SR IIS , ES DER tre Er pren An l'ai r r x CR AL UN ”! ' P È * : L LR f w Li Pnt #1 qe PA | » " U ? i] j ral {} » ) L FA : ERA A He 1 " 4e | D L 1 + 1% OBSERVATIONS (ETES L AGP HYSIQU_E, SUR L'HISTOIRE NATURELLE ET SUR LES ARTS, AVEC DES PLANCHES EN RARE IE- DOUCE: DÉDIÉES À M“. LE COMTE D'ARTOIS: Par M. l'Abbé RozrER , de plufeurs Académies ; par M. J. A. Moncez le jeune, Chanoine Régulier de Sainte Geneviève, des Académies Royales des Sciences de Rouen, de Dijon , de Lyon , &c. &c. & par M. DE LA MÉTHERIE , Dodeur en Médecine , de plufieurs' Academies, JANVIER 1788. HOONNEE EX CCI. LL 7. CE AU BUREAU du Journal de Phyfique , rue & hôtel Serpente, MABDIC CE XNXEX- VITE AVEC RM ILEGE" DU ROL mr] [R 4 DE” | ‘ SENS SD = LEE f ? Æ SE FSC 221 MÉMOIRES SUR L LA PHYSIQUE, SUR L'HISTOIRE NATURELLE, ET SUR LES ARTS ET MÉTIERS. ps —— DISCOURS PRÉLIMINAIRE: Par M. DE LA MÉTHERIE Déecee cette année offre peut-être moins de grandes découvertes que quelques-unes des précédentes, cependant on voit avec plaifir la même ardeur fe foutenir dans la recherche du vrai. Nous ofons même dire que l’efprit humain fe perfetionnant chaque jour , la raifon marche aujourd’hui d’un pas plus ferme & plus afluré. Les grandes vérités morales « & politiques font difcutées dans ce moment avec une nobleffe qu’on ne fauroit trop admirer, & avec une décence également éloignée & d’un enthoufiafme fanatique & d’une bafleffe fervile. La Philofophie qui a amené cette heureufe révolution , porte par-tout un regard éclairé; & Tome XXXIT, Part. I, 1788, JANVIER, À 2 (ha 4 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, fi le méchant ne triomphe encore que trop fouvent, au moins eft-il effrayé par le cri public qui le pourfuit. Il entend dire de toutes parts : VoiLA L'ENNEMI DE SES SEMBLABLES. Ce progrès de la raifon eft dû à l'avancement des fciences naturelles. Lorfque l’Aftronome fuit les mouvemens d’une comète qui femblent les plus irréguliers; que le Zoclogifte & le Boranifte examifent avec un détail qu'on feroit d'abord tenté de regarder comme minutieux , toutes les parties d’un animal ou d’une plante; que le Minéralogifte décrit la pierre en apparence la plus, fimple ; que le Phyficien recherche les loix qui animent tous ces êtres ; que le Chimifte rente l’analyfe de ceux qui font à fa portée. ...on doit être bien perfuadé que c'eft cette mafle de lumières qui a ébranlé les coloffes effrayans du defpotifme & de la faperftition qui pèfent fur une partie du genre-humain. Sous ce rapport l'étude des faits de la nature acquiert encore un nouvel intérêt pour l’ami de l’humanité, Afronomie. Wevelius dans la carte de la lune qu'il publia dans le fiècle dernier avoit défigné comme volcanique le voifinage de la tache nommé Mons porphirites. Dominique Cafini avoit aufli foupçonné que quelques lueurs qu’il apperçut dans cét aflre pourroient bien être des volcans. Dom Ulloa crut voir dans la lune une échancrure , qu'on aima mieux regarder comme l'effet d'un feu. Mais il étoit réfervé au célèbre Herfchel de confirmer l’exiftence des volcans de la lune. Ce fur le 21 avril de cette année qu’il en apperçut trois d'une manière bien diflinète dans cet aftre. Cette découverte confirme les analogies qui avoient faie dire que la lune étoit femblable à notre terre. Elle nous apprend encore que cet aftre a réellement une atmofphère. On en doutoit , parce que la lumière en paffant auprès de lui n’éprouve pas une réfraction fenlible. Mais d’un autre côté il eft très-certain que nalle combuftion ne peut s’entretenir fans air. Ainfi, comme le marquoit M. Girtaner, on eft obligé de reconnoître que la lune a une armofphère. Le même Aftronome a aufli reconnu deux fatellites autour de la planète u’il a découverte. M. Herfchel a achevé fon télefcope de 40 pieds & un autre de 20, Le miroir de celui de 40 pieds a quatre pieds 2 pouces de diamètre & pèfe 103$ livres. C’eft avec celui-ci que notre illuftre Affronome parcourt ou balai , faivant fon expreflion , toute la partie du ciel vifible dans nos climats, Il efpère avoir fini ce travail dans l'efpace de 10 à 12 ans, aidé par Mademoifelle Herfchel fa fœur aufli laborieufe que lui. Il a trouvé des parties du ciel tellement peuplées d'étoiles, que dans le feul champ de fon télefcope , il en compte depuis 60 jufqu'à I10 , & que dans uüné zone de 15 degrés de iongueur fur 2 de largeur, il a vu pafler dans une heure 0000 étoiles affez diflinétes pour Les compter. SUR L'HIST. NATURELLE ET LES ARTS. s La force de fon télefcope peut groffir jufqu'à 3090 fois les étoiles ; mais pour les planètes elle ne va pas au-delà de foo fois, & même Herfchel ne fe fert ordinairement que de verres qui groflifflent 250 fois, Nous devons ces détails à M. Picter. © M. l'Abbé Rochon a fini fon télefcope, dont le miroir de platine fait un grand effet. M. Mechain a apperçu une comète le 11 avril de cette année. Il en a déterminé l'orbite, en forte que cette comète eft la foixante-quatorzième connue. M. de Cafini père avoit propofé à la Société Royale de fuivre en Angleterre la méridienne tracée en France. M. le Général Roi s’eft chargé de ce travail qu’il a exécuté avec l'exactitude la plus rigoureufe, M. de Caffini fils, M. Mechain & M. le Gendre ont été le joindre pour faire la réunion des triangles, M. l'Abbé Beauchamp qui eft à Bagdad y a élevé un obfervatoire où il faic de bonnes obfervations fous un des plus beaux ciels qu'il y ait. Il a été reconnoître les bords de la mer Cafpienne , & fixera enfin à cet égard les incertitudes des Géographes. On a aufli élevé un obfervatoire à l'Ecole Militaire à Paris , un autre à Gotha. Plus les obfervations fe multiplieront, plus nos connoiffances augmenteront. M. Bernard qui fait des obfervations à l’obfervatoire de la Marine à Marfeille , eft parvenu à voir cetté année les fatellites de Saturne qui fonc fi dificiles à obferver, qu'on ne l'avoir pas fait depuis foixante-dix ans. On a donné en Angleterre de nouvelles Tables de la lune qui font d’une grande exattitude. Tels font les principaux travaux dont l’Aftronomie a été enrichie cette année, Mais nous renvoyons pour cette partie au Journal des Savans où ces objets font traités avec tous les détails néceffaires par le célèbre Profefleur d’Aftronomie au Collège Royal, M. de la Lande, Les obfervations érantplus exactes aujourd'hui, on a befoin d’inftru- mens plus parfaits. On ne fauroit donc témoigner trop de reconnoiffance aux artiftes éclairés qui s'occupent de cette partie effentielle. Cet fous ce titre que M. Grateloup a bien mérité des favans par la conftruétion de ? lunettes d’une grande perfeétion, qu’il fait en collant enfemble avec un maftic particulier , des verres de différentes qualités, M. Deflandes , Directeur de la manufadure des glaces de Saint-Gobin, eft parvenu à couler une glace de 73 pouces de diamètre fur 20 lignes d’épaifleur, & une autre de 32 pouces de diamètre fur 4 pouces d'épaifleur. Je les ai vues chez lui. Elles font d’une grande beauté , & pourroient faire des lentilles d’une force fupérieure fi on les faifoit travailler. Zoologie. Les animäux font de toutes les produétions de la nature fur notre globe, les êtres par excellence. [ls donnent la vie & le mou- 6 OBSERV@A4TIONS SUR LA PHYSIQUE, vement À cout dans le fens moral, comme ils le recoivent dés autres êtres dans le fens phyfique. Les Naturaliftes s'en occupent toujours avec fuccès. M. Vicq-d'Azir enrichit PAnatomie, M. Pinel par une application des mécaniques & du calcul perfectionne la théorie des forces motrices chez l'animal. M. Cuiskrand a fort étendu nos connoiffances fur les vaifleaux lymphatiques. Nous n'avons pas acquis de quadrupèdes inconnus, Mais lhiftoire de ceux qui le font continue à être enrichie en Allemagne par l'Ouvrage de M. Schreiber qui fe publie en françois & en allemand. Les figures coloriées font prifes des meilleurs Auteurs fur cette partie, & il y en a plufieurs faites d'après nature. Cependant les defcriptions font quelquefois infufñ- fantes. M. Pennant a fait connoître dans {a Zoologie arctique publiée tout récemment en anglois plufieurs animaux intéreflans des valtes contrées inconnues de l'Amérique feptentrionale. La régénération des partiesanimales a occupé plufieurs favans. M. Arre- mann a publié à Gottingue une Differtation {ur la régénération des nerfs. M. Murray , neveu du Profeffeur de Botanique de ce nom, & M. Kuhn ont aufli écrit fur la régénération en général. Ils penfent tous que les parties primitives de notre corps ne fe régénèrent point, qu'il fe forme, À la vérité, une nouvelle fubftance analogue à l’ancienne , mais que ce n'eft jamais un vrai nerf, un vrai mufcle. Cette opinion , qui eft aufli celle de M. Louis , a été développée dans une Differtation publiée à Strafbourg par M. Egrins fous le titre de Con/olidatione vulnerum. Plufeurs favans , tels que MM. Camper, Fontana , Michaëlis White, &c. font d'un fentiment oppofé. M. Plumenbach, Profefleur de l’'Univerfté de Gottingue , aflure méme qu'après avoir enlevé Les yeux à des falamandres, ces organes s’écoient reproduits, M. Broufloner a fait part à l'Académie des Sciences d'une fuire d’obfervations intéreflantes fur la régénération de toutes les nägeoires des poiflons. 1 Ornithologie. M. Letham s'occupe toujours avec zèle de certe belle partie, & vient de publier les derniers volumes de fon Ouvrage. M. Moerhem fait paroître à Gottingue par fafcicules les defcriprions & figures de différens oifeaux, & il fe propofe de les tous donner. M. Pennant, «4 “ À 1% F 2 5 . À toujours infatigable a publié cette année un index raifonné fur les. oifeaux , avec des planches enluminées & exécutées à Paris par M. Martinet. Dans une Préface très-bien faite il répond à plufieurs objections que lui avoient propofées des Naturaliftes diftingués , fur quelques articles de fes autres Ouvrages. M. Sparman a donné deux fafcicules fur les oifeaux , dans lefquelles fe trouvent décrits plufieurs qui n'étoient pas connus, Amphibies. M. Hermann, Profeffeur À Strasbourg , a fait paroître un premier volume de l’hiftoire des amphibies. La manière exacte dont ce \ 0 SUR L’HIST. NATURELLE ET LES ARTS. 7 favant Naruralifte a traité les objets fur lefquels il a écrit, fait defrer vivement la fuite de ce Traité. Tähiologie, M. Bloch continuefon hiftoire des poiffons. Les Naturaliftes defireroient que fes defcriprions fuflent un peu plus détaillées, On a publié à Vienne les premières fafcicules de l’hiftoire des poiflons d'Autriche. Qer . ÆEntomolgie. L'hiftoire des infectes fait tous les jours des progrès rapides. Le bel Ouvrage fur les papillons d'Europe fe continue avec le même zèle par MM. Gigot d'Orcy, Garangeot , &c. & cette colle&tion peut déjà rivalifer avec les plus riches de l'Europe. MM. l'Abbé Poirer, de la Martinière, Bruière, ont décrit dans ce Journal quelques efpèces d’infectes inconnus. Mais ce font fur-tout les Naturaliftes fuédois qui avancent la fcience, parce qu'ils publient toutes leurs obfervations. M. Thunberg fait aufli connoître tout ce qu'il a apporté de fes voyages, M. Fabricius a donné cette année le premier volume d’un Ouvrage fur les infectes , dans lequel il a inféré toutes les efpèces dont il avoit déjà parlé dans fes autres écrits, & y a ajouté toutes les nouvelles qu'il a pu fe procurer. On y voit fur-tout un grand nombre d’efpèces particulières d'Afrique qu’il a reçuesdeM. Vabl, Profefleur de Botanique à Copenhague. C’eft l’Ouvrage le plus complet qu'il y ait fur cette partie. M. Cavolini a publié à Naples un excellent traité fur l’organifation des coraux & des madrépores, dont il a très-bien décrit les animaux. On fera fans doute étonné de voir dans cette courte énumération que nous venons de faire des principaux travaux fur l'Hiftoire-Naturelle , que les Narturaliftés François écrivent fi peu. Ce n’eft pas qu'on ne s'occupe avec zèle de la fcience. Mais on ne publie rien... .. Mais revenons aux favans Naturaliftes étrangers. Linné , qui a donné cette fi grande impulfion à lPHiftoire-Naturelle, rendit le plus grand fervice en en décrivant tous les objets par des phrafes courtes & précifes dans fon Syflema naturæ. IL N’EXIGFOIT PAS DES GRAVURES, Mais la fcience s'eft tellement enrichie depuis, que le Sy/Zema elt abfolumenc infufifent. Il feroir donc à fouhaiter qu’on donnât une nouvelle édition de cet Ouvrage, où on fît entrer tous les objets nouveaux. Linnéle fils s’en étoit occupé, pour une partie, M. Smith qui eft aujourd’hui poffeffeur de route la collection des Linné père & fils , ne fauroit rien faire de plus avantageux pour la fcience dont il s'occupe fi utilement, que de reprendre ce travail, I! faudroit commencer par donner tout le règne animal, & fi une {zule perfonne ne pouvoit tout faire , ce qui feroit difficile, on fe partageroït la matière, par éxemple, les fix grandes divifions du rèvne animal pourroient être divifées en fix perfonnes. D’autres fe chargéroient du règne végétal, qu'on partageroit aufli entre plufieurs favans. Enfin, la minéralogie viendroit la dernière , parce que les efpèces y font moins nombreufes , & qe d’ailleurs nous avons plufeurs bons traités complets fur cetre matière, 8 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, Il feroit encore à fouhaiter que les différens favans qui font graver des objets d'Hiftoire- Naturelle, fiilent toujours choix d'objets nouveaux, & employaflenc Le même format, En réuniffant enfuice toutes ces gravures particulières ,on pourroic efpérer avoir une fuite complette, Botanique. Le grand nombre de favans voyageurs qui s’occupent de cetre intéreffante partie, l'enrichiflent journellement. Aucun de ceux donc nous avons parlé l'année dernière n'eft encore arrivé. Quelle richeffe ne vont-ils pas apporter! mais plufieurs Botaniftes publient les plantes qui exiftent dans les différens jardins de l’Europe ou dans les herbiers , & qui n'ont pas encore été décrites. En France MM. l'Héririer , l'Abbé Cava- . nilles, le Chevalier de la Marck, Bulliard, &c. continuent leurs inté- reflans Ouvrages. M. l'Abbé Pourret a donné®%dans le Journal de Languedoc un prodrome de l’hiftoire des plantes de cette Province. Le titre de fon Ouvrage eft: Chloris occitana où Chloris du Languedoc, dont ily a déjà quelques fragmens dans le même Journal. M. de la Peyroufe de l’Académie de Touloufe vient de propofer dans les Mémoires de cette favante Compagnie une Flore des Pyrénées fous - le titre fuivant : Icones Floræ Pirenaïcæ cujus plantas in fmatalibus exploravit , ex vivo depingi curavit, defcriptas Notis & Obfervationibus illuflravic Philippus Picot de la Peiroufe, Baro de Bazus, &c. Reg. Scierr. Acad. Tolofanæ , Holmenfis, Soc. Acad, Scient. Pariftenfis Correfp. necnon Societ. Agrariæ reg. &c. Ec. M. de la Peyroufe adopte Le format z7-fol. des Flores d’Autriche & de Ruffie de MM. Jacquin & Pallas. Il a déjà un grand nombre de plantes deffinées & peintes avec leurs couleurs naturelles. J'ai vu quelques-uns de ces deflins qui mont paru d’une belle exécution. Il fe propofe de faire enluminer les gravures. Il croit que fon Ouvrage pourra avoir mille ou douze cens figures (1). M. Jacquin & un grand nombre de favans Naturaliftes étrangers publient aufli ce qu'ils ont de nouveau. On s’eft un peu plus occupé de la phyfiologie des végétaux. M. Brouf- fonet nous a fait connoître l’Aedifarum pirans. M. Desfontaines a décrit les phénomènès de l'irritabilité d’un grand nombre de plantes, fur-tout de leurs parties fexuelles, : Le favant Linné avoit établi la néceffité des éramines pour la féconda- tion des plantes d’une manière à ne laifler aucun doute; cependant deux Naturaliftes diftingués, MM. Spalanzani & Reynier viennent d’oppofer ——————_—_—_—_— () M. de la Peyroufe a donné un Traité des Mines de Fer & des Forges du Comté de Foix , que nous avons annoncé dans le tems, & qui {& trouve chez Mérigot le jeune, quai des Auguftins de ’ * % _SUR L’HIST. NATURELLE ETLES ARTS. 9 de nouvelles expériences à celles du célèbre Naturalifte da nord! En les publiant nous n’avons eu d’autre but que d'expofer de nouvelles recherches à faire aux favans, fans qu'on puifle croire que nous régardions Ces expériences comme capables d’avoir ébranlé le /exualifme des plantes. Lorfque le célèbre Bonnet a prouvé qu'un. puceron fécondé donnoic -le jour à des petits qui jufqu'à la cinquième génération pouvoient être féconds fans accouplement, on n’a pas cru le fexualifme des animaux renverfé. Mais on a reconnu que la nature seit un peu écartée des fes loix ordinaires; & qu'ici comme en tant d’autres circonflances elle a différentes marches, Le. polype qui-fe multiplie par fection, la régénération des membres des crultacés, &c. nous apprennent qu’elle a plus d’une voie pour parvenir au même but. Ne cherchons donc pas à la limirer fuivant La foibleffe de nos vues : ne lui pofons d'autres bornes que celles qu'elle fe donne à elle-même... Siles expériences de MM. Spallanzani & Reynier font exactes, le/exuali/me des plantes ne fera point renverfé, pas plus que celui des animaux par fa reproduction des pucerons fans accou- plement. Si au contraire ces obférvareurs ont: été trompés par quelques circonftances, ce qui n’arrive que trop fouvent , ainfi que le favent tous ceux qui obfervenr, & comme femblent le prouver des expériences répétées avec le plus grand foin en Angletetre d’après celles de M. Spallanzari, ces deux Naruraliftes reconnoîtront leur erreur ; qui aura pu être caufée par des étamines précoces ou tardives qui auront pu féconder la plante fans qu'iis s’en foient apperçus. Enfin, fouvent la femelle chez les plantes dioïques, comme le chanvre, aquelques éramines qui auront pu également remplir Le vœu de la nature. Au refte, lorfqu'une Académie, par exemple, couronne un Mémoire, on limprime dans fon recueil : ce n'eft pas dire qu'elle adopte les idées de l'Aureur ; mais elle dit au public qu'elle a cru ce Mémoire digne de lui être préfenté. Nos Lecteurs favent que ce recueil ef dans le même cas. > Minéralogie. Certe partie étant bien moins riche em efpèces a moins à acquérir de nouveautés; mais les variétés font inépuifables. Cependant elle s'eft enrichie cette année. Outre le fpath adamantin dont je parlai l'année dernière, M, Piétet nous a fait connoître une pierre criftallifée qui pourroic bien être une efpèce nouvelle. M. le Lièvre nous a dévoilé la nature de la chryfolite des volcans qui paroîc être une efpèce de ferpentine qui a éprouvé l'action des feux fouterrains, MM. Delarbre & Quinquet ont décrit un nouveau pechftein. Les foffiles fort la partie qui paroîtroit le plus promettre de chafes nouvelles, Ce fujet eft encore peu avancé. Quelle multitude de dépoui les de quadrupèdes, &e poiffons, d'infeétes, de coquillages, de plantes enfouis & confervés dans les différenres couches de la terre ! Le birume élaftique fofile du Derbyshire , analogue au caoutchou dont j'ai douné la defcriprion & l’analyfe, eft abfolument neuf. Cer’e obfervation confirme Tome XXXII, Part, 1, 1758. JANVIER. B t æ rs ‘ 10 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, que la plbs grande partie deices débris foffiles desrègnes organiques vient: des pays méridionaux, bé ss auart tons ho NOTE gui Phyfiques. Les mouvemens des corps, céleftes paroiffent aflujetris à une loi conftante quieft la gravitation univerfelle, Quelle qu'en foir la caufe phyfique, cette caufe étant canitante, ils devroient être parfaitement réguliers : cependant ils préfentent sencote quelques anomalies qu'on al appelées zrégalicés féculaires, parce :qu’elles ne font bien fenfbles.que dans la fuite des fiècles. Ceux de jupiter'& de-faturne éprouvent fut-tout de: grandes inégalités. Le moyen mouvement de faturne eff retardé, tandis que celui de jupiter eft accéléré. Les célèbres Euler & la Grange en avoient déjà recherché la caufe. M. de la Place vient de reprendre ce travail, & à ramené à des époques dérerminées ces variations dans leur mouvement. « En examinant, dit cet illuftre Géomètre , les circonftances » des mouvemens de jupiter & de faturne, on apperçoit aifément que » leurs moyens mouvemens approchent beaucoup d’être commenfu- » rables; & que cinq fais le moyen mouvement de faturne eft à-peu-près » égal à deux fois celui de jupiver; d'où jai conclu que le rerme qui dans » les équations différentielles du mouvement de ces planètes, ont pour » argument cinq fois la longitude moyenne du foleil, moins deux fois » celle de jupirer, pouvoient devenir fenfibles par les intégrations , » quoique mulripliés par les cubes & les produits de trois dimenfions >» des excentricités & des inclinaifons des orbites, J'ai regardé confé- » quemment ces inégalités comme une caufe très-vraifemiblable des » variations obfervées dans les mouvemens de jupirer & de faturne. La » probabilité de certe caufe: & l'importance de cet objet, m'ont déter- » miné à entreprendre le: calcul long &-pénible néceflaire pour m'en » affurer. Le réfultat de ce calcul a pleinement vérifié ma conjedture, en » me faifant voir, 1°. qu’il exifte dans la théorie de faturne une grande # équation d’environ 47’, dont la période eft à-peu-près de huit cens » foixante-dix-fepe ans, & dépend'de cinq fois le mouvement moyen de » faturne, moins deux fois celui de jupiter ; 2°. que dans la théorie de » jupiter il exifte une équation d'un figne contraire d'environ 20’, & » dont la période eft la même ». Le même Géomètre a enfuite recherché la caufe de l'inégalité du mouvement des fatellires de jupiter qu'il a également fait voir dé- pendre de la gravitation univerfelle, & ül a affigné les loix de ces inégalités. On avoir obfervé une accélération dans le mouvement de la lune, dont Ja caufe avoit échappé jufqu'ici aux recherches des plus grands Géo- mètres. M. de la Place vient de prouver qu’elle eft due à la diminution qu'éprouve depuis plufieurs fiècles l’équation de l'orbite folaire. Mais cette diminution qui eft produite par l'attraction des planètes, deviendra dans la fuite une augmentation, Par conféquent le mouvement de la tune SUR L’'HIST. NATURELLE ÉT LES ARTS. 11 qui eft accéléré aujourd’hu, fera retardé dans cé rems-là , & dès-lors ce ne font plus que des inégalités périodiques. L'électriciré, cette belle & prefque nouvelle branche de la phyfique, a beaucoup gagné cetté année. M. Van-Marum nous à donné une belle fuite de fes expériences. J'en ai aufli publié de très-intéreffantes faires par M. Charles. 4{ PAPA ERU fil La Météorologie acquiert des faits nouveaux. M. Angos a obférvé une variation curieufe daris la marche du baromètre. M. de Luc nous a denné «un nouvel hygromèfre "M, ‘de ‘Sapffure a faic dés’ 6bfervations bien intéreflantes pour. cette fcisnce à la cîme du Moñt: Blanc. Mais fi on veut pertéctionner k*Métébrologie, on he fauroic faire trop d'attention au beat Memoire qué nous a dünné M. Senébier für cerré matière, a Agriculture. L'Agriculture dont on paroît tant s'occuper, languit toujours dans la plus ae partie de l’Europe. Maïs ce'ne feront ni les bons livres d'Agriculture, entre Jefquels on doit diftinguer le Cours compler d'Agriéulture de M: T'Abbé Roziér, ni les Sociétés d'Agriculture, malgré tous leurs efforts, ni quelques riédiocres récompenfes du montent qui la fecônt feutir. Commenr ce Cükivateur, cet homme fi eftimable’, pourra-t-il chercher à amékioter Id'éwitare, lorfqu’il eft écrafépar routes fortes de charges, lorfqu'il n’eft ‘päs propriétaire direct, & qûé celui qui cultive le champ d'autrui na poûr-perfpective de fes peines & de fes avances en argent , qu'une augmentation dans le prix de fa ferme au bout d’ün bail très-court , defix ou neuf ans au plus ? On m'a afluré qu'en Anglererré une des caufes qui a coftnbué à la perfection ds l'Aori- culture ,eft qu'un grand nombre de Gulrivareurs eft propriétaire, &-que lés Fermiers fonc fouvent des baux de quarante, cinquante , foixante ans & plus, en forte qu'un Cultivateur regarde fa ferme en partig £orme fa propriété, y fait des avantes contidérables, l'améliore , &c. bien sûr que lui ou les fiens en retireront une partie du profit, D'ailleurs, le Cultivateur y eft*très-eftimé, la nation s’aflemblant chaque année, conferve fon autorité , fes droits. . . . L'Agriculture ne prendra de la vigueur que lorfque le Culrivateur aura un honnête & ample néceflaire, qu'on lui rendra la confidération qui lui eft due comme à la clafle /a plus utile & la première de la Jocièré. Nulle part l’Agriculrure n'eft arrivée au point où elle eft en Chine, parce que l'Empereur laboure lui-même le champ qui eft cenfé le nourrir. Elle étoic aufi au plus haut degré de perfection dans l’ancienne Egypte, dont les premières marques de difinéion “éroient une charrue où ur horan, comme l'a fait voir M. l'Abbé Mongez l’aîné, & non point une lance ou une épée. , . . Chimie. Certe belle partie eft foujours fuivie avec le même zéle, Quoique les grandes queftions qui partagent la fcience ne foient pas encore décidées, cependant les faits fe mulriplienc, & on peut réduire Tome XX XII, Part, T, 1788. JANVIER, B 2 12 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, les difficultés à un petit nombre. de points; cequi en rendra la folution plus facile. lai 2 Spel 2083 UE 9 1°. Les adverfaires de la doëtrine de Stahl croient que l’eau eftcompofée d'air inflammable & d'air pur, &. qu'elle fe décompofe toures.les fois qu’elle fe trouve avec des corps qui ont plus d’afinité avec l'air pur que cet air pur n'en a avec l'air inflammable; enfin , que tout air inflammable vient de la décompofñtion de Feau,.:2 1: : ain 11°, Is regardent le foufre , le phofphore , les métaux , Île principe muriatique , Le charbon.,.& les.bafes.de tous les acides, foit végétaux, {oit animaux , comme des êtres fimples & non décompolés , qui fe com- binant avec l'air.pur forment les acides vitriolique,, phofphorique, les chaux & les acides. métalliques, l'acide marin, l'air acide , & tous les acides végéraux &t animaux. l | de j TII°, Quelques-uns de ces êtres fimples , tels que le foufre,, le phof- phore , les métaux , &c. en brûlant avec l'air pur donnent une flamme qui G{t due à la marière de la chaleur qui fe dégage de l'air pur. Enfin , Pair infammable qu'on obtient de ces fubitances dans différens procédés , ne: vient. point d'elles, mais de l'eau décompofée , dont l'air pur s'eft combiné, tandis, que l'air inflammable fe dégage. IV°. Les mêmes favans penfent aufli que l'air pur, l'air inflammable; l'air impur ou phlogifliqué , les'alKalis & les verres, font également des êtres fimples & non décompofés. °. Ils regardent les huiles comme compofées de charbon & d'air inflammable (1) provenu d'une portion d’eau décompofée par la végé- tation. Lorfque ces fubltances brülent avec l'air pur, leur air inammable fe combine avec une portion de cet air pur, forme de l’eau , tandis que eur charbon fe combinant avec l’autre partie d’air pur produit de l'air Scie , &c. Le fucre, les corps muqueux contiennent à-peu-près les mêmes principes que l'huile. Ce fyftème ef très-fimple, parce qu'on y fuppofe que la plupart des corps font des êtres fimples. On pourroit encore le rendre plus fimple en fuppofant tous les corps des êtres fimples. “Les partifans de l’ancienne doctrine cherchant au contraire à étendre nos connoiflances en fondant les profondeurs de la nature & perfectionnant l'analyfe, n'admettent point tous ces êtres fimples, & par conféquent leur théorie doit paroître plus compliquée, quoique l'écant réellement moins. Ils difent : 1°. L'eau n’eft point compofée d'air inflammable & d'air pur, & rien ne paroït prouver fa décompolition. (1) On pourroit cependant dans ces principes dire que les huiles ne font compoftes que de charbon & d’eau. Lorfqu’on diftille l'huile , l’eau fe décompoferoit , (on ar inflämmable fe dégageroit, & fon air pur S’uniffant avec une portion de charbon, formeroit Fair acide. - SUR L'HIST. NATURELLE ET LES ‘ARTS. 13 += J'ai fait pafler de l'air inflammable dans des flacons pleins dé mercure & dans d’autres pleins d’eau, Les Aacons bien bouchés & le goulot ren- verfé,, foit dans le mercure, foit dans l’eau, il ne pouvoir y avoir accès d'air pur. Il n’y a point eu d'abforption dans les flacons pleins de mercure. L'air inflammable au contraire a prefque tout difparu dans les flacons pleins d'eau. Donc il a-été décompofé par l’eau, & a difparu après avoir abandonné l'eau qu'il conrenoit. On répondra peut-être que, cette diminution de l’air inAammable a été opérée par l'air pur contenu dans Peau. Mais j'ai fait voir que la portion d’air pur contenu dans l’eau eft très-petite relativement à la quantité d’air inflammable abforbé, Ain cette réponfe n’eft point fatisfaifante. D'ailleurs, j'ai également fait pafler de l'air pur dans des facons pleins de mercure & pleins d’eau. Il n’a pas été dihinué fur le mercure, & l’a été fur l’eau , quoique pas autant que l'air inflammable, On ne dira pas qu'il y a de l'air inflammable diffous dans l’eau, qui a operé certe diminution. Ces expériences nous démontrent ce que deviennent l'air pur & l'air inflammable dans leur combuftion. Il°,: Le foufre, le phofphore, le principe muriatique, les métaux , le charban les -bafes des acidés végétaux & animaux ne peuvent être regardés comme des étres fimples ou non décompo/és. … J'ai élevé dans l’eau diftillée des plantes , fur-cout des légumineufes, quienfuite à la diftillation m’ont donné des produits ordinaires, favoir , différens airs, des acides, des parties métalliques, du charbon, des cendres, &c. Or, quelle pourroit être l'origine de toutes ces fubftances, fi elles étoient fimples? Par exemple, d'où viendroit cette quantité de charbon ? On le dira peut-être apporté par l'air acide. Mais l’eau diflillée ne contient point de cet air. Il ne s’en trouve point non plus dans l'air atmofphérique. C’eft ce que démontre l'expérience fuivante : J'ai expofé dans un endroit découvert en plein air pendant quinze jours de l’eau diftillée & qui avoit bien bouilli. Je l’ai enfuite verfée dans l’eau de chaux qui n’a point été précipirée. Cette eau avoit ce- pendant abforbé de l'air de l’armofphère, & elle auroit dû abforber principalement de l'air acide, s'il s’y en für trouvé. L'air acide qui exifte dans la crême qui fe forme fur l’eau de chaux expofée à l'air eft donc un produit nouveau réfultant de la combinaifon de l'air pur avec /e principe quelconque qui eft dans la chaux, & que j'appelle matière de la Chaleur, ou matière du feu combinée. Quelque nom qu'on donne à ce principe , les expériences fuivantes prouvent que c’eft la matière du feu combinée. L Jai précipité une diffolution de vitriol de fer par lalkali volatil cauftique & par la piérre à cautère. Le précipité a été noirâtre & attirable à l’aimant. La même diflolution de vitriol de fer précipitée pat l’alkali aéré , eft A HP IT MEN : Coy Var Ro a à 3 L Le Un 14 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, verdâere. J'ai fleré la liqueur, & ayant bien lavé dans l’eau diftillée ce récipité, je l'ai mis dans fine cornue, & l'ai tenu demi-heure dans un HO feu, Le précipité a se une couleur d'un beau pourpre noirâtre & a éré fenfible à l'aimant. Le feu a donc produit ici la même chofe que l'atkali cauflique , c’eft-à-dire , que le principe contenu dans la chaux; d'où je conclus que ce principe eft une modification {da feu que j'appelle principe de la Chaleur, ner .) L'eau de chaux précipite'en gris-brun les diffolurions nitreufes d'argent, de mercure, &c. Ces nimes diflolutions font précipitées en blanc par l'aikali aéré de la craie; mais en expofant à Ja chaleur, à la lumière, à la vapeur de l'air inflammable ces mêmes précipités blancs , ils prennent la couleur que leur donneila éhaux 17 JERe re Ces expériences prouvent que la chaux côntientun principe analogue à la matière du feu , de lu lamière ; Re Or, t'elt ce principe qui combiné avec l'air pur formé, fuivant mot , l'air acide, | | De célèbres Chimiftés précendent que l'air acide eft produit par la combinailon du phlogiilique & de l'air pur. C’elt ce que je ne crois pas. Plufeurs d'eux regardent T'airinflammable commeile phlogittique: Or, fuivant quelques-uns , 1°, l'air inflammable brûlé avec l'air pur forme de l'eau: comment pourroit-1l former de l'air acide? On répond que e'eft fuivanrles différens degrés de chaleur ; parce que, 2°, lcrfque lachaleur eft moindre , ces deux airs forment de l'air acide. Mais dans la combuflion du charbon avec l'air pur il y a de l'air acide, & la chaleur eft aufli forte que dans la combuition de l'air par & de l’air indammable, Un grand nombre d'autres Chimities, qui penfent aufli que l'ait acide et le produit de la combinaifon de l'air pur & du phlogiftique , ne croient pas que le phlogiftique foic l'air inflammable. Autf ils peuvent éviter cette difcuiré ; mais ils admettent le phlogiftique dans les métaux, dans le charbon , par exemple. Pour démontrer qu'aucune de ces deux opinions ne peut fe fourenir , il me fuffit de faire voir, 4°. que la chaux change l'air pur en acide : ce qui eft prouvé par les expériences ci-deflus; 2°. que le principe qui eft dans la chaux n'eft point le nême que celui qui eft dans les métaux, le charbon , &e, C'eft ce qu'établiffent les expériences fuivanres : 4 La chaux, foir qu'elle foie difillée , fair qu'elle foit trairée par les acides, ne donne pas d'air inflammable, comme les méraux. Ayec lacide vitriolique elle ne forme pas d'acide fulfureux ni de foufre ; avec l'acide nitreux , point d'eir nitreux , &c. Le principe contenu dans la chaux & qui forme l'air acide eft donc différent de celui contenu dans les métaux ; le charbon , &c. quoique cependant ils aïenc quelqu'anslogie. On m'a feit une autre objeétion , & on dit : ii d'air acide éroir produit par la combinaïfon de l'air pur & de la matière de Ja chaleur, sl devroit donc avoir beeucoup de chaleur, Or, fuivant des tables {a chaleur n’eft SUR L'HIST. NATURELLE ET LES ARTS. 15 que 9527,.& celle de l'air pur eft 87,00. Je réponds , que dans l’air acide la chaleur y eft combinée*conime dans tous.les autres acides ; au lieu que dans ces tables ilne s'agir que de la chaleur fpécifique, Suivant les mêmes tables , l'eau a une chaleur = 1,009, tandis que celle de l'acide vitrio= lique eft 0,758, celle de l'acide nitreux eft 0,844 , celle de l’acide marin eft 0,680, &c. & cependant ils.ont plus de chaleur combinée que l’eau. Le charbon obtenu de la combuftion des plantes ci-deflus ne peur donc venir de l'air armofphérique. [left donc un produit nouveau , par confé- quent un compofé, & n'efl. point un être fimple. J'en dis autant de l’acide phofphorique contenu dans la fubftance glutineufe. de ces plantes , de leurs acides particuliers , de l'acide vitrio- lique, & de l'acide marin qu'on retrouve dans beaucoup de plantes ; enfin, de leurs parties métalliques, de Leurs alkalis & de leurs terres. Toutes cesfubftances n'étoient ni dans l'air de l’armofphère , ni dans l’eau diftillée, Donc ce font des produits nouveaux , qui par conféquent {ont compofés des principes donc fe nourrit la plante, favoir, de l’eau, de différens aits, de la lumière , de la matière de la chaleur , du fluide électrique, &c, Donc ce ne font pas des êtres fimples.C, QE. D. phyfiquement. L'acide marin eft encore produit dans les nitrières ainh que les alkalis fixes , le foufre dans les cloaques, &c. par le concours des différens airs’, favoir , de l'air pur & de l'air putride qui contient de l'air inflammable & de Pair impur; &c. Donc ce ne font pas des êtres fimples, C. Q. E. D. phyfiquement. Or, fi coutes ces fubflances font des compofés comme ces faits le démontrent , tout le [yfléme de nos adverfaires ef? renverfe , parce qu'il eft vraifemblable. philofophiquement parlant, qu'elles contiennent un Jeul & méme principe inflammable, qui ne peut être qu'une combinaifon quelconque de la matière du feu ; & j’ajoute que les expériences paroiflent démontrer que c'eft l'air inflammable à l’état concret, ou combiné, puifque cet air inflammable fe. trouve dans les principes qui com- pofent ces fubftances , & qu'on l'en retire par un grand nombre de procédés. Il arrive fouvent que cet air inflammable eft tellement combiné qu'on ne fauroit le dégager de fa bafe fans intermède ;.le charbon, le fer, le zinc , &c. qui ont éprouvé un grand degré de feu, ne donnent plus d’air inflammäble ; mais en leur ajoutant de l’eau & continuant le feu , il fe dégage beaucoup d’air inflammable ; d’où nos adverfaires ont conclu que cet ait inflammable éroit dû à la décompofition de l’eau. Les expériences fuivantes me ‘paroiffenc prouver le contraire, M. de Laflone ayant diftillé du zinc avec de la pierre à cautère , a obtenu beaucoup d'air inflammable & d'air acide. M. Kirwan ayant fait un amalgame avec le mercure & le zinc & l'ayant diftillé , en a retiré de l’air inflammable, FN 16 OBSERVATIONS SUR LA PHPSIQUE, J'ai plongé dans le bain de mercure un charbon incandefcent & qui avoit été cenu à un grand feu, de manière qu'il ne donnoit plus d’air. Je lai mis aufli-tôt dans une cornue & ai procédé à la diftillation. Il s’eft dégagé beaucoup d’air inflammable & d'air acide, ù Le mercure dans lequel on ne fauroit admettre de l’eau libre a donc produit dans ces deux dernières expériences le même effet que l’eau , ain ue l’alkali dans la première. Ces fubftances en fe volatilifant donnenc de ailes À l'air inflammable, mais ne le forment pas. C'eft ain que l'acide vitriolique difillé feul ne donne pas d'air pur, & en donne loriqu'il eft diftillé avec d’autres fubftances. Enfin, le charbon ne donne de l'air acide dans fes combinaifons avec l'air our que Lorfqu'il efl à l'état d'incandefcence. Or, la refpiration change l'air pur en air acide. Le charbon ne fauroit y étre à l'érar’ d'incandefcer.ce. Donc cet air acide a une autre caufe, favoir, le principe de la chaleur corbinié avec Pair pur. ; IV9, La combufion du foutre, du phofphore, des métaux , ef accompagnée des mêmes phénomènes que celles des huiles , des rélines, du fucre , &c. où on admet l'air iflammable, J'ai faic brûler fous des cloches ou dars des cornues pleines d’air pur ; du foufre, du phofphore, du fucre, du benzoin, &c. &ec. Il ÿ a eu abforption d'air pur, & j'ai eu des acides étendus d'eau. Cerre eau eft due dans lan & l’autre cas à la combuftion de l'air pur & de l'air inflam- mable. On répond qu’en brûlant le pholphore dans un air très-fec fur le mercure, on a un acide concret. Mais cet scide criftallife, le plus fouvenc en rayons divergens, Il doit donc contenir de l’eau, airfi que tous les criftaux falins D'ailleurs, la Aamme que donnent dans leur combuftion le foufre, le phofphore, les métaux, ne fauroient venir de la matière de la chaleur qui fe dégage de l'air pur dans l’inftant de fa combinaifon, Car lorfque cet air fe combine avec l'air nitreux, par exemple, l’abforprion eft aufli prompte que dans fa combuftion avec l'air inflammable. On à de la chaleur, mais on n’a point de flamme, Il n’y a donc de la flamme que toutes les fois que l’air pur fe combine avec l'air inflammable échauffé À un certain degré: parce que j'ai prouvé que l'air inflammable contient beaucoup plus de matière du feu que l'air pur, comme l'indique fa grande légèreté. C. Q.E. D, phyfiquement. Dans la combuftion du foufre, du phofphore , des métaux , du fucre, du benzoin , &c. une pattie d’air pur eft combinée comme le prouve Pexcès de poids des réfidus. IL s’agit donc de favoir fi cet air pur eft néceffaire pour faire pafler le fucre, le benzoin, le foufre, le phof- phore , &c. à l'érat d'acides, en forte qu’on puifle dire que l’acide du fucre, celui du benzoin, l'acide vitriolique , l'acide phofphorique, l'acide arfenical, &c, ne font point dans le fucre, le benzoin, le fonfre, Je phofphore, l'arfenic, &c. mais que ce benzoin , ce foufre, ce phof- phore SUR L'HIST. NATURELLE ET LES ARTS. 17 phore font feulement des principes quelconques qui ne deviennent acides que par leur combinaifon ‘avec l’air pur. - L J'ai mis du fucre , du benzoin,, du fuccin, &c. dans de petites cornues que j'ai enfuite remplies de mercure, & en ayant plongé le bec dans le bain de mercure fous des cloches pleines de mercure, j'ai procédé à Ja diftillation. Il a paflé d’abord de l’air inflammable, de l'air acide, &c. & j'ai obcenu fans accès d’air pur les acides que donnent ordinairement ces fubftances (je détaillerai ailleurs ces expériences). Ces acides. me paroiflent donc réellement exifter comme acides dans le fucre, le benzoin, le fuccin, &c. : Or, je crois qu’on peut dire également que les acides vitriolique, phofphorique , arfenical, &c. exiftent dans le foufre, le phofphore ; l'arfenic, &c. On ne peut les dégager par la diftillation , parce que leur adhéfion avec le principe inflammable eft trop forte; mais on peut rompre cette union Par de doubles afinités , par exemple, par le moyen des alkalis, de la chaux, des méraux , &c, Du foufre & du fer humectés avec de l’eau bien bouillie , & avec de l’eau de chaux mêlés enfemble dans des vaifleaux pleins de mercure, m'ont donné de l'air inflame mable & du vitriol de fer. Le foufre a donc été ici décompofé fans accès de l'air pur. On dira, il eft vrai, que c’eft l’eau qui a été ici décompofée & a fourni l'air pur d'un côté, & l’air inflammable de l’autre 3 mais j'ai fait voir ailleurs que l’eau bien bouillie & l’eau de chaux mifes avec de la limaille- de fer n’en dégagent point d'air inflammable, & ne l’attaquent nullement. L'eau bouillie n'attaque pas non plus le foufre : donc c’eft le foufre qui a été décompofé. à : Examinons ces différens phénomènes plus en détail, parce que c’elt le vrai point de la difficulté, ET QUE CETTE GRANDE QUESTION NE ROULE QUE SUR CETTE SEULE EXPÉRIENCE. Lorfqu'on brûle du fucre, du foufre, du phofphore, &c. avec l'air pur dans des vaiffeaux fermés , ofi a des acides étendus d'eau, comme mous l'avons vu. Or , il peur fe préfentér trois cas dans cette combuftion, 1°. L'air pur brûlant avec l’air inflammable du fucre, (on convient unanimement qu'il en contient) du foufre, du phofphore , &c. peut s’abforber comime dans la combuftion de l'air pur, & de l’air inflam- mable, & l’acide du fucre , l'acide vitriolique , l'acide phofphorique!, &c. demeureront libres & dégagés. 2°. Une partie de l'air pur peut brûler avec le principe inflammable du fucre , du foufre, &c. & une autre partie de cet air pur fe com binant avec un principe quelconque de ces fubitances, former ces acides. 3°. L'air pur peut fe combiner tout entier avec le fucre , le foufre , le phofphore, &c. & former les acides. Lorfqu'on fait chauffer l'acide vitriolique , l'acide PRIORONAUE &c, Tome XX XII, Part. I, 1788. JANVIER. 18 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, avec de l’air inflammable, on a de l'acide fulfureux, du foufre, du phofphore, &c. 4 J'ai rempli une cornue de douze pouces d’air inflammable , & j'en ai plengé le bec dans une capfule pleine d'acide vitrioliqué très-pur. La cornue étant léoèrement chauffée, il en eft forti deux pouces d'air. Lorfqu’elle a été refroidie, il eft monté par conféquent deux pouces d'acide. Bouchant alors la cornue je l'ai renverfée, & l'acide eft tombé dans le fond de la cornue que j’ai remis fur le feu en en plongeant le bec dans le bain de mercure fous une cloche pleine de mercure. J'ai affez chauffé la cornue pour faire bouillir l'acide. Il a contraété l'odeur d’acide fulfureux , & les vaiffeaux refroïdis, il y a eu un peu d’air abforbé. Qu'on" ne croye pas que le mercure air rien pu fournir; car la même chofe a lieu à l'appareil à l’eau. On peut même avoir du foufre par ce procédé. L'acide phofphorique traité de même donne du phofphore. Voilà des faits certains & avoués. On en peut donner différentes explica- tions, 4°. Les acides peuvent fe combiner avec l’air inflammable & former l'acide fulfureux , le foufre & le phofphore. 5°. Les acides pourroient fe décompofer , abandonner une portion d’air pur qui fe combinant avec de l’air inflammable formeroit de l'eau ou fe diffiperoit, tandis que d'autre portion de l’acide fe combinant avec l'autre portion de l'air inflammable donneroit de l’acide fulfureux , du foufre , du phofphore. ; 6°. Tout l’air pur pourroit fe dégager , & fe combinant avec tout l'air inflammable former de l'eau ou fe diffiper, tandis que le foufre & le phofphore demeureroient à nud, : Il refte à favoir laquelle de ces explications eft la véritable. Il eft certain : ‘ 7°. Qu'il y a de l’eau dans les réfidus de la combuftion du fucre , du phofphore , du foufre.# k 8°. Que l’air pur & l'air inflammable dans leur combuftion difpa- roiffent prefqu’en entier , & laiffent beaucoup d'eau. 9°. Que cet air pur & cet air inflammable mélés, foit fur l’eau ou fur le mercure, & même chauffés jufqu’à ce qu'ils ne détonent pas, ne S'abforbent point dans les premiers momens, & qu’ils ne diminuent que lorfqu’ils demeurent long-tems enfemble ou féparément fur l’eau. 10°. J’ai mis demi-once d’acide fulfureux fous une cloche contenant douze pouces d'air pur fur le mercure. Au bout de quatre Jours il y a eu beaucoup d'air abforbé; l'acide avoit prefque tout paflé à l'état d'acide vitriolique , & le réfidu de l'air étoit moins pur. Car une mefure & trois d’air nitreux donnèrent 0,67, tandis qu'avant l'opération les mêmes quantités ne laifloient pour réfidu que 0,19. Cet air a été altéré par l'air inflammable. SUR L'HIST. NATURELLE ET LES ARTS. 19 117. J'ai mis fous des cloches pleines d’air pur fur le mercure du fücre , du foufre, ils n’ont point été altérés. 12°, L’acide vitriolique K acide phofphorique au degré de Pébullition ne donnent point d’air pur. De tous ces faits je crois pouvoir conclure que lorfque j'ai faic bouillir l'acide vitriolique avec l'air inflammable, il n'y a pas pu avoir combultion de cet air ; car, 1°. l'acide vitriolique lui-même n’eft pas combuftible ; 2°, cet acide en bouillant ne donne point d'air pur 3 3°. l'air pur & l'air inflammable ne s'abforbent pas à ce degré de chaleur. C’ef? donc l'acide lui-même qui a abforbé cet air inflammable. Or, puifqu'il a pañlé à Pétat d’acide fulfureux; donc l’acide fulfureux eft l'acide vitriolique, plus Vair inflammable; éh chauffant encore davantage on a du foufre, où du phofphore fi on fe fert d'acide phofphorique. Donc le foufre & le phofphore ne font que les acides vitriolique & phofphorique faturés d’air inflammable. : La même chofe ne peut avoir lieu avec l'acide du fucre , parce qu'il fe décomipofe, D'un autre côté dans la combuftion de l'air pur & de l’air inflammable il y a de l’eau, & les airs difparoiffent. La combuftion du fucre, du foufre, du phofphore donne des acides étendus d’eau. Donc cette eau vient de la combuftion d’une portion de l’air pur avec l'air inflammable du fucre, du foufre & du phofphore. Les acidés obtenus de ces combuftions font l'acide fulfureux , l'acide dn fucre empireumatique , &c. L'acide fulfureux, (expér. 10) en abforbant de l'air pur, devient acide vitriolique , & le réfidu de l'air pur eft de l'air impur, L’acide du fucre empireumatique donne de l'acide faccharin, fi on le traite avec l’acide nitreux qui lui fournit d'un côté de l'air pur, tandis qu'une autre portion de cet acide fe joignant avec l’air inflammable de l'acide empireumatique paile en air nitreux. Des diftillations répétées de cet acide empireumäatique fans accès de l'air pur , produifent à-peu-près le même effec que l'acide nitreux , comme la prouvé M. Schrikel. . fn, le facre, le foufre, le phofphore, &c. traités avec l'acide nitreux, donnent les acides faccharin ouoxalin , vitriolique & phofpho- rique, & on a beaucoup d'air nitreux. Cet air nitreux eft ici formé de la combinaifon de l'air inflammable de ces fubftances avec une portion de l'acide nitreux décompofé , tandis qu'il fournit d’un autre côté une portion d'air pur à ces acides qui font à l’état d'acide fulfureux pour les faire paffer à l’état d’acide vitriolique, comme dans l’expé- rience 10. * Ces explications me paroiffent fimples & naturelles. L'air pur abforbé fe retrouve dans les acides, mais en différens états. Enfin, tout eft ici commun entre le fucre , le foufre & le phofphore. Or, puifqu'on admet Tome XXXII, Part. I, 1788. JANVIER. C 2 0 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, de l'air ivflammable dans le fucre , comment le pouvoir nier dans le foufre & le phofphore. ÿ Ainf il me paroî donc bien démontré que le foufre, le phofphore, les métaux, &c. font des acides faturés par l'air inflammable , ainfi que le fucre, le benzoin, le fuccin, &c. La feule difficulté qu’on oppofoit étoit de faire voir ce que devenoit l'air pur abforbé. Or, je viensde le montrer. L'air pur ne fera donc point le principe acidifiant dans le fens de nos adverfaires. Mais je dis que l'air pur a été combiné dans les acides lors de leur formation première , comme dans les nitrières, comme dans les cloaques, enfin, chez les êtres organifés. Les différens acides qu'on en retire, le foufre , le phofphore, les fubftances métalliques, &c. y ont été produits par le concours des difiérens airs, favoir de l'air pur, de l'air inflammable , de air impur, &c. &c. Par conféquent l'air pur s'y trouve; mais celui qui eft abforbé par la combuftion de ces fubftances, du foufre,du phofphore, du fucre, du benzoin , &c. ne fert qu'à les dégager de leur air inflammable. Mais je füis bien éloigné de regarder lair pur comme le principe acidifiant, c’eft-à-dire, le principe de l'a@ivité. [1 a été reconnu de tout tems que le principe le plus a@if de la nature eft le feu. Or, les acides font les fubftances qui ont le plus d’activité. Elles la doivent donc tenir du feu ou de la matière de la chaleur, qui eft ici dans un. état bien . différent de celui qui conftitue la chaleur fpécifique. D'ailleurs , quand même il feroit vrai que l'acide vitriolique, l’acide phofphorique, les chaux & les acides métalliques traités avec l'air inflam- mable pour pafler à l’écat de foufre , de phofphore & de métaux, per- droient une partie de leur air pur, en forte-que ces acides ne fe trou= veroient pas en entier dans le foufre , le phofphore, &c.-cela ne prou- veroit rien en faveur de nos adverfaires. Îls ne fauroient en conclure; comme ils le font, 1°. que Le foufre, le phofphore, les métaux, les bafes des acides animaux & végétaux , font des êtres fimples , 2°. que routes, ces fubflances ne contiennent pas un principe inflammable ; 3°. que l'air inflammable qu’on en retire par differens procédés vienne de la décompofition de l'eau. Ce font les feuls points conteftés, & dont je crois la vérité démontrée de notre côté par tous les faits que nous venons de rapporter. Il eft évident que le foufre ou l'acide vitrio- lique , le phofphore ou Pacide phofphorique , l'acide marin où le prin- cipe muriatique, &c. font produits journellement dans les êtres organifés , dans les nitrières, dans les closques, &c. par le concours des différens airs, favoir, de l'air pur & de l'air purride, lequel contient de l'air impur , desl’air inflammable, de l'air acide , &c. l’eau & la matière de la chaleur s'y trouvent aufli : par conféquent , 1°. ils ne font pas des êtres fimples; 2°. ils contiennent un principe inflammable , favoir ; air inflammable ; 3°, ce principe inflammable peut en être dégagé, Or, fi SUR L'HIST. NATURELLE ET LES ARTS. A Facide phofphorique , vitriolique , &c. contiennent de l’air inflammable, & qu’en pailant à l’état de foufre & de phofphore ils perdent de Pair pur, comme Le veulent nos adverfaires , il eft évident que l'air inflam- mable fe trouvera alors en excès dans le foufre & le phofphore, &c. ainfi que nous le prétendons, & que par conféquent le foufre & le phofphore font ces acides avec excès d'air inflammable. Ces mêmes acides pourront donc paller à F'érat de foutre & de phofphore en fe combinant avec l'air inflammable. } IV°. Les alkalis & les terres ne fauroïent être regardés comme des êtres fimples, On convient que l'alkali ammoniacat eft compofé, Or, 1°. l’alkali fixe peut paflerià l'érat d’alkaliammoniacal; 2°, les alkalis font produits dans les végétaux comme leurs autres principes par les airs, Veau, le feu, &c. Ils le font aufli dans les nitrières par le concours des différens airs. 3°, MM. Deyeux , de Henne , Osburg , Lorgna ont retiré ‘ du natron beaucoup de magnélie ; 4°. les végétaux contiennent de la magnéfie & de la terre calcaire, qui par conféquent font aufli des produits de la végétation , & compofés des mêmes principes que les autres produits; $°. toutes les pierres filiceufes; telles que les cailloux , les gränits, les porphires, les laves, &c. paroiflent fe convertir en argiles par l’action des tems. Cetre opération eft accélérée par l'acide fulfureux dans les pays volcaniques. L'air pur, l'air inflammable, l'air impur, ne font point des êtres fimples, comme je l'ai prouvé, & je penfe qu’il ny a qu’un feul air principe dont tous les autres ne font que des modifications. Je foupçonnerois donc qu’il n’y a d’autres premiers principes confti- tuans des corps que le feu ou la lumière fous différentes modifications, Pair pur & l’eau. Encore ne regardé-je point ces principes comme des étres fimplés. Tels font les grands faits qu'on allègue de part & d'autre, & qui doivent fixer Patrention du Philofophe qui recherche de bonne foi la vérité dans ce confli& d'opinions, La fcience s'enrichit toujours par la découverte de faits nouveaux. M. Berchollet eft parvenu à combiner les alkalis fixes avec l'acide marin déphlooiftiqué ou avec excès d'air pur. C’eft en expofant des linges imbibés d’aikali à la vapeur de cet acide dans l’'inftant de la diftillatior. Ces fels mis fur les charbons ardens éprouvent une efpèce de décrépita- tion qui fe rapproche de la déronation du nitre. On fait que le fel marin décrépite fur les charbons ; mais l'excès d’air pur qu’a le fel de notre célèbre Chimifte brülant avec le charbon , produit une efpèce de détonation. © M. Lavoifer a pris une partie de fucre qu’il a fait difloudre dans quatre à cinq parties d'eau. fl a ajouté une très-petite quantité de levure de bière, & a tenu ce mélange à une chaleur de 15°, -La fermentation 22 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, sy eft excitée. Il s'eft dégagé une très-grande quantité d'air fixe ou air acide , qu'il a calculée, Il a enfuice diftillé Ja liqueur qui lui a donné une certaine quantité d’efprit-de-vin: & rout calcul fait, 1l a trouvé qu'il y avoit eu perte du dixième environ de l'eau employée. Cerre eau, fuivant ce célèbre Chimifte, a été décompolée, Son air pur s’eft uni à une portion du charbon du fucre, &:a formé l'air acide ; tandis que fon air inflam- mable fe combinant avec l’autre portion du charbon du fucre, & l'air inflammable du fucre a formé la partie fpiritueufe. MM. Weftrumb & Hermbftad perfeétionnent Panalyfe végétale , & ont fair voir que l’acide tartareux, l’acide faccharin ou oxalin, & l’acide acéteux , ne font que des: modifications d’un feul & même acide. M. Hermbftad croit quesl'acide des pommes ou malummien eft un paflage de l'acide oxalin à l'acide acéreux. Je regarde ces acides comme celui des corps muqueux qui fe retrouve en fi grande quantité chez les végétaux donc il fait la bafe , & qui n’eft as encore tout dénaturé chez les animaux, puifqu'on retire beaucoup d'acide faccharin des matières animales, Je vais le confidérer fous cinq érats differens : 1°. comme acide muqueux , tel eft celui qu’on retire du mucilage à la diftillation; 2°. comme acide tartareux qui exifte dans le raifin , les pommes; 3°. comme acide oxalin qui exifte dans l'oxis , &c. 4°. commé acide malummien qui fe trouve dans un grand nombre de fruits; $°. l'arc l'amène à l’état d'acide acéteux. Maïs l'acide qu'on retire des huiles ineffentielles végétales ou grafles , telles que le beurre de cacao , l'huile d'olives , &c. même des fuifs & des graifles animales qui ne font que ces mêmes huiles pas encore dénaturées, me paroît tout différent. Je l'ai traité avec l’acide nitreux fans en pouvoir retirer d'acide faccharin. Enfin, les acides des huiles effentielles, telles que ceux du benzoin, de la réfine copal , &c, paroïflent encore différens de ceux-ci , & ont des qualités particulières. Je n'ai pu les amener à l'état d'acide faccharin par l'acide nitreux, Nous pouvons donc diftinguer jufqu’ici trois efpèces particulières d'acides végétaux : 1°, ceux des corps muqueux, dans lefquels fe rangent tous les acides des fruits, & dont les modifications font les acides tartareux , faccharin, malummien & acéteux ; 2°. ceux des huiles ineflentielles , qui peut-être ne font qu’une feule efpèce; 3°. ceux des huiles effentielles qui préfentenc plufeurs différences entr'eux. Peut-être parviendra-t-on à: faire pafler tous ces acides les uns dans les autres, Lors done qu’on diflillera des végétaux qui contiendront des corps muqueux des huiles effentielles, des huiles ineflentielles, on obtiendra une liqueur acide compofée de tous ces acides particuliers, qu'il faut par confé< quent féparer, C’eft pourquoi j'ai dit que l'acide lignique, tel celui, par exemple, que M. Goethling a retiré du bouleau , ne doit pas être regardé SUR L'HIST. NATURELLE ET LES ARTS. 23 comme un acide particulier. Le bouleau contient beaucoup de parties fucrées , ( puifqu’on en retire un vrai fucre ) de l'huile, &c. Ainfi l'acide de M. Goethling eft donc un acide compofé de tous ces acides, dont par conféquent nous ne pouvons fairé un acide particulier. Je regarde le principe colorant du bleu de Prufle comme compofé d’air inflammable combiné avec une petite portion d’air acide, & if ne me paroit point un acide particulier , aïnfi que je l'ai dit dans ce Journal, feptembre 1787, page 261. J'ai auf dit , id. 1786, janvier, page 41, que l’aikali volatil n'y étoit point, & j'appelerai le bleu de Prufle chaux bleue de fer. OUT Peut-être l'acide pallique ou de fa noix de galle n’eft-il pas un acide païticulier. Schéele a retiré de l’acide faccharin de la noix de galle. Son principe colorant me paroît approcher de celui du bleu de Prufle, L’encre étendue d’eau eftbleue, &c..Ainf il pourroit bien être un acide muqueux contenant un principe analogue à celui du bleu de Prufle, c’eft- à-dire , un excès d'air inflammable. - M, Brugnatelli vient aufli.de retirer du liège un acide qui paroît encore une modification de celui du corps fucré ou muqueux. Les acides empireumatiques ou qui onréprouvé un coup de feu ne doivent pas être diftingués des autres, parce que lorfqu’on confidère un corps on le prend dans toute fa pureté. Les acides empireumatiques ne font que les acides dont'nous venons de parler , en partie décompolfés & en partie combinés avec des huiles, &c. Cependant il faut convenir que toutes ces modifications préfentent des différences réelles, L’acide de la grofeille eft différent de celui des pommes, ou du verjus, ou de la grenade, &c. de même que l'acide fulfureux , par exemple , eft différent de l'acide vitriolique. Ce que nous venons de dire des acides végétaux doit s'appliquer aux acides animaux. Enfin, de célèbres Chimiftes ont propofé une réforme dans la nomen- clature chimique. Je renvoie le Lecteur à l'extrait que j'ai donné de leur travail, & aux obfervations qu'un anonyme & moi avons faites à cer égard. Je me contenterai d'ajouter que la plus grande partie des favans étrangers & nationaux ne l’adoptent pas. M. Berthollet vient de lire un Mémoire à l’Académie dans lequel il prétend que le principe colorant du bleu de Pruffe eft compofé de car- bone, d'hydrogène & d’azore , c’eft-ä-dire, de charbon, d'air inflam- mable, & d'air impur combinés ; d'où il s'enfuit que ce n’eft plus un acide, Les célèbres Auteurs de la nouvelle nomenclature regardent le principe colorant comme un acide compofé d'une fubftance fimple ou non décompofée & d’airfpur ; & on appelle fes combinaifons, pruffiates, Le célèbre Chimilte dont nous parlons abandonne donc cette opinion : 1°. le principe colorant , fuivant lui, n'eft point acide ; 2°, fa 24 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE; bafe n'eft pas une fubftance fimple ; 3°. fes, combinaifons ne, feront plus des prüfliates, puifque toutes. les terminaifons en ares indiquent la combinaifon d'un: acide, NET : N Cer exemple confirme ce que j'ai dir, que toute nomenclature fondée fur un fyfléme eft vicieufe, parce qu’à chaque pas que fera lafcience , il faudra changer la nomenclature; au lieu que les noms étant faits pour exprimer des objets dérerminés, ne doivent point varier. DÉFENSE D E L'HYGROMÉTRE A CHEVEU: Per M, DE SAUSSURE. It & INTRODUCTION. L. Effais que j'ai publiés: far l'Hygrométrie-ont reçu du Public un accueil fort au-deflus de mes efpérances. Les Journaliftes les ont annonçés avec éloges: plufeurs Profefleurs & Démonftrateurs-célèbres ont admis mes principes dans leurs cours ;,& prefque tousles Auteurs qui ont écrit fur des fujets analogues ont aufli adopté ces principes, & ont accordé leur confiance aux expériences-qui leur fervent de bafe, Si au milieu de tous ces applaudiffemens aucune critique ne s’étoit fait entendre, çauroit été un exemple unique dans les faftes de la littérature, & je n’étois point, fait pour mériter cette exceprion. Adi Trois Phyliciens fe font élevés contre cet ouvrage; mais plus-encore contre l'inftrument que contre la théorie: & ce quil y a de bien remar quable , c'eft que chacun de ces trois Phyficiens elt inventeur d’un hygro- mètre différent du mien; & que chacun d’eux n'a déprimé mon hygro- mètre.que pour exalrer le fien, Je parle de MM. de Luc , Chiminello & du Père Jean-Baptifte. Lu Mon deflein eft de travailler encore à perfeétionner mes recherches fur l’'Hygrométrie , lorfque j'aurai achevé l'ouvrage fur les montagnes & fur la Géologie auquel je travaille. Mais comme il s’écoulera néceflai- rement plufieurs années avant que cet ouvrage foit terminé, j'ai cru devoir dire un mot en faveur de cet hygromètre fi vivement attaqué ; je ferois fâché que les Phyfciens qui en anr acheté de M. Paul cruflent avoir fait une trop mauvaife emplette. , Je commence par M. de Luc, & fans m'arrêter à-fes raifonnemens généraux, je viens d’abord à fes objections contre mes termes d'humidité & de fécherefle extrême, CHAFITRE “ NN el SUR L'HIST. NATURELLE ET LES ARTS. 25 CHAPITRE PREMIER. L'humidité de l'air renferme fous une cloche humeétée ef bien un terme d'humidité fixe & extrême. Pour obtenir l'humidité extrême, je fufpends mon hygromètre dans une cloche dont les parois intérieures font conftamment humectées, & qui repofe {ur un baflin rempli d’eau, J'ai cru , & je crois encore, que de l'air qui eft ainfi renfermé dans un petit efpace entouré d’eau de toutes parts fe charge bientôt de route l’humidité dont il eft fufceprible. M. de Luc croit qu’il vaut mieux plonger l'hygromètre dans l’eau, Mais d’abord le cheveu fe refufe à ce procédé. Ce net pas à caufe de la ftrudure de l'hygromètre: j'en ai fait dont le cheveu pouvoit très- commodément être plongé dans l'eau, Mais le contrepoids qui tient le cheveu tendu eff trop foible pour furmonter l’adhérence que ce cheveu contracte avec l’eau. Il vient bien aux environs du terme de l’humidité extrême ; mais il ne s’y fixe point avec précifon ; la vifcofité de l’eau qui s'attache à lui fait qu'il fe tient indifféremment dans un efpace de 4 ou $ degrés autour de ce terme, M. de Luc auroit bien éprouvé cet incon- vénient avec fes rubans de baleine, puifque la grandeur de leur furface les expofe à une adhérence beaucoup plus forte : mais il rend fi forrement fa baleine , que l’effec de cette adhérence devient abfolumenc infenfible, J'ai donc renoncé à l’immerfion dans l’eau, & je ne l'ai nullement regrettée, En efer, ce n’eft pas l'humidité de l’eau que l'hygromètre eft deftiné à melurer ; c’eft l'humidité de l'air : & M. de Luc doit fentir cet argument avec plus de force que perfonne; lui qui a fi laborieufement démontré, que les mefures & leurs corrections doivent toujours être analognes à l'objet & à la partie de l’objet que l'on veut mefurer, Cependant cette raifon ne fufiroit pas pour juftifier mon procédé, fi l'humidité de l'air que renferme ma cloche ne donnoit pas tout-à-la-fois un terme fixe & un terme d'humidité extrème. Que ce foit un terme fixe, c'elt ce que prouve d'abord l'accord de mes hygromètres. M, Paul en a conftruit environ cent cinquante; la plupart ont paflé par mes mains : je les ai roujours trotivés d’accord & entreux & avec les miens. M. Senebier & M. Pictet qui s'en fervent conftamment leur rendent Le même témoignage. M. de Luc lui-même eft forcé d’avouer que les deux,qu'il a obfervés ont entr’eux tout l’accord dont ce genre d'inftrument paroît être fufceptible, Or, cet accord feroit-il concevable fi l'un ou l’autre des termes n’étoit pas un terme fixe ? On m’objectera peut-être, que dans les épreuves que M. de Luc a fait fubir à mes hygromètres fous une cloche mouillée , ils font defcendus à 97 & même à 96, au lieu de demeurer , comme ils l’auroient dû, fxés au nombre 100, J'en conviens ; mais cet écart ne tient point à la fixité du terme, & M. de Luc le fait bien : c’eft la fuite d’un défaut de certains -gheveux que j'ai nommés rétrogrades : j'en parlerai ailleurs. Et la preuve Tome XXXII, Part, I, 1788. JANVIER. D 26 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, que cette rétrogradation ne tient point à quelque changement dans l'humidité de l'air renfermé fous la cloche, c'eft que quand ces cheveux font parvenus au dernier terme de leur rétrogradarion , ils demeurent fixes, même pendant plufieurs jours, comme on peut le voir dans les expériences de M. de Luc: Idées fur la Météorologie , page 7o. S'ils varient, ce n’eft que de quelques fractions de degrés dont M. de Luc convient bien que l’on ne peut pas répondre. Puis donc que les expériences même faires & citées par ME de Luc pour combattre mes hygromètres ;, démontrent, qu'au moins pour eux, ce terme eft un terme fixe, comment peut-il lui contefter cette propriété? M. de Luc répond que cela ne prouve rien , & que fi mon hygromètre n’a point varié fous cette cloche bume@ée, lorfqu'elle changeoïit de température , c'eft mon hygromètre qui a tort ; puifque le fien qui étoit en même-tems fous l'appareil y a fubi des variations confidérables. Un Phylicien qui fe déferoit un peu de fes forces & qui fentiroit la dificulté de fon fujet, ne pourroit voir un nouvel infrument de fon invention tenir un langage oppofé à la théorie d’un Phyficien connu, & cette théorie confirmée par le témoignage d'un inftrument long-tems éprouvé par ce même Phyficien , fans concevoir quelques doutes fur la vérité du langage de ce nouvel inftrument. Mais M. de Luc n’a pas le moindre doute : il décide fans héfiter que ma théorie & mon hygromètre ne valent rien, parce qu’ils ne font pas d'accord avec fon inftrument ; avec cet inftrument dont il n’a pas même étudié la marche dans des airs d'une humidité déterminée ; avec cet inftrument dont il n’avoit pas encore pu comparer trois entr'eux , dont il n’avoit même poflédé deux à la fois que pendant quelques inftans , & auquel il n'a fait fubir prefqu’aucune des nombreufes épreuves auxquelles j'ai affujerti les miens. L’étonnement augmente lorfque l’on obferve dans les expériences de M. de Luc la marche de cet inftrument; on le voit cheminer de la manière la plus irréoulière, & faire des écarts énormes dans un fens oppofé à celui qu’il devroit fuivre d'après les principes de fon inventeur, M. de Luc croit que fousune cloche conffamment humeétée la chaleur doit faire marcher l'hygromètre à la fécherefle, Lors.donc que la chaleur eft le feul agent qui fubiffe quelque changement fous cette cloche , les variations de l'hygromètre doivent lui être proportionnelles ou du moins à-peu-près. Le 8 janvier à 3 heur. 45" (Idées fur la Météorologie, pag.70), l'hygromètre de M. de Luc eft déjà depuis plus de 3 heur, : renfermé fous hi cloche mouillée ; & il doit par conféquent s'être bien mis à l’'uniflon de l'air de cete cloche. Cet hyzromèrre paroît fixe au 94 degré, tandis que le thermomètre eft à 49 de Farenheir. Depuis ce moment jufqu'à 11 heures du foir le thermomètre baifle de 3° +, & l'hyeromètre monte de 3 + Voilà donc ?-peu-près un degré que l'hygromètre fait vers l'humidité , tandis que le thermomètre en fait un vers le froid, Pendant la nuit le thermomètre SUR L'HIST. NATURELIE ET LES ARTS. 27 monte de 6 degrés; l’hygromètre auroit donc dû marcher d'environ 6 degrés vers la féchereffe. Point du tout , il demeure fixe , il refte exatement au même terme. Dans un autre moment , un feul degré de différence dans le thermomètre produit une variation de 7 degrés = dans l’hygromètre. Enfin, ce qu'ii y a de plus remarquable, on le voic faire un écart prodi- gieux en fens contraire. Le 40 Janvier à 11 heur. 35" il eft à 89 quand le thermomètre eft à 69 =. À 2 heur. 30’, le thermomètre fe trouve plus bas d’un demi-degré ; l'hygromètre devroit donc fe trouver d’environ un demi-degré plus à lhumide ; & au contraire il eft à 78, c’eft-à-dire, de z1 degrés plus au fec. Conçoit-on que tandis que M. de Luc met fous les yeux de fes lecteurs des écarts aufli énormes de fon propre inftrument, il ofe reprocher au mien des variations irrégulières de quelques dixièmes de degré. Ce procédé me paroïfloit fi étrange , que j’eus befoin de relire ces nombres à plufieurs reprifes , pour me perfuader qu'ils étoient bien tels que je viens de les tranfcrire ; je foupçonnai enfuite une faute d’impreflion , mais l'accord de la fuire des nombres avec celle de leurs différences me prouva qu'il n’y en avoit aucune. On me demandera, peut-être , comment il eft pofible que l'hygro- mètre de M. de Luc fubiffede fi grandes variations fous certe cloche, fi l'air qu'elle renferme a une humidité toujours fixe & invariable, C'eit ce que jexpliquerai dans la fuite , & à ce que J'efpère d’une manière parfaitement fatisfaifante. Je dois auparavant dire un mot des principes de théorie , fur lefquels M. de Luc fe fonde , pour aflurer que fous la cloche humec- tée l’hygromètre doit aller au fec , lorfque l'air fe réchaufre, CuHap.Il. Continuation du même Jujet. Argument tiré de la théorie. Ecoutons M. de Luc, « Quand le milieu eft à la même rempérature » que l’eau qui s'évapore, les vapeurs produites font d'autant plus loin > de leur maximum , que la cempérature eft plus chaude. Et l’hygro- > mètre nous avertit de cet effet ; parce que fa fubftance étant réduite à » l'état hermofcopique & hygrofcopigue des vapeurs, ne leur enlève >» plus ni feu, ni eau, & qu'elle nous montre ainfi par fon propre étar, » celui des vapeurs dans le milieu ». Idées fur la Météorologie , $. 46. Si ce paragraphe eft favant , il faut avouer au moins qu’il n’eft pas clair, Et lorfqu'après bien des efforts je fuis parvenu à le comprendre, je n’y ai vu qu'une répétition de cette même affertion, que l'air renfermé fous la cloche eft d'autant plus éloigné d'être faturé de vapeurs, qu'il eft plus chaud. Cependant M. de Luc paroît regarder cette aflertion comme une preuve, & il ajoute que cela elt confirmé par les expériences qu'il a faites avec fon hygromètre fous la cloche mouillée. Mais j'ai déjà fait voir, & je démontrerai encore mieux quel fond on peut faire fur le rapport de cet hygromètre. M. de Luc s'appuye encore de l'exemple de la mer, Il prétend que Tome XX XII, Part. 1, 1788. JANVIER. D'2 2 28 OBSERVATIONS SURLA PHYSIQUE, étendue de l’eau qui s’évapore, /upplée en plus grande partie aux parois mouillées d'une cloche, & que pourtant il ne règne point roujours à fa furface une humidité extrènre, J'obferve d'abord que M. de Luc dit, que l'étendue de la furtace fupplée en plis grande partie ; il ne dit pas qu'elle fupplée entièrement ; cette aflertion auroit été trop ablurde. Mais je fouriens qu'elle n’y fupplée qu'en tré.-perite partie. En effet, ne fait-on pas que l'air en s'élevanr & en s'éloignant de la furface de la mer, fubit tès-fréquemment des changemens qui le dépouillent de l’humidité dont il s’étoit chargé ; que les vents, les viciitudes du chaud & du froid font redefcendre cet air defféché, le mêlent à celui qui rampe à la furface de la mer, & le forcent à participer à leur fécherefle ; que fouvenr mème celui qui eft à la furface de l’eau s'élève avant d’avoir eu le tems de fe faturer , & qu'ainfi cet air abfolument libre du côté du ciel, n’a pas la moindre reffemblance avec celui qui eft confiné dans un petit efpace, & entouré d’eau de toutes parts. Employer de pareils argumens , c'elt bien prouver qu'on a une mauvaife caufe à défendre, J'en dirai à-peu-près autant de celui que M. de Luc tire de ce que les bois employés dans les piftons de la machine à vapeurs s’y defsèchent & sy crevaflenr. S'ils fe defsèchent, ce n’eft point par l'action de la vapeur ; c'eft parce que leur union avec le corps de la machine leur fait contradter, au moins par intervalles , un degré de chaleur fupérieur à celui de la vapeur qui les-entoure. D'ailleurs, le jeu alternatif de la machine doit néceflairement les expofer à être par intervalles fortement réchauffés dans des momens où ils ne font entourés d'aucune vapeur, & alors leur defféchement doit être très-confidérable. Quant la féchereffe de la vapeur de l’eau bouillante dont parle M. de Luc, il y a une diftin@ion à faire : fans doute, cette vapeur eft sèche lorfqu'elle eft renfermée dans des vafes ou dans des tuyaux très-fecs®& très-chauds ; mais il eft tout aufli cértain qu'elle elt complettement humide lorfqu’elle eft contenue dans des vafes humides. C’eft ce dont on voit la preuve dans ces marmites inventées par M. Parmentier, & connues fous le nom de marmites américaines, Dans ces marmites , les légumes expofés à la vapeur de l’eau bouillante, fans être en contact avec l'eau même , fe cuifenc & s'attendriflenc dans la plus grande perfeétion, & par conféquent cette vapeur ne les defsèche pas. Pour moi, plus je réfléchis fur cette queftion, & plus il me paroît évident, que lorfqu’un petit volume d’air fera entouré d'eau de toutes parts il s’en raflafera. Car, que ce foit l’air lui-même qui diffolve l'eau & la métamorphofe en vapeur , que ce foit le feu renfermé dans cet air, que ce foit l’un & l’aatre, pourquoi ne s'en fatureront-ils pas ? Suppofons que dans un moment donné, le diflolvant quelconque de l'eau qui produit les vapeurs n’en foit pas faturé , pourquoi n’en prendra-t-il pas, puifqu’il en eft entouré, puifqu'aucun obftacle ne l'empêche d'en prendre > ; . . | | SUR L'HIST. NATURELLE ET LES ARTS. 29 Et quand on voir une théorie fi fimple , fi conforme à toutes Les loix connues , confirmée par le témoignage de tous mes hygromètres , quand on pit ces inftrumens fi mobiles, fi fenlibles , inébranlables autour du même degré , malgré des changemens confidérables dans la température de la cloche, peut-il refter encore quelque doute ? CHap. III, Conférmation des mêmes principes , pär La confideration de la rofée tant artificielle que naturelle, Il exifte encore un phénomène aufi décifif que bien conftaté par mes expériences, qui confpire à prouver que le terme fupérieur de mes hygromètres eft bien celui de l'humidité extrême, Mais je dois définir ce mor. J'entends par’ umidité extréme un degré d'humidité, tel que * Pair en foit faturé , c’eft-à-dire ;: qu'il refufe d'en admettre davantage, & que fi l'on en introduit une plus grande quantité, il ne puifle pas la con- ferver , mais qu’elle retombe immédiatement & mouille les corps qu’elle rouche, D'après cette définition , lorfque l'air dépofe de l'eau fur un corps qui eft en contaét avec lui, c’eft fans doute une preuve que cet air , dans le point où il couche ce corps, eft actuellement au terme de l'humidité extrême, ou qu'il eft faturé de vapeur. Or, dès que mes hygromètres atteignent le 109° ou plus exactement le 98° degré de leur échelle, on voit à l'inftant même l'eau fe féparer de l'air & mouiller les corps qu'il touche, fi du moins ces corps ne font pas plus chauds que cet air. J'ai cent & cent fois renfermé un de mes hygromètres dans une cloche sèche pofée fur du mercure; ou fcellée avec de la cire molle; j'ai introduit fous cette cloche une carte hbumectée ; j'ai vu mon hygromètre marcher à lhumide, & les paroïis du vafe demeurer sèches , rant que lhygromèrre réftoit au-deflous du 98e degré, mais dès qu'il avoit atteint ce degré, je voyois des gouttes de rofée paroître fur quelque point de la furface inté- rieure du vafe. Si j'approchois ma main de l'endroit où ces petites gouttes s'étoient réunies, cette chaleur les réduifoit en vapeurs, elles difparoif- foient ; mais au même inftant je les voyois reparoître fur quelqu’autre oint de la paroi intérieure du vafe. L'air de ce vafe étoit donc faturé. Si lon demande comment il pouvoit fe faire que dans cet air faturé la carte continuât de fournir des vapeurs ; je répondrai, que même dans un vafe clos, il y a continuellement des variations de chaleur imperceptibles à nos fens & à nos inftrumens , mais qui fufifent pour produire des vapeurs, qui fe forment dans un endroit , pour fe condenfer dans un autre. Mais ce qui démontre que la fomme totale des vapeurs contenues dans le vafe éroit conftamment la même dès que l’hygromètre avoit atteint le 98° degré , & tant que la chaleur moyenne des vafes demeuroit Ja même, c'eit que l’élafticité de l'air que je melurois en même tems demeuroit invariablement la même. Ceft donc le 98° degré de mon bygromètre qui indique le vrai point de faruration de l'air; les deux 3o OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, derniers degrés donc il s'élève , lorfqu'il eft plongé dans un air fuper- faturé, ne font qu'une extenfion mécanique produite par cette eau furabondante. C’elt par cette raifon que dans toutes mes tables hygro- métriques on voit le 98° degré correfpondre au point de la faturation. Cette expérience , je l'ai variée & répétée dans des vafes de formes & Ge grandeurs différentes, avec tout Le foin dont un long apprentiflage dans l’art d'expérinienter a pu me rendre capable. J’érois le premier qui marchois dans cette route ; je n’avois perfonne à réfuter ni à défendre ; je cherchois la vérité pour la vérité mème; & fi je me fuis formé une théorie, c’elt d’après ces expériences ; car je n'avois adopté aucun fyftème avant de les avoir faites. Si donc on veuc détruire cette théorie, ce doit être par des expériences du même genre, & faites avec le même foin, & non par des apperçus ou des argumens vagues & indireëts, ou fur le témoignage d'un inftrument imparfait done on n’a conftaté la marche par aucune expérience. Mais M. de Luc, dont les hypothèfes réfiftent rarement à des épreuves trop févères , dira , fans doute, comme il l’a fait en d’autres occalions, u'il fe défie des expériences faites dans des vafes fermés, & que les chofes fe paflenr rout autrement à l'air libre, Eh bien , je lui alléguerai des expériences faites en plein air, & je l'inviterai à Les répéter lui-même. S'il a un de mes hygromètres en bon état, qu'il le fufpende en été en rafe campagne, à quelques pieds au-deffus du fol , quelques momens avant le coucher du foleil; & qu'il aic auprès de lui & à la même hauteur que l’hygromètre, ou des feuillages verds , ou une plaque de verre mince, nette, dont la température puifle fuivre au plus près poflible les variations de celle de l'air: il verra que la rofée commencera à fe manifeter fur ces feuillages ou fur cette plaque , précifément au moment où mon hygro- mètre arrivera au 98° ou au 99° degré de fa graduation. Or, la formation de la rofée n’eft-elle pas l'indice le plus certain de l’humidité extrème ? Cap. IV, De la nature de la baleine relativement à l’hygromérre, & quel efl à-peu-près le degré de l’hygromètre de baleine qui indique le terme où Pair ef? faturé de vapeurs. Pourquoi donc l’hygromètre de M, de Luc donne-t-il des indications fi différentes ? C’eft ce que je puis expliquer clairement. [Il y a des fibftances dans lefquelles l'application de l’eau produit un relâchement & une extenfion indélnis : telles font les fubftances purement muqueufes ou gélatineufes. La baleine n’eft pas dans la claffe de ces fubftances, puifque M. de Luc affüre que fon alongement dans l’eau a des limites invariables, Il paroît cependant qu’elle contient une quantité aflez confidérable d’une matière muqueufe ou gélatineufe, difféminée entre fes fibres lonitudinales. Si ces fibres n'éroient pas liées entr'elles par quelques filets tranfverfaux , la baleine fe relâcheroir fans fin & fans ceffe par l'application de l’eau, SUR L'HIST, NATURELLE ET LES ARTS. 31 Mais ces fibres font aflez lâches pour permertre à la baleine de fe dilater en travers dans le fens de fa largeur , au-delà du rerme où la conduiroic l'afiuité hygrométrique de fa fubftance avec la vapeur aqueufe. Dans l'expérience qu'a faire M. de Luc pour éprouver meshyoromètres, il a commencé par pofér fur l’eau la cloche qui renfermoit fon ,hygro- mètre & le mien, fans mouiiler les parois de la cloche, Dans ce cas-fà, lorfque les parois de la cloche demeurent sèches, l’air fe fature plus lentement que fi la cloche eûr été humectée ; cependant mes hysromètres vinrent au 98° desré, qui indique ; comme je l'ai prouvé, le vrai point de la faturation ; & depuis 6 heur. = du foir, jufqu'à 9 heur. du lende- main , ils reftèrenc fixes à 98, ou ce qui revient au même, ils ne s’en écartèrent que de 3 dixièmes de degré. Ceux de M. @e Luc fe fixèrenc auffi, mais feulement au 80 ou 81° degré de leur échelle, On doit conclure de-là, que le 80 ou 81° degré marque fur l’hygro- mètre de M. de Luc Le terme de la faturation ou de l'humidité extrème de l'air, & que tous les degrés fupérieurs jufqu'au 100° mefurent , non - point des vapeurs diffouces ou dans le feu , ou dans l'air , mais la quantité de l’eau qui a pénétré la baleine après s'être dépofée matériellemenc fur elle. + Lorfque la cloche ne fait que repofer fur l'eau fans que fes parois intérieures en foient chargées , l'air fe fature bien de vapeur , mais il ne s'en forme cependant pas aflez, du moins dans les premières heures, pour dépofer une quantité confidérable de rofée. C'eft pourquoi l’hygro- mètre de M. de Luc ne dépafle pas dans ce cas-là Le 81° degré. Mais quand la cloche eft charoée d’eau dans toute fa furface intérieure , les alternatives du chaud & du froid , celles mêmes qui font imperceptibles à nos fens, produifent des évaporations & des condenfations fimultanées, & les vapeurs fe dépofent fous la forme de rofée, tantôt dans une place, tantôt dans l’autre. Lorfque j'ai laiflé mes hygromètres plufeurs heures de fuite fous la cloche humectée, je les ai vus cent fois chargés de gourtelettes d’eau qui embrafloient le cheveu comme autant de petites perles. Et comme le cheveu n’eft que très-peu fenfible à l’action immédiate de l’eau, cette application ne le fait marcher que de 2 degrés, ou de 98 à 100 ; au lieu que la baleine fubit par cette même ation de l’eau une exrenfion de 18 à 20 degrés. Si donc on vouloit adoprer l’ufage de la baleine dans les hygromètres , il faudroit ne tenir aucun compte des _ degrés au-deflus de 80. Je dis 80 , par forme d'exemple, car il faudroie déterminer par des expériences faires dans ce deffein , & même difficiles à faire avec précifion , le degré qui correfpond réellement à la faturation de l'air. Et comme ce degré elt très-éloigné de celui auquel l'application immédiate de l’eau fait marcher la baleine, il eft rrès-douteux qu'il fe trouve au même point dans les différentes baleines que l’on pourra employer. (l 32 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, Cuar. V. Pourquoi l'hygromètre de M. de Luc fubit des variations Je irrégulières fous la cloche humeëée. Les principes que j'ai pofés dans les chapitres précédens me fourniffent les moyens de rendre raifon des étranges anomalies que l'hygromètre de M. de Luc lui a préfentées fous la cloche humedte, lorfque cette cloche a changé de température. M. de Luc n’a pas elfayé d'en rendre raifon ; il n'en a pas même fait la plus lézèrè mention , parce qu’elles ne peuvent s'expliquer que par des principes qui condamnent entièrement cet hygromètre, ; Quand après un long féjour fous la cloche, il s’eft dépofé fur Le ruban de baleine une quantité de rofée qu’il a abforbée, & qui l'a fait marcher au-delà du 80° degré, ou du terme où l'air eft faturé de vapeurs, fi l'appareil vient à fe réchauffer, l'augmentation de chaleur produit une évaporation , & cette évaporation fe fait, ou aux dépens de l’eau furabon- dante que contient la baleine, ou aux dépens de l’eau qui tapifle les parois de la cloche. Dans le premier cas l’hygromèrre marche au fec ; dans le fecond il demeure ftationnaire. De même, fi l'appareil fe refroidit , une partie de la vapeur fe condenfe , & cette vapeur condenfée tombe, ou fur la baleine, ou fur les parois du vafe : fi elle rombe fur la baleine, l'hygromètre va à l'humide; fi elle combe fur le verre, l'hygromètre demeure au même degré. Comme le ruban de baleine, par fa ténuité, fe prête aux variations de température plus promptement que Les parois de la cloche, le cas le plus fréquent eft celui où l’eau fe condenfe, ou s'évapore à la furface de la baleine , & ainfi pour l'ordinaire l’'hygromètre marche à l'humide par le froid, & au fec par le chaud. Mais comme pour- tant la chaleur, lorfque c’eft une chaleur proprement dite & purement obfcure , doit premièrement agir fur les parois du vafe , avant d'affecter l'air & le cheveu qui y font renfermés, il doit arriver aufi quelquefois que les changemens fe font {ur les parois du vafe & non fur la baleine, On voit aifément combien la complication de toutes ces caufes doit produire de mouvemens irréguliers dans l’hygromètre à baleine: Le cheveu , au contraire, n'étant nullement affecté par l’eau furabon- dante, ou l'étant du moins infiniment peu en comparaifon de la baleine, il ne peut être mu par l’action de la chaleur , que quand elle eft aflez forte pour que l'air cefle d'être faturé; ce qui n'arrive point fous la cloche humectée. C’eft par cette raifon qu'il demeure immobile fous la cloche, malgré les changemens de température qu’on lui fait fubir. Cette différence et fondée fur un principe que j'ai établi dans mes effais fur l'Hygrométrie, & que M. de Luc non-feulement ignoroit, mais n’a pas même bien faif. C'eft qu’il faut diftinguer l’eau qui ef liée avec les élémens d'un corps par l’action de cette caufe que j'ai nommée affinité hygrométrique , d'avec celle qui eft répandue dans leurs pores , qe ne urface SUR L'HIST. NATURELLE ET LES ARTS. 3s Mic comme un corps étranger, & fans aucune liaifon intime avec eurs élémens. La première, celle qui eft liée par l'affinité hygrométrique, ne peut être féparée d’un corps que par une affinité plus forte; au lieu que la feconde, celle qui eft étrangère, peut être délogée, non-feulement par la chaleur , mais‘encore par des moyens mécaniques. J'ai fait voir l'importance de cette diftinétien dans la confidération de l'infuencele l'électricité fur l'évaporation. J'ai prouvé que l'électricité augmente l’éva- .poration de l’eau furabondante , mais qu'elle n’agit point fur celle qui eft combinée. Le cheveu donc qui ne renferme que de l’eau combinée, n’en perd que quand il fe trouve dans un lieu qui contient proportionnellement moins d’eau qu'il n’en contient lui-même. La baleine , au contraire, qui eft fufceprible de fe gorger d’eau furabondante , peut perdre cette eau par des caufes qui n'ont aucun rapport avec l'humidité & avec la féchereffe ; & cé vice feul fufiroit pour la rendre abfolument impropre à l'Hygrométrie, CHar. VI. Du terme de féchereffe extrême. Pour obtenir ce terme, M. de Luc emploie la chaux à grande dofe; & il nelui 4 pas fallu un grand effort de génie pour {ubftituer la chaux à j’aikali cauftique que j'avois employé ; il n’avoit pas beloin de dériver cette invention de fes principes fur l'ërcandefcence, On connoît l’analogie que ces deux fubftances ont entr'elles ; l'une & l’autre fonc privées d’eau & d’air fixe, l’une & l'autre cauftiques, Pune & l’autre préparées par une grande chaleur. D'ailleurs le procédé de M, de Luc eft abfolument calqué fur le mien ; & la preuve du defféchement extrême, qu’il tire comme moi de l'alongement du cheveu par la chaleur, eft une rencontre trop extraordinaire pour être purement fortuire. } Je n’ai point encore eu le tems de comparer la force defficative de !a chaux avec celle de l’alkali cauftique. Mais je delire beaucoup que mes expériences confirment celles de M. de Luc; que la chaux conferve long- tems fa force , & n'ait pas befoin d'être calcinée de nouveau à chaque fois qu'on l’emploie ; cela fera beaucoup plus commode ; & la graduation de l’hygromètre par fes deux points fixes ne m'en sppartengge pas moins, car fans doute , ceux qui ont changé quelque chofe dansl& matière des caractères de l’Imprimerie , n'ont pas prétendu pour cela avoir inventé cet art, Je doute cependant que La chaux donne un degré de féchereffe plus grand que l’alkali , & fi cela fe trouve vrai, ce fera à caufe de l'énorme quantité ques M. de Luc en emploie. Car on fait que l’alkali. cauftique attire quatre ou cinq fois plus d'eau & avec une promptitude incompa- rablement plus grande que la chaux. En attendant , comme l’alkali employé avec les précautions que jindique, donne un degré de fécherefle parfaitement fixe & déterminé, on Tome XXXII, Part. T, 1788. JANVIER. E 34 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, peut fans inquiétude fe fervir de mes hygromètres , & en conftruire de nouveaux fuivañt ce procédé, Car. VII De la Rétrogradation. Je viens enfin à la rétrogradation , ou à ce défaut de certains cheveux ; qui dans l'humidité extrême, commencent par s’allonger pour fe raccourcir enfuire, J'ai f peu difimulé ce défaut , que je lui ai moi-même donné le nom qu’il porte. J’ai même indiqué le moyen de le reconnoître, & j'ai foigneufement averti de mettre au rebut les cheveux qui rétrograderoient de plus d’un ou deux degrés. Il paroît que l'on a négligé ce foin dans les deux hygromètres qu'a obfervés M. de Luc, puifque leur rétrogradation eft de 4 deorés. Je dis de 4 degrés, & je m'en rapporte pour cela aux expériences, dont M. de Luc donne les détails aux $$. 74 & 76, car pour * ce qu'il dit vaguement qu'il en a vu un à 90 dans un brouillard où le fien étoit à 109, je n'en tiens aucun compte; l'inftrument étoit sûrement dérangé, ou le brouillard venoit de fe diffiper, car ni M. Senebier, ni M. Pidter, ni moi, qui avons fi fouvent obfervé cet inftrument dans le brouillard, n'avons jamais rien vu de pareil. En eñfer, il eft bien naturel que toutes les tortures que M. de Euc a fait fubir à cet inflrument l'aienc enfin dérangé, & l’on en trouve la preuve dans ce qu’il dit, $, 78, qu'il ne revient plus au terme de la fécherefle extrême, puifque ceux qui font en bon état y reviennent conftamment. Mais l'expérience que M. de Luc rapporte au $. 82, en donne une preuve bien plus forte encore, & complette même la démonitration du dérangement produit par les vexations qu’il a fait effuyer aux deux hygro- mètres qu'il a eus entre les mains. I] dir qu'il commença par les tenir long-tems fous la cloche humectée ; qu’enfuite il les en tira promptement & les porta au fec dans un autre endroit de la chambre ; que dans les $. premières minutes ils defcendirent à 84 degrés, & qu'enfuite ils rétro- gradèrent continuellement pendant $O minutes, au bout defquelles ils fe trouvèrent remontés à 91 degrés, tandis que le fien pendant cet intervalle {uivit une manche conflante & régulière vers la féchereffe, à Cette expéce m'étonna beaucoup; il me paroifloit étrange que dans les épreuves innombrables que j’ai faites & que mes amis ont faites comme moi avec ces hygromètres , nous n’euflions jamais obfervé d'aufi grands écarts. Cependant je réfléchis que jamais je n’avois laiflé mes hygro- mètres fous la cloche humectée auffi long-tems que l’avoit fait M. de Luc. Comme j'avois toujours vu qu'au bout de quelques heures ils ne fubifloient plus de variation fenfible, &:qu'un plus long féjour fous cette cloche rouille le métal, le ternit du moins ; fait tomber le vernis que M. Paul applique fur le cadran , & gêne le mouvement de l'aiguille fur fon axe, je ne les y avois jamais laiflés trois jours de fuite comme l’a S SUR L'HIST. NATURELLE ET LES ARTS. 35 fait M. de Luc. Je réfolus donc d'en faire l’expérience. Le 24 mai de cette année 1787, j'ai pris quatre de mes hygromèrres, conftruits à différentes époques, & avec des cheveux coupés fur des têtes différentes; je les ai placés fous la cloche, & les y ai laïffés pendant 3 jours & 16 heures de fuite, en tenant cette cloche conftamment humectée. Dans cet efpace de 88 heures, celui des quatre qui a fubi la plus grande rétrogradation , n'a rétrogradé que d’un degré & 7 dixièmes ; le fecond feulement de 7 dixièmes , le 3° de 6 dixièmes , & le 4° de 3 dixièmes de degré. Enfin, leurs variations dans les changemens de température qu'a fubis mon laboratoire pendant cet intervalle , n’ont été que d’un ou deux dixièmes de degré, & doivent par conféquent être regardées comme nulles. 