement: on les tranfporte la nuit fur des charrettes, avec Îes autres poiffons ; enfermés dans des tonneaux remplis d’eau , qu'on renou- veille "1 SUR L'HIST. NATURELLE ET LES ARTS. 279 velle de tems en rems; mais fouvent le poiffon fouffre de ce tranf… port , comme je l’ai dir, en parlant des carpes qui y perdent leurs œufs ou leurs laites; quelquefois mème il en meurt. Si l'étang que l’on pêche eft à portée de la Saône , on conduit les tonneaux fur fon rivage; on embarque le poiffon dans des ba- teaux percés, qui le defcendent jufqu'à Lyon : arrivé à la ville, on le garde encore un certain tems, pour le faire dégorger dans de pa- reils bateaux, que nos pêcheurs nomment béchus : les eaux du Rhône ne conviennent point à cet ufage ; le poiffon y meurt ou maigrit en peu de tems. Dans celles de la Saône, les carpeaux perdent, en partie , leur goût de marais , fans diminuer de poids ; mais ce goût ne devient jamais comparable à celui des carpeaux pèchés dans certe rivière, de ceux même qui, depuis peu de jours, font venus des étangs s’y dé gorger en liberté. Quelque foin que l’on prenne, le carpeau pèché dans un étang , refte toujours inférieur à celui de la Saône , & même à celui du Rhône, quoique la chair de ce dernier foit ordi- nairement aflez dure & peu chargée de graille , différant en cela du brochet qui, dans le Rhône, eft d’une qualité fupérieure. On a trouvé quelquefois des carpeaux dans des étangs de la plaine du Dauphiné ; on affure que le lac de Genève n’en fournit point, & que celui de Nantua en Bugei, en a quelques-uns; il nous en vient aufli du lac du Bourget en Savoie; ils font inférieurs à ceux de la Saône , mais plus eftimés que ceux du Rhône. Les meilleurs, fans contredit , les plus forts, les plus gras & les plus fucculens , fe pêchent dans la Seife , petite rivière qui a fon embouchure dans la Saône , entre Mâcon & Tournus : fon lic eft étroit & profond, fon cours aflez lent ; tout contribue à y faire pro- fiter les carpeaux , qui fe plaifent à quitter les eaux de la Saône même , pour remonter dans la Seille , fur- cout après les fortes pluies. Les Pêcheurs de la Saône prennent le carpeau comme la carpe ; à l’hameçon , à l’épervier, & communément à la Jéime. Ils nomment pagniaux les petits carpeaux d’une livre , dont la Police devroit prohiber la pêche. Les carpeaux ordinaires pèfent depuis une livre jufqu'à cinq. Les oros font de huir à dix livres ; les plus forts vont à quinze, mais cela eft rare , & en général le vrai carpeau, à Lyon même , de quelque poids qu'il foit , eft un poiffon peu commun & très-recherché, Les plus gros font conftamment aufli les meilleurs & les plus délicats. Leur chair fond à la bouche; elle a le goût de la carpe, mais il eft infiniment plus fin. Le courbouillon eft la ma nière de les accommoder, la plus en ufage. Tome VI, Parc. IL. 1775. Oo :8o OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, Quant au prix de ce poiffon, il varie fuivant les circonitances, le poids, la groffeur, le lieu d’où on l’a tiré, le moment où on l'achère. On ne le vend point à la livre ; celui d’un poids médiocre vaut toujours plus du double de ce que vaudroit une carpe pareille. On l’évalue à so fols ou un écu la livre, dès qu'il eft un peu gros. C'eft certe valeur qui engage, comme je l’ai dit, les Marchands de mauvaife foi à tirer, par l'anus , la lairance des carpes mâles , pour applatir le ventre & leur donner l'air de carpeaux. Les carpes œu- vées ont l’abdomen trop élargi pour donner lieu à cette fupercherie, contre laqnelle les acheteurs expérimentés fe mettent en garde, en examinant l’état de l'anus , & en comprimant le ventre du carpeau pour voir s’il ne fe préfente aucuns veftiges, ou reftes de laitance. Il n’y a rien de fixe fur le prix des très-gros carpeaux ; la plu- part font envoyés à Paris ou à la Cour. En général, on les payoit autrefois cinq à fix louis ; dans les dernières annces on en a donné jufqu'à dix. Il eft vraifemblable que cela peut encore augmenter, vû l’ufage que la France paroît avoir emprunté des Anglois & des Genevois, de fervir du poiflon dans tous les repas du moin- dre appareil. RECHERCHES PHYSIQUES SUR LAA LR PA XIE Par M FONTANA, Phyficien de S. A. R. l'Archiduc Grand- Duc de Tofcane. LA: fixe, fur lequel le célèbre M. Prieftley nous 4 donné un fi grand nombre de belles expériences & d’obfervations, fait au- jourd’hui lobjer de l'occupation des Phyficiens modernes; mais quoi- qu'on air déja découvert une grande quantité de fes propriétés , il refte pourtant encore beaucoup d'obfcurité & d'incertitude , particu- lièrement fur la nature de ce fluide. Parmi ceux qui ont, jufqu'à préfent, travaillé fur cet objet, il y en a qui regardent toutes les propriétés connues de l'air fixe , comme tenant effentiellement à la nature de ce fluide , fans égard à pas une de fes combinaifons : d’autres, au contraire, foupçonnent que l'air fixe ne doit les qualités qu'on lui connoïît , qu’à l’union de quelques fubftances avec lefquelles il peut être combiné : la lé- MT TANT M 4 4 : < SUR L’'HIST. NATURELLE ET LES ARTS. 281 gere acidité que l'air communique à l’eau , lorfqu'elle s'en charge , et de toutes fes qualités la plus intéreflanre, parce qu'elle le peut rendre utile à la fanté des parte , & c'eft aulli la feule que je vais examiner; cependant cette difcuflion me donnera néceffairement occafon de déterminer aufli d’autres points également inréreffans. Le célèbre M. Prieftley affure que l'eau devenue acide par l'intro- duétion de l'air fixe, ne contient pas un atôme d'acide vittiolique, & il avance de plus, que l'air fixe eft lui-même une efpèce d'acide naturel très-foible : il fonde fon affertion , principalement fur ce que l'air ne perd point la faculté de rendre l’eau acide , mème après lavoir fait palfer à travers des fubftances alkalines par un tube affez long ; il affure aufi, qu’il n’a jamais pu , par aucun moyen chymique , découvrir la moindre partie d'acide virriolique dans cette eau, & il ajoute que M. Bergman , Profeffeur à Upfl , penfe que cet air eft un acide aërien, parce qu’il change en rouge le bleu du trout- nefol, IL eft vrai que M. Prieftley, pour confirmer encore davantage fon opinion , a eu recours aux expériences de M. Hey , qu'on trouve à la fin de fon Ouvrage en forme d’appendix, ayant pour titre : Expériences faites par M. Hey , pour prouver qu'il n'y a point d'acide viriolique dans l’eau impregnèe d'air fixe. M. Hey ne croit point à l’acide virriolique dans l’eau impregnée d'air fixe, parce qu'elle ne change pas en rouge la teinture de vio- letres ; ce qui arrive pourtant avec une feule goutte de cet acide mêlée à une livre Anglaife d’eau diftillée. Pour ce qui regarde les autres expériences , telles que celles faires avec le favon, qui fe diffout mal , & fe grumèle dans l'eau acrée, la difficulté d'en obtenir tant foit peu de moulfe, la précipitation du fucre de Saturne, &c. toutes expériences qui pouvoient faire foupçonner la préfence de l'acide vitriolique dans l'air fixe , il en fait peu de cas, uniquement parce que l'air fixe , après avoir pallé à travers un tube de trois pieds de longueur rempli de fel de tar- tre, continue à produire les mêmes effets qu'auparavant ; enfin, il ajoute que l’eau ainfi chargée d’air fixe bouillant avec le lair, ne le coagule point. Mais, ou je me trompe, ou tout cela ne prouve autre chofe, fi ce n'eft, que s’il y a vraiment de l’acide dans l'air fixe , il n'y en a pas allez pour l'y démontrer par de pareilles expériences , ou du moins, qu'il y eft dans un érat différent de celui où il fe trouve quand on le combine immédiatement avec les autres fluides. S'il y a donc des expériences plus directes, & plus décifives pour admettre dans cette eau de l'acide vitriolique , on doit avoir , ce me fem- ble , peu d’égards aux raifonnemens contraires. pi o 2 LUN 182 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, D'après le Profeffeur d'Upfal , j'ai mille fois répété l'expérience de changer en rouge la teinture de tournefol , en l’uniffant à l’eau impregnée d'air fixe ; cependant il faut dire que cette eau > lorf- qu'elle eft très foible, & peu acide , ne rougit point , ou bien pew cette teinture : cette expérience eft direéte, & cette teinture ne peut rougir qu'à l’aide d'un acide. Or, comme c’eft par le moyen de l'acide vitriolique qu’on extrait l'air fixe, c’eft à lui auffi qu'on doit attribuer la couleur rouge du tournefol, à moins qu'on ne démon- tre l’impoflibilité à cer acide de s'élever avec l’air fixe , lorfqu’on dé- gage ce dernier. Tous les acides qu'on connoit en Chymie , s'élèvent en vapeurs. lorfqu'on les échauffe ; c’eft une loi qui eft commune à tous les: fluides, même au mercure , fi la chaleur va jufqu'à lébullition.. Lors du dégagement de Pair fixe par l’acide vitriolique, outre qu'il s’y excite une grande chaleur, il y a aufli un mouvement inteftin. des parties entr'elles , & une effervefcence violente, qui pouffe au loin. de tous côtés & ce fluide, & la terre calcaire mème, comme je l'ai éprouvé plufeurs fois; routes ces vapeurs doivent donc s'élever avec l'air fixe , pafler enfemble avec lui, & elles paffent en effer. Qu'on mette de la terre calcaire dans un verre , qu'on en dégage l'air fixe par l'huile de vitriol, & qu’on couvre exattement le vaif- feau avec un linge affez fin, peu de momens après on trouvera le linge humide , & fi on l’applique fur la langue , il y caufe une vraie fenfation d'acide vitriolique , tout autant, que fi le même acide avoit été contraint par la force du feu de s'élever tout feul. du. fond du vaifeau. Qu'on enduife nn finge bien fec de tournefol en poudre très- fine, & qu'on le place fur le mème verre (1), peu de tems après on verra cetre poudre devenir rouge çà & là , & le linge fe tein- dre d’une couleur femblable à celle du fang délavé. La même ex- périence a lieu lorfqu'on met dans le verre de l'acide vitriolique en fubftance, & qu'on l’échauffe. Les circonftances font les mères 4 les effers font tour - à- fait femblables, & quand il y. auroit quel- que différence, ce ne feroit jamais que contre l'air fixe , puifque dans la première expérience , outre la chaleur , il y a encote l’effer- vefcence & une difperfion de parties de plus que dans la feconde. Je fuis parvenu à rougir le tournefol, foir en le délayant dans un peu d’eau, & impregnant enfuite cette eau d’air fixe , foit en fai- fant paller cer air à travers d’un long tube de cryftal , qui conte- noit tant foit peu de tournefol en poudre, quoique j'eufle placé à om (1) Dégageant l'air fixe comme ci-deffus. 4 AR L [EG be 29 772! TTNT SUR L'HIST. NATURELLE ET LES ARTS. 2133 différens endroits dans ce tube , des éponges pour abforber du moins en partie , l'humidité de l'air fixe. Si l’on mêle à beaucoup d’eau affez d'huile de tartre par défail- lance, pour verdir légèrement la teinture de violette, & fi l'on charge cette eau alkalire d'air fixe , on remarque d’abord que cette liqueur perd ; non-feulement la faculté de verdir la teinture de vio- letres , & la faveur urineufe qu’elle avoit auparavant, mais encore elle prend un petit goût piquant; enfin, on la voit blanchir petit- à-peuc, & il s'en précipite au fond du vaiffeau une poudre blan- che, telle qu’on l’obtient en mélant l'huile de vitriol à l'huile de tartre par défaillance, d’où il réfulte un vrai tartre vitriolé. J'ai effayé par différens moyens & pendant long-tems, de rendre Veau acide en la chargeant d’air fixe dégagé des corps fans le fecours des acides, tel qu’on l’obtient par la putréfaétion. Cet air avoit exac- tement les qualités d'air fixe, puifqu'il étoir abforbé par l’eau, & faifoir périr les animaux qui le refpiroient. Mais l’eau, loin d’avoir aucun goût acide , acquéroit l’odeur & la faveur,des matières ani- males putréfiées. Cet acide n’eft donc qu'accidentel à l’air fixe; car s’il entroit effenriellement dans fa compofition , jamais l'air ne le perdroit qu'avec fes autres qualités , qu'il conferve cependant dans la putréfaction. Il s'enfuit donc, que lorfqu'on dégage l'air fixe des corps par l’huile de vitriol, fon acidité n’eft point l'acidité de l'air, mais celle de l'huile de vitriol avec laquelle on l’a dégagé. Le point capital qui fe préfente dans le dégagement de l'air fixe des corps par l'intermède de l'acide virriolique , c’eft de favoir com- ment & par quel moyen l’acide vitriolique s’unit à l'air fixe, lorf- que celui-ci fe dégage des corps. S'élève-t-il en molécules très-peti= res, & volatiles par la feule chaleur ou par le choc de l’effervefcence ; ou enfin par quelqu'autre moyen adopté par la Nature dans la fo- lution des corps? Ce point, une fois difcuté , fervira de réponfe aux difficulrés de MM. Prieftley & Hey, & nous donnera la folu- tion de quelques problèmes finguliers touchant l'air fixe. Je penfe que l'acide vitriolique eft dans l’air fixe dans un véri- table état de diffolution, & qu'on peut dire à la rigueur, que cet acide eft uni à l’air fixe, comme la vapeur humide s’unit à l'air na- turel, c’eft-i-dire, qu'il eft diffout par l'air fixe , comme l’eau left par l'air naturel. D'après les belles expériences de M. le Roy, les Phyficiens fem blent être d'accord , que l’air de l’athmofphère tient en diffolution une certaine quantité d’eau plus ou moins grande, fuivant les dif- férentes circonftances dans lefquelles il fe trouve. J'ai extrait l'air fixe par la méthode ordinaire , & je l'ai renfermé 284 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, dans de grands récipients de cryftal. Plufieurs mois après je lai trouvé encore en état de rendre l’eau acide, & cette eau de chan- ger en rouge la teinture de tournefol. Cette conftance que l'air a de fe conferver toujours acide, ou bien limpuiflance où il eft de jamais quitter l'acidité dans de pareilles circonftances , quoique de- uis long-tems en repos, & confervé même dans les endroits les plus froids , fait voir évidemment que l'air fixe a diflouc l'acide vitriolique, & qu'il le retient dans cet état, comme l'air athmof- phérique retient les vapeurs , l'humidité, en un mot, l’eau. Il femble mème que l'air fixe foit diffout par l’eau, & qu’il ne devient foluble dans l'eau précifément, que parce qu’il eft fixe. Tou- tes les expériences prouvent bien la juftefle de cette opinion, & ce n’elt qu'ami qu'on peut concevoir comment l’eau , outre la quan- cité d'air athmofphérique qu’elle a naturellement , peut abforber en- core une fi grande quantité d'air factice. La Chymie nous donne aflez d'exemples de pareilles diffolutions. L’eau entr'autres, après avoir diffout une certaine quantité de fel, peut encore en diffcudre d’au- tres d’une efpèce différente. Ain , l’eau après avoir diffout & ab- forbé une quantité d’air naturel, peut de même diffoudre , & fe charger d'un autre air de nature différente, tel que l'air fixe. Mal- gré cela, l'air fixe, mêlé & diffout dans l’eau , ne perd jamais fa première qualité de vrai & naturel diflolvant de l'acide vitrioli- que, car il n’ett plus poflible de lui ôter cet acide, ce qui arri- veroit infailliblement fi l’eau , elle feule, en étroit alors le vérira- ble diflolvant. L’eau ne diffout donc que l'air fixe, & non pas l’a- cide qui eft difflout déja par l'air fixe. Cer air ne quitte jamais l’a- cide , & quelque diffout & divifé dans l’eau qu'il foi, il conferve toujours fur lui toute fon activité, ce qui fait une des plus fingu- lières propriétés de cet air, propriété admirable, inconnue jufqu’à préfent, qui mérite toute l'attention des Phyficiens, & qui peut très-utilement s'appliquer à la Chymie. Il eft donc certain que l'a- cide vitriolique n’eft point diffout par l’eau, mais il s’y trouve, parce qu’il eft combiné avec l'air fixe, qui eft lui-même en difo- lution dans cette eau. Un fait déja connu , mertra la chofe hors de doute. On fait que l'air fixe , venant à quitter foit naturellement, foit par art, l’eau qu'il rendoit acide, cette eau perd tout goût, toute acidité, tandis que l'air âxe conferve encore les mêmes propriétés qu'il avoit avant d’entrer dans l’eau : fucé à l’aide d’un tuyau, on lui trouve fon goût acide ordinaire ; il rougit encore la teinture de tournefol , & l'eau qu'on en charge, devient acide de nouveau. C’eft ce que j'ai appris d’après des expériences répétées. SUR L'HIST. NATURELLE ET LES ARTS. 285 Ainf l'air fixe , en quittant l'eau, emporte tour l'acide vitrioli- que qu'il y renoit en diflolurion , fans que l’eau , en diffolvant cet air, lui en air pu enlever & en retenir un atôme. On a eu donc tort de croire que cet acide conftirue le caractère propre & eflentiel de l'air fixe, ou que cet air foit lui-même un pur acide atrien. Cet acide n'y eft qu'accidentel , mais il ne s’en- fuic pas de-là , que la faculté que cet air a de le. diffoudre , foit aufi accidentelle; au contraire , il ne la perd jamais , tandis qu'il continue d’être air fixe. D'après ces vérités qu’on vient d'établir, on peut aifément faifir la caufe de plufeurs phénomènes ; par exemple , l'air fixe pique- t-il le palais & les yeux , lorfqu’on les expofe quelque rems à fon aétion ? L'air fixe pique, parce qu’il entraîne avec lui les fels aci- des du vitriol. L'eau redevient-elle infpide au départ de l'air fig ? Comme ce n'eft pas l’eau, mais l'air, qui tient en diffolurion l'acide , l'air n'ayant pas changé de nature, doit nécelfairement, en fortant de l'eau , emporter avec lui tout l’acide qu'il avoit déja diffour par fa propre nature, & ne reftant plus de cet acide dans l’eau, elle re- devient infipide comme auparavant. La teinture de tournefol, rougie par l’eau chargée d'air fixe & expofée à l'air libre, perd -elle, peu de rems après, fa couleur rouge , comme je l’ai obfervé au mois de Mai de l’année dernière devant plufieurs de mes amis? L'air fixe fe dégage de cette eau acide & rouge, & en fe dégageant il emporte tout fon acide , comme je viens de le faire voir, & dès-lors , l’eau perd aufli la couleur rouge que lui donnoit l'acide vitriolique de l'air fixe. Ces vérités font une conféquence des principes établis ci-deffus ; il n’eft donc pas étonnant que cette couleur fe diflipe : il le feroit au contraire, fi elle ne fe difipoit pas, puifque ce feroit contradiétoire à la nature même de l'air fixe & du fel vitriolique, qu’il tient en diffolution. Et qu'on ne croye pas que cer acide foi différent de l'acide vitriolique , parce que la teinture de tournefol, lorfqu’on y a dif- fous de l’huile de vitriol en fubftance , continue de fe conferver rouge, car c'eft précifément ce qui doit arriver : l'acide vitriolique dans l'air fixe eft diffous & rendu volaril par l'air même; ain lorfque l'air quitte l’eau, cet acide doit fortir avec lui , & il en fort en effet; mais l'huile de vitriol mife en fubftance dans la rein- ture de tournefol faite par l’eau , n’eft point unie avec un fluide volatil qui puiffe l’entraîner avec lui : là elle eft difloure dans l’eau; mais elle n’eft plus volatile , & voilà pourquoi elle ne peur plus fi facilement, ni par elle-même s’évaporer ; cependant , comme l’eau à la fin s’'évapore peu-à-peu , & que les vaiffeaux même expofés à 286 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, l'air libre , & plus facilement encore dans un lieu chaud, fe defsè- chent tout-à-fair, alors la couleur rouge diminue peu-à-peu dans cette eau , jufqu’à ce qu’elle fe perde tout-à-fait: c'eft ce dont je me fuis afluré par des expériences répérées : joignez à cela que l'huile de vicriol étant diffloute & étendue dans une grande quan- tité d’eau , fes molécules font alors plus défunies, & elles devien- nent par-là même plus mobiles. L'eau rendue acide par l’air fixe , ne rougit pas la teinture de violettes faute d'affez d'acide; mais elle rougit celle de tournefol, parce qu'une moindre quantité d’acide fufhit pour la rougir : toutes les expériences chymiques conftarent certe vérité , & j'ai obfervé Won peut à une petite quantité d'huile de vitriol ajouter tant bia , qu'elle ne rougit plus la teinture de violettes , tandis qu’elle rougit encore celle de rournefol. Le favon fe difflout mal & moufle difficilement dans l’eau aëtrée ; c'elt ce qui arrive aufli dans l’eau commune unie à un peu d’acide vitriolique : le lait qu'on fait bouillir dans l’eau chargée d'air fixe, ne s’y coagule pas faute d’affez d'acide , comme il ne fe coagule pas non plus dans l’eau bouillante commune rendue acide par une fi petite quantité d’huile de vitriol , qu'en rougiffant à peine la teinture de tournefol , elle ne puifle point rougir celle de vio- lettes. L'expérience des alkalis, au travers defquels on fait pafer l'air fixe, prouve feulement que l'acide vitriolique a moins de rapport avec ces fels qu'avec l'air fixe, & cela doit être , car certainement de tous les diffolvans de l'acide vitriolique, l'air fixe , eu égard à la quantité & au poids, eft, fans contredit , le plus puiflant, de forte que mème diffous dans l’eau, il ne lâche pas prife , tanc eft grand le rapport entre ces deux fubftances. D'après ce que nous venons de dire, il n’eft pas difficile de con- cevoir pourquoi l'air fixe, fi l’on en croit les Médecins , eft fi fa- lutaire aux malades en comparaifon de l'acide vitriolique , qui n’eft diffous que dans l’eau : en effet, l'acide de l’air fixe atténué , exalré & réduit par ce mème fluide en des molécules infinimenr petites & imperceptibles, peut fe gliffer par - tout avec lui ; il peut paler à travers des corps, peut mème pénétrer dans les fubftances folides , & s’entremertre parmi les fibres; mais on ne doit pas attendre de pareils effers de l'huile de vicriol , laquelle fans le fecours de l'air fixe , eft moins diffoute par l’eau , & moins pénétrante , foit que les Médecins l’adminiftrentc ainfi aux malades , ou fous toute autre forme que ce foir. L’acide diffous par l'air fixe, ou l’eau rendue acide par cet air , étant parvenue aux inteftins, l'air fixe y eft entièrement abforbé , fe fair SUR L'HIST. NATURELLE ET LES ARTS. 287 fait jour même à travers des fibres, & corrige ainfi la putréfaction déja commencée : l'acide alors ainfi diffous , atténué & volarilifé, peut vouc faire, parce qu'il fe trouve préfent , & qu’il touche par- tout ; tandis qu'étant diffous fimplement dans l’eau, loin de péné- trer & de s'unir aux parties , il n’en peut tout-au- plus lécher que la furface extérieure ; ce qui me fait croire que l'efficacité de cet air, relativement à la Médecine , tient elfentiellement à la petite portion d'acide vitriolique , qui ne devient fi active & fi pénétrante, que parce qu'il l’a fingulièrement diffoute & volatilifée ; c’eft en effer ce qu'on obferve dans tous Les remèdes les plus aétifs connus : ce n'eft jamais que des molécules imperceptibles & très-mobiles , qui s’infinuent & fe combinent dans les humeurs animales, & fonc tout : l’opium, le quinquina , le mercure nous en donnent des exemples frappans. La décompofirion de Pair athmofphérique par l'éle&ricité , eft de toutes les découvertes faites de nos jours par le célèbre M. Prieftley, ka plus belle, & celle qui, fans doute, fera époque en Phyfique. Il a fait paller une étincelle électrique à travers un cylindre de criftal rempli en partie de teinture de tournefol, & en partie d’air athmo- fphérique, & il a obfervé que la couleur de certe teinture fe change en rouge , & que l'air naturel, de fain qu'il étoit, devient nuili- ble & meurtrier. Cette expérience de M. Prieftley eft crès- sûre; je l'ai répétée ici avec le mème fuccès plufeurs fois, & par différens moyens , afin de pouvoir mieux m'aflurer de la nature de l’acide qui rougit le tournefol. Mes effais ne font pas encore affez nombreux pour les rendre publics ; mais il eft toujours certain que cer effer fur- prenant & inattendu , marque dans l'air athmofphérique & fain , un principe d'acide volatil naturel, Cer acide naturel de l'air athmofphérique , a des propriétés tout- à-fair différentes de celles de l’acide vitriolique, ou de l'acide de l'air fixe, & il n'a aucun rapport avec pas un des acides que prépare la Chymie. L'air qu'on refpire neft fain qu'autant qu'il eft intimément uni avec fon acide naturel, puifqu'on obferve qu’en féparant fon acide à l’aide de l'érincelle électrique , cet air devieut fur le-champ mal- faifant & meurtrier | pendant que l'air fixe, tout chargé qu'il eft de l'acide vitriolique, ne perd pas pour cela fes qualités malfai- fantes, & on ne le refpire pas impunément : ces acides font donc aufli différens entr'eux que les effets divers qu'ils nous préfentent : Pair, dans Le premier cas , ef& par la préfence de fon acide, fain & bienfaifant : dans le fecond cas , l’acide ne Le corrige point , & il gefte toujours nuifible & dangereux. Que l'on prive l'air athmofphérique de fon acide naturel, il de- Tome VI, Part, IL. 1775. P p 238 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE; vient air fixe, air meurtrier : qu'on umifle l'acide vitriolique à Pair fixe , il n’en fera pas moins air fixe & malfaifant : on voit donc que l'acide vitriolique de l'air fixe eft différent de l’acide naturel de l'air athmofphérique. Ainfi, bien loin de penfer que l'air fixe foit naturellement acide, je ferois mème difpofé à le croire fixe , précifément parce qu'il eft privé de fon acide naturel. L'air fixe extrait des corps fans le fecours des acides , l'air fixe qui fe dégage des animaux en putréfation , ne laïffe pas d’être air fixe & malfaifant, & il n’en eft pas moins abforbé par l’eau, quoiqu'il ne foit pas acide, & qu'il n'ait pas non plus la fa- culrté de rendre acide l’eau : d’un autre côté, l’air athmofphérique privé de fon acide naturel par le fluide éleétrique , devient meur- trier , eft abforbé par l’eau , & acquiert enfin les propriétés d’air fixe ; il eft donc devenu air fixe, en ce qu’il a été privé de fon acide naturel. Les Recherches Phyfiques fur les propriétés de l'air naturel & de Pair factice , dont les Philofophes , peut-être par pure curiofité, s’oc- cupent depuis quelque tems avec tant de fuccès, pourroient bientôt devenir très-intéreflantes , & il femble que nous touchions à quel- qu’une de ces grandes époques que la nature marque dans le long intervalle des fiècles par quelqu’une de ces découvertes importantes pour le bonheur du gente humain. Que l’on s'attache donc avec ce courage obftiné, qui fut de tout tems la fource des plus utiles inventions, à la recherche du carac- tère & des propriétés de cet acide naturel qui exifte dans l’air ath- mofphérique , & qui le rend bienfaifant & propre à la tefpiration, & l’on fera bientot en érat de trouver des moyens efficaces & sûrs de rendre meilleur lair mème que nous refpirons. Voilà un objet qui intéreffe également tous les hommes :les Souverains mêmes qui, comme les autres, partagent l'utilité publique, en pourtoient fingu— lièrement faciliter les moyens & la découverte , découverte fans doute plus utile que celle des longitudes qu'un fiècle avant on croyoit fu= périeure à routes les forces de l'efprit humain , & que lefpoir feui d’une récompenfe vient de faire éclortg de nos jours. En attendant, une chofe très-urile fans doute , ce feroit un inftru- ment qui nous marqueroit la bonne qualité de l’air que nous ref- pirons , & qui, thermomètre nouveau , nous en indiqueroit les dif- férens degrés de pureré & de falubrité ; nous ferions alors avertis à chaque inftant du danger où nous ferions expofés , & l’on voit de quelle refource il pourroit être pour notre confervation : c’eft cer inftrument, ou plutôt quelques-uns de ces inftrumens d’une utilité femblable , que j'ai inventés depuis peu, & que je me propofe de SUR L’HIST. NATURELLE ET LES ARTS. 289 . fn a . . . . . faire connoître dans un petit Ouvrage que je vais faire imprimer fur l'air nitreux qu'on tire des fubftances métalliques. tee LEE Ed EE LT PRO BR ET INQUIE DaE CHOSMNB NN A CTLS OU N'ES Intéreflant pour les Arts & pour le Commerce ; Par M. Le C. de'M. Trouver la fomme de cette férie, & la valeur de toutes les inconnues qui la compofent. x x xt tt x!Y Gus DT DC UT PU 2 +p+g+s ++ &c. a + a x! xl xl 144 V CORRE PER + HEe. Hs Hit Re 2 x xuI x1V (2) EEE ee. sig + Ke. q $ ga + ES AIDANT: LU LULU s += Sc... ‘ # FES Suite dans laquelle le plus grand terme eft au plus petit +: 8. 1: À l'égard des quantités, 4, p,q, s, £, &c. ( dont le nombre eft y}, on a, P=A—-Y, {=p—J+Ii, 5=q—y+i,t= S—7+ 3, & ain de fuite. Pipes 290 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE; MOETCRSERREENROMONPAIS SE Sur le moyen de perfectionner les ifolemiens pour toutes fortes de Machines électriques ; 0 Par M. DETIENNE, Ecuyer, Avocai en Parlement, Huiffier ordinaire du Roi en fa Grande Chancellerie de France, prémier Huf- fier en fon Grand - Conjil. Homo Natura Minifler & interpres, tantum facit & intelligit, quantum de Nature ordine, re, vel mente obfervayerir , nec amplius [cie , aar poteft. Bacon, Novum Organum, Liv, 1, Aphor, 1. fs: Phyficiens éleétrifans diftinguent les corps en deux efpèces : ils appellenc Îes uns £Ézeéfriques , Idio-életiriques | ou non-conduleurs 3 les autres Anéleëlriques où Conduiteurs. Ils admerttent qu'un corps électrifable par frottement , peut l'être par communication : on peut ajouter ; lorfqu’il eft devenu éleétrique par ce dernier procédé , qu'il peut encore tranfmertre la vertu qu'il a reçue ; à des corps qui lui feroient contigus. © M. Dufay voulut établir deux efpèces d’éleétricités , l’une virée, l'autre réfineufe. Ce fyftème fouleva tous les Phyfciens , & fur - rout le célèbre Profeffeur du College de Navarre ; d’autres rapportèrent ces deux éleétricités à l’hyporhèfe de celles pofirive & négarivs : plu- fieurs prétendent qu’elles diffèrent feulement en ce que cette der- nière eft plus foible & plus langyiffante. Il faut rendre juftice aux peines & aux foins des Savans qui ont les premiers travaillé & apperçu l'utilité de connoître un principal agent , que la nature fe plaît tant à employer dans fes ouvrages. Le fluide électrique, quelle que foit fa nature , eft fi expanfble Jorfqu'il eft actilifé, qu'au moyen de l'extrème ténuité de fes par- ties , il eft crès- difficile à être traité & manié par les Phyficiens: il eft donc néceffaire de perfeétionner les machines , en forte qu’il ne puifle s’en échapper en perte que le moins qu'il fera poflible. On à donné une differtation à cet égard dans le Journal de Phyfi- que du mois de Juillet dernier, fous ce vitre : Recherche pour augmen- ter La force de l'éleétricité de routes fortes de machines ; par une armure SUR L'HIST. NATURELLE ET LES ARTS. 29: adaptée au premier conduéleur : \es expériences qui y font expofées , ont été vérifiées avec M. Delor, ainfi que celles qui fuivenr, Il feroit avantageux que les corps qui fervent à ifoler le premier conducteur, fuffent parfaits non-conducteurs : pour lors il n’y au- roit aucune tranfmiflion en perte au plancher par cette voie , ni par les autres ifolemens employés pour les expériences , fur-tout pour les machines qui donnent les électricités poñtive & négative. Au défaut d’un corps ou d’une fubftance capable de couper toute communication entre le fluide éledrique actilifé & les corps qui peuvent le tranfmettre plus ou moins promptement au réfervoir commun : ne feroit-il pas poffible d'y parvenir Par approximation ; en forte que la ATEN étant infiniment petite pendant le tems d'une expérience , elle ne puiffe ètre fenfiblement nuifible 2 Ce moyen ferviroit dans le befoin , pour corriger les imperfections de circonftances qui pourroient avoir lieu en employant une fubftance qui paroïîtroit convenable. I ne faut s'attacher à aucune opinion, quelque célébrité qu’ait acquis fon Auteur : il faut, en Phyfique , procéder par l'expérience & les principes qui en dérivent, fans négliger la marche géométrique, PRO PAOMSMRAR AT ON. Le verre poli & les réfines étant employés alternativement avec des corps conducteurs pour fervir d’ifolemens ; les parties qui appro- chent le plancher , ne lui tranfmettent prefque point d’éleétricité : on peut annihiler cette perte ; foible pendant le tems d’une expé- rience, par la compenfation d’un gain en une portion en force qui eft fenfible , pendant que la perte ne peut être mefurée. Les expériences qui fuivent, établiflent cette propofition. PRORQE D AR A TL O NES" I. Ayez plufieurs bâtons de cire d’Efpagne & plufieurs con- duéteurs parfaits: 1°. Ifolez fur du verre un bâton de cire pouf fecond conducteur; qu'il foi hors de l’athmofphère du premier conducteur , qu'il lui communique par un prolongement de métal : 2° mettez en contact avec ce fecond conduéteur de réfine , un troifième de métal : 3° un quatrième de réfine en conraét avec le troïfième : 4° un cinquième de métal : $° un fixième de réfine : 6° un feprième de métal, &c. Tous ces conducteurs doivent être pofés bout-à-bout , ifolés & en contact les uns avec les autres, 592 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, LL. Servezevous d’un pied de bois, qu'il foir fec; attachez fur ce ied une baguetre de verre plein, d'environ huit pouces de hauteur; établiffez fur cette mige un fupport formé par une traverfe horifon- tale , qui portera deux riges ou fupports en bois , un à chaque bout de la craverfe ; vous atracherez au fommet de ces deux fupportsune autre baguetre de verre , parallèlement à la traverfe. On peut fe fervir d’un guéridon; on n'aura de changemens à faire qu'à la tige mobile , & le picd fervira à d’autres expériences. Il eft beaucoup mieux pour ifoler, d'employer alternativement le verre & le bois ; il en coûtera moins. Faites mouvoir le plateau , globe ou cylindre, & procédez aux expériences. É ENS XINPARE MRSTNUE RENAN CAPES. I. Approchez les boules de M. Canton des différens conduéteurs fuccellivement ; vous verrez ce qui fuit. 1°, Elles s'écarteront en les préfentant au-deffus du premier conducteur & de fa communication, ce qui doit être : 2° eiles s'é- carteront auf en les prélentant au-deffus du fecond conducteur qui elt de réfine, du troifième qui eft de métal, & du quatrième qui eft de réfine : 3° elles ne s’écarteront plus en les prefenrant aux au- tres conducteurs : 4° une boule feule , un fil de lin feul , ne feront atrirés par ces derniers conducteurs, qu’en les préfentant prefqu'en contact. 1. Approchez contre le premier conducteur le gnéridon, en forre que la baguette de verre fixée au fommer du fupport, foir en contact immédiar avec ce conducteur. Préfentez les boules de M. Canton au pied du guéridon, elles ne s'écarteront que lorfqu'elles feront dans l'arhmofphère du premier conducteur ; une boule feule ne fera point attirée près le plancher ; un fil de lin ne le fera qu'étant prefqu’en conraét. 1LI. Servez - vous de l’éleétronome de M. Lane ; prenez avec, la diflance de l'érincelle, les ifolemens étant placés; merrez enfuire une chaîne, pour faire communication au plancher & au pied de la machtne , l’éclar vous fera appercevoir un peu d’accroiflement à l’é- tincelle, ce qui compenfe au moins la perte occafionnée par la pe- tire imperfection de l'ifolement ; il femble plutôt qu'il y a un gain en accroillement, RTS Fes F: A"T ” AB à ‘ >, SUR L’'HIST. NATURELLE ET LES ARTS. 293 RAM RO Tire: s: LL I. Il faut, chaque fois qu'on s’eft fervi des boules, avoir foin de les coucher avant de les préfenter à un autre conducteur. IL. Les effets varient comme les aurres phénomènes électriques. IL. On peut par ce moyen, tranfmertre l’éleétricité avec ‘des degrés de force différens. IV. On voit fenfiblement combien eft grand l'avantage des com- munications , lorfqu’on fait attention à les bisn employer : leur in- vention efkt due à une nation rivale ; elle enrichit continuellement par fes travaux & fes dépenfes, les fciences & les arts. V.La chaîne qui fert de communication au pied de la machine, fair écarter les boules, en donnant un accroifflement de force, parce qu'elle a communication avec le corps frotté, dont l’érat eft diffé- renr de celui da corps frottant; c’eft ce qui donne une répercuflion du fluide qui feroit tranfmis en entier par le pied du guéridon au plancher : les balons qui compofent le fluide éleétrique , font re- pouifés par l'air contre le conduéteur , comme les corps légers entre deux platines ; répercuflion qui accroît lorfque le corps qui repouñle, eft comme l’armure , en contact avec le pied de la machine , à caufe des deux états differens. PRO E VENUE: Elle réfalte de la compoftion & décompofition des expériences; ce qui eft très-facile. Ce qui fera expofé dans les Obfervarions , forme la démonftra- tion. OLD Ste PR AMEA ENT Te OL ENS; I. Le verre poli , même enduit de réfine, & les corps qu'on appelle jufqu’à préfenr électriques, font conducteurs , ainfi que le foufre & les rélines. Rien de plus facile à éprouver. Le fupport du guéridon de la feconde expérience, ifolé par une baguette de verre plein, donne des étincelles lorfqu’il eft éleétrifé, la baguette fupérieure étant en contact avec le premier conduéteur. Auf, il ne paroît pas qu'il foit exact de diftinguer les corps en élec- tiques & conduéteurs ; aucuns de ceux employés n'ifolent parfaite- ment. C'eft pour fe conformer à l’ufage qu'on a employé ces expref- 294 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, fions dans la differtation précédente. Ces différentes dénominations feroient plus exactes en fe fervant des expreflions, éleéfrico-conduc- Leurs , & conduëteurs ou arféleétriques. 11. Vous pouvez, dans la première expérience, éleétrifer la bou- teille par l’attouchement de fon crochet au fecond conduéteur , & elle donnera la commorion ; ce: que vous ne pouvez obtenir par fon contact au troifième, quatrième, &c. 111. Lorfque la Nature forme des conducteurs ainfi variés & con- tigus , & qu'ils font armés, ne doit-il pas fe préfenter des varia- tions dans les méréores, & fur-rout lors de ces crifes terribles qui font trembler les plus intrépides? Heureux qui peut, au milieu de fi horribles cataftrophes , en connoiître les caufes , les examiner fans en craindre les effets, & mettre à fes pieds la ciainte de la mort! Felix, qui potuit rerum cognofcere caufas : Quique metus omnes & inexorabile fatum Subjecit pedibus , firepitumque Acheruntis avari. Virg. Georg. Liv. 2e IV. Les étincelles qu'on voit éclater entre les quarrés ‘d’érain ; donc eft armé un bocal en communication à un premier conducteur qu'on électrife , fonc sèches , quoiqu'elles foient un effer de l’élec- tricité négative. On fait qu'elles ceflenc lorfque l'extérieur a perdu ce qu'il contient naturellement & qu'il eft électrifé en moins. Les érincelles qu'on tire des réfines, fonr plus molles que celles du verre électrifé négativement. Il ne paroït donc pas qu'il y ait une identité parfaite entre les électricités négatives & réfineufes. Le P. Beccaria a traité de cette dernière, dans fes Lettres , avec toute la fagacité qu'on lui connoîr. V. Il paroït que ce n’eft pas parce que le verre eft non-conduc- teur & capable d’ifoler parfaitement, ce qui n’eft pas exact, que la bouteille de Leyde, les jarres, les carreaux, font fufceptibles de détonations. C’efl plutôt parce qu’ils peuvent fervir de magalin, à caufe de limperméabilité du verre. Car le verre, formé dans le feu , peut être imperméable au principe inflammable. Ne feroir - ce pas une propriété particulière aux vitrifications ? Léibnitz, dans fa Differtarion intitulée Protogea , $ 3, dir que Ja matière vitrée eft la manière primitive; & au 6 19, la pierre appellée belemnire où lyrcurium , qui ef? éleëtrique ; fe trouve aux en- virons d'Hanovre, ou plutôt du Fort de Marienbours , dins une caverne ; qu'il y a beaucoup de bitume en ce lieu. Les veltiges its diquent qu'il y a eu un volcan, à SUR L'HIST. NATURELLE ET LES ARTS. 195 VI. Si les Phénomènes électriques paroiffent contredire les loix de la Nature, combattre les principes de la Méchanique, c’eft que cerre fcience eft encore près de fa naiflance. On établit des loix géné- rales lorfqu’elles ne le font pas. 11 doit aufli y avoir dans les effers naturels, des différences, des variations , qui n’exftent pas dans les démonftrations qui font intellectuelles. 11 faut déplorer avec le favanr Evèque d’Avranches, la foibleffe de l'efprit humain, M. Huer, de imbecillisate ments humanæ , & admirer avec Nieuwentyt, dans les merveilies de la Nature, une fagelle infinie qui exécute les plus grandes chofes en employant les plus perites. Ses œuvres, par leur beauté , leur perfection, furpaflent l'intelligence humaine. VIL D'après les expériences ci-deflus expofées, il eft poffible d'a- dapter des ifolemens moins imparfaits que ceux qu'on employe. Pour les avoir parfaits, il faudroéc une fubftance non électrifable par com- -Munication, ou qui l’étant , ne tranfmit aucune portion aux autres corps qui lui feroient contigus. Il pourroit encore arriver des imper- fections de circonftances. 11 feroit avantageux d'y remédier. Lorfque les Géomètres ne peuvent parvenir à une folution rigou- reufe & exacte, telle que par la Géométrie élémentaire , ils em- ployent des valeurs approchées ; enforte qu'on parvient le plus près qu'il.eft poflible, à l’exacte folution. On fe fert de la méthode des fuxions, ou fuites infinies, ou des calculs différentiels & intégrals. On y néglige les quantités infiniment , ou plutôt indéfiniment pe- tites , telles que les derniers termes d’une férie, &c. On les re- garde comme zéro , & l’on obtient des valeurs qui approchent d’au- tant plus de l’exacte folurion, que l’on a porté plus loin le calcul. Si l’on ne peut avoir un olement parfai, il fera donc régulier d'employer celui qui ne peut tranfimettre qu’une très petite quantité d'électricité en perte , pendant le rems d’une expérience. Cette por- tion en perte pourra être regardée comme infiniment petite , rela- tivement à celle qui fera employée fans perte. La partie en perte, peut pour lors être regardée comme infiniment petite, & être nc- gligée comme égale à zéro. Ce procédé eft géométrique, & l’on peut conftruire des ifolemens plus parfaits que ceux dont on fait ufage. Le plateau mis en mouvement , il peut fe former autour un tour- billon dont les forces centrifuges font en raifon inverfe des quarrés des diftances au centre , la vitefle des balons en raifon inverfe des racines quarrées de ces diftances. La propagation par les conducteurs, eft renforcée par les répercuflions. On pourra donc avoir les valeurs des quantités fluenres de leurs fluxions .& de leur relation, pour en faire l'application à l’armure & aux ifolemens, Le point , ou É quan- Tome VI, Parr, II, 1775. Os 296 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, tité Auente deviendra un minimum, & déterminera le maximum de l’i- folement. Conftruilion d'un ifolemenr. Etabliffez fur le plancher un fupport folide en bois. Sur ce fup- port, fcellez une tige de verre plein. Sur cette rige de verre, une de bois. Sur celle de bois, une de verre , & ainfi de fuite , juf- qu'à ce que le premier conduéteur foit fupporté par une douille fur une vige de verre. Il eft bon que les tiges de verre ayent cha- cune fi pouces de hauteur, hors des fcellemens dans les tiges de bois. : Il ny aura prefqu’aucune tranfmiflion au plancher, & de-là au réfervoir commun, fur-tout en élevant les machines & le FRE conducteur beaucoup plus qu’on ne fait actuellement, & multipliant les ifolemens autant qu'il fera néceffaire. Il s'écoulera trop peu d'é- ledriciré en perte, pendant le tems d’une expérience, pour qu'elle puiffe ètre fenfble, Il ne faut compter de perte que celle qui a lieu, pendant qu'on met une batterie en état de la faire détonner. }! fera avantageux de faire communiquer le pied de l'ifolemenr,, en y attachant une chaine qui communique avec le plancher, & le pied ou fupport de la machine. Or retrouvera, par ce moyen, un accroiffement plus for que la petite perte qui réfulre de l'ifo- lemenr, quoique fi foible, qu'elle ne puille être mefurée. Remarque. Il feroit mieux d’armer toute la machine en laiffant un courane d'air , & faire porter les ifolemens par lParmure , s’il eft poflible, Mais en opérant d’après les principes pour l'armure & l’ifolemenr,. il faut avoir égard à la pofition, à la place qu'on peut employer, & fe prèter aux circonftances. M . ah Le furplus tient à la fagacité du Phyficien, & à l'adreffe de l'Artifte. : VIII. Les machines éleétriques étant conftruites d’après ces prin- cipes , & armées ainfi que les batteries , on pourra rendre ces der mières plus confidérables. Il eft encore nécelfaire d’avoir une mefure exacte de l’intenfré. Toutes celles imaginées jufqu'a préfent , quelques ingénieufes qu’elles puiffent être, ne fatisfont pas encore. Elles font routes perte. Les frotroirs font imparfaits. Il faudroit les compofer , enforte que leur frottement für idenrique à celui des mains. On entend celles qui ont les qualités requifes. SUR L’HIST. NATURELLE ET LES ARTS. 197 ” On pourroit, avec des machines plus parfaites que celles dont on fait ufage , avec une mefure exaéte, & des tables météorologiques dreffées avec foin , en comparant plufieurs fois par jour , les varia- tions de l'éleétricité avec l’état de l’athmofphère, parvenir à des découvertes qu’on n’a pu efpérer jufqu'à préfent. Il faut, pour l’en- treprendre , un Phylicien où Amateur, qui ne foit pas détourné par des occupations étrangères, ou aidé par un Affocié intelligent. Il faut aufli la pofition d'habitation favorable. On croit devoir indiquer aux Phyficiens éleétrifans, ces expérien- ces & obfervations , pour concourir, avec la differtation précédente, au but qu’ils fe propofent. Des objets aufli érendus , méritent leur attention. L’éleétriciré & le magnétifme mieux connus , enrichiront confidérablement la Phyfique. C'eft en obfervant l’hypothèfe des éleétricités poftives & néga- tives , que la recherche fur l’armure s’eft préfentée naturellemenr. Des obfervations fur l'électricité des réfines , ont conduit à celle fur les ifolemens. GC ON CC L,U S:1.,0 N. Les corps appellés ordinairement idio-éleéfriques ou non-conduileurs, propagent & rranfmertent l'électricité à d’autres corps qui leur font contigus; ainfi ils ifolent imparfaitement. Ils peuvent être moins imparfaits , fi on les difpofe alternativement & en contiguité , avec des corps conducteurs ou anéleétriques. L'imperfeétion rhème qui reftera , fera corrigée, en leur adaptant une communication au plancher & au pied de la machine. Se Le tout réfulte de leur ordre ou permutation ,& l’on peut en- gore dire avec l’illuftre Chancelier : Ad opera , nil aliud potef} homo , quam ut corpora naturalià admo= veat, & amoveat : reliqua , natura int&s tranfigir. Bacon , Novum Organ. Liv. 1, Aph. 4. Les limites des Sciences fe reculent continuellement, les Arts s’enrichiffent par d’utiles découvertes. La Phyfique expérimentale pa- soît comme naiffante. Une nouvelle branche de cette fcience fem- ble ne faire que commencer à fe montrer, & elle occuperoit plu- fieurs années, fi l’on vouloit la préfenter dans toute l'étendue dont elle eft fufceprible. L’aiman a une étroite affinité par fes propriétés, A1 eft peu connu. L'éleétriciré & le magnétifme feroienc - ils des modifications d’un feul & même agent ? Il faut un travail pénible, Qg2 193 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, & qui exige plufieurs connoiffances des dépenfes confidérables pour exécuter les machines. & les expériences. Quelles reMources fi l’on établiffoit dans les grandes Villes plu- fieurs Sociétés philofophiques ,ayant une Correfpondance réciproque ! Puiflent les habirans fentir leur urilité !'Les Savans trouveroient des facilités, leur nombre accroïtroit , les Amateurs y feroient utiles par leurs, obfervarions, l’opulence, fe feroit honneur de contribuer à les foutenir , les Grands une gloire d’en être au moins les proreéteurss L'émulation, animée par le goût pour les Sciences & les Arts, bannit l’oifiveté , détruit l'indigence. L’efprit philofophique, des vues plus fublimes, refferrent les liens de la Société. Une telle harmo- nie fait la gloire des Souverains, les délices des Grands |, & le bonheur des Peuples. FAUTES à corriger dans la Differtation fur l'Armure inférée au Cahier de Juillet 1775 , page Sr. PAGE 81, vers la fin, au lieu de 2° & 3°, life, 19 & 2% Page 82, ligne G, au lieu de boucle, iféz, boule. Idem, ligne 10 , diamètre : it efl, /ifez , diamètre , eft. Tdem , ligne 14, pieds ; lift , pouces. i Idem , ligne 31, Grain, /iféz, étain. Page 83, ligne 22, un autte cylindre , fé, une autre du cyliné dre. Page 84, ligne 11, Vilc & Epinus, Life, Wilke & Æpinus. Page 86, ligne $, obfervation foiblement imitée, Zifez, foibles ment imités. Idem ; ligne 6, engloutiront, Zfe, engloutiffent. aise SUR L’HIST. NATURELLE ET LES ARTS. 205 En RAT EE A NON Des Analogies les plus fingulières & les plus importantes du Frorp & du CHaup, avec l'explication de ces Analogies ; Per M. CHANGEU x. DSP HET ON SEAT ETC ENT Se La chaleur eft l’effec du feu selle dénote toujours dans les corps chauds la préfence de ce grand agent. Le froid paroïit n'être que le défaut ou l'abfence du feu: dans un corps. Un mème corps peut pafler fucceflivement du froid au chaud , & réciproquement : dans ces états fi différens , il préfente fouvent des phénomènes femblables, ou qui paroiffent tels : c’eft-là tout ce que Fon “doit entendre par l'analogie du froid & du chaud. Voyez fur ces définitions le N° XXIII. | D'où vient cette reflemblance dans les effets dûs à des caufes qui femblent abfolument oppofces ? C'elt ce que nous tâcherons de découvrir en expofant ces reflemblances , & ce que nous ferons quelquefois forcés d'abandonner en grande partie à la fagacite des lecteurs. Il faut remarquer 1°. Que l’analogie dont nous parlons , fe re- marque lorfque le froid & le chaud fonc extrèmes , ou approchens de cer état, 29. Que le froid & le chaud extrèmes font relatifs à la nature des corps : le feu, par exemple, qui confume la paille , n’eft pas capable d’attaquer la pierre de manière à l’altérer , & le feu qui al- tére la pierre , ne décompofe pas certains métaux. Nota. L'on fait que l’analogte eft le grand inftrument de nos con- noiffances 3 ainfi, les rapports que nous allons examiner , ne font pas un objet de pure curiolité; & comme ils font très- généraux , ils doivent nous conduire aux principes de plufeurs phénomènes de l& Nature. 300 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, LMP NRIE) AMNRIME ROME EXCUETONDM PATES De l'analogie du froid & du chaud , la fichereffe de l'air & de la / Lerre, Dans les grandes chaleurs, l'air devient fec & brülanr : la terre privée de fon humidité , fe defsèche, prend de la confiftance , ou quelquefois fe réduit en pouflière. Le froid exceflif, en condenfant & congelant les particules aqueufes & les autres fubftances hétérogènes qui fe trouvent dans l’athmo- fphère, rend l'air fec & âpre. Il defsèche également la terre. La féchereffe fur fi grande en Thuringe pendant le froid de l’hiver de 1750 , que ceux qui fe pro- menoient dans la campagne , faifoient voler la pouflière en marchant, comme dans les plus grandes chaleurs de l'été, & en éroient égale- ment incommodés : Guernerii Rolfincii, ord, & meth. med, lib. 2. chap. 4 fe page 111, Cer effet paroîr ètre dû, 1°. à l’évaporation qui , comme nous le verrons (N° 6.) eft produite par le froid comme par le chaud. 2°. À la fixation des parties aqueufes , huileufes & falines : ces parties arrêtées par le froid dans les pores des corps humides, lient plus fortement le folide dans lequel elles font interpofées ; c'eft ainfi que ces corps acquièrent la forme de dur ou de fec. © Dans la chaleur , ces mêmes molécules des liquides qui entrete- noient l'humidité ou la molleffe des corps, s’évaporent; il ne refte que les parties cerreftres, en forte que les corps deviennent aufli fecs & durs. La dureté & la féchereffe que produit le froid eft accidentelle , l'autre eft effentielle & permanente ; mais dans l’un & l’autre cas, l’efer actuel eft le même. LAS 20R EM AR 30% UU'E Sur de froid & le chaud , le fèc & l'humide Les anciens regardoient le froid & le chaud , le fec & l'humide £omme des chofes abfolues ; ils les diftinguoient foigneufement : ces qualités confidérées d’une manière abftraite , faifoient la bafe de la Phyfque des fcholaftiques. Il paroît au premier coup-d’œil, que le chaud doit produire la -féchereffe ; il la produit dans plufieurs occafons ; le fec n’eft donc SUR L'HIST. NATURELLE ET LES ARTS. 301 que l’effer du chaud, & n’en diffère tout-au-plus que comme l’effer diffère de la caufe. Mais d'un autre côté, le froid produir le fec dans plufeurs occa- fions ; il ne faudroit donc pas non plus diftinguer le fec du froid : le froid condenfe , rapproche, & mème il évapore l'humidité comme le fait la chaleur; l’eau elle-même devient un corps folide pendant les grands froids. La grande chaleur fond , liquéfie les métaux & les corps les plus durs, tels que le fable , les fels , &c. elle leur donne la fluidité & une forte d'humidité : le chaud n’eft donc pas diftingué de l’humide; ces réflexions démontrent que pour connoître les quatre qualités donr nous parlons , il eft-néceflaire de diflinguer les corps à qui elles aj= partiennent. Les qualités accidentelles & variables des corps font tout-à- fait relatives à la nature de ces corps. Si vous voulez rai‘onner fur les qualités d'une manière abftraite , vous tombetez nécellairement dans une foule d'erreurs. LV. in$1E0C: ON: IDiucE XlE:M; PxL.E, La Raréfaëlion. Si un corps a des pores affez grands pour contenir beaucoup d’huz fidité , l’eau ne fauroit fe geler fans fe dilater , & fans écarter les parties du corps qui la renferment les unes des autres ; ainf , les pierres tendres qui font expofées à la gelée avant que l’eau donc elles éroient abreuvées , en ait pu fortir par l’évaporation , fe fendent & fe convertiflent prefqu’en pouflière , de la même façon que fi elles avoient été calcinées à un feu très-violenr. Il eft vrai que dans cette efpèce de calcination impropre , opérée par le froid , il n’y a point lieu à la décompofñtion, mais à la dé funion des parties. On dit que le froid condenfe & que le chaud raréfie les corps ; cette règle, comme on le voir, n'eft pas fans exception : les corps les plus durs lorfqu’ils font remplis d'humidité , fe. fendent ; comme nous venons de le dire, pendant la gélée : on remarque une pareille raréfaétion dans les végétaux. (Voyez le N° VIH), & fes fuites leur font auf funeftes. ! Le froid fait augmenter fenfiblement le volume de l’eau ,-& ik paroît que l’eau fe raréfie à raïfon de la ne d'air qu'elle contient ; cependant l'air eft condenfé par le froid. On peut rendre raifon de cette efpèce de paradoxe. L'air contenu dans l’eau éft dans un état de diffolurion , & lorf- . ! 302 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, . que l’eau fe refroidir , elle doit laiffer échapper fon air à- peu-près comme elle laiffle échapper les fels qu’elle vient en diflolution. {Voyez le N° V). L'air en fe raffemblant au centre de la liqueur , devient claftique , & occupe un plus grand efpace que ,lorfqu'il étoit divifé prefqu'à Y'inGni : il nef donc pas étonnant que le froid qui condenfe l'air ; produife une véritable raréfaction dans un liquide : on peut expli- quer de la même manière la raréfaétion des corps qui contiennent beaucoup d'humidité { 1 ). Une chofe remarquable, c’'eft que l’eau glacée augmente d’un quatorzième , & que l’eau dans l’état d’ébullirion , c’eft-à dire dans J'érac de plus grande chaleur , augmente précifément de la mème quantiré. N. B. Que je ne parle pas de l’eau réduite en vapeur dont la male fe raréfie alors d'une manière prodigieufe, parce qu'elle fe dé- compofe , ainfi il ne faut pas artribuer cet effer à la fimple chaleur, mais à la nature même de l’eau, puifque l’on fait que l’eau dans l'état d’ébullirion (& avant qu’elle fe réduife en vapeur) éprouve le plus haut degré de chaleur dont elle foit fufceptible; c'eft ce dont on peut fe convaincre par le moyen du thermomètre. VANUT RO RSA EME EXNE MoPÈRE: On deffale l'eau de la mer par de froid, auffi-bien que par la chaleur. Si l’on foumet l’eau de la:mer à la diftillarion, le fel qu’elle con- tient étant fixe & peu évaporable , refte au fond de la cucurbite , &c l’eau qui palle dans le récipient , eft légère & fans faveur ; elle fera même potable , fi on la dépouille de la partie bitumineufe volatile & nauféabonde qu’elle conferve. Mais on trouve dans les Actes de Leipfick du mois de Seprem- bre 1697, que l'eau de la mer perd fon fel en fe glaçant , lequel fe dépofe au fond du vaifleau , & cerre glace dégelée ; devienc une æau-très- douce : les Brafleurs à Amifterdam s'en fervent pour faire de la bière. On fait que plus l'eau eft chaude, plus elle diffout de fel : plus donc le froid fera confidérable , plus la qualité diffolvante de l'eau diminuera ; ainf l’eau qui acquiert le degré de froid le plus grand, ceft-à-dire Feauglacée ; abandonne fon fel , parce qu’elle perd prefqu’entièrèment fa propriété diffolvante. / EE (1) Voyez cejendant fur ce fujet le n, xxx g Lo A SUR L'HIST, NATURELLE ET LES ARTS. 303 VI QUATRIÈME EXEMPLE. L'Evaporation. Le froid & le chaud produifent fur les liquides un même effer; qui eft l’évaporation; cette évaporation peut être fenfble ou infenf- ble , fuivant le degré de froid & de chaud. Couvrez un vailleau rempli d’eau & expofé au feu; fi vous en- levez le couvercle, il s’élévera une fumée épaifle. Caffez la furface d’une eau glacée (1), il s'élevera aufli une va- peur, mais à la vérité beaucoup moins confidérable. M. Gauteron de la Société Royale des Sciences de Montpellier , a fait des obfervations fur l’évaporation infenfble des liquides pro- duite par le froid ; elles fe trouvent dans les Mémoires de l’Acade- mie Royale des Sciences de Paris , année 1709, p. 451. On eft accou- tumé , dit l’Académicien de Montpellier, de regarder l’évaporation des liquides comme un effer de la chaleur ou du mouvement de l'air qui les environne ; mais il paroît furprenant qu'une caufe toute oppofée, produife à-peu-près le même effer , & que les liquides per- dent beaucoup plus de leurs parties pendant la plus forte gelée, que pendant que l'air eft dans un état. moyen , entre le grand froid & le grand chaud , c’eft-à-dire qu'il eft dans un état que l’on appelle tempéré ; c'eft pourtant ce que j'ai remarqué dans le tems de la plus grande gelée de cet hiver (année 1708.) J'ai obfervé que plus le roid a été grand , plus l’évaporarion des liqueurs a été confidérable, & que la glace mème qui étroit formée depuis quelques jours , di- minuoit confidérablement , & autant à proportion que les liqueurs qui réfiftoient à la gelée. M. Gauteron a fait à ce fujer quelques expériences qui peuvent donner lieu à en tenter un grand nombre d’autres : il a expofé , par exemple, au grand froid de la nuit du 7 au 8 de Janvier 1709, de l’eau commune , de l’eau-de-vie , de l'huile d'olives, de l'huile de noix , de l'huile de térébenchine & du mercure , une once de cha- cune de ces liqueurs ; le thermomètre ordinaire étoït au deuxième degré de fa graduation , & celui de M. Amonrons à 51 deyrés 6 lignes : l’eau fur bientôt gelée, & diminua dans une heure de fix grains, l'huile de noix diminua de 8 , l’eau-de-vie & l'huile de té- rébenthine. de 12 , chacune dans Le même rems d’une heure, & PT + (1) 11 faut que la quantité d'eau foir crès-grande pour que l'effet dont nous arlons Loic fenfble. Tome VI, Parc. II. 177$. Rr 04 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, l'huile d'olive & le mercure parurent plutôt avoir augmenté que diminué de leur poids ; le lendemain matin, la diminution de l’eau gelée fut de 36 grains, celle de l'huile: de noix qui ne gela point, de 40, celle de l'eau-de-vie & de l’huile de térébenthine qui réfif- tèrent auffi à la gelée, de 54 chacune ; le mercure & l’huile d'olive reftèrent à-peu-près au même état : le grand froid & les vents ont toujours produit une plus grande évaporation que le moindre froid & le rems calme. La glace la plus ferme a continué à s’évaporer , celle de l’eau & diminué de 36 grains depuis 8 heures du matin jufqu'à une heure après midi, & de 56 grains encore depuis une heure après midi , jufqu’à 8 heures du foir : l'évaporation de la nuit a été à-peu-près de la même quantité, c'eft-à-dire que la glace a fouffert environ 100 grains de diminution dans 24 heures, & cela dans un tems qui femble plus propre à la refferrer qu’à enlever la moindre de fes par- ties : routes ces'épreuves ont été faites fur une once de liqueur poids de marc , & dans des gobelets qui avoient deux pouces de dia- mètre. Il n’y a perfonne qui ne voye combien on peut varier ces ex- périénces , & qui ne fenre qu'il feroit curieux de faire fur cetre matière des recherches plus fuivies & plus exaétes que celles de l'Académicien de Montpellier : la quantité du froid peut être augmentée ou diminuée à volonté , par le mélange des fels dans la glace pilée, les vaiffeaux profonds ou plats donneroient des ré- faltats qu'il feroit aufli nécelfaire de comparer ; il faudroit varier les liqueurs & les mêlanger ; les corps mols eux - mêmes devroient être foumis à toutes les épreuves : il y a certains corps parmi ces derniers, que j'ai expofés au froid artificiel & naturel combinés, & qui m'ont paru fouffrir un commencement de raréfaétion & de dé- compofition. Pour favoir combien l'air influe fur l’évaporation des liquides par le froid , il conviendroit de faire glacer ces liquides dans le vuide -de la machine pneumatique : il m’a paru par les expériences que j'ai commencées fur ce fujer, qu'il y a une différence très - notable & capable de piquer la curiofté des Phyficiens. Le froid de l’hiver que M. Gauteron a choifi pour faire fes expé- riences , étoit fi confidérable, qu’il éroit pareil à celui du huitième climat , puifque dans les maifons des perfonnes les plus riches, on ne put sen garantir , & que peu de perfonnes pendant certains jours , goûtèrent un fommeil tranquille, malgré les précaurions qu'elles prirent : nous pouvons remarquer ici que fi elles n'euffenc point pris de précautions , elles auroient eu un fommeil très-profond mais funefte. (Voyez le N° XVII). SUR L'’'HIST. NATURELLE ET LES ARTS. 30; L’Auteur que nous venons de citer , a fait une autre expérience, il a couvert l’eau d'huile, il en a aufli enduit les parois du vafe ; & il a remarqué que l’eau a gelé environ demi-heure plus tard que l'eau expofée à l’air fans précaution , & en fe gelant, elle a formé un champignon de glace relevé d'un pouce fur la fuperficie de l'huile. D'où venoit ce champignon? de la raréfaétion de l'air contenu dans l'eau : cette raréfaction eft prouvée par l’évaporation fenfble dont nous avons parlé au commencement de ce Numéro, mais que l’'A- cadémicien de Montpellier ne connoifloit pas. Il a remarqué que l'huile de noix a garanti l’eau d’une gelée mé- diocre , ce que l'huile d'olive n’avoit pu faire. Il me femble que cela peut encore s'expliquer : l’huile d'olive fe grumèle en fe gelant, & peut avoir laiflé entrée à l’aétion de l’aic fur l'eau, ce que l'huile de noix fait beaucoup moins, ou même ne fait point du tout. Il faudroit encore effayer de mettre fur l’eau expofée au froid , de l'huile de rérébenthine qui ne fe gèle point, du moins par le froid naturel de notre climat; il faudroit enduire tous les parois du vafe de térébenchine ; ces effais pourroient appuyer le fentiment de M. Mariotte, qui croyoit que l'évaporation de l’eau pendant le froid , étoit due au dégagement de l'air contenu dans les liqueurs. Les liquides , dit M. Mariotte, contiennent beaucoup de parties d’air. (Ces parties font , fuivant fon calcul, dans un état de com- preffion dix fois plus fort dans les liquides que dans l'air libre.) Or les refforts de l’air ainft comprimés, fe débandent pendant la gelée par la diminution du mouvement du liquide; c'eft donc à l'explofon de ces. refforts que l’on doit rapporter l’évaporation des parties des liquides pendant la gelée ; l’état de compreflion doit don- ner en effet à ces reflorts beaucoup de force; de-là, la raréfaction, la légèrecé de la glace & les bulles que l’on y trouve. M. Gaureron ne veut point admettre cette explication comme fufhfante & capa- ble d'expliquer tous les Phénomènes de l’évaporation de la glace, parce que, dit-il, la glace, formée depuis quelques jours; diminue autant où plus que l’eau qui commence à fe geler, Le débandement de l'air dans une liqueur glacée n’a plus lieu , 8 par conféquent il ne devroit plus y avoir d'évaporation. L'Auteur fubftitue-t-il à la chéorie de M. Mariotte une autre théo- rie plus fatisfaifanre? C'eft ce.qu'il faut voir. Les rayons du foleil dans l'hiver tombent, dit-il, obliquement fur la partie de la terre où règne l'hiver ; la matière érhérée qui répond à cette partie de la terre , doit avoir moins de force ; de-là, la condenfarion des flui- des qui ne fonc plus mis en mouvement par cette matière ; de-li, Rt2 306 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, la condenfation même de l'air; les molécules de nitre qui font ré- pandues, fuivant l’Auteur, dans l'air, s'accumulent & augmentent en nombre , ou en mouvement & en force , & cette augmentation peut être la vraie caufe de l’évaporation des liquides & de la glace; pourquoi , fuivant lui, les parties globuleufes & pefantes du mer- cure ne s'évaporent-elles pas par le froid ordinaire de nos climats? C'eft, dit M. Gauteron, parce qu'il faudroit un agent plus fort que le nitre de l'air pour pouvoir les féparer de leur mafle, mais ce mème nitre peut agir fur l’eau, &c. L’Auteur prétend encore expliquer par fon fyftème, la mortifica- tion des plantes, l'épaififfement du fang dans les animaux, & la gangrène que le froid occafionne. Ce qu'éprouvent les parties des arbres & des plantes qui ont été gelées , qui eft une efpèce de gan- grène. Or cette pourriture ne doit-elle pas être l’effert d’un fel cor- rofif qui en a corrompu la tiflure ? I] y a tant de rapports entre cette gangrène qui arrive aux plantes pendant la gelée, & celle qui arrive aux parties des animaux, qu’elles doivent avoir une caufe fort analogue ; les humeurs corrofives brülent les parties des animaux; le nitre aérien, plus groffier qu’à l'ordinaire , fait le même effer fur les parties des plantes. Penerabile frigus adurir. À l'égard de la coagulation du fang, qu'un trop grand froid caufe, M. Gauteron s'étend beaucoup fur les rhumes épidémiques qui fui- virent le dégel du 23 Janvier & celui du 26 Février 1709, & il prétend que fon nitre aërien trop rapproché, ne peut plus, vu la groffeur de fes parties, paller par les filtres du poumon, & fe mè- ler dans le fang 3 de-là , le fang , privé de ce fel falutaire, fe doic coaguler. Le degel furvient-il ? les molécules de nitre féparées fe mêlent dans le fang, & procurent des fonres de férofité que le dé- faut de nitre avoit empêché de s’en féparer par les voies excrétoires ordinaires. Ce nitre aérien de M. Gaureron eft un être qui paroît chimérique & fuppofé. On fair de la glace en plein été & dans des vailfeaux fermés ;, où par conféquent le Prétendu nitre ne peut s'infinuer pou réduire l’eau en glace. Je n'ai rapporté les explications précédentes que pour faire voir de les hypothèfes purement arbitraires, coûtent peu à imaginer. Il aut voir dans le Mémoire que nous venons de citer, comment l’Au- teur , qui étroit Médecin, fe ferr de fon hypothèfe pour prouver quels font les remèdes qui conviennent & qu'il dit avoir adminif- trés avec le plus grand fuccès, dans les rhumes produits par le dé- gel, ou produits par les fortes gelées, SUR L'HIST. NATURELLE ET LES ARTS, 307 VIS EMPIN TO NU IE M: Eu EXE MPL'E La Cryflallifarion. C'eit également par le moyen du froid ,ou par le moyen du chaud, que s’operent les cryftallifations des fels, des pierres, & l'aggrégation des parties qui conftituent les différens minéraux , métaux & fof- files. Cette vérité s’obferve dans la nature & dans le laboratoire du Chymifte qui imite la Nature. (Voyez le n° $ , où il eft queftion de la manière de deflaler l’eau de la mer.) Le fpath fe forme à l’aide du froid , comme les autres pierres par cryitallifarion , lorfque les eaux féjournent dans les cavités des rochers & des rerreins calcaires qu’elles diffolvenr. Les vapeurs , produites par les feux fourerreins , diffolvent auffi- bien le fparh, & le font cryftallifer à des diftances plus ou moins grandes. Je conferve | dit M. Hill, des incruftations de vraies fta- lactites trouvées à Cornouailles dans des tuyaux de pompes à feu des mines, à une hauteur à laquelle l'eau n’a jamais pu monter, mais feulement la vapeur. Le même Auteur cite encore un autre exem- ple dans ce genre. C’eft le mundick. J'ai, dit-il , des triedres de fpath couvertes de mundick cubique, qui ne peut être le produit de l'eau , mais de la vapeur. Sparoginéfie traduite de M. Hill, dans le Journal de Phyfique de M. l'Abbé Rozier, tome 3, page 213. Au degré de feu qui eft le plus violent , par rapport à certaines matières, la volatilifarion fe fait, c’eft-à dire, comme parlent les Chyiniltes , que ces matières fe fubliment & forment fouvent ce qu'ils appellent des fleurs ; or ces fleurs font de véritables cryftallifations. Les molécules régulines de l’anrimoine & du zinc, qui font très- fufcepribles de volatilifarion , s’arrangent d’une manière fymétrique & régulière; c’eft ce que l’on appelle Aeurs de zinc & neige d’antimoi- ne. Le mercure eft très-volatil , & 1l s'élève toujours fous la forme de globules, quand il eft expofé au feu fans mêlange d'autre fubftance; ce même mercure, joint au foufre, fe fublime d’une autre manière, & forme le cinabre qui eft aufli un corps trés-régulier, mais en ai- guilles. L’arfenic eft rrès-volaril, & fe fublime fous une forme cryf- talline. Le foufre forme des fl:urs dans les aludelles qu'on place au-deffus du vaifeau où on le fait fondre (1). RE , (1) On peut citer d'autres exemples, tels que les fleurs cryftallines d'érain , les fleurs de bifmuth , celles de cobalt , de fel ammoniac pur, & chalibées, cui- vreufes , martiales. Les fleurs de fel marin & de cuivre, &c, 305 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE; Mais fi l’on n'expofe pas les corps volatils à un feu affez vio- lent pour les réduire en vapeurs, & fi on fe contente de les fondre, le froid leur donnera, en les précipitant, une cryflallifation qui eft très-analogue à la fublimation qu'auroit opéré le feu. Un travail fuivi fur les rapports de la précipitation & de la fu- blimation, nous manque abfolument ; il feroit cependant très-utile & pourroit faire connoître de plus en plus ce que l’on doit penfer des vrais élémens des corps ; mais combien ne faudroit-il pas va- rier & modifier les opérations, relativement à la nature des corps? Ce travail auroit un objet très-érendu : il eft des demi-métaux, & mème des métaux que l’on regarde comme effentiellement fixes , & qui, à de très-hauts degrés de chaleur , s’exhalent & fe volati- lifent abfolument : en peut même dire qu’il n’y a pas un feul métal ni un feul corps de quelque nature qu'il foit, qui ne puifle fe vo- latilifer, pourvu qu’on le foumette à un degré de chaleur fufhfant & qui lui foit approprié : Por & le diamant le plus fin fe font vo- Jatilifés au miroir ardent : ce dernier corps, fuivant des expériences crès-récentes , peut fe volatilifer & fe détruire à un feu tecnique & affez médiocre. Il eft des matières qui rendent volatils Les corps les plus fixes, comme il en eft qui fondent les corps les plus réfractaires : en re- cueillant les vapeurs de ces mixtes, & variant les expériences autant qu’elles peuvent l’être , & fuivant des méthodes raifonnées , on feroit des découvertes effentielles. Je répète qu’il feroit néceffaire d'accompagner , autant qu’il feroit pollible, la fublimation de la précipitation , & de comparer exacte- ment tous les produits : les cryftallifations pourroient quelquefois être différentes ; mais il faudroit faire attention aux matières qui ne font pas-toujours aufli pures dans la précipitation que dans la fu- blimation : plufieurs matières hétérogènes demeurent dans certe pre- mière opération avec le corps que l’on a mis en fufon , & la fe paration n’eft pas toujours entière & parfaite ; or, on fair que les plus petites caufes produifent de très-grandes différences dans la cryltallifation des corps. VAL LAN" SI NADIE MOEMIMENXE MAIRE. Le grand froid & Le grand chaud caufent les mêmes défordres dans Le règne végétal. Les grandes chaleurs, en defféchant les feuilles , l'écorce, les fleurs & les parties les plus délicates des plantes, les fonr quelque- SUR L’'HIST:: NATURELLE ET LES ARTS. 30) fois périr , & les atraquent jufque dans leurs principes , où elles les ‘empéchent de fruétifier : on fait combien la vigne , les bleds & les arbres fruitiers fouffrent de cette intempérie, La gelée caufe les mêmes défordres : elle déforganife & corrompt les fruirs & les bourgeons des plantes & des arbres, & produit des effecs fi analogues à ceux de la chaleur , que les gens de la cam- pagne fe fervent fouvent du nom de brgler, lorfqu'ils veulent expri- mer ce qu'opère le froid fur les feuilles & les tendres rejettons des arbres & des plantes. Tour cela doir être attribué à la raréfaétion & à l'évaporation , & eft facile à expliquer. IX COS MP IT ULÈ ME EX; E M°P'L'E. Succeffion du froid & du chaud , & vice verfa. Lorfque le froid fuccède au chaud , ou le chaud au froid d’une manière rapide , la deftruction eft plus fenfible : bien loin que l’un temédie à l’autre; bien loin , par exemple, que la chaleur rétabliffe l'ordre dérangé par le trop grand froid , elle ne fait encore qu’a- jourer au défordre : ces deux chofes n’ont plus rien de contraire, & concourent mutuellement au même effer. Les pores des rejertons & des fruits font diftendus par l'humidité congelée , la chaleur ne fauroit pénétrer dans leur texture qu'avec peine ; elle a déja détruit leur tiflu infiniment délicat, avant d’ar- river jufqu’à leur centre encore glacé. SMMAUUINENEUL E (MUE LE'XLE M'P'É NE: Les efprits ardens des liqueurs fermentées , obtiennent également par & froid & par la chaleur. Si l'on expofe du vin au froid, la partie egmatique fe congêle ; & la partie fpiritueufe reftant fluide , peut être féparée de la glace. Le vin mis fur le feu, donne les mêmes produits, mais d’une manière différente ; la partie fpiritueufe s’évapore , & la parrie aqueufe ou fegmarique relte ; c’eft fur cette théorie qu’eft établ& Parc crès connu de la diftillacion. XI. Le grand froid & Le grand chaud produifent des effets très= analogues dans Le règne animal. Mais où l’analogie du froid & du chaud fe montre davantage 310 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE; c'eft dans les effets qu’ils produifent chez les animaux, foi que ces corps organifés foient vivans, foit qu'ils foient morts; c’eft dans ce double état qu'il faut confidérer que le froid & le chaud nous pa- roitront prefqu’identiques. XIL, ON ENUUM, IVÉN MXE un EX NE Mal; L EE; Evacuation périodique diminuée. On n’a pas fait affez de remarques fur l’effert