+ RS RE DRE ALIAS DT RES RES EL Lu | ain M mn 4 0 1 ne QE nl TR d f _ 10 2 pe a vu 'U NE 4 [| : TN | [ | L D o | » a \ Pa Ÿ x Pr L L : {) EN on OBSERVATIONS LA, PASSES TO UE sn SUR L'HISTOIRE NATURELLE ETS UR LESIARTS, AVEC DES PLANCHES EN TAILLE-DOUCE, DÉDIÉES A Mx LE COMTE D'ARTOIS; Par M. l'Abbé RoziER, Chevalier de l'Eglife de Lyon ; de l'Académie Royale des Sciences, Beaux-Arts & Belles-Lettres de Lyon , de Villefranche, de Dion, de Marfeille, de Beziers , de Fleffingue , de la Société Impériale de Phyfi- que & de Botanique de Florence , de Zurich , Correfpondant de la Société des Arts de Londres , de la Société Philofophique de Philadelphie | &c. ancien Direéteur de l'Ecole Royale de Médecine - Vétérinaire de Lyon. TOME HUITIÈME PR Pa Ai Det. Chez RUAULT, Libraire, rue de la Harpe. D +. à MARDICAC AI TXEXAVAL CFE ERP ILE GE DULRO LE AV als À MM. les SouscrrPTEuRS dont l' Abonnement finit à la fin de l'année 2775. Picsiurs Soufcripteurs fe font plaints de ce qu'ils ne rece- voient pas les Cahiers aufli-tôt qu'ils avoient formé leurs deman- des. Ils font priés d’obferver que fouvent ils s’adreflent à des Commiflionnaires qui négligent de foufcrire , ou de faire par- venir les Cahiers à leur deftination. Pour éviter, à l'avenir , de pareils reproches & de femblables lenteurs, MM. les Soufcrip- teurs, qui ont été dans le cas d’être mécontens, font invités à recommander cxpreflément aux perfonnes qu'ils chargent de leurs commiflions , d’être plus exactes que par le pañlé : ou s'ils. jugent la chofe plüs commode , de configner le montant de la Soufcription au Bureau des Poftes de leur Ville, fans l’affran- chir, mais affranéhir feulement la Lettre qui en donne avis. Un fecond fujet de plainte vient de ce que ceux, chez lefqueis on prefcrit de remettre les Exemplaires, les prêtent , les égarent, & difent enfuite ne les avoir pas reçus. On prévient que Pon fait l'appel de chaque Cahier & de chaque Soufcripteur, comme dans un Régiment on fait l'appel des Soldats, & tous les Cahiers font portés fermés , dans un fac cacheté, à la grande ou à la petite Pofte de Paris: On voit par - là, que fi quelques -uns ne font pas rendus, ce n’eft plus la faute du Bureau des Journaux. MM. les Soufcripteurs, qui défirent renouveller leur Abon- nement pour l’année 1776 , font priés de donner /eur nom & de- meure , éCrits d’une manière lifible , dans le courant du me: de Décembre, ou le plutôt poflible, afin d’avoir le tems de faire imprimer leur adreffe. On foufcrit à Paris, chez l’Auteur , Place & Quarré Sainte - Geneviève , & chez les principaux Libraires des grandes Villes. Le prix de la Soufcription eft de 24 livres pour Paris, & de 30 livres pour la Province, port franc. FF ADSETE D'EUS ANRT C LES Contenus dans cette feconde Partie. D: UXIÈME Mémoire d'Optique , ou Recherches fur Les Couleurs accidentelles ; par le Dofteur de Godard, Médecin des Hopitaux de Ver- vier, Membre des Académies Impériale & Royale de Dijon & de Bru- xelles, page t Effai fur les caufes de la falure de la Mer, 16 Lettre de M. Alexandre Volta, à l'Auteur de ce Recueil, fur l'Elec- trophore perpétu:l de fon invention ; traduit de l'Italien par M. ? Abbé M***, 2 I Mémoire fur le Phlogiflique , confidéré comme la caufe du développement, de la vie & de la deftruilion de tous les êtres dans les trois Règnes ; par M. Sennebier, Bibliothécaire de la République de Genève, 25 Lettre à l’ Auteur de ce Recueil ; par M. Pafumot, Ingénieur-G éographe du Roi, &c. 35 Obfervations fur le [yfléme de La converfion de l'Air en eau, adreffées a M. de Machy; par M. de la Folie , de l’Académie de Rouen , 47 Effai fur la poffibiliré de divifer un Angle quelconque en trois parties égales, en ne faifant ufage que de la règle & du compas; par M. Romain , $$ Lettre adreffée à l'Auteur de ce Recueil , par M. Maupetir, Prieur de Caffan , fur la petite Vérole , sé Réflexions fur l'ufage de l’Algalie dans les veffies malades, fur les in- convéniens qui en réfultent, & Les moyens d'y remédier ; par M. Na- vier, Doëleur en Médecine , Gt Differtation fur ce que les hommes peuvent voir les mémes objets fous des couleurs différentes , © fur ce qui en doit réfulter par rapport aux Peintres ; par M. l’Abbé Dicquemare, Proféffeur de Phyfique & d'Hif- toire Naturelle ; de plufieurs Académies Royales des Sciences , des Belles- Mervres & des Arts , Ec. Ec. 64 Objervation fur un accident fingulier occafionné par un coup de Soleil ; par M. Changeux , 68 Effer fuppofé de l'ébullition fur l’eau qu'on vent glacer plus promptement , vérifié par des expériences ; par M. J. Black; Profeffeur de Chymie à Edimbours , 69 Extrait & fuite d'Expériences fur Les Phofphores & Les Couleurs prifma- tiques qu’ils offrent dans l’obfcurité ; par M. B. Wilfon , Membre de la Société Royale de Londres, & de l'Académie Royale d'Upfal, 72 APCE; RO BAT TT A MOTENS Je 1 lu; par ordre de Monfeigneur le Garde des Sceaux, un Ouvrage qui a pourtitre : Obfervations fur la Phyfique, fur l'Hifloire Naturelle & fur les Arts, &c. par M. l'Abbé Rozier, &c. La collection de faits importans qu'il offre pério- diquement à fes Leéteurs, mérite l'accueil des Savans ; en conféquence, j'eftime qu'on peut en permettre limpreflion. A Paris, ce 23 Juillet 1776. VALMONT DE BOMARE. OBSERVATION à, TT == | = À = = — om LT: NN mn OBSERVATIONS MEMOIRES SUR LAS PH Y-S LOUE SUR? L'H:LS TOI R EAN A LUIR ELLE ETYSUR LES ARTSUET:MÉT.IEIRS: DEUXIÈME MÉMOIRE D’ O dre Aie ni 2e CO Ou Recherches fur les Couleurs accidentelles ; Par le Doüeur DE GODART , Médecin des Hopitaux de Vervier, Membre des Academies Impériale & Royale de Dijon & de Bruxelles. De tous les phénomènes de la nature, il n’y en a pas de plus tendre ni de plus délicat ( qu'on me permette ces expreflions), je Tome VIII, Part. II. 1776. 2. OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, veux dire de plus variable ni de plus inconftant que celui des cou- Jeurs. À La moindre altération dans le tiffu, la compofition d’un corps dans fa température, fon degré de féchereffe & d'humidité dans l’e- paiffeur , le poli, la direction des particules qui conftituent fa fur- face, le plus petit changement dans le point de vue fous lequel il eft apperçu, la plus légère différence dans la quantité ou la force de la lumière qui l’éclaire, dans la vertu réfrangible & réflexible du milieu tranfparent qui l’environne, &c. &c., fufhifent pour amener une diverfré rrès-confidérable dans la fenfation des couleurs. Encore cette inftabilité n’eft pas bornée à ces feules circonftances externes , où qui ne regardent que l'objet éclairé, le milieu ambiant & les rayons qui le traverfent ; mais elle reçoit d’autres modifica- tions, tant de la part des diverfes difpofirions de l'organe, que de celle de la fimulranéité des différentes impreflions qu'il reçoit, & même de la variété de leurs facceflions. Ce font ces dernières diverfités que nous avons ici à confidérer , puifque le phénomène propofé par M. Franklir, à la fuite de celui qui fait le fujer de mon précédent Mémoire , & dont j'ai promis de chercher la caufe, tient à cette claffe de la mutabilité des cou- leurs. En effet ce Savant, aufli modefte que profond , ajoute qu'il ne fait non plus rendre raifon de ce qui fuit, favoir, » qu'après avoir » long-tems regardé avec des lunettes ou conferves vertes, le papier » blanc d’un livre paroîr, aufli-tôt qu’on les à dtées , avoir un œil rou- » geâtre, & après avoir long-tems regardé avec des lunettes rouges, » il femble avoir un œil verdâtre, ce qui femble indiquer un rap- » port entre le rouge & le verd qui n’a pas encore été expliqué. Ejprit des Journaux, 30 Janvier 1774 , page 330. Avant de faire part des-idées que mes recherches fur la caufe de ce phénomène “m'ont amenées,, je crois devoir rapporter quelques faits qui lui font analogues, parce que fi la théorie que j'ai à pré- fenter , eft folide , elle ne doit pas fufhre à rendre raifon de ce phé- nomène feul , mais elle doit aufli fervir de clef ou de principe à tous ceux du même genre. C’eft ce qui m’a déterminé à placer ici le mor- eeau fuivant viré du Mémoire fur les couleurs accidentelles de M. de Buffon. . » Lorfqu'on regarde , dit cet illuftre Obfervateur , fixément & » long-tems une tache ou figure rouge fur un fond blanc , comme » un petit quarré de papier rouge fur un papier blanc, on voit naître »autour du petit quarré rouge une efpèce de couronne d'un verd Ve SUR L'HIST. NATURELLE ET LES ARTS. 3 » foible; en celfant de regarder le quarré rouge, fi on porte l'œil fur » le papier blanc, on voit très-diftinétement un quarré d'un verd » tendre tirant un peu fur le bleu : cette apparence fubifte plus ou » moins long-rems, felon que l'impreflion de la couleur rouge a été » plus où moins forte ; la grandeur du quarré verd imaginaire eft la » même que celle du quarré rouge réel , & ce verd ne s’évanouit qu’a- » près que l'œil s’eft rafuré & s'eft porté fucceflivement fur plufieurs » autres objets dont Îes images détruifent l’impreflion trop forte caufée » par le rouge. » En regardant fixement & long-tems une tache jaune fur un fond » blanc, on voit naître autour de la tache une couronne d’un bleu » pâle, & en ceffanc de regarder la tache jaune, & portant fon » œil fur un autre endroit du fond blanc, on voit diftinétement une » tache bleue de la même figure & de la même grandeur que la tache » jaune , & cetre apparence dure au moins aufli long-tems que l'appa- » rence du verd produit par le rouge. » Si on regarde fixement & long-tems une tache verte fur un » fond blanc, on voit naître autour de la tache verte une couleur » blanchâtre qui eft à peine colorée d’une petite teinte de pourpre, » mais en ceflant de regarder la tache verte , & en portant l'œil fur » un autre endroit du fond blanc, on voir diftinétement une tache » d’un pourpre pâle femblable à la couleur d’une amérhifte pâle : cette » apparence ne dure pas, à beaucoup près, aufli long-rems que les cou- » leurs bleues & vertes, produites par le jaune & par le rouge (1). » De même en regardant fixement & long-tems une tache bleue » fur un fond blanc , on voit naître autour de la tache bleue une » couronne blanchâtre un peu teinte de rouge , (je la vois jaunätre) » & en ceffant de regarder la tache blanche & portant l’œil fur le fond » blanc, on voit une tache d’un rouge pâle (Je La vois décidément jaune) (2) » toujours de la même figure & de la mème grandeur que la tache » bleue, & cette apparence , ne dure pas plus long-tems que l’ap- » parence pourpre produite par la tache verte. » En regardant de mème avec attention une tache noire fur un » fond blanc, on voit naître autour de la tache noire une couronne (x) Elle dure tout aufli long-tems dans la façon que j'indiquerai ci-après , de faire naître les couleurs accidentelles. (2) J'ai trop de fois répété l'expérience pour qu'il me refte le moindre doute fur la couleur jaune de la tache; ainfi, puifqu'elle eft rouge-pâle aux yeux de M. de Buffon , l'on doit conclure de cetre contrariété , que du rouge au jaune il n'y a qu'une nuance qui peut affcéter diverfement la vue des différentes per- fonnes. À 2 4 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, » d'un blanc vif; & ceffant de regarder la tache noire & portant l'œil » fur un autre endroit du fond blanc, on voit la figure de la tache » exactement deflinée, & d’un blanc beaucoup plus vif que celui du » fond : ce blanc n’eft pas mat, c’'eft un blanc brillant femblable au » blanc du premier ordre des anneaux colorés décrits par Mewron. » Au contraire , fi on regarde long-tems une tache blanche fur un » fond noir , on voit la rache blanche fe décolorer, & en portant » l'œil fur un autre endroit du fond noir, on y voit une tache d’un » noir plus vif que celui du fond. Mémoires de l’Académie des Scien- 5» CES 1743 «. Ces phénomènes , entre lefquels lobfervation Franklinienne fe trouve comprife, méritent affurément toute l’atrention des Phyfciens, & leur fingularité ne peur manquer de faire naître le defir d'en con- noître la caufe , mais elle eft fi abftrufe, cetre caufe , que le génie perçant de lilluftre de Buffon , n’a pu nous la dévoiler dans le tems qu'il préfenta fon favant Mémoire à l’Académie. Comme je ne fache pas que les diverfes occupations de ce grand homme lui aient permis depuis , de nous donner l'éclaircifflement defiré, je vais hafarder là-deflus quelques idées par les rhéorèmes fuivans. 1°. Les fibres vifuelles donnent la fenfation de diverfes couleurs felon la diverfité de leurs tons. L'organe de la vue n’a rien de particulier à cet égard, puifque les fibres de nos fens en général fourniffent à l'ame des fenfarions de différens tons, felon qu’elles font plus ou moins tendues : lorf- que la peau, par exemple , eft dans un état de fanté , on la pince, on la manie, fans qu’il en réfulte d’autre fenfation que celle d’un at- touchement indifférent ; mais fi elle eft attaquée d’inflammation, on ne peut alors y toucher, fans exciter la plus vive douleur. Je me fouviens qu'ayant la fièvre , j'entendois dans la maladie, un fon ex- trèmement aigu & perçant, comparable à celui des trompettes d’ai- rain ; ce fon s’amollit dès que la tenfion fébrile commença à dimi- nuer, & me parut approcher de celui du violen; enfuite il prit le ton ofave d’une baffe; le relâchement ayant encore augmenté, j'en- tendois comme le bruit d’un torrent; enfin par une diminution ulté- rieure de l’état fébrile , je fus affecté du doux murmure d’un ruifleau; de forte qu’à chaque jour, à mon réveil, je reconnoiflois le progrès qu'avoit fait ma convalefcence pendant la nuir, par l’adouciflement de ce bruit dans mes oreilles, lequel ne ceffa entièrement que lorf- que la maladie fut route difipée. Les épileptiques éprouvent la même chofe dans le commencement de leurs accès , ils voient d’abord des couleurs vives & brillantes qui auomentent d'éclat à proportion que les fibres fe roidiffent davan- À (SUR LHIST. NATURELLE ET LES ARTS. 5 rage, jufques-là, qu'avant de perdre connoiffance , tout leur paroit être en feu, & que leurs oreilles font affectées d’un fiflement aigu, au-delà de toute expreflion. C'eft donc une loi de l'économie animale, que nos fenfations va- tient d’après la diverfité de la tenfion de nos fibres ; par confé- quent celles de la rétine doivent fournir différentes couleurs felon qu'elles font plus où moins rendues ou ébranlées. 2°. Le noir, le bleu, le verd , L pourpre , ie rouge correfpondent a des degrès de tenfion qui vont en ausmentant, félon l'ordre de leur énumération. Mertez-vous à lire au foleil , placé de façon que quelques rayons puiffent entrer directement dans vos yeux (1), les lertres commen- ceront par perdre de leur noirceur, elles deviendront bleues, puis d’un beau verd, enfuite d’un rouge obfcur qui s’éclaircira peu à peu & deviendra même d’un rouge écarlate de plus en plus ébloutifant. Le peu de rayons qui, dans cette expérienc® , affectent immédia- tement la rétine , en chatouillent les âbres &'hauffenr de plus en plus leur ton, de forte que leurs vibrations qui étoient à l’uniffon du noir, paffent à celui du bleu , montent enfuite au verd, s’élè- vent de-là au rouge obfcur , & enfin parviennent par un degré de renfion ultérieure, à faire des vibrations pareilles à celles qu’exécu- teroit dans ces fibres , la préfence d’un corps coloré de rouge très- vif & crès-brillanr. Comme ce rouge commence par le pourpre & gagne fa vivacité en s’éclaircifant , il n’y'a nul doute qu'en continuant l'expérience, il fe clariñieroit au point de paroître fous la couleur jaune du feu, & mème qu'il deviendroit de ce blanc brillant qui eft la couleur propre de cer élément lorfqu'il eft dépourvu de toute fumée , ainf qu'il confte, de la fufion des métaux & des foyers des miroirs ar- dens qui donnent le blanc en queftion. Je fuis d’autant plus fondé à le croire, que le rouge mis à cette expérience s’eft d’abord terni, puis eft devenu d’un rouge doré des plus charmans , enfuite de cou- leur écarlate d’un brillant inexprimable & bien fupérieur à celui fourni par les lertres noires. Néanmoïns ce rouge a commencé alors à p4- lir; mais j'avoue n'avoir ofé pouffer l'expérience plus loin, crainte de me gâter la vue. Si vous regardez long-tems & fans clignotter , une main de papier (1) Cette expérience réuffit prefque cout le long du jour vers le folftice d'hiver; mais dans les autres faifons , il faut, pour en bien voir le fuccès, la faire une ou deux heures après le lever, ou avant le coucher du foleil , les rayons donnant trop obliquement pour ateindre la rétine , aux autres heures de ces rems de l'année, 6 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, blanc fur laquelle le foleil donne direétement , fa couleur perd d’a- bord fon éclat & fe ternit par l'écourdiffement de l'œil, puis prend une couleur jaunâtre , laquelle devient bientôt bleuâtre , certe cou- leur en fe fortifiant, fe change en bleu décidé, alors on voit comme des fumées qui paflent devant les yeux, mais fi raréfites , que la couleur bleue n’en eft prefque pas alcérée. Enfin ce bleu prend une teinte rougeâtre , & celle-ci cède bientôt fa place au rouge obfcur. Si vous vous fetirez tout de fuite dans un lieu ténébreux , vous n'appercevrez d'abord rien, mais le moment d’après, vous verrez un quarré long, de la forme de la page, d’un blanc pâle jaunâtre qui difparoït & reparoît neuf à dix fois; (plus ou moins de fois felon que l'expérience du plein jour a duré plus où moins long-tems ) cha- que retour fournir fa nuance d’affoibliffemenc de couleur; car l’im- preflion, de pâle-jaunâtre qu’elle étoit d’abord , reparoît fous un œil jaune-doré , puis ayant difparu de nouveau , on la revoit d’un jaune- verdâtre, enfuite verte, puis violette , après bleue , enfin pouipre & brun-rougeätre. Ces alternatifs fe font en manière d’ondulation accompagnée de différentes couleurs, c’eft-à-dire , que fi le centre prend la couleur jaune, 1l eft entouré d’autres couleurs qui difparoiffenr à proportion que la centrale s’élargit ou germe du fond, & qui reparoiffent dans les intervalles de chaque retour, de forte qu'on voit des ombres, tantôt rouges, tantôt vertes, tantôt bleues, avant que la couleur dominante ait regagné le deffus , ou ait repris la forme de la main de papier. Le mème phénomène fe laiffe obferver , fi ayant refté Iong-tems au grand jour, vous vous rerirez dans un endroit fombre. L'im- prelion centrale eft d’un clair bleu ou d’un bleu-verdâtre, lequel eft environné d’une couronne verte , celle-ci d’une rouge. Le bleu difparoiffant , le verd renaît du centre, s'élargit, germe du fond, & eft pendant ce tems, entouré d’un cercle rouge; celui-ci occupe à fon tour le centre ayant le verd pour circonférence ; alors reparoît l’impreflion du bleu , mais affoiblie dans fes teintes, & aïnfi confé- curivement ; de forte que par cet affoibliflement gradué , le bleu ceffe le premier de paroïtre , enfuite le verd , & que l’impreflion rouge refte la dernière; du moins c’eft-là l’ordre que je penfe avoir le plus fouvent obfervé, car il y a quelque anomalie dans la fucceflion de ces apparences. 3°. Le con de la vifion fuit la raifon direële de celui de l'impreffion de Bobjer, & l'inverfe de celui de l'organe. Nous avons fait obferver dans le Mémoite qui a précédé celui ci, que l’intenfité de la vifion eft l’expreflion de la différence entre le mouvement organique & l'objectif. Or ces mouvemens peuvent être À mx à ae : SURVLUHTIST. UN ATURELTLENET BESLARTS. confidérés relativement à leur force & à leur ton, & notre théorème eft vrai à l'égard de vous les deux: commençons par leur force. La: force du mouvement des fibres de la rérine dépend principae lement du degré de lumière qui éclaire le milieu, je dis, préncipa- lement , parce que je héglige ici la part que peut avoir l’action vitale à ce mouvement , comme étant trop peu de chofe à l'égard de cette autre caufe. Il s’agit donc de prouver que l’impreflion d’un objet quelconque étant donnée , le ton de la vifon eft d’aurant plus élevé que la lu- mière du milieu eft moindre 6 vice verfä , que ce ton fe trouve d’autant plus abaiilé que le milieu eft plus éclairé, les faits faivans ne laïflent aucun doute li-deflus. Quand on a fixé quelque rems la lumière d’une bougie ou le fo- Jeil , l'on voit une tache fur tous les objets. Or cette rache eft de différente couleur felon le degré de clarté de la place où “l’on fe trouve; car dans un lieu rout-à-fait obfcur, c’eft un feu foller , une lueur plus ou moins vive, ou un trait lumineux & comme phof- phorique ; moins d’obfcurité donne la fenfation pourpre ; s’il fait en- core plus clair, la tache fera bleue-verdâtre , ce bleu fe décide par l'ouverture d’un voler qui laïfle venir plus de jour , & enfin elle fe rembrunit jufqu'à devenir noire, fi la place eft fort éclairée. Ceux qui ont vu faire l’expérience de l’inflammation de l'huile éthérée par un efprit de vitriol , qui n’a pas toute la force requife, peuvent avoir remarqué que la vapeur qui s'élève du mêlange, eft d’un noir obfcur, sil y a beaucoup de jour dans le laboratoire, qu’elle l'eft moins , prend même un œil bleuâtre, s’il y fait fombre; qu'elle paroîe verdâtre, puis rougeâtre , enfin jaune lorfqu'on renforce l’obfcu- rité; & qu'on ne la voit en feu qu'après avoir fermé toutes les ou- vertures, par où la: clarté arrivoit dans la place. La lumière de la mouche de Saint-Jean, celle des vers luifans, des bois pourris, du poiflon qui fe corrompt, de la pierre de Bo- logne & autres phofphores, ne font que des taches blanches en plein Jour. : Joignons à ces exemples, celui de la maifon blanche rapportée dans mon précédent Mémoire , laquelle fe voit rouge dans les té- nèbres , par l’œil qui l’a fixée au grand jour, & l'expérience d’un car- ton ‘blanc percé qui , confidéré au foleil , fe garnit d’une bordure pourpre , s’il fait obfcur, par-deffous , & dont l'ouverture fe remplit également de cette couleur. L'image de la maifon elt rouge & ne paroît que dans l’obfeurité, parce que la maifon a laiffé dans l'œil une imprefion, qui quoique trop foible pour former un excédent fur la lumière du jour , & faire fenfation dans un endroit éclairé , entretient néanmoins un degré 8 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, de mouvement dans les fibres de la rétine, capable de donner la fenfation rouge lorfqu’elle agit feule, ou qu'elle n’a aucun autre mou- vement à furmonter; cette impreflion eft fi forte dans le cas du carton blanc confidéré au foleil, que l’obfcurité du deffous fuft pour la rendre fenfble & lui faire faire fenfation en plein jour; d’où l'on voit que ces cas appuient également la partie de notre théc- rème qui regarde les degrés de lumière du milieu. Mais que dire de l’écarlate qui devient pourpre dans l’obfcurité , du pourpre qui s’y voit brun ou bleuâtre , du bleu qui y paroît noir? Ces changemens des couleurs ne font-elles pas contraires à ce qu'on vient de dire? Pas du tout , parce qu’on fuppofe l’imprefion déterminée , & que dans ces exemples, elle change de nature par l’affoibliflement de la lumière ; car l'évènement eft conforme à l’avancé , lorfque la lumière qui éclaire l'objer reftant la même , l'organe fe trouve placé dans un endroit plus ténébreux; puifqu’alors l’écarlate fe voir plus vif, que le pourpre gagne de l'éclat & que le bleu s'embeliir. Notre théorème eft également vrai à l’égard de la différence des sons , c'ett-à-dire que l’impreflion d’un objer fait une fenfation dont le ton eft en raifon inverfe de celui de l'organe. C'eft de-là que les couleurs en général s'avivent, lorfqu’elles font vues par un œil qui vient de confdérer celles d’un moindre ton, & qu'elles fe terniflent dans le cas oppofé ; que le blanc, par exem- ple , confidéré fur un fond noir, forme une rache d’un noir plus foncé, & que le noir confidéré fur un fond blanc forme une tache d’un blanc plus vif. Il faut fe rappeller ici la divifion que nous avons faite de la vifion en pofitive & négative, fe remémorer que dans la pofitive le mou- vement, & par conféquent le ton objectif, l'emporte fur l’organi- que, & qu’il lui eft inférieur dans la négative; car ces idées pré- fentes à l’efprit, il eft facile de comprendre que l’impreflion que laiffe après foi le blanc, doit former fur un fond noir, une tache d’un noir plus foncé ; en effer, le blanc étant vu poftivement , certe im- preffion eft une augmentation du ton des fibres de la rétine; lors donc que le noir, qui eft vu négativement, vient agir fur ces fibres, fon impreflion eft plus furmontée que s’il donnoit fur celles dont le ton n’eûr pas été hauflé par le blanc; ainfi y ayant une plus grande différence entre le ton organique & objectif, dans la portion de la rétine qui a reçu l’impreflion du blanc , que par-tout le refte, cette ortion doit donner la fenfation d’un noir plus foncé , & d'autant plus foncé, que la différence réfultante de l'excès, d’un côré, & du défaut, de l’autre, eft plus confidérable. Par SUR L’HIST. NATURELLE ET LES ARTS. 9 Par la raifon des contraires , la partie de la rétine qui a reçu l’im- jredion du noir, venant à recevoir celle du blanc, elle doit voir ce Sbue plus brillant que les autres portions de cet organe , parce que c’eft par l'excès de fon mouvement & de fon ton fur celui de l'or- gane , que le blanc eft fenfble, & que cet excès eft plus confidé- rable fur la portion de la rétine qui a été affectée du noir, que fur celles qui ont été affeétées du blanc , par conféquent ce blanc doit paroïtre avec plus d'éclat fur cette portion déterminée. Cette théorie explique également les avivemens & les terniffemens réciproques des autres couleurs de différens tons vues les unes après les autres: car puifque la fenfarion eft l’expreflion de la différence des impreflions , il eft clair qu’une impreflion quelconque fait une fenfation d’autant plus vive, que celle qui l’a précédée éroir d’un moindre ton, & qu’au contraire elle doit être d'autant moins fen- tie, que celle-ci approche davantage de fa manière d'agir; mais cette vérité va être mieux développée par le théorème fuivant qui en eft comme le corollaire. 4°. Le blanc fait une impreffion d’une couleur, d'un ton d'autant plus élevé fur La portion de La rétine qui a reçu l'image d'un objet, que la cou- leur de celui-ci a moins d'éclat, c’eft-a-dire, que le ton de certe impreffion Juit la raifon inverfe de celui qui l'a immédiatement précédé. Newton nous a appris que la couleur blanche eft le réfultat du concours des autres couleurs : on peut en conféquence la confidérer comme en étant le germe , la matrice ou le réfervoir. Certe couleur prile dans fon entier eft fufceptible d’un certain éclat qui la rend brillante, & ce blanc brillant diffère autant du blanc mat, que celui-ci diffère du blanc fale ou jaunâtre ; de forte que ces trois couleurs forment trois nuances ou degrés qui vont en defcendant , fi l’on part du blanc brillanr. Du blanc jaunâtre au jaune , il n’y a encore qu'un pas à faire, puifqu'il fufit que la teinte jaunâtre augm@nte pour s’y trouver; or le jaune, en fe fonçant , devient orange & fe rapproche du rouge : nous avons vu par la première des expériences citées en preuve du fecond théorème, que le rouge , Le verd , le bleu, le noir corref- pondent à une échelle du ton des fibres vifuelles, qui a pour fom- met le rouge , & pour bafe le noir , c'eft-à dire , que la diverfité des couleurs accidentelles confifte dans la feule différence du ton des fibres de la rétine ; que la fenfarion de la couleur noire répond au moindre de ces degrés; que les fibres rendues un peu plus, donnent Ja couleur bleue ; que cette couleur eft remplacée par la verte , fi ce ton vient encore à augmenter , & qu'un degré ajouté fait naître le violet , puis le pourpre , enfuite le rouge ; d’où il s’en fuit, que le jaune & même le line , doivent fuccéder & fuccéderoient en effet Tome VIIT, Part. II. 1776. B 1o OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, par un progrès ultérieur de tenfion, ce que nous avons d’ailleurs droit de préfuméer de la pâléur que prend le rouge éclatant dans la feconde expérience du même article. Puis donc que le blanc mat qui eft la couleur mère qui renferme dans fon fein toutes les autres , devient blanc brillant, ou prend une couleur d’un plus haut ton, par cela feul, qu'il agit fur une portion de rétine réduite par le noir à un ton inférieur à celui au- quel elle eft portée par les caufes naturelles de la machine, & que j'appelle niveau : ce même blanc doit laïffer faillir d’autres couleurs, lorfqu'ilagit fur une portion de rétine montée à quelque ron fupérieur à celui de ce niveau; ces couleurs , fuivant notre troifième théorème, doivent être d’un ton d’aurant plus élevé, ou approcher d'autant plus du blanc, que celui de la rétine s’éloignera moins du noir ou du ni- veau : or, la couleur bleue eft celle des poftives qui diffère le moins du noir; donc le blanc venant à donner fur une portion de rétine affectée du bleu, ne doit baiffer que d’un degré, & le degré , im- médiatement au-deffous du blanc, étant le jaune , c’eft fous cette couleur que doit paroître le blanc, lorfqu'il agit fur une portion de rétine qui a reçu l’impreffion du bleu: par la mème raifon, le verd qui eft une couleur qui s'éloigne plus du noir que le bleu, doit retrancher davantage du blanc, par conféquent le faire paroïtre fous une couleur d’un moindre ron que le jaune; or le ton qui fuit le jaune elt le rouge. En continuant cette analogie, l’on s’appercevra que l’impreflion rouge doit amener la couleur verte, & que le jaune doit faire pa- roître le bleu. Il s’en fuit donc de tout ceci, que dans les expériences de M. de Buffon , la fenfation eft d’une couleur d’autant plus vive , que celle qui l’a précédée a été d’un moindre ton; ainfi, par exemple, le quarré bleu ayant laiffé fon imprefion dans l'œil, le blanc qui vient agir deffus, ne dé@it pas s'aviver comme il fait , lorfque fon impreflion porte fur l'œil affecté du noir dont le ton eft négatif; au contraire, 1l doit perdre d’autant plus de fon éclat ou de fa fu- périorité , que le ton du bleu eft-élevé au-deffus du niveau ; il n’eft donc pas étonnant que le blanc, loin de s’exalrer , paroifle jaunâtre. Le verd étant encore d’un ton plus élevé , il caufe un plus grand déchet au blanc; celui-ci doit conféquemment prendre la couleur d’un degré encore plus bas, c’eft-à-dire, paroître rouge. Par une fuite de cette théorie , le rouge doit donner le verd, & le jaune, le bleu ; de façon qu'on peut d’un feul coup-d’æil , ap- percevoir la couleur apparente que donne une couleur réelle quel- conque, en écrivant les couleurs fur une colonne de haut en bas, & de bas en haut, fous une autre parallèle; la première contient SUR L'HIST. NATURELLE ET LES ARTS. 14 les couleurs réelles, & chaque accidentelle fe trouve à fon vis-à- vis dans la feconde , ainfi qu'on le va voir: Blanc. Notre NE MR EE planc brillant, 1e) USE CEST AER ENG PTE Merde RRPEUME EME ROnre: ROORE ST M a Dita bent del ANCEdE Fanneste dune 00e 0e h .MUiBleu BANC 2 Me 21 An INOIE EE HFOrCe, Noir. Pour ce qui eft des couronnes ou bordures qui fe montrent comme par anticipation , il eft aifé de reconnoître qu’elles font l'effet de la vacillation des yeux ou de la nutation de la tête, qui faifant déborder la vue de deffus l’étoffe, donne lieu à un commencement de couleur accidentelle. Cette façon de M. de Buffon , de faire naître les couleurs acci- dentelles , eft extrèmement pénible, fatigue cruellement les yeux ; mais ceux qui veulent fe contenter de voir les phénomènes moins parfaitement , peuvent faire les expériences à l'ombre, dans un en- droit bien éclairé. On peut même jouir de route la beauté de ce genre de fpeétacle, & fans fe bleffer la vue, en employant, à la manière de M. Fran- Klin , des lunettes colorées : à leur défaut, voici une méthode facile , & qu'on peut avoir en tout tems fous la main, qui mérire d'autant plus d’être rapportée , qu’elle a cela de particulier , que les couleurs accidentelles y paroiffent, fans l'intervention d’un fond blanc externe. Il faut pour cet effet fe procurer ‘des liqueurs tranfparentes, fi fortement colorées, que l’image du foyer, vue à travers , en foit teinte ou difperfée. La folution faturée de deux parties de vitriol de chypre fur une de fel ammoniac, forme le bleu dont je me fers ; de l’aikali vo- latil ajouté à cette liqueur, fournit le verd ; le vin rouge, la tein- ture de vieille rhubarbe faite avec l’eau de chaux, &c. &c., don- nent un rouge très-propre à produire fon effet, & la décoétion de feuilles de bouleau & autres plantes pareilles , fufhit pour procurer le jaune. Je remplis des bocaux de ces diverfes teintures, & je les place en- 2 12 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, tre mon*œil & la lumière d’une bougie dont je me laiffe affecter affez long-rems ; enfuire je ferme les yeux ou je les couvre , & les cou- leurs accidentelles apparoiffent, c’eft-à-dire , que fi j'ai confidéré la liqueur bleue, je vois du jaune ; l’impreflion eft rouge, fi j'ai mis le bocal verd en expérience ; elle eft verte , fi je me fuis fervi du rouge; enfin la liqueur jaune me fait voir du bleu. Pour ce qui eft du blanc & du noir qui manquent de tranfpa- rence , j'emploie des morceaux d’étofe que je fixe à l'ordinaire , & ils me donnent leurs couleurs accidentelles refpeétives, dès que je couvre ou que je ferme les yeux. Pour comprendre la raifon de ces phénomènes, il faut favoir que la rétine , lorfqu’elle eft fouftraite aux impreflions des agens externes, & livrée à elle-même, dorine la fénfation du blanc entre- mêlé de traits noirs ; ce dont on peut fe convaincre en prètant attention à ce qui paroit dans fes yeux lorfqu’on s’éveille pendant la nuit, & à la nature des phantômes qui, dans ce cas, ne font que des nuages blan- châtres féparés par des ombres , & fe rappeller de notre précédent Mé- moire , dans lequel nous avons dit que les fibres de la rétine ne font jamais dans un parfait repos pendant la vie, mais qu'elles jouiffent en tout tems, d’un mouvement fourd qui leur eft communiqué par le jeu du méchanifme animal. Car ce mouvement doit faire naître des fenfations différentes , d’après celui que les fibres confervent des in:- preflions antérieures; ainfi, fi celui-ci eft, par exemple, réduit au plus bas degré de force par l’aétion négative du noir qui a précédé, les caufes naturelles de la machine obtiennent leur effet tout entier, & .donnent la fenfation d’une lueur blanche ; fi les fibres confervent un degré de mouvement de plus, pour avoir reçu l'impreflion du bleu , ces caufes ne peuvent faire fentir que le jaune ; ce fera du rouge que l’on verra, fi elles agiffent fur un fond verd; ce fera du verd, fi ce fond eft rouge; du bleu, s'il eft jaune ; & enfin, du noir s'il eft blanc, conformément à la théorie que nous avons donnée ci-devant. On trouvera peut-être de la contradiction dans ce que je dis ici, que Je blanc donne du noir dans l’obfcurité, tandis que dans mon récédent Mémoire , j'ai avancé que la maifon blanche y paroit rouge ou brillante. Néanmoins, les deux obfervarions font vraies, & il ne s’agit, pour les concilier, que de faire attention à la diverfité des circonf- tances. Dans le cas de la maifon blanche , le blanc a éré expofé à toute la vivacité des rayons du foleil; dans celui-ci, il a été échairé par la foible lumière d’une bougie; l’impreflion qui refte dans la rétine, après que l'œil a confidéré la maifon blanche, eft un mouvement SUR L'HIST. NATURELLE ET LES ARTS. 1; capable de faire fenfation dans l’obfcurité, & la maifon eft vue en conféquence , rouge où brillante. Mais l'impreffion qui relte après qu'il a confidéré le blanc à la lumière d’une bougie , eft trop foible pour produire tel effet ; fon mouvement ne pouvant guères s'élever au-deflus de celdi que les caufes naturelles entretiennent dans la rétine ou du ziveau, il en iéfulte la fenfation du noir. Par une fuite de ceci, celle qui fubfifte, après avoir fixé les au- tres couleurs de mes bocaux, étant au-deffous de ce niveau , le mou- vement niturel de l'organe donne des fenfations, dont le ton fuic la raifon inverfe de leur force , conformément à l'énoncé du théo- rème; en un mot, l'œil qui a reçu l’impreflion du blanc dans ma façon de faire naître les couleurs accidenrelles , eft précifément dans le cas de celui qui, du grand jour, palfant dans un endroit moins éclairé, voir tour noir, & les autres liqueurs colorées le mettent dans l'état où il fe rrouve le moment d’après , où lorfqu’il com- mence à diftinguer confufément les objets de l'endroit ombré , avec cette différence que ce ne font pas des objets externes qui font ici fenfation , mais bien la différence ou l'excès des mouvemens vi- taux, fur les imprefions laiffées par ces objets. Quoique la manière, dont j'ai rendu raifon, de la loi que fui- vent les couleurs accidentelles, foit appuyée fur des faits affurés, ou fur ce qui arrive certainement dans l’économie vifuelle , lorfque les imprefions fubféquentes ou fecondaires différent notablement de celles qui les ont précédées , néanmoins fi l’on jugeoit que dans le cas des couleurs accidentelles produites à ma façon, le réfultat de cette différence füt trop peu de chofe pour caufer un changement de ton dans la fenfarion, voici une autre théorie de ces phénomènes, contre laquelle cette difficulté n’a pas de prife; c’eft de dire tour uniment qu'une fibre, ébranlée par un objet , refte incapable de donner la fenfation d’un autre, aufli long-tems qu’elle conferve l’im- preflion du premier , & que les différentes couleurs étant exprimées par des portions d’une même fibre, d’autant plus courte que le ton de la couleur eft plus vif; c’eft la partie qui n’a pas joué, qui , excitée par le blanc à le faire, donne la couleur accidentelle. Dans cette fuppofñtion , il eft manifelte que la partie reftante doit donner une couleur accidentelle d'autant plus fombre , que la réelle aura été plus vive & réciproquement ; la théorie des fons donne beaucoup de vraifemblance à cette hypothèfe, dont le méchanifme fe voir à œil dans la figure IX , planche première, & felon laquelle l'arc de la vibration noire comprend toute la longueur de la fibre , fauf un infiniment petit réfervé pour celui de la blanche. Je ne puis me difpenfer de dire un mot d’un phènomène que M. de Bufton a obfervé en faifant fes expériences ; favoir, » qu'en 14 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, » continuant à regarder fixement le quarré rouge, on voit fon milieu » fe décolorer , & les côtés fe charger de couleur & former comme un » cadre d’un rouge beaucoup plus fort & beaucoup plus foncé que le » milieu ; enfuire ; en s’éloignant un peu & continuant toujours à re- » garder fixement , on voir le cadre fe partager en deux dans Les quatre » cotés , & former une croix d’un rouge aufli foncé. Le quarré rouge » paroît alors comme une fenêtre traverfée dans fon milieu par une » grofle croifée; continuant toujours à regarder avec opiniâtreté , » cette apparence change encore & tout fe réduit à un rectangle » d'un rouge fi foncé, fi fort & fi vif, qu’il offufque entièrement » les yeux ; lorfqu'enfin on détourne l'œil de cer objet, & » qu'on le porte fur un autre endroit du fond blanc, on voit, au » lieu du quarré rouge réel, l’image d’un rectangle rouge imagi- » naire , exactement deflinée & d’une couleur verte brillante (1) «. Je n'ai pu parvenir à former la croix en queftion, mais j'ai très- bien vu le cadre & le rectangle. Leur formation m'a même fait comprendre la manière dont l’autre peut naître dans des yeux plus fenfibles que les miens : voici comme je conçois la chofe. Lorfque vous fixez le quarré dans fon milieu, les quatre bords de l’étoffe (2) forment quatre ombres. dans l’image de votre œil; pour peu que vous branliez la tète, ou que vous remuïez les yeux, la couleur du quarré vient donner fur ces bandes ombrées, & y fait une impreffion bien fupérieure au refte , conformément à notre troifième théorème ; ainf, voilà le cadre formé. En reculant , le bord fupérieur de ce cadre defcend fur le quarré; & pour peu que dans ce mouvement on s'éloigne de la ligne droite, le bord du côté oppofé du cadre, gagne-également fur la furface du quarré, & forme une croix avec l’autre ; pendant ce rems, il refte allez d'ombre de tous côtés pour reproduire un nouveau cadre qui fera pourtant plus mince du côté dont on s'approche , l'ombre y di- minuant , que du côté dont on s'éloigne; alors le quarré paroît comme une fenêtre traverfée dans fon milieu par une groffe croi- fée, dont les quatre panneaux font blancs, parce que le rouge, ainfi que nous l'avons obfervé ci-devant, pâlit fur la fin de l’expé- rience. La caufe qui a produit la croix ceffant , il n’eft pas étonnant qu'elle difparoiffe ; or, deux côtés du cadre doivent aufl difparoitre , (1) M. de Buffon avertit que ces apparences ont évalement lieu à l'égard des quarrés d’autres couleurs. (2) Car il dit dans fon Mémoire que fes expériences ont été faites avec des morceaux de papier ou d'étoffes colorés. Anal: à: (ue Le à CR 1 SUR L’HIST. NATURELLE ET LES ARTS. 15 püifque , par le mouvement en queftion, l'œil fe trouve placé de façon qu'il n’y a plus d'ombre du côté vers lequel il s’eft porté; & c'eft alors que paroit le rectangle. Il eft fi vrai que c’eft-là la véritable caufe du phénomène, qu’on peut.faire naître le reétangle de quelque côté que l’on veuille. Il n'ya, pour cela, qu’à changer le point de vue par un mouvement de la tête ou des yeux; car fi, par ce mouvement, le point de vue donne, pat exemple, fur l'angle inférieur occidental, le rectangle fe trouve à l'angle fupérieur oriental ; & fi, par un autre mouvement, vous venez à fixer un autre angle, le rectangle fera à fon oppofé, c'eft- à-dire , qu'il paroît toujours à l'extrémité de la diagonale , fur la- quelle le point-de-vue donne. M. de Buffon termine la partie de fon Mémoire, qui traite des couleurs accidentelles, des quarrés diverfement colorés, par obfer- ver que ces couleurs changent en fe mêlant avec les réelles, & qu’elles fuivent les mêmes règles que ces dernières pour leurs apparences ; que la couleur bleue accidentelle, par exemple, tombant fur un fond jaune, devient verte, &c. &c. Mais je dois dire que mes yeux ne me font pas obferver ce change- ment, puifque j'ai vu conftamment le jaune demeurer jaune , & s’aviver feulement lorfqu’il donne fur la partie de la rétine qui a reçu l’impreflion du bieu , & ainf des autres couleurs, qui s'ani- ment ou fe terniflent, felon qu’elles portent fur une impreffion d’un ton plus bas ou plus haut. Il n'y a point de contradiction pour cela dans nos obfervations, puifque cette différence peut réfulrer de celle de la fenfbilité des organes. Je veux croire que les yeux de M. de Buffon font d'un fentiment fi exquis, que le bleu lui fait une impreflion permanente, capable de réfifter au jaune, & qu’en conféquence il voit du verd, par la même raifon que fon ami qui, s'étant fatigué la vue en ob- fervant une éclipfe du foleil , appercevoit une tache verte fur les corps bleus ; celui-ci portoit du jaune dans fes yeux, & M. de Buffon du bleu dans les fiens ; mais chez moi , l’organifation n’a point cette délicatefle pour donner ainfi de la confftance à l’impreflion bleue. Je vois dans l'expérience en queftion, le jaune par la vifon pof- rive externe, & M. de Buffon voit du verd par la poftive interne, combinée avec l’externe. Ceci mérite d’être encore un peu plus développé. Il faur donc fe rappeller que les impreffions antérieures , qui #onnent lieu à la re des couleurs accidentelles , font de purs phantômes ; c’eft-à dire, des mouvemens de la rétine, trop foibles pour faire fenfarion en plein jour , mais feulement capables de pro- duire cer. effec, lorfqu’ils font favorifés par l’obfeurité, & cela, parce 56 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, que la lumière du lieu où l'on fe trouve, communiquant à la ré- tine un mouvement trop fupérieur à celui qu’elle conferve des imprelions antérieures , ce n'eft pas celui-ci qui fait fenfation au grand jour, mais feulement l’autre, ou plutôt fa partie dont il fur- pafle le premier ; celui-ci n'a fon effet que lorfqu'il agit feul, c'eft-à-dire, dans les ténèbrés : or, la fenfbilité de l'organe peut être fi exquife dans certains fujets, que les caufes qui excitent les phantômes , amènent des mouvemens capables de faire fenfation en plein jour ; fi ces perfonnes , ayant ainfi les yeux munis d’un phan- tôme, viennent à confidérer quelque objet coloré, elles font affec- tées de deux impreflions à la fois, dont le concours fait naître la fenfation d’une couleur mixte. Je réferve, pour un troifième Mémoire, quantité d’obfervarions que j'ai rencontrées dans la route de mes recherches, & dont les rai- fons, découlant du contenu de celui-ci, achèvent de donner le der- nier degré de vraifemblance à fa théorie. ER Soul Sur Les caufes de la falure de La Mer. La falure de la mer a fort tourmenté les Philofophes anciens & modernes ; les plus célèbres fe font mis en tête d’en découvrir les caufes , mais de tous leurs travaux il n’a réfulté que des hypothèfes plus ou moins vraifemblables , dont aucune n’a pu réunir tous les fuffrages. 11 femble mème que dans certe recherche, les modernes font moins avancés que les anciens; car, dire que le fel marin, que nous voyons aujourd’hui, exifte depuis la création, qu’il ne fait que circuler perpétuellement , que la mer en tire des mines & des rivières , une quantité qui équivaut à celle que l’art des hommes lui ravir, c'eft, ce me femble , avancer des propofitions contraires au raifonnement & à l'expérience. Pourquoi le fel marin fera-t-il une forte d’élément qui ne fait que circuler depuis la création ? Pourquoi ne fera-t-il point un mixte fujet à la deftruétion, comme tous les autres individus des trois rè- gnes? Si l'agarhe & le granit font détruits avec le rems, à plus forte raïfon le fel marin le doit-il être. Tout fe forme & fe c# truit joutnellement. Les plus petits atômes font des aggrégats des mixtes , des compofés fujets à la deftruétion. Tout être contient en puiffance , des propriétés qui peuvent le faire devenir ce qu’il n’étoit pas ; SUR EHIST. NATURELLE ET LES ARTS. 17 pas ; c’eft la raifon pour laquelle il eft impofñlible de trouver une fub£- tance parfaitement fimple , foit dans les élémens des Phyfciens, foit dans ceux des Chymiftes. Le feu élémentaire lui-mème, quoi- que principe & moteur de tout, n’eft pas plus exempt de compo- fition , car il ne peut exifter fans aliment ; il dévore fans celfe une fubftance alimentaire; fa nature renferme en foi l'agent & le patient, ce qui doit faire regarder les atomes infécables , & la ma- tière parfaitement homogène , comme de pures chimères. Si, du raifonnement , on vient à confulter l'expérience, il fera très facile de fe convaincre que le fel marin fe détruit; l’eau de la mer , ou fimplement de l’eau falée, expofée affez de tems à la cha- leur & à l'impreflion libre de l’athmofphère, entrera en fermenta- tion, fe corrompra , & la putréfaétion ne ceffera que lorfque le fel marin ne fera plus. Je conclus de certe expérience , que le fel marin, qui fe ie fur la terre, eft entièrement détruit avant d'être rendu à la mer, ainfi que celui qui provient des fources fa- lées qui tombent dans les rivières. Si on a recours aux mines de fel gemme , que l’on fuppofe être fi communes dans la mer, les difficultés ne font pas moins grandes; le fel, fe diffolvant dans l'eau , fait précipiter des parties rerreufes que cette eau contenoit ; il s’en forme un dépôr fur les mines de fel, ce qui les incrufte & empêche une plus grande diffolution. Si des ruiffeaux d’eau - douce paflenc au travers des mines de fel gemme en Pologne & ailleurs, fans s’altérer, fans devenir fenfiblement falés, comment la mer pourroit - elle opérer cette diffolurion ? S'il exifte des mines de fel gemme dans la mer, elles doivent être incruftées de minéraux , de coquillages & de végéraux marins. On voit ici le foible de toutes ces hypothèfes, elles ne peuvent expliquer comment la mer peut acquérir de la falure; cependant, la né qu'elle fait journellement de fon fel, eft prodigieufe ; outre a quantité que les hommes en retirent , les rayons du foleil, la chaleur fouterraine, les poiffons, &c. excitent continuellement une fermentation qui le volatilife, le difipe & le détruit. Je crois donc qu'il vaut encore mieux s’en tenir à l'hypothèfe d’Ariftote. Ce Phi- lofophe nous enfeigne » que la falure de la mer eft produire par » des exhalaifons groflières qui forrent de fon fond, lefquelles, ai- » dées de la chaleur du foleil, brûlent fes eaux , & les rendent fa- » lées & amères «. C'eft cetre vieille hypothèfe que je vais râcher de faire revivre, en la développant & l'érayant du mieux qu'il me fera poflible. Le fond de la mer eft aufi diverfifié que la furface du globe que nous habitons ; il a des rochers , des montagnes, des fources & des volcans ; il en fort continuellement des exhalaifons qui font effbrt Tome VIII, Parc. II. 1776. C 18 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, our pénétrer dans l’athmofphère. Mais contraintes de fe méler avec l'eau , elles fe joignent à des débris de végétaux, d'animaux & de coquilles , en enlèvent une partie, & forment, par cette union, des fubftances qui rendent l’eau de la mer pefante, falée & amère. De ces fubftances, les unes, plus légères, fe portent à la fuper- ficie , les autres, plus pefantes, occupent les lieux les plus profonds. Ce tout hétérogène , tend au divorce ; le volatil fe dévelope , la fermentation fe fait, la chaleur l’augmente, & la mer fe purge fans ceffe de la furabondance de ces matières qui, par leur guerre inteftine, lui font violence & lui caufent fouvent de grandes agi- tations. Les parties fixées fe terrifient & fe précipitent ; celles qui font volatilifées, paflent dans l’athmofphère pour y exciter d’autres troubles. C'eft ainfi que le fel marin fe forme & fe détruit journellement , comme l'ont très-bien reconnu Stahl & fes Difciples, qui, en cela, font du fentiment d’Ariftore : par fon fond , la mer alimente ou entretient fa falure, & par fa fuperficie, elle la détruir. Le fel & le bitume fe fubrilifent par la chaleur & la fermentation; ils s'échappent de la mer & paflent dans l'air pour le nourrir & l’agirer. Ce font ces matières qui produifent les orages, les tempêtes, le feu St-Elme & les lumières que l'on voit briller la nuit fur la fur- face de la mer. Ce font elles aufli qui, fur la mer, rendent l'air ni plus ni moins épuré que fur la terre: Pour ce qui eft des par- tes fixées, elles fervent en partie aux *änimaux marins, à la com- pofition de leurs coquilles, à celle des coraux & madrépores, & enfin, à s’unir aux nouveaux acides qui s'exhalent du fond. Voilà comment la mer devient un grand laboratoire où la Nature travaille fans cefle à former & à détruire. Elle n’eft pas plus oifive dans le cœur de l'Océan, que dans le fein des montagnes. On peut objecter contre ce fyftème, qu’il eft des mers douces, . ou lacs d’une étendue prodigieufe , tels font ceux du Canada qui ont quatre & jufqu’à cinq cens lieues de circuit. Or, ces grands lacs devroient être falés, puifque , comprenant une fi grande étendue, ils doivent recevoir des exhalaifons fouterraines. Avant ‘d'avoir été en Canada, je me fuis fait cette objection; mais lorfque j'ai eu fait des obfervations fur ces lacs, l’objection s'eft évanouie. Voici un précis de ces obfervations. Les eaux de ces lacs ont une difpoftion à devenir falées & amè- res comme celles de la mer; elles ont une faveur auftère ; un peu d’acrimonie; & ceux qui en boivent pour la première fois , s’en trou- vent incommodés. Ces eaux font plus pefantes que celles des rivières qui s’y jettent; . SUR L'HIST: NATURELLE ET LES ARTS. 7x9 les canots y paroiffent moins chargés : les Rameurs s’en apperçoi- vent aufli par la réfiftance qu’elles font à leurs rames. Ces lacs ont , ainfi que l'Océan , la propriété de réduire en fable la plupart des rerres que les rivières y portent. Le fablon qu'ils forment , eft jetté fur le bord du rivage, & enfuite tranfporté plus loin par les ouragans. IL eft par-tout de la mème grolleur & de la mème couleur. Les moufles & autres plantes qui croiffent dans ces lacs fur Îles rochers & bancs de pierres, font toutes différentes de celles qui croiffent au fond des rivières voifines. Ces lacs ayant une iffue par où ils s’écoulenr dans le fleuve Saint-Laurent , leurs eaux âcres & pefantes , font place à d’autres plus douces & plus légères , qui viennent des rivières & de la plure. Par ce moyen, les eaux de ces lacs font renouvellées à chaque inf- tant, ce quiles empêche de devenir auffi falés que la mer. L’évaporation eft plus foible dans ces lacs que dans la mer, parce qu'étant fort élevés, l'air y eft froid & rare , & il a moins de force pour foutenir l’eau en vapeur. Il faic prefque toujours froid fur ces lacs , particulièrement fur trois nommés Michigan , des Hurons & Supérieur. I y gèle dans tous les mois de l’année ; la chaleur ne s’y fait fentir que pendant quel- ques heures du jour en été, & l'hiver y eft plus rude qu’à Québec. Or, ce froid met obftacle à la formation du fel marin. Le fond de ces lacs eft compofé de rochers, de bancs de pierres & de groffes roches ifolées , ce qui laiffe peu d'iffue aux exhalaifons pour pénétrer dans ces lacs froids. Le plus grand nombre de ces exhalaifons, doit fe détourner vers le menu-fable qui forme le ri- vage, & qui s'étend affez loin dans la profondeur. Il eft à remar- quer que ce fablon eft couvert de pins, dè fapins , d’épinetres & autres bois abondans en matières grafles & bitumineufes. Or, il faut bien que ces arbres tirent leur graiffe des exhalaifons de la terre; car on ne peut imaginer comment ils poutroient trouver une pa- reille nourriture dans un terrein fi maigre & fi aride. Ces mers douces érant peu profondes & peu difpofées à retenir les exhalaifons qui peuvent y pénétrer , celles qui y parviennent font des efforts pour palfer brufquement dans l'athmofphère, ce qui fe prouve par un phénomène aufi fingulier que dangereux pour les Navigateurs. Plufieurs heures avant les tempêtes, lorfque l'air eft dans un calme parfait, ces lacs commencent à s’agiter, & con- winuent avec tant de violence , que les canots qui ont le malheur d’être au large, ont beaucoup de peine à fe fauver. Par ces obfervations , on voit que les mers douces du Canada C 2 20 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, font plutôt favorables au fyftème d’Ariftore, qu’elles ne lui font con- traires. Je crois qu'il en doit ètre de même des autres grands lacs d’eau douce en Suifle & ailleurs ; les Phyficiens obfervareurs décou- vriront aifément pourquoi ces lacs ne font pas falés. On ne doit donc pas être furpris fi ceux des pays chauds le font prefque tous. On en trouve en Italie, en Turquie, en Egypte, aux Indes, au Mexique, & généralement dans tous les pays de la Zone torride. I! refte à favoir pourquoi la falure de la mer n’augmente ni ne diminue fenfiblement; ce qui ne fera pas difficile dans ce fyftème. Si la mer recevoit plus d’exhalaifons qu’à l'ordinaire, la fermen- ration feroit plus forte, & la deftruction plus grande ; l’air en ab- forberoit davantage, & les tempêtes feroïent plus fréquentes. Si au contraire, la mer recevoir moins d’exhalaifons qu’elle n’a _de coutume, la fermentation feroit moins forte , & la deftruétion moins grande ; l'air en abforberoit moins, & les rempères feroient plus rares. Il eft vrai que fi ces exhalaifons groflières venoient à être fi abon- dantes que la fermentation & l'air, par le défaut de chaleur fuf- fifante, ne pourroient en détruire la furabondance , j'avoue qu'alors l'Océan feroit furchargé de bitume, comme la mer morte ; les ani- maux qu'il renferme, périroient. Mais nous n’avons point ce mal- heur à craindre , la vafte étendue de cette mer & des autres qui y communiquent par de larges détroits, fait que fi des endroits exha- lent plus que de coutume, il s'en trouve d’autres qui , au contraire, exhalent moins ; ainfi les uns compenfent les autres, & la falure refte toujours à-peu-près la même. Il n’en eft pas ainfi des lacs, il peut s’en trouver beaucoup comme la mer morte. On peut encore expliquer par ce fyftème, la formation du fel marin dans les débris des volcans. Car les eaux de pluie qui fe ra- maffent dans les cavités des montagnes qui contiennent des volcans, font néceffairement phlogiftiquées & brülées, ainfi que les autres fucs minéraux, par le feu & les exhalaifons foutertaines. Dans les lieux où il n’eft point de volcans, ces citernes fouter- raines peuvent donner naiflance aux mines de fel gemme & aux fources d’eau falée. Car ces eaux, continuant d’être brülées & phlogiftiquées par les exhalaifons & la chaleur fourerraine , elles ne peuvent plus tenir le fel en diffolution , il fe cryftallife rou- jours de plus en plus, jufqu’à ce qu’enfin l’eau de la pluie ne trouve plus à s’y loger. Je crois pouvoir terminer préfentement cet effai; on a vu que ce fyftème a feul l'avantage d'être appuyé du raifonnement & de l'expérience. Je n’ai plus qu’un article à ajouter. _ SURNL'HISTY NATURELLE ET LESVARTS, 2x L'éau des marais devient faumäâtre dans les pays chauds, après de longues féchereffes; & nous éprouvons tous les jours , dans nos climats tempérés , que l’eau la plus douce & la plus légère, devient pefante & défagréable au goût, lorfqu’elle croupit & au’elle eft échauffée par la chaleur. En faut-il davantage pour confirmer le fyftème d’Ariftote ? OR ENVRENCT EE RENTE De M. ALExANDRE VoLrrTaA, à l’Auteur de ce Re- cueil , fur l’Eleétrophore perpétuel de fon invention (x). Traduit de l'Italien par M. l'Abbé M***, Je vous ai déja dit que je cherchoïs à conftruire l’appareil portatif, de manière que fous une égale dimenfon , il offrit une plus grande capacité ; au lieu d’étendre le maftic fur un plat, j'en remplis la cavité d’un hémifphère , & je donne à l’écu ou plaque fupérieure , la mème forme, dans une proportion convenable : un cône tronqué de la longueur d’un palme ayant cinq à fix pouces de diamètre , vau- droit encore mieux que l’hémifphère. Dans le vuide de ée premier cône , j'en infère un nouveau qui tient lieu d’écu, & qui peut con- tenir un vaifleau de médiocre grandeur: fi on les fait rous les deux en fer blanc, en cuivre, ou en laiton, le tour enfemble pèfe & em- barraffe moins : mais j'ai bien moins à cœur tout ce qui tient à ces machines portatives , & l'élégance des formes dont elles fonc fufceptibles , que la magnificence des effets des grandes ma- chines : aufli m'en tiendrai-je à vous parler de ma plus grande , que j'appelle mon grand Eleëlrophore. Cette machine que j'ai fait achever, lors de mon retour dans ma patrie , a un diamètre. de deux pieds: fon aétivité eft étonnante. Figurez-vous que fouvent j'en tire des étincelles de dix à douze tra- vers de doigt & plus: elles font on ne peut plus belles à voir : re- préfentez-vous les traits fubrils & enflammés du Maître des Dieux, tels que les dépeignent les Peintres & les Poëtes; pour les avoir ain, (1) Il y a une Lettre fur ce fujet dans le Journal précédent, page sor, 22 OBSER#ATIONS SUR LA PHYSIQUE, j'électrife lemaftic par excès (1), & je préfente à l’écu qu'on tient élevé, la pointe du doigt, ou fi je veux ufer de précaution, l'anneau d’une clef : tantôt il en jaillit une écincelle longue & effilée, comme je viens de le dire 3 tantôt une: fuire-d'étincelles avec pétillement ; tan- tôr enfin, on en voit fortir une très-longue aïgrette accompagnée d'un léger filement. Si l'on emploie un morceau de canne de rofeau de la longueur de deux coudées coupée par le milieu, & couverte du côté convexe: de papier doré, poli avec la peau de chien, à chaque érincelle qu’on tirera , elle fera frappée , en tout ou en partie, d’une ou plufeuts traînées de lumière vive & verdoyante , abfolument fem- blable à celle de la foudre, lorfqu’elle brille au milieu d’épais nuages. Enfin je me, fuis fervi. d’une caraffe de médiocre grandeur, & je n'ai pas répété cinq à fix fois le jeu de l’écu, qu'elle s’eft chargée de fa- çon à me donner une comimotion violente. Ne croyez pas qu’il faille un tems bien favorable à l'électricité ; pour obtenir les furprenans effets que. je viens de vous décrire. Ils ont eu lieu, à peu de chofe près, ces derniers jours de brouillard & de pluie; j'avois eu feulement.la précaution d'effuyer les longs cordons de foie qui foutiennent l'écu. Bien plus, j'ai laiffé ma ma- chine en repos fans en renouveller la charge, pendant plufieurs heu- tes, & mème pendant un jour entier, fans que la force en für bien fenfblemenc diminuée. Après trois jours, il m’eft arrivé de tirer des érincelles que le doigt avoir peine à fouffrir, & dont une dou- zaine me fuffifoit pour charger modérément la bouteille. Enfuite ñ pour ne pas la laiffer perdre, je la verfe fur le maftic, je ne tarde pas à avoir la plus grande intenfité. D'où il faur conclure que ma machine offre un moyen unique d'obtenir dans tous les tems , (& ce qu'il faut remarquer) dans ceux les moins propres , à l'électricité des effets infiniment fupérieurs à ceux des meilleures machines à globe ou à difque. Ajoutez encore l'avantage de faire mon plat de mctal mo (x) J'ai à ce fujet une chofe très-fin ulière à vous faire obfervers c'eft que jé maflic de mon grand Eleétrophore, de quelque manière qu'on le frotte avec la main, un morceau d’éroffe , avec de la peau, du papier, &c. s'éleétrile conftam- ment en plus , ce qui eft non-feulement contraire aux idées reçues, touchant les propriétés des corps réfineux, mais contredit en quelque forte les effets des mal- tics que j'emploie dans mes autres machines : bien que la compofition en foir à peu-près la même, fi on les frotte avec les mêmes fubftances que je viens de nommer , ils s'éleétrifent fcrupuleufement er moins. Autre fingularité ; je trouve un maftic d’une compofition peu différente des pre- miers, qui s'eft tellement voué, fi je puis le dire, à l'éledricité en moins , que c'eft toujours celle-là qu'il acquiert, & jamais l'éleétricité en plus, bien quon le frorte avec des lames d'étain, du papier doré, de l'oripeau, &e, SUR L'HIST. NATURELLE ET LES ARTS. 23 ou de bois , d'une igrandeur a ‘solonté pour des éffers à volonté), donime Je difoit affez plaifamment le P. Beccaria, en vantant les merveilles de fon tableau fulminant. Il y a cependant deux inconvéniens à faire cette forte de machine, de grandeur démefurée : l’un eft intrinfèque & eflentiel , l’autre exe trinfèque :& accidentel : le premier , c'eft que la force de la charger, de l'explofion, de l'étincelle qui fort de l’écu pendant qu'on l'élève, croïffant en proportion de la grandeur de la furface, le maftic ef bientôt rompu ou fondu, à moins qu’on n’augmente fon épaiffeur ; mais une plus grande épaiffeur nuit à la charge & à la force de l’é- leétricité permanente (je dis éleéfricité permanente, & non pas ven- gerefle , parce que l’idée arrachée à ce dernier mor, ne convient ni au fair ni à la théorie , comme je me propole de le prouver un jour)s le fecond inconvénient , c’eft la difficulté de fe fervir d’une auñi grande machine ; outre qu'il faut avoir les bras rendus pour élever l'écu , & renir le corps & les habits écartés; fon poids fatigie confidérable- ment, quoiqu'il foit de bois argenté ; ce qui empèche de le lever ou le baïfler avec vitelle, comme je le fouhaireroïs. Il eft cependant poflible de remédier à ce dernier inconvénient, moyenant un levier, ou, ce qui eft plus commode encore, moyen- nant quelques poulies dont l'arrangement eft dans ima tête : à l’aide de certe invention, peu de force fuflira pour vaincre la pefanteurs je ferai jouer l’écu à volonté , en me tenant à une diftance cominode , & en confervanc la libre difpoñtion de route ma perfonne. J'ai déja penfé à faire l’écu dix fois plus léger qu'il ne left, érant de bois: c’elt d'étendre une toile comme celle de 'nos tableaux ; fur un cadre de forme ronde , & de l’argenter. Si au lieu de cadre de bois, on emploie un tiflu d’ofier, il en réfultera un enfemble plus léger & moins fujer à fe déjetter ; à l'avantage de la légereré , il réu- nira celui de pouvoir s'appliquer parfaitèment à la furfice da mal tic, & d’être pour ainfi dire collé avec elle , tant à caufe de fa fou- plefle naturelle , qu'à caufe de l'attraction életrique. C'elt avec de tels expédiens que je me propofe de rendre propre au maniement d'un LA TRUE , une machine de fix à huit pieds, Repréfenrez-vous une table grande comme celle d’un jeu de billard, mais ronde , doublée d’une feuille de fer blanc ou de laiton , dont la furface feroir enduite d’un maltic bien nivelé , bien uni, noir, & luifant comme une glace; au-deffus, un beau couvercle à plat-fond argenté ou doré, foutenu par quatre cordons de foie qui fe termi- nent en un feul à un groupe de poulies, que l’on fait monter où def- cendre au moyen de deux autres cordons de foie pofés verticalemenc fur deux autres poulies placées aux deux bouts oppofés dé l’écu : un homme à quelque pas de la table | tenant une corde À la main ; 24 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, dans l'attitude d’un Sonneur de cloches qui, au lieu d’elles, vous fait entendre un très- grand bruit de plufeurs étincelles, le fifle- ment de différens jets de flamme & de lumière portés en tout fens à la diftance de plufeurs palmes, contre les différens conducteurs placés à volonté , ou par la main du hafard, auprès de cette grande machine. Eh bien, qu’en dires-vous? cet écu , ce couvercle n’eft-il pas à vos yeux l’image d’une nuée fulminante ? N’avez-vous pas peur de vous en approcher? mais je ne veux pas effrayer plus long-tems votre imagination : j'aime mieux l’occuper des avantages réels qu'une relle invention peut offrir; & j'ai du plaifir à trouver dans elle cette chambre d’éleétricité médicale, dont M. Prieftley fouhaite fi fort l’é- tabliffement. Au refte, fi je vous annonce les effets d’une aufli grande machine, fi grands, fi bruyans, fi. merveilleux , ne croyez pas que j'extravague : j'ai prefqu’une certitude qu’ils feront tels; & j'en juge d’après l’action de la machine fur laquelle je travaille actuellement: elle n’a pas tout-à-fair deux pieds de diamètre ; & vous feriez étonné de voir combien elle laifle derrière elle toutes les machines d’un pied ou au-deffous. Mais l’épailfeur néceffaire de la couche de maftic, pour une auf grande étendue de furface, que j'ai dir être le premier & intrinfè- que inconvénient , me donne encore beaucoup à rèver. Je crois ce- pendant qu’une ligne & demie doit fuffire pour quelqu’étendue que ce puille ètre; & c’eft encore d’après des expériences que j'avance cette opinion. J'avoue que la fouftration d’une demi-ligne & plus d’épaifleur , diminue confidérablement la vertu éleétrique ; mais il eft conftaté par nombre de faits, qu'avec une ligne & demie, on peut procurer une charge aflez forte; à condition, toutefois , que le maftic foic bien également étendu ; que fa furface ; ainfi que celle du plan fur laquelle il repofe, foit parfaitement unie, qu'en n'y découvre ni crevafles, ni vuide, ni bulles d'air. Comment, me direz-vous, éviter tous ces défauts ? rien de plus fimple : lorfque le maftic eft étendu fur le plan, & qu'il a pris de la confiftance , faites promener deflus, mais fans le toucher, un gros & large fer rouge : dans le moment, fe formeront nombre de petits trous, qui peu après, fe rempliront & difparoîtront par la cha- leur même qui les aura fait naître. Ce n’eft pas tout : il arrive très fouvent qu’en fe fervant de la ma- chine, & la tourmentant, pour ainfi dire, il fe fait des explofions fpontanées qui ont pour caufe quelques défauts non fenfibles à la vue. La véritable lanterne pour les découvrir , eft une bouteille bien chargée avec laquelle on parcourt toute la furface. Une érincelle qui s'échappera furtivement vous avertit à point nommé de l'endroit qu'il faut rectifier avec le fer rouge. ! MÉMOIRE SUR' L'HIST. NATURELLE ET LES ARTS, :; pa ao NO EUR LE Sur le Phlogiftique , confidéré comme la caufe du déve- loppement, de la vie & de la deftrution de tous les êtres dans les trois Règnes ; Par M. SENEBIER, Bibliothécaire de la République de Genève, IL n’y a point de faits ifolés dans la Nature; chacun eft un chaînon particulier de cette chaîne immenfe qui unit rous les faits qu'on obferve dans l'Univers; chacun doit être étudié , non-feule- ment pour lui-même , mais encore pour mieux pénétrer les autres avec lefquels il a des rapports; cependant , ceux=là méritent fur-rout l'attention, qui toachent-aux opérations les plus importantes de la Nature, & qui ont une influence plus étendue. Telles fonc les rai- , fons qui m'ont fait étudier plus particulièrement les caufes de la mort des animaux qui refpirent le même air. J'ai cru y apperce- voir une théorie générale de la reproduétion , de la confervation & de la deftruction des êtres matériels; c'eit cette théorie que je tâche de faire connoître dans ce Mémoire. Je fuis bien éloigné de croire avoir trouvé la vérité, je regarde feulement mes idées comme pro- bables ; mais leur probabilité me paroiffant établie fur une foule de faits, il-doit être utile de les publier, pour conftater leur foli- dité, fi elles en font fufcepribles , afin d'en tirer, avec confiance, les nombreufes conféquences de pratiques qu’elles fourniffenc. J'obferverai ici que j'ai eu les idées que M. Prieftley a dévelop- pées dans la Differtation fur la refpiration & fur le fang ; que j’avois fait des expériences analogues aux fiennes , & que je communiquai mes vues à M. Landriani, dans une lettre dattée du 13 Avril 1776 , à l’occafion d’une Differtation de M. Mofcati fur le même fujer; que j'apprenois à cet ingénieux Phyficien que j'avois eu ces idées depuis long-tems ; je dois ajouter que je ne connois point le fecond volume que M. Prieftley a publié fur l’air, & que je n'ai vu fà Differration fur la refpiration, que dans les Numéros XV & XVI du Journal Anglois, où elle eft traduite, qui ont feu- lement paru à Paris le 25 & le:3o Mai; mais il importe peu au Püblic de favoir dans quel tems, & dans quelle tête, éclofenc les idées qu'on lui offre; d’ailleurs, {a fincérité & la modeltie font Tome VIII, Part. II. 1776. D . 26 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, d’un ufage fi peu ordinaire dans la fociété, qu’on ne fait jamais affez d'honneur à quelqu'un pour les lui fuppofer : de forte que pour éviter au Public un jugement défavorable fur mes juftes prétentions à ces idées, je les abandonne auprès de tous ceux qui voudroient me les difputer. J'appelle phlogiflique ce feu combiné dans les corps, qui s'y fixe fouvent & qui y garde le plus parfait incognito; maïs qui fe ma- nifefte aux fens lorfque quelque caufe particulière le met en mou- vement; en général, on peut le regarder comme un principe fubtil, fluide & incoercible par nos procédés. Je ne crois pas que le phlosiftique foit le feu pur ; ce dernier doit ètre un fluide d’une parfaite homogénéité ; au lieu que le phlogiftique paroît varier dans fes effets; la couleur de la flamme , celle des corps qu’il rougit, n'eft pas la mème dans tous. M. Baumé m'a paru définir , avec exactitude , le phlogiftique , en difant qu'il eft uz compofe de fe pur & de terre vitrifrable ; maïs cette terre n’eft pas un être tellement identique , qu’elle ne puiffe être modifiée diverfement, en confer- vant fes qualités de terre vitrifiable. Pour procéder avec ordre dans la recherche de l’influence géné- rale de ce phlogiftique fur tous les êtres qui fe reproduifenr , 1°. j'établirai l’exiftence de ce phlogiftique dans tous les corps des trois règnes de la Nature; 2°. je ferai voir qu'il circule dans tous; 3°. j'en montrerai l’ufage & les effets; 4°. j’expliquerai , par cette chéo- rie, divers phénomènes de l’économie animale , végétale & minérale, mais fur-tout, la mort des animaux qui refpirent toujours le même air. Je fouhaite qu’on fe rappelle que fi je prends le ton affirmatif, ce n’eft pas parce que je fuis convaincu de la vérité de mes idées, mais feulement pour être plus court. I. 19. Il n’y a aucune partie dans l’animal qui ne renferme du phlogiftique. Le /érum contient un fel ammoniacal & phofphorique ; la partie du fang qui fe putréfie , lui donne un goût d'huile effen- tielle. M. Mofcati a démontré l’exiftence de ce phlosiftique dans le ferum, parce qu’en y jertant de la chaux, il s'y forme un alkali volatil. La /ymphe renferme du phlogiftique; on le prouve par les mêmes raifons. Le fang rouge eft plus inflammable que les autres parties du fang ; il fournit une plus grande quantité d'huile empy- reumatique. Le Docteur Langrish, dans fa Théorie moderne de la Médecine, obferve que dans les fièvres inflammatoires, le fang con- tient quelquefois une quantité de fel volatil & d'huile , plus grande du double que dans la fanté; enfin, lorfqu’on fait putréfier le fang, il donne des caractères certains d’une très-grande infammabilité. On ne fauroit douter, après cela, que les fécrétions tirées du fang, & les folides qu'il développe & qu’il conferve, ne contiennent SUR: L’'HIST. NATURELLE ET LES ARTS. 27 une quantité plus ou moins grande de ce phlogiftique ; 4 cranfpira- tion infenfible, eft de l’eau jointe à une petite partie de mucilage & d'huile eflentielle ; elle frappe même quelquefois l'odorar , par une odeur qui approche un peu de celle du fluide électrique ; la Jueur eft compofée des mêmes élémens; l’urine donne de l’eau, un fel ammoniacal & phofphorique, de l'huile effenrielle, La /alive four- nit une huile féride; le laic eft une huile exprimée avec une ma- tière coagulable & fucrée. La ile contient beaucoup d'huile empy- reumatique : plus les fécrétions feront élaborées, & plus la quan- tité de phlogiftique qu’elles concentreront , fera confidérable ; je le vois s’accumuler dans la liqueur féminale, rouler peut-être comme un fluide particulier dans les nerfs ; enfin , ce phlogiftique fe trouve dans les folides ; ils fe réduifent tous en charbons. 2°. Les véséraux contiennent de même une grande quantité de phlogiftique; on le reconnoît bientôt dans les plantes réfineufes : quelque aqueufe que foit la sève des autres plantes , on y découvre toujours du phlogiftique ; mais on l’obferve fur-tout dans les étamines des fleurs qui en fourniffent beaucoup; le miel & la cire donnent la matière d’un phofphore ; on le trouve encore avec abondance dans les graines & les pepins, où il s'offre fous la forme d'huile, 3°. On ignore , fans doute , l'organifation des minéraux ; mais f l’analogie peut fervir d'indice, files effets peuvent conduire aux caufes , on ne fauroit douter de l’exiftence du phlogiftique dans les minéraux. Les métaux, privés de leur phlogiftique , font plus dars, plus fixes, moins opaques; ils ont perdu leurs qualités extérieures de métal; mais en leur rendant ce phlogiftique, on leur rend leur premier état : fi l’on accumule le phlogiftique dans un métal, on augmente fon poids : il n’y a point de calcination métallique, , lorfque le phlogiftique ne peut s'échapper des métaux expofés à l'action du feu, foit qu'ils foient enveloppés de céments charbon- neux, foit qu’on les calcine dans des vaiffeaux clos ; enfin, la rouilie des métaux n’eft autre chofe qu’une décompoñtion du métal opérée par la privation de fon phlogiftique. Enfin, M. Prieftley obferve qu'il n'y a aucun végétal, où mi- néral, ou animal , qui ne puifle produire de l'air inflammable. 4°. On obferve encore ce phlogiftique dans les élémens , il s’unit particulièrement avec la rerre, il fe combine plus difficilement avec Veau ; cependant il s’y joint dans les graifles & les réfines ; on fait que l’eau de quelques rivières fermente dans les tonneaux , & que la vapeur qui en fort, peut s’enflammer; enfin, il eft un des compo- fans de l’asr qu’on refpire , puifque l'air fixe, qui en eft privé , eft nuilfible à la végétation & à la refpiration , parce qu y manque ; 2 8 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, d’ailleurs ; il'eft aifé de communiquer à l’air cette qualité inflamë mable. ! : Il. Après avoir établi l’exiffence de ce phlogiftique ; il importe d'en chercher les fources. 1°. Le phlogiftique s’échappant dans les animaux par plufieuts fé- crétions qui le portent au dehors comme nous l'avons vu ; & fe fixant dans leurs folides , il faudroit en imaginer un fond inépuifa- ble dans Panimal , s’il n’y en avoit pas, une fource continuelle au dehors. On trouve cette fource dans les alimens qui en contien- nent beaucoup ; je pourrai même, dans un autre Mémoire, établif avec aflez d’exaétitude, la quantité de phlogiftique que chaque corps peut renfermer : les alimens hourrifflent donc autant le corps, en réparant les fucs qui s’exhalent , que le phlogiftique qui fe diffipe 3 ce qu'il y a de certain, c’eft que la couleur du fang change pen- dant la digeftion; elle devient plus foncée ou plus noirâtre. MM: Prieftley & Mofcati ont démontré, par des expériences, que l’on brunit la couleur du fang , d'autant plus qu’on le charge davantage de phlosiftique; j'avois eu aufli le plaifir de m'en affurer. On favoic d’ailleurs que le fang eft d'autant plus noir , que les maladies font lus inflammatoires ; enfin, M. Landriani a aufli obfervé, qu'après avoir beaucoup mangé, lair qu'il expiroit; étoit chargé d’un tiers de plus de phlogiftique qu'auparavant. On conclut donc , avec rai- fon, que les alimens fourniffent au fang du phlogiftique. 2°, Les végéraux fe chargent femblablement de phlogiftique , par la sève qu'ils tirent de la terre. Les plantes réfineufes qui regorgent de ce phlooiftique , le laiffene couler quand on leur ouvre une iflue; les abricotiers , les pruniers, les cerifiers , dont les vaiffeaux s’ob{- truent aifément, laïiflent échapper une gomme qui eft une matière très-phlogiftique ; les plantes qui croiffent dans les lieux les plus fecs & fur les montagnes les plus hautes, font plus belles par leur couleur , plus favoureufes par leur goût, plus fuaves par leur odeur, que celles qui croiffent dans des lieux ou des tems humides; je me propofe aufi de montrer une autre fois comment les couleurs, les faveurs, les odeurs, font les effets du phlogiftique combiné d’une manière particulière. 3°. Les minéraux , Comme nous l'avons vu, fe modifient diver- fement, fuivant la quantité du phlogiftique qu'ils renferment ; on peut leut en donner ; ou leur en ôter à volonté , de forte qu’on peut dire qu'il eft au moins pollible qu'ils en reçoivent, & qu'ils en perdent. 4°. cs élémens en recoivent auffi du dehors. 1°. l’ar eft rendu aifément inflammable, comme M, Prieftley l’a démontré; 2°: l'eau, SUR L'HIST. NATURELLE ET LES ARTS. 29 fuivant cet excellent Phyficien , fe charge du phlogiftique contenu dans l'air, lorfqu'on l’y agite; 3°. la serre s'en fature dans lésteal: cinations. s L HI. Mais quels font les wfages & les effers de ce phlogiftique ? 19. Il me paroïit très-probable que le phlogiftique foit la caufe de la fluidité ; les métaux coulent quand ils en font pénétrés ; l’eau coule quand elle en a une certaine quantité; elle devient folide comme les métaux, lorfqu’on la prive de cetre quantité qui eft déterminée pour la rendre fluide; plus les liqueurs fonc chargées de phlogiftique , & plus elles gèlent difficilement. C’éft ce phlopif- tique qui entretient la fluidité des liqueurs dans le corps; plufieurs fe coagulent à l'air; le fang des loirs, des ‘marmottes, des animaux froids, perd fon mouvement par un degré de froid très-perit. On fait encore que le fang , confervé dans une température femblable, pour le degré , à la 'chaleur‘animale, corifeive fa fluidité; que fa partie rouge , qui eft la plus phlosiftiquée , refte le plus long-tems fluide; que le fang des veines ; qui eft plus chaud que celui des artères , comme on l’a obfervé dans les Efläis de Médecine ‘d'Edim- bourg , Tome VI, eft auf plus long-tems fluide ; enfin, le fang', chargé de phlogiftique , conferve très-long-tems fa fluidité. S 29,0Ce phlogiftique eft la caufe de la chaleur, & il doit l'être pour tous les corps lorfqu'il eft en mouvement ; auili, tout ce qui tend à augmenter le phlogiftique dans Le corps , Comme les liqueurs fpiritueufes, augmente aufli fa chaleur; on fait qu'après le repas, lorfque la digeftion fe fait, la tranfpiration elt plus abondante ; ceci offre aufñli une explication raifonnable de la chaleur animale ; & la circulation de ce phlogiftique que j'établirai à la fin de ée- Mémoire, fera comprendre comment le mêrne degré de’chaleur fe conferve toujours dans ceux qui fe portent bien, | EL 3°. Le phlosiftique répandu dans les neuf liqueurs qui circuléne dans le corps , leur donne cette faculté irritante’, fr nécelfaire pour’ l'entretien de la machine ; par elle, le fang toujours chargé de phlo- giftique ; agit efficacement fur le cœur & les artères, & il ÿ OCCa= fionne par fa caufticité, les monveniens: de fyltole & de ‘diaftole qui opèrent la circulation; aufi ie mouvement du cœur &' des ar- tères s'accélère en raifon de inflammation’; les liqueurs fortes’ qui vetfenr à flots le phlogiftique dans le fang ; en précipirent le COUFS ; une fuppuration confidérable hâte le pouls en s’établiffant , parce que la fermentation purride qui la produit, développe du phlogiftique & le répand dans le fang ; les maladies putrides occafonnene la fè- vre pour les mêmes raifons. Dans tousices cas , le fang'érant chargé d’ane quantité plus con- fidérable de phlogitique , qu'il ne l'eft ordinairement , agit fur le cœur 30 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, & les artères avec plus de force, & leur occafionne des convulfons. plus fréquentes ou des mouvemens plus preftes ; aufli dans ces mo- mens , on éprouve une chaleur vive & un mal-afe général , qui eft produit fans doute par l'iritation générale que caufe ce phlogiftique à toutes les parties irritables. Ceci explique encore pourquoi le fang veineux eft plus chaud & d’une couleur plus foncée que le fang ar- tériel ; lorfqu’il arrive dans les veines, 1l a circulé dans le corps, où il s’eft chargé du phlooiftique fuperfu qu'il a trouvé fur fa route , & même dans le chyle; de forte qu'à tous égards, il doit avoiriplus de phlogiftique , lorfqu’il eft dans les veines , que lorfqu'il eft dans les artères; & cela doit être aufli; il lui faut alors toute fon acrimonie pour faire efforc fur le cœur, & réparer par cette uouvelle puiffance , la quantité de mouvement perdu par le frot- tement dans les vaiffleaux, & acquérir des forces nouvelles pour re- mettre le cœur en jeu ; au refte , j'obferverai que le fang fe charge avec la plus grande facilité de phlogiftique , & qu'il s’en décharge de même. Je n'entre pas ici dans une foule de détails phyfologi- ues , qui confirment mon hypothèfe, mais qui allongeroïent trop ce Mémoire. J'obferverai feulement , que le phlogiftique doit être la caufe du mouvement périftaltique des inteftins auxquels il s'applique, en s’échappant des alimens ou des humeurs qui s'y mêlent ; pour en faciliter la digeftion. C’eft vraifemblablement le phlogiftique extrait du fang, & concentré dans la liqueur féminale , qui lui donne fon activité fur les parties qui la renferment, & fur le germe qu'elle doit développer. Sa fluidité qui eft affez durable , montre qu'elle abonde de ce principe. Verheyen dit avoir reriré de la femence du taureau , beaucoup d'huile fétide & d’alkali volatil: il falloit bien cette qualité irritante à la liqueur féminale, afin de donner aux or- ganes l’érétifme néceffaire pour accomplir l'œuvre de la génération, & pour vaincre l’inertie du fyftème vafculaire dans le germe; aufli dès que le mouvement eft établi, le fang moins irritant remplace cette liqueur qui feroit trop aétive. Enfin , il eft encore très-poflible que ce phlosiftique foit la fource du fluide nerveux, des efprits animaux; ces derniers doivent avoir tant de rapports avec la liqueur féminale, qu'ils paroïffent avoir auñli une fource commune , & ne différer que par le degré de concentra- tion ; d’ailleurs, la nature ne dirige vers le cerveau , une fi grande quantité de fang, qu'afin d’y opérer cette ardente fécrétion ; aufli tout ce qui diminue la quantité du fang, ou celle du phlogiftique qui doit y circuler, diminue en mème-tems la vigueur du corps, & tarit la fource de la vie. Il en eft de même dans les végétaux, la glace y interrompt la végétation, parce qu'elle arrête ce ftimulant qui favorife la circula- SUR L'HIST. NATURELLE ET LES ARTS. 3x tion de la fève , plus lente que celle du fang , parce que la quan- ticé du phloyiftique qu’elle contient eft moindre , & que les orga- nes font moins irritables. Les plantes végèrenc toute l’année dans les lieux où la chaleut de Pair fournir ce phlogiftique ; auñli l'on trouve fur les Andes , les plantes des Alpes & de la Laponie : outre cela, c’eft dans le moment où la température de l'air eft la plus chaude, que fe forment les graines ; il faut l’acrifnonie du phlogiftique dans les pouf- fières , pour féconder le germe , & leur abondance pour en remplir tous les vaifléaux & les enveloppes nourricières. J'abrège... je dirai feulement que les métaux femblent l'ouvrage du feu; on les trouve dans les lieux où l’on en remarque les in- dices ; la forme fous laquelle quelques-uns fe préfentent, ne per- met pas de douter de l'aétion du feu fur eux. Enfin on 4 foupçonné ue l'air deviendroit folide , fans le phlogiftique qui l'anime, l’eau see inutile fans lui, & il métamorphofe de mille façons la terre à laquelle il s'unir. Il ne refte plus qu’à examiner comment les corps parviennent à fe décharger d’un phlogifique furabondanr, qu’ils doi- vent avoir , après qu'il a circulé dans leurs différentes parties. IV, J'ai déja fait voir que le phlogiftique fe répandoit dans le fäng par le moyen des alimens, qui y verfent celui qu'ils renferment, par la fermentation putride qui en développe une grande quantité, par tout ce qui caufe les maladies inflammatoires, enfin par tour ce qui accélère le mouvement du fang : peut-être l’air lui-même qui en eft chargé en eft-il une fource abondante. Mais ce phlogiftique ne peut être dans l'animal, & dans les plantes, que de deux manières , où comme lui étant propre, ou comme le réce- vant d’ailleurs; dans le premier cas, il feroit invariablement le mème, à moins qu'il n'y eût des circonftances particulières pour le modifier; mais ces cas feroient rares, parce qu'ils troubleroient un ordre éta- bli; dans le fecond cas, il s'accumuleroit fans celle, & on l’apper- cevroir par! les effets ; rmais comme cette atigmentaion de phlogif- tique ne s’apperçoit pas , quoiqu’on fache que l'animal & les plan- tes en reçoivent fans celle du-nouveau, il faut néceflairement con: clure qu'ils fe déchargent de tout ce qu'ils en ont de farabondant, à moins que leur fanté ne foit alrérée , comme cela s’obferve bientôt; mais où chercher ce moyen de décharge pour les animaux ? il ny a aucune fecrérion qui pût y fuflire : celle du fuide féminal pour- toit l'offrir , mais elle n’eft pas affez abondante , & les organes qui la renferment ne font pas des points, où abourit toure la malle du fang: Il n’y a donc que le poumon qui puiffe remplir cette fonction, & tout femble concourir à la lui affurer. Telles éroient les idées que javois déja eues fur cette matière, & que M. Prieftléy a fi ingé= nicufement & fi folidement développées. 32 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE): L'ufage des poumons , fuivant cer excellent Obfervateur , eft d’ex- pulfer cer effluve que j'appelle p#logiflico-putride , qui pafle des alimens dans le fyflème animal ; l'air eft le menftrue de cer efluve, il s’en empare dans le poumon , où 1l eft en conta@ avec le fang qui en et chargé; car, comme je l’avois obfervé, & comme MM. Prieftley & Mofcati l'ont démontré; la couleur du fang change en raifon de la quantité du phlogiftique dont il eft chargé, & il reprend quelque- fois fa couleur, lorfqu'il peut communiquer avec l’air qui l’en dé- charge ; ainfi le fang placé dans un air inflammable, fe noircit; mais il redevient. quelquefois rouge , en l’expofant à l'air libre. M. Prieftley obferva encore que, la partie fupérieure d’une goutre de fang , couverte d’huile, devient noire, maïs qu’elle reprend fa cou- leur rouge fi on la découvre; que la partie inférieure d’une goutte de fang rouge, eft d’une couleur noire; que du fang noir, placé dans un air déphlogiftiqué , chargea l'air de phlogiftique. Enfin , M. Prieftley prouve, par une expérience concluante, que les mem- branes du poumon ne fauroient être un obftacle à cer effet ; car ayant mis du fang noir dans une veflie enduite.de ferum, le fang y reprit fa couleur rouge, par fon contaét avec l'air extérieur, au travers de cette veflie. Les expériences offrent des moyens pour trous ver la caufe de la mort des animaux qui refpirent dans un lieu où l'air ne peut fe renouveller. J’obferve d’abord , que dans toutes les infpirations, la vapeur qui fort du poumon eft chaude ; qu’ellé nuit à la refpiration des animaux , fi elle eft renfermée avec eux dans le mème lieu; & qu’elle y nuira d’autant plutôt que ce lieu fera plus petit, le nombre des animaux refpirans, plus grand, ou que la quantité d’air refpiré chaque fois, fera plus confidérable. Je ferai aufi remarquer que la raréfaction de l’air n’eft pas une caufe fufhfante de leur mort, puifqu’on refpire impunément fur les montagnes élevées, un air bien plus rare que celui que ces animaux refpirent alors; ce ne fera pas non plus l’augmentation de la denfité de Vair qui fera périr ces animaux; le baromètre n’annonce pas un changement infoutenable , & l'air fe conferve d’autant plus falubre qu'il eft plus denfe; la chaleur ne contribue pas davantage à leur mort : les dernières expériences de M. Banks, montrent jufqu’à quel point les hommes peuvent la foutenir. Ce ne font pas non plus les vapeurs aqueufes ; les Ruffes,. dans leurs bains, fouffrenc aifément la grande quantité de vapeurs produites par l’eau qu'on verfe à lots fur des pierres brülantes & dans des lieux fort petits; enfin,.les animaux ont péri dans/,un air renfermé par un froid affez vif, Il y a donc quelque chofe de particulier à cet air refpiré long-tems dans un lieu fermé , qui eft IA caufe de la mort qu'il donne; on z SUR L'HIST. NATURELLE ET LES ARTS. 33 on ne fauroit en douter, car, 1°. il a une odeur putride ; 2°. ïül laifle appercevoir une fubftance grafle & inflammable ; 3°, toutes les vapeurs nuifibles étant inflammables, on peut conclure que cette inflammabilité contribue à les rendre nuifbles, & qu'elle eft auñli une des caufes de la mort qu’occafionne le même air long-tems ref piré dans un lieu bien petit. D'ailleurs, Halley tua des animaux avec un air qui avoit paflé feulement au travers d’un feu de charbons ardents, & qu'il avoit conduit par un canon de fufil dans un ré- cipient vuide d'air, où ces animaux furent placés. M. Cigna re- marque que l'air extrèmement réchauffé, change de nature, & qu'il éteint la flamme ; cependant la feule différence de cet air avec l’air commun , fi l’on néglige la raréfaction, eft feulement le phlogifti- que dont il fe charge. Il faut remarquer encore que l’air vicié par la refpiration , a de grands rapports avec l'air produit par la fermentation putride ; | tous les deux éreignent la flamme, tuent les animaux , ont la même odeur défagréable , précipitent également l’eau de chaux, & font rétablis par les mêmes moyens. L'air inflammable à aufi des rap- ports avec l'air vicié par la refpiration ; ni l’un ni l’autre ne font effervefcence avec l'air nitreux ; tous les deux tuent les animaux qu’on y place de la mème manière, tous les deux ont une odeur défagréa- ble ; il réfulre de ces comparaifons, que le phlogiftique uni dans l'air inflammable avec un acide , fe trouve uni dans l'air produit par la Er A avec un alkali, & que celui qui s’exhale du poumon, ui reflemble parfaitement ; ce qui fe confirme. par les efforts inu- tiles de M. Prieftley , pour changer la nature de l’air inflammable, en le combinant avec les émanations putrides. Enfin j'ai .obfervé que le fang expofé à un air gâté par des émanarions putrides, où à un air inflammable, ou à la refpiration , fe noircifloit femblablement, & prefque auffi vite, dans tous les trois , quand les autres circonftances étoient femblables; d'où je conclus qu'il y a dans ces trois efpèces d'air, le même principe noirciflant, c’eft-à-dire , le phlogiftique. La peinture que M. Prieftley fait des animaux qui meurent dans un air vicié par la refpiration , annonce qu’il y a dans cet air quel- que chofe qui doit être très-âcre & rrès-actif; car , comme il le dir, les animaux placés dans un air où d’autres font morts après l'avoir xefpiré aufi long-tems qu'ils ont pu, y meurent à linftant qu'ils le refpirent ; ils meurent toujours dans des convulfons violentes , & comme les airs inflammables ou chargés de matières inflammables occafionnent de la même manière, la mort des animaux qui le ref- pirent, on ne fauroit douter que le phlogiftique ne foit la caufe de leur mort. Auf rous ceux qui font affectés de maladies inflammatoires, éprou= Tome VIIL, Pare. II. 1776, E 34 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, vent à peu-près les mêmes fymprômes, lorfqu’elles fonc pouffées à un haut deoré ; une toux forre & fréquente qui annonce un ftimu- lant abondant pour irriter le poumon en le traverfant, une refpira- tion courte & .preffée , une fièvre dévorante , le délire occafonné par l'ébranlement fimulrané de tous les nerfs qui brouille routes les idées, la ftupeur produire par la fatigue qu'ont effuyée les nerfs, qui les met hots d'état de fe mouvoir , & qui les relâche entièrement; auñli comme l’obferve M. l’Abbé Fontana, ceux qui font tués par le tonnerre ont un relâchement fingulier dans tous les mufcles ; & les animaux tués par l’érincelle électrique , font, à caufe de cela, beaucoup plus tendres, & beaucoup plutôt prèts à manger. Quelle eft-donc la caufe de la mort des animaux qui refpirent un air qui ne peut fe renouveller ? Ils meurent, parce qu'ils ne peuvent £e décharger de cet efluve phlogiftico-putride , qui s'échappe des pou- mons , & qui fe répand ordinairement dans l'air environnant. Je m'explique: une portion d'air ne peut, diffoudre qu’une certaine quantité de cet eflluve; de forte que quand cet air qui environne l'animal refpirant , ne peut fe renouveller ; il fe charge toujours de nouveaux efluves qui fortent du poumon, jufqu'à ce qu'il en foir faruré ; alors, au lieu de rafraichir le fang , & de le délivrer avec le poumon de cette humeur âcre , il les en charge encore, 1l s’y accu- mule; delà, les convulfions & la mort la plus prompte; aufi les animaux périffent d'autant iplutôr , que le volume d’air où on les place eft plus petit, parce qu’il eft plutôt faturé de cet effluve phlo- giftico-putride ; que l'air contenu dans l’endroit renfermé eft plus rare, parcé qu'il ne peut pas en diffoudre autant ; que l'animal eft plus grand , parce que chaque expiration chaffe plus d'air du pou- mon; j’ajouterai, que l'animal eft d’an tempérament plus chaud , parce qu’il laife échapper une plus grande quantité de phlogiftique; auf , lorfqu'on place un animal dans un lieu où un autre eft mort pour y avoir refpiré le mème air, le dernier placé périt au moment même, l'air qu'il y trouve étant faturé de phlogiftique : enfin les animaux comme les infeétes qui refpirent différemment des animaux à poumons , n’y meurent pas, ils éprouvent de l'engourdiffement , mais ils reviennent à l'air; il faut obferver que ces animaux n’ont point de fang rouge. Je ne doute pas que les marmottes & les ani- maux froids, ne puillent refpirer plus long-tems le mème air avant de mourir , que les animaux dont le fang eft plus chaud. Une expérience de Hales, femble confirmer cette hypothèfe, qui fair du poumon la plus grande décharge du phlogiftique du fang, par le moyen de l'air qui s’en faifit en s'appliquant aux membranes du poumon ; il prouve que la quantité d’air expiré eft plus petite que l'infpiré; de forte qu'il y a toujours une portion d'air infpiré SUR L'HIST. NATURELLE ET LES ARTS. 3 qui s'applique plus immédiatement aux parois du poumon ; qui en pénètré les plus profondes véficules ; & qui s’y charge de tout ce “qui s’exhale au travers des membranes minces de ce vifcère ; alors, cet air volatilifé & raréfié par ce phlogiftique & ces vapeurs élafti- ques , fair place à un plus pefant qui tend à y entrer. Enfin les remèdes qu'on emploie utilement dans les maladies in- Aammatoires ; font les anriphlogiftiques , tout ce qui augmente les fécrétions , les véficatoires elles-mêmes , la faignée, font autant de moyens pour diminuer la trop grande quantité du phlogiftique: j’at éprouvé que le nitre faifoit paler le fang de la couleur noire à la couleur rouge claire. Mais il ne faudroit pas conclure de tout ceci , que l’air privé de tout phlogiftique , fût-le plus falubre; au contraire, on nuiroit à fa falubrité , fi on le lui toit entièrement : l'ait fixe nuir aux ani- maux, parce qu'il abforbe ce phlooifiique ; aufli les infectes & les plantes qui fupportent , fans périr , un air chargé d’effluves phlogif- tico-putrides , périffent dans l’air fixe. M. Prieftley foupconne la pof- fibilité de rendre l'air fixe falubre , en l’uniffant au phlosiftique ; mais il dit dans fon premier volume de fes expériences far l'air, qu'il n'a pu encore parvenir à exécuter ce mélange ; d’où il réfulreroir que Pair naturel contient du phlogiftique , c’elt-à-dire , l'élément du feu combiné avec la terre vitrifiable; & qu'on ne croie pas cela impof- fible , les fels & les huiles volatilifent affez la terre pour la répañdre dans l'air. Les végétaux qui font Les premiers combinateurs du phlogiftique, né périflent pas lorfqu'on les laifle dans le même air , quoiqu'ils y languiflent; 1ls paroilfent au contraire végérer vigoufeufement dans un ait chargé d’efluves phlogiftico-putridés , ‘produits par la refpira- tion des animaux , ou la puttéfaétion , quoïque ces efluves tuallenc far-le-champ les animaux qui les refpirotent , & mème les végéraux purifient cet air entièrement , comme M. Prieftley l’a découvert : fans doute que les plantes fe nourriffent de cet excrément de l'air, & “qu'elles languiffent lorfqu’il leur manque; ce qu’il y a de certain, célt qu’elles s'approprient au bout d’un certain tems, tout ce qui les environne. Mais ce qui eft remarquable , c’eft que les plantes qu'on met dans l’air inflammable, y croiffent, fans que l’air y perde beau- coup de fon inflammabilité, quoique ces mêmes plantes purifient parfaitement un air vicié par des émanations putrides, qui contient cependant , comme nous l'avons vu , beaucoup de phlogiftique ; maïs les parties falines avec lefquelles il eft combiné , la rerre dont il eft plus charoé, rendent peut-être fon union plus facile avec le végéral ; peut-être auf cette union eft-elle plus fenfible dans les émanations putrides, pasce que la quantité de phlogiftique y _. moindre, & 2 36 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE; que les autres émanations attirées par le phlogiftique font plus den- fes, au lieu que l'air inflammable étant faturé de phlogiftique , & le végétal ne pouvant en recevoir qu’une certaine quantité, ce der- nier, après en avoir fuçé ce qui lui convenoit, en laifle encore une grande quantité; peut-être aufli la circulation du phlogiftique dans 1e végétaux , n’elt pas une vraie circulation, mais celui qui arrive, fe fixe dans les parties du végétal qui deviennent aufli plus folides; il m'a femblé encore que les plantes fe féchoient dans l’air inflam- .mable; comme dans les grandes chaleurs; enfin, peut-être ne s’é- chappe-v'il pas du végétal des émanations putrides, mais on peut au- gurer au moins qu’elles font en très-petit nombre, fi l’on fait atren- tion au petit degré de chaleur qu’elles éprouvent, qui eft roujours celui de la température de l'air extérieur, On peut affurer que la partie fèche des végétaux contient beaucoup de phlogiftique , qu’elle en acquiert toujours en vieillifant, & que cette augmentation eft en raifon de la folidité. Quoiqu'il en foit, ce phlogiftique eft indifpenfablement nécef- faire pour l'entretien des plantes, puifqu’elles périffent dans l'ait fixe qui en eft privé , le fumier n’agit vraifemblablement fur elles, qu’en leur communiquant les émanations phlogiftico-putrides qu'il développe , le gyps n’eft devenu un engrais fi précieux , que par le phlogiftique qu’il recèle &-qu'’il laiffe échapper. Il eft vraifemblable que l’eau foit un conducteur du phlosiftique, comme elle l’eft de l'électricité; à la vérité, ce phlogiftique a plus d’af- finité avec les corps fecs, mais il s’unit pourtant avec l'eau, au moyen d’un intermède, comme dans les liqueurs aqueufes du corps; & peut-être ne s’exhale- t'il auñi du corps, que lorfqu’il s’eft chargé de ces matières purrides avec lefquelles il a une plus grande afh- nité , mais il reprend fa première pureté, & il abandonre même l'air qu'il remplit, lorfqu’on l’agite fortement dans l’eau; peut-être auf lorfque ces émanations phlogiftico-putrides font agitées dans un air humide comme dans le poumon , cet air s’en empare , les emporte avec lui, les purifie dans fes mouvemens , & fournit un phlogif- tique punifié, pour une nouvelle circulation, ou un phlogiftique im- pur, pout la nourriture des végétaux ; il réfulteroit delà , que la cir- culation du fang feroit rallentie dans les rems humides, parce qu'il {e diffiperoit une grande quantité de ce phlogiftique , & que comme on n’en perdroit pas aflez dans Les tems fecs , on feroit expofé à des maladies inflammatoires. Enfin ce principe inflammable peut volatilifer tous les corps, & devenir ainfi la caufe de leur deftruétion. On fait que l’acide vitrio- lique qui eft beaucoup plus fixe que l’eau , devient beaucoup plus volatil qu’elle, f on l'unit au principe inflammable ; peut-être elt-ce SUR L’HIST. NATURELLE ET LES ARTS. 37 ainfi qu'il détruit tous les corps qu'il a faturés; le bois vieux expofé à l’air fe carie & brûle très-mal , les métaux fe rouillent, les pierres fe minent; peut-être cette volatilifation eft-elle produite par la cauf- ticité du phlogiftique : on fait combien les maladies inflammatoires maiorifflent dans peu de jours. Je regarderai aufli le phlogiftique comme une caufe de l’évapora- tion ; il tend fans cefle à l'équilibre; c’eft pour cela qu’il quitte les corps où il abonde , pour fe précipiter vers ceux qui en ont moins; l'air dépofe en été , les gouttes d'eau qu’il renferme fur un vafe plein de glace, parce que le phlooiftique qui les tenoit diffoutes, les quitre pour pénétrer le vafe ; aufh M. de Luc obferve à cette occafon , que l’évaporation occafionne le froid en diminuant la quantité du phlo- giftique , & que la liqueur évaporée devient plus chaude , parce qu’elle s’eft faifie de ce phlogiftique. C’eft ainfi que les brouillards font mon- ter le chermomètre qu’on y place , comme l’a obfervé le même Phy- ficien, & qu'ils garantiffent de la gelée. Je crois avoir montré la probabilité de ces idées , en citant les faits qui les ont produites; j’ai moins raifonné qu’enchaîné des faits; j’aurois pu en réunir encore davantage , y joindre le détail de quelques ex- périences , appuyer & développer les idées que j'infinue, en faire connoître d’autres relatives à ce fujer ; mais je fuis déja trop long, & j'attends d’avoir poulfé plus loin mes expériences, & d’en avoir fait de nouvelles pour former de nouveaux Mémoires , que je m'em- prefferai à faire connoître, fi je puis m'aflurer de leur uvilité. 38 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, Li ENT. 6, (RARE À l’Auteur de ce Recueil; Par M. PASUMOT, Ingénieur-Géographe du Roi, Ec. 1 Re UR, vous avez inféré dans votre Journal du mois de Février dernier, une Lettre de M.&Corte, qui contient des Obfer- vations météorologiques faites en divers endroits, rapprochées & comparées enfemble. C’eft affurément rendre un fervice effentiel à la Phyfique , que de publier de bonnes obfervations fur lefquelles on puille compter. Le fyftème phyfque embraffe tellement toutes les parties de la Nature, qu'il fuffit que ces obfervations foient utiles à une partie, pour que cette utilité reflue de près ou de loin fur les autres, & qu'il foit très-avantageux de s'en occuper; mais quand les obfervations ne font point exactes, il faut fe hâter de les rectifier, afin de n’induire perfonne en erreur. M. Corte cite dans fon Mémoire, pages 99 & 100, des Obfer- vations faites à Auxerre en 1771, extraites des Papiers publics. J'ai cru d’abord que ces obfervations pouvoient m’appartenir, parce que je crois avoir été le feul à Auxerre qui en ait fait pendant les années 1767, 68, Go, 70, 71 & 1772. J'étois étonné que M. Cotte n’eüt connu que les obfervations de 1771. Mais comme je puis aflurer que celles que ce favant Phyficien a publiées , fonc faufles, quoique extraites de Papiers publics, j'ai cru ne pouvoir mieux les corriger , qu’en publiant les miennes , auxquelles on peut d'autant plus ajouter foi, que j'étois muni de bons inftrumens bien placés. Je me fuis fervi d’un baromètre de Toricelli, dont la co- lonne a environ 2 lignes & demie de diamètre, & d’un thermo- mètre à l’efprit-de-vin, conftruit par feu M. l'Abbé Nollet lui- même, en 1737. De plus, la marche de ces inffrumens étoit par- fairement d'accord avec celle de plufeurs autres qui avoient été bien cor ftruits. Comme il feroit peu utile de publier un volume d’obfervations, je crois ne devoir donner que le réfultat de chaque année, ce qui faflira pour comparer ces obfervations avec d’autres. SUR L'HIST. NATURELLE ET LES ARTS, . Plus grande hauteur du mercure. Jours du mois. Barométre. Thermomètre, 30 Avril. 28pouc. 1 lign. 4°.1 dilar. N.E. ZINSEDE NZ RUE Este ele Bien C re cute Ne TE 19 Sept. 28... 1... 1.0... E. Plus petite hauteur. % MANN EN se «Ouen nee de so 1 HOie a à Plus. grand froid. 2 Janv. 27... . 4... 13Scondenf. Zéro, Plus grand chaud, 11 Août. 27...., 10X. .. 24 dilat. N. O. ANNÉE :1768. A NNÉE 117617; 39 Vent. Etat de l'athmofphire, Plus grande hauteur du mercure. ue Déc, 28pouc. 2 lign. 29°. dilat 2j DOS Ps else Oro Moindre hauteur. 22 Nov. 26.... si. SÆee ue Plus grand froid. 5 Janvier. 27.... 81... 14icondenf. Plus grand chaud, im Juiller. 27.,., 74 .. 26! dilat. Zéro. O:S.0: N°VE: S. Très - beau. Très - beau, Beau. Neige tenante: Beau, Brouillards, Couvert, Couvert, Très - beau. Beaucoup de va- PeUISe 4 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, ANNÉE 1769. Plus grande hauteur du mercure. Jours du mois. Baromître, Thermomètre. Vent. Etat de l'athmofphtre. P 28 Nov. 28pouc. 4 lign. 1°.condenf. N.E. Clair, Plus petite. 8 Févr. 26....11.... 7 dilat. . . O.S.O. Grande pluie. Plus grand froid. 21 Janv 27e ele eu dei et NE MUR EAU: 22 Janv. 27.... Gi... 4 condenf. N.N.E. Couvert. Su DÉC 28 NN PAM Rte N. Couvertà l’hori- zon. Plus grand chaud. 7Juillet, 27. .. 10.... 242 dilat. S.E. Sec. Beau. Clair. ANNÉE :1770. Plus grande hauteur du mercure. 24 SEA RER ie 5 + dilat. O. Pluvieux. 25 Doetecsnerteele eee cie ME DEN CONVETE 28 Janv. 28 pouc. 3 lign. o.. N. Idem. 29 du da heat AS One E Idem, 30 nhenniNe ie tels ie et ee RE Îdem, 20Nov- 26 Co NET Teri N.E, Pluie, Plus grand froid. 8 Janv. 27..,,2: 5$...,. 5? congél. N.N.O. Neise&couvert. Plus grand chaud, 8 Août, 27..... 101... 26: dilat. N.N.E, Beau. Nuagesra- fes. ANNÉE SUR L’'HIST. NATURELLE ET LES ARTS. 41 ANNÉE :1771. Plus grande hauteur du mercure, Jours du mois. Baromètre. Thermomètre. Vent. Etat de l'athmofphire, 9 Nov. 20 Janv. 6 Mars. 13 Févr. 26 Juillet. 8 Juin. x7 Janv. 19 Janv, 26 Juin. 2$pouc. 2lignes. o+ dilar. N.E. Brouillards &c couvert, Plus petite. 2e Man LIEN. se st 0 SE Dép6lqec fort couvert, Del tel- les deéatsse tient DE: Pluie-}Très-éou- vert. Plus grand froid. Date eau 2.2 10% CONOEl. E. Neige tenante & brouillard. Plus grand chaud. 27. 9%. 243 dilat. SE. Unpeu nébuleux ANNÉE :1772. Plus grande hauteur du mercure. 28 pouc. 2 lignes, 14 dilat. REX poses & très- clair, Plus petite. 26. 9er ent 0e congél YiN, CO : Couvert. Plus grand froid. . D7s Lie NS ele rio le 1518 congél, S.E. Clair. Sec. Plus grand chaud, 27e sn see 28% dilat. O. Nuages épais à l'horizon, Tome VIII, Part. II. 1776. F 42 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, ONDVANN TUT. EX DJ EPP) LUAITE: * ANNÉE 1769. La quantité de pluie de cette année a éré de 2$ pouces 2 lignes à. Le mois le plus pluvieux a été Septembre , pendant lequel il ef tombé > pouces 8 lignes & d’eau. Octobre a été le mois le moins pluvieux. Il n’eft tombé que 4 lignes ; d’eau. ÂA N NÉE 1770. Il eft tombé dans le cours de cette annce, 22 pouces $ lignes d’eau. Le mois le plus pluvieñx a été Novembre , pendant lequel il eft tombé 3 pouces. 6 lignes = d’eau. Mars à été le mois le moins pluvieux. IL n’eft tombé que 6 lignes + d’eau. ANNEE NL M7 RTS La quantité d’eau qui eft tombée dans le cours de cette an- née, a éré de 21 pouces $ lignes +. Juin a été le mois le plus pluvieux. Il eft tombé 3 pouces une ligne moins -+ d’eau. Le mois le moins pluvieux a été celui de Juillec. Il n’eft tombé que $ lignes À d’eau. AN, NNÉNE) (Ti71712e Il eft rombé pendant le cours de cette année, 23 pouces 7 lig. 3 d’eau. Septembre a été le mois le plus pluvieux. Il eft tombé 48 lignes d'eau. Le mois le plus fec a éré celui d’Aoùûr. 11 n’eft tombé que 11 lignes d’eau. j Afn que l’on n'ait aucun lieu de douter de l’exattitude de mes obfervations fur la quantité de pluie, j'ai cru qu'il étoit à propos de donner la defcription de ma machine propre à mefurer com- bien il tombe d’eau chaque année, foir en pluie, foit en neige. II fera ailé d’en faire conftruire une pareille. Beaucoup d’Obfervateurs, far-tout dans les Provinces , emploient des vafes quarrés , larges & très fujets à l’évaporation. Comme ils fe contentent aflez ordinaire- ment de mefurer la hauteur de l’eau, en plongeant dans le vafe un pied-de-roi commun, qui eft prefque toujours mal gradué, leurs obfervations peuvent être fort équivoques. Il m'a paru ‘que ma ma- chine remédioit à tous les inconvéniens , & pouvoir être employée avec la jufteile & La précifion nécelfaire, SUR L’'HIST. NATURELLE ET LES ARTS. 4; DEUST C RAI PLVE TO: N D'une Machine propre à mefurer la quantité de pluie, 6: d'eau fournie par la neige. La figure première eft un entonnoir pyramidal, de plomb , d’une ligne & demie à deux lignes d'épailleur, ayant un rebord perpen- diculaire de la haureur d’un pouce & demi. Ce rebord forme l’ou- verture À BCD , qui a 13 pouces de longueur de À en D, ou de Ben C, & 12 pouces ou un pied, de À en B, ou de C en D. ( Voyez figure 6.) _ La figure feconde eft une bouteille ordinaire de grès , qui peut contenir neuf à dix pintes de Paris, plus évafée dans le haut A que dans le bas B, afin que la furface fupérieure du dedans fafle , dans le cas d’évaporation , l'oflice de chapiteau, & ferve à con- denfer l'eau qui pourroit être réduire en vapeurs , & qui confé- quemment ne peut s'échapper de la bouteille. La figure 3 eftun vafe pyramidal tronqué , d'étain ou de plomb, qui contient 6 pouces & demi cubes d’eau, & dont l’orifice À n'a qu'un pouce quarré. La figure 4 eft un vafe de fer-blanc, de la capacité d’un pouce cube. La figure $ eft un challis de bois, folidement affemblé , dont les montans, ainfi que les traverfes, ont deux pouces d’équarriffage. Les traverfes d’en bas portent un plancher, P. Ce chaflis fert à por- ter l'enronnoir & la bouteille, ginfi qu’on le voit à la figüre 6; & les quatre traverfes d'en-haut font coupées intérieurement en bi- feau , felon l’obliquité du corps de l’entonnoir. ( Voyez figure 7.) La figure 8 eft une caiffe de fer blanc qu'on pofe fur le plan- cher du chaflis, dans laquelle on place la bouteille, & qui reçoit l'excédent de l’eau, quand la bouteille , dans quelque cas extraor- dinaire , vienr à être trop pleine , ou qui la garantit des fraétures; & l’enconnoir ferme le haut de certe caille figurée par des lignes pon‘tuées, 4.b,c, d,e, f, figure 6. , Cette machine , ainfi difpofée & placée au grand air dans un jardin, & éloignée autant qu'il eft poflible , des arbres & des bâ- timens , reçoit l’eau de la pluie, ainfi que la neige. La pefanteur de l’entonnoir lui fair un left, & la met à l'abri d’être renverfée par les vents. Il ett clair que la furface de l’entonnoir étant de 156 pouces quarrés; fi, fur un plan qui auroit cette fuperficie , il y avoir une ligne d’eau en épailleur , 1l y auroit conféquemment un douzième Ee2 44 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, de 156 pouces cubes, qui vaudroit 13 pouces cubes. L'épaiffeur d’une demi- ligne d’eau équivaudroit par conféquent à 6 pouces & demi cubes. D'après certe théorie, le vafe pyramidal , figure 3, contenant exactement @ pouces & demi cubes , chaque mefure de ce vafe équivaudra à l’épaiffeur d’une demi- ligne d’eau fournie par la pluie ou par la neige. L'ouverture de ce vafe eft réduire à un pouce quairé , afin que quand on mefure la quantité d’eau conte- nue dans la bouteille, la furface de la liqueur qui bombe toujours, emporte une moindre quantité d’eau qui n'entreroit point en compte; & comme il y a prelque toujours du plus ou du moins, on fe fert du pouce cube, figure 4, pour mefurer l'excédent d’eau, ou ce qui peur s’en trouver de moins, pour remplir exaétement le vafe pyramidal. En tenant un regiftre exact de toutes les mefures & de la quantité de pouces cubes en plus ou en moins, on connoît exac= tement combien il eft tombé d’eau chaque fois qu'il a plu , en- fuite chaque mois, & enfin chaque année. Quand il tombe beau- coup de neige, qui ne fond point aflez vite, on vuide l’enron- noir, quand il eft rempli, dans la caifle de fer-blanc , & on fair fondre la neige pour mefurer la quantité d’eau qu’elle fournit. Je fuis , &c. P. S. C’eft d'après les obfervations du baromètre, que j'ai rap- portées ci-deffus, que j'ai déterminé la hauteur de la Ville d'Auxerre, de 76 toifes au-deflus de la Méditerranée, & 77 au-deffus d2 l'O- céan. Si ces fortes d’obfervations pouvoient fe multiplier, on évi- teroit beaucoup d’erreurs dans des élévations qu’on croit être de beau- coup fupérieures à ce qu’elles font en réalité. On dit affez communément que la ville de Langres eft le point le’ plus élevé de la France. Cette affeition eft tout-à-fait faufle, & 1l eft plus faux encore que, felon un Auteur moderne, » /æ » Marne prenne fa fource dans le point le plus élevé de notre Continent «. L'opinion de la prodigieufe élévation de la ville de Langres , ne peut être accréditée que par des perfonnes qui n’obfervent point , ou qui n'ont point recueilli d’obfervations pour les comparer. On peut citer beaucoup de Villes en France au moins aufli élevées, telles que Flavigny en Bourgogne , Château-Chinon dans le Morvand , le Mont Saint-Vincent dans le Charollois, Bourbon - Éancy dans le Bourbonnois, &c. Toutes les Villes de la haute & baffle Auvergne font plus élevées. La Chaife-Dieu, qui eft réputée la Ville la plus haute de cette Province, pourroit, peut-être, pafler aufli pour la Ville Ja plus élevée du Royaume. Mais d’ailleurs , celle de Langres n’eft point fituée fur une éminence ifolée. Elle occupe un Cap d’un pla- ‘ SUR L'HIST. NATURELLE ET LES ARTS. 45 teau qui, de Langres où 1l fe termine, s'étend au Sud-Oueft, fans interruption, à plus de vingt lieues, jufqu’à Sainre- Reine, Flavi- gny, même Semur. On peut confidérer que la fource de la Seine, à trois quatts de lieues au-deflus du Bourg de Chanceaux , eft, fe- Jon toute apparence, le point le plus élevé de ce vafte plateau qui fair fuite des montagnes de la Bourgogne & du Morvand. Le Mont- Afrique, près Dijon, doit: être au moins aufli élevé que ce plateau, & la montagne de Beuvray, près Autun, doir être plus haute. 11 faut efpérer qu'on pourra, quelque jour , publier des Obfervarions du baromètre, d'après lefquelles on pourra juger des différentes élévarions des hauteurs du Royaume ; mais, en attendant, on peut comparer celles de Langres avec le bord de la mer; Paris & l’Au- vergne, par les obfervarions fuivantes. Hauteurs moyennes du mercure... . . . , Caleuléés à raifon de 13 toifes par chaque ligne d'abaiffement du mer- cure, On a , Au bord de la mer., . . . 28 pouc. À Paris, Obfervatoire Royal, 27... . 75liga. $6 roifes 2 pieds. taime PAM AE se tt d 6) 234 toiles. À Chanceaux, près la fource IE ER ET CREER SR PURES 234 toifes, À Clermont en Auvergne. . 26. ... 4. 260 toifes, À la Tour-d'Auvergne. Hi MZ AUS 6. 546 toiles, 11 réfulte de la comparaifon de ces obfervations > que la Ville de Langres eft quatre fois plus élevée au-deflus de la mer que lOb- fervatoire Royal de Paris ; que fa haureur eft inférieure , de 26 roifes, à celle du fol bas de l'Auvergne, & n’eft que les trois feptièmes de celle de la Tour-d'Auvergne. Selon route apparence , l'élévation du Morvand & du Bourbonnois, tient le milieu entre celle de l'Auvergne & celle de ce vañle plateau , dont les eaux produifent la Seine, la Marne , ainf que plufieurs rivières fécon- daires, telles que l'Aube , &c. J'ai recueilli la haureur moyenne du mercure à Langres, par les informations qüe j'ai faires, & par l’obfervation d’un baromètre , dont la plus grande élévation , ainf que la plus petite, étoient marquées par des Cpingles. A Chanceaux » j'ai trouvé un fort bon baromètre chez M. l'Abbé Vioc ; qui a bien obfervé fa marche conflante, Les obfervations que j'ai faites à la Tour-d’Auvergne, au . 46 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, mois d'Aoùût 1773, m'ont fait conclure la hauteur “moy nne du mercure. Elle peut cependant être encore moindre que célle que je üxe. Quant à celle de Clermont, je ne puis la garantir qu'à une ligne près. J'obferverai que la Tour-d'Auvergne eft fituée dans les Monts- Dor, à-peu-près à hauteur égale des célèbres bains de ces mon- tagnes : que felon M. Cafliny de Thury (Méridienne), le village des Bains eft de $o9 toifes au-deffous du fommet du Mont-Dor: que conféquemment la hauteur de ce village eft de 65 toifes au-def- fous du fommer du Puy-de- Dome(1}), dont le cône à 226 toiles d'élévation ( 2) au-deflus du plateau fur lequel il eft implanté , & que cette haute plaine eft de 331 toifes au deflus de la ville de Clermont. Ces obfervations donnent des niveaux où des hauteurs d'autant plus comparables, que l'Auvergne eft une des Provinces les plus élevées du Royaume. J'obferverai encore que la Marne prend fa fource à environ 30 toifes, perpendiculairement , au-deffous de la ville de Langres ; que la fource de la Seine étant dans un vallon fort élevé & peu profond, il en réfulte que la fource de certe rivière eft beaucoup plus haute que celle de la Marne; & comme la Dordogne prend fa fource prin- cipale à environ 100 toifes au-deffous de la cime du Mont-Dor, il eft clair que fa fource eft de 750 toifes plus élevée que la fource de la Marne. Je terminerai par une particularité d’hiftoire naturelle fur la Seine. À quelque diftance au-deflous de la Papeterie de Chanceaux, certe rivière, dont l’eau eft foutenue , au- deffus de la Papeterie, par plufeurs Etangs qui font les uns au-defflus des autres, fe perd en terre pendant une très-grande partie de l’année , dans un trou d'environ un pied de diamètre. Elle va reparoître enfuite , à une demi - lieue de diftance , au-deffus du village de Billy, au-deffous de la Chapelle de Notre - Dame de Compañion , féparée du village dont elle eft diftante d’environ 300 toifes. La preuve que ce n'eft pas une nouvelle fource qui fort dans cet endroit, c’eft que l’eau eft limoneufe, & entraîne des débris de joncs, quand on pêche les Erangs de Chanceaux. : oo oo (1) Le Mont-Dor , felon M. de Thury, eft de 1048 toiles au-deffus de la ‘ Mer, & le Puy-Dome de 817. (2) Selon la mefure que j'en ai faite, en 1764, au village de Lachamp. SUR L'HIST. NATURELLE ET LES ARTS. 47 DD SE CROP PR ESPET CO PAORENEES Sur le fyftème de la converfion de PAïr en eau , adreflées à M. pe Macuy, Par M. DE LA FOLL1E, de l’Académie de Rouen. Ne J'ai. lu votre Mémoire intitulé, Recherches fur que'ques propriétés attribuées à l'air , & inféré dans le Journal de Phyfique, Avril 1776. Si mes éloges étoient d’un grand poids, je les prodiguerois ici, avec un plaifir égal à celui que vous m'avez fait éprouver ; mais js me botne à quelques obfervations. Gardez-vous bien, je. vous prie, de prendre pour une critique, les doutes que je vais vous pro- _pofer. L’envie. de m'inftruire me les a fuggérés : à qui pourrois-je mieux m'adreffer ? Vos quinze premières expériences, prouvent invinciblement, que ce n’eft point à un air fixe , développé des corps, & attiré puiffam- ment pat d'autres corps, qu'il faut actribuer divers phénomènes ap- perçus; qu'il ne faut les attribuer qu'aux vapeurs & aux émanations des corps mêmes. IL réfulce de cette preuve , une conviction des bons principes Phyfiques; mais vous croyez pouvoir afhirmer!, d’a- près votre dix-feprième expérience, & autres fuivantes , que l'air fe convertit en eau, & que l'eau fe convertir en air, C’eft ce que je ne puis me perfuader : je vais vous développer Les motifs de mon incrédulité. » Vous moulâites un cercle de cire molle fur.les bords d’un réci- pient de quatre pinres & demie, de contenence, Vous ,miîtes un. fer rouge fur la platine de votre machine pneumatique , & après avoir jetté 12 grains de fleur de foufre fur le fer rouge , vous vous em- prefsâtes d’aflujettir le récipient fur la platine. 1] fe ft un léger fif- flement , qui étant ceflé , vous annonça que le récipient éroit collé: les vapeurs n’en furent pas moins abondantes ; l’eau ruiffeloit de toute part. Vous dérachâtes ce récipient chargé de ooutres d’eau : vous le pesâtes , Jon poids étoit augmenté de 1 $ grains ; or, comme vous n’aviez mis que 12 grains de fleur de foufre fur le fer rouge , & qu’il y étoit encore relté deux grains d’hétérogénéité , il y avoir donc $ grains 48 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, d'eau produits dans cette expérience. L'air s'étoir donc converti en eau. Telle eft, Monfieur, la conclufon que vous adoptez. Avant de vous préfenter mes obfervations, je dois vous faire un aveu; c'eft que J'ai répété plufieurs fois cette mème expérience , fans appercevoir les phénomènes qui vous ont frappé. J'ai engagé mes amis à faire les mêmes tentatives : elle n’ont pas eu plus de fuc- cès. Point d’eau ruiffelante, pas une goutte d’eau, point d'augmen- tation de poids. Cependant, Monfieur , je fuis bien éloigné de con- refter ce que vous avez apperçu. D'ailleurs, en fuppofant que votre platine peut-être encore chargée de parties aqueufes , d'après votre feizième expérience , vous eür induit en erreur , il eft à préfumer que MM. Maquer & l'Abbé Nollet, nommés par l'Académie, pour l’exa- men de votre Mémoire , ont eu la curiofité de vérifier ce phénomène frappant. J'admettrai donc la certitude de cette expérience. Mais voici mes idées fur les réfulrats. Nous avons pour axiôme en Chymie, que plus les gouttes de l'a- cide vitriolique font petites & mulripliées , plus elles préfentent de furfaces à l'air, & plus elles attirent les parties aqueufes qui s’y trouvent répandues ; or, quand vous avez détaché votre récipient , il étoit alors chargé de petites goutes d'acide vitriolique , provenantes de la décompoltion du foufre. L'air s’eft entonné avec affluence dans ce récipient , & les parties aqueufes contenues dans l’air de l’armof- phère, auront pu occafonner quelques grains d'augmentation de poids. Voilà , Monfeur, ce que je crois appercevoir dans l'expé- rience que vous avez faite, & rien de plus (1). Enfin, il eft une vérité inconteftable , c’eft que l'air eft plus léger que l’eau. L'air ne fe transformeroit donc en eau, que par une condenfation prodigieufe : or penfez vous qu'un fer rouge , & une fubftance enflammée , puiflent former cette condenfation ? Le feu peut-il condenfer l'air? non: & c’eft dans votre expérience même, où j'en trouve la preuve. A peine le foafre eft-il aflumé dans le récipient, que l’on enrend un fifflement, comme vous l’annoncez. Mais d’où provient ce fiffle- ment ? il provient de l'air dilaté qui s’échappe du récipient; ce qu'il -eft facile de reconnoître , foit en approchant fa main de ce petit courant d'air, foit en lui préfenrant des corps légers qui font fur le champ écartés du récipient. Il eft donc fenfible que le foufre allumé QE mener sono (x) Puifque 1$ grains d'acide vitriolique ruifleloient de toure part dans un récipient de quatre pintes & demie, l’extenfion de cet acide préfenroic donc une furface étonnante. na SUR L'HIST. NATURELLE ET LES ARTS. 49 n’a point la faculté de condenfer l'air, puifqu'au contraire il le di- late & le chaffe du récipient. Ainfi la tranfmutation d'air en eau, eft, pour ainf dire, démontrée impoflible dans cetre même expérience. Je paffe à une obfervarion fubféquente : après une quantité d'air échappé du récipient, celui-ci forme adhérence avec la platine, & s’y colle exaétement. Cette conféquence eft bien fimple. En effet, puifqu'il y a diminution de l'air qui étoit fous le ré- cipient , alors le poids des colonnes d'air extérieur , devient pro- portionnellement plus confidérable fur le récipient, & doit occafion- ner l’adhérence du récipient à la platine. Ainfi, fans nous écarter des loix de la bonne Phyfique , fans avoir recours au fyftème des abforp- tions extraordinaires, ni croire aux converfions d’air en eau, nous pouvons expliquer beaucoup de phénomènes. Rappellons aétuellement votre dix-huirième expérience. Vous avez brûlé 12 grains de foufre fous le récipient pofé fur la platine de votre machine pneumatique , & vous avez preftement pompé de l'air. Alors vous difiez : » fi c'eft l'air qui eft converti en eau, yen » ayant moins dans le récipient , les 12 grains de foufre donneront » moins d’eau. Si c'eft l’eau contenue dans l’air qui fe manifefte, fa » préfence fera fenfible & plus prompte , parce qu'elle féra moins em- » barraffee dans cet air «. Je préfume bien, Monfeur , qu’il y a ici erreur ou omiflion, parce qu'un Phyficien aufli éclairé que vous, n’a pas dû foupçonner, qu’en pompant l'air d’une machine pneumatique, on ne pompoit pas en même-tems, l'eau contenue dans ce mème air ; je pale donc au ré- fultat de l’exprience. Le foufre brûla lentement. Ses vapeurs circu- lèrenr. La jauge que vous aviez mife dans le récipient ne bougea point, & à peine apperçütes-vous quelques gouttes éparfes. Je ne fuis pas furpris de ces effets, puifqu’en pompant l'air, vous avez pompé en mème-tems, l'eau contenue dans cette portion d'air: tout ce qui pourroit me furprendre , c’eft que vous ayez encore ap- perçu quelques gouttes d’eau éparfes dans ce récipient, dont vous aviez pompé une portion d'air, & qui étoit conféquemment mieux formé que les meilleurs aludels, où l’on fublime le foufre. Au refte, je le répète , je ne contefte aucune de vos expériences, & j'attribue mon défaut de fuccès à mon peu d’adrefle, On eft, dires-vous , bien convaincu (pag. 312.) que l’eau contenue dans l’air de l’athmofphère , n’eft pas bien abondante. Pourquoi ? parce qu’une once de fel de tartre, expofée à l'air, n’attire ce qu'il.lui faut d’eau pour être diffoute , que dans l’efpace de 12 à 15 jours. Permettez-moi , Monfeur : nous avons ici une obfervation impors Tome VIII, Part. II, 1776. so OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, tante à faire ; c'eft de favoir combien vous donnez de furface à une once de fel de tartre ; car plus on lui fait préfenter de furface, plus la diffolution eft prompte. Au refte, à mefure que l’alkali fe farure d’eau, fa grande afh- nité avec l’eau s’affoibli : il n’eft donc pas étonnant qu'en 12 à 15 jours , la diffolution d’une once de fel de tartre foit à peine com- plette, fur-tout, fi elle ne préfente pas beaucoup de furface à l'air; mais il ne s’en fuit pas, que l’eau contenue dans l'air, ne foit pas abondante, Combien, au contraire, cette abondance d’eau n’eft-elle pas fenfñble , lorfque l’on fait l’alkali extemporané ? À peine ce fel eft-il forti du creufet , & refroidi, qu'il fe charge d’une quantité d’eau confdérable, fur-tour , fi on l’a féparé en petites parties. Nous avons encore une preuve frappante, qui démontre l'abondance de l'eau contenue dans l’athmofphère , & non la converfion de l'air en eau, comme vous le fuppofez. Dans un appattement un peu échauffé , fi l’on jette du fel am- moniac dans un verre d’eau, on fait que la fraicheur communiquée au verre , eft caufe que la furface extérieure du verre, fe couvre à l’inftant d’une quantité d’eau. Mais quelle eft certe caufe ? ceft-à- dire , pourquoi les corps froids condenfent-ils les vapeurs que con- tient un air échauffé ? c’eft qu'aux environs des corps froids, il y a moins de mouvement, moins de dilatation qu'aux environs des corps échauffés ; or, les vapeurs qui pafenc fur les corps froids , éprouvant moins de mouvement, moins de percuffion , moins de dilatation, ces vapeurs ou portions d’eau doivent donc s’y raffembler. Voilà, Monfeur , mes idées fur ce phénomène. J'avoue qu’elles font bien fimples; mais il m’eft impoflible d’exalter mon imagination, au point de croire, que les corps froids aient la propriété merveil- leufe de convertir l’air en eau. D'ailleurs, fi l’air fe convertifloit en eau par le froid , croyez-vous que nous refpirerions facilement pen- dant les grandes gelées ? Enfin, quand on confulte de trop près la glace d’un miroir, fou- vent on s’impatiente , parce que cette glace fe couvre de vapeurs: on l’effuie ; elle fe ternir de nouveau: on la frotte encore , & ce n’eft qu'après plufeurs frottemens , qu'ellé ceffe d’être ternie par la ref- piration. Mais quels effets produifent les frotremens ? ils communi= quent un peu de chaleur au miroir. Preuve. Si au lieu de frocter ce miroir, on l’échauffe devant le feu, alors on peut l'approcher de fa bouche , aufli près qu'on le defire ; il ne fe ternit point. Eh bien , Monfeur, pourrions-nous dire que le miroir étant froid, a la faculté de convertir en eau , l'air qui fort de notre bouche ? je ne le crois pas. Il n’eft donc queftion ici que de la condenfation des SURHIST. NATUREILE ET LES ARTS. svt vapeurs, qui fürement étoient déja formées en fortant de la bouche. Je fuis intimément perfuadé que certains fels n'atrirenc les vapeurs de l'air , qu’en raifon de ces mêmes principes, & qu’ils n’ont point la faculté prodigieufe de tranfmuer l'air en eau. Je vais rapprocher ici les deux principales expériences de votre Mémoire. Suivant l’expérience dix-feprième, vous préfumez que le feu a con- verti l’air en eau, & fuivant l’expérience vingt-huitième , vous penfez que le feu a converti l’eau en air. J'avoue que cette dernière opinion feroit plus féduifante ; mais je vais vous faire part des raifons qui m'empêchent de l’adopter. C'eft d’après l'incertitude de Boyle, que vous avez imaginé un appareil, qui, fuivant vous, ne doit laifler aucun doute fur la con- verfon de l’eau en air. Vous fites bouillir de l’eau pendant une demi- heure. C’eft-là, dites-vous, le cems néceffaire pour la priver d'air. Je pourrois d’abord vous propofer des doutes fur cette aflertion, mais je ne m'y arrête pas. Vous introduifites donc trois gros & demi d’eau dans un petit éolipyle. Vous fites entrer le bec de cer éolipyle dans une tubulure formée au ventre d’un matras: vous eûtes foin de le bien lutter. Le col du matras étoit élevé d’un pied un pouce : vous fermâtes fon orifice avec une veflie fèche , enfuire , vous allumâres une lampe fous l’éolipyle. L'eau ne tarda pas à bouillir, elle forma d’abord un jer vaporeux qui obfcurcit rout le matras. La veflie fe bomba; vous y fires alors un trou d’épingle. Les parois du matras fe couvrirent de vapeurs ruiffelantes , & celles-ci n’eurent pas plutôt pris l’érat aqueux, que les nuages fe diflipèrent. L'eau continua de fe précipiter en vapeurs , & de fe condenfer dans le matras, 7’y ayant que l'air qui put s'échapper par Le haut ; ce que vous confirma évar Jec du haut du col, ainfi que celui de la veflie. L'opération étanc finie , vous fûtes certain qu’une portion d’eau s'étoit convertie en. air, puifque vous trouvâtes 30 grains de diminution de poids. Voici préfentement mes obfervations. Il n’y a, dites-vous, que l'air qui a pu s'échapper par le trou d’épingle que vous avez fait à la vefie; c’eft ce qu'il m'eft impofñlible de croire. Au contraire , je fuis intimément perfuadé que cec air, qui s'échappe par le rrou d’é- pingle , eft chargé de vapeurs. Je ne vois rien dans votre expérience, qui puifle déranger à cet égard, l’ordre phyfique; & l'afcenfion des vapeurs raréfiées dans un col de verre de 13 pouces d'élévarion, me paroît bien naturelle à croire. Quant à l'étac fec du haur du col du matras , prouve-t-il qu'il ne s’eft point échappé de vapeurs ? je ne le crois pas. Voulez-vous bien que je vous cite encore l'exemple fimple dont il a déja été queftion ? G 2 52 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, Nous favons que notre refpiration contient une abondance de va- peurs. Or, quand quelqu'un s'amufe à fiffler, s’apperçoit-il que le bord de fes lèvres devienne humide ? non; cependant il y circule une grande quantité de vapeurs. Il en eft de mème fur tous les corps un peu échauffés , les vapeurs raréfiées n’y éprouvent aucune conden- fation. Ainfi l’état fec du haut du col de votre matras, ne prouve point qu'il na pu s'échapper aucunes vapeurs du matras. Je ne vois donc, Monfieur , dans l'expérience réfultante de votre appareil , que les effets de l’éolipyle ordinaire. Votre trou d’épingle a formé un fecond éolipyle , par où fe font échappées des vapeurs d'autant plus raréfiées, que ce font les plus légères de celles qu’a données votre premier éolipyle dans le matras. Voulez-vous une preuve frappante ; c’elt qu'ayant répété votre expérience avec des vafes de même capacité, j'ai rendu fenfible l'eau qui fort par le trou d’é- pingle, & que vous fuppofez n’ètre que de l'air. J'ai préfenté vis-à- vis du trou d’épingle, un miroir de métal ; les vapeurs s’y font con- denfées, & ont formé des gouttes d’eau. Enfin , j'ai répété l'expérience de M. Boy, que vous citez. Je refpecte comme vous les hommes illuftres , mais j'aurois défiré que M. Boyle, n'eût pas laiffé d'incertitude fur le réfulrat de cerre ex- périence , puifqu'il lui fufhfoit à cer égard de fubftituer un petit éolipyle à celui donc il s'étoit fervi. C'eft ce que j'ai fair. J'ai pris un éolipyle de deux pouces & demi de diamètre. J'y ai introduit un pouce cube d’eau. J'ai ajufté & lutté bien exaétement , au bec de cet éolipyle, une veflie fèche d'environ quatre pintes de continence. Jai mis l’éolipyle fur le feu. Après l'entière évaporation de l’eau , il eft réfulré que la veflie étoit fort peu gonflée. Ce gonflement a été prefqu'infenfible après le refroidiffement, & j'ai retrouvé dans la vellie, l’eau en nature. Je m’y atrendois. Enfin, je n’ai vu dans cette évaporation, qu'une fimple diftillation. Les vapeurs fe font conver- ties en eau, & il s’en faut bien que j'aie trouvé dans la veflie, cette quantité d'air permanent , dilatable , élaflique, qui auroit dû être d'un volume huit cents fois plus confidérable , que le volume d’eau, fi en effec l’eau s’étoir convertie en air. D'après cette vérification que j'ai faire avec le plus grand fcru- pule (& je n'étois pas le feul obfervareur), je crois que vos expé= riences fubféquentes ne nous fourniffent pas de nouveaux phénomènes à difcuter. Par exemple, lorfque l’orifice de l’éolipyle a été plus étroit, vous avez cru voir une plus grande quantité d’eau convertie en air» & moi j'ai cru appercevoir que les vapeurs pañfées dans le matras, étant plus divifées, & plus légères , ont monté avec plus d’afluence SUR L’HIST. NATURELLE ET LES ARTS. $3 au haut du col du matras, & fe font évaporées en plus grande quan- cité par le trou d’épingle. Voulez-vous me permettre de vous expofer encore ici, le même exemple fimple & frappant, que je vous ai déja cité? Je le répète, parce qu'il a des rapports avec les effets de l’éolipyle. Le Voyageur Philofophe ayant été tranfporté dans la lune, pro- pofa aux Académiciens de cette planète, plufeurs queftions, aux- quelles les Savans de fon pays n’avoient point, difoic-il , fait de ré- ponfe. Parmi ces queltions, on lifoit celle-ci : » Pourquoi , en fouf- » flant avec la bouche fur un corps quelconque, le rafraîchit-on ou » l’échauffe-t-on à volonté, en ouvrant ou étréciffant la bouche? Com- » ment deux effets aufli oppofés, peuvent-ils émaner d’un peu plus » où d’un peu moins d'ouverture « ? Des évènemens arrivés à notre Voyageur , l'empèchèrent de rece- voir la réponfe des Académiciens de la lune. Je crois que fans aller fi loin , 1l auroit trouvé réponfe à cette demande , s’il y avoir fé- rieufement infifté, & je fuis für que nos Phyficiens étoient en état de la lui faire. En effet , perfonne n’ignore que par le mouvement intérieur qui nous anime, l'air que nous afpirons s'échauffe avec nne promptitude étonnante , & fe charge des vapeurs que ce même mouvement pro- duit dans nos poumons. Or, fi en foufflant nous ouvrons beaucou la bouche , nous fourniffons tout-à-coup une quantité confidérable d'air & de vapeurs chaudes, L'air extérieur ne peut point fe mêler avec affez de vicefle à cette malle d'air chaud : les vapeurs ne font pas diffoutes ; alors , non-feulement elles échauffent notre main, f nous l’approchons de notre bouche , mais elles la rendent humide. Quand , au lieu de fournir une colonne d’air d'environ un pouce de diamètre , nous n’en produifons qu'une de demi-ligne , elle fe trouve à l'inftant mélangée avec l'air extérieur qui lui communique fa frai- cheur, & le froid que nous éprouvons , provient non-feulement de la petite colonne d'air échappée de notre bouche , maïs encore d’une quantité d'air extérieur qui fe mêle avec elle, & fuit l'impulfon que nous lui avons donnée. Telle eft, je crois, Monfieur , la réfolution du problème préfenté par le Voyageur Philofophe. Je m'imagine bien que vous fentez en- core mieux que moi, les rapports frappans de tes obfervations , avec celles fur l'éolipyle. Il n’eft donc pas étonnant que le ventilateur , produit par l'éolipyle, ne forme qu’une diftillation fimple, lorfque les vapeurs n'ont plus le contact de l'air extérieur. Votre trente-troifième expérience & les fuivantes, démontrent que moins les corps contiennent d’eau , plus ils font fufcepribles de s’6- 4 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, chauffer, & plus l’eau qu’ils contiennent , eft fufceprible de dilata- tion, mais elles ne démontrent nullement la converfion de l’eau en air. Lorfque nous foumettons certaines fubftances à la diftillation, nous voyons, vers la fin de la diftillation, que les pores de ces fub{- tances ; brifées par la percuflion continuelle du feu, lâchent enfin quelques portions d’air & d'eau qu’elles receloient; ces mêmes por- tions en fe dilatant , & augmentant de volume , peuvent quelquefois caufer des explofons ; mais ces effets ne me paroiflent point indi- quet une formation d'air, ni unesconverfion d’eau en air. Je n'y vois que des dilarations de l'air, de l’eau, & des émanations du corps même que l’on a foumis à la diftillation. J'obferve encore que les vapeurs deviennent plus légères que Paire fans fe tranfmuer en air. Ne voyonsnous pas tous les jours celles qui s'élèvent de notre globe ? Sont-elles pour cela converties en air? non; elles ne tardent pas à fe condenfer , lorfqu’elles éprouvent moins de mouvement , & bientôt devenues plus pefantes, elles retombent en pluie. Les expériences nouvelles & ingénieufes de M. le Duc de Chaul- nes, démontrent combien les vapeurs {ont fufcepribles d'être dila- tées, fans perdre cependant leur principe , puifqu'elles redeviennent fenfibles aux yeux , lorfqu'on les condenfe avec de l'air moins ra- réfié (1); enfuite une plus grande quantité d'air les difpeife, il ne s’en fuit pas que ces vapeurs foient converties en air. Je crois bien que l'alkali fixe peut devenir volatil, &c. &c. SCC enfin j'ajoute foi à la variété infinie des tranfmutations de fubftan- ces réfultantes des diverfes proportions des élémens, mais je ne crois point à la tranfmuration des élémens , & je perfifte aux raifons al- léguées dans le Livre intitulé : 4 Philofophe Jans prétention ; page 223 à 228, Croyez, Monfieur , que je n'en fuis pas moins admirateur de vos talens, Mon deffein n’eft pas de vous faire changer d'opinion. Vous avez expofé la vôtre : j'expofe la mienne. Préfentez-moi des preuves plus convaincantes , pour démontrer la converfion de l’air en eau, j'abjurerai mes principes. Au refte, en augmentant mes con noiffances , vous ne pourrez jamais augmenter l’eftime particulière, avec laquelle j'ai l'honneur d'être, &ec, "2 (tr) Dans l'expérience dont il eft ici queftion, c'eft auffi parce que les va- peurs nitreufes font extrêmement divifées & légères, qu'elles n'agiffent point fur la teinture de tournefol; mais à l’inftanc qu'elles deviennent plus condenfées , & par conféquent plus pefantes , elles font rougir cette teinture, SURCLHIST:, NATURELLE, ET LES ARTS, ss EU PASSAT + 17 Sur la poflibilité de divifer un Angle quelconque en trois parties égales, en ne faifant ufage que de la règle & du compas; - Par M. ROMAIN. OPÉRATION ET CONSTRUCTION. S 017 l'angle À BC, à divifer en trois parties égales (figure pre- mière). 