7 Après ce long féjour dans l'humidité extrême, j’en retirai brufquemenc ces quatre hygromèrres, & je les portai au fec au fond du laboratoire. Un cinquième hygromètre, qui depuis long-tems n'avoit point été dans l'humidité, étoit fufpendu au milieu d'eux, pour indiquer les changemens qui pourroient furvenir dans l'air pendant l'expérience. J'obfervai tous ces hygromèrres exactement aux mêmes époques auxquelles M, de Luc avoit fait fes obfervations. Celui des quatre, dont la marche étoit la plus prompte , vint au bout de $ minutes à 70,3 ; au bout de 8° à 70, & au bout de 16 à 69,3 où il demeura fixe. Les autres arrivèrent un peu moins vite à ce même degré, mais aucun des quatre ne rétrograda, pas même d'un dixième de degré ; & le lendemain matin ils étoient encore d’accord & entr'eux , & avec celui qui n'avoit point été avec eux fous la cloche. Comme M.de Luc n’avoit point employé la précaution que j'avois prife , d'avoir un hygromètre diftinét de ceux qui fortoient de l’intérieur de la cloche, pour favoir s’il ne furviendroit point de changement dans J'humidité de l'air de la chambre pendant lexpérience, je ferois en droit d'attribuer la rétrogradation de mes hygromètres à une humidité contractée par l’air qui les entouroit ; & la marche pareffeufe de l’hygro= mètte de M. de Luc, donc les allures n'ont point été étudiées , n'auroit pas fuffi pour renverfer cette fuppolition. Mais je vois une autre raifon de cette rétrogradation, & je fuis convaincu qu'elle vient d’un tiraillement extraordinaire qu'ont fübi les cheveux de ces deux hygromètres. J'ai expreflément averti dans mes Eflais fur PHygrométrie,, $. 15 & 16 , que les cheveux qui avoient été tiraillés ou trop fortement tendus, devenoient fujets à ce défaut. J'ai dit que cétoic pour les préferver de ce tiraïllement que j'aflujectiflois leurs extrémités avec des pinces à vis, plutôt que de les nouer comme je le faifois d’abord. J’ai dit encore que les mêmes cheveux qui devenoient rétrogrades lorfqu'ils portoient des contrepoids de 12 grains, ne le devenoient plus lorfque ces contrepoids n'étoient que de 3 grains ; & qu’en conféquence, les contrepoids que leur adapte M, Paul ne re ag cette quantité. Tome XXXII, Part, I, 1788. JANVIER. E 2 > 36 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, Je foutiens donc, qu'il eft impoflible que des cheveux bien choifis & bién ménagésrétrogradent jamais de plusd’un degré ou d'un degré & demi; & fi j'adopte pour un moment la poflibiiiré d'un écart de 4 degrés que M. de Luc a obfervé dans mes hygromètres, lorfqu'il Les a placés fous la cloche humectée, c’eft uniquement parce que ces obfervations font d’ailleurs très-favorables à ces hygromètres , & très-contraires à celui de M. de Luc. J'obéis à ce principe de jurifprudence, qui ne permet pas à un plaideur de prendre dans un acte ce qui lui eft favorable en rejetant ce qui lui eft contraire, Or, en admettant cet écart de 4 degrés, en fuppofant que mes hygro- mètres foient rétrogradés à 96, au lieu de fe tenir à 100 comme ils. l'auroient dû ; l'erreur qui paroïît. d’abord de 4 deprés, n'eft réellement que de 2; parce que l'humidité extrême eft réellement au 98° degré ; comme je l'ai déjà dit ; les deux degrés de 98 à 109 n'indiquent qu'une humidité furabondante. Et quand l'humidité de l'air fera afez grande pour faire rétrograder les hygromètres à 06; on ne s'y trompera pas, on verra fur le champ qu'ils font en défaut; l'eau qui fe précipitera en abondance, & fur les inftrumens, & fur tous les corps voilns, fous la forme de rofée en été & de givre en hiver, dépofera contr'eux , & mani- feflera leur défaut. Enfin , fi jamais ces hygromètres étoient aflez répandus pour que les Phyfciens puflent les choifir eux-mêmes chez les artiftes qui les conftruifent , ils les eflayeroient avant de les acquérir, & ils rebuteroient ceux qu'ils verroient rétrograder de plus d'un degré ou d’un degré & demi. Or, on doit s’expofer fans peine au danger d’une erreur d’un degré ou d’un degré & demi, lorfqu’on voit qu'un Phyficien tel que M. de Luc, qui depuis tant d’années s'occupe à inventer & à perfectionner des hygromètres , finie par nous en propofer un , dont les vingt degrés fupé- rieurs font abfolument infignifians, & qui fait des écarts de onze degrés, dans des épreuves choifies à deffein pour nous donner une haute idée de fa perfection. . Car. VIII. Expériences décifives propofées à M. de Luc. M. de Luc répliquera , fans doute, car avec de l’efprit il n’eft point d’argument, fi démonftratif qu'il foit, auquel on ne puiffe répondre. Si donc on vouloit terminer cette controverfe, il faudroit imaginer quel- qu'expérience décifive , d’après laquelle on pût sûrement prononcer, & fur nos inftrumens, & fur nos procédés. Il s’agit de trouver un principe que nous admettions l’un & l'autre, & qui puifle fervir de bafe à ce jugement. Or, Le Auide élaftique, dans lequel l’eau fe convertit au moment où elle s’évapore, doic nous fournir ce principe ; puifque nous l'admettons évalement M. de Luc & moi. On établira donc une efpèce de combat judiciaire entre nos hygro- SUR L'HIST. NATURELLE ET LES ARTS. 37 mètres, & le manomètre qui eft la mefure des fluides expanfbles, fera le juge de ce combat. On renfermera ces deux hygromiètres dans un grand vafe bien net, qui contiendra de l’air , dont la fécherefle ira au moins à 60 ou à 70 deyrés du mien, On leur joindra un thermomètre & un manomètre. Au moment où on fera prêt à fceller le vafe, on y introduira un peu d’eau, ou un corps impregné d’eau, dont l’évaporation foit aflez lente pour que les hygromètres puiffent en fuivre les progrès. Si le vafe eft bizn fermé, & fi l'air qu’il renferme ne fe refroidit point , au moment où l'évaporation commencera , on verra le mercure monter dans le nianomètre ; cette afcenfion fuivra la marche de l’évaporation , & elle fe ralentira graduel- lement avec elle, fi du moins la chaleur demeure , comme il le faut, conftamment la même pendant d'expérience. Au moment où le mano- mètre ceffera de monter, il conviendra d’agiter un peu le vafe fans cepen- dant l’ouvrir, pour faciliter & l'évaporation & le mêlange de l'air faturé avec celui qui peut ne l'être pas encore. Lorfque, malgré cette agitation , le manomètre perfiftera dans fon immobilité, il fera bien certain qu'il ne fe* forme plus de vapeur élaltique , & qu’ainfi cette vapeur a atteint fon maximum dans le vafe. Ce fera donc le moment d’infpeéter les hygro- mètres. Si le mien n’elt pas alors à 98 ou tout près de 98, & fi celui de M. de Buc, celui du moins qui a fervi à fes dernières expériences, ou un autre à fon uniflon, n'eft pas refté à 80, ou tout au plus à 83 , je me regarderai comme condamné, & j'avouerai que je me fuis trompé dans toute cette théorie(1). Mais fi au contraire l'événement eft tel que je l'annonce, il faudra que M. de Luc convienne que l’hygromètre à cheveu h'eft point un inftrument fi méprifable ; que le 98° degré de cet hygro- mètre indique bien le maximum de la vapeur élaftique ; qu’en revanche rous les deorés dont l’hygromètre à baleine fera demeuré au-deffous du 100°, font abfolument 1llufoires , & qu'ils ne proviennent point de la vapeur élaftique , mais d'une mouillure proprement dite, ou de l’eau qui fe dépofe à fa furface. Si M. de Luc fe refufoit à cette décifion , ou cherchoir à Féluder, fous quelque prétexte que ce püût être, j'efpère que les Phyficiens ne fufpen- droient plus leur jugement : parce qu'enfin , fi la vapeur n’eft autre chofe qu'un fluide élaftique , la ceffation de la produétion de ce Auide démontre néceffairement la ceflation de la production de la vapeur. Au refte, ceux qui fouhaiteront de faire cette épreñve n’auront point befoin pour cela des deux hygromètres; on peut la tenter avec un feul ; parce que fi Fun des deux a raifon , l’autre à néceffairement torr. (1) Comme on pourroit croire que le retard de l’hygromètre de M. de Luc tient à Ja lenteur de fa marche, je confens, qu'avant de prononcer, on attende encore une beure , à compter du moment où le manomètre aura ceflé de monter. - 33 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, L'expérience fur la rofée, dont j'ai parlé ci-devant, peut aufli être regardée comme décifive, En effet, l'apparition de ce météore eft égale- ment un figne certain de la faturation de l'air dans lequel il fe forme. Qu'on fufpende donc nos deux hygromètres en plein air, quelque momens avant la chûte de la rofée, & qu’on regarde comme vaincu celui des deux, qui, au moment où elle commencera à paroître, fe trouvera fenfiblement éloigné de fon terme d'humidiré extrème. Certe épreuve peut auffi fe faire avec un feul hygromètre; parce que, encore une fois, l’un des deux ne peut pas être juite fans que l'autre foic néceflairement faux. À Je dois feulement avertir ceux qui penferoient à faire fubir à un hygromètre l’une ou l'autre de ces deux épreuves, qu'il faut commencer par S'aflurer fi le terme de l'humidité"eft bien placé à fon point fur l'inftrument qu'ils fe propofent d'éprouver. Pour cet effet il faut le plonger dans l'eau , fi c’eft un hygromètre à baleine, & dans une cloche humectée de toutes parts fi c’eft un hygromètre à cheveu, Le degré, quel qu’il foit, où ils fe fixeront, eft celui qui doit fervir de règle. g Enfin, fi l’on vient jamais à déterminer par des expériences directes & précifes la valeur réelle des diférens degrés de l’hygromètre à baleine, comme je l'ai fait pour ceux de l'hygromètre à cheveu, je propoferai à M. de Luc d’en placer un fous le récipient de la machine pneuma- rique , & d’eflayer fi des épuifemens égaux & fucceflifs ne produiront pas fur cet hygromètre des effets correfpondans à des defléchemens réels continuellement plus grands. Si ces effets font égaux, dans ce cas-là encore , j'avouerai que mon hygromètre ne vaut rien. On comprendra les raifons pour lefquelles je propofe cette épreuve , lorfqu'on aura lu le Chap. X. Car. IX. De ce que M. de Luc appelle fon fyfléme. Quoique le but principal de cer écrit foit la défenfe de lhygromètre à cheveu, jé ne puis cependant pas me difpenfer de dire un mot de la théorie. J'y fuis d'autant plus obligé, que c’eft avec un argument tiré de la théorie ,-que M. de Luc prétend porter le dernier coup à mon inftrument, à ma théorie & à la toralité de mes recherches fur l'Hygrométrie. J'obferverai d’abord, que ce que M. de Luc appelle fon /yfléme eft précifément le mien. M. de Luc dic en 1786: L’évaporation, dans mon fyfléme, ef? l'effet d'une union particulière du feu à l'eau , & fon produit efl un fluide expanfible particulier, &c. Ydées fur la Méréorolo- gie, $.2. Or, j'avois imprimé en 1783: La vapeur élaftique efl un mixte qui rèfulte de l'union des élémens du feu avec ceux du corps qui s'évapore. . ..@ la vapeur invifible qui s'élève de l’eau par la - SUR L'HIST. NATURELLE ET LES ARTS. 30 fimple chaleur de l'atmofphère efl un fluide éluflique de la même nature. Eflais fur l'Hygrométrie, $$. 188 & 189. Peut-être M, de Luc croit-il pouvoir s’appropriet ce fyftème, parce qu'il l'explique par les corpufcules de M. le Sage, Mais M. de Luc n'ignore pas, qu'expliquer n’eft pas inventer, & que le Phyficien qui expliqueroic le plus heureufemencla détonation de Ja poudre, ne pourroit pas pour cela fe vanter d’avoir inventé la poudre. Il eft vrai que M. de Luc croit mertre une grande différence entre fon fyflême 8: le mien , en n’admettant pas que l'air foit le diflolvant de la vapeur élaftique. Mais ce n'eft point-1à l'eflentiel de ce qu'on peut appeler up /yflême fur la nature de la vapeur. L’effentiel étoit d'énoncer iftinétement, & de prouver par des expériences directes , que dans toute évaporation proprement dite , l’eau fe combine avec le feu, & fe change ainfi en un fluide élaftique. Or, c'eft ce que j'ai fait , finon le premier de tous les Phyficiens, du moins certainement avant M. de Luc. Mais demander enfuite fi cette vapeur élaftique , lorfqu'elle fe mêle avec l'air, & qu’elle forme avec lui un tout homogène, s’y trouve dans un étar de diflolution, ou dans un état de fimple mélange, c'elt une queftion purement fecondaire. Et lorfqu'elle eft réduite à desgermes aufli fimples , ce n'eft même plus une queftion , au moins pour fôüt homme qui a les premières notions des principes de la Chimie. Car dès les premières leçons, on enfeigne aux étudians, que toutes les fois que deux fluides mélés enfemble forment un tout homogène & tranfparent , ils fe diffolvent mutuellement , comme l'eau & l’efprit-de-vin ; & qu’au contraire, lorfque deux fluides ne font pas de nature à fe difloudre l’un l'autre, & que par des moyens mécaniques, tels que -la fecouffe ou le broyement , on les force à fe mêler enfemble, ils forment un tout opaque , & fe féparent bientôt par la différence de leurs pefanteurs : l’eau & l'huile en dofifient un exemple. Or, l'air & la vapeur élaftique, lorfqu'ils font mèlés enfemble en dofes convenables , forment un tout parfaitement homogene,, & ne fe féparent point malgré la différence de leurs pefanteurs. Ils neMfenvenc être féparés que par des corps qui ont avec l'un des deux une affinité fupérieure, ou par le refroidiflement ; ce qui forme encore deux caractères connus & certains de la diflolution chimique. Je ne m’arrêrerai pas davantage fur cette queftion, perfuadé comme je: l'ai dit, que l’expofer, c’ett la réfoudre; & quoique M. de Luc me dife que j'aurois fait quelques progrès dans l'Hygrométrie , fi cette oplion n’avoit pas entravé ma marche, je fuis déterminé à y perlifter; & jofe lui répondre, que tout homme qui aura des notions claires de ce qu'eft une diflolution , croira comme moi & comme je l'ai prouvé 4 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE: dans mes Effais, que la vapeur élaftique fe diffout réellement dans l'air : dans toute la rigueur de ce terme. Mais M. de Luc porte fes prétentions bien plus loin encore; il veut que la théorie entière de l'Hygrométrie qu'il donne d'après les découvertes les plus nouvelles, & d’après les miennes en particulier, ne foit qu’une conféquence des idées qu'il a publiées dans fon Ouvrage fur les modifi- cations de l’atmofphère. I] dit à la page 7 de fes Idées fur la Météorologie: Les premiers germes des principes d’où découlent ces propofitions , c’eft-à-dire, toute la théorie de l’évaporation , Je trouvent déjà dans mes recherches fur les modifications de l'atmofphére. Cette aflertion peut être vraie dans ce fens: c’eft que les premiers germes de tous les êtres fe font trouvés originairement dans le chaos. . Car le chaos n'étoit pas plus confus que les idées que M. de Luc a données fur les vapeurs dans fes recherches fur l'atmofphère. Et c’eft ce que je vais prouvér. J'obferverai d'abord, que dans les nombreux endroits de ce livre où il et queftion des vapeurs, M, de Luc n'applique qu’à la vapeur de l’eau bouillante la qualification de fluide élaflique. Or, il ne peut pas s’en faire un grand mérite, puifque de tous les Phyficiens , qui depuis la renaiffance des à parlé de la vapeur qui fort du bec de l’éolipyle , il n’en eft pas un feul qui n'ait reconnu que cette vapeur étoit un fluide élaftique, Et cependant, je vais faire voir à quel point cette notion même de la vapeur de l'eau bouillante fe trouvoit confufe dans la rête de M. de Luc lorfqu’il écrivoit cet Ouvrage, IL veut expliquer le phénomène connu de ces petires boules de verre creufes que l’on jette fur les charbons ardens, & qui n'éclatent point fi elles ne contiennent que de l'air, mais qui fe brifent avec une explofion violente fi l’on y a renfermé un peu d’eau. ce L'air renfermé, dit M. de Luc, dans une petite boule de verre fcellée » hermétiquement, réfifte à l’introdu@ion du fluide igné, & la phiole » peut refter long-tems expofée à l'action du feu Gns fe rompre. Mais » fi l'on y renferme une feule goutte d'eau , le feu la réduit aufli-tôt en » vapeurs, & s'accumule en fi grande quantité dans fes pores, que la > petite boule fe rompt avec éclar ». Recherc S. 677. Je prierai M, de Luc de nous dire fi cette explication eft un de ces germes qui receloient de fi grandes découvertes. Elle a cependant le mérite de l'originalité. IL falloit vraiment être l'inventeur d’un fyftème pour favoir que la boule, quand elle ne contient que de l'air, ne crève pas à caufe de la réfiflance que l'air apporte à l’introduction du feu, & qu’en conféquence l'intérieur de la boule demeure froid au milieu des charbons ardens. Et, fans doute, qu’en vertu du même principe, fi certe bo avoit été purgée d'air, comme rien n’auroit empêché l'entrée du feu , ele auroit fait, même fans eau, une explofon terrible. Et ces pores de l’eau dans lefquels Le feu s’accumule. . . . Je demande fi un Phyficien qui fe feroit u SUR L'HIST. NATURELIE ET LES ARTS. 41 feroit formé une idée nette de la converfion de l’eau en vapeur élaftique , où qui auroit eu feulement ie germe de cette idée, auroit eu recours à de pareilles explications. C Enfuite, lorfqu’il eft queftion des vapeurs qui fe forment naturelle- ment dans l'air, M. de Luc fe donne une très-grande peine pour prouver que le feu concourt à leur formation. Mais ce n’eft-apparemment pas cela qu’il appelle /oz fyfléme. Car tous les Phyficiens l'ont dit depuis Ariftote, & même, fans doute, avant Ariftote, En effet, le fauvage qui sèche fes vêtemens au foleil , ou devant le feu de fa hutte, a auf pour fyftème que la chaleur contribue à l'évaporation. J'en dis autant de la lévèreré des vapeurs, chofe fi connue, que de tout tems les vapeurs onc été l'emblème de ce qui s'élève ou doit s'élever vers.le ciel. Ce qu'il y avoit de difficile, ce qui pouvoit faire l'objet d'un fyftème, c'étoit de déterminer la forme que le feu donne à l'eau, lorfqu'il la change en vapeurs, Or, c'eft ce que M. de Luc n’a point déterminé. IL fait dans le $. 675$ l’énumération des différens fyftèmes que les Phyliciens ont imaginés fur ce fujet, mais il n’en adopte aucun. Quelle que für celle de ces opinions dont l’expérience eût démontré la vérité, M. de Luc auroit pu également en trouver les germes dans fes Recherches. Il avoit cependant alors une idée favorite à laquelle il revenoit conti- nuellement , c’eft que l’évaporation eft le produit d'un enlèvement pure- ment mécanique des parties de l'eau par celles du feu. Cerre idée elt clairement énoncée dans le $. 707. « Si la chaleur du >» fluide qui s’évapore eft beaucoup plus grande que celle de Pair, elle >» produit une évaporation vifible, parce que le feu fortant plus rapide- >> ment enlèvera des molécules-plus groffes ; leur groffeur & la quantité > du feu dont elles feront pénétrées faciliteront leur afcenfion , elles >» monteront donc avec rapidité dans l’air fans fe mêler avec lui. Mais » fi [a différence de chaleur entre l’eau & l’air fe trouvent moindres, fi >» elle devienc mème contraire, comme il arrive en été dans les grandes > mafles d'eau; le uide igné agira par fa feule agitation , & non comme » un-courant; les particules qu'il dérachera de l’eau feront petites, & » n'altéreront point fa tranfparence », Je dis que l'on voit dans ce paragraphe le feu enlever l’eau d'une manière purement mécanique, comme le vent enlève de la pouffière ; on ne levoitpoint contracter avec elle une union intime , de laquelle réfulte un être nouveau tel qu’un fluide élaftique. Et M. de Luc achève de le démontrer lui-même dans le paragraphe fuivant. Il eft fi éloigné d’avoir l’idée d’une combinaifon , d’une union intime du feu avec l’eau , qu'il croit que dans un efpace vuide fuffifamment élevé , le feu abandonneroit l’eau, & que celle-ci retomberoit par fa pefanteur, « Il eft très-probable , dit-il, » & M. Homberg l’a déjà remarqué , que le feu laïfferoit échapper les >» particules d’eau qu'il a féparées-de la mafle dont il eft forti, fi les Tome XXXII, Part, 1, 1788. JANVIER, F v 42 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, » récipiens vuides d'air avoient aflez de hauteur : comme il abandonne » les particules vifbles de cuivre & de plomb, qu'il détache par fes » élancemens, lorfque ces métaux font dans une forte fufion >». M. de Luc , quand il écrivoit fes recherches , n’avoit pas des idées plus nettes fur la différence qu'il y a entre la vapeur véficulaire & la vapeur élafique. Ici il ne voit entr'elles d'autre différence que celle de la grofleur de leurs parties ; le $.707 que jai tranfcrit plus haut en préfente la preuve. Là, il affirme expreffément qu'il y a entr'elles une différence effentielle , & voici cette différence. « L’humidité, dit-il, $. 672, qui » agit ordinairement fur l'hygromètre , n’eft point femblable à celle que » nous voyons fous la forme de brouillard. Ceux-ci ne font pas baifler le » baromètre , & l'hygromètre n’en eft prefque point afleté quand il eft » dans une chambre bien fermée ». M. de Luc confirme un peu plus bas certe même idée , en difant que les particules du brouillard flostent dans l'air fans l'affeëler fenfiblement , c’'eft-à-dire , fans le mouiller. Si cette idée eft un des germes dont eft fortie la théorie que M. de Luc appelle aujourd'hui on fyfléme , il faut qu'il avoue que ce yerme a bien changé en fe développant. Car dans l’origine M, de Luc n’accordoit pas à ces particules la faculté d’humeéter l'air qui les entoure , & dans fon fyfième aduel il reconnoît, ce que j'ai prouvé dans mon Hygro- métrie, qu'un corps plongé dans le brouillard {e trouve non-feulemenc dans l'humidité, mais dans ce qu'il appelle lAumidité extréme réelle. Idées fur la Météorol. 6. 76. Lorfque l’on voit ce profond filence fur la vraie nature des vapeurs ; & cet aflemblage d'idées confufes & contradictoires , conçoit-on que M. de Luc ofe dire en propres termes: qu'il avoit déjà énoncé dans fes Recherches fur les modifications de l'atmofphère le {yftème vrai, fimple ; clair, qu'il a adopté dans fon nouvel Ouvrage, J’ajouterai que M. de Luc, dans le Chap. IT de fes Idées, donne fans me citer un extrait des principes que j'ai le premier développés fur les affinités hygrométriques ; à la vérité il change leur nom en les appellant hygrofcopiques ; mais ce nom eft la feule chofe qui lui appartienne , du moins auroit-il de la peine à en montrer le germe dans fes Recherches. En effet, s'il en avoit eu la moindre notion, il en auroit fans doute parlé dans les notes du $, 671, où il ramène roujours & uniquement fon principe favori du feu qui charrie l’eau, & qui la dépofe à la furface des corps qu’il pénètre. Cnap.X. De la marche de l'Hygromètre à cheveu dans un air raréfré. Il ne me refte plus pour achever cette tâche pénible qu’à juftifier mon hygromètre fur la marche qu’il a fuivie dans un air graduellement raréfié, J’avois vu, que quand je raréfois l’air autant que je le pouvois par le moyen d’une bonne pompe, & avec les précautions que j'ai indiquée SUR L'HIST. NATURELLE ET LES ARTS. 43 dans mes EfJais , l'hygromètre à cheveu placé fous le récipient de cette pompe marchoit de 30 ou 75 degrés vers la féchereffe. Je fus curieux d'étudier la loi fuivant laquelle fe faifoit ce defféchemenr. Pour cer effet, au lieu d’épuifer tout de fuite mon récipient, je commençai par extraire une partie déterminée, une huitième, par exemple, de l'air qu'il renfer- moit ; je notai le nombre de degrés dont l’hygromètre marchoït au fec par l'effet de cette raréfation; enfuire je fis fortir une feconde huitième, Je notai de nouveau le defléchement produit par cette extraction , & ainfi de fuite. Cette expérience répétée plufieurs fois, avec tous les foins poflibles, me fit voir conftlamment que le defféchement. fuivoit une progrefion croiffante; c’eft-à-dire, que la feconde extraction de Pair defféchoit l'hygromètre plus que la première , la troifième plus que la fecondez & ainfi des autres. Après avoir conftaté le fait, j’effayai d'en rendre raifon. M. de Luc n’a pas goûté mon explication ; & il a combattue par des fübrilités , qui ont été, il avoue lui=même, inintelligibles à fes amis, & qu'il a vainement effayé de rendre plus claires dans fon appendice, Mais je n'entre point dans certe difcufion , jen épargne l’ennui à mes Lecteurs. Je ferai mieux placé pour traiter ce fujet d’une manière inté- reflanre, lorfque je viendrai à le remanier, comme je me le propofe, & que je racherai de le perfectionner par des expériences nouvelles & décifives. Dans ce moment je ne veux défendre que mon hygromètre. M. de Luc prétend que des épuifemens égaux doivent néceflairement produire des defléchemens égaux, & que fi mon hygromètre les a marqués inégaux , c’eft parce qu'il eft vicieux. M. de Luc , comme on le voit, conferve toujours la même manière d'argumenter. L'expérience la mieux faite & la plus concluante eft-elle contraire à fes idées ; cette expérience eft trompeufe, & l'inftrument qui a fervi à la faire eft entièrement défeétueux. Et quelle eft la conclufion générale qu’il tire de cette manière d’argumenter? C’eft qu'on ne peut faire aucun fond ni fur lesexpériences , ni fur les formules, ni fur les tables pour lefquelles je me füis fervi de cet inftrument. Et M. de Luc a une telle confiance dans fes propres idées, qu'il ne daigne pas feulement répéter avec l’hygromètre de fon invention une expérience aufli facile & aufli fimple que celle du defféchement dans le vuide. Il décide à priori qu'indubitablement fon inftrument fuivra une toute autresmarche ; & d'après cette décifion , il prononce fans héfiter fa fentence contre tout mon Ouvrage. Un tel procédé caractérife-t-il bien un critique impartial & de fens- froid ? En effec, commenc M. de Luc n’a-t-il pas vu que les accroille- mens de la férie que m’a donné l'expérience font trop grands pour venir de ce que mon hygromètre indique des deflécherhens égaux & pro- greffifs par des nombres de degrés continuellement plus grands? Car j'ai déterminé avec le plus grand foin la marche de mon hygromèrre, & cette Tome X XXII, Part. I, 1788, JANVIER, EF 2 ' \ 44 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, marche ne peut pas rendre raifon , même de la moitié des accroiffemens que j'ai obfervés. Ec M. de Luc n'ignore pas que j'ai dérerminé cette marche, car le parti qu'il a tiré de mon livre prouve qu’il l’a lu. Mais il aime mieux paroître lavoir devinée ; d’abord pour faire à fon génie l'honneur de cette découverte , enfuite pour demeurer dans le vague & pour donner ainfi la plus grande latitude à cette prétendue imperfe@ion de mes hygromètres. En effer, fi M. de Luc avoit calculé les réfultats de mon-expérience d’après la table que j'ai donnée au $. 176, il auroit vu gue non-feulement les defléchemens apparens , mais aufi les defléche- mens réels ont fuivi une progreflion croiflante; en forte que le dernier defféchement réel a été plus que double du premier. Si donc M. de Luc veut perfifter à foutenir que des épuifemens égaux produifent des defléchemens égaux, il faudra qu'il anéantifle les expé- riences par lefquelles j’ai déterminé la marche de mon hygromètre. Or, comme je l'ai déjà dit, ce n'eft que par des expériences contradiétoires aux miennes qu’il parviendra à détruire celles que j'ai faites & répétées plufieurs fois & par différens procédés, avec toute l'exactitude dont elles font fufceptibles. Tant que M. de Luc n’oppofera que fes opinions & fes apperçus à des faits aufh bien conftatés, les juges éclairés ne pourront lui accorder aucune confance, J'ofe donc me flatter d'avoir fatisfait aux objections que mon critique a élevées contre l’hygromèrre à cheveu. J'ai démontré les vices effentiels de celui qu'il a prétendu lui donner pour juge (1) : j'ai indiqué des expé- riences tranchantes, à la décifion defquelles M. de Luc ne peut pas fe fouftraire, & que pourront tenter tous Les Phyficiens à qui il refteroit encore des doutes : J'ai fait voir que dans fes Recherches fur les modi- fications de l'aimofphère M. de Luc n’avoit donné que des idées faufles ou confufes fur tout ce qui tient à la théorie de l’évaporation, & que ce qu'il a appelé /a théorie n’étoit autre chofe que la mienne. Je ferai voir dans la fuire & avec la même évidence , que les théories qui font vraiment propres à M. de Luc ne valent pas mieux que fon hygromètre. Je ne prends pourtant pas l’engagement de répondre à toutes (1): Je nai parlé que des vices de cet hygromètre qui font relatifs à ceux que M. de Luc a reprochés au mien. Maisil enfa d’autres qui lui font propres, & qui ont frappé tous les connoilleurs ; comme l’extrême tenfon qu’on eft obligé de donner à la baleïne, les variations que fubit la force du reffort par le froid & le chaud , par V’accourciflement & l’alongement du cheveu & par la continuité même de (a tenfion: la difficulté & la délicatefle de l’opération par laquelle on donne à la baleine le degré de ténuité qui lui eft néceffaire : la difficulté de la rendre uniforme dans toute fa Jongueur , & fur-tout dans les différens hygromètres que lon voudroit confiruire fans modèle. Enfin, dans les petits, la grandeur des frottemens produits par le nombre des roulettes fur lefquelles pafle la baleine, SUR L'HIST, NATURELLE, ET LES ARTS. 4$ fes critiques: ce feroit un travail trop long ; trop pénible, trop ennuyeux pour mes Lecteurs. * Qu'on ne me croie cependant point ennemi de la contradiction , j'aime au contraire à entendre des objections contre mes opinions , lorfque ces objections fonc propofées dans la vue de foutenir ou de découvrir Ja vérité. Mais lorfqu'on voit manifeftement l'intention de déprimer un Ouvrage ; lorfqu’on voit un Auteur y chercher des fautes pour Le plailir de les mettre au grand jour; jouer fur un mot pour vous donner l’appa- rence de vous contredire vous-même ; s’efforcer de s'approprier à Jui- même ou d'attribuer à d'autres ce que vous avez fait de bon; vous attaquer fur des opinions généralenient reçues, comme fi elles n’apparte- noient qu'à vous ; préfenter les vôtres fous le jour le.plus défavorable & prendre enfin vis-à-vis de vous le ton d'un régent qui corrige le thème de fon écolier, & qui diftribue magiftralement le blâme & la louange, on eft également choqué & des éloges & des critiques. Lors donc que je reprendrai cetravail, je ne releverai point ces critiques à demi-perfonnelles qui ne peuvent fervir qu'à aigrir Lefprit & à le rendre minutieux. Je ne craiterai que les grandes queftions de mon fujet : j'avouerai avec candeur les erreurs que j'aurai commifes , & je m'appli- querai à développer les vérités dont j'aurai été convaincu par l’expérience ou par le raifonnement. La fuite au mois prochain. MÉMOIRE ! Préfenté à l’Académie Royale des Sciences de Paris, fur les dimenfions des Horloges-de Château ou gros volume ; Par M. Rogin, Horloger ordinaire du Roi & de la Reine. | PE horloges de château ou gros volume dans les machines deftinées à la mefüure du tems, doivent être placées au’premier rang , en confidérant Jeur utilité, 1°. parce que ces machines font ordinairement deftinées à raflembler des milliers d'hommes à un même ordre, au même fervice ; 2°. parce qu'on peut parvenir à une exécution foignée & à des courbes auf décidées que la géométrie peur les concevoir & les tracer; d'où il fuit, que d’une machine de cette force bien combinée & bien exécutée, on peut attendre une extrème juftefle. Ces machines, effentielles relativement aux travaux publics, aux affaires 46 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, civiles ou exercices quelconques, que plufieurs fiècles peuvent à peine anéantir, méritent bien qu'on ne néplige rien pour leur perfe&ion. Cette perfection confifte à donner une diftribution au calibre, qui procure une très-grande force de mouvemens avec des petits mobiles, afin de ne point avoir des mafles , par la grandeur, qui exigent particu- lèrement un poids pour les mettre en mouvement, ce qui eft toujours préjudiciable à la sûreté des effers & à la durée de l'horloge, Il faut que ces machines foient très-aifées à fabriquer, très-faciles à gouverner, qu'elles ne-foient point fujettes à perdre leur liberté par la nature des frottemens ; que l'échappement & le régulateur tendent à un ifochronifme parfait ; que la marche de l'horloge foir établie parfaitement régulière, fur le tems moyens, mais que la quadrature indique & fonne le tems vrai; car le foleil ayant une marche irrégulière, oneft obligé de remettre l'horloge tous les jours fur la méridienne; on n’a donc pas befoin d'une machine bien faite, ou on a abfolumenc befoin d'une cadrature qui füive & indique les variétés du foleil, quoiqu’elle foic elle - même conduite par un mouvement uniforme. ÿ Meffieurs, j'ai l'honneur de vous préfenter un ouvrage de cettenature , dans lequel tous ces chefs font fcrupuleufement traités ; je vous prie de vouloir bien affeoir votre jugement fur leurs avantages. Defcription d'une Horloge exécutée en 178$, & placée au Château de Trianon, fonrant les heures & les quarts, marquant le rems vrai fur deux cadrans placés à foixante pieds l'un de l'autre, marchant huit jours fans avoir befoin d’étre remontée. Cette horloge eft placée fur un chevalet de quatre pieds de long fur deux pieds de large; elle eff difpofée en trois parties féparées , le mou- vement , la fonnerie des heures , la fonnerie des quarts ; chaque chaflis contient tout ce qui compofe une de ces parties féparées ; elles font routes trois réunies fur le fufdit chevalec par des vis d'une manière inébranlable ; on voit, par cette difpofition , que pour la fabriquer , on eft obligé de tenir & de-ne tranfporter que le tiers de toute la machine à la fois, que par conféquent, l’Artitte eft plus à fon aife & peut donner plus de per- fe&ion à fon ouvrage; & s'il arrivoit qu'il y. eût à travailler à une de ces parties, par exemple, les quarts, on démonteroit feulement la partie des quarts , ce quine coûteroit quelle tiers, puique les deux autres refteroient en place, fans compter: que le mouvement donneroit toujours l'heure & fonneroit de même, Ces deux avantages fonc également utiles , agréables & économiques. La fonnerie des heures & celle des quarts font pofées des deux côtés du mouvement ; mais les rouages fur un plan. équilatéral à celui du mouvement , ce: qui. procure une difpofition pour les détentes d'un avantage réel, l'extrémité de la barre de détente fe trouve à côté de la SUR L'HIST. NATURELLE ET LES ARTS. 47 cadrature , levée par un dérentillon, le tout aflez léger jour pouvoir être levé par la cadrature ordinairé d’une pendule d'appartement; & l’arrêr du rouage fe trouve à l’autre extrémité de la barre de détente à trois pouces du pivot, ce qui en aflure l'effet, puifque la pefanteur de la détente eft à fes deux extrémités dans le rapport de cinquante à un. Il ‘réfulre donc que la preflion des détentes fur l'arrêt des totaux, ef cinquante fois plus puiflante que fur Le détentillon. Il n'y a donc poinc de contrecoup qui puifle la faire fauter ni mécomprer, ce qui eft très- fréquent dans les horloges ordinaires , & très-défagréable dans les monu- mens publics; les deux rouages de fonnerie fe trouvent affez près pour que la communication des quarts puifle faire détendre la fonnerie avec facilité. À Comme c’eft fur le régulateur que l'aion du froid & du chaud imprime un mouvement tantôt plus vif, tantôt plus lent, pour corriger cer effet de la dilatation, celui de cette horloge eft un pendule à chafis, dont le point de fufpenfion eft immuable & déterminé, ce qui établit la marche de l'horloge aftronomique ou régulière; ce compen- fateur eft à chaflis; il n’a d’autre ajuftement & fupport que les points de contatt. Cetre conftruction a été bien combinée pour obtenir une compenfation jufte, qui ne foit point dérangée par les ajuftemens mécaniques. L'expérience a montré que ce compenfateur étroit encore fufceptible d’être perfectionné ; la mafle des barres quarrées de ce pendule préfentoit un plan affez-large pour s’oppofer aux ofcillations par la preflion de l'air, par conféquent, variable en raifon de fon épaifleur. La largeur de ces mêmes plans empêchoit un peu l':ffet de condenfation & d’extenfion, tant par leur frottement , que parce que l'air ne pouvoit agir évalemenc fur tous les corps. La pefanteur des branches détruifoit la gravité de la lentille, & par conféquent, la puiflance réglante, Je me fuis attaché à le perfectionner, en corrigeant les inconvéniens dont les favans obfervateurs l’avoient trouvée fufceprible, en donnant à fes branches une forme ovale, qui préfente prefque tout le corps à découvert, & par ce moyen, augmente les furfaces, quant à la fenfibilité du chaud & du froid, & diminue la réfiftance de l'air, quant aux ofcillations ; la cohéfion des branches réduit prefqu’à zéro leur pefanteur dimiguée d’un quart; la gravité & puiflance réglante augmentée de ce quart. Mais comme il faut que l'horloge marque fur les cadrans & fonne l'heure vraie, voici la cadrature que j'ai imaginée & exécutée pour la première fois dans cette horloge : c'eft une cadrature que nous appelerons eadrature d’équation, mais beaucoup plus fimple que celles de nos pendules de cette nature; elle eft compofée de deux roues A 4, placées au centre de cette cadrature; & de deux roues B 2 , portées par un noyau _ ’ 45 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, mouvant autour des deux-roues À a, par un rateau dont un bras va s'appuyer fur une ellipfe dont l'inégalité des rayons fait parcourir à la: roue B la moitié de la circonférence de la roue À ; mais comme elle ne peut fe déplacer fans faire un mouvement de rotation fur fon axe, cette roue B n'ayant que la moitié de la circonférence de la roue À , elle fait un tour, pendant que la roue À ne fait qu'un demi-tour ; la feconde roue 4 étant dans le même rapport avec la roue b, prend un mouvement accéléré ou rétrogradé en proportion des mouvemens que la courbe fait faire à la roue C, ce qui eft plus que fuffifant pour donner l'équation de chaque jour; en faifant comparaifon des deux moyens, on trouvera toujours que cette cadrature ne coûtera pas plus que le pendule mouvant; il aura, de plus, l'avantage d’être meilleur. Cette cadrature ne peut être qu'infiniment préférable, & plus jufte que les horloges qui donnent l'équation par la mobilité du pendule, puifqu'indépendamment d'une exécution vicieufe, l'horloge eft encore comptable des inégalités fuivantes: 1°. l'ifochronifme eft troublé par l’extenfion d'un levier néceflairement long , fans quoi, il opéreroit difficilement l'enlèvement de la lentille , & doubleroit les erreurs des preflions; 2°. le mouvement du levier inconftant fait décrire à la fufpenfon une cicloïde irrégulière, ce qui eft confirmé par les obfervations de vingt favans qui appuient mon raifonnement ; mais un autre inconvénient {ans remède, & qui produit les plus grands écarts, c’eft la preflion d’une mafle aufli confidérable, qui ne permet pas aux points de contact de reprendre leur même place, en montant comme en defcendant, & par conféquent, donne des réfulrats différens; d’où il fuit, que toutes ces caufes raflemblées , donnent plus d’inégalité dans la marche de l'horloge, qu'on n'a d'équation à corriger chaque jour; plus encore, fi par hafard les inégalités opèrent en raifon inverfe de l'équation ; que devient alors l'heure vraie que doit marquer notre horloge ? Ma cadrature n'a aucun de ces vices, même dans des ouvrages lus où moins foignés , puifque fon exa@itude eft dans le principe. Je dois, Meffieurs, cetre cadrature à des réflexions que vous m'avez forcé de faire fur une fufpenfon de cette nature, par laquelle je confervois toure la gravité de la lentille fur les ofcillations, & j’anéantiflois fa pefanteur fur fon effort fur la courbe; je vous préfentois cette fufpenfion , non préférable à celle qui eft fixe, mais comme la meilleure, étant obligé d'employer ce moyen pour l’effer dont étroit queftion. i Vous avez reconnu ma fufpenfion neuve & très-intéreffante ; mais vous n'avez pu vous empêcher d’obferver que cette mobilité du pendule s'oppofoit à fon extrême juftefle. Meflieurs, je n’ofe vous occuper fur la fimplicité de cette machine , fur fon exécution , fur le peu de place qu'occupent ces difpofitions, ce qui donne toujours une fagefle qui détruit peu-à-peu le charlatanifme des ouvrages embarraffés, qui n’ont pour objet que d’éblouir les admirateurs non SUR L'HIST. NATURELLE ET LES ARTS. 49 non inftruits; mais telle envie que j'aie de fimplifier, je n'ai pu me réloudre à fupprimer les cercles qui enchaînent toutes les chevilles de levée, & qui réuniflent fur tous l’effort d’une feule. Une réflexion aufi faine mérite bien d’être confervée ; car , fi une cheville quelconque ifolée , eft fufifamment forte pour réfifter à Peffort du marteau , en les * enchaînant toutes, on pourroit ne les mettre que d’un dixième ; on gagneroit, par ce moyen, neuf dixièmes d'intervalle pour lefpace par- couru par lalevée, & beaucoup de liberté pour les rouleaux montés fur des broches neuf fois plus petites. ® IUeft une infnité de moyens & de foins qui tendent à la perfection & à la durée de ces machines; fi vous les trouvez dignes de votre _ attention , je ferai très-flatté qu’ils trouvent place dans votre rapport. Le régulateur dont a été queftion dans ce Mémoire , étanr ainfi per- fectionné, remplit entièrement mes vues dans toutes les pendules où je lai employé, particulièrement celle du Cabinet de Phyfique du Roi. C’eft après la réputation de certe pendule , que M. de Lalande m'a adreflé M. Cagnoli , Affronome de Vérone, pour lui faire une pendule aftronos mique de cette conftruction. Comme ce favant eft reconnu pour un obfervateur précieux , je crois que les amateurs ne feront point fachés de trouver à:la E de ce Mémoire le journal de fes obfervations , qui prouvent que les écarts de cette pendule font moindres que ceux des meilleures pendules connues. 1°. Une pendule de l’obfervatoire de Manheim, faite par M. Arnold , Horloger anglois, déclarée parfaite par M. Chriftian Mayer, pour n’avoir : eu qu'une fecoñde de variété journalière depuis ‘le premier feptembre jufqu'au 10 janvier 1780, paflant de l’automne à l'hiver. 2°. Use pendule de M. Grenier de Rouen, qui a été publiée pour n'avoir point paflé huit dixièmes de feconde de variété journalière, Je n'en cite point d’autre connue, les erreurs étant bien plus confidé- rables. On va voir, par 1e journal fuivänt , que la pendule de M. Gagnoli n'a eu que deux dixième de feconde de variété journalière, paflant de F’automne à l'hiver, Tome XXXIT, Port, 1; 1788, JANVIER, G go OBSERVATIONS SUR LA PAYSIQUE, De Rene rte s Mars 1787. Marche de la Pendule de M. GacNout, faite par M. ROBIN ; envoyée à l’Auteur par. M. CaGNour. Époques en 1785. do à si Re à as rs Etat du Piromètre. De 11 à 26 mai . «retard par jour O” 80], 1° 15 : [De 16° à 19° = De 26 mai À7 juin retard. ....0"8ç5|.1° 15 © |De 19° 5 à 16° ; De 7juinà23..retard.....1"30l.1° 15 ; |De 17° à 21° De23 juinà13 juilretard. ....1"37|-1° 15 : |De 17° à 19° Der3à26.....retard.....1" 3$|:1° 15 : 19° * On a changé un reflort , & on a raccourci le pendule par le moyen du micromètre. Dez7fept.à130@. .......0" o|-1° 15/5 |De 11° à 12°* Der3à24e:. retard > ..0/ 33/1118 % |Dex2° à 8° ; De 24à $ Novemb. retard ...0/ 18|:1° 15 ; |De 8° : à 10; Desà16...... retard... .0" 20|:1° 15 3 [De 10 5 à 6; On n'a pas fuivi la marche de la pendule , & on l’a laifée arrêter poux voir combien de jours elle peut aller fans être remontée. Du 1 décemb. au 14 avance . . .0" 03|,1° r$/ Du 14au2$...., avance. ..0" 18] ,1° 15 Du 25 au 28.... erreur pour avoir oublié deremonter la pendule. Du 28 au 12 janvier. avance . . .0" 30|-1° 1$ ; M. Cagnoli fait bâtir & arranger fon obfervatoire, il a promis d’envoyer la fuite de fes obfervations. D Ke SUR L'HIST. NATURELLE ET LES ARTS, $r emmener meme rire ermenencemnenennee se nee C ON JE CT URE SUR LA CAUSE DE LA CHALEUR DES EAUX THERMALE; Par Dom SAINT-JULIEN , Bénédi&in de là Congrégation de Saint-Maur, Profeffeur Emérite de Philofophie & Mathématiques, de T Académie des Sciences de Bordeaux. Lss Phyfciens ont penfé pendant long-tems que la chaleur des eaux thermales éroit occafionnéé par des feux fouterrains placés au-deflous des réfervoirs ou conduits des fontaines qui fouriffent ces eaux. Mais cette idée étroit effrayante pour les habitans des pays où l'on voit de pareilles fontaines. Car l’on fait , dépuis aflez long-tems, quelle gft la violence de l’eau réduite en vapeurs; fi donc quelque filet d'eau venoie à s'échapper, foit du réfervoir , foit des conduits pour tomber dans le foyer ( l'on conçoit facilement qu'il eft prefqu'impoñlible qu'un pareil malheur n'arrive) cette petite quantité d'eau réduite fubirement en vapeurs va occafionner l'explofion la plus violente, & même la ruine entière d’un pays, qui s’eft cru riche par fes eaux thermales, Mais de plus, il s’en faut de beaucoup que cette hypochèfe fatisfafle à tous les phénomènes que préfentent les différentes eaux thermales. C’eft pourquoi les modernes ont penfé, avec plus de jufteffe, que la chaleur de ces eaux doit être attribuée à la décompofition de différentes pyrites. Les expériences ont appris , en effet, que prefque rous ces corps font très-fujets à la décompofition, & que dans leur déliquefcence , ils forment ou occalionnent une très-grande chaleur, qui va mème quelque- fois jufqu'à l'incandefcence & à l'inflammation; c'eft pourquoi ils ont fabftitué aux feux fouterrains des amas de pyrites, qui tombant en efflorefcence, par des courans d'air ménagés dans la terre, occafionnent cette chaleur des eaux Qui paflent à portée , & même fouvent les trem- blemens de terre & les éruptions volcaniques. En examinant de près cette opinion, elle m'a paru très-propre à expliquer la chaleur que l’on remarque dans ces eaux , fans effrayer, au moins autant , les habitans des pays qu’elles enrichiflent. Mais elléne m'a pas paru farisfaifanre pour expliquer les autres phénomènes , que l'on peut remarquer dans les mêmes eaux ; pour s’en convaincre, il fuffit de faire attention aux obfervations fuivantes. 1°. Parmi les eaux thermales, les unes font fimples, telles que les eaux de la grande fontaine de Dax dans les landes, & les eaux de Bagnères de Bigorre ; d’autres font compofées ou minérales, telles que les eaux Tome XXXII, Part. T, 1788. JANVIER, G 2 se OBSERVATIONS SUR ZA PHYSIQUE, de Barèyes, de Cauteretz en Bigorre, les eaux bonnes & eaux chaudes en Bean; &c. Si les unes & les autres traverfent des pyrites en décom- poñtion , d'où vient qu'elles ne font pas toutes chargées de principes métalliques ? LATE INER 2°, Les eaux d’une même fource contiennent toujours les mêmes principes , & toujours, à-peu-près , dans, la même proportion. Il paroïc au contraire que Ces pyrires décompofées & continuellement lavées par des-eaux courantes, devroient peu-a-peu perdre de leurs principes , s’épui- fer, & fournir enfin de l’eau qui r’auroit plus aucun principe métallique. 3°. Ces pyrites continuellement arrofées par une eau qui fe renou- velle à chaque inftant, devroient réduire par leur chaleur une partie de cette eau en vapeurs..Ces vapeurs condenfées dans des voûtes fouterraines, occafonneroient fréquemment des explofions très-dangereufes. Il eft bien vrai que Bagnères ,, Gaurererz ,,& en général tous les pays des Pyrénées riches en eaux minérales, font aflez fujets à des fecouffes de tremble- mens de terre; mais Dax.où il y a une fontaine très-chaude & très- aboñdante hors des Pyrénées n'y.eft,pas plus fujet que le refle de la Province de Guienne & Gafcogne. X 4. L'on trouve des eaux.thermales gazeufes, telles que celles de Barèges, ou ferrugineufes , telles que celles de Cautererz, les eaux bonnes, &c. L'on fait que les eaux gazeufes, ou faturées d’acide craieux ou air fixe, perdent leur gaz à un degré aflez médiocre de chaleur; fi donc ces eaux ainfi acidulées paffent librement fur des amas de pyrites, d’ailleurs expofées à un courant d'air, pour y être échauffées , fouvent à un devré de chaleur très-fort, comment peuvent-elles conferver leur gaz ? Et perdant leur gaz, comment pourroient-elles conferver leur fer, qu'elles ne tiennent ordinairement en diffolution que par l’intermède du gaz ê L'expérience apprend , en effet , que l’eau diftillée faturée d'air fixe eft fufceptible de difloudre une certaine quantité de fer; mais fi l’on expofe enfuite cette eau ainfi chalibée à un certain degré de chaleur, dans un appareil pneumato-chimique, l’on en retire la quantité de gaz abforbée , & l’on voir le fer diflous fe précipiter ; par conféquent, fi l'eau étoit libre dans les conduits foutérrains , où elle reçoit des degrés de chaleur très- grands , elle fe dégageroit de fon air fixe, & dépoferoit par conféquent fon fer. Voudra-t-on dire que c'eft précifément par le paflage à-travers les matières pyriteufes décompofées , que l’eau fe charge de fon gaz & de fes parties ferrugineufes ? Pour s’aflurer du contraire, il fufhe de faire attention que le gaz dégagé des pyrites en décompofition , n’eft jamais de la nature de celui que l’on reconnoît dans les eaux minérales , qui eft : un gaz ou acide craieux. : $°. Dans un même lieu il y a des fources de différente température , depuis un froid très-fenfible , prefque jufqu’au degré d’ébullition , comme cela eft à Bagnères de Bigorre , & plus particulièrement à Acqs en Foix, . SUR L'HIST. NATURELLE ET LES ARTS. 53 où l'on voit une montagne tout autour de laquelle fortent des fources de ces différentes températures. Certains Phyliciens ont prétendu que ces différens degrés de chaleur provenoient de la diftance du lieu où la fontaine coule , au lieu où eft fa véritable origine ; mais il eft aifé de voir que dans les deux lieux cités, particulièrement à Acqs, l'origine eft la même , & la diftance eft auffi fenfiblement la même. 6?. Dans certaines fources l’on trouve les mêmes principes chimiques que dans d’autres fources voilines , tandis qu’il n'y a aucune chaleur dans les premières, & qu'il y en a un très-fort depré dans les fecondes. A Barèges , par exemple , l'on trouve, foit dans le lit du Gave, foit fur la côte qui eft à l'oueft du village, des fources d’eau- très-froide, qui décèlenrgles mêmes principes que Les eaux du bain de Poulard ; qui font du plus fort degré de çhaleur, $ 7°. Enfin, à Dax, pays de landes, il y a une fource très-abondante d’une eau dont le degré de chaleur va prefque jufqu'à ébullition , fans qu’on puifle remarquer dans ces eaux le moindre veftige de minéral, tandis qu’en defcendant Adour, depuis la ville jufqu’à un lieu nommé le Bagnon, c’eft-à-dire, pendant environ un quart de lieue, l'on trouve de loin en loin, des fources d'eaux médiocrement chaudes & très- fenfiblement minérales, Au Bagnon il y a des bains affez renommés & des boues fort utiles contre les douleurs rhumatifmales. Dans un pays uni & plein de fable comme celui de Dax, il eft crès-vraifemblable que tofites ces eaux ont une même origine, qui doit être probablement dans une colline qui borde la plaine du côté du fud à-peu-près ; j'ai remar- qué moi-même que toutes les pierres de cette côte portent des empreintes de pyrites martiales décompofées, Il eft aufi probable que les eaux de Tercis ont la même fource, & celles-ci font chaudes & minérales, Voyant combien le fyftème des amas de pyrites décompolées, jufte- ment fubftitué aux feux fouterrains des anciens , étoit infuffant pour expliquer ces différens phénomènes , j'ai cherché à les expliquer, en m'écartent le moins poflible de l’opinion reçue. Voici comme je conçois l’expérience que je laifle à faire aux amateurs ou autres favans , qui auront des moyens pour la faire avec précifion. Suppofons un grand vaifleau de verre ou de toute autre matière capable de contenir une certaine quantité d’eau , & percé dans fon fond de plufeurs trous , où peuvent s’adapter juftement en vis ou autrement différens tuyaux de verre garnis de viroles : nous appelerons ce vafe Ze réfervoir. Suppofons-le appliqué au bout d’une longue caifle prifmatique rectangulaire de bois, doublée exactement de plomb, & percée de différens petits trous où l'on puifle aufi adapter des tuyaux & fes boucher à volonté. Cette caifle fera deftinée à recevoir des matières" très-eflervef- centes , comme de la limaille de fer & de l'efprit de vitriol , ou, fi l’on veut, des amas de pyrites en décompofition. Cette caiffe nous repréfentera # ÿ4 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, très-bien les amas de pyrites auxquels nous attribuons , avec tous les Phyfciens , la chaleur communiquée à l’eau. L'on aura de plus diftérens tubes de verre, les uns contournés en ferpentin , dont les fpires feront plus ou moirs ferrés, & dont le diamètre ne furpaflera pas la pro- fondeur ou la largeur de la caïfle, les aueres un peu courbés, d’autres droits , rous d'une longueur fufhfante pour être adaprés par un bout au réfervoir , & par l'autre à un robinet écabli à l’une des petites faces de la caifle, L'on aura enfin d’autres tubes droits | mais très-petits qui puiflent s'adapter, fuivant différentes directions à volonté, dans les trous pratiqués autour de la caille. . Que l’on bouche exaétement tous les trous de la caïfe, & que l’on adapte deux tubes à leur trou du réfervoir & à leur robiner. pofans , par exemple, l’un le plus contourné & l’autre droir. Si l’on verfe dans la caiffe une certaine quantité de limaille de fer & d’efpric de vitriol pour la remplir dans la proportion requife, i! fe formera, comme l’on fait, une effervefcence très-vive , qui doit néceflairement échauffer les deux tuyaux qui traverfent la caifle & la matière effervefcente; que l’on rempliffe enfuire le réfervoir d'eau commune, après avoir ouvert les deux robinets qui communiquent aux deux tuyaux , d’eau du réfervoir doit fortir par ces deux robinets , mais il eft bien évident que celle qui aura pañlé par le ferpentin ayant refté plus long-tems dans le foyer de la fermentation , doit avoir acquis un plus ‘grand degré de chaleur , que celle qui a paflé par le rüyan droit; & cette différence fera très-fenfible à la forriebdu robinet; cette eau fera de l'eau commune, telle qu’elle a été mife dans le réfervoir. Si l'on fuppofe un troilième tuyau adapté au réfervoir, & qui pifle hors de la caïffe, l’eau qui coulera par celui-ci fera froide comme celle du réfervoir. Si l'on met quelque tuyau au trou pratiqué dans la caifle pour laiffer échapper une petite partie de l’eau de l’efter- vefcence & la mêler avec de l'eau commune, pour couler par quelque autre robinet, celle-ci aura plus ou moins de chaleur , fuivant la pro- portion du mêlange, & fera vitriolico-martiale, ou plus généralement, elle participera plus ou moins, de la nature des matières qui ont été mifes dans la caiffle. Voilà donc, d'une même fource, des eaux de deux diflérens degrés de chaleur, (il eft évident qu’en mettant un plus grand nombre de tuyaux l’on auroit d’autres degres différens de chaleur ) des eaux froides & des eaux véritablement minérales & thermales. Si l'on met dans le réfervoir des eaux gazeufes, toutes les eaux qui fortirone du réfervoir feront gazeufes & de différens degrés de chaleur, & celles qui fortiront de la caifle feront dans le même état que dans le cas précédent, Il en fera de même fi l'on met dans le réfervoir des eaux hépatiques ou hépatifées , des eaux martiales , &c. » Je ne donne pas cette expérience comme ayant été faite. Les moyens : Lu SUR L'HIST. NATURELLE ET LES ARTS. $s nécéffaires pour la faire me manquent ; mais les réfuitats n’en paroifent- fi évidens , que je crois qu'on peut La regarder comme faite, & la ranger dans la clafle de ces propoñtions que les Géomètres appellent des demandes. Son application aux eaux thermales dont il s’agit ici, me paroît fi _ fimple que je me difpenferois volontiers de la faire. L'on voit , en effet, qu'il ny a qu'à fuppofer que l'eau, fimple ou compofée, dans fes refer- voirs primiufs, ef conduite à l'endroit où elle fort par des tuyaux folides d’une pierre non effervefcente, qui traverfent , dans uhe longueur plus ou moins grande , des amas de pyrites en décompolfition, qui font préci- fément les caufes de la chaleur , que d'autres pareils tuyaux paflent à côté du même amas, & qu’enfin cerraines eaux venant du même réfervoir ou d’ailleurs , traverfent les extrémités des amas de pyrites, fans tuyau pareil, avant que de fortir de la terre, Ainfi pour répondre par ordre & fuccinc- tement aux fept obfervations faites plus haut, nous dirons : 1%. Parmi les eaux thermales les unes font fimples , les autres compo- fées, parce que le réfervoir des unes eft rempli d'eau fimple & celui des autres eft rempli d’eau compofée & minérale. 29, Les eaux d'une même fource contiennent touiours les mêmes principes & à-peu-près dans la même proportion, parce qu'elles fe rendent dans leur réfervoir , après avoir traverfé dans les montagnes des couches de terre & de pierre qui peuvent leur communiquer conftimment les mêmes principes ; car ceux-ci fe forment aufi conftamment dans le fein de la terre. 3°. Les eaux étant contenues exactement dans des conduits impéné- trables, ne peuvent point être converties en vapeurs, 4°. Les eaux, étant bien renfermées dans les mêmes conduits, ne peuvent pas perdre leur gaz, ni par conféquent le fer, quel que foit le degré de chaleur occafionné par les pyrites, - $°. Quant aux degrés de chaleur des eaux, qui paroiffent venir de la même fource, la caufe eft parfaitement évidente dans notre expérience. IL fuit de fuppofer les conduits venans d'un même réfervoir, différem- ment contournés dans l’amas de pyrires, ou dont les uns traverfent cet amas & les autres paflent à côté. Ainfi, par exemple, à Acas en Foix la même montagne fournit tout autour des esux dont les unes font froides & les autres ont différens degrés de chaleur, jufqu’à celui de lébullition, Rien n'empêche de fuppofer un amas de pyrites en décom- pofition vers le centre de la montage, le réfervoir , qui eft peut-être dans quelque montagne voifine , a autant de tuyaux qu'il y a de fontaines différentes ; ces tuyaux font les uns enfermés plus ou moins dans le foyer de leffervefcence , les autres laiflent entièrement ce foyer à côté. Les premiers donnent des eaux plus ou moins chaudes, & les feconds donnent des eaux froides , telles qu’elles font dans le réfervoir. Fr $6 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, 6, Si las eaux du réfervoir font minérales, celles dont les conduites pañleront dans le foyer d’effervefcence acquerront de la chaleur, & celles dont la conduite ne paflera pas dans ce même foyer feront froides P P y ; tandis qu'elles auront les mêmes principes minéraux. 7°. Enfin, fi l'on fuppofe des conduits dont les uns viennent du rélervoir plein d'eau commune, en traverfant le foyer d’effervefcence , & d’autres conduits, ou fimples filets provenans du même réfervoir ou d'ailleurs, & baignant la bafe de l’amas de pyrites , les principales fources eront thermales fimples es fources fecondaires feront minérales. fe h les fimples, & les” fc fecond feront l inf, par exemple, à Dax les eaux de l& grande fontaine font conduites Ainñ, p ple, à Daxl de la grande f font conduit du réfervoir jufqu’à la fource , qui eft dans la ville, par.un conduit oli (SJ ui traverie ans une rande 10ngueur , un ran amas e folide, q fe, dans grande long 2 grand d pyrites martiales en décompolfition ; mais il s’echappe du même réfervoir: des filets d’eau qui après avoir baigné la bafe du même amas de pyrites , viennent fortir dans différens endroits jufqu’au Bagnon & à Tercis; celles-ci font minérales, tandis que celles de la grande fontaine ne le font pas. : Il eft évident que l'on peut appliquer.la même expérience & le même raifonnement , aux eaux froides au-deffous de la température du pays où elles fortent, en fubftituant aux pyrites décompofées de la glace , ou plurôt de ces mélanges, qui produifent un froid artificiel plus grand que celui de la glace, Me conteftera-t-on l’exiftence ou même la pofibilité des tuyaux ou conduits fouterrains fermés , que je fuppofe ici aux eaux? Ce ne pourra pas être férieufement, du moins fi l'on fait attention , que fans l’exiftence de pareils tuyaux , il eft impofñfible d'expliquer un très-grand nombre de phénomènes relatifs aux fontaines ordinaires, , D'où vient en effet , que certaines fontaines ne font fujettes à aucune: viciflitude, & fourniffent conftamment la même quantité d’eau, fi ce n'eft parce qu'elles coulent dans des canaux fouterrains folides & conftam- ment pleins? De forte que les viciflitudes d’humidité & de fécherefle, réellement fenfibles dans le réfervoir primitif, deviennent infenfibles dans le débouchement, D'où vient encore que certaines fontaines font intermittentes, comme; par exemple, celle de Fonteftorbe à Beleftat en Languedoc? La meilleure explication qu'on a pu en donner, eft par le moyen du fiphon : j'ai moi- même imité parfaitement cette fontaine, en en faifant une artificielle toute femblable , avec des réfervoirs & des fiphons en fer-blanc. Or, le fiphon fuppofe des conduits & des tuyaux très-folides. : D'où vientencore que certaines fources fourdent au fommert de quelques montagnes ifolées ? On.ne peut l'expliquer que par un fiphon ou rube recourbé, qui dirige les eaux des réfervoirs, fitués dans des montagnes plus élevées, jufqu'à la fource , en traverfant fous terre la plaine ou le vallon . qui ‘ SUR L'HIST. NATURELLE ET LES ARTS, s7 qui fépare les deux montagnes; or, pour que l’eau puifle réellement monter» ainfi, il faut néceffairement que le tuyau ou fiphon foit folide & fermé. : Nous ne multiplierons pas davantage ces exemples, qui font aujourd'hui connus de tout le monde ; & nous regardons ceux-ci comme fufifans, pour empêcher qu'on ne nous difpute l'exiftence ou tout au moins la poffibilité des conduits que nous admettons dans notre hypothèfe. La feule condition que nous demandons, qu'ils foient de matière non effervefcente, pourroit fouffrir quelque difficulté, fi l’on ne favoit que cette efpèce de matière eft aflez Commune dans la nature. D'après notre hypothèfe, il doit paroïtre évident que les degrés de chaleur ne font qu’accidentels dans les eaux minéralesg & que par confé- quent leur analyfe ne dépend point de ce degré de chaleur , ni même, pour l'ordinaire, leurs propriétés médicinales. On voit néanmoins tous les jours des perfonnes, même inftruites, fe décider en faveur de certaines fources par certe confidération , la feule fenfible pour le vulgaire. Il eft vrai que les habitans des pays qui font favorifés de pareilles fources ne manquent pas de les accréditer par certaines guérifons furprenantes , vraies ou fuppofées. Ne feroit-il pas de l'intérêe public , du bon ordre & du bien de l'humanité qu'un Miniftre de fanté attentif & zélé, prit des moyens efficaces pour garantir de l'erreur, & pour faire conftater juridiquement de pareilles guérifons? C'en feroit un bien grand que de prémunir les petits & les grands contre de pareils préjugés. Il en eft en effer, au- jourd'hui, des fources d’eaux minérales, comme des modes: chacun fuit aveuglément celles qui font en vogue; heureux ceux qui ne payent pas cher la foibleffe qu'ils ont eu de fe livrer au torrent. SUR L'ACIDE DES POMMES, OU VINAIGRE IMPARFAIT, { Par M, HERMBESTADT : Traduit de l'Allemand. TL y a quelques années que Schéele publia (1) une fuite d’expériences fur les acides des fruirs & des baies de différens végétaux, qui méritent la plus grande attention , puifque ce Chimifte a cru devoir en conclure , qu’indépendamment de leurs autres parties conftituantes , ces fubftances — (1) Annales chimiques pour 1785 ;, fecond vol. pag. 291 —— 303: Tome XXXII, Part, I, 1788, JANVIER. H 58 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, sontenoient un acide particulier auquel il donna le nom d'acide des pommes (1). Quelle que foit la vénération que je porte à cet Homme célèbre & le cas que je fais de fes travaux , mon impartialité cependant ne me permet pas d'embrafler fon fentiment à cet égard, puifque je n’ai pas encore pu me convaincre par mes propres obfervations que cet acide eft en effet d’une nature particulière. Schéele farura de craie le jus de grofeilles du grofeiller à fruits velus (ribes groffularia)& obtint deux compofés différens, un vrai fel rartareux Calcaire , fuivant ui l'acide du citron, & une diffolution de chaux dans un autre acide , qui fe comporta de la manière fuivante: elle rougit la teinture de rournelol ; unesplus grande quantité de craie ne la priva pas de fon excès d'acidité ; elle tenoit néanmoins de la chaux en diflolution. Pour obtenir cet acide entièrement pur, Schéele fit évaporer le jus de grofeilles jufqu’à confiftance de miel, verfa deflus de l’alcohol bien reifié pour le redifloudre ; l’alcohol chargé de l'acide qu’il tenoit en diffolution pafla par le filtre & laifla fur le papier une fubitance 9ommeufe. Cet alcohol fut enfuite féparé de l'acide par l’évaporation ; le réfidu étendu de deux parties d’eau , fut faturé de craie; & la folurion ayant bouilli pendant quelques minutes, le fel tartareux de chaux fe précipita à caufe de fon peu de folubiliré. La fclurion reftante ayant été mêlée avec de l’alcohol fufifamment concentré, il fe forma un coagulé. L’alcohol qui pañla par le filtre n'étoit Chargé que d'un peu de matière favoneufe & de fubftance fucrée. Ce qui ne pafla point fut lavé avec un peu d’alcohol, & avoit les propriétés fuivantes : fi l’on en mettoit un peu fur ongle , il couloit d’abord, fe féchoit peu après en prenant un brillant de vernis ; il étoit facilement foluble dans l’eau & coloroit en rouge la teinture de tournefol, Si l’on expofe cette folution pendant quelques jours à l'air libre , elle laiflé précipiter une quantité de petits criftaux , qui ne font folubles que dans l'eau bouillante ; ils font parfaitement neutralifés par la chaux, qui s’en fépare par l'addition d’un alkali. Schéele trouva l’acide que nous venons de décrire dans la plupart des fruits de cette efpèce, mais le plus abondamment dans le jus de pommes; c’eft pourquoi il lui donna le nom d'acide de pommes & en fit une clafle féparée. à : On fe rappelera que dans mes recherches fur les acides végétaux (2) ; il a fouvent été queftion d’un acide que je promis d'examiner avec plus d’exactitude ; c’eft précifément celui que Schéele défigne fous la déno- mination particulière d'acide, de pommes. Je me propofe de prouver oo oo (x) Depuis, M. de Morveau l’a nommé acide malufen: dans la nouvelle Nomemæ clature chimique on l’appelle acide malique, ; (2) Voyez entr'autres le Mémoire fur l'acide univerfel du règne végétal. SUR L'HIST. NATURELLE ET LES ARTS. s9 actuellement que cet acide n’eft qu'une modification de l'acide tartareux , qu'il contient trop peu de la matière de la chaleur & trop de phlogiftique pour paroître fous forme de vinaigre , trop peu de phlogiftique & trop de matière de la chaleur pour être de l’acide tartareux , & qu'on doit le regarder comme tenant un milieu entre ces deux acides (1). En traitant avec de l'acide nitreux les fubftances qui contiennent des acides végétaux , on obtient toujours une certaine quantité d'acide des pommes ; la raifon en eft qu’à chaque opération une partie de l'acide qui auroit paru fous forme d'acide tartareux fe détruit en fe rapprochant de la nature de l'acide acéteux. Cet acide ainfi modifié tient’ cependant encore de l'acide tartareux en diflolution & fe change à caufe de cela par une plus grande déphlogiftication en acide oxalique. Pour m'aflurer d’une manière plus exacte de la nature de ce nouvel acide , je fis bouillir du fucre avec de l’acide nitreux , jufqu’à ce que le mélange fe transformät en une mafle d’un brun clair; je fis difloudre certe mafle dans de'eau & l’ayant faturée complettément avec de la craie , il fe précipita une poudre très-peu foluble , qui par les épreuves auxquelles je l'ai foumife , fe trouva être un véritable {el tartareux calcaire. La liqueur furnageante tenoit encore de la chaux , qui s’en fépara par l'acide vitriolique. Comme cependant cette féparation par l'acide vitriolique ne réuffit pas aflez bien, j'eus recours à un autre procédé. Ayant préparé une folution de fel acéteux de plomb, j'y verfai goutte à goutte celle de chaux dans l'acide dont il eft queftion, & que je nommerai dans la fuite vznaigre imparfait. Le plomb fe précipita, uni à cet acide, & la chaux fe combina avec l'acide acéreux féparé du plomb, Je fs digérer le précipité avec de l'acide vitriolique & j’obtins ainfi le vinaigre imparfaie ( l'acide des pommes) dans route fa pureté. En le traitant avec une petite quantité d’acide nitreux , il s’en fépara un peu d'acide oxalin, mais en ajoutant une plus grande portion du même acide, tout pafla dans le récipient : ayant mêlé le produit de la . diffillation avec de l’acide nitreux phlogiftiqué , j'en féparai de l’acide de vinaigre imparfait, par le procédé connu, dans l’état d'acide acéteux pur (2). GRR ES PC RARE A A MN sn nus (1) M. Hermbftadt a depuis reflerré ces limites èn plaçant cet acide entre l’acide oxalique & l’acide acéteux. Woyez à la fin de ce Mémoire l'extrait d’une Lettre de M. Hermbfadt, (2) Si l’on confidère que l’acide malique en enlevant une certaine portion d’oxigère à l'acide nitrique , fe transforme en partie en acide acéteux & laïfle un réfidu d’acide oxalique, & qu’en fe combinant avec plus d’oxigène il pafle en entier à l’état de vinaigre le plus pur ; on fe convaincra que cet acide a la même bafe acidifiable que l'acide acéteux , avoir, le principe muqueux , & qu’il ne différe de ce dernier acide Tome XXXII, Part. 1, 17988, JANVIER, H 2 6o OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE; L'acide qui fe trouve dans le jus de citron & dans beaucoup d’autres de cette efpèce , eft de même nature. Si on les fature de craie, un des acides eft précipité comme acide tartareux, & la liqueur furnageante n’eft que du vinaigre imparfait uni à la chaux. Je ne crois pas qu’il foic permis de faire une claffe particulière pour un acide aufli facile à décompofer que celui-ci. Ne feroit-on pas plutôt fondé à le regarder comme un vinaigre imparfait ? Car on doit craindre ne ADS s PBLE : de multiplier les êtres fans néceflité dans une fcience aufli étendue que la Chimie. Au refte, je foumettrai cet acide à un examen encore plus » } P rigoureux : il fuffit pour le préfent d'avoir apporté quelques raifons pour appuyer mon fentiment. Depuis que ce Mémoire a paru en Allemagne, M. Hermbftadt a donné fuite à fes recherches fur cette matière: il marque à M. Crell (Annales chimiques pour 1787, premier cahier ) : « Plufieurs expériences » queje viens de faire, confirment toujours de plus en plus mon opinion » fur l'acide des pommes, favoir, que cer acide n’eft qu’un vinaigre imparfait qui a trop peu de phlogiftique pour être de l'acide oxalin, » & trop pour paroître dans l’état d’acide acéteux , qu'il tient par con- » féquent le milieu entre ces deux acides. Je fuis très - porté à croire » que c’eft au moyen d’une férmentation lente , que l'acide tartareux eft » converti en acide des pommes dans les fruits qui contiennent ce » dernier », L: Nota. Il n’eft pas étonnant , que cet acide contienne plus de calorique que le tartareux ou l’oxalique, fi l'on réfléchit à la grande affinité du calorique avec l'oxigène , le gaz oxigéné étant, fuivant les belles expé- riences de MM. Lavoifier & de la Place, de toutes les fubftances effayées celle qui eft unie à une plus grande quantité de certe matière : c’eft à raifon de fa plus grande portion d’oxigène , que l’acide malique contient que par une moindre portion d’oxigène, & probablernent par une plus grande de carbone : car fuivant les expériences rapportées par M. Creli ( Journal de Phyfique, oûtobre 178$ ), il y a toujours dégagement d’acide carbonique lorfque l’acide tarta- reux ou oxalique paflent à l’état d’acide acéteux, Puilque l’acide malique fe change fi facilement en acide acéteux, en comparant cette propriété avec les expériences de M. Hermbftadt {ur la converfon des acides tartareux & oxalique en acide acéteux ( Journal de Phyfique, feptembre 1787), il eft clair que l’acide malique tient le milieu entre les acides oxalique & acéteux. Les acides tartareux & oxelique forment avec la chaux des fels infolubles qui fe précipitent ; l’acide acéteux au contraire donne un fel foluble : donc puifque celui qui naît de la combinaifon de Ja chaux avec l’acide malique eft foluble, & que les criflaux qui fe dépofent ne le font plus que dans l’eau chaude , il en réfulte encore que l'acide malique doit être placé entre Les acides oxalique & acéteux, 4 SUR L'HIST. NATURELLE ET LES ARTS, 61 plus de calorique, de mème que les oxides métalliques en contiennent plus que les régules. Le nom d’acide malique ne marquant pas affez bien l’analogie de cet acide avec ceux dont il n'eft qu'une modification, il conviendroit peut- être de le nommer acide oxalique oxigéne , & fes compolés, oxalates oxigénés. I] femble aufli qu'il {eroit avantageux de changer les termes d'acide tartareux & tartrites en ceux d'acide oxaleux & oxalites. (Note du Traduéteur ) (1). LETTRE DEVM LE BARON DE MARIVET Z; A MADE EL AME THERE: Sur LA NOMENCLATURE CHIMIQUE. N DE les favans liront avec plailir , avec reconnoiffance, Monfieur; vos très-judicieufes obfervations fur La nouvelie Nomenclature que quelques Chimiftes dignes , à tant d'autres titres, des plus grands égards, & dont les noms font juftement célèbres, tentent, mais très-vaine- ment, fans doute d'introduire dans la Chimie, : IL n’eft pas une feuie des objections, que vous oppofez à cette ten- tative, qui ne lui foit véritablement applicable , & qui ne fufife pour la faire repoufler. Il feroit aufli difficile qu'inutile d'y rien ajouter, je n’allongerai donc point cette lettre par de nouvelles obfervations, elles feroient fuperflues. 1 Un favant, dont le nom feul infpire le refpect à tous ceux qui font entrés dans les différentes carrières de la métaphyfique, de la philofophie (1) Dans la crife où eft la Nomenclature chimique, bientôt la même fubflance aura un grand nombre de noms différens. Il faudre donc avoir le di&ionnaire de chaque Auteur, Le mot acide nitreux , {uivant la nouvelle Nomenclature , figrifiera acide nitreux phlogiflique , tandis qu’ordinairement il fignifie lacide nitreux....Pour éviter tous les reproches qu’on peut nous faire , nous laïflerons à chaque Auteur fa nomenclature. Aïnfi le célèbre M. Hermbftadt n’adoptant pas la nouvelle théorie, nous lui avons laïiflé l’ancienne nomenclature , parce que carbonate calcaire , par exemple , pour exprimer de la craie eût fuppo£é qu’il admet du charbon dans la craie, ce qui n'elt pas. Maïs fon favant Traduéteur paroiffant admettre la nouvelle théorie, nous avons confervé fa nomenclature. Tel eft le parti que nous avons cru que la fagefle & l’équité nous ordonnoient de prendre dans ce moment. More de M, de la Mérherie, 62 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, & des fciences naturelles, m'écrivait, il y a quelques jours, & il fe plaignoit du vocabulaire de nos Novareurs. Fonder un fyftème fur quelques principes puifflamment conteftés, fur quelques expériences , dont l'étiologie elt encore très- incertaine; ériger en doctrine immuable , ce qui ne peur être confidéré jufqu’à préfenc que comme des foupçons équivoques, créer précipiramment, «en con- féquence, un jargon nouveau , donc tous les mors naiflenr de deux ou trois hypothèfes, donner ce jargon inintelligible pour la langue de la fcience , le confacrer dans le dépôt des connoiilances de notre fiecle , voilà une entreprife qui fans düiite exigeait que le Rédaéteur du Journal de Phyfique, le véritable Journal des favants, s’élevac contrelle ; il falloic que les Etrangers appriflenc que certe innovation n'avoit été reçue que dans peu de laboratoires ; 11 falloit que les générations fu- tures, en lifant avec étonnement ce diétionnaire, appriffent comment furent accueillis ces muriates , ces carbonates , ces carbures , ceS fulfates, ces /ulfires, ces fulfures, ces phofphates ; ces phofphures , ces oxides, &c. &c, &é. il falloit que l’on für que ces mots bizarres ne furent reçus que dans le jargon des adeptes qui les avoient imaginés. Tout novareur eft obligé de juftifier fon entreprife, & on doit la profcrire, lorfque des motifs puiffants ne s'élèvent pas en fa faveur; or ici on ne peut pas même appercevoir un prétexte propofable. Plufeurs fayants fe font permis d'ajouter à la langue de la fcience quelques mots nouveaux que leurs découvertes rendoient néceflaires ; mais ces noms nouveaux , ils les donnoient à des êtres innominés; jamais il n’y eut rien qui reffemblât au projet chimérique de changer tout d’un coup le dictionnaire d’une fcience. Si certe rentative n’eft pas un jeu de la gaîté de ces Meffieurs, en vérité elle eft l'efer d'un enthoufafme biéa exalté , & d’une manie de profélytifme bien inconcevable; je vous avoue que je fais porté À adopter la première fuppofñition, & à penfer qu'ils ont voulu eflayer à quel degré l’afcendant de leur jufte réputation , aidé de la légéreté françoife , pourroit influer fur les efprits, Un pamphlet, écrit de”ce ftyle, auroit été très-plaifant, il l’eût éré d’aurant plus que l’on auroit eu peine à deviner fi l’auteur parloir fé- rieufement, ou, fi fe moquant de nouveaux mots, déjà introduits aflez lésèrement, il ne fe propofoit pas de tourner en ridicule le néolooifme dans les fciences. Lorfque l’Ouvrage , intitulé, Origine des premières Sociétés , tomba entre les mains du bon M. Court de Gébelin, il fut long-tems fans pouvoir deviner s’il lifoit l'œuvre férieux d'un partifan outré de l'art étymologétique , ou celui d’un plaifant qui s’égayoit en en faifant la caricature, & l'excès de l'abus fe portoit vers cette dérnièreidée beau- coup plus que vers la première ; je riens de lui-même cet aveu de fon a tend ee SUR) L'HIST. NATURELLE ET LES ARTS. 63 émbarras , & j'ai éprouvé le même doute en cet Ouvrage, mais ici l’effai pafle la raillerie. … Je crois donc, Monfieur , que vous ferez très-bien , quoi qu’on vous en dife, d'imprimer tout ce qui vous fera envoyé écrit de ce ftyle , & Dieu fait éombien vous allez avoir de carbonares & de carbures 3 mais les dangers des principes faux , ne peuvent être trop fouvent préfentés , ce font les meilleurs argumens contre ces principes. Laiflez ces Meflieurs bien multiphéer , bien étendre leurs applications, les bien développer, & bientôt on ne les lira que comme on lit encore l'Hiftoire de Pantalon-Phæbus, le Dictionnaire néologique & la ré- ceprion du Docteur Mathanafius à l'Académie. © Cependant, Monfieur, la fcience de Ja chimie fe perfectionnera, ou donnera enfin des bafes véritablement phyfiques à cette fcience à qui elles manquent encore, & c’eft ainf que fa langue fe formera peu-à-peu, d'après des idées juftes, long-rems méditées, lumineufement difcurées ; mais ce perfectionnement fuivra la marche lente & circonf- pedte de l'analyfe, &, bien long-rems avant qu'il approche du terme , les carbonates & les carbures auront été oubliés, mais non pas les noms célèbres, non pas les utiles travaux de ceux qui fe reprocheront bientôt d’avoir trop précipiramment configné ces mots dans le Dic- tionnaire Encyclopédique. Je fuis, &c. Au Château de Vincennes , le 10 Novembre 1787. LI A A I EM 2e Pet EME EIRE SERRE RE BEM RR TE DIE: M DE "ROME: DE LES LE, À M. LE BARON DE MARIVETZ, Sur le Fluide igné ou matière de la chaleur. J E viens de lire, Monfeur & très-excellent ami, votre VIL* volume de la Phyfique du Monde, que M. de la Métherie a eu la complaifance de me prêter, Je l’atrendois avec impatience pour voir le complément de votre théorie du feu, dont j'ai été fort fatisfait , à un feul point près, fur lequel j'aurois defiré que vous vous fufliez rapproché davantage de la théorie de nos Chimiftes modernes , j’entends de ceux qui n’ont pas profcrit le phlogiftique, & fur-tout de M, de la Métherie qui , comme 64 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, vous le dites vous-même, eft, après Euler , le Phyficien qui fe rapproche le plus de vos principes. 1. Vous admettez cinq élémens, qui font l'écher ou matière de la lumière, la terre, l'eau, l'air pur ou la partie vraiment élémentaire de l'air, & enfin le principe inflammable, Vous convenez de la forte tendance à l'union , de la tendance à fe combiner qu'ont chacun de ces principes dans leur état le plus pur. «Je doute, dites-vous (rome VI, page 287) , que dans notre globe » 6 dans fon atmofphère il y ait un feul atome de fubflance élé- » mentaire qui ne Joit pas combiné ». Cela pofé, je vous demande pourquoi, dans les phénomènes du feu, vous confidérez toujours la matière de la lumière (& même l'air) comme un fimple agent méca- nique, agiflant par fon élafticité parfaite & par fes vibrations , & jamais comme élément. chimique fufceptible de fe combiner avec l’un ou l’autre des principes élémentaires que vous admettez? « La fubflance de la » lumière, dites-vous (rome VI, page 77 ), n’efl point combinée , elle » wagit qu'avec fes propriétés effentielles ; elle n’ef qu'élaflique, & » ce nef que par fon élaflicité qu’elle étend le volume des corps ne Or, je vous le demande, trouvez-vous qu'il foit bien conforme à la nature, après avoir reconnu la tendance à l’union, à la combinaifon qu'ont entr'eux tous les élémens , d'en excepter enfuite celui qui par fon extrême ténuité, par fon activité même, paroït le plus propre à agir & réagir comme principe chimique , & pas feulement mécanique, fur tous les autres élémens ? [, Vous admettez cependant que, dans le fluide électrique , la raatière de la lumière eft unie au principe inflammable , & en cela vous êtes d'accord avec MM, de la Métherie , de Sauflure & tous les bons Phyfciens. Voici vos propres expreflions : æ Nous confidérons la fubflance de l'éleétricité COMME UNÉ COMBINAISON de la fubflance de la lumière & du principe » inflammable ibid. page 143. Vous dites encore, page 360 d Nous » confidérons le phlogiflique ou principe inflammable comme lui étant » (à la lumière) /£zon toujours , au moins très-fréquemment unt & » TOUJOURS dans l'atmofphère & dans l'état libre », Vous reconnoiflez donc que la matièré de la lumière peut fe combiner avec une autre fubftance élémentaire, Or, fi elle peut fe combiner , cette combinaifon peut être détruite par d’autres circonftances , & la lumière alors devenir libre ou fe dégager de cette combinaifon pour rentrer dans une autre, Elle n’agit donc pas toujours comme fimple caufe mécanique & vibrante. Mais fi la lumière peut en fe combinant avec Le principe inflammable produire le fluide particulier fi répandu dans notre atmof- phère & dans la mafle même du globe, & que nous défignons par le pom de fluide éleslrique , pourquoi cette même fubftance de la lumière ne 8 SUR L'HIST. NATURELLE ET LES ARTS. 6$ ne pourroit-elle, dans notre atmofphère , entrer aufli en combinaifan avec la partie propre & élémentaire de l'air que l'on appelle air pur , pour former par cette union cet autre fluide fi fubtil, que vous rejettez, mais que vous défignez fous les noms de fluide ioné , de matière de la chaleur , & pour former enfin avec une plus forte dofe de cette fubftance de la lumière & lair pur, le principe inflammable lui-même que vous confidérez comme un être fimple, quoique les nouvelles découvertes induifent à penfer qu'il eft compofé d'air pur & de la ubffance de la lumière. = TILL Pour moi je vous avoue que je ne conçois pas que la lumière, qui, de l'aveu de tous les Phyficiens, s’unit fi bien avec le principe inflammable , ne puifle d’un autre côté s'unir avec cette autre fubftance élémentaire que l’on appelle air pur, & fi vous convenez qu'elle s’y unit, alors je vous demanderai quel nom vous voulez donner à cette combinaïfon , fi ceux de fluide igné, de cauflicum , de matière de la æhaleur , de principe calorique enfin, ne vous plaifent pas > Je vous demanderai de plus fi vous croyez qu'un tel fluide ne puifle être accu- mulé, déplacé, tranfporté, comme le fluide éledtrique, quoique la matière de la lumière fimple & non combinée rempliffe tout l’efpace qui n’eft point occupé par le refte de la matière Auide ou folide exiftante dans cet univers. IV. Je conviens qu’en admettant un tel fluide il jouera un très-grand rôle dans tous les phénomènes de la chaleur & de la combuftion, qui - ne feront plus fufifamment expliqués par de fimples vibrations du Auide éthéré contre les molécules du principe inflammable & des autres fubftances élémentaires ; mais alors je concevrai pourquoi l'air joue un fi grand rôle dans les phénomènes de la combuftion , dont il s’en faue bien qu’il foit un fimple agent mécanique , comme vous le fuppofez ; alors je concevrai pourquoi il n’y a point de chaleur dans les efpaces éthérés, où la lumière pure & non combinée n'agit que par fes vibra- tions fans jamais s'y trouver à l’état de fluide igné ; alors je concevrai comment la chaleur & le principe inflammable s’engendrent à la furface & dans l'intérieur même de notre globe, par l’union qui fe forme de la fubftance de la lumière avec l'air pur en différentes propor- tions ; enfin , par-là je concevrai , ou j’aurai du moius des notions plus claires de tous les phénomènes chimiques de la combuftion, de la calcination , de la vitrification , dont il eft impoffible de fe faire une idée nette fi l’on n’admet pas que tout s’y pafle à l’aide des nouvelles combinaifons réfultantes de la décompofition des mixtes & des Auides aériformes qui concourent à ces opérations. SUP V. « I] paroft, dites-vous , que la matière de la lumière ne peur » pas fe combiner avec ces trois élémens , (l'air, l’eau, la terre) Ze x manière à former du phlogiflique ou du principe inflammable , ibid, Tome XXXII, Part, I, 1788. JANVIER. I 66 OBSERVATIONS: SURLA PHYSIQ UE, pag: 790. Vous ajoutez, ( page 138) » On ne peut pas dire un Jeul » mot fur les principes qui le conflitsent (le phlosiftique ), fur L'inter- » méde qui fert de lien à la matière de la lumiere pour la combiner 3 > out paroît même. prouver QU'IL N'EST AUCUN ÉLÉMENT » avec lequel elle puiffe s'unir direétement ». À rpyies . VI, Cependant vous convenez, comme nous venons de le voir, qu’elle efl unie au principe inflammable dans le fluide électrique ; mais où eft la preuve que cette même matière de la lumière ne puifle pas s'unir immédiatement à l'air pur pour former par cetté union le fluide igné & le principe inflammable lui-même ? Tous les phénomènes des gaz ou fluides aériformes ne démontrent-ils: pas au contraire cette union de la fubftance de la lumière avec l'air pur ? L'air inflammable, l'air impur ou phlogiftiqué, l'air fixe. ou air acide, qui ne font autre chofe que la partie élémentaire de l'air vulgaire, unie à des dofes plus ou moins confidérables , foit de principe inflammable, foit de matière de la chaleur & d'eau, ne font-ils pas tous réduétibles ou convertibles en air put, à mefure qu’on les dépouille du principe de la luniière déjà combinée qui leur étroit uni ? Or, puifqu'on décompofe en air pur l'air inflammable , qui, bien certainement, n'eft autre chofe que le principe inflammable lui-même à l’état vaporeux, on peut donc dire quelque chofe fur les principes qui le conftituent, puifque ces principes font d’un côté l'air pur ou partie élémentaire de l’air , & de l’autre la matière de la lumière unie à cet air pur & à l’eau en diverfes proportions dans les divers Auides aériformes, comme le prouvent les gravités fpécifiques particulières à chacun de ces fluides. La décompofñition de l'air inflam mable par fa détonation avec l'air pur auroit donc pu vous empêcher de mettre en avant l’affertion fuivante : « Je ne crois pas qu'il y ait une » feule expérience qui induife le plus légèrement même à penfer que » Le phlogiflique qui s'échappe des corps Joit décompojé ». Ibid page 140. VII. Non-feulement il eft des expériences qui prouvent la décompo- fition du principe inflammable , mais il en.eft aufli qui démontrent fa production , fa génération par l'union que contraëte la matière de la lumière avec Pair pur; car, ne vous y trompez pas, ce n’eft que par cette union que la lumière devient un corps phlogiftiquant."e Mille & » mille preuves fe réuniffent, dites-vous très » judicieufement , pour ». démontrer que la lumière phlogiflique les corps, c’efl-à-dire , qu'elle >» augmente en eux la quantité de phlogiflique ou de principe inflam- » mable. Ibid. page 361. C’efl méme, dites-vous dans le volume fuivant, page 181, »1oute la différence que l’on peut concevoir entre lu lumière » reçue à nud par les plantes & celles que les PLANTES NE » REÇOIVENT QU'AU TRAVERS D'UN VERRE, Cefi que la » premiere efl une fubflance phlogifliquante, & que la feconde a perdu, SUR L'HIST. NATURELLE ET LES ARTS. #7 » finon: La totalité ,-au moins une partie! trés-confidérable de fon >» principe inflammable in: Plus loin; (page 190 ) vous dires encore que le principe inflammable «« ne traverfe pas çauffi facilement Le verre » QUE LE FAIT LA SUBSTANCE DE LA LUMIÈRE ». Or, Gi; d’après vous-même , la lumière traverfe le verre plus facilement que le principe inflammable, comment pouvez-dire, page 389 du même volume ve Je mers en-affertion!très-pofirive que l'on ne peut pus dire * que la lumiere vraverfè Le‘verre >. VIH. Mais qu'elle le:traverfe ou non, c’eft un fait que le turbich fe colore ou fe. phlopiftique à. travers le verre d'@h facon bien bouché expofé à la lumière, comme vous le reconnoiffez vous-même à l’occafon des expériences de M. Senebier que vous expofez pag. 364 & fuiv. de vôtre fixième volume.:! :: mit eue: nÉa : - C'eftin fait querl’acide nitreux parfairement-blanc fe colore & devient rutilanc lorfqu’il: eftexpofé à l’action des rayons folaires. C’eft un fait que les chaux d’argent , que la lune cornée fe colorent par la lumière du foleil , &c. &c. &c. Or, il eft très-facile-de rendre raifon de tous ces phénomènes , même en convenant que lephlogiftique ou principe inflammable ne traverfe point ou_ne traverfe qué très-difficilement le verre. : IX. 