du froid & du chaud , par rapport aux fonctions naturelles : peut-être , fi l’on exa- minoit mieux ce fujet, trouveroit-on des analogies qui éclairciroient la fcience obfcure & très-incomplète de la Phylologie. Nous verrons dans le N° XVI ce que le froid opère par rapport à la couleur des peuples qui habitent les climats les plus oppofés de la terre ; & dans le N° XVII combien ils influent fur la taille : l'exemple dont il s’agit ici, n’eft pas moins fingulier. C’eft une chofe conftante que l'évacuation périodique du fexe n’eft pas fort copieufe dans les pays ou exceflivement froids , ou excefli- vement chauds : on peut confulter là-deffus les voyageurs. Les peuples qui habitent le pays le plus tempéré de PAméri- que , font pourtant exception à cette loi: les Médecins employés dans les Colonies , ont calculé que la dofe de l’émanation des femmes indisènes , lorfqu’elle eft la plus abondante , n’équivaur pas au tiers de l’émanation des Européennes , Recherches Philofophi- ques fur les Américains , tom. I. p. 46: Cette exception tjent proba- blement à des circonftances particulières ; mais quelles font ces cir- conftances ? ï 4 IL D AT RAT ENMRE LS EX EMMENPHIENE: Gangrène G fphacèle. Une chaleur extrême , dans quelque partie du corps que ce foit; produit la gangrène & le fphacèle ; ce qui arrive anfli quand les mêmes parties du corps font dépourvues de chaleur & de mouve- ment. Ce relâchement & l'atonie qui .en eft la fuite, privent les mem- bres qui en font attaqués , de la chaleur vivifiante néceffaire à leur confervation , & par-là, font fouvent caufe de leur mortificarion, On voit des gangrènes produites par la vieilleffle, que l’on peut expli- quer ici facilement. Dans les cadavres des vieillards on a fouvent «trouvé que la caufe des gangrènes fpontanées, étoir Lot e$ SUR L'HIST. NATURELLE ET LES ARTS. 311 des membranes des gros vaiffeaux. M. À. Peric dic avoir vu le tronc de l'aorte à fa bifurcation , ofifié de quatre travers de doigts; quand cela eft, dic-il, le fang ne fait plus que couler lentement dans les vailleaux, la force des parties inférieures s'éteint, & de-là, les gan- grènes fpontannées dont on ignore la caufe ; une compreflion , foit de la part d’un exoftofe , foit d’un fquirche fur un gros vaifleau , fait le mème effer;rout cela peut & doit être rapporté à un défaut de mouvement , & à une diminution excellive de chaleur. Ce qui fe dit des parties du corps, peur être appliqué au corps entier ; le défaut de mobilité & de chaleur ôte la vitalité. Les vieil= lards périffent par le défaut de chaleur. Une trop grande mobilité qui reconnoît une caufe extérieure , ow celle qui eft produite par l’âcreré des humeurs donnent également un alkalefcence aux Auides & un excès de ton aux folides , d'où naif- fent des inflammations générales , des fièvres putrides, &c. qui con- duifent de même l'animal au tombeau. Le froid & le chaud ont une aétion également deftructive fur les parties les plus dures des animaux , telles que les dents. C’eft une obfervarion utile à ceux qui élèvent la jeunefle. Ils ne doivent ja- mais permettre aux enfans de tenir de la glace dans la bouche, ou de manger trop chaud, La fuite au le Cahier prochain. DE SLCR A HAPE TT: OÙN De la confiruëlion d'un Four pour recuire La Chaux qui doit étre emt< ployée dans le Mortier- Loriot (1). Pi fa conftruétion , on commence par élever un mañif de maçonnerie en moilons , fur lequel on écablit l'aire à la hauteur ordinaire des fours à cuire le pain, afin que le fervice en foic plus commode ; on trace à cette. hauteur une ellipfe ou un ovale, dont le grand diamètre ait dans-œuvre quatre pieds, & le petit diamè- Cr) Au mois de Novembre 1774 (voyez rome 4, page 416), nous dornâmes le Mémoire de M de Moryeau fur la manière de rendre !a préparation du Mortier+ Lorior moins dangereufe, plus économique & plus sûre ; ce Ciroyen eftimable n'y décrit pas le Four donc il s'eft fervi pour recuire la chaux après qu'elle a éré éteinte & réduite en poufhère. C'eft la defcriprion de ce Four que nous gréfentons ici. | Tome VIT, Pare, II. 1775. DS 312 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, tre deux pieds. On élève fur cette ligne les parois du four avec des briques & de l’argille détrempée ; on prend la vouffure à 3 pouces au-deffus de l'aire, & on la conduit de manière qu'il n'y ait qu'un pied ou 13 pouces au plus d’élévation fous la clef. Voyez Figure 1°, 2e & 3°. A l’ane des extrémités de cet ovale, on pratique une ouverture demi-circulaire de dix pouces de largeur fur huit pouces de hauteur; c’eft-là ce que j'appelle la gueule du four , par où la Aamme sé- chappe , par où l’on introduit les matières à calciner , & qui , comme dans les fours ordinaires, doit ètre garnie d’un cercle de fer, & furmontée d’une hotte pour recevoir & conduire la fumée, & pré- fenter une table faillante en pierre , ou mieux encore , en fonte à la hauteur de l'aire. À l'extrémité oppofée du four ovale, on réferve une ouverture de huit pouces en carré; elle fert au palfage de la flamme du ti- fard dans le four , elle doit être élevée à deux pouces au - deffus de Paire pour que le rable ne poufle pas les matières qu’on calcine dans le tifard. Le tifard et le foyer déftiné à mettre le bois ; il fait rerour d’e- querre avec le grand diamètre de l'ovale ; il a dans-œuvre trois pieds de lonoueur , & un pied fix pouces de largeur ; fa grille eft placée à huit pouces au-deffous de l'aire du four , afin que le bois & les cendres ne puiflent fe mêler avec la chaux ; fa bouche d’un pied de largeur , fur neuf pouces de haureur, fe préfente à l’extré- mité du retour d’équerre; & il eft terminé par une vouflure demi- circulaire qui conduit la flamme dans l’intérieur du four. Le four ainfi difpofé , on le laifle fécher lentement; quand l’ar- gille commence à s’affermir, on y met par degrés un peu de feu pour durcir l'aire, & alors il eft en état de fervir. Voici maintenant la manière de procéder à la calcination. On jette dans le four deux pieds cubes de chaux éteinte, on lPérend fur Paire, & on met tout de fuite le feu dans Le tifard; il eft crès-important de n’y brüler que du bois fec refendu , comme celuï qu'on emploie dans les fours de Verreries, le bois verd don- nevoit une) fumée incommode qui retarderoit l'opération ; on bouche larguéule du four par une brique faite en forme de triangle équi- latéral qui divife la flamme en trois parties & l’abaifle fur la chaux. Voyez Fio. 4me, - Quand- la chaux ; qui ;ef touchée) par la flamme, commence à rougir , On: introduie dans le four un rable de fer à long manche, & l’on’ remue pour ramener à la furface celle qui en étroit la plus éloignée, obfervant de ne la pas jetter dans le tifard. Certe opéra- tion , qui fe répète au moins de quart- d'heure en quart - d’heure, SUR L'HIST. NATURELLE ET LES ARTS. 31; n’eft ni pénible ni dangereufe , le même ouvrier peut aifément four- nir à ce fervice, entretenir le feu , enfourner la chaux éteinte, & défourner læ chaux vive, quand il a eu la précaution de placer d’a- vance à fa portée tous les matériaux & les inftrumens dont il a be- foin; chaque fournée exige environ deux heures; la première quel- que chofe de plus pour échauffer le four. On met à chaque fois la chaux que l’on en tire dans des brafiers ou autres vaiffeaux de fer battu ; on les bouche exactement, furtout fi la chaux ne doit être employée que de quelques jours, mais il eft bien plus avan« tageux de ne la préparer que la veille. Le point effentiel eft de juger quand la calcination eft parfaite ; la pratique apprendra en très-peu de tems aux ouvriers à ne pas s'y tromper , mais jufques-là on peut leur donner des moyens d'aflurer leurs jugemens; j'ai remarqué que quand la chaux étroit bien cuite également & entiérement reviviñée , au moment où on la rame- noit au-devant du four comme pour l'en tirer, il s'en élevoit tout- ä-coup une belle flamme blanche, très-légère, qui paroïffoit formée par le mélange fubit de la vapeur de la chaux avec l'air extérieur. Il y a une autre méthode qui eft encore moins fujette à équivo- que, & qu'il fera bon de fuivre une ou deux fois dans les com- mencemens, elle n’exige ni calcul, ni appareil d’inftrumens : on pèfe exactement une pierre de chaux vive, on la met à part pour la lai£ fer éteindre à l'air, on mefure le plus jufte qu'il eft pofible, le volume de la chaux en pouflière que cette pierre a donné, & fi en fortant du four un pareil volume n’a plus que le mème poids qu'a- voit la pierre de chaux vive, il n’y a pas de doute que la nouvelle calcination l’a ramenée au même point où elle éroit avant l'extinc- tion. Quant à la manière d'employer cette chaux , elle eft abfolument: la même que celle indiquée par M. Loriot dans fon Mémoire, & par M. Patte dans le Mercure du mois d'Août 1774. La compofi- tion qui m'a paru la plus sûre, eft celle qui fe fair de srois perties de fable fin , rois parties de ciment de briques bien cuites , deux patties de chaux fondue, & deux parties de chaux en poudre re- vivifiée. On mélange d’abord exactement le fable , le ciment & la chaux fondue avec le rabot , comme pour en faire un bon mortier ordinaire, feulement un peu plus liquide ; on prend un pied cube de ce mortier que l’on met dans une auge de bois carrée de deux pieds de longueur, d’un pied de largeur , de neuf à dix pouces de profondeur ; alors on remplit de pouflière de chaux vive une mefure qui contient un cinquième de pied cube, on la répand fur le mor- rier, on agite le tour avec un large rabot à long manche, & ou met en œuvre. Ss 2 314 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, Je ne puis trop infifter fur la prompritude & l’â-propos de cette dern ère opération , c'eft de-là que dépend tout le fuccès; pour en connoître l'importance, il n'y a qu'à faire verfer la mème augée en trois tems différens dans trois vafes pareils de terre cuite ; celui rempli au premier tems, éclatera fi la préparation eft bonne & d'une confftance aflez ferme ; le mortier du fecond vafe deviendra dur & folide, fi on ne le tourmente pas après coup avec la truelle, parce qu'il avoit plus, lorfqu'il a ére pofé , que la force néceffaire pour réagir fur lui- même dans l'efpace qu'il occupoit; enfin le mot- tier employé dans le troifième inftant, s’échauffera à peine, n'ac- querrera guere que la dureté du mortier commun, & fera comme lui fujer à gerfer. D ————— Explication des Figures qui renferment les différens deffeins du Four & recalciner la chaux éteinte à l'air, @ réduite en poudre , pour fervir au Mortier- Lorior. \ FrGqcurRE PREMIERE. Cours du Four, prife dans fon milieu , fur fa longueur & fur fa hauteur. À À A. Voûte du Four, où l’on indique fon épailfeur & fa cour- bure intérieure fur les côtés. B. Gueule du Four. CCCC. Mafif de maçonnerie, far lequel le Four & fon aire font établis. DD. Tifard. G. Indication en lignes ponétuées de l'ouverture du cendrier ; au-deffous du tifard. H. Rebord qui fépare le tifard de l'aire du Four. ‘ Fire vor e HI Plan du Four. A. Table de fonte à l'ouverture du Four. B. Baie de la cheminée. C. Languetre. D D D. Plan du tifard avec fes oril- les de fer. E. Rebord qui fépare le tifard de l'aire du Four. F. Ou- verture du Foyer, furmontée d’un cintre en ligne ponétuée. Firiciu meet Je Coupe en travers du Four, & vers le milieu de fa longueur : on y voit l’arrangement & la difpoñtion des tuiles qui compofent LB | | SUR L'HIST. NATUREIIE ET LES ARTS. 315 voûte. B. Aire du Four & fon épailleur. CCCC. Mailif de ma- connerie , fur lequel le Four eft établi. BéniGN UX RENE, Elévation du Four en face de la gueule, avec la hotte. À A. Gueule du Four. B. Tuile triangulaire percée au centre, & pofée devant la gueule du Four pour divifer la flamme & la retenir dans l’intérieur. CC. Hotte de la cheminée du Four, EÉËEE. Maçonnerie de la face du Four. D D. Sol qui foutient toute la maçonnerie, NT Eur en on Eee eh, De M. le Chevalier MARSILIO LARDRIANI , à l'Auteur de ce Recueil, M. ; je vous envoie le deflin ( PI. 2.) , & la defcription d’une machine que j'ai imaginée au commencement de cette année, & que dans le mois de Mars j’eus l'honneur de préfenter à Son Excellence le Comte de Firmian , Miniftre Plénipotentiaire dans la Lombardie Autrichienne : cette machine fert à mefurer la fa- lubrité des airs avec autant de précifion que de commodité : j'ap- pelle cette machine Eudiomètre : vous en verrez bientôt une defcription plus détaillée dans un Ouvrage qui va paroître concer- nant la falubrité de l'air. Dans cet Ouvrage , je démontre, d’après les belles découvertes du Doéteur Prieftley , que l'air nitreux n’eft autre chofe que l’air commun tenant en diffolution de l'acide nitreux combiné avec le phlogiftique ; que ce phlogiftique , en s’uniffant avec air commun, en précipite l'air fixe, & reftreint les dimenfons de l'air réfidu ; que cette contraction eft plus ou moins grande , non- feulement, felon la quantité du phlogiftique contenu dans l'air com- mun, mais encore felon la quantité de phlogiftique dont l'air ni- treux eft furchargé; que de ce phlogiftique on furcharge l’air nitreux, en employant dans la diffolution du fer, un acide plus concentré, & par d’autres procédés qu’on peut encore employer ; d’où l’on voit que pour faire des expériences comparables , il eft néceflaire de donner une mé- thode avec laquelle on puifle furcharger lair nitreux, toujours d’une même quantité de phlogiftique; on obtient tout cela en employant, 1°, une méme quantité d'eau forte qui, pour nous en Italie, eft toujours d’un degré de concentration à-peu-près égale ; 2° une quantité conf tante de limaille de fer , & avec d’autres précaurions que j'indique 316 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, dans mon Ouvrage , dans lequel je démontre, que l'air fixe & le phlogiftique , fonc deux élémens de l’infalubriré de l'air ; que l'air nitreux peut determiner la quantité de ces élémens ; mais comme ces deux élémens ne fonc jamais entr’eux dans une proportion exacte, on doit féparer dans les expériences eudiométriques , la quantité de Pair fixe d'avec la quantité du phlogiftique : à cer effer , on doit faire le mélange de l’air commun avec le nitreux , dans un fluide capable d’abforber le fixe, & après répéter l'expérience dans un fluide incapable de l’abforber , & après, en faire une raifon compo- fée, &c. Mais revenons à l'eudiomètre : cet inftrument confifte dans une bouteille À B rubulée en À & en B:la tubulure À eft garnie d’un gouleau d’yvoire À travaillé au-dedans à vis : à l’autre tubulure, on attache un robinet BC de,la conftruétion de M. de Luc: le cy- lindre inférieur de ce robinet porte un tube de cryftal CD partagé en douze parties indiquées par l'échelle, au- deffous de laquelle on fixe le cylindre de laiton H L , qui contient un reflort fpiral qui porte en-dehors un couflin de maroquin rempli de cire molle : tout cet appareil eft folidement fixé fur une table en bas de laquelle ef un petit réfervoir de cryftal E , qui peut hauffer ou baifler au moyen de la vis G. Avec l'application forte de ce couflin, on ferme la bouche de la canne , & par le gouleau À on remplit d’eau la canne & la bou- teille ; cela Fait , an arrète le robinet NO au gouleau auquel eft attachée une veflie chargée d'air nitreux, & en verfant un peu d’eau dans le réfervoir de manière que la canne puiffe tremper ; alors on débouche la canne en retirant le couflin, & tournant la clef du ro- binet NO, & en comprimant la veflie on force l'air nitreux à en« trer dans la bouteille, qui eft aufh - rôt remplie d'air nitreux : tour- nant la clef du robinet BC, on intercepre la communication avec Ja canne CD, & on aura une bouieille d’air nitreux. Pour avoir une quantité conftante de l'air dont on veut dérer- miner la falubrité, on abaifle le réfervoir , de forte que l’eau de la canne tombe, & une colonne d’air y entre à fa place ; après cela on remet le réfervoir en fa place : on peut épargner la peine d'abailfer le réfervoir , pratiquant au robinet BC un petit trou qu'on ferme avec de la cire ou avec un bouchon d'yvoire : cela fert à mer- veille quand on emploie un tube étroit. Cela fair, on mêle les deux airs en tournant la clef du robinee BC, & la diminution de deux airs, où pour mieux dire, de l'air athmofphérique , fera indiquée par la colonne d’eau qui ionte dans le tube DC; mais our cela eft plus en détail dans l'ouvrage que je vous annonce, Je fuis, &c SUR L'HIST. NATURELLE ET LES ARTS. 317 1 CORTE RATS KO IN Sur un F£ÉMUR FRACTURÉ; Par M. l'Abbé DICQUEMARE, Profeffleur de Phyfique & d’Hif. toire Naturelle, de plufieurs Académies Royales des Sciences , des Belles- Lettres G des Anis, Etc. 1É parut , il y a quelque tems, fur la place publique, au Havre, un garçon de treize à quatorze ans , auquel un os de plus de deux pouces de long fortoit de la cuifle , ce qui lui procuroit des au- mônes fort abondantes. Un Chirurgien major qui pafloit, fut in- vité par les fpectareurs à s'approcher : il fit quelque difficulté, per- fuadé qu'un peu de charlatanerie avoit part à ce qu’on lui annon- çoic : preilé de nouveau , il s’approcha , & en faifant quelques quef- tions, tâta l'os pour s’aflurer fi c'éroit en effet une partie du fémur. Comme cer os réfftoit peu ; il acheva de l'ébranler , & le détacha: c'étoit vraiment une portion de la partie moyenne de l'os de la cuiffe : l’enfant fut conduit à l'Hopital, & j'eus occafñon de lui faire, ainf qu'à fa mere, quelques queftions : celle-ci n'éroit guere propre à y répondre :je ne pus tenir compte de ce qu’elle me difoit ; il fallut écouter l'enfant. Il paroît que depuis cinq ou fix ans il avoit eu la cuifle caflée , que l’indigence de fa famille & fa pofition dans un village , ne lui avoient pas permis d’être bien traité : qu'un fecond accident ayant occafonné une nouvelle fracture, ou au moins une grande incommodité , il avoit été retenu au lit auffi [ong-rems que la première fois, c’elt-à-dire, pluleurs années fans pouvoir fe procurer d'autre Chirurgien que la Nature affez mal fecondée. Je n’ai pu avoir rien de plus circonftancié fur tour ceci, quoique j'aie fait plufeurs recherches. Ce qui eft évident, c'eft qu'en arrivant au Havre , il éroic boireux, &# ne marchoit que très-difficilement à l’aide d’un bâton, & que fur la place il reftoic aflis. La portion d'os étoit un peu adhérente aux lèvres de la plaie qui Jui donnoic iffae au-dehors, & quelques petits lambeaux y reftoient attachés. La cuifle étoit conrbée en devanr, & il y avoit, proche le genou, plulieuts plaies cicatrifées. Je conferve cette portion d'os dans mon Cabinet, & lorfqu’elle ’ 318 OBSERVATIONS: SUR LA PHYSIQUE; étoit encore fraîche, je la deflinai d’après nature le plus exactement qu'il me fur pothbie. Voyez les figures c1 jointes, elles repréfen- tent cette portion d'os dans deux afpcéts différens. On appeacoit en AA, lg. 6 & 7, une marque circulaire où les chairs éroient at- tachées ; toute la partie A B, AB, fortait de deffus & un peu en dedans de la cuifle en fe relevant. Le bout fupérieur ce de cette portion du fémur paroïr être à peu- près le milieu de fa partie moyenne, & je crois qu'en D eft encore un refte de la ligne âpre: À l’aide de ces indices &: des deux fgures, on peut avoir une idée fufhfante de l’érar de cer os & des altérations qu’il a fouffertes; les afpérités & rugolités, occafionnées par la carie, s’y remarquent & fuppléent à de plus longs détails ; j'ai donc cru inutilé de m'étendre davan- tage. Il n’y a dans la cuiffe que le fémur. Si cet os foufre folution de continuité , il eft impoflible que le fujet marche avant la réunion, Comment donc l'enfant dont nous venons de parler, pouvoit-il mar- cher, ayant perdu une portion au moins de trois pouces fept lignes du fémur ? Quelque fyftème qu'on adopte fur la formation des os, il eft certain, pat les diffeétions anatomiques , qu'il fe forme des exof- rofes , c’eft-à-dire , des concrérions olleufes , ou même de nouveaux os. On voit au Cabinet du Roi & dans les Mémoires de l’Aca- démie des Sciences de Paris, plufieurs exemples de ces reproduc- tions offeufes. Je conçois donc que le périofte de l’enfant n'ayant pas été déraché du haut de la partie moyenne du fémur, 1l aura produit une exoftofe capable de chaffer la portion que nous voyons. Quant à la manière dont cela s’eft opéré , on peur s’en former des idées différentes. La courbure de la cuiffe me feroit croire que l’e= xoftofe s’eft formée à la partie antérieure, & un peu extérieure de la place qu'occupoir la partie fraéturée de l'os , peut - être même, cette exoftofe l’enveloppoit - elle entièrement , au lieu de n'occu- per qu'un côté, On fait qu'il eft des exoftofes affez ruméfiées pour contenir librement l'os qu’elles doivent fuppléer ; celui-ci auroit pu fortir de cette caviré par un trou qui fe feroit fait, ou par la ca- rie, ou par la pofition oblique de l'os à l’exoftofe mème, comme il y en a des exemples. Il fe pourroit que la portion , érant déta- chée par une double folurion de continuité que la carie aura prépa- rée , eür laiffé à l’exoftofe la liberté de devenir un os à peu-près femblable au premier , & que cette reproduétion fût aflez informe pour défigurer la cuiffe. Dans çes différens cas, le fémur pourroit avoir une folidité aufli grande qu'auparavant , puifqu’on a vu des exoftofes d’un tiffu tout-à-fait femblable à celui des os , d'autres re- couvertes d’une fubftance ou croûte prefqu’aufli folide que celle qui recouvre SUR L’HIST. NATURELLE ET LES ARTS. 319 recouvre la partie offeufe des dents, &c. Il ne faut donc pas s’éton- ner fi cer enfant marche, quoiqu'une partie allez confidérable de l'os de fa cuiffe foit dans mon cabiner. Elle à été remplacée. Ce fait n’eft point unique, & n’a dû caufer une furprife notable qu'à ceux qui n'écoient pas aflez inftruits des reffources de la Nature dans certe partie, elles y fonc très-fécondes, & y offre des phénomènes les plus inftruétifs. Celui-ci, quoique affez rare, a déja été obfervé. On peut voir à ce fujer un Ouvrage intitulé : Medical Obfervations and inquiries, By a Society of Phyficans , Vol. 11, ir London. La plaie de l'enfant a été fort peu de tems à fe cicatrifer , & il eft retourné chez lui toujours boiteux , mais ayant beaucoup moins de peine à marcher, OBS ERNEST ACTE OPN Sur fa Lumière dont la Mer brille fouvent pendant la nuit; Par M. l'Abbé DICQUEMARE, I. femble que depuis qu’on a ceflé de faire parler la Nature fans la connoître & fans l’interrouer, tous ceux qui s'occupent des Scien- ces naturelles devroient être plus d'accord ; cependant il s’en faut beaucoup qu'on remarque dans le réfulrar de leurs travaux, certe conformité fi défidérable : c’eft que tous ne font pas également inf- truits, & que dans le petit nombre de ceux auxquels on peut don- ner le titre de Savans, les uns ont un peu plus en étendue, les autres en profondeur ; cependant, ils faififfent également toutes les occafions qui fe préfentent d’obferver , quoiqu'en général ceux qui compofent l’une de ces deux claffes, paroiffent y avoir un peu moins d'aptitude. Admirant peu , ils laiffent volontiers échapper des faits allez communs, qui deviennent pour les autres une fource féconde de découvertes & de connoiffances réelles qu'on devroit développer de concert , au lieu de les affoiblir en oppofant l'expérience à l'ex- périence. On fe rapprocheroït d’ailleurs un peu en tâchant de fe dé- pouiller d’un refte de l’ancienne méthode qui fait précéder l’obfer- vation des faits par des fyftèmes fur leurs caufes , rapporter à une feule ce qui peut êrre l'effet de plufeurs, ou regarder comme caufes différentes des propriétés qui n'ont fouvent qu'un même principe, Tome VI, Part. II. 1775. QUE j:50 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, L’exiftence des petits animaux qui rendent la mer lumineufe pen- dant la nuit, découverts en Italie par MM. Vianelli, & l'Abbé Nollec en 17493 par M. Rigaut, en France, en 1759, & qui lui fourni- rent le fujet d’un Mémoire en 1768 ; par M. Fougeroux , à Venife. en 1766, & autres, ne devroit plus être conteftée. J'en ai été té- moin & le fuis encore chaque jour. En 1761, dans un Cours de Phyfique que je donnai, je fis voir ces infeétes à ceux qui le fui- voient , je les deflinai même alors, & ce deffin fut envoyé à M. Rigaut en 1769, qui me manda , Le deffin que vous m'avez envoyé ef abfolument le même que celui qui accompagne mon Memoire ; cela me prouve que je ne me fuis pas trompé. C’eft certe figure que j'ai jointe ici, (pl. 2, fig.8);enAÀ, ils font de grandeur naturelle ,& en B, vusau microfcope fimple. Je n'ai connu, des expériences de M. Rigaut , que ce qui en parut alors dans un Journal (1); elles étoient de nature à con- vaincre. Si on ne voyoit ces petits animaux que fur quelques plan- tes marines , affurément nous ne les aurions pas regardés comme la: principale caufe de cer agréable phénomène , que le plus beau clair de lune n’abforbe pas totalement : mais la furface de la mer, dans le Port du Havre & aux environs, en eft remplie. Plus elle eft lu- mineufe , plus on y en trouve. Dans ces circonftances , j'ai fouvenc vu la mer rouler des flots de lumière femblable à celle que donne le phofphore d'urine, & briller d’un éclat fort vif à cinquante comme à plus de quatre cens toifes de mon Cabiner. J'y conferve toujours une affez grande quantité d'eau de mer , que j'ai occafion de rou- cher & de tranfvafer la nuit; & s’il m'arrive d’en jetter par la fenè- tre fur le pavé de la rue, elle paroîr lumineufe dans fa chûte, & le demeure encore pendant quelques fecondes. Des obfervarions & des expériences , qu'il feroit minutieux de rapporter, m'ont donc prouvé depuis long-rems ce dont on croit encore devoir douter. Je ne m'arrèterai pas à relever tout ce qu'on étroit bien libre de ha- farder à ce fujer. Peut-être ne faudroit-il que rapprocher les princi- pes pour mettre bien des chofes d’accord dans la partie conjeétu- rale. On voit d’ailleurs que dans ces obfervations, tel n’a manqué Vobjer que parce qu'il étoir prévenu. Il feroic défirable que tous les Obfervareurs fe donnaffent la peine de voir par les yeux du corps: en même-tems que par ceux de l'efprit. EEE ET TT CT TT TT Te ee 7 (x) L'Avant- Coureur 1769 » 24 & 31 Juillers. SUR L'HISZNNATUREILLE ET LES ARTS. 31 SERRE ET DE ER EGP EEE POV RCE CONTRER RL ERRE PRE PETER LT EEE EE T TE T CRETE TRUE RES CR TOP T AI ON D'un Infeéte marin remarquable par les iris qui l'environnent; Par M. l'Abbé DICQUEMARE, >: AU de la mer,.que j'ai prefque toujours fous les yeux, con- tient une mujtitude innombrable d’infeétes qu'on apperçoit par le fecours du microfcope, & fur-tout du microfcope folaire. On en voit beaucoup aufli à la vue fimple : plufieurs de ces infectes fonc fans doute connus, mais un très-grand nombre pourroient ne pas l’être ; j'aurai occafion d’en parler. Bornons-nous maintenant à un. 11 y a environ trois ans que j'apperçus dans l’eau de la mer, à la vue fimple , un animal de la groffeur d’une noifette, blanc & fi t'anfparent , qu’on le perdoit facilement de vue ; je l'examinai avec attention , & je le deflinai dé grandeur naturelle , comme le re- préfente la fig. 9 , pl. 2. Il ne me fut pas difficile d’appercevoir qu'il étoit oétogone. Sur les angles qui paroifloient émouffés , je voyois un petit mouvement d’ondulation qui les parcouroit d’un bout à l’autre avec une vitelfe extrème; & lorfque l’animal faifoir quel- ques mouvemens , quelques balancemens , un ou plufeurs de ces angles formoient un iris de toute beauté, non pas feulement dans l'obfcurité ou en plein jour, mais mème au foleil; je le nommai donc à ceux auxquels je le faifois obferver , Porre-iris. À l’aide de très-fortes loupes, je m'appercus que ce mouvement d’ondulation étoit dû à une grande quantité de petites nageoires attachées à chaque angle , comme les aubes fur la roue d’un moulin à eau; ces nageoires font courtes & larges , fur-tout par le bour qui eft déchiqueré ; c’eft à l’aide de ces nagcoires , qui font dans un mouvement prefque continuel & fort vif, que l'animal fe tourne comme il veut , avance, &c., & c’eft de ces mêmes nageoires que partent les couleurs de l’i- ris. À la partie antérieure de l’animal, j'apperçus une ouverture qui eft comme l’orifice d’une carafe à orgeat; cette efpèce de carafe, qui eft apparemment la bouche , l’œfophage & le ventricule de l'animal, s’érend à peu-près aux deux tiers de la longueur du corps. Des cô- tés & vers le fond de cette carafe, fans paroître y être adhérans, partent deux longues queues d’un beau blanc mat, qui traverfent le corps par des ouvertures que la tranfparence dns imperceptibles , t 2 332 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, | & vont fe plonger dans l’eau. Elles excèdent fouvent cinq à fix fois la longueur du corps, & font formées comme le gramen fur leque les enfans, par des mots répétés alternativement, cherchent à déter- miner une chofe cachée. Ces efpèces de queues fervent-à l'animal à s'élever vers la furface de l’eau, à avancer , &c. Elles ont un mou- vement très-vif. L’infecte les retire enfemble , ou l’un après l'autre, en paquet vers leur origine. J'ai obfervé cer animal pendant une douzaine de jours. Il maigrifloit. Etant devenu de moitié plus pe- tic, un accident me l’a fair perdre. Je n’ai pu en retrouver un autre, quelque foin que j'aie pris. Sa fubftance paroït à peu-près fembla- ble à celle des otties errantes ou gelées de mer ; animaux, comme je l'ai dit, dont on a confondu les efpèces & les propriétés. On défireroit peut-être favoir à quel genre , à quelle efpèce , il faut rapporter ce petit animal ? Où l’on voudra. Voyez Tome V , vers la fin de la page 106. D Me à m0 VO M On Fair à l'Académie des Sciences | fur le FAR D. La cADbEMI1E Royale des Sciences toujours animée du defr de remplir le vœu de fon inftitution , de contribuer autant qu'il eft en elle au progrès des Sciences, & fur-tout au bien de l'humanité, fe trouve fouvent dans le plus grand embarras pour établir d’une manière fixe & certaine les limites qui dérerminent l'étendue de fon seffort ; elle feroic tentée de croire que rien de ce qui a rapport aux Arts, & de ce qui peut intéreffer la fociéré n’eft étranger pourelle , & c’eft fous ce point de vue qu'elle s'occupe quelquefois d’objets qui pourroient paroître au premier coup-d'œil, futils & de peu d'im- portance. Le rouge dont les femmes fe fervent pour colorer leurs joues, confidéré comme objet de parure & d’ornement eft fans doute peu fait pour occuper l’Académie ; cependant lorfqu'elle à confidéré que cette parure étoit adoptée par des claffes entières de la fociéré, & fur-tour par les fermes de la première qualité , elle a penfé quil ne lui étoit pas permis d’écarter ceux qui pouvoient lui préfenter des moyens de compofer un rouge qui ne contint rien de nuifble ni à la peau, ni à la fanté en général ; en conféquence ; le fieux Colin 4 1 | SUR L'HIST. NATURELLE ET LES ARTS. 373 ayant préfenté à l’Académie un rouge qui réunifloit ces avantages, elle n’a pas dédaïgné de lui donner fon approbation. Depuis certe époque le fieur Dupont, Parfumeur de Paris a pré- fenté à l’Académie un rouge végétal qui paroît ne le céder en rien à celui du fieur Colin, & qui réunit comme lui l'avantage de ne contenir aucune matière qui foit capable de nuire à la peau , ni d’al- térer la fanté , la compolition de ce rouge a éte faite fous les yeux de MM. Lavoifier & de Juflieu le jeune, Commiflaires nommés par la Compagnie , & fur le rapport qu’ils en ont fait, elle a penfé que le fieur Dupont avoit les mêmes droits que le fieur Colin à une approbation. Cependant fur ce qu’il a été obfervé à l'Académie que le plus grand nombre des Parfumeurs de Paris n’employoient pour la fabri- que de leur rouge que des teintures végétales , que conféquemment tous les Parfumeuts de Paris ne manqueroient pas de réclamer fuc- ceflivement la même approbation, & que l’Academie feroit continuel- lement interrompue pour un pareil objet, elle a penfé qu’elle ne pouvoit prononcer fur le rouge du fieur Dupont, fans s'expliquer en même tems fur les différens rouges en général qui fe débitenc dans Paris , & elle a chargé M. Lavoifier & M. de Jufieu le jeune , de faire toutes les recherches & expériences qui pourroient être relatives à cet objet. Il réfulre du compte qui a été rendu par ces Commiffaires, que la fabrication d’un rouge végétal , deftiné à être appliqué fur la peau, loin d’être une découverte, eft au contraire de l’ufage le plus ancien: Théophrafte parle d’une racine, alors connue fous le nom de Xizion, dont on tiroit un fwcus ou fard deftiné à rougir les joues ; Pline le Naturalifte parle d’une racine qui fe tiroit deSyrie, qu’on employoit au même ufage , & qui fervoit aufli pour la teinture des laines : ces facines fans doute avoient quelque rapport avec celle de la garence ou de l’orcanette. Les Italiens en apportant en France l’ufage du rouge fous le règne de Catherine de Médicis, apportèrent en même-tems leur méthode de le préparer ; cette méthode eft encore à peu-près la même qui fe pratique aujourd’hui , & voici en quoi elle confifte. On prend les fleurons du carthame ou faffranum féchés , on les met dans des facs de toile qu’on plonge dans une eau courante ; ou au moins qu'on à foin de renouveller fouvent ; un homme muni de fabots monte fur le fac, & le pécrit jufqu'à ce que l’eau forte fans aucune teinte jaune & abfolument claire ; après cette première opé- ration, on mêle avec le faffranum ou carthame environ cinq à fix 324 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, pour cent de fon poids de fel de foude ou de cendre gravelée , on verfe par-deffus de l’eau froide ou filtrée, & on obtient une liqueur jaunâtre qui , mêlée avec du jus de citron , dépofe une efpèce de fé- cule qui s'attache au fond des vaifleaux dans lefquels elle féjourne & qu'on tranfvafe fucceflivement jufqu'à ce que toute la couleur rouge foit cpuifée, c'eft certe même fécule , qui mêlée avec du talc en poudre & humeétée avec du jus de citron, où même avec de l’eau , forme une pâte qu'on met dans des pots & qu'on fait fécher. Quoique cette efpèce de rouge foit très-répandu dans le commerce, il en exifte cependant une autre moins belle , moins chère & qu'on a coutume de vendre en paquets. Ce rouge eft fait avec le carmin, qu'on fait êtreune préparation de cochenille ; on incorpore également cette matière colorante avec le talc , on l’humecte, & on la fait fécher de la mème manière. IL eft certain que le haut prix de la matière colorante du faffra- num & du carmin ont pu quelquefois engager à y fubftituer le ci- nabre ou vermillon, & on trouve en effer d'anciennes recettes où on le prefcrit en tout ou en partie. Cette préparation du rouge pour- roit avoir de très-grands inconvéniens, maisil y a apparence qu'elle eft très-peu répandue dans le commerce; en effet, parmi une douzaine d’é- chantillons de rouge que MM. Lavoifier & de Juflieu le jeune fe font procurés chez les Parfumeurs & Merciers de Paris , en affeétant mème de demander les efpèces les plüs communes, il ne s’en eft pas trouvé un feul qui contint autre chofe que de la cochenille & du faffranum. Il ne fera pas inutile de donner ici les caraétères à l’aide defquels on peur diftinguer ces deux efpèces de rouge, & les détails des moyens par lefquels on peut s’affurer qu'ils ne contiennent rien de minéral. La teinture rouge, extraite du faffranum , ainfi que prefque toute les matières coloranres extraites des végétaux, a la propriété de fe diffoudre dans l’efprit de vin; fi donc après avoir pañlé à trois ou quatre reprifes différentes de l’efprit de vin fur du rouge, cette li- queur fe charge de la matière coloranre, & que le talc refte blanc, on peut conclure Par cette feule expérience que le rouge fur lequel on à opéré étoit tiré des végétaux. La cochenilie ou le carmin n’a pas la même propriété, fa matière colorante eft infoluble dans l’efprit- de-vin, & ce premier caractère la diftingue des matières végétales ; mais elle a une autre propriété très-remarquable , c’eft de fe dif- foudre avec une très-grande facilité dans les liqueurs alkalines , telles par exemple qu’une folution très-foible de criftaux de foude, & alors le talc refte blanc au fond du vafe: d’après cela, toutes les fois qu'un rouge peut ècre décoloré par l'efprit-de-vin, c’eft un rouge SUR L’HIST. NATURELLE ET LES ARTS. 325 végétal; routes les fois qu’il ne peut pas l'être par cette liqueur, mais feulement par les alkalis , c'eft un rouge animal : enfin, toutes les fois que la matière colorante n'eft pas difloure par l’une ou l’autre de ces deux fubftances , on peut regarder comme très-probable qu'il contient des matières minérales, telles que le cinabre , le mercure précipité rouge, &c. : MM. de Julieu & Eavoifer ne fe font pas contentés de ces ex- périences , pour s'aflurer que les douze échantillons de rouge qu'ils s'éroient procurés ne contenoient aucune fubftance minérale, ils les ont traités par la calcination, par la combinaifon avec les acides & par la précipitation au moyen de l’alkali phlogiftiqué ; ils n’ont obre- nu dans aucun cas rien de métallique. Il eft donc conftant qu'il ne fe vend en général à Paris que du rouge végétal principalement viré du faffranum & du rouge de co- chenille ; or ni l’un ni l’autre ne peuvent faire aucune mauvaife im- preflion fur la peau , ni nuire en quelque façon que ce foit à la fanté, le rouge des fieurs Colin & Dupont, quoique fabriqué avec tout le foin qu'on peut defirer, ne fe trouve donc pas dans une circonf- tance particulière ; & l’Académie croit en conféquence devoir an- nôncer une fois pour toutes. 1°. Que ces rouges ne font pas les feuls qui méritènt fon approbation , relativement à l'objet qu'elle fe pro- pofe dans ces fortes d’examens. 2°. Qu’atrendu le préfent avertiffe- ment , elle ne prononcera plus à l’avenir fur les différens rouges qui Jui feront préfentés à moins qu'il ne fe trouve quelque chofe de nou- veau, foic dans leur fabrication, foit dans leur compofition. (RÉCENT AGDE P7 (ONE ON ENT 8 CR | 2 Sur le THERMOMÈTRE; Par M. BLONDEAU , Profeffeur de Mathématiques , de l Académie de Marine , à Breft. O. fait depuis quelque tems que l’évaporarion produir un refroi- diffement d'autant plus grand que la liqueur qui s’évapore eft plus volatile, & j'ai fouvent obfervé, que fi la boule nue d’un thermo- mètre , devenue humide par quelque caufe que ce foir, eft féchée ar le vent, il en réfalte un abaiffement de la liqueur d’autant plus confidérable que le defféchement eft plus fubir. 5:26 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, - 11 femble que le tube de verre dans lequel on enveloppe main+ tenant cet inftrument , doit parer à cet inconvénient , & c’elt peut- être en grande partie pour cela qu'on a pris ce parti. J'ai penfé ce- pendant que la malle d'air contenue dans le tube enveloppant pou- vant être refroidie par lévaporation de ce qui mouilleroit ce tube , & agir fur la liqueur‘du thermomètre , l'inconvénient ci-deflus peut fubfiter au moins en partie. Pour m'aflurer du fair, j'ai pris un thermomètre au mercure fur ’échelle de M. de Réaumur, ainf enfermé dans un tube de verre, & qui étant depuis plufeurs jours au mème lieu qu'un autre à l’efprit- de-vin fur la même échelle, fe tient conftamment près d’un dégré au-deflus. Sans fortir du lieu où font ces deux thermomètres, & où celui de mercure éroit à près de 12 degrés, j'ai plongé la partie in- férieure de fon enveloppe dans de l’eau-de-vie plus chaude que la température actuelle, & j'ai replacé linftrument à la place qu'il oc- cupe journellement auprès de celui à l'efprit : alors un vent foible de Nord-Nord-Ouelt ayant accéléré l’évaporation de l’eau-de-vie, le mercure a defcendu plus d’un degré au-deffous de l’efprit-de-vin, ce qui fait deux degrés d’abaiffement total , & s’y eft maintenu tant que j'ai maintenu l’évaporation en remouillant d’eau-de-vie. Lorfque j'ai celfé, le mercure a remonté & eft parvenu en moins d’un quart- d'heure à la hauteur refpeétive qu’il affecte continuellement. On fent bien qu’une liqueur & des circonftances plus favorables à l’évaporation autoient produit un plus grand effer, & cette ex- périence me paroît prouver que l'enveloppe de verre ne difpenfe pas d’être en garde contre cet effet, qui peur être produit par l’humi- dité ordinaire dont l’évaporation feroit accélérée par un vent fec qui s’éleveroir fubirement , comme je lai vu arriver ici rrès-fouvent avec un thermomètre à boule nue:je me fuis même afluré de cet au- tre fait pour le thermomètre de mercure enfermé dans le tube de verre ; en mouillant l'extrémité inférieure de ce tube d’eau commune à la température du lieu , un vent de N. N. E. médiocrement fec a produit un degré d’abaiffement, en faifant évaporer cette eau. Le mercure toit auparavant à onze degrés& y elt revenu bientôt après J'évaporarion totale, CRENRRTARAE 7 SUR L’'HIST/ONATURFELLE ET LES ARTS, 3:57 er ES RATE COUPER E Ecrite par M. le Duc DE LA ROCHEFOUCAULD, à l'Auteur de ce Recueil. uoIQUE depuis quelques années , Monfieur , les Phyficiens & les Chymiites fe foient fort occupés d'étudier les phénomènes que préfente la calcination des pierres calcaires, & de rechercher les caufes qui opèrent des effets fi finguliers fur ces fubftances : M. Jacquin éroir le feul qui eût rentré l'expérience fondamentale, & les réful- tars qu'il a publiés, & qui, dans le tems, ont paru dans votre Journal , fembloient donner une folution fatisfaifante de la dimi- nution de poids qu’éprouve la pierre, & de la caufticité qu’elle acquiert en fe calcinant : cette folution devenoit plus vraifemblable encore par la liaifon naturelle qu’elle paroifloit avoir avec l'effet des acides fur cette mème pierre : enfin la théorie de l'air fixe s’établif- foit, & perfonne encore n’avoit répété la diftillation de la pierre calcaire : la defcriprion que M. Jacquin avoit donnée de fon opéra- tion , préfentoit beaucoup de difficultés , & même un affez grand danger : l'abondance & l’impétuofité du Auide élaftique devoit faire craindre la rupture des vailfeaux & l’extrème raréfaétion dans la- quelle on devoit fuppofer ce fluide à raifon de la chaleur nécef- faire pour opérer la calcination , rendoit l’appareil embarraffant à établir. J'avois effayé cette diftillation peu de tems après la publication du Mémoire de M. Jacquin; & comme mon but alors éroit de me- furer la quantité d'air qui fe dégageoit, je l’avois faite avec l’appa- reil de Hales corrigé par M. Rouelle; mais la chaleur ayant fondu le lut gras dont je m’étois fervi, & ce lut produifant beaucoup d'air étranger à mon opération , je l’interrompis , & ne l'avois pas re- prife depuis. La lettre de M. du Coudray inférée dans votre cahier du mois de Mars dernier , a réveillé toute mon attention fur cette matière inté- reflante : le nom de l’Auteur fi avantageufement connu comme Ofi- cier & comme Savant , le nom de M. Spielman qui avoit trouvé -des réfulrats abfolument conformes à ceux de M. du Coudray , la contrariété de ces réfulrats & de ceux de M. Jacquin , tout m'a paru mériter que l’on répétat avec foin leurs expériences, & que Tome VI, Pare. II. 1775. V v 328 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, l'on en fit mème d’ultérieures pour découvrir, s’il étoir poffible > la vérité. Mon fervice m’ayant appellé ici avant d’avoir pu fatisfaire à ce fujet ma curiofité , j’eus occafon d’en caufer avec M. Thyrion $ Aporhicaire de cette Ville, connu par plufieurs Cours de Chymie qu'il y a faits avec fuccès, & que l’on efpére lui voir reprendre lhyver prochain : cet habile Chymifte , qui de fon côté avoit déja: beaucoup médité fur certre matière , me parut perfuadé que l’abfence de fluide élaftique dans lopération de M. du Coudray, tenoit aux cornues dont il s’étoir fervi, & qu’en employant le verre au lieu du grès, le réfultat feroit peut-être différent : nous nous difpofions en conféquence à la répéter des deux manières , lorfqu’un heureux hafard nous à mis à portée d'opérer avec M. du Coudray lui-même, dont la compagnie d'ouvriers vient d'arriver ici. Nous avons commencé par une exacte répétition de fon expérience pour la qualité des vaiffeaux; mais au lieu du marbre blanc qu'il avoit employé, & que nous n'avons pas pu nous procurer , nous avons foumis à la diftillation une pierre de couleur légèrement ar- doifée, d’un grain fin , dans laquelle on trouve fréquemment des coquilles , mais dont les morceaux employés à l'opération , n'en contenoient point : cette pierre qui fe tire d’une carriere peu éloignée de Metz, fournit une chaux de la meilleure qualité , & par-là nous a paru propre à l’effai que nous avions intention de faire. Sept onces de certe pierre pulvérifée , & une once fimplement concaffée pour reconnoître plus facilement le degré de calcination , ont été miles dans une cornue de hefle bien lurtée avec plufeurs couches du lut de fapience appliquées au pinceau , & huit onces de craie de Champagne bien blanche, dont une feulement aufli concaffée , ont été imifes dans une autre femblable cornue : les deux cornues ont été placées dans des fourneaux de reverbere : on leur a adapté des allonges de verre & de grands ballons de verre rubulés pour réci- piens : les joints ont été luttés avec le blanc d'œuf & la chaux vive en poudre , & les luts ont été recouverts d’une veflie bien ficelée. Au bout de cinq heures d’un feu gradué , les deux cornues ont été amenées à l’incandefcence ; on les a foutenues dans cet état pen- dant fept heures , après lefquelles on à laiffé tomber le feu de lui- même:il a pallé d’abord un peu d’eau; mais il ne s'eft manifefté dans le cours de l'opération aucun courant de vapeur femblable à ce qu'annonce M. Jacquin; 1l y en avoit cependant un peu; mais elle éroic trop foible pour éteindre la foible lumiere d’une petite bougie; elle ne faifoit que l’agicer , & elle n’étoit réellement fenfble qu’à l'œil lorfqu’on l'approchoit de la tubulure ; cette vapeur exhaloit une légère odeur nauféabonde pareille à celle qui fe fait fencir fur les SUR"T' HIS Te NAMURELLE ET LES ARTS. 529 Fours à chaux : aucun fifflement ne s’eft fair entendre, & le papier mouillé de falive donc les tubulures éroient couvertes , n’a jamais été os ice peu de vapeurs a totalement ceflé deux heures avant “qu'on laïfsât romber le feu : les cornues n’ont épronvé aucune al- tération ; le luc qui les enduifoit étoit bien cuit, & Îes appareils étoient de tout point en bon état. La calcination des deux fubftances s’eft trouvée parfaite; de huit onces, la pierre ardoïfée étoit réduite à cinq onces trois gros ; fa couleur avoit changé, & d’ardoifée, elle étroit devenue d’un jaune pâle ; le récipient contenoit environ trois gros d’une eau légèrement alkaline , qui teignoit un peu le firop de violette ; cette eau étoit impregnée d’une odeur femblable à celle des vapeurs qui s’éroient fait fentir pendant l'opération : la craie étoit un peu grife à fa fur- face , mais l’intérieur étoit parfaitement blanc , la déperdition de poids plus confidérablé que dans la première fubftance ; de huit onces elle étoit réduite à quatre onces trois gros, & fon récipient n'a fourni qu'un gros d’une eau femblable à la précédente. Ces réfulrats prefqu’entièrement conformes à ceux de M.du Coudray, nous ayant lailfé les mêmes doutes qu'auparavant fur la perméabilité des vaifleaux de grès au fluide élaftique , nous avons réfolu d’em- ployer le verre, & quelques jours après la première opération, nous en avons entrepris une feconde , dont voici le détail. Nous avons mis huit onces de la pierre ardoifée concaffée en petits morceaux dans une cornue de verre enduire du même lut que celles de la prémière opération : pour éprouver fi dans la calcination il fe dégage du phlogiftique , nous y avons jetté en même-rems une petite balle de zerre douce de vitriol , & un petit morceau de fil de fer, dans l'idée que la balle fe réduiroit, & que le fil de fer approcheroit à fa furface de l’état d'acier; la cornue a été placée dans un fourneau de reverbère , & nous avons ajufté l'allonge de verre & le ballon tubulé ; mais au lieu de blanc d'œuf & de chaux en poudre, nous nous fommes contentés du blanc d'œuf, qui feul forme encore le meilleur lut ; nous en avons impregné des veflies mouillées , qui ont été bien ficelées autour des joints. Quatre heures d’un feu gradué bien ménagé par M. Thyrion, qui a conduit toutes ces opérations dans fon laboratoire , ont fufhi pour chauffer la cornue au rouge blanc : il a paflé dans ces premières heures un peu d’eau dans le récipient comme dans les opérations précédentes ; mais avec l'incandefcence il s’eft établi par la rubu- lure , un courant de fluide élaftique fenfible, non pas feulement à l'œil comme auparavant, mais fenfible à la main, éreignant vive- ment la lumière, chaffant avec fifflement le papier dont la tubulure étroit couverte, & répandant une forte odeur Eos : cette v 2 339 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, vapeur a cellé rout-à-coup après deux heures & demie; & quoiqu# l'on ait mème encore pouflé le feu plus vivement pendant une heure & demie , il n’a rien reparu : au bout de ces quatre heures d’incandefcence, on a bouché toutes les ouvertures du fourneau , & le feu s’eft érouffé. Le lendemain nous avons vifté l'appareil qui s’étoit bien main tenu : le lut qui enduifoïr la cornue étoit vitrifié ; la cornue que nous crumes d’abord intérieurement recouverte d’un fel ; parce qu’elle éroit blanche , avoit paflé à l’état de porcelaine ; mais cet état n'é- toit pas le même dans toutes fes parties; celles qui avoient été ex-- pofées à la chaleur la plus vive, étoient léoèrement ridées, & pré- fentoient dans leurs caflures un grain très-blanc & très-fin; les au- tres, à proportion de leur éloignement des premières , avoient éprouvé moins de retraite, & ne s’étoient converties qu'en porce- laine de M. de Réaumur; enfin la partie du bec qui étoit expofce à l'air, étoir feule reftée verre : la perite balle de serre douce de vitriol avoit noirci; elle étroit attirable à l’aimant ; le premier coup de marteau l’a caffée, & elle nous a paru dans l’état de fcorie : le fil de fer avoit fondu, & s’éroit incrufté dans la cornue qu'il avoit même percée dans un endroit , & la foufflure qui s’étendoit de cette ouverture dans l’enduit extérieur ,. nous a fait croire qu'il s’étoit en- core échappé par-là du Auide élaftique , & que peut-être l'inftant où elle s’étoit faire , avoit été celui de la ceffation fubite de l’iflue des vapeurs. par la tubulure du récipient. L'état des pierres que nous avons retirées de la cornue , confirme encore cette conjecture : elles étoient d’un jaune pâle comme dans la première opération; de liuir onces elles éroient réduites à cinq onces un gros, & cependant leur calcination nous a paru moins par- faite , & elles s’échauffoient moins avec l’eau , & s'en emparoient avec moins d’avidité ; cependant elles fe font effleuries à l’air comme la meilleure chaux : l’eau paffée dans le récipient pefoit environ un gros ; elle étoir plus alkaline que celle des deux premières diftilla- tions, & verdifloit plus fenfblement le firop de violerte. Comme la diftillation de la chaux eft une expérience importante & qui doit jeter du jour fur les queftions qui agitent la Phyfique & la Chymie, j'ai efpéré que les détails que j'ai l'honneur de vous envoyer, pourtoient trouver. place dans un Journal intéreffant où fe trouvent déja confignées prefque toutes, les pièces de ce grand procès,:: il pourroir bien en être de celui-ci comme des autres ; chaque partie à cherché à groflir fes avantages, & à diminuer ceux de la partie ad- verfe : il me femble , par exemple , que M. Jacquin attribuant à l'air feul. les à du poids de la pierre calcaire, porte fon calcul un . ae A , : . peu. haut : il n'a trouvé, dir-1l, dans fon ballon que = d’eau; il em SUR L'HIST. NATURELLE ET LES ARTS. 331 accorde encore - pour la déperdition de cette fubftance en vapeur ; mais dans l’état de raréfaction où la chaleur néceflaire pour opérer la calcination , doit la réduire , ne croyez-vous pas qu'il doive en fortir fous la forme de vapeur , une beaucoup plus grande quan- tité, à moins d'employer pour la condenfer , des précautions que M. Jacquin n'a point prifes; & l’avidité de la chaux pour abforber Peau, ne vous paroïît-elle pas une raifon de penfer que la pierre calcaire en contient une plus grande proportion ? Au refte , à-préfent que cette expérience ne préfente plus les in- convéniens dont elle paroifloit embarraffée , j'efpére vous donner dans peu quelque chofe de plus pofitif fur la quantité du fluide claftique qui fe dégage par la calcination , en la répérant avec l’ap- pareil propre à mefurer cette quantité, & M. Thyrion fe propofe de vous envoyer aufli fous peu de tems, les détails d’une diftillation faite de manière à condenfer les vapeurs, & à connoîtte la propor- tion dans laquelle l’eau & l'air les conftituenr. Pour en revenir aux opérations qui font le fujet de cette Lettre; il paroît en réfulter que la calcination s'opère facilement dans les vaifleaux fermés, & que quatre heures d’incandefcence fufhfent pour la completter ; que les vaiffeaux de grès laiflenc échapper, à travers leurs pores, la prefque totalité du fluide élaftique; que ceux de verre , ménagés avec foin, peuvent foutenir le degré de chaleur néceffaire, & que n'étant pas perméables au fluide , le courant de vapeurs par la tubulure , eft très-abondant & très-fenfble ; fans l'être cependant autant que M. Jacquin l’avoit annoncé : il réfulre encore des détails expofés ci-deflus, qu'il fe dégage un peu de phlogiftique pendant la calcination, mais que loin de noircir les matières, elles tendent même à prendre une couleur plus. claire, puifque d’ardoi- fée, notre pierre eft devenue d’un. jaune pâle : ce fait, réuni à celui que préfenrent dans leur calcination les alkalis fixes qui en fortent plus blancs qu’ils n’étoient auparavant , femble prouver que le phlo- iftique , contenu dans. les matières que l’on calcine dans les vaif_ Ta fermés, ne réagit point fur elle, & ne leur communique au- cune couleur. Quant au phlogiftique qui s’eft manifefté dans cette opération, il faut fe garder d'en conclure pour l’exiftence de ce prin- cipe dans les pierres calcaires en général ; avant de prononcer , il faudroit éprouver la réduction d’une chaux métallique avec une pierre calcaire bien pure , le marbre blanc par exemple, car il fe pourroir que la matière colorante de notre pierre ardoifée, en eût produit aflez pour opérer fur la petite balle de serre douce. de virriol, Enfin, il paroït réfulrer des expériences de M. Jacquin, de M. du Coudray , & de celle-ci, la néceflité de répérer encore & de: diverfes manières, la diftillation de la pierre calcaire, pour dérer- ÿ332 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE; miner avec précifion, s’il eft poflible , la déperdition de poids de cette fubftance dans la calcination , pour connoître quelle partie de cette déperdition doit être attribuée à l'ifue de l’eau , quelle partie à celle de l'air, & fi cette étonnante diminution, qui va prefque à la moitié du poids total, ne tient qu'à l’abfence de ces deux fubftances. NOUVELLES LITTÉRAIRES. L> Neptune Oriental, dédié au Roï, par M. d’Après de Manne- villete , Chevalier de l'Ordre du Roi, Capitaine des Vaiffeaux de la Compagnie des Indes, Correfpondant de l’Académie Royale des Sciences, Aflocié de l’Académie Royale de Marine. A Paris, chez Demonville , Imprimeur-Libraire de l’Académie Françoife , rue Saint- Séverin , aux Armes de Dombes; & à Breft, chez Malaffis , Impri- meur-Libraire de la Marine, 1775. L'Ouvrage que nous annonçons , eft compofé de foixante Cartes & d’un corps confidérable d’Inftructions; l’une & l’autre de ces deux grandes parties embraflent tout ce qui peut être relatif à la Navi gation des Indes & de la Chine. Sur cet expofé, quelle idée ne doit-on pas s’en faire ? Elle eft parfaitement foutenue à l’afpeét de l'Ouvrage. La Préface indique ce que fut le Commerce des Indes pour les Egyptiens, les Vénitiens, &c.; les Découvertes des Nor- mands , celles des Portugais, qui doublèrent le Cap de Bonne -Ef- pérance ; les Expéditions qui jettèrent les premiers fondemens de la gloire que s'acquit cette Nation dans les fiècles fuivans, On y trouve enfuire une Differtation favante fur la conftruétion des Cartes marines. Les noms des Auteurs qui s’étoient occupés de celles des Indes, précèdent le compte que l'Auteur rend du premier Neptune Oriental qu'il préfenta au Roï en 1745 , mais , faute de bon- nes obfervations fur le Cap de Bonne - Efpérance, de Madagafcar, des Ifles de France & de Bourbon, la partie méridionale ne fut point comprife. Cette partie étoit trop intéreflante pour la négli- ger » mais auf, elle devoit être déterminée par des obfervations très-précifes & très délicates; M. d'Après eft le premier Navigateur qui ait déterminé la longitude à la mer par les diftances de la June aux étoiles & au foleil. Nous paffons fous filence les autres obferva- tions qui le mirent à portée de dreffer la Carte générale qu'il pré- fentaau Roi en 1753; un Mémoire fur la Navigation de France SUR L'HIST. NATURELLE ET LES ARTS. 333 aux Indes , avec la Carte des lfles du Cap- verd, &c. qu'il préfenta de même en 1766. Nous aurons occafion d’y revenir. Comme les Inftruétions que donne M. d’Après pour aller aux Indes, commen- cent dès les Ports de France, il convenoit qu’ils fuffenc l’objet de la première Carte ; qu’elle für fuivie d’une feconde des côtes d’Ef- pagne & de Portugal, où les vaiffeaux, qui vont aux Indes, peu- vent aborder, & d’une troifième des Canaries & des Açores. Sachant l'importance de cette addition, il s’eft adreffé, pour la remplir , à M. l'Abbé Dicquemare, de plufieurs Académies, Profeffeur de Phy- fique & d’Hiftoite Naturelle, fon concitoyen & fon ami, dont il connoifloit en particulier les talens & l’exactitude pour des ouvra- ges de cette nature. La première , dreffée vers la fin de 1772, offre donc, fous un même coup-d’œil, les côtes occidentales de France, une partie de celles d’'Efpagne, d’Angleterre & d'Irlande, c’eft-à- dire, qu’elle comprend les Bancs de Flandres & de la Tamife, la Manche , le Golfe de Gafcogne, l'entrée du Canal Saint - George, celui de Briftol, & certe partie de l'Océan qui s'étend depuis Oueflant jufqu’environ $ degrés au-delà des Caps Cléare & Finifterre, avec le Tableau général de la nature des fonds & le brafliage de ces Mers. On remarque que, pour ce dernier article, l’Auteur a fait ufage des connoiflances que procurent la Phyfque générale & l’Hif toire Naturelle , difcuré les anciennes fondes , employé heureufe- ment la fynthèfe, &c. Cet Académicien a découvert, par des moyens que nous ne pouvons dévoiler ici, qu'il exifte dans quelques - uns de ces parages deux fonds différens, Ze fond ancien 6 permanent, & le fond accidentel ; le premier, fans doute, doit faire la bafe d’un Tableau général ; le fecond , déconcertera toujours les mefures de ceux qui fe flatceroient d’en fixer le portrait. Le Navigateur atten- tif pourra s’aflurer du fond permanent en fondant fouvent, & ne fera point livré à la contradiction qu'offriroit les détails fugitifs du fond accidentel. La Carte des côtes d’Efpagne, de Portugal & de Barbarie, qui s'étend jufques compris Madère, a été dreflée avec foin. Celle des Canaries , du Cap Bajador & des Açores, eft aflujettie aux derniè- res obfervations. M. d’Après a ajouté entre la Carte de France & celle d'Efpagne un plan des rades du Port-Louis & de l'Orient, fur l'exactitude duquel on peut compter. Pour continuer la route, une autre Carte s'étend depuis le Cap-blanc jufques & compris la Rivière de Gambie. Les fréquens voyages de M. d’Après l’ont mis à portée de dreffer cerre Carte d’après fes propres obfervarions. Celle des Ifles du Cap-verd qui fuit immédiatement, & qui fut publiée en 1766, a reçu quelques améliorations par les dernières obferva- tions de MM. Pingré, de Fleurieux & de Verdun, Quoique Rio- 334 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, Taneïro foit plutôt de l'Occident que de l'Orient, comme nos vaif- feaux y relâchent, l’Auteur a recueilli un plan que les Portugais avoient levé de cette Baye en 1730, & en ayant reconnu l'exaéti- tude dans fes relâches, il en a enrichi fon Neptune. Celui du Cap de Bonne-Efpérance qui eft dû originairement à feu M. l'Abbé de La Caille, a éré effentiellement corrigé par M. d’ Après. On trouve enfuite les vues de la Baye de Falfe, de Simousbay , & des Caps & Côtes voifines. La Carte générale , depuis le Cap de Bonne - Efpérance jufqu'à Y'Ifle Formofe, commence l'Océan Indien, & fera fuivie d'une autre qui terminera tout l'Orient. Parcourons avec M. d’Après, cette grande partie du Globe. Les principaux points de la Côte méridionale d’A- frique , depuis la Baye de Saldaigne jufqu'au Cap des Courans, a été déterminée par les obfervations de l’Aureur , celles de l'Abbé de la Caille, &c. Les Côres de. Natal, de Sofala , de Mofambique, Querimbé; les Ifles de Madagafcar , de Bourbon, de France, Ro- drigue, &c., font comprifes dans la Carte fuivante, dont cinq Cartes plates & feize plans font les développemens & occupent neuf plan- ches & demie ; les détails précieux qu’on y remarque font le fruit de travaux pénibles qui ne peuvent être appréciés que par de favans Cofmographes; il a fallu pefer l’autorité d’une multitude de titres François & érrangets , juger de la certitude ou de l’invalidité des déterminations par celle des moyens, accorder des contradiétions qui n'étoient qu'apparentes , & faire cadrer le rout avec les obfervations précifes qui appartiennent à l’Auteur ; telles font entr'autres les dé- terminations de longitude & de latitude des Iles de Bourbon , de France, &c. Non content d’avoir fixé des pofirions aufli effentielles, l'Auteur étendit fes opérations géométriques fur cette dernière Ile, & diminua de près de moitié, la longueur qu'on lui donnoit. Ces travaux ne laifsèrenr à M. l'Abbé de la Caille que la fatisfaétion de confirmer les obfervations de fon ami. La pofition de l'Ifle Rodri- gue eft due aux obfervations de M. Pingré. La partie méridio- Pale de l'Océan Oriental eft terminée par un Plan des Ifles Mahé, précédé d’une Carte de l’'Archipel du Nord-Eft de Madagafcar , de- puis l’Equateur jufqu’au 21° 30’ de lat. mérid. qui a dù coûter con- fidérablement à l’Auteur , vû les incertitudes où l’on étoit fur cette partie. Les Journaux des Officiers & des Navigateurs François, font venus à l'appui de fes connoiffances particulières. La Carre de l'Océan oriental, feprentrional , qui contient une partie des côtes d'Afrique ;* de l’Arabie , de la Perle , & celles de lindoftan , avec les Ifles Ceylan, Maldives & Laguedives , eft plus précieufe que celle de la première Edition. Elle a pour dévelop- pemens neuf planches contenant fix Cartes plates, huit Plans, & ya si SUR L'HIST. NATURELLE ET LES ARTS. 335 ün grand nombre de vues. L'entrée de la Mer - rouge , dont l'exac- titude a été reconnue , eft conforme à la première édition, mais à plus grand point, & ornée des plans de la Rade de Moka & des lieux voifins. L’Ifle Socotora a été réduite d’un plan qu'a envoyé à l’Auteur , M. d’Alrymple , ancien Capitaine de la Compagnie des Indes d'Angleterre, &c. &c. On trouve enfuite un très-beau plan de la Mer- rouge avec quelques développemens , entre lefquels un grand plan de la Rade de Jedda fe fait remarquer par les détails qui s’y trouvent. C’eft principalement à la réduction qu'a fait l’Au- teur des Relèvemens & des Routes de M. Floch de la Carriere & autres, qu'on doit l'entrée du Golphe Perfique , différente de la première édition. Dans le Golfe, la Côte de Perfe & les Ifles qui l’environnent , font tracées conformément aux relèvemens & aux la- titudes obfervées ; celle d'Arabie , peu fréquentée des Européens, eft moins connue. On y voit un plan de la Baye de Bundéreck & des Iles Korgo & Karak. Les Côtes du Guzurat, de Bambaye , de Concan & de Canara, jufqu'à Mangalor, font dreflées de nouveau. On voit fur la Carte qui les contient, un plan de [a Rivière de Surate ; cette Carre eft fuivie de celle qui renferme les Côtes de Malabar , de Coromandel, & l'Ifle de Ceylan, qui eft dreffée avec une égale attention. Les longitudes de cette partie de l’Indoftan font référées à celle de Goa dans la Carte générale, déterminée par des Obfervations Aftronomiques. L’Auteur a fait des changemens & des additions aux Laquedives & aux Maldives, donc il rend compte dans fon Routier. Les développemens de certe Carte géné- tale font terminés par une Carte de la Baye & du Port de Trinque- malay dans l’Ifle de Ceylan, qui eft dû à M. Néichelfon. Les principaux lieux de la Carte générale des Golfes de Bengale & de Siam, font déterminés par des Obfervations Aftronomiques. Suivant celles de l’Auteur, la différence entre lObfervatoire Royal de Paris & Pondichery, eft de 77° 45°, & pour Merguy de 95° 58°. Nous ne rapporterons pas les autres ni les opérations géométriques de l’Aureur. Cette Carte elt précédée des Côtes de Golconde, d'O- richa , &c. à grand point, & fuivie de dix planches de développe- mens. C’eft encore ici où l’immenfité des objets ne nous permet gueres de les faire bien connoître; la première planche elt une carte précieufe des Bouches du Gange & de la Côte d'Orixa, communi- quée par M. d’Alrymple 3 la 2°, une caite de la Côte Orientale du Golfe de Bengale pour les vaifleaux qui vont à Carigan ; la 3°, une carte de la Côte de Pégu fort eftimée‘de ceux qui vont à la rivière - de Siriam 3 la 4°, le plan dè l’Archipel de Merguy, qui eft dreflé fur les obfervations de l’Auteur & fur celles de M. Ronçais-Viollerte, & le plan de Junkfeilon ; la 5°, une carte des Ifies Nicobar avec Tome VI, Part. Il. 1775. X x “ 336 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, un plan; la 6°, le plan de la Rade d'Achem & des Ifles circonvois fines, que l’Auteur a dreflé, en plus grande partie, fur fes propres connoiflances & fur celles de nos Navigateurs ; il en eft de même de la 7°, qui offre la partie feptentrionale du Détroit de Malac, depuis Achem jufqu'à certe place; elle eft forr différente de routes celles qui ont paru jufqu’à- préfent; la 8°, la Côte de Salangor , celle de Malaye, depuis la pointe Caran jufqu’au Mont Parcelar ; le gif- fement général en eft dû aux obfervarions faites fur nos vaiffeaux ; la 9° & 10°, font deux cartes de la Côte occidentale de l'Ifle Su- matra, pour lefquelles on a fait ufage des Cartes Holandoïfes de certe partie , qui ont paru affez exactes. On trouve enfuite une Carte générale de l'Ifle de Java , corrigée de la première édition pour la partie du Nord; elle embraffe auf dans fon étendue l’Ifle de Banca , de Billiton , ayec une partie de celles de Sumatra & de Borneo , & a pour développemens un plan des Détroits fitués à l'Eft de certe Ifle & de Madura, qui font ceux de Bali, Pondi & Refpondi, dreffé fur les relèvemens des vaifleaux François & Anglois qui ont confirmé les opérations de l’Auteur. Ce plan a exigé des travaux confidérables. Il eft orné d’un plan de Ba- lanbouang ; une belle carte du Détroit de la Sonde, depuis la pointe de Vinerou jufqu'à l'Ile du Nord ; M. d’Après l'a corrigée de fon ancienne édition fur fes nouvelles obfervations, & l’a enrichie d’un plan de l'Ifle Cantaye, tiré de ceux de M. d'A/rymple; une carte pour aller du Détroit de la Sonde à celui de Banca, &c. réduire d’une carte à plus grand point que l’Auteur avoit dreflée, avec un petit plan de quelques flots; enfin, un plan du Détroit de Banca , ac- compagné d’un autre, de celui qu'on trouve à l’'Eft de cette Ifle. Après le plan du détroit de Banca, Monfeur d'Après donne une Carte des mers comprifes entre ce détroit & Pulo-Timon, aflujer- tie à fes obfervations & pour quelques parties, aux ouvrages anté- rieurs : elle eft fuivie des plans du port Rio en l'Ile Bintan , & de celuï du détroit du Gouverneur. Le Golfe de Siam qui eft l’objet de la Carte fuivante , eft avec connoiffance de caufe , rétreci de plus d’un tiers: on voit fur certe Carte un plan qui s'étend depuis l'Ifle Brala jufqu'à la grande Bridang : elle eft fuivie d’une Carte de la Cochinchine par M. Le Floch de la Carriere, & d’un plan de l’Ifle Condor par M. Deidier, La Carte réduire des Mers de la Chine; eft la dernière Carte générale de ce grand Ouvrage : on y lit l'inferiprion fuivante , qui fait. également honneur à M. d’Alrymple & à M. d'Après. ( 4 Chart of the China fea inferibed 10 Mon d’Après de Mannevillerte: the in geniofus of the Neptune Oriental as a tribute due 10 his labour for. the benefit of Navigation ir acknowledgement of his many fi SUR L’'HIST: NATURELLE ET LES ARTS. 337 gnal favours 10 d'Alrymple.) Cette Carte, la plus précieufe qui ait paru de ces mers, a pour développement une Carte d’une partie des côtes de la Chine depuis lifle de la Pierre Blanche mufqu'à celle d'Artimon , tracée fur les obfervations de M. d’Alrynple ; un plan des principaux ports de la côte d’illocos dans l'Ifle Luçon; un plan qu'a donné M. 4’ A/rymple de la partie du nord de Borneo, de l’Archipel des Ifles de Sooloo , &c. un plan de la Baye & Ville de Manille; enfin, un plan du port de Subec termine ce grand Ou- vrage. Pour donner à la Carte des Mers de la Chine le degré de per- fection qu’elle mérite; M. d’Après a fuivi pour la côte de la Chine, le détail qu’en a donné M. Danville jufqu’aux frontières du Tongquin: fuivant les obfervations des Jéfuites; cet habile homme , qu’on doit à jufte titre, confidérer comme un des premiers & des plus favans Géographes de l’Europe , a , en qualité d'ami , aidé lAuteur des Cartes originales qu’il a drelfées, &ec. Toutes les Cartes du Neptune Oriental ont deux pieds un pouce de long fur un pied & demi de haut; les demi-Cartes ont la même hauteur fur un pied de large ; il fuffit d'annoncer aux amateurs qu'elles font routes gravées au burin par M. Guill. de la Haye, Graveur du Roi. Après avoir jetté un coup d'œil rapide fur les Cartes du Neptune Oriental, donnons , s'il eft pofible , en peu de mots , une idée du corps d’inftructions qui les accompagne. Monfieur d’Après a commencé par inftruire fur la navigation de France aux Indes : on peut le fuivre depuis nos côtes jufqu'au Cap de Bonne- Efpérance ; 1l donne enfuire dans le plus grand détail , la route par le canal de Mozambique : mouillages , atterrages , écusils , mouffons , &c. tout eft prévu, tout eft favamment dévoilés il continue la route par les Ifles de France & de Bourbon , en ob- fervanc de plus, que les variations de la bouffole dans cette partie, peuvent procurer la correction des longitudes ; 1l indique les paral- lèles & les routes à fuivre, pour ne pas manquer l’atrerrage de ces Mes : le traité fur les vents généraux & particuliers qui règnent dans les mers orientales, décèle un génie vafte qui embraile aifément les objets les plus grands & les plus compliqués ; celui des courans y eft effentiellement lié, & ne dévoile pas moins les grandes vues & l'étendue des connoiffances de l’Aureur : les Phyficiens comme les navigateurs éclairés, le fuivront avec autant de fruit que d'agrément’, ar les côres de la Mer-rouge , lé Golfe Perfique, les côtes de l’In- Roftau , le Bengale , le Golfe de Siam, à la Chine , aux Ifles Borneo, Luçon, de la Sonde, Molucques , &c. où il met dans un grand jour les phénomènes des courans , des vents, &c. il Pr tout ce qui ax > 333 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, : peut contribuer à la sûreté des vaiffeaux pendant le changement des moullons. Rien de plus beau & de plus avantageux pour les navigateurs , que les inflruétions que leur donne M. d’Après fur l'Archipel du nord & du nord-eft de Madagafcar, qu'il a traverfé plufieurs fois, route infiniment préférable à l'ancienne , & qui la raccourcit de plus de 300 lieues, & accélère confidérablement les voyages. Nous ne pouvons le fuivre dans celle qu'il trace enfuite ; il y parle de la manière de déterminer les longitudes à la mer; on ne doit pas oublier combien il à contribué à l’heureufe révolution qui s'eft opérée dans l’art de naviguer depuis 1750, époque où le pre- mier , il réduifit en pratique celle de la diftance de la lune aux étoiles & au foleil : la bonté fourenue de fes préceptes fur le choix des routes, eft de la plus grande importance , & mérite toute l’at- tention des navigateurs : les inftructions qu'il donne pour parcourit les côtes, ne font pas moins précieufes : avec quelle véracité, quelle circonfpeétion ne conduit il pas le voyageur ? quelle jufteffe dans le choix des lieux fur lefquels il fixe, par préférence fon attention‘! comme 1l évite les détails trop fuperficiels : avec quelle équiré ne Jui nomme-ril pas tous ceux qui ont fait des obfervations & d’heu- reufes tentatives, & ont contribué à rendre fon ouvrage plus sûr & plus complet : quelle adrefle pour ménager dans fon efprit la répura- tion de ceux qui avoient été induits à erreur : de quelque côté qu’il tourne , 1] le conduit par-rout; par-tout il l’avertit des dangers où la faifon va l’expofer, &' lui indique les moyens de parer à ces in- convéniens. Paffons avec M. d’Après dans les mers de la Chine qu'il A parcourues plufieurs fois ; mais avant tout, invitons les Géogra- Phes à jetter un coup d'œil attentif fur la defcription que l’Aureur nous donne de la Cochinchine, les détroits de la Sonde & de Banca, les courans formés par la combinaifon des marées & du cours des ri- vières , les reconnoiffances, les bancs, les relâches, la nature des fonds , les brafliages ; offre le détail le plus farisfaifant pour les ma- sins, & très-capable d’intéreffer , comme nous l'avons déja remar- qué ; ceux qui s'occupent de la théorie de notre globe : il eft précédé d'obfervations très-uriles fur les traverfées en allant de l'Ifle de France aux parages dont nous parlons , & fuivi d’inftruétions néceffaires pour traverfer les mers en allant du détroit de Banca à Pulo-Timon & à Pulo-Condor, & de-là à la Chine en paffant à l’eft du Paracel. L'Auteur prévoit les différens cas qui doivent faire varier les pro- cédés : dans les inftruétions pour le retour, M. d’Après fait voir rout ce qui eft particulier à cette route, & ne laiffe rien à défier pour la connoiffance parfaite des détroits dont il avoit parlé : il pafle en- fuite à Manille, de-là à Pulo-Sapate , puis à la vue de Pulo-Aor & SUR L'HIST:-NATURELLE ET LES ARTS. 339 lés détroits à left de Java : c’eft encore à l'égard de quelques-uns de ces détroits, qu’on peut admirer fa circonfpeétion , l'expérience lui ayant fait connoître qu'une inftruction hafardée eft un très - grand danger : il guide toujours favamment fur le retour au Cap de Bonne- Efpérance & en Europe; il indiquela poftion des Açores fuivant les nouvelles Obfervations de MM. Pingré & le Chevalier de Fleurieux , dont M. l'Abbé Dicquemarre a fait ufage dans la troifième de fes Cartes dont nous avons parlé : M. d’Après termine le retour par une inftruction