1°. oppofez l'angle À BC au fommer; 2°. du fommer, comme centre & avec l'intervalle d’un rayon À B quelconque, dé- crivez la circonférence À D EC; 3°. divifez les deux angles op- pofés au fommert ABC & DBE, en deux parties égales , par une droite indéfinie MN; 4°. (figure 2 ) fur une des arêtes de la règle y y , en prenant de l’extrémité 4, rapportez le rayon A B de la première figure : marquez le point où aboutira la longueur de ce rayon , pour avoir ab=— rayon À B; 5°. (figure première ) pofez la règle yy fur le plan ; metrez fon extrémité 4 fur le point S, & qu'en mème-tems, l’arête a d foit fur le point E. Faires enfuite mou- voir la règle de telle forte que l'extrémité 4, gliffant le long de la ligne SM, l’arète a 4 foit toujour$ fur le point E; continuez ce mouvement jufqu'à ce que le point #, marqué à l’arêre de la règle, rencontre la circonférence ; pour lors , fans remuer la règle, tirez la fécante a E, du même point & de la ligne M N; tirez une au- tre fécanre a D , pareille à celle 4 E; 6°. tirez la corde D E &-des points O & R , par où les fécanres couperont la circonférence du cercle; tirez les deux diametres OT & RI, & la corde OR, les points O & R divifent l'angle À BC en trois parties égales , ce qu'il faut démontrer. D\É M'O NS" T RAT MI D IN Les triangles D4E, O2R & OBR, font ifocèles. Le pre- mier eft ifocèle, parce que la ligne 4 ? eft perpendiculaire au mi- lieu de la corde DE, & que l'on à Da=4E. Les deux autres s6 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, le font aufli, en ce que les points O & R font deux points fem- blablement placés par rapport à la perpendiculaire az, & que l’on a Oa—Ra, & O B—R B. Ces trois triangles font de plus fem- blables. Le triangle D4E, eft femblable au triangle O2 R ; car Oz étant égal à Ra, la bafe OR de l’un elt parallèle à la bafe DE de l’autre. Les deux triangles O2 R & OBR, font aufli fembla- bles, ayant O B pour bafe commune , & leurs quatre côtés égaux entr'eux par conftruction. Les triangles D2E, OaR & OBR, font donc ifocèles & fembiables. De-là, avec une légère attention, l’on verra que les deux anglesaOR & aRO=— l'angle aOB, & conféquemment que l'angle Oz R, fupplément de la fomme des deux premiers , eft égal à l'angle DO B, fupplément du dernier. Par une raifon pareille, l’angle BR E fera démontré égal à l'angle OR. De l'égalité de ces trois angles DOB, OR & BRE, il s’en fuit que O B, prolongé jufques en T, eft parallèle à la ligne aR, prolongée jufques en E, & que RB, prolongé jufques en, eft parallèle à la ligne 4 O , prolongée jufques en D. Par la propriété des cordes parallèles , l'arc O R eft égal à l'arc TE & à l'arc DI; donc DIT E; mais le mème arc OR=larcIT, comme fer- vant de mefure à deux angles oppofés au fommet qui eft au cen- tre d’un cercle. Lesarces DI,TI,TE, étant par-là démontrés égaux, les angles DBI,IBT&TBE, auxquels lefdics arcs fervent de me- fure » font aufli démontrés égaux. Donc leurs trois angles oppofés au fommet ABO, OBR & R BC, font égaux C. Q.F. D. LS CT Un SBOSE Adrefée à l'Auteur de ce Recueil, par M. MAUPETIT, Prieur de Caffan, fur La petite Wérole. Mes , la petite vérole eft un fléau pour l’humanité que l’on cherche depuis long-tems à rendre fupportable. Les maux dont elle nous afflige , font irréparables ; les familles font dévaftées, les pères défolés, l'Etat dépeuplé, par certe maladie : & ceux qui n'ont point éprouvé fa fureur, font dans des inquiétudes continuelles , jufqu'à ce qu’elles aient payé le tribut, que l’on regarde prefque comme inévitable. L'inoculation a diminué le danger; mais elle marche encore dans les fentiers de l'erreur. Point de fil conduéteur dans ce labyrinthe; po de principe qui ferve de bafe à la conduite des Inoculateurs. ur quel fondement , par exemple, ont-ils pu fe perfuader qu'il éroit - + SUR L'HIST. NATURELLE ET LES ARTS. 57 étoit avantageux d’infinuer le poifon dans les veines d’un enfant? Dans quels abymes d'inconféquences , n'eft on pas tombé par le fuc- cès de l'inoculation ? N'avons-nous pas vu un Auteur diftingué par fes connoiffances , croire l'inocularion de la pelte avantageufe pour en diminuer le danger ? L’inoculation de la maladie épifootique , a-t-elle eu d’autre effet que de hâter la mort des beftiaux fur lef- quels on a fait ces expériences ? Au refte, mon but n’eft point de diminuer le volume des liftes que les Inoculateurs ont fournies , des perfonnes qu’ils avoient pré- fervées des dangers de la petite vérole par le moyen de l'inocula- tion, Ils ont fu s'élever au-deflus des préjugés reçus, & le Public leur en doit un tribut de reconnoiffance. Mon intention eft de faire voir, 1°. que dans le traitement de la petite vérole naturelle, l’on prend le contre-pied de ce que l’on devroit faire. 2°. De prouver que le traitement des Inoculateurs, quoique bon, eft défectueux. Pour atteindre à mon premier objet, comparons les deux petites véroles ; il en réfultera qu’elles font de mème nature (la preuve eft facile). Les Inoculateurs trempent , communément, le fil qui doit fervir à l’inoculation , dans des boutons de petite vérole naturelle : donc elle doit être de même nature ; puifqu’elles font occafionnées par le mème venin : donc elles doivent être gué- ries par les mêmes remèdes : donc l’on fe trompe dans le traitement de l’une des deux. L’on réuflit mieux par le traitement des Inocu- lateurs : celui-ci doit donc être préféré pour guérir la petite vé- role naturelle : or , le traitement des Inoculateurs , eft diamétra- lement oppofé au traitement ordinaire de la petite vérole natu- relle ; donc l’on prend le contre-pied , de ce que l’on devroit faire, dans le traitement de la petite vérole naturelle. Pour confirmer ma preuve, je pourrois ajouter, que j'ai vu, dans un de vos Journaux, que je lis avec le plus grand plaifir , des ex- périences mulripliées , qui prouvent que les animaux ne peuvent vivre dans un air qu'ils ont refpiré ; vous parlez des animaux en fanté’, à plus forte raifon en maladie: donc un malade dans une chambre bien fermée, doit y périr s’il y refte long-rems ; bien plus encore , fi la maladie eit contagieufe : en eft-il beaucoup de plus contagieufe que la petite vérole ? donc le malade ne doit point être enfermé ; donc le traitement ordinaire de la petite vérole na- turelle eft mauvais. Ce que je confirmerai , en prouvant que le trai- tement des Inoculateurs, quoique bon, eft défectueux. Pour ne laiffer aucune équivoque , fur ce que j'entends par /e rrai- tement ufité dans la petite vérole, & par Le traitement des Inoculateurs, il eft néceffaire de prévenir , que par le premier, j'entends, la cou- Tome VIII, Part. II, 1776. H 48 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, tume ordinaire de tenir chaudement les malades ; de les priver de nourriture ; d'empêcher , pour ainfi dire, l'air extérieur de péné- trer dans la chambre du malade , fans néanmoins condamner l’ufage de leur donner quelques gouttes de vin, & autres cordiaux. Les médecines & autres remèdes femblables, font au moins prouvés inu- tiles, par le fuccès de l'inoculation , dans laquelle ils en font dif- penfés : par Ze traitement des Inoculateurs , ÿ'entends celui qui laiffe ref pirer le malade en plein air, le laïffe manger , & ne lui donne pref- que d’autre remède , que des rafraichiffans , tant intérieurs qu’exté- rieurs. Ne foyez point furpris que je ne faffe aucune mention , des pré- parations qui précèdent linoculation: je pourrois citer plufieurs ha- biles Médecins, qui traitent ces préparations d’inutiles : & feu M. le Profeffeur Venel, ne craignir point d’inoculer les deux enfans de M. le Marquis de Bermond , fans préparation. Jen ai vu inoculer plufieurs fans préparation ; pas un d’eux n'a été plus malade que les : RES Se mieux préparés. L'on peut réduire à quatre articles principaux le traitement des Jnoculareurs. Le premier eft la nourriture qu'on ne leur refufe pas. Le fecond eft l'air libre qu'on leur laiffe refpirer. Le troifième , les rafraichiflemens extérieurs , tels que les bains frais, & l'air frais auquel l’on expofe le malade. Le quatrième, les rafraîchiffemens intérieurs , tels que la limonade, même à la glace , l’eau froide, &c. Il eft inconteftable , que la nourriture , fur-tout, pouf un enfant, eft abfolument néceflaire. Il n’eft point de maladie plus dangereufe, far-tout , pour les enfans, que la faim; il en eft nombre qui périf- fent de cette maladie, particulièrement dans la petite vérole. Com- bien de fois, des Gardes-Malades , attendries par les plaintes réi- térées de ceux qui étoient confiés à leurs foins , leur ont donné clandeftinement à manger , fans qu’il en foit arrivé d’autres accidens,; que de les empêcher de mourir de faim. Ajoutez à cela que la na- ture, dans la petite vérole , doit jetrer au dehors l’humeur vario- lique, & a befoin de toutes fes forces. Pour être convaincu de la bonté da fecond article, il ne faut que faire attention, que l'air que nous refpirons fe:charge dans la poi- trine , d’humeurs qui feroient nuifbles, fi elles n'étoient point em- portées par l’air que nous rejettons : donc il ne faut pas les y réat- tirer : donc il faut refpirer un air toujours nouveau : donc les Ino- culateurs ont raifon de faire refpirer un air libre à leurs malades. Il ne me refte donc à prouver que deux propofitions. La première eft que les rafraîchiffans extérieurs fonc avantageux. SUR L'HIST. NATURELLE ET LES ARTS. 59 La feconde , que les rafraichiffans intérieurs font nuifibles. Pour prouver ma première propolition , j'écablis comme fondé fur l'expérience la plus conftante, 1°. Que dans toutes les petites véroles, fi le malade eft tenu chaudement dans un lit, il fera plus chargé de boutons varioliques fur les parties de fon corps qui auront été les plus découvertes ; le vifage & les mains font les plus affectés. 2°, Que les parties les moins couvertes font les moins échauffées ou les plus froides. 3°. Que fi vous appliquez, fur les parties charnues de l'enfant , de l’eau fraîche , c’eft-à-dire , de l’eau moins chaude que le corps de l'enfant , vous y attirerez de très-oros boutons varioliques. J'ai fait faire cette expérience; les boutons étoient de la groffeur du pouce, Il eft facile de la réitérer; il ne peut en arriver aucun accident. Je demande , fans craindre un refus, que l’on m’accorde que le but de tout Médecin, qui traite la petite vérole, eft d'attirer à l’exré- rieur le venin, ou humeur variolique. Donc, felon la première pro- poñtion , il faut découvrir : donc , felon la feconde & troilième , l’on doit rafraîchir extérieurement : donc , les Médecins qui rafraïchiffent extérieurement ont raifon. Il eft pour lors évident, que les rafraîchiffans attirent le venin (1): donc les rafraichiffans intérieurs, attireront le venin à l’intérieur: donc ils feront nuilibles, puifque le but qu'on fe propofe eft d’at- tirer le venin à l'extérieur: donc le traitement de l’inoculation , quoi- que bon , eft défectueux. Il s'en fuit, fi je ne me trompe, 1°. Que la petite vérole naturelle & inoculée, font de même nature. 2°. Quelles doivent être guéries par les mêmes remèdes. 3°. Que l'inoculation ne diminue pas le danger de la petite vé- role (2). RSR (1) Lorfque je dis que les raffraichiffans extérieurs attirent le venin, je ne prérends pas parler avec l'exactitude que l'on exige d'un Philofophe , j'exprime . les apparences , comme quand l'on dit , le foleil tourne, fe lève , fe couche , quoique l'on foit perfuadé que le feul mouvement de la terre foir la caufe de ces phénomènes. IL feroic trop long d'expliquer la caufe phyfique qui porte l'humeur variolique à l'extérieur, lorfqu'il eft frappé d'air frais ou d'eau fraîche ; il me fufc que cette éruption ne manque jamais dans les circonftances indiquées. (2) M: de Plos , de Roujean , village fitué dans nos environs, ayant fait inoculer H 2 60 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, 4°. Que l’on n’eft redevable des fuccès de l’inoculation, qu’au traitement qui eft diamétralement oppofé à celui de la petite vérole naturelle. 5°. Que les rafraîchiffemens extérieurs font bons pout les deux pe- tites véroles (1). 6°. Que les rafraîchiffans intérieurs font nuifibles dans l’une & dans l’autre. 7° Qu'il faut couvrir les parties du corps qu'on veut garantir des boutons. Lorfque le malade va au grand air, un voile fur le vifage eft néceffaire. Vous ferez fans doute furpris, Monfieur , qu’un Eccléfiaftique , fans ètre aggrégé à aucune Faculté de Médecine, ait ofé entreprendre de donner une méthode pour traiter la petite vérole. Les ravages énor- mes qu'elle fait dans le Languedoc, m'ont déterminé à examiner de près cette maladie, & à chercher les moyens les plus efficaces, finon pour en préferver, du moins pour la guérir plus facilement. La raïfon eft de tous les états & de toutes les Sciences; je me fuis appliqué à la préfenter , d’une manière qui foit à portée de tout le monde ; fi j'ai réufli, la farisfaction d'être utile au Public fera pour moi une récompenfe plus fatteufe que tous Les tréfors. Je fuis, &c. D un de fes enfans , Madame de Plos , épouvantée de le voir tourmenté d'une groffe fièvre, craignit pour fes jours, & rien ne fut capable d'empêcher cette mere ten- dre de tenir chaudement fon enfant; il a été couvert d’une feule croûte de Ja rète aux pieds; il s'en eft peu fallu qu'il n’en foit mort. (1) Un enfant de M. Caron, Négociant à Lyon, attaqué de Ja petite vérole paturelle, fut traité par un Médecin, felon les règles ordinaires; les remèdes fu- rent inutiles ; l'enfant fut affez mal pour que la maladie fût jugée mortelle ; le Médecin l’abandonna ; l'enfant fut tranfporté dans une autre chambre , tant pour le changer que pour lui faire refpirer un bon air; l'enfant fe trouva mieux ; on réitéra les changemens de lit & de chambre; il fe promenoit au bout de trois jours. Un Domeftique de M. Lavit de Magalas éroit trèsmal; pendant qu'on avoit envoyé chercher M. Mazart , Médecin, le malade fe baigna dans une marre; lorfque le Médecin arriva, le malade étoit hors de danger; la petite vérole naturelle étoit totalement fortie. Ii feroit facile de citer une infinité d'exemples de cette efpèce, pour confir- mer combien il eft dangereux de tenir chaudement les enfans attaqués de la pe- tite vérole. Au refte, lorfque je dis que les raffraîchiflans extérieurs font bons & effentiels dans l’une & l'autre petite vérole, je ne parle que des raffraîchiffans modérés ; les bains font d’un grand fecours, mais il eft bien dangereux de les donner trop froids. Je connois des Médecins qui ont plongé leurs malades dans l'eau qui fortoit du puits; une grande fraîcheur doit occafionner une trop fubite & trop grande révolution. SUR L'HIST. NATURELLE ET LES ARTS. 61 RARES PR EME TEO MN: S Sur l’ufage de l’Algalie dans les veflies malades, fur les inconvéniens qui en réfultent, & les moyens d’y re- médier; Par M. NAV1ER, Doëteur en Médecine, | A velie eft un vifcère d’un ufage précieux & indifpenfable dans l'économie animale, pour l'entretien de la fanté & la confervation de la vie. Mais aufli ce mufcle creux eft fujert à une infinité de maladies. Il eft mème étonnant qu'érant deftiné à recevoir perpé- tuellement un liquide âcre & falin , il puifle fe conferver auf Jong-tems dans un état d’intéorité. En effet, l’urine, dont la veffe eft fans cefle abbreuvée & fouvent remplie, eft chargée d’un fel muriatique & ammoniacal, que la nature a expulfé de la mafle des liquides deftinés à l'entretien de la vie. Si l'urine eft chargée d’une trop grande quantité de ces parties falines, elle follicite fortement la partie mufculeufe & membraneufe de la veflie, afin de s’en débarraller. Si l’irritation eft trop grande , elle y attire une inflam- mation plus ou moins forte ; enfin, une fuppreflion de l'urine, & fouvent une fuppuration, qui oblige de recourir à la fonde nom- mée algalie , pour procurer l'évacuation de l’urine, que les plus grands efforts ne peuvent expulfer. D’autres fois, l’urine ayant été retenue trop long-tems dans la veflie, par telle caufe que ce foir, ce vifcère perd fon reflort, & ne pouvant plus vaincre la réfiftance du fphinéter, il s’emplit de plus en plus, jufqu'à ce que, forcé de recourir à la fonde algalie, on l'ait délivré de la furcharge de fon urine. Dans l’une ou l’autre de ces circonftances, on eft quel- quefois forcé de laifler la fonde pendant bien du tems; & fi on la retire, ce n'eft fouvent que pour la nettoyer & la remettre quel. ques heures après. La fonde flexible que l’on à imaginée , a trop d’inconvéniens pour nous y arrêter. Or, dans de telles circonftances, il refte toujours dans la veflie une certaine quantité d'urine, foit faine, foit fanguinolente , foit purulente , foit fanieufe , felon la nature de la caufe qui produit la fupprefion d'urine. Si l’urine eft faine, c’eft le cas où il y a le moins d’inconvénient; encore peut-il arriver, par un long & ha- 62 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, bituel féjour , qu'il fe forme, dans le fond de la vefie , quelque dépôt pierreux fufceprible d’accroiffemenr. S'il y refte du fang , 1ly fera, à la vérité, lavé par l'urine ; mais il y peut refter, après les lotions de la partie rouge , beaucoup de cette fubftance albuminée & filandreufe, qui, fe durciffant de plus en plus , formeroit dans la veflie un corps chanveux, qui ne pourroit plus en fortir que par la pourrirure de cette même fubftance, & qui pourroir alors , par la qualité feptique qu’elle acquerreroit , attirer fur la veflie de grands accidens. Il pourroit même fe former fur les filets de cette fub£ rance encore dure , des incruftations pierreufes & des efpèces de Iytophites, dont on prévoit tour Le danger. Si la veflie eft tombée en fuppuration, il eft évident que le pus 8&z la fanie occuperont le bas de la veflie , & qu'ils n’en pourront fortir totalement, même en preffant le corps de la vefie, lorf- qu'on en fera fortir l’urine par l’algalie, parce que cette fonde , qui n’eft ouverte qu'à fon extrémité obtufe par deux fentes latérales, ne préfente aucune ifue au fluide contenu dans le bas de la veñlie. La courbe de cet inftrument , indifpenfablement néceffaire pour fa- ciliter fon introduétion dans les veflies des hommes, occupe la par- tie inférieure de ce vifcère creux , tandis que le bout, deftiné par fes fentes à laiffer couler le fluide , eft toujours élevé en l'air, & touche à la partie fupérieure de la veflie. Cela une fois connu & avoué , il eft difficile de comprendre ce qui peut avoir empèché, jufqu'à préfent, de fe fervir de fonde, dont toute la courbure fût percée d’une infinité de trous pratiqués , cependant alternativement & de manière à ne pas affoiblir le corps cylindrique de l’algalie. Ces trous, quoique capillaires, fourniroient autant d'iffues à tout le liquide contenu dans la veflie, jufques dans fa partie la plus ca- vée & la plus déclive; & s'il arrivoic que celui qui feroit dans les parties baffes, fût un peu limoneux , on feroit remuer le ma- lade, afin de mêler ce fond avec tout le liquide urineux, ou on y feroir une injection déterfive , ou fimplement aqueufe ; enforte ue le moyen bien fimple que nous propofons , préviendroit in« failliblement les accidens graves auxquels font expofés les malades qui font forcés de porter la fonde pendant des mois entiers, quel- quefois des années. Ce que nous propofons ici n’a point échappé aux vues fages & lumineufes de l'Ecole de Paris. M. Boury y a foutenu, le 14 Mars 1766, une Thèfe, préfidée par M. l'Epy, dans laquelle il fait voir l'utilité des Algalies qui feroient percées de deux trous à l'endroit le plus déclive de la courbure de la fonde , au lieu de l’être à l’ex- trémité. An fatiüs it cathæterem in mediä fuæ curvaturæ parte forami- aulo utrinque pertundi quam verfus apicem , & conclut pour l'affirmative. 4%? tai Me SUR L'HIST. NATURELLE ET LES ARTS. 6; Nous penfons donc qu’il y auroit un grand avantage à fe fervir de ondes ainf percées, non-feulement de deux trous, mais de plu- fieurs autres, parce que ce feroit un moyen de vuider plus prompte- ment & plus complètement l'urine contenue dans la vefhe. Il fe préfente encore un autre inconvénient dans l’ufage des fon- des algalies. Lorfquerles malades font obligés de les porter habituel- lement, comme cela arrive à nombre de vieillards, donc le corps -de la veñie À perdu fon reflorr, tandis que le mufcle- fphinéter , doué de plus de force, ne permet point à l'urine d'en fortir, ou lorfque la vellie eft devenue dure , épaifle , variqueufe, &c.; alors, comme on eft contraint d'y l’aifler la fonde , on la tient bouchée avec du liège pour la déboucher en tems & lieu, afin d’en laiffer fortir l'urine. Mais il arrive fouvent que le malade à des envies fréquentes d’uriner très-urgentes, fuivies de douleurs aiguës , fi on ne débouche promptement la fonde; ce qui lui devient fotr à charge & à ceux qui ont foin de lui, fur-tout l’hiver; car on eft obligé de le découvrir quelquefois à chaque demi-heure, & de l'expofer à fe refroidir & à s’enrhumer, &c. Un moyen fimple pour éviter ces embarraffants & dangereux inconvéniens , feroit d'adapter un tuyau de métal au bout extérne de l’algalie ; où y feroit fouder un rebord en forme de bourlet garni de trois où quatre peaux de ville , pour y attacher, par le moyen d’un écrou , un des bouts d'un tuyau Aexible, qui auroit plus ou moins de longueur, tandis que l’autre bout tomberoit dans un urinal ou dans un pot-de-cham- bre ; enforte que l’urine s’échapperoit & romberoit continuellement, & goutre-à-goutte , de la veflie , ce qui éviteroit au malade les dou- leurs que la retenue de l'urine lui caufe fi fouvent, & les autres inconvéniens dont nous venons de parler. Tel eft le précis des ré- flexions que nous ont donné lieu de faire les plaintes des malades qui fe trouvoient réduits à la dure néceflité de porter habituelle- ment ces fortes d’inftrumens incommodes. Le 5 @ CS 64 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, DIS SE RIT) ART TON Sur ce que les hommes peuvent voir les mêmes objets fous des couleurs différentes, & fur ce qui en doit réfulter par rapport aux Peintres, Par M, l'Abbé DICQUEMARE, Profeffeur de Phyfique & d'Hif- toire Naturelle ; de plufieurs Académies Royales des Sciences, des Belles- Lesres G& des Arts , Gc, &c. À L'afpe& des tableaux & autres ouvrages des plus grands Co- loriftes , on remarque une différence fi confidérable dans le ton gé- néral qui y règne, qu'on feroit porté à croire qu'ils voient la na- ture différemment. On fait qu’elle n'eft pas la même par-tout , & que les climats & les mœurs y caufenc des altérations fenfibles : mais ce ne doit pas être le principe de cette variété de tons qu'on remarque dans les tableaux des plus grands Maîtres, fouvent d’une même école. Faut-il donc croire que ces Peintres ont vu la nature d’une couleur différente, à raifon de la différence qui peur s'être trouvée dans leurs ouvrages? & en ladmerttant, doit-on en con- clure que cela ait pu influer fur le ton général de couleur qui rè- ne dans leurs tableaux ? En fuppofant le principe de la fenfarion abfolument égal dans tous les individus, fi les organes font diffé- rens, la fenfation doit l'être. Dans cette fuppoftion , l'organe étant plus ou moins affecté , à raifon, non de l’intenfité de l’objet, mais eu cgard au degré de force de cet ergane, il s’en fuivra une fen- fation plus où moins forte, plus ou moins agréable. Tel degré de lamière, par exemple, réjouira des yeux & en incommodera d’au- tres : telle couleur fera vue avec plaifir de l’un , qui déplaira à l'autre : il y a plus, fi par quelque vice de conformation, par quel- que maladie, les humeurs ou les tuniques de l'œil font teintes dif- féremment, la couleur des cbjets paroïîtra différente , c'eftt-à-dire, qu'ayant les humeurs de l’œil un peu jaunes , ou la conjonctive , comme il arrive dans la jaunifle , on verra jaunes les objets blancs, & verds les objets bleus. Ces mêmes objets bleus, paroîtroient violers à celui qui auroit les humeurs de l'œil teintes en rouge, & il verroit rouge les objets blancs. On pourroit aufli, par quelque iritation , par quelque difpoñtion vicieufe de la rétine, de la choroïde, SUR L'HIST. NATURELLE ET LES ARTS. 6 choroïde , ou des autres tuniques de l'œil, qui font une expanfon du nerf optique. & de fes gaines, voir des couleurs qui n’auroient pour caufe ni celles des objets, ni celles des humeurs de l'œil , comme il arrive dans certains cas. Ces différentes manières de voir ; n'en doivent mettre aucune dans le langage , parce que les noms ne font que de convention. Tel verroit le firmament rouge, à caufe de la nature de fon or- gane , & diroit, comme les autres , qu'il eft bleu-célefte , parce que dès l'enfance, 1l a entendu nommer bleu-célefte , la couleur fous laquelle il appercevoir le firmament. Il eft donc vraifemblable que les hommes ayant des différences dans leurs organes , doivent être différemment affectés , fans qu'on puifle s'en appercevoir par leur converfation , & fans qu'ils s’en apperçoivent eux-mêmes, rien en cela ne leur étant nouveau : mais s'enfuit-il de tout ceci, qu'un Peintre qui auroit les humeurs de l'œil teintes en rouge, & un autre qui les auroit teintes en bleu , fiflent des tableaux où ces cou- leurs domineroient ? c’eft ce que je ne fuis pas porté à croire. Qu'ar- riveroit-il à ce Peintre quiverroit rouge ? Juftement ce qu'éprou- veroit celui qui, ayant un organe bien conftitué , fe ferviroit de lunettes rouges, & oublieroit abfolument qu’il eût jamais vu d’une autre manière : or, dans ce cas, un tel homme verroit non-feu- lement rouge les couleurs naturelles, mais il verroit de même les couleurs artificielles, c’eft-à-dire, cellés qui font fur fa palerte ; le linge, la neige, fous une lumière ordinaire, & eu égard feulement à leur couleur propre , lui paroîtroient d’un rouge de blanc de plomb ; il emploieroir du blanc de plomb pour les imiter, & fe- roit une couleur tout-à-faic femblable à celle qu'auroit choili celui dont l'organe feroit. fans défaur. De même, l’Artifte qui auroit les humeurs de l'œil teintes en bleu, ou des lunettes bleues avec un organe parfait, verroit un objet jaune, d’un verd de jaune de Naples, de maflicot , de gomme-gurte , ou autre couleur jaune que fon genre de peinture lui permertroit d'employer, & imiteroit la nature à nos yeux Comme aux fiens, Il pourroit même, comme les autres Peintres, porter la magie de fon art jufqu'à procurer à fes couleurs artificielles, l'éclat des naturelles » par ces oppolitions qui donnent aux couleurs une beauré qui n’eft point en elles, & qui leur vient de la comparaifon qu’en fait le fpeétateur fans s’en appercevoir ; çar 1l ne faut pas croire que les combinaifons & les mélanges que feroit ce Peintre , fuffent, par cette raifon , différentes de ceux des autres. Ce qui lui arrive à l'égard des couleurs primitives, ou les plus fimples, ne manqueroit pas de lui arriver pour toutes les tein- res qu'il auroir à faire. + On pourroit, en regardant à travers un verre rouge, penfer, Tome VIII, Part. II. 1776. I 66: ‘OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, au premier coup-d’œil, que celui qui auroit les humeurs de l'œil teintes en rouge, ne difcerneroit pas aifément les couleurs léoères, comme le gris perlé, le bleu pâle, le verd rendre : mais il faut fe reffouvenir que la teinte des humeurs de l'œil ne peut être que foible, & que la longue habitude donne lieu d’appercevoir des dif- férences peu fenfbles qui ne frappent pas dans les premiers rems. Unenfant ne raifonne pas fur les couleurs & fur les corps éloignés comme. un homme, parce que les objers lui font nouveaux, & qu'il n'a pas eu occafion d'exercer fon jugement fur ces objets. Un homme ordinaire prend volontiers pour une barque, un vaiffeau qui paroît à l'horizon, que diftinguera fort bien un Navigateur , & un Peintre qui voit les couleurs d'un œil exercé, en faific les différens rapports beaucoup mieux que ceux qui s’en occupent moins. Tout cela eft le fruit de l'habitude -où l’on eft de raifonner avec les objets. IL en eft de mème de celui qui auroit les humeurs de l'œil teintes; il diftingueroit, malgré ce défaut, des différences léoères que nous n'appercevons pas avec un verre coloré, quelque foible qu’en foir la teinte , parce que cette manière de voir nous eft nouvelle. Il eft donc certain, qu’un Peintre qui verroit rouge, ne feroit pas pour cela des tableaux plus rouges qu’un autre. L’intenfité de la lumière, diminuée par des humeurs teintes, n'influeroit peut-être pas même autant fur les tableaux, qu’on feroit d’abord tenté de le croire, parce que cette diminution feroir peu confidérable , & parce que la vivacité des couleurs artificielles feroit diminuée en proportion. Le Peintre employeroit, fans s’en appercevoir , des cou- leurs plus vives pour imiter des objets plus vifs ; rout deviendroit égal, pourvu qu'il eût eu toujours la mème vue. Il n’en feroit pas de cet Artifte comme des deux autres qui au- roient, lun la vue fort courte, l’autre la vue très-perçante ; leurs tableaux feroient différens , parce que les objets éloignés dans la na- ture , ne fe rapprochent pas de l’œil miope comme les couleurs ar- tificielles, on comime les différens plans d’un tableau qui eft tou- jours une fuperficie plate. N’y a-t-il donc aucune différence: dans les organes qui puiflé influer fur le ton général des tableaux !'Je ne fais; mais affurément ce ne doit pas être celle de voir d’une cou- leur différente , à moins que cet effet n'ait pour caufe limagina- tion. J'ai peint d’abord le payfage; alors, en me promenant avec ce- lui qui m'enfeignoit , il me faifoit remarquer que tout tenoit du verd dans la nature ; peu après il voyoit tout gris ou tout bleu; enfuite, tout lui paroïffoit doré; & ce qu’il y a de remarquable, où je voyois comme lui, ou je me faifois des fyflèmes à-peu-près femblables , fans changer de faifon fou même d'heure du jour, ce qui eût naturellement occafonué une différence réelle dans le ton SUR L'HIST. NATURELLE ET LES ARTS. 67 de la nature ; nous la voyions comme nous imaginions qu’elle étoit. Quel danger pour un jeune Arrifte ; voilà comme on peut voir rouge ou bleu , & alors ( je n'en puis douter ) ce fyftème de co- loris paffe récllement dans les ouvrages. Ce qui nous jettoit dans l'erreur , c'eft que nous étions frappés de l’union que donnent aux objets la couleur de la lumière qui les éclaire, celles qui fe réfé- chiffent réciproquement , la douceur des couleurs rompues dans les demi- teintes, & la privation de couleurs dans les ombres. Nous n'avions pas la force de réduire cela en principes, & de le diftin- guer de la couleur propre des objets. Nous ne faifions pas non plus affez d'attention aux phénomènes de.la vifon, & principalement à l'accord que prennent entr'eux les objets qui ne fe trouvent point dans la direction de l'axe de l'œil ou du rayon vifuel. Ainf, frap- pés d’un effet, fans pouvoir remonter jufqu'aux caufes qui le pro- duifoient, nous rampions dans une carrière où l’on eût pu courir; nous fortions d'un précipice pour nous jeter dans un autre; nos ouvrages ne nous préfentoient plus , au bout de vingt-quatre heures, ce qu'ils nous paroifloient en les faifant; l'imagination avoit en ceci beaucoup de part, puifqu'il eft vraifemblable que l'état des organes de deux individus, ne changeoiïit pas fenfiblement & de la même manière d’un inftant à l’autre. C’eft donc plus par l’imagination que par l'organe de la vue, qu’il eft dangereux à un Peintre de voir rouge ou bleu , danger dont ne feroit pas exempt celui dont les humeurs de l'œil feroient teintes en verd , en jaune |; &c. C'eft donc à l'imagination des Peintres, plutôt qu'à la différence de leurs organes, qu'on doit rapporter le ton général de couleur qui règne dans leurs tableaux. Dans ceux des grands Maîtres , ce ton général fi différent n’en eft pas moins le ton de la nature , par l’harmo- nieufe intelligence qui réfulte de la conduite des tons & des tein- tes qui fe rapportent à cette couleur générale à-peu-près comme chaque grouppe fe rapporte au tout enfemble, & cela tient même à d’autres beautés qui nous méneroient trop loin, fur lefquelles les Maîtres de l’art ne fe font point mépris. On ne doit donc pas regarder comme des défauts ce qui fait l'objet de l'admiration des Amateurs & des Arriftes, ni penfer que ces grands Maîtres voyoient même par l'imagination, la nature d'une couleur qu’elle n’avoit pas. On doit leur favoir gré au con- traire de nous avoir fait appercevoir qu'il faut avoir égard au jour qui l’éclaire, au climat, à la convenance du fujer, &c. &c., & conclure que la contradiction qu’on croiroit remarquer dans leurs tableaux, n’eft qu’apparente. L'art peut, fans doute ; avoir fes bornes & fes difficultés, qu'aucun d'eux n'a pu vaincre, & par cela même on ne pourroit les blâmer de n'avoir pas faifi le vrai ton de la Le 63 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, nature , quand on fuppoferoit qu'ils auroient tourné autour, fans être affez heureux pour le bien rendre. Mais feroit-il bien vrai que la nature eût un ton abfolu qui doit fe remarquer dans les pro- duétions de l’art qui limite de plus près? Aflurément, je ne le crois pas. Je penfe que le vrai ton de la nature réfide dans cette harmonieufe intelligence qui féduit dans les ouvrages des plus grands Coloriftes, & que le danger de voir rouge ou bleu, n’exifte que pour les Peintres qui n’ont pas aflez médité fur les principes de l'Art. DB Et OT LPS TP RO MENT Sur un accident fingulier occafionné par un coup de. 7 Soleil. Par MS CRHIAUNIGRENDIERS NT Ep ***, Porte- Manteau de Louis XV, éprouva, il y a une quinzaine d'années , un accident fingulier que l’on n’a recueilli nulle part; mais qui mérite place à côté de plufeurs autres phé- nomènes, dont la réunion pourra , par la fuite, reculer prodigieu- fement les bornes de la Phyfologie. Cette perfonne étoit à la chaffe un jour d'été, à la fuite du Roi; elle fut expofée long-tems au foleil & frappée d’un coup de fo- leil; au bout de quelques minutes, elle ôte fon chapeau & trouve, avec étonnement, qu'une grande quantité de cheveux fe détachoient de fa tête. Le lendemain , lorfque M. * * * fe leva , il étoit abfolument chauve; fes fourcils , fa barbe, & tous les poils de fon corps , éroiens rom- bés. Il n’a pas eu d’autre mal. LUN PUS) LA A SUR L'HIST. NATURELLE ET LES ARTS. 65 nee mue me see ÉVPSF EE TeS'U:-P:P:O S$SÉ De l’ébullition fur l’eau qu’on veut glacer plus promptement, vérifié par des expériences; Par M. J. BLACK, Profeffeur de Chymie & Edimbourg. L'usver dernier, uñ jour qui étoit très-froid & très-calme, je fis bouillir, pendant quatre heures, de l’eau dans une théyère. Après l'ébullition , j'en remplis une bouteille de Florence à laquelle j'ap- pliquai d’abord de la neige, jufqu’à ce que la liqueur fe fût refroidie au 48° du thermomètre de Fahrenheir, qui étoit l4 température d’une certaine quantité d’eau non bouillie, renférmée dans mon laboratoire. J'en mis alors féparément , quatre onces de l’une & de l’autre dans deux tafles à thé, égales, que j’expofai au vent du Nord, fur une fenêtre , où le thermomètre marquoit 29°. Le réfultar fur que l’eau bouillie fe glaça la première, ce qui arriva toutes les fois que je réi- térai l’expérience, même neuf heures après avoir verfé la liqueur de la théyère. La longueur du rems is chaque eau employa avant de commencer à fe prendre , fut différente dans les diverfes expé- riences. Une caufe de cette variété dépendoit de la température de Fair , qui étoit devenu plus froid l’après-midi, & avoir fair defcen- dre le thermomètre à 25°, mais il y en avoit une autre, que j’at- tribue à l'agitation de l’eau : car l’eau non bouillie fe glaçoir auffi-tôt, ou prefque aufli-tôt , que celle qui avoit fubi l’aétion du feu, fi jé la remuais léoèrement de tems a autre avec mon cure-dent. Dans une de ces expériences , ayant vilité mes tafles après une heure d’ex- pofition à l'air, & voyant de la glace fur l’eau bouillie, tandis qu'il n'y en avoit pas fur l’autre ;, je battis légèrement celle-ci avec mon cure-dent, & vis fe former tout de fuite, à fa furface , de fins pin- ceaux de glace, qui groflirent & fe mulriphèrent promptement , au point , qu'en une ou deux minutes , il y eut aurane de glace dans une taffe que dans l’autre. Dans le refte des expériences, l’eau non bouillie commença égalemént toujours la dernière à fe geler; mais une fois qu’elle commençoit, {a congélation alloit f vite , qu’en très peu de rems elle devenoit égale, ou prefque égale à celle qui éroit furvenue plus fucceflivement dans l’autte. L'opinion que je me fuis formée d’après ces expériences , eft que so OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, l'eau bouillie diffère de l’eau commune , en ce que celle-ci, expofée - tranquillement à‘un air plus froid de quelques degrés que le rerme de la glace, peut facilement fe refroidir à ce même degré, & refter néanmoins fluide tant qu’elle n'éprouvera pas d’agitation ; au lieu que l'eau bouillie ne peut garder fa Auidité dans ces circonf- tances : car étant refroidie au terme de la glace, fi nous tentons de la rendre plus froide , elle fe gèle tout de fuite en partie ; après quoi l’action continuée de l'air froid augmente , à chaque inftant, fa congélation , au point qu’elle ne forme plus qu'un monceau de glace avant d’être devenue aufli froide que l'air qui l’environne. Cette découverte nous apprend pourquoi les Indiens font obligés de faire bouillir: l’eau Ana veulent réduire en glace. Le plus grand froid qu'ils puiffent obtenir, par tous les moyens qu’ils employent, ne va probablement qu’au 31° ou au 30° du thermomètre de Fahren- heic. L'eau commune , non agitée, defcend facilement à ce degré de froid fans fe glacer; & s'ils n’avoient d’autres moyens de la rendre plus froide, elle refteroit long-tems fluide, pourvu qu’on ne l’agitât pas: les caufes réfrigérantes qui l'ont portée à ce terme, ont fait ce qu'elles pouvoient, & n'ont plus d’aétion à exercer fuc elle. Mais c'eft bien différent à l'égard de l’eau bouillie : quand les caufes réfrigérantes l'ont refroidie au 32°, leur premier effet con- fécutif eft d'y occafionner un commencement de congélation , qui continue enfuite, comme l'expérience le démontre à ce même de- gré ; car elle ne peut être rendue plus froide, tout autant qu'il en refte quelque partie confidérable non glacée ( 1 ). Les caufes réfrigé- rantes ne celfent dont d'agir fur elle, & changent fuceflivement le tout en glace, fi leur action eft affez long-tems continuée. Inftruit par l'expérience , qu’en agitant l’eau commune, nous hâ- tons fon commencement de congélation, c’eft-à-dire, que nous la rendons incapable de fe refroidir au-deffous du 32°, fans qu’elle fe glace ; l'unique différence , qui fe remarque entre elle & l'eau bouil- lie, quand on les expofe enfemble à un air calme & glacial, ne peut- elle pas confifter en ce que l’eau bouillie eft néceffairement foumife à l'action d'une caufe agitante , pendant tout le tems de fon expo- fition , tandis que l’autre n'éprouve rien de femblable ? L'eau qui bout long-tems, diffipe l'air qu’elle contient naturellement : dès que —— (1) Quand l’eau commune eft refroidie, dans un état de tranquillité, à plu- fieurs degrés au - deffous du terme de la glace , elle remonte fur-le- champ â à ce point, fi on l'agite de manière à y occafionner un commencement de cons gélation, SUR L'HIST. NATURELLE ET LES ARTS. ÿ: le refroidiflement arrive, elle l’attire, & l’abforbe de nouveau, juf- a ce qu’elle fe foit farurée de toute la quantité qu'ellé”"en pof- édoit auparavant. Or, à mefure que cer air s’y introduit , il occa- fionne une agitation ou un déplacement de fes molécules, qui, pour être invifñble , n’en eft peut-être pas moins capable de l'empêcher de fe refroidir au deffous du rermeide la glace, fans qu'elle com- mence à fe glacer, en conféquence de quoi, fa congélation doit furvenir dès qu'elle eft arrivée à-gerte wempératyre.Voicisun fair qui me paroït appuyer fortement cette théorie. Fahrenhek , seit ap- perçu le premier , que l'eau non agitée peut être refroidie de quel- ques deurés au-deffous du termé’de la glace, fans fe congeler. Mific cette découverte en effayanr de faire gelerade l'eau , qu'il avoit purgée de fon air. Pour venir à bout de fon deffein, il avoit mis de l’eau dans de petits globes de verre; qu'il fcella hermériquement , & expofa à une athmofphère glaciale , après Jés avoir purgés de leur air fur l'ébullition, & avec une machine pneumatique , il étoit fa- cile de voir que l’eau tardoit beaucoup plus à fe glacer qu'il ne s’y étoit attendu 3 lorfqu’ouvrant enfin un de fes globes, pout appligter un thermomètre à l'eau, ou pour examiner l’état où elle fettrouvoit , il apperçut qu’elle fe congela à l’inftant de l'introduction de Fair. Ïl caffa alors les autres globes , & la congélation de l’eau fé fir'aulis tôt. La conclufion, qu'on doit tirer de ces expériences de Fahrenheis ; fe montre affez d’elle mème : je crois qu’elles mettent hors dé doute la fuppoñirion que j'ai établie. Avant de me les rappeller, j'en mé- ditois quelques unes , dont les conféquences auroient pu fe trouver les mêmes; mais, le froid n'ayant eu qu'un jour de durée, je n'ai pu les éxécater, 7: OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, Fislisn te) do Rdiréertonh halte EF ST ITU DV EX PER TE NC°ETS Sur les Phofphores & les Couleurs prifmatiques qu’ils offrent dans l’obfcurité; Par M. B. WiLSON, Membre de la Société Royale de Londres, & . de l'Académie Royale d'Upfal. or dont nous offrons ici l'extrait, forme, en quelque forte, l’Hiftoire complette des Phofphores connus jufqu’à ce jour. Si M. Wilfon n'en a pas érendu beaucoup la famille, on ne doit pas Le lui imputer à blâme. L’ardeur avec laquelle il a embraffé ce fujer, dépofe qu'il n’a rien négligé pour y parvenir. Mais dans cha- que fcience, il eft un certain terme , au-delà duquel les progrès de- viennent néceffairement rares, parce qu’il refte peu d’objets à dé- couvrir. C’eft ainf que le célèbre Beccari de Bologne , qui a dé- friché la matière des phofphores , femble en même-tems l'avoir, pour ainf dire, épuifée, en démontrant qu'il n'eft prefque pas de corps qui, fous certaines conditions, ne puifle rentrer dans cette claffe. C'en étoit, fans doute, affez pour fa gloire : mais un phé- nomène qu'il n’a pas connu , & dont la découverte étoit réfervée à M. Wiljon, eft la propriété que les phofphores ont de répandre une lumière mêlée des couleurs prifmatiques. Nous avions, il eft vrai, quelques obfervations fur la lumière colorée des phofphores; mais elles étoient éparfes ou ignorces : & avant lui, perfonne n’a- voit fongé à en faire un objec eflentiel de fes recherches, tant on foupçonnoit peu qu’elle exiftât d’une manière fi générale. Cet principalement fur ces couleurs que roule le Mémoire de M. Wilfon, qui a pour bafe une nombreufe fuite d'expériences. À la fin de ce Mémoire, on trouve une traduction de ceux de Beccari fur le même fujer, publiés dans les Aétes.de Bologne , an- nées 1744— 1747. L'Auteur a jugé à propos de les aflocier au fien, parce que, dit-il, » l'Effai que je publie ici, étant en quelque » forte la fuite des crayaux de ce Savant , j'ai cru ne pouvoir pe aire SUR L'HIST. NATURELLE ET LES ARTS. 7; » faire que d’en donner une traduétion à la fin de mon Ouvrage. » [ls s'éclairciront mutuellement, & la matière en deviendra plus » intelligible «, On trouve au commencement une -fuire d’expériences , qui ne font, à ftriétement parler, que la répétition de celles de Beccari , mais extrèmement variées, & enrichies d’une foule d’obfervations très intéreffantes , qui avoient échappé au Profeffeur de Bologne. Telle eft, en particulier , celle de l'effer que la ‘chaleur opère fur les phofphores en différens cas. M. Wilfon prouve, jufqu’à l'évidence, qu'elle développe leur lumière & l’éreint alternativement, felon les circonftances. Que le papier, par exemple, rendu lumineux pat l'application d’un fer chaud, perd à l’inftant cette propriété , fi on l'y applique de nouveau ; qu'il peut la recouvrer par une troifième application , puis s'obfcurcir, & aïinfi tour-à-tour, tandis que le même fer n’y opère aucune altération fenfible, s’il eft froid. M. Wilfon poufle la démonftrarion jufqu’au bout, en faifant voir que toutes fortes de corps, tant folides que fluides, opèrent le même effet fur les différentes matières noctiluques, felon qu’on les y ap- plique à chaud ou à froid. Adhérant à la marche de Baeccari, le Phyfcien Anglois parcourt fucceflivemenc les trois règnes naturels. Cette tâche eft remplie avec diftinétion. Tantôc il confirme les obfervarions de fon devan- cier , tantôr 1l le relève d'erreur , & ajoute ,#de rems en tems, des vérités nouvelles. Beccari, par exemple, établir, comme une règle conftante, que la lumière des phofphores dure d’autanc plus qu'elle eft plus vive. Cependant, M. Wilfon trouve qu'un fluor ver- dâtre de Suède, qui ne devient jamais fort lumineux, conferve néanmoins cette propriété plus de fix minutes. » Ce fait, dit-il, » femble contredire la règle que Beccari a pofée , en ‘avançant que » les corps luifent d'autant plus long-cems , qu’ils jettent plus d'é- » clat ; car quelques-uns des plus “tré phofphores que j'aie obfervés, » ne durent pas plus de trente fecondes «. j En s’engageant dans ces recherches , M. Wilfor femble n'avoir eu d'autre but que de s’affurer quels étoient les meilleurs phof- phores, & la caufe qui les conftitue tels. Il l’avoue en divers en- droits de fon Ouvrage, particulièrement à l'entrée du règne mi- néral. » Beccari y a découvert une infinité de très-beaux phofpho- » res. Ses Recherches ont été fi exactes dans cette divifion de la » nature, que j'efpérois peu d’y ajouter quelque chofe de remar- » quable. Néanmoins je réfolus de pourfuivre mes obfervations fur » les fubflances les plus phofphorifques, me Mattant , jufqu'à un cer- » tain point, que le hazard & l’induftrie me dévoileroient , avec Tome VIII, Part. II. 1776. K 0 74 OBSERFATIONS SUR LA PHYSIQUE, » le tems, quelque chofe plus digne de mon attention, qu’une » fimple recherche des phofphores les plus lumireux ». Et ailleurs : » Je m'occupois de ces recherches, avec toute l’ardeur & l’in- » duftrie dont j'étois capable, obfervant jufqu'aux moindres circonf- » tances, dans la vue de découvrir le principe caché d’où dépend. la verts » phofphorique , lorfque le ‘hazard me découvrit un objet extraordi- » naïire , que je regardai comme un tréfor en Phyfique , pour exer- » cer mes médiocres talens «, $ Cet objet extraordinaire n’eft que les couleurs prifmatiques mêlées à la lumière des phofphores. En effet, ce n’eft qu'après nombre d’apperçues, recueillies de loin en loin , que l’Auteur commenca foupçonner que ces couleurs pourroient bien être une propriété énérale de ces fortes de corps. Sa première obfervation fe Ht fur u fucre : la voici telle qu’il la rapporte. » Un fer à liffer, qui m’avoit férvi à une foule d'expériences , » pendant plufieurs jours; s’étoit incrufté de fucre fondu en par- » tie, & peut-être d'autre matière qui lui étoir mêlée. Maloré cela , » je ne laïifflai pas de l’employer. Un jour, après avoir retiré dans » l’obfcurité, une carte, fur laquelle je venois ‘de fondre un peu » de fucre en poudre, par application de ce fer que j’avois chauffé » à deffein, j'apperçus une des plus belles lumières vertes en divers » endroits de ma carte. Son éclar étroit extrème, & fa couleur jouoit » la plus belle émefaude expofée aux rayons du foleil.... quand » elle eut difparu , je la ranimai plufeurs fois, & cela pendant quatre » où cinq jours confécutifs, en expofant fimplement la carte au #» foleil «, j Le » J'ai fouvent répété certe expérience fur deux-ou trois autres » cartes , avec un pareil fuccès «. Dans la fuite, M. Wilfon rencontra quelques#utres phofphores, dont la lumière étoit diverfement colorée ; mais fans s’y arrêter, il ne fongeoit pas encore à établir fur ces apparences un corps de doétrine, parce qu'il ne prévoyoit pas de les trouver fi générale- ment répandues. Cependant, après bien des travaux fur les fubftan- ces phofphoriques des trois règnes , il fe décida fermement à tour- ner fes vues de ce côré-là. Ecoutons le parler. » Tandis que je pourfuivois ces expériences , en traitant d’autres » corps de nature onétueufe & fulfhureufe , je me rappellai la Z4- » mière verte que j'avois obtenue du fücre. Un jour que le tems étoir » raflis & très beau ; j'effayai de la reproduire par divers moyens; » & fachant que dans certains cas, le cuivre excitoit une femblable » couleur, jy eus naturellément recours. ..... En conféquence, je » verfai cinq gouttes d’eau-forte fur une pièce de ce métal, & les s à [4 le] d SUR L'HIST. NATURELLE ET LES ARTS. y» »y laiffai près de vingt fecondes. Enfuite , j'emportai brufquement » É folution avec demi-once de nouveau menftrue : je la verfai fur » une once & demie d'écailles d'huitre calcinées, dont partie fe » trouvoir en poudre , & laiffai repofer le tour environ feize heures... » Alors je décantai le fuperflu de liqueur que les écailles n'avoient » pu abforber, & mis celles-ci , réduites en pâte, dans un creufet » où je les prellai bien exaéteinent; le creufet fur enfuite expofé, » près de quarante minutes, à un très-ardent feu de charbon de » terre. L'ayanc retiré & laiffé refroidir, la mafle en fortit entière, » & préfenta à l'extérieur une.{ale nuance verdâtre. J'eus beau l’ex- » pofer plufieurs fois au jour, & lexaminer enfuite à l'obfcurité, je » n’y apperçus jamais qu'une lumière grisâtre, fale & foible. Pour- » lors, en ayant détaché un fragment du côté qui regardoit le fond # du creufet, je découvris, dans la caffure , une grande pièce d'é- » caille , plus blanche en plein jour qu'aucune autre partie. Cet en- » droit, expofé aux rayons du foleil, puis rentré fubitement dans » l’obfcurité, offrit, à ma grande furpréfe , une apparence générale » de ‘couleurs, femblables à celles de l’arc-en-ciel, mais beaucoup # plus vives. Le rouge parut la plus belle, & ne différoit en rien » de celui qu’on voit dans les anciennes vitres peintes, quand les » rayons du foleil tombent deflus. À côté de celui-ci, étroit le » jaune, qui ne paroifloit pas de beaucoup fi vif, mais fort lu- » mineux. On voyoir enfuire le verd qui étoit plus foible, & quoi. > qu'il fût encore aflez éclatant, il s’en falloir beaucoup qu’il ap- » prochâe de celui du fucre. Le bleu fe montra infiniment plus » pâle que les autres couleurs. Pour ce qui eft du pourpre ,. j'eus » quelques doutes fur fon exiftence. .... quelques-unes durèrent au » moins fix jours, mais elles ne fe foutinrent pas, à beaucoup près, » fi animées que le premier & le fecond. :... Au huitième, elles » avoient toutes difparu, & on ne voyoit, à leur place, qu’une lu- #» mière blanche, jaunâtre , affez vive «. » La découverte de cette apparence curienfe, me fit redoubler » d'induftrie, pour tâcher d’en dévoiler la caufe, &c. « Ici M. Wilfon s'engage dans une longue fuite d'expériences, tant fur les divers méraux & les demi-métaux , que fur les acides, les alkalis, les fels neutres, & quelques autres corps de différens enres. Je n’entreprendrai pas de le fuivre dans tous ces points : il audroit traduire fon ouvrage. Je me contenterai de dire que ces fubftances , appliquées aux écailles d’huitre, & expofées avec elles, dans un creufet, à l’action du feu, ont conftamment communiqué “les diverfes couleurs du prifme à leur lumière phofphorique. Cette propriété fingulière de colorer les phofphores, à généralement paru plus éminente dans celles qui palfent pour contenir le plus de prin- 2 76 OBSERVATIONS SUR I4 PHYSIQUE, - cipé inflammable ; comme l'or, le zinc, le bleu-de-Prufle , le char- bon de bois; dans l’acier, plus que dans le fer, & parmi les aci- des, dans l’efprit-de-nitre, beaucoup plus que dans les autres : d’où l’Aureur conclut que c’eft à ce principe qu'on doit principalement rapporter la caufe des couleurs prifmatiques des phoiphores. » Il me paroît, dit-il, plus que conjeétural , que les couleurs » prifmatiques, & généralement la lumière de tous les phofphores, » dépendent en grande partie, fi ce n’eft entièrement, de ce prin- » cipe inflammable que les écailles reçoivent des corps auxquels elles » touchent dans les creufets , & que ces corps laiflent échapper par » l’action du feu «. » Il ne refte donc plus, pour établir ce principe & le rendre » général, qu'à examiner les effets que produiront fur les écailles, » les autres matières qu’on fait abonder en phlogiftique. Si elles » nous, produifent les mèmes apparences , nous pourrons fürement » conclure, pour la généralité du principe, äu moins jufqu’à ce qu’on y oppofe des exceptions «. M. Wüfon continue fes recherches fur [es matières réputées in- flammal les par excellence; comme les huiles, les réfines, les bi: tumes, les graifles, l’efprit-de-vin , la fuie , le phefphore de Kun- Kel , la Aamme même, &c, &c., qu'il traite avec les écailles de la manière que nous avons expofée , & obrient, à-peu-près, les mêmes réfultats. Bien plus, il fait voir, par une foule d’obferva- tions particulières, que les autres couleurs des phofphores ne font, en quelque forte, qu'une efpèce de diminutif de la couleur rouge, ou bien le rouge commencé, puifqu'on peut, 1°. les changer toutes en cette dernière couleur, par une fuperaddirion de phlogiftique aux phofphores qui les préfentent; 2°. que les parties rouges fe trouvent toujours plus denfes que les autres, & que cette denfité fupérieure eft toujours une fuite de l’augmentation du principe inflammable. » Sa courte durée , (ditil, en parlant de la couleur rouge ,) de » même que celle des autres, prouvent que cette denfité, fans » doute particulière à chacune , ne leur eft pas moins effenrielle à » toutes. Car, en trois ou quatre jours, elles fubiffent des varia- » tions confidérables dela part de l'humidité de lair qui pénètre » les écailles ( 1), alrère leurs parties conftituantes, & conféquem- » ment change leur denfité ». C’eft pourquoi il conclut définitive- (1) Dans fes recherches fur les couleurs prifmatiques des phofphores , M. Wil{on a pris les coquillages, & fur-touc les écailles d'huitre calcinées , pour bafe de fes expériences. Il feroir à défirer qu'il les eût étendues davanrage fur les autres phofphores de nature différente, | $ Fm. | SUR L’HIST. NATURELLE ET LES ARTS. 77 ment , que les effets du principe inflammable » font abfolumenr » indifpenfables à la produétion des couleurs prifmatiques «. M. Wiljon remarque que les écailles n’offrent, en plein jour, qu'une fimple lumière blanche , fans aucun mêlange des couleurs qui s'y font appercevoir dans l’obfeurité , & tâche d’en donner une rai- fon farisfaifante. Voici quelles fonc fes idées. » Une légère réflexion nous expliquera, peut-être, ce phéno- » mène , qui me paroît fi exaétement conforme à d’autres de a na- » ture. Le foleil, parvenu dans le méridien, éclipfe les étoiles, la » lune même, par les lors de lumière dont il remplit l’athmof- » phère. Cembien cependant la lune ne paroît-elle pas refplendif- » fante , lorfque cette lumière fupérieure s’eft retirée? L’obfcurité » que nous nous procurôns par artifice , furpalle celle-là de plufieurs » degrés; ainfi, il n’eft pas étonnant que la différence qui fe trouve » entre la lumière extérieure & le cabiner ( 1 ) qui a fervi à mes » obfervations, foit beaucoup plus grande que celle de midi à mi- » nuit, fur-rout au clair de la lune. C’eft donc entièrement à caufe » de cette extrême difference, que les couleurs prifmariques des » écailles deviennent vifbles dans les ténèbres, quand l’œil s’y trouve » convenablement préparé : de mème que l’abondance des reflexions » & des réfractions de la lumière qui les environne, les font dif- » paroître fitôt qu’on les expofe au foleil, quoiqu’elles n’y exiftent » pas moins actuellement «. » Quelque étrange que certe idée puiffe paroître, j'ai quelque >» raifon de conjecturer que nous trouverions les couleurs prifmati- » ques beaucoup plus éclatantes en plein jour que dans lobfcurité , s’1l éroit pofhble de les y appercevoir. Plufieurs obfervarions que » j'ai faites. ... , le donnent à penfer. Car lorfque je traduifois les » divers phofphores, de la lumière , dans les ténèbres , elles éroient 2 2 (1) Ce Cabinet diffère de celui de Beccari, I| a depuis fix jufqu’à cirq pieds & demi de dimenfion , eft peint en noir dans toute fon étendue, ou tapiflé d'une flanelle de la même couleur, Où y remarque deux portes, plus longues & plus larges de cinq ou fix pouces que l'entrée. Un trou qui fecr à pafler la main pour expofer les corps à la lumière , & fermé par fix rideaux , trois en dedans & trois en dehors. Ces rideaux font beaucoup plus grands que l'ouverture, qui a environ 15 pouces de diamètre, & regarde le Sud. Chacun a de petits poids de plomb, fufpendus à fon extrémité inférieure, qui le rérabliffent dans fa fitua- tion, lorfqu'on retire la main dans la chambre: Pour relpirer librement dans ce Cabinet, & y refter long tems à (on aile, l'Auteur y ajufle deux conduits re- courbés , d'environ 3 pouces de diamètre , communiquant tous les deux avec l'air extérieur, l'un par le haut de la chambre noire, & l'autre par le bas. 11 aflure ue ce Cabinet eft plus commode , & lui a procuré plus d'obfcurité que celui ce Beccari, 38 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, n extièmement plus vives & plus belles au premier inflant, qu’elles »ne le patoifloient un tiers de feconde après «, L'ouvrage , dont nous nous occupons , contient aufli des recher- ches intéreffantes fur la nature de la lumière, en vertu de laquelle les phofphores luifent dans l’obfcurité. D'abord , l'Auteur établit, pour propolition , que tous les corps contiennent plus ou moins de prin- cipe inflammable , mais qu'il paroît n'être pas toujours également diftribué ou uni aux différentes parties de tous les corps; que dans ceux qui font phofphoriques, par exemple , il tient fi foiblemenr, mème aux endroits qui en contiennent le plus (comme certaines parties des écailles ) , qu'il eft plus fufceptible de s’en féparer, par ladion de la lumière ou d’autres mouvemens violens , que des au- tres fubftances auxquelles il fe trouve plus fortement uni. — Que la lumière phofphorique dépend , en grande partie, de cette caufe, & non entièrement des rayons folaires aëluels , que Les écailles ont auparavant abforbes. | Cetre propoftion eft tour de fuite appuyée par la répétition d’une expérience du Pere Beccaria de Turin (1), mais qui a fourni à M. Witfon des réfultats fort oppofés. Elle confifte en plufeurs boîtes de fer-blanc, noires à l'intérieur & cylindriques , chacune recou- verte, à fon fommer, d’un verre de couleur différente. Le Pere Beccaria mit dans toutes, des gâteaux de phofphore fulphuro- cal- caires, femblables en tons points; ferma fes boîtes, les expofa au foleil routes à la fois, puis les traduifit dans l'obfcurité, & les y ouvrit. Il affure avoir remarqué que le gâteau , qui avoit abforbé la luinière à travers le verre verd, retenoit cette couleur; que celui qui l'avoir reçue par le’ rouge, étoit rouge; celui par le jaune, jaune lui-même; & qu'enfin, certe expérience lui cpprit , non-feule- ment combien le phofphore avoit abforbé de lumière, mais encore qu'il ne répandoit que celle qu'il avoit acquife. Le Docteur Priflley (2) a aïouté fi fermement foi à cette ex- périence, qu'il l'a regardée comme décifive en faveur de ceux qui perfent que le phofvhore donne exaëlement la même lumière qu'il reçoit, fansen répandre d'autre, & conféquemment que la lumière confifle en particules réelles de matière, capables d'être ainfi abforbées , retenues & : renvoyées. Mais M. Wilfon , qui a répété l'opération de plufieurs manières, a conftamment obtenu des réfulrats oppofés à ceux de Beccaria. Par exemple, il trouve qu'une écaille d’huitre , qui ne donne qu’une EEE (x) Tranfactions Philofophiques , année 1771. (2) Hiftoire de la Vifon, de la Lumière & des Couleurs, page 365. PU NLS dial 16:22 ie à si " DE Lt D SUR L’'AIST. NATURELLE ET LES ARTS. >; ‘ lumière blanche après fa calcination , n’en répand que de cette efpèce, foit qu'on pole au foleil dans les boîtes de Beccaria , où bien dans des cylindres de verre diverfement colorés. Il obferve que le phofphore même de M. Canton , qui paroït être celui dont Beccaria a fair ufage, traité felon ces deux méchodes , ne donne maloré rous les différens verres, que la lumière qui lui eft propre, fans au- cun mélange ni rapport de couleurs. — Qu’une écaille phofphorique, éminemment colorée de toutes les nuances du prifme, n'éprouve", dans ces procédés, d'autre altération, qu’un affoibliffement de cou- leurs, un peu moindre dans celles qui fe trouvent refpettivement femblables aux reintes des verres employés, mais que d’ailleurs, elles fubfiftent également toutes , après comme avant, randis que fuivanc l’idée du P. Beccaria , & du Docteur Prieflly , elles de- vroient être toutes effacées, hors celle qui eft refpeétivement fem- blable à la couleur du verre, puifque le rouge, par exemple , eft fuppofé ne tranfmerttre que les rayons rouges , & ainfi des autres. :Ces faits diamétralement contraires à ceux qui font rapportés par Beccaria , démontrent combien il faut fe renir en garde de tirer des conclufions des expériences qui n’ont pas éré fuffifamment ré- pétées. Quoiqu'il en foir, M. Wüifon fe croit folidement fondé à conclare , » que les apparences lumineufes des pho/phores dépendent » d’un principe différent de la lumière , & que ce principe doit » êvre le phlogiftique répandu auparavant dans leur fubftance « ; c’eft-à- dire , felon le fentiment de Zanosti , que les phofphores luifent par leur propre lumière naturelle , après avoir été allumés par la lumière étrangère; mais, » qu'à confidérer la nature & la difpofrion des » parties conftituantes des écailles (que l’Auteur prend toujours pour » exemple }, lorfqu'elles ont été phlogiftiquées , nous devons penfer » qu'elles ne peuvent répandre d’autre lumière colorée, que celle qui » correfpond à l’épaifleur &c à la denficé de ces parties. Par exemple, » les parties les plus denfes, pourvu qu’elles le foient affez, ne » peuvent en répandre qu'une rouge , de mème que celles qui en » approchent le plus par leur denfité, n’en fauroient donner qu'une » jaune, & ainfi de fuice.....« ; Nous avons rendu compte de la vertu fingulière qu'ont les corps chauds, d’éteindre les phofphores qu'ils ont allumés, puis de les rellufcirer, de les obfcurcir de nouveau, & ainfi rour à-tour, fi on les y applique à plufeurs reprifes. M. Wilfon entreprend de recon- cilier ces phénomènes , en difant , » que l’aétion du feu chañle la » matière phofphorique, effentielle , pour que les phofphores luifens » dans l’obfcurité. Qu'une fois difipée, ceux ci ne peuvent plus don- » net de lumière, par l’application de cer agent, qui peut néan- » moins les faire revivre, dès qu'ils ont recouvré le principe qu'ils » avoient perdu. « Toujours d'accord avec la théorie, 1l obferve que _ 80 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, &c. ce principe n'elt autre chofe que le phlooiftique tranfmis par la lumière extérieure , & cite en preuve une foule d'expériences, donc voici à peu-près le réfume. Il prit quelques écailles phofphoriques, enluminées des plus vives couleurs du prifme ; les coucha les unes à côre des autres, deflus une boîte de fer-blanc rrès-chaude , & les examina dans l’obfcurité. Bienrôc après leur expofrion deffus la boîte, ces écailles répandirent üne foible lumière blanchätre, qui s'anima néanmoins un peu; mais fa plus grande fplendeur ne furpaffa pas celle qui furvenoir en ex- pofant les coquillages en plein jour, mème en tems couvert ; les couleurs prifmatiques étoient également plus foibles & beaucoup plus fombres. — Ces écailles ne furent point expofées au jour après l’o- pération. On les lailfa fimplement refroidir, & tout de fuite on les replaça delfus la boîte de fer-blanc chaud. Ce fecond procédé réuflie encore moins. Il fallut attendre plufieurs minutes, au bout def- quelles, il s'offrit une fi foible lumière , qu’à peine pouvoit on la diftinguer. — Alors , fans leur donner le tems de refroidir, on les préfenta au foleil, & fur-le champ elles furent examinéés dans l’obf- curité. Le réfulrat fur qu’elles répandirent plus de lumière qu’elles n'avoient jamais fair , mème avant ces opérations ; & les couleurs prifmatiques parurent également un peu réchauffées. Quand les écail- les furent froides, on les foumit de nouveau à l’action de la lu- mière, qui fit revivre les couleurs ; mais pas tout-à fait fi animées que lorfqu’elles étoient chaudes. » Ces expériences, dit M. Wilfon, prouvent que la lumière & » les couleurs phofphoriques , fonc développées, non engendrées par » la chaleur «. — Que leur véritable caufe matérielle n'eft que la lumière extérieure, mais modifiée d’une façon particulière , ou chan- gée en principe inflammable , fans quoi les rayons folaires, tranf. mis, paf exemple, à travers un verre rouge , ne pourroient jamais produire que la couleur rouge , ce qui eft contraire à l’expérience: & , d’ailleurs, comme l’obferve Ifuac Newton, » le changement des » corps en lumière, & de la lumière en corps, eft très-conforme »au cours de la nature , qui femble fe plaire dans les tranfmuta- # TIONS 66, L—- (lullet 1376. L 1 A 7, EE en UT us RU RE de 20e ne RS Mn de pt - are 1%. in à | Galeurs Acudenklls Le à Couleurs Rzelles Nour: Bleu | Jullet. 1776 PI Par AT) k er See mine SP En ce mana aaie ER = 1e ne : à AE . Ne de : ME OBSERVATIONS $S U_R LA PHYSIQUE, SUREULHISTONRE: NATURELLE EURUOU RODESyA RES, AVEC DES PLANCHES EN TAILLE-DOUCE, DÉDIÉES AMEN LE. COM:EFE:.D. AR OLS; Par M. PAbbé RoOZIER, Chevalier de lEglife de Lyon ; de l'Académie Royale des Sciences, Beaux-Arts & Belles- Lettres de Lyon , de Villefranche, de Dion, de Marfèille, de Nifmes , de Fleffingue ; de la Société Impériale de Phyf- que & de Botanique de Florence , de Zurich ; de Madrid , Correfpondant de la So- cièté des Arts de Londres , de la Société Philofophique de Philadelphie , &c. an- cien Direéleur de PEcole Royale de Médecine - Vétérinaire de Lyon. TOME HUITIÈME. AUONTNS ET TRAD As AS RAT IN Chez RUAULT, Libraire, rue de la Harpe, MANDICICOML'X XV RPSENCN ER PILE GE DU RO. A VAS À MM. ks SouscrrIPTEURS dont l’Abonnemens finit à la fin de l'année 2775. Pr USIEURS Soufcripteurs fe font plaints de ce qu'ilsne rece- voient pas les Cahiers aufli-tôt qu'ils avoient formé leurs deman- des. Ils font priés d'obferver que fouvent ils s’adreflent à des Commiflionnaires qui négligent de foufcrire , ou de faire par- venir les Cahiers à leur deftination. Pour éviter, à l'avenir , de pareils reproches & de femblables lenteurs, MM. les Soufcrip- teurs, qui ont été dans le cas d’être mécontens, font invités à recommander expreflément aux perfonnes qu'ils chargent de leurs commiflions , d’être plus exaétes que par le pañlé : ou s'ils jugent la chofe plus commode , de configner le montant de la Soufcription au Bureau des Poftes de leur Ville, fans l’affran- chir, mais affranchir feulemene la Lettre qui en donne avis. Un fecond fujet de plainte vient de ce que ceux, chez lefqueis -on prefcrit de remettre les Exemplaires, les prêtent , les égarent, & difent enfuite ne les avoir pas reçus. On prévient que l’on fait l'appel de chaque Cahier 8 de chaque Soufcripteur, comme dans un Régiment on fait l'appel des Soldats, & tous les Cahiers font portés fermés , dans un fac cacheté, à la grande ou à la petite Pofte de Paris. On voit par - là, que fi quelques-uns ne font pas sendus, ce n’eft plus la faute du Bureau des Journaux. MM. les Soufcripteurs, qui défirent renouveller leur Abon- nement pour l'année 1776 , font priés de donner eur nom & de- meur:, Écrits d’une manière lifible , dans le courant du mois de Décembre, ou le plutôt poflible, afin d’avoir le tems de faire imprimer leur adreffe. On foufcrit à Paris, chez l’Auteur , Place & Quarré Sainte - Geneviève , & chez les principaux Libraires des grandes Villes. Le prix de la Soufcription eit de 24 livres pour Paris, & de 30 Livres pour la Province, port franc. AA D LE PRES" ART PIC LUE "S Contenus dans cette. feconde Partie. : ) À NPITATION à MM. es Phyfiiens, pour examiner la queflion du Feu central , page 87 Eloge de M. Jallabert, 3 Mémoire fur une nouvelle Roue éleétrique ; par M. Bertholon , Prérre de St-Lazare, Profeffeur en Théologie , des Académies des Sciences de Lyon, de Beziers, de Marfeille, de Nifines , de Touloufe , de Mont- pellier , &c. &c. 89 Expériences fur Les Liqueurs animales expofees a la machine du vuide ; par le Doëteur Darwin, 97 Obfervations Phyfico-Chymiques fur les Couleurs, lues à l’Académie Royale des Sciences , par M. Macquer, pour M. Opoix , Maire Apothicaire & Provins, 100 Daefcription d'un nouveau Fourneau de Laboratoire ; par M. de Morveau, 117 Lettre adreffée à l'Auteur de ce Recueil, fur la manière de conferver es Vanilles, 120 Lettre adreffée à l'Auteur de ce Recueil , par M. Maupetit, Prieur de Caffan , pour expliquer les variations du Baromètre, 12E Objervations fur les Méfanges , 123 Obfervation fur une Femme qui fait ufage de fon bras droit , malgré qu’on ait amputé toute La tête de l’humérus , 130 Manière d'appliquer l'Air fixe aux Cancers, qui procure en peu de tems une ceffation des douleurs , & une diminution très - confidérable dans le Cancer , 132 Leitre de M. de Stehlin, Confeiller d'Etat de Sa Majeflé l'Empereur de Ruffie , au Doëleur Maty, fur une malle de Fer natif, 13$ Mémoire du Doëteur G. Brownrigg, fur quelques Echantillons de Sels natifs, préfentés à la Société Royale de Londres, 137 Letrre adreffée à l Auteur de ce Recueil , en réponfe à la triféttion de l'Angle propofé par M. Romain, 142 Defcriprion d’une Matrice & d'un Vagin doubles ; par M. J, Purcell, Profeffeur d' Anatomie au Collége de Dublin , 143 Nouvelles Littéraires , 3146 AUPNCPIERM ON BA NTRINOPN. Ja lu, par ordre de Monfeigneur le Garde des Sceaux , un Ouvrage qui a pour titre : Obfervations fur la-Phyfique, [ar l'Hiftoire Naturelle & fur les Arts, &c. par M. l'Abbé Roz 1ER, &c. La collection de faits importans qu'il offre pério- diquement à Les Lecteurs, mérite l'accueil des Savans ; en conféquence, j'eflime qu'on peut en permette l'impreflion, A Paris, ce 31 AOÛt 1776 YALMONT DE BOMARE. INVITATION PPT NUIT Pre MP ï ' .. 8L D ———— 270 | Ge — de TON PI TANT TI ON PANNES PULY SICI ENS, Pour examiner la queflion du Feu central. Ox n’eft point d'accord fur un point qui doit être regardé comme de fait, & par conféquent décidé par le fair. Quelle eff la chaleur dans L'intérieur de La terre a une profondeur quelconque? Cette chaleur varie-t-elle Jüivant l'état de l’athmofphère ? Des Phyfciens ont admis un feu cen- trail, & ont prétendu que fa chaleur augmentoit en proportion qu’on approchoit plus ou moins de fon foyer, en enfonçant dans la terre. D'autres ont nié complettement fon exiftence. Tant qu’on s’en tiendra aux raifonnemens , aux hypothèfes, le Phyfcien n’en fera pas plus inftruit : aujourd’hui , il faut des faits & non des mots. Pour par- venir à décider certe queftion , autant qu’il eft poflible à l’homme, ne pourroit-on pas s’y prendre de la manière fuivante ? 1°. Chercher, chacun dans fa Province , les plus grandes profon- deurs des mines ou des carrières. 2°. Commencer par examiner toutes les particularités locales qui peuvent faire varier l’état de l’achmofphère dans ces fouterrains. 3°. Confidérer fi la preffion de l'air, plus ou moins forte à l’exté- rieur, ne fait pas plus ou moins engouffrer la chaleur de l’athmof- phère dans la mine , & à quelle profondeur fe propage l’action variée de l’athmofphère. 4°. Plufeurs chermomètres également gradués , & placés à différentes diftances, à différentes profondeurs , n’indiqueroïent-ils pas les va- rations de l’air athmofphérique , & de celui du fouterrain ? s°. Le fouterrain eft à puits ou à galerie. Un thermomètre placé dans la réunion de deux ou de plufeurs galeries, ne ferviroit-il pas à indiquer les effets des courans d'air fur le thermomètre, & peut- ètre fur le baromètre ? 6°. Ne conviendroit-il pas de laiffer pendanr plufeurs jours de fuite, ces inftrumens dans le même endroit, & de comparer chaque jour leur produit avec celui des inftrumewus qu’on auroit laïffés à l'air libre , c’eft-à-dire, à l’extérieur & à l'ombre ; il ne feroit peut-être pas mal-à-propos d'en avoir de femblables expofés au foleil , afin d’avoir un triple état de comparaifon. Tome VIIL, Pare. II. 1776, L 82 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, 7°. À ces précautions, ne faut-il pas-ajouter le foin desdefcendre également plufieurs jours de fuite dans les fouterrains, favoir ; avant le foleil levé , & à trois heures après midi, d’y écrire dans le mo- ment même le réfultar des obfervations. 8°. Ne feroit-il pas important d’y defcendre toujours feul, & avec unesfeule & très-foible lumière ? La tranfpiration , la refpiration de plufeurs perfonnes , la chaleur occafionnée par la flamme d’une bou- gie, &c. ne font-elles pas fufifantes pour altérer. l’état de l’arthmof- phère dans un lieu, pour l'ordinaire, aufli circonfcrit, & où l'air fe renouvelle fi difficilement ? 9°. Ne conviendroit-il pas encore , pour que toutes les circonf- .tances fuffent égales, que les portes des fouterrains reftaffent ouvertes plufieurs jours & plufeurs nuits de fuite, avant & pendant le tems des expériences ? | 10°. Enfin ne vaudroit-il pas mieux faire de telles expériences dans des mines qu'on n'exploite plus, ou dans de fimples & pro- fonds fouterrains? Mille caufes locales, & qu’on ne peut prévoir, nui- roient peut-être à la précifion des réfultats,-fi on les exploite. Le grand point eft de bien voir, de comparer avec méthode , & de ne pas fe hâter de décider; mais s'il fe préfente quelque fingularité frap- pante, il faut, je crois ,en chercher la caufe dans la nature & la po- fition du lieu. La queftion de l’exiftence ou dela non-exiftence du feu central, eft une des plus importantes de la Phyfique , fur-tout pour la théorie de l’agriculture : elle mériteroit d’être propofée par un Académie pour fujet de prix; mais en attendant , nous invitons MM. les Phyficiens à nous communiquer leurs recherches fondées fur l'expérience, & non fur des hypothèfes. S'il exifte un feu central, fon aétion doit né- celfairement être plus fenfible à mefure qu’on s'enfonce plus profon- dément en terre. Toute profondeur quelconque eft bien petite , il eft vrai, fi on la compare à la diftance de la circonférence du globe à fon centre; mais comme une malle de feu, toujours conftante & tou- jours la même, doit agir toujours également , ne pourroit-on pas con- clure que fon action fe fait fentir par des dégradations impercepribles du centre à la circonférence? Quelques Auteurs employent le mot de fermentation intèfline. Quelle en eft la caufe ? Comment agit-elle? & quelle preuve a- t-on de fon univerfalité dans: le globe ? as TL =) SUR LHISTONATURELLE "ET LES ARTS, \\85 EI OULG LE D EM: I AT, LA Be RTS). | RAR JALLABERT naquit à Genève, le 26 Juillet 1712, d’Etienne Jallabert , Miniftre & Profeffeur de Philofophie, & de Michée Tronchin. À l’âge de onze ans, il perdit fon pere. Des Parens , qu'une tendrefle vigilante & des foins empreflés rendoient- dignes de fuppléer à cette perte, le mirent dans une des meil- leures Penfons de Genève, où d’abord il fit peu de progrès. Une extrème vivacité, que rien de férieux ne pouvoit encore fixer , fem- bloit ne lui laiffer d’ardeut & de goût que pour les amufemens de la jeuneffe ; mais infenfiblement cette vivacité fe tourna du côté de l'étude , & fa raifon plus développée , commençant à le diriger , il donna des efpérances. On de vit s'appliquer aux Belles-Lettres grecques & latines fous d’excellens Maîtres, qui, le diftinguant dans la foule de leurs Dif- ciples, applaudirent plus d’une fois à fes fuccès. La Philofophie & les Mathématiques fuccédèrent , felon l’ufage, aux Humanités. Elles manifeftèrent fes talens d’une manière plus frappante. Un penchant qu'il avoit jufqu’alors ignoré, l’entraîna vers ces fciences tien Il obéir à la voix de la nature, & fecondé par les foins du fa- meux Géomètre, feu M. Cramer , il courut avec rapidité dans cette nouvelle carrière. Il rendit un compte éclatant de fes progrès dans deux Thèfes qu'il avoit lui-même compofées. La première avoit pour objet un grand nombre de queftions philofophiques ; il la fou- tint fous la préfidence de M. de la Rive, & l’autre fut foutenue fous M. Cramer. Dans celle-ci, M. Jallabert examinoit en Phyfi- cien & en Géomètre , la pefanteur des corps. IL établit fur des preuves données par Newton (2), la gravitation univerfelle, & s'ef- força d'expliquer , par l’aétion d’un fluide invifible, müû en ligne (r) Ce célèbre Profeffeur a trop bien mérité de la Phyfique , pour que nous nous difpenfions de jetter quelques fleurs fur fon tombeau, en rappellant, d'après la Société Royale de Montpellier, les principaux traits de fa vie. Si les Eloges des Phyfciens diftingués plaifent à nos Lecteurs, on aura foin d'en inférer quelques- uns dans ce Recueil. Ils font priés de faire parvenir leurs avis fur ce fujet. (2) On ne dit pas ici que M. Jallabert ait été l'inventeur de ce fyftême fur lequel M. le Sage a des droits inconteftables, L 2 $4 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, dioite & felon toutes les directions imaginables, ce qui, au juge- ment d’un grand nombre de Phyfciens de nos jours , eft fupérieur au méchanifme ordinaire, & indépendant des loix de l'impulfon. M. Jallabert paroïfloir appartenir, de plein droit, à nos fcien- ces , lorfque feu M. Alphonfe Turretin réuffit à le gagner, au moins pour quelque tems, à celle qu'il profefloir , à la Théologie , que le jeune Jallabert avoit été jufques là peu curieux d'approfondir. I fe rendit aux invitations d’un homme célèbre, qui lui avoit ou- vert fon Cabinet, & dont les confeils & l'amitié pouvoient lui ètre d'un grand fecours. En Île prenant pour guide, 1l acquit, en peu de tems, une infinité de nouvelles connoiffances. La Critique , la Théologie, l’Hiftoire Eccléfiaftique , l'Hébreu, lui devinrent fami- liers. Ce nouveau fond de fcience le fit juger digne du Mimifère Evangélique , & il y fut admis en 1737. Les fonctions de Pafteur étoient cependant peu conformes à fon goût; & la mort de M. Turretin, arrivée dans la même année lui permit de fe convaincre, qu'en fe livrant à la Théologie, ïk avoit beaucoup plus confulté l'amitié que fa propre inclination. MM. Calandrini & Cramer , tous deuf Profeffeurs de Mathémati- ques, s’unirent à leur Confrère, M. de la Rive, pour rendre M. Jallabert à des fciences qui le revendiquoient. Ils proposèrent, en faveur de leur Ami, l'Etabliffement d'une Chaire de Phyfique ex- périmentale qui manquoit dans l’Académie de Genève. Le Confeïl de la République entra facilement dans leurs vues +: la nouvelle Chaire fur établie, & M. Jallabert fut, d’une voix unanime, choilt pour la remplir. Pour être plus en état de farisfaire à fes nouveaux engagemens,, il voulut s'inftruire par les voyages. Il alla d’abord à Bâle, où ïl fe perfectionna quelque rems dans les Mathématiques anprès de MM. Bernouilli, dont il étoit particulièrement connu. Il paffa de-là en Hollande, d’où il fe rendir en Angleterre & en France. 1 vit en Hollande MM. sGrawefande & Mufchenbroeck ; & en Angleterre, M. ke Chevalier Sloane & M. Defaguilliers, fous lef- quels il fit quelques Cours. À Paris, il forma d’étroites liaifons avec M. l'Abbé Nollet, & fe fit connoître à MM. de Mairan, de Réaumur, de Buffon , avec lefquels il a depuis entretenu de fré- quentes correfpondances. Par-tout où M. Jallabertr vir des Savans, il acquic leur eftime. L'Académie des Sciences de Paris & de Lon- dres , fe firent un plaifir de l’admettre dans leurs doétes affemblées. Ces deux Compagnies firent plus. La première, en 1739; fe l’at= tacha fous le titre de Correfpondant, & la feconde , l'adopta, l'année fuivante, en qualité d’Affocié étranger. Décoré de ces ritres académiques , & riche des nouvelles con- une ue étés ét Le Vlr pe die SE SRE SRE LS à » “ e ‘ C2 n _ ES SUR L'HIST. NATURELLE ET LES ARTS. 8; noilfances qu'il avoit eu foin d'acquérir , M. Jallabert revint dans fa paie pour s’y confacrer à l'inftruétion de fes Concitoyens. Il fic l'ouverture de fes leçons de Phyfique expérimentale, par un Dif cours qui préfente les plus grandes vues. Je prévois, lui écrivoic M. Bernoulli, après avoir lu ce Difcours inaugural que l'Auteur lui avoit envoyé, je prévois que vous allez faire grand bruit dans l'Eu- rope Javante ; vous êtes fait pour éclairer tout le monde, En le fuivanc dans fes leçons , on reconnur qu'il poflédoit , au fouverain degré, le talent de faire des expériences; & ce qui n’eft pas moins eflen- tiel, celui d'appliquer le calcul aux phénomènes, & la Phyfique à la pratique des Arts. Sans cette double application, les expériences de Phyfique ne feroient le plus fouvent qu'un fpeétacle inutile. Indépendamment de ces Cours publics, M. Jallaberr, aux diftri- butions des Prix de l’Académie de Genève , & dans d’autres occa- fions folemnelles, prononçoit de favans Difcours , dont pluñeurs font des morceaux précieux. Les éruptions du Monr-Véfüve, la couleur des Nègres , les effets attribués à l'imagination des femmes enceintes , les amours des plantes , & la defcriprion des organes qui fervent à leur génération, font les fujets qu'il a traités dans quelques-uns de fes Difcours. Celui qui à pour objes les éruptions du Véfuve, eft imprimé dans le Wufœum Helvericum de 1752. Il faut joindre ici fes obfervations fur les Seiches, c’eft- à-dire, fur les crues fubires & palagères des eaux du Lac de Ge- nève , dont il eft fait mention dans l'Hiftoire de l’Académie des Sciences de Paris de 1742, & un Difcours contre l’opinien de quelques Savans, fur le bouleverfement général que paroft avoir éprouvé le globe terreftre. M. Jallabert foutient qu'avant le Déluge, l’arrangement admirable de ce globe éroit le même qu'aujourd'hui; que les montagnes, les fleuves, tout ce qui végère , tout ce qui à vie, les minéraux, les métaux, ont confervé leur nature; & que le monde entier ne forme qu’une chaîne immenfe, dont on ne fauroit ôter un feul anneau fans détruire l’harmonie généraie qui doit y régner. Les travaux atrachés à fa place , altérèrent fa fanté. IL demanda & obtint laspermiflion de venir refpirer l’air des Provinces méri- dionales de France. H vint à Montpellier , à la fin de 1742; il y pafla fept à huit mois , qu'il regardoit comme les plus agréables de fa vie. Sa fanté parut fe rétablir ; il fur fatisfait & du climar, & de ceux qui l'habitent. On l’avoit particulièrement adreffé à M. de Sauvages, & il fe lia bientôt avec rous les Membres de l’A- cadémie. Elle défira de l'avoir pour @éñfrère, & ce fur à fon oc- cafñon qu’elle demanda une claffe' d’Affociés Etrangers qui lui man- quoit. Cette clafle fur accordée , & M, Jallaberc fur le premier s6 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, que les fuffrages de l’Académie firent entrer. Quelque fenfible qu'il für à cet honneur académique, fa modeitie lui fit repréfenter qu'il étoit bien mieux dû à fon ancien Maître & fon ami, M. Cramer, dont le mérite, difoit-il, éroit de beaucoup fupérieur au fien. La nouvelle claffe ne devoit être compofée que de quatre perfonnes , & il y avoit, ce femble, quelque inconvénient à en choifir deux dans la feule Ville de Genève. Cependant , l’Académie paña par- delfus cette confdération , & les deux Amis furent nommés. M. Jallaberc fut roujours le premier d’une claffe formée à fon occafon, & M. Cramer, fenfble à une diftinction bien méritée, fut ravi de la tenir en quelque forte, des mains de l'amitié. On vient de dire que la fanté de M. Jallabert avoit paru fe ré- tablir à Montpellier. À fon retour à Genève , quelques - uns des maux dont il s’étoit plaint, parurent revenir ; mais ils furent beau- coup moindres & fon état beaucoup plus fupportable. 1 lui fallut feulement s’affujertir à quelques ménagemens , & modérer , de tems en tems, fon ardeur pour le travail. On l: difpenfa entièrement des fonctions de Pafteur, qu'il ne faifoit plus que très - rarement. Ainf les Sciences profitèrent de tous les momens que l'état de fa fanté lui permit de leur donner. Les merveilles de l'Electricité qui, dans ce tems- là, firent tant de bruit dans le monde, vinrent occuper M. Jallabert : il répéta les expériences & en imagina de nouvelles. Plein de cette matière, il publia, en 1748, l'Ouvrage le plus confidérable qu'on ait de lui : il eft incitulé : Expériences fur l'Eleétricité , avec quelques conjeëtures fur la caufe de fes effets, en un volume iz-8°, IL règne dans cet Ou- vrage beaucoup d'ordre & de clarté. Les phénomènes y font ex- polés avec rour le détail nécelfaire. L'éleétricité s’y montre, fi l’on eut s'exprimer ainf, fous tous fes différens afpects. L’artraétion & la répulfon des petits corps légers par le tube ou par le globe , la communication de la vertu électrique , la propriété de rendre la lumière , les étincelles électriques , la commorion de Leyde, con- nue fous le nom de coup foudroyant, rien n’eft oublié. L’Auteur, our rendre raifon de tous ces effets, fuppofe un fluide très-délié & très-claitique, rempliffant l'univers & les pores des corps mè- me les plus denfes, rendant toujours à l'équilibre ou à remplir les vuides que laiffent les autres corps. Il faut voir dans l'Ouvrage même , comment les phénomènes peuvent réfulrer de l’aétion de ce Auide. Cette hyporhèfe elt propofée par M. Jallabert, avec beau- coup de modeftie. Il reconnoit que la Nature récompenfe plus vo- lontiers la patience de ceux qui l’étudient , que la curiolité de ceux qui prétendent la deviner. Il n’en eft pas moins perfuadé, que les conjectures ne font point inutiles. Les bannir entièrement, ce feroir Dirii rs MUASREL SSSR à SUR L'HIST. NATURELLE ET LES ARTS. 87 arrêter les progrès de la Phyfique. La hardieffe à imaginer, peut fervir de préparation aux plus grandes découvertes. Peut-être que Newton auroit moins produit, fi Defcartes avoit moins ofé. "Un morceau très-intéreffant dans l’'Ouvrage de M. Jallabert, c'eft le détail des expériences faites fur un paralytique pour le guérir par l'électricité. M. Jallabert eft le premier qui ait eu certe idée. Elle fit en naiflant une affez grande fortune , & l’on vit par-tout des pa- ralyriques éleétrifés. On trouve dans les Recueils de l'Académie de Montpellier , un grand nombre de femblables expériences faites par M. de Sauvages. Il ne paroît pas qu'aucun paralyrique ait été par- fairement guéri par ce moyen qui a feulement procuré des foulage- mens. Toutes les découvertes n’ont pas le mérite d'apporter des avan- tages réels à l'humanité. La patrie curieufe dans routes les Sciences fera toujours plus étendue que la partie utile. En 1752, M. Jallabert fut nommé, par acclamation , Profeffeur de Mathématiques & de Philofophie. Certe place lui coûta bien des larmes; elle éroit devenue vacante par la mort de fon refpectable Collègue M. Cramer. Tous fes concitoyens partagèrent fes regrets, & il les exprima dans un difcours public, imprimé dans le Journal de Suiffe. Les talens de M. Jallabert fe font exercés dans plus d’un genre. Il étoit très-verfé dans l’Hiftoire Naturelle. Il avoit formé un ca- binet de médailles , & fe trouvoit en relation avec plufeurs célè- bres Amateurs de l'antiquité, entre lefquels nous devons diftinguer feu M. le Cardinal Paflioney , qui le follicitoit fouvent de faire le voyage d'Italie ; mais les grandes occupations de M. Jallabert ne lui permirent jamais d'y penfer : il avoit fait de profondes recher- ches fur l’hiftoire de fa patrie. Enfin il étoit excellent Bibliothé- caire, & on l’avoit affocié à MM. Baulacre & Abauzit, pour avoir foin de la bibliothèque publique qu’il a confidérablement augmentée. Il eût été trop heureux, s’il eût pu continuer de fe livrer en li- berté, à fon goût pour les Sciences; il auroit pu alors remplir par- faitement les hautes deftinées que lui avoit préfagees M. Bernouilli; mais fa patrie exigea de lui les plus grands facrifices , & il ne fut qu'obéir. Dès 1746 , il avoit été admis dans le Confeil des deux cents. En 1757, 1l fut nommé Confciller d'Etat, & alors, une nouvelle carrière s’ouvrant à lui, il fut forcé de dépofer le per- fonnage de Savant , pour fe réduire à celui de Magiftrat & de citoyen. Les commencemens de fon ad#iniftration furent heureux; 1l montra, dans toute fa conduite , Que l’efprit des fciences & celui des affaires, ne font nullement incompatibles. Il déploya, daus plufieurs occafions, avec le plus grand fuccès, l’activité de fon ss OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, génie; & chacun s'empreffa de lui applaudir. À ces jours brillans , en fuccèdèrent de nébuleux. La divifion fe mit dans la République: on le pourvut du Syndicat dans ces fâcheufes circonftances. C'eft alors qu'il regretta plus d’une fois la douceur de fes anciennes oc- cupations : il lui fembloit entendre la voix des fciences qui s'ef- forçoit en fecrer de le rappeller ; mais l'amour de la patrie le ren- dir fourd à cette voix : 1l ne fe detourna point de fon objet, le bonheur de fes concitoyens. En voulant le procurer, il lui arriva fouvent de déplaire aux deux parties. Il favoit bien que tôt ou tard, on lui rendroit juftice; mais il fallut s'entendre blâmer, & palfer une partie de fes jours dans l’amertume. Enfin, les troubles cef- sèrent , & le terme prefcrit à la durée de fon Syndicat, arriva. IL fortit de charge le 11 Mars 1768. Débarraifé des plus cuifans fou- cis, il s’emprefla d'aller prendre quelque délaffement dans fa mai- fon de campagne de Beguin , fituée en Suifle. Un danger qu'il n'avoit pu prévoir , l’attendoit à fon retour. Au milieu de fa route, & dans le chemin le plus uni, fon cheval s’effraye , fe renverfe , & Ini porte à la tète un coup mortel. D'habiles mains s’empreffenc inu- tilement de voler à fon fecours. Au bout de quelques heures, on eut la douleur de le voir expirer : il n'étoit âgé que de 56 ans. Sa mort caufa, dans la Ville de Genève, un deuil univerfel ; & les deux partis oppofés , qui, de fon vivant, fembloient s'être accordés à le contredire, fe réunirent alors pour le pleurer. On a trouvé dans fes papiers des projets de Mémoires fur la théorie de la terre ; fur la congélation du mercure ; fur l'élévation de l’eau en vapeurs; fur la force des liqueurs dans l’état d’expanfbilité. Ces effais qui, avec le tems, feroient devenus des ouvrages confidé- rables, portent l’empreinte d’un Phyficien obfervateur. Il avoir auñli compolé un Cours compier de Chymie , qui n'a point été imprimé. Les lertres qu’il écrivoit aux divers Savans de l’Europe, & celles qu’il en recevoit continuellement , formeroient un Recueil précieux fi jamais il étoit donné au Public. M. Jallabert étoit extrèmement aimable en fociété , il avoit l’ef- prit naturellement gai, tourné même à la plaifanterie & à la raille- rie; mais il réprimoit un talent dangereux, dont un efprit jufte ne fauroit redouter les fuites, IL étoit facile & communicatif, d’une modeltie qui paroîit avoir nui à fon éloge, en dérobant plufeurs traits qui en auroient fait l'ornement. MÉMOIRE SUR L'HIST. NATURELLE ET LES ARTS. 89 EEE MOMIE MMOT CRE Sur une nouvelle Roue éleétrique ; Par M. BERTHOLON, Prétre de Saint-Lazare ; Profeffeur en Théologie , des Académies des Sciences de Lyon, de Beziers, de Marfèille , de Nifmes, de Touloufe, de Montpellier, &c. Ec. Si tout eft lié dans la Nature, & fi les divers individus qui com- pofent la mafle entière de ce vafte Univers > ne font que les diffé rens degrés qui forment la chaîne immenfe des êtres, il eft cer- tain que toutes nos connoiflances graduées entr'elles font les chaî- nons dont l’aflemblage & l'union conftituent la férie univerfelle des Sciences, Ainf toutes les découvertes font intimément liées les unes aux autres, toutes les vérités font unies par des nœuds indiflolu- bles , toutes les obfervations , les expériences ont des rapports né- ceffaires, & rien n’eft à négliger , puifque tout fait partie & degré dans. l’enchaînement univerfel. C’eit pourquoi ce qui aux yeux du vulgaire , ou aux regards de ces froids Contemplateurs qui n’ont que des yeux, paroît être un frivole amufement > eft cependant au jugement de la faine raifon, un object utile encore plus que cu- rieux. Quel eft le génie affez clairvoyant qui du tems de Thalès, c’eft- à-dire, fix cens ans avant notre Ere, où on connoifloit uniquement la propriété que l’ambre frotré a d'attirer les corps légers, eût ofé croire que ce phénomène fi petit en apparence, eùt un jour conduit la race audacieufe de Prométhée ; à faire defcendre à fa volonté le feu du ciel, à détourner la foudre , & à la maïîtrifer en quelque manière ? Si quelque ignorant Contempteur de cet âge eût vu le célèbre Fondateur de la fete lonique , occupé férieufement à frot- ter de l'ambre, & à attirer par ce moyen des brins de paille ; avec quelle orgueilleufe pitié, & avec quel altier mépris n’eûc - il pas regardé cet illuftre Philofophe? & c’eft pourtant à ce premier phénomène que nous devons la férie de toutes nos connoiflances far ce fujer, & même la guérifon de certaines maladies chroniques, rebelles jufqu’à-prèfent aux remèdes de l’art. Laiflons donc le peuple de tous les états, blafphèmær" ce qu'il ignore, & continuons Tome VIII, Part. II. 1776. 99 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, d'interroger , avec une opiniâtre conftance , les Oracles de la Na- ture. On entend par roue électrique , une roue conftruite felon un cer- tain mécanifme que l'électricité feule met en mouvement. Franklin en a inventé deux différentes, & j'ai eu le bonheur d’en imaginer une troifième qui diffère abfolument des deux précédentes. Afin qu'on puiffe plus facilement les comparer , je vais auparavant rap- porter la defcription qu’en donne le célèbre Phyfcien de Phila- delphie dans fon Ouvrage, Tom. II, pag. 55, pag. 172 & fui- vantes. Sur le principe établi que les crochets des bouteilles différemment - chargées , atrireront & repoufferont différemment , on a fait une roue électrique qui tourne avec une force extraordinaire. Une petite flèche de bois élevée perpendiculairement , pafle à angles droits, à travers une planche mince, & de figure ronde , d'environ 12 pouces de diamètre , & tourne fur une pointe de fer fixée dans l'extrémité inférieure , tandis qu’un gros fil d’archal, dans la partie fupérieure , traverfant un petit trou dans une feuille de cuivre, maintient la flèche dans fa fituation perpendiculaire. Environ trente rayons d’é- gale longueur, faits d’un carreau de vitre, coupé en bandes étroires, {ortent horifontalement de la circonférence de la planche, les extré- mités les plus éloignées du centre excédant les bords de la planche d'environ quatre pouces ; fur l'extrémité de chacurr, eft fixé un dez de cuivre. Maintenant, fi le fl d’archal de la bouteille éleétrifée par la voie ordinaire, eft approchée de la circonférence de certe roue, il atirera le dez le plus proche, & mettra ainfi la roue en mou- vement. Ce dez dans le paflage, reçoit une érincelle , & dès - lors étant éle@rifé , il eft repouffé & chaffé en avant , tandis qu'un fe- cond étant attiré, approche du fil d’archal, reçoit une érincelle, & eft chaffé après le premier, & ainfi de fuite, jufqu'à ce que la roue ait achevé un tour: alors les dez déja éleétrifés , approchant du fil d’archal, au lieu d’ètre atrirés comme auparavant , font au contraire repoullés , & Île mouvement ceffe à l’inftant. Mais fi une autre bouteille qui a été chargée par les côtés eft placée auprès de la mème roue , fon fil d’archal attirera le dez repouflé par le pre- mier , & par-là , doublera la force qui fait tourner la roue , en en- levant non-feulement le feu qui a été communiqué aux dez par la première bouteille; mais leur en dérobant même de leur quantité paturelle , au lieu d’être repouffés lorfqu’ils reviennent verts la pre mière bouteille , ils font plus forremenr attirés ; de forte que la roue accélère fa marche jufqu'à fournir 12 ou 1$ tours dans une minute, & avec une telle force, que: le poids de cent rixdales dont nous la chargeâmes une fois, ne parut en aucune manière rallentir SUR L'HIST. NATURELLE ET LES ARTS. 91 fon mouvement. C’eft ce que l’on nomme une broche éleétrique , & fi un gros oifeau étoir embroché à la flèche perpendiculaire , il tourneroit devant le feu avec un mouvement capable de le rôur. Au lieu de faire cetre roue de bois, & d’y rapporter des rayons de verre , comme l’enfeigne M. Franklin , j'ai imaginé, dit M. d’A- libard , qu'il étroit plus fimple & plus commode de la faire d’une feule pièce de verre; j'ai choifi pour cela un carreau de verre de Bohème, le plus uni & le-plus plane que j'ai pu trouver: je l'ai fait couper en plateau rond de 18 pouces de diamètre: j'ai collé fur chacune de fes furfaces, une feuille de papier marbré en couleur de bois , qui n’approche pas de la circonférence du plateau, plus près que de deux pouces : j'ai enfuite maftiqué fur fon centre, de chaque côté, deux gros fils d’archal qui fervént d’axe , & dont l’un eft terminé en pointe pour fervir de pivot , & pour tourner fur une petite crapaudine de cuivre , & l’autre plus long ,»pour pafler dans un trou rond pratiqué dans une traverfe de bois. On pourroit faire l'axe rout d’une pièce , en perçant la roue au centre, pour les re- cevoir. Cette roue étant ainfi mife à peu-près en équilibre fur fon axe , j'ai maftiqué fur fes bords 30 balles de cuivre creufes, à égales diftances les unes des autres, & également éloignées du centre, L'on conçoit que certe roue eft bien plus légère, & par conféquent plus mobile que celle de M. Franklin, auili a-t-elle mieux réufli que celles qui ont été exécutées fuivant fa méthode. Mais cette roue , ainfi que celles qui font pouffées par le vent, l'eau ou les poids, reçoit fon mouvernent d’une force étrangère , à favoir celles des bouteilles. La roue qui tourne d'elle-même, quoi- que conftruite fur les mèmes principes , patoîtra encore plus furpre- nante ; elle eft faire d'un carreau de verre mince & rond, de 17 pouces de diamètre , dorée en entier fur les deux côtés, excepté deux pouces vers le boïd. On arrête alors deux petits hémifphères de bois avec du maftic au milieu des côtés fupérieur & inférieur op- pofés à leur centre, & fur chacune , une forte verge de fil d’archal longue de 8 ou 10 pouces qui font enfemble l’axe de la roue. Elle tourne horifontalement fur une pointe à l'extrémité inférieure de fon axe, qui pofe fur un morceau de cuivre cimenté dans une fa- lière de verre. La partie fupérieure de fon axe traverfe un trou fait dans une lame de cuivre cimentée à un fort & long morceau de verre qui le tient éloigné de $ ou 6 pouces de tour corps non électrique ; & l'on place à fon fommer, une petite boule de cire ou de métal pour conferver le feu. Dans un cercle fur la table qui foutient la toue , font fixés 12 petits piliers de verre à la diflance d'environ quatre pouces , avec un dez fur le fommet de chaque pilier. Sur le bord de la roue eft une balle de plomb, communiquañt par un fil M 2 92 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, d’archal avec la dorure de la furface fupérieure de la roue, & à fix pouces environ, eft une autre balle communiquant de la même manière avec la furface inférieure. Lorfque l’on veur charger la roue par fa furface fupérieure , il faut établir une communication de la furface inférieure à la table. Lorfqu'elle eft bien chargée , elle com- mence à s’ébranler ; la balle la plus proche d’un pilier s’avance vers le dez qui eft fur ce pilier , l’électrife en paffant, & dès-lors , eft forcé de s’en éloigner ; la balle fuivante qui communique avec l’autre furface du verre , attire plus fortement ce dez, par la raifon que le dez a été électrifé auparavant par l’autre balle, & ainfi la roue augmente fon mouvement jufqu'à ce qu'il vienne au point d’être réglé par la réfiftance de l'air. Elle tournera une demi-heure , & fera l'un portant l’autre, 20 tours dans une minute , ce qui fait 60a tours dans une demi-heure. La balle de la furface fupérieure don- nant à chaque tour 12 érincelles aux dez, ce qui fait 7200 étin- celles, & la balle de la furface inférieure en recevant autant des mêmes dez; ces balles parcourent dans ce tems près de 2$00 pieds. Les dez font bien attachés, & dans un cercle fi exa&, que les balles peuvent paller à une très petite diftance de chacun d’eux. Si au lieu de deux balles vous en mettez huit, quatre communiquant avec la furface fupérieure, & quatre avec la furface inférieure , placées al- ternativement ; lefquelles huit étant environ à fix pouces de diftance, complettent la circonférence , la force & la viteife feront de beaucoup augmentées , la roue faifant so tours dans une minute, mais elle ne continuera pas à tourner fi long-tems. On pourroit peut-être appli- quer ces roues à la fonnerie d’un petit carillon (on l’a exécuté depuis), & faire mouvoir par leur moyen de petits planétaires fort legers. Plufeurs Phyfciens avoient voulu conftruire la feconde roue de Franklin; & , quoique très-verfés dans cette partie de la Phyfque, aucun n'avoit pu réuflir à lui imprimer le mouvement circulaire ; on n'a aucune connoiffance du moindre fuccès en ce genre. M, le Marquis de Courtanvaux , de l’Académie royale des Sciences, qui fait fervir fa fortune aux progrès des Sciences & des Arts, & dont les connoiffances diftinguées & Les découvertes précieufes ne fonc ignorées nulle part; cet illuftre Académicien s’adreffa à MM. Delor & Sigaud. de la Fond , pour avoir une de ces roues. Le premier fubftitua aux dez de Franklin, des dez à quarnes arrondies , & le fecond des cylindres , & maloré ces changemens les roues ne purent tourner : ces tentatives infructueufes prouvent les grandes difficultés qu'on avoit à furmonter. M. le Marquis de Courtanvaux, après quel- ques efais, eft enfin venu à bout d'exécuter cette machine, & en a donné la defcription dans.une lettre inféxée dans le Journal de Phyfique. Avril 1774, pag. 272. SUR L’'HIST, NATURELLE ET LES ARTS. 93 Ce Savant fit faire des boules de 1 ÿ lignes de diamètre &'il en plaça quatre fur la furface fupérieure de la roue, & quatre autres en deflous , la moitié de leur diamètre excédant celui de la roue , ( ce qui eft effentiel , ainfi que de bien centrer la roue, comme il le dir lui même ). Les douze piliers font mobiles > étant placés fur une pièce qui entre à coulifle dans une autre fixée fur le bâtis, par ce moyen on place les piliers avec les boules qui les furmontent à une diftance convenable. Lorfqu’on charge. cette roue, on doit lui communiquer d’abord fe moins d’éleétricité pollible , pour qu’elle puiffe fe mettre en mouvement, autrement les. balles pourroient s'arrêter vis-à-vis des piliers, & la roue pourroit déronner roure feule. Tout étant ain préparé , on voit tourner cette roue d’une ra= pidité fingulière, en faifant 6o tours par minute. ticite La nouvelle roue que je propofe n’exige point un appareil auf compolé , puifqu’elle eft de la dernière fimplicité, C’eft une roue de fer blanc de deux pouces & demi de diamètre , percée dans fon mi- lieu pour recevoir une chape de cuivre | femblable à celles des ai guilles de boutfole : cette chape y eft foudée, Sur deux diamètres qui fe coupent à angles droits, j'ai fait fixer quatre rayons de fer de trois pouces & demi, de longueur chacun, en y: comprenant:la partie qui fert à les unir à la roue, qui eft d'un pouce. Ces rayons ont.une ligne & demie d’épaiffeur , & font dérerminés à une de leurs extrémités par des boules métalliques de quatre lignes & demie de diamètre ; & les boules étant éloignées de la circonférence. du cercle de fer blanc de deux pouces & demi , la roue entière à en tout fepr pouces & demi de longueur environ. Cette roue eft placée fur un pivot de cuivre ou de, fer; dont la pointe ne doit être ni trop aiguë , ni trop obtufe; dans le premier-cas, le poids de la roue l’émoufleroit ; dans le fecond , il y auroit trop de frottement contre les parois intérieures de la chape, & le mou- yement en feroit rerardé, On place certe roue devant le conducteur de la machine élec- trique , de telle forte que les boules qui rerminent les quatre rayons ne foient éloignées, lorfquelles tournent, que de deux ou trois lignes, environ de la’groffe boule du conduéteur. À une plus grande diflance le mouvement circulaire ne feroit pas firapide, & à une moindre , fi les rayons ou les boules n'éroient pas égales. 1] pourroie y avoir ur choc contre l'extrémité du conducteur qui arrèceroit la roue , & de plus la roue rourneroit moins vire , parce que l’érinçelle qui éclate entre; Le conducteur & les boules. auroir moins de force. Ileft bon que le centre:des boules coincide à peu:près ; fi cela n’éroit pas , la foue tourneroit roujours., mais elle feroit des ofcillarions ajterna+ 94 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, uivement déflus & deflous la boule du condutteur, qui retarderoient le mouvement. Lorfqu'on préfente cette roue au conducteur , on 4 foin de la placer de manière que la boule du conducteur réponde à peu-près au mi- lieu de la diftance qui fe trouve entre deux boules : alors, dès qu’on commence à électrifer une des boules , celle qui eft la plus proche eft ordinairement attirée par le conduéteur , elle’ eft éle&trifée par une étincelle très-forte qui éclate entré la boule du conduéteur & celle du rayon le plus proche ; la répulfion électrique Péloigne en la faifant tourner : la feconde boule eft attirée pour être électrifée par l'écincelle, & pour êtfé après repouflée, & ainfi de fuite. De façon que dans un tour de roue, il y a quatre étincelles qui ont éclaté, & autant à chaque tout fuivant. Le mouvement s'accélère à chaque révolution , & devient enfuite de plus en plus rapide, jufqu’à ce qu'il fe foit mis en équilibre avec la force qu'oppofe la réfiftance de l'air. NET Si une des boules étoit beaucoup plus proche du conduéteur que lautre , & que celui-ci ne répondit pas au milieu de la diftance qui eit entre deux rayons, on verroit des ofcillations que cerre boule feroic devant celle du conduéteur, & ces vibrations augmentant de plus en plus, la roue tourneroit enfin. Mais fi üne des boules eft placée d'abord:trop près dé l'extrémité du conduéteur , elle eft telle- ment attirée par l'extrémité du conducteur , qu’elle refte conftamment à la même place; cependant quand on place la roue comme je l'ai dit ci-deffus ; jamais abfolument elle ne manque de tourner. Dans des tems ordinaires, cette roue a fait 70 à 8o tours dans une minute, dans des tems plus favorables, elle à fait 90, 95, & 100 touts. Je fuis même venu à bout de lui voir faire 110 & 120 révolutions en y introduifant quelques changemens, & je fuis très- perfuadé qu’en la rendant plus lésère, & en augmentant la force & l'énergie de l'électricité du conduéteur, par différèns moyens fa- ciles & connus, fa rotation feroit encore plus rapide : j'ai fait quel- ques expériences à ce fujer, & j'en parlerai ne une autre oc- cafñon. Certe roue à pat conféquent tiré dans le mème efpace de rems d’une minute de 280 à 320 étincelles, & d’autrefois 360, 380 & 400 ; quelquefois même jufqu'à 440 & 480. Lorfqu'elle ne faifoic que 85 tours dans une minute, il y a eu, dans une demi-heure, plus de 2550 révolutions, & elle à tiré ro200 érincelles, & dans une heure, plus de $106 rours & 20400 étincelles, ce qui elt pro- digieux , eu égard au petit nombre de quatre boules : dans les tems où elle a fait r10 révolutions par «minute , on en a compté SUR L'HIST. NATURELLE ET LES ARTS. os plus de 6600 par heure, & plus de 26400 érincelles dâns le même efpace de rems. 3 Chaque boule , en fuppofant qu'il n’y ait que 85 révolutions par minute; parcourra donc, dans le mème tems, plus de 1914 pouces, & dans l’efpace d’une heure; plus de 114,840 pouces , ou plus de 9570 pieds. Si la roue fair 110 rotations par minute, chaque boule parcourta un efpace de plus de 2475 pouces par minute, & plus de 148,500 pouces par heure , qui donnent 12375 pieds, ce qui eft confidérable , eu égard au petit diamètre de la roue. Cette roue , tournant plus ou moins vite dans un rems que dans un autre , & avec une machine plus ou moins forte, pourra fervir d’un véritable éleétromètre fi défiré. Le mouvement de notre roue ne va jamais en diminuant, mais plutôt en aug- mentant toujours, parce que la force, qui la met en mouvement, n’éprouve point d’affoibliffement ; elle tourne perpétuellement , tant que l'éleétricité eft en jeu, ce qui peut durer à volonté & fans fin, ‘ Rien n’eft plus joli à voir, & ne fair plus de plaifir à enren- dre, que ces érincelles qui brillent & qui éclarent fucceflivement avec rapidité & avec un grand bruit : cela peut donner occafion d’y figurer quatre hommes tenant des fufils, dont les canons , ter- minés par une boule , feront des décharges fucceflives fur la boule du conducteur qui peut repréfenter un but & mille -autres amufe- mens de cette efpèce. Plufieurs de nos roues peuvent tourner à la fois ,:ce qui n’eft pas poflible avec celles de Franklin. J'en ai fait tourner fix en même-tems devant un même conducteur : alors, j’avois fait conf- truire un conducteur qui repréfentoit une grande croix ; chacune des petites branches étroit terminée par une groffe boule de métal, & chaque boule répondoit à deux roues ; avec le conduéteur ordi- naïre, deux roues tournent très-bien ; mais lorfqu’il y a plufieurs roues , le mouvement circulaire eft diminué , le fluide électrique étant partagé. La roue que j'ai décrite, tourne également lorfqu'elle eft pla- cée fur le conducteur , & qu’on lui préfente une boule de mé- tal non éleétrifée qui communique au plancher, mais le mou- vement circulaire ne m'a pas paru aufli rapide, les boules de la roue étant plus petites que celles du conducteur. J'ai fait faire quelques roues plus grandes que celle dont j'ai donné la defcription , & d’autres plus petites : toutes ont très- bien tourné, fur-tout une de 11 pouces & demi de diamètre, dont j'ai été très-fatisfait. La rapidité du mouvement n'a pas été 96 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, fi grande , lorfque les rayons ont augmenté de beaucoup , parce que la fphère d'activité de l’athmofphère éleétrique du conducteur, diminue en râifon inverfe du quarré de la diftance du centre des émanations: Cependant, une petite roue ne tourne pas d’autant plus vice qu’elle eft plus: petite; 1l y a de cer effet, plufieurs rai- fons de:méchanique qui, fe préfentent. J'ai aufi. exécuté plufeurs autres roues qui avoient plus ou moins de rayons, & par confé- quent plus ou moins de boules, & j'ai affez ordinairement trouvé que les roues ne tournoient pas avec une vitefle proportionnée au nombre des rayons & des boules ; comme on auroit pu l’imaginer; foir que le nombre des boules rendit la roue plus pefante , & con- féquemment moins mobile ; foit que la multiplicité des boules diminuât lai force électrique du conduéteur, en tirant dans un tems donné, plus d’étincelles ; foit par plufieurs autres raifons ; de forte que le nombre de quatre boules paroîr être préférable à ce- lui de huit & de fix, ainfi que les dimenfons qu’on a aflignées ci- deffus. Si la nouvelle roue’, dont on vient de donner la defcription & la conftruétion , tourne avec une rapidité fupérieure à celle des roues de ‘Franklin ; on doit l’attribuer au peu de frotte ment. qu’elle éprouve, à fa grande mobilité, à fon peu de poids & à fa grande fimplicité; qualités importantes dans tous les ebjets phyfco - méchaniques : de plus, le principe moteur eft dif- férent. Je finirai en faifant remarquer qu’une certaine précifion n’eft pas abfolument néceffaire pour réuflir dans cette expérience. Si la roue n'étoit pas en équilibre, on n’auroit qu'à charger de petits poids un: côté de la roue; fi les rayons ou les boules n’éroient pas égaux , le mouvement de rotation auroit toujours lieu, mais la vélocité diminueroit feulement : ainfi, cette roue ne peut être que très-facile à exécuter, 51: e>° AA EXPÉRIENCES L) SUR L'HIST. NATURELLE ET LES ARTS. 97 PEN PE RAEN CES Sur les Liqueurs animales expofées à la machine du vuide; Par le Doëleur DARWIN. Or penfoit anciennement qu'il exiftoit de l'air dans quelques vailleaux fanguins ; mais cette opinion fut profcrite par la décou- verte de la circulation, Cependant, nous avons des Phyfologiftes modernes qui femblent encore croire que ces fortes de vailleaux re- cèlent quelque vapeur élaftique. C’eft pour cela qu'ils attribuent les maladies lunaites & équinoxiales aux changemens de preffion de l’athmofphère. _ Ce fentiment ne s'eft accrédité que parce qu'on a vu la peau s'élever, fes vaifleaux fe diftendre , & même fe rompre fous la ventoufe. L'expérience fuivante paroïc effe&tivement d’abord Le dé- montrer, Quatre onces de fang ont été mifes fous le récipient de la ma- chine du vuide, immédiatement après avoir été tirées du bras, À mefure qu'on pompa l'air, le fang commença à fe bourfoufler & à fe remplir de bulles , au point qu'il augmenta dix fois de volume, Mais comme le faux raifonnement ne tire jamais tant à confé. quence que dans la Médecine , on ne peut trop s'attacher à éviter l'erreur dans laquelle l’obfervation précédente feroit capable d’in- duire les perfonnes qui n’y feroient pas affez d'attention. M. Young, habile Chirurgien de Shiffnal, & M. Waliire, Pro- fefleur d'Hiftoire Naturelle, ont bien voulu faire, en ma faveur, les expériences qui fuivenr. 1°. On à fait une double ligature à la veine jugulaire d’un mou- ton, pendant que l’animal étoit encore en vie : l’efpace compris entre chaque higature, étoir rempli de fang ; on emporta cette por- tion de veine avec fes liens; elle fur d’abord mife dans un verre d’eau chaude , & placée fous le récipient de la machine du vuide, Elle s’y précipita au fond de la liqueur, & ne s’éleva jamais, quoique l'air für pompé le plus exaétement pofible. Alors, on l'efuya; elle fut placée à fec deffus la platine de la machine; & après avoir renouvellé le vuide , on ne put y appercevoir la moindre expanfon. Tome VIII, Par II. 1776. N 05 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE; © 2°. Ona lié le col de la véficule du fiel du mème animal, im- médiatement après fa mort. On l’a foumife à la machine pneuma- tique , en la mettant d’abord dans l’eau, & enfuite à fec fur la platine, comme dans la première expérience. Elle évoic pleine de bile, & romba au fond du verre. Mais quoiqu’on eût opéré tout le vuide praricable, il ne sy manifefta aucune altération dans l'un ni dans l’autre cas. 3°. On a lié le col de la vefie urinaire de ce mouton ; après quoi, on l'a d'abord jeitée dans de l’eau tiède, dont elle a gagné le fond. Elle renfermoit environ 3 onces d'urine. Dès qu'on com- mença à pomper, il parut à fa furface plufeuts globules argentins; enfuite elle fe gonfla manifeftement , & monta jufqu’au haut du vale. L'expérience fut répétée à fec, comme les deux précédentes, & l’expanfon de la vellie y revint encore aufli fubitement. M. Welfler, habile Chirurgien de Monsrofe , & moi, avons repris ces expériences en fous œuvre, de la manière fuivante. Nous avons emporté une portion du cylindre de la veine - cave inférieure d’un gros cochon qui venoit d’être affommeé. Ce fegment veineux étoit rempli de fang que nous y avons intercepté entre deux ligatures. Il en contenoit environ une once , & avoit un pouce & demi de longueur. Nous le jettimes dans de l’eau chaude, im- médiatement après l'avoir enlevé du corps encore tout chaud, & il fut placé de fuite fous le récipient de la pompe. Après avoir extrait & laiflé rentrer l’air à plufeurs reprifes , nous ne vimes pas du tour oroflir la veine, quoique ç'eût été très-facile à con- noiître par l’élévation du vaifleau dans la liqueur: Cette expérience a également réufli fur la veflie urinaire, l’urècre ayant été lié, tandis que la veflie étoit encore dans le corps. La véficule du fel s’eft gonflée dans l’eau bien chaude , quoique nous euflions lié le conduit de la bile avant de retrancher cet or: gane du. foie ; il a même paru, fur fes côtés, des bulles fembla- bles à des globules de mercure, comme la veflie urinaire en a pré- fenté dans les expériences faites à Shiffnal. Mais dans un cas, aufli- bien que dans l'autre , nous ne pouvons attribuer cet effet qu'à quelque refte de tiffu cellulaire adhérent aux veflies , qui avoit été pénétré par l’air dans le tems qu'on le dérachoit. L'eau qui a fervi à routes ces expériences, n’étoit échauffée qu’au centième degré du thermomètre de Fahrenheis, de crainte qu'une plus grande chaleur n’eût développé, dans ces fluides, une vapeur élaftique qui n'y exifte pas naturellement. Chaque partie a été exac- tement dépouillée de fon rillu cellulaire & graiffeux : car il y avoit lieu d'appréhender que l'air athmofphérique ne s’introduisit dans SUR I'HIST. NATURELLE ET LES ARTS, 99 ce tiffu, comme on en voir des exemples, lorfqu’on écorche des animaux récemment tués, & même comme cela arriva, dans deux de nos expériences déja citées, ainfi qu’on peut s’en affurer par les globules arsentins qui fe montrèrent à la furface des vellies. Les faits établis par ces expériences , nous portent à conclure, 1. que le changement confidérable, furvenu au fang dans notre premier eflai, dépendoit de la grande quantité d'air athmofphéri- que , qui s'y étoir mêlé pendant fa fortie hors de la veine. Cette confidération doit nous faire juger, combien les opérations, faites far les propriétés fenfibles ou chymiques de ce fluide, font incer- raines & trompeufes; car fa couleur, la difpofition qu’il a à fe coa- guler, & peut-être même , la facilité avec laquelle il fe putréfie, euvent fort bien être la fuite de cette forte de mêlange. D'’ail- fe ne voyons-nous pas combien la quantité d'écume , que le fang forme dans la machine du vuide , furpafle celle qu’on remarque dans l'application de la ventoufe ? Cependant, le vuide elt peut - être aufli exact dans un cas que dans l’autre. 2°. Ces faits nous appren- nent encore que les animaux peuvent impunément fubir,une pref- fion plus variée de la part de l’athmofphère , que les autres corps de la nature. On dit que certaines perfonnes ont eraché le fang, pour être montées au fommet de quelques montagnes. Cela n'arrive pourtant pas aux animaux qu'on expole fous le récipient de la ma- chine pneumatique , quoique la pefanteur de l'air y foit quelque- fois moindre que fur la cime des monts Les plus élevés. Il eft donc probable que ce n’étoit là qu’une maladie accidentelle , ou l'effet de quelque exercice violent dans le tems de la montée. Le Doéteur Æalley rapporte que defcendant lui-même dans la cloche du plongeur , il n’éprouva d'autre fenfarion défagréable qu’une efpèce de bourdonnement dans les oreilles, qui revint quand il monta , & précifément à la même hauteur de l’eau. Le bourdonnement dont parle ce Phyfcien , étoit probablement dû à l’air renfermé dans la caille du tambour , dans le veltibule, dans le limaçon & dans les canaux femi-circulaires, qui fe fit jour dans les trompes d’Euffache , ou dans l'oreille externe, par quel- que voie inconnue. Avant de terminer ce Mémoire, je ne peux m'empêcher de par- ler d'une idée, que l’obfervation du Doéteur Haley me fit naître, Préfumant qu’une femblable opération, pratiquée fur des fourds, dont la caufe immédiate de la furdité für due à l’excès ou au dé- faut de l’air intérieur des organes de l’oüie, j’appliquai une ven- toufe, munie d’une feringue , fur les oreilles de trois perfonnes qui n'entendoient prefque rien. L'inégalité de l’apophyfe maltoïde, m'obligea d’appliquer autour de l’Aéix deux ou trois cercles de cuir N 2 100 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, trempés dans de l'huile. À mefure que je fis jouer le pifton de la feringue pour pomper l'air, l'oreille externe fe gonfla & devine rouge : mais les patiens fe plaignant enfin d’une douleur au-dedans de l'organe, j'y laiffai rentrer l’air, en éloignant ma ventoufe. L'un: des trois entendit parfaitement d’abord après l’opération, & eft refté guéri pour toujours. Les deux autres n’en ont reçu aucun bien ni aucun mal. OBSERV A TAIUINES PHYSICO-CHYMIQUES SUR: E E SC OX UPB/ETURNS, Lues a lAcademie Royale des Sciences , par M. MACQUER,pou# M. OPo1Ix, Mañre Apothicaire a Provins. Es couleurs font une illumination particulière des corps qui ne: us les fait pas feulement appercevoir , mais qui leur imprime en- Ce un caractère diftin@if, indépendant de leur forme extérieure, FUnivers, femble lui donner la vie. C’eft le coloris & la dernière perfe&tion du tableau. C’eft un fard que la Nature répand, comme en fe jouant, fur la furface des objers. Mais la Nature, dans fes jeuxs, n'en eft pas moins difficile à faifir. C’eft au contraire alors, que laif= fant moins de prife , elle fe dérobe plus aifémenr à nos recherches, Auffi la théorie des couleurs des corps eft-elle encore peu connues. Peut-être le peu de lumières qu’on a acquis fur certe matière, vient-il de ce qu'on ne l’a pas confidérée fous fon véritable point de vue, & de ce qu'on n’a pas aflez étudié la nature des corps colorés. Tous les Phyfciens , jufqu’ici, n’ont cherché à connoître des corps, que leurs propriétés relatives, telles que la pefanteur, la figure , le mouvement, le repos , l’élafticiré, &c. Enfin, ils fe font plutôt oc- cupés des qualités communes à Îa matière en général, que des principes qui conftituent chaque corps en particulier & le diflinguene des autres. Il ne feroit donc pas étonnant qu'ils fe fuffent trompés + Jorfqu ils ont voulu expliquer les effets naturels qui dépendoient des principes conftiturifs des corps. C’eft ce qui nous paroit leur être: arrivé , particulièrement fur la caufe des couleurs des corps, Le fen- etre 1llumination des corps, en variant infiniment le fpectacle de . L 2 (al SUR L'HIST. NATURELLE ET LES ARTS. . 101 timent de Newton, fur les couleurs de la lumière , eft fans doute le fyftème le plus intéreffant , le mieux conçu , le mieux développé. 