'Ea coloration& la rutilance d’un acide font des preuves incon- teftables de furabondance de phlogiftique ou de principe inflammable ; & fans fuppofer que ce phlogiftique traverfe les vaifleaux de verre conjointement avec la lumière ; ce qui: pourroic être contefté; fans fuppofer même que ce phlogiftique exiftoit dans les acides avant de manifefter fa préfence par leur coloration ; il fuffie que les fubftances où fe produit ce phénomène abondent en air pur, pour faifir l’étiologie de ce qui fe pañfe alors, pour rendre en un mot une raifon très-fatisfaifante de leur phlogiftication par l’action directe & même indirecte de la Jumière fur ces fubftances; il fuffit de concevoir que cette action dégage ou développe une portion de leur air pur avec laquelle la lumière fe combine pour former , foit /a matiere de la chaleur , foit le principe inflammable lui- même , qui n'exiftoit pas dans ces vaifleaux , du moins en aufli grande quantité, & qui fe manifefte alors par la coloration du turbith & des ‘autres chaux métalliques fi abondantes en air pur, ainfi que les acides vitriolique , nitreux , marin & généralement tous les acides, dont l'air pur eft, comme perfonne ne l’ignore aujourd’hui , un des principes confti- tuans. C’elt cet air pur de l'acide fulfureux qui s’uniffant à la matière de la lumière , dans un flacon bien bouché, produit aflez de phlogiflique où de principe inflammable pour régénérer le foufre. C’elt cet air pur qui s’uniffant à cette mème matière de la lumière rend à l'acide arfenical contenu dans un flacon bien bouché, aflez de principe inflammable pour régénérer des criftaux d’arfenic oétaëdres d'une régularité parfaire. C'eft Tome XXXII, Part, 1, 1788, JANVIER. I 2 LA 63 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, cet air pur qui s’uniflant à la matière de la lumière , introduit dans tout ce qui végète à la furface du globe, rément pas le verre, & Le vale étant même fuppofe ouvert, on ne peur æ pas penfer que É contenu\ dans l’atmofphére fe dégage de ce » mélange pour pénétrer ; ainft purifié, dans l'efprit de nire de » l'experience ». £ XI. Mais qu’eft-il befoin d'aller chercher hors du vafe & dans l'atmofphère cer air pur, qui fait, comme tout le monde en convient aujourd’hui, la majeure partie de l'acide nirreux, &' que la chaleur feule fuit pour en dégager lorfqu'il n'eft point en contact avec l'air atmof- phérique. | XII. « On pourroit encore moins fuppofer, ajoutez-vous, que la >» fubflance de la chaleur , formée d'air pur & de la matière de la » lumière, vient s'unir à cet acide de quelque manière que: ce fou » Comment ce mixte pafferoit-il à travers le verre, puifque de,fes » compofans il en eft un (l'air pur) auquel le verre ef? imperméable , » & que l'autre (la matière de la lumière) n'a point de mouvement » de tranfport» ? A cela je réponds, 1°. que l'air pur, de l’aveu de tous les Chimiftes & de tous les bons Phyfciens ; exiftant dans les acides & dans les chaux métalliques dont il s’agit , il eft inutile de s’arrèter à chercher comment il peut s’y introduire du dehors à travers des flacons bien bouchés. Je réponds , 2°. que fi:la lumière fimple & non combinée n’a point de mouvement de tranfport, ce que j'accorde très-volontiers , en n’en peut pas dire autant de la lumière combinée, foic avec l'air pur pour former la matière de La chaleur (qui très-certainement a un mouvement de tranfport ainfi que le principe inflammable), foit avec le principe inflammable lui-même pour former le fluide éleétrique ;, auquel on ne contefle pas non plus le mouvement de tranfport , quoique la lumière comme fimple matière de la lumière remplifle tout l’efpace. XIII. Dans lexpérience , ou plutôt les expériences dont il s’agit, car elles font en’ grand nombre, il fufñit que la matière de la lumière contenue dans le facon, ou du moins une partie de cette lumière, entre en combinaifon'avec l'air pur que l’action de cette lumière dégage & met en expanfon , pour que cette lumière combinée foit aufli-tôt rem- placée par celle qui ne left pas , & qui, pour me fervir de votre expreflion , pénètre tous les corps aufñli facilement que l'eau pénètre une éponge qui s’y trouve plongée, SUR L'HIST. NATURELLE ET LES ARTS. 69 XIV. Enfin, fi le principe, caufe efficiente de toute chaleur, eft cette combinaifon, de l'air pur avec la fubftance de la lumiere, comme tout femble le démontrer, dès-lors on ne peut plus dire, comme vous le faites, page 191 du VI volume : « La principale caufe efficiente de La chaleur » érant univerfellement répandue dans tout l’efpace », &c. Car le fluide éthéré ne contra@te cetre union avec l'air pur ( caufe , fuivant nous, pro- duétrice de la chaleur & même du principe inflammable) , que dans les régions de l'univers qui, comme notre atmofphère, lui préfentent ce principe aérien dans fon état de fimplicité ou même déjà mélangé à d’autres fluides aériformes 3 & ce n’eft qu'en fe dégageant de cette union, foic par la combuftion , la putréfaction , le choc éledrique, &c. &c. que la lumière reprend fon état de fimplicité primitive ; qu’elle redevient écher pur propre à communiquer la fenfation de lumière par fes vibra- tions, mais jamais celle de chaleur que dans l’état de combinaifon dont je viens de parler. XV. Je laifle à M. dela Métherie , le foin de répondre, s’il le juge convenable, aux autres objections que vous propofez contre fa théorie ; mais les nouvelles découvertes me forcent de conclure avec lui, « que » la lumière ef le principe du feu, de la chaleur , de la raréfaction , mais »,que pour produire ces effets , il eft néceffaire qu’elle foit déjà com- æ binée avec une fubftance plus grofière qui lui donne de la mafle, & » que je crois être l'air pur. C’eft cette combinaifon de la lumière qu’on » défigne communément par matière du feu, par fluide igné, & qui a > fait croire à quelques Phyficiens que le feu étoit un principe particulier, » dans lequel ne fe rrouvoit point la lumière, & qui en éroit ertièrement » différent. Ainfi la matière du feu des Phyficiens ne me paroît €tre » que la matière de la chaleur, ou la lumière combinée avec l'air pur ». Journ. de Phyfig. février 1786. © XVI, Voilà, Monfieur & cher ami, les objections que je crois qu'on peut faire à votre théorie du feu & que vous demandez avec cette noble franchife & ce zèle pour la vérité qui vous caraëtérifent. Si vous jugez qu’elles ne foient que fpécieufes & que vous ayez des réponfes péremp- toires à leur oppofer , vous êtes le maître de les rendre publiques & de les difcuter devant ce tribunal auquel vous en appelez avec tant de raifon. Rien de plus ingénieux, de plus vraifemblable, ni même de plus fatif- faifant que la théorie du célèbre Euler pour expliquer par de fimples vibrations du fluide éthéré & du fluide fonore , tous les phénomènes de la lumière & des fons ; théorie devenue plus complete & plus favisfai- fante encore par ce que vous y avez ajouté, &.par fa liaifon avec les autres grands phénomènes de l'univers, XVII. Mais je crois que les nouvelles découvertes en Chimie, qu'Euler ignoroit , doivent nous porter à admettre dans la théorie du feu quelque chofe de plus que des chocs & des vibrations, pour expliquer 70 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, ce qui fe pafle dans les phénomènes de la chaleur , de la raréfaction , de la combultion , de la fermentation , de la putréfaction , de la calcination, de la vitrification, &c, D’ailleurs, le paflage plus ou moins rapide d’une uantité de matière de la lumière combinée à l'étar libre de matière échérée, eft une caufe bien plus puiffante de chocs & de vibrations que celles que vous admettez dans les phenomènes dont il s’agit. XVIHI. Il ne faut pas fans doute multiplier les êtres fans néceflité ; mais quand une multitude de faits bien avérés démontre l’exiftence de cés êtres , quand pour s’en pafler on eft obligé de nier, ou du moins de mé- connoître la tendance à l’union de deux élémens , tels que la matière de la lumière & l'air pur, que mille expériences démontrent, & qui eft d'ailleurs fi conforme à la marche ofdinaire de la nature , ne doit-on pas craindre de laiffer imparfaice une théorie qu'il étoic fi facile, après le grand pas que vous lui aviez fair faire, de rendre concordante avec tous les fairs ? Avant definir ma Lettre , qui n’eft peut-être déjà que trop longue, je crois devoir vous avertir d'une méprife qui vous eft échappée en rendant compte de la rhéorie de M. Pott, page 205 de votre VI° volume, « le ne congois pas , dites-vous, pourquoi l’etincelle du caillou ne lui » paroît pas du feu. C'eff, dit-il; qe cette étincelle allume pas: Le » contraire, ajoutez-vous, ef? très- démontré par cette étincelle qui « ullime la poudre du baffinet des fufils , » &c. Mais jamais Pott n’a nié que le caillou fit feu contre l'acier ; il parloit du choc de deux cailloux l'un contre Pautre, choc qui, en effet, ne donne point de véritables étincelles propres à enflammer la poudre, comme le font au contraire celles du caïllou contre l'acier. H ne réfulre du choc ou du frottement rapide de deux cailloux qu'une lueur ou traînée phofphorique , telle qu’on lobtient auffi de deux morceaux de fucre frortés l'un contre l’autre, Je crois, mon excellent ami, que vous devez au Public de le défabufer de cette erreur, qui n’eft déjà que trop conforme à l'opinion vulgaire que du choc de deux cailloux réfultent de véritables étincelles, Quant au choc de nos opinions, s’il n’en réfulte pas de la lumière ; du moins n’altérera-t-il pas la parfaite eftime & la très-fincère amitié que vous a vouée pour la vie votre ami & ferviteur, &c. A Paris, ce 12 Décembré 1787. FF « SUR L'HIST. NATURELLE ET LES ARTS. m1 Ge, om om LUE Ti FORGE DE\M LE BARON DE MARIVETZ, A M DE ROMÉ DE LISLE, Sur LE FEU. Jar Ju avec Lien de l’intérèt, mon excellent ami, les favantes obfer- varions que vous avez bien voulu m'envoyer fur ma théorie du feu. Vous connoillez tous les droits que ce qui me vient de vous a fur moi , je me gatderai donc bien de peufer ; avant une plus férieufe méditation ; qu'il me foit aifé de répondre à toutes vos objections: peut-être exigeront-elles des corrections dans quelqués parties de ma théorie, peut-être auñi , & je vous avoue que c’eft ce que j'ofe efpérer , ne naiffent-elles que de quelque défaur de clarté dans mes explications, ou de l'oubli de quelques modifi- cations dans telle, ou telle de mes affertions ; j'étois bien malade lorfque j'ai écrit ce volume. L'examen très-atrentif de vos obfervations m'apprendra feul ce qui me refte à faire ; mais, quel que foit mon rort , ces obférvarions ne peuvent qu'être très-utiles aux Lecteurs qui veulent bien m'accorder quelqu'attention, & mes réponfes, ou léveront Jes équivoques auxquelles mon défaut de clarté aura donné lieu , ou indiqueront les corrections à faire à ma chéorie, Elles prouveront au moins mon zèle pour la vérité, ma reconnoiffance des lumières que l’on veut bien me communiquer, & fur-tout, mon ami, le prix que j'attache à l’incérèe que Vous prenez à moi , à votre amitié & à vos avis. Je defite donc ardemment que vous faliez inférer vos obfervations dans le Journal de Phyfique. La bien- veillance de M. de la Métherie pour vous & pour moi me permet d’efpérer il ne nous refufera pas la Carrière, &, en invoquant votre amitié pour moi, j'invoque aufli votre févérité ; la feconde me fera aufli utile que la première m'eft, chère. ? 1 J'ai l'honneur d'être, &c. De Vincennes , le 14 Décembre 1787. : ss 72 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE; _ OBJETS DE RECHERCHES, EXTRAITS D'UN MANUSCRIT, SUR LES VFENTS, Par M. DUCARLA. Subflance des Vents. La pluie , en fourniffant un pied cube d’eau , laïifle dans l’atmof- hère un vuide qu’on peut évaluer à plus de mille pieds , ce vuide eft Bientôt rempli par l'air ambiant, qui, de proche en proche eft rem- placé par l'air marin , chargé de nouvelle eau. Cette eau aériforme que l'air marin verfera fur les terres , eft une portion de la mafle-& du volume de cet air; cette portion manque à cet air lorfqu'il s’en retourne fur la mer, la fubftance des vents terreftres eft donc moindre que celle des vents marins. Pour fe peindre cette différence , il fuffit de voir que le Rhin, le Nil, le Maragnon, & toutes nos eaux douces vinrent de la mer fous la modification aériforme qu'on nomme le vers, & y vont fous la mo- dification bien différente qu'on nomme 7iviére. ; Les terres intertropiques reçoivent annuellement de la mer 80 pouces d'eau & l’atmofphere n’en pefe que 384; un cinquième de l'air ter- reftre eft donc comme anéanti chaque année , il eft reproduit par la mer, c'eft le cinquième d'un courant général qui va, & ne revient Pase Vents côtiers." 2. Soit ER, (fg.r , PL IT j le bord de la mer, le vent ma- rin, en parcourant la largeur C À des terres, dépofe une portion de fa propre fubftance en forme de pluie, toute celle qui devoir tomber fur cette largeur a traverfé le point C , il n’a pañlé fur le point ir- termédiaire D que l'eau deftinée à tomber fur D A : chaque point de CA plus éloigné de C a donc moins de vent. D'autre part, chaque point de la furface maritime fournit fon con- tingent à l'évaporation , le contingent du point 13 franchira toute la largeur maritime B C ; le contingent du point intermédiaire F ne franchira que la partie FC : l'eau aériforme & par conféquent le vent eft donc plus confidérable pour chaque point de BC plus yoifin de d st Ainfi 2 SUR L'HIST. NATURELLE ET LES ARTS. 73 .Ainfi chaque point de la route A Ba plus de vent s'il eft plus voifin dela côte C, qui a donc le maximum du vent, ® La fomme des vents fur chaque point C de la côre eft comme. le diamètre moyen de l’île où l’on obferve, s'il eft vrai qu'en général ia pluie eft proportionnée à fa {urface ; car toutes fes pluies ont pallé par la côte en-érat de vent (1). Le vent côtier doit donc régner plus loin d’une île plus grande, Corps flottans. 3. Les corps flottants viennent tôt ou tard, fe mertre en ligne fur le rivage, car rout amas d’eau eft l'origine, la caufe & la matière d'un vent qui va par tous les rumbs, du centre à la circonférence, Dans un calme partait des autres vents, dans les jours chauds & fereins, & près des eaux confidérables , ce zéphir devient fenfible, L'évaporation comparée aux pluies. © 4. La mer exhale routes les eaux que les Aeuves lui porteront , & celles que les pluies verferont directement fur.elle ; la pluie eft donc moindre en général pour chaque point du globe que l'évaporation pour chaque point d’un réfervoir, Températures terreftre & maritime. ÿ. La furface de la torride a 6700000 lieres quarrées, fa partie terreftre, qu'on peut évaluer au tiers, reçoit donc anvuellement 877 : lieués cubiques d'eau pluviale; tonte cette eau vient des mers avec les 302 d. de feu latent qui la rendent aériforme. La température moyenne de certe zone paroît-être d'environ 20 d., il n'y faudroit donc ajouter que 60 d. de chaleur pour faire bouillir fes mers; le fea latent de ces vapeurs furoit donc s'il reftoit calori- fique pour mettre en ébullition cinq fois plus d'au ou 4,585 lieues cubiques, prefque autant qu'en a la Méditerranée. a à Cerre mañle de feu fort tous les ans des mers HA où il éroic calorifique, ce qui doit y rendre les chaletifs moindres que celles des continens fous le même foleil. " Ce feu pris aux mers redevient caloriñque fur le local ou la vapeur qu'il conftitue , fe refond en pluie, c’efi-à-dire dans Pair qui couvre les terres : cer air échauffé par un tel dégagement, foutire moins la chaleur des terres, qui reftent donc plus chaudes. L'excès de la ‘chaleur terreltre fur la chateur maritime a donc une double .caufe dans le fen combiné; 1°, l'atr marin eft refroidi par une «- : ES (x) Cette furface ef comme le quarré du diamètre. Tome X XXII, Par", 1788. JANVIER. K 74 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, évaporation qui n'a pas lieu fur terre ; 2°. l'air cerreftre eit échauffé par un° dégagement qui n’a pas lieu fur mer. L’évaporation terreftre & les pluies maritimes n’entrent point dans ces confidérations , il ne s’agit ici que des’ 80 pouces d’eau pluviale, fournie annuellement aux terres par la mer. | s Ces déductions s'appliquent à toutes les latitudes : l’hémifphère auf- tral doit être plus froid : il n’a prefque point de terre hors des tro- piques. Il eft plus brumeux : car l'air n’y pouvant courir que fur de l’eau, eft toujours faruré, toujours prêt à s'en deflailir, & toujours à portée d’en reprendre, Au fort de l’été, nos rivières, très-bafles, & par conféquent très- lentes, ont tout le temps néceflaire pour contracter la température ambiante; l'air qui les avoifine efl cependant moins chaud , même pendant la nuic, que lair éloigné de cent pas; cette fraîcheur rela- tive cefle avec la férénité, parce que l'évaporation cefle quand l'air eft faturé, Or, qu'eft- ce qu'un fleuve pour tout un horifon? Le feu qui fe combine dans la vapeur da fleuve eft fubirement remplacé par tout le feu de la campagne ; mais fur mer c'eft la campagne route entièreiqui s'exhale. Aufli parmi tous les relevés des obfervations thermométriques faires loin des terres, n'aije pu voir le thermomètre à 25 d. qu'une feule fois, & jamais au-deflus, tandis qu'il atteint le 32° à Paris, le 33,5 à Pékin , au Sénégal, à Pondicheri, au Cap-de-Bonne-Efpérance, en Sirie, à Ormus, &c. . Si le thermomètre fuit pour montrer que la chaleur eft plus grande fur terre que fur mer, au moins en été, nous pouvons conclure que Y'air terreftre eft foulevé par l'air marin qui afflue vers les terres comme plus denfe pour s'y échauffer, fe lever. On attribue à l'afcenfion de l'air, les grandes pluies de la torride , & la plupart des nôtres ; vous les relevés eudométriques donnent plus de pluie à no$étés qu'à nos hivers, quoique l'hiver foit plus habi- -tuellement humide & louche. Cet air vient de la mer fur la terre avec fa température, toujours fupérieure aux 1000 d. qui conftituent le zéro de Réaumur; säl ne venoit pas, la terre n'auroit ni des pluies ni des hommes; lorfqu'il s'élève au zénith en vertu de fa légèreté relative, il fe dilate par la fouf- traction du poids comprimant, & fe refroidir par fon éloignement de la terre ; ces deux changements fimultanés , diminuent fa qualitémenf- truelle, il abandonne l’eau qu’il tenoit en diflolution, qui devient brouillard , nuage , pluie. Cependant cet air arrive au haut de l'amofphère, & s’y trouve ré- + SUR L'HIST. NATURELLE ET LES ARTS. 7 duit prefque au zéro fuprême, il redefcend enfuire, car ces mouvemens ne peuvent être que des circulations, il va remplacer l’air qui l'avoit chaflé, remplacé, & fe dirige vers le vuide qu'il a laiflé, c’eft-à.dire vers la mer, fa froidure diminue à mefure qu’il tombe; parce que l'exhalation calorifique-des mers lui rend à mefure le feu qu'il vient d’exhaler dans les régions échérées ; c’eft donc principalement la mer qui fait ces reftitutions , qui eft donc le plus.refroïdie par cette circu- lation, Je conclus def cette cinquième confidération , qu'une partie de l'air marin, venu fur terre par la baffe région , s’en retourne à la mer par la haute; cet@partie a donc produit un vent marin fenfible en venant, & ne produira pas un vent terreftre fenfible en s’en rerournant. Ceci nous annonce combien d’autres caufes influent fur les courants aériens : fi les deux que je viens d’expofer écoient les feules, les vents marins feroient éternels & furieux, Vents compofes. 6. Tout vent qui n'eft pas dirigé dans un plan parallèle à l'équateur eft fans cefle détourné par les différences du mouvement diurne ,E R (fig. 1) eft un arc du tropique boréal , AB un arc méridien long de 20 lieues où d'un degré : le bout auftral B a 117 pouces de vi- tefle diurne par feconde plus que le bout feptentrional A : un corps tout-à-coup tranfporté fans frottement du bout B au bout A paroîtroit donc aller de loueft à l’eft dans le fens C Q avec certe vitefle da 117 pouces, &au contraire s’il avoit été porté de A en B, fi ER étoic un-arc du cercle polaire, cette différence diurne feroit de 277 pouces, plus que double de la première. g Le petir cercle € (fig. 2 ) eft la bafe horifontale d'une colonne aérienne verticale, dont le diamètre aura dix dieuss : cette colonne eft échauffée , allégée par un beau foleil à midi, tandis que le refte de l’horifon eft couvert d’un épais nuage , l'air ambiant, plus froid & plus denfe, accourt vers cette colonne par tous les rhumbs pourgéchauffer, s'élever, être remplacé. L'air qui va par le rhumb EC parallèle à l'équateur , n'éprouve point de différence diurne, puifqu’il ne change point de latitudes. Mais l'air qui fe dirige du fud au nord par le rhumb SC change de latitude chaque pas, les différences diurnes le pouffent d'occid:nt en orient dans le fens SB ; toujours parallèle à Péquateur : il parcourt donc la réfultanre SA, qui eft un rhumb fud-oueft. # L'air venant du mfrd en fens oppolé N, fuit par la raifon des con- traires la réfultanre nord-eft ND, parallèle à S A. En comparant ces diagonales aux côtés, on voit fi les différences diurnes accélèrent ou rallentiflent le rumb qu'on examine. Tome XXXII, Part, I, 1788. JANVIER, K 2 m6 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, La feule infpedtion de la figure, montre que ces réfultantes donnent un mouvement giratoire à toure la mafle de cet air affluent, ce tour- noiement eft en helice, parce que Pair tend direétemert vers €, tandis que les différences diurnes le détournent fans cefle. L'air des rumbs ÉC,OC oppolés, mais parallèles à l'équareur, eft entraîné par ces impulfons latérales. Un navire en marche, n’eft guère dévié par les différences diurnes: fi la quille ef dans le méridien, elles le pouffent par le flanc, fi dans un parallèle elles font nulles, mm Les mers étant moins profondes , moins larges, moins continues que l’atmofphère, leurs courants font beaucoup moins affectés que les vents par ces différences. Vents alifés fur un globe homogène. 7. Entre les 32° parallèles , nord & fud , le vent dominant eft d’entre let & le pole vifble. D’après MM. Mariote, Hallei, Bernouilli, Franklin , les méréorologiftes reconnoiffent que cette tendance réfulte des différences calorifiques & diurnes. On paroît avoir fuppofé que le maximum général de la chaleur réfide conftamment fous la ligne , ce qui n’eft vrai que pour les équi- noxes : le maximum du tropique eft plus fort, puifque le foleil touche le tropique pendant dix-fepr midis confécutifs , & parcourt un arc diurne plus orand ; aufli les feux particuliers au tropique , pañlent - ils en proverbe. Queile que foit la latitude actuelle du maximum calorifique , c’eft vers elle que l’air afflue des deux hémifphères , pour foulever celui qui S y» trouve. : L’équareur ER ( fe. 1 ) a le maximum calorifique du moment, les 21 mars & feptembre, époques des équinoxes ; l’atmofphère s’y porte du nord par le rumb nord-eft HC, & du, midi par le rumb fud-eft, GC, , Le 21 décembre, époque du folftice méridional, le maximum du moment & même du femeitre eft pour le tropique méridional GJ, c’eft donc vers cette latitude que l'air accourt des deux hémifphères. L'air boréal fuit encore alors le rumb nord-eft HC jufqu'à la ren- contre € de l'équateur, lorfqu'il approche du 4° parallèle K , les dif- férences diurnes font très-petites, parce que les cofinus de latitude aug- mentent peu des ce climat ; cet air a donc d'autant plus de temps pour recevoir du frottement de la terre, la vitefle diurne de fes bafes fucceflives, & va prefque aufhi vite que ce poincK , ce point n’a que trois pieds de viteffe diurne par feconde moins que l’équateur : l'air affluent doit franchir encore 80 lieues pour atteindre ce grand cercle ; il a donc plus de tems qu'il ne faut pour prendre peu-à-peu cette vi- L] as SUR L'HIST. NATURELLE ET LES ARTS. 77 teffe de trois pieds, & tourne aufli vite que fa bafe en arrivant à cette limite des deux hémifphères. k L Cet air venu du nord par HC, continue de tendre vers le tropique - fud ; ayant atteint en C la vicefle dinfne du plus grand parallèle, il _trouve à préfent des cofinus toujours moindres, Sa viceile diurne ef donc par-tout fupérieure à celle de fes bafes fuccellives , il les devance donc d’occident en @rient & fuir un rumb nord-oueft CG. Six mois après, c'elt-à-dire le 27 juin ,le maximum calorifique du moment & du femeitre eft pour le tropique boréal HL : l'air qui y va du midi, fuit d’abord le rumb fud -eft GC, puis le fud- oueit CH; tous ces rumbs réfulrent des différences diurnes, en défaur quand l'air s'approche de l'équateur , en excès quand il s’en éloigne, Perus alifes. 8. Principe général, le rumb qui mène l'air au parallèle du foleil eft d’entre l’eft & le pole vifible, quand le’zénich elt entre le foleil & ‘ce pole, & au contraire , le rumb eft d’entre l'oueft & le pole invi- fible , quand le zénith eft entre le foleil & ce pole ; toute latitude in- tertropique plus grande a donc plus d’alifés orientaux, & moins d’occi- dentaux, qui feront donc les perirs alifes. Dans chaque bande alifée , les vents réglés occidentaux font direc- tement oppolés aux orientaux ; airfi dans la bande nord , les orientaux” font nord-eft , & les occidentaux fud-oueft ; dans a bande méridionale, les orientaux font fud-eft & les occidentaux nord-oueft, : Grands alifés. 9. Les deux bandes alifées vont jufqu’au 32° degré & débordent par conféquent d'environ 9 d. la zone torride ; le zénith dans ces deux bor- dures eft toujours entre le foleil & Îe pole vifible, les vents reglés orientaux y. font donc perpétuels, ce qui me les fait nommer grands alifes. : Claffification. 10. On a donc trois fortes de vents alifés; 1° d'entre left & le pole viGble , ils durent plus de fix mois, & ce plus augmente avec la la- titude intertropique ; 2°, d’entre l'oueft & le pole invifble, ils durent moins que le femeftre , & ce moins augmente avec cette même lati- tude ; 3°. dans l’efpace alifé qui déborde la torride, les vents réglés font conftamment d’entre l'eft & le pole vifble. D'où l'on peut conclure qu’eu égard à la durée & à l'efpace , les alifés orientaux font quintuples des occidentaux. L’ Anneau. 11. La mafle d'air, qui fur le parallèle du maximum va fans cefle au zénith , eft une forte de couronne ou d’anneau qui entoure le globe, fa largeur nxridienne eft inaflignable , elle varie même avec les faifons, Comme il faut cependant s’en former quelque idée provifoire , on paroît pouvoir, d’après tout ce que j'en ai dit ailleurs, évaluer à em 78 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, . viron 1$ d.,ou 300 lieues ; la largeur moyenne horifontale , méris dienne de l'anneau. pe SAN | L’anneou , toujours parallèle à l’équateur , &. par conféquent à lui- même, va tous les fix mois d'un tropique à l’autre, avec le foleil ; ou plüror quelque temps après; car la manifeflation d’un effet auf médiat que l'anneau, doit être fort poflérieure à la caufe. Nos ma- ximum calorifiques annuels & diurnes arrivent quarantel jours & trois heures après le folftice & le midi. La latitude où pafle attuellement l'anneau, eft ordinairement cou- verte d’un nuage, fouvent épais & noir, qui verfe de grandes pluies , prefque les feules de la torride ; ce nuage eft le caraétère ou plûtot la conféquence de l’anneau , fon ais afcendant par fa polition devient hu« mide par fa narure. L'arc méridien BA de 1$ d, ou 309 lieues ; eft la largeur hori- fontale de l’anneau ( fg. 2 ), l'arc ER parallèle à l'équateur eft fon milieu. Un navire en traverfant la demi-largeur BC, a moins de vent à mefure qu'il avance ; car tout l'air de l'anneau devant aller au zénith, il pafle horifontalement moins d'air fur chaque point intermédiaire F plus voifin du milieu C, où il n’en pañle plus, | Un arc CQ de l’anneau fera ferein , fi la ligne À B ( f. 1 ), fituée #3 fon orient, eft la côte d'un continent; car l'air venu par les rumbs orientaux GC, HC, n'a pu fe farurer d'eau en pailanc fur des terres, & ne dépofera donc point de pluie en montant dans cee arc de l’an- peau, qui fera donc ferein {ur les parages qui avoiinent la côte oc= cidentale de l'Afrique & de l'Amérique. Enfin, un certain arc EQ de l'anneau peut fe placer à demeure périodique, hors de la zone torride; fi quelques circonftances fixene périodiquement fur ce parallèle, ER le maximum calorifique de tous les méridiens A B qui paffent par cet arc parallèle EQ ; car, où que puifle être le maximnm calorifique d'un méridien, tout l'air aflis {ur ce méridien accourra fur le local où réfide atuellement ce maximum, Un arc de l'anneau peut donc être ftarionnaire, tandis que le refte de l’anneau va & vient avec le foleil, ce qui mérite une attention particulière, La fuite au mois prochain. < Année rurale , ou Calendrier à l'ufage des Culrivateurs, 1788. A Paris, chez Cuchet, Libraire, rue & hôtel Serpente, 1 vol. 7-16. EXTRAIT. CG la feconde année que paroît cet utile calendrier , confacré à Pinftruétion des Cultivareurs. On y trouve les travaux de la campagne pour chaque mois de l’année, Ils font fuivis des obfervations de M. Toaldo, Ze F . SUR L'HIST: NATURELLE, ET-LES: ARTS. 79 que nous.avons annoncées dans: ce Journal juillet 1787 ; pour prévoir les changemens de tems. On donne enfuite des inftructions fur les haies, fur la culture des pommes de terre, la préparation de leurs fécules, fur la culture des afperges , fur la manière de faire le meilleur vin avec un raifin quelconque , fur la culture de la betterave nommée difette,, fur un pro- cédé pour extraire l'huile des pepins. de railins , fur l'emploi du chardon pour la nourriture des vaches, & celui des farmens de vigne pour la nourriture des beftiaux , fur Femploi du trefle, & la méthode de cultiver la grande chicorée.. . .fur les moyens de détruire les vers qui ravagent des vignes, fur les moyens de guérir la volaille. Il y a enfuite quelques préceptes généraux aux habitans de la campagne pour leur fanté, & pré- venir les maux auxquels l'intempérie des faifons les expofe continuelle- ment, & pour porter de prompts fecours aux afphixiés , &c. Des proverbes, des änecdores, & un précis des Ordonnances rendués cette année rela- tivement à des objets d'économie rurale, terminet ce volume, avec annonce des prix diflribués à la féance publique dont nous avons parlé. On voit par ce court expofé que l’Auteur de ce petit Calendrier a cher- ché à yfréunir beaucoup de chofes utiles à l'habitant de la campagne. On ne fauroit trop l'inftruire, parce que quittant pour lors fa routine, il cherchera à améliorer {a culture lorfque fes facultés le lui permettront. C'eft pourquoi j'ai dit ailleurs qu'il faudroit que les aflemblées publiques de chaque communauté qui fe font une ou deux fois chaque jour de repos, fuffent terminées par des inftruétions fur ces objets, & faire fuccéder aux difcours de morale quelques notions fur les principaux phénomènes de la nature. Ce feroit perfectionner l'éducation des claffes pauvres des citoyens qu’on néglige beaucoup trop. Un planétaire pourra leur donner une idée du fyfême des grands globes que nous connaifions, des révolutions de la terre, de celles du foleil , des planètes , des comètes, ainfi que des éclipfes. On fera cefler par ce moyen les frayeurs que leut caufent fouvent les comères & les éclipfes. Quelques-unes des grandes . 7 + -ù7 a expériences fur l'électricité leur apprendont quelle eft la nature du ronner- re, des aurores boréales, &c. phénomènes qui fouvent les inquiètent. La machine pneumatique leur feroic connoître quelques propriétés de l'air 3 &{ur-rour le baromètre qui leur feroit rrès-utile pour leurstravaux, &8:c. &c. Quelques notions {ur la nature des différentes cerres & pierres lui feroient encore de la plus grandeutilité pour fertilifer fes champs. . . Ainffil feroit en garde contre routes les efpèces de charlatans qui, hélas ! furprennent fans ceffe fa bonne foi. Il pourtoit raifonner fa culture , augmenter fon produit, es diminuant fon travail. . . Qu'on ne m'objeéte point la foible dépenfe de ces inftrumens..…. . On prévoir ma réponfe. Les Maîtres pour «Finftruction ne manquéront pas. . . . Et ce plan qui, je crois, contribueroit beaucoup au bonheur de nos précieux habitans de la campagne, eft de la plus facile exécution... t , s F2 0e PP 7 2 8o OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, 6c Foftruire le Culrivateur , lui apprendre à-chérir fes occupations en dimi- nuant {es charges, & lui faifant voir qu'ileft plus près du bonheur qu'aucune - autre claffe de la fociété, anoblir fes occupations à fes yeux par les hon: neurs juftemient dûs qu'on lui rendra, comme on le fait aujourd'hui dans les Cosmices agricoles.. . . ce font les feuls moyens de faire eur l'Agri- culrure. Je n'ufe prefque pas dire dé rendre le Culrivareur heureux , parce qu'en général on calcule plurôr le produit net de fon travail, que La Jonime de for bonheur. Maïs au moins on je rendra heureux quel qu'en foit lé motif. : RES A PENSE à ETCPNT KA BALE DES ARTICLES CONTENUS DANS CE CAHIER. Discours prèlièminaire ; par M. DE LA MÉTHERIE, page 3 Défenfè de L Hyzromérre à cheveu ; par M DE SAUSSURS , 24 Mémoire prélenté à l'Académie des Sciences de Paris, fur Les dimenfions des Horloges de Château ou gros volume ; par M. RoBi, Horloger ordinaire du Roi & de la Rene, 4$ Conjeëture fur la caufe de la chaleur, des eaux thermales ; par Dom SAINT JULIEN, Bénédiétin de la Congrégarion de Saint-Maur , Profeffeur Emérite de Philofophie & Maïhematiques, de l'Acudémie des Sciences de Bordeaux, SI Surl Acide des Pommes ou Vinaigre imparfait ; par M. HERME TADT : traduit de l'Allemand, s7 Lettre de M. le Baron De MariveTz, à M. DE La MÉTHERIE, Jur la “Nomenclature chimique, 6x Lerrre de M. DE RoMÉ DE LuisLe, à M. le Baron DE MArrverz , fur le Fluide igné ou matière de la chaleur, 6 Lettrede M. le Baron DE Mariverz ,à M. pe RoMé DE Lise, fur le Feu, I Oïjets de Recherches, extraits d'un Manuferit, fur les Vents ; par M. DucarLa, A 72 Année rurale, extrait, | 78 AVP'P'RIO BA MTUENO" IN: J'ai lu , par ordre de Monfeigneur le Garde des Sceaux , un Ouvrage qui a pour titre: Obfervations fur La Phyfique, fur l'Hifloire Nururelle & fur les Ares, Ec. par MM. Rozter, Moncez Lejeune & ne 14 Meraerte , Gc. La Collettion de faits importans qu’il offre périodiquement à fes Leéteurs, mérite l’atrention des Sa- vans ; en conféquence , j'efime qu’on peut en permettre l’impreffion. A Paris, ce 28 Janvier 1788. VALMONT DE BOMARE, 1 1 ; , s - ) , 4 { } ! : > t ’ H ns cart beer-conmitemantie mme ane os cd - |, anne dun. + ue 8 j x Re qe mcm ete dom) | PAT. LS pee lAanvier 170. 7 ALU ) ; a pit Cr « — MEME AU pe 22 # LE LD nr - Tip. % 4 à 4 : di F- 1 * A y ! F ï | “. à #. . : #4 | “H | | (4 x ; 1 ! ; : 4 t ; " : . ; k : é A — DOS femmes onnmmees mortes rime AUS WE) Des Cal ë | JOURNAL DE PHYSIQUE. j 3 FÉVRIER 1788. I a ee a — FRERE EE SR 0 EX RRAIT D'UN MÉMOIRE Lu à l'Académie Royale des Sciences, Sur uné Pierre filicée, calcaire , alumineufe , ferreufe, magnefienne , de couleur verte , ex maffe lamelleufe | demi- tranfparente , dont la furface eff criftallifée en faifceau. Par M. HASSENFRATZ., La pierre dont je préfente l’analyfe nv'a été donnée par Madame la Comtefle de la Marck. Cette Dame en pofsède un très-beau morceau dans fon cabinet ; mais elle ignore de quel lieu il lui vient, & par qui il lui a été envoyé. M. l'Abbé Rochon , de l’Académie Royale des Sciences, a rapporté du Cap de Bonne-Efpérance quelques fragmens d’une pierre rout-à-fait femblable qui lui avoir été donné commeune curiofité venant de l'intérieur des terres. Ce favant a fait préfent de fes morceaux à M. d'Angivilliers. Les criftallifations que l'on apperçoit fur la pierre de Madame fa Comrefle de la Marck paroiflent s'être formées dans des cavités ou efpèces de géodes qui fe rencontrent dans ces pierres. La furface de ces cavités eft mamelonnée, & ces mamelons font recouverts de petits criftaux en fafceau ou en paquet, quelquefois divergent un peu du centre de chaque paquet. On trouve fouvent fur la furface oppofée aux mamelons des cavités éubiques qui femblent n'être autre chofe que l'empreinte de quelques autres criftaux tout-à-fait indépendans de cetre efpèce de pierre. Ces empreintes font recouvertes de rouille de fer. Certe pierre eft verte, prefque tranfparente , fa caflure eft lamelleufe : quelquefois elle préfente des faifceaux de rayons divergens du centre de chaque mamelon; il paroît que l’efpèce de trouble que l'on apperçoit dans fa male eft occañonnée par la différence de direction des lames qui , formant ces faifceaux de rayons divergens, doivent néceffairement dévier irrégulièrement le rayon de lumière. Tome XXXII, Part, I, 1788. FEVRIER, L 82 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, Le briquet tire de foibles érincelles de cette pierre ; elle coupe le verre, elle eft rayée par le criftal de roche, & le criftal de roche ne l’eft point par elle; elle ne fait point effervefcence avec les acides, M. l'Abbé Haüy ayant bien voulu m'aider de fes confeils pour déter- miner la forme des molécules élémentaires de cette pierre , nous avons effayé enfemble à trouver le fens des caflures les plus faciles; ces caflures fous ont fait appercevoir un angle plan conflant de 60 degrés. Nous avons tenté inutilement des caflures dans les autres fens, nous n’avons encore pu rien déterminer. Cet angle plan de 69 degrés établit un rapport entre cette pierre, les fchorls & les feld-fpaths, qui toutes les deux préfentent un angle femblable, avec cette différence que la caflure la plus facile dans le feld-fpath eft celle des faces qui prélentent Pangle droit ; tandis que dans notre pierre, ainfi que dans les fchorls, les faces les plus faciles à enlever par feuillets font celles qui préfentent l’angle de 60 degrés. N'ayant pas pu dérerminer le fecond ou les autres angles plans de la forme primitive de cette pierre, il nous eft impoñlible de déterminer pof'ivement fa nature d'après ce feul caraétère, M. Briflon qui a bien voulu foumettre cette pierre à fes expériences , a déterminé fa pefanteur fpécifique de 2,9423 , ce qui l’écarte abfolumenc des fchorls dont Les extrêmes font 3,4529; le fchorl verd du Dauphiné & 3.0$41 la tourmaline de Ceylan , ainfi que des feld - fpaths dont les extrêmes fort 2,704$ le feld -fpath verd chatoyant & 2,4378 Le feld- fpath rougeitre. L’analogue la plus approchée de cette pierre par rapport à fa pefanteur fpécifique, & qui paroît en même-tems ne pas s'éloigner beaucoup de la nature & de la proportion de fes compofans, eft une efpèce de pierre que Bergmann a nommée bafalte, & que M. Defmarefts appelle fchork noir en mafle. Sa pefanteur fpécifique eft de 2,6225. La pefanteur fpé- cifique de cette pierre differe fingulièrement des autres efpèces connues fous le nom de bafaltes, dont les extrêmes font 2,8642 le bafalte de la chauffée des Géants, & 2,320$ la pierre de Volwic. Il paroîtroit , d’après les Elémens de Minéralogie de M. Kirwan qui fixe la pefanteur fpécifique de la zéolite entre 2,1000 & 3,1500, que l'on pourroit foupçonner la pierre verte d’être fufceptible d'y être placée; mais non-feulement M. Briffon d’après qui nous comparons toutes nos pefan- teurs fpécifques, n’en a point trouvé qui puifle en approcher , puifque fes pefanteurs extrêmes font 2,4868 la zéolite rouge d'Ædelfon & 2,0739 la zéolite blanche ; mais encore M. l'Abbé Haïüy n’a trouvé dans le nombre des zéolites qu'il a foumis à fes recherches aucune efpèce dont la cafluüre préfente un argle plan de 60 degrés, Après avoir déterminé les caraétères extérieurs les plus apparens de la pierre de Madame la Comtefle de la Marck, j'ai cherché par l’analyfe chimique la nature & le rapport de fes compofans afin de fixer le genre SUR L'HIST. NATURELLE ET LES ARTS. 83 auquel elle appartenoit , fi ce genre étoit connu, ou la comparer à ceux qui en approchoient. Expofée feule dans une cornue à un feu paflablement fort , elle n’a laiflé dégager aucun fluide élaftique fufceptible d’être recueilli à travers le mercure, non plus que chauffé avec l'acide fulfurique. Huit onces de cette pierre pulvérifées , expofées à une chaleur violente dans un creufet, s’y font fondues en une fcorie brune noirâtre, très- fpongieufe & ont perdu 4$ grains : perte de poids qui appartient très- probablement à fon eau de criftallifation , puifque l'acide fulfurique n’a u en dégager aucun fluide élaftique. J'ai fait digérer les”7 onces7 gros 27 gr. de fcorie noirâtre dans de l’acide muriatique que j'ai recohobé à plufieurs fois fur cette pierre afin de lui faire difloudre tout ce qui étoit fufceptible de l'être. Après fix ou fept recohoba- tions j'ai verfé de l’eau diftillée fur ce qui reftoit dans la cornue, je l’ai fait bouillir fur le réfidu , j'ai reverfé de l'eau diftiliée une fecorde fois après avoir décanté la première, jai fait bouillir de même cette feconde portion d'eau diftiliée, & j'ai filtré le tout. La matière qui me refta fur de filtre étoit blanche, avoit l’apparence complette de la terre filicée, & étoit indifloluble dans les acides fulfurique & nitrique. J’en ai diffous une portion dans du carbonate de potafle que j’ai enfuite précipité par l'acide nitrique, Certe terre filicée reftée fur le filtre pefoit 4 onces après avoir été calcinée dans un creufet. J'ai fait bouillir la liqueur qui étoit paflée à travers le filtre afin de Ia rapprocher ; j'ai verfé dans la diflolution rapprochée un peu d’acide fulfu- rique affoibli ; il s'eft formé aufli-tôt un précipité abondant de fulfate calcaire, Car, il fe laïfloit diffoudre dansune grande quantité d’eau diftillée, Ce précipité recueilli fur un filtre, calciné dans un creufet, pefa 3 onces 2 gros $2 gr. Jai verfé du carbonate de potafle fur la liqueur qui étoit paîlée à travers le filtre , il s’eft formé un précipité abondant : j'ai recueilli ce précipité fur un filtre. J’ai fait digérer un peu d’acide muriatique fur le précipité, il n’en a diffous qu'une portion; le refte, ce qui n’a point été diflous , s’eft com- porté comme le fulfate calcaire. Cette fubftance calcinée pefoit 1 once 2 gros $3 grains. J'ai rapproché la diffolution , & l'acide fulfurique n'en a plus rien précipité. Ainfi j'ai obtenu de cette pierre 3 onces 2 gros $2gr. + 1 once 2 gros ÿ3 gr.—æonces $ gros 33 gr. de fulfate calcaire calciné. J'ai verfé de la diffolution de prufliate de potafle fur la liqueur qui méroit rettée, il s’y eft fait auffi-tôt un précipité de bleu de Prufle, Cette fubftance recueillie fur un filtre & calcinée, a produic de l'oxide rouge de fer pefant 257 grains ou 3 gros 41 grains. De nouveau prufliate de potafle n’a plus précipité de prufliate de fer. J'ai précipité par le carbonate de potafle toutes les terres tenues en Tome XXXII, Part. I,1788 FEVRIER, L 2 84 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, diffolution dans le liquide refté à la fuite de routes ces opérations, & j'?i verfé fur le précipité féparé par le filtre, de l’acide acéteux affoibli afin de difloudre la terre de magnéfie qui pouvoit y être unie. Cette diflolution filtrée a laiflé précipiter par l'alkali fixe un peu de terre blanche qui lavée & calcinée peloit 19 grains. J'ai lavé à plufieurs reprifes la terre que l'acide acéteux n’avoit point attaquée, je l’ai fait calciner, & elle pefa après cette opération 1 once, S gros 11 grains. Certe terre diffoute dans l'acide fulfurique donna des criftaux d’alun. Il fuit des expériences que je viens de rapporter que j'ai obtenu de 8 onces de la pierre verte de Madame la Comtefle de la Marck 45 grains d'eau , 4 onces $ gros 33 gr. de fulfate calcaire calciné, 3 gros 4r gr. d’oxide rouge de fer, 19 grains de terre de magnéfie , 1 once $ gros 11 gr. de terre alumineule & 4 onces de terre filicée, ce qui feroit en fomme 10 onces 4 gros 49 gr. au lieu de 8 onces que j'avois employées. Cette différence vient de ce que la terre calcaire n’étoit point dans la pierre à l'état de fulfate calcaire , non plus que le fer à l'état d’oxide rouge; je dois donc déduire de cette fomme l'acide fulfurique & l’eau unie à la terre calcaire pour former le fulfate calciné , & l’oxigène en furabondance dans le fer pour en faire l’oxide rouge, Le fulfate calcaire eft compolfé , d'après M, Kirwan , de 32 parties de terre, 30 d'acide fulfutique & 38 d'eau, ou 32 parties de terre & 68 d'acide fulfurique & d’eau. Le fulfate calcaire, d’après le même Chimifle, perd en fe calcinant 0,20 de fon poids d’eau un peu acidulée ; d’où il fuit que les 100 parties de fulfate calcaire qui, avant d’être calcinées contenoient 32 parties de terre & 68 d'acide fulfurique & d’eau , ne contiennent plus après la calcination que 32 parties de térre & 48 d’acide plus concentré. Comme le fulfate calcaire que j'ai obtenu dans mes expériences n’a été pefé qu'après la calcination , il s'enfuit que la proportion de terre calcaire y étoit, d'après les données de M. KirWan: : 32448 = 80:32. D'après cela on aura la quantité de terre calcaire contenue dans les 4 onces $ gros 33 gr. de fulfate, en faifant cette proportion 80: 32:: 4 onces $ gros 33 gris x — LEA LE ARR LR RE 1078,8 — I once 82 89 6 gros 70 grains, Quoique la couleur verte de la pierre que je viens d’analyfer prouve bien que le fer n’y étoit point contenu à l’état d'oxide rouge , il n’en eft pas moins très-diffcile de déterminer fon degré de calciration, Auñli ne partirai-je poine de l'état du fer dans la pierre verte, mais feulement de celui où il éroit dans la pierre fcorifiée. Cet état d'après lequel je vais partir ne produira point de différence dans le poids total, puifque n'ayant déternsiné la quantité d’eau dégagée de la pierre que d’après fa perte de poids dans la fcorification , fi ke fer a augmenté ou diminué de poids dans SUR L'HIST. NATURELLE ET LES ARTS. 85 cette opération, ma conclufion doit être moindre ou plus grande pour l'eau. Ainfi la différence d’érat du fer dans la pierre verte criftallifée & fcorifiée ne peut porter de différence que fur le poids de l’eau , ce qui n'établit point de différence fur fa nature. La pierre verte fcorifiée étoit brune, donc le fer mê'angé ou combiné avec elle y étoit fous l’état d’oxide brun de fer. D'après les données de M. Kirwan, 100 grains d'oxide brun de fer produifent 79 à 89 grains de fer; donc la quantité moyenne de fer contenue dans 100 grains d’oxide 79 + 89 brun eft de ———— — 84 grains, Ainfi la proportion 84 : 100: : 100: x z 100 X 100 TD par 100 grains de fer. Puifque le fer contenu dans 100 grains d’oxide rouve eft, d’après le même Auteur, entre 72 & 78 , la quantité moyenne 5 SHOP q y — 119 , donne la quantité moyenne d'oxide brun produit rx 2 +78 she 3 doit être de 7 = 75, & 133 déduit de la proportion 75 : 100 : : 100 X 100 =, p ë = 100 : x = — 133, fera la quantité d'oxide rouge produit par 75 100 grains de fer. : Comme l'oxide rouge de fer n’eft autre chofe que de l’oxide brun avec une addition d’oxigène ; connoiflant les proportions d’oxigène uni à 100 grains de fer pour former les oxides bruns & rouges , on aura la quantité d'oxide brun contenu dans une quantité d'oxide rouge en faifant cette proportion. La quantité d’oxide rouge formée par 100 grains de fer eft à la quantité d’oxide brun formé par 100 grains du même métal comme une quantité quelconque d'oxide rouge eft à la quantité d'oxide brun qui y eft contenu; donc, d’après les données de M, Kirwan, 133: 119:: 257 X119 1 d’oxide rouge de fer contenoient 3 gros 14 gr. d’oxide brun. Il fuit de ces confidérations que les 8 onces de pierre analyfées ont produit : Eau de criftallifation. .... O onces O gros 4$ or. Terre filicée. ....,.... 14 (o) o MÉTreMEAICArE ANR ei 6 70 D< (o) o 257:x— —230 — 3 gros 14 gr. Ainfi les 3 gros 41 grains Terre alumineufe. ....., $ 11 Terre magnéfienne. . .... o 19 Oxide brun de fer ...... 3 14 Total............. 8 onces O gros 1$ gr. Donc 15 grains de plus fur 8 onces; ce qui vient très-probablement de 1. 86 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, Ja différence d'état des terres dans la pierre verte fcorifiée & féparée de la fcorie. Comme cette différence ne forme que la trois cent feptième partie du tout ou environ , on peut fans danger la compenfer fur chaque partie dans la réduction des proportions des compofans pour 100 parties de la pierre. C'eft ainfi que j'ai déduit ces proportions, 8 onces 1$ grains ou 4623 4 onces X 100 — $o de terre filicée. 4623 grains : 4 ONCEs :: 100: x— ( x once 6 gros 70 gr.) 100 4623 : 1once 6 gros 7o gr. :: RS 5 4623 23,3 de terre calcaire. ({ ronce $ gros r1 gr.) 100 4623 (] 4623 : 1 once Sgros II gr.::100:x = 20,4 de terre alumineufe. &c. EC EC. Ainfi fur 100 parties les proportions font : Terre filicée 49 eo Merrelcalcaire#21 15.0 20 Terre alumineufe. ...... 20,4 Féreneitent IAE 40 Eye RONA TES SE 0 D Terre magnéfienne ....,,. o,$ nn 100,0 Les pierres qui paroïffent fe rapprocher par les compofans , de celle que je viens d’analyfer, font le fchorl en barre & le bafalte de Bergmann: ces deux pierres contiennent de même de la terre filicée, de la terre calcaire , de la terre alumineufe, du fer, de la terre magnéfienne & de l’eau. Mais ces matières different beaucoup de notre pierre par la propor- tion de leurs compofans; la première contenant fur 100 parties 6,6 de terre filicée, 21,6 de terre calcaire , 6,6 de terre alumineule, 1,6 de fer, s de terre magnéfienne, $ d’eau. La feconde, $2 de terre filicée, 8 de terre calcaire, 1$ de terre alumineufe, 2 de terre magnéfienne, 25 de fer & 6 d'eau ou de fluide élaftique. IL fuit de tout ceci que la pierre verte de Madame la Comtefle de la Marck approche fingulièrement des fchorls par l’arrangement de quelques lames de fes criftaux élémentaires ; du fchorl noir en mafle de M, Defma- reft par le rapport de fa pefanteur fpécifique, & de ces deux fubftances par la nature de fes compofans, mais qu’elle differe du fchorl par fa pefanteur fpécifique , du bafalte noir en mafle par fa couleur & que la proportion de fes compofans n’eft qu’une efpèce moyenne entre ces deux fubftances, SUR L'HIST. NATURELLE ET LES ARTS. 87 EE ——_—_—_ GPBSUER VAT E O'N S$S Sur la Lettre de M. De LUC, infèrée dans Te Journal de Phyfique de Novembre 1787; Par M. TREMBLEY, Dix: le Mémoire que j'ai donné fur la mefure des hauteurs par le baromètre , j'ai exclu les cas où l’on n’avoit pas obfervé le baromètre au haut & au bas de la montagne; ainfi l'obfervation du Mont - Blanc comparée avec une obfervation faite à Genève , n’a aucun rapport avec les réfultats que j'ai obtenus dans mon Mémoire, La moyenne qu’on prétend prendre entre une obfervation faite au haut du Mont-Blanc & une obfervation faire à Genève, à quinze lieues de-là , éft rout-à-fait imaginaire. On verra dans le troifième volume des Voyages de M, de Sauflure , que l'obfervation faite par M. fon fils au bas de la montagne, donne un réfulrat qui s'écarte davantage de la règle de M. de Luc. Il eft certain , comme le dit ce célèbre Phyficien , que pour juger de fa règle, il faut obferver les thermomètres au foleil. Je n’ajouterai rien ici à ce que j'ai dit de certe méthode, j'atrendrai les argumens péremptoires que nous annonce M. de Luc dans fon Ouvrage fur la Météorologie. Je remarquerai feulement que dans ce cas-ci l’on ne peur conclure de Pobfervation du thermomètre au foleil faire à Genève quelle auroit été la hauteur du thermomètre obfervée au foleil à Chamouni, parce que l’action du foleil fur le thermomètre varie fuivant les hauteurs. J'ajouterai qu’en général lorfqu'on obferve le thermomètre au folgil à Genève, on ne peut favoir fi le tems eft convert ou non à Chamouny, & s'il eft couvert , l'obfervation peut-elle-être jufte ? Si Pon avoit une fuite de thermomètres placés dans les différens points de la colonne qu'il s’agit de mefurer,on pourroit avoir la chaleur moyenne de la colonne en prenant un milieu entre les degrés indiqués par ces thermomètres. Lorfqu’on n’a obfervé que les extrêmes, on fuppofe que Ja chaleur décroît uniformément à mefure qu’on s'élève dans la colonne, & fi la majeure partie de cette colonne eft voifine de la neige, elle fera plus froide que fi cette neige n’exiftoit pas, La colonne d’air qui longe le Mont-Blanc doit donc être plus froide que celle qui longe les montagnes baffes; car il ne s’agit que de cetre colonne & non de la colonne parallèle fituée perpendiculairement au - deffus de Genève, comme le prétend 83 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, j M. de Luc. Le raifonnement de M, de Sauflure fubfifte donc dans toute fa force, = M. Piétet n’a point donné de mefure directe du Mont-Blanc, il n’a fait que lier la mefure du Buet à celle du Mont-Blanc, ce qui étoit très-propre à fon but ; il vouloit favoir quelle différence pourroit rélulrer de-là fur la hauteur de certe dernière montagne. Mais ce procédé mulriplioit en même-tems les caufes d'erreurs, & fur-tout celles qui proviennent des réfractions. On ne peut donc aflimiler cette méthode à la méthode directe, & prendre une moyenne entre les réfultats. La différence de ces réfultars eft de dix-neuf toifes, & celle des deux mefures de M. le Chevalier Schucburgh n’eft que de fix toifes angloifes. La mefure adoptée par M. Schucburgh tient le milieu entre les deux mefures , mais il faut obferver que la bafe de l’une de ces mefures eft plus que double: de celle de l’autre, & donne la hauteur du Mont-Blanc plus grande. On ne peut nier que toutes chofes d’ailleurs égales, l’obfervation qui a pour fondement une bafe double ,ne mérite plus de confiance. Je n’ai jamais oublié que M. de Luc avoit tiré de fes obfesvations la règle des logarithmes, je l'ai dit dans mon Mémoire , mais certe règle exiftoit avant lui , elle n’eft qu’une conféquence mathématique de la loi des condenfations de l'air, & je ne pouvois lui attribuer ce que d’autres avoient déjà trouvé. Je n’ai examiné que ce qui lui appartenoit véritable- ment, la correction pour la chaleur , j’ai trouvé fes réfulrats différens de ceux que j'ai déduits d’un très-grand nombre d'obfervations faites en des lieux très-éloignés les uns des autres, & à des cempératures très-différentes, par les plus habiles Phyficiens de l'Europe, MM. le Monnier, Schucburgh, Roy , de Sauflure, Pictet, &c, & j'en ai conclu que la queftion. étoit encore indécife & méritoit de nouvelles expériences. C’eft donc à tort, que M. de Luc fuppofe que j'ai voulu fubftituer une règle à la fienne. Je n'ai donné la moyenne que j'ai obtenue que comme un exemple, & j'en ai averti expreffément. J'ai fait voir qu'avant de chercher le coefficient de la correction pour la chaleur, il falloit s’aflurer du point où cette - correction étoit nulle d’après l'efpèce de mefure adoptée, & que ce poine une fois trouvé, il falloit exclure du nombre des obfervations qui devoient fervir à déterminer le coefficient , toutes celles qui étoient faites trop près de ce point, fans quoi l’on s’expofoir à des erreurs énormes. Avec ces précautions , on pourra procéder à la recherche de la loi du coefficient, qui probablement n’eft pas conftant, par les méthodes connues des Géomètres pour trouver Les loix des phénomènes d'après les obfervations ; car, quoi que puifle en penfer M. de Luc, toute théorie phyfique qui n’eft pas fondée fur l'accord du calcul avec les obfervations, eft toujours pré- caire. J'ai été obligé faute d’obfervations fuffifantes de fuppofer ce. coefficient conftant , & j'ai averti que la différence entre mon réfultat & celui de M, de Luc étoit fort petite, M. de Luc fe plaint dans l'Ouvrage cité, SUR L'HIST. NATURELLE ET LES ARTS. 89 cité, des longs & pénibles calculs qu'il a été obligé de faire pour remonter à l'origine de mes conciulions, Mais comme ces calculs fe réduifene à quelques additions & fouftractions, je ne crois pas avoir abufé de fa patience. Genève, ce 21 Décembre 1787. | SUITE DES OBJETS DE RECHERCHES, PORTRAITS LS DAURN: 7 MA NAUD, SICRUIC TES SUR L'ES:ME NTS, Par M. DucARLA. Sommet du monde. 12. ON a peu de vents alifés dans l’efpace compris entre les 4° pa- rallèles; car, 1°. tout courant diminue de virefle quand fon lit s'étend ; or chaque parallèle eft la largeur du lit des vents alifés, & l'équateur eft le plus grand des parallèles ; 2°, les différences diurnes font comme nulles dans cet intervalle équinoxial, il eft donc le féjour des calmes, on y entre, mais on n’en fort point, & les marins y trouvant de la magie, l'ont nommé le /ommet du monde. à Les vents s'y ralentiflent à mefure que l'anneau y pénètre , puifque anneau eft le terme de leurs concours, & enfuite à mefure qu'il s'en éloigne d'avantage; car, tout le refte étant fuppofé, le volume de l'anneau elt comme le cofinus de fa latitude, puifque ce cofinus eft fon demi-dismètre intérieur. La quantité d’air qui afflue & s'élève dans Fanneau eft donc mpsindre, quand l'anneau eft plus loin de l'équateur, il pafle donc moins de vent par l'équateur. Faux alifes, 13. L'air ayant atteint Le haut de l’atmofphère en montant dans l'anneau , fe verfe en lames, des deux côtés, comme un bouillon per- pétuel , pour couler vers les deux poles ; & redefcendre à la furface de {a planerte. Cet air de la haute région fans ceffe renouvellé, conferve en tout ou en partie la viteffe diurne qu'il a contraétée dans l’anneau , & comme en avançant , il trouve des cofinus toujours moindres , il devance de plus en plus fa bafe, d'occident en orient ; redefcendu fur terre, il Tome XXXII, Part, I, 17988, FEVRIER. M 90 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, femble devoir être prefque le pur ouelt; car depuis qu'il a quité Pau- neau , il n'a eu pour bafe que de l'air, de lair prefque aufli rare que à lui, dont le frottement n’a donc prefque pu rallentir cet excès de yi- tefle diurne. Cependant ce vent ne peut être ni régulier, ni général, ni du: rable ; car, 1°. fon air eft obligé de fe loger dans un efpace beaucoup moindre que l'anneau à caufe des colinus ; ce qui doit produire un conflit, des tourbillons ; 2°, cet air eft forcé de fe replier fur lui-même, pour revenir vers l'anneau ; 3°. ces deux caufes varient avec les faifons qui élargiflent & refferrent alternativement tous les ans chaque bande alifée, Ces vents oueft dans les latitudes moyennes pourront donc être do- minans , fans pouvoir être aflujettis à des regles. Cette prépondérance a été reconnue par Carreri, confirmée plus expreffément par Peiflonel , déduite par le docteur Francklin, avouée par la plupart des naviga- teurs, comme fair, & par les météorologiftes comme conféquence théorétique ; j'en ai fait la bafe d'un mémoire fur les vents refroidis par l’évaporation , imprimé dans ce recueil. | Mouffons. 14 Dans toutes les parties de l’Iffde qui ne font pas trop élevées fur le niveau marin, le maximum thermométrique diurne pafle le 25° degré pendant près de fix mois ; donc le maximum de tous les méridiens de l'Inde, habite pendant près de fix mois fur les terres de l'Inde; elle n’a au fud que .des mers, & l'on a vu que le maximum calorifique des mers ne va jamais à 26 degrés. Toute compenfation faire dans l'examen d’un grand fait qui réfulte de ces compenfations, on peut identifier avec cette côte de l'Inde, un des parallèles voifins du tropique ; le 22° ,par exemple, entre les 60 & 150° méridiens, eft prefque autant fur mer que fur terre, & toujours très-voifin de la côte, à l'exception de trois points dans l’A- rabie & les deux prefqu'îiles du Gange. A) Puifque le maximum calorifique de tous les méridiens de l’Ende, eft pendant près de fix mois fur cette côte réduite ou non réduite au 22€ parallèle ; l’arc indien de l'anneau loge donc pendant près de fix mois fur certe côte qui a 1760 lieues ou 90 degrés en longitude ; c'eft vers cette valte côte que l’air aflis fur tous ces méridiens afflue du feptentrion & du midi, pour s’y échauffer, s’alléger , s’élever pendant près de fix mois.confécutifs. Or l'air qui y vient du füd franchit continuellement des latitudes croiflantes, depuis qu'il a paflé l'équateur, & fuit donc un rumb fud- oueft depuis ce pañlage jufqu'à cette côte; le vent dominant, le vent reglé des mers fituées entre l'équateur & la côte , fera donc fud-oueft, SUR L'HIST. NATURELLE ET LES ARTS. o1 en vertu des différences calorifiques & diurnes, pendant prés de fix mois, Lorfque, vers la fin du femeftre , Les maximum calorifiques diurnes de la côte n’atreignent plus le 26° degré, l'Inde eft moins chaude que le parallèle maritinte , aétuellement décrit par le foleil dans l’hé- mifphère auftral ; c'eft donc fur cette nouvelle latitude que fe trouve en ce moment l'arc indien de l'anneau, Alors l'air boréal, toujours dirigé vers l'anneau, où qu'il puiffe être ; afflue vers le paralle du foleit, à cravers les mers de l'Inde; & comme les latitudes qu’il franchit font décroiflantes , il fuit jufqu'à ce qu'il trouve l'équateur, un rumb nord-eft ; toujours par l'effet combiné des différences calorifiques & diurnes.. Ainfi la mer comprife entre l'équateur & l'Inde, a deux vents réglés, alternatifs oppofés ; l’un fud-oteft pendant le femeftre d'été, l'autre nord-eft pendant le femeltre d'hiver. Conclufions. 15. La néceflité où je fuis de préferter enfemble tous ces faits gé- néraux, pour en montrer la liaifon, & de me reflerrer-pour ne pas prendre trop de place dans ce recueil, m'interdit les détails , les dé- veloppemens & les citations qui doivenc éclaircir les exceptions appa- rentes, & les faits particuliers; elles rempliront un volume. Les na- vigateurs feront donc beaucoup d'obfervations , qui paroîtront choquer ces règles, fans cefler d'en être les conféquences. Joffre donc ici en attendant de faire moins mal sil eft pofible, un plan de recherches & non des folutions; il peut contribuer au progrès de la théorie, fans pouvoir être encore directement employé dans la pratique. On peut juger de la bifarrerie qui règne dans les vents mème alifés par cette remarque perpétuelle de rous les navigateurs que la feule ap- proche d’une petite île, au milieu même des plus grandes mers, change tout-à-coup la force & la direction des vents, & cette remarque leux fert même de connoiflement, ce qui fuppofe que ces anomalies font elles-mêmes aflujetties à des regles, ainfi que le champ tout enties de la nature. Ces variétés font autres la nuit que le jour , autres dans chaque faifon , dans chaque latitude , pour chaque hémifphère & pour chaque afpect, & conduifent cependant à des r°5les , puifque cette différence elle-même en eft une, paroît attachée aux terres, & peus par fes difficultés même conduire à de grandes lumières. Les courants fonc encore une grande caufe de ces irrégularités ap- parentes , ils portent fur tous les points de leur paflage, les rempéra- tures réfultantes de toutes celles qu’ils ont éprouvées, elles boulever- fent l'air de mille manieres , parce que ces Œôurants ne gardent pas deux jours de fuite, ni leur intenfité, ni leur diredtion, ni leur tem- Tome X XXII, Parc. I, 1788. FEVRIER, M 2 92 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, pérature, ni leur volume; tout cela modifie les faits généraux fans en détruire les loix ; & ce font ces loix qu'il faut bien débrouiller avant d’eflayer la folution des faits particuliers ; c’eft le feul but que je me füuis propofé dans ce canevas. LUE TR DRS E Ecrite par M. CarMoy , Doéleur en Médecine à Paray- le-Monial en Bourgogne , Correfpondant de l’Académie de Dijon , AM. LE MYA R QUUMS M IDIEMEVINCr HN. Paray-le-Monial , le 20 Oëobre 1787. Prrurrrez ; Monfieur le Marquis, que je trouble votre retraite. La dernière fois que je vous quittai, je vous trouvai pénétré d’admi- ration de l'effrayant , mais du fuperbe fpeétacle que l'orage qui a dé- folé nos campagnes , & ravagé nos vignes ; vous avoit donné. Je vous envoie deux obfervations que j'ai faites avec le plus grand foin, & qui ne vous intérefleront pas moins. On a penfé dans tous les tems que la foudre éroit lancée des nuées fur la terre, & ce n’eft que depuis peu qu’on a obfervé que le ton- nerre en fortoit quelquefois pour fe porter aux nues. Il n'y a rien en cela que de très-conforme aux principes électriques. MM. l'Abbé Chappe, Cafiny , Prunelay & plufieurs autres, ont communiqué des obferva- tions décilives; & les deux que je vais vous rapporter en augmenteront le nombre. , J'étois l'été dernier à Tancon, village du Beaujolois, où , quelques jours auparavant, un homme qui.s’étoit mis fous un arbre, avoit été tué par le tonnerre; fes vêremens avoient été déchirés en lambeaux, ainfi que ceux de fon camarade qui s’étoir également refugié fous le même arbre, mais qui n'eut d'autre mal qu'une alphixie momentanée. Leurs cheveux furent enlevés & portés fur le haut de l'arbre. Un cercle de fer qui lioit le fabot de lun d’eux, fut porté aufli fur une branche élevée du même arbre, à laquelle il refta accroché. J'obfervai dans la terre, fous un arbre placé à trois ou quatre pieds de celui fous lequel avoit été foudroyé le malheureux , & afphixié VPautre, un trou rond Mévafé par le haut, & fe recreufant en forme d’entonnoir, À quelques pieds au-deflus la premiere écorce du tronc … SUR L'HIST. NATURELLE ET LES ARTS. 93 de l'arbre éroit enlevée; la feconde étoit foulevsée de bas en haut non en larges bandes , mais en petites lanieres en forme de découpures, A’côté étoir l'arbre fous lequel s’éroient abrités les deux hommes, Leurs véremens déchirés en petires pièces , écoient parfemés aurour des arbres, Un mouchoir de foie que l’un d'eux avoit au cou, fut feul excepté, La partie inférieure de l'arbre n’avoit aucun mal; mais à dix pieds de hauteur , l’écorce avoit été emportée, ainfi que des éclats confidérables du corps même de arbre. On voyoit un grand nombre de longues efquilles, féparées de bas en haut , qui renoient à l’arbre par leurs parties fupérieures. Les feuilles étoient defléchées d’un côté, & de l'autre elles avoient confervé leur verdure, La marche de la foudre eft aifée à fuivre; elle eft fortie de terre au pied du premier arbre par l’entonnoir dont j'ai parlé; de-là elle s’eft élevée & en a détaché ’écorte ; enfuite , parvenue à la hauteur de deux ou trois pieds, elle l'a quittée, s'elt élancée fur les deux hommes qui éroient fous l'arbre voifin, atué l'un, afphixié l’autre, déchiré en lam- “beaux leurs vêtemens, tranfporté les cheveux & le cercle de fer au haut de larbre , la dépouillé de fon écorce, détaché des éclats conf - dérables. dans fon afcenfion , a foulévé-des lanieres qui ne peuvent, felon l'état des choïes, avoir été prifes que de bas en haut. Enfin elle a frappé les feuilles qui fe font entièrement defléchées, ainfi que cela arrive aux plantes qui reçoivent une trop forte commotion , & enfuite s'eft portée à la nuée dont le dépouillement avoit attiré le coup fulmi- nant. J'oubliois de vous dire que, quelques momens avant, le coup de tonnerre qui fut bref & fourd, il étoit parti un coup exceflivemenc éclatant, Seroit-ce là un figne caraéériftique de l’afcenfion de la foudre 2 Le premier coup auroit-il défélectrifé la nuée, & le fecond lui auroit- il rendu ce que le premier lui auroit enlevé ? L'habitude de voir la foudre fortir des nuées, l’ignorance profonde où l’on étroit des principes & de la théorie de l'électricité, ainfi que de fon identité avec le tonnerre , les fyftèmes fur la formarion de ce terrible météore devoient naturellement éloigner l’idée de fon afcenfion; mais depuis que la marche de la matière éleétrique eft connue, ce hénomène n’a plus rien qui étonne. Depuis long-tems on avoit des obfervations qui auroient dû conduire à cette vérité. Dans les éruptions du Véfuve & de l'Etna on voit des fillons éle@riques fortir de la bouche de ces volcans, filloner la colonne de fumée qui s'élève des craters, s'élancer & produire fur les corps voifins, les effets ordinaires de la foudre. M. le Chevalier Hamilton en rend témoignage dans la belle defcription qu'il a faite de l’éruption de ces volcans en 1767, 79 & 3 04 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE; Voilà une feconde obfervation, M, le Marquis, qui vous intéreffe perfonnellement,, ainfi que tous ceux qui s’occupent d’électricité ; elle vous apprendra à ne point faire d'expérience dans les momens d'orage, fut-tout quand il tonne. Le 11 oûtobre 1787 fut extrêmement orageux. Mon appareil élec- trique venoit d’être chargé de quelques tours de roue, & j'avois tiré du conducteur principal une érincelle qui dut emporter une grande partie de la charge. Nous étions plufieurs. Quelques inftans après nous apperçcumes fur les grands conducteurs qui ont 2$ pieds quarrés de furface, une lumière électrique accompagnée d’une aflez forte explo- fion, &, au inême inftant , un. grand coup de tonnerre. Vous favez que mon appareil ef bien ifolé ; aucun corps n'eft à portée d'en tirer une étincelle ; le feul qui en eût été capable étoic la boule de léleétromètre qui étoit à un pouce du conduéteur principal , & placée à $ ou 6 pieds au-deffous des grands conducteurs. C'eft de ceux-ci qu’elt partie l'explofion fpontanée. L'érincelle ne s'eft point portée à la terre, réfervoir commun, puifque le feul corps qui pouvoic l'y tranfmettre ne l’a pas tirée. Elle seft donc élancée dans l'air. Il a fallu qu’elle ait été bien puiflamment attirée par un corps éle&rifé en moins, relativement à mon conducteur. Le coup de tonnerre qui eft parti at même inftant a une relation trop directe avec le phénomène dont il s'agit, pour ne pas laiffer croire que la nuée qui étoit au-deflus de mon appareil, étoit ce corps né- gatif qui a excité l'explofion qui nous éconna, ainfi que le coup fulmi- nant qui partit au même inftant. Si l'appareil eût été chargé complettement, fi quelqu'un fe füt trouvé à portée, il auroit pu arriver ce qui arriva au malheureux Ricman ; létincelle attirée du conduéteur auroit pu déterminer la matière fulminante fortant de terre, à prendre fa route à travers la perfonne qui auroit établi la communication. IL faut fans doute des circonftances combinées pour que ce malheur aït lieu, mais la poffbilité exifte ; ainfi, dorénavant interrompez toute expérience électrique dans un tems d'orage, c’eft le confeil de quelqu'un qui vous a voué Patrachement le plus véritable, & qui a Phonneur d'être, &c. as SUR L'HIST. NATURELLE ET LES ARTS. 9$ tn DE DESCRIPTION ABRÉGÉE D'un INSTRUMENT PROPRE A MESURER LES DISTANCES (1). Az eftun tube dont la partie À C, PJ. Ta environ 28 lignes de diamètre fur ÿ pouces de longueur, & la partie CB, 14 lignes de diamètre & environ 11 pouces de longueur. À l'extrémité de cette dernière s'ajufte à vis la monturelB X d’un objectif dont le foyertombe entre lesouvertures DE, Ze pratiquées à la partie A C du tube, exactement vis-à-vis l’une de l’autre, de manière qu’un plan qui pafleroit par routes les deux feroit perpendi- culaire à l’axe du tube. QY (fig. 2) eft une efpèce de micromètte deftiné à mefurer , non de petits angles, mais de petites longueurs. Sa platine Q Z entre à frottemens dans les ouvertures DE, de (fig. 1) & fe trouve, ainfi que les fils, au foyer de l’obje&if. ZY eft un cadran divifé en 180 parties & traverfé par la vis qui mène la règle mobile PR. Dans celui qu'on m'a exécuté, 18 tours de vis font parcourir $ lignes à la règle mobile PR & au fil qu’elle orte. Un tour répond donc à + de ligne, & une divifion du cadran à = de ligne. On peut ainfi mefurer en lignes & fractions de ligne l’image d'un objet formée par Pobjedtif, Les tours de vis fe comptent fur un des bords de la platine QZ vers l'extrémité Q , & font indiqués par le perit côté de la règle PR. Quant aux fractions on les compte fur le cadran. On pourroit,au moyen d’une cadrature, faire marquer fur ce dernier Jes tours de vis par une aiguille & les fractions par une autre; mais ma conftruäion paroît avoir plus de fimplicité & autant d’exadtitude, En A (fig: 1 ) eft un bout de tube à rebord, qui entre à frotrement dans la partie À C. Son fond porte une couliffe dans laquelle gliffe une pièce quarrée à laquelle eft fixée la monture d’un oculaire S, Cet oculaire peut ainfi s’approcher ou s'éloigner de l’image & des fils, felon que l'exige l’étendue de fon foyer; & il eit toujours facile de lui donner, fi on le juge convenable , une pofition telle que fon centre & un des bords de l'image foient dans une droite paralièle à l'axe du tube, afin de mieux déterminer le contact de cette image & des fils. Un exemple va mainte= . nant expliquer le principal ufage de cet inftrument. Suppofons que j'aie vis-à-vis de moi un clocher furmonté d'un de ces globes de métal qu'on y voit quelquefois, & dont je veuille avoir la diftance, Dirigeant Pinftru- (x) Cette deftription eff tirée d’un Mémoire qui doit entrer dans le recueil de la Société de Phyfique de Laufanne, 96 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, ment contre le globe, je mefure le diamètre horifontal de fon image; ainfi que la diftance focale, & j'ai évidemment cetre analogie : le diamètre de l’image eft à la diflance focale , comme le diamètre du globe eft à fa diftance à l'inftrumenr, L'un de ces deux derniers termes étant connu me donne l'autre, Mais fi je navois aucun moyen de les connoître , j'y fuppléerois de la manière fuivante: je choifirois deux ftations en ligne. droite avec le globe, ou qui fuffent du moins dans le même plan vertical. Prenant enfuite le diamètre de l’image depuis ces deux flations, la feule différence entre la plus grande image prife à la ftation la plus près du clocher & la plus petite mefurée à l’autre , me donneroit la diftance du olobe à l’ene & à l’autre des flations, par un calcul bien fimple, mais done détail ne conviendroit pas ici. Il eft aifé de voir que pour mefüurer une ligne quelconque dont les deux extrémités font accellibles, il fufit de placer l’inftrument à l’une d'elles , & de faire porter à l’aurre ou une règle garnie de deux mires qu’on placera borifontalement & perpendiculairement à la ligne à mefurer ; ou, fi la dittance eft plus confidérable, deux mires ifolées & portées chacune fur un pied, Quant aux diftances inacceflibles , toute la diffculré fe réduira à bien choifir fon objet ou fes objets , ce qui fera poffible dans la plupart des cas. Pour rendre l’ufage de cette machine plus général & plus commode & joindre, lorfqu'on le voudra, aux opérations qui lui font propres, celles de la Trigonométrie, je lui ajoute les pièces fuivantes : D'abord je fais entrer à frottement la partie A C du tube dans un cercle FG (f£g. z ) qu'on voit prefqu'en face en FG (fig. 3) & où le tube peut tourner avec jufteffe & liberté, Ce cercle eft porté par deux montans dont le pied eft fixé bien folidement & perpendiculairement fur une platine circulaire HA. Cerre platine eft pofée concentriquement fur une autre IK, fur laquelle elle tourne & qui la déborde d'environ un pouce. La marge ou faillie eft divifé en degrés, & un nonius gravé fur le bord de la platine HA fert à les fubdivifer. Le tour eft monté fur un trépied conftruit de manière à pouvoir mettre Les platines exactement de niveau. La f. 4 repréfente un fecteur dont les degrés fe comptent depuis le point O plaçé au milieu du limbe, de part & d'autre de ce point. Il eft fixé par fon centre au pivot du cercle F G qui traverfe un des montans ON, par un écrou à oreille, & cela de manière que lorfque les platines fonc bien de niveau, un à-plomb fufpendu au centre a s'arrête fur le point O, & qu’alors l'axe du tube A B eft exactement dans le plan de l'horifon. Or, tout cela peut s’obtenir par la méthode qui fert à vérifier les niveaux. Les degrés du feéteur font fubdivifés par un double vernier placé au bas du montant ON , de manière que fon O répond se du £cieur sn SUR: L'HIST. NATURELLE ET LES ARTS. 97 fetteur lorfque l'i-plomb tombe fur ce dernier. Un: de les moitiés fert pour-la partie 0 du fecteur, & l’autre pour la parrie oc. - Au moyen de cet inftrument l’on peut donc réfoudre Les problèmes füuivans : 1°. Mefurer une diftance acceflible quelconque. 2°. Mefurer une diflance inacceflible avec le micromètre feul dans la plupart des cas , ou trigonométriquement dans d’autres. | 3°. Faire un nivellement quelconque, 4°, Déterminer tout-à-la-fois les angles horifontaux que forment entr'eux divers objets, vus depuis une ftation donnée, leurs angles de hauteur avec leur différence de niveau, moyennant les corrections requifes, & enfin leur. diftance à ma flation. 5°. Déterminer l’angle que fait la face d’un édifice avec la ligne vifuelle, au moyen d’un cadran d'horloge peint fur cette face. Si le cadran eft vu obliquement,, il paroît une ellipfe, & c'eft la différénce entre les deux axés ou deux diamèrres de cette ellipfe mefurés au micro- mètre , qui donne l'angle cherché, & qui dérermine même la pofition de la perpendiculaire au centre du cadran, Je fupprime beaucoup d'autres ufages, ainfi que plufeurs détails de conftruétion , parce que ceux que contient cet écrit, font bien fufifans pour mettre {ur la voie un ouvrier doué de quelqu'intelligence, & qu'un autre entreprendroit inutilement l'exécution de cette machine. Mais je dois ajouter que la première idée m'en vint en 1784 à l'occafon d'un balon parfaitement fphérique qu’on devoit lancer dans le lieu de ma demeure, & dont j'étois curieux de connoître, à des inftans déterminés , Télévation & l'éloignement du point de départ. Dans ce premier effai , Timage étoit reçue fur une glace dépolie d'environ $ pouces & demi de diamètre, & elle étoit auñi mefurée par un micromètre qui différoit peu de celui que j'ai adopté depuis lors. Mais comme la glace caufoit des erreurs , fur- tout lorfque l'image étoit un peu étendue, erreurs qui venoient de la réfraétion des rayons obliques, & que je dérerminai aifément par le calcul, je fupprimai la glace & m’arrêtai à l'inftrument que je viens de décrire, Tome XXXII, Pare. I, 1788, FEVRIER; N 98 OBSERVATIONS SURLA PHYSIQUE, gendre SUITE DE LA DÉFENSE MDE LHYGROMETURE. A CHENE: Par M DE SAUSSURE. CHAPITRE XI. Réponfe aux criiques de M. Chiminello. M. CHIMINELLO, aftronome attaché à lobfervatoire de Padoue, remporta en 1783 le prix propofé par l’Académie des Sciences de Manheim, pour la conitruction d'un hygromètre comparable, La matière de fon hygromètre eft le tuyau d’une plume d’oye rempli de mercure. Il-détermine fa graduation par deux termes fixes. Celui de Phumidité extrême, il l’obtient par l'immerfion dans l'eau. Pour celui.de la fécherefle, il choifie un moment où, fur Le rapport d'un. autre hygromètre à plume d'une graduation quelconque, l'air paroifle d’une fécherefle moyenne. Alors il prend l’hygromèrre qu'il veut graduer, il l’expofe. au #oleil ou devant un feu modéré, jufqu’à cequ'un ther- momètre de Réaumur placé auprès de l'inftrument s'élève précifément au 25° degré, & il tâche de le maintenir dans ce même degré de chaleur pendant quatre heures confécutives. L'hygromètre fe trouve avoir contracté ‘alors un certain degré de fécherefle, qui n'eft pas la fecherefle extrême; mais que M. Chiminello croit être aflez fixe pour fervir de bafe À la divifion de fon inftrument. On pourroit faire des objections d'une grande force contre cet inf- trument & contre {a graduation ; mais, je l'ai dit, cet écrit n’eft point deftiné à l’arraque ; mon but unique eft de me défendre. M. Cbiminello décrit avec beaucoup de foin & de détail tout ce qui concerne la confruétion ‘& l'ufage de fon hygromètre. Enfuite, dans un pofl-feriptum , il fait fes obfervations fur le mien, dont la’ defcription n'a paru qu'après que fon mémoire a été couronné par l'Académie de Manheim. Comme fes objections font numérotées , je fuivrai dans mes réponfes l’ordre de fes numéros. Première Objeëtion. « M. de Sauffure nous a donné un hygromètre » dont la conftraction eft très-compliquée & difpendieufe, randis que »* l’on pouvoit la réduire à une forme beaucoup plus fimple, comme SUR L'HIST. NATURELLE ET LES ARTS. 99 » à-celle d'une balance ; ce qui diminueroit beaucoup Le p:ix de fou » hygromètre » (1). Réponfe, Je fuppofe que M. Chiminello entend par la forme d'une balance, celle dans laquelle Le cheveu C B( PL. IT, fig. r) eft fixé à un poirt immobile par une de fes extrémités €, & à laiguille B AR par fon autre extrémité B , tandis qu'un poids P fufpendu au même côté de Ja même aiguille tient le cheveu tendu. Cetre aiguille étanc mobile autour du centre À, le point B monte ou defcend fuivant que le cheveu fe raccourcit ou s’alonge, & l'extrémité R de l'aiguille fe meut en fens contraire, & marque fes variations fur l’arc de cercle 7 RN. Cette forme eft en effet très-fimple; je l'adoptai d'abord dans les premiers hygromètres que je conftruilis moi-même pour effayer fi le cheveu pourroit être employé à cer ufape. Mais lorfque j'ai voulu donner à cet inftrument toute la perfeétion dont je l'ai jugé fufceprible, j'ai vu qu'il falloic renoncer à cette conftruction , parce qu’elle a des inconvéniens qu'un peu de réflexion rend palpables à tout homme qui connoît les premiers principes de la méchanique. ‘Eu effer, lorfque l'aiguille eft dans une fituation horizontale comme BR, le cheveu eft tendu par tout l'eflort du poids P (2). Mais Lorfue cette aiguille prend une fituation inclinée telle que br, l'axe de Pafguille À porte une partie de ce poids. Cette partie eft propor- tionnelle au finus de l'angle 7 À R ; tellement que fi l’aiouille s'élève ou s’abaifle de 30 degrés, l’eflieu portera la moitié de P & par con- féquent le cheveu ne fera plus chargé que de la moitié de ce poids; & fi l'aiguille venoic à 90 degrés, le cheveu ne porteroit plus rien du tout; la totalité du poids repoferoit fur l’effieu, Cette extrême inégalité dans la tenfion du cheveu me parut un vice trop grand pour être racheté par la fimplicité de certe conftruction. Et celle que j'imaginai pour rendre cette tenfion toujours égale n’étoit pas fort compliquée, Je donnai à l'extrémité de l'aiguille la forme d’une poulie à double gorge, je fis pafler le cheveu dans l’une de ces gorges, & la foie à laquelle tient le contre-poids dans l'autre. Suivant cette difpofition, quelle que foit la pofition de l'aiguille, le cheveu et tou- jours chargé de la totalité du contre-poids, & fa tenfion eft par con- féquent toujours la même, Un autre inconvénient qui réfulte de la conftruétion de l'aiguille (1) Comme je n’ai pasle Mémoire original de M. Chiminello , je traduis ceci de Yltalien des Opufcoli Scelri de Milan , Tome IX, pag. 1 &2. (2) Je fais abftraétion du poids de l’aiguille même, parce qu’elle doit être conftruite & lefée de manière que dans quelque poftion qu'elle fe trouve elle foit roujours en équilibre autour du centre A. Tome XXXII, Part, 1, 1788, FEVRIER, N 2 100 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, en forme de balance , c’eft que fes mouvemens ne font pas propor= tionnels à l’alongement & à l’accourciflement du cheveu, En effet, lorfque l'aiguille pale de la pofition B R dans la poñtionr ; le cheveu s’alonge de la quantité 74 & l'aiguille indique un alongement exprimé par l'arc B 7. Or la ligne 7 2 ou le prolongement réel du cheveu eft le finus de l'angle Z 48 ou de fon égal r AR ou de Parc Rr(x1). Donc lorfque l'aiguille a la forme fimple d’une balance , les arcs décrits par la pointe R de cette aiguille ne font pas proportionnels aux alon- gemens ou aux accourciflemens réels du cheveu, A la vérité lorfque l'aiguille ne décrit pas de grands arcs, l'erreur qui réfulte de là n’eft pas bien confidérable ; mais enfin il en réfulte une erreur. Lorfqu’au contraire le cheveu fe roule autour d'une circonférence concentrique à l’arc décrit par l'extrémité de l'aiguille qui marque les deorés , les mouvemens de cette extrémité font exactement proportion- nels aux prolongemens & aux accourciflemens du cheveu. On voit donc que j'ai eu des raifons bien légitimes pour préférer la conftruétion que j'ai adoptée. La deuxième objection de M. Chiminello porte fur les incertitudes qui peuvent réfulter de la préparation du cheveu. Mais cette prépa- ration eft fi facile, toutes fes circonftances font déterminées avec Énc de précifion , que bien loin d’en faire un fujet de reproche, on doit au contraire coufidérer fa fimplicité comme un des principaux avantages du cheveu. En effet, eft-il poflible d'imaginer quelque chofe de plus fimple, & qui foic plus fufceptible de précifon , que de faire bouillir des cheveux pendant un nombre déterminé de minutes dans une quan- tité déterminée d’eau à laquelle on ajoute une quantité déterminée d'un fel connu & invariable, Cette préparation ne fait que dégraiffer la furface du cheveu en lui jaïflant la forme & l’efpèce d’écorce dont la Nature l’a pourvu; tandis que la plume de M. Chiminello & la baleine de M. de Luc doivent étre coupées, raclées , limégs d’une manière qu'il eft impoflible de déterminer exactement: La troifieme critique de M. Chiminello roule fur le procédé que j'emploie pour obtenir le terme de l'humidité extrême, 11 m'objecte: d’abord qu'il n’eft pas certain que fous la cloche humedtée j'aye tou- jours à différens degrés de chaleur le même degré d'humidité. J'ai déjà répondu à cette objection dans le chap. premier. Enfuite pour prouver que lhumidité qui règne fous cette cloche n'eft pas la plus grande poflible , M. Chiminello ajoute , que fans-doure un cheveu qui feroit plongé pendant 24 heures dans l'eau feroit plus bumeëté qu'il ne l'auroit été dans les vapeurs de la cloche, & que (x) Je fupofe l'extrémité fixe du cheveu € affez éloignée de l’aiguille, pour que les lignes CB , cb demeurent fenfiblement parallèles. SUR L'HIST. NATURELLE ET LES ARTS, OI pourtant il a vu fes hygromètres marquer à l'air libre une humidité de plufieurs degrés plus grande que celle qu’ils avoient contraétée en fé- journant dans l’eau pendant 24 heures. À Ce raifonnement eft fort extraordinaire. M. Chiminello préfume que l'application de l’eau dilateroit plus ur hygromètre que celle d’un air humide, dans le moment même où il nous apprend que fon hygro- mètre eft plus dilaté par l'air humide que par l’eau. Pour moi je tire au contraire de ce fait un nouvel argument en faveur de mon procédé, Car il fournit une nouvelle preuve de cette vérité connue , que lapplication immédiate de l’eau produit fur certains corps des effets fort différens de ceux de la vapeur proprement dite, On a vu que la baleine fe dilate d'environ 20 degrés de plus dans l'eau que dans l'air faturé de vapeurs ; & on voit ici qu’au contraire la plume fe dilare de plufieurs degrés de plus dans l'air humide que dans l’eau. Puis donc, que c’eft l’effec de l'humilité de l'air que l’on veut mefurer, & non pas celui de l'application de l'eau, & que ce dernier effec eft tout différent du premier, c'eft dans celui-ci, c'eft dans Pair humide & non pas dans l'eau, qu’il faut plonger les hygromètres pour favoir comment ils feront affectés par la plus grande humidité de Pair: La quatrième objection porte fur le terme de fécherefle. M. Chimi- nello dit que mon procédé neft pas bien commode, & j'avoue qu'il a raïfon. Mais il doute que ce procédé donne conftamment le même terme; & en cela il a tort, comme le prouve l’expé- rjence. | Dans {a cinquième M, Chiminello inffte fur lincommodité de ce même procédé , qui exige qu'on laifle l'hygromètre dans l'appareil pendant 2 ou 3 jours. Que dira-t-il donc quand il verra M. de Luc émployer la chaux, qui au lieu de 2 ou 3 jours, exige 2 ou 3 fe- mäines ? S Mais c'eft qu'il faut avouer qu'un terme de féchereffe tout-à-la-fois commode & fixe eft une chofe bien difficile à trouver. Celui de M. Chi- minello ne paroît pas très-embarraflant , quoiqu'il ne foit fürement pas bien facile de tenir pendant 4 heures , exactement au même degré de chaleur, un inftrument qui n’eft point renfermé, Mais à qui M. Chiminello perfuadera-t-il que fon procédé donne un terme fixe ? N’eft-il pas évident qu'en été, lorfque l'air libre aura un degré de chaleur qui approchera du 25° de Réaumur, fon hygro- ‘ mètre, qu'il tiendra pendant 4 heures dans un air réchauffé à 25 degrés, ne contractera qu’une fécherefle très-approchante de la féchereffe moyenne qui doit fervir de bafe à fa graduation ? Et en hiver, au contraire, le thermomètre ne füt-il qu'a © dans le moment où les hygromètres indiqueront une fécherefle moyenne , fi vous augmentez de 25 degrés 102 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, ja chaleur de Pair, ne lui donnerez-vous pas un degré de fécherefle prodigieufement fupérieur à certe même moyenne ? Sixième. Le poids que porte le cheveu, dit M. Chiminello , lui aide à s’alonger lorfqu'il s’humeéte , & l'empêche de fe raccourcir quand il { defléche, & par conféquent le mouvement de l'hygromètre de j humidité à la fécherefle , n'eft pas le mème que de la fécherefle à l'humidité, Le critique n’a pas pris garde , que fi cette objection avoit quelque force , elle profcriroit fans retour fon propre hygromètre. En effer, dans cet hysromètre, le poids du mercure qui eft renfermé dans la plume & dans le tube de verre , favorife auffi la dilatation de la plume par l'humidité , & s’oppole à fa contraction par la fécherefle, Cette colonne de mercure exerce même contre la furface intérieure de la plume un effort qui eft plufieurs milliers de fois plus grand que celui que mon contrepoids de trois grains exerce fur le cheveu de mon hyzrormètre. Et il y a encore cette différence au préjudice de l'hygromètre à plume , c’eft que dans celui-ci certe preflion varie comme la hauteur du mercure dans le tube, & produit par conféquent des” effets différens, non-feulement à différens degrés d’huridité ; mais encore fuivant le degré de la chaleur qui prolonge plus ou moins certe colonne. Or , c’eft cette inégalité qui nuit à lexactitude ; car fi le poids eft conftamment le même, comme il left dans mon hygro- mètre, la tenfion du cheveu eft aufli conftamment la même, & ainfi l'hygromètre revient toujours au même point par les mêmes degrés d'humidité & de fécherefle. ! La feptième critique porte fur un cas particulier, dont j'ai parlé dans mes Eflais, $. 68. Je dis que deux de mes hygromètres , d’ailleurs bien d'accord entreux, ne reviennent pas précifément au même degré lorf- qu'on les porte dans un air d'une fécherefle moyenne , après qu'ils one féjourné long-tems dans des airs très-fecs & inégalement fecs. Mais j'indique au même endroit le moyen de prévenir cette irré- gularité ; c’eft de commencer par tenir les hygromètres pendant quelques inftans dans un air humide. Er fi l’on trouve cette fujétion incommode, il faudra pour avoir le droit de s’en plaindre préfenter quelqu’autre hy- gromètre, qui placé dans les mêmes circonftances , ne foit point fujee à ce défaut. Or, je crois cela difficile, & M. Chiminello ne nous die pas feulement qu'il ait foumis fon hygromètre à cette épreuve. Le huitième reproche fait à mon hygromètre eft d’être dérangé par la poufière & par les fils d'araionée. J'avoue que cet inftrument exige des foins & de la propreté. Mais avec un peu d’adrefle on peut toujours réparer ces petits accidens, & remettre lhygromètre en bon état en lavant le cheveu avec un pinceau humedté, IX, L’hygromètre à cheveu n’a pas des variations auf étendues que | SUR L'HIST. NATURELLE ET LES ARTS. 103 celui à plume. Celui-ci, à ce que dir M. Chiminello , parcourt ure échelle de 400 degrés, & par conféquent quadruple de celle du mien. Sans doute, cette érendue eft un avantage précieux; mais il ne faut pas l'acheter aux dépens de l'exactitude ; & cent degrés aflez grands pour qu'un œil exercé les fubdivife aifément en dixièmes , fufifenc bien à nos befoins. La dixième critique eft fort extraordinaire : M. Chiminello me blime de donner des rèoles pour déterminer la quantité abfolue de vapeurs que renferme l'air atmofphérique ; il prétend qu'on ne doit s'occuper qu'à mefurer l'humidité ou la fécherefle qui affe&tent les corps & l'air qui nous environnent, D'autres phyfciens , au contraire, ont fort applaudi à cette recherche, En effet, la connoiflance de la quantité réelle d'eau que renferme un volume donné"d’air, doit être le but & le réfulrat fnal de toute l’hy- grométrie. Mais en fuppofanc que j’aye eu tort de donner des for- mules pour dérerminer cette quantité, c'eft un tort qu’il faut m'imputer à moi feul, l’hygromètre à cheveu en eft parfaitement innocent, & il eft injufte de compter ce tort au nombre de fes défauts. En effer, je n'ai point cherché à entraver par ces règles les indications que donne mon hygromètre : on peut obferver immédiatement les degrés qu'il indique fans s’embarrafler de mes formules, & laifler aux amateurs de l’hygrométrie le foin d'en déduire la quantité abfolue de l’eau con- tenue dans l’air, Le onzième & dernier reproche que M. Chiminello fait à mon hygromètre , c’eft que la nature du cheveu eft variable. Mais il ne fonde ce reproche fur aucune taifon , fur aucune expérience; c’eft une affertion vague & arbitraire. Je ferois tout aufi fondé à dire que da plume eft variable, & que le cheveu ne l’eft pas. D'ailleurs je n'ai jamais foutenu que les cheveux fuffent tous parfaitement femblables : fi j'avois cru qu'ils euffenr cette belle propriété, je ne me ferois pas dotfné la peine de chercher des termes fixes d'humidité & de féche- reffe, il auroit fui de prendre pour divifions des parties aliquotes de leur longueur. Et puifque M. Chiminello a auffi recours à ces termes fixes, il faut bien qu'il croye que toutes les plumes ne font pas par- faitement femblables entr’elles. Mais je dirai de plus, que M. Paul s’eft fouvent plu à me faire obferver combien les hygromètres , dont les dimenfions étoient les mêmes, s’écartoient peu les uns des autres dans leurs variations , même avant que leurs divifions euffent été fixées par les rermes fixes d'hu- midité & de féchereffe, Et c’eft pour cela que quand il nous arrive de caffer le cheveu d’un de nos hygromètres, M, Paul parvient toujours aifément à en fubf- 194 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, ticuer un autre qui fait fes variations exactement entre les mêmes termes, Je ne puis donc pas foufcrire à la conclufion que M. Chiminello tire de fes onze critiques, & j'ofe croire que l'hygromètre à cheveu peut encore fe.foutenir contre l’hygromètre à plume. Mais je ne rer- minerai pas cette réponfe fans témoigner à M. Chiminello ma fincère reconnoillance des éloges qu’il veuc bien faire des autres parties de mon ouvrage fur l'hygrométrie. CHar, XII Ofjedion du P+: Jean-Baptifte. Le troifième adverfaire de l’hygromètre à cheveu eft le Pere Jean- Baptifte, Capucin du couvent de Saint-Martin à Vicençe, , : Dans l'hygromètre qu'il a inventé & qu'il oppofe au mien , c'est un ruban de baudruche qui fert à mefurer l'humiditégde l'air, & qui fait les fonctions que fait le cheveu dans le mien : fa conftruction eft d'ailleurs à-peu-près la même, Pour le terme fixe d'humidité , le Pere Jean -Baptifte fe fert d’un procédé aflez femblable au mien; il introduit des vapeurs aqueufes dans un vafe où eft renfermé fon hygromètre, & il affüre que la chaleur plus ou moins grande de ces vapeurs n’influe point fur le terme auquel il fe fixe. Quant au terme de féchereffe, il prend une petite étuve ; il la ré- chauffe jufqu'au 50° degré du thermomètre de Réaumur en la tenant ouverte ; la maintient à ce degré pendant quelque temps; après quoi il la ferme & y place fon hygromètre. Le degré de fécherefle qu'il obtient par ce procédé eft, à ce qu'il dit, abfolument invariable. Tout en faifant l'éloge de ce procédé, le Pere Capucin critique lé mien & le taxe d'incertitude, à raifon de la plus ou moins grande caufticité des fels que j'emploie, de leur plus ou moins grande quan- tité, & du plus ou moins d'humidité qne peut avoir l'air dans lequel je les renferme, Mais le Pere Jean-Baptifte ne prend pas garde que ce dernier inconvénient eft d'une bien plus grande conféquence dans fon propre procédé. Car la chaleur qu'il communiqué à cet air ne détruit pas l’humidité ; elle ne fait que rendre fon action moins fenfible , au lieu que les fels, fion en métQune quantité fuifante , abforbent cette humidité, quelqu'abondante qu’elle puiffe être. Ec il oublie de plus que j'ai trouvé un critére, un figne certain auquel on peut reconnoître fi le cheveu a bien contraété toute la fécherefle dont il eft fufceptible. Effais fur l'Hygrométrie, $. 