pour entrer au Port-Louis & à l'Orient : on lit en- fuite la traduétion d'un Mémoire fort détaillé fur la Carte des Mers de la Chine par M. d’Alrymple , & tout l'ouvrage eft terminé par des tables des variations de l'aiguille aimantée , rédigées en plus grande partie par M. Blondeau, Profeffeur Royal de Mathématiques de l’Académie Royale de Marine, avantageufement connu pas de favans Mémoires. Prix extraordinaire propofé par l Académie Royale des Sciences | pour l'Année 1778. Sur le compte qui a été rendu au Roi par M. le Contrôleur Gé- néral des Finances , de l’état actuel de la fabrication du Salpètre en France, & de la diminution fenfble qu’elle a éprouvée ; Sa Majelté, après avoir reconnu que cet inconvénient provenoit des défauts du fyfléme ci-devant adopté fur cette branche d’adminiftration, & Y avoir fait les réformes & les changemens qui lui ont paru néceffai- ses, a juge qu'il feroit encore avantageux à fes fujets de faire re chercher trous les moyens d'augmenter le produit du falpètre dans fon Royaume , fur-tout, pour les délivrer, le plurôt qu'il fera pofli- ble, de la gène & des torts que leur occafionnent les perquifitions, les fouilles & démolitions que les Salpêtriers ont le droit de faire «dans les habitations des particuliers | & des abus qui en peuvent réfulter. Aucun moyen n'a parn plus propre à Sa Majefté pour remplir fes vues , que de propofer fur cer objet un Prix aa jugement de l’Aca: démie , & elle la chargée d’en publier un Programme affez détaillé & affez inftruétif pour faciliter , le plus qu'il fera poflible , les re- cherches de ceux qui voudront concourir. L'Académie , pour fe conformer aux intentions du Roi, croit donc devoir faire les obfervations faivantes, en indiquant le fujer & les conditions de ce Prix. Nos connoiffances actuelles fur l'origine & la génération du fal- pètre , fe réduifenr à plufeurs faits certains fur lefquels on à érabli quelques théories affez incertaines. Il eft conftant, par lobfervation journalière des Chymiftes & de 40 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, tous ceux qui travaillent à l'extraction & à la fabrication du falpè- tre, que ce fel ne fe forme où ne fe dépofe habituellement que dans des murs , des terres & des pierres tendres & poreufes, qui peuvent être impregnées des fucs des fubftances végétales ou ant- males, & fufcepribles de putréfaétion ; que le falpèrre ne commence À devenir fenfñble , dans ces terres & pierres, qu’au bout d'un cet- rain tems, tout-à-fait indérerminé , & qu'il eft pourtant très-ellen- tiel de connoître & d'abréger , s’il eft poffible : ce rems varie fans -doute , fuivant les circonftances, & c’eft probablement celui où la décompofrion des végéraux & des animaux a été portée à fon plus haut point. On fait encore que les endroits Les plus favorables à la produétion du mitre , font les lieux bas qui ne font pas trop expolés a l’action du grand air , dans lefquels cependant l'air a un affez libre accès, qui font à l'ombre , à l'abri du foleil & de la pluie, & où 1l règne habituellement un peu d'humidité , tels que font les caves , les ‘cuifines, les latrines , les celliers, les granges, écuries , étables; en un mot, tous les endroits, roures les pièces habitées par les hommes & les animaux. On s’eft affuré par l’expérience , qu’en mêlant les fumiers, les li- tières des animaux, les plantes, même toutes feules, de quelqu’ef- pèce qu'elles foient , avec des terres, fur tout calcaires , marneufes & limonneufes , on peut conftruire des murs ou des monceaux de fept à huit pieds d’élévarion , qui, lorfqu’ils fonc placés dans des lieux , tels que ceux qu’on vient d'indiquer, & arrofés de rems en tems avec de l'urine, commencent à fournir une quantité fenfible de falpètre quelque tems après leur conftruction ; que ce falpètre ui eft à bafe d’alkali fixe, quand il vient des plantes , fe cryftal- life à la furface ; qu'on peut l'enlever par le houffage ; que fa quan- cité augmente jufqu'à un certain terme ; quon peut en retirer de cette manière, & fans lefliver les mêlanges , pendant fepr ou huit ans; & qu’enfin on les leilive pour achever de retirer tour le fal- pêtre qui s'y eft formé ou raffemblé : c’eft de cette manière que fe conftruifent & s’exploitent, à ce qu'on aflure , les couches ou ni- triaires artificielles en Suède , dans plufeurs autres pays, & peut- ètre même aux Indes , dont on apporte en Europe une énorme. quantité de falpètre , lequel , malgré les frais du tranfport & le bénéfice du commerce , n’eft point ici d’un plus haut prix que celui du pays. Au rapport des to les terres qu’ils ont épuifces de nitre par les leflives, en refourniffent une nouvelle quantité , après qu'elles ont féjourné fous les hangards où ils les confervent pour cer ufage; il eft vrai qu'ils répandent fur ces mêmes verres , les eaux-mères qu'ils SUR L’'HIST. NATURELLE ET LES ARTS. 341 obtiennent de leurs cuites, & que ces eaux contenant ordinairement encore une portion de falpètre, & toujours du nitre à bafe terreufe, cette circonftance répand de l'incertitude fur la réproduétion du fal- être dans ces terres, quoiqu'’elle foit bien d’accord d’ailleurs avec Ê énération de ce fel dans les couches Suédoifes (41 ). Enfin , les analyfes des Chymiftes ont prouvé que beaucoup de plantes , telles que la bourache , la pariétaire , & fur-rout le grand foleil, contiennent , fans aucune putréfaétion préalable , une quan- cité fouvent confidérable de falpètre à bafe d’alkali fixe ; on a obfervé que celles qui croiffent aux pieds des murs , ou dans des terreins remplis de fumier , en contiennent beaucoup plus que leurs analogues , qui ont végété dans des terres moins nitreufes, ou contenant beaucoup moins de matériaux du falpêtre, ce qui peut faire préfumer , avec oo (1) Nota. Le peu de tems que l’Académie a eu pour dreffer & publier ce Pro- gramme, ne lui a pas permis de fe procurer, par le moyen de fes Correfpondans, tous les éclairciflemens qu’elle auroit défiré d'inférer ici, fur ce qui fe pratique dans les Pays étrangers, au fujer des couches à falpêtre ou nitriaïres artificielles ; mais voici ce qu'un Citoyen (M. de Chaumont), qui s'occupe avec zèie depuis un certain temis de cer objet, a bien voulu lui communiquer. » Les couches à Salpêtre, érablies près de Stockholm, font faites en pyramides » triangulaires, avec du chaume, de la chaux, des cendres & des rerres de pré; leur bafe eft conftruite en briques pofées de champ , fur cette bafe eft un lic de chaume de neuf pouces de hauteur, & fur ce chaume eft pofé un lit de mor- » tier fait avec de la terre de pré, de la cendre, de la chaux & fuffifante quan- æ tité d'eau-mère de falpétre où d'urine : les lits de chaume & de mortier fe fuc- » cèdent ainfi alternativement jufqu'au fommer de la couche, » Pour couvrir ces monceaux & les garantir de la pluie, on pique en terre au- » tour d'eux des perches, qu'on lie par leur extrémité fupérieure , & le tour eft m» couvert avec de la bruyère; on obferve qu'il y ait entre le monceau & fa cou- » yerture, un efpace aflez grand pour qu'on puifle les arrofer quand il convienr, » & recueillir le falpêtre qui fe cryftallife à leur furface ; l’arrofement fe fait avec » des urines & des matières fécales , que des femmes de mauvaile vie ent for- » cées d'y tranfporter. » Ces couches font en rapport au bout d'un an, & durent dix ans. On en dé- æ tache le nirre avec des balais tous les huit jours, & on les arrofe, dès qu'elles æ font balayées , avec des eaux-mères étendues d'eau pure, quand on n'a pas » affez d'eau-mère pour arrofer complètement la couche. » Le réfidu de ces couches, au bour de dix ans, eft un excellent engrais & # très-recherché pour la culture du chanvre & du lin. » On conftruit auffi en Pruffle des murs de terre mêlée avec la vuidange des > latrines, & quand ils font falpétrés, on en retire Le nitre par les lexiviations » & les cuites ordinaires ce, Le Ciroyen qui a bien voulu communiquer ces dérails à l'Académie, dit qu'il les tient du fieur Berchelin , François, qui a conduic en Suède une Manufaéture de Porcelaine, & qui eft aétuellement à fa Terre pour y diriger une Nitriaire à peu-près fur les mêmes principes, mais avec quelques changemens dont il efpèrg de l'avansage, ] y» 5 à y 342 “OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, beaucoup de vraifemblance , qu’il fe forme habituellément une grande quantité de falpètre fur toute la furface de la terre, par l& putréfaétion des herbes, feuilles & racines qui y reftent enfévelies chaque année ; mais que ce falpètre étant emporté & difperfé par l'eau des pluies , ne fe trouve nulle part en quantité fenfñble dans les endroits découverts, à moins qu’il ne foi recueilli & raffemblé par des plantes qui ont, en quelque forte, la vertu de les pomper. On :econnoît que les terres & pierres font bien falpètrées, à leur faveur qui a quelque chofe de falin & de piquant : de plus , ces ma- tières, quand le falpètre y eft abondant , n’ont plus leur confiftance naturelle ; elles font plus friables ; ordinairement leur furface fe couvre d’une efilorefcence qui fe réduit en pouflière dès qu’on y touche, & dans certaines circonftances, on y obferve mème un vrai falpètre de houffage. Les faits qui viennent d’être expofés , réunis avec les procédés connus, ou faciles à connoître ; de l’extration & de la purification du falpètre, compofent toutes nos connoiffances certaines fur la pro- duction & l'extraction de ce fel; car, comme on l’a déja fait ob- ferver, les Chymiltes n’ont encore établi aucune théorie entière- ment fatisfaifante fur les principes de l'acide nitreux, fur fa véri- table origine & la manière dont il fe forme. Tout ce qui a été dit fur cet objet, peut fe réduire à trois fen- timens principaux. É Le premier eft celui des anciens Chymiftes ; ils penfoient que l'air de l’athmofphère étroit le lieu natal & le grand magafin de l'acide nitreux : fuivant cette opinion qui a même encore des par- tifans , cer acide nitreux de lair fe dépofe dans les terres calcaires & autres matières alkalines qu’il tronve à fa portée, & forme avec elles les différentes efpèces de nitre qui fe manifeftent dans ces matières après qu'elles ont été expofées à l’air pendant un tems convenable ; ceux qui adoptent ce fentiment, fe fondent principa- lement fur ce qu’on ne trouve point de falpètre dans les. terres & pierres , à moins qu’elles n’ayent éprouvé pendant long-rems l’aétion & le contaét d’un air tranquille; mais outre que ce fait n’eft pas bien avéré, & qu'il eft un de ceux qui demandent à être vérifiés, il eft combattu par un autre fair indubitable, favoir , que les mêmes terres & pierres qui fe falpètrent abondamment dans les habitations des hommes & des animaux, ne produifent point du tout de fal- pêtre dans leurs carrières, lors même qu’elles-s’y trouvent placées de manière qu’elles foient acceflibles à l'air, précifément comme dans les maïfons & autres lieux habités. Le fecond fentiment eft celui de Stahl, qui n’admettant avec Bécher qu’un feul acide primitif, principe & origine de tous les autres , et SUR L’'HIST. NATURELLE ET LES ARTS. 343 autres, favoir l’acide virriolique, croit que l'acide nitreux n'eft que cet acide univerfel, tranfmuc par fon union intime avec un prin- cipe inflammable qui fe fépare des fubftances végérales & animales, & même de l’alkali volaril, dans la décompofñrtion que la purréfac- tion fait éprouver à toutes ces matières. Il y a beaucoup de faits chymiques qui dépofenr en faveur de cette opinion , comme on peur Le voir dans les ouvrages de Stahl, & particulièrement dans les Fundamente Chymie dogmati:o-rationalis ; dans le Specimer Becherianur, & dans le Confpeëus Chymiæe de Juncker, Tab. de nitro 6 de acido nitri. Cependant on ne peut pas regarder cette théorie comme fufifam- ment prouvée, parce qu'elle exigeroit un travail expérimental, fuivi d'après ces vues, & plus complet que tour ce qu'on a entrepris juf- Fos préfent. On n'a fur cer objer que la Differtation du doéteur tetch, imprimée à Berlin en 1750 , & qui a remporté le Prix que l’Académie de Pruffe avoit propofé fur l'origine & la formation du nitre. Les expériences de ce Chymifte , qui fout toutes en faveur du fentiment de Stahl , demandent néanmoins à être vérifiées, & fur-tour variées & mulripliées. On croit devoir ajouter ici, que Stahl avance encore dans plu- fieurs endroits de fes ouvrages , que l'acide du fel commun peut aufi fe tranfmuer en acide nitreux dans certaines circonftances; & il eft certain qu’en différens rems plufñeurs gens à fecrets ont pré- tendu polféder celui de cette tranfmutation, & ont offert de la réa- lifer ; mais foit qu'on n'ait pas accepté leurs offres, foit que leurs expériences n’ayent point réull , leurs propolitions ne paroilfent avoit eu aucune fuite. Le troifième fentiment fur l’origine du nitre , ef celui de M. Lémery le fils; il l'a expofé dans deux Mémoires imprimés dans le Recueil de ceux de l'Académie, pour l’année 1717. Ce Chymilte entreprend de prouver dans ce Mémoire, que le nitre eft un pro- duit de la végétation; qu'il fe forme habituellement dans les plantes vivantes , d’où il pafle dans lessanimaux, & que fi ce nitre ne fe manifefte point, finon en crès-petite quantité, dans les analyfes or- dinaires des fubftances végétales & animales , c’eft parce qu'il eft embarraffé & mafqué par les autres principes de ces mixtes , ou dé- uit par l’action du feu, mais que la putréfaétion eft le moyen que la nature employe pour le développer & le féparer. On peur voir les preuves que M. Lémery apporte de fon opinion dans ces Mémoires, qui méritent d'être lus à caufe des réflexions qu’ils contiennent, & des vues qu'ils peuvent fournir; au furplus, ilen eft de cette théorie comme de celle de Stahl; elle demande à être confirmée par des expériences beaucoup plus variées & plus mulriplites que celles de l’Auteur. Les trois fenrimens qui viennent d’être expofés en abrégé, ren- Tome VI, Par. II. 1775, Y y 344 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, ferment , comme on l’a dit, routes les idées théoriques que les Chymiltes ont eu jufqu'à préfent fur l’origine & la production du falpètre ; quoiqu’aucune d’elles ne foit affez bien érablie, pour n'être pas fuierre à de grandes difficultés, elles peuvent fervir néanmoins à fugoérer des plans d'expérience , & à empêcher qu'on ne travaille en quelque forte au hafard. D'ailleurs , il eft très - probable que les fuites d'expériences dirigées d’après chacune de ces théories, & ten- danres à découvrir fi elles font bien ou mal fondées , répandront beaucoup de lumières fur le point de Phyfique qu'il s’agit d’appro- fondir , quand même il réfulteroit que ces théories font toutes fauffes où incomplettes. IL eft facile de reconnoître fi l’acide vitriolique ou l'acide marin fe tranfmue en acide nitreux, par le concours des matières en pu= tréfaction , fuivant l'opinion de Stalh:il ne s’agit pour cela que de mêler avec des matières végérales & animales , fufceptibles de pu- tréfaction , l’un & l’autre de ces acides féparément , foir libres, foit engagés dans différentes bafes, en obfervant néanmoins de les pro- portionner , ou de les combiner de manière qu'ils ne puiffent re- tarder fenfiblement la fermentation putride. Il fera à propos de laiffer ces mélanges en expérience dans un lieu rel que ceux que l'obfervation a fait reconnoïtre comme les plus favorables à la gé- nération du falpètre, & de mettre de plus dans le mème lieu d’au- tres mêlanges qui ne différeront des premiers , qu'en ce qu'on n'y aura ajouté ni acide vitriolique, ni acide marin , ces derniers devant fervir de comparaifon. Si l’on a fait entrer en mème-rems dans plufeurs de ces mélanges une affez grande quantité de terres calcaires ou marneufes , bien exemptes de falpètre , comme cela paroït affez convenable , en ce que ces terres accélèrent la putréfaction , il eft bien certain qu'avec le cems, il fe fera formé du falpètre dans tous ces mélanges; mais s'il y a eu en effet tranfmutation des acides vitriolique ou marin en acide nitreux, cela fera démontré par la quantité de falpètre qu'on obtiendra de chacune des matières mifes en expérience, & qui dans ce cas, doic être plus grande dans celle où ces acides auront été ajoutés, & ne doit pas être plus confidérable dans les autres. Des expériences de ce genre, faites comme il convient , feront d'autant plus avantageufes, qu’elles pourront fervir en mème-tems à fe décider fur le fentiment de Eémery , qui admet la préexiftence du falpètre dans les végéraux & les animaux , & fon dégagement par la parréfaétion. Mais comme il eft de la plus grande impprtance de prévoir tout ce qui pourroit induire en erreur fur le réfulrat des ex- périences , c'eft-à-dire fur les quantités de falpètre qu’on pourra ob= tenir dans ces procédés, il fera abfolument néceffaire de garantir les mêlanges , où da moins une portion notable de chacun d'eux, du SUR L'HIST. NATURELLE ET LES ARTS. 34 contact immédiat des murs, & mème du fol du lieu où ils feront placés , fans quoi le falpètre qui doit -naturellement fe former dans ces mêmes endroits , indépendamment de toute addition, répandroit immanquablement beaucoup d'incertitude fur le produit réel de celui qui pourroit s'être formé dans les mélanges mis en expérience. À l’égard de l'influence de l'air dans la produétion du falpétre , c'eft encore un objet effentiel, & auquel on ne peur fe difpenfer de donner la plus grande attention. Il paroît démontré , à la vérité, contre le fentiment des Anciens, que l'air n’eft point le récepracle ni le véhicule de l’acide nitreux tout formé; mais il eft vraifemblable qu’il contribue directement ou indirectement à la produétion de cer acide. On fait que le concours de l'air favorife & accélère la putréfaétion ; & quand il n’y auroit que cette circonftance, il en ré- fulteroit que fon influence n'eft point indifférente pour la production de l'acide nitreux ; mais, indépendamment de cette circonftance , il eft crès - pollible que l'air entre lui-même , comme partie confti- tuante, dans la compoftion de cet acide , ou qu’il fourniffe quel- que fubftance gazeufe, ou autre, qui, fans être de l'acide nitreux , fe trouveroit cependant un des ingrédiens néceffaires à fa mixtion. Ces confidérations fuffifent pour faire fentir combien il importe de déterminer fi l’air contribue ou ne contribue point à la génération du falpètre , & en cas qu’il y influe, en quoi, & jufqu’à quel point fon concours eft néceflaire à cette opération. Cette circonftance in- troduit dans les recherches qu’il convient de faire, une nouvelle fuite d'expériences toutes dirigées vers lation de l'air. On ne les indique ici qu'en général, patce qu’elles font faciles à imaginer , & qu’elles ne peuvent manquer de fe préfenter d’elles-mèmes à ceux qui voudront s'occuper de ces travaux. Après cet expofé des connoiffances actuelles fur l’origine & la produétion du Salpètre , l’Académie annonce que le fujet du Prix qu’elle propofe , eft de srouver Les moyens Les plus prompts & Les plus économiques de procurer en France une produëlion & une récolte de Sal- pêtre plus abondantes que celles qu'on obtient prèfentement | & [ur- tout qui puiffent difpenfer des recherches que Les Salpétriers ont le droit de faire dans les maifons des particuliers. Elle exige que ceux qui enverront des Mémoires expofent leurs procédés avec toute la clarté & tous les détails néceffaires, pour qu'on puille les vérifier fans aucune incertitude , comme l’Académie fe propofe de le faire : elle déclare que le Prix fera adjugé à celui qui aura indiqué le procédé le plus avantageux pour la promptitude, l'économie & l'abondance du produit, indépendamment de toute autre confidération; & que quand même ce procédé réfulreroit uni- quement d’une application heureufe des HÉM des pratiques ÿ 2 LA 346 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, déja connues , il fera préféré aux plus belles découvertes dont on ne pourroit pas tirer aufi promprement la même utilité. Ce Prix fera de 4000 livres, & fera proclamé à l’Affemblée pu blique de Pâque 1778. Les Mémoires ne feront admis pour le con- cours, que jufqu'au premier Avril 1777, inclufivement ; mais l’A- cadémie recevra, jufqu’au dernier Décembre de la même année, les fapplémens & les éclairciffemens que voudront envoyer les Auteurs des Mémoires qui lui feront parvenus dans le tems prefcrit. Outre le Prix de 4000 livres, il y aura aufli deux Acceffr ; le premier de 1200 livres, & le fecond de 300 livres. Les Savans & les Artiftes de toutes les Nations font invités à con- courir au Prix, & même les Affociés-Etrangers de l’Académie ÿ les feuls Académiciens regnicoles en font exclus. Les Mémoires feront écrits lifiblement en françois ou en latin. Les Auteurs ne mettront point leur nom à leurs ouvrages, mais feulement une fentence ou devife; ils pourront, s'ils le veulent, at- tacher à leur Mémoire un billet féparé & cacheté par eux, qui con- tiendra, avec la même fenrence ou devife, leurs noms, leurs qualités & leur adrefle: ce billet ne fera ouvert fans leconfentement de l’Auteur, qu'au cas que la pièce ait remporté le Prix , ou un des deux Acceffir. Les Ouvrages, deftinés pour le concours , feront adreffés à Paris au Secrétaire perpétuel de l'Académie; & fi c’eft par la Pofte, avec une double enveloppe , à l’adrefle de M. de Malesherbes, Secrétaire d'Etat. Dans le cas où les Auteurs préféreroient de faire remertre directement leur Ouvrage entre les mains du Secrétaire perpétuel de l'Académie, ce dernier en donnera fon récépiffé, où feront marqués la fentence de l'Ouvrage & fon numéro , felon l’ordre ou le tems dans lequel il aura été reçu. S'il y a un récépiffé du Secrétaire pour la pièce qui aura remporté le Prix , le Tréforier de l’Académie délivrera la fomme du Prix à celui qui lui rapportera ce récépiffé , il n’y aura cela nulle autre formalité, S'il n’y a pas de récépiffé du Secréraire , le Tréforier ne délivrera le Prix qu’à l’Aureur même qui fe fera connoître , ou au porteur d'une procuration de fa part. Nouvelle édition du Didionnaire Raifonné univerfel d’'Hifloire Na- turelle , contenant l’hifloire des Animaux, des Végétaux & des Mi- néraux ; celle des Corps céleftes, des Méréores & des autres prin- cipaux Phénomènes de la Nature; avec l’hiftoire & la defcription des Drognes fimples tirées des trois règnes; Je détail de leurs ufa- ges dans la Médecine, dans l'Economie domeltique & champêtre, & dans les Arts & Métiers; avec une Table concordante des noms Latins , & le renvoi aux objers menrionnés dans cer Ouvrage; pat. M. Vaimcent de Bomare. À Paris, chez Brunes, Libraire, rue des L w SUR L'HIST. NATURELLE ET LES ARTS. 34 Ecrivains , vis-à-vis le Cloître Saint Jacques-de-la- Boucherie , neuf Volumes grand in-8°. fur papier fuperfin d'Auvergne , Caractère de Philofophie, & même format du Traité particulier & fynoprique de Minéraloyie de l’Aureur. Prix so liv. relié, Et en 6 volumes in 4°. fur carré fuperfin double d'Auvergne , Carattère de Cicéro interli- gné. Prix 78 liv. relié. L'iz-8°. compofé de quarante à quatante-cinq feuilles, & l’:7-4°. d'environ cent feuilles, Ouvrage dédié à S. A. S, Monfeigneur Ze Prince de Condé. Voilà la troilième Edition de cet Ouvrage, fans compter les Edi- tions contrefaites en France & dans les Pays étrangers, & l’on pour- roit compter plus de 40000 exemplaires qui ont été enlevés à mefure qu'ils ont paru. Cet empreffement eft une preuve du goût pour l'Hiftoire Naturelle & du fervice eflentiel que M. almont de Bo- mare à rendu à ceux qui fe livrent à ce genre d'Hiftoire. Cette Edi- tion aura le fort glorieux de celles qui l'ont précédée; toutes les Nations feront jaloufes de la traduire dans leur langue. On doit donc conclure que M. de Bomare à produit, dans fon genre , la même révolution que M. de Buffon dans le fien. Ce Dictionnaire , fin- gulièrement augmenté , corrigé, perfectionné, établiroir, d’une manière irrévocable, la réputation de M. de Bomare , fi elle ne l’é- toit déja depuis long-tems. Journal Anglois, contenant les Découvertes dans les Sciences , les Arts Libéraux & Méchaniques , les Nouvelles Philofophiques, EE téraires, Economiques & Politiques des trois Royaumes, & des Co- lonies qui en dépendent. Nous annonçons le Journal Anglois, depuis long-tems défiré du Public. Ce Peuple célebre , voifin de la France dont il eft trop peu connu , va offrir à fes regards le tableau le plus neuf, le plus pittorefque & le plus varié. Savant , induftrieux, philofophe , commerçant , agricole , 1l tient à la fociéré par tout ce qui en fait le bonheur & la gloire. Supérieur à l'envie , il s’emprelle de célé- brer nos talens & de profiter de nos lumières; mais fur-tout inven- teur & créateur, il eft toujouts original, même en imitant. Toutes les Sciences, rous les Arts, lui doivent des découvertes, & il fem- ble ne rien devoir qu’à la nature & à la liberté de fon génie. L’An- glois, en un mot, à tant de grandeur & de nobleffe dans lame, tant de hardiefle & de reffort dans l’efprit , que fi la pofition des deux Nations n'établiffoit déja entr'elles le lien politique & focial , il faudroit rechercher cet avantage pour le wiomphe de la vérité, des lumières & des mœurs. Le Journal Anglois paroïîtra réculièrement deux fois par mois, le 15 & le 30, en deux Cahiers de quatre feuilles 27-8°, chacun. Le premier Numéro, fixé au 15 d'Oétobre prochain, commencera s 348 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, par un Difcours abrégé fur l'origine & les progrès des Sciences & de la Civilifation en. Angleterre. Il fera fuivi de la vie d'un homme cé- lèbre; ce qui fera toujours obfervé dans la fuite du Journal, en gar- dant l’ordre des tems, & en fe plaçant d’abord à l’époque de la naiffance des Lettres. On commencera par les Poëres; on paflera enfuite aux Philofophes , Jurifconfultes , Médecins, Hommes d'Etat, &c. On annonce, pour le premier Numéro , la vie de Chaucer, fur- nommé Ze Pere de la Poëfie Angloifé. Les bornes du Journal décide- ront des autres Articles intermédiaires. fl fera terminé par un récit hif- torique de la Révolurion de Bofton, depuis fon origine jufqu’à ce jour. Les Journaux fuivans, auxquels le premier doit fervir d’introduc- tion utile & néceflaire, feront divifés en fix Articles principaux. Le premier, contiendra les Nouvelles Littéraires; la continuation non interrompue de la vie des grands hommes , en fera partie ; le fecond , rapportera les, découvertes dans les Sciences & les Arcs; le troifième, les Anecdotes , Faits finguliers, Evènemens remarquables; le quatrième, les Spectacles, Fêtes, morceaux de Poëlies, Mufique, &c. ; le cinquième rendra compte des Nouvelles Economiques ; le fixième, des Nouvelles Politiques. L'année complette fera de vingt- quatre Cahiers & formera trois Volumes. Le prix de la Soufcrip- tion eft de 24 livres , rendu, franc de port, par tout le Royaume. On fera libre de foufcrire à telle époque que l’on voudra, même pour fix mois. Les perfonnes qui défireront fe procurer le Journal, font priées d’affranchir l’argent & la lertre d'avis. On foufcrit à Paris, chez Ruault, Libraire , rue de la Harpe. Annoncer le Profpetus d’un Journal, c’eft quelquefois induire en erreur, parce que fouvent la montagne en travail enfante une fouris. Le premier Numéro de celui-ci, remplit rigoureufement fes conditions , & aura fürement le plus grand fuccès. Les Phyficiens litont avec plaifir les nouvelles expériences fur les effets de Pair. échauffé à un plus haut degré que la température du corps animal. Des Erreurs & de la Vérité, ou Les Hommes rappellés au principe uni- verfel de la Science ; par un Ph. inc. À Edimbourg , & à Genève, chez Ifaac Bardin. 11 eft facile de voir, par le titre de cet Ouvrage, que la plupart des matières qu’il renferme ne font point du reffort de ce Journal; mais comme l’Auteur y traite aufli des objets Phyfiques , j'expoferai fes idées fur quelques-unes des parties de la Science qui nous occupe. Après avoir établi que les fens ne font que l'organe de nos penfées & de nos connoiffances , & qu’ils n’en font pas l'origine, après avoir fait remarquer les différences qui fe trouvent entre l'homme & l'ani- mal, le Philofophe inconnu donne une méthode pour placer les bor« nes qui féparent les trois règnes de la Nature, SUR L'HIST. NATURELLE ET LES ARTS. 345 » Si l'homme , dit-il enfuite , avoir une Chymie par laquelle il püc » appercevoir les vrais principes des corps , il verroit que le feu eft le » propre de l'animal , l’eau le propre du végétal , & la terre le propre » du minéral «. L'Auteur, dans la 2° divifion, foutient avec force que les principes, foir généraux , foit particuliers, des êtres matériels, font abfolument différens des apparences de la matière ; que les principes des corps font des êtres RotR: indivifbles , incommenfurables, & qu’au con- traire la matière étant foumife à une mefure fenfble , il en refulre que la matière & Les principes de la marière, ne peuvent être de la mème nature, Ceci le conduit à donner fur la divifbilité de la matière des idées EE font voir que, non-feulement la matière n’eft pas divifible à l’in- ni , felon l’idée commune, mais qu’il n’eft pas poilible que l'homme opère fur elle la première & la moindre des divifions. De là, l’Auteur examine la reproduction & la génération des for mes. Les principes de la matière, felon lui, ayant en eux routes leurs propriétés & toures leurs puiffances, il rejette pleinement le fyftème reçu fur la reproduction continuelle des formes par l’affemblage & la réunion des débris des corps qui fe diffolvent; prétendant d'ailleurs que chacun des principes généraux & particuliers des corps étant uns & fimples, léar action doit être une & fimple commeeux, & n'avoir qu'un feul bur à remplir ; que dans le cours de cette action, ils ne font fufcepribles ni de mêlange , ni de divifion; que les débris des corps diflouts , ne fervent que d'engrais, de médecine & d’agens fe- conds, foir pour réchauffer le nouveau germe & procurer fa reproduc- tion , foir pour le défendre de la trop grande réaétioà du feu extérieur univerfel qui, fans cela, le diffoudroit dans fon berceau , fans lui laïlfer produire la moindre partie de fon action. Pour appuyer cette doétrine, l’Aureur obferve qu'aucun corps ne peut fervir d’alimens à un autre corps, qu'il ne foir auparavant def- ticué de fes principes de vie, & qu'il ne foir devenu cadavre ; d’où il conclut de nouveau, que c’eft une erreur de croire que les êtres par- ticuliers , qui fe diffolvent, entrent dans la compolition des nouvelles formes. L’Aureur eft engagé par là à parler de la digeftion & de la nutrition animale de la végération, des mêlanges chymiques , &c. Dans la 3° divifon , l'Aureur ne reconnoît que trois élémens; fz- voir, le feu, la rerre & l'eau. L'air, dir-1}, meft pas au nombre des élé- mens conftirurifs de la matière, quoique fon action foir nécefaire à l'exiftence des corps. Il n’eft pas foumis comme eux à la vue corporelle, & dans leur décompofition on ne le trouve point viñiblement, comme on y trouve l’eau, la terre & Le feu; aufli fon action elt-elle d’un au- 350 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, &c. tre ordre & d’une autre claffe; il eft en même-tems Ze char de la vie des étres , & L’agent principal de leur defiruüfion. 6 Cet Ouvrage paroîtra aux yeux de certaines perfonnes , un affemblage de‘tidiculités, & pour d’autres un fond inépuifable de fcience. Noùs l'annonçons tel qu'il eft , afin que chacun le juge comme il l’entendra. . Le, Coucou , Difcours apologétique | ou Memoire [ur le Coucou. Cet Ouvrage elt uniquement fondé fur des faits qui font pour la. plu- . part auffi extraordinaires que peu connus, Cette Brochure de 73 pages an. 8°, plaira aux Amateurs de l’Hiftoire Naturelle. M. Zostinger , Méde- cin, en eft l’Auteur , & elle fe trouve à Nancy, chez Leclerc, Libraire. Examen de la Houille, confidérée comme engrais des terres; par M. Raulin, Docteur en Médecine, Penfonnaire du Roi &: de plu- fieurs Académies , ë7-12 de 70 pages. À, Paris, chez Vincent , rue des Mathurins. Réflexions fur Les dangers des Exhumations précipitées ; & [ur les abus des Inhumations dans les Eglifes , fuivies d'Objfervations fur les planta- tions d'Arbres dans les Cimetières ; par M. Navier, Docteur en Méde- cine, Médecin du Roi pour les maladies épidémiques dans a Pro- vince de Champagne , 7-12. de 8o pages. À Paris, chez Morin , Libraire, rue Saint-Jacques. Mémoire [ur les funefles effets du Charbon allumé , avec le détail des Cures & des Obfervarions faites à Nancy fur le même fujet ; par M. Harman , Gonfeiller-Médecin , #7-8°. de 80 pages. À Nancy, chez Balthafar. Manuel du Meñnier & Charpentier de Moulins, ou Abrègé claffique du Traité de La Mouture économique , orné de gravures en taille-douce , & rédigé fur les Mémoires du fieur Céfar Buquet ; par M. Béquiller, Avocat & premier Notaire des Etats de Bourgogne, de plufieurs Académies , 1 vol. ir-8°. de 1850 pages. À Paris, chez Panckoucke, Libraire, rue des Poirevins. Cet Ouvrage eft un précis du Traité de la Moature économique que cet Auteur donnera inceflamment au Public en 2 volumes in-4°., Ouvrage attendu avec impatience, à caufe de fon utilité. Il eft bien fingulier qu'on ait attendu jufqu'à ce jour à perfectionner des machines qui font d’une première né- ceffité. L'Ouvrage que nous annonçons remplit entièrement fon but, Nouvelles Expériences & Obfervations fur le Fer , relativement à ce que M, de Buffon à dit de ce métal dans l’'Introduction à l’Hiftoire des Minéraux qu'il vient de publier; par M. du Coudray, Capitaine d'Ouvriers au Corps de l’Aruillerie , & Correfpondant de l’Acadé- mie des Sciences de Paris, ëz-8°. de 148 pages. À Paris , chez Ruaulr, Libraire, rue de la Harpe. 3 Octobre 1776 : FN | \ L ( 0) 4000 7 Ne *ALNIGLA XAFHI FT YANII'TIFID AT YA0Z #104 De mn ess 0 0 id fohat LORD ET ORNE + è ; ñ f ë k M1 bre LE a de 4. a PACE Y ST Q U FE: SUR L'HISTOIRE NATURELLE PAPE MES U RYL'E S ARTS; AVEC DES PLANCHES EN TAILLE-DO.UCE, pt nt bd % 2. DÉDIÉES “A Ma LE COMTE D'ARTOIS; Par M. lAble ROZIER, Chevalier de l'Eglife de Lyon ; de lP Academie * Royale des Sciencés , Beaux-Arts & Belles- Lettres de Lyon ; de Villefranche, de Dior, de Marfeille, de Fleffingue ; de la Société Impériale de Phyfique & de Bo- zaniqué de Figrence ; Correfpondant de la Société des Arts de Londres , de la. Societé Philofophique de Philadelphie , &c. ancien Directeur de Ecole Royale de Médecine - Vétérinaire de Lyon. T'OUM ES SI X NH EM.E, NOVEMBRE, 7S. role bis, Chez RU AULT, Libraire, rue de la Harpe. EEE EE VERRE SE MR DIGG, CEE XIV. M AUFCENCOEIRU PI L E GEL DU JR OI. A MM. ls SouscrrPTEuRrs dont l Abonnement fenit à la Jin de l'année 1775. Prusrrurs Soufcripteurs fe font plaint de ce qu'ils ne rece- voient pas les Cahiers aufi-tôt qu'ils avoient formé leurs deman- des. Ils font priés d’obferver que fouvent ils s'adreflent à des Commiffionnaires qui négligent de foufcrire , ou de faire par- venir les Cahiers àx leur deftination. Pour éviter, à Favenir , de pareils reproches & de femblables lenteurs , MM. les Soufcrip- teurs, qui ont été dans le cas d’être mécontens, font invités à recommander expreflément aux perfonnes qu'ils chargent des leurs commiflons , d'être plus exaétes que par le pañlé : ou s'ils jugent la chofe plus commode , de configner le montant de la Soufcription au Bureau des Poftes de leur Ville, fans l’affran- chir, mais affranchir feulement la Lertre qui en donne avis. Un fecond fujet de plainte vient de ce que ceux, chez lefquels on prefcrit de remettre les Exemplaires, les prètent , les égarent, & difent enfuite ne les avoir pas reçus. On prévient que l'on fait l'appel de chäque Cahier & de chaque Soufcripteur, comme dans un Régiment on fait l'appel des Soldats, & tous les Cahiers font portés fermés , dans un fac cacheté, à la grande ou à la petite Pofte de Paris. On voit par - à, que fi quelques -uns ne font pas rendus, ce n’eft plus la faute du Bureau des Journeaux. MM. les Soufcripteurs, qui défirent renouveller leur Abon- nement pour l’année 1776 , font priés de donner /eur nom € de- meure , écrits d'une manière lifible , dans le courant du mois de Décembre, ou le plutôt poflible, afin d’avoir le tems de faire imprimer leur adrefle. On foufcrit à Paris, chez l’Auteur , Place & Quarré Sainte - Geneviève , & chez les principaux Libraires des grandes Villes. Le prix de la Soufcription eft de 24 livres pour Paris, & de 30 livres pour la Province, port franc. VE BEL TE DE SU A RTC LES Contenus dans cette feconde Partie. he TRE de M. de Morveau, à l’Auteur de ce Recueil, [ur la mas nière d'agir du Mercure dans les maladies dont il ef? le fpécifique, à page 351 Seconde Lettre du même Auteur, fur Le Bleu de Pruffe, 355 Suite de l’expofition des Analogies les plus fingulières & Les plus Empor- tantes du Froid & du Chaud, avec les explications de ces Analogies : par M. Changeux , 357 De la Cryflallifation des Sels ; par M. J. G. Pfæhkr, 369 Mémoire en forme de Lettre , [ur une maladie des Grains appellée Nielle, &c. par M. Fréderic Rainville , de l’Académie de Phyfique de Rotterdam, 330 Obfervations fur la Larme Batavique ; par M. Maupetit, Chanoine Ré gulier de la Congrégation de France, 6 Prieur de Caffan, 399 Mémoire fur la fufion de la lame d'une Epée dans le fourreau par La foudre ; par M. Bertholon, Prêtre de la Miffion , des Académies Royales des Sciences 6 Belles-Lertres de Begiers, de Lyon, de Marfülle, de Nifmes, de Touloufe, &' de la Société Royale des Sciences de Montpellier ; Etc. 401 Lettre écrite à M. Darcet, Doëleur-Règent de la Faculté de Médecine de Paris, Profeffeur de Chymie au Collège Royal ; par M. Berniard, 410 Confidérations Optiques. Dixième Mémoire, fur les Lifières lumineufes, 412 Differtation fur le mouvement & ls élémens de la Matière ; par M. Comus , 410 Nouvelles Littéraires ; 427 Fin de la ‘Lable; #4 Fr + k " nd. AE : “re ed , < J "Az lu, par ordre de Monfeigneur le Chancelier, un Ouvrage ayant pour titre : Obfervations far la Phyfique, fur l'Hifloire Naturelle & fur les Arts, &c par M. l'Abbé Roz1en, &c. & je crois qu'on peut en permettre l'impreflion, 1 MX = dVi2: ME A Paris, ce 25 Novembre 177$ ds AT taf De | = k ARDANE, taste 5: > spa Si, KL ARE A Ju Le C ar b d 512 À Ÿ 1 © \ " : « La »] OBSERVATIONS . F L # ES . D U Pthtun tent, CEST REP RRN ee RE RE | À — ht Bed RTE < De M. pe Morveau à l’Auteur de ce Recueil, Sur la manière d'agir du Mercure dans les maladies dont il eff de Jpécifique. M. les éloges que j'ai entendu donner pat tous les gens de l’art, à l'Ouvrage que M. de Horne vient de publier fur les différentes mérhodes d’adminiftrer le mercure , m'ont engagé à chercher l’en- droit où il traite de fa manière d’agir; & quoique très-peu verfé dans les fciences médicinales, j'ai lu ce chapitre avec lintéréc de quelqu'un qui a propofé fes idées fur le même fujet, & qui dé- fire les apprécier. M. de Horne attribue la manière d’agir du mercure, comme curatif, à ce qu'il eft pollible qu’il faffe dans les liqueurs du corps humain , des mutations fuffifantes pour que les parties virulentes fe trouvent par-là détruites, & ne puiffent plus agir comme telles, par la défunion de leurs principes conftituans, ou que rendues ainfi d’une ténuité évaporable , elles s’échappent par tous les émonétoires qui leurs font ouverts; il jage en conféquence que la vertu du mer- cure eft probablement due au fouffre de ce minéral , dont la vapeur bienfaifanre entraîne le virus vénérien ou le décompofe , & que la combinaifon, qui fe fait du mercure avec les acides, peut être re- gardée comme la caufe occafionnelle du développement de ce fouffre, quoiqu'on ne puifle dire comme il s'opère. Ce langage, d’un aufli favant Médecin qui s'explique avec au- tant de réferve, qui n'indique que des probabilités , m’enhardit à vous communiquer , Monfieur , le morceau fuivant , tel que je lai lu à la Séance de l’Académie de Dijon, du 29 Novembre 1771, fous le vitre de Corjetures , &c. Je n’y ajouterai qu'une obfervarion qui fut rapportée dans la même Séance, à l’occafion de certe lecture, par un Chirurgien dont le nom & les ouvrages font bien connus, & qui fut rerenue fur le regiftre. Je viens de voir dans un extrait de l’Effai de M. Peyrilhe fur la vertu anti-vénérienne des alkalis volatils, qu'à l'exemple de, Sy- denham, cet Auteur, rapportant l’action du mercure aux loix dé Tome VI: Part. II, 1775. L'z 352 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUES l'hydraulique , fuppofe qu'il ne guérit qu'en excitant un mouvement fébrile , qu’en foutenant ce mouvement pendant un efpace de tems proportionné à l'épaifliffement vénérien, & appuie cette induction fur les bons effets des alkalis fixes & volatils. Il ne m’appartient pas d'examiner des faits de cette nature, mais je crois pouvoir re- marquer, 1%. qu'ils ne tendroient qu’à établir une propriété com- mune quelconque entre le mercure & les alkalis, & que dans le fyf- téme de nos connoiflances actuelles, il eft tout auf probable que les alkalis ont, du moins jufqu’à un certain point, comme le mer- cure , la propriété de s'emparer du phlogiftique; 2°. que l’hypotèfe ne néceflite mème pas une propriété commune, parce qu’on peut opérer la défunion de deux principes par des voies très-différentes , & en attaquant particulièrement l’un ou l’autre ; c'eft ainfi que l’a- cide & l’alkali décompofent également un fel métallique , le pre- mier en s’appropriant ia bafe, le fecond en lui enlevant le prin- cipe avec lequel elle étoit combinée. Conjetture fur la manière d'agir du mercure dans les maladies dont il ft le fpecifique. Depuis que l'on à éprouvé l'efficacité du mercure dans le traire- ment des maladies qui font le fruit contagieux de la débauche, on a, fans doute, imaginé bien des hypothèfes pour rendre compte de fa manière d’agir fur le corps humain, & en particulier fur la ma- nière dont il attaque fi heureufement le virus vénérien, j'avoue que je ne les connois pas, la lecture des ouvrages où j'aurois pu les ren- contrer , fuppofe une application plus profonde que celle que je puis donner à des objets de goût ; & fi j'ofe propofer aujourd'hui une conjecture à ce fujet , c’eft que j'y ai été conduit par les expérien- ces que j'ai faites fur le turbith minéral, & dont j'ai donné le ré- fultac dans une Differtation fur le phlogiftique ; c’eft que ces expé- riences m'ont paru établir des vérités nouvelles, & que la conjecture dont il s’agit, en étant en quelque forte la conféquence naturelle, jai pu croire qu'elle n’avoit point encore été formée. Je fens que pour l’annoncer avec avantage, 11 faudroit réfuter les fyftèmes qui lont précédée, examiner les faits qui peuvent la contrarier & la faire cadrer avec les obfervations les plus accréditées, mais ce travail fe- roit au-deffus de mes forces , je me borne à préfenter cette idée comme je l'ai conçue; fi les gens de l’art la juge digne de quelque attention, elle ne tardera pas à recevoir entre leurs mains la forme qui peut la rendre utile. J'ai prouvé, contre l'opinion commune , que le mercure éroie SURNL 'HISMEUN ATURE LLENET LES ARTS: 353 calcinable (1), c’eft-à-dire qu'il étroit fufceprible de perdre fon phogiltique , de mème que les autres métaux imparfairs , ou du moins une partie de fon phlogiftique néceffaire à l’état de métal- lifation : ce point de fait acquis, fa réduétibilité fans addition , n'en a pü balancer les preuves ; mais en même-tems qu'elle m'a fervi à appuyer quelques conféquences par rappott à la nature du phlogiftique & au méchanifme des réduétions métalliques , elle m'a forcé de reconnoître dans le mercure une propriété particulière qui lui appartient exclufivement aux autres métaux , ou du moins dans un degré excluff; cette propriété eft la facilité avec laquelle il fe recombine avec le phlogiftique qui traverfe les vaiffeaux , quoiqu'il ne foit engagé dans aucune bafe , ni arrété par aucun flux : je remarquerai en paflant, que certe propriété fe concilie affez bien avec ce que j'ai dir. en dernier lieu dans mon Eflai Phyfco- Chymique fur la cryftallifation , que l’état de Huidité du mercure étoit abfolument une déliquefcence phlogiflique , comme l’état de l'huile de tartre étoit une déliquefcence aqueufe ; or c’eft de certe propriété que je tire toute la théorie de l’action du mercure fur le virus vénérien. De quelque manière , & fous quelque forme que l’on adminiftre le mercure , il eft dans un état falin ; dans le nombre des diffe- rentes méthodes dont j'ai oui parler, la feule qui me paroifle fuf- ceptible de quelque difficulté à cer égard, eft la mérhode des fric- tions avec l’onguent mercuriel; mais M. Beaumé fait voir dans fes Elémens de Pharmacie, que la graifle que l’on emploie dans la préparation de cet onguent , n’eft pas un fimple intermède propre à divifer le mercure, que fon acide attaque & diffout le métal , & qu'ainf il y en a au moins une partie réduite à l’état falin:il y a long-tems que l’on auroit dû le foupçonner , fi l’on eût fait plus d'attention à la prompte rancidité de la graifle ainfi mélan- gée , parce que cette rancidité eft un figne manifefte de la défu- nion des principes acide & inflammable qui conftituent les huiles. Maintenant fi on demande de quelle manière agit le fel mercu- riel , on peut répondre d’abord que ce n’eft ni comme fel neutre, ni à raifon de fon acide : ce n’eft pas comme fel neutre, parce qu'alors il ne feroit fpécifique qu’autant qu'il feroit déterminé & pour la nature de l'acide, & pour le degré de faturation : ce n’eft pas non plus à raifon de fon acide, puifqu’il change dans les diffé- rentes préparations , & que l'efficacité du remède elt conftante ; c’eft donc uniquement la bafe de ce fel qui agir, & elle agit non pas (1) Voyez Digrefions Académiques, page 221 & fuivantes. FETE 354 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, comme engagée dans tel ou tel acide ; mais elle agit feule & dé gagée de toute autre fubftance qui ne ferviroit qu'à modifier fes propriétés. Il paroit donc déja conftant que les acides quelconques , tels que Vacide huileux , lPacide marin , l'acide acéteux, la crème de rartre, & tous ceux que l’on employe prefque arbitrairement dans les trai- temens dont il s’agit, ne fervent que par la propriété qui leur eft commune à tous fans exception , de calciner les métaux avec lef- quels ils s’uniffent ; car puifque nous avons établi d'une part, que le mercure étoit calcinable , & de l’autre , qu'il n’étoit fpécifique que lorfqu’il étoit employé dans l’état falin , il fuit rigoureufement de ces deux principes , que ce n’eft plus le mercure même, mais la chaux du mercure que ces acides portent dans le corps humain; d'où je conclus que cette chaux ayant la vertu fingulière d’arrirer puif- famment le phlogiftique , de fe combiner avec lui crès- facile- ment, de fe lapproprier enfin , il eft probable qu'elle agit en fe revivifant. Ce feroit ici ke lieu d’effayer de déterminer la nature de la ma- tière morbifique que cette révivification décompofe en s’appropriant üun de fes principes , ou de faire fentir du moins, qu'elle eft telle qu'une furabondance de phlogiftique en fait le vice principal, & que la privation de cette portion de phlogiftique trop développé , peut en arrêter les effets & en détruire le ferment; mais c'elt un vuide que je fuis encore forcé de laiffer à remplir à ceux qui font plus occupés de la Médécine ; jajouterai feulement , pour appuyer ma conjecture, que la révivification que je fuppofe , n'a rien d’im- poffible, puifque la chaux de fer fe réduit par la feule digeftion dans l'huile, puifque la chaux de cuivre fe réduit pareillement au degré de chaleur néceffaire à la préparation de l’onguent égyptiac, & par le feul contact des parties inflammables du miel; cette dernière obfervation a encore cela de remarquable , que la combinaifon de la terre métallique & du phlogiftique , fe fait malgré la préfence d’un acide ; comment donc pourroit-on révoquer en doute la pofli- bilité de la réduction de la terre mercurielle dans le corps humain, tandis que nous avons des expériences qui en démontrent la réducti- bilité dans un degré extraordinaire & infiniment fupérieur à celle de toutes les autres verres métalliques. P.S. M. Hoin, Affocié de l’Académie Royale de Chirurgie , qui étroit préfent à la leéture de ce Mémoire , dir avoir été témoin d’un fait qui donnoit beaucoup de vraifemblance à ce fyftème, c’eft qu'il avoit vu un de fes malades rendre par les pores du mercure réduit , & qui fans doute avoit repris dans fon paflage par la mafle humorale , le phlosiftique dont il étoit dépouillé en y entrant. À - AT D _— Le mr rhone SUR'L'HISTY NATURELLE ET LES ARTS. 355 DRAM ON DIE CE EMIOTNR'E Du même Auteur, Sur le BLEU de Pruffe. M. Dans un Mémoire imprimé au Tome IV de vos Obfervations de Phyfque , &c. page 357. M. de la Folie , de l’Académie de Rouen , a propofé une nouvelle préparation du bleu de Pruffe, par l'alkali de la foude , pour éviter, tant à ceux qui le compofent , qu’à leurs voifins , l'odeur fétide que répand la combaftion du fang de bœuf. En lifant cet article, je me fuis rappellé avoir employé avec fuccès pour la mème préparation, un procédé qui a le mème avantage, & que je crois plus économique. En faifant, il y a quelques années , les expériences fur le bleu de Pruffe, que j'ai rapportées dans ma Differtation fur le Phlooifti- que (1), je me trouvai manquer abfolument de liqueur alkaline faturée , l'impatience d’achever une opération dont le réfultat m'in- rérefloit , me fit chercher les moyens les plus expéditifs pour me procurer la quantité qu'il me falloit de cette liqueur , & que j’au- rois été obligé fans cela , de faire venir de Paris: je penfois bien que la déficcation du fang de bœuf devoit être défagréable ; mais je ne croyois pas qu’elle püt être auf arroce que l'annonce le Mé- moire de M. de la Folie , & qu’elle left en effet; je ne fongeois qu'à aller vire , & l’idée que j'avois prife de la théorie de cette préparation me perfuada que je pourrois fubftituer au fang de bœuf des matières animales prefqu'aufi peu chargées de terre, & natu- rellement sèches ; en conféquence , ayant trouvé fous ma main du poil de bœuf dont j'avois provifion pour les luts dont on garnir les cornues de verre , j'en mêlangeai groflièrement une poignée avec quatre onces de fel de potafle, je plaçai le tour dans un grand creufet pour le faire calciner de 14 même manière que l’on calcine le mélange d’alkali & de fang de bœuf defléché , je leflivai le réfidu , & après la concentration des leflives & la neutralifarion de l’alkali furabondant , j’eus Le jour même, fans aucune odeur incommode, A —————————— — — © ——— — "a e (1) Digreflions Académiques , page 244 & fuivantes, 356 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, route la quantité que je défrois de liqueur alkaline faturée de ma- tière colorante. D'après cette épreuve , j'ai penfé qu'il feroit poflible de faire à meilleur compte du bleu de Prufle bien fupérieur à celui qui eft dans le commerce : dans cette Province où l’on eft à peine éveillé fur les reffources de l’induftrie , parce que l’on voudroit y faire fruc- tifier les arts avant de les éclairer , je vois les poñtions les plus avantageufes pour l’établiffement d’une femblable Fabrique , ce font des pays arrofés par des ruiffeaux qui jauniffent leurs lits par l'ocre qu'ils y dépofent, où le charbon minéral eft abondant & de peu de valeur par la difficulté de l'exportation, & où le fel de cen- dres ne coûteroit prefque que la main d'œuvre ; il n’y auroit donc à chercher que des poils d'animaux , marchandife aflurément très- commune par-tout, & avec cela , avec quelques chaudieres & quel- ques creufets, on feroit en état de fournir le plus beau bleu de Prufle, fans être obligé d’évaporer le fang de bœuf, fans avoir befoin d'acheter ni le vitriol de Mars pour donner le fer dillous, ni la foude pour précipiter , ni l’efprit de fel pour aviver ; on fa= tureroit l’alkali Pruflien par le bleu lui-mème tout formé, Par ce moyen , on poutroit donner aux Chymiftes cerre liqueur d’épreuve à un moindre prix. En fecond lieu , le bleu de Pruffe qui fortiroit de certe fabrique, feroit toujours d’une égale intenfité, toujours également pur & privé de matières hétérogènes, ce qui n'eft pas un médiocre avan- tage ; les Artiftes fauroient du moins ce qu'ils acheteroient , ils y mettroient enfuire celle bafe & en teile quantité qu'ils ingeroienrt à-propos- Enûn il feroit facile d’en fournir de tout préparé avec la terre de l’alun à ceux qui le préféreroient ; il y a des fources tout-à-la- fois martiales, & alumineufes , qu'il fufhroit de précipiter par l'alkali Pruflien non faturé , ce qui épargneroit encore une opé- ration. Je fouhaite, Monfieur, que ces idées puiffent être de quelque utilité à ceux qui feront à portée de les fuivre ; je n'ai pas d'autre vue en vous les communiquant. J'ai annoncé il y a quelques an- nées, qu'indépendamment du bleu, cette préparation pouvoit fout- nir à la peinture un très-beau jaune orangé (1); mais je ne doute pas que fon ufage ne s'étende un jour à des objets plus importans ; la Médecine qui a jufqu'ici totalement négligé certe fubftance, & (x) Digreff. Acad. page 247 SUR L’'HIST. NATURELLE ET LES ARTS. 357 l'alkali Pruflien que donne l'évaporation de la liqueur faturée , portera tôt ou tard fes recherches fur les propriétés d’un fel qui eft, fi je l’ofe dire, animalifé, qui différe de tous les autres par ce caractère bien inréreffant , qui eft métallique , & n’a rien de cor- rofif , qui réfulte de l’union des principes les plus actifs, parfaite- ment neutralifés, qui formant un véritable hépar , ou fel à trois parties , admettant dans fa compofition la terre martiale fi amie de l’homme , ne peut manquer de produire fur l’économie animale des effets très-fenfbles , & par conféquent falutaires dès qu'ils feronc indiqués. Je fuis, &c. RTE De l’expofition des Analogies les plus fingulières & les plus importantes du Froid & du Chaud, avec les explications de ces Analogies ; Par M. CHANGEUX. XLV-, ONZE ME ‘EX EM'P'L'E: Succeffion du Chaud & du Froid, & vice verfa. L: grand froid & la grande chaleur produifent encore mieux l'effet général ou partiel dont nous venons de parler(1), quand ils fe fuccèdent rapidement l’un à l’autre. M. Sanche à raconté à plufeurs perfonnes qu’en Rufñe il m'étoit pas rare de voir des hommes périr de froid , & que quand on voit quelqu'un qui a les joues très-pâles pour s'être trop expofé à l'air, on lui dit qu'il eff brilé, & alors il va chercher de la neige pour s’en frotter le vifage , ou 1l fe lave avec des liqueurs tiedes , ou il va fe chauffer en prenant foin de s'approcher du feu par degrés infenfibles ; car s’il fe préfentoit au grand feu , la gan- grène viendroit fur-le-champ. | (1) Voyez le Cahier du mois d'Oftobre précédenr, % - 558 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, Les vaiffeaux, par la congellation font déja très - diftendus, & par le grand feu on dilate encore plus & l’on rompt les vaiffeaux. Dans le cas oppofé , c’eft-à-dire lorfque le froid fuccède au chaud, il y a lieu à un effer auffi funefte : des perfonnes ont été attaquées de gangrène pour être defcendues l'été dans un puits, ou pour avoir mis les mains dans de l'eau froide, afin de tempérer l’ardeur de la fièvre. é Après de grandes inflammations, on remarque que le relâchement des fibres qui fuccède, eft quelquefois fi confidérable, qu'il arrive mortification & gangrène : dans l’irritation , la fibre s’allonge , & quand la partie enflammée a repris fon volume ordinaire, elle eft trop lache pour exercer fes fonctions. XVe. D:O'UNZ AE ME J'EPAVE) MP LE, Conférvation des cadavres , des plantes & des animaux. Si le froid & le chaud exceflifs ont les fuites pernicieufes que nous venons de rapporter quand il s’agit des plantes & des ani- maux qui jouiflent de la vie ; leurs effets font tout différens , quoique toujours analogues entreux, quand les plantes & les ani- maux font morts ; alors le froid & le chaud extrèmes les con- fervent. La corruption des cadavres, dit M. d’Aubenton (Hift. nat. aéner. & part. tom. $. pag. 389.) & l'on peut dire la même chofe de la corruption des plantes , n'étant caufée que par la fermentation des humeurs, tout ce qui eft capable d'empêcher ou de retarder cette fermentation, contribue à leur confervarion ; le froid & le chaud , quoique contraires , produifent le même effet à cet égard , par le defféchement qu'ils caufent ; le froid en condenfant & en épaifhf fant les humeurs du corps, & la chaleur en les raréfiant , & en accé- Jérant leur évaporation, avant qu’elles puiffent fermenter & agir fur les parties folides. Mais, ajoute ès bien M. d’Aubenton, il faut que ces deux ex- tèmes foient conflamment les mêmes, car s’il y avoit une viciflitude du chaud au froid, & de la féchereffe à l'humidité , comme il fe fair d'ordinaire , la corruption arriveroit nécffairement. Garcilaffo (hift. de incas Rois du Pérou , tom. 1. p. 181 & {niv.) prérend , au fujet des Momies des Péruviens , aufh belles que celles des Egypriens, que l'air eft fi fec & fi froid à Cufco , que la chair s’y defsèche comme du bois fans fe corrompre, & ül conjecture que l’on faifoit deffécher les corps dans la neige avant d'y appliquer Le bitume : il ajoute que du rems des Incas on expololt ve rade ee at Din aus BE Bon. , SUR L'HIST. NATURELLE ET LES ARTS. 349 expofoit à l'air les viandes qui éroient deftinées pour les provifions de guerre, & que lorfqu’elles avoient perdu leur humidité , on pouvoit les garder fans les faler , & fans aucune autre prépa- fation. ; On dit qu’au pays de Spitgberg , qui eft à 79 ou 80 degrés de latitude , & par conféquent dans un pays extrémement froid ; il n'arrive prefque aucune altération aux cadavres qui font enlevelis depuis trente ans; rien ne fe pourrit ni ne fe corrompt dans ce pays 3 les bois qui ont été employés pour bâtir les huttes où l’on fai: cuire les graifles de baleine, paroiflent aufli frais que lorf- qu'ils ont été coupés. Vous conferverez du gibier, du bœuf, & autres viandes , en les enveloppant d’un linge blanc pendant qu'ils font encore frais, & les mettant dans un coffre que vous couvrirez de fable ; la viande s'y conferve pendant trois femaines , & elle devient fort tendre , foit que ce lieu foit fec ou qu'il foit humide ; fi le coffre eft bien cou- vert de fable, la corruption fera très-long-remps retardée. Aux obfervations fur les effets du grand froid fur les corps morts des animaux & des végétaux , l’Auteur que j'ai cité ajoute aufli- tôc celles que l’on à faites fur le grand chaud par rapport aux mêmes objets ; il n’eft pas moins certain, dirce Naturalilte, que la féche- relfe, qui eft caufée par la grande chaleur, préferve , comme le grand froid , de la corruption. On fait que les hommes & les animaux , qui font enterrés dans les fables de l'Arabie, fe defsèchent prompte- ment & fe confervent pendant plufeurs fiècles comme s'ils avoient été embaumeés. Il eft fouvent arrivé que des caravanes entières ont éri dans les déferts de l'Arabie, foit par les vents brülans qui s’y élèvent , & qui raréfient l'air au point que les hommes ni les ani- maux ne peuvent plus refpirer , foit par les fables que les vents im- pétueux foulèvent à une grande hauteur, & qu'ils déplacent à une grande diftance; ces cadavres fe confervent dans leur entier, & on les retrouve dans la fuite par quelque effec du hafard. Plufieurs Au- téurs, tant anciens que modernes, en ont fait mention. M. Shaw, (Voyage dans plufeurs Provinces de l'Afrique, imprimé à la Haye, in-4°. tome 2, page 79) dit qu'on lui a affuré qu’il y avoit un très- grand nombre d'hommes, d’ânes & de chevaux , qui étoient con- fervés depuis un tems immémorial dans les fables brülans de Saibah, qui eft un lieu que cet Auteur croit fitué entre Ruffem & l'Egypte. Si l’on veut conferver les plantes, on peut le faire par la délic- cation , & l’on fair que les fleurs confervent de cette manière leurs couleurs & rous leurs caraéères, Tome VI, Part. II. 1775. Aaa 360 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, XVL TREIZIÈME EXEMPLE. Couleur chez les Peuples qui habitent les climats les plus oppofes pour la température. Il eft un effet très-remarquable que le froid & le chaud extrèmes produifent également , c’eft la couleur chez les hommes. Les voyageurs ont rencontré des Nègres dans les pays extrèmement froids & extrèmement chauds : la chaleur , dit M. de Buffon, lorf- qu'elle eft exceflive , comme au Sénégal & en Guinée, rend les hommes tout-à-fair noirs; lorfqu’elle eft un peu moins forte, comme fur les côtes orientales de l’Afrique , les hommes font moins noirs; lorfqu'elle commence à devenir un peu plus tempérée, comme en Baibarie, au Mogol, en Arabie, les hommes ne font que bruns ; & enfin, lorfqu’elle eft tout-à-fait rempérée, comme en Europe & en Afie, les hommes font blancs; on y remarque feulement quel- ques variétés qui ne viennent que de la manière de vivre. Par exem- ple , tous les Tartares font bafanés, tandis que les peuples de l’Eu- rope , qui font fous là même latitude , font blancs, parce que les Tartares font toujours expofés à l'air, qu’ils n’ont ni villes, ni de- meures fixes, qu'ils couchent fur la terre, qu'ils vivent d’une ma- nière dure & fauvage. Mais lorfque le froid devient extrème, il produir quelques effets femblables À ceux de la chaleur exceflive. Les Samoïèdes, les Eapons, les Groëlandois, font fort bafanés; on affure même qu'il fe trouve parmi les Groëlandois des hommes aufli noirs que ceux de l’Afri- que. Les deux extrèmes fe rapprochent ici; un froid très- vif, une chaleur brûlante , produifent le même effet fur la peau , parce que lune & l’autre de ces deux caufes, agiffent par une qualité qui leur eft commune ; cette qualité eft la fécherefle qui, dans un air très- froid , peut-être aufli grande que dans un air très - chaud. Le froid comme le chaud, doit deffécher la peau , & lui donner cette cou- leur bafanée que lon trouve chez les Lapons. XVIL QUATORZIÈME EXEMPLE, Les climats extrémes font également défavorables au développement. des parties du corps, @& produifent le plus de Nains. Pa Nature, qui a mis des peuples d’une taille très-petite, & mème de véritables nains vers le Pôle, en a aufi placé fous la Zone Torride; le peuple nain, connu fous le nom d’Efquimaux 1 : SUR L'HIST. NATURELLE ET LES ARTS. 36 au centre de l’Ifle de Madagafcar, eft compofé d'hommes d'environ quatre pieds, M. de Commerfon vir une Efquimauffe dont le fein étoir parfai- tement plat; fi toutes les femmes de ce pays ont la même Organifa- tion, elles forment, dit là-deffus un Philofophe, le contrafte le plus fingulier avec les Naines de la Laponie & de la Baye d'Hudfon, dont les mammelles font aflez longues pour donner à tetter aux en fans par-deflus l'épaule. La chaleur, en même-tems qu’elle énerve, defsèche le corps en enlevant au fang fes efprits & la partie lymphatique , laquelle pa- roît être le principe de l’accroiffement de tout ce qui entre dans la compofition de l'animal. Les fibres , privées du fuc nutritif, fe ra- corniffent , & le développement des parties qui compofent l'individu, étant de toutes parts empêché , il refte d’une extrème petirelle. A l’écard du froid, il refferre, dit M. de Buffon , rapétifle & ré- duit à un moindre volume toutes les productions de la Nature ; auf les Lapons , qui font perpétuellement à la rigueur du plus grand froid, font Les plus petits de rous les hommes. Rien, ajoute le grand Ecrivain, que je viens de citer, ne prouve mieux l'influence du climat que certe race Laponne qui fe trouve placée tout le long du cercle polaire dans une très - longue zone, dont la largeur eft bornée par l'étendue du climat extrèmement froid, & finit dès que l'on arrive dans un pays un peu plus tempéré, XVII QUINZIÈME EXEMPLE. L'affoupiffement € la flupeur. Il n’eft pas néceflaire de prouver que la grande chaleur affoupic & produit un affaiflement & une ftupeur fenfbles. Tout le monde a éprouvé ces effets. à ] Wepfer nous apprend que le froid extrême affoupit de même tous les animaux ; 1l femble feulement que le fommeil, caufé par le froid , eft plus infurmontable & plus dangereux; mais en récompenfe il et plus agréable. Ceux qui voyagent au milieu des neiges, par un froid très-rigou- reux, font ordinairement pris par une envie paflionnée de dormir; mais s'ils s'abandonnent à cet attrair perfide, ils ne fe réveillent jamais , à moins qu’un heureux hafard n’amène quelqu'un à leur fecours. Ces fortes de cas ne font pas bien rares dans les Alpes. Le célèbre Boërhave s’y trouva expofé en Hollande, en 1709, au fort du grand hiver. Lui-même raconte, qu’étant monté en voiture avec un Chirurgien pour aller à deux milles de TR une Dame JAN 362 OBSERVATIONS SUR EA PHYSIQUE, qui s'étoit caflé la cuiffe, il fe trouva accablé d’un fi grand affou- pifement , accompagné d’une douceur inéfable, qui gagnoit égale- ment le Chirurgien & le Cocher, qu'ils fe feroient fürement lai(fé aller à cet appas pernicieux , fi, lui qui en connoifloit le danger, ne les eût obligés de defcendre de la voiture & de redonner du mou- vement à leur fang en marchant. Par ce moyen, ils furent bien- tôt réveillés & dégourdis. ( Azecdores de Médecine , Tome I, page 43, Boerk. Inf. cum Commentariis , B. de Huller.) XIX. Le froid & le chaud , grands principes des produiions naturelles 6 de leur confervation. On doit conclure d’une partie des obfervations précédentes que le froid & le chaud pofsèdent également la propriété de produire ; ils font les principes des générations; ou du moins, ils entrent fouvent dans ces principes, (qui peut-être nous feront toujours inconnus) comme des conditions eflencielles. Le froid paroît être dans le règne minéral plus producteur que deftruéteur ; & dans le règne végétal & animal , il femble que la chaleur produife plus qu’elle ne dérruir. Je dois rapporter ici ce que dit M. Antoine Timony , Doéteur en Médecine à Conftantinople , pour prouver la qualité confervatrice que j'attribue au froid & à la chaleur. Dans un grand froid & dans un grand chaud, la pefte perd de fa force. En 1752 la pelte fit ici (à Conftantinople) de grands ravages pendant tout l'été, qui fut fort humide; mais, ajoute M. Timony, la neige & le grand froid qui furvinrent le premier Novembre, f- rent celler tour-à-coup la contagion. Au Caire, dès que les grandes chaleurs de l’été commencent, Îa pefte finit : c'eft ordinairement vers la Saint-Jean que cela arrive. Voyez l’Aift. Nat. de l'homme malade, par M. le Clerc, tom. 2. p. 8x. Au Levant, les grands froids & les grandes chaleurs font ceffer la pefte. Remarques fur le Voyageur François , inférèes dans le Journal En- éyclopédiqne, 15 Mars 1767. (Voyez d'autres exemples au N° XV). XX. Le froid & le chaud, grands déflruëleurs dans les trois genres de la Nature, Si le chaud & le froid pofsèdent également & au plus haut degré, la propriété de produire & de conferver , on les peut regarder aufli & avec autant de raifon , comme les principes de la deftruction & de la corruption de tour ce qui exifte, q SUR L’HIST. NATURELLE ET LES ARTS. 363 Il eft certain que chez tous les êtres animés, le froid détruit la vie & l'organifation , tout comme le chaud extrême ; ceux donc qui croyent que tout eft animé dans la nature, & qui ne concoivent pas qu'un individu puiffe exifter s'il n’eft un animal » doivent artri. buer précifément les mêmes effets à tout excès > foit de chaud, foit de froid. Le froid eft fur-tout funefte aux plantes & aux animaux ; les parties les plus délicates des arbres , comme les fruirs » les rejertons, &c. ne peuvent fupporter fes atreintes. Le froid exceflif ne condenfe plus, il raréfie ; voilà pourquoi il produit des diftenfions & des déchiremens dans les vailfeaux déli- cats des végéraux & des animaux. Le-rere mirabile de Malpighi rend la poitrine très - fufcepcible d'être affedtée par le froid & par le chaud. On éprouva en 1705 , dans le Languedoc, des chaleurs qui fu- rent fuivies d'effets très-funeltes ; rout ce qui refpire fe trouva dans l'athmofphère brûlant de cette Province , comme fous le récipient de la machine pneumatique : l'air renfermé dans les vaifleaux , y oc- cafonnoit une diftenfion très-douloureufe. Voyez l'Hif. de L'Académie Royale des Sciences de 1705. pag. 38. On fait que dans les grands hivers, les animaux fouffrent beau- que : dans celui de 1709, un grand nombre de plantes périrent 3 plulieurs arbres ne purent réffter; les trop grands ou trop longs froids dans une année, annoncent Ja maladie , la difette & re) famine. M. Poftel, Médecin de Rouen , dans une differtation fur les pé- ripneumonies d'hiver , parle des inflammations de poitrine qui f- rent périr tant de citoyens à Paris durant l'hiver & le ptintems de l’année 1684, & cherche à certe occafon, les effets & la nature du froid; je ne fais fi l’on admerttra fa théorie > qu'il n’eft pas inutile d’expofer en peu de mots. Les effers du froid & du chaud, fuivant cer Auteur, fe rappor- tent trous au defaut de fermentation: l'air que l’on refpire dans un grand froid , coagule plufeurs parties du fang , & les rend Pituiteu. fes , il engendre aufi des crudités dans les premières voies ; imais la chaleur , en atténüant la bile & Ja mêlant dans le fang , l’avire d’une maniere immodérée ; de-li, les inflammations qui en font la fuite , & celle dont il s’agit ici; de-là, la différence & les rapports entre les maladies inflammatoires que l'été & l'hiver produifene : de-là , le traitement que l’Auteur preferit , car il allure que les pé ripneumonies d'été, produites par la chaleur & par la bile , exi- gent la faignée, & que celles d'hiver, produites par la pituite & par Le froid , demandenc fur-cout la purgation. 364 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, Cette conféquence eft déduire d’une théorie qui ne fera pas re- gardée comme deftituée de difficultés. Le trop grand froid & le trop grand chaud s’oppofent également à la végération , & l'expérience en eft un sûr garant. Les hautes montagnes, au fommet defquelles règne un éternel hiver , font arides, & ne nourriflent aucune plante: on ne trouve à une certaine hauteur , que des moufles & plantes de certe fa- mille ; c'eft auñli ce que l’on obferve dans les climats où la chaleur eft excefive : dans les fables brûlans de quelques cantons de l’Afri- que, on ne voit point d’autres productions végétales (1). Voyez les N°s XIII & XIV. où vous trouverez d’autres exemples. XXI. Dans quelles circonflances le froid 6 le chaud deviennent dele- ières & dangereux. Les deux Numéros précédens préfentent des contradictions , qui fans doute ne font qu'apparentes. Par exemple, quand l'humidité eft jointe à la chaleur , elle hâte prodigieufement la putréfaction , & elle devient capable d'infecter Pair de miafmes très - dangereux. La chaleur humide développe dans les corps mal-fains les hu- meurs peccantes, & infecte tous les liquides ; ces corps peuvent devenir contagieux 3 ils communiquent à d’autres leurs maladies : la pefte, comme on le fair , fe répand fouvent par le moyen d'un feul individu , dans de vaftes contrées. Pourroit-on dire la même chofe du froid excefMif ? je ne fais. Les grandes gelées de 1709 produifirent la pefte à Dantzick & à Ham- bourg : y avoit-1l quelques difpoñtions accidentelles dans l’athmos fphere qui rendirent ce froid fi pernicieux ? c’eftce que les Auteurs n'ont pas remarqué, & qu'il feroit bien effentiel de favoir. Il paroît certain qu’il fe joint fouvent au froid & au chaud quel- ques qualités que nous ignorons lorfqu'ils ont des fuites que nous avons remarquées : par exemple , tous les peuples qui habitent des climats extrèmes, ne font pas des nains ; quoique nous ayons vu re A EU 0 (1) Les mouffes & les végéraux de ce genre, qui fupportent mieux le froid que jes autres plantes, forment donc le premier degré de l'échelle que l'on pourroit conftruire pour déterminer le rapport de la végétation avec la température de l'athmofphère ; cette même famille de plantes fupportant aufli beaucoup mieux que les autres la chaleur, occuperoient encore le dernier degré de l’échelle dont fous parlons. Les deux. extrêmes fe vouchent ici d'une manière frappante, SUR L'HIST. NATURELLE ET LES ARTS. 365 que l'on ne trouve en grande quantité de ces efpèces d'hommes que dans ces climats: le froid & le chaud ne ne font donc que des caufes générales , mais qui ne paroiflent pas fuffire pour pro- duire le phénomène de la réduction de la taille humaine. XXII. Æxpériences à tenter par le froid. Je ne doute pas que fi nous avions autant d'expériences fur le froid (ou le défaut de feu) que nous en avons fur la chaleur , le nombre de nos connoiffances ne s’accrüt prodigieufement. Il eft vrai qu'il n’eft pas aufli facile d'opérer avec le froid qu’a- vec le feu; celui-ci eft toujours facile à exciter , à diriger, à augmen- ter , à diminuer; au lieu que nous n'avons pas les mêmes fecours pour nous fervir du froid & l'appliquer aux corps. On fait que les acides & les fels mélangés dans la neige ou la gheee en augmentent confidérablement la froideur ; mais il s’en aut bien que l’on ait poulfé cette découverte auñli loin qu'elle pou- voit l'être. On fait encore que toutes les liqueurs, & fur-tout celles qui font fpiritueufes, en s'évaporant de deflus un corps, le refroidiflene confidérablement. Ces deux obfervations certaines ne conduifent- elles pas naturel- lement aux tentatives qui fuivent, & qui pourroient n'être pas fans fuccès ? 1°. Effayer plufieurs mélanges de fels, & varier les dofes juf- qu'à ce que l’on connüt leur plus grand effer. 