11 femble que ce grand homme ait levé le rideau qui voiloit la Na- ture, & nous déroboir cette partie la plus brillante de fes opéra- tions. Le rems, en refpeétant l'ouvrage de ce génie fupérieur , paroît l'avoir fcellé du fceau de la vérité: cependant le fyftème de Newton n’eft pas toujours exempt du reproche que nous pourrions faire aux autres Phyfciens. Lorfqu’il s’agit d'expliquer la caufe des couleurs des corps naturels, on voir qu’il n’a connu ces derniers que forc imparfairement , & à la manière des autres Phyficiens, d'où il doi céfulter des explications plus ingénieufes que folides , & des confc- quences au moins hafardées. La lumière , fuivant le Philofophe Anglois, eft une matière hé« térooène , compofée effentiellement de fept couleurs primitives. Ces couleurs étant de nature différente, fe plient diverfement en traver- faut le prifme , & forment fur le carton qui les reçoit, une fuite de points colorés dans cet ordre: rouge , orangé, jaune , verd, bleu, indigo , violet : ce font ces différens rayons colorés, qui fe réfléchi{- fant fur les corps , les font paroître de telle ou telle couleur. Mais comment les couleurs fe féparent-elles de la lumière pour fe peindre fur les corps? Pourquoi un corps réfléchit-il une couleur plutôt qu'une autre ? Newton attribue cette propriété des corps à l’épaifleur des lames qui en compofent la fuperficie. Il calcula mème le degré d’a- minciflement & de ténuité que devoient avoir ces lames pour ré- fléchir cel ou tel rayon coloré. M. Nollet, en adoptant certe idée, croit aufli que la figure des parties, la contexture de leur affemblage, & les variétés qui naiffent delà , dans leur porofité , contribuent beau- coup à leurs différentes couleurs. Enfin, ces deux Phyfciens s’accor- dent à regarder les couleurs comme abfolument indifférentes à la nature des corps. Cette afferrion fuppofe de profondes connoïiffances en Chymie, & ne pouvoit être que le réfultat d’une longue fuite d’obfervarions fur la nature des corps colorés , cependant aucune expérience n’a été faite. Les Phyficiens ayant toujours regardé la Chymie comme une Science qui leur éroir étrangère , ne s’en fonc point occupés; s'ils l'euffent confultée, ils auroient vu qu’elle ne confirme pas leur fentiment. Il paroît au contraire démontré par une multitude de faits, que les corps ne font colorés , qu’autant qu’ils contiennent un principe inflammable, auquel on a donné le nom de phlogiftique (1), . — ‘@) Nouetemploïerons comme fynonimes les expreflions, marière inflammable, principe inflammable ; phlogiftique, Ce dernier ft une monnoye courante dons 102 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, La découverte de certe vérité nous femble ouvrir une nouvelle car: rière , & fépandre un grand jour far la nature des couleurs ; peut- être même, pourroir-elle amener une révolution dans cetre partie de la Phyfque. C'eft un fil, qui par une fuite de conféquences, peut nous mener naturellement aux plus heureufes découvertes. En effet, fi le phlogiftique eft la caufe des couleurs des corps, leurs différentes couleurs ne peuvent venir que des différens états de certe matière inflammable. Les corps dont le phlogiftique eft dans le mème étar, doivent paroître avec les mêmes couleurs. Ceux qui fubifentr di-_ verfes altérations dans ce principe inflammable , doivent pafer fuc- ceMfivement par autant de couleurs différentes. Enfin , 1l femble qu'on pourroit, jufqu’à un certain point, connoître l'état relatif d’un corps, & juger de fon degré d’altérarion par fa nuance de couleur. Ces recherches intéreffantes feront le principal objer de cette difs fertation. Après avoir, par des preuves fuffantes , érabli ce rapport, que les couleurs des corps ont avec leurs principes conftitutifs , nous remonterons à la caufe première des couleurs , & nous tâcherons d’éclaircir les queftions futvantes : pourquoi les couleurs fe féparent- elles de la lumière pour fe réfléchir fur les corps qui contiennent du phlogiftique ? Ÿ auroir-il un cerrain rapport entre le phlouiftique des corps, & les couleurs de la lumière? La matière colorante de la lumière & le phlogiftique, {eroient-ils d’une feule & même na- ture? Enfin, les couleurs font-elles originairement dans la lumière comme parties conitituantes, où font-elles étrangères à fon eflence ? Nous confdérons donc les couleurs, 1°. dans les corps naturels; 2°. dans la lumière. Nocre principale intention étant de tirer un parti avantageux des couleurs, en les faifant fervir à la connoiffance des fubftances colorées , nous ne marcherons qu’à l'appui de l’expé- rience. Pour les conféquences que nous tirerons par rapport au fyftème des couleurs en général, & qui feront la matière de la feconde partie de cetre differtation , nous ne les donnerons que comme des con- jetures vraifemblables. PRE M MERE. POSSR Ter Des Couleurs confidérées dans les corps naturels. Toutes les différentes impreflions que les objets peuvent faire fus l'organe de la vue, & auxquelles on a donné le nom de couleurs, L1 RS ja valeur n'eft pas bien dérerminée. Nous tâcherons, par la fuite, de fixer da3 yantage l'idée vague qu'on attache à ce terme. { —_ SUR L'HIST. NATURELLE ET LES ARTS. 10; É fe rapporter à neuf principales, le blanc , le noir, & les ep couleurs du prifme, rouge, orangé, jaune, verd , bleu, indigo, violer. Comparons enfemble ces couleurs. Voyons fi les corps qui fonc colorés de même, ont entre eux quelqu’identité de principe, & en quoi différent ceux qui font diverfement colorés. La couleur blanche eft celle que prennent ordinairement les corps qui n'ont que peu ou point de phlogiftique. Les corps les moins fuf- ceptibles d’inflammation , les rerres calcaires, & les fubftances métal- liques dépouillées par le feu ou par les réactifs de leur phlogiftique, fonc également de couleur blanche : tels font le blanc de plomb, le magiftère de bifmurh, la laine philofophique , ou fleurs de zinc, lantimioine diaphorécique , le bezoard minéral, la portée d'érain, l’arfenic, &c. La couleur blanche de ces matières eft mème la feule marque qui indique qu’elles font dépouillées de phlogiftique au- tant qu’elles peuvent l'être. On fait ,.au contraire, que la couleur noire des corps, annonce qu'ils fonc chargés d’une grande quantité de matière inflammable. Les métaux paroiffent d'autant plus noirs qu’ils en contiennent da- yantage. L'argent & les chaux de plufeurs fubftances métalliques, noirciffent même par le fimple contrat du phlogiftique réduit en vapeurs. Les fubftances charbonneufes & les fuies qui font fi in- flammables, font très - noires. On peur même dire que les corps noirs fonc feuls inflammables, car tous les corps ne prennent feu que quand ils font noirs. Le papier, approché du feu, rouflit d’a- bord; il noircir enfuite & s’enflamme alors. Le bois , le linge, la laine, la foie, la cire , le fuif, les huiles, celles même qui s’enflamment par les acides concentrés , noirciffent & fe conver- tiffenc avant de brûler en une matière charbonneufe. Si ces corps, dans leur état naturel, fonc blancs, c’eft que le phlogiftique , in- timement combiné , eft trop mafqué , & par conféquent de nul effer (1) : auffi, comme nous l'avons dit, ne font-ils pas inflam- mables fous cette couleur blanche, il faut que l’action du feu , en décompofanr ces corps, en fépare les principes, & dégage en con- féquence le phlogiftique d’une partie de fes entraves; alors ces corps paroiffent noirs & s’enflamment. Il ne fuit donc pas qu'un corps, pour paroître noir, contienue beaucoup de phlogiftique , il faut en- (x) Dans les corps combuftibles blancs, le phlogiftique, l'acide, l'huile, &c, font dans un état de combinaifon parfaire. Aucun de ces principes n’eft fenfble alors; aïnf, il.n'eft pas plus étonnant que ces corps ne foienr pas noirs, quai- que contenant beaucoup de phlogiftique, que de ne pas être acides & gras, quoi- que contenant de l'acide & de l'huile, , 104 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, core que cette matière inflammable foit très-développée, & en quelque façon à nud ; enfin, en état de prendre feu par le feu attouchement d'un corps aétuellement embrafé. Les corps blancs font donc en général ceux qui ne contiennent point de phlogiftique, ou dans lefquels il eft abfolument mafqué. Les corps noirs, au con- traire, font ceux qui en contiennent le plus dans un état plus dé- veloppé, & qui font en conféquence plus voifins de l’inflammation. Les obfervations fuivantes prouveronc fingulièrement ce que nous avons dit de l'état & de la quantité de matière inflammable con- tenue dans les corps noirs, & ces obfervations, données comme des phénomènes , trouveront ici leur explication. » Effayez, dit M. Franklin, à mettre le feu à du papier avec »un verre ardent; s’il eft blanc, vous n’en viendrez pas aifémenc » à bout; mais fi vous amenez le foyer de votre verre fur une tache » d'encre, ou fur des lettres manufcrites ou imprimées, le papier pren- » dra feu aufli-tôt à l'endroit écrit. (Ob/erv. de Phyfique ; Nov. 1773.) » Le premier Janvier 1774, il tomba à Paris une quantité fuf- » fifante de neige, pour en former une couche fur le bois d’ap- # provifionnement de cette Ville, fur les briques, les tuiles, &c.; » mais les batteaux à charbon ne préfentoient aucun veftige de neige, » finon dans quelques petits endroits épars où elle éroit raffemblée » en flocons, Comme les autres quartiers de la Ville étoient éga- » lement couverts de neige, il fe préfenta fur le Quai de Conti un © phénomène à-peu-près femblable au premier , dans les endroits # où les Charbonniers ont coutume d’expofer leur charbon, la » neige toit également fondue, quoique le pavé ne füt, pour ainf » dire , recouvert que d’une couche lésère de pouflière ». ( Obferr. de Phyfique, Avril 1774.) » La boule d’un excellent thermomètre ayant été expofée aux » rayons directs du foleil , le mercure monta au degré 41, di- ” vilion de M. Réaumur; cette boule fut peinte en noir avec de » l'encre de Chine. Pendant l'application de la couleur & l’évapo- » ration de l'eau , le mercure defcendit de quelques lignes; mais » il remonta peu-à-peu jufqu'au 53° degré «. Les corps noirs font donc ceux qui contiennent plus de matière inflammable , & qui s’enflamment plus aifément. ( {dem.) Les corps rouges, jaunes, &c., enfin tous ceux qui paroïffene colorés des couleurs du prifme, reconnoifflent auffi pour caufe de leurs couleurs une matière inflammable, ainfi que les corps noirs, mais fpécifiquement beaucoup moins denfe que dans ces derniers, La Chymie eft pleine de faits qui prouvent cette vérité , & il fufñr de raréfier le phlogiftique d'un corps pour lui faire prendre les couleurs variées de l’ixis. Le fer, par exemple, eft du LR es ES SUR L'HIST. NATURELLE ET LES ARTS. 105 des corps rrès-noirs, & dont, en conféquence, le phlogiftique eft le plus abondant : l'aétion du feu lui fait perdre de plus en plus de fon phlogitique , la première PRLORA de chaleur lui em- porte une partie de celui de fa furface ; elle prend alors plu- fieurs nuances de couleur jaune, verte, rouge , bleye , violette. La plupart des méraux en fufon , qui commencent à fubirle pre- mier, degré de calcination, fe couvre d’une pellicule mêlée des mêmes couleurs. Les eaux martiales, celles qui contiennent des matières végérales ou animales putréfiées, les décoctions de fubf- tances réfineufes, comme celle de quinquina, de graine de genièvre, &c., préfentent également des iris à leur furface. Les matières combuftibles , avant de brûler , prennent une couleur noire ; la flamme qui fuccède , eft le développement de leur phlogiftique , & elle offre des couleurs bleue, verre , jaune, rouge. Dans trous ces cas, il arrive décompoltion & perte d’une partie du phlogiftique. La couleur noire des corps prouve donc l’intenfité de leur phlo- giftique, & c’eft la raréfaétion de ce mème principe qui leur fait prendre les couleurs du prifme. Cherchons fi ces couleurs diffèrent aufli entr'elles par une quantité plus où moins grande de matière inflammable ; fi les corps anxquels on ajouteroit où on retranche- roit de plus en plus de leur phlooiftique , prendroient fucceflive- ment routes les couleurs & dans quel ordre. Pour cet effet, nous nous fervirons particulièrement des fubltances métalliques; les vé- gétaux & les animaux étant d’une teinture plus délicate, fe prè- tent moins aux expériences ; la moindre altération qu’on leur fait éprouver , en opère fouvent la décompoftion entière. Le fer, comme nous l'avons dir, dans fon état parfait, eft très noir , fon brillant métallique n'étant dû qu'à l'aggrégarion de fes parties. L'air & l’eau combinés, lui enlèvent beaucoup de fon phlogiftique , & il forme alors l’ocre jaune. L’aétion du feu peur encore priver cette terre martiale d’une partie de fon phlogiftique, & elle pale à l’état d’ocre rouge. Son phlogiftique eft alors extrè- mement rarefé ; elle en contient le moins pofhble , & n'elt pas mème diffoluble. L'ocre jaune, que nous avons dit en contenir davantage, peut en effet fe diffoudre dans les acides, mais elle n’eft pas criftællifable ; il faut à cette terre un degré de plus de phlogiftique , & elle prend alors une couleur verte : tels fonc les cryfaux de vitriol martial. A l’état du fer dans ce vitriol , fi on ajoute du phlogiftique, dont s’eft chargé la liqueur alkaline phlo- giftiquée fur du fang de bœuf, le fer fe précipite en bleu-clair ou indigo , de toutes les nuances de bleu , à raifon de la plus ou moins grande quantité de matières maigres auxquelles il eft uni, & qui foibliffent l'intenfité de fa couleur ; fi on précipite le fer Tome VIII, Part. II. 1776. 506 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, de fa diffolurion , pat une matière réfineufe aftringente , telle qu'ert fournit la noix de galles, il reprend une très-grande quantité de hlosiftique, & fa couleur alors eft le violer ice : celle paroit Parcs étendue dans beaucoup d’eau. Enfin, fi on furcharge le fer de phlogiftique , en le traitant avec des matières grafles , il reprend une couleur abfolument noire, laquelle ‘eft fa couleur naturelle quand il eft parfait & qu'il eft réduir en fes parties intégrantes, comme dans l’'œtiops martial de Lémery. Le plomb & le bifmuth , foumis à l’action du feu violent & long-tems continué, perdent facceflivement de leur phlogiftique. Il A s’atténue, s’éclaircit, fe diflipe de plus en plus, La chaux qui en réfulre, prend d’abord une couleur jaune, enfuite elle paffe à l’o- rangé & forme le maflicot; enfin, elle devient rouge, & c’eft le minium. Elle eft alors plus difhcile à réduire, ce qui prouve qu’elle a perdu fuccellivement de fon phlogiftique , & qu'il eft dans fon plus grand degré d’exhaltarion. Il fuir déja de ce que nous venons de dire, 1°. que les différen- tes couleurs des corps, dépendent de la quantité & de l’état de leur phlogiftique; 2°. que la couleur rouge eft celle qui annonce le phlogitique porté à fon plus haut point de raréfaétion; 3°. que les corps fe rapprochent d'autant plus de la couleur noire, que leur phlogiftique éft plus intenfe; 4°. que les différentes couleurs par lefquelles ils pallent dans la raréfaction fucceflive de leur phlo- giftique , & l'ordre qu’elles fuivent entrelles, font après le noir, le violer, le bleu , le verd, le jaune, l'orangé & le rouge ; s’.enfin, que ces couleurs font les mêmes que celles du fpeétre folaire, & que l’ordre qu’elles obfervent , eft aufli le mème. Voyons fi les au- tres corps colorés confirment ces premières obfervations : pour cela, nous fuivrons les effets que produifent fur eux les différens réactifs, en commençant par le feu qui eft le plus puiffanc de tous. Dans la concentration de l'acide nitreux, les vapeurs font d'a- bord jaunes , Orangées ; enfin rouges. La chaux d'or, traitée avec des matières fondantes à un feu de- fuñon, forme le rubis artificiel d’un beau rouge. La chaux de fer donne aufli au verre une couleur rouge. Le feu fait prendre au foufre une couleur rouge, de jaune qu'il eft naturellement. Le téalgar & le cinabre ne doivent de mème leur couleur rouge qu'à l'exhaltation de leur foufre. La chaux d’antimoine, pouflée à un feu violent, prend une couleur plus claire, & fe convertit en un verre de couleur oran- gée & rouge. SUR L'HIST. NATURELLE ET LES ARTS. 107 Le mercure, précipité par l’alkali fixe de fa diffolurion, & foumis dans une cornue à un feu affez fort pour faire rougir la cornue , a donné les couleurs fuivantes en fe fublimant. » La par- » tie inférieure du col de la cornue étoit, depuis deux pouces au- » deffous du bec, enduite d’une couche mince d’un jaune foible » qui fe perdoir dans une autre couche de couleur orangée , à la- » quelle en fuccédoic une autre jaune plus foncée, qui, devenant » de plus en plus rouge à mefure qu'elle approchoit du corps de » la cornue , fimifloit par être rouge & brillante comme le rubis «, (Objerv. de Phyfique, Février 1774.) Le mercure, calciné avec l’acide nitreux , forme une mafle blan- che, dont l’action du feu dégage une couleur d’abord jaune, en- fuire orangée , enfin rouge, & c'eft le mercure précipité rouge. Ce même métal, expofé à un feu long tems continué, fe con vertit en une poudre rouge, à laquelle on a donné, quoique fort improprement, le nom de mercure précipité per Je. * Les huiles ne peuvent diffoudre le foufre qu’à l’aide d’un certain degré de feu, & elles prennent alors fucceflivement les couleurs jaunes , oranges & rouges. L'action de la chaleur rarefie le phlogiftique des fruits. Le côta le plus expofé au foleil , change fa couleur verte en jaune, en- fuite en orangé, enfin en rouge. Les premières feuilles que les végéraux pouffent au printems, contiennent très-peu de matière inflammable , étendue dans beau- coup d’eau ; elles font jaunâtres ; quelques-unes mème comme celles des Grenadiers, &c. font d’abord rouges : le jaune fuccède enfuite, & fe mêle d’un peu de verd. À mefure que les fucs deviennent plus abondans, & la matière inflammable plus denfe, le jaune s’ef- face, le verd prend plus d’intenfité, & palle même au bleu ; telles TENTE les feuilles du bled , &c. En automne, lorfque les feuil- Jes ne reçoivent plus affez de fucs pour répater la perre qu’elles fonc de leur phlogifique par la tranfpiration, leur couleur paffe au verd clair, enfuice au jaune, & fouvent à la couleur rouge, ainfi qu'il arrive aux feuilles de cerifier , de pècher, &c. Le phlogiftique des chaïbons, réduir en état d'ignition , c’eft - à- dire , extrèmement raréñé par le feu, change en rouge vif, fa cou- leur noire. » Dans la famme du feu domeftique , de la chandelle, &c., » on remarque que l'extrémité de la flamme eft rouge , enfuite pa- » roiffent l’orangé & le jaune qui, fe confondant enfemble, ne font » en apparence qu'une feule couleur , laquelle eft celle du corps de 2 10 OBSERVATIONS SUR. LA PHYSIQUE, » la flamme (1). Au bas de la flamme, on voit diftinétement le verd, » puis le bleu immédiatement après Île verd ; enfin, on apperçoit » quelquefois enfuite une petite bande violette «. ( Ephemérides d'Allemagne.) La Aamme nous donne , comme on voit, une variété de couleurs qui toutes obfervent conftamment entr'elles l’ordre que tous les corps tendent à fuivie, dans la raréfaction de leur phlogiftique. La cou- leur noire de la mèche, à fa partie inférieure, prouve ce que nous avons dit, que les corps ne font inflammables que fous la couleur noire. C’eft le premier developpement du phlogiftique. Les autres couleurs, ainfi que dans le prifme , fe fuccèdent dans cer ordre, violer, bleu, verd, jaune, orangé; enfin, le foyer & la réunion de la flamme, en un point, eft rouge. Après le feu, les fels font les fubftances qui ont le plus d'action fur le phlogiftique , puifqu'ils ent avec lui un plus grand rapport (2). Is agiflenc de même en détruifant, en excitant le phlogiftique & en faifant paffer les corps des couleurs fombres & intenfes aux cou- leurs plus vives, & toujours dans le même ordre qu’elles obfervent dans le prifme, violer, bleu, verd, jaune, orangé & rouge. L’acide vitriolique diffout le fer & difipe une grande partie de fon phlogiftique , comme il eft facile de s’en convaincre, en pré- fentant une bougie allumée aux vapeurs qui en émanent, lefquelles s’enflamment & déronnent aufli tôt. Le fer fe trouve donc moins contenir de phlogiftique ; fa couleur alors. de noire qu’elle eft na- turellement , pale au verd, ainfi que le prouve fa diflolurion & les cryftaux qui en réfultenr. L'acide vitriolique agit de même fur le cuivre; mais le phlogiftique, dans ce dernier, étant mieux com= biné, l'acide le détruir & le raréfie moins ; au , le viciol qu'il forme eftil de couleur bleue, c’efta-dire, d’un degré de couleur plus intenfe que le vitriol de fer. La nième différence a lieu enrie les chaux de fer & de cuivre. L'un & l’autre méral, expofés à la double action de l'air & de l’eau, perdent beaucoup de phlogiftique. Le fer forme une ocre jaune, & oo (1) Pour la couleur blanche de la Aamme, elle vient d'une autre caufe , elle eft due aux réfle@ions de la lumière & au mélange des particules d'eau & d'huile, ce qui occafionne des direétions de lumière en tous fens, d'où réfulre la couleur blanche, comme nous le prouverens plus bas. } (2) Les couleurs des cequillages d’eau-douce font beaucoup moins vives & brillantes que celles des coquillages de mer; effet qu'on attribue au défaut de particules falines, (M. Valmonc de Bomare, Hifi. Naë.) ts | à SUR L’'HIST. NATURELLE ET LES ARTS. 109 le cuivre une ocre verte qui contient, comme on fait, plus de phlo- giflique que celle du fer. ; Les acides de l’eau- régale, diffolvent l'or & l’érain. Le mélange de ces deux diffolurions, fair précipiter l'or fous une couleur rouge qui donne la belle pourpre de Cafius. Le phlogifique de l'or à fu- . bi, dans cerre occafon , un certain degré d’exhalrarion comme fa couleur rouge l'indique , peut-être méme y a t-il perte de phlogif- tique , car ce précipité eft plus difficile à fondre que l'or fous fa forme métallique. La diflolurion du fer par l'acide vitriolique , refufe de donner des cryftaux de vitriol , lorfque le fer qu’elle contient a perdu , par l'aétion trop long-rems continuée de l'acide & du feu, une grande 'partie de fon phlogiftique. Cette diffolurion , qui prend alors le nom d’eau-rmere , palle de la couleur verte qu'elle avoir, au jaune , enfuite à l’orangé , enfin au rouge. ( M. Monner, Mem. Jur les Eaux minér. ) En général , les diffolntions des chaux de fer font d’auranr plus rouges que le fer eft privé de plus de phlogiftique. On n’en obtient que des fels déliquefcens , ou plurôt des efpèces de magma. L'ef- prit-de vin tire de ces matières une belle teinture rouge , qui elt la teinture martiale de Ludovic. ( Zdem.) Dans la diftillarion des baumes naturels , à- mefure que l'acide fe développe , l'huile prend une couleur d’abord jaune, orangée & rot ge En mêlant l'acide vitriolique très-concentré avec de l’efprit de-vin , pour la formation de l’éther, on obferve que les liqueurs prennent fucceflivement les couleurs jaunes , orangées & rouges. Il:eft vrai qu'à mefure que la difhllarion avance, la liqueur devisnt brune , même noire. Mais il arrive alors décompoñtion, & c’elt un nou- veau phlogiftique qui fe développe , & que nous expliquerons plus bas. Les acides font paffer au rouge les reintures végétales bleues. Ils régénèrent la couleur rouge des rofes de provins , lorfqu’elles l’ont perdue par la deflicarion. Il femble même que les couleurs rouges des fleurs & des fruits font produites par un peu d'acide à nud & déve- loppé, telles font celles des grofeilles , de l’épine-vinerte , des pe- pins de grenade , &c. Ceux qui en murifflant pallent du rouge vif à un rouge plus intente & rirant fur le noir, perdent en même-réms leur acidiré. De ce nombre font les mûres, les merifes & autres. Les fleurs de rofes de provins , de fumac, de grenade , doivent peut-être aufli leur couleur rouge à la préfence d'un acide qui en exhalre le phlogiftique ; car, outre cette faveur ftiprique qui leur eft commune avec les acides, leur infufon tourne au brun avec les 110 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, terres abforbantes ; c’eft ce qu’on voit arriver tous les jours ; fans qu'on en ait jufqu'ici connu la raifon, quand on mêle les fyrops de ces fleurs , ainfi que ceux de pavot rouge, d'œiller, &c. avec des coraux & autres fubftances terreufes; le mêlange pafle au noir aufli- tôt. Les métaux mêmes alrèrent les couleurs rouges. Quand on traite ces fleurs dans des vaiffeaux de cuivre, & particulièrement dans ceux. d’érain, il leur arrive la même chofe qu'avec les terres abforbantes , l'acide abandonne fa réfine colorante pour s'attacher au métal. Cette réfine qui ne devoir qu'à fon acide fa couleur rouge & fa folubilité, prend une couleur brune, & fe précipite fous la forme de laque. Quelques gouttes d’acide rendent mifcible à l’eau certe réfine colo- rante , & régénèrent fa couleur rouge. Les violettes donnent un fuc violet, fur-tout quand on les bat dans un mortier. Cette couleur violette dans les vaiffaux d’étain s’affoiblir, fe perd, & il ne refte plus qu’une couleur bleue. On voit qu'il arrive ici la même chofe aux fleurs de violettes qu'aux fleurs rouges dont nous avons parlé. Cerre couleur violette n’eft due qu'à un peu d'acide qui fe dégage quand on pile ces fleurs. Cette perite quantité d’acide en rougit légèrement la teinture bleue, & lui donne un œil violer. Quand on la laiffe un peu de tems dans l’é- tain , l'acide atraque ce métal, fe neutralife, & il ne refte qu'une couleur bleue. En ajoutant un peu d’acide très-affoibli, on redonne= roir à ce fuc un œil violer, une plus grande quantité le rendroït rouge. Lorfqu'on trempe des linges dans de gros vin rouge ou dans le fuc de baies de fureau & autres, la couleur rouge de ces linges fe paffe à l'air en peu de tems, & il fuccède une couleur bleue. On ne peut attribuer ce changement de couleur qu’à la difipation d'un acide volatil ; car ces linges reprennent une couleur rouge, lorfqu’on pale deffus un acide quelconque, Les fleurs de mauves font rouges ; en féchant à l’air elles devien nent bleues. Si on les trempe dans un acide très-étendu , elles re- prennent leur couleur rouge. Les couleurs même déja rouges acquièrent plus de vivacité par l'addition d'un peu d'acide. La cochenille & quelques autres tein- tures changent en rouge vif, & de couleur de feu, leur couleur rouge pourpre. Il ya cependant quelques fubftances , qui par l’action trop vive & long-tems continuée des réactifs, paffent de la couleur rouge au jaune pâle , cela vient de ce que tout le phlosiftique de ces ma- tières n'eft pas porté au même point d’exhalration, & comme l'effet des réactifs , après avoir prodigieufement raréfié le phlogiftique, eft de le détruire, la couleur rouge doit fe perdre & difparoître la SUR L'HIST. NATURELLE ET LES ARTS, 111 première , puifqu'elle eft produite par la partie la plus raréfiée du phlogiftique. Îl ne refte donc plus alors que la portion qui l’eft moins, & qui en conféquence ne réfléchit que la couleur jaune. Une preuve qu'il y a perte de phlogiftique , c’eft que la couleur jaune qui fuc- cède à la couleur rouge eft très-pâle. Les alkalis ont aufli une grande affinité avec le phlogiftique. Ils en exhaltent plus ou moins la couleur, à raifon de la force de leur réac- tion. Ils raréfient le phlogiftique du foufre , & lui font prendre une couleur rouge , ainfi qu'il arrive au kermès minéral, aux Heurs rouges d’antimoine, &c. Le foufre uni par la diftillation à l’alkali volatil cauftique , forme une liqueur fumante qui à la propriété de teindre en rouge les pré- parations mercurielles , même le mercure fous fon brillant & fon agorégation métallique. ( Obférv. de Phyfique ; Septembre 1774). » L'huile de tartre verfée en petite quantité fur une portion de » mercure diffous dans l’acide nitreux , produit une couleur citron. » À mefure qu’on en verfe davantage , la liqueur devient d’un jaune » plus orangé , & fouvent mème rougeâtre. Les fels fixes qui fonc » bien alkalis , & qui fe réfolvent facilement à la moindre humi- » dité, excitent la même couleur ; & plus ils font alkalis, plus la » couleur eft chargée & tirant fur le rouge «. Ce précipité mercu- riel, féparé de la liqueur , acquiert un rouge vif par la calcination. ( Mém. de P Acad. 1712). La diffolution du fublimé-corrofif, mêlée avec un alkali, fe pré- cipite fous une couleur rouge-briqueté ; avec l’eau de chaux, fous une couleur jaune orangé; & avec un alkali cauftique , fous une couleur rouge. , : Les couleurs rouges de la teinture de fel de tartre , & particulière- ment de la teinture des métaux ou lilium de Paracèlfe, font occa- fionnées par l’action des alkalis fur le phlogiftique de l’efprit- de- vin. C'eft de mème à la raréfaétion du phlogiftique du fer par lation de l'acide nitreux, & fur-tout de l’alkali fixe, que la teinture de Mars de Staahl doit fa couleur rouge. Les alkalis changent aufli en rouge la teinture jaune de la rhubarbe, L’infufñon de la garence du fenné & quelques autres , prennent éga- lement une couleur rouge avec les alkalis. L’orfeille, traitée avec les alkalis & la chaux, donne à la tein- ture une couleur rouge. Pour foutenir cette couleur, & même pour l’aviver, il eft néceflaire d’ajouter un peu d’alkali volaril. Les fyrops de violette & les autres teintures végétales bleues , 112 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, prennent avec les alkalis une couleur verte qui, comme nous Pa- vons dit, annonce un degré d’exhaltarion de plus que la couleur bleue. L'eau de chaux faic prendre à plufieurs bois , comme à ceux de merifier, de prunier , une belle couleur rouge. La chaux a beaucoup de propriétés communes avec les alkalis. Elle donne au fuc de noirprun une belle couleur verte qui forme le verd de vellie. La chaux change en verd, le fuc violer des fleurs de l'iris, ce qu'on appelle en peinture le verd d'iris. L'eau de chaux, même les terres abforbantes, font prendre, ainfi que les alkalis, une couleur verte aux fucs bleus des végétaux. Les acides, comme nous l'avons vu, portent tour d'un coup ces cou- leurs bleues à la couleur rouge , ce qui fait voir qne les acides ont plus d'action fur le phloaiftique des corps, que les alkalis & les terres, routesfois ces derniers tendent toujours à produire fur le phlogiftique le même effer que les acides & le feu. La matière inflammable des corps eft donc la caufe de leurs cou- leurs. Dans ceux où elle eft fpécifiquement plus denfe, les couleurs font plus fombres. Toutes les caufes qui tendent au contraire à en diminuer l'intenfité , tels que le feu, les fels acides & alkalis, font prendre aux corps des couleurs d’autant plus vives, & fe rappro- chant d'autant plus de la couleur rouge , qu’ils ont plus d’aétion fur le phlogiftique. Les corps, dans la raréfaction de leur principe in- flammable, fuivent cet ordre de couleur, noir, violet, bleu, verd, jaune , orangé & rouge. Enfin, ils paroiffent blancs quand ils fonc totalement privés de phlogiftique, ou qu'il eft abfolament mafqué, c'eft-à-dire , parfaitement combiné, Une expérience d’un fameux obfervareur, M. Franklin, s'accorde on ne peut mieux avec notre fentiment, & prouve completrement la plus grande denfité de la matière inflammable dans les couleurs fombres ; la plus grande raréfaétion de cette matière dans les cou- leurs claires, & l’ordre que ces couleurs obfervent entr’elles. Voici l'expérience telle que la rapporte M. Franklin. » J'ai pris quantité » de morceaux quarrés de draps de différentes couleurs. Il y en » avoit de noit , de pourpre, de bleu foncé , de bleu- clair, de verd, » de jaune , de rouge, de blanc, & d’autres couleurs & de diverfes » nuances, Je les pofai tous fur de la neige, le matin par un » beau foleil. Au bout de quelques heures, le noir ayant été plus » échauffé, s’étoit enfoncé fi bas dans la neige, qu'il ne pouvoit » plus être frappé des rayons du foleil; le bleu foncé étroit pref- #-que aufi-bas; le bleu clair n'étoit pas tout-à-fait fi enfoncé; » les SUR L'HIST. NATURELLE ET LES ARTS. 113 »°les autres couleurs { vertes, jaunes, rouges) (1), étoient d'autant » moins enfoncées à proportion qu’elles éroient plus claires, & le ».blanc éroit refté tout-a-fait fur la fuperficie de la neige , fans y » enfoncer aucunement «, Dans une matière aufli délicare que celle des couleurs des corps, äl fembloit d'abord qu'on ne pouvoir compter pour en connoître la nature & les différens rapports. qu’elles ont entr'elles, que fur les fubftances minérales, comme étant les plus fixes & fe prèrant mieux aux expériences. Cependant , nous avons vu les couleurs vé- gétales donner des réfultats farisfaifans & d’accord avec les obfer- vations faites fur les minéraux. Les fubtances animales même, qui fonc des corps beaucoup plus compofés, plus voifins de leur en- tière deftruétion , & dont les couleurs beaucoup plus fagaces, ne permertent pas d'en examiner la nature, rentrent auûi dans les principes que nous avons établis autant qu'il eft poflible de l’ef- pérer de matières qui laiffent fi peu de prife aux expériences. Le fang ne doit probablement fa couleur rouge qu’à l’exhalra- tion de fon phlogiftique , occafñonnée par fa grande agitation, fa chaleur & fes fels (2). . L'urine , par fa couleur, indique aufli la quantité de matières fa- lines qu’elle contient, & le degré de chaleur qui règne dans l’éco- nomie animale. Ces deux caufes, à mefure qu’elles 4giffent davan- tage , font paller l'urine, de la couleur jaune , à l’orangé, enfin à la couleur rouge. 4 Le feu & les acides changent la couleur brune des écreviffes & des autres cruftacées , en une couleur rouge. L’eau-forte jaunit la peau. Lorfqu'on lui fait diffoudré une cer- tainé quantité de mercure, elle devient plus corrofve , elle a plus d'action fur les fubftances animales, & la tache qu'elle imprime, (1) » Je préfume, dit M. de Buffon, ( Introduëfion à l'Hiff. des Minéraux ) » que da lumière en elle-même eft compofée de parties plus ou moins chaudes, » Le rayon rouge. ... doit, en toutes circonftances, conferver beaucoup plus de » chaleur, &c.... « Cette plus grande chaleur de rayon rouge , ne s'accorde pas avec ce que nous avons dir. Cette préfomption fe trouve détruite entièrement par l'expérience de M. Franklin. Où ne ‘doit pas attribuer la plus grande chaleur de la couleur noire aux par- ticules de fer dont elle pourroit être compofée , puifque les corps noirs, qui ne doivent pas leur couleur aux fubftances métalliques, éprouvent un effet fembla- ble, Nous renvoyons aux obfervarions aies fur le charbon , & rapportées page 4. (2) » S'il eft vrai qu'on retire un peu d'acide dans l’analyfe du fang, comme æ le difent MM: Homberg & Macquer, ce feroit probablement dans la fubftance p rouge qu'on en trouveroit l'origine «, ( Diélionnaire de Chymie. ) Tome VIII, Part. II. 1776. 114 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, eft rouge. Nous allons joindre à cela quelques obfervations fur les couleurs naturelles des animaux. Nous avons dic que les feuilles des végétaux , à mefure qu’elles croiffent, paflent des couleurs rouges & jaunes aux couleurs ver- dâtres, vertes foncées & tirant fur le bleu ; que ces dernières cou leurs annoncent une plus grande quantité de phlogiftique, une conftiturion plus parfaite, & une plus grande vigueur; que lorf- qu’elles ceffent de recevoir de la rerre la même quantité de fucs, ou qu’elles n'en reçoivent plus en raifon de la diflipation qu'elles font , l’action de la chaleur rarefiant de plus en plus le phlogifti- que qui n'eft plus réparé, ces feuilles alors perdent leur couleur verre & blene, & fuivent l’ordre inverfe qu'elles ont pris dans leur accroiffement. D'où il fuit que la denfité du phlogiftique donne aux corps vivans plus de force & d'énergie , & que les couleurs fombres nous annoncent cer état de vigueur. C’eft ce que nous remarquons aufli dans les animaux. Les hommes bruns, & dont le poil eft noir , font généralement plus forts & robuftes. L'âge, en diminuant la force & la vigueur, leur en ôre en mêème-rems les fignes extérieurs, & ils blanchiffent. Les Nègres blancs, qui naïflent fous la Zone torride , font une “efpèce dévénérée & de beaucoup inférieure pour la force, aux vrais Nègres de couleur noire. On peur faire les mêmes remarques dans les autres animaux. Il y a des efpèces entières d’oifeaux, dont les mâles fe diftinguent aux couleurs qui mançuent aux femelles ; tels font les moineaux-francs, les canards, les paons, &c. » On æobfervé depuis plus de dix-huit fiècles ( 1), que les qua- drupèdes dont la robe eft blanche, fans bigarrure & fans mélange, font moins vigoureux , moins robuftes que leurs analogues, d’un poil peint ou bariolé, IL n’y a pas tant de force vive ni tant de réfiftance dans les mufcles & les nerfs d’un cheval né blanc, que dans ceux d’un cheval noir. ou bai. Il en eft de même du refte des animaux foumis aux travaux de la domefticité que leurs talens ou leur utilité ont fait étudier avec foin par ceux qui les emploient ou les achèrenr, PE mem À (x) Virgile, dans le choix d’un étalon, rejette ceux qui font de couleur blan- che..... Color dererrimus albis. .... Georg. Lib. III, Le blanc, l'alezan clair, languiflent fans vigueur. Trad. de M. de Lille. Il faut qu'un étalon foir d'un bon poil, comme noir de jai, &c...: Tous les poils qui font d'une couleur lavée & qui paroïflent mal teints, doivent être bannis des haras, auili= bien que Les chevaux qui ont les excrémités blanches, M. de Buffon, SUR L'HIST. NATURELLE ET LES ARTS. 115 En Hollande, on a reconnu par une longue fuite d’obfervations , que les vaches rouges font d’un tempérament inférieur & moins fécon- dés , que les vaches noires ou tachetées de noir & de blanc, auf l'efpèce rouge a-r'elle été entièrement bannie des pâturages du pays «, { Recherches Pilofophiques ). Nous aurions pu rapporter encore une multitude de faits qui con- firment les loix que la Nature fe prefcrit dans la diftribution des couleurs: mais nous croyons que ce que nous avons dic fufhc, & peut palfer pour une démonitration phyfique, Il ne faut pas s'attendre à pouvoir donner des raïfons également farisfaifantes de toutes les nuances de couleurs & dans toutes les circonftances. Ce feroir être étranger en Phyfque , que d’exiger une précifion fi exacte. Par exem- ple, pour démontrer que la caufe des couleurs fi tranchantes & op- pofées d’une tulipe, dépend d’une plus ou moins grande denfité du phlogittique , il faudroit ou que la fleur für d’un tiffu capable de fupporter les expériences, ou que nous euflions des moyens allez délicats pour découvrir la différente conftiturion de ces parties di- verfemenc colorées. Ne pourroit-il pas arriver que le noir de ces fleurs füt compofé d’un phlogiftique très à nud & très-intenfe , re- lativement à celui qui forme la couleur rouge, & que certe dif- férence, quoique très-grande , ne für pas fenfible par rapport à nous ? Il y a en effet tout lieu de croire que cette diverfité de couleurs vient d’une diftribution inégale du phlogiftique; car fuivant M. de Bomare, ( Diféours, Hifloire Naturelle ): » la couleur unie des leurs » vient d’une force de nature, & on eft für que les diverfités de cou- » leurs dans toures les fleurs font des marques de foibleile ou d'un » défaut de nourriture «. Les fucs étant altérés, leurs principes ne confervent plus entre eux cet équilibre & certe difolution parfaite. IL peuc donc arriver que le phlogiftique fe répande inégalemenr , ce qui produiroit ce panache des Aeurs. Nous avons.die qu'un corps par l’exhaltation & raréfaction de fon phlogiftique , palfoit des couleurs fombres , aux couleurs plus vives, & enfin au rouge. Cependant, il peut arriver quelquefois que le noir fuccède au rouge. Ainfi, quand on mêle de l’efprit-de-vin & de l'huile de vitriol pour la formation de lécher , le mêlange pafle fucceflive- ment à la couleur rouge. En le foumettant à l'action du feu un cer- tain tems, il pale au noir. Cec effet femble d’abord contraire à nos principes , mais il faut faire attention à ce que lorfque la couleur noire paroït , 1l y a décompofition de l’efpric- de-vin & deftruction de la couleur rouge. C’eft fur une nouvelle fubftance que l'acide vitrioli- que agit, & c'eft un nouvel ordre de couleurs qui » fe développer. LTAT Fr 116 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE," L'acide, après avoir enlevé l'eau principe de l'efprir-de-vin ;! exerce fon ation fur l'huile, & la prive elle-mème de l’eau qui entre dans fa conftitution. Le phlogiftique dégagé de fes entraves, & encore dans un état très-denfe, paroît d’abord fous nne-cauleur noire. Les rÉac= tifs, raréfiant de plus en plus ce phlogiftique, lui feront prendre di- verfes couleurs, & dans l’ordre du prifme; foumis à l’action du feu , il fe fublimera avec une portion de Pacide virriolique fous une cou- leur jaune , & ce fera du fonfre. Sublimé de nouveau avec quelques ‘inrermèdes , tels que le mercure, &c., ou tfairé avec les alkalis , il pale à la couleur rouge. On voit qu’en y faifant un peu d'attention , tous les faits éra- blifent cetre fuccelion de couleurs que nous avons obfervée , & qui nous paroît être la marche générale de la Nature. D'ailleurs , quel- ques cas particuliers que nous aurions peine à rapporter à cette loi, - ou qui fembleroient mème s’en écarter , ne prouveroient encore rien contre. Ils doivent nous avertir feulement que nous devons nous contenter de ce que la Nature veut bien nous montrer en grand; les dérails lui appartiennent, & font même au-deffus de notre in- telligence trop bornée. L’interroger davantage , c’eft préfomption, c’elt opiniâtreté, c’eft indifcrérion; elle ne nous doit pas de réponfe. Peut-être cherche-t-elle encore à fe juftifier, mais ce langage eft trop fublime, nous ne l’entendons plus. Après avoir &xaminé la nature des corps colorés , ce qui conftitue leurs couleurs, & le rapport que les différentes couleurs ont avec le phlogiftique où matière inflammable des corps, qu'il nous foit permis de remonter aux caufes premières , & de chercher pourquoi le phlo- giftique eft le principe des couleurs ; pourquoi les, différentes couleurs. des corps dépendent de l’état de la matière inflammable qu'ils con- tiennent; enfin , pourquoi dans la raréfaction fucceflive de leur phlo- giftique , ils rendent tous à fuivre cette échelle de couleurs que donne invariablement le prifme. On trouvera la feconde partie de ce Mémoire dans Le Cahier fuivant: CA Fe L e- SUR L'HIST. NATURELLE ET LES ARTS. 5:17 D MOLE SC bp TEL:0.N D'un nouveau Fourneau de Laboratoire ; Dar M. DE MoORFEAU. [DA ns l'ignorance des principes qui pelvent déterminer invaria- blement les formes des inftrumens , il eft tout fmple qu'ils fe mulri- plient au gré de l'imagination des Artiftes ; la plüpart des anciens Chymiltes fe vanroient d'avoir leurs fourneaux phfealiess, auxquels ils donnoient des noms pompeux ; tels font /e arefleux Henri, l A- thanor de Libavius , Le Fourneau piloophique de Glauber > la Coupe de Bec- cher , le Vulcain domeflique de Leutmann , &c. &c. Ils s’attachoient fur-tout à rechercher le fourneau polichrefte , ou univerfel, & il n’eft point de figure qu'ils maient fait prendre à l'argile en fuivant ce projet chymérique. Ces appareils impofans ont difparu de nos laboratoires , à mefure que la fcience a fait des pro- grès ; aujourd’hui ces inftrumens ont une forme fimple & ftable, tout fourneau devient , au befoin, polichrefte entre les mains d’un homme intelligent , tandis que celui qu'on auroit conftruit à ce deffein ; n’auroit peut-être pas mème l'avantage de remplir fes vues pour une feule opération. Ce n'eft donc ni un fourneau univerfel que je propofe, ni un four+ neau d'une forme fingulière, rourmentée à plaifir pour avoir l'air de l'invention, c’eft un PME dont les proportions font depuis long terms déterminées par les plus heureufes expériences , & qui m'a parw . fufceprible de devenir d’un ufage plus étendu & plus commode, au moyen de quelques changemens qui n’intéreflent pas fa conftruction eflencielle. Tous ceux qui, ont travaillé far des matières qui exigent ‘un feu de la dernière violence, connoiffent le fourneau dont M. Macquer a publié la defcriprion dans les Mémoires de l’Académie Royale des Sciences , en l’année 1758. La théorie que ce Savant en a donnée, eft un des plus. grands pas de la Chymie moderne , & je fuis bién perfuadé que les Arts font encore wès-éloignés d’en avoir recueilli tour le fruir qu'elle peur leur aflurer. Quand on a befoin du plus grand coup de feu que ce fourneau 118 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, puiffe donner , il n’y a rien de mieux que de placer le creufet fur le milieu de la grille, entouré de charbons avec la précaution ; s’il eft petit, de le défendre par un plus grand creufer renverfé, il peut ainfi réfifter à un feu de fix heures, & perfonne n’ignore que la durée ajoute confidérablement à l’effer, mais ce degré n’eft pas toujours né- ceffaire ; cer appareil ne peut fervir pour les calcinations , les cou- pellations , les vitrifications en vaifleaux découverts ; dans ces cir- conftances , on eft obligé d'introduire une mouffle dans le fourneau, pour y placer les creufers, & de quelque manière que l’on s’y prenne, il eft bien difficile de remédier à tous les inconvéniens, de prévenir tous les accidens; on fent d’abord que cette mouffle ne devant oc- cuper qu'une partie de la capacité du fourneau , elle ne peut plus recevoir que de très- petits vaiffeaux; d’autre côté , fi on pofe la mouffle fur des briques de champ ile charbon ne peut plus fe ré- pandre également fur la grille , il refte un vuide où l'air frais pé- nètre, & dès qu'il a frappé la femelle , elle eft fendue; fi on aflure la mouffle fur des briques à plat, elles bouchent prefque tout le paflage de l'air, & la chaleur diminue dans la même proportion; enfin, pour peu que dure l'opération, les moufles de la meilleure qualité font fujertes à fe déformer , à s’affaiffer fous le poids des charbons , les cendres qui s’y attachent déterminent à leur furface un commencement de vitrification, & par-là, elles forment avec les briques une feule mafle, qu’il faut mettre en pièces pour la rerirer du fourneau. Il n’y a peut-être point de plus grand obftacle aux progrès de la Chymie, que le retour fréquent de ces accidens , les embarras qu’ils occañonnent, & la défiance qu’ils infpirent fur la réuflite des expé- riences les mieux combinées. C’eft ce qui m'engage à communiquer à ceux qui culrivent certe fcience , un nouvel inftrument qui peut leur épargner une partie de ces dégoûts. Ayant eu fouvent occafon d’obferver, 1°. que les coudes que l’on faifoit faire à la flamme, dans les tuyaux du fourneau de M. Mac- quer, ne rallentifloient pas le courant d’air, & ne produifoient d’autre effet, que de fuppléer une plus grande hauteur de tuyaux , 2°. que ce fourneau donnoit dans la partie fupérieure , un feu de flamme ui furpafloit celui des fours de verrerie ; je penfai qu'il feroir pof- ble d’en tirer parti, en dirigeant cette flamme dans une efpèce de mouffle perpétuelle , placée à la hauteur du deffus des charbons d’où elle s’écouleroir enfuité dans les tuyaux perpendiculaires ; de forte se cet efpace fervant exactement de premier tuyau, par rapport au oyer principal , le tirage & l’activité du feu ne pourroient être di- minués, & que cette conftruction offriroit dans le même fourneau, fans aucune dépenfe ; un fecond laboratoire parfaitement analogue SUR L’HIST. NATURELLE ET LES ARTS. 119 à un four de verrerie, & rrès-commode pour une infinité d’opé- rations. C'eft ainfi que j'ai fait exécuter , au laboratoire de l’Académie de Dijon , le fourneau dont je joins ici le deflin ; on en a fair ufage pour les démonftrations du cours public, & on y a vu dans le même tems , fondre la platine & l'acier dans des creufets fur la grille, & traiter fur l’aire de la mouffle différentes matières par la calcina- tion & la cémentation. He POLE C AT'TOÏNNNDE SRI GURE S. La première figure repréfente le fourneau entier vu du grand côté, À eft la première pièce, percée par fon fond pour recevoir une grille , toute femblable à la pièce inférieure du fourneau de M. Mac- quer , & qui fe place de même fur un trépied ou autre fupport, à 6 pouces au-deffus du pavé. B eft une efpèce de chappe prolongée horifontalement pour former la mouffle perpétuelle ; elle fe rapporte d'un bout à feuillure fur la pièce À, & porte de l’autre bout fur le maflif, F. Cette pièce eft ouverte pour recevoir en C , une porte qui fert à jeter le charbon, L'autre porte D, percée de deux efpèces d’ouvraux , fert pour pla- cer les creufets dans la mouffle; la même pièce enfin eft terminée par un rebord , fur lequel on ajufte le tuyau de taule E; on à donné à ce tuyau $ pouces de diamètre & 9 pieds de hauteur. La feconde figure repréfente le fourneau vu par le côté où l’on jette le charbon. La figure troifième donne le plan par terre des deux pièces du fourneau , c’eft-à-dire , de la pièce À , à la hauteur de la grille, & de la pièce B, à la hauteur de l’aire de la mouffle. La figure quatrième eft une coupe du fourneau entier fur fa plus grande Yongueur. La figare cinquième eft une coupe tranfyerfale des deux pièces du même fourneau , par la ligne du milieu de chacune de ces pièces ; on a figuré ici la porte D à droire, pour faire voir que cela eft in- différent , & que cerre poñition dépend abfolument de la forme du laboratoire pour lequel on les: fera conftruire. Ce fourneau eft ici repréfenté en terre cuite, on peut fi l’on veut Pélever en briques, tour de même que le fourneau de M. Macquer , en obfervant routes les proportions de l’intérieur, 120 OBSERVATIONS SUR IA PHYSIQUE, LEE T NTESRIRRE Adreflée à l’Auteur de ce Recueil, Sur La manière de conferver tes Vanilles. C Ïr y a bien des années, Monfieur, que j'avois indiqué à plu< fieurs habitans d’une de nos Colonies méridionales, un moyen très- fimple & très-facile à employer, pour conferver les goufles de Va nille, fans que perfonne eüt encore tenté la méthode que j'avois indiquée. Un Médecin, établi dans cetre Colonie, me marque avoir “parfaitement réufhi en fuivant mon procédé, Il à fait tremper des gouffes de vaniiles mûres, péndant un demi-quart-d’heure , dans de l'eau bouillante ; après les avoir bien égourtées , il les a expofées, pendant quinze jours environ , dans une chambre à l'ombre, & ex- pofées à un courant d’air. Les gouffes font devenues molles, noires & grafles, de l’odeur la plus agréable. Il les a enfuite roulées dans du papier ; où elles fe confervent très-bien & avec routes leurs qua- lités. Le mème Médecin me marque qu’il y a trois efpèces de va nilles; la meilleure eft la plus grande; la gouffe à $ pouces de long, x de large, étant à moitié applatie, 2 pouc. 2 lign. de circonférence; elle eft fort pefante. La gouffe de la feconde efpèce , a 4 pouces + de long, 1 pouce de circonférence; elle eft sèche & bonne, quoique moins odorante. La première s’atrache au palmier nommé Maripaà la Guiane; elle eft aflez rare : la feconde s'attache indiftinétement fur plufieurs arbriffeaux; elle eft plus rare : la rroifième efpèce fe trouve communément fur le palmier maripa; elle eft fi commune fur le pal- mier appellé Bache, Palma duitilifèra ; Radiata major , Giabra. PLun. Il ny à prefque pas un de ces palmiers, qui n'en ait un pied qui prend /naiffance à l’attache des feuilles dans une efpèce de terreau qui s’y ramalle & qui rampe fur elles. Cette troifième efpèce porte urie quantité prodigieufe de filiques; elle n’eft pas bonne , n’a pref- que point d'odeur, &ces filiques n’ont pas plus de 2 pouces de long. Il feroit très-aifé de cultiver les deux premières efpèces qui geprennent facilement de-bouture. Je fuis, &c LETTRE SUR L'HIST. NATURELLE ET LES ARTS. x2r DES Ee ENT te RE Adreflée à l’Auteur de ce Recueil, par M. MAUPETIT, Prieur de Caflan, Pour expliquer les variations du Baromètre, IL eft inutile de donner ici la defcription du baromètre qui eft entre les mains de tout le monde ; mais il importe de connoître la caufe de fes variations. La plus furprenante eft de voir monter & bailfer le mercure fans que l’athmofphère paroifle avoir changé pat rapport à fa mafle. Il arrive mème que l’athmofphère fe dé- chargeant des particules d’eau qui formoient une partie de fon poids, le baromètre monte & annonce un beau tems prochain , & dans d’autres circonftances il annonce l'orage & devient menteur, &c. Il eft inutile de rapporter & de réfuter les explications qui ont été données, il n’en eft aucune qui ait porté avec elle le caraétère d’évidence que l’on exige dans l'explication des phénomènes qui n'ont certainement d’autre caufe que la variation de la pefanteur de l’athmofphère. L'impoffibilité apparente d'expliquer ce phéno- mène par la feule variation de la pefanteur de l'air, a forcé de re- courir à d’autres caufes, telles que fon élafticité , &c. Pour parvenir à cette explication, j'établis , 1°. Que l’eau , répandue dans l’athmofphère, tombe lorfque, par des caufes qui ne font peut-être pas bien connues, les particules de vapeurs fe réuniffent & deviennent plus pefantes que le milieu qui les fup- portoir. 2°. Que l’eau , réduite en vapeurs, monte dans l’athmofphère. 3°. Que les particules d'eau , réunies au point de devenir plus pefantes que l'air, fe divifent fouvent avant d'arriver à nous, & remontent à l'endroit d’où elles étoient tombées. 4%. Qu'un corps, tombant dans un milieu, pèfe moins fur le milieu qu’il ne pèfe à raifon de fa male. La vérité de certe propofrion doit être éclaircie par un exemple. Suppofons qu’un vafe plein d’eau, contenant dans le fond une balle de plomb, foit en équilibre avec un autre poids, je dis que fi l’on fait parcourir à la balle la diftance qu’il y a, de l’orifice au fond du Tome VIII, Pare, IL. 1776. Q 122 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, vafe , l'équilibre fera rompu jufqu'à-ce que la bale foit arrivée au fond du vafe. ( L'expérience eft facile.) 5°. Qu'un corps , forcé de monter par la pefanteur du milieu qui l’environne, pèfe plus que fon poids par la raifon des con- traires. L'on pourroit dire que le corps qui defcend , pèfe fon poids moins fa virefle ; le corps qui monte, pèfe fon poids plus fa vi- trefle. Il eft facile aétuellement d’expliquer comment, dans un tems fort ferein, le baromètre baiffe fans que l’athmofphère ait changé de malle. Les particules de vapeurs fe réuniffent & tombent felon la pre- mière propoñrion; donc, felon la quatrième, elles pèfent moins fur l’achmofphère ; donc elles doivent moins pefer fur le mercure; donc il doit defcendre , puifqu’il n’eft foutenu que par la pefan- teur de l'air; donc, dans cette hypothèfe, le mercure doit def- cendre fans que l’athmofphère ait changé de maffe. Le fcond phénomène eft plus difficile à expliquer ; une partie de l'explication tient à la caufe qui produit les particules, dont eft compofée l’athmofphère, ce qui feroic d’une difcuflion trop étendue, & qui pourroit être le fujer d’un autre Mémoire. Il eft pourtant vrai que l'explication du troifième phénomëne peut être appliquée au fecond. Il eft facile d'expliquer comment le baromètre eft menteur , c’eft- à-dire, comment l'orage annoncé , les nuages fe difipent fans pluie, & le baromètre remonte. ES XAUP VE UNI! CL'ANT SINOUN: Il eft conftant que dans l’hypothèfe les vapeurs fe divifent , puifque les nuages fe diflipenr; donc, felon la troifième propofition, elles montent; donc, felon la cinquième , elles deviennent plus pefantes; donc, elles pèfent davantage fur le baromètre ; donc le baromètre doit remonter. Le baromètre éroit defcendu , à caufe de la réunion des parties ; il monte à caufe de leur divifon ; cela eft prouvé: lorage annoncé n’a pas eu lieu , & l’on peut dire qu'il eft men- teur. Cette explication fait voir les raifons qui empêchent de s’en rapporter toujours au baromètre qui, par fes variations , ne défigne, à ftritement parler, que le plus ou moins de pefanteur dans l'arh- mofphère. L’explication fuivante en fera une nouvelle preuve. Il arrive quelquefois qu'un grand vent eft annoncé par la def- cente du mercure. Cela vient de la différente péfanteur de l'air, SURPT'HIST. NATURELLE ET'LESIARTS. 123 comme dans les autres phénomènes ; mais alors la malle eft moin- dre ; la preuve eft facile. Le vent eft un fluide qui coule ; il ne peut couler que comme tous les fluides, de haut en bas; l’on peut donc dire , le vent coule du Midi au Nord; donc la colonne d'air eft plus haute au Midi qu'au Nord; donc tout grand vent fuppofe un vuide ; donc il y a moins de mafle ; donc l’athmofphère eft moins pefante; donc le baromètre doit baifler. L'on pourroit encore y ajouter la différence de pefanteur d’un corps en repos & d’un corps en mouvement; je parle d’un mouve- ment horifontal qui diminue toujours la pefanteur. Vous obferverez, Monfeur , s’il vous plaît, 1°. que lorfque je parle de vuide dans l'explication du quatrième phénomène , je ne rends pas ce mot dans fa fignificarion exacte, mais feulement re- Ééves c’eft-à-dire, que l’athmofphère eft moins élevée. 2°, Qu'en difanc que le vuide efl caufe de la defcente du mer- cure, je n’exclus pas les autres caufes qui peuvent diminuer ou augmenter le mercure, CUS NEC R NV UtRT FER IONN ES SUR LES MÉSANGES. méfanges préfentent un genre d’oifeaux affez fingulier, & ce genre offre en France fept efpèces bien connues & très-diftinétes. Ces efpèces font répandues en nombre plus ou moins grand dans nos Provinces. Elles habitent communément les grands bois, les tail- lis, les vergers, & on les trouve affez ordinairement fur les faules qui bordent les ruiffeaux & les marais. Les efpèces les plus fingu- lières, telles que la méfange huppée & la noire, vivent communément fur les montagnes, & on les rencontre rarement dans la plaine. Depuis la nichée jufqu’au printems, ces oifeaux vont en troupe. Chaque fociété eft compofée des individus de la mème famille; fon nombre eft toujours en raifon de la petiteffe de l'individu; ainñ plus l'individu eft petit, plus la famille eft confidérable. D'après les apparences d'union & de fraternité que ces animaux gardent extérieurement entre eux, on auroit tort de penfer qu'ils foient fufcepribles d’artachement & d'amitié. Ces vertus font mé- connues des méfanges jufqu’au tems où elles partent. Alors fi le mâle recherche une compagne, ce n’eft que pour travailler à fa reproduc- tion. Dans toute autre circonftance , quoique ces ee de la même 2 1324 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, famille, fe raffemblent par un cri de ralliement , quoiqu'ils mar“ quent un vif empreflement de vivre enfemble , ils craignent cepen- dant de s'approcher, de fe voir de trop près, & paroiffent fe mé- fier des fuites de leur caraétère âpre & colérique. Il y a fur-tout une antipathie marquée entre les méfanges noires & les grifes. Les noires les tuent, & lorfque les grifes les appercoivent , elles jettent un cri particulier & fuyent à grande hâte, leur ennemi. Malgré les foins les plus aflidus, il n'a pas été poñlible d’en réunir tranquillement baie dans une même cage ( 1 ). Leur querelle y eft perpétuelle, & elles s’y battent avec acharnement. Le premier domicilié fe regarde comme le maître & le defpore de l'habitation ; il fond fur ceux qui viennent après lui, & mâle ou femelle , rout eft indifféremment mis à mort. Son combat eft cruel, fa victoire eft affreufe , & il couronne fon triomphe en ouvrant le crâne de fon ennemi pour en dévorer la cervelle. Quel tableau (2)! Prefque tous les infectes qui vivent fur les écorces des arbres, fervent de nourriture aux méfanges , & le bec fin & pointu de ces oifeaux , leur permet de fouiller dans les gerfures de l’écorce pour y dévorer leurs larves. L’inquiète aétivité de ces oifeaux eft étonnante; fans cefle en mouvement, ils voltigent en criant d'arbre en arbre, de branche en branche, & s’accrochent & fe fufpendent indiftinc- tement contre toutes les parties , fans refter plus d’une demi-minute dans la même place. Outre les infeétes & les vermiffeaux qui fonc ——— (1) Cependant, j'en ai vu chez M. Demareft, de l'Académie des Sciences , plu= fieurs, & même d’efpèce différente, & prifes à la pipée, vivre dans une cage pendant plus d'une année. Ce qu'il y a de plus fingulier encore, c’eft qu'il mit dans la même cage où étoit une méfange bleue, deux petites méfanges noires & encore dans le nid. La bleue leur tint lieu de mere, & elle les nourrit avec du chénevi qu’elle cafloit pour elles , avec du bifcuir & de la pâtée faite avec le jaune d'œuf. La noire auroit-elle rendu le même fervice aux mélanges bleues ? C'eft ce que j'ignore ; ou bien cette commifération de la bleue envers les noires, n'eft-elle due qu'à l'état de foibleffe & de befoin oë elles fe trouvoient? (1) Ce caraëtère feroit-il particulier aux oifeaux de petit volume? On lit dans les Recherches Philofophiques & Politiques des Européens dans l'Inde, Tome VII, page 109, Edition in-8°. : » L'oifeau mouche ne fe nourrit que du fuc des fleurs; il voltige de l'une à l'autre comme les abeilles; quelquefois il fe plonge dans le calice des plus grandes. . .. Malgré {a foibleffe , il ne paroït pas méfiant. Les hommes peuvent s'approcher de lui jufqu'à huit ou dix pieds. Croiroit - on de être fi perir fûr méchant, colère & querelleur ? On voit fouvent ces oifeaux € livrer une guerre acharnée, & des combats opiniâtres. Leurs coups de bec font fi vifs & fi redoublés, que l'œil ne peut les fuivre, Leurs aîles s'agitent avec tant de vîtefle, qu'ils paroiffent immobiles dans les airs. On les entend plus qu'on ne les voit. Ils pouflent un cri femblable à celui du moineau. L'impatience € lame de ces petits oifeaux, &c,..., & Que de rapports avec nos méfanges! SUR L'HIST. NATURELLE ET LES ARTS. 325 leur nourriture ordinaire , quelques-unes des efpèces de méfanges, comme la groffe , attaquent les noix , les châtaignes, l’amande du hêtre & les graines. Rien de plus amufant que de voir ce petit animal tenir entre fes doigts , un grain de chenevi, l’affu- jettir par ce moyen contre la branche qui le fupporte, & à coup de bec redoublés & mulripliés, percer l'enveloppe coriace qui recouvre la petite amande. Les méfanges élevées dans les cages ne font pas abfolument délicates fur ce qui doit leur fervir de nourriture. Elles aiment beaucoup le fang, les viandes qui fe pétrifient , la graifle, fur-rout lorfqu’elle eft rance , le fuif de la chandelle, & principale- ment celui qui a déja été fondu par l'action de la flamme de la mêche. Le chenevi fair leurs délices , mais elles ne mangent ni la navette ni le miller. Plufieurs font mortes, parce qu'on ne leur avoit donné pour toute nourriture, que ces deux graines; elles ne digé- roient point ces graines , même cuites avec de la pâtée, elles les ren- doient entières dans leurs excrémens. La Nature paroît avoir enrichi d’aflez belles couleurs , le plumage de ces oifeaux. Elle broye pour les vètir, le gris-cendré , le jaune, le verd , le noir velouté & luftré , le blanc clair & obfcur. Ces cou- leurs font parfairement mêlangées, & différemment nuancées fuivant les efpèces. Les méfanges ont le bec court, fin & très-fort , relativement à leur petitele , leur crâne eft épais, outre mefure, les mufcles du col ont beaucoup de reffort & de folidité. On obferve la mème chofe dans tous les pics. Quoi qu'on ne puilfe pas précifément afligner le tems de la pa- riade des méfanges, elles fe divifent par paires au printems , les unes plutôt, les autres plus tard. Quelques efpèces , telle que la groffe méfange, commencent dès les premiers jours de Février ; elles ref- tent long-rems appareillées avant de s'occuper de leur nid ; elles le placent toujours dans des trous d’arbres , & le compofent entière- ment de moule , d'herbe defléchée, de laine, en un mot avec des corps moux, doux, & par conféquent les plus propres à la confer- vation de leurs œufs. L'incubation n’eft pas longue, elle peut aller à onze ou douze jours pour les plus groffes efpèces; je ne puis en fixer la durée pour les plus petites. Le nombre des œufs varie depuis 10 jufqu'à 14; mais règle générale, plus l’efpèce eft petire, plus le nombre des œufs eft confidérable. On diroit que la Nature, dans la population & la génération des animaux , fupplée par le nombre, quand elle leur refufe la groffeur. La méfange nouvellement fortie de fon œuf, refte plufieus jours les yeux fermés, bientôt les paupières fe féparent , le globe de l'œil paroît, & il n’eft pas affecté d’une crop vive lumière, 126 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, puifque Les rayons du jour pénètrent dificilement dans le réduit où l'animal eft renfermé. Bienrôc fur le fommet de fa tête, & fur les parties les plus apparentes de fon corps, croît un duvet très-fin & rare ; il eft attaché au fommet des plumes, & tombe quand elles font venues. Les petits fortent du nid après quinze jours, de forte que du moment que l’œuf eft pondu , à celui où l’oifeau abandonne fon berceau , on peut compter un mois environ. Lorfque la faifon eft de tems en tems pluvieufe , fon accroiflement eft plus rapide, parce que fans doute, la nourriture que lui apportent le père & la mère eft , ou plus fubftancielle , ou du moins plus abondante. Dès que les jeunes méfanges font forties de leur première demeure, elles n’y rentrent plus, & vont fe percher fur les branches des arbres voifins. C'eft-là qu’elles apprennent à chercher leur nourriture , à effayer leurs aîles, & à folâtrer avec une légèreté furprenante. Dès que coute la nichée à acquis un force fuffifante pour fuivre le père & la mère, elle abandonne fa patrie, & va chercher ailleurs les alimens qui lui conviennent. Le tems de la nichée s'étend affez avant dans la faifon , puifqu'on trouve des petits dans le nid jufqu’à la fin du mois de Juin. Cet oifeau fait-il plufieurs pontes dans la mème année ? Je n'ofe décider cette queftion, c’eft à l'expérience à la décider , & je ne lai pas. Dans le premier âge , les couleurs du plumage font peu diftinc- tes, & on ne reconnoît guére les mâles d'avec les femelles que par leur volume, leur activité, & les premiers traits de ce caractère co- lérique & méchant, que la Nature femble lui avoir départi à un degré plus éminent qu'aux femelles. À la mue, la plus grande partie des plumes du corps tombent; la fourrure de l'animal devient plus épaiffe, & plus en état de la défendre des rigueurs de la faifon âpre qu'il doit paffer. I1 s’embellit , fes nuances s'expliquent , fe diftinguent , & fe colorent d’une manière plus tranchante. Il ne faut que quatre ou cinq mois pour que les jeunes méfanges aient acquis leur accroiflement total, & quatre mois après la mue, elles font en état de travailler à leur reproduction. Si on juge de la durée de leur vie par le tems employé à les former parfaitement , on pourra conclure que le terme de leur exiftence eft détruit à neuf ans environ, & encore c’eft beau- coup. La majeure partie ne poufle pas fa carrière aufli loin; dès l’âge de cinq ans, les infirmités commencent , de fréquentes Auxions atra- quent leurs yeux, les mouvemens de l’animal fe ralentiffent, fon étonnante activité celle, & fa décrépitude prématurée , fans beau- coup diminuer fon colérique caractère , répand la trifteffe & la dou- leur fur un refte de vie languiffante , & la termine enfin. La chair des méfanges eft ordinairement amère, fèche & de mau- vais goût. Leur maigreur habituelle , le peu de volume de leur corps, SUR L’HIST. NATURELLE ET LES ARTS. 117 les fouftraient à la voracité de l’homme , & font qu'ils les dédai- gnent; cependant, il a inventé plufieurs piéges pour les prendre, La pipée eft celui où cet oifeau donne le plus aifémenr. C’eft - là qu'il montre une hardieffe foutenue, un courage décidé. Ses plumes s'enflent, fes attitudes varient à l’infini, il multiplie {és cris aigres & défie la chouette au combat ; mais bientôt , viétime de fa mé- chanceté, il devient la proie de l’oifeleur. Qui croiroit , que dans cet inftant où il eft, pour ainf dire, lié & garotté, il pique, à coups de bec redoublés, celui qui l’a pris, infulte à fa viétoire, & appelle , par des cris multipliés, les oifeaux de fon En Pom à venir prendre fa défenfe ? Ils y répondent, ils accourent en foule autour de la pipée , fe jettent inconfidérément fur les bras, & font à leur tour les victimes de leur arrogante rémérité. Si l’oifeleur les met en cage, ils dédaignent ordinairement la nourriture qu’il leur préfenre , & préfèrent la mort à l’efclavage. Il eft inutile de rap= eller les autres piéges inventés contre eux par l'induftrie humaine. je n'ai parlé de la pipée que pour mieux Aie connoître le carac- rère de cette famille fingulière. De ces généralités, paflons aétuellement à ce qui concerne ‘les efpèces en particulier, c’eft-à-dire, de celles qui habitent la France. J'y connois fept efpèces bien diftinétes. La première de toutes, eft remarquable par fa oroffeur qui furpafle celle des autres. Elle eft égale à celle du moineau fauvage; aufli, quelques Naturaliftes l'ont appellé Moineau des bois. La grofle méfange eft défignée par le Che- valier Von-Linné, par ces mots parus major ; M. de Buffon la nomme Charbonnière. On la diftingue ailleurs fous le nom fimple de Méfange ; ici, fous celui de Borgne; là , fous celui de Creve-chaffis, de Larderiche , Lardenne, &c. Cet oifeau eft bien fait, vif, mé- chant, agréable dans fes mouvemens , & adroir dans fa manière de faifir fa proie & de la manger. Le blanc, le noir, le jaune, le verd & le gris de lin, font proprement nuancés dans fon plumage. Son bec eft court, fin & fort; fes pieds plombés, trois doigts en avant & un en arrière, & tous armés d'ongles très-aigus, Il à la tère & la gorge noire, la poitrine jaune , le bas-ventre noir & gris de lin. Il a du bas de la gorge à l'anus, une raie noire qui fépare le. plumage de la poitrine en deux parties égales; les, plumes du dos font vertes, celles du croupion, gris de lin, celles des aîles, bleues; Jes fcapulaires font de même couleur, avec quelques taches d’une autre teinte; celles de la queue font au nombre de douze. On doit obferver que les méfanges en général , de même que les pics, les grimperots & les roitelets , font très-fournies de plumes fur le crou- pion, & que ces mêmes plumes font très-remarquables par leur lon- gueur. L’oifeau les à fouvent hérifflées, ou tout au moins élevées. 128 OBSER"ATIONS SUR LA PHYSIQUE, Cette première efpèce a les yeux noirs comme toutes les autres; l'intérieur du bec, blanc, rouge dans le fond ; la langue fixe, affez longue & frangée à l'extrémité. — Le chant ordinaire du mâle, celui qu'il fait entendre dans routes les faifons de l’année, & fur-rout la veille des jours de pluie , imite à - peu - près le bruit produit par le frottement d’une lime contre du fer. Cette fingularité l’a fait ap- peller Serrurier dans quelques Provinces. Au printems, ce fon prend une autre modulation ; il eft beaucoup plus agréable, & fi varié, qu'on ne croiroit pas qu'il provient du même oifeau. Cette première efpèce de méfange , niche dans les trous des arbres, dans ceux des murs , fous les toits des maifons ifolées & près des forêts , dans les gerfures ou crevaffes que laiffe la mauvaife architecture des Charbon- niers , en bâtiflant leurs cabannes. C'eft de-là qu’on lui a donné le nom de Charbonniere. Cerre efpèce eft affez connue, on la ren- contre par-tout, dans les montagnes, les plaines, près des marais, fur les buiffons , dans les taillis & les grands bois. Les peritsufont le plus ordinairement au nombre de neuf; ils reftent en famille jufqu’à la nouvelle faifon , tems où ils fe féparent deux à deux, pour fuivre les douces impulfions de la Nature, & donner la vie à de nouveaux êtres. La feconde efpèce, qui fuit immédiatement la précédente en rai- fon de fa groffeur, eft la méfange hupée, parus criffatus , Lin. S. P. Celle-ci eft rare & ne fe trouve que dans les montagnes, & quel- quefois dans les bois de haute futaie ; elle a à-peu-près les mê- mes mœurs que la première; mais elle ne niche jamais ni dans les murs, ni près des maifons. Ses petits font au nombre de dix à onze; ils fe fuivent & vont en compagnie jufqu’au printems. Le plumage de cet oifeau eft gris-cendré fur le dos ; le ventre & la poitrine font d’un blanc fale; la gorge noire & blanche , ondée aufli- bien que la tète qui eft ornée, dans fa partie fupérieure , d’une crête en forme de corne. Cette figure elt fort exacte quand l’a- nimal eft vivant. Les plumes de la queue font au nombre de douze, & comme la partie fupérieure du corps , elles font d’un gris cendré. La croifième efpèce elt celle que le Chevalier Von-Linné défi- gne par ces mots parus paluffris, & que M. de Buffon appelle Nonerte cendrée. Cet oifeau a la tête noire, la partie fupérieure du corps cendrée , le ventre d’un blanc fale & très-peu de noir à la gorge. Il eft très-commun dans le Duché & le Comté de Bourgogne, dans la Champagne, dans le Beaujollois , & très-rare dans le Bas- Dauphiné. Sa groffeur égale celle de l’efpèce précédente; l’un & l'autre ont à-peu-près 3 pouces & demi à 4 pouces, du bout du bec à l'extrémité de la queue. La quatrième efpèce eft celle que M. Linné appelle parus ee ê SÉPROLTATS Te NATURELLE! ET LES ARTS. Cr: Je n'ai vu cet oïfeau que dans quelques cantons ombragés du Vi- varais, peu éloignés du Rhône. Il eft un peu plus petit que la Nonetre cendrée. Toute la partie poftérieure de fon corps elt d’un bleu noir, moucheté fur les côtés de quelques raches d’un blanc obfcur. Le deflus de la tête & du col eft de couleur noire, qui s'étend jufqu’aux épaules & revient un peu en devant. Les faces fon d'un blanc clair; la gorge, la poitrine, ont la même teinte , mais un peu falie; le bas-ventre eft de couleur obfcure & peu décidée, comme toutes les efpèces de méfanges. La Méfange bleue de M. de Buffon, & que M. Linné appelle Parus cœruleus , eft du même volume que la noire. Elle eft très- commune dans les Provinces de France où j'ai habité, Sa famiile eft plus nombreufe que celle des autres méfanges, & refte plus long- tems réunie ; je la crois l’efpèce la plus féconde. La queue de cer oifeau eft d’une couleur bleue, azurée & luifante ; le deflus de la cèce eft orné de plumes de même couleur, & illes relève à volonté; le deffus du corps eft d'un verd blanchâtre , aufli-bien que le col; le bas-ventre , la poitrine & la partie inférieure de la gorge, fonc jaunes , avec une tache d’un bleu obfcur à la naiffance du col; les faces font d'un blanc-clair, & la têre en eft généralement très- ornée. La différence des mâles & des femelles, s’eftime, par le vo- lame conftamment plus petit , dans les femelles. On en juge encore par les teintes qui font toujours moins décidées. Il me refte à décrire la Mé/ange à longue queue & celle des marais. L'une & l'autre ont beaucoup d’analogie , felon moi, & pour la figure , & pour la forme de leur plumage. La queue, dans ces deux oifeaux , eft fort longue & étayée fenfiblemenr. Ces deux ef- pèces ont les pates & les pieds noirs, & courts. La méfange des marais, autrement dite le perdulino (1) des Italiens, les a de cou- leur brune. Le plumage, dans les premières, eft mélangé für tour le corps & fur Îles aïles mêmes, de blanc, de noir, de pourpre éteint , fans que ces trois couleurs l'empottent l’une fur l'autre; dans la feconde, il eft afforti par tout le corps de fauve, de pourpre éteint, de canelle foncé, & ces couleurs font affez bien mariées. Les aîles font totalement fauves aufli-bien que la queue, où l’on diftingue plufeurs plumes en partie blanches & brunes. Ces deux (1) On avoit penfé jufqu’à préfent que cet oifeau étoit particulier à la Hon- grie, à l'Italie, & fur-tout à la Pologne; c'eft pourquoi on l'appelle Méfange de Pologne, ou le Remis. Voyez ce qui eft dit de cer oifeau, page 468 du Tome IV de ce Recueil, année 1774, & fur-tout fur la manière aufl fingulière qu'ingénieufe , done il fait fon nid; de même que ce qui cft rapporté par M. Sonnerat , fur la Méfange du Cap de Bonne-Efpérance. Tome VIIT, Pare. II, 1776. R 130 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, oifeaux font très-perits, mais leurs plumes, qu'ils tiennent prefaue toujours hériffées, les font paroître à-peu près de la grofleur du pouce, & leur donnent en même-rems un air fi fingulier, que les gens de la campagne les appellent des monftres. Ils les appellent en- core meénières , materat, & c'eft fous cette dénomination que les méfanges, dites à longue queue , font connues dans le Dauphiné. La mélange meüûnière à un caractère fingulier qui la fait facilement reconnoître. Sa paupière fupérieure eft d’un très-beau jaune, très- apparent, qui s'éteint à fa mort, parce qu’il ne tient qu’à la peau. On a beaucoup de peine à faire revenir cette couleur, & comme l'œil eft très petit, on rifqueroit de le rernir fi on tentoit de co- lorer cette paupière , mème en fe fervant d’un très-petit, pinceau. OBS E RNVT AN TIITAO IN Sur une Femme qui fait ufage de Jon bras droit, malgré qu’on ait amputé tonte la tête de l'humerus (1). Mu Turner, fille d’un Fermier d’Ipffones , s'adreffa à moi, en Oétobre 1771, pour un abfcès fitué dans l'articulation de l'épaule droite, qui lafligeoit depuis trois ans. Par l’examen que j'en fis, j'y trouvai trois ouvertures, deux près du milieu & du bord inférieur de la clavicule, & la troifième , à côté de l'in- fertion du grand peétoral à l’os du bras. Deux fondes paflées , l’une dans l’orifice fupérieur, Pautre dans celui d’en-bas , fe rencontroient aifément dans l’article, en traverfanr le ligament capfulaire par une très-érroite ouverture. Je découvris, par ce moyen, que Îa rêre de l’humérus étoit attaquée de carie. Dans un cas de cette nature, je ne vis rien de mieux à faire , pour le bien de la malade, que d’amputer le bras où de retrancher la tête de l'os, après avoir in- cifé les parties molles. Cette dernière reffource fut préférée. En con- féquence , je commençai mon incifion à l’orifice fupérieur proche la clavicule , & l’étendis fur la jointure jufqu'à lattache du mufcle ectoral. Cette incifion étant trop petite, & ne me donnant pas affez d'aifance pour atteindre la tête de los, je coupai une partie des attaches du deltoïde à la clavicule, avec une portion de celles (x) L'Obfervation appartient à M. James-Bent, Chirurgien à Newcajile, qui cn a fait part à M. Hunter, " Fi SUR"LHIST. NATURELLE ET LES ARTS. 131 qui s’implantent à l’humérus. Enfuite , je parvins librement à l’ar- ticle, dont les fréquentes inflammations avoient tellement durci la capfule, & ferré fi Fort la tête de l'os dans fa cavité, qu'il m'écoic prefque impollble de gliffer une fpatule entre deux. Quand le li- gament fut ouvert, je ne pus néanmoins faire fortir la rète de l'os hors de l'articulation , quoiqu’en pouffant le coude en arrière, comme c’eft l'ufage dans l’opération qui fe pratique fur le cadavre bien conformé. Je me trouvai forcé d'ouvrir la capfule tout-à-l'entour, avant de pouvoir portet ma fcie fur l'os. Alors, je reculai le coude de la malade, & fis avancer la rète de l’humérus fur le mufcle pettoral , car je n’aurois pu fcier d’abord l'os tranfverfalement fans en laiïffer une grande portion dénudée par le couteau , & qui, pro- bablement, n’auroit pas manqué de s’exfolier. Ayant donc placé une carte entre le bord du deltoide & l'os, j'ajuftai ma fcie dans l’in- cifion, vis-à-vis de la jointure, & amputai tout ce qui manquoit de périofte , fans avoir fubi d’exfoliation. Je n’avois lieu de crain- dre d'ouvrir aucune artère. Le tendon du mufcle biceps ayant été coupé en travers, j'eus le foin de tenir l’avant-bras fufpendu. Ma malade s’en retourna chez elle après l'opération. Elle foufirit peu , & guérit par le traitement ordinaire, fans avoir fubi aucun accident fâcheux. On.la vit par- tir pour la campagne , un mois & demi après l'opération. L'ufage indifcrer que certe fille fit de fon bras, lorfqu’elle fut chez fes parens, fur caufe que là cicatrice fe rouvrit dans l’éten- due d’un pouce & demi. Cela en retarda la confolidation pendant trois femaines; mais au bout de ce tems, la guérifon s’eft trouvée parfaite. La petfonne fait de fon avant-bras tout ce qu’elle veut. Elle le lève & l’écarre à $ ou 6 pouces des parties latérales du tronc, le porte en arrière, lace fon corcet, ajufte fon chapeau, coud , & fair plufeurs chofes aufli-bien qu’un autre, pourvu qu’il ne foir pas né- ceffaire de trop lever le coude. L’extrémité fupérieure de l’humérus joue environ à un pouce de diftance au-deffous dé la cavité glénoïdale de l’omoplate. Et l’on voit faillir l’apophyfe coracoïde & l’acromion fur chaque bord de la cicatrice , dont ces deux éminences font également diftantes. Je rapporte ceci, afin de faire mieux connoître Le trajet de mon incifion. hr 132 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE; D m5 M}: ANT AMRUE D’appliquer l’Air fixe aux Cancers, Qui procure en peu de tems une ceffation des douleurs , & une diminution très - confidérable dans le Cancer. Noé devons ces détails au zèle de M. de Magellan. À peine la nouvelle de l’expérience s’eft répandue à Londres, qu'il s’eft em- preffé de la faire connoître en France. Il ne fe rappelle pas dans ce moment le nom du Chirurgien qui en eft l’Auteur, & dès qu’il Jui fera connu , il lui rendra , comme à un bienfaireur de l’huma- nité , le tribut de louanges qu’il mérite. La cure de ce mal terrible n’eft pas completre ; mais c'eft toujours avoir déja fait un grand pas que de le foulager. Voici la manière d'y procéder Prenez deux grandes veflies a & b, figure 6, liez l'embouchure de chacune.à un tuyau ç #7, (par exemple à un morceau de pipe à fumer), avec les ficelles z s z s. Coupez le fond de la veflie fg, de façon qu'il refte comme une manche pendante. Prenez une grande bouteille Ze, mettez-y un peu de craie ou mème du marbre blanc concaflé; ajoutez-y de l'eau, de façon que. la craie ou le petit morceau de marbre, foient couverts. Jerrez fur ce mêlange un peu d’huile de vitriol, & auf. rôt il y aura une grande effervefcence ; c’eft pourquoi on laïffera plus de la moitié de la bou- teille vuide, pour que ce vuide foit capable de contenir l’écume produite par l'effervefcence , fans qu’elle entre dans la veflie. Liez la vefie h avec la ficelle k À ; alors tout l'air fixe qui fe dé- gage par certe effervefcence , palfera dans le tuyau # €, &c. remplira ha vellie à. Ofervez avant d'employer ces veffies de lesendre fouples, molles; pour cela il fuffic de les tremper dans l’eau pendant quelques mi- nutes , mais après, il faudra les effuyer à l’exrérieur avec un linge; au- tement, elles feroient trop gliffantes & difficiles à manier. On fappofe aétuellement le malade couché dans fon lit, ou fi l'on veut , afis fur une chaife. Soit &Æ, figure 7, le corps du malade , & foir /, la mammelle avec le cancer. Aufli-tôt que la veflie a fera pleine d’air fixe, prenez-là avec la main par rr, figure 6, de fa- con qu'en la preffant entre les doiats, elle ne perde pas l'air &xe qu’elle contient par le tuyau € 7. SURL'HIST: NATURELLE ET LES ARTS\ 33 Déliez la ficelle À # ; appliquez la manche de la veflie f?, figure 6 , tout autour de la mammelle & du cancer L'r#n, figure 7. La ma- lade ou bien la Femme-de-chambre, preflera avec les mains, & ap- pliquera les extrémités de cette manche de veflie zn2n, tout le tour de la mammelle. Alors preffez petit à petit la veflie #, pour que l'air fixe forte par le tuyau € #7. On verra dans peu de tems que la quantité de l'air fixe diminue confidérablement & eft abforbée par le cancer. On devroit avoir plufieurs femblables veflies qu'on adapreroit fuccelivement à la bouteille , tandis que l’on feroit ufage de la première , afin de profiter de l'air fixe qui s’en dégage encore. Certe opération durera une demi-heure tout au plus, & on peut la répéter autant de fois que l’on voudra, & ce fera au moins deux fois par jour. Le Chirurgien Anglois, dont parle M. de Magellan, traire ac- tuellement à Londres , un malade dont le vifage eft dévoré par le plus terrible des cancers. Les douleurs éroient fi vives, filancinantes, que ce malheureux ne dormoit pas depuis long-tems. Quand le Chi- ‘rurgien l’a entrepris, le cancer avoit alors 16 pouces de circonfé- rence, de façon que tout un côté du vifage en éroit dévorc. Dans moins de huit jours de traitement par l'air fixe , les douleurs ont ceffé, le cancer a été réduit à 12 pouces de circonférence, & on continue le traitement. La ceffarion des douleurs , & le recouvre- ment du fommeil, voilà déja deux grands points obtenus. Cependant , quoique nous n’ayons pas l’honneur d’appartenir à ce Corps refpectable, qui veille fur la fanté du citoyen, qu'il nous foir permis de faire quelques obfervarions à ce fujet. Le cancer eft-il une maladie locale où une maladie dépendante d'un vice des humeurs quelconques ? L'expérience à toujours prouvé que l'opération une fois faire à un fein cancéreux , il fe manifeftoit bientôt un nouveau cancer à l’autre fein , à moins que le cancer n’eût été produit, par exemple , par un coup qui auroit fait engorger & abfcéder des glan- des, ou par telles autres caufes extérieures & femblables. Si le cancer éroit un vice local, le fecond fein ne feroit donc pas devenu can- céreux après l'amputation du premier. Le vice cancéreux dépend donc des humeurs quelconques, Ce n’eft pas à moi ni le moinent d’exa- miner l'humeur en particulier d’où 11 provient. L'air fixe, dans l’ex- périence de Londres , agit-il fimplement fur le cancer, ou en même- tems fur la maffe des humeurs ? Il y a beaucoup à préfumer que ce nef pas fur le premier. La pourriture des chairs n’eft que la fuite de la perte de leur air fixe, ou plutôr la chair n'entre en putré- fation que par la perte de cer air. Vérité que M. Macbride, & plulieurs autres après lui, ont fi bien démontrée, Je crois donc que dans pareil traitemenc , il feroit avantageux, fi je ne dis pas né- 134 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, ceffaire , d'ajouter l’ufage intérieur de l'air fixe , combiné avec l’eau ou avec cel autre médicament liquide. En effet, combien n'a-t-on pas vu de remèdes produire, dès les commencemens, des changemens heureux, mais dont le fuccès a cté de peu de durée? Je réponds, par ma propre expérience, des bons effets du mouron rouge. Anagallis flore phœæniceo. Lan. La décottion de certe plante prife en breuvage, & le marc appliqué fur le cancer, entre deux linges toujours humectés de certe décoc- tion, fit confidérablement diminuer un chapelet de glandes telle- ment engorgées autour du col, & fur-tout fous les aiffelles , que la malade ne pouvoit abaïffer les bras fans douleur; les bords de la plaie cefsèrent d’être carcinomateux, de faire le cul de poule; enfin, la plaie devint très-belle & beaucoup plus petite. La malade, qui étoir une pauvre femme de campagne, fe fentanc très - foulagée, voulut aller aux moiflons dans la plaine, ceffa , pendant deux mois, l'ufage du mouton rouge, les accidens reparurent ; le mal augmenta, & elle mourut l'hiver fuivant. À cette feconde reprife, la décoc- tion ne produifit plus aucun effet. Je prie les Maîtres de l'Art de prendre en confidération ce fait, dont j'attefte la vérité. Revenons actuellement aux bons effets de Pair fixe dans différens traitemens. : M. Percival (Expériences & obferv. fur l'Air five) dit, qu'ayant appliqué l'air fixe à un cancer, la fanie fut adoucie, & la douleur modérée. ... Qu’une perfonne avoit au vifage une éruption fcorbu- tique, pour laquelle on avoit fait divers remèdes fans fuccès ; qu'il lai appliqua l'air fixe, & ce remède abattit l'écoulement féreux, & diminua l’éruprion. M. Champeaux, Chirurgien très-diftingué de la Ville de Lyon, dans fon Mémoire couronné, au commencement de 1776, par l’Aca- démie Royale de Chirurgie de Paris, fur cette queftion : Comment l'air, par fes différentes qualités, peut-il influer dans les maladies chirurgica- Les, & quels font les moyens de le rendre falutaire dans le traitement ? rapporte plufieurs expériences qui lui ont parfairement réuil,. M. Louis, un des célèbres Profefleurs de cette Ecole , a fair la lec- ture de ce Mémoire dans fes Lecons publiques, & c’eft par-là que nous avons eu connoilfance des principales. Une femme , âgée de 77 ans, fe caffa la jambe gauche à quarre travers de doigts au- deffous de la rotule; une autre femme entreprit de la guérir, & par les violentes extenfions & contre-extenfons qu’elle fit faire à cette jambe, & par un appareil mal fait & trop ferré , il furvinc un gonflement confidérable qui fur prodigieufement augmenté par l'application des huileux ; enfin, toute la jambe fe remplit de phlyétènes pleines de fanie féreufe’& noirâtre. A cer afpect, la chabilleufe prit peur & abandonna le malade. Un bandage, arrofé SUR L'HIST. NATURELLE ET LES ARTS. 135 de 4 en 4 heures avec de l’eau faturée d'air fixe, diminua bientot l'engorgement ; les phlyétènes fe defféchèrenr , & la fracture fur réduite: Un homme avoit, depuis fix mois, deux ulcères fongueux à l’anus, dont on ne pouvoir obtenir leur cicatrice; une comprefle, empée dans l’eau faturée d'air fixe, & fouvent renonvellée, ferma la plaie dans ttois jours. ... Un ulcère calleux à la jambe droite, qui , depuis dix ans, s’étoit rouvert & cicatrifé plufeurs fois, étoit parvenu au point d’une pourriture confidérable , accompagnée de fièvre & d’inflammation, fut guéri par les mêmes compreifes. La prosreflion en bien fe manifeftoit d’un panfement à l’autre, & l'ulcère étoit de la grandeur de la main. Tous ces exemples réunis, prouvent donc l'efficacité de l'air fixe. Pourquoi n'en multiplie-t-on pas l'expérience , fur-tout pour ces maux réputés incurables, & fur-tout pour les ulcères à la matrice? 11 eft plus aifé d'imaginer des appareils propres à cette opération , que de les décrire honnêtement. Ce n’eft pas à nous à porter la faulx dans la moiffon d’autrui. LE Em Lay ME De + Gr De M. DE STEHLIN, Confeiller d'Etat de Sa Majefté l'Empereur de Ruffie, au Doüeur M ATY, fur une male de Fer natif. 1e AA Ets JE vous envoie un échantillon de fer crud & natif, que M. Pallas à dé- couvert l’année dernière , dans la Sibérie , fur les monts Aéir, entre l'Ubec & le Sim , ruifleaux qui fe déchargent dans la riviète de Je- nifei. La quantité, que ce Naturalifte en a trouvée , ne forme qu'un feul bloc pefant cinquante. puds (1), &. n’éroit éloignée que de cent braffes d’une tiche mine d’aimant ou de fer. - * t Vous favez bien, Monfieur , que l’exiftence d’un femblable fer a été révoquée en doute jufqu'à ce jour. Je fuis néanmoins affuré que cette découverte déterminera la queftion: fur-tout fi l’on confi- dère qu’on ne trouve aucune trace d’ancienne forge dans tour le Dif- tri où ce bloc éroit, & que rien ne peut faire foupçonner qu'il (1) Le pud pèfe quarante livres Rules, 136 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, y ait eu autrefois, dans cet endroit, des travaux fur le fer, où cette maille aura été fondue , & enfuire abandonnée deffus le lieu. Il n’y a abfolument que la fappofition d’un ancien volcan, qui foit capable d’infirmer l’authencicité de cette découverte. Car on pour- roic objecter que le fer ayant été d’abord fondu par fa violence, ce métal fe fera pris ainfi en male, & que par le laps du tems, s'y feront incorporées les petites paillettes , couleur d'hyacinche, qu'on y voit aujourd'hui. Certre malle eft fpongieufe, compofée d’un fer des plus parfaits & des plus malléables. Ses cavités font exactement remplies de petites paillettes fort polies, couleur d’hyacinthe. Il y a des paillettes ron- des ; on en trouve de plates ; & toutes paroiffent tranfparentes coin- me de l’ambre. 1 Toute la fuperficie du bloc eft couverte de rouille, qui n’a pu pénétrer le dedans , à caufe d’une forte de vernis ou d’incruftation poire , qui recouvre le fer. Sa forme eft très-irrépulière , mais les angles font tous tronqués. Ce fer peut fe battre & s'étendre à froid ; &, pour peu qu'on l’échauffe , il eft facile d’en former des cloux ou d’autres inftrumens, Lorfqu'on lui fait éprouver un plus grand degré de feu, fur-tout, fi on veut le débarraffer des matières étrangères , en l’expofant au fourneau de fufon, il devient caffant, grenu, & fes parties ne fe reprennent plus dans la forge. On l'a trouvé à la furface du fommet d’une élévation couverte de bois, près des montagnes, que Les Tartares appellent Nerir. L’afpect , la nature de cette male, les qualités du fer, qui la conftitue en plus grande partie, font fi décififs, qu'il n’eft pas dou- eux qu’elle ne foit un produit de la Nature. Aiïnfi l'exiftence du fer natif ne doit plus être problématique. Car, quoiqu'il y ait des travaux établis pour ce métal, dans plufieurs montagnes de la $:- bérie, on n’en remarque aucune trace d'anciens ni de modernes dans le lieu où on en a fait la découverte. D'ailleurs , la: mine d’aimant ou de fer, dont j'ai déja parlé , ne fut ouverte qu’en 1752, tems où les Mineurs , employés à fon exploitation, découvrirent, pour la première fois, ce bloc de fer: mais on y fit peu d'attention, & M, Pallas eft le premier qui en ait connu la véritable nature. PE RS MÉMOIRE Gen SUR. L'HIST. NATURELLE ET LES ARTS. 137 PME MEMOIRE Du Do&teur G BRowNR1GG, Sur quelques Echantillons de Sels natifs, préfentés a la Société Royale de Londres. Le premier eft Le Je/ cathartique amer, que Grew découvrit, à la fin du dernier fiècle , dans la fontaine d'Epfom , & qui eft le plus généralement répandu fur la furface de notre globe , après le fel commun. Les eaux de l'Océan en contiennent une quantité immenfe: c’eft mème à ce fel qu’elles doivent leur amertume. On trouve pref- que par-tout des fources qui en font chargées. Ces fources, deve- nues impropres aux ufages domeltiques , prêtent un grand fecours à la médecine. On le rencontre abondamment dans plufieurs lacs, tels que l’Æfphalte , & quelques autres de la Sibérie (1). Enfin, les échan- ullons que j'ai envoyés à la Société Royale , nous démontrent que germe , pour ainfi-dire , dans les pierres , & autres fubftances enfon- cées dans le fein de la terre. C’eft delà que les fontaines, les lacs, & même l'Océan, du moins en partie, retirent celui qu'ils tien- nent en diffolution. Le N°. 1, offre divers échantillons de fel amer, que j'ai trouvé en grande abondance , dans un& pierre de taille d’un gris-blanchâtre, qui fe voit dans la mine de charbon de Howgils , près Whirehaven. Il fort de cette pierre, en prenant la forme de filamens très-fins, blancs , fragiles, & brillans comme de l'argent poli. Il y a de ces aiguilles , qui ont trois pouces de longueur; mais elles ne font pas toutes également grandes. On en trouve plufeurs accumulées les unes far les autres , au point de ne faire qu’une feule mafle. Il y en a de très-pures : fouvent elles paroiffent entremèëlées d’une légère effloref- cence de vitriol verd, que la mème mine produit auñli abondammenr. Les vaftes lits de pierres de taille, qu'on trouve dans les mines de charbon , près Whirehaven , & dans la plupart des autres mines fem- blables , réfiftent rarement aux injures de l'air : quoique ces pierres foient crès-dures, inaltérables , pendant qu’elles reftent dans les en- (1) Gmelin. Tome VIII, Part. II. 1776. S 138 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, trailles de la terre, on les voit fe réduire fucceflivement en pouf- fière , dès qu’on les expofe à l’impreflion de l'athmofphère. C'eft pour cela qu’elles ne peuvent fervir à la conftruction des édifices. Leur def- œuétion ne vient probablement que de la germination du fel amer; quelquefois aufli de celle du vitriol ; mais rarement de la formation des fels nitreux, comme on la communément fuppofé. Le N°.2, eft le /e/ cathartique de la mème mine , mais dans un état de cryftallifation. Je l'ai trouvé dans de petites crevalles, au fommet de quelques piliers de charbon, qu'on laiffa il y a environ quarante ans , pour fupporter la voûre de la mine. Il a été produit par une pierre femblable à la première, & qui forme le ceintre de la voûte. Ces cryftaux imitent de petites aiguilles , analogues à celles du N°. 1. Elles font forties fucceflivement de leurs matrices pier- reufes , fi près les unes des autres, qu'elles forment un bloc (ide. N. B. Tous les fels, produits par la germination , affectent une texture fibreufe comme le /&/ amer. Les échantillons de couperofe verte & d’alun, que j'ai recueillis dans la mème mine de Howpils, en fourniffenr la preuve. - Le N°.3, préfenre le fel cathartique cryftallifé en petites maffes folides , tranfparentes, & irrégulières. Il s’en rencontre beaucoup de pareil dans plufieurs endroits des mines de charbon de Howgils & de Whingils, près Whitehaven , où l’on a ceffé de travailler depuis environ une centaine d'années. Il y a trente ans que j'en envoyai des échan- tillons , au Doéteur Auns-Sloane. Sous le N°. 4, j'envifage le fel cathartique amer dans un état de pu- rification; pour le rendre tel , je commence parle diffoudre dans l’eau : Pendant cette diffolution, il fe fait un dépôt charbonneux, dans lequel fe trouvent aufli d’autres matières étrangères. Lorfque toutes ces fub{- - tances font bien précipirées, je décante ma leflive, & l'ayant réduite à un état d’évaporation convenable, je la mets cryftallifer dans des vafes fort propres. En répétant quelquefois ce procédé , j'ai obrenu des cryf- taux très-purs, & affez confidérables. Ils ont la figure d’une colonne quadrilarère , terminée à fon fommer, par une pyramide à quatre cotés. Ils paroïffent comme rompus à leur bafe dans le lieu où on les a détachés des parois du vaiffeau , ou de tout autre corps auquel ils s'é- toient unis pendant leur formation. Les quatre pans des colonnes fe rencontrent toujours à angles droirs , & font tous égaux dans les petits cryftaux qui fe font formés les premiers. Mais les plus gros, qui femblent compofés d’autres plus petits, ont fouvent deux côtés oppofés plus larges que les deux autres. Les quatre triangles , formés par le concours des furfaces de la colonne, différent communément entre eux, en figure & en grandeur ; c’eft pourquoi les pyramides qui en réfultent, paroiffent irrégulières : quelquefois , au lieu de SUR L'HIST. NATURELLE ET LES ARTS. 139 finir en pointe , elles fe terminent en un fillon formé de deux plans in- clinés, qui font une continuation de deux faces de la colonne pa- rallèles & oppofées. Ces cryftaux font parfaitement diaphanes , & de la plus belle eau. On peut les Hiulee plufieurs années dans cer érat en les enve- loppant dans du papier ; feulement pour empècher que la pouflière , ou d’autres impuretés,’ viennent Les falir. Ceux que j'ai préfentés à la Société Royale , fe font confervés pendant vingt ans , avec cette fimple précaution. Ils n’ont point y fa l’eau de leur cryftallifation, au point de devenir blancs ou poudreux ; & on n’apperçoit pas qu'ils foient tombés en deliquium , en abforbant l'humidité de l'air. À la vérité , je ne fache aucun fel formé par la germination , qui foit fujer à fe diffoudre dans un air humide. Au contraire , ces circonftances favorifent extrèmement leur production , parce qu’il faut une certaine quantité d'humidité pour qu’ils fe forment. [ly en a feulement plufieurs qui quittent une partie de leur eau, lorfqu'ils reftent long-tems ex- pofés à l'air libre. L'aphronirre ou fel muriatique, qui n’eft que l'alkali fixe , m'en a offert un exemple. Ayant purifié une grande quantité de ce fel, j'en ai tenu les cryftaux dans un bocal bouché fimple- ment avec du liége. Au bout de’ douze ans, je les ai trouvés fecs, pulvérifés en partie , au point d’avoir perdu leur tranfparence, & pref- que leur configuration. Le vitriol verd eft également fufceptible de fe rouiller; il perd à l'air libre , une portion de fon eau , quoique l’acide qui le confticue , eft peut-être de tous les corps falins , celui qui attire le plus avidement l'humidité, Le fel cathartique amer des mines de charbon , m'a paru exac- tement conforme au fel d’'Epfom purifié , tant à caufe de fon goût frais & amer, que par fa vertu purgative & autres propriétés. Ses cryftaux ont la même configuration. IL refflemble encore, par toutes fes qualités, à un fel (1) qui refte dans l’eau-mère des chaudières qui ont fervi à faire évaporer de l’eau dela mer, pour en obte- nir le fel commun. Je ne trouve aucune différence entre lui & le fel des eaux de Scarborough , décrit par le Docteur Shaw, & qu’on vend très-cher fous le nom de ces eaux. Enfin, la plupart des fels purgatifs , qui ont retenu la dénomination des fources qui les f8ur- niflent , ne font autre chofe qe le fel cathartique amer. Ils n’en diffèrent que par la grandeur des cryftaux, ou à raifon de leur pureté. D'ailleurs , il y a plufieurs eaux purgatives qui , outre le (() J'ai extrait fouvent ce fel de ces eaux-mères , qui évoient très-épailles & tres-pefantes, S 2 ‘140 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, : fel amer , contiennent encore Je marin, le fel muriatique calcaire, le natron , & autres efpèces. Sous le N°. $ , je comprends le fel d'Epfom ordinaire, purifié de la manière qui fuir. Après qu'il a été difflous dans de l’eau, & que la leflive a repofé quelque tems, il s'en fépare une grande quantité d’écume noire qui gagne le haur, en même-rems qu'on voit précipiter un dépôt terreux. Quand la liqueur eft débarraffée de ces matières, on lui fait fubir une légère coétion qui en dégage une grande quantité de fel marin ; dont on écume les pétits grains qui montent à la furface de la liqueur, tandis que les gros tom- bent au fond du vafe. L'évaporation étant ainf purifiée & ré- duite à un état convenable, on la mer cryftallifer dans des vaif- feaux bien propres, & après la cryftallifätion, on verfe le. réfidu de la liqueur (1). ; Le N°. 6 préfente du fel amer bien pur, que j'ai obtenu de leau-mère des falines établies près de Whirehaven. Le fël marin en avoit été déja féparé par le moyen de la coétion. gi Le fel cachartique, ainf purifié, forme un remède excellent dans plufeurs maladies. C’eft dans cet état que je le recommande , an lieu de celui qu'on vend partout dans les Bouriques. Le difcrédie où ce dernier eft juftement tombé, ne vient que des matières étran- gères qui le fouillent. ; N°. 7. J'ai obrenu de la mème eau-mère, (N°. 6) un fel dont les cryftaux font rhomboïdes, cuneï-formes, & prefque inalrérables à l'air libre; ils femblent avoir un goût plus amer que celui du fel cathartique commun. RARE e Le N°.,8 renferme divers échantillons de vitriol verd natif, re- tiré des mines de charbon, fituées auprès de Whitehaven. Je l'ai ramallé dans celle de Howgils, où il étoit très-abondant dans les , joints ou interftices des piliers de charbon qu'on à ménagés: pour fourenir la voûte de la mine; on avoit ceffé de travailler, depuis environ 40 ans, aux endroits où je l'ai cueilli 3 l'air paroifloit ,y avoir un libre accès, & le charbon y étoit ‘par petits morceaux , peu preffés les uns à côté des autres. ; j Parmi ces vitriols (N°. 8), il y à un échantillon fort curienx, qui démontre combien ce fel & les autres, dont il eft queftion . dans ce Mémoire, peuvent prendre une apparence fbreufe. Ici les germinations où productions falines , fortent de certaines pyrites, . (1) Ce réfidu n'eft qu'une folution du même fel, mélangé de beaucoup de fel commun & de fel muriatique calcaire. Ÿ : SUR L’'HIST. NATURELLE ET LES ARTS. 141 très-voilinés les unes des autres Ÿ de forte que dans plufieurs en- droits , elles s’affémblent en. faifceaux ou en pelotons. Mais il refte encore des places ou des vuides, qui, fi la pyrite eût confervé fa fituation natale, fe feroient très-probablement remplis d’autres fila- mens, fournis par la même matrice, & toute la concrétion faline ‘n'autoit. formé dans'la fuite qu’un feul corps compaëte, de texture fibreufe. N°. 9. Plufeurs échantillons du même vitriol, qui font plus ferrés & plus compactes que les précédens (N°. 8), le tiffu fibreux du fel y eft aufh plus apparent. N°. 10. Diverfes pyrites , avec du vitriol verd adhérent & retenu dañs leurs crevalles , où, les fels, ne ceffant de groffir, ont agi comme des coins & les ont réduites en poudre. Dans cet érat de dépérifflement , les pyrites paroïffent noires , parce qu’elles ne font plus,qu'un réfidu de bitume & de terre, ayant déja perdu Jeurs principes falins. Je ne nierois pourtant pas qu'il ne pût y voir quelque portion de charbon foflile entremélee. Le N°. r1 contient de l’alun natif des mines de charbon, proche de Whiteaven. On le trouve adhérent à de la pierre, dont il fort en très petits filamens, de couleur blanche & brillans. Ils reffem- blent à des flocons ou à du duvet; ainf, c'eft le même fel qu'on - connoît depuis long:tems fous le nom d’alur en plume. On trouve quelques efpèces d’asbefle , qui ont un afpett femblable. On les a défignées par la mème dénomination , mais c’eft rrès- improprement. Ce fel'a le goût caraëétériftique de l’alun, quoiqu'il foit un peu plus rude & plus aftringent. Cette différence lui vient, fans doute, d’un petit mélange de vitriol de fer, qui paroît être né avec lui, ou bien, peut-être, parce que l’alun préparé reçoit des additions étrangères qui le rendent moins âpre & moins ftyprique que le na- tif. La pierre qui a fourni celui-ci, eft noire & brillante. Elle paroît fr empreinte de bitume , qu’elle brûle lentement, & laiffe une cendre blanche , lorfqu’on l’expofe au feu , en gros tas. N. B. J'ai ramaflé au fommet de ces tas, une confidérable quantité de-foufre, qui s’y étoit fublimé pendant la calcination de la pierre. Le N°. 12 offre de gros morceaux du même alun natif très - pur. Celui-ci eft jaunâtre exrérieurement, pour avoir demeuré deux ans à-l’air libre, après qu’il fuc retiré de la mine. Il paroît plus brillance dans fa caffure , & préfente un œil bleuâtre. On trouve autour de cet alun une grande quantité de terre âpre, auftère, & ftyprique comme Falun calciné. Sans doute que c’eft une terre alumineufe. Je ne niéroïs pas en mèême-tems qu’elle ne con- 142 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, tinc quelque particule ocreufe , qui peut être la caufe de fon œil Jaunatre, t Il y a encore de vaftes lits d’une glaife pierrenfe & brillante, très - réfractaire au feu, & qui produit de l’alun en certains en- droits. LEA CAE RATE Adrefée à l'Auteur de ce Recueil. NE ur, on lit dans votre Journal de Juillet, un Æffai Jur la poffibilité de divifer un Angle quelconque en trois parties égales, en ne faifant ufage que de la règle 6 du compas, par M. Romain. Cet article n'a rien de nouveau. Avec le compas & la règle de Gunter, il ne feroit pas difficile de réfoudre ce célèbre problème de la trifeétion de l’angle. Mais la règle de Gunter n’eft pas une fimple règle, comme le problème l’exigeroir. 11 en faut dire au- tant de la règle de M. Romain ; dès qu'il marque un point de divifion fur cette règle, elle cefle d’être une fiinple règle; & le roblème n’eft plus réfolu géométriquement , mais méchaniquemenr. M. Ozanam avoit trop de fagacité, pour ne pas s'être apperçu de la vérité de ce que j'avance : aufi, s’eft-il bien donné de garde de préfenter cette folution comme géométrique; il la réfervée pour fes Recréations Mathématiques; on l’y trouve à la page 274 du tome premier, édition de 1741. Je crois M. Romain trop modefte , pour vouloir s’attribuer les anciennes découvertes ; c’eft, fans doute, par pure diftration qu'il a oublié d’avertir que fa folution ne différoit point de celle de M. Ozanam. Je fuis, &c. K 7 f4\ SUR L'HIST. NATURELLE ET LES ARTS. 143 NES CRD PE ENON D'une Matrice & d’un Vagin doubles; Pur M. J, PURCELL, Proféffeur d'Anatomie au Collège ds Dublin. L'Éz£ dernier on apporta , à l'Amphitéâtre Anatomique du Col- lége de la Charité, le corps d’une femme morte en travail d’en- fant, au neuvième mois de fa grolfeffe. A l'ouverture du bas-ven- tre , la matrice parut de la grandeur ordinaire dans ce période. Elle renfermoit un fœtus qui avoir acquis tout fon développement. Mais on ny remarquoit qu'un ovaire & une trompe. C’éroient ceux du côté droit. Il y avoit à gauche un fecond utérus non im- prégné, grand comme de coutume, & qui avoit recu en partage l'autre ovaire avec fa trompe. Chaque matrice étroit parfaitement diftincte l’une de l’autre; elles ne s’uniffoient qu'au bas de leur col, dans l'efpace d’un quart de pouce, formant entr'elles un an- gle aigu. Les parties externes de la génération, n'offroient rien d'extraordinaire. On voyoir feulement, à chaque côté du méat urt- naire , une membrane qui fe portoit en arrière , embrafloit cet orifice, & , rapprochant fes deux feuillets, formoir, par leur réu- nion, une cloifon qui prenoit le refte de fon origine du fillon dit communément /2 colonne antérieure, alloit s’inférer perpendiculaire- ment à la pofférieure, & s'étendant tout le long du vagin, le di- vifoit exaétement en deux tubes d’égales dimenfons. Chaque con- duit n'aboutifloit pas féparément dans fa matrice correfpondante. Le droit s’élargifloit par degrés en montant, & devenoit enfin aflez amplé pour embraffer les deux orifices de l’urerus. Le gauche , te- nant une direétion oblique , fe terminoit en une efpèce de cul- de-fac, ou de cæcum. Une conformation fi fingulière auroit rendu ce dernier tout-à-fait inutile à la conception, fi la Nature n'eût prévenu cet inconvénient par un artifice fort extraordinaire. C’eft une efpèce de fifure, longue d’un pouce, ménagée dans la cloifon, & diftante d’environ un pouce de la matrice correfpondante. Chaque matrice pouvoit donc être imprégnée par chaque vagin; la droite par les deux ; mais la gauche n'étoit probablement fuf- 144 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE; ceprible de concevoir que par le vagin oppofé. Car s’il n’y avoit eu que fon correfpondant qui eût été mis en ufage, la faillie de la cloifon , devant le mufeau de tanche caufée par la préfence de la verge, n'auroir pas manqué de couvrir & de fermer cet orifice. Alors, la femence ne pouvant s’y introduire avec facilité, fe fe- roit tranfimife dans lorifice gauche, dont elle auroit trouvé l'entrée plus libre. On peut même conjecturer que dans le cas préfent ; il ny avoit que le vagin gauche qui eür été mis en ufage. La cloifon n'éroit pas entièrément membraneufe, mais charnue & fort épaifle. On remarquoit dans fa compoftion , deux lames , dont chaque vagin fournifloit la fienne. Car ceux-ci avoient cha- cun un confriceur propre , & étoient totalement entourés de fibres mufculaires , qui leur permettoient de fe contracter indépendam- ment l’un de l’autre, Je terminerai ce Mémoire par une remarque particulière fur lac- couchement qui fe préfenre quelquefois à faire dans des cas de certe nature. Je ne peux trop recommander aux Accoucheurs d’ob- ferver à cer égard la circonfpection la plus fcrupuleufe. Autrement, on rifque de fe livrer à des entreprifes aufli réméraires que cruelles pour la patiente, Dans la perfonne qui a donné lieu à certe ob fervation , j'ai trouvé l'orifice de la marrice non enceinte, fi dilaté, que jy pallois facilement deux doigts; ce qui pouvoir bien dé- pendre des tentatives que la Sage-femme avoit faites pour déli- vrer la malade. Les deux orifices, fe préfentant alternativement au toucher des gens qui ont peu d'expérience , peuvent leur fug- oérer des doutes fur la réalité de la groffeffe , dans le réms mème où le travail approche; ou bien ils entreprennent de dilarer le vagin correfpondant à la matrice vuide, efforts qui augmentent les difficulrés de l'accouchement , ou le rendent peut-être impra- ticable. NOUVELLES LITTÉRAIRES. SURVPHAIST: NATURELLE: ET LES ARTS. 14; ———————— ————_—_———— —_—_—— - à NOUVELLES LITTÉRAIRES. © MORT D PR LO CG ERA IM: 2 ME DE LA SOCIÉTÉ DES ARTS DE GENÈVE. ÏL n'eft guère d'époque plus intéreffante dans l’hiftoire de l’efprit humain, que celle de l'établifemenr de ces Compagnies favantes , connues fous le nom général d’Académies. Ce font ces Compagnies, qui diftinguent fi avantageufement nos tems modernes, qui ont donné une nouvelle vie aux Sciences, aux Lettres & aux Arts. Ce fonc elles qui ont fait gérmer dans notre Europe’, Les talens, de tout genre, encouragé l'induftrie , excité l’émulation , alimenté le génie, perfeétionné l’efprit d’obfervation , ouvert les routes qui con- duifent aux vérités de la nature, ployé ces vérités aux befoins rou- jours renaillans de la Société, & produit une multitude de décou- vertes théoriques & pratiques, qui ont enrichi de plus en plus le fonds précieux des connoiffances humaines , & donné à notre fiècle une fupériorité fi décidée fur les fiècles qui l'ont précédé. Tous ces grands effecs de l’établiflement des Académies r’étoient pas difhiciles à prévoir; & ils n’avoient, point échappé à Ja pénétra- tion de ces. Hommes rares, qui en avoienr été les premiers Fon- dareurs , & qui étoient devenus ainf les bienfaiteurs de l'humanité. Mais, ce qu'ils n'avoient peut-être pas prévu, c’eft qu'il .viendroit bientôt un tems où les principales Villes de l’Europe fe glorifieroient de marcher fur leurs traces , & de fonder des Académies fur le modèle des leurs, & confacrées, comme elles. à l'avancement des Sciences, des Levrres ou des Arts. s L Genève, appellée à: cultiver.au.fein, de la paix, les, Arts de là paix, & dont le territoire, Hheureufensent très-borné, ne; laïfle à fes habirans que les reflources qui naiflenc des talens & de l'in- duftrie ; Genève, dis-je, n'avoit point encore de Sociéré confacrée uniquement à l'encouragement des Arts vraiment utiles , & .cet éra- blifement manquoir à fes befoins. Elle ,en jouir aujourdhui; & le généreux empreffement d’un grand nombre de Soufcripteurs, a domué, à la Société naifante, la fatisfaétion de, pouvoir, faire -connoïtre, au Tome VIII, Part. II. 1776. 1 \ 146 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, Public le but de fon inftiturion, & de diriger fes premiers pas vers | ce bur, en faifant l'ouverture de fes Programmes. La Société des Arts de Genève informe donc le Public, que fon deffein eft de faire tous les ans un choix de Queftion , dont la folation lui paroîrra la plus imporrante pour le perfectionnement des Arts & de l'Economie, & d’attacher à cette folurion des récompene fes honorables, propres à encourager les ralens & l'induftrie : Elle invite tous les: Savans & les Arriftes , & en particulier les Mem- bres des Sociérés étrangères, dont les travaux ont le mème obiet, à s'occuper de la folution de ces Queftions , à entrer en commerce avec elle, & à lui faire part des découvertes utiles qui parviendront à leur connoiffance. De fon côté, elle fera très-exacte à cultiver un commerce fi avantageux pour elle, & à répondre, par fes fervices, à ceux qu'on aura bien voulu lui rendre. La Société propofe , pour l'année 1777 , les Queffions fuivanres. QUESTIONS SUR LES ARTS. PREMIÈRE QUESTION. Tracer un plan de Eegons & de Démonftrations élémentaires de Me chanique appliquée à l'Horlogerie. On a un f grand nombre de bons Elémens de Méchanique , d’Hydraulique , de Dynamique, &c. que l’on ne demande point le plan d’un Traité général & univerfel fur les forces des corps & far leur ation réciproque. On défire feulement que l’on indique fes principes qu'il faur tirer de ces différentes fciences, pour l'intel- ligence de la Théorie de l'Horlogerie. Et ce n’eft pas mème une Théorie abitraite de l’Horlogerie , que l'on veut enfeigner, mais une Théorie fimple, facile, & qui s'applique utilement à la Pratique. Les. Leçons & les Démonitrations , dont on demande le plan, font deftinées à de jeunes Arrifans; le but qu’on fe propofe, n’eft pas d’en faire des raifonneurs, mais d’habiles Artiftes, ainfi, on ne veut leur enfeigner ici, que ce qui peut leur fervir dans l’exer- cice de leur profelion. En fuppofant donc que les Elèves auxquels on s’adreffe, ne fachent que les quatres règles de lPArithmétique , on défire de connoître la meilleure manière de leur enfeigner pré- cifément ce qu'il faut de Calcul, de Géométrie, de Méchanique & d’'Aftronomie , pour l’intelligence de lPHorlogerie. On demande enfuite la meilleure méthode à fuivre, pour démontrer la ftructure d'une Montre ou d’une Horloge, la forme de fes différentes pièces, SUR L'HIST: NATURELLE ET LES ARTS. 147 leur ation, leur dépendance réciproque, & les effets qüi en réful- cent ? quelles {ont les qualités qui conftituent la perfection de cha- cune des pièces & de leur aflemblage, les différentes conftructions que l’on à imaginées, leurs avantages & leurs inconvéniens , les moyens de les perfectionner, ou du moins, la route qu’il faudroir fuivre pour trouver ces moyens? On voudroit aufli prémunir les Artiftes contre les cromperies de ceux qui promettent des chofes impoñhbles, comme la recherche du mouvement perpétuel, & d’au- ces problèmes infolubles. Enfin, pour ce qui regarde immédiarement la pratique, on dé- fireroir aufli le plan des enfeignemens & des démonitrations qui doivent fervir à la diriger; pour apprendre aux Ouvriers à mettre le meilleur ordre & à fuivre les meilleurs procédés dans leurs opé- rations, & leur faire comprendre les raifons de cet ordre & de ces procédés; pour leur montrer l’ufage des différens outils, foit fim- ples, foit compofés; les caractères de la perfeétion & de l'imper- fection de ces outils , les moyens de remédier aux impetfections, &c. Mais comme les Savans, capables de réfoudre la partie Théoré- tique de la queftion, ne pourront vraifemblablement pas répondre à celle qui ne concerne que la Pratique , on admettra & ‘on cou- ronnera même le Mémoire ; qui excellera dans la première patrie, & on donnera un Acceflit à celui qui aura le mieux traité la fe- onde. Le Prix fera une Médaille d’or dé la valeur de doute louis & demi, ou 300 livres argent de France. L’Accefhit fera une Médaille d'argent du mème volume. Ce Prix fera décerné par le Comité des Arts: SECONDE QUESTION. La bonté de la trempe dans l’Acier, étant une qualité précieufe, foic pour. les ouvrages de l'Art, foit pour les outils des Artiftes ; 8 la bonté de cette trempe ; dépendant eh partié de laciér donc on fait ufage, on demande : | 1°. Quelles font: les différentes efpèces d'acier; & à quels fignés en peut les reconnoître & s’affurer fe leur perfection ? Quelles ef- pèces ou quels mêlanges d'acier il convient d'employer : pour diffe- sens ouvrages, & fpécialemént pour éeuk qui font énoncés dans le N°. 3 de cette queftion? De quelle manière on doit préparer & travaillér des. différens Ouvrages ; fabriqués avec cès aciers ou ces mélanges , pour les conduire jufqu'au moment de la trempe , fans altérer leur qualité? 2°. Quel feroit ls cément où l’énveloppe là plus convenable pour Tue 148$ OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, : difpofer: l'Acier à recevoir la meilleure trempe pofhble, & pour empêcher la diffiparion de fon phlogiftique , quand on le fair rou- gir pour le: foumertte à la trempe ? 3°. Comme certe trempe doit varier felon l'objet que louvrier fe propole , on demande les meilleurs moyens d'obtenir ,:4°. la trempe ferme & dure qui convient aux liminoirs , limes, ‘burins, marteaux, coins de monnoie ; &o.; 2°.-la: trempe moyenne, conve- nable aux pièces frotrantes de l'Horlogerie , relles:que. cylindres, ou verges de balanciers, pignons, pièces de quadrature des répéti- tions, petits reflorts , &c. 3°. la trempe douce”, : particulièrement adaptée aux grands reorts de pendules & de montres. Gerre queftion étant trop érendue pour que la Société qui la pro- pofe puille fe Aatter diy recévoir une réponfe complete; elle cou- ronnera le Mémoire le plus: fatisfaifant fur ces objers & fur-rouc celui qui indiquera des moyens nouveaux & meilleurs que ceux qui font déja connus, pour obtenir la treimpe dure & la trempe douce qu'elle juge les plus importantes. Le prix fera une Médaille d’or de la valeur de 24 louis ;; ou une Médaille d’argent de même grandeur , avecile-furplus en efpèces , auchoix de: l’Artifte. L’Acceflic fera une Médaille d'argent. Le Comité: des Arts éprouvera les recerres & les procédés pro pofés par les Auteurs des Mémoires; & Ja Société, après avoir, vw les réfultats de ces épreuves , & entendu le rapport du Comité, dé- cernera le Prix à la pluralité des fuffrages, dans fon. Affemblée du 19: Seprembre 1777. TROISIÉÈME. QUESTION On fait combien il importe de n’employer, à le conftruétion des Montres, que des métaux perfectionnés; & comme le Léron en- tr'autres s'écarte” fenfiblementr , depuis quelques anntes, de celui qui eft connu dans l'horlogerie fous. le nom de Cuivre. jaune de chau- dière ; la rareté de ce, Cuivre, dont la qualité fupérieure:n'eft peut- êtte dûe qu’à l’action répérée du feu & des graiffes fur les:chaudières dont: on-le rire , fair défirer que Part en puiffe produire, en moins de terns ; d’aufi doux &d’aulh: parfait : en conféquence , on de mande deux”bandes-de léton dont chacune ait fix pouces de lon- gueur, un-pouce & derm de largeur , :& mois. hgnes d’épaifleur au moins! qui rempliffenc les “conditions: fuivantes ;"favoic : Que .les parties dé ce métal foienr homopènes &: bienciliées:5) que forgé :à froid pendant: long-ræms avec: lés foins-requis., 1 acquière-le plus de dureté & d’élalticité poffibles , fans fe fendré ni stécailler ; qu'il préfenre à larcaffure des grains. Hinss égaux, & d'un beaû) jaune; SUR L'HIST. NATURELLE ET LES ARTS. 149 que dans les épreuves qu’en feront les Artiftes, il puiffe fe divifer en petites parties fans qu’elles fe détachent ; & qu’enfin, il fou- tienne l’action du mercure à la dorure , fans fe tourmenter ni fe défunir. Un moyen facile, & dont on pourroit ne pas s’avifer, pour re- counoître d’abord fi l’on peut efpérer d’avoir réufli dans la produc- tion du métal qu'on cherche; c'eft que, de même que l’or, il doir fe percer difficilement, fi le forêt n'eft imprégné d'huile. L'Arufte qui aura produit ces pièces de léton, expofera fes pro- cédés dans un Mémoire, en défignant l’efpèce de cuivre rouge dont il fe fera fervi pour cela, Le Prix fera une Médaille d’or de 20 louis , ou une Médaille d'argent de mème grandeur, avec le furplus en efpèces, au choix de l’Artifte. L'Acceflit fera une Médaille d'argent. : Ce Prix, de même que le précédent, fera décerné par l’Affem- blée du 19 Septembre 1777, après avoir ouï le rapport & vu les réfulrats des épreuves faites par le Comité des Arts. ” QUESTIONS SUR L'ÉCONOMIE. PREMIÉRE QUESTIO N. N°. I. Quelle eft la caufe de l’infériorité des récoltes en grains, dans le territoire de Genève & de fes environs, en comparaifon de celles qu’on fait ailleurs? N°. II. Par quels moyens pourroit-on, fans altérer ni changer la nature d'aucune propriété , augmenter , dans le territoire de la République de Genève, le nombre des Charrues & des Terres ara- bles, & mettre en plus grande valeur les Terres communes ? Le Prix deftiné à la réponfe qui fera trouvée la plus fatisfaifante à certe queltion, fera une Médaille d’or de la valeur de 20 louis, foit 480 livres de France. L’Acceflit fera une Médaille d'argent du même volume. Cette queftion en renferme réellement deux, qui peuvent être traitées en deux Mémoires féparés; en ce cas, le prix fera parta- gé, mais il fera adjugé en entier & par préférence, à celni qui, dans un feul Mémoire , aura traité ces deux parties. Le Prix fera décerné par le Comité d'Economie. SECONDE QUESTION. ‘Si lé Gouvernement dela République de Genève ordunnoit l’é- tabliflement d’une Mailon de force ; pour conteñir:les' Mendians , 159 (OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, les Vagabonds, & les Malfaiteurs de tout âge & de tout fexe , con- damnés aux travaux publics, comment devroient-ils être gouvernés les uns & Les autres, & à quels différens travaux pourroit-on les occuper, afin que le produit füt fuffifant pour fubvenir à leur en- etien, & aux frais d’un pareil établiflement ? On fouhaite que les Auteurs des Mémoires ne s’en tiennent pas à des vues générales, mais qu'ils entrent dans les détails convena- bles fur les frais de l'érabliffement, fur fa police, & fur le produit du travail. Le Prix fera une Médaille d’or de Îa valeur de 16 louis, foit 384 liv. de France. L’Accellit fera une Médaille d’argent du même volume. Ce Prix fera aufli décerné par le Comité de l'Economie. Tous les Savans & Arriftes, foir Etrangers, foit Genevois, & les Membres mêmes de la Société, font invités à envoyer des Mé- moires, & feront admis à concourir aux Prix. Les feules perfonnes exceptées du concours, font les Membres de chaque Comité pour les queftions qui le concernent. Ainfi, les Membres du Comité des Arts ne pourront point concourir aux Prix pour les trois premières Queftions, ni les Membres du Comité de l'Economie pour les deux dernières. On n’admettra point non plus au concours les Mémoires dont les Auteurs fe feront fair connoître direétement ou indirectement, ils fonc priés d’infcrire leur nom dans un billet cacheré & annexé au Mémoire; & ce billet ne fera point ouvert, à moins que le Mémoire n'ait mérité le Prix ou l’Acceffir. Les Mémoires & Réponfes aux Queftions fur les Arts, feront adreffés, francs de port, à M. de Sauffure, Profelleur de Philofo- phie, Préfident du Comité des Arts; & les Réponfes aux Queftions fur l'Economie, feront adreflées à M. Wafferor de Dardagny , Préli- dent du Comité de l'Economie. Le terme final , pour la réception des Mémoires , fera le premier Juiller 1777: Les Prix feront délivrés dans l'Affemblée générale de la Société, du 19 Septembre 1777, aux Auteurs ou à leurs fondés de procu- ration. Quoique la Société ne propofe.des Prix que pour les cinq Quef- tions énoncées dans ce Programme , elle a cependant pris la réfo- lution d’accorder des Médailles où des récompenfes pécuniaires, aux perfonnes qui lui communiqueroient des fecrets ou des découvertes utiles pour les Arts ou pour lFEconomie : ceux qui feroïent dans certe intention, font priés de s'adreler aux Préfidens des Comités SUR L'HIST. NATURELLE ET LES ARTS. 51 ou au Secrétaire “le la Sociéré. On recevroit, par exemple, avec bien de la reconnoiffance, quelque moyen für de préferver les Doreurs qui employent le mereure , des funeltes effers de fes va- peurs. L'Académie de Nifines propofe pour fujet de Prix du l’année 1777, la queftion fuivante : Quels font Les moyens les plus frmples € les moins difpendieux de rendre les moulins de Languedoc propres a La mouture éco- nomique ? Les Memoires feront adreflés , francs de port, à M. Séguier, Secrétaire de l’Académie. Le Prix fera indiqué au mois de Juin 1777. La Société des Sciences de Copenhague, propofe pour le Concours des Prix qu’elle diftribuera l’année prochaine, les fujets fuivans: Dé- terminer par une méthode plus précife & plus claire que celle qu'on à trou- vée jufqu'ici , la lione que parcourent Les boulets au forcir des canons & des mortiers. ..... Expliquer par les expériences les mieux conffatées la for- mation de l'acide nivreux. Les Mémoires feront écrits en François on en Latin , Danois & Allemand , & envoyés, francs de port, à M. le Chevalier de Dannebroy | avant le premier Juin 1777, exclufve- ment. Connoiffance des Tems , pour l’année commune 1777, publiée-par ordre de l'Académie Royale des Sciences, préfenrée au Roi le 14 Juiller 1776, & calculée par M. Jeaurat, de la mème Académie, ancien Profeffeur & Penfonnaire de l'Ecole Militaire. De l’Impri- merie Royale, 1776; & fe vend à Paris, chez Panckoucke , Hôtel de Thou, rue des Poitevins. Cet Ouvrage parut pour la première fois en 1679, & l’idée en fur due à M. Picard , célèbre Aftronome. M. Z Fevre lui fuccéda en 1689; M. Lieutaud en fut chargé en 1702 ; M. Godin, en 1730; M. Maraldi , en 1735 ; M. de la Lande, en 1760 ; enfin M. Jeaurar, en 1774, & voici le fecond volume qu'il publie. Ces Savans , de- puis M. Picurd , ont fucceflivement augmenté & enrichi cet Ouvrage de ce qu'ils ont cru de plus utile aux progrès de l’Aftronomie & de la navigation. C’eft dans certe vue que M. Jeaurat lui donna, l’année dermère , une forme nouvelle, & érendit confidérablement le Calendrier , partie effentielle de l'Ouvrage. Il a ajouté dans le vo- lume que nous annonçons , à la table ordinaire de la différence des méridiens, celle des principaux lieux contenus dans le Neptune orien- tal de M. Daprès de Manevillert : l’équation du midi, conclue par des hauteurs correfpondantes du Soleil qui, précédemment , n’étoit calculée que pour la lacitude de Paris, le ici pour 14 laritudes -. 52 OBSERPATIONS SUR LA PRPSIQUE, * d'#érentes , commençant à cellé de-20 degrés, & finiffanc à celle de 6o. É s Le Catalogne des étoiles zodiacales de ‘Flamfléed , tiré du Cara- logue Britannique , eft de nouveau réduit au premier Janvier 1777. L'Auteur y a ajouté les afcenfons . droices, & les déclinaifons ré- düites à la mèmé époque. La table des amplitudes & des arcs femi- diurnes eft confervée , afin de fuppiéer aux autres connoiffances des téms qu'on pourroit ne pas avoir fous la main... .. On trouve en- core dans ce volume nne table des plus utiles aux Marins , c’eft celle des inclinaifons de l’horifon vifuel , pour différentes élévations de l'Obfervateur au-deflus de la mer, fuivie de celles de la parallaxe du felsil & de la lune à divers degrés de hauteur, ainfi que l’augmen- tarion du diamètre de la lune à fes diverfes hauteurs. On voit dans les obfervarions météorologiques, l’expoñtion dif., cutée du grand froid de Janvier 1776, enfin ce volume eft terminé par des tables de nonagéfime fous la larirude de Dantzick, 54°. 22° 23". Elles font la fuite de celles que l'en trouve dans les deux précédens volumes, année 1775 & 1776. Leur totalité embraffe pref- que toute l'érendue de l'Europe, & ces dernières tables font pour la réduction des obfervarions, faites dans l'Obfervatoire que Æeve/ius a rendu fi célèbre par la multitude de fes recherches. Recueil de Differtations , ou Recherches Hifloriques & Critiques ( [ur plu- fieurs objets qui ne font pes de la compétence de ce Journal), avec de nouvelles affeitlations fur la végétation fpontanée des coquilles du Château des Places ; des deffins d’une nouvelle collection de coquilles foffiles de La Tourraine & de l’ Anjou ; de nouvelles idées fur la falunière de Tourraine, & plufieurs Lertres de M. de Voltaire, relatives a ces differens objets, par M. de la Sauvagère, Chevalier de l'Ordre Royal & Mihtaire de Saint-Loüis, Ancien Directeur en Chef dans le Corps Militaire du’Génie , &c. À Paris, chez la veuve Tillard, rue de la Harpe, 1776, 2n-8°, avec figures. Prix, 3 lv. 42 {. broché. L'Académie des Sciences de Harlem a renvoyé à l’année 1577, la diftribution des Prix, fur les trois queftions fuivantes. 1°./ Quels font les moyens de retenir les rivières du pays dans leurs lits, de! prévenir Les inondations , les ruptures des dignes, &c.? 2°. Quels fort les meilleurs moyens € les moins difpendieux d'élever la terre entre deux pour la cor- fervation des digues, le long du Zuider Zée , & de conferver ce terrein “ans le même état? 3%. EfFil , outre le cafè, de fucre , le cacao & le coton, d'autres plantes , arbres ou végétaux; qui puiflent être cultivés dans les Colonies des. Indes Occidentales ; & qui paiffent fervir d'aliment ou étre uriles aux Manufaëlures du pays ? Les effais qu'on a faits il y a quel- ques années , fur l’indigo, ont prouvé que fa culturesefl:nuifcble à la fanté des SUR L'HIST. NATURELLE ET LES ARTS. x53 des Nèpres; mais en a-t-on fait, ou pourroit-on en faire [ur d'autres vé= géaux, & quels font ces effais? ,... La mème Académie propole en- core cette queftion : L'Æifloire fournis-elle des preuves authentiques du tems précis où fe font formées Les anfes de La mer du.Texel? Quels chan- gemens confidérables ont-elles éprouvés, & quelles en ont été Les fuites, par rapport au Zuider-Zée & à l'Y, ainff qu'aux digues qui font Le long de la mer? Les Mémoires doivent être envoyés, francs de de l’Académie , avant le premier Janvier 1778. Les Eçarts de la Nature, ou Recueil des principales monflruofités que Ja Nature produit dans le genre animal , peintes d'après nature , gravées & mifis au jour, par M. & Madame Regnault. À Paris, chez l'Au- ceur , rue Croix-des. Petits-Champs, vis-à vis-à-vis l'Hôtel de Luflan; & chez les principaux Libraires de l'Europe. Ce quatrième Cahier contient dix Gravures; la première repré- fente le petit Pepin , que tout Paris a vu vivant. Il étroit privé des bras, des avant-bras, des cuiffes & des jambes; fes mains fortoient des épaules , & fes pieds fortoient des hanches. La feconde, un double Faon. Ces deux animaux font réunis par un doubie fternum, M. Daubenton en a donné une Defcriprion très-détaillée dans l'Hif- toire Naturelle de M. de Buffon, Tome VI, page 140. La troifième, un Poulet à quatre pates & quatre aîles, dont deux bien conformées & placées dans l'ordre naturel. Les membres furabondans qui for- ment la monftruofité , font placés fur la poitrine. La quatrième, un Veau à deux croupes ; fa partie antérieure n'offre qu'un animal, & fa partie poftérieure en offre deux. La cinquième, un Cochon cy+ clope de la Martinique. Au-defflus de fon œil unique, il fort une excroiffance cartilagineufe , qui reffemble un peu à la trompe d’un Eléphant ; la gueule & le nez font encore très-diformes. La fixième, un Bœuf à cinq yeux & à crois narines. La feptième, un Chat monf- trueux , qui a au défaut des côtes, la croupe entière & bien con- formée d’un autre Char, à l’exceprion dé la queue qui eft très-caurte. La huitième , un Mouton à fix pieds; les deux piéds furabondans, fortent de la partie antérieure de la poitrine. La Neuvième , une Vache à cinq pieds; la jambe furabondante eft attachée à la partie fupérieure du dos, entre les omoplates. Elle avoir une tumeur à la partie poftérieure de cette jambe , à laquelle on avoit donngpat un groflier artifice , la figure d’une tère d'homme. La dixième , enfin, repréfente un double enfant, ne tenant enfemble que par la réunion des os des deux crânes. Il réfulte de l'Ouvrage de M. Regrault, que nous aurons bientôt une colletion complette des écarts de la Nature; mais pour la rendre plus intéreffante encore, ne pourroit-on pas le prier de donner également , les monftruofités des parties intérieures Tome VIII, Part, LI. 1776. port , au Secrétaire 4 154 OBSERFATIONS SUR LA PHYSIQUE, de l’homme ou des animaux ? Ce feroit un fujer de plus d’inftruc- tion, fur-rout pour ceux qui fe livrent à l’érude de l’Anatomie. Au furplus, ces Planches font très-bien gravées & enluminées. Expériences & Obfervations fur différentes efpèces d’Airs , traduites de l'Anglois du Doëteur Prieflley , Membre de la Société Royale de Londres ; par M. Güibelin, Docteur en Médecine , Membre de la Sociéré Mé- dicale de Londres, fecond & troifième volumes, 27-12. Ces deux nouveaux volumes renferment un fi grand nombre d'’ex- périences ingénieufes , de faits intéreffans , & de brillantes décou- vertes, qu'il feroit impoñlible d’en faire le moindre détail , fans ex- céder les bornes d’une fimple annonce. Nous nous contenterons de prévenir les Amateurs de la Phyfique & de la Chymie, que les principaux faits, nouvellement découverts par M. Prflley , ont déja été vérifiés par quelques-uns des plus illuftres Phyficiens de cette Ca- itale , en préfence de l’Académie Royale des Sciences. Plufieurs Mem- a de cette favante Compagnie, voulant accélérer l’impreflion des deux volumes dont il eft queftion, & en affurer le débit, ont ou- vert, pour cer effer , une Soufcription , dans laquelle ils fe font inf- crits pour un nombre d'exemplaires. Ils ont fixé eux-mêmes le prix des volumes à 6 livres, qu’on fera libre de ne payer qu’en les re- cevant brochés. L’impreflion fera commencée dès qu'il y aura 200 Soufcriptions affurées. On Puferi chez M. Gibelin , Docteur en Médecine , rue des Cor- deliers, la Porre Cochère à côré de l’Académie Royale de Chirur- gie; & chez Nyon, Libraire , rue Saint Jean-de-Beauvais , chez qui fe trouve le premier volume de cer Ouvrage , qui n’eft pas compris dans la préfente Soufcription. Obfervations fur les maladies des Nègres , leurs caufes , leurs traitemens , É Les moyens de les prévenir; pat M. Dazille, Médecin Penfonnaire du Roi, Ancien Chirurgien-Major des Froupes de Cayenne, des Hopitaux de l’'Ifle de France. À Paris, chez Didor, le jeune , Quai des Augultins , 1776 , in-8°. Cet Ouvrage eft la preuve de la beauté de l'ame de lAuteur, des richeffes de fon efprit, & un réfultat heureux de fes obfervations. The Navigator guide , &c. Le guide du Navigateur fur les mers de l'O- rient & des Indes , ou Defcription de l’ufage de la Carte des variations, de l'aiouille aimantée dans les principales parties de l'Océan atlantique , éthiopique & méridional, dans un degré ou Go milles ; avec une Intro- duilion fur la découverte de la variation de l'aiguille ; celle de la longi- tude par ces Variations, & pluficurs Tables utiles ; par M. Duna , Pro- fefeur de Mathématiques. À Londres , ir-8°. Traité fommaire des Coquilles | tant fluviatiles que terreffres , qui fe crouvent aux environs de Paris; par M. Géoffroy , Docteur-Régent de SUR L'HIST. NATURELLE ET LES ARTS. «55 la' Faculté de Médecine. À Paris, chez Muffer, fils, Libraire, Quai des Auguftins, 1776, vol. ir-12. L'Auteur eft trop connu par fes Ou vrages fur les infeétes, pour rien ajouter à cette annonce. Trois Plan- ches très bien gravées enrichiffenc ce Traité. * Spéculations and , &c. Spéculations & Conjeélures fur la quantité des nerfs ; par M. Samuel Mufÿrave, Membre de la Société Royale de Londres. À Londres, Elmfly, 1776, in-8°. Vermifchre Chururpifche , &c. Mélanges d'Ecrits de Chirurgie, publiés par M. Schmucker, premier Chirurgien du Roi de Pruffe, Tome pre- mier avec figures. À Berlin, 1776, 27-89. Ce Recueil intéreffanc contient cinq Differtations. 