21. Mais je viens aux quatre objections que le Pere Jean-Baptifte prô- pofe en forme contre l'hygromètre à cheveu. 1% ditil, « le cheveu nous paroït un corps trop mince ( sroppo » efile } SUR L'HIST. NATURELLE ET LES ARTS, 10ÿ » efile ) (x) pour füivre dans tous leurs degrés les variations de l’hu- » midité & de la féchereffle, & pour étre employé avec tant de » réferve. » Réponfe. I eft difficile de comprendre comment la fineffe d’un corps peut l’empêcher de fuivre les variations de l'humidité & de la fécherefle de Pair; il femble au contraire que cette même finefle doit le rendre propre à fuivre ces variations avec la plus grande prompti- rude, Il eft vrai, cependant, que fi le cheveu étoit un corps fufcep- tible d'être diflous par l’eau ou par l'air, fa ténuité Pexpoferoit à une deftruction plus prompte ; mais on fait que c'eft au contraire le corps organique connu qui réfifte le mieux à routes les injures de Pair, Il eft vrai auili que l'on ne peut pas manier un cheveu auf rudement que : l'on manieroit un cable. Mais quels font les inftrumens délicats qui © n’exigent pas des atrentions on des foins de la part de ceux qui s'en fervent ? Je puis affurer que dans une longue fuite d'obfervatins , on ne déranse pas plus d’hygromètres À cheveu que l’on ne cafle de ther- mètres. Or, la fragilité de ceux-ci n’a jamais fait une objection contre leur ufage. : La feconde critique porte fur la conftruction. Le Pere Jean-Baptifte dit que mon hygromètre eft exceflivement compliqué & difficile à exé- cuter , au lieu que le fien eft réduit à la plus extrême fimplicité. Il ne me paroït pas qu'aucun Phyficien, fi l’on en excepte M. Chi- minello & le Pere Jean-Baptifte, ait jugé que mon hygromètre por- tatif fût trop compliqué ; mais il eft vrai que le Pere Capucin l’a en- core fimplifié, non par une conftruction eflentiellement différente , mais en fupprimant des pieces qui contribuent à la perfection de l'inf- trument , & à la commodité de fon emploi, C’eft ainfi qu'il a fup- primé la vis de rappel qui fert à faire monter & defcendre le cheveu, & à faire venir l'aiguille au point où on veut la fixer, Il a de même fupprimé les pinces à vis qui fervent à retenir le cheveu; il s’eft con- tenté de lier fa baudruche avec des bouts de fil, Il a aufi fupprimé la pince qui fert à fixer l'aiguille quand on veut tranfporter l'inftrument. Il a enfin fupprimé le contre- poids, en tenant la baudruche tendue par le poids même de l'aiguille, qu'il évalue à 60 grains. Les trois premières fuppreffions rendent l’inftrument moins commode, mais ne le rendent pas défectueux ; au dieu que la dernière a l'inconvéniene que j'ai développé dans le Chap. précédent; c’eft que la baudruche n’eft plus chargée d'un poids égal dans fes pofitions différentes ; qu’elle porte les GO grains que pèfe l'aiguille lorfqu'elle eft Horifontale , tandis (r) Je traduis auffi ces objeë&tiors de l’Itilien des Opufcoli Scelii de Milan, Tome VIII, page 4, Tome XXXI, Par. 1, 1788. FEVRIER. O 106 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, qu'elle n'en porte que 30, & même moins, lorfqu'elle eft inclinée de 30 ou 49 deprésæSi donc 60 grains font néceflaires pour donner à la baudruche le degré de tenfion qui lui convient, elle eft trop peu tendue dès qu’elle fort de la ligne horifontale; & fi au ‘contraire elle ne doit être tendue que par un poids de 30 ou 40 grains, elle le fera trop toutes les fois qu'elle approchera d'être paralièle à l'horifon, La troilième raifon de la préférence que le P. Jean-Baprifle accorde à la baudruche, c’eft l'étendue de fes variations. [1 die qu'elle eit d’un tiers au moins plus expanfble que le cheveu; en forte qu'un hygrometre à baudruche long de 8 pouces fera autant de variations qu'un bygromètre à cheveu d’un pied de longueur, | Cette expanfibilité eft certainement avantageule. Mais le Pere Jean- Baptifte ne peut pas nous: aflurer qu'elle ne foit pas compenfée par le peu de durée ou par le peu de ténacité de la baudruche, Il s’eft_preflé de publier la defcription de fon inftrument fans le foumettre, comme j'ai fonmis le mien, à de longues épreuves; & j'avoue qu’à cet égard j'ai quelques préventions contre la baudruche. Lorfque dans la nouveauté des aéroftats on employoit cette fubftance à leur conftruétion , je l’ai vue perdre à l'air fa flexibilité, devenir caflante , fe laifler entamer aux infectes; en forte que j'ai peine à croire que ni la baudruche , ni la ba- leine puiffent avoir la permanence, je dirai prefque l'indeftructibilité reconnue du cheveu. Enfin le quatrième & dernier reproche que le Pere Jean - Baptifte fait à mon hygromètre, c’eft de coûter 2 louis ou 84 livres de Venife ; tandis que le fien ne coûte que ÿ de ces livres, ou un peu moins de 3 liv, de France. Je réponds , que f l'on vouloit dans l’hygromètre à cheveu fubfti- tuer une planche de bois à un cadre de laiton , employer un clou pour fixer le cheveu au liea d’une vis de rappel, fupprimer les pinces à vis auffi bien que celle qui fixe Faiguille quand on tranfporte l'hygromètre; fi enfin on vouloit fe paffer dun étui pour cer inftrument & détacher le cheveu de fa planche pouf le mettre dans fa rabatière , lorfqu’on le tranfporte, comme le Pere Capucin fait avec fa baudruche, on pour- toit conftruire des hygromètres à cheveu qui vaudroient encore moins d’un petit écu, car enfin ce n’eft pas le prix du cheveu qui les ren- chérir. : cé IL feroit cependant ridicule de fe jetter dans un excès d'économie qui rendroit cet inftrument néceffairement infidelle. Je ne confentirai, par exemple, jamais à lui donner pout bafe une planche de bois; les viciffitudes de la fécherefle & de l'humidité extrême que cer inf trument eft deftiné à fubir, excluent néceflairement de fa conftruction une fubftance que la féchereffe & l'humidité affeétenc autant que le ® bois. Mais il y a des moyens de le rendre moins coûteux fans facrifier SUR L’'HIST., NATURELLE ET LES ARIS, 157 trop de fon exaditude. M: Paub'a depuis long-rems fur ce fujér des idées qu'il auroit mifes en exécution fi fa fanté coujours chancelante le lui avoit permis. Mais à préfent qu'il va être aidé par un de fes fils qui fe voue entièrement à le feconder dans la conftruction des inffrumens de phyfque, j'efpère que nous y réuflirons. Er je le defire d'autant plus , que je fuis perfuadé que malgré fes défauts le cheveu eft encore de tous les corps que lon a éprouvés jufques à ce jour celui qui ef le plus propre à la conftruétion des hygromètres. Cependant, ceux que M, Paul a conftruits jufques à préfent valent bien leur prix; & il n’en pourra faire de moins chers qu'en les finif- fant moins & en fupprimant quelques-unes des pièces qui contribuent à la commodité de leur ufage; ainfi les amateurs de phyfique qui pour- ront confacrer deux louis à un inftrament de ce genre, feront toujours bien de s’adreffer à lui pour s'en procurer de femblables à ceux dont j'ai donné la defcription dans mes eflais, EEE RECENSE NE DE SCENE SE SE RE PTE PIRE CRETE RCE ETAT EE TIRE SEC TEE EERNE) EXTRAIT DU, MÉMOIRE DE M LE DOCTEUR BONVOISIN, Sur la dépuration de l’Acide pholphorique : infèré dans les Mémoires de l’Académie Royale des Sciences de Turin, L'ürirrré de lacide phofphorique dans l’analyfe des minéraux qu'on fait au chalumeau eft déjà très-connue; & on fait de quelle néceflité il eft pour la précifon des réfulrats de lavoir tout -à- fait . exempr de matière étrangère, La voie de réduire cet acide en phofphere & le décompofer enfuice pour l'avoir pur eft très-bonne, mais aufli très-longue & très-difpendieufe. Celle que nous allons indiquer eft pré- férable à caufe de fa promptitude & de fa fimplicité. Il faut prendre environ quatre parties d'huile de vitriol fur fix de terre des os, ou d'os calciné à blanc , & procéder dans le refte fuivant le procédé connu: on doit laïffer le tout en digeftion pendant quelque tems; & y ajoutant enfuite la quantité d’eau nécéflaire, il faut filtrer ,édulcorer le réfidu, & foumettre la liqueur à l’évaporation iufqu’à ce qu’elle ait acquis une gravité fpéci- fique de 1262 : 1000. Il ne refle alors qu'à y vetfer peu-à-peu de l'alkali volatil aéré jufqu'à faturation ,ce qui le débarraffera entièrement du mêlange terreux. La précipitation achevée , on filtre la liqueur, & l'on Tome XXXIU, Part, I, 17988, FEVRIER, 0 2 103 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, pafle de l’eau difillée à plufeurs reprifes pour en extraire toute:la partie faline. Cette liqueur fe faic fécher fur le feu , & enfuite en l'expotant à un feu un peu plus violent , l’alkali volatil s’évapore , l'acide fe vitrifie fous la forme d'un verre très-pur , & qui étant mêlé avec du phlooiftique donne très-aifément du phofphore, L’alkali farurant cer excès d'acide qui eft effentiel pour tenir la chaux en état de liqueur dans ce cas, le fel compofé de terre calcaire & d'acide phofphorique, doit fe précipiter. La terre qui fe précipite en verfant dans l'acide ci-deflus de lalkali volatil cauftique , ou qui fe fépare d'elle - même par l'évaporation , n’eft pas une terre calcaire pure, ni une félénite, comme l'ont cru plufeurs Chimiftes, mais une combinaifor de terre calcaire avec l’acide phofphorique, une véritable terre ofleufe. Un phénomène qui eft très- digne d’obfervation dans ce cas, 'c'eft que quoiqu'il y ait dans cette liqueur une terre calcaire, l'acide faccharin ne la décèle point, car il n’y occafionne aucun précipité, pas même fi cet acide eft uni avec un alkali fixe. La raifon de ce phénomène eft que le compofé de terre calcaire & d'acide phofphorique eft foluble dans tous les acides: l’acide du fucre Le diffout , mais ne le décompofe point, ou pour parler plus rigoureufement, ne manifefte point fon action par la précipitation de la chaux. Cet acide qu'on a pris pour un agent infaillible propre à démontrer V’exiftence du plus petit atôme de chaux, ne l'eft pas dans le fait, car, comme la chaux combinée avec l'acide faccharin eft foluble dans les autres acides , il arrive que l'acide faccharin ne manifefte point de préci- pité lorfque la chaux eft tenue en diffolurion dans un excès de beau- coup trop grand d’un acide quelconque, excepté le vinaigre & l’acide fpathique, é IL eft à propos d'ajouter que l'acide phofphorique ainfi purifié criftallife aifément, & prend toujours la figure des prifmes quadrangulaires ter- minés en pyramides également quadrangulaires. SUR LA ROTATION ET L'ATMOSPHÈRE D'ENRMMUMPIT T'EURS Par JEAN-JÉROME SCHROETER, Grand - Baïlli de S. M, Britanique, & Membre de l'Académie. Eleétorale de Mayence ; AM DELA MÉTHERTVE A PRÈS avoir fini mes obfervations, faites fur jupiter dans l'hiver de 1785 à 1780 (1), je n'ofois efpérer pouvoir éclaircir le contrafte fx), Voyez le Journal de Février 3787. SUR L'HIST. NATURELLE ET LES ARTS. 109 tout fingulier qui s’y trouve. Mais contre toute mon attente, les obfer- vations que j'ai continué à faire en grand nombre & avec toute l'exactirude poflible pendant lhiver pañlé, font devenues fi inftructives qu’elles ‘répandent beaucoup de lumière für la rotation & l’atmofphère de certe planère ; & quelque différentes qu'elles foienc de celles de MM. Cafini & Maraldi , elles ne laiflent pas néanmoins de Les confirmer en même- tems. Je viens d'achever un Traité que j'ai écrit fur ce fujet ; mais à caufe de la variété & du grand nombre des obfervations, il contient trois cens pages en manufcrit , eft trop grand pour aucune colleétion périodique , & fans donner atteinte à la vérité, il eft impoñfible d'en donner un abrégé. C’eft pourquoi je me contente de ne vous marquer en général que les plus remarquables de ces obfervations & les réfulrats. Cepen- dant je me ferai un plaifir de vous faire part du Traité même , aufli- tôt qu'il fera imprimé (1), & alors vous pourrez juger fi les réfulrats tirés de ces obfervations ne font pas conformes à la vérité même, ou du moins ne font pas d'une vraifemblance , qui s'élève prefque jufqu’à l'évidence. Les obfervations les plus remarquables font en général les fuivantes : T. Revenant à obferver la rotation de jupiter l'hiver paffé , je trouvai la furface apparente de cette planète tellement changée, qu'il feroit contre toute vraifemblance, fi l'on vouloit prendre de tels grands changemens pour des révolutions , que l’écorce ou la furface du globe même eût fouffertes. Auprès des deux bandes obfcures du milieu il s’étoit formé deux zones ou bandes blanches & lumineufes, celles que M. Campani décou- vrit auffi à Rome l’année 1664 (f9. 6 ,ab, pl. 1). La zone équato- tiale au contraire , qui fe renferme entre les deux bandes obfcures du milieu, avoit pris une couleur terne, grife, tirant fur le jaunitre (fig. 6,c). Outre cela, la plus feptentrionale des bandes obfcures à préfent vilibles , laquelle j'avois obfervée dès fa nouvelle origine , avoit reçu par un épaiflement un accroiflement aflez frappant (fig. 6, d). Celle au contraire qui étoit le plus au midi, s'étoit environ un peu plus d'un tiers de fon cercle tout-à-faic éteinte, & étoit devenue une bande interrompue (fg. 6 ,e). 2 IT. Pluñeurs obfervations réitérées m'ont enfin confirmé, non-feu- lement que celle des deux nouvelles bandes blanches & lumineufes qui fe faifoit voir le plus au midi, paroît tantôt plus étroite & tantôt plus large de moitié (fig. 6& 7 bb); mais encore que les bandes (») M. Bode, Aftronome de S. M. le Roi de Prufle , a eu la bonté d’annoncer dans les Ephémérides de Berlin pour l’année 1790, qu'il penfe à faire imprimer maintenant ce Traité avec d’autres de mes Mémoires, 110 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE; obfcures éroient fujettes à un épaiflement très-variable qui alloit tantôr en augmentant, tantôt en diminuant. C’eft pourquoi je trouvai à plufieurs regards aflez intérefflanc de déterminer la fituation de léquateur de & même que la déclinaifon méridionaleg& boréale des bandes & des cercles parallèles, auxquels j'avois apperçu un mouvement tantôt plus vîte rantôt plus lent, ce que je fus capable de faire au moyen d’un nouveau micro- mètre à lampe que j'ai inventé à ce fujer. LIT. Un phénomène qui étoit aufli remarquable que tout-à-fait d'accord avec tous ces changemens frappans, fut que la bande obfeure la plus méridionale , (fig. @, e ) avoit reçu au commencement de décembre un nouvel accroiflement dans Ja longueur, qui s’étoit formé DANS UN COURT INTERVALLE DE 796 HEURES à cette partie de fon cercle où elle s’étoit éteinte, & qui s'évanouit également vite & pendant un intervalle encore plus court , quoiqu'il füt d'une longueur au moins de 140 degrés du cercle. IV. C'étoit par des obfervations réitérées & conformes, que je décou- vris que la couleur un peu plus grife, qui fe fait voir à l'ordinaire vers les deux poles de jupiter, éroit caufèe par une matière fine , qui paroît étre de la nature des bandes obfeures, parce gw’elle forme beaucoup de raies interrompues extrémement fenes & étroites, LESQUELLES, ce qui mérite une attention particulière , étoient PARALLÈLES AVEC LES GRANDES BANDES, AVOIENT TOUTES LA MÊME DIRECTION D'ORIENT EN OCCIDENT, & failoient entrevoir felon toute vraifemblance , le même trait atmofphérique , qui fe laifle déjà préfumer en quelque manière dela figure fphéroïde du globe de jupiter & de la fituation des bandes par-tout -parallèles à l'équa- reur (fig, 667). V. Ce qu'il y avoit de conforme à tout cela, étoit que la zone polaire méridionale avoic-une couleur changeante plufieurs fois, favoir, rantôe plus claire, tantôt plus grife, & que, VI, dans la fuire de mes obfer- vations une raie de lumiere trés-remarquable ou bande‘blanche , longue, ais étroite, fe forma de nouveau dans la zone grife vers le pole arctique & par conféquent dans la matière grife, laquelle fembla être de la nature des bandes obfcures ( fg: 7, cc), de plus que cette nou- velle bande claire , en fe répandant du moins jufqu’à 100 — 110 degrés de fon cercle de déclinailon, eut dans fon mouvement la période obfervée par M. Cañlini, mais fit entrevoir jufqu'à la fin de mes obfer- vations d'hiver quelques changemens de couleur & plufieurs autres petites irréoularirés, VIT. De même il ne fut pas moins remarquable, que la bande cbfcure, fituée le plus au nord & tout proche au-deflous de la raie nouvelle, dont je viens de faire mention , laquelle étoit diminuée & interrompue par plufieurs périodes avant l’origine de celle-ci, s'accrut au même tems SUR FHIST.'NATURELLE ET LES “ARTS. 111 où la nouvelle raie de lumière virt de naître, & fembla êcre contigue avec la matière grife qui la berne du côté du nord. VIII. Outre cela, je vins à obferver peu-à-peu 17 points de taches obfeures , qui fe firent voir prefque rous à la même déclinaifon méri= dionale de 6 degrés 30, dans laquelle j'avois découvert ceux d'auparavanr, À juger felon les obfervations, la plupart étoient des taches diverfes, dont le mouvement fut trés-confus & d'une vitef]e différente. Les périodes que quelques-unes d'elles femblerent fuivre, furent de 7 heur. 7" ,7 heur, 36" & de 8 heur. Par corféquent toutes ces périodes furent plus courtes que la période de la rotation obfervée par M. Caflini. Mais ce qui donne le plus de lumière fur la rotation & l’armofphère de jupiter, ce font , pour pafler ici fous filence toutes les autres , les obfervations fuivantes : IX. PENDANT qué Jj'apperçus près de l'équateur un mouvement , qui, quoiqu'il füc différent, & tantôt plus vite, tantôt plus lent , ne Jaïfloit pourtant pas d’être en général & prefque par-tout d'une vitefle plus grande que n'empertoit la période de la rotation , je découvris le premier de décembre de l’année paflée à une déclinaifon feptentrionale de 12 degrés dans la bande où zone claire boréale UNE TACHE DE LUMIÈRE TRÈS-REMARQUABLE ( fig. 7, d ), Elle étoit ronde, plus blanche" & brillante que le champ de cette zone claire, & pouvoir étre vue diflinétemenr. Ce qui me frappa le plus fut, que /e mou- vement de cette tache brillante fut conforme à la période de la rotation , favoir, fi l'on la fuppofe à 9 heur. $$ — $6/, mais qu'il fe néanmoins voir très - certainement tantôt quelqu’accélération , tantôt quelque rerardement , & par conféquent des petites irrégularités, qui ne pouvoient être ni l'effet des petites inégalités de jupiter , que j’ai toujours calculées , ni l'effet de fautes dans les obfervations. É Je pafle ici toures les autres circonftances de cette bien remarquable tache brillante, me bornant à marquer feulement , que je l'ai obfervée felon la table fuivante perdant 242 révolutions jufqu’à ce que jupiter S'approchoit déjà trop du foleil, & que fa période, fi l'on calcule léquation du tems & les inégalités de jupiter, ez prenant un terme K=) moyen de toutes les obfervations , donne 9,heur. 55’ 33",6. 112 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, AB L\'E. Tems Nomb.| Nomb.| La vraie acceleration des des des & Le rerardement. PÉRIODES, Oëbfrrvations. obferv | révoz, |Accel. — Retardem. GE 1—15 Déc, 1786. 49 h. 55! 18" 4 15—30 Déc. s\o he s6' I 30 Déc.— 6 Janv. sko h. 55! 8 6 Janv. —13 ol? h. 55! 3 14 Janv.— 6 Fév. 8/9 R 55! 32! 6—11 Fév. 3 9 h. 55! 41"! È h. 55! 30" 6 Fév.—11 Mars. 1 9 h. $s' 30" — 1h. 46! 34" 719 h. s5' 33" 6 Savoir fi l’on fuppofe) Au-milieu de toutes les ob- Ja période de la rota-|fervations. jion à9h. s6, \ . X. Mais ce qui doit être remarqué avec grande attention, c’eft que PENDANT LE MÈME TEMS, dans lequel cette tache brillante avoit une période moyenne de 9 heur. 55" 33",6 , les bornes occidentales de la bande obfcure interrompue & la plus méridionale, ( fig. 6& 7) faifoient voir avec la même certitude & fous des irrégularités femblablesau MOUVEMENT PLUS VITE, & celasàa une déclinaifon méridio- nale de 32 degrés & dans un intervalle de 2$Q révolutions , de telle forte que la période de cette bande conclue de toutes les obfervations, felon la table fuivance , n’emporta que 9 heur, 55" 17",6, & que Paccélé- ration de cette bande par rapport à la tache brillante pendant ce tems ze fut moins que 1 heure 10" 21",8. - TABLE, SUR L'HIST. NATURELLE ET LES ARTS, 112 TABLE Tems Nomb.|La vraie acceler. des des | & Le rerardement.|PÉRIODES Obfervations. révol. |Accél, — Retard. dèsle 1—-10 Déc, 12 — 20'. 1, oh, 55" ms"20, h. sa se 6 ro=16 Déc, el ni lobe cat all période obfer- £e 14 15 35 ph. 54 53 vée auffi par 15—25$ Déc. 22 — 13! 28" |9h. 54 s6" M. Hershel, 20—30 Déc. 12 + 6! 27" 6l9h. $6! 32" 30 Déc. — 6 Janv. 17 — 26! 48 2l9h. 54 25 PE obfervée 6 Janv. — 13 17 — 3/25" 7l9h. 55! 47/04 par M. Maral- di,#708« 13—22 Janv. 22 — 5310" oh, 53° 35" — 4 Fév; HP e crencucs el has éme poe | h. 56! 12 a PRE æ 8 ee Î o! 494 sh SEE 3 Pér. obf. 166$ 22 Janv.— 11 Fév.|48 eo! 49")..........l9h. 56! 1'of par M, Cafl, 1E Fév 30 — 17! 41" oh. ss! 24/7 23 Fev. — 14 Mars 46 — 24 4!" |oh. 55! 287 . h. ss! 17" 6 e À 250 |—2 h. 56! 56" |? Si lon füppofe la En prenant de période de la ré-| M€ AE Æ volution à9 h.ç6'.] fOUies Les OD- fervations. XI. Ourre cela il eft bien remarquable , que j'ai obfervé PENDANT LE MÈME TEMS & à. la méme déclinaifon méridionale de 6 degrés 30° où javois découvert prefque toutes les tadBes oblcures, une tache de lumière longuette, blanche & grande , mais non pas bien bornée( fige 6,Z)» qui, après avoir eu par un intervalle de 17 révolutions felon trois obfer- vations UNE PÉRIODE DE 9 heur. fo” 30", telle que MM. Cafini & Maraldi ont obfervée aufli, reçut un mouvement tres-irrégulier. Voilà donc rois périodes différentes, tantôt plus longues, tantôt plus courtes, que j'ai obfervées dans de divers cercles de déclinaifon & TOUTES EN MÊME TEMSs avec toute la précilion poflible. _ Quant aux réfulrats tirés de toutes ces obfervarions, je les ai expofés dans mon Traité avec foin & en comparant toutes les autres obfervations antérieures , ils font : Tome XXXII, Part. I, 1788. FEVRIER, E 114 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, a Que les taches obfcures aufli bien que celles qui font brillantes & les changemens remarquables que j'ai obfervés aux bandes, au moins pour la plupart ne Je font pas faites fur l'écorce ou la furface de jupiter même, mats plutôt dans latmofphère de cètte planète , qu'il faut que la plupart de ces phénomènes fuffent caufés par des changemens que l'atmofphère fit voir à l’égard de fon obfcurciflement & réclairciflement , & qu'il y a enfin beaucoup de vraifemblance , que la diverfté du climat, peut-être aufli de. quelques faifons , eut principalement infué fur la variété & la durée de tous les phénomènes ci-deflus mentionnés, b. Je continue à expofer dans men Traité les raifons pourquoi il fau .qu'il y ait dans L'atmofphère de jupiter des vertus ou forces ‘de la nature , lefquelles , pendant que toute larmofphère fe tourne avec le globe autour de fon axe, par des accidens phyliques, font tantôt accélérer, tantôt retarder le‘mouvement de la maf]e atmofphérique , & font par là voir un mouvement irrégulier tantôt plus vite, tantôt retardé, & des périodes différentes & variables , qui different cantôt plus, tantôt moins du tens vrai de la rotation. Cefl doné qu'il y a des mouvermens atmofphériques OU, DES VENTS fur Jupiter , qui ayant des divers degrés de viteffe & une direétion à l'ordinaire parallele à l'équateur , reffemblent en quelque manière aux pal]ats & mouffons de notre terre. c. Selon une exacte comparaifon des obfervations faites fur ce fujec par MM. Cafini & Maraldi avec les miennes, j'ai détaillé dans mon Traité les raifons, par lefquelles j'ai lieu de foupçonner , que les taches obfervées par ces obfervateurs célèbres, fans même excepter celles qui. ” font marquées fous le nom de la tache vieille de 1665, eulfenc été, au moins pour la: plupart , de la mème qualité atmofphérique. d. Mais quoique les irrégularités qui fe font voir pour cela dans le mouvement des taches & des bandes & la variété des périodes nous mettent hors d'état de déterminer la période. de la rotation avec toute la précifion & jufqu’à fecondes , je n'ai néanmoins pas manqué à expofer pourquoi la période de la rotation , telle que le grand Caflini lui-mêine Va déterminée, favoir , à 9 heur. 55 à 56”, foit de la dernière certitude & ‘uflefle, pourquoi le milieu de toutes les obfervations faites dès l’année 1665 jufqu’à l’an 1714, que M. de la Lande mer à 9 heur. ÿs' 50" (1), ne puifle différer de la vraie période de Ja rotation qu'à peu de fecondes , & pourquoi enfin on ne fauroit jamais fixer cette période avec plus de précifion que le premier obfervareur ne l'a déterminée, attendu que plurôt le-milieu de la période tiré d'un grand nombre d’obfervations faices fur des taches d’une longue durée & de peu d’irrégularités ,commé LA L () M. Maraldi donne le milieu des obfervations d’un grand incervaile à 9 heuc, #5" 52”, Mém, de P'Acad, Roy. Franç, de l’année 37084 SUR L'HIST. NATURELLE ET'LES ARTS, 11$ vous voyez auffi le réfulrat de mes obfervacions dans les tables ci-deflus, Jera toujours entre 9 heur. $$ & 56". Quant à la qualité de l’armofphère de jupiter & à la variété de la difpoñition cofmologique, je pafle au refte, pour n’être trop long , cous les autres réfulrats quoiqu'ils foient d'autant plus remarquables qu’ils font fondés fur de nouvelles expériences , & je marque feulement , qu'après avoir apperçu avec toute l’évidence poflible durant le même intervalle dans de divers cercles de déclinaifon un. mouvement diver- fement vire, qui felon un accord de toutes les -obfervations & cir- conftances ne pouvoit être qu'un mouvement atmofphérique, & après avoir mefuré la déclinaifon feptentrionale & méridionale, dans laquelle cette vitefle différente fe fit voir par beaucoup de périodes, je fus capable de calculer combien de toifes & pieds le mouvement atmof- phérique eût faits en chaque feconde dans de divers cercles de déclinai- fon, & de mettre tout cela en comparaïlon avec les vents de notre terre. . * Les réfülrats de ces calculs font en plufieurs regards bien remarquables, & fourniflent de nouvelles vues fur la variéré analogique qu'il y a entre les corps céleftes ; mais je lés pafle ici de même & d’autant plus qu'ils ent du rapport à plufeurs recherches de mon Traité, & parce que ne voyant. pas l'enfemble de toutes les obfervations & leur détail on pourroir peut-être bien venir à penfer, qu’une trop ‘grande vivacité d'imagination m'eût entraîné à des découvertes venteufes. . = VOYAGES MINÉRALOGIQUES Fais en Auvergne dans les années 1772, 1784 & 1785 ; Par M. Monxer. IL n'y a peut-être pas de pays au monde dont le règne minéral offre : plus de variérés & de plus grands fujets d’obfervations que celui de cette province. Plus un pays eft coupé ou montagneux, plus le miné- ralogifte fe trouve à portée de voir & d'obferver de chofes différentes, Certe province n'offre pas feulement cet avantage aux minéralogifes, elle leur en offre d’autres qui femblent lui être particuliers ; fa com- poficion & fa ftruéture fonc des plus fingulières, & aucun pays en France, ni ailleurs ne lui refflemble; auffi fes fingularités ont-elles frappé depuis long-tems les étrangers, naturaliftes ou non ; tous les géogra- phes en ont fait mention, comme d'un pays très-extraordinaire & digne Tome XXXII, Part, I, 1788. FEVRIER. P2 116 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE; de la curiofité de tout le monde ; mais le plus frappant de ce pays a été ignoré jufqu’au moment où M. Guettard , accompagnant M. La- moignon de Malsherbes en 1752, s’apperçut que prefque toute cette province avoit été boulverfée à fa furface par une multitude de volcans étonnante ; bientôt le bruit s’en répandit dans le monde, Un milord & plufieurs autres étrangers, vinrent vérifier certe découverte, & les Auvergnats étonnés de ce qu'on difoit de leur pays, fe réveillèrent, pour ainfi dire, de leur inattention, & quelques-uns le : confidé- rèrent tout autrement qu'ils n’avoient fait jufqu’alors. Je ne fus pas le dernier à faire attention à cette grande vérité & à gravir fur les montagnes pour aller reconnoître l'antique exiftence de ces feux terri- bles & les effets qu'ils y ont produits, & je ne fuis jamais retourné dans ce pays fans augmenter mon journal de quelques nouvelles ob- fervations ; mais je nai pas népligé d'en connoïtre en même-tems les autres objets de la minéralogie. Ce font lés obfervations que je pré- fente acjourd'hui au public, mais en abrégé parce que les circonftances ne me le permettent pas autrement, PREMIER VOYAGE. L’attention du naturalifte n’eft guère frappée extraordinairement qu'aux approches de Riom , la plus belle & la plus agréable ville de l'Au- vergne, bâtie fur un mañlif fableux & pofé lui-même fur un affemblage de graviers antiques ; je veux dire appartenans à l’ancienne roche. On a alors à la droite la continuité d’une chaîne de montagnes, qui va toujours en s’élevant jufqu’au-deffus de Clermont , où la montagne connue fous le nom de Puys-de-Dôme, domine majeftueufement; à gauche , on a une des plus vaftes plaines & des plus fertiles qu’il y ait en Europe, où l’on trouve communément jufqu'à 20 pieds de profondeur de cou- ches de terre, formées du débris des montagnes primitives & volca- nifées. On voit en s’avançant vers Clermont, cette plaine: fe retrécir & ne former plus qu’une vallée étroite parfemée d’élévations de montagnes plus ou moins vaftes; c’eft ce qu'on nomme les montagnes de la Li- magne, qui ne font pas moins hautes que celles de Ja haute Auvergne. L'Allier coule dans cette vallée du midi au nord, & eft caufe de fa profondeur comme de l’atrangement général de toutes les parties de terreins qui l’avoifinent. Nous ne nous arrêterons pas aux carrières de Volvic , qu'on a à droite du chemin que nous fuivons , & qui ont fait le fujet d'un ex- cellent mémoire de M. Guettard, où ce naturalifte fait voir que c’eft le plus horrible & le plus grand amas de laves qui exifte peut-être dans le monde, & dont on ne cefle de tirer de la pierre pour bâtir, dont Riom, Mont-Ferrand & Clermont font prefqu’entièrement formés , ainfi que tous Jes grands édifices & les autres villes de Ja baïe Au- “ SUR L'HIST. NATURELLE ET LES ARTS. 117 vergne; c’eft parce que cette lave y eft plus propre qu'aucune autre de cette province, étant en mafle plus continue, & d’un tiffu a-peu- près égal par-tout, & la feule qui fe laïfle tailler & façonner faci- lement ; cet amas de lave peut être confidéré comme le rendez-vous de plufieurs courants de Have qui y font arrivés peu de rems les uns après les autres, de manière qu'ils ont pu fe confondre les uns les autres & former de grandes mafles, Cette même chaîne à droite, c’eft-à-dire à l'oueft, préfente cependanc toutes les marques de fon ancien arrangement , comme tant d’autres chaînes primitives. On voir dans fon fond que fa bafe eft de granit, que la pierre calcaire fableufe & les terres argileufes calcaires, font adoffées à cette bafe & l'ont furmonté de beaucoup, & que c’eft dans ces additions immenfes que font nés les volcans , lorfque cette partie du royaume étoit encore fubmergée. Cette vérité méconnue, nous femble , par tous ceux qui ont vifité cette province, qui ont même laiflé ignorer fi les volcans avoient été produits dans les montagnes primitives ou fecondaires, acquerra un nouveau deoré d’évidence dans la {uite, quand nous décrirons en particulier quelques-unes de ces montagnes. La plupart de ces matières calcaires argileufes font vifiblement al- térées par le"feu ou par les alluvions d’eau bouillante qui ont coulé deffus ; aufi rien n’eft plus rare que d'y découvrir des parties de co- quilles fuiviatiles ous marines. On voit auffi que la plupart des fables dans les bas, ou ont été ainfi altérés ou font un mélange de parties détachées des roches de volcans; on y voit aflez fouvent des terres rougeâtres , argileufes ou bolaires qui ont été cuites ou qui font elles. mêmes provenues de la deftruétion des roches volcanifées. Plus on remonte dans cette vallée, plus tout ceci devient fenfble, plus le pays devient montagneux & plus le granit fe découvre dans les fonds , parce que la pente plus grande a mis les eaux à portée d’en emporter davantage de terre & de découvrir davantage le granit; c’eft fur-tout dans le lit même de l'Allier qu’on peut faire aifément cette obfervation,. En remontant depuis le Pont du Château , on y voit généralement cetre roche grife à gros grains ; on la voit aufli hors de ce canal & prefque par-tout au bas des montagnes & fur-tout au bas de la chaîne que l’on a à droite, On a alors devant foi à gauche & à droite des montagnes qui fe préfentenc prefque toutes fous la forme de pain de fucre , & dont toutes les pointes ou fommets font terminés par des roches de volcans, & où lon trouve quelquefois des marques d'anciennes bouches de ces feux terribles ; on peur auñi s’appercevoit qu’on a à gauche , c’eft-à-dire, à left; une autre chaîne de montagnes bien moins élevées, qui eft en- tièrement formée de granit; & ce qu'il y a de bien fingulier ; où l’on u1S OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, ne trouve aucune trace de volcan. On appelle cette chaîne mon- tagnes bafles , par comparaifon à celles de la droite , où le Mont- d'Or, grouppe de montagnes-volcanifées, les plus élevées de la bafle Auvergne, contrafte fingulièrement, ; Les eaux qui coulent de ces deux côtes, viennent fe rendre dans l'Allier, en agrandiflant continuellement leurs canaux particuliers, & comme les pentes en font fort rapides en certains endroits, les eaux les fillonent, & cela d’autant plus facilement jufqu'au granit, qu'elles ne confftent qu'en matières prefque mobiles ou peu folides , foit’ de terre calcaire, de fable ou de matières volcanifées ; le canal tortueux de l'Allier en feroit bientôt comblé, s'il n'avoit lui-même une très- grande pente, laquelle paroît d'autant plus grande ; qu'on avance davantage vers fon origine, Les dépôts que fait cette rivière font d'autant plus grands, qu'elle les fait plus éloignés de ces montagnes où il y a fe moins de pente. On ne peur douter que la pliine dent nous venons de parler ne foit un produite fes dépôts, auñli bien qu'une partie du Bourbonnois, où l'on trouve à-peu-près les mêmes matières, mais plus atténuées. Ainf , la vallée d'Auvergne ou Limagne, large de deux à trois lieues & de quatre dans fa plus grande largeur , eft fermée entre deux chaînes de granit dans toute fa longueur, lefquelles femblent fe réunir au midi & n'être féparées l’une de l’autre que par le canal étroit du confmencement de l'Allier , au-deflus de Vielle-Brioude, où le granit fe montre entière- ment à découvert. ” Le voyage actuel n’aura pour objet que les obfervations que nous avons faires à droite & à gauche du chemin qui fuit la Limagne ; jufqu'à la fameufe montagne de Lam , Où nous nous arrêterons , quoiqu'il n’y ait que trois lieues de Clermont à cette montagne, C’eit dire par-là copie il y a d'objets à voir & à connoître dans une f petite diftance. Nous commencerons par Clermont où nous avons plufieurs remarques importantes à faire. Cette agréable ville eft fituée fur une éminence évafée & plus élevée que celle fur laquelle eft Riom. La cathédrale, qui en fait le fommet , & qui eft bâtie entièrement de pierres de laves , de l'efpèce connue fous le nom de bafalte , & par conféquent noire, eft fort remarquable de loin , & femble indeftruétible de près (1). C’eft une chofe remarquable, dont les voyageurs font frappés , de voir que les trois villes les plus confidérables de la bafle Auvergne, Riom, Mont-Ferrand & Clermont, & qui fe fuivent de fi près, foient précifément affifes fur des (x) Toutes les pierres où entre le fer en grande quantité comme dans celles-ci, & qui ont été parfaitement fondues femblent en effet être indeftruëtibles, Les pierres de cet édifice, bâti depuis quatre cens cinquante années , ne paroiflent pas plus altérées que fielles venoient d’être tailléese SUR L’'HIST. NATURELLE ET LES ARTS. 119 éminences à-peu-près femblables. Mais la fituation de Clermont furpafle de beaucoup les autres en grandeur & en agrément. Cette ville peur à jufte titre être regardée comme la ville la plus pitorefque de la France & peut-être de l'Europe, fur-rout du côté de la chaîne à l'oueft où fe trouve un baflin fort vafte circulaire, le plus fertile & le plus agréable que l'on puifle voir , dominé majeftueufement par cette chaîne qui s'élève en gradins, & qui eft terminée par le Puy-de-Dôme, qui eft en face de Clermont. C’e vraifemblablement de cette partie de la chaîne, que fe fonc écoulés les immenfes laves, les cendres volcaniques & les torrens d'eau plus que bouillante , qui ont égalifé jadis ce bas-fond, mais que de nouvelles eaux, telles que celles qui y coulent a@uellement, ont creufé de nouveau, tandis que le mafñlif fur lequel eft fitué Clermont, affez éloigné pour n'être pas atteint des derniers courans de laves, s’eft confervé en entier, Il y a toute apparence auñli qu'il exiftoit & qu'il exifte encore dans cer emplacement une autre forte de maflif que celui qui sy voit, qui elt occidental & volcanique. On fembleroiten avoir la preuve vers l'Abbaye de Saint-Allyre , placée au-deflous de cette ville , dans un des retours du baflin dont nous venons de parler , où l’on voit paroître des bancs d’une pierre fableufe & calcaire d’un gris blanc jaunâtre, c’eft-à-dire, un vrai tuf, qui à l’égard des produits volcaniques, peur être regardé comme primitif, & fecondaire à l'égard du granit, fur lequel vraifembla- blemient cette roche eft placée (1). On a donc lieu de croire que les produits volcaniques qui hauflent cette éminence, portent directement fur cette roche tufacée. On ne peut pas d’ailleurs nier que la totalité de ce mafif ne porte fur le granit, & on confidère que les eaux minérales de Clermont, très-abondantes, & dont nous parlerons ci-après , fortent de ce mañlif, car ces eaux, comme nous le ferons voir évidemment dans d’autres circonftances , ne peuvent exifer & fe conferver que dans cetté roche primitive, Si donc , comme nous avons lieu de le croire , cette bafe graniteufe a été continue ou a fait partie de celle qui fair les premières élévations granitiques qui font au-deflus de Clermont, tel que Roya à une forte lieue de cette ville , il faut confidérer néceflairement l'inter- valle profond qui eft entre l'un & l’autre, commeïl’ouvrage des eaux ; & qui calculera l'immenfité des fiècles qu'il a fallu pour cela ! Ainfi l'ordre que nous donnerons au mañlif de Clermont eft celui-ci, 1° le granit 2°. la pierre fableufe tufacée, & 3°. Faffemblage volcanique. Et comme il n’y a que ce dernier qui foit à proprement parler fournis à notre infpection , c’eft lui auquel nous nous arrêterons. C’eft dans la (3) Nous verrons dans la füite que c’eft à-peu-près la mêmetefpèce de pierre qui forme les éminences de la bafle Auvergne , qui font für. des bas-fonds & au bas des montagnes volcaniques, 120 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, partie de cette ville qu'on appelle Saint+Genêt, qu'on peut le confidérer à l'aife, car toutes les caves profondes qu’on y trouve lont taillées dans cette partie, & aucun de ces approfondiflemens ne le dépafle, du moins aurant que j'ai pu le voir par les plus profondes caves où je fuis entré, c’eft-à-dire , de cent cinquante pieds en ligne très-oblique. Ce maflif qui confifte en une efpèce de cendre & de fable graveleux à demi-vitrifié , dans lequel on voie çà & là des galets de roche volcanique compactes & très - durs, qui y font comme encaftrés, eft le plus favorable que l'on puifle trouver pour y faire de pareils approfondiffemens, car il n’eft ni trop dur pour y creufer, ni trop mou pour craindre que les voûtes & les jambages que l'on ygonferve pour les foutenir, s’écroulent, J'ai trouvé dans ce maffif aflez fouvent de gros morceaux de bafalte volcanique & plus fouvent encore de plus petits, dont les angles ufés & arrondis, atteftent qu'ils ont roulé lonc=tems, ou ont été long-tems fous les eaux avant d’être dépofés ici (x). Il y avoit autrefois trois fources principales d'eaux minérales bien connues , qui fortoient de ce maflif, fous les noms de Saint-Pierre, de Saint-Allyre & de Jaude. La première a été effacée par de nouveaux bâtimens, Les eaux ne différent entr'elles que par les proportions différentes de leurs matières. Elles font fortement gafeufes, alkalines & ferrugineufes, comme le font prefque toutes les eaux minérales de certe province , qui elt, comme nous le verrons, la plus riche en ce genre, non-feulement du Royaume, mais vraifemblablement de l'Europe entière. Ces eaux peuvent donner par conféquent une idée des autres de ce pays. Les eaux minérales d'Auvergne ont toutes un air de famille, fi je puis m'exprimer ainfi , qüe l’on y apperçoit au premier, coup-d’œil. La terre abforbante , l’alkali minéral & le fer, faturés d’air fixe, font les matières qu'on y trouve le plus communément, & qui en font les caractères effentiels. La terre abforbante fur-rout s'y trouve en fi grande quantité, qu’on en eft fort étonné , quand on fait attention aux” propriérés que les Chimiftes ont alignées à cette terre, lorfqu’elle eft unie à l'air fixe, qu’ils ont défigné dans cet état comme indifloluble dans l’eau , fur-tout lorfqu’elle en eft faturée entièrement (2). Re (1) On croit communément que fes pierres ne s’ufent dans les eaux que parce qu’elles y roulent & fe frottent enfemble. Mais c’eft une erreur de croire que cet effet ne puiïfle pas avoir lieu autrement. Nous voyons de groffes pierres & de gros blocs s’ufer de même, quoiqu'immobiles dans les lits de rivières rapides, & nous voyons que plus les eaux paflént deffus, plus les pierres s’ufent. Ces pierres s’ufent en effet ainf, jufqu’à ce qu’elles foient réduites à l’état de galets & emportées par les eaux, qui vont les dépofer_bien loin, (2) On ne peut faire ufage dans l’analyfe de ces eaux de la méthode de M. Gioa- netti, qu’on a tant vantée , pour connoître la quantité d’air fixe qui y eft contenue, çar non-feulement l’eau de chaux ne s’emparera pas de l'air fxe de l’alkali minéral, Ces « ’ SUR: L'HIST, NATURELLE ET LES ARTS) 121 — Ces eaux font conftanres comme toutes celles de l'Auvergne, & comme le fonc toujours routes les fortes d'eaux, c’eft-à-dire, qui fortent de da roche primitive ; elles n’éprouvent aucun changement par la pluie & la fécherefle ; je les ai analyfées trois fois en des tems fort éloignés, favoir, en 176$, 1772 & 1784, & je n’y ai pas trouvé la moindre différence. Leurs produits ont été conftamment les mêmes. De 12 livres d’eau de Saint-Allyre, j'ai obrenu terre calcairé très-blanche 2 gros 2$ grains, fel marin bien beau 20 grains, fer 2 grains & demi à-peu-près. La même quantité de celle de Jaude, n’a donné terre calcaire 2 gros 24 grains, fer 3 grains & demi à-peu-près, {el marin blanc 1 gros, & alkali minéral 12 grains. Ces analyfes ont été répétées & faites avant moi par M. Ozy, Chimifte-renommé , de l'Académie de Clermont, & lui ont donné'les mêmes produits à-peu-près, Mais ce Chimifte s’en elt rapporté davantage à la quantité du réfidu de ces eaux, bien defféché, qu’au poids des matières prifes féparément, On fait que le plus ou le moins d'exactitude dans la deficarion apporte des différences confidérable$dans le poids des matières des eaux, & qu'il faut par conféquent beaucoup fe méfier de ces fcrupuleux calculs, introduits depuis peu dans ces fortes d’analyfes. Au furplus , ces eaux fonc vives, pétillantes & mouffeufes comme le meilleur vin de Champagne; le piquancqu'elles préfenrent au goût prifes à leurs fources, couvre Le ob le goût des matières qu’elles contiennert; fans cela elles feroient comme toutes les autres eaux miiérales d’Au- vergne , infupportables au goût à caufe de cette grande quantité de matières. La noix de galle colore celle de Saint-Allyre en un rouge de rofe , & celle. de Jaude en un rouge de vin. Elles forment beaucoup de dépôc ou ftalagmites par où elles paflent: & cela nè paroîtra pas éronnant quand on fera attention à la grande quantité de terre calcaire, qui privée à l’air de la furabondance de l'air fixe qui l'y retienc en diflo- lution , ne peut plus s’y maintenir, & doit fe dépofer néceffairement, en confervant néanmoins autant de gaz qu'il en faut pour la faturer entiè- rement ; ce qui occalionne l'union intime de fes parties & des différens dépôts entreux. C'eft ainfi qu’on peut expliquer la manière dont s’eft formé le fameux pont. de Saint-Allyre de Clermont, dont on a tant parlé. Les eaux de Saint-Allyre fe rendant toutes autrefois vers un point commun , y ont formé un amas de dépôts qui s’eft augmenté peu-à-peu , & a enfin gagné l’autre bord de la petite rivière, tandis que l'eau qui coule deffous a emporté peu-à-peu ce qui s’oppofoit à fon paflage. C'eft-là l'explication que je donnai de ce fingulier monument de miné+ comme on l’a 2fluré dans des Livres & Mémoires remplis d’erreurs , mais même l’eau de chaux fera précipiter avec elle une portion-même de Jaterre de ceseaux, faturée de ce principe , en s’emparant de la partie excédente de cet airfixe, qui eft la caufe de fa diffolution dans l’eau. ; Tome XXXII, Part. I, 1788, FEVRIER. Q # x ag _ 122 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, ralogie en 1766 dans le Journal de Médecine , mais qui trouva tout aufli- tôt un contradicteur, qui prérendoic que ce n'étoic qu'à la faveur d’une planche ou canal fur laquelle cette eau couloit autrefois de l'autre côté , que s'étoit formé cet immenfe dépôt. On ne voit pas trop à quel fujec on auroit conduit ainfi les eaux minérales au-delà de la rivière, nt comment la maffe énorme qui forme ce pont auroit pu garnir prefque tout l'efpace de fix à fept pieds qu'il y a d’un bord à l’autre {ur une ligne droite, puifque le bord-oppofé eft plus bas que celui par lequel les eaux £e jettoient dans la rivière: & comment encore dans ce cas-là ce dépôt auroit pu former une mafle auffi inégale que ce pont l’eff en deflous , fi les eaux minérales avoient été toujours conduites à l’autre côté par un canal. Quoi qu'il en foit, cette curieufe mañle de dépôt calcaire eft encore faturée d'air fixe, car non-feulement les acides y excitent une vive effer- vefcence , mais encore ils en dégagent une grande quantité de cet air. Un peu plus haut, là où les eaux minérales viennent fe jeter maintenant dans la rivière, on voit de nouvelles mafles de- dépôt fe former abon- damment;elles.yformentdéjà une avance confidérable. En la confidérant, on ne peut s’empècher de croire que la vapeur de l’eau de la rivière ne contribue beaucoup à la fépararion de cette terre de l’eau minérale; on feroit porté à croire que cette vapeur abforbe la partie furabondante de cet: air qui tient laterre difloute dans cette eau; car il s’en faut bien que dans Le trajetique fait cette eau: pour venir à cette petire rivière, elle y laifle un dépôt auffi confidérable à proportion de celui-ci. Il eft vrai aufñ que la chûte de cette eau dans la rivière , en l'éparpillant, lui donne peut-être le moyen de perdre une grande quantité d'air fixe. Roya à une lieue de Clermont, dans les premières montées de la chaîne, eft le village que les étrangers Naturaliftés font difpofés à aller viliter ; non-feulement à caufe des objets de la minéralogie, relatifs au rocher primitif qui s'y trouve, mais encore à caufe des belles eaux qu'on y voit s'affembler par un canal naturel pour venir à Clermont, Ce viliage eft en effer très-remarquable par-là, & l’on peut dire que cetre fource eft une des: plus belles-& des plus abondantes qu'il y ait en France, Cette eau belle & vive, & qui entretient un, grand nombre de belles: fontaines à Clermont, fort du rocher graniteux & fe raflemble dans uneefpèce de grotre couverte -par de la lave bourfoufflée, Elle eft une des plus pures:qu'il y ait, &: il me femble que M. le Monnier fe trompe à cet égard , lorfqu’il dit dans fes Obfervations minéralogiques, faires dans le voyage de M. de Caflihy pour tracer la méridienne de la France , que les eaux de Clermont. participent plus. ou moins. des eaux minérales: Ce favant Médecin n’a-pu, prendre: cette idée que d'après plufieurs petites. fources qu'en. voit çà &, là autour. de Clermont, & fur-tout en defcendanr à Saint-Allyre, Ayant de parvenir à Roya, ou au granit, on trouve-une terre vitriolique 4 SUR L'HIST. NATURELLE ET LES ARTS\ 323 &alumineufe : elle, fe découvre jufqu'à trois pieds de profondeur. C’eit une efpèce de couche qui fuit la difpoftion du terrein, qui s'incline de l'oueft à l'eft. Cerre matière eft colorée par l'ocre, On y reconnoifloir en 2772 que je vilirai cette ere. l’exiftence du vitriol & de l’alun par le goût feul. Nous avons plufieurs exemples de pareilles terres dans le royaume, mais il n'en eft guère dont l'origine paroïfie plus probléma- rique que celle de cemge terre, car rien de ce qui la précède ou la fuit, mannonce fon origine. @e’ qui m'intéreflà bien davantage dans cette promenade minéralogique , fut un filon large d'un pied à-peu-près, & rempli de fpath pefant blanc & laiteux , viible à quelques toifes au-deflus du village , & qui fe dirige du fud au nord, par quart, comme tous les bons filons ; cependant celui-ci ne préfente pas dans la partie qui eft vifible du minérai relativentent à cette belle difpofition , mais quelques grains de minérai de plomb galène difperfés dans le {parh ; lequel s’élevane en 1772 à quelques pouces au-deflus de la furface de la terre, reflembloit affez à une muraille dont on vient de jeter les fondemens , & il traçoic aux yeux la direction du filon (1). ; Après cette vifire, ayant monté un peu plus haut par côté, M. De- larbre, qui étoit alors Curé de Roya , nous montra des veines irrégulières dansle granit qui éroient remplies d’une autre forte de fpath pefant , d'un jaune fombre, à demi-tranfparent, criftallifé très-régulièrement. C’eft cetre forte de fpath que je fs connoître en 1773 comme une nouvelle efpèce, & qui a fervi aux expériences dont on a rendu compte dans un des volumes du fupplément du Journal de Phylique. De-là nous fümes voir les eaux minérales de Saint-Marc , du nom d'une chappelle , qui en eft tout près. Ces eaux très-renommées en Auvergne, forcent directement du granit. Elles ont quelques degrés de chaleur , & cependant elles font très- gafeufes, & tiennent tant foit peu de feren diflolution , qui s’y manifefte tout de fuire par la noix de galle, comme dans celles de Clermont , dont elles ne paroïfloient pas différentes. C'eft ici où je vis la première fois la différence qu'il y a entre les eaux minérales férrugineufes, fpirirueufes & celles qui ne le font pas , & la vérité de l'objection que m’avoient faire MM. les Journaliftes de Gottingue, lorfqu’en parlant de mon Traité des eaux minérales, ils difent que parmi: les eaux ferrugineufes, il s’en trouve de chaudes fans être vitrioliques. Ils en donnent pour exemple une dans 2 (x) Dans ldroche granitique d'Auvergne, on trouve affez communément des veines ou des filons, mais ces: veines ou ces filons ne font cara@érifés en général que par deux fortes de métaux , le plomb & l’antimoine. Les filons où fe trouve l’antimoine font ceux qui fe montrent dans la partie de la haute Auvergne, qui eft comprife entre Saint-Flour, Maffiac & Brioude ; ceux où fe trouvent les minérais de plomb, font ceux qu’il y aentre Brioude, Ambert & Saint-Germain ; & du côté oppofé entre Ponts au-Mur , Pont-Gibeau & Saïint-Sauve , &c, au-delà dans les bordsdela Dordogne. Tome XXXIT, Part, I, 17988, FEY RIER. Q 2 / 124 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, leur pays, qui a quelques degrés de chaleur , & qui eft fort ferrugineufe. Jufques-R je n’avois vu d'eaux minérales ferrugineufes fpiritueufes, que de celles qui font froides, c’eft-à-dire , qui ne paffent pas 12 degrés de chaleur felon le thermomètre de Réaumur , & je me convainquis ici poux la première fois qu’une grande quantité de gaz uni à une bafe, fait la fondtion d’un véritable acide : vérité bien plus frappante dans les eaux du Mont-d'Or , comme nous le verrons dans la fuiregétant beaucoup plus chaudes, Les eaux de Saint-Marc , autre un quätt de grain de fer par pinte, à-peu-près, contiennent de la terre calcaire, du fel marin & quelque peu d’alkali minéral. Douze livres de ces eaux m'ont fourni 2 gros de terre calcaire, 3 gros de fel marin beau & blanc & quelques grains d'alkali minéral. ‘ Etant defcendus de la côte de Saint- Marc , nous vilirèmes mieux que nous n'avions fait jufqu’alors les différentes efpèces de pierres vol- canifées ou laves, qui ont roulé ou fe font raffemblées au bas des côtes, lefquelles bordent les fentiers ou forment des amas ça & là. Nous y en diftinguâmes de toutes les efpèces que décrit mon frere dans fa differtation inférée dans le Journal de Phyfique, tome IV , page 65, favoir, des bourfouflées, des compactes unies ou bafaltiques, de fco- riées rougeâcres & de cendrées , dans lefquelles nous voyons aflez fouvene de petires parties parfaitement fondues de couleur jaune de cire foncée, qui y paraiflent quelquefois comme des chevilles, qu'on y défigne fous le nom de chærl de volcans, pour le difinguer du véritable , de celui qui fe trouve dans le granit, & dans les roches primitives en général, Comme il y a lieu de croire que les produits volcaniques de la-Li- magne d'Auvergne font provenus des terres calcaires fableufes, ar- gileufes ou marneufes, dont étoit formée la cîme des montagnes, en a lieu de croire auñi que les parties font le produit de la fonte des matières purement argileufes & calcaires ; car:on remarque d’après le célèbre Pott , que ce mélange fe fond parfaitement bien & donne un verre tout pareil à celui de ce prétendu chærl, & qui comme celui-ci eft d'autant plus où moins coloré ; qu'il fe trouve +dans le mélange dont il réfulre plus ou moins de:fer. Le: verre ou !fcorie a la même propriété de ne pas fe: confondre avéc Id’autre qui: n’eft pas parfaitement fondu ; ce qui peut rendre raifon de la diftinétion qu'obferve la matière dont nous parlons dans celle où elle fe trouve engagée. Du lieu dont nous parlons ,'noûs vinmes nons repofer dans le perit village nommé Chamalière, à un quart de lieue de Clermont , dans la maifon de plaifance de M, l'Abbé de la Batifle , dont la cave étoit renommée par rapport à l'air fixe, dont elle éroit continuellement remplie, que l'on regardoit alors comme des vapeurs moffétiquis. Les lumières s’y éteignoient biensvite, lorfqu'on y étoit avancé de qt elques » Pr | “ . SUR L'HIST. NATURELLE ET LES ARTS. 125 pas, quoique les portes en fuffent ouvertes ; ce qui prouve qu’il y avoic des émanations continuelles de cette vapeur de tous côtés. M, Ozy qui avoit déjà fait connoître ce phénomène, & qui avoit eu l'hon- nêreté de m'accompagner dans ce petit voyage, m'avoit averti de ne pas trop m'y enfoncer; mais voulant tout voir & tour connoître par moi-même, & cela dans un tems où la connoiflance des airs n’avoic pas fait encore beaucoup de progrès , je parle dés années 176$ & 1772, je fus aflez téméraire de ne pas me régler d'après cet avis, & dans moins d’une minute jy perdis prefque connoiflance & tombai en dé- faillance ;°ce jour là c'éroit felon le dire du jardinier un mauvais jour, car ii eft bon d'obferver qu’il y avoit certains jours où cette cave étoic plus remplie d’air fixe que d'ordinaire , & ce jour, qui étoit fombre, en étoit un; il eft encore on de remarquer que cette cave, maloré les pernicieux effets de cet air , étoit remplie de tonneaux de vin, & que ce vin s’y confervoit mieux que dans beaucoup d’autres, & y étoit meilleur, ce qui ne peut être attribué qu’à l'influence de cet air, qui, comme on le fait maintenant, empêche la fermentation , & rétablie jufqu'à un certain point les vins gâtés, qui ne le font que parce qu'ils font privés de ce principe. M. Ozy avoit déjà fait obferver que de Valkali fixe ou minéral, diflous dans une füuffifante quantité d’eau , fe criftallifoic dans cette cave en très-peu de tems, ce qui venoit comme on le fait bien encore, de ce que cet air fixe fe combinoit avec cer alkali; mais cet effet étoit en 1765 un phénomène très-extraordinaire; & comme M. Ozy vouloit me le faire voir, il avoit apporté avec lui une demi-livre à-peu-près d’alkali fixe bien pur, que nous fîmes diffoudre dans de l’eau de Roya très-pure , & l’ayant expofé ainfi dans üne ter- rine au milieu de cette cave, en recommandant bien au jardinier de ne pas y toucher, nous y revinmes au bout de trois jours, & nous trouvâmes notre fel alkali en beaux criftaux tranfparens & reffemblans aflez au fel de Glauber, mal conformé & criftallifé tumultueufement. Comme tout étoit fec dans cette terrine, nous l’emportâmes ainfi à Clermont, couverte fimplement d’un linge : rendus chez M. Ozy, nous fîmes quelques expériences fur cer alkali pour en reconnoître les pro+ priétés particulières. Ces expériences fervirent à nous faire connoître que l'air fixe pouvoit fe ‘combiner par excès avec l'alkali, & que c’eft dans cet état feulement que l’alkali fixe fe criftallife en criftaux folides & permanens, & fufceptible de fe conferver aufli long-tems qu’on le defre, pourvu qu'on le tienne fermé dans un flacon, La montagne de Gergovie ou Gergovia, comme elle eft nommée dans les commentaires de Céfar, eft une vafte montagne volcanique ui fe préfente devant Clermont, au midi, fous la forme, d’un pain a fucre. Cette montagne eft ordinairement un objet de curiofité pour les émangers. On fe tranfporte de-là dans le téms ancien pour fe D" FT y 126 OBSERFATIONS SUR LA PHYSIQUE; reflouvenir du malheur des Auvergnats; car c’elt ici où a enfin expiré leur liberté, long-temps foutenue contre les Romains; les pierres que l'on y voit tracent leur malheur & leur conftance , car la difpofrion de ces pierres fait connoître l'utilité donc elles ont éré (1). Ce font toutes pierres de laves, mais dans aucune je n’ai trouvé de la zéolite annoncée par M. Pafumor, mais feulement dans les croûtes cendrées qui couvrent en quelques endroits cette montagne , comme tant d’autres de cette province , des petites parties de fpath calcaire vacquillés & reflemblant aflez au gyps en filet, & entièrement foluble dans l’eau forte ; ce dont nous parlerons plus amplement, lorfque nous décrirons les environs de Vie-le-Comte , où cette matière fe trouve bien plus abondamment, + F Reveaus à Clermont nous fuivimes la grande route qui va de cette ville au Pont du Château, placé directement fur l'Allier. Nous nous arrêtâmes au petit monticule volcanique, très-connu par la fource de piffaphalte qui sy trouve, C'eft une fource d'eau froide qui amène avec elle cette matière, d'abord très-tenue & qui s’épaiflit enfuite peu-à-peu en perdant fes parties fubriles, & ne fe trouve plus au bout de quelques jours qu'une matière tenace , & reflemblante à de la poix (2); cette eau amène aufli des petites pargies de verre fphériques qui reffemblent à des perles. Outre la fingularité de cette fource que l'on connoît depuis long-temps pour être toujours la même, on a d’abord de Ja peine à comprendre comment il exifte là un monticule formé de roches volcaniques ou laves, car il eft éloigné de beaucoup de toute mon- tagne qui ait pu le produire; il eft vrai que l'on voit à travers. le chemin® comme une coulée de lave qui s'étend à la droite & s'élève comme le terrein, ce qui fait foupçonner que la montagne qui l’a produite étoit de ce côté là. De ce lieu prenant à droite, je fus au village nommé Lampdes , où le terreau volcanique eft un des plus épais & des plus fertiles de l'Auvergne. Je moritai de-là fur la très-vafte montagne, à laquelle eft LA . (x) C'’eft une erreur de Piganiol de la Force & d’autres Géographes, de croire que Clermont ait été placé jadis fur cette montagne, Outre que la plature de cette montagne n’eft pas aflez grande pour y établir une ville tant foit peu confidérable , on n’y auroit eu aucune commodité de la vie, fur-tout de l’eau , qui eft l’effentiel pour l'exiftence des hommes, Il y a bien plus d'apparence qu’il y avoit-là une efpèce de fort ou de camp fortifié, où les Clermontois fe retirèrent lors de l’invañon des Romains, (2) Ce bitume a fait le, fujet d’un fort bon Mémoire de M. Ozy, lu dans une affemblée publique de l'Académie de Clermont, Ce Mémoire ef refté inconnu comme tant d’autres de nos Académies de Province , dont les travaux font ignorés faute de publicité. L’Auteur de ce Journal avoit invité dans l’origine ces Corps à lui envoyer leurs Mémoires, pour les faire paroître peu-à-peu dans ce Journal, mais cette invitatjon eft reflée inutile, - L.d a . L x \ x SUR L’'HIST. NATURELLE ET. LES ARTS. 127 adoffé de l’autre côté, un des plus grands villages de la baffle Au- vergre, nommé Cornon. Je vis dans ce trajec beaucoup de petites couches de pierres calcaires, ternes & blanchâtres, & je compris alors pourquoi tout ce terrein elt fi fertile; mais je ne vis dans la pâte de cette pierre aucune partie de coquilles ou de madrepores ; certe efpèce de pierre eft marneule, c'eft-à-dire qu'elle contient une partie argileufe, comme toutes celles de la bafle Auvergne; elle me parut de la plus haute antiquité, & de la même efpèce que celle qui a été fondue par le feu des volcans & qui forme vraifemblablement cette matière vi- trifiée qui fe diftingue dans les laves , ou qui forme les pierres bafal- tiques homogènes , au fujet defquelles nous reviendrons dans la fuite, Le fommet de la montagne de Cornon n'eft point garni de pierres bafaltiques , comme tant d’autres , elle paroît détruite dans cette partie, & l’on n'y voit plus que des terres pouzzelaniques graveleufes qui font ftériles. Je donne cette montagne comme un exemple de beaucoup diautres femblables de la baffle Auvergne & comme étant de la plus haute antiquité , & comme étant appuyée fur le granit, qui ne fe trouve néanmoins qu'à une très-orande profondeur, & qui ne fe voit même que dans le fond du canal de Allier, qui court au- deflous de cette montagne au Îevanr. De-là pour revenir fur la grande route qui fuit la vallée de la Limagne , on traverfe une des plaines les plus fertiles de l'Europe, c'eft vifiblement le fond d’un grand lac, où les eauxamenoient de toutes les montagnes voifines le terreau fin & le dé- tritus des pierres volcanifées; quand on a traverfé cette plaine, & qu'on eft revenu fur la grande route , il faut revenir à la vue de Clermont, à une petite demi lieue de cette ville, pour y confidérer un des plus grands amas ou courants de lave qu'il y ait en Au- vergne. Cette lave eft bourfouflée & cendrée , & fi épaifle qu’elle hauffe le terrein confidérablement , pendant plus de deux cents toifes d’étendue, tant en largeur qu’en longueur ; on ne connoît pas l'origine de ce courant, & on eft obligé de fuppofer que la montagne ou les mon- tagnes qui l'ont produit, n'exiftent plus; tout ce rerrein couvert d'ex- cellentes vignes, laifle voir de ces mafles ou roches volcaniques , en- taflées les unes fur les autres, & qui femblent s'être refroidies avant d’avoir eu le tems de s’affaifer & de couler plus loin, ce qui fait fup- pofer que cette partie de l'Auvergne étoit fous les eaux , quand ces laves y ont été lancées. Nous donnerons encore ce courant de laves bourfouflées | comme un autre exemple detant d’autres qui fe voyenc dans la Limagne d'Auvergne, &° que nous ferons .connoître à mefure que l'occafion s’en prélentera, à caufe de leur différencé & des parti- cularités que je pourrois y remarquer, De-là jufqu'à Vaires, village placé dans un fond fort agréable , entre la montagne de Montons & celle de Coran , on a de petites montées & LA . ï un s 198. OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, defcentes formées par des courants de lave on débris de montagne , qui comme celui dont nous venons de parler, viennent de la droire ou de l’oueft à left. Ils fe terminent à quelques toifes du chemin ; ces courans font couverts par le terreau, & l'on ne s'en apperçoic qu’autant qu'on examine leur direélion, & que l’on en voit faillir de tems en tems les pierres. La montagne fur laquelle eft afis le grand village nommé Mon- tons, n'ayant rien de plus remarquable, & étant de même nature abfolument que celle de Cornon, nous allons nous occuper de celle de Coran, la plus belle, la plus riche, & une des plus grandes de ia baile Auvergne. Cette vafte montagne de 2 lieues & demie de cir- conférence, à-peu-près , eft rout-à-faic fur le canal de l'Allier, & porte bien vifiblement fur un fondement graniteux , que l'on peut voir fort aifément fur le bord de cette rivière. Pour parvenir à cette bafe, on pañle par Vaires, & on fuit ce fond admirable par fa fertilité, où fe trouvent les martres de Vaires , un des plus beaux -& le, plus riche village d'Auvergne fort renommé par la production de fes excellentes pommes de reinette, qui fourniffent les marchés de Paris. En arrivant fur le bord de l’Allier, on voir d'abord un banc ho- rifontal de granit fecondaire qui porte fur le rocher de granit pri- mitif & vif qui fait tout le fond de cette rivière; le banc que l'on voit fe prolonger fort avant fous les vignes & fous la montagne de Coran de 10 à 15 pieds de hauteur; il en fort deux fources prin- cipales d’eau minérale, auxquelles nous allons nous arrêter un inftant. La première de ces fources eft affez près de la bafe de la montagne du Coran , & porte les noms des martres de Vaires ou du tambour, parce qu'on entendoït autrefois bouillonner les eaux dans le rocher, ce qui n'a plus lieu aujourd'hui, qu'une partie de ces eaux ne fort plus par le même trou, & s’eft frayée d'autres iflues çà & là dans les fentes naturelles du rocher ; j’en ai compté 7. Elles fe font connoître par leur dépôt ocreux & calcaire qu’elles forment fur le rocher en fortant, ce qui fait voir clairement combien ces eaux font minérales ; douze livres de ces eaux m'ont fourni 2 gros & demi de terre abforbante, demi-gros de fel marin, & un gros de fel alkali minéral affez blanc. Ces eaux fe colorent avec la noix de galle, en un vin rouge ordi- naire, & j'eftimai la quantité de fer qu’elles contiennent à un quart de grain par pinte. L'autre fource beaucoup plus confidérable , vient de bas en haut , fur une furface plane À 100 toifes à-peu-près plus bas dans une vigne. Le dépôt que cette fource y a fait efl fi confi- dérable , qu’elle y a formé déjà un petit monticule, d’environ une toife & demie de diamètre, au travers duquel on voit l'eau fourciller par plufieurs ouvertures qu’elle s’eft confervées. Cette eau a quelque degré de chaleur au-deflus du tempéré ; en marchant fur ce petit mon- " ticule, dit Le] SUR L'HIST. NATURELLE ETLES ARTS. 12 ticule , on fent de la chaleur fous les pieds, &le gaz fpiritueux qui s’en élève eft fi ahondant que le nez en eft affecté, à-peu-près comme il le feroit dans une vinée où la fermentation du moûc feroit en train. Cette eau me donna fur la même quantité.que ci-deflus, 3 gros de terre abforbante, 1 gros de fel marin fort beau , & un demi-gros d'alkali minéral ; il n’eft guère poilible de trouver d’eau minérale plus chargée que celle-ci, Après l'examen de ces eaux, je revins fur mes pas & fuivis le banc de granit, jufqu'au pied de la montagne de Coran. Mon frère, qui m'accompagnoit, m'ayant fait remarquer une forte de fpath calcaire aiguillé, & tout-à-fait femblable au gyps jaunâtre, nous nous y ar- rêtâmes , il étoit un peu au-deflus de la première fource dont nous venons de parler. Dans une des ouvertures de ce rocher, j’enlevai un beau morceau de ce fpath , fi pefant, ficompacte, eu égard aux autres fpaths de cette efpèce, que j'y fus trompé d'abord, & que je Le pris pour toute autre chole; mais un morceau mis dans de l’eau forte, y ayant été diflous totalement, & l'ayant converti enfuite en gyps, en y verfant de l'acide vitriolique, ce morceau, dis-je, me le fit connoître pour ce qu'il étoit véritablement, je veux dire un fpath calcaire, mais fort différent des autres par le viflu & la forme extérieure (1). A côté de cette matière calcaire, il y en avoit une autre de même nature; mais terne, terreufe, de même couleur, fur laquelle il y avoit du bi- tume, noir fec & luifant, qui mis fur les charbons ardens , répandoit une odeur qui n’éroit pas défagréable. A l’occafon de ce banc de granit fecondaire , divifé horifontalement en plufieurs couches, nous ferons remarquer qu'il n’eft pas le feul au long des bords de PAllier ; il s’en voit fur-tout un bien plus confi- dérable encore par fon épaifleur, en face du château de Chadieu , à une demi-lieue plus haut ; il a en quelques endroits plus de 30 pieds d’épaifleur. Au furplus nous pouvons dire que cette roche reflemble au granit primitif & général de cette province, il eft gris & ne paroît être compofé que de deux fortes de quartz d'un gris & d’un blanc; entre-mêlé de parties chyteufes. # Les premiers pas que nous fîimes pour monter fur la montagne de Coran, nous firent appercevoir d'abord Jes anciennes parties terreufes calcaires & marneufes blanchâtres , qui formoient jadis feules toute (x) C’eit une chofe remarquable que le caraêtère général du fpath calcaire d'Auvergne , foit d’être par-tout aïnfi aiguillé & d’une couleur jaunâtre. Nous aurons occafon d’en voir d’autres dont les aiguilles font difpoftes en rofe, ou divergentes du centré à Ja circonférence , & par-là très-refflemblans à la zéolite, avec laquelle je J'ai confondu d’abord; ce qui eft une nouvelle preuve qu’il ne faut pas s’en rapporté à la configuration des corps pour juger de leur nature, Tome XX XII, Part. I, 1788. FEVRIER. R lb “50 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, cette montagne , c'elt-à-dire avant que le feu des volcans en eût con- verti une grande quantité en laves ; à mefure que nous montions, cetre verre fe perdoit , & après deux cents roifes à-peu-près, nous nous trouvâmes tout-à-faic fur la partie volcanifée, formée & couverte en- tièrement de roches bafalriques , cylindriques ; rondes & autres, en- taflées les unes fur les autres, & entremèlées de terre grafle & noire, provenant de la décompoftion de ces pierres. A mefure que nous avancions vers le village de Coran , placé direétement fous le couron- nement de cetre montagne , à l'efl, nous voyions plus diftinétement Je beau fpeîtacle de pierres bafalriques , rangées les unes à côté des autres comme des tuyaux d'orgues , & formant une efpèce d’enta- blement de 40 à $O pieds de hauteur. Cette rangée de pierres ba- faltiques r'eft pourtant pas la plus régulière que l'on puifle voir fur Jes montagnes d'Auvergne, nous aurons occafion d'en voir de plus belles encore , mais nous aurons occafion aulfi d’en voir qui ne le font pas autant, On y voit des colonnes rompues ou difloquées, & d’autres qui fonc fort bien emboîtées les unes dans les autres ; les unes droites & les autres penchées, & formant des paquets penchés à droite ou à gauche. Ce fonr les éboulemens fréquens qui fe font faits de cet entablement ;. qui ont couvert la furface de cette montagne, & vraifemblablement ju'qu’à une très grande profondeur, ce qui fait fuppoler que cet en- tablement étroit bien plus étendu qu'il n’eft aujourd'hui & que cette: montagne volcanifée eft de la plus haute antiquité. Quand on con- fidère ce village, bâti bien enrendu entièrement avec des tronçons de: colonnes bafaltiques, on eft étonné de la hardieffe des hommes d'aller fe loger fous cette corniche , qui menace à tout moment de les écrafer ; mais en cet endroit fe trouve ur.e efpèce de plateau penché , où les eaux fe rendent comme vers la partie Ja plus abaiflée de la mon- tagne , ce qui a pu porter les propriétaires des vignes qui couvrent cette belle moragne à s’y érablir. . Après ces conlidérations, nous vinmes fur Ja montagne, par un: fenrier rès-commode, formé en efcalier fur les pierres bafaltiques ; nous eûnies alors la vue d'un des plus vaftes plateaux & des plus beaux qu'il y ait fur aucune montagne d'Auvergne, d’où l’on voit tout le baflin de la Fimagne, quoique cette montagne ne foit pas des plus hautes de cerre partie de l'Auvergne ; ce plaréau, de demi-lieue de circonférence à-peu-près, n'eft pourtant pas per- tout uniforme, & on fent bien qu'il ne peut pas l'être, en confidérant qu’il a dû exifter deffus des bouches de volcans, dont les déjections ont dû donner à droite & à gauche des amoncelemens confidérables. En effet, on y voit des élévarions plus ou moins grandes, & qui rendent ce plateau très-inépal , formées par les laves , qui font ici en petites pierres de dif- ‘ D } SUR L'HIST. NATURELLE ET LES ARTS, 2x férentes formes & figures, & qui furmontent les colonnes dont nous venons de parler de plufeurs toifes ; cés pierres détachées ont donné Ja facilité de les enlever & d’en former des tas pour laiffer la furface du terrein libre, que l’on y cultive, chofe fort extraordinaire & rare fur de pareilles montagnes. La terre qui sy; trouve eft le produit du détritus de ces pierres, occafionné par l'air & l'humidité, ce qui faie efpérer qu’il augmentera continuellement, & que ces terres deviendront de plus en plus fertiles. Dans les parties bafles de ce plateau , à caufe de cette terre grafle, & vraifemblablement aufli à caufe de la jonction exacte des colonnes bafaltiques qui font deflous, il fe trouve des affem- blages d'eau ou mares, qui ne fe defféchent entièrement que dans les grandes chaleurs de l'été. Je confidérai tout cela malgré l’ardeur du {oleil , dont il n’eft guère poflible de fe mettre à l’abri faute d'arbres ; lorfque mon frère impatient de me montrer une des plus importantes découvertes qu'il ait faites fur les montagnes de fon canton, me con- duifit promptement au midi de ce plateau, prefque fur fon bord ; c’étoit pour m'y faire voir une bouche de volcan très-fraîche encore; cette bouche a 27 pieds à-peu-près de largeur & à-peu-près le double de longueur ; elle eft un peu circulaire & paroît fe reflerrer en deflous comme un entonnoir. Ses parois que l'on voit de $ à 8 pieds de hauteur, font formées d'une lave rouge colcotarifée , bourfoufée & égoutée de,haut en bas, comme une matière en fufion qui s’elt figée avant de tomber; on voit aufli fur un de ces côtés au midi, le reftant de fa dernière déje@ion, fans doute , arrêtée en grande partie fur le bord de la montagne. Elle confifte principalement en:chærl luifant , & d’un beau noir, & fe divifant facilement en criftaux réguliers , affectant la forme otogone ou l'octaëdre ; ils font ternis dans les parties où ils ont été joints l'un à l’autre par de l'ocre rouge. Comme c'étoit la plus belle production volcanique que j'eufle vue en Auverone, jen aurois rempli entièrement mes poches , fi l’ardeur du foleil & la faim ne nous euflent avertis de defcendre promptement de la montagne, Nous fuivimes pourtant autant que nous pümes les traces des coulées de ce petit volcan par le fentier le plus rapide & le plus difficile qu'il foic poffible de fuivre. | ] ! A" Quand on a vu comme moi à-peu-près tout ce qui refte de traces de cratères fur les montagnes d'Auvergne ,on.ne peut guère fe refufer de reconnoître celui-ci comme le plus moderne de tous ; & c’eft en celà que l'obfervation de mon frère eft vraiment importante. Par la même raifon on ne peut lui affigner aucune des époques où les autres volcans ont été en action, volcans que lon peut confidérer comme des plus anciens du monde, fi on fair attention à leur état de vétufté, & au filence des plus anciens écrivains , qui paroïflent en avoir ignoré totalement l'exiftence, Celui-ci ne peur pas même être regardécomme contemporain de celui, ou Tome XXXII, Part, 1, 1788. FEVRIER. R 2 x32 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, de ceux qui ont produit le fommet immenfe de cette vafte montagne, puif- qu'il n'y exifte pas d’autres cratères. l ne peut être regardé que comme un petit volcan fecondaire, tel qu'on en voir fur le mont Ethna & autres montagnes volcaniques qui commencent à s'éteîndre. Mais de-là naît une difficulté qui n’eft pas petite, c'eft de favoir comment ce petit volcan a u Ctre entretenu, quand Ja caufe qui a fait fubfifter les autres , a été détruite depuis long-tems. Car il ne faut pas chercher la caufe de ces feux dans des pyrites & autres matières qui contiennent des fubftances inflammables , caufe miférable pour des effets fi grands & fi permanens, que la feule idée fait voir tout de fuite, l’extrème ignorance ou la fimpli- cité des Chimiftes qui l'ont imaginée, Il faut en chercher la caufe dans une matière plus commune, plus abondante & plus permanente ; & de routes les matières, il n’y a que l’eau , comme nous l’avons expliqué ailleurs , qui puifle être regardée comme cette caufe. Aufli voyons-nous qu'à mefure que la mer fe retire & que les pays fe defsèchent , les volcans s'éteignent. Il me femble donc que je trouvai Pexplication de la durée de celui-ci, dans un lac qui exifte encore dans la partie du terrein le plus. ‘creux de ce plateau, qui vraifemblablement ef l'emplacement d’un ancien cratère, & Le principal de cette vafte montagne. Cette eau pouvoir fore bien s'introduire dans le foyer de ce petit volcan, & en entretenir leseffets,,. tandis qu'il étoit encore échauffé par le feu des anciens volcans de la montagne , & qu’il étoit en état de mettre-l'eau en vapeurs à mefure qu’elle s’y introduifoit. C’eft ainfi qu'on peut expliquer la caufe des petits volcans qu’on voit fur le mont Ethina, & fur les montagnes des Cor- dillières, c'elt-à-dire , par les eaux des neiges & les napes d'eau qui sy trouvent. ; LETTRE DIE ME D EL UC: A_ M DE LEA MÉTHERTE: SUR L'HYGROMÈTRE DE BALEINE. . Moxsieur; Je ne pourrois choifir un moyen plus naturel d'informer les Phyficiens des objets d’hygrologie auxquels je fuis ramené, qu'en vous priant d'admettre cerre Lettre dans votre Journal, qui contient & l'hiftoire de ce que j'ai déjà publié fux ce fujet, & le motif de mes occupations actuelles. SUR L'HIST. NATURELLE ÉT LES ARTS. i33 M. l'Abbé Rozier y plaça en 1775 l'Effai d'Hygrométrie que j'avois pré- fenté à la Société Royale de Londres en 1773: vous me fîtes vous- même l'honneur d’y admettre au mois de juin dernier , le chapitre de mes Taées fur la Météorologie qui concerne l'hygromèrre; & vous y impri- mâtes au mois de novembre mes remarques {ur la Relarion publiée par M. de Sauflure de fon Voyage à la cime du Mont-Blanc ; à la fuite defquelles , après avoir rapporté quelques nouvelles expériences hygromé- triques , je faifois mention d’autres expériences dont j'étois occupé, C'eft ce dernier objet que je vais reprendre ici , après quelques remarques fur mon hygromètre. À la fuite de l'extrait de mon Ouvrage dont je viens de faire mention , vous donnâtes, Monfieur , d'après M. Hurter , la defcription d’un inftru- ment de cette efpèce, à laquelle je vais d’abord ajouter un mot. C’eft celui de mes hygromètres où la bandelette de baleine, paflant fur des rouleaux, revient vers le point où elle eft fixée, & fait mouvoir un index au centré de Ja machine, qui prend ainfi la forme d'une montre. J'ai deftiné cet inftru- ment aux ufages ordinaires; parce qu'il peut être placé fans rifque dans les appartemens, les magafins , les ferres où il deviendra très-utile. Nos fenfations noustrompent fouvent fur le degré d’Aumidité, en le confondant avec celui de la chaleur & avec d’autres modifications de l'air : & dans nombre d'objets relatifs à la fanté , au commerce , aux arts, à l'économie, il importe plus de faire attention à l’Aygrométre , qu'au thermomètre & au baromètre , inftrumens fi communs aujourd'hui. Vous avez reconnu ; Monfieur , que cet inftrument étoit très-mobile, malgré les plis de la baleine. Et en effer, l'expérience m’a tellement rafluré contre ces plis, que je n'ai point craint leur multiplication, en portant la baleine elle-même jufqu'au centre de l’inftrument: par où il n'excède guère la groffeur d’une: montre de poche. En finiflane mon dernier Ouvrage, je fis mention d'un autre hygromètre , qui a été aufi exécuté par M. Hurter: il eft deftiné aux opérations chimiques, lorfqu'il importe de connoître s’il s’y produit de Feau cu s’il en difparoit ; & que la chaleur n’eft pas affez grande pour altérer l’hygromètre. La fi. 2, PL. 1F, repréfente cet inftrument vu de face & de grandeur naturelle, aaaa elt un cadre de laiton , réuni par derrière à un cadre femblable. La ligne pon@tuée c, Bbb b, d , repréfente la coupe de la baleine , fixée en c à une vis de rappel, paflañt en 22BD fur des rouleaux, & fe réuniflant en 4 à une lame métallique. J'emploie à cet ufage, la lame d'argent doré qu'on fabrique pour le galon. Cerre première lame , d,e, f, pafle en e furun rouleau, & vienr en f fe joindre à la pièce mobile g du vernier 2 À À k. Du haut de cette même pièce, en #, part une feconde lame, fixée par {on autre extrémité à uneypoulie #. Cette poulie eft portée par un même axe , avec une plus petitélpoulie 7, d'où part une troifième lame, qui va fe fixer à l’extrémité fupérieure d'un double 134 OBSERVATIONS SURLA PHYSIQUE,. levier », 7. Enfin, le petit bras » de ce levier eft preffé par un reflort, qu'il faut fuppofer ici, parce qu'il auroit été difficile de le placer fans confufion dans la figure. On concevra aifément, que lorfque la baleine s’allonge par l'augmentation de l'humidité, la pièce mobile du vernier s'élève par l’action du reflort ; & vice versa, Cette action , fenfiblement la même dans toute la variation de l’inftrument , s'exerce fur la baleine comme celle d’un poids d'environ demi-once. La fig. 3 repréfente l'infirument vu de côté. aa, bb font les coupes des deux cadres, réunis par deux, pièces c, c, auxquelles ils font fixés par des vis. d d'indique la bandelette de baleine vue de face, & e,e deux des rouleaux fur lefquels elle paffe au haut de l’inftrument. On voit en f l'équipage de la vis de rappel: c’eft un petit cadre, auquel la baleine eft fixée, & qu’on peut faire mouvoir par la vis. Enfin, la place du reflort eft indiquée en gg. Cet inftrument , déjà bien court , fera encore raccourci d'environ demi-pouce, dans une conftzuétion à-peu-près femblable, où la baleine , toujours de même longueur, viendra elle-même fe réunir à la petite pièce du vernier. Car il eft fi mobile, malgré les quatre plis de la baleine , que jene crains pas d'y en ajouter un cinquième, fur le rouleau e, fig. 2 + Quoique cet inftrument foit en effet très-mobile, & que je le croïe pro: pre à fa deftination, ce n'eft pas par lui que des queftions relatives à l'Aygro- métre en général peuvent être convenablement décidées. €ependant il n’y avoit que celui-là à Genève quand M. de Sauflure revint du Mont-Blanc ; &il n’y étoit arrivé que durant fon abfence; de forte qu’il n’avoit eu pro- bablement que le rems de le voir & en d’autres mains, quand il publia fæ gelation. Auf fus-je d’autant plus étonné de la aote tranchante, par laquelle il-condamnoic mon hygromètre ; comme ux inflrument vicieux & trompeur. Si M, de Sauflure favoit douter quand il critique , il auroit peut-être penfé qu'un Phyficien que l'on fait être occupé d’hygrométrie depuis feize ans, après s'être convaincu par de longs travaux combien elle eft importante pour la météorologie; qui, fans entrer dans les détails de fes recherches ( parce que ce n'étoic pas alors fon objet) en avoit dit aflez pour montrer qu'il ne s'étoit pas décidé à la léoère ; qui annonçoit même la continuation ‘de ces recherches, & un autre ouvrage dont elles feroient l’objet principal, pourroit bien répondre à des objections nées avant la connoiflance de l’inftrament lui-même , & par conféquenc /ans aucune épreuves Frappé donc du ton que M. de Sauflure prenoir fi légèrement avec moi, quoique je n’y eufle jamais donné lieu, & malgré des égards qu'il devoig {entir mieux que perfonne , je voulus tâcher de l'amener à une difcuffion plus paifible MiGtee l'occafion de fon voyage , pour lui donner de nouveau (non En fatteur, mais en ami du vrai) les éloges que je lui crois SUR L'HIST. NATURELLE ET LES ARTS. 135. dus, & en faifant mention de fa more, & de quelques autres parties de fa relation (fur lefquelles je fuis loin de lui donner des éloges) fans en montrer aucun reflentiment. Tel fut, Monfieur , le motif, fi je ne me trompe, bien évident de ma lettre du 8 octobre ; que vous avez inférée dans votre cahier de novembre. Un voyage l'avoir rerardte contre mon gré, & enfuite, l'abfence d’un de mes amis, à qui je ladrcilat à Paris, pour être plus sûr d'une prompte publication. Depuis que la haleine prife es travers de fes fibres s'eft difinguée entre toutes les fubftances hygrofcopiques que j'avois fongé à éprouver 5 fans perdre de vue les autres, je n'ai pas ceilé de travailler fur la première , à mefure que mes expériences l’ont exigé. Jai dit dans mon Ouvrage, que la grande expan/fibilié de cette fubitance , & la fexiré de fon expanhñon dans l’eau, écoient les deux propriétés qui m'avoient déterminé pour elle; mais je dois faire remarquer plus particulièrement ici, que c’eft la dernière de ces propriétés qui donne du prix à la première. J'ai trouvé nombre d’autres fubftances; la plume, par exemple, livoire, les cheveux, qu'on peut amener à conferver une même longueur dans leax fous un même poids ; mais il faut quegepoids n'excède pas certaines limires , fans quoi elles s'étirent de plus e s à chaque nouvelle immerfion. M. de Sauflure l'a éprouvé à l'égard des cheveux : & c’eft-là une des circonftances qui m'a pris le plus de rems dans mes.effais fur d’autres fubflances. Mais à l’égard de la baleine prife en travers des fêbres , pourvu que le poids foit fuffilant peur la tenir tendue, qu'il ne foit pas capable de la rompre, & qu'il demeure à-peu-près le même, elle revient toujours à la même longueur dans l’eau ; ce qui m'a rafluré contre la crainte d’un tiflu trop lâche, & par-là peut-être capricieux {rel que celui des membranes) , crainte qui naît naturellement de la grande expanftbilité de cette fubitance. C'eft donc par-là , comme je viens de le dire, que cette propriété acquiert du prix à plus d'un égard. Mais l'expérience m’a prouvé, qu’il ne fuffoit pas de faire des bande- lettes quelconques de bañeine prife en travers , & de les placer dans des montures qui en indiquaflent a longueur a@uélle, pour en faire de bons hygromèrres. Plufieuis confidérations, dans lefquelles je n’entrerai pas ici, m'ont fucceflivement obligé à chercher de plus en plus les moyens de les rendre & minces & étroites. M. de Sauflure a eu {ur moi un grand avantage à cet égard (fi c’en eft un que de trouver trop de facilite dans fa première route, & d’être difpenfe par-là de regarder à chaque pas autour de {of objet). La nature lui a fourni dans le ckeveu un fl hygro/copique tout préparé : au lieu que je n'ai pu obtenir des f£/s de baleine en travers, que par une gradation très-lente. Mais enfin jy fuis parvenu ; & je fais maintenant ces f£/s, avec autant de facilité & de sûreté, que mes Pande- lettes minces; ou plutôr , ce font celles-ci que je coupe en d’autres bande= letres, fi étroires, que j'en ai de dix pouces de long , qui ne pèfenc qu'Æ » 2 i 138. OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, de grain. Cependant elles font très-fortes. Je ne les tiens tendues que par un reflort dont d'effort eft égal à celui d'un denier, parce qu'il ef fuffifant : mais elles fupportent un beaucoup plus graud poids , & elles peuvent être employées fans difficulté aux ‘hygromètres à rouleaux , dont j'ai parlé ci-deflus, é Ayant fait ce pas eflentiel dans la conftruétion de lhygromètre , j'ai repris les expériences fondamentales fur les autres objets qui concernent cet_inftrument , & je travaille à un ouvrage d'hyvrologie élémentaire, divifé en divers mémoires, dont je vais, Monfeur , vous indiquer les titres, ‘ Premier Mémoire. De l'Humidiré & de V'Evaporation. 1. De {a manière dont les /ubflances hy/grofcopiques fibreufes font affe@ées par l'Humidiré. WI, Defcription de l'Hygromérre employé aux expériences rapportées dans les Mémoires fuivans. IV. De l’'Humidire extrême. NV. De la Sécherefle extrême. VI. Des marches de diverfes Subflances hygrof- copiques par les mêmes changemens de l’Humidité. VII. De la Marche particulière des Cheveux. VIII. Des expériences de M. de Sauflure pour déterminer les rapports de l'Huridité réelle avec les Degrés de fon hygromètre, & de la didiculté d’une telle din. IX. Critique de Lhygromètre de baleine. Ce dernier objet, comme je le difois déjà dans ma lettre du 8 octobre; eft un de ceux dont je m'occupe, & que je me propofe de traiter avec le plus de foin, parce qu'il me paroît renir à des points intérefflans de phyfique générale , indépendamment de fes rapports avec l'hygrologie. C'eft pourquoi aufli je n’entreprendrai de le traiter, que lorfque je ferai parvenu à donner un desré fu&{ant de probabilité à mes conjectures : de forte qu’il pourvoit bien devenir le fujet d’un traité à part: & au contraire les objets des deux premiers mémoires me font devenus fi familiers, que je me propofe de les publier bientôt, pour donner une première idée du plan de cet Onvrage, É Ma lettre, Monfeur, devroit d’abord fe borner à cette annonce de mon nouveau plan , mais la feuille du Journal de Paris du 4 de ce mois m’eblige à l’étendre davantage ; car Les plaintes de M. de Sauflure fe multiplient ; & comme elles fout fententieufes, elles fe répètent aifément & rerentiffent par-tout. J'ai trouvé dans certe feuille, une nouvelle lettre de lui, qui me regarde, & dont voici le débur: « Genève le 23 décembre 1787. » Mefñieurs, c’eft M. de Luc qui fe trompe quand jl dit, que le cheveu, » alors lâche, pouvoit s'appliquer contre les parois humeëées de la bote >» dans [laquelle je plaçai mon hygromètre fur la cime du Mont-Blanc. »> Mon hygromètre étoit fufpendu au milieu de cette boîte ; le contre- » poids exerçoit librement fon action fur le cheveu, & celui-ci n'étoit >» ni lâche, ni appliqué contre les parois », J'ai cru d'abord n’ètre trompé réellement ; car, comment en douter, après une aflertion fi poñrive ! Cependant \ SUR L'HIST. NATURELLE ET LES ARTS. :1;,7 Cependant cela fe réduit à ce que Je ne Juis pas devin. J'ai relu le paflage dont il s’agit , & voici ce qu'A porte, ( Relat. d'un voy. à la cime du Mont-Blanc) « Hygromètre. J'en avois deux ; je commençai par les > renfermer dans urè boîte humeëée (x). Is y vinrent, comme dans la » plaine, à {eur terme d'humidité extrême ». Les mots que j'ai mis eu italiques , font les feuls de la relation qui aient rapport à l'objet préfenc, & c'eft à leur fujet que M. de Sauflure avoit mis en note: « (1) Je ferai » voir dans peu combien les objections de M. de Luc contre certe manière » d'obtenir l’humidité extrême font peu fondées. . . .» Je n’avois point fait d'objection contre une boîte humeëlée, mais contre la cloche de verre humeëée, ce fut là ma première remarque. Puis, partant de ce que M. de Sauflure a publié de relatif à une boîte humeëlée, je remarquois en paflant que j'avois moins d’objections contre cette méthode, que contre celle de Za cloche, parce que dans la pre- mière , le cheveu pouvoit s'appliquer aux parois de la boite. Or voici d’où je partois, On lit au $. 