2°. Soumettre le vafe qui conriendroit la glace & les fels, à l'é- vaporation des liqueurs fpiritueufes, 3°. Accélérer l'évaporation par des foufflets forts & multipliés ; & de peur que le vent de ces foufflets n’emportät la liqueur ed roffes gouttes , fe fervir de coton & de linges, & difpofer les fee dans des directions oppofées. N. B. Il conviendroit fur - tout de faire ces expériénces dans les grands froids, & il faudroit bien prendre garde à ce que dans les tems chauds, le vent des foufllets n’agît que fur les liqueurs évapo- rables ; car s’il couchoit à la glace , il la fondroit infailliblement : quelque violent qu'il füt , il contiendroit toujours une grande quan- tité de particules de feu. ; Les expériences faires avec les miroirs ardens les plus forts , nous démontrent que les fubftances les plus dures s’évaporent & ne laif- fent aucun réfidu, La diffiparion & la volatilifation des parties s'opéreroient peut- être par le froid, du moins quand on opéreroit fur certains Corps , 366 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, & en particulier fur les liquides ; l’art d'augmenter le froid & de . le concentrer, comme nous augmentons & concentrons le feu, eft à peine ébauché : le froid produit dans les corps une forte de mouve- ment qui eft l'inverfe du mouvement produit par le feu. Il paroît affez prouvé que le feu fépare les parties ou les raréfe en les pouffant du centre à la circonférence ; le froid au contraire, opéreroit un effet analogue ; mais par un autre méchanifme, c’eft-a- dire en pouffant les parties de la circonférence au centre : il eft des corps durs dont la ftruéture eft telle que le froid eft peut-être capa- ble de les folidifier, bien loin de les diffoudre comme fait le feu , chaque molécule de ces corps fe prètant un appui & une force mutuelle ; les différentes couches qui les compofent , forment des efpèces de voutes que l'impreflion du froid ne fait que reflerrer & afermir ; refte à favoir fi quelques manipulations & préparations ne donneroient pas à un froid extrème toute la qualité diffolvante dont il peut jouir. Arifote dir quelque part que le grand froid peut fondre le plomb réduit en lames rrès-minces ; je ne fais fi on admettra un fait auf extraordinaire ; l'autorité de ce grand homme & les expériences que nous avons raffemblées fur Îles analogies du froid & du chaud ne fuffifent pas pour faire préfumer la poflibilité d’un pareil phénomène ; elles peuvent feulement nous engager à renter des expériences qui feroient’infailliblement fuivies de fuccès inattendus. XXI SC ONNIIGIRL MD SEMI OMAN Remarque fur ce que les anciens entendoïent par l'antipériftafe. Les analogies que nous avons raffemblées font très-dignes d’oc- cuper les Phyficiens qui favent que la méthode analogique eft le grand inftrument des connoifflances humaines. Nous les avons pré- fentées dans l’ordre qui nous a paru le plus naturel , & nous avons tâché d'en donner les explications les plus fatisfaifantes : on peut voir qu'il eft pluñeurs de ces analogies dont les raifons n’ont fem- blé très- cachées , que parce qu'on n’a pas eu égard à toutes les çaufes qui concourent à produire un même effet ; nous convien- drons cependant que nous fommes peut-être encore fort loin d’avoir faiñ les vraies caufes des effets que nous avons énoncés. Nous avons défini le froid & le chand comme l'ont fait tous les Phyfciens anciens & modernes: il n’y a point, ont-ils dit, de chaleurs & de froids abfolus ; ces deux qualités ne font produites que par Jabfence prefque totale ou la préfence d’une grande quantité de feu dans les corps : certe opinion , quoique vraifemblable, offre des difficultés j LL FL ALP PT . SUR l'HIST, NATURELLE ET LES ARTS. 3:67 difficultés ; le froid que l’on penfe n'être que l’abfence ou la grande diminution du feu qu'un corps peut contenir , devroit produire une diminution dans le volume de ce corps, & c’eft bien ce qui arrive à un certain degré de froid; mais au-delà de ce degré, le volume augmente , les parties fe défuniffent , la glace entie mème dansun certain degré de fuhon, & coule comme une lave lorfqu'elle éprouve un plus grand froid que celui qui fufht pour la tenir dans l’état de glace : il arrive quelque chofe de femblable aux métaux qui éprou- vent un tiès-grand froid + ils diminuent d'abord de volume jnfqu’à un certain poinc : après cela, ils ceflent de fe contraéter ; maïs en éprouvant un plus grand froid, ils fe dilatent, deviennent caffans, & en cet état on dur qu'ils font gels. En augmentant l’inrenfité du froid, dit un Chynutte, 1l eft à préfumer qu'on liquéfieroir les métaux; on les feroir couler comme l’eau congelée foumife à un très- grand froid. Chymie Expérim. par M. Paumé, tom. I. pag. $2. Cet Auteur eft ici de l'avis d’Ariftore , dont nous avons rapporté le fentiment & une expérience qui mérite d'être répétée. M. Baumé remarque que l'air contenu dans l’eau n’eft pas la feule caufe de la dilatation de la glace. Cer air n’eft pas dans un état de compref- fion : fi l'on perce la glace avec une aiguille pour en faire fortir les bulles d'air , il n’en fort pas , ou sil en fort, c'eft fans efforts. Jhid. pag. 77 D'un autre côté, la chaleur ne paroît pas être une propriété in- féparable du feu, puifqu'il y a du feu fans chaleur ; tel eft le feu pur & épars, la lumiere ou la matière échérée , le feu électrique non concentré, &c. la chaleur ne paroît fe manifefter que par l’ac- tion des parties des corps mis en mouvement ; un Auteur moderne foupconne même que le feu eft effentiellement froid. Chymie Expér. com. Î. pag. 50. Le froid & le chaud pourroient donc dépendre de caufes qui nous font encore fort inconnues, & plufieurs des analogies que nous avons raflemblées , engageront le lecteur à le penfer. Mais dans l’état d’imperfection où font nos connoiffances fur un fujet aufli important, nous n'avons pas cru devoir nous écarter des idées reçues, & en fuivant l'opinion que le feu plus ou moins abon- dant, produit le chaud & le froid (epinion très-limple , & fondée fur un grand nombre de faits), nous avons cru expliquer affez heureu- fement pourquoi des circonftances particulières faifoient fouvent pro- duire des effets femblables à des caufes fi différentes : nous nous en tenons là, fans recourir à des principes cachés : les anciens admet- toient l’anripériflafe : pour compléter l2 matière de nos recherches , nous finirons par faire quelques remarques fur c&grand mot, qui -étoit d'une reflource infinie dans la Philofophie fcholaftique. Tome VI, Part. II. 1775. B bb 568 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE; Par antipériftafe on entendoit l'intenfité d'aétion qu'acquiert un contraire (par exemple la chaleur,) quand il eft environné ou fou- mis à l’action de fon contraire (le froid.) Les anciens Philofophes avoient remarqué que l’on digere mieux en hiver qu'en été: cela, difoient-ils, a lieu par antipériftafe ; le froid extérieur concentre la chaleur interne du corps, laquelle devient plus confidérable , augmen- te le jeu de toutes les fonctions, & fur-tout celui de l’eftomac : les corps combuftibles brûlent mieux par un grand froid que pen- dant tout autre tems, par le même principe. C'étoit l’antipériftafe qui rendoit les premiers rayons du foleil fi dangereux pour les plantes qui avoient fupporté la gelée de la nuit; la chaleur de ces rayons, en concentrant le froid renfermé dans les tendres boutons & les fleurs ou les jeunes fruits de ces plantes, lui donnoit plus d'activité ; cela paroifloit fi vrai, qu’en préfervant les plantes de ces rayons , le froid avoit bien moins d'effet , ou n’en avoit point du tout; on expliquoit de la même manière pourquoi Ja fuccelion-du chaud au froid & du froid au chaud étoit fi dan- gereufe pour les animaux. Les Modernes , qui ne fe contentent pas de mots fcientifiques pour rendre raifon des effets naturels , ont obfervé les phénomènes dont nous parlons, & en ont connu d’autres, fans fe croire obligés de recourir à des caufes nominales. Ils ont obfervé que lorfqu’on plonge un thermomètre dans l'eau froide où même glacée , la liqueur contenue dans linftrument monte, dans les premiers inftans , de quelques degrés ; que lorf- qu'on le plonge dans l’eau chaude elle baifle ; mais après les pre- miers momens, la chaleur & le froid agiflent , l’une en faifant mon- ter la liqueur, l’autre en la faifant defcendre fuivant les loix ordi- naires de la nature. M. Duluc nous donne un autre exemple de lantipériftafe des Anciens dans l'expérience qu'il a faite avec l’hygromètre , de fon invention , lequel forti de la glace fondante, & plongé dans l’eau chaude , bien loin de remonter , defcend de quatre degrés dans le premier moment. Si lon fait attention à ces exemples, on conclura que les An- ciens n’avoient recouts à l'antipériftafe ; que parce qu'ils ne les avoient pas confidérés affez foigneufement : en effet , ce n'eft que dans les premiers inftans qu'un contraire n'eft pas détruit par fon contraire , & qu'il angmente mème d’intenfité : après ces premiers inftans , ces contraires fe combattent , & le plus fort l'emporte , ou ils fe combinent quand ils agiffent conjointement, & il en réfulte un effet moyens Ce.n’eft donc qu'à des circonftances particulières qu'il faut rap- dé SUR L’HIST. NATURELLE ET LES ARTS. 369 potter les effers artribués à l’antipérift:fe , comme nous l'avons faic, par exemple, dans les Nos IX & XIV. & ailleurs. D QG D Er LA CRYSTALLISATION DES SELS; Par M. J. G. PFÆHLER,. Pie traiter les chofes avec ordre, nous allons d’abord définir la cryflallifation. La cryftallifation eft la réunion des particules fa- lines, divifées & tenues en féparation par l’intermède de l’eau (1). En général, les cryftaux font des malles folides, brillantes, de figure anguleufe, régulière & conftante dans chaque fel, mais dif férente dans les diférens fels (2). D'après cette définition, nous allons divifer en deux parties ce que nous dirons fur les fels. Dans la première, nous parlerons de la diffolution du fel , & dans la deuxième, de la réunion en male régulière de ce même fel diffous. Mais auparavant, voyons ce que l’on doit entendre par fel. IT. Par le mot de fel, on entend tout corps fapide , diffoluble dans l’eau , & dont on peut le féparer en lui confervant toujours fa même nature ( 3). D’après leurs différentes propriétés, les Chymiftes en reconnoiflent de trois efpèces : Les acides, les alkalis & les neu- tres. Les fels acides ont pris ce nom de la faveur acide qu'ils pro- duifent fur la langue. Leur principale propriété eft de teindre en rouge Les fucs bleus des plantes, & de former avec les alkalis des fels neutres. Les trois règnes de la Nature fourniflent ce fel ; auf le divife-t-on en acide minéral, végétal & animal. Les alkalis, qui forment la feconde claffe, font effervefcence avec les acides, teignent en verd les couleurs bleues végétales, & forment un fel neutre avec les acides. Les trois règnes de la Nature donnent l’alkali folle, le ———_—_——— mm (x) Boerrhaye, Elém. Chym, p. 571. (2) Rouelle, Mém. de l’Acad. des Sciences 3 AND. 1774, p. 356 Macquer, Elém. de Chym. théor. p. 34. Baumé, Chym. exp. & rail. t. 2, p. 171, 173 3 179. (3) Vogel, Inft. Chem. $. 212. Dict. de Chym. €. 2, p. 414 & 416, Spielmann.Inft, Chem. $ LII, Bbb 2 370 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, végétal & l'animal, Enfin, les fels neutres doivent leur naiffance à la combinaifon d’un fel acide avec un alkeaii jufqu'à farutation, mais ils n’ont aucune propriété alkaline ni acide (1). Aujourd'hui on donne en général le nom de fel neutre à tout produit de combi- naifon des acides avec routes les fubftances qui peuvent leur être unies; comme alkali, terres, méralix , &c. (2). JII. I faut d’abord que le fel fe diffolve, avant que fes ato- mes puiffent, par leur propre force, fe réunir & former des eryf- taux. C'eft ce que l'on nomme diffolution. La plus ordinaire qu’on appelle fuperficielle, eft la réunion mutuelle des parties intégrantes d’un corps avec celles d’un autre de nature différente, par laquelle cependant ils ne forment plus qu'un tout qui patoit homogène. Pour cela , il eft néceffaire qu'il y air un des deux corps dans lPérat de fluidité, ou'au moins, que fes parties intégrantes foient moins unies & liées entr’elles, que celles de l’autre corps. Le premier de ces corps fe nomme le diffolvant ou menftrue, & le fecond, le corps difous (3). Ainfi, la diffolution des fels eft certe opération par la- quelle ils fe divifent dans l'eau au point d'échapper à notre vue, femblent ne former qu'un feul corps avec elle, & y reftent fufpen- . dus tant que la diffolution fubfifte (4). Comme elle doit être dé- duite de l’affinité du corps diffous avec le corps diffolvant ($), il eft évidence que le corps diffous doit pofféder quelque chofe de le nature du diflolvant , afin que fes parties puiffent s'unir avec les fiennes, & ne former-qu'un feul corps. Les parties du corps diffous , échappant à notre vue , il eft donc réduit à fes plus perits élémens, & leur lien commun a donc été brifé & rompu. Leur réduction , quand on les dégage de leur menftrue , prouve encore que le diffol- vant agit fur leurs élémens phyfiques , & qu'il ne les abandonne que dans l’aggrégation & la mixrion parfaite (6). L'eau eft le dif folvant de tous les fels, & entre dans leur compoftion , fuivant tous les Chymiltes. Les particules de l’eau ayant beaucoup plus d’affinités a à 2 A SE (x) Di@. de Chym. t. 2, p. 432. (2) Rouelle, L. ©. p. 353. Di&. de Chym. p. 468. (3) Dit. de Chym, t. I, p. 353- Spielmann. Li c. (4) » C'eft en cela que fa diffolution diffère de la fufpenfon ; car dans celle= 5 pets corps s'en féparent comme dans les émulfions «, Spie/mann, L, ce Exp. IV. C5) Idem, $ XLNIII. (6) ldem, L, c. $. XLV. RAA ET SUR L'HIST. NATUREILE ET LES ARTS. 371 entr'elles qu'avec les autres principes du fel, le diffolvant agir d’abord fur l’eau , principe du fel, & puis fe DAT HET avec Îles autres élé- mens, il fe les unit, & si par-là, une parf. dre & entière dif folurion. IV. L'eau difouc plus vite certains fels, que d autres, elle en diflout quelques-uns en plus grande quanuié. Cette diese influe beaucoup fur la cryftallifation. Il ne fera donc pas hors de propos de rapporter les obfervations que l’on a faites fur la diffolubilité de l'eau froide, comparée à celle de l’eau chaude, Les expériences fur l'eau froide ont été rentées par des Savans , dont la fagacité & l’exac- titude font fi connues, que nous aimons mieux nous contenter de les rapporter que de les répéter. Nous n’en avons donc faites qu'avec l'eau chaude; & les réfulrats fuivans montreront combien eft orande la différence de difolubilité entre l’eau chaude & l’eau froide. Boerrhave (1), Mufchenbroeck (2), Spielmann (3) & nous, nous avons trouvé qu'une once d’eau difolvoir: Bocrrhave. Mufchenbroeck. Spiclmann. Nous, La température de ÿ l'eau éroit de 38 deg. deg. deg, degrés, MÉPRPN O RG P tete ele Seite te UV 2TS LE —_———_—— grains, grains. grainse Sel marin. « . 150]. Gemme. . . 147 Ammoniac.. 147 Nitre. TETE") PEU TE ES a | Lie ee pelle pese ex T7ONS ES SSL 72 Ho nelle alele le sinus ose te 11320 MAITRE CCR NE pee Alun. ...... 34 Sel d'Eplom. . 384 Vitriol verd, .. 30 Joleorsretst.e 640 ere 15 Sels.e le ele ROPPOCTAR si leléçorioisso + 649 Arfenic. . . .. 76 Vitriol de chypre. 28 Sel de corne de cerf. Sucre de Saturne. # Sel de tartre. . 282|. Fiel de vitriol. . nr | test 1e Bel INR : | om (1) Elém, Chym. , par. x, p. 576. (2 Introd. ad Philof, Nat, Ce 2, Pe 589% 3) L. c, $. LIL 372 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE; Boerrhave, - | Mufchenbroeck. Spielmann. Nous. mms ets je ne mens Mme grains. grainsà Terre foliée de tartre 470.08... " Sel de Sedliez. . 3841. . « . . . + + 760 SucredeThomas.360/.,-, eee Sel de Soude. . 200... de Glauber. 168|.....4.-:. 608 de Lothaire, 168|.,......e DigeftifdeSylvius Taitre vicriolé.. 301. +. +, ++ 96, Metcure fublimé. 30|. . . . -. ; Sel végétal. . . 212... 64a Vitriol blanc. . 210[.,...... 2. 160|... ++ .... de Seignette.. 37|. « + - : AE de Glafer. . . 40. . . . Nitele Sel volatil de Succin. sil. ire Cr cho) Tartre crud. . . 44]: MA ohÈE Créme de tartre, . 3 Sucre blanc. - 128< EC OEN TRS nn DE DO COCO DEUST SRE SCENE LES EE CRE NE WE Il faut remarquer que quand le diffolvant tient autant de fels en diffolution qu'il en peut tenir , alors on dir qu'il eft au point de cxyftallifation (ir) Y. De la diffolution , nous allons. paffer à la feconde opération de la cryftallifarion, qui eft la réunion en maffes régulières & an- guleufes des particules falines diffoutes. Pour qu’elle fe forme , il ‘faut enlever les obftacles qui peuvent s’y oppofer, c’eft-à-dire, diminuer la quantité du diffolvant aqueux, ce qui s'opère par l’évaporation (2). L'eau, plus volatile que le fel, fe diffipe dans l'air; les particules falines fe dégagent de l’eau qui les tenoit en diflolution, & alors la force, qui S'oppofe à la divifion des corps, & en vertu de la- 0 (1) Baumé, L, c. p. 205. Lavoifier , Obf. & Mém. fur la Phyfique, &c, t,r, ann, 1773 , P. 11 & feqs (2) Baumé, L. c, p.179, SUR L'HIST.)UN'ATURELILE ET LES ARTS. 373 quelle ils s’artirent & s’approchent mutuellement , commence à dé- ployer fon pouvoir ; elle met en mouvement les parties du fel, & l'on voit naître infenfiblement le cryftal. Le cryftal , d'abord très- petit, croît, augmente & fe perfectionne par la jufte appoftion des autres molécules, ou lames falines. La cryftallifation du borax nous a montré clairement cette marche. Ayant mis une certaine quantité de diflolurion de borax dans une cucurbite de verre, dont on avoit coupé le col & la partie fupérieure > nous avons vu facilement fe former les cryftaux. Ils s’attachoient aux parois de la cucurbite, à la hauteur de la diffolution ; toute la circonférence n’en fournifloir pas , mais feulement la moitié. Dans le refte, commençoient à fe former les cryftaux peu élevés d'abord , cependant aflez apparens pour que l'œil nud püt les diftinguer, & appercevoit les figures qu'ils affeétoient. Une nouvelle lame , ou plutôt une nouvelle couche , s’appliquoit fur la première couche aqueufe. C’eft à cette eau , qu'on appelle eau de cryftallifarion (1) , que les cryftaux doivent leurs pro- riétés (2). Elle eft néceffaire à la ciyftallifation. En effet, fi on l’en- her la nature du fel refte toujours la même (3), tandis que fa forme cryltalline change & fe détruit (4). VI. M. Baumé, d’après plufieurs expériences , croyant pouvoir faire former des cryftaux du côté du vale qu'il vouloit, à imaginé un fyftème particulier fur la cryftallifation qu'il explique par l'at- craction & la répulfon. Ayant mis, dans une cucurbite de verre, du fel de Glauber dif- fous au point de cryftallifation , il approcha un autre vafe de verre plein de fel de Glauber, mais cryftallifé. Bien-tôc, il remarqua , que du côté où étoit le fel de Glauber cryftallifé, celui quiétoit en dif- folution, étoit fortement attiré, & venoit fe cryftallifer de fon côté, tandis que de l’autre à peine fe formoit-il quelques maigres cryftaux : mais s’il pofoit , près de la cucurbite, un vafe plein de fel de tartre, les cryftaux , comme repoullés, alloient fe former au côté oppofé. Ce favant Chymifte croit mème fi grande l’attraétion dans le fel de Glauber, & la répulfon dans le fel de tartre, qu’il penfe qu'il n’eft pas néceflaire que les vafes fe touchent. (1). Baume & Rouelle appellent cette eau, » çau furabondante à la cryftals » lifation «, (2) Rouelle, L, c. p. 356 Buumé, L. c. p. 175. (3) Rouelle, L, c. Baumé, L. c..p. 185. - (4) Dit, de Chym. tome 1, page 296 ;74 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE; VII. M. Lavoifier répéta cette expérience curieufe de M. Beaumé, (1) ayant rempli fix bocaux d’une diflolution de fel de Gilauber prèr à fe cryftallifer, il les mit fur des fupports fépa- rés. Près du premier bocal (à 3 ou 4 pouces de diftance) il pofa un vafe plein de fel de Glauber cryftallifé ; près du fecond, de lal- kali £xe concret ; près du troifième , de l’alkali fixe en deliquium ; rès du quatrième, un mêlange de fel de Glauber cryftalhié, & de l'alkali fixe en dliquium ; enfin les deux derniers bocaux furent féparés & mis à Pécart : par-tont , les cryitaux fe formerent également, foit au fond , foit fur les parois des vafes ; les fels de Giauber où de Tartre n'influoient donc en rien fur la formation & l’ordre des cryltaux ; enfin simaginant que le refroidiflement plus où moins prompt d'un côté du vafe , poutroir entrer pour quelque chofe, il entoura un côté d’un des bocaux avec d’autres vafes remplis de fable, laiffant l’autre côté expolé à l'air : les cryftaux fe formerent bientôt devant lui du côté le plus expofé à l'air , parce que de ce côte , le refroidiffement avoir été plus prompt : le fel fe cryftallifa encore en mettant au lieu de fable du fel de Glauber pulvérifé : enfin, quoique la difolution fût placée entre du fel de Glauber & du fel de Tartre, les cryftaux fe formerent toujours du côté où il y avoir moins de fel, c’elt-à-dire du côté où le refroidifflement étoit plus prompr. VIII, Nous allons rapporter quelques expériences que nous avons faires à ce fujer. Exrérience I. Sur dix livres de fel de Glauber nous avons jetté dix pintes d’eau diftillée & bouillante : après l'avoir filtrée , nous l'avons mife dans dix cucurbites féparées , dont on avoit en- levé le col; afin que l’évaporation fe fit plus facilement, à côté de chaque cucurbite , fac placé un vafe cylindrique nommé dans le pays uckerglas , plein de fel de Glauber; & tout étant ainfi arrangé, nous avons attendu la cryftallifation. Exr£rience Il. À la place du fel de Glauber , nous mîmes du fel de Tartre dans le vale cylindrique. | Expérience III. Nous plaçâmes la cucurbite entre du fel de Glauber & du fel de Tartre. = Exrérience IV. Nous avons pris unc des cucurbites pleine de diffolution de fel de Glauber, & nous la verfâmes dans une autre environnée des deux côtés de fel de Glauber & de fable. A 2 A ES À EE D EE (1) Obf. &*Mém, fur la Phyf. tom. x, année 1773, p. &1. EXPÉRIENCE SUR L'HIST. NATURELLE ET LES ARTS. 375 Expérience V. À la même diflolution, nous avons appliqué d'un côté, du fable, & de l’autre, du fel de Tartre, Exrérience VI. Et la cucurbite & la raie cylindrique fu- rent environnées de fable jufqu’à la hauteur de la diffolution. Exrérience VII. Cette Expérience ne différe de la précé- dente , qu’en ce que le vafe cylindrique contenoit du fel de Tartre. ExrérieNcE VIII. La cucurbite fut placée deffus la raie qui contenoit le fel de Tartre. Expérience IX. Au-deffus de la cucurbire fur placé un vafe plein de fel de Glauber , de façon qu'il entroit près de la moitié dans la diffolurion. ExrériEeNcE X. Enfin nous avons réuni les deux procédés ; c’eft-à-dire, que dans la cucurbite pofée fur du fel de Tartre, nous avons placé un vafe plein de fel de Glauber cryftallifé. Il faut dire la vérité, nous croyons que M. Beaumé a fait une règle conftante de ce qui n’étoir que l'efler du hafard : tous les ré- fultats de nos expériences le démontrent affez. Nous avons cru que dans la premiere expérience, le fel de Glauber cryftallifé n’exerçoit aucune force d'attraction ; & dans la feconde, le fel de Tartre au- cune répulfion ; que dans la troifième, quoique la cucurbite für en- core du fel de Glauber & du fel de Tartre , il n’y avoit eu ni at- traction , ni répulfion , & que les cryftaux fe font formés dans le milieu au fond de la cucurbite ; que dans les quatrième & cin- quième , le côté de la cucurbite environné de fable comme moins expofé à l’air, s’eft refroidi le dernier, l’autre côté étant garni de fel de Glauber dans la quatrième , & de Tartre dans la cinquième ; c’eft pour certe raifon que les cryftaux étoient un peu plus inclinés de ce côté -là que de l’autre, effer qui certainement n’étoit dù ni au fel de Glauber , ni au au fel de Tartre. Nous avons vu dans la fixième expérience , que les cryftaux fe forment également, fans af- fetter un côté plutôt qu'un autre : enfin dans les huitième , neuvième & dixième expériences , tien n'a paru en faveur du fyftème de M. Beaumé , car les cryftaux fe font toujours formés dans le fond de la cucurbite ; ainfi, & par le raifonnement, & par l’expérience, nous pouvons affurer avec M. Lavoifier , que les cryftaux affectoienc fimplement le côté où le refroidiffement étoit le plus prompt, & que le fel de Glauber n’a aucune vertu attractive, & le fel de Tartre de répulfive. IX. Avanrde parler des phénomènes particuliers de la cryftallifation: fous allons dire un mot des généraux. D'après nos diverfes obfer- Tome VI, Part. II, 3775. Cce 376 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, vations , le däffolvant doit être pur, & en en même - rems im- pregné d’une certaine quantité de fel (1). Puifque la. diffolurion ne fe fait qu'en traifon de l’affinité de l’eau avec le fel à diffoudre, elle ne peut en diffoudre qu'une certaine quantité ; mais quand il s’agit de la cryftallifation , il ne faut, pas rechercher trop lafi- niré entre l’eau & le fel, car moins il y a d’affinité entre le diflol- vant & le corps diffous, &"plus la ctyftallifarion fe forme en grande quantité; plus on laiffe en repos le menftrue, & plus la force at- tractive a d'action par l’évaporation du diffolvant, & plus les cryf- taux qui fe forment font beaux & grands. (2) Rien ne démontre mieux ce que nous venons d'avancer , que ce beau canon de cryftal “de fel Anglois qu'obrint an de nos Chymiftes : ïl lailla fa diflolu- tion repofer un an entier , & par ce moyen il eut un morceau de ctyftal de la longueur & de la grofleur du pouce ; qui ne fait pas que le fel Anglois ne forme jamais que de très- perits cryf- “taux ? On remarque encore dans la cryftallifation , que la fuper- ficie de l’eau que tonche l'air ambiant, fe couvre d’une croûte fa- line, dont voici la caufe : des molécules falines dégagées de la maffe totale , fe réuniflent, dans l’endroir du diffélvant où le mouvement eft moindre , & où le refroidifflement fe produit le plutôt ; or, cer endroit eft la fuperfcie de l’eau : la premiere réumon dés parties falines eft donc due à l’évaporation & au refroidiffement de la fu- perficie antérieure de l’eau : (3) Il faut ceffer l’évaporation dès que ces phénomènes paroiffent, car autrement les particules élémentaires es fels ne s’attireroient plus fuivant leur nature; mais elles fe réuniroient indiftinctement & en malles irrégulières (4). ) X. Nous avons dit que pour obtenir de beaux cryftanx en males régulières, 1l falloit diminuer la quantité du difflolvant en propor- tion du fel déja combiné. (5) Plus la chaleur qui produit l’'évapora- tion eft grande ou moindre, & plus les cryftaux du même fel fonr pareils ou diffemblables; & même, c’eft fur ce. fondement qu’on a avancé que les figures des cryftanx n’étoient jamais cenftantes, pour obtenir les plus beaux cryftaux , foit pour la figure ; foir pour là D Cris TE x (2) Spielmann, L. c. $, LYI (3) Rouelle, L, c. (4) Dit. dé Chym. L. c« Baumé, L.c. Spielmann ," L ic. (5) Se IV. IX, SUR L'HIST. NATURELLE ET.LES ARTS. 377 spadeur , il faut chercher, le flambeau de l’expérience en main , e degré de chaleur dans l’évaporation qui convient le plus à cha- que efpèce de fel : c’eft donc avec raifon que M. Rouelle à diftin- gué‘ trois éfpèces d’évaporation ; (1) l'évaporation infenfible , la moyenne & la rapide: il place Pévaporation infenfble depuis le degré de chaleur néceffaire pour fondre la glace ; jufqu'à celui de la chaleur dufoleil en été, c’elt-à-dire, depuis le foixanre-quinzième degré jufqu'au quatre-vingrième de l'échelle du thermomètre de Faren- heic : l’évaporation moyenne commence où finit la premiere, & va juf- qu'à ce degré de chaleur de l’eau, où à peine peut-on y tenir le doigt un moment , c’eft à dire jufqu’entre le cent quarantième & & le cent foixantième degré : enfin l’évaporation rapide va jufqu'au terme de l'eau bouillante , c’eft-à-dire jufau’au deux cent dou- zième. XI. Ce favanr Chymifte ayant fait cryftallifer différens fels fous ces trois degrés d’évaporation, examina fcrupuleufement les divers phé- nomèves qu'ils préfentoient : leurs figures lui fournirent des carac- tères particuliers dont il forma plufeurs fections : tous les fels , felon lui, renfermés dans chaque feétion , fe conviennent entr'eux : cet axiomé ne nous paroît pas tout-à-fait jufte pour plufieurs rai- fons ; il met fouvent dans la même clafle des fels de diverfes f- gares; & fouvent auf, des fels cryftallifés fous la même figure, fe trouvent féparés par plufeurs feétions; par exemple , le fel commun & l’alkali fofile uni à l’acide nitreux , qui ont tous deux la figure cubique : il réunit fous la même feétion le fel commun & le tartie vitriolé ; mais par l’évaporation infenfible , le rartre vitriolé ne donne Fa de petits cryftaux mal confgurés, tandis que le fel commun ournit des cryftaux très-grands & très-réguliers : l'évaporation rapide fournit à peu- près les phénomènes oppofés ; car par elle, le rartre vitriolé fe cryftallife régulièrement, & point du-tout le fel commun; de plus, dans la même feétion, il place le borax & le fucre, tandis que ce dernier ne fe cryftallife que par l’évaporation moyenne. Je pale fous filence grand nombre d’autres fels, dont les phénomènes de cryftallifation font très différens, & qu'il a cependant réunis dans la mème clafle : il fuffhra de comparer nos obfervations avec celles de ces favans Chymiftes ; les voici. SE (:1)L c Ccc'a 378 PC A 2 Evaporation Evaporation infenfible. moyenne. Taïtre vitriolé, . .| Lescryftauxétoient| Lescryftauxétoicent rares, petits, mal {un peu plus grands & mieux configurés. nombreux que ceux|gros , & en plus de tartre , un peu [grande quanuité. plus gros, mieux configurés & de for- me cubique. Très-beaux, quoi- que rares ; les uns fé-|bre , tous grouppés parés & foliraires , | enfemble, les autres grouppés enfemble, Très-beaux , mais petits. e Sel commun, .. . | Rares, mais plus! Plusgrands, plus Vitriol de Mars. En plus petitnom- Plus rares & con- ! fus. Alun.. 0. + + | Borax. . . .« . .« « .| Formés à la fur-| Plus nombreux, face, très-petits,mais | mais plusitréguliers. ailez beaux. Ce n'eff que par certe évaporation qu'il a pu fe cryftal- lifer.. , Les cryftaux, ob-| Nombreux, très tenus par cette éva- | grands &zrès-beaux. poration & par la dernicre, diffèrent ff peu entreux , qu'il feroit difficile d'aff- gner les plus beaux. Beaux & nom- SUCIC RE te ete De ite Sc de Scignette. . Moins beaux & plus rares. artre foluble. . Peu différens des beaux. premiers, Nombreux, petits| Très beaux, très- & réguliers, breux. Sucre de Saturne. .| Nombreux & Sel de Glauber. . . enfemble, OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, Evaporation rapide, Les criftaux avoient la même figure,finon qu'ilséroient plus pe- tits & qu'ils renoient aux parois du vafe, depuis le haut juf- qu'en bas. Très-perits , très mal configurés ; c'é- toit plutôt de la pouf- fiere que des cryf- taux. Tous mêlés & très mal faits, Réunis enfemble, très-grands & crès- beaux. Affez nombreux, très-beaux , les uns féparés , Îles autres réunis. CR Plus petits & en plus petit nombre. EE — ————_—_—— —_—_—_—_—— — Plus beaux que les précédens, & très- réguliers, Beaucoup plus grands, plus beaux & plus épais. Beaucoup plus grands, & grouppés|srands,& les mêmes, Re. SUR L'HIST. NATURELLE ET LES ARTS. 379 Evaporation E vapora tion E vaporation infenfible, moyenne. rapide, Nitre, .5.,.6.l...,...4....) Les plus beaux. | Beaucoup infé- 1 rieurs aux précédens, Sel Ammoniac, ,.} Irréguliers& très-| Très-beaur. Très - nombreux, petits. mais moins beaux, Nitre & tartre crud, Moins beaux &| Trèsbeaux &très-| Beaux & aflez moins nombreux |grands. grands, que les fuivans, XIII. M. Beaumé a fuivi unautre fyftème fur la cryftallifation : il divife les fels en deux claffes : dans la premiere, il parle des fels formés par refroidiflement, & dans l’autre, de ceux formés par l’é- vaporation : cette diverfité dépend de la différente manière de fe dilloudre dans les fels : la premiere clafle renferme les fels qui onc peu d’eau principe, & peu ou point d’eau de cryftallifation : ces fels , felon ce Chymifte , fe diffolvent également dans la même quantité à-peu-près d'eau froide ou d’eau chaude , de façon que l'eau chaude ne paroïît point avoir de prérogative fur l’eau froide: il eft évident que l’eau tiendra les fels en diffolution tant que la quantité d’eau fera en même proportion avec ces fels , & elle fera la même, foit que la difflolurion fût placée dans un endroit tem- pété où chaud ; il faut donc expofer la diflolurion dans un endroit chaud , pour que la proportion de l’eau au fel diffous, puifle di- minuer : les feis qui fe trouvent dans le cas dont nous parlons , fe cryftallifent donc par évaporation : la feconde clafle renferme les fels qui contiennent beaucoup d’ezu principe ou d’eau de cryftallifation, qui fe diffolvent en plus grande quantité dans l’eau bouillante, que dans l'eau froide , & qui par conféquent, ne fe cryftallifent que par refroidifflement ; mais cette divifion nous paroît faulfe, car de nos expériences comparées avec celles de plufeurs autres Savans, on peut conclure que le nombre des fels qui fe diffolvent en égale quantité dans l’eau froide comme dans l’eau chaude, eft très - petit; que quelquefois l’eau froide diflout certains fels plus que l’eau chaude ; enfuite il fait dépendre le degré de diffolubilité , & la facilité à fe cryftallifer, de la quantité plus ou moins grande d’eau principe & d’eau de cryftallifation; mais tout ce que M. Beaumé avance nous paroît fimplement une théorie appuyée fur nul fondement ; on ne voit pas mème par quelles expériences il pourroit la démontrer : comme donc cetre théorie de la cryftallifarion n’eft pas affez conftatée pour qu'on puille Ja regarder comme l'ouvrage de la nature , il eft çto “OBSERPATIONS SUR LA PHPSIQUE, à plus fimple & plus avantageux de répéter les différentes expériences quénots avons faites ;"& ie biech enaïiners Tès divers phénomènes que les fes peuvent offfirten fe éryftaifantes | { ue M. É- M OT RME FUN OMIOUR ME ID Else PU TRE, Sur une Maladie des Grains appellée N1ELLE, &c. Par M. FRÉDÉRIC RAINVILLE, de l’Académie de Phyfique 4 de Rotterdam. M. Je Viens de lire dans le fecond volume du mois de Mai der- nier , de vorré édition du Journal des Savans, page 468 , un Mé- inoiré tiès curieux /wr l'origine des petits Vers ou Anguilles, du bled ra- chitique : j'y ai trouvé un pallage qui m'a paru mériter une réponfe ; le voici : Page 469. « Le hafard procura à M. de Néedham certains grains » nolirâtres, &e. & p.470. Depuis cette époque & ce premier pas » franchi, on n'a publié aucun ouvrage pour inftruire fur la nature » des propriétés & fur l’origine de ces filamens ; on n’a même pas » penfé à faciliter aux curieux les moyens de répérer & de vérifier » les obfervations déjà faites , en leur apprenant quelle eft précifé- > ment l’efpèce de bled qui porte ces grains monftrueux , & quels » font les vrais caractères auxquels on peut découvrir quels font les » pieds & épis affectés de cette maladie «, Ces paroles expriment , ce me femble, un reproche bien formel , & cependant très - jufte, (1) adreffé à tous les Botaniftes, qui ont négligé jufqu’ici. de communiquer au Public leurs obfervarions fur un fujet aufli effentiel, puifqu'il ne s’agit de rien moins que d’une production de premiere néceflité, que nous voyons dépérir tous les ans fous nos yeux , fans pouvoir y apporter le moindre remède : j'ai donc pris ce palage pour moi, & en conféquence , j'ai raffemblé , —————_—_—_—_—_—_—_—_—_—_—— À (1) Très-jufte pour ce qui regarde [a Nrelle (uftilago) du Froment, de l'Orge) de l'Avoine, &c,; car on a aflez écrit fur le Seigle ergoté. SUR L'HIST: NATURELLE ET LES ARTS. 39: ‘le plus promptement poflible , routes les obfervations que j'ai faires “fur cetre matière. | Je vous les adrefle ; Monfieur, ces obfervations ; non pas dans l'intention de-rien décider fur, ua abjer G obfeur & fi difficile, mais uniquement pour lever les premieres difficultés, pour frayerle chemin Aux curieux , & les metrre en érar de rendre! à l'humanité un ferviée des plus effenciels , en trouvant , s'il eft poflible , les moyens de prévenir ou d'arrêter les progrès d’un fléau aufli deftruc- teur & aufli ruineux que left la maladie qui va m'occuper. Avant que d'entrer en matière, je propoferai quelques difficultés qui mempèchent d'entendre clairement certains paflages du Mémoire de M. Roffredi : ces difhcultés, felon toures les apparences , ne viennent que de ce que: ce favant Obfervateur ne s'eft pas fervi de termes Techniques , dans la defcriprion des grains fur lefquels il a opéré : aufli pour éviter toute équivoque , j'aurai foin d’ajouter les noms latins à tous les termes Techniques dont je me fervirai; & ces noms latins feront tous tirés des ouvrages du célébre Chevalier yon-Linne. | . 1. Depuis bien desannées que je recueille & que. j'examine des plantes , je n’ai jamais rencontré un feul grain de froment, sriticum hybernum ; qui reflemblat au grain fur lequel M. Roffredi à fondé fes. obfervations. Tour grain de froment, writicum , attaqué de Ja nielle, wffilago , eft alréré au point qu'il n’eft plus une femence , fémen ; c'eft un aflemblage informe de grains de pouflière noire xrès- déliée, qui fe détruit fous les doigts au moindre effort, qui nejpeut rélifter, ni à l'action violente du Alcan dans-la grange, ni au :mou- vement de la pelle .& de la trémie , dans lesgrenier.:cependant le avance Obfervateur parle d'un grain de blé charbonné ; qu’il trouve ‘abondamment-dans Fe monceaux de blé raffemblés dansles greniers, où dans les ordures qui tombent de la trémie : cela ne me paroït pas “poffible ,. s'il :s’agic d'un vrai grain .de fioment charbonnié, que les * Botaniftes appellent afhlago vritici hyberni ; où bien il faudra recon- noître que Le Piémont produit une}efpèce de nielle.; inconnue par- ‘our aïlleurs ,18c alors M: Roffredi , ce me: femble ,, doit au Public dla defcription exacte de ce rare phénomène { 1 ). * {1 Comment un grain niellé} ou charbonné ; comme ‘on voudra l'appeller, qui , du confentement de tous ceux qui onc parlé de 21 : F4 1 ! | SRE i h ) 1 05 € F : | . (x). Seroit-ce cetre efpêce de Seigle dont parle Pline, Lib. 18, cap. 16 , que Ton appelle Afa aux environs de Turin, & qui eft l'efpèce de grains ( Cerealiä} Ja plus noire & la plus mauvaife ? Voyez la Traduétion-Holl, de Dogonée , Edxe, de 1608 , page 878, Ier | ET ‘ 382 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, cette maladie , eft un compofé de petits grains de pouflière noire très-déliée ; comment, dis-je , un tel grain , ouvert à l’une de fes extrémités, & légèrement prellé par une petite pince, peut-il livrer & faire voir de petites anguilles vivantes ? c’eft ce que je ne conçois aucunement. Jai été herborifer le 9 du préfent mois de Juillet, dans des champs de froment, sriticum hybernum , d'orge, hordeum hexafticon , & d'avoine, avena fativa. J'ai examiné ces plantes fur pied , avec une loupe de fix lignes & une de trois lignes de foyer : ne trou- vant aucun infecte, n’appercevant pas même le moindre mouve- ment, j'ai cueilli féparément des plantes niellées de ces trois gen- res, environ une bonne poignée de chacune , & je les ai apportées chez moi, avec le plus grand foin : en fecouant légèrement chacune de ces plantes à part fur du papier blanc, j'ai obtenu , à-peu-près, un dé à coudre ordinaire, plein de chaque pouflière noire. J'ai porté des grains entiers niellés des trois genres ci-deflus , & des trois différentes pouflières , chez un curieux de mes voifins, qui joint à une dextérité fingulière pour obferver , un amour infatigable pour le vrai , & un éloignement infurmontable pour tout ce qui approche le moins du monde des écarts de l’imagination. Comme le cabiner de ce favant Obfervateur eft richement muni de ce qu’il y a de plus excellent en inftrumens d’Oprique, neus avons obfervé: 1°, des grains entiers de froment, d'orge & d'avoine, qui ne préfen- tent abfolument que des maffes informes & inégales d’une pouflière noire , entremêlée des fibres du calyce détruit. En preffant, en ou- vrant ces grains , il ne fe préfente autre chofe que de la pouflière noire, 2°. En mettant la pouflière noire sèche , & dans fon état na- turel , fous le microfcope , à différens degrés de force , nous n’avons trouvé , dans les trois genres de plantes ci-deflus , que des globules parfaitement femblables, dans le froment , l'orge & l'avoine. Chacun de ces globules eft parfaitement diaphane ou tranfparent , fans aus eun point noir. III. En délayant cetre pouflière noire dans un peu d’eau claire & froide , ce qui eft difficile, parce que cette pouflière eft fore graffe , les grains de pouflière fe féparent plus aifément les uns des autres ; on les apperçoit beaucoup plus diftinétement ; mais ils font tous tranfparens, fans points noirs , fans le moindre mouvement , & , ce qu'il y a de plus fingulier , fans la moindre petite anguille, JV. Cette même poufñlière, confervée dans l’eau claire & froide, pendant huit jours, dans un flacon bouché , fentoit déja mauvais , donnoit fous le microfcope, abfolument les mêmes globules ; mais fans mouvement & fans infectes. | QE Non contens de ces découvertes, & nous défiant ençore de nos propres SUR L'HIST. NATURELLE ET LES ARTS. 33; propres yeux, nous avons porté de nos trois grains niellés & de no- tre pouflière noire chez M. Cuhbertfon, habile Artifte, établi depuis peu à Rorterdam , où il fe diftingue par fon intelligence dans l'Op- tique, & par fon ingénieufe dextérité à conftruire d'excellens inf- trumens. Cet habile homme , verfé & rompu pour ainf dire, dans l'habitude de bien voir & d’obferver jufte, n’a découvert autre chofe que ce que nous avions apperçu d’abord : il eft donc de la dernière nécefliré que M. Roffrédi déclare clairement au Public , quelle eft l’efpèce de grain duquel il a tiré naturellement des an- guilles vivantes |, de mème que je nomme très - diftinétemenr les trois genres de plantes que j'ai examinés , & qui font incontefta- blement sricicum hybernum , hordeum hexaflicon , & Avena fativa alba. Après rout ce que je viens de dire , on peut s’imaginer combien il m’eft impoñhble de concevoir qu'un grain de froment charbonné puifle être femé, qu'il germe en terre, qu'il croifle, & qu'enfin il produife une plante. Selon tous les Auteurs, & fuivant mes der- nières obfervations , ce grain eft un amas informe de poufllière noire : fuivant les propres termes de M. Roffrédi , ce grain con- tient des anguilles toutes vivantes , ou une pouflière noire ; mais quel eft l’homme à qui l’on pourra perfuader , qu’en femant des anguilles , ou de la pouflière noire, on fera croître du froment ? Obfervez, je vous prie, que ce que je dis ici n’eft pointune plai- fanterie ; c'eft précifément le réfultat des opérations de M. Roffrédi; d’où je conclus que le Mémoire de M. l’Abbé de Cafa Nova a ab- folument befoin d'explication. Pour prévenir de pareilles obfcurités , je ne puis rien faire de mieux que de décrire fimplement, mais d’après nature , toutes les variétés que j'ai obfervées dans la maladie qui fait le fujer de ce Mémoire ; j'indiquerai en même -tems les différentes plantes fur lefquelles fe trouvent tous les ans ces variérés de la nielle , & ces plantes feront nommées , dans mon Mémoire , de façon qu'aucun Botanifte ne puifle s’y méprendre. Pour répandre encore plus de jour fur cette matière, je commencerai par expofer d’une manière fuc- cinte ce que les Auteurs les plus célèbres, dont les ouvrages font venus à ma connoiflance , ont dir de mieux fur cette matière. Tel eft le but que je me propofe dans ce Mémoire : c’eft unique- ment en qualité de Botanifte que je prends la plume ; & je laifle volontiers à des yeux plus perçans que les miens, le foin d’exami- ner & de décider fi toutes les obfervarions fur la zée/le | faires au microfcope , préfentent des molécules organiques, des animalcules microfcopiques , ou des anguilles. Pour moi, j'avoue que je n'y ai jamais cherché que la nielle mème ; heureux fi j'en avois découvert Tome VI, Part. Il. 1775. D d d 384 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, l'origine ou la nature ; mais j'en fuis encore fort éloigné : j'ofe me flatrer cependant, qu'au moyen des éclairciffemens que je vais don- ner, quelqu'obfervateur plus aétif & plus pénétrant que moi , par- viendra à découvrir la vérité. Il eft bien {urprenant qu'une maladie, prefqu’auffi ancienne que le monde, foit cependant aujourd’hui fi peu connue : il en eft fair mention en plufieurs endroits de la Bible, fous le nom Hébreu ?9P° (a) Jerakon , ou Hircon , comme d’un fléau & d’un inftrumenc de la Juftice Divine. Je n'ai point maintenant , fous les yeux d’au- tre témoignage de la part des Grecs, que celui d’Ariftore, qui ap- pelle cette maladie des grains Eprruên , où Eeuri@n ; mais elle étroit très-connue des Romains, fous les noms de Aobigo , ou Rubigo : elle avoit même donné lieu chez eux, à une fète annuelle, appellée Robigalia , ou Rubigalia : certe Fête, qui avoit été établie par Numa, la onzième année de fon règne , & qui fe célébroit le VII des Calendes de Mai, c’eftà-dire le 25 Avril, confiftoit en certains fa- crifices , que l’on offroit, felon Ovide, (2) à la Déeffe Robigo; &. felon d’autres, (3) au Dieu Robigus, pour les prier de détourner ce fléau de deffus les bleds. à Depuis que les Sciences fleuriffent en Europe , prefque tous ceux qui fe font appliqués à l’Hiftoire naturelle, ont fait mention de certe maladie ; & il paroït que le premier nom qu'on lui a donné en France, étroit celui de Niezze où Nurzee. (4) « Denis Godefroi , » fur la Loi XV. au Digefte Locari , dir : Galli Nellam qua Ne- # bulam vocanr, En Languedoc , on dit que /e bled eff Neullat, quand »il eft gâté par la nielle. Neullar C'eft Nebularus. Budée fur les 5 Pandeétes , fol. 148. versd , rubigo , vel ærugo , nif£ fallor, eff quam » Nuillam zoffrates agricolæ vocant «. Je conferverai donc , dans le cours de ce Mémoire , le nom de Nrsize, non-feulement comme le plus ancien, mais aufli comme le mieux connu & le plus ufité, fur-tout dans la France proprement dite. Les Allemands fe fervent du mot Mutter-Korn ; les Hollandois employent les termes de Mæder-Kooren , Brand, Schræying : en An- glois cette maladie fe nomme Mildew , Blafling , Smut , 6tc. (1) Deuter. c. 18, v. 22. Id. 1bid, y. 42. Joël, 1, v. 4. Idem, c. 2, v. 25. Regum. L. TI, c. 8, v. 37. (2) Flamen in antique lucum Robiginis ibut. Ovid. 4, Fafi. V. 721. (3) Voyez Varr: Liv. 2, de re Ruflicé, cap. 1. Pline, Lib. 18, cap. 29. Gell, cap. 12, Lib. 5. (4) Dictionnaire Etymologique, &c. pat M. Ménage. Paris 1694, page 529; au mot Nielle, ah: dl SUR, L'HIST/NATURELLE ET LES ARTS: 393$ Les plus fameux Botaniftes n’ont pas négligé de parler d’une m1- tière auili intéreffante ; mais malheureufement , aucun ne l’a tra tie à fond. Pour ne point ennuyer le leéteur , je ne produirai que L:s témoignages les plus décififs. Rai, dans fon Hiftoire des Plantes, tomelIl, page 1241, fait mention du Seigle ergoté, Secale cornutum : il attribue cette maladie aux pluies fréquentes , & foupçonne qu'elle eft occafionnée par des infectes : ce fentiment qui n’explique rien , & qui laiffe tout, pour ainf dire, à deviner, pourroit bien cependant nous conduire à la vérité , en ce qu'il n’eft pas impoflible que dans la oraifon , rem- pore florefcentiæ , tems auquel les calices de toutes les fleurs font con- fidérablement ouverts , les pluies ou les brouillards épais endomma- geallent les parties tendres de la fructification , flamina € piflilla , au point qu'étant fort alrérées , elles offriflent alors , à certains in- fectes , une place convenable pour y dépofer leurs œufs. Ces œufs, en fe développant dans un efpace de rems affez court, produiroient des vers qui, après avoir augmenté le dégât, pour fe nourrir, fe méramorphoferoient en infeétes aîlés, & ne lailleroient plus à nos obfervations que des débris informes ,-& les reftes de leur ra- yage (1). Voilà , dira-t’on peut-être , encore une conjecture ; un jeu d’ima- gination ajoutée à tous ceux dont les livres font déja pleins. Je conviens que ce n’eft en effet qu'une conjecture ; mais je la donne auf pour telle : je n’afiirme rien, & je ne prends aucun intérêt à la fortune que cette opinion peut faire ; cependant dans une caufe où tout eft encore couvert de voiles épais & entouré de difficultés, je ne crois pas qu'il y ait grand mal à propofer une conjecture qui, d'un côté , n’engageant à rien , ne laïfle pas , de l'autre , d'ou- vrir la porte à certaines obfervations qui , je crois , font trop né- gligées ; je parle de l'examen des épis avant la oraifon, anré flo- refcentiam , & des mêmes épis confidérés lorfque les grains, cerealia , font en pleine fleur. Après tout, je me crois fondé à propofer mo- deftement cette conjecture , fur ce que , en fecouant , comme je l'ai dit plus haut, quelques plantes d'avoine niellée fur du papier blanc, j'ai reçu quatre gros vers, aflez femblables à ceux qui mangent l'intérieur de plufeurs fruits : chaque ver grisâtre , compofé de plufieurs anneaux , plus gros dans le milieu du corps que vers les deux extrémités , étoit long de trois lignes environ : le dos, ou toute la partie fupérieure eft convexe ; la partie inférieure , ou le a (x) Voyez le fentiment de M. Tiller, expofé dans le Tome V du Di, Encycl, Edit. de Paris, page 906, au mot Ergot. Ddd2z e té » 386 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, ventre eft plate, en forte que l'animal reffemble à la moitié d’un cylindre qu'on à coupé en deux perpendiculairemenr. Comme je ne penfois aucunement à ces infectes, combien «ai - je pà en -perdré, le long du chemin , depuis le champ d'avoine jufqu'à mon cabiner ? Quoiqu'il en foit, je fuis très perfuadé-qu’il eft ici très-effenriel de bien obferver les grains fujets à la nielle , dans le tems où cette cruelle maladie fe manifefte, & j'ai un préffentiment que les obfer- yauons, faites à-propos , ne feront pas fans fruit. Jean Bauhin, dans fon Hiftoire des Plantes , some II. Livre XVIII. chap. 10. foutient que les endroits élevés font peu fujets à la nielle: { des expériences conftantes & répétées tous les ans, m'ont convaincu du contraire, comme je l’expliquerai ci-après;) mais il prérend que les vallées y font fort expofées : il ne m'a pas été poffiblé de. rien conclure de fixe, de tour ce que dit cet Auteur à ce fujer. M. de Sauvages , dans un excellent Ouvrage qui apour'titre, Nofo- dJogia Methodica, rome Il. p. 613. au mot Necrofis , diftfngue & fé- pare de la nielle ordinaire, l’Ergot , » Secale cornutum de duo fcripfc » Moellerus Comment. Lipfæ , anno 1752. p. 634. Geïmanis Brand » &Mutter-Korn (1). ‘ M. le Baron de Haller, dans fon Hiftoire des Plantes de Suiffe, page 207. cite plufieurs Auteurs anciens & modernes , qui ont parlé de la zielle, & que les curieux peuvent confulter; mais cescélèbre Au- teur s'occupe plus des accidens & des maladies qui fuivent lufage intérieur de l’ergot , que de la caufe qui le produit. ° Comme les quatre témoignages que Je viens de rapporter , ne : décident rien fur la queftion préfenre , je vais en‘offrir deux au- tres, qui entrent dans un plus grand détail, & qui probablement Fourniront des idées & des lumières aux vrais amgreurs de l’Hiftoire naturelle. e le j M. Fagon , premier Médecin du Roi de France, & Académicien honoraire , s'explique ainfi dans l’'Hiftoir£ ‘de l’Académie Royale des Sciences, Année 1710. pag. 80. ; » Il ya des brouillards qui Een les fromens, & dont la plu » part des épis de feigle fe défendent par leurs barbes : dans ceux » que cette humidité maligne peut atteindre & pénétrer, elle pout- » tit la peau qui couvre le grain, la noircit, & altère la fubftance » du grain même : la sève qui s’y porte, n'étant plus refferrée par » la peau , dans les bornes ordinaires, y circule en plus grande abon- » dance, & s’amaflant irrégulièrement , forme une efpèce de monf- A ——— — ————————— ———— ne ——————————— ————————————— (1) M. Aimen: prétend le contraire, Voyez Di, Encycl, première Edition Tome XIV, page 893, au mor Seigle. . SUR L’HIST. NATURELLE ETVEES ARTS. 387 »tre, qui d'ailleurs eft nuifble, parce qu'il eft compofé d’un mê- » lange de certe sève fuperfue avec une hamidité vicieufe «. Page 85 du même Méroire , ce Savant s'exprime ainf : » Cette mauvaife efpèce de grain vient en plus grande abondance » dans les cerres humides & froides, & dans les années pluvieufes. » Un certain feigle particulier , qu’on feme en Mars , y eft plus fu- » jet que ceux qu'on feme en Automne «, L’Auteur du Diétionnaire Anglois des, Arts.8& des Sciences, (1) dit à-peu-près la même chofe que M. Fagon : il ajoute, qu'on peut préferver la femence du’ feigle de la rielle ; en trempant cette fe- mence dans:de la faumure : c’eft aufli le fentimenc de quelques au- tres Ecrivains; mais lorfque l’on admet les brouillards du Printems pour caufes de la zielle, comment s'imaginer qu’une faumure appli- quée en Automne fur la femence , pourra, l’année fuivante , produire quelqu’effer far. l'épi , fur la fleur? Enfin, M. le Baron Otro von Munckhaufen, dans un Livre ano- nyme , qui a pour titre, DER HAus-VATTER , ex deux volumes in-3°, Hanov. 1766. paroît ètre , de tous les Naturaliftes, celui qui a étu-, -dié le plus férieufement la maladie qui nous occupe : fon fentiment a fait une telle impreflion fur le célèbre Chevalier Von-Linné , que celui-ci a inféré dans le feprième volume des Amænitates Academice, * un difcours ptononcé à Upfal le 6 Mars 1767. fous le titre de Mundus invifibilis ; dans lequel l'Orateur rapporte un affez long paffage , tiré du fecond volume de l’Ouvrage de M. de Munckaufen, page 329. Voici ce paffage traduit en François. » La nielle eft quelquefois fi abondante, qu’elle s'empare du tiers » ou du quart d’un champ ; de forte que tous les grains, au lieu » de farine , font reinplis d’une pouflière noire : l’examen exact de + »cette pouflièré, au microfcope, & dés expériences répétées plus » de cent fois, m'ont appris que -cette pouflière étoit compofée de » petits globules tranfparens , avec des points noirs en-dedans, qui » fonc des œufs d'infeétes infiniment déliés , ou plutôt de vermi£ » feaux. Lorfque ces œufs font placés (22 humido,) & à un certain » degré de chaleur, il en fort un petit animal, qui a la forme » d’un œuf, qui fe rompt à fon extrémité, & qui répand une grande » quantité d'œufs. i » Lorfque l’on bat le bled, on fait fortir de l’épi un grand » nombre de grains gâtés par la nielle, & les œufs s’attachent aux » petites barbes qui fe trouvent à l’extrémité du bon grain de » froment, & par ce moyen, fon fémés avec le grain : les petits CS DDR A En SAR mm - Cr) Didionary of Arts) and Sciences, London 1764, page 12988, au mot Smur. 12 388 OBSERVATIONS SUR IA PHYSIQUE, » infeétes, en fe développant, fuivent l’accroiflement du germe ; » fe multiplient à mefure que la tige s'élève ; ils confument la » moëlle encore tendre de la plante , & enfin dépofent leurs » œufs. » Ainfi donc, pour prévenir la nielle, il n’y a rien de mieux » que de femer du froment qui ne contienne point de ces œufs ; » car lorfqu'il n’y a point d'œufs, il ne peut y avoir d’infectes ; » mais fi l’on ne peut fe procurer du froment pur, il faut au moins » détruire les œufs, & les mettre hors d'état de pouvoir fe mul- » tiplier. En examinant la pouflière de la nielle, qui eft vieille d’un »an, on s’apperçoit que les globules font defléchés à l'intérieur : »3il n’y a donc aucun mal à en appréhender , & l’on n'a befoin » d'aucun remède, pourvu que le froment foit bien fec, & qu'onle » préferve de l'humidité ; mais fi l’on eft obligé de femer du grain » nouveau , il n’y a rien de fi contraire à ces infeétes , que de la » faumure mêlée avec de l'eau , qui les détruit fur le champ :il faut » arrofer le grain d’une leflive faite de chaux & de faumure : c'eft » pat ce moyen que, depuis vingt ans, j'ai préfervé mes grains de » la nielle, pendant que mes voifins ont quelquefois perdu jufqu’à » un tiers de leur récolre«. Tout cer expofé de M. le Baron eft fi clair, fi fimple, fi facile, que j'ofe me Matter que le plus grand nombre de mes Lecteurs fe fera un plaifir de répéter l'expérience. Si donc , d'ici à une couple d'années, chaque Obfervateur veur bien communiquer fes décou- vertes au Public , il eft impoflible qu'il refte le moindre doute fur cette matière ; l’exiftence des œufs & des infectes , leur progreflion fucceflive depuis la racine jufqu’à l’épi , la deftruction de la moëlle de la plante qui leur fert d’aliment , le dépôt de leurs œufs au fommet de la rige, &c. tout cela fera prouvé, démontré, ou dé- truit & renverfé pour jamais : je crois cependant devoir avertir que , comme il s’agit d'objets infiniment petits , il eft à-propos d’être en garde contre l'imagination : il faudroit, ce me femble , fur - tour en commençant , n'adopter aucun fyftème , & être fermement dé- cidé à ne décrire que ce qui eft, & non ce que l’on defire , ou ce que l’on croit voir. J'avoue ingénuement que ce dernier fyftème m'affeéte & me plaîc au point que je fais les vœux les plus fincères pour qu'on puifle en démontrer la vérité; mais en même-tems, je me crois obligé de communiquer au Public quelques obfervations qui , jufqu’ici , m'ont préfervé de l’enthoufiafme , & qui m'ont fait fufpendre mon jugement jufqu’à un plus ample informé. j 19. Je crois être bien fondé à me défier d’une pouflière que l’on apporte dans fon cabinet , que l’on met infufer dans une liqueur, SUR L'HIST. NATURELLE ET LES ARTS. 389 & à un certain degré de chaleur, fans doute aufli pendant un cer- tain tems; toutes ces opérations-là me rendent-elles ce que la na- ture exécute en plein champ? c'eft ce que j'ignore : j'aimerois mieux que lon examinât la plante fur pied, dans fon état natu- rel , & qu’on râchâr de découvrir, fine ullo addito , ce que c’eft que cette poufilière noire qui détruit nos moiflons ; car fi je ne me trompe , voilà ce qui intérefle les propriétaires , les laboureurs , l'humanité entière , & non pas le réfulrat chymique du mélange d'une pouflière avec une liqueur. 2°, Sans faire la moindre violence aux expreflions de M. le Baron, il fuit naturellement de fon fyftème , qu'avec de bons yeux , au moins à l’aide d’une bonne loupe , on devroit, depuis le commen- cement du Printems jufqu’à la formation de la pouflière noire, ap- percevoir des traces de cette progreflion des infectes , qui » fuivenc » l’accroiflement du germe, fe multiplient à mefure que la tige » s’élève , & confument la moëlle encore tendre » (d’une plante qui n'a jamais eu de moëlle ;) mais je puis certifier que depuis trente ans , je n'ai jamais pu trouver une feule plante de froment , #riri- cum hybernum , où il y eût autre chofe de niellé que la fructifica- tion, l’épi , les feuilles étoient faines & entières, la tige , culmus , éroit intaéte : en l'ouvrant dans fa longueur , je n’y ai jamais ap- perçu la moindre altération ; l’intérieur de la tige cu/mus, qui eft toujours creufe & fans moëlle , l’intérieur , dis-je, étoir frais & fuc- culent, & n’annonçoit, paï conféquent, en aucune facon, le paf- fage d'un grand nombre d’infeétes qui auroient vécu à fes dépens: on dira peut-être que ces infeétes font infiniment petits; mais uand ils le feroienr encore davantage , je crois qu’une armée d’in- Les affez nombreufe pour dépofer, en très- peu de tems, des millions de milliards d'œufs, doit laifler des marques de fon paf- fage fur une plante tendre, de laquelle feule elle a tiré fa fub- fiftance : or , je le répète , un nombre infini d'examens & d’obfer- varions , m'ont toujours préfenté les feuilles & la tige du froment niellé dans l’état le plus naturel : j’avouerai que j'ai quelquefois, rarement cependant , trouvé la premiere articulation de la tige entre l'épi & le premier nœud de la tige qui étoit endommagée ; mais j'ai plus de raifon de dire que ce mal venoit de l’épi mellé, qui étroit tout proche , que de l’attribuer à une progreflion, à un paflage d’infectes que tout le refte contredir. 7 Queiqui en foit de mes réflexions , que je ne donne que comme de fimples obfervations ; & pour prouver ma parfaite im- païtialité fur les anguilles & fur les animalcules microfcopiques, je propofe un moyen bien fimple , & à la portée de prefque tout le monde , pour vérifier le fyftème de M. le Baron : il ne s'agit que 399 : OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, de fe procurer quelques grains de froment , sriticum , peu importe quelle efpèce; d'avoir foin que ces grains foient bien fains & bien mûrs, de les rouler ou frotter dans de la pouflière de nielle de l’an- née , jufqu'à ce qu'ils en foient bien chargés , les femer enfuire en Automne , dans un vafe tranfportable , & faire enterrer ce vafe dans un jardin où il reftera tout l’hyver : au Printems , on fera rapporter ce vafe pour le placer fous fes yeux , fur une fenèrre , dans une cour, &c. alors rien ne fera plus facile que d’obferver fi les infectes fe développent avec Île germe , s'ils montent, en fuivanc l’accroifle- ment de la tige , & s'ils s’arrèrenc à l’épi pour y dépofer leurs œufs : cette expérience doit d'autant moins manquer que , fuivanc M. le Baron, »lorfqu'il n’y a point d'œufs , il ne peut y avoir d'in- fectes; « par conféquent, vice versé, où il y aura beaucoup d'œufs, on devra trouver abondamment des infectes, Voici encore une expérience très- praticable : prenez une petite quantité de grains purs & abfolument fans poulière ; que ce foit du froment , du Jeigle, de l'orge , peu importe , pourvu que vous fachiez politivement ce que c'eft. Semez une trentaine, plus ou moins, de ces grains en Automne, en pleine terre, dans un jardin, autour duquel il n’y ait aucuns grains, cerealia. Selon M. le Baron, ces grains doivent produire des plantes abfolument exemptes d’anguil- les, d’animalcules , de nielle quelconque. Lorfque ces plantes feront en pleine fleur , tems où les calices s’ou- vrent confidérablement ; ayez des œufs d’animalcules que vous aurez fait éclorre , & dépofez avec précaution les anguilles vivantes, les animalcules, Chaos aflilago enfin , (1) fur l’embrion germen de la fleur ouverte. Pour plus de sûreté, répétez cetre opération plufieurs fois , & fur pluñeurs Aeurs différentes : il me paroît impoñlible que l’ex- périence manque jamais ; car enfin vous aurez des œufs éclos , des animalcules vivans , ou auxquels, en cas de mort, vous pourrez aifément rendre la vie, animal redivivum : ces animalcules font aifés à traiter, corpus liberum : il n'eft point à craindre qu’en les tranf- portant vous endommagiez leurs organes délicats , artubus fenfufque organis externis nullis. I eft donc très-probable que vous produirez de la nielle fur toutes les fleurs où vous aurez porté des infeétes : en effet, lorfque l’on a des êtres vivans, une place convenable pour les loger, & une nourriture naturelle & abondante à leur fournir; il me paroit impoñlible qu'on ne foit pas maître de les mulriplier. EEE (1) Voici la Définition générique de l'Animalcule de la Nielle : CHAOS Us- ziLAGO. Corpus liberum, uniforme, redivivum : Artubus fensûs que organis exter- nis nullis, Syit. Nat. Gen, 354, page 1326, Peut-être SUR'L'HISTONATURELLE ET LES ARTS. zou Peut-être les deux expédiens que je viens de propofer , ont-ils un très grand défaut? Ils fonc trop fimples , trop clairs, trop na- turels; 1ls répandroient trop de jour fur une matière qui ne plaie peut-être, que par fon obfcurité & par les difficultés qui environnent toutes fes operations : tel eft l’homme : les fubriles obfervarions faices au microfcope enchantent ;, raviflent ; elles élèvent l’ime fort au- deffus de fx fphère, & la tranfportent , pour ainfi dire , dans un nouveau monde : qu'en réfulre-vil pour le globe que nous habirons ? Rien, ou fi peu que rien, éxterim patitur juffus. Nos moiffons fouf- frent beaucoup tous les ans ; le pauvre manque quelquefois de pain, parce que fouvenr un fixième de la récolte eft détruit par la nelle. Comme il elt bon , cependant, que toutes les efpèces de bien poflible s’exécutent , rendons au-zèle, à la fagacité & à la patience des obfervateurs au microfcope , toute la juftice qu'ils méritent, convenons qu'ilsinous ont rendu, & qu'ils peuvent nous rendre en- core des fervices effenriels ; mais pendant qu'ils travaillent dans le fecrec de leurs cabinets, qu'il y ait au-moins quelques-uns de nous qui fréquentent le laboratoire de la nature, qui , fans pré- jugés ; fans fyftèmes, avec une ame toute neuve, s'il eft permis de parler ainfi , examinent ce qui fe pale dans nos champs , le décri- vent en termes clairs, dans le ftyle le plus fimple, & le commu- niquent à la focicté. Si, depuis bien des années, ma fanté me l’eûc permis, je ne ferois pas réduit aujourd’hui à faire cette propofition au Public. En voilà affez, ce me femble , pour les différens fyftèmes fur la nature de la nielle : ceux qui fouhaiteront des détails plas circonf- tanciés , peuvent confulter les Tranfaétions Philofophiques de la So- ciété Royale de Londres, volume LV , année 176$. pag. 106 , où fe trouve une lertre de M. Tiffot à M. Baker , & le volume LIX. année 1769. Article XVIIL. page 138. où l’on verra un Mémoire de M. Jonh Ellis Efquier , au fujer des découvertes de M" Munckaufen & Needham ; enfin un ouvrage de M. Henry Baker, de la Société Royale de Londres, qui a pour titre , Employement for the Microf- cope , &c. 1764. chap. IV. page 250. où il y a un très beau dif- cours fur les anguilles du bled niellé: il ne me refte donc plus qu'à faire connoître les différentes formes fous lefquelles la rie/le des grains set préfentée à moi pendant le cours de mes herbori- farions. Quoique l’examen de la pouflière noire de la miel m'ait con- vaincu que cette maladie, qui attaque les grains , cercalia, & une rande partie des plantes grâminées, gramina , n’elt réellement qu'une ule: & même maladie , fous quelque forme qu’elle fe préfente ; Tome VI, Part. IL. 1775. Eee 392 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, cependant pour mettre quelqu’ordre dans ce que j'ai à dire, je me crois oblige d'établir d’abord trois divifions générales, dont chacune aura fes fubdivifions particulières , fuivant le nombre des variétés que je rencontrerat. Comme je n’ai jamais trouvé une feule plante dont toutes les parties fuffent infeétées de la elle, je me crois bien fondé à di- vifer cette maladie en trois clafles, dont la premiere contiendra les divers accidens que la ielle (uftilago) occafñonne à la fruétification, & je nommerai celle-ci Uftilago fruétificationis. Sous la feconde claile , je rangerai les variétés que j'ai obfervées dans la elle , lorfqu’elle n’attaque que les feuilles de la plante ; je l’appellerai z/fi/ago folio- rum. Enfin la nielle qui attaque la tige feule, qui la brûle & la rend femblable à un charbon, donnera la troifième divifion géné- rale , & fera appellée zfälago culmi. DANRMEUN NET RP EME TT NET NIS RTE LOMME La nielle qui attaque la fruétification , wflilago fruélificationis , et proprement celle qui intérefle le plus lhumanité ; c’eft auf celle fur laquelle on a le plus écrit, comme je l'ai déja dit:je l'ai ren- contrée une infinité de fois, fous trois formes très-différentes , qui me fourniffent trois fubdivifions très-naturelles. Gite La premiere fubdivifion comprend ce que l’on appelle communé- ment feigle ergoté ou ergot ; ( fecale cornutum.} Voyez Langius, Ac, Lipf. 1718 , p. 309. & tous les Auteurs que j'ai déja cités. Cette maladie a été décrite tant de fois; elle eft fi généralement connue, que ce feroit perdre le tems, que de la décrire encore ; mais je crois devoir communiquer des particularités qui me font tombées foùs la main, & qui pourront, je crois ; conduire à quel- que découverte utile. : 1°, En examinant du feigle, fecale cereale ; qui fortoit de fleur , fur les épis duquel fe trouvoient encore quelques anthères deflé- chées , qui avoient depuis peu répandu leur pouflière fécondante ; j'ai trouvé une légère teinte de noir ; répandue très-fuperfcielle- ment fur tout l’épi, & qui n'étoir bien fenfble qu’en certains en- droits, où l’on diftinguoit à la loupe des grains de pouflière noire, parfaitement femblables à ceux qui fe trouvent far routes les plantes niellées : tous les calices étoient fermés, fains & entiers : il eft bon de remarquer que les balles du feigle , glumæ calycinæ , font finguliè- rement dures & rudes , & c'eft , je crois, ce qui ne permet pas à SUR L’'HIST. NATURELLE ET LES ARTS. 393 fa nielle de défigurer le feigle , comme les autres grains. En ouvrant les calices l’un après l’autre, j'ai trouvé plufieurs grains fains & dans un état naturel; quelques calices écoient vuides, & ne contenoient qu'un embryon, germe, detléché & mort : enfin , j'ai remarqué que plufieurs autres embryons , germina , étoient déja altérés, noirs, & changés en petits ergots : mes occupations & les circonftances ne m'ont pas permis de fuivre trous les jours ces expériences , qui de- mandent tous les foins d’un obfervateur qui demeure à la campagne; mais j'entrevois qu'il ne fera pas difhcile de vérifier & de conftater les expériences de M. Tillet, dont le fentiment a été couronné par l'Académie de Bordeaux en 1754, & qui attribue l’ergos à la pi- quure de certains infeétes : je ne me lafferai point de répéter que c'eft pendant la floraifon , sempore florefcentiæ , que l’on fera les dé- couvertes les plus utiles, & que, huit jours bien employés en plein champ, au pied de la plante, en apprendront plus fur certe ma- tière, que fix mois d’obfervarions microfcopiques dans un cabiner. 2°. J'ai trouvé, quelque tems après, des épis où l’on remarque quelque légère trace de pouflière noire : un grand nombre de calices ne renferme que des germes delléchés, germine deficcata ; mais les bons grains, qui n'ont pas été attaqués, font beaucoup plus gros, plus renflés qu'à l’ordinaire ; enfin, j'ai quelques-uns de ces épis, que l’on peut, avec raifon, appeller RacmiriqQues : la partie de l’épi que l’on nomme rachis , étant courbée & contrefaite. 3°. J'ai recueilli des épis vifiblement pâtés par une pouflière noire très-fenfible ; la plupart des calices font vuides, ou ne contiennent qu'un peu de pouflière noire. Il y a quelques grains fort bons, & d’autres changés en ergots affez longs , dont quelques-uns n'offrent ‘plus qu’une peau noire , ou pour mieux dire, un petit fac, fembla- ble, par l'extérieur, à un ergot , mais dont l’intérieur eft rempli d’une pouflière noire de la même nature que celle qui fe trouve fur tous les autres grains. C’eft cette dernière découverte qui prouve, ce me femble, que l’ergor n'eft point une maladie. différente de la xielle. 