1. Recherches fur l'amputation des membres, par M. Schmucker. W. Différtation Hiflorique & Pratique , [ur l'ufage des fangfues dans la médecine, par le mème, IN. Défcription d'une ma chine très fimple pour la guérifon des fraëtures de l'os de La cuiffe ; par M. Thaden. \V. Obférvation fur l'ufage de l'affa-fœtida dans la carie des os ; par M. Bloc. V. Objérvarion fur les pétéchies , fur Les effets de La bella- dona dans les attaques de mélancolie, 6 fur l’hémipligie ; par M. Even. Aus fuhrliche, &c. Méthode, détaillée, exaële 6 démontrée, pour amé- liorer d'une manière füre , inocente, permife, & auffi durable qu'avan- tageufe 6 facile, les vins d'Allemagne, afin d'obvier aux falfifications nui- Jibles ; publiée dans la vue de fervir l'humanité ; par un bon Allemand. À Leipfck, chez Mezler, 1776. L'Auteur a joint à ce Traité une fec- tion fur l’art de perfeétionnet les cidres. Charaïleres generum plantarum, &c. Caraëlère des rouveaux genres de Plantes recueillis dans le voyage aux ifles de la mer Auftrale, deffinés & décrits dans les années de 1772 41775 ; par M. Forfler, Docteur ès Loix, & par fon fils. À Londres, 1776, grand #-8°, Ce Recueil contient 73 Planches parfaitement bien gravées, Atlas Trinéraire , portatif, de l'Europe, adapté, quant à la France, aux Meffageries Royales ; pat le fieur Brion , Ingénieur - Géographe du Roi. Avec Approbation & Privilège du Roi, PROSPECTUS. La Géographie itinéraire eft inconteftablement auf utile que curieufe : elle devroir être toujours l’un des objets effentiels des Cartes, dont les Livres itinéraires ne fauroient tenir lieu ; parcequ'ils n’ont pas l’avantage de préfenter comme les cartes un tableau du local des pays. D'un autre côté, fi l’on s’en rapporte au témoignage des voya- geurs , on ne doit nullement compter fur les diftances fommaires, que l’on rencontre dans les Traités ou Dictionnaires de Géographie, La raifon en eft fans doute, qu'un compas & des cartes , quelles qu’elles foient, ont paru fuffire aux Ecrivains pour établir leurs cal- culs ; fans faire attention que la conftruction des ER , fondée fuc 2 156 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, le rapport des Cieux avec la Terre, ne fauroit compter la valeur des finuoftés ou dérours des chemins. Il n'eft rien en même-tems de plus embarraffant que les moyens de fuppléer à la Diffance abfolue , ou en ligne droite, pour en faire, par approximation, une diffance purement itinéraire, Ces moyens dé- pendent du plus où moins d'obftacles naturels, qui interceptent ou changent la direction des chemins, & qui règlent fouvent Les dif- tances. L'expérience apprend feulement que, pour porter en compte | leurs finuofrés, ce que l’on doit ajouter à la diftance abfolue d'un lieu à un autre, varie depuis un dixième jufqu'à un tiers. Un che- min de 24 à 25 lieues, qu'un voyageur parcourra, n'eft fouvent qu’une diftance abfolue de 20 lieues. Les Cartes itinéraires épargnent des calculs aufli incertains, quand non-feulement les chemins y font tracés, mais encore quand les diftances y font exprimées. Les Cartes Topographiques , levées géo- métriquement , font les feules où l’exprefon des diftances peut être fuperflue ; parce que les détours des chemins y étant figurés avec exaditude , on y trouve les diftances juftes & purement itinéraires , en les compaflant d’après l'échelle. On conçoit, d’après ce que je viens de dire, que quand des hom- mes intelligens , & déterminés à braver les périls & les fatigues des voyages, pourront s'occuper entièrement de la Géographie iti- néraire , 1l en réfultera fans doute , pour le Public & pour la per- fettion de nos cartes , autant d'avantages que de l’obfervation d'une Planète , à fon pañlage fur le difque du Soleil. Quelque épineux que foit l’objet que j'entreprends de traiter : je tâcherai de le remplir , autant que le permet l’état actuel des con- noiffances qui s’y rapportent , jointes aux matériaux que j'ai acquis dans mes voyages. Mais , pour ne laiffer à defirer que le moins pof- fible , je prie inftamment les curieux & les voyageurs de vouloix bien coopérer à certe entreprife, par la communication des maté- riaux qu’ils pourroient avoir. En fecondant mon zèle, ils fe ren- dronr utiles à la Société : motif , qui fera à leurs yeux d’un bien plus grand prix que la reconnoiffance que j'en témoignerai. Je ne me propofe point, dans l'Atlas que j'annonce, & dont les premières feuilles font déja gravées, de décrire la prodigieufe mul- titude de Routes, qui s’entrecoupent les unes les autres dans toure l'érendue de l’Europe. L’entreprife feroit immenfe , & fort au-deflus des forces d’un particulier. Mais j’embrafle la partie la plus intéref- fante, c'eft-à-dire, Les Routes direëles € les plus fréquentées (avec les Diflances) de Paris à toutes les Cours ou Villes capitales des divers Etats de l'Europe ; ainfi qu'aux Villes les plus commerçantes ; aux Ports célè= SUR L'HIST.' NATURELLE ET LES ARTS, 157 bres , aux lieux les plus renommés par des Bains ou Eaux minérales , &c. Je ne me permertrai point de préconifer mon ouvrage, ni de faire la critique d’autres ouvrages , qui font à peu-près ou femblenc être de même genre : c'eft aux connoiffeurs à les mettre en paral- lèle, & à les apprécier. Qu'il me foit permis de dire au moins que celui-ci eft plus étendu ou plus complet ; & fur un tour autre plan, que je dois fimplement expofer, avec les avantages qu’il réunit. Toutes les feuilles de mon Atlas étant orientées dans le fens or- dinaire, & celles qui formeront la carte-de chaque Etat de l’Eu- rope , n'ayant qu'une même échelle, on pourra les coller enfem- ble , pour en faire, fi l’on veut, de grandes bandes , comme celle que HE par exemple, la Route de Paris à Marfeille ; ou un grand tableau , tel que la France ou l’Alemagne (1) itinéraire. Il ne s'agira pour l’aflemblage des feuilles, que de confalter les indi- cations qui font dans leur bordure , ou la feconde des deux Cartes générales , qui, devant ètre le réfultat ou la réduétion de ces feuil- les, iront à leur fuite. La première fera une carte analytique , dans laquelle les Longi- tudes & Latirudes des lieux feront tracées : ce qui n'auroit pu s’exé- cuter fur les feuilles de détail, fans défaut apparent dans leur ac- cord; & fans préjudicier à la clarté des indications ou renvois , qui font dans leur bordure. La deuxième carte efquiflée du même pays repréfentera la direétion. des grandes Routes, avec les lieux les plus remarquables ; & les numéros des feuilles, pour fervir à les affem- bler. Mais fans être obligé de joindre enfemble nombre de feuilles, on pourra fuivre avec la plus grande facilité la route la plus longue, celle mème de Paris à Conftantinople ; vu que, dans la bordure des cartes, à l’extrémité de chaque route, la’ continuation en eft indiquée par le numéro de la feuille, à laquelle on doit recourir : & ce numéro eft accompagné du nom de l’un des premiers lieux de cette continuation. Par exemple, feuille première , en fuivane la route de Paris à Péronne ; on trouve qu’au-deli de Senlis il faut recourir à la feuille feconde , où la poftion du Pont Sainte-Maxence fe préfente. : Il n’y a pas plus de difficulté à comprendre les Chiffres, qui font le long des routes , à peu-près à moitié chemin d’un lieu à un au- tre, dont les roms font foulignés : ces chiffres indiquent leur Diffance (1) Ce nom s'éciit communément avec deux 1 affez mal-à-propos; car il dé- rive d'Aléman , qui fignifie multitude d'hommes, 158 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, en lieues communes. Par exemple , feuille première, le 3 qui eft entre Dammartin & Nanteuil , marque la quantité de lieues, dont ces deux endroits font éloignés l’un de l’autre ; ainfi de fuite. Quant au nombre, qui fe trouve fous le nom de chaque ville remarquable , 1l défigne leur Diflance totale de Paris : ainfi , feuille première ,on voit que Meaux eft à 10 lieues de Paris, & dars la feuille feconde , que Péronne en eft à 33 lieues. Il a paru conve- nable de ne marquer cette forte de diftance qu'aux villes les plus importantes; comme de ne pas trop mulripler les diftances parti- culières, entre des lieux plus remarquables; vu que l'échelle, qui eft au bas de chaque carte, peut donner les diftances, du moins ab- folues. Les Diftances feront toujours comptées , telles que les voyageurs les trouvent fixées, ou eflimées de la manière la moins arbitraire, dans les différens pays qu'ils parcourent ; en réduifant néanmoins les mefures itinéraires de ces pays à la mefure uniforme des lieues com- munes, de 25 au degré, & chacune de 2282 toiles, ou environ. Il n’y en aura pas d'autre employée dans tout le cours de l'ouvrage. L'érendne de chaque feuille de mon Atlas eft de 26 lieues fur 22, ce qui fait 572 lieues quarrées. Il eft à propos de prévenir que je n'ai pas cru devoir remplir mes cartes fymétriquement , fuivanr la coutume; n'ayant pour principal objet que la partie icinéraire de la Géographie, & regardant ici tout le refte comme accefloire. Cependant j'ofe aflurer que rien d’effen- tiel n’eft omis; car j'ai inféré dans les efpaces intermédiaires des routes, non-feulement trous les lieux mentionnés dans les livres de Géographie , que l’on met communément entre les mains de la jeu- neffe ; mais encore beaucoup d’autres lieux , que l’on chercheroit en vain dans ces livres, comme dans la plupart des cartes générales : j'entends même des Gouvernemens de places ; des lieux illuftrés par des titres du premier ordre, foit Principauté ou Duché ; & des Champs de bataille, dont plufeurs ne font que des chérifs lieux hors des routes. En difant que je n’ai pour principal objet que la partie itinéraire, je n’enrends encore que ce que j'ai annoncé ci-devant; favoir, les Routes direëtes de Paris , comme d’un point conftant de départ, aux Villes Les plus célèbres de la France, 6 des autres Etats de l'Europe, même les plus reculés. Ce font ces routes-là que je traite avec dé- tail , elles font enluminées dans les cartes. Quant aux principales Routes de communication , je ne fais que les indiquer par de fimples traits, coujours avec les diftances. SUR L’HIST. NATURELLE ET LES ARTS. 159 J'excepre cependant plufieurs de ces dernières routes, fur-rout en Allemagne & en Italie: les Cours ou Villes capirales des divers Erats fouverains , qui forment ces deux régions, exigent que les commu- nications en foient détaillées. C’eft le moyen de rendre mon Atlas d'un ufage plus général. Tous les lieux, qui entreront dans mes cartes | feront exactement figurés fuivant leur plus ou moins d'importance; & les villes ne s’y confondront point avec les bourgs, ni ceux-ci avec les villages: je n'ai pas négligé de marquer aufli les châteaux qui font fur les grandes routes. Les Places fortes , fur-tout , s’y diftingueront de tout autre lieu : il fera même aifé de difcerner celles de la première & de la feconde claffe par leurs pofñtions, plus ou moins figurées. Plufieurs Etats , dont les armes ou la politique ont changé la face dans ces derniers tems, préfenteront aufli de nouvelles divifions. L'Atlas fera accompagné de trois articles intéreflans. 1°. Un Ré. Pertoire raifonné des Routes de l'Europe , dans leur plus grande étendue, par forme de tournée, feulement avec les lieux les plus confidéra- bles, qui y feront nommés de fuite, & les numéros des feuilles où ils fe trouveront. Pour ce qui concerne la France, Ze départ, Les dinées , les couchées, & l'arrivée des Meffageries Royales y feront indi- qués, ainfi que le prix de ces voitures. 2°. Une zomenclature alpha bérique des mèmes lieux, avec leurs noms anciens de plus; & quant aux pays étrangers les noms nationaux & François ou francifés, qui font quelquefois très difcordans : tels font, par exemple, Kegenfpurg & Ratishonne , noms Alemand & François d’une même ville. Cha- cun de ces lieux fera aufi accompagné du numéro de la feuille où il fera placé. Cerre répétition eft néceflaire, en ce que , au moyen de l’ordre alphabétique , on trouvera rour-à-coup ce que l’on cher- che. 3°. Des tables particulières , qui inftruiront du prix des chevaux de pofle dans les pays étrangers : ainfi que du rapport de leurs monnoies € de leurs mefures itinéraires à celles de France, Cet ouvrage , grand iz-8°, on de même format que ce Profpeëus, ouvert, commencera par la France, qui fera compofée de 60 feuil- les: les autres Etats de l’Europe fuivront de proche en proche. Toutes les cartes feront gravées , d'après mes deflins, par de très-habiles Ar- tiftes (MM. Chambon & André.) Les Amateurs peuvent acquérir cet ouvrage par parties, à mefure qu’elles paroïtront. Il leur fera facile, comme on à vu ci-devant, d’en former dans la fuite de grandes car- tes; ou de les raflembler en un feul ou plufñeurs volumes. La livraifon des 11 premières feuilles, avec un frontifpice, fe faic dès à préfent ; & il en paroîtra 12 autres le 30 Juillec : ainfi de fuite, de mois en mois, avec la plus grande régularité. Les premières em- 160 OBSERVATIONS SUR 14 PHYSIQUE, braffent une grande :partie des Provinces feptentrionales de la France, & des Pays étrangers limitrophes. Le prix de chaque Section, contenant 12 Cartes enluminées, ef de 3 liv. Les perfonnes qui ne defireront qu’une feule ou plufieurs Routes , au-deffous de ce nombre de cartes, payeront chaque feuille à raifon de 6 f, S'il eit des Amateurs, à qui il plaife d'encourager l’Auteur dans fon entreprife, en foufcrivant pour quelque partie de l’ouvrage, & en s'affurant par-là des premières épreuves ; chaque feétion ne leur coûtera que 2 liv. 8 f. moyenant qu'à la livraifon de la première fe&ion , ils payent les trois quarts d'avance pour la partie de leur foufcription ; par exemple, pour la France 9 liv. en recevant la première feétion, & 3 liv. à la dernière. Il en fera de même pour les autres parties fuivantes de l'Atlas. Les billets de foufcriprion fe- sont fignés par le Libraire nommé ci-après & par l'Auteur. Les let- tres & l’argent doivent être affranchis : & les acquéreurs fonc priés de faire retirer leurs exemplaires, La Soufcription eft ouverre, & l'Ouvrage fe dcbite chez M. Langlois , Libraire, rue du Perit-Pont, près de la Fontaine Säint- Severin: & chez l'Auteur, même Maifon, au premier fur le de- yant. Johanis adami Pollich. Æifforia Plartarum in Palatinatu . Eleétorali fponte nafcentium incepta , fecundum Jyflema fixuale digefla, tomus pri- mus. À Paris, chez Ruault, Libraire , rue de la Harpe, in-$°, avec figures. Prix 6 livres. Ce premier volume comprend jufqu'en la Décandrie inclufivement, Ce n’eft point une fimple nomenclature méthodique , mais un ouvrage où les caraétères des plantes font fin gulièrement bien obfervés. Nar. Jof. de Necker. Philofophia mufcorum per examen analiticum de coporibus variis naturalibus inter fe collaiis continuitatem proximam ve animalis cum vegetabili concatenationem indicantibus. À Paris, chez Ruault, 1 volume ën-80. avec figures. Prix 4 liv. - Journal d'un Voyage, qui contient différentes Obfervations mi- néralogiques , particulièrement fur les Agates & fur les Bafaltes , avec un détail fur la manière de travailler les Agates; par M. Collint, Secrétaire intime, Directeur des Cabinets d’Hiftoire Naturelle, & Membre de l’Académie des Sciences de S. A. Eleétorale Palatine. A Paris, chez Ruault, 1 volume 27-89. avec beaucoup de gravures. Prix 10 liv. Nous ferons connoître ce que l’Auteur a dit des Bafaltes. Ce Journal eft audi intéreffant que curieux. PROSPECTUS SUR L'HIST. NATURELLE ET LES ARTS, 16» EPRAPOETS CRE RGNTAU S Servant de Préface à l'Ouvrage intitulé : HISTOIRE GÉNÉRALE ET Économique pes Trois RÈèGNESs DE LA NATURE; contenant , V°. La Defcription anatomique & phyfique de l'Homme , fes maladies; les remèdes qu'on peut y apporter ; ls alimens qui lui conviennent er état de fanté, € l'utilité qu'on peut tirer des différen- tes parties de fon corps, tant pendant Ja vie qu'après fa mort. JF. L’Anatomie comparée des Animaux , conjointement avec leurs def- pallerene, & revenir en i, & de-là en k. Mais fi dans le mème inf- tant, la vue fe dirige fur les vaiffeaux 3 , 4, il paroît qu’on voit en- femble le fluide monter en c, & defcendre en z; monter en é, & s’abailler en o; s'élever en e, & tomber enr. Cette confufon apparente vient de l’uniformité du mouvement du fluide dans les vaiffeaux, & de la poñtion irrégulière des diaphragmes. Si l’on exa- mine les vailleaux 5 & 6, & dans ceux-ci, les points g,e, i, 0, on voit les deux filets g,e, monter , & les deux ;, 0, defcendre. De plus, e coupe le filer aa, & i coupe ce. Le premier vient de ce que le mouvement eft uniforme; le fecond , de ce que le vaif- feau dec d eft en partie placé fous le vailleau voifin 4 #6 4. Si les Tome VIII, Pare. IL. 1776. KKk 254 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, vaiffeaux font placés l’un fur l'autre, comme dans l'endroit 7, les filets paroiffent alors très-rapprochés, & on les croiroit contenus dans un feul & même vaiffleau. # rm 1, defcendent ; x y &, montent: ils fe coupent en z, toujours en apparence, en , en 7; & entre b & n,lun monte pour aller en z, l’autre defcend pour aboutir au point w. Enfin, fi le côté dioit d’un vailleau eft placé fous le côté gauche d’un autre, ou que le contraire ait lieu, deux filets paroillent fe mouvoir en fens contraire. La cinquième, eft une feuille vue au microfcope. La fixième, fait voir un petit morceau très - mince de Pécorce d'une courge, obfervé par le côté extérieur. Il paroït un tiflu de fibres longitudinales, ferrées par de fréquens liens. À À , À A, fonc des parties prefque opaques : BB, BB, font tranfparentes : x eft une groffe épine, telle qu'il s'en trouve abondamment fur la tige des courges. La feptième, préfente une particule d’écorce renverfée & vue en-deflous , ou du côté intérieur. À A ; eft un tiffu de fibres lon- gitudinales, formant des tuyaux prefque elliptiques, fort étroits , Jongs & pleins d’une lymphe , dans laquelle on voir nager différens petits corps qui circulent dans l'intérieur de ces petits tubes. BB, eft un compofé de vaifleaux gros & courts. #77 font des vaifleaux femblables à ceux qu'on a vus en À A. CC, les plus gros de tous, contiennent un fluide qui eft immobile, ou dont le mouvement s'exécute fans ordre & avec lenteur. La huitième, eft un toupillon d’une efpèce de trémella très-oros, dont le diamètre eft au moins dans le rapport de 3 à à à la plus grande, dont j'ai donné la defcriprion dans mes Obférvarions microf- copiques , &c. Lucques , 1774. Les gros fils ont des mouvemens fpontanés, leur extrémité eft tantôt pointue comme cccc,& tan- tot obrufe ou émoullée comme eece. La figure 9, eft l’un de ces fils qui multiplie fon efpèce par la fe“tion en travers : 44, et l'un de ces fegmens terminé : ce eft un autre qui commence. Hd SUR L'HIST. NATURELLE ET LES ARTS. 25; OP RUE" COMAIETS Du Rapport fait à l'Académie Royale des Sciences, par Meffieurs MACQUER , le Chevalier D'ARCY 6 le Comte DE MILLY, d’un Mémoire fur la Mine de Plomb de Huelgrat en Baffe-Bretagne, lu dans une Scance de l'Académie par M. GUILLOT DUHAMEL, Correfpondant 6 Commiffaire du Confeil pour les Forges a fer & pour les Mines. L E bur de l'Auteur eft de donner plutôt une defcription topo- graphique du lieu où la mine eft fituée, que le détail des travaux & des machines employées pour fon exploitation. La mine de plomb d’'Huelgrat s’exploite dans une montagne d'environ 1$0 pieds de hauteur perpendiculaire, depuis le niveau du ruiffeau qui fait mou- voir les machines , jufqu’à {on fommet. Sa pente eft de 45 degrés ou environ, fon expofition eft au Nord-Eft. Cette mine fut autrefois exploitée par les ordres de la Duchefle Anne, pour en tirer du plomb riche en argent; mais alors on fe borna à exploiter la partie fupérieure de la montagne , & l’on ne creufa pis au-deffous du niveau du ruiffleau qui en arrofe le pied. L'abondance des eaux, le défaut de connoiffance de l’hydraulique, l'appauvriflement du filon en approchant au bas de la montagne, ont été, peut-être , les caufes de la ceflation des travaux. Une Compagnie les à enfin repris. Le filon principal de cette mine a fa direction du Midi au Nord, & l’Auteur affure que tous ceux qui ont une direction contraire , c’eft-à-dire, de l’Et à l'Ouelt, font regardés en Bretagne comme ftériles. Les meilleurs , ajoute M. Duhamel , ont leur cours depuis neuf heures jufqu’à midi , & depuis midi jufqu’à trois heures ; les filons qui ont une autre direétion, ne valent pas la peine d’être exploités. La direction du filon, par rapport aux points cardinaux , eft, comme on le fait, déterminée par la bouffole divifée en 24 degrés, nommés heures en langage des Mineurs. Ils appellent f£/ons énclinés , ceux qui courent depuis neuf heures jufqu’à midi, & f£lons debour, ceux qui ont leur direétion depuis midi jufqu’à trois heures. Ceux que M. Duhamel cite, font dans le cas de ces deux nominations. Ce qui l’a le plus frappé dans certe mine, & ce qui effective- ment eft digne de remarque, c’eft de voir le filon ne dans une K k2 248 OBSERVATIONS 'SUR LA PHYSIQUE, gangue de dix à douze pieds d’épaifleur, formé par des gallets ou pierres fphériques & oblongues , qui femblent avoir été primiti- vement roulées par les eaux. Ils font la plupart quartzeux , mais la majeure partie font bleuâtres , couleur de fchifte,, & , felon M. Duhamel, refflemblent à de l’argille bleue pétrifiée. On trouve dans les mines d’'Hilinenau en Allemagne, au Comté d’Henneberg, des concrétions fchifteufes qui ont la forme oblongue comme des rognons , fuivant M. Hennekel, dans fa Pyritologie, & qui fe rapprochent beaucoup de ceux dont M. Duhamel fair mention, qui reffemblent , dit-il, parfaitement à ceux qui ont été long-rems expofés au flux & reflux de la mer, & que lon trouve fur fes rives. Cependant, il dit plus loin que la montagne où eft la mine, ainfi que tous les environs , font compofés de granites, de pierres fchifteufes : il femble vouloir donner comme une fingularité la différence prétendue qu’il trouve entre les galets environnans, les filons & les pierres du voifinage qu'il cite; mais celui que nous avons entre les mains, nous a paru être abfolument de la même nature, c’eft-à-dire, fchifteux, & il contient des pyrites cuivreufes. Ces galets font lités, & pour ainfi dire, maçonnés dans une ef pèce de terre blanche qui n’a que peu. de folidité , fur rout lorf qu’elle a été defféchée à l'air ; c’eft une efpèce de guhr, où moëlle de pierre, on en détache facilement les galets. Elle ne fait point effervefcence avec les acides, & les galets n’en font aucune. Cetxe terre nous a paru être de l’argille grife, argilla cinerea. M. Duhamel n’a apperçu aucun coquillage ni autres corps marins dans cette terre blanche qui remplit, comme il l’a dit, les inter- valles que laïffent les galets entreux , ce qui eft une preuve que certe montagne eft de première formation , où, comme l’on fait, l'on trouve rarement des velliges de corps organifés. Les travaux de la mine d’Huelgrat font actuellement à plus de 450 pieds de profondeur, à compter du fommet de la montagne, & à plus de 300 pieds au-deffous du ruiffeau. L'on y trouve tou- jours le mème banc de galet & de terre blanche qui fert de gangue au filon. M. Duhamel foupconne qu'on la trouvera encore à des profondeurs plus confidérables. IL ajoute que le minéral de plomb eft communément très-beau , très-abondant, entre ces deux bancs de galers, & que le filon y eft aufi puiffant & aufli riche que s’il avoit palfé à travers fa matrice ordinaire, qui eft granite d’un côté, & fchifte de l’autre. L’angle d’inclinaifon du filon, avec la ligne horifontale, eft de 6o à 70 degrés, & avec la verticale , de 20 à 30 ; ce qui paroît à M. Duhamel une fingularité difficile à expliquer , relativement à la formation du filon. Comment concevra-t-on , dit-il, qu’un voit, Lmnel SUR L’HIST. NATURELLE ET LES ARTS. 3257 couché fur le filon de 6o à 70 degrés d’inclinaifon, air [pu fefou- tenir pour permertre aux matières métalliques de fe former & de fe placer entre ces deux remparts inclinés ? Ce qui lui à paru d’au- tant plus étonnant, qu'il ne fe trouve pas de galets dans le corps du filon, donc la difpofñtion ne permet pas de dourer qu'il n'ait été formé poftérieurement aux deux bancs de galets qui lui fervene de gangue : comment donc, ajoute-t-il, expliquer la manière dont les galets ont confervé leur polition affez de tems pour permetre aux matières minérales & métalliques de former un filon de 6 pieds de largeur qu’on exploite aujourd’hui ? M. Duhamel propofe differentes idées conjeéturales fur la for- mation de cétte mine, qui nous ont paru, fi elles ne fonc pas, abfolument farisfaifantes , du moins aflez vraifemblables, Ne pour- roit-on pas penfer que les deux bancs qui forment la ganoue , n'en ont d'abord fair qu'un qui, par la fuite, s'eft fendu & partagé en deux, par un tremblement de terre ou autres caufes quelconques, lefquels auront pris affez de folidité pour fe foutenir dans leur po- fition inclinée, & donner le tems au filon de fe former & de rem- plir le vuide; ou que cet amas de pierres roulées s’eft fait de ma- nière que la partie, actuellement occupée par le filon, étoit, dans fon principe , plus terreufe, ce qui aura donné la facilité aux eaux fouterraines de délayer & de tranfporter cette rerre dans d’autres fentes, & que les fubftances métalliques en auront enfuire pris [a place? En admettant cette dernière hypothèfe, on n’auroit pas befoin de recourir aux eaux fouterraines. Celles de quelques inondations fu« périeures auroient fuff ; en s’infiltrant dans les terres , elles auroienc entrainé les plus faciles à délayer , relles que l'efpèce d’aroille qui compofe le banc où font les galets; elles auroient naturellement formé un canal vuide qui, par la fuire, fe feroit rempli de matière mé- tallique ; mais ceci eft une hypothèfe qui n’eit rien moins que dé- montrée, & dont on peut fe paller. Il n’y a que les faits qui foient vraiment intéreffans aux yeux des Naturaliftes. M. Duhamel ajoute que, vifitant la mine de Huelgrat, pendanc l'été dernier , avec M. le Chevalier d’Arcy & les Dépurés de la Compagnie, il apperçut, dans RER parties du filon, deux fubf- tances différentes , lefquelles fe trouvent fréqueminent dans des cavités qui en font remplies; l’une de ces matières eft un ocre martial que les Allemands appellent gulber, & nous giben, & l’au- tre eft une terre noire & légère comme de la fuye, qui étroit ci- devant rebutée & pallée aux laveries avec les autres, & emportée par les courans d’eau. M. Duhamel foupçonna que ces terres , jerrées en pure perte, pourroient peut-être contenir de l'argent; il en fic - 258 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, faire l'effai, & il fe trouva qu’elles en contenoient effectivement plus d’un marc par quintal. La matière noire qui, fuivanr M. Du- hamel , eftun plomb décompofé, donne en-fus de l'argent, quel- ques livres de plomb par quintal. L'argent, contenu dans le gulben , ou matière ocracée, provient, dit-il, de la décompoftion de quelque partie de mine de plomb , riche en argent, & l’ocre qui l'enveloppe eft le réfulrar de la dé- coMpofition des pyrites. Il eft à préfumer , continue-t-il , que lar- gent qu'on y trouve, y étoit comme natif; mais la mine de plomb avec laquelle il étoit minéralifé par le foufré, s'étant décompofée , il eft refté à nud, & s’eft trouvé enveloppé par l’ocre provenant des pyrites décompofées. ne ment rm M é DIDIER oo we PS NOUVELLES LITTÉRAIRES. PROGRAMME De l'Académie Royale des Belles-Lettres , Sciences & Arts de Bordeaux. APE E de Bordeaux avoit remis à cette année à prononcer fur le prix qu’elle avoit repropofé pour l’année dernière , fur la queftion : Quelle ef? la meilleure manière de mefurer fur mer La vireffe ou le fillage des vaifleaux , indépendamment des obfervations afronomiques , € de l'impulfion ou de la force du vent, Ec. ? Lorfqu'en 1772, cette compagnie , pénétrée de l'importance de ce fujet , invita encore les Savans à s'en occuper 3 elle ne défef- péroit point que, par de nouvelles recherches, ils ne puffent enfin parvenit à trouver une méthode plus füre, & moins fujetre à erreur que celle du Lok ordinaire, ou que du moins ils ne puflent venir à bout de perfectionner cer inftrument , & d’en corriger les défauts." Alors même une machine qui lui avoit été propofée fous le nom de Trochomètre , pour être fubftituée au Lok, lui avoit paru pouvoir devenir le germe ou la bafe de la découverte qu'elle avoit en vue; & ce fut dans cette confiance qu’en accordant une médaille à l’Au- teur de cette machine (1), pour l’encourager à de nouveaux efforts , elle remit, pour le prix , le même fujer au Concours. REA EAN SE CL LE ER (1) M. Aubéry , Chanoine Régulier de Sainte-Géneviève, & Vicaire de la Paroifle de Nanterre. Woyez Le Programme du 25 Août 1772e SUR L'HIST. NATURELLE ET LES ARTS. 259 Elle à vu cet Auteur , plein du zèle qu'avoit dû lui infpirer cette diftinétion , fe repréfenter dans la carrière. 11 a cherché à donner à fon Trochomètre toute la perfection dont il l'a ct fufceprible : mais les changemens qu'il y a faits dans cet objet , n’ont pu difliper les doutes que l’Académie avoit confervés fur l’effer. de cette machine. Au contraire, un nouvel examen à, pour ainf dire, convaincu cette Compagnie , que, quelqu'ingénieux que cet inftru- ment püt paroïître dans la théorie , il demeuroit lui-même fujet à bien des inconvéniens, qui en rendroient l’ufage fouvent nul dans la pratique ; que les irrégularités perpétuelles du Tangage le mettroient fréquemment en défaut ; & qu’on devroit encore moins en attendre une eftime au vrai du fillage , lorfque le vaiffeau tomberoit à la bande, & viendroit à carguer, N'ayant donc trouvé dans cette invention , & n'ayant reçu d’ailleurs rien qui püc pleinement la fatisfaire fu: cetre queltion , cette Com- pagnie a été forcée de ne point adj"ger le prix qu’elle y avoic deftiné : mais ne perdant point de vue l'utilité dont feroit , pour la navigation, la découverte qui en faifoit l’objet , elle annonce qu'elle recevra en tout tems, avec plaifir , ies ouvrages qu’on voudra lui adreffer à cet égard , & qu’elle tiendra toujours ce prix en réferve, pour le diftribuer à celui que l'expérience prouvera avoir le mieux atteint fon but. II. Pour cette année-ci cette Compagnie avoit deux prix à diftribuer. Un double ( réfervé de 1773) deftiné à certe queftion : Zndigner des propriétés médicinales du Règne animal, celles fur-tout des vipères , des écreviffes , des tortues , des cloportes , 6 du blanc de baleine ; en donner l'analyfe chymique., & l’'appuyer d'obférvations faites avec foin dans Les maladies ; Et le prix extraordinaire qu’un citoyen aufi refpeétable par fes vertus que par fes talens , & que l’Académie compte aujourd’hui au nombre de fes Membres (1), deftina en 1774 à cette queftion intéreffante : Quelle eff la meilleure manière de tirer parti des Landes de Bordeaux , quant à la culture & à la population ? À Pégard du premier de ces deux fujets , dans ce que l’Académie a reçu , qui le concerne , elle a vu une étude approfondie donner plus de force à des vérités importantes : l’analyfe parcourir les {ub- ftances animales de tous les genres, & en développer les différens principes conftitutifs; la Chymie répandre la lumière fur les obfer- A (1) M: Elie de Beaumont, Avocat au Parlement de Paris, & Intendant des Finances de Monfeigneur /e Comte d'Artois. 260 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, vations médicinales par uhe fuite d'expériences aufli curieufes qu’in- téreflantes ; le, zèle enfin pour le bien de l'humanité, porter le cou- rage jufqu'à éprouver fur foi-même les différens remèdes tirés du Règne animal , en les prenant encore jufqu’à des dofes capables d’effrayer , pour mieux en étudier les effets : mais elle a vu avec regret tout cela noyé dans beaucoup de chofes qui lui ont paru inutiles, & tous ces avantages perdre de leur mérite par un ftyle trop diffus, fouvent embarraflé , quelquefois obfcur, au point d'en ètre prefque inintelligible. Ainf , en trouvant d’un côté ce qui pouvoit la fatisfaire fur cette première queftion , il lui a refté à defirer qu’on l’eût préfentée d’une manière , & plus claire , & plus concife. Elle repropofe donc ce mème fujer pour 1778 , & elle exhorte ceux qui voudront de nou- veau concourir au prix double qui lui demeure deftiné , à s'attacher à fe faire mieux entendre, & à mettre plus de précifion dans leurs ouvrages. 3 Quant au fujet concernant les Landes de Bordeaux , V Académie a eu la fatisfaction de voir fortir , du fein même de ces deferts, un Mémoire qui, à tous égards, lui a paru digne de fes fuffrages. D'un côté l’Auteur , réuniffant à l'avantage de connoître lui-même le fol du pays, le mérite de ne poinr fe laiffer égarer par un efprit fyftématique , n’a fait que fuivre les indications de la nature, pour tracer la voie la plus capable de conduire à de plus heureux fuccès le défrichement de ces contrées. D'un autre côté , il a fu rendre fon ouvrage aufli intéreffant pat les vues patriotiques dont il eft rempli , qu'utile par une infnité d’obfervations judicieufes , & d'initruétions folides , relativement à l'Agriculture & au Com- merce. L'Académie ne s’eft point contentée de lui adjuger les cinq cens livres qui avoient été deftinées pour ce fujet ; elle a cru devoir ajouter à cette récompenfe une de fes médailles ordinaires. Le Mémoire couronné a pour épigraphe ce paflage de Montaigne : » Il nous faudroit des Topographes qui nous fiffenc des narrations » particulières des endroits où ils ont été...... Je voudrois que » chacun écrivir ce qu'il fait, & autant qu’il en fait , non en cela » feulement, mais en tous autres fubje@s ». ÆEffais, liv. I. ch. 30. M. Desbiey , Entrepofeur & Receveur des Fermes du Roi à la Tefte, eft l’Auteur de cet ouvrage. III. L'année prochaine , l'Académie aura, comme elle l’a annoncé par fes derniers Programmes, deux prix à diftribuer : Un , fimple, pour lequel elle à donné pour fujet : D’établir, fur des preuves folides , comment la Fille de Bordeaux tomba au pouvoir des Romains, & quels furent , fous leur domination , l'Etat, les Loïix , SUR L'HIST. NATURELLE ET LES ARTS. 26 & les mœurs de fès habitans ? (Ce fujet n'a aucun rapport à ce Journal. ) Et un, double, deftiné à cette queftion : S’i/ ne feroit pas poffible de procurer à la Ville de Bordeaux une plus grande abondance de bonnes eaux ; G quels feroient les moyens de Les y conduire, & de Les y diftri- kuer, les plus Jolides , les moins fujets à inconvéniens, & en méme-tems Les moins difpendieux. IV. Elle annonce aujourd’hui qu’en 1778 , indépendamment du prix qu'elle a réfervé pour cette année fur les propriétés médicinales du Règne animal , elle en aura à diftribuer un autre, pour fujec duquel elle demande que l’on indique les différentes efpèces de plantes qui nuifent le plus aux prairies , & quels feroient les moyens les plus efficaces , les mieux conflatés par l'expérience | & les :moins coûteux pour les détruire radicalement , particulièrement celle que les Botanifles défignent par le nom d'Equifetum Paluftre , brevioribus feris , connue en Fran- gois fous le nom de Prèle où Queue de cheval 3 & ex terme vulgaire dans la Guyenne, fous celui de Rougagnet. Ce prix, outre la médaille ordinaire , fera compofé d’une fomme de crois cens livres en argent , qu’un citoyen recommandable à voulu confacrer à ce fujer, & de plus d’une fomme de cet Livres, dont l'Académie avoir encore à difpofer par la générofté de l’un de fes Membres. Ælle annonce aufñli qu’elle a deftiné un prix double, pour 1779 , à l’Auteur qui indiquera le mieux : Quelles font Les principales caufes qui font que les cheminées fument , & quels feroient les moyens d’obvier G de remédier, par principes , & cet inconvénient. € Les prix f’mples, que certe Compagnie diftribue, font une mé- daille d’or, de la valeur de trois cens livres :les doubles font com- pofés d’une pareille médaille, & d’une fomme de trois cens livres en argent. Elle prévient les Auteurs qui voudront concourir pour ces prix , que ; paflé le premier Avril des années pour lefquelles ils font afii- gnés , elle ne recevra point leurs ouvrages. Elle les avertit aufi qu’elle rejecte les pièces qui fent écrites en d’autres langues qu’en françois ou en latin; & que, fuivant les loix qu’elle s’eft prefcrites , elle n’admet point non plus au Concours celles qui fe trouvent fignées par leurs Auteurs. Elle les prie d’avoir l'attention de ne point fe faire connoître: Pour cer effet, ils mertront feulement une Sentence au bas de leurs ouvrages , &.y joindront , en les envoyant , un billet cacheté , fur lequel la même Sentence fera répétée, & qui contiendra leurs noms, leurs qualités, & leurs adreffes. Tome VIII, Part. IT. 1776. L1 262 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, Les paquets feront affranchis de port, & adreflés à M. de Lamon- taigne , Confeiller au Parlement , & Secrétaire perpétuel de l'Aca- démie. Journal Littéraire , dédié au Roi de Pruffe , par une Société d’Aca= démiciens de Berlin. Ce Journal a commencé à paroître au mois de Septembre 1772, & maleré cela il ne nous étoit connu que par des annonces générales , faites dans diverfes feuilles périodiques ; mais aujourd’hui, après une lecture entière de toute fa colleétion , nous ne craignons pas d’affurer que c’eft un recueil précieux, un vrai livre de bibiiothèque , & de la dernière utilité pour ceux qui {e livrent à l’érude des fciences , ou qui les culcivent fimplement par goût ; cette partie melt pas la feale de ce Journal. Ea partie Littéraire nous a paru très-agréable , mais comme elle n’eft pas de notre reffort , nous laiffons au public à prononcer. MM. les Acade- miciens , afin que leurs extraits foient exacts , raifonnés & profonds, fe font affociés en fi grand nombre , que chacun d'eux ne s'occupe que d’un feul gente d'ouvrage, de la fcience qu'il pofsède le mieux; & de plus, il n’a qu'un petit nombre d'extraits à fournir dans le courant de l’année. Chacun ne parle que de ce qu'il entend , de ce qu'il travaille à loifir , & on ne lui force jamais la main pour inférer Les articles qu'il a rejertés. Voilà fans contredit la meilleure manière de travailler un Journal, & d'y réunir l’agréable & l’utile. Chaque volume, grand 7-12, & fur beau papier , eft compofé de 360 pages , divifées en cinq parties égales. La première eft toute confacrée à des ouvrages de Mathématiques , pures ou mixtes ; la fecondé, à des ouvrages de Phyfique générale & expérimentale ; læ troifième , à des ouvrages de Philofophie fpéculative ; la quatrième, à des ouvrages de Littérature; la cinquième, à des ouvrages nou- veaux, non analyfés , aux nouvelles littéraires , & à de perites- pièces fugitives. Il paroît tous les deux mois un volume. On foufcrie à Berlin, chez Decker ,Ymprimeur du Roi; & à Paris , chez Lacombe. Libraire, rue Chriftine. Le prix de la foufcription eft, pour la France , de 15 liv., franc de port à Paris & dans la Province. Mémoire fur le danger des inhumations précipirées , & fur la néceflité d'un Règlement pour mettre les citoyens à l'abri du malheur d’être enterrés vivans , par M. Pineau, Doëteur en Médecine. A Paris, chez Didot le jeune , Libraire, Quai des Auguftins , # vol. i7-8. de 140 pages; prix, 1 liv. 16 Î. broché. Ce: Mémoire renferme au moins quarante exemples de perfonnes enterrées vivantes, ou ouvertes vivantes; de plufieurs autres qui , ayant été répurées mortes pendant long-rems , font revenues à elles, foit naturellement, foit par les fecours qu’on leur a donnés. On ne À, sn tdi SUR L'HIST. NATURELLE ET LES ARTS. 163 peut lire de tels détails fans frémir d'horreur & d’effroi ; l’Auteur véritablement ami de l'humanité , & qui tient toujours le langage d’une ame fenGble , ajoute quelques réflexions fur la néceflité de faire exécuter l'ordonnance , par laquelle MM. les Evèques défen- dent aux mères de faire coucher leurs enfans avec elles, avec leurs nouirices, ou autres perfonnes , jufqu'à ce qu'ils ayent atteint l’âge de deux ans. Le célèbre M. Winflou avoit, en 1740, fait foutenir aux Ecoles de Médecine une rhèfe , fur l’incertirude des fignes de la mort. M. Brukier la commenta en 1742 3 & M. Louis en 1746 , publia une lettre fur le même fujer. Ces ouvrages produifirent les plus vives fenfations fur l'efprit du public. Chacun fentit la néceilité d'apporter des remèdes aux abus. On parla d'or, & on ne conclut tien. Puiffe l’ouvrage de M. Pineau faire enfin ouvrir les yeux. J'ai crié comme vous pendant long-tems , dit M. Lieutaud , dans une lettre adreflée à l’Auteur , contre les abus effrayans auxquels vous fou- hairez que l’on remédie ; mais on ne m'a point écouté ; peut-être ferez- vous plus heureux ; il ne faut point fe rebuter ; il faut crier fans reläche jufqu'a ce qu'on Les ait fait ceffer; l'objet de votre Mémoire ef? très-inté= reffant pour l'humanité. Effai fur la plus grande perfeëlion poffible d'un ouvrage quelconque , par M. Sicard de Roberti, Ingénieur ordinaire du Roi, : vol 17-8. de 100 pages. À Avignon, chez Mérande ; & à Paris , chez Bouder, Imprimeur du Roi, rue Saint-Jacques. Tout ouvrage commencé & compofé d’après le plan de l'Auteur , fera fürement très-bien fair. Comme cet objet n’eft pas abfolument de notre compétence , les détails nous en font interdits. Introduëtion à l'Hifloire Naturelle & à la Géographie-Phyfique de l'Efpagne, traduite de l'Original Efpagnol de M. Guillaume Bowles; par M. le Vicomte de Flavigny , 1 vol. in-8°. de 516 pages. À Paris, chez Cellor & Jombert , fils, Libraires , rue Dauphine. Enfin, on commence donc à avoir quelques notions fur l’Hiftoire Naturelle de ce pays fi riche, fi varié dans fes minéraux , fi connus par les Romains, & fi ignorés du réfte de l’Europe jufqw'à cette époque. Ce premier pas, une fois fait, on a droit d'attendre une vÉrita= ble révolution. Déja des Savans voyagent par ordre de cette Cour , déja plufieurs ont rapporté dans leur patrie le fruit de leurs recher- ches. Il eft doux de penfer qu'ils y feront comme l'étincelle qui communique la flamme de proche en proche. L'Ouviage de M. Bowles, contient, ainfi qu'il le dit.lui- même, des fais 6. des rei- fonnemens. Les premiers font certains. Quant aux raifonnemens & LH 164 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, aux hypothèfes, l’Aureur les livre à la difpute. Chacun a fa ma- nière de voir. Cet Ouvrage aura fürement le plus grand fuc- cès , & nous en ferons connoître fucceflivement plufeurs articles. On auroit défiré que l'Auteur eût donné les deflins des différens fourneaux employés dans les mines. Mélanges de Philofophie & de Mathématique de la Société Royale de Turin, pour les années 1770 , 1773, 1 vol. ir-48. De l’Imprimerie Royale à Turin. C’eft le cinquième volume de cette excellente Col- led ion. Il renferme huit Mémoires de Philofophie , & autant de Mathématiques. Nous publierons quelques-uns de fes Mémoires. Petite Vérole anéantie , ou nouveaux faits & obférvations, qui confr- ment qu'un Particulier , un Village, une Ville , une Province , ur Royaume , peuvent” également fe préferver de cette maladie en Europe. Troifième Mémoire, pour fervir de fuite à fon Hiftoire , dans le- quel on répond à toutes les objections faites à ce fujet; par M. Pauler, Docteur en Médecine des Facultés de Paris & de Mont- pellier, 1 vol: ä-12 de 140 pages. À Paris, chez Ruauk, Libraire, rue de la Harpe. On ne peut trop louer le zèle de PAuteur, & ceux qui penfent que l'air communique la petite vérole, abandon- neront fans peine cette idée, après avoir lu ce Mémoire. Or, fi la petite vérole fe communique d’individu à individu, il y a donc des moyens de s'en garantir? C’eft ce que prouve évidemment M. Paule. Traité des mauvais effets de la fumée de la Litharse ; pat M. Sa- miel Srockhufen', traduit du latin , & commenté par M. Gardane, Docteur des Facultés de Médecine de Paris & de Montpellier , Cen- feur Royal , Médecin de Madame Zz Comteffe d'Artois , Aflocié & Correfpondant de plufieurs Académies , 1 vol. ë#-12 de 220 pages. À Paris, chez Rueulr. Aucun Ouvrage ne fert plus à l'Hiftoire des maladies des Artifans que celui-ci. Tous les ouvtiers qui travaillent fur les métaux, les Peintres, &c., font fujets à ces affreufes co- liques, connues fous le nom de cofiques de plomb , & cette portion labo- rieufe de Citoyens, méritoit, par toutes fortes de titres, qu'un Citoyen, ami de l'humanité, s’occupât de leur fanté. Cette nou- velle Traduction & les notes: de l’Auteur , feront fürement bien accueillies du Public. Obférvations fur l'Air; par M. Beriholtes | Doëteur en Médecine. Brochure 27-12 de $9 pages, qu'on trouve à Paris, chez Didor, le jeune , Libraire, quai: des Auguftins. C’eft une fuite & une répé= tition de plufeurs expériences fur cet air qu’on appelle fxe. Obfervations fur les Maladies épidémiques | Ouvrage rédigé d’après SUR L'HIST. NATURELLE ET LES ARTS. 126$ le Tableau des Epidémiques d’Hyppocrare , & dans lequel on indi- que la meilleure manière d’obferver ce genre de maladies, On y a réfenré à côté de chaque obfervarion, dans des colonnes féparées, M iimaron des remèdes, leurs effets, les fignes de coëion , les jugemens de la maladie, les pouls cririques, &c. &c. Cet Ouvrage a été publié par ordre du Gouvernement & aux frais du Roi; & rédigé par M. Lépecq de La Cloture | Médecin défigné de l'Hôtel-Dieu de la Ville de Rouen, & Adjoint à la Société & Correfpondance Royale de Médecine, établie principalement pour les maladies épi- démiques , 1 vol. ir-4®. de 410 pages. Si depuis le commence- ment de ce fiècle feulement , on avoit obfervé les maladies épi- démiques , & qu’on eût rafflemblé en un même corps d'ouvrage leurs fÿmptômes , leur marche, leur terminaifon , & les remèdes qu’on à employés , nous aurions aujourd’hui un corps complet de doctrine qui feroit de la plus grande reffource pour les jeunes Médecins, & que les anciens confulteroient mème avec plaifir. Ce qu’on n’a poine fair encore, M. Lépecq a le conrage de l’entreprendre, en commen- çant par le tableau des maladies épidémiques de 1770 ; nous ofons le prier, au nom de l'humanité , de continuer une fi belle entreprife, en fuivant la méthode d’Hyppocrate. Cet Ouvrage fera le dépôt pré- cieux où chacun s’empreflera de configner des faits comme er l'ancien Temple d’Epidaure. Y n'y a qu’une voix fur les obferva- tions de M. Lépecq, c'eft celle de l'éloge donné par les Maîtres de larr. Zoologie Danoife , publiée par M. Orhon-Fréderic Müller | Confeil- ler d’Erat du Roi. Dans l'intention de contribuer à érendre là connoiffance des Œuvres du Créateur , en particulier lhiftoire naturelle de ma patrie , & de fatisfaire aux fouhaits de plufieurs Amateurs du règne animal, j'ai entrepris de publier une Zoologie Danoife , ou l'hiftoire des animaux de Dannemarck & de Norvege. Pour mettre les Curieux en état d'acquérir l'Ouvrage en tout ou’en partie , fui- vant leurs facultés ou bon plaifir , j'en ai préféré la forme fuivante. 1°. À Pâques 1776, paroîtra l’Avant-coureur, ou les caractères géné- riques & fpécifiques de tous les animaux, qu'on a jufqu’ici trous vés en Dannemarck & en Norvège, avec leurs noms ufités dans cha- que Province du pays , & quelques Synonimes : 2°. Cet Avant-cou- reur fera fuivi de cahiers de deflins des plus rares animaux, qui juf- qu'ici ont été imparfaitement connus, ou entièrement inconnus, Chaque cahier contiendra 40 planches en noir ou en couleurs, £7-folio , avec la Nomenclature. Les deflins font faits d’après les originaux vivans , & feront gravés & enluminés fous mes yeux avec toute 166 OBSERVATIONS: SUR LA PHYSIQUE, l'exaétitude pofhble. Le prix de chaque cahier des eftampes eft fixé à 6 écus d'argent courant de Dannemarck , pour l’exemplaire en noir, & à 12 écus pour l’exemplaire enluminé. 3°. Le cexte ou l'hiftoire & les defcriprions déraillées des animaux repréfenrés fur les planches, fera imprimé à part en grand i7-8°, en Danois, Fran- çcois, Allemand & Latin, afin qu'on puifle l'avoir en telle de ces langues qu'on voudra, avec, ou fans les eftampes. Les dépenfes confidérables qu’exige un tel Ouvrage , fur-rout les Eftampes, ne permettent de tirer ou de faite enluminer que les exemplaires qui feront arrêtés. On ne demande ni ne reçoit aucune avance ou prénumération ; ainfi les Amateurs n’ont qu'à donner leurs noms aux Libraires renommés , MM. Pancoucke , Hôtel de Thou, à Paris; Z. M. Bruyfet, à Lyon ; Ælmsly , à Londres; Bauer, à Strasbourg; M.M. Rey, à Amfterdam ; Philibers, à Copen- hague, ou à ceux qui diftribueront cet Avis, & à recevoir, moyennant argent comptant, les Exemplaires de l’Ouvrage & des Eftampes à mefure qu'ils paroifflent , ou immédiarement de moi, par leurs Commis à Copenhague, ou bien defdits Libraires. Les frais des envois & de la correfpondance, feront naturellement pour leur compte. On eft aétuellement occupé à graver les planches du premier Cahier, qui contiendra les deflins fuivans: Tage 1. Une grande Holothurie. 41. Sa ftruéture intérieure. IT. Ses Inteftins. IV. Un nouveau Polype de Mer. V. Une nouvelle Patelle avec l'animal. VI. Un Owrfin inconnu. VII. Une Médufe. VHI, Une grande Afcidia. IX. Son intérieur avec une petite moule, qui s'y trouve nichée. X. Deux Holorhuries. XI. Une Plume de Mer. (Pennatula mirabilis. ) XII. Trois Patelles avec leurs animaux. XHI. Le Cardium échinatum,, avec l'animal en repos & en marche. XIV, Sa ftruéture intérieure. XV. Une Afucidia avec fes petits & fa ftructure intérieure. XVI. Trois nouveaux Polypes d'Ourfns. XVIL Deux Doris. XVIIL Deux Néreides. XIX. Une Etoile de Mer. XX. Un Poiffon rare. ( Callionymus Dracunculus.) XXI. Une Sangfuë de Mer. XXII. Trois Anomies. XXII. Deux Anémones de Mer. XXIV. Deux Parelles avec leurs animaux. XXV. Une nou- velle Afcidia. XXVH. La Sabella granulata & l'animal. XXVII, Un Ver marin inconnu. XXVIH. La Vénus d'Iflande avec l'animal, XXIX. Une nouvelle Néreide. XXX. Une belle variété de l'E- toile ronge. XXXI. Une nouvelle Afcidia. XXXII. Fafciola flac- cida € rofea Werm. vol. 1. p. 2. p. 57 & 58. XXXIIL. Qua- tre Lernées inconnues XX XIV. Deux nouvelles Afcidia. XXXV. Animalcules d’Infufñon. XXXVI. Une Etoile de Mer in- connue, XXXVII. Un Poiflon rare. XXXVIII. Deux Crabes. SUR L'HIST. NATURELLE ET LES ARTS. 267 XXXIX. Un Ver de Mer'fingulier. XL. Une Plume de Mer in- connue. Examen analytique, des Eaux minérales des environs de l’Aïigle en Faure Normandie, avec leurs propriétés dans Les maladies ; par M. Terrede , Docteur en Médecine, & Médecin ordinaire de la Ville de l'Aigle, 1 vol. ë7-12. À Paris, chez Wincenr, Imptimeur-Li- braire, rue des Mathurins. Analyfe des Eaux minérales de Secray , près de Piriviers ; par M. Genefl , le jeune , Maïtre en Pharmacie, à Pitiviers, 1 vol, 27-12. À Paris, chez le mème. Peu-à-peu les travaux , fur cetre partie , augmentent , & 1l fera bien prouvé que la France eft auf riche en caux minérales. qu'aucune autre partié du monde. Ces deux Ana- lyfes plaironc fürement. » Cartes Géographiques des parties feprentrionales d'Allemagne, telles que la Pruffe, la Pométranie , le Mecklenbourg , la Helfe, la Ruflie , les Duchés de Brème & de Verden; la Bavière , une grande Carte d'Allemagne, fur toile ou fur papier. Le Plan de Berlin auf fur toile ou fur papier; le Parc de Berlin, & un Atlas de Marine. Les Cartes ont été gravées fous la direction de l’Académie Royale des Sciences & Belles-Lettres de Berlin ; faut-il d’autres garants de leur bonté ? Ces Cartes fe trouvent à Paris, chez Madame Duclos , rue des Singes «, La Société & Correfpondance Royale de Médecine, dans fa pre- mière Séance tenue le 13 du préfent, après avoir déterminé la forme de fes travaux, a propofé le fujet d’un Prix de la valeur de 300 livres, qui fera diftribué dans la Séance du deuxième Mardi d'Août 1777; à l'Auteur du Mémoire qui fera jugé avoir le mieux répondu à la queftion fuivante : Déterminer dans Les fièvres exarthé- matiques , quelles font les circonflances dans lefquelles Le régime raffrai= chiffant ef? préférable à celui qui eff échauffant | € celles où il faut em- ployer une méthode contraire. Ceux qui concourront à ce Prix, écarte- ront tout ce qui pourroit avoir la moindre apparence de fyftème, & fe fouviendront que fi l’on avoir donné moins de confiance à la théorie, on ne feroit pas obligé d’en appeller au tribunal de l’ex- périence. Les Mémoires feront adreffés, francs de port, avec des billers cachetés, contenant le nom des Auteurs, avant le premier Juin 1777, à M. Vicq- d'Azyr, Médecin-Confultanc de Monfeigneur Ze Comre d'Artois, premier Correfpondant avec les Médecins du Royaume, demeurant à Paris, rue du Sépulcre. Gazeue de Santé, Ce n’eft plus une feule perfonne qui dirige cer 2 265 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, Ex. Ouvrage, mais une Société de Médecins. Ces Meflieurs en ont changé, en général, la manière de préfenter Les objets. Chaque feuille con- tient quelques: articles particuliers, connus peut-être des perfonnes qui palfent leur vie à des recherches utiles, mais entièrement igno- tés pour la mulritude, & la multitude a-le plus grand befoin d'être inftruite, fur-tout d’être en garde contre l’audacieufe charlatanerie de ces empiriques qui ne craignent pas d'employer, fans connoif- fance de caufe , les fubftances les plus actives. Que d’ignorans & d'empiriques ! tout leur mérite eft dans la forte crédulité du vul- gaire. Prenons deux.titres pour faire connoître cetre nouvelle Ga- zette de Santé. Moyens de découvrir la préfence du tartre émétique dans une liqueur. Sion mêle du foie de foufre dans une liqueur qui con- tient le tartre émérique, alors certe liqueur fe trouble, prend une couleur de brique , & fi on la laiffe repofer quelque rems', on ob- tient un précipité qui eft un vrai foufre duré d’antimoine. Dans ce procédé , la crème de tartre qui forme avec le régule d'antimoine, le tartre émérique , quitte la partie réguline de ce demi-métal pour s'unir à l’atkali du foie de foufre, & forme avec lui une efpèce de fel végétal qui refte en diffolution, tandis que le foufre, devenu libre , fe porte fur le régule d’antimoine, & forme ce qu'on appelle le foufre doré d’antimoine , lequel érant infoiuble dans l'eau, fe précipite au fond de la liqueur fous la forme de poudre rouge... Moyens de reconnoître la préfence du fublimé corrofif dans une liqueur quelconque. Lorfqu’une liqueur contient du fublimé corrofif, outre la faveur âpre & métallique qu'elle doit avoir, il y a d’autres in- dices qui le font connoître. La meilleure manière de s’en affurer , confifte à employer l’eau de chaux nouvellement préparée. On mêle les deux liqueurs, & s’il y a du fublimé corro if, il fe fait fur- le-champ un précipité couleur de brique... Dans cette combinai- fon qui forme l’eau phagédénique , l'acide marin, qui étoit uni au mercure , le quitte pour s'unir à la chaux, avec laquelle il a plus d’affinité, tandis que le mercure, devenu libre, fe précipite fur-le-champ fous la forme d’une poudre couleur detbrique.-Certe pierre de touche eft plus sûre que celle que fournit l’alkali fixe ordinaire, qui pourroit difloudre Je métal. On foufcrit , pour cer Ouvrage, non-feulement utile aux gens de l’art, mais encore à tout le monde, chez Ruaulr, :Libraire, rue de la Harpe. Le prix de ‘Abonnement pour l’année, eft de 9 Liv. 12 fols, franc de port, par tout le Royaume. TROISIÈME B A À Mes PEN } Seplmbre Z 776: m4 ne EN ECTS - ' TER TS TETE Erree — J. Fes 177 2. OBSERVATIONS SUR L'ASP HMS POU E, SUR L'HISTOIRE NATURELLE PR SAR ES RS ARTS AVEC DES PLANCHES EN TAILLE-DOUCE, DÉDIÉES A M LE COMTE D'ARTOIS,; Par M. l'Abbé ROZIER, Chevalier de l'Eglife de Lyon ; de l’Académie Royale des Sciences, Beaux-Arts & Belles-Lettres de Lyon , de Villefranche, de Dijon, de Marfeille, de Nifines , de Fleffingue , de la Société Impériale de Phyf- que & de Botanique de Florence , de Zurich , de Madrid , Correfpondant de la So- cièté des Arts de Londres , de la Société Philofophique de Philadelphie , &c. ar- cien Diredeur de l'Ecole Royale de Médecine - Vétérinaire de Lyon. TOME HUITIÈME. OCT OBUR EN 2776. | | A 2 HAUE 23 JEU de 2 AR pe | Chez RUAULT, Libraire, rue de la Harpe, | MADEIG LXXVL APE CU BR IIR LE LE GE DU 8 OT \ a a du A MM. les SouscrrPTEuRS dont l'Abonnement finit à la fin de l'année 2776. Pros: EUR S Soufcripteurs fe font plaints de ce qu'ils ne rece- voient pas lès Cahiers aufi-tôr qu'ils avoient formé leurs deman- . des. Ils font priés d'obferver que fouvent ils s’adreflent à des Commiflionnaires qui négligent de foufcrire , ou de faire par- venir-les Cahiersà leur deftination. Pour éviter, à l'avenir , de parcils reproches & de femblables lenteurs , MM. les Soufcrip- teurs, qui ont été dans le cas d’étfe mécontens, font invités à recommander expreflément aux perfonnes. qu'ils chargent de leurs commiflions , d'écre plus exactes que par le pañé : ou s'ils jugent la chofe plus commode , de configner le montant de la Soufcription au Buréau des Poftes de leur Ville, fans l’affran- chir, mais affranchir feulement la Lettre qui en donne avis. Un fecond fujet de plainte vient de ce que ceux, chez lefquels On prefcrit de remettre les Exemplaires , les prêtent , les égarent, & difent enfuite ne les avoir pas reçus. On prévient que l'on fait l'appel de chaque Cahier & de chaque Soufcripteur, comme dans un Régiment on fait l'appel des Soldats , & tous les Cahiers font portés fermés , dans un fac cacheté, à la grande ou à la petite Pofte de Paris. On voit par- là, que fi quelques -uns ne font pas rendus, ce n’eft plus la faute du Bureau des Journaux. MM. es Soufcripteurs, qui défirent renouveller leur Abon- nement pour l’année 1777, font priés de donner /eur nom & de- meure, écrits d'une manière lifible , dans le courant du mois de Décembre, ou le plutôt poflible, afin d’avoir le tems de faire imprimer leur adreffe. On foufcrit à Paris, chez l’Auteur , Place & Quarré Sainte - Geneviève , & chez les principaux Libraires des grandes Villes. Le prix de la Soufcription eft de 24 livres Pour Paris, & de 30 livres pour la Province, port franc. , j à HLLARASS 12 ui ré æ sd T'ABIENE DES LA ARC ANGES PAS Contenus dans cette feconde Partie. Ja OI1S1ÈME Mémoire d'Optique, ou fuite de celui fur les Cou- leurs accidentelles; par le Doëleur de Godart, Médecin des Hopitaux de Wervier, Membre des Académies Impériale & Royale de Dijon & de Bruxelles, page 269 Differtation Chymique fur Le Nickel, foutenue dans l’Auditoire de Guf- tave , par J. Afrel Arvidffon, fous La préfidence de M. Torb. Beroman , Proféffeur Royal € ordinaire de Chymie, Chevalier Doré de l'Ordre Royal de Wafa, & Membre de plufieurs Acadeèmies , 279 Mémoire fur une manière de communiquer du mouvement à l'Eau d’une Baignoire ordinaire ; 6 augmenter par-la les effers falubres des Bains domefliques , en les rapprochant à volonté de ceux d'eau courante ; par M. le Comte de Milly. 298 Suite des Mémoires de M. l'Abbé Dicquemare , pour férvir à l'Hifloire des Anémones de Mer, 3 o Suite des Découvertes de M. l'Abbé Dicquemare ; fur quelques Rire duéfions animales, 314 Objérvations fur le Froid extraordinaire qu'on a reffenti en Hollande € en Frife, aux mois de Novembre & Décembre 1774, @ de Janvier 177$; & fur la denfité de la Neige ; par M. J. H. Van - Swirden , Profeffeur em Philojophie, Logique & Méraphyfique , à Francker em Frife , & Membre de la Société des Sciences de Harlem, 316 Lettre adreffée à l'Auteur de ce Recueil , par M. Le Roy, de l'Acade- mie Royale des Sciences, fur l’étincelle éleëtrique de l'Anguille de Surinam , 33E Nouvelles Littéraires , 336 APPROBATION. J: A1 lu, par ordre de Monfcigneur. le Garde d Sceaux, un Ouvrage qui a pour titre : Obfervations fur la Phyfique , fur l'Hiffoire Naturelle & fur les Arts, Ece par M. l'Abbé Roz1eR, &c. La collection de faits importans qu'il offre pério- diquement à fes Lecteurs, mérite l'accueil des Savans ; en conféquence , $ j'eftime qu'on peut en permettre Le A Paris, ce 25 Oétobre 1776 + VALMON G:DFROMARE" Le TROISIÈME ü es 15 269 TROISIÈME MÉMOIRE DO PTT OUU E, O UV Suite de celui fur les Couleurs accidentelles ; Parle Doëleur DE GODART , Médecin des Hopiraux de Verviers Membre des Académies Impériale 6 Royale de Dijon & de Bruxelles. J., promis une fuite d'Obfervations analogues à celles de mon précédent Mémoire, & c’elt pour dégager ma parole que je donne celui-ci , qui n'eft qu'un rapport des corollaires de cet autre , ou des faits dont les explications fe déduifent de la théorie que j'y ai établie : mais pour comprendre ce que je vais dire, il eft bon d'a- voir les deux colonnes de couleurs devant les yeux, OU tout au moins bien préfentes à l’efprir. PREMIÈRE OBsERVATION. Ayant refté quelque tems en plein fo- leil, fi vous paflez dans un endroit obfeur, vos yeux font affectés d'une impreffion verdâtre, dont vous n'aviez pas la moindre fen- fation au grand jour. L'éclar de la lumière du foleil a fi vivement agi fur la rétine, qu'elle en conferve le ton, dont le mouvement fait la fenfation du verd ; mais cette impreflion eft infenfible au grand jour, & fe fait feulement fentir dans les ténèbres , parce que le mouvement de la lumière lui étant fupérieur , elle n’eft qu'un phantôme qui a befoin d’un certain degré d’obfcurité pour paroître. 1 OsservArIoN. Ayant lu affez long-tems au foleil , fitué de façon que fes rayons donnent fur le livre ; fi vous paflez à j’om- bre , les lettres font d’un verd décidé. Les lettres parôiffent vertes, parce que le noir étant vû néga- tivement , les endroits de la rétine qui en reçoivent les images, font dans une obfcurité capable de faire appercevoir la couleur ex- primée par le ton des fibres vifuelles qui, felon l’obfervation pré- cédente , eft la verte ; ainfi, ces endroits, c’eft-à-dire, les lettres , doivent être vertes. I Osservarion. Lorfque les lettres ceffent d’être vertes , elles Tome VIII, Parc. II. 1776. M m 270 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, le redeviennent fi vous approchez le papier fi près de vos yeux, qu’elles commencent à: fe déformer. La raifon en eft que le verd eft devenu fi foible, qu’il ne peut plus'être fenfible à la première diftance , & qu'il faut augmenter la force négative du noir pour le faire reparoïtre , ce que l’on ob- tient en confidérant les lettres de plus près, puifqu’elles devien- nent par-là plus obfcures. IV OsservATION, Si vous avez lu moins long-tems au foleil, les lettres font bleues, & le papier jaunâtre. Les lettres font bleues, parce que les fibres ne font parvenues qu'au ton bleu, & le papier eft jaunâtre, parce que Île blanc, donnant fur le bleu, à le jaune pour couleur accidentelle. V OmseRVATION. Dans l'expérience, n°. 2, le papier eft rou- geâtre , & fi vous rentrez dans l'appartement , tout ce qui eft blanc, vous le paroit aufli. Le blanc réel venant agir fur le verd de la rétine, prend un œil rougeñtre, parce que le blanc fur le verd a le rouge pour couleur accidentelle. : VI OsservArTion. Si vous avez refté quelque tems au foleil, & que vous baifliez peu-à-peu un livre que vous tenez à la main, comme pour lire, dès que les rayons folaires commenceront à ra- fer la page, le blanc du papier prendra une teinte rouge ; le rouge paroît évalement dans l’ombre que vous faites avec un doigt, & même fur un papier groflier fur lequel il n’y a pas des lertres écrites ni imprimées. La condition requife de devoir avoir refté quelque tems au fo- leil, prouve que le phénomène dépend de l’état des yeux , c’eft- à-dire , que les fibres font au ton verd, & nous avons obfeivé que le verd, infenfble au grand jour, paroît dès que l’on pañle à l'ombre ; or, les inégalités du papier préfenté obliquement au fo- leil, forment autant de monticules dont les vallons étant ombrés, font fentir le verd, & le blanc du papier donnant fur ce verd de la rétine , fait naître la fenfarion rouge; il en eft de mème des ombres du doigt pofé fur le papier; ainfi, la raifon qui fait pa- roître le rouge, dans ce cas, eft manifefte, puifque c’eft le même phénomène que le précédent. IL faut être en chemife pour faire cette expérience, ou tout au- moins n'être point vêtu d'un habit dont la couleur foit vive, ou tire fur le rouge ; autrement , le reflet de lumière qui fe fait de votre habit fur le livre, en empèche le fuccès, ou vous fait voir un rouge qui n’eft pas celui dont il eft ici queftion. VIL OssenvarTion. Si vous allumez au crépufcule une chandelle, & que vous courbiez du côté des fenêtres une partie d’une main SUR L'HIST. NATURELLE ET LES ARTS, 271 de papier blanc, de façon que la lumière de la chandelle donne fur la portion non courbée, & celle du crépufcule fur la courbée, cette dernière paroît d’un beau bleu lorfque vous la confidérez, après avoir contemplé quelque tems l’autre. La lumière de la chandelle étant jaune, elle colore la partie non roulée, & l'œil qui la confidère , reçoit une impreflion jaune qui fubfifte pendant le tems que vous regardez la partie roulée ; ot la couleur de celle-ci n’eft pas changée, puifque la lumière de la chandelle n’y peut donner; le blanc donc de cette dernière por- tion agit alors fur la rétine affeétée de jaune, d’où réfulte la fen- fation bleue, puifque blanc fur jaune donne bleu. L'ombre de votre main eft bleue par la même raifon, lorfque vous écrivez à la chan- delle dans le tems de la journée. VII OmservATION. Si vous roulez dans le fens oppofé , la pare tie courbée ne paroît pas bleue. L'obfcurité étant trop forte , le blanc du papier ne peut concou- tir à l’impreflion, c’eft-à-dire, que le blanc de la portion roulée ne fe faifant pas affez fentir, le blanc ne donne pas fur le jaune, & par conféquent point de bleu. IX Osservarion. Cette expérience faire de la nuit dans une chambre éclairée d’une chandelle , fait voir le bord de la partie plane , contiguë à la portion roulée, de couleur d’or, & le creux de celle-ci Jaiffe appercevoir un violet magnifique. La bordure dorée eft produite par la couleur jaune que la flamme de la chandelle communique au papier , laquelle s’avive fur le bord de l'ombre par la vacillation du point de vue, conformément à notre troifième théorème, & le creux fe remplit d’une fuperbe couleur violette, parce que fon blanc donne fur l’impreflion d'un jaune qui, par fon éclar, anime la couleur bleue accidentelle. X Osservation. Ce creux fait voir un crès-beau jaune , l’expé- rience étant faite au clair de lune. Tout le monde fait que la lumière de la lune eft bleue; or, le blanc fur le bleu , donne jaune pour couleur accidentelle. * XI Ossenvarion. Celle-ci & la fuivante font tirées du Mémoire de M. de Buffon. » J'érois, dit ce grand Obfervateur, dans un » lieu élevé, & le foleil fe couchoit dans une gorge de montagne, » enforte qu'il me paroifloit fort -abaillé au-deflous de mon ho- » rifon; le ciel éroit ferein, à l'exception du coucher qui, quoique » exempt de nuages, éroit chargé d'un rideau tranfparent de va- » peurs d’un jaune rougeâtre; le foleil lui-même étoir fort rouge, » & fa grandeur apparente au moins quadruple de ce qu’elle et à » midi, je vis très-diftinétement Les ombres des arbres qui étoient » à vingt & trente pieds de la muraille ÉLrE , colorées d’un m 2 272 OBSERFATIONS SUR LA PHYSIQUE, » verd tendre, tirant un peu fur le bleu; l'ombre d’un treillage ; » qui étoir à trois pieds de la muraille, éroit parfaitement deflinée » fur cette muraille, comme fi on l’eût nouvellement peinte en verd- » de-gris; cette apparence dura près de $ minutes «, M. de Buffon qui, occupé de fes couleurs accidentelles, cherchoïit, ainfi qu'il le dir, à voir le foleil, dont l'œil foutient mieux la lumière à fon coucher, qu’à toute autre heure du jour, pour re- connoître enfuite les couleurs & les changemens des couleurs cau fés par ces impreflions , a reçu, en remarquant l'étendue du ri- deau tranfparent, la couleur & les dimenfions d’un foleil qui fe couchoit au-deflous de lui ; a reçu, dis-je, dans les yeux, des rayons qui ont monté les fibres vifuelles au ton verd, & les om- bres lui ont paru vertes pendant près de $ minutes qu'a duré certe impreflion : où M. de Buffon auroit-il l'organe de la vue affez dé- licat pour avoir confervé, pendant ce nombre de minutes, l’impref- fion rouge du rideau & du foleil, lequel donnant fur le blanc om- bré ou affoibli de la muraille , y auroit produit la couleur verre accidentelle, & point fur le refte, dont le blanc, trop vif & trop fort, auroit effacé & détruit cette légère impreflion. Ce que nous avons obfervé ci-devant de la fenfibilité des yeux de M. de Buffon, donne quelque vraifemblance à cette explication. XII OssenvArion. » Le lendemain , au lever du foleil, j’allat » regarder d’autres ombres fur une autre muraïlle blanche ; mais » au lieu de les trouver vertes, comme je m'y attendois, je les » trouvai bleues, ou plutôt de la couleur de l'indigo le plus vif; » le ciel étroit ferein, & il n’y avoit qu’un petit rideau de vapeurs » jaunâtres au levant; le foleil fe trouvoit fur une colline, en » forte qu'il me paroifloit élevé au-deffus de mon horifon; les om- » bres bleues ne durèrent que trois minutes, après quoi elles me » parurent noires : en après, le foleil ayant avancé pendant fepc » jours, & fe couchant derrière un rocher qui le faifoit difparoître » avant qu'il pc s’abaiffer au-deffous de mon horifon , les ombres » étoient d’un bleu d’azur «. Le foleil plus élevé, donnant plus obliquement dans les yeux de M. de Buffon, fes rayons n'ont pu faire monter les fibres de la rétine qu’au bleu (voyez la nore de la lecture au foleil), & cette impreflion érant moins forte , a aufhi eu moins de durée , puifque la couleur des ombres bleues n’a fublfté que trois minutes, tandis que les vertes fe font foutenues près de cinq. Conformément à la conjecture de l’obfervation précédente, on pourroit préfumer que le rideau jaunâtre a laiffé dans les yeux une imprefion jaune qui, portée fur le blanc , a fait naître le bleu ac- cidentel, puifque blanc fur jaune, donne bleu. SUR L’'HIST. NATURELLE ET LES ARTS. 27; XII Osservarion. Il arrive quelquefois que les ombres reftenr vertes ou bleues pendant près d'une demi-heure, & qu’elles fe montrent telles fans que l'œil ait été tourné vers le foleil. Dans ces cas, le foleil fe trouve dans un horifon fi fortement teint de rouge ou de jaune , qu’il colore la muraille blanche à l'oppofite , & la couleur de celle-ci fe communiquant à la rétine, le blanc de la portion ombrée excite alcrs la couleur accidentelle qui lui compère, c’eft-à-dire, que l'ombre eft verte fi la muraille eft rouge, & bleue fi elle eft reinte en jaune, parce que blanc fur rouge , donne verd, & blanc fur jaune, donne bleu. Je dirois volontiers que les obfervations de M. de Buffon ne font qu'une avec celle-ci, & qu’on doit les expliquer de cette dernière manière. À XIV OnsenvATion. Si vous regardez un papier blanc avec des lunettes vertes, à la lueur de la flamme d’une bougie, le rouge ne paroït pas lorfque vous les ôtez, mais il paroït fi vous avez fixé la flamme. Il ne paroït pas dans le premier cas, parce que le verd eft fi peu fenfble, qu'il n’y a qu'une petite différence entre voir le pa- pier à travers du verre , ou de le voir à nud , & que dans le fe- cond , l’intenfité du verd forme une différence fufhifante à Ja pro- duction du phénomène. XV Osservarion. Ayant les yeux fermés , levez la tête vers le foleil, pour que fes rayons donnent obliquement fur vos paupières, puis, le moment d’après, couvrez vos yeux exactement, vous verrez le plus beau bleu qui puiffe s’imaginer. Les rayons folaires font dans tel état une impreflion jaune dorée, qui, donnant fur le blanc que prend la rétine dans l’obfcurité, excite la couleur bleue accidentelle; de-là, il arrive que fi vous faites cette expérience la rète plus élevée, & que vous reftiez plus long-tems dans cette fituation, c’eft une couleur verdârre que vous appercevrez lorfque vous couvrez vos yeux , parce que dans ce cas, limpreilion des rayons devient rouge, & que blanc fur rouge, donne verd pour couleur accidentelle, XVI Osservarion. Si vous regardez un carton blanc éclairé d’un foleil brillanc, & qu'il falle obfcur deflous, on voit une bordure pourpre tout-à-l’enrour, & fi vous faites une ouverture dans le car- ton, la couleur pourpre vient remplir le trou. Le blanc fur un fond noir, donnant une tache plus noire, il fembleroir que le bord & l'ouverture du carton blanc devroiene donner la fenfation noire, d'autant que l’obfcurité du deflous fait la fonétion d’un fond noir. Mais il eft à remarquer que dans l’ex- périence du blanc vû fur un fond noir , ce n’eft pas le blanc que 274 OBSERVATIONS SUR LA“PHYSIQUE"» l'on voir, mais le noir, ou pour parler plus jufte , c'eft fa diffe- rence d'avec le blanc , c'eft-à-dire, que l’impreflion qui refte dans la rétine, pour avoir fixé le blanc , eft de la claffe des phantômes qui ne peuvent donner la vifion en plein jour, mais qui entretien- nent feulement un furplus de mouvement dans la rétine; or, ce fur- plus , augmentant la différence de l’impreflion négative du noir, il doit renforcer fa teinte , ainfi que nous l'avons expliqué en fon lieu. Mais il n’en eft pas ainfi dans le cas dont il s’agit, l’impreflion du carton blanc y communique à la portion ombrée de la rétine; un ébranlement qui s'élève au-deffus des phantômes, & qui a route la force requife pour faire fenfation en plein jour; pour peu que le, noir des ténèbres le favorife , on augmente fa différence. Ce n'eft donc pas le noir que l’on voir ici, mais c’eft le blanc, & ce blanc fait paroitre le rouge dans l'obfcurité , de la mème manière que les rayons du foleil font paroïître les lettres bleues, puis vertes, enfin rouges, dans l'expérience de la lecture de notre fecond théo- rème. XVII OsservarioN. Les couleurs accidentelles , produites en plein foleil, prennent routes une teinte plus où moins rouge, lorfque l’on tranfpotte le papier ou le fond blanc dans une médiocre obfcurité. Les couleurs accidentelles , produites en plein foleil, font cau-. fées par l'excès du blanc brillanc fur les impreflions qui reftent de l'action des autres couleurs , & la lumière qui à fait naître ces 1m- preflions, a fatigué la vue affez pour laiffer après foi le phantôme verd. Ain, il n'eft pas étonnant que les couleurs accidentelles, produites au grand jour, deviennent rougeâtres dans une médiocre obfeurité, puifque cette couleur réfulte de laétion du blanc fur le verd. XVIII OnservAriIon. Ce phénomène ne paroît pas, fi on a fait naître les couleurs accidentelles à l’ombre. La raifon en eft que l'imprefion productrice n’a pas été affez forte pour laiffer après foi le phantôme verd. XIX OsservaArioN. Il ne paroît pas non plus dans une obfcurité plus confidérable. Dans ce cas, le défaut eft du côté du blanc qui ne fe fait pas affez fentir pour concourir, avec le phantôme , à la fenfarion. ‘ XX Osservariox. Lorfqu’on fixe un papier blanc éclairé d’un foleil éclatant , il paroît jaunâtre , enfuite bleu , & enfin d’un rouge obfcur. Les rayons réfléchis du blanc ont à-peu-près la même force que les directs; or , la lecture au foleil a appris que l’action de ceux- ci fait paler les fibres de la rétine par les différens tons qui répon- SUR L'HIST. NATURELLE ET LES ARTS. 275 + dent aux variétés des couleurs; il y a pourtant cette différence en _tre ces deux cas, que dans celui de la lecture , le frémiffement des fibres donne fur le noir des lettres qui laiflenc fencir la couleur an- nexée à chaque genre de vibration, au lieu que dans celui-ci, ce frémifement porte fur le blanc qui fait faillir les couleurs acciden- telles, d’où Î arrive que le bleu naïfflant donne d’abord du jaune, à raifon que le blanc continue à faire fon impreflion ; & que blanc fur blea , donne jaune ; maïs ce jaune ne dure que jufqu’à ce que le bleu fe foit fortifié; car fon impreflion eft alors fi forte, qu'elle eft vue par la vifion interne en plein jour, c'eft-a-dire, que cette impreffion furpalle celle du blanc, & c'eft alors que le papier pa- roît bleu ; mais bientôt après, le ton des fibres s'élève au verd, & ce verd étant trop foible dans fon commencement pour effacer de blanc, du concours de celui-ci avec le verd , réfulte la fenfation rouge , parce que blanc fur verd, donne rouge. J'ofe prédire à celui qui.fera aflez hardi de pouffer cette expé- rience plus loin, qu'il verra du verd; que ce verd durera même le double des autres couleurs , parce que le ton rouge qui fuccède au verd, donnant encore le verd pour couleur accidentelle, le verd doit fe faire fentir depuis le ton verd foncé, jufqu’au ton rouge renforcé, ce qui vaut le double du tems des autres : je conçois de plus que les fibres, continuant d'être de plus en plus irritées , paf- feroient de ce verd. au rouge, puis parviendroient au ton jaune; qu'alors elles feroient encore voir du bleu, jufqu’à ce que le jaune eût gagné le deflous , & qu’enfin , parvenues au blanc , on verroit du noir, c’eft-à-dire, qu'on finiroit par être aveugle fi on avoit la témérité & l’imprudence de pourfuivre cette expérience jufqu'au bout. Finiflons par quelques queftions , dont la folution fe déduit en partie du prémis, en partie des différentes modifications du tiflu cellulaire du nerf optique; car, quoique nous ayons confidéré juf- qu'ici cet organe comme formé des fibres nues , néanmoins il entre dans fa compofirion un tiflu qui les fépare les unes des autres, & qui en outre recouvre leur épanouiflement , ou la rétine en manière d'épiderme, & ce tiffu, chargé de vaiffeaux , entre pour quelque chofe dans les phénomènes de la vifon, particulièrement dans ceux qui nous reftent à expofer. : PREMIÈRE Quesrion. Pourquoi eft-ce qu'après avoir été expofé au grand éclat de la lumière, les fpeétres ou phantômes n’apparoiflent pas au premier moment qu'on couvre les yeux, ou qu'on entre dans les ténèbres, mais feulement quelques inftans après? La Nature, ou plurôt fon auteur, admirable dans fes précautions, paroît avoir eu particulièrement foin de munir les organes de nos 276 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, fens, d’un modérateur qui les mît à l’abri des violences des agens externes; la peau eft recouverte de fon épiderme à ce deflein, les papilles de la langue font garnies d’un fourreau, fourni par le corps muqueux de Malpighi; la membrane fchneïdérienne tapifle toutes les concamérations du nez ; l'oreille a fon timpan & fon veftibule , & l'œil, le plus délicat de nos organes, n’a pas été ou- blié dans ce plan de prévoyance; en effet, 1l a fes paupières qui font fentinelle au dehors : l’entrée de fon fanétuaire eft formée par une prunelle très-fenfible à la lumière qui, fecondée par l'encre de la choroïde , n’admet à la fois qu’une quantité fupportable de rayons: plus avant, la membrane vafculaire d'A/binus, recouvre la rétine pour recevoir leur premier choc & en amortir l’impreflion : & enfin, fes fibres font chacune emmaillotées d’un tiflu rempli de vaiffeaux qui, fe gonflant à l'occafñon de la moindre violence , les compri- ment, & modèrent par-là leurs mouvemens défordonnés. Lors donc que la rétine eft expofée, pendant un tems notable, à l’action d’une forte lumière , fes fibres irritées ne prennent pas tout le mouvement dont elles font capables, & qui tendroit à leur deftruétion , mais elles font retenues dans leur jeu par cette efpèce de frein qui ne leur laifle la liberté de frémir qu'avec modération, & quila leur ôreroir entièrement , fi la tendance de ces fibres au mouvement venoit à fe rallentir; or , c’eft ce qui arrive lorfque dans le cas en queftion, l’on couvre fes yeux ou que l'on afle dans les ténèbres , la caufe excitante ceffant alors, l'effort des fibres eft rallenti, tandis que les entraves du tiffu cellulaire fubfftent. Ainf, la tendance au mouvement étant inférieure à la gène , leur mouvement eft fufpendu , & ne recommence qu'après que les vaifleaux fe font dégorués, & que le tiflu celle de comprimer les fibres ; ce fecond tems eft celui où les fpeétres & phantômes com- mencent à paroître. IL Question. Ponrquoi ces phantômes paroiffent-ils & difparoif- fent-ils alternarivement, ou quelle eft la caufe de ces intervalles pendant lefquels on ne voit goute? Le grand éclar auquel l'œil a été expofé , a déterminé des cou- rans d’humeurs en manière de flux & de reflux dans le tiflu dont je viens de parler. Pendant les flux, les fibres comprimées ne peu- vent réfonner, mais elles reprennent leurs vibrations pendant les reflux. HI Quesrion. Pourquoi n'obferve-t-on pas ces fortes d’éclipfes dans la vifon du jour, mais feulement dans celle des ténèbres ? Parce que la compreflion qui les caufe , fuflit pour arrêter les phantômes ; & qu’elle eft trop foible pour avoir cet effec fur des fibres excitées à frémir par la lumière , le mouvement étant trop confidérable DR 7. : SUR L'HIST. NATURELLE ET LES ARTS. 277 confidérable dans ce dernier cas, pour être arrêté par fi peu de chofe. IV Question. D'où viennent les fumées qui pallent & repaflent devant les yeux lorfqu’on fixe au foleil le blanc, jufqu'à le voir bleuâtre ou rougcâtre ? Elles viennent vraifemblablement de ce flux & reflux d’humeurs dont il vient d’être fait mention. V Quesrion. Pourquoi perd-on la vue en fixant le foleil ? Parce que la forte irritation de la rétine remplit alors tellement les vaifleaux du tiflu cellulaire, interpofé entre les fibres du nerf optique , que le mouvement de ces fibres en eft étoufté. VI Question. Pourquoi des mouvemens exceflifs du corps font= ils voir bleu tout ce qui eft blanc, ainfi que je l'ai éprouvé plu= fieurs fois dans ma jeuneffe ? Parce que les vaiffeaux de la membrane de la rétine qui, dans l'érat tranquille , ne charient qu’une lymphe claire & limpide ; ad- mettent la férofiré, lorfque le torrent de la circulation eft fort aug- menté, & que le blanc, donnant fur la couleur jaune de cette f€- rofité, fournit la couleur bleue accidentelle. VIL Quesrion. Pourquoi l'ami de M. de Buffon voyoit-il une tache verte , lorfqu'il portoit la vue fur du bleu? Parce que la portion de la tunique de la rétine , qui avoit reçu l'image du foleil, étoit reftée engorgée de férofité, & que de la couleur jaune de celle-ci , combinée avec la couleur bleue de lobjer , réfultoit la fenfation verte. VII Quesriow. Pourquoi voit-on des points noirs fur tous les objets éclairés, après qu'on s’eft gâté la vue, foit en fixant le foleil, foir en y faifant les expériences de ce Mémoire, ainli qu'il eft arrivé à M. de Buffon ? Parce que ces exercices laiflent après eux des engorgemens dans certains endroits du tiffu cellulaire qui, comprimant quelques fibres du nerf optique , les rendent incapables de faire leurs fonctions. IX Quesrion. Pourquoi la tache de l’ami de M. de Buffon étoit- elle pourpre, lorfqu’il regardoit fixement du jaune brillant, comme, par exemple, une bordure dorée ? Parce que le grand brillant de cette bordure avivoit la tache jaune , tandis que, bleffant l'œil devenu trop fenfble, il augmen- toit fon engorgement, jufqu'à y produire des points noirs qui 3 avec le jaune renforcé , fouruiffoient Ja fenfation pourpre. Tome VIII, Pare. II, 1776. Nn 278$ OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, X Question. Quels fonc les moyens que l’on peut employer pour guérir ces accidens ? C'eft de s’abftenir de tout exercice pénible aux yeux, & de tout mouvement violent du corps ; d'éviter de regarder les cou- leurs trop fortes, fur- rout le jaune , & Île ciel lorfqu’il eft cou- vert de nuées blanches; de rafraîchir fouvent fes yeux avec des fomentations d’eau froide; de fe mettre à la diète, à la ti- fanne, s’abftenant de vin, liqueurs & autres boiflons fermentées; de tremper fes pieds tous les foirs, de s'y faire faire une ou deux faignées; d'appliquer des veflicatoires à la nuque , & de fe purger finalement plufeurs jours confécutifs, avec un apozème laxatif & rafraichiffant. Par ces moyens, on a lieu d’efpérer que la circulation étant ralentie, fon impétuofité , détournée des yeux , la fatigue ceffant d’y attirer les humeurs , ces humeurs étant dé- gagées , puis dérivées vers le bas , les rafraïchiffemens fréquens , rendant du reflort aux vaifleaux dilatés, on a, dis-je, lieu d'ef- pérer que par tous ces moyens, combinés & placés dans l’ordre qui leur convient , les molécules dévoyées feront repouflées, des vaiffeaux trop étroits dans ceux que la Nature a deftinés pour leur livrer paflage, .& que tandis que la membrane albinienne re- couvrera fa tranfparence, les fibres du nerf oprique, délivrées de la compreflion qui gênoit leurs mouvemens, reprendront leur ati vité & leurs ofcillations primitives. 4 SUR L’HIST. NATURELLE ET LES ARTS. 2179 \ ES SE OR RAGE UE: ©. N CHYMIQUE SNA AIUUE LONG KE 15 Soutenue dans l’Auditoire de Guflave, par J. AFZEL ARVIDSSON, fous la préfidence de M. TORB. BERGMAN , Profeffeur Royal É ordinaire de Chymie, Chevalier Doré de l'Ordre Royal de Wafa, & Membre de plufieurs Académies. O: trouve , dans les contrées métalliques de l'Allemagne , une mine appellée Kupfer-nickel, tantôt grife, fouvent d’un rouge jaune & brillant, dont le nom vient peut-être de ce que, femblable en apparence à celles de cuivre, elle ne peut donner rien de ce der- nier métal par le fecours du feu. Hencke! penfe que c’eft une efpèce de cobolt ou d’arfenic, mêlé de cuivre (1) : Cramer la rapporte aux mines cuivreufes ou arfeni- cales (2): mais ni eux, ni perfonne , n’ont pu, comme ils l’avouent, en retirer le moindre atôme de cuivre. Telle étoit néanmoins l'o- pinion de tous les Naturaliftes , lorfque le célèbre M. Cronflede en- treprit de plus exactes recherches fur cette mine, & prouva , par beaucoup d’expériences, publiées en 1751 & 1754 (3), qu'elle con- tenoit un nouveau demi-métal, qu’il nomma zickel. La plupart des Minéralogiques Suédois & étrangers, fe rangèrent de fon avis: d’autres n’ont pu encore fe rendre, quoique certains paroiffent moins conduits par des expériences fidèles , que par des conjectures vagues & des apparences trompeufes. Dernièrement en- core, M. Sage s'eft efforcé d'établir une nouvelle doctrine : &, fondé fur une analyfe du nickel, décrite dans les Mémoires de l’A- cadémie Royale des Sciences , il regarde ce demi-métal comme du cobolt mêlangé de fer, d’arfenic & de cuivre (4). —————————————…———————————————————— —— ——————————“ñ—û“—— (1) Pyrir. C. 7 & 8; A. Ac. N. C. vol. V. Obf. 92. (2) Docimait, $6, 371 & 418. (3) A&. de l'Académie Royale des Sciences de Stockholm. (4) Mémoires de Chymie de M, Sage, Edit, de 1773. à nez >8o OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, Pour décider cette queftion , il nous a paru néceflaire de faire beaucoup d'expériences que nous avons exécutées , mettant à l'écart tout efprit de parti. La rareté du minéral n'a pas permis aujour- d'hui de les pouffer aufli-loin qu’il feroit à fouhaiter. Mais nous nous flattons d’avoir mis la vérité affez à découvert , pour , qu’à l'aide d’une nouvelle quantité de matière, elle puiffe paroître dans toute fa force, & difhper les doutes qui pourroient encore refter. 6. 11. Pour obtenir le régule du nickel, il faut d’abord calciner la mine, qui exhale alors plus où moins de foufre & d’arfenic, fuivant fa nature; de forte qu’elle perd quelquefois plus de la moitié de fon poids, & fouvent % au plus. 100 Cette mine, long-tems & très-bien calcinée , n’acquiert pas tou- jours la même couleur. Elle devient ordinairement d'autant plus verre qu'elle eft plus riche. Quelquefois (fur-tout fi on la laifle en repos) fa furface fupérieure fe recouvre de végétations verdâtres , coralliformes , dures & fonnantes. Ajourez le double ou le triple du flux noir à la poudre calcinée; mettez le mêlange dans un creufet ouvert; recouvrez - le de fel marin, feton la méthode ordinaire, & pouffez-le en fufon dans un fourneau de forge , ayant foin d'animer le feu par le moyen d'un foufilet à deux âmes. Ayant enfuite caffé le vaiffean, vous trouverez dans le fond , ous des fcories brunes, noirâtres, & quelquefois bleues, un glo- bule métallique, dont le poids fera , proportionnellement à la mine crue, de dix, vingt, ou tout-au-plus de cinquante centièmes. Il s'en faut pourtant bien que ce régule foir pur, cat il con- tient encore beaucoup de foufre , & fur-rout d’arfenic, du cobolt, & du fer en abondance qui le rend ordinairement attirable à lai- manr. Ces matières font caufe qu'il varie beaucoup ; tant par rap- port à fa caffure, dont la furface brillante eft lifle ou lamelleufe.. qu'à l'égard de fa couleur blanchätre, qui eft plus ou moins jaune, ou rouge. On voit donc combien il eft néceffaire de le purifier, afin de juger comme il faut, de fon vrai caractère. Si nous rapportions s dans routes leurs circonftances, les nombreufes tentatives que nous avons faites pour y parvenir, ce Mémoire deviendroit un volume. Nous nous contenterons de citer fuccinctement les principales. $ ILE. Pour connoîre l’effer des calcinations & des fcorificarions séitérées, nous avons tenté les expériences fuivantes fur un régule de nickel de Souabe, fondu par M. Cronfledt. Pefé à une très- exacte balance hydroftatique , fa gravité fpécifique étroit à celle de l’eau diftillée :: 7,4210 : 1,0000, manière de comparer que nous employerons dans tout ce que nous dirons par la fuite. SUR L'HIST. NATURELLE ET LES ARTS. 281 a) Quatre onces & demie de ce régule en poudre, 'calcinées pendant fix heures dans plufeurs capfules; fous la voûre d’un four- neau docimaftique , exhalèrent d’abord de larfenic, accompagné de fon odeur ordinaire, puis du foufre, enfuite beaucoup de fu- mée blanchâtre , fans odéur d'ail, & provenant peut-être d’un ar- fenic privé de phlogiftique. Dès que les tas éprouvèrent une forte chaleur, ils commencèrent à fe bourfouffler, leur furface fe recou- vrit totalement de végétarions verdâtres, femblables à des moufles & à des lichens filifoumes, & il refta au fond’ une poudre d’un cendré ferrugineux. La mafle entière perdit dans cette opéra- tion b) Demi-once de cette chaux , fondue en quatre minutes, avec le triple de Aux noir, à un feu de forge animé d’un foufiler, donna un régule dont la furface étroit réticulaire, la plupart des aréoles féxangulaires & le centre tuberculé, d’où partoient en rayonnant des ftries très - menues. Ce régule pefoit 7 de demi-once, s’atta- choit à l’aimant , & faifoit avec le borax un verre noirâtre. c) Soumis à une feconde calcination , il exhala d’abord une odeur d'ail, enfuite une fumée vifble, inodore , & poufla des végérations. Le refte comme dans la calcination précédente, d) Sa poudre calcinée , ayant été réduite avec du flux noir, & retirée du creufet ,'exhaloic-encore une odeur d’arfenic. Fondue de nouveau avec parties égales de chaux & de borax, elle ne pré- fenta que de légères traces de cobolt. e) Le régule de nickel, calciné pour la troifième fois, fentoie peu l’arfenic; il ne s’éleva plus de végétation, & la chaux mécal- lique prit une couleur plutôt ferrugineufe que verte. f) Ayant été réduire, le régule offrit prefque les mêmes phéno- mènes dans une quatrième calcination. | g) Après fa réduction, fondu avec de la chaux & du borax, il perdit, à la première fois, beaucoup de fer inhérent à des fcories noires , communiqua enfuite une couleur hyacinthe, fans mélange confidérable de cobolt; obéit peu à l'aimant, & pefa fpécifique- ment 7,0828. k) Enfin, calciné pour la cinquième fois, en ajoutant par .repri- fes de la poudre de charbon dans les capfules chauffées à rougir, il exhala une grande quantité d’arfenic , fous forme de fumée; car tel eft le caractère de ce dernier, qu'à moins d’une certaine por- on de phlogiftique à laquelle il puille s'unir , 1l réfifte à l'aétion du feu & refte fixe. L'opération fut continuée jufqu’à ce qu'il ne fe manifeftât plus ni fumée , ni odeur d’ail , quoiqu'on ne cellär d'ajourer de la poudre de charbon, 382 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, i) J'obtins, par la réduction, un régule, dont la texture étoit lamelleufe & renace , & qui après que le creufer fut hors du feu, répandoit encore une odeur arfenicale. &) Une fixième calcination , continuée dix heures, en ajoutant de la poudre de chatbon, fit exhaler de Parfenic , qui n’éroit fen- fible qu'à l’odorat. La chaux métallique étroit d’une couleur fertu- gineufe fombre; mêlée d'un verd prefque imperceptible. 1) Sa réduétion , opérée avec le flux noir, & parties égales de chaux & de borax, AIRE un régule à - demi ductile , adhérent très-fort à aimant, & foluble dans l'acide nitreux qui en recevoit une couleur très-verre. Ce menftrue ne le diffour pourtant pas en entier : il refte une mafle noirâtre qui blanchit à la fin, & qui, jecrée fur des chatbons embrâfés, fe diffipe fans odeur notable d’ar- fenic. m) Ce régule fat enfuite fondu fix fois avec de la chaux & du borax. Les fcories qui en provinrent, avoienc la couleur d’hyacinthe. Une chaux métallique verte entouroit le régule, qui étoit, comme ci-devant, actirable à l’aimant, à-demi duétile & tenace, c’eft-à- dire, hérillé, dans fa caflure, d’efpèces de filets. n) Malgré tant de calcinations , je le foumis encore , pendant quatorze heures , à la violence d’un grand feu ; après quoi , j'ajoutai de tems en tems de la poudre de charbon , fans appercevoir la moindre diflipation d’arfenic ni diminution de poids. La poudre calcinée avoit une couleur ferrugineufe , mèlée de très-légères traces de verd. o) Après fa réduction, il refta dans les fcories qui étoient très- chargées de fer, un fort petit globule , encore artirable à l’aimant, & dont nous parlerons plus amplement au $. IV, expérience à, & fuivantes. $. IV. J'ai torréfié & purifié, de la manière qui fuir, un échan- tillon de la mine de nickel, fituée près de Los en Helfingie. a) La calcination s’eft faite à la mode ordinaire : B) De mème que la réduction. c) Enfuite , j'ai calciné mon régule, en y ajoutant par reprifes , de la poudre de charbon, jufqu’à ce qu'il nait plus paru de fumée atfenicale, & que la chaux de nickel ait pris une couleur verte foncée. d) Cette chaux étant réduite, a donné un régule attirable à l'aimant : mais refondu avec de la chaux & du borax , il ne lui a plus obéit, & a laifé une fcorie d’un bleu foncé. e) Après avoir fufhfamment calciné ce régule , j'y ai ajouté, SUR L'HIST. NATURELLE ET LES ARTS. 183 pendant dix heures (1) , de la poudre de charbon, qui a fair dif fiper beaucoup d’arfenic, & il eft refté une poudre ferruginceufe un peu verte. } f) Sa réduétion avec le flux noir, la chaux & le borax, à fourni des fcories colorées en partie par le fer, en partie par le nickel. Le régule éroir blanchâtre & s’atrachoit fortement à l'aimane, g) J'y ai enfuite ajouté, pendant quatorze heures ; du phlogif- tique dans des capfules chauffées à rougir , fans appercevoir aucune fumée ni odeur d’arfenic, La mafle , loin de perdre de fon poids, augmenta d'+, & la chaux métallique verdoyoir à peine. h) Après à réduction , le régule éroit à-demi dudtile, & attirable à l’aimant. i) Fondu avec de la chaux & du borax ; & uni enfuite avec celui dont nous parlions au $. précédent, expérience 0, il donna un régule blanchâtre, fémi-duélile, recouvert d'une chaux verte, & de, fcoriés couleur d’hyacinche. &) Ayant combiné ce régule avec du foufre , par le moyen de la fufon, j'en pris la moitié, imparfaitement calcinée, que je fon- dis avec une portion crue. Ce nickel fulphuré donna, après fa calcinarion , & par fa réduction avec le double de flux noir , un régule attirable à l'aimant, & prefque aufñli réfractaire au feu que le fer de forge. L'érroite affinité qui règne entre le foufre & ce demi - méral, me fit efpérer que le minéralifant, n'étant pas en quantité fufhifante pour faturer le fer & le nickel , abandonneroit celui-ci pour fe joindre au premier, qui, fe trouvant par-là réduit en fcories, fe fépareroit facilement du nickel. Le $. qui fuit, nous apprendra la valeur de certe conjecture. $. V. a) 800 parties du régule de M. Cronfledt ( $. II), fon- dues avec du foufre & un peu de borax, donnèrent une minérali- facion d’un rouge jaunâtre , pefant 1700. b) La moitié de cette minéralifarion, expofée dans une capfule à un feu gradué, commença par noircir; enfuire elle poulla des végérations. La chaux métallique reftante pefoit 652 parties. c) Certe chaux , fondue avec l’autre moitié non calcinée & un peu de borax, donna un régule fulphuré, d’un blanc jaunâtre , pe- fant 1102. d) Le même régule , calciné pendant quatre heures , fe recouvrit d’abord de végétarion; après quoi, y ajoutant de la poudre de char- (1) Si on continue à en ajouter davantage, les arômes régalins fe réuniffens facilement, 194 : OPS ERVATIONS SUR\LA: PHYSIQUE; bon ; il répandir long-tems une odeur d’arfenic. Sa chaux métal- lique verdoyoit légèrement, & pefoit 1038. e) Après la réduction, le régule parut d'un blanc jaune, pefant 594 ; Jemi-duétile, tès-artirable à l’aimant, & fort réfractaire. f) Fondu de nouveau avec du foufre, il fe trouva pefer 816 ; dont la moirié calcinée jufqu'à ce qu’elle verdîit, puis unie, par le fecours du feu, avec l’autre partie encore fulphurée, & pefant alors $09, obéifloit à peine à l’aimant. Après quatre heures de calcination, pendant laquelle il s’exhala beaucoup d’arfenic par l'intermède du phlosiftique , la poudre acquit une couleur cendrée, peu verte, du poids de 569. Cette poudre étant réduite, fournit un régule rouge à la furface, d’un blanc cendré dans la caflure, très-fragile , égal à 452, & pefant fpécifiquement 7,1730. g) Ce régule, minéralifé, pour la troifième fois, avec du foufre, far traité comme ci-devanr. Sur la fin, on y ajouta de la poudre de charbon, jufqu’à ce qu'il ne parût plus aucun veftige d’arfenic, ce qui exigea une violente calcination de douze heures. La poudre reltante peloit 364, & étroit d’une couleur cendrée verdâtre. Le té gule qui en provint, après une réduétion qui dura trois-quarts- d'heure ;. dans un fourneau de forge où j'entretenois un très- grand feu , étoir.fi réfractaire, qu'il s'étoit aggrégé impatfaitement entre les fcories couleur d’hyacinthe , & ne put mème fe réduire en glo- bule à ce degré de chaleur, par l'addition du borax. Sa gravité abfolue étoit 1803 fa gravité fpécifique , 8,6666 ; il adhéroit for- tement à l’aimant, à toute forte de fer ; fes parties s’attiroient mutuellement; il étoit d’ailleurs fi ductile, que d’un globule, qui avoir au-plus une ligne de diamètre, on pouvoit forger une lame de plus de trois lignes de largeur. Sa couleur étoit d'un blanc rouscâtre, & fa fracture tenace ; fa diffolution , dans l’alkali vo- latil, bleue; & celle dans l'acide nitreux, d'un verd foncé. Cent parties de ce régule, réduites en lamines à coups de marteau , après une calcination de quatre heures, fe recouvrirent d'une efpèce de croûte martiale, fous laquelle étoient une poudre verte , & inté- rieurement un noyau compofé d’atômes régulins, qui n’avoient fabi aucun changement : le poids avoit augmenté de $. Cette ma- tière pulvérifée prit une couleur d’un brun verdâtre ; & après une nouvelle calcination de quatre heures, elle forma une croûte fra- gile, noitâtre, adhérente au fond du vaiffeau, très-attirable à l’ai- mant, & pefant 100. Cette croûte, réduite en poudre, ayant été torréfiée pendant trois heures avec de la pouflière de charbon , ne manifefta aucun veflige d’arfenic, & conferva fa vertu magnétique: elle pefoir alors 10$, & avoit peu changé de couleur. Tenue en fuñon, pendant une heure, avec la chaux & le borax, elle donna un E A > ol SUR L'HIST. NATURELLE ETLES ARTS. 2%; un régule pefant 72, qui étoit rougeâtre , angulaire , femi-duétile, adhérent à l'aimant par toutes fes parties, & dont la gravité fpé- cifique fut 8,8750. Le mème globule, diflous dans l’eau - régale , en fur précipité par le vitriol de Mars, comme s’il eût contenu de l'or: mais le dépôt étoit fi foluble dans l’acide nitreux , qu'il ne fourint pas le caractère de ce précieux métal. D'ailleurs , la plu- part de mes autres régules n'offrirent aucun précipité par-certe voie, d’où l’on voir que fi le nickel contient quelquefois de l'or , il n'en eft pas toujours de même. k) Soo parries d’une mine de nickel, des environs de Gohan Georgenftadr , en Saxe, calcinées pendant quatorze heures, & dé- gagées autant qu'il fe Peut de leur arfenic , par le moyen de la poudre de charbon, perdirent, dans ce procédé, 248 de leur poids. Après l1 réduction & une première minéralifarion, faites fuivant la méthode ordinaire, le régule fulphuté, qui pefoit avant la calci- nation 238 , fe trouva pefer 242. Ayant été fulphuré une feconde fois, fon poids augmenta prefque de la même manière dans une dernière calcination, c'eft-à dire, depuis 70 jufqu'à 78 parties. Le régule qui en provint , égaloir 22, obéifloit à l’aimant, pefoir fpé- cifiquement 7,3333 ; & faifoit, avec le borax , un verte couleur d’hyacinthe. La calcination en étoir difficile; mais il fe réduifoic enfin en une poudre verdâtre, & formoit, avec l’acide nitreux, une diflolution de la même couleur. 2) Le procédé des minéralifations & des calcinations que nous venons de décrire (4), a été répété fur 100 parties de la mine de Lootz, fans qu’il en foit réfulté aucune augmentation de poids. Le régule que j'en obtins à la fin, pefoit abfolument 1, fpécif- quement environ 8,0000. IL teignoit le borax en couleur d’hya- 'cinthe jaunâtre , & l'acide nitreux en verd. $. VI. Sachant par expérience que le foie de fouphre diffolvoit plus facilement le cobolt que le nickel; de forte qu'on peut, en uelque forte, les féparer par ce moyen , je préfumai que la dif- AE d’affinité pourroit en faire autant, par rapport au fer & au nickel. a) Ayant donc fondu $S parties de régule de nickel fulphuré, ($: V, g.) avec 1800 parties de foie de foufre falin, la mafle fut diffoute dans l’eau bouillante, puis filtrée au papier gris, & pré- cipitée par un acide. Le dépôt pulvérulent. qui fe fit, rorréñié dans une capfule jufqu’à l’entière confomption du foufre, étoit cendré & pefoit 3$ parties. . b) Le réfidu, qui n’avoit pu fe diffoudre dans l’eau bouillante, ayant été dépouillé de fon foufre par la corréfaétion , étoit égale- ment cendré, & pefoit 334 parties. Tome VIII, Part. Il. 1776. O o Sur Nes ét SAR | L + Lé : PA L 136 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, c) Ce réfidu, réduit par le moyen du flux noir, donna un ré- gule fragile, d’abord peu attirable à l’aimant, à caufe de fon foufre; mais qui, étant fondu avec du borax, y adhéra plus fortement. d) Les mêmes efpérances furent tentées avec le foie de foufre calcaire. Je pris, pour cela, fuivanc la méthode de M. Baumé, parties égales de chaux de nickel , de gypfe , de colophone & de flux blanc : matières qui, fondues enfemble, donnèrent une mafle réguline, difperiée & écailleufe. Cette mafle étant fondue avec du orax , fournit un régule doué des propriétés du nickel, qui rere- noit néanmoins encore du cobolt, adhéroit à l’aimant, & ne per- dit fon fer qu'après deux diffolutions dans l'acide nitreux, diverfes réduétions, & plufeurs fufons avec le borax : elle conferva aufli opi- niatrément fon foufre, $. VII. La fupérioriré avec laquelle le nitre enlève te phlogifti- que, fit que nous y eûmes recoüis, dans l’efpoir de fcorifier par- là plus faciiement les mêlanges hétérogènes : d'autant que le nickel paroi très-long à quitter Le principe inflammable, & fort prompt à le recouvrer. ; a) Je mis dans un creufet une partie du régule de M. Cronfiede, avec douze parties de nitre en fufon, & tins le mélañge pendant une heure au même degré de chaleur. Il parut au commencement de foibles étincelles, qui venoient peut-être du foufre : enfuite la malle exhala beaucoup d’arfenic; les parois du creufec fe rapifsèrent d’une croûte bleue de cobolt, & il refta au fond une matière verte, Celle-ci, fondue de nouveau, pendant une heure, avec douze par- ties de nitre , colora en bleu les parois du vafe, & il refta au fond une malle d’un brun verdâtre, beaucoup moindre que dans l'opé- ration précédente. La matière verte , traitée également , pour la troifième fois, pen- dant deux heures, laiffa au fond une fcorie grife, qui ne donna, avec le Aux noir, aucun régule. Une autre portion de mème régule, fondue avec du nitre comme ci-devant, formoir une diffolution verte. Ayant été privée de fon alkali par le moyen de l’eau, elle ne fournit également aucun ré- gule, mais des fcories, couleur d’hyacinthe, mêlée de bleu , qui reignoient l'acide nitreux en verd , s’épaiflifloient en forme de ge- lée, & laifloient, après l’évaporation , une chaux verdâtre. b) Une nouvelle portion de régule de M. Cronfedt , fut tenue quelques heures en fufion dans un creufet avec feize parties de nitre. Par ce moyen, tout l’arfenic s’en fépara d’abord; enfuite , l'acide nitreux phlosiftiqué s'exhala en vapeurs, & les parois du vafe fe trouvèrent pénétrés de fleurs d’un bleu verdâtre. La malle, Là « LL SUR L'HIST. NATURELLE ET LES ARTS. 287 privée de fon alkali par l’intermède de l'eau, & enfuite féchée, verdoyoir légèrement, & veignoit le botax d’un bleu fombre. Elle fut encore craitée de la même manière, pendant quatre heures, avec douze parties de nitre, & donna, après l’édulcora- tion, une poudre également verte, qui, réduite avec + de flux noir, + de chaux & + de borax, fournit en demi-heure un régule d’un jaune blanc, obéiffant à l’aimant de même qu’au marteau , doué de routes les propriétés du nickel, & dont la gravité fpécifique éroit 9,0000. J'ajoutai peu de principe inflammable , afin que le fer entrât dans les fcories s’il étroit poilible. c) Une partie de la mine de Lootz, tenue une heure en fufon dans un creufer avec huit parties de nitre, fit d'abord entendre une déronnarion plus diftinéte que le régule. La chaux, féparée de la malle faline par le moyen de l'eau , étoit d’un brun ferrugi- neux, femblable a celle qui a coutume de refter , après la calcina- tion, avec la pouflière de charbon. Ayant été réduite, elle donna un régule d’un blanc cendré, tenace, artirable à l’aimant, & d’une gravité fpécifique égale à 8,5573 : les fcories étoient noires. Ce régule , mis en poudre & fondu avec douze parties de nitre, per- dit beaucoup de cobolt, donna une chaux verte qui, réduite avec le double de flux noir, une demie partie de chaux vive & de bo- rax, ne laiffa que des globules de Dcel » difperfés , tenaces & adhé- sens à l’aimant. d) Une partie du régule de M. Cronfledt , fuc tenue trois heures en fufon avec huit parties de nitre, dans un creufet dont le cou- vercle recevoir un tube de verre ouvert, ajufté de manière que la fumée qui s’élevoit, pouvoit s’y amafler. Après l'opération , je trou- vai, au haut du tube, de l’arfenic blanc, & dans le bas une pou- dre d’un brun cendré un peu verdâtre, qui teignoit le borax cou- leur d'hyacinthe, & donnoit un régule fi chargé d’arfenic , qu’il n'adhéroit pas à l’aimant. Les parois du creufer étoienr bleus, & il y avoit au fond une mafle faline qui , étant leflivée, dépofa une chaux verte, laquelle , tenue une heure en fufon avec douze parties de nitre, teignit en bleu les côtés du vafe, & laïffa un réfidu d’un cendré verdâtre, Ce réfidu ayant été fondu , pendant une heure, avec du nitre, devint en partie bleu & en partie verd; mais la partie verte feule, ayant été traitée de mème pour la qua- trième fois, avec du nitre, parut entièrement d’un bleu - célefte, quoiqu’elle fe diffolvit en verd dans l'acide nitreux, & qu’elle ren- dit le borax couleur d’hyacinthe; ce qui indique que le nickel éroic entouré d’une croûte bleue très-mince. e) Affuté, par les expériences dont on vient de rendre compte, que le nitre étoit un moyen für de découvrir les moindres traces © o 2 4 288 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, de cobolt qui reftent autrement rout-à-fait cachées, j'expofai, pen- dant quatre heures , fous la voñte d’un fourneau docimaftique, di- vers produits de nickel, diftribués dans des capfules avec du nitre. Savoir, 1°. le régule ($. IV, c.) qui étoit peu bleu; 22. le régule diflous auparavant dans l’alkali volatil ($. X, 4. ), qui manifefta alors beaucoup de cobolt, ce qu’il navoit pu faire jufques - là; 3°. le régule fulphuré auparavant , qui fe recouvroit d’une pelli- cule bleuârre ; 4°. les globules de l'expérience c, qui poufsèrent quantité de fleurs bleues ; 5°. le fublimé de l'expérience précé- dente d, qui offrit de très -égers veftiges de bleu - célefte ; 6°. une fcorie de nickel couleur d’hyacinthe, d’un beau bleu, qui contenoit pourtanc fi peu de cobolt , qu’en foufflant par un chalu- meau la lumière d’une chandelle deffus du borax qui en étoit teinr, on pouvoit le décolorer entièrement, & faire renaître fa couleur bleue , en y ajoutant une petite portion de nitre. Tel eft effedi- vement le caraëtère des chaux métalliques, qu'elles teignent d’au- tant plus vigoureufement les verres, qu'elles font plus dépouillées de phlosiftique , & qu'au contraire toute la couleur s’évanouit, dès qu’elles le recouvrent à un certain degré. Le nitre produit le pre- mier effect; la fufon fur un charbon embrâfé, peut opérer le der- nier, fi la quantité de chaux eft fi petite que le charbon puifle la faturer. $. VII. La facilité dont le fer fe fublime avec le fel ammoniac, me ft tenter d'en féparer le nickel par ce moyen, de la manière qui fuit. a) Je pris de la chaux de nickel fi dépouillée de cobolt, qu’elle ne teignoit plus abfolument le borax en bleu : je la mêlai avec le double de fel ammoniac , dans une cucurbite recouverte d’un alem- bic, & l’expofai à un feu que j'eus foin d'augmenter par degrés, jufqu’à ce que le verre rougir. Alors le fond de la cucurbite prit une couleur hyacinthe, très-foncée; fes parois fe tapiffèrent de fleurs en partie cendrées & en partie blanchâtres, mais qui ne purent s’é- lever autant que les premières. Le réfidu offrit deux couches, dont la fupérieure étoit jaune, écailleufe , brillante comme l’aurum mufivum, formoit avec le borax un verre couleur d’hyacinthe, & ne donnoit aucun régule. Après quelques jours d’expoñrion à l'air libre, elle fe liquéfa en confif- tance de beurre, & acquit une couleur verre. Le réfidu, diffous dans de l’eau bouillante, manifefta la couleur & les propriétés de la chaux de nickel. Cette diffolution étoit verdâtre , devenoit bleue avec l’alkali volatil, mais ne donnoir avec la teinture de noix de galle aucun indice de la préfence du fer; ce qui eft également vrai des féurs. n PPT 2 amet SUR L'HIST. NATURELLE ET LES ARTS. 289 La couche inférieure contenoit de la chaux de nickel qui ne s’éroit pas encore élevée en végétations, & renfermoit peu d'acide de fel. Cette couche étoit notrâtre, d’un brun ferrugineux au fond du vafe; elle formoit avec le borax un verre couleur d'hyacinthe, donnoit un régule fragile , d’un rouge blanchâtre, & actirable à peine à l’aimant. &) Une portion de cette couche, fublimée avec le double de fel ammoniac, au même degré de feu (1) que dans l'expérience «, $. VII, reignit également le fond de la cucurbite en couleur d’hya- cinthe, donna des fleurs très-blanches, & un réfidu d’un brun fer- rugineux, verdâtre autour de fa fuperfcie. c) Vingt parties de fel ammoniac , ajoutées à la portion réduire de la couche inférieure, s’élevèrent dans la retorte fans changer de couleur. Il refta une poudre noirâtre , qui, de mème que le fond du vafe, devint verte en fe calcinant, & couleur d'hyacinthe par la fcorification. d) Je mélai à cette poudre le double de fel ammoniac, qui fe fublima de nouveau fous une forme très-blanche, laiffant un rélidu verdâtre, d’un brun ferrugineux dans le fond. e) La fublimation, réitérée fur ce réfidu avec le ‘double de fel ammoniac, donna des fleurs ammoniacales très-blanches , comme auparavant, & un nouveau rélidu extrèmement verd , tout-à-fair femblable à la chaux de nickel. 11 en communiquoit la couleur à l'acide nitreux, lorfqu'on venoit à l’y diffoudre, & donnoit par la réduction un régule blanchâtre, fragile , peu attirable à l'aimanr. A chaque fublimation il palfa d’abord dans le récipient de l’al- kali volaul, puis du fel ammoniac, & enfin un peu d’acide de fel. $.IX. Après tant d'expériences opérées par le fecours du feu, nous en tentâmes encore plufeurs par la voie humide. La première fe fit avec des cryftaux d’un fel compofé de nickel & d’acide nitreux, & que je nomme zickel mirré. Elle nous paroifloit un des plus sûrs moyens de féparer le fer, déja phlogiftiqué par fon menftrue. a) Ce nickel nitré, mêlé, pendant fa calcination , à de la pou- dre de charbon, exhala beaucoup d’arfenic, & fournit, par la ré- duétion , un régule gris, femi-duétile & actirable à l’aimanr. b) Celui-ci, diffous de nouveau dans l'acide nitraüx, précipité par l’alkali fixe & enfuite réduit, donna un régule caffant, qui, c) Après avoir été diffous une troifième fois, & traité comme au- paravant, redevint femi-duétile & atrirable. (1) Ce degré de feu eft auffi le même que j'employai dans les expériences (ais antes. 190 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, d) Je le foumis à une quatrième opération, e ) Et enfuite à une cinquième , qui fut incomplette, parce qu'il s'étoit réduit à fi peu de chofe, que la chaux blanchätre , obtenue par précipitation, ne put fubir de plus profondes recherches. Dans chaque diffolution , il parut un réfidu noirâtre, qui, laiflé dans l’acide , blanchifloit infenfiblement , & exhaloit, après avoir éré édulcoré & jerté fur des charbons ardens, une fumée fulfu- reufe , laiffant après elle une poudre noïrâtre, infoluble dans l’acide nitreux. $.X. Pour connoître le fuccès de l’alkali volatil cauftique dans la dépuration du nickel, je traitai de la manière fuivante une por- tion du régule de M. Cronfledt , diffoute dans l'acide du nitre, pré- cipitée par l’alkali fixe, édulcorée & enfuite féchée. a) 437 parties de cette chaux, plongées dans une quantité fura- bondante d’alkali volatil, donnèrent, au bout de 24 heures, un réfidu égal à so, d’un noir verdâtre, & une diffolution bleue, qui, filtrée & évaporée jufqu'à ficcité , laiffa une poudre d’un verd clair, pefant 282. Cette poudre, réduite avec du flux noir, fournit un ré- gule blanchâtre, femi-ductile , très-attirable à l’aimant, pefant 35 païties & d’une gravité fpécifique , égale à 7,0000. La fcorie , “quoique fpadicée , prenoit avec le borax une couleur d’hyacinthe , & contenoit une chaux de nickel dont j'obtins un régule blanc de 30 parties, qui, uni au précédent par le fecours du feu, éroic fi réfractaire , que la flamme aidée par le chalumeau ne pouvoir le fondre fur des charbons, mème par l’addition du borax. Etant cal- ciné & mêlé à de la poudre de charbon, il n’exhala aucune fumée d’arfenic ni de foufre. Sa réduction donna une fcorie couleur d’hya- cinthe, & un régule qui formoit, avec l'acide nitreux, une diffolu- tion très-verte, (1) dont l’alkali volatil précipitoit une poudre de mème couleur. b) $o parties du réfidu d’un noir verdâtre fournirent , par la ré- duétion, un réoule bianchâtre & briilant, fragile , écailleux, peu actirable, pefant 14 parties & d’une gravité fpécifique, égale à 933333 La fcorie éroit d’un bleu obfcur en-deffous, & couleur d’hyacinthe en-deffus. Le régule fondoit aifément & teignoit d’a- bord le borax en bleu , puis en couleur d’hyacinthe; après quoi, 1l éroit plus attirable à l'aimant. Il fe diffolvit, à l’aide de la chaleur, dans l'acide nitreux qu'il colora d’un très-beau verd; mais 1l refta une EEE (1) Ce régule ne fe diflolvoit pas en entier. Il formoit un réfidu en manière de flocons. | | ; has er at en ot ane à 0 à SUR L'HIST. NATURELLE ET LES ARTS, 301 oudre noirâtre infoluble , fufpendue d’abord dans la liqueur fous a forme de flocons, & qui fe précipita enfuite en blanchifiane. Cette poudre édulcorée & expofée au feu, fe diflipa, pour la plus grande partie, en répandant une odeur fulfureufe; & il ne refta au fond du vafe qu’une petite maffe de couleur brune, foluble dans laikali volatil. La folution décrite plus haut, étoit précipitée. par l'alkali phlosiftiqué fous la couleur de la chaux de nickel, & l’alkali volail ja reteignoit enfuité en bleu. On voit donc par-là que le nickel fe diffour aifément, & même en entier, dans l’alkali volatil, à moins que la préfence du foufre n'élude l’efficacité du menftrue. $. XI. A bien confidérer les expériences que nous avons rapportées, il eft clair que la parfaite purification du nickel ne peut avoir lieu par les moyens connus jufqu’ici. Le foufre s’enlève à peine par les calcinations & les diffolutions réirérées ( $. II, 2; IX & X ) : ar Jénic tient encore plus fort ( . IL, IV ), quoiqu'on vienne à bout de le chaffer, moyennant la poudre de charbon & le nitre ( $. II, n3; VII, & ): Le cobolt adhère plus opiniätrement que les deux autres; cat le nitre nous l’a fair découvrir dans quelques produits, où il ne fe manifeftoit d'aucune autre manière. Cependant ñous l'avons di- minue, par le moyen de ce fel, au point qu'on n’en appercevoit plus un veftige dans les diffolutions humides ( $. VII, 2), qu'il teignoit à peine le borax, & que la couleur qui en réfultoir, pouvoir s'éva- nouir, Ctant faturée du phlogiftique des charbons par le moyen d’un chalumeau ; preuve démonfirative d’une extrème ténuité par rapport au cobolt qui de lui-même eft très-riche en couleur (*$. VII, e). Je ne doute même pas qu'on ne puille parvenir à fe débarrafler de fes foibles reftes, d'autant que je fuis sûr que les dernières apparences de couleur bleue n’appartiennent pas au cobolt, mais au fer; (ce que nous démontrerons bientôt , ) quoiqu'il ne foit pas trop facile de les féparer. En effet, ces reftes, dégagés par le moyen du nitre, entourent toute la furface du nickel qui devient très-fpongieux dans cette opération ; ils y adhèrent fi fort , qu'on ne peut les en féparer par aucun moyen méchanique, & très-difficilement par les menftrues qui diflolventià-la-fois les deux matières. Il n’y à guères plus de reffource dans la fufion, parce que l’une & l’autre entrent enfemble dans les fcories ; de forte que fi on n’en traite une grande quantité à-la-fois , cout le nickel fe diffipe avec le cobolr. Il ne refte donc plus que Ze fer; & nous n'avons pu en diminuer la quantité au-delà d’an certain point. L’aimant en décèle aifément la préfence. Non-feulement il attire les régules traités de diverfes ma- nières ; mais encore quelques-uns acquièrent la vertu magnétique ($. V,g); ce qui eft bien digne de remarque. D'ailleurs, la té- 292 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE; naciré du nickel & la difficulté de fa fafion augmentant en raifon qu'on le traite plus long-tems , démontrent affez qu'on ne peut gueres efpérer d’en féparer le fer. En un mot, niles fcorificarions , ni le fel ammoniac, ($. VIII), ni l’acide nitreux, ($.1X), ni lalkali vo- latil, ($. X}), n’ont pu en venir à bour. Le nitre mème ( qui, fe- lon Junker, attaque d’autres fois fi puiffamment le fer, que d’une livre de limaille de ce métal , mêlée avec autant de nitre, il ne refte, après la détonnation, la fufion & les lotions , que demi-once de fafran ); le nitre, dis-je, n’y a pu réuflir ( $. VIT). Le bifmuth eft aufli quelquefois mélangé, allié au nickel; mais il s’en fépare aifément, fi on étend d’une fufffante quantité d’eau les acides qui le diffolvent , parce que le menftrue affoibli en laifle pré- cipiter la chaux fous forme de poudre blanche. $. XI. C’eft ici le lieu de demander fe de nickel ef? une matière métal- lique particulière , ou ur mélange de quelques autres unies intimement en= femble par la main de la nature ? Nous avons dit, au commencement de ce Mémoire, que divers Auteurs regardoient l’arfenic, le cuivre, le cobolr & le fer, comme fes principes prochains; mais l’arfénic doit être hardiment exclu de ce nombre; car les expériences dont on vient de rendre compte, démontrent qu’on peut l'en chaffer entiè- rement. Je ne doute point que 4 cuivre ne fe trouve dans certaines mines de nickel, & conféquemment qu'il n’en fouille le régule ; mais la plupart n’en contiennent pas du tout. Il eft encore vrai que le nickel fe diflour totalement dans l’alkali volaril, & cela fous une couleur bleue ($. X, 8.) : mais fi cette objettion étoit folide, il ne feroit que du pur cuivre, & montreroic des phénomènes bien différens de ceux du nickel ; quoique l’alkali volatil les diffolve fous une même couleur, cela ne prouve pas plus leur identité, que la folution jaune de l'or & du fer dans l’eau-régale , n'en prouve une entre ces derniers métaux. Le nickel & le cuivre ont encore de commun d'être précipités des acides & de l’alkali volatil par le fer; mais il y a une grande différence dans la manière. Si on plonge un fer net dans une fo-. lution de nickel, ce dernier le tapille infenfiblement d’une pelli- cule jaunâtre, qui s’enlève au toucher, & noircit enfuite , fi l'acide n'a pas été bien faruré ou étendu d’une fufhfante quantité d'eau. Il arrive , au bout de demi-heure, un femblable précipité , fi on emploie du zinc au lieu de fer: mais dans une diflolurion de cuivre , délayée au point que le précipité qui fe fait fur le fer reffemble , en quelque forte, à celui de nickel, le zinc fe recouvre à l'inftanc d’une écorce couleur de léton, Les * SUR L’HIST. NATURELLE ET LES ARTS. 293 Les expériences rapportées plus haut ($. X; XII, k.) , démon- trent affez que le cobolt n'appartient pas à l’effence du nickel. Il ne refte donc plus que Ze fér, & il eft certain que nous avons une foule de raifons affez folides de croire que le nickel, le co- bolt, & la pierre d'aimant , ou le régule de la pierre d’aimant noire, font autant de modifications de ce métal. D'abord , on fait en général que les qualités du fer varient fin- gulièrement en raifon des différentes quantités de phlogiftique qu’il contient. Quelle multitude d’efpèces de fer & d'acier n’y at-il pas ? N'oublions point aufli que les demi-méraux en queftion, de quel- que manière qu’on les traite, non-feulement ne fe dépouillent pas de tout leur fer, mais qu'ils deviennent encore plus duétiles, plus attirables à l’aimant, & plus réfraétaires. Enfin, le fer offre les di- verfes couleurs que ces trois demi-méraux acquièrent , foit par la voie sèche , foit par la voie humide. Le cobolt & la pierre d’aimant pré- fentent une couleur rouge dans les acides : la pierre d’aimant la mon- tre même dans les verres. Le nickel & la pierre d’aimant , fondus avec le borax, donnent une couleur d’hyacinthe. On en obtient une verte du nickel diffout dans les acides, de fa chaux, de la pierre d’aimant noire long-tems & fortement calcinée , & aufli des fcories de cette dernière , fi on la réduit avec du flux blanc. Enfin, le cobolt manifefte dans le verre une teinte bleue, ou plutôt vio- lette ; la pierre d’aimant en donne une femblable dans l’alkali fixe, & le nickel en fair aurant dans l’alkali volaril. Le fer offre toutes ces mêmes variétés. Diffout dans les acides, il leur communique une couleur verte, qui dure tant que le mé- tal conferve une certaine quantité de phlogiftique ; au lieu qu'ils jauniflenc , rougiflent ou deviennent. d’un brun rouffâtre à mefure qu’elle diminue. Il teint-également les verres en verd, en jaune, en noir ou en rouge. Si on le calcine pendant plufeurs heures avec du nitre, le fond & les parois du creufet fe tapiffenc de fleurs falines vertes, bleues, d’un verd bleu & pourprées, felon le cas. Cette efflorefcence colore à peine l’eau, &, de même que le fer, communique aux verres une verdure qui s’évanouit par le refroidif- fement ; d’où l’on voit que celle que nous chafsimes du nickel, par le moyen du nitre, étoit, pour la plus grande partie, produite par du fer. C’eft ce dernier métal qui colore en verd les Pierres néphrériques , les fineétiles, les ferpentines , les jafpes, les argilles dites serres vertes , & autres de même couleur : c’eft lui qui teint les pierres d'azur , les bleus naturels de Berlin & autres fembla- bles ; enfin, plufieurs variétés de jaune & de ronge. Quiconque pefera attentivement ces raifons, admettra, fans peine, que les demi-méraux, qui ne peuvent être privés entièrement de Tome VIII, Part. II. 1776. P p 294 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, fer, proviennent de ce métal, & s’efforcera d’étayer cette conjec- ture par des expériences & des obfervations nouvelles. Mais comme perfonne n’en a encore compofé de pareils avec du fer pur, ni indiqué les moyens de faire , à volonté, de la pierre d’aimant, du cobolt ou du nickel, les foupçons vagues doivent céder aux phénomènes & aux qualités conftantes , pour qu'on puifle enfin par- venir à des idées claires & précifes fur l’origine de ces matières. Car, de fubftituer des conjectures vraifemblables à des faits fuffi- famment prouvés par des expériences, c’eft prendre l'ombre pour le corps, embraffer une nue en place de Junon. Les expériences fynchétiques que j'ai faites, ne m'ont point ap- pris l’origine du nickel, & ont été conféquemment inutiles à cet égard : néanmoins, pour applanir la carrière à d’autres, j'en vais rapporter les principales. Les gravités fpécifiques du cuivre , du fer, du cobolt & de l’arfenic blanc, que j'ai traités, éroient à celle de leau diftillée, comme 9,3243 ; 8,3678 ; 81500, & 4,0000. a) Parties égales de cuivre & de fer, fondus enfemble avec du Aux noir, donnèrent une mafle rougeâtre, pefant fpécifique- ment 8,$441 , qui colora l'acide nitreux d’abord en blanc, puis en verd, puis en jaune, & enfin en brun opaque. B) Deux parties de cuivre & une de fer, unies enfemble , pe- foient fpécifiquement 8,4634, & coloroient le menftrue d’abord en bleu , enfuite en verd. c) Parties égales de cuivre, de fer & de cobolt, fournirent un régule d’une pefanteur fpécifique ; égale à 8,0500, & qui fe dif- folvoit fous une couleur brune. d) Une portion de cuivre , autant de fer, & deux d’arfenic, donnèrent un mêlange fragile, pefant fpécifiquement 8,0468 , qui formoit une diflolution bleue. e) Une partie de cuivre, une de fer, deux de cobolt, & autant d’arfenic blanc, formèrent une compofition fragile , pefant fpécifi- quement 8,4186, qui teignoit fon menftrue en brun roufsâtre, & s’en précipitoit, d'elle-même. f) Une potion de cuivre, autant de fer, quatre de cobolt & deux d’arfenic blanc, pefoient fpécifiquement 8,5714 ; le régule fe comporta de même relativement à l'acide nitreux, hors qu’il rouf- Toit davantage. Une partie de cuivre , deux de fer, quatre de cobolr & deux d’arfenic blanc, jouifloient d'une gravité fpécifique , égale à 8,2941 , fe diflolvoient fous une couleur rouffe , & laifsèrent pré- cipiter un fédiment. k) Une partie de fer & quatre d’arfenic blanc, fondues enfem- SUR L’HIST. NATURELLE ET LES ARTS. 195 ble, donnèrent une diffolution jaune, dont l’alkali phlogiftiqué pré- cipita du bleu-de-Pruffe. Tous ces mélanges expofés au feu, laifsèrent une chaux qui n’é- toit pas verte comme celle du nickel, mais brune, noire ou fer- rugineufe. 