68, des Effuis fur l'Hygrométrie : « Lorf- qu'on craindroit que dans un tems fec, cette caufe (une forte d'en- gourdiflement contracté par le cheveu , lorfqu’il demeure long-tems dans un lieu fec ) » n’empêchât l’hygromètre d'accufer fidèlement l'état » actuel de l'air, on pourroit prendre la précaution d'humecter un peu » l'intérieur de l’écui dans lequel on Le porte ». 11 n’eft point dit- B, qu'on doive l'y fufpendre, après avoir libéré Le poids & le cheveu. Mais voici qui fuppofe même le contraire; c'eft un Ars qui ac- compagne Îes hygromètres de M. de Sauflure , « qu’il convient , » eft-il dit, de lire avanr que de fortir l'hygromètre de fon étui »e Gr cet 4F1S porte, « lorfque l’hygromèrre a fait quelque féjour dans » fon étui.... il faut avoir foin d’humeëler Le cheveu , foit en le >» tenant renfermé pendant quelques minutes dans fon étui , après avoir » mouillé intérieurement celui-ci , foit en fufpendant l’hygromètre » fous une cloche dont toutes Les parois foient mouillées ». S'il n’étoit pas naturel d'interprêter les mots de la relation d'après ces paflages , c'efl moi qui me fuis trompé ; mais cett& difcufion eft de fort petite importance. Ce qu'il importe de déterminer , eft : « fi une cloche de æ verre, dont les parois intérieures font mouillées & qui repofe fur de » l’eau, peut fourair un terme d'humidité qui foit le même à toute » température ». C'eft ce que M. de Sauffure a conclu de fes expé- riences, mais dont j'ai trouvé Le contraire par les miennes. Il y'a donc quelque part des apparences qui méritent d’être obfervées de près. Et voilà à quoi je defire que M. de Sauflure s'applique avec autant de fang-froid sn je l'ai fair. Je lui ferai part en attendant , ainfi qu'aux autres phyfciens , dans le 2° & le 4° de mes mémoires , de nou- velles expériences , qui contribueront peut-être à le faire douter des gonféquences qu’il a tirées des fiennes, en diminuant fa confiance en Tome XXXII, Part, I, 1788, FEVRIER. 158 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, quelques principes dont il eft parti, de mème que celle qu'il accorde . aux réfulrats vihibles d'expériences délicates , faites fur certains fluides expanfibles dans des vales clos. Es Avant que d’avoir connoiflance de la nouvelledlettre de M. de Sauf- fure, j'avois mis fimplement en doute , sil lui avoir été avantageux d'arriver aifément à un hygromètre comparable , & d’une grande fen- fibilité (du moins apparente ); mais je crois néceflaire à préfent de m'expliquer davantage fur ce fujet, en y ajoutant quelques remarques, dont je métois, abftenu en parlant. de fes Effais fur l’hygromérrie. N'ayant eu aucun objet de comparaifon ( car il ne paroït pas qu'il ait effayé aucune autre fubftance hygrofcopique , que la première qui lui étoit venue à l'efpric ), il fe perfuada bientôt , que quelques raifonne- mens à priori quil avoit faits fur la nature du cheveu ($.67 ), étoient indubitables ; de forte qu'ayant pris par degrés une confiance d’habi- tude en cette fubitance , unique objet de fon attention en hygrométrie ; on doit être moins étonné de lui voir dire au $, 360 : « quant à l’hy- ». oromètre lui-même, j'avouerai ingénuement, que je ne crois pas que » l'on ajoute beaucoup à fa perfection. Déjà je fuis perfuadé, qu'après » avoir sout eflayé, on fénira par revenir au cheveu ». Mais après s'être déclaré d’une manière fi précife fur le mérite de fon hygromètre, il. n'étoit pas. naturel que le mien, qui réclamoit contre cette décifion finale, trouvait aifément grace. devant lui 3 cependant il avoit obfervé lui-même un fymptôme qui auroit dû le tenir fur fes gardes, je veux. dire la grande rétrogradation de quelques cheveux ; mais ayant eu encore le défavantage de faire cefler aifément la plus grande partie de - : ; ë k ER à SU ce {ymprôme, il ne fut point conduit à foupçonner, qu'il tenoit à-la nature du cheveu , & que fa caufe pourroit bien affecter la marche. entière de ceux mêmes où il étoir le moins fenfble ; cependant, comme il falloit expliquer ces grandes rétrogadations , il imagina l’hypothèfe étrange, de plaies produités dans quelques cheveux par déchrrements; plaies que l'humidité guérifloit peu-à-peu , mais que la féchereffe re- nouvelloit ( $. 15). si : En traitant de l'hygromètre de M, de Sauflure , je ne fis aucune mention de ces divers jugemens, & obligé cependant de, traiter leurs. objets, je. n’attribuai la conñance trop grande qu'il me paroifloit donner à.cer hygromètre, qu'à ce qu'il n'avoir pas. eu occafion comme moi, de fuivre en divers phénomènes la marche d'effets , dépendans en même-; tems de caufes fenfibies & de caufes d'abord cachées ; ce qui l’avoit empêché d’appercevoir ce qu'indiquoit la rétrogradation des cheveux. Je:rappelai alors, les phénomènes du thermomètre d’eau, & la ma- nière dont leur caufe:fe cache dans ceux d'e/prit-de-vin & d'eau falée ,. & pour ne pas fortir du fujer, j'indiquai une clafle entière ce fubf- tances, favoir celle des /ubflances fibreufes prifes en longueur, qui Le or SUR L'HIST, NATURELLE ET LES ARTS. 139 - manifeftoit le: même fymprôme hygrofcopique , remarqué feulement pr M. de Sauflure dans quelques cheveux, Je montrai enfuite, ique/-la caufe d'une rétrogradation finale devoit affecter toute la marche pré- cédente ,& quelque petite qu'elle füt, elleindiquoit lexiftence'd'uñe .caufe:de: modification, d'où: réfultoir ;:vers: un certain point .de-cette marche , l'état nommé /avonnaire dansiles phénomènes de ce genre; & ce fur après toures ces difcuflions, purement phyfiques , & .très- ménagées à l'égard des opinions contraires de M. de. Sauflure , que j'attribuai à la marche du cheveu, la. différence de\nos iugemens fur l'ufage de la cloche humeëlée, pour produire un degré fixe & ex- wrême d'humidité” se er RE A HAT N'eft-il donc aucun moyen sûr, de mettre l'amour -propre à fon aile S fans trabir Ce qu'on perle, ) & taire cé qu'on croit util&? La prévention de M, de Sauflure l’empêcha de concevoir aucun doute fur la marche de fohygromèrre ; & fans fonger à foumertre à de noû- :rvelles expériences aucun dés points contenus dans une tractation fi dé- +pouillée de toute pérfonnalité, il faifit aux cheveux l’occafon:que lui fournifloient! fes nouvellés obfervations hygrométriques aux ‘Alpes, lieu qui auroit dû lui rappeller une grande réticence à mon égard , pour prononcer contre mon hygromètre, la fentence laconique qui pafle, aujéurd’hui. de bouche en bouche dans toute l'Europe. Je ré- ponds encore À cette aflertion avec le plus grand ménagement; mais il m'arrive de faire une remarque ( au fond indifférente ) fur fon copération. hygrométrique , faite avant l’ebfervation au Mont-blanc, re- marque. à laquelle un fait; connu à lui, mais non à moi, fe trouvoic répondre; il me croit en faute, & il fe hâte encore de réclamer contre -cette remarque ,, comme fi elle alloit brifer fa cloche humeélée & rompre fon cheveu ; cependant il n'y avoit rien-là qu'il dût craindre, ce fera contre mes, mémoires qu'il fera obligé de défendre ces appareils, car les queftions qui les concernent font trop importantes à la phyfique, -pour que nous ne lui devions pas l’un & l’autre, de défendre nos opi- nions à cet égard , aufhi long-tems qu’elles nous paroïtront fondées, comme d’avouer ce que nous viendrons à y découvrir dé défectueux. J'ai trouvé dans cetre même lettre de M. de Sauflure , le paflage fuivant, & Quant à la critique de M. de Luc fur La mefure de la hau- » teur du Mont-blanc, M. Trembley lui répond par une note, un > peu trop étendue pour ce Journal, mais que j'envoie aujourd’hui. à » M. de la Métherie pour le Journal de Phyfique ». J'efpère donc, Monlieur, de la voir dans votre cahier de ce mois ; mais coinme cette circonftance doit naturellement ramener l'attention des Phyfciens fur la mefure des hauteurs par le baromètre , je me dérermine à ne pas. renvoyer davantage l’examen que j'ai déjà annoncé du mémoire, pré- fenté à l'Académie des Sciences de Paris, par M. Trembley , fur cette Tome XX XII, Part. I, 1788, FEVRIER, S 2 * 2 140 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, efpèce de mefure; ainfi je le joindrai aux deux mémoires mentionnés ci-deffus. Cet examen n’aura probablement qu'un rapport indirect avec les queftions à décider relativement au calcul de l’obfervation de M. de Sauflure , parce que je n'y traiterai que d'objets généraux ; toutefois je me propofe bien d’examiner avec attention les nouvelles remarques , de M. Trembley , pour y chercher le vrai de quelque côté qu'il foit. Je fuis, &c. W'indfor , le 19 janvier 1788. MÉMOIRES ACADÉMIQUES, Ou Nouvelles découvertes fur la Lumière, rel@tives aux points les plus importans de l'Optique , x vol. in-8°. de 338 pages, avec dix Planches , dont quatre en couleurs. Prix, 8 lv. broché, A Paris, chez Méquignen , rue des Cordeliers, près Saint-Côme, EXTRAIT. Lrs nouvelles découvertes de M. Marat font contenues dans quatre mémoires, qui ont pour objets /a doërine de la différente réfrangi- bilité des rayons hétérogènes , celle des accès de facile’ reflexion & de facile tranfmiffion , celle de la formation de l'arc en ciel, & celle des couleurs des lamelles tranfparentes. L'Auteur convaincu‘de l'im- portance de fes découvertes, & jaloux de les conftater rigoureufement.,, a provoqué lui-même l'examen des compagnies favantes , en leur faifant remettre les programmes. Le premier de ces mémoires contient un examen des principales expériences que Newton donne en ue du /yfléme de la différente réfrangibilité. M. Marat cherche à démontrer par une fuite d'obfer- vations , que la prétendue réfrangibilité des rayons hétérogènes n’eft rien moins propre qu’à expliquer la formation du fpectre qui eft formé par le prifme, Dans le fecond mémoire , Auteur préfente cinq elafles d'expériences, dort les réfultats lui paroiflent prouver que les rayons héréropènes font également réfrangibles , & que la lumière directe ou réfléchie du foleil ne fe décompofe qu’à la circenférence des corps; il y donne “diverfes méthodes de faire conftämment émerger du prifme la lumière dirette du foleil , auffi acolore qu’elle l’eft à fon incidence, & même de füupprimer les iris qui bordent l'image d'un object vu au prifme, VIE image foit moips nettement terminée que sil étoit vw à œil nud. : SUR L'HIST. NATURELLE ET LES ARTS. 141 Le troifième mémoire combat l'explication que Newton donne de l'arc en ciel d’après les expériences de l'Archevèque de Spalaro. Enfin dans le quatrième mémoire , couronné par l’Académie de Rouen , M. Marat apporte des faits pour prouver que les couleurs des corps minces tranfparens ne réfulrent point de leur différente ténuité ; & comme lexplication donnée par Newton eft érablie fur le ///éme de la différente réfrangibilité, & qu’elle fuppofe celui des accès de facile réflexion & de facile tranfmiffion | M. Murar croit encore pouvoir en faire voir le faux. Il s'applique enfuite à développer les caufes des iris des plaques de verre & des bulles de ‘favon, Quant aux premières , il croit que les rayons tranfmis n'ont aucune part à la formation des anneaux noirs; ce qu'il croit prouver en fubftituant un miroir de verre noir à l'objectif inférieur; & il fait réfulter les an- -neaux colorés des rayons déviés & aécompolés aurour des points de contaét des verres comprimés. Quant aux iris des bulles de favon , il prétend qu’elles font produites par des particules colorantes , ou par des particules propres à réfléchir l’une des coulèurs primitives qu'il borne au rouge, au jaune & au bleu. Après quoi il fait voir le je de ces particules, dégagées de leur diffolvant par l'évaporation ; puis, féparées les unes des autres par l’af finité plus étroite de celles d'une même couleur, elles fe réuniffene pour former des anneaux , ces anneaux fe placent au-deflous les uns des autres, à raifon de leur différente pefanteur fpécifique, & la pel- licule irifée qu'ils forment, diftincte de la bulle, s'agite au-deflus & fuivant tous les mouvemens de l'équilibre. Quoique ces mémoires traitent de différents points d'optique, ils ont “principalement pour objet , la diflérénte réfrangibilité des rayons hé- térogèhes; il paroît même que c’étoit pour ramener la difcuffion de ce point important, que l’Aureur a fait propofer les différentes quef- tions qui en fonc le fujer. ‘ Un des grands principes de M. Marat , c’eft que la lumière ne fe décompofe jamais qu’à la circonférence des corps; & que la lumière “qui forme les teintes du fpeétre, vient du foleil route décompofée, Or voici comme il entreprend de le prouver au fujet de la IV* expé= rience de Newton, qui confifte à regarder le foleil à travers un prifme; « mefurez au prifme , convenablement incliné, la longueur de l’image ; » vous trouverez qu'elle s'étend fur toute la hauteur de la première » face de l'angle réfringent, au moyen d’une carte interpofée, rien » de plus aifé que d’intercepter féparément à cerre face les rayons de » chacune des teintes du fpeétre ; la lumière folaire rombe donc toute > décompofée fur le prifme ». Premier mémoire , page 63. En analyfant la 3° expérience de Newton ; notre Auteur penfe que les réfultats font diamétralement oppofés au fyfème de la différenre 142 … OBSERPATIONSESUR,LA PHYSIQUE, rétranpibilité, er Après .avoir;; fair: pailer, ( die il) uns falfceau de » rayons folaires de 12 à 15 lignes de diamètre, à travers un prifnge æ de 10 degrés placé convenablement pour que les réfractions à fes » furfaces foient égales, qu’on projette ces rayons fur un carton blancht, » inrecpolé à 15 pieds, de ;diftance,, ils forméront un champ de lu- >. mière un peu oblong ,-blang au milieu, &:circonfcrit de, larges » croiflans colorés; qu'au moyen d'un difque deipapier noir, percé > d'un trou d'une Hene, & interpo{é à un pouce du prifme; ‘on donne » fucceflivement paflage aux:rayons qui forment la partie blanche du », champ, ils ofiricont conftamment les mêmes phénomènes que le >» faifceau entier; à cela près que leur champ fera beaucoup plus, petit. » Jufqu'ict, cette expérience femble étayer, le. fyflème.que.je combats, » mais, daignez jme .fuivre ençore-quelques,momens , &. elle nous » donnera pour réfultats, de nouveaux faits 'qui,le fappent fans reflource. » Au carton fur lequel les rayons, font projetés , qu'on fubftitue un » grand diaphragme de 1$ lignes d'ouverture , de manière à intercepter » les craiflans colorés ,. & qu'on projette enfuite les rayons de la partie » acoloré fur le carton interpofé à 15. pieds. de diltance, ils y for- .2.1meront encore un! ,champ un, peu ovales blanc.au milieu, &'circon(- >» crit de croiffans colorés, femblables aux ‘précédents , à l'étendue » de leurs teintes près. Alors, qu'au moyen d’un'traifième diaphragme ».de 5 à 6 lignes d'ouverture,,on fupprime ces nouveaux croiflans ; » qu'enfuite on projette les rayons du milièu fur le carton blanchi, > placé perpendicülairement à leur axe 10, 20, 30 pieds plus.loin, » on aura un champ circulaire & acolore., , mais environné d'une pé- » nombre &. d'une auréole comme il le feroit s'il n'y.avoit point de » prifme interpolé. Puis donc, que le champ de lumière eft conftamment » ovale & circonfcrit de .croiflans colorés ; en quelqu’endroit qu'on » interpofe le premier diaphragme, & puifqu'il devient circulaire & » acolore, quand on en fépare les croiflans colorés, au moven de plu- » fieurs diaphragmes de plus grande ouverture , fes couleurs, confé, » quemment celles du fpectre, viennent indubitablement des rayons » de la circonférence du faifceau folaire, c’eft-à-dire des rayons dé- >» compofés autour du foleil & au bord du trou deftiné à leur livrer » pañlage ». L’Auteur prétend enfuite que les réfültats font uniformes , quelle que foit l’ouverture du prifme; mais c’eft dans l'ouvrage même que les favans doivent fuivre le développement des preuves de l’Auteur, pour en faifir l’enfemble, & apprécier fon travail. Les lunettes achromatiques ont prouvé que le grand NEWTON s’étoit trompé fur les réfractions dela lumière ; s'eft-il également trompé dans les points qu’attaque M. Marat? C'eft aux favans à prononcer, SUR L’AIST: NATURELLE ET LES ARTS\ 143 Là 00e 9 2 20e ER 0 D om | MÉMOIRE “DE: M LE CHEVALIER DE SOYCOURT, SUR LES EXPÉRIENCES DONNÉES EN PREUVE DE LA CHALEUR ‘ r ‘ LAT'ENTE =: Couronné par l’Académie des Sciences de Rouen , le 27 juillet 1787. EXTRAI Te « à RER , dit l’Auteur, que l’idée d’une. matière effentiellement >, calorifique & renfermée dans le fein des corps fans donner aucun figne » de fa préfence, foit au taét , foit au thermomètre, me paroît trop fingulière pour être vraie. Mais il s’agit de l'examen des preuves fur » lefquelles on établit cette étrange doctrine». ! Elle.eft déduire, 1°. des phénomènes de la caufticicé ; 2°. des expé- riences {ur la chaleur fpécifique des, çorps; 3°. de la fonte de la glace; 4°. de l'évaporation des liquides; 5°. de la congélation de l'eau ; 6°. de la criftallifation des fels, Exumen des preuves de la chaleur latente tirées des phénomènes de’ la cauflicité de certaines fubflances. 8 On attribue la’caufticité.de la chaux calcaire des alkalis ; des acides, à la chaleur combinée .ou, latente dans, ces fubftances. Mais fi la matière ignée étoit le principe.de la:caufticiré de la chaux & des alkalis, pourquoi cette matière leur communiqueroit-elle une faveur âcre & corrofive lorfqu'elle s'y combine, & ne la leur communiqueroit- elle pas lorfqu'elle refte libre ? Le contraire devroit cependant toujours arriver, puifque dans les deux cas ces fubftances font compofées-des mêmes principes ;.8& il eft inconteftable que. celui des faveurs doit être libre & diflous pour produire fon impreflion. D'ailleurs, plufeurs expériences connues, celles du Docteur Black, prouvent que Ja chaux & les alkalis deviennent cauftiqués lors feulement: que la calcination leur.enlève l’eau & le gaz aériforme qui s’y trouvent combinés. A l'égard des ds minéraux, qui ignore qu'ils perdent leur caufticité en. fe combinant avec la chaux, & les alkalis cauftiques qu'on nous dic & faturés de matière ignée ? “Ainfices preuves qu'on nous donne de la chaleur larente fe réduifent à de. fimples conjeétures, :: ; | 144 144 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, Examen des preuves de la chaleur latente tirées des expériences fur la chaleur fpécifique des corps. ce La chaleur fuppofée matière, il eft conftant qn'à égalité de poids , les diverfes fubftances connues n'en contiennent pas égale quantité: c’eft certe quantité relative qu'on a défignée fous la dénomination de chaleur Jpécifique ». ._« La différence de chaleur fpécifique des mêmes fubftances ef, dit-on , très-confidérable , fuivant qu’elles font liquides ou folides : celle de l'eau dans ces deux états eft même prodigieufe. . . .» Il eff biexr Jingulier , obferve à ce fujet un partifan diftingué de cetre doctrine (1), que dans les différens corps la chaleur varie autant. Auroit-on jamais Joupronné que l'eau liquide,contfnt plus de-chaleur que Les acides Les plus puiffans. Le mercure lui-même qui fe congelle ft difficilement , n'a que les 0,033 de la chaleur de l'eau ; & néanmoins cette grande’ chaleur fpécifique de l'eau n'efl fenfible ni à nos fens ni à nos infird- mens... .æ Mais il n'y a de merveilleux dans tour cela que celui que‘nos Auteurs y ont mis. Es ont travaillé à déterminer la chaleur fpécifique des différens corps d’après l'expérience de Wilke qui a fervi de bafe à leurs opérations. Une livre de glace à zéro, dic Wilke, exige pour être fondue une livre d’eau à $8° (du thermomètre de Luc}; donc elle abforbe totalement la chaleur fans que le bain qui réfulte de fa fufion acquière lui-même une autre température : de-là ils ont conclu que la chaleur fpécifique de l’eau ef à celle de la glace :: 58: 1 ». - « Pofons ici un grand principe , dit M. le Chevalier de Soycourt, ui fera admis de tout Lecteur judicieux , principe qui n'étoit pas ignoré d nos Auteurs, mais auquel ils n’ont pas même fongé, le feul néanmoins qui pouvoit éclairer leur travail. Le voici: Jamais les corps ne s'échauffent Jans fe dilater: C’eft donc dans leurs pores uniquement que fe loge la matière ignée qui les pénètre; car leur fubftance elle-même eft imper- méable. Or, à fuppofer cette matière efentiellement calorifique , leur dilatation refpective eft la vraie, l'unique mefure de la quantité qu'ils en reçoivent par leur caléfaction : c’eft donc fur le rapport des augmentations de volume, non fur celui des mafles qu'il falloit conftruire la table de leur chaleur fpécifique, . . ,» æ Dans la table que M. Kirwan a dreffée d’après fes propres effais & ceux de MM. Wilckes Black & Crawford , l’eau eft de tous les corps celui dont la chaleur fpécifique eft la plus confidérable : elle y eft même fuppofée à celle du fer :: 1000: 125 ; mais on vient de voir que c'eft uniquement par les degrés refpectifs de dilatation des corps que doivent (1) L'Auteur de l'Effai analytique fur l'air pur & les diflérentes d'efpèces d'air. etre L SUR L'HIST. NATURELLE ET LES ARTS. Y4ÿ être fixées les quantités de matière calorifique qu’ils contiennent échauflés de tel à tel degré, & la règle eft très-jufte ; comparons donc d’après cette règle les quantités contenues dans l’eau & le fer, échauffés au même point». EE æ Par fon immerfion dans l’eau bouillante à 80°, un cube de fer à un degré au-deflus de zéro, du poids de 16 onces & de 17 lignes + de 14 face, a augmenté au bout de 20 minutes d'= de ligne fur toutes fes dimenfons, c'elt-ä-dire, de 18 lignes cubes < ; puis par fon immerfion dans 8 livres d à : de degré du terme de la congélation, il a fait monter d'un degré le thermomètre qui y étoit plongé. Tandis que par l'ébullition un cube d’eau à un degré de zéro, du poids de 16 onces & de 34 lignes # de face, a augmenté en volume dÆ, c'eft-à-dire, de 1296 lignes cubes puis par fon mélange à 8 livres d'eau à ? de degré du terme de la congélation , elle a fait monter de 9 degrés le thermomètre qui y éroit plongé. Ainfi la dilatation du fer eft à celle de l’eau environ ce que 1 eft à 38; tandis que la chaleur communiquée par l’eau eft à la chaleur communiquée par le fer ce que 9 eft à r. À certe température & à dilatation égale, lefer contient donc au moins quatre fois plus de matière ignée que l'eau : d’où l’on pourroit conclure que fa chaleur fpécifique eft au moins quatre fois plus grande, A préfet , fi l’on compare les quantités de matièreignée , contenues dans le fer incandefcenr & l’eau bouillante, ou trouvera de nouveaux rapports ; car notre cube. de fer roupi à blanc fe dilate de Æ de ligne fur toutes fes dimenfions , c'eftà-dire d'environ 141 lignes cubes : puis plongé dans 20 livres d'eau, à = de degré du terme de ja congellation ; il-lui communique 7 degrés de chaleur; tandis qu’un cube d’eau bouil- lante fe dilate d=, c'eft de 1296 ligues cubes =, & ne communique par fon mélange à 20 livres d'eau à : de degré du terme de la con- gellation , que 4 foibles degrés de chaleur. Ainfi la dilatation du fer rougi à blanc, eft à ja dilatation de l’eau bouillarte , environ ce que 1 eft à 9; tandis que la chaleur communiquée par le fer , eft à la chaleur communiquée par l'eau : : 7 : 4. À dilatation égale, le fer rougi à blanc, contient donc au moins 15 fois plus de matière ignée que l'eau bouillante : d'où l’on pourroit conclure que fa chaleur fpécifique eft au moins I$ fois plus grande. De ces réfultats il fuit ésidemment, que toutes les expériences faites jufqu'ici fur la chaleur fpécifique des corps , font manquées, tranchons fe mot, font faufles. ..... æ Il eft clair que la prétendue chaleur fpécifique n'eft qu'une pro- riété fictive. .. Mais fuppolons-la pour un moment, une vraie pro- priété, & fes rapports également aflignables pour tous les corps, #les mêmes dans tous les degrés de l'échelle. D’après l'hypothèfe des par- sifans de la“chaleur latente , l'intenfité de la chaleur n’eft proportion: Tome XXXIT, Part, I, 1788. FEVRIER, 146 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, tionnelle qu'à la denfité de la matière calorifique ; & dans leurs tables , Ja chaleur fpécifique de l'air commun eft à celle de l'air fixe :: 18670 : 2703 tandis que la chaleur fpécifique de Pair déphlogiftiqué eft à celle de Pair fixe : : 87,000 : 270, mais comme ces rapports font fuppofés invariables, châque globule d'air fixe, à la température la lus froide, contiendroit néceffairement 270 particules calorifiques ; chaque globule d'air commun 12670 particules calorifiques , & chaque globule d'air dépblogiftiqué 87,009 particules calorifiques : car La cha- leur fpécifique ( à ce qu'ils difent ) ef? /a pe numérique des particules élémentaires de feu, que chaque molécule intégrante des corps contient. Or quelque différence que l’on mette entre les volumes de ces globules & de ces particules ; il faut l'avouer , 83000 particules de feu contenues dans un feul globule d’air offrent déjà un prodige cu-- rieux >». a Ce n’eft pourtant rien encore. L'air étant fuppofé fufceprible des: mêmes degrés de chaleur que le corps le plus réfractaire, & les rap- ports de la chaleur fpécifique étant cenfés invariables dans toutes les températures poffibles, portons { d’après un calcul affez modéré } à 20200 degrés, l'échelle entière de la caléfaétion des corps, & n'aflignons qu'une feule particule calorifique à chaque globule d’air fixe pour l’ac- croiffement de chaque degré, nous aurons donc pour chaque globule: d’air fixe parvenu à fon dernier point de caléfaétion 20270 particules calorifiques, pour chaque globule d’air commun, parvenu à fon der- nier point de caléfaétion, 1398000 particules calorifiques , & pour chaque globule d’air déphlogittiqué parvenu à fon dernier point de caléfattion 28,101,0C0 particules calorifiques 3; or 28,10r.000 par- ticules de feu contenues dans un feul globule d’air, forment un nouveau prodige bien plus curieux encore ». : « Enfin quelque puifle être l’excédent du volume de ces globules fur ces particules, les mêmes rapports doivent fubffter dans les moindres: parties d'un globule d'air. Ainfi 28,r01,000 particules de feu feroient conrenues dans un efpace plus petit que chacune d’elles , fans que cer efpace ceffâr d’être rempli par chaque molécule d'air ; la partie feroit donc 28,101.0C0 de fois plus grande que le tout, & aflurément ja- mais prodige ne fût plus merveilleux ». Je n'arrête ici pour inviver le Lecteur à pefer ces conféquences. Examen des preuves de la chaleur latente tirées des expériences faites Jur la fonte de la glace. « On prétend qu’une livre de gface à zéro exige , pour fondre , une livre d’eau à 58°, & qu'elle en abforbe totalement la chaleur , fans que le bain où elle s’eft liquéfiée, acquière lui - mème une différente température. Et sien de plus fimple, nous dit-on, que ce phénomène, # SUR L’HIST. NATURELLE ET LES ARTS, 147 car cet 1e propre des folides d’abforber de la chaleur en fe liquéfant, de fe l’aflimiler & de fe combiner intimément avec elle ». . æ Aflyrément toute matière liquéfiable contient plus de. matière ignée dans fon érat de liquidité que dans fon état de folidité : puifque tout liquide n'eft au vrai qu'un folide renu en diflolution par cette ma- tière ». Mais comment juger par le degré de chaleur du bain , de la quan- tiré de matière ignée que la glace abforbe en fondant. Il ef indubi- table que la matière ignée de l’eau chaude eft libre. Or avant d’avoir pénétré la glace que l’eau chaude environne, elle fe diflipe en très- grande quantité, & dans le vaifleau où fe fait la fonre, & dans l'air ambiant, déperdition dont on ne tient aucun compte, mais toujours proportionnelle à la température de ce milieu, à l'épaifleur du vaiffeau, & au tems que cette matière emploie à pénétrer la glace. L'expérience qui fuit, ne laifle aucun doute à cet égard, Ayez deux vafes de fer blanc, cylindriques, égaux & garnis chacun d'un bon thermomètre : dans l’un , mertez une livre de glace pilée , laiffez vide l’autre ; enfuite fufpendez-les trous deux à des cordons au milieu d’une chambre, dont la température foir à zéro. Au bout d'une heure verfez duns chacun une livre d'eau échauffée à $8° , remuez un inftant la glace avec une fpathule , & dès que la fonte fera complete, obfervez les rhermomèrres : celui du vafe qui ne contient que l’eau, fera à 28 environ, tandis que celui qui contient la olace fondue, fera à = degré. Dans l'inter- valle que la glace a mis à fondre, le bain a donc perdu 30 degrés de chaleur : cette quantité de chaleur perdue, la glace ne la donc as abforbée ; reftent 27 degrés & ! de chaleur que l’on pourroït croîre abforbés réellemenc, fi la matière ignée étoit effentiellement calorifique ; mais comme cette hypochèfe eft plus que douteufe, mille faits dé- montrent jufqu’à l'évidence, que la chaleur confifte dans le mouve- ment inteftin d’un fluide particulier , la déperdition des 27 degrés &+, s'explique d'elle-même ; car ce fluide perd de fon mouvement contre les parties es corps qu'il pénètre, & toujours d'autant plus qu’il les pénètre avec plus de peine, parce que tout mouvement s'afloiblit par ja réfiftance ; ce fluide perd aufli de fon mouvement à raïlon de la ré- fiflance que les corps opèrent à la défunion de leurs parties inté- grantes , parce qu’il ne fauroit les échauffer fans les dilaer ; c’eit pré- cifément ce qui arrive durant la fonte de la glace. Nous allons voir que cette énorme quantité de matière ignée, qu’en attribue à l'abforprion de la glace , fe réduit prefqu’à rien; car celle que la glace abforbe en paflanc à l’état de liquide , l’eau la reflitue exac- - tement en paflant à l'état de folide; or certe quantité fe borne à celle qui eft néceflaire pour faire monter le thermomètre tout au plus à d'= degré, ligne de féparation entre ces deux états. Tome XXXII, Part. I, 1788. FEVRIER, Are 148 OBSERVATIONS SUR LA PHPSIQUE; Examen des preuves de la chaleur latente tirées des expériences faites Jur l'évaporation des liquides, On dit que les liquides en vapeurs contiennent une très - grande quantité de chaleur latente qu'ils abandonnent en fe condenfant; l’eau: par exemple réduite en vapeurs, a plus de chaleur latente que l'eau bouillante, € voici la preuve qu'on en donne. Une livre d'eau ré- duite en vapeurs dans un alambic ,, communique un degré de chaleur plus confidérable au réfrigérant , que ne feroit une livre d’eau bouil- lanre. Cependant l'eau en vapeurs ne fait pas monter davantage le: thermomètre que l’eau bouillante ; donc l’eau en vapeurs contient plus de chaleur latente, . Il eft facile de voir que cette expérience en a impolé; fi une livre d’eau enfermée dans un alambic, & réduite en vapeurs ,.a communiqué plus de chaleur au réfrigérant, qu'une livre d’eau bouillante, c'eft que: l’eau enfermée comme dans la machine de Papin, a pris un deoré de chaleur bien fupérieur à celui de leau réduite en vapeurs dans des vaifleaux découverts; car dans cette dernière circonftance,. les vapeurs. de l'eau ne donnent que le degré de l'eau bouillante; pour que l'ex- périence foit tranchante il importe de recueillir les vapeurs très-proche: de la furface de l’eau, ce qui fe fait au mieux ,. au moyen d’un en tonnoir de verre, placé au milieu de cette furface & porté par un fup- port, & garni d'un thermomètre à grandes divifions, ou fimplement: au moyen d’un thermomètre dont le Bulbe ou réfervoir large de trois. pouces, foit en forme de conque.. Voici les réfultats de cette expérience variée, Le bulbe du thermomètre préfenté pendant 10 minutes, deux lignes au-deflus de la furface de l’eau bouillante , la colonne de mercure s’eft- conftamment tenue un degré plus bas qu’elle n’écoit lorfqu’il. venoit à: être plongé dans l’eau. Le bulbe du. thermomètre préfenté pendant 10:minutes, trois pouces au-deflus de la furface de l’eau bouillante ,, la colonne a baiflé de 11: à 12 degrés. Le bulbe du thermomètre préfenté pendant 10 minutes, neuf pouces au-deflus de la furface de l’eau bouillante, la colonne a baiflé de 257 à 26 degrés. ; Il eft donc inconteltable que les vapeurs les plus chaudes donnent en fe condenfant toujours moins de chaleur que l’eau bouillante qui les a fournies, & il eft inconteftable aufi. que leur degré de chaleur eft toujours d'autant plus foible qu’elles s'éloignent davantage de la furface de l’eau, & qu'elles fe condenfent plus promptement ; con- féquences diamétralement oppofées à lhypothèfe de la. chaleur las. 1eriles, SUR L'HIST. NATURELLE ET LES ARTS, 49 Examen des preuves de la chaleur latente tirées des expériences faites Jur la congellation de l'eau & la criflallifation des Jets. Mais on prétend qu'après avoir plongé le cylindre d'un thermomètre pud dans un vafe d’eau prête à fe congeler, on voit d'abord le mer- eure defcendre graduellement au-deflous du terme de la glace, refter enfuite ftationnaire ; puis à l'inftant de la congellation , monter un peu au-deflus de ce terme. puis monter encore à melure que la congella- tion devient plus complette, plus intenfe ; enfin fe foutenir au même point, tant que la température du milieu ambiant ne change pas. D'où l'on infere que la glace contient plus de chaleur libre que l'eau prête à fe conseler. Or felon eux c'eft la chaleur latente devenue libre par la congellation qui fait monter le thermomètre plongé dans les matières qui congëèlent. À ces phénomènes peu connus encore, je puis en oppofer d'autres totalement inconnus’, & bien propres à démontrer la faufleté du prin- cipe auquel on les rapporte; mais il fauc auparavant montrer le peu de fond que l’on doit faire dans nombre de cas, fur les indications du thermomètre , quand on ignore l’art délicat d'en décéler la caufe. « Perfüadé qu'avant de fe livrer à l’étude d'une fcience , le phy- ficien doit parfairement connoître le mécanifme de fes inftrumens, & les effets qui doivent réfulter des principes de leur conftruétion , j'ai examiné avec foin celle du thermomètre, & je me fuis afluré qu'il n’eft point d'inftrument plus défetueux. . . Bornons-nous ici aux effets diamétralement oppofés, qui réfultent neceflairement de la combinaifon de fes parties, défaut qui a échappé jufqu'ici à l'obfervation ». La chaleur tend à dilater tous les corps, & elle agit toujours fur les parois du verre, avant d'agir fur le liquide qu'il contient, Or il eft impoflible que la capacité du bulbe augmente, fans que la colonne du mercure ne baifle ; comme il eft impoñlible que la capacité du bulbe diminue, fans que la colonne du mercure ne hauffe; ainfi les variations de hauteur de la colonne ne font pas de fimples réfultats dé la dilatation plus ou moins grande du mercure que le tube contient, mais les réfulrats de la différence de cette dilatarion à l'augmentation ou à la diminution de capacité du tube. ..Ïi fuit de-là que le ther- momètre ne fauroir confervet une marche uniforme dans les différents milieux où. il eft plongé. Fluides liquides ou folides, ces milieux le compriment toujours plus ou moins, foit par leur plus où moins d'é- laficité, foit par la hauteur plus ou moins confidérable de leur co= lonne , foit par la cohéfion plus ou moins grande de leurs parties. . J1 eft donc fouvent impoñfible de favoir à quoi s’en tenir fur la caufe des variations du thermomètre dans certains phénomènes délicats , à moins qu'on ne les ait analyfés avec art, Tels font ceux qu'on obferve- 159 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, durant la congellation des liquides : phénomènes qu'on a rapportés mal-à-propos à la chaleur latente, devenue libre. Tant que le bulbe du thermomètre eft à nud, il eft impoflible qu'il ne Sn ou moins comprimé par les matières qui fe congèlent, fuivant que fes parois font plus ou moins étendues , plus ou moins épaiffes , plus ou moins élaftiques ; il étoit donc indifpenfable de le mettre à couvert de cette comprellion , pour rendre linftrumenc propre À indiquer la température de ces matiéres ; c’éft ce que j’ai fait en ren- fermant le bulbe dans un étui de verre très-mince, fcellé hermétique- ment par un bout, maftiqué au tube par l’autre bout , & n’ayant tout autour qu'un vingtièm. de ligne de jeu ; je l'appelle shermomètre armé. Or le $ mars 1786 , à 3 heures après midi, la gelée éroit très-forte,, je fufpendis dans un vafe métallique très-épais , contenant 8 livres d’eau, deux thermomètres , dont l’un étoic nud, l’autre armé de fon étui, ils fe foutinrent chacun à -— degré au - deflus de zéro , jufqu'à ce que la congellarion füt complette , alors le nud monta & l'armé baiffa fenfiblement. À 11 heures du foir , celui-ci fe trouva de 4 degrés & au- deffous de zéro; celui-là de 2 degrés au-deffus, quoique deux ther- momètres de comparaifon fuflent 7 degrés plus bas. À cinq heures du lendemain matin, l’armé fe trouva 7 desrés au - deffous de zéro , le nud, 3 degrés & : au-deflus. À midi l'armé fe trouva 4 degrés au- deflous de zéro, le nud 2 degrés au-deflus, quoique les chermomètres de comparaifon fuffent 3 deorés plus bas, À dix heures du foir, Parmé fe trouva 6 degrés & * au-deflous de zéro, le nud à 2 degrés au-deffus, quoique les chermomètres dé comparaifon fuffent 7 degrés & : plus bas. La criflallifation des fels préfente les mêmes phénomènes que la congellation, le thermomètre monte un inftant & redefcend enfüite ; c'eft que le bulbe du thermomètre qu'on y plonce , eft également comprimé par le fel qui criftallife ; j'ai mis dans une diffolurion d’alun échauffée à 70 degrés, prête à criftallifer, deux thermomètres , l’un nud & lautre armé, la liqueur criftallifoit à mefure que fa chaleur fe diffipoic; le thermomètre armé a d'abord defcendu moins prompre- ment que l'autre, parce que l'érui lui confervoit de la chaleur; mais dès que cet excès de chaleur a été diflipé, il a toujours été conftamment plus bas que le nud, parce que celui-ci éroit comprimé par le fel qui criftallifoir, & même lorfqu'il a été à 64 À , il eft remonté un inftant à 6$ =, & enfuite redefcendu , au lieu que larmé ne peut Être comprimé, C’ett donc pour avoir ignoré le mécanifme du thermomètre , que nos Auteurs ont été trompés en voulant expliquer les phénomènes qu'il préfente lors de la congellation & de la criftallifation. Après des faits de cette nature, on voit ce que l’on doit penfer de l'étrange doctrine de la chaleur latente & de la chaleur fpécihque, SUR L'HIST. NATURELLE ET LES ARTS. :5x - PR ENTIER LEE RE TPE IE PET IE FETES ETIENNE RECHERCHES Sur les rentes, les emprunts & Les rembourfemens, d’où réfultent, 1°. des . formes d'emprunt moins onéreufes à l'emprunteur , & en méme-tems plus avantageufes aux créanciers accumulateurs , que ne le font les differentes formes d'emprunts publics employés jufqu'à préfent ; 2°. des converfions de rembourlemcens qui réuniflent ces deux avantages , Jur-tout lorfque le débiteur renonce à emprunter de nouveaux capitaux ; par M.DE ViLLARD, À Paris, chez Méquignon: _ & à Genève, chez Franç. Dufort, Imprimeur-Libraire, 1 vol, 27-4°, de 12$ pages. EXTRAIT. LA UTEUR ne confdère point ici le prêceur qui ne cherche qu’à augmenter fon revenu pour le manger annuellemenr. Il eft certain que celui-ci ne doit pas avoir d’autre but que de fe faire la rente la plus confidérable qu'il pourra. ' , Mäis il eft une autre claffe nombreufe de prêteurs , qui ne voulant pas acheter d'immeubles, ni courir les rifques du commerce, cherchent à faire valoir leur argent d'une manière sûre & la plus évantageufe, fans cependant aliéner le principal. Ils peuvent le placer chez un banquier ou tout autre capitalifte, qui payera le s pour 100 fans aliéner le fonds, Il s’agit de favoir s'il eft poffible au prêteur de retirer un intérèr plus confidérable de fon argent. On a fair de grands calculs à cer égard depuis que toures les nations fe ruinant cherchent à faire des emprunts. On a cherché à offrir au préteur un avantage réel-en chargeant cependant le moins poffible le-fife public. Pour cela on a eu recours aux emprunts viagers qui ont de l'appâc pour un-grand nombre de perfonnes qui, depuis qu'il n’y a plus de patrie, ne penfent qu'à eux. En conféquence on a été obligé de calculer la pro- babiliré de la vie. On a trouvé que l’âge de-dix ans étoit le terme où il ÿ avoit le plus de probabilité de vivre. ; Les prêreurs de la feconde clafle qui ne veulent point aliéner leurs gapitaux, & retirer cependant le plus gros intérêt pofñible, ont aufli placé dans ces rentes viagères, & voici le parti qu'ils ont pris : à Genève , par exemple. Un père de famille qui voudra placer trente mille francs dans les emprunts viagers d'Angleterre, n'a pas pu mettre fur farère, puifqu’à fa mort tout auroit été perdu pour fa famille. Ïl ne peut pas mettre davantage dur celle d’un de fes fils, qui quoïque bien portant, peut mourir. On a donc choif trente enfans de dix ans bien portans , fur lefquels on place ces tente mille francs , en forte que lorfqu'il en meurt un , on ne perd que 155 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, l'intérêt de mille francs. Les tables mortuaires font voir que de ces trente enfans il y en a un qui vivra quatre-vingt-fix ans. On a calculé en con- féquence les fommes des intérêts que rendront ces trente mille francs à 10 pour 100 pendant la vie de ces trente enfans, & on a trouvé que le capital rembourfé , l’intérèc fe trouvoit payé à $ € pour 100. Cer intérèt eft onéreux à l'emprunteur , & n’elt pas le plus avantageux ôffible néanmoins au prêéteur: c’eft ce que l'Auteur fait voir par de favans calculs. Nous allons-en donner un exemple, + Suppofons qu'on veuille emprunter 100 millions ; quelles font les conditions les plus avantageufes pour l’emprunteur & pour les prêteurs ? L’Auteur fuppofe que l’on emprunte en viager à 10 pour 100 l'an , ou à $ pour 100 par femeltre , ou tous les fix mois, fur des têtes féparées âgées de dix ans. Premiere affertion fondée fur La Table de mortalité des tontinierse Si l'emprunteur fait valoir chaque Il ne pourra remplir les fuites de réfidu annuel de l'emprunt, fon enzagement qu’en ajoutant dès- à-préfent aux 100 millions qu'il recoit des prèteurs: Au oO pour 100 par femeftre. . 3733333333 Au 2: pour 100 par Jémeflre. 63,27010 INR E CSS Biialoc 41,9309$0 PR ENOOU CERN CT à 2$,0721C0 AUPANTENSE CT-PRte Ce Eee 11,616666 AA E eee ee ele ee 0,678800 Au 4 _ ou au 45306. ROLE 0,000000 Au $ÿ pour 100 par femeftre il sABHErOIT El ca ieiel: le 8,363600 Seconde afertion fondée fur la même Table: Les prèreurs qui conftitueroient leurs rentes fur plufieurs têtes féparées ; agées de dix ans, & qui accumuleroient leurs rentes de $ pour 100 pat femeftre avec les intérêts compofés au 2 = pour 100 par femeitre , trouve= soient à la mort de toutes ces têtes (au bout de quatre-vingt-fix ans ) une fomme égale au montant du capital qu'ils auroient prêté , augmenté de fes intérêts fur intérêts au 2,793$ pour 100, foit au 2 L pour 100 par femeftre ; tandis qu’au bout de 31 ansde jouiflance, & feulement à cette époque, la fomme de l’accumulation de la rente feroit celle qu’elle repré- fenteroit le capital prêté (109 millions ) accru de fes intérêts compofés au 3508083 pour 100, foitau3 + pour 100 par femeftre. Cela pofé: 1° Si au lieu de rembourfer l'emprunt par une rente viagère de ÿ pour 109 de NET QU k M 0e . SSURIL'AIST. NATURELLE ET.LES ARTS. :15} - 400 par femeltre fur des rètes de dix ans, l’emprunteur offroit aux prèteurs de les rembourfer dans l'efpace de 14:? ans par 29 paiemens égaux de 5759677 pour 100 par femeltre, les prêteurs auroient au bout de 14 £ans : leur argent placé au 3 À pour 100 par femeftre; cela étant, il eft clair que fi l'emprunreur vouloir recevoir trois fois de fuire fous les mêmes condi- tions les 100 millions’ des prêteurs avec les profits qu'ils auroïent faits à la fin de chaque époque de 14 © ans, il leur foutiendroit par ce moyen jufqu’au bout de 43 » analytique annonce des connoïffances étendues, & l'habitude de manier » le calcul avec facilité & avec adrefle, & qu'ainfi il mérite l'approbation » de l’Académie ». L'Auteur fe propofe de faire une application plus étendue du calcul aux opérations du commerce & des finances, dans un nouvel Ouvrage, intitulé : Cours de Mathématiques à l'ufage du Commerce & des Finances , qui fera en 2 vol. ir-4°. La foufcription eft de 24 liv. qu'on payera en recevant l’'Ouvrage. 6 oo NOUVELLES LITTÉRAIRES. Osszr VATIONS fur l Arc-en-ciel, fuivies de l'application d'une nouvelle théorie aux couleurs de ce phénomène ; par M. l'Abbé P***, Y] ne fuffit pas qu'un fyflême foit poffible pour mériter d’être cru; il faut qu’il fit prouvé. Elémens de la Philof. de Newton , par M. de Voltaire. A Paris, 1788. Antonio de Dominis fut le premier qui effaya de rendre raifon des cou- leurs de l’arc-en-ciel. Il fufpendit au fond d’une chambre une boule de verre pleine d'eau , & ayant fait tomber deflus un rayon du foleil fous un angle de 40 à 42 degrés, il apperçut les couleurs de l’arc-en-ciel ; d'où il conclut que des gouttes de pluie réfraétant également les rayons du foleil produifoient ce beau météore. Defcartes, Newton, &c. ont adopté cerre explication, & tous les Phyficiens après eux. Tous les rayons de la bande rouge de l'arc interne doivent fe réfléchir vers l'œil du fpeétateur fous un angle de 42° 174 Cet angle de réflexion diminue pour les autres _ 1 SUR L'HIST, NATURELLE ET LES ARTS. fs couleurs, & enfin il eft de 40° 57! pour le violet ; en forte que chaque fpectateur a fon arc-en-ciel. . M. l'Abbé P*** préfente aux Phyficiens plufieurs obfervations qui Jui paroiffentinexplicables dans ce fyflème. « J'ai obfervé & fair obferver, dit-il, » des arcs-en-ciel qui paroifloient en même-tems & dans diffé- >» gens points de l'horifon, éloignés l'un de l'autre de crois à quatre lieues, > d’autres fois d'un quart de Jieue. . .:. J'ai vu une des extrémités de l'arc » colorer fenfblement le toit & le mur d’une maifon voifine de moi, » quoique les gouttes de pluie fuflent extrémement rares. . . Etant fur » des montagnes j'ai vu l'arc-en-ciel au-deffous du niveau , & le même » arc avoit été apperçu dans la vallée. . . J'ai vu un arc quadruple, . . » De ces obfervations & de plufieurs autres, l'Auteur conclut que le même arc étant apperçu pat des perfonnes très-éloignées, qu'une même perfonne pouvant appercevoir plifieurs ares différens & dans différentes pofitions, qu'enfin l’arc-en-ciel. étant apperçu dans un lieu où il ne pleuc prefque pas , l'explication de Dominis ne peut rendre raifon de ces phénomènes. : -.« Ce n’eft donc pas dans les gouttes de pluie qu’il faut chercher la » caufe de ce phénomène, mais dans le nuage oppofé au point de l'horifon >» où l’on apperçoit l'arc-en-ciel, au nuage que le foleil femble percer dans » ce moment-là , lequel nuage doit produire tour l'effet du prifme, Si je » me trompe c'eft de bonne foi, & je prie les Phyfciens de me reprendre, » Pourexpliquer ce phénomène je n'ai befoin d'invoquer ici que deux > principes inconteftables : 1°. les rayons lumineux qui paflent près d’un » corps quelconque dans la chambre obfcure fe brifent en s'approchant de ce corps, & cetre infexion de la lumièce produit toutes Les couleurs du >» fpectre folaire. Cette découverte a été faite par le P. Grimaldi en 1660, » & confirmée depuis par Newton & plufieurs autres gran ls Phyficiens. » 29, La lumière qu'on fait entrer dans la chambre obfcure, forme toujours une image circulaire fur le mur qui la reçoir, & certe figure eft d'autant plus marquée que le mur fe trouve plus éloigné. Cela polé, toutes les fois que le foleil perce un nuage où qu'il rencontre une lacune dans la mafle de la nuée, il eft évident que ceux de fes rayons qui pénétrant cetre lacune paffeng près des parois qui la terminent, doivent s’inféchir & s'approcher du nuage. ILeft encore évident que > ceux qui paflent plus près doivent fe brifer, s’infléchir beaucoup plus que ceux qui en paflenc plus loin. Enfin, il eft démontré que Les rayons qui paffent par le centre de cette lacune doivent conferver leur première direction. Cette ouverture entourée de nuages fait donc ici l'effet du » prifmé, & puifque l'inflexion agit fur la lumièrerout comme la réfadtQg 5 il's'enfüir évidemment que des infléxions différentes produiront des # nuancés différentes. Or, l’inflexion n’a lieu que pour les rayons qui » paflent près des parois de la lacune, J! n’y aura donc des couleurs que Tome XXXII, Part. 1, 1788. FEVRIER. Nov CC 8 #81 & y 356 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, fur le botte l'image. Voilà donc un fpeëtre folaire produic par Îes: nuages qui entourent cette lacune. [IL ne: s’agie plus que d'examiner quelle forme il doit prendre. » Or, nous favons que la lumière qu’on introduit dans la chambre obfcure produir coujours fur le mur une image circulaire, quelle que foit la forme de l’ouverture qui Padmet, Le fpectre formé par ces nuages > prendra donc une forme circulaire qui feroit términée fi: la terre ne le >» coupoit pas par le milieu ». e 8 8 B 8 y Nouvelles: Inflruélions bibliographiques, Hifloriques & critiques de Médecine, Chirurgie & Pharmacie , ou Recueil raifonné de tout ce qu'il importe d'apprendre pour étre au courant des connotffances & à l'abri des erreurs relatives à l'art de guérir : dédiées à S, À. S: Monfeigneur le Duc d'Orléans, Premier Prince du Sang; par M. RETZ, rome quatrième. À Paris, chez Méquignon, Libraire. rue des Cordeliers, près des Ecoles de Chirurgie, 1787, 1 vol. 47-16. Cet Ouvrage eft aujourd'hui connu du Public qui en-a porté ur jugement avantageux. Ce nouveau volume nous paroit mériter {e même’ accueil, Differtation fur le Café & fur les moyens de préparer & prévenir les effets qui réfultent de [a préparation communément vicieufe, & en: rendre la boiflon plus agréable & plus falutaire , avec une gravure: en taille-douce; par M. GENTIL , Doéteur Réoent & ancien: Profeffeur de la Faculté de Médecine en l'Univerfité de Paris, ancien Médecin des Camps & Armées de Sa Majeflé le Roi de France , ancien & premier Médecin: des Troupes de Sa Majeflé Impériale, Royale & Apoflolique. Prix, 2 Liv. 8 fols, À Paris, chez: V'Auteur, rue Saint-Hyacinthe, N°. 53, & Pyre, Libraire, rue de la: Harpe, vis-à-vis Saint-Côme , N°. $1. 1787, 1 vol, ë7-8°, Cet Ouvrage a été approuvé par la Faculté de Médecine de Paris # Nous eftimons, difent MM.les Commiflaires , que laFaculté rendra: » à l’Auteurune juftice méritée en approuvant fon Ouvrage, & un vrai » fervice à la fociété en autoerifant fa publication », Théorie des nouvelles découvertes en genre de Phyfique & de Chimie ;, pour fervir de Supplément à la Théorie des étres fenfibles ou au Cours: complet & au Cours élémentaire de Phyfique de M. l'Abbé ParA 5 par l'Auteur desces deux Ouvrages. À Paris, rue Dauphine, N°, 116. Didot fils, Libraire pour.le Génie & l’Artillerie,, 1 vol. 27:8°, Ce cinquième volume fait, fuite aux quatre que nous avons annoncés: dans le cahier précédent, Leur favant Auteur a voulu rendre fon Ouvrage: complets. SUR L'HIST. NATURELLE ET LES ARTS. 157 Scrpes novæ, aut minus cognitæ quæ defcriprionibus & Inconibus illuftravie C. EL. LHÉRITIER DE BRUFELLE, in aula Juvaminum Parifienfi Regis Confiliarius. Paris, Typographia P. D, Pierres, 1734 ; = . Cet Ouvrage eft peut-être le plus beau que nous ayons en Botanique, Son célèbre Auteur ne négligeant rien pour lui donner toute la perfection ofible, vient de faire enluminer le premier fafcicule; on croit voir la plante elle-même, & on ne peut rien ajouter à l'exécution. Chaque planche coûtera 6 liv. non compris le difcours ni la planche en noir. Elles fe trouvent chez Prevoit, Libraire, rue du Hurepoix. Le Bon Jardinier, Almanach pour l'année biffextile 17838 , contenant cè qui concerne la culture générale de tourcs les Plantes potageres , des Arbres fruitiers de toute efpece , des Oignons & Plantes à fleurs , même. les plus rares, & des Arbres & Arbriffeaux d'ornemens. Nouvelle édirion avec fupplément ; par M..bE GRACE, Cenfeur Royal , Culeivateur & Amateur. Prix, 36 Jos relié. À Paris, chez Eugène Onfroy, Libraire, quai des Auguflins, au lÿs d’or, 1 vol. 7-16. Dans la révolution heureufe qui fe fair dans l'Agriculture, cet Almauach ñe pêut êrre que fort utile. Il faut dans cette partie des connoiflances à portée de tout le monde, & on les trouvera ici. ‘Anitales de La petite Ruffie , ou Hifloire des Cofiques Saporogues & des Cofaques de l'Ukraine ou de La petite Ruffie, depuis leur origine jufqw'à nos jours , Juivie d'un abrégé de l'Hifloire des Hettmans des Cofüques, & des Pieces juflificauves , traduites d’après les manuf- crits confervés à Kiow ,enrichies de notes ; par JEAN - BENOIT SCHERER , Penfionnaire du Roi, Employé au Bureau des Affaires étrangeres ; Membre de plufieurs Académies, Confeiller du Grand-. Sénat de Strafbourg , ci-devant Jurifconfulre du Collège Imperial de Juflice à Sarnt-Péterfhourg pour les affaires de la Livonie, de l'Eflônie de la Finlande, 2 vol. in-8°. À Paris, chez Cucher, Libraire, rue & hôtel Serpente. : Ontrouvera dans ces Annales des chofes qui intéreffent les Naturaliftes, Mémoires hifloriques fur la vie &' les écrits de M. APRAHAM Tremscex. A Neufchirel, chez Samuel Fauche , Imprimeur & Libraire du Roï ; à Genève, chez François Dufaur ; & fe trouve à Paris ,chez Saint-Hilaire, Libraire , rue Haute-Feuille, N°, ee M. Trembley a trop bien mérité des fciences pour que le Public ne reçoive pas avec plaifir ces Mémoires concernant fa vie & fes écrits. | Differtation fur l'Anis étoilé, fes différentes efpèces , fon analyfe { (1 158 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUES chimique, fes proprictés alimentaires , médicinales , alexitéres Juperflitieufes , & d'ornement pour les jardins, & für la manière d'en tirer une liqueur connue fous le nom d'eau de badiarie , avèc fig. par M. Buca oz. Différtation fur le Creffor de roche, la Pamacée des Alfaciens , dans differentes maladies , fpécialement dans les vbffruétions de foie & Les maladies de poitrine, & fur fon analyfe chimique ; avec fig. par. M. Bucx oz. Phyfique nouvelle formant un corps de doctrine , & foumife à La démonftration rigoureufe du calcul. Cet Ouvrage renferme ce qu’il y a de plus important dans la Phyfique céleffe & terreflre , ainfi que dans la Métaphyfique, & qu'on n'avoit pu expliquer jufqu’à préfent + par M. DeLarras, Doëeur de Sorbonne. 2 Hi motus originem habent ex caufis mecanicis. À Paris, chez l'Auteur, rue des Vieilles-Garnifons , x vol. z7-8°, SÉANCE AÂACADÉMIQUE, L'Académie Royale des Sciences, Arts & Belles-Lertres d'Orléans, a tenu fon Aflemblée publique le 11 Décembre 1727, en préfence de M. Duc de Luxembourz , & des principaux Membres de l’Affemblée Provinciale. TAfER ÿ L'Académie dans fon Affemblée publique du 17 Mai 178$, avoit propofé pour fujer d’un prix de 400 livres qu'elle devoir décerner au» jourd'hui , les queltiens fuivantes ; 1°. À quelle caufe doit-on attribuer le mauvais goût que les ron- neaux font quelquefois contrader au vin, 6 qui ef! généralement connu Jous le nom de Goût de Für? ie *" 2°, Le bois ne fubig-il l'altération qui occafionne ce goût , qu'après avoir été coupé, ou La fève en étoit-elle affectée lorfqu’il étoit fur pied? : 3°. À quels fignes peüt-on reconnoître les bois donr les fucs one Jouffert cette aliération ? 4°. Qüéls font les moyens de corriger, ou de faire perdre an Win le goût defagréable que Le fit lui a communiqué ? Ra Le Concours a été forc nombreux ; mais c’elt à regret que parmi la multitude de Mémoires que l'Académie a reçus ; elle s'elt vue dans Fimpoñfibiliré d’en couronner aucun, : : Les Auteurs, où n'ont traité qu'une partie des Queftions , ou ils les ont difcutées d’une maniere vague & incomplerre. L'Académie croit néanmoins devoir cirer honorablement deux Mé- moires qui, par Jes obfervations neuves & inréreflantes qu'ils renfer- ment, méritent cette diftincion, Le premier côté N°. 6, a pour SÛR L'HIST. NATURELLE ET LES ARTS, 159 épigraphe ce vers des! Géorgiques : Felix qui pouit rerum cognofcere caufas, & commence par ces mots, qui le diftinguent d'une autre Pièce portant la même épigraphe : le Probléme que propofe la So- ciéré Royale d'Orléans , érc. L'autre mémoire eft coté N°, 13, & porte pour épigraphe ces mots de Séneque : Major fa hærcduas à me ud pofieros tranfeat. L'Académie, en propofant les mêmes queftions pour fujet du prix de 400 livres, qu'elle décernera à la fin de l'année 1789, invite par- ticulièrement ces deux Auteurs à s'en occuper de nouveau. Mais elle a foin de les prévenir que le goût de für dont elle cherche à découvrir Vorigine , & tel qu'il eft connu dans la province , e/? occafionné par les tonneaux neufs ; que ceux qui en font affectés , le communiquent au vin prefqu'auflitot qu'il y a-été mis, & que pour cette raïfon les Tonneliers de l'Orléanois font garans jufqu'à la Saint-Martin , & dans les années tardives, jufqu'à la Saint-André, des vins qui fe trouvent avoir contraété ce goût dans les vaifleaux qu'ils ont fournis. “Elle accordera, à la même époque, un fecond prix de 800 livres à celui qui déterminera par des expériences précifes & directes : 1°. 54 l'eau ef? une fubflance compofee , ou fi elle ef! une matière Simple € élémentaire ? 2°. Si celle que l’on obtient par la combuflion du gaz inflammable avec L'air viral, ef? produite dans l'aë&te même de certe combuflion ; ou f elle n'en eff que dégagée ; c’eft-à-dire , ft réellement elle provient de la combigaifon de l'air vital, ou de fa bafe avec l'air inflammable, ou ft cet air vital & sous les fluides. élafliques ne font pas eux-mémes une modification de l'eau , opérée par fa combinaïfon avec la matière du feu, de La lumière, ou de la chaleur ? k Toutes perfonnes, excepté les Académiciens réfidens , feront admife au Concours. Les Mémoires écrits en françois ou en latin, feront “adreflés, francs de port, ou fous le couvert de M. l’fntendant de la Généralité d'Orléans, au Secrétaire perpétnel de l'Académie, avant le premier de Juin de chaque année où les prix feront diftribués, : | Et ; TABLE Des ARTICLES CONTENUS DANS CE CAHIER. Ex TRAIT dun Mémoire lu à l Académie des Sciences | fur une Pierre filicée, calcaire, alumineufe, ferreufe , magnéftenne , de couleur verte, en mafle lamelleufe , demi-tranfparente , dont la furface eft criflallifée en faifceau ; par M. HASSENFRATZ , page 814 ré M LS F Lé » ! « - 169 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, &c. Obfervations fur la Lettre de M. DE Luc, infèrée dans Le Journal de Phyfique de Novembre 1787 ; par M. TREMBLEY, 87 Suite des objets de recherches, extraits d'un manuferie, fur les Vents, par M: Ducarra, 89 Lettre écrite par M. Carmov, Doë&teur en Médecine à Paray-le- Monial en Bourgogne , Correfpondant de l'Académie. de Dijon, à M. le Marquis DE Vic, 92 Defcription abrégée d'un Inftrument propre à mefurer les diflances, 9$ Suite de la défenfe de l'Hygromètre à cheveu ; par M. DE SAUSSURE , 98 Extrait du Mémoire de M. le Doëteur BONVoISiN , fur La dépuration de L Acide phofphorique : infèré dans les Mémoires de l'Académie Royale des Sciences de Turin, 107 Sur Lla-:Rotation & LP Atmofphère de: Jupiter; par JEAN -JÉROME ScHROETER , Grand-Bailli de S. M. Britannique, & Membre de l'Académie Eleëtorale de Mayence , 108 Foyages Minéralogiques, faits en Auvergne dans les années 1772, 1784 & 1785 ; par M: MONNET, à 115 Lettre de M. DE LÜc, à M. DE LA MÉTHERIE, fur l’Hygrométre de baleine , : ‘132 Mémoires académiques, ou nouvelles découvertes fur la Lumiere, relatives aux points les plus importans de l'Oprique , &c. extrait, 140 Mémoire de M. le Chevalier DE SOYCOURT , fur. les expériences données en preuve de la chaleur latente : couronné par l'Académie des Sciences de Rouen, le 27 juillet 1787, extrait, 147 Recherches fur les Rentes, les Emprunts & les Rembourfemens , &c« par M.DE ViLLARD, extrait, « if Nouvelles Lirtéraires , h 154 APPROBATION. J'ai lu, par ordre de Monfeigneur le Garde des Sceaux , un Ouvrage qui a pour titre: Obfervations fur La Phyfique, fur ? Hiftoire Narurelle € fur les Arts, ÉCe per MM. Rozier, MoNcEz le jeune DE LA MeTaerie , 6c. La Colle&tion de faits importans qu’il offre péricdiquement à fes Le&leurs, mérite l'attention des Sas ans ; en conféquence , j’eflime qu’on peut en permettre l'impreflion. A Paris, ce 23 Février 1788. : VALMONT DE BOMARE, Ÿ ef NZ €, LORS RÉ ERRR Æguuleur SRE RAR RENE RES DEN TES RS À mure mare ee tes ne mas ur A re € CRT ares sm mmernemeres) © Æevrier 1788. ‘ à LE L AE DO AC MODE av29e 2 * . 4 LEE . Qu ‘* Déesse peu 2 + x . pt La Lai ce sEdmgee tn @ ms Qc MENU param à 0 32 2e 0 Ca on M on or 4m € M 2 LS RE RAR MEET < CL EUTTE | PE, 17, — eh. A D PR CS Te LA nu Sa Dei ‘1 w De 2 2, | L Le ae are Lo nd Dé) *.+ gs De. de =: « 2 PEL >: a ne mt ee 1 JOURNAL DE PHYSIQUE. | MARS 1788. a ——_— EE AÉSS RS——— — RST lE SUR L'INDIGO ETSSES DISSOLVANS; Par M. JEAN-MICHEL HAUSSMANN, à Colmar. De quelqu'utilité que puiffent être pour l’art de la Teinture les différens Mémoires fur l’indigo qui ont paru jufqu’à préfenr, ils n'offrent aux Chimiftes & aux Phyfciens que peu de matières intéreflantes. Si celui que je préfente me paroît mériter quelqu’attention de plus ; c’elt qu'il a été compofé, non-feulement dans la vue d’aflurer conftam- ment la réufite des différentes opérations fur l’indigo, mais encore de faire voir que toutes les diflolutions dans lefquelles les molécules inté- grantes de cette fubftance colorante fe trouvent dans un état non altéré, ne paroiflent avoir lieu que par le concours du phlogiftique ; car quel- qu’ingénieufe que foit la nouvelle théorie de M. Lavoifer , elle ne me femble pas propre cependant à expliquer ces expériences d'une manière aufli fatisfaifance que l’ancienne doctrine de Stahl, Je diviferai ce Mémoire en trois Sections. Dans La première il s'agira de l’indigo traité avec les acides. J'y ferai voir qu'il n’y a abfolument que l'acide vitriolique , dans un certain état de concentration, qui foit propre à difpofer cette fubftance colorante à être employée à la teinture, & que tous les autres acides ou la détruifent radicalement , ou n'y exercent aucune action. Dans la feconde, je me propofe de démontrer que les alkalis en général , foit cauftiques, foic faturés d'air fixe, écant employés féparé- ment, n'exercent aucune action fur l'indigo ; & que la diflolution de cette fubftance colorante n’a lieu, lorfqu’on emploie des alkalis cauf- tiques , qu'autant qu'on leur ajoute certains compofés métalliques , tels que Parfenic rouge, l'orpiment, l’antimoine , par lefquels on obtient ce qu'on nomme communément le bleu d'application. La troifième Section enfin, traitera de la diflolution de l'indigo à l'ufage des cuves bleues au moyen du précipité de fer phlogiftiqué & du régule d’antimoine pulvérifé , conjointement avec les fubltances alkalines Tome XXXIT, Pars, I, 1788. MARS X 162 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, caufliques ou la chaux calcaire. Je ne manquerai pas de faire voir que ces mêmes fubftances métalliques, dans l'état de chaux parfaite, de même que les fubftances alkalines, lorfqu'elles font faturées d’air fixe , n’exercent plus la moindre action fur l’indigo (1). ne Quoique l’expofition de l'indigo à l’aétion immédiate d’une chaleur concentrée ne préfente rien de particulier fur ce que j'ai à dire de cette fubftance colorante , je l'ai cependant foumis à cet agent deftructif des fubflances végétales & animales. Outre du phlegme & de l'huile empyreumatique , j’ai obtenu, en me fervant d'un appareil pneumato-chimique , une grande quantité d'air inflammable mêlé à près d'un quart d'air fixe. Je n'ai examiné ni fi cet air contenoit une portion d'air phlôiftiqué , ni fi le phlegme étoit chargé d'alkali volatil : je fuis porté à croire l’un & l’autre, avec d’autant plus de fondement que M. Quatremère Dijonval aflure poftivement avoir obrenu de l’alkali volaril (2). La quantité de fluide aériforme qui fe dégage dans cetre opération eft relative aux degrés de chaleur que l’on emploie. Plus celle-ci eft forte, moins il y a de produit liquide, plus il fe développe: de fluide élaftique , & vice vers&. PREMIRRE SECTION. De l'Indigo traité avec les acides. Afin que l'acide vitriolique que l'on emploie avec l’indigo , pour former ce qu’en termes d'art on appelle cuve bleue, produife l'effet defiré, il faut qu'il foit dans un jufte degré de concentration ; trop concentré il détruit l'indigo , trop foible il ef fans action fur lui. On peut vérifier aifément fi l'acide eft dans ce dernier cas; il fuffit d’en échauffer doucement une petire portion & d'y mettre enfuite un morceau d'indigo : fi la partie de l'acide qui touche immédiatement cette fubftance , ne fe colore pas d’abord en jaune verdätre ;puis en verd foncé, & ne finit par tourner au bleu, ce fera une marque quil eft crop foible, & qu'il a befoin d’être évaporé pour être employé avec fuccès. Il eft à préfumer que l'acide done M. Quatremère Dijonval s’eft fervi pour la compofition bleue dont il parle dans fon Mémoire, avoit le défaut d’être trop peu concentré, & que s’il a réufli en ajoutant de l'alkali fixe, ce n'eft pas à la nature alkaline de cette fubftance qu'il a dû le fuccès de l'opération , comine il l’avance, mais à l'abforption de la partie aqueufe & à la chaleur produire dans J'aéte de la neutralifation, - (x) La plupart des expériences rapportées dans ce Mémoire furent faites il y a au-delà de douze ans, Note de l’Aureur. (2) Voyez fon Mémoire qui a pour titre : Analyfe & [Examen chimique de Y'Indigo tel qu'il eft dans le commerce pour l’ufage de la teinture , page 12° » SUR L'HIST. NATURELLE ET LES ARTS. 16; Pour que la compofition bleue foit bien faite , il faut qu’elle foic d’un beau bleu foncé lorfqu’on la regarde à travers le verre qui la contient & qu'on incline pour cer effet. On s’aflurera très-facilement de cette vérité en expofant au bain de fable dans un vafe de verre de la compofition bleue qui a parfaitement réufli. Car à mefüure que l'évaporation fe fait, la compofition devient de plus en plus violâtre , lilas enfuite, en acquérant à la fin une couleur d'ardoife, qui paîle au noir fi l’on continue l’évapo- ration. De cette manière les molécules intégrantes de l’indigo font réduites dans un état de charbon. Il fe dégage du gaz acide fulfureux pendant cette évaporation: il m'a paru aufhi qu'à melure que celui-ci fe forme, il £e produit du gaz inflammable ; car ayant approché de tems à autre une bougie allumée aux bulles qui montoienc à la furface de la liqueur, il y eut des marques légères d'infammation. : IL convient d'obferver ici, qu'il y a une grande différence entre les expériences en petit & celles qu'on fait plus en grand. Un acide qui auroit beaucoup trop de force dans ce dernier cas peut néanmoins faire réuflir la compofition lorfqu'on n'opère que fur une petite quantité. La raifon en eft qu'en mêlant, par exemple, une once & demie d’indigo guatimalo en poudre impalpable avec huit onces de pareil acide vitriolique, la chaleur fe communiquera beaucoup plus vîte aux corps adjacens, que fi l'on doubloit les dofes. Le mêlange conferve toujours plus où moins long-tems fa chaleur, en raifon de fa quantité, de la figure & de la conftitution du vafe , du plus ou moins de furface qu'il préfente à l'air atmofphérique, ainfi que de la température de cet air. Malgré les petits accidens auxquels la réufite de la compofition bleue eft aflujettie, on y parvient facilement & d’une manière sûre, fi l'on veut y prêter l'attention néceffaire. J’ai obtenu ainfi nombre de fois la plus belle compofition d’un mélange de quatre onces d’acide vitriolique & de fix gros d'indigo guatimalo en poudre : j'avois foin , lorfque lacide étoit trop concentré, de l’affoiblir avec la quantité d’eau convenable ; lorfqu’au contraire il étoit trop foible, j'évaporois le mélange au bain de fable, jufqu'en laiflant tomber une goutte dans un verre d’eau, celle - ci s’érendît dans toure la mafle au moyen d’une agitation légère & la colorär en un beau bleu tranfparent. Comme autrefois je faifois beaucoup ufage de cette compofition, chargée de la plus grande quantité poffible d’indigo , pour l'obtenir dans cet état , j'obfervois le procédé fuivant. Je mélois le mieux poffible avec une baguette de verre cinq onces d'indiso guatimalo en poudre impalpable avec vingt onces d'acide vitriolique, que j'avois eflayé d'abord fur un morceau d'indigo à la manière que je viens de décrire: on en peut aufli déterminer le deyré convenable de concentration à l’aide d’üne balance hydrofta- Tome XXXII, Part, I, 1788. MARS. X 2 164 OBSERFATIONS SUR LA PHYSIQUE; tique (1). Le mêlange fe faifoit dans un bocal de verre dont il ne remplifloit que la fixième partie. Tant qu'il fe dégageoic de la chaleur du mêlange (elle éroit telle que l’on ne pouvoir prefque tenir la main au bocal), je re difcontinueis de remuër jufqu’a l’entier refroi- diffement ; je laiflois encore repofer pendant quelques heures, je verfois enfuité peu-à-peu & en remuant toujours de Peau pure dans'le bocal, jufqu'à ce qu'il für entièrement rempli. Cette dernière précaution fert, non-feulement à garantir le vafe d’un échauffement trop fubit, qui auroit lieu fi l’on verfoit toute l’eau à la fois; elle empèche en outre le mélange de fe coaguler , ce qui préjudicieroit à l’intenfité de la nuance. Si les circonftances l’exigent , on peut étendre la compolition avec,une plus grande quantité d'eau. Au lieu de vaiffeaux de verre ou de orès pour y préparer la compofition bleue , on peur fe fervir de vafes de plomb, d'érain & même de cuivre. L’acide vitriolique n'agit que très-foiblement fur le plomb &#'érain dans leur état métallique & que fort lentement fur le cuivre fans le fecours d'une chaleur confidérable, fur-touc lorfque l’acide fe trouve concentré; le peu d’ailleurs qu'il pourroit difloudre , n’altère pas fenfiblement la couleur bleue. Le bourfoufflement & le dégagement des vapeurs fulfureufes que on ne manque jamais diappercevoir en faifant la compolñition bleue , ne laiflenc pas douter de l’action qu'exerce l'acide vitriolique fur les parties conflituantes de l’indigo ; auf auroit-on tort de regarder une diffolution d'indigo de certe efpèce, comme n'ayant fouffert aucune altération, & de: vouloir la comparer aux véritables diflolurions de l'indigo non altéré, que l’on obtient par des procédés tout différens. On ne fauroit donc réputer abfolument bon teint le bleu d’indigo que Pon obtient au moyen de l'acide vitriolique , quoiqu'il réfifte aflez bien à ce même acide affoibli, ainfi qu’aux acides végétaux; car il fe comporte tout autrement avec les alkalis & le favon que le bleu d’indigo bon teint, Ee favon, fur-tout avec de l'eau bouillante, l'emporte très-facilement , ce qui n'a pas lieu pour le bleu folide, Les liqueurs alkalines le trans- forment en olive plus ou moins jaunâtre fuivant leur degré de concen- tration & leur cauflicité ; elles le détruifent même lorfqu’elles font trop: fortes, de manière qu’il n'eft plus poflible de faire reparoître la couleur bleue au moyen de l’eau acidule, Ces mêmes liqueurs alkalines n'exercent ar elles-mêmes aucune action fur le bleu d'indigo bon teint, L'adhérence du bleu de compofition au lin & au coton ef fi foible ; qu’il fuffic d'expofer les toiles à l'eau courante , pour qu'il foit emporté oo (1) Ou d'un pefe-liqueur, SUR L'HIST. NATURELLE ET LES ARTS. 165$ peu-à-peu, de manière à ne plus laifler aucune trace. L'action de l’eau bouillante l’enlève encore plus promptement, j C’eft principalement pour teindre les draps en bleu & en verd de Saxe que l'on fait ufage de l'indigo traité avec l'acide vitriolique ; les parties colorantes s'y dépofent plus facilement & en plus grande abondance que fur toute autre étoile. En général la teinture des fubftances du règne animal eft beaucoup plus facile que celle des fubftances végétales : elle a même encore bien d’autres avantages ; car fi après avoir teint des draps ou de la foie ,on eft mécontent d’une nuance , on peut facilement en fubftituer d’autres, tandis que dans les manufactures d’indiennes où il s’agit de ménager des objets blancs ,on eft fort embarraflé de remplacer les nuances manquées ; dans nombre de circonftances cela n'eft pas même praticable. L'acide nitreux fpécifiquement moins acide , même dans l'état le plus concentré , que l'acide vitriolique propre à la diflolution de l'indigo , agit néanmoins plus efficacement & d'une manière entièrement deftruétive fux certe matière colorante , & la transforme en une fubltance dont les qualités font tout-à-fait oppofées à fes qualités primitives, & qui mérite toute J’attention des perfonnes qui voudront pourfuivre ces recherches. Dans l'intention de voir, fi en traitant l'indigo guatimalo avec l’acide nitreux , jobtiendrois de l'acide faccharin , j'ai mis fucceffivement & par petits morceaux quatre onces de cette fubilance colorante dans feize onces d'eau-forte ordinaire du commerce, que j’avois chauffée légèrement pour en accélérer l’action. Chaque morceau occafonnoit un bourfouffle- ment & un dégagement corfidérable de gaz nitreux. Ce gaz n’avoit pas Podeur ordinaire du gaz nitreux, elle étoit mélée de celle qui provenoit d'une autre fubftance qui paroît avoir été dégagée en même-tems : je n’aë pas examiné fi le gaz que j'ai obtenu conrenoit encore d'autres gaz que Le nitreux. Après que tout l'indigo fut confommé , je trouvai dans le vafe un coagulé; la liqueur furnageantée éroit jaune, d’un goût acide amer. Le coagulé dépouillé de rout acide nitreux par le lavage, formoit une mafle brune & vifqueufe, ayant roure l'apparence d’une fubftance gommc-. réfineufe;il fe comportoit à-peu-près de même, fe diffolvoit dans l'efprit- de-vin ,ceque ne fait pas l’indigo, & n'éroic difloluble que dans une grande quantité d’eau ,en plus forte dofe dans l’eau chaude que dans l'ezu froide : ce coagulé à cet épard fe comporte de même que certaines fubftances falines qui exigent beaucoup d’eau pour fe difloudre : fur la langue il eft d'une amertume fort défagréable, que la falive n’emporte que fucceflivement & à la longue. L'eau qui avoir fervi à laver le coagulé fut évaporée avec la liqueur acide (urnageanre, il fe dépofa par l’évaporation. & Je refroidiffemenc encore beaucoup de cette fubflance amère & vifqueufe, qui de même que la précédente donnoit une nuance jaune à l’écoffe que l’on trempoit dans 166 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, fa diflolution, Ce jaune adhéroit foiblement , puifqu'il a été emporté par Veau courante en très-peu de tems. Après quelques jours d'intervalle , ayant examiné la liqueur évaporée, je trouvai le dépôt éntre-mêlé des rpetits criftaux femblables à ceux de crême de tartre: ils paroifloient plus “acides qu'amers & précipitoient la diflolution nitreufe calcaire, ce qui me fit juger qu'ils avoient un grand rapport avec l'acide tartareux. Cette criftallifation me fit recommencer la deftru@ion des parties colorantes de l'indigo. Sur quatre onces d’indigo j'en mis feize de la même eau-forte : lorfque l'opération fut achevée, j’ajoutai encore feize onces de cer acide en expofant le tout à la chaleur du bain de fable pour en faire évaporer les trois quarts. Dans ce moment ayant été diftrait par d’autres occupations, j'oubliai cette évaporation : à mon retour je trouvai le vaifleau café & rempli d’un charbon très-fpongieux dont une partie couvroit le fable; le cylindre de verre que j’y avois laiflé fut lancé au- dehors par la déflagration. Je recommençai donc la même opération dans un tems où je pouvois Jui donner plus d'attention , & ayant évaporé les trois quarts , je troufai + le lendemain dans le réfidu quantité de criftaux qui s’étoient dépofés & dont la configuration reffembloit à celle de l'acide faccharin : ils avoient une couleur jaune qu’ils confervoient après le lavage dans l’eau pure, étoient d'une amertume auffi défagréable que la fubitance brune vifqueufe de la première opération, ne manifeftoient rien d'acide fur la fangue & ne précipitoient point la diflolution nitreufe calcaire, en quoi ils différoient totalement de l'acide faccharin. La liqueur où les criftaux s'étoient formés, étoit d’un jaune rougeâtre , un peu plus acide qu’amère ; je ne pourrois dire fi elle tenoit encore en diflolution le fel qui a un fi grand rapport avec l’acide tartareux : mes occupations n’ont empêché de traiter cette liqueur de nouveau avec de l'acide nitreux plus concentré que celui du commerce, Ce qui me refte encore à dire, c’elt que les criftaux que j'ai obrenus, fe diflolvent très-difficilement dans l’eau froide, en plus grande proportion cependant dans l’eau chaude. En mêlant la folution de ces criflaux avec une liqueur alkaline, cauftique ou non cauftique, il fe reforme à l'inftanc une multitude de petits criftaux jaunes, pointus & d’une apparence foyeufe , qui fe rediflolvent aufli-rôt fi l’on ajoute de l'eau en fufffante quantité; ce qui me porte à croire que ces criftaux ne different en rien’ de ceux dont ils proviennent , & qu’ilsne reparoiffenc plus petits que parce que l’alkali les prive de leur véhicule aqueux. L'action de l’acide marin déphlogiftiqué fur l'indigo , me paroît fur- pafler de beaucoup celle de l’acide nitreux. Car ayant mis un morceau d’indienne imprimée en bleu foncé bon teint dans de Peau très-foiblement chargée d’acide marin déphlogiftiqué, la couleur difparut dans très-peu de cems fans laiffer la moindre teinte jaune fur la toile, comme cela a » SUR L'HIST. NATURELLE ET LES ARTS. 167 lieu par l'acide nitreux & même quelquefois à la blancherie par les rayons du foleil (3). .: | L’acide marin ordinaire le plus concentré n'alrère aucunement les parties colorantes de l'indigo; il en eft de même des acides végéraux & animaux les plus forts: je n’ai cependant pas examiné l'effer des acides phofphorique & arfenical, ainf que celui de divers acides découverts depuis quelques années. SECONDE SECTION. De l'Indigo traité avec les alkalis & Les fubflances métalliques combinées ñ avec Le foufre. De tous les différens agens chimiques dont on fe fert pour difloudre Pindigo fans en alrérer les principes conftiruans, il n'y en a aucun qui , | feul & ifolé , produife de l'effer fur certe fubfiance colorante, Pour m'en aflurer , jai.eflayé fucceflivement les fels neutres métalliques, leurs préci- pités phlogiftiqués & déphlogiftiqués , particulièrement le fel neutre arfenical , l'arfemic blanc , la chaux calcaire, &c. roures ces fubftances ont | été employées inutilement, & dans l’état le plus puiffanc , & modifiées différemment avec le véhicule aqueux : j'ai même répété plufeurs fois » ces expériences pour en conflater la certitude, (z) Un grand nombre d'obfervations me portent à croire que le blanchiment des toiles doit être attribué à ces trois caules ; {avoir, àla fixation de 12 chaleur des rzyons: du foleil, à celle de l'air pblogiftiqué deFarmofphère , & en£n , à l’éyaporation de Vezu Qui en paffans À l’érat de Auide élafique entrzine toujours 2vec elle une bonne rare de parties colorantes. Pour ne rapporter qu’une feule obfervation , c'eft que même bleu d'indienne qui expofé à la blancherse fe décolore fortement enété , ne diminue en intenft£ que d’une manière prefqu'imperceprible par le plus beau folei} d'hiver. Cette explication pourroit s’appliquer zu blanchiment de toutes les couleurs . végétales & animales des indiennes & des ausres étoffes, On pourroit peut-être la vérifier en expofznt pendant Véré zux rayens du foleil des morceeux d’indiennes. diverfement colorés dans des récipiens remplis refpe&tirement d'air dépblogifiiqué , de g27 inflimmable, de gaz phlogifliqué & d'air fixe, ainfi que dans un réçipient vuide d'air. - Cetre idée ne-m’eft venue , qu’en pzrtant de la fuppofrion que la matière de la chzleur refte unie en très-grande parie avec l'acide marin déphlogifiiqué , lorfque cet. … acide p2fle de l’érat de paz à celui de liquide ,en (e combinant avec Vezu , 2vec ur acide , ou vn 2)kali quelconque ; czr on fait que ces combinzilons de l’zcide marin … Évphloziiqué détruilent roues les couleurs végérzles & animales , zinf que l’ont fzic woir Schéele, B=rgman , MM. Benhollet & Pelletier, & 2infi que je m'en fuis convzincs par mes propresexériences. Ez fuppoñtion de J’union permanente de Ia, maticre de la ch2leur avec Pacide marin déphlogiffiqué eft très - prozzble , puifque cet acide reprend trés-facilement fon élzfticité (ans le fecours de R chaleur : il y peut être un perir refroidiflement produit dans les liquides qui tiennent cet 2cide en ‘pe » ce qu'il fero facile de vérf£er 21ee un thermomètre, Noce & T'Aureur, 168 -OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE Après ces tentatives, j'ai eu recours, pour diffoudre lindigo , aux rocédés divers dont on fait ufage dans la teinture du bleu d’indigo bon teint, Le bleu d'application (1) des fabricans d’indiennes devoit naturel- lement fe préfenter le premier à mes recherches. Il fe prépare ordinairement de la manière fuivante : Avec deux cens livres d’eau on mêle feize livres d'indigo bien broyé, ou plus ou moins, fuivant fa qualité & fuivant la nuance plus ou moins foncée que l’on delire, Dans ce mêlange on met trente livres de bonne potafle : on expofe le tout au feu , & dès qu’on apperçeit un commence- ment d'ébullition, on ajoute douze livres de chaux vive, mais peu-à-peu & par morceaux, pour empêcher le mêlange de déborder. Cette addition de chaux ne fe fait que pour donner de la cauflicité à l’alkali fxe auquel la chaux enlève l'acide aérien. Jufqu'aiors les molécules de l'indigo n'ont encore fouffert aucune diflolution, & ce n’eft qu'après que l’on aura encore ajouté douze livres d’arfenic rouge ou d’orpiment en poudre, & qu'il fe formera un foie de foufre métallo-arfenical , que la diflolution aura lieu. Pour la completter on laiflera encore bouillir le mélange pendant quelque tems. On reconnoîtra que la folution eft parfaite par la couleur jaune qu’elle donnera dans le premier moment de fon appli- cation fur un verre blanc & tranfparent,. Si l'on expofe cette diflolution à l'air atmofphérique, elle fe couvre d’une pellicule cuivreufe ; elle devient de plus en plus bleuâtre fi on l'affoiblit avec de l’eau ou qu'on la laiffe expofée trop long-tems à l'air armofphérique dans fon état de concentration. Cette pellicule fe mani- fefte également avec les mêmes phénomènes lorfqu’on met la diflolarion en contact avec l'air déphlogiftiqué , l'air nicreux & l'air fixe; mais fous le récipient de la machine pneumatique, elle diminue à raifon du vuide que lof produit : elle n’a pas lieu du tout dans le gaz inflammable & phlogiftiqué. : Quelles que puiffent être dans les différentes manufaëtures , les propor- tions des ingrédiens dont on fe fert pour préparer le bleu d'application, ce ne fera jamais qu'à la faveur de la diffolurion de l’arfenic rouge ou de l'orpiment par l’alkali cauftique , que l’indigo fe difloudra. Ce qui prouve que ce n’eft abfolument que l'arfeni: dans fon état métallique combiné avec Le foufre, qui produit la diflolution de l’indiso, c'eft que fi au lieu d’arfenic rouge ou d'orpiment, on diflout le foutre, feul , ou avec une portion d’arfenic blanc , dans une liqueur d’alkali cauflique , l'indigo, que l’on aura préalablement mélé avec la liqueur alkaline , demeurera intat & ne donnera aucun figne de diflolucion. > 000 (x) On entend par-là le bleu d’indigoïque lon applique für les indiennes au moyen du pinceau, Il A Lee A DES - 2 ‘ SUR L'HIST. NATURELLE ET LES ARTS. 169 Il.en feroirde même fi, en fuivant le procédé que j’ai indiqué, au lieu d’alkali cauftique, on employoit un alkali faturé d'acide aérien, en omettant d’ajouter de la chaux calcaire au mélange. De-là il eft facile de conclure qu’en expofant le bleu d’application au conta& de l'air fixe, la folution abforbe cet air, s'en fature, & çela d'autant plus promptement, qu'ôh renouvelle plus fouyent la furface, qu’alors l'indigo ne peur plus refter deflous, qu'il reprend fon premier état , fous lequel il ne peur plus adhérer aux étoffes. Ayant mis du bleu d'application en quantité convenable en contact avec de l'air déphlogiftiqué , obtenu par la diftillation du nitre dans des cornues de verre, & ayant eu foin de rémuer continuellement , les ? de cet air furent abforbés , & le rélidu aériforme fe trouva être du gaz phlo- giftiqué. Le bleu d'application fe dégrada entièrement & Pindigo fut répénéré, comme cela avoit lieu avec l'air fixe. Il y avoit cette différence cependant , qu'une portion de l’alkali demeura cauftique, tandis que l'autre partie s’unit à l’acide du foufre engendré dans cette opération , & forma avec lui du tartre vitriolé. Le véhicule cauftique du bleu régénéré au lieu de tenir en diffolution l'arfenic dans l'érat métallique &*combiné avec le foufre , né le contenoit plus que fous l’état de chaux ou d’arfenic blanc. La calcination de l’arfenic rouge ou de l'orpiment diffous dans l’alkali cauftique ayant toujours lieu par l'abforption de l'air déphlopiftiqué , fans quoi! y ait fait difloudre de findigo, il eft naturel de demande. quelle pourroit être la caufe diffolvante de cette fubftance colorante & l’action que l'arfenic rouge ou l'orpiment exerce fur elle, Les Chimifles attachés à l’ancienne doctrine de Srahl diront que la caufe de ia diflolution de l'indigo ne peut être que l’affinité du phlogiftique plus grande avec l'indigo qu'avec l’arfenic, & que c’eft l’action du phlopiftique jointe à celle de Paikali cauftique qui opère la diffolution ; mais que le phlo giftique ayant encore plus d'afinité avec l'air déphlogifliqué qu'avec l'indigo, dès qu'il peut fe porter fur cet air, il abandonne la fubftance colorante, & celle-ci eft régénérée ; l’action feule des alkalis étant infuf- fifante pour entretenir la diffolution. On pourroir peut-être objecter que fi réellement le phlogiftique-fe combinoit avec l'air déphlogiftiqué , on devroit obtenir un rélidu de gaz phlogiftiqué plus abondant que celui que l'on rrouve à la fin de l'opération & qui n’eft que le huitième de l'air déphlogiftiqué, & cela d'autant plus que ce peu d'air phlogiftiqué a fort bien pu préexifter dans l'air déphlogiftiqué que j'ai employé & dont je n’ai pas vérifié la pureté par des eflais eudiométriques ( effais fur lefquels d’ailleurs on ne peut pas compter exactement ), ou bien ‘l'on pourroit dire qu'on devroit retrouver la combinaifon du phlogiftique avec J'air déphlogiftiqué dans la liqueur alkaline fous forme d'acide aérien. Mais les Stahliens auront recoürs dans ce cas à la formation d’une fubftance acide quelconque, qui à caufe de fa petire quantité ne donne que très- Tome XXXII, Part. I, 1788. MARS. 170 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, difficilement des indices de fa préfence; ou bien ils pourront recourir à la régénération de l'eau ; car plulieurs regardent l’eau , non-feulement comme la bafe de l'air déphlogiftiqué, mais comme différemment modifiée par: le phlogiftique & la matière de la chaleur , ils la prennent encore pour la bale de bien d'autres efpèces de gaz (r). L'abforprion de la partie pure de Pair atmofphétique par le Bleu d'application & la régénération de l'indigo qui en eft la fuite, rendent (x) Familiarifé depuis long-tems avec le Sflême de Stahl, je croyois que ces expériences ne pouvoient recevoir aucune explication dans la nouvelle théorie de: M. Lavoifier. Une perfonne cependant à laquelle j’ai communiqué ce Mémoire me: fit les obfervations füuivantes, J1 réfülte des expériences précédentes, É HE 1°. Que l’arfenic & l’antimoine combinés avec le foufre & diffous dans les alkalis: exercent une aétion diffolvante fur l’indigo ; mais l’on fait d’ailleurs que ces hépars métalliques en exercent une très-forte for la bafe de l’air déphlogiftiqué , de manière” qu’étant expofés fans indigo au contaét de l'air déphlogiftiqué , ils abforbent la bafe de: cet air & fe converüflent en chaux métalliques. 2°. Que l’ar'enic & Pantimoine réduits à l’état de chaux n’exercent plus aucune: aétion fur lindigo. $ ASS. 4 De-là il s'enfuit, que f on expofe la folution d’indigo à l'air déphlogiftiqué ou à: Pair atmofphérique , la bafe de l'air déphlogiftiqué s'unir aux hépars métalliques , les décompofe , convertit les demi-métaux en chaux & le foufre en acide vitriolique : il fe forme du tartre vitriolé avec Palkali : les demi-métaux calcinés n'ayant ples: d’aétion (ur l'indigo , il n’eft pas étonnant que celui-ci reprenne fon premier état & fe: régénère.. foie 3°. Qu'il faut obferver que l’air fixe en détruifant la cauflicité des alkalis émoulle- leur ation fur l'indigo : que d’ailleurs le gaz nitreux contient la bafe de l’air déphlo-- gifiqué qui fe porte fur les hépars , calcine les demi-métaux & occañonne la pelli- cule d’indigo régénéré qui fe fait voir à la furface de Ja folution. ARR 4°. Qu'il eff très-probable que l’indigo renferme une certaine portion d’air déphlo— illiqué concret qui s’y eft fixé par la fermentation qu’on fait fubir eux tiges & aux. Féuilles de l’indigofera pour en extraire la fécule colorante : que l'indigo contient en outre une grande quantité de fubftance réfineufe , ainfi qu’on peut Pinférer des réfultats obtenus en traitant Pindigo avec l'acide nitreux (première feétion) ; que par- conféquent il y a lieu de croire, que l’indigo, en fe diffolvant, cède aux aétions: fimultanées des hépars métalliques fur la bafe de l’air déphlogiftiqué & de l'afkali cauflique für la partie réfineufe ; chaaune de ces z&ions feroit infufffante fi elle. étoit: iolée. NE Le Quelque fpécieufe que foit cette-explication fondée für la théorie de M. Lavoilier, jetne faurois me d'fpen{er cependant de demander, pourquoi l’afkali cauflique combiné avec le foufre ne peut fans le fecours de l’arfenic produire un effèt diffolvant für - l'indigo , tandis qu'il efl reconnu que le foie de foufre a une très-grande-affinité avec Pair pur & qu’il 'abforbe très-facilement. Si le phlogiftique de ce foie dé foufre eft incapable d'opérer Ja diffolution de l’indigo, c’eft qu'en fe dégageant du foufre il r°eft! pas entièrement pur, puifqu'il entraîné toujours avec lui une partie de l’acide qui lui. adhère , ce qui eff prouvé par la nature de l'air hépatique, ainf que par-la minéra-- lifation des métaux par ce même air. Nore de l'Auteur. Re VA | 2 Ld SUR L'HIST. NATURELLE ET LES ARYS. 17: Tapplication de ce bleu fujerte à beaucoup de difficultés : auffi eft-il très - rare de trouter une pièce d'indienne peinte en bleu, qui foit d'une nuance égale dans toute fon érendue. IL faut pour que les nuances me différent pas trop entr’elles, que cette couleur foit appliquée promptement & également par les ouvriers les plus habiles. On ufe de la même précaution dans les manufaétures où l’on applique cette même couleur à b planche de bois, Comme la leffive cauftique diffout à l’aide de la chaleur une plus grande quantité d’arfenic rouge ou d'orpiment qu’à froid , la partie furabondante fe dépofe par le refroidifflement , ce qui forme avec la chaux calcaire dont on fe fert, les diférens fels neutres & autres fubftances terreufes qui fe trouvent ordinairement dans la potafle , un dépôt confidérable dont on peut néanmoins encore mettre à profit les parties colorantes. … Pouréviter ledépôt qui fe forme par le procédé que je viens de détailler’, je ferois fortement d'avis de ne fe fervir que de la portion furnageante de la diflolation de l’arfenic rouge ou de l'orpiment avec laquelle on mêleroit enfüite en raifon de la nuance plus ou moins foncée que l'on delireroit , une fufffante quantité d'indigo broyé avec de l’eau qui s’y diffoudra plus lentement à froid qu'à l'aide de la chaleur ; mais comme ce dépôt peut fervir plufeurs fois de fuite de corredtif au bleu d'application altéré par l'action de l'air refpirable & de l’air fixe , je préfere le procédé décrit ci- deflus, & cela d'autant plus que je ferai voir que l’on peut tirer parti de différentes manières du bleu contenu dans le dépôt. Ce dépôt peut fervir, 1°. de corredif au bleu qui auroit été altéré foic au pinceautage foit autrement ; il (ufic de réchauffer la couleur avec le dépôt, ce qu'on peut répéter plufieurs fois , fi le cas l'exige; 2°. en le délayant avec fufñfante quantité d’eau , on peut en faire une cuve propre à teindre les fonds; 3°. enfin, en l'étendant avec une quantité d’eau con- venable , laiflant repofer & décantant on fe fervira avec avantage de la partie liquide au lieu d'eau dans d’autres préparations de bleu d’appli- cation. Si de cette manière la nuance devenoit trop foncée, on pourroit à fonfigré la rendre plus claire avec de l’eau , ou, afin qu'elle fe conferve plus long-tems, avec une diflolution alkaline d’arfenic rouge ou d'orpiment. Comme on ne peut faire ufage du bleu d'application fans qu'il foie gommé , il vaut mieux y difloudre la gomme à l'aide de la chaleur qu'à froid ; car comme dans ce dernier cas on eft obligé de remuer plus long- rems, on renouvelle trop fouvent la furface de la liqueur, ce qui favorile trop l'abforption de la partie pure de l'air atmofphérique , ainli que la régénération de l’indigo. A-peu-près de même que l'arfenic rouge ou l'orpiment , l’antimoine u nau foufre fe diffour aflez facilement dans la leflive cauftique & déter- mine la diffolution de l'indigo; cette diflolution. préfente les mêmes Tome XXXII, Pare, I, 17988. MARS. 1 172 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, phénomènes que celle par le régule d’arfenic combiné avec le foufres elfe ne fauroit non plus s'effectuer lorfqu'au lieu de fe fervir de régule, on emploie les différentes chaux de ce demi-métal mêlées avec les diffolurions , caufliques de foie de foufre, De-là il réfulte, que le rôle que joue le foufre confifte uniquement à completer la diflolution des réoules d’arfenic & d’antimoine dans les alkalis cauftiques. 