4°. J'ai un bon nombre d’épis chargés d’ergots , d’une grandeur af- fez confidérable. Jamais je n'ai vù d’épi, dont tous les calices por- taffent des ergots; mais une partie contient de bons grains, quelques- uns font abfolument vuides, & les autres portent des ergors de diffé. rentes grandeurs : j'en ai de deux pouces de long, ou droits , ou con- tournés différemment, Voyez la Defcription de M. Aimen, rappor- tée dans le Dié&t'onnaire Encyclopédique , au mot Seigle , & qu'il faudroit copier mor-à mot , pour décrire tout ce que j'ai obfervé. s”. Enfin, j'ai quelques épis, où il ne fe trouve n1 bon grain, ni ergot; mais tous les calices font vuides; l'épi ES en quel- € € 2 394 OBSERVATIONS SUR LA PAYSIQUE, ques endroits, d’une pouflière noire; d’ailleurs, tout eft aride & def- féché , ce qui arrive aufli quelquefois au Phalaris Arundinacea. Voilà l’expofé le plus fimple qu'il me foit pofible de faire de ce que j'ai obfervé fur le Seigle. Je laifle aux. Curieux le foin de répéter ces obfervarions, & d'en tirer des conféquences. Il m’a été, jafqu'ict, impoñlible de conftater s’il n’y a qu'une forte d’ergor , ou s'il y en a deux. Ce qui autorife le doute fur cet article, eft la contradiétion frappante des Aureurs fur les effets de l’ergos : prefque tous les Fran- çois affurant que l’ufage intérieur en eft mortel; une grande partie des Allemands, (1) au contraire , foutenanc qu’il ne caufe aucun dommage. S'il n'y avoir que des Botaniltes qui fiffent ces fortes d'expériences, la queftion feroit bien-rôt décidée. Les Plantes qui font fujertes à l’ergor, font, 1°. le Seigle, Secale cereale ; 2°. une efpèce de Chiendent, Triicum repens ; 3°. Triticum junceum ; 4. Arundo arenaria; $°. Aira criflata, qui eff une va- ricté du Poa criflata ; 6°. Lolium perenne ; 7°. Fefluca ‘fluitans ; 89. Fefluca elarior ; 9°. Alopecurus pratenfis ; 10°. Alopecurus genicula- tus ; 11°. Agroflis floloniféra ; 12°. Holcus lanatus, Je fuis très - per- fuadé qu'on en découvrira encore d’autres ; mais, au moins, voilà ce que j'ai recueilli & defféché. Les numéros 3; 4 & $, prouvent, à ce qu'il me paroît, qu'un terrein humide n'eft pas toujours néceffaire pour la production, où pour la multiplication de l’ergor, puifque ces trois efpèces de plan- tes ne croiflent que fur le fommet aride de nos Dunes. Le numéro 3 a ceci de particulier , que chaque fpicule , quælibes Jpicula , ne produit qu’un ergor allongé , menu , cylindrique, & furmonté de deux cornes de deux pouces de long. Je n'ai encore trouvé qu'un feul exemple de certe plante. EE La feconde fubdivifion ne m'a préfenté qu'une feule efpèce de plante, dont la fruétification eft viciée & alrérée d’une facon bien fingulière : c’eft le Carex arenaria , très-commun fur nos Dunes , & dont voici la defcriprion. Les racines , les feuilles & la tige , font dans l’état le plus natu- cel; mais le panache ( panicula), au lieu de femences, femina , porte rm (1) Voyez Natuur en Genees-Kundige Bibliotheek, Negenae deel, Eerffe Stuk æ772, p.62. Art. 111, IW en VW; en Twecde Stuk, p. #26, Art. XI en XII SUR L'HIST. NATURELLE ET LES ARTS. 395 dans chaque fleuron , ë? medio cujuflibes flofeuli , un grain noir arrondi , de la groffeur je ne d'un moyen grain de chenevis, /èmen can- nabis, prefqu’aufli dur qu’une pierre. Les bales du calice, glume cali- cine , font entières , ou très-peu endommagées; mais dans leur cen- tre , fe trouve une petite pierre noire arrondie , qui réfifte à la pref- fion des doigts, & qui étant écrafée avec violence, donne une pou dre très-fine , qui m'a toujours paru encore plus noire que celle de la nielle ordinaire. Les panaches, panicule, font recouverts d’une poufière noire très-fine , mais que je n'ai pas eu occafon d’exami- ner fraiche & nouvelle. Le Carex arenaria, ne croiffant que fur nos Dunes, prouve encore que l'humidité du terrein n’eft pas la caufe de la rielle. $- 3. LA nielle de la troifième fubdivifon, confilte en ce que le grain eft entièrement détruit : on ne peut plus dire que ce foit une fe- mence , femen. La fubftance du grain eft totalement changée en une pouflière noire, qui, quelquefois, fe foutient encore fous les bales réunies du calice, & plus fouvent fe diffipe par le vent, & lailfe le rachis à nud. Dans le premier cas que j'ai obfervé fur l’orge, hordeum hexaflicon , les trois calices de chaque denticule, dexriculus, font réunis enfem- ble à l’extérieur, & préfentent à l'œil la figure d’une dartre sèche, d'un corps galeux. Ces trois petits fleurons peuvent fe détacher , en une pièce, du rachis, & l'on apperçoit que. leur intérieur n’eft au- tre chofe qu’une pouflière noire très-fine. Dans le fecond cas, qui eft très-commun fur le froment, sriti- cum hybernum , fur l'orge ; hordeum hexaflicon | & hordeum difli-hom, & fur l’avoine, avena fativa , chaque grain eft changé pour l’ordi- naire en une mafle informe de pouflière noire qui, en féchant, fe difipe dans l'air; & voilà pourquoi j'ai dit , au commencement de ce Mémoire , qu’il m'éroit impoflible de concevoir ce que M. Roffredi entend par un grain de bled charbonné, qu'il sème, qui pouife, &c. J'ai trouvé, la femaine dernière, dans une terre forte & toute neuve, (cirée de deffous les eaux pour former une digue), j'ai trouvé, dis-je, plufeurs pieds d'avoine, avena fativa ; d’une force & d’une groffeur extraordinaire. Le panache, panicula , eft encore enfermé tout entier dans es gaînes des feuilles, i7 vaginis foliorum , fans avoir aucunement vü le jour; & ce panache eft abfolument per- du de la rielle, tous les grains en font convertis en pouflière : le 355 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, ‘ racine, radix, la tige, culmus , & les feuilles, font dans l’état le plus fain & le plus robufte. Le mal s'eft1l introduit par l'extrémité des feuilles fupérieures , qui, étant roulces fur elles-mêmes, forment un tabe ouvert par le haut? J'ai plufñeurs plantes de froment & d'avoine, dont le bas de la fructification , pars inferior fruélificationis , eft totalement détruit par la nielle, & la partie fupérieure eft compofée de femences parfaites. Cela ne viendroit-il pas de ce que, pour l'ordinaire , les feurons inférieurs , flofeuli inferiores , s'ouvrent les premiers dans la forai- fon ? Jufqu’ici , toutes les différences, dans les bleds niellés dont jai parlé, font formellement oppofées au fentiment de M. le Baron de Munckhaufen, puifque la fruétificarion feule eft infeétte de pouf- fière noire, tout le refte de la plante étant parfaitement fain : mais voici d’autres obfervations qui s’ajuftent mieux à fon fyfiême. SPENC IO ND EM ID TE VAUTNS MATNOIUN La nielle, qui n’attaque que les feuilles, wffilago foliorum , fe pré- fente bien moins fouvenr que les précédentes ; je ne l'ai rencontrée que deux fois , fous deux formes particulières, que je ranoerai fous les deux fubdivifions fuivantes. | Su; La première variété confifte, en ce que l'intérieur des feuilles eft cannelé dans toute fa longueur , & les canelures font remplies d’une pouñlière infiniment déliée , plus jaunâtre, mais de la même nature que celle dont j'ai parlé jufqu’ici. J'ai trouvé certe mielle fur le Poa aquatica qui croit le long de tous nos canaux. La racine & la tige font dans l'état le plus naturel ; la fruétification , ou le panache, eft foible , maigre, & paroït avoir fouffert ; les feuilles inférieures font plus endommagées , canelées plus profondément ; les feuilles fupérieures font entièrement faines. Les côtes de la feuille qui for- ment, ou qui laiffent entr'elles les canelures , font faines & fortes, enforte que la feuille fe foutient & ne paroît altérée que quand on la regarde de près; d’ailleurs, l'extérieur de la feuille eft dans fon érat naturel. S° 102; La feconde variété eft précifément le contraire de la précédente, avec quelque différence. L'intérieur des feuilles eft fain & naturel, \ SUR L'HIST. NATURELLE ET LES ARTS. 397 mais la fuperficie extérieure eft toute couverte de petits grains noirs, qui lui fonc fortement adhérans, & qui la, rendent rude au toucher. À l'aide d’un crès-bon microfcope , ces grains fe font trouvés les mêmes que tous les autres, mais ils font adhérens, & la feuille n'eft point canelée. J'ai trouvé cette variété , 1l y a un mois, au commencement de Juillec, fur le rofeau ordinaire, arundo phragmi- ces : depuis, à la fin d'Aoùût, il ne s’eft point encore formé de ca- nelures. J'ai trouvé un très-grand nômbre de ces plantes viciées ; les feuilles inférieures étoient très-endommagées, & les fupérieures très-faines. La fructification n'avoit point encore paru. OR MOMMI MSN MN END) «eV er US rrmoil:N) La nielle, qui s'attache uniquement à la tige, wffilago culmi, eft encore plus rare que toutes les autres. Je la retrouve tous les ans au même endroit, mais far une feule & même plante vivace, qui croit fur la Dune la plus proche de la dernière Auberge de Scheveningen, fur le bord de la mer. Ceux qui peuvent confulter Morifon, Planr. Hifi. Univ. Oxon. Tom. IL, Set. 8, tabula 2, fig. 12 , auront une idée beaucoup plus claire de la plante dont je parle, que par le moyen de routes les defcriprions que j'en pourrois donner. Cette figure eft parfaite : il faut fimplement ajouter que, fous les feuilles qui quelquefois font un peu pâles, mais fouvent aufli font vertes & naturelles, depuis la racine jufqu’au fommet de la plante, la tige, culmus, eft abfolument charbonnée , comme une branche de bois qu'on auroit brûlée & éteinte pour faire un charbon. Lorfqu’on ouvre les feuilles , la tige laïffe romber une grande quantité de pouf- fière noire , dont les crains font totalement femblables à ceux que j'ai tant de fois cités. Comme cette plante ne porte jamais de fructification , il ne me paroît pas poflible d’affurer politivement quelle eft l’efpèce dont la maladie a lieu; mais à en juger par les feuilles qui font faines, & par les autres plantes qui l’environnent , ce doit être la nielle du Triticum junceum , uffilago Tritici juncei , où uflilago Elymi arenarii. Après avoir répondu , le plus clairement qu'il m’a été poflible, aux juftes defirs de M. l'Abbé de Cafa-Nova , qu'il me foit permis de dire deux mots de ce que je penfe fur toutes les obfervations microfcopiques qui ont été faites jufqu'à ce jour fur la nielle, On a pris des corps folubles, corpora folubilia, on les à fait in- fufer, macérer, fermenter, pourrir quelquefois, dans de l’eau tiède, ou entretenue à un certain degré de chaleur, pendant un certain tems; qu'en eft-il réfulté ? La liqueur a détaché du corps foluble 398 ‘OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, de petites molécules de matières très-délites, le mouvement natu- rel à tous les fluides, celui de la fermentation, qui eft encore bien plus violent, a fait mouvoir ces molécules de inarière, en tout fens, ou en différens fens déterminés, par rapport à leurs malles, au degré de fermentation, &c. & l'on à pris ces molécules agitées pour des animaux; enfin, on les a rangées, dans le règne animal, fous les noms de Chaos uflilago & de Chaos infuforium. Je prie les Naturaliftes, qui ont le Svsrema Narurzæ, Eauio Holmiæ, 1767, de lire, de fang froid ; la détinirion générique de Cnaos, page 1326, & de dire s'ils ne reconnoîtront pas la complaifance de l'im- mortel Chevalier Von-Linné pour M. de Munckhaufen & d’au- tres; & fi le bon fens & la jaftefle du Naturalifte ne brillent pas dans ces derniers mots de la note au bas de la même page : Arima- zum vix Dixero ? Pour revenir à la nielle , sffilago, n'ayant point de fyfème à pro- pofer pour en découvrir la nature; je prends la liberté d’exhorter tous les Amateurs de l’Hiftoire Naturelle & de l'humanité, qui pourront le faire commodément, de fe tranfporter à la campagne, proche des terres enfemencées de grains , cerealia, & là , d’obferver le plus fimplemenr qu’il fera pofible , pendant quinze jours ou trois femaines au plus, sempore florefcenriæ, tous les changemens qui ar- riveront aux plantes qu'ils auront fous les yeux. Il me paroït impof- fible, avec des obfervations aufli fages, de ne pas découvrir un myf- rère caché depuis fi long-tems. Qui fait fi la Nature, prife ainf réel- lement fur le fait, ne nous procurera pas l'avantage de pouvoir dire quelque jour , avec plus de vérité qu'Horace: Nec flerilem Jèges fentiet rubiginem. Telle eft, Monfieur , la Réponfe que j'ai cru devoir au favant Mémoire de M. Roffredi. Si vous croyez qu’elle puiffe être de quel- que utilité à ce zélé Naturalifte, & au Public, vous m’obligerez de l’inférer dans votre Journal. : CRD 1048 OBS E RFA TI OMNES lALZ be % _ dé É + Ut Lé bdd ‘à CE RAS TR Hi reueu :!:315608 SUR L'HIST. NATURELIE ET LES ARTS. 399 OPDAS EE Rakr AMI, ON. S Sur la LARME BATAVIQUE; Par M. MAUPETIT, Chanoine Réoulier de la Congrégation de France , & Prieur de Caffan. Le: invitations réitérées que vous faites à tous les amateurs de la partie qui compofe votre Journal, de vous adreffer les nouvelles découvertes , m’engagent à vous envoyer l'explication da phéno- mène de la Larme Batavique, qui étonne tous les Phyficiens, & dont on n'a point encore donné d’ékplications fatisfaifantes. La Larme Batavique fe forme en laiffant couler dans l’eau froide, une goutte, fi je puis ainfi m’exprimer , de verre mis en fufon ; certe feule opération la rend capable de quatre phénomènes : le pre- mier, eft fa folidité, qui eft au point de réfifter aux coups réitérés du marteau , ce que ne fupporteroit point un morceau de verre de même grolfeur qui auroit refroidi infenfiblement. Le fecond eft l’explofion qui fe fait lorfque l’on caffe la pointe de la larme. É Le troifième eft le peu de bruit qu’elle fait en éclatant, qui ne paroïît pas proportionné à fa folidité. Le quatrième confifte dans la qualité des particules de verre (après l’explofion) qui eft réduit en pouñlière , & n’a plus le tran- , chant du verre café. Pour parvenir à l'explication de ces quatre phénomènes , j'éra- blis, comme fondé fur l'expérience la plus conftante : 1°, Que le verre en fufñon tombant dans l’eau froide , fe cal- cine : 29. Que les morceaux de, verre calcinés n’ont point de tran- chant. Nota que par verre calciné , je n’entends autre chofe , que réduit en morceaux, tels qu’on les voit lorfqu'on a plongé un morceau de verre chaud dans l’eau froide : 3°. Que lorfqu'un corps quelconque , pénétré d’un feu vif, eft placé dans un milieu froid , la chaleur tend à s'échapper avec im étuofté : Tome VI; Part. II, 1775: Fi 400 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, 4°. Que la chaleur ne peut s'échapper avec impétuofiré, d’un fluide , fans entraîner les particules du Auide à fes extrémités : 5°: Qu'elle ne peut entraîner les particules du Auide à fes extré mités, fans laifler un vuide au milieu. Nota que je ne parle dans la cinquième propoñtion , que d’un fluide fujer à la congellarion , tel que le verre a ; l'eau, &c. 6%. Qu'en fuppofant un vuide au centre d’un corps folide , l'air extérieur agit de tout fon poids fur les parties de la fuperficie de ce corps : 7°. Qu'érant preffé par l'air extérieur , il doit avoir une foli- dité proportionnée à la preflion de l'air extérieur & à la dureté de fes parties. Vous obferverez, M. s’il vous plait , que dans la fi- xième & feptième propoftion , je ne parle que des corps ronds par- faits , ou ronds allongés , tels que la larme Batavique. Si l’on fait attuellement attention à la manière de former la larme Batavique , l'on ne pourra difconvenir : 1°. Qu'il n’y ait un vuide dans la larme, felon la quatrième & cinquième propoltion. Donc elle eft preffée par tout le poids de l’arhmofphère , felon la fixième ; donc felon la feptième , elle doit avoir beaucoup de folidité , puifqu’elle eft compofée de parties très. dures de leur na- ture : 2°. Que la larme Baravique eft un verre calciné felon la pre- micre; donc felon la feconde , les morceaux ne doivenr pas avoir de ttanchanr. Pour entendre lexplication des deux autres phénomènes , il faur faire attention que le vuide qui fe trouve dans la partie la plus épaifle de la larme , diminue à mefure qu'il approche de la partie la plus mince, devient infenfible, & enfin diminue au point de n'avoir point affez de diamètre pour recevoir une bulle d'air. Il eft conftanr que l'air extérieur entre avec impétuofité , puifque felon les troifième, quatrième & cinquième propoftions , il yaun vuide dans la larme; donc felon la fixième , l'air preffe de tout fon poids, donc il entrera avec impétuolité , puifqu’on lui a ouvert un paflage capable de le recevoir 3 done la larme doit éclater, puif- qu'elle ne rire la plus grande partie de fa folidité , que de la pref- lion de l'air extérieur qui n’a plus lieu. Il ne me refte plus à prouver autre chofe , finon que l'explofion ne doit pas être proportionnée à la folidité apparente de la larme 5 les particules de la larme font calcinces ; c'eftra-dire , défunies felon la première propoltion : Donc elles n’avoient de folidité, c'efl-ä-dire, d'union entr'elles : SUR: L'HIST. NATURELLE ET LES ARTS. 401 que par la preflion de l'air extérieur qui agifloit de tout fon poids à caufe du vuide. Le vuide étant rempli , l'air extérieur n’a plus d’aétion ; donc les particules de la larme font faciles à défunir. Il eft conftant que l’explofion n’eft prefque qu’en raifon de la réfiftance ; Donc elle ne doit pas être confidérable; donc elle ne doit pas être proportionnée à la foiidité apparente de la larme. Expériences. Si vous caflez l’extrémité de la larme que j'ai fuppofé fort allongée , vous n'avez point d’explofon, & ainfi des autres fractures , jufqu'à ce que vous foyez parvenu au point d’en faite une qui ouvre un orifice capable de laifler un pañlage à l'air extérieur , pour lors l'air entre avec impétuolité, & fait Cclarer la larme -Batavique. EE RE PR MP EM OAI. RE Sur Ja fufon de la lame d’une Epée dans le fourreau par la foudre; Par M. BERTHOLON, Prêtre de la Miffion , des Académies Royals des Stiences & Belles Lertres de Beziers, de Lyon, de Marfiille, de Nifmes, de Touloufe, & de la Société Royale des Sciences de Montpellier | Ge. L:s loix de la nature font générales, conftantes & invariables , puifqu’elles font l'ouvrage d’une fagefle infinie : les phénomènes nombreux qui éclarent de toutes parts dans ce vafte univers , quel- que diverfifiés qu’ils nous paroillent , font les effets des mêmes caufes , & encore ne font-ils produits qu'avec la moindre quantité d'action pofhble : c’eft donc fans raifon qu’on à fouvent cru qu'il y avoir des exceptions aux loix immuables de la Phyfique, dans le cours ordinaire des chofes : ce fentiment n’a pu être enfanté que par Vignorance ou la pareffe : il en coûte moins d’avoir recours à cet expédient trompeur , que d’avouer fon impéritie, ou de s'occuper de recherches toujours farigantes , & de rappeller à un même prin- cipe des effets qui paroiffent oppofés , fans l'être effectivement : ce Mémoire. donnera une preuve frappante de ee 05 OÙ ee: 402 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, On ef affuré depuis une fuite immémoriale de fiècles, que la foudre fond quelquefois la lame de l'épée, fans endommager le fourreau : quelques anciens en ont parlé, entr'autres Seneque. Muret, dans fes Notes fur le fecond Livre des Queftions naturelles de Seneque, dit qu'il fut témoin de cet effet merveilleux, chez le Car- dinal Hyppolite d’Eft. Mihi hoc comigit, ut fulmen in palatium ipfius decidens , ad mea ufque cubicula pervenerit : 1bi gladii , qui ad leilum urius ex famulis meis perdebat , mucronem ipfum ira colliquefecit | ut in globulum converterit , iles prorsis vapiné. Les anciens ne nous ont rien fourni de fatisfaifant fur l'explication de ce prodige naturel : ils imaginoient , felon le befoin & les cir- conftances , différentes efpèces de foudres qui pénétroient, ou confu- moient les divers corps, fuivant que les molécules qui la compo- foient , étoient plus ou moins fubeiles : jamais ils n’étoient embar- rallés , lorfqu'il s’agiffoit de multiplier les caufes, & de’ les faire agir différemment : leurs principes, comme la marière premiere qu'ils avoient imaginée , étoient fufceptibles de toutes les formes pofli- bles , fans être affervis à aucune : forme cujufeumque capax , nullius LeTLAX. Jufqu'au 1ègne de l’éle@ricité , les modernes n’ont pas été plus heureux : on peut voir dans tous les Livres de Phyfique, que les pores du fourreau étant fort grands, laiffent paller plus facilement les exhalaifons enflamimées du tonnerre ; qui n’attaquent que la lame dont les pores font étroits. Si quelquefois , ajoute-t’on, le fourreau et réduit en cendre, c'eft que les molécules de la foudre fe font trouvées plus groffes , & ne pouvant les pénétrer avec facilité ; elles lauront brülé. En lifanr cette prétendue explication , on ne peut s’empècher de dire que tout cela n’eft que des mots vuides de fens, meræ voces, pt@tercaque nihil... Ce langage , dont un Périparéricien pourroit à-peine être content, & qui fouvent a été tenu par des Philofophes modernes, décèle bien plutôt l’ignorance qu'il ne fert à la pallier. Les exhalaifons de la foudre font quelquefois fines & délites, quelquefois fes parties font groflières, relativement äu be- foin ; rien afflurément de plus commode : elles confumeront des corps , ou elles les laïfferont intacts, felon le fouhait du Phyficien : encore un pas de plus, & nous avions une fympathie, une anti- pathie , une antipériftafe & une qualité occulte, & une forme fubf- tantielle , & toutes ces belles quiddités dont l'empire n’a été décruie qu'après tant d'efforts du génie. Depuis que les phénomènes électriques ont été découverts & ap- profondis, on a tenté d'expliquer par cette voie , certe efpèce de merveille : les Phyficiens, dit-on, le produifenr tous les jours par le fecours de l'électricité artificielle : pour cet effet , 1l faut ferrer that MRC à Lib Lin NC er dx Lé dés SEL, HA, VHVRE SUR L’HIST. NATURELLE ET LES ARTS. 403 fortement deux plaques de verre , entre lefquelles une feuille d’or a été interpofée, & décharger la bouteille de Leyde avec l’excitareur placé convenablement; on verta alors une partie de la feuille d’or fondue , & même incruftée dans le verre , fans que celui-ci foit caflé ou altéré à l'extérieur : cette expérience nous préfente , ajoure-t'on, la. fufion d'un métal, tandis que le corps environnant n’eft au- cunement endommagé : telle eft l’explication que les Phyficiens élec- trifans ont donnée jufqu'ici; mais on peur légitimement en contefter Ja bonté. Expliquer un phénomène par un autre femblable , n’eft - ce pas plutôt multiplier la difficulté , que de la réfoudre ? Ne peut - on pas demander la raifon du dernier phénomène comme celle du premier ? Ne peut-on pas répliquer qu'il faut différens degrés de feu pour fondre un verre épais & une feuille d’or très-mince , que le moin- dre fouffle emporte , & que l'étincelle éle&rique, fufifante pour opé- rer la fufñon de cette légère feuille métallique, n’a pas affez d’ac- tivité & d'énergie pour fondre le verre > eu égard à la foiblefle de l'électricité artificielle ? au contraire , la flamme de la foudre qui a affez de force pour fondre la lame de l'épée, n’en manquera certai- nement pas pour produire cet effer fur le fourreau, matière bien plus combultible que l’acier : d’ailleurs , ne remarque - t'on pas quelques traces d’une lévère fufion ou altération dans les parties de la lame de verre, où l'or fe trouve mème incrufté ; conféquemment , l’exem- ple eft mal choifi : bien plus , quelquefois le fourreaten été confumé fans que la lame ait été fondue, & la bourfe a éré brûlée, l'argent ayant été souvé intact, phénomène dont l’explication n’a point en- core été tentée par les Philofophes Electriciens : nouvelle preuve : mais preuve péremptoire que cette explication eft inadmiflible , qu'elle eft infuffifante , qu'elle ef même oppofée à ce qui arrive quelquefois. Avant que d’expofer les caufes de ce phénomène, je ferai obfer- ver que, quelqu’étonnant qu’il paroiffe d’abord, & quoiqu'on l'air cru mal-à-propos unique dans fon efpèce , il eft femblable , qu'on y falle attention, à plufieurs. de ceux qui arrivent tous les jours, & qu'il n’en diffère qu'accidentellement : je n’en rapporterai qu'un peric nombre pour prouver. cette affertion. A Lurs, petite ville de la Haute - Provence , le ronnerre étant tombé, le 17 Août 1770, dans l’Eglife, fur un de mes amis & de mes compatriotes (M. Jacquet de Lyon) endommagea en trois en- droits deux clefs qui étoient dans la poche de fon habit, & on Y apperçut des marques de fufon : la chaleur de ces clefs étroit telle que, plus de trois quarts d'heures après la chûte de la foudre ,Onne pouvoit les tenir dans la main : cette chaleur ne brüloit pas la peau 404 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE; à l'inftant du ta; mais elle reembloir à celle d’un fer expofé aux rayons du foleil au plus fort de l'été ; aufli la poche ne fur-elle au- cunement brûlée : une des boucles de foulier de certe malheureufe perfonne, fur un peu fondue à la furface inférieure, précifément dans les parties où elle preffe le plus le foulier qui a été intact, ainf que la fuperfcie fupérieure de la boucle : onapperçut encore des marques de fufon à une boucle de rideau tiré devant un des autels de cette Eglife , fans que le fl avec lequel il étoir coufu , fûc brûle. Le tonnerre étant tombé à Clermont en Beauvoils, fur le châ- teau, le plomb des vitres coula en plufieurs endroits, fans que le feu prit au bois des chaflis, ( Mém. de l’Acad. Royale des Sciences , année 1764. pag, 450.) La foudre, en plus de vingr endroits que je pourrois citer en détail , fi je ne ir d'être top long, la fou- dre a très-fouvent fondu des fils de fer , fans calciner la pierre, ou fans enflammer le bois qu'ils traverfoienr , &c, &c, &c. Ces phé- nomènes font entièremenr femblables à celui de la fufñon de l’ar- gent & de la lame de l'épée , fans confumer ni la bourfe, ni le fourreau : notre obfervation doit faire difparoïître une partie : du merveilleux, $ montrer que ce phénomène eft plus commun qu’on ne penfe. Après avoir prouvé que ce phénomène n'avoir point encore été expliqué par les anciens ni par les modernes ; je vais en dévelop- per la véritable caufe ; conféquemment aux principes de Péleétriciré les plus certais, & notre explication paroïtra d'autant plus plau- fible , qu’on fera plus au fair des expériences électriques, & qu'on les aura plus approfondies. Je crois qu'il eft inutile de rappeller ici , encore moins de prouver , que le tonnerre eft un phénomène électrique, & par con- féquenr , que les phénomènes qui dépendent de ce météore, font des réfulrats d'électricité : cetre aflertion eft aufli bien prouvée qu’un dogme de Phyfque puiffe l'être : une fuire d'expériences brillantes & d’obfervations victorieufes , ont porté cetre vérité au plus haue période de certitude, & l'ignorance & la mauvaife foi n'ofent plus la contefter. Principes d’'Eleëlricite. Il eft démontré en Phyfique , 1°. Que l'expérience de Leyde où la commotion, ne fe fait fentir qu'aux êtres qui forment la chaîne, & que ceux qui font hors d'elle , quoiqu'ils la couchent, n'éprou- vent rien, lorfqu’ils n'en font pas partie. Pour le prouver , fuppofons le rableau magique ou la bouteille de Leyde chargée; que vingt perfonnes fe tenant routes par la main, SUR L'HIST. NATURELLE ET LES ARTS. 405 forment une chaîne non interrompue , & que la première touche le fond de la bouteille ; dès que la dernière perfonne de cette ligne touchera le crochet de la phiole, tout le monde fe fentira frappé d'un violent coup ; mais fi, la chaîne étant forinée , une perfonne touchoit d’une main, & même de deux, le bras , par exemple, d'une de celles qui font arrangées , aïnfi que nous l'avons dit, certe perfonne furnuméraire n’éprouveroit aucune commotion , ni toutes cellés qui feroienr placées de cette dernière façon ; qu’on ne perde pas de vue ce principe, auñli néceflaire pour l'intelligence de ce Mémoire , qu’il eft certain en lui-méme, Second Principe, La matière éleétrique fe porte de préférence aux corps métalliques plutôt qu'à ceux qui ne le font pas, lorfque les uns & les autres font dans la fphère de fon activité. Preuve. Pré- fentez à un conducteur chargé d'électricité, à une barre de fer, un tronçon non pointu de lame d’épée & un fourreau d'épée, que le premier foit à une diftance plus grande du conduéteur , & le fe- cond à une diftance moindre; l'érincelle électrique, malgré cette dif- férence , s’élancera fur le tronçon métallique, & point du tout fur le fourreau ; l'expérience décide hautement en faveur de cette vé- rité. Troifième Principe. Les métaux font encore les meilleurs conduc- teurs que l’on connoiffe. Une barre de fer, pour tranfmettre l’élec- tricité, vaut mieux que du bois , une pierre , du chanvré , &c. Il n'ya point de doute fur cet article. Quatrième Principe. Le fluide éleétrique n’agit que fur les corps qui font fournis à fon aétion , & dans les parties feulement de ces corps qu'elle atraque : voici la preuve de cette propoftion , qui n'a rappott qu'à l'expérience de Leyde. Que deux barres de fer foient placées dans la même direction , qu'il y ait cependant une diftance entre leurs deux extrémités les plus ‘proches ; que dans cer intervalle il y ait une troifième verge de ferÿqui foit perpendiculaire aux deux autres, & falle avec elles quatre angles droits ; il eft certain qu'il n'ÿ a que la partie qui correfpond à la furface des extrémités des deux premières barres , qui éprouve l'effet de la commotion. Subftituez le poignet à cette troifième barre, & vous ne fentirez la commotion qu’à la main, & non aux autres parties du corps qui en font éloignées. Cinquième prireipe. Le feu éleétrique, lorfqu’il eft réuni en abon- dance, ou lorfqu’il a acquis une grande énergie, comme, par exem- ple, dans la bouteille de Leyde , fond les métaux, mème dans pos Laboratoires, & avec Le fimple fecours de l'électricité artifi- cielle , ainf que nous l'avons déja dit. Sixième principe. La fufion, produite par l'explofon de l'électricité, 06 _ OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE; et comme tous les effets, proportionnelle à leurs caufes : ainf, l'étincelle métallique, qui fond une iévère feuille d'or entre deux verres, ne pourra point opérer ce changement fur une guinée, & la foudre , qui a fondu quelquefois de petits fils de fer, ne les a point endommagés lorfqu'ils avoient plus d’épailfeur. Je demande qu'on m'accorde lhypothèfe fuivante, qui eft très- poliible & très-naturelle : que la ‘foudre ; après être tombée & après avoir parcouru divers corps qui ont formé fa route ou une efpèce de chaîne , que la foudre arrive enfin près de quelque perfonne qui porte une épée, dont la pointe foit à une petite diftance d’une malle de fer , ou d’un corps quelconque bon conduéteur. Explication des Principes inconteflables que nous avons établis en fuivant le flambeau de l'expérience, 1! réfulte néceffairement que la matière électrique , étant parve- nue près de la poignée de l'épée, s’y portera préférablement, & de-là à la lame , plutôt qu'aux autres corps voifins & à la perfonne mème, par le fécond € le troifième principe. Mais la lame de l'épée eft dans fa chaîne électrique, & le fourreau n'y eft pas; conféquemment ; par le premier & le quatrième principe, la lame, & non le fourreau, éprouvera l'effet de la commorion. Or, l'effet ordinaire de la com- motion étant, par le cizquième principe, de fondre les métaux, la foudre qui, par elle-même, a une forte énergie, & qui eft accu- mulée fur la lame de l'épée, la fondra donc; & par le fxième prin- cipe, la fufon ne s’étendra pas quelquefois fur la poignée qui a beau- coup plus d’épaiffeur que la lame. Donc quelquefois la lame de l'é- pée feule fera fondue dans le fourreau , la poignée reftant dans toute fon intégrité. Enfin ; le fluide électrique, après avoir fondu cette lame dans le fourreau , de ce culot métallique s’élancera dans le corps voifin que nous avons fuppofé près de la pointe de l'épée; il fe dif fipera en continuant fa route, &c fe perdra dans la mafféÿ de la terre fans faire de ravage. Pour applanir routes les difficultés qui pourroient fe préfenter dans l’efprit de quelques perfonnes, & confirmer cette explication , nous ajourerons encore quelques mots. On conçoir bien que la lame de l'épée peut être fondue , mais il paroït plus difficile que le four- reau ne foit pas confumé en mêmg-tems. Voici comment on peut ailiper ce doute. Si le fourreau devoir être brülé, ce feroit par le moyen de la commotion ou explofon qui a fondu la lame , & à laquelle il par- ticiperoit également : or , il doit être exempt de combuftion, puif- qu'il ne compofe pas la chaîne électrique , & qu'ileft ae © ots A ALI d SUR L'HIST. NATURELLE ET LES ARTS. 407 hors d'elle. Pour le démontrer , fappofons qu'on faffe l'expérience - de Leyde fur deux perfonnes qui tiennent , chacune par une main, une extrémité d’une mème lame d'épée, de telle forte que le mi- lieu de la chaîne foit formé par l'épée, & que cette lame longue, par exemple , de trois pieds, enfile un fourreau percé de deux pieds de longueur feulement. Si on décharge la bouteille de Leyde, je dis que ce fourreau, étant hors de la chaîne, ne recevra aucunemenc la commotion. On peut porter les chofes jufqu’à l'évidence, en varianc l'expérience de cette manière : tout étant difpofé , ainf que nous l'avons prefcrit, qu’on Ôôte feulement le fourreau, & que l'épée étant toujours tenue à fes deux extrémités par les deux pre- mières perfonnes , trois autres perfonnes empoignent, avec leurs deux mains, la longueur de la lame , de forte que ces mains for- ment une efpèce de fourreau plus court que la lame, il eft de la dernière certitude que les deux premières perfonnes feulement ref- fentiront la commotion lorfqu'on déchargera la bouteille ; & les mains qui repréfentent le fourreau, ne reflentiront rien, le fluide électrique n’agiffant point fur elles, parce qu’elles font hors de la ‘ chaîne. Donc le fourreau ne doit point être brûlé, puifque la ma- tière électrique du tonnerre n’exerce point d'action fur lui, mais feulement fur routes les parties de la chaîne électrique, Le fluide éleétrique du tonnerre, érant entré par une extrémité de la lame, en fortira par l’autre, fans endommager le corps en- vironnant, ou le fourreau, qui eft hors de la chaîne , & qui de de plus, eft beaucoup moins conducteur. En fortant, il fe portera fur le corps qui fera le plus voifin de fon iffue, ou fur celui qui auta le plus de vertu conduétrice, ou fur celui qui réunira ces deux qualités. Dans l'hypothèfe faire plus haut, j'ai demandé que la pointe de l'épée für à une petite diftance d’une malle de fer, ou d'un corps ARAaEduE bon conduéteur ; parce que l’obfervation paroïît prouver que la foudre qui tombe fur un eonduéteur mince, fur un petit fil de fer, à la vérité, le fond affez facilement , foit qu'il foit con- tigu avec d’autres bons conducteurs, foit qu'il en foit féparé, mais elle ne liquéfie point un conducteur d’une mafle & d’une épailleur confidérable (par exemple, la lame d’une épée,) lorfque celui-ci fera contigu à un corps de mème nature que lui. Cet effet n'arrive que dans le cas où il ny a ni continuité, ni contiguité; alors, le fluide électrique, à caufe de la quantité furabondante de f1 ma- tière , s'accumule, autour de ce corps, fornre une athmofphère du feu le plus a&if qu'on connoiffle, & dont l'énergie eft en raifon du nombre des parties amoncelées ; ce qui ne peut manquer d’e- pérer une fulion, comme il confte par le cinquième principe. Tome VI, Part. II: 1775, Ggeg 40$ OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, Malgré le défaut de contiguité, la matière électrique continue fa route , en faifant éclater une étincelle dans l'intervalle; car ce n'eft jamais que dans des circonftances femblables que lécincelle brille , & c'eft toujours en s’élançant d’un corps dans un autre qui eft dif- tant du premier, qu’on voit le fluide électrique fous la forme d’une lame de feu, ainfi que le favent tons ceux qui ont feulement vu faire des expériences fur cette matière. Le phénomène qui nous a occupés jufqu'à préfent, peut éprou- ver des variations dans diverfes circonftances , & routes les combi- naifons dont il peur être fufceprible, fe réduifent néceffairement à quatre feulement : 1°. La foudre peut fondre la lame , fans produire aucune altération fur le fourreau : 2°. La foudre peut confumer le fourreau, fans fondre la lame : 3°. Elle peut opérer une fufon fur la lame de l'épée, & brûler en même-tems le fourreau : 4°. Enfin, elle ne produira aucun effet fur lun ni fur l’autre , ou altération dont elle fera caufe , fera très-peu de chofe. Le premier fair, quiet le plus difficile, a été expliqué jufqu'ici, d'une manière, je crois, fatisfaifante, & d’après des principes clairs & inconteftables. Le fecond peur tre ainfi conçu : fi quelquefois le fourreau a été brûlé , fans que la lame ait foufferc aucun dommage ; cet effet vient de ce que le degré d'électricité communiqué , a été trop foible pour fondre le métal. Dans des rems propres à l’éledricité , ou lorfque la bouteille de Leyde n’eft pas affez chargée , on ne réuflit pas à fondre la feuille d'or renfermée entre deux plaques de verre ; il faut pour cela une forte électricité; ainfi, lorfque ce ruiffeau de matière élec- trique qui tombe fur l'épée, eft trop foible pour opérer la fufon du métal , la lame n’éprouvera aucun changement , & fi le bout de l'épée fe trouve trop éloigné de tout autre conducteur , l’étin- celle ne s’élancera pas de- là fur quelqu’autre corps, puifqu'il n’y ena pas par l'hypothèfe , d’aflez proche, relativement à fon éner- gie actuelle. La vertu électrique qui ne tend qu’à fe communiquer , fe répan- dra fur le petit tuyau de fer qui termine la pointe du fourreau , & ne trouvant point d'autre corps ambiant à une jufte diftance , fe repliera en quelque forte en attaquant le fourreau qui , alors, de- viendra partie de la chaîne , pour fe communiquer enfuite au corps de l’homme ; mais quoique cette quantité donnée de matière élec- trique , foit infufhifante pour fondre la lame , élle pourra cepen- dant produire un effer plus petit, qui eft de brûler le fourreau par le fixième principe ; & de mème que l’explofion d’une bouteille de Leyde qui ne peut fondre l’excirateur , produit cependant la fufion d’une légère feuille d’or. Si l’on jette dans un feu qui ne foit pas SUR L’'HIST. NATURELLE ET LES ARTS. 409 trop ardent , une épée dans fon fourreau , la flamme qu'on fuppole foible & peu aétive, confumera le fourreau, & laiflera la lame dans fon entier. Troifièmement , lorfque le fourreau a été brûlé & la lame fon- due, on expliquera ce phénomène comme le premier & le fecond Ca que nous venons d'examiner , & dont il fait partie ; air rien de difficile. Quatrièmement enfin , fi la flamme életrique de la foudre à moins d’activiré que dans les circonftances précédentes , elle ne fera qu'échauffer le métal , fans confumer même l'enveloppe ou le four- reau. Nous avons vu plus haut, que des clefs trouvées dans la poche d'un homme foudroyé , étoient brûlantes , quoiqu’elles ne fuffent cependant point fondues dans la plus grande partie de leurs dimen- lions, l’étoffe de l’habit n'étant aucuneinenc brûlée ni échauffée : ce fait fe conçoit facilement par ce qui arrive tous les jours, & il réfulte de ce que le métal qui à plus de denfité, reçoit plus de degrés de chaleur , & les conferve plus long-tems. Sur un métal ex- pofé aux ardeurs du foleil en été, mettez une gaze ou une lépère étoffe , & vous verrez une différence bien notable dans l’intenfité de chaleur communiquée aux deux corps. Ainf, plus les loix de la nature & les principes de la faine Phy- fique feront étudiés & approfondis , mieux on connoîtra les vérita- bles reflorts de tant de phénomènes merveilleux qui brillent de toutes parts à nos yeux ; & ‘quelque mulripliés & quelque di- vers qu'ils foient , on les rapportera aux mêmes caufes. La nou- velle explication que nous avons donnée d’un phénomène des plus difficiles, en fournit un exemple; mais elle” ne peut plaire qu'à ceux qui pofsèdent bien toute la théorie électrique ; & il n’eft pas poflible que ceux qui n’en ont aucune idée » Où qui n'en ont qu'une ICgère teinture, ce qui eft à-peu-près la même chofe, puiffent la goûter. Ne comprenant point cette explication , ils s’écendront avec complaifance fur Ja ténuité plus où moins grande des molécules de la foudre & des pores de l'acier & du bois, &c. Ce jargon men- fonger n’en impofera pas moins à ceux qui le proférent , que ceux qui l’entendent : pourquoi le langage de l'erreur elt-il prefque tou- jours préféré à celui de l’aimable vérité 2 Lei] vQ [22 410 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, NEA A + ENEIEAN Ecrite a M. DAaRCET, Doëteur-Revent de la Faculté de Médecine de Paris, Profeffeur de Chymie an Collège Royal, par M. BERNIARD, M. Il femble, d’après la belle fuite d’Expériences que vous avez donnée fur le Diamant, que fa volatilifation ne devroit plus être un problème ; cependant, il fe trouve encore des Chymiftes & des Phyfi- ciens qui la révoquent en doute ; c’eft pourquoi j'ai été bien aife de faire l'expérience en Pologne , pour prouver que vous n'avez rien avancé qui ne fût muni du fceau de la vérité. Habirant une partie de la Pologne, où il n’eft pas aifé de fe pro- curer tous les Infirumens Chymiques, principalement les fourneaux, je m'en fuis conftruit moi-même, entrautres , un de fufion, d’après le modèle de celui du Laboratoire de M. Rouelle. Après y avoir fondu le granit , je ne doutai plus que je ne parvinffe à y vola- tilifer le diamant. Monfeur & Madame la Marquife Myszkowki, M. le Comre Poninski , M. le Comte Velfel, Grand Tréforier de la Couronne, ainfi que M. fon fils, & plufeurs autres perfonnes de diftinétion , ayant défiré que l'expérience fe fie en leur préfence , je foumis le fix de Septembre , cinq diamans à l’aétion du feu dans le labo- ratoire de M. le Marquis, en fon château de Mirow , de Îa manière fuivante. 1°, Je mis trois diamans, pefant enfemble un grain, dans un creufet de porcelaine , muni de fon couvercle à gorge rentrante, que vous donnâres avec des coupelles, à Madame la Marquife , avant notre départ de Paris : j'enfermai ce creufet dans un fecond creufer d'Allemagne , avec fon couvercle aufli à gorge rentrante , pour empècher que le charbon n’y entrât, & je le mis dans le milieu du fourneau fur un trépied de fer , que j'avois fait faire ex- près pour que mon creufer ne vacillt point lorfque j'ajouterois du charbon. 2°. Je mis deux autres diamans dans deux petites coupelles de pâte de porcelaine, que je plaçai fur le bord du fol de la chemi- née du même fourneau , & que je couvris avec une capfule de terre cuite pour éviter la communication du charbon , mais de manière ue l’on pouvoit aifément appercevoir la flamme telle que celle que préfenta le diamant que M. Roux , Profeffeur de Chymie , de la nr SUR L'HIST. NATURELLE ET LES ARTS, -4ut Faculté de Médecine, foumit à l'expérience , en préfence de M. le Lieutenant-Général de Police ; le fuccès répondit à mon attente. Après avoir ainfi difpofé le tout , je remplis mon fourneau de charbon ; à quatre heures après midi j'y mis le feu, en entrerénanc toujours le même degré : une heure après que le fourneau tiroir avec une rapidité fans évale, ayant-ouvert la -porte , j'apperçus que les deux diamans des coupelles avoient un éclat refplendiffant , & qu'ils étoienc léchés d’une perite flamme rrès-légère ; pour lors, j'engageai la compagnie de s'approcher , & elle fut autant furprife que farisfaire du phénomène. Ayant été engagé d’en retirer un dans cer état”, pour obferver le progrès qu’il avoir fait , je pris la coupelle avec des pin- cettes, je la mis fur un plateau de terre, & la portai au milieu du laboratoire; le diamant avoit perdu la moitié de fon volume & tour fon éclat , il écoir de la couleur du foufre Pa: l'ayant examiné à la loupe, on le voyoit tour égrifé & remplitd@ ftries : je l'ai gardé dans cet état, en entretenant toujours le feu au même degré : une heure après, le diamant de la feconde coupelle fut entièrement vo- latilifé , on n'apperçut que fa place ; pour lors, les fpeétateurs me demanderent d’ôter le creufer du feu, croyant que les trois dia- mans feroient auf volatilifés ; mais leur ayant obfervé la différence qu'il y avoit entre ceux qui étoient à l'air libre & ceux qui éroient renfermés dans ce double creufer , j'obtins encore une heure de feu, c'eft-à-dire, jufqu’à fepr heures , ce qui fit trois heures entières de feu : dès qu'il me fut pollible de regarder dans l’intérieur du four- neau , j'apperçus les deux creufets d'Allemagne fi bien unis enfem- le , qu’on ne pouvoit pas diftinguer les jointures , par une efpèce de frite d’une brique du fourneau qui avoit fondu : après qu'ils furent entièrement refroidis , je les callai avec beaucoup de précaution , pour ne pas endommager le creufer de porcelaine, que je trouvai en très-bon état, & parfaitement bien fermé : après l'avoir ouvert, en préfence de toute la compagnie , il ne fe trouva pas le moindre veftige des diamans , pas même la marque qu’ils laiflent ordinaire- ment dans les coupelles , de manière qu’en trois heures de tems , uatre diamans furent volatilifés, & le cinquième l’eûr été de même, 4 je l’avois laiflé avec les autres. Voilà, Monfeur, l’expolition exacte de l'expérience telle que je l’ai faite en préfence d’une brillante compagnie, qui offre fon témoignage, s’il eft néceffaire. RC \ 4iz2 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, CONSIDÉRATIONS OPTIQUES. X. MÉMOIRE(:) Sur les Lifières lmineufes. 23. Des corps très-menus , des aiguilles ou des épingles , fuffient pour laiffer démêler, dans les phénomènes qu’ils procurent , diverfes combinaifons des rayons qui font réfraétés, en fe tranfmettant par les athmofphères optiques, avec ceux qui, paffant tout près de ces athmofphères, ne + leur direction primitive. Mais on n'obtient des -réfulrats fuflifans qu'avec certaines précautions. Il faut choifir un beau jour. Le diamètre du trou, qui admet la lumière, doit être proportionné; trop de lumières, & Les vapeurs , répandues dans l'air, empêchent également que les apparences foient bien diftinétes. IL eft difficile ; d’ailleurs, de bien difcerner fur une ombre aufhi étroite que l’eft celle d’une épingle , les différences des diverfes bandes , plus ou moins éclairées, qui les partagent, & les lignes de féparation. J'ai cherché à éluder ces inconvéniens , & j'ai employé un procédé qui, rendant les effets très-fenfibles & bien marqués, permet qu'on fuive, fans craindre de fe méprendre, la marche & les déviations des divers rayons qui produifent les alter- natives d’inégales clartés qui fe manifeftent dans l'ombre. 24. La lumière a été admife dans la chambre obfcure par deux trous MN * (fig. 1), difpofés horifontalement à quatre lignes l’un de l’autre , y compris leurs diamètres qui étoient de + de ligne; enforte qu'ils repréfentoient les extrémités .du .diamèrre -horifontal d’un trou qui auroitieu 4 lignes de diamètre. Les. deux traits de lumière qu'ils laiffoient paffer , formoient deux gerbes MR7r, NQ7, qui fe croifoient en c , à énviron 34 pouces de diftance.des trous, où par conféquent leurs images , reçues fur un,carton, étoient con- tigués. En-deçà , elles étoienc féparées comme en Ffi& Gg. Au- delà, elles anticipoient l’une fur l’autre comme.en.Rr & Q39, y étant plus lumineufes dans la portion Qr, où elles coïncidoient , que dans celles qui ne reçevoient des rayons que d'une feule des deux gerbes. M Lt us à tar) Pi) 2) RSR RU PRO Pr (tr) Ce Mémoire eft une fuite du précédent, LE SUR L’'HIST. NATURELLE ET LES ARTS. 413 J'ai placé en-decà du point c de décuffation des deux gerbes, une bande de carte T,O, de deux lignes de largeur, de fiçon qu'elle interceproit une portion de chacune des deux gerbes, Il fe projet- toit fur le carton, placé derrière & rout près de cette bande de carte, une ombre fort noire, aux côtés de laquelle on ne diftinguoit point les lifières lumineufes, qui là, ne peuvent être qu’extrèmemenc étroites. ’ On éloigna enfuite le carton peu-à-peu, & à mefure qu'on l'é- loignoit, la bande noire de l'ombre , qui décroifloit fuccellivement de largeur , & fur les bords de laquelle commencèrent à fe mani- fefter les deux lifières lumineufes, dont la largeur, au contraire, alloit toujours en croiffant , acquit une pénombre , où bande claire, de chaque côté , routes les deux croiffantes auffi, ainfi que deux au- tres lifières lumineufes adoffées en dehors aux pénombres, mais moins fenfibles que les deux premières qui bordoient la portion noire de l’ombre. Cette apparence eft rendue dans la fig. 2, où A repréfente la portion noire de l'ombre ; B & D,les deux lifières lumineufes intérieures ; P & P, les deux pénombres; E F, les deux lifières extérieures, plus foibles que les deux autres B & D. La portion noire de l'ombre, qui décroifloit ainfi toujours, dif- parut enfin à un certain éloignement, & les deux lifières lumineufes intérieures fe réunirent en L. Cette feconde apparence eft repréfentée dans la fig. 3, où les deux pénombres P P renferment une lifière lu- mineufe, & font renfermées elles-mêmes entre les deux lifières lu- mineufes E EF. Enfin, en continuant à éloigner de plus en plus le carton, les deux pénombres , qui s’élargiffoient toujours d’autant , étoient fépa- rées par une bande claire qui s’élargifloit aufli de plus en plus, & fur laquelle, lorfqu’elle eut acquis une certaine largeur , les deux li- fières lumineufes commencèrent à fe féparer & à fe faire diftinguer du milieu de la bande qui étoir moins claire qu’elles. Voyez la fig. 4, où H repréfente la bande claire intermédiaire; D & B, les deux lifières lumineufes intérieures, alors tranfpofées ; P & P, les deux pénombres, ou bandes claires latérales; E & F, les deux lifières lu- mineufes extérieures. 25. Il eft aifé de rendre raifon de ces apparences, d’après les no- tions qui ont été expofées ci-devant , & en faifant attention , qu’ou- tre les rayons venus direétement du foleil, & raflemblés dans les deux gerbes MRr, NQ3, il en entre encore beaucoup d’autres par les trous MN, réfléchis fur l’air extérieur, & qui fe dirigent en tous fens. Le corps T,O étant moins large que l'intervalle M N , les rayons de la gerbe MR 7 qui pallent vers T dans fon athmofphère, doi- US 14 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE; vent aller croifer au-delà en un point quelconque L; ceux de la gerbe N Q 3 qui y pallent vers O. Chacune de ces divifions de rayons s'y réfracte, & par conféquent chacune d’elles eft propre à produire des lifières lumineufes, en tombant fur des endroits aufli éclairés par les rayons non infléchis des mêmes gerbes qui pallent en dehors de lathmofphère. De plus, il eft évident qu'il ne peut parvenir aucun rayon dans l’efpace T,O,L.Er dès-lors , on voit comment l’om- bre décroît à de plus grandes diftances du corps diffringent jufqu’au point L, & comment elle ne peur manquer d’être par-tout bordée de deux lifières lumineufes. Si on tire à préfent un ligne N, T,S, du trou N, laquelle repré- fente un rayon réfléchi fur l'air extérieur qui rafe la furface de l’ath- mofphère de ce corps d’un côté, & une autre ligne M,O, V, du trou M, laquelle repréfente un autre pareil rayon qui la rafe du côté op- pofé, on verra que l'efpace T,S ,L, qui reçoit des rayons introduits ar le trou M, n’en recoit aucun du trou N, & qu’en revanche , l'efpace L,O,V, qui reçoit les rayons introduits par le trou N, n'en reçoit Point du trou M. Ces deux efpaces qui font éclairés à un certain point , le font donc moins que les efpaces qui font en dehors de part & d'autre, lefquels peuvent recevoir des rayons parvenus par l'un & l’autre trou. Ce font ces efpaces foiblement éclairés qui, fe projetrant fur le carton de part & d'autre de l’ombre noire, lui pro- curent, (fig. 2) deux pénombres qui n'en font féparées que par les deux lifières lumineufes intérieures, & qui doivent être bordées elles-mêmes par d’autres Irfières lamineufes produires, l’une par les rayons qui , du trou N, vont fe réfracter dans l’athmofphère du corps diffringent vers T , & l’autre par ceux qui, du trou M, vont fe réfracter dans fon athmofphère vers O. Er comme ces rayons rer- minent toujours les efpaces S, T,L, L,O, V, les lifières lumineufes qu'ils produifent , fe rencontrent füremenc fur les bords extérieurs des pénombres , & elles fe laient moins bien diftinguer que les lifières lumineufes intérieures, parce que les rayons qui les produi- fent , ne font pas de ceux qui font partie des gerbes MRr, NQ3, venus directement du foleil, mais de. ceux dont j'ai parlé ci-devant qui, réfléchis dans l'air extérieur , s’introduifent aufh dans la cham- bre obfcure. Les rayons, qui forment les lifières lumineufes intérieures , fe croifent en L. Il en réfulre, que fur la ligne S, L, V, la portion noire (fig. 3), de l'ombre doit s'évanouir, & qu'une lifière lumi- neufe, compofée des deux intérieures réunies, doit occuper le mi- lieu de l'apparence , & être accompagnée des deux pénombres tou- iours croiffantes, chacune avec fa lifière Llumineufe extérieure. Confdérons à préfenr que l'efpace D recoit des rayons de chacun " SUR L'HIST. NATURELLE ET LES ARTS. 415 chacun des trous M, N, & que l’efpace D, L,Ss, en reçoit du premier, & non du fecond, tandis que l’efpace B,L, V v, en recoit du fecond , & non du premier. Voilà donc un efpace bien éclairé entre deux autres D, L,Ss; B,L, V v, qui le font beaucoup moins; donc par-tout, au-delà du point L, on doit avoir l'apparence d’une bande claire, ( fig. 4) féparée par fes lifières lumineufes de deux pénombres bor- dées chacune extérieurement d’une autre lifière lumineufe ; & tou- tes ces différentes parties de l'apparence doivent acquérir plus de largeur à de plus grandes diftances du point L. On voir, par cette expérience , comment un corps diffringent , même très- menu, expofé à une diftance nvenable d’un trou, dont le diamètre excède à un certain point le fien, eft dans le cas que les rayons direéts (N,A;Na(:), qui rafent fon athmofphère, foient convergens, & que la portion la plus obfcure de fon ombre , décroille , devienne nulle, & foit remplacée par une bande éclairée. 26. La bande intermédiaire de cette apparence , d’abord noire, enfuire éclaircie conjointemement avec les bandes claires latérales, de je viens d’appeller pénombres, c’eft-à-dire , tout ce qui eft ren- ermé entre les deux lifières lumineufes extérieures, eft, felon la definition qui en a été donnée ci-devant , l'ombre du corps diffrin- gent T,O, puifque c’eft l’efpace auquel ce corps dérobe plus ou moins de rayons provenans par les trous M & N. 27. Pour examiner plus diftinétement aufli ce qui s'opère dans les circonftances du N°. 18 du Mémoire précédent, j'ai placé, en- decà du pointe, fig. $ , vis-à-vis les deux trous M, N , ( tout d’ailleurs étant de même que dans l'expérience du N°. 24) un corps diffrin- gent T, G, d’une largeur qui approchoit fort d'être égale à celle de l'intervalle M , N. L'apparence, reçue tout près du corps T,G, offroit une fimple ombre noire; reçue plus loin, elle offroit une bande noire bordée par des lifières lumineufes , au dehors defquelles s’éren- doient deux pénombres bordées aufli extérieurement , chacune de fa lifière lumineufe moins diftinéte que les intérieures. Quelque loin qu'on portât je carton , la bande noïre confervoit toujours la même largeur , quoique les pénombres devinffent toujours d’autant plus larges que le carton étoit plus éloigné. Ce réfultat dépend évidem- ment de ce qu’alors les rayons qui fe réfraétent dans l’athmofphère du corps diffringent en T, & en G, & entre lefquels eft compris l'efpace B, T,G, D, où il ne parvient aucun rayon ni du trou M, ni du trou N, fuivenc des direétions T,B; G , D, parallèles entr'elles ; & en ce que les efpaces S, T,B; V,G, D, renfermés , l’un entre les rayons N,T,S, M,T,B, qui font divergens au-delà du point T , & oo , (1) Voyez le Numéro 19 & la figure $ du Mémoire précédent. Tome VI, Parc. II, 1775. Hhh 416 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, l’autre entre lesrayons M, G, V;,N,G, D, auf divergens au-delà du point G, ne font éclairés chacun que par les rayons admis par un feul des deux trous, à l’exclufion de ceux qui le font par l’autre. 28. Enfin , pour obtenir de pareils éclairciffemens par rapport aux circonftances du N° 21 du Mémoire précédent , j'ai placé vis-à-vis des trous M & N, fig. 6, en-decà du point C de décuf- fation des deux gerbes de lumière, un corps T , 1 , plus large que l'in tervalle M, N, le carton étant mis tout près du corps F, I, pour en re- cevoir l'ombre, elle parut noïre dans toute fon étendue. Enfuite , à mefure qu'on éloignoit le carton , les deux lifières lumineufes fe manifeftèrent comme ci-devant , aux bords de la bande noire & au- delà deux pénombres ou bandes claires, accompagnées aufli exté- rieurement de deux autres lifières lumineufes, & toutes ces diffé- rentes portions de lombre alloient toujours en augmentant de lar- geur, à de plus grandes diftances du corps diffringent , ce qui s’ac+ corde avec ce que la figure nous montre, que l’efpace B,T,1, D, où il ne parvient aucun rayon, & les efpaces S,T,B; V,1,D, fur chacun defquels il n’en aborde que d’un feul des deux trous , font compris tous trois entre des rayons qui divergent entre eux. 29. La bande claire intermédiaire de la projection de l'ombre mentionnée au N° 19 du Mémoire précédent & 24 de celui-ci, & que MM. Maraldi & de Mairan avoient déja obfervée, (je l’ai diftinguée) fur l’ombre d’une épingle , conjointement avec les deux bandes claires latérales dont elle étoit féparée par deux bandes obfcures , c'eft-à dire, allez différemment , que dans l’expérience du N° 24. où l'apparence ne confifte qu'en trois bandes. Un léger changement dans le procédé de certe expérience , m’a procuré les cinq bandes d’inégales teintes , difpofées comme je viens de le dire , & m’a ap- pris d’où provenoit l’abfence des deux bandes obfcures dans l'expé- rience du N° 24. Dans ie milieu de l'intervalle qui fépare les deux trous M, N , fig. 7. deftinés à admettre les deux gerbes M, R7; N ,Q3, j'en ai percé une autre avec la pointe d’une épingle, qui a admis une troifième gerbe P,X,Y, & j'ai placé au-delà du point D de décuffation des gerbes, le corps T,O de deux lignes de largeur , de façon que des rayons de la gerbe P,X,Y, paffaflent tant à la droite qu’à la gauche de ce corps vers O & T. & que de la gerbe N,Q39, il ne s’en tranfmit qu'à la droite vers ©. Le carton étant à quelque diftance du corps T,O au- delà du point L , où les rayons partis du trou N, & réfractés dans fon arh- mofphère en O , croifent ceux qui, partis du ou M, y font ré- fractés en T, j'ai eu l'apparence rendue par la figure 8. c’eft-à-dire, une bande claire H au milieu, & de part & d'autre dans l’ordre, fuivant Les deux lifières lumineufes B, D qui la bordent; deux bandes SUR L’HIST. NATURELLE ET LES ARTS. 417 obfcures 1,1; deux lifières lumineufes C,G ; deux bandes claires P,P; & enfin deux autres lifières lumineufes E , F, qui terminoient l'apparence. On voir qu'ici, comme dans l'expérience du N° 24 l'efpace D,L,B,eft éclairé à la fois par les rayons prbvenus des Jeux trous M, N ; & que les efpaces D, L, T,K, B; L,O, 1, ne le font chacun que par des rayons admis par un feul des trois trous, tandis que l’ef- pace S,T,K, left à la fois par des rayons introduits par les trous M &P, & que l'efpace V,O,1, left à la fois aufli par des rayons tranfmis par les trous N & P. Les endroits du carton où fe projet- tent les efpaces D,K; B,1, doivent donc être néceflairement plus obf- curs que les endroits où fe projettent l’efpace intermédiaire DB & les efpaces extérieures K,S ; [, V. À l'égard des lifières lumineufes qui féparent toutes ces bandes, on voit encore par la figure, que par-tout elles fe rencontrent dans la direction des rayons qui, partis des trous M ,P,N , fe réfraétenc “dans l’athmofphère des corps diffringens vers T & vers O. Il eft fenfble que fi le carton étroit placé entre le corps T,O, & le point L, l'apparence moins étendue que la précédente, n’en diffé- reroit qu'en ce que la bande intermédiaire feroit noire. 30. Les premières expériences que j'ai faites fur la bande claire intermédiaire de l'ombre , en y employant une épingle, m'avoienr fourni des obfervations , dont la décuffation des rayons à la pointe de l’efpace T,O,L, donne l'explication. C'en eft une que la bande claire intermédiaire n’a lieu que quand le carton eft à une certaine diftance de l’épingle , & qu’elle s’élargic enfuite à proportion qu’on éloigne davantage le carton. Ce n’elt effectivement qu’au point L que fe fair la décuffarion des rayons provenus des trous M & N , de laquelle dépend la production de cette apparence, & au-delà du point L, l’efpace qu’ils embraffent après s'être croifés , va roujours en s’élargiffanr. 31. C'en eft un autre que de deux épingles d’inégal diamètre, la plus menue eft celle dont fur le carton l’ombre commence à s’éclair- cit dans fon milieu, à une moindre diftance de l’épingle : par exemple ; ayant placé à 36 pouces de diftance du trou , une épin- gle d’un tiers de ligne de diamètre & un camion , l'ombre du ca- mion parut claire dans {on milieu , lorfque le carton où on la re- cevoit n’en étoit éloigné que de 26 pouces ; il n’en fur pas de même de l'ombre de la groffe épingle , dont il fallut éloigner le carton d'environ 48 pouces, pour lui procurer la bande claire intermédiaire; & enfuite comparant, à mefure qu'on éloignoit de plus en plus le carton , les portions intermédiaires illuminées des deux épingles , je jÜgeai toujours celle du camion quadruple de celle de la groffe épingle : il eft aifé de reconnoître par la figure que , ‘ le corps T,O Hhh 2 _ 418 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, étoit moins large , les rayons partis des points M & N qui tra- verfent ou qui rafent fon athmofphère , & vont fe croifer vers L, où commence à fe manifefter la bande claire intermédiaire fur fon ombre, fe croiferoient en des points plus rapprochés du corps T, O, que ne left le point L, & de plus qu'à diftances égales du corps dif- fringent, les rayons qui, après avoir paflé à côté du corps plus menu , fe feroient croifés moins loin que le point L, embrafleroient toujours un plus grand efpace que ceux qui ayant paflé à côté du corps T,O, ne fe croifent qu’au point L. 32. Les réfulrats de l'expérience des trois gerbes au N°27 , aident à conftater de la façon la plus fenfble , ce qu’on fait que de chacun des points qui compofent l'étendue d’une ouverture quelconque, par laquelle la lumière s’introduit dans la chambre obfcure , il part une gerbe de lumière, & que toutes ces gerbes donc les axes font di- vergens, mais dont les rayons des unes croifent les rayons des autres, font fufcepribles de former autant d'images folaires qui doivent anticiper les unes fur les autres, & par leur réunion en compofer une plus éclatante que ne le feroit chacune d'elles à part. Ces gerbes de lumière, lorfqu'on expofe dans leur direction un corps cylindrique , doivent donc produire chacune fur le carton l'ombre de ce corps bordé de part & d'autre par des lifières lumineufes. Cependant toutes ces ombres & ces lifières lumineufes étant nécef- fairèment projerrées prefqu’en entier les unes fur les autres, on n'étant que peu développées fur le carton tenu à une médiocre diftance du corps diffringent , il n’en peut réfulter qu’une ombre commune & obfcure , où on ne peut diftinouer l’effer des rayons refractés dans fon athmofphère , c’eft-à-dire , les lifières lumineufes, ni l’effer des rayons non inflechis qui rafent cette athmofphère , c’eft-à-dire, les bandes claires, que vers les bords de l'ombre com- mune, où ces rayons font plus dégagés d'avec les ombres particulières qui fe débordent mutuellement. Mais comme à de plus grandes diftances du corps diffringent, toutes ces ombres particulières, accompagnées de leurs lifières lu- mineufes, fe débordent de plus en plus, & que par ce développe- ment il ne peut manquer d'arriver que les gerbes latérales de rayons qui paflent en dehors de l’athmofphère, s'étendent fur les bords de l'ombre, & que quelques-unes de celles des lifières lumineufes de ces ombres particulières, qui font tournées du côté de la malle d'ombre, ne viennent à fe rencontrer enfemble fur cet axe, le milieu de l'apparence , tracée fur le carton placé à cette diftance , doit être plus claire que les portions latérales contigués, On peut imaginer de plus, que par ce développement plus é6m- pler , diverfes lilières lumineufes de ces ombres particulières peu (LE A F Ü < SUR L'HIST. NATURELLE ET LES ARTS. 419 vent venir à fe rencontrer aufli enfemble fur des lignes qui fe di- rigent du trou au carton, autres que l'axe de la mafle d'ombre, & que certaines parties des ombres particulières peuvent devenir plus en prife que d’autres aux rayons non infléchis, comme dans l’expé- rience du n°. 27. Enforte que fur le carton , placé au-delà, il y aura des portions claires autres que celles du milieu de l'apparence entremêlces avec des portions obfcures; & cela donne une idée de la façon dont peuvent être produites toutes ces apparences fi diver- fement entrecoupées par des bandes claires & des bandes obfcures, dont il eft fait mention dans la feconde partie des expériences op- tiques de M. Maraldi (1), & dont les différences paroiffent dé- pendre de la diverfité des rapports du diamètre du trou aux diamètres des corps qu’il y a employés. 33. Selon les obfervarions recueillies ou indiauées dans ce Mé- moire , les lifières lumineufes fe rencontrent précifément aux endroits où doivent aborder les rayons qui fe font réfraétés dans les athmof- phères des corps , dont elles décorent l’ombre en fe plaçant immc- diatement fur fes confins. Ceflant de fe manifefter, fi une plus grande quantité de rayons étrangers les éclipfe, elles ne laiflenc pas d’être quelquefois fenfibles en plein foleil ; grifes ou bleuâtres, quand elles ne fonc dues qu'aux feuls rayons réfraétés dans les athmofphères optiques ; elles acquièrent une blancheur affez écla- tante , lorfqu’on n’intercepre pas les rayons non infléchis qui palfent en dehors de ces athmofphères, & les rafent de plus près, ce qui indique , que dans ce dernier état, leur teinte eft due au concours de ces rayons non infléchis & des autres rayons réfractés. ET DR ET ET (1) Mém. Acad. 1723, page 124, & fuivantes. SERRE ERR AT À pour le huitième Mémoire des Confidérations Optiques. Page. Ligne. 2335 8, à l'air; lifez, de l'air. 2335 24 & rayons, l'fez, des rayons, dem, 28, cavence, lifez, carence, Idem, Idem, après blanche, au lieu du poinr, mettez une virgule. Idem, 30, après pollible, au lieu de la virgule ; mettez un pointe ERRAT A pour le neuvième Mémoire. Page. Ligne, 1373 16, au lieu de elles étoient, lifez, elles foient. Jiem, 24, au lieu de entières, lifez, au lieu. Idem, 43, après le mor figure, ajoutez, 4. Idem, Idem, au lieu de repréfentanc, Lfez, repréfentent. 138» 17, au lieu de continuëés, lifez , contenues, Idem, 27, au lieu de douze, Lifez, deux. 1393 14, au lieu de liaifons, lfez, liñères. 145, 37 après le mor augmenter , ajoutez, & elle augmente. 1452 12» au lieu de & qu'elle-même, dfez, & qui elle-même, 410 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE; DEL S SRE RM AELIO NN SUR LE MOUVEMENT ET LES ÉLÉMENS De Etqhedtor Moi pt SEA ET RAGE Par M. Comus. Principes effentiels pour expliquer les Phénomènes connus fous le nom d’Electriques. Le mot Electricité ne préfente pas à l'imagination la nature du fluide univerfel , principe du mouvement, différemment modiñé par Ja nature du corps qu'il pénètre, & fur lequel il agit. Beaucoup de perfonnes prennent le mor Electricité pour la caufe , quoiqu'il ne fignifie que l’effer. Les remarques que plnfieurs Savans ont faites de l'action de ce Auide igné fur différens corps, n’ont point été rendtres avec la netteté que la Phyfique exige : le mot Electricité étoit propre, lorfqu'on .ne connoiffoit qu’une feule propriété dans la fubftance à laquelle on avoit donné ce nom ; mais préfentement qu’on a remarqué dans plufieurs corps la mème propriété qu'à l’ambre, ainfi que nombre d’effers finguliers du fluide univerfel fur différens corps. Il faut bien diftinguer les effets, le méchanifme qui les met en évidence , ainfi que l'agent qui les produit : en procédant de cette façon, les Etudians auront des idées netres fur cette partie de Phy- fique, & ne confondront pas l'effet avec la caufe , ce qu’on a fait jufqu’à préfent. Les phénomènes que la matière préfente , effet des modifications du fluide univerfel , fuivant les combinaifons des différentes fubftances des compofés qu’il pénètre , ne doivent pas faire enfanter plufieurs fluides ou agens , comme les Philofophes lont fait jufqu'à préfent : les phénomènes magnétiques ont fair imaginer un fluide magnétique, les électriques un fluide électrique , en forte que plus nous aurons d’obfervations, & plus le fyftème Phylique fera embrouillé, & d’obfer- vations en obfervations , nous retomberons dans les qualités occultes. Ce n’eft pas dans un fluide particulier qu'il faut chercher la caufe du magnétifme , c'eft dans le compofé & la nature de l'aimant & du fer , qu'il faut chercher l'explication des phénomènes qu'il préfente. Le fluide univerfel, agit autrement fur ces corps que fur les autres : il les pénètre différemment , par la nature de leur \L4i à EN ÊEé Lis SUR L'HIST. NATURELLE ET LES ARTS. 411 compofé & la difpoftion de leurs pores : ceux qui pourront expliquer comment le fluide univerfel pénètre l’aimant , rendront compte facilement de la direction , de la déclinaifon , de l'attraction & répulfon des pôles, & de la communication. L’éleétriciré agiffant fur tous les êtres , 1l eft effenriel de remonter, autant que nous pouvons , aux premiers principes des corps , pour rendre compte de ce fluide. Il eft impoflible d’en avoir une connoiffance parfaite, fans connoître le mouvement, le corps premier de la matière, les femences univerfelles des êtres , l'acte abfolu de ce mouvement fur trous les corps , de quelle façon il met en jeu ces femences univerfelles, comment il les entretient & les détruit: ces connoïffances préliminaires conduiront non-feulement à une connoiffance parfaite de l’éleétricité, mais aufli aux principes géné- raux de la faine Phyfique. L'étude de certe fcience n’eft difhcile que par la multiplicité des termes & des expériences imaginées prefque toutes pour foutenir des fyftèmes qui fe font évanouis : les expé- riences exiftantes , chacun s’en empare , & les explique comme il l'entend : les Etudians n’apprennent tout au-plus que l’hiftoire de la Phyfique , les difputes des différens Auteurs & les décifions de leurs Maitres, bonnes ou mauvaifes. La nature eft fimple dans toutes fes produétions , la fcience qui en traite doit être aufli fimple. Cette fage nature nous offre affez de faits pour établir un fyftème fans imaginer d'expérience. Le monde eft compofé de deux fubftances très - diftinétes ; l’une fluide , à qui je donne le nom de fluide igné , agent univerfel , principe de tout mouvement ; l’autre, d’atômes , ou premiers corps {olides de la marière, corps indivifibles , inaltérables & impénétrables au fluide igné. Ces corps font les matériaux qui compofent les prin- cipes principiés des êtres que le monde renferme ; ils font puremenr pailifs , indifférens au mouvement & repos apparent , ainfi qu'à former une fubitance ou une autre. Toutes ces fubftances périffent; il ne refte après leur deftruction, que les feconds principes principiés, qui eux-mêmes fe réduifent en atômes. Le monde ne doit fa durée qu'à l'incorruptibilité de ces premiers corps. L'autre fubftance ou fluide igné , remplit l'efpace infini , & forme un plein de contiguité, dans lequel rous les mondes fonc plonvés, comme plufieurs boules de pefanteur différente , fonc plongées dans une liqueur , à différentes diftances l’une de l’autre , en raifon de leur pefanreur fpécifique. Ce fluide exerce , fur tous les corps, une force de preflion qui contraint les parties détachées d’un rour de fe réunir, comme la pierre, lancée dans l'air, eft forcée de fe réunir à la terre. La tendance qu'a ce fluide à fe réunir, eft la caufe de la deftruétion des étres. 412 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE); La création de vous les grands corps ftellaires, planetaires, ainfi que tous les êtres de notre monde , a commencé par un point in- perceptible, centre de la preflion du fluide environnant. Vers ce point , il s’eft accumulé plufieurs des premiers corps de la matière; qui, ne pouvant être pénétrés, ont cédé à la preflion du fluide en- vironnant , & par fucceflion de tems & de mouvement, ont formé des molécules, des corps phyfiques, des mondes, des femences & des êtres qui, après un laps de tems, ont produit & perpetué par différentes voies , pour un tems, les variations & l’immenfité d'êtres qui nous occupent. Ce travail nous paroît impoflible par le peu de tems que nous vivons, en proportion de celui que la Nature met à produire les premiers êtres, leur mutation d’un règne en l'autre, ainfi que leur rétrogradation, & le peu d’obfervations que nous avons dans ce genre. Une fomme d’obfervations acquifes , fe perd roujours, au bout d’un tems, par des révolutions & bouleverfemens qui dé- ruifent la partie du monde inftruite. Le fluide occupe , dans la mafle qu'il a réunie , toutes les interf- tices des premiers corps qui la compofent. Ce fluide, renfermé dans ces corps, y établit l'harmonie, la circulation vitale ou fenfitive, fuivanc l’organifation du corps. C’eft lui qui forme leur athmofphère, athmofphère qui 2git du centre à la circonférence. Chaque corps or- ganifé forme un petit monde, qui a fa force centrifuge, qui réfifte tant qu'elle peut à la force centripère du fluide environnant , à la- quelle elle eft forcée de céder, Ce n’eft qu’à l'équilibre parfait de ces deux forces , que les êtres doivent leur durée. L'homme qui fait de quelle façon ces deux forces agiflent , & comment on peut maintenir l'équilibre, en peut tirer de grands avantages pour Ja fanté ; avantages qui feuls peuvent dédommager du travail pénible de la Philofophie abftraite. Les corps ftellaires , planétaires, ne doivent leur confervation , leur fituation & leur éloignement refpectif, immuable , qu’au plein de contiguité du fluide igné & à leur athmofphère. Ce fluide foutient tous ces grands corps , & les empèche de s'approcher en raïfon de leur male, comme j'ai dit ci-devant; une liqueur contient plufieurs corps de différentes pefanteurs, à des diftances proportionnées à leur pefanteur fpéciñique , conformément aux loix de l'hydroftarique. Si on enlève l’eau du vafe, tous ces corps fe réuniront; ce qui arri- veroit à tous les grands corps, fon pouvoit annihiler le fluide dans lequel ils font plongées. Les exalaifons , les vapeurs, Îles émanarions les plus déliées de la terre & des êtres, forment en partie ce que nous appellons air. Ces particules, folides & fluides, ne font enlevées de la terre que par le Auide igné qui forme fon athmofphère & qui agit du çentre à la À ds ton t-n — Gé ne me "jo. re nt ne mt _ SUR L'HIST. NATURELLE ET LES ARTS, 41; a circonférence. Cerre force centrifuge , pouffe ces corps à la diftance poflible , lieu feul où fe font les premières & parfaites combinaifons des élémens des mixtes. Plufieurs molécules fimilaires s’'uniffent & forment une molécule plus forte qui, ayant plus de poids, s'approche plus près du cen- tre-du mouvement ; dans ce lieu, il fe fair une nouvelle afimila- tion, ce qui forme un corps qui eft forcé, en raifon de fa pefan- teur , de retomber vers la terre , avec une portion de fluide igné emprifonné entre ces molécules. C’eft à cetre afcenfion & defcenfion des premiers corps, & à leur intime union avec le fluide igné , que nous devons la fertilité des campagnes, ainfi que nombre de pro ductions & d’augmentarions des êtres. L'air ne doit donc fa forination , fon élévation, qu'à la force centrifuge qui l'éloigne de la terre ; la force centrifuge n’eft due qu'au mouvement de rotation, la force centripère qu’au plein de contiguité du fluide igné, la chûte des corps. à la fection du plein de conriguité, par un corps qui fait milieu entre les deux fegmens inégaux de ce plein. j Les premiers corps de la nature s’uniffent dans leur choc, parce qu'ils n'ont point de réaétion. Lorfque par un mouvement uniforme, ils viennent à fe rencontrer direétement dans l’efpace , ils font for- cés de s'unir. Alors le fluide igné, ne pouvant pénétrer ces COIPS; il exerce toute fa force fur eux. Si les atômes faifoient reffort, ja- mais il ne s’en pourroit lier pour former une molécule. Si ces pre miers corps n'étoient pleins, il ne pourroit y avoir plufieurs mou- vemens. Ce n'eft que par l’impénétrabilité de ces premiers corps, que la matière réfifte à un mouvement, pour céder à un autre. Tous ces différens mouvemens contribuent à la formation, à l’entretien & à la deftruétion des compofés. Si les atômes pouvoient fe divifer à l'infini, nous n’aurions qu’un feul mouvement de difperfon. Les petits corps ne font enlevés de la terre & n’y retombent , que par leur impénétrabilité, & conféquemment font foumis à l’aétion, qu'un Auide à fur un corps qu'il ne peut pénétrer. Le fluide igné , après avoir féjourné long-tems entre les premiers corps de la matière des molécules & des compofés, a acquis une efpèce de folidité, & a changé prefque de nature. Ce fluide, dans cet état, tient le milieu entre les premiers corps & le fluide envi- ronnant ; C'eft ce qui compofe le gluten & le ciment des compo- fés. Les verres calcaires doivent leur origine à cet hermaphrodite; aufli voyons nous les terres calcaires & alkalines poreufes. Elles con- fervent & retiennent l’arrangement qu’elles avoient autour des pre- miers corps qui les ont enlevées à leur tout. C’eft en paffant d’un règne Tome VI, Pare. IL, 3775, AT . 