2) Une partie de cuivre, huit de fer , feize d’arfenic blanc, & quatre de foufre, unies par le moyen du feu , donnèrent, avec le Aux noir, une maffe qui, après plufeurs calcinations & réduc- tions, fournit conftimment une chaux ferrugineufe, ou brune, co- lora l'acide nitreux en verd, & laiffa précipicer du bleu-de-Pruffe par fon mêlange à de l’alkali phlogiftiqué. k) Nous tenrâmes aufli, par la voie humide , plufieurs expé- riences, dont il fuffit de rapporter une feule. Une partie de fer, une de cuivre, & une de mine de cobolt calcinée , furent diffou- tes féparément , chacune dans fix parties d'acide nitreux. Je mêlai toute la diflolurion de fer avec cinq parties de celle de cuivre, d’où réfülta un verd fombre de nickel, que trois parties de la dif- folution de cobolt obfcurcirent fenfiblement. Y ayant verfé une lefive alkaline, il fe précipita d’abord un dépôt d’un brun ferru- gineux , fans que la diflolution perdit fa couleur verte; mais le pré- cipité continuant à fe faire en bleu , elle en fut totalement pri- vée, & en acquit une rouffe par la folution du cobolt dans l’alkali. Le dépôt, ayant été réduit, donna un régule femblable à du cuivre, qui étoit ductile, & coloroit en bleu l'acide nitreux & le verre. Lorfqu'on mêle deux parties de diffolution faturée de nickel, à une partie de diffolution de cobolt , la couleur verte s'obfcurcit beaucoup , & elle s'efface rotalement fi le mélange fe fait à quatre parties du premier, fur trois du fecond. $. XIV. Nous n'avons pu déterminer exactement la nature du nickel , parce que le fer qu’il confetve toujours , en confond, juf- qu'à un certain point , les propriétés. a) Sa gravité fpécifique ne s’eftime qu'impatfaitement, fur-tout lorfque la quantité de fer qu’il contient eft inconnue. Suppofons ue du nickel, auffi pur qu'il fe puilfe , contienne un poids de 2e —p, & un poids de vrai nickel — g: eftimons en même-tems la gravité Gécrbque du premier ingrédient —f, celle du dernier 2, & celle du mêlange — 2; nous aurons, fuivant les règles agf Pf+gqf—ap. le fer augmente plus de poids par la calcination qu'aucun autre mé- tal. Cette augmentation monte à €. Ainfi, la chaux du nickel ets F à 100*° x RS purifié, ayant augmenté d'£, ( &. IV, g.) fi on rapporte la moitié de cette augmentation à la portion de nickel, il faut de nécef- P p 2 de l’hydroftatique , 7 — Maintenant nous favons que 296 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, fité en afligner autant à la partie martiale; & en déduifant fa moitié de l'augmentation , comme provenant de la poudre de char- bon, il refté toujours démontré par ce qui refte, que le. fer com- pofe plus d’un tiers du régule. Soir donc p=—1; f— 8,000 ;,a — 9,000 ($. VII, 2.):q fera —2, & 7 — 9,600. Les élémens de ce calcul ont été difpofés de manière que 7 s’eft trouvé eftimée au-deflous de fa valeur réelle, parce que l’augmentation du nickel a été fuppofée égale à celle du fer, ce qui eft à peine probable ; que d’ailleurs la quantité du fer n'eft cenfée que d'un tiers, quoi- que d’après la fuppoñition elle foit plus grande; & qu’enfin on prète + de l’augmentation à la poudre de charbon , que toutes les expériences démontrent n’ajouter rien à la pefanteur , d’où je con- clus que la gravité fpécifique du vrai nickel égale au moins 9,000. Notre calcul fuppofe, à la vérité, que les volumes fonc conftam- ment les mêmes dans le mêlange, ce qui eft rare ; mais l'erreur qui en réfulte , n'excède jamais 0,7000 , autant que nous avons pu nous en appercevoir, & peut-être convient-1l mieux , dans Le cas réfent , de l'ajouter, que de la fouftraire. S'il entroit quelque portioncule d’or dans la compoftion, il feroit facile d'expliquer par-là une fi prande pefanteur ; mais, quoiqu'il ne s'y en trouve prefque jamais, comme on l'a dit 6. Vg, nous fon- dimes néanmoins enfemble 36 parties de ce métal, 48 de fer & une de cuivre, d’où réfulra un globule pefant fpécifiquement 8,8ç57r, peu foluble dans l'acide nitreux. Ce globule, après avoir fubi deux heures l’action du menftrue, laiffa voir tout l'or féparé , ne donna, par l’alkali volatil, qu'un précipité d’un brun ferrugineux ; prit au feu les apparences du fer calciné; circonftances qui le diftinguent toutes du nickel. B) Le nickel eft foluble dans les acides. Le virriolique en attaque Ja chaux avec laquelle il forme un fel verd décaëdre, femblable à des cryftaux d’alun applatis & tronqués aux deux extrémités oppo- fées. Celui du nitre la diffout difficilement; de cetre union réfultent des ctyftaux d'un bleu- verd , figurés en mode de fpatule , & déli- quefcens. L’acide marin diffout le régule & la chaux , quoique lente- ment, & demande même pour cet effer ,. le fecours de la chaleur. L'arfénical forme avec la chaux du nickel , une mafle faline verte & concrète. L'acide du fpath fluor forme , avec certe chaux , qu'il diflouc. difficilement, des cryftaux d’un verd-clair. Le vinaigre en forme de pareils, mais fieurés en manière de fparule & très-verdsi L’acide rar tareux attaque à peine; du-moins n’offre-il pas de diffolution verte. Celui du. fucre change le régule & la chaux du nickel en une chaux blanche difficile à fe diffoudre dans l’eau. L’acide phofphorique diflouc foiblement cette chaux, avec laquelle il ne forme point de cryftaux, SUR L'HIST. NATURELLE ET LES ARTS. 297 mais une diffolution qui verdit à peine. L’acide des fourmis paroît n'attaquer ni le régule, ni la chaux, ni le nickel récemment préci- pité ; cependant il convertit enfin ce dernier en une matière faline par le fecours de la chaleur. Le fuc de citron n’a aucune action fur le nickel, non plus que Ze Jë! fédarif, vel qu'on le connoît jufqu’à ce jour. Les alkalis volatil & fixe diflolvent le nickel; le premier, fous une couleur bleue; le fecond, fous une couleur jaunâtre, mais en petite quantité ; tandis que tous les acides en reçoivent une teinte verte très-foncée. Il faur mème que cette vertu de colorer foit très- puiffante , puifque le premier régule ($. 11) offre les mêmes teintes que le plus dépuré. Ces richeffes de couleur conviennent parfaire- ment à une grande quantité de matière comprife fous un petit vo- lume. c) Le nickel eft d'autant plus difficile à fondre qu'il eft plus pur; de forte que le plus pur régule que nous avons obtenu , exige prefque le même degré de feu que le fer de forge. Il entre aifément en fu- fion avec les autres métaux ; mais la diferte de cette matière ne nous a pas permis d'examiner tous les phénomènes qui en réfultent, Ob- fervons feulement, en général, que le régule impur ne pent con- tratter aucune union avec l'argent; ce qui dépend du cobolr; puif- qu'étant dépouillé de celui-ci, il s’y mêle très- facilement à parties égales, fans en altérer beaucoup la blancheur ni la duttilité. Ce mè- lange communique au borax une couleur d’hyacinthe, lorfqu’on le fond avec lui. Le cuivre s’unit plus difficilement au nickel, avec le- quel il forme une malfe rougeñtre , duétile , qui donne un verre cou- leur. d’hyacinthe enfanglantée. Notre demi-métal, uni avec partie égale, où même avec une plus grande quantité d'étaiz, ne donne qu'un mêlange caffant; en quoi, le nickel diffère encore du cobolt, Nous n’avons pu l’amalgamer avec le mercure par le moyen de la ti- turation. Celui qui eft puriñé , fe fond avec le zinc; mais la malle eft caffante. Maintenant il pourroit paroître douteux fi le nickel doit être rangé parmi les méraux ductiles ou caffans. Le fer de forge eft prefque toujours caffant ; de forte qu'il eft crès-fingulier qu'il devienne duc- tile, lorfqu'on l’unit au nickel. Le nickel dépuré fe calcine très- difficilement à la méthode ordi- naire, fous la voûte du fourneau docimaftique. 11 n’acquiert même par cette voie, qu'une couleur brune; au lieu qu'il en prend une verte par le moyen du nitre, qui le prive mieux de fon principe inflammable. Sa chaux vitrifiée avec du borax développe une cou- leur d’hyacinche que l’aétion du feu long-tems continuée fait difpa- roître entièrement , fi elle vient d’un régule mal purifié; de forte que le verre refte fans couleur, & ne prend qu'une foible réinte 298 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, bleue par l'addition du nitre. La chaux provenant d’un régule bien purifié donne une couleur qui s'évanouit difficilement ; elle commu- nique au fel microcofmique une nuance d’hyacinthe qu'une longue fufñon fur les charbons peut affoiblir, fans pouvoir prefque l’effacer totalement. Mais en y ajoutant du nitre, elle devient violette, & reparoît hyacinthe , dès qu’on augmente la quantité du fel micro- cofmique. Si on met de la chaux de nickel jufqu’à faruration, le verre fondu femble être couleur de fang ; mais il jaunit de plus en plus, à mefure que le refroidiffement arrive. ME MO SUR UE Sur une manière de communiquer du mouvement à l'Eau d'une Baïgnoire ordinaire , & augmenter par-là les effets falubres des Bains domeftiques , en les rappro- chant à volonté de ceux d’eau courante; Par M. le Comte DE MILLFY. ke mérite d’une découverte peut fe mefurer par fon utilité, rela< tivement à la confervation des hommes, à leurs befoins, & à leur agrément, C’eft , je crois, le moyen le plus naturel d’en apprécier la jufte valeur. D'après cela les découvertes les plus fimples pourroient quelquefois avoir la prééminence fur celles qui paroïtroient d’abord aux yeux du vulgaire devoir l’emporter : mais aux yeux de la philofophie , l’utile aura conftamment la préférence fur l’agréable , & l’art de faire le pain lui paroïtra toujours plus précieux que celui de tailler le diamant. Ces réflexions m'’encouragent à mettre aujourd’hui fous les yeux de l’Académie , une invention dont la fimplicité paroîtroit peu recommandable , fi l'utilité qui pourra en réfulter ne lui donnoit quelque prix. L'invention , dont il s’agit, eft une manière de com- muniquer à volonté un mouvement à l’eau d’une baignoire, pour augmenter fon action fur la furface de la peau , & produire plus d’etfer en quelques minutes d’immerfion , qu’en plufeurs jours par la méthode ordinaire : ce qui peut non-feulement faciliter l’ufage des bains à ceux qui , par leur tempérament trop foible , ne peuvent SUR L'HIST. NATURELLE ET LES ARTS. 299 pas les foutenir affez de tems pour qu’ils faffent l'effet qu’on doit en attendre, mais encore donner les moyens aux Médecins d’in- troduire , dans une limphe viciée, les fluides qu'ils jugeront con- venables, Avant de décrire la machine dont il s’agir , je tâcherai de dé- montrer par des expériences fimples , & à portée des gens les moins inftruits , la différence d’activité, comme diflolvans, des fluides en mouvement , avec ceux qui font en repos. Certe différence eft énorme, & pour peu qu'on y réfléchifle, on feroit tenté de croire que lation de l’eau fur les folides , lorfqu’elle eft agitée, peut égaler , & peut- étre mème furpafler celle d’un feu violent. Les corps les plus com- paëts , & qui femblenc réfifter avec plus de conftance aux efforts des acides concentrés les plus forts, {e diffolvent avec facilité dans l'eau la plus pure, fi elle eft mife en mouvement, & que fa vélocité foit proportionnée à la dureté du corps qu'on veut difloudre. L'or, enfin , que tous les acides minéraux & végétaux , lorfqu’ils fons purs, ne peuvent pas attaquer , fe diffout entièrement dans l’eau diftillée, & fe réduit en fel, fuivant M. de la Garaye , pour peu qu’on le divife mécaniquement par l’action groflière d’une lime , & qu’on l'expofe enfuite à celle de l’eau , mife en mouvement par un moyen quelconque. "(Voyez la Chymie hydraulique, page 226 , édition de 1745.) Mais le mème or quife difloutavec facilité dans l’eau agitée , y demeureroit, comme on le fait , pendant des fiècles entiers , fans qu'on s'apperçüt d'aucune dégradation. | Tous les corps que la nature nous offre , fuivent la même loi, Depuis les fels jufqu’aux cailloux , depuis les terres jufqu’aux métaux, tous font attaqués par l’eau fimple fi elle eft agitée avec violence: mais fi elle eft tranquille, fon action s’anéantit, ou du moins dimi- nue fi confidérablement , qu’elle femble être réduite à zéro. Pour déterminer la différence de l’aétivité dans le mouvement ou dans le repos de ce diffolvant , qu’on pourroit peut - ètre fans erreur , regar- der, fuivant les circonftances , comme univerfel , j'ai fait plufeurs expériences , dont je ne rapporterai aujourd’hui qu’une partie , pour ne pas allonger ce Mémoire. J'ai commencé par les fels les plus diffo- lubles , jufqu’à ceux qui font réputés ne l'ère prefque pass depuis le fucre jufqu’à la félénite, depuis la félénite jufqu'’à la pierre à chaux, & enfin depuis le caillou jufqu’à l'or, tous les réfulrats m'ont prouvé que rien ne réfifte à l’action difloivante de l’eau agitée avec vio- lence. Pour en donner une idée abrégée dans ce Mémoire , & avoir les deux extrèmes , je cirerai feulement dans ce moment-ci les deux fels les plus folubles , & l'or qui eft réputé ne l'être que dans l'eau régale. 300 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, PREMIÈRE EXPÉRIENCE. Le Thermomètre étant à 7 degrés au-deffus de la glace, & le Baromètre a 27 pouces 9 lignes. . J'a1 pris deux morceaux de fucre d’égale groffeur, pefant chacun une once ; je les ai plongés en même-tems dans huit onces d’eau diftillée ; j'ai expofé un de ces morceaux à l’action de l'eau, mife en mouvement par un moufloir , & il s’eft diffous parfaitement en deux minutes 4$ fecondes. L'autre, qui étoit dans l’eau tranquille, a été uñe demi-heure fans pouvoir s’y diffoudre parfaitement ; car, après 30 minutes , j'ai décanté la liqueur , & j'ai trouvé au fond du vafe 6o grains de fucre qui n’étoient point attaqués. Il faut 12 heures pour une entière diffolution. SE C'O'N:DIEMLE XP. É RME IN CNE! Le Thermomètre & Les Baromètres comme ci - deffus. J'ar pris enfuite deux demi-onces de fel marin très pur , je les ai mifes dans deux vafes contenant fix onces d’eau diftillée ; j'ai agité l'eau d’un de ces vafes, & il s’eft diflous en 55 fecondes. Celui qui étoit dans l’eau tranquille, y eft refté pendant trente-fepr heures, fans que la diffolution füt complete. L'or fe diffout par le même moyen , fuivant M. de la Garaye , au point de palfer par un filtre compofé de deux doubles de papier. (Chymie hydraulique, pag. 227.) J'ai expofé plufieurs efpèces de terres & de pierres à l’action de l’eau agitée par une machine faite exprès , & routes s’y font dif- foutes en plus ou moins grande quantité, fuivant la violence du mouvement, & la quantité des terres. Mais je ne parlerai pas dans ce moment-ci des différentes expériences qui feront peut - être un jour l’objet de quelqu’autre Mémoire : je paflerai fur-le-champ à l’application que j'ai faite de la propriété diffolvante de l’eau agitée aux bains domeftiques qui ont été imaginés pour fuppléer aux bains de rivière , dont l’ufage eft de toute antiquité. Car lEcriture nous apprend que la fille de Pharaon fe baignoit dans le Nil, & Homère ne donne pas d’autres bains à la Princefle Nauficaa, qu'il fait baigner dans un fleuve. La plus grande partie des Peuples de la terre en ont fait un principe de Religion , & plus les climats font chauds, & plus cet ufage a été confacré, parce que effectivement les bains utiles dans toutes les parties de l'Univers, qui SUR L'HIST: NATURELLE ET LES ARTS. or nivers, qui font habitées par des hommes, font indifpenfables dans les climats brülans , foit pour réparer la perte du fluide Iymphati- que, foit pour défobitruer les pores exhalans dont l'orifice exré- rieur fe boucheroit à la longue par la concrétion des fels volarils qui s'exhalenc & fe diflipent fans cefle par la tranfpiration infenf- ble qui eft néceffairement plus abondante dans les pays expofés à l'ardeur du foleil , que dans les climats tempérés, ou fous les zones glacées du Nord; dans ceux-ci, on y fait ufage des bains de vapeur d'une chaleur étonnante-(1); dans les autres climats, on fe baigne de préférence dans les eaux courantes (2), & cela doit être pour produire le même effet; & voici comment. Dans les pays chauds, les fels, dont la fueur eft impregnée , comme on peut s’en convaincre par l'impreflion falée que cette liqueur animale laife fur la langue, étant privés promptement , par la’chaleur exceflive de l'air , de l'humidité qui les tenoit en diffolution & facilitoit leur fortie , doivent néceflairement fe con- créter à la fuperficie de la peau , ainfi que dans l'extérieur des pores , & en boucher Porifice, d'où il doit s’enfuivre une réper- cution des humeurs furabondantes, dont la nature tâche fans celle de fe défaire par la tranfpiration infenfible. Les bains fonc donc néceffaires pour difloudre ces fels obftruans, & débarraffer les po- res; mais plus l’eau fera agitée, & plus l'effet fera prompt. Donc les eaux courantes feront meilleures que celles qui font en repos. Le froid excelif du Nord produit les mêmes inconvéniens que la grande chaleur : il condenfe ces mêmes fels & refferre les po- res , d'où il réfulrera les mèmes effers, fi l’inftin naturel des hommes, plus für , en bien des circonftances, que leur raifon, ne leur infpiroit toujours ce qui eft le plus propre à leur confervation. Auf, les bains de vapeurs, pratiqués chez les Rufles, ouvrent les pores refferrés par le froid, diffolvent les fels, par leur humidité, excitent une tranfpiration forcée par leur chaleur , qui poulfe en dehors les matières falines qui obftruoient les canaux de Ja tranf- piration , & produifent précifément le mème effet que les bains de rivière fur les habitans des bords du Gange. Nous avons démontré avec quelle facilité l’eau fimple aidée du mouvement, diffour & pénètre les corps les plus compaéks , & d’a- près cela il eft aifé de juger de l'effet qu’elle doit produire pour défobftruer les pores, débarraffer les canaux de la tranfpiration , (1) Voyez le Voyage de Ruflie, par M. l'Abbé de Chap. (2) Les habitans des bords du Gange croient fe purifier de toutes Jes impu getés de l'ame & du corps, en fe baignant dans le fleuve, Tome VIII, Part. II. 1776. Q q Li 302 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, dégager les mufcles des matières coagulées qui les gènent, & occa- fionnent des douleurs. Que ne feroit-ce pas fi un Médecin habile animoit cette eau par quelque principe actif, pénétrant & propre À combattre la maladie qu'il veut détruire ? Mais ceci n’eft pas de ma compérence; je ne prétends qu’indi- quer l'avantage qu'on pourroit tirer d’une machine propre à intro- duire dans le corps humain , par toute la furface de la peau , les fluides qu’on jugera néceffaires; ou tout-au-moins fe procurer, fans {ortir de fa chambre , un bain d’eau courante , dont la vitefle peut être plus grande , fi on le défire, que celle du fleuve le plus ra- pide. Il ne s’agit, pour cela, que de faire conftruire une des deux machines dont les plans font ci-joints , & par le moyen defquelles on pourra augmenter la vélocité du mouvement de l'eau à volonté, en tournant plus où moins vire. Ces machines font peu coûreufes, & peuvent s'adapter à toutes fortes de baignoires, fans occafionner aucune dépenfe nouvelle, que celle de leur conftruction. Il eft à remarquer feulement que d’après ce qui vient d’être dit dans ce Mémoire, fur la propriété diffolvante que l'eau acquiert par le mouvement , il eft néceflaire de ne pas fe fervir indifféremment de toutes fortes de matières pour conftruire les baïgnoires ; car la diffolution qui s’enfuivroit, pourroit produire des effets relatifs aux propriétés dangereufes ou falubres de la matière dont la baignoire feroit conftruite. La plus fimple, le meilleur marché, & en mème-tems la plus faine , eft une baignoire de bois. Voyez la figure 3. PE EXPLICATION DE LA PLANCHE PREMIÈRE. Fisure PREMIÈRE. Une Baignoire de cuivre, montée fur fes pieds en bois fculptés, avec la machine à mouvoir l’eau , dont on ne voit que la manivelle D. A, corps de la Baignoire. B, planche de bois qui eft une portion de couvercle , à laquelle le mouliner, figure $, eft adapté. e, eft le trou par où pañle le pivot du moulinet. d, eft la manivelle qui fait mouvoir le mouliner. e, eft une boule de bois mobile au bout de la manivelle , pour faciliter le mouvement du trourneur. m,m,m,m;, font quatre gonds pour recevoir les crochets 7,#; qui fixent la planche B à la Baignoire A. SUR L’HIST. NATURELLE ET LES ARTS. 530% Ficure I1..eft la coupe de la même Baignoire À , figure première , où l’on peut voir la figure & la difpolñtion du mouliner, a, le corps de la Baignoire. d,la manivelle. e, bouton mobile qui termine la manivelle. f, aîles du mouliner. 1,1, deux montans qui entrent dans la planche B, figure pre- mière & figure 4, & qui y font fixés en O par deux clavettes z, x Ces deux montans s'adaptent à la LRU (P. fig. 9), par les deux mortaifes i,5, fig. 9, & y font fixés par les deux avettes k,k, fig. 9. m,m, les gonds. 0,0, mortaifes pour recevoir les deux montans /, L. 4, pivot du moulinet qui tourne fur fon boulon p, lequel bou- lon entre dans la traverfe (W. fig. 9 ), dans le trou 4. Z &» clavettes. Ficure III. Baignoire de bois, reliée en fer. z,n, crochets de fer pour fixer la planche B, fig. 4 & fig. 6. Ficure IV. Planche qui fert de couvercle à la Baignoire A , figure première , & à laquelle le moulinet de la figure $ eft adapté. c, trou par où pafle le pivor 3 du moulinet, fig. 5. m;m;, M, M, Quatre gonds pour recevoir les crochets 7, #, figure première. 0,0 mortaifes où entrent les deux montans , fig. 10. Ficure V. Moulinet avec fes quatre aîles. f, les aîles du moulinet faites en chène ou autres bois durs. P, boulon qui termine le pivot , ou axe du moulinet. g, le même pivot, ou axe du mouliner. r , quarré à la partie fupérieure du moulinet, pour recevoir la manivelle d qui s’y fixe par la cheville g. e, boule de bois mobile qui termine la manivelle d. Ficure VI. La même planche que la figure 4, deftinée à s’adaprer à la Baignoire de bois , à 3. Le détail de la figure 4 fer- vira à la figure 6. Ficure VII. Planche en bois pour fervir de couvercle à la Baignoire de bois, figure 3. J, échancrure pour paffer la tère de celui qui fe baigne. Ficure VIII. Le mème couvercle pour la Baignoire de cuivre, figure première. Ficure IX. Traverfe pour recevoir le moulinet, figure $ , qui eft foutenue par les deux montans, figure 10. 1,1, tenons qui entrent dans les mortaifes /,/, des montans, figure 10. Qaq2 / 304 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, k, trou pour recevoir le boulon P du mouliner, figure $. k,E, deux clavertes pour fixer la traverfe x aux deux mon- tans. Ficure X. Deux montans qui s'adaptent en 0,0, fig. 4 & fig. 6, & ené,i, de la traverfe #, fig. 9. EXPLICATION DE LA PLANCHE DEUXIÈME. Ficure PREMIÈRE. B, Baignoire de bois avec des cercles de fer; & fon élévation vue fur fa longueur. 1,2, 3, vis dont les extrémités entrent dans les écrous 4,$,6, pour ferrer les cercles de fer 0,0,0. Ficure Il. C, intérieur de la Baignoire. D,D, plan de deux corps de pompes foulantes. E, pilaftre pour recevoir en g le levier H, figure 4. Ficure III. Piltons qui foulent l’eau dans les deux corps ff, Ggnar Ficure IV. Coupe de la machine vue fur la largeur de la Bai- gnoire. .g» pilaftre dans lequel le lévier H joue pour faire mouvoir les deux piftons f, f. f,f, deux piftons. i,i, levier qui meut les deux piftons , f, des deux corps de pompe k, &. * k,k, deux corps de pompes foulantes. L, une efpèce de vanne qui fe meurt par le levier H. Ficure V. Coupe de la Baignoire fur fa longueur qui life voir les corps de pompe A. A, corps de pompe vue de côté. m, tuyau qui conduit l’eau jailliffante plus près de celui qui fe baigne. #, trou percé dans le tuyau d’où l’eau jaillit. N°. 2, trou quarré par où l’eau entre dans le corps de pompe, dojo, of die De fs HR = ÉRS S SUR L’HIST. NATURELLE ET LES ARTS. 3e$ $ JS OUMAEMENNTE PENSE ME M) OÙ TRUE. S DE M. L'ABBÉ DICQUEMARE, Pour fervir à l’Hifloire des Anémones de Mer. Mémoire fur la génération de la quatrième efpèce. Abus: avoir expofé, dans un fecond Mémoire pour fervir à l’hiftoire des Anémones de mer, mes découvertes fur la manière dont celles de la quatrième efpèce fe multiplient ; après avoir donné quelques conjeétures fur l’organifation intérieure des perits lam- beaux qui deviennent anémones, je ne diffimulai pas qu'on ne de- voit point y reftraindre fes idées ; ce qui fe pafloit fous mes yeux, me perfuadoit de plus en plus, & je m'en expliquai, que les moin- dres parties d’un être vivant ont une organifation qui furpalle in- finiment l'idée que nous pouvons nous en faire; que l'énorme pe- titefle de ces parties la dérobe aux regards les plus avides, & que, loin de s'étonner des effets finguliers de reproduétion, on de- voit, pour ainfi dire , les attendre & fe mettre à portée de les failir : c'eft dans cette vue que j'ai continué mes obfervations & mes expériences ; elles ont confirmé les découvertes que j'avois faites, & me procurent la fatisfation de juftifier les hommes :il- luftres qui, en nous faifant connoître la multiplication des polypes d'eau-douce par la fection , ont éprouvé les conttadiétions les moins méritées. De tous les objets que la nature offre à l’efprit méditatif, il n'en eft point de plus grand , de plus refpéétable que celui de la génération des êtres, & fur-tout des êtres animés; c’eft aufli vers cette merveille que les Philofophes les plus diftingués ont dirigé leurs regards. Avec quelle avidité n’auroient-ils pas faifi l’occafon d’être témoins de ce qui fe paffe dans la première organifation des fœtus, dans le premier développement des plantes ? Quelle eût été leur furprife & leur vénération , en appercevant les premières évolutions qui s’opèrent ? Cependant il eft à craindre que Le terme 306 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, ne fe fût encore éloigné, & n’eût laiflé fublifter le myftère ; des circonftances, l’opacité & la ténuité des objets , leur éloignement de l'œil, la foibleffe de cet organe , l’imperfeétion des inftrumens d'optique, s’y four d'ailleurs conflamment oppofés : tant d’obftacles n'ont fait qu'augmenter la fagacité. Il étroit réfervé à notre fiècle de fourenir nos efpérances , en faifant paroître fur la fcène des êtres jufque-la ignorés où mal connus ; des animaux formés fur un mo- dèle abfolument différent des autres, qui nous permet d'étendre nos idées, nos plans, nos fyftèmes, & nous procure ainfi un noa- veau point de vue, d’où nous pouvons , fous un afpect non moins avantageux, confidérer de plus près les opérations de la nature. Dès qu'on publia qu’en coupant tel animal par morceaux, on le mul- tiplioit, quelques Savans apperçurent dans ces découvertes une lu- mière naiflante qui alloit éclairer des régions jufques - là enfévelies fous le voile le plus ténébreux ; plufeurs, un peu crop tôt, effayè- rent de lever ce voile, tandis que d’autres , trop foibles ou trop timides , craignant d’être obligés de revenir fur leurs anciennes idées , effrayés d’ailleurs par la ténuité des objets , s’efforcèrent de douter & doutent peut-être encore. Si je n'avois à préfenter ici que les mèmes découvertes, quoi- que ce fût multiplier les preuves, je laïfferois à la Nature le foin de fixer l'opinion; mais dans ce champ fertile , jai été affez heu- reux pour recueillir quelques fruits à l’écarr , & qui n’avoient échappé aux resards des autres que parce qu'ils éroient occupés de récoltes plus abondantes; j'ai vu la fingularité s’augmenter , & le nombre, comme l'étendue des objets, m'a paru propre à difliper les doutes. Je ne rappellerai pas ici ce que j'ai dit de la reproduétion de la partie fupérieure des anémones de la quatrième efpèce , fouvene plus groffes que le bras; de nouvelles expériences l’ont encore con- fiimée, & ont fait voir la poflibilité de celle des polypes d’eau- douce, fans avoir befoin de recourir à une multitude d’animaux imperceptibles : mais qu’il me foit permis de retracer ici , en peu de mots, ce que j'ai déja publié fur la génération de cette efpèce, autrement il feroit difficile de faifir ce que j'ai apperçu depuis (1). Ces anémones ayant la bafe inégalement étendue & fortement at- tachée fur un corps dur, fe retirent fur elles-mêmes , & laifflenc ainfi, en fe déchirant, une ou plufieurs portions très-perites de leur bafe, recouverte d’une parcelle de leur robe , qui deviennent , en (:) Il eft inévitable de revenir fur certains objets , lorfqu'on publie par partie des découvertes qui forment une chaîne dont on n'apperçoït pas encore le bout, À | | SUR L'HIST. NATURELLE ET LES ARTS. 307 peu de tems ? de petites anémones , ce qui à lieu aufli par des fections violentes. En obfervant de nouveau ces animaux, & après avoir attendu long-tems, j'ai eu la farisfaétion de voir fe répéter certe opération fingulière , & je l’ai fuivie d’aufli-près qu’il m'a été poffble. Le 26 Oftobre 177$, une anémone .fur laquelle j'avois tenté une expérience qui n’a rien de commun avec notre objer préfenr, laiffa contre les parois du vafe , en fe retirant, un petit lambeau que je foupçonnai , dès le commencement, deftiné à devenir une petite anémone , non qu'il fût épais ou qu'il me parût contenir quelque bulbe, mais parce que l’anémone s’étoit fort allongée par ce point de fa bafe, depuis plufeurs jours, d’une manière toute particulière. On appercevoit dans l’intérieur certaines fibres ou rayons qui , dans l’anémone , avoient tendu de la circonférence au centre, & comme ce lambeau étroit un fegment irrégulier de l'aire du cer- cle que forme la bafe d’une grande anémone , on comprend que ces fibres ou rayons, un peu diftans l’un de Flautre à l'arc de ce fegment , ne convergeoient pas affez pour former un centre à la corde, & que le point de réunion de ces rayons, éroit le centre d’un cercle égal à celui que formoit la bafe de l’anémone. Woyez les figures Jix & Jipt, PL 2. Dans l'une , il eft de grandeur naturelle, & dans l’autre, vü à la loupe. Pendant les premiers jours, cette pe- tite portion prenoit de l’épaifleur , fe recourboit & s’arrondifloit peu-à peu; elle tendoit de toutes fes forces à prendre la forme où elle parvint le 25, c’eft-à-dire , que petit-a-petit les fibres éranc devenues plus convergentes , la corde de l'arc de cercle, plus courte, l'arc, une portion d’un plus petit cercle , il s’écoir formé un centre de réunion de ces rayons qui occupoit les côtés de ce petit corps animé , comme le repréfente la figure 8 qui eft vue à la loupe ; quant au profil, il eft repréfenté par la figure 9, ou par un feo- ment de fphère. Le 30, j'apperçus des contraétions & des dilata- tions très- fenfbles dans l’épaifleur, mais point de bouche ni de membres : le premier Novembre, il a change de place. Le 7, à l'aide d’une forte loupe, j'ai apperçu un orifice & des apparences de membres : le 16, je les ai vus très-diftinétement : le 17, il a de nouveau changé de lieu. Au commencement de Janvier 1776, le pli du corps s'eft formé; c’éroit donc alors une petite anémone qui, à l'exception du nombre des membres , reffembloit parfaire- ment à celle dont elle étroit provenue, mais fe développoit peu- à-peu. La demi-tranfparence, qui gène quelquefois dans les obfer- vations , m'a permis de diftinguer le progrès par lequel les perires fibres font devenues convergentes; j'ai vu aufi les angles du fegment fe raccourcir, & rien ne m'a paru périr, tout s’eft refoulé 308 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, - dans la mafle. Ce mot tout, ne doit cependant pas*ètre pris à [a lettre , j'ai apperçu quelques pellicules, quelque fubftance un peu jaunâtre autour de la, petite malle , qui en ont été féparées; mais elles éroient en fi petite quantité, que je n’ai pu en conclure qu'il eût péri quelque chofe du lambeau; cette fubftance étroit peut-être due à des fecrérions , ou à quelque humeur extravafée. Ce qui me laiffe encore un doure réel , c’eft que cet effet à été plus fenfible dans quelques ünes de mes expériences. Si cette portion d’anémone eût contenu un germe , n’eft-on pas porté à penfer que les mem- branes qui l’enveloppoient auroient péri, lors de fon développe- ment? C'eft ce qu'on ne remarque pas d’une manière aflez fenf- ble dans plufieurs, & fur-tout dans ceux qui fe déchirent naturel- lement. D'abord, le petit lambeau étoir mince , & avant qu'il für féparé de l'anémone , je l'ai obfervé pendant plufeurs jours 3 il étoit plus mince encore , je n’y voyois nulle apparence de bulbe, & je n’y en ai point vu depuis. J'ai donc été tenté de croire, fur- tout à caufe de la réunion du bout des fibres à un centre commun, que c’étoit un fimple lambeau qui devenoit anémone ; mais qu'et- ce qui fait , qu'étant détachée, cette petite portion fe recourbe & prend de l'épaiffeur ? par quelle caufe tend-elle vifiblement à former un animal? fent -eile alors la néceflité de le devenir? le principe de la vie feroit-il, dans ces animaux, particulier à cha- cune de leurs parties? & comment eft-il ou n’eft-il pas, felon les circonftances que nous pouvons faire naître , fubordonné à l’organi- fation générale de l'individu ? Oh, fi on étoit tenté de donner l'effor à l'imagination , que de chofes à dire! Tout ce qui me fem- ble qu'on peut conclure de ces obfervations, & plus encore de celles qui vont fuivre , c'eft qu'il eft vraiment des êtres animés qui fe multiplient comme de bouture; mais j'attens à être inftruit par de nouvelles expériences fur linutilité du concours des deux fexes ; je ne puis que la foupçonner , parce que Îles anémones que j'ai opé- rées jufqu’ici, étoient nées en mer : la manière dont ces animaux fe multiplient, femble étayer ce foupçon , & la fuite de mes ex- périences fur la première efpèce, dont je ferai part au Public in- celamment, ne laille prefque rien à défirer. Déja nous nous accou- tumons à toutes ces idées nouvelles , elles nous frappent moins; cependant , combien font-elles éloignées de celles que nous avions de l'animal ? ; Paffons maintenant des opérations propres de la Nature à celles où l’art entre pour quelque chofe. Le 12 Décembre 1775 , je cou- pai de nouveau, avec le bout d’un biftouri, dix petites portions des bords de la bafe de plufeurs anémones ; aux endroits où ces bafes étoient plus étendues & plus adhérentes à des écailles de groffes er de = SUR L’'HIST. NATURELLE ET LES ARTS. 309 groffes huitres, dont elles fe détachoienr en les coupant , j'ai mis ces particules dans autant de vafes ; le lendemain , deux étoient attachées au fond ; le 14, deux autres étoient de même attachées; le 22}, fix; le 24, neuf, & le 27 elles l’éroient toutes. Chacune d'elles m'a préfenté fucceflivement les mêmes progrès qu'avoient fait les portions déchirées naturellement; il feroit inutile de les décrire de nouveau. Avant le premier de Mars, elles avoient toutes des membres. Quoique j'aie obfervé , avec le plus grand foin, ce qui s'eft pale, je n'ai pas encore été aflez heureux pour voir tout ce que je défirois, mais j'y reviendrai, & j'efpère beaucoup dés nou- velles rentatives que je médire; celles-ci m'ont offert des différen- ces qui donnent lieu à quelques réflexions. Ceux de nos petits mor- ceaux d'anémones que j'ai coupés plus grands, ont produit ( indé- pendamment de ce qui a pu s’en détacher ) des anémones plus gran- des : fi c’eft en vertu d’une bulbe, d’un germe ; d’un œuf quelconque, que cette multiplication fe fair , il femble que tout ce qui y fe- roit joint comme enveloppe , & plus encore comme contigu aux enveloppes , devroit ne pas faire partie du perit.animal, & qu'il n’y auroit qu'un germe plus pros qui donnât une anémone plus groffe dans le premier développement. Sommes-nous donc les mai- tres, non-feulement de faire naître les anémones quand nous vou- lons, mais mème de leur donner plus ou moins de groffeur (1)? L'anémone qui multiplie, en difpofe-t-elle aufli à fon gré? Tout cela , joint à la réunion des fibres, femble bien oppofé aux germes & aux œufs; mais aufli d’autres obfervations leur font favorables. 11 ma femble qu'il fe féparoic un peu plus de ces efpèces de par- ticules, dont j'ai déja parlé, des morceaux coupés un peu gros, que de ceux qui font arrachés naturellement par l’anémone même; mais comme je n'ai eu occalon d’oblerver qu’un petit nombre de ceux-ci, il pourroit arriver que cette différence ne feroit due qu’au plus ou moins d’étendue du lambeau. Une autre remarque que javois déja faite dans les morceaux féparés naturellement , eft qu'il s'en trouve quelques-uns d'où naiffenc plufeurs anémones , entre lefquelles il y en a qui reftent unies, tandis que d’autres fe féparenr. Certe opération s’eft répétée fous mes yeux. Un lambeau que j'a- vois coupé, avoit à-peu-près la forme que repréfente la figure 10; (1) Sans affoiblir ce que j'expole, quelques expériences me font penfer que ceci a des bornes aflez érroires , que des morceaux trop gros périffent, & qu'en général il faut couper de petits morceaux, qu'il ne faut pas les tirailler , que les vafes doivent être nets, & l’eau claire & fraîche. Tome VIII, Part. II. 1776. Rt - io OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, il fe forma un petit étranglement entre l’un & l’autre de fes bouts; chaque bout prit une figure ronde, & leur furface fupétieure s’é- levoit en goutte de fuif; l’étranglement devint comme un filer, figure 11, Le 24 Janvier , la plus groffe patrie , car elles étoient fort inégales, monta un peu aux parois du vale, & le 28 le filet s'eft rompu. Ces deux parties font devenues deux petites anémones; ÿ auroit-il donc eu deux germes dans ce morceau? ou bien peut-il, d’un fimple lambeau , fans bulbe , fans germe, fans œuf quelcon- que, naître une ou plufieurs anémones unies ou féparées ? c’eft ce que je ne fais pas encore, & je voudrois être feul qui l'ignorât; on ne rencontreroit plus ces feux folets qui nous égarent à chaque pas, mais une lumière vive, fufcitée & entretenue par l’obferva- tion : revenons donc à cette fource féconde. D'abord , on doit re- garder comme des faits certains, dont j'ai été témoin plufeurs fois, 1°. que les anémones de cette efpèce fe multiplient naturellement & artificiellement par des lambeaux; 2°. que ces lambeaux devien- nent fouvent une, quelquefois plufieurs anémones ; 3°. que de ces petites anémones , formées d’un mème lambeau, plufieurs reftenc unies entrelles, quoique le plus grand nombre fe féparent par étranglement ; 4°. qu'entre celles qui reftent unies, il y en a qui deviennent de la plus belle groffeur, comme l’anémone monftrueufe dont j'ai parlé dans mon fecond Mémoire (1), dans laquelle trois individus éroient confondus, & une autre moins grofle en forme d'Y, tepréfentée dans la planche du même Mémoire, qui produifit dévant moi une petite anémoñe non monftrueufe, en déchirant elle- mème un lambeau du bord de fa bafe. Qu’appercoit-on dans l’un de ces lambeaux ? Jufqu'ici, je n’y ai vu qu'une membrane qui faifoic auparavant partie de la bafe de la grande anémone ; .une peau, portion de fa robe ; des fibres mufculaires, & de petits cor- dons dans l’intérieur; j'en ai parlé dans mon fecond Mémoire, après les avoir examinés au microfcope folaire; enfin, une matière géla- tineufe qui remplit les intervales. Lorfque ces lambeaux fe décom- pofent, il en réfulte une matière blanchâtre, légérement vifqueufe, laquelle, vue au microfcope , offre des efpèces de corps globuleux très-petits & qui paroiflent compolés, entré lefquels on remarque (1) Il eft comme le premier, imprimé en Anglois & en François, avec figures, dans les Tranfactions Philofophiques de la Société Royale de Londres. Cette ef- pèce, féconde en monftruofités, m'en a encore offert une qui a deux corps fur une même bafe, Je n'ai jamais eu qu'un monftre de la première efpèce; il avoit au contraire deux bafes & un feul corps; je l'ayois vu naître, ji TT ai * SUR L'HIST. NATURELLE ET LES ARTS: 311 une grande quantité d'animaux plus grands & plus allongés, comme le repréfente la figure 12. Ces animalcules fe retrouvent dans une grande quantité de fubftances marines toutes différentes. Le bord en portion de cercle de ces lambeaux, qui formoit celui de la grande anémone , conferve la faculté de s'attacher & de fe déra- cher, & dans la formation du petit animal, les fibres ne fé détrui- fent poinc, ils ne font que-prendre , comme l’on voit , un nouvel arrangement ou plus de convergeance. Quelle peut être la caufe par laquelle ces Ébres & ce lambeau entier tendent à former , & femblenc former en effet, fans le fecours d’un germe, une petite anémone ? On conçoit aifément que le bord extérieur du lambeau, confervant la faculté de s'attacher, peut former une portion d’un plus petit cercle; mais aufli il pourroit en former une d’un plus grand , fr ce n’eft qu'il paroït plus naturel pour un corps doué de la faculté de fentir, de tendre à refermer une plaie , que de l’ou- vrir ou de Ja cirailler de plus en plus; il y a donc dans ce petit lambeau une forte de fenfation, puifque, pour s'attacher & fe dé- tacher au befoin , il femble qu'on doit fentir qu’on s'attache ou qu'on fe détache : il y a plus que cela dans le lambeau que nous obfervons; car quand le bord s’arrondiroit, que par -là les fibres prendroient de la convergeance , que les angles fe rapprocheroient, que la plaie fe confolideroit , qu’en réfulteroit-il ? un petit corps animé : mais'butre qu'il fera toujours difhcile de concevoir com- ment ce petit lambeau conferve ces facultés, & comment ce corps animé acquiert celle de changer de lieu au befoin , on peut encore demander d'où procédera le développement qui fuit : où fe trouvera le principe des membres, des inteltins, de la bouche , du pli du corps, d'où naiffenr ces beaux panaches que terminent les mem- bres , &c. puifque rien de tout cela ne fe remarque dans cette portion d’anémone ? Chercherons- nous ces principes dans les cor- dons déliés, dont la ftruéture au microfcope folaire nous a paru fi admirable ? mais je n’ai pu trouver dans l’obfervation de quoi me convaincre qu’ils foient deftinés à cer ufage. Ce qui eût été bien plus capable de me fixer fur ces cordons , c'eft la faculté qu’ils ont de fe rouler en fpirale & de former des efpèces de paquets qu'on apperçoit comme un petit corps blanchätre vers les bords , entre la peau & la bafe des jeunes anémones lorfqu’elles l’étendenr. J'au- | rois pu encore être arrêté d’une manière plus particulière à l'afpect | de certains globules flotans , tranfparens , que j'ai fouvent trouvés au microfcope parmi ces cordons, & qui me paroifloient compofés à- peu-près de même, autant que les illufions microfcopiques per- mettent d’en juger; car elles font fort grandes, à caufe de la fphé- | Kre 312 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, sicité & de la tranfparence de ces globules qui , au premier coup- d'œil, femblent percés diamétralement d’un gros trou; le microf- cope folaire ne m'a pas mieux fervi que les autres à ce fujer. Ces globules, qui d’ailleurs fe rencontrent fouvent dans l’eau de mer vues au microfcope, font peut-être remplis d’une liqueur tranfpa- rante; ou bien ce qui ne paroïtroit plus vraifemblable , ce font des globules d'air difféminés dans l’eau. Sera-ce dans la fubftance géla- tineufe, dont la texture ne nous eft point connue, qu’exiftera le principe quesnous cherchons ? Si nous la connoïffons jamais , elle pourra bien nous renvoyer à une caufe méchanique plus éloignée ; celle-ci en a une d’un ordre plus délicat ; & enfin, la dernière caufe apperçue , a l’ordre général, c’eft-à-dire , a la nature , & la nature a fon auteur: mais combien n’eft-il pas fatisfaifant, combien ne peut-il pas être utile de développer peu-à-peu , quoique avec quelques incertitudes , le méchanifme même le plus groflier, par lequel la nature opère? Dans l’ordre phyfique, c’eft une fource in- tarilable de connoiffances; dans l’ordre moral , un fond inépuifa- ble de fujets de médiration. Cette matière gélarineufe ne feroit- elle qu'un corps informe fans texture ? À la première vue, nous en dirions bien autant de la fubftance blanche du cerveau; quoi- que plus compacte cependant en plufeurs endroits, elle paroit fi- breufe; & fi nous pouvions y fuivre les nerfs, nous découvririons fans doute une organifation admirable. Ce qui fe pale dans les œufs, dans les cryfalides, dans les nymphes & dans une affez grande quantité de fubftances qu’on trouve à la mer, nous porte à croire qu'il y a, dans certaines humeurs, une forte d’organifation qui nous échappe & qui couvre de grandes merveilles; il faudra donc fuppofer tout cela dans la matière gélatineufe de notre petit lam- beau. Là, plus encore que dans les reprodüétions de parties, elle pourroit nous offrir en grand ce qui précède en très-petit la forma- tion du fœtus dans l'œuf, & peut-être celle de tout ce qu'on peut nommer germe. C’eft ainfi que les différens points de vue, fans lef- quels il nous eft poflible de confidérer les opérations de la nature, pourroient s’éclairer mutuellement. Je n’ai pas la folle préfomprion de croire que je ferai aflez heureux pour faire beaucoup de chemin dans cette carrière obfcure; je me fens feulement le courage d'y entrer ; je compte beaucoup fur les expériences que jé médite; mais je ferai obligé de reprendre les chofes de loin. Un accident vient de me priver de mes douze petites anémones : l’eau de la mer, dans les premiers jours de Mars, a été tellement troublée par l’ébou- lement des falaifes, que mes grandes anémones, de la première & de la troifième efpèce , ont confidérablement fouftert , & les pe- SUR L’HIST. NATURELLE ET LES ARTS. 313 tices de la quatrième font toutes mortes en un même jour. Un au- tre accident avoir précédé & m'avoit fait perdre un an de travail. Le 28 Janvier, le thermomètre de Réaumur defcendir à 15 deg. de condenfation; j'avois alors quarante vales d’anémones de mer, & mes foins étoient partagés par d’autres objets; quelques précau- tions que j'aie prifes , l’eau de plufieurs gela; mes anémones n’en feroient pas mortes, puifqu’une de la première efpèce que j'ai fait geler exprès à fec, n'a point péri, mais elles ont beaucoup fouf- ferr, & je ne veux aucun équivoque dans mes expériences. À en juger par le nombre des petits qu'on trouve autour des groffes anémones de la quatrième efpèce , leur mulriplication eft très-nombreufe ; elle offre auf, comme on vient de voir, une fin- gularité que ne nous ont point préfenté les polypes d’eau-douce , celle de fe multiplier en s’arrachant elles-mêmes de petits lam- beaux. J'ai coupé en deux, perpendiculairement à leur bafe, un affez grand nombre de ces perits ; chaques moitiés font devenues de petites anémones, & n’ont employé que quinze jours, & fou- vent moins, à cette reformation. Une. très-perite portion d’une grande anémone, coupée le 7 Mars, avoir des membres le 7 Avril de la même année 1776. Le 20 Mai, j'ai coupé un morceau de la bafe & de la robe de cette petite anémone qui étoit en très-bon état ; elle y a continué, Le morceau s'eft attaché aux parois du vale, & le premier Juin il avoit des membres ; mais l’anémone qu’il formoit alors , étoit d’une petitefle extrème. À la fin de Juiller je l'ai mife toute entière au microfcope folaire, ce qui m'a fervi à découvrir que les membres font articulés, ou au - moins ont des plis de diftance en diftance, comme on en voit fur les cryfalides. Je donnerai toutes ces figures ‘de détail dans l’ouvrage entier. ASS #4 314 OBSERFATIONS SUR LA PHYSIQUE, SCO EMOMAERCE MREUSL) DÉS OEM ERRNIEMENS DE M. L'ABBÉ DICQUEMARE; Sur quelques Reproduflions animales. | ER des Reproductions animales s'augmentera & fera époque , fi le goût des obfervations fuccède à celui des fyftèmes. La Nature, toujours la mème, s'offre & femble quelquesfois fe prèter à nos obfervations ; elle nous découvre fouvent, dans un feul ob- jer, le fil qui circonfcrit une fuite nombreufe de connoiffances, & nous invite à le fuivre; mais c'eft fouvent au travers des ténèbres les plus épaiffes; aufli, la forme fingulière de certains animaux qui pofsèdent la faculté de reproduire les parties qu'on leur a retran- chées, où chez lefquels la partie mème reproduit le. tout, qu’on foupçonneroit peut-être mal-à- propos de n'avoir pas un centre unique & bien diftin& de fenfibiliré , a-r-elle laïflé en fufpens les efprits timides, & fourni aux plus hardis le prétexte tant défiré & fitôr faifi de prendre l’effor au-delà du vrai, Plus les formes des animaux qui pofsèdent ces facultés fe rappragheront de l'organifa- tion la mieux connue, moins il y aura de doutes & d’aflertions hafardées ; & plus on obfervera, plus aufli on découvrira de ces fortes de fingularités. Les vers, claffe du règne animal qu’il nous eft intéreffant de bien connoître, parce qu’elle attaque & détruit nos digues, nos vaifleaux , nos meubles, nos provifions, les animaux domeftiques, & toutes les parties de notre corps, nous fournit mille commodités, & ce qui eft infiniment plus précieux, peur nous éclairer fur la phyfique de l’économie animale & fur les reflources de la Nature, en nous préfentant des phénomènes tiès-finguliers. Je n’entrerai pas ici dans les divifions qu’on en peut faire, c’eft un foin que j'abandonne fans regret à ceux qui , de nouveau , voudront s’en charger. Les . vermiffeaux de mer, dont plufieurs font à-peu-près connus , peuvent encore nous offrir des chofes fort intéreffantes. Un coup de crayon levant mieux les équivoques que les plus amples définitions , jettons d’abord les yeux fur la figure 13. Elle SUR L'HIST. NATURELLE ET LES ARTS, 315 repréfente un très- petit grouppe de ceux dont je veux parler, & defquels il me fufit de donner ici une connoifflance fuccinte , parce que j'ai pour objet particulier , d'annoncer qu'ils ont la fa- culté de reproduire des parties confidérables de leur corps. Ces tuyaux blancs font ici attachés fur une vieille volute. La f- gure 14 repréfente le corps entier du vermifleau hors de fon tuyau ; il eft vu de côté, c'eft la pofition la plus avanrageufe ; les trois parties très-diftinctes qui le compofent, peuvent être con- fidérées , lune A , comme le trou , les autres comimê les extrémi- tés : jé diffère d’en donner l'anatomie exacte. Le trou à fix ef- pèces de jambes de chaque côté qui paroïffent percées , d’où il fort de petits corps jaunâcres de la forme d’un œuf; ces jambes ou tuyaux , unies par une double membrane fine & tranfparente. L’extrémité fupérieure B , eft un joli plumaceau compofé quelque- fois d’une trentaine de membres en forme de plume, moucheté par cinq ou fix rangs de petits corps, dont la forme approche de celle d’un œuf ou d’une olive , couleur de carmin, & l’extrémiré inférieure C , a la forme d’un ver renflé par le milieu , compofé d'un nombre confidérable d’anneaux , orné de quelques poils vers la queue. Lorfqu’on détruit la partie fupérieure du tuyau de ces vermilleaux, ils la rétabliffent en peu de jours; mais quand je les en ai en- tièrement dépouillés, ils n’en ont pas reformé, quoiqu’ils ayent con- tinué de vivre en bon état pendant long-tems. Je n'en ai vu mou- tir aucun. Un de ces vermilleaux , déchiré par la moitié du tronc, c'eft-à-dire, entre la troifième & la quatrième jambe , a repouffé toute cette moitié, & la partie fupérieure avec tous les perits corps ovales , couleur de carmin ; de forte qu’il n’y avoit aucune différence , au bout de quinze jours, entre fon état de repro- duction & fon état primitif. Un autre de ces vermifleaux m'a offert un fpectacle fingulier ; tout fon joli plumaceau s’eft détruie de lui-même : j'ai mis au microfcope les olives, couleur de car- min ; la figure 15 eft celle qu’ils avoient. Plufieurs ont enfuite pris de l'allongement & du mouvement. Une multitude d'animaux à paru en fortir, comme on voit dans la figure 16; peu de jours après, le plumaceau avoit repouffé. Ces vermilfleaux & ceux que je déchirai par la fuite, qui leur reffemblent beaucoup , ne patoiffent point avoir d’yeux; cependanc ils voyenr. Au moindre changement de lumiere, à l'afpe&t de l’homme, &c., ils fe retirent avec une agilité furprenante , fur- tout lorfqu’ils font nouvellement pèchés. Il y en a qui ont un oper- cule conique, velouté par fa bafe, orné des plus riches couleurs; d'autres , comme ceux que j'ai décrits, n’en ont point. OBS E RF A TT OMS Sur le Froid extraordinaire qu’on a reflenti en Hollande & en Frife, aux mois de Novembre & Décembre 1774, & de Janvier 1775, & fur la denfité de la Neige; Par M. J.H. VAN-SWINDEN, Profeffeur en Philofophie , Logique & Métaphyfique, à Francker en Frife, & Membre de la Société des Sciences de Harlem. < O N trouve dans les Obférvations fur la Phyfique, publiées par M. l'Abbé Royter, des obfervations fur le degré de froid extraordinaire qu'on a fenti dans les Volges en Novembre 1774. L'utilité dont ces fortes d’obfervations, bien comparées, peuvent être, m'engage à pu- blier celles que j'ai faites à Francker dans le mème tems; mais avant d'entrer en matière, il ne fera pas inutile de dire un mot des inf- trumens dont je me fers. J'emploie deux thermomètres gradués felon l'échelle de Fahremheit , ordinairement ufitée dans ce pays. L'un eft expofé au Nord; l’autre l'eft au Sud, à une quarantaine de pieds du premier. Ils font l’un & l'autre pendus à l'air libre, fans toucher à aucune muraille, & fans que la boëre de bois qui les renferme, foit fermée par une glace. Je me fers d'un très-bon baromètre que j'ai conftruit avec foin, en:faifant bouillir le mercure dans le tube même. L’échellé eft di- vifée en pouces, mefure du Rhin: 30 p.coincident avec 28 p. r1 1., mefure de Paris ; 29 p., avec18—o319;& 28 p.,avec27+0761.; de forte qu'on ne commettroit pas d’erreur bien fenfble, fi entre 29 . & 30 p., on ôtoit un pouce, pour réduire la mefure du Rhin à celle de Paris. J'obferve la force du vent au moyen de l’arémomètre de M. Bouguer, dont la tige porte une furface d’un pied quarré. Une fuite d'expériences faires, depuis quelques années , tous les jours , à différentes heures du jour , m'a convaincu de l'excellence & de la fimplicité de cer inftrament, auquel je n'ai fait qu'un très-petit changement. Il eft ficheux que les Obfervateurs météorologiftes ne faflent guères en- trer dans leurs obfervations ce qui concerne la force du vent. J'ai divifé , par expérience , la tige de mon inftrument , en parties qui indiquent SUR L'HIST. NATURELLE ET LES ARTS. 317 indiquent chacune une once. Quand le vent eft de 10 onces, il com- mence à être fort : il eft peu de tempêtes dans lefquelles je l’aye vu monter au-delà de 72; & il m'eft arrivé deux fois de le voir aux en- virons de 100 onces. J'ai uñe très-bonne expofition pour mefurer les ventsS , SE, SO; elle eft moins avantageufe pour les N, N-E, NO, à caufe des bâtimens voilns. Ma maifon eft fituce près du boulevard , fur un canal. Les mai- fons qui font de l’autre côté de ce canal, donnent fur le boulevard même, & font très-bafles. C’eft dans ce canal que je mefure l'épaiffeur de la glace en pouces, mefure du Rhin. NOVEMBRE. Ee commencement de ce mois a été affez froid : il commença à geler le 73 le thermomètre étoit alors à 26; il dégela un peu le 8 & le 9. Le 10 & le 1r,le thermomètre fut aflez haut; mais il recommenca à geler le 123 il neigea beaucoup ce jour-là. Le 13, le chermomèrre éroit le matin à 235. Il dégela le 14 : le thermomètre étoir, le matin, à 37, & le foir, à 46. L'air fut extrèmement doux les jours fuivans:; & le 17e, le thermomètre ne fut pas au-deffous de 48 , & monta juf- qu'à s2. Il fic du brouillard, & il romba 4 lignes de pluie. Le ba- romètre étoit entre 28 p.841. & 28 p. 1041. Le 18, jour de pleinelune, le thermomètre étoir encore entre 43 & 513 l’air fort couvert; pluie, grèle, brouillard. Il y tomba 114 1. d’eau. Le foir, le vent étant O, - O-N-O, N-O, fa force fut entre 16 & 48 onces à 4 heures, & en- tre 11 & 22 à 9 heures. Le baromètre entre 28 p. 5+ 1. & 28 p. 2 |. Le 19, ciel très-couvert, grèle, neige, pluie, vent O-N-O, N-N-O:, N: le foir, EN, entre o & 12, onces. Le thermomètre entre 41 & 343 le baromètre entre 28 p, $ |. & 28 p.ël. Le 20, le chermomèçre fe trouva le matin à 6 heures, à 304; à midi, à 323 à 9 heures du foir, à 24; à 10 heures, à 27. Le ba- romètre entre 28 p. 9 |. & 28 p. 11À L.; ciel très-couvert. Il tomba de la neige à la hauteur de 24 pouces; elle fournit, étant fondue, 1.97 lignes d’eau; fa denfité étoit donc à celle de l’eau comme 1 : 124 à- peu-près. Le vent étoit le marin S-E; à midi, E; le foir, O;N & O-S-O; fa force étoit le matin 2, 4, 83 le foir, O. Le 21, 6 heures du matin, Therm.à 24 Ciel couvert : pas 3 heures du foir, .. . . . 32 le moindre fouflle 9 heures. .. . . . . . 21. de vent. Le baromè- 1olhenxes. .. :.,,14le, aïe au ep 230: trerentrer29 plz il &29p.32l. Il romba la puit 14 p. de neige, qui, fondue, donna 1.45 lignes d’eau. La neige étoit donc 9.138 fois plus rare que l'eau. Tome VIII, Part. II. 1776. SC B- p, pr 318. OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, Le 22,4 6 heures du matin, Therm. à 39 Le matin, neige: ‘à 3heuresdufoir. . . . . 27+ le foir, Ciel à-peu- à 1o heures. . . . . . . 16 prèsferein;ventSS-E. Force du vent, le ma- tin, 4, 8,10; à midi, 8, 12, 16,10; foir, 2, 4. Ba- romètre entre 29 p. 2 |. & 29 p. ox I. Le 2;,à Gheures du matin, Therm. à 18 Ciel couvert : à à 2 heures du foir. . . . - 282 midi & le foir, de à 10 heures, . . . . . . 35 la neige. Baromètre entre 29 p.2 |. & 28 p. 6j 1. Le vent, au matih, S-E. foible : à midi, S-0:0.4, 8, r1 : le foir, S-S-O, 20. La gelée continua jufqu’au 29. Le thermomètre defcendoit tous les jours à 22, 24 ou 26, excepté le 25 & le 26, qu'il ne Mon ca au-deffous de 30. Il tomba beaucoup de neige le 24, avec un fort vent de N-E, qui alloit à 48 onces. Il en tomba encore plus le 25, avec un vent N-E de 24 onces. Le 26 , ( dernier quartier de la lune } il en tomba encore, vent N-E, 218 onces : cette neige étroit douze fois plus rare que l’eau. Enfin, il en tomba le 28 , à la hauteur de 32 p.: cette neige étroit 6+ fois plus rare que l’eau. Il fouffloit un vent de S-S-E violent , qui n’alloit le matin qu'à 28 onces, mais qui monta le foi à 40, 86 & 72 onces; à 7 heures, à 76, & à 10 heures, à 44. Il neigea encore le 29 & le 30, mais beaucoup moins. Le baromètre à fouffert de grandes variations pendant ce tems. Lez4ilfurentre28 p.1cil.&28p.4i. Lersentre28 p. 71.&28p.9tl. 25. + . 28p. 71. &28p.97 26. . 28p. 97& 29 p.04. 27.020 ip.) 0. Cc29/peILS 28. . 28 p.107 & 28 p.4. 29e =. 1e :28)p. 75. &26p:0+. 30... 1217p. 11 628 p.27. Maloré le froid qu'il faifoit, l'évaporation d’abord de l'eau , en- fuite de certe mème eau glacée & de la neige tombée par-deus, fut, du 15 au 30, de 11. 36 lignes; ce qu’on doit attribuer au vent violent qu'il a fair. Les obfervations faites par le P. Core , le 4 Fé- vrier de cette année 177$, prouvent combien le vent peur augmenter lévaporation. Un froid aufli violent, d’aufli longue durée, & accompagné d’au- tant de neige, eft très-rare dans nos quartiers au mois de Novem- bre. Le plus grand froid qu’on ait obfervé en Novembre à Zwanen- burg, ( maïfon fituée entre Haerlem & Amflerdam, au confluent de l'Y & du Lac de Haerlem) depuis 174$ à 1759, a été de 24°, le 28 Novembre 1746 & le 24 Novembre 17493 & de 23°, le17, 18. SUR L'HIST. NATURELLE ET LES ARTS. 319 24 Novembre 1759. Le 28 Novembre 1739, le thermomètre fur à Haerlem 22°. En Novembre 1770, j'ai vu le thermomètre encore plus bas dans cette Ville; favoir, à 9° le 203 mais ce froid fut de très-coutte durée. Certe, obfervation. comparée à quelques autres du même genre ; eft inférée dans le 63e Volume des Tranfaélions Philo- Jophiques de la Société Royale de Londres, page 82. Cette rigoureufe température paroît avoir été générale en Europe, comme l’a très-bien obfervé le P. Corte. Selon les Nouvelles pu- bliques, le thermomètre de Réaumur a été à Copenhague, à 7 d. . au-deflous de la congélation, ( c. à d. à 18 de Fahrenheiït ) le 11 No- vembre; à Drontheim, il a été, le 10, à —15$° , (ou à+ 3 de Fahrenheit; ) & à Mongmorenci, il a éré, le 27, à —6+ ( 10 de Fahrenheit). Ce grand froid ne s’eft donc pas fait fentir également par-tout dans le mème tems; mais il paroît avoir commencé par le Nord, & être arrivé fuccelivement aux Pays plus méridionaux. Aufli n’eft-ce que le 27 au foir & le 28 au matin qu'on a fenti le plus grand froid à Sénones. Il étoit de 16 au thermomètre de Réau- mur, ou de 1 à celui de Fahrenheit. Le 22, il étoit à —10; & il pe commença à. dégeler que le 30. A Paris, le thermomètre étoir, le 27, à—7( 18 de Fahrenheit ) à-peu-près comme il étoit ici le 22 au foir. Le vent étroit à Sénones, à Paris & ici, N-E; à Montmo- renci, E. En fuivant l’ordre des laritudes, on a eu le plus grand froid, À Drontheim, le 10, de 3 degrés. Il en faut cependant À Coppenhague, le 11, de 18 des. eprer l'Angleterre, car A Francker, le 22, de 16 degrés. à Bondres le Thermomè- A Sénones, le 27 & 218 , de.3 deg. .tre n’a pas été au-deffous À Paris, le 27, de 18: degrés. de. 314 entre le 10 & le A Montmorency, le 27, de 20 deg. 27. Le 22 au matin, le Thermomètre étoit à 33, & le 27 à 315. Voyez Phil. Tranf. vol. 65 , page 161. . Cette comparaifon fait voir. que l’intenfité du froid n’a pas été proportionnelle aux. degrés. de latitude, mais qu'il a dépendu de caufes locales; c’eft ce qui paroîtra plus clairement, fi l'on fait atten- tion que cette intenfité a confidérablement varié dans des endroits très-voifins; c’eft ce qu'il fera important de vérifier; & voici les obfervations qui m'ont été communiquées à ce fujer. Mon frère ,-qui depuis plufeurs années, fait à la Haye des ob- fervations météorologiques très-érendues , m'a marqué ce qui fuit : SiS2 320 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE; Le 19, à 11 h. du foir, le Therm. à 37°. BON AMEN IT . . 28%. DAME Ur ee PU IT RES S EN Nec: DR etre late QU BE SN RC OUVELE 23, à 8 heures du matin. .« . 182. Brouillard, vent fort: à 11 heures du foir. .'. 37. Neige, N-N-E. tempête. 24, à 2 heures du matin. . . 465. Forte pluie. 11 heures du foir. . . . 28. Le 25, le thermomètre étoit entre 28 & 331; le 26, entre 31 & 353 le 27, entre 26 & 311. On voit par-là qu’il a fait beaucoup moins froid à la Haye qu'ici, & que le 22, la différence étoit de 115 degrés à la mème heure. A Leyde, le thermomètre a été, le 23 au matin, à 55; & à Wys, Ville de la Province d’Utrechr , à 13. M. Xoo!, homme d’un rare mérite & très bon obfervareur , m’a écrit qu'à BÉverwvx, Bourg confidérable en Nord-Hollande , à deux lieues de Haerlem, le ther- momètre n’a pas été au-deffous de 28. A Bréda, le thermomètre a été, le foir du 22, à 2413 le matin du 23, à 1475 & le foir du 27, A à 207. Il n’étoit alors ici qu'à 26. DÉCEMBRE. Il recommença à geler le foir du $. Vent EN , de 4, 8, 12 onces; baromètre 29 p. 52 1. ; ciel ferein ; aurore boréale. Le 6 matin, à6Gh. Term. 20. Bar. 29 p. 7 I. Serein, E. ART ON ET DONNE ot AE 207 CL EP ME ME EC on UNE ONE Zi re L’épaifleur de la glace , qui s'eft formée pendant ce jour-là. & la nuit du 6 au 7, étoir de À de pouces. Je faifois faire tous les matins dans la glace, un trou d’environ 2 pieds quarrés en furface. Le7matin, à 7 h.Therm. 221, Bar. 29 +77. Couv. E-N-E. 2.4.6, LISA CSS al e7e ele foire Véhi oniR ae MN Netge. 10 h, NRC AUPNEN AE RE TSITS RR2 FA Epaiffeur de la glace À de pouces. Hauteur de la neige 25 pouces. Cette neige fournit 2 lignes d’eau. Sa denfité étoit donc à celle de l'eau, comme x:16%. Il n'arrive pas fouvent de voir de la neige auf rare. his SUR L'HIST. NATURELLE ET LES ARTS, 321 Le 8 , jour du plus grand froid. Le matin, à 6 h.+, Thermom, 10. Bar. 29p. 3 |. Couv. N-E, O, ‘249 PE er COMENT ER 1 l. Neige. à Le foir, à $. . . . . . 12.. .28p.xx. Neige. “His . - . . e d 8. s G ; le vent Le sereine dte £ étroit S.E.,de4,8, re De: /à5 EL Ms G 12 & 16 onces. SOIT PUR Pie 1 BEN S URASEET LES Ile « + «+ + ©. Le Thermomètre expoféauSud, a marqué 2°. + Bar. 28 p. 113. Serein. La nuit, il fic un vent violent de S. E; qui montoit à 721 on- ces. Je me levai à 3 heures du matin pour obferver le thermomè- tre, & je le trouvai, à mon grand étonnement , remonté à 19 : il y étroit tombé une quantité confidérable de neige ; fa hauteur moyenne étoit, dans mon jardin, de $ pouces : dans quelques en- droits il y avoit s0 pouces de neige. La neige fondue ne donna que 38 lig. d’eau, & fa denfiré étroit à celle de l’eau comme 1, 1$;, 9. Épailfeur de la glace 25 pouces. Je me rappellai , pendant le grand froid qu’il faifoit cette foi- rée , les expériences fur la congélation des liqueurs, que M. Pigorr avoit faires à Caen, en pareilles circonftances , l’an 1768. Elles fonc décrites dans le &ime Volume des Tranfailions Philofophiques , p. 283. 11 me prit envie de faire quelques effais. N°. 1. Je plaçai, à 67 heures dans mon jardin, un verre rond, d’un pouce de diamètre & de 3 pouces de hauteur , rempli de vin rouge : à 7 heures 1l étoit gelé, mais non pas jufqu’au fond: à 7 heures & demie il l’étoit entièrement; j'en tirai un cylindre de glace filamenteufe , peu folide. À 9 heures & demie, j'expofai à l'air fur la neige, N°.2,un verre rond, de 3 ou 4 pouces de diamètre , conte- nant un mêlange d’efprit de vin & d’efprit de nitre fumanr; N°. 3, un verre femblable au N°. 1, contenant un mêlange de trois parties d’eau & d'une partie de très-bonne eau-forte; N°. 4, un verre plar, plus petit que N°. 2, rempli de vin de Malaga. À 8 heures 5’, N°. 3 étroit gelé à la circonférence, mais l’inté- rieur étoit encore fluide, 322 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, N°. 4 étoit rempli de por morceaux de glace. Je rapportai ces verres dans ma chambre , où il y avoit du feu; & ils y reftèrent tout le rems que j'étois occupé à en préparer d’au- tres; à 8 heures & demie, je rapportai dans le jardin ( où N°. 2 éroir refté ). No°i 4: N°. $, contenant un mêlange de deux parties d’eau-forte & deux parties d'eau commune. N°. 6, contenant de l’efprit de vin. A 9 heures , le N°. 4 étroit entièrement gelé : la glace éroit formée de petits morceaux inclinés les uns aux autres, & qui ref- fembloient exactement à des écailles de poiffons. A 11 heures & demie, les autres Numéros n’avoient pas fubi de changement. Le 9, à trois heures du matin, le thermomètre étoit remonté, comme je lai dit, à 19°, & il éroit tombé beaucoup de neige. Les Numéros 2 & $ n’étoient pas gelés. Je vis à 10 heures que le verre, N°. 6, ne contenoit plus de liquide, mais toute la neige étoit gelée aux parois intérieurs du vafe. C’éroit une véritable glace qui fe fera formée par la folution de la neige dans l’efprit de vin. La neige qui étroit tombée, étoir très-sèche ; on la pouvoit fouffler de deffus les corps où elle étoit ; fans qu’il en reftât la moindre trace : ce n'étoit, à la lettre, qu'une pouflière très-fine. Cette glace étroit très-friable , peu cohérente & remplie de ftries : on la diftinguoit très-aifément de la neige qu'il y avoit aux parois & au fond. A dix heures & demie, on n’appercevoit pas de neige dans N°. 6: celle qui y étoit tombée, s’y étroit donc diffoute. Le N°. 2 nen contenoit pas auf; mais il me fembla que je commençois à voir, fur la furface de la liqueur, de petites pointes de glace : foit que ce fûc un véritable commencement de glace, foir que ce füt feule- ment un refte de neige mal fondue. Celle qui tomboit alors , n'é- toit qu'une pouflière imperceptible, On fent bien qu’en expofant à l'air de l’efprit de vin, je ne m'at- tendois pas à le voir geler : il faut pour cela un degré de froid bien fupérieur à celui que nous avons dans ces contrées ; mais je m'attendois que la partie fpiritueufe s’évaporeroit la première , & que la liqueur qui refteroit, étant un phlegme plus délié, pourroit fe geler, & j'avois deffein de déterminer alors la denfité de cette liqueur, après avoir fait fondre la glace , afin de connoître à quel degré de cenfité l’efprit de vin doir être réduit pour pouvoir geler par le froid que nous avons eu; mais la neige furvenue pendant la nuir, & la diminution du froid , ont empèché l'exécution de ce delfein. Je me dérerminai à cette expérience, parce que je me à. SUR L'HIST. NATURELLE ET LES ARTS. 31; rappellois que MM. Dymond & Wales avoient fait, en Janvier 1769; une pareille obfervation, étant à la Baye de Hudfon. L’efprit de vin, contenu dans un vafe ouvert, s’étoit évaporé, dans une nuit, de la moitié : la partie fpiritueufe s’étoit attachée aux parois du vafe , & à un fil à plomb qui y pendoit. Ce qui reftoit, fe gela alors pour la première fois. Cetre obfervation fe trouve dans les Tranf, Philof. vol. 6o, page 165. Le 9. A 3 h.du m.Therm. 19. Neige. 8. . . . . .19.Bar. .28<+ 9i 1. Neige, S-E. 24. 44. 72: Aïh.duf, . . .26. . .28+11 1. Neige, S-E. 16. 40. 4e ee + + +25. + +29. 07 Neige, S-E. 48:16. 32, ROM. LUN nel A 0 jp: Pl Ms DE Et 456.024 Hauteur de la neige, 1 pouce 1 ligne. Neige fondue, 1.2 lignes. Epaiffeur de la glace , 14 de pouce. Le 10. À Gb. du m. Therm, 19. Bar. 28 + 10. Couvert. 2 dufoir. . . .40.Bar. 28 + 9. Couvert, S-S-E, 2.4 MONT SIM » 1105 I BU, 1 0: LCouyéree (pluie Il dégela les jours fuivans. Ce degré de froid eft très-rare dans ce pays, fur-tout au com: mencement de Décembre ; car c’eft une obfervation conftante & fujette à très-peu d’exceprions, que le plus grand froid a lieu après le folftice d'hiver, & par conféquent à la fin de Décembre , ou plus ordinairement au mois de Janvier. Le plus grand froid qu’on ait obfervé en Décembre à Zevanenburg , de 1745 à 1759, et de 16°, le 13 Décembre 1759. Ce froid exceflif a eu lieu en quelques autres endroits, mais ni en même-tems , ni par-tout au même degré : il a même été trèse différent dans des endroits affez voifins. À la Haye, le cherm. a été, le 6 au mar. à 27:le foir à . . 267. 7e Ie 2 GE. ::: ee AO es 8. , . ro:lef.à1rh. 325, avec neige qui avoit commencé dès les $ heures du foir; elle étoit très- fine , mais en grande quantité : de 6 heures à 11 heures, forte neige. Voilà 322 de différence entre Francker & la Haye , à la même heure: la neige, qui ne tomboit pas encore ici, mais qui peut-être fe formoit alors dans Fair, tandis qu’elle tomboit déja à la Haye, 324 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, “auroit-elle été la caufe de cette grande différence ? J'ai du moins obfervé très-fouvent, que quand l'air menace de la neige, le ther- momètre defcend , & qu'il remonte dès qu’elle tombe. Le 5, au matin, le cherm. éroit à la Haye à 29%: le foir à 26. TO DNS EL 4 ON LTD, RON 3 SEAT ARE 23: À Bréda, le thermomètre étroit, le 8 au matin, à 16: à midi, à 22 : le foir, à 22 : or il y neigea dès le matin , & fur-tout dans la journée. Le 9, le thermomètre étoit, le matin, à 24, & le foir à 212, plus bas qu'ici. Mais le 10, le thermomètre y étroit le ma- tin à 34, pendant qu'il étoit ici à 19 , différence très-confidérable de 15 degrés. À Wyck, le thermomètre n'a été qu'à 13 le 8, & à Leyden 1l étoit le 8 à 15, & le 9 à 25. Quoique le froid ait été très-rigoureux à Beverwyki, il n’a pas été comparable à celui que nous avons eu ici le 8. Le rhermomè- tre y a été, à la vérité, plus bas les jours précédens, mais il a commencé à neiger dès l’après- dinée du 8. Voici les obfervations mêmes, ; Le 6 matin, 23° Le 7 matin, 20°. N-E. ferein. midi, 26 pN_E. ferein. midi, 24e foir, 20 foir, 26. N-E. nuages. Le 8 mat. 14. N-E. gros nuages. Le 9 matin, 14. S. très-fort, neige midi 20. S-O. neige. midi, 24. confidérable , à foir, 13.S-E. fort , neige foir, 22. G pieds de hau- | très-fine, - teur. Le 10 mat. 23. E-N-E, neige. aie midi 34. S-E:S. foible, foir, 36. À Montmorency, le thermomètre n’a été au plus grand deoré de Froid ;:que le 3x ; il évoic alors à — 6 ou 20° de Fahrenheir. Ce jour-là il étoit ici à 24. À Londres, le thermomètre a été le matin du 8, à 281, & le matin du 9, à 25. JÉAUNESPAMENR 1775 La température de Janvier a été très-douce au commencement du mois. Il commença à geler un peu le 16 (jour de pleine lune ) : la gelée fur crès-foible jufqu’au 20 ; le thermomètre ne defcendit au- deffons de 27 que le 29, qu’il fut dans la matinée à 21. Il dégela le 21 & le matin du 22. Il commença à geler & à pleuvoir vers les SUR L'HIST. NATURELLE ET LES ARTS. 325 les 3 heures. Il romba depuis 6 heures du foir jufqu’à une heure de nuit, une pluie gelée : ce n'éroit pas une pluie dont les goutçes ‘ fe geloient à terre, & formoient un verglas confidérable, mais c'éroient de petits glaçons qui tomboient; ce qui forma à terre une croûte de glace de 42 lignes : le foir, à 10 heures , le thermomètre étoit à 30; le baromètre à 29+2!, Vent E, 8,12, 16. Le2;,à Sh.dum.Th.241. Bar, 290. Couvert, E. 8. 12, 16. siRduoir 2: M: 1 UE LES ADR Nrzree 14 35. Serein,E.A.B.8, 11316, 20; Epaifleur de la glace 14 pouce. Le24,à Gh.dum.Th. 125. Bar. 29481. Serein. 4. 8. 16. Dernier 2h.dufoir,, 207. . . . 71 . . EN. 4. 8. 10. guartierde 10h., , . 12 NS UN SaTon 2 AID Za Lune. z 3 Épaifleur de la glace 15 pouce. Le2s,à Gh.dum.Th. 8. Bar. 29481. Serein , EN. s 3 ap he Glu foir SO PLATE N SHÉVEEN "27 4 618] CASE AREQE ET L'ECLEL le ONE CALENIEMNET UOTE DOTE 1 D Ge 11, + + + 4 . . . 4 Serein, À. B. point de vent, Le26,à $sh.dum.Th.— —. Serein, S-E. . 27 À moitié ferein, S-E; le thermom. au Sud + 2, ; LAS 1e" Mel Et EE TU TEE LE oi SABLE, 2h duo 40 MT So: Neige, S-E, 2.4. 6, G. + +. + 1754 284-114. Neige. RON RER OT : 107. Couverts Epaifleur de la glace 4 de pouce. Neige fondue 0.725 1. Dens fité de la neige à celle de l’eau, comme 1 : 6. 21. = pin [ve] D ve À D Le] ©) b “| Le27,à6% h.du m.33.Bar. 29414. Couvert, S:O. o. 1. 3h.duf. 38. . . of. À moit. couv. SE, 2. 4. 8. 10. 037. e 28-Ér1E1) MN MISHE 56 20. 40. 48. On voit pat ces obfervations que le froid a éré très-excefMif: il eft très-rare qu'il parvienne à un fi haut point dans nos climats. On fait qu'en 1740, il a été à 2 & à 4 au deffous de o. En 1767, il a éré ici à —2 le 7 de Janvier : en 1768, le 6 de Janvier, Tome VIII, Part, IL, 1776. TEE 526 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, je l'ai vu à4# 343 il éroit alors à — 35 dans un village près dé Bois-l5-Duc. On voir auffi que le changement de température a été très prompt & rièc-grand. Du 26 au 27, (à 8 heures du matin) il y a eu 34° de différence, & il y en a eu 25 depuis 8 heures du matin à 1# heures du foir, dans la journée du 26. Le froid a été fort rigoureux dans d’autres endroits ; mais il l'a été beaucoup moins qu'ici. Voici un extrait des obfervations que mon frere a faites à la Haye. Lez22aufoir. Therm. 411. Bar.28-+ 8. Brouillard. ? 23aumats © /./ 36, -. «4 «l 8./1E-S-E,3%5.6. Couvert: foir. 1 JL SES 7 art SE. 3: 52 ro: Couvià7 hi 7.10 15 onces. 24matin, . . F9. « 29=+ 14. Serein, E. 4. 10. 14. Loire NE ral OUTRE EN EM ESS mo AE GSiinatin: Tr Me MOINE Sete 47 0e EE Loir. 0e EN rt + 17. À moitié ferein, E. 26 matin, à 4h. 10. 8. . as. . 28-11. S-S:E, 3. 4. Soleil, nuages ; flocons de neige. foir. Là 2h: HAE NCX 8 22 S-S-E, 3. Neige fine. ITA 0 ; . . . … 8à. Couv.l avoit plu à 7h. +leplss ël . Le plus grand degré de froid a donc différé de 11 deg. de ce qu'il étroit à Francker, & le changement a été de 29$ en 19 h, de terms. Depuis le 28, la température a été fort douce & à la Haye & ici : la température moyenne du mois a été ici de 35°. A Leyden, le thermomètre n’a été, le 26, qu'à 10°. Le froid a été beaucoup plus rigoureux à Beverwyk. Le 23, vent E-N-E, fort: pluie qui fe changeoït en glace en tombant. Thermomètre à midi, 30:à 10 h. du foir 21 ; couvert. Le 24 matin, Thermomètre 16. E-N-E, fort, ferein, midi NME 20: au coucher du foleil. 10. foir, à 10 heures. 13. Le 25 matin, 67 à 9. N-E. midi hi NPnse Loir ME LAURE dé. SUR L’'HIST. NATURELLE ET LES ARTS. 317 Le 26 matin, $. S-E, couvert. midi. 12. après midi. 18. Neige. d.7h:3 36. $. pluie. Très - couvert. Le 27, le thermomètre étoit le matin à 34 : vent S-S-O, hu- mide. Voilà donc encore un changement de 31° en 13 heures. Les Papiers publics ont fait mention du froid rigoureux qu’on 2 reffenti dans quelques endroits. Au rapport de la Gazette de Leyde, (N°. 10 de cette année) » il gela fi fort à Rotterdam dans les deux » nuits du 24 & du 25 de Janvier, qu'on pañloir La Meufe à pied » & à cheval, ce qui dura jufqu’au Jeudi 26. Mais le thermomètre » de Fahrenheit, qui étoit le matin à 8, éroit remonté le foir à 7 » heures, à 34 : dès le 27, il y eut dans la rivière une ouverture » de 20 verges, dans le même endroit qui, la veille , fourmilloit » de paflagers «. À Montmorency , il n’y a eu en Janvier qu'un jour de froid très-vif : le 25, le thermomètre étoit le matin à —8!, c'eft-à- dite, à 16 de Fahrenheit à-peu-près, Plulieurs circonflances me paroiïffent rendre très-remarquables les obfervations dont je viens de rendre compte. 1°. L'incenfité du froid. Al eft , comme je l'ai déja dir, rare de le voir à un pareil degré dans ces contrées , & encore plus de l'y voir fi violent en Novembre & au commencement de Décembre. 29. Le changement fubic de température , qui a quelquefois été de près de 30° en 24 heutes. Cette variation fubite eft rare, fur-tout au fort de l'hiver; mais elle n’elt pas fans exemple. J'en ai vu une, à-peu-près pareille, en Novembre 1770(1), & je fais qu'on en a quelquefois obfervé ailleurs de plus confidérables ; par exemple , le 7 de Janvier 1742, le thermomètre étoir à Spafendam , à midi, à 22°, & le foir à 11 heures, à 1°. Voilà un changement de 21° en 11 heures (2). Le 3°. La très-orande différence qu'il y a eu entre Les degrés de froid obfèrvés en des endroits très-peu diflans les uns des autres. Voici la table de comparaifon. (1) Wid. Phil, Tranf. Vol. 63, page 87. (2) Voyez un Livre Hollandois de M. Duin, qui a pour titre : Remarques fur trois rigoureux hivers. Je connois peu d'Ouvrages qui contiennent plus d'Obfer- vations intéreffantes. Icez 318 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE; Le 8 Décembre au foir. Breda. La Haye. Leyden. Beverwyk. Francker. 20. 32 16, 13. O. Le 26 Janvier au foir. Rotrerdam. La Haye. Leyde. Beverwyk. Francker. 8. 10. 10. $« = On a vu plus d'une fois des différences auffi confidérables; par exemple , le 7 de Janvier 1742, le thermomètre étoir à Harlem, à 153 à Sparendam, à 4 ; à Zevanemburg, à 4 3 à Alkmaer , à 7; à Bergen, village de la Nord-Hollande, à 4 , & au Æelder , village au haut de la Nord-Hollande , à 21. On en trouve d’autres exem- ples ailleurs (1). En voici un des plus forts que je me rappelle. En 175$, le plus grand froid à Goringue fut de 199 au-deffous de o, le 8 Février, À Caulenburg , ville diftante de Gortingue de deux milles d'Allemagne, le plus grand froid fut de 30° au-deffous de o, le premier de Février. En fuppofant donc que le froid ait été à Gottingue aufli violent le premier de Février, qu'il l'a été le 8, ce qui fürement n’eft pas, il y aura toujours eu une différence de 11© fur un froid aufli violent (2). 4°. On peur obferver que le mercure du baromètre s’eft fou- tenu à une hauteur très-extraordinaire, pendant le froid du mois de Janvier. Le Pere Corte remarque que le mercure s’eft toujours foutenu fort haut à Montmorency, durant le cours de ce mois. s°. On peut remarquer enfin, que les jours qui ont précédé ceux du plus grand froid en Janvier, & ces jour-là mêmes , ont été des jours d’aurore boréale. On a vu cetre lumière les 20, 21, 23,24, 25 & 28:le 26 & le27, le ciel éroit très-couvert. Certe obfervation n’eft pas conforme à celle de M. Maraldi, qui croyoit que l'A. B. paroïît le plus fouvent pendant un tems doux (3). » Ce » qu'il ya de conftant, dit-il, eft que les jours de ces apparences, » l'air a toujours été fort doux & fort tranquille, foit qu’elles foienr > arrivées dans le printems & dans l'automne, foic qu’elles ayenct (1) Hif. de l'Acad. 1766, page 41. (2) Nov: Comm. Petrop. Vol. VII, page 309. (3) Mém, de l'Acad, 1716 , page 336. SUR L'HIST. NATURELLE ET LES ARTS. 319 » paru en hiver, Cette remarque , que nous fimes dans les Mémoires » de 1727 fur cetre lumière, s’eft toujours vérifiée depuis; de forte » que dans les années de fécherefle, cetre température d'air, pen- » dant le jour, paroît un indice prefque certain, que la lumière » paroîtra le foir. Ces conjeétures, quelques foibles qu’elles paroiffent, » nous ont fervi pour nous préparer à obferver ces phénomènes, » Peut-être que cette difpolition d’air concourt à la formation de » ce phénomène; peut-être aufli qu’elle n’y a aucun rapport «. Je me rappelle aufli avoir lu dans les Mémoires de l'Académie, quel- ques obfervations qui rapportent que l'air paroïfloit devenir plus doux pendant l'apparition du phénomène. Sur la denfité de la Neige. J'ai parlé plus d’une fois de la denfité de la neige, & j'ai allé- gué plufieurs exemples des variétés qu'on y trouve quelquefois. Le Pere Corte la fuppofe conftamment fix fois plus rare que l’eau, & c'eft en effet ce qui fuit des expériences de M. Sedileau. Mais outre ue ces expériences ont été faites fur la feule neige tombée le 1 5 de Pie 1689 (1), M. Sedileau avoue lui-même que cela dépend de la manière dont elle tombe , & qu'elle rend davantage quand elle tombe à gros flocons, parce qu'alors elle s’entafle plus. Qu'il me foit donc permis d’obferver que la denfité de la neige eft très- va- riable , & d’en apporter les preuves fuivantes. Selon M. /a Hire (2), la denfité de la neige eft à celle de l’eau, AU MOINS COMMME. 314 10, OU.) elle le lett =l:333. dAINEES 010 commine (3) 4e Le Lil Pinei Ve he Lie lee ge : OÙ —1: 6. Le 14 Février 1711, jour que la neige étoit fort déliée Borr OC) HÉSLNOMONE Mer ME ATEN PEN M. Mufchembroeck a vu de la neige dont la denfité étoit dicellelderlieate#letP Pc PE PRE: elle der de ils 124 Selon M. Krafft (5), elle eft comme. . . . : 1:27; M. Celfius (6) a déterminé, par diverfes obfervations , CIE) PrOPOrEION! COMME. Le Acte la - Ne = eo De UTT. (1) Hifi. de l'Acad. anciens Mém. Tome 2, page 59, (2) Hifi. de l'Acad, 1693, page 231. (3) Mém. de l'Acad 1692, page 29. (4) Mém. de l Acad, 1711, (5) Comm. Petrop. XIV, page 213. (6) Aëa Lerter Suecia | N°. 1731, Te 3, page 41: 3350 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, La denfiré de la neige, comprimée autant qu’elle peut l'être, efti,;felon le: mème Auteur) + EMEMMENNENN rt 2,8. &' felon M! Kraffr. | 21 2 SRE NOR 157 La neige humide & preffée, ef, felon M. Celfius, . —1:1,$3. Enfin, j'ai fait moi-mème un très-gtand nombre d'expériences, dont voici les réfulrats. La denfté de la neige étoit à celle de l’eau En1772,le4Janv.—1: 5,64. En1774,le2 Janv.=1: 17,1. En1774,le 2 Déc.=1: BEM GA OFÉVIE=— 1:75 02e Hu NE 25-00: 0:94. 12Nov.—1: 6,58. 8. —1] ; 2 TLC OT 20 ET: 7 7e OT 29 FEU 169 2:00 F4 773 leo lave 1: 30. «—1:10,31 2167 ee 12% 26. re 1773, enFévr.—1 : 5518. DEAN 4 Févr. —1: 31 DEG=EIE15:58e AORNMEENN EEE 22 Mars —1: On voit donc que de 24 obfervations, il y en a 18 où la neige eft moins denfe que dans la proportion de 1 : 6, & que parmi ces 18, il y en a 3 où elle eft à-peu-près + de la denfité de l’eau. Si l'on prend un terme moyen de ces 24 obfervations, on trouve la denfité de la neige à celle de l’eau, comme 1 à 95 à- peu- près. SUR L'HISTA NATURELLE"ET LES. ARTS. 331 LE le ON TR GE Adreffée à l’Auteur de ce Recueil, Par M. LE ROY, de l'Académie Royale des Sciences, Ta 1 l'honneur de vous écrire, Monfeur, pour vous faire part d’une découverte importante qu’on vient de faire en Anglererre, relative- ment à l'électricité & aux poiffons qui donnent une commotion, ou ui font reflentir une engourdiffement, &c. M. Walsh, bien connu dans le monde favant par fes curieufes expériences fur la torpille, faites à la Rochelle en 1772 (1), viene de découvrir que dans le coup que donne l’anguille de Surinam , ap- pellée par le Chevalier Linée gymnotus eleétricus , on voit , comme dans le choc de Leyde, une étincelle fort fenfible , lorfque les chofes fonc difpofées convenablement. Ainfi cette expérience diflipe tous les dou- tes fur l'identité du fluide électrique , avec celui en vertu duquel cette anguille , comme la torpille, fait reffentir une commotion ; mais pour vous donner une idée plus claire de certe curieufe découverte, 1l eft à propos de reprendre les chofes de plus haur. Vous vous rappellerez facilement , Monfieur , que les expériences de M. Walsh fur la torpille, annonçoient une reflemblance marquée entre le fluide électrique & celui au moyen duquel ce poiffon produie la fenfation fingulière , obfervée depuis fi long-tems, puifque cetre fenfation peut être tranfmife par les fubftances métalliques, comme le choc de Leyde, & qu’au contraire, elle eft toujours arrêtée, de mème que ce choc, par les fubitances électriques par elles-mêmes ; mais vous vous rappellerez de mème que, quoiqu'une pareille ref. femblance dans les effets fût très-propre à établir l'identité de ces deux fluides, il y manquoit un phénomène effentiel & frappant , je veux dire l’étincelle qu’on n’apperçevoit point, & qu’on obferve ce- pendant toujours dans le choc de Leyde, quelque léger qu'il foir. En effet, malgré toutes les peines que M. Walsh avoir prifes dans fes expériences , pour avoir une profonde obfcurité & pour découvrir fi, lors du coup de la torpille, on ne verroit pas d’étincelle, il ne put (x) On en trouve la Relation dans ce Recueil, Cahier du mois de Septembre 1774; page 215: 332 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE ; jamais en appercevoir aucune. Or, la parité des effets paroiffant fe démentir à cer égard , plufeurs Phyficiens formèrent des doutes fur l'identité du fluide éleétrique & de celui par l’intermède duquel la torpille excite une commotion; & leurs doutes paroïfloient trop fon- dés pour les leur reprocher. M. Cavendish même entreprit à certe oc- cañon (1), de.montrer par différentes expériences, comment le choc de Leyde pouvoit être fenfible , quoique l’étincelle füc fi foible qu’à peine elle franchiffoit un efpace d’un quarantième de pouce; mais enfin, quelque petite qu’elle für, c’étoit roujours une étincelle. IL éroit donc bien effentiel de faire évanouir ces doures par des expe- riences certaines ; il n’y avoit gueres d’apparence d'y parvenir avec d’autres torpilles, quand même elles auroient été plus grandes que celles de la Rochelle, par l’inutilité des tentatives que M. Walsh avoit faites avec ces dernières ; il falloir donc avoir recours à quelques autres poiffons dont les effers étant analogues, mais plus forts , on püt efpérer que dans leur choc ou commotion, on verroit ou on dé- couvriroit cette étincelle qu’on n’avoit pu appercevoir dans celui de la rorpille, L'anouiile de Surinam, ou Ze gymnotus eleéricus , produifant des effers femblables à ceux de la torpille, mais en même-tems beaucoup plus confidérables, comme M. le Chevalier Pringle l’a rapporté dans fon Difiours fur La Torpille (2), il éroit naturel de tenter fi ce poiffon, en donnant fon coup, feroit voir en même-tems certe érincelle tant defirée; mais c’écoir- [à la difficulté. Dans des expériences de cette importance, on veut voir par foi-mêème, & 1l n'éroit pas facile de fe tranfporter dans le pays où ces anguilles fe trouvent ; car on n'a pas toujours Le rems de faire un voyage de deux mille lieues pour tenter une expérience. Ïl eft vrai que des Anglois, par une louable conftance à fuivre un mème objet, & qui eft particulière à leur nation , ont fou- vent entrepris de grands voyages pour des objets qui ne le méritoient pas tant. Mais M. Walsh, étant membre du Parlement, ne pouvoit quitter l'Angleterre pour un tems aufli confidérable que celui que de- mande un pareil voyage. Il ne lui reftoit donc d'autre parti que de tâcher de faire tranfporter de ces anguilles en Angleterre; maïs il y avoir de grands obftacles par la longueur de la traverfée. Le célèbre Mufchembroeck , qui avoit voulu connoître par lui-mème toutes les merveilles qu'on en racontoit , avoit échoué autrefois dans un pareil {1) Voyez fon Mémoire , page 196 de la première Partie des Tranfaétions Philofophiques de cette année 1776. (2) On en trouve la Traduétion dans ce Recueil, Cahier du mois de Mars 1775, page 241. projet, SUR L'HIST. NATURELLE ET LES ARTS. 335 projet. Elles éroient routes mortes dans le paflage, ou en arrivant en Hollande. Cependant ces difiicultés n'arrétèrent point M. Walsh; il en fit venir une dès l’année paflée ; mais faute apparemment de foins nécellaires , elle eut le fort de celles de Mufchembroeck. Loin de fe rebuter, & pour qu'on apportât plus d'attention dans leur tranfport, 1l promir une récompenfe confidérable pour chacune de ces anguilles qu'on tranfporteroit vivante en Angleterre; & cette promelle a fi bien opéré parmi les gens de mer qui fréquentent les établiflemens des Hollandois en Amérique, qu'on lui en a apporté cinq toutes en vie à Londres , l'été dernier, Il y en a une de morte; mais les quatre au- tres étoient encore dernièrement très-vivantes, & même vigoureufes, Pour cer effet, on les tient dans une eau qu’on a foin d'entretenir à la température des rivières de la Guiane, c’eft-à-dire, entre le vingt- quatrième & le vingr-feprième degré du thermomètre de M. de Réaumur. On imagine bien quelle devoir être l’impatience de M. Walsh de reconnoître fi, lorfque ces poifflons donnent leur coup, on apperce= vroit cette étincelle qui devoit trancher toute difhiculré, Voici ce qu'il m'écrivir à ce fujer, au mois d’Août dernier: Après m'avoir parlé de l’arrivée de ces anguilles à Londres, il continue en ces ter- mes : » C'eft avec plaifir que je vous apprends qu’elles m'ont donné » une étincelle electrique ; perceptible dans fon pallage à travers une pe- » tite fente ou féparation pratiquée dans une feuille d’étain collée fur » du verre, Ces poillons étoient dans l'air; car cette expérience n’a » pas réufi dans l'eau ; leur électricité eft beaucoup plus forte que celle » de la torpille, & il y a des différences confidérables dans leurs effets » électriques «, Je reçus, quelque rems après, une lettre du Préfi- dent de la Sociéré Royale, M. le Chevalier Pringle, dont je vous ai déja parlé, qui me confirmoit cette découverte; enfin, M. Ma- gellan , de la Société Royale de Londres & Correfpondant de l’Aca- démie des Sciences, m'en a mandé encore dernièrement des détails intéreffans, dont il me prie de vous faire part. Selon ce qu’il me mar- que, le Chevalier Pringle & un grand nombre d’autres perfonnes de la Sociéré Royale, au nombre de plus de quarante , s'étant rendues dans l'endroit où éroient les anguilles de Surinam, M. Walsh leur fe voir très-diftinétement l’érincelle éleétrique dans l'inftant où le poiffon donnoit fon coup; ce qui fut répété jufqu’à dix ou douze fois. Cette étincelle fe manifeftoit dans le moment où, comme je lai dit plus haut, le fluide fautoit d’un des bords de la fente à l’autre. M. Ma- gellan ajoute : Vingt-fept perfonnes, du nombre defquelles j'étois , ayant fair enfuite yne chaîne en fe tenant routes par la main, & les deux de chaque extrémité ayant touché en même-tems l’anguille, Tome VIIT, Part. Il. 1276. Ver 334 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, toutes les perfonnes de la chaîne entr'elles deux, reffentirent le même coup qu'elles, & au même inftant, comme cela arrive dans le choc de Leyde. Je voudrois pouvoir ajouter ici quelque chofe de plus circonftancié far la manière dont M. Walsh fair cette expérience de l’étincelle fi intéreffante & fi décifive; mais il ne m'a rien mandé de plus parti- culier que ce que je vous en ai dit plus haut. Je conjeéture qu'il s'y prend à-peu-près de même qu'il s’y prenoit, lorfqu’il vérifioit en plein air la tranfmiffion du coup de la torpille. Je concois, en conféquence, qu'il pofe l’anguille fur une fervierte mouillée, placée fur une table; qu'il prend enfuire deux bouts de fil de fer, ou de laiton, qui com- muniquent chacun bien intimement & de part & d’autre avec la feuille d’érain collée fur le verre, & dont la fente, ou la féparation, fert à faire voir l’étincelle ou le paffage du feu d’un bord à l’autre; de manière que ces deux fils ne forment plus, par cet arrangement, qu’un tout continu ; enfin, qu'ayant placé un des bouts de ce fil, ainfñ difpofé fur la ferviette mouillée , au-deffous du ventre de l’a- nimal, du côté de la queue, il le follicite avec l’autre bout par- deflus & vers la tête, à donner fon coup. Car les organes qui don- nent le choc, n'étant pas placés de même dans l’anguille de Surinam , que dans la torpille , il y a apparence que pour l’exciter à le donner, il faut en même-tems l'irrirer vers la tête, tandis qu'on communi- que avec la queue (1). J'en ai dit aflez, Monfeur, pour vous faire voir, comme je l'ai avancé, que cette découverte de M. Walsh met le fceau aux preuves de l'idenuité du fluide , au moyen duquel certains poiffons nous cau- fent un engourdiffement ou une commotion , avec le fluide qui pro- duir l'électricité. Les effets de ces deux fluides fe tranfmerrent de mème par les métaux; ils font arrèrés ou fufpendus, dans leur cours, de même par les fubftances éleétriques par elles mêmes; enfin ils font l’un & l’autre lumineux, comme nous l’avons appris par certe découverte. Tane de reffemblances ne peuvent appartenir qu'à l'identité; mais l’im- portance de cette découverte ne fe borne pas là; elle nous montre encore que le rôle que l’éleétricité joue dans l'univers que nous fup- polions déja fi étendu, eft encore beaucoup plus vafte que nous ne geo (1) Lorfque l’anguille de Surinam veut tuer un poifon, fa proie, elle s'avance vers lui comme pour le faifir ; mais dans l’inftant, fans le toucher, elle lui donne fon choc, & on le voit aufli-1ôt rourner {ur le dos , rantôt mort, tantôt feule- ment étourdi. Il paroît ainf, par cette manœuvre, que le plus grand efker de la commotion eft au-devanc de fa tête. SUR L’'HIST. NATURELLE ET LES ARTS. 335 l'avions imaginé. En effer, quel nouveau champ cette découverte ne nous ouvre-t-elle pas? quels objets de recherches pour les Phyfio- logiftes pour expliquer comment il peut y avoir des organes chez les animaux , qui peuvent comprimer le Auide éleétrique dans les milieux qui les environnent de manière à produire des fenfarions fi prompres & fi extraordinaires ? pourquoi ces animaux ne fe trouvent que dans l'eau ; fi c’eft parce que ce Auide étant non électrique par lui-même, leur action peut fe tranfmertre facilement, même à de grandes dif- tances ; ce qui ne pourroit avoir lieu dans un fluide électrique par lui-même, comme l'air. Si l’exiftence de ces animaux dans l’eau n'eft pas encore nécellitée, parce qu’ils trouvent conftamment dans cer élé- ment un réfervoir continuel du Huide néceflaire à leur aétion; quel rapport il y a entre ce fluide & le fluide nerveux qui fe trouve en fi grande abondance dans les organes deftinés à cette action par la multitude de nerfs qu'on ÿ rencontre. Mais je ne finirois pas fi-tôt, fi je m'écendois fur tout ce qu'il y auroit à dire fur ce fujer; je me bornerai donc là ; néanmoins je ne puis m'empêcher, avant de terminer cette lettre, de faire une remarque qui fe préfente trop na- turellement pour la pafler fous filence. Il y a deux mille ans qu'on difpute fur la caufe des effers de la torpille ; & en fuivant la même route, on auroit pu difputer encore deux autres mille ans fans en ètre plus avancé; cependant cinquante ans d’expériences fuivies fur l'électricité, fujer qui parut G frivole d'abord , ont porté nos con- noiffances au point de parvenir à découvrir certe caufe fi obfcure ; & cent après que M. Richer eut appris à l’Europe qu’il y avoit à la Cayenne une anguille qui donnoit des coups plus forts que ceux de la torpille, & faifoit des effets plus extraordinaires encore , on par- vient à connoître que ces effets tiennent à la même caufe, à l’é- leétricité. O illuftre Bacon! comment a-t-on pu méconnoître , pen- dant fi long - tems, que c’étoit la nature elle - mème qui r'avoit infpiré, lorfque ton génie traça la route qu’il falloit fuivre pour la connoître ? Ca? al ‘ 336. OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, pe — VV —————.".—.—.".—) J(C NOUVELLES LITTÉRAIRES. SOU TUE LD AP ABIR TE 50 Propofe par l’Académie des Sciences , Belles-Lettres & Arts de Lyon, pour l’année 1777. M. De Fleffelle, Intendant de la Ville & Généralité de Lyon, empreflé de concourir à l'avancement des Arts qui feurifflent en certe Ville , a invité l'Académie des Sciences, Belles-Lettres & Arts, qui y eft établie, de propofer, en fon nom , une Médaille d’or, du prix de 300 livres, pour la perfeilion de la Teinture noire fur la Sote. L'Académie a accepté cette commiflion avec reconnoiffance , & s'emprefle d'annoncer qu’elle décernera ce Prix, dans la Séance pu- blique de fa rentrée, au mois de Décembre 1777 , à celui qui aura conftaté avoir porté, en France, à une plus grande perfe&ion, la Teinture noire de la Soie, ou par un M°morre détaillé , accom- pagné d'échantillons d’eflais, ou par des expériences répétées par- devant les Commiflaires qui feront nommés par l'Académie , & qui s'engageront à garder le fecret du procédé , fi l'Inventeur l’exige. L'intention de M. l’Intendant érant au furplus de folliciter la fa- veur du Gouvernement pour l'Auteur couronné. | Les Académiciens ordinaires font feuls exceptés du concours : les Mémoires n’y feront admis que jufqu’au premier Août 1777. Ils pourront être adrellés à l’Académie , fous le couvert de M. l’Inten. dant; ou francs de port, à M. de la Tourette, Secrétaire perpétuel de la Claffe des Sciences ; ou à M. Bollioud , Secrétaire perpétuel de la Clafe des Belles-Lettres ; ou chez Aimé de la Roche, Impri- meur-Libraire de l’Académie. MM. les Souféripreurs du Journal de Medecine font priés d'indiquer leurs Adreffes par une Lettre, franche de port, qu'ils feront par- venir à Madame la Veuve Thibouff , Imprimeur du Roi, Place de Cambrai , à Paris, & d’inférer dans cette Lertre une Note qui puiffe fervir à retirer des mains de M. Wincent , leurs avances pour ce qui refte à courir du tems de leur Abonnement; au moyen de quoi, ils continueront à recevoir ce Journal comme ci-devant. SUR L’HIST. NATURELLE ET LES ARTS. 337 Le défaut d’adrefles retardera l'envoi prochain ; mais enfuite on le fera paroître avec exactitude, On ell prié d’ajouter au haut de la Soufcription des Lettres, ou fur l'enveloppe des Paquers qui contiendront des Mémoires où Ob- fervations , ces mots : Journal de Médecine. On Trouve chez Ruault, Libraire, rue de la Harpe , quelques Exemplaires des Livres Etrangers qui fuivent : Médirationes Theoretico - praëlicæ de furore hemorroidum internarum me- thodicè confcriptæ a juflo Arnoldo Gulich, Doë. Med. Editio altera : 1n-8°. br. Prix 2 Liv. Hifloria Naturalis Dentium humanorum in qué eorum Strutura , ufus, formatio ; incrementum ac morbi explicantur; atque ancis figuris illuftran- ar, Gc. in-4°. Prix 12 liv. br. Novi Commentarii Societatis Regiæ Scientiarum Gottingenfis | Tomus VI, in-4°. avec figures. Prix 12 liv. br. Chriflophori Saxii onomaflicon Litterarium Jève nomenclator Hiflorico- criticus præffantiffimorum omnis aetatis, populi , artiumque formule Jerip= Zorum ; ilem monumentorum maxime iluftrium ab orbe condito ufque ad Jeculi quod vivimus tempora digeflus | Ëc. Tome 1, ir-4°. grand pa- pier. Prix 8 Liv. 10 {. br. Exercitationes de lingua primæva , &c. Aulore Stéphano Morino , in-$°. avec figures. Prix 4 liv. 6 Leçons de Morale, ou Leëlures académiques faites dans LUniverfité de Leipfick , par feu M. Gellert, traduit en François, 2 vol. in-$°, Prix 9 Liv. br. Vie & Lettres du méme , traduit de l’Allemarid en François, 3 Parties 27-89. Prix 9 Liv. br. , Nouvelle Ediion des Anis & Méiers, publiée par M. Bertrand, Profelleur , & par la Sociéré Typographique de Neufchâtel. Tomes 1, HI & IV. (Poyez ce qui a été dit de cette utile entreprife, dans Le Tome VI du Journal de Phyfique , année 1775 , page 429.) Le prix de chaque volume eft de 12 livres, mais il augmente en proportion du nombre des gravures, dont chaque planche eft payée 4 fols. Cer Ouvrage eft poullé avec zèle. Le cinquième volume paroït déja, & il ne nous eft pas encore parvenu. Le fecond volume contient les quatre premières Sections fur les fers de MM. de Courtivron & Bouchu, & l’art du Charbonnier, & fes additions par M. Duhamel. Il eft enichi de 33 gravures parfaitement bien exécutées, ce qui fait monter le prix de ce volume à 18 livres 12 fols, tandis que les mêmes Cahiers, dans l'édition de Paris, coûtent 38 liv, 6... 338 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, Le troifième volume contient les Arts du Tanneur, du Chamoïfeur; du Méiflier , du Corroyeur , du Parcheminier, de l’'Hongroyeur , du Maroquinier , de travailler les cuirs dorés & argentés, du Cor- donnier, du Paumier-Raquettier & de la Paume. IL à 21 gravures, & coûte par conféquent 16 liv. 4 fols : l’Edirion de Paris, 42 liv. 10 fols. Le quatrième renferme l’art du Thuillier & Briquetier ; l'art de tirer des Carrières la pierre d’ardoife, de la fendre & de la tailler; l’art du Couvreur; l’art du Chauffournier ; l’art de faire le Papier; l'arc du Cartonnier & l’art da Cartier. Il a 28 gravures, & coûte 17 liv. 12 fols.... Edition de Paris, 48 liv. 18 fols. ; de forte que ces trois volumes reviennent à $52 livres 8 fols, & les mêmes Arts, Édition de Paris, à 129 liv. 14 fols. La plupart de ceux de Neufchâtel font confidérablement augmentés par des notes aulli inftruétives que curieufes ; ce n’eft donc point une fimple con- ie-façon , comme on s'efforce de l’annoncer. Journal, dédié à MONSIEUR, Frere du Roi, Table des. Journaux anciens © modernes | contenant les jugemens des Journaliftes fur les principaux Ouvrages en tout genre, fuivie d'Obfervations impartiales & de planches en taille-douce ou en couleur; par une Société de Gens de Lettres. Nous avons publié le Profpeétus de ce nouveau Journal , & annoncé qu’on foufcrivoit à Paris chez Lacombe, Li- braire, rue Chriftine , & que le prix de la Soufcription eft de 24 livres pour Paris, & de 30 livres pour la Province. Le premier vo- lume vient de paroître & elt compofé de 240 pages, & il en pa- roîtra un femblable par chaque mois. Cetre Table eft une manière ingénieufe de rémettre nee fcène des objets ou trop peu confi- dérés dans le rems , ou prefque oubliés aujourd’hui. Sans nous ar- rèter à parler des objets de Littérature qui ne font pas de notre genre, nous dirons que plufeurs points eflentiels dans les Sciences, ont reffemblé aux modes françoifes. Ils ont beaucoup occupé dans un tems, on ne parloit que d’eux, on ne voyoit qu'eux. Peu-à-peu l’en- thoufiafme à diminué, & l’objet a ceffé de fixer l’attention. Cette époque étroit cependant effentielle, & c’éroit le moment que l’on devoit choifir pour raflembler , en un corps de doétrine , ce qui avoit été écrit pour & contre, afin de fixer le point où en étoit refté la Science, & éviter à ceux qui veulent la reprendre, le tra vail faftidieux de rechercher dans une infinité de Livres, quelques vérités ifolées. Puiffe ce Journal, comme nous l’efpérons, préfenter aux Savans des points à difcuter, & les engager à les reprendre, pour ainfi dire, en fous-œuvre. L'Auteur, chargé de la partie des Sciences, paroît beaucoup tenir à l’ancienne doctrine, &, pour ainfi dire, rejetter l’actraétion Nevtoniene. Il entre par conféquent dans une lice où il aura beaucoup d’ennemis à combattre, SUR L'HIST. NATURELLE ET LES ARTS. 339 Gazete de Littérature des Deux-Ponts. Aux Eloges que nous n’a- vons ceflé de donner à cet Ouvrage périodique, on doit fans celle en ajouter de nouveaux. Elle vient de changer d’Auteur, & il fe- roit difficile de décider fi elle a perdu ou gagné dans le change- : ment. Il eft inutile de répéter que c'eft un des Ouvrages pério- diques qui nous met le plus complerrement à même de connoître la Littérature étrangère, & les ouvrages nouveaux concernant les Sciences. On lit dans le N°. 68 de cette année , le dérail d’un phé- nomène affez fingulier qui mérite d’exercer la curiofité des Natu- raliftes. » [1 y a en France, dans un Cabinet d’Hiftoire Naturelle, une Agathe qui, des deux côtés , repréfente exactement un cigne. Si l’on mer cette Agathe dans un lieu humide , & qu’on l’enve- loppe pendant trois heures dans du papier mouillé , le. cygne dif- paroït entièrement, & la pierre qui étoit auparavant grife & par- femée de points rouges , n’eft plus que d’une couleur uniforme d’un gris cendré ; enfin , certaines taches auparavant tranfparentes , de viennent opaques. Qu'on Ôte enfuite cette Agathe du lieu humide, aufli-rôt le cygne reparoît, & les taches redeviennent tranfparentes commeñuparavant ; cependant, on ne peut douter que ce ne foit une véritable Agathe «. Il auroit convenu de citer le Cabinet où l'on voit cette pierre fingulière, afin d’ètre à même d’examiner ce fait. On foufcrit , pour cet Ouvrage, à l’Imprimerie Ducale des Deux-Ponts; à Paris, chez Lacombe , Libraire, rue Chriftine, & chez les principaux Libraires du Royaume. Il en paroît deux feuilles par femaine. L'Abonnement eft de 18 livres, port franc, dans tout le Royaume. Elémens de Taëlique pour la Cavalerie; par M. Mottin de la Balme, Capitaine de Cavalerie, ancien Officier- Major de la Gendarmerie Françoife. À Paris, chez Ruault, Libraire, rue de la Harpe, 1 vol. in-8®, de 272 pages. Perfonne n’avoit encore confidére , fous le point de vue, cette partie de la Tactique. Quoique cet Ouvrage nous it paru neuf, qu'il y ait beaucoup d'ordre & de marche dans les idées, que le ftyle le faffe lire avec plaifir , ce n’eft pas à nous à décider fur fon mérite. La Phyfique fe plaît dans la folitude, fuit le tumulte des camps , les horreurs des combats. L'art de la guerre s’eft fait une phyfique particulière , dont nous ne faurions nous occuper. À Expofé des moyens curatifs & préfervatifs qui peuvent être employés contre les maladies peflilentielles des Bêtes a cornes, publié, par ordre du Roi, par M. Vicq-d'Azyr, Docteur- Régent de la Faculté de Médecine, Médecin - Confulrant de Monfeigneur le Comte d'Artois, de l’Académie Royale des Sciences, Profeffeur d’Anaromie humaine & comparée, Commiflaire - général pour les Epidémies, & premier 349 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, &c: Correfpondant avec les Médecins du Royaume, 1 vol. #7-8°. de 728 pages. À Paris, chez Mérigot, Libraire, Quai des Auguftins. Prix 4 liv. 10 f br. Cer Ouvrage eft divifé en trois parties ; la pre. mière contient les moyens curatifs, & on y compare les maladies des hommes avec celle des beftiaux ; la /éconde , renferme les moyens préfervatifs ; la sroifième , comprend les ordres émanés du Gouver- nement. On y a joint les principaux Edits & Règlemens des Pays Bas, relativement à la maladie épizootique, & le Mandement de Monfeigneur l’Archevèque de Touloufe fur le mème fujer. Peu de perfonnes ont été plus à même de fuivre les progrès , la marche & les terminaifons de l’épizoorie, que M. Vic d’Azyr qui a été charve, par ordre du Gouvernement , de fe tranfporter fur les lieux infec- tés. C’eft-là où, fans celle au milieu de ces ravages, il a obfervé, réfléchi, examiné & compaté; enfin, cet Ouvrage précieux eft le réfulrat de fon travail. Quelle différence de fes obfervations avec celles de ces tranquilles Ecrivains, qui ne voyent les chofes que du fond de leur Cabinet, ou fouvent fur le rapport des perfonnes plus zélées qu'inftruites ? C’eft aufli ce qui a engagé Sa Majefté à rendre un Arrêt de fon Confeil, du 29 Avril 1776, qui établit une Com- million de Médecins à Paris, pour tenir une Correfpondance avec les Médecins de Provinces, pour tout ceiqui peut être relatif aux maladies épidémiques & épizootiques , dont M. Vic-d’Ayyr eft le premier Correfpondant. Il n’eft aucun Citoyen qui n’applaudiffe aux vues bienfaifantes du Monarque, & de celui qui lui en a préfenté le projet. Diféours en forme de Differtation , fur l'état aëluel des Montagnes des Pyrénées , @ [ur Les caufes de leur dégradation ; pat M. d’'Arcer, Docteur-Régent de la Faculté de Médecine de Paris, Lecteur & Pro- fefeur Royal, pour fon inftallation & l’inauguration de la Chaire de Chymie au Collése de France, 1 vol. 27-8°. de 134 pages. A Paris, chez Cavelier, Libraire , rue St-Jacques, Il feroit difhcile de faire l’ex- trait de ce Difcours fans le mutiler ; il faut fe tranfporter fur ces mon- tagnes pour les y étudier avec un tel Maître & un tel Obfervateur. Il y a joint des expériences & des obfervations curieufes fur les va- riations du Baromètre , fur le Thermomètre & autres morceaux de Phyfique , d'Hiftoire Naturelle & de Chymie, avec une Note de M. 4e Monnier, fur l’Aiguille aimantée. Nous ferons connoître quelques-unes de ces obfervations, NUIT Il LILI Will (IL } SAONE AR ARE LE RUE te RTC NÉ ET s " £ : G UE PRES ; ns À (APE hs ae # ch hui | ul | OBSERVATIONS Se HUMCNTE EL AP H;Y SHLQ'U EF, SURBRALHISTOIRE::NATUR ELLE RO SOUL RAD E SA RTS, ‘AVEC DES PLANCHES EN TAILLE-DOUCE, | DÉDIÉES Nes. LE G OM ED AR TO: LS: Par M. l'Abbé ROZIER, Chevalier de PEglife de Lyon ; de l'Académie Royale des Sciences, Beaux-Arts & Belles-Lertres de Lyon , de Villefranche, de Dijon, de Marfeille, de Nifimes , de Fle[Jingue , de la Société Impériale de PhyJt- que & de Botanique de Florence , de Zurich , de Madrid , Correfpondant de la So- ciété des Arts de Londres , de la Société Philofophique de Philadelphie , &c. an« cien Direëteur de l'Ecole Royale de Médecine - Vétérinaire de Lyon. TOME HUITIÈME. NOV Æ M'B;R Ej1776. EEE MM. les Soufcripteurs qui defireront continuer à recevoir ce Journal, font priés de renouveller leur Abonnement dans le mois de Décembre , afin qu'on ait le tems de faire imprimer les Adrelles pour le mois de Janvier, & d'envoyer des adreffes d’une écriture bien lifible. Se E 4yS Aa UPE Ab RAT SN, Chez RUAULT, Libraire, rue de la Harpe. ENTER TES LS MARDIGICAMLEXEEAVRE Pr PICUP IR PULL EG. E 1 DU R:O"T. An Wars A MM. les SouscRIPTEURS.dont lAbonnement finit à la fin de l'année 1776. P LUSIEURS Soufcripteurs fe font plaints de ce qu’ils ne rece- voient pas les Cahiers aufli-tôt qu'ils avoient formé leurs deman- des. Ils font priés d'obferver que fouvent ils s’adreffent à des Commiflionnaires qui négligent de foufcrire, ou de faire par- venir les Cahiers à leur deftination. Pour éviter, à l'avenir , de pareils reproches & dé femblables lenteurs, MM. les Soufcrip- teurs, qui ont été dans le cas d’être mécontens, font invités À recommander expreflément aux perfonnes qu'ils chargent de leurs commiflions , d'être plus exa@es que par le pañté : ou s'ils jugent la chofe plus commode , de configner le montant de la Soufcription au Bureau des Poltes de leur Ville, fans l'affran- chir, mais affranchir feulement la Lerere qui en donne avis. Un fecond fujet de plainte vient de ce que ceux, chez lefquels on prefcrit de remettre les Exemplaires, les prêtent , les égarent, & difent enfuite ne les avoir pas reçus. On prévient que l’on fait l'appel de chaque Cahier & de chaqué'Soufcripteur, comme dans un Régiment on fait l'appel des Soldats, & tous les Cahiers font portés fermés , dans un fac cacheté, à la grande ou à la petite Pofte de Paris. On voit par - là, que fi quelques-uns ne font pas rendus, ce n’eft plus la faute du Bureau des Journaux. MM. les Soufcripteurs, qui défirent renouveller leur Abon- nement pour l’année 1777, font priés de donner /eur nom & de- meure , écrits d'une manière lifible , dans le courant du mois de Décembre, ou le plutôt poflble, afin d’avoir le tems de faire imprimer leur adrefle. On foufcrit à Paris, chez l’Auteur , Place & Quarré Sainte - Geneviève , & chez les principaux Libraires des grandes Villes. Le prix de la Soufcription eft de 24 livres pour Paris, & de 30 livres pour la Province, port franc, | TABLE ll DES ARTICLES Contenus dans ce Cahier. Q> ATRIÈME Mémoire d'Oprique , ou Explication d’un, Phénomène remarqué par M. l'Abbé Royier ; par M. le Doëleur de Godart, Mé- decin des Hopitaux de Vervier, Membre des Académies Impériale & Royale de Dijon & de Bruxelles, page 341 Obférvation de La cryflallifation du Fer ; par M. de Morveau, 348 Effai fur une nouvelle manière de perfeilionner Les Machines électriques ; par M. l’Ange de Villeneuve , 353 Letrre de M. de la Lande, de l Académie Royale des Sciences, à l'Au- teur de ce Recueil, contenant des Notes fur l'Eloge de M. Commerfor , publié dans ce Recueil, Cahier de Février 1775 » 357 Offérvations fur l'éleétricité de La Glace; par M. Achard, 364 Différtation fur les limites des Règnes de la Nature; par M. l'Abbé Dicquemare, 71 3 Mémoire dans lequel on examine, fi les Animaux des différentes familles tranfmettent Le choc ékëtrique, & à quelle fubflance ils doivent cette vertu ; par M. Bertholon, Prêtre de Saint-Lazare, Profeffeur en Théo- logie, des Académies Royales des Sciences & Belles-Lertres de Beziers, de Lyon, de Marfeille , de Nifmes , de Touloufe , & de la Societé Royale de Montpellier , 377 Effai fur la Fourmi ; par M. Barboteau , Conféiller au Confeil Supérieur de la Martinique, Correfpondant de l’Académie Royale des Sciences, & de la Société Royale d'Agriculture d'Angers , 353 Nouvelles Expériences éleétriques; par M. Comus , 395$ Addition à la Deféription du Sphéromètre , inférée dans le Journal du mois de Juin 1776, page 48, éc. 393 Obfervation fur le Pont du Saint - Efprir, 399 Obfervation fur une Afphixie, AOI Expériences faites fur le Pic du Midi dans les Pyrennées ; par M. d’Arcct, Leëteur & Profeffeur Royal de Chymie au Collège de France, 403 Obfervations détachées de lOuvrage de M. Bowl, intitulé : Introduction à l'Hiftoire Naturelle & à la Géographie phyfque de l'Efpagne , 404 Nouvelles Lirtéraires, ALI oo APIPRER" "© CB: ART MAIOUN. J. lu, par ordre de Monfeigneur le Garde des Sceaux, un Ouvrage qui à pour titre : Obfervations fur La Phyfique , fur l'Hifioire Naturelle & fur les Anis, &c. par M. l'Abbé RoZIER; &c. La collection de faits importans qu'il offre pério- diquement à Les Lecteurs, mérite l'accueil des Savans 3 en conféquence, j'eftime qu'on peut en permettre l'impreflion, A Paris, ce 25 Novembre 1776. VALMONT DE BOMARE QUATRIÈME QUATRIÈME MÉMOIRE MAO NBU TE LOUE oO U ExpLicaTion d’un Phénomène remarqué par M. l'Abbé RoziER; Par M. & Doëeur DE GODART, Médecin des Hopitaux de Ver- vier, Membre des Académies Impériale & Royale de Dijon & de Bruxelles. M. L’Abbé Rozier, dans fon Journal, Cahier du mois de Décembre 1775 ; expofe, à la confidération des Phyficiens , le phénomène fuivant. , » Placez à vos pieds & fur le carreau , un chandelier ; regardez >» perpendiculairement cette chandelle, de manière que vos yeux la » fixent, fans interruption, pendant quelques inftans ; aufli-tôt après, » placez un éteignoir fur cette lumière , levez les yeux contre, les » murs de l'appartement, fixez vos regards fur le mème point fans » cligner l'œil; vous ne verrez qu'obfcurité dans le commencement » de cette opération; puis vers le point que vous fixez, paroîtra une » obfcurité beaucoup plus grande que celle du refte de l’apparte- » ment. » Continuez à fixer fans vous laffer ; peu-à-peu , dans le mi- » lieu de cette obfcurité, fe manifeftera une couleur rougeâtre; » elle s'animera infenfiblement, fa vivacité augmentera; enfin, elle » acquérera la couleur de la flamme, & cette flamme fera toujours » fcintillante. » Continuez à fixer fans changer la direction de votre œil , vous » verrez cette flamme, de la groffeur d’un petit œuf environ, fe » détacher du mur & venir comme en roulant très-près de votre œil. » Si vous détournez la rête , elle femblera fuir, mais elle revien- » dra, comme la première fois, fi vous perfiftez de nouveau à fixer » votre vue. Tome VIII, Part. II. 1776. X x 342 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, » Pour réuflir, ajoute l'Obfervateur, d’une manière décidée , dans » cette expérience, il faut , fi je puis m’exprimer ainfi, charger » fes yeux d’une grande quantité de la lumière de la bougie, ce » qui ne peut s’exécuter qu'en la confidérant long-tems perpendicu- æ lairement & fans cligner l'œil «, Ge Je crois, avec M. l'Abbé Rozier , cette obfervation digne de l'attention des Phyficiens; & comme je penfe avoir pofé des prin- cipes qui peuvent fervir à en rendre raifon dans les trois Mémoires qui ont précédé, je vais hafarder ici de l'expliquer. J'obferve d’abord que, quoique l’expofé foit vrai, on peut ce- pendant en retrancher quelques circonftances ; telle , par exemple, que celle de mettre la lumière à fes pieds pour le fixer, puifque l'expérience réuflit dans quelque lieu qu'il foit placé. Il n'eft pas non plus néceffaire d’éteindre la bougie pour voir le phénomène, puifqu’il paroît dans tous les endroits ombrés de la chambre éclairée; que dis-je ? dès qu’on s’eft, pour me fervir de l’expreflion de M. l'Abbé Rozier , chargé les yeux d’une grande quantité de lumière , & qu'on détourne la vue du foyer, on le voit de tout côté, même jufques dans la flamme de la bougie, dans laquelle il s’apperçoit fous la forme d’un petit point noir. Si vous conduifez ce point hors de la flamme par le mouvement de vos yeux, il augmentera de volume, & fi vous arrêtez la vue fur du blanc qui foit ombré, il fe change en une oroffe flamme d’un charmant verd de prairie, d'où ils’en- fuit enfin qu'on n’a pas befoin de fixer la muraille pour faire naître l'illufon , le fpectre ne paroiffant ni plus ni moins, foit qu'on ait les yeux ouverts, foit qu'ils foient fermés ou couverts, & qu’on le voit également, lorfqu'on fe refufe à fixer aucun objet ; qu'il eft même indifférent de regarder en bas , en haut, à droite, à gauche, &c. &c. Mais ces obfervations à part , je dois rendre juftice à l'énoncé de M. l'Abbé Rozier, d'autant qu'il renferme les conditions les plus propres à faire paroître le phénomène dans fon plus grand éclat, ce qui fuffifoit à fon intention, qui n’éroit que de faire re- marquer le fait & d’exciter les Philofophes à en chercher la caufe. Il s’agit donc de rendre raifon des articles fuivans. 1°. Pourquoi ayant fixé, pendant quelque tems, un corps lu- mineux, en voit-on l’image dans les: ténèbres ? 29. D'où vient que cette image ne paroît pas d’abord & qu'elle femble fortir d’un endroit plus fombre que le refte du champ de la vifon? 3°. Pourquoi fe manifefte-t-elle fous une couleur rougeâtre , au commencement qui s’éclaircit peu-à-peu ? SUR L'HIST. NATURELLE ET LES ARTS. 343 4°. Pourquoi acquert-elle la groffeur d’un petit œuf lorfqu'on l'obferve dans les ténèbres, & fe réduit-elle à un point, étant confidérée au milieu de la Aamme ? 5 °: Quelle eft la raifon de fon étincellement ? 6°. Pourquoi le moindte clignement la fair elle difparoître ? 7°. Quelle eft la caufe qui la fait avancer ? quelle eft celle qui la fait reculer ? Quelques embarraffantes que paroiffent ces queftions, néanmoins les principes, répandus dans les Mémoires ci-deflus cités, fournif- fent, à ce qu'il me femble, le moyen d’en donner des raifons aflez Plaufbles; le Leteur en jugera par les réponfes fuivantes. PREMIÈRE QUESTION. Pourquoi voit-on dans les ténèbres les images des objets lumi- neux que l’on a fixé? Pour répondre à cette queftion , il faut faire attention que le phénomène n’a lieu qu'à l'égard des corps brillans ou lumineux, & que les images des autres objets, quelque tems qu’on les aie fixés, ne nous apparoiflent jamais dans les ténèbres; car cette circonftance donne à connoïrre que l'intenfité de l’aétion de l’objet eft la caufe effective du phénomène , & qu’ainfi ce fait eft analogue à ce qui fe paffe dans le toucher, lequel ne conferve de la fenfarion après l'impreflion d’un objet, que lorfque l’aétion de celui-ci a été affez forte pour bleffer l'organe, c’eft-à-dire , que l'image que l’on voit dans les ténèbres , eft l'effet de la violence qu'a fupporté la rérine, ou de fon irritation qui entretient dans les fibres le mouvement, imprimé par la préfence de l’objet , lequel continue à repréfenter celui-ci à l'ame. DEUXIÈME QUESTION. Pourquoi cette image ne paroïît-elle pas d'abord, & femble- t-elle fortir d’un endroit plus fombre que le refte du champ de la vifon? J'ai fait obferver dans mes Mémoires , que les filamens du nerf optique font tous féparés les uns des autres par un tiffu cellu- laire ; or, c’eft une loi commune à tous les organes de l’économie animale , qu'une irritation quelconque, détermine une affluence plus abondante d’humeurs dans les vaiflaux de ce tiflu , & certe abondance y produit une tuméfaétion qui , imprimant les fibres , fufpend leurs mouvemens. Puis donc que l’image en queftion eft l'effet de l'ir- ritation des fibres de La rétine , 1l s'enfuir que de que la caufe xE2 344 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, exiftante celle d'agir & de les ébranler , ces fibres, preflées de tou- tes parts par le gonfliment du tiffu cellulaire, peuvent continuer leur mouvement, & qu'elles le reprennent feulement lorfque le tiffu en queftion s’eft dégorgé , parce que, délivrées alors de leurs entraves, elles tremoulfent de nouveau en vertu de l’irritation qu’elles ont effuyées, & qui fubffte encore, Cette explication eft fondée fur ce qui arrive à toute autre partie fenfble de notre corps qui, étant bleflée, celle de nous faire mal dès qu’on comprime le nerf qui lui donne le fentiment, & qui recommence à nous faire fouf- fric aufitôt que cet organe eît délivré de fa gène ; or , l'irritation étant plus forte dans l'endroit de la rétine impregnée de l'image de l'objet, que par-tout ailleurs , les fibres plus comprimées y font plus en repos & font paroître l’obfcurité plus grande; mais dès que Paction itritante defilte, le tiffu fe dégorge, & les fibres, ceffant d'être comprimées, recommencent leurs vibrations , & font ainfi fortir l’image de l’objer lumineux hors de cer endroit, plus fombre que le refte de la rétine. TRIO SIT ÉMIE QUES TIT'ONN, Pouiquoi cette image fe manifefte-t-elle fous une couleur rou- geâtre dans le commencement, qui s’éclaircit peu-à-peu & devient enfin de la couleur de la flamme ? La détumefcence du tiffu cellulaire étant fuccefhive , les fibres ne seprennent pas leur jeu toutes-à-la-fois, mais les unes après les autres, & la fenfation rouge, ou couleur de flamme qu’elles por- tent chacune, fe trouve, par le mouvement des premières éveillées, difperfée entre quantité d’autres fibres qui, pour être tenues en repos , donnent la fenfation du noir; or, ce rouge ainfi répandu parmi des points noirs, fournit la couleur pourpre, laquelle s’éclair- cit à proportion que le-nombre des fibres éveillées augmente & devient enfin de la couleur de la flamme, lorfque toutes celles que le feu avoit mis en mouvement, font forties de leur état d'engour- difemenr, | QUATRIÈME QUESTION. Pourquoi acquiert-t elle la groffeur d’un petit œuf lorfqu’on l’ob- ferve dans les ténèbres, & fe réduit-elle à un point, étant conli- dérée au milieu de la flamme ? La vifon interne eft produite par la fupériorité du mouvement de certaines fibres de la rétine, qu’elles confervent après l'aétion de l’objer, & il eft de la nature du mouvement de fe répandre à SUR L’HIST.: NATURELLE ET LES ARTS. 345 la ronde en s’affoibliffant ; par conféquent l'étendue de l’image de l’objec fuit la raifon directe de la force de ce mouvement, & l’in- verfe de celui des autres fibres ; or, ces dernières, ayant moins de mouvement dans les ténèbres qu’au jour, il s'enfuir que la fu- périorité des premières doit occuper un plus vafte champ, à propore tion que l’obfcurité eft plus grande , & qu'ainfi l’image, qui fubfifte dans l'œil après laétion de la flamme, peur acquérir le volume d'un petit œuf; c'eft par cette raifon que les luminaires , la flamme, par exemple , d’une-torche allumée, paroiffenc plus gros de nuit que de jour, & c’eft ainfi ce qui fait que la portion éclairée du premier quartier de la lune , femble faire portion d’une aire plus grande que le difque obfcur. Par la raïfon des contraires , lorfque l'œil fe trouve affe@té d’une vive lumière , la limite des objets doit être extrèmement refferrée, d'autant que l’intenfité de cette lumière empiette fur l’efpace oc. cupé par leur image & qu’elle la rappétifle ; ainfi, il n’eft pas éton- nant que le FL foit réduic à un petit point noir, lorfque l'œil le conduit jufques dans la flamme de la bougie. » Lorfque dans » l’obfervation de 1634, Gaflendi vit,:pour la première fois, Mer- » cure dans le Soleil , il,le prit d’abord pour une petite tache. ... » ne pouvant s’imaginer que le globe de certe Planette püt produire » une fi petite ombre fur le difque du Soleil (1)«, ainfi que je le rapporte dans mon obfervation d'une Epilepfe qui rendoit les yeux microfcopiques, inférée dans le treizième Tome du Journal de Mé- decine, dans laquelle l'Editeur à corrigé mal - à - propos le mot de voûte /urbaiffée, qui faifoit le nerf de mon explication par celui de yvoxte agurée , la couleur ne faifant- là rien à la chofe. CHNOUTE LE: 00 E STIRO Mr Quelle eft la raifon de fon flamboyement ? Cette particularité ne fe montre que lorfque l’image paroît dans tout fon beau, c’eft-à-dire , lorfque le fpectre eft étendu & fort allongé , ou terminé par une efpèce de queue ; & comme nous fom- mes accoutumés de voir la Aamme flamboyer lorfqu’elle acquert cette -forme , nous attribuons au fpectre ainfi terminé , le même mou- vement qu'à la flamme ; ce flamboyement eft donc une de ces illu- fions de concomitance, dont la Peinture & la Phyfique nous four- niflent quantité d'exemples , entre lefquelles l'expérience du Pere (1) Hiftoire de l'Académie Royale des. Sciences de Paris, 1743. 346 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, Labat , de la phiole à demi remplie d’eau qui, vue dans un mi- roir concave , paroît pleine dans fa partie vuide , & fe remplir à mefure que l’eau s’en écoule (1), mérite d'être remarquée comme venant ici très-à-propos. SIXIÈME QUESTION. Pourquoi le moindre clignement la fair-elle difparoître ? Nous avons fait obferver que le fpectre apparoît, foit que Îles yeux foient ouverts ou fermés dans l’obfcurité ; & il s'enfuit de cette obfervation que le clignement ne le fait pas difparoître en tant qu'il ferme l'œil auparavant ouvert, mais bien en ce que le mouvement de la paupière par lequel il s'opère , froifle l'œil & y ranime le mouvement des humeurs; l’effet du clignement eft donc analogue à celui du diaphragme & des mufcles abdominaux qui, par la preffion qu'ils exercent fur les vifcères du bas-ventre dans la refpiration , aide à la circulation du fang dans cette région; or, cette accélération du cours des humeurs dans une partie dont les vaiffeaux ceflent à peine de. fe dégorger, doit reproduire leur en- gorgement , & par conféquent faire difparoître le phantôme; ce rai- fonnement donne à connoître que dans l’ophrhalmie il eft utile de tenir l'œil couvert, non pas feulement pour écarter les rayons de lumière qui y maintiendroient l’inflammation, mais aufli pour empêcher le clignement des yeux qui y entretiendroit le mouvement d’inflam- mation. SEPTIÉME QUESTION. Quelle eft la raifon qui fait avancer le fpectre ? quelle eft celle qui le fait reculer ? Cette fingularité, pour être ce qu'il y a de plus piquant dans l’obfervation de M. l’Abbé Rozier, n’en eft pas le point le plus difhcile à expliquer; on n’a en effet, pour en comprendre la caufe, qu'à faire attention que l'ame qui, dans la vifon ordinaire, juge de la diftance des objets par l’ouverture de l'angle formé par les axes optiques , rapporte l’image tracée au fond de fes yeux au fom- met de cet angle ; de forte, qu’à parler ftriétement, ce n'eft pas l'objet lui-même qu’elle voit , mais feulement fon image ; or, comme cette image n’a d’exiftence qu'autant que les rayons, réfléchis par l’objet , la nourriffent , celui-ci eft rapporté au même lieu aufli long- (2) Journal des Savans, Mai 1764 , page 361. SUR L’HIST. NATURELLE ET LES ARTS. 347 tems, qu'il ne change pas de place, & le mouvement des yeux n’y peut apporter aucun changement, puifque dès qu’ils ceffent de le fixer ; il devient invifible à leur égard ; mais la chofe fe palfe tout autrement dans la vifon dont il s’agit ici, & que j'ai nommée vifion interne dans mes Mémoires, dans laquelle l’image , tracée fur la rétine, eft indépendante de fon objer, puifqu’elle fubffte après que celui-ci eft fupprimé ; car l'ame rapportant également ce qu'elle voit au fommet de l’angle formé par les axes optiques , cha- que mouvement de fes yeux eft accompagné d’un autre diftance de l'objet; en effet, pour peu que l’un des yeux chancelle, la ren- contre des axes optiques charge de place, & l’objet paroît fe re- muer en conféquence; & comme les mufcles adducteurs l’emportent en force fur les abduéteurs , de même que les fléchiffeurs des jambes ont la fupériorité fur les extenfeurs, il arrive qu'ayant , pendan un certain tems, tenn les deux yeux dans la même fituation, A laflitude ou la gène qui en réfulte, donne lieu à l’adducteur d’un des yeux de rompre l'équilibre d'avec fes concurrens , ce qui , rap- prochant le point de rencontre des axes optiques, fait paroître l’objec s’avancer vers la perfonne, par conféquent fe détacher de la mu- raille fur laquelle il paroiffoit appliqué, & les yeux fuivant d’habi- tude l’objet dans ce mouvement apparent, ils continuent à donner plus de convergence aux axes, c’eft-à- dire, de les faire rapprocher de plus en plus; mais un mouvement de tête fait fuir ou rétro- grader le phantôme, dit M. l'Abbé Rozier. Je lui demande ici pardon d’ofer le contredire (1), m’étant affuré que ce n’eft point le mouvement de la tête qui opère ce prodige, mais bien celui des (1) M. de Godart a raifon de dire que c'eft le mouvement des yeux, & non celui de la tête, qui agit dans cette circonftance ; je m'étois mal expliqué. Loin de lui favoir mauvais gré, je le remercie bien fincérement de fon obfervation. Qu'il me foit permis de faifir cette occafion pour inviter MM. les Auteurs qui feroient bleffés de ce qui eft imprimé contre eux dans ce Journal, d'avoir la bonté de me communiquer leurs remarques ou leurs critiques; elles feront 1m primées fans y changer ni fans y répondre un feul mor, quand même ce feroit une diatribe , dans le cas cependant qu'elle ne porteroit que fur moi feul. M. Cofte, Médecin de l'Hopital Royal & Militaire de Calais, a fait inférer dans le N°. 6 de l'Année Littéraire, une Lettre dans laquelle il fe plaint de l'annonce de la Traduction de l'Ouvrage intitulé : Phyffologie des Corps organifés , &c. Cahier de Dé- cembre 1775, page 513. Je fuis obligé de convenir aujourd'hui que les Nouvelles Lictéraires, depuis le Cahier de Décembre 1775 , jufqu'a celui de Juillet 1776, ne font pas de moi. J'étois alors occupé à parcourir , par ordre du Gouvernement, les Provinces de Languedoc, de Provence , les Côtes d'Italie & les -Isles de la Méditerranée, voilines de ces parages. 