4 .… On ne fauroit faire ufage de la diffolution de l'indigo par l’antimoine ; fi l'on vouloit s’en fervie comme couleur d'application , on verroit bientôt que lorfque la toile fe sèche , la plus grande partie de la fubftance pyri- teufe fe dépofe fous forme de kermèsou de foutre doré, & qu’elle y adhère prefqu'aufli fortement que les. molécules d’indigo dont elle ternit fa nuance, ‘ J'ai tenté inutilement de diffoudre l’indigo par la combinaifon du foufre avec les autres métaux: ces fubftances par la voie humide ne fe diffolvent que très-diffcilement , peut-être pas du tout dans les alKalis cauftiques ; de manière que je n’ai pu juger de leurs effets fur la fécule colorante : je n’ai pas entrepris de traiter ces mêmes métaux par la voie: sèche avec le foufre & les alkalis fixes cauftiques. : j TROISrTÈME SECTION. à Des cuves bleues d'Indipo. On entend par cuves bleues de grands & profonds vaifleaux de bois de fapin, de plomb, de oyps, &c. dans lefquels on produit la diffolution de: lindigo au moyen du précipité de fer phlosiftiqué & de la chaux vive où de l’aikali cauftique. Voici le procédé que j'obferve ordinairement pour faire le bleu des cuves. Dans une cuve de quatre pieds de diamètre conflruite en bois de fapin & cerclée de fer, qui contient environ trois mille livres d'eau, je fais éreindre trenre-fx livres de chaux vive en y verfant devx cens livres d’eau jy mêle de-l'indigo broyé avec fufñfante quantité d’eau ; j’ai foin de remuer le mêlange fans difcontinuer, & avant de le laiffer refroidir, jy ajoute une diffolution de vitriol' de mars faite avec trente livres de ce fel veutre & cent vingt livres d’eau chaude : le vitriol doir être bien pur & exempt de tout fel étranger, fur-rout de vitriol de cuivre. Cette diflolution ferrugineufe augmente confidérablement l’épaififflement du mêlange pat 1a précipitation du fer fous la forme d’éthiops & la génération d'un fe! félénireux. Il y a une grande quantité de chaux qui eft en excès après là faturation complerre de l'acide du vitriol de mars & qui conjointement avec le précipité de fer opère la diflolution de l'indigo. Certe diflolution s'annonce aufli-tôt par une pellicule cuivreufe qui couvre la furface de la: liqueur & oui reparoît auffi fouvent qu'elle eft enlevée, Le mêlange devienr de plus en plus jaunätre à mefure que la diflolution fait plus de progrès. SUR L'HIST. NATURELLE ETLES ARTS. 17 Pour lui laiffer le rems de devenir complette , je laifle repofer le roue pendant un quart d'heure ; après quoi j’achève de remplir la cuve avec de Feau , en ne ceflant de remuer lentement, On peut indifféremment faire la cuve bleue avec de l'indigo fin ou ordinaire ; il fuffic d'en varier la quantité, On prendra, par exemple, douze à vingt livres pour la cuve que je viens de déraille, & même quelque chofe de plus fi l'on veut avoir une couleur pareille à l’indigo en fubftance, füur-rout s'il s’agit de reindre des toiles de lin. La nuance dépend aufi beaucoup du tems que l'on laïlle Îes pièces dans la cuve & de l’afage plus ou moins fréquent que l'on en af IL eft facile cependant d'obtenir rou- jours la même nuance à peu chofe près: il ne faut pour cet effer. qu'ajouter de tems à autre une certaine portion d’une diflolution d'indigo concentrée, c’eft-à-dire , d'une diflolution qu'on aura préparée avec le moins d'eau pofible. Avant de reindre dans la cuve bleue, on y laifle airenet dépofez le mêlange de précipité de fer, de chaux & de félénite calcaire, pour ne teindre que dans la partie furnageante & limpide, ce qui fe continue jufqu’à ce qu’elle commence à fe troubler ; après quoi on remue le tout &£ on n’y recommence la teinture des pièces que lorfque la cuve fe retrouve dans un état convenable. De cette manière on peut, f on le juge à propos, épuifer la diflolution de toutes fes parties colorantes ; mais les nuances deviennent plus foibles vers la fin ; ces nuances cependant font recherchées pour certains deflins. ; Lorfqu'on ne fait pas continuellement ufage d'une cuve, il eft effentie} de la remuer quelquefois par femaine; car par l’abforption continuelle de la partie pure de l'air atmofphérique, les molécules intégrantes de l'indigo fe régénèrent dans la liqueur furnageante ; elles ne fe rediffclvent.que Jorfqu’on remue le dépôt, & qu’elles viennent en contaét avec lui ; certe manipulation a de plus Favantage de répandre dans la liqueur les molécules colorantes qui s'éroient Mélées au dépôt. L'indigo fe régénère encore dans la partie limpide de fa diffolution , f par des circonftances quelconques fon véhicule aqueux faturé de chaux vive vient à abforber de l'air fixe : alors la chaux reprend fon état crayeux fous lequel elle ne peut plus concourir à.la diflolution de l'ndigo. ft s'agira donc lorfque cet inconvénient a lieu, de remplacer ce fel neutre calcaire par de la nouvelle chaux vive. Pour cela, il n'y a qu'à remuer le dépôt qui en contient toujours en escès ,en le répandant dans toute la cuve. Si cependant on répétoit trop fouvent ce procédé , route la chaux feroit à la fin neutralifée, & il faudroit en ajourer une nouvelle portion, après lavoir éteinte dans une quantité d'eau convenable. Si après cette addition de chaux la partie colurante ne fe redifloué peu-à peu, c'eft marque que le précipité de fer mêlé avec le dépôt a perdu tout fon phlogifique par l’action de l'air pur dans ce cas on sjourera ax 174 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, mélange cinq parties de vicriol de mars en liqueur; {uppofé que l’on aît mêlé auparavant fix parties de chaux : car il faut que la dernière de ces fubftances foic roujours en excès & dans la proportion Gxée ci-deflus. En prenant bien toutes ces précautions il eft impoflible que la cuve manque de réuffir ou quelle foit altérée. À force de teindre dans une cuve bleue , on en épuife quelquefois les parties colorantes au point, que les toiles ne reçoivent prefque, plus de couleur , fans que le dépôr ait pour cela perdu le pouvoir de redifloudre l'indigo. En effer, il fufir d’en ajouter une nouvelle portion , broyée avec de l'eau , de remuer la cuve quelquefoiside fuite & de la laiffer repofer ; elle fera alors en état de teindre de nouvéau. De cette manière j’ai con- fervé la même cuve pendant deux ans, & j'aurois pu m'en fervir bien plus long-tems, fi l'accumulation du dépôt n'avoir empêché d'y plonger les toiles aflez profondément. On peut fur-tout en prolonger lufage fi lon a foin de la couvrir exaétement chaque fois qu’on cefle de s’en fervir, afin de mettre obftacle à l’abforption de l’air pur & de l’air fixe. La petite quantité de chaux calcaire qui fe trouve en diffolution daus le véhicule aqueux de la cuve ne contrarie que très-foiblement la tendance qu'ont les parties colorantes à fe porter fur l'étoffe ; mais fi l’on charge de plus la cuve d'un alkali ou cauftique ou faturé d'air fxe, cette tendance diminuera proportionnellement à la quantité d’alkali que l'on y aura mis, de forte que l'intenfité de la nuance bleue de l'étoffe fera en raifon du moins ou plus d’alkali qui fe trouvera dans la cuve : ce qui fait voir avec quels ménagemens il faut procéder en préparant une cuve bleue, dans laquelle on eft obligé de faire entrer de l'alkali fixe, M. Quartremère Dijonval fait mention de l’ufage de pareilles cuves dans fon Mémoire {ur Findigo. Les parties colorantes de l'indiso , en s’attachant avec fes diflolvans à la furface de l’étoffe qu'on plonge dans la cuve, lui communique d'abord la couleur jaune de la diflolution. Dès que l’éroffe et fortie de la cuve , cette couleur devient de plus en plus verdâtre & finit par fe convertir en bleu. On accélère confidérablement ce changement de couleur, fi à linftant où l’étoffe elt retirée de la cuve, on la plonge dans une autre remplie d’eau chargée d’acide vitriolique, De cette manière l'étoffe acquiert une nuance beaucoup plus foncée que par tout autre procédé, Pour m'aflurer que l'intenfité de la nuance dépend de la promp- titude avec laquelle les molécules de l'indigo font rendues adhérentes aux étoffes, j'ai plongé un morceau de toile de coton dans une cuve bleue fraîchement préparée ; après l’y avoir laiflé quinze minutes , je Fai partagé le plus promptement poffible en quatre parties, l’une fue mile auffi-tôt dans de l’eau rendue acidule ; je rinçai l’autre dans le çourant le plus rapide de la rivière, la troifième fut lavée dans de l'eau ni. SUR L'HIST. NATURELLE ET LES ARTS. 175 flagnante de Ja même rivière; la quatrième refta expofée à l'air atmof phérique pour fe transformer en bleu par l'action feule de cer air, É'intenfieé de la couleur de la première partie fut la plus forte, parce que l’acide vitriolique mêlé avec l'eau, s'étoit emparé à l'inftant de la portion calcaire pour former de la félénite; la feconde devine feuf- blement moins foncée en changeant plus lentement de couleur, & le changement ayant étéencore plus lent à l'égard de la 3° & 4°, celles- ci eurent auf la nuance la plus foible, fur-tout la dernière, Si lon continue à fe fervir pendant quelque tems de la cuve remplie d’eau acide, elle s’'affoiblit de manière à régéner trop lentement les particules d’indigo , & l’intenfité de la couleur diminue jufqu'à devenir pareille à celle du morceau lavé dans Feau ftagnante ; on remédie à cet inconvénient en ajoutant de rems en tems une nouvelle portion d'acide vitriolique. Cette cuve devient bleue de plus en plus par l'indigo que le grand nombre de pièces déchargenr. Dans les grands atteliers où lon confume cette fubitance colorante en grande quantité , on pourroit encore tirer bon parti de ces cuves acides chargées d'indigo , en s'em fervant au lieu d'eau pour la préparation de nouvelles cuves bleues ; il ne s’agiroit que d’er neutralifer l'acide par la chaux calcaire. L'’indigo préfente encore un phénomène aflez fingulier ,. il fe laifle emporter de deflus les éroffes par le fimple frottement de#orps plüs durs que lui ; c’eft ce dont je me fuis apperçu en expofant des pièces. d’indiennes , teintes en bleu, au courant d’une rivière qui charioi beaucoup de fable ; je fus fort furpris de voir que Les pièces devenoient inégales en couleur, en raifon du tems qu'on les laiffoit dans l’eau , & de la quantité de fable qui glifloit deflus; m’étant bien affuré de ce moyen deftruétif des fonds bleus , j'ai pour ainfi dire, reblanchi les pièces devenues inégales, en les laiffant plus long-tems dans la: même eau, pour les réferver & reteindre erfuite. Tous les précipités qu'on retire au moyen de la chaux vive ou d’un: alKali cauftique des diflolutions ferrugineufes quelconques, faites avec des acides minéraux, végétaux ou animaux, tous ces précipités peuvent fervir indiftinétement à la diflolucion de l'mdigo, pourvu qu'ils aiene encoré la propriété d’abforber la partie pure de l’air atmofphérique 3 mais il eft effentiel d’ajouter à ces précipités un excès de chaux vive ou d'alkali cauftique, autreméfit la diffolution de l'indigo n’auroie pas lieu. : Si à la place des diffolutions ferrugineufes dans lefquelles la fubftance métallique a la propriété d'attirer l’air pur , on fe fervoit de la diffolution nitreufe on de toute autre, dans laquelle le fer exiftât fous forme d’ochre- parfaire, inattirable à l'aimant & incapable de la moindre sétion fur l'air- pur, cette folution ne pourroit contribuer en rien. à la difflolution de Lindigo , quand même on en auroit précipité la chaux férrugineufe aveg: 176 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, excès de chaux calcaire ou d'alkali cauftique. {J'ai conftaté ces faits par la répétition multipliée d'un grand nombre d'expériences. Toutes ces expériences me portéñt à croire que le précipité de fer qui a le pouvoir d’abforber l'air pur & de contribuer à la diflolution de l’indiso conjointement avec la chaux calcaire ou l’alkali caultique , doit être pourvu d'une fubftance propre à produire cet efler. Cette fubftance ne peut être que ce que Stahl & fes partifans appellent phlopiftique, qui ne fauroir être appercu dans un état libre & non combiné, parce qu’il n’abandonne ua corps que pour s'unir à un autre, Îl en eft abfolument de même avec loxigène qui ne quitte la matière de la chaleur avec laquelle il confitue Pair déphlogiftiqué que pour fe combiner avec un autre corps. Lorfque le phlogiflique fe porte fur l'air pur pour s'unir avec lui , il réfulte de certe union ou de l’eau ou une fubftance faline fuivanc les proportions de deux principes. : i Je ne faurois trouver d'explication fatisfaifante de 1a diflolution de l'indigo fans admettre l'exiftence du phlogiftique, à moins que, dans le fyflème pneumatique, on ne veuille fuppofer l'oxioène feulement adhérent aux molécules intégrantes de l’indigo fans être combiné avec elles, ce qui me paroîc hors de toute probabilité, Il éft vrai que fi cette fuppoñtion pouvoit être admife , il feroit facile de rendre compte de la diflolutiontde Pindigo fans recourir au phlogiftique , & cela par les loix de l’afinité. L'oxigène trouvant à fe combiner avec les parties ferrugi- neufes , avec lefquelles fon afinité eft plus puifflante, abandonneroit l'indigo , qui à fon tour eft fi avide d’oxigène qu'il ne le céderoit pas à moins de rencontrer la chaux calcaire ou l’alkali cauftique , avec lefquels il pût fe combiner & former une diflolution. L'indigo .abandonneroit enfuite fes diflolvans dès qu'il trouveroit moyen de reprendre de l'oxigène, Des expériences fouvent réitérées fur la teinture alkaline martiale de Stahl, m'ont fait voir que dans cette teinture le fer ne fe trouve diffous que par l’intermède de l’acide aérien. En effet, ayant préparé une liqueur alkaliné cauftique concentrée avec le même alkali fée qui faturé d'air fixe, n''avoit fervi pour faire Ja teinture de Stahl,je verfai goutte à goutte de cet alkali cauftique dans la teinture; la chaux de fer s'eft précipitée fous forme d'ochre en raifon de l’alkali cauftique qui éroit ajouté: & ce précipité refta toujours indiffoluble [lors même qu'il y eut grand excès d’alkali cauftique. Actuellement fi, comme je crois en être afluré, le précipité ferrugineux provenant d'une diflolution quelconque ne peut fe difloudre par le procédé de Stahl, fans avoir perdu la propriété d’abforber l'air pur, & que d'un autre côté ce précipité eft indifloluble dans l’alkali fixe cauftique, tant fous l'érac d’ochre que lorfqu'il eft capable encore d'attirer l'air pur, je n'entrevois pas de quelle manière le précipité du vitriol de mars pourroit SUR L'HIST. NATURELLE ET LES ARTS. :177 pourroit conjointement avec la chaux calcaire ou l'alkali cauftique, produire la diffolution de l'indigo, fi ce précipité ne contenoit du phlo- giftique. Lorfque l'indigo eft mêlé avec de la chaux calcaire ou de l'aikali cauftique, le phlogiftique doit avoir avec lui une affinité plus grande qu'avec le fer dans l’état de précipité ; cette affinité eft cependant moins forte avec l'indigo qu'avec l'air pur, comme je l'ai déjà faic voir. s Pour conftater avec une grande précilion la caufe diffolvante de Yindigo, il faudroit non-feulement entreprendre une analÿfe rigoureufe de cette fubftance colorante; mais encore après l'avoir diflous par fes différens diffolvans , il faudroit n’opérer que fur les diflolutions filtrées, ou ce qui vaudroit mieux, décantées de leur dépôt avec précaution : je n'ai ‘pas entrepris ces expériences, mes occupations ne m'auroient pas permis d’y mettre toute l'attention qu’elles auroient exigée. Tout ce que j'ai pu faire, c’eft dlexpofer la diffolution filtrée & produite par le concours du précipité de £er phlogiftiqué & la chaux vive ou l'alkali cauftique aux mêmes efpèces d’airs auxquelles j’ai expofé le bleu d’application. Ce font ces expériences qui ont donné lieu au Mémoire fur une production artificielle de l'alkali volatil, inféré dans le Journal de Phyfique, juin 1787. L'air déphlogiftiqué a été abforbé comme il l'eft par le précipité de fer phlogiftiqué , il ne m'a pas femblé produire de l'air fixe; il en éroit de même de l'air nitreux qui par fon abforption a produit de l’alkali volatil comme lorfqu'il eft abforbé par la diflolution du vitriol de mars & fon précipité. L'air fxe fut aufli abforbé, mais par la partie alkaline de la diflolution de indigo. Toutes ces abforptions par l'air déphlogiftiqué & Vair nitreux ont été fuivies de la régénération de l'indigo , & certe fubftance ne pouvoit fe redifloudre enfuite que par le concours d'une nouvelle portion de précipité de fer phlogiftiqué : randis que fi dans les mêmes circonftances l'indigo eft régénéré par l'air fixe ou par une addition d’acide vitriolique affoibli , fufffante pour faturer tout l’alkali, il fe rediffout très-facilement , (i l’on ajoute de nouveau de la chaux vive ou de l’alkali cauftique; mais dans ce cas même, pour que la rediflolu- tion ait lieu, il faut que l'indigs régénéré n’ait pas été trop long-tems expofé dans fon véhicule aqueux à l'air atmofphérique. IL en eft abfolument de même avec l’indigo régénéré fur les toiles. La couleur y reparoîtra également dans fon état de diffolution , c’eft-à-dire, qu'ellereprendrauneteinte jaurâtre, quoiqu’on ait paflé ces toiles par l'acide vitriolique affoibli & bien lavé avanr de les plonger dans une liqueur alkaline cauftique; mais il eft eflentiel d’obferver que cet effet n'aura plus lieu fi l’éroffe a été expofée pendant quelque tems à l'air armofphé- rique. IL me paroît que tous ces effets ne pourroient avoir lieu, sil ne reftoit encore du phloziftique foiblement uni à l'indigo régénéré; lin ligo Tome XXXII, Part, I, 1788, MARS. 378 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, dans ce cas n'attend que la préfence d'une fubftance alkaline pour reparoître dans un état de diflolution. . IL faut que le fer fe trouve dans un état de divifion chimique, tel qu'il left dans le précipité de fer phlogiftiqué, pour qu'il puifle con- courir à la diflolution de l'indigo. J'ai mis en digeftion un mélange de limaille de fer réduic en poudre très-fine, d’indigo broyé avec de: Veau, & de liqueur alkaline cauftique concentrée,. fans avoir pu par- venir à la diflolution de ce corps colorant. Le régule d’antimoine en poudre par contre, mêlé avec les mêmes fubftances & mis en digef- tion, m'a procuré une très-bonne diflolution d’indigo , dont on peut fe fervir pour du bleu d'application & pour en former des cuves bleues. ‘Il n'en a pas été de même avec les diverfes chaux d'antimoine; elles n’exercent abfolament aucune action diffolvante fur l'indigo. Le réoule- d’antimoine en poudre, mêlé avec de La chaux calcaire éveinte dans l'eau & de l'indigo broyé , ayant été mis en digeftion fur un bain de: fable, m'a auffi produit la diflolution de la matière colorante; n’étant pas pourva de régule d’arfenic ;. je n'ai pu voir s’il contribueroit aufñli: fans être combiné avec du foufre, à la diffolution de l'indigo , mais. j'ai lieu de le croire, je n’ai pu jufqu'à préfent produire la diffolution: de l'indigo, avec d’autres précipités ou d’autres fubftances métalliques ,. pas même avec Le zinc dont le phlogiftique fe dégage fi facilemenr,, & fe trafisforme en aix inflammable, lorfqu'on verfe , fur ce demi- métal, une liqueur alkaline cauftique. Le précipité de cuivre préfente avec l’indigo des phénomènes, tout: à-faic particuliers, Loin de contribuer à fa diflolution , il en opère la: régénération dans toutes les différentes diffolutions,. arfenicale , anti- moniale, ainfi que dans celle qu'on obtient par le précipité de fer. La diflolution de cuivre dans l'aile volatil cauftique, produit le même: effet; je fuis aflez porté à croire que dans ces circonftances le cuivre s'empare du phlogiftique de la diflolution de l'indigo. = Il y a des teinturiers qui tirent parti de cette propriété du cuivre: pour épuifer plus promptement les cuves bleues, qui parce qu’elles ont fervi trop long-tems ou parce qu'elles font naturellement peu: chargées d’indigo, ne fourniroient que des nuances très-foibles ; tandis que l’on en obtient des plus foncées en pañlant les pièces avant de les teindre par une eau très-légèrement chargée de vitriol de cuivre ou d’autres diffolutions cuivreufes , acides ou alkKalines. Cette propriété fingulière des fubftances cuivreufes d’alrérer les diffo- lutions de l’indigo , doit les faire employer le moins: poffible , dans les manufa@tures & atreliers de teinture en bleu , où l’on s'en fert pour réferver les objers que la liqueur des cuves bleues ne doit:pas pénétrer. li feroit même plus avantageux de profcrire entièrement ces fubftances. SUR L’HIST. NATURELLE ET LES ARTS. 179 cuivreufes dans les circonftances où l’on pourroit leur fubfticuer d’autres matières propres à réferver. Pour les réferves, on fe fert communément de cuivre diflous par Le vinaigre , fous la forme de verd-de-oris, ou diffous par d’autres acides végetaux ou minéraux. Dans ces écats différens, il nuit de deux manieres aux cuves bleues; 1°. par la chaux cuivreufe qui occafonne la régénération de lapartie colorante , & 2°. par fon diflolvant acide qui neutralife la chaux calcaire ou la fubltance alkaline; ces fortes de cuves altérées peuvent néanmoins être rétablies par une nouvelle addition d’un mélange de diflolution de vitriol de mars & de chaux calcaire en excès, éteinte avec une fufñfante quantité d'eau ; mais alors le dépôt s’augmente , & la cuve préfente encore d’autres isconvéniens. Je n'ai pas eu occafon d'entreprendre la diffolution de l’indigo par la voie de la fermentation, comme on le pratique pour la cuve bleue deftinée à la teinture de la foie, & ainfi que cela eft. décrit dans le Mémoire de M. Quatremère Dijonval. Je n’ai également pas travaillé fur la cuve de paîtel dont il eft parlé dans ce même Mémoire; maiscomme on n’ajoute point de fubftances métalliques à ces cuves, & que les alkalis & la chaux calcaire que l’on y fait entrer ; n'exercent par eux-mêmes aucune action fur l'indigo ni à froid ni par le concours de la chaleur, ce ne peut être, {elon moi, que le phlogiftique dégagé par le fermentation des fubftances végétales, qui puifle produire dans ces cuves la diflolution de la matière colorante. , Quoique l'alkali volatil puifle concourir , tout aufli bien que les alkalis fixes , à la diflolurion de l'indigo ; fa volatilité empêche de s’en fervir. ns SECOND VOYAGE MINÉRALOGIQUE FAIT EN AUVERGNE; Par M. MoNNETï. Nous commençämes ce voyage par la vallée de Talendres & de Saint-Amand, en remontant contre le cours da ruiffeau une petite rivière qui y coule pour s’aller jetter dans l'Allier, par Vaires & les Martres. Cerre belle vallée paroît très-fertile, jufqu’à ce qu'on ait at- teinc le commencement du courant de lave, le plus confidérable qui fe voit dans le fond des vallées de la baffle Auvergne. On le trouve à quelque centaine de toifes au-deffous de Talendres. Ce village eft bâti deflus ; & là on commence à monrer comme fur un monceau de Tome XXXII, Part. I1,1788, MARS, LR2 150 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE; pierres entallées les unes fur les autres. On y “voir les laves bourfou= flées confidérablement, entremèlées çà & là de cendres sougâtres ; les fcories font elles-mêmes rougeâtres & colcotarifées , & paroïlent s'être arrêtées en bouillonnant, Dès que j'ai eu paflé Talendres , j'ai compté en quelques endroits plus de 1$ pieds d’épaifleur dans le courant de laves ,«& je remarquai que plus j'avançois vers Saint- Amand, plus il s'épaififloit. Cette petite ville eft également bâtie deffus. De-là à Saine Saturnin , village à un quart de lieue plus haut, le courant delave s’épaiflit fi confidérablement qu'il paroît avoir plus de 30 pieds d’épaifleur ; par-tout onle voit bourfoufié, inégal, raboteux, & tel, en un mor, qu’un courant de fcories qui coule avec de l’eau ou dans l'eau, & qui fe fige à me- fure que certe eau s'évapore. On y diftingue des parties qui n’ont été qu’à demi fondues., & d’autres légèrement alrérées,’ En voyant ce Courant ou ces courans, car il fe peut qu'il y en ait plufeurs les uns fur les autres, on elt porté à croire que dans leur marche rapide ils ont en- traîné tout ce qu'ils ont trouvé fur leur paffage. Ce qu'il y a de bien plus fingulier, eft que ce banc de lave ne remplit pas toure la largeur de cette vallée, il s’en faut bien; il eft diftingué des deux côtés eomme: une muraille , fur-tout à côté de Saint-Saturnin , où l’on a à la gauche, au-deflous de la vafle montagne de Saint-Sans-Doux , plus de 40 pieds de profondeur pour atteindre le fond du ruifleau , & là on ne trouve pas encore le granit. La male de lave s’élève bien plus encore au liew même où eft fitué Saint-Saturnin ; elle y forme une boffe très-grande, & lon peut regarder ce village comme étant fur la plus énorme mafle: de lave qu'il y ait non-feulement en Auvergne , mais peut-être en Europe. Quoique cette lave foit très-inégale , elle n’en eft pas moins dure , de telle forte que l’ufement de fes inégalités eft très - difficile. On marche avec peine fur ce pavé monftrueux , ilne faut pas y aller la nuit, fi on ne veut rifquer de tomber; le poli des bofles fupérieures de ces. pierres augmente encore cette difficulté de marcher, & Saint- Saturnin eft à cec égard le lieu habité de la baffle Auvergne, le plus défagréable, De toutes les montagnes volcaniques qu'on voit près de Saint-Sa- turnin , on ne voit que la grande & énorme mafle de montagnes que’ nous avons nommée ci-devant, que l’on peut fuppofer avoir fourni cette grande quantité de laves; cependant placée de côté, elle n’a pu donner çe courant droit, tel qu’il eft. On a lieu de croire, en y ré- féchiflanc davantage, que ce courant vient de bien plus loin , je veux dire des montagnes qui font au-deflus ou à côté d’Auloy, dont nous allons parler, lefquelles dominent cette vallée à l’oueft , c’eft-à-dire en ligne droite, quoique fur la pente rapide qui borde ce vallon, & qui fait comme une grande digue au-deflus de Saint-Saturnin, on ne mouve que le granit feul. Au furplus, ce n'eft pas feulement ici où -SUR L'HIST. NATURELLE ET LES ARTS. 181 l'on trouve de la difficulté à expliquer la caufe & l'origine des courans de laves, Il y a deux autres grandes vallées & principales dans la Li- magne, dont la direction eft la même, non loin de celle-ci, j'entends celle de Champeix, & celle de Saint-Florèt ou de {Saint-Cieroue, &e ui peuvent encore mieux être regardées comme les égoüts du groupe Fa montagnes du Mont- d'Or, sen approchant davantage ; dans ces vallées; dis-je, il y a des courans de laves, dont l’origine- n'eft pas plus facile à expliquer, fi on ne les fuppofe pas venir droit du Mont d'Or. - Après nous être repofés à Saint-Saturnin , nous primes notre chemir pour aller à Auloy, village éloigné de celui-ci d'environ une lieue & demie ; c’eft le lieu où fe repofent ordinairement ceux qui montent au Mont-d'Or. A un petit quart de lieue de Saint-Saturnin , nous eûmes la première montée du rocher de granit ; qui fe préfente droit comme une muraille. Alors la vallée fe détourne à gauche & conduic à un hameau confidérable , nommé Chaîne, dans un fond où {e trouve encore beaucoup de laves bafaltiques, mais feulemeuc difperfées cà & 1à,'& donc lorigine n'eft vraifemblablement pas la même que celle du courant dont nous venons de parler, Il paroït bien évident que ces laves font pro- venues du haut de la montagne de Saint-Sans- Doux, puifqu’on y voit des traînées encore marquées fur les Hancs de cette montagne. IL faut croire que la pente rapide du rocher dont nous venons de parler, n’a pas permis aux laves de s’y arrêter, & que de-là elles one coulé rapidement dans la vallée que nous venons de quitter. Plufeurs veines tortueufes que nous vimes dans ce rocher, compofé de deux fortes de quartz, d'un gris & d’un blanc, mêlé de quelque peu de micas, fixèrent notre attention, pendant que nous n'avions plus de produits volcaniques à confidérer ; nous y trouvâmes une forte de fpath : pefant, gris, en criftaux folitaires , à demi-tranfparens, comme il s’en voit généralement dans le granit d'Auvergne. Nous en vimes aufñi qui étoic colorés en violer fale, L'irrégulariré de ces veines & ce fpath olé , qui étoit dedans, m'annoncèrent qu’il n'y avoit pas de métal à y chercher, dont, d’ailleurs ; le granit à gros grains , tel que celui- ci , eft un affez mauvais augure à cet égard, ; Auloy eft au pied d’une montagne volcanique de forme conique, qui eft toute couverte de laves bafaltiques, très-unies, très-dures & très- compactes. Il y en a de bleuâtres, & de configurées en colonnes très- régulières. Tout ce village en eft bâti, on y admire des tronçons de colonnes dans les murs & comme des chapiteaux qui les cerminenr, Les laves plattes ou en lattes , fervent aux efcaliers & à couvrir les maifons. De-là en fuivant le chemin qui conduit au Mont-d'Or, on ne marche que fur des laves, jufqu'à ce qu'on arrive fur le rerrein couvert de paturage qui les mafque, Dans cette pofition , la vue eft 182 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, entièrement entretenue par le fpeétacle magnifique du groupe du Mont: d'Or, qui s'élève majeftueufement devant foi, où le voyageur piéton croit toujours atteindre, & où il voir fon efpérance fruftrée de nouveau à une nouvelle montée, qui lui fait appercevoir une nouvelle diftance à parcourir, Quoiqu'il n’y ait felon les gens du pays, que 3 lieues d’Auloy au Mont-d'Or, nous fümes cependant plus de 7 heures à Les faire. Il eft vrai que la pente rapide que nous montions , & la chaleur du foleil qui étoic alors très-forte, nous obligea plufeurs fois à nous repofer fur le gazon, qui eft ici fi bon, fi touffu ; il nourrit une fi grande quantité de vaches, & donne lieu à la fabrique d’une fi grande quantité de beurre & de fromage, qu'il mérite feul l'attention dès Naturaliftes voyageurs. Nos ftations ne nous étoient donc pas tout-à- fait inutiles pour l'hiftoire naturelle, Outre les roches volcaniques que nous appercevions dans les places où le gazon étroit ouvert, nous y confidérions, le meum , La gantiane , la bétoine, l’élébore blanc, la coguelourde ou renoncule de montagne ; toutes plantes que les vaches évitent avec foin , & qui dominent par conféquent les autres plantes toujours de beaucoup. Notre dernière flation fut au bas de la croix Morand ; c’eft ainfi qu'on nomme la plus grande hauteur de terrein, par laquelle on eft obligé de pafler pour aller au Mont-d'Or. Elle eft entre deux hautes montagnes, en forme de pain de fucre. Ce mafñif qui eft fort vafte, paroît avoir été formé des déjedions de ces deux montagnes, & avoir été auparavant une vallée très-profonde , garnie d'eau jufqu'à une grande hauteur, C’eft-là que fe fait la féparation des eaux qui defcendent dans Îa Limagne d'Auvergne, d'avec celles qui vont dans le Limoufin , & qui forment le commencement de la Dor- dogne. Dès qu'on eft au haut de ce maflif, on trouve une pente dans le fens oppofé à celle que l'on vient de quitter ; cette pente devient peu-à-peu fi rapide, que les eaux coulent avec grande force pour s’aller jetter dans un gouffre , taillé & formé dans les débris de volcans très- friables , telles que les terres pouflolaniques qui font entraînées par les eaux très- facilement. C'eft par-là qu'on peut expliquer facilement la formation de tous les abimes, que l'on trouve communément dans ce groupe de montagnes, ainfi que les déchirures qu’on y voir.de tous côtés, la profonde vallée des bains du Mont-d'Or, & celle où coule la Dor- dogne. NT Ce mafñfif diminue de largeur à mefure qu’il avance vers [e goufre; & comme les eat: font le guide Le plus sûr que l’on puiffe avoir pour y parvenir dans certains tems, où le fentier n’eft pas reconnoiflable, ii faut bien fe garder de le fuivre jufqu'au bout, parce qu’on rifqueroit de fe précipiter avec lui dans ce gouffre , où il n’y a & où il ne peut y avoir de fentier; il faur fe détourner à droite; alors on trouve un 7 chemin très-oblique , qui traverfe un bois de vieux fapin, Ce chemin SUR L'HIST. NATURELLE ET LES ARTS, 183 qui à caufe de fa pente rapide fe dérériore très-promptement, eft fur le flanc d'une autre montagne & des plus vaftes qu'il y ait dans le groupe du Mont-d'Or, montagne qu’on ne peut bien voir que lorfqu'on eft arrivé cout-à-fait dans le profond abime dont nous parlons. Les déchirures qu'on voit de tems en tems dans cette montagne entre: les fapins, & celles que Pon trouve au bas de la montagne , & de-là jufqu’aux bains & par-tout dans les pentes de ces montagnes, vous font voir une terré blanchätre pouflolanique, graveleufe , où l’on dé- couvre quelquefois des parties plus fines, que l’on peut prendre pour un très-bon tripoli. On apperçoit alors que les pierres volcaniques , celles qui ont coulé totalement ou ont été fondues entièrement, fon polées par-deflus , & que les autres pierres y font difperfées. On ne voit plus ici de ces pierres bafaltiques, noires , compagtes , prifma- tiques & d'une pâte homogène , comme dans la Limagne. Aucune montagne du groupe du Mont - d'Or ne préfente de ces rangées de colonnes qui couronnent celles de la Limagne. * La plupart des pisves qu'on y voit, ne fonr que dés granits où des chyts à demi-fondus. Quelques-unes de ces pierres font fi peu al- térées , qu'on peut les reconnoître d’abord pour ce qu'elles ont été. Dans quelques - unes on voit les parties quartzeufes étonnées feulement & propres par conféquent à fe réduire en poudre. Dans d’autres on ap- perçoit le verre du feld-fpath. Le fond de ces pierres eft en général d'un gris de cendre , de manière que les parties dont noûs parlons, y reflortent à merveille , & en font encore des efpèces de granit. Le fond de tous ces vallons offfe une grande collection de ces pierres, & même du granit dans fon état naturel, comme nous le verrons dans la fuite. ou FPT Quand on eft détourné à la gauche, & qu’on eft entré dans la vallée où font les bains, vallée qui court du midi au nord, on a l'af- pet le plus agréable que l'on puifle avoir dans ces montagnes, une vafte vallée dont le fond eft plat, & qui eft terminée à une demi- lieue au midi par le groupe particulier de montagnes, qui eft la partie qu'on nomme à proprement parler le Mont-d'Or. Ceft de ce groupe ue defcendent les eaux qui ont taillé & qui taillent encore cette: vallée & fillonent fes bords Les neiges qui couvrent ces montagnes la plus grande partie de l’année , donnent à ce vallon les premières. eaux & les plus abondantes. Les autres qui viennent de droite & de: gauche grofhifent dans peu ce principal bras du commencement de la Dordogne, qui ne coule pas fi vite que les autres, parce que le fond de cetre vallée eft beaucoup moins penché , & fa plature eft caufe qu'elles fe répandent plus qu’elles ne devroient pour le bien des habitans: du Mont-d'Or. Le village des bains fe trouve à la gauche en remontant contre 184 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, le cours du ruifleau , adoffé au bas de la côte crès- efcarpée, d'où fourdent les eaux minérales abondamment. Comme dans les premiers voyages que j'avois faits au Mont-d'Or, javois apperçu fur cette côte de 6 à 7 cent pieds de hauteur , un banc de lave des plus remar- quables, je fus porté tout de fuite à l'aller examiner ; je trouvai qu'il couroit & s’abaifloict comme la furface fupérieure de cette côte, c'eft- à-dire du midi au nord, comme celle qui lui eft oppofée de l’autre côté de la vallée, qui prend auñi fon origine aw#groupe du Mont- d'Or, & qui n’en eft de même qu'un appendix. Je fuivis celuisci en le remontant vers les montagnes du Mont-d'Or, & examinai en paffant la chûte d'eau fort connue, qu'on nomme la cafcade , qui fe préci- ite dans un abime qu’elle s’eft creufé. C'eft ce banc folide fur lequel gliflent les eaux qui viennent des montagnes qui dominent le vafte plateau à left, qui a maintenu cette chûte d’eau, & les oblige à couler perpendiculairement ; fans lui ces eaux ne trouvant aucune ré- fiftance , auroient ouvert davantage, depuis long-tems la gorge qu'elles ont faite, & elles n’y tomberoient plus maintenant de cette manière. Auñi le defflus de ce banc , qui en quelques endroits peur avoir 39 pieds d’épaiffeur , eft-il excavé en deflous, par le feul jer & le contre- coup des eaux. C’eft-là & dans des efpèces de fentes de ce rocher, qu'on trouve ce fer fpéculaire, en petites plaques minces, lillées & polies , qu’on connoît fous le nom de fer fpéculaire du Mont-d'Or, & que l'on regarde comme un fer fublimé, au moyen des parties antimoniales qui lui étoient unies ; mais il ne nous a paru n'êtreMtout fimplement que du minérai de fer ordinaire fondu , & qui a coulé comme la matière qui forme ce banc de lave, & cela fans s'y mêler, parce qu'il eft de nature différente (1) ; par-deflus ce banc & dans l’étendue du plateau , & où fe trouve un des meilleurs pârurages d’Au- vergne, on voit des monceaux de roches volcaniques, en haufler ou baifler la furface confidérablement, Plus on s'approche du groupe de montagnes du Mont-d'Or, & plus on voit de ces roches granitiques, entaflées ou roulées dans les déchirures faires dans la terre dont nous avons parlé. Prefqu’en face du village des Bains, il y a une montagne coupée perpendiculairement fur le fond de la vallée, & qui fait partie de la côte ,. que l’on nomme le Capucin, on ne fait trop pourquoi. Cette montagne n'eft pas du tout ce qu'elle paroît être de loin, ni pour la (1) J'ai effayé ce fer & j'ai trouvé qu’il étoit entièrement pur. Une grande quantité d’acide marin bouilli deflus, en a diffous une aflez grande quantité, qui précipitée au moyen de la leflive du bleufde Prufe , a fourni un précipité bleu très-abondant. Cè fer fondu avec le flux noir ordinaire, le verre & le borax, a donné un régule fans prefqu'aucun déches & d’un bon fer, - forme ; mi SUR L'HIST. NATURELLE ET LES ARTS. 185 forme, ni pour le fond , & c'eft en cela qu'elle mérite véritablement Pattention des Minéralogiltes. Nous venons de dire que toutes les mon- tagnes n'offrent dans leur bas que des certes pouflolaniques & des pierres ou roches entaflées dans leur haut. Celle-ci en diffère en ce quelle n'offre depuis le bas jufqu’en haut que des mafles de roches entaflées les unes fur les autres. Ces roches font au furplus comme celles des autres montagnes, à la différence près cependant, qu’elles reffemblenc un peu plus à celles qui fe trouvent éparfes fur le fond de la vallée, c'eft-à-dire qui reflemblent plus au granit à demi-fondu, On a peine à concevoir l'origine & la caufe de cette fingulière montagne , ou £omument tant de roches de même efpèce ont pu fe raffembler au même lieu , ou fi elles font l'effet de l'affemblage des laves, qui fe font ac- cumnulées en ce lieu. Le chemin pour y monter eft très-droit ; mais on en eft dédommagé par l'ombrage qui le couvre, & parce qu'on trouve à s’y repofer agréablement, fur-tout fur le col de cette montagne, c'eftä-dire entre la cîme de cette montagne & la côte fur laquelle elle eft comme appuyée. Il en eft de cetre côte comme de l’autre, on peut gagner de là le grouppe des montagnes du Mont-d’Or, & même avec moins de difficulté; on trouve ici un chemin pratiqué par où les gens du pays coupent court pour aller du Mont-d'Or à la Tour, & autres lieux placés au-deflous du groupe de montagnes, De retour de cette dernière courfe, je m'occupai à découvrir le rocher de granit dans le fond de la vallée, mais ce fut inutilement ; je compris enfuite qu'il devoit être plus bas & enfoncé prodigieufement fous les débris volcaniques, & comme je favois que je le trouverai plus loin, je veux dire dans la vallée où la Dordogne eft formée de toures fes branches primitives, qui court de-l'eft à l'oueft, je me propofai de fuivre cette vallée jufqu'au lieu nommé la Bourboule , où il y a encore beaucoup d'eaux minérales que j'avois deffein d'examiner en même- tems. Je ne tardai pas, en effet, lorfque j'y fus, à reconnoître que je quittai la couverture volcanique. On compte une lieue & demie des Bains du Mont-d'Or, à la Bourboule ; mais à peine eus-je fait un quart de lieue, que je remarquai dans le fond de la rivière des blocs de granit dans fon état naturel, qui étoient pêle- mêle avec les roches volcaniques. Je n’écois embarraffé qu’à favoir d’où venoient ces pierres ; car il étoit clair pour moi qu'elles n’avoient pas été détachées du lieu même où je les trouvois , puifque le fond de la rivière étoit encore couvert de laves; je ne pouvois donc me difpenfer de croire que ces pierres de granit venoient d’au-deflous les hautes montagnes dont j'ai parlé ci-devant , que les chûtes d’eau terribles dont j'ai auffi parlé , les en avoient détachées, avant que ces mêmes chütes d’eau euflent couvert de débris volcaniques le rocher de granit ; ce qui remonte à un tems extrêmement éloigné du nôtre, du moins on a lieu de le croire en Tome XXXII, Part. I, 17988. MARS. À a 186 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, voyant l’immenfe malle volcanique qui enfevelit cette roche primitive. Je vis le rocher de granit parfaitement à nud à une demi - lieue: de la Bourboule. Alors ie ne doutai plus que toutes ces montagnes fatices ne portaflent fur cette partie du globe. Je crois devoir faire: une remarque qui me paroi venir naturellement ici; c’eft qu'en ne: donnant à ces montagnes que neuf cens pieds de hauteur perpendiculaire ,. depuis la roche de granit jufqu’à leur cime la plus élevée, ce que l'on ne peut pas moins leur donner, fur-tout fi on compte depuis la vallée de Chambon, d’une part , du fond de la tour & du lieu dont je parle de l’autre, on trouvera que cette mafle volcanique eft une des plus grandes que l'on puiffe voir, non pas tant à caufe de cette hauteur, qui n’eft rien en comparaifon du Pic-Tenerif, du Mont- Ethna & de tant d’autres montagnes volcaniques ; mais à caufe de fon: étendue, dont les trois points que je cite ne font pas les plus éloignés. que lon peut donner comme extrèmités de cette énorme mafle , ce: qui fait fuppofer qu’il a exifté au centre de cette mafle un des plus effroyables volcans qu'il y ait au monde. On ne peut pas d’ailleurs en prendre d’autres idées en voyant les énormes courants de laves gagner les vallées, defcendre dans la Limagne, & donner tous ces amas de- laves qui couvrent le granit pendant plus de 20 lieues de circonférence .. tout autour de cet amas de montagnes volcaniques, que l'on peut confidérer comme le reftant de bien plus hautes montagnes, qui s’a- baiffenc & fe détruifent journellement par les eaux, qui comme nous: l'avons dit, les déchirent fort facilement. Les montagnes ne font plus aujourd’hui formées comme rous l'avons vu, qu'avec les débris dü rocher: de granit, où le feu s’eft éteint peu-à-peu: Voilà pourquoi ces roches: graniteufes n'ont pu fubir une fufion parfaite & entière. Les terres gra-- veleufes, blanches, pouflolaniques, n’en font quele détritus , & le même: qu'on feroic en calcinant plufieurs fois le granit & l’éteignant chaque fois dans l'eau. Elles réfultent en un mot d'un granit qui a été moins: ouffé à la fufion que celui des roches qui s'y trouvent mêlées. D’après cela il eft facile aufi de comprendre pourquoi on ne trouve: plus dans le groupe du Mont-d'Or de ces laves compactes, dures, noires, homogènes, qu'on nomme bafalt; car il eft cour aufi évident que la matière qui les a formées, a été des premières fondues, & jettée au loin, avant que le travail du volcan ait pu atteindre le rocher graniteux ou Pancienne terre. La Bourboule eft un hameau tout-à-fait fur le bord de la Dordogne, dépendant du village nommé Murat, qui eft fur le haut de la monta- gne. Dans le bas de cette montagne, derrière Îe hameau dont nous: parlons , on ne voit que beaux rochers de granit , il y en a un fur- tout qui eff très-faillanc & qui atrira aufli-tôt mes regards ; il eft fort près du Bain & derrière la principale maïfon du hameau. Je trouvai SUR L'HIST, NATURELLE ET LES ARTS. 187 dans celui-ci de belles criftallifations quartzeufes, avec des parties de minérai de fer, couleur de café brûlé; c’eft ici où j'ai trouvé les plus beaux morceaux du granit de l'Auvergne , cependant avec peu de mica. Lis confiftent principalement en trois fortes de quartz ; favoir un jaunâtre, un blanc & un gris. Mais ce rocher de $ à @ voifes de hauteur & d'autant de largeur , eft encore plus remarquable par quatre ou cinq fortes d'eaux minérales, qui en découlent; roures ces fources prélentent une eau falée & piquante à caufe du gaz qui y eftuni, qui n’ÿ étant pascombiné comme dans celles du Mont-d'Or & autres de l'Auvergne , leur donné un goût véritablement acidule, Ces eaux reffemblent par-là beaucoup aux eaux de Seltz ; ellés fonc plus faléesÿ en ‘effet elles contiennent beaucoup plus de fel, & fi peu de fer qu'à peine fe colorent-elles avec la noix de galle; elles ont outre cela un degré de chaleur fupérieur au tempéré. Tout-à-fait fur le bord de la rivière, on en voit une autre plus abondante encore. En général tout ce petit canton eft fi rempli d'eaux minérales qu'il y en auroit pour fournir à toute la province fi elles étoient ramaffées convenablement. Il y a des pays où le fel étant fort cher , les premieres fources dont j’ai parlé, feroient exploitées pour le fel marin qu'elles contiennent; maïs ici on n’y fait pas feulemenc attention , fur-tout depuis que les eaux du Mont-d'Or fe font attiré une fi grande réputation, Le Bain de la Bourboule eft entièrement abandonné, l’eau y fourde fi abondamment , qu’on ne fauroit mettre les pieds fur le pavé fans les voir baignés. Le déné de chaleur de cétre eau n’eft pas fort grand , & eft véritablement celui qui convient pour Les bains; il ne paile pas 28 degrés felon le thermomètre de Réaumur, Le goût de cette eau eft à-peu-près pareil à celui des eaux dont nous venons de parler, elle ne fe coloré pas avec la noïx de galle, elle eft d’ailleurs fenfi- blement falée. Douze livres dé cette eau m'ont fourni, terre abforbante demi-gros, fel marin jaunâtre & fentant la leflive 2 gros & demi, fel alkali minéral aufli lixiviel demi - gros, C'eft ici une belle occafon de faire voir que les eaux minérales conftantes , les véritables eaux minérales, en un mot, les chaudes fur- tout ; fourdenc toutes des roches primitives, que c’elt-là où elles exiftent toures, comme n'y ayant que ce rocher qui puille les conferver; mais comme ce faic parle ici de lui-même , nous ne croyons pas devoir nous y arrêter; d’ailleurs nous allons voir dans le cours de ce voyage bien d'autres occafons de montrer cette vérité aufi inconteftablement. Avant de retourner aux Bains du Mont-d’Or, je voulus vifitér encore mes beaux rochers de ogranirs, & j'eus lieu de m’applaudir de ma ré- folution, puifque je découvris tout-à-faie au bas & prefque par-deflus le bâtiment du Bain , une grande mafle d’une terre blanche argilleufe, qui me parut aufli-tôr être de certe terre à porcelaine, qu'on nomme Tome XXXII, Part. 1, 1788. MARS. Aa 2 : 188 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, kaolin, J'y découvris des morceaux de feld-fpaths, comme dans a terre de Saint-Yrieix en Limoufin , à cette occafon nous remarquerons que c'eft une chofe très-digne d'attention, dé voir que cette terre ne {e trouve ordinairement que fur le granit, comme on en a encore la preuve auprès d'Alençon, où une pareille terre fe voit ainfi fur le granit , laquelle a donné lieu. d'établir les premières fabriques de por- celaines en France. Plus loin fur la mème ligne à-peu-près , en fuivanc mon chemin pour retourner au Mont-d'Or, je vis: une forte de banc chyteux & ferrugineux & une mafle de rochers fecondaires, recouvert par en haut par du gravier, dans lequel je trouvai des noyaux fer- rugineux, des pierres roulées, parmi lefquelles j'en vis de volcanifées,, ce qui me prouva que fa rivière avoit coulé autrefois à cette hau-- teur. Lorfque je fus rentré dans Ja vallée du Mont-d’Or , n'étant un peu: écarté du grand chemin à gauche, j'apperçus une forte de banc de chyte ferrugineux, d'un gris fombre, qui paroîtroit au premier coup- d'œil être dans fon érat naturel, mais que l’on voit bientôt enfuite- être le réfultat de l’afflemblage des parties de même nature miles en: fufon , & qui font attirées en raifon de leur analopie, en coulane enfemble ; du moins peut-on dire avec aflez de vraifemblance, que cette matière a été une des premières rejettée du volcan, & qu'elle eft reftée long-rems enfevelie fous d’autres que les eaux ont emportées peu à-peu: Il y a certaines parties de ce banc qui peuvent pafler pour un bo minérai de fer. On y diftingue des parties criftallifées fphériquement,. & en gros grains anguleux, lefquels font attirables à l’aimane. Mais: le plus difficile à expliquer , eft de favoir comment une matière qui a: été fondue ou altérée par le feu, a pu fe divifer ainfi en feuillets, &c. prendre la régularité qui eft naturelle aux chites. Il en exifte une autre à côté & par-deflus le Bain de Céfar , en bien plus grande quantité. dont la nature approche encore plus de la véritable ardoife des mon- ‘ tagnes primitives, & dont la forme feuilletée & l'apparence intérieure: ont bien embarraflé les voyageurs Naturaliftes pour en. expliquer Pc rigine.. Si cette matière ne fonnoit pas & n'étoit pas dure comme une: terre cuite. on feroit tenté de la prendre pour être dans fon état na-- turel, tant fon arrangement & fa difpofition reffemblent à ceux des chytes naturels des montagnes intactes. Après l’obfervation que j'avois faite à la Bourboule fur l’origne des: fources minérales, je ne devois plus être empêché de confidérer celles. du Mont-d'Or ,; comme venant aufli de l’ancien monde ; & je ne devois plus me laiffer induire à croire que la croäte volcanique qui le couvre , participoit pour quelque chofe à la qualité de ces eaux; car il étoit bien viñble pour moi que ces eaux font entièrement étrangères dans: gette partie volcanique, qu’elles ne font que traverfer pour venir au nt SUR L'HIST. NATURELLE ET LES ARTS, . 189 jour où elles” perdent même vraifemblablement une partie de leur chaleur; au furplus ces eaux, un des plus beaux phénomènes de la nature | à caufe de leur abondance & de leur chaleur , reflemblent à routes les, autres eaux de la bafle Auvergne que nous avons vues ou que nous verrons dans la fuire fortir directement du rocher de granir, Cette reflemblance feule fufiroit pour perfuader qu'elles ont la même origine, D'ailleurs comme nous l’avons obfèrvé , il n'y a que le ro- cher granitique primitif & continu, qui puifle maintenir ces eaux, & les conferver dans leur état naturel, On diftingue trois fources principales au Mont-d’Or. Celles du bain de Céfar eft la plus abondante comme la plus proche de la côte. Celle du grand Bain quieft à quelques pas au-deflous, & celle de la Mag- deleine , qui eft la plus avancée vers la rivière. Les eaux de ces trois fources font fi abondantes qu’elles forment un ruiffeau confidérable , & augmentent de beaucoup la rivière, dont l'eau n’eft pourtant pas moins bien pure à quelques centaines de toifes plus bas (1). Ces eaux ne font point eflentiellement différentes , comme on va le voir, ni par leur degré de chaleur, ni par les matières qu'elles contiennent. L'eau du Bain de Céfar, qui paîle pour la plus chaude, ne fait monter le thermomètre, de Réaumur qu’à 36 degrés ; celle du grand Bain à 3$ , & celle de la Magdeleine entre l’un & l’autre de ces degrés. Elles onc toutes un goût fenfiblement gazeux, mais ces eaux expofées quelques tems à l'air, & même dès qu’elles font refroïdies entièrement, n’ont plus qu'un petit goût de leflive , comme la remarqué M. le Monnier, qui le premier a fait connoître ces eaux. Les eaux du Bain de Céfar, & celles de la Magdeleine fe colorent avec la noix de galle, en un vin ordinaire, & celle du grand Bain en un: vin clairer, C'eft ici fans doute où nous avons un exemple bien frappant de certe propriété de Fair fixe, de pouvoir fe tenir dans l’eau chaude, d'y maintenir le fer & la terre abforbante en diffolution , & même d’y faturer lalkali minéral que nous y allons démontrer. E’eau du Bain de Céfar fur 12 livres, m'a fourni terre abforbante 4 grains ,fel alkali minéral jau- nâtre, 60 grains, fer 3 grains à-peu-près, & fel marin 4 grains; celle du grand Bain, terre calcaire 1 gros, fel alkali minéral très-lixiviel, $4 grains; celle de la Magdeleine, terre calcaire 48 grains, fel alkalà jaunâtre 36 grains , & fer 3 grains. Cette dernière eau pañloit dans Vefprit de quelques Médecins pour ètre fulfureufe, & a été indiquée (x) C’eff une remarque que j'ai faite ailleurs & dans plufeurs circenflances fem blables, où les eaux minérales fe mêlent aux eaux douces à Pair libre, Les fubftances falnes &les autres matières de ces eaux s’y détruifént fans doute , & il le faut bien; ear fans cela certaines eaux de rivières qui reçoivent beaucoup d’eaux minérales , feroient très-impures ou minérales à proportion. 190 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE; comme telle à des malades, préjugé funefte, qui a fait quelque tort à fa réputation. Le fer 8 le gaz contenus dans une eau , {ont des fignes évidents pour les connoïffeurs , qu'une telle eau ne peut point être fulfureufe ; mais la charlatannerie, qui s’accommode fi bien avec l’igno- sance & les préjugés , n'a eu garde de chercher à s’éclaircir là-deflus, On voit au-deflus du Bain de Céfar, une fource d’eau froide fer: rugineufe; c'eft une eau fimple, & qui ne contient pas autre chofe qu'un tant foic peu de fer en diflolution , fans gaz. Il s’en trouve une pareille à quelques pas au-deffous de l’églife fur le grand chemin. Ces eaux ne peuvent pas être Confidérées comme primitives, mais comme accidentelles, & venant fimplement de la croûte volcanique ; aufli diminuent-elles & augmentent-elles à proportion {qu'il fait fec où qu'il pleur. Après cetre obfervation , je fuivis la vallée vers les montagnes du Mont-d'Or dans l'intention de les travetfer pour me rendre à l’autre côté, c'eft-à-dire fur la pente par où il faut pafler pour aller à Befle, petite ville dont nous parlérons bientôt. Il faut remarquer que vers ce côté là, le groupe des montagnes du Mont-d'Or eft coupé net, & qu’on ne trouve plus quand on l’a paflé, que de petites élévations ou monticules çà & là fur ce vafte pâturage, le plus grand & un des meilleurs! de cette partie des montagnes d'Auvergne. Ces petits mon ticules ou petites montagnes ; font des amas de laves recouverts d'herbes couffues dans la belle faifon, Maïs avant d'aller plus loia, il faur dire un mot de cette partie du groupe des montagnes du Mont-d'Or où il eft fi difficile d'atteindre , par la rapidité du fencier que on fuit pour y parvenir, On pañlé entre les deux principales montagnes qu'on voit des Bains, lefquelles font taillées en pain de facre; on les voit dé- chirées, crévaflées dans feur bas, avec des mafles de pierres à demi fondues, répandues dans la terre pouflolanique, C’eft dans ces crevafles que fe conferve la neige le plus long-tems; ces montagnes ne paroiflent pas fort hautes, quand on eft fi près d'elles, & ne paroïflent guère être autre chofe que de petites pointes, en comparaifon de ce qu'elles paroiffent être des Bains, C'eft parce qu’alors on eft fort élevé, & que les cols où l’on fe trouve ajoutent de loin beaucoup à leur élévation , que je nai trouvée en réalité que de 160 pieds, en les méfurant du plus bas de leurs cols, Quand on a pañlé ces deux montagnes, on defcend continuellement jufqu’à ce qu'on foit fur le pâturage dont je viens de parler ; mais avant de fuivre ce nouveau fentier, moins long, mais plus tortueux que l'autre, on fe repofe fort agréablement dans la pente, pour contempler la haute Auvergne : qu'on a en face, & tous les pays qui font au- deffous de ces montagnes. Lorfqu'il fait beau , on eft dédommagé par- là de la très-grande fatigue qu'on éprouve pour y parvenir, De-là on SUR L'HIST. NATURELLE ET LES ARTS, xox fé difpofe à aller fe rafraîchir aux auxberges qui font près de Ja éha- pelle de Vafñiviere ; que la dévotion des Auverpnats à rend très= célèbre. Certe chapelle eft placée fur la pente oppolée à celle qui détermine les eaux à aller dans la Limagne. Ainfi dès qu'on eit def- cendu de la partie du groupe dont je parle: il faut fe détourner à droire , fans quoi on manqueroit de trouver cette chapelle, on iroit droit à Beffe ou dans la vallée Chambon, en fuivant la pente oppofée, qui eft à gauche. On peur d'autant plus aifément fe tromper qu'il n'y a aucun chemin, ni {entier de tracé , ou aflez bien marqué fur cec herbage , pour qu’on puifle le fuivre. Ce feroit bien pire encore fi le foleil ne donnoit pas, car alors on fe trouveroit dans un brouillard épais, où il fegit très-dificile de fe reconnoître. Ce lieu eft très- zenommé pour les bons moutons qu'on y élève, auf les auberges donc nous venons de parler, en font-elles toujours bien fournies , à la grande fatisfaction des gourmets de cette efpèce de nourriture, Après donc avoir joui de’ cet avantage, nous revinmes fur nos pas, & remontane la pente pour aller à Befle, plus courageux alors , & plus en état de fupporter de nouvelles fatigues, nous nous déterminâmes à aller vificer les éminences ou montagnes bafles dont j'ai parlé ci-devant ; je monta d'abord fur celle qui écoit fur notre chemin ; le plus grande & la plus vafte de routes, & qui partage les eaux qui vont dans la Limagne , à left, d'avec celles qui vont dans la haute Auvergne, à l’oueft. La forme applatie de cette montagne me donnoit des foupçons qu’elle n'éroit pas de même nature que celles que je venois de quitter, nf telle que les autres monticules qui Fenvironnent, & je n’eus pas liew de me repentir de mon entreprife , puifque je reconnus aufli-tôt qu’elle * avoit été une bouche de volcan , ayant même encore à fon fommer, en grande partie, la forme d'un entonnoir, & toutes les niarques d’ailleurs d'un très-ancien cratère , dans lequel même je tombai, croyant marcher droit à travers l'herbe touflue qui le couvroir.* On ne fera point éronné de la poftion de ce cratère, au-deffous des hautes mon tagnes du Mont-d'Or, quand on fera attention que long-tems après que l’immenfe volcan de ces montagnes a été éteint , il a dû s'ouvrir des bouches au-deflous, comme on le voit dans de vieux volcans qui fubfftent encore. Ce n’eft pas le feul cratère au furplus que nous puifions remarquer au-deflous du groupe des montagnes du Mont-d'Or; nous allons en voir un plus bas, infiniment plus grand. Mon intention n'étoit pas d’aller de-là droit à Beffe, qui n’eft éloigné de ce lieu que d’une lieue & demie. Comme il n'étoit alors que 2 heures après midi, & qu'il faifoit beau, je réfolus d’aller avant xeconnoître le commencement de la vallée de Chambon & les mon- tagnes qui la dominent, qui font partie du groupe du Mont-d'Or à Teft. En conféquence nous primes tout-à-fait à gauche, en côtoyanc 192 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, le has de ce groupe , nous y arrivâmes en une heure de tems, & je puis: aflurer que ce commencement de la vallée &t un des plus hor- tibles gouffres que l’on puifle voir ; c’eft l'égout le plus grand & le plus creux qu'il y ait au deffous du Mont-d'Or , où les eaux fe préci- picent perpendiculairement & y entraînent avec force les terres & les pierres qu'elles détachent avec facilité des montagnes. Rien n’eft plus trifte, ni plus hideux que cet afpect, Cet là l’origine de la rivière qu’on nomme Coufe, qui coule tout au long de cette vallée , aflez droite & profonde, qui pale à Montaigu-le blanc, à Champeix, pour allée fe jeter dans l'Allier au- deffous de Nécher. Elle a taillé fon lit à travers le granit, & le bruit qu'elle fait en roulant rapidement entre les roches qu'elle a détachées, augmente la triftefle que ce lieu infpire naturellement ; mais nous reviendrons à, cette vallée. Après être revenus. reprendre le chemin de Befle, nous ne tardnies as à arriver au fameux lac de Paven, qui eft à droite du chemin, & élevé par-deflus d'environ 80 pieds, Ce lac, qui eft la merveille du pays ; et la plus effroyable gueule de volcan que l'on puifle voir. Ses bords très-efcarpés, & où l'on voit les fcories rangées à-peu-près dans l'ordre qu'elles ont été lancées, fonc circulaires & ont, de 20 à 60 pieds de hauteur ; fa largeur eft de plus d'un quart de lieue , & fa circonférence eft de plus d’une demi -lieue; il en fort continuellement. un grand volume d'eau, qui s’eft ouvert une tranchée à travers l’épail= feur des laves, pour venir fe jetrer dans la vallée de Befe; il y forme déjà une riviere remarquable, qui pafle à Saint-Floréc & à Tfloire, pour aller fe jeter dans l'Allier. On ne voic arriver aucune eau dans cette gueule, excepté celles qui y jyienvent directement par les pluyes ; mais on ne peut douter qu'il y en arrive par en deflous, c'eft-à-dire fous la mafle volcanique, çar on connoît plulieurs petits étangs ou lacs placés plus haut qui reftent toujours les mêmes à-peu-près, quoiqu'ils reçoivent toujours à-peu-près la même quantité d'eau, On parle d’un creux de Souces, dans lequel fi on jette quelque chofe , on le voit paroître fur le lac de Paven, au bout de quelques jours ; il faut que la pro- fondeur de certe gueule foit bien grande, puifque , avec cent brafles de corde, on n’a pu atteindre Je fond dans le milieu. Les eaux de ce lac étant fort claires, on voic fort bien que fon fond va toujours baiffant vers fon milieu, de manière qu'on ne peut y méconnoître la forme d'un entonnoir. On voit que ce fond eft garni, du moirs vers fes bords, de pierres de laves, c'eft peut-être ce qui lui a fait donner le nom de lac de Paven, Ce lac privé de poiffons, qui ne fauroient y fubfifter à caufe de fa profondeur & de la froidure des eaux, a un afpe& rrifte & fombre ; ce qui elt occafñonné en partie par J'ombrage des coudriers qu'il y a tout autour. Dès qu'on a pailé ce lac, pour defcendre à Befle, on commence à . SUR L'HIST. NATURELLE ET LES ARTS. 193 à revoir les laves bafaltiques & prifmatiques, qu'on voit fi ccmmuné- ment dans la Limagne ; on trouve mème près de Befle , beaucoup de tronçons de colonnes. Cette petite ville eft entièrement bâtie avec cette efpèce de lave, ce qui la rend fort roire & trifte ; mais elle eft fort propre , car étant aufli pavée avec cette efpèce de pierre, je veux dire avec celles qui-font plates, & étant fur une pente fort grande, les eaux en balayent les rues fort exactement, En général, on peut dire que cette ville eft fort curieufe à voir, puifqu'elle eft comme une carrière de pierres volcaniques , & pofée elle-même fur une mafle énorme de laves. J'étois fort impatient de retrouver le granit, afin de confidérer. l'épaiffeur de cette mafle volcanique. Nous le revimes enfin le len- demain , en fortant de Befle, & lorfque nous traverfsàmes la vallée ‘où coule la rivière dont nous venons de parler, & que nous montâmes la côte oppofée à celle qui eft directement au-deflous des murs de la ville, où le granit gris & ordinaire fe montra à nous en rochers qui failloient à travers les laves. Paffanc de-là fur un maflif longitudinal de près d’une lieue de largeur, qui peut être confidéré comme un appendix des montagnes du Mort-d'Or, qui va de l'oueft à left, comme la vallée de Chambon & celle de Befle qu'il borde, & qui eft formé par un courant de lave qui couvre le granit, nous nous rendîmes dans la vallée de Chambon ; en y abordant, & en y defcendant , nous vîmes tout à notre aife, k rocher primitif à découvert. La fatigue que nous avions éprouvée dans cette traverfée, expofés au foleil, fur un terrein où il n'y a pas un feul arbre, pour fe mettre à abri, nous obligea d'aller droit au village de Chambon pour nous rafraichir. Ce village elt dan encoignure de la côte granitique, oppofée à celle que nous defcendimes , il en fort une fi grande quantité d’eau que ce village eft. baigné prefque toute l’année ; & lorfque dans l'hiver la fonte des neiges fait gonfler affez la rivière pour retenir ces eaux, ce village eft abfolumenc impraticable , ou il faut y marcher fur des efpèces de digues, ou fur les pierres qui y font difperfées. C’eft pourtant là le rendez-vous de tous les gens difperfés dans les montagnes, ou une efpèce de capitale pour les vachers & fabriquants de beurre & de fromages, qui sy donnent rendez-vous les dimanches & fêtes. Nous fuivimes enfuite le chemin qui accompagne la rivière, & nous arrivames bientôt au lac de Chambon, le plus grand & le plus poi‘foneux de l’Auvergne. Ce n'eft qu’en y allant que nous apperçumes pour la première fois les traces du courant de laves, qui comme nous l'avons dit ci-devant, fuir cette vallée; & c’eft une chofe aflez fingulière que ce ne foit quen s'éloignant des montagnes qui l'ont produit, qu’on le voit, & quil n’en exifte aucune trace entre ces montagnes & le vil- lage de Chambon , fi ce n’eft quelques pierres de laye qu’on voit çà & Tome XXXII, Part. 1, 1788. MARS. 194 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, R, & mélées avec celles de granit. Certe difficulté qui n’eft pas petite, m'ayoit porté à croire dans le voyage précédent, que ce courant comme ceux qui font dans les autres vallées, ne provenoit que des volcans qu'il y avoit eu à droite & à gauche de cette vallée, quoiqu'il n'em exifte aucune marque aétuellement. Mais depuis , ayant fufpendu mor jugement, je me fuis accoutumé à confidérer autrement le grouppe du Mont-d'Or, en fuppofant que le volcan ou les volcans , car il fe peut qu’il y en ait eu plufieurs, étant infiniment plus élevés & plus vaftes que ce grouppe n’eft aujourd’hui , avoient pu lancer leur matière bien au-delà de l’efpace où nous voyons qu'il n’y a pas de courant; mais la difficulté n'eft pas à Beaucoup près , totalement levée par-là, ils’en faut bien. Elle refte au contraire prefqu’entière, quand on voit que ces courants de laves s’épailiflent à mefure qu'ils s’éloignent de ces montagnes. On ne peut trouver de réponfe à cette dernière difficulté, qu’en fuppofant que tant que ces courants de laves ont été liquides, ils ont coulé avec une rapidité qui ne leur a pas permis de s'arrêter, que là où ils ont trouvé des obftacles qui les ont obligés de s'arrêter & de fe figer. Du moins peut-on rendre raifon par-là des amoncelemens de laves & des fréquentes interruptions qu'on y remarque aufli. Quoi qu'il en foit, nous n'eûmes pas de peine à reconnoître dans un de ces amoncelemens de lave, -la caufe de la grande nappe d’eau qui fait le lac de Chambon ; car nous vîmes biex clairement qu’au-deffous de ce lac, là où la vallée fe reflerre confidérablement , & où les deux côtes granitiques fe rapprochent de beaucoup , nous vimes, dis-je, le courant de lave remplir toute la largeur de la vallée, & s'élever de 25 à 30 pieds, de forte que les eaux ont été obligées de s’afflembler & de s'élever à cette hauteur, & remplir au-deflus, touteMla largeur de cette vallée, pour pafler par-deflus cette digue. Cette lave eft très- bourfouflée , comme toute celle qu’on voit ainfi entaflée ; mais elle paroît cependant avoir été parfaitement fondue; malgré fa dureté, l’eau »’a pas laiflé d’y tailler peu-à-peu une tranchée très-grande pour s'é- couler, de telle forte que l'on peut dire que ce lac a été plus pro- fond autrefois qu’il n’eft aujourd’hui. Après ce lac on trouve la vallée tellement refferrée, & tellement remplie de lave, qu'on eft obligé de marcher fur un fentier très-étroit & très- inégal , pratiqué fur ces laves mêmes , dont on voit de tems en tems des entaflemens confidérables. Nous ne fuivimes pas davantage cette vallée, parce que nous étions aflurés que nous la trouverions toujours la même juf- qu’au village nommé Saillant à une lieue plus bas. Nous nous détournâmes à gauche , pour aller à un autre village fort connu par fes eaux minérales, c’eft Saint-Neétaire ; en y allant nous vimes aflez fouvent fur les hauteurs de terrein , qui eft ici fort découvert, je veux dire dépouillé de In croûte de lave qui couvre , comme nous l'avons vu ,tout le terrein qui svoifine SUR L'HIST. NATURELLE ET LES ARTS, ‘195 le grouppe des montagnes du Mont-d'Or, nous vimes, dis-je , de petites rangées de colonnes bafaltiques, qui étoient contigues au granit ou appuyées fur lui & coupées net comme lui fur le fond du terrein. Ces petits aflemblages de lave, que l’on prendroit de loin pour des jeux d'orgues , fonc affez communs dans cette partie de l'Avergne, comme nous aurons occafion de le voir encore. , Saint-Nectaire eft placé dans un petit fond , & cependant'élevé comme für une efpèce d’amphithéâtre , formé par une maffe de granit gris à gros grains de quartz, qui s’avance dans un fond qu'elle rend demi-circulaire. L'églife de ce village, qui eft placé tout-à-fait fur la partie la plus avancée de cette mafle, qui eft coupée droite fur ce fond , augmente la fingularité de ce lieu d’un pittorefque très-fauvage. À l’extrémité du.chemin qui nous . avoit amenés dans ce fond , & avant de paler le ruiffeau qui y coule, J'apperçus dans le granit, prefque fous mes pieds, de fort belles petites ‘criftallifations en aiguilles blanches & fort fines, qui fe divergeoient d'un centre commun vers la circonférence, ou qui repréfentoient des paquets ou faifceaux dont les extrémités étoient plus larges que les bafes, & qui . ‘me parurent fi bien être de la zéolite, que je me réjouis de cette rencontre; “mis l’eau-forte me détrompa enfuite , en me faifant voir que ce m’étoit ‘qu'un fpath calcaire très-pur. Le lieu où eft placé Saint-Neétaire, eft vraiment très-remarquable en ce ‘que routes les eaux qui fortent de fon rocher, font toutes plus ou moins minérales , & contiennent toutes plus ou moins d’alkali minéral. En ‘montant fur cette mafle de rocher, on voit fourdir des fentes naturelles qui s’y trouvent, plufieurs fortes d’eau, dont le goût & la noix de galle -vous les font connoître tout de fuite pour être fortement minérales. Mais la fontaine réputée de ce pays eft à un grand quart de lieue plus loin , au côté oppofé , fur le chemin de Saillant & de Montaigu. Cette fource très- abondante fort en bouillonnant du fond d’une petite cuve enfermée dans une grotte, Cette eau a 15 à 16 degrés de chaleur, & fe colore légèrement ‘avec la noix de galle; elle contient une fi grande quantité de terre calcaire que malgré fon gaz elle s’y manifefte bien promptement , non-feulement au goût, mais encore fur les vaifleaux où on la laiffe repofer. Quelques gouttes d'acide verfé deflus, y excitent auffi-tôt un frémiflement remar- uable, Douze livres de ces eaux m'ont fourni terre calcaire 3 gros & demi & fel alkali minéral affez blanc 48 grains. Il n’eft guère poñlible de trouver d’eau minérale plus chargée que celle-ci. Après avoir paflé Saillant , nous retrouvâmes à gauche la roche gra- ‘niteufe, qui s'élève comme un grand rempart fur le bord de la rivière, & j'y vis çà & là comme encaftrés des morceaux de lave, ce que je n’avois pas encore remarqué dans le cours dêce voyage. Je crus pouvoir expliquer ce phénomène en fuppofant que lorfque la lave a coulé fur cette roche , elle en avoit fondu ou calciné quelques parties, & qu’elle s’y étoic Tome XXXII, Part. I, 1788, MARS, Bb 2 1 196 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, logée ; car à fuppofer que le rocher de granit n’éroit pas mou alors, & qu'il ne s’eft folidifié que depuis cette époque, cette opinion n’eft pas outenable, vu que la formation totale de ce rocher primitif doit avoir été bien antérieure à l’époque où les volcans ont été en action. Nous nous détournâmes enfuite pour entrer dans une autre vallée qui eft à gauche, où ne fe trouve point de courant de lave, & qui eft entiè- ’rement taillée dans le granit. C'étoir pour y chercher une fource d’eau minérale, découverte depuis peu, & dont on m’avoit parlé. Cette vallée s'appelle la valle de Roignon à caufe d’une tour ifolée & bâtie fur une pointe de rocher , qui fe trouve à la gauche en montant contre le cours du ruiffeau. Nous rencontrâmes certe fource aflez abondante à quelques centaines de toifus au-deflus de cette tour, tout-à-fait fur le bord du ruifleau. Nous [a reconnümes par trois forties qu’elle s’eft pratiquées à travers le granit, & qu'elle a enduires d'ocre jaune. Cette eau eft fort fpiritueufe, & n’a point le goût défagréable de celle de Saint-Nectaire ; elle m'a fourni fur la même quantité , terre calcaire un gros & demi, fer quatre grains & alkali minéral un gros. Revenu fur notre chemin nous arrivames bientôt à Montaigu-le-Blanc. C'eftune montagne en grande boffe de granit ordinaire, autour de laquelle il y a des maifons & l’églife par-deflus. C’eft le lieu d'Auvergne le plus remarquable par rapport à cette fingularité. Ce feroit le plus ftérile fi «“ Saint-Nectaire ne l’étoit pas davantage. Mais le terrein qui eft rout-à-fait fur le bord de la rivière, je veux dire le fond de la vallée formé en partie du débris des laves , eft bon & fertile, C’eft-là l’entrée de la Limagne du côté des montagnes du Mont-d'Or ; de-là à Champeix la vallée s’élar- giffant & fe peuplant de plus en plus d'arbres , & les coteaux de vignes, l'afpect du pays paroît d'autant plus agréable, qu’on le compare à celui qu’on vient de quitter. Dans cette diftance d’une petite demi-lieue , le courant de lave eft intercepté plufieurs fois, & ne fe montre le plus fouvent que par quelques maîles de layes répandues çà & là dans la rivière, On trouve cependant à la droite de cette rivière & au-deflus de fon lic actuel un énorme affemblage, & comme une petite digue dans le lit même. Mais on peut négliger de confidérer ces laves en voyant à la gauche à la cîme des côreaux qui bordent le creux de Champeix , comme des pavés de laves bafaltiques très-érendus. Ces pavés font enchaflés les uns dans les autres par côté, & en général fi bien joints qu'ils ne laiffent entr'eux aucun intervalle par où les eaux puiffent s'échapper. Ces rangées de pavés très- uniformes à leur furface fupérieure, ont de douze à quinze pieds d'épaifleur., & font pofées fur une rerre pouffolanique, qui s'écroulant facilement, donne lieu à ces pavés de s’écrouler aufli, & de rouler dans les vignes qui font deflous. On trouve quelquefois par-deflus ces pavés un autre pavé qui peut être regardé comme l'effet d’une feconde coulée; on en voit même : o k: £ 4 un qui eft formé de grandes colonnes fur le chemin de Ladrefle à Cham SUR L'HIST. NATURELLE ET LES ARTS. 197 peix ; village éloigné de cetre petite ville d'une demi-lieue, Mais cette coulée-ci plus en arrière porte en grande partie fur le granit même, On y diftingue des colonnes de fix à fept pieds de hauteur, brifées & mal conf- gurées. Cette mafle de lave eft petite ; mais elle eft curieufe , en ce qu’elle femble maintenir le terrein qui eft par-deflus , & empêcher que les eaux en emportent la terre, On voit encore un autre pavé & rour aufli confidé- rable rout-à-fait en face de Champeix au nord. On y trouve de même une terre pouflolanique , qui donne lieu pareillement à ces pavés de s’ébouler. Au furplus les laves de ces coulées different quelque peu de beaucoup d’autres , fur-tout de celles qu'on nomme bafalte ; en ce qu’elles font & moins noires & moins pefantes ; elles m'ont para contenir moins de fer, mais elles fonnent à-peu-près comme une terre cuite ou de la poterie. Ces côtes, fort élevées , font furmontées en arrière par des terreins plus élevés encore, en forte qu'elles font de la fituation de Champeix le creux le plus grand & le plus profond fans contredit de la baffle Auvergne, lequel eft taillé dans le rocher de granit qui eft ici à tès-gros grains & forc friable. Les eaux qui ont fait ce creux , en y arrivant par deux côtés, l’un à droite, l’autre à gauche, je veux dire par la vallée dont je viens de parler , & par une autre plus petite au côté oppofé, ont laiflé fubffter entr'elles une mafle de rocher graniteux, qui eft coupé à pic fur ce creux, fur laquelle eft une des deux paroifles qui forment ce lieu , ce qui le rend fingulière- ment pitrorefque. À l'eft-fud-eft ce creux eft dominé de beaucoup par une très-haute montagne, qui paroït comme taillée en pain de fucre, quoiqu'elle ne Le foit pas. Certe vafte montagne qui eft appelée dans le pays le Bon-homme, mérite d'autant plus attention qu'il paroit aflez clairement que c’eft elle ou le volcan qu’elle a recelé dans fon fein , qui a fourni , au moins en grande partie , les laves & autres matières volca- niques, qu’on voit dans ce creux ou tout autour. Cerre montagne prefque droite fur Champeix eft entourée de tous les côtés de rerres cuites ocracées ou bolaires qui fe trouvent mêlées avec les pierres de lave. On voit cepen- dant que cette montagne ne doit pas entièrement fon origine au volcan, puifqu'on trouve, outre le granit dans fa bafe, d’autres matières dans leur état naturel & qui n’ont nullement été altérées par le feu. On y remarque fur -rout de la pierre rufacée rangée en couches, J'y en ai vu une petite carrière en 1784 tout-à-fait au bas de cette montagne fur le chemin de Champeix à Chidrac. Cette obfervation peut s'appliquer de même, il eft vrai, à plufieurs autres montagnes volcaniques voifines de celle-ci , fur- tout à celle qu'on nomme le Puits-de la-Vèle, qui en eft peu éloignée à l'oueft. Lorfqu'on eft parvenu au fommet de la vafte montagne qui nous occupe, on eft arrêté tout de fuite par une mafle de lave qui en forme le fol. On y voir çà & là, mais plus en certains endroits qu’en d’autres, des roches de laves rernes cendrées & bourfoufflées. Gette furface de la mon- tagne eft un plateau très-alongé , qui s'étend jufques fur le bord de la ‘ 193 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, vallée de Saint-Cirgue, dont nous parlerons dans le voyage fuivant. If eft en face de celui de Pardines, & n eft féparé de ce terrein mobile formé de terre pouffolanique , qui s’écroula avec ce village er 1733 ,que parune plaine très-fertile d'un quart de lieue à-peu-près (1). Après être defcendu de cette montagne, je fuivis la rivière de Cham- peix jufqu'à un des plus grands.amas de laves que l’on puifle voir, & {ürement le plus grand que je connoiffe en Auvergne; c’eft celui de Necher fur lequel eft bâti ce grand village ou bourg, non loin de l'Allier. Le grand amas de laves bourfoufflées où l’on voit des roches fort grandes s'élever au-deflus des autres, m'a paru avoir plus de trente pieds d’épaifleur. Le village ne l’occupe pas en entier, il y en a une plus grande partie encore au-delà du eôté de Champeix , qui s’étend en plature affez uniforme , & qui peut avoir trois cens toifes tant en latgeur qu’en longueur. Au furplus on ne voit entre Necher & Champeix dans le canal profond de la rivière , aucune fuite de courant: je n’y ai obfervé que quelques pierres de lave bafaltique çà & 1à & parmi de groffes maffes de granit, détachées fans doute des bords , car ici le rocher de granit eft formé généralement de parties criftallifées & féparées les unes des autres. Mais on voit à un demi-quart de lieue de Champeix , près d’un moulin, une digue remar- quable de lave qui arrête les eaux, & les oblige à fe précipiter de dix-huit à vingt pieds de hauteur. C'eft ce qu'on nomme le faut de Saillant dans ce pays. Les eaux en jailliflant ont excavé en deflous , c’eft-à-dire , entre la lave & le granit, & y ont fait une ouverture aflez confidérable. On voit encore une belle coulée de lave, pareille à celle que nous avons décrite ci-devant , c'eft-à-dire, de celle qui forme une forte de pavé plat, à peu de diftance du lieu dont nous parlons, & à un gros quart de lieue de Champeix , fur le chemin qui conduit à Plaufa. Il peut avoir trente toifes de longueur, il couronne la hauteur dela côte qui domine la rivière, & eft en tout femblable à ceux dont j'ai déjà parlé; on peut ne pas manquer de Le reconnoître, quand nous dirons qu’il y a deflus une chapelle fort grande & fort renommée dans ce pays-là. Je n’entreprendrai pas de (1) Poyez la relation qui à été donnée de cet événement la même année dans le Journal des Savans & dans celui de Trévoux. Dans ce dernier on trouve pour le mois de novembre de cette année , une mauvaile explication de la caufe de ce défaftre, par un Jéfuite, qui étoit employé alors à faire la miflion dans ces lieux, Ceux qui ‘auroient du tems perdre pourroient voir qu’il y a plus d’efprit que de vérité dans cette explication; car cet éboulement eff arrivé tout fimplement parce que ces terres mobiles ont été imbibées peu-à-peu par l'humidité, & que la partie la plus aväncée du bord s'eft détachée lorfqu’elle a été affez minée par en-deffous. Pareil événement , mais moins défafreux , eft arrivé il y a feize ans dans la montagne de Saint-Sans-Doux. 11 vient d’en arriver un autre fous la montagne de Rentière, dont nous parlerons en fon lieu, SUR L'HIST. NATURELLE ET LES ARTS, ‘rce tendre raifon de la caufe , de Porigine & de la pofition de cette coulée de lave, non plus que des autres. Nous avons lieu de croire que les changemens qui fe font faits à la furface de tous ces rerreins , font caufe qu'on ne pourroit avancer à ce fujet que des corjeétures, que d’autres conjeétures & d’autres fuppolitions pourroient détruire également. II fufit que dans ce moment nous falions connoître ces pavés volcaniques près de Champeix , qui font au nombre de trois aflez éloignés l’un de l'autre, pour croire qu'ils n’ont pas eu une origine commune, Ces pavés font d'autant plus curieux à voir, qu’ils me paroiflent uniques dans l'Auvergne, tant par rapport à leurs pierres, que par leur arrangement total & à leur fituation. Je terminerois ici le récit de mon voyage, fi je ne me croyois encore obligé de dire quelque chofe relativément à la vafte montagne de Saint- Sans-Doux , au pied de laquelle eft fitué le village de Ladefle du côté de Champeix, Au-deflous de cette montagne, & en face de ce village, on voit deux petites montagnes rondes , fort remarquables de loin par la couleur de leurs couches rougeâtres & blanchâtres, où fe trouve des parties aflez fines , pour être regardées comme du tripoli & du bol colco- tarifé ordinaire, & en général on.y voit de la terre qui peut être confidérée comme de la pouflolane , le tout mêlé avec des parties groffères & grave- leufes. On ne peut guère s'empêcher de regarder ces deux petites mon- tagnes comme le produit des premières jetées de l'immenfe volcan de la montagne de Saint-Sans-Doux , & qui bien plus élevée qu'elle n’eft aujourd’hui , aura pu vomir par-deflus tout ce terrein , des laves qui auront coulé fort loin ; mais il faut fuppofer que tout le terrein qui eft entre les coulées dont nous avons parlé & cette montagne , a été détérioré jufqu’à - une grande profondeur, & que tout a été emporté par les eaux, car il ne refte aucune marque, aucune fuite , qui puifle faire connoître ce tranfport. Du côté de Plaufa qui eft auffi fous cette montagne au nord-eft , on ne voit que des pierres de lave qui depuis ont roulé de cette montagne, & qui ne font pas même parvenues tout-à-fait dans ce village. Cet intervalle eft garni de pierre calcaire, Il y a plus, il faut fuppofer aufli que la grande tranchée & très-profonde , où coule un ruifleau qui vient de Ludeffe à Champeix, n’a été faite que depuis la ceflation du volcan, & même long-tems après, car on n'y trouve aucune lave. Les deux côtés de ce vallon fort étroit , ne montrent qu’un granit gris & déchiré, dans lequel mon frère m'a fait remarquer du fpath pefant , dont nous avons parlé au commencement de ce voyage, Fra 200. OBSERFATIONS SUR LA PHYSIQUE, RÉPONSE DE M LE BARON DE MARIVETZ, A M ROMÉ DE LISLE. Du Château de Vincennes, le 15 Février 1788. JE defire très-fincèrement de m'inftruire , mon favant & excellent ami, je defire avec la mème ardeur de concourir à répandre quelque lumière fur les phénemènes que nous préfente la nature, & je ferois très - fâché d'induire en erreur les Lecteurs qui r’honorent de quelqu’attention ; d’après ces fentimens , il vous eft aifé de juger combien it m'eft agréable de difcuter avec vous & fous les yeux du Public éclairé, la folidiré de mes principes & la juftefle de leurs applications. J'ai traité de l'Aftronomie-phyfique , je n'ai adopté aucune hypothèle , je ne me füuis permis aucune fuppoficion. Un fait certain , incontelté autant qu'inconteftable , /a rocation du foleil fur lui-même , rotation qui, femblable à l’impulfion que le pendule reçoit de l’horloger, a été l’effec de l’ordre de l'Eternel , m'a préfenté la première caufe phyfique & méca- nique de tous les mouvemens des globes céleftes , le monde n’a plus été pour moi qu'une grande machine*qui n’obéit qu'à une force unique, communiquée par l'éternel machinifte. J'ai déduit de cette caufe unique Fexplication claire & fatisfaifante de tous les phénomènes de l’efpace éthéré : le mouvement général , la lumière & la chaleur font venus fe ranger dans l’ordre des effets néceflaires de lation du foleil , & le vain preftige des hypothèfes qui dominoient autour de moi, s’eft diffipé comme un fonge léger. Le mouvement &æ la chaleur font les deux caufes actives & détermi- nantes de toutes Les actions de la nature, de routes les modifications de la matière. Je crois n'avoir à redouter aucune objection contre ma théorie du mouvement : le plein de Defcartes & le vuide de Newton étoient égale: ment inapplicables au fyflème de notre monde. Un plein de continuité ne peut admertre le mouvement refpectif des parties qui le forment, & de vaftes efpaces vuides ne peuvent propagér le mouvement. Si les roues d'une machine ne s’engrainoient pas, il n’y auroit point d'action réci- proque entr'elles, il ne réfulteroit pas de leurs différens mouvemens un effet commun. Ù J'ai nn SUR L'HIST: NATURELLE ET LES ARTS. 201 J'ai donc ofé dire que Defcartes & Newton, ces deux génies immor- tels que perfonne ne refpecte & n’admire plus que moi, fe font trompes ; je crois l'avoir prouvé, & je ferai toujours prêt à répondre à toutes les objections que l’on voudra bien me propofer. J'ai follicité les lumières, j'ai invoqué la févérité des difciples du génie de l'Angleterre, ils ont été fourds à ma prière; mais, depuis que j'ai ofé porter la coignée fur cet arbre majeftueux , combien d'autres font venus l’attaquer ? Il m'a femblé qu’on attendoit que quelqu'un fe chargeât du prétendu facrilège. Jam ne quis veflrim dubitet fubvertere [ylvam , Credite me fecifle nefas (x). J'ai donc ofé me croire autorifé à regarder comme folidement établie la bafe de ma phyfique générale ; mais je ne cherche point à me faire d’illufon ; ce n’eft pas aflez qu’un fyftème explique d’une manière fatis- faifante beaucoup de phénomènes, il faut qu'il les explique tous : c’eft fur certe pierre de touche qu'il faut defirer d’être éprouvé; c’elt cette tâche u'il faut fe foumettre à remplir: je pourrois enfin avoir été heureux Li la découverte d'un principe & malheureux dans fes applications ; que me ferviroit d’avoir couru Îles mers orageufes, fi j'échoue contre un écueil, fi, prefqu’à la vue du port, l'abîme des eaux engloutit ma cargaifon &.mes travaux ? . Vous m'avertiflez, mon ami, de cet écueil redoutable: plus j'ai préfenté la théorie de la chaleur comine une des deux caufes générales & les plus actives des phénomènes de la nature , plus il feroit malheureux pour moi de m'être trompé fur fa nature & fur fes propriétés. Votre feule opinion m'impofe, & mon premier fentiment fera toujours de douter , au moins de la vérité de ce que vous rejettez; mais vous m'invirez vous-même à difcuter avec vous mes principes, & c’eft avec plaiGr ; avec la certitude d’être éclairé, que je vais les foumettre à votre jugement & à celui de nos juges , après avoir répandu , autant qu’il me fera poflible, quelque lumière fur les parties de ma théorie qui vous ont paru exiger des développemens, Pofons d’abord avec précifion & avec clarté le véritable état de la queftion fur laquelle nos opinions font différentes. Selon vous, « les nouvelles découvertes forcent de conclure avec M. de la Métherie que la lumière eft le principe du feu , de la chaleur , de la raréfaction , mais que , pour produire ces effets , il eft néceffaire qu’elle foit déjà combinée avec une fubftance plus groflière qui lui donne de la mañe, & que vous croyez l’un & l’autre être l’azr pur. C'eft cette combinaifon de la lumière qu'on défigne communément par matière B 8 y 8 % (1) Que « perfonne de vous maintenant n’héfite à renverfer cette forêt, croyez que », je me füis feul chargé du crime», Lucain, liv. III, vers 436, en parlant de la forér des Marfeillors, Tome XXXIT, Part. I, 1788 MARS. Cie ” “ 902 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, » du feu, par fluide igne, & qui a fait croire à quelques Phvfciens que >» le feu étoit un principe particulier dans lequel ne fe trouvoit point la > Jumière, & qui en étoit totalement différent », Ainfi la matière du feu des Phyficiens ne vous paroît à l’un & à l’autre; c’eft-à-dire, à M. de la Métherie & à vous, être que la matière de la lumière combinée avec l'air pur. Voilà l'opinion de deux Phyficiens que je fais profeffion d’eftimer infiniment & d'aimer très-fincèrement : elle a été expofée dans Le Journal de Phyfique du mois de février 1786. Voici la mienne telle que je l'avois préfentée, il y a plus de dix ans(1), à quelques très-léoères différences près, telle que je l'ai énoncée d'une manière plus précife en 1780, dans le diétionnaire joint au premier volume de la Phyfique du Monde, page 31 , feconde colonne, ligne 2 & fuivantes : telle enfin que la préfente le feptième volume. « La chaleur, confidérée comme fenfation , n’eft qu'une affection des >» êtres doués de fenfiblité; la chaleur , confidérée comme modificatiort æ» de la matière, eff une feule & même chofe avec la raréfaction ; la > raréfaction eft l'effet d’un mouvement inteftin produit entre toutes Les » parties des corps appelés chauds. æ Ce mouvement ne peut être excité que par une action extérieure 5 >» cette action appartient néceflairement à une fubftance fluide , infini- æ ment rare, infiniment pénétrante , infiniment élaftique ; elle doic >» appartenir au plus rare, au plus pénétrant, au plus élaftique des fluides. » La matière de Ja lumière eft ihconteftablement le Auide le plus rare ; » le plus pénétrant , le plus élaftique: donc la chaleur eft l'effet de la >» Jumière, ce que confirment toutes les expériences & toutes les obfér: æ vations ». La chaleur n’eft donc, ni une fubftance particulière, commie l'ont penfé tant de Phyfciens , & particulièrement de nos jours, M. le Comte de Buflon , M. Schéele, M. Bergmian, M. de Morvean, &c. &c. &c, ni la propriété d'une fubftance diftinéte de la lumière. La chaleur n'eft que l'état d’agitation des parties intérieures des corps, & cet érat eft produit uniquement pat l'action élaftique de l’éther difléminé dans l’intérieur des corps (2). J'ai fuffifamment expliqué la caufe & les effets de l’action vibrante de la lumière, & je n'ai à combattre à cet égard aucune objection, (1) Voyez le Journal de Phyfique , Septembre 1777, pag. 206 , un Mémoire fous le nom de M. de V....adreflé à M. Senebier, Bibliothécaire de la République de Genève. — tome premier de la Phyfique du Monde, pag. cxv1, ma Lettre à M. Senebier ; voyez auf tom. 2, publié en 1781, pag. 40, & dans le Di&. de ce même volume, pag. 17, la détermination de l’intenfité de la chaleur'fur chique planète, (z) Tome 7, page 35e SUR L'HIST., NATURELLE ET LES ARTS. 203 Voilà quelle eft mon opinion fur la chaleur, & jufqu'ici , il me paroît par votre lettre , mon favant adverfaire, que j'ai la fatisfaction vive & bien fincère d’être d’accord avec vous & avec M. de la Métherie. Quel pas fait dans la carrière de la Phyfique ! Ceux-là feuls peuvent le mefurer qui ont préfentes à l’efprit les faufles idées que Pon avoit fur la nature de la chaleur, & les erreurs qui naïfloient en foule de ces faufles idées. - Mais fa matière de la lumière n’agit pas feule dans les phénomènes de la chaleur, foit obfcure , foit accompagnée de lumière, c’eft-à-dire, dans la fimple raréfation & dans la candefcence, dans l'inflammation & dans la combuftion. Trois autres élémens concourent puifflamment à ces effets: ces trois élémens, ce font le principe inflammable, l'air & l'eau, tous trois élaftiques , tous trois expanfbles; ils uniflent, lorfqu’ils font portés à l’état d’expanfion & par leur élafticité propre (1), leurs efforts à ceux de Vélafticité vibrante de la fubftance de la lumière pour agiter, pour repouffer les particules des corps folides dans lefquels ils fonc incarcérés. La fubance de la lumière eft donc la première, ou plutôt, l’unique caufe de la raréfa@tion des corps; mais c’eft à l’aide de la raréfaction qu’elle excite dans les trois élémens expanfibles , qu'elle parvient à vaincre {a force d’adhérence des particules des corps folides (2). C’en eft affez pour expliquer facilement tous les phénomènes de la chaleur obfcure , & vous , & M. de la Métherie ne m'en demandez sûrement pas davantage. Quant à la chaleur accompagnée de lumière, nos opinions femblent différer un peu. Ici j’invoque le principe inflammable après avoir prouvé la néceflité & la réalité de fon exiftence. Ce principe, je le regarde comme élémentaire, & vous, Meflieurs, vous me demandez où eft la preuve que da matière de la lumière unie à l'air pur ne forme pas elle-même ce principe inflammable. Ce font donc des preuves négatives que vous me demandez , lorfque j'aurois le droit de vous en demander de polfitives. Nous ne différons donc qu’en ce que je regarde le principe inflammable comme un élément; & que vous, Meflieurs, vous le confidérez comme un mixte formé de la matière de la lumière & de l'air pur ; il m’eft très- agréable de réduire la diftance entre nous à un fi petit intervalle; mais me feroit-il pas poffible de le faire difparoître tout-à-fair ? J'ofe l'efpérer (x) J'ai expofé mes principes fur Ja caufe & fur la nature de l’élafticité dans ra Lettre à M. le Comte de la Cépède, tome 3, pag. r1 & fniv. (2) J'ai prouvé que cette force d’adhérence n’eft elle-même que leffet de 1a° preffion générale qu'exercent l’un für l’autre tous les globes célefles , femblables à une multitude de reflorts continus entre des parois dont la nature & le lieu nous font & nous feront toujours inconnus. Joy. le tome 2 , pag. 251, 257 & 279 , première partie, pag. 8 & 57 , feconde partie. Tome XXXII, Part, I, 1788. MARS, Cc2 204 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, ou de Ja force de mes raifons, ou de ma docilité à me rendre à [a puiflance viétorieufe des vôtres. Je vous prie l'un & l’autre de confidérer atrentivement tous les différens rôles que le principe inflammable jous dans la nature , & dont j'ai tiché de donner des idées claires dans mon feptième volume, pag. 129 &fuiv. jufqu’à 170 & même jufqu'à 321. J'y confidère le principe inflammable comme la feule caufe primitive de la faveur, de la couleur & de l'odeur , & perfonne ne niera cette affertion ; je préfente & j’explique les effets de fes combinaifons dans les minéraux, dans les végétaux , dans les animaux. Oferai-je à mon tour vous demander comment vous prouvez que la matière de la lumière s’unit à l'air pur? Comment vous concevez que la fubftance de la lumière , unie immédiatement à l'air pur, peut produire les couleurs , les faveurs & les odeurs ? J’ai expliqué les caufes & Ja nature de ces trois phénomènes par l’admiffion d’un cinquième élément que j'appelle principe inflammable, j'en déduis l’origine de la nature du phlogiftique. Me feroit-i} permis de vous prier de nous donner une théorie des couleurs propres des différens corps , de leurs odeurs, de leur fapidité, d’après votre fuppofition que le principe inflammable n’efl formé que par Punion de la matière de la lumiere avec Pair pur ? L'un ou l'autre font-ils doués de quelque principe odorant ou de quelque principe fapide? M. de la Métherie, dans fon excellent Effai analytique fur l'Air pur , n’a donné à cet élément aucune fapidité (1). Je ne me rappelle point qu'aucun Phyficien lui en air accordé, car je ne crois pas qu'il faille parler de Popinion de M. Schéele qui en fait un mixte compolé de phlogiftique & d’acide : j'ai aflez réfuté l'opinion de ce chimiite & celle de M. Bergman, tome VI, pag. 287 & fuiv. Seroit-ce donc la matière pure de la lumière qui , unie à l'air pur, feroit le principe de la fapidité & celui de l’odeur ? Or, comment nous ferez-vous concevoir que de l’union de ces deux élémens infipides &c inodores réfultent la fapidité & l'odeur ? Je ne me permettrai point de fuppofer que perfonne propofe cette opinion. Celui qui la préfenteroic auroit un beau problème à réfoudre ; on feroit autorifé à attendre de lui l'odeur primitive , la fapidité primitive , il lui fufiroit de faturer de la matière, de la lumière, de l’air pur renfermé dans un vafe de criftal & expofé au foleil. ” Je ne crois donc pas qu’il foit poffible d’admettre que le principe des faveurs & des odeurs, car pour être court je ne parlerai point des coulèurs, puifle être formé de l'union de l’air pur à la matière de la lumière. Les phénomènes de la calcination & ceux de la révivification des RES SERE SRESMENNNEERNES GRNERNRD fr) Page 61. SUR L'HIST. NATURELLE ET LES ARTS. 20$ métaux me fourniroit encore beaucoup d’obfervations à vous préfenter, mais ces confidérations nous meneroient trop “loin, Enfin, felon vous, Meflieurs, de routes les fubftances de !a nature, l'air pur eft celle avec laquelle la matière de la lumière a la plus grande affinité , & de leur réunion réfulte le principe inflammable, Or, par cette union, l'air pur eft vicié. Ne pourroit-on donc pas vous demander comment ilrefte un atôme d’air pur dans l'atmofphère, puifqu'elle eft toujours pénétrée dans tous fes points par la matière de la lumière qui remplit tout l'efpace. . Dans mes principes , au contraire, la matière de la lumière ayant , pour parler le langage ordinaire , fa plus grande affinité avec le principe inflame mable , & ce principe étant moins abondant que la matière de la lumière, & dans une quantité déterminée, comme celle des autres élémens, on couçoit aifément comment la fubftance de la lumière s’en empare, cemment elle le fait pénétrer avec elle danses corps où il fe fixe & qui L reftituent, & comment il refte aufli dans l’atmofphère une grande quantité d’air privé de ce principe inflammable & à l'état d’air pur : état que vicie toujours du plus au moins le mélange du principe inflammable, mêlange d’où naiffent tous Îes différens puz , comme je le prouverai. Cent autres difficultés fe préfentent à mon efprit ; mais je ne veux pas faire un volume, & je crois en avoir dit affez pour faire concevoir les raifons qui m'ont éloigné de votre opinion fur la formation du principe inflammable. Vous m'avez donc demandé, mon ami, où étoit la preuve que la matière de la lumière ne peut pas s'unir à l'air pur. J'aurois pu vous demander où eft la preuve qu’elle ne peut pas s'unir au principe inflam- mable, & ajouter, comme vous l’avez fait, que tous les phénomènes prouvent cette union : mais j'aime à vous foumettre, & mes opinions, & tous leurs morifs. Vous avez vu dans mon Ouvrage pourquoi je penfe que le principe inflammable eft un élément; vous avez vu comment il fuffie à l'explication de tous les phénomènes connus, & j'ofe efpérer qu’il fatisfera également à tous ceux qui pourront fe préfenter. Vous voyez ici pourquoi je ne puis admettre qu'il eft formé par l'union de la matière de la lumière à l'air pur. Voili quant au fond de la théorie : examinons à préfent enfemble quelques incorretions , quelques obfcurités, ou même quelques contra- riérés que vous avez remarquées dans mon Ouvrage , & que je ne ferois pas étonné qui y exiflaffent. 