424 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, à l’autre, & en rétrogradant, que ce Auide a acquis le plus où moins de folidité que nous lui remarquons. C'eft affez differter , pour donner une idée du fluide igné & des premiers corps de la matière. Examinons préfentement quels fonc ces premiers corps ; analyfons ceux que nos fens nous manifeftent , & connoiffons ceux qui pofsèdent les qualités que ces premiers corps doivent avoir. Ces premiers corps doivent être indivifibles, inaltérables , au feu & à vous les menftrues poffibles, fans goût, fans odeur , diaphanes & de forme ronde. Je ne vois dans toutes les rerres que la vitrifiable qui puiffe être un compofé de ces premiers corps , & qui renferme toutes ces qualités. Port, dans fa Lithogéognofie, en parlant des terres vicrifiables , tome Î, pag. 143 , chap. 4. dit : » les efpèces de terre & de pierre » primitives fimples , font les rerres & pierres vitrifiables : ce n'eft » pas que je prérende qu’elles fe vitrifient dans le feu par elles- » mêmes & fans aucune addition; j'avoue au contraire, qu'aucune » de ces terres, quoique très-pure , ne s'eft jamais vitrifiée toure » feule, même dans un feu des plus violens ; mais je les appelle » vitrifiables, parce qu'on s’en fert ordinairement pour faire du verre. » Il divife ces rerres vitrifiables en deux efpèces ; favoir , en terres » fimples & en terres compofées. Les rerres fimples , font tous »les fables, fins & gros , blancs & différemment colorés , le » fable des fources que Vanhelmont appelle terre primitive, les pier- » res fableufes, les pierres des champs & celles dont on fe ferr » pour paver, les cailloux blancs & ceux qui font différemment co- » lorés, les pierres à fufl & les pierres cornées, le quartz, le cryflal, » l'agathe , le porphyre, le jafpe , la calcédoine , & même la plus » grande partie des pierres précieufes. La feconde efpèce renferme les » terres & les pierres qui font déja fenfiblement mêlées avec d’au- n tres tels font les fpaths fufibles, le limon, l’ardoife , la pierre- » ponce ; l'argille ordinaire , &c. | » Quelque connues que foient routes ces terres & ces pierres par # leurs propriétés principales, il eft cependant néceffaire d'établir leur » caractère fpécifiques tels font principalement les quatre fuivans, » Que les terres vitrifiables exactement pures , ne fe laiffent » diffoudre par aucun acide. » Le fecond caractère, qu'érant expofées au plus grand feu de cal- » cination, elles ne deviennent ni chaux ni plâtre. On ne peut pas » non plus les rendre par le feu auñi dures que l'argile ; elles de- » viennent plutôt , pour la plus grande partie , friables & capables » d'être mifes en poudre ; elles perdent quelque chofe de leur SUR L'HIST. NATURELLE ET LES ARTS. 415 » liaifon, ce qui arrive même à la plus grande partie des pierres » précieufes , quand on les fait fouvent rougir au feu, & qu'on les » éreint enfuite dans l’eau. » Leur troifième caractère qui eft le plus diftinétif, c’eft qu’elles fe » laiflent vitrifier par une addition médiocre d'alkali; ou, qu'étant » fondues avec une petite quantité de fel , elles fe changent en un » verre très-tranfparent, tandis que les autres terres , quoique très- » pures & mêlées avec l’alkali, fe vitrifient , pour l'ordinaire, avec » beaucoup plus de difficulté , qu’elles ne deviennent jamais, à » beaucoup près , aufli tranfparentes, & qu’elles-demandent une plus » grande quantité d’alkali, » Le quatrième caractère des pierres vitrifiables , confifte en ce que » dans leur état brut ou naturel, elles font ordinairement feu, étant » PAES contre l'acier , ce que les pierres des trois autres efpèces » ne font point «, D'après tous les Auteurs qui traitent des différentes terres, & qui les diftinguent comme M. Staahl, en vitrifiable & calcaire , ou, comme M. Port, en calcaires, aypfeufes, argilleufes & vitrifiables : je m'en tiens aux deux efpèces , l’une vitrifiable & l’autre calcaire; les autres efpèces de terre tirent leur origine , ainfi que toutes les pierres & cailloux de ces deux terres : la vicrifiable eft la terre premiere, qui ne peut fe changer, s’altérer ni fe divifer par aucun menftrue , ni même par le feu le plus violent ; c’'eft à ce premier corps que la nature doit fa confervation : il eft mafqué dans les êtres des trois règnes ; mais on le retrouve toujours par l’analyfe avec toutes fes propriétés : l’autre terre , connue fous le nom de calcaire, eft formée, comme je lai dir, du fluide igné corporifié avec les élémens élé- mentés de la nature, & a toujours pour bafe, la terre vitrifiable. D'après les ouvrages des plus habiles Chymiftes & Naturaliftes ; nous voyons que la terre vitrifiable a toutes les propriétés, que les premiers corps doivent avoir , & conféquemment, qu’elle eft la bafe des compolés ; cetre terre fe divife , autant qu'elle le peut, parle feu, c'eft-à- dire, qu'il peut la réduire à fes parties indivifibles fans la fondre ; ces parties indivifibles font de forme ronde, celles du fluide igné font gafeufes, rameufes , gluantes & adhé- rentes les unes aux autres : fi ces parties éroient fphériques, il faudroit admettre , entre leurs interftices, une marière plus fub- tile, ou le vuide; ce qui feroit oppofé à la fimplicité du mé- canifme de la nature. Je n'avance rien dans cet abrégé que je ne-fois en‘érat de prouver avec toute la clarté poflible, &c mème de répondre à toutes les objections , par des obfervarions & reuves fans réplique , appuyées de la décifion des Auteurs les plus célèbres , principalement fur le feu ; la lumière Frs les phéno- 112 ‘ #26 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, mènes magnétiques & électriques , phénomènes qui m'ont conduit à découvrir la fimplicité de la nature dans fes productions, & à réduire ces principes en deux, matière & mouvement. OBS ERA 10: NN Sur la nature du Verre. Connoiffance effentielle pour expliquer Les effets connus fous Le nom : d’Electriques. Quels font les corps les plus propres à donner des fignes électriques ? Al ce font ceux où le fluide igné eft pur , & non dans l’état de phlo- giftique, & où la circulation eft plus égale par la proportion des : pores, conformément à la récularité des parties conftituantes & à leur folidité ; folidité qui diminue la mafle du fluide igné, & modère la dilatation inteftine qu’un frottement pourroit occafonner ; je ne connois que le verre qui renferme toutes ces propriétés. ‘Le verre eft compofé de deux matières , l’une faline & fuñble ; ces fels font des alkalis fixes purifiés ; l’autre eft la terre vitrifiable, qui ne peut, par aucun feu, fe fondre & former du verre ; lorfque ces deux fubftances en dofes proportionnées, font foumifes au feu, | l’alkali entre en fuñon , & alors divife les molécules vitrifiables , autant qu'elles le peuvent être , & les réduifent à leur unité ; ce travail fe fair de la mème manière que les menftrues divifent les métaux : les parties divifées ne font point corps avec le fluide di- vifant, qui n'agit que fur le ciment & le gluten des compofés , & non fur les parties conftituantes : fi le feu eft proportionné &° continué , alors ces premiers corps indeftructibles, nageant dans ce fluide alkalin, fe rangent dans les directions que le fluide igné en hr: mouvement , leur donne : chacun de ces petits corps eft féparé de n'i ceux qui l'environnent, par un enduit de fluide alkalin & de fluide ge) igné, qui unit tous ces corps, & en forme une malle, à peu-près hi comme la chaux lie les parties de fable, & forme le mortier : certe l terre vitrifiable ne fait pas plus corps avec l’alkali , que la chaux ‘g avec le fable : la preuve que cette terre eft inaltérable , même après | avoir été combinée avec l’alkali par le feu, c’eft qu’en la fépare & Ja retire de la fubftance alkaline avec laquelle elle étoir combinée fans altérarion , & de mème nature qu’elle étoit avant : ces opéra- | tions ont été faites avec le plus grand foin; par M. Beaumé : on | peut voir ce qu'il en dit dans fon Traité de Chymie, Tome I, | | | page 326, & fuivanres. La verre alkaline pure ne peut recevoir de fignes électriques , . SUR L'HIST. NATURELLE ET LES ARTS. ‘#7 parce que le fluide igné eft embarraflé & engourdi dans la malle, & n’a aucune circulation, ainfi qu'il fe trouve dans une malle méral- lique qui ne peur jamais recevoir de fignes éleétriques : les pierres filiceufes font dans le même cas : comme elles ont.été formées par la voie humide, le peu de fluide igné qui fe trouve dans les in- terftices des parties vitrifiables , n’a aucune aétion; aufli tel frottement qu'on faile elluyer à un plateau formé d’uné matière!filiceufe , on ne peut obtenir aucun figne électrique : entre routes les fubftances qu’on a eflayées pour avoir des fignes carattériftiques du fluide igné en mouvement, on donne la préférence au verre. C’eft ainf que j'explique comment le fluide igné agit dans le verre, 8: donne des fignes éleétriques. Les premiers élémens de la matière, réunis dans une maffe connue fous le nom de verre , forment un tout dont les pores font Égaux ; la forme fphérique & égale de ces premiers corps, conferve des in- rerftices que l’alkali & le fluide igné rempliffent parfaitement. Lorfque l'alkali étoit en fufon, le Auide igné s’eft ménagé une circulation qu'il a confervée , quoique rrès - lente , après le refroidiflement de la mafle : veut-on augmenter cette circulation | & dilater le fluide igné ? il faut frotrer le verre : le fluide ne pouvant.par la dilatation , refter dans les interftices du verre , où 1l n’avoit confervé qu'un efpace conforme à la lenteur de fon mouvement , ce fluide fortira fur les deux furfaces , & occupera plus de place ; alors cette athmofphère de fluide igné en mouvement , éloignera l'air en- vironnant , & augmentera fon volume , en raifon de l’efpace qui fera entre l'air repouflé & le plateau. La fuite au Journal prochain. = —— 2 a NOUVELLES LITTÉRAIRES. D ESCRIPTION © ufage d'un Cabinet de Phÿfique expérimentale ; par M. Sigaud de la Fond , ancien Profefleur de Mathémariques, Démonftrareur de Phyfique expérimentale en l'Univerfité, de la So- ciété Royale des Sciences de Montpellier; des Académies d'Angers, de Baviere, de Valladolid , de Florence, 2 volumes i7-8°, avec figures. À Paris, chez Gueffier, Libraire-Imprimeur, au bas de la rue de la Harpe, & chez l’Auteur, rue Saint-Jacques ; près Saint-Yves, Mai- fon de l'Univerfité. Prix 12 liv. broché, ’ 418 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, Cet Ouvrage, neuf en fon genre, manquoit encore aux befoins$ des Phyfciens. Celui de M. l'Abbé Noller, très-bien fait en lui même, n’eft utile qu'aux Aruiftes ou aux Amateurs qui veulent fabriquer des Machines; au lieu que celui-ci eft entièrement deftiné à ceux qui veulent opérer. Un expofé clair, fucciné&t, mais fufhfant des machines , la manière de procéder pour faire les expériences avec précifon , le but que l’on fe propofe en faifant telle ou telle expé- rience, ce qui en réfulte , les induétions qu’on en peut tirer; voilà en général l’objet de cet Ouvrage. Utile aux Profeffeurs qui veulent enfeigner , ils y trouveront la marche qu’ils doivent fuivre dans l’enchaînement de leurs expériences, les théories qu'il faut développer , les difficultés qui fe préfentent, & les Auteurs qu'ils peuvent confulter : fuffifant pour l’Amateur qui ne cherche qu’à s’inftruire des principes de la faine Phyfique , & fe rendre raifon des phénomènes de la Nature, le Livre de M. de {a Fond les expofe tous avec ordre, & les confirme par des expériences aufi utiles que fatisfaifantes. C’eft, à proprement parler, un cours de Phyfque purement expérimentale, d'autant plus intéreffant qu'il renferme plufeurs articles dont les Phyfciens ne s’étoient point en- core affez occupés. Les affinités chymiques, les nouvelles découvertes fur l'air fixe , les effets de l’air fur l’économie animale, le phlogif- tique que les Phyficiens ont toujours confondu avec le feu propre- ment dE tous ces objets font préfentés fous le point de vue, fous lequel le Phyfcien doit les envifager. es planches, au nombre de cinquante-une, gravées avec foin, offrent le fpectacle d’un des plus riches Cabinets de Phyfique. Les Machines y fonc développées de façon, qu’on peut faifir facilement leur conftruétion & leur manière d’agir. Pour ne parler que de ce ,qui concerne l’éledricité, on y voit l'appareil le plus fimple, le mieux conftruit & le plus commode qui ait paru jufqu’à ce jour. On fait combien l’Aureur s’eft occupé de cette importante partie de la Phyfque , & nous nous fommes plus d’une fois empreflés de faire mention dans ce Journal des découvertes heureufes que nous lui devons. Nous touchons, peut-être, au moment où les Savans , à force de travaux, parviendront enfin à découvrir les véritables caufes de plu- fieurs phénomènes qui nous font encore entièrement inconnues. On s’eft lalfé de bâtir des fyftèmes, dont les expériences nouvelles démon- trent chaque jour la fauffeté. Les vrais Phyficiens ne doivent s'occuper u’à découvrir de nouveaux faits, & ils feront heureux, fi des mains auf habiles que celles de M. de La Fond, veulent bien arracher à la Nature fes fecrets, conduire ceux qui commencent à marcher dans SUR L'HIST. NATUREILE ET LES ARTS. #19 êette carrière, & inftruire des Amateurs qui, trop éloignés de la Capitale , ne peuvent fe procurer dans les Provinces, les lumières qui leur font nécelfaires. x 414 & Suivant le Profpectus que M. de la Fond vient de publier, il com- mencera un double Cours de Phyfique expérimentale ; l'ouverture du premier, fe fera, le Lundi 4 Décembre, à onze heures du matin, & celle du fecond , le Mardi, $ du même mois, à 6 heures du foir. Les perfonnes qui voudront fuivre ces Leçons intéreffantes , faites par un homme éclairé, par un grand Phyficien, auront foin de fe faire infcrire quelque tems auparavant qu'eiles foient commencées. Nouvelle Edition des Arts & Métiers, publiés par l’Académie des Sciences, rédigée par M. Berrand , Profefleur à Neufchätel, & par Meflieurs de la Société Typographique de cette Ville, dédiée au Roi de Pruffe. | L'Académie des Sciences de Paris étoit encote, pour ainf dire, à fon berceau, qu'elle conçut le vafte project de porter le flambeau de l'expérience & de l’obfervation fur toutes Les opérations des arts mécaniques. Plufeurs Académiciens fe chargèrent de différentes parties , & renfermèrent ; dans le fein de cette Compagnie , le dé ot de leurs connoiffances. Les matériaux s’accumulèrent à mefure ue les Arts fe perfeétionnèrent, & le célèbre M. de Réaumur , l'homme, peut-être de fon fiècle , le plus éclairé fur cette partie de la mécanique, travailla >. pendant prefque toute fa vie, à rédiger les matériaux qui lui avoient été confiés, & il fut , pour ainfi dire, nommé le Directeur de cette grande entreprife. A la mort de ce grand homme, l'Académie a cru devoir reprendre l'exécution de ce projet, & pour y parvenir, elle a engagé, en 1759, ceux de fes membres qui ont pu fe prèter à ce travail » à fe charger de publier, non-feuiement les Mémoires déja rédigés, mais encore de les revoir, d’y ajouter les progrès qu'avoient faits les Arts; enfin, de travailler à la defcriprion de ceux qui n'avoient pas encore écé examinés. Cette entreprife a été pouifée avec un zèle & une rapidité furprenante, puifqu'à dater depuis l’année 1761, où furent publiés les fix premiers Cahiers des Arts, il en a paru, juf- qu'à ce jour, foixante dix-neuf Cahiers; mais l’Académie annonce, dans fon volume 1761, avec cette modeftie qui caraétérife les vrais Savans , & en particulier cette refpectable Compagnie, quelle e bien éloignée de regarder cet Ouvrage comme parfait , qu’il Peut lui man- quer une infinité de pratiques & de connoiffances de détails qu’elle rece- yra avec plaifir de la main de ceux qui pratiquent les Arts Métiers, Etc. C'eft pour concourir au but d'uulité publique , que MM. de la Société Typographique de Neufchitel ont entrepris une nouvelle édi- dion i7-4°. de ce grand Ouvrage, Ce n'eft point une contrefaction u5o OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, dans le genre du brigandage aétuel de la Librairie , c’eft vraiment une nouvelle édition fingulièrement augmentée; on va en juger par le fimple expofé que nous allons faire. Et nous prendrons pour exemple l’art du Meénier, du Boulanger & Vermicellier, qui forme un gros volume in-4°. Outre les obfervations nombreufes qui fe trouvent répandues en forme de notes indiquées par un numéro, ces différens arts comprennent tout ce qui a été écrit de plus im- portant , foit en Allemagne, en Anpleterre ; en Suiffe, en Italie, fur les marières qui y ont des rapports. Première Addition. Obfervations d’un Meünier étranger fur les avan- tages de la mouture Saxone , & la préférence qu'on doit lui donner fur coutes les autres. L’Auteur de cette Méthode, eft un Allemand, peut-être un peu trop prévenu en faveur de fa nation, mais rem- li de fens, & parfaitement inftruit de fon art. Seconde Addition. De la Mouture Saxone pour le froment. Troifième Addition. Mémoire fur la Farine des Pommes de terre; contenant les différentes manières de la préparer, d’en faire de la bouillie, du pain & de l’amidon. Quatrième & cinquième Addition. Règlement de Police de la Ville de Hal , concernant les Meüniers , l’ordre à obferver dans les moulins, &c. &c. fair en 1585, & femblable Réglement du Village d'Oberkochen de 1559. Sixième & féptième Addition. Extrait des Commentaires de M. Vun- Swieten, fur les Aphorifmes de Boerrhave, & extrait des Œuvres mèlées de M. Richart, des fromens d’été. Huirième Addition. De l'utilité & de la néceflité de fe régler dans le Commerce des Grains, non-feulement fur les mefures, mais aufli principalement fur le poids. Nenvième Addition. Manière de faire le Pain en Hongrie. Dixième Addition. Règlement du Confeil de Eéipfc, concernant les Boulangers de la Campagne. Onxzième Addition, Obfervations fur Ja confervation des Grains. Ce Volume eft terminé par un Traité de M. Maneui. Cet efti- mable Auteur examine, dans la première Seétion, le froment & fes différentes efpèces; dans la feconde , la farine & la manière d’en faire le pain; dans la troifième , les différentes, fortes de pain de froment fimple ; dans la quatrième , les autres fortes de pain de froment, la manière de les préparer , de les cuire, &c.; dans la cinquième, le pain fimple & compofé pour l’ufage ordinaire de la vie , fait entièrement avec des légumes, ou avec un mélange de légumes & de graiñs; dans Ja fixième, le pain compofé, fait pour la délicareffe & le-luxe; dans la feprième, les défauts de pain, de la farine, & des maladies occafionnées par le pain; dans la hui- tième | SUR L'HIST. NATURELLE ET LES ARTS. 431 tième, les fermens , les fruits qui tiennenr lieu de pain, quoique de forme différente, fervent de nourriture à plufeurs peuples; dans la neuvième, enfin, il traite de pluñeurs herbes & plante; qui ne font pas généralement connues, & dont jufqu'ici on n'a pas uiré du pain, mais qui , dans un tems de cherté & de diferre, poutroienc fappléer au pain & fervir de nourriture. On voit clairement, d’après cer expofé, que l'Ouvrage que nous annonçons , n'eft point une contrefaction , mais un Ouvrage fin- gulier, non retouché , enfin, le Traité le plus complet fur cet objet de néceflité premiere : la defcription de cinq Arts différens paroît déja, & nous les ferons connoître dès que les volumes nous feront parvenus ; les volumes font de 70 à 8o feuilles 27-4°. Le prix de chacun eft de 12 livres, argent de France ; mais le volume renchérira un peu , fuivant le nombre de gravures, que l’on payera 4 fols la pièce; ainfi le volume contenant l'art du Menier ; Boulanger , Wermicelier | coûtera 14 livres 10 fols , tandis que le même art de l'édition de Paris, coûte 21 livres 10 fols. Pour que l’on juge de la valeur des oravures , de leur exactitude & de leur exécution, nous en joignons ici une tirée de l’art du Briquetier : il nous a paru inu- tile d'expliquer les différentes parties de la gravure , parce qu'au premier coup-d'œil , il eft aifé d’en failr les diverfes fignifications. Chaque année il en paroîtra au moins cinq volumes; on les trou- vera chez les principaux Libraires du Royaume. Ephémérides falutaires | où Recueil de tout ce que les diffé- rentes branches de l’art de guérir , offrent de plus nouveau , de plus utile & de plus certain chez les Nations favantes , Ouvrage deftiné à fervir aux progrès & à l’Hiftoire de la Médecine & de la Chirurgie , & utile à ceux qui cultivent ces arts par état, par né- ceflité, ou par goût : ce Journal, fi toutefois on peut l’appeller ainfi, commencera à paroître au premier Janvier prochain à Yverdun, & toutes les fix femaines on publiera un volume 22-12. Le prix de chaque volume eft de 3 livres à Yverdun. Voici le plan qu'on y fuivra : la premiere feion eft deftinée à la Médecine-pratique , la feconde à la Chirurgie , la troifième comprend des Inftiturions dé Médecine , ou plutôt un Cours de Médecine à l’ufage des gens du monde; la quatrième enfin, les Nouvelles Médicinales & Chirurgicales : ce n’eft pas une fimple traduétion , mais de bonnes analyfes , qu'on ne trouvera certainement pas ni dans la Bibliothèque de Médecine-prati- que de M. Murray , n1 dans celle de Chirurgie de M. Richter, & les Médecins & Praticiens François ; y verront l’analyfe d'un très-grand nombre de Livres Allemands & Suédois qu’on ne connoît point à Paris. Cer Ouvrage fera sûrement bien accueilli du Public. Diionnaire Vétérinaire & des Animaux domefliques | contenant leurs Tome VI, Pare. II. 1775. Kkk 432 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, mœurs , leurs caractères , leurs defcriptions anatomiques, la manière de les nourrir , de les élever & de les gouverner , les alimens qui leur font propres , les maladies auxquelles ils font fujers , & leurs propriétés, tant pour la médecine & la nourriture de l’homme , que pour tous les différens ufages de la fociété civile , auquel ona joint un Fauna Gallicus; par M. Buc’hoz , Médecin Botanifte, & de Quartier furnuméraire de Monfeur , ancien Médecin de Monfeigneur le Comte d'Artois & de feu Sa Majefté le Roi de Pologne, &c. &c. fix forts volumes iz-12 , ornés de 60 planches gravées en taille-douce. À Paris , chez Brunet, Libraire , rue des Ecrivains , vis-à-vis Saint Jacques-la- Boucherie. Les premiers volumes de cet Ouvrage qui ont paru dans le rems, faifoient défirer les derniers , que l’Auteur vient de publier; enfin, ce Diétionnaire eft complet , & en outre le Faune Gallisus, on voit avec plaifir la Bibliographie Vétérinaire qui le ter- mine : on a beau dire que les Dictionnaires n’ont jamais fair des Savans , cela eft vrai ; mais auñli il y en a très-peu qui foient faits uniquement pour les Savans : celui-ci, dont chaque article a été puifé dans les meilleures fources , fera utile aux uns & aux autres, parce que l’Auteur a l'attention d'indiquer les Ouvrages qu'il a confultés : les travaux mulripliés de M. Buc’hog ; fon zèle infati- gable, font faits pour lui mériter la reconnoiflance du Public. On délivre aujourd’hui, & féparément, les cinquième & fixième volumes. Troifième Décade, ou Cahier des écarts de la Nature, ou Recueil des Monflruofités dans Les diffèrens Règnes. On voit par la prompritude avec laquelle M. Repnaud remplit fes engagemens envers le Public, l'abondance de fujers que fournit la nature dans fes écarts: on en trouve dans ce troifième Cahier d’aufli finguliers & d’aufli affreux que dans les deux premiers. La premiere planche de cetre Décade offre un homme âgé d’en- viron 30 ans, ayant une croupe d’enfant mâle rrès-bien conformée , qui lui forroir de la région épigaftrique , & qui prenoit fon origine au- deffous du fternum : la EE ide nous préfente un cochon fans tête , ayant feulement une ouverture, accompagnée de deux oreilles au-deffas de la poitrine j il n’a point vécu : le pigeon qui fuit a vécu long-tems, ayant deux pattes furabondantes attachées à un nouvel os, qui ne tient qu'aux chairs : un enfant fans tête, fans bras , fans clavicules, fans fexe marqué, trois doigts & trois os du mératarfe au pied droit , & deux feulement au pied gauche; nireins; ni foie, ni rate ; rel eft le monftre de la quatrième planche ; produit d’un double accouchement : vient enfuice un chat à deux tères collées enfemble , de façon qu'il a trois yeux & deux oreilles pour les deux têtes , dont l’une cependant n’a ni mâchoire, ni bouche , ni menton; il ne paroît pas avoir vécu : un mouton à une feule tête, maïs ayant SUR L’'HIST. NATURELLE ET LES ARTS. 433 deux corps réunis par deux fternums , & fe féparant au-deflous de la poitrine : un enfant double depuis les cuifles jufqu’à la tête , les deux têtes très-bien conformées, quatre clavicules, quatre omoplates, quatre bras, vers la crère de l'os fans nom , un fragment d'os qui paroît être l’origine du fémur d’une troifième cuifle : un chien cy- clope , à qui tous les autres organes de la rête lui manquent: un fanglier monftrueux dans les parties du fexe; enfin, un enfant très- bien conformé, hors la tère , où l’on diftingue deux bouches, deux nés , trois yeux & trois mentons; c’eft une fille, elle eft vivante. An Oration delivred February 4 1774. before the American Phijofo- phical Society heldat Philadelphia containing an enquiry into the natural hiflory of Medicine among the Indians in North America ; and à come. parativeview of their difcafè[and remedies Wivh thofe of civilized nations ; zogether Wilhan appendix containing proofs aud illufrations-By Benjamin Rufth M. D. Profeffor of chemgftry in tho College of Philadelphia Philadelphia, 1774. in-8°. ou Difcours prononcé à la Société Philo- fophique de Philadelphie , fur l’'Hiftoire de la Médecine des Indiens du Nord de l'Amérique , avec une comparaifon de leurs maladies & de leurs remèdes avec ceux des Nations civililées , &c. par B. Ruch , Docteur en Médecine , & Profeffeur de Chymie au College de Philadelphie. Le vitre feul annonce combien cet Ouvrage peur être intéreffant; la manière dontil eft fair, & les notes que l’Auteur y a ajoutées, en relèvent le prix : ce Difcours, dont la traduction a été confiée à une perfonne habile & connue avanrageufement parmi les Savans d'Europe, va paroître inceflamment dans notre langue. Inoculation defruëtive to mankind ; c’eft-à-dire , l’Inoculation deltruc- tive du genre humain : l’Auteur anonyme de cet Ouvrage cherche à y prouver cette effrayante affertion, capable de renverfer le fyftème actuel de pluñeurs Puiffances d'Europe , qui ont adopté cette mé- thode. Il fe fonde fur les relevés de mortalité caufée par la perite vérole , faits fur-tout à Londres & à Briftol. Tous ces faits paroilfent bien propres à juftifier l'opinion de ceux qui ont dit qu’on ne fauroit prendre trop de précautions contre la contagion de cette maladie, routes les fois qu'on permet la pratique de l’inoculation dans les villes. Hiflory aud prefent [late of Eleétricuy. C'eft la troifième édi- tion de l’Hiftoire de l’Electricité, par l’ingénieux Prieftley , qui eft fous prefle en Anoleterre, & qui fera prefqu’aufli-tôt traduite en François , que publiée à Londres : le Traducteur François recoit les cahiers à mefare qu'ils s’impriment à Londres : on attend cer Ou- vrage avec impatience, & felon toute apparence , il fera accueilli aufli favorablement que les deux premieres éditions, puifque celle-ci renferme un très-grand nombre d'expériences nouvelles, faires avec le plus grand foin. 434 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE; Effai fur lHifloire naturelle de P'Ifle de Saint - Domingue , avec des figures en taille - douce. À Paris, chez Gobreau , Libraire , Quai des Auguftins, 1775.78. Cet Ouvrage offre un détail qui paroît exact , de ce qu'il y a de plus intérellant à connoître relativement au genre de commerce, à la fituation des lieux, à la culture des plantes , à la nature du fol, &c. de Sainr-Domingue. Il renferme en outre , le catalogue des plantes de certe Ifle, donc le nombre fe monte à plus de 400 , tandis que M. Poupée des Portes n’en avoit donné qu'environ 180. Elles fonc toutes décrites avec beaucoup de foin. L’Auteur a ajouté les noms vulgaires & les fynonimes des principaux Botaniftes, leur ufage économique leurs propriétés , &c. Ce Catalogue eft fait par ordre alphabétique , ce qui le rend très-commode. Il s’en faut bien que les règnes minéral & animal foient traités avec la même étendue : il y a apparence que l’Auteur , qui.eft le Pere Micolfor , Religieux Dominicain , attend le fuffrage du Public, pour donner une fuite de ce travail imparfait jufqu'à préfent ; mais ce qui le diftinguera de bien d’autres, c’eft l’ordre , la clarté, & fur-touc la véracité qu'on y trouve. # L'Académie de Rouen propofe un Prix de 300 livres à celui qui aura indiqué /e progrès de nos Arts utiles , cultivés dans la Ville & Banlieue de Rouen, fous le règne de Louis XV, & leur influence [ur le Commerce de la Normandie. Les Mémoires feront adreflés, avant le premiér Juillet 1776 , à M. L. 4. d’'Ambourney, Négociant à Rouen, Secrétaire ‘perpétuel de l’Académie. L'Académie de Pérersbourg propofe , pour l’année prochaine , les deux Problèmes fuivans. 1°. Expliquer quel ef? le caraëlère des fons que produifent des tubes d’une grandeur égale, & ayant un trou latéral , É quelle eff la variété de cés fons par rapport au grave 6 à l'aigu , Jüivant La différente pofition & grandeur de ce trou. 2°. Expliquer la Sanguification. Les perfonnes qui voudront concourir pour ces Prix, dont chacun eft de cent ducats, doivent, avant le premier Juillet prochain, adrelTer leurs Mémoires écrits en Rufle, en Latin, en Allemand ou en François, & francs de port, à M. Jeun Albert-Euler, Secrés taire de l'Académie Impériale des Sciences de Pérersbourg. ee # € ste a+ r " Î u 4% L 7 e di 1 S'-n D ut. P A P CE © ne DE r72 8 : É NME NS: 2 DIRE Jp RL AE ME Ne Planche IV. OBSERVATIONS EPA PEN STO UE: SUR L'HISTOIRE. NATURELLE PUR CL: ESS AR TS, AVEC DES PLANCHES EN TAILLE-DOUCE, DÉDIÉES MERE CO M'LE D) AR'TOTS; Par M. lAble ROZIER, Chevalier de lEglife de Lyon ; de l’Académie Royale des Sciences, Beaux-Arts & Belles- Lettres de Lyon , de Villefranche, de Dion, de Marfeille, de Flefingue ; de la Société Impériale de Phyfique & de Bo- tanique de Florence ; Correfpondant de la Société des Arts de Londres , de la Société Philofophique de Philadelphie | &c. ancien Directeur de l'Ecole Royale de Médecine - Vétérinaire de Lyon. TOME SIXIÉM_E. DÉCEMBRE, :775. A A CORTE Chez RUAULT, Libraire, rue de la Harpe. MA RDIC IC AT EXIEXOV. CPE COPIER UEFA IR EN GE CDEULP RON AS VReEUS A MM. les SouscrRIPTEURS dont | Abonnement finit à la fin de Pannée 2775. P: USIEURS Soufcripteurs fe font plaint de ce qu'ils ne rece- voient pas les Cahiers aufli-tôtqu'ils avoient formé leurs deman- des. Ils font priés d’obferver que fouvent ils s’adreffent à des Commiffionnaires qui négligent de foufcrire , ou de faire par- venir les Cahiers à leur deftination. Pour éviter, à l'avenir , de pareils reproches & de femblables lenteurs, MM. les Soufcrip- teurs, qui ont été dans le cas d’être mécontens, font invités à recommander expreflément aux perfonnes qu'ils chargent de leurs commiflions , d'être plus exaétes que par le pañlé : ou s'ils jugent la chofe plus commode , de configner le montant de la Soufcription au Bureau des Poftes de leur Ville, fans l'affran- chir, mais affranchir feulement la Lettre qui en donne avis. Un fecond fujet de plainte vient de ce que ceux, chez lefquels on prefcrit de remettre les Exemplaires , les prêtent , les égarent, & difent enfuite ne les avoir pas reçus. On prévient que l’on fait l'appel de chaque Cahie: & de chayue Souferipteur, comme dans un Régiment on fait l'appel des Soldats, & tous les Cahiers font portés fermés , dans un fac cacheté, à la grande ou à la pctite Pofte de Paris. On voit par - à, que fi quelques -uns ne font pas rendus , ce n'eft plus la faute du Bureau des Journaux. MM. les Soufcripteurs, qui défirent renouveller leur Abon- nement pour l'année 1776, lont priés de donner /eur nom & de- meure , Écrits d'une manière lifible, dans le courant du mois de Décembre , ou le plutôt poflible, afin d’avoir le tems de faire imprimer leur adrefle. On foufcrit à Paris, chez l'Auteur, Place & Quarré Sainte - Geneviève ; & chez les principaux Eibraires. des grandes Villes. Le prix de la Soufcription eft de 24 livres pour Paris, & de 30 livres pour la Province, port franc. nn. TA BALLE, DrE Sue go RTL CG LE. S Contenus dans ne feconde Pere ? PT TRE de M. l'Abbé de Linieres ; à l'Auteur de ce Recueil, fur un Probléme à réfoudre, propofé par M. le Chevalier de Dolomiex , dans le Journal du mois de Juillet 177$ , page s. page 435 Remarques fur le fond de la Mer, & fur Les Cartes qui le repréfentent ; par M. l'Abbé Dicquemare , Proféffeur de Phyfique € d’Hiftoire Na- turelle , de plufieurs Académies Royales des Sciences , des Belles- Lerrres & des Arts, Gc. 438 Expériences fur l'influence de la Lumière fur les Plantes ; par M. Bernard- Chrifloffle Méeffe , 445 Traitement contre ie Ténia ou Ver folitaire , pratiqué a Morat en Suiffe, 460 Lettre à l’'Auteur de ce Recueil, fur*une dégradation des Couleurs ; par M. J. A. Mongès, Chanoine Réoulier | & Profejfeur de l'Abbaye de Saint-Lô de Kouen, 453 Æxpériences faites [ur quelques précipités de Mercure, dans la vue de dé. couvrir leur nature ; par M. Bayen, Apothicaire-Major des Camps & Armées du Roi, 487 Obfervation fur une efpèce d'Hermaphrodifme dans un individu de l’efpèce du Daïm , faite par M. Valmont de Bomare , par ordre de Son Aliefe Séréniffime Monfeiyneur le Prince de Condé, sor Nouvelles Lirtéraires , 529 Fin de la Table; a ñ ANDRE O NB ACT ON Je lu, par ordre de Monfeigneut le Chancelier , 452 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, .. Exvérience XII. J'ai pris, au commencement de Mai, quatre pieds de Stratiotes Aloides : elles nagent alors librement fur l’eau , & n'ont. point de racines : celles-ci s’allongent pourtant enfuire, & atrachene . la plante au fol. J'en ai pe deux autres qui étoient déja plus grandes ,- & avoient leurs principales racines. J'ai mis dans l’obfcurité une partie :*.: pu vafes qui contenoient ces plantes, & j'ai laiffé l’autre expofce à la umière. Trois femaines étant écoulées , les racines étoient un peu plus «° longues dans lobfcurité ; mais la différence étoit fort petite. Toutes ces plantes, mème celles qui jouifloient de la lumière, fé portoient + allez mal ; de forte qu’elles paroiffoient avoir fouffert de la tranfpofition. Expérience XI. J'ai pris, vers la mi-Mai , deux pieds d'Aydrocharis, qui nageoient librement , & n’avoient que de très-petites racines : j'en ai laiffé une expofée à la lumière , j'ai mis l’autre dans l’obfcurité; & après quelques jours , les racines avoient crû également dans routes les deux. Un accident m’empècha de pourfuivre cette expérience. Les racines étoient verdâtres , mème dans l’obfcurité. ’ Les plantes aquatiques que j'ai employées jufqu’ici, ont toutes une de leurs furfaces expofée à l'air. J'ai cru devoir aufli examiner celles qui font entièrement plongées dans l’eau. set Exrérience XIV. J'ai pris quelques individus du Myriophyllum fpicatum , couverts d’eau : après deux mois & demi écoulés, j'en ai trouvé quelques-uns qui vivoient ; ils avoient perdu leurs feuilles , excepté les fupérieures : la tige étoit ettiolée, blanche :les feuilles étoient jaunâtres, tirant fur le blanc, & plus petites que de coutume. Les diftances , entre les articulations , éroienr d’un riers plus grandes que dans les individus qui étoient reftés expofés à la lumière : les racines étoient devenues très-longues & blanches. Confequences. Il fuit de cette expérience que l’ettiolement a lieu dans les plantes : aquatiques ;. qu'il y eft caufé par l'obfcurité , & par conféquent , que la lumière influe fur la végétation de ces plantes à travers l'eau. Comme l’ettiolement de ces racines eft très-confidérable, ne pourroit-on pas conjecturer , quoique la douzième & la treizième expériences ne foient pas complertes , qu'il a lieu pour routes les racines dans les mêmes circonftances ? she Er fi, comme je tâcherai de le prouver dans la fuite, l’ettiolement procède d’une diminution de tranfpiration , ne s’enfuivroit-il pas encore que les racines des plantes aquatiques font aufli, dans leur état naturel, des organes excrétoires ? Quoi qu'il en foir , il eft clair que la feule abfence de la lumière ©: SUR L'HIST. NATURELLE ET LES ARTS. 453 produit l’ettiolement, tour le refte étant d’ailleurs égal; & quoique _-jé n'aie pas fait d'expériences fur les Mouffes , les Champignons , &c. _J'at lieu de croire que cette conclufon eft généralement vraie. V7 V. Expériences fur la frulification dans lobfeurité. Il m’a paru intéreffant d'examiner quelle eft l'influence de la lumière fur la fruétificarion , cetre partie la plus délicate de la végétation. Exr£rience XV. J'ai mis dans l’obfcurité, au commencement d'Avril 1773, le Bellis perennis : cette plante avoit alors deux fleurs ouvertes , & quelques-autres fermées ou à demi-ouvertes. Au bout de quelques heures , les fleurs fe fermèrent : la plante refta dans cet état pendant tout le mois d'Avril : les feuilles vertes périrent peu-à-peu, & les fleurs font toujours reftées fermées : la plante mourut vers la mi-Mai. Il fuit de-là, 1°. que la fructification fa pas eu lieu dans l’obfcurité ;. 2°. que Le fommeil des plantes n’eft pas périodique, puifqu’il a eu lieu ici, dès qu’on a intercepté la lumière. Exrérience XVI. J'ai mis dans l’obfcurité l’Azagallis monelli, On . fait que les fleurs de cette plante, qui font d’un beau bleu, fe ferment pendant la nuit, ou les jours brumeux : c’eft aufli ce qui eft arrivé dès que certe plante fut mife dans l’obfcurité. Le 6 Septembre , les extrémités des branches étoient jaunâtres & etriolées : les fleurs, toujours fermées, tombèrent au bout de trois jours , & quelques branches continuèrent à s’alonger. ‘ Le-14, il n’y avoit plus aucun figne de fruétifcation. Au commencement d'O&tobre , la plante vivoit encore, mais elle étoit fort maigre : quelques branches étoient alongées de plus de quatre pouces aux extrémités. Les petites branches forties de deffous les aiffelles des plantes avoient un pouce de longueur, & portoient toutes des marques d’ettiolement. La plante mourut peu après’, fans L anne fleur fe fût ouverte , ou qu’il y eût eu le moindre figne de emence. Exrérience XVII. J'ai pris, dans le mème tems, plufieurs individus de Senecio frutefcens exoticus. 11 y en avoit un (4) dont les fleurs radiées , pofées à la circonférence du difque , étoient épanouies en tout ou en partie. Il y en avoit d’autres (Z) qui portoient, outre ces fleurs , des fleurs subulées ouvertes. Enfin , les troifièmes (C) portoient des fleurs déja réellement fécondées. Toutes ces plantes étoient très-faines & très-vigoureufes, lorfque je les mis dans l’obfcurité. Au bout de trois ou quatre jours, les fleurs 4 demi-fleuron ; (Flores ligulati) & celles qui étoient encore foibles , paroiffoient être devenues plus parfaites; car le rayon s’étoir un peu ACER : mais il ne l’éroit MHZ . » L Le 4$4 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, pas parfaitèment , puifque chaque fleur à demi-fleuron roulé, refflembloït à un petit tube, comme cela a ordinairement lieu dans les jeunes fleurs de cette plante. Du refte ces fleurs étoient pour la couleur & pour la grandeur entièrement femblables à celles qui étoient reftées expofées à la lumière. SH Au bout de fept jours, plufeurs fleurs commençoient à mourir : celles qui avoient été fécondées étofent du mombre : les Aigrettes s’érendoient à l'ordinaire , mais on n’y a trouvé aucune femence bien conditionnée. Les fleurs à demi-fleürons & les tubulées périrent de la mème façon : celles qui n’avoient de développé que le rayon, ne vécurent guère plus long-tems; cependant, quelques-unes des fleurs qui étoient les moihs avancées fe développèrent en partie; mais les fleurs à demi-fleurons reftèrent toujours plus ou moins roulées, Au commencemerit d'Oétobre, la plante étoit morte à la partie fapérieure , mais le tronc étoit encore verd près de la racine : cette couleur difparut bientôt. Il n’y eut d’ettiolement que dans un des raméaux :.tous les autres, qui portoient des fleurs, ne fe font point etriolés, Cette expérience confirme que la femence ne vient pas à maturité dans l’abfence de la lumière : elle prouve encore que les fleurs à demi-fleurons, pofées à la circonférence du difque, peuvent fe développer plus ou moins fans le fecours de la lumière , & conferver leur couleur jaune. Celle-ci ne change donc pas dans lobfcurité. Exr£rience XVIII. Le 30 Août 1773, j'ai pris deux rameaux de Soleil ( Helianthus) , qui portoient des fleurs, & trois ou quatre feuilles allez grandes. Je les ai mis dans des vafes remplis d’eau , dont j'en plaçai un dans l’obfcurité, laiflant l’autre expofé à la lumière, à température égale. Au bout de dix jours, j'obfervai dans chaque individu des fleurs à demi-fleurons. Peu après, les fleurs tubulées s’épanouirent à l'extérieur du difque. La couleur des unes & des autres éroit un peu plus pâle que de coutume ; ce que je crois devoir attribuer à l’eau dont ces rameaux fe nourrifloienc : ils ne produifirent pas de femence. La corolle des fleurs compofées fe développe dans l’obfcurité : voyons ce qui a lieu pour des fleurs fimples. Expérience XIX. J'ai pris différens rameaux d’A/cea , que j'ai mis dans des vafes remplis d’eau, & dont j'en ai pofé une partie dans l'obfcurité , laifant l’autre à la lumière. Toutes les fleurs s’épanouirent; leur couleur étoit feulement un peu plus pâle que d'ordinaire; ce que je crois devoir attribuer à l’eau, puifque la même chofe avoit lieu pour les fleurs expofées à la lumière. Ni les unes ni les autres ne produifirent de femences, ou feulement des femences infécondes. 0 L : é - . re . SUR L'HIST. NATURELLE ET LES ARTS. 455 . L . . Les fleurs fe peuvent donc épanouir ‘plus où meins dans . L1 “ Poblfeurité..1:1n 2h 0e #3 Expérience XX. J'ai pris, le 25 Avril , quatr® fleurs de Narciffe Narciffus poeticus) encore fermées, & je les ai mifes dans deux v sont Pa RE J TC : Fe 4 remplis d'eau; de façon qu'elles fe nourrifloient par l'extrémité rompue de la tige. Une de ces fleurs, que j'ai mife dans l’obfcurité, étroit rrès- proche de-l’épanouiffement : deux autres (dont l'une fut “mile dans l’obfcurité) étoient égales & à moitié de leur développement: R quatrième , qui refta expofée à la lumière, étoit la moins avancée. " Le premier Mai, une des fleurs expofces à la lumière s’épanouit : l’autre s’épanouit le 3. Celles qui étoient dans l’obfeurité étoient encore fermées , quoiqu’elles fuffent plus développées. Le 9 Mai, toutes ces fleurs commençoient à périr, quoique celles gui étoient dans l’obfcurité ne fe fuffenc pas développées. Les extrémités des pétales cohéroient trop. La couleur verte des tiges fe conferva plus long-tems dans l’obfcurité. Ceci ne prouve:t-1l pas que la tranfpiration * y cit moindre ? ExrériEeNce XXI. Le 29 Août, j'ai employé les plantes fuivantes : N°. 1. Lotus Doricnium ; qui portoit alors des fleurs ; N°. 2. Parnaffia paluffris , qui portoit des fleurs tant ouvertes que fermées ; 5 N°. 3. Cheirantus incanus , portant des flears violettes, & de jeunes filiques ; ENT … ‘N°. 4. Une efpèce de Mefembryanthemum , qui portoit un nombre de fleurs extrèmement confidérable, J'ai employé cette plante parce que je favois que les plantes fucculentes tranfpirent peu, & que je croyois qu'à caufe de cela elles pourroient mieux fupporter l’abfence de la lumière, & parvenir à fructifier. N°. 5. Célofia criflata , à belles fleurs pourprées. J'ai mis toutes ces plantes dans l’obfcurité , & j'en ai expofé de pareilles à la lumière. ” Le premier de Seprembre , il n’y eut guère de changement : les fleurs du N°. 4 étoient fermées , comme cela a toujours lieu dans l’obfcurité. Le ; quelques fleurs du N°. 3 fe fanoient : il y en avoit de nouvelles qui s'ouvroient lentement. Le $s, quelques fleurs du N°. 4 font mortes. Le 7, les fleurs du N°, 1 & du N°. 3 tombent, 456 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, Le 8, prefque toutes les fleurs du N°. 1 font mortes. N°. 2 fleurie au mieux, mais les feuilles fe fannent. Il en eft de mème du N°. 5. N°. 4 eft malade; les Heurs périffent (1). Les plantes expofées à la lumière font toutes en bon état. Le 11, les fleurs & les feuilles du N°. 3 ont prefque toutes péri : il en eft de mème de quelques fleurs du N°. 2. Le 16, les feuilles du N°. 1 & du N°. s ont péri : les fleurs fubfftent. Les tiges du N°.1, qui ont porté des fleurs, font mortes. N°. 3 a perdu beaucoup de feuilles & quelques filiques. Elle eft fort maigre. Le 25 ; N°. 2. a perdu toutes fes fleurs : il n’y a aucune femence féconde dans les capfules féminales : cette plante a confervé fes fleurs plus long-tems que fa pareille expofée à la lumière. N°. 1 fleurifloit encore , & étroit faine : les feuilles du N°. 2 étoient encore vertes : N°. 3 avoit des fleurs & des filiques très- belles : les leurs du N°. 4 avoient péri:la plante n’étoit pas en trop bon érat: N°. s étoit dans fon érat naturel. Le premier Octobre j'ai mefuré les tiges étriolées du N°. 1, & je les ai trouvées de 16 pouces ; elles n’en avoient que 4 le 29 Août ; les rameaux produits dans l’obfcurité, étoient très-minces , avoient la longueur d’un pied, &:1l en fortoit des rameaux latéraux; leurs feuilles éroient fort petites & jaunâtres : les Aeurs & les filiques du N°. 3 étoient tombées ; leur couleur étoit jaune , & la plante étoit à peu- près morte : les feuilles qui reftoient encore au N°. 4 étoient d’un vert très- pâle, & la plante languifoit : N°. 3 étoit morte ; elle n'avoit pas de femence. Confequences, Il fuit des expériences précédentes, que la fruétificarion ne s'a- chève pas. dans l’obfcurité ; il y a cependant des plantes fourerraines , qui portent des fruits fous terre ; j'ai deffein d’en parler ailleurs. On a vu qu'il y a des feuilles , comme celles de l’Aguilegia, du Rumex , qui reftent pliées dans l'obfcurité; qu'il y a des fleurs, comme celles du Soleil & de l'A/cea qui s'y font ouvertes; qu'il y en a d’autres, comme de l’Aragallis, quis’y ferment; qu'il yen a d’autresenfin, qui ne s’y épanouiflent jamais : ilme femble qu’il faut faire attention à deux choles dans cet épanouiflement des leurs : 1°. à l'exrenfion lente des parties encore contenues dans leurs enveloppes ; celle-ci fe fair par la nutrition. 2°. À l’expanfon fubite par laquelle la leur s'ouvre, & qui provient d’une plus grande affluence de fucs : cela polé, nous EE (x) Je fais, par expériences, que les efpèces de Mefembryant hemur , qui fleu- riffenc extrêmement en été, deviennent malades, & pallent rarement l'hiver. Pong — ct M Ÿ SUR L'HISTNNATURELLE ET LES ARTS. 457 tâcherons de montrer dans la fuite, que l’abfence de la lumière trouble le mouvement des fucs, en retardant & diminuant la tranf- piration : fi cela eft , les fucs affluant en moindre quantité , dans l'abfence de la lumière , ne pourront pas étendre les leurs avec autant de force ; celles-ci ne s’ouvriront donc pas, fi la fruétification n’eft pas encore affez avancée lorfqu’on intercepte la lumière ; mais elles s’ouvriront plas ou moins, fi la végétation a déja affez de force pour ne pas fe reffentir trop d’une diminution qui leur furvient; enfin, ne fera-t’il pas probable que les fleurs ouvertes, fe fermeront dans lobfcurité , parce que les fucs n’y onc plus une force fufhfante pour vaincre l’élafticité des fibres ? Quoiqu'il en foit, il eft certain que l'influence de la lumière fur la fructification eft très-grande ; mais il refteroit encore bon nombre d'expériences à faire fur la pouflière des étamines, fur la liqueur qu'on trouve dans les ftigmates & les ftyles des piftils: fur les fé- condations qu’on pourroit tenter dans l’obfcurité de diverfes manières, Je n'ai fait que deux expériences fur la pouflière des étamines. Expérience XXII. J'ai pris quatre oignons de Colchique, Colchis automnalis , qui étoient deftitués de racines & de fleurs; j'en ai placé deux dans l’obfcurité , fans les entourer de terre , & j'en ai expofé deux à la lumière. Ces dernières ont produit plus promptement des fleurs que les premières : la couleur de celles-ci étoit d’abord blanche, enfuite tirant légèrement fur le pourpre. Les Aeurs expofées à la lumière , avoient leur couleur naturelle, & éroient ouvertes, les autres étoient fermées ; elles ne s’ouvrirent un peu, que lorfqu’elles commencèrent à languir , car les pétales , qui étoient auparavant appliqués l’un contre l’autre, fe ftparèrent un peu , lorfque les fleurs commencè- rent à fe fanner : la grandeur de la corolle étoit à l'ordinaire ; la pouflière éroit jaunâtre comme de coutume, & abondante; les éta- mines étoient bien nourries, & languifloient après avoir lancé leur pouflière ; en un mot, routes les loix ordinaires avoient lieu , les péduncules, ou plutôt les tubes de la corolle avoient dans l’obfcurité un tiers de plus en longueur , que ceux qui étoient expofés à la lumière. | Exrérrence XXIII. Le 2 Mars, j'ai mis quelques fleurs d’Hellebore noir dans des vafes remplis d’eau ; j'entourai l’un d'eux d’un tuyau de carton , qui interceptoit la lumière. Le 19 Mars , les fleurs expofées à la lumière , éroient d’un verd plus foncé que celles du mème genre que je culrivois alors dans le jardin : celles qui étoient dans l’obfcurité, avoient la mème couleur qu'au commencement de l'expérience ; les étamines des unes & def LA { 458 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, autres étoient également conditionnées ; la pouflière y étoit de même couleur , & également abondante. La poufière des éramines fe forme donc parfaitement bien dans l'obfcurité , au moins quant à l'extérieur , car il faudroit faire d'autres expériences pour connoître fivcetre pouflière eft réellement fécondante. VI. Sur la durée des Fleurs, pofees dans lobfcurire. On fair combien de circonftances font varier la durée des fleurs, & combien une trop grande ardeur de foleil , ou des pluyes trop abondantes , leur font nuifibles : j'ai tâché d'examiner fi la lumière contribue à rendre la durée des flears plus ou moins longues ; mais comme il eft difficile d'empêcher les fleurs qui croiffent à la lumière , d'être expofées À une rempérature différente , ou aux injures de l'air; ce n’eft qu'avec beaucoup de circonfpection qu'on doit former des conclufions générales fur ce fujer. Expérience XXIV. J'ai pris, le ro Avril, quatre fleurs ouvertes de Pfeudo Narciflus , qui fe nourrifloient de l'eau dans laquelle leurs tiges étoient plongées : j'en ai mis deux dans l’obfcu- rité ; j'en ai laillé deux à la lumière , aucune n'étoit expofée aux in= jures de l'air ; mais ces dernières éroient placées devant une fenêtre, à l’orient, où le foleif donnoit pendant quelques heures ; ces fleurs vécurent pendant quelques jours, mais celles qui étoient expofées à la lumiète , moururent les premières. Exrérience XXV. J'ai pris dans le mème tems quatre fleurs d'Hépatique (hepatica verra cærulea) que j'ai traitées de la même manière. Le 10 Avril, une des fleurs expofée à la lumière, fe fanoit. Le 19, les fleurs que j'avois mifes dans l’obfcurité, & qui étoient reftées fermées , ouvrirent leurs pétales, ce qui provenoit de foibleffe, comme l’indiquoient les rides qui fe rrouvoient aux extrémités de ces pétales. Le 20, la feule fleut expofée à la lumière qui vivoit encore, avoit refferré fes pétales , quoiqu’elle fût elle- même entièrement ouverte : une de celles qui étoient dans l’obfcurité, commençoir à fe faner, l'autre fe portoit paffablement. Le 21, la fleur expofée à la lumière , fe fanoit; celle qui vivoit dans l'obfcurité, étoir dans un état un peu meilleur ; maïs elle étoit gntièrement fanée au 23 +. Il n’y a donc que deux ou trois jours de différence entre les durées des fujets de ces deux expériences , ce qui peut ètre provenu de l'adtion : SUR L’HIST. NATURELLE ET LES ARTS. 4ç9 l'aétion direéte du foleil fur deux d’entr’eux, ou peut-être auf parce que l’âge de ces plantes aura un peu varié, quoiqu'il ne parüc pas différer fenfiblement. Cependant , voici d’autres expériences qui paroîtroient prouver que la durée des fleurs eft plus courte dans l’obfcurité. Expérience XXVI. J'ai pris quatre rameaux d’Jberis fémper florens de même âge , j'en ai mis un dans un tube de verre, fans aucune matière dont il püt fe nourrir (N° 1.) J'ai mis le fecond N°2.) dans un pareil tube, mais entouré d’un tube de carton pour intercepter la lumière; j'ai mis le troifième dans un vafe rempli d’eau; enfin le quatrième (N° 4.) dans un pareil vafe, mais en- touré d’un tube de carton, la température étoit la même dans tous ces effais. Les fleurs du N° 2 fe fanerent les premières , enfuite celles du N° 1; celles du N° 3 & du N° 4 ont vécu beaucoup plus long-tems ; mais celles du N° 4 commencerent plutôt à languir que celles du N° 3, & tomberent; ce qu’on A pas dans ces dernières. ExrérienNce XX VII. J'ai mis dans des vafes remplis d’eau ; huit Aeurs de Sartolinel ; j'en ai placé la moitié dans l’obfcurité , laïffant l’autre moitié à l'air; je les ai examinées tous les jours; les premières ont péri que les autres étoient encore faines. Exrérience XXVIII. Il en a été de même des rameaux de Daphnet laureola , dont les fleurs ont péri plus promprement dans l’obfcurité : les feuilles font tombées , & les boutons ne fe font pas ouverts. ExrérieNce XXIX. Les fleurs d'Heilebore font aufli mortes plus promptement dans l’obfcurité , foic qu’elles fuçailent l’eau ou non. Exrérrence XXX. J'ai pris deux rameaux de Laurier-thin, qui portoient des fleurs encore fermées, & fuçoient l’eau par leurs extrémités : j'en plaçai un dans l’obfcurité ; ils vécurent plufeurs jours fans différence fenfible ; mais le rameau placé dans l’obfcurité, périt enfin fans avoir ouvert fes fleurs, pendant que l’autre vivoir , & avoit ouvert les fiennes. Cependant il n’eft pas arrivé roujours que les fleurs placées dans lobfcurité fans aliment , fe foient fanées les premières : j'ai vu fouvent le contraire , ce que j'attribuerois à une diminution de tranfpiration. Il paroït qu’en général, les fleurs mifes dans l’obfcurité , périfleng fouvent plutôt que celles qui jouiffent de la lumière. Tome VI, Part. II, 1775: O0 460 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, RAC LT ENS EN | T Contre k TÉNIAoOuUVERSOLITAIRE, pratiqué à Morat en Suifle (1). Le LE Ténia à anneaux courts, plus connu fous le nom de er Jolitaire (2), féjourne dans les inteftins de l’homme & de quelques autres clafles d'animaux, & paroît fe nourrir du chyle préparé dans leur eftomac, Divers fymptômes annoncent fa préfence : les malades ont des rapports, un fommeil interrompu , une faim dévorante , ou quelquefois un dégoût général , des coliques , des naufées, des étour- diffemens ; des démangeaifons au nez, des vomifflemens , des dé- jections fluides & blanchâtres , quelquefois des conftipations , une tenfon légère dans le bas-ventre , une fenfation douloureufe dans la région de l’eftomac , que l’on fait ceffer en prenant de la nourri- ture; quelques-uns ont de la toux, des convulfons ; de la fièvre avec friffon : fi le mal n’eft arrèté ou diminué par des remèdes convenables , ils tombent dans le marafme. Le ver (planche 1) qui produit ces accidens, eft long & plat, compofé de plufeurs anneaux très-courts , articulés les uns au bout des autres , & traverfés dans leur longueur par une efpèce de veine (planche 1, A) plus ou moins apparente, qui a fait donner à ce Ténia , par les Allemands , le nom de Vér plat à épine ; elle: eft bleuâtre ou rougeâtre , ou fimplement de couleur blanche ; quel- quefois elle ne fe manifefte que par une tache noirâtré ou blan- EEE (1) Quoique plufeurs Papiers publics aient donné l'extrait de ce Mémoire, quand cette nouvelle publication ne feroit utile que pour une feule perfonne , notre but feroit rempli. (2) Lumbricus latus feu Tania inteffinorum. Plater. Prax. tome II, p. 810, Tania, Ver folitaire, Solium à épine. Andry, génér. des vers, c. III, art. 2. 7e s Tone à annaux courts. Bonnet, Mém, des Sav. étrang, vol. I, p. 478: Tania vulgaris & Tania lata. Linnæi, Syft. édit, 12, ps 13231 & 1324. Tania ofculis lateralibus geminis. Linn. amœn. acad. 2,p. 78, tab. 1, f. 2. Tania prima Plateri. Le Clerc, hift. des vers, tab. ÿ, f. 15 tab. 6 , f. 2 ; tab, mAÉÉULTSs (Cab SR 25 64e | Tania acephala & Tania capirata. Nogel, de cog. & cur. corp. hum, affcét, j 17723 Pe 645 À 646 D él + SUR L’'HIST. NATURELLE ET LES ARTS. 461 châtre, fenfble au milieu de chaque anneau , garnie fur les deux farfaces d'un mamelon peu apparent. La queue (B) ou terminaifon poftérieure , n’a jamais pu être obfervée, parce que le ver fe rompt, & que les malades en rendent de tems en tems quelques porrians naturellement ou par le moyen de divers remèdes. Son corps (C) , ordinairement long de plufieurs aunes , & applati en forme de ruban ; fe rétrécit peu-à-peu vers {4 partie fupérieure, & fe termine emün fil (2) fort menu , d’un pied de longueur ou plus; la pointe (£) que l'œil fimple voit très-aigué , paroit renflée à la loupe , & fous la lentille d’un fort microfcope , elle préfente une tète (F G H) terminée par quatre cornes de longueur inégale, qui font peurètre des fuçoirs par lefquels l'animal prend fa nourriture. Le corps du ver s'étend dans tout le conduit inteftinal , & fe prolonge mème fouvent jufqu'à l’anus on le nomme ver folitaire ; parce qu'ordinai- remenc il n'en exifte qu'un feul dans le même fujet ; quelquefois cependant, il s’en trouve deux enfemble; quelquefois aufli, après la fortie d’un premier , il s’en régénère un fecond. Ce ver n’eft point facile à déloger ; les remèdes vermifuges purgatifs ufités en Mé- decine , font rendre des portions de l'animal que l’on eft roujours "obligé: de rompre pour les féparer de celles qui reftent dans linté- rieur du corps ; ils procurent rarement une guérifon completre. On ne doit point confondre avec le ver que nous venons de décrire , le Ténia cucurbitin (1) qui lui reffemble en plufeurs points , qui fe trouve également dans les inteftins des animaux, & dont la préfence produit les mèmes fymptômes. Ce dernier (p2.2) fe diftinguera du précédent, en ce qu’on ne lui trouve ni tête re- marquable , ni veine longitudinale : Les anneaux dont il eft compofé, font beaucoup plus longs (planche 2, A), ftriés dans leur longueur , & garnis d’un feul mamelon latéral; ils fe détachent facilement les uns des autres ; ce qui les à fair regarder comme autant de vers diftinéts qui ont chacun une vie indépendante & un mouvement particulier. Sans approfondir cette queltion , on obfervera ici que la forme de ces anneaux articulés enfemble , varie beaucoup ; ils (x) Wermis cucurbitinus. Plater prax. med. tome III, p,. 810. Tania, Solium fans épine, Ver cucurbivaire. Andry , génér. des vers. c, III, ait, 2, P. 74. d Tenia à anneaux longs. Bonnet, Mém. des Sav. étrang. vol, I, p. 478. Vermi cucurbitini. Nallifnieri nuove offervazioni ; p. 74. Tania, Solium. Linnæi, Syft. nat. édit, 12, p. 1323. Tania ofeulis marginalibus Jolitariis. Linn. amœæn, acad. 2, p. 74, t. 1, f. 1. Tenia fecunda. Le Clerc, hift. des vers, tab. 1; À, tab. 2. Tenia cucurbitina, Vogel de cog. & çur, corp. hum. aflect. p. 646. O0o02 46: OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, font plus ferrés , plus courts, plus étroits & plus minces près de l'extrémité fupérieure (2), plus allongés près de l'inférieure (C). La reflemblance de ceux-ci avec des femences de courge, a fait donnner au ver le nom de ver de courge, ou mieux encore , ver cucur- bitin. 1 eft long de plufieurs aunes ; on ne le rend jamais entier , mais par portions détachées qui tombent d’elles-mèmes; les accidens occañonnés par fa préfence , étant les mêmes que ceux que produit le ver folitaire , l’infpection des portions rendues eft le moyen le lus sûr de déterminer l'efpèce. On peut même ajouter que cette infpection eft la feule preuve certaine de l’exiftence des vers quel- cpnques dans un corps malade , parce que les fymptômes décrits pré- cédemment, peuvent dépendre d’une autre caufe. On a cherché de tout tems les moyens de tuer ces vers & d’en procurer la fortie; les ouvrages des anciens Médecins font remplis de recettes propres à produire cet effer : quelques - unes continuene d’être employées , mais avec peu de fuccès ; d’autres font rombées dans l’oubli , ou modifiées diverfement , elles font la bafe des re mèdes fecrets vantés pour la guérifon de cetre maladie. Dans ce nombre , il en eft un qui pdroïît mériter une attention particulière. Madame Nouffer, née Meyer , de Morat dans le canton de Berne, qui l’adminiftre depuis vingt ans ; d’après les inftruétions & l'exemple de fon mari, a eu un fuccès fi foutenu , qu'un grand nombre de malades de la Suiffe, des pays voifins & mème du Nord, alloienc auprès d’elle chercher leur guérifon , par le confeil des Médecins les plus accrédités. M. le Prince Baratinski, de Ruflie, en éprouva l'utilité au mois d'Oétobre dernier , & rendit le lendemaïn de fon arrivée à Morat, un Ténia bien entier , long de quatre aunes. De retour à Paris, ce Seigneur s’apperçut au bout de fix mois, qu’il en avoit un fecond. Madame Nouffer fe tranfporta dans cette ville, à fa réquifition , & lui donna, fous les yeux de M. de la Motte fon Médecin , une nouvelle dofe du fpécifique , qui détermina au bout de quinze heures, la fortie d’un autre Ténia également entier & long de huit aunes. Ce remède fur enfuite adminiftré à d’autres perfonnes avec un fuccès pareil , & parvint même à calmer, fans aucune fuite fâcheufe , dans une jeune perfonne d’une conftitution très - délicate & très-irritable, des fymptômes qui avoient fait foupçonner chez elle l'exiftence d’un ver folitaire. Sa Majefté, inftruite de la célébrité & de l'efficacité de ce remède; a défiré d’en faire l'acquifition de Madame Nouffer elle - même ; nous avons été chargés par M. Turgot, Contrôleur - Général des Finances, & M. Trudaine, Intendant des Finances , de l’examiner, d'en vérifier les effers & de le rendre public. En conféquence, Madame Nouffer nous a communiqué l’expofé fuivant, écrir par SUR L’HIST. NATURELLE ET LES ARTS. 463 M. Motrer, ancien Confeiller-fecret & Chirurgien de la ville de Morat, & depuis environ huit ans, confident de fa méthode de guérir cette maladie. Æ XPOSÉ de la Méthode que Madame NOUFFER emploie dans l'adminiftration de [on fpécifique contre le Ténia, & du régime qu'elle fait obferver pendant le traitemene. » MapaAmE Nouffer n'exige de fes malades aucune préparation » particulière jufqu'à la veille de l’adminiftration du remède. Ce » jour ils doivent fe priver de rout aliment après le diner, & prendre » feulement, fur les fept ou huit heures du foir, une foupe, n°. 1e » un quart-d’heure après, elle leur donne un bifcuit & un gobelec » ordinaire de vin blanc, pur ou détrempé avec de l’eau, où même » de l’eau toute pure à ceux qui ne font pas habitués au vin. Si le » malade n’a pas été à la garde-robe ce jour-là , ou qu’il foit échauffé » ou fujer aux conftipations, ce qui eft rare quand on a le ver plar, » Madame Nouffer lui fair prendre le lavement fimple, n°.2, qu'il doit garder le plus long-tems qu'il pourra ; enfuite il fe couche & repofe de fon mieux. » Le lendemain de grand matin, environ huit ou neuf heures après la foupe, il prend, dans fon lit, le fpécifique, n°, 3; & pour faire paller les naufées qui viennent quelquefois à la fuite , il mâche du citron ou autre chofe femblable, ou fe gargarife la bouche avec quelque liqueur , fans rien avaler, ou il fe contente de refpirer du bon vinaigre. Si, malgré ces précautions , les naufées font trop fortes, fi les efforts du malade, pour garder le fpécifique , font impuiffans , il en reprendra une nouvelle dofe dès que les naufées feront pañlées, & tâchera de s'endormir aufli-t6e après. » Au bout de deux heures, il fe lèvera pour prendre le bol pur= » gatif, n°. 4, en une ou plufieurs prifes, & boira par-deffus une » ou deux tafles de thé vert peu chargé; il fe promènera enfüite » dans fa chambre. Lorfque la purgation commencera à faire effet, » il prendra de tems à autre une nouvelle taffe de thé léger, jufqu’à » ce que le ver foit rendu; alors, & pas avant, Madame Nouffer » lui donne un bon bouillon qui eft bientôt fuivi d’un autre, ou » d’une foupe , fi le malade la préfère. Il dîne comme on fait un » jour de purgation; après le diner, il fe repofe fur fon lit, ou va faire un tour de promenade, fe conduifant tout ce jour avec ménagement , foupant peu & évitant les alimens indigeltes. » La guérifon eft alors parfaite , mais elle ne s'opère pas avec la » même promptitude dans vous les fujets. Celui qui n'a pas gardé 2 C2 2 2 Cu ve 1 VUS CT MUIIS IV LES y M … ÿ » ÿ re’ 464 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, » tout le bol, ou que ce bol ne purge pas aflez, prend, au bout » de quatre heures , depuis deux jufqu’à huit gros de fel de Sedlirz, » ou à fon défaut, du fel d'Epfom difflous dans un petit gobelet d’eau bouillante : on varie la dofe felon le tempérament & les » circonftances. » Si le ver ne tombe pas en peloton, mais qu'il file , (ce qui 5» arrive particulièrement quand le ver eft engagé dans des glaires 5» tenaces qui ont peine à fe détacher ), le malade doit refter à la » garde-robe fans le rirer, & boire du thé léger un peu chaud: » quelquefois cela ne fuflit pas, & l’on a recours à une dofe de » fel de Sedlitz, fans changer de fituation jufqu’à ce que le ver foit » rendu. » Il eft rare que les malades, qui ont gardé le fpécifique & la » purgation , ne rendent pas le ver avant l'heure du diner : ce cas » particulier à lieu lorfque le ver tué refte en gros pelotons dans les » intetins, de façon que les matières, ordinairement plus claires » fur la fin de la purgation , paffenc au travers & ne l’entraînent » pas. Le malade peut alors diner, & l’on a obfervé que le manger, » joint à un lavement, concouroit à la fortie du ver. » Quelquefois le ver fort, par l'action feule du fpécifique , avant >» qu'on ait pris le bol ; alors Madame Nouffer ne donne que deux » uiers de celui-ci, où elle lui fubftitue le fel. » Les malades ne doivent point s'inquiérer des chaleurs & des » malaifes qu'ils éprouvent quelquefois pendant l'action du remède, » avant ou après une forte évacuation , ou lorfqu'ils font préts à » rendre le ver; ces impreflions font paffagères & fe diflipent d’elles- » mème , ou à l’aide du vinaigre refpiré par le nez. » Ceux qui ont vomi le fpécifique & le bol, où qui men ont » gardé qu'une partie, ne rendent quelquefois pas de ver ce jour-là. »> Madame Nouffer leur fait reprendre le foir la foupe, n°. 1, le » bifcuit, la boiflon, &, fuivant les circonftances, le lavement , » n°. 2. Sile ver ne fort pas dans la nuit, elle donne le lendemain, ©, de bon matin, une nouvelle dofe de fpécifique ; deux heures après, » fix à huit gros de fel, & dirige du refte fon malade comme le » jour précédent, à l’exceprion du bol qu’elle fupprime. » Elle obferve , en finillant , que les, grandes chaleurs diminuent » un peu l’action de fon remède ; aufli a-c-elle toujours préféré de » l'adminiftrer dans le mois de Septembre : quand elle n’a pas eu le » choix de la faifon, & qu’elle s'eft vu obligée de traiter des ma- »lades dans les jours les plus chauds de l'été, elle donnoit le » fpécifique de rrès-grand matin :avec cette précaution , elle n’a re- » marqüé aucune différence dans les effers ni dans les fuites. » Le ver folitaire eft le feul fur lequel le remède de Madame » 1 PR Q LAS SUR L'HIST. NATURELLE ET LES ARTS. 46$ » Nouffer a une aétion certaine , quoiqu'elle le regarde auffi comme » très utile contre le ver cucurbitin, elle avertit pourtant que ce » dernier eft beaucoup plus difficile à déraciner , & que pour en » guérir , il faut répéter le traitement plus ou moins fouvent, felon » la conftitution du malade «, Après cette déclaration , il fut décidé que le 23 Juin, on pro- céderoit aux premières expériences qui devoient conftater la bonté du remède de Madame Nouffer. Cette Dame , de concert avec M. Mottet, adminiftra , en notre prcfence , fuivant le procédé in- diqué , la foupe , le lavement, le fpécifique & le bol purgatif à cinq fujets différens, en nous prévenant qu’un feul avoir décidément le ver folitaire , & qu’elle ne propofoit que celui-là pour l’effai de fon remède, Ce fujer étroit M. Vincent, natif de Neuchâtel en Suiffe, logeant depuis trois ans & demi à Paris, Place Dauphine , chez M. Maller, Négociant en Horlogerie , âgé de vingt-fix ans, d’un tempérament vif & délicat, & aflez maigre. Il avoit fouvent de la mélancolie , des coliques, des dévoiemens accompagnés de dégoût , & alrerna= tivement des conftiparions avec appérit , des démangeaifons au nez, une fenfation douloureufe au creux de l’effomac , qui s'étendoir à droite & à gauche comme une ceinture. Il avoit rendu à Neuchâtel pour a première fois , cinq ans avant , une portion de Ténia , d'environ deux pieds , après avoir mangé beaucoup de raifin : au bout de deux ans, fouffrant de coliques & de dévoiement, il en rendit à Paris plufeuts autres portions. Cinq à fix mois après , ayant pris un purgatif dans la feule intention de fe purger , il en rendit deux aunes , & après le même efpace de rems , dans un cours-de-ventre fpontané, 1l en rendit autant pour la dernière fois, fur toujours obligé de le rompre , fans quoi il reftoit pendu fans fig, ou rentroit tout feul dans le corps (1). De l'avis d'un Mé- decin célèbre, il avoir fait ufage à Paris, depuis le 8 Février jufqu’au 8 Mai, tous les matins à jeun, d’une décoction de deux onces de racine de fougère mâle ,'& d’une pincée de bois de régliffe, dans deux pintes d’eau, réduites par l’ébullition à une pinte ; & par intervalles, il lui fubftituoit des pilules de Bontius à la dofe de 12 grains. L'infufifance de ces remèdes l’avoit déterminé à faire inceffam- C1) C'eft fur ce dernier figne, & fur ce que le malade le reconnue aifément à l'infpettion de différens vers plats, que Madame Nouffer propofa ce füujec, comme le feul parmi les cinq qui eûr ce qu'elle appelle le yraë Ténia, 466 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, ment le voyige de Morat, lorfqu'il apprit que Madame Nouffer étoit à Paris, Il prit donc ie foir du 22 Juin , la foupe N° 1, puis le lavement N° 2, comme les quatre autres fujers , & le lendemain marin à fix heures, le fpécifique N° 3, puis le bol N° 4 à huit heures & demie. IL eut au bout d’une heure, une première évacuation fimple ; dans la feconde , qui fur à neuf heures cinquante minutes, le Ténia pendoit & filoit ; à dix heures un quart, il étoit entière- ment rendu. Ce ver , qui a fervi de modèle au deflin que l’on a joint ici (pl. 1), étoit long d’environ trois aunes ; fon corps avoit , vers le bout le plus large , le long de la veine ou conduit longi- tudinal , à différens intervalles , des tubercules blancs (plr,1), gros comme des grains de chenevi , & quelques trous à peu - près carrés-longs (pZ. 1 , À), qui le perçoient à jour. Il étoit fort large & fort épais, ayant vers le milieu la largeur d’environ cinq lignes, & environ un tiers de ligne d’épaifleur ; ce corps fe prolongeoit de l'autre extrémité en un col mince ou filet d'environ vingt pouces de longueur , lequel alloit toujours en diminuant de groffeur, & avoit à fon extrémité , le diamèrre d’un fl à coudre. M. Vincent, après la fortie de ce ver, eut encore deux évacuations moyennes. Nous le vimes quelques jours après, en fort bonne fanté & fort content de fa guérifon, Nous dirons deux mots des quatre autres malades, quoiqu’ils nous fuffent préfentés par Madame Nouffer , le fecond & le troifième , comme ayant le ver cucurbitin , & le quatrième & le cinquième , feulement comme foupçonnés d’avoir des vers. Deuxième Malade. Le fieur Olivau , de Bordeaux , avoit rendu fouvent , depuis plufieurs années, des bouts de ver cucurbitin ; fur la fin de Mars, le remède de Madame de Nouffer lui avoit fair rendre, en peu d'heures , un autre bout d'environ fix aunes , en un peloton : il en rendit encore un d’une aune ; le jour qu'il fut traité fous nos yeux. Troifième Malade. Madame Dumont , de Metz en Lorraine , avoit rendu, depuis fix ans , des afcarides , quelquefois & plus fouvent des bouts de ver cucurbitin, de différentes longueurs, qui tomboient d'eux-mêmes & qui étoient vivans. Le jour de çe traitement elle en rendit de nou= yeau , avec des afcarides. Quatrième $ { = se SUR L'HIST. NATURELLE ET LES ARTS. 467 Quatrième Malade. La Dame Charles, de Marcouffi, à fix lieues de Paris environ, avoit rendu , il y a trois ans , des bouts de ver de la même efpèce, & vers la-fin de Mai, un ver rond. Elle avoit fait des remèdes; elle ne rendit aucun ver par cé traitement. Cinquième Malade. Le fieur Daniel, Orfèvre , rue de la Huchette , n’avoit jamais rendu de vers d'aucune efpèce, mais il croyoit avoir le ver folitaire, à caufe des fymptômes qu'il éprouvoit à l'eflomac & au ventre, & de la grande quantité de glaires jaunâtres & blanchâtres qu'il ren- doit par le bas, & qu'il regardoit comme des vers corrompus & diffous. Il rendit encore beaucoup de glaires dans fes évacuations du 23 Juin, mais point de vers. Jl ne fera pas inutile de remarquer , 1°. que Madame Nouffer ne donna aux troilième & quatrième de ces malades, que les trois quarts du bol purgatif, n°. 4, qu’elle avoit préparé chez elle, & apporté dans la maifon où les malades éroient raflemblés. Elle nous dit avoir fait ce retranchement, à caufe de la délicatelle de ces deux 2] fujets. 2°. Que tous ces cinq malades ne furent pas plus incommodés par leurs évacuations, qu'on ne l'eft communément dans une pur- gation médiocre; qu’ils n'eurent ni tranchées, n1 mal-aife. 3%. Qu'ils éprouvèrent tous, environ un quart-d’heure après avoir pris le bol, & le troifième malade un peu avant de le prendre, la fenfation comme de quelque chofe d’embarraffant & pefant, qui defcendoit de l’eftomac au bas-ventre. Le premier malade fur-tout eut cette fenfarion d’une manière fi marquée , qu'il jugea dans ce moment , par la liberté nouvelle de fon eftomac , & par l'embarras & la pefanteur furvenus au bas-ventre , que fon ver avoit quirté fon ancienne place & éroit defcendu. 4°. Que trous ces malades , après avoir pris leur foupe, n°. 1, la veille, dans une maifon où on les avoit raflemblés, allèrent coucher chez eux, & prirent le lavement, n°. 2, à l'exception de la troifième malade, qui en prit d’abord un d’eau fimple , puis un fecond d’eau avec un peu d’huile. Ils revinrent tous le lendemain dans la même maifon , où ils prirent aux mèmes heures le fpéciñ- que, n°. 3, & le bol, n°. 4, debout, & fans fe coucher de toux Tome VI, Part. Il. 1775, P po 468 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, le jour, hormis la troifième malade, qui fe tint de tems en tems couchée fur un lit, fans fe déshabiller, & à qui les règles, qu’elle attendoit plus tard , parurent le même jour. 5°. Que tous ces cinq malades dinèrent de bon appétit environ à une heure, eurent une ou deux petites évacuations l’après-dinée ; & furent dans l’état naturel le lendemain. Ce premier effai ayant prouvé que le remède propofé étoit efficace & nullement dangereux , nous jugeîmes qu’il convenoit de répéter nous-mêmes les expériences fur de nouveaux fujets ; & pour nous mettre à portée de les faire, Madame Nouffer nous donna les recettes fuivantes, écrites également de la main de M. Mortet. N°. 1. La Soupe. » Prenez une livre & demie d’eau ordinaire, deux à trois onces » de bon beurre frais & deux onces de pain coupé en petits mor- » ceaux, ajoutez-y la quantité de fel fufhfante pour l’affaifonner ; » cuifez le tout à bon feu, en le remuant fouvent jufqu'à ce qu'il » foit bien lié & réduit à une bonne panade «. N°. 2. Lavement. » Prenez feuilles de mauve & de guimauve, de chacune une » petite poignée, faites-les bouillir dans fuflifante quantité d’eau; » mêlez-y une pincée de fel ordinaire, & après avoir coulé , ajoutez » deux onces d'huile d’olive «. N°. 3. Specifique. » Prenez deux ou trois gros de la racine de fougère mâle, cueillie » en automne , & réduite en poudre très-fine; donnez cette poudre » dans quatre à fix onces d’eau de fougère ou de fleurs de tilleul. » Il faut que le malade pafle deux ou trois fois de cette même eau » dans fon gobelet, & qu'il la boive-après s’en être rincé la bouche, # pour n'y rien laifler (1) «. LR + GI D (x) L'eau de tilleul ou celle de fougère, ne font pas abfolument néceffaires, & peuvent être remplacées par l'eau fimple. Madame Nouffer l'a fubftituée dans je traitement du 23 Juin, n’en ayant pas d'autre fous la main; elle ne regatdoit pas certe différence comme fort importante, 1 SUR L’'HIST. NATURELIE ET LES ARTS. 469 La fougère mâle, indiquée ici par Madame Nouffer, eft le Filix non ramofa dentata. C. B. Pin. 358, Tourn. inft. 536. Polypodium filix mas. Linnæi, Sp. pl. 1551. Sa racine (pZ. 2, 4), eft traçante, horizontale, compacte, chargée d’un grand nombre d’appendices (Z) très-ferrées & dirigées verticalement , qui font des bafes fubliftantes de tiges anciennes. Ces appendices (C), de la groffeur du petit doigt, font noirâtres à leur furface, jaunâtres dans l’intérieur , en- tourées à leur bafe de plufeurs écailles membraneufes (2), & garnies inférieurement d'une touffe de racines chevelues (£); de l’une des extrémités de la racine principale, s'élèvent plufieurs tiges (F) qui, fans fe ramifier, fupportent deux rangs oppofés (G) de feuilles oblongues & pinnées (H), plus allongées vers le milieu de la tige (Z/), plus courtes à mefure qu'elles s’approchent de fon fommet (Æ). Les folioles (L) qui les compofent, font dentelées dans leur contour , & leur furface inférieure dans le tems de Ja fleuraifon, fe charge de petits paquets (M) arrondis & jaunâtres , difpofés régulièrement; la membrane qui recouvre chacun d’eux , laifle appercevoir , en fe déchirant fur les côtés , un amas d’anchères d’abord jaunes, enfuire noirâtres , lorfqu’elles ont jetté leur pouflère féminale. Ce font les feules parties de la frucification que l’on connoiffe dans cette plante, ainfi que dans toutes fes congénères dont on n’a pu découvrir jufqu’à préfent les organes femelles. On réferve pour l’ufage , la groffe racine (N) avec fes appendices, ayant foin de retrancher les deux extrémités , dont l’une ( © ) eft toujours trop ancienne & fpongieufe, l’autre (P) trop nouvelle & verdâtre. La partie confervée doit être ferme & compaéte, noire à l’extérieut , blanchâtre en dedans : on la sèche avec foin & on Ja pulvérife lorfqu'on veut l’employer. La fougère femelle, Æilix ramofa major , pinnulis obtufis non den- tatis. C. B. Pinn. 357. Tourn. Inft. 536. Pueris aquilina , Linnæi, Spec. 1533, jouit à peu-près des mêmes propriétés que la mâle, fuivant plufeurs Médecins. On la diftingue aifément par fa racine fimple & dénuée d’appendices , fes tiges rameufes, fes folioles en- tières & bordées dans leur contour d’un feuillet membraneux , qui fe replie fur fa furface inférieure, & recouvre les anchères difpofées le long de la bordure, N°. 4. Bol purgatif. » Prenez panacée - mercurielle fublimée quatorze fois, réfine de # fcammoncée d'Alep bien choiïfe, de chacune dix grains ; gomme- » gutte, bonne & fraîche, fix à fept grains : réduifez féparément Pppa 470 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, » chacune de ces fubftances, en poudre fine; enfuire vous les mêlerez » enfemble pour en faire un bol, avec de la bonne confection » d'Hyacinthe «&, Cette recerte, que Madame Nouffer tenoit de fon mari, peut varier pour les dofes, & elle a eu , depuis plufieurs années, le même faccès, en réduifant la gomme-gutte à quatre grains. C'eft même dans cette dernière proportion que le bol avoit été adminiftré aux cinq malades du 23 Juin. Madame Nouffer , qui avoit apporté de Suite fes remèdes tout préparés, s’étoit fervi du poids de ce pays, le même que celui d'Allemagne, dont le gros eft divifé feulement en foixanre grains. Il er réfulroir , que pour former ici des bols purgatifs du même poids, il falloir augmenter chaque dofe d’un fixième , & mettre douze grains de fcammonce, autant de panacée- mercurielle, & quatre grains, plus quatre fixièmes de gomme-gutte, poids de Paris, puifque le gros de Paris eft divifé en foixante-douze grains. Nous reconnümes aufli que, quoique Madame Nouffer , fui- Vant les inftructions de fon mari , fe foit ordinairement fervie de la véritable réfine de fcammonée, il lui eft cependant atrivé d'acheter, fans le favoir, & d'employer à fa place, la réfine de jalap , fans avoir apperçu aucuné différence dans les effets; elle fe plaignoit feu- lement que certe réfine pulvérifée confervoit une couleur jaunâtre, pendant que l’autre, employée par fon mari, & préférée conféquem- ment par elle, devenoit d'un blanc verdâtre. Dès que nous eumes une connoiffance affurée des remèdes foumis À notre examen, M. Cadet fe chargea de les compofer fous nos yeux & en préfence de Madame Nouffer & de M. Mortor, qui les trou- vèrent tous très-bien préparés. On choiïfit de la racine de fougère bien sèche & cueillie l'automne dernier ; on en fépara toutes les parties inutiles, & on pulvérifa le refte avec foin. Certe poudre fut partagée en plufieurs paquets de trois gros chacun: La panacée mer- curielle de M. Cadet, étroit le mercure doux, fublimé fepe fois, Sa réfine de fcammonée avoir été préparée la veille par l'évaporation jufqu’à ficcité, d'une forte teinture de belle fcammonnée d'Alep, faite par lefprir-de-vin. Cette réfine en mafle étroit noirâtre; en lames minces, elle devenoit tranfparente & de couleur d'hyacinte; en poudre, elle étoit d’un blanc-verdâtre. Pour préparer les bols, on broyoit d'abord à moitié la fcammonée dans un mortier de caillou avec un pilon de mème matière; on ajoutoit enfuite la panacée-mercurielle & on broyoit ces deux fubftances réunies jufqu’à ce qu'elles fufent en poudre très-fine; alors on y mêloir la gomme gutte, & Madame Nouffer les réduifoir en éleétuaire, avec fuffifante quantité (48 à 6o grains) de confection d’hyacinthe ; fe fervant, pour cer effer, de ENT MC PTINNT Lada A si "1 L Le | SUR L'HIST. NATUREILE ET LES ARTS. 51 la paume de fa main & d’un couteau. Ce fur ainfi que l’on forma pluñeurs bols, compofés chacun de dix grains de panacée, autant de fcammonée, & quatre grains de gomme -gurte, poids de Paris (1 ). Ces divers paquets furent cachetés , & le foir du même jour on donna , chez M. Cadet, la foupe, n°. 1 , aux malades qui devoient prendre le fpécifique ; ils allèrent paffer la nuit chez eux, & fe réu- nirent le lendemain 26 de Juin dans le mème lieu ; nous les traitâmes fuivant la méthode indiquée, & nous obrinmes les ré- fultats fuivans, Premier Malade, La Demoifelle Legrand , d’une conftitution ordinaire , nous 4 dit sêtre apperçue , il y a cinq ans, qu'elle avoit le ver folitaire, en ayant rendu une portion par l'effet d’un purgatif; elle ne fentoit jamais de démangeaifon au nez, mais elle fouffroit des coliques & de fréquens battemens dans le creux de l’eftomac, beaucoup de dé- goût , fouvent des naufées avec vomiffemens de férofités, un dévoie= ment prefque continuel , la fenfation fréquente de quelque chofe qui montoit à la gorge comme pour l'étrangler , qui lui donnoit envie de vomir , & qui fe paloit en avalant : elle éroit mal réglée, & avoit environ tous les mois quelques érourdiffemens; fes déjec- tions étoient blanchâtres, comme quand on a pris beaucoup de laits elle avoit pris auparavant, pendant cinq femaines, de l’eau bouillie avec du vif-argent, dans laquelle on faifoit infufer de la racine de | fougère, On lui donna à fept heures du matin, la poudte N° 3 à la dofe | de trois gros. Vers les huit heures & demie, elle fentit à l’eftomac un allégement nouveau , auquel fuccéda un poids dans le bas-ventre; à neuf heures elle ne prit, eu égard à fa grande facilité de vomir, que les trois quarts du bol N° 4 , préparé la veille : ce ménagement joint à celui qui nous avoit fait fubitituer le poids de Paris à celui d'Allemagne , retarda les évacuarions, au point qu'il fallut fur les onze heures , lui donner deux gros de fel de Sedlirz , & les répéter cinq heures après, puis donner au bout d’une heure le layement N° 23 à deux heures elle dina avec appétit ; mais demi-heure après le lavement , elle rendic ce qu’elle avoit mangé. Elle eur encore d’autres vomifiemens dans la journée & dans la nuic; fes felles, au nombre de dix-huit ou vingt dans le mème efpace de tems, furent nété te de nn tes a ————_—_——— Ê ° C1) Dans la crainte de fatiguer les malades qui devoient être foumis aux premières expériences , on employa, fuivant le defir de Madame: Noufér elle- même , le poids de Paris, moins fort d'un fixième que celui d'Allemagne, 472 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, toutes très-petites , les dernières étoient écumeufes & blanchâtres. Le poids au bas-ventre qui s’étoit fair fentir une heure & demie après la prife du fpécifique , fubfifta jufqu’à quatre heures du matin; elle eut alors , pour la première fois, une grande évacuation, dans laquelle elle rendit en pelotons deux Ténia bien formés , de plu- fieurs aunes de longueur, de cinq lignes de largeur , & terminés chacun par un col où filet fort allongé ; il avoit une aune de lon- gueur dans lun, dans l’autre il éroir beaucoup plus court. Les vers éroient mollaffes & faciles à rompre , à caufe de leur long féjour dans les gros inteftins & dans les matières qui étoient fétides. Cette forte évacuation fut fuivie de trois autres moyennes , & la malade s'eft retirée parfaitement guérie. Second Malade. La Dame Cornu, d’une conftitution maigre & délicate , de- meurant à Paris depuis fix ans , reconnut dès l'âge de dix -fept ans , qu'elle avoir le ver folitaire , parce qu’elle en rendit de grandes portions dans un dévoiement à fa première couche. Dans les crois ans qui fuivirent, elle ne reffentit aucune incommodité ; mais au bout de ce tems elle eut un cours de ventre continuel de dix-huit mois , pendant lequel on la mit au lait & au gruau pour toute nourriture. I! furvint dès coliques très-fortes, qui fe renou- vellèrent tous les deux mois ; celle qu'elle éprouva l'hiver dernier , dura plus long-tems , & fat accompagnée d’un cours de ventre dans lequel elle rendit cinq fois des portions aflez longues de Ténia. Elle avoit de tems en tems des conftipations de fepr à huit jours, à la fuite defquelles elle évacuoit par le bas avec douleur des eaux rouffés mèlées de pellicules noirâtres & de glaires ; ces diarrhées fuccellives lui ont occafñonné une chute de reétum habituelle. Elle étoit d’ailleurs mal réglée , & fouffroit quelquefois pendant un mbis & plus des naufées fans vomilfemens, des palpitations au moindre mouvement, des douleurs autour du nombril & point à l’eftomac, des démangeaifons au nez & au fondement. Elle prit le fpécifique à la dofe de trois gros , le 26 Juin à fept heures du matin, & à neuf heures, un peu plus de la moitié du bol purgatif; les caufes qui avoient retardé l’action du purgatif fur la première malade , produifirent le même effet fur celle-ci, qui éprouva à peu-près des fymptômes pareils, à l'exception de la dou- leur d’eftomac qui ne changea pas de lieu , & ne paffa pas dans le bas-ventre. À une heure après midi, on lui donna deux gros de fel de Sedlirz; elle dina à deux heures avec appétit, à quatre, elle pric le lavement N°. 2. Dans le cours de la journée , & le foir , elle Les PE sr F SUR L'HIST. NATURELLE ET LES ARTS. 473 eut quatorze à quinze felles moyennes fans douleurs ; fon fommeil de la nuic fur bon , mais interrompu par plufeurs felles , dont quatre ou cinq furent plus confidérables; à cinq heures du matin, on trouva dans fon baflin le ver qu’elle avoit rendu fans s’en ap- percevoir , & même en vifitant le baflin plus attentivement , on re connut qu'il y avoit deux Ténia bien diftinéts , dont l’un fut vu vivant & remuant, à fix heures & demie , par M. de Jufieu , qui avoit pallé la nuit chez M. Cadet, pour être à portée des malades retenus dans le même lieu. Ces deux vers mollaffes & partagés en plufieurs portions , à caufe du long féjour dans le corps & dans les matières, avoient quatre ou cinq lignes de largeur ; l’un étoit d’un gris- blanchâtre , l’autre jaunâtre & un peu plus mince. La malade, malgré fes évacuations , n'étoit pas fatiguée, & fe trouvoic très-bien. Il eft bon d’obferver que Madame Nouffer lui avoit donné trois femaines auparavant , des tablettes purgatives & vermifuges en perite dofe, pour reconnoïître par les évacuations , l’efpèce de ver qui oc- cañonnoiït la maladie. Ces tablettes, donr nous donnerons ci-après la compofñrion, la purgèrent pendant trois jours , environ quarante fois chaque jour , & l’affoiblitent fans qu'il parût de ver:ce ne. fur qu’au bout de dix jours qu’elle rendit des afcarides, & quatre à cinq aunes de Ténia blanchatre. Troifième Malade, Le troifième malade eft le fieur Allain, de conftitution moyenne, âgé de quarante-huit ans. Selon fon rapport , il rendit, ily a environ trente ans , après une colique accompagnée de dévoiement, une longue portion de ver folitaire (1), & depuis ce tems, chaque année il a éprouvé quatre ou cinq fois les mêmes fymptômes , & a rendu autant de fois de nouvelles portions de ver , qu'il étoit tou- jours obligé de rompre. Il fouffroit aufli des douleurs fourdes & ha- bituelles autour du nombril, des maux d’eftomac, des érourdilfe- mens , des laflitudes & des douleurs dans les membres; des dégoûts & quelques démangeaifons au nez. Ce malade prit à fepr heures du matin, le fpécifique à la dofe de trois gros; & à neuf heures le bol entier , que nous avions préparé la veille. Il fentit dans la matinée , que l'embarras habituel de l’ef- tomac étoit defcendu dans le bas- ventre ; fon fondement lui pa- roiffoit bouché , comme par un paquet qui arrèroit les évacuarions, C1) On lui montra un ver cucutbitin & un folicaire, il reconnut que le fin toit de cette dernière cfpèce. . i - TT TT GA g. d = è 474 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, X Pour les accélérer, on lui donna à midi une demi-once de fel de ne Sedlitz, & autant une heure après; il dîna de bon appérit à deux heures ; à quatre , il prit le lavement, N°. 2; à fix , où lui enddmi- niftra un fecond d’eau , dans lequel on avoit diffous rois gtos dé fel commun. Les évacuarions ‘ne commencèrent qu'après | ‘Ainer » & furent peu nombreufes pendant le jour ; dans Ja nuit, il y en eut” vingt affez abondantes ; à cinq heures du matin, le paquet qüi toit toujours refté au fondement fortit, & le malade s’appergar que ‘c'é< toit le ver ramaflé en peloton. Il eut encore, depuis fa_ forme quel- ques évacuations légères & aqueufes : ce Fénia avoit cinq à fixaunes’. de longueur , fon col ou filer éroit très-long, le corps large &'aflege épais ; fa couleur tiroit für le gris- cendré ; le long féjour dans corps & dans les matières l'avoir rendu mollaffe ; la portion de la plus mince étoit féparée & réduite prefqu’en pâte :, le malides . éroit de fort-bonne humeur & en bonne difpofñtion. ÉTES Quatrième Matade. à 10 TNT RE Pendant que nous étions, le foir du 26, chez M. Cadet, afliflans à ; les malades dont nous venons de parler, il fe préfenta, la, Damef® Marguerite Schmidt, de Pérersbourg ; âgée de trente - deux 1®, + d’une conftiturion aflez délicate, & elle nous dit qu’elle avoit com-#* mencé à rendre des portions de Ténia depuis dix ans, & qu'elle ere avoit rendu un bout fix jours auparavant ; elle nous ajouta qu’elle fouffroit habituellement des maux d'eftomac , qui s’érendoiènt-aux hypocordres comme une ceinture , des maüx de tête , des érout-, diffemens, quelques naufées, des coliqgs , des maÿx de, reins , des démangeaifons au nez, & ratement des couts dé-ventre.; elle dit qu'elle avoit pris en Ruflie quelques remèdes dont*elle ne. fe fouvenoit point , & qu’elle n’en avoir pas fait à Paris. Nous’ lui fimes prendre le même foir la panade au beurre & le livement , comme l’expofé l'indique. Le lendemain, 27 de Juin, à fix heures trois quarts, elle prit la poudre à la dofe de trois gros & demi, & à neuf heures .& demie, le bol fait avec dix grains de panacée-mercurielle ," dix de réfine de fcammonée, & quatre grains de gomme-gutte, poids d'Alemagne(1), = LE be Ne (1) On préféra, pour cette dernière épreuve, le poids d'Allemagne à celui de Paris, pour voir fi l'action retardée du remède dans les malades précédens, dé- endoit de la diminution des dofes. L'expérience confirma la vérité de certe conjeéture, ; puifque l'addition d'une fixieme partie détermina beaucoup plus promptement la fortie du ver, " - & à fa troifième felle, elle rendit, fans s'en apperce- Hépaquet , deux ténia blancs, bien entiers , avec leur es pour la figure à celle'que donne M. Le Clerc, Le Ténia le plus court avoit trois aunes & demie ; filévswu à la loupe , paroifloit fe terminer en un petit tuber- conformé comte un bec de canne, & de couleur roufle ; le filet de l’autre Ténia, examiné de même à la loupe, éroit terminé par Mine fpirale à deux-tours & demi, qui, dans l’efprit-de- vin, changea en ligne droite. : rois antressperfonnes qui croyoient avoir le ver folitaire , mais nous avions jugé atteintes d’un autre mal, défirèrent cependant prendre le remède de Madame Nouffer, il ne produifit fur eux "d'awre effec que de les purger efficacement, & d’évacuer beaucoup de. irgs. Le fieur Olivau, l’un des malades du 23 Juin, qui, dans _… {es'defx crairemens antérieurs, avoit rendu deux portions de ver cucurbirin, ne rendit rien dans cette dernière épreuve à laquelle il julut de nouveau fe foumettre ; ce qui nous. fit préfumer qu'il étoit tièrement guéri. Le fieur Daniel, autre malade qui fouhaita réi- tre “l'épreute , ne rendit encore , dans ce fecond traitement, que < Mises s dont la fortie le foulâgea beaucoup; il fut alors con- yaincu que fon mal n'étoit point caufé par la ae d'un ver. = Telles*fonr les épreuves que nous avons faites pour conftater -lefficaciré da remède adminiltré par Madame Nouffer , & qui nous ont engagés à lui donner üne. pleine approbation. Ce fpécifique ne doit pas cependant être regardé comme une découverte nouvelle, action de larfougère fur de Ténig a été connue très-anciennement. - Théophraîté (1) indique fs racine à la dofe de quatre gros dans - xoir jen un. . C1) Filix fœmina uilis contra interaneojum animalia lata , melle fubaëäa , & contra tenuja in vino dulcr cum farinâ hordeaceñ data. Theophr. hift. plant. Gaza interprete , Lib. IX, cap. :0..... Filicis maris ( Preris) radix lumbricum latume excurit , quatuor drachmarum pondere, cum aquê mulfd accepta ; meliès autem fe cum fcammonie , aut “veratri nigri obolis quatuor quis exhibeat. Verbm eos qui ac- | ciprunt alliugr prits ediffe oporter..... Filicis fœmine ( Thelypteris ) radices cum + melle in eclegmate fumpte latum lumbricum expellunt.; cum vino verd pote , drachma- ; rum trium pôagere, rocundum lumbricum excutiunt. Diofcorid. Mater med. inter prete Cornario, Zi. 1W5 cap. 163. ... Filicis ( cum maris, tum fœmine)) radices pellunt interaneorum animalia...., Utraque alvum folvit, primd bilem trahens , \ mox aquam , meliès Tanias cum fcammonit pari pondere. Plin. hift, nat. lb, XXW11, 4 è cap. 9.... Filix mas radicem habec maximé utilem, latum: enim lumbricum interficir, 4 fi quis eam quatuor drachmis cam melicrato bibaï, Galen, fimplic. /éb. 8, Princip, è medic. Aëtius. p. 49. Ckibaf, p. 6o8, . ; 8 Tome VI, Part. II. 177$: Q qq 476 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, une eau émulfionnée, comme propre à chaffer les vers plats. Diofcoride l'ordonne à la même dofe, & il ajoute que fon effer eft plus sûr, quand on la mêle avec quatre oboles (40 grains) de fcammonée, ou d’ellébore noir; il exige fur-rout qu'auparavant on ait pris de l'ail. Pline, Galien, Oribafe , Aëtius, afignent cette même vertu à la fougère, en quoi ils font fuivis par Avicenne &c les autres Mé- decins Arabes. Dorftenius (1) Valerius Cordus , Dodoens, Mathiole, Dalechamp, qui ont commenté Diofcoride , ou qui l'ont copié dans plufeurs articles, citent également la fougère , comme fpécifique contre le Ténia. Sennert (2) & Burnet , après lui, recommandent, en pareil cas, l’infufon de cette plante , ou fa poudre, à la dofe d’un gros pour les enfans , & de trois pour les adultes. Simon Pauli(3}, cité par Ray & Geoffroy, la regarde comme le poifon le plus efh- cace contre les vers plats, qui fait la bafe des remèdes fecrets vantés par les Charlatans , pour cette maladie. Andry ( Génér. des Vers, pages 246 & 249, ) préfère l’eau diftilée de fougère à fa racine en poudre , ou il n’emploie celle-ci que fous forme d'opiate , & mêlée à d’autres fubftances. Ces Auteurs ne font pas les feuls qui aient parlé du Ténia; plu- fieurs autres ont décrit ce ver, ainfi que les maux auxquels il donne naiffance , & le traitement pour les guérir; prefque rous font men- tion de la fougère, mais en même-tems ils indiquent d’autres remèdes comme également propres à tuer le ver. Tels fonc l'écorce de la racine de mürier, le fuc de l’avricula muris (4), la racine du chameleon niger (s), celle du gingembre, de la zédoaire; les (1) Dorftenii botanic. p. 124.... Dodon. hift. ftirp. p. 459..... Mathiol, comment. in Diofcorid. p. 1289.... Dalechamp. hift. plant. p. 1222..... Filix mas germanicè Faren, ffve Faren-kraut vocatur, proptereà qua latos ventris lum- bricos expellat , quos Germani Faren nominant. Valer. Cord,iannor. in Diofcorid. page 76. F2) Commendatur imprimis filix , è qué recent: aqua diflillata datur , vel pulvis, drach, $. pondere, infantibus ; natu majoribus , drach. 1 ; adulris , drach. 111 pon- dere, cum aquä galge, que [ine ullis moleffiis vermen € lente & cd, fi velis, enecat. Seunert, praét. page 410. Burnet, Thef. medic. page 648. (3) Filix lumbricos longos ac latos enecat , quorum prefentiffima peflis eff... eamque inter fecretifima fua fecreta, adversùs lumbricos habent & venditant agyrte. Simon Pauli quadrip. bot. p. 301 Raïi, hift. plant. vol, 1, p. 149. Gcoffr. mar. medic. vol. III, p. 476. (4) Alfine myofotis five auricula muris. Lobel ic. 461. Echium fcorpioides ars venfe. C. B. pin. 254. Lithofpermum arvenfe minus. Tourn. inft. 136. Myoforis fcorpioides. Linn. fpec. 188. (5) Chamaleon niger. Diofcorid. Chameleon niger umbellatus, flore caruleo hya= cinthino. C. B. Pin. 380. Carthamus aculeatus, carline folio, flore mulriplici , veluti umbellato. Cor, inft, 33. Carthamus corymbofus. Linn, fpec. 1164. SUR L'HISTONATUREILLE ET LES ARTS. 477 décottions d’armoife , d’aurone, d’abfinthe , le pouliot, l’origan , l'hyfope, & en général toutes les plantes amères & aromatiques, &c.... Les uns ordonnent le fpécifique , fimplement délayé- dans du vin ou dans une eau émulfñonnée, les autres lui joignent un purgatif qui augmente, felon eux, fon eficacité. Quelques-uns, rels qu'Oribafe (1), Sylvius , &c. diftinguenc le fpécifique qui tuele ver, du purgarif qui l’évacue , & recommandent de les adminiftrer dans des tems diffé- rens. Sennert (2), en adoptant cette méthode, en donne une raifon fort fatisfaifante : fi l’on joint, dit-il, le purgatif au fpécifique , il entraine le fpécifique avec lui, précipite fon aétion, & ne lui donne pas le tems de tuer le ver qui réfifte alors à une impulfon pañagère. Au contraire, lorfque le fpécifique a eu le tems de tuer le ver & de le détacher , le Lt qui vient après , pouffe au dehors lun & l'autre, & la guérifon s'opère promptement, fur-tout fi l'on a eu foin auparavant de lubréfier les premières voies. Ces attentions font néceflaires pour aflurer la cure , & l’on voie que Madame Nouffer ne les néglige point dans fon traitement. La prie au beurre & le lavement qu’elle donne la veille , lubréfient es inteftins & préparent les voies. La poudre de fougère prife le matin , tue & détache le ver, ce que les malades fentent par la ceffarion de la douleur à l’eftornac, à laquelle fuccède un poids dans le bas-ventre. Le bol purgatif adminiftré deux heures après , procure une évacuation complète ; il eft compofé de fubftances tout- à-la-fois purgatives & vermifuges , qui ont encore une action di- recte fur le ver, & qui, mème adminiftrées feules par divers Mc- decins , ont quelquefois fufñ pour l’entraîner au-dehors. Si ce purgatif paroiffoit trop fort , on fe fouviendra qu'il n’a produit aucun effet nuifible fur les malades foumis à nos expériences , & que même pour avoir une fois diminué les dofes, nous avons retardé les Évacuations. Il faut cependant avoir égard à l’âge & au tempérament RS ee 00 6 C1) Hac breviffimo tempore lumbricos interimunt, quos poflea medicamentum educit. Principes medic. Oribaf. p. 329..... Lumbrici ff adfunt, agri fanantur, 19. wvidés ratione...... 1°. remediis necantibus lumbricos. .. .. abfinthio, abro- tano.... menthaftro, alio, radice filicis mafculæ , radice pgraminis , &c..... 3°. remediis enecatos expellentibus , ut aloë, abfinthium , rhabarbarum. . . . & (pra- cipuè pro lumbricis latis) pilule ex aloë, myrrhâ, croco... &c. Sylvius, p. 442. (2) Fortioribus medicamentis opus eff ut interficiantur lumbrici lati. Quapropter etfi in teretibus purgantia cum interficientibus commode admifceantur : prafiac ta- men in latis, nulla ïis purgantia primèm admifcere, chm purgantia non ffnant me- dicamenta vermes interficientia di in énteflinis herere, fed ea cità per alvum fecum educant. SE verd prils exhibeantur medicamenta que ipjum debilitent , totus rotun- dus faëlus ad pile figuram exit, & homo fanus evadit. Sennert , pra, page 410, Burnet, Thef. med, page 648. Qqq2 478 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE; du malade , & il convient que le traitement foit toujours dirigé paf des Médecins habiles à faifr les proportions convenables. Si le pur- gatif eft trop foible , le ver déja détaché par le fpécifique , féjourne trop long- tems dans les inteftins , s’y corrompt & ne fort que par parties détachées ; lorfque le purgauf eft trop fort , il occafionne des irritarions & des évacuations incommodes. Madame Nouffer avoit fur ce point un ta& particulier , fruit d’une longue expérience. Ce traitement , comme l’on voit, eft extrait en partie des an- ciens Médecins ; il fera poflible de produire le même effet en variant les remèdes , mais la manière de les appliquer n’eft pas indifférente. On fera toujours plus sûr de réufir fi l'on a la pré- caution de vuider le conduit inteftinal, & fi l’on donne le fpéci- fique quelque tems avant le purganif. C’eft à cette méthode que nous croyons devoir attribuer les fuccès conftans de Madame Nouffer. Son remède a aufli une action fur le Ténia cucurbitin , mais comine les anneaux de celui-ci fe féparent facilement les uns des autres , il eft prefqu'impoñlible qu’il forte entier ; on doit alors re- commencer plufeurs fois le traitement , jufqu'à ce que le malade ne rende plus aucune portion de ver. On le renouvelle également, lorfqu’après la fortie d’un ver folitaire il s’en forme un nouveau dans le conduit inteftinal. Ce dernier cas eft aflez rare, ce qui avoit fait croire qu’une mème perfonne ne pouvoit avoir qu’un feul ver, nommé pour cette raifon Solitaire , lequel une fois délogé, n'étoic jamais remplacé par un fecond ; mais l'expérience a démontré la faufleré de ce préjugé : quelquefois ces vers fe fuccèdert les uns aux autres, quelquefois encore ils exiftent plulieurs enfemble. On a obfervé affez fréquemment deux Ténia vivans dans les mêmes in- teftins ; nous enavons eu fous les yeux, le 26 & le 27 Juin, trois exemples , auxquels on pourtoit ajouter un quatrième plus frappant rapporté par M. de Haen (1), d’une femme qui rendit dix-huit Ténia, bien entiers dans un feul traitement. Alors les fymprèômes font plus graves , l'appétit devient exceflif, parce que ces vers , qui ne fe nour- riffent que de chyle, en confomment davantage. Si un régime trep auftère & mal entendu les prive de cet aliment , il eft à craindre qu'ils n’attaquent les membranes mème des inteftins , au point de les percer; on évite ce malheur en mangeant fouvent. Telles fonc les précautions indiquées dans cette maladie ; les ver- mifuges ordinaires , employés dans la vue de guérir , n’opéroient le pius fouvent qu’une cure palliative ; quand ils étoient admi- nifirés fans méthode. Celle que nous préfentons ici paroïc certaine RD D CP (1) Ant, de Haen, ratio medendi, tome VII, p. 157. | APS vi AT LÉ REI Mars , ; 10 r œ k bo. Dés on con SUR L'HIST. NATURELLE ET LES ARTS. 4% & confirmée par l'expérience; notre premier devoir étroit de la pu- blier promptement , & de remplir en ce point les vues bienfaifantes d'un Roi qui defire que les découvertés utiles à fes fujets, ne reftent pas long-rems ignorées. Ce motif nous a fait paller légèrement fur l'hiftoire naturelle des vers , pour nous occuper plus fpécialement de la partie qui intérefle la fanté des citoyens. Ainli , après avoir décrit en peu de mots les deux efpèces principales de Ténia, après avoir indiqué leurs caraétères diftinctifs & les fymptômes qui annoncent leur exiftence dans le corps humain , nous avons pallé tout de fuite aux moyens de guérifon & à l'examen du remède propofé, Les épreuves faites pour reconnoître fon efficacité & affurer fa compofi- tion , ont été détaillées avec un foin qui paroïtra peut être minutieux; mais nous avons cru ces détails d'autant plus importans , que le fpécifique du ver folitaire , déja connu dans l’ancienne Grèce, & recommandé de rems en tems par des Médecins du premier ordre, étoit généralement tombé, comme bien d'autres, dans l'oubli & même dans le mépris, parce qu'il n’avoit pas toujours été donné avec un égal fuccès. Certe différence dans les réfultats, vient d’une part , de ce qu'on n’a pas décrit foigneufement les fpécifiques & la manière de s'en fervir ; de l’autre, parce qu'on seit écarté de la pratique des peres de la Médecine, & qu’on n’a pas fait attention que les changemens les plus favorables en apparence , peuvent fouvent rendre inutiles des remèdes dont l'expérience à conftaté l'utilité. : A Paris, ce trente- un Août mil fept cent Joixante-quinze. Signé. Lassowe, Macquer , Gourez DE LA Morte, À. L. pe Jussieu, J. B. Carpur: & Caper. PIIOMSETASLSECIR DEP TI TM: Nous ajoutons ici deux Recettes particulières , communiquées par Madame Nouffer , qui dit les avoir employées avec fuccès dans les maladies vermineufes ; c'eft fur fon fimple témoignage que nous ublions leurs vertus qui n’ont point été éprouvées fous nos yeux : ke premier de ces remèdes procure la fortie du ver cucurbitin ; le fecond eft purgatif & vermifuge , adminiftré fous forme de tablettes, Reriède contre le ver cucurbirin. Prenez diagrède & extrait d'ellébore noir, de chacun un gros ; kermès & graine de tilli, de chacun un ferupule ; gomme-gutte un gros & demi; vous mélerez Le tout pour en former des pilules du poids de quatre grains, 4$o OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, Madame Nouffer ne donnoit ces pilules qu'aux payfans d’une forte complexion , qui, après avoir rendu des vers cucurbitins, par le traitement antérieur , vouloient quitrer Morat , & emporter avec eux quelque remède pour achever leur guérifon. Comme celui-ci n’eft pas bon pour tous les rempéramens, on préférera ; avec raifon, la poudre de fougère & le bol purgatif qui produifent le même effer après plulieurs prifes, & font moins aétifs, Tablettes vermifuges & purgatives. Prenez réfine de jalap & mercure - doux , de chacun deux gros ; coraline, un gros & un fcrupule ; blanc d’Efpagne ou de Troies, deux gros & deux fcrupules ; fucre blanc , fix onces. Réduifez cha- cune de ces fubftances en poudre fine , ayant foin de tamifer le facre & la coraline ; vous mêlerez le tout avec fufhifante quantité de gomme-adragant , pour en faire une malle qui fera applatie fous le rouleau , & partagée en cent cinquante tablettes. Ces tabletres fé- chées avec foin , & confervées dans des boîtes à l’abri de l’humi- dité, peuvent fe conferver des années entières. Pour les employer, on fait bouillir environ fix onces de lait bien écrèmé, dont on verfe la moirié fur les rablettes mifes dans une taffe ; lorfqu’elles font bien fondues , on fait prendre au malade cette portion de lait ainfi chargée ; enfuite pour ne rien laïffer , on rince la taffe avec l’autre portion , que le malade boit encore. Ces tablettes font infuffifantes pour détruire le Ténia, elles en fant feulement rendre des portions. Madame Nouffer qui leur connoifloit cette propriété, les employoit quelquefois avant tout, pour recon- noître par quelque évacuation (1), l'efpèce de ver qu'elle avoir à combattre. Si c’étoit le Ténia , elle avoit recours à fon traitement particulier ; lorfque les malades n’avoient que des vers ronds ordi- naires , elle continuoit l’ufage des tablettes pendant trois jours confécutifs. Le premier jour elle donnoit aux enfans trois à fepr tablettes, & fepr à neuf aux adultes , ayant toujours égard à l'âge & au tempérament ; le fecond & le troilième jour, elle augmentoic où diminuoit la dofe, felon l’effer du jour précédent. Le régime éroit celui d’un jour de purgation ordinaire. ———————————————…—.—…—" —_"—" _ _’—_—_—————— (1) Les eaux de Pafly, font encore fort bonnes pour manifefter la préfence du ver, qu'elles font toujours paroître au-dehors lorfqu'il exifte. Cetre propriété peut être attribuée au vitriol qu'elles contiennent, & qui a été recommandé pag quelques Auteurs dans çe ças, SUR L'HIST. NATURELLE ET LES ARTS. 4% Nous obferverons, au fujet du traitement pour le Ténia , que le remède indiqué , adminiftré même plufeurs fois de fuite fous les yeux de plufeurs Médecins , à Paris, à différentes perfonnes atta- quées du ver cucurbitin, a manqué toujours fon effet, & qu'ainf on doit avoir recours à des médicamens plus efficaces pour le dé- truire, On obfervera encore que l’extiait de tanaifie , celui de ro- matin ne font point des remèdes indifférens dans ce cas, & que l’ufage des huileux mêlés au vinaigre , tels qu’on les prend en falade, contribue beaucoup à foulager les perfonnes qui ont le ver cucur- bitin. On ne doit point oublier aufli que M. Paulet, Médecin de Paris , après avoir effayé plufeurs fois en vain le remède de Madame Nouffec fur une perfonne qui avoir cette efpèce de ver, n'a pas été lus heureux , en faifant prendre quinze jours de fuite à la malade, ie amandes amères, à la dofe de 15 ou 16 par jour , ce qui furprend d'autant plus , qu’on fait que l’amande amère tue prefque tous les ani- maux. Ce Médecin a obfervé de plus, que dans la nombreufe famille des champignons , il y en a qui ont fait rendre plufeurs fois des vers cucurbitins à des chiens , ne faire périr l'animal qui Les avoic pris; mais il n’a pas ofé en faire l'épreuve fur les hommes. ARE RRE OUR pie QitE A l’Auteur de ce Recucil, fur une dégradation des Couleurs ; Par M. J. 4 MONGÈS, Chanoine Regulier , & Profeffeur de l'Abbaye de Saint- Lo de Rouen. A, ANT de vous détailler les obfervations fingulières que j'ai faites fur les couleurs accidentelles , il ne fera pas hors de propos de rap- posée ce qui y donna lieu. Je venois de lire dans le Journal de 7erdun du mois de Mars 1775 ; deux anecdotes d’hiftoire natu- relle , dont l'explication ne me parut point vraifemblable : les voici en peu de mots. Henri IV voulant jouer aux dez avec le Duc de Guife , on vic paroître tout-à-coup des gouttes de fang fur la table : on efluye, elles reparoiffent ; on efluye de nouveau, mais le fang reparut fans qu'on füt d’où il pouvoit venir ; ce phénomène épouvanta le Roi. Tel eft le premier fait que dans Le Journal on explique par Le fuivanc, 482 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, dE M. Bequelin lifoit une Gazerre ‘en fe promenant dans le parcde Berlin; tout d'un coup il fe trouve en face du foleil , tenant toutefois fa Gazette de façon que les caractères étoienr à l'émbre: il les vir alors teints d’un rouge vif & éclatant ; il répète pluleurs fois & de différentes manières cette expérience, & roujours le ré- falrar lui fr voir que , pour qu’elle pür réufir complèrement, il falloir que le foleil frappät direétement les paupieres de l'obferva- teur, & que l'objer resardé füt dans l'ombre. « Toutes ces circonf= » tances , ajoute celui qui rapporte ces deux anecdotes, fe trouvèrent » fans doute réunies lorfqu'Heuri IV voulut jouer aux dez «. Ce Prince, meilleur guerrier , meilleur Roi, que Phyfcien ou Naruralifte, fut effrayé de ce phénomène, dont il ne découvroit oint la caufe : je n'en fuis pas étonné ; mais ce qui me furprend , c'eft que dans ce fiècle éclairé, on veuilie expliquer deux faits rota= lement diffemblables l’un par l’autre. Dans les gouttes de fang qu'Henri IV apperçut fur fa table , jene vois que certe liquéur rouge & fanguinolente , que la chenille épi- neufe répand quand elle pañle de l'état de chryfalide à celui de papillon ; je ne vois que certe pluie de fang qui épouvantoit pério- diquement les anciens , & qui jetra l’allatme & l’effroi aux en- virons d'Aix en Provence, en 1608. M. de Peirefc feulen découvrit alors la caufe; il compara ces gouttes de liqueurs rouges qui ta- pifloient les murs de la ville & de la campagne , avec des gouttes pareilles que ces chryfalides de la chenille épineufe avoiéht rendues en fe métamorphofant; & fur-rout ce qui féalifa fa conjecture , ce fut lorfqu’il apperçut voltiger une nnée de papillons femblables rout-à-fait aux fiens : qui peut empêcher d'appliquer cette explication aux gouttes de fang qu'Henri IV & fes couttifans apperçurent ? Car, de bonne foi , peut-on dire que la table ne leur parut rouge, ue parce que le foleil frappoit leuts yéux ? Que de fuppofñrions il taie faire à pure perte ! En voici deux des plus frappantes, mais qui fe retrouvent dans le phénomène de M. Bequelin. D'après le réfultat des expériences du Phyfcien de Berlin, il fflloit néceffairement qu'Henri IV , le Duc de Guife, les courtifans & les valets qui effuyoient la table, fe crouvalfent fingulièrement placés , c'eft-à-dire, tous fur une même ligne, le foleil dans les yeux: je veux bien encore qu'ils fe fuffent trouvés rangés ainf une fois ; mais que le foleil les incommodant ; ils ne fe foient point dérangés du tout; que patiemment cette ligne de gens de Cour ait attendu que des valets effuyalfent jufqu'à deux fois la table; que ces mêmes valets, après avoir rempli leur office , fe foient rerrouvés juftement comme 1l falloit pour voir la table rouge , (car tout le monde voyoit ces taches) cela peur être, c'eft dans l’ordre des combinaifons pollibles ; maiy SUR L'HIST. NATURELLE ET LES ARTS. 48; mais qui ne dira pas avec moi, cela eft bien difficile , tranchons le mot pour ne pas dire impofñhble. La feconde fuppoñtion eft encore plus fingulière, Toutes les cir- conftances de la Gazette de M. Bequelin devant fe retrouver dans la table à jouer, elle devoit êrre à l'ombre dans une fituation ver- ticale, & perpendiculaire à l’horifon , comme la Gazerre : qui ad- mertra cette fuppolirion ? Les tables à jouer de notre tems, & à plus forte raifon du tems paflé , étant dans une fituation pirallèle à l’horifon , celle d'Henri IV étoit-elle la feule exceptée ? Mais, dira-ron , la table pouvoit fe trouver tout-à-fait à l'ombre dans un coin; à cela, je demanderai pourquoi l’on vit des taches rouges fur la table plutôt que fur les murs à l'ombre ? L’explication que je donne du phénomène n'eft peut-être pas plus vraie, mais elle eft au moins plus vraifemblable , plus naturelle & plus phyfque; il ne faut qu'une fuppofñirion affez fimple. Ë Une chryfalide ou deux de la chenille épineufe fe métamorphofenr en papillon comme Henri IV vouloit jouer au dez ; elles répandenr leur liqueur rouge; on efluye, de nouvelles taches tombent & fuc- cèdent aux premières : l'ignorance n’en voit pas la caufe, & ne la cherche même pas : à rous les yeux ces raches rouges paroiffent du vrai fang ; on crie au miracle. Dans un fiècle de carnage , où les jours ne fe comptoient que par des maffacres, des meurtres & des combats , où l’aftrologie judiciaire , fille de l'ignorance & de la pu- fillanimité, rèonoit defpotiquement , tous les effets dont la caufe n'étoit pas connue , paroifloient miraculeux : c'étoit , difoit-on, autant d’avertiffemens du ciel, & je ne doute point que fi les Courti- fans de Henri IV euflent vu le papillon répandre cette liqueur rouge, ils lauroient pris pour un figne funefte , pour le préfage de quelque grand malheur. Mais je m’apperçois que me voilà bien loin du phénomène dont je voulois vous entretenir : c'eft en répérant les Expériences de M. Bequelin , que j'ai cru en découvrir la caufe que je rapporte aux couleurs accidentelles: la voici avec l'explication que j'ai ofé \: joindre. d ile J'ai remarqué qu’en fixant le foleil légèrement , & que refermant les yeux aufli-tôt, on appercevoit une tache verte bordée de rouge; que plus on fixoit cet aftre brillant, plus la tache verte diminuoït, & plus le cercle rouge augmentoit; & qu’enfin, fi l’on fe hafardoic à le fixer au poinc que l'œil fatigué par fon éclat , éprouvat une douleur vivé, lé vert alors ne paroiffoit plus ; le rouge , & un rouge éclatant , fe faifoit feul appercevoir. Continuant toujours cette .ex- périence ,je voulus voir combien de tems dureroit cette rache rouge, Tome V1, Parc. II, 1775, Rec 434 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, Après donc avoir fixé le foleil autant qu’il m'étoit poflible, je ferme - les yetix , appliquant les deux mains deflus , afin que la lumière extérieure ne püt nuire ; j'attendis patiemment la difparition du difque rouge ; mais quel fut mon étonnement, quand infenfiblement je vis difparoitre le rouge, l’orangé lui fuccéder , celui-ci difparoître pour faire place au jaune , qui bientôt s’évanouit pour me laiffer appercevoir le vert, puis le bleu , l'indigo , & enfin le violet ; celui- ci difparut, je ne vis plus rien ! Frappe de ce phénomène de dégrada- il tion de couleur , je ne crus pas à une première expérience; à peine m'en tapportai-je à mes yeux; je la répérai plufieurs fois, & toujours le mème réfulrat, ou à-peu-près ; enfin, j’abandonnai tout, pour ne pas perdre les yeux qui commençoient à me faire mal, douleur que j'éprouvai affez long tems. J'ai réfléchi beaucoup fur ce phénomène d'optique , que je crois avoir échappé aux obfervations des Phyfi- ciens ; jen cherchai long - tems la caufe : un Mémoire de M. de Buffon { 1) fur les couleurs accidentelles, que je lus fur ces en- trefaites, me fit bien appercevoir la raifon de la couleur rouge que M. Bequelin vit fur fa Gazerte, & me donna la clef pour le fpeétre lumineux qui s’étoit offert à ma vue; j'en hazarde une explication, vous la jugerez avec votre fagacité connue. Toutes nos fenfations corporelles peuvent & doivent fe rapporter au feul taë : les corps nous touchent , les fons ébranlent le tympan - de l'oreille, les faveurs affectent les papilles nerveufes du palais & de la langue ; c'eft fur la membrane pituitaire que fe fait la fenfa- ; tion des odeurs; & fur le nerf optique, celle des couleurs : les rayons de lumière réfléchis par les objets extérieurs , traverfent les trois parties de l'œil, qui ne font que l’épanouiffement des trois parties du nerf optique, fe réfraétent dans les humeurs, frappent enfin & ébranlent le nerf optique : la lumière eft pefante ; les rayons qui la compofent le font tous plus ou moins , & c’eft de la différence de leur poids que naît la différence de leur réfrangibilité : le rayon #4 rouve le moins réfrangible de tous, me paroït le plus pefant, & # le violet le plus réfrangible ; ne feroit-il pas en mêème-tems le moins 1 pefant? étant donc tous de différens poids, ils doivent faire des impreflions différentes ; cela pofé , voici comme je raifonne. Je revarde le foleil ; un faifceau de lumière vient frapper mon æil; cette fecoulle ébranle le nerf optique , le fatigue, & cette fa- tigue nait de la renfion qu'il éprouve : plus l'ébranlement a été vif, plus la fatigue eft forte , & plus la tenfion eft violente : fi donc je (1) Hiftoire Naturelle de M, de Buffon, t. 11, p. 517, édit. ën-4°, SUR L'HIST. NATURELLE ET LES ARTS. 485 a'ai fait que regarder en paflant le foleil, fa vue ne m’aura im- primé qu’une fenfation douce, facile à fupporter ; le nerf oprique ne fera tendu que médiocrement , & je verrai une tache verte bor- dée de rouge ; mais fi au contraire, j'ai ofé regarder fixement cet aftre , fupporter fon éclat quelque tems, la fatigue de l'œil aug- mente , devient extrème, fa tenfion eft àu dernier point; & le rayon rouge le plus fort de tous, paroîrra feul, & fe peindra fur tous les objets que je fixerai ; c’eft ce qui fit voir à M. Bequelin fa Gazette couverte de taches rouges : il n’eft perfonne qui ne s’ap- perçoive de ce phénomène. Pour ce qui regarde cette dégradation de couleur dans le fpectre lumineux , un exemple fort fimple fervira à faire comprendre l’ex- plication que je hazarde : que l’on prenne un violon , un inftrumenc à cordes quelconque, ou fimplement une corde d’inftrument ; fuf- endez à cette corde un vafe comme un entonnoir, que vous rem- plirez de fable , de façon qu’elle foit extrêmement tendue , & qu’elle rende le ton le plus aigu : n'efl-il pas vrai que fi pendane le frémifflement imprimé à cette corde, le fable de l’entonnoir s'é- coule , elle diminuera de tenfion? & en même-tems le ton baif- fera & paffera fucceflivemenr du ton le plus aigu, au ton le plus grave, Il en eft de même dans le cas dont il s’agit. Le faifceau de lumière ayant frappé vivement & long-rems le nerf optique, le tend au dernier degré , pour ainfi dire ; ce nerf alors , faifant l'office de la corde d’inftrument, rendra le ton le plus fort, le plus aigu des couleurs , c’eft - à- dire, le rouge. Mais à mefure que la fatigue de l'œil diminue , la tenfion diminue également, & le ton des couleurs baiffe dans la mème proportion : au rouge fuc- cedera donc l’orangé ; à l’orangé , le or le vert, puis le bleu , puis l’indigo & le violer. Enfin, la tenfion cellant tout-à-fair, ce nerf tranquille , fans ébranlement, & rendu à fon premier étar, ne donnera plus la fenfation de quelque couleur déterminée. Ce qui confirme encore que le phénomène des couleurs acciden- telles ne vient que de la gnes que d’une trop grande tenfon occafionnée au nerf oprique, c’eft qu'effeétivement la vue du rouge eft celle qui fatigue davantage & le plus promptement ; enfuite celle de l’orangé , du jaune, &c, Cependant, la fenfation du jaune, fuivant M. de Buffon, elt la plus douloureufe, & celle 2 produit le plutôt les petits points noirs qu’on apperçoir quelquefois, & qui paroiflent voltiger dans les airs, Quelque grande que foit l'autorité de notre Pline François, je crois que fon obfervarion peut n'avoir pas lieu à l'égard de tous les individus. Je me fuis toujours ap- perçu que la couleur rouge me fatiguoir, & la Éer & le plus 5 Me) 486 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, violemment (1). J'ai même voulu éprouver combien il falloit de tems, pour que telle ou telle couleur me fatiguir. Mais diverfes circonftances m'ont empèché de fuivre ces obfervations; peut-être, aurai-je dans la fuite occafñon de m'y livrer de nouveau: _ Je remarquerai encore que la couleur verte , la plus amie de la vue, eft aufli celle qui fe forme la première. Fermez les yeux; dans quelques circonftances que ce foit, & prefque toujours , vous verrez une tache verte. Si la Nature n'étoit parée d’une robe de certe couleur, : fa vue ne nous recréeroit pas tant , & nous redouterions le plaifir & le charme de la confidérer. Celui qui a créé la Nature, a fait l'œil de l’homme pour la contempler , & reconnoître à l’harmonie, la magnificence de fes ouvrages, la fagelle qui préfide à l'univers. Aux expériences de M. Mongés , nous croyons devoir en ajouter une qui nous a paru aflez fingulière dans fes effets, & dont nous n’entreprendrons pas de donner l'explication, quoiqu’elle mérite ce- pendant l'attention des Phyficiens. Suppofons un appartement quel- conque, ou privé de la lumière du foleil, ou du moins, dans le moment dont on pourroit dire qu'il ne fair ni'jour ni nuit, (lex- périence réuflir mieux dans le premier cas). Suppofons dans cet appartement un chandelier garni de fa bougie allumée ; la lumiére d’une chandelle où d’une lampe- produifant le mème effer. Placez ce chandelier à vos pieds & fur le carreay , regardez perpendiculaire- ment cette lumière, de manière que vos yeux la fixent, fans inter- ruption , pendant quelques inftans; aufli-tôr après , placez un éteignoir fur cette lumière, levez les yeux contre le mur de l'appartement, fixez vos regards fur le mème point fans cligner l'œil; vous ne verrez qu’obfcurité dans le commencement de cette opération; puis, vers le point que vous fixez, paroïîtra une obfcurité beaucoup plus grande que celle du refte de l'appartement ; continuez à fixer fans vous laffer ; peu-à-peu, dans le milieu de cette obfcurité, fe mani- feftera une couleur rougeâtre ; elle s’animera infenfiblement, fa vivaciré augmentera , enfin elle acquerra la couleur de la flamme, & certe flamme fera toujours fcintillante. Continuez à fixer fans changer la direction de votre œil; & vous verrez cette famme, de la groffeur d’un petit œufenviron , fe détacher du mur, & venir, comme en roulant, très-près de votre œil. Si vous détournez la tête, elle fem- em 41) Que l'on confulte les femmes qui s’'amufent à faire de la rapiflerie, elles vous diront qu'elles ne peuvent travailler log-tems une broderie fur un fond rouge; & qu'au contraire, à peine s'apperçoivent-elles de la fatigue des yeux, quand elles s'exercent fur un fond jaune. ) SUR L'HIST. NATURELLE ET LES. ARTS. 487 blera fuir , mais elle reviendra comme la première fois, fi vous erfiftez de nouveau à fixer votre vue. Pour réufir, d’une manière décidée , dans.certe expérience ; il faut, fi je puis m’exprimer ainf , charger fes yeux d’une grande quantité de la Jumière de la bougie; ce qui ne peut s’exécuter qu’en la confidérant long-tems perpendi- culaifemenr & fans cligner l'œil, SET LAPS EPST ELRPRNE CESVC PE POI PACE 7 PEL EN TON PI RTE APTE NUL US END RELMEUNICAE SE Faites fur quelques précipités de Mercure , dans la vue de découvrir leur nature; Par M. BAYEN, Apothicaire-Major des Camps & Armées du Roi. mVe Mint De PLE 12 rain Sur le Turbith mineral, PREMIÈRE SECTION. A ccouTuMÉ, d’après quelques Chymittes, & fur-rour d’après feu M. Rouelle , à regarder le turbith minéral comme un fel, le nom de précipité jaune , qu’on lui donne fouvent , ne me faifoit point illu- fion; 1l n’entroit donc pas d’abord dans mes vues 'de le foumertre aux expériences qui m'ont fait découvrir dans les autres précipités mercuriels, des propriétés chymiques qui démontrent jufqu’à l’é- vidence que ces préparations, de quelque manière qu’elles aient été faites , doivent leur état de chaux , non, pas à la perte du phlogifti- que , ainfi qu'on le. fuppofoit, mais à une combinaifon nouvelle du Mercure dvec un autre corps que l’athmofphère fournir à ce miné- ral, lorfqu’on le calcine par lui-même, ou qu'il tire des acides, lorf- qu'on le calcine par voie de diffolution. Cependant, contrebalançant l'autorité de M. Rouelle avec celle de quelques Chymiftes célèbres, qui foutiennent que le turbith mi- (1) La première a été imprimée dans ce Journal, mois deFévrier 17745la feconde, mois d'Avril 1774 ; la troifième, mois de Février 1775. Dans certe dernière, à là page 158 du Journal, ligne 7 , life , les animaux & les plahtes, 488 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, nétal, bien lavé , eft une chaux privée de phlogiftique, j'ai cru ne devoir prendre d’autre parti que celui du doute. En vain Charas an- nonçoit-il en 1676 , qu’on peut dulcifier le précipité jaune en le fublimane feul après l'avoir bien lavé; en vain nous aflure-t-1l qu'oz peur y réuffir encore mieux , f?, ayant broyé dans un mortier de verre quatre ances de précipité jaune bien lavé & defféché, 6 y ayant incorporé autant de mercure cou- lant qu'il en aura pu abforber ; on en fait la fublimation par les voies or- dinaires , & fi, ayant broyé ce Jublimé, on le refublime deux ou trois fois fans aucune addition : en vain M. Rouelle avoit-il- enfeigné de vive voix & par écrit, que le tuibith n'étoit pas une chaux; que c'étoit, au contraire, un fel dans lequel l'acide vitriolique fe trouvoit com- biné avec le mercure , à la moindre quantité poflible; enfin, fans prétendre me mettre à côté des deux grands Chymiftes que je viens de citer, je regardai, comme vaine, une expérience que j'avois ten tée, il y a près de vingt ans, dans la vue de faire du fublimé cor- rofif avec du turbith minéral, & du fel marin décrépité; expérience qui ne produific point , à la vérité , de fublimé corroff , mais dont cependant je retirai une belle fublimation de véritable mercure doux. Rien ne put faire ceffer mon doute, & m'empêcher de re- garder, pour un moment, tout ce qui avoic été dit & fair fur le turbith minéral, comme des affertions vagues, On ne refte communément dans le doute, fur un fait qui intéreffe l'art qu'on cultive par goût & parétar, qu'aurant qu'il eft impoflible de découvrir la vérité ; or dans la queltion dont il s'agiffoit, je n'en- trevoyois pas de grandes difficultés, la patience me paroifloit feule néceflaire, & il en faut pour répéter des travaux qui ne nous appar- tiennent pas, l’'amour-propre n'y trouve pas fon compte ; aufli ai-je vu la plupart des Chymiftes de ma connoillance, n’efluyer dans cette forte de râche , que des dégoûts. La critique feroit peut-être un ex- cellent aiguillon pour foutenir le Chymiite dans des recherches done l'objet feroit de conftater des faits annoncés par d’autres , mais elle n’a point de charmes pour moi; ainfi donc, n’envifageant que le plaifir de trouver la vérité, je me fuis mis à l'œuvre , avec la réfo- lution de tâcher de tirer tout le parti que je pourrois du fujet que j'allois traiter. L'acide vitriolique, combiné avec le mercure, fuivant les précautions indiquées par l’art, forme un fel blanc, ou vitriol mercuriel, dans lequel tous les Chymiftes conviennent que l'acide furabonde. Si on tient long-temps ce vitriol mercuriel expofé à un grand feu, il perd , à la vérité, une portion de fon acide ; mais comme à la fin il fe fublime, on a rejerté ce moyen comme incapable de remplir l'objet qu'on fe propoferoit, en voulant l'employer pour adoucir ce fel qui ef fort corrolif. On a donc eu recours aux lotions; en effer, fe SUR L'HIST. NATURELLE ET LES ARTS. 49 fi l’on verfe fur certe maffe faline une grande quantité d’eau bouil- lante, & qu’on la broïe fort & long-tems, Pacide furabondant s'unit À l'eau, entraînant avec lui une portion de mercure avec lequel il forme une forte de vitriol crès-foluble. La partie qui ne s'eft point diffoute dans l’eau, à perdu fa cou- leur blanche, & eft devenue d’un jaune de citron fort vif; on con- tinue les lavages jufqu'à ce aue la poudre jaune & l’eau qu'on en re- tire paroiflent l’une & l'autre infipides. Cette poudre étant defléchée, eft ce qu’on appelle dans les Phar- macies turbith minéral (1); & c’eft certe mème poudre que M. Rouelle difoit être une combinaifon d'acide vitriolique & de mercure, l’un & l’autre dans les proportions qui conftituent l’état neutre. Cet homme juftement célèbre ne nous préfentoit pas les expériences fur lefquelles il appuyoit fon fentiment; M. Rouelle le cadet, qui foutient fur ce point la doctrine de fon aîné, paroït aufi en nég'iger les preuves; du moins ne voyons nous, dans les procédés qu'il a publiés l’année dernière, rien qui vienne à l'appui de l'opinion des deux frères, quoiqu’elle foit vigoureufement conteftée par des Chy= miftes qui fe font fait également un grand nom. Ces derniers ont regardé le turbith minéral , lorfqu’il eft bien lavé, comme une Vraie chaux métallique, c’eft-à-dire , felon eux, comme un mercure privé de fon phlogiftique, & ils n'ont pas manqué d’ap- puyer leur fentiment fur des expériences que je me fuis fait un de- voir de répéter. Je vais rendre compte de mon travail; j’examinerai d’abord le turbith préparé à la manière des Pharmaciens, comme le feul qui doit porter ce nom; je paflerai à celui qu'on obtient en précipitant les premières lotions par l’alkali fixe ; j’examinerai en- faire le vitriol mercuriel, & lorfque je ferai parvenu à le réduire À l’état de chaux, j'expoferai le moyen que j'ai empleyé pour opérer fa réduction. ————— ——————_————_ (1 ) Le turbich minéral eft, heureufement pour le bien dc l'humanité , banni depuis long-tems de l'ufage médicinal. Le dernier Charlaran que nous ayons vu en tenir boutique ouverte fur Îe Pont-neuf, étoit le gros Thomas : il le faifoie prendre à des dofes deux & rois fois plus fortes que ‘celle prefcrite dans les dif= penfaires; auf , de quels ravages n'ai-je pas été témein, une fois qu'il l'avoir donné à uve malheureufe fille qu'il avoit entrepris de guérir du mal vénérien 3 La dofe de certe violente préparation , eft de fix grains au plus; le Charlatan en avoit fait prendre dix-huit. Le eurbirh n'eft pas rejetté au point de ne plus reparoître fur la fcène; déjà on le confeille comme un errhin puiffant & faluraire; il va de pair avec le Précipiré rouge, & l'un & l'autre fe portent dans de jolies petites hoëres pour les faîre renifer au befoin. Bo-leus narrat pauculä turpethi pro ptarmico ufurpati doff, totum corus mutatum , Verè cataraëas diffolutas , dit Boerrhaave, dans fa Chymie, 7 499 OBSERVATIONS SUR L4 PHYSIQUE, Expériences faites fur le Turbith minéral , préparé felon les règles prefirites par les Pharmacologifies. ji Pour me procurer ce turbith, j'ai combiné le mercure avec l’a cide vitriolique concentté; & ayant eu l'attention de bien triturer la mafle ‘faline dans dé l’eau diftillée & bouillante, j'ai confervé les fi£ premières lotions pour en précipiter lé mercure qu'on fait y être uni; enfin j'ai multiplié les lavages toujours faits avec l’eau diftllée ; jufqu’à ce'que cette même eau, & la poudre jaune qu’on obtient par ce procédé, fuflent infpides( 1}; pat ce moyen , 8 onces de mercure &ud; & 14 onces de bonne huile de vitriol, m'ont donné 6 onces, trois gros, & quelques gréffns de turbith , couleur de citron, * 1 : % Expérience [. Ayant mis une once de ce turbith dans une petite retorte de verre lurée, & placée dans un fourneau à dôme, propre à recevoir un affez grand feu, il fur adapté à fon bec un récipient proportionné, dans lequel il y avoit environ 4 onces d’eau. Le feu ayant été poulfé jufqu’à faire rougir les barres & la cor- nue, l'acide fulphureux fe fit fentir; le col de la retorte fe couvrir de globules de mercuré; bientôt on entendit une forte de bouillon nement , de frémiffement , un bruit enfin, pareïl à celui qui s'élève d’un vafe , lorfque l’eau dont il eft rempli; eft aù moment de bouil= lir; le feu fut foutenu à ce degré pendant plus d’une heure & de- mie, c’eftà-dire, un quart-d’heure après la ceffation du bruit dont je viéns de parler. Les produits de cette opération, que j'ai répétée plufeurs fois, fonc conftamment au nombte de cinq. 1°. L’acide fulphureux volail, qui pafle en quantité fuffifance pour rendre l’eau du récipient très- acide ; 2°: le Auide élaftique , où l'air, dont 1l fe dégage une quan- cité remarquable; 3°. le mercure qui fe revivifie ; 4°. un fublimé blanc; s°. une poudre grife, qui eft un mélange de la portion la plus légère du fublimé blanc, & d’un peu de mercure vif, | En preffant ce dernier produit dans un linge fort & ferré, il en eft forti du mercure coulant qui, réunilà celui du récipient, ANDÉTC AM ENTE. en en etienne nt en ret AND EOU TN OPARNS PÉSublUne Folunc, Dao pr Motel tie te IR EOS TOUIOTIINSs Lay Poudre snife.r ; immnr 218 mr 2e et D Le 0 lila Leralast Total. . , + 6 gros 6$ grains, ESC ES SET eue (1) Je dois expliquer ce que j'entends ici pat ce mot énfipide : quand on mee fur le bout de la langue un peu de cutbith bien lavé, on n'y éprouve aucune fenfation , mais on ne tarde pas à fenuir, vers la racine de cet organe, une âcreté fort incommode qui occafionne une falive abondante; il faut donc allier ici l'in- fipidiré avec la caufticicé. L'arfenic çft dans le même cas, La SUR L’'HIST. NATURELLE ET LES ARTS. 49x La perte, qui eft de 1 gros, 7 grains, eft due à quelques gouteletres d’eau qui fe font élevées au commencement de l'opération (1), mais principalement à l’acide vitriolique qui a paflé fous la forme d’acide fulphureux, & au fluide élaftique que fournie la portion de turbich qui fe revivifie, ainfi qu'il fera démontré dans la fuice. Il n’eft rien refté dans la cornue. La cornue employée dans la précédente expérience, étant lutée , il m'avoit été ‘impoñhble d’obferver ce qui fe pafloir dan fon inté- rieur , par conféquent de deviner la caufe du bruit qui s'éroir fait entendre pendant l'opération, je crus devoir la répéter , & hazarder de la faire dans une retorte non lutée , Mais aflez épaifle pour foutenir, fans fe fondre , le degré de feu qui fublime le rurbith ; & voici ce que j'ai obfervé. | L Aufli-tôt que la cornue a été rouge , l'acide fulphureux s’eft faic fentir , la revivification du mercure a commence, & le bruit s’eft fair entendre , alors les bords de la matière parurent entrer circulaire ment en fufon, & bouillonner , ou du moins être en mouvement ; or c'éroit ce mouvement qui occafonnoit le bruit qui fe faifoit entendre; pour le faire ceffer , il fufhfoit de ralentir le feu ; fermoit-on la porte du cendrier ? la portion fondue fe figeoit, & on n’entendoir plus rien; louvroit-on ? le feu reprenant fon activité, les bords de la matière entroient de nouveau en fufon, & le bruit recommençoit , en forte que je me crois en droit de pouvoir conclure que le turbith ne fe fublime qu'après être entré en fufon ; que cette fufron ne fe fair que fucceflivement, & roujours le long des parois de. la cornue, qui eft la partie la plas échauffée. Dès que je fus inftruit de la caufe du bruit que j'avois entendu , je fupprimai le feu qui étoit au degré où il pouvoir faire couler la retorte ; je voulais d’ailleurs favoir dans quel état fe trouveroit le turbith après avoir efluyé un aufli grand degré de feu : ayant donc, après le réfroidiffement , coupé la cornue , j'obfervai qu'il n'avoit plus fa forme pulvérulente , mais qu'il étoit en malle fpongieufe allez confiftante; fa couleur jaune avoit difparu:, il étoir devenu blanc & non pas rouge , comme quelques Auteurs l’ont écrit : au refte, on voyoit dans le col un commencement de fublimation blanche & du mercure revivifié : la matière reftée dans la retorte avoit perdu un pèu plus de deux gros. CR RUN TEST CUIR NENRRTECRRE or (x) Je ne fais point entrer certe eau dans le calcul , parce qu'elle eft en fort petite quantité, & que d'ailleurs, elle peut être regardée comme étrangère au Turbith qu'il cit difficile d'amener à une deffication abfolue, Tome VI, Parc. Il, 1775. Sss ————_— x 492 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE; Exrérience Il. Quoique la préfence de l'acide vitriolique dans le turbith fût démontrée par la première expérience , je crus ce- pendant ne devoir pas négliger le procédé dont j'ai parlé au commencement de ce Mémoire. Je triturai en conféquence 2 gros so grains de mon turbith , & autant de fel marin décrépité; le mèlange fur mis dans une retorte de verre lurée & appareillce convenablement. Dans cette opération, il s’eft fublimé 2 gros 6 grains de mercure doux, auquel adhéroient quelques globules de mercure revivifié ; la matière faline reftée dans la retorre, étant entrée en fufon, il fur impofñlible de la détacher, & par conféquent de la pefer; mais dif- foure dans une fufhifante quantité d’eau diftillée, elle a donné par l'évaporation tout le feBMmarin qui n’avoit pas fouffert de décom- pofition , & fur la fin, la liqueur réduite à 2 gros au plus , ayant été décantée & laiffée à l’évaporation fpontanée , a donné environ 33 grains de fel de Glauber. Ce réfulrar , que tous ceux qui ont tenté de faire du fublimé corrofif, par l’intermède du turbith, auroient dû appercevoir , prouve de plus en plus que le turbith minéral , quoique bien lavé, contient encore une quantité très-remarquable d'acide vitriolique, non pas à nud, ou interpolé entre les parties du mercure , mais réellement combinée avec ce minéral. Les produits de la première & feconde expérience comparés avec ce qui a été publié dans ces derniers tems , me rendirent mon tur- bith fufpect : je me méfiai de ma propre opération ; je penfai donc à m'en procurer d'autre, & voulant mertre le fceau le plas authen- tique à mon travail, j'en demandai , ou j'en achetai chez quelques- uns des plus célèbres Apothicaires de certe ville. . Ces rurbiths préparés par différentes mains ; ont été foumis aux épreuves précédentes, & 1ls ont conftamment donné les mêmes pro- duits , c'eft-à-dire qu'à quelque petite différence près pour les quantités, tous ont fourni du mercure doux & du fel de Glauber, en les traitant fuivant la feconde expérience , & tous fe font en patrie fublimés, & en partie revivifiés, en les traitant fuivant la première (1). (1) Je dois faire ici une obfervation effentielle pour ceux qui voudroient vé- rifier mes expériences. En foumertant mon turbith à la première expérience , il n'eft rien refté dans la retorte; ceux, au contraire, qu'on m'avoit donnés, ou que j'avois achetés, y ont conftamment laiffé une petite quantité de terre qui reftoit attachée au verre à demi vitrifiée; le mien avoir été préparé avec du mercure retiré du cinnabre, & lavé avec de l’eau diftillée ; les autres pouvoient avoir été SUR L'HIST. NATURELLE ET LES ARTS. 49, Expériences faives fur le Mercure précipité de l'acide viriolique , par l'alkali fixe de foude, ow de tartre. En préparant mon turbith,, j'avois confervé les fix premières lotions qui, comme je l'ai dir , avoient été faites avec de l’eau diftillée. Dès qu’elles furent devenues claires & décantées de deflus la por- tion du turbith qu’elles avoient entraînée , je procédai à la précipi- tation du mercure , avec l’alkali fixe de foude { 1 ) : cette opération m'a procuté un précipité jaune , qui , édulcoré & féché, pefoit deux onces quatre gros & trente grains. Si quelque préparation mercurielle peut paroître une vraie & pure chaux , c’eft, à coup sûr, celle donr je viens de parler ; cependant en la traitant, fans intermède, dans les vaifleaux fermés & felon la premiere expérience , l'acide fulphureux s’eft fait fentir fortement; une portion du mercure s’eft revivifiée , & 1l s’eft fair une fublima- tion blanche ; tout, en un mot, s’elt pailé comme fi j'avois opéré fur du turbith ordinaire, J'ai également foumis ce précipité à la feconde expérience, c’eft- à-dire, que je l'ai traité avec partie égale de fel marin décrépité, & il en eft réfulté du mercure doux & du fel de Glauber, On voit , d'après ces différens produits, qu'il y a entre le vitriol mercuriel & le fublimé corroff , une grande analogie de propriérés chymiques : dans l’une :& l’autre de ces deux compolitions, l'acide refpect1f furabonde , ce qui les rend cauftiques : tous deux ne font folubles que par cette furabondance , tous deux ne font décompofés qu'en partie par les alkalis fixes : le précipité qu'on retire du fu- blimé corroff par le fel de foude ou de tartre , contient environ la moitié de fon poids de mercure doux (2); or, nous avons vw ïl n'y a qu'un inftant, que le précipité du virriol mercuriel , par les mêmes intermèdes , n’elt également qu'à demi décompofé , & qu’il faits avec le mercure du commerce , & ils avoient été certainement lavés avec de l'eau ordinaire; il n’eft donc pas étonnant que ceux-ci ayent laiffé dans la retorte la petite portion de terre dont j'ai parlé. (1) Je donne la préférence au fel de foude , qui, ainfi que je l'ai éprouvé, ne change rien à la chofe, afin d'éviter de faire du tartre vicriolé qui, cryftalli- fanc à mefure qu'il fe forme, rend les lavages plus longs & plus difhciles , incon- véniens que n'a pas le fel de Glauber. (2) Voyez la première partie de ces Effais, Journal de Phyfique , année 1774, mois de Février, page 140. S's's 2 494 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, fe trouve feulement changé en vrai turbith minéral. Enfin , je crois que nous fommes affez avancés, pour pouvoir conclure que le turbirhi minéral officinal eft au vitriol mercuriel , ce que le mercure doux eft au fublimé corrofif. Tertatives faites fur le Turbith, pour lui enlever tout ce qu'il peut encore contenir de foluble dans l'eau. Peut - on enlever ; par des lotions faites avec l’eau bouillante & mulripliées bien au delà du terme prefcrit par les Pharmacologiftes, la portion d’acide qui éft unie au mercure dans le turbith minéral ? Un Chymifte célèbre le prétend ; ainfi , quoique je n’y aie pas réuffi, je ne concluerai pas que la chofe eft impoñlible , je me contentérai feulement d’expofer en peu de'mots , les obfervations que j'ai faites fur cer objet. Ayant trituré une once de mon tutbith en différentes fois dans deux cens onces d’eau diftillée & bouillante, à peine ai-je retiré G grains d’une poudre brune , en en faifant la précipitation avec quelques gouttes d’alkali fixe. È Ayant aufi fair bouillir une once de ce mème turbith à diffé- réntes reprifes dansune affez grande quantité d’eau diftillée , & ayant fait évaporer deux livres de la décoétion bien clarifiée , il n'eftirefté dans la capfule de verre que deux grains, environ , d'une matière grife dans laquelle on remarquoit un arrangement cryftallin. A la vue de cette petite quantité de réfidu , j'avoue que la pa- tierice m’abandonna ; ainfi donc , fans nier l’impoflibilité de dé- compofer le turbith par le feul intermède de l’eau , je trouvai qu'il éroit plus convenable de ranger avec MM. Rouelle, cette prépa ration dans la claffe de ces fubftances appellées infolubles , à caufe de l’immenfe quantité d’eau qu’on eft obligé d'employer pour en difoudre quelques grains, & je m’en tins là (+). Au refte, ce turbith lavé & bouilli dans une fi grande quantité d’eau, avoit encore la propriété de fe fublimer en vitriol mercu- riel , & de donner du mercure doux en le traitant par le fel marin, en moindre quantité qu'auparavant, fans doute, ce qui devoit être. IL me refteroit encore beaucoup de chofes à dire, fi je voulois rendre compte de toutes les expériences que j'ai faites fur le turbich minéral; mais comme elles ne ferviroient qu’à prouver de plus en plus lPétar falin de ce même turbith , j'ôfe croire qu’à cer égard, ce qu'on vient de lire, eft plus que fufhfant pour en convaincre (1) Voyez Tableau d'Analyfe de M. Rouelle le cadet, page 151. Procédé, 286. SUR L'HIST. NATURELLE ET LES ARTS. 49 même ceux des Chymiftes qui, jufqu'ici, ont regardé cette prépara- tion mercurielle comme une pure chaux métallique. Je n’entrerai donc dans aucun détail fur les expériences que j'ai faites fur le vitriol mercuriel préparé par des cohobations répétées (1), je ferai feulement remarquer qu'il exige , pour être fublimé, un plus rand feu que celui qui a érc préparé à l'ordinaire , & que dès la Éonde diftillation faite avec de nouvel acide, il ne donne plus d'acide fulphureux. Paffant aufli fous filence ‘un grand nombre d’expériences tentées fur du turbich fublimé, jufqu'à quatre fois ; je me contenterai de dire, 1°. Que ce fel perd à chaque fublimation une portion d’acide vitriolique-qui pale conftamment fous la forme d'acide fulphureux: 2%, Que de certe perte, il réfulre la converfion d’une partie du mercure en chaux,, qui en fe revivifiant , donne une affez grande quantité de fluide élaftique , auquel elle devoit fon augmentarion de poids. 3°: Queila diftillation fublimatoire fufhfamment répétée., eft un moyen sûr pour décompofer entièrement le vitriol mercuriel & le turbith minéral. | . Je ne ferai aufi qu'une fimple remarque fur le vitriol mereurie qu'on obrient en précipitant par l'acide vitriolique la diffolution du mercure dans l'acide nitreux, favoir, qu'il ne différe de celui qui a été préparé par la voie ordinaire , que par une perire quantité d’a- cide nitreux qu'il ne perd qu'au moment où il eft prêt à fe fublimer. Laiffant donc tout cé qui auroic pu inutilement furcharger ce Mémoire , je rermine cette première feétion en concluanr , 1°. que le turbith minéral confidéré comme tel ; eft un fel qui exige une oo (1) Les anciens Pharmacologiftes preferivoient , dans la préparation du Tur- bith, de cohober plufeurs fois l'acide vitmolique fur la mafle faline. J'ai répété cette opération jufqu'a cinq fois, & j'ai remarqué que le mercure , dès qu'il eft faturé d'acide, & faturé par furabondance, ne s'en chargeoit plus; auffi , dès la première cohobation , le nouvel acide, dont je me fuis fervi, ne contracta-t-il plus l'odeur d'acide fulphureux volatil. Mon principal objet, en répétant cet ancien procéd£, étoit de tâcher de dé- couvrir ce que Juncker avoitivoulutdire dans ce paflage de la page 991, de fes Tables Chymiques. S7 oleum victrioli bonum à mercurio, fœpius a: 4 vi tum hic in tigillo fufus colorem fanguineum refert , & perdiu igni valido refiflit. Mais comme dans toutes mes expériences, je n'ai rien découvert qui air pu me {etvir à expliquer ce paffage , & qu'au contraire, j'ai conftlamment éprouvé que les vi- triols mercuriels , faits par cohobation ou fans cohobation , fe fublimoient égale- ment l'un & l'autre, lorfqu'on les expofoir, à la vérité, au plus grand feu que puiflent fupporter nos petites cornues de verre lutées ; n'ayant d'ailleurs jamais oblervé certe couleur de fang , fi ce n'eft quand les vaifleaux font eux-mêmes dans l’embrâfement ; j'avoue que je ne comprends pas cé qu'a voulu dire le cé- lèbre Juncker, 496 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, très-grande quantité d’eau pour être diffous. 2°. Que les lavages ow les ébullitions font un moyen infuffifant pour amener ce fel à l’état de chaux , ou du moins que ce moyen , en fuppofant qu'il fût propre à remplir cet objet , ne changeroit abfolument rien à la thèfe pofée par feu M. Rouelle , au contraire, il ne feroit que la confirmer, en. faifant rentrer cette préparation pharmaceutique dans la clafle des autres fels , qui tous font fufceptibles d’être décompoñés par des cbullitions, ou par de fimples diffolutions plufieurs fois répétées. SECONDE SECTION.: Expériences Chymico - pneumatiques faites fur Le Vitriol mercuriel & Jur Le Turbith minéral, avec & [ans addition de matière char= bonnerfe. Exrérience I. Quatre onces de mercure crud , & fix onces d’acide: vitriolique concentré , ayant été expofées , dans un appareil pneumati- qüe, au degré de feu qui opère la combinaifon de ces deux corps, il s’eft élevé une quantité de fluide élaftique, fuffifante pour déplacer 33 onces d’eau pat laquelle il n’étoit pas abforbé ; le récipient avoit une forte odeur d’acide fulphureux, & l’eau éroit très-acide. Exvé£rience ll. Uneonce de vitriol mercuriel, traitée au mème appareil, il a été déplacé près de 32 onces d’eau par un fluide qui ne s’abforboit pas; il a pailé de l'acide fulphureux ; il n’eft rien refté dans la cornue, mais il s’eft trouvé dans fon col 4 gros, 6o grains de vitriol mercuriel fublimé, & 58 grains d’un autre fublimé pul- vérulent, fali par une portion de mercure revivifié; il a palfé 21 grains de ce dernier dans la boule du conducteur; là perte, qui eft de 2 gros, $ grains , eft due à l'acide vitriolique qui furabonde dans le vitriol mercuriel, où malle faline, & au fluide qui , en fe dépa- geant, a déplacé les 32 onces d’eau. Expérience III. Un mèêlange de 72 grains de poudre de char- bon , & d’une once du même vitriol mercuriel, ayant été traité à l'appareil pneumatique, il a été déplacé $8 onces d’eau par un fluide qui s’abforboit fort vite; 11 s’eft formé du foufre, qui, uni à un peu de mercure, avoit la couleur de l'éthiops minéral; on voyoir auf dans le col de la rerorte , une couche mince de fort beau cinabre; la réduction ayant été complète , il s'eft trouvé dans la boule du conducteur $ gros, 6 grains de mercure revivifié; les 72 grains de charbon étoient réduits à $43 enfin l’eau du récipient répandoit l’o- deur d'acide fulphureux. EL Expérience IV. Ayant foumis à la même diftillation, mais fans addition d'aucune matière charbonneufe, une once de turbith SUR L'HIST. NATURELLE ET LES ARTS, 407 bien lavé , il a été déplacé 35 onces d’eau, qui, en 36 heures, n’a pas paru être remontée d'une eq le récipient fentoit fortement l'acide fulphureux; il s’eft reviviñé 3 gros, $5 grains de mercure; il s’eft fublimé 1 gros, 61 grains de vitriol mercuriel , & 52 grains du même fel, fous forme pulvérulente ; il n’eft rien refté dans la retorte, La perte en acide, en fluide élaftique, & en quelques gouttes d’eau , eft de 1 gros, 48 grains. ExPp£RIENCE V. Un mélange de 24 grains de charbon, & d’une : once de turbith, ayant été traité au même appareil, il a été déplacé 41 onces d’eau qui abforboic avec vitele le Auide ; il s’eft reviviñé & ros, 52 grains de mercure; & comme les 24 grains de charbon employés éroient infufhfants pour décompofer entièrement le turbith , il s’eft fu- blimé environ 40 grains de vitriol mercuriel ; on voyoit aufli vers le bec de la cornue un peu de fonfre & de mercure combiné en échiops, qui avoit la propriété de brüler , en le mettant fur un charbon ; il croit refté dans la retorte 10 grains de cendre grife, produite par la combuftion du charbon ( 1). Expérience VI. Un mêlange de 48 grains de charbon, & d’une once de tutbith préparé par un des plus habiles Maîtres de Paris, ayant été traité au même appareil ; Le turbith a été entièrement dé- compofé ; il a été deplacé $o onces d’eau qui remontoit fort vite dans le récipient, en forte que fix jours après l’opération , il ne s’en falloir que de 12 onces qu’elle n’arteignit le degré où elle éroit fixée , avane de fubir la dépreflion; il s’eft revivifié 6 gros, 16 grains de mercu- re; il s’eft aufli formé un peu de foufre; l’eau du récipient avoie erdu en 6 jours l'odeur d'acide fulphureux qu’elle avoit contraétée ; le charbon refté dans la retorte ne pefoit plus que 27 grains. Il y auroit , fans doute, un grand nombre de réflexions à faire fur les expériences qu’on vient de lire, mais je n’en ferai qu'une, & encore ne m'y arrèterai-je qu’un inftant, Lorfque l'acide vitriolique s’unit au mercure , il fe forme, pendant tout le temps que dure l’effervefcence , une grande see d'acide ful- phureux volatil, qui, femblable , par fon odeur fuffocante, à celui qui s'élève du foufre allumé, en diffère pourtant , par je ne fais quelle autre moffette virulente, dont l’odorat eft fortement frappé, & qu'il di£- tingue facilement de la première : lorfqu'on expofe, ou du vitriok mercuriel, ou mème dururbith proprement dir, à des fublimations (1) Je dois rappeller au Lecteur, que dans les procédés avec addition de cher- bon, la réduétion du Mercure fe fait fort vite & avec un feu médiocre, Voyez la deuxième partie de ces Effais. . 495$ OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, répétées, ce fel fe décompofe, & il s’en fépare à chaque procédé une portion d'acide de vitriol, qui palle toujours en acide fulphureux. D'où vient cet acide fulphureax ? Tous les Chymiftes répondent unanimement qu'il doit fon origine au phlogiftique ; dont le mercme a été dépouillé.en tout, ou en partie par l'acide viriiolique; mais pear-on priver une fubftance métallique de tout ou de partie de fon phlogiftique, fans en opérer la décompolñrion totale ou partielle ? Non, fans doure, répondent encore les Chymiltes. Or il eft démontré que le mercure, uni à l'acide vitriolique, n’a fouffert aucune altération , & qu’il peut en être retiré fous fa forme fluide , fans addition d’aucune matière charbonneufe , propre à réndre le phlogiftique aux fubftances qu'on fuppofe Pavoir perdu ; car dire que le mercure contient ce principe en fi grande abondance, qu'il en peut perdre une partie fans être, ou, fi l'on veut, fans nous pa- roître altéré, ce feroir éluder les loix de l’art & de la nature, pour foutenit fon fyflème , & la faine Chymie rejette de pareils moyens. Croire, avec quelques.Alchymiftes, que le mercure contient une certaine onétuofité. ce feroit s'appuyer fur un être chimérique ; çar enfin, il s’en faur bien que cette onŒtuofité foit démontrée (r). J'en refterai-là, en laifant aux Srahliens le foin de répondre à toutes les difficulrés qu’on pourroit faire contre leur doërine, fur la compoñtion de l'acide fulphureux volatil, à propos de celui qui fe dégage , foir en préparant , foi en fublimant le virriol mercuriel, & A7: » ot: £ » 2 LE à se . = à propos d’un grand nombre d'autres expériences chymiques qui pa ro (1) Ily a long-tems que j'aurois répété le procédé de l'empirique Auteur des Dragées anti-vénériennes , fi j'avois été à portée de le faire; ce qu'il appelle sête morte du mercure, mériteroit bien d'être examiné. Je fuis étonné que ce ré- fulrat de la trituration du vif- argent avec l'eau, déja obfervé par les anciens, m'aic pas frappé quelqu'un de nos Chymiftes. J'ai eu -occafion de voir une fois Keïfer ; la Chymie lui étoit abfolument étrangère, qu'importe? il parle auffi d'huile dans la revivificarion de fon échiops ; tout cela , encore un coup, de- mande à être refair par un homme inftruir; qui fait, fi on ne feroit pas dé- dommagé de fes peines & de fa dépenfe par quelque découverte heurcufe qui dé- muiroit, peut-être, bientôt mes objeétions contre le phlogiftique mercunel ? Je renvoie au procédé de Keifer , publié par ordre du Gouvernement , & implimé dans le fecond volume des Obferv. de :Méd. de M."Richard , au Louvre en 1772, Au moment où ce Mémoire eft fous prefle, je reçois le premier volume des Adtes de l'Académie Éleétorale de Mayence, établie à Erford , & jy vois que les Chymiftes Allemands nous ont devancé fur ce point, ainfi que fur bien d'au- tres. M. Mangold a déja publié quelques expériènces fur la matière qui fe fépare äu mercure , en le triturant avec de l'eau de pluie, Jed vix inchoata res. roiffent ’ SUR L'HIST. NATURELLE ET LES ARTS. 499 roillent contredire le fyftème reçu fur le phlogiftique , auquel nous faifons jouer un fi grand rôle dans l’art & dans la nature ( 1 ). Converfion du Turbih minéral en chaux : réduélion de cette chaux ; Jans addition d'aucune matière charbonneufe. N'ayant pü amener à l'état de chaux parfaite le mercure uni à l'a- cide vitriolique, foit en précipitant la diffolution du fel qui réfulte de cette union, par les alkalis fixes , foic en lavant ou faifant bouillir à plufeurs reprifes le turbith proprement dit, j'ai cru, pour parve- nir à mon but, devoir recourir au procédé fuivant, qui m'a réufli parfaitement. | Si on verfe, fur du turbith bien lavé, une quantité d’eau diftillée, rendue alkaline par le fel de foude ou de tartre, & qu’on tienne le tout en digeftion fur le fable chaud , avec la précaution d’agiter de tems en tems la matière, on ne tardera pas à voir la couleur citrine da turbith, fe changer en rouge ; & en quelques heures, on obtiendra un vrai précipité de mercure, une vraie chaux métallique, qu'il faut édulcorer avec foin, & faire fécher. | Si on foumet à l’évaporation l’eau de digeftion, on en retirera, ou du tartre vitriolé, ou du fel deGlauber , fuivanc la nature du précipitant employé; nouvelle preuve de la préfence de l'acide vi- triolique dans le turbith. Une once de cette chaux mercurielle, traitée à mon appareil pneu- matique , & fans addition de charbon, l’eau du récipient s’eft dé- primée & fixée, après l'opération, au degré de l'échelle qui annon- çoit qu'il en avoit été déplacé 64 onces (2). Le fluide qui occupoit la place de l’eau, en étoit très-vîte abfor- (1) Je ne connoïs aucun Chymifte qui ait travaillé fur le Turbith avec plus de vues qu: M. de Morveau. Si quelque Stahlien a des droits, pour foutenir que le mercure perd de fon phlogiftique lorfqu'on le traite avec l'acide vitriolique, c'eft, fans contredit, ce Savant; fes expériences font bien faites, fes raifonne- mens font profonds; mais enfin, en dernière analyfe , ils fe réduifent à celui-ci. Le mercure, en [e changeant en turbith minéral, augmente de poids; donc il 4 perdu du phlopiflique. Je prie les Leéteurs de confulter la Differtation de M. de Morveau fur le Phlogiftique , article Turbith minéral , & d'après les difficultés qu'éprouve l'Auteur pour râcher de concilier la doétrine de Srakl avec les ex- périences qu'il venoit de faire, ils jugetont fi j'ai tort de propofer mes doutes fur cette même doë&rine. (2) Un demi-gros de cette chaux, trituré avec fix grains de fleur de foufre ; & chauffé lentement dans une cuiller de fer, détonne à la manière de la poudre Rene aufli-bien que le précipité de la diffolution mercurielle, fait par l'alkali XC, Tome VI, Part. II. 1775. LE 500 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, bé; fon odeur étoit femblable à celle que j'avois remarquée en trai- tant les autres chaux de mercure ; c'eft-à-dire, qu'elle étoit appro- chante de celle du phofphore ; il s’eft revivifié 7 gros de mercure, & il n’eft refté dans la retorte qu'un demi-grain , au plus, de terre, dont j'attribue l’origine à l'alkali employé comme précipitant. C0 ::N: 6 EAU: SMRLONN: En démontrant que la chaux mercurielle obtenue par le procédé que je viens de décrire, eft réduéhble par elle-même, & qu'elle ne doit fon état & fon augmentation de poids, qu'à l'air ou fluide €laftique qu’elle tient de l'acide vitriolique , j'ai completé , autant qu'il m'a été poffible, un travail qui m'occupe depuis plus de trois ans, & dont on peut voir les premières efquifles dans l’analyfe des eaux de Banières de Luchon , faite en 1766 (1). Je vais donc finir cette quatrième & dernière partie de mes Effais fur les précipités du mercure ; en prianc ceux des Lecteurs qui cultivent la Chymie avec zèle, de vouloir bien vérifier celles de mes expériences qui les au- ront le plus frappés, & en les prévenant qu'ils ne le feront pas fans profit , foit en obfervant des chofes qui m'ont échappé, & il m'en eft fans doute échappé un grand nombre, foit en partant du point où je me fuis arrêté; le champ eft vaite; déja quelques expériences femblent me prouver que les chaux de plomb fe rapprochent de celles de mercure, & quela perte du phlogiftique, tant célébrée pour ex- pliquer'le phénomène des calcinations métalliques, pourroir bien n’a- voir pas plus lieu dans celles de plomb, que dans celles de mercure. Que les Chymiftes , qui aiment les progrès de l’art , daignent donc con- courir avec moi ; & j'ofeleur donner ma parole qu'ils ne tarderont pas à me devancer dans la carrière, (1) Et imprimée en r772, dans le deuxième volume des Obferv. de Méd, de M. Richard. Es SUR L’HIST. NATURELLE ET LES ARTS. sor DEEP PO RE D RENE CD, SE R VAT TEE :O,: N Sur une efpèce d'Hermaphrodifme dans un individu de l'efpèce du Daim , faite par M. VALMONT DE BOMARE, par ordre de Son Ale Séréniffime Monfeigneur Le Prince DE CONDÉ. De tous les phénomènes de la nature animée, les êtres réputés Hermaphrodites ; font ceux qui paroiflent piquer le plus la curiofité du Public. Le vulgaire toujours crédule , toujours amateur du mer- veilleux , & aflez perfuadé que tous les individus , de quelqu’ordre qu'ils foient , & qu’on appelle de ce nom, ont tour à-la-fois les parties naturelles des deux fexes réunies dans une mème enveloppe, & qui, jouiffant de leurs facultés avec un égal avantage , peuvent fe féconder réciproquement : cette opinion erronée eft plus le lan- gage fantaftique d’une tradition orale, qu'une doctrine propofée pat les anciens Naturaliftes , d’après l'imagination licencieufe où méta- phorique de quelques Poëtes. Les êtres organiques vivans, qui ont des fexes , des fens , des qualités qui indiquent la fpontanéité , en un mot , qui font autant d'anneaux de la grande chaîne de l’animalité , paroïffent foumis à la loi générale de la reproduction par la génération & l’évolution: les efpèces individuelles & parfaites , c'eft-à-dire pourvues d’un feul fexe , ou uniquement mâle, ou feulement femelle , font les plus abondamment répandues dans la nature. — La claffe des Humains, celles des Quadrupèdes , des Amphibies, des Céracées, des Poiffons, des Oifeaux, des Reptiles, des Cruftacées, & la plus grande partie des infeétes & peut-être des vers, renouvellent fans cefle l'évidence de ce fait : ces animaux réputés parfaits, & que le célèbre Von-Linné appelle Dioikes | ne peuvent produire feuls & fans le concours d’un fecond individu de fexe différent. On fait que parmi les différens moyens que la nature employe pour parvenir à fes fins (la reproduétion) il en eft qui paroïffent des plus bizarres, & cela parce qu’ils s’exécutent par un appareil d’or- ganes générateurs ou d’équivalens, finon plus compliqué , au moins plus caché , plus difficile à trouver , & par conféquent moins connu; le fcalpel de l'obfervateur n'a encore foulevé qu’une partie du voile INCEPZ $o2 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE; qui cache à nos yeux le laboratoire où s'opère la merveille dont if eft queftion. On n’a point encore vu d'animaux qui puiffent rigoureufement porter le nom d’hermaphrodite, A la vérité , parmi les limaçons terreftres , chaque individu réunit en lui, fur la tête, entre les deux cornes , & dans une ouverture commune , les deux fexes ; il peur en faire ufage en mème-tems ; mais il ne peut fe féconder lui-même , faut le concours d’un autre & femblable individu pour opérer la fécon-- dation : ce limaçon conftitue donc une efpèce particulière d’herma- phrodite ; l’admirable mécanique de cette fonétion fi importante pour perpétuer l’efpèce , eft réciproque & fimultanée dans ces fortes de bifexes. Parmi les corps organifés & végétaux, dit M. Adanfon, il y en a qui portent aufli les deux fexes fur le même individu , mais féparés l’un de l’autre , chacun dans une enveloppe particu- lière:— ceux-ci s'appellent Ændrogines. Parmi les hermaphrodites & les androyines du règne végétal , il n’eft pas rare, dit encore le même favant obfervareur , de voir l’un des deux fexes fférile ; quel- quefois aufli l’on voir des hermaphrodites mélés avec des mâles & des femelles parmi les androgines; on appelle ces derniers , wbrides & polygames. Les irrégularités partielles ou totales paroiffent même plus nombreufes & plus fréquentes dans les végéraux que dans les animaux. Dans la lifte des animaux non fanguins & effacées , on voit des coquil- lages afexes ou neutres , & qui, n'offrant fenfiblemenit aucun des artri- buts fexuels, ne peuvent produire aucune efpèce d’accouplement , aucun acte extérieur de copularion , de fécondarion : ils fe déchargenc d’une partie d'eux-mêmes pour produire leur femblable : ils en font donc en mème-tems le pere & la mere; certe efpèce d’hermaphro- difme eft particulier aux conques , & même à quelques pucerons , qui alors, font l’an & l’autre vivipares ; la reproduction des po/ypes d'eau douce , qui fe fait aufli fans génération , mais par la fection d’une partie de leur corps , eft encore des plus inoutes. Combien d'individus æonoikes, où unifexes imparfaits, dans cette clafle d’a- nimaux , qui produifent feuls & toujours par génération? Tels font encore les aphrodites, comme qui diroit animaux femelles , parce qu'en effet, il femble n’exifter dans leur efpèce que le fexe féminin; ils produifent de même que les monoïkes. Des Savans ont fait mention , en 1737, de divers poiffons her- maphrodites ; ils avoient la laite d’un côté, & l’ovaire de l’autre: on ignore fi la matière fpermatique a pu féconder les œufs de ces. hermaphrodites aquatiques & nageurs. H paroît, de tems en rems , des quadrupèdes réputés hermaphro- SUR L'HIST. NATURELLE ET LES ARTS. 503 dites, & les deux fexes, dont ils paroiffent extérieurement avan- tagcs, ne font jamais affez parfaits pour fervir en même - rems de mile à une femelle, & de femelle à un mâle; en un mor, ils ne font point propres à produire & à concevoir avec l’un & l'autre des deux fexes. = Parmi les quadrupèdes , il y en a tels que l’efpèce du lièvre & celle du lapin, dont la fingulière configuration fexuelle & l’abondante reproduction , les à fait regarder par quelques-uns, comme des her- maphrodites qui font, tour à tour, mâles & femelles, & qui en font alternativement les fonétions : c’eft encore une erreur; MM. de Buffon & Daubenton ont démontré que dans ces animaux ; les mâles très-ardens trouvent , dans la conformation particulière des parties génitales de leurs lafcives femelles ; les moyens de la fuperfération : -celles -cimont point d’orifice ni de col de matrice ; mais les cornes de la matrice ont chacune un orifice qui déborde dans le vagin & qui fe dilate dans l'accouchement : ainli, ces deux cornes font deux matrices diftinctes, féparées, & qui peuvent agir indépendaîmment l'une de l’autre ; enforte que ces femelles peuvent concevoir & accou- cher en différens tems pas chacune de ces matrices : elles peuvent recevoir le mâle , quoiqu'elles foient pleines : elles peuvent être en chaleur & pleines en tour rems. Ces femelles fipèdes ont le gland du clitoris proéminent & prefque aufli gros que le gland de la verge du mâle; & comme la vulve n'eft prefque pas apparente, & que d’ailleurs les mâles n’ont 4u dehots m bourfes ; ni telticules dans leur jeunelle , il eft fouvent aflez difhcile de diftinguer le mâle de la fe- melle. Nous avons dir que les femelles du lièvre font plus ardentes que les mâles; en effer ; elles les couvrent avant d’en être couvertes; ces manières d’agaceries ou de catelles plus intimes , & autres avan- tures jointes à leur refemblance extérieure , tout a fait dire, que dans les lièvres il y avoit beaucoup d’hermaphrodites, Quant aux fujets humains , que l’on qualifie fi gratuitément auf de l'impofant nom d’hermaphrodite , parce qu'ils participent en ap- parence de l'un & l'autre fexe, loin d'être , au gré de leur caprice, tantôt hommes & tantôt femmes, c’eft-à dire , pouvant engendrer hors d'eux comme dans eux, ils ne font ordinairement ni lun ni l'autre; ils ne doivent, de même que quelques quadrupèdes , leur conformation fingulière & ambigu, qu'à un jeu, qu'à un excès, difons à une erreur de la nature, dont l’opération ordinaire a été in- terrompue, confondue, telle qu’on l’a obfervée à Paris, en 1351, dans la perfonne de Michel-Anne Drouart, & ef 176$, dans celle de Grand-Jean. Le fexe le plus apparent ou le plus décidé chez ces infortunés , fut , au premier moment de leur exiftence, le fexe fé- 504 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, minin:indifférens d’abord fur leurs attributs générateurs, des facultés trompeufes , qui fe décelèrent au moment de la puberté , les ap- pellèrent (fur-tout Grand-Jean) à l'état de mari : mais l'un & l'autre n’étoient que des sribades peu timides, c'elt-à-dire, des filles pour- vues d’un clitoris de la groffeur du doigt index, & long de plus de quatre pouces; vers le fommet de ce cliroris, éroit une efpèce de gland avec fon prépuce : & comme ce clitoris n'étoic pas percé, il ne pouvoit produire aucune éjaculation ; mais fufceptible d’érec- tion & confervant cet état dans l’aéte du coït, il avoit l’avantage de faire ftérilement la fonction de mentule, ou partie virile. Qu'il nous foi permis d'expofer quelques idées fur la caufe de la bizarre conformation des prétendus hermaphrodires fanguins. Si dans le moment de la conception , des molécules organiques ou mixtes, ou en excès, ou viciées, ou incomplettes, par la portion deftinée à l'attribur fexuel , font projettées , dérangées, ou confufément defli- nées, à l’occafon d’un choc , de quelque pafhon, (on préfume bien que le hafard y a beaucoup de part ); de-là, naîtra des individus ou à fexes imparfaits, ou des bifexes incomplets ; les productions anomales, les môles ou malles charnues & informes , qui s'engen- drent quelquefois dans la matrice des animaux parfaits, paroiflent avoir eu pour principe la même erreur d’organifation dans leur to- talité ; hé, combien de productions informes ou difformes, occa- fionnées par des conceptions , foit déforganifées , foit manquées,, foit méfalliées ! Les Cabinets d'Hiftoire naturelle, offrent des exem- ples frappans de cette trifte vérité. Dans le tems du rut le plus marqué, & dont l'ardeur rend fu- rieux certains quadrupèdes , il peur arriver que leffervefcence du coït porte quelques individus , plutôt fauvages & errans , que dé- tenus en captivité, pétulans & preffés par le befoin, à fe facisfaire indifféremment : privés d’une compagne de leur propre efpèce, ou trormpés par une faufle apparence , &ec. l'un & l’autre , quoique différens en race, & mème éloignés pour le genre , parviennent quelquefois à s’appareiller , à s’accoupler ; & malgré les degrés de méfalliance , ils rempliffent quelquefois aufli le grand but de la nature; il peut donc réfulter de ces rencontres fortuites dans le filence de la nuit & des bois, des actes fans préludes, faits à la hâte, mais quelquefois prolifiques ; de-là , des métis, des animaux mi-partis, des mulers & les jumars : on a obfervé que ces dernières races fi étranges, offrent des efpèces qui ne font ni certaines, ni conftantes; au refte, les nouveaux - nés participent aux qualités individuelles , tant paternelles que A | & il paroît que dans les quadru- pèdes, lorfqu’il y a mêlange d’efpèces, ce qui eft engendré, a plus SURCL'HISTONATURELLE ET ILESLARTS. s$0$ de reffemblance à la mere qu’au pere , principalement en ce qui re- garde la forme & l'habitude du corps ; fuffit-1l pour cela que la mere l'emporte en vigueur & en force fur le pere? A l'égard des Bréhaignes , on appelle ainfi des femelles d’animaux qui ne portent jamais, parce qu'elles ne font pas fécondes. Enfin, on donne le nom de monffre à des animaux nés avec un vice de conformation contraire à la marche ordinaire de la nature, c’eft-à-dire, avec une ftruéture de certaines parties , & différentes en plus ou en moins de celle qui caraétérife l’efpèce vulgaire des animaux dont ils fortent ; la plupart de ces écarts de la nature nous frappent d’éronnement par les différences extérieures, & quelquefois intérieures; il y a donc des êtres qui pèchent par la conformation extraordinaire & bizarre, par la grandeur OR A > par le renverfement de toutes les parties de gauche à droite, par la place fingulière que ce déplacement leur Fe fouvent occuper, par un dérangement confidérable , par l'union ou la défunion de plufieurs arties, ce qui s’oppofe à l'exécution de leurs fonétions, &c.; dans (2 lifte des monftres, nous avons vu un poulain cyclope, un enfant acéphale , un cochon-d'inde à deux corps , des chats a deux têtes, un lapin tripède, un lièvre avec une feule oreille, un bélier hexapode , un chat & un veau à tête double ; un enfant monopède ; un fœtus de fix mois a deux têtes, un feul corps , quatre bras , trois jambes ; des lévrauts à huit pattes , des canards à deux becs , des pigeons & des dindonneaux à quatre pattes, & quantité d’autres animaux, dont les parties ou montftruofités varioient en fituation , en figure , en proportion & en nombre; nous avons vu aufli une famille d’humains fexdigitaires ; 11 faut en convenir, toutes ces conformations font rarement héréditaires; la Nature ne confond jamais pour toujours, ni fes véritables mar- ques, ni fes véritables fceaux : foumife à la loi du modéle qu’elle s’eft formé, le prototype , ou deflin primitif de l’efpèce, refte ou reprend fes droits ; en un mot, il tend toujours à rentrer dans l’ordre & la régularité de l’efpèce originaire : la variété ou les écarts, n’en ébranleront peut-être jamais l'immatabilité, parce qu’ils font illu- foires , éphémères ; un Naturalifte, inftruir & conféquent, placera ces individus accidentels dans la lifte des êtres momentanés. Tel eft à-peu- près le fommaire des irrégularités dans les corps or- ganiques, fi contraires à la marche ordinai- de la nature : expoli- tion qui oppofe tant de difficultés à la définition de l’efpèce, & qui a fair propofer par un favant cette fameufe queftion : Æf?-ce qu'à proprement parler, il n’exifleroit point d’efpèces , maïs feulement des individus ? Difons maintenant que les temps font changés; l’école moderne a fecoué le joug des trop ridicules préjugés de l’ancienne Rome; elle ol so6é OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE ; n'outrage point le trifte efclave qui offre honteufement l'excès ou l’'am- biguité du fexe : notre Sénat ne punit point le coupable innocene de la nature que le rigoureux Aréopage d'Athènes profcrivoit ou con damnoit tour à la fois, comme prophanateur & comme infâme : les hermaphrodires, quels qu'ils foient, ne fonc plus jetés à l'eaus ni relégués dans des ifles défertes; en un mot, ce ne font plus des êtres de mauvais préfages ; s'ils font aflez malheureux pour n’offrir aux regards de l’obfervateur que l’erreur organique d’une conftitution phyfique à leur égard , ils font un objet de méditation à l’efprit du Philofophe qui cherche à configner dans les annales de la nature, toutes les ef- pèces de faites de cette mere du monde. © Aujourd’hui, que les Grands fe font une gloire de ramafler à grands frais, & pour linftruétion publique , routes les produétions naturelles, qu'ils accordent leur protection à ceux qui étudient la fcience de la nature, qu’ils ne dédaignent point de convetfer, tant avec ceux qui y font quelques progrès, qu'avec ceux que d’heureux fuccès , guidés par le génie, ont fait marcher à grands pas dans cette carrière : les Princes, dans leurs momens de loifir, contemplent & comparent avec fruic les détails de leurs colleétions, fe rendent pro- pres la férie des connoiffances acquifes fur le domaine de l’hifloire naturelle ; par-là, ils fe montrent au fait des richelles des différentes Provinces & Etats, enfin des intérêts & des travaux de la Société qu'ils gouvernent; d’après ces vues, ces motifs, Leurs Alteffes Sérénifimes Mefleigneurs le Prince de Condé & le Duc de Bourbon , animés d’une curiofité noble & exemplaire , ont ordonné , pour faciliter les moyens d’inftruction fur les vices d’organifation des êtres créés, les rapports & les différences fenfibles qui les caraétérifent, ces Princes ont, dis-je, ordonné, que tous les animaux rares ou finguliers qui meurent à la Ménagerie de Chantilly , & ceux qu'ils chaffent, fuflent , avant d’être dépofés dans leur Cabinet d’hiftoire naturelle, examinés dans leur enfemble & leurs détails. Un Daim , à la veille du rut, ayant été lancé dans la forèr d'Halat, près de Chantilly, le 16 Septembre 1775. laiffa obferver, au mo- ment de l'attaque, qu'ilne faifoir que toucher au bois , tandis que le bois des autres Daims avoir déja frayé & bruni; on remarqua aufli ue les chiens le chafloient alors mollement ; ils fembloient même refufer de le fuivre : ce ne fut qu’une heure après, que cer animal étant échauffé, fes émanations devenant abondantes, ils le chafsèrenc vigoureufement. L'animal étant porté à terre par les chiens, donna alors le cri d’un Daim : on alloit le déshabiller , & commencer, fuivant l’ufage , par l’amputation des Daintiers ; ( terme de Chafleur, qui défigne les tefticules) l'afpeét de l'irrégularité extérieure du fexe, : frappa ; | | L h * 4 + £ à ÿ [ Ù SUR L’'HIST. NATURELLE ET LES ARTS. 507 frappa d'étonnement Son Alteffe Sérénifime Monfeigneur le Duc de Bourbon, ainfi que les Piqueurs de l'équipage. Son Alreffe Séré- niflime ordonna que l'animal fût porté inraét & rour de fuite au Château de Chantilly, où Son Alteffe Séréniflime Monfeigneur le Prince de Condé étoir. Ce Prince me fit appeller pour en faire l’e- xamen, & ordonna en même-tems à M. Brilloër, pere, l’un de fes Chirurgiens, d’en faire l'ouverture en fa préfence : plufenrs des Sei- gneurs qui étoient au Château, eurent la même curiofiré, & fui- virent les deux Princes à l'Amphichéâtre. IL eft important de dire que ce Daim eft d’une taille de Daim or- dinaire , cependant haut fur jambes ; fa tête ne porte qu’un bois, lequel eft implanté fur la partie gauche de l'os frontal :on trouve uniquement fur le têr droit la feule meule de l’autre bois, avec fon pivot. On fair que chez les Daims, comme chez les Cerfs, l'efpèce mâle eft la feule qui porte des bois. ( M. de Buffon a expofé, avec toute la fa- gacité philofephique qui règne dans fes écrits, les rapports entre la nutrition, la production du bois, le rut & la génération dans ces quadrupèdes ruminans. La furabondance ou fuperflu de la nourri- ture alors inutile au développement & à l’extenfion du corps chez ces animaux, indique des effets fenfbles ; elle fe manifefte par dé nou- velles productions ; elle produit la sée ou bois, le gonHemeut des Daintiers , la venaifon & furcharge de graille, le rat & en ce moment le gonflementde la gorge.) Le Daim dont il eft queftion, a été jugé par le pied pour un Daim de dix cors jeunement; par l’anique bois qu'il avoit, quelques Chalfeurs ne le jugeoient que troifième ou quatrième tête ( corne ou bois ) au plus; mais les Piqueurs les plus experts ont eftimé qu’on ne pouvoit plus juger de cet animal pour l’âge; fa tête proprement dite , eftbifarde ; il a l’encolure d’une daine; le pelage fauve & moucheté de blanc; les goutrières du bois affez larges, & ne fe terminant qu’à l’extrémité de l’empaumure ; le merrain fort maigre , & n’indiquant plus de connoiffances au Chaffeur ; mettant bas fon bois annuellement; le fexe prédominant, en apparence , chez cet animal, fembloit être le fexe féminin; des térines aflez longues & groffes; un clitoris trèsproéminent & aflis fur le méat urinaire, à l'entrée d’une vulve perite , étroite, & diftante de l'anus de plus de #rois. pouces & demi ; deux protubérances qui indiquoient moins aux yeux qu’au toucher , l’exiftence de deux tefticules intérieurs; le daintier le plus faillant , étroit à gauche, précifément du même côté que le boïs ; aucune trace extérieure de mentule. Tout, dans cet animal, joint au bois, dont la cète et à moitié parée ou armée, faifoi: foup- gonner un mélange des deux fexes dans un même degré d'imper- feion, & que cet individu n'avoir pu être puilfant ni par l'un Tome VI, Part. II, 1775, Vyy so8 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, ni dans l'autre fexe; telle éroit fa conformation fexuelle, elle pas roilloir renir de l’efpèce d’hermaphrodifme la plus commune. Pafons maintenant au réfulrat des recherches de l'Anatomifte, c’eft M. Brilloëc qui va parler. 2 » Son Alteffe Séréniflime Monfeigneur Le Prince de Condé, nous ayant ordonné de faire, en fa préfence , l'ouverture d’un Daim,;, qui avoir, par la rère, l'extérieur d’un mâle, nous avons reconnu, par l'examen que nous en avons fait, que les parties de la géné- ration repréfentoient celles d’une femelle , à la différence qu'il paroiffoir intérieurement ; entre les cuifes , deux tumeurs repré- fentant deux efpèces de relticules fans aucune forme de ferotum. Le cefticule gauche étoit faillant ; fenfible à la vue , recouvert par la peau & les tégumens; le cefticule droit, plus petit, plus couvert, moins faillant , étoir très-peu fenfible à la vue. Avant que de faire l'ouverture de cet animal, nous avons examiné extérieurement les parties de la génération, elles nous ont paru être de lefpèce des hermaphrodites , n'ayant aucune efpèce de verge fous le ventre, mais une forte de vulve qui fervoit uniquement de conduit uri- naite; les mammelles étoient comme celles d’une Daine ordinaire, bien conftituées, & compofées de quatre mammelons aflis chacun far un corps graiffeux , & avec les proportions & diftances natu- relles.. Le bout de chaque mammelon étoit fort gros, de même que chez les Daines qui ont fait des petits. » Sur les côtés , à la partie moyenne & extérieure du mufcle oblique, latéralement aux mufcles droits, il y avoit deux tumeurs en forme de tefticules, féparés l’un de l’autre d'environ quatre pouces, & ces tefticules croient fans noyau, & recouverts chacun d’une enveloppe grailfeufe; la tunique extérieure ou vaginale , très- épaifle; les deux cordons prenoient leur origine du milieu du ref cicule , & fe continuoient enfemble environ de la longueur de deux pouces, en fe féparant enfuite l’un de l’autre, pour aller lun à l'aorte inférieure , au-deffous de l’émulgente; & l’autre, dans une glande fituée fur le reétum. La partie extérieure de la vulve, quoi- que petite, étoit comme celle d’une Daïne ordinaire, & fervoit uniquement de conduit urinaire ; y ayant introduit une fonde ; nous avons pénétré facilement dans la veilie. Au - deffus de la vulve , patoifloit extérieurement une éminence affez volumineufe, faite comme un clitoris, recouvert d’une efpèce de prépuce. La vulve, ou l'urèthre, dans cet animal, étoit fans aucune trace de vagin, propremént dite; l’aÿant ouverte, nous avons découvert & exa- » miné la veflie, laquelle ayant été foufflée, s’eft trouvée avoir cinq 2 ouces de longueur ; de figure cylindrique , fans courbure, arrondie P 5 D > SUR L’HIST. NATURELLE ET LES ARTS. 509 # par les deux bouts, & de trois. pouces de diamètre ; à deux pouces » de fon orifice, deux urerères de neuf pouces de long, qui fe com- » muniquoient aux deux reins; à fon col, deux ligamens larges, » de cinq pouces de long, & attachés, de chaque eôté ; dans là par- » tie inférieure & latérale du baflin. » Au-déffus du canal de l’uürèchre , nous avons fuivi l’éminéncé » qui formoit l’efpèce de clicoris, laquelle fe continuoit tout le lors # du canal urinaire , en formant dans fa continuité une efpèce » de double S romaine, fe cérminant près du col de la veflie pat wune glande comme la proftare : ce cordon avoir environ cinq » pouces de long, fans aucuné ouverture, & de la confiftance d'un » tendon. » Entre la veflie & le retum , nous avons découvert nne efpèce » de poche, en forme de matrice, d’une confiftance molaffe & muf- » culeufe , Jars tubercule, & différente de celle de la matrice ordi- » paire des Daïnes ; cette matrice informe, éroic fourenue latérale- ‘» ment par deux ligamens plats, courts, & qui éroient attachés >» autour du rectum, & une petite ouverture dans le canal de Pu- » rèthre , environ deux pouces avant fa fortie dans la vulve ou le » Canal de l’urèrhre. D'ailleurs, nous n'avons découvert aucune efpèce » de trompe ni d’ovaire , comme il s’en trouve dans l’état naturel » des Daines, NOUVELLES LITTÉRAIRES. ASE ONS Critiques fur la, Muriomèrrie de, M, Dubét ; par M. Buffel , Infpeéteur des Manufactures de Languedoc pour la Province. À, Paris, chez Monory., Libraire, rue de la Comédie- Françoife. 1775. 27-89. it s Cer Ouvrage, dont l'exécution répond au titre , eft la critique en effet de celui de M. Duber, Si tous les Ecrivains avoient à craindre de pareils adverfaires , on doute fort qu'ils entrepriflenc jamais d'écrire. M. Buffel s'acharne, fpécialement à la Muriomiètrie de M. Dubet , femblable à un combattant qui ne peur quitter fon adverfaire qu'après l'avoir rerraffé, & on peut dire que fon Ouvrage eft écrit sanquam ab irato. Du refte , on croit ne pouvoir mieux faire, pour en donner une idée jufte, que de Lies en entier l'appro- v Y 2 $io OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, bation du Cenfeur, qui eft M. Adanfon, de l'Académie Royale des Sciences. » Ces Réflexions judicieufes & vraies, dit-il, font d'autant plus » folides, qu’elles font le fruit de plus de cinquante années d’ob- » fervations & d'expériences autentiques & reconnues, faites au »-milieu des éducations les plus floriflantes des vers à foie, & des premières Manufaétures des Soieries de la France : elles font ac- compagnées de plufeurs vues nouvelles & utiles; 1°. fur la né- » ceflité d’arrèter les abus des grandes plantations de müriers, pro- » jettées dans nos Provinces feptentrionales , où elles font moins » avantageufes & préjudiciables aux cultures des grains , & d’encou- » rager leur auomentation dans les terres maigres ou trop médiocres »de nos Provinces méridionales , 2°. fur les moyens d'empêcher » qu'il ne forte tous les ans du Royaume des fommes confidérables » d'argent, pour quatre mille quintaux de foie des plus hauts prix » qu'on achète en Piémont , qu'on pourroit fabriquer avec les cocons » du crû du Royaume, en augmentant le droit des foies moulinées » étrangères, & en diminuant au contraire, ceux des foies grefes non travaillées, dont l’importation eft plus avantageufe ; 3°. enfin fur l'utilité qui réfulteroit de [a multiplication des établiffemens, des filatures & moulinages en grand, en organcins des premières qualités, fuivant la méthode de M. de Vaucanfon , pratiquée à Aubenas dans le Vivarais ; ces diverfes vues d'amélioration & de réforme à faire, tant dans nos Manufactures de foies de France , # que dans nos plantations abufives de müûriers , dont la trop grande quantité dans les meilleures terres, feroit une fouftraion à la » culture des denrées de prémière néceflité , me paroillent de la plus grande importance , & mériter une attention particulière de la part » du Gouvernement, & je crois que le Public éclairé , lira avec plaifir » & avec fruit cette production d’un homme aufñli inftruit fur cette » matière , que véridique & bon citoyen, La > » C2 v [2 La % % É OV % % % 2 $ E ÿ La Tonotechrie, ou l’art de noter les Cylindres, € tont ce qui ef Jufcsptible de notage dans les Infirumens de concerts méchaniques ; par le P. Engramelle , Religieux Auguftin de la Reine Marguerite. A Paris, chez Delaguerre , Libraire-Imprimeur , rue de la Vieille- Draperie i7-8°, 1775. La Tonotechnie , ou l'art de noter les Cylindres , enveloppée jufqu’à aujourd’hui fous l'ombre myftérieufe du fecret , vient d’être mife à decouvert par l’Auteur : cet art ne fe borne pas au norage des ferinertes , des carillons , des orgues portatives , des automates & des autres petits inftrumens ufités jufqu'à ce jour ; il embrafle SUR L’HIST. NATURELLE ET LES. ARTS. s1x tout ce que la Mufique peut produire d'intéreffant. Si cet art eüc été connu plutôt, nous jouirions de l'exécution des chef- d'œuvres des Rameau, des Lulli, des Marchand, & de tous les grands hommes qui ont ravi d’admiration leurs contemporains. S'ils avoient connu le notage tel qu'on le connoït aujourd’hui , leurs meilleurs morceaux tranfmis par eux-mêmes à la poltérité fur quelques cylindres inal térables ; auroient été confervés dans ce genre d’expreflion, dont nous n'avons plus d'idée que par l’hiftoire. Cet art eft donc précieux; puifqu'à l’avanrage connu de noter la Mufique, il ajoute celui de conferver les fons , leurs tons & rous leurs agrémens, En prenant les ferinettes pour exemple , äl y a trois principales” manières de les noter , à l'échelle, à la roue & au cadran, L’Auteur, après avoir in- diqué & détaillé les avantages & Les inconvéniens de toutes ces méthodes, fait voir que le cadran eft l’inftrument qui réunit le plus d'avantages pour cet effet. Cer Ouvrage eft enrichi de figures néceffaires pour l'intelligence de cet arr & de plufieurs airs notés, avec tous les agrémens dont ils font fufcepribles pour la belle exécution : l’Au- teur donne quelques vues, nouvelles fur ja manière de noter les airs de Mufique qui ne peuvent manquer de plaire aux Arriftes de ce genre : on, trouve par-tout l'exemple à côté du précepte, & on ne fauroit trop l'inviter à perfectionner un travail fufceptible de per- fection, de tant d'agrément, & capable de faire honneur à la Nation, Syflème phyfique Emoral de la Femme ; par M. Rouffit, Docteur en Médecine de la Faculté de Montpellier. À Paris, chez Vincent, Li- braire , rue des, Mathurins, 2 à F Cer Ouvrage , intéreffanc par fon fujer, l’eft encore par la mal nière donc il eft fait. L’Auteur lui à donné une forme littéraire , qui le met à la portée des gens même à qui les matières de Mé- decine & d’Hiftoite naturelle ne font pas familières. Les Phyliciens y verront des chofes piquantes fur la génération, fur l’étac rèfpec- tif de l'enfant & de la mere pendant la groffefle, fur l’accouche- ment, fur la nature & la formation du.lait. Les Philofophes ÿ trouveront des traits d’une morale très appropriée & très-conforme à l'organifation de l’homme, &, des difeuflions fondées fur une Méraphylque très-délite; un coloris frais , un ftyle décent & ana- logue aux objets qu'on avoit à peindre , font encore des qualités qui en rendent la lecture agréable; enfin, l’Auteur , par les images vives & vraies dont il fe fert pour caratérifer la fenfbilité de la femme , femble ne laiffer aucun doute fur la fienne. 512 OBSERVATIONS SUR LA. PHYSIQUE, Traité de la Dyffenterie ; pat M.'Zimmerman | D. M: &c. traduit “de l'Allemand par Me Febvre de Villebrune ; D. M: &c.) À Paris, chez Vincent ; Libraire : Imprimeur , rue des Mathurins , Hôrel de Cligny”, vol®ïr-12 1775. $ TP Atedtlide cet Ouvrage eft le mème que celui du Trairé de l'ex- “péfiènés Hsns d'art de guérir M diftingue quatte efpèces de dyflenteries; 0 brerfiière ef, cellé qui -eft' ‘accompagnée d'ave: fièvre inflamma- roïce } la déuxième, celle qu’accompagne une fièvre bilieufe ou pu- tridé ;-c’eft ‘la plus commune ; la troilième , celle qui eft unie à atnélifèvré maligne ; la quatrième, fi l'on veut, celle qui tire en dongtieutti és quatre éfpèces font détailléés & décrites avec ‘leurs cäkattètés diftinétifs. Cet Ouvrage renferme un-grand nombre d’obfer- warions/pratiques fut cette maladie dont les Médecins peuvent tirer ain grand -fecours dans la pratique. On -aüroit ‘défiré que’ l’Au- reur | crès-eftimable d’ailleurs, n’eût pas fait fi fouvent des forties vives & ‘quelquefois déplacées contre fes confrères ; on auroit défiré de plus, qu'il eût parlé du Traité de la Dyffenterie de Srrack”, qui renferme d'excellentes 6bférvations; & qu'il füé entré dans quelque dérail fut l'ufage des 'eahx minérales, fui-rout des ferrugineules qui, dansceftains cas, fur-rout dans les dyffenreties iongues & opiniâtres, prôduifent le plus grand bién: qu'il eût détaillé les avantages & les ” inconvéniens qui réfultent de lufage des fruits dans la dyflenterie, dont les uns peuvent agir comme caufe du mal, & d’autres:comme remède, & dont la même efpèce ( rel eft le raifin ) à raifon de fa acurité es bonnes où, maüuvaifes qualités; à raïon de la terre qui lé lprôdüir ;\ du climat ; des-corps'étrangérs répandus à fa furface., &c. peut produire ces deux effers fi contrirès ; far-rout le chaffelark qui peut donner! & guérir certaïnes dyflènteries. Tous ces objets mé- ritoient d’être difeurés &'éclaircis dans un ouvrage femblable , fur- tour l’ufage des fruits à duvet coronneux , tels que les pêches, &c dont la! futface eft la plus ‘propre à ferenir les œufs des infectes ; &'à domier naïflanté par ‘cerre raïon , à certaines dyflenteries. On ne peut fe difpenfer éncore de prévenir le lecteur contre une inad- Yertance ‘de l’Auteur ; où plurôt/du traducteur , au fujer du. [el de tartre ordonné à la dofe d’une once , ce qui peut donner lieu à des méprifes funeltes. Le fel dont l'Auteur à voulu parler ; ft la crêine où fel de rartre , ou bien le fel alkali de tartre : fi c'eft le premier, éomme c'eft très probäble ; nous croyons que cette dofé ; quoi qu'un peu forte, ne peut pas nuire dans certains cas , & alors on doit dire la crème de rartre; mais fi c’eft l'alkali de tartre, on prévient que la dofe-d’une once peur caufer la mort, i | nl - S - TR SUR L'HISTYNATURE LLEJET\LESSARTES. 514 Pyfiologie des corps organijés ; où Examen analytique. des animaux des végétaux comparés enfemble, & deffein de démontrer La chaîne de continuité qui unir les diffèrens règnes de la nature. Traduétion Françoife du Phyfiologia Mufcorum de M. Necker. À Bouillon, aux dépens de la Société, 1775. Rien ne répond moins à la promeffe du titre, que l'exécution de l'ouvrage. Cette produétion eft un affemblage fort mal ordonné de pluñeurs paffages de MM. de Buffon ; Trembley & Bonnet fur les polypes & autres zoophyres, & dans léquel on trouve fouvent des fotties vives & quelquefoïs indécentes contre le célèbre Linrœeus, Le Traduéteur François en a fupprimé quelques-unes & adouci quelques autres. On cherche à y établir cette fameufe chaîne de continuité, ou ce: paflage infenfble d’un règne à l’autre; que les: hommes ont foupçonné exifter dans la nature , & qui ; relativement au petit nom- bre d'êtres que nous connoiflons ,‘patoïc ‘vraifemblable, L'Anteur de la-phyfologie des moufles, prétend que ces derniers végétaux for- ment ie principal aclteminement infenfiblé au æègne animal, puif- que les moufles ne fe renouveilent pas par des femences ; comme on lavoir cru, mais par des rejetrons qui ant la faculté de: les repro- duire. Le Traducteur , peu au fait du langage des vrais Botaniftes, en introduit un nouveau , qui aura fans doure bien de la peine à prendre : par ‘exemple ; il traduit partout; même aux titres, plensa perénnis, par plante pérennelle : le centaurea cyarus panrcentaurée' blenerse ; &c. au lieu de plante vivace & de Bluet : certe! traduétion informe eft attribuée à-M. Cofe, Médecin de Nancy. ! Du reffe , quant à ce qui concerne cette-chaîne de continuité entre les règnes végétal & animal ,'äliparoïf que.jufqu'à préfent, le Tremella dans lequel M. Ædanfor a decouvert un mouvement tièss" fenfble, & les polypes font les tres! qui l'éabliffent le mieux, Le Médecin Miniffre de la Nature, ou Recherches & Obférvarions fur le Pepafme ou coëtion pathologique ; pat M. Carrere , Cenfeur Royal , Docteur en Médecine de l’'Univerfité de Montpellier, de l’Académie Royale des'Sciences de la mème ville, de celle de Touloufe, ancien Infpecteur général des Eaux Minéralesde la Province de Rouftllon & du Comté de Foix , &c. Profeffeur Roÿal émérite :en Médecine dans l’Univerfité de Perpignan : avec cette {belle Sentence, tirée de Celfe : { Repugnante naturé ; nihil Medicina proficit.] À Amifterdam ; & fe trouve à Paris, chez Ruault, Libraire ; rue de la Harpe, 1776, L'Auteur, déja connu avantageufement par:de bons Ecrits en Mé: decine , vient de juftiñier dans celui-ci ; l’idée qu'on :avoit de fes talens : il cherche à y établir une doétrine qui.ne fauroir ète trop + « si4 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, accréditée pour la gloire de la Médecine, & trop univerfellement pra- tiquée pour le bonheur du genre humain. Il s’agit de l’art de placer à propos les évacuans , fur-tout les purgatifs dans les maladies ; art fi peu connu en général dans les campagnes , où la plupart du tems l'exercice de la Médecine eft livré à des Chirurgiens qui ne peuvent pas avoir toutes les connoïffances néceffaires pour cela. L’Auteur dé- veloppe dans cet Ouvrage les raifons qui autorifent à attendre pref- que toujours les fignes qui annoncent la coétion des humeurs dans les maladies, pour placer les évacuans; fait voir le danger d’une adminiftration trop prompre de ce genre de fecours ; fe ferc des autorités les plus refpectables en Médecine , du précepte & de l'e- xemple de vous les bons Praticiens pour établir folidement cette doétrine; marque le rems dans les maladies où l’on en doit faire l'application : jamais matière ne fur plus importante dans la pratique de la Médecine, que celle dont l’Auteur traite, & jamais on ne fauroit trop fe récrier contre l’ufage meurtrier où font quelques perfonnes de l’Art dans les campagnes, de purger à tort & à travers au commencement des maladies aiguës , & d'augmenter ainfi jufqu’à La mort, l'irritarion , le fpafme & l’état inflammatoire des organes, Traité des Jardins, ou le Nouveau de la Quintinie , contenant la defcriprion & la culture , 1°. des arbres fruitiers, 2°. des plantes potagères , 3°. des fleurs, 4°.des arbres & arbrilleaux d’ornement; par M. L. B. #**% A Paris, chez Didot le jeune, Libraire de la Faculté de Médecine, Quai des Auguftins , 1775. Prix, 7 liv. 4 fols les deux volumes brochés , en deux parties 7-89. On vendra fépa- rément le Tome I. 4 livres 4 fols broché ; & le Tome Il. 3 livres 4 fols. M. de la Quintinie , pere du Jardinage François, éroit le feul, jufqu'à préfent, qui eût fait fur cette matière , un Traité complet, rempli d’excellens préceptes & de principes folides & féconds : mais fes inftructions font la plupart du tems noyées dans des mots , interrom- pues par de fréquentes digrefions & des répéritions inutiles , ou erdues pour la plupart des lecteurs. Pour épargner au leéteur une étude fi pénible, l'Auteur offre au Public le réfultat d’un travail d’un rand nombre d'années , les moyens de fimplifier certaines pratiques, d'en rectifier beaucoup de vicieufes , & de leur en fubftiruer de meil- leures : l’ordre, la précifion & la brièveté caraétérifent cet Ouvrage. Il eft enrichi des planches néceffaires pour en faciliter l’intelligence. Si le Public eft farisfait de ces deux premières parties ; l’Aureur s’em- preffera d’en ajouter deux autres, qui comprendront le Jardin freurifle & le Jardin d'ornement, On SUR L'HIST. NATURELLE ET LES ARTS s'S On trouve chez le même Libraire des exemplaires du A'aruel de Chymie de M. Baumé , in- 12. nouvelle édition , 1766. L'Are de la teinture des Laïnes , &c. par M. Hillor, nouvelle édition, 1772, L'hifloire de la petite vérole, par M. Paule, avec fon Avis au Public Jur Jon plus grand intérér, &c. le tout relié en deux volumes àn-1 2. Le Philofophe fans prétention , ou l'Homme rare Ouvrage phyfique; chymique , politique & moral. À Paris, chez Cloufier,, Imprimeur- Libraire , rue Saint-Jacques , & chez Lacombe , Libraire, rue Chrif- tine. Prix 4 liv. 10 fols broché. f L’Auteur de cet Ouvrage favant , agréable & bien écrit, a cherché à rafembler, fous une forme moins aride qu'on ne fait ordinairement, tous les principes de Phyfique les plus abitraits. 11 fuppofe un. Philo- fophe grand Obfervareur, & le place dans des circonftances favorables au développement de fes divers fyftèmes; car l’Aureur en propofe plu- fieurs d’un caraétère nouveau & hardi. Il avance entrautres, que le Soleil, qui n’eft , felon lui, qu’un globe lumineux, ne renvoie point à la terre une chaleur direéte , la chaleur n’étänt que lation de la lumière agitée par le mouvement des globes. Il foutient certe hyporhèfe avec finefle, & répond adroitement à plufeurs objections qu'on pourroit lui faire. Il parcourt fucceflivement tous les différens règnes de la Nature, & emploie , contre le matérialifme, les preuves phyfiques qu’il peut en déduire, Nous ne ferons point l’analyfe dé- taillée de cet Ouvrage, c’eft aux Savans , à qui l’Auteur a dédié fon Livre, à juger fi fes preuves font fondées. Nous dirons feulement qu'il a tiré un parti, on ne peut plus heureux, d’un très - petit nombre d’Interlocuteurs & de fort peu d'évènemens, & fur-tout nous avons remarqué, avec plaifir , qu'il a cherché à repréfenter , ar des termes fimples, les chofes les plus abftraites, en écartant LE mots tecniques qui ne fervent que peu aux perfonnes inftruites, & dérobent abfolument l’inftruction au grand nombre des Leéteurs. La Province de Dauphiné eft l’une de celles du Royaume qui préfente au Naruralifte les fpectacles les plus intéreffans & les plus variés : fi aux raretés qu’elle offre, elle joint le mérire de donner le jour à des hommes laborieux, avides de découvertes > animés du cou- rage néceflaire pour les entreprendre , propres à courir rapidement la carrière des Sciences & des Arrs; ne doit-elle pas fe féliciter plus encore de rencontrer dans M. Pajor de Marcheval (qui en eft In- tendant) un Magiftrat jaloux de la voir jouir de tous fes avantages, encourageant tous les talens utiles, s’adonnant avec fuccès, quoique par fimple délaffement , à l'étude de l'hiftoire naturelle, favorifant ce goût par-tout où 1l le trouve, parce que c’eft une fuite du plan qu'il s’eft formé de ne rien négliger de ce qui peut la rendre heureufe & célèbre. Tome VI, Part, IL. 1775. Dex * st6 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, M. Guettard, de l'Académie des Sciences , & M. Faujas , vice- Sénéchal de Montelimar , accompagnés du fieur Villard , Dé- monftrateur de Botanique à l'Ecole de Chirurgie de Grenoble, viennent de parcourir dans le plus grand détail, toute certe Pro- vince. L'objet de leur travail a été de dreffer des Cartes Minérae logiques dans lefquelles on diftinguera par des hachures, des enlu- minures différentes & des fignaux particuliers; 1°. tous les cantons calcaires, graniteux , argileux , &c. 2°. Ceux de coquillages, de graviers ; ardoifes , pierres roulées , &c. 3°. Toutes les mines de métaux où demi-métaux. 4°. Les carrières de marbre, plâtre, pierres ollaires , ardoifes, tufs, &c. 4°. Les charbons fofliles, houilles , marnes , terres à porcelaine , &c. 6°. Les eaux thermales & miné- rales: 7°. Les criftallifarions, pétrifications, & généralement tout ce qui a trait à l’Hiftoire Narurelle. Ces MM. pendant le féjour qu'ils ont fait à Montelimar , ont. trouvé fur la rive gauche du Rhône, & affez avant dans le pays, de très-gros fragmens de bazaltes à colonnes , que M. Faujas avoit reconnu depuis long-tems , s’étant bien aflurés qu'ils ne pouvoient venir des montagnes fupérieures du côté du Dauphiné , ils ont imaginé de traverfer le Rhône; & après une heure de chemin, en emontant fur le Vivarais, ils ont trouvé dans un torrent un amas prodigieux de matières de volcan, qu’ils ont fuivi jufqu'à fa fource : il ne leur a pas été difficile de reconnoître le volcan ; c’eft une montagne fort élevée, fur le fommet de laquelle ils ont trouvé la bouche, d'environ 8o toifes de diamètre ; la lave eft partie vifble- ment du deffous de cette bouche ; elle a coulé en grandes mafles par les ravins , l’efpace de 7 à 8000 toifes ; la matière s’eft amon- celée , toute brûlante , en certains endroits; venant enfuite à s’y figer, elle s’eft gerfce & fendue dans toute fa hauteur , & a laiffé toute la plaine couverte d’une quantité innombrable de colonnes , depuis 15 jufqu'à 30 pieds de hauteur, fur environ 7 pouces de diamètre ; ces efpèces de pyramides obfervent des terminaifons différentes , depuis 4, $s & 6 angles. Ces Naturaliftes en ont apporté quelques - unes au Cabinet d’Hiltoire Naturelle de Gre- noble, qu'ils ont enrichi de tout ce qu'ils ont trouvé de curieux. On voit une fuite complette de routes ces colonnes de bazalte, avec divers accidens , à Montelimar, dans le cabinet de M. Æaujas, où font encore les pierres brûlées & poreufes relatives à ce volcan. Dans le fecond voyage que ces Naturaliftes ont fait aux Alpes, ils éroient accompagnés de M. Margoy Duverney , Ingénieur - Géo- graphe , & de M. Lieutard, neveu de M. Villard, Ils ont parcouru très-foigneufement , & avec des peines incroya- bles , toutes les montagnes de l'Oyfans, dont les cimes font entiè- SUR L'HIST. NATUREILE ET LES ARTS. $t7 rément couvertes d'une neige qui ne fond jamais ; & ont fait dans cette partie l'examen le plus attentif des mines curieufes & inté- reflantes de cryltal de roche des foffes de Ja Garde, des Mas Jur-Les- Clos, de Marone, du Freney. Leur goût pour cette recherche, les a portés à aller vifiter & fuivre les anciens travaux de la fameufe mine de cryftal de roche de la Grande Herpie, qu’on a été forcé d’aban- donner , malgré fa richefle , parce qu'on ne peut y aborder que pendant un mois & demi de l'année , & qu'il faut courir les plus grands rifques, en y efcaladant par des rochers taillés à pic, qui ne préfentent que quelques faillies qui fufhfent à peine pour placer la pointe du pied ; & c’eft au-deffus d'un précipice de plus de $00 pieds de profondeur qu’on eft obligé de voyager de la forte ; mais on eft dédommagé des peines & des dangers, en contemplant cette magni- fique cryftallière, qui préfente à l'œil un rocher qui n’eft prefque qu'une malle du plus beau cryftal; & c’eft pour cette raifon que les gens des environs l’ont nommé 24 Grande Cryflalliere. Ces Meflieurs ont vifité de-là les chaînes de C/avans , de La Grave : ils ont craverfé le Lautaret , où ils ont trouvé une moiflon 4bon- dante en plantes curieufes & rares : ils fe font enfuite rendus fur le Mont Genévre, dans toute la vallée de Neuvache , dans celle de la Vallouife, & dans le Briançonnois. C’eft à deux lieues de Briançon, & dans la vallée de Servieres , qu'ils ont découvert la fource des pierres variolites qu'on rencontre dans la Durance , au - deffous d'Avignon : on fait combien cette pierre eft rare , & on ne la con- noifloit jufqu'à préfent , qu’en caïllous roulés ; mais ces Meflieurs l'ont trouvée par grande malle & en rochers; 1l s’en détache dans les fortes gelées, des pièces qui font entraînées par le ruiffeau de Servieres dans la Durance ; qui les roule & les arrondit de la ma- nière qu'on les trouve au-deffous d'Avignon Il en à été envoyé une de quatre-vingt livres dans le cabinet de M. de Marcheval. De Briançon , Mefieurs les Naturaliftes ont pris la route du Queyras, où ils ont refté huit jours à parcourir les montagnes de cetre contrée, terminée par le Mont-Vifo , qui donne naiflance au Pô:ils fe fonc rabattus de-là fur Mont-Dauphin, Guilleftre , Vars & les vallées voi- fines, jufqu’aux limites de Barcelonette, en graviflant fans celle cette fuite prodigieufe de montagnes , & recueillant les différens miné- raux , les plantes , les poiflons , les infeétes , &c. Enfin , ils fe font rendus à Grenoble par Vizille, portant avec eux une fuite d’obfervarions locales, & des Mémoires relatifs aux divers points d’hiftoire naturelle qu’ils ont été à portée d’examiner, & qu'ils vonc s'occuper à publier inceffamment , avec le fecours de cinq cartes minéralogiques, qu'ils ont entièrement remplies des dif férens fignaux correfpondans à leurs découvertes. Xxx 2 s18 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, M. Guettard , après s'être répolé quelques jours , a repris fes courfes du côté du Pont de Beauvoifin , fur la côte du Rhône, dans la partie du Dauphiné qui elt au-deflus de Lyon , &c. tandis que M. Faujas va s'occuper d'un autre côté, aux environs de Montelimar, Valence, Creft, le Buis, Orange, &c. La rigueur de la faifon n'ayant pas permis à MM. les Naturaliftes de continuer leurs courfes, M. Guettard eft revenu à Paris mettre en ordre fes remarques , tandis que M. Foujas s'occupe dans fa Pro- vince à rédiger les fiennes, & à faire graver, fous fes yeux, ce qui lui a paru mériter ce foin : il n'appartient qu’au Public de récom- penfer par fon fuffrage , les travaux de ceux qui le fervent avec tant de zèle, nous croyons qu'il accueillera ces derniers de MM, Guettard & Foujas. Nous ne nous flattons pas de pouvoir ajouter du luftre au nom du premier; le fecond qui, au mérite des talens, de l'activité & des connoiffances, réunit Ja jeuneffe , ne tardera pas à occuper un rang diftingué parmi les favans Naturaliftes. Aufi tôt que les Mémoires nous feront parvenus, nous nous empreflerons de les inférer dans notre Journal. Obfèrvations fur l'état aëluel de l'Epigootie aux environs de Touloufe: A Touloufe, chez Simon Sacarau, Libraire, rue St-Rome, 1775. L'Auteur anonyme débute , en difant qu'il eft très-intéreflant d’ap+ prendre, dans le moment préfenr, qu'il y a une révolution favorable dans l'Epizootie qui a gagné prefque toute la campagne des environs de Touloufe, & que cette maladie, peut-être intraitable autrefois, fe trouve aujourd’hui beaucoup adoucie, puifqu’elle cède à des traitemens. Parmi ceux qui ont le mieux réuf, celui qu’on a fuivi dans le Mar- quifar d'Ofun , confifte, 1°. après une faignée aux deux flancs, à don= ner une once de thériaque dans le vin; pour boifflon , l’eau blanche faite avec la farine, & par intervalles , du bouillon gras ; à couvrir l’a- nimal avec une couverture de laine, & à le frotter, plufieurs fois, le long de l’épine avec de l'eau-de- vie ;2°.à donner, le deuxième jour, demi once de camphre , demi once de nitre, & une once de miel dans du vin. D’autres ont donné demi once de thériaque par jour. Les lavemens faits avec les herbes émollientes , ont eu un très-bon effer. Quand l’animal a commencé à être mieux, on lui a donné un peu de foin & de fourrage. À Flaurenfac , on a fuivi le mème traitement, avec certe différence qu'on n'a pas employéle mêlange de camphre, de nitre & de miel, . Aux environs de Touloufe, on n’a point faigné; on a donné les cordiaux , rels que la poudre cordiale , la chériaque & le vin. Sou- vent on a mèlé du pain émietté dans le vin. La faignée a paru nuifñble dans les autres Provinces, On dic : »Il RES: SUR L'HIST. NATURELLE ET LES ARTS. sta » eft aifé de voir qu’elle doit hâter la mort dans la violence de la conttitution épizootique , lorfque tout tourne rapidement à la pu- » tréfiction gangréneufe. Mais Re la maladie toutne aux dépôts » critiques , c'eft par elle qu'on doit commencer ; & dans ces Cas, » elle doit être placce à la première marque de triftefle «, Les purgacifs, Les irritans, ne téuffiffent point en général dans cetre maladie. D'après toutes ces confidérations , l’Auteur indique le plan du traitement fuivaut. Saigner l’animal à la queue aux premiers fymptômes de la maladie; quatre heures après , lui faire prendre une once de thériaque dans une livre de vin; demi-once de chériaque le deuxième & troifième jour dans du vin, frotter à fec l’épine du dos; ne donner à boire que de l’eau blanchie avec la farine, & le nourrir avec de l’eau blanche un peu épaiffe, ou avec de la mie de pain froiflée dans de l’eau blanche & du vin, & laver la bouche de l'animal avec parties Cgales d'eau & de vinaigre, dans lefquels on aura mis du miel. La plupart des principes qui ont conduit à ces traitemens fimples, établis dans les Recherches fur les Maladies épizootiques , publiées, par ordre du Roi, à Paris, chez Ruaule , auroient bien dû déterminer lAureur à en faire quelque mention , il n'en dit pas un mor, Confultation fur Le Trairement qui convient aux Befliaux attaqués de Pépizootie ; par M. Félix Vicq-d'Azyr, Médecin envoyé par le Roi. A Bordeaux, $ Novembre 1775: Cette Confultation, qui renferme ün traitement fimple, fe réduie à fix principaux chefs ou articles, qui font la faignée, la boiffon ordinaire, les /avemens , les purgatifs, le traitement extérieur , & les prèférvarifs. Dans le premier, l'Aureur examine l’ufage qu'on doit faire de la faigynée, & les principaux cas où il convient de la placer. Il en ré- fulte qu’elle eft naturellement indiquée, lorfque le pouls eft plein, dur & fréquent, mais que ce moyen peut devenir préjudiciable, fi l’on atrend que la ftafe gangréneufe foit commencée, & que certe ftafe fe fair beaucoup plus promprement qu'on ne penfe ; qu'ainf, une feule doit fuflire en général, & qu'on ne doit point oublier, qu'employée trop tard , ou lorfque la maladie eft entièrement dé- clarée, elle eft roujours mortelle, é Dans le fecond chef, il eft queftion des boiffons ordinaires qui conviennent aux animaux malades. Les émollientes faites avec la décoétion des plantes qui ont cette vertu; l’eau blanche, faire avec la farine, jamais avec le fon; les boiflons acidulées avec le vinaigre ou l'acide vitriolique ; les boiflons mitrées , &le mêlange de vinaigre & d'eau-de-vie, recommandé par M. Vire, fonc les principales que l'Auteur confeille, so OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, &c. Les portions qu'on donne quelquefois dans la journée, fe réduifent à quelques cordiaux ou alexipharmaques , rels que la canelle, la thériaque, &c. auxquels le vinaigre ou le vin fert toujours de bafe ; on ordonne , pour le déclin, du pain rôti trempé dans le vin. Quant aux lavemens , l’Aureur confeille les émolliens nitrés ou acidulés , & lorfque l’éruprion eft faite, d’en fufpendre l’ufage. Les pargatifs ne conviennent point au commencement ; les draf- tiques font dangereux en tour tems, & les minoratifs feuls convien- nent dans le déclin de la maladie. Le traitement extérieur confifte dans l’application des férons au com- mencement, au bas du fanon, dans la térébration des cornes, l’appli- cation des boutons de feu ; les lotions de la bouche & du nez avec du vinaigre, les frictions sèches, les fumigations fimples & les lotions avec l’eau chaude ; les irritans & épifpaftiques ; une charge quelcon- que , fixée fur le front entre les cornes, pour tenir la tète chaude. L’Auteur infifte d'autant plus volontiers fur le traitement extérieur, qu'il le regarde comme le plus important. » On ne fauroit trop, dit-il, » page 11, tourmenter le cuir des beftiaux malades, pour y porter » l'effort critique de la nature «. Quant aux préfervatifs & moyens de désinfection, le principal, après avoir paré aux dangers de la communication, confifte à laver avec de l’eau, verfée en abondance, tous les jours, les auges, les rateliers, les planchers , la peau de l'animal, &c. L’Auteur alléguant pour preuve de l'avantage de cette pratique , que l’eau eft le grand moyen employé dans tout le Levant pour la désinfeétion des uften- ciles impregnés de virus peftilenriel. Tous ces principes , tous ces moyens fimples, faciles & peu dif- pendieux , fe trouvent (à l'exception de la charge pour échauffer la tête de l'animal) dans le deuxième volume des Xecherches fur les Ma- ladies épizootiques , publiées par ordre du Roi ; par M. Paule. Fin du Tome VI & de la Seconde Partie. A rene Es get pe ie DOCS EEE TABLE GÉNÉRALE DEPEMAU ART TACLS ETS CONTENUS DANS CE SIXIÈME VOLUME. PS Re AQU UN LES E XPÉRIENCES fur la pefanteur des Corps à différentes diflances du centre de la terre ; faites aux Mines de Montrelay en Bretagne, par M, le Chevalier ve Doromteu, Officier des Carabiniers ; page 1 Recherches fur une Loi générale de la Nature , ou Mémoire fur la fu- Jibilité & diffolubilité des Corps , relativement à leur male, où l’on trouve l'art de tirer facilement & fans frais , une matière alimentaire de plufieurs Corps , dans lefquels on ne connoiffoit pas cette qualiré par M. CHANGEUX , 43 Mémoire fur la modification de Paëlion des Menftrues , € [ur-tour du Feu, par les qualités accidentelles des Corps, où l’on recherche quel … ff l'art de mefurer cette aëtion ; par le même, 148 Expoftion des Analogies Les plus fingulières & les plus importantes du Froid & du Chaud , avec l'explication de ces Analogies ; par le même , ; 299 Suite de l’'Expofition des Analogies les plus fêngulières & Les plus im- portantes du Froid & du Chaud, avec l'explication de ces Analogies ; par le même , Nouvelles Expériences éleétriques ; par M. Comus, eu k Suite des nouvelles Expériences électriques ; par le même, 175 Suite des nouvelles Expériences életriques ; par le même, 2658 Differtation fur le mouvement & les élémens de la Matière; par le même , 420 Recherches pour augmenter la force de PEleëricité , par le moyen d’une armure adaptée au premier conduëleur ; par M. D'EriEeNNE, Ecuyer, Avocat en Parlement , Huiflier ordinaire du Roi en la grande Chan- cellerie de France , premier Huiffier en fon Grand-Confiil, 81 Ô s22 T° ATBÛL ÉUNG. É NPÉRR ATDUE Recherches fur le moyen de perfeétionner les ifolemens pour toutes fortes de Machines életriques ; par le même, 290 Obférvations fur les Efprits ardens., vulgatrement appellés Eau-de-vie de marc , & fur les avantages qui réfulteroient de leur libre fabri- cation ; 101 Précis d'un Mémoire qui porte pour titre : Recherches fur l'origine des Fofliles accidentels du Brabant; par M. pe LaAunay , lé à l’Aca- émie Impériale & Royale des Sciences & Belles-Lertres de Bruxelles, par M. NéronaM , Direileur de cette Académie , 113 Lettre fur la Fontaine ardente du Dauphiné ; par M. D. S. 124 Exrrait d’une Lettre de M. DE MAGELLAN , relative au nouveau Voyage autour du monde, fait par le Capitaine Cook , & à quelques Ex- périences- fur l'Air fixe, 131 Confidérations Optiques ; neuvième Mémoire ; fur les Lifières lumineufes ; par M. Durour, Corre/pondant de l’Académie , 13$ Confidérations Optiques , dixième Mémoire ; fur les Lifières lumineufes ; par le même ; 412 Suite du Mémoire de M. MaTnoN De LA Cour, de l’Académie de Lyon , fur la Machine mue par la réaition de l’eau, 166 Demande relative au Problème à réfoudre , propofé par M. ve Doro- mieu, Officier des Carabiniers, dans le Cahier de Juillet 1775 ; age S; 182 Lerrre de M. l'Abbé ne Linieres, à l’Auteur de ce Recueil, fur ur Probléme à réfoudre, propojé par M. Ds Doromteu, dans le Jour nal de Phyfique du mois de Juillet 177$; page S, 435 Effai d'explication d'un Phénomène affez fingulier ; produit par la fonce de la glace ; par M. DE ServiemEs , Officier dans Orléans, Cava- derie , 183 Obférvations fur les Echos de la mer, 192 Oëférvations fur une efpèce particulière de Thermomètre ; par M. Pa- sumorT, ngénieur - Géographe du Roi, de l’Académie de Dijon, 230 Recueil de quelques Expériences far lEleëtricité ; par M.G. HENLEY , Membre de l'Académie Royale de Londres , : 133 Lertre de Madame ve V***, à M. le Comte DE NÉE 261 Recherches phyfiques fur P Air fixe ; par M. FonrANA, Phyficien de S, À. R. l'Archiduc , Grand Duc de Toftane , 280 Lerrre de M. le Chevalier Marsicio LARDRIANI, à l'Auteur de ce Recueil » 31 $ Obfervations fur la lumière dont la Mer brille fouvent pendant la nuit ; par M, l'Abbé DicQuEMARE, Profeffeur de Phyfique, &c. 319 Remarques fur le fond de la Mer, & fur les Cartes qui le repréfentent ; par le méme , 45 Rapport DNENS: ARE LE LES. 523 Rapport fait à l Académie des Sciences , fur le Fard , 322 Obfervation fur le Thermomèrre ; par M. BLonveau , Profeffeur de Mathématiques , de | Académie de Marine , à Bref , 32$ Obféervation fur la Larme Batavique; par M. Mavvrerir , Chanoine Régulier de la Congrégation de France, & Prieur de Caffan, 309 Mémoire fur la fufion de la lame d’une Epée dans le fourreau , par la foudre ; par M. BERTHOLON , des Académies Royales des Sciences de Béxiers, Lyon, Marftille, Montpellier, Ec. 401 Lettre à l Auteur de ce Recueil, fur une dégradation des Couleurs ; par M. J. À. Moncès, Chanoine Régulier ; & Proféffeur de l Abbaye de Saint-Lo de Rouen , 481 CHE MEET E Erves de M. Mort, par M. PARMENTIER, Penfionnaire du Roi, Maître Apothicaire de Paris , Membre de l’Académie des Sciences, Belles-Lérrres & Arts de Rouen, &c. page 5 Mémoire. fur La découverte de la Sélénite dans. la Rhubarbe , traduit de l'Allemand de M. Mopez ; par M. DEMoRET ; ffls, Apothicaire, 14 Obférvations & Expériences de M. Canet , fur le mercure précipité per fe, ordinaire , & fur celui préfenté par M. BaumE, à l’Aca- _ démie des Sciences , comme fublimable en entier & irréduékible, 5 Obférvation d'une propriete fingulière de la Serpentaire ; par M. ve Monveau, 130 Lertre de M. ve Morveau à M. le Comte pe BurroN , fur la fufi- bilité , la malléabiliré, le magnétifme, la denfité, la cryflallifation de la Platine, & Jon alliage avec Pacier , 193 Seconde Lettre du méme , fur le Bleu de Pruffe, 355 Mémoire fur la nature du Spath pefant ; par M. Monxer ;, 214. Mémoire fur les mines de Fer, & fur les parties étrangères qui s'y trou- vence "per M KniNGER , traduit de. l Allemand, 22$ Lettre de M. de Duc DE TA DE roncAn . à P Auteur de cé Recueil , 327 De la Cryflallifation des Sels; par M. J. G. PrÆuLER , 369 Lettre à M. Darcer , Doëteur-Répent de la Faculté de Médecine de Paris , Profeffeur de Chymie au Collége Royal, &c. par M.BERNIARD, 410 Expériences Jur quelques précipités de mercure , dans la vue de décou- vrir leur nature; par M. BAYEN , Apothicaire-Major des Camps & Armées du Roi, 487 Tome VI, Parc. II. 1775. Yyy TABLE GÉNÉRALE ME: D ER ONU Fe O: SÉRVATION fur un Fémur fratturé ; par M.V Abbé Dicqur- MARE, Profefleur de Phylique & d’Hifloire naïarelle , de plufieurs Académies des. Sciences , Belles-Lerrres, Arts , 6e, DAS 517 Lettre de M. De Morveau à l’Auteur de ce Recueil , fur la manière d'agir du Mercure dans les maladies dont il eff le fpecifique 351 Traitement contre le Ténia ou Wer folitaire ; pratiqué à Morat en Suiffe , 460 HEST OIR:Es N AT UK ELLE. a O1S1ÈME Mémoire fur les Abeilles, où on expofe les prin- cipaux réfüultars des nouvelles Expériences qui ont ëté faites fur ces diouchès dans le Palatinat!; par M. BonNet, de diverfes Académies , E page 23 Obférvations fur plufieurs. objets d’Hifloiré” naturelle faites par M. Roume DE SaiNr-Laurenr, Jur fes Terres, quartier de Saint-Pa- trice, Tfte de Grenade ;* si Suite de la Deftription des Poiffons de l'Ifle de France, qui occafion- nent des maladies à ceux qui en mangent ; par M. SONNERAT ; _Correfpondant de l Académie des Sciences , 76 Dbfervation fur les Cogs € Poules de l'Amérique méridionale ; par M. Sonninr ne Manoncour , 128 Obfervations de M. Wairzemer, Doyen des Apothicaires de Nancy, Sur les Perles qu'on trouve dans les Huitres de Lorraine , 145 Effai fur les Rofes rouges de Provins ; par M. Ovarr {porlivaire à Provins ; 169 Obfervation fur un article de l'Eloge de M. CommErson , par M. DE LA LANDE, de l’Académie Royale des Sciences ,infèré dans le Journal de Phylique, Tome W, Février 1775; par M. Barry, Commiffaire de la Marine , au Département de Toulon , 179 Obférvarwn fur un Poiffon fingulier , 191 Etat de la Population de Paris ; pendant l’année 1774; comparé à celui de 1773; 204 RIT PI à VER ITTR TA T U % L), (in 'Éndl D se, fé DES ARTICLES. s2$ = Lettre adreflée à M. pe F***, à Montelimart , für deux dés'plus. sep ne ! 4 F petits Oifeaux de l'Europe ; par le Révérend Pere* **, 20$ Remarque de M. l'Abbé DicQuEMARE , Citoyen du Hävre , de plufieurs = “ £ = 3; 5 PU) Académies des Sciences, &c. 210 efcriptioni d'un Infeëte marin, remarquable par les iris ‘qui l'environ-" ptior / ; q P q nent ; parile même, LUZ Recherches & Obfervations fur le Carpeau de Lyon; par M. DE LA ToursrTE, 271 + Mémoire en forme de Lettre, fur une maladie des Grains appellée Nielle , Gc. par M. Frédéric RAINViLzE , de l’Académie de Phyfique de Rorterdam., 3$a Expériences fur l'influence de la lumière fur les Plantes ; par M. Bernard- Chriflophe MÉesse , 445$ Obférvacion fur une efpèce d'Hermaphrodifine dans un individu de lef- pèce du Daim, faire par M. Varmonr DE BoMARE , par ordre de Son Alreffe Sereniffime Monféigneur le Prince DE CoNDÉ, $soi Se —— © © @—@—_—E EEE AR PERS E ETTRE de M. RoMaiN à l’Auteur de ce Recuil , page 70 Mémoire en abrégé de l'exécution du Radeau qui a fervi de Chantier à é la Caiffe qu'on conftruit au Port de Toulon, de 300 pieds de lon- gueur, & 94 de largeur ; dans laquelle on doit bâtir une forme pour le radoub des vaifleaux ; par le même, 71 Probléme de Combinaifons ; intéreffant pour les Arts & le Commerce ; par M. le C. pe M. 289 Défcription de la conflruétion d'un Four pour recuire la Chaux qui doic être employée dans le Mortier - Loriot , 311 Nouvelles Luréraires , 893 332, 263, 427 Fin de la Table des Articles du fixième Volume. Be dE Root) À Pour le Journal de Phyfique , Novembre 177$, page 433 où l’on 4 à mal rendu le titre de l’Ouvrage. fuivanr. “An Oration delivred February 4°, 1774 ; béfore the American Philofo- phical Society heldat Philadelphia containing an enquiry into the natural hiflory of Medicine among the Indians in North America , and a come parative view of their difeafes and remedies With thofe of civilized nations , cogether With an appendix containing proofs and illuftrations ; By-Benjamin Rush M. D. Profeffor of Chemyfiri in the College of Philadelphia. Phila- delphia, printed By-Joféph-Crukshauk ; in-8°. 1774 ion nt Decembre1776 ZE » TR pts gs he “rs 7 1 4 Er - caps nude nd ee Ré rRr al 0 manage gi Gide + LU La “+ emppep ane su mnpi mé conité à TR 4 LM EE » 2 4 3 = 7 AI TS PRES, SALE AS — RSS 2e 23 SE