348 .OBSERPATIONS SUR LA PHYSIQUE, yeux qui rebrouflent chemin en faifant diverger préfentement les axes qu'ils avoient fait converger lentement. Cetre unique & légère méprile, dans un cas aufli compliqué, fait connoître l’efprit obfer- vateur de celui qui le premier à fçu le a remarquer. OLB ES ER RE NPEMARTEANTISONUNI DE LA CRYSTALLISATION DU FER; Par M. DE MORFEAU. L A fufñon des métaux eft une véritable diffolution par le feu le plus puiffant des menftrues ; la folidité qu'ils acquèrent par le refroidiflement, eft une vraie cryftallifation qui s'opère par l’évapo- ration de la partie furabondante du diffolvant , & en s’appropriant, ar la puilfance de l’affinité, la partie de ce même fluide néceflaire à l'état de concrétion ; ces vérités’, dont j'ai effayé de montrer, en peu de mots, tous les rapports, en difanr que le feu eft exacte- ment aux métaux ce que l’eau eft aux fels (1), n'ont échappé fi long- tems à nos recherches, que parce que le travail de la fufñon étoit abandonné à des gens que le befoin de jouir animoit plus que le befoin de favoirs le hafard leur en auroit offert les preuves , qu'ils auroient négligé de les reconnoître , faute d’en prévoir l'importance; l’obfervation et la fource de la bonne Phyfique , mais c’eft l’analogie qui forme l’obfervateur, & qui le tient attentif aux phénomènes qui échappent au vulgaire. D'ailleurs, les produits de la fufñon fu- bordonnés à mille accidens indifférens à l’objet de ceux qui en étoient occupés, ne préfentoient pas cette conftance de forme, certe régu- larité qui fuppofe une méchanique fecrerte, qui indique une forte de progrès géométriques dans la compoñrion de ces folides, qui nous fervira peut-être un jour de microfcope pour appercevoir les figures de leurs élémens, & qui déja ne permet plus de douter que c'eft réellement à cette figure qu'ils doivent ce que nous appellons leurs propriétés. On connoît depuis long-tems le culot étoilé d’antimoine , dont l'apparition ne fervit d’abord qu'à bercer les efpérances des adeptes; MM. Macquer & Baumé ont obfervé la cryftallifation de l'argent 000 eee eee pe RE OI SDS CIE GS (1) Digr. Académ, pages 170 & 174 ) & LOTO ; e SUR L'HIST. NATURELLÉ ET LES ARTS. 349 & du cuivre mais lorfque j'ai entrepris le travail, acat je vais rendre compte , je ne connoiflois aucun Auteur qui eût parlé de ceus du fer; j'ai depuis trouvé deux paflages où il en eft fait mention; le premier , qui fait partie des obfervations recueillies par Swedem- * bourg (1) , annonce fimplement, fur le rapport de Zanichellus, que le fer, fondu & refroidi, montre de petites particules pyramidales à quatre côtés; l’autre eft de M. l'Abbé Monnet qui, dans une Dif- fertarion fur les Volcans d'Auvergne, place le fer au nombre des métaux qui, comme l'argent & l’antifhoine , prennent, en fe te- froidiffant , une forme particulière (2); on.me pardonnera, fans doute, d’avoir penfé qu’ils ne remplifloient pas, à beaucoup près, tout ce que la curiofité de notre fiècle a droit d'attendre de l’exa- men d’un pareil fujer (3). Voulant effayer , au mois d'Avril dernier, la converfion du fer en acier, par le cément de pouflièe de charbon, dans le fourneau de M. Macquer, les fapports du creufer coulèrent en moins de trois heures; le creufer fut renverfé fur la grille prefqu’entièrement vuide; je cherchai envain le lingot de fer, je ne trouvai que des fcories ; il étoit naturel de penfer qu'il s'étoit plurôt calciné que fondu ; cependant, la pefanteur d'une de ces fcories me fit foupçonner qu’elle pouvoit contenir quelques parties métalliques ; je la fis chauffer pour l'eMayer enfuite fous le marteau; les premiers coups en dérachèrent bientôt toute l'enveloppe vitreufe, & je vis déja, avec étonnement, fe former un petit barreau de la longueur d’environ 3 pouces, fur la longueur de 6 à 7 lignes de chaque face; je compris alors que le fer s'éroit réellement fondu dans cette opération, mais j'étois bien éloigné d'imaginer qu'il y eût eu tout-à-la fois fufion & con- verfion , fur-teut dans aufli peu de tems, & le fer ayant été ainf expofé au feu nud; cependant, ayant fait tremper ce barreau , 1l prelenta, dans fa caflure, le plus beau grain d’acier que j'eufle ja- mais appetçu. Cette expérience avoit été faite à Montbart, chez M. le Comte de Buffon, & fur ce que je lui témoignai que j'avois le delfein de la répéter & de ramener à un procédé für ce que le hafard avoit A (1) Swedembourg , Obfervation fur le Fer, page 182. {2) Journal de Phyfique , Juillet 1774. (3) M. Jars, dont on a publié les Voyages métallurgiques depuis la rédaétion de ce Mémoire, dir expreflément dans fa Diflertation fur le fer & l'acier, qu'on ne fauroit trop engager les Chymiftes à continuer les expériences auf utiles qu'intéreffantes, fur la forme régulière que les métaux affeétent lorfqu'ils om été fondus, Tome VIII, Part. II. 1776. Y y 3590 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, produit çetre fois, il me remit plufieurs morceaux d’acier bourfoufflé, comme plus difpofé à fe pénétrer de feu & à entrer en fufion; on appelle acier bourfoufflé les barres de fer qui fortent du fourneau de cémentation , parce qu’en effet leur furface eft remplie de foufflures plus où moins confidérables. On fait, au refte, que dans cet état, ces bartes ne peuvent plus fe forger à froid , qu’elles fe caffenc ai- fémenr, & que le grain de cette caflure ne reffemble ni a celui du fer, ni à celui de l'acier, ni même à celui de la fonte ordinaire. Après avoir bien examiné toutes ces circonftances, je crois pouvoir dire qu'il n’y a rien de moins fondé que l'opinion où l’en a été long-tems, que l’acier de fonte étoit néceffairement plus parfait que l'acier de cémentation , parce que le dernier ne pouvoit être purgé des parties hétérogènes qu'il contenoit. Je fuis perfuadé que dans cette opération, le fer eft amené à un point de fufon fuffifante pour que l'attraction, qu'éprouvent les parties fimilaires, pouffe au-dehors tout ce qui leur eft étranger. Il n’eft pas même befoin de fup- pofer que le cément fert de moule ps conferver aux barres cé- mentées leur première forme , il fufhir de fe rappeller ce qui fe pafle dans la liquation, pour être convaincu qu'un métal ramolli par le feu, peut laiffer échapper fon alliage fans arriver à l'état de fluidité. Cette théorie , que je ne fais qu’indiquer ici en paf- fant, mériteroit, fans doute, d’être développée ; mais elle m'é- carteroit trop de mon fujet. Le 23. Avril, je mis dans un creufer de plomb noir un mor- ceau de cet acier bourfoufilé, du poids exaét de 9 gros 64 grainss. j'imaginai d’en tenter la fufion fans autres fondans que cette ef- pèce de laitier de fourneau qui eft blanc, très-léger , comme écu- meux , & qui, après avoir reçu l'humidité de l’haleine , fait en- tendre un cracquement dans toutes les parties de fa furface : il y eut fufñon parfaite en deux heures & demie de tems, au four- neau de M. Macquer; le culot bien arrondi pefoit ro gros 2 grains, ce qui faifoit une augmentation de ro grains que j’attribuai, fans héfiter, aux parties de fer que contenoit ce laitier, & qui s’é- toient réunies au culot. Toute la furface de ce culot étoit cou- verte de lignes entrecoupées régulièrement comme une hachure, & formoit un relief très-fenfible , à la réferve d’un feul endroit de la furface fupérieure que l'air avoit frappé, parce que le flux n'étoit pas affez abondant, & qui avoir un coup- d'œil de fer brülé. Je compris dès-lors que ces protubérances n’étoient pas un put: effect du hafard ; mais j'étois bien éloigné de penfer que je parvien- drois à les produire à volonté , avec toutes. forces de terres ferru SUR L'HIST. NATURELLE ET LES ARTS. 35t gineufes, dans tous les états, en employant des flux très-différens, & qu’elles ferviroient ainfi à prouver , contre l'opinion prefque gé- inérale, l’identité du fer que contiennent les mines de ce métal. Ce fur en travaillant à la recherche du procédé de M. Boucher, pour l’effai de ces fortes de mines, que j'eus occafion de revoir le phénomène de cette cryftallifation, & il fe montra fi fouvent, fi conftamment le même, que bientôt je ne fus plus furpris que de ce que M. Bouchet n’en avoit pas fair mention une feule fois dans un manufcrit où il avoit rendu compte de plus de 2000 eflais de mines de fer, & où il avoit décrit, avec exactitude, jufqu’aux nuan- ces des produits. Cette circonftance , qui n’auroit pu lui échapper, me parut établir la fupériorité de mon procédé fur le fien , parce que sil n'avoit point obfervé ce phénomène , c’eft que la fonte n'étoit pas fi parfaite, ou qu’il étoit peut - être obligé de frapper fon creufet pour favorifer la réunion des parties du métal fondu. Or , à s’en tenir même à cette dernière fuppofition, fon flux n’avoit pas toutes les qualités convenables, puifque le régule ne le traver- foir qu'à l’aide d’une percuflion. Il ne pouvoit rien conclure de fes effais dès qu'il n’étoit pas parvenu à donner toujours à fes fondans un égal degré de fluidité & d’équipondérance, par la connoiffance même de la nature des corps unis à la terre métallique; c'eft ce que je crois avoir prouvé dans le Mémoire deftiné à publier la me- thode de ces effais, pour tenir lieu du fecret que la veuve de M. Bouchet a refufé de donner pour le prix qui lui en étoit offert par les Etats de Bourgogne (1). Cependant je crus devoir fufpendre mes expériences fur les mines ro (1) Ce Mémoire fur La manière d'effayer les Mines de Fer, les avantages qu'on en peut retirer pour Le travail en grand, &c. eft déja connu par quelques Extraits, notamment la partie qui contient le procédé d'eflai; je me propolois d'imprimer 3 la fuite l'Oblervation fur la cryftallifations mais les circonftances ne me laif- fant pas même juger quand je pourrai completter cer Ouvrage, je me fuis dé- terminé à détacher ce morceau qui tient à une théorie plus générale , & fur la- quelle j'ai encore d'autres faits à publier ; qu'il me foit feulement permis de con- figner ici une courte note fur /e fer natif. Je tiens pour conftant, que la nature n'a aucun moyen de produire du fer pur , malléable, natif; que s'il fe trouve des minéraux qui ayent en apparence ces caraétères, ce font des alliages de fer & d'autres métaux dans des HpRions capables d'opérer la duétilité. Cette affertion paroîtra hardie après la Defcriprion imprimée dans ce Journal, Tome VIT, page 1353 mais puifque ni le fer le plus pur, ni le meilleur acier fondus, ne font malléables qu'après qu'ils ont été mal- lés, il n'y a ni diffolution humide, ni diffolurion par le feu qui puifle, dans quelque circonftance que ce foit, donner une malle de fer pur, pourvu de cette propriété, & pour cela le marteau eft tout aufli néceffaire que la main du Cor- dier pour filer une corde, Yy 2 3s2 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, de fer, pour les diriger plus particulièrement fur la cryftallifation de ce métal , & j'en fis de deux fortes ; Les unes pour m'affarer fi la nature du flux environnant n’avoit pas quelque part à ces pra- duits; Les autres pour vérifier fi je les obriendrois toujours fembla- bles, en employant le fer & la terre ferrugineufe dans tous les dif- férens états pollibles; les réfulrars ont été très- fatisfaifans. 1°, J'ai eu des cyjots cryftallifés de la même manière, en etm- loyant fuccellivement pour fondans le fel de tartre, le fel marin, le fel de Glauber , le borax , le fel neutre arfenical (tous ces fels mê- lés d’un peu de verre & de poufhière de charbon); enfin, le pur laitier blanc, fpongieux de fourneau de fer , qui et, comme l'on faic, la partie la plus légère du verre qui fe forme avec l’argille & la terre calcaire. 29, J'ai obtenu les mêmes culots avec la mème cryftallifarion, eu traitant fuccellivement les mines de Péme & de Juffey , données comme les extrèmes des bonnes & mauvaifes qualités ;. la pierre d'aimant, l’hématite, le grès ferrugineux , la chaux, les précipités de fer, le fer lui-même , enfin l'acier d'Allemagne & d'Angleterre. Ainf , cette obfervation devient par-là intéreffante pour les Scien- ces & pour les Arts; pour Les Sciences, par les rapports qu'elle pré- fente de la formation des régules métalliques avec les concrétions réoulières des corps falins, & en ajoutant un fait à ceux qui nous ont déja conduits fur la route de la vraie théorie de leur compo- fition ; pour les Arts, en achevant de détruire le préjugé de la di- verfité elfentielle des efpèces de fer contenues dans les différentes mines. POST-SCRIPTUM. On à cru devoir joindre ici le deffein de certe cryftallifation ; la figure première , planche x, repréfente le culot d’acier fondu , pefant 10 gros 2 grains; la partie fupérieure où l’on n'apperçoit au- cune ligne, eft celle qui a été frappée par l'air, n’étant pas recou- D verte par le flux. La figure 2 repréfente la cryftallifation du même culot vu à la loupe. Tous les autres régules , obtenus par la fonte de ce méral ou de fes mines, ne préfentant aucune différence dans leurs cryftallifations > Ho : on a penfé qu'il fuffiroit de donner celle-ci. La figure 3 repréfente une hématite d’un genre particulier ; elle ME : D 3 appartient à la belle collection de minéraux de M. Beflon , qui a bien voulu permettre que l'Auteur la fit defliner ; c’eft une cryftal- lifation minérale ferrugineufe , qui paroît avoir autant de rapports SUR L'HIST. NATURELLE ET LES ARTS. 353 avec la figure première, qu'un minerai peut en avoir avec fon ré- gule parfaitement pur. Cette hématite, dont la furface inférieure eft polie & de cou- leur brune , tirant au verdâtre, eft compofée de plufeurs couches ; celle de deffous, qui a 4 à 6 lignes d'épaiffeur , eft ftriée en forme de rayons; on diftingue en quelques endroits fur les côtés, une fe- conde couche de l’épaiffeur d'une ligne , tantôt brillante par fes cryftaux, tantôt unie & rerne; fur cette feconde couche, on en ap- perçoit une troifième qui règne affez uniformément, & qui, étant découverte dans une partie, préfente des e‘pèces d’alvéoles ; ces al- véoles font deflinés en grand dans la figure cinquième , pour faire voir qu'ils paroiffent eux - mêmes formés de plus petites figures fem- blables, qui fe font remarquer dans les cavités régulières terminées par les lignes faillantes. La troilième couche qui forme la croûte de ce minéral & qui n'en recouvre plus qu'une moitié ou environ, paroît formée de pe- tits prifmes réguliers qui fe touchent par des faces polies, & fonc implantés dans des alvéoles, femblables à ceux que l'on apperçoit dans la partie découverte; le deflus de cette croûte conferve quel- que apparence de la régularité des alvéoles, mais les prifmes font terminés par une efpèce de petits mammelons , & la plupart de ces mammelons font renfoncés à leurs extrémités, comme une foufliure métallique dont on auroit enlevé la partie fupérieure. La figure 4 repréfente la même hématite vue de côté, pour in- diquer l’ordre des couches. Æ rs 88 Su An Sur une nouvelle manière de perfe@tionner les Machines életriques ; Par M. L'ANGE DE WILLENEUPE. 11 VAS les fois que nous voudrons forcer la Nature à nous ouvrir fon fanétuaire , & que, livrés à l'indifférence ou à la rou- tine , nous ne franchirons pas quelquefois les voies connues pour y parvenir à coup für, nous refterons dans une monotonie peu fa- vorable à la Phyfique. Doué du defir d'en avancer les progrès, cha- 554 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, que individu qui veut fe décorer du beau titre de Phyficien, doit s'en montrer digne & par fon travail & par fon étude. C'eft ce mème defr qui m'a fait entreprendre la conftruction d’une nou- velle Machine électrique , dont les effets & les avantages qui en réfultent, méritent, à tous égards, la préférence fur les modernes. La fimplicité & la folidité font la bafe effentielle de cet inftrumenr. J'ai la farisfaction de voir l’expérience l'emporter fur le raifonne- ment, non que ce dernier ne foit venu à fon fecours. Je me fuis déterminé à donner la defcriprion de cette Machine avec fa figure, afin de mettre les Amateurs de cette partie de la Phyfique, à por- te de me faire leurs obfervations avec la mème bonne-foi que je leur préfente. Perfuadé que fi ce foible Effai obtient quelques fuf- frages , je ne tarderai pas à donner quelques autres obfervarions relatives au mème fujer, PLANCHEIÏI. AAA, eft une table fous la forme d'un triangle ifofcèle ; un arrondiflement qui règne tout-autour , détruit les vives-arrètes. BB, chaflis compofé de deux montans , entre lefquels tourne fur un axe de cryftal ou de cuivre, un plateau de glace de 30 pouces de diamètre; on voit que le montant le plus près de la manivelle, eft fixé à demeure, au moyen d’un tenon qui pafñle dans une fe- conde table de mème forme , à laquelle font adaptés trois pieds très-folides, affemblés par des traverfes. C, eft un boulon à vis qui traverfe les deux tables & reçoit un écrou pour les ferrer l’une contre l’autre. Je déduirai dans mes Re- marques les raifons de cette conftruétion. D, eft un ceintre pour affermir le montant de derrière avec ce- Jui de devant, qui entre à queue d’aronde dans une entaille pra- tiquée fur le devant des deux tables, & eft maintenu par deux vis à oreilles. EEEE, quatre couflins bien fermes de 14 pouces de hauteur , fur 4 de largeur. Sur les plaques qui forment les couflins , on y a fait deux larges ouvertures pour y mettre du crin à fon gré; ilya, fans cette commodité, deux réfforts à boudin qui preffent également, que l’on voit répondre au milieu des couflins de derrière. Le de- vant de la table , décrite ci-deflus, n’a que deux pieds de large. En général , elle eft traitée de manière à ne pouvoir être ébranlée par le mouvement de rotation. Les traverfes qui uniflent les trois pieds, ont allez de largeur pour fupporter un poids qui la rend iné- branlable. FF, font deux conducteurs métalliques féparés l’un de lautre; SUR L'HIST. NATURELLE ET LES ARTS. 35s ïls ont 6 pieds de long , fur $ pouces de diamètre ; ils font ter- minés par des boules de 6 pouces & demi , à l’une defquelles font adaptées quatre pointes bien acérées , prifes fur Îeut demi - dia- mètre. 11, deux parties féparées pour chaque conducteur , dans lefquelles font maftiquées les quatre colonnes de cryftal HHHH, de 28 pouces d'ifolement. gggg; quatre petites boules avec une tige qui entre dans des trous pratiqués aux conduéteurs, & maftiqués fur les mêmes colon- nes. J'ai fait couvrir ces boules avec un vernis à la cire d’Ef- pagne. J'oubliois de dire que j'ai fait pofer des conduits métalliques entre les montans de la table, & que fon deflous , avec les pieds, eft prefque garni de même, RUE: MAUR. OUVRE NS. Jar cru devoir adopter la forme de ma table pour me faciliter un ifolement beaucoup plus grand, & il feroit à fouhaiter qu’on pût encore l’augmenter. Car j'éprouve fréquemment qu'une pointe, diftante de 3 pieds de mes conducteurs, plonge encore dans l’ath- mofphère. J'ai laiffé une efpace d’un pied environ, entre le lymbe du plateau & la furface de la table. J’obferve que lorfque la matière eft abondante , il y a une affluence de rayons excentriques qui fe rendent fur les corps les plus voilins, ce que j’eftime être une perte confidérable. Je donne 6 pouces d’écartement au chafis, & il ne - peut y en avoir trop; on en fent affez la raifon. Je propofe un axe de cryftal, de préférence au métal , pour parfaire l'ifolemenr. Je le crois cependant inutile , malgré l’approbation que j’obtins d’un de nos Démonftrateurs, dans un entretien que j’eus avec lui à ce fujer. Mes deux tables font faites pour fatisfaire aux defirs d’avoir des machines propres à faire le politif & le négatif. On peut, par cette conftruction, fubftituer à celle dont les pieds font en bois, une dont les mêmes pieds feront en cryftal. Il fera néceffaire que celui qui tourne le plateau foit ifolé, & par le moyen des 2 conducteurs féparés, il y en aura un que l’on pourra char- er aux dépens de l’autre, à la manière de M. Franklin. ( Woyez for Traité d’Eleüricité,) Jufqu’à préfent , on a regardé comme un obltacle à l'accumulation du fluide électrique, les couflins & les montans d'une machine. Plufeurs Phyfciens , d’après ce raifonnement, ont conftaté que l’étincelle, provenante d’un conduéteur , ne pouvoit être qu'en raifon de l'efpace qui régnoit entre les pointes & l'arbre 3:36 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, du plan. L'expérience détruit ce raifonnement. Ce même efpace net, à mon plan, que de 8 pouces ; & lorfque le tems eft favo- rable , j'obtiens des étincelles de 1$ à 16 pouces. Ces effers méri- teat quelques réflexions de la part de MM. les Phyficiens. J'hafar- derai quelques conjectures fuivant ma manière de voir. Je penfe que les parties d’un plateau qui reftent fans frottement, font une perte réelle; qu'au contraire, lotfque routes les furfaces font frot- tées comme par mes couflins, alors il fe forme une athmofphère d'électricité qui fert au-moins à faturer l’axe & les montans, tan- dis que la zone, correfpondante aux pointes des conduéteurs , four- nit coute enrière fon eu. , fans craindre que la décharge ne fe fafle fur le centre de la glace. D'ailleurs, il eff un axiome phyfique qui. nous dit que le fluide électrique cherche toujours à s'identifier , & que deux corps qui en font également pleins, s’éloignent comme par averfon. Une infinité d'avantages feront donner la préférence à ces con- duéteurs. Je n’en entreprendrai pas le détail. Je dirai feulement que j'établis deflus une table, bien arrondie à fon extrémité , re- couverte en étain; que fur certe table j'arrange une batterie confi- dérable qui fe charge d’une manière oppofée à la méthode ordi- naire. Je fais defcendre du plafond de mon Cabinet, une tringle communicante d’un bout à l’intérieur de la batterie , & de l’autre aux montans de la machine. Alors, au lieu de charger l’intérieure pofitivement, elle fe trouve l’être négativement. Cette manœuvre m'évite beaucoup d’embarras. S'il me plaît d'augmenter les furfaces des conducteurs , j'ifole la communication avec le plafond , & je fais communiquer aux conducteurs. Je laiffe à penfer quelle quan- tité d’expériences on peut faire fur cette table; telle que d’obferver les corps qui conduifent plus ou moins, faire fubir à tous les êtres connus , tous les effets de l'électricité. On peur , avec un de ces conducteurs , faire telle expérience, tandis qu'avec l’autre on fait £elle. autre qu'il plait. bear Ga L oo TS LYENTATIRYE SUR L’'HIST. NATURELLE ET LES ARTS. 357 RQ A RE RE AR DPCE 2 2 UCI NEA ME SP UD 20 CL UN TO VO D RU PAS 5 1 RUES med AAA De M. px LA Lanpe, de l’Académie Royale des Sciences, à l’Auteur de ce Recueil, Contenant des Notes fur l'Eloge de M. COMMERSON, publié dans ce Recueil, Cahier de Février 1775. D EPUIS que vous avez bien voulu , Monfeur, publier l'Eloge de mon illuftre Compatriote, M. Commerfon , il m’eft parvenu di- verfes obfervations qui méritent d’être communiquées au Public, & je ne puis les placer mieux que dans un Ouvrage dont la réputa- tion eft faite parmi tous les Savans , & dont on ne fauroit fe paller quand on à du goût pout la Phyfque. Je rendois juftice, dans cer Eloge , à M. le Baron de Clugny , d’'a- près une Lettre de M. Commerfon lui-même; cet habile Officier a cru devoir me témoigner qu'il y étoit fenfble ; & à certe occafion, il m'a fait des objections fur l’article du peuple Nain de Madagafcar: je vais tranfcrire cette partie de fa lettre. » Admirateur , plus que perfonne , des talens de M. Commerfon, de fon amour infatigable pour le travail; ami des bonnes qualités de fon cœur; permetrez-moi de partager avec vous Îles regrets que tous ceux qui l'ont connu, doivent à fa mémoire; je ne crains pas d'hafarder en affirmant, que s'il eût pouffé plus loin fa carrière, on l’eûr cité comme l’homme unique en fon genre, Lorfque je vis le Supplément au Voyage de M. de Bougainville, à la fuite duquel vous aviez fair inférer la Lettre de M. Commerfon, qu'il vous écrivoir de l’Ifle de Bourbon en revenant de Madagafcar, je me propofois, fi je le revoyois en France, de lui dire mon fen- timent fur les obfervations morales & locales qu’il avoit faites au Fort-Dauphin. Mais puifque le fort en a autrement décidé , c’eft à vous, Monfieur, à qui je vais faire part des petites contradidtions qu'il y auroit eu emtre lui & moi. J'ai été employé près de quatre ans à Madagafcar. J'ai parcouru en grande partie la côte de l'E, par mer & par terre. J'ai appris la langue Madegafle | que je parle, où du moins que je parlois Tome VIII, Parc. II. 1776. Z'Z 358 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, prefqu’aufli couramment que le François. Avec ce fecours, j'ai été dans le cas de me procurer bien des connoiffances fur les mœurs & l'intérieur du pays, que je n’aurois jamais pu acquérir par le moyen d'un interprète. Jy avois obtenu une confance-fans bornes de la part des naturels de l’Ifle; mon nom y étoit connu du Nord au Sud , & j'y ai reçu des ambaffades de tous les Rois. J'y ai fait la guerre & la: paix; enfin ; j'ai eu l'avantage ; en 1771 , de procurer; par mon crédit, la fubfiftance des Troupes que le Roi avoit envoyé à l'Ifle de France, qui, fans cela, fe feroient trouvées dans la plus grande difette : j'ai payé tous ces agrémens , par le plus grand attachement pour ce pays; je défirois y retourner; des raïlons qui font d'un trop long détail , & qui vous feroient étrangères , m'en ont éloigné J'ai été dans le cas du fc vos non vobis de Virgile; peut-être au- rois-je pu y être utile à ma patrie. , Je ne vous détaille tout ceci, Monfieur, que pour établir mon droit à penfer différemment de M. Commerfon , fur un apperçu aufli court que celui qu'il a été dans le cas de faire d’une Ifle aufli grande ue Madagafcar. Il dir que le Fort-Dauphin éft vraiment le point où doit fe faire l'établifement politique ; que Fair y eft plus fain que dans aucune autre partie de llfle, & que Foulpointe eft le tombeau des Eu- ropéens. Prenez la Carte, Monfieur , & jettez les yeux fur cette Ifle. Se- roit-il poflible qu’on adoptât le projet de M. Commerfon? Eft-1l na- turel de former un établiffement, qui doit fervir de Métropole, à la pointe la plus reculée d’une Ifle comme Madagafcar? De quel fecours pourroit-il être aux autres parties? La difhculré des commu- nications eft extrème; le Fort-Dauphin eft un langue de terre fa- blonneufe & ingrare ; la végétation y eft plus lente & moins nourrie que par-tout ailleurs; point de port; une mauvaife rade remplie de rochers fous l’eau. Les vaiffeaux y font en danger de fe brifer far les récifs, par la perte de leurs ancres & de leurs cables ; on ne peut en fortir qu'avec une peine incroyable , à l’aide des cables, fur lefquels il faut continuellement virer. J'ai employé neuf jours à ce pénible exercice , fans que mon équipage ait eu le tems de fe re- pofer la nuit. Les nations qui l’avoifinent, ne font riches ni en bé- tail, ni en efclaves; conféquemment il y a peu de commerce ; le peuple y eft ferf des Bohandrians , ou chefs qui gouvernent ; ainf, peu d'émularion pour les arts. Quant à la falubrité de l'air , l'expé- rience dément ce qu'en dit M. Commerfon. En 1768, l'on y a en- voyé une petite Colonie pourvue de tout ce qui étoit néceffaire pour sy bien inftaller ; & lorfque j'ai été la relever deux ans après , à peine reftoic - il un tiers de ceux qui y avoient pallé. * di ; SUR L'HIST. NATURELLE ET LES ARTS. 359 Je ne crois pas que les peuples de cette Province foient d'un ca- taétère plus féroce que les autres habitans de l'Ile; mais comme ils nous ont mafflacrés deux fois, ils vivent politiquemerit avec les Fran- çois , craignant toujours que par repréfaiiles nous ne les puniflions d’un crime qu'ils ont commis, plutôt forcés par la cupidité & les mauvais traitemens de ceux qui éroient à la cèce de nos établiffe- mens, que par une méchanceté naturelle. Foulpointe au contraire eft prefque dans le centre de l'Ifle. Il offre un port commode, dans lequel quinze vaifleaux de guerre feroient en füreté, Un peuple doux, affable , intelligent, aimant les arts, ayant un penchant décidé pour le luxe, ce qui forme un dé- bouché pour les marchandifes de l'Inde ; des rivières & des lacs, dont ces riches contrées font arrofées , fourniffent une communica- tion à plus de cinquante lieues dans les terres, & rendent par confé- quent les traites plus promptes & moins difpendieufes. Le pays, peu découvert autrefois , rendoit cette terre inhabita- ble , fur-tout dans la faifon où des vapeurs , qui s’arrêtoient fur les bois & qui ne fe diflipoient que versle Midi, infectoient l'air au point que les. naturels du pays défertoient leurs villages, & fe re- tiroient dans les montagnes. Mais depuis que l’on a éloigné la fo- rèr, que les eaux ; auparavant retenues par des amas de feuilles pourries, ont pris un cours vers la mer , & que la terre s'eft def- féchée, cet endroit n’eft plus redoutable aux Madecafles, & ils l'ont nominé Maha-velon, qui veut dire terre de bonne fanté. Je ne vous cacherai pas cependant que fur quinze Soldats de la Légion de l'Ifle . de France, qu’on y avoit envoyée en 1767, il n’en ft peut-être pas revenu deux; mais il faut attribuer leur mort au peu de difcipline, plutôt qu'à l'intempérie de d'air. Vous favez à quels excè$ fe porte le foldat livre à lui-même. Il étroit fous les ordres d’un Chef de Traite, qui, n'étant poiut Militaire, n’avoit pas grande autorité fur eux. Leur logement influoit aufli beaucoup fur leur fanté. Ils habi- toient de peutes cafes très-bafles , dans lefquelles il ne cireuloir point un air libre, & ils couchoient fur la terre, dé l'humidité de laquelle ils n'étoient garantis que par une snatte. Dans quel pays du monde, un homme qui occupe un pareil logement , ne feroit:il pas expofé à des maladies ? ajoutez-y la vie crapuleufe qu'ils:y mènent , le jour noyés dans l'eau-de-vie, & la nuit portant le-libertinage à l'excès; tout individu doit fuccomber à de pareilles débauches. J'ai fréquenté Foulpointé plus que tout autre endroit de l'Ifle. J'y ai toujours logé À terre ;; mais avec précaution & dans une cafe élevée & bien clofe. Je n'ai jamais éprouvé de mauvaife influence du climat: J'ai toujours porté Ja plus grande attention à ce que les gens .de mon équipage ne s'enivraflent point ; perfuadé que rien n'é= 2 2 360 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, toit plus pernicieux que les liqueurs fortes, dans un pays où tout tend à la décompolirion des fluides; je n’ai rien négligé pour leur nourriture; & avec ces précautions , j'y ai perdu moins d'hommes que je n’en eufle peut-être vu périr à la Côte de Bretagne. Vous voyez, Monfieur, que toutes ces raifons militent en faveur de Foulpointe; l’avantage de la fituation du lieu, la richeffe des Provinces voifines , la bonté des habitans, & enfin la falubrité du cli- mat qui, en employant les moyens néceffaires, l'emporte dans la balance fur celui du Fort-Dauphin. Je paffe à préfent aux Quimos, ces hommes extraordinaires qui, s'ils exiftoient, tiendroient du prodige. C’eft une ancienne Fable du pr qui leur à donné l’exiftence. Je n'ai vu aucun Nègre, ni dans e Nord ni dans le Sud , qui aît pénétré dans leurs retraites ; lorf- que M. Commerfon eft venu avec moi au Fort-Dauphin, je réfolus d'aller chez ces peuples ; je m’avançai jufqu’à vingt lieues à l'extré- mité de la Province d’Arom , où l’on m'avoit dit qu'ils habitoient; mais je fus bien furpris quand on m'afflura que de ce point, il me falloit encore quatre jours pour m'y rendre. Je vis pour lors l’inu- tilité de ma recherche ; car en continuant ma toute pendant ce tems-là, je ferois arrivé à la mer du canal de Mozambique; d’ail- leurs, je connoiflois les Nègres, & j’euffe vraifemblablement parcouru les deux hémifphères avant de trouver ce qu’ils m'avoient affuré exifter fans aucune preuve phyfque. La prétendûüe Quimoffe , dont parle M. Commerfon , a été embarquée dans l’Ambulanre que je commandai pendant près d’un mois, & j'ai eu le rems de l’exami- ner à mon aife. Cette petite femme avoit trois pieds fept pouces de hauteur ; mais les accidens des Nains étoient par-tout caractérifés chez elfe : fes bras étoient extrêmement longs , difproportionnés à fa taille, de mème que les phalanges des doigts; les cuifles & les jambes étoient maigres & fort prolongées ; le corps raccourci, la têre groffe; tout cela eft plutôt une bifarrerie de la nature, que la ftruéture d’un peuple formé fur un pareil modèle, Ses organes étoient également altérés. Elle rendoit des fons confus , & elle avoit fi peu d'intelligence , qu’il étoit prefque impoflible de lui faire rien com- prendre ; bien différente en cela de ceux de fa nation, à qui l’on fuppofe une bravoure & un plan de conduite digne d’admirarion. Je n’en ai jugé que comme d’un être malheureux qui n’avoit point eu, en naiflant, les avantages des autres hommes, & rien ne m'a paru extraordinaire en elle. Mais M. Commerfon a donné carrière à fon imagination échauffée par les tréfors de la nature à Madagaf- car ; il a voulu , fans doute, que rout fût merveilleux dans certe terre , qu'il appelle, à jufte titre, le parradis des Naturaliftes. D'ail- leurs , il eft bien étonnant que M. le Comte de Modare, à qui ES —— SUR L'HIST. NATURELLE ET LES ARTS. 361 cette Naine appartenoit, homme d’efprit, curieux & rempli de con- noiffances, n'ait pas approfondi la vérité de l’exiftence de ces peu- ples , pendant deux ans qu'il a commandé au Fort-Dauphin. Mais il falloir laiffer quelque chofe à raconter de cette contrée : je crois qu'il eft aufli perfuadé que moi, que ces petits hommes n'ont d’au- tre exiftence que celle qu’on leur a prêté dans l'imagination. Vous paroïllez, Monfieur, taxer M. Commerfon d'avoir été un peu trop attaché à fes intérêts : je dois rendre juftice à fa mémoire, & vous faire part de ce qui m’eft arrivé avec lui, lorfque j'allai relever l’écabliffement du Fort-Dauphin. M. le Chevalier des Roches, alors Gouverneur de l’Ifle de France, me donna ordre d’embarquer tous les Efclaves appartenans aux habitans du Fort. Je favois que M. Commerfon n'étoit pas riche; je fus charmé de trouver l’occa- fion de l’obliger fans me compromettre :je lui offris ma bourfe pour acheter des Nègres, qu'il eût aifément fait pafler. L’on faifoit un profit au moins de 600 livres par tête d’Efclaves. Il me remercia, & me fit voir cinq à fix mille francs qu'il me dit avoir promis à une perfonne qui en avoit befoin ; je ne pus jamais le déterminer à s’en fervir pour lui-même, & j'ai fçu depuis qu’effectivement il les avoit généreufement prêtés à quelqu'un qui en a fait fon profir. Eft-1l bien étonnant qu’au retour de cette campagne, après le défagrément u’il effuya par la fuppreflion de fa penfon, il ait un peu fongé à £ mettre à l'abri des nouveaux caprices de la fortune , qui l’euflenc peur-ètre culbuté fans reffource ? Voilà, Monfieur, ce que j'aurois dit ou écrit à M. Commerfon, s’il étoit encore vivant; bien éloigné de vouloir difputer avec lui, ce n’eùt été que des obfervations que j'aurois foumifes à fes lumières. Après vous avoir communiqué, Monfieur, les objections de M. le Baron de Clugny, fur ces articles de l’Eloge de M. Commerfon, je dois me FE moi - même fur le reproche qui m'a été fair dans votre Journal, pat M. Barry , Commiflaire de la Marine , à Toulon, au fujer de M. Maillart du Mesle, Intendant des Ifles de France & de Bourbon; je m'étois plaint, avec amertume , de ce que M. Com- merfon avox été obligé de quitter l'Intendance après le départ de M. Poivre; j'avois regardé cette fortie comme indiquant, de la parc de M. Maillart , peu de confidération pour les Savans; mais voici des faits qui font parvenus à ma connoiffance, & qui doivent ré- former nos idées à ce fujer. D'abord , il y avoit ordre exprès du Miniftre de renvoyer en France M. Commerfon, & de faire celfer fon traitement; il demanda de refter, croyant que fa fanté ne lui permettoir pas de partir; M. Maillart y confencit, & lui conferva 3000 livres d’appointement, & 1800 livres pour fon Deflinateur; il logeoit dans une pièce dépendante de l'Intendance, qui devenoir 362 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, néceffaire pour placer les Bureaux du Secrérariar : M. Commerfon ne pouvoit en difconvenit, le fervice du Roi & de la Marine de- voir avoir la préférence fur le Boranite. IL refta cependant encore trois mois dans ce logement, pour avoir le tems d'en chercher un autre. Il en fortir le premier Décembre : M. Maillart étoit arrivé le 21 Août, & il lui fit payer , à compter du jour de la forrie, 60 livres de logement par an, dont M. Commerfon à joui jufqu’à fa mort. Il fut obligé d'acheter une maifon , parce qu'il étoit difi- cile de trouver à fe loger chez les autres avec l'encoutrement pro- digieux de fes collections, & l’efpèce d’infeétion que caufoient fes plantes & fes poiffons infupportable pour tout autre que pour celui qui avoit la pallion de lPHiftoire Naturelle. Après fa mort, M. Maillard fit faire , par les Médecins du Roi, l'inventaire le plus exact de fes livres, papiers & objets d'Hiftoire Naturelle; 1l y fit donner les plus grands foins : 1l rendit compte au Miniftre; il fit embaler le tout au frais du Roi, il l’envoya en France aux oïdres du Miniftre; il fit accompagner cer envoi par le Dellinaceur de M. Commerfon , comme très-propre à donner des renfeignemens à ce fujer. Il en donna avis au Miniftre. Tout eft arrivé à l'Orient, comme on l’a feu depuis ce tems- là. En 1775, M. Turgot, alors Contrôleur - Général , chargea M. Dombery , habile Botanifte , de Mâcon, de mettre en ordre l’herbier & les manufcrits de M. Commerfon , pour lui procurer enfuite le moyen d'aller, par de nouveaux voyages , perfeétionner & aug- menter les connoiffances que nous devons à M. Commerfon. Ces papiers ont été enfuite remis à M. de Juflieu, le jeune, l’un des Boraniftes de l'Académie des Sciences, ainfi que le célèbre Bernard de Juallieu, fon oncle, pour en procurer la publication. Quant à M. Maillart, il a déja donné des preuves authentiques de fes lumières & de fon zèle; il naquit à Aunonne le 31 Cétobre 1731, fils d'un pere qui avoit cté Intendant de Saint-Domingue, & qui s'étoit diftingué, fuivant le- témoignage de M. le Duc de Choifeul , dans une Lettre du 20 Avril 1764. Dès l’année 1756, le fils fur fait Commillaire-Ordonnateur à Mahon , après avoir fait la campagne de cette année-là fur l’efcadre du Roi, & aflifté à un combat naval du 10 Mai 1756. L'année fuivante, il fe rembarqua encore, en qualité de Commillaire, fur une Efcadre de quatre vai£- faux , qui efluya un combat naval dans le Détroit de Gibraltar, le 6 Avril 175$, contre cinq vailleaux Anglois. Il fur enfnite em- ployé à Rochefort & chargé du détail des Colonies, dans le tems du projer de Cayenne. Les fervices qu’il rendit alors, fon zèle , fa probité & fon intelligence, font atreftés dans une Lettre du Mi- niftre, du 19 Juin 176$, qui lui annonce &la farisfaction du Roi, SUR. L'HIST. NATURELLE ET LES ARTS. 363 & une nouvelle récompenfe de fes fervices. Il fur envoyé dans certe Colonie de Cayenne, Commiffaire - général de la Marine & Ordonnateur , en 1765. I la quitta en 1769, après avoir fair fes efforts pour tâcher de virer parti des débris de cer établiffemenr. Mais pour sinfttuire davantage, & povoir juger par comparaifon, M. Maillart parcourut l'Amérique dans un bateau du Roi. Il fur d'abord à Surinam, enfuite à la Barbade, à Sainte- Lucie, à la Mar- tinique, à la Guadaloupe, à Saint-Euffache, à Sainte-Croix , à Por- 10-Rico, & à Saint-Domingue, où il aborda dans tous les Ports de la patrie Françoife. Il étoit au Port-au-Prince le 3 Juin 1770, & il y fut témoin du tremblement de terre qui, ce jour-là | détruifr cétre ville, & quelques autres de la même Ifle. M. Maillart reçat encore des témoïgnages de la fatisfation du Roi, & une nouvelle récompenfe de fes Éurices dans l’adminiftra- tion de la Colonie de Cayenne, fuivant une lettre du Miniltre, en date du 28 Novembre 1371. Ce fut alors qu'on jecta les yeux fur lui pour être Intendant des Ifles de France & de Bourbon ; il y arriva le 21 Août 1772, & il a reçu les mêmes marques de fa- tisfaétion de fes fervices dans cetre nouvelle adminiftration, 11 à follicité fon rappel , en demandant la petmiflion d'aller vifiter l'Inde & la Chine; mais on a exigé qu'il continue de faire le bien de ces Iles. Sa correfpondance avec M. du Hamel, au fujet des étuves à grains qu'il y a établi en grand, & des € Keep de pompes à ref- forts qu'il a imaginées pour les vaifleaux ; fes obfervations fur lPHif toire Philofophique du Commerce des deux Indes, &c., in’ont prouvé fes connoiffances dans la Phyfique , & fon goût d’obferva- tions & de recherches. * I étoit néceffaire, Monfieur , que j'entraffe dans tous ces détails, pour ma juftification, plutôt que pour celle de M. Maillart; heu- reufement, 1l a bien voulu me fournir les pièces nécellaires pour cette juftification. Les anciennes relations que j’avois eues avec lui dans nos études de Collége, & qu'il a bien voulu me rappeler ; l'avoient rendu plus fenfible à mes reproches, que ne méritoit le fait dont il étoit queftion; mais elles ont augmenté l’emprefflement que je devois avoir à réparèr mes torts. Je fuis, &c. Le 364 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, OBS EURO ANT OMNES: Sur lélettricité de la Glace; Par M. ACHARD (1) HPoue les Phyfciens s'accordent à regarder l’eau, tant qu'elle eft fluide , comme un conducteur de l'électricité ; mais ils diffèrent au fujec de la glace ou de l’eau qui a perdu fa fluidité par le froid. Les uns la regardent comme un conducteur aufli parfait que l’eau non gelée ; les autres penfenc que la glace ne conduit pas l'éleétri- cité, & la rangent au nombre des corps originairement éleétriques. M. Jallabere déchargea avec explofion une bouteille de Leyde, dans laquelle l’eau étoit gelée, & il conclut de certe expérience, que la glace conduit le fluide éle&rique. é M. Franklin regarda la glace comme un corps originairement éleétrique ; mais comme il ne s’étoir fervi, pour fes expériences, que d’un glaçon, M. Beccaria, & après lui M. Beroman, dans une Lettre à M. Wülfon, objeéta aux expériences de M. Franklin, qu'il en eft de la glace comme de l’eau , & qu’une petite quantité d’eau ne conduit point le Auide éleétrique , tandis qu’une plus grande quantité d’eau le conduit très - bien; enforre que les réfulrars des expériences de M. Franklin auroient été différens, s’il avoir faie ufage d’une plus grande quantité de glace. M. Bergman femble ce- pendant avoir changé de fentiment ; car il dit dans un autre en- droit , avoir obfervé que la neige ne conduit que par l'électricité, & il penfe que s’il pouvoit fe procurer des plaques de glace ailez épailles , il parviendroir à les charger comme des carreaux de verre. M. Cigna étroit fi perfuadé que la glace eft un corps originaire- ment électrique , & qu’en fe fondant elle fe change en un corps conduéteur , qu’il s’en fervit pour s’aflurer fi les corps originaire- ment électriques, contiennent plus de fluide électrique que les con- duéteurs, comme le penfe M. Franklin. (1) Cet article eft tiré de l’excellent Journal Litréraire de Berlin, dédié au Roi de Prufle, & entrepris par une Société d'Acañémiciens de certe Ville. Il en pa- soit un volume tous les deux mois. On foufcrit à Paris chez Lacombe, Libraire, sue Chriftine, Prix 15 livres, port franc. M. ne SUR L’HIST. NATURELLE ET LES ARTS. 36$ M. Prieflley fiv plufeurs expériences qui femblent prouver que l# glace conduit l’éleétricité : ce Phyficien éleétrifa un morceau de glace par un froid affez confidérable , qu’il ne détermina cependant pas. Pour faire ces expériences, il tranfporta fa machine électrique en plein air, & il tira de fortes étincelles d’un morceau de glace mis en communication avec le conduéteur de fa machine éleétrique. M. Prieflley mit encore le crochet d’une bouteille de Leyde en communication avec un morceau de glace, & trouva qu'elle fe chargeoit aufli bien que fi elle avoit été attachée au premier con- ducteur. Ce Phyfcien obferva aufli que la neige ne conduit pas le Auidé électrique auf parfaitement que la glace, ce qu'il attribue à ce que, dans la neige, les parties de la glace font écartées les unes des autres. Il y a long-tems que cette diverfité de fentimens parmi les Phy- ficiens , & de réfulrars dans les expériences, m’a fait fouhairer de faire des expériences capables de me donner quelques lumières fur ce fujet ; le grand froid de cet hiver étant très-propre pour ce def- fein, je n’ai pas manqué d’en profter.! La première difficulté confiftoit à me procurer de grands morceaux de glace tranfparens , également folides & exempts de bulles d'air. Après plufeurs tentatives infruétueufes , qu'il feroit inutile de rap- porter ici, je trouvai enfin le moyen d’obtenis de très-grands mor- ceaux de glace aufli tranfparens que l’eau, & entièrement exempts de bulles d'air. Je ‘remplis un grand vafe de verre cylindrique avec de l’eau dif tillée, & le plaçai fur une fenêtre dans une chambre qui n'étoit üe très-pea chauffée ; le froid ide l’air'extérieur étoir de 7 degrés, Sbilion de Réaumur; enforte que le côté du vafe qui étroit le plus près de la fenêtre, étoir expofé à un froid affez confidérable pour faire geler l’eau; tandis que le côté oppofé étoit dans un air trop chaud pour que: l'eau, qui éroit de ce côté; püt fe convertit ex glace : de certe manière!, il fe forma un morceau de glace, dont la furface fupériéure & l’inférieure avoient la forme d’une lunule} Lorfqu’on tenoit le verre dans lequel la glace s'éroir formée, contre le jour, on ne pouvoit pas diftinguer l’eau de la glace. La glace qui s’étoir formée de cette manière , étoit entièrement exempte de bulles d’air ; & paroifloit être pat:tout d'une égale denfité. JE cri 1330 ul us : - Pour peu qu'on fafle attention à ce qui arrive lorfque l’eau fe change en glace, &7 à la formation des bulles d'air qui interrom- pent prefque toujours fa! continuité ; l’on .fe convaincra aifément, Tome VIII, Part, II, 1776. Aaa 366 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, qu’en fuivant la méthode que j'ai indiquée, l’on doit néceflairement obtenir de la glace rranfparente, & exempte de bulles d'air. Celles qu’on trouve ordinairement en très-grand nombre dans la glace , doivent leur origine à l'air que contenoit l’eau avant de geler; donc, plus l’eau contenoit d'air , plus aufli la glace qui en eit for- mée, doit contenir de bulles d’air : c’eft pourquoi j'ai donné la pré- férence à l’eau diftillée , parce qu’on la conferve dans des vafes fer- més ; elle contient toujours moins. d'air que l’eau de pompe, de pluie ou de rivière. Cette obfervation n’eft pas contraire à celle que M. Cafillon à inférée. dans les Mémoires de l’Académie Royale des Sciences & Belles-Lertres de Berlin; j'ai appris de cet Académicien celèbre , que les bouteilles de fon eau diftillée avoient été long tems débouchées, & qu’elles l'écoient quand l’eau y gela; que cette année, quatre boateilles d’eau diftillée , qu’il avoit tenu bien bouchées , fe fonc gelées dans fon laboratoire , & que la glace n’avoit prefque point de bulles; mais que celles qui y éroient en très-perit nombre, avoienc la forme fphérique , & reflembloient à de petites perles. La condition principale pour obtenit de la glace tranfparente , confifte à placer le vafe qui contient l’eau ; dont une partie doit fe changer en glace, de manière qu'un de fes côtés foir expofé à un froid affez confidérable pour faire geler l’eau, randis que le côté oppolé eft à un degré de température qui ne permet pas à l’eau de fe changer en glace. L'eau n'étant jamais entièrement privée d’air, il eft effentiel, pour qu'elle fe change en glacë tranfparente, qu’elle puiffe fe décharger de l'air qu’elle contient, à mefure qu’elle prend de la fotidiré, ce qui ne peut avoir lieu que lorfque le froid agir fuivant une feule direction , & que l’eau fe gèle peu-à-peu, fuivant la même direc- tion; dans ce cas, les particules d’eau , au moment où elles perdent leur fluidité, touchent à des particules d’eau qui font encore fluides, & qui, n’oppofent, par conféquent aucune réfiftance au paflage de l'air; & comme ,fuivant la méthode ique j’ai indiquée, il y a une artie ‘de l’eau. qui inelpeut jamais.fe geler , air trouve rowjours un Fibre pallage , &,n’interrompt pas là tranfparence & la folidiré de la glace; ce qui arriveroit infailliblement fi le froid agiffoir avec une force égale, fuivant toutes les direétions, cômme on le voir brfqu'on expofe un;vafe, rempli d’eau , à l'air libre , .& que le froid eft à quelques degrés au-deffous du terme de la congélation. Je. fuis. entré! dans -quelques détails à loccañon -dé la glace trahf- parente & de fa formütion., & j'ai donné l'explication de la mé: thode que j'ai indiquée, patce que j'ai su que les Phyfciens ver< SUR L'HIST. NATURELLE ET LES: ARTS. 367 roient, avec plailir, un moyen de fe procurer de grands morceaux de glacé aufli tranfparens que l’eau , ce qui fera peut-être utile en tulle occafons. Je pafle maintenant aux expériences qui font l'objet principal de cetre Diflertation. Exrérience 1. Je tranfportai , le 16 Janvier, ma machine éle&ri- que en plein air, & je l'y laillai jufqu’au lendemain fans en faire ufage, afin qu'elle prit le degré de Froid de Pair extérieur. Le 17 au matin, le thermomètre étant à 6 degrés de Réaumur , au-deffous du point de congélation , je fufpendis à des cordons de foie un morceau de glace qui avoit la figure d’un parallèlipipède, de deux pieds de long , & de deux pouces d’épaifleur & de largeur; de ma- nière que ce parallèlipipède étroit en communication , par une de fes extrémités, avec le conduéteur de la machine électrique. Après avoir électrifé ce conducteur , j’approchaï Le doigt de la glace à l’ex- trémité qui ne couchoit pas le conducteur , & qui en étoir par con- féquent la plus éloignée; il en fortit une très-foible érincelle, qui, quoiqu'elle füc vifible, ne fit qu'une impreflion fort peu fenfible à la peau. Je répérai certe expérience, en approchant fucceflivemenc le doigt de la glace dans des endroits plus où moins éloignés de l'extrémité qui touchoit le conducteur deftiné à recevoir & à tranf- mettre plus loin le Auide électrique ; & je me fuis convainçu, que plus l'endroit d’où je cirois l'érincelle, éroit près de l'extrémité du morceau de glace qui communiquoit avec le conduéteur , plus l'étin- celle étroit fenfible, & que les érincelles qu'on tiroit du conducteur par l'approche du doigt, ou de quelqu'autre corps non-électrique per JE, étoient toujours beaucoup plus fortes que celles qu'on pouvoit tirer de la glace par la même méthode, dans quelque endroit qu’on la touchät. Il fuit de cette expérience , que la glace , fous les conditions in- diquées , c'eft-à-dire , lorfque le froid eft de 6 degrés de Réaumur, conduit l’éleétricité, quoique difficilement, & que la réfiftance qu’elle oppofe au paflage de la matière éleétrique ; augmente à mefure que le fluide électrique eft obligé de paffer par une plus grande quantité de glace. Pour faire un prifme de glace, de la grandeur marquée , je com- mençai par me procurer , de la manière indiquée, un grand mor- ceau de glace tranfparente ; je tirai de ce morceau de glace, au moyen d'une fcie chauffée fur des charbons , deux prifmes quadran- gulaires , d’un pied de longueur chacun ; dite leurs furfaces , qui éroient fort inégales , avec un fer à repaller chauffé; enfuite je mouillai une des extrémités de chaque prifme , & après avoir appro- ché ces extrémités de manière qu’elles fe rouchoient exaétement , je Aaaz 368 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, plaçai ces prifimes au froid : ils fe réunirent dans quelques minutes, par la congélation de l’eau, & j'obrins de cette manière un prifme quadrangulaire de deux pieds de longueur. Exruience IL. Je mis une des extrémités de ce prifme en com- munication avec l’armure extérieure d’une bouteille de Leyde, & après l'avoir chargée, j'approchai l'autre extrémité du fil d’archal qui communiquoit avec l’armure intérieure; il ne partit qu'une érincelle foible , quoique la bouteille de Leyde füt très-fort chargée, & je pus en tirer fucceflivement , de la même manière , quatorze étin- celles, à la vérité routes fort foibles, cependant fenfñbles , tandis que la même bouteille de Leyde fe déchargeoit en une fois, lorf- que la communication fe faifoit au moyen d’un cercle métallique. Cette expérience fur. faite dans les mêmes circonftances que la première, le froid étant de 6 degrés, divifion de M. de Reaumur. Les conféquences qu'on peut en virer, font parfaitement femblables à celles que nous préfente la première expérience. Ces expériences ne m'ayant cependant pas paru fatisfaifantes , je fouhaitai beaucoup de pouvoir les répéter par un plus grand froid. Je fis tous les préparatifs néceffaires , dans l’efpérance que nous au- sions un retout de froid femblable à celui du 13 Janvier, dont je n’avois pu profirer, faute d’avoir tout préparé pour Les expériences; mes efpérances furent réalifées le 27 Janvier ; le froid augmenta tel- lement vers le foir, que le thermomètre baiffa à 20 degrés au-delfous du terme de la congélation , où il refla aufli une partie de la nuit du 27 au 28 Janvier. Je commençai à répérer mes premières expé- riences | & j'eus le plaifir de voir que les réfultats furent non-feu- lement différens, mais entièrement oppofés; car ayant éleétrifé le prifme , comme dans l'expérience première, je ne pus en tirer au- cune érincelle par l'approche du doigt : je mis alors l'extrémité de morceau de glace , qui étoit la plus éloignée du conducteur , én communication avec un bâtiment ; mais malgré cela, le premier conducteur de la machine avec lequel l’autre extrémité du morceau de glace communiquoit , refta électrique, & je pus en tirer encore des érincelles affez fortes pour enflammer l’efprit de vin chauffé ; ce qui prouve que la glace ne tranfmertoit pas le fluide éleétrique, dont le conducteur étoit furchargé. Je répétai auffi l'Expérience II, en ajoutant le prifme de la glace, de manière qu'il fit partie du cercle de décharge d'une bouteille de Leyde; le réfultat fur encore fort différent de ce qu’il avoit été la remière fois, & je ne pus tirer de cette manière aucune étincelle fenfible ; la bouteille refta mème chargée prefque au même degré où elle lavoir été, quoique fon armure extérieure & l'intérieure euffent été en communication pendant cinq minutes. SUR L'HIST. NATURELLE ET LES ARTS. 369 Exréience II. Je fufpendis une plaque de glace à des cordens de foie, de manière qu’elle fur dans une fituation horifontale. J'a- vois tiré cette plaque , plufieurs jours auparavant , d’un grand mor- ceau de glace qui étoit fort tranfparent & entièrement exempt de bulles d’air ; elle étoit quarrée ; chaque côté avoir deux pieds de lon- geur, & fon épailleur étoit à deux pouces. J'avois appliqué au mi- ieu des deux furfaces oppofées de cette plaque , des plaques circu- laires de fer-blanc, de dix pouces de diamètre, que j'avois mouillées auparavant , afin qu’en fe gelant contre la plaque de glace , elles s'y affermiflent. Tout étant ainfi préparé, je mis la plaque de fer- blanc , qui étoit attachée à la furface fupérieure de la glace, en communication avec le premier conducteur de la machine électrique, & la plaque de fer-blanc qui étoit fixée à la furface inférieure, fur mife en communication avec un bâtiment , au moyen d’une chaîne de métal. Enfuite , j’éleétrifai le premier conducteur, & lorfqu’il donna des fignes bien marqués d’éleétricité, j'approchai la chaîne qui communiquoit avec l’armure inférieure , de l’armure de la furface fupérieure de la glace; il partit fur-le-champ une érincelle bruyante & très-vive. Après avoir éleétrifé de nouveau le conduéteur , j'appro- chai un doigt de la couverture métallique de la furface fupérieure de la glace , tandis que je touchai de l’autre main l’armure de la furface inférieure ; il partit encore une étincelle affez forte , & je reffentis une commotion aflez vive dans le bras & dans la poi- trine. Je variai l'expérience précédente, en la répétant avec un morceau de glace creufé de manière qu'il avoit la figure d’un verre à boire; il avoit un pied de haut, fur 8, pouces de diamètre, & la glace étroit par-tout de 2 pouces & de@ai d'épaifleur; je remplis la cavité à la moitié de fa hauteur , avec de la limaille de fer, & je couvris la glace extérieurement à la mème hauteur avec des feuilles d’étain; en- forte que ce morceau de glace creufé imitoit , à tous égards , une bouteille de Leyde : après l'avoir éleétrifé de la mème manière, j'ap- prochai en même-tems un fil d’archal de l’armure extérieure & in- térieure ; il partit une étincelle bruyante, & je reflentis une com- motion aflez vive, en approchant une main de l’armure intérieure, tandis que je rouchois de l’autre l’armure extérieure. Quoique ces expériences paroiffent fuffifantes pour donner tous les éclairciffemens néceffaires fur l'électricité de la glace, j'en rapporterai encore une qui eft très-propre à lever tous les doutes. Exvérience IV. Je formai d’un grand morceau de glace tranfpa- rent & exempt de bulles d'air, un fphéroïde elliptique, dont le plus grand diamètre avoit 14 pouces, & le plus petit 10 pouces. Ce fphé- 370 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, roïde avoit été à l'air libre depuis le 18 Janvier , & avoit un peu ae perdu de fon volume par l’évaporation de la glace, qui, epmmé, . Ton fait, eft très- confdérable. La nuit du 27 au 28, je fixai ce ” fphéroïde à la machine de rotation, donr je me fers pour mettre : ; SU le globe életrique en mouvement ; j'avois ajufté à certe machine un , coullin couvert d’une feuille d’étain, de manière que quand on fai- A {oit tourner un morceau de glace, il frottoit contre le couflin : lorf- que tout fac ainfi préparé , je fis tourner affez vite huit à dix fois * 4, de fuite le globe de glace; enfuite, je trouvai que les endroits de LE la glace qui avoient frotté contre le couflin , attiroient & repoufloient des cheveux, du duver & autres corps légers. Voyant alors que le corps de glace étroit effectivement devenu éleétrique , jy appliquai le conducteur de ma machine électrique je fis encore tourner le globe de glace huit ou dix fois; j'eus alors le plaifir de virer avec le doigt des écincelles très- fenfbles du conduéteur; il attira aufli alors des corps légers, & les repouffa enfuite. Cette expérience demande beaucoup de précautions ; car pour peu que le frottoir ou la glace s’échauffe, l'expérience ne réuflit pas; , auf, eft-il effentiel , pour éviter cet inconvénient , de ne pas faire * tourner le globe de glace trop vite, ou pendant grop long-tems de fuite. ÿ Je fis toutes ces expériences en plein air, le 27 Janvier aufoir, & pendant la nuit du 27 au 28, le thermomètre érant à 20 de- grés au-deflous du terme de la congélation. En comparant maintenant ces dernières expériences, avec les deux premières qui furent faites par un froid de G degrés, l’on fe con- vaincra aifément que la glace eflgranrôt un conduéteur de l'éleétri- cité, & tantôt un corps originairément éleétrique, fuivant le degré de froid de la glace & de l'air; car la glace conduifit le fluide élec- tique lorfque le froid de l'air, & par conféquent aufli celui de la lace qui y avoit été expofé pendant long-tems , éoit de 6 degrés, A Gen de Réaumur , au-deflous du terme de la congélation; tan- dis que les autres circonftances , étant d’ailleurs les mêmes, la glace avoit tous les caraétères d’un corps originairement électrique , lorf- que le froid étoit de 20 degrés au-deffous du terme de la congé- lation. Ces expériences peuvent encore fervir à expliquer d'où vient la différence, & même l’oppoftion qui fe trouve entre les réfultats des expériences faites fur ce fujer par différens Phyficiens. Il paroic qu'ils n'ont pas fait attention au degré de froid, par lequel ils onc fair leurs expériences, & qu'ils ont ern que les réfultats feroient toujours les mêmes, pourvu que l'eau fût bien gelée, & que le L SUR L’HIST. NATUREILE ET LES ARTS. 371 degré de froid de l’endroit dans lequel ils faifoient leurs expériences, “Für affèz gas pour empêcher la glace de fe fondre , & de deve- nir humide à fa furface. Les expériences que je viens de rapporter, confirment encore très- bien la différence que j'ai tâché d'établir entre les corps conduéteurs & les corps originairement électriques. J'ai prouvé alors qu’on peut changer à volonté , un corps conduéteur en un corps originairement électrique , pourvu qu’on rapproche fes parties , & qu’on diminue ainfi la grandeur de fes pores, en augmentant fa denfité; c'eft exac- tement le*cas de la glace qui, par un froid de 6 degrés, condui- foit le Auide électrique, tandis que par une augmentation confidé= rable de froid , qui devoit néceflairement augmenter fa denfité , le froid produifant cet effe Œur vous les corps connus , elle fe changea en un cotps originairement électrique. DS EE RATLAT, À ON Sur les limites des Règnes de la Nature; se Par M. l'Abbé DICQUEMARE. Au premier afpect de certains corps, doués de la faculté de fe mouvoir , mais formés fur des modèles peu conformes au méchanifme jufqu'alors connu de l'économie animale , ou à l’idée générale qu’on s'en étoit fait d’après des idées particulières , on fur féduir, on crut appercevoir des plantes, des fleurs , c’éroit des animaux. On tâta, on balança beaucoup ; c’étoit, fans doute, l'effet d’une forte de répu- gnance épale à celle que dûrent éprouver les anciens Botaniftes , lorf- qu'ils publièrent que certaines plantes auxquelles on remarque un mouvement machinal dans les eaux, étoient animées, c’eft-a-dire , qu’elles joignoient à la fenfibilité des mouvemens fpontanés, &c. D'un autre côté, l’idée d’un animal , fixe par une racine, a des corps étrangers, recevant, par la feule ftrudure de fes pores, des fucs diftribués enfuite en vapeurs à fes extrémités, par l’aétion & la température des fluides ambians , y portaflent l’évolution & Pac- croiffement, étoit-elle moins fingulière ? ne dat-il pas paroître aulli difficile de l’infinuer aux autres , que d'en être vivement perfuadé ? Mais trompés par les apparences, émus par l'éclat des phénomènes, follicités à décider , on crur devoir établir ou renouveller une clafle 372 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, intermédiaire , qui formeroit une nuance imperceptible entre le rè- gne animal & le végéral : ceci, érendu jufqu’au minéral , a même été reçu par un grand nombre comme une découverte heureufe qui levoit toute difhcuité, & depuis, la plupart des définitions ramè- nent fans cefle à ce fyftème, & laiffent à peine la liberté de dou- ter. Dans des difcours élégans , on va beaucoup plus loin que les premiers ; l’aifance qu’on fe procure eft grande, tout coule de fource: cependant, en continuant d'effacer a de plus en plus la ligne de démarcation qui a jufqu’ici féparé les règnes, ne feroit-il pas à crain- dre de jetter dans les idées une forte de confufon, qui ne paroît pas exifter dans la nature? On éviteroit cet écueil, en développant, par des obfervarions fuivies, tout ce qui, fous une légère apparence de plantes, eft réellement animé, & ce qui ne fait que le paroïtre; mais ce travail eft long & pénible. Il y a, fans doute, entre les animaux & les végétaux , & entre ceux-ci & les minéraux, des rap- ports finguliers , des analogies féduifantes ; j'en ai moi-même véri- fié, j'en ai découvert; mais le langage ordinaire ne les rapproche- t-il pas fouvent beaucoup plus qu’ils ne le font en effet ? Les trois règnes forment, à la vérité, un tout &. un tout harmonique ; mais ce tout a fes parties fi bien diftinguées l’une de l’autre , qu'il ne fera peut-être jamais poñlible de prouver à ceux qui y regardent de près , qu'entre l'animal & la plante , il n’y ait point d'intervale; cependant , en enchériffant l’un fur l’autre, on a prononcé que la nuance étoit imperceptible. Quand on obferve avec autant de patience que de méthode, on eft füurpris qu’à cette affertion un peu fingulière , on en ait ajouté, fur les facultés de certains animaux, un grand nombre qui ne pa- roiffent guère mieux fondées; qu’on ait désradé celui-ci, relevé ce- lui-là. La diftance eft quelquefois fort grande du cabinet au fond de la mer, & dans l'éloignement les objets fe confondent. Ces idées, cet apperçu d'échelle de la nature, de nuances imperceptibles , de chaine non-interrompue, de trait unique qui trace l’enchaînement de tous les êtres, de poflibilité, &c., a vraiment quelque chofe de grand , d’élevé , qui dévoile un coup-d’œil, dont tous ceux qui cul- : tivent les Sciences ne font pas fufceptibles ; mais dans le fond , cet air de grandeur qui nous plait, ne reflemble-t-1l pas un peu aux agréables , aux délicieufes produétions du Décorateur ? Plus on y pro- digue de ticheffes apparentes , moins on perfuade ; on eft enchanté en appercevant le vol rapide de l'imagination; l’efprir s'élève à l’af- peét des productions hardies qui femblent reculer les bornes de l’art; mais peu-à-peu l’enchoufiafme diminue ; on fe reflouvient que l’art doit fuivre la nature, & craindre de la détruire fous prétexte de l’'embellir, Sentir, SE ——— LAL ES * ' : SUR L'HIST. NATURELLE ET LES ARTS. 373 Sentir , difcerner , agir, travailler, c’eft être animé. Etre infen- fible, mais croître & fe reproduire , c’eft végcter. Recevoir par juxta- pôfrion l’accroiffement , une figure accidentelle ou régulière, fans organifation , fans fenhbilité , fans faculté générative, c’eft le pro- pre du minéral. Un être quelconque, fent ou ne fent pas; s'il fenr, c'elt un animal; il y a alorsentre cet être & celui qui ne fait que véoéter , une plus grande diftance que de celui-ci au minéral, Le minéral eft la matière concrète élaborée; le végétal, la matière or- ganifée ; quelque merveilleufe que foit l’organifation d’une plante, la fenfbilité , actribur effentiel de l’animal, ne vient pas feulement d’une organifation plus parfaite, on à dir la matière morte , la matière vivante ; a-t-on dû dire, a-t-on pu dire, la matière fenfble? Cette faculté, cette forte de fentiment de foi-mème, & l'intérèc propre qui en paroît la fuite nécelfaire, même fans idées abftraires, doit fuppofer un être effentiellement différent d'un corps feulement organilé, un principe fenfitif & d’aétion, peut être mème de fenfations de fentiment & d'opérations, dont les bornes & l'éten- due pourroient fournir le fujet d’une belle differtation : mais la nature, ou plutôt l’effence de cet tre , nous fera-t-elle jamais bien connue ? Si les animaux qu'on a jufqu’ici regardés comme les dernières & comme les premières plantes, fentent qu'on les touche , ils font d’un ordre fupérieur qui ne tient point à celui des plantes ; la chaîne refte interrompue jufqu'à ce qu'on trouve, ce qui ne paroît guère poffible , quelque chaînon , quelque maille propre à la rétablir ; mais s'ils fe déterminent en conféquence de cet attouchement, s'ils dif- cernent leur proie , l’intervale eft encore plus grand , le paffage plus brufque. La réponfe à tout ce qu'on à avance, fe trouve dans la nature ; c’eft en l’obfervant de nouveau qu’on fe convaincra que ce qu’on avoit pris pour des zoophyres, font de vrais animaux ou de fimples végétaux. Si on entend par zoophytes des animaux qui ont, au premier coup -‘d'œil, quelque reffemblance avec la figure d'une plante ou d’une fleur, ou une plante qui ait un mouvement uni- forme , occafionné par l'action d’une multitude de petits animaux qui y feroient logés , ou par l'intromiflion alternative d’un fluide, ou par un effet à-peu-près femblable à celui qu'opère l'eau fur une corde, le feu fur un parchemin , &c., on auroit dù choifir une expreflion plus jufte : mais fi elle doit défigner une plante animée, un animal végérant & feulement palif, ou un être qui foit en même - tems plante & animal , c’eft encore un plus grand inconvénient ; les idées fe confondent, la claffe , ou l’ordre des zoophytes , s'évanouir, c’eft le fruit de l'imagination; on n’a pas affez obfervé les êtres qui la compofent. Un polype d’eau-douce change de place, a des mouve- mens combinés & relatifs, difcerne fa proie ; une anémone de mer Tome VIII, Parc. II. 1776. Bbb 374 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, la difpate à fa voifine, a un mouvement prosrelüf, agit en confé- quence de ce qui la gène ou l’accommode ; une ortie marine n’eft point adhérante , elle change de lieu en nageant par un mouvement qui devient plus fréquent & plus fort lorfqu’elle eft attaquée par, l'anémone de mer qui s’en nourrit, ou par quelque autre ennemi; 1l y en a même des efpèces très-vives , que je ferai bientôt connoître : üne étoile de mer jouit de la faculté loco-morive, faifit fa proie, amène à fa bouche , l’avale , &c. ; une ortie marine, une anémone de mer, un polipe d’eau douce, une étoile de mer, font des ani- maux. Les plantes, même celles qu'on nomme improprement fenfi- tives, ne connoiffent point de proie , reftent attachées aux corps dont elles reçoivent leur nourriture ; elles n’ont point de mouve- mens fpontanés , au contraire , le changement de pofñtion qu'éprou- vent leurs pédicules, leurs feuilles, et toujours le même; il ne tend ni à fuir, ni à s'approcher du corps qui touche; on peut les tou- cher mème affez fort, fans que l’effer s’en fuive, il faut un ébran- lement. Il paroît que les vibrarions intérieures de leurs fibres, arrè- tées par cet ébranlement qu'occafonne le contact du vent, du doigt, &c., lorfqu’il va jufqu’à leurs feuilles entièrement ouvertes, opère ce changement de poftion : cec effet, dont le méchanifme a été fuivi, n'a pas paru avoir également lieu dans les jeunes feuilles, & ne fe communique pas toujours au pédicule ; la fenftive la plus parfaite n'eft donc pas, comme on l’a dir, prefque un animal, c’eft une plante & rien de plus; elle ne fent pas : les hypothèfes les plus ingénieufes , les affertions les plus décidées, les déclamations mêmes les plus fortes, fi on les employoit, prouveroient - elles jamais le contraire ? La diftinétion de fexe dans les plantes, n’occalionne au- cun mouvement fpontané , aucune recherche d’un individu à l’autre; leurs amours, puifqu’on s’eft permis de parler ainfi, font bien mé- chaniques , bien obfcurs & bien froids; fans fentiment , fans con- noilfance , fans defir comme fans fenfbilité, que refte-t-1l? On nous fera bientôt, par de jolies phrafes , rentrer dans les agréables illufions de la féerie. Tout être fenfble eft animal; tout ce qui eft privé de certe faculté n’eft point animé; & comme on ne peut être & n'être pas en même-tems doué de fenfibilité , il fuir qu'il ne peut y avoir de plantes animées, ou d’animaux-plantes ; il n'y a donc point de nuance vraiment imperceprible qui umife les deux premiers règnes , puifque non-feulement cela implique, mais même que les êtres qu'on a défignés comme les derniers termes de l’un, & les premiers de l’autre, appartiennent , fans équivoque, à l’un ou à l’autre; la ligne de démarcation n’eft donc point effacée. Ceux qui fe font familiarifés avec l’obfervation, difcernent même , par la forme extérieure , un animal d’avec une plante, cetre forme fûür-elle SUR L'HIST. NATURELLE ET LES ARTS. 376 pour eux la plus nouvelle ou la plus bizare, & quand ils feroiene féduits au premier afpeét , il y a toujours quelque manœuvre, quel- que particularité qui décèle l'animal ; mais auf ne montre-t-il conftamment rien de plus que ce que nous appercevons dans les autres animaux. Tout ceci elt fenti & ne tient guère aux idées gé- nérales qu’on peut s'être fait du principe fenftif, ni du méchanifme de l’économie animale, fur des idées particulières, & qui devien- nent fouvent des préjugés nuilbles ; à l’afpe“t de ces manœuvres, de certe forme , on dit, il y a ici quelqu'un, & on ne fe trompe pas. Alors, un coup de biftouri dévoile la figure de l’intérieur & les principaux rapports qui fe trouvent entre les parties conftituan- tes, & même, quoique énigmatiquement , celui du principe fenfitif à la machine. $ Je ne fais où l’on a puifé la confiance avec laquelle, même dans des ouvrages férieux, on a prétendu rapprocher d’huitre affez près du dernier terme, pour en faire prefque une plante; il auroit pu ar- river que par une oppofition de fentimens , dont on n’a que trop d'exemples, d’autres euffent cru trouver, dans fa ftructure compliquée, de quoi nous la repréfenter comme fufceptible des plus hautes fpé- culations ; il femble qu’on en ait mieux connu les coquilles & le soûr, que la conformation intérieure , où on voit tout ce qui peut conf- tituer l'animal ; quand on l’aura anatomifé de plus près qu’on ne l’a fait, & fur-tout quand on aura obfervé & fuivi les manœuvres que l’huitre emploie pour fe défendre, fe nourrir, multiplier, aggrandir fon logement, & tour ce qui eft relatif à fes befoins, y apperce- vra-t-on quelque chofe qui rappelle l’idée même la plus éloignée d’une plante ? fera -t- on bien perfuadé alors que cet animal foic moins animal qu’un autre? Elle refte fixée aux rochers, au corail , à des coquillages, à des arbres & autres corps; y attache indiffé- remment l’une de fes coquilles , fans y jetter de racines , fans en tirer par-là aucune fubftance , & peut même refter détachée ; elle n’a donc rien, abfolument rien de commun avec les végétaux, pas même avec les plantes marines qui croiffent fur les écailles : mais pour obferver de nouveau, & avec fruit, les manœuvres de f’huitre, des coquillages qui font mal connus , & des autres animaux ma- rins qu'on s’eft permis de dégrader , il faut joindre au coup-d'œil de laigle, la fagacité de l'abeille , ’eft-à-dire, à des connoïffances très- étendues , celle de la Phyfique, de l’économie animale , confidérée dans les animaux qui s’éloignent le plus de la manière d'etre des mieux connus; faifir avec autant d’activiré & de patience que d'art, le crayon à la main, ces beautés fugitives, ces petits tours , ces af- pects heureux, & tour ce qu'on apperçoit ; le décrire avec clarté, avec précifion, indiquer où cela peut conduire ; mais fur tout fans Bbb 2 376 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, / amour du merveilleux , fans préjugés, fans prétentions au fragile honneur de faire des fyftèmes ; bannir tout autre inrérèr que celui de la vérité ; avoit le courage de voir les années s’écouler dans l’at- tente de réfulrats incertains , & dans un travail pénible & difpen- dieux. Lorfqu’on fréquente les Cabinets , qu’on ouvre des Livres, on y voit des dérails iimmenfes, des chofes très-intéreffanres & rrès-agréa- bles fur les coquilles ; mais ces coquilles font des châteaux , des for- terelles, où l’art de l'attaque & celui de la défenfe, paroiffent bien mieux balances que ch2z nous ; ceux qui les habicèrent, furent des Artiftes peut-être moins bornés qu’on ne l’imagine, & qui pouvoient varier leurs procédés jufqu'à un certain point; ils en furent les Ar- chirectes , les Modeleurs & les Peintres; or, c’eft la perfonne & l’art de ces habirans qu’il feroit intére{fanc de bien connoître. Voudroir- on terminer l’hiftoire de ce peuple immenfe , fans l'avoir vu, fans le connoître , fans avoir vécu avec lui ? . Si quelque chofe éroit capable d’induire en erreur , c’étoit les po= lypes qui forment les coraux , les corallines, &c. Aufñli n’ont-ils pas manqué de produire cet effer. Ces petits animaux fembloient unir le règne animal au végétal, à caufe de leur forme - leurs admira- bles productions, regardées comme des pierres végétantes , paroif- foient faire la nuance entre le végétal & le minéral; mais il eft aifé de diftinguer , & on diflingue très-bien le polype , le polypier & la plante marine, fur laquelle il eft quelquefois formé. Quelques vermifleaux de mer, ou vers à tuyau, fonc des animaux qui , fous l’apparence de très-jolies Heurs (avec la faculré de repouffer que je leur ai découverre), ont une adrelle admirable & une vi- vacité étonnante, femblent voir, travaillent leur logement avec une propreté, une aifance qui a peu d'exemples : à l’afpect de leurs ha-: bitations qui font comme autant de colonies, on peut foupçonner comment elles ont été fondées, & fuivre leurs progrès ; il n’y a là nt plantes ni eurs. La mer eft remplie d’une quantité innombra- ble de productions animales & végérales, peu connues, mal connues, où entièrement inconnues, & qui méritent de l'être; mais il faut être en garde contre l'illufion du premier afpeét. Les animalcules des humeurs animales & autres, feront mieux connus à mefure que les microfcopes fe perfcétionneront 3 & plus nous obferverons ; moins nous aurons d’équivoques. “tr AUS UE AU ner SUR L'HIST. NATURELLE ET LES ARTS. 377 LL Mi EM ONanesnE Dans lequel on examine, fi les Animaux des diférentes familles tranfmettenc le choc éle&rique , & à quelle fubf- tance ils doivent cette vertu ; Par M. BERTHOLON, Prétre de Saint-Lazare , Proféffeur en Théologie , des Acadèmies Royales des Sciences & Belles. Lerrres de Begiers, de Lyon, de Marfille, de Nifmmes, de Touloufe, € de La Société Royale de Montpellier. Le eft certain, par des expériences conftantes , que les animaux reçoivent parfaitement la commotion électrique. Les différens in- dividus des fix grandes familles qui partagent Île règne animal tels que les hommes & les quadrupèdes, les oifeaux, les poiffons , Les amphibies, les repriles , les infeétes & les vers, manifeftent tous de la douleur, lorfqu'on fair fur eux l'expérience de Leyde; ce qui ne permet pas de douter qu’ils ne foient d'excellens conducteurs de la commotion. Pour rendre encore plus certain certe expérience, je me fuis fervi du même appareil que j'ai décrit dans le Mémoire précé- dent, c’eft-à-dire , d’une machine électrique à plateau , d'un carreau de verre éramé fur chaque furface, & de deux perfonnes qui for- moient la chaîne éleétrique, & entre lefquelles on plaçoit fucceflive- ment les corps qui éroient les objets de nos recherches. J'ai donc mis au milieu de la chaine, d’abord différentes efpèces de quadru- pèdes , enfuite des oifeaux divers, plufieurs poiffons de mer & de rivière ; des reptiles, tels que des tortues, des ferpens, des lézards, des infectes, des vers de verre , des limaces , des holoruries ; des calmars , des étoiles de mer, des outfins; des coquillages , tels que des limaçons terreltres, Auviatiles & marins; des vis, des tenilles, des manches de couteau , des cames & des huitres, &c. Quoique l'envelopp: calcaire des reftacés parût s’oppofer au fuccès de l'expés rience de Leyde , l'effet a été le mème , en touchant feulement la coquille. Il eft donc prouvé, par des expériences aufli fimples que cerraines, que toutes les familles du règne animal fonc d’excellens conduéteurs; mais comme il ne peut y avoir de dufliculté à cer égard, je me fuis 373 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, peu érendu fur le détail de ces fortes d'épreuves; j'ai voulu enfuite rechercher, comme je l'ai fait pour le règne végétal , quelles étoienc les fubftances qui donnoient aux animaux divers , qui peuplent de toutes parts notre globe, la faculté de rranfmettre la commortion , & après plufeurs expériences , j'ai été intimement convaincu que l'eau feule avoir cette efpèce de prérogative. Nons avons d’abord commencé par ces efpèces d’ètres animés qui femblent, pour ainli dire, moins animaux que ceux dont l’organi- fation eft À ros yeux plus parfaite , & paroiffent former le paffage du règne végétal à l’animalité; les plumes de mer de différentes efpèces, un certain nombre de fertularia & de corallines, décrites par Lin- næus & Ellis, que j'ai prifes à l’Ifle de Rhé, & fur certains para- ges de l'Océan; des éponges de diverfes fortes & de différens lieux ; des alcyons, des kératophyfes & des coraux : cés efpèces de zoophytes étoient parfaitement fecs, & aucun n’a communiqué la commotion. Les lychophytes, parmi lefquels on compte les tubipores, tels que Les tuyaux d’orgues , &c.; les madrépores , dont les formes fonc aufli variées que belles; les millépores, les rétépores & les célépo- res, &c.; les différens reftacés, ou coquillages univalves, bivalves & mulrivalves , très- bien defféchés, ont été un obftacle invincible au coup foudroyant. Plufieurs mollufques ont été aufli éprouvés , & ceux que nous avons employés , font les limaces, des aphrodites, des déchyes, des priapes, des holothuries , des médufes, des étoiles de mer & des ourfins. Toutes ces produétions animales étoient dans un état parfait de deffication, & aucune d’elles n’a laillé reffencir la moin- dre fecoufe électrique. Pour completter nos épreuves fur eette der- nière claffe des êtres animés qui paroiflent, aux yeux du vulgaire, de hideux enfans de la mer & le rebut informe de la Nature, nous avons aufli mis dans la chaîne électrique , quelques inteftinaux, les vers de terre & les fangfues crès- defféchés , & le choc éleétrique n'a point eu lieu. Ces heureufes tentatives nous ont porté à tourner nos vues vers les infectes , cette famille nombreufe du règne animal dont la brillante variété frappe tous les regards. Plufieurs coléoprères, tels que des ca- rabés , des dermeltes , des charanfons, des coccinèles, des chryfo- mèles, des ténébrions, des ftaphylins , des capricornes & des bu- preftres; quelques efpèces d’émiptères, entr'autres des blattes , des mantes, des grillons, des fauterelles , des cygales, &c.; des lépi- doptères , parmi lefquels plufieurs papillons fphinx & phalènes; des neuroptères , & particulièrement les demoifelles & les perles ; des bymenoptères appellés frélons , guèpes & abeilles, &c.; des dip- ières, tels que des taons, des afiles , des volacelles, des hyppo- { Le7 4 MO" À M _ ÉSSS me" FE SUR L'HIST. NATURELLE ET LES ARTS. 379 bofques ; & enfin , des aptères, donc les principaux ont été des fco- lopendres, des piles, des crabes, macroures & brachyures ; toutes ces différentes efpèces , après avoir bien été defléchées, foit au four, foit au foleil ou à l'ombre, ont été jugées, après pluñeurs épreu- ves , incapables de cranfmertre le coup foudroyant. On peut répéter facilement ces expériences, en prenant des in- fectes défféchés, comme on les trouve dans les Cabinets d'Hiftoire Naturelle : j'ai employé aulli ceux que j'ai dans mes collections d’infeétes, qui fonc abfolument privés de toute humidité. Les crüf- tacés que nous rangeons avec les modernes dans cette divifon, les cruftacés même les plus grands, tels que les homars, les langouftes, les écrevifles & les fquilles, qui nous avoient fait relfenrir une vio- lente commotion lorfqu'ils étoient frais, ont été des obitacies im- pénétrables à la tranfmiflion du choc électrique , après une entière deflication , foit qu'on ait éprouvé les enveloppes ou les chairs. Les poiffons , ce peuple muer des eaux , que l'élément liquide femble dérober à nos recherches; les poiffons, foit les acanthopré- rygiens , ou branchioftèges, ou, fi on aime mieux, foit apodes , jugulaires , thorachiques, ou abdominaux, ont entièrement inter- rompu la chaîne éleétrique, & il n’y a eu aucun effet; j'ai éprouvé quelques poiffons de ces différentes divifions , parfaitement défléchés, & le réfulrat a toujours été le même : la proximité de la mer où je me fuis trouvé dépuis quelques années, m'a fourni les occañons de faire ces expériences. Les amphibies nageans, tels que les lamproies qui font communes dans lOrb (rivière qui roule à Beziers), les raies, l’humantin , ou Squalus centrina ; diférentes parties du baudroiïe, l’efturgeon, des hyppocambes , ou perits chevaux marins qu’on trouve ordinairement fur les parages de la Méditerranée , l'aiguille’ d’Ariftore , qui font du genre des /yngnatus, étant bien défféchés, n’ont jamais pu com- muniquer la commotion; il en a toujours été de mème des ferpens, des tortues, des lézards, des grenouilles; & femblables repriles bien délféchés : les épreuves faites fur les oifeaux défféchés, foit fim- plement, foit au four où au foleil, foit par le moyen des poudres deflicatives, ont préfenté les mêmes phénomènes , ainf que différens petits quadrupèdes. | Ces expériences pourroient fuffire pour démontrer que l'eau eft, dans les animaux , la feule matière conduétrice de la commotion, fac- tout fi on fe rappelle que comme les plantes communiquent le choc électrique, ce qu’elles ne font pas dans l’érar de deflication ; de même , les animaux font d’excellens conducteurs de cette éron- nante fecoufle dans leur érat ordinaire; mais ils ne font plus pro- pres à cet effer dès que, par le defsèchemenc , ils ont perdu route 880 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, ., l'eau furabondante qu’ils contenoient ; cependant, j'ai cru à propos d'ajouter de nouvelles obfervations , afin de répandre plus de jour fur cette matière. = Jufqu'à préfent, nous avons foumis à l'expérience des animaux entiers de toutes les familles du règne animal : examinons mainte- nant, chacune des parties de ces animaux, pour favoir fi le réfaltac fera conftant ; il faut, en bonne Phyfique , répéter les ‘expériences de mille manières, pour avoir une certitude entière. Une partie de la chaîne a été formée par différens os très-fecs , qui avoient appartenu à des quadrupèdes & à des hommes, & la commotion n'a jamais pu réullir ; il en a été de même de la moëlle bien sèche ; nous avons éprouvé entr'autres une mâchoire d’un Sol- dat Romain, trouvée dans les cavernes de Pompeya , cette ville an- tique qui, dans une irruption du Véfuve , fur enfevelie fous les cendres de ce volcan, qui n’en eft qu’à fix milles. Enfuire , nous avons fait fcher, de différentes manières, divers mufcles , & dans cer état ils n'ont jamais pu faire reffentir le coup foudroyant, tandis qu'avant la deflication avec ces mêmes mufcles , on éprouvoit une violente fecoufle. Nous avons auili éprouvé plufieurs tégumens , différentes enveloppes & diverfes membranes, quelques vifcères, certaines glandes conglo- mérées , & autres organes du corps animal ; nous les avons fait déflécher de différentes manières, & lorfqu’elles ont fait partie de la chaîne électrique , la fecoufle n’a jamais pu réuflir : il en a été de même des artères, des nerfs & des veines que nous avons bien fait déffécher ; de forte qu'on peut aflurer , parce que cela eft cer- tain par des expériences réitérées, qu'il n’y à aucune partie de tou- res celles qui font l’objet de l'Oftéologie , de la Myologie , de la Splanchnologie , de l’Angiologie, de la Névrologie & de la Déno- logie , qui étant bien défféchées, ce qui eft une condition abfolu- ment effentielle ; il n’eft aucune de ces parties qui puifle communi- quer la commotion , tandis que toutes la tranfmettoient avant la deflication , fi on en excepte la graifle qui, quoique récemment extraite d’un animal quelconque , ne laiffe point reffenrir la fecoufle cleétrique, pourvu qu’il n’y ait point de parties hétérogènes mêlées. Le fang humain & celui des quadrupèdes, a été foumis à la même expérience , dans un état parfait de défsèchement; & quoiqu'il for- mât une partie de la chaîne , on n'a nullement éprouvé le choc élec- tique. Afin qu'on puifle plus facilement répérer cette expérience, je préviens que rien n’eft plus difficile à déffécher que le fang ; fou- vent le coagulum , ou la partie rouge du fang, que quelques - uns appellent le caillot, paroît bien fec, & il n’y a que la croûte ou la furface extérieure , qui foir dans cet étar de défsèchement, & les parties SUR L'HIST. NATURÉILE ET LES ARTS. 3% parties intérieures, quoiqu’elles ne paroiffent point humides, recèlent encore une partie de la lymphe & de la férofité propre au fang; :31 faut donc un tems confdérable pour que le coagulum du fang foic dépouillé de toute humidité. Dans mes premières épreuves , on ref- fentoit la commotion, en employant du fang qui paroifloit bien fec, mais qui, dans la réalité, ne l’éroit pas fufhifamment; la def- fication ayant été enfuite complerte, le coup foudroyant n’eut plus lieu : le fang qui a fervi dans les épreuves précédentes, a été féché à l'ombre ; j'en ai fait enfuite fécher au foleil, au four & fur un. fer chaud , & le fuccès a été le même. Les œufs frais communiquent très - bien la commotion, & lorf- qu'ils font parfaitement défléchés, on ne reffent rien. La préparation de ce produit animal , eft encore, ainfi que celle du fang, un fujet de patience & l'ouvrage du tems; on doit faire durcir l'œuf & le dépouiller de fa coquille, quoique bien dure, il communique en- ‘core fortement la commotion éleétrique, parce qu’il renferme dans fon intérieur beaucoup d'humidité. Pour en hâter l’évaporation, il faut perforer , en plufeurs endroits , cet œuf, autrement on feroit obligé d’attendre une fuite d’années : ces trous multipliés donnent une iffue à l’humeur aqueufe, contenue dans le blanc & dans le jaune de cette matière, & facilitent le defsèchement; lorfqu'il eft complet , on peut tenter, fans crainte , l'expérience de Leyde, & on ne reffent aucune fecouffe , ainfi que plufieurs épreuves me l'ont attefté ; le réfulrar a toujours été le même , quoiqu’on ait fait def fécher des œufs de plufeurs manières différentes, & qu’on ait éprouvé des œufs d’infectes & de poiflons. Si on a vuidé depuis peu des co- quilles d'œufs, on reffent la commotion , à caufe de l’humidité qui y eft contenue, & fi on répète l'expérience avec cette même coquille bien sèche, on n'éprouvera pas la plus légère fenfation. Le fromage quelconque bien fec, donne le même réfultat que le fang & les œufs privés de route humidité ; mais la préparation eft très-longue , & elle doit être faite à l'ombre, & rien ne doit fuinter de fes pores; la cire, le fuif, la graff, & autres matières animales de cette efpèce , ne font point conduétrices de la commotion. Les cheveux, le crin, les poils, les plumes, les piquans de hériflon , la laine, la foie , le biffus de la pinne-marine , la cire, la corne, lécaille , le cuir , le marroquin & toutes les peaux, les cordes à boyaux, les baleines qui font les fanons , ou barbes de céracés de ce nom, &c. &c., ne peuvent point faire partie de la chaîne éleétrique, & le coup foudroyant n’elt point tranfmis par ces fubftances; il en eft de même des bézoards, des calculs humains, des yeux d’écrevifle , & de toutes les concrétions animales, Tome VIII, Part. II. 1776. Ce 3%: OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, Il n’eft aucun animal ni aucune partie d'animaux, qui ne tranf- mette très-bien la fecoufle électrique, lorfque ces êtres font pleins de fucs aqueux, comme ils le font pendant leur vie, ou peu après leur mort; & les parties des animaux qui en contiennent une plus grande quantité, la communiquent mieux que celles qui n’en ren- ferment pas en fi grande abondance ; ainf, les tégumens & les mem- branes, ont une moindre faculté conductrice que les mufcles ; ainfi, les papillons tranfmettent mieux le coup foudroyant , lorfqu’ils font partie de la chaîne dans une direction parallèle à la longueur de leur corps, que dans une fituation qui lui foit perpendiculaire, c'eft à-dire , que s'ils étoient touchés par l’extrémité de Jeurs aîles étendues, parce que la fubftance des aîles contient beaucoup moins de fubftance aqueufe, que le refte du corps, &c. Mais dès que les animaux ou leurs patties font défféchés parfaitement, & qu'ils font dépouillés de l’eau qui étoit interpofée dans le tiffu de leurs organes, alors ces fubftances animales, quelles qu’elles foienr , ceffent d’être des conduéteurs de la commotion : fi on expofe à la vapeur de l'eau chaude, les corps animaux, défféchés & incapables par-là de tranf- mettre le coup foudroyant , ils deviennent de nouveau propres à læ tranfmiflion de l’expérience de Leyde , comme je l'ai éprouvé plu- fieurs fois fur les mèmes individus qui devenoient alternativement capables de communiquer le choc électrique, ou qui étoient privés de cette faculté, felon qu’ils étoient pleins de fluide aqueux, ou dé- pouillés d’eau furabondante. C’eft donc à l’eau , & feulement à l’eau, que les animaux, les parties animales, & tous les produits que la nature & l’art en favent tirer, doivent la faculté qu’ils ont de com- muniquer le choc électrique. C’eft un nouveau rapport que les ani- maux ont avec les végétaux, & plus on approfondira les vrais prin- cipes des véritables fciences, plus aufli verra t-on fe rapprocher ces” deux règnes, dont la ligne de démarcation, fi toutefois elle exifte , n'elt pas encore connue, & ne le fera peut-être jamais. Nous terminerons ce Mémoire par une remarque générale que nous avons placée ici , pour éviter la monotonie des répétitions ennuyeufes; c’eft que les mêmes précautions que nous avons prifes, & les mèmes obfervations que nous avons faites au fujer des plan- tes , ont eu lieu pour les animaux; ainfi, les expériences précéden- tes ont été répétées avec les mêmes plateaux , les mèmes globes & cylindres ; avec des bouteilles de Leyde , des bocaux & des carreaux éramés , de différentes grandeurs : ainfi, ces différentes circonftances du tems & du lieu, ont été les mêmes, & tout a été égal. Lorfque les corps avoient une grandeur dérerminée, c’eft toujours dans l'état naturel que les éprevves ont été faites; & lorfqu'elle n’étoit pas SUR L'HIST. NATUREILE ET LES ARTS, 38; fixée par la nature de la chofe , comme les cheveux, la laine, les peaux, les baleines, &c. &c., la longueur que nous avons choifie étoit d'an pied; par exemple , le fang a été verfé & moulé dans un petit vafe de fer-blanc, de la longueur d’un pied , & d’un pouce de largeur & de hauteur , &ç. Les yeux d’écrevifle, &c. ont été mis dans un tuyau de verre, ouvert par les deux bouts, où on avoit inféré de petits fils de fer, ainfi qu’on l’avoit fait pour les graines des plantes. Le choc électrique n’a jamais été communiqué, quoique les longueurs aient été enfuite de beaucoup diminuées, & que les préparations aient été différentes , ce qui prouve que ces ex- périences font conftantes, & que l'effet tient à la nature du défsè- chement & à la privation de l’eau, plutôt qu'aux manipulations , aux dimenfons & à mille circonftances auxquelles il eft inurile d'a- voir égard , puifqu'un animal quelconque , bien fec , ne tranfmet jamais la commorion, de quelque mamière qu’on le foumerte à l'ex- périence. eee e0 ed JENST HS NICANNAT SHUVR NEA ONCE MT; Par M. BARBOTEAU, Confeiller au Confeil Supérieur de la Mar- tinique, Correfpondant de l’Académie Royale des Scienees, € de ia Société Royale d'Agriculture d'Angers. L A Fourmi, fléau plus deftruéteur que la grêle, ne cefe de propager & de multiplier fes funeftes dégâts à la Martinique, où tout fe écrit, pour ainfi dire, fous la main du Culrivateur aflidu; où tout sèche, tout périt, fans qu'aucun des moyens, pratiqués jufqu'à ce jour, ait pu réuflir à délivrer cette Ifle infortunée d’un ennemi fi redoutable. Je vais tâcher de faire connoître le mal, afin qu’on y remédie. En conféquence, 1°. je traiterai de la fourmi en général ; 2°. des diverfes efpèces de fourmis, & particulièrement de l'efpèce facchari- vore , qui défole la Martinique. 3°. Je déraillerai les différentes expériences employées pour leur deftruétion. 4°. Je ferai connoître les ennemis de cet infecte. Ccez \ 384 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, e j ARTICLE PREMIER. De La Fourmi en général. RON LA fourmi eft un inifecte de ordre des hyménoptères , c’eft-à: dire, de ceux qui ont communément quatre aîles membraneufes , - & un aiguillon au derrière. Elle a pour marques génériques, 1°. une léoère écaille, interpofée entre le corfeler & l'abdomen (1); 2°. un aiguillon caché ; 3°. quatre aîles membraneufes. | H eft bon d’obferver que dans une fourmillière, où il fe rencontre des mälés, des femelles & des neutres, il n’y a que les femelles qui’ aient tout enfemble cet éguillon & ces quatre aîles. Les mâles n'ont que des aîles fans aiguillon. Les neutres, ou mulets, autye- ment dites ouvrières, ont, au contraire, un aiguillon , & ne fonc point pourvues d’aîles. | Les femelles font, de toutes, les plus grandes & les plus groffess Les mâles font les plus petits, & ont les’ plus gros yeux. Les on vrières font d’une groffeur moyenne. Comme elles ont de plus vaftes machoires , & qu’elles ne font point utiles à la reproduction de l'efpèce , c’eft fur elles que roulent les travaux les plus rüdes du dedans & du dehors de la fourmillière (1). * Le corps de cet infeéte eft allongé. Sa rète , vue au microfcope, femble bombée & partagée en lobes. Elle eft, ainfi que la poitrine ;: cuiraflée d’une peau dure, ftriée & crénelée. Elle eft en outre dé- fendue par des pointes épineufes, qui fe diftinguent par derrière. Sa poitrine paroît formée de plufeurs jointures , divifées chacune en des faillies pointues. Ses yeux font noirs, clair-voyans, & fur- montés de deux petites cornes ou antennes. Ses jambes, au nombre de trois de chaque côté, font velues. La dernière paire eft armée de deux pinces ou onglets, qui lui fervent de crampons , de points d'appui dans les montées & les defcentes. Les ferres, dont fes mâchoires font garnies, piquent vivemenr, de mème que l’aiguillon caché qu'il porte à lanus. La douleur, que ces fortes de défenfes occalionnent , eft très-cuifante. Les moin- dres inconvéniens qui en réfultent, font la rougeur & la bourfouf- flure de la peau, accompagnées de cruelles démangeaifons dans là” RE —— —— — — ——5 (1) Linnar Syflema Nature, Edit. X, Tome I, page $r9. (2) Dans la république des fourmis , qui eft en grande partie calquée fur celle des abeilles, les ouvrières fonc les plus nombreufes. Elles chaffent & ruent les mâles, devenus inuriles par l'âge, SUR L’HIST. NATURELLE ET LES ARTS. 385 pattie offenfée. Quelques gouttes d’hfile d'olive , appliquées comme topique , ou de l'urine fraiche, ont fouvent fufh pour difliper le mal , qui eft toujours plus difficile à guérir quand l’aiguillon dardé lance dans la plaie une eau âcre & mordicante qui produit l'effet d'au véficatoire (1). * La fourmi vit en focicté. Son nom dérive du tranfport des grains & des miettes qu’elle dépofe dans des greniers communs. Elle eft fi vigilante-& fi laborieufe , que le fage envoie le pareffeux vers elle. En effec, nuit & jour elle travaille (2) , fans que rien la rebute. Elle porte de fi lourds fardeaux , qu'il eft étonnant qu'un fi petit animal né fuccombe point fous leur énorme péfanteur. Lorfqu’elle ne peut parvenir à les enlever feule , elle va au loin chercher du fecours. Bientôt il en vient par milliers; & chaque fourmi , de . tailler ;"dépecer , corroder , découper , à qui mieux-mieux : l'ouvrage avance ; les greniers s’empliffent ; fuffent-ils encore plus pleins ! Elles accumülent provifions fur provifions : elles conftruifent fans celle des magafins , où elles entaflent , à nouveaux frais , toutes fortes de vivres, qu’elles n’ont garde dé toucher, tant la manie du ravage leur eft naturelle , & leur prévoyance eft vaine. C’eft l’image de l’avare qui fue-pour amafler, fans beaucoup jouir , qui dévore la fubftance de tout ce qui l’environne , qui met tour à contribution pour aug- menter fes tréfors, & dont la feule volupté eft de contempler fes richelles dans fes coffres. La prévoyance des fourmis, dir M. le Comte de Buffon , n’étoit qu'un préjugé; on la leur avoit accordée , en les obfervant ; on la leur a ôtée , en les obfervant mieux; elles font engourdies tour l'hiver (3); leurs provifions ne fonc donc que des amas fuperflus, (1) H faut que ces accidens foient propres aux fourmis des pays chauds, car fouvent j'ai eu les mains entièrement couvertes de fourmis ; elle m'ont pincé ; mais il n'en eft réfulcé aucun accident. (2) Je crois que les fourmis d'Europe ne travaillent point pendant la nuit. La chaleur des nuits d'Amérique, ou des autres pays chauds, feroit-elle la caufe de cette différence? {3) Swammerdam & M. de Réaumur, penfent que les fourmis ne mangent poinr, . stant que l'hiver eft rigoureux. Ils conviennent l'un & l'autre qu'elles reftent en- gourdies durant ce tems. Leur décifion eft appuyée du fuffrage de M. François Carre, qui s'elt occupé, pendant près de trente ans, à étudier cet infe@te, ( Voyez [a Differtation fur La police des Fourmis, inférée dans le Mercure de France, de mois de Mai 1749.) Au refte , la fourmi n'eft pas le feul animal léchargique que nous connoiflions. On compte encore, parmi les infeétes , les abcilles, les guêpes , les mouches, les fcarabées, les hannetons 3 parmi les quadrupèdes, les blaireaux , les marmotes , les hériflons , les loirs ou rats des Alpes, les belettes, 386 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, amas accumulés fans vues, fans connoiffance de l'avenir, puifque, par cette connoiffance même, elles en auroiïent prévu toute l’inuti- lité (1). N’eft-il pas très- naturel , ajoute-t-il, que des animaux, qui ont une demeure fixe, où ils font accoutumés à tranfporter les nourritures dont ils ont actuellement befoin, & qui fatrent leur appétit, en cranfportent beaucoup plus qu'il ne leur en faut, dé- terminés par le fentiment feul & par le plaifir de l'odorar, ou de quelques autres de leurs fens, & guidés par lhabitude qu'ils ont prife, d’emporter leurs vivres pour les manger en repos ? Quelques- uns penfent qu’elles ramaffent des grains, des brins de bois, &c. comine de fimples matériaux pour bâtir leurs loges. De tant de faits mulripliés qui excitent l’admiration de quelques enthoufaftes dans l'examen de la fourmi, que refte-t-il aux yeux du Philofophe? Un ouvrage groflier que cet infeéte conftruic dans un endroit déclive & ombragé, de grands amas de provifons fans but ni prévoyance, fans même qu'il femble en faire grand cas ni grand ufage. à Le à Comme l’exceflive chaleur & la trop grande humidité nuifent également aux fourmis , elles choifffent pour leur demeure un ter- rein plutôt frais qu'humide, à l'abri de l’activité des rayons du fo- leil & de la cruë des eaux. Le pied d’une plante tant foit peu exhauf- fée, le tronc creufé d’un atbre caduc, une vieille mafure , font EEE re les taupes; parmi les oifeaux, la cicogne, l'hirondelle, l'étourneau , la grive, le coucou; quelques amphibies & quelques poiflons, fubiflent aufli cet état d'en- gourdiffement. (1) I n'y a peut-être point d'infeétes, difent MM. Arnault de Nobleville & Salerne, Médecins à Orléans , à qui toute cette prévoyance & tout ce travail fuf- fent plus en pure perte. À quoi ferviroient des amas de bled, pendant l'hiver, à des fourmis, qui le paflent amoncelées les unes fur les autres, & fi immobi- les qu'elles femblent mortes ? Bien loin qu'elles euffent la force d'entamer des grains de bled , elles n'ont pas même celle de fe mouvoir : ce feul fait nous apprend combien les faits d'Hifloire naturelle les plus reçus , ont encore befoin d'être examinés de nouveau. La vraie prudence des fourmis fe réduit à fe mettre, je plus qu'il leur eft poffible, à l'abri du froid , dont un degré aflez médiocre, eft capable de les priver de tour mouvement. ( Hifoire des Animaux , Tome I, Seëlion II, page 468.) Confultez le Traité des Fourmis de M. Gould. Lond. 1747, n-8°. Cette prévoyance anéantie, que deviennent l'intelligence, la mémoire , le ju- gement & la raifon prefque divine , que Cicéron artribue à la fourmi? Que de- vient certe gaie & naïve réponfe à la cigale, que tout le monde connoît ? Vous chantiez ! j'en fuis bien aife; Hé bien, danfez maintenant. T'Pr L L sc 4 * VTT URL >. Q » | 5 , _ » « SUR L'HIST. NATURELLE ET LES ARTS. 387 des poftions avantageufes Ge l’établiffement de leur domicile. Une efpèce de cintre, en forme de voûte, foutenue & herméti- quement fermée à l'écoulement des eaux, par des racines, des mor- ceaux d’écorce tendre & légère , & les côtes veinées des feuilles dé- chiquerées d'arbres, d’arbultes , d’arbrifleaux & d’heïbacées, en conf- titue l'entrée. La même demeure a plufeurs iffues, ou portes d’en- trée femblables , qui communiquent toutes à un fouterrain com- mun, dont les différences branches , répandues çà & là, font fou- vent profondes d'une toife & plus. C’eft dans ce fouterrain que fe font ces grands & inutiles amas de pravilions de routes fortes; c’eft- là que les fourmis dépofent leurs œufs, & où gifent les vers qui en éclofent. Tandis que les ouvrières font occupées à fourager de toutes parts, à charrier les vivres, à les affembler en tas ; tandis qu’elles vont & viennent toutes en ordre, à la file & comme en procellion, fans que jamais aucune fe dérange, fi ce n’eft pour aller chercher du renfort, pour annoncer une capture, une proie, un trouble , un péril, une déclaration de guerre, & pour tranfporter fort loin du chemin, frayé & battu , leurs camarades qui périflent en route ou dans l’artaque , les femelles dépofent, dans l’intérieur de la four- millière, une multitude prodigieufe d'œufs blancs , oblongs , & pref- que imperceptibles, dont la fubftance molle & rendre , reffemble patfairement à du fucre en poudre , ou à du fel bien blanc & bien fin, Le Docteur Edmond-King (1), qui a fair d'excellentes obferva- tions fur les fourmis, fur feurs œufs, leur production , leurs pro- grès , leur maturité, & fur l’ufage qu’on en peut faire, dit que, fi on prend gros comme un grain de moutarde, & qu'on le metre far le porte-objer d’un bon microfcope , on voit, en l’ouvrant avec la pointe d’une aiguille, plufieurs petits corps blancs & tranfpatens, renfermés dans des membranes diftinctes , qui ont chacun la figure d'un petit œuf d'oifeau, Ce Savaut a trouvé cette fubftance dans les fourmis. {1 eft per- fuadé que ce font leurs œufs , ayant obfervé que toutes les fois qu’on les découvre, elles les emportent pour les mettre en füreré; & que fi on les écarte, elles les entalent de nouveau aufli promprement qu'il leur eft poñfible. Le mème Auteur nous apprend qu’en peu de tems chacun de ces petits corps fe change en un ver de la oroffeur d’une mire, qu'on ne voit mouvoir qu'avec peine; mais que bientôt après on apperçoit (1) Colle£tion Académique, part. étrang. Tome IL, page 81. Tranfa&tions Phi- Jofophiques, année 1667. 388 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, un foible mouvement de flexion & d’extenfion dans leurs membres; qu'ils commencent à paroître jaunes & velus , ayant la fignre des petits vers qu'on trouve dans le fromage ; qu'ils deviennent, fous cette forme, prefque aufli gros que les fourmis, & ont chacun une tache noire ; qu'ils s’enveloppent enfuite d’une membrane blanche , de figure ovale, qui les a fair prendre pour des œufs de fourmis, quoique, à proprement pailer, ils n'en foient pas(1); que pour pré- venir toute erreur, il a ouvert plufeurs de ces prétendus œufs , dont les uns éroient aufi gros qu’un grain de froment, d’autres plus petits qu’un grain de feigle; qu'il n'a trouvé dans quelques-uns que des vers ; qu'il a vérifié , par l’onverture de quelques autres , qu'ils commençoient à fe changer en fourmis, en ayant la rêre & deux petires taches jaunes à la place des yeux; qu'enfin, il en a trouvé d’autres beaucoup plus avancés, & entièrement changés en fourmis toutes blanches, à l'exception des yeux qui éroient alors très-noirs. Tant qu’elles confervent cette couleur , elles font foibles & trainan- tes, parce que leurs fibres n’ont point acquis aflez de vigueur. Elles fe fortifient à mefure qu’elles bruniffent. Quels foins , quelles attentions, les fourmis n’ont-elles pas pour leur frai ! Il eft difficile de leur faire prendre le change. Dans les beaux jours de l'été en Europe, & prefque tous les jours en Amé- rique , elles l'apportent le matin entre leurs ferres , fans le bleffer, au haut de la fourmillière , pour l’accoutumer petit-à-petit à l’ar- deur des rayons brûlans du foleil, & à l'influence de l'air, dont la trop grande activité pourroit le faire périr. Elles n'ont rien de plus preilé que de le redefcendre au déclin du jour, pour le garan- tir des fraîcheurs nuifibles de la nuit (2). Ainfi donc le tendre eflaim, qui doit un jour former de nouvelles colonies, fe trouve , au milieu du jour, à quelques pouces près de la furface de la terre , tandis que le foir, le matin & toute la nuit, il eft enfeveli dans les ca- vités les plus profondes de fes fourerrains. Ces obfervations , quoi- que minutieufes en apparence , font en réalité très-effentielles. Elles peuvent contribuer à indiquer un für moyen pour la deftruétion de cer infecte. Voulez-vous connoître jufqu’où les fourmis portent la follicitude maternelle, & la connoilfance de leurs œufs? Enlevez les premières couches de terre remuée, qui fervent comme de dôme à leur ha PR (1) Ce font des crifalides. (2).Ces foins font abfolument néceffaires pour le développement de Ia fourmi. A l'aide d'une chaleur artificielle, Swammerdäm ne put jamais réuflir à faire éclore des œufs de fourmis, ni à conduire les nymphes à l'état de fourmi, bitation, PL Cr - SUR L’'HIST. NATURELIE ET LES ARTS. 389 bitation, de forte que le frai foi à découvert. Avec quelle virélle, quel emprefflement n'arrivenc-elles pas pour porter leurs petits en lieu de füreré? Jertez au milieu du fel, du fucre, du pain , en groffeur égale au frai, jamais elles ne fe méprendront. Elles dif- ringueront toujours la pa du frai, l'image de la réalité, & s'o2 pinâtreront à rejecter l’une tant que l’autre fera en danger. Leur inftin& me paroït en cela fupérieur à celui de quelques oifeaux, qu'il, eft facile de tromper dans Le tems de l’incubation, en pla- çant fous eux des œufs de craie, qu'ils couvent avec autant de foin que s'ils étoient véritables. | On trouve dans certains pays , au-dedans des fourmillières, des efpèces de pierres noires, qui font les enveloppes d'œufs de mou- ches cantharides, Michel - Frédéric Lochner s'en fit apporter, dans le deffein de les examiner (1). Ces prétendues pierres éroient ovoïdes, un peu moins grofles qu'un œuf de pigeon , très - légères & d’une couleur brune, femblable à celle de la terre végétale. Il y avoit fur leur furface des éminences formées par d’autres pierres. Quand on les agitoit près de l'oreille, on entendoit un petit bruit intérieur , Pan par quelque chofe renferme dans leur cavité. En un mot, ces efpèces de pierres n’étoient autre chofe qu’une malle d’une fubf- tance terreufe , & de figure ovale. Lochner rompit une de ces pierres en préfence d’un de fes amis. Il trouva au - dedans une nymphe jau- nâtre, prefque fans mouvement, & parfaitement femblable à celle d’une chenille, & il découvrit que la pierre en queftion n'étoir autre chofe qu'une enveloppe de terre que s’étoir faite un ver pour y paffer l'hiver. Quelques jours après, il ouvrir le fourreau de la ctyfalide ; mais il ne connut pas d’abord à quel genre d'infeéte elle appartenoit. Il fur fort furpris , an bout de huit jours, de trouver, en entrant dans fon cabinet, des mouches cantharides , appellées en Allemand Gold kafer, ou Rozen-Kafer , parce que ces infectes fe rien nent dans les rofes; elles voltigeoienr , en faifant entendre nn peric murmure. Îl fe hâta de faire {ortir par les fenêtres ces infectes fales & incommodes , qui gâtoient fes papiers & fes livres. Il ne pouvoie concevoir comment ils s’y. étoient introduits, parce que tout étoir exactement fermé; mais fon étonnement cefla quand il eut apperçu que ces prétendues pierres de fourmis, ou plurôr ces coques ter- reufes, avoient été rompues” par ces mouches cantharides. Gafpard Schwenckfeld (2) à aufi remarqué que l’on trouvoit des mouches cantharides dans les fourmillières. Mais, difent les Rédacteurs (1) Ephémérides des Curieux de la Nature, année 1687, Obf. 215, (2) Theriotroph. Silef. page 251. de Cantharide formicariä latiore, Tome VIII, Part. II. 1776. D d 399 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, de la Colleétion Académique , comme on fait par expérience ques lorfqu'on jette un fcarabée dans une fourmillière , il eft bientôt dé- voré , ce n'eft pas fous cette forme, mais fous celle de ver, que la cantharide pénètre dans les fourmillières. Schwenckfeld décrir ce ver blanchâtre , un peu velu , allongé, de la grofleur du pétit doigt ; & compofé d’anneaux, Les fourmis fonc frugivores, herbivores, pifcivores, carnivores. Elles dévaftent promprèment un verger, un potager, un parterre. Elles détruifent des animaux de tout genre, de route efpèce & de toute grandeur. Rien n'échappe à leur voracité & à leurs dégâts. Ce font des armées de loutres & de tigres, qui renouvellent fans cefle leurs carnages. Leur faim même aflouvie, elles dépècent en- core. Elles entament , dévorent, ou emportent tout ce qui fe ren- contre fous leurs pas. L'intérieur des maifons les mieux clofes, n’elt point exempt de Jeurs râvages. Elles trouvent le moyen de s’y infi- nuet , d'y fignaler, par des coups d’éclar, leur féjour & leur paffage. Veut-on enfin avoir une oftéologie naturelle d’un rat, d’une fouris, de léfard, de grenouille, de couleuvre, de fcarabée, d’oifeau, &c. il fuffit d'en jetrer un à la portée de ces infectes, ils le difsèquent avec plus d'art, de célérité & de perfection, que ne-le pourroit faire la main fubrile du plus habile Anatomifte. On rencontre rarement les mâles dans les fourmillières, Ils vol- tigent le plus fouvent à l'entour, & s’accouplent en volant avec les femelles, qui, dans une même direction, font emportées , unies & conjointes, & s’aident elles-mêmes de leurs aîles légères. Leur copulation eft fi vivifiante, qu’une feule & même ruche ne fauroit contenir routes les jeunes fourmis qui proviennent d'œufs fécondés (1). Aufli en part-1l chaque année de nombreux eflaims, qui vont ail- leurs fe loger, portant avec eux le ravage & la défolation. L'on voit avec effroi, dit M. de Buffon, arriver ces nuages épais, ces phalanges aîlées d’infectes affamés, qui femblent menacer le globe en- (x) Les efpèces d'animaux les plus nombreufes, ne font pas les plus utiless rien même n'eft plus nuifible que cette multitude de rats, de mulots, de faute- relles, de chenilles, & de tant d'autres infe@es dont il femble que la Nature permette & fouffre , plurôt qu'elle ne l'ordonne , la trop nombreule multiplica- tion...... Lorfqu'on réfléchit fur cette fécondité fans bornes, donnée à chaque cfpèce, fur le produir innombrable qui doit en réfulter , fur la prompre & pro- digieufe multiplicauion de certains animaux qui pullulent tout à-coup, & vien- nent par milliers défoler les campignes & ravager la terre , on eft étonné qu'ils n'envahiffent pas la Nature, on craint qu'ils ne l'oppriment par le nombre, & qu'après avoir dévoré fa fubftance, ils ne périffenr eux - mêmes qu'avec elle, € Hif. Nar, gén. & pare, Tome V1, page 246 € fuivantes. AIX SUR L'HIST: NATURELLE ET LES ARTS. 3o1 tier, & qui fe rabarttent fur les plaines fécondes de l'Egypte, de la Pologne ou de linde , détruifent en un initant les travaux, les e£ pérances de rout un peuple, & n'épargnant ni les grains, ni les fruits, ni les herbes, n1 les racines, ni les feuilles ; dépoullent ia terre de fa verdure, & changent en un defert aride les plus riches contrées. L'on voit dans les pays méridionaux , dit encore ce grand Naturalifte , fortir tout-à coup du défert des myriades de fourmis, lefquelles , comme un torrent dont la fource feroit intarifTible, ar- rivent en colonnes preffces , fe fuccèdent, fe renouvellent fans celie, s'emparent de tous les lieux habités, en chaflent les animaux & les hommes, & ne fe retirent qu'après une dévaftarion générale. Voyez à l’Article IL, des diverfes efpèces de fourmis , plufeurs étranges phénomènes occalionnés par de nouvelles peuplades de ces infeétes , qui quicrenc leur demeure natale pour aller s'établir ail- leurs. Les fourmis, de même que toutes les diverfes fortes d'animaux, ont des infeétes particuliers qui les tourmentent, François Rédi, qui en à fait la découverte, nous apprend qu'ils fonc prefque impercep- tibles. 11 faut par conféquent un excellent microlcope & beaucoup d’atrention pour les difcerner. Ceux des fourmis ailées font de même figure que l'infeéte de la poule, & ceux de la fourmi qui n’a point d'ailes, reflemblent beaucoup à ceux de la tourterelle commune. Le défauc d'air fait périr la fourmi. Boyle, dont nous avons d’excellenres expériences fur la refpration des animaux dans le vuide de la machine pneumatique, cite ainfi fes opérations fur la fourm:: j'en enfermai un bon nombre dans un peut récipient portatif, & l'on y fit le vuide ; Les fourmis éroient fort vives, & couroient avec beaucoup d’agilité dans le récipient , lorfque je les y enfermai ; mais dès qu'on eut pompé l'air , elles parurent fort engourdies, & beau- coup plus encore quelques tems après; elles éroient comme mortes au bout de fepr à huit heures : je foupçonnai qu’une certaine fubitance glutineafe, produite par les vapeurs du maftic, & qui fembloit avoir pénétré dans l’intérieur du récipient, avoit contribué à les mettre en cet état; mais dans la fuite, cette conjeéture m'a paru peu fon- dée : j'ouvris le récipient pour y faire rentrer Pair ; mais pendant long tems, aucune des fourmis ne donna le moindre figne de vie; cependant le lendemain, à neuf heures du matin, je les trouvai pour la plupart vivantes & en mouvement. Si B;yle les avoit rerenues plus long-rems dans le vuide, il n’eft pas douteux qu’elles n’y euflent toures péri. Car fans avoir recours à la machine pneumatique, il fufit de les enfermer dans un vafe quelconque, & de leur inrercep= ter la communication de l'air extérieur & libre, en bouchant h&- D d d 2 h 392 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, métiquement le vafe, pour qu'elles perdent bientôt leur liqueur, fe defsèchent & périflent (1). On extrait des fourmis deux fortent d'huiles : l’une effentielle & odorante , l’autre grafle & expreflible. Margraff (2), qui a publié fes Oblfervations fur l'huile qu’on peut exprimer des fourmis, & fes Eflais fur l'acide des mêmes infectes , remarque , 1°. qu'aucun ef- rit de vin ordinaire, le plus reétifié, ne fauroit produire la folution . de l'huile effentielle de fourmis, mais qu’elle s'opère parfaitement par le moyen de l’efprit de vin que le fel alkali fixe a délivré de fon eau fuperflue, & qui a été de nouveau diitillé; 2°. que cette huile réfout entièrement le phufphore folide, mais fans qu’il foit rendu lumineux par-là ; 3°. que bien loin qu'il foupçonne certe huile de renfermer quelque léger acide, il ne fe manifefte point, & ne manifefte aucune réaction, lorfqu'on le mêle avec une por- tion de fel de tartre & de limaille de fer, & qu’on l’expofe à la digeftion ; 4°. qu’elle n’imprime aucune faveur brûlante à la langue ; & enfin, $°. qu’elle frappe les narines d'une odeur toute particulière, Neuman, dans les Ephémérides d'Allémagne , & dans fes: Præ- kétiones Chemicæ , dit avoir tiré des fourmis une huile aromatique & d’une odeur très-gracieufe ; phénomène qui a paru rrès-furpre- nant à M. Waller, qui n’en nie pourtant pas la poñibilité. ( Voyez fon Hydrologie à la fuite de fa Minéralogie, Paris 1753). C'eft à Margraff qu'on eft redevable de la feconde efpèce d'huile, qui pofsède & fair voir tous les caractères & toutes les propriétés des autres huiles exprimées. Elle fent, dit-il, en quelque forte la four- mi; fa couleur eft d’un brun rougeâtre ; fi on l'expofe à l'air -or- dinaire , elle devient tranfparente ; une médiocre gelée lépaiflit, & par conféquent diminue fa tranfparence; elle imprime au papier une tache huileufe ; elle nage auwdelfus de l’eau, & refufe de s'y mêler; elle n’eft point imbibée par l’efprit de vin le plus rectifié ; en la diftillanc avec de l’eau , elle ne s'élève ni ne pafñle par l'a- lembic; elle brûle comme toute autre huile, par le moyen de la mèche ; dans la cottion, elle diffout le foufre, & fe change avec lui en foie huileux de foufre ; en la mêlant avec d’autres graiffes, & corps huileux, elles s’y unit & en procure la folution : cuire avec de la chaux de plomb, ou le minium, elle conftitue une mafle de la forme ordinaire des emplâtres, & avec le (el alkali fixe, fur- tout le cauftique , elle fournir un favon ordinaire & bien lié. EEE (1) Ce n'eft pas l'air qui leur manque ; par leur tranfpiration & refpiration ; elles ont rendu cet air femblable à celui qui eft infeété par les mofferes, le gas , &c. (2) Mémoires de l'Académie Royale des Sciences de Berlin, Tome V, année 1749, & Opufcules de M. Margraff. SUR L'HIST. NATURELLE ET LES ARTS. 39; L'acide des fourmis eft’très-développé. Il agit avec une certaine force fur quelques métaux & demi-méraux. Par rapport aux corps dont la fubftance eft rerreufe , cer acide, felon les mèmes obferva- tions ; diffout les coraux avec unehgrande véhémence, & prend en- fuite avec eux une confftance faline; cryftalline, en confervanr toujours une forme sèche ::la mêmé chofe arrive, quand on verfe cer acide fur la craie | & cette folution donne pareillement de beaux cryftaux qui gardent conftamment la forme sèche; de plus, cer acide diffout les yeux d’écreviiles, les coquilles des teflacées, la pierre de chaux, la chaux vive ,-le marbre, les fpaths de chaux, les os calcinés, où autres matières femblables, & cela avec une grande ébullition ; à quoi il faut ajouter qu'avec la chaux vive il fe change auf en cryftaux. Cer acide a donc une très-grande affinité avec ce- lui du vinaigre, & il eft à préfamer que c’eft par fa violence que les pierres , fur lefquelles les fourmis pallent & repaflent fouvenr, en font rongées. s} {a - Cet acide,, diftillé avec de l’efprit de vin, compofe une liqueur cordiale & céphalique ;, que. les Apothicaires; nomment eau de-ma- DR On la dit fouveraine contre plufeurs maladies. ( Voyez on ufage &fés propriétés, Hiftoire naturelle des Animaux , par MM. Ainault de Nobleville & Salerne, Tome 1, Se&. 2, p. so0 & fuivantes; Ouvrage qui fert de. continuation à la matière mé- dicale de M. Geoffroy.) Etrmuller la recommande comme ftomachi- que & prolifique, échauffant les maris crop froids, & difpofanc les femmes à Ja fécondité. à M, Valmont de Bomare tire fa preuve du. développement de l'a- cide dans les fourmis, de ce qu’une fleur bleue , jettée. dans une fourmillière , change de couleur & devient rouge. Cette épreuve elt facile à faire. Elle eft conforme à ce que dit Langham dans fon Jardin de Santé. Jertez des fleurs de chicorée dans un tas de fourmis, & elles deviendront bientôt auffi rouges que du fang. Hieronymus Tragus, Æüff. Stirp: Lib. I, Cap 91, s'ex= prime ainfi : Cette Aeur a une qualité finguhère; c'eft qu'érant en- fermée dans une fourmillière, elle change de couleur, & devient rouge comme fi elle rougifloit de leur terreur. Jean Bauhin , Ochon Bransfeld , & le Docteur Hulfe, en font aufli mention. Cette obfervation a non-feutement lieu fur les fleurs de chicorée, ais encore fur toutes-les autres fleurs bleues. Samuel Fisher’ de Schieffeld , a éprouvé qu'un foiblé efprit de fourmis ; de même que du vinaigre un peu chaud , rougit, en un inftant, des fleurs de bourrache. Nous avons de ce Savant les détails fuivans , confervés dans une lettre de M. J. Wrai, du 13 Janvier 1670 , fur l'acide des fourmis : les fourmis , diftillées routes feules ou avec de l’eau, 394 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, : donnent un efprit fémblable à celui du vinaigre , ou à l’efprit de verdet : du fer, mis dans cet efprit, donne une teinture aftringinte, & fe change, en répérant l'opération , en fafran de Mars : du plomb en fait du fucre dé Saturne, &"decefacre de Saturne , ainh fait & diftillé, on retiré le mème efpr:acide, ce qui n'arrive, point au-fücre de Saturne! fair avec le: vinaigre ; lequel fe convertic en une huile inflammable fans acide y mais bien à celui qu'on fair avec du verd de-pris. Il s'exhale des fourmillières une vapeut d’une odeur forte & défa= gréable, qui produit des effers fivguliets, très bien décrits par le Savant M! Roux; Médecin de la Faculté de Paris! & Auteur tiès- éftimé du Jouttial de Médecine, Ecoutons-le parler lui-même dans le volume de Septembre 1762 : Si l'on ouvre, dit-il, une four- millière un peu confidérable, & qu'on approche le nez de fa fur- face , il s’en élève une vapeur qui frappe l'odorat , d’une façon vive & défagréable : fi l’on y expofe une grenouille vivante de façon qu'elle ne puille s'échapper’, elle meurt en! moins de quatre à cinq mi- nutes , fans qu'il foit néceflaire qu'elle ait été mordue par des four= mis irritées. : Il y a quelques années qu'érant à la campagne , ilivoulut ramaf- fer des fourmis qu'on lui avoit demandées, pour répéter les expé- riences de Margraff. Il tenta inutilement de s’en procurer une quan- tité fufifante. Le moyen qui lui réuflit Le mieux, fur de placer, au milieu d’une’ fourmilière, une bouteille à large goulot, & de faire tomber dedans, avec les mains, les fourmis qui montoient en foule le long de fes parois extérieurs. Il obferva , en faifant cette opération , que les premières fourmis qu'il avoit fait tomber dans la bouteille, remontoient & reffortoient même avec facilité ; mais lorfqu’il fut parvenu à y en accumuler une certaine quantité, ceiles mêmes qui étoient les plus vigoureufes, ne pouvoient plus remon- ter qu'à la moitié de la hauteur de la bourelle : elles reromboient auffi-tôt , comme fi elles euflent été érourdies par une vapeur, fu£ focante (1). Ayant palfé rour un après-midi dans cer exercice, 1l fentit le foir un peu de chaleur a fes doigrs, qui s'enflèrenr & devinrent rouges : le lendemain , l'épiderme fe fépara de la peau, comme s’il y eût appliqué un véficaroire , & les doigts de l’une & l'autre main lui pelèrent entièrement. dote Il rapporte un fait plus extraordinaire encore , qui lui a été com- muniqué pat M. le Baron d'Holbac. Le nommé Teflier | Maitre Maçon de Suci en Brie, voulant détruire une fourmillière qui s’'écoit OS (x) C'étoit un effet de l'air fixe. dl SUR L'HIST. NATURELLE ET LES ARTS. 395 établie dans fon jardin, imagina de la recouvrir avec une cloche de verre , efpérant que la chaleur qu’elle produiroit, fufhroit pour faire périr les fourmis. Ce moyen lui réuflit : mais ayant voulu res lever fa cloche, & ayant imprudemment approché le vifage de fon embouchure , 11 fentit une vapeur forte , qui lui occafonna fur - le- chämp un violent mal de tère; peu -à:peu fon corps enfla; il éprouva des agirations & des anxiétés qui faifoient craindre pour fa vie; ce qui dura route la nuit : le lendemain, il fe fit une érup- tion à la peau, & le calme revint par degrés ; cette éruprion, d’une nature particulière, dura trois jours , au bout defquels la peau tomba en écailles. Outre les huiles & l’acide qu’on extrait des fourmis, il eft prouvé par les expériences de M. Lyfter , qu’on peut encore tirer de leur têre , par le moyen d’une leflive , une couleur de pourpre, ou in- carnat fixe, femblable à celle que donne la chenille commune de laubépine. Extrait d’une Lettre de M: Lyfter, contenant quelques obfervarions fur les couleurs, par rapport à la ceinture. La fuite au Journal prochain. Né OUT VAE DEN TE. d'S EXPÉRIENCES ELECTRIQUES, Par M. Comus. Senfirive éleétrifée. De toutes les plantes dormeufes que j'ai foumifes à l'électricité, j'ai obfervé que la fenfitive éroir celle qui préfentoir le plus de fingularité. 1°. En la couchant avec un morceau de métal poli , garni de deux boules aux extrémités , les feuilles fe ferment; en la touchant avec un morceau de verre de mème forme, elle paroït infenfible, & les feuilles ne fe ferment point; fi, au contraire, on éleétrife le mor- ceau de verre par frottement ou communication, & qu’on touche la plante , les feuilles fe ferment. 2°. En approchant l’athmofphère, d’une bouteille de Leyde élec- trifée , à un demi-pouce d’une branche, toures les feuilles de la branche fe fernient dans linftanr, & cette branche tombe fur la üge, comme fi on l’avoit caffée dans fa charnière. 596 OBSERVATIONS SUR:LA PHYSIQUE, à :3°%. En donnant la commotion à la plante, par le moyen d’ane chaîne qui touche d’un bout à la tige, & de l’autre à la bouteille de Leyde éleétrifée, on rire enfuire une érincelle de l’extrémité de - la plante, pour lui donner la commorion : après plufieurs commo+ tions , toutes les feuilles fe ferment, & les branches fe couchent toutes fur la tige, comme dans l'expérience précédente. Ces branches quitrent la, diceétion horifontale , pour prendre la perpendiculaire aufli brufquement que fi on lächoir un, refforr qui tint routes ces branches. enfemble. + 4%. Eu élecrifant la plante ifolte, cela ne produit aucun effet; j'ai remarqué feulement que les feuilles fe redrefloient un peu pen: dant l'opération, & qu’elles reprenoient: enfuite leur pofirion. s°. J'ai oblervé que cette plante, à force d’être électrifée , 1per- doit peu-à-peu de fa délicatelle, & qu’elle éroit moins fenfible , fans rien. perdre de fa fraîcheur, fes feuilles confervant toujours leur ver- dure. Après l'avoir éleétrifée , pendant plufieurs jours de fuite, elle eft devenue auf infenfible qu’un autre plante; enforte que l'atrou- chement ne lui fair plus fermer fes feuilles ; elle eft devenue de même infenfible à routes les expériences électriques. Je ne fçai fi elle confervera long-tems cer état forcé. J'ai répété l’expérience fur plufieurs fenfrives, pour me convainçre en effec de l’état aparhique de ces plantes, par l'éleétricité, Or & Charbon foumis a l'éincelle d’une forte batterie. J'ai répété plufieurs expériences de Boyle, par lefquelles il produi- foit , avec deux fubftances d’odeur défagréable -& fæœtide , une odeur fuavé ; je n'ai pu y réuffir par l'électricité, j'ai effayé d’autres fubf= tances qui m'ont produit l'effet que j'en attendois , particulièremeng lOr & le Charbon. É :X P ER IE :Nj°CUE: Je prends de l'or en feuille, je le foumets à la commotion comme pour le calcinér; il me donne alors une odeur fœride & défagréa- ble : je répète de même l'expérience avec la poudre de charbon; j'obtiens la mème odeur : je prends enfuite une feuille d’or, plus épaffe que celle que l’on emploie pour dorer, ce que les Batreurs- d'Or appellent, Or du premier cochet, & je tamife deffus à-peu-près le double du poids de mon or, de poudre de charbon. Je recouvre cette poudre d’une feconde feuille, & je ferre l’appareil dans une petire preffe. Je charge une très-forte batterie , & la décharge à travers 0 SUR L'HIST.NATURELLE ET LES ARTS. 307 travers mon appareil, qui, pendant quelques minutes, exhale une odeut fuave & agréable, comme d’éther ou d'efprit de vin. Les autres métaux produifent cet effet avec quelques différences; la poudre de chaibon que j'ai employée , eft celle produire par l'é- corce , ce que l’on appelle vuloairement poufher ; celle du corps du charbon ne produit pas le mème efter. Rien de fi extraordinaire que le réfultat de la combimaifon de ces deux phlogiftiques qu'on foupçonne être analogues; en effer, on revivifie une chaux métallique avec le phlogiftique du charbon; de même, ces deux phlogiftiques , exaltés féparément par l’éle&ri- cité, donnent la mème odeur; & réunis enfemblé , on obrient une odeur fpiritueufe & tout-à-fair oppofée. Je compte faire plufeurs opérations chymiques avec ces deux fubitances , pour tâcher d’ob- tenir la même odeur que par l'électricité : j’en donnerai les réful- tats dans une autre feuille. J'ai annoncé dans le Journal de feu M. Roux, du mois d'Octobre 1774, qu'on pouvoit , en calcinant l'or par l'électricité, obtenir une couleur bleue , ainfi qu'une verte. Dans le tems, j'annonçai feulement le fait, fans en détailler le procédé. EX APCE ROI GT EMN UC E Pour avoir une couleur bleue avec l'or, vous tamifez légèrement une couche de fleur de foufre fur une glace ; vous étendez fur votre fôufre une feuilie d’or ; vous mettez une feconde couche de foufre; vous couvrez le tout d’une carte ; vous ferrez l'appareil légérement dans une prefle; vous faites paffer enfuite la décharge d’une forte batterie , l’écincelle réduit l'or en chaux , & fond le foufie, Ce mèe- Jange laife fur la carte une couleur bleue, fans aucune marque mé- tallique ; fur la glace, on voit au centre l'or, & la couleur bleue mêlée par endroits , principalement au bord de la glace. Pour faire paroître l'or verd, il faut prendre en place de foufre, de l'or- piment que Walerius appelle arfenic jaune, & procéder également; la couleur verte eft beaucoup plus belle & plus éclatante que la bleue. L'argent pur, avec cette dernière fubftance, foumis à l'électricité, donne une couleur d’un jaune citron. Le cuivre qui, par fa calcination , approche de la couleur de la chaux de l'or, donne avec cette fubftance, une couleur fouci. L’étain donne une couleur d’un brun jaunâtre. Ces couleurs font les mêmes par réfraction & réfleétion. On les voit à travers le verre qui en eft marqué, ainfi que fur la carte. L'arfenic , foumis feul à l'étincelle d’une batterie entre deux Tome VIII, Part, IT, 1776. Erere 393 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, glaces, laiffe deffus un mêlange de toutes les couleurs en forme d'iris; ces couleurs font plus belles que celles que l’on obtient par les procédés ordinaires. Cetre dernière expérience paroît appuyer le fentiment de ceux qui attribuent à l’arfenic le principe colorant mé- tallique. Nota. Dans le dernier article inféré dans le Journal du mois de Juin de cette année, page 530, où j'enfeigne le moyen de con- noître le Diamant du Mogol d’avec celui du Bréfil par l’éleétricité, on a oublié de mertre qu'il feroic à fouhaiter, pour connoîrre mieux la nature du Diamant, d’en foumettre deux au feu , l’un du Brcfl, & l'autre du Mogol; peut-être diftingueroit-on quelque différence dans les réfulrats, ainfi que par l’éleétricité. Celui qui a été founus au foyer de la loupe du Jardin de l’Infante , & qui a rélifté en fe noirciflant , eft peut-être du Mogol. 7 GS D D LAS (gi GE Uk 0 ra A la Deftription du Sphéromètre , inférée dans le Journal du mois de Juin 1776, page 48s , &c. UYSVANGUME, E TARLISSEZ d'abord le fphéromètre fur une table quelconque, de manière qu’elle ne vacille point. s Elevez la pointe de l’arbre à vis gg, au niveau des pointes pp, des deux coulans oo, ainfi que le nez y de la potence [, y. Ap- pliquez fur les quatre pointes le plan ou la glace, dont il eft parlé dans la defcriprion , pour favoir fi elies fe trouvent dans le même plan. Le tout étant ainfi difpofé , ayez un verre quelconque, convexe ou concave ; prenez-en le diamètre en pouces , lignes & parties de lignes; faires la diftance du ner y de la potence 1, y, à l'arbre à vis gg, égale au demi-diamètre du verre en queltion, les deux pointes pp, des deux coulans oo, feront approchées de l'arbre à - vis gg, à des diftances égales entr'elles , mais d'une ligne ou d'une ligne & demie moins que le demi-diamèrre pris ci-deffus. Si c’eft un verre convexe, vous ferez defcendre la pointe de larbre à visgg, jufqu'à ce que les quatre pointes, & fur-rouc celles des deux cou- SUR L'HIST. NATURELLE ET LES ARTS. ‘3ÿ9 lans , s'accordent avec la portion de fphère, dont vous avez le finus droit. Par la diftance defdites pointes, marquée fur le devant du chañlis , la quantité de tours & partie de tours que vous aurez fais fur la platine avec l'index, vous donnera la flèche, ou finus verfe de votre verre. Pour connoître fon rayon de fphéricité, vous ferez, par une règle de trois, comme la flèche connue eft au finus droit ; ainfi, le mème finus droit a un quatrième térme qui fera le diamètre de fphéricité, dont la moitié vous donnera le rayon. MOMBUI SALE PMP A AT PO EN Sur le Pont du Saint - Efprie. I L eft fingulier qu'on ait choif l’endroit le plus rapide du Rhône pour y élever un Pont. Chacun connoit l’impéruofité des eaux de ce fleuve, fur-tout lorfqu’elles font enflées par la fonre des neiges, ou par quelque pluie très-forte. Ce Pont paroît élevé de foixante pieds environ au- deffus du niveau des plus bafles eaux ; il a douze pieds de largeur fur trois cens de longueur , & dix-neuf arches compofent cer édifice. Malgré les réparations les plus aflidues , on craint cepen- dant que les charrettes trop chargées ne lui occafionnent quelque ébranlement ; à cer effet, on defcend les ballors & les marchandifes, & on les pañle fur des traîneaux, Quand la charrette eft entièrement déchargée, fi elle eft encore d’un volume & d’un poids confidérables:, les roues font enrayées, pour éviter les fecouffes & les cahots. Le frottement continuel des traîneaux & des roues enrayées , rendent les pavés de ce Pont liffes & polis comme le marbre , & les chevaux ont beaucoup de peine à fe tenir. Du côté du Comtat d'Avignon, la culée eft douce , la pente facile, & la porte qui fert d'entrée eft d’un bon ton en Architeéture. La porte, au contraire, du côté de la ville du Saint-Efprit, eft dans un genre Gorhique , fans goût , & pas même hardie, comme la plupart des édifices en ce genre. La defcente en eft rapide & aflommante pour les chevaux. Celui qui fournit les traineaux , paye une ferme de trois cens livres, dont le produit eft affeété à fon entretien. Ce Pont a des droits particuliers adminiftrés par les Tréforiers de France de Montpellier ; ils fe pré- lèvent fur les bateaux chargés de fel qui paflent dans cet endroir. On afure que leurs produits montent à quinze É vingt mille livres ee.z 400 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, employées en réparations. Ce droit s'appelle petit blanc. Si on n’a pas l'attention la plus fcrupuleufe d'entretenir la levée en pierres de tailles énormes, qui dirige du côté du Comrat les eaux fous le Pont, äl eft à craindre que le Rhône ne reprenne fon ancien lit, & ne life plus qu’une branche dont l’eau paflera fous le Pont. Un fait fingulier doit exciter la curiofiré de ceux qui voyagent pour s’'inftruire. On voit prefque fur tous les piliers ou piles des ger- fures ou fentes perpendiculaires , qui fe prolongent depuis le parapet jufques fur l’avant-bec ou avant-corps de la partie inférieure de la pile. Dans les pièces qui fervent de recouvrement au parapet & où font les gerfures , on a cimenté de chaque côté de la gerfure, un morceau de fer quarré de quatre lignes d'épaiffeur & long d’un à deux pouces. Ces morceaux fe joignent en À l’un à l'autre ; comme dans la figure LP Tant que la chaleur fe fait fentir, les points À fe touchent ; mais dès que le froid commence & augmente , les barres s’écartent, & il refte au point À un vuide de quatre, cinq, & quelque fois fix lignes. La gerfure fuit la mème proportion dans toute la maçonnerie de la pile. Ces marques en fer font comme le Thermomètre de l’é- cartement ou du refferrement de la malle. On pourroit dire que l’ac- tion de la chaleur ou du froid n’agit que fur le fer , & non fur la malle de la maçonnerie ; maïs ces barres ont trop peu d’étendue, pour avoir un prolongement où un raccourciffement aufi confidéra- bles. D'ailleurs, on apperçoit le même effet dans le parapet oppofé, quoique l’un foit direétement placé au Midi & l’autre au Nord; puifque la direétion du Pont eft de l'Eft à l'Oueft. Des obferva- tions fuivies ont prouvé que c’eft la malle de la maçonnerie qui travaille, & que les barres de fer en fuivent les rapprochemens ou les écartemens. Que de conféquences à tirer de l’aétion foutenue du chaud ou du froid ! Ce Pont a été commencé en 1250. sd SUR L’HIST. NATURELLE ET ILES ARTS. 401 Où BS PE PRUMAATEREE :O: N Sur une Afphixie. | DEA Papiers publics font remplis, depuis quelque tems, de gué- rifons de morts apparentes. Ce n’eft prefque que par eux qu’on par- viendra à inftruire la malle générale des hommes, qui ne lifent que our tuer le tems. Cette malle l'emporte de beaucoup fur celle des pds qui lifent pour s’inftruire. Ces derniers ont befoin des Jour- naux , pour être au courant des découvertes dans les fciences, & les autres pour avoit des fujets de converfations. Eh bien, qu'ils s’en- tretiennent donc de fujers utiles , que de bouche en bouche, les vérités circulent & parviennent enfin à la dernière claffe des hom- mes. Il y a des inftruétions qu’on devroit publier fur les toîts, afin que chacun en profite. Telle ef celle-ci, M. de la Tourelle, Secré- taire-perpéruel de la Société d'Agriculture de Soiffons , donna ordre à un Plombier de vifiter un puits, pour y fouder un tuyau de pompe à vingt-cinq pieds de profondeur. Le Maître Plombier & deux de fes Garçons y defcendirent, le 16 Septembre dernier, par une ou- verture de quatorze pouces en quarré. Ils eurent l’imprudence de defcendre avec eux une terrine de charbon, pour faire chauffer leurs fers, & commencèrent à travailler fur les trois heures après midi, fans avertir M. de la Tourelle. À cinq heures, un domeftique vine lui dire que les ouvriers étoient à l'ouvrage, & qu’il ne pourroit pas être fini, parce qu'ils éroient obligés de remonter tous les quarts d'heure, & qu'ils éroient comme yvres. Il courut à l'inftant pour faire ceffer le travail; il appella les ouvriers, & il étoic crop tard. Déja fans connoilfance , on les trouva couchés fur l'efpèce de plan- cher qu'ils s’éroient conftruit au niveau de l’eau du puits (1); & à la faveur d'une lumière qu’on defcendit à une certaine profondeur, on en découvrit un qui parut encore avoir du mouvement. M. D. L.T. fit defcendre aufli tôt un homme fort & vigoureux, après lui avoir frotté le vifage avec de l’eau de Luce, & lui avoir prefcrir de vite accrocher la cerrine aux charbons aux cordes qu’on defcendit. On (1) S'il n'y avoit point eu d’eau dans le puits, il eft certain qu'ils auroiene été beaucoup plutôt fuffoqués. L'eau abforbe confidérablement l'air fixe, ou méphi- sique, où fuffoquant. Le nom ne fait rien à la chofc. 42 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, l’atracha lui-même avec des cordes pour le tirer au befoin : la terrine fut retirée; mais à l'inftant même, il fallut remonter l’homme qui fe trouvoir incapable d'agir, ayant les yeux , le gofier & les natrines trop irrités par l’eau de Luce. Un fecond homme , également atraché avec des cordes , defcendir ; il en pafla fous les bras des trois moribonds, & Fat aufli-rôc retiré. Les trois hommes le furent fucceflivement. Dé- pouiilés & expofés à nud à l'air, un d’eux revint affez promptement, après qu'on lui eut fait avaler quelques gouttes d’eau de Luce, & qu'on lui en eur injecté dansle nez. {1 fallut employer pour les deux autres les lavages d'eau, les frictions avec de la flanelle; & après une de- mie - heure de foins, ils n’avoient encore donné aucun figne de vie. On préparoit un bain de cendres; & en attendant qu'il fût prêt, on fit ufage de la petite machine fumigatoire (1). Aux premières injec- tions de tabac, la connoiïffance & le mouvement revinrent aux deux patiens, Enfin, à fept heures du foir, ils furent en état de fe retirer chez eux, fans vouloir être faignés; & le 17 au matin, on les trouva en patfaite fanté. Il faut obferver qu’il fe pafla plus de trois quarts d'heure depuis le moment que M. D. L. T. defcendit jufqu’à celui où ils furent virés hors du puits, à caufe de la difliculté de manœuvre par une fi petire ouverture. L'un de ces hommes fut trouvé mordant un de fes camarades à la cuiffe avec une telle violence, que pour l’en détacher, il falluc arracher l’écoffe & déchirer les chairs. Aucun d’eux ne s’eft fouvenu de s'être trouvé mal, & ils ne comprenoient pas pourquoi ils n’étoient plus dans le puits. Quand la connoiffance leur fut revenue , ils ne voyoient tien; & ce ne fut qu'un quart d'heure après que la vue revint. ———————_———————————— (1) Voyez la defcription & les deffins de cette machine, dans le Volume de Janvier 1775; de même que la defcriprion & les deffins de celle employée pour les mêmes ufages , par la Ville de Paris, & de l'invention de M. Prat, ancien Echevin, Volume de Mai 1775. RETRO CN Re SUR L'HIST. NATURELLE ET LES ARTS. 4o; EF NP EN R PRENMNECE S Faites fur le Pic du Midi dans les Pyrennées ; Par M. D'ARCET, Lecteur & Profeffeur Royal de Chymie au Collége de France, M onsteur Rouelle, (c'eft M. d’Arcer qui parle), fachant que j'allois au Pic du Midi, m'engagea à rentrer quelques expériences qui deve- noienc.intéreffantes par la circonftance du lieu où elles devoient être faites. 1°. J'avois porté avec moi de l'alcali fixe pur & en poudre que j'a- vois fondu la veille. J'en expofai à l'air libre dans une capfule de vèrre, fur le fommer du Pic; une heure & demie après, ce fel étroit encore fec & pulvérulent; au lieu qu’en ayant expofé de mème au- près du grand Lac, au bout d'une heure, une partie de ce fel éroit déja réfoute en liqueurs. Cette expérience a fourni kes mêmes réful- tats, répétée à deux jours différens. 2°, Un flacon d’efprit de fel très-fumant, que j’avois diftillé roue exprès à Barèges, ayant été ouvert fur le fommet de cette montagne, évaporoit infiniment moins qu'en bas & à Barèges ; la vapeur, quelque attention que j’aye eue à l’obferver , ne m'a jamais paru vi- fible ; il y eut feulement un inftant où ayant pofé le facon devant mes yeux & à contre jour , je crus appercevoir une vapeur mobile, prefque tran{parente comme celle de l’éther, ou de Pair même qui circule par- deffus un brafier placé au foleil d'été. Ce fut une partie de mon ha- leine, qui portant direétement fur le goulor de la bouteille, s’unic à l'efprit de fel qui évaporoit, & rendit vifible cetre combinai- fon (1). 3°. Un col de matras de 13 pouces de longueur, au défaut d'un tube de verre, étant frotté à la manière ordinaire , a éle@rifé aflez (1) J'ai trouvé depuis mon retour qu'on avoit déja obfervé, que fur le fom- met des monragnes les plus élevées, comme fur le Pic de Ténéritfe, les fubflan- ces qui onc le plus de faveur, comme l: poivre , le gingembre, Île fel, l'efpric de vin, &c., font prefque infpides. ( Voyez Encyclopédie, lestre À , page 130.) Je ne l'ai pas éprouvé par moi-même , mais je le croirois plus volontiers. pour les odeurs que pour Les faveurs, 44 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, fortement un fil de laiton de deux pieds de long, pour exciter am doigt une commotion , & à l'oreille, un pétillement très-fenfible. Le même col de matras attiroit & repoufloit les feuilles d'or & d’ar- gent que j'avois apportées avec moi; en un mot, ces deux expériences n'ont paru réuflir au haut du Pic tout au moins aufli-bien qu'à Ba- règes. 4°, Enfin, mon barreau aimanté a levé & foutenu au fommer du Pic du Midi, le même poids qu’ Barèges, c’elt-à-dire, trois onces & demi-gros. Ces quatre expériences ont été faites & répétées le 28 & le 31 Août, aux mêmes lieux, & elles ont eu à-peu près le même fuccès, malgré la grande différence qu’il y a eu ces deux jours-là' fur cetre montagne , ainfi qu'à Barèges, dans l’état de l’athmofphère. Il eft aifé de fentit pourquoi , comme l’avoit penfé M. Rouelle, la vapeur de l’efprit de fel eft moins forte ou plutôt invifible fur le fommet d'une haute montagne; pourquoi elle fe manifefte fi Fort en bas; pourquoi étant invilble dans les vaiffeaux fermés, elle fe mon- tre comme un brouillard affez épais, lorfqu'’on lui donne une libre communication avec l'air extérieur, ou que cet air, dans certaines circonftances, vient à entrer dans le ballon. OBS AE CRIE EL SEAMO NES) Détachées de l'Ouvrage de M. Bo we, intitulé : Jrtroduélion & l'Hifloire Naturelle & à la Géographie phyfique de l'Efpagne. ri L À mine de cinabre d’Almaden , eft la plus riche pour l'Etat, la plus curieufe pour l’hiftoire naturelle , & la plus ancienne que l'on connoille dans le monde.... Le pays abonde en mines de fer, & même on trouve dans celle de cinabre, divers morceaux où le fer, le mercure & le foufre, font tellement mèlés, qu'ils ne forment qu'un mème corps. Ce fait détruit l'opinion commune où l’on eft, que le fer eft d’entre tous les métaux, l'unique qui foit indifloluble par le mercure. J'ai découvert la fauffeté de cette opinion dans les mines de vif-argent de Hongrie , où il eft certain qu’on trouve auli un minéral mélangé de fer, & j'ai vu dans la mine de vif-argent du Palatinat, une grande quantiré de ce minéral martial , fervir de matière au cinabre. Il. Les Profelfeurs de Chymie, de France & d'Allemagne , éta- bliffent pour principes , qu'il y a trois acides minéraux dans la na- ture; que l'acide vitriolique eft l’acide univerfel qui accompagne les MINÉTAUX » ft Li SUR L'HIST. NATURELLE ET LES ARTS. 4 ‘minéraux, & duquel provieñnent les’ deux autres? ‘que l'Acidé'#t- treux eft le fecond ,/ quant à l'a@tivité, & actompagne ‘lès’ vévéraux, & que l'acide marin, le plus foible de tous, 'eft en mêmerems le plus homosène pour les poiffons. Ils mettent au nombre des acides, Tacide animal qui , uni avec le phlogiftique’ | ‘forme‘le phofphore. ‘Ces Maïtres difent en outre, que l’alkali fixe du falpètre n'eft'pas fimple'& pur dans la nature , mais qu’il 'elt l’éffet'du feu ; cependanre, ‘comme ils voient que le falpètre des Indes orientales fe trouvé n9- turellément dans la terre, ils éludent la difficulté en difanr qu'il s'eft formé par la combuftion accidentelle d’un bois qui a imprepné la terre d'un alkali fixe, c’eft-à-dire, dela bafe du falpètre. D'a- près ces affertionis , je crus que cette bafe du falpêtte étoir l'alkali fixe , formé par une certaine combinaifon qui fe faifoit dans le mo- ment de la combüftion des plantes ; maïs j'ai reconnu mon erreur aufli-tôt que jai vu comment fe faifoir le falpètré dans diférens «endroits de l’Efpagne ; & aüjourd’hui, je fuis évidemment convaincu que la bafe du falpètre exifte , formée dans la terre & dans les plantes comme dans les foudes d’Alicante. Il fuftie dé venir en Efpagne pour toucher cette vérité au doigt & à l'œil; on'fe défabufera en voyant Je falpètre formé avec fa bafe alkaline ;- dans toutes les Fabriques de cé pays : on y verra que le falpètre fe fait fans le fecours d’au- cune matière végétale, & que dans quelques-unes on a coutume de ne pas mettre au-delà d’une poignée de cendres de fparte, pour cou- ler ou filtrer la lefive des terres, & que, quoique pour l'ordinaire, il y ait du plâtre dans les environs des Fabriques , il arrive com- munément que dans plufieurs d'elles , on obtient d’excellent fal- pètre, en fe contentant de faire bouillir les’ léflives des ‘terres, dans lefquelles on ne trouve pas même un atôme de ce plâtre. C’eft pourquoi on peut avoir en Efpagne, & on a effeétivement de la poudre qui porte avec elle la bafe de l’aikali fixe, fans qu'il foit néceflaire de recourir aux végétaux , & fans la converfion vifible ni fenfible de l'acide vitriolique du plâtre. Ayant donc remarqué que Jon trouve lalkali fixe, fornié & parfair dans les terres nitreufes de l’Efpagne, j'écendis mes obfervations fur les autres fers & fur les autres produétions végétales. Après des expériences mulripliées , je trouvai que de pareils alkalis fixes, beaucoup d'huiles & de fels néutres , fonr l’effer des combinaifons différentes de la terre , de l'eau & de l'air, avec les matières que ce dernier élément porte, diflout en lui-même , & que ces trois élémens, en s’élevant où s’abaïfantc , & en s'arrètant, fe combinent & forment de nouveaux corps dans les organes de la végctation. IT. Je ne-m'arrèterai pas ici à ‘parler des parties du falpètre, de foufre & de charbon, qui entrent dans la compofirion de la poudre, Tome VIIL, Part, II. 1776. RCE 406 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, parce que cela dépend de l'expérience, & que d’ailleurs, c’'eft une chofe que tout le monde fait. J'ai vu faire à Grenade les épreuves que l’on exécute felon l'Ordonnance du Roi , pour connoître la qua- lité de la poudre, pour la recevoir ou pour la rejetter ; mais je fuis d'avis que ces épreuves ne fignifient rien, parce qu’une poudre, ré- .cemment faire, peut , quoique très-imparfaite, chaffer les boulets à la diftance prefcrite par l'Ordonnance ; mais pour juger fainement de la bonté de la poudre, il faudroit la tranfporter dans divers en- droits, & l’éprouver dans différentes faifons ; car je fuis afluré que telle poudre qui pourroit être approuvée & remplir les conditions de l’'Ordonnance , en Andaloufe qui eft un pays extrèmement fec en été, pourroit être rejettée en Galice , qui eft une Province très- humide en hiver; l'humidité eft très-à-craindre- pour la poudre, & il eft dela plus grande importance de la conferver sèche. J'ai ima- -giné-un moyen pour empècher l’eau de pénétrer la poudre en baril, & je crois que la dépenfe n’excéderoit pas vingt fols pour chacun. Il fufhc, pour cet objet, de garnir l’intérieur des barils d’une feuille d’étain, collée avec de la gomme ou de la colle, comme on fait pour les boëtes à tabac, à l'effet de le renir frais. Cette feuille, prefque aufli mince que le papier, eft extrèmement légère, impénétrable à lhu- midité , facile à appliquer , foit en dedans, foit en dehors des barrils , & conféquemment elle réunit toutes les conditions néceffaires. IV. On voit dans la plaine de Séville, plufieurs oliviers qui n’ont abfolument que l’écorce pour tronc , par la mauvaife méthode qu'on emploie pour planter ces arbres; car pour cette plantation, on prend une branche d’olivier, de la groffeur d’un bras, on la fend en quatre par le bas , environ de 7 à 8 pouces ; on met une pierre dans chacune des quatre fentes, & on plante cette branche à deux pieds en terre, en pratiquant une rigole autour, afin d’y retenir l'eau ; le haut de la die eft aufli coupé. Les eaux & la chaleur qui pénètrent dans le pied, pourriffent tout le bois intérieur de l'arbre... ... Le même abus fubfifte en France. V. Pour avoir une idée. exacte de la prodigieufe montagne de Filabre , fituée à dix lieues d’Alméria, il faut fe figurer un bloc de marbre blanc, d’une lieue de circuit, & de deux mille pieds de hauteur, fans mélange d’autres pierres ni d’autres terres. Elle eft prefque plarte fur le fommet, & le marbre y eft à découvert dans plufieurs endroits, fans que ni les eaux, ni les vents, ni les autres agens qui décompofent les roches les plus dures, faffent la moindre imprefhon fur lui. Du coté de Micaël, qui eft un hameau, fitué au pied de cette montagne, on découvre une grande partie du Royaume de Grenade, fi montagneux, qu’il reffemble à une mer agitée par une grande tempère. De l’autre côté , on voir que certe même mon- SUR L’HIST. NATURELLE ET LES ARTS. 407 tagne , coupée prefque perpendiculairement , reffemble à une efpèce de terrafle , épouvantable par fon élévation, d'où l’on découvre la ville de Guadix , qu’on croiroit être très-éloignée, & qui cependant, à vol d’oifeau, n'en elt pas à demi-lieue. Je defcendis dans le vallon pour mieux examiner cette énorme terraffe élevée par la Na- ture. Je vis qu’elle avoit plus de mille pieds de hauteur ; que c'é- toit un bloc de marbre maflif qui avoit très- peu de fentes, & fi petites d’ailleurs , que la plus grande n’excédoit pas fix pieds de long , fur une ligne de large. VL. 11 y a beaucoup de falines dans la Jurifdiétion dela Mingranilla, dont quelques-unes font exploitées. Le fel gemme qu’elles produi- fent , eft excellent ; il eft toujours plus falé que le fel produit par Évaporation. À une demi-lieue du village, on defcend un peu pour entrer dans un terrein gypfeux , où il y a quelques collines, & dont le circuit peut avoir une demi-lieue. Au-deffous de la couche de plâtre, on trouve un banc folide de fel gemme, parallèle à certe couche ; on ne connoît pas fa profondeur , parce que, quand les ex- cavations paflent so toiles, l’extraction du fel devient trop coûteufe. Il arrive même quelquefois que le rerrein s'enfonce ou qu’il fe rem- plit d’eau , & alors on abandonne le puits pour en ouvrir un autre à côté. Cet endroit eft compofé d’une mafle énorme de fel, quel- quefois mêlé avec un peu de terre gypfeufe, & d’autres fois pur, rougeâtre , & cryftallifé pour la majeure partie, Quiconque n’auroit vu que cette mine de fel, pourroit s’imaginer que c’eft le plâtre qui forme la totalité du fel gemme d’Efpagne; mais il verroit le contraire à Cardonna , où la mine de fel ne contient aucune particule de plâtre , & où cependant le fel eft fi dur & fi bien cryftallifé, qu'on en fait des ftatues, de petits meubles curieux, &c....... Le bourg de Cardonna eft à feize lieues de Barcelonne, près de Mont- ferrat & des Pyrénées. Il eft fitué au pied d’un rocher de fel, qui, du côté de la rivière de Cardonero, paroît coupé prefqu'à pic. Ce rocher eft un bloc de fel maflif, qui s'élève de terre d'environ 4 à 500 pieds, fans crevalles , fans fentes & fans couches :on ne trouve pas de gypfe dans fes environs. Ce bloc peut avoir une lieue de cir- cuit, & a élévation cft la même que celle des montagnes circon- voifines. Comme on ignore fa profondeur, il eft impoñlible de favoir fur quoi il pofe. En général, le fel y eft blanc depuis le haut juf- qu'en bas. Il y en a cependant qui eft roux. On en trouve aufi de bleu-clair 3 mais la couleur n’y Aie rien. En faifant moudre le fel, elle difparoît , il refte blanc, & on s'en fert fans qu'il ait ni goût ni odeur de terre, ni la moindre vapeur. Cette prodigieufe montagne de fel, eft l’unique de fon efpèce en Europe. Les Phyfi- ciens y trouveront matière à s'exercer pour CRIE fa formation. 2, #08 OBSERMATIONS SUR LA’ PHYSIQUE, Te ne, fais tropléil.feur fuffira de dire, que c'eft une évaporation-de l’eau de la mers'certé folurion ne fatisfera pas tout le monde: Quoique cette montagne foir très-érendue , la pluie n’en diminue pas le fel, La rivière qui baigne fes bords, eft falée , & le devient encore da- vantage. lorfqu'il pleut. Les poiffons :y meurent ; mais cer inconvé- nient ne.s'étend pas au-delà de trois lieues: Le village de Faliera eft: fur une côte , vers le.milieu de laquelle on,trouve une mine de {el gemme , qu'on découvre hors de terre, du côté qui conduit à la galerie de la mine. À vingt pas , dans l'intérieur de la mine, on voit que le fel qui eft blanc & en abondance, a pénétré les couches de gypfe. Cette mine peut avoir quatre cens pas de long , & plufieurs de fes galeries latérales qui en ont plus de quatre-vingts, font fou- tenues par dés piliers de fel & de gypfe, que les mineurs y laiffent de diftance en diftance, pour que l’intérieur réffemble à une Eglife gothique. Le fel fuir la direétion de la'colline vers le Nord, ainfi que les veincs de oypfe. Le fel eft contenu dans une efpace d’envi= ron cinq pieds d’élévation, fans qu'il paroiffe la moindre variation dans tout ce qu'on découvre. On voit qu’il a corrodé plufeurs cou- ches de gypfe & de marne, dont il a pris la place, en laiffant ce- pendant fublfter quelques veftiges de ces deux matières. À la fin de la principale galerie , les mineurs ont prolongé un rameau à la droite, où l'on voit que le filon falin fuit exa@temenc l’inclinaifon du côteau, dont la pente eft confidérable dans certe partie, & que cette couche de fel, de cinq pieds d’épaifleur, defcend dans le val- lon pour paffer à la colline qui eft vis-à-vis. Certe marche régulière détruit le fyftème de ceux qui prétendent que le fel gémme fe forme par l’évaporation des feux fouterreins. S'il en étoit ainfi , les filons n’en feroient pas ondés comme ils le font ici, où ils reffemblent aux couches de charbon de pierre de Saint-Chaumont , près de Lyon, & à celles d’afphalte en Alface, qui fuivent les élévarions & les pen- tes des collines & des vallées, & où l’on voir fouvent que le bitume furnage l’eau , lorfqu’il lui arrive d’en renconter. Cette mine de fel eft forc élevée, relativement à la hauteur de la mer. VH. Concud eft un village fitué à une lieue de Téruel. Il eft bâti far une colline de rocher calcaire, devenu aujourd’hui terre dure, & confervant encore fi bien les fentes & les féparations des couches de rocher , que, quoique le rerrein foit aétuellement fort inégal, on voit qu’il a été précédemment compofé de rochers, que les pluies ont miné petit-à-petir, & ont décompofé plus ou moins, felon leur dureté & leur réfiftance. En fortans du village du côté du Nord, on monte & on defcend trois petites collines, après lefquelles on parvient à celles de Cueva-Rubia , ainfi nommées par rapport à une efpèce de terre rouge que les eaux du ravin ont découverte. Ce SUR L'HIST: NATURELLE ET LES ARTS. 409 tavin a environ deux cens pas de long, trente de large, & quatre- vingts de profondeur. Le fommet de fa colline qui borde le ravin, €ft compofé d’un rocher calcaire gris, plus ou moins dur, & difpofé en couches de deux & trois pieds d’épaifleur. Il eft rempli de co- quilles rerreltres & Auviatiles, comme de petits limaçons, de buccin,&c, qui paroiffent feulement être calcinés. On trouve aufi dans le centre des mêmes rochers, beaucoup d'os de bœuf, de dents de cheval & d’ânes, ainfi que d’autres perits os d'animaux domeftiques plus petits: Quelques-uns fe trouvent folides , & d’autres s’en vont en poudre. On y voit des jambes & des cuiffes d'hommes & de femmes, dont les cavités font remplies de marières criftallines. Il y a des cornes de bœuf | mélées avec des cuilles & avec d’autres os de différentes articulations. Il y en a de blancs, de jaune$ , de noirs, tous mélés & placés de manière que, dans quelques endroits, on remarque fept ou huit jambes ou os d'hommes raffemblés fans ordre. Ordi- naitement ces os fe rencontrent dans une couche de rocher, de trois pieds d’épaifleur , décompofée & prefque convertie en terre, mais furmontée par une autre couche de pierre dure, qui fert de couverture à la colline , & qui peut avoir de quinze à vingt pieds d'épailfeur. La couche qui contient lés os, eft aflife fur une grande malle de terre rouile , accompagnée de quelques pierres rondes , cal- caires , conglutinées avec du fable rouge , de manière qu'elle forme une brèche dure. Cette malle fe trouve également dans le fond du ravin, tandis que les collines des environs font compofées de gypfe blanc. De l’autre côté du même ravin, on trouve dans le point où il commence , une caverne noircie par la fumée du feu qu'y font les Bergers , où l’on rencontre des os dans une couche de terre dure, qui a plus de foixante pieds d’élévation, & qui eft couverte de dif- férentes couches de rochers qui correfpondent, feuille pour feuille, avec celles de l’autre bord du ravin; enforte qu’on ne peut pas dou- ter que la partie que le ravin a écrafée, ne réunit les mafles des bords du ravin, & ne contint la même matière. VIIL. Le Règne végétal ne produit pas de meilleure plante pour faire du charbon, que la bruyère. Le Maïrre d’une forge, qui pof- sède à fa proximité des racines de cette plante, peur fe regarder comme très-heureux , parce qu’elle produit un charbon dur & ar- dent, & qui laiffe aller peu-à-peu fon principe inflammable. . .., Le noyer eft un arbre très-commun en Efpagne. Son bois ferc à faire beaucoup de meubles. Si on avoit la précaution de jeter fes planches dans quelques marais fangeux , où les animaux vinffent boire, & qu'on les y laïflät pendant quelques mois , fon bois deviendroit beaucoup plus beau; fes veines reflortiroient davantage & prendroient un jafpe plus brun & plus vifible. uto OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, IX. Je ne puis m'empêcher de témoigner ici mes regrets fur ce que l'on a perdu en Efpagne l’ufage, & même jufqu'au fouvenir, du Semoir inventé, dans le fiècle paflé, par Dom Jofeph Lucatello , Gentilhomme Aragonois, & dont on fit l’expérience fous les yeux de Philippe IV. Sa defcription a été imprimée, & il n’en refte plus de veftige aujourd’hui, tandis que les Etrangers ont mis à profit la découverte, & ont écrit des volumes à ce fujet, fans daigner citer l'inventeur de ce Semoir. X. J'ai vu chez un Gentilhomme de Reinofa , une manière de cultiver les choux, qui mérite d’être rapportée. Il avoir dans fon Potager plufeurs pierres plattes , d'environ trois pieds en quarré , de deux pouces d’épaiffeur, & percées au milieu. 11 plantoit dans le trou l’efpèce de chou", qu'ils appellent Lanta dans le pays. Ce chou y croifloit & s’érendoit prodigieufement. J'en mangeat & le trouvai très-tendre & rrès-délicat. Je crois que cette invention pour- roit être fort utile pour les légumes, & même pour les arbres qui languiflent , faute d’être humeétés dans les pays chauds & fecs. Ces ierres empècheroient l’évaporation de l'humidité, & conferveroient à la terre fa fraicheur. . XI, Les Chymiltes de Paris fe font occupés à faire des expériences far les Diamans. Il en eft réfulté que les Diamans blancs du Brélil fe font entièrement évaporés à un feu violent, fans laiffer, dans le creufer, le moindre veftige de leur exiftence. Il en réfulre en- core, que ces mèmes diamans font d’une nature différente de celle des autres pierres précieufes, leur évaporation étant le figne carac- tériftique d’un nouveau genre. Aucune expérience n'a été faite fur des diamans colorés de l'Orient, quoiqu'il y en ait de paillets , de verds , de noirs, de couleur rofe & de bleus. On verroit alors, à n’en pas douter , fi la couleur de ces diamans provient des par- ticules ou des vapeurs métalliques, ces mèmes diamans devant laif- fer des taches & des indices fur la porcelaine, dont on fait des creufets deftinés à ces opérations. La bruyère, dont il vient d’être fait mention dans le Numéro VIII, eft la bruyère en arbre, Erica arborea , Lin. Sr. PL., qui ne croît que dans les Provinces méridionales de France, & dans les pays chauds, ji SUR L'HIST. NATURELLE ET LES ARTS. 411 NOUVELLES LITTÉRAIRES. Su MMLUNG Brauchbarer adhandluugen, &c. &c. c’eft-à-dire, Col- deilion de Mémoires | traduits des Obfervations fur la Phyfique , fur l'Hifloire naturelle € fur les Arts, rédigées par M. l'Abbé Rozier. À Leipfic , par M. Chrétien Ernefl Wunfch. Le Offervaziont atenenti alla Fifica , alla Storia naturale & alle Arti ; dal Sis. Abba Rozier; c'eft-à-dire, Obfervations fur la Phyfique , Jur l'Hifloire naturelle & fur les Arts ; par M. l'Abbé Rozier. À Ve- nife, chez Gafpard Storti. Je ne m'étois pas attendu que le Journal de Phyfique mériteroir complettement l'honneur des traduétions. Je favois qu'il éroit morcelé dans le Journal des Savans d'Amiterdam , dans plufeurs Ouvrages périodiques d'Allemagne, de Suiffe & d’Angle- terre; que la plupart de leurs Rédacteurs ne daignoient même pas indi- quer la fource où ils avoient puifé. Il en réfulroit un bien pour les Sciences; & j'étois fanisfair, Aujourd'hui, par reconnoiffance, je defire vivement que le produit réponde à l’atrenre de MM. les Traducteurs ; & par amour pour les Sciences , que la Phyfique, l'Hiftoire naturelle & les Arts, en retirent un avantage réel par une plus prompte publi- cation des découvertes, Ces MM. concoërent à remplir le but que je me propofai en en- treprenant cet Ouvrage. Depuis cette époque jufqu’à ce jour , je n’ai ceflé, foit par lettres, foic en faifant préfent de mon Journal, d'inviter les Savans & les Académies de l'Europe à regarder mon cabinet comme celui du P. Merfenne , qui fur le point de réunion des Pafthal, des Toricelli & des Boyle. Tous ceux qui s'occupent réellement des Scien- ces, fenrent combien un centre commun, ou dépôt public, eft né- ceffaire. MM. Wunfch & Srorti me permettront de les prier de faire la même invitation aux Savans de leur nation; ils font aujourd’hui auffi intéreffés que moi à augmenter le mérite du Journal de Phy- fique. Je prie encore ce dernier d’avoir la complaifance d’adreffer les vo- lumes de fa Traduétion à M. Molini, Libraire à Florence, qui lui rem- bourfera pour moi le prix des volumes, & je remercie M. Wunfch de l'Exemplaire qu’il a eu la bonté de m'envoyer. Memoire fur Les Moyens de Je garantir de la Foudre dans les maifons , Suivi d'une Leure fur l'Invention du Cerf-Volant électique , avec Les Pièces Juflificatives de cette même Lettre ; par M. de Romas , Lieutenant Afleffeur au Prélidial de Nérac, de l’Académie Royale des Sciences de Bor- yi2z OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE; deaux & Correfpondant de celle de Paris; 1 volume i7-12 de 80 pa- ges, avec fioures. À Bordeaux, chez Bergeret , Libraire; & à Paris, chez Piffot, Libraire, quai des Auguftins. L’Auteur fe propofe prin- cipalement trois objets dans fon Ouvrage; 1°. de démontrer que les barres éleétriques, placées aux faîtes des maifons, ne fuffifent point pour les garantir de la foudre; 2°. qu'il vaut mieux divifer les con- ducteurs, parce qu’ils obligent la matière du tonnerre à fe divifer &àagir, par Et aa , avec moins de force; 3°. enfin, qu'il eft le premier qui ait imaginé & exécuté le cerf-volant électrique. Suwu- vons rapidement ces trois objets. L’Aureur effaie de démonrrer l’inu- tilité & même le danger des barres électriques fur les maifons, en les confidérant comme des conduéteurs qui attirent le fluide électrique &e qui fixent autour d’eux l’athmofphère des nuages chargés de tonneïre. L'aveu mème de M. Franklin, qui dans fon Ouvrage , rapporte que gras de ces barres & de leurs conduéteurs avoient été bii- es, fondues & détruites diverfes fois & en divers pays, femble confirmer ce que M. de Romas avance ; mais dans les accidens dont parle M. Franklin, les fils de fer, qui communiquoient de l'aiguille électique à la terre, étoient trop minces. Que l’on faffe ces conduc- teurs communiquans d’une groffeur raifonnable , & l'on n'aura point à craindre de fufon. L'idée de divifer les conducteurs pour divifer le fluide électrique, eft très-ingénieufe ; & celle de l’ifolement, ou de la machine pour fe mettre à couvert de la foudre, left encore davantage. L’Aureur propofe deux appareils; le premier confifte dans une garniture de fils de fer tout autour de la chambre qui doit fervir de refuge ; ces fils de fer partent de la furface du plancher fupérieur , defcendent tour le long des murailles latérales , & viennent s'attacher fur le plancher in- férieur, à un gros fil de fer, qui faifant tout le tour de la chambre, réunit ous les bouts des autres fils. Les deux extrémités de ce der- nier tendues enfemble, traverfent le mur de l’apparrement & vont fe perdre dans la terre. Quelque fimple que foir ce premier appareil , 1l peut paroître infuffifant aux gens timides. Le fecond a toutes les qualités requifes pour les raffurer. C’eft une guérite, une boëte de bois fec & réfineux, de verre, de réfine & d’autres matières électri- ques, fufpendue & ifolée au milieu d’un vafte appartement, par des cordons de foie. De cet afyle, on pourroit voir à fes côtés rouler la foudre, fans en craindre les terribles effers. Mais pourquoi M. de Romas ne cherche-t-1l qu’à garantir quelques individus particuliers , fans veiller à la sûreté générale ? pourquoi abandonner une maifon toute entière aux ravages d’un météore aufli dangereux , pour n’en défendre qu'une pièce ? Si l’Aureur eût dirigé fes vues plus haur, elles euffent éré plus patriotiques. Entre plufeurs expériences qui confirment mt tt SUR L’HIST. NATURELLE ET LES ARTS. 41; confirment les principes de M, de Romas ; nous ne citerons que celle du pigeon & du chien. Dans un vafe de verre de 11 pouces de hau- teur, ce Phylcien attacha un pigeon par le col; au-deflus du vafe étoit un trépied de fil d’archal qui touchoit à terre ; de la pointe du trépied tomboit une chaîne de métal prefque fur la tête du pigeon. Cet appareil étant préparé, il dirigea fur la pointe du trépied une vingtaine de traits de feu; les uns, de 7à 8 pieds de longteur ; les autres, de 1012, & de 15 à 18 lignes de diamètre, qu'il tiroit d’un cerf-volant éleétrique. Mais le pigeon ne marqua à chaque coup, que de la frayeur , & demeura fain & fauf : au contraire , un chien de Boucher, qu'il avoit attaché à un piquet avec un cordon de foie , fur tué par un petit trait de trois à quatre pouces de longueur & de deux lignes de diamètre. Pour ce qui regarde l’invention du cerf-volant éle&rique , il paroîe certain que M. de Romas en eft le premier Auteur, & par les preuves qu’il en donne, & par les certificats de l’Académie des Sciences de Paris & de celle de Bordeaux. Différtation fur la nature du Froid, avec des preuves fondées fur de nouvelles expériences chymiques ; par M. Herckenrorh, Apothicaire- Aïde-Major des Camps & Armées du Roi, 1 volume ir-12 de 108 pages. À Paris, chez Monory, Libraire , rue de la Comédie-Fran- çoife. Certe Differtation renferme plufeurs expériences neuves; mais la théorie de l’Afüteur , ou plutôt les conféquences ou principes qu'il en tire, feronc-ils au gré des Phyfciens? Il eft dificile de le enfer. Profpeäus fur une nouvelle Encyclopédie, publié par M. Formey , Secrétaire perpétuel de l’Académie de Berlin. L'entreprife littéraire, la plus confidérable , dir l’Auteur, & la plus propre à caractérifer ce fiècle , eft, fans contredic, celle de l’£n- cyclopédie. Elle a produit une fermentation prodigieufe dans le cer- veau des Auteurs; ils ont, la plupart, voulu travailler d’après ce modèle , en donnant des Encyclopédies füubalrernes , fi je puis m’ex- primer ainfi. Je m'abitiens de porter aucun jugement fur ces objets; j'ai eu diverfes occalions de le faire , & j'ofe dire que perfonne n'y eft plus autorifé que moi. J'ai non-feulement vu naître l'Encyclopédie , mais j'en ai eu l’idée avant qu'on en ait ré- pandu l’annonce. J’avois commencé & conlidérablement avancé un Ouvrage de ce genre, que je cédai à M. l'Abbé de Gua de Malves, le premier Direéteur des travaux encyclopédiques, qui ne confftoient originairement que dans une traduction du Dictionnaire Anglois de Chambers, & qu’on auroit enrichie de diverfes additions. Mes articles fe trouvent inférés avec mon nom, aflez fidèlement dans les pre- miers volumes de l'Encyclopédie; mais enfuite, on a jugé à propos, Tome VIII, Part, II, 1776. Ggg 14 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, en continuant à les employer , de fupprimer mon nom; ce qui n'eft pas dans la règle des bons procédés. Quoiqu'il en foit, je me fuis toujours intéreifé à la publication de cer Ouvrage, & j'en ai exactement fuivi le fil, en obfervant, autant que je fuis capable , le forr & le foible de chaque volume. Enfuire eft venue l’Éncyclopédie d Yverdon, qui vient d’èrre achevée en quarante-deux volumes 27-4°. J'y-ai aufli fourni un bon nombre d'articles, à la réquifition de M. le Profefleur de Félice ; & j'ai par- couru , avec la même attention, tous ceux qu’elle contient. A préfent, voici l’idée qui s’eft préfentée à mon efprit, & qui m'a fait prendre la plume. Le prix des Encyclopédies n’a pas permis au plus grand nombre des Gens de Lettres, de les acquérir; & parmi ceux qui les pofsèdent , il en exifte bien peu qui fachent ce qu'elles renferment, ce que l’on peut y chercher avec fuccès, & ce qui y eft ou défectueux, ou fuperflu. II me femble donc qu’on poutroit rendre un fervice effentiel au Public, en lui donnant zne. comparaifon des Encyclopédies | où l’on indiquât , fans exception, 1°. tous les articles qu’elles renferment ; 2°. ceux qui font précifé- ment les mêmes dans l’une & dans l’autre; 3°. ceux qui en diffé. rent; 4°. les articles de l'Encyclopédie de Paris, fupprimés dans celle d'Yverdon; 5°. enfin, ceux qui font nouveaux dans cette der- nière. | IL faudroit joindre à tout cela des obfervarionséqui appréciaffent ces articles, & appriffent aux Lecteurs à quels égards ils peuvent être cenfés utiles , inutiles & mème nuifibles, De cette manière , & à l’aide de l'Ouvrage que je propofe , fans avoir l'Encyclopédie en propre , on fauroit ce qu’elle renferme, & dans quelles occafons on peut la confulter. Je ne fais fi je me fais illufion , mais il me femble que cet Ouvrage, bien exécuté, feroit un tréfor. Je n’oferois prefque dire , après cela, que j'ai deflein de me char- ger de l'exécution ; mais j'ai expofé ci-deflus les raifons qui me portent & m'y promettent quelque fuccès. Puifqu'il plait à Dieu de me conferver la vie & la fanté, je croirai en faire un bon ufage, fi je viens à bout de ce travail. Il ne s'agira que de la manière de le publier. Ce ne peut être, ce me femble, que par une fuire de volumes pour lefquels on foufcriroit chez un Libraire qui fe char- geroir de l’impreflion : ce n’eft point encore le projer de cette Souf- cription; ce n’eft qu'un Profpeilus général que je répands pour fon- der le goût du Public. J’attendrai les réponfes des lieux où je l’en- verrai, & des Savans à qui je les communiquerai , pour me dé- terminer. Pour peu que les apparences foient favorables, je mettrai tout de fuite la main à l’œuvre. L'entreprife du célèbre Secrétaire de l’Académie de Berlin, doit SUR L’'HIST. NATURELLE ET LES ARTS. 419 néceffairement avoir le plus grand fuccès. Economifer le rems de ceux qui fe confacrent à l’érude , eft un fervice inappréciable, dont eux feuls peuvent fentir toute l'étendue. Qu'il nous foit permis, aux idées de M. Formey , d'en ajouter quelques-unes. On connoît trois grandes Encyclopédies , celle de Paris, celle de Pife, & celle d'Y- vérdon. On ne compte pas celle de Laufanne , puifque ce n’eft qu'une répétition de celle de Paris. Il eft certain qu’il y a de gran- des variations entre les unes & les autres. Il eft au moins probable que dans celle d’Yverdon , ceux qui auront été chargés de rédiger les articles de leur genre, auront donné une idée des progrès de chaque fcience , depuis la publication de l'Encyclopédie de Paris. Ne feroit-il pas plus avantageux que ces trois Encyclopédies, & les nouveaux Supplémens de celle de Paris, fuflent refondus par des gens qui auroient fait leurs preuves , & dont les noms fe- roient bien connus ? Ne conviendroit-1l pas que les grands Dic- tionnaires , comme ceux de Moréri, de Furetière, & le Vocabulaire François, &c., y fuffenc inférés ? En un mot, de cette multipli- cité de: Diétionnaires dont on a inondé l’Europe depuis le commen- cement de ce fiècle, n’en former qu’un feul Diéionnaire univerfel, duquel on fupprimeroit toutes les fuperfluités qui fe trouvent dans les autres. J'ai long:rems médité fur une pareïlle entreprife. Le plan en eft tout fair. 11 paroît , au premier coup-d’œil, que le nombre des volumes doit effrayer; mais qu'on life attentivement l’article qu'on defrera , qu’on le compare avec le même article dans tous les Dictionnaires, & on fe convaincra que les Auteurs en général, fe font tous copiés les uns & les autres. Il n’y auroit donc que les articles originaux à ajouter. Je ne prétends pas ici faire la plus lé- ère critique. C’eft une idée que je propofe. Si elle eft bonne , elle FA applaudie. Si elle l’eft, il eft poflible de la mertre à exécution. Cinquante volumes i7-4°. en caractères Cicéro & à grande juflification, formeroient ce Diionnaire univer/el. * Tratato de Calenturas , &c, Traité des Fièvres, fondé fur les loix de l'inflammation & de la putrèfailion que les plus grands Médecins ont conflamment obfervées ; pax Dom Louis Péreyra , de l'Académie Royale de Médecine de Madrid; chez Fernandez. . Praëlical Remarks , &c. Obfervations - pratiques fur les Maladies des Indes Occidentales. À Londres, chez Newbery. De Rachitide Différtatio; par M. Ferranini, Chez Rinaldi 2 Ferrare. L’Auteur définit cette maladie , une efpèce particulière de cachexie, dans laquelle la malle des humeurs pèche par une acrimonie qu’oc- cafionne la corruption du lait. Inflruccion, &c. Inflruëtion fur la manière de fecourir ks Noyés & 16 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, E6c Les Afphyxiques , écrite par ordre de l'Hopital- Royal de Notre-Dame dé la Grate, de Saragoffe. À Madrid, chez Efcribano. A Tréatifè on cattle, &c. Traité fur les Befliaux, coftenant les ‘méthodes, les meilleures & les plus conftatées , pour élever, foi- gner , rendre plus utiles les quadrupèdes domeftiques, avec des Inf tructions fur le traitement des maladies auxquels ils font fujets, & une Differtation fur Les maladies contagieufes : le tout recueilli des meilleuts Auteurs, & enrichi de Remarques ; par M. Jean Mills, Ecuyer, Membre de la Société Royale. À Londres, chez Joknfon. Danielis Wilhelmi Trilleri clinotechnia medica antiquaria, five de diverfis Ægrotorum Leëlis , fécundum ipfa varia morborum genera , conve- nienter inffruendis , Commentarius Medico - criticus. À Francfort fur le Mein, chez Fleifcher. Depuis 30 ans, l'Auteur s’occupoit de cet Ouvrage. Letera fulleria fffe, &c. Lettre fur Pair fixe, adreffée à M. le Mars quis de Tanucci; par M. Andria , Docteur en Médecine. À Naples, chez Flauto. Del Corpo folare, &c. Differtation fur Les Corps folaires ; pat M. Gam- barana , Profelfeur de Phylque au Collége de Bréra. À Milan , chez Galeazzi. 5 Elémens de Géométrie; par M. l'Abbé Roffgnol, ancien Profeffeur de Mathématiques & de Phyfique en l'Univerfité de Milan, i7-12 de 81 pages. A Milan, chez Marelli. Ornithologia Methodice digefla , Tomus V, & ultimus , in-folio, à Florence; enrichi de 20 planches, gravées & coloriées par les meilleurs Maîtres de Florence, avec des explications très-dérailléess par M. Maneri. Elsmens of Foffilogg , &c. Elémens de Foffiologie, ou difiribution des Foffiles en claffes, ordres, genres & efpèces , avec leurs caraëlères ; par M. Georges Edwars , Ecuyer. À Londres, chez White. Handbuch der Pferdewifenfchafft , &c. Manuel d'Hippiologie, pour Servir aux Leçons publiques par M. Prigelius , Ecuyer. À Lempgo , chez Meyer. sn inventione, &cc. Nouvelle invention d'un Inffrumenr pour trouver l'angle de dérive ; par M. Laurent Michelli , in-8®. Bologne. EE mine À FAUTES à corriger dans la Letrre de M. DE LA LANDE. Ligne 9, encoutrement ; /fez , encombrement. Ligne 22, Dombery; Zifez, Dombey. Ligne 30, Aunonne ; /ifêg , Auxonne en Bourgogne, | " f { È À PL. Fr D 27 VOX ES re me Menara ge DS a em \ pe] — > à > )) y) D) . OBSERVATIONS s SELS R EAN APS IRO:U E: SORT RO AIS OMR EN IEUR E L'ÈE RP TNSOUSR D SN ARLES AVEC D'ESOPILAANIC HIS MEN AA TL LE DIO UC'E, C | DÉDIÉES de Men EG O M'ILE D'ART'OTS; Par.M. l'Abbé ROZIER, Chevalier de PEglife de Lyon , de l’Académie Royale des Sciences, Beaux-Arts & Belles-Lettres de Lyon , de Villefranche, de Dion, de Marfeille, de Nifimes , de Fle[fingue , de la Societé Impériale de Phyft- que & de Botanique de Florence , de Zurich , de Madrid , Correfpondant de la So= ciêté des Arts de Londres , de la Société Philofophique de Philadelphie , &c. an- cien Direëteur de P Ecole Royale de Médecine - Vétérinaire de Lyon. TOME HUITIÈME. DÉCEMBRE on T Ce MM. les Soufcripteurs qui défireront continuer à recevoir ce Journal, font priés de renouveller leur Abonnement le plutôt poflible, afin que leurs Adreffes foient imprimées pour le mois de Janvier , & d'envoyer des Adrelles d’une écriture bien lifible. A Poe A 1e Riy At 481$ Chez RUAULT, Libraire, rue de la Harpe. SC M'ÆDICIC NL IXEXAVAL 4 VE’ CUP RPC TL EIGE D 0 RO, ADN us, A MM. les SouscrIPTEURS dont l’' Abonnement finit à la fin de l'année 1776. Pr USIEURS Soufcripteurs fe font plaints de ce qu'ils ne rece- voient pas les Cahiers aufli-tôt qu'ils avoient formé leurs deman- des. Ils font priés d'obferver que fouvent ils s'adreflent à des Commiflionnaires qui négligent de foufcrire , ou de faire par- venir les Cahiers à leur deftination. Pour éviter, à l'avenir , de pareils reproches & de femblables lenteurs, MM. les Soufcrip- teurs, qui ont été dans le cas d’être mécontens, font invités à recommander expreflément aux perfonnes qu’ils chargent de leurs commiflions , d'être plus exaétes que par le pañlé : on s'ils jugent la chofe plus commode , de configner le montant de la Soufcription au Bureau des Poftes de leur Ville, fans l'affran- chir, mais affranchir feulement la Lettre qui en donne avis. Un fecond fujet de plainte vient de ce que ceux, chez lefquels on prefcrit de remettre les Exemplaires, les prêtent , les égarent, & difent enfuite ne les avoir pas reçus. On prévient que l’on fait l'appel de chaque Cahier & de chaque Soufcripteur, comme dans un Régiment on fait l'appel des Soldats, & tous les Cahiers font portés fermés , dans un fac cachcté, à la grande ou à la petite Pofte de Paris. On voit par- là, que fi quelques-uns ne font pas rendus , ce n’eft plus la faute du Bureau des Journaux. MM. les Souftripteurs, qui défirent renouveller leur Abon- nement pour l'année 1777 , font priés de donner /eur nom & de- meure, écrits d'une manière lifible , dans le courant du mois de Décembre, ou le plutôt poñlible, afin d’avoir le tems de faire imprimer leur adreffe. On foufcrit à Paris, chez l’Auteur , Place & Quarré Sainte - Geneviève , & chez les principaux Libraires des grandes Villes. Le prix de la Soufcription eft de 24 livres pour Paris, & de 30 livres pour la Province, port franc. a ee DA PUIL.E DES ARTICLES Contenus dans ce Cahier! : Vy E $-Economiques fur Les Moulins & Preffoirs & Huile d'Olives, connus en France ou en Italie, page 417 Suite du Mémoire fur La Fourmi; par M. Barboteau , Confeiller au Con- Jeil Supérieur de la Martinique ; Correfpondant de l’Académie Royale des Sciences, 6 de la Société Royale d'Agriculture d'Angers, 444 Obférvations fur les Serpens de la Guianne, & [ur l'efficacité de l'Eau de Luce pour en guérir la morfure ; par M. Sonnini de Manoncour , Correfpondant du Cabinet du Roi, 469 Mémoire fur l'Acide aërien ; par M. Bergman , Proféffeur en Chymie, à Upfal, 476 Nouvelles Littéraires , 487 Fin de la Table, A: PS ER /Q By MATE O N. J *A1 fu, par ordre de Monfeigneur le Garde des Sceaux, un Ouvrage qui a pour titre : Obfervations fur La Phyfique', fur l'Hiffoire Naturelle & fur les Arts, &c. par M. l'Abbé Roz1ER, &c. La collection de faits importans qu'il offre pério- diquement à fes Lecteuts, mérite l'accueil des Savans ; en conféquence, j'eftime qu'on peut en permettre l'impreffion. A Paris, ce 25 Décembre 1776. VALMONT DE BOMARE. M 'DNELS RE — 7 | Ge — VOIES BAOTO NOMME QUE 148 SIORYLES- MOULINS ET PRESSOIRS à Huile d'Olives, ÿ = de Connus en France ou en Ztale (1). JE ne m'occuperai aujourd’hui que de cette partie, puifque ce qui concerne la culture de l'Olivier, la taille de cet arbre, le tems de la récolre de fon fruit , celui d'en extraire l'huile , &c. &c., font encore autant d'objets problématiques. Dans tous les cantons de Languedoc , de Provence , d’Italie, on fuit une pratique locale & nullement réféchie : il faut cependant en exceprer les environs d’Aix. Ces variérés de culture & de fabrication ne doivent pas furprendre l'Obfervateur, parce qu’elles font une fuite néceffaire du défaut de principes établis fur l’expérience. Plufieurs perfonnes font dans la ferme croyance que chaque coutume locale eft pour l'endroit, la plus par- faite. On ne la confervetoir pas dans le pays, difent-elles, fi l'expérience n'avoir prouvé qu'elle eft la meilleure, & qu’elle n’eft parvenue à ce point, qu'à force de travaux & de réflexions. Certes, ceux qui tiennent ce langage, ne connoiffent pas la manie des habitans des campagnes, & ils n’ont parcouru les champs, qu'avec des yeux peu accoutumés à étudier les travaux , à comparer les mérhodes & à appré- cier leurs produits. Il y a près d’un fiècle que les habirans de Mon- treuil s'occupent à élever les pêchers, à perfectionner leur culture; & elle étoit à fon plus haut période , lorfque la France ignoroit ce qui fe paffoit aux portes de Paris. M. l'Abbé Roger de Schabol a publié fon Traité de la culiure du Pécher; route la France fuit aétuellement fes précepres. Avant lui, un pècher en efpalier fubfftoit 10 ou 12 ans; & l’onen ——————————— G) On trouvera chez Ruaule , Libraire, rue de la Harpe, des Exemplaires féparés de ce Mémoire. Tome VIII, Pare. II. 1776. Hhh u$ OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, voit à Montreuil, qui fe foutiennent depuis la fin du dernier fècle: Dira-t-on que la méthode des autres Jardiniers étroit la meilleure; qu'ils la devoient à l'expérience, &c. &c ? Il en eft ainfi pour toutes les parties de l’agriculture. Le Payfan, le Culrivateur reffemblent à l'abeille, qui conftruit aujourd’hui les alvéoles de fa ruche de la même manière que les abeilles conftruifoient les leurs au commence- ment des tems; avec certe différence cependant , que l’Etre fuprème a donné aux animaux l’induftrie pour perfeétionner leur ouvrage du premier coup, & que l’homme ne parvient à ce point de perfeétion que lentement, & plutôt guidé par le Hambeau de l'expérience que par celui du ratfonnement. Si les coutumes locales croient les meilleures, je demanderois pour- quoi, dans Pefpace de 70 ans, on a vu la raille des oliviers yarier trois ou quatre fois dans le terrein contenu entre Nifmes & Béziers ? Là , les arbres ont été taillés en tables ; ici, on a donné à leur 1ère une forme arrondie; là, on a tenu le tronc élevé; ici, on à fur baifié le tronc & les branches. Bientôt les premiers ont eu l1 figure des,feconds , les feconds, celle des premiers; & par une troilème ou quatrième mu tation, tout a repris un ordre quelconque. Ces bigarrures dans la taille ne prouvent elles pas la bigarrure des principes, ou plurôr , qu'on ne connoît aucun principe bien décidé ? À Toulon, à Anubes, à Nice, à Monaco, &c., les oliviers reffemblent à des arbres foreftiers _ dont on éclaircic tous Les deux ans les branches; en Corfe , ils viennent au gré de la nature, fans être jamais ni vaillés, ni fumés, ni tra- vaillés au pied; dans les environs d'Aix, on prendroit ces arbres, par leur hauteur , pour les miriges de nos vergers, ou tout au plus pour les pèchers plantés dans nos vignes. Enfin, depuis les dernières plantations d’oliviers, en tirant du côté de Touloufe , jufqu’aux plan- tations de Provence, les plus voifines du Piémont, la culture, la raille, les efpèces d'olives, la manière de faire l'huile, varient d’une façon furprenante , fans avoir un motif déterminant. Je conviens néanmoins que les cultures peuvent & doivent varier fuivant la nature du fol , de fon expoftion, du plan des oliviers, &c.; mais cet aveu ne juftifie point le mot coutume ; il eft, au contraire, l'effet de la conviction intime où je fuis de la néceflité d'établir des princi- pes généraux , fondés fur une longue fuite d'expériences , d’obferva- tions, & qui doivent néceflairement être modifiés fuivant les cir- conftances. J'ai lu rour ce qui a été écrit fur les oliviers , depuis Pline jufqu’à nos jours. J'ai remarqué que rous Îles Ecrivains ont parlé de leurs cantons comme fi le refte du monde leur reffembloir, c’eft-à-dire , qu'ils font partis de crois ou quatre fuppoñtions qu'ils n'ont jamais vérifiées , & ont SUR L'HIST. NATURELLE ET LES ARTS. 419 établi leurs conféquences pour des principes. Si l’on n’a pas fait des progrès plus rapides en agriculture; depuis ces heureux jours qui lui virent obtenir quelque faveur en France , c'eft que l'on a fup- pofé fon point actuel démontré, fans examiner fi ce qui avoit été fait machinalement pendant certe longue fuite de fiècles , avoir une bafe folide. Or, pour avoir un ouvrage vraiment utile pour la Pro- vence, le Languedoc, dé même que pour tous les! autres pays à oli- viers, on doir regarder comme incertain tout ce qui a été dir, fair & Ycrit fur ce fujer , & reprendre les chofes dès leur berceau. En effet, comment un Culrivateur de Béziers comprendra -r-il ce qu'on lui dira dans un Mémoire fur l’olive appellée colombane à Nice? l'habitant d'Antibes entendra-t-il mieux ce qu'on lui dira fur fes olives appellées Plumes , filoches , au Pont du St-Efprit ? L'olive, connue à Montpellier fous le nom de Marfeilloife , a une autre dénomination à Marfeille. Les noms locaux de Roubérau à Grafle, de Triparde à Aix , de Tourtourellingue à Caflan, de Couche- fac à Nifmes, de Sayerne à Montpellier, font autant de mots plus qu'Hébreux pour les autres pays. On fent donc la néceflité abfolue d'établir une nomenclature, une finionimie, au moins pour la France ; fans cela, le meilleur ouvrage n’a une utilité réelle que pour un feul canton. Si dans un territoire on à adopté par raifon ou par habitude, la méthode de former la cère d’un olivier , il refte à démontrer, 1°, fi les douze efpèces ou variétés d'olives, cultivées au Saint-Efprit; les onze de Nifmes; les quinze de Montpellier ; les quatorze de Caffan; les fix d’Aix; les feize de Marfeille ; les cinq de Toulon; les quatre de Graffe; les huir d'Antibes, &c., doivent être taillées de même, quoique les efpèces foient différentes entr'elles. 2°. Prouver quelle ef- pèce convient le mieux dans les terreins calcaires ou vicrifiables , & dans toutes leurs modifications ; fi chaque efpèce n’aïme pas mieux un terrein qu'un autre ; enfin, fi chaque terrein ne fuppofe pas une taille particulière pour chaque efpèce d’arbre ; j'ai de très-fortes raifons, fon- dées fur l'expérience , pour infifter fur cet article. 3°. Quel eft le point précis où il faur cueillir chaque efpèce d'olive pour qu’elle donne une huile la plus parfaite, puifque routes les efpèces d'olives ne mü- riffent pas en même - rems. 4°. Montrer de quelle nature, de quelle qualité, eft l'huile de chaque efpèce d'olive féparée. 5°. En quelles proportions ces différentes efpèces peuvent être mélangées , pour avoir une huile de qualité fupérieure, & fi chaque année , : relativement à la faifon , cette proportion doit varier. Tel eft le plan de l'Ouvrage qu'on devroit tracer avant d'écrire fur la culrure de l'olivier, & tel eft celui que je me propofe d'entreprendre. Je de- mande à préfent, fi l'on pofsède en Languedoc ou en FREE , des no- Hhh2 go OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, tions exactes & bien déterminées fur ces objers ? J'y ai vu, au con- taire, les oliviers plantés en général & indiftinétement dans tous les terreins ; toutes les efpèces d’un canton, taillées fur le même plan ; tou- res les olives récoltées en même-rems, & confondues fous le prefloir. C'eft donc un travail neuf à faire, puifqu'’il n’exifte que des généralités fondées fur la coutume. Si quelqu'un veut me devancer dans cette car- rière, je lui offre les obfervations que l'étude de ces deux Provinces m'a fair naître. La véritable gloire eft d’être utile. Laïffons - donc la fumée à ceux qui en font avides. T'elles font les raifons qui m'ont engagé à circonfcrire cer arricle & à ne m'occuper, pour le moment, que des machines à huile. Malgré cela , je ne propofe mes vues que comme des obiets à examiner, afin de comparer les machines érablies en Provence & en Languedoc, & que chacun puiffe , après une forte conviétion, adopter pour lui, celles qu'il jugera les plus fimples, les plus économiques, les meilleures & les plus convenables à fon local; je n’y mets pas d’autres prétentions. Si je me fuis trompé, fi j'ai mal vu, je prie ceux qui feront plus éclairés que moi, de me communiquer leurs réflexions, & je rectiferai les miennes. Si d’autres trouvent quelques articles ou trop concis, ou trop obfcuré- ment expliqués, je me ferai un devoir de me rendre plus intelligible! Il auroit été facile de faire un volume de cette Differtation ; mais le Lecteur & moi aurions perdu notre tems; tout ce qui n’eft pas utile eft folie. 11 faut des chofes, & non des mots; je préviens même que je ne décris pas la pratique de tel ou de tel endroit en particulier ; il auroit fallu faire trop de comparaifons & de répétitions ; ce Mémoire eft un réfumé général. Voyons quels font les différens moulins connus dans ces deux Pro- vinces; quels font leurs preffoirs; s’il eft pofble de les perfectionner, & quelles font les attentions que l’on doit avoir dans le choix deg pièces de bois deftinées à leur conftruction. Des Mouzins. Les moulins font en général placés à côté des preffoirs, ordinaire- ment fous le mème toit; c’eft une perte réelle de tems & une augmen- tation de dépenfes, quand ils en font féparés. Ce local doit perpé- tuellement avoir un certain degré de chaleur; s’il eft un peu froid , il refte plus d'huile dans le marc ; ou , ce qui revient au même, l’olive s’étrirre , c’eft-à dire, s’écrafe moins facilement fous la meule , & eft moins exprimée par l’action du prefloir dans les cabats; de forte qu’il eft moins avantageux de porter au moulin pendant les grands froids: On a fair en Flandre la même obfervation fur les graines dont on ex- trait l'huile ; remarque effentielle dans le choix du local d’un moulin, SUR'L'HIST. NATURELLE ET LES ARTS. 411 Le Moulin n’eft autre chofe qu’une maffe de maçonnerie A , fig. 1. pl. I, haute de 24 à 30 pouces; elle varie beaucoup dans fa hau- teur. Je crois que la meilleure eft celle qui, combinée avec la hau= teur de la meule B, rendroit prefque de niveau la barre C au poitrail du cheval , comme on la voit en arrière du cheval repréfenté dans la fÊg. 23 parce que dans cette pofition cet animal a plus de force & fatigue moins. Il 'eft bien démontré que le cheval ne tire que par fon poids ou par fa pefanteur, & l'effort de fes mufcles ne fert qu'à porter fucceflivement fon centre de gravité en avant, ou à reproduire continuellement le renouvellement de cette action de fa pefanteur : fi les cordes attachées à la barre ou lévier C, font trop baffes , le cheval en tournant a beaucoup plus de peine , & fupporte en partie le poids de la meule; cette pefanteur efl cependant né- ceffaire pour étritrer les olives; fi au contraire elles font trop hautes, le cheval eft foulevé pardevanr & fes pieds ne trouvent pas contre terre un bon appui pour pouffer fon corps en avant. Il y a donc un point qu'on doit faifir & auquel on ne pente guères, puifque les mêmes traits, fans les allonger ou les raccourcir, fervent à des che- vaux qui varient beaucoup pour la taille. Exiger ces obfervations de l’ouvrier, ce feroit trop lui demander, il n’y regarde pas de fi près. La malle de maçonnerie À, dont le diamètre eft de fix à huic pieds, eft recouverte de dales polies qui inclinent de E en F. Dans certains endroits, l’inclinaifon eft de fix à dix pouces; la meilleure eft celle qui offre le moins de réfiftance à l’homme , qui avec fa pelle , repoule en G le marc de l’olive que la meule en tournant a fait reluer fur le plan incliné. La partie G eft celle fur laquelle la meule en tournant, prefle , brife, criture , érirce la chair de l’olive & fon noyau. La feule infpection de la gravure explique tout le mécanifme de ce moulin. Le cheval attaché au lévier C, fait tourner la meule B, la meule en fuit le mouvement; mais elle a encore fon mouvement particulier, c’eft-à-dire qu’elle tourne fur elle-même ; autrement, il n’y auroit qu'une de fes parties qui frotteroit continuellement ; elle uferoit les dales & elle s’uferoit à fon tour à un feul endroit. Le levier C eft fortement aflujecti en H, dans l'arbre K; l'arbre tourne fur fon pivot en fer dans la grenouille [ cimentée dans la pierre , & fa partie fupérieure eft aifujettie dans une poutre du plancher L, qui le vient d’à-plomb & lui permet de tourner fur Îui-mème avec la meule. Dans beaucoup d’endroits , la partie fupérieure des dales depuis E jufqu'en F, eft recouverte de plateaux en bois, c’eft, m'a-t-on dir, pour que l'huile ne filtre point à travers la jointure des dales, & pour que le froid de la maçonnerie ne concentre pas l'huile dans le marc. ‘ 421 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, Je crois, dans ces deux cas, ces plateaux inutiles ; la malle de mas connerie doit être à la mème température que celle de l’attelier. S'il y fair trop froid, c'eft une duperie d'y prelfer; ces planches abforbent une quantité d'huile qui féjourne dans ce bois où elle prend un mauvais goût & le communique à la malle; ce fera fi l’on veur un infiniment petit, mais tous les infinimens petits en ce genre étant raffemblés, ne laiffent pas de former une mafle. Pour l'huile, comme pour le vin, il faut une grande propreté. On aura beau laver ces planches à la fin du preflurage , mème les faire bouil- lir, l'huile nichée dans les pores du bois n’en fera jamais route extraite, & de cette époque au preflurage de l'année fuivante, l'huile fe fera rancie & moifie, &c. Il vaudroit donc mieux cha- que année , vifiter les jointures des dales, & les cimenter de nou- veau. Avant de parler du ciment convenable, arrèrons-nous à quel- ques articles que la propreté prefcrir. Dans le plus grand nombre d’endroits , au tems où ceffent le preffu- rage & le moulinage, on laiffe tous les uftenfles fans les nettoyer ; la rouille attaque le fer , le verd-de-gris ronge le cuivre, la pouflière fait corps avec l'huile, les portions d'huiles nichées çà & là ranciffent , &c. Ce n’eft que l’année fuivante quand les travaux recommençent, qu'on fonge à laver les moulins & Îles preffoirs ; eh encore, de quelle ma- nière s’y prend-on ! On croit qu'un peu d’eau chaude fuffit, & l’on fe trompe; tout eft fi mal fait & tellement à la hâte , que ce lavage eft prefque nul. Le bien public n’exigeroit-il pas que la police des lieux y veillâc de plus près: qu’elle prefcrivit, par exemple , de faire une forte leffive alcaline avec des cendres ordinaires, dont on augmen- reroit l’activité avec de la chaux ; de la cendre gravelée ou clavelée; qu'on employât cette lefive très-chaude à frotter moulins, pref- foirs & inftrumens ? Cette leflive s’uniroit à l'huile par fon /arus alkalin & en feroit un favon; dans cet état, une feconde & fimple eau chaude diffoudroit le favon & entraîneroit toutes les parties huileufes ; enfin une nouvelle eau froide ou chaude finiroit d’enlever tout ce quai relteroir. En répétant cette opération lorfqu'on voudroir l'année fuivante recommencer l’étrictrage & le preffurage, on ne crain- droit plus les fuites néceffaires de la mal-propreté. Ce que je dis ici des moulins, des prelfoirs, &c. s'applique fur-tout, aux cabats dont on fe fert pour renfermer les olives écrittées qu'on met fous le preffoir. Dans beaucoup d’endroits, le Propriétaire du moulin doit fournir la première preffée ; c’'eft donc une preuve que lon craint qué l'huile rance ne réagifle , & la feconde raifon de cette coutume, et qu'il imbibe de (on huile les cabats deftinés à fervir, ce qui lui fait une petie perte d’huile. Chacun a fa manière de compofer fon ciment pour mafti- SUR L'HIST, NATURELLE ET LES ARTS. 413 quer les jointures des dales; celui que je propofe eft d’une dureté extrème ; fi l’on en connoît un meilleur, je prie qu'on me le com- munique. 1°. Prenez de la chaux fortant du four, ou au plus tard fortie depuis un jour, prenez-en, par exemple, un quart de livre; plongez-la dans l’eau pendant une minute feulement , & même moins fi elle, ef bien cuite, & enlevez-la aufli-côc de l’eau ; metrez-la dans un vaiffeau quelconque pour l'y laifler fufer fans addition d’eau. $ 20, Ayez deux livres de limaille de fer ou d'acier crès-fine, faires- là rougir dans un poëlon, afin de lui enlever les ordures qu’elle conuent, & lorfqu'elle fera refroidie , paflez-là par un tamis. 3°. Prenez dix ou douze gros limaçons jaunes ou gris, de ceux qui fonc fans coquilles & qui rampent dans les jardins ; broyez-les dans un mortier avec trois têtes d'ail ; réduifez le tout en pâte, ajoutez par égales patries la limaille & la chaux éreinte, mais encore chaude, & du tout, n’en faires qu'un corps. Netroyez & lavez exactement les jointures des dales, & faites pénétrer avec une efpatule ou tel autre inftrument, le ciment dans tous les vuides; poliflez & laiflez fécher, Si cette opération a été faite en Septembre, 1l eft certain que lorf- que l’on portera les olives au moulin, ce ciment aura acquis la plus grande dureté : lorfqu'il fera bien fec, 1l faudra le laver à grande eau, afin de détacher les bavures ou les faletés qui s’y feroient attachées. Le moulin que je viens de décrire eft bien fimple, & c’eft fans doute cette fimplicité qui porte à s’en fervir prefque par -tour, Celui dont je vais parler ne feroit-il pas plus économique, puifqu’il fupprimeroit la perfonne fans celle occupée à poulfer fous la meule, avec fa pèle , le marc que la meule fair refluer fur les côtés? Woyezfig. 2. La table À eft en maçonnerie comme dans la figure première, mais au lieu d’être inclinée de E en F, ce font au contraire des gargoules en pierres, faifant le tour de la table. Si l'on n'entend pas le mot de gargoule ou gargouilles, je veux dire que la table eft creufée dans fon contour comme left une gouttière; ainfi la cavité qui fe trouve de C en D, forme un demi-cercle de dix à douze pouces de profondeur , dans lequel la meule E roule & tourne fur elle-même comme dans la figure première. Ce moulin n’eft autre chofe que le moulin à cidre ou à poirée fi connu en Normandie & en Bretagne; comme les côtés de ces gargoules in- clinent vers le centre, le marc ou la pâte aura beaucoup de peine à refter attaché contre leurs parois. Cependant pour prévenir cer inconvénient, il y a un moyen bien fimple : attachez en F, du côté de la meule qui traverfe le levier G, ou une corde, ou une chaîne, ou une tringle; cette corde viendra s'unir par un nœud à fa fem- y24 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, blable, derrière & un peu au-delà de la meule; là les deux bran- ches de la corde s’attacheront à la bafe ‘des oreilles HH, de l’inf- trument de fer 1, que j'appellerai valer. Voyez fig. 3, de forte que la meule en tournant, le traîne après elle. Ce morceau de fer ou ce valer eft courbé en demi-cercle & dans le même fens que la gargoule; parconféquent , il touche en tournant par toures fes parties & prefle celles de la pierre : les deux montans HH font repliés en manière d'oreilles , elles augmentent en raifon de keur élévation, afin de faire tomber dans le milieu, le marc qui étoit adhérent aux parois de la gargoule. La partie inférieure du valet K eft applatie, mince , & fert à foulever la pâte fur laquelle la meule vient de paller, de forte que lorfque la meule revient, la pâte eft retournée & préfente de nouvelles furfaces à la meule pour les écrafer. On fent que ce valet doir avoir une certaine force, par exemple , les montans de $ à 6 lignes d’épaiffeur , mais évafés dans le haut pour former les oreilles, & que dans les parties K, jufqu’à la naïf fance , cette ‘partie inférieure doic ètre large au moins de 6 pouces, être plus amincie fur le devant que fur le derrière, c'eft-à dire, for- mer une efpèce de coin, afin que la partie antérieure s’infinue plus facilement fous la pâte applatie ; fi certe partie K portoit en hauteur, au lieu de foulever la pâte, elle l’accumuleroit contre la meule, & à la fin obftrueroit la gargoule. 1l faut donc que ce valet foulève la pâte, pañle deffous, la laife en place & rien de plus. Plus le point K devancera & précédera les oreilles HH, & mieux le valet opérera. Voyez fa poñition dans la fig. 4, qui repréfente la coupe de la gar- goule. Je ne me fuis jufqu'à préfent occupé qu’à diminuer la dépenfe, il faut actuellement apprendre à économifer fur le rems, ce qui eft une augmentation de produit pour ceux qui tiennent & louent ces fortes de moulins. Voyez pl. 2. On s’eft fingulièrement attaché dans le territoire d’Aix à avoir de la bonne huile, & fa qualité vient autant du terrein, que des foins que l’on prend pour fa fabrication. On retient fon tour pour étritrer des olives comme dans les fours bannaux pour y cuire le pain. Dans plufieurs autres endroits de la Provence & du Languedoc, on eft moins foigneux, & cependant, ces précautions font aufli effentielles pour rendre l'huile parfaite, qu’elles le font pour urer à propos le vin de la cuve & le mettre fur le prefloir. J1 eft bien démontré que l’olive trop mûre, ou par exemple cueillie depuis une femaine par un tems chaud , & amoncelée depuis cette époque, ne donne pas une huile auñi délicate , aufli précieufe; & que dira-t-on donc des olives amoncelées pendant un mois! Je pourrois, fi je voulois, tracer ici les abus qui réfultent des différentes manipulations , j'en ai ‘1h 111 se LE 1 48NR RSS, hd { SUR L'HIST. NATURELLE ET LES ARTS. 141$ ai comparé un affez grand nombre, mais ce n’eft pas le cas, puif- qu'il ne s'agir actuellement que dés machines ; quelque jour je m'en occuperai. ‘ En parcourant ces deux Provinces, je n'ai vu qu’à Aix un fembla- ble moulin. En exifte-t-1l d’autres ? je l’ignore , & il mérite d’être connu. Ce moulin fuppofe une maïfon compofée d’un rez-de-chauflée & d’un premier étage. L'arbre A, pl: 2, porté fur fon pivotB, arrèté dans une grenouille , traverfe le plancher D, & eft arrêté en C, dans une poutre de la charpente du toît. Le cheval E eft placé au pre-- mier étage & attaché à la barre F, qui s'implante fortement en H; alors, l'arbre qui part d'une feule pièce au point B, fuit le mouve- ment du cheval; laroue [1 , armée de trente-fix dents, fuir le mou- ement de l’arbre, & fes! dents rencontrent les barreaux de la lan- -erne K,, au nombre de douze; de forte qu'un feul tour de la roue fait faire trois tours à la lanterne K, par conféquent à l'autre arbre L & à la meule M, qui ‘brife les olives N; on obtient donc dans une heure , le mème effet pour la mouture , qu’en trois dans les autres moulins; objet rrès-important. Il n’y a pas deux ans que ce moulin a été conftruit à Aix. On objeétera, que fi d'un côté cette machine gagne pat la vitelle , elie doit perdre de l’autre de fa force par le frotrement; j'en conviéns , mais obfervez ici que le frot- tement eft peu de chofe, En fait de machine, l'expérience vaut mieux que le raifonnement. Le moulin d’Aix va à merveille, quoique le cheval qu'on y employe ne foit pas très- fort : voilà la preuve fans replique. Si dans les environs du local pour un moulin, on avoit un courant d'eau à fa difpoñtion, il vaudroit bien mieux en conftruire un à aubes qui iroit par la chüte de l’eau. Woyez fig. $, dans la p. x. e cette manière, on économiferoit la nourriture & l'entretien du cheval , toujours chers dans les pays à olives, à caufe du manque dé fourrage. Je propofe ce moulin à ceux qui feront dans le cas d’en faire ufage ; on pourra en diverffier la forme , parce qu’elle dé- pend du local, de fa fituation, de la mafle d’eau, &c. Je n'écris que pour donner dés idées. Il auroit fallu repréfenter la roue D beaucoup plus grande que la roue E, & diminuer en proportion celle - ci : c’eft une faute du! Deflinateur dont je ne me fuis apperçu que lorfqu'il n’a plus été téms d’y remédier : fi les chofes reltoient ainfi, la roue E ne feroit qu'un tour quand les roues B & D en feroient deux. Ce moulin, ainfi qu'on le voit, ne diffère des précédens que par la pofition des roues. L'eau vient par le canal A; fa chûte fair toutnet la roue B, dans laquelle eft fortement enclavé l'arbre C; la roue D , fixée fur l'arbre, fait autant de tours que lui; les dents Tome VIII , Part. II. 1776. lii 426 OBSERVATIONS. SUR LA PHYSIQUE, de certe roue rencontrent les pignons de la roue E; l'arbre F en fuit le mouvement, & la meule G tourne avec lui par un. double mou- vement comme dans les moulins précédens. Ce moulin me paroît bien plus économique que tous les autres: heureux celui qui aura de l’eau à fa difpoñition, qui en combinera la mafle , la hauteur de fa chûte, la réfiftance des frottemens, le poids de la meule; il, fera. sûr d’avoir un excellent moulin. ! Des Preffoirs.. Les preffoirs en Languedoc & en Provence fe réduifent en géné- ral à deux. Le premier dont je parlerai, eft le Preffoir à Martin, ainf appellé au Ponr, du S.! Efprit; c'eft le moins commun, fans doute; parce qu'il eft plus difpendieux., peu commode & fort.embarralfant. Voyez pli), fig. 1. Du Preffoir à Martin. Ce preffoir eft compofé de quatre jumelles où montans À A, entre lefquelles pafle un grand lévier où mouton BB; le milieu de ces montans efl creufé ou évuidé en C; afin d’avoir la liberté d’y. placer des pièces de bois équarries de quatre à fix pouces de hauteur , & d'ane largeur proportionnée à la: partie évuidée des. jumelles; ces pièces de bois s'appellent sraverfes ou clefs. La table ou maye du preffoir E E eft fortement affujettie entre les jumelles & porrée, ou fur des pièces de bois appellées brebis , ou fur un maflif de ma- çonnerie : fur cette maye, on place les cabats FF chargés de la pate des olives étrirtées 3 quatre hommes placés. aux léviers on barres HH, fonc tourner dans le fens qu'il convient l'arbre G taillé en vis; alors, le lévier B, qui traverfe dans la partie fupérieure de la vis G, s'abaifle; mais comtne l’autre extrémité de.ce levier eft fixée en LT, par les clefs DD, qui traverfent les jumelles À +, 1l s'abaifle & preffe fur les cabats. Suppofons aétuellement qu’on veuille de nouveau preffer les cabats en fens contraire, ou bien les changer, ou y ajouter de l’eau chaude . ou rirer les clefs K K de la jumelle À, &c.,on les place dans.le vuide L, jufqu’à ce qu’elles touchent le lévier B, 6c on enlève entièrement les autres clefs DD des jumelles À + : alors, les ouvriers placés en H,, tournent l'arbre G-en fens contraire, le le= vier s’abbaifle de leur côté, s'élève en 1, & les. clefs placées en L, fervant de point d'appui, facilitent l’élévation du levier entre les jumelles À +; de force qu'il s'élève alors autant de ce côté, qu'il paroît lever de l’autre dans la figure que je décris; dès qu'il eft à sepe hauteur, on manie fans peine les cabats & on les change à volonté, SUR L'HIST. NATURELLE ET LES ARTS. 4:7 Le befoin & l’économie tendent toujours à fimplifier & à per- fectionner les machines ; c’eft par cette raifon, fans doute, qu'on a adopté prefque généralement par-touc le preffoir repréfenté dans la figure 2, de la planche 3. . Deux jumelles A A, font réunies dans leur fommet par une forte pièce de bois BB, creufée en écrou, pour laifler paller les vis CC. L'arbre D, par fa partie fupérieure , et fortement affujerti dans cetre traverfe ; & par fa partie inférieure dans la maçonnerie ou char- pente EE, qui porte les mayes ou tables FF. On garnit les cabats, en les place fur les mayes, & en dérournant la vis C, on l’abaifle fur le manteau G, repréfenté féparément dans la fig. 3; ce manteau eft retenu d’un côté par une partie faillante H, qui entre dans uve raînure ou couliffe [, pratiquée dans les jumelles À ; & de l’autre, il eft rerenu par fa partie ceintrée L, qui embraffe la moitié de l'arbre D, de forre que le manteau dance lequel eft fixé la partie inférieure de la vis C, ne peut vaciller à droite, ni à gauche, ni en arrière , ni en avant, & maintient toujours la vis dans une polfition perpen- diculaire. Lorfque le prelfoir eft chargé, deux ou trois hommes paf- fent la barre ou lévier dans la tête de la vis, la tournent & vont fucceflivement en plaçant & déplaçant la barre jufqu'à ce que leurs efforts ne faffenc plus abailfer la vis; alors, ils attachent une corde à l'extrémité de la barre, l’attachent à un treuil, le tournent autant qu'ils peuvent, & finiffent ainfi la preffée. Ce treuil n'eft poinc de- figné dans cette figure , il eft trop aifé de fe le figurer. Ce preffoir eft très-commode , j'en conviens, & il occupe peu de place; maisje penfe qu’on n’exprime point affez de pâte a la fois,” ce qui eft une perte de tems & une multiplication de main- d'œuvre : que la force de deux ou trois hommes placés à chaque barre, n'elt pas affez fuffifante, puifqu'il refte encore beaucoup d'huile dans le marc, comme on s’en convaincra lorfque je par- lerai du moulin de Récenfe. Le moulin à Martin prefle beau- coup mieux & une plus grande quancité de pâte à la fois. S'il n'é- toit pas fi difpendieux & fi volumineux, je Le préférerois ; enfin, Gx hommes font employés pour le preloir commun, & ce feroit une économie de diminuer le nombre & de preffer aufli bien. Le pref- Loir à Etiquet , pl. 4, fi avantageufement connu pour preffurer la vendange, remédieroit à ces inconvéniens; il fera plus coûteux que celui que je viens de décrire, il occupera un plus grand efpace & moins que celui à Martin; mais s’il eft plus économique; fi l'on en retire à moins de frais une plus grande quantité d'huile, n’eft-il pas préférable ? c’eft ce que je laiffe à difcuter, puifque je ne préfenre ici que de fimples vues auxquelles je ne riens ete qu'elles peu- i2 428 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, vent être utiles; elles ont pour elles , au moins les plus fortes pro- babilités. Du Preffoir à Etiquer. Planche 4 À. La vis, d’un côté, eft fortement enclavée dans la roueB, & de l’autre , pafle dans l’écrou C , ou arbre de traverfe ; qui lie dans le haut les deux montans DD ou jumelles. EE font des clefs de fer qui aflujettifflent exactement cer écrou & ces jumelles. Feft le mouton; ce mouton entre de chaque côté par une partie faillante , dans une rai- nure ou cavité pratiquée en T dans les jumelles. Cette rainure fixe le mouton & l’empèche d’aller en arrière, ou en avant, ou de côté; de forte qu’il n’a que le mouvement d’élévarion ou d’abbaiffement. Lorf- que le preffoir eft chargé, comme on le voit dans la gravure, le mou- ton porté fur des traverfes K; ces traverfes font des pièces de bois équarries de 6 à 10 pouces de diamètre, & de la longueur du mouton F; on les place les unes fur les autres , c’eft-à-dire , que deux, d’égale hau- teur, font en ligne droite fur le manteau V & dans la longueur du prefloir ; les deux autres font dans le fens contraire , c'eft-à-dire, en travers du prefloir; on en place ainfi jufqu'à ce que tout l’efpace vuide entre le mouton F & le manteau V foit garni. Il faut obferver que ces pièces de bois ne doivent pas être placées perpendiculairement les unes fur les autres, mais toujours rentrant vers le centre; enfin, on met entre ces traverfes & le mouton, la dernière traverfe dans la difpofition du mouton. Par ce moyen, fon effet eft direét fur toutes les traverfes, & par conféquent , fur le manteau, fur les cabats, & en un mot, fur toute la preffée. Plus la preffée eft mife an milieu de la inaye, plus elle eft montée droite, & mieux elle va. Le manteau V recouvre les cabats G remplis de pâre d’olive. On devroit faire ces cabats quarrés ; il n’y auroit point d’efpace vuide fous le manteau, finon celui de deux à trois pouces entre les deux piles formées par les cabats; & ceux-ci pourroient être prefqu’aufli larges que le man- teau ; ce qui accéléreroit l'opération. 1 eft la maye ou table du prefloir ; & l'huile s'écoule en Y. Tout le preffoir eft porté fur les chantiers vrais ou faux HH. Pour éviter la dépenfede ces chantiers, ne vaudroit-il as mieux établir en groffes pierres un mañlif de maçonnerie ? La corde N de la roue B eft portée à l’arbre ou tour L ; en pouffant les bar- res M du tour , la corde fe dévide fur l’arbre; la roue B s’abbaifle, &c. Il eft certain que ce prefloir eft le meilleur que je connoiffe, & en mêème-tems le plus avantageux pour la vendange. Suivant fa grandeur, il preffure la vendange de 15 à 25 barriques à-la-fois ; & le marc fe ferre à un tel point, qu’on auroit peine à y faire pénétrer un épée à la profondeur de quelques pouces, même dans les marcs de vendange SUR L’'HIST. NATURELLE ET LES ARTS. 419 égrappée avant de la mertre dans la cuve. Pourquoi ne feroit-il pas également utile aux olives étrittées ? Son ufage demande quelques foins. Il eft avantageux que la roue B ne foit n1 trop haute, ni trop balle ; elle a alors moins de force. La meilleure proportion eft que la roue foic à la hauteur de la corde N fur l'arbre L. Pour cet effer, fi la corde, en'fe dévidant fur cer arbre, eft crop haute où trop balte , relativement à la roue, on la remonte ou on la rabaifle à volonté, foit en la reciranc fur la roue , foit en la roulant fur elle-même fur l’ar- bre L. Les craverfes ou pièces de bois KK fervent encore à tenir la roue & (on mouton F à la hauteur que lon defire , parce qu'à mefure que les cabars baïlfent par la prefion , il fuffit de détourner la roue B, & d’ajouter par-deffus les autres, de nouvelles pièces de bois ; Opérarion plus longue à décrire qu’à exécuter. Ce preffoir peut donc être à deux fins, & pour l'huile & pour le vin; il ne s'agit que de le bien layer, quand on ne s’en fert plus. Ce preffoir fuppofe quatre hommes employés à tourner les barres M du tour; & s'ils n'ont que cela à faire pendant la prelée, ils per- dent beaucoup de momens dans l’efpace d'une ferre à l’autre, parce qu’il faut donner le rems à l'huile des cabats de s’écouler. Ne vau- droit-il pas mieux que la corde N qui fe dévide fur l'arbre L, & que j'appelle aétuellement corde O , pafsât fur la poulie P, & pür fe dé vider fur l'arbre horifontal R. Cer arbre eft, d’un côté, afüjetrr con- tre la jumelle, ou par un anneau de fer, ou par un demi-cercle, qui lui fert de point d’appui contre la partie extérieure de la jumelle; & de l’autre, il tourne dans le mur, ou dans une pièce de bois qui le foutient. Plus la roue S fera grande, plus l'homme qui sartithera à fes chevilles & la fera mouvoir, aura de force. Un feul homme; en tournant certe roue, fait mieux preffer, a plus de force qué quatre & même fix hommes employés à tourner les barres M. Pour que la poulie P foic fixe & folide, elle a pour fupport deux pièces de bois qui la fixent; de manière qu’elle n’a d'autre mouvement que celui de la rotation qu’elle reçoit de la corde ©. De tous les prefloirs, pour le vin ou pour l'huile, c’eft à ce dernier que je donnerois la préfé- rence. Du Moulin de Récenfe ou de Récenfemenr. Je n'ai vu, en parcourant le Languedoc, aucun moulin femblable à celui dont je vais parler, ou du-moins, qui en approchôr. Ce moulin même n’eft pas bien commun en Provence, quoi- qu'on dûe l'y multiplier. Je ne connois rien de plus économi- que, de mieux imaginé & deplus fimple. Quel en a été le pre mier inventeur? C'eit, m’a-t-on dit, un fimple payfan, & fans pouvoir m'indiquer fa demeure. Cependant, il feroit aifé de re 450 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, monter à l’époque de l'établiffement des différentes récenfes de Îa Province ; & découvrir par-là celui à qui l’on eft redevable de cette dé- couverte ; elle mérite une récompenfe de la part des Etats. Venons à fa defcription. A, tuyau en plomb, ou en bois, ou en briques, par lequel o® conduit l’eau dans une efpèce de tour creufe, ou cuve C. B, robinet qui donne l’eau dans la tour, ou la recient dans le tuyau À. C, tour proportionnée à la grandeur de la meule G ; cette tour peut tre conftruite en pierres de taille de quatre à fix pouces d’é- paiffeur, ou en plateaux de bois durs, comme le chène. 11 fufir que Îes plateaux foient bien jointés par des feuillures, & le tout juftemenr cerclé par des bandes de fer. Certe tour porte fur un maflif de ma- connerie ferme, très-folide & de deux pieds d'épaiffeur, dans lequel la pierre de taille, ou les plateaux qui forment la tour, s’implantent & font fortement maftiqués, afin que ces différentes parties ne faffent qu'un tout qui s’oppofe à la fuite de l'eau, réfifte à fon poids & à la force du mouvement que la roue G lui communique en tournant, Le mafif, ou bafe de la tour, eft percé dans fon milieu par un trou que traverfe l'arbre D. D , arbte de bois dur, communément en chène ; il traverfe & eft arrêté à fon fommer par la poutre F, qui le rient perpendiculaire. Une pièce de bois E eft affujettie fortement dans cet arbre & porte la meule G. Cet arbre traverfe la maçonnerie CC, pour gagner l'ouverture où vuide Il; là, il eft adapté à la roue K, & finit par tourner fur fon pivor H. E, morceau de bois dur, ou en buis, ou en chène, prefque du dia- mètre du fupport de la meule, traverfant lépaiffeur de l'arbre & y étant fortement arrêté par des tenons & des chevilles. G, meule. Il ne s’agit pas ici, comme pour les grains , que la pierre foit poreufe ; elle doit, au contraire, être très-lille , afin que toutes fes parties touchent & portent fur le marc répandu fur le maflif de maçonnerie qui eft également life & poli. La meule eft communément de cinq à huit pouces d’épañfleur & de trois à quatre pieds de hauteur. Plus cette meule eft pefante , mieux le marc eft écrafé & réduit en pâte très-fine ; de certe divifion extrème des parties, dépend le plus ou moins de bénéfice qu’on retire du moulin. La grandeur de la meule décide celle de la tour. Cette meule eft adhérente à l’arbre D par la traverfe E; de forte qu’elle a deux mouvemens, 1°. celui de décrire un cercle, en tournant perpendiculairement avec l'arbre D, & par conféquent, en parcourant tout l’efpace de la tour ; 2°. celuÿ de rouler fur elle-même, étant portée par la traverfe D; de forte que - SUR L’HIST. NATURELLE ET LES ARIS. 431 l'effet de la roue fur le mañlif eft à-peu-près le même que celui des deux cylindres des lamineurs des métaux. | H, bafe de l'arbre armée d’un boulon de fer qui tourne dans une grenouille de fer ou de cuivre. IT, ouverture pratiquée dans la maçonnerie & fuffifante pour laiffer tourner librement la roue horifontale KK, mile en mouvement par la chûce de l’eau du canal M. : KK, roue horifontale, garnie de palettes LL, contre lefquelles l’eau du canal M vient frapper avec impétuofité, & leur communique le mouvement. Ces palettes doivent être creufées en manière de cuiller à pot, afin de préfenter plus de furface à l’eau | d’en retenis plus long-rems une partie & d'augmenter fa force. MM. C'eft du volume de l’eau de ce canal & de la rapidité de fa chüte que dépend le mouvement plus ou moins accéléré de la roue K, & par conféquent , de l'arbre D & de la meule G. N , canal de dégorgement qui part de la furface de l’eau de la tour C, remplie par l'eau venue du canal A, & qui délaie, par le moyen de la meule GG, le marc mis dans la cour C. Les débris du parenchyme, des écorces du fruit , furnagent l'eau, de même que les petites portions d'huile qui s’en féparent par le moyen de ce Auide ; le tout elt entrainé dans le canal N, auquel on fair faire plufñeurs con- tours , afin que l’eau qu'il porte , coule avec moins de violence dans le premier réfervoir P ; & pour que la chûte de cette eau ne fafle pas remonter la crafle du fond du réfervoir , elle frappe contre un mor- ceau de bois OO, qui rompt fon effort. O, morceau de bois pris ordinairement dans un tronc d’arbre; il eft enclavé à fa bafe, dans. la maçonnerie, retenu à fon fommer, par d’autres mosceaux de bois ou de fer, .enchâflés dans la partie fu- périeure de la mâçonnerie; de forte qu’il refte immobile. P, premier réfervoir bâti en maçonnerie ou en briques ; c’eft le plus grand de tous. Il a communément dix pieds de longueur, fur huit de largeur, Il convient qu'il foit recouvert d’un toit , afin d’em- pêcher les ordures d'y tomber, & fur-tout , pour mertre fon eau à l'abri de la pluie. Les gouttes d’eau tombant fur les débris du fruit ou de l'écorce, les feroient précipiter au fond du baflin. On n'a point ici repréfenté cette charpente, parce qu’elle auroit mafqué tour le méchanifme de la conduite des eaux. Q. Si l'écoulement du baflin P étoit dans la partie fupérieure . l’eau entraîneroit les portions huileufes & les débris du fruit qui fur- nagent. Pour éviter cette perte réelle , on pratique, dans la maçon- nerie, une foupape Q qui s'ouvre , fe ferme à volonté , & laille couler l’eau dans la partie mitoyenne , par le conduit RR, R. Conduit de communication du premier baflin P dans le bafia S, 432 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, où l’eau qui s'écoule, rencontre un mème, morceau de bois OO que dans le premier baflin, & qui retient l’effort de fa chüûre. S, fecond baflin femblable au premier, mais dont l'écoulement fe fait directement avec le troifième baflin T, & celui-ci avec le qua- trième X. La communication de ces trois baflins eft au centre comme on peut le voir en Y, qui uniroit le baflin X à un fuivant fi on le defroit. : Z, là même foupape qui laïfle écouler l’eau en Y, & en Zen même -tems & à volonté ; il fuflit de la foulever plus ou moins, & on ne la foulève entièrement que lorfqu'on veut nétoyer le bain. L'eau qui s'écoule par la partie fupérieure de la tour n’eft chargée que des débris du fruit, d’un peu d'huile & des parties brifées de l’'amande que contenoit le noyau, on les appelle grigzon noir; mais les débris du noyau ne furnagent point l’eau, & reftent précipités au fond de la tour ; cependant, comine ils peuvent retenir & re- tiennent en effet des débris du fruit, il eft important de ne rien perdre. Pour y remédier ,on ménage dans la maçonnerie & au bas de la tour, une ouverture qui communique par le trou 2, dans l’é- pailfeur du mur 3, & va fortir par le canal 4 qui conduit l’eau & les débris du noyau nommé grignon blanc dans le baflin 5 , également garni comme les baflins du grignon noir , d’une foupape 6, ainf fe rempliffent fucceflivement les baflins 7, 8. D'après la defcriprion du moulin de Récenfe, pañlons à la ma- nière d'y opérer. Le marc des olives déja preffurées dans les autres moulins ordinaires, & dont on a tiré par la preflion le plus d'huile qu'il a été pofible, eft répandu fur le plancher de la chambre, c'eft-là qu'on en prend une portion pour Îa jetter dans la tour; lorfqu'il y en a une quantité fuffifante , on fait tourner la meule pendant un quart d'heure, opération qui broye & écrafe de nouveau le grignon; après ce moulinage , on ouvre le robinet B pour donner de l’eau , & la roue continue toujours à fe mouvoir. L’effort de l’eau qui tombe avec rapidité, joint à celui de la meule , délaye le grignon; on ajoute de nouvelle eau, la meule va toujours, enfin on lâche l’eau entièrement , le grignon noir monte à la furface , & l’eau qui s’écoule par le canal N, l’entraîne dans les différens réfervoirs P, S, T, X : lorfque l’eau ne paroït plus entraîner de grignon noir , on ouvre la foupape 2 du bas de la tour, & l’eau s'écoule avec le gri- gnon blanc par le canal 3. 4. dans les réfervoirs $. 7. 8. Lorfque l'eau des grignons noirs & blancs eft parvenue dans les baflins qui leur font deftinés, c’eft-i-dire , lorfque la tour eft vuide de grignon quelconque, on ferme la fonpape 2 & le robinet B, & on garnit de nouveau la gour avec du marc répandu fur le plancher. Pendant qu’on renouvelle cette SUR L'HIST. NATURELLE ET LES ARTS. 43; cette opération dans la chambre , un homme placé près des baflins, armé d’un grand bâton 10, au bout duquel il y a un croifillon, le promène légèrement fur la furface de l’eau des réfervoirs , & poule ainf dans l'angle du bafin, l’huile qui furnage, avec les débris de la chair du fruit & de l'écorce ; alors, il prend une poële à manche court & percée comme une écumoire 12, ou ce qui eft encore mieux, un tamis de crin affez ferré , il enlève par ce moyen, tout ce qui fe trouve raffemblé à la furface de l’eau, & le jette dans un petit ba- quet ou vailfeau de bois de forme quelconque ; il ne cefle de ré- péter ce travail jufqu’à ce que l’eau des différens bañlins, fans être agitée, ne fournifle plus rien; enfin, il porte fon baquet vers la chau- dière 13, dans laquelle il le vuide. Je ne décrirai point ici les dé- tails de la chaudière, ils font trop connus; je dirai feulement qu’elle eft à moitié pleine d’eau; qu’on y jette le grignon noir & qu'on l'y laiffe bouillir jufqu’à ce que la fumée foi blanche & denfe, ce qui annonce que l’eau eft fuflifamment évaporée, & que la pâte eft afez rapprochée ; alors, avec un poëlon 14, l’ouvrier prend la matière dans la chaudière, en remplit des cabats 15, les difpofe les uns fur les autres fur le prefloir, ain qu'ils font repréfentés , & l’on appelle cetre opération, charger le prefoir ; alors, quatre hommes , dont deux font placés à chaque barre qui entre dans l'ouverture 16, à force de ferrer , font defcendre la vis, les cabats font preffés, l’huile s'écoule dans les vaifleaux 17 3 lorfqu’ils font prefque pleins , on en fubfti- tue d’autres & on vuide les premiers dans de grandes jarres de terre où cette huile dépofe une fécule abondante. On n’enlève jamais toute la pâte, ou eau pâteufe, de la chau- dière , pendant tout le rems que doit durer le récenfement ; il faut en laiffer dans le fond une certaine quantité, afin que la chaudière ne brûle pas, & l’eau première elt prife ou dans la tour , ou dans les baflins. A mefure que la force du preffoir agit fur les cabats, on prend de l'eau bouillante dans la chaudière, dont on les arrofe légèrement tout autour, & elle en détache les parties huileufes qui feroient trop épailles pour couler; cette eau eft reçue avec l’huile dans les baquets; le tout eft porté enfemble dans les jarres. Comme l'eau eft plus pefante que l'huile, elle gagne le fond du vafe; l’huile furnage. On les laiffe ainfi pendant quelques jours ; & durant ce tems, la craffe, la portion ter- reufe, &c. fe féparent de l'huile & fe précipitent au fond de l'eau; alors, par le moyen d’une canelle adaptée à la jarre, on ouvre fon robinet; la crafle s'écoule la première, & eft mife de côté pour re- bouillir de nouveau dans la chaudière; l’eau vient enfuite; & lorfque l'huile commence à couler, on ferme le robinet. Cetre huile eft alors Tome VIII, Part. II. 1776. Kkk 454 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, mife dans des tonneaux; quelques-uns la placent dans de nouvelles jarres pour la faire encore mieux dépouiller fa crafle & pour la foutirer une feconde fois; ce qui vaut beaucoup mieux. Revenons actuellement aux réfervoirs des différens grignons. * Après avoir enlevé, autant qu'il eft pofhble, la portion huileufe & les débris du fruit, un ouvrier armé d’un inftrument 9, à-peu- près femblable à celui dont les maçons fe fervent pour unir le fable à la chaux & en faire du mortier, agite le fond des baflins où fe font précipités la crafle & d’autres débris; alors , routes les parties huileufes & légères du fruit fe féparent de la craffe , viennent à la furface & font enlevées. Cette opération fe répète plufieurs fois; & lorfque l'on croit pouvoir ne plus rien retirer des réfervoirs P, S, T, X, on ouvre la foupape Z du réfervoir X, & toute l’eau & la crafle des bafins s’écoulent. Ne pourroit-on pas encore reprendre ces craffes & les faire bouillir ? C’eft une expérience à tenter, & qui ne coûteroit que Ja main d'œuvre. Il eft certain que s’il y avoit cent réfervoirs, les uns après les autres, le dérnier fourniroit de nouvelles portions huileufes, puifqu’on en trouve encore dans les eaux tranquilles des ruiffeaux qui ont fervi aux récenfes , fouvent à plus d’un quart & même d’une demi - lieue de l’endroit. IL eft donc très- important de mul- tiplier les bañins le plus qu'il fera poffible, & autant que le lo- cal le permettra. Le marc que l’on retire des cabats après la preflion, fert & fuffic pour entretenir le feu fous la chaudière & tenir fon eau toujours bouil- Jante. On dit que les cendres ne peuvent fervir à aucun ufage pour la leflive; ce qu'il y a de sûr, c’eft qu'on les jette. Il faudroir bien conf- tater ce fair, & j'ai oublié d’en faire leffai fur les lieux; mais on de- vroit au moins les garder pour les répandre fur les prairies marécageufes ou fur lés terres trop argilleufes. Il ne me refte plus à parler que du grignon blanc, c’eft-à dire, du débris des noyaux , refté dans les baflins, $, 7, S. Ici, fe répèrent les mêmes opérations que pour les réfervoirs du grignon noir. Enfin, on lève la foupape; mais comme dans le dernier baffin, elle eft garnie d’une grille , l’eau feule s'écoule, & Le grignon blanc refte à fec. Alors, on le jette fur le terrein où il finit de fécher. C'eft dans cet état qu'on le vient prendre dans des facs pour le porter à la Ville la plus voifine. Deux facs, ou la charge d’un mulet, coûtent au moulin fix fols , & on les vend dix, douze & quinze fols, fuivant l'éloignement des lieux. Les boulangers achètent, par préférence, ce grignon blanc; & comme il n’eft compofé que des débris du noyau, fon feu eft très- actif pour chauffer le four. Qui croiroit que la vente de grignon feu. fuffit pour payer la nourriture & les journées des ouvriers employés à \ 4 SUR L'HIST. NATURELLE ET LES ARTS. 435 la récenfe ? Rien cependant n’eft plus vrais Les cendres en fonc très- eftimées & ont encore un prix réglé, Les cabats font de fpart, d'autres, de joncs marins ; ils font pro- portionnés à la grandeur des preffes. Les uns font percés dans le milieu des deux côtés ; dans ce cas, on garnit leur ouverture de petits plateaux ronds & de même matière que les cabats. Ailleurs, ils n'ont que la partie fupérieure ouverte ; & dans ce fecond étar, il eft plus aifé de les remplir, de les changer & de les manier; tout dépend de l'habitude des ouvriers & des coutumes du canton. Quoique j'aye placé en-deffous la roue KK, qui reçoit l’eau du ca- nal M, c'eft-à-dire, horifontalement, & garnie de fes paletres, on fent bien qu’il eft facile de la difpofer d’une manière différente , par exemple, perpendiculaire, attachée contre le mur & mife en mou- vement par la chûte de l'eau; mais cette manière fera plus compli- quée, puifqu’il faudra une lanterne ou roue de rencontre , comme dans la fig. $, pl. 1, pour faire mouvoir l'arbre D, auquel la meule G eft attachée. C’eft la quantité d’eau dont on peut difpofer, qui déci- dera la pofition de la roue, & fur-rour celle du terrein. Ici, tou eft relatif, de même que pour le nombre & la pofition des baflins. J'ai fuppofé un terrein quelconque, & j'ai décrit d’après cette fuppo- ficion. Que chacun en fafle l'application au local qu'il jugera con- venable. Quel fera l’éronnement de ceux qui n’ont point d'idée de ce mou- lin, quand ils apprendront que les fix récenfes de la Ville de Gralle donnent, année commune, environ 2000 rhubs ou rues d’huile ? Le rhub pèfe 20 livres, poids du pays. Les Récenfeurs achetoient, dans le mois de Janvier 1776, le marc des olives de 20 à 25 fols les deux quintaux du pays; ce qui revient à-peu-près à 170 livres, poids de marc; & par leur opération , ils en retireroient 8 à 10 livres d'huile, poids de marc. La livre d'huile récenfée ne fe vendoit qu'un fol de moins que l’huile commune. L'huile fine éroit à 9 livres 10 fols le rhub; l'huile commune, à 7 livres 10 fols, & l'huile récenfce, à 6 livres 10 fols, Certe dernière eft verte & très-verte. On la préfére pour le favon, parce qu’il faut moins de tems pour la faire prendre avec la leflive; & par conféquent, c’eft une grande économie pour le bois, On voit de femblables moulins à Lorgues , à Draguignan, à An- tibes, &c. &c. Leur établiffement a caufé de grandes plaintes, de fortes réclamations de la part des Propriétaires des olives, parce qu'ils difoient que les Récenfeurs s’enrendoient avec les ouvriers des moulins banaux à huile, & que ceux-ci prefloient moins les cabats Ë tant ils éroient éconnés de la quantité d’huile qu’on jettoit aupa- Kkk 2 #36 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, ravant avec le marc. Comme chaque Particulier voit faire fon huile ; il doit veiller à ce que le marc foit bien preffé : d’ailleurs , perfonne ne le force à l’abandonner, & il peur le vendre aux Récenfeurs. Heu- reufemenc les clameurs ont cellé; & ces moulins, chefs-d’œuvre d'économie , fe mulriplienr chaque jour. Le bien de l'humanité n’exigeroit-il pas que dans ces ateliers, comme dans tous les autres & dans tous les endroits où l’on com- merce des huiles, il für févèrement défendu de fe fervir de vaiffeaux de cuivre, de cuillers ou poches de fe métal ? Je puis affirmer que je les ai vus prefque par - tout charoés de verd-de-gris formé par Vacide de l'huile, ou par l’eau qu’elle tient encore. Ce poifon eft diffous dans la liqueur & y refte fufpendu. J’indique le mal & ne puis y remédier. Ce que je viens de dire du moulin de Récenfe à huile d'olive, ne peut-il pas être mis en pratique également pour les graines à huile? Je n’en ai pas fait l’expérience ; mais l’analogie eft fi forte, que je ne puis me refufer à cette idée. J'invite les habitans de la Flandre & des Pro- vinces voilines, où l’on cultive une fi grande quantité de colfat & de navette, à elfayer cette manipulation. Quoique les gateaux, ou tourtaux , où pain de marc, paroillent très-fecs, cependant , on fent en les touchant, quelque chofe d’onétueux qui indique qu'ils con- tiennent encore plus d'huile qu’on ne le penfe. Heureux! fi je puis avoir fait naître une idée avantageufe pour la focicré. * Des Bois propres à la conffruilion des Moulins & des Prefloirs. Le choix des bois eft fans contredit un point très-effentiel dans [a conftruction en grand de toute efpèce de machine, & jufqu'à ce jour, on s’en elt crop rapporté à l'Ouvrier où au Marchand qui les fournit, Celui-ci ne defire que de vendre, & l’autre de travailler ; auf, leur importe-t-il peu , une fois que l’ouvrage eft livré , qu'il dure au- tant qu’on a droit de l’attendre ; plus il y aura de réparations à faire, plus ils y gagneront l’un & l’autre. Voilà le nœud de l'énigme. Ce- pendant , l'ignorance y a fouvent autant de part que la mauvaife foi. Voici quelques préceptes, d’après le Pline François, fondés fur le fait & l'expérience ; feules chofes à admettre. Le jeune bois eft moins fort que le bois plus âgé. Le bois trop vieux & en décours, perd fa force. Sa confiftance dépend beaucoup de fon defsèchement. Le bois , tant qu'il eft vert caffe plus difficilement que le bois fec; il plie beaucoup fans fe rompre. Il ne faut donc pas l'employer dans cet état , parce qu'on ne peut pas répondre de l'effet qu'il fera SUR L'HIST. NATURELLE EI LES ARTS. 437 dans la fuite. Une feule pièce de bois encore trop vert, fuffr en fe déjettant pour déranger & rendre inutile toute une machine. Le bois qui dans le mème terrein croît plus vite , eft le plus fort. Celui qui a crû lentement & dont les cercles annuels, c'eft-à-dire, les couches ligneufes , font minces, eft plus foible que l’autre, La force du bois eft en général proportionnelle à fa pefanteur. Cependant, la force & la pefanteur varient , felon que le bois eft pris au centre ou à la circonférence de l’arbre. Le nombre de couches ligneufes influe fur la force du bois. Le bois du pied d’un arbre pèfe plus que le bois du rronc au mi- lieu de fa hauteur, & celui de ce milieu pèfe plus que le bois du fommet , & cela à - peu - près en progreflion arithmétique tant que VParbre prend de l’accroiffement ; mais il vient un tems où le bois du centre, celui de la circonférence, & du cœur , pèfent à-peu-près également : c’eft le rems auquel le bois eft dans fa perfection. Ces expériences ont été faites fur des arbres de foixante ans qui croifloient encore, tant en hauteur qu’en largeur , & elles ont éré répétées fur des arbres de quarante-fix ans , & de trenre-trois ans. Le bois du centre à la circonférence, & du pied de l'arbre au fommer, diminuoit à-peu-près en progreflion arithmétique. Dans un arbre de cent ans, le cœur n’eft plus la partie la plus folide , & l’aubier eft plus pefant, plus folide dans les vieux que dans les jeunes arbres. Pour augmenter la force du bois , il fufhit d’écorcer l'arbre de haut en bas dans le tems de la sève, & le laiffer sècher entièremenc fur pied avant de l’abbattre. Il faut environ deux mois pour s’ap- percevoir d’une altération fenfible ; à la fin du mois d’Août , les feuilles jauniffent , sèchent & tombent. Ces arbres écorcés repouffent au printems fuivant , & devancent de huit à dix jours pour la ver- dure ; mais les feuilles tombent au mois de Juiller. Ces arbres, coupés la feconde année qu'ils ont été écorcés, ont le bois beaucoup plus dur que ceux coupés en Août, la première année de l'écorce- ment. L’aubier du bois écorcé eft non-feulement plus fort que l’aubier du bois ordinaire, mais même beaucoup plus que le cœur du chêne non écorcé, quoiqu'il foit moins pefant que ce dernier , à caufe de l’eau que celui-ci contient encore. Le bois des arbres écorcés & féchés fur pied , eft plus dur, plus folide , plus pefant, plus fort que le bois des autres arbres abbattus dans leur écorce ; moins fujec à plier, & plus durable pour le fer- vice. La caufe de la folidiré & de la force dans les boïs écorcés , vient de ce que les arbres augmentent en groffeur par des couches addi- 433 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, tionnellesydu nouveau bois qui fe forme à toutes les sèves entre l’é- corce & le bois ancien; les arbres écorcés ne forment point! de ces nouvelles couches ; & quoiqu'ils vivent après l’écorcement , ils ne peuvent groflir. La fubftance deftinée à former le nouveau bois , fe trouve donc arrêtée & contrainte de fe fixer dans tous les vuides de VPaubier & du cœur même de l'arbre ; ce qui augmente néceflaire- ment la folidité, & par conféquent la force du bois. Il faut obferver que fi on écorce de jeunes arbres , ils meurent dans la première année , tandis que les gros fubliftent deux ou trois ans. 5 Le tems le plus favorable pour écorcer les arbres, eft celui de la plus grande sève , & l'on a remarqué que les infectes , qui font tant de mal aux autres bois non écorcés, n’attaquent point les pre- miers. Le bois qu'on vient d’abbattre avec fon écorce, ne fe defsèche pas plus dans un an, que le bois écorcé, en onze jours. Celui- ci attire moins l'humidité de l’air que l’autre. Que d'avantages réunis dans une feule opération ! Un fair inféré dans une des dernières Gazettes d'Agriculture; donne une plus grande authenticité à ces expériences, parce qu'il a de plus, le laps du tems qui y met le fceau. En faifant réparer le Pref- bytère de Placy , Paroifle près d'Harcourt en baffle Normandie , on y trouva une poutre ou fommier de chène , avec tout fon aubier ; mais dont l'écorce avoit été entièrement enlevée. Les Architectes jugèrent au premier coup-d'æil , qu'on devoir ôter cette poutre pour en fubftituer une autre , attendu qu'ils la croyoient vermoulue. L’hé- ritier du Curé dernier mort, examina cette poutre & l'ayant trouvée faine , il s’oppofa à ce qu’elle für ainfi rejettée. L’Archirecte & les Ouvriers l’examinèrent alors de plus près , ils la trouvèrent parfai- tement faine, & aufli dure que le cœur des meilleurs chênes. Cet examen réfléchi fit découvrir qu'on avoit gravé fur la poutre , l'an- née qu’elle avoit éré placée, il y avoit trois cens ans. Cette at- tention à marquer l’année qu’on plaça la poutre, dénore qu'on vou- loir alors faire une expérience ; & fa durée prouve invinciblement combien il eft urile d’écorcer le bois, La Provence & le Languedoc abondent en pins , pinus maritima , dont le bois eft peu utile. Ne conviendroit-il pas de foumettre ces atbres aux mêmes expériences ? Si elles réufliffent, comme on ne. peut en douter ; ce feroit une grande reffource pour ces Provinces,’ où le bon bois eft rare & cher. SUR L'HIST. NATURELLE ET LES ARTS, 439 MWOLU, LT NIMAMAVAEUN- TT: Arès avoir parlé des moulins & des prefloirs à huile , connus, foit en Languedoc, foir en Provence & en Italie; après avoir indiqué les changemens donc ils feroienc fufceptibles pour leur affurer une plus grande perfeétion; qu'il me foit actuellement permis de propofer quelques vues fur les moulins & les prefloirs à grains, fi connus dans les Provinces feptentrionales de la France, & fur-rout, aux environs de Lille, Rien n’eft plus fimple que leur mécanifine ; rien n’eft plus prompt que leur exécution. Malgré l'éloge que j'en fais, on fe rap- pellera que toutes mes prétentions fe bornent à propofer des vues fondées , il eft vrai, fur des conféquences tirées d’un raifonnement qui a pour lui plus que ja probabilité. L'expérience feule décide les avantages & fixe les produits. Voyons f les moulins de Flandre, fi ces moulins deftinés aux graines huileufes , peuvent être employés pour les olives. La defcriprion de leur mécanifme & de leur conf- truction , fuffit pour cet examen. Le moulin, fig, 1 , planche VI, reffemble, à l'extérieur, à tous les moulins à vent en général. On fait que porté fur un pivot , il tourne tout entier par Le moyen de la barre À, afin que fes ailes foient direc- tement foumifes à l’aétion du vent. On fait encore que les toiles de ces ailes font plus ou moins tendues, fuivant les circonftances; enfin, la conduite de ces moulins eft trop connue pour infifter davantage fur ce fujet. Qu'on fuppofe actuellement le moulin pour les graines huileufes , entièrement dépouillé de fon enveloppe , afin de ne confidérer que fon mécanifme intérieur. La fig. 2 , dans la pl. VI, le repréfente vu par- devant ; & on lé voit par-derrière dans la pl. VII. À , eft l'arbre ou le premier moteur de chaque pièce; d’un côté, c’eft-à-dire, dans la partie qui fort du moulin, il porte les ailes qui le font tourner. Cer arbre eft garni de palettes B, & il repofe, de l'autre côté D, dans une échancrure pratiquée dans la charpente, qui l'affujertir & ne lui permet d'autre mouvement que celui de la rotation fur lui-même. La roue C, implantée dans cet arbre, en fuir le mouvement; elle tourne dans une autre D, feulement retenue & aflujettie contre les parois du revètiffement du moulin ; mais elle n’eft pas fixée. Cette roue eft mince, & ordinairement n’eft qu'un fort cerceau attaché dans fa partie inférieure & fixée fur le frein E. Ce frein a un point d'appui F, fur lequel il eft mobile, c’eft-à-dire , qu'il peur exécuter le mouvement d'élévation & d'abbaiffemenr. Un crochet part de ce frein & va s’enclaver dans une boucle de la roue D. A {on autre ex- . #40 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, trémité, une corde G eft attachée; elle traverfe le plancher & vient aboutir à la main de l’ouvrier. Lorfqu'il veut arrèrer le mouvement de l'arbre, il tire cette corde; elle fait baïfer le frein E; le frein tire à lui la roue D. Cette roue touche alors prefque par tous fes points, contre la roue C; ce qui oppofe une fi grande réfiftance , que l’action du vent fur les ailes devient infufhfante : par-là , toute la machine refte en repos. Il fuflit donc de relâcher cette corde pour que la mou- ture recommence , parce qu’alors la roue C n’eft plus rerenue par la roue D, &c. &c. H eft le plancher du moulin fortement affujetti contre toutes les par- ties extérieures ; ce plancher eft foutenu , dans fon milieu, par le gros arbre K, ou pivot; cet arbre eft la feule pièce qui ne foit pas mou- vante dans le moulin. 11 porte jufqu’à la bafe où il eft vigoureufement implanté & enchevreté dans la maçonnerie , ou dans d’autres pièces de bois, fi, pour plus grande économie , on a fupprimé la maçonnerie. On fent donc que tout le moulin porte fur cet arbre qui tient direc- tement au plancher. ï Reprenons attuellement : l’arbre des ailes, mis en mouvement par le courant d'air, foulève, par les palettes B dont il eft garni, les pi- lons Il. Voyez leur forme dans la fig. 4, planche VII. À, eft le corps du pilon; B, fa partie inférieure, garnie d’une plaque de fer, ou au moins armée d’un fort cerceau en fer... D, eft la dent par le moyen de laquelle la palette B foulève le pilon I. Comme les palettes font im- plantées fur différentes lignes de l’arbre À, fig. 2, planche VI, elles lèvent, en différens tems, les pilons. Ne confidérons, dans ce moment, que les cinq pilons placés à côté les uns des autres, & nous viendrons enfuite aux deux autres féparés. Ces pilons tombent fucceflivement dans les mortiers LL; ces mortiers font creufés dans la pièce de bois M, ou dans deux pièces de bois réu- nies pour les former, mais fortement liées enfemble & maftiquées dans leur point de réunion. Ces mortiers fonc creufés en manière de poire, afin que la pâte retombe toujours fous le pilon, & ils font garnis à leur bafe d’une plaque de fer fur laquelle tombe le pilon; de forte que fi lon mettoit des olives , au lieu de graine, la chair & le noyau fe- roient en peu de tems & parfaitement écrafés. On pourroir objecter que l’impétuofité du coup doit faire reffauter la partie fluide exprimée, & qu'il eft pofible qu'une portion de ce fluide, & même de la pâte, s'échappe par l'ouverture ménagée pour la chûüre du pilon. Je ré- ponds, 1°. que ce n’eft pas fans de bonnes raifons que le mortier eft creufé en forme de poire; 2°. qu'il fuffira de garnir fon ouverture avec du liège, ou avec du cuir, ou avec des planches amincies & inclinées contre la partie intérieure du mortier , qui ne laifferoient vuide que la feule \ j 4 SUR L'HIST. NATURELLE ET LES ARTS. 441 : feule entrée du pilon; 3°. que le pilon lui-même , dans la partie fu- de. périeute, à l'ouverture du mortier, pourroit être garni & enveloppé, ou avec des éponges , où avec des treffes de fpart ou jonc ma- in, &c. &c. Rien n’eft plus aifé à imaginer que ces fortes de gar- nitures ; alors, on ne craindra plus les éclabouffures , ni la perte de la pâte ou de l'huile. Si on crainrencore que cette pâte foic trop fluide, qu’elle n’éclabouffe, on y reméiliera en ménageant de petits trous dans la partie arrondie & inférieure du mertier. Ces trous communiqueront dans un réfervoir ou enfer ON. Voyez la même leure, planche VIT, fig. 1. L'huile y cou- . leroic, on le vuideroit quand il feroir plein, & la pâte ne feroir plus trop chargée de particules Auides. Lorfque l'olive feroic affez étrittée, ce qui arriveroit promprement , on enleveroit la pâte pour la mettre dans les cabats, & l'on prendroit de nouvelles olives dansle magafin N, planche VI, pour garnir les mortiers. On fent que fi les conduits des mortiers au réfetvoir s’obitruoient par la pâte , il feroit aifé de les dé- boucher de tems à autre, en y pailant un fil de fer proportionné au diamètre des conduits. En Provence & en Languedoc, on ne connoîr pour preflurer , que l’ufage des cabars; & en Flandres, que celui des pièces d’un drap, qui eft une efpèce de moleron en laine. Je préférerois le drap pour les oli- ves, parce qu'il tient moins de place, & l’aétion du prefloir eft plus forte, plus immédiate fur la pâte. La différence du prix des cabats à la pièce de moleton , eft peu confidérable. Suppofons la pâte d'olive aflez étritrée, l'ouvrier la retirera du mor- tier, l'étendra fur le drap, le repliera pour qu’elle n'échappe d’aucun côté, & Ja portera ainfi dans les cafins 1, 5. Voyez fig. 2, planche VI, fig. 1, planche VIT, & fur-tout fig. 3 de la même planche , qui repré- | fenre chaque détail de cette preffe. Tout le vuide entre 1 & $ eft garni avec des calles de bois 4, 6, 7, qui fervent à la preflion Jaté- rale. On place dans le milieu de ces calles , le coin 3, & on laiffe rom- ber le pilon 1+. La pefanteur du pilon enfonce le coin, & la preffion s'exécute avec force. Par un mécanifme bien fimple, on defferre cette preffe. Entre la calle 6, faite en forme de coin, & la calle 4 enriè- rement plate, on préfente le coin renverfé 2, qui, enfoncé par les coups du pilon Ale foulève tous les autres coins; & ils viennent tous à-la-fois dans la main de l’ouvrier. Deux ou trois coups du pi- lon AI fuffifent pour entièrement delferrer. L'huile tombe dans le réfervoir 8, & on l'appelle Auie-vieroe. L’ouvrier retire les facs placés dans les cafins 1 & $ , déplie le drap, enlève le tourteau, l’émierte, le repile de nouveau , s’il le veut, & , le porte dans la chaudière R , pl. 6 ; il reprend de nouvelle pâte dans ” Tome VIII, Pare. II, 1776. EATA 442 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, les mortiers L L, en regarnit les draps, & continue l’opération tant qu'il refte de fubftance à moudre. Un feul homme, afifté d’un enfant de dix à douze ans, fufhr pour conduire tout ce travail. Dans les moulins à graines dont on fe fert en Flandre, ce qui s’ap- pelle chaudière, n’eft, à proprement parler, qu'une grande bafline de cuivre 12, fig.2, pl.6, montée fur un fourneau en briques. La pâte qui a déja été preflurée & émiettée, eft légèrement mouillée & mife dans cette bafline; celle qui en toucheroit le fond, ou du-moins une partie de cetre pâte, brüleroit & communiqueroit fon goût d’empy- reume à toute la malle. Pour éviter cet inconvénient, on a ménagé une efpèce de frouloir S qui remue & agite continuellement la pâte. Voyez fig. 3, pl. 6. Ce frouloir eft foucenu par un petit arbre V, qui palfe dans les gouflets TT; de manière qu'il eft toujours perpendicu- laire. Son fommet eft garni d’une lanterne X, dont les barreaux fonc rencontrés par les dents Y de la roue Z, qui eft adhérente à l’arbre À, qui porte les ailes du moulin; de forte que le vent, à l’aide des ailes, fait agir, fans interruption, toutes les pièces de cette machine aufli fimple qu'ingénieufe. Pour le travail de la mouture de l’olive , cette chaudière peut fervir à deux ufages, ou pour tenir de l’eau chaude que l’on met fur la pâte dans les cabats, ou enfin quand on ne retire plus rien de la pâte après l'opération de l’eau. On pourroit alors lui faire éprouver l’action du feu dans certe chaudière, en y ajoutant de l’eau. Cette huile auroit un mauvais goût; j'en conviens; mais elle ferviroit ou pour les favons, ou à brüler. Ne rien perdre eft le premier bénéfice d’une Fabrique. Si, dans cette efpèce de moulin, on pile & on preffe fans peine des graînes sèches & coriaces, dont la groffeur de quelques-unes n'excède pas celle d’une tête d’épingle ordinaire, & dont quelques autres, comme celles de pavot, font encore plus petites, on peut & on doit donc conclure que les olives y feront parfaitement étritrées , & la pâte vigoureufement preffée. On concluera encore que l'opération fera bien plutôt faite; qu’elle fera plus économique, puifqu'’il ne faut qu'un homme & un enfant pour conduire ce moulin; en un mot, que ce méçanifme peu coûteux reçoit toutes les perfections qu'on peur defirer. Il ne me refte plus à parler que de la manière dont on arrète le mou- vement des pilons. On fent bien qu'ils ne peuvent agir qu'autant que les palettes B de l'arbre A, fig. 2, pl. 6, rencontrent les dents D, fig. 4, pl 73 du pilon; ainf, en foulevant les pilons au-deffus du point de réunion, ils n’ont plus de mouveinent. Pour cer effer, on arrête le mouvement de’ tous à-la-fois, en appuyant fur le levier ow bafcule 10, pl. 6, fig. 2 & fig. 1, pl. 7. Ce levier eft adhérent à la 118 SUR L'HIST. NATURELLE ETIES ARTS. 443 barre 12, qui traverfe toute l'étendue du moulin. A cette barre font attachées toutes les cordes 9.9 deftinées à foulever Les pilons; ainfi, la barre 12, en tournant, les foulève tous à-la-fois; mais comme il peut arriver que quelque corde cafle, & qu’il feroit à craindre que l’ou- vrier ne füt eftropié , lorfqu'il a les mains , ou dans les mortiers, ou occupées à ranger les facs & les coins , on les retient & on les fixe cha- cun en particulier, en plaçant en À , voyez pl. 7, un boulon de fer qui traverfe le pilon & la barre 12. Auprès de chaque pilon eft une bafcule 9, fourenue par la barre 12 ; à l'extrémité eft atrachée une corde G , voyez pl. 7, dans laquelle le moulin eft repréfenté vu par derrière. Cette corde pafle deflus la tra- verle BR j'ai fuppofé exifter ; tandis que dans le moulin , les cordes paflent dans autant de poulies fixées contre les parois de la charpente , c’eft-à-dire , contre les planches de fon revêtiflement. Il en eft ainf du coude de fer L, fig. 2, pl. 7, qui ,en B, eft attaché contre ce même revêriflement, & qui elt ici repréfenté fixé fur le pilon. La corde G étant tirée par la bafcule, foulève le coude L; ce coude ren- contre une cheville en bois ou en fer, implantée dans le pilon, & par ce moyen, le tient fufpendu. 11 réfulte de ce mécanifme que rel ou tel pilon agit à volonté, tandis que les autres font immobiles. Quoique ce moulin foit de la plus grande fimplicité, il eft poffible de le fimplifñer encore , fi on eft affez heureux pour avoir de l’eau à fa difpoñtion , parce qu’alors , il ne faudra qu’une grande roue à au- get, comme dans la pl. 1, fig. $. La roue fera tourner l'arbre hori- fontal; l’arbre garni de palettes, foulevera les pilons , &c. &ec. Si quelque Amateur eft curieux de connoître le relief du moulin à vent que je viens de décrire, il peut s’adreffer à Lille; il y a des ouvriers qui en font des modèles. S'il n’a point de Correfpondant dans cette Ville, je lui offre mes fervices. Tous les moulins dans les environs de Lille, ne font pas en tout femblables à celui que je préfente; ils varient dans quelques points; mais celui-ci eft Le plus fimple & bien moins compliqué que celui qui eft décrit & gravé dans le premier Volume des Planches de l'Encyclopédie, à lArticle Agriculture, Economie. J'ai attaqué des abus par des vérités; bien des gens me traiteront d'homme à chimères. J'appelle de leur jugement à l’expérience. j Li 19 (@SS 444 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, SANT EP ET TPE D à LS MOTS ER RO NT Rp SOU RONLUAN ME NO TER MIE Par M. BARBOTEAU, Confeiller au Confeil Supérieur de la Mar- tinique , Correfpondant de l'Académie Royale des Sciences, & de la Société Royale d'Agricuiture d’ Angers. DEA S 2 PRINT AE CNRS OS CRE AUROT ACCOLHENEETEE Des diverfes efpèces de Fourmis. L LLUSTRE Vonn-Linné, Chevalier de l'Etoile Polaire , pre- mier Profeffeur de Botanique à Upfal, cite, dans fon Syftème de la Nature; Edit. X, dix-fept efpèces différentes de fourmis. La première , qu'il nomme herculane (1), celt-à-dire, la forte, Ja robufte, la laborieufe , l’intrépide, eft noire. Son abdomen eft arrondi en forme ovale. Ses cuiiles fonc de la couleur obfcure du fer, Elle habite l'Europe & l'Amérique feptentrionale. Elle erre çà & là entre les troncs pourris des bois abbattus, ou dans le creux de ceux qui font cariés. C’eft l’hippomyrrrex de quelques Auteurs. La feconde, dite la Rouffe (2), ou la moyenne fourmi rouge de Raye , refte communément dans les tas de broflailles des forêts de l’Europe. Elle {e rencontre aufli dans l'Amérique feprentrionale. Sa tête & fon abdomen font noirs. Sa poitrine refferrée , eft de couleur de fer. C'eft fur cette efpèce que Margraff a travaillé pour fes recherches d'huile & d'acide de fourmis. ES SR APE ME EEE de LAS ice HAE: Lis EC (x) Species, 14. herculanea, feu, formica magna, nigra, abdomine ovato , fe- moribus ferrugineis. @ a. Rufa, formica , thorace compreffo , toto ferrugineo , capite abdomine que mIgrIs. Formica media rubra. Raj. Infi, 69, SUR L’'HIST. NATURELLE ET LES ARTS. 445 La croifième , ou la brune (1), qui eft la moyenne fourmi de Raye , remarquable , dit-il, par fa noirceur , eft d’un brun cendré, Ses jambes font pâles. Elle fe trouve dans les terreins fablonneux de l'Europe. La quatrième , ou la noire (2), eft en effer toute noire comme du jais , à l’exceprion de fes jambes qui fonc griftres. Raye la repréfente fous une couleur noire, iranc fur le brun. Son domicile eft fous terre. La cinquième, fale & dégoûrante (3), d'où lui vient le nom latin obfoleta , eft fi roufle en deffous, qu'on diroit d'un petit morceau de rerre cuire. Le deffus eft noir. Son abdomen eft en quelque forte arrondi. Sa demeure eft dans la terre, en Europe. La fixième, ou la rouge (4), qui eft la petite fourmi rouge de Raye, eft de la couleur d’une terre bien cuite & rougie par le feu. Ses yeux font noirs; elle a une tache de mème couleur fous l'ab- domen ; elle refte près des nœuds enracinés des plantes graminées en Europe. La feprième , ou la fourmi de Pharaon (5), habite l'Egypte, qu'elle défole. Elle eft roufle & très-perite. Son abdomen eft un peu rembruni. La huitième, dite fourmi du Sage ou de Salomon (6), fe voit communément en Egypte, en Arabie , & dans la Paleftine. C’eft une des plus mauvaifes & des plus laborieufes. Elle fait des dégâts inouis. Elle eft route rouge, à lexceprion de l'abdomen qui eft noir & un peu fourré. La neuvième , la Saccharivore (3), ou la mangeufe de fucre , dont parle Brown Jam. 440 , demande un examen particulier. C'eft fur elle que je dois principalement fixer mon attention. Le Chevalier Vonn-Linné la décrit noire , avec les mâchoires , les antennes, & — L (1) 32. Fufca, formica cinereo fufca, tibiis pallidis. Formica media nigro colore fplendens. Raj. Ibid. (2) 4e. Nigra, formica tota nigra , nitida, tibiis cinerafcentibus. Formica minor è fufco nigricans. Raj. Ibid. (3) 5a. Obfoleta, formica , fuprà nigra , fubfiès teflaceo-rufa , abdomine fubelo- bulofo. (4) 6e. Rubra, formica minima rubra. Raj. Ibid. Formica teflacea, oculis punélo que [ub abdomine nigris. (s) 72. Pharaonis , formica rufa , abdomine magis fufco. (6) 8a. Salomonis , formica rubra, abdomine nigro fubvillofo. (7) 92. Saccharivora . formica nigra, pedibus , antennis, maxillis que rufis ; ha- bicat in Americé intrà culmos facchari nidificans , eos que deffruens ; corpus aufper- fum pilis albidist; fquamé petioli crafa, inregra j magnitudo formicarum cefpi- tum. 446 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, les pieds roux. Il dir qu’elle eft de la grandeur des fourmis de ga- fon de l’Europe; qu’elle habite en Amérique; qu’elle nidiñe entre les chaumes des cannes à fucre qu’elle détruit; que fon corps eft parfemé de poils blancs; & que l'écaille, qui recouvre le pétiole , ou le tuyau de communication du thorax à l'abdomen, eft épaile , forte & robulte. Elle dévore , en peu de tems, beaucoup de fucre , qu’elle réduire en une poudre infipide. On verra qu'elle ne borne pas là fon goût, fes déprédations , & qu’elle eft véritablement omnivore. Elle fem- ble, en effet, avoir juré la perte entière de tour ce qui a vie, ani- mal & végétal. Sa population eft fi abondante, que rien ne peut lui ètre aflimilé. Pour peu qu’on lui laiffe prendre pied dans un terrein, elle l’a bientôt envahi & dévafté. Je remets à en parler, après que j'aurai pallé en revue les autres fourmis de Linnæus, & quelques autres dont les divers Auteurs font mention. La dixième, nommée fourmi de gazon (1), de ce qu’elle loge en Europe au milieu des plantes herbacées , baffes, noueufes , chat- nues & rampantes , qui conftituent Le gazon, a le périole compolé de deux nœuds alternes, dont le dernier eft plus grand que l’autre. La onzième, que Brown appelle fourmi domeftique omnivore de l'Amérique méridionale (2), confume, déchire, & pollue toutes fortes de vivres. Elle a la poitrine lifle, féparée par deux perires cloifons ou dentelures. On y remarque quelques points faillans, & prefque imperceptibles. Son corps eft rougeñtre & très-perit. Son abdomen eft brun. Un léger duvet blanc s’y découvre avec peine. Le pétiole eft compofé de deux nœuds un peu arrondis en forme cylindrique. La douzième, ou la fourchue (3), fe trouve dans l'Amérique mé- ridionale. Elle a la tête ovale , furmontée d’antennes, dont la pre- mière articulation eft longue & noire, & les autres font très-courtes, d'une couleur fombre & ferrugineufe. Sa poitrine eft remarquable par une élévation en boffe doublement dentelée, ou par deux poin- tes émouflées , très-courtes & rapprochtes, qui fe rencontrent au milieu en forme de deux épines. La treizième, que le Chevalier Vonn-Linné appelle Sexdens (4) , (1) 102. Cefpitum , formica petiolo nodis duobus alternis-pofieriore majore. (2) ra. Omnivora; formica domeflice omnivora. Brown. Jam. 440. Formica thorace bidentato , petiolo binodofo , corpore teflaceo, abdomine fufco. (3) ra. Bidens, formice thoracis gibbere bidentato , capite ovato , antennis fer- rugineis , articulo infimo nigro. (4) 132 Sexdens , formica chorace fex fpinofo, capite didymo, utrinqu' pofficè mucronat o. SUR L'HIST. NATURELLE ET LES ARTS. 447 c'eft-à-dire , trois fois fourchue , eft aufli habitante de l'Amérique méridionale. Elle à le derrière de la tète féparé par deux lobes égaux , qui font terminés chacun par une pointe ou épine folitaire. Sa poitrine eft garnie , en arrière, de trois paires de pointes épi- neufes , dont la première s’élance en avant, la feconde eft très- petite, & la troifième eft droite & élevée. Un pétiole noueux, joint les deux articulations de l’abdomen. La quatorzième , la céphalore (1), ou la groffe rère qui eft la grande fourmi du Bréfil de Margraff , fe nomme aufli dans les Ifles Antilles Françoifes de l’Amérique, groffe & grande fourmi Flamande, tte de chien. Son corps eft tout couvert de poils naiffans, de la cou- leur obfcure du fer. Sa tête eft très-groffe & prefque ronde : elle eft divifée, par arrière, en deux lobes jumeaux , qui font armés, lun & l’autre , d’une courte épine. Le thorax, ou la poitrine , eft garni , en avant, de deux pointes élevées & diftantes , & en ar- rière , de deux autres également élevées & fort rapprochées. Le tuyau, ou pétiole de l'abdomen, fe diftingue par deux petites tu- bérofités qui fe fuivenr. C'eft à cette efpèce qu'il faut rapporter ces fourmis exceflivement grandes, décrites par Mademoifelle de Mérian(z), qui, dans une nuit, coupent, taillent, déchirent, & emportent les feuilles de plufeurs arbres. La quinzième, la veuve , ou l’habillée de noir (3), que Margraff nomme Tapiiai, du nom qu’elle a dans quelques parties de l’Amc- rique méridionale qu'elle habire, a la tête large, peu faillante, élevée de chaque côté dans les bords, & armée, en arrière, d’un double aiguillon. Ses mâchoires font très-courtes. Sa poitrine reflem- ble parfaitement à celle de la céphalote. Le périole de fon abdomen eft compofé de deux petites tumeurs, en guife d’écailles, qui font à la fuite l’une de lautre. La feizième, ou la fanglante (4), a le corps noir , les pieds jau- nes, la tête oblongue , un peu abaiïflée vers la poitrine : elle ef partagée , par derrière, en deux lobes, fans points : fes mâchoires font droites, parallèles , éminentes , découvertes , rouges & éden- (1) 140. Cephalotes , formica thorace quadri fpinofo , capite didymo , magno utrinquè poflicè mucronato. (2) Merian - Surin. Tome XVIII, formice majores. (3) 152. Arrata, formica thorace quadri fpinofo , capite depreffo marginato urrin- que bifpinofo. (4) 162, Hamatoda ; formica fquamé petiolari conicé , capite fxbdidymo, maxillis porreflis rubris, 448 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, tées. Sa poitrine n'offre point de défenfes, Son abdomen eft noiratre. Au pétiole, eft adaptée une écaille aiguë , de forme conique. Ses aîles font tranfparentes , ou hyaolides. Elle eft originaire de l'Amé- rique méridionale. t La dix- feprième , ou la puante (1), a le corps noir, & furmonté de trois petits points élevés , qui font une marque très-diflinétive de cette fourmi aux autres Américaines. Ses mâchoires un peu lon- gues , fonc très-ouvertes , droites & parallèles : elles font nues & découvertes. Sa poitrine , de même que celle de la fourmi fanglante, eft fans armes , fans défenfes. Quelques poils, clair - femés, font épars fur fon abdomen & fur fes pieds. Ses ailes. ont la rranfpa- rence du verre. Le pétiole, qui a une bofle , ou tumeur en-deffus , eft joint à l’abdomen par une feule articulation. Cette bofle eft comprimée en avant & en arrière : elle eft tranfverfalement cannelée dans cette dernière partie. Le premier fegment de l'abdomen, eft plus refferré que les autres. Cette fourmi eft naturelle de l’'Amé- rique méridionale. Cette longue énumération de fourmis, n’eft rien en comparaifon de toutes les efpèces différentes, qui exiftent dans l'univers entier. Qui pourroit fe flatter de les comprendre toutes dans une defcrip- tion, où dans une nomenclature? Les infeétes , en général, font fi mulripliés, qu'il n’y 4 point d'animal, de plante, de. terre, de vè- tement, de meuble, de tenture, d’eau, de liqueur mème, qui men ait qui lui foient propres (2). Ceux - ci en ont d’autres qui les aflli- gent ; & le microfcope en étend chaque jour le nombre connu , fans qu'on puille découvrir quel a été le but de l'Auteur de la Nature (3), LAS EBIEMET ITA TEE Le ETES ER LS PER CYR D pp er EIRE ER LR LA (:) 172. Fœtida, formica gibbere petiolari tranfversè compreffo, abdominis primo Jegmento contraëtiore, maxillis porreëis habitat in Americä mertdionali. (2) Chaque plante, chaque graine, chaque particule de matière -organique , contient des milliers d'atômes animés. Les véséraux paroïffent être le premier fonds de la Natures mais ce fonds de fubfiftance, tout abondant, tout inépui- fable qu'il cft, fufhiroit à peine au nombre encore plus abondant d'infeétes de toute cfpèce. Leur pullulation, toute auf nombreufe, & fouvenr plus prompte que la reproduction des plantes, indique allez combien ils font furabondans; car les plantes ne fe reproduifent que tous les ans, il faut une failon entière pout en former la graine; au lieu que dans les infe@tes, & fur-tour dans les plus pe- tites efpèces , comme celle des pucerons , une feule faifon fufit à pluficurs géné- rations. Ils maülciplieroient donc plus que les plantes, s'ils n'éroienr détruits par d'autres animaux , dont ils paroïffent être la pârure naturelle , comme les herbes & les graines fembient être la nourriture préparée pour eux-mêmes. Aufli, parmi les infectes , y en a-t-il beauconp qui ne vivent que d'autres infectes ; il y en a même quelques efpèces qui, comme les araignées, dévorent indifféremment les autres efpèces & la leur. (Hit. nat. gén. & part. Tome VII. ) (3) Vel in minimis maximum eminet Deus. en 4f SUR L’HIST. NATURELLE ET LES ARTS. 449 en les créant en multitude fi prodigieufe de genres & d'efpèces, & leur accorddnt la faculté de fe reproduire à un degré fi éronnant de prolificarion. Ce font de ces fecrets impénétrables à route la fagacité de l’efprit humain, de ces profondeurs divines qu’il n’a pas été donné à l'homme de pouvoir fonder. On fait bien en gros que les grands animaux détruifent les petits, & que ceux-ci , éléphans pour d'au- tres, Les dévorent à leur tour. Mais que cetre connoiffance du phy- fique eft foible ! qu’elle eft minutieufe, comparée à celle du moral, qui eft l'arc & la main de Dieu, qui conduit toutes fes œuvres, qui eft le tréfor caché dans le fein de l’Être par excellence, & à lui feul réfervé au milieu de tant & de fi fublimes merveilles ma- nifeftées par la création! Swammerdam, dans fon excellent Recueil de la Nature, Biblia Nature, décrit plufeurs efpèces de fourmis. La première, donc il fait mention, & qui lui a fervi pour vérifier plufeurs faits concer- nant cet infecte , eft la fourmi commune des jardins & des prés en Hollande. I1 a obfervé qu'entre les fourmis de cette efpèce, 1l ne fe trouve qu'un petit nombre de mâles & quelques femelles, en comparaifon du grand nombre des ouvrières. La feconde, de cou- leur brune foncée , venoir du Cap de Bonne-Efpérance. La troifième, de couleur rougeâtre , provient d’une nymphe qu'enveloppe une coque tiflue de fils, comme une forte de toile. La quatrième, plus petite, plus noire & plus luifante que la fourmi ordinaire, fe trouve fur les faules. La cinquième, encore plus petite , eft plus épaille & de couleur roufsâtre. La fixième, a le corps plus mince & plus al- longé que la précédente. La feprième eft très- petite , de couleur brune, & reflemble aux autres par la figure du corps. Swammer- dam ne doute pas qu'il y ait bien d’autres efpèces. Il cite, en- trautres exemples , ces fourmis longues, comme la première pha- lange du pouce , qu'on lui a dir exifter dans les grandes Indes. C’eit vraifemblablement un diminutif de la fourmi des Indes , que, mal- à-propos, Busbeq aflure avoir vue en Turquie, & qu'il dit, contre toute apparence de vérité , être de la grandeur d’un chien de moyenne taille. Le Docteur Edmon-king a obfervé trois différentes efpèces de fourmis , des noires, des brunes, & une autre de couleur de feuille morte. Elles habitent chacune une fourmillière féparée , fans jamais fe mêler enfemble. Leur inimitié mème eft fi grande , qu’elles fe mordent , s’entre-déchirent & fe ruent, pour peu qu’eiles fe ren- contrent dans un même endroit. Cette obfervation eft appuyée du fentiment de tous les Naturaliftes, qui s'accordent à dire que les fourmis d’une Colonie , n’en fouffrent point d'étrangères parmi elles ; Tome VIII, Part. II. 1776. M mm “3 450 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, ‘ qu'au contraire, elles les expulfent & les exterminent même, fi elles le peuvent (1). C'eft par une fuire de cette cruelle antipathie , que l’on voit fe renouveller de tems à autre, entre des fourmis de grandeur, de couleur & d’efpèce différentes , ces fanglans & terribles combats , dont parle Æneus Silvius, qui fut témoin oculaire d’un furieux, que de grandes & de petites fourmis fe livrèrent aû-deflus d’un poirier , dans le territoire de Bologne , en préfence de l’armée d’Eugène IV. M. Gléditfch, de l’Académie Royale des Sciences de Berlin, faic mention d’une efpèce de petire fourmi noire, nommée en Allemand, Bif[- mière, qui conftruir fon domicile dans les monceaux de terre des prairies , & qui eft fort incommode aux Economes en Allema- gne. Ce font les effains de cette efpèce de fourmi qu'il a vu s’éle- Ver & defcendre par pelotons, former des colonnes très-hautes , lé- oèrement flottantes d’une partie du ciel à l’autre, agitées dans la bafe, prefque immobiles vers le centre, fans mouvement apparent à leur extrémité qui fe perd. dans la nuë; fpeétacle fingulier, qui dure des heures entières, & dans lequel il trouve quelques rapports; quelques vraifemblances avec les jets, les flocons, les élans de lu- PR (1) On remarque en tous lieux, que chaque efpèce de fourmi fait conftam- ment bande à pat, & qu'on ne les voit jamais mêlées enfemble ; fi quelqu'une, par inadvertance, fe rend dans un nid de fourmi qui ne foit pas de fon efpèce, elle perd néceflairement la vie, à moins qu'elle n'ait le bonheur de fe fauver promptement. Vonn-Linné penfe qu'on devroit rechercher, parmi les punaifes de campagne, quelque efpèce qui, introduite dans les maifons, détruiroit celles de lit. Quel- ques perfonnes, dans les Colonies, penfent de même, qu'on devroit rechercher, parmi les diverfes efpèces de fourmis , une qui détruisit la faccharivore. L'une ëc, l'autre idée me femblent frivoles & erronées. Comment apprivoifer aflez de punaifes de campagne, pour détruire toutes celles de lit? Expatriées de l'arbriffleau qui leur eft naturel, vivroient-elles aflez long-tems dans leur nouveau domicile, pour peu qu'on pür en éprouver le bien qu'on efpéreroit? En tout cas, feroient-elles plus voraces que l'araignée, qui , route ennemie qu'elle eft des punaifes & au- tres infe@tes, dont elle détruit un bon nombre, ne peut, dans certaines mailons de l'Europe, venir à bout de les délivrer de la prodigicufe multitude de punaifes qui. les infeétent ? D'ailleurs, plus on les fuppofera carnaflières , plus il eft à craindre qu'elles ne deviennent elles-mêmes incommodes. Quant à l'efpèce de fourmis qu'on oppoleroit à la faccharivore, il n'eft pas douteux qu'il fe livreroic un combat , après lequel chaque efpèce, ne fongeant qu'à vivre féparément & felon fes SN mr s'inquiétervit peu de celles de l'autre. Sup- pofe-t-on aux deux différentes cfpèces , des inclinations fembiables ? Il faut alors, pour qu'on y gagne, que l'une & l’autre périffenr. Car autrement, la plus forte, la vi£torieufe, s'emparant feule de la canne à fucre, la détruiroit par goût, par inclinarion; ce feroit toujours le même fléau , la faccharivorc, SUR L’HIST. NATUREILE ET LES ARTS. 451 mière, & autres phénomènes éblouiffans de Aurore boréale. (Voyez fa Relation, traduite du latin, inférée dans le Recueil des Mé- moires de l’Académie Royale des Sciences de Pruffe, c.1 ,p.210,& fuiv.) André Acoluth (1), Prédicateur à Breflaw , rapporte un fair qui a quelque affinité avec celui-là. Il parut, dit-il, le 17 de ce mois, environ à trois heules après midi , une multitude innombrable de mouches , qui voloient au-deflus des tours des Temples de Breflaw : on les vit, en premier lieu, autour de celle du Temple Ste-Eliza- berh, & elles étoient en fi grand nombre, que le peuple les prit pour une fumée fort épaille , & qu'il commença à craindre que le feu ne für quelque part. Peu de rems après, on vit la même chofe fur les clochers des autres Temples de la Ville, & environ une heure après, elles tombèrent à terre, où on les ramafloit à pleines mains encore vivantes. Voici la defcription que Chrétien Mentzelius donne de ces mou- ches (2) : elles font de la taille d’une fourmi de médiocre groffeur : cet infecte , vû au microfcope, paroît avoir le corps recouvert d’une efpèce de cuirafle ; il a la tèce arrondie, les yeux faillans , & deux antennes, difpofées au milieu du front comme deux cornes ; cha- cune de ces antennes eft compofée de douze petits globules, arti- culés les uns avec les autres; le dos eft relevé, noir & hériffé de petites pointes ; le bas- ventre, d’une forme allongée , comme dans les fourmis, eft couvert d’écailles & de petites pointes ; les aîles, au nombre de quatre, font toutes compofées d’une membrane très- imince : vues au microfcope, elles ont des couleurs femblables à celles de l’arc-en-ciel; les fix pattes & le corps, ont certe mème couleur; les aîles ont une teinte brune fur la moitié de leur éten- due, du côté du corps. La defcriprion de ces mouches formicifor- mes, a beaucoup de rapport avec celle des mouches dangereufes qui infectent, de tems en tem$, la Pologne. Ces dernières font beaucoup plus grandes , & ont de plus un très-grand aiguillon fous le ventre. Le Doéteur Charles Rayger (3), rapporte qu’en l’année 1679, le 15 Juillet, par un tems très-chaud, mais couvert & nébuleux , on vit voler, vers deux heures après midi, une nuée de grandes fourmis aîlées , qui alloient, du Nord-Eft au Sud:Ouelt , du côté du Danube: toute la ville de Pofen en fut remplie; car en volant , il en tomba EE ES (1) Lettre d'André Acoluth à Chrétien Mentzelius , du 22 Août 1687, fur des mouches formiciformes qui volent par troupes. (2) Ephémérides des Curieux de la Nature. Collection Académique ;, Vol. IV, page 142. (3) Ephémérides d'Allemagne, Décuric 3, année 2, page 27. M m m 2 452 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, une infinité qui étoient apparemment fatiguées de leur vol; enforte que dans la place publique , on n’auroit pu pofer le pied fans en écrafer trente ou quarante à la fois : leur vol ne dura guère plus d'un quart- d'heure : ces fourmis, en tombant à terte , perdirenrt tout-à-coup leurs aîles, & ne firent plus que fe trainer lentement çà & là : au bour de deux heures, on n’en vit pas une, & per- fonne n’a pu favoir ce qu’elles éroient devenues. Robert Knox, dans la Relation de fon voyage de Ceylan , ob- ferve que cette Ifle abonde en fourmis de toutes fortes. Leur va- riété furprenante , le détourne de les décrire toutes. Il s'arrête à fix principales. La première , qu’il nomme Coumbias, eft de la gran- deur des fourmis rougeâtres de l’Europe. Elle eft noire, fenc très- mauvais, & ne fe trouve que dans les arbres pourris. La feconde, dite Tale Coumbias, eft afez femblable , en tout, à la première. La troifième, nommée ÂDimbios , fe niche fur les arbres : la crainte d'en être piqué, ne permet pas alors d’y monter : elle eft grande & rouge. La quatrième , ou Couraatches, grande & noire, fe creufe des rerriers fi profonds, que les beftiaux courent rifque de s’y caf- fer les jambes. La cinquième, qu'il appelle Coddias , & dont il dé- figne mal la grandeur, à fa demeure également fouterraine : elle eft accoutumée à faire des excurfons en troupes fort nombreufes : elle nuit peu d'ordinaire, & ne mord que lorfqu'’on la bleffe : elle ef d'un fort beau noir. La fixième, qu’il nomme Vacos , eft en beau- coup plus grand nombre que les autres : la terre en eft quelquefois jonchée. Elle eft fi vorace , qu'on n’ofe rien laifler dans une mai- fon qui n’eft point habitée. Drap, bois, paille , tout, à l'exception de la pierre & de quelques métaux, devient promprement fa proie. Elle eft de grandeur médiocre. Son corps eft blanc & fa tère rougeâtre. Elle grimpe le long des murailles, & fe fabrique , avec de la terre, une forte de voûte, qu’elle continue dans toute l'étendue de fon chemin, à quelque hauteur qu’il puiffe parvenir. Si cette voûte, ou arcade, fe rompt en quelque endroit , les vacos reviennent fur leurs pas , réparent l'ouvrage , & continuent leur marche après ce travail. On s’'apperçoit aifément de leur approche par l'apparence de ces pe- tites voûtes ; & pour lors, on elt obligé de redoubler de foins & de précautions pour les détruire ou les éloigner. Elles élèvent dans les champs de petites monticules de terre, hautes de quelques pieds, & fi forres, qu'il n’eft pas aifé de les abbattre avec des pieux. Ces petites élévations , huttes, ou maifonnettes, fe nomment homboffes. Elles font compofées de voûtes ou d’arcades, diverfement compar- ties & édifiées avec une terre légère & rrès-fine. Les vacos multi- plient prodigieufement. Elles meurent par pelotons. Lorfque leurs ailes font venues, elles s’envalent en fi grand nombre vers l’acci- SUR L'HIST. NATURELLE ET LES ARTS. #45; dent , que le ciel en eft prefque obfcurci. Elles s'élèvent à une hauteur qui les faic perdre de vue , & ne ceflent de voler que pour tomber mortes après s'être épuifées. Les oifeaux , qui fe retirent un peu tard , en fonr leur proie, & les poules s'en nourriffent plus vo- lontiers que de riz. ù Suivant cette defcription , les vacos me femblent le même in- fecte que nos vilains Poux-de- bois (1), efpèce de fourmi fort commune dans toute l'Amérique & dans les Indes Orientales. Son corps, d’a- bord blanc, rouflit à mefure qu'il croît & fe fortifie. Il blanchit de nouveau, à proportion que les aîles pouffenr. IL eft d’une cou- leur fauve, quand fes quatre aîles , ayant atreint leur dernière lon- gueur , lui couvrent tout le corps. Il voltige de côré & d'autre, & fe porte, par un attrait invincible , vers la lumière d’un feu quelconque qui le détruit. Des particules d’huile , qui émanent de tout fon corps, répandent au loin une odeur fade & dégoûtante. Divers petits anneaux, qui ont tous la faculté de fe mouvoir en fe repliaut les uns fur les autres, fe diftinguent vifiblement fur la partie dorfale poitérieure de cet animal, où ils font difpofés en rond & continués jufques fous l'abdomen ; ceux du milieu , ont quelques ceintes de couleur obfcure. Le corceler eft peu dégagé : les fix patres, qui y font adhérentes, font couvertes de poils, qui ont la forme de pointes aiguës. La tère , affez généralement roulfe , eft furmontée de deux petites antennes, en apparence filiformes , & cependant très-noucufes. Les yeux, placés aux deux côtés de la rêre, font d’un noir-clair & luifant. Le cafque, qui lui couvre le crâne, paroît épais & folide : il eft divifé en deux lobes. La rète eft rer- minée par une pointe, avancée & armée de pincettes fort aiguës. C'eft avec cet inftrument, comme avec une lime, vrille, ou poin- çon, que le poux-de-bois fcie, perce & détruit tour ce qu’il ren- contre. Cet infeéte, de grofle & longue taille pour une fourmi, multiplie fingulièremenr. 11 eft très-dificile de le chafler, une fois qu'il eft établi quelque part. C’eft l’image du méchant : laïffez-lui prendre un pied chez vous, il en aura bientôt près de quatre. Il ronge, pourrit, & dévafte des maifons entières. Etoffes , toiles, cuirs, bois, meubles, tout, jufqu'’au cuivre, fe reffent de fon pañfage infe& & défolant. Il réduit, en moins de vingt-quatre heures, en dentelle & filigrane , une garde-robe , quelque remplie de linge & de hardes qu'elle foir; fes dégâts dans des papiers & des livres, ne font pas moindres. En quelque lieu que le poux-de-bois s’établiffe , il pétrit la terre, (1) Formica lignaria turmatim pediculans. 454 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, la conglutine, en fait une motte, ou un mañlif fi ferme & fi folide ; que les pluies, les plus abondantes, ne peuvent le pénétrer. On ne découvre aucune ouverture en-deflus , parce que cet infeéte obfcur n'avance jamais que dans des chemins couverts, qui prennent quel- quefois de la,bafe d’une mailon , en parcourent les deux côtes, traverfent tout le faîte, & viennent aboutir à un coin des deux pi- gnons. Ces chemins couverts, ou galeries , creux en-dedans, bien imaftiqués au-dehors, ont communément trois où quatre lignes de largeur. Le logement principal eft un vrai labyrinthe de galeries mulripliées , contournées , entrelacées, jointes & adoffées les unes aux autres. Elles font fi- peuplées , qu’à. la moindre brèche faite à l'aide d’une gaule ou d’un bâton pointu , on les voit fortir par pe- lotons de plufeurs milliers, qui viennent en hâte la reconnoitre , our réparer, au plus vite, le défordre. J'ai eu plufeurs fois les deux mains couvertes de poux-de-bois, que j'irritois; je n’en ai jamais reffenti la moindre fenfation de dou- leur. < Les domeltiques, prépofés au foin & à l'entretien des baffes- cours , détruifent chaque jour quelques ruches de ces infeétes, pour la nourriture des poulets, des pintadeaux, & des jeunes canards, qui en font très-friands. (Voyez à l’article des Expériences, com- iment on en délivre une maifon.) Qui ne reconnoît encore les poux-de-bois à la defcription que M. Lyonnet fait du travail de certaines fourmis des Indes Orien- tales ? Ces infectes malfaifans avoient pénétré dans un magalin de la Compagnie, au bas duquel il y avoit un tas de cloux-de-gérofile qui alloit jufqu'au plancher; elles s’éroienc fair un chemin creux & couvert qui les avoit conduites par-deflus ce tas, fans le toucher , au fecond étage, où elles avoient percé le plancher & gâté , en peu d'heures, pour plufieurs milliers en évoffes des Indes, au tra- vers defquelles elles s’étoient fait jour. Des chemins d’une conftruc- tion fi pénible , femblent, dit M. Lyonnet, devoir coûter un tems exceflif aux fourmis qui les font : il leur en coûre pourtant beau- coup moins qu'on ne croiroit : l’ordre, avec lequel une grande mul- titude travaille , fait avancer la befogne. Quelques perfonnes , di- ones de foi, lui ont rapporté que ces fourmis ne marchent jamais à découvert; qu’elles fe font toujours des chemins en galerie pour parvenir là où elles veulent être. Occupées à ce travail, rencon- trent-elles un corps folide, qui n’eft pas pour elles d'une dureté impénétrable ? elles le percent & fe font jour au travers. La ma- tière eft-elle trop dure? elles fe fonc tout le long un chemin voûté, compofé de terre liée , par le moyen d'une humeur vifqueufe. Enfin, s'agit-il de pafler fur un tas de corps détachés? comme un chemin, sundaisiss SUR L'HIST. NATURELLE ET LES ARTS, 455 qui ne feroit voüré que deffus, lailferoit par-deffous trop d’interval- les ouverts, & formeroit une route trop raboteufe , elles fe conf- truifent alors une efpèce de tube, un conduit en forme de tuyau, qui les fait paller par-deflus ces amas, en les couvrant de roures parts. ( Hift. Nar. des Animaux. Hift, gén. des Voyages. Encyclopédie.) C’eft de la même efpèce de fourmi , que le Pere Le Conte, Jéfuite, a entendu parler dans fes nouveaux Mémoires fur l’état préfent de la Chine, lorfqu'il dit que les fourmis blanches s’y trouvent par- tout , quelque foin qu’on prenne de les détruire; qu’elles font cé- lèbres par l’incommodité qu'elles caufent, & par leurs propriétés naturelles; qu’elles font très-petires, d’une fubftance molle, blanche, & quelquefois un peu roulfe; qu’elles fe #ulriplient à l'infini, & que quand elles fe font emparées d’une maifon ou d’un apparte- ment, il. n’y a que les fourmis noires qui les en puiffent chailer ; qu’elles ont les dents fi aiguës & fi pénétrantes, qu’elles percent dans une nuit, non-feulement les plus gros ballots, les draps, la laine , & toutes les autres étoffes, mais encore les cabinets & les armoires, dont le bois devient, en peu de jours, tout vermoulu ; qu'elles gâtent même le fer, le cuivre & l'argent, {ur lefquels on voit fouvent les traces & les veftiges de leurs perites dents; que néanmoins 1l y a bien de l'apparence que cer effet vient encore plus de la qualité particulière de leur falive, qui eft une efpèce de dif- folvant, & qui agit alors à-peu-près comme l'eau-furce fait fur les métaux. Les Carreyans du Royaume de Maduré, dans la prefqu'Ifle orien- tale de l'Inde, ne me femblent également que des poux-de-bois, Elles élèvenc leurs fourmillières à la haureur de cinq ou fix pieds au-deflus dela terre, &1les enduifent artiftement d’un mortier im- pénétrable. Elles font blanches, & deviennent la proie ordinaire des écureuils, des lézards, & autres animaux de ce genre. Je penfe de même de cette prodigieufe multitude de fourmis. blanches qui incommodent fi fort les pays qui bordent la Gambra. Elles fe répandenr , difent les Voyageurs , par des voies fort fin- gulières. Elles s'ouvrent, fous terre, une route imperceprible & voürée avec beaucoup d’att, par laquelle des légions entières fe ren- dent , en peu de tems, au lieu qui renferme leur proie. Il ne leur faut que douze heures pour faire un tuyau de cinq ou fix toifes de longueur. Elles dévorent particulièrement les draps & les éroffes, & l'expérience prouve tous les jours qu’elles trouvent le moyen de sonser l’intérieur du bois, fans, en alrérer , en apparence, la fuper- ficie. Le foleil eft leur ennemi. Non-feulement elles fuient la lu- fière, mais encore elles meurent lérfqu'elles ÿ font expofées trop long-tems. La nuir leur rend toute leur force. Mooe dir que les - 456 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, Anglois , pour conferver leurs meubles, font obligés de les élever fur des piédeftaux enduits de goudron, & de les faire fouvent chan- ger de place: Entre plufeurs efpèces de fourmis que l’on voit à Madayafcar, il y en a deux qui, felon le rapport de plufieurs Voyageurs dignes de foi, donnent du miel. L'une, aîlée , mellifie dans ie creux des arbres. L'autre, dépourvue d’aîles , dépofe fon miel dans de groffes mortes de rerre, nommées voutoutanes, élevées en pointes, dures, & percées d’une infinité de trous en forme d’alvéoles. On prétend que dans plufeurs Provinces des Indes orientales, telles que Pégu, Bengale, Malabar , il y a des fourmis volantes, de couleur rouge, qui, par un effect à-peu-près femblable à celui de la caprification, produifent cette gomme ou cire rougeûtre , claire & tranfparente , connue en Europe fous le nom de Réfénc-laque, Tout expofé qu’eft le Mexique à de fréquentes inondations, il ne laiffe pas que d’être incommodé par des fourmis de routes fortes. La piquure des noires eft prefqu’aufli dangereufe que celle des fcor- pions. ( Dampier, Tome MI, page 275.) Il y a au Bréfil de grandes fourmis aîlées, qui ont une odeur de cidre & un goût très-agréable. Elles y font; dit Aldrovande , en fi grande abondance , que, s’envolant et l'air par bandes , elles y forment comme une nuée épaifle. Le perceur du Japon, efpèce de fourmi blanche , qui eft en guerre continuelle avec prefque tous les autres infeétes, a le mufeau garni de quatre pinces recourbées & tranchantes, dont elle fe fert pour percer , trouer , & déchirer tour ce qu’elle fent & voir. Sa viteffe eft furprenante, & fon ravage fait , avant qu’on ait pu fonger à y remédier. Le feul moyen efficace , pour fe préferver de fes cruel- les dévaftarions , eft de répandre du fel fur fon pañage. Le Père Labat rapporte (1) que fur les terres du Sénégal, il fe trouve dé petites fourmis rouges, d’une nature fort venimeufe. Les bois , felon lui , font remplis d'une autre efpèce , de groffeur extraor- dinaire, blanche, vive &. fort laborieufe. Les maifons qu'elle conf truir, Ont quatorze ou quinze pieds de circonférence, fur fix ou fept de haut. Elles n'ont qu'une entrée, qui eft à-peu-près au tiers de l'élévation. La route, pour y monter , eft cortueufe. La matière de ces fortes d’édifices, eft de la terre grafle, qui fe sèche prompte- ment, & qui s’affermit autant qu'un mur de plâtre. Entrautres fourmis des Royaumes de Congo & d’Angola , Dapper en cite quatre, dont la plus grofle, armée d’un aïguillon fort pi- (1) Mém. de l'Afrique, Vol, 2 & 3. quant ; FN mg — sat is. à. bone SUR L'HIST. NATURELLE ET LES ARTS. 457 quant, caufe une enflure très-douloureufe. Denis Carli de Placenza (1), Mifionnaire Apoltolique au premier de ces deux Royaumes , érant alité & malade, fut réveillé cout -d’un- coup par un faut que fon finge fic fur fa tête. Il crur que les-rats l’avoient effrayé ; & pour l'encourager, il le carefloit de la,main, lorfqu’il entendit la voix de plufieurs Nègres qui lui crioient de fe lever, parce que les fourmis s'évoient ouvert un paffage. Dans l’impofhibilité où il étoir de fe re- muer , il fe fit porter fur fon lit dans un Jardin. 11 évoit tems; çar les fourmis couroient déja fur fes jambes, & dans un inftant, elles couvrirent le plancher d'un demi-pied. Le porche & l'allée du Cloître, n’en furent pas moins remplis. On ne trouva pas d'autre expédient pour les chalfer , que de brüler de la paille dans tous les lieux qu’elles occupoienr. La flamme les détruifit, ou les fit fuir; & elles laifsèrent une odeur fi forte, que le Miffionnaire , s'étant fait remonter dans fa chambre, fut obligé de tenir long-tems le finge contre fon vifage. Foible & malade comme il éroir , il de- meura perfuadé qu'elles l’euffent dévoré avant la fin du jour. Il ap- porte l'exemple de quantité de vaches qui ont le même fort dans le Royaume d'Angola, & dont on ne retrouve que les os à l’arrivée du jour. Les fourmis de la Côte d'Or, dit l'Abbé Prévôt, font leurs nids, ou leurs loges, âu milieu des champs & fur les collines. Ces habi- rations, qu'elles compofent avec un art admirable, font quelque- fois de la hauteur d’un homme. Elles fe bâtillent aufli de grands nids fur des arbres fort élevés, & fouvent elles viennent de ces lieux , dans les Forts Hollandois, en fi grand nombre, qu'elles met- tent les Faéteurs dans la néceflité de quitter leurs lits. Leur voracité eft furprenante. Elles ont fouvent dévoré des moutons & des chè- vies. Bofman rapporte (2) que dans l’efpace d’une nuit, elles lui ont quelquefois mangé un mouton, avec tant de propreté, que le plus habile Anatomifte n’en auroit pas un fi beau fqueletre. Un poulet n’eft pour elles que l’amufement d’une heure ou deux. Le rat mème, quelque léger qu'il foic à la courfe , ne peut échapper à ces cruels ennemis. Qu’une feule fourmi l'attaque, il eft perdu. Tandis qu'il s'efforce de la fecouer,, il fe trouve faifi par quantité d’autres , jufqu'à ce qu’il foit accablé par le nombre. Elles le rraï- nent alors dans quelque lieu de füreté. Si leurs forces ne fufhfent pas pouf cecre opération, ellës font venir un renfort; elles fe fai- (1) Relation de fon Voyage, par l'Abbé Prévôr, Hiftoire générale des Voya- ges, Tome 16, page 92, & fuivantes. : (2) Defcriprion de la Guinée, par Bofman, . Tome VIII, Part. II. 1776. Nana 453 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, fifent de leur proie & la conduifent en bon ordre. ( Hift. Nat. de la Côte d'Or. Hit. gén. des Voyages, Tome XIV , Liv. IX.) Jean Barbot obfervé (1) que le nombre des fourmis eft furprenanr en Guinée, fur-tout aux environs d’Aera, où les terres font plates & unies. Elles y font des nids de plufeurs pieds de haut. La Re eft pyramidale , & la compofition fi ferme & fi folide, qu'il n’eft pas aifé de les détruire. On eft étonné, en les démoliffant, de la variété des loges, & des divifions qu'on y découvre. Smith raconte, d’après fa propre expérience (2), que la morfure d’une fourmi noire caufe des douleurs infupportables , quoiqu'elle n'ait pas d'autre effet dangereux. Il s’eft amufé plus d’une fois à leur jetter des kacrelas morts (3). Les premières qui pañloient , fe con- tentoient de reconnoître la proie. Elles fe dépèchoient d'aller don- ner avis aux autres pour les aider à faire la levée du corps. Si le premier piquet ne fuffifoit pas, elles expédioient un fecond courier qui ne tardoit pas à reparoître avec de plus forts dérachemens. Du- rant le féjour de cer Auteur au Cap-Corfe , un grand corps de cette milice vint rendre fa vifire au Château. IL étoit précédé de 30 à 40 guides, poftillons ou meffagers, tous remarquables par Jeur haute ftature. On eût dit des coureurs d’une armée formidable , char- gés d’applanir les chemins, de frayer les paffages , fonder les guets & terreins, diriger & conduite la marche, préparer les gîtes , s’of- frant à l'ennemi comme corps de troupes avancées , effuyant bra- vement les premiers coups, facrifiant & prodiguant leur vie pour le falut, la füreté & la défenfe de tous. Il étoit prefque jour , lorf- que l'avant-garde entra dans la Chapelle , où quelques domeftiques Nègres étoient endormis fur le plancher. Ils furent réveillés par l’ar- rivée de cette troupe féroce & fanguinaire; & l’Auteur s'étant levé au bruit , eut peine à revenir de ae étonnement. L’arrière - garde étoit encore à la diftance d’un quart de mille. Après avoir tenu confeil fur cet incident , on prit le parti de mettre une longue trai- née de poudre fur le fentier que les fourmis avoient tracé, & dans tous les endroits où elles commençoient à fe difperfer. On en fit fauter ainfi pluñeurs milliers, qui étoient déja dans la Chapelle. L’arrière-garde , ayant reconnu le danger , & s'étant repliée fur elle- mème , regagna directement fes habitations. Les fourmis rouges de Cayenne, font grandes & dangereufes. G) Defcription de la Guinée, par Jean Barbor. (2) Voyage de Smith en Guinée, page 151 & fuivantes, GG) Kacrela, blarta Americana malè olentiffima: SUR L’'HIST, NATURELLE ET LES ARTS. 459 Elles ont les mâchoires armées de deux pincettes longues, dures & tranchantes. Le meilleur cifeau ne taille pas mieux. Le feul fecrer, trouvé jufqu'ici contre elles, eft de creufer leurs fourmillières & d’y faire un grand feu. On en détruit une partie; mais il en refte tou- jours affez pour repeupler. Ce feroit , dit Barrere (1), faire un grand bien à la Colonie , que d'apprendre aux habitans le fecrer de dé- truire entièrement ces animaux. La fourmi - paffagère , ou fourmi-coureur de la Guiane Fran- çoife , autrement dite fourmi - vifiteufe de l'Amérique , eft grande, forte & bien armée. Elle marche en troupes nombreufes. Dès qu’elle paroît, on ouvre les buffets , les coffres, les armoires; elle exter- mine les rats, les fouris, les ravets, les araignées , les kacrelas elle purge une maifon de toutes fortes de vermines & d’infeétes; & aufli-tôr que fon expédition eft faite, elle fe retire en bon or- dre, & va ailleurs exercer fon miniftère doux & bienfaifant pour l'homme. Barrere dit (2), que durant deux ou trois jours que certe fourmillière ambulante féjourne dans une maïfon , on elt obligé de déloger, de peur d'en être vivement incommodé. D’autres , difent qu’elle n’eft méchante que lorfqu’on lirrite; qu’elle s’élance alors fur les fouliers & fur les bas qu'elle met en pièces. Les grandes fourmis aîlées de Surinam (3), peuvent être regar- dées aulli comme des fourmis de vifte. Elles font en guerre avec les araignées & tous les infeétes du pays. Elles fortent de leurs ca- vernes , une fois rous les ans, en eflaims innombrables , qui s’intro- duifent dans les édifices, en parcourent toutes les chambres, tuenc les autres infectes, qu’elles fucenr. Lorfqu’elles furprennent une groffe araignée, elles fe jettent deflus en fi grand nombre, qu’elles la dé- vorent en un inftant : les habitans même d’une maifon fe voient forcés de prendre la fuite, plusôt parce qu'ils en craignent l'in- commodité , que les bleffures; car on ne dir point qu’elles atta- quent l’homme. Après avoir netroyé un édifice , elles vifitent de mème tous les autres, & fe retirent enfuite dans leurs cavernes. Lorfqu’elles veulent paffer du bord d’une rivière à l’autre, elles fe conftruifent un pont fingulier. La première , s'attache à un petit morceau de bois qu’elle tient ferré avec les dents. La feconde, s'ac- croche à celle-là, & ainf de fuite, jufqu'à ce que la plus avancée ait atteint la rive oppofée. Cetre chaîne de corps étroitement unis, fert de pont à toutes les autres. Mademoifelle Marie-Sibille Mérian, (1) Nouvelle Relation de la France Equinoxiale, page 61, (2) Ibid, page 64. (3) Hift, gén. des Voyages, in-12, Nnn2 460 ‘OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, de Francfort fur le Mein , aufi intéreffante voyageufe qu’élégante deffinatrice , les peint d’une grandeur démefurée , & armées de dents courtes ; qui coupent , l’une fur l’autre, comme des cifeaux (1). Elles dépouillent, dans une feule nuit , les arbres de routes leurs feuilles. Leur principale demeure eft en terre : elles s’y creufent des cavernés de 7 à 8 pieds’ de profondeur. C'eft affez parcourir les diverfes efpèces de fourmis, étrangères à nos flés. Il convient maintenant de nous attacher à celles qui font particulières & propres à nos climats. On comprend bien que jé ne me propofe pas de les décrire toutes, Une légère nuance de couleur, des armes tant foir peu différenciées, un quart de ligne dans les proportions corporelles, un rien de plus ou de moins, échappe, chaque jour , aux yeux de l’Obfervateur le plus fcrupuleux ; & certe minutie tire fouvent à conféquence ; car de même qu’elle varie l’ef- pèce , elle varie aufli l’inclination. Je ne prétends parler que de cinq efpèces principales, & fi diftinctes, que perfonne ne peut les con- fondre les unes avec les autres. La première (2), eft une très-petire efpèce de fourmi rouge , que l’on a plutôt fentie que découverte. Elle pique vivement. De l'eau tiède & du jus de citron, la dérachent de deffus la peau, la fonc enfler & périr. La feconde efpèce (3), va, vient, court, flaire, s'arrête, retourne, vifite, s'agite , s'inquiète, rafolle. Tantôt en avant, tantôt en ar- rière ; maintenant à droite, tout-à-l’heure à gauche; elle fait mille marches & contre-marches, & quantité d’autres évolutions fatiguan- tes. Errante & vagabonde , elle n’a jamais un but certain, C’eft de ce caractère indécis, & de tant de pas perdus, que lui vient fon furnom de fourmi-folle. Un peu de fucre, de miel ou de fyrop, femble cependant la fixer pour un moment. Elle y goûte avec avi- dité , s’y plonge toute entière , & s’y noye fouvenr. Les parois d’un vafe miellé ou fyropeux, en font quelquefois tout garnis. Les pots de confiture, que l’on n’a pas foin de bien boucher, en contien- nent des milliers. Elle gâte, fouille, infecte tout ce qu’elle touche. L'odeur de la fourmi s’en exhale au loin. Il fufhit, pour s’en pré- ferver, de mertre les pots de confiture, les bouteilles de miel, & autres vafes qui contiennent du fyrop & d'autre liqueur douce & (1) Elle a fait un très-beau Recueil des infeétes de- cette Colonie Hollandoife, publié, en 1716, à la Haye, chez Pierre Goffe , en 72 Planches, dont on ne retrouve plus d'exemplaires que dans les Cabinets des Curieux. (2) Formica caribaarum minima rubra. (3) Formica caribaarum minima, nigricans , infanicus, Ardelio, » SURVL'HIST. NATUREIILE ET: LES, ARTS: .46x agréable , dans des terrines remplies d'eau. Cette efpèce efl vive, légère, noïûtre, & très-petite. Elle n’eft point d’ailleurs malfai- fante. La troifième efpèce (1), eft la groffe & grande fourmi - flamande du pays. Habitante des forêts, elle loge dans des troncs de bois pourris : on la trouve fouvent en védette , ou furetant au pied d'un vieil arbre : quelquefois elle fe niche entre le bois & l'écorce. Elle a près d'un demi-pouce de longueur. Sa groffe tête , furmon- tée d’une paire d’antennes articulées & très-longues , eft divifée en lobes , garnis de pointes épineufes. Les deux ferres, dont fes mà- choires font armées, ont la faculté de s'ouvrir en ligne droite, & de fe refermer avec tant de vivacité, qu’elles font rerentir un pe- tit bruit femblable à celui du feu qui pétille , ou au cliqueris qui accompagne l'étincelle qu’on tire de la chaîne éleétrique. Comme chacun croit voir & entendre quelque chofe d’analogue à fon étar, je fuis perfuadé qu’une Couturière naïve s’imagineroit entendre le bruit d’une paire de cizeaux que l’on ferme : ces ferres fonc fortes, robuftes & très-denrelées. Le thorax eft muni, en avant, de deux petites épines droites & diftantes, & en arrière, de deux autres également droites & rapprochées. Le pétiole de l'abdomen, eft re- marquable par deux tubérofités, alternativement placées & inéga- les : la dernière , plus groffe, eft défendue par une vigoureufe épine. L’'abdomen , vü à la loupe , reffemble à celui de la guèpe-maçonne, qui eft Jui-mème femblable , à la couleur près, à celui de la guëèpe ordinaire : on diftingue en-deflus deux points , ou taches blanches & tranfparentes : il eft terminé par une veflie jaunâtre, qui contient un acide, & par un aiguillon caché qui , lorfque l'animal eft irrité, reflort impregné de liqueur. La couleur noire domine générale- ment fur le corps de cette fourmi , qui eft fi élaftique , qu’une puce ne s'élance pas mieux, ni plus loin. Ses pieds font roux, & fes jambes font jaunâtres. Leur grande longueur lui fert à prolonger beaucoup ‘es pas, & à toifer, en peu de tems, beaucoup de che- min. Gare au voyageur fatigué , que l'ombre d’un arbre invite à fe repofer. S'il fe trouve des fourmis- flamandes à la proximité, elles viennent bientôt en troupes l'affaillir. Une petite quantité fuflic pour le forcer à céder la place à ces voifines incommodes, qui s’a- charneroïent à la lui difputer. Leur morfure eft fi cuifante , qu'on la dit incomparablement plus douloureufe que celle da fcorpion. Elle n'eft pourtant pas fi durable , & on s’en guérit facilement à (1) Formica maxima nigra, in caribais belgica nuncupata , caput caninum diéa ; Linnai Cephalotes. 46: OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, l'aide de l'huile d'olive, ou en bafinanr la partie offenfée ; avec de lurine la plus fraîche. Ce font les ouvrières qu'on vient de décrire. Les mâles & les femelles en diffèrent par quatre ailes membraneufes , qu’elles ont de plus. L'aiouillon au derrière, marique aux mâles, qui, confi- dérées & priles dans toutes les proportions , font les plus perites de toutes. Les femelles font les plus groffes & les plus grandes. Les ouvrières tiennent le milieu. J'ai remarqué , à l'aide de la loupe & du microfcope , une mul- titude de poils noirs & quelques poils blancs, fur le corps de la fourmi - flamande ouvrière. On en remarque aufli, mais en moin- dre quantité , fur le corps du mâle, & fur celui de la femelle. La quatrième, que je nomme fourmi-domeflique des Antilles (1), a la rète très-groffe , d'une couleur noire tirant fur le roux, divi- fée en deux lobes, & garnie d’un double cafque ; fes yeux, pla- cés aux deux côtés de la tète, font d'un très-beau noir d’ébène ; fes mächoires , fortes & robultes , font armées d’une paire de pinces, droires , aiguës & très-poignantes ; fes antennes , roufsâtres & ployées vers le milieu, forment chacune un angle, qui, fuivant leurs di- vers mouvemens & inflexions , eft tantôt obtus, tantôt aigu. Le corps, la poitrine , le périole, les pieds & les jambes , font d’une couleur fauve. Les trois premières parties font défendues par de bonnes cuiraffes. La région abdominalé, moins grande & moins groffe que la tête, eft d'un noir plus foncé : quelques poils blan- châtres , en forme de pointes allongées, s'y diftinguent avec peine. C'eft cette efpèce de fourmi qu'on voit accourir en foule dans une maifon; dès qu'un ravet, une araignée , un Kacrela, un clo- porte, ou quelqu’autre infecte bleffé, gic étendu par terre, elles l'emportent dans leurs terriers, ou le difsèquent fur la place. Si quelques fourmis étrangères arrivent, par hafard , les premières, les domeltiques s'accordent entrelles pour les chaffer. Si les étrangères font affez fortes & en affez grand nombre pour réfifter, 1l fe livre alors un combat qui devient bientôt général. Elles fe mêlent les unes aux autres; les pointes fe hériffent, les pinces fe dardent, LE PE TP SE 0 EL 40 (x) Formica caribæœarum domeflica, capite craffiffimo, à nigro tantisper rufefcente, didymo, & duplici defenfo caflide , oculis ebeninis ; maxillis validis, feptem deni- culatis, binis que armatis forfcibus acutis, ereëis , pungentibus, & acerbifimus ; antennis fubrufs atque angulofis ; corpore ; peélore , petiolo loricatis , iifdem que cum femoribus ; cruribus , & pedibus fubfulvis ; abdomine nigro, albefcentibus ma- culato pilis è prolongato cufpidi - formibus , fubque oculi fenfum vix cadentibus , minus craflo ac magno quam capite. SUR L'HIST. NATURELLE ET LES ARTS. 463; les armes fe croifent , de grands coups redoublés font volriger la mort de tous côtés. De puiffans renforts, en forme de troupes au- xiliaires , arrivent de toutes parts. Celles-ci, toutes fraîches, affail- lent à leur tour. Elles s'élèvent , s'élancent , fe faififfent , oppo- fenc pieds contre pieds , ferres contre ferres ; poitrines contre poi- trines. Les membres, déchirés , font épars. Le champ de bataille n'eft plus qu'un vafte cimetière. Les étrangères , accablées par le nombre, & réduites à une très- petite quantité, tournent le dos, laiffent le champ libre, & fuient à toutes jambes. Pourfuivies , har- celées, aiguillonnées en arrière, elles ne ceffent de courir que lorf- qu’elles ont gagné leurs retraites , où elles s’enfeveliffent profondé- ment pour y cacher, dans d’épaiffes ténèbres, leur honte & leur terreur. Tandis que l'infanterie fe livre un fi furieux combat , des efcadrons de fourmis aîlées, fe font, dans l'air, une guerre non moins cruelle. Ce font les mâles & les femelles, qui viennent, de part & d'autre, pour fecourir leurs ouvrières. Que d’acharnemenr, d'inimitié , de rage & de furie , elles font mutuellement éclater ! La mort les accompagne , & fond fur elles. Epuifées à force de combattre , leurs aîles fe dérachent, & elles deviennent la proie da vainqueur , qui leur plonge impitoyablement fes ferres dans le corps. Pour faire cefler le combat & difliper les combattans , il fuféc de jetter , au milieu du champ de bataille, un peu de cendre chaude. Hi motus animorum ; atque hec certamina tanta Pulyeris exigui jaëlu compreffa quiefcent. Gcorg. Lib. IV. Ces combats fonc plus fréquens qu'on ne penfe. Ils fe livrent d’or- dinaire au coucher du foleil, & les prétendus moucherons, qui, pour lors , aveuglent les voyageurs, ne font communément que des fourmis mâles & femelles, qui combattent pour leurs amours, ou pour quelqu’autre caufe que j'ignore. L’odorat des fourmis-domeftiques, de mème que celui de routes les autres efpèces, eft fi fin, que, quoique fort éloignées , elles paroiffent aufli-rôr qu'il y a une capture à faire. La première, en marche, va reconnoitre la proie : elle court à toutes jambes cher- cher fes compagnes, occupées à fureter, épier , & prendre vent ail- leurs. Celles qui vont au butin, fe rendent par un fentier; celles qui font déja chargées, retournent par un chemin contraire. Pour les atrirer dans un endroit, on tue un infeéte quelconque, que l’on étend à terre. Elles accourent, dépècent, ou tranfportenr. 11 eft furprenant de les voir enlever de gros anolis , les porter toutes enfemble. Si l'animal refpire encore, il fecoue la tête , remue des 464 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, pieds , agite la queue. Ses efforts font vains : il n’en refte bientôr plus que le fquelette. j: Un fpectacle plus divertiffant encore , eft celui qu'offre la prife d’un raver. Dans les horreurs & les convulfons d’une mort prochaine, il croit fe défendre avec fuccès. Tantôt il agite une jambe , tantôt l'autre ; il remue fa tête, il fecoue fa poitrine, ploie fes antennes en mille fens contraires, fait mouvoir les anneaux de fon abdomen, trémouffe de tour le corps. Les fourmis , voraces & intrépides , fuivenc fes divers mouvemens & agitations. Une troupe de boules- dogues Danois, tels qu’on en voit à la Barrière de Sève, Fauxbourg Saint-Germain , à Paris, où le fieur Saint-Martin les exerce à faifir une corde, fans que mille feux d'artifice puilfent les en détacher, ne paroïffent pas plus acharnés que ces fourmis, Cette efpèce eft très-cruelle. Elle aime beaucoup le fang. Elle gâre, pollue, dévore & infecte toutes fortes de vivres, de mêts & de provifons. Sa morfure eft très-fenfible. On emploie , pour s’en gué- rir , les remèdes précédemment indiqués. La cinquième & dernière efpèce de fourmi que j'ai à décrire, eft la fourmi faccharivore de l'Amérique (1). On conçoit qu’en la nommant ainfi, je prends la partie pour le tour; où bien, pour peu qu'on fache de Botanique, on verra que je fais dériver ce terme, avec Brown, de deux mots latins, de vorare, dévorer , détruire, & de faccharum, qui fignifie également fucre & canne-a-fucre. En effet, l’Arundo faccharifera , de Mathiole, de Gafpard Bauhin, & du Chevalier Sloanne, eft indiqué fous le mot fimple /zccharum dans lefpèce 73 gén. plant. du Chevalier Vonn-Linné, Edir. VI. Cette efpèce de fourmi eft, de mème que toutes les autres, un infeéte allongé , dont le corps fe divife en trois parties principales : en tête, en poitrine, & en ventre. Elle eft très petite ; & Linnæus (Syft. Nat. Tome I, page 580 , Edit. X.) a raifon de la comparer, pour la grandeur , aux fourmis de gazon de l’Europe. Elle provient d'un œuf life, poli, diftendu, blanc , luifant, fur lequel on n'ap- perçoit aucune incifion, aucune future , & qui eft d’un fi petit vo- ————————_—_——— (1) Formica caribæarum faccharivora, animalium , vegerabilium que inimica cru- delifima , omnia devaflaus , deffruens , omnivora ; È flavo- fulvis pedibus ; capire fufco , infuper rotundo, in parte anteriore acuto ; biferratis maxillis , ferris que Jaturati fufcis, pungentibus & recurvis ; antennis rufis , articulatis , angulofis, & in tenu? minutifimorum, levium & ferici- formium fafciculo pilorum definentibus ; oculis lucidis ; ebeninis, nicidis ; peëlore ë fufco-rufefcenre | bene Loricato, fix fpi- nofis junéturis compofio ; fulvo & terete petiolo; abdomine nigro aliquot que fubal= bidis adsperfo pilis, î lume, _ +. in fé sn SUR L'HIST. NATURELLE ET LES ARTS. 465 lume , que; placé fur.une terre noire, à peine peut-on le, décou- vrié. De cet œuf, fort un vermuffeau , donc on diftingue pour lors, à l’aide du microïcope, les diverfes parties qui conftituenc fon. tour. Le, deflus, femble partagé :en douze anneaux. On voit en deflouse la ère recourbce vers la poitrine, le corfeler renflé dans fon milieu, & un abdomen bien nourti. J'apperçois, en outre , au corfelet, de petits points. avancés, qui lui tiennent lieu de crampons, en atten- dant que fes jambes & fes pieds fe foient développés. Sa bouche eft très-vifible. Ce vermifleau eft tout blanc, à l’exception d’une large tache, de couleur biftre, qui règne fur fon dos. Il a la fa- culté de fe mouvoir très-lentement; & fans les bons foins des ou- vrières , il feroir expofé à périr à tout imfkant. IL change une fe- conde fois de forme, & fe convertit en une nymphe mollafle, débile & difforme. Il fubit, dans l’engourdiflemént & le filence de cet état, une troifième & dernière métamorphofe. Il fe dégage des maillots embarraffans de l'enfance, pour fe ceindre le ge du cafque , arborer le panache, revèrir la cuirafle , s’'armer de ferres, de pointes, d’épines, faire ufage de fes membres, fouler la terre de fes pieds , marcher à l'ennemi, voltiger dans les airs , ravager, mulciplier, prendre enfin une forme folide & durable, La fourmi faccharivore , parvenue à fon point de perfection, a la tête brune , arrondie en-deffus , pointue en avant. Les deux fer- res, qui garniflent fes mâchoires , font faillantes , recourbées, & d'un brun plus foncé. Ses antennes font rouffes , articulées, ployées en angle dans leur milieu, & rerminées par un perit bouquet de poils fort déliés & foyeux. Ses yeux, placés aux deux côtés de la tête, fonc d'un noir d'ébène reluifant. Sa poitrine, bien cuiraflée, eft formée de plufieurs jointures, défendues par des pointes aiguës: elle eft d’un brun rouffâtre. Le périole de l'abdomen , me femble cylindrique & d’une couleur fauve. Le ventre, garni d'un léger du- ver blanchâtre, eft plus noir dans fon enfemble que le refte du corps. Les jambes, d'un roux clair, & les pieds d’un roux plus foncé , fonc très-longs, proportionnellement à la malle qu’ils ont à foutenir. Ils font hériffés de poils fauves, très-apparens au microfcope. Les mêmes différences, que l’on découvre entre les mâles, les femelles, & les ouvrières des autres efpèces de fourmis, s'apperçoi- vent aufli dans celles-ci, C’eft au vol folâtre des deux premieres, qu'on reconnoit fouvent l’exiftence d’une fourmillière voifine. En effet, en me promenant fur mon habitation, le foir d'un beau jour, combien de fois ne les ai-je pas vu volriger de côté &. d'autre, & diriger par-là mes regards fur les perires fentes de verre, dont elles Tome VIII, Part. II. 1776. Ooo 466 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, fortoient en foule? Je brifois ces iffues, & ne manquois jamais de trouver les ruches (1). Cette fourmi formidable , qui mulriplie beaucoup en peu de tems, niche communément au pied de la canne , en sèche les feuil- les, les noircit dans le bas, les rougit dans le haut. Ces effets per- nicieux font produits par l'acide qu’elle contienr ; & il n’y a pas jufqu’à la terre, qu’elle ne frappe de ce fléau. Elle la pètrit , la conglutine , la dépouiile de fes fucs nourticiers; ou bien la criblant de mille manières différentes ; elle découvre les racines de la canne, qu’elle arrofe de fon acide perfide & diffolvant. Le foleil, venant à la traverfe , brûle de fes rayons ardens, cette plante délicate, à laquelle convient une humidité rempérée. Le chevelu à découvert, defféché, & en partie enlevé par les fourmis , n’eft plus capable de foutenir le rofeau. La moindre impulfon couche la canne par terre. Elle s’y Aëtrit encore plus , ou devient la proie des rats. L'efpé- rance s’évanouit : la défolation refte. Les eaux, lécèrement répandues fur la furface de la terre, in- quiètent peu cette fourmi. Elle grimpe le long de la canne, fe loge aux aillelles des nœuds & des feuilles, y trouve un abri contre le déluge, s’y conftruit de nouvelles fourmillières, y dépofe fes œufs, De bientôt fécondés, afiligenc le Cultivateur de plaies plus pro- ondes. L’exceflive quantité de fourmis faccharrivores qui dévaitent la Martinique, augmente les forces de chaque individu. Elles quittent la canne-à-fucre pour venir, en effaims nombreux, affaillir les bef- tiaux. Elles pénètrent jufqu’à la peau, ferrent, piquent , aiguillon- nent ; & commençant toujours l'attaque par les endroits les plus fenfbles , elles contraignent l'animal de courir, bondir , fauter ; elles arrivent en nombre incroyable ; fans celle , de nouveaux dé- tachemens, toujours de nouvelles forces. Bientôt les conduits de la refpiration gènés , embarrafés, bouchés, ne charrient plus d’air juf- qu'aux poumons ; l’animal le plus vigoureux, fuccombe & meurt. Si elles traitent ain le bétail, jugez quel dégât elles doivent faire dans un poalailler , & par-rout ailleurs. On à même vu, & l'humanité en frémir, des Négrillons mal-propres, devenir, dans le court intervalle d’une nuit , les triftes viétimes de la négligence oo (1) On m'a rapporté que dans les Quartiers des François, de la Trinité , & autres de la Martinique, il {ufifoit de frapper la verre du pied pour en faire fortir des millions d'ouvrières, qui couvroient fort promptement toute la fuperf- cie de la verre, SUR L'HIST. NATURELLE ET LES ARTS. 467 de leurs meres. Le lait, le fyrop , le miel, & autres matières li- quides & vifqueufes, découloient de deflus leurs hardes , & leur couvroient le vifage, la poitrine & tout le corps. Les fourmis atti- rées durant leur fommeil , atrivoient par milliers, fuçoient les par- ties miellées & fyrupeufes , ferroient , pinçoient de toutes leurs forces. Un fang extravafé , tuméfiant la mesh enfloit & rougifloir la peau; un acide des plus cuifans, diftillé de mille aiguillons divers , élançoit de toutes parts la douleur , & renouvelloit fans ceffe celle qui étroit déja fentie. Des cris perçans & redoublés, frappant vainement l'air, ne pouvoient fe faire entendre de ces meres ma- râtres , que le plus odieux libertinage retenoit-ailleurs. Déja, la poi- trine de leurs enfans , trop long-tems dilatée , avoit perdu fon jeu, fon élafticité; des foins tardifs, des remèdes de toutes fortes, des flots de larmes, vains témoignages du plus douloureux repentir, ne pouvoient plus rappeller la voix éteinte & les forces épuifées de ces innocentes & déplorables créatures , que le tranchant de la faulx cruelle ne tardoit pas à moiflonner. Ces fourmis voraces font d’une intrépidité fi furprenanre , que le feu fouvent n’eft point capable d'arrêter leur ardeur pour le pillage. Elles accourent en foule. Les premières fe brülent. Les fecondes fuc- combent à la chaleur. Les troifièmes périffent encore. La route fe fraye fur des monceaux de cadavres; & le ps dela troupe pafle, pour ainfi dire, fain & fauf au milieu du feu & des flammes con- jurés pour fa perte. Le paffage des vorrens les plus rapides, ne les épouvante pas plus. Elles s’accrochent les unes aux autres , comme les grandes fourmis de Surinam , forment un pont entr'elles à la manière des finges- guenons ; l’armée entière franchir le paflage, & arrive, à point donné , au rendez-vous général. Dans une marche forcée, & pour une plus prompte expédition, elles jettent quelquefois plufieurs ponts femblables, placés près-à - près les uns des autres. Elles font de rems en tems des parties de plailr , qui, toutes fin- gulières qu’elles paroïffent, ne laiflenc pas que d’être vraies, & nui- fent beaucoup aux plantations des cannes-à-fucre. Elles fucenc le derriere du puceron , & le délivrent d’un fuc miellé & vifqueux qu’il diftille continuellement en petites larmes qui fe congèlent. Ces gouttes, tombant fur la canne, la brülent. Lorfqu'elles fe figent au derrière mème de l'animal, elles le tuent. Les obfervations mo- dernes, font routes conformes à celles-ci. Ceux qui les ont faites, s’ac- cordent à dire, qu'à défaut d’un fecours fi benin de la part de la fourmi, le puceron ne tarde pas à périr. On diftingue plufieurs fortes de pucerons qui s’adonnent particu- 002 468 . OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, lièrement aux plantations des cannes-à-fucre. Les uns, qu’on nomme dans nos Ifles: P/uchors-volans | ne font pas extrèmement mal-faifans. Il eft cependant à propos de s’en débaïrafler, parce qu'ils fe nour- riflent uniquement de la fubftance légère qui filtre du tronc dans les côtes! feuillées du rofeau faccharifère. Les autres, connus fous le nom de Pluchons- grains-de-rig , font très-prèjudiciables. Ils ont la forme d’un grain de riz, qu'on auroit coupé par le milieu. On remarque en-deflous leurs œufs, & plulieurs petites patres; ou cram- pons. Ils multiplient éronnemment; & fi on ne travaille au plutôt à s'en défaire, ils s'emparent de routes les poffeflions voifines , pi- quent les tendres feuilles de la canne, les brûlent, les jaunifent, les pliffent, les recoquillent, & réduifent à rien les plus abondantes moillons. Un habitant du Quartier du Port-Louis , Ifle Grande - Terre, pour avoir négligé d’en détruire à tems une très - petite: quantité qui ravageoit une de fes pièces de canne, s’eft vu à la veille d’ètre ruiné fans reflource. Les pucerons avoient gagné toute fon habita- tion ; & les fourmis, leurs fidèles compagnes , marchant toujours fur leurs traces, s’étoient multipliées en fi grand nombre , que les habitans voilins s’en plaignoient déja. On lui ft oavrir.les yeux fur fa propre fituation. Il prit un Econome entendu, qui fit le facrifice d'une récolte prefque entière , pour le préferver d’un fléau fi re- doutable. Le fuccès fut heureux. Pourquoi le même procédé ; em- ployé pour lors, ne réufliroit-il pas à la Martinique? La caufe étant la mème , les effets doivent ètre femblables. M. le Préfident Tafcher , Intendant des Ifles Françoifes, du venc de l'Amérique , a eu la bonté de m'envoyer une phiole, dans la- quelle on avoit hermétiquement fermé des fourmis de la Marti- nique. Je les trouvai mortes : le feul défaut d’air les avoit apparem- ment fait périr. Je les ai examinées avec beaucoup d'attention. Je me fervois, pour mieux en découvrir les diverfes parties, d’une loupe qui groffit fort les objets; je les rapprochois des nôtres pour mieux les confronter ; & quoique la couleur de la fourmi varie quelquefois, felon la qualité de la terre qu’elle habite , le réful- tat a toujours été une parité parfaite de couleurs & d’armures. Un âge plus avancé, s’annonçoit de part & d'autre, par quelques tein- tes plus foncées, par des pointes plus allongées; un peu plus de longueur & de groffeur dans les proportions du corps, éroit égale- ment un figne non équivoque de leur vétufté. Je ne puis donc dou- ter que l’efpèce facchorivore de la Martinique , ne foit la mème que celle que je viens de décrire. Elle :m'avoit déja paru telle dans un voyage que je fis dans cette Ifle , en Oétobre 1773. La SUR "L'HISTNATURELLE. ET LES ARTS.:1469 pellicule blanche , qu'on remarque quelquefois fur fon dos, eft un accident qui fe rencontre aulli dans les nôtres. J'ai tout lieu de préfumer que la fourmi, dont la Barbade eft affligée depuis tant d'années , eft aufli la même. Les fourmis & les pucerons ne font pas les feuls infectes qui faffent du tort à la canne-à-fucre. Les rouleux, que d’autres nom- ment Mahokas, en rongeant les racines de cette plante, la font fécher fur-pied. C’eft, je penfe, l’infecte dont parle Margrave dans fon Hiftoire du Bréfil, que les habitans du pays appellent Guira- peacoja , & que les Portugais nomment Pao-de-Galinha. Le ver brûlant fait aufli beaucoup de dégâts dans les jeunes cannes. Les tiges, qui commencent à s'élever , en font quelquefois fi vermou- lues, que, pour peu qu’on les tire, elles cèdent à l'impulfon, & fe dérachent. On trouve à l’extrémité un petit ver; & fi on ne peur le découvrir, c’eft qu'ayant fubi fes méramorphofes , il eft de- venu papillon. Quand on plante , on doit avoir attention d’écrafer les rouleux; & lorfqu'on farcle, on doit enlever les parties de la tige defféchées par le ver brülant, les porter hors de la pièce, & les brûler. J'ai cout lieu de croire que ce font ces deux infeétes qui font un fi grand tort aux jeunes cannes à la Grenade. La continuation de ce fujer dans le Cahier fuivane, OBS EURO PT UL OU NS Sur les Serpens de la Guiïanne , & fur l’efficacité de l'Eau de Luce pour en guérir la morfure ; Par M. SONNINI DE MANONCOUR , Correfpondant du Cabinet du Roi. 1e ferpens , les reptiles, dont la vue feule glace d’horreut , font affez communs dans roures les parties de l’Amérique méridionale; mais en exécration aux hommes & aux animaux : la Nature femble les avoir relégués dans l’obfcurité des déferts ; leur nombre eft en rai- fon inverfe de celui des hommes : l'Europe en connoït peu: la Mar- tinique , Saint-Domingue, & les autres Colonies bien peuplées , & par conféquent défrichées, n’en voient que quelques individus d’ef- pèces rares. C’eft par cette raifon que dans la Guianne Françoife, 40 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, ces animaux fourmillent : c’eft dans certe vafte partie du Continent de l'Amérique ; dans cerre étendue de forêts , de près de quatre cens lieues de profondeur , où quelques Colons épars, fans fecours, fans encouragemens, s'occupent de cultures aufli foibles que leurs moyens, & fufhfent à peine pour faire juger, au premier afpeét, que les côtes de ces contrées ne font pas abfolument defertes; c'eft, dis-je, dans ce climat chaud, & fur ce fol humide, que fe plai- fenc & croiffent prodigieufement une foule innombrable de repriles, qui font l’effroi des voyageurs. À La morfure de prefque routes les efpèces de ferpens , eft très- dangereufe, & caufe la mort fi l’on n'elt promprement fecouru. L'on vante beaucoup de remèdes, tous tirés du Règne végétal; comme la Lianne à férpent (1), la Tayove (2), l'Ouangue(;), le Pois - fer- pent (4), l'Herbe à La fléche (5), le Sénéka (6), &c. &c. L'on dit aufl (1) Lianne à ferpent; Lianne à glacer l’eau. — Ariffolochia foliis trilobis, caule volubili, floribus maximis. Jacq. Sp. 8, T. 3.—— Ariflolochia trilobata. Linn. Hit. Nat. Gen. 1022, Sp. 2, Edit. 12. Et Aublet, Hift. des PL. de la Guianne, Tome Il, p.833. — Ariflolochia folio hederaceo , crifido , maximo flore radice re- pente. Plum. Car. $ , & Barr. Franc. Equinox. p. 16.— A Cayenne, Lianne à ferpent. — Par les Indiens, Caapeoa. (Voyez ce mot dans le Di&. d'Hift. Nar, de M. Valmont de Bomare). (2) Tayove. — Arum maximum Egyptiacum , quod vulgo colocafia. C. B. Pin. Tayoba Pifonis. Barr. Franc. Fquinox. page 18. —Arum acante foliis peltaris , ovatis , repandis , baff emarginatis. .. . Arum colocafia, Linn. Sift. Nat. Gen. 1028. Sp. 5, p. 603, Edit. 12. À Cayenne, Tayove, : (3) Ouangue. — Digitatis fefamum di&a, rubello flore. Plum. & Barr. Franc, Equinox. p. 48. — Sefamum foliis ovatis, oblongis , integris.. .. Sefamum orientale. Linn. Hift. Nat. Gen, 782, Sp. 1, p. 423 , Edit. 124 Et Aublet , Hift..des PI, de la Guianne , Tome I, p. 669.— Digitalis ortentalis , fefamum diëta. Tournef, Inftit. R. H. & Buren. Zeil. 87, T. 38, F.. 1. — Gingili aux grandes Indes. Aublet, page 666.— Giugiri à la Martinique. Diét. d'Hift. Nar. de M. Valmont de Bo- mare. — Ouangue , où Ouangle , à Cayenne. (4) Pois- ferpent. Je n'ai pas encore vu cette plante. (5) Herbe à la flèche, — Maranta culmo ramofo...... Maranta arundinacea. Linn. Hift. Nar. Gen. 5, Sp. 1 , p. so, Edit. 12. Et Aublet, Hüift. des PI. de la Guianne, Tome I , p. 3. — Maranta arundinacea , cannacori folio. Plum. Gen. 16.— Canna indica, radice albä , alexipharmacä. Sloan. Hift. 1, p. 253, T. 149, fig. 2. — Arundo fagittaria , unba brafilianis diéta Margravii Barr, Franc. Equinox. p- 19. — Kouronmari par les Indiens. — A Cayenne, Rofcau à flèches & herbe 2 la flèche. (1) Seneka:—— Poligola de Virginie. — Racines de ferpens à fonnettes. ( Voyez le Diét. d'Hift. Nac. de M. Walmont de Bomare , art. Seneka. — Polygala flori- bus imberbibus, fpicatis , caule ereéto fimpliciffimo, foliis lanceolatis. , ,,. Polygala Jenega. Linn. Hift. Nat. Gén. 851, Sp. 16, p. 471, Edit. 124.) Je ne crois pas que cette plante croïfle dans la Guianne, SUR L'HIST. NATURELLE ET LES ARTS, 471 y le fucre brut, pris en grande quantité, & appliqué fur la mor- ure, eft un bon fpécifique. Au rapport de quelques Canadiens, l'on ne voyage pas dans les forêts du Canada , fans être muni d’un fac plein de fel, qui eft un remède pour guérir la morfure des ferpens ; l’on en applique fur la plaie, & om en avale une forte dofe. Mais tous font infufhfans, du moins dans certaines circonftan- ces , & c'en eft aflez pour les abandonner, s’il exifte un remède qui réuflit dans les cas fé plus critiques & les plus defefpérés. Ce contre-poifon , dont on ne peut faire trop d’éloges , eft l’alkali vo- latil uni à l'huile de fuccin. Ce mélange eft connu fous le nom d'Eau de. Luce. Avant de rapporter les obfervations que j'ai faites fur l’alkali vo- lacil , il eft bon de dire un mot d’un préjugé qui règne dans la Guianne Françoife , fur une pratique fuperftitieufe que l’on y re- garde comme un remède afluré, & prefque furnaturel, contre la morfure des ferpens. Dans cette Colonie , qui tombe en décadence fans être encore for- tie de l'enfance, l’on voit peu de perfonnes qui puiflent s'élever au-deffus des autres, par les notions les plus communes des fciences. Apparent rari mantes in gurgite vaflo. L'ignorance , chaffée de l’Europe , femble y avoir trouvé un azyle commode dans la nonchalance des Colons; les Crcoles , qui man- quent abfolument d’inftruétion & d'éducation , ont embraflé les er- reurs & les fuperftitions des Indiens & des Nèores , & quelques Fran- çois y ajoutent les préjugés de leur patrie, dont ils font le rebur. Il eft difficile, prefque impoñlible même ; de les tirer de ce cahos embrouillé d'erreurs, tant l’entètement orgueilleux de la fottife, eft enraciné chez eux; leur montrer la vérité, c’eft, comme le dit un Philofophe moderne , introduire un rayon de lumière dans un nid de hibou , il ne fert qu’à bleffer leurs yeux, & à exciter leurs cris (1). (x) Je ne parle ici que de [a plus grande partie de la foule des habitans de la Guianne, où il n'y a pas de ce que l'on nomme en Europe, peuple, populace ; par leur ignorance , leurs préjugés , leurs erreurs , ils en tiennent lieu. Il y a, fans contredit, des perfonnes inftruites, dont le mérite eft d'autant plus précieux qu'il eft plus rare. Ce petit nombre de gens diftingués, n'eft pas compofé de Créoles, & l’on ne doit pas accufer d'exagération M. de P** *. lorfqu'il dit, en parlant des enfans Créoles, qu'adolefcens ils deviennent nonchalans , inappli- qués , hébèrés, & n'atteignent à la perfeétion d'aucune fcience ; qu'ils font déja 472 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, Ils font perfuadés que les ferpens ne mordent pas, mais piquent avec leur langue : quelques Nègres prétendent avoir le talent de préferver des mauvais effets du venin , en fe faifant mordre par un de ces reptiles. C'eft un art qui eft réfervé à un petit nombre. Les Blancs, loin de chercher à dérruire les fourberies de ces prérendus Magiciens, & à érouffer la confiance fuperftitieufe & nuifible de la crédulité, fe foumetrent eux-mêmes à cette opération; c'eft ce que l'on appelle Je faire piquer du ferpent (1) Une famille ancienne de Colons eft, depuis les premiers établiflemens , felon le rapport du Pere Labbar, en poffeflion de ce fecret (2), qui paffe, dans le gros des efprits, pour un don qui tient du fortilège. » Rien n’eft plus naturel, difenr ceux qui veulent paroître plus fenfés, c’eft une efpèce d’inoculation « ; que cela eft piroyable ! oo aveugles, lorfque les autres hommes commencent à voir; & qu'enfin , ils n'ont pas la moindre ca acité, le moindre goût, la moindre intelligence. ( Voyez les Recherches Philofbphiques fur les Américains. Berlin, Tome II, page 165 & fuivantes. ) $ (x) J'ai été plus d'une fois témoin de la confiance humiliante que les Blancs ont pour quelques Efclaves. Un tel Nègre pafle pour avoir un reméde infaillible pour guérir telle maladie; on va le tronver, on fe foumet à fes ordonnances, que l'on préfère à celles d’un Médecin inftruit. Quelquefois le mal difparoît, mais n'eft pas guéri; de-là, naiflent une foule de maladies, dont on ignore la nature & la caufe, & qui n'ont d'autre fource qu'un palliatif, ou un répercuflif admi- niftré par un vil ignorant. » La médecine de ces gens nous plaît, difenr les Co- > lons, elle eft prompte & aufli fimple que les plantes qu'ils employent. « Si quelque Européen fenfé leur difoit : » Pourquoi ne connoïflez - vous pas vous- » même ces plantes? Pourquoi ne les faites-vous pas connoître aux gens de l'art » qui vous indiqueroient les circonftances où vous devez les employer , & la » meilieure manière de le faire? Vous êtes aufli étrangers dans la Guianne que » vos Nègres ; ils font cependant parvenus à connoître les vertus de quelques plan- » tes; vous ne pouvez douter de leur favoir, par les poifons tantôt fubrils, tan- » tôt lents, dont ils fe fervent contre ceux qu'ils haïffent, & contre vous qui êtes » leurs plus grands ennemis ; pourquoi ne cherchez-vous pas à vous inftruire des » matières qu'ils employent, & dont vous avez vu fouvenr de riftes effets ? Cette » connoiflance vous donneroir le moyen de découvrir des antidotes, & votre vie >» feroit en füreté. Pour être digne de dominer fur des hommes, il faut avoir >» fur eux la fupériorité en tout genre. Soyez enfin maîtres, vous avez eté affez » long-tems des tirans,... « Si quelqu'un, dis-je, renoit ce difcours à quelques Créoles aflemblés , il verroit avec étonnement, l'un jerter un rire méprifant & de pitié, urès-familier aux femmes ; l'autre , l'interrompre par un bâillement énorme & indécent, figne non- équivoque de l'ennui qu'il caufe; celui-ci {e retourner non- ch2lamment dans fon hamac, étendre les bras & s'endormir; celui-là..... mais il fe rerireroit & S'écricroit, fans doute, quelle indolence ! quelle lâcheré!, .., quel homme ! (2) La famille des Kerckove, ( Voyez Labbat, Voyages de Defmarchais. Lorfqu'on SUR L'HIST. NATURELLE ET LES ARTS: 473 Lorfqu'on inocule la petite vérole , par exemple, l’on rend bénigne une maladie que le plus grand nombre des Européens ont une fois dans leur vie, & qui auroit pu être très maligne fans cetre précau- tion mais nous n'avons pas en nous le venin du ferpent, & fi dans l'opération on l'infinue réellement, on eft néceflairement forcé de donner un antidote quelconque , pour l’expulfer promptement; autrement , il auroir des fuites funeftes. Quelle vertu peut-on attri- buer à un poifon infinué & détruit aufli tôt , pour empêcher dans la fuire l'eflee d'un autre poifon, fouvent bien différent? car le ve- nin de toutes les efpèces de ferpens n’eft pas de mème nature. L’ex- périence eft d’ailleurs une raifon fans replique; l’on a vu des Nègres mourir d’une morfure de ferpens , après avoir fubi l’opération de la piquure, parce qu'ils avoient négligé de recourir à d’autres remèdes, Ne feroit-il pas de l’intérèc des Colons de déraciner la confiance que leurs Efclaves ont à la parole d’un fourbe ou d'un ignorant, puifqu’elle les expofe à en perdre quelquefois ? Mais il faudroit, pour cela, qu'ils commençallent par fe détromper eux-mêmes. On ne doit pas être furpris que ces mêmes demi-forciers pren- nent aufli & manient impunément un ferpent. L'on fair qu’il eft aifé de faifir ces reptiles de manière à ne pas en être mordu, & l’on n'ignore pas que les Charlatans en Europe fe laiflent mordre par des vipères , après avoir bouché exaétement les ouvertures des dents qui donnent pallage au venin. Les Charlarans de Cayenne, puifque l’on y croit que c’eft la langue des ferpens qui pique, n’ont befoin de prendre d’autres précautions que celle d’arracher l’efpèce de pe- tire poche qui contient le venin, & les dents s'ils le veulent. Je ne finirois point fi je rapportois les autres faits merveilleux que l’on cite du talent obfcur des Charlatans noirs, au fujet des fer- pens : ils les enchantent (1), les font venir en les appellant, &c. &c. Je nai fair mention de celui de la piquure, que parce qu’on le croit un remède, ou plutôt un préfervatif infaillible , dont il étoit intéreflant de montrer la fauffeté ; & le bon fens ne voit rien de réel dans trous ces fecrets , que l’adrefle de quelques fourbes , & limbécilité de ceux qui y ajoutent foi. Dans le nombre des obfervations que j'ai faites fur l’eau de Luce, je me contenterai d’en rapporter trois qui y ont un rapport abfolu; (1) Le Chevalier Von-Linné dit, d'après le témoignage de quelques Voyageurs, que l'on enchante les ferpens avec routes les efpèces d'ariffoloches & quelques autres plantes; mais l'on peur douter de leurs vertus, jufqu'à ce que des expé- riences fûres les aient confirmées. ( Wid. Hifi. Nar, Edit. 12, pages 348 ©& 383, Tome VIII, Part. II, 1776. P pp 474 OBSERVATIONS SUR LA PÆYSIQUE, tandis que dans les autres cas où je l'ai employée, la guérifon ne pou- voir lui êrre attribuée d’une manière claire & évidente, parce qu'on avoit auli fair ufage des autres remèdes. du pays. Dans un voyage entrepris dans l’intérieur des terres, je paflai chez une famille d'indiens; une confternation générale y régnoir ; elle fe difipa à mon arrivée. » Voici un François, difoient-ils, il aura » certainement quelques remèdes (1) «, Je m’informai; on me fit voir un jeune Indien étendu dans fon hamac. Il avoit été mordu, depuis quelques heures, à l'orteil , par un ferpent de l’efpèce de ceux que l’on connoît à Cayenne fous le nom de /érpers à grage(2) ; & dont le venin eft plus fubuil, & plus dangereux encore que celui du férpent à fonnettes. Son pied , fa jambe , fa cuifle, étoient prodi- gieufement enflés & durs; il avoit une fèvre ardente des plus via- lentes, avec le tranfport au cerveau. Ces Indiens avoient mis en ufage tous les remèdes qu'ils connoilfent ; ils avoient écrafé fur la plaie fcarifiée, la rère du ferpent; le malade en avoit avalé le foie, ce qui pale parmi eux pour un excellent fpécifique contre le poifon de trous les animaux vénimeux : toutes les plantes qui, felon eux , ont quelques vertus en pareille occañon , avoient été employées de toutes les manières, & n'avoient apporté aucun foulagement. Ee mal empiroit toujours, & ils s'attendoient à voir expirer bientôs leur parent. Je tentai une guérifon que je n’ofois efpérer ; je fis avaler au malade une cuiller à café remplie d’eau de Luce, dans un peu de vin; je fcarifiai de nouveau la plaie pour la faire faigner, & j'y appliquai une compreffe imbibée de la même eau. Deux heures après, l’enêure & la tenfion avoient fenfiblement diminué, ainfi que la fièvre. Je lui fis prendre une feconde dofe, & je renouvellai la comprelfe; il étoit pour lors neuf heures du foir. On le laïffa tran- quille pendant la nuit, & le lendemain matin, je le trouvai mar- chant dans fa chambre, à l’aide d’un bâton ; il avoit dormi, & la fièvre l'avoir quitté. IL ne reftoit qu’un peu d’enflure à la jambe, qui difparut infenfiblement, & le troifième jour, il alla à la pèche: I n’eft guère poflible de voir un effet plus prompt & plus mar- qué. Ce fair, dont tout un Détachement que je commandois, a RE (1) Ce propos ne démontre-t-il pas que ces Sauvages ne font pas bien aflurés de l'efficacité de leurs drogues ? (2) Serpens echinatus, Barr. Franc. Equinox, p. 159. Son nom lui vient de fes écailles qui, fur le dos, font hériffées, longues & aiguës comme les dents d'une efpèce derape, dont on fe fert pour réduire le manioç en farine, & que l’on nomme en Amérique, Grage. | | (ES SUR L'HIST. NATURELLE ET LES. ARTS. 475 été témoin ;, eft une preuve évidente de l’efficacité de l’eau de Luce, pour guérir les fuires terribles de la morfure des ferpens, & en même-tems de l’infufhfance des autres remèdes, au moins dans cer- taines circonftances, Lorfque le fecours efl prompt , une prife d’eau de Luce fufir. Un Nègre qui m'appartenoir, fur mordu, à deux reprifes, au bas dé la jambe, pat un ferpent 4 grage; & quoique cet accident lui füt ar- rivé able à la porte de la maifon, il eut peine à marcher jufqu’à ma chambre. La jambe avoit déja eu le rems de s’enfler : les dents du reprile étoient enfoncées profondément, & avoient percé deux veines. Je fcarifiai les plaies , ce qui eft prefque toujours nécefaire ; parce que les petires efpèces de ferpens ont les dents rrès-fines & déliées; j'appliquai une comprefle imbibée d’eau de Luce, & je lui en. fis avaler une pleine cuiller à café , dans un demi-verre de vin, ce qui à été fuffifant; le Nègre mordu, à neuf heures du matin, p’avoit plus à nridi la moindre apparence de mal, L'on trouvera peut-être les dofes que j’emploie, trop confdérables, fi: on les coinpare à celles qui font prefcrites ordinairement , & qui fe, réduifenc à cinq ou fix goutres; c’eft aufli à cétte petite quantité qué:fe bornoit un Chirurgien de Cayenne , à qui l’of avoit envoyé de l’eau de Luce pour en faire l'expérience, & qui feroit peut-être bon obfervateur, s'il étroit plus inftruir. Mais ce qui. peut fuffire en Europe , feroit fouvent infruétueux dans ces climats, où le venin de quelques efpèces de ferpens eft fi af, qu'il donne la mort prefque à l’inftant de la morfure:; il faur dont ,;-poar affwrer la vie, avoir recours à une dofe plus force , telle que celle dont je fais ufage , & qui ne peut avoir d’inconvénient. : L'eau de Luce eft aufli un remède affuré contre la piquure des autres animaux véhimeux\ Je me conrèriterai dé donnét une obfer- vation faire fur moi-même. Je fus piqué vivement , derrière la cuille, par un amimal-que-je;ne: pus voir, mais quetj'zi jugé êtreune ef- pèce de fcolopendre , qui porte à Cayenne le nom de mille-pieds, & dont le vénin caufe auf quelquefois la mort. Les environs de la plaie dévinrent-aufitôt enflés & enfanimés ; l’inflamtation gagna toute la cuifle qui étoit très-douloureufe; je reffentis aufli une pe- tite fièvre; je me contentai de prendre quelques gouttes d’eau! de Luce ; jen humeétai la plaies l’inflammation & les ‘autres fymptô- mes ; difpaturent peu-à:peu. [left donc bién cerrain que l’ean de Lucé a fouverainement la vertu derréfifterai venin: des’ ferpens! & des autrès aninranx' mal- faifans, commerles. fcorpions:,-les fcolopendres , &e, &c. Dé quelle utilité, de quelle néceflité n’eft donc pas fon ufags: dans les éoif- Ppp2 476 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, es méridionales de l'Amérique? L’on fera, fans doute, étonné : que dans la Guianne , j'ai été peur-être le feul qui en fût muni. Les habitans y font comme nos payfans d'Europe ; ils ont de la peine à abandonner de vicilles habitudes , & les Créoles auroient chez eux de l’alkali volatil, qu'ils employeroient toujours leurs agiers (1). Sauver la vie à quelques individus , n’eft point un objet qu'un fage Gouvernement dédaigne. L'Europe voit avec admiration, & les François avec atrendrifflement , les établiflemens formés chez eux pour les retirer, pour ainfi dire, du fein de la mort; tels fonc les fecours établis en faveur des perfonnes noyées , &ce. &c. L'on doit peu attendre de la police actuelle de Cayenne; les Chefs ne font pas affez infteuirs pour veiller à la confervation des hommes ; mais l’on doit tour efpérer d’un Müiniftère éclairé, qui, fous un Roi bienfaifant, s’eft confacré au bonheur des peu- ples. Il donnera , fans doute , à la Guianne languiffante , des Chefs actifs, inftruits & défintéreflés ; à l'exemple de leur Maître , ils travailleront aux avantages des habitans qui, auf débiles que la Colonie qu'ils compofent, ont befoin d’être encou- ragés & éclairés; femblables à ces enfans qui, par une efpèce: de peur goût dépravé, ordinaire à leur âge, fe plaifent à courir dans la boue, & qu'une main sûre & vigilante, ramène & guide dans le bon chemin. (1) Ils nomment ainfi les petites plantes, MP É SM PO UPMRMRE SU RL’ A'C'E D'E AE RTE N: Par M. BERGMAN , Profeffeur en Chymie, a Upfal. P. usreurs Chymiftes ont penfé, depuis long-tems, qu'il y avoit un. acide dans l'air, qu'on appelloit en général, acide uni- verfel , acide aërien, acidum primigenium ; mais on n’a pu être d’accord dans les jugemens qu’on a porté de fa nature. Quelques- uns ont cru que c’étoit l'acide vitriolique , & ils ont fouteniu que l'alkali fixe végétal, expofé pendant long-tems à l'air, contenoit plus ou moins de tartre vitriolé. SUR L'HIST. NATURELLE ET LES ARTS. 477 Cette expérience n’a pas réufli pour moi. Car après avoir expofé, pendant quatre ans, dans un grenier , à un courant d’air continuel, un alkali très-pur, il n’a pas donné le moindre indice d'acide vi- triolique. Il eft d’ailleurs très-aifé de fe tromper , fi la pureté du fel lixiviel n’a pas été bien éprouvée auparavant. Car il fe trouve fou- vent du cartre vitriolé dans les cendre nouvellement brülées. Il ne faut pas non plus faire cette expérience dans un lieu où l’on con- ferve des acides , ou dans un laboratoire où , à chaque inftant, on décompofe des corps, foit par le feu ou par d’autres moyens, fi on veut que le réfultar foir sûr. M. Margrave a trouvé de l'acide nitreux & de l'acide marin dans la neige & dans l’eau de pluie, quoique en petite quantité. Ce- pendant , on n’eft pas sûr de les y trouver toujours & par-tour. J'efpère à préfent pouvoir prouver , par des expériences sûres, que dans notre athmofphère , il eft par-toüt répandu un acide tout-à-fait différent de ceux qui font connus jufqu'ici , & que déformais j’ap- pellerai acide aërien. Je vais donc d’abord le chercher ailleurs, en- fuite déinontrer fa qualité d’acide , & puis prouver qu'il domine dans notre athmofphère. Le célèbre Chevalier Boyle favoit déja que toutes les fermenta- tions & routes les diffolutions produifoient une grande quantité d’air, Le Doéteur Hales a porté une attention plus marquée fur cetre ef- pèce d'air, qu’il appelloit air fixe, parce qu'il ef fixé dans les corps, u’il y entre comme principe conftituant, & qu'il y perd toute fon élafticité; qualité qu'il recouvre cependant au moment où, d’une manière quelconque, il en eft féparé. La pierre calcaire ordinaire a depuis donné lieu à des théories toutes nouvelles, & à une infinité d'expériences relatives à cet ob- jer. On fait que cetre efpèce de pierre perd , dans le feu, à-peu- près la moitié de fon poids, devient friable & foluble dans l'eau, &c. M. Black à jetté un nouveau jour fur tous ces phénomènes, par des expériences très-bien faites & très-intéreffantes. Il prouve que la pierre calcaire perd fon air fixe par la calcination & par les acides , & que la féparation de cette matière élaftique développe des qualités naturelles qu’elle mafquoit par fes combinaifons. Neuf ans après, feu M. Meyer, célèbre Apothicaire , propofa, en 1764, un nouveau fyftème , par lequel il explique trous ces phé- nomènes par fon acide gras, acidum pingue , qu'il dit fe trouver dans le feu, d'où la pierre calcaire le pompe & devient, par fon union, une efpèce de fel neutre , foluble dans l’eau , cauftique , &c. Ces deux fyltèmes font à préfent combattus & défendus alternativement, & fouvent d’une manière peu digne de ceux qui, de bonne - foi, cherchent la vérité. Il ne m’eft pas permis maintenant d'entrer dans 478 OBSERVATIONS SUR-LA PHYSIQUE, quelque examen de certe difcuflion ; mais il eft certain qu'elle a donné lieu à des expériences qui ont ouvert une nouvelle porte pour découvrir les fecrers de la Nature, & pour enrichir l’Hiftoire Na- turelle & la Philofophie , par des découvertes vraiment furprenantes. Les acides diffèrent principalement des autres fels, en ce qu'ils excirent fur la langue une fenfarion que nous appellons goût aigre; qu'ils s’uniffent avec avidité aux fels alkalis &'aux terres alkalines; qu’ils forment avec eux des fels neutres, plus doux & moins caufti- ques que chacun d’eux féparément ; qu'ils diffolvent les métaux, & changent en couleur rouge la plupart des ceintures bleues du règne végétal. J'examinerai chacune de ces qualités féparément , & nous vertons jufqu'à quel point elles conviennent à l'air fixe , que je crois être le véritable acide aérien. Un être qui a la fubrilité & la fineffe de l'air, peut difficilement affecter le goût fans aucun véhicule: Celui qui y patoît le plus pro- pre , eft l’eau pure qui s’unit volontiers avec toute forte de fels, & même avec l’air fixe. Cerre faturacion s’obrient de plufieurs manières, décrites déja par d’autres. Tous conviennent qu'il faut renfermer l'eau , avec l'air fixe, dans le même vaiffleau , & les laiffer foir en repos , lorfque l'eau pompe peu-à-peu l'air fixe, ou en accélérer la combinaifon par un mouvement convenable. On obtient l'air fixe dont on a befoin , principalement par des mêlanges qui occafionnent une violente effervefcence , où par un mouvement inteftin , appellé fermentation. J'ai fait l’expérience des deux manières , pour Cviter toute équivoque. ° Pour en faturer l’eau, il faut une chaleur moyenne , de r$ de- otés au- deffus du point de congélation , & un égal volume d'air fixe. Elle contraéte alors un goût aigrelet rrès-agréable , qui reffemble fort à celui de l’eau de Pyrmont, ou du vin de Champagne. Tous ceux qui en ont goûté, en conviennent. Cet acide eft l'ame des eaux minérales. Plufieurs Chymiftes de nos jours fe fonc trompés , lorf- qu'ils les ont confidérées comme alkalines, & en condamnant leur ancienne dénomination d’eaux acidules. Depuis plufieurs années, j'ai compofé , pour mon ufage & pour celui de mes amis, par le: moyen de l'air fixe, de l'eau de Pyrmonr & de Seltz, abfolument les mée- mes , pour le goût & pour la qualité, que celles qu’on faifoit venir de l'Etranger, & fouvent plus fortes lorfqu'on le défiroir. IL eft aifé à préfent à l’art d’imirer parfaitement une eau miné- rale , lorfque par l’analyfe on en a déterminé toutes les propriétés, & l’on pourra éviter déformais de la faire venir de fi loin avec tarir de frais, d'autant plus que pour la plupart, elles ont perdu leur force par le tranfport, & que fouvent mème elles font entièrement câtées. Je crois même qu'on: pourra obtenir , par l'art, de plus par- 4 2 + SUR L'HIST. NATURELLE ET LES ARTS. 479 faites que les naturelles, fi l’on en exclut les matières malfaifantes. L'eiu de Pÿrmont, par exemple, contient du gyps en diffolution, qui , loin d'être faluraite , peur être fort nuifble. La meilleure manière de voir jufqu’à quel point l'air fixe change la nature de l'alkali fixe végétal, c’eft de comparer une leflive qui en eft parfaitement faturée , avec un alkali cauftique , qui en eft abfolument privé, La première eft douce, fans aucun goût brûlant, & difpofée à la cryflallifation. La feconde , brûle, dévore & re- tient Opiniâtrément l'humidité. Si on le defsèche par le feu, il at- tire l’humidité de l’athmofphère avec tant de violence, qu'il fe dif- four bientôt en liqueur. La même chofe arrive avec l’alkali volatil doux & cauftique ; ce qui eft l'effet ordinaire de tous les alkalis en général, lorfqu'ils font unis ou féparés des acides. On trouve quelquefois dans certaines eaux naturelles , de l’alkali minéral dans un état particulier. Il a de la peine à fe cryftallifer , il attire l'humidité de l'air , au lieu de tomber en efflorefcence, & fait une violente effervefcence avec les acides. En combinant toutes ces circonftances , on voit que les alkalis peuvent fe faturer, par excès, avec l'acide aérien, & l’effet en eft alors le mème que celui que produit la faturarion , par excès , avec les autres acides. En calcinant la pierre calcaire , on la réduit dans un état à ne pouvoir faire effervefcence avec les acides. La même chofe arrive fans feu, fi la chaux, mife en diflolution par un acide, eft préci- pitée par un alkali fixe cauftique ; mais fi le précipitant contient plus ou moins d'acide aërien, le précipité l’atrire à foi, & devient fermentefcible à proportion. Un alkali volatil cauftique , eft long-rems à précipiter la chaux en diffolution ; mais s’il eft adouci par l'air fixe, dont il furabonde, il le fait fur-le-champ , en vertu des doubles affinités. Car la fomme des attraétions entre la chaux & l’acide qui la tient en diffolurion , l'acide aërien & l’alkali, devient alors moindre que celle des attractions entre l’acide aërien & la chaux, & l’alkali & l'acide diffolvant, précifément comme cela fe fait dans le mélange des autres fels doubles; c’eft-à-dire , que l’air fixe de l'alkali volatil s’imifçant à la chaux, reflufcite la pierre calcaire, en la féparant de fon diffolvant; & l’alkali volatil , redevenant cauf- tique par l'abandon de l'acide aërien, s’unit à l’acide qui renoit la chaux en diffolution , & forme avec lui un fel ammoniac. Si l’on mêle à l’eau de chaux une petite quantité d’acide aérien, elle fe trouble tout de fuite & commence à fe précipiter ; mais fi l’on y ajoute une plus grande quantité, & plus que le poids de la chaux, l'ean de chaux s’éclaircic fur-le-champ, & reprend fa tranfparence. J'ai confervé une pareille diffolution, pendant plufieurs années, dans 480 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, une phiole bien bouchée, fans qu’elle ait perdu de fa tranfparence. Si l’on fépare la magnéfie blanche d’un acide, par le moyen d'un alkali doux, elle ne fe précipite pas toute entière; mais une partie s’unit à l’acide aérien que contenoit l'alkali, & 1l s’y tient en dif- folution. Dans le moment où la précipitation fe fait, la matière préfente une plus grande furface , & ce qui n'eft pas attaqué alors, devient plus difficile à diffoudre lorfque les molécules , preffées & accumulées les unes fur les autres, adhèrent plus fortement. Pour découvrir ce que pouvoit l’acide aërien, fans une divifion auffi fubrile, j'ai rempli trois phioles , de la capacité de 4 pouces cubes , d'eau diftilée & farurée d'acide aërien ; dans la première, j'ai mis deux grains de fpath calcaire tranfparent , réduit en pou- dre ; dans la feconde, tout autant de magnéfie; dans la troifième, de la terre d’alun. Après avoir bien bouché les phioles , je les ai renverfées & expofées dans une chambre froide, pendant 24 heures. Enfuite je les ouvris, & après avoir filtré, je fis des expériences avec. L'eau de la première & de la feconde phiole, changea d’abord en bleu le papier teint avec le bois de Bréfil ; & lorfqu'on y ajouta de l’alkali cauftique, la diffolution fe précipita. J'ai mis une partie de chacune de ces diffolutions dans des bocaux ouverts , où il fe dépofa, au bout de deux jours, une poudre très-fine ; il fe forma en mêème- tems à la fuperficie une pellicule , ou crème de chaux, à laquelle le foleil & le contact de l'air avoient enlevé par l’évaporarion , l'excès d'acide aërien, nécelfaire pour la tenir en diffolution. On apprend, par ce moyen , la manière dont fe forment les incruftations & Îles ftalactites, ainfi que la raifon pour laquelle les eaux minérales tien- nent en diffolution de la chaux & de la magnéfie. La verre d’alun n’avoit pas fubi la moindre diffolution ; je ne m'y atrendois pas non plus, mais j'en avois fait l’eflai pour plus de füreté. L'acide aérien diffout aufli le fer, & forme avec lui un fel mé- tallique qui fait la bafe de toutes les eaux minérales martiales. L'air fixe par conféquent, fe comporte abfolument de même que les acides en général, non-feulement avec les alkalis fixes & volatils , mais même avec la chaux, la magnéfie & le fer, . J'ai été convaincu , par plufeurs expériences, que l'air fixe réagit comme acide. Lorfque par le moyen d’un acide, il eft chaffé d’un alkali quelconque, & mêlé avec de la teinture de tournefol, 1l la teint en rouge tout de fuite. Le tube dont je me fuis fervi pour la communication , avoit trois pieds d’élévation , & le bout qui tou- choir un mêlange de fermentation, étoit légèrement bouché avec du cotton trempé dans de l'huile de tartre , & couvert d’une mouf- feline extrèmement fine, également trempée dans la même matière. On pourroit cependant faire ici une objeétion que je me fuis faire x à SUR L'HIST. NATURELLE ET LES ARTS. 481 à moi-même ; favoir, que malgré toutes ces précautions, une teinte légère de l'acide diffolvant, pouffée par la violence de l'efervef- cence , auroit pu furmonter tous ces obtacles , percer à travers le coton fans fe neutralifer par l’alkali, & fe mêler avec la teinture de rournefol , qui , de routes les couleurs bleues des vépéraux , efE la plus fenfble aux acides. Mais j'ai dérruit cette objeétion par une autre expérience. J'ai expofé au foleil , ou dans une autre chaleur, cette teinture rougie par cette opération, & elle n’a pas tardé à reprendre fa couleur bleue ; ce qui prouve que ce changement doit être attribué à un acide plus volatil que les acides minéraux. Il eft bien vrai qu'en mêlant à la ceinture de tournefol très- peu d’acide vitriolique , & même d'acide nitreux, qui d’ailleurs détruit route couleur , elle reprend fa couleur bleue; mais cela doit être attribué à un peu d’alkali qui, à la préparation , eft entré dans la compo- fition de la teinture de tournefol, & qui attire l’acide. Mais aufli- tôt que cet alkali en eft faturé, la rongeur ne fe difiipe plus, mais elle refte inaltérable. Lorfqu’on fait entrer l'air fixe dans la tein- ture de rournefol , elle devroir aufi à la fin recevoir une couleur rouge conftante, fi l’acide diffolvant en éroir la caufe; mais cela n'arrive pas , quelque long que foit le tems que l’on y mer. Pour ôter route efpèce de doute, je me fuis aufli fervi d’un air fixe, féparé d’un mêlange par fermentation volontaire , où aucun: acide ne s’étoit encore développé ; j'en ai faturé de l’eau diftilée , que j'ai mêlé enfuite avec de la teinture de rournefol. A peine y avois-je mis un cinquantième , que la couleur changea fubitemenr. Cette couleur rouge fe diffipe par la chaleur, & même fans cha- leur , dans un vafe ouvert, quoique plus tard. Ainfi, puifque l'air fixe a manifeftement un goût acide; puifqu'il forme avec les alkalis différens fels neutres, & même avec la chaux, la magnéfie & le fer; enfin, puifqu’il teint en rouge la teinture de tournefol , j’efpère qu'il eft évident que cet être eft, par fa na- ture, un véritable acide. Ceci une fois reconnu, la plupart de fes propriétés deviennent des conféquences naturelles. Tout le monde fait que les acides s’uniffent avec avidiré aux al- kalis, & à plufeurs terres & métaux, & qu’ils adouciffent le goût brûlant des alkalis. L'expérience journalière démontre qu’un acide lus fort , en chaffe un plus foible ; & fi celui qui eft mis en li- LES eft plus volatil & acquiert de l’élafticiré au moment de fa féparation , il faut néceffairement qu’il en réfulte une fermentation. Car chaque molécule prend , en s'élevant , la forme d’une bulle qui furnage ; ce qui forme une efpèce d’écume ; enfin, l’air fixe , uni au phlogiftique , forme différentes efpèces de foufres & de combinaifons inflammables, qui fe manifeftenc fur-rout dans les diffolurions mé- Tome VIII, Part. II. 1776. Qqq 452 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, talliques; ce qui eft conforme avec l’afinité qu’on fait que les aci- des ont avec la matière inflammable. On voit clairement par ce qui précède, que je regarde la pierre calcaire comme une efpèce de fel neutre. Ceci pourra paroîtie ex- traordinaire au commencement , & exiger une explication ultérieure. Il eft à obferver d’abord que les idées que nous nous formons des produétions de la Nature, & des bornes qui les féparent, font fou- vent très-étroires , & mème entièrement erronées, Il eft difficile d'en marquer le point de féparation, lorfqu’enfemble elles forment une efpèce de chaine, & que femblables aux couleurs d’un tableau , elles font fondues les unes dans les autres, fans qu’on puiffe déterminer au vrai où chacune d'elles finit ou commence. Il en eft de même des fels en queftion. On donne le nom de fel aux corps qui laiffent un goût fur la langue, & qui font folubles dans l’eau. Ces qualités varient d’une infinité de manières. Le tartre vitriolé demande feize fois plus d’eau pour fa folution, que le même poids de terre foliée de tartre. Le gyps demande quatre cens fois fon volume d’eau , & le mercure doux onze cens fois pour fe diffoudre , &c. &c. Il en eft de même du goût qui dépend en grande partie de la folubilité. Nous voyons ainf une progreflion immenfe de variations, & il eft poflible qu’il y ait des fels qui demandent plus d’eau pour les dif- foudre, qu’il n'en faut pour les environner à la fois : d’où il fuit qu'ils refteront éternellement infolubles, ou qu'ils ne font attaqua- bles que par un excès d'acide, d’un feu violent & renfermé, où d’une divifñon extrèmement fubrile , &c. &c. Il faut ranger dans cette claffe la pierre calcaire, la magnélie, les cailloux, le fpath fuñble , &c. Les deux premières fe trouvent fouvent en diffolution par un excès d'acide aérien. J'ai trouvé , avec furprife, dans les puits d'Upfal, & dans d’autres eaux , du flex en diffolurion. La chaux calcinée eft foluble dans l’eau , comme on le fait, par l'eau de chaux. On trouvera peut-être fingulier qu’une certaine quan- tité d'acide aërien, la rende difficile à diffoudre. Mais l’alkali fixe eft déliquefcent par fa nature, & l'acide vitriolique attire fi vio- lemment l’eau, qu’on ne peut pas l'obtenir fous une forme con- crète. Cependant, de leur union naît un fel neutre , qui eft beau- coup plus difficile à diffoudre. Dans les deux cas, les caufes font les mêmes, & la différence ne confifte que dans le plus ou le moins. On peut prouver, par différentes expériences, que notre athmof- phère contient une quantité confidérable d’air fixe. L’alkali cauftique devient doux en plein air. On croit bien en général qu'il n’y a point de différence entre l’huile de tartre, par défaillance, & la diffo- lution de l’alkali cauftique, lorfque la quantité eft la même, mais SUR L’HIST. NATURELLE ET LES ARTS. 48; Texpérience prouve qu'il y a une grande différence , & que le pre- mier eft infiniment plus doux. L'eau de chaux , expofée au grand air, forme , fur fa furface, une croûte qui fermente avec les aci- des. Lorfqu’elle fe fépare & tombe au fond de l’eau ; il s’en forme tout de fuire une autre, jufqu’à ce qu'il n’en refte plus. J'ai brûlé du fpach calcaire tranfparent , jufqu’à ce qu'il ne fic plus d’effervef- cence avec les acides, & il a perdu, par. cette opération , les deux cinquièmes de fon poids. Cette chaux de fpath, expofée au grand air , manifefta peu à peu des difpofñrions à l’eferveicence avec les acides » laquelle augmenta tous les jours , ainfi que fon poids , juf- qu'à ce qu'elle recouvrit les deux cinquièmes qu’elle avoit perdu par le feu. Cette opération demande plus ou moins de rems, fe- lon les difpoñtions de l'air, qui n’abonde pas toujours également en acide aërien, & felon l’érendue de la furface que la chaux de fpach préfentoit à l’air. Celle qui eft bien preffée & bien enfermée, fe conferve plufieurs années ; mais celle qui refte entièrement dé- couverte , devient à la fin abfolument femblable à la terre calcaire qui na point fubi la calcination. La pluie porte aufli avec elle de l'acide aérien. On ine LE ‘ ne calcin 2 çonnerie 5 MAIS eue LCILC SL la chaux entièrement pour. la ma toujours avec les acides, Cela n’eft même pas néceffaire ; car pourvu qu’elle foit affez brûlée, pour qu’en léteignant elle fe réduife dans une poudre très-fine , l’eau qui entre dans la préparation du mor- tier , trouve allez de quoi fe faturer ; & c’eft la décompolition de l'eau de chaux , & la faruration des mollécules de chaux brülées , avec de l'acide aérien , qui lient enfuite le mortier, & le rendent dur comme la pierre. De cette manière , il fe trouve roujours & par-tout autour de no- tre globe un acide; cet acide reffemble à l'air par fa tranfparence & par fon élafticité, &c. J'ai cru , par cette raifon , devoir l’appeller acide aërien plutôt qu'air fixe ; qui eft une dénomination moins propre. Comme l'acide aérien eft plus d’un & demi plus pefant que la mème quantité d'air, il doit naturellement occuper en plus grande abondance la région inférieure de l’athmofphère, & roucher la fu- erficie de la rerre ; mais il doit fe trouver aufli à une plus grande élévation, quoiqu’en moindre quantité; ce qui eft prouvé par les matières inflammables, à la combuftion defquelles il y a roujours beaucoup d’acide aërien, mis en liberté, lequel refte fufpendu dans l'endroit où le tourbillon de feu l’a emporté, parce que fon furplus de poids ne peut pas tout de fuite furmonter le frottement. Autant que j'ai pu juger jufqu’ici, il paroît que les changemens occalionnés dans le volume de l'acide aërien, par différens degrés de chaleur , font plus confidérables que ceux de l'air ordinaire ; ce qui joint à Q qq 2 484 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, la quanticé qui, dans la mème proportion , trouve mêlée avec l'air qui nous environne & que nous refpirons , quantité qui n ef pas la mème par tout dans les différentes faifons & dans les diffé rentes années, doit influer puiffamment fur les corps des animaux , & produire plufieurs maladies dont on ignore les caufes $ jufqu à ce que les Médecins tournent leur attention de ce côte. Mais je dois auili montrer l’origine d’où cet acide provient dans l’athmofphère, L’Analyfe chymique démontre que les p'incipes prochains des corps non-feulement perdent leur adhérence, mais fe féparent, en effet, dans le même moment où ils perdent leur air fixe , lequel s comme je l'ai prouvé, n’eft autre chofe que l'air aérien. La fynchèle nous aporend , d’un autre côté, que les principes féparés s'atrachent & s’uniffenc les uns aux autres, lorfqu’ils reprennent cet air acrien. Il paroïit, par conféquent , que cet acide fert de lien & de ciment aux molécules fixes ou aux élémens des corps. Cela devient plus pro- bable, lorfqu'on confidère qu'on peut à-préfent , pat le moyen de l'acide aërien, non-feulement empêcher la putréfaction > Mais encore rendre la fermeté, la fraîcheur & le goût, aux viandes putrides , fe- tides & prêtes à fe décompofer. On a guéri par le même moyen ; RÉ PRE RS MEET at dt nn dt samy See ie are. Dans le grand laboratoire de la nature, il fe fait, fans relâche, une infnité d'opérations, comme digeftions, cuiflons , combuftions , effervefcences , fermentations , putréfaétions, &c. &c. Par-là, une uantité incroyable d’acide aërien eft mife en liberté, recouvre fon élafticité, & fe méle avec notre athmofphère. L'air en feroir bientôt farchargé, & il éroufferoit tout ce qui refpire, fi cer acide n'éroit pas néceffaire & n’éroit pas employé, à chaque inftanr, à la régéné- ration des corps qui doivent remplacer ceux qui fe détruifent. La cinquième partie de l'air que nous refpirons par nos poumons, eft gâtée & ne peut plus fervir à la refpiration. La partie gâtée n'eft rien autre chofe que l'acide aërien qui fe fépare de notre corps, re- flue continuellement dans les poumons , & en eft chaffé par lexfpi- ration. Nous le voyons clairement, quand nous poufflons notre ha- leine dans de l’eau de chaux claire. Elle fe trouble tout de fuite; & il fe forme un précipité tout comme par l'acide aërien. Nous fup- portons , dans l’air que nous refpirons, un petit alliage de cet acide ; mais une plus grande dofe nous incommoderoirt plus ou moins, felon les circonftances. Voilà pourquoi les endtoits élevés font plus fains, pourquoi l'air libre rétablit la fanté, pourquoi de petits appartemens bien fermés font mal-fains, &c. &c. Une grande effluence d’acide aérien occafonne des étouffemens , & même la mort. On en voit des exemples dans les effets. de la vapeur du charbon, des matières SUR L'HIST. NATURELLE ET LES ARTS. 485 en fermentation, dans les exhalaifons de la grotre des Chiens, près de Naples, &c. Un alliage d'un ? rend le mélange incapable de noutrir le feu qui, par cette raifon, s’éreinc fur-le-champ. L'objet principal de ce Mémoire a été de démontrer que ce qu’on appelle air fixe, a toutes les qualités d’un acide, & que c’eft ce véri- table acide qui domine dans notre athmofphère. Je traiterai, par la fuite, plus au long de fes autres qualités dont j'ai fait mention; mais avant de finir, je veux, en peu de mots, décrire les rap- ports de l’eau diftillée, faturée d’acide aërien. C’elt parce qu'on les a ignorés, qu'on n'a pu tirer des conféquences juftes des effets qu'ont produits les moyens ordinaires dont on fe fer pour l’analyfe des eaux. La pefanteur fpécifique de l’eau faturée d'acide aërien, relative- ment à celle de l’eau diftillée , eft comme 1,0922, à 1,0000. Mais fi vous expofez cette eau faturée à l’aétion de l’air dans une chambre ouverte, avec une chaleur de 15 degrés, la pefanteur diminue juf- qu'à 10018, & revient , à la fin, jufqu’à 1,0000 , après avoir perdu tout fon acide aërien. Plus la chaleur & la furface font grandes, & plus la réparation fe fait promprement. Eu fecouaur le mtlange , 1l fe forme une grande quantité de pe- cites bulles. | Il a un goût aigrelec , très-diftinét & très-agréable. En verfant une partie de ce mélange dans $o parties de teinture bleue de Tournefol , elle devient fenfiblement rougeâtre. Si l’on y verfe, goutte à goutte, une folution de fel de Saturne , le mêlange blanchir & fe trouble, & dépofe , à la fin, une poudre blanche très-fine. L’acide aërien chaffe le vinaigre, s’unit au plomb, & forme un fel très-difficile à diffoudre ; mais en y verfant du vinaigre, tout fe diffout de nouveau. Du mercure diffous dans l'acide nitreux , fe précipite également en forme de mucilage fin & blanc; mais cela ne paroîc qu’au bout de quelques jours. La folution d'argent ne produit aucun changement apparent, & même niacide, ni alkali. L'eau faturée d'acide aërien Attaque & diffout le fer qui eft en forme métallique ; mais elle n’actire rien à elle d’une chaux de fer, pas même du fable ferrugineux qui fe trouve fur le bord des rivières , & que l’aimant attire. Lorfque l'acide aérien a attiré à lui autant de fer qu'il peut, l'eau prend un goût ferrugineux fort comme les eaux minérales mar- tiales. D'une teinture forte de noix de galles, préparée avec de l’efprit de vin rectifié, & des noix de galles réduites en poudre”, une feule 486 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, goutte produit une couleur de pourpre clair dans une peinte d’eau - toute entière. Le fyrop violat en eft teint en verd. Cet effet eft produit uni- quement par le fer; & on n’en fauroir conclure la préfence d’un alkali dominant, comme quelques Chymiftes l’ont cru. Au refte, une telle eau change la teinture de Tournefol en rouge, laquelle couleur cependant fe diflipe, lorfque la teinture eft expofée au foleil ou à la chaleur, & celle-ci-ci reprend fa couleur bleue, La même chofe arrive aufli, lorfqu’il n’y a point de fer. Le fucre de plomb fe précipite comme il a été dit ci-deffus. La folution du vif-argent opère ici un peu plus promptement ; mais elle refte de même, comme il a été dir ci-deflus. La folution de l'argent paroît ne produire aucun changement. Cetre eau confervée dans un verre ouvert, forme fur fa furface une pellicule forte, de couleur changeante. On ne fauroit même empêcher cet effet que dans un vafe bien fermé, En la laiffant éva- porer jufqu’à ficcité, on en obtient environ cinq grains de fer par melure de deux pintes, laquelle eft encore difloluble dans tous les acides minéraux. Un alkali fixe cryftallifé, ou déja faturé d'acide aërien, sy pre- duit aucun changement; mais sil eft pur, ou rendu cauftique , il caufe des nuages verdâtres qui fe dépofent enfin en un fédiment jaunâtre. À Un alkali rendu bien phlogiftique produit fur-le-champ un préci- ité bleuâtre, ou bleu de Berlin. L'eau faturée d'acide aérien diffout la chaux & la magnéfie blan- che , comme il a été: dit ci-deflus; ces diffolutions fe précipitent par le moyen d’un alkali rendu phlogiftique; mais un alkali cryftal- lifé, ou non phlogiftiqué, n’y fait aucun effet. La diffolution de chaux fe trouble par l’eau de chaux. Un acide verfé deffus n'y produit aucun autre changement appa- rent, fi ce n’eft une quantité de perles qui fe montrent au fond & fur les côtés. La folution de vif-argent fe précipite en maffe légère & blanche. La folution d'argent fe précipite oiblement par le moyen de la folution de magnéfie, mais très-abondamment avec la folution de chaux. Le précipité prend d’abord une couleur noire; ce qui eft la preuve qu’il contient de l'argent. 2 LI Do ct a Li l'arié LA a SUR L'HIST. NATURELLE ET LES ARTS. 487 A —— —— NOUVELLES LITTÉRAIRES. L'a CADÉMIE des Sciences, Belles-Lettres & Arts de Rouen, tint fa Séance publique le Mercredi 7 Août 1776. M. Huiles de Couronne , Secrétaire Perpétuel pour les Belles-Lertres & les Beaux- Arts , rendit compte des divers Ouvrages de fon département; il pro- clama les Vainqueurs dans les claffes de la Peinture, du Deflin & de l'Architecture. Les Prix, fondés par le Corps Municipal, leur furenc publiquement diftribués. Il annonça que le grand Prix de 1777, feroit deftiné à une pièce de 200 Vers François au moins, dont le genre & le fujet font laiffés au choix des Auteurs. Les Pièces, écrites bien lifi- blement, feront adrefées, franc de port, & dans la forme ordinaire, avant le premier Juiller 1777, à M. Haillet de Couronne. M. Dambourney , Secrétaire Perpétuel pour la partie des Sciences & des Arts utiles, annonça les Ouvrages des Savans Etrangers & des Aca- TER à démiciens. Savoir : ME LÉ RIDE MON UT ONE: 1°. Un Méroire de M. Danricq, fur la caufe des Epidémies & des Epi- gooties , que l’Auteur impute à l’alkalefcence des fucs digeftifs. Il re- commande, pour remèdes, tous ceux qui , par leur acide propre ou accidentel, peuvent corriger cet excès d’alkali; tous les anti-fepriques, les boiflons fermentées, telles que le vin & la biere, qui deviennent acides dès qu’elles entrent dans l’eftomac ; le vinaigre, le petit-lai, le fuc d’ofeille & de citrons, les bains froids, l’expolition à l'air libre, & la propreté. C’eft ainfi qu'il a préfervé ou guéri fes bœufs & fes chevaux au milieu d’un Village infefté de la plus terrible épizootie. M. Danticq cite , par analogie avec fa mérhode curative , celle du Docteur Lerfons, qui guérifloit toutes les fièvres putrides, en ordon- pant par jour , à fes malades, jufqu’à trois pintes de vin de Bordeaux, autant de forte & de petite biere qu'ils en pouvoient boire , & au moins deux onces de quinquina en décoction. 2°. Un volume 27-12, intitulé : Recherches fur la Rougeole, fur le pallage des alimens & des médicamens dans le torrent de La circulation , &c. par M. Duboftq de la Roberdiere , Médecin , réfident à Vire. É 3°. La Differtation fur la Lymphe, par M. de Laffus , premier Chirur- gien de Mefdames de France, qui I€MPOrtA » EN 1773 » le Prix de l'A- cadémie de Lyon. 483 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, 4°, Un vol. 7-42, intitulé : Obférvations fur les Maladies Epidèmiques de 1770, publié par ordre du Gouvernement; ouvrage de M. /'Epecg de la Clôture, Doéteur-Régent en la Faculté de Caen, Aggréocé au Collége de Médecine de Rouen. Dès le commencement de fes études, l’Auteur , perfuadé que /4 Nature feule guérit les maladies , penfa que tout honnête homme qui de- fire d’en devenir le miniftre & l'interprète, doit employer toutes fes facultés à la bien obferver , afin de pouvoir feconder fes vues. À me- fure qu’il s’affermiffoit dans cette réfolution par l’expérience, il regret- toit de plus en plus, que depuis les 42 Hiftoires des Epidémiques d’Hyppocrate , on eùt négligé de fuivre ce plan, tracé par le Pere de la Médecine. Outre un long & favant Difcours préliminaire qui annonce la marche & le but de l’Auteur , ce volume contient l’état général des Sailons de l’année 1770 , l’hifloire des Maladies qui régnèrent alors à Rouen & dans les environs. Celle des épidémies du Gros-Theil, de Louviers, & des Prifons du Palais, pour lefquelles M. ?’Epecg fut chargé de porter les fecours du Gouvernement. En marge du détail des accidens arrivés à chaque malade, font trois colonnes qui indiquent les remèdes adminiftrés, leur effer & les crifes. Enfin, on retrouve à chaque page, le fage Obfervateur , le Philofo- phe Médecin, l'Homme fenfible , le Citoyen éloquent & modefte. Prefque indifférent pour fa propre gloire, il ramène toujours la con- noiffance du Lecteur fur les travaux de fes Coopérateurs , ou fur le zèle du Magiftrat qui difpenfoit les bienfaits du Roi. L'Ouvrage fut d’abord écrit en Latin ; mais l’Auteur l’a mis en François, par l’ordre du Miniftère , qui defire qu'il foit dépofé dans tous les Hopitaux du Royaume. É CC D ANNE OMUS ENS: s”. Une Montre, par M. Duval, Horloger à Rouen, Adjoint à l’A- cadémie, Elle eft à équation , à fecondes, & aufli utilement compliquée dans fes effets, que celle que l’Aureur avoir préfentée en 1773. Mais ila fu réduire celle-ci à un très-petit volume , ce qui la rend beau- coup plus agréable. Il y a aufli appliqué le moyen inventé par M. de l’'Epine , pour la remonter par le bouton. 6°. Un Procédé qu'a trouvé M. Quentin, Neveu , Pompier à Rouen, our rendre amovibles, en moins d’une minute, les Pompes foulantes, fixées dans les Puits des maifons; de forte qu'on peut les tranfporter où l’on veut, pour prêter fecours contre les incendies. 7°. Une Machine inventée par le fieur Micolas Gafquouin , pour faire à toutes Les pièces de Menuiferie courbées, ou cintrées , des Raïnures à recevoir Les panneaux. Il précend qü’avec cet inftrument, on peut faire trois SUR L’HIST. NATURELLE ET LES ARTS. 4%9 trois raînures, en moins de tems qu’on n’en employeroit à en for- mer une feule, avec les outils ordinaires. 8°. Une nouvelle Barrière, forte & peu difpendieufe, qui ne peut être enlevée, & dont la ferrure, très-fimple , n’eft point fujetre à être forcée ni engorgée ; par M. Groult , Procureur du Roi en l'Amirauté de Cherbourg, Affocié. 9°. Un Mémoire de M. de Bernieres , l'an des quatre Controleurs Gé- néraux des Ponts & Chauffées, Affocié, fur un Rouet, avec lequel une feule perfonne peut filer à-la-fois deux fils de lin ou de chanvre. Après avoir détaillé les avantages du Rouet fimple à pédale, fur celui dont on fait mouvoir la roue avec la main, comme auf l'importance de diminuer le prix de main d'œuvre de filature, M. de Bernieres pale à la defcription de fon Rouet. Il a feulement ajouté à celui à pédale une feconde tère ou bobine, & fixé Ja quenouille au milieu, fur une jatte qui contient une éponge ou un chiffon mouillé. Il en téfulre qu'après quatre ou cinq jours d'exercice , une femme file prefque le double de ce qu’elle pourroit filer avec le rouet fimple à manivelle. II propofe ce moyen pour occuper plus utilement les pauvres dans les hopiraux, & donne le deflin d’une falle où l’on pourroit en raffembler un grand nombre fous l’infpeétion d'une ou de deux perfonnes, Il recommande que les pédales foient larges, & qu’on accoutume à y appliqner+les deux pieds alternativement , tant pour délaffer, que pour prévenir les difformirés qu’occafionneroit dans la taille des enfans, l'habitude de s’incliner d’un feul côté, Plufeurs de ceux que M. de Bernieres à exercés, fe font avifés d'eux-mêmes d'y placer les deux pieds à la-fois; ce qui maintient le corps dans un a-plomb parfait. 10°. La Defcription, les Deffins & les Calcul de l'Appareil dont on s’eft fervi à Breft, en préfence de M. de Sartine, pour tirer à fec fur la cale, une frégate de 26 canons, qui pefoit, tant en poids réel , qu'en réfiftance de frottement & d’inclinaifon du plan, 372 ton- neaux, ou 744000 livres. Cette opération fut faire à l’aide de fix cabeftans müs par la force de 384 hommes. Ce Mémoire, &c. eft de M. Forfait , fils, Adjoint. 11°. Le Modèle d’une Eclufe deftinée à retenir l’eau de mer dans un bain, tel que celui du Havre; par M. de Ceffart , Ingénieur en Chef des Ponts & Chauffées à Rouen, Adjoint. 12°. Une Machine , avec laquelle un feul homme peut faire agic alternativement neuf battoirs fur des pièces de toiles on d'indiennes, & les arrofer, par un feul & mème mouvement; par M. Scanegauty , Titulaire. Tome VIII, Part. II. 1776 RATE 490 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, 13°. Le Modèle d'un Tablier également léger & folide , pour remé- dier aux inégalités du pont de bateaux de Rouen, dans les eaux ex- celivement hautes ou balles; par M. Scanégarty. PIO-NAE SE AGP AUUUS SEE. 14°. Le Mémoire imprimé de M. Perronet , premier Ingénieur des Ponts & Chauffées, Affocié, fur les Moyens de conduire à Paris une partie de l’eau des rivières de l'Yverre & de la Bièvre. 15°. Des Oëférvations fur le Canal fourerrein de Picardie; fur les Moyens de le perfectionner; les Inconvéniens auxquels ce plan eft encore fujet, & les Remèdes qu'on y pourroit apporter; par M. de Ceffart, Adjoint. 16%. Un Mémoire procuré par Mgr. le Duc d’Harcourt , Gouverneur de la Province, fur le Mortier que les Romains employoient, tant pour la conftruction des édifices, que pour les renduits. L'Auteur du Mémoire préfenté par Mgr. le Duc, cite les textes de Pline, de Pallade & de Virive, & en conclut que les Romains n’avoient que deux manières d'employer la chazx : celle qui étroit fufée à l’eau, qu’il n’éroit pas permis de mettre en ufage avant trois années de fuñon, fervoit particulièrement aux rerduirs ; l’autre, feulement fraifée, en pouflière fine comme la poudre à cheveux, en- troit pour un tiers dans les mortiers; on y ajoutoit deux tiers de fa- ble lavé & encore humide, fans autre fupplément d’eau. On géchois le tout comme du plâtre, & on l’employoit diligemment, On a fair à Paris, avec ce mortier & des débris de pierres, un obélifque de trente pieds de hauteur d’un feul jet; des vafes d'ornement, des balcons & des males de pierre faétice, plus dures que celles dont les fragmens étoient entrés dans la compolition. L'Académie a nommé des Commiifaires pour répéter ces effais. PU VS RU UT. 17°. La Differtation de M. Vincent, Régent de feconde au Collége d’Eu, fur une Trombe rerreftre , obfervée , près de ladite Ville, le 16 Juillet 1775. 18°. Un Aréomètre nouveau, deftiné à maïntenir la juftice entre les Commerçans d’eau-de-vie & les Fermiers des droits des Aides; par M. Scanegatty. - 19°. Une Relation du Tremblement de terre, reMenti à Breft, le 30 Jan- vier dernier, à onze heures du foir; par M. Blondeau. L’Aurteur à obfervé que le’plus grand froid de l’hyver dernier n’a été à Breft, que SUR L'HIST. NATURELLE ET LES ARTS. 491 de 4 & 5 degrés, tandis qu’il étoit de 16 à Paris, & de 15 degrés au Havre. Quelle différence entre des poñtions fi peu diftantes & aufli peu diverfes à rous égards ? 20°. Le Détail des Expériences faites par M. de La Follie, en pré- fence des Commiflaires nommés, & des Obfervations contraires au fyftème de la converfion de l'air en eau. 219, Sel, dont la cryftallifation prend toujours la forme de petits arbres diftinctement féparés les uns des autres , le tronc au centre, & toutes les branches tortueufes y attenantes. Ces petits arbres font par- fairement definés. M. de la Follie à obtenu ce fel d'une combinaifon de terre arsilleufe, d'acide fulfureux & d’alkali végéral. 22°. Deux Machines pneumatiques | rettifiées & plus parfaites que celles qu'on a faires depuis peu en Angleterre; par M. Thillaye , pere, Plombie: privilégié du Roi à Rouen. 23°. Une Dif{ertarion de M. Parmentier | Affocié, qui, d’après des expériences repétées, détruit le préjugé accrédité, que l'odeur des fleurs de l’aubépine fait gârer divers poiffons, & particulièrement le maquereau. 24%. Un Mémoire de M. de Valagé, ancien Officier d'Infanterie, fur la Caufe de l'Elévation des Vapeurs dans l’athmofphère, H EST O‘LR EN°-A T U R E-L L E. 25°. Un Mémoire de M. Dambourney , fur un Thouyou femelle ; ou une Autruche des Terres Magellaniques , vivante depuis dix-huit mois, chez M. de la Norraye, à Canteleu, près Rouen, & un des dix œufs qu’elle a pondu cet été, dans lefpace d'un mois. Cet œuf montré à la Séance, pefoir vingt-deux onces. On regrette fort que le mâle foit mort dans la traverfée de Buénos-Aires à Cadix, puif- qu'on ne peut eflayer de multiplier ici ces oifeaux, originaires d’un pays plus froid que le nôtre. Cette autruche a, par choix, couché fur la neige pendant l’hyver dernier, & s’eft toujours refufée aux foins qu'on a voulu prendre pour l’enfermer pendant les nuits. Cu A MOUE 26°. Un Procédé, pour appliquer fur le fer poli un vernis de la plus grande folidité, en frottant avec de la cire la pièce chaude, & l’ex- pofant au feu à diverfes reprifes; par M. de /a Follie, Le fer chaud , éteint dans l'huile, y acquiert un vernis moins brillant, mais ca- pable de préferver de Ja rouille les clous, les chevilles & les boulons de fer qui affemblent les pièces de bois des navires. Ce feroit un Rrr2z 492 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, moyen d’en retarder le dépériffement, puifque la plupart manquent par les ferrures, qui, en fe rouillant, ceflent d’en entretenir la liaifen. 27°. Un Mémoire de M. l'Abbé Clouet , Affocié , fur la Mérhode fuivie à la Prévalaye, en Breragne, pour faire l'excellent beurre ainfi nommé. Les atrentions de propreté, de nouveauté de la crème, & autres petits foins, font les mêmes qu'on obferve dans le pays de Baye; ce qui confirme l'opinion de l’Auteur fur l'influence du fol, d'autant plus qu'on a éprouvé que des pâturages produits par les grai- nes des herbes du lieu, femées ailleurs, & chargés des mêmes va- ches, n’ont pas procuré la mème qualité de beurre. 28°, Des Echantillons de Bägins , fabriqués en Normandie, & blan- chis par un procédé que M. de La Follie promet inceflamment. Les trois nuances de blanc naturel, blanc de lait & blanc-bleu, lPem- portent infiniment & également fur les bâzins blanchis en Hollande, qui, jufqu’à-préfent , avoient la préférence fur tous les autres. HV DS RO GARE AD, CELA: 29°. Les Cartes des côtes orientales de la France & de l’Efpagne , ainfi que les Ifles Açores & les Canaries ; par M. l'Abbé Dicquemare , Alfocié. Ces Cartes font partie du Neptune oriental de M. d’Après de Mannevilleite. 30°. Une Carte réduite des côtes de Normandie, tracée par M. de Gaule, Hydrographe au Havre, Affocié ; pour faciliter aux Naviga- teurs venant du large, la connoiflance des feux, ou phares, élevés par la Chambre du Commerce de Rouen; fur les côtes de Barfleur , de la Hève & le Cap d’Ailly. 1°. Un Mémoire intitulé : Réflexions concernant le Fond de la Mer ; M, de G É par M. de aule. MODO M N EN ANSE ISO VUS ENS: 32°. Un Projet d'Inflrument pour opérer la trifection mécanique des angles; par M. Chef. d'Hôtel , Vice-Directeur. ANS TT MRIEON NM ONMAP EME: 33°. L'Obfervation de PEclipfe totale de Lune, du 30 Juillet der- nier; par M. Dulague, Titulaire, Profeffeur d'Hydrographie à Rouen. SUR L'HIST. NATURELLE ET LES ARTS. 49; Les Prix fondés par le Corps Municipal, pour l’Anatomie, la Chirurgie, la Botanique , les Mathématiques , l'Hydrographie & l'Art des Accouchemens, furent publiquement diftribués aux Vain- queurs proclamés. M. Dambourney lut fon Eloge hiftorique de feu M. Dufay , Afocié, réfident à Dieppe, décédé au mois de Mai dernier. Le grand Prix des Sciences étoit deftiné, cette année, au Mémoire qui auroit le mieux expofé Ze progrès des Arts utiles ; cultivés dans la Ville & dans la Banlieue de Rouen , jous le règne de Louis XV, & leur influence fur le commerce de la Normandie. Quoique l’Académie n’ait reçu aucun Mémoire, elle croit ce fujec affez intéreffant pour le continuer à l’année prochaine. Elle à permis à fon Secrétaire d'indiquer , dans cette Séance, les Citoyens dont les découvertes utiles méritent qu’on honore leur Mémoire, & de rendre un jufte hommage à ceux qui nous inftruifent encore par leurs exemples & leurs travaux. En conféquence, M. Dambourney lut un Apperçu des progrès de l’induftrie dans les manufactures de ziffus de toutes matières, dans la teinture, les mécaniques, les fayances, les papiers, l’art des pompes, la conftruction des vaifleaux, & enfin de l’accroiffement du commerce facilité par la perfe“tion des grands chemins & la navigation. Cetre lecture donna une idée de l’im- orrance du fujer, & des reflources qu’il offre à quiconque voudra A traiter. Les Mémoires feront adreffés, franc de porc, & dans la forme ordinaire, avant le premier Juillec 1777, à M. L. 4. Dambourney , Négociant , rue Herbière, Secrétaire perpétuel. Il feroit à fouhairer que routes les Académies fuivifent l’exemple de celle de Rouen. Ceux qui veulent s'inftruire & travailler, fau- roient au moins dans quelle mine ils doivent creufer pour trouver des matériaux. Que d’Académies muettes ! 404 TABLE GÉNÉRALE TABLE GÉNÉRALE DES A IRAT CL ESS CONTENUS DANS CE HUITIÈME VOLUME. PE EN SE OUPS" D EUXIÈME Mémoire d'Optique, ou Recherches fur les Couleurs acci- dentelles ; par M. le Doëleur DE GoDaRT, Médecin des Hopitaux de Vervier, Page 1: Troifième Mémoire d'Optique, où fuite fur celui des Couleurs acciden- celles ; par M. le Doëleur DE GoDART; 269 Quatrième Mémoire d'Optique ; ou Explication d'un Phénomène remarque par M. l'Abbé Rozier ; par M. GopaRT, 341 Invitation à MM. les Phyficiens , pour examiner la Queflion du Feu central , SI Differtation fur ce que les hommes peuvent voir les mêmes objets fous des cou- leurs différentes , & fur ce qui en doit réfulter par rapport aux Peintres ; par M. l'Abbé DicQuEMARE : Profeffeur de Phyfique & d'Hifi. Nat. 64 Obférvation fur le Pont du Saint - Efprit, @ Jur la dilatation ou con- traëlion des gerfures de fes piles pendant le froid & le chaud, 399 Obférvations détachées de l'Ouvrage de M. Bowzes , éntitule : Introduction À l'Hiftoire Naturelle & à a Géographie phyfique de l'Efpagne , 404 Obfèrvation fur la Poudre à tirer ; par M, Bowtes, 405 Effai fur la poffibiticé de divifèr un Angle quelconque , en ne faifant ufage que de la régle 6 du compas ; par M. Romain, 55 Lettre adreffée à l Auteur de ce Recueil , en Réponfe à celle de M. ROMAIN , fur la poffibilié de divifer un Angle quelconque , en ne faifant ufage que de la règle Ë du compas, 142 Expériences fur Les Liqueurs animales ; expofées à la machine du vuide; par M. le Doëteur DARWIN , 97 Lerrre de M. Maurerit, Prieur de Caffan, pour expliquer les variations du Baromètre, 121 A DIE ARIAI.C LES. 20 Lettre à L Auteur de ce Recueil; par M. PAsumor, Ingénieur-Géographe du Roi, concenant des Obférvations météorologiques | comparées des la fin de 1766, jujqu'a la fin de 1772 > Obfervations fur le Froid extraordinaire qu'on à reffenti en Hollande en Frife, en 1774 & 1775, € fur la denfité de la Néige; par M. VAN-Swinpen , Proféfjeur en Philojophie ; à Francker en Frife , 316 Obfervations nt à faites au Havre, fur Le grand Froid du mois de Janvier 1776 ; par M. l'Abbé DicQuemare , 225 Lettre de M. ÂrExANDRE VorrA, fur L'ELrophore perpétuel de fon in- vention , traduite de l'Icalien par M. l'Abbé M***. 21 Lettre adreffée à Ll'Auteur de ce Recueil, par M. 1e Bees de l’Acadé- mie Royale des Sciences, fur la APR faite par M. Warsu, de d'étincelle éleëtrique rte par l'Anguille de Surinam, 331 Effai fur une nouvelle manière de perfélionner les Machines éleëfriques ; par M, L'ANGE PE VILLENEUVE, 353 Oëérvations Jur l'électricité de la Glace; par M. AcHARD, de l’Acade- mie Royale des Sciences de Pruffe : 364 Mémoire fur une nouvelle Roue électrique ; par M. BERTuo1oN , Prêtre de Saint-Lazare , G& Membre de plufieurs Académies , 89 Mémoire dans lequel on examine, ff les Animaux des différentes nié tranfimettent Le choc éedrique 6 à quelle fubflance ils doivent cette vertu ; par M. BirntuoLoN, 377 Mémoire dans lequel on examine quelles font les Plantes qui communiquent plus ou moins de commotion élettrique, & dans quel état elles ont plus ou moins cette vertu ; Ga quelle fubtance elles doivent cette propriété ; par M, B:rTHoLoN , 211 Nouvelles Expériences éleilriques ; par M. Comvus , fur la Senfitive, 395$ Sur l'or 6 Le charbor foumis à l’étincelle d’une forte batterie | 396 Ca ES M AE, O: SERVATIONS Phy fico - Chymiques fur les Couleurs ; par A1. Oroix, Mañtre en Pharmacie à Provins, page 100 Suite des Obfervations Phyfico-Chymiques fur les Couleurs ; feconde Partie, des Couleurs confidérées dans la lumière ; par M. Ovorix ; 189 Efai Jur les caufes de la Jalure de la Mer c 16 Memorre Jur le Phlogiffique , confidèré comme caufe du développement , de la vie & de la defiruétion de tous les êtres dans Les trois Règnes ; par M, Sexesien , Biblicthécaire de la République de Genève, 25 496 T A:BILIE :G ÊÉ N ÉRIALE Obférvätions fur le Syfléme de la converfion de l'Air en Eau , adreffées à M. ve Macuy , par M. DE LA Foxte, 47 Effet fuppofé de l'ébullition fur l'eau qu'on veut glacer plus promptement , vérifié par des expériences ; par M. Brack, Proféfleur de Chymie à Edimbourg , 69 Extrait & fuite d'Expériences [ur les Phofphores 6 Les Couleurs prifmati- ques qu'ils offrent dans l'obfeurité ; par M. Wuson , Membre de la Société Royale de Londres , 72 Obfervation fur la cryflallifation du Fer; par M.ve Morveau, 348 Differration Chymique fur le Nickel; par M. BEKGMAN , Profeffeur Royal de Chymie, à Stockolm , 279 Mémoire fur l'Acide aërien ; par M. BERGMAN , Profeffeur en Chymie a Upfal , 476 HISTOÏR:E: NW UR ELLE N. TE des Obfervations fur La Phyfique & fur l'Hifloire Naturelle ; par M. l'Abbé Dicquemare , Proféffeur de Phyfique, & Membre de plu- fieurs Académies. . .. La Larme marine & [a chenille , page 222 Mémoire fur la génération de la quatrième efpèce d'Anémones de mer; par M. l'Abbé Dicquemare, 305 Suite des Découvertes de M. l'Abbé DicQuEMARE fur quelques Repro- duitions animales , 314 Différtation fur les limites des Règnes de la Nature; par M. l'Abbe DicQuEMaARE, 374 Obférvations fur les Mélanges , 123 Effai fur la Fourmi ; par M. BARBOTEAU , Confeiller au Confeil Su- périeur de la Martinique, 383 Suite du Memoire fur la Fourmi , 444 Obfervations fur les Serpens de la Guianne, & fur l'efficacité de l'Eau de Luce pour en guérir La morfure ; par M. SONNINI LE Maxoncour, Correfpondant du Cabinet du Roi, 469 Lettre fur La manière de conferver la Vanille, 120 Obférvation fur la maffe d’eau ou Typha; par M. Duroxr, Profeffeur de Mathematiques , 227 Lettre adreffée à M. le Comte PARADIS! , fur la circulation d’un fluide , découverte en diverfès plantes ; par M. l'Abbé BonAvENruRE Cortr, Profeffeur de Pliyfique au Collége de Regpio , 232 Mémoire de M. Le Doëteur BRownrice , fur quelques Echantillons de Sels natifs, préfèntés à la Société Royale de Londres, 137 ( Lere DER ee VTT te SE L« DES ARR EC L E #. de Lettre de M. Grosson , de l’Académie des Sciences de Marfeille , fur Les anciens Volcans de Beaulieu en Provence , 228 Précis du Rapport fait à l’Académie Royale des Sciences, par MM. Macquer, le Chevalier d'Arcy @ le Comte de Mirrx , d'un Mé- moire fur La mine de Plomb de Huelgrat, de M. Guizror pu HAMEL,255$ Expériences faites fur le Pic du Midè dans les Pyrennées ; par M. v'ArcrT, Leéleur & Profeffeur Royal de Chymie au Collège de France, 403 Obférvation fur la mine de Cinabre d’Almadën ; par M. BowLes, 404 Obfervations fur l’Alkali fixe du falpètre tout formé dans celui d'Efpagne ; par M. Bowzess, 404 Obfervation fur la montagne de marbre blanc de Filabre en Efpagne; par M. Bowzess, 406 Objfervation fur les Salines de Mingranilla en Efpagne ; par, M. BoWLES, 407 Objervation fur un amas fingulier d’Os foffiles qu'on trouve près de Concud, village d’Efpagne; par M. Bowzes, 408 MMRAQUDN dE TEA 'NNSE, Larre E adreffée à l'Auteur de ce Recueil, par M. Mavretir, Prieur de Caffan, fur La petite Vérok, page $6 Réflexions Jur l’ufage de l’Algalie dans Les veffies malades, fur Les in- convéniens qui en réfultent , & les moyens d’y remédier ; par M.NAVIER, + Doiteur en Médecine , 61 Objérvation fur un accident fingulier , occaffonné par un coup de foleil ; par M. CHANGEUX , Oëfervation fur une Femme qui fait ufage de fon bras droit , malgré qu'on ait amputé toute la tête de l'humerus ; par M. JAMes-Benc, Chirur- ien a Newcafile , { 130 Manière d'appliquer L'Air fixe aux Cancers , qui procure, en peu de tems , une ceffation de douleurs, & une diminution très-confiderable dans le Cancer ; communiqué par M. be MaceLLaAN , 132 Déjéription d'une Matrice & d'un Vagin doubles ; par M.Purcert ; Pro- fejeur d'Anatomie au Collège dé Dublin, 143 Oëjervation Jur une Afphixte ; par M. ve LA ToureLe , Secrétaire per- pétuel de la Société d'Agriculture de Soiffons ; 401 Tome VIII, Part. II. 1776. Sisis 498 TABLE GÉNÉRALE, &c. À: GR IC U L'T'UR'E O: SERVATIONS fur les Oliviers de la Plaine de Séville; par M. BowLes , page 406 Obfervation fur une manière particulière de cultiver les Choux ; par le méme , 410 Ve Vila it A D ESCRIPTION d'une Machine propre à mefurer La quantité de pluie & d’eau fournie par da neige; par M. PAsumor, page 43 Déféription d'un nouveau Fourneau de Laboratoire ; par M. ve MoRvEaAu, 117 Principe d’après lequel M. Suxzer conflruit fes Thermomètres , 221 Mémoire fur une manière de communiquer du mouvement à l'eau d'une Baignoire ordinaire ; 6! augmenter par-la les effers falubres des Bains domeffiques , em Les rapprochant a volonté de ceux d'eau courante ; par M. le Comte ve Miriy, 298 Obférvation fur l'avantage de la Bruyère en arbre pour faire du Charbon ; par M. Bowress, 409 Vues Economiques fur Les Moulins & Preffoirs à huile d'Olives , connus en France ou en Italie, 417 Addition à la Deftription du Sphéromitre , inferée dans le Cahier du mois de Juin 1776, page 4855 , 398 Nouvelles Littéraires & fujets de Prix, 145, 259 336, 411, 487. Eloge de M. JALLABEKT , 83 - Programme de la Société des Arts de Genève , 145$ Lertre de M. ve LA Lanve, de l'Académie Royale des Sciences , con- tenant des Notes fur l Eloge de M. COMMERSON , publié dans ce Re= 5 s BAS DS cueil, Cahier de Février 1775; 22 : 357 >1 152 Rd Ke Jéconde Partie. RAVIE Fin du Tome VIII TT = = WE ONE DENT ET TIR . RE Re er é CR D 1 AA M EN MTL, AL EE AU ill (ui Diambre. 2776: RS } ' Pr ue FF CUT J er EAU M | È LR ppt nn HT TT rt RE | Res | V/ e En MR e 1 “AU ut ln! nn ET Lo ae Et A (An Lui | dt il ol . NS pv er 2 r : l mA _ 1 L 2 à "4 M: l # m1 1h 1 . y : Un FT 2 t £ : Ni Fi NL | " DOUTE 14 ù “TNT à RTS RSS SE SERRE TES RER HT