1°. Vous mobjeétez que je confidère la lumière comme pure, {tome 6, pag? 77) & qu'ailleurs je la confidère comme combinée, Obfervez bien qu'à la page même que vous citez, je la confidère fous deux points de vue; voici ce qu'on y lit: æ Jci la fubftance de la lumière n’eft point combinée; elle n’agit l 206 OBSERFATIONS SUR LA PHYSIQUE; » qu'avec fes propriétés effentielles ; elle n'eft qu'élaftique, & ce n'eft » que par fon élalticité qu'elle étend le volume des corps. Lorfque fon » action eft portée jufqu'à opérer la deftruétion des corps, elle eft » dégagée d’entre les débris de ces tiflus brifés ; mais elle reite dans fa » nature propre & effentielle , & ici point de flamme. » Si nous prenons le mot combinaifon dans la féconde acception, qui » eft.fa véritable fignification, nous concevrons que la fubftance de la #. lumière contracte dans les corps, qu'elle rend ainfi combuftibles ou » inflammables , une union, une adhérence avec quelqu’autre principe, » & que ce n’elt que de cette uniôn , de cette adhérence que peur naître » le phénomène de la flamme », Je la préfente donc ici même, & comme un agent mécanique, & comme un agent phyfique & chimique, & il me femble que je ne mérite pas le reproche que vous me faicés. IL en eft de même de Pair, je l'ai confidéré comme agent mécanique, & comme agent, comme élément chimique, combiné avec l'eau & Le principe inflammable ; mais, je vous l'avoue, j'évite de m’appefantir fur les étiologies chimiques ; je regarde cette fcience, de laquelle nous avons tant à attendre un jour, comme ayant encore long-tems befoin des fecours & même des leçons de la Phyfque. IL me femble qu'on lui ôte beaucoup trop tôt fes lifières, Ce que vous ajoutez vous-même , & tiré des pages 143 & 360 , prouve combien je fuis éloigné de croire que la matière de la lumière n’éprouve oint de combinaifons, quoique je me fois permis de ‘la confdérer quelquefois abftractivement comme pure. Vous me reprochez-encoré d'avoir dit que le principeinflammable n'eft jama's décompofé ; affurément je ne puis concevoir qu’il foit décompofé, puifque je le regarde comme un élément, & c'éroir pour lui aflurer cetre qualité que je difois & que je prouvois qu'il n’eft jamais décompofé : je ne peux confondre fon dégagement avec une décompolition effedive, ni fon tranfport d’un corps dans un autre avec une produétion réelle. Si vous confentiez à perdre de “ue, pour un feul moment, votre bypothèfe de la combinaifon de l'air pur avec la matière de la lumière, combinaifon que rien ne paroïît pouvoir prouver , que les difficultés que je viens de vous préfenter me femblent profcrire , hypothèfe enfin qui n’a rien de préférable à l’admiffion du principe inflammable comme élément, vous ne verriez dans les expériences, que vous me citez, que dégagement , ou tranfport du principe inflammable, j’ai cout expliqué par l'un & par l’autre, & j’ofe être perfuadé que pas une de mes explications ne peut être trouvée infuifante. Mais voici une contrariété bien apparente dans les mots'& que vous me reprochez : J'ai dit dans quelques endroits que la lumière traverfe le verre , &, dans d'autres qu'elle ne le traverfe pas. IL mefembloit, mon ami, que j'avois pris, & bien des fois, des précautions qui devoient me \ LZ 1 SUR L'HIST. NATURELLE ET LES ARTS. 07 imettre à l'abri de cette inculpation. J'ai expliqué dans vingt endroits la manière dont je conçois que la lumière agit à travers le verre , & parti< culièrement tome 3, pag. 2$$,tome 4, pag. 333 & 3433 & dans le même volume, dont vous citez les pag. 364 & 389, j'avois dit pag. 370 ; après avoir expliqué d’une manière fimple & claire par l'action vibratoire de la lumière, les expériences que vous citez, explication que confirme l'expérience de M. Senebier , rapportée pag. 365. æ La petitefle infinie dés pores du verre he permiec pas ait principe inflammable de les traverfer , quoique l’action vibratoire de la lumière s'exerce à travers Le verre; c'eft ainfi qu'une planche mince qui ne permet ni aux vapeurs, & aux exhalaifons unies à l’air lui-même, de les traverfet, rie détruit point l'action vibratoire qui produit le » fon, & j'ajoute en note , & d'après les explications que j’aÿois données de ce mot sraverfer , adapté à l’action de la lumière, tom. 3, p. 255$ »: On fait que la matière ne traverfe pas le verre. Quant à l'erreur que vous me reprochez d’imputer à Pott, voici ce que j'y ai lu : &« Quand on frappe un caillou contre un autre, on a des » écincelles | mais qui n’allument pas, & qui par conféquent ne, confti- > tuent pas le feu (1) ». Il ne parle point de lueurs , ou de traînées phof- phoriques, il parle d’étincelles ; & ,en citant cette phrafe, je me fuis cru difpenfé de la commenter : j'ai eu tort peut-être, & , à cet égard, je fais à Pott toutes les réparations que vous pouvez defirer. Enfin , mon favanc & excellent ami, je me réfere à cout ce que je viens de vous expofer pour m'autorifer à penfer que, s'il eft poflible d'expliquer quelques effets , quelques phénomènes en fuppofant que la matière de la lamière s’unit à l'air pur , il eft exceffivement difficile au moins de conce- voir comment de cette union naîtroit le principe inflammable, principe des couleurs, des odeurs & des faveurs; je perfifte donc à regarder le principe inflammable comme un élément : tous les phénomènes me le prouvent ; je les ai tous expliqués d’une manière claire , d’après cette aflertion , vous n’attaquez aucune de mes explications ; que quelques Phyfciens en faflent autant avec l’hypothèfe que vous propofez, alors nous ferons à armes égales , & nous difcuterons nos étiologies, Mais, en attendant, je me prêterai toujours avec grand plaifir à répandre fur toutes celles que j'aurai données la clarté dont elles pourront avoir befoin, Je vous l'ai dit en commençant cette Lettre, mon ami, & je vous le répéterai avec grand plaifir en là finiflant ; rien ne peut m'être plus utile & plus agréable que vos obfervations fur mes écrits, parce que je ne defire que de m'inftruire & de concourir aux progrès de la Phyfique : je ÿ ÿ 8 H B DE 2 RATE RER T2 (x) Lithogéognofe , tome I, page 347, , 208 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, crois entrevoir le moment où, fecouant un joug qui arfétoit fon noble eflor , elle marchera rapidement dans des routes plus sûres; & fur ces -routes, mon ami, que de mauvais pas vos utiles cravaux lui auront applanis ! qu’elle trouvera de monumens élevés par vous ! que dg vallons, que de retraites l'illuftre Auteur de la Criftallographie a placés fur le chemin de la vérité ! ‘ Recevez, ainfi que votre célèbre ami, votre favant collègue dans le culte fi féduifant , rendu à l'air pur, les affurances bien fincères de ma haute confidération & celle du parfait attachement avec lequel j'ai l'honneur d’être, &c, me L] LETTRE DET MAG UE OU, Chirurgien-Major des Vaiffeaux de Guerre de la Nation Françoife , À (M D'ETL'AËM'ÉTHERTE | Mo NSIEUR, La figure que j'ai l'honneur de vous envoyer (fg. 9 & ro )repréfente _ la colonne vertébrale d’un poiffon nommé pagel , pagrus de Rondelet, erythrinus de Linné , dont une apophife tranfverfe eft exoftofée. . Cette maladie paroît avoir commencé dans la partie mcyenne de l’apophife & en avoir refpeté les deux extrémités, c’eft-à-dire ; fa naïflance & fa terminaifon. Le trou qui fe trouve à la racine de l'apophife & qui livre paffage à la moëlle épinière n'a pas été endommagé ; mais il n’en a pas été de même des gouttières antérieures & poltérieures qui font creufées fur ces apophifes & qui fouciennent les principaux troncs ner- veux (1); ces gouttières, dis-je, fans être entièrement effacées, ont beaucoup diminué de leur profondeur, La maladie , après avoir fait un certain progrès, paroît avoir éprouvé quelqu'obftacle ayant d'arriver à l'extrémité de l’apophife. Cependant elle (1) Ces nerfs paroïflent être foutenus par les gouttières dont je parle , à-peu-près , eomme les apophifes tranfverfes cervicales humaines foutiennent les nerfs brachiaux , de forte que fi les poiflons femblent n'avoir point de col extérieurement , les vertèbres qui entrent dans leur compoftion confervent davantage le cara@tère des vertèbres Cervicales que celui de toute auire versébres 2 SUR: LHIST: NATURELLE'ET LES ARTS 209 a pris de nouvelles forces pour ne Hifler que la dernière rerminaifon de cette apaphife parfairement faine , comme on peut s'en aflurer par linfpection de la figure ci-jointe. Si l'anatomie comparée nous a fourni: de grandes Îumières fur le rapport & l’ufage de nos parties , pourquoi l’affemblage des maladies des êtres organifés ne pourroit-il pas nousiéclairer fur leurs caufes ? L’hiftoire des os du poulet que M. Mauduyt nous a tranfmis &: dont leurs parties moyennes étoient très-gonflées & fort dures , tandis que les extrémités Pétoient beaucoup moins, me paroît avoir quelqu'analogie avec la maladie que je viens de remarquer à ce poiflon. Lecélebr@M, Daubenton en avoit déjà fait une maladie particulière aux galinacées; il femble pour tant qu’elle fe rencontre dans d'autres aniriaux, Peut.- être qu’elle dépend des loix confituves des os, N'eft-ce pas dans cette partie moyenne, (que la maladie 4 rendue crès-compa“te ) que commerce le premier point d'offification ? A l'égard des apophiles tranfverfes, on fait qu'elles.ne fonc que des épiphifes dans le principe & qu’elles fe développent, dans la fuite, par un point d'offification placé dans leurs parties moyennes. Ces confidérations ne paroîtéont pas de fimples objets de curiofité ; quand on fera attention que les animaux font fujets à un grand nombre de maladies qui nous afligenc également; que la gangrène sèche, l'exoftofe, l'épilepfie , la goutte, &c. leur {ont familières ; qu'on pourroit, fans remords, des foumettre à nos expériences, &, par la connoiflance des caufes de ces maladies ; parvenir sos des'remèdes qui leur conviennent, à Pù Je fuis, &c. A Toulon ; Le 30 Novembre 1787... HE UD TRUE. S D E MD :A FD ILIE RO FT, LACS ROME er RAT AN EST I NE à Sur. la Marine, & particulièrement fur les moyens de perfectionner la Navigation des Fleuves. AL ENS A vanr de publier ces Lettres, que nous ne pouvons donner que fucceflivement , nous croyons devoir dire un mot de ce qu'elles con- tiennent. Tome XXXII, Part, I, 1788, MARS, Dd 210 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, Dans la première de ces Lettres, M. le Roy montre principalement [a poffibilité de donner à de petits navires , une forme & une voilure telle, que remontant jufqu’à Paris, ils puflent aller de cette capitale, à Londres, à l'Amérique. Dans la feconde, il le prouve par le fait, F1 décric un navire de ce genre, qu'il a fait exécuter à Rouen , qu'il a éprouvé le 15 & le 16 du mois de feprembre dernier au milieu de la Manche, & qui eft actuellement à Paris, au bas du Pont-neuf, Ce navire a mérité l’atrention des étrangers. Ns en ont parlé, mais d’une manière fi peu exaéte , que nous croyons EX a ce qu'ils en ontécrit. Voici ce qu’on lit dans le Courrier du Bas-Rhin, du famedi 17 novembre 1787, pag. 778. De Clèves. On voit au bas du Pont-Neuf un petit brigantin anglois à deux mats , qui profitant de la hauteur de La rivière , efl venu ici de Rouen pour avoir un meilleur débit de fes marchandifes : c’efl la premiére fois qu'on a vu au pied du Louvre flotter le pavillon anglois. Cet article eft aufñi imprimé précifément de même dans la Gazette de Leyde du 20 novembre. Voici en quoi il s'éloigne de la vérité: Ce navire appelé Naupotame d’après la propriété qu'il a de naviguer également en mer & fur les fleuves , ne tire que trois pieds d’eau , il pourroit remonter la Seine quand elle ef la plus baffe, Il n’a apporté aucunes marchandifes angloifes dci, mais vingt-quatre rouleaux de plomb laminé, & fix paniers de vin de Bordeaux. Ce n’eft point un navire anglois, mais un navire françois. IL n'a jamais fait lotter le le à anglois au pied du Louvre, mais le pavillon françois’qu’il s’eft honoté particulièrement de déployer toures les fois que le Roï, qui en a bien voulu encourager la conftruétion , eft venu à Paris. | M ais La troifième Lettre de M. le Roy à M. Franklin contient diverfes Gbfervations fur celle que ce Philofophe célèbre lui a adreflée , & que nous avons publiée précédemment. ‘PRÉMIERE LETTRE, A M'FRANKLIN (1), Sur les Navires des Anciens, fur ceux des Modernes , & fur les moyens de perfe&tionner la Navigation en général, & particulièrement celle des Fleuves , en fe rapprochant de la forme dès premiers, & en Jaifant ufage de leurs voiles. Movsrsvx: Vas profondes connoiflances dans la Phyfique & dans les Arts, fe .génie également fimple & fublime qui vous en a fait tirer des réfultats ————————— a —— (x) Ayant fait part à M. le Roy du deffein que nous avions de faire imprimer (es Lettres dans notre Journal, il y a fait quelques eorre@tions, & y a ajouté quelques notes. SUR L'HIST. NATURELLE ET LES ARTS, 11 fi nouveaux & fi utiles ; & l’intérèr que vous continuez de prendre à mes recherches fur la marine , m’enhardiffent à vous foumettre di- verfes obfervations fur cette fcience. Le point de vue fous lequel j'en confidérerai quelques parties, fera conforme au plan que je me füis tracé dans mon travail à l'Académie des Belles-Letrres : il eft indiqué dans le nouveau Réglement qu'elle a reçu. Pour fe rendre toujours de plus en plus utile, elle donnera, dit un des articies de ce Régle- ment (1), une attention particulière & l'étude des Sciences, Arts € Metiers des anciens , en les comparant avec ceux des modernes. D'après ce que prefcrit cet article, je comparerai les vaifleaux des anciens avec ceux des modernes ; je prouverai que les premiers étoient plus propres que ceux que nous faifons, pour la navigation des fleuves; '& je hafarderai quelques idées fur les moyens de perfeétionner cette na- vigation, & la navigation en général. _Æ: Lifez, je vous prie, Monfieur , ma lettre avec induloence; je ne l'écris pas à bord d'un vaifleau au milieu de l'Océan , comme vous avez écrit celle que vous m'avez fait l'honneur de m'adrefler (2) : mais dans une ville où on ne voit point de navires. En parcourant L’hiftoiré des arts, on voit que nous devons quelques- unes des machines, ou des inftrumens qui nous font le plus utiles, à des hommes très-célèbres. C’eft Pafcal qui a imaginé le haquet qui fert au tranfport de nos boifflons. Huguens, ce géomètre, cec aftro- nome fameux, ce précurfeur de Neuwton, a le premier appliqué le pendule aux horloges : & nous vous devons le paratonnerre, qui ga- rantit nos maifons de la foudre. Ces machines ou ces inftrumens ont été créés & perfectionnés par un feul génie ; le vaifleau eft l'ouvrage de l’homme. Archimède contribua à le perfectionner en lui donnant trois mâts : vous y contribuerez, Monfeur , par les vues aufli neuves qu'utiles que. contient votre lettre. Bientôt le conftructeur de navires fera plus d'attention à la réfiftance que les voiles éprouvent en fe mouvant à travers l'air. Il ajoutera fous les cables, des rouleaux, pour faciliter: la manœuvre des navires à Pancre. Le navigateur retardera les mouvemens défavorables que les flots & les vents impriment à fon vaifleau au milieu des mers les plus profondes. Il le préfervera de divers accidens qui en entraïîneroient la perte. Îl reconnoîtra quand un courant l'écarte de fa route ; & le plus favorifé des biens de la fortune, en prenant pour fon voyage les pré- (1) Ce Réglement eft du 22 décembre 1786 : l’article eft le XXF°. (2) Cette Lettre a été écrite en mer à bord du vaïfleau le London, commandé par le Capitaine Truxton, au mois d'août 1785 : elle eft imprimée en anglois dans les Mémoires de Ja Société Philofophique américaine , & dans ce Journal 1787, feptembre, æftobre & novembre. Tome XXXII, Part. I, 1788. MARS. Dd 2 212 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, cautions pleines de fagefle & d'humanité que vous Jui prefcrivez, con- fervera & fa fanté , & quelquefois la vie des paffagers peu riches qui auront le bonheur d'être embarqués avec lui, Si mes premières recherches fur la marine ont mérité votre attention, celles qui fuivent, fur la navigation des fleuves , doivent particulière ment vous intérefler ;. s’il eft avantageux de la perfeétionner , c'eft prin- -cipalement pour les contrées que vous habitez, traverfées par ces grands fleuves , ces fuperbes rivières, que votre nation fe propofe de réunir par des canaux, Le moyen le plus général, le plus prompt , le moins difpendieux d'y parvenir, eft, je penfe, de faire des navires qui , après avoir par- couru jufqu'à leur embouchure, les fleuves les moins profonds, les rivières les plus embarraffées de ponts, de bacs, puiffent faire en mer de plus ou moins grandstrajets; qui defcendus , par exemple, de Paris au Ha reMbbiflenc aller à Londres, à Philadelphie, & revenir de ces villes à Paris. . Des navires de cette efpèce, particulièrement propres pour la navi- gation des grands fleuves , des grandes rivières, de l'Ofo, de la De- lavare, qui augmenteroient, qui rendroient plus promptes & plus sûres les communications des parties d'un grand Etat , ou de divers Etats entr'eux , feroient certainement utiles ; & cependant hous n'avons pas de ces navires. Je vous ai fouvent entendu dire, Monfieur, que des effets qui vous étoient envoyés de Philadelphie, étant arrivés aw Havre en 23 jours, vous aviez été trois mois à les recevoir du Havre à Pafly. On peut aflurer en général, que le trajet par. eau de Paris à Londres, ou de Londres à Paris, ne fe fait pas, à beaucoup près , aufli promptement que celui d'Europe en Amérique , par la lenteur de la diligence de Rouen, &: par les retards de toute efpèce, qui réfulrent du changement de bâtimens dans cette traînante navigation, Vainement chercheroit-on dans la marine moderne, le modèle de: ce bâtiment le plus propre à aller de Paris à Londres ou à Philadel- phie : elle ne nous offre à cet égard, que des efquiffes très-imparfaites. Occupés de la forme qu'il faut donner aux vaifleaux deftinés à tra- verfer l'Océan , nos marins femblent ne s'être pas aflez appliqués à faire: des navires qui, très-propres en général à naviguer fur les fleuves ; puffent encore parcourir divers efpaces en mer. Ceux des anciens réu— pifloient ces deux propriétés fi précieufes, parce qu'ils tiroient en gé- néral bien moins d’eau que les nôtres. On le voit par le combat des vaifleaux décrit dans Pliliade : on le voit également par une a@ion qu’eurent les Grecs au port de Pile, pendanr!x guerre du Péloponèfe (r). TS () Mémoires de Lits tome XKXVIII, pag. 579. . SUR L'HIST. NATURELLE ET LES ARTS. 213 Les Lacédémoniens ; battus par la lotte d'Athènes , ayant abandonné leurs galères pour fe refugier à terre, comme ils virent que les Athé- niens vouloient s'en emparer, ils rentrèrent dans l'eau, ils les faifirenc, & les défendirent avec tant de courage , que leurs ennemis ne purent venir à bout de leurs deffeins. | Céfar, dans fes Commentaires, en parlant de fa première expédi- tion (1) dans la Grande - Bretagne , dit que ce qui nuifit le plus au débarquement de fes troupes, fuc la grandeur de fes vaiffleaux; & ce- pendant dans cette expedition, on voit l’enfeigne de la dixième légion s'élancer de fon navire dans la mer, marcher entourée des flots à l'en- nemi, & déterminer les Romains par fon exemple à le fuivre. J'ai vu à S. Malo, dans la derniere guerre , nos navires deflinés à une fem- blable expédirion ; il n'y en avoit aucun qui eût permis à nos foldats la même audace, parce qu'ils s’enfonçoient tous dans l’eau plus que la hauteur d'un homme. On ne voit point les galères , 705 pentères mo- dernes , remonter jufqu'à Rome, Paul Emile y remonta avec la ma- gnifique Decaexere de Perfée. Dans les ports que les Ruffes ont à Cherfon fur la mer Noire, on ne trouveroit pas, je le p:éfume, un bâtiment qui, mettant à la voile, allät jufqu'à la premiere cataracte du Nil. Un navire des anciens (2) faifoit cet immenfe trajet. Partant des Palus Méortides, il traverfoit, dans une navigation continue, la mer Noire , celle de Marmora, l’Archipel ; il cingloic dans la Méditerranée jufqu'à l'embouchure du Nil, remontoit ce fleuve, & arrivoit en Ethiopie en moins'de vingt-cinq jours de navigation. Cette propriété des navires des anciens réfultoit principalement de ce qu'ils n'étoient pas fort grands, & de ce qu'étant en général plats par deflous, ils tiroient peu d’eau , comme je l'ai dit; ceux dont nous faifons ufage font bien différens. ; La plupart des vaifleaux employés par les nations maritimes, s'enfoncent confidérablement dans la mer ; afin qu'ils aient une grande capacité, qu'ils portent plus de voiles, & dérivent moins dans les roures du plus près, Commeils ne font prefque jamais mus que par le vent, ils ont de grands mâts, des voiles & des vergues grandes & élevées ; de forte que la forme d’un navire de cinquante à foixante tonneaux , par exemple, eft telle que fon: poids feul, lorfqu'il n’a ni fon left ni fon chargement , le feroit enfoncer dans l’eau plus qu'un grand nombre de fleuves & de rivières n’ont de profondeur dans plufeurs parties de leur lir. Deux efpèces dé bâtimens, l’un employé par les françois » l'autre ; (1) Voyez la belle édition de ces Commentaires , publiée par M. le Comte de Turpin, & fes notes fur cette expédition , pages 277, 278 & 279. L (2) Je lai dit ailleurs , Marine des anciens Peuples, pag. 75, Navires des Anciens » pag xxx, Préf. Woyez Diodore de Sicile, liv. 3, n°, 167. 2 F4 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, dont les anglois font beaucoup d'ufage, femblenr nous mettre fur là voie pour compofer Le vaifleau le plus propre à naviguer fur les Aeuves, L'un eft la gribane, petite barque employée à tranfporter des marchan- difes du Havre à Rouen ; l’autre un petit bâtiment dont on fait ufage en Angleterre, fur la rivière de Merfey. Je vais entrer dans quelques détails fur l'un & fur l’autre de ces bâtimens. Les plus petites gribanes portent cinquante tonneaux : on en fait de bien plus grandes. Elles font plates par-deflous ; ce qui n'empêche pas qu'elles ne foutiennent la haute mer. Borée, le Pilote qui me conduilit de Villequai à Quillebœuf , dans le voyage dont j'ai parlé dans mon dernier ouvrage (1), m'a raconté que dans fa jeunefle, il y a vingc à trente ans , elles alloient quelquetois jufqu'à Bordeaux. L’élancement de létrave dans ces bätimens , elt prodigieux ; elles n'ont qu'un feul mât, Leur voilure eft très-élevée, J'ai parlé ailleurs de la difficulté qu’elles ont à virer de bord. Voici le voyage aufi hardi qu’intéreffant que fit l’autre bâtiment dont j'ai parlé, Vous ne douterez pas, Monfieur, de la vérité de ce voyage, lorfque vous faurez que j'en dois le récit.à M. K***, cer anglois qui, ainfi que vous, foufcrivit pour les épreuves des voiles latines que je fis en 1785, & que us receviez avec tant d'amitié & de fécurité, pendant que vos nations fe faifoient une guerre fi cruelle, En 1753, un bâtiment plat au fond , (en anglois à flat), & ponté, de quarante tonneaux, qui tranfportoit des marchandifes de Liverpool à Manchefler, fur la rivière de Merfey , partit de Liverpool avec huit hommes d'équipage pour la côte des Negres. Il y échangea [à cargaifon pour trente-cinq de ces êtres opprimes , les tranfporta à Pile d'Antigoa , & revint à Liverpool avec une cargaifon des produétions de cette île , fans le moindre accident. Qu’on perfectionne ces bâtimens , en les rapprochant de {a forme , de la ftructure du vaïfleau long; qu'on projette beaucoup leur voilure à l'avant & à l'arrière, comme j'ai projeté celles que j'ai éprouvées en 1782 & 178$, pour en diminuer l'élévation, le poids, le moment, fans en diminuer la furface ; qu’on difpofe enfin les mâts de façon qu’ils puiffent {e fupprimer , fe rétablir , s'abaifler ou fe relever promptement, facilement, pour le paflage des ponts. Alors ces bâtimens qui pourront faire de grands trajets en mer , feront encore propres pour la navigation des fleuves. On, pourtoit appeler ces bâtimens, vasffeaux longs, parce qu'ils (x) Cet ouyrage a pour titre: Nouvelles Recherches fur Les Vaiffeaux longs des Anciens , fur les Voiles Latines | & fur les moyens de.diminuer Les dangers que courent les Navigateurs. À Paris, chez Nyon, rue du Jardinet , & les Libraires qui vendent les nouveautés, année 178% SUR L'HIST. NATURELLE ET LES ARTS, 215 auroient la forme & la ftruëture de ces navires impériffables des anciens diligences marines , de la célérité de leurs voyages, ou Naupotames , vaiffeaux des fleuves , de la propriété particulière qu'ils auroient d'y naviguer. Dans cette Lertre je les défignerai par ces divers noms , mais le plus fouvent par le dernier, parce qu'il eft le plus court (1), Votre nation , Monfieur, pourroit exécuter des navires de ce genre, d'une mafle bien plus impofante que la nôtre. La nature femble avoir travaillé plus en grand dans les Etats-unis de l'Amérique , que dans les contrées que nous habitons. Les fleuves qui y coulent ont une étendue immenfe , une grande laroeur & une profondeur confidérable; ainG le naupotame de l'Oïo , de la Delaware, pourroit s’exécuter fur une bien plus grande échelle, que ceux de la Seine & de la Tamife. Dans votre Lertre vous faites une obfervation fur la forme des vaiffeaux ; dont je proficerois pour tracer celle du vaifleau long ou du naupotame. Vous penfez que leurs bords, au lieu d'avoir de la rentrée, devroiene au contraire fe projetter en dehors. Je fuis entièrement de votre avis pour le plus grand nombre de ceux qui font employés au commerce , dont je penfe que la forme a été copiéertrop fervilement fur celle des vaifleaux de ligne; mais dans ces derniers , les batteries élevées les unes au-deflus des autres, ont en quelque forte impofé la Joi aux conftructeurs de vaifleaux , de leur donner cette rentrée qui en diminuant l’étendue des ponts les plus élevés, & par conféquent leur poids, donne plus de ftabilité au bâtiment (2). Ainfi, felon moi, fi le type de la coque des très-grands vaifleaux eft en quelque forte le tonneau qui furnage & roule fur les lots, celui de la coque du vaiffeau long eft la planche qui flotte, & ne tourne jamais dans la mer la plus agitée. Je vais expliquer les avantages qu'auroit cette dernière forme fur la première à navigation des fleuves. Un vaiffeau marchand court en général, comme ils le font prefque tous , qui a dix-huit pieds de baux ou de largeur, n’en a pas beaucoup plus de foixante à la flottaifon. Il en a neuf de creux , ne tire que fepr à huit pieds d’eau, & porte de cent cinquante à deux cens tonneaux. On.peut le tegarder comme le plus grand de ceux qui remontent jufqu'à Rouen avec toute leur charge, quand la Seine a le moins de profondeur, Un naupotame qui, avec la même largeur auroit quatre-vingt- dix pieds de long & environ huit pieds de creux, pourroit ne pas (1) Dans un voyage que j'ai fait à Rouen depuis la publication de cette Lettre, jy ai vu une forte de bâtiment très en ufage à Dunkerque , qui eft encore plus propre que la gribane pour fervir de bafe au naupotame ; comme j’aurai occalon de le ver dans la fuite: (2) Dans les vaifleaux de guerre anglois , me dit un officier de marine françois & très-inftruit , cette rentrée ne commence pas auff bas que dans les nôtres, « 216 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, tirer plus d'eau que la diligence de Rouen ou cinq à fix pieds, & porter cependant le même nombre de tonneaux’ que le vaiffeau marchand ; mais: ils différeroient en ceci: le premier en allant à Philadelphie, à la Mac- tinique , & en en revenant, ne pourroit commencer & terminer fon voyage qu'à Rouen ; le fecond le commenceroit & le rérmineroit à Paris. | Quand vous defiriez , il y a deuxans, Monfieur, de trouver un bâtimenc commode qui vous defcendit jufqu'à Rouen, avec quel plaifir n'auriez- vous pas vu fous vos fenêtres à-Pafly , celui qui vous auroit tranfporté diretement dans votre patrie ! avec quel intérêt les habitans de cette ville ne l’auroient-il pas vu ! Votre ami lui eût adreffé quelques vers qu'Horace adreffe au vaiffeau qui portoit Virgile à Athènes ; & nos regrets, en le voyant defcendre la Seine , n’auroient pas été moins grands que la joie de vas compatriotes en le voyant remonter la Delaware. , Ce bâtiment qui auroit quatre-vinot-dix pieds de longueur à la flottai- fon , feroit, felon moi, le plus grand naupotame qui remonteroit jufqu'à Paris. Celui qui borneroit fa navigation à aller de notre capitale à Londres, & à revenir de cette dernière ville à Paris, pourroit n’en avoir que trente; & entre ces deux termes ; En confervanc toutes les propor- tions que j'ai indiquées pour le premier , on pourrait en faire de toutes les grandeurs poffible ë } Des navires de certe efpèce contribueroient beaucoup à multiplier ces hommes, fi utiles, fi difficiles à former, & fouvent trop rares, employés à la manœuvre des vaifleaux; peut-être feroient-ils abolir la prefle chez nos voilins. Il feroit d'autant plus facile d'augmenter dans notre nation le nombre de ces hommes précieux, que leur état vient d'être affranchi des chaînes qui le dégradoient. Par la nouvelle Ordonnance qu'on doit à M. le Maréchal de Caftries , le matelot peut quitter le fervice de mer, s'il le defire, en prévenant un an d’avance de fon intention; au lieu qu’autrefois, il étoic claffé dès fa naïflance & pour toute fa vie : c’eft un acte de bonté, comme de jüftice, que l'humanité placera entre ceux qu’elle a déjà infcrits & qu'elle infcrira dans les annales du règne de Louis XVI. 1 5 Si l'ufage de ces bârimens s'établifloit, comme tout nous donne lieu de le defirer , Paris deviendroit une ville maritime, Ils femblent dévoir être le premier fruit de ce traité, préfage d’une longue paix , fi glorieufe aux Souverains qui l'ont faite, pour l'échange de nos productions contre celles de l'Angleterre, Combien de fois le Négociant de Paris, de Nantes , de Bordeaux, de Londres, d'Amfterdam , fatigués de la lenteur & des inconvéniens qui réfulrent du tranfport des marchandifes, fait à diverfes reprifes fur plufieurs bâtimens , n’ont-ils pas defiré un femblable navire ! Combien de fois les favans ne l’ort:ils-pas defiré pounecevoir plus promptement , & fans altération , leurs livres, leurs inftrumens, les matières que la Chimie foumet à fes analyfes? ù S « SUR L'HIST., NATURELLE ET LES ARTS. 217 1Sileplus perit dé ces naupotames naviguoit avec quelque défavantaue dans les hautes mers ; il n’en feroir que plus propre pour cellede la Seine & des-rivières qui s'y jettent. Il.lès remonteroit: à la voile ou par le hallage, jufques ‘dans la Bourgogne & ‘dans la Champagne ; & non: feulementlik donneroic aux ‘habirans de ces: provinces, la pofibilité d’y embarquer leurs vins pour les envoyer direétement à Londres, mais 1l leurdonnerdiraufli l’aflurarce qu’ilsferoient bien moins alrérés’& diminués pendant la durée du voyage: 100% fovÿ 5Travth : Cetce forme ancienne de navires, fi on l’adoptoit , rendroit maritimes; comme je viens de le faire voir ; des villes confidérables qui ne le font pas; elle rendroit aufli plus. maritimes des villes qui le font déjà. On verroit partir: de Rouen. des vaifleaux qui ne partent que du Hâvre,:& qui, plus:grands quela Vidoire, Pun-des navires de la flotte.de Magellan, qui fcle tourdumonde} pourroïenc.aller aux grandes Indes,::) 5 * Enfin ; en bornant la navigation : des plus perits bâtimens de :cetre efpèce , au trajet de Paris à Rouen , îls pourroient.n'avoir qu'un feul mâes & ‘quoique très-petits, mériter; à caufe de leur :voilure ,. le nom de diligence marine, qu'on ne peut donner-aux bateaux lourds:, & mus feulement par des :chevaux qui: font aujourd’hui certe navigation. | - On :voit dans les Planches que je joins à (cette Lettre, des diligences mitines dé différentes grandeurs, donc les voilures: font : plus où'mroins compliquées, relativement aux trajets plus ou moins longs qu'elles feroïent , qui eft indiqué par l'écric qui 'eft-au-deflus de chaque figure. Ces voilures :conviendroient: encore: à un :grand- nombre de bâtimens emploÿés dans la marine, ainfi que fe vais: l'expliquer , après avoir-faie quelques obfervations igènérales* fur cles changemens que fa grandeur à laquelle on a porté ies vaifleaux , femble indiquer de. faire’ à Jeur voile an om noel). 1iandon N sbsaët: uliov ! Le vaiffeau ; cette machine:fi fuperbe , fi ‘utile, ce chef-d'œuvre de l'homme, eft devenu , avec le tes, d’une grandeur fi prodigieufe , qu'il préfente aujourd’hui dans fa compofrion, des difficultés qu’on wavoit pas à’ furmonter il :y a dix fiècles: tant qu'il n'a eu qu'une certaine ‘grandeur ; on a pu à -chague manœuvre ;- pour ainft dire ‘changer la «poñirion des cordages qui retiennent les'maäts, la régler fur ce qu'exigeoic da fituation des voiles; on‘a pu donner à: ces voiles, les formes que l'on préféroir. : t&! La. grandeur des vaïfleaux ayant forcé de donner à ces cordages , aux haubans , aux étais, une fituation-déterminée &-invariable, il faut, ou fe réfouare à avoir des voiles: dontles mouvemens font gênés par °ces core ; qu'on n’oriente que d'une manière très-impatfaite, & dans des circonftances {1 importantes , que le falut des équipages en dépend; & c'eftce qu'on a fait jufqu'à préfent ; ou bien déterminer la figure des yoilés fur la fituation déterminée de ces cordages , afin qu’on puiffe les Tome XXXII, Part, I, 1788. MARS, Ee 218 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, orienter de toutes les manières pofibles : c’eft ce que je propofe, comme le prouvent tous les deffins de voilures que j'ai donnés précédemment, Je crois devoir remarquer encore , que dans la compolition de [a voilure des vaiffeaux , il femble qu'on n'a pas fait route l'attention que l'on devoit faire , aux diverfes propriétés que devoient avoir les voiles, felon le lieu du vaifleau où elles étoient établies, Par exemple , les voiles de l'avant & de l'arrière étant deftinées à faire faire aux vaifleaux leurs diverfes évolutions , on ne fauroit, je penfe, s'appliquer avec trop de foin, à faire qu'elles puiffent , avec facilité, avec célérité, s'orienter de toutes les manières poñfibles; fe fupprimer lorfque l’ation que le vent exerceroït fur leur furface feroit défavorable , foit en les carguant promp+ tement , foit en les mettant dans le lit du vent. Qu'on examine fous ce point de vue, les artimons qui font à F'arrière des vaifleaux. & les focs qui font à l'avant, & on verra qu'ils font bien éloignés d'avoir ces propriétés qu'ont fingulièrement les voiles latines que j'établis à ces deux extrémités des navires. Ces propriétés fi importantes pour les voiles de la pouppe. & de la roue des navires, ne font pas aufli eflentielles à celles qui en occupent £ partie du milieu , & qui , fans être employées pour fes diverfes évolu+ tions, contribuent beaucoup à en accélérer la marche, J’appelerois donc, en général, les premières, voiles de manœuvre, & les dernières, voiles de marche. J'obferverai enfin que les voiles bafles des plus grands vaiffeaux étant celles qui s’orientent de la manière la plus impartaire pour aller au plus près, ce font auffi celles auxquelles il eft le plus important de fubftituer des nouvelles voiles latines , qui s’orientent parfaitement pour ces routes du plus près. ; UT La voilure repréfentée figure I, pourroit, felon moi, être fubftituée avec avantage à celle des bateaux bermudiens, des gouëletres ; des galères , des chebecks & des petites gabares: celle qu'on voir figure 11, feroit aufli, je l’imagive, préférable , fous un très-grand nombre de rapports, à celle de tous les vaifleaux marchands à trois mâts, qui n’égalent pas en grandeur les plus grandes corvettes ;ou les plus petites frégates. Je penfe qu'elle leur donneroit la propriété qu'ils n'ont pas, d'aller bien ‘au plus près: qu’elle auroit moins de poids , moins de moment , qu’elle coûteroit moins , que la manœuvre .en feroit plus facile , exigeroit un équipagé moins nombreux , & expoferoic , & le navire & les matelots, à bien moins de dargers. La figure IH repréfente le vaiffeau à trois mâts couvert de voiles latines, ou le développement le plus complet du nouveausffième de voiluré que je propofe, Cette voilure , je penfe , pourroit être fubftituée avec avantage à celles des corvertes, des frégates à une batterie, & même à celles des plus petites de ces frégates qui en ont deux; & elle feroit,, SUR L'HIST, NATURELLE ET LES ARTS.) 219 felon monopinion , employée encore avec avantage fur les bâtimens de commerce que les grandes compagnies de diverfes nations envoyent dans les deux, Indes. A-l'égard des figures IV & V , elles n'indiquent que des détails relatifs à l’écablifflement des axes de révolution des voiles. La figure V1 donne une idée générale de la manière dont on pourroit unir les voiles latines aux voiles quarrées dans les plus grands vaifleaux : voici les raifons qui me dérermineroient à les fubftituer à celles dont elles occuperoient la place. L’artimon des grands vaifleaux ne peut pas s'établir pour le vent arrière; celuf que je propofe s'établiroit parfaitement pour ce vent. Cet artimon des grands vaifleaux ne fe projette. pas aflez à l'arrière dans plufieurs. circonflances, puifqu'on y ajoute une bonnette; celui que je propofe tiendroit lieu de ces deux voiles. La grande voile dés vaifleaux s'oriente encore d'une manière très- défavorable pour aller au plus près; quelques efforts qu’on ait faits pour y corriger ce défaut , fa vergue ne s'oriente qu'à un angle de trente-trois degrés avec la quille , tandis qu’elle devroit s'orienter à un angle de la moitié moins, ou de dix-fept degrés ; & le grand hunier qu’on oriente un peu mieux, ne s'oriente pas encore aflez bien : les deux voiles latines bafes., qui en tiéndroient à-peu-près lieu, s'oriente dela manière la plus favorable pour ces routes; & ce que je viens dire pour la grande voile & le grand hunier, a également lieu pour la mifaine & le petit hunier. On entrevoit affez par tout ce qui précède, que ces mélanges des nouvelles voiles latines avec les voiles quarrées , pourroient fe faire d’un grand nombre de manières différentes, & avec d’autant qu de facilité, que les voiles latines fe meuvent ou par-deflus , ou par-deffous les étais, & n'obligent pas, comme dans les gouëlettes , de changer la fituation de ces principaux cordages, fi néceflaires pour aflujettir bien la mâture. Si, comme je viens de le faire voir, les voiles latines peuvent encore être employées avec avantage dans quelques parties des plus grands vaifleaux , elles devroient particulièrement être préférées pour les plus petites embarcations qui n’ont qu’un feul mât, celles que celles qu'on voit feures VITE VIII ; ces figures, & celle du grand vaifleau, figure WT, expriment , ainfi qu’on le voit, le maximum & le minimum de la nouvelle voilure. CONCIUVUSION. On voitparcette Lettre, & particulièrement en confidérant les Planches qui en dépendent, que les nouvelles voiles latines pourroient être employées généralement fur tous les petits bâtimens de quelqu’efpèce qu'ils foient ; fur ceux qui n'ont qu'une batterie, & peut-être mème fur les plus petits de ceux qui en ont deux; & que même fur les grands vaiffeaux 4 elles pourroient être employées en auffi grand nombhre que les voiles quarrées ; Tome XXXII, Part. 1, 1788. MARS, Ee 2 ‘ 220 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, d'où je erois pouvoir être autorifé à conclure , qu’elles féroient’ celles qu'on pourroit employer de la manière la’ plus générale dans la marine. Différentes caules, Monfiéur, m'ont fait différer jufqu'à: préfent à : vous témoigner la: vive reconnoiflance que j’ai des marques publiques que vous me donnéz par votre Lectre, de l'intérêt que vous prenez à mes recherches, & qui peuventitant influer fur l'attention ‘que l’on y ‘donnera; & je ne vous dois pas mboins.de remercimens pour l’extrème honnêteté avec laquelle vous avez bien voulu me les donner. Quand! vous aviez tant &' de fi grandes affaires, m'écrire au ‘milieu des mers; à peine arrivé dans votre patrie, lire la Lettre que vous m'adreflez à la Société Philofophique américaine ,.me faire infcrire au nombre de fes membres, faire imprimer votre Lertre dans fes Mémoires & me l'envoyer après quelques mois feulement écoulés depuis votre départ d'Europe : veilà des traits d’intérèt, de bonté ;-qui reftérontigravés dans mon cœur aufli long-tems qu’il confervera quelque mouvement. . J'ai l'honneur d'être, &c. DD en A SES NOTES. : Afin de ne pas trop m’éloigner dans cette Lettre, du plan de mes autres ouvrages fur Ja marine déjà publiés , jai cru devoir réferver pour ces Notes, l'explication plus approfondie, plus détaillée des caufes qui ont retardé jufqu’à préfent l’établiffement des naupotames , & des raifons qui m'ont déterminé à indiquer la forme, les proportions & la voilure que je penfe qu'ils devroient avoir, De ce que nous n'avons point de Naupotames , de Diligence qui aille de Paris à Londres, à la Martinique, doit-on conclure qu'il n'e 2] à . #7 a . Pas poffible d'en avoir , ou que l'ufage n’en feroit pas avantageux ? On me demandera peut-être pourquoi on n’a point fait de naupotames, puifqu’ils feroient fi utiles? On a fait une queftion du même genre au Chevalier Renaud, quand #l propofa la galiote à bombe ; à M. Grognard, quand il propofa de faire fa forme à Foulon ; à Herfchel, peut-être, quand il parla du deffein qu'il avoit de faire fes merveilleux télefcopes. On a fait des queftions femblables à l’égard de prefque toutes les inventions auxquelles on s’eft oppofé d’abord ; & qui ont enfuite été adoptées très-généralemenr, Parrapport au naüpotame , je dirai que ceux qui aurejent eu le deffeîn d'établir ces forres de navires, contraire, peut-être, à quelques privilèges des diligences d'eau, à quelques droits levés fur les bateaux , auroient trouvé plus de difficulté autrefoisiqu’à préfent, à réuffir dans leurs projets, parce qu'on a des idées plus jaftes & moins rétrecies fur le commerce. Je dirai qu'on a eu moins d'intérêr de les faire auxrefois qu’à préfenc , qu'il SUR L'HIST. NATURELLE ET LES ARTS. 221 y aun traité de commerce entre la France-& l’Angleterre, Je dirai enfin que M. Pafflement & d'autres , s’étoient trop occupés de changer l’état de la rivière & de faire des canaux pour recevoir les vaifleaux comme ils ” fonc, & pas aflez de changer la forme des vaiffeaux pour naviguer fur la rivière comme elle eft; ce qui demandoic des eflais, des rentatives de Ja nature de ceux que j'ai faits, fur la forme qu'il falloit donner au corps de ces navires, comme fur la voilure qui leur feroit la plus avantageufe, Que les changemens que je propofe de faire aux Navires pour leur donner la propriété de naviguer également en mer & furles fleuves , ne leur ôceroient pas celles qu’ils doivent avoir de ne pas trop dériver , 6 de bien virer de bord. ‘En diminuant d’un tiers; ainfi que je l'ai propolé, la quantité dont les vaiffeaux plongent dans l'eau, on diminueroit de la même quantité la téfiftance qu'ils oppoferoient au fluide dans les routes du plus près, & par conféquent on auroit lieu de craindre qu’ils ne dérivaffent beaucoup ; mais fi, en diminuant d’un tiers la quantité dont ils plongent dans l’eau, on auginente d’une autre part leur longueur d'un tiers, ils oppoleront alors au fluide dans les routes du plus près la même mafle qu'auparavant, & n'auront plus le défaut de trop dériver, -: On pourroit peut-être craindre que leur longueur ne nuisît à la propriété qu'ils doivent encore avoir de virer de bord. facilement , promptement ; mais fi on avoit cette crainte en employant quelques-unes des voilures qui font en ufage, on ne l’auroit pas en fe fervant de la nouvelle voilure latine : les voilures de l'avant, dans cette voilure, comme celles de l'arrière , érant difpofées de la manière la plus avantageufe pour faire cette manœuvre. £ si Que, quoique le Naupotame plongeët bien moins dans l'eau que les autres V'ailleaux ; il auroit cependant la flabilité néceffaire , & Jeroit affranchi du danger de chavirer. En transformant deux fois de petits bateaux de Saint-Diziers en canots, ou yachts, portant d’aflez grandes voiles , j’ai été obligé de chercher tous les moyens d'augmenter la ftabilité d'un bâtiment, fans le faire plonger beaucoup dans l’eau. Ces moyens font de deux efpèces; les uns ont rapport au corps du bâtiment, les autres à fa voilure : je vais les expliquer, ou rappeller ce que j'ai dit ailleurs à ce fujer. La forme la plus avantageufe qu'on puiffe donner au-deffous d'un navire pour qu'il tire peu d’eau & porte cependant bien la voile, eft, tous les marins le favent , de rendre dans cette partie la carène abfolu- ment plate. C’eft ainfi que j'ai fuppofé celle du naupotame. Ils favent auf que le navire porte bien mieux la voile quand les bords ont de la projection en dehors, que quand ils ont de la rentrée ; c’eft encore ain 222 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, que j'ai fuppofé les bords du nauporame, en imitant ce qui fe pratique pour les chebecks. SM J'ai employé encore une autre reffource dont les marins n’ont fourni l'idée. Ils mettent quelquefois une quille de fer fous leurs canots pour les rendre capables de porter plus de voiles ; à leur exemple, j'ai mis fous mon dernier yacht une quille afez large, peu haute, creufe & remplie d'une quantité confidérable de briques, bien arrangées , qui forment une mafle folide & confidérable de left, Cette efpèce de quille exécutée fous les naupotames , en augmenteroit peu le tirant d'eau, mais beaucoup la ftaLilité; parce que le left qu’elle contiendroit , defcendu jufqu'à l'eau, à l’épaifleur d'une planche près, feroit fitué de la manière la plus avantageufe pour faire defcendre’ le centre de gravité, Ce centre feroit defcendu encore plus bas ; fi on fubitituoir aux briques , des mafles de fer ou de plomb qui -euffent la même forme, & qu'on fubftituat encore à la planche qui les foutenoit dans mon yacht, une planche de cuivre, comme je l'ai fait faire dans quelques modèles, Tels font les divers moyens que je penfe qu'on pourroit employer pour compofëer la coque du naupotame, afin qu'il portâc bien la voile en tirant peu d’eau. À l'égard de ceux qui concour . roïent au même but & qui ont rapport à la voilure, comme je les ai fufifamment expliqués dans mes ouvrages, je ne les répéterai pas ici : je me conteñterai de rappeler que j'en ai defcendu prefque routes les vergues au niveau du pont, que j'en ai diminué en général le nombre & le poids; & que j'ai étendu beaucoup cette voilure à la pouppe & à Ja proue , pour en diminuer la hauteur fans en diminner la furface , afin de parvenir a tous ces moyens, à diminuer le moment de la voilure, & a defcendre le point vélique, J'ai dit dans cette Lettre que la forme du naupotame devoit être rapprochée de celle du vaiffeau long ; je penfe aufli qu'elle peut être, comme celle des bateaux les plus fimples qu'on voit fur les fleuves , com- pofée prefqu'entièrement , peut-être même entièrement, de plans droits. Ges plans, comme l'a pronvé M. Borda, quand .ils forment un angle ail détermine & qu’on peut facilement leur donner, peuvent être Éibitués fans défavantage aux courbes compliquées qui font à la proue des navires (1); & j'ai prouvé d'une autre part qu'ils feroient fubititués’ même avec avantage, dans toute la pe de la pouppe qui s'élève au deffus de la furface de l’eau , quand le bâtiment fait route au plus près (2), (1) Hifoire de l’Académie des Sciences, année 1767 , page $0z. (2) Navires des Anciens, page 502, &ce 3e KE SUR L'HIST. NATURELLE ET LES ARTS. 223 | OBSERVATIONS Sur les Encres anciennes, avec l'expofition d’une nouvelle méthode de reffaurer les écritures que Le tems a dégradées ; par M. CHARLES BLAGDEN , M. D. Séer, R.S. extrait des Tranf. Philof: D, NS un entretien que j'eus, il y a quelque tems , avec mon ami Thomas Aîtle, Ecuyer & Membre de la Société Royale, relativement à la pofhbilité de lire les anciens manufcrits , on demanda fi les encres quiéroient en ufage il y a environ huit cents ans ou mille ans, & qu'on trouve avoir confervé leur couleur d'une maniere très- marquée, étoient compofées d'ingrédiens différens de ceux qui ont été employés dans des temps poftérieurs , & dont la plûpart font devenus fi pâles & fi décolorés, qu'on peut à peine les lire. Dans la vue de décider certe queltion, M. Aftle me procura obligeamment divers manufcrits fur le parchemin & le velin, depuis le neuvième fiècle jufqu’au quin« zième inclufivement ; quelques uns étoient encore très-noirs , & d’autres étoient de différentes couleurs, depuis un brun jaunâtre foncé, jufqu’à un jaune très-pâle & dans quelques parties fi foible, qu’on pouvoit à peine l’appercevoir. J'ai fair des expériences fur tous ces manufcrits, avec des réactifs chimiques qui m'ont paru les plus appropriés à ce deffein , fur-tout avec les alkalis, foic fimples , foit phlogiftiqués , les acides minéraux & l’infufion de noix de galle, © IL feroit ennuyeux & fuperflu d'entrer dans le. détail de ces expé- riences particulières, puifqu’elles s'accordent toutes, un feul cas ex- ecpté, à faire voir en général que l'encre anciennement employée dans les manufcrits dont il eft ici queftion , eft de la même nature qué celle dont on. fait à préfent ufage; car les lettres perdoient avec les alkalis leur brun rougeâtre ou jaunâtre, devenoient pâles & s’oblitéroient enfin avec les acides minéraux délayés, & une soute de liqueur acide qui avoit fait difparoître, une lettre , fe changeoit en un bleu foncé ou en verd par l'addition d'une goutte d’alkali phlogiftiqué, Outre cela, les lettres prenoient avec l’infafien de noix de galle, une teinte plus ou moins foncée fuivant les divers cas. Il eft évident par-là qu'un des ingrédiens de l'encre étoit le fer qui étoic fans doute uni à l'acide vitriolique; & la couleur du manufcrit le plus parfait , qui offroit dans quelques lettres un noir foncé, & dans d’autres un noir pourpré, en- femble avec ie rétabliffement de cette couleur par la noix de galle, dans celles qui l’avoient perdue, prouve fuffamment qu'un autre des ingrédiens étoit une matière afringente, & l’hiftoire indique que c’éoit 224 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE; la noix de galle, Je n'ai découvert aucune trace de vernis noir d'au- cune efpèce; la-goutte d'acide qui avoit fait complettement difparoître une lettre, paroiffoit d’un pâle uniforme & d'une couleur ferrugineufe , fans qu'on y vit Aotter aucun atome de poudre hoire’ ou d'une autre matière étrangère. Quant à la plus grande durée, des encres les plus anciennes; il paroît réfulter de mes expériences, qu'elle dépend beaucoup:d'une meilleure préparation de la fubftance fur laquelle l'écriture étoit tracée, füur-tour le parchemin ou le velin, les lettres les plus noires étant en général celles qui répondoient à celui qui étoit le plus épais. On appercevoit ordinairement quelque degré d’effervefcence quand les acides entroient en contact avec la furface de ces vieux velins ; j’ai été cependant conduit à foupçonner que les:anciennes, entres contenoient une bien moiriäre proportion de fer que les modernes ; car en général la teinte de couleur produite par l'alkali phlogiftiqué mis dans l'acide qu'on laifloic au- deflus de. ces encres, fembloic. moins foncée, ce qui cependant peut dépendre en partie de la longueur du temps, pendant lequel elles: ont éré gardées ; & peut-être.on y employoit auf plus de gomme, il: eft poffible aufli qu'on y: ait fait pañler par-deflus ; quelque forte de vernis; qui für de nature à ne laiffer aucun luftre, ï : Un des échantillons ; qui me fut envoyé par M. Aftle, parut très- différent des autres. On me dit que c’étoit un manufcrit du quinzième fiècle, & les lettres en éroient ce qu'on appelle groffe- main pleine, angulaires , fans aucun trait délié , larges & très-noires ; aucuns des réac- tifs ci-deflus mentionnés n'ont pu y produire un effet bien marqué ; la plûpart d’entr'eux ont plutôt, paru rendre les lettres plus noires, pro- bablement en nétoyant -la furface , & les acides qu’on a fortement imprimés fur ces lettres, n’en contractoient point une teinte plus foncée avec l’alkali phlogiftiqué ; rien n’a paru attaquer & tendre à oblitérer ces lettres, que ce qui emportoit la furface du velin , & lorfque l'on appercevoit de petits rouleaux d'une matière fale ; il eft manifelte par conféquent , que le fer n'entroit point dans la compolfition de cette encre. Leur réfiftance aux menftrues chimiques , une apparence de grumeau qu'offroient ces lettres examinées de près, & dans quelques endroits un léger degré de luftre me font préfumer qu'il entroit dans leur compofition, une poudre noire , foit de füuie , foit de charbon & une huile; c'étoic probablement quelque chofe de femblable à l'encre dont fe fervent à préfent les Imprimeurs, & jai quelque foupçon que ces écrits avoient été réelléèment imprimés (1). Pendant que j'étois à réfléchir fur les, expériences à faire pour déter- (x) Un examen poftérieur d’une plus grande portion de ce manuftrit fuppofé, a montré que ç’efk une partie réelle d’un livre imprimé très-ançien, miner SÛR L'HIST. NATURELLE ET LES ARTS. 5; miner la compelition des encres anciennes, je crus qu'une des meilleures ‘méthodes peut être de reftaurer les anciennes écritures , devoit être ‘de joindre l’alkali phlogiftiqué avec les reftes de la chaux martiale, en ceque la quantité de précipité formé par ces deux fubftances, devant excéder beaucoup celle du fer feul , le volume de matière co- 1 P = lorante en feroit beaucoup augmenté, M. Bergman penfoit que le précipité bleu contient feulement entre le cinquième & le fixième de “on poids de fer; & quoique des expérienfces poftérieures tendent à faire “voir, que dans quelques cas, au moins la proportion du fer eft beau- coup plus grande , cependant il eft certain en général que fi le fec laiflé par un trait de plume étoit joint à la matiere colorante de l'al- kali phlogiftiqué , la quantité de bleu de Prufle, qui en réfulteroir, feroit beaucoup plus grande que la quantité de matière noire, primi- tivement contenue dans l'encre dépofée par la plume , quoique peut- être le corps de la couleur n'en füt pas également augmenté. Pour vérifier cette idée, j'ai fait les expériences fuivantes : L’alkali phlogiftiqué fut fortement appliqué fur l'écriture nue dans différentes proportions, mais avec peu d'effet. Dans un petit nombre de cas, cependant il donna une teinte bleuâtre aux lettres, & aug- menta leur intenfité, probablement dans les endroits où quelque chofe de nature acide avoit contribué à la diminution de leur couleur, Réfléchiffant que quand lalkali phlogiftiqué forme un précipité bleu avec Le fer, le métal eft ordinairement d’abord diflous dans un acide; je fus d’abord conduit à effayer ce qui réfulteroit de l'addition d'un acide affoibli à: l'écriture, outre l’alkali. Ce procédé remplit parfai- tement mon attente, les lettres tournant très-promptement à une cou- leur bleue foncée d'une grande beauté & intenfité; il femble peu im- ortant , relativement à la force de la couleur qui en provient, que l'écriture foit d'abord mouillée avec un acide, & qu'enfüuite on la touche avec l’alkali phlogifliqué, ou bien qu’on renverfe le procédé en commençant par l'alkali; mais pour une autre raifon, je penfe que ce dernier moyen eft préférable; car le principal inconvénient qui fe préfente dans la méthode propofée de rétablir les manufcrits, eft que la couleur s'étend fréquemment , & tache tellement le parchemin, qu'il n’eft plus pofibie de les lire; ce qu'on évite jufqu'à un certain point , quand on met d’abord l’alkali , & qu’on y ajoute par - deflus l'acide étendu dans beaucoup d’eau ; la méthode qui jufqu'ici m'a le mieux réui, a été d'étendre, avec une plume, l'alkali diflous, fur les traces des lettres, & de le toucher alors légèrement aufli près qu'on peut le faire au-deflus des lectres, avec un acide afoibli, au moyen d'une plume ou d’un morceau de bâton taillé en pointe émouflée. Quoique l'alkali n'ait occafionné nul changement fenfible de couleur, cependant au moment où l’acide vient s’y joindre, chaque trace d’une lettre tourne Tome XXXII , Part, I, 1788, MARS, FF 226 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, en même temps à un beau bleu (1) qui acquiert auf-tôt fa pleine in- tenfité, & eft fans comparaifon plus fort que la couleur de+la trace primitive n'avoit été. Si on applique alors le coin d’un papier brouil- lard, avec foin & adrefle près des lettres, de manière à pomper la li- queur fuperflue , on peut éviter en grande partie de teindre le par- chemin ; car c’eft cette liqueur fuperflue qui en abforbant une partie dela matière colorante des lettres, vient à tacher tout ce qu’elle touche. Il faut prendre garde de ne point mettre le papier brouillard en contact avec les lettres, parce que la matière colorante eft tendre quand elle eft humide, & peut être emportée. L’acide marin et celui que j'ai principalement employé ; mais les acides vitrioliques & nitreux réufliroient très- bien. Il faudroit fans doute les étendre d’une fi grande quantité d’eau, qu’on n'eüt pas à craindre la corrofion du parchemin ; après cette confidération le degré de force ne paroît pas être un objer de grande importance. La méthode qu'on met ordinairement en pratique pour reftaurer les anciennes écritures, eft de les mouiller avec une infufñon de noix de galle dans le vin blanc (2). Ce moyen eft irès-efficace, mais il eff fujec en partie au même inconvénient que l’alkali phlogiftiqué, qui eft de teindre la fubftance fur laquelle Pécriture eft tracée ; peut - étre qu'on l’éviteroit, fi au lieu de noix de galle , l'acide particulier ou toute matière qui développe le noir avec le fer, étoit féparé de la matière fimple aftringente , fuivant l’un des deux différens procédés, donnés par Piepenbring (3) & par Schéele (4). Il eft probable auñi w’on peut préparer un alkali phlogiftiqué plus adapté a cet objet que ne l’eft l’alkali ordinaire, comme en le rendant auffi exempt de fer qu'il eft poffible, en le délayant jufqu'à un certain degré, ou en fubf- (1) L’alkali phlogiftiqué (qui doit être confidéré fimplement comme un nom) paroït être compofé d’un acide particulier , en prenant le terme dans la fignification préfente la plus étendue , joint à un alkali. Maintenant la théorie du procédé ci-deflus me paroît fe déduire de ce que l’acide minéral par fa plus grande affinité avec lalkali chafle l'acide colorant (pruffique ) qui attaque alors immédiatement Ja chaux de fer & la convertit en bleu de Prufle fans la faire fortir de fa place. Maïs fi on met d’abord l'acide minéral {ur l'écriture, la chaux de fer ‘eft en partie diffoute & difpeffée par cette liqueur avant que l’acide pruffique fe combine avec elle. De-là vient que les’ bords des lettres font moins diflin@s & que le parchemin eff plus teint. Le développe ment foudain d’une ff belle couleur fur les fimples traces des lettres produit un fpeétacle amufant. (2) Voyez un procédé compliqué pour la préparation d’une pareille liqueur, dans Caneparius, de Aetramentis , page 177e G) Crell, Annal. 1786, B, I. pag. sr. (4) Kongt. vetensk, Acad; nya handlingar, tom. VIT, pag. 30. Poyez aufli Fexpoñitian que fait M. de! Morveau de:cçette fubflance dans fon Encyclopédie par ordre des matières, , ; . SUR' l’HIST. NATURELLE ET LES ARTS 227 tituant J'alkali volatil à l'alkali fixe. L'expérience pourra très-proba- ‘blement indiquer plufeurs autres moyens de perfectionner le procédé ci-deflus ; mais dans l'état préfent, je pen£e qu'il peut être de quelque utilité ,en ce que non-feulement il fait développer un corps prodigieux de couleur fur les lettres qui écoient auparavant fi pâles , qu’elles éroient invifbles , mais il a d'autres avantages fur l'infufon de galle, en ce qu'il produit fon effet immédiatement , & qu'on peut le borner aux° feules lettres qui ont befoin de ce fecours. HISTOIRE NATUREELE DES QUADRUPÈDES OVIPARES ET DES SERPENS ; Par M. le Comte DE LA CÉPÈDE, Garde du Cabinet du Roi, des Académies & Sociétés Royales de Dijon, Lyon, Bordeaux , Touloufe , Metz , Rome , Siockolm , Hef[e-Hombourg , Heffe-Caf]el , Munich, Gc. &c. tom. I, in-4°”. À Paris, hôrel de Thou, rue des Poitevins, 1788. Ex T'RALIAT, L E nom feul de quadrupèdes ovipares ,dit M. le Comte de la Cépède, en indiquant que leurs petits viennent d'un œuf défigne la propriété remarquable qui les diftingue des vivipares, Ils different d’ailleurs de ces > derniers en ce qu'ils n’ont pas de mammelles , en ce qu’au lieu d’être couverts de poils , ils font revêtus d’une croûte offeufe , de plaques dures , d’écailles aigues , de tubercules plus ou moins faillans ou d’une » peau nue, & enduite d’une liqueur vifqueufe. Au lieu d'étendre leurs » pattes comme les vivipares, ils les plient & les écartent de manière à > être très-peu élevées au-deflus de la terre fur laquelle ils paroiffent >» plutôt devoir ramper que marcher ». Nous ne pouvons mieux faire connoître cet Ouvrage intéreffant qu’en en préfentant la Table méthodique, 8 BE 8 4 A Premiere claffe. Quadrupèdes ovipares qui ont une queue. Seconde claffes Quadrupèdes ovipares qui n'ont point de queue. La première clafle eft divifée en deux grands genres ; 1°. les cortues qui ont le corps couvert d’une carapace ; 2°. les lézards qui ont le corps fans carapace, f Premier genre. Les tortues: elles forment deux grandes divifions, Tome XXXII, Part, 1,1788, MARS. Ft 2 228 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE; Premiere divifion. Les doigts très-inégaux & allongés en forme de nâgeoires. Tortue franche. Te/ludo mydas , Lin. Un feul ongle aigu aux pieds de derrière, T. écaille verte. Des écailles vertes fur la carapace. T. caouane. Tefludo carreta, Lin. Deux ongles aigus aux pieds de derrière. T. nalicorne. Un tubercule élevé fur le mufeau. T. carret. 7'efludo imbricata, Lin. Les écailles du difque placées au-deflus les unes des autres, commes les ardoifes fur les toîts. T. luth. Tefludo coriacea, Lin. La carapace de confiftance de cuir, & relevée par cinq arrères longitudinales. Seconde divifion. Les doigts très-courts & prefqu'égaux. T. bourbeufe. Tefludo lutaria, Lin. La carapace noire, les écailles îtriées dans leur contour, & pointillées dans le centre. T. ronde. Tefludo orbicularis , Lin. La carapace applatie & ronde. T. terapene. La carapace applatie & ovale. T. ferpentine, Tefludo ferpentina , Lin. La queue aufli longue que la carapace qui paroît découpée par derrière en cinq pointes aigues. T. rougeârre, Du jaune rougetre fur la tête & fur le plaftron. T. fcorpion. Tefludo fcorpioides , Lin. La carapace relevée par trois arrètes longitudinales. Les cinq écailles du milieu du difque très- allongées, le plaftron ovale. T. jaune, La carapace verte femée de taches jaunes. T. molle. La carapace fouple & fans écailles proprement dites, T, grecque, ou tortue de terre commune. Te/ludo græca, Lin. La carapace très-bombée , les bords très-larges , Les doigts recouverts par une membrane, ‘ T. géométrique. Tefludo geometrica , Lin. Des rayons jaunes qui fe réuniflent fur chaque écaille à un centre de la même couleur. T. raboteufe. Tefludo feapra, Lin. Les écailles de Ja carapace blan- châtres & préfentant de très-petites bandes noirâtres, celles du milieu du difque relevées en arrète, le plaftron feftoné par devant. T. dentelée, Tefludo denticulata, Lin. La carapace un peugn forme de cœur , les bords de cette couverture très-dentelés. T. bombée, Tefludo carinata, Lin. La carapace très - convexe, les écailles verdâtres, rayées de jaune, le plaftron ovale, -T. vermillon, Te/ludo puffilla, Lin. Les écailles de la carapace variées de noir, de blanc, de pourpre, de verdâtre & de jaune. T. courte-queue. Te/ludo carolina, Lin. La carapace échancrée par devant, les écailles de cette couverture bordées de ftries & pointillées dans le milieu. T. chagrinée, Le difque offeux &. chagriné. SUR L'HIST. NATURELLE ET LES ARTS. 229 T. roufsâtre. La couleur roufsâtre, la carapace applatie , les écailles minces. T, noirâwe La couleur brune noirâtre , les écailles épaifles & très-douces au toucher, Second genre. Lézards. Le corps fans carapace. Ce genre a huit divifions. Premiere divifion. La queue applatie. Cinq doigts aux pieds de devant, Crocodile, Lacerta crocodilus ; Lin. Quatre doigts palmés aux pieds de derrière. La couleur d’un vert jaunâtre. Crocodile noir. Quatre doigts palmés aux pieds de derrière. La couleur noire. M. Adanfon dit qu'il fe trouve au Sénégal, Gavial. Quatre doigts palmés aux pieds de derrière: les mâchoires très- étroites & très-allongées ; fe trouve aux grandes Indes, Lézard fouette-queue. Lacerta caudi-verbera , Lin. Cinq doigts palmés aux pieds de derrière. La dragonne. Lacerta dracona, Lin. Cinq doigts féparés aux pieds de derrière ; des écailles relevées en forme de crête fur la queue. Le tupinambis. Lacerta monitor , Lin. Des doigts féparés à chaque pied, les écailles ovales entourées de très-petits grains tuberculeux & non relevées en forme de- crête. Lézard fourcilleux. Lacerta fuperciliofa, Lin. Une arrète faillante au- deffus des yeux , des écailles relevées en forme de crète depuis la tête jufqu’au bout de la queue, La cêre-fourchue. Lacerta feutata, Lin. Deux éminences au-deflus de la tête. Le large-doigr, Lacerta principalis, Lin. Une membrane fous le col ; l'avant-dernière articulation de chaque doigt plus large que les autres. : Le bimalculé. Deux grandes taches noirâtres fur les épaules, Le filloné. Lacerta bicannuta, Lin. Deux ftries fur le dos : les côtés du corps pliflés & relevés en arrète ; le deflus de la queue relevé par une double faillie, Seconde divifion des Lézards. La queue ronde. Cinq doigts à chaque pied, & des écailles élevées fur le dos en forme de crête. Iguane. Lacerta iguana, Lin. Une poche fous le cou: des écailles relevées en forme de crête fous la gorge , & depuis la tête jufqu'au bout de la queue. ' Le baflic. Lacerta bafilicus , Lin. Une poche fur la tête. Le porte-crête. Une membrane très-relevée ; & ‘une forte de crête écail- -leufe au-ceflus de la queue, Le galeote. Lacerta calotes, Lin. Des écailles relevées au-deflous des ouvertures des oreilles, & depuis la tête jufqu'au milieu du dos : le deflus des ongles noir, 230 OBSERWATIONS SUR LA PHYSIQUE, L’agame. Lacerta agama, Lin. Des écailles relevées en forme de crête au-deflus de la partie antérieure du dos , celles qui garniffent le derrière de la tête tournées vers le mufeau, Troifieme divifion des Lézards. La queue ronde : cinq doifé aux pieds de devant; des bandes écailleufes fous Le ventre. Lézard gris. Lacersa agilis, Lin. La couleur grife, de grandes plaques fous de cou. < Lézard vert. La couleur verte, de grandes plaques fous le cou. Le cordyle. Lacerta cordylus , Lin. La queue garnie de très-longues écailles terminées en pointes allongées, & qui forment des anneaux larges & feftonés. + Lézard hexagone. Lacerta angulata, Lin. La queue préfentant fix arrètes crès-vives (1). L’améiva. Lacerta ameiva , Lin, La couleur grife ou verte fans grandes écailles fous le cou. £ Le lion. Lacerta fex-lineata , Lin. Trois raies blanches & trois raies noires de chaque côté du dos, Le galonné. Lacerta lemnifcata, Lin. Depuis fept jufqu’à onze bandes blanchâtres {ur le dos : les cuifles mouchetées de blanc, j Quatrième divifion des Lézards. La queue ronde , cinq doigts aux pieds de devant, fans bandes écailleufes fous le ventre, ASE Cameleon. Lacerta chameleon , Lin. Les doigts réunis trois à trois, & deux à deux par une membrane. La queue bleue. Lacerta fufciata , Lin. Cinq raies jaunes {ur le dos, la queue bleue. Lézard azuré. Lacerta agurea, Lin. Des écailles pointues, le dos bleu: Le grifon, Lacerta turcica , Lin. La couleur grife marquée de points roufsâtres; des verrues fur le corps. L'umbre. Lacerta umbra | Lin. Une callofité fous l'occiput : un pli fous la queue, - Le pliffé. Lacerta plica, Lin. Deux plis fous la gueule; deux verrues garniés de pointes derrière les ouvertures des oreilles. L'algire. Lacerta algira, Lin. Quatre raies jaunes fur le dos. Le ftellion. Lacerta flellio, Lin. Tout le corps garni de tubercules aigus ; la queue çouverte -d'anneaux dentelés. Le fcinque. Lacerta fcincus , Lin. Tout le corps garni d’écailles qui fe recouvrent comme -les ardoifes des coîts : la mâchoire fupérieure plus. avancée que l'inférieure. LR LAID EE CRE (x) Nous n’avons pas vu l'hexagone. Nous préfumons qu’il a des bandes écailleufes für le ventre, S'il n’en avoit pas, 1l faudroit le placer dans la quatrième divifion après le teguixin. Noce de PAuseur. - SUR L'HIST. NATURELLE ET LES ARTS. 231 Le mabouya. Tout le corps garni d'écailles qui fe recouvrent comme les __ ardoifes des toits; la mâchoire inférieure aufli avancée que la fupérieure ; la queue plus courte que le corps, Le doré, Lacerta aurata , Lin. Tout le corps garni d’écailles qui fe recouvrent comme les ardoifes dés toîts: une raie blanchätre de chaque côté du dos; la queue plus longue que le corps. Le tapaye. Lacerta orbicularis ; Lin. Le corps arrondi & garhi de pointes aigues, Le ftrié. Lacerta quinquelineata , Lin. Six raies jaunes fur la tête: cinq raies jaunes fur le corps. Le marbré. Lacerta marmorata , Lin. Des écailles relevées en forme de petites dents fous la gorge: le deflous des onglé noir; la queue relevée par neuf arrètes longitudinales, | Le roquet. La couleur de feuille-morte marquée de taches jaunes & noirâtres ; une petite membrane de chaque côté de l'extrémité des doigts. Le rouge-gorge, Lacerta bullaris , Lin. La couleur verte : un véficule rouge fous la gorge. Le goitreux. Lacerta flrumofa , Lin. La couleur grife mêlée de brun , ae poche couverte de petits grains rougeâtrés fous la gorge. Le tepuixin. Lacerta teguixin , Lin, Plufieurs plis le longedes côtés du corps. Le triangulaire. Lacerta nilotica , Lin. L'extrémité de la queue en forme de pyramide à trois faces. Le double-rayé. Lacerta punétata , Lin. Deux raies d'un june fale, & fix rangées de points moirâtres fur le dos. Le fputateur. De pe plaques écailleufes au bout des doigts (1). Cinquième divifion des Lézards. Les doigts garnis par-deflous de grandes écailles qui fe recouvrent comme les ardoifes des coîts. Le gecko. Lacerta gecko, Lin. Des tubercules fous les cuifles : de très- petites écailles difpofées fur la queue en bandes circulaires. Le geckotte. Lacerta mauritanica ; Lin. Le deflous des cuiffes fans tubercules. La tête platte. Le deffous du corps & de la tête très -applati, la queue garnie ‘des deux côtés d'une membrane. FRE aisés (1) Comme nous n’avons'pas vu la queuesbleue , l’azuré., le grifon, l’urhbre , ni le pliffé , nous pouvons feulement préfumer d’après les defcriptions des Auteurs que ces cinq lézards n’ont point de bandes écailleufes fous le ventre. S'ils en aYoient, 4 Faudroït les placer dans la troifième divifion à Ja fuite dù galonné, 232 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE; 4 4 Sixième divifion des Lézards. Trois doivts aux pieds de devant & aux pieds de derrière. Le feps. Lacerta feps, Lin. Les écailles placées les unes au-deflus des autres. Le chalcide. Lacerta chalcides , Lin. Les écailles difpofées en anneaux. Septieme divifion des Lézards. Des membranes en forme d’aîles. Le dragon. Draco volans , Lin. Trois poches allongées & pointues fous {a gorge. Huitieme divifion. Trois ou quatre doigts aux pieds de devant, & quatre à cinq aux pieus de derrière. La falamandre terreftre. Lacerta falamandra , Lin. La queue ronde, des raches jaunes marquées de points noirs. : $. à queue platte. Le palufiris , Lin. La queue garnie par-deflus & par-deflous d'une membrane verticale, S, ponctuée. Lacerta punétata , Lin. Deux rangs de points blancs fur le dos, S. quatre-raies. Lacerta 4-lineata, Lin. Quatre raies jaunes fur le dos. S. farroubé. De grandes écailles & des ongles recourbés au-deflous des doigts. S. trois-doigts. Trois doigts aux pieds de devant: quatre doigts aux pieds desderrière, Û Seconde claffe. Des quadrupèdes ovipares qui n'ont point de queue. Ils font divilés en trois genres , 1°. les grenouilles , 2°, les raines, 3°. les crapauds. Premier genre. Les grenouilles. La tête & le corps allongés : l'un ou l'autre anguleux. Grenouille commune. Rana efétlenta, Lin. L&æ couleur verte, trois raies jaunes’ Le long du dos : les deux extrémités faillantes. G. roufle. Rana temporaria , Lin. La couleur rouffe : une tache noïre de chaque côté entre les yeux & les pattes de devant, G. pluviale. Rana rubera, Lin. Des vérrues fur le corps: le deflous de la partie poftérieure parfemée de points. G. fonnante. Rana bombina , Lin. La couleur noire : le deffus du corps hérifé de points faillans 3 un pli tranfverfal fous le cou. G. bordée, Rana marginata, Lin. Une bordure de chaque côté du corps, G. réticulaire. Le des du corps veiné ; les doigts féparés, G. patte-d'oie, Les doigts de chaque pied réunis par une membrane, G. épaule armée, Rana marina, Lin. Un bouclier charnu fur chaque épaule: quatre gros boutons à la partie poftérieure du corps. G. mugiflante. Rana ocellata , Lin. Des tubercules fous toutes les phalanges des doigts. G, perlée. La tête triangulaire : de petits grains rougeâtres fur le corps. SUR L'HIST. NATURELLE ET LES ARTS. 23; G. jackie. Rana paradoxa, Lin. La couleur verdätre mouchetés , les cuifles ftriées obliquement par derrière. 4G. galonnée. Rana typhonia, Lin. Quatre ou cinq lignes longitudinales & relevées fur le dos. Second genre. Raïines. Le corps allongé: des pelottes vifqueufes fous Les doigts. Raïine verte ou commune. Rana arborea , Lin. Le dos vert : deux raies jaunes bordées de violet & qui s'étendent depuis le mufeau jufqu’aux pieds de derrière. R. boflue, Une boffe fur le dos. , R. brune, La couleur brune: des tubercules fous les pieds. R. couleur de lait. [a couleur blanche ou bleuâtre pâle ; des bandes cendrées fur le bas-ventre. R. flüceufe. Des taches rouges fur le dos. R. orangée. La couleur jaune ; le plus fouvent une file de points roux de chaque côté du dos qui eft quelquefois panaché de rouge. R. rouge. La couleur rouge: quelquefois deux raies jaunes le long du dos. Tfième genre. Crapauds. Le corps ramaflé & arrondi. Crapaud commun. Rana buffo, Lin, Un tubercule en forme de rein au-deflus de chaque oreille. C. vert. Des taches vertes bordées de noir , & réunies plufieurs enfemble. C. rayon vert. Des lignes vertes en forme de rayons. C. brun. La peau lifle: de grandes taches brunes, Un faux ongle fous la plante des pieds de derrière, G C. calamite. Trois raies jaunes ou rougeâtres Le long du dos. Deux faux ongles fous chaque pied de devant, C. Couleur de feu. Le dos d’une couleur olivâtre très-foncée & tacheté de noir. C. puñluleux. Des tubercules en forme d’épines fur les doigts : des . puftules fur le dos. C. goitreux. Rana ventricofz, Lin. Un gonflement fous ia gorge : les deux doigts extérieurs des” pieds de devant réunis. C. boflu. Rana pibbofa , Lin. Une bande longitudinale pâle & dentelée fur le dos qui eft convexe en forme de boffe. C. pipa. Rana pipa. La tête très-large & très-platte , les yeux très-petits & très-diftans l’un de l’autre. C. cornu. Rana cornuta, Lin. Les paupières fupérieures très-relevées en forme de cone aigu. - C. agua. Le dos gris femé de taches roufsâtres & prefque couleur de feu. C. marbré. Le dos marbré de-rouge & de jaune cendré ; le ventre jaune moucheté de noir. Tome XXXII, Part. I, 1788, MARS. Gg 234 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, C. criard. Rana mufica. Le dos moucheté de brun : les épaules relevées & très-poreufes ; cinq doigts à chaque pied, Reptiles bipèdes. Deux divifions. , Première divifion. Deux pieds de devant, Le cannelé. Des demi-anneaux fur le corps & fur le ventre, des anneaux entiers fur la queue qui eft très-courte. Ce reptile, qui rapproche beau- coup du chalcide , vient du Mexique. Seconde divifion. Deux pieds de derrière auprès de l'anus. Le sheltôpufik. Un filon longitudinal de chaque côté du corps, Les trous auditifs aflez grands : la queue au moins aufli longue que le corps, M. Pallas l’a trouvé fur les bords du Volga. « M. le Comte de la Cepède, difent MM. les Commiffaires de l'Académie des Sciences de Paris , »: fait connoître près de vingt efpèces dont >» aucun Auteur n’avoit fait mention , ou qui n’avoient été ni claflées , ni >» comparées avec foin. Il préfente en tout la defcription de cent treize » efpèces de quadrupèdes ovipares. . . , Cet Ouvrage nous a parwfait » avec autant de foin que d'intelligence. Il y a de la clarté & la » précifion dans les defcriptions ; les caractères des clafles, des genres &e > des efpèces font bien contraftés; la partie hiftorique eft faite avec >» difcernement : l’Auteur n’a pas négligé de rendre fon ftyle agréable, » pour donner quelqu’attrait à des détails faflidieux , & fouvent dégoütans > par la nature de leur objet. . . . Nous penfons que cet Ouvrage mérite » l'approbation de l'Académie ». es EE à — NOUVELLES LITTÉRAIRES. Nomrxer ATOR entomologicus , oder fyftematicher namenyer zeichnifs der bis jerzt bekauntge wordnen jorfelken : c’eflà-dire , le Nomenclateur entomologique , ou Catalogue [yflématique de tous les Infeëtes connus jufqua préfènt, publie par l’ Auteur de La defeription des Papillons d'Europe. Imprimé à Stralfund, chez Struik ; {e trouve à Leipüick & à Denau, dans la Librairie des favans , à Strafbourg, dans la Librairie académique, 1787 , petit 7-4°. de 67 pages. Prix, 36 fols, - Cet opufcule ef très-utile pour les progrès de l’Tnfeétéologie. Il ren- ferme une fynonimie complette des dénominations diverfes donnees à SUR L'HIST. NATURELLE ET LES ARTS. 235 tous les infectes. L'on y trouve auñli les découvertes faites fur cette fcience par l'Auteur. Pi Gefchifchte einiyer den menfcha , thieren der œconomie, &c. c'efl-a-dire, Hifloire des infeëtes nuiftbles à l'homme , aux animaux , & à l'économie rurale , avec les moyens de s'en préferver , traduite du françois en allemand, & augmentée de remarques , par M. GosTze. À Leipück, chez Weidmann & Reich, 1787 ,4n-8°. de 264 pages. Tous les noms ont été difpofés par le traducteur fuivant le fyftéme du Chevalier de Linné. M. Goetze a corrigé les erreurs de l'original , il a ajouté d’ailleurs de nouveaux remèdes, parmi lefquels quelques-uns paroiflent mauvais & inutiles. Beytraegs zur naturkunde und den damitz Verwandtem wiflen fchaften ; fonderlich den Botanick , Chimie, Haus-und haudw irthfchafc arzheygelarheit und Apothekerknart. Obfervations fur l'Hifloire-Naturelle, & les fciences voifines , favoir, la Botanique, la Chimie , l'Economie rurale & civile, la Médecine & la Pharmacie ; par M. FRÉDERIC EHRHARDT, Botanifle de Brunfwick-Lunebourp. À Hanovre, chez Schmidtz,, 1787 , in-8°, de 192 pages. Première partie. Ces obfervations avoient déjà paru dans le Magafn de Hanovre. M. Ehrhardt a eu raifon de les rafflembler & de les faire imprimer à parts Celles qui font contenues dans cette première partie, concernent princi- palement la Chimie & la Botanique. Elles font vraiment intéreflantes & méritent d'être lues. Programme de L Asademie des Sciences, EPP) &. Arts de Lyon, 1787. Diflribution des Prix, L'Académie en avoit trois à diftribuer après la fète de Saine Louis, en 1787. Les papiers publics ont rendu compte des motifs qui l'ont obligée de différer cette diftribution juiqu'à la féance publique de fe rentrée après les féries. Elle s’eft tenue le 4 Décembre dernier , & l'Académie y a procédé à la proclamation des prix. Elle avoit propofé , pour celui de Mathématiques , qu’elle devoit décerner en 1784, le fujet fuivant : 1°. Expofer les avantages & les inconvénients des voûtes fur- baiffées , dans les différentes conflru&ions , foit publiques , foit. parti. culières , ot l'on efl en ufage de les employer. Tome XX XII, Per. 1, 1738. MARS. Gg 2 236 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, 2°, Conclure de cette expofition, s'il eff des cas oi elles doivenz préférées aux voütes à plein-ceintre , & quels font ces cas. 3°. Déterminer géométriquement quelle feroit la courbure qui leur donneroit moins d'élévation | en leur confervant la folidité né- ceffaire. L'Académie déclara, à cette époque, qu'elle avoit reçu quatre mé- moires qui méritoient des éloges, mais que n'étant pas pleinement fa- tisfaire , elle s’écoit décidée à continuer le fujer à l’année 1787 , & à doubler le prix, confiftant en une médaille d’or, de la valeur de 300 liv. L'Académie s’eft félicitée d’avoir pris ce parti. Elle a admis au nou- veau concours, onze mémoires très - eftimables, chacun en quelques parties; de forte que l'ouvrage complet qu'elle eût defiré , fe trouve à-peu-près compris dans ces divers mémoires ; mais elle ne peur fe difpenfer d'annoncer qu'aucun en particulier n’a rempli pleinement fes vues : néanmoins elle a jugé deux de ces Ouvrages fupérieurs aux autres, & également dignes d'être couronnés, favoir : Le mémoire, côté N°. 7, fuivant l'ordre de fa réception , ayant pour -devife, e& nafcitur ex fabricä & ratiocinatione. L’Auteur eft M. Rondelet, Architecte, Infpecteur des travaux de la nouvelle Eglife de Sainte Geneviève, à Paris. Et le mémoire N°, 9, portant pour épigraphe, ur profim & amer, dont l’Auteur eft M. Griffe de la Beaume , Ingénieur des Ponts & Chauflées, à Montbrifon. “ L’ Acceffir a été décerné au Mémoire, N°. 17, Ufus & erudirjo pa- rèter Architeëtis neceffarit. Nota. Par des conftdérations particulières & une délibération expreffe, l'Académie a arrété que le billet cacheté de ce Mémoire, ainft que les billets cachetés de tous ceux qui , dans la fuite, feroient dans le cas de mériter des Acceffit, ne feroient point ouverts pour y voir les noms des Auteurs, mais feulement refervés , pour ne lever Les cachets, qu'à leur demande, lorfqu'ils defireroient d’être connus & nommes. Enfin l'Académie a décidé qu'il feroit fait une mention honorable & particulière des Mémoires du même concours, côtés N°, 2, {nventæ perficere non inglorium ; N°. $, Ariis 6 ingenit auxilio, monumentis publicis, vis interna datur ; & N°. 20, Wis unita fortior. L'Académie, à la prière d'un Citoyen, aufli éclairé que zélé pour L: SUR L’HIST. NATURELLE ET LES ARTS. 237 le bien public, propofa, en 178$ , un prix de 600 liv., dont il fit les fonds , fur cette queftion : Les Voyages peuvent-ils être confidérés comme un moyen de per- feétionner l'éducation. d Vinet-cinq difcours, fur ce fujet, ont été envoyés au concours. Le q î Job Rte lus erand nombre admet l’affirmative ; slufieurs cependant regardent 8 Fr P Le les voyages comme dangereux pour la jeunefle, dans l’étar actuel ya UE P SET RES Me o2 des mœurs. Les premiers ne s'atrachent ouère qu'à prouver Putilité des voyages bien faits ; ils oublient trop fouvent d’examiner , s’ii eft poffible ordinairement de les bien faire à cet âge : c’étoit le véritable objet de la queftion. Le prix a été décerné au Mémoire, côté N°. 10, qui expofe avec énergie, l'abus & les dangers des voyages entrepris dans la jeunefle. Les deux devifes de lAuteur viennent à l’appui de fon opinion : riex r'eft beau que le-vrai. Boileau. I! ne füuffit pas, pour inflruire, de voër du pays, il faut favoir voyager. Roufleau, Emile, L’Auteur eft M. Turlin, Avocat au Parlement, à Paris. L'Acceñit a été donné au mémoire N°. 22, Ouvrage plein d'idées , de lumières & de vues fages, en faveur des voyages de Ia jeuneffe ; fon avis ett également étayé de deux grandes autorités : il a pour de- vife, ce paflage de Bacon : Pereorinatio in partes exteras , in ju- nioribus pars inflisutionis efl ; & ces mots de Montaigne, le com- merce des hommes efl merveilleufement propre à l'éducation , & la vifite des pays étrangers, L'Académie a arrêté, en même-tems, qu'il feroit fait mention de quatre autres Mémoires, qui lui ont paru mériter des éloges, favoir : le N°. 14, Cælum non animum mutant | qu? trans mare currunt 3 le N°. 16, demeure en ton pays, par la nature inftruit , La Fontaine; & certe autre devife, tirée des Epitres de Séneque : Quamdiu quidem nefcieris quid fupgiendum , quid petendum , quid neceffarium , quid Jupervacuum , quid juflum , quid honeflum fie, non erit hoc peregri- nari, fed errare. Le N°. 24: Natura inchoat ; & le N°. 25 : Verfar nos & præcipitat traditus per manus error ; tk perimus exemples , Senec. De vit. bear. Ce dernier Difcours , écrit en italien, n°eft arrivé que long-tems après le terme aflipné, & n'a pu être admis au con- cours; M. l'Abbé Idelphonfe- Valdaftri de Modene, à qui l’on dair un cours théorique de Logique & de Langue Italienne, très -eftimé , s’en eft déclaré l'Auteur, é 233 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, Sujets propofés pour l'année 1788. Pour le prix de Phyfique de la fondation de M. Chriftin, qui fera double , l’Académie, après avoir couronné un favant Mémoire qui a démontré Les dangers évidents qui réfultent de la mixtion de l'alun dans Le vin , defirant la folution complette d’un problème qui lui paroît de la plus grande importance pour le bien de l’humanité, a propofé le fujet qui fuit : Quelle efl la manière la plus fimple, la plus prompte & la plus exade, de reconnoître la préfence de l’'alun & [a quantité, lorfqu'il efl FOR TiOE dans le vin, Jur-tout dans un vin rouge trés- colore { Le prix confifte en deux médailles d’or, chacune de 300 liv. & fera délivré en 1788 , dans une féance publique de l’Académie après la fête de la Saint-Louis. Les Mémoires ne feront admis au concours que jufqu’au premier avril de la même année, le terme étant de rigueur. On demande des expériences conflantes, fimples & faciles à ré- péter. L'Académie, pour les prix d'Hifloire naturelle, fondés par M. Ada- moli , a demandé : Quels font les différents infe“es de la France, réputés venimeux ? quelle eff la nature de leur venin? quels font les moyens d'en arrêter les effets ? Les Auteurs , en annonçant les infeétes qu’ils voudront défipner , en détermineront le genre & Pefpèce. On leur demande effentiellement de nouvelles recherches & des ex- périences. À Les conditions comme ci-deflus. Les prix, confiftant en une mé: daille d'or, de la valeur de 300 liv. & une médaille d’argent, frappée au même coin, feront décernés en 1788, après la fête de Saime- Pierre. La même année, l’Académie"diftribuera | extraordinairement , le prix double qu'elle a référvé, concernant /es arts ; elle a propofé le fujet fuivant : Fixer fur les matières végétales ou animales, ou fur leurs riffus ; en nuances également vives & variées , la couleur des Lichens, & fécialement celle que produit l'Orféille , c’efl-à-dire , teindre les ma- tiéres végétales ou animales, ou bien leurs tiffus , de manière que les couleurs qui en réfulreront , notamment celles que donne l'Orfeille , puiflent étre réputées de bon teint. On demande que les procédés de teinture & ceux d'épreuves foiens SUR L'HIST. NATURELLE. ET LES ARTS. 239 accompagnés d'échantillons, tels qu'on puiffe inferer de leur état de comparaifon , ce que telle ou telle couleur & telle ou telle nuance, peuvent Jupporter de l’aëion de l'air ou des lavages. Nota. Les concurrents, qui voudront répéter leurs expériences , en préfence des Commiflaires de l'Académie , y feront admis, après avoir dépofé leurs Mémoires au concours, Les autres conditions , fuivant l’ufage. On diftribuera après la fête de S. Louis, le prix double, qui confifte en deux médailles d'or, de la valeur , chacune, de 300 liv. Sujets propofés pour l'année 1789. En l’année 1789, l’Académie doit décerner le prix des Arts, fondé par M. Chriftin. En 1771 , elle avoit partagé une couronne entre deux Mémoires fur la maniére de durcir les cuirs 3 elle annonça alors que Jon objet étoit d'encourager les recherches qui tendent à perfec- tionner, en France , l'art du Tanneur ; prenant, de nouveau, cet objet en confidération, elle propofe le fujet fuivant : Trouver Le moyen de rendre le cuir imperméable à l’eau , fans altérer [a force ni fa foupleffe , & fans en augmenter Jenfiblemens Le prix. | Le prix confifte en une Médaille d'or de 300 liv.; il fera diftribué , après la fête de S. Louis, en 1789, & les Mémoires ne feront admis au concours, que jufqu'au premier Avril de la même année, Les autres conditions, comme ci-deflus, A la même époque, & fous les mêmes conditions, l’Académie ad- jugera le prix de 1200 liv., dont M. PAbbé Raynal a fait les fonds. Elle propofe le fujet pour la quatrième fois , & dans les mêmes termes : La découverte de l’ Amérique a-t-elle été utile ou nuifible au genre humain ? S'il en réfulte des biens, quels font les moyens de les conferver & de les accroître ? Si elle a produit des maux, quels font les moyens d'y remé- dier ? L'Académie n’admettra au concours, que les nouveaux Mémoires qui lui feront adreflés, avant le premier Avril 1789 , ou de nouvelles copies des anciens , avec les changements que les Auteurs jugeront con- venables, Lo, © BSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, &c: TAB; L,E Des ARTICLES CONTENUS DANS CE CAHIER. M: OIRE fur l'Indigo & [es diffolvans ; par M. JEAN-MicHez HauUssMANN , à Colmar, page 161 Second Voyage minéralogique, fait en Auvergne; par M. MoNNET, 1 Réponfe de M. le Baron DE MARIVETZ , à M. ROMÉ DE Due 200 Lettre de M. Guicou, Chirurgien-Major des Vaiffeaux de Guerre de la Nation Françoife, à M, DE LA MÉTHERIE, 208 Lettres de M. Davin LE Roy, à M. FRANKLIN , fur la Marine , & particulièrement Jur les moyens de perfeëionner la Navigation des Fleuves, 209 Obfervations fur les Encres anciennes , avec l'expofition d’une nouvelle méthode de reflaurer les écritures que le tems a dégradées ; par M. CHarLes BLAGDEN, M. D, Sécr. R. S. extrait des Tranf. Philofon. 223 Hifloire Naturelle des Quadrupèdes ovipares & des Serpens ; par M. le Comte DE LA CEPÈDE, Garde du Cabinet du Roi, des Académies & Sociétés Royales de Dijon, Lyon, Bordeaux , Touloufe, Metz, Rome, Stockolm ; Heffe- Hombourg, Heffe- Caffel, Munich, &c, &c. s 227 Nouvelles Lorréraires ; 234 PAPPIPNRNOPREACTEROEN. Jar lu , par ordre de Monfeigneur le Garde des Sceaux, un Ouvrage qui a pour titre: Obfervarions fur La Phyfique, fur l’Hifloire Naturelle & fur les Arts, &c. par MM. Rozier, MoNcez le jeune & DE LA METHERIE, &c. La Colleétion de faits importans qu'il offre périodiquement à fes Lecteurs, mérite l’attention des Sa- vans ; en conféquence , j'eftime qu’on peut en permettre l’impreffion. À Paris, ce 22 Mars 1788. k VALMONT DE BOMARE, MIS Er 27 Dilgence de Parur au Havre et a Londres . Mars 1768 | | F 1e, 248 - à HT , ‘ LME FPS ni 4, 1 h us k k RU Q .. } ñ ere 4 \ ñ Ï M à f } à A "Jo ë A \ | % d k à # = % " art ‘ ‘ LT 3 \ 1 { 1 } PA 4 "HA f } ; | ALES ets \ F9 Le sr à PEUR D ce, de Let il . (PR | He! SN 24e 5 er ARTE F F + at LENS PPPUILEE CL 5 CIRE Er TON ENT Là D 4 re BE ï h # Diigence d Orleans à Nantes. Mars 1788. DE Cp A a A TA, : . n de = à 1 NU vs NE SE ; 4e % À ; al Li Ü LOT se Ts me _ DL encens, sum ce nn S Du pe mue mme ES | JOURNAL DE PHYSIQUE. | AVRIL 1788. LR ]# RÉ = 7 RE GUN L'EUTT RE D Ed Mile ReOaUrS T3 AENESs D'AR CET: Mowsisur, La poffbilité de l'acide phofphorique dans les minéraux étoit fufi- famment démontrée par la découverte de M. Gahn 3 mais quand nous n’euffions pas eu à lui oppofer la rencontre des os fofiles, & autres débris de matière organifée , le droit que nous nous fommes arrogé d'ac- corder à chacun des regnes de la nature un privilege pour produire exclufivement telle ou telle fubftance , nous eût-encore offert de nouveaux retranchemens contre cette poflibilité. Il falloi: donc pour difliper toute efpèce de doute, quelque chofe de plus décifif que les mines de plomb phofphorique ou de fer limoneufe…., La terre ou le phofphate calcaire fe préfente ici par montagnes , pour conftater fans retour la propriété du 4 regne minéral fur cet acide, En effet, découvert une fois dans le domaine des minéraux, il falloit bien s'attendre à cette nouvelle combinaifon comme à toutes les autres, tant foit peu durables de cet acide. Je l’avois déjà préfenté dans une note fur le mémoire de M. Wiegleb, C’eft à ceux qui parcourent les montagnes & les mines à le pourfuivre fans relâche , afin de le fur- prendre dans quelqu’autre de fes unions moins difpendieufes à rompre . que celle du phofphate calcaire. Mais pour épier avec fuccès les unions patives de cet acide comme de bien d’autres, il manque prefque toujours eux voyageurs minéraloyiftes d’être aflez familiers avec l’afpect ou les traits de celles que l’art imite dans nos laboratoires. Préfidées par les mémes loix , les unes & les autres font toujours des alliances de choix & de proportions; elles emportent néceflairement des traits de ref- femblance, qui prémuniroient de fignalements heureux pour rechercher Tome XX XII, Part. 1, 1788. AVRIL. Hh 242, OBSERVATIONS SUR LA.PHYSIQUE, enfuite ces unions natives, au travers des mêlanges qui les déguifente Ici les copies aideroient infailliblement à reconnoître les originaux. Il feroic difficile de bien crayonner l’afpect de cetté pierre; elle a comme tant d’autres, dont l’aggrégation eft en défordre, un air, un je ne fais quoi que les defcriptiôns lytographiques ne rendent guère. Comme elle indique fous la dent une dureté affez femblable aux feld-fpaths feuilletés , je la pris d’abord pour une de fes variétés | voyant d’ailleurs que le toucher des acides n’y faifoit pas d'impreflion appa- rente. Cette pierre eft blanchâtre , uniforme, aflez denfe, mais pas aflez dure pour étinceler avec l'acier, elle fe préfente par couches fré- quemment entre-coupées d’un quartz pur & fain , & ces couches offrent un entaflement de filets verticaux applatis & ferrés; quelquefois in- clinés de manière à préfenter çà & là quelque chofe de cunéiforme dans leur arrangement. Ces couches toujours horifontalement placées fur le quarz, portent l'empreinte manifefte d’une criftallifation aqueufe, qui ne peut appartenir à l’ancien travail de la nature, La collection que j'en attends, nous fournira fans doute dans des fratures ou cavités, quelques criftaux aflez dégagés des mafles pour qu'on puifle en afligner la forme; & l’on verra pour la première fois cette figuration primitive que l’art n'a point encore reconnue dans ce fel pierreux. M. Bowle la rapporta de fon voyage d'Eftramadure, & M. Davila la plaça au Cabinet du Roi parmi les pierres phofphoriques. Voici ce qu'en dit le premier (1) : « De-là on va à Logrofan , village > fitué au pied d’une cordillere qui court du levant au couchant, & » qu'on appelle la chaîne de Guadeloupe; au fortir de ce lieu, on æ découvre une veine de pierre phofphorique , qui traverfe lé chemin » royal, obliquement du nord au fud. Cette pierre eft blanchâtre, » fans faveur, & fa poufliere répandue fur la braife , donne une famme > bleue fans aucune odeur >», *., La qualité qui a le plus mérité l'attention à cette pierre, eft une intenfité de phofphorefcence fi remarquable, qu’elle eft devenue l'objet de curiofité le plus en vogue dans la province d'Efpagne où elle fe | 22212 DORE 22 2. CRE EAN LT ARE C DARURS RO (1) Page 60 de l'édition de Madrid. L'Efpagne doit au zèle de M. le Chevalier d’Azara une feconde édition qu’il a enrichie de notes puifées dans l’érudition la mieux choifie & les connoiffances les plus récentes de l’Hiftoire-Naturelle & de la Chimie, 11 rappelle à FPufage préfent cette nomenclature des fubftances naturelles que Ja langue efpagnole avoit reçue de celle des arabes, bien avant que les autres peuples de l’Europe fongeaffenr à ’aller chercher dans les ?langues grecque & latine, Il fait remarquer que les anglois ne pouvoient mieux montrer l’eflime qu'ils font de J’ouvrage de Bowle qu’en copiant à l’entier la partie de l'Hiftoire-Naturelle, comme on peut le voir dans le Sravels rrought fpain, &c. By John Talbot Dillon. . London, 1780. Ouvrage donné pour un travail neuf, tandis qu’il n’eft au fond que le voyage de Bowle compilé , commenté , & traduit prefque par-toute 4 SUR L'HIST. NATURELLE ET LES ARTS. 243 trouve. Quand on la feme fur des charbons ardens, elle ne décrépite pas, mais s’embrâfe tranquillement d’une fuperbe lumière verte qui la pénètre, la parcourt, & ne s'enfuit qu'avec la lenteur néceilaire pour donner tout le temps d’en admirer l'éclat. A cette propriété, on avoit cru reconnoître en elle une variété de fpath-fuor. Si l’on compare la lumière de ce phofphate naturel, à celle du fpath-fluor , en projettant leur poudre mêlée fur une braife un peu obicure, pour ne pas trop précipirer les phénomènes , on diftingne que celle du fpath-fluor eft bleue, moins avivée, plus fugitive que l’autre, & tandis qu'on s’amufe à confidérer les nuances de ces feux devenus par leur oppolition fort agréables à voir, il eft impoñible à l'odorat d'en faifir aucun effluve odorant. Je n’étois pas à même de la com- parer à la lueur du fpath pefant calciné ou de la pierre de Boulogne ; mais elle me fembloit nuancée au ton de la lumière du ver-luifant. La diffipation lente de fa lumière me fit penfer à fon eau de crif- tallifation, & ayant tenu cette pierre brûlée plus & moins de tems dans l'eau, la chaleur des charbons ne la ranima point. Elle fort du feu légèrement avivée, & fans avoir perdu de fa dureté. Les os des animaux , s’il étoit facile de les dépouiller complette- ment de toute mucofité fans le fecours du feu, fi l’activité de la machine de Papin alloit aflez loin pour les amener au point de ne plus noircir fur les charbons ardens , ce phofphate, calcaire, je veux dire, également formé par la nature, auroit peut - être la faculté de luire comme celui de nos montagnes ; peut-être aufli la chimie réuf- Gira-t-elle à imprimer au phofphate calcaire artificiel, certe phofpho- refcence , ce cachet de lumière avec lequel la nature femble avoir voulu diftinguer fon ouvrage des contrefactions de l’art, Pour attaquer cette pierre au chalumeau , il faut la chauffer à blanc fur le plus délié d’une pointe ; alors elle coule en émail blanc fans bourfouflure. Ceramoliffement nous offre déjà la préfomprion d'un prin- cipe de fufbilité plus abondant que dans les os, L’ivoire foilile, les arêtes de poiflons , les os de mouton, la corne de cerf, qui ne fléchiffent point au chalumeau, montrent à peine le foupçon de fufbilité au plus grand feu de porcelaine, comme on le voit dans les mémoires de M. d’Arcer. Cependant on verra bientôt que ces matières offeufes ne contiennent pas mins d’acide phofphorique que cette pierre. D'où viendra donc cette différence ? Le defir de connoître le rang qu’elle occupera bientôt dans l’hiftoire des minéraux , m'a conduit à quelques eflaiss Comme je ne jouis pas encore de mon laboratoire, mon but a été d’entrevoir feulement {es principes généraux , & non de la foumettre aux rigueurs de l’analyfe. Voici ce, que l'application de deux acides m'a fait découvrir. L'acide nitreux ordinaire, l’eau forte diflout cette pierre à la .ma- Tome XX XII, Part. I, 1788, AVRIL, Hh 2 244 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, nière des os calcinés, c’eft-à-dire avec aflez de chaleur, & par con féquent avec un dégagement de fluide très - médiocre. La diffolurion eft un peu gélatineufe | mais le repos léclaircit & en fépare une- poudre toute filiceufe qui forme = de la pierre. L’acide vitriolique verfé- dans cette diflolution, en précipite une félénite abondante. Les la- vages de ce précipité , débarraflés par le rapprochement de leurs crif- tallifations ‘ordinaires de félénite , finifent par une liqueur firupeufe , femblable à celle que donnent les os décompofés par ces deux acides combinés. Ce fut alors que je comimençai de foupçonner l'acide: phofphorique. Mais pour obtenir un produit plus grand que celui de l'expérience précédente, j'appliquai immédiatement l'huile de vitriol à quatre onces de ce fpath, réduit en poudre & mouillé. La félénire fe forma, le produit de fes lavages évaporé au bain- marie dans un plat de por- celaine, ne différa point de celui qu'on retire des os des animaux. Je le fondis aufli-tôt dans un creufet bien recuit & pefé; & comme fi j'eufle eu affaire à des os calcinés, la mañle prit en fe bourfouflant & fe fondant une couleur noire charboneufe qui ne ceffa qu'avec les élan- c2mens de flamme verte, .que le verre offeux laifle échapper en fe dé-- purant. Ce verre devenu blanc & tranfparent, pefa $ gros net. En reftituant à ces quatre onces de poudre de pierre pure, pour- Li remplacer la poudre filiceufe qui s’eft féparée dans cette proportion ., ce produit de verre fera plus fort; mais fi d'autre parc on lui ôte un gros pour la félénite qui comme on fait, l’accroît de beaucoup, on aura pour produit moyen un gros de verre paronce , de ce phofphate- pierreux ou deux onces pour livre, ce qui eft approchant la quantité: généralement trouvée dans la corne de cerf , les os de bœuf , de mouton & autres. IL fembloit fuperflu d'en extraire le phofphore ; afin cependant d’é- viter les méprifes où l'analogie peut entraîner, il falloic s'en rendre- compte, Deftitué de cornues & fourneaux, j'ai eu recours à un ex- pédienc vétilleux fi l'on veut, mais dont le réfultat n’en a pas moins furpaflé. mon atrente. A la flamme du chalumeäau j'ai façonné en rerorte: l'extrémité d’un tube à bougie phofphorique qui me tomba fous la main , il avoit deux lignes de diamètre fur trois à quatre pouces de long. J’y verfai'à l’aide d'une petire lame de baleine trois à quatre grains d’un mélange finement broyé de charbon & du verre ci-deflus, buit à dix minures de chaleur rouge donnée par le chalumeau à cet embrion de cornue-, fuffrent à faire partir le phofphore. Le gaz phof- phorique , la lumière , l’enduit ocreux acide , tout s’y développa d'une manière bien frappée, comme M. le profefleur Chabaneau & d’autres: perfonnes en furent témoins. Deux circonftances, c'eft qu'il faut fe renfermer avec {a bougie dans l'obfcurité ,. & quand l'odeur s’annonce , SUR L'HIST. NATURELLE ET LES ARTS, 24ÿ on’en ferme de tems en tems le tube avec le pouce, puis on le porte fous la table ou à l'abri de la lumière. J'ai répété ceci plufñeurs fois avec le même fuccès, c'efl, comme on voit, un travail très - abrégé pour s’ailurer qu'un verre contient réellement l'acide du phofphore. Tel eft le petit nômbre d'expériences quê j’aï pu tenter, Cette pierre admettra peut-être dans fon aggrégation quelques élémens-étrangers à Ja combinaifon principale , tels que de l'acide Vitriolique, magnéie, terre pefante, & de l'argile qui vraifemblablement aide avec Pacide phof. phorique à fa fufñbilité ; des recherches ultérieures nous en infor- meront , comme de fa pefanteur fpécifique , fa folubilité dans l’eau &: autres qualités qui complecteront les connoiflances qui reftent à acquérir fur elle. 5 Un (e Je ne doute point que cette pierre mieux connue dans la fuite, ne puiffe remplir beaucoup d'objets d'utilité. La verrerie, la porce- laine, les poteries dures pour la coüverte ; & d’autrés enfin que le temps & l'expérience dirigée dans ces vues pourront découvrir. Si les mines-de plomb & d'argent qui fe trouvent dans les contours du dif- tri de cette pierre , au rapport de M. Bowle, fe travaillent un jour, elles auront fous la main la verre ‘à Coupelle. que l'éloignement des: villes rend quelquefois difficile à raffembler. On trouve cette pierre non par veines, mais par collines entières: aux environs du village de Loorofan , dans la Jurifditton de TFru- xillo , province d'Eftramadoure. Les maifons & les murailles d'enclos: en font bâties; un coup d’œil fur la fituation de ces collines , leur entablement , leur bafe, leur rapport dans'le fyftême de celles qui les environnent , eût été plus intéreffant que des conjectures. Ne pré- voyant pas le tems 6ù il me fera permis de les parcourir, je n'aurai de fi-tôt même des apperçéus à vous offrir, Je mirai pas non plus rechercher l'acide phofphorique de ces mon- tagnes plus loin qu’on a été pour expliquer l'acide vitriolique des plâtres. Ces montagnes nouvelles ne pouvant être que l'ouvrage des eaux , il eft à préfumer qu’elles auront pris leur afliette fur des fonds calcaires, & qu'ellés’appartiéndront comme les’ plâtres , aux travaux récens de la nature. Dés puits, des raVins, des coupures , offriront un jour” à ceux qui les_ étudieront , quelques veftiges où monuments propres à nous révéler le problème & l'époque de leur formarion, Quand les caradtères extérieurs de ce’ nouveau fpatlr auront été rendus familiers aux lirhologiftes , ils le découvriront fans doute dans plufeurs points de PEurope: L’Efpagne, bién qu'elle renferme dans: l'étendue de fa péninfule tous les-trélors (n--de He minéralogie, ne: EL ; r7 2 ui Gl +: 1 2H07 2 : cree * . (x) On a découvert d'immenfes quantités de volfram dans un domaine de 246 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, fera pas l'unique endroit du globe où la nature aura placé ce nouveau genre ; & l'acide phofphorique loin d'être pris pour un transfuge échappé des corps organifés, fera enfin reconnu comme production légitime du regne minéral, & comme occupant fur la furface de la terre, autant de combinaifons , autant de terre calcaire tout au moins que l'acide vitriolique. Je -dois la première connoïffance de cette pierre, ainfi que les échan- tillons que jai employés dans mes expériences, à M. Bueno , très- habile apothicaire de cette capitale , le premier qui y ait étabii les travaux en grand de la chimie pratique avec un fuccès digne d’en- couragement. Sur le Salpêtre de Madrid. Si l'Efpagne ne recueilloit de falpêtre que ce qui en eft produit par fa putréfaction , il feroit alors bien rare & bien précieux. La nature ne paroît point ici appeller les gaz putrides & inflammables au tra- vail de ce fel, & celui que la putréfation peut former , n’eft au fal- pêtre créé par les autres moyens de la nature, que comme le foufre de la putréfaction eft à celui des volcans. 1 : Le falpètre de Madrid n’a pas befoin de longs rafinages, fes criftal- lifations ne font point embarraflées de fels terreux comme celui qu'on prépare aux environs de Paris. Ses eaux mères ne préfentent que du felfébrifuge & en dernier reflort du tartre vitriolé , done-les crif- taux font des prifmes quadrangulaires , comme nous l'avons remarqué plufieurs fois M. Fernandès & moi. Je rechercherai dans la fuite quelle caufe peut ainfi modifier leur configuration. : . è Le travail de M. Lavoifier fur certe matière , apprend que ce tattre vitriolé doit exclure les fels à :bafe terreufe. L'affluence du premier détruit les autres à mefure qu'ils paroiflent. De-là ces énormes dépôts de félénite, qui entraînant, du tartre vitriolé pendant l'éva-, poration , forment ces encroûtemens à demi fondus qu'on n'enlève qu'avec danger pour les chaudières. . L'expérience & l’économie fe réuniflent pour enfeigner qu'il. faut, faturer les lavages de tout le- falpètre qu'elles peuvent prendre ,. en les repaflant {ur de /nouvelles terres. Ici au contraire on eft dans l'opinion qu’ils s'appauvriroient par ce procédé. De-là la néceflité où l'on fe met d’évaporer des océans d’une leffive qui marque à peine fur la langue ; méthode dévorante qui engloutiroit à la fin tous les combuftibles de l'Europe, fi la fagefle dû miniftére ne fe propofoit den. arrêter le cours. lEftramadure appartenant à M, le Marquis de la Hinojofa. M. Chabaneau & moi l'avons reconnu : ceci nous promet la tungfiène & de nouvelles mines d'étain. SUR L'HIST, NUTURELLÉ ET LES ARTS. 247 Sur leVarriol de magnéfie L'Efpagne eft fans contredit la région du monde la plus fertile en fels natifs, fans parlèr ici de fes montagnes de fel gemme, de fon {el amer de Higuera dont une immenfité de fontaines abondent; j'ap- pellerai volontiers le falpètre & le vitriol de magnéfie, les fels effen- tiels de cette péninfule. Ce dernier végète fur toutes les pierres les moins propres à lui offrir des bafes. Dans lAndaloufe il fleurit la terre après le paflaze des pluyes, le defléchement des mares , il fe re- nouvelle fans interruption fur des pierres de grès, dans:les exploita- tions de linares , & dans une atmofphère continuellement abreuvée des plus épaifles fumées de vitriol de plomb. Dans Madrid il recouvre par- tout le pied des murailles d’une efflorefcence deftructive, Le plâtre dont on ufe dans cette capitale, eft un entaflement de groupes enveloppés d'argile remplie de magnéfie, Par une fuite de la calcination ou quelque rupture d’affinité, l'acide vitriolique fe reporte fur cette terre, la vitriolife, & l'humidité ne tarde pas À la faire fortir des murailles dont elle entraîne la deftruétion ; une médiocre quantité de chaux re- médieroit fans doute au vice de ce plâtre, en arrêtant dès l’origine le progrès de cette vitriolifation ; mais ce qui eft étonnant, c’eit le fal- père & le vitriol de magnéfie qui naïflent, fleuriflent & fe recueillent enfemble fur les mêmes pierres. Si la nature ne forme jamais de com- binaifort fans une bafe , quelle bafe peut-elle trouver dans tn grès pour la formation de l'acide nitreux & vitriolique ? I] faut croire que les bafes terreufes & alkalines font des formations contemporaines des acides qui les faturent; que ces terres qu'on laboure ici, qu'ailleurs on élève, on pétrit, on entafle, loin d'offrir des bafes aux fels qu’on y recueille, ne font que les points dé réunion où s’aflemblent les éle- mens qui fe conviennent pour l'ouvrage de ces combinaifons , des pieds-à-terre que celles-ci prennent pour entrer dans le cercle des pro- ductions naturelles. Madrid, 12 Septembre 1787. Faute à corriger ; cahier de Mai 1787, page 394, Dom P. de Levena, Z/èz: Dom Pedro de Lerena, ss 248 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, nn. eee nee EN NUE MU M ee ee nd een ee ee | EX P'É PTE NOEL Faites dans la vue d'examiner fi l' Alcohol eft produit par la fermentation , ou »s'il'exifle tout formé dans les corps fermentefcibles ; ” ant Extraites du Mémoire Allemand fur la Fermentation, de M. HERMBSTADT (I). : Se Te OK a cherché depuis long-tems à raffembler différentes preuves pour & contre la préexiftence de lalcohol ou efprit ardent avant la fermentation , mais elles font infuffifantes pour décider la queftion d’une manière ou de l’autre. Pour établir l’afirmative,; on fe fonde ordinaire- ment fur l'odeur fpiritueufe qui fe fait fentir dans les endroits où l'on a confervé pendant long-tems des:fruits mürs, & fur ce que cetre odeur fe remarque»pareillement dans les moulins où l’on moud à la fois une grande quantité de bled ; mais ces obfervations font loin d'être décilives , puifque pour en rendre raifon , il fufhroit de dire que cette odeur eft dûe à un commencement de fermentation , qu’elle en eft l'indice, & que cette fermentation feroit difficilement découverte de toute autre manière, 6. 2. D'un autre côté , les argumens qu’on apporte ordinairement contre la préexiftence de l’alcohol ne font pas plus concluans, parce que fi Palcohol préexiftoit réellement dans les cas qu’on allègue, il devroie être détruit infailliblement par l'opération. Je mets au nombre de ces argumens infignifians, celui qu'on déduit de ce que l’alcohol ne fe mani- feite pas lorfqu’on fait diftiller du fucre, ou un-autre corps qui en fournit par la fermentation. Si 3e Pour que les preuves pour ou contre la préexiftence de l’alcohol avant la fermentation foient fondées , il faut qu’elles foient appuyées, autant (1) Expériences & Obfervations phyfico-chimiques ; par S.F. Hermbfladt, premier vol. Berlin, 1786. Cet Ouvrage, écrit en allemand , contient beaucoup d'expériences intéreffantes, particulièrement fur l’analyfe végétale, qu'il SUR L'HIST. NATURELLE ET LES ARTS. 249 qu'ileft poffble ; fur des expériences ou des obfervations décifives. Pour cet effet il conviendra, non de chercher à mettre l’alcohol à nud , mais de vérifier s’il ne fe décèle pas par fes combinaifons avec d’autres corps. Comme les acides s’uniflent crès-facilemenc à l’alcohol & forment avec lui des compofés particuliers, j'ai cru pouvoir les employer avec fuccès dans ces circonftances, ss J'ai fait ufage dans cette vue des acides vitriolique , muriarique & nitreux, j’ai même employé l'acide muriatique déphlogiftiqué, fans avoir pu obferver aucun indice d’alcohol préexiftant, Je me bornerai donc à remarquer, que l'acide vitriolique , traité avec des jus de fruits doux, devient tout noir, & qu’à la diftillation il donne d’abord du phlegme & vers la fin de l'acide fulfureux & du gaz acide vitriolique, $, LÉ J'efpérois fur-tout que l'acide nitreux m’offriroir un réfulrat fatisfaifant # je le mêlai en conféquence avec les jus de raifin , de cerifes, de pommes, de grofeilles, &c. fraîchement exprimés ; J’avois e4 foin de l’érendr ede beaucoup d'eau : mais je n'obtins rien qui reflemblâr par le goût ou l'odeur à de l'acide nitreux dulcifié ; quoique ce goût & cetre odeur fe manifeftaffent dès que j'ajoutois un peu d'alcohol à ces mélanges. r SE, Je n’omettrai pas les détails de ces expériences , parce que je me pro- pofe d’en tirer encore d’autres conféquences. Je pris des cerifes, qu'on venoit d'écrafer après en avoir ôté les noyaux , & avant qu'elles euffent pu commencer à fermenter ; j'en mélai le jus avec de l'acide nitreux, compofé d’une partie d’acide fumant avec trois parties d’eau ; la propor- tion étoit d'une partie de jus fur une demi-partie d’acide nitreux. Après avoir laiflé repofer le mêlange pendant deux jours dans un ballon entièrement rempli & bien fermé, je le diflillai à un feu de lampe très-doux ; il vint dans le récipient un peu d’acide nitreux phlogiftiqué très-foible, qui colora en bleu la teinture de gayac (1). Il ne fe manifefta pas la moindre portion d’acide nitreux dulcifié, ni par le goût, ni par l'odeur, ri par des propriétés inflammables. Il en fut de même en foumettant à des opérations pareilles des jus d’autres fruits. $. 7. Pour m'aflurer davantage de l'exactitude de mes obfervations , je (x) L’acide nitreux pofsède toujours cette propriété , lorfqu’il a été diftillé fur des matières phlogiftiquées ; ce changement de couleur ne prouve donc rien poux la préfence de Valcohol, ( Nore de l'Auteur.) L Tome XXXII, Part, I, 1788. AVRIL, Ii ao OBSERP'ATIONS SUR LA PHYSIQUE, diftillai les jus des mêmes fruits, tels que je les obtins par exprefhon & fans les mêler avec aucun acide ; je n’eus rien qu'un phlegme in- fipide , fans aucune trace d’alcohol , ce qui fait voir que ces jus n'avoient pas encore fermenté. : S. à. Ces obfervations prouvent donc fuffifamment ,-que dans toutes les fubftances végétales dont j'ai fait ufage , il n'exiftoit point d’alcohol avant la fermentation ; fans quoi il y auroit eu production d’éther où d'acide dulcifié; ce qui n'arriva pas, quoique j'eufle eu foin de laiffer repofer chaque mélange pendant deux jours avant de le foumettre à Fopération, à 6. Qe Il me reftoit à examiner de quelle manière les mêmes fucs fe comporteroient avec les acides , après qu’ils auroient fubi une fermen- #&tion lente. Ainfi, dès que la fermentation fpiritueufe eut lieu ;' je les mêlai avec de l'acide nitreux , dans la même ‘proportion que ci- deflus ( 8. 6 ), & tous me donnèrent à la diflllation, une certaine quantité d'acide dulcifié, qui fe décéla par l'odeur la plus agréable, $. « 10. On ne pouvoit donc plus douter, que ce ne füt que pendant la fermentation que lalcohol a été formé; s'il avoit préexiflé, & qu'il n’eût été que féparé, les moyens employés précédemment l'auroient fait reconnoître ; mais le gaz même qui étoit contenu dans les vaifleaux. n’en donna aucun indice, car il éloignoit la bougie ;. & confiftoit prin- cipalement en gaz nitreux, $ Ile Je voulus aller plus loin ; & examiner leffet que produiroient les acides concentrés. Dans cette vue je mêlai dans un appareil pneumato- chimique à une partie de jus de cérifes ou de raifin, un tiers d'acide nitreux fumant, Le mèlange fe ft tranquillement d’abord, enfüite il fe forma de l’écume , qui fut augmentée par l'application d’une chaleur douce ; il fe dégagea pour lors, une grande quantité de gaz nitreux & d'acide aërien ( air fixe). Le réfidu étoit clair, & il y avoit des parties réfineufes qui nageoient à la furface.. $& 12. Une partie du réfidu , traité de rechef avec de nouvel acide, nitreux,, outre une grande quantité de gaz nitreux., donna de l'acide faccharin , du fl faccharin de potafle, un peu de terre, & dans le récipient , de l'acide nitreux, mêlé avec un peu d'acide acéteux. SUR L'HIST. NATURELLE ET LES ARTS. 251 $. 13. Ce qui reftoit du jus fut faturé complettement de chaux aérée ; j'en obtins deux combinaifons différentes ; l’une étoit du tartre de chaux très-peu foluble, & duquel je pouvois retirer par l'acide vitriolique de l'acide tartareux pur en criltaux ; l’autre combinaifon étoit en partie du tartre de potafle & en partie un acide particulier ( l’acide des pommes ) uni à la chaux; cet acide faivant mes obfervations eft un vinaigre imparfait; je me réferve d'en parler dans une autre occa- fion (1). $. 14. On voit donc qu'en variant feulement [a manière de les traiter ; on obtient des mêmes fubftances , des produits tout différens. Je foumis aufli à la décompofition par l'acide nitreux des corps fermentefcibles fecs, Voici les obfervations qu'ils m'offrirent , & que je comparai enfuite avec les phénomènes que me préfenrèrent ces mêmes corps décompolés fpontanément par la fermentation. Se 15° Je verfai dans une cornue de verre , fur une partie de fucre ordi- naïre , trois parties d’acide nitreux, compofé de portions égales d’acide nitreux fumant & d’eau. J'adaptai un récipient auquel étoit attaché un tube de verre, pour raflembler le gaz , en appliquant la chaleur, j'obfervai les phénomènes ordinaires qui accompagnent la préparation de lacide faccharin, | $, 16. Le réfidu , dégagé de tout acide nitreux , formoit un acide épais, brun de châtaigne, tel qu’on en obtient d'ordinaire dans ces fortes de cas. J'en combinai une partie avec trois parties de nouvel acide nitreux que j'avois eu foin d'étendre de deux parties d'eau ; après que cet acide avoit auffi paffé dans le récipient, le réfidu ne me fournit que peu d'acide faccharin. Outre une grande quantité de gaz nitreux, je trouvai dans le récipient de l'acide nitreux phlogiftiqué, mêlé d’acide acéteux, de même que ( $. 12 ). 17 Ayant étendu d’eau, la partie reftante de l'acide brunâtre ci-déflus, je le fatürai de terre calcaire, en Le faifant bouillir doucement dans un vaifleau de verre; j'obtins comme ( $. 13.) du tartre calcaire, & (1) Voyez le Mémoire fur cet acide , Journal de Phyfique , janvier 1788. Tome XXXII, Part. I, 1788. AVRIL. li 2 252 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, une folution de chaux dans l’acide que j'ai nommé vinaigre imparfait ;; certe folution laiffa pareillement précipiter la chaux, en y verfant de l'acide vitriolique. $. 18. Je pris une portion de ce vinaigre imparfait, dans fequel il y avoit de la chaux diffoute , & ayant précipité certe terre par l'acide tartareux, la liqueur fut évaporée jufqu'à confiftance de firop, & diftillée de nouveau avec le double de fon poids d'acide nitreux fumant. Comme il ne refta rien dans la cornue, j’examinai ce qui avoit paflé dans le récipient, je trouvai que c'étoic un mélange d’acide nitreux & d’a- cide acéteux ; c'elt-là précifément ce qui me fit conclure que cet acide: particulier étoic un vinaigre imparfait. De ces expériences & de ce qu'en traitant ces corps avec de l'acide nitreux, j'obtins toujours de l’acide tartareux , de l'acide faccharin ou de l’acide acéteux , fuivant que j'em- ployai moins ou plus d'acide nitreux ; il réfulte que ces trois acides végétaux ne font que la même fubftance modifiée par plus où moins de phlogiftique , ainf que je l’ai foutenu depuis long-tems & que je: me propofe de le prouver plus clairement dans un autre mémoire (x). Se 19. Qu'il me foit permis actuellement de faire un parallèle entre les: phénomènes qui ont lieu, fi l’on décompofe les mêmes corps par les deux voies différentes, par la fermentation & par l'acide nitreux. La: fermentation fuivant fes différens degrés , fournit du vin ou du vinaigre, Le vin par la fuite laifle précipiter du tartre qui n'eft autre chofe que de la potafle furfaturée d’acide tartareux ; diftillé il donne de l’alcohol.. Le vinaigre lorfqu'il æ été parfairement bien préparé, ne donne ni tartre ni alcohol. Les mêmes corps décompofés par l'acide nitreux préfentent des phénomènes tout différens ; on ne remarque point d’al- cohol, à moins que ce ne foit à la fuire d'une fermentation lente ,, mais ils fourniflent directement de l'acide tartareux , faccharin ou acéteux.. füivant la quantité d'acide nitreux que l’on emploie, &, 204 Puifque donc on ne pouvoit au moyen de l’acide nitreux , découvrie aucune trace d’alcohol , fi les fubftances n'avoient fermenté auparavant, & qu'après læ fermentation | l'alcohol fe manifeftoit très-facilement ; 11 en réfulre qu'il a dû néceffairement fe former dans l’acte même de EDP D tr) Voyez le Memoire fur la converfion de lacide rartareux en acides faccharin. & acéreuxs Journal de Phyfique , feptembre 1787< ‘SUR L'HIST, NATURELLE ET LES ARTS. 253 a fermentation. Cela pofé, il s'enfuit que lalcohol doit être com- pofé des mêmes principes que les corps dont il provient, & je vais prouver que cela eft cel en effer. CPL Les principales parties conftituantes de ces corps, font l’acide tar: tareux , le phlogiftique & l'eau. Pour en conftater la préfence dans l’alcohol , il fufira de le traiter avec de l'acide nitreux, comme or le fait à l'égard des corps dont il provient. Qu'on mêle, par exemple, -une partie d'alcohol rectifié avec demi - partie d'acide nitreux fumant, étendu auparavant de*deux parties d’eau , & qu'on diftille , il paflera dans le récipient un peu d'acide dulcifié ou d’éther nitreuxe 6.12%, En évaporant enfuite le réfidu de la cornue, on obtiendra un acide brunâtre , pareil à celui du ($. 16 ) ; fi aétuellement fans déphlegmer davantage ce réfidu, on y mêle un. peu d’eau diftillée, & qu'on ajoute d'une diffolution d’acère calcaire ou d’acète de plomb , jufqu'à ce qu'il n'y ait plus de précipitation , on aura du tartre calcaire ow du tartre de plomb, defquels on pourra féparer par l'acide vitriolique de l'acide tartareux très-pur. $ 23: Si l’on enlève du phlogiftique à cet acide tartareux , en diftillant deflus de nouvel acide nitreux , il fe convertit en acide faccharin ; qui lui-même étant encore diftillé avec une nouvelle portion d'acide nitreux, fe transforme en acide acéteux. Puifque donc de l'alcohol on obtient les mêmes réfultats que des corps qui le fourniffent par la fermentation , lorfque ces corps font traités de la même manière ; ii en réfulre que l’alcohol eft formé & compofé pendant la fermentas tion des principes mêmes de ces corps (1). $. 24: D’après ces expériences il eft clair que l’alcohol contient les mêmes (x) Schéele (Annales chimiques , 1784 , fecond vol. pag. 337 ) prend pour principes conflituans de l’alcohol l’huile de vin & le vinaigre, parce qu'il avoit Gbfervé qu’en combinant l’alcohol avec les acides, particulièrement avec l’acide vitriolique & la manganèle , il fe féparoit du vinaigre : j’ai répété les expériences de Schéele ,& j’ai trouvé la même chofe ; j’ai même obtenu des réfultats pareils en employant Pacide muriatique déphlopifiiqué. Malgré tout cela , je ne faurois regarder l'acide acéteux commeun vrai principe conflituant aétuel de l’alcohol , puifque cet acide n’eft qu'un acide tartareux privé de phlogiftique & chargé au contraire dure’ plus grande quantié de matière de la chaleur, ( Nore de l'Auseur, ) 254 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, principes conftituants, qui fe manifeftent dans tous corps fermentef- cibles; je le regardai donc comme compofé d’acide tartareux, de phloe giftique & d'eau, ce fonc là fes principes éloignés; fes principes pro= chains font l'Auile de vin & leuu (x). REMARQUE DU TRADUCTEUR. Puifque la matière fucrée , traitée avec l'acide nitrique , donne de l'acide rartareux , de l'acide oxalique ou de l'acide acéteux, fuivant que lon emploie moins ou plus d'acide nicrique ; il eft clair que la matière fucrée eft la bafe commune de ces acides véséraux. Elle n’eft vraifem- blablement elle-même que le muqueux combiné avec un peu d’oxigène & accidentellement avec une certaine portion d'hydrogène. Ainfi, puifque Palcohol fournit aufli de l'acide tartareux par l'acide nitrique ( $. 21, 23, ci-deflus ) , il faut en conclure que la matière fucrée eft encore la bafe de lalcohol. Mais l’alcohol contient de plus de l’hydrogène en très-grande quan- tité. Outre l'expérience de M. Landriani, on peut rapporter ici celle de M. Lavoiler qui eft plus concluante ; par la combuftion d’une livre d’alcohol, cet illuftre chimique a obtenu du gaz acide carbonique & 18 onces d’eau, or il n'y a que l'hydrogène qui avec l'oxigène fixé dans late de la combuftion, puiffe former de l’eau. D'ailleurs en faifant pafler de l’alcohol à travers un sube de verre rouoi au feu, (x) Des obfervations de. M. le Chevalier Landriani il fuit qu’en difillant de Palcohol dans une petite cornue , & en faifant pafler-les vapeurs par un tube de fer rougi au feu , il fe transforme en air inflammable (Journal de Phyfique, juiller 1787, puge 63). M. Buchholz ( Anrales chimiques, 1785, fècond vol. page 337) a non-feulement vérifié cette expérience, mais il a obtenu de même de l'air inflammable en prenant de l’eau au lieu d’alcohol. M. Volta, profeffeur à Pavie, a fait les mêmes obfervations ( Annales chimiques , ibid, page 339 ), Ha trouvé er outre qu’on obtenoit encore cer air en faifant pafler des vapeurs aqueufes par un tube ce verre qui contient du charbon, Toutes ces exnériences me paroïffent prouver que Vair inflammable provient dans tous ces cas différens du métal ou du charbon. Barner déjà (Chymie philofophica, Norinbers , 1689, page 254 ) a fait voir qu'on obtenoit de l'huile après la difillation de l’alcohol ; il admet en conféquence que lalcohol réfulte de la diflolution de cette huile dans l’eau. M. Weflendorf ( Différcario de optima acetum concentrarum, ec. 1772, page 14, ) ayant difillé vingi livres d’alçohol retiré de l’eau-de-vie de France , dans un bain de fable jufqw'à ce qu'il ne reflät plus qu'une livre dans la cornue , trouva fur la furface du réfidw cinq gros d'huile, 11 obferva la même chofe en employant de l’alcohol retiré du froment & diftillé fur de l’alkali fixe. Cette huile avoit toutes les propriétés d’une huile éthérée , elle avoit l'odeur de l’alcohel, bräloit avec une flamme claire & ne donna que très-peu de fuie. M. Weftendorf regarde cette huile comme le principe conftituant qui avec l’eau forme l’alcohol. Après avoir diftillé fept fois de fuite vingt livres d’alcohol, il en recueillir fix livres de phlegme & trois onces & demie d'huile, le refle de l’alcohol n’avoit {bi aucune aération, ( Nose de P'Auseur. ) SUR L'HIST. NATURELLE ET LES ARTS, ogg M. Lavoilier a eu beaucoup de gaz hydrogène mêlé avec un peu de gaz acide carbonique & tenant du Carbone en diflolution, & il s’eft dépofé de la matière charbonneufe dans l'intérieur du tube ( Journal de Phyfque, Juillet 1987 }, 11 paroït donc qu'on peut regarder l’alcohol comme réfultant de la combinaïfon de la matière fucrée avec l'hydrogène. Si en traitant l’alcohol avec l’acide nitrique, on obtient de l'acide tartareux, cela ne provient uniquement que de l’oxigène de l'acide nitrique, qui fe combine avec l’alcohol, tandis que l’azore fe dégage fous.forme de gaz nitreux. L'oxigène, en s’uniffant à l’alcohol fe porte en partie fur l'hydrogène & forme de l’eau avec lui, &-en partie il s’unit à la matière fucrée & engendre de l'acide tarrareux. L'éther nitrique me paroît réfulter de la combinaifon de la partie la plus fubtile de lalcohol avec l'acide nitrique , après que celui-ci a été dépouillé d’une portion d'oxigène; dè forte que lécher dans ce cas, eft formé de quatre fubftances, d'azote, d'oxigène, d'hydrogène & de matière fucrée, unies enfemble dans de certaines proportions. D'après tout cela, fi M. Hermbftadt n’a jamais pu trouver aucun veftige d’alcohol dans les fubitances fucrées avant leur fermentation , c'eft qu'il n’ÿ avoit pas une fufiifante quantité d'hydrogène, & que par l’ate de la fermentation l’eau s’eft décompofée & a fourni cet hydrogène, qui s’eft combiné avec la matière fucrée , pour former Falcohol. Toutes les expériences précédentes me paroïflént concourir à confirmer cette belle propoftion de M, Lavoilier ( Mémoires de “Paris, année 1781, pag. 491 ); favoir, que dans la fermentation Jpiritueufe l'eau fe décompofe ; que fon oxigène fe combine avec le carbone du fucre ou du corps fucré, & forme le gaz acide carbo- nique, qui fe dégage ft abondamment dans cette opération ; tandis que l'hydrogène devenu libre, [e fixe dans la combinaifon en s'uniffant à une portion affez confidérable de carbone, & que c’efl l'hydrogène qui forme la partie fpiritueufe , alcohol, (24) Errata du Mémoire fur L Acide des Pommes , cahier de Jenvier: Page 58, ligne 19, précipiter une quantité, Zifez : précipiter quantité Page 59, ligne 2, trop peu de la matière , Zifez: trop peu de matière - Thil, ligne 12, en acide oxalique , Zfez : en acide oxalin LEE Jiia. ligne 31, ayant mélé le produit de la diftillation avec de l’acide nitreux phlogifiiqué , j'en féparai de Pacide de vinaigre imparfait, par le procédé connu , dans l’état d'acide acéteux pur, Zifez: du produit de la difillarion qui étoit mêlé avec de l’acide nitreux phlogifliqué, je féparai par le procédé connu, le vinaigre imparfait dans Pétat d’acide acéteux pur, PU EM OR 2$6 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, ANA ETASISE Du Spath pefant aëré (*) tranfparent & ftrié , d’Alflon-morr. Par M. SAGE, | Bzrenmax a parlé de la terre pefante aérée, celle-ci eft au fpath pefant aéré ce que la craie eft au fpath calcaire; & le fpath pefanc aéré eft au fpath pefant vitriolé ce que le fparh calcaire eft à la félénire. MM. Claproth & KirWan ont parlé du fpath pefant aéré blanc tranf= parent & ftrié , fous le nom de serre pefante aérée j mais comme on doit réferver le nom de terre aux matières pulvérulentes & opaques, j'ai cru devoir défigner fous le nom de fpath pefant atré, le fel pierre ftrié tranfparent dont je vais donner l'analyfe. Le fpath pefant aéré fur lequel M. Claproth a travaillé venoit des mines de charbon de Lancashire où il a été trouvé en mañles arrondies de la groffeur de la tête d’un homme; c’eft de ces mêmes morceaux qu'ont eu MM, Wichering , Prieftley & Watr. M. Black a reçu d'Alfton-moor le fpath pefant dont il a parlé, celui-ci avoit été trouvé dans une mine de plomb. M. Claproth dit que Bergman n’a pu préfenter que quelques-unes des propriétés de la terre pefante aérée , parce que celle qu'il a analyfée & qui venoit de Schotland , étoit mêlée de beaucoup de terre calcaire , puifque le Chimifte fuédois n’y a trouvé que huit parties de terre pefante fur quatre-vingt-douze de terre calcaire. é Bergman dit que la terre pefante aérée a plufieurs rapports avec Ja terre calcaire, qu'après avoir été calcinée & après avoir été mife dans l’eau il fe forme une pellicule à fa furface ; il eft à préfumer que cette propriété étoit due à une portion de terre calcaire que contenoit la terre pefante aérée de Scholtand que ce Chimifte a effayée ; car le fpath aéré d’Alfton-moor après avoir été calciné & mis dans Feau diftillée , ne produit point de pellicule , cette eau ne fe trouve nullement alrérée. Le fpath pefant aéré blanchätre ffrié demi-tranfparent que j'ai employé pour les expériences dont je vais rendre compte vient d’Aiflon-moor , & m'a été donné par M, le Chevalier de Gréville; ce morceau avoit environ fix pouces de long, fes deux extrémités étoienc recouvertes d'ochre martiale d'un jaune pâle, La pefanteur fpécifique de ce fpath pefant a été reconnue par M. Briflon de 4,2919 ; celle du fpach pefant vitriolé ef de 4,4400. (1) Carbonate de barite dans la nouvelle Nomenclature, La à « d Li PET SUR L'HIST. NATURELLE ET LES ARTS. 2$7 La gravité fpécifique du fpath pefant a fait foupconner à quelques Naturaliftes qu'il contenoit du métal ; Cronfted Pa déligné fous le nom de marmor metallicum ; je ne fuis point parvenu à extraire de métal du fpath pefant aéré blanc & tranfparent , celui qui eft opaque récèle fouvenc de la blende , de la pyrite, de l’ochre martiale jaurâtre, & quelquefois de la chaux de plomb. Le fpath pefanc aéré expofé au feu , y perd fa tranfparence & devient friable fans perdre fenfiblement de fon poids : ce fpath n'a pas été plus altéré après une calcination de quatre heures, après laquelle il n’étoit pas plus foluble dans l’eau qu'avant d’avoir été calciné, Le fpath pefant aéré ayant été pulvérifé & expofé à un feu violent s’eft agglutiné , les portions de cette pierre qui étoient en conta@ avec les parois du creufet avoient une couleur verdâtre, taches que Bergman avoit auffi obfervées , après avoir expofé à un feu violent la terre pefan’e. J'ai fondu uvepartie de fpath pefanc aéré avec deux parties de borax calciné, j'ai obtenu un verre blanc tranfparent, tandis que le même borax fondu fans addition a produit un verre jaunâtre. Après avoir fondu un mélange d’une partie de fpath pefant aéré, & de deux parties d'alkali fixe du tartre, je l’ai coulé dans un mortier de fer ; enfüire je l’ai pulvérifé & faic difloudre dans de l’eau diftillée: j'ai filtré cette leflive, la terre pefante eft reflée fur le paper oris : la leflive évaporée n’a produit que de l'alkali fixe & poing de tartre vitriolé, On fait que le foath pefant traité de Ja même manière produit du tartre vitriolé. J'ai formé des rotules avec le fpath pefant aéré pulvérifé dont j'ai réuni les molécules avec du mucilage de gomme adragante, j'ai calciné ces rotules à travers les charbons ardens ; elles ont pris une couleur verdâtre & n’ont point décélé la préfence d’un foie de foufre, comme le phofphore de Bologne, préparé de la même manière avec le fpath pefant vitriolé. L'acide vitriolique concentré (1) diflout avec effervefcence & chaleur le fpath pefant aéré; la diflolution eft limpide, fi l'on a employé douze parties d'acide viriolique contre une de ce fpath. Si l’on n’a verfé defflus que fept à huit parties d'acide, on n'obtient qu’une mañle gélatineufe demi- tranfparente. Si l'on verfe de l'eau dans la diffolution du fpath pefant aéré par l’acide vitriolique concentré , elle devient aulli-tôt laireufe & il fe précipite du fpath pefant vitriolé , celui-ci lavé & defléché, fe trouve pefer un dixième de plus que le fpath pefant aéré qui a été diffous dans l'acide vitriolique. L J'ai formé des rotules avec ce fpath pefant vitriolé artificiel ; je Les ai calcinées à travers les charbons ardens, elles ont produit un phofphore mers (1) Get acide vitriclique marque 67 degrés à l’aréomètre de M, Baumé. Tome XXXIY, Part. 1,1788. AVRIL. Kk 058 OBSERFATIONS SUR LA PHYSIQUE, femblable à celui de Bologne, l’eau a diflous le foie de foufre à bafe de terre pefante qu'il contenoit, . L’acide nitreux à trenre-deux degrés fait d'abord une vive effervefcence avec le fpath pefant aéré; le nitre qui en réfulte demandant beaucoup: d’eau pour fa diffolution , fe précipite aufli-tôt qu'il fe forme, comme l’a obfervé M. Claproth, mais il fe précipite en même-tems du fpath pefant vitriolé, J'ai verfé de l’eau diftillée fur le nitre à bafe de terre pefante , qui étoit fous forme d’une poudre blanche; il faut environ foixante parties d'eau. pour difloudre une partie de ce fel , dont il faut aider la diffolution par la chaleur. : Ayant fait évaporer au bain de fable dans une capfule de verre évafée, la diffolution de nitre à bafe de terre pefante, elle a produit par'le refroi- diffement-des criftaux blancs tranfparens qui repréfentént l’oétaëdre dans différens états. J'ai fait évaporer en trois tems la diflolution de nitre à bafe de terre pefante; la première criftallifation a produit : 1°. Des octaëdres retangulaires. 2°. Des octaëdres tronqués aux fommets. 3°. Des octaëdres tronqués aux fommers & parallèlement à un des plans. d’une pyramide. + 4°. Des odaëdres tronqués aux quatre angles de la bafe commune des pyramides. 5°”. Des octaëdres tronqués fur les bords. 6°. Des pyramides à quatre pans ou moitié d’octaëdre. La feconde évaporation a produit des criftaux octaëdres , affeniblés confufément , parce que la capfule r'étoit pas auffi évafée. La troifième & dernière évaporation de la diffolution de nitre à bafe de terre pefante a auffi produit des criftaux octaëdres & en pyramides > quatre pans. On remarquoit au fond & fur les bords de la capfule des: prifmes tétraëdes articulés & croifés formés d'otaëdres implantés les uns dans les autres, Le nitre à bafe de terre pefante ne s’altère point à l'air, mis fur Îes charbons ardens, il éclate & fufe. L'acide marin du commerce fait une vive effervefcence avec le fpath: pefant aéré & le diflout , mais cet acide marin contenant toujours de l'acide vitriolique, celui-ci fe combine avec la terre pefante & forme dit fpath pefant vitriolé qui fe trouve au fond du vafe, à L'expérience fuivante fair connoître que l’acide marin pur & très- concentré a la propriété de diffoudre le fpath pefant & de produire un fel foluble dans l’eau: J'ai diftillé une demi-once de fpath pefant aéré avec une once de fe! SUR L'HIST. NATURELLE ET LES ARTS. 259 ammonijac, il s'eft dégagé de l’alkali volatil concret; la portion de fef qui n’a point été décompolfée s'eft fublimée à la voûte & au commencement du col de la cornue ; le rélidu de cette opération ayant été lefivé dans de l'eau diftillée, s’y eft diflous en entier ; cette leflive a produit par l'évapo- ation des criftaux en lames rhomboïdales, taillés en bifeaux fur les bords & tronqués aux angles plus ou moins profondément, Le fel à bafe de terre pefante (1) ne s’altère point à l'air , a une faveur amère & un peu piquante; mis fur des charbons ardens, il y perd l'eau de fa criftallifation , y devienc blanc & opaque & ne s’y décompofe point. La diffolution' du fel à bafe de terre péfante eft le réactif le plus propre à déceler la préfence de l'acide vitriolique dans les acides nitreux & marin, cet acide vitriolique provient des intermèdes employés à décompofer ces fels. Tel foin qu'on prenne pour féparer l'acide vitriolique qu'ils con- tiennent, foir en diftillant à plufieurs reprifes Pacide nitreux fur du falpètre, & l'acide marin fur du fel, on retrouve toujours dans ces acides de l'acide vitriolique qu’en peut féparer par la diffolution de fel à bafe de terre pefante qu'on verfe dans ces acides, jufqu'à ce qu'il ne fe trouve plus de terre pefante vitriolée. Si c'eft l'acide marin qu’on a ainfi puriñié, on le diftille enfuire pour le dégager de la terre pefanre qu'il peut temir en diflolution ; fi Pon veut féparer cet acide marin du fer, qui lui donne une couleur jaune , il faut diftiller cec acide fur du fel marin purifié & décrénité qui retient le fer. L’acide marin qu'on obtient eft blanc & limpide, L'acide nitreux dont on 4 féparé l’acide marin par le moyen de la diflolution d'argent, contient encore de l'acide vitriolique qu'il faut pré- Cipiter par la diffolution de fel à bafe de terre pefante ; mais comme il pourroit refter une portion de ce fel dans l’acide nitreux & que l'acide marin qui s'y trouveroit en régaliferoit une partie, il faut de nouveau précipiter l’acide marin par la diflolution d'argent , & enfuite diftiller l'acide nitreux, + NOTE. Quelques jours après que j’eus lu à l’Académie l’analyfe du fpath pefant aéré, une perfonne dévouée à la nouvelle Nomenclature me demanda pourquoi je ne faifois point ufage des mots muriate de barite, au lieu de fel à bafe de terre pefante ; je lui répondis que le mor /e/ employé fans (1) Le fpath pefant aéré après avoir été calciné pendant trois heures, a décompofé le fe] ammoniac comme celui qui n’avoit point éprouvé l’aétion du feu. Tome XXXII, Pare. I, 1788. AVRIL. Kk 2 260 OBSERVATIONS SUR LA PHFSIQUE, épithère exprimoit par-tout le fel marin, que cette acception étant générale, je penfois qu’on fe feroit toujours bien entendre, en défignant toute combinaifon faline, où l’acide marin fe trouve, par le mot /e/, en. ajoutant, le nom de la bafe de la combinaifon faline. Ainfi /e/ de cobalt défignera l’acide marin combiné avec la chaux de cobalr. SeZ à bafè de terre pefante exprimera la combinaifon de cette rerre avec l'acide maria. J'ajoutai que fi j'étois convaincu que ces mots æuriate de barite rendiflent mieux la nature de cette combinaifon faline, je les employerois,. mais qu'ils me paroifloient moins expreflifs, parce que muriate étoit dérivé du mot latin muria, que Cicéron a employé pour défigner la: faumure faite avecun poiffon. £ Martial s'eft fervi du mot zuria pour défigner la fauce qu'on faifoi: avec cette faumure. © : Le mot françois faumure, en latin garum, fignifie une fauffe que Les anciens faifoient avec le faumure du poiflon nommé gars que Voflius prétend être le maquereau. Ÿ’oyez-ces mots latins dansle Dictionnaire de’ Boudor. + Linné & M. Romé de Lifle ont défigné fous le nom de fpath muria- tique, la pierre calcaire criftallifée en rhomboïdes aigus, qu'on trouve: daus les coquilles fofliles. : Les Chimiftes néolggues croyent défigner par barite (1) la terre pefante; mais ne faudroit-il pas laiffer un peu plus du mor orec baros qui figrife pefanteur, ce qu'on a obfervé quand on acompolé les mots baromètre ,. barofcope , barofanème. Peut-être nos Chimiftes néologues ont-ils délaiflé le mot barore: qu’ils avoient d'abord employé, parce que baro eft un terme de marine. & de charpente qui fert à défigner les pièces de bois qui traverfent d'un. bord à l’autre du navire & fervent à porter les ponts. Baroté fe dic d'un vaiffeau dont le fond de cale eft rempli jufqu’au barot. —— —_——————_—mt, (1) Si Burice ef dérivé pour les- Chimifles néologues, des mots grecs Bapos & aides, il fignifie pierre pefante. Géographie fignifiant defcription de la terre, Barogeo: ou barogo doit fignifier terre pefantes - € SUR L'HIST. NATURELLE ET LES ARTS. 26: LUE TT RTE DE-M BONNIN; Ingénieur-Architecte à Marfeille, % M DE LA MÉTHERIE, SUR LES PARATONNERRES. Mo NSIEUR » . La note que vous avez jointe à l'extrait de la lettre de M. Geanty: à M. Rouland , fur les paratonnerres , inféré dans votre Journal de Phyfique du mois d'oétobre, eft le fujer qui m'engage à vous écrire, La réputation méritée dont vous jouiflez à rous égards, pourroit ac- créditer les doures que vous témoignez fur l'efficacité durable des con duéteurs, & je fuis intéteflé à ce que cela ne foit pas, parce qu'ils alarmeroient des perfonnes pour lefquelles j'ai placé un paratonnerre, il n'y a qu'un mois, & de qui la tranquillité nef auili chère que: la mienne. dx C'eft avec raifon ,; Monfieur , que vous remarquez dans le premier articlede votre note, qu'un fil de fer de la groffeur qu'indique M. Geanty, Re fufiroic pas pour conduire un courant confidérable de matière foudroyante qui y entreroit avec explofon , puifque dans ce cas il y a plufeurs exemples , que des trinoles de fix lignes n’ont pas fui La crainte que vous avez auffi fur la deftruétion du fil de fer, par la rouille, n’eft pas moins fondée; 2/ eff vrai, dites-vous, que l Auteur - propofe de le vernir ; mais ne feroit-il pas à craindre que ce vernis ne prive ce conduéleur de toute [à force, car il eft connut ; en phy- Jique , que les métaux ne conduifent que par leurs furfaces. Sü celle: du fil de fer efl enduite d'un vernis capable de le défenre de la rouille, il ef? vraifemblable qu'il perdra toute on prefque toute Ja force con- duétrice. D'après cela vous ajoutez dans le fecond article de la même note, qu'il eft à craindre que les paratonnerrés ordinaires ,. quoique beau- soup plus gros, ne deviennent avec le rems incapables de foutirer: Vélectricité des-nuages , &-vous demandez en conféquence s’il ne feroir pas néceflaire de couvrir le fer d'un autre métal peu difpendieux ou: de lui fubftituer le cuivre.. 262 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, + Ce problème important par lui-même , le devient encore davantage, dès que vous le propofez, & que l'utilité publique en eft l'objer. D'ailleurs votre Journal étant très-répandu , les perfonnes qui ont fuivi mestopé- rations dans le placement du conducteur dont je vous ai parlé, pour- roient, malgré leur confiance dans les connaiffances qu'elles ont la bonté de me fuppofer ; avoir les mêmes doutes que vous , fur fon efficacité , non-feulement pour l'avenir, par rapport à la rouille, mais encore pour le moment préfent, parce que j'ai verni toutes les parties fur lefquelles la lime avoit paflé comme plus expofées à l'action de l'acide aérien, RUE Ces confidérations me paroiffent aflez effentielles pour mériter l’at- tention des Phyficiens; ce n’eft cependant point comme tel que j'aurai l'honneur de vous faire part de mes idées , je fuis rrès-éloigné de m'arroger ce titre, n'ayant étudié de la phyfique que Les objets qui ont quelques rapports avec l’art que je profefle, & dont les limites font moins circonfcrites qu’on ne le penfe communément , quand on veut l'embrafler en grand. Quoique je fufle très- perfuadé que le fluide électrique pénétroit la mafle des corps anélectriques , je n'ai pas moins fait de nouvelles expé- riences pour n'en aflurer d’une manière pofitive. En voici une , entre autres, qui eft directe relativement à la queftion dont il s'agit, J'ai pris une barre de fer carré d’un pouce & de trois à quatre pieds de longueur ; après lavoir fortement échauffée, je l'ai enduite de réfine fondue , à l'exception des deux bouts que j'ai laiflés découverts d'un à deux pouces. On fait que la matière électrique pénètre les ré- fines jufqu'à deux pouces de profondeur, & qu'elles ifolenc incom- plettement , fur-rout lorfqu’elles font nouvellement fondues, & d’ailleurs parce qu'elles contiennent une affez grande quantité de matières hé- térogènes, J'ai foumis au uide électrique cette barre ainfi préparée, fans l'ifoler | & en la plaçant fimplement fur deux fupports de bois, our la mettre à portée du conducteur d’une forte machine à plateau de ciftal. Malgré que tout fût défavorable, d’après ce que je viens de dire, jufqu’à la forme carrée, & que de plus l’armofphère fût très- chargée de vapeurs humides, la couche de réine n’a pas laiflé de l'i- foler affez pout en tirer des étincelles à l’autre extrémité, moins fortes, à la vérité, que celles qui fortoient du principal conducteur , parce qu'il y avoit une déperdition de la matière électrique à travers la réfine, ui faifoic éprouver à la main une fenfation pareille à celle des frittions électriques. 11 eft facile de voir par-là , que la partie du fluide qui s’eft manifeltée à l’autre extrémité de la barre , a traverfé la fubftance du fer; autrement élle n’auroit pu y arriver qu'en fuivane la furface de\l’enduit, ou en paffant entre l’enduir & la furface du fer, Dans le premier cas , les fupports l’auroient abforbée, comme cela elt arrivé SUR L'HIST. NATURELLE ET LES ARTS. 263 Jorfque j'ai polé deflus les bouts non-enduits, & dans le fecond on ne peut imaginer fon paflage, qu'en fuppofant que la réfine ne füc point adhérente à la furface du fer , fuppoñtion détruite par la précaution que j'ai prife de tenir la barre très-chaude, Au refte, en admettant un moment que cela pûc être, il s’enfuivroit du moins que le vernis ne nuiroit point à la vertu déférente du métal; ce qui eft l’objet prin- cipal; mais pour ne point laïfler de doutes fur la pénétration des corps par l'éleétricité , je me contenterai de faire obferver que fans cela, on concevroit difficilement comment les pointes des conduéteurs pour- roient être fondues , & on concevroit encore moins la révivification des chaux métalliques, qui ne peut s'opérer que parce que la matière électrique pénètre leurs parties conftituantes, pour leur rendre le phlor giftique quelles avoient perdu. Quelle eft donc la raifon , me deman. derez-vous peut-être , qui a donné lieu à beaucoup de perfonnes d'i- maginer que le fuide électrique n’eft conduit que par les furfaces ? Elle vient de ce qu'on n’a pas diftingué les conducteurs ifolés de ceux qui communiquent avec la terre. Il eft bien démontré que la forme des conducteurs n'eft point ar- bicraire ; que la furface contribue plus que la mafle à les rendre ca- pables de recevoir une grande quantité de fluide éle@rique, & que par conféquent leur capacité eft en raifon de leur furface. M, Volta écrivant à M. de Sauflure fur cet objet, dit que perfonne avanc lui n’a peut-être remarqué, que de deux conducteurs de furfaces égales , le plus long jouir d'une plus grande’ capacité , & qu'il eft à-propos de donner un très-grand volume aux conduéteurs , parce que l’élec- tricité ne fe déploie que fur leur furface extérieure. H rapporte à ce fujer, des expériences qui conftatent évidemment la vérité de cette affertion ; mais il n'eft queftion que des conduéteurs z/o/és, à l’effee d’accumuler fur eux la plus grande dofe d’éleäricité poffible , & non des conduéteurs en communication avec la terre. Îl ne s’agit point d’accumuler l’électriciré fur ceux-ci, mais feulemenc de lui fournie un canal pour la tranfmettre au réfervoir commun ; ce qui rend leur longueur & leur furface fort indifférentes , vu la rapidité inftantanée avec laquelle ils font parcourus ; c'eft alors que je fuis convaincu que leur male eft la feule chofe effentielle, Je regarde les premiers comme un lac dañs lequel l’eau fe rend & déborde dès qu'ileft plein , fans faire de ravage, & les autres comme le lit d’un torrent, dont les rives trop rapprochées rifquent d’être emportées & détruites par la violence du courant , lorfqu’il y arrive fubirement & y marche en colonne au l'an d'y couler en détail. L'erreur vient donc d’avoir confondu le terme de conduire, avec celui de déployer. Ainfi on peut dire que Pélectricité ne fe déploie que fur les furfaces, mais non pas qu’elle ne peut être conduire que par elles, Je crois même que fi la capacité des 264 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE; conduéteurs elt proportionnée à la longueur des furfaces, c’eft qu'à furfaces égales, la plus allongée enveloppe une moins grande foli- dité, Le fluide éle&rique tend, comme vous favez , à fe mettre en équi- Jibre, & fait effocr pour s'échapper des corps auxquels on le cominu- nique, & qui ne peuvent le recevoir que par cette voie | mais aufli ces mêmes corps exercent à leur tour, une attraction fur le fluide électrique, & il y a toute apparence que c’eft l'action combinée de ces deux forces qui eft la caufe des atmofphères électriques, & qui dé- termine leur .plus où moins grande extenfipn. En effer, puifque l'ac- traction agit en raifon des males, il doit s’en fuivre que le Auide élec- ÿique S’éloignera moins du corps qui en aurai le plus, & que fa fphère d’adivité fe trouvant plus refferée, parviendra plutôt à fon plus haut degré de tenfion. Ne pourroit-on pas en conféquence regarder le corps fur lequel on l’accumule, comme un noyau aurour duquel il fe forme un tourbillon dont l'énergie du rayon eft en raifon inverfe de la force attirante. Cette idée mériteroit d'être approfondie, parce qu'elle ré- pandroit un nouveau jour fur la théorie des atmofphères électriques. Les expériences de M: Volta fur fes trois cylindres de furfaces égales, mais dont les mafles éroient dans la raifon des nombres 1 : 2; 8, la rend du moins probable ; il aflure qu'il ne falloir que quatre à cinq tours pour charger le plus court, tandis qu'il en falloit trente pour le plus long. Cela me feroit . que fi les conducteurs rappro- chés n’acquitrent pas, un aufi haut degré de tenfian , que lorfqu'ils font éloignés, c'eft que les atmofphères fe pénétrant, leurs limites doublent de denfité, & qu'arrivées plutôt au dernier degré de tenfion que le refte, elles fourniflent une iflue à la matière éleétrique. Quoi qu'il en foic de ces idées auxquelles je n’attache aucune prétention, & que je foumets d’ailleurs aux lumières des Phyficiens plus éclairés que moi, je me bornerai à vous communiquer une réflexion fur la fufñon des pointes des conduéteurs qui tend à confirmer la pénétration des métaux par l'électricité. Je crois que cette fufion arrive plus fouvent par les coups de foudre afcendans que par les de/cenduns. La raifon fur laquelle jappuye cetre affertion , eft premièrement que Fexplofion d’une pointe qui communique à un fyffême pofitif, fe manifefte à une diftance double de celle qu'il lui faut lorfqu’elle tient à un fyflème né- gatif. Secondement, que dans ce cas fi le nuage négatif détermine fpon- tanément un courant confidérable de matière électrique, ce courant obligé de pafler par un canal qui va toujours en diminuant, fe con- denfe fortement, & communique alors un mouvement de vibration violent à toutes les parties eonflicuantes du métal, qui les fépare & les divife. C'eft ainf, fuivanc l’idée du célèbre M. Macquer , qu'agit le SUR L'HIST. NATURELLE ET LES ARTS. 265 1e feu fur les métaux pour les fondre, & il eft plus que vraifemblable que le principe inflammable & le fluide électrique ne font que la lu- mière diverfement modifiée. La forme d'aigretre fous laquelle Péle&ri- cité fe manifelte en fortant d’une pointe, marque aflez l'effort qu’elle fait pour fe fouftraire à la compreflion qu’elle y éprouve ; mais le contraire doit arriver & arrive en effet en y entrant, car elle ne fe manifefte que par un point lumineux, parce qu’elle fe dilate en fe répandant dans le conduéeur ; & telle eft, à ce que je penfe, la raifon pour laquelle une pointe lance le feu électrique à une plus grande diftance qu’elle ne l'attire. Il feroit à defirer que quelqu'un fit des ex- périences avec des appareils aflez grands pour déterminer fi la matière foudroyante fond plus facilement les pointes en en fortant qu'en y entrant. Comme beaucoup de gens, ainf que le remarquetrès-bien M. Geanty, fe mêlenc de pofer des paratonnerres fans en connoître la théorie, & que dans un objer de cette nature , les moindres défectuofités peuvent avoir des conféquences fâcheufes, je crois qu'il ne fera pas inutile d'ex- pofer les procédés que j'ai fuivis pour réunir la sûreté à la folidité ; d'autant mieux qu'il y a fort peu de conducteurs en France pour lefquels on ait pris les mêmes précautions. M. Ricard qui habite à Peliflane, petite ville près de Sallon, dans la faifon la plus fujerre aux orages, une maïfon voifine d’un clocher très-fréquemment vifité de la foudre , defiranr.de fe mettre à labri du danger auquel il éroit expofé , & voulant donner à fa patrie un exemple utile, fe décida à faire pofer un conducteur, & m'en confa la direction au mois de Seprembre dernier. Perfuadé que les conduéteurs compofés de tringles jointes enfemble par des anneaux, font très-vicieux parce qu’ils font fujets à être fondus dans les points de contaét par le défaut de continuité du métal, & afluré d’ailleurs que des tringles de fix lignes avoient été décrochées & leurs anneaux en partie brifés par la foudre, je me fuis déterminé à employer du fer paflé à la filière d’un pouce de diamètre, Les tringles les plus courtes ont fix à fept pieds de longueur, & font terminées en bec de füte pour fe joindre l’une fur l'autre. J’aieu foin de faire refouler le fer dans cette partie en forme d’ovoïde, afn que la preflion des gâches dans lefquelles elle eft ferrée à vis, l'oblige de joindre exactement. Ces gâches en conféquence font compofées d’un crampon à queue de neuf à dix pouces de longueur, terminé par une boëre à charnière évidée aufli en ovcïde; une partie de cette boëte eft de la même pièce que le crampon, & l'autre qui eft mobile porte une oreille à œil à fon extrémité, pour laifler pafler la vis à anneau qui la ferre contre Ja première, dont l'oreille eft taraudée à cet effer, Pour rendre la continuité plus parfaite , j'ai fait limer avec foin les tringles à leur Tome XXXII, Part, I, 1788. AVRIL. LI 266 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE; jonction , j'y ai interpofé un écuflon de plomb bien décapé, & jai enveloppé l'ovoïde formé par la réunion des extrémités de deux tringles, avec une feuille de plomb laminé qui fe trouvant écachée par les deux coquilles de la gâche, Ôre tout accès à l’eau qui pourroit les rouiller & diminuer leur vertu déférente. Il faut prete garde qu'il eft né- ceffaire que le petit axe de l’ovale formé par la fection oblique des tringles , foit dans la direction de la longueur du crampon , afin que l'action de la preffion lui étant perpendiculaire, puifle s'exercer avec avantage. Les crampons font engagés d'environ fix pouces , & tiennent le ‘conducteur à trois pouces du mur dans lequel ils font fcellés en plâtre. Ce moyen offre celui de pouvoir en cas d'accident, réparer facilement une pièce, de la changer même, & de plus l'avantage de vificer de tems en tems les fonctions des tringles, pour reconnoître l'état où elles fe trouvent. Et 44 Le mât qui fupporte les pointes , à treize pieds au-deflus du toit, eft contenu contre un mur avec des étriers, & repofe par le pied fur une panne du toît inférieur. Au-deflus de ce mât s'élève une verge de fer de fix pieds, terminée par quatre tiges d'un pied de longueur , foudées à la même fouche , l'une verticale, & les trois autres faifane avec elle des angles de 45 degrés. Ces branches font taraudées pour recevoir les pointes de deux pieds de longueur, faires en cuivre de dix lignes de diamètre en leur bafe , très-éfilées & dorées en or moulu fur 9 à 10 pouces. En viflant ces pointes, j'ai eu foin d’incerpofer entre le cuivre & le fer une rondelle de plomb taraudée pour em- pêcher l'humidité de pénétrer dans l’écrou. La tringle qui part de la dernière verge pofée fur le mat, l'embraffe par le moyen d'un coller brifé, donr une partie fe joint contre l'autre avec deux vis. Pour rendre leur contact parfait, j'ai enveloppé la tige d’une feuille de plomb, & j'ai fait fouder à trois pouces au-deflus, un chapeau du mème métal pour mettre à l’abri de la pluie cette partie la plus eflentielle+ Quant aux Cheneaux dont la maïfon eft garnie, je les ai mis en commurication avec le éonduéteur par des tringles de fix lignes. La hauteur de la pointe verticale au-deflus du toît, eft de 22 pieds. La tringle fait plufieurs coudes arrondis, & vient plonger d’environ fix pieds dans un puits qui ne tarit jamais. Il refte encore un point important auquel il faut fonger en établiffant les pointes, c’eft d’obferver qu'il y en ait une placée dans la dire&ion io le plus communément les orages, ce qui dépend de la fituation locale. Je finis en recommandant d’avoir attention de ne pas donner des coups de feu qui puillent dénaturer les pièces de la tringle, qui ont befoin d’être forgées, parce qu'il eft reconnu que le fer perd d'autant plus de fa vertu déférenre, qu'il approche davantage de l'état de chaux, foir par l'aétion du feu, foit par celle des acides ; cela vient probablement de la déperdition qu’il fait de fon principe inflammable SUR L'HIST. NATURELLE ET LES ARTS. 9267 pour pafler à l’état de fafran de mars; déperdition qui, fuivant M. le comte de Milly, lui ôte fon affinité avec ce même principe inflam- mable dans l'état éleétrique. On doit voir par-là , combien eft vicieufe la conftruction des conducteurs en chaînes, dont Les pointes faites fim- plement en fer limé, fans aucun étamage, ne tardent pas long-tems à être dévorées par la rouille. D’autres ont été fi négligés, que leur extrémité inférieure n'aboutit que dans des égoûts de cuifines, où il n’y a d’eau qu'accidentellement, Cependant s'il arrivoit qu'un coup de foudre provoqué par de femblables conducteurs, s’y porte & fit quelque ravage , il n'en faudroit pas davantage pour décréditer les paratonnerres, fans examiner qu’on ne devroit en attribuer la faute qu'à l'ignorance de ceux qui les auroient dirigés. Je vous demande pardon, Monfieur , pour la longueur de cette lettre en faveur du motif qui l’a dictée. Entraîné par le fujer, elle et devenue un mémoire; mais dans le moment où l’ufage falutaire des conducteurs commence à fe répandre, j'ai cru qu'il étoit important de difliper tous les doutes que l'on pourroit avoir fur leur utilité per- manente , lorfqu'ils font bien conftruits; & pour n’avoir plus à revenir fur cette matière, j’ai ajouté le procédé que j'ai employé , afin qu'il foit füuivi s’il eft bon, ou qu’on le rectifie s’il elt vicieux dans quelques-uns de fes points. Je fuis, &c. MÉMOIRE Sur la culture & Le rouiffage du Chanvre ; par M. l'Abbé ROZIER, Membre de plufieurs Académies , couronné par la Société Royale d'Agriculture de Lyon, le 32 Août 1785. EXTRAIT. L À Société d'Agriculture de Lyon donne le fignal. Elle veut qu’une théorie approfondie devienne ie Aambeau de cette antique fcience où les erreurs fe propagent des fiècles ,\& où les vérités font toujours vacillantes, On citera peu d'exemples que des cultivareurs ordinaires aient fimplifié ou perfectionné des méthodes ou des procédés, On doit prefque toutes les innovations utiles à des perfonnes érrangères à la profellion du cultivateur. On a reconnu de tout tems en France combien la culture du chanvre étoit avantageufe à ce royaume, Maïs fon importance n'a jamais été Tome XXXII, Part. I1,1788. AVRIL, LI 2 263 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, mieux fentie que dans la dernière guerre maritime, En 1783 on en a employé plus de quatre cens millions de livres pefant pour les cordes, cables & voiles, & beaucoup plus du tiers a été tiré de l'étranger , fur- tout des pays du nord. La culture du chanvre feroit bien plus foriffante en France fi elle y avoit toujours été protégée. En 1686, & 1722 la fortie de nos chanvres fut rigoureufement détendue. Dès-lors fa culture fut abandonnée à un tel point qu'on fut obligé en 1749 de fupprimer le droit d'entrée fur tous les chanvres venans de l’étranger. Cette nouvelle loi acheva de décourager le cultivateur , parce qu’il ne put plus foutenir la concurrence. Les nouveaux Etats d'Amérique ont mieux connu leurs véritables intérêts. Ts viennent d’accorder une prime de gratification au chanvre quon exportera de chez eux. Tant il ef vrai que l’efprit de liberté & de patrio- tifme marche toujours de concert avec les lumières. Dans les Etats defpotiques comme la Turquie, l’ignorance accompagne l'abus continuel: d'un pouvoir tyrannique. On demande & on redemande de l'argent fans s'inquiéter de quelles fources il viendra; mais fa décadence prochaine: doit fervir d'un grand exemple aux autres Etats defpotiques. On ne manquera pas d’objecter que la culture du chanvre augmeniée en France préjudiciera ou diminuera celle des grains. Mais que répondronc ces fpéculateurs de cabinet lorfqu'on leur dira, que la France récolte près: du double plus de bled qu'elle n’en confomme ; que la terre qui porte: du bled une année feroit reflée en jachère , & que quoique cultivée en chanvre elle donnera l'année fuivante une: plus belle récolte en bled que fe elle étoit reflée en jachères. ; La France produit le meilleur chanvre connu. Je dis le meilleur pour la qualité, mais non pas le plus long. Ce n’eft pas dans la longueur que: confifte la bonté , c’elt dans le nerf & la finefle. Cependant nos voifins,. für-tout les Hollandois & les Suiffes, font parvenus à une fupériorité dans- la perfection de leurs chanvres, même avec des matières moins bonnes que: les nôtres. Or, comment fe peut-il que le fol de France produifant le’ meilleur chanvre, des meilleurs vins, des huiles, du grain ,. des prai- ties, &c. au-delà de fa confommation , le cultivateur y foit cependant ,- au dire de tous les étrangers , le plus malheureux de l'Europe , tandis qu'il eft fi heureux en Angleterre ! c’eft qu’en Anpglererre il eft libre. De la culture du chanvre. Cette plante eft originaire des Indes & fe naturaliferoit en France fans les gelées de l'hiver, Sa racine eft pivotante. I] lui faut donc'eflentiellement une terre douce: & qui ait du fond, au moins d’un pied. On doit préférer celles qui font: noires ou brunes, un peu argileufes & qui confervent un peu d'humicité. On doit apporter beaucoup de foin dans le choix de la graine. Le meilleur procédé pour en avoir d'excellente eft de faire comme les Anglois & les Hollandois, de deftiner une certaine étendue de bon > SUR L'HIST. NATURELLE ET LES ARTS. 269 terrein qu'on sème très. clair, & dés que la plante eft aflurée, on arrache & on ne laifle qu'une feule tige fur l'efpace d’un pied; ces tiges ainfi ifolées deviennent très-grofles & donnent de la graine excellente. On ne doit la recueillir que dans une,pleine maturité, En général le chanvre ne doit être arraché que lorfqu'ilt mür, & la plante male l’eft toujours avant la femelle, Fixer définitivement la quantité-de femences qu'on doit répandre fur un arpent, n’elt pas chofe aïlée ou difons mieux, toute règle en ce genre feroic abufive , puifque cette quantité dépend de la qualité de la graine, de la manière d’être du climat & des principes conftituans du fol. Du rouiffage. I'y a différentes méthodes pour rouir le chanvre : la première elt à l'air, la feconde à la gelée & la troifième à l’eau. Du rouiffage à l'air. On emploie plufieurs moyens pour rouir le chanvre à l'air, & tous ont leur inconvénient. Le premier confifte à placer contre un mur les faifceaux à mefure qu'on les amène du champ, de les délier & étendre, afin que chaque tige foit frappée des rayons du foleil , & jouiffe des influences de l'armofphère. On fent bien que fi la récolte eft abondante , l'efpace manque bientôt; alors on a recours au fecond moyen qui eft de placer les tiges contre des buiffons. Dans le premier cas les plantes reçoivent mieux les rayons du foleil, parce qu'ils ne font pas coupés ou inrerrompus par les courans d'air qui ont lieu dans les buiflons. Auprès de ceux-ci elles fonc plutôt defléchées que rouies, uifque le courant d'air réuni à la chaleur augmente l’évaporation & hâte: la deffication. La troifième mérhode eft de coucher les riges fur verre & encore mieux fur un pré nouvellement fauché. Les rofées y font plus fortes : il ya par conféquent plus d’humidité qui pénètre le gluten ; maiss'il furvient des pluies un peu fortes, la terre qu’elles font éclabouffer entache’ la filaffe , fur cour fi la terre eft un peu ferrugineufe. Le grand & eflentiel défaut de ces préparations eft que le gluten n’éprouve pas une bonne fermentation , & encore je ne fais s'il en éprouve: aucune. Tout ce que l'on voit évidemment ce font des diflolutions & des deflications renouvelées par les rofées , les petires pluies , les arrofemens ou irrigations , les fraïicheurs humides des prés ou de la terre pendant la nuit, l’exfication enfin & la chaleur alternative de l'air & du foleil pendant le jour. Le gluten de la plante peut en être diffous , entraîné & atténué tant bien que mal, füuivant les circonftances plus ou moins favorables. Du rouiffage par la gelée. On a propofé de rouir le chanvre par’ Ja gelée ; mais en décrire le procédé c'eft en montrer les inconvéniens. La filafle que j'en ai vue retirer avoit de la blancheur, de la finefle & formoit de belles toiles ,; mais d'un blanc mar. Le fl en étoit fans nerf, la toile foible & cotoneufe. Le procédé confifte à foumettre l’action de la gelée du chanvre bien mouillé & que lon avoit confervé fec depuis la récolte »709 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, fans être roui. Cette opération ne peut être regardée comme un rouiflage : c’eft une fimple divifion mécanique de parties fans diffolution phyfique , & qui fe fait uniquement par la propriété que la glace a d'occuper plus de volume que l'eau , de brifer ou diftendre les vafes qui la contiennent. Certainement la fibre du chanvre ou filaffe eft vraiment divifée par ce moyen ; mais La divifion n’a pas lieu uniquement entre une fibre & l’autre. Il fe fair une extenfion dans fa continuité même. Lorfque la plante vient enfuite à dégeler , à être féchée à l'air ou au hâloir , la filafle aban- donne aflez mal fa chenevotte. La réfine n'a pu être difloute par le medium gommeux, parce qu'elle n’a éprouvé ni diflolution ni fermen- tation : la gomme fubit une diflolution , mais elle reprend une confiftance en féchanr. La filafle que l’on retire ainfi eft comme vernie, c’eft ce ui lui donne de l'éclat, & fa Zureté qu'on appelle force s'évanouit avec le vernis. Le blanchîment des toiles préparées avec ce fil exige des leflives plus fortes , plus réitérées , & étant laiffées plus de tems fur le pré pour les blanchir, leur éclat fe diflipe avec le vernis, Du rouiffage à l'eau. Doit-on faire rouir dans l’eau courante ou dans l'eau dormante ? Laquelle de ces deux méthodes eft la plus avantageufe ? Perfonne n’a encore donné la folution de ce problème. On a tâtonné : on a roulé autour du point de la queftion ; mais l'incertitude n'en fubfifte pas moins encore. M. Duhamel paroît donner la préférence au rouiflage dans l’eau croupiffante, parce que, dit-il, la filafle en devient plus douce. M. Mar- candier préfere l’eau la plus belle & la plus claire, fur-tout celle des rivières, parce que le chanvre eft plus blanc, mieux conditionné, qu'il donne moins de déchet, & moins de pouflière au balayage, laquelle pouffière eft très-dangereufe pour les ouvriers. 4 Des expériences faites par la Société d'Agriculture de Bretagne prouvent que les chanvres rouis dans les eaux courantes font fans comparaifon plus blancs que ceux de même qualité qu’on a rouis dans les eaux dormantes. Analyfè du chanvre. Les vrais principes du rouiffage dépendent de Ja nature des parties conftituantes du chanvre. La feule écorce du chanvre doit nous occuper, puifque c’eft le principal but qui engage à cultiver certe plante. Elle recouvre, lorfqu’elle efl parvenue à fa maturité un tube ligneux appelé cherevorte , & cetre écorce à a plufieurs plants de fibres ou couches corticales longitudinales, s'étend du bout de la racine au haut de la tige. Ces plants s'écartent entr'eux pour laiffer pañler les queues ou pétioles des feuilles. d Beaucoup d’écorces de plantes, d’arbuftes peuvent fervir à faire de la filafle, & être réduites en papier; mais foie que ces plantes foient moins faciles à cultiver , foit habitude, foit, ce qui eft plus vraifemblable , que leur filaffe ne foit pas aufi bonne, elles n’ont pas été miles en ufage. Les effais qu'on a faits en différens tems de plufeurs efpèces de lianes , Di SUR L'HIST. NATURELLE ET LES ARTS. 271 de l’apocin , du houblon , du jonc d'eau, du rofeau, du fpart , de l’abaca, du rafia , de la pitte , du bangi, du ierre en arbre , des orties, du papyrus, du bouleau , du tilleul, du palmier , du topinambour , du cocotier , du bananier, &c. ont prouvé la fupériorité du chanvre & du lin. L’écorce qui fe rapproche le plus de la leur eft celle du gener, & fur-tout celle de la pitre & du ko des Chinois. Le point eflentiel dont je dois m'occuper eft de démontrer que le but du rouiflage eft de rompre la cohéfion des fibres qui par leur réunion conftituent l'écorce du chanvre. Cette cohéfion fe fait par l'incermède d’une colle ou gluten , & forme dans le végétal vivant un parenchyme ou fubftance ordinairement verre &-organifée , appelée tiflu cellulaire ou réticulaire à caufe de l’aflemblage de fes réfeaux, reciculare opus, qui lie chaque fbrille & chaque faifceau de fibres entr'eux , dont les mailles ou petits inrerftices font plus étroites du côté du bois que de celui de l’épiderme. Elles femblent aufli par le dehors prendre un des principes de leur exifténce de la lumière qui les colore. Les plantes ériolées font peu colorées. - La vraie théorie du rouiffage doit donc être d'enlever cette colle de la partie fibreufe du chanvre en confervant à chaque fibrille conftituant les faifceaux & les couches route la force & l’élafticiré & les autres perfections & qualités que la nature lui a données. Il a donc fallu premièrement chercher le menftrue qui füt le meilleur diflolvant du gluten fans l'être de la fibre afin de le lui appliquer con- venablement. Cependant on a été obligé de confulter dans ce choix le moyen le plus commode & le moins difpendieux. Ces obfervations néceflitent l'examen de cette queltion : Quel eft ce gluten ? quel en eft le meilleur diflolvant ? L'opinion a dit: c’efl de La gomme , & l'ufage a établi l'eau comme fon meilleur diffolvant. Mais ces affertions font-elles démontrées ? Le fuc qu’on obtient des écorces fraîches ou de toutes autres parties parenchymateufes des végétaux par infufion, macération ou décoction au moyen de l’eau , eft nommé extrait, Ces extraits font de trois genres : la gomme , la réfine, la gomme-refine qui femble être un mêlange intime des deux premières. ; Quel eft le principe exiftant dans l’écorce du chanvre ? C’eft ce qu’on n’a point encore examiné , ou du moins je n’ai trouvé aucune notion exacte fur ce fujet. L'eau eft-elle le diffolvant du gluten de cette plante ? Il faut fe rappeler que l’eau fimplement gommée diffout une affez grande quanriré de réfine, La diffolution s'exécute encore bien mieux fi ces deux fubftances ont été mêlées par la nature, C’eft ainfi que l’eau diffout l'opium & plufieurs autres fubftances qui contiennent feulement une plus grande quantité de gomme que de réfine. Pour favoir donc fi l'écorce de la plante à 232 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE; chanvre contient de la gomme ou de la réfine & dans quelles propot- tions, il ne faut pas appliquer l'eau la première ; mais les véhicules fpiri- tueux qui feuls ou chargés de réfinés ne peuvent difloudre la gomme. J'ai pris une livre d’écorce de chanvrè mür, fans être roui, que j'ai mis en digeftion dans de Pefprit-de-vin, lequel a äcquis une couleur jaunâtre aflez foncée; filtré & évaporég il a refté une réfine brune, qui péfoit quatre gros dix-huit grains. Toutes ces écorces donnent de la réfine par ce procédé ; Les herbes les plus tendres donnent une teinture verte dans l'efprit-de-vin, & cette fubltance verte eft le dernier réfultat du pañlage de la lumière à l'état de phlogifique. J'ai procédé, enfuite, pour retirer la partie gommeufe de la livre décore, qui avoit donné fa réfine dans l'efprit;de-vin; après l'avoir fair sècher, je lai étendue & fait macérer à froid pendant trois jours, dans aflez d'eau pour l'en couvrir. Cette eau enfuite, évaporée avec foin , j'ai obrenu une fubitance gommeufe du poids de trois onces, trois gros & demi, qui n'étoit pas bien defléché, & qui colloit comme un mucilage. On voit que la proportion de la réfine à la gomme, eft affez confidérable dans l'écorce du chanvre , comme l'avoir déjà vu M. Home. Le meilleur diffolvant de cette fubftance, feroit donc l’eau-de-vie, l'efprit-de-vin huileux , préparé comme celui qui fert au blanchiment des {oies que l’en ne veut pas décruer ; enfin le favon , l’eau de chaux , lesalkalis, fur-cour les cauftiques, & les acides adoucis, foir qu’ils foient produits par la fermentation acéteufe du lait, du fon ou de la farine de feigle, ou que l'on emploie les acides minéraux édulcorés ; toutes ces fubftances font reconnues pour être de très-bons diflolvans des gommes réfines ; il faut abferver que l’écorce, foumife à mes expériences pour connoître Ja nature de ce glu‘en, n'a pas été aufi facilement mife en filafle que celle qui a été fimplement rouie, ou du moins cette filaffe éroir plus dure, Ce qui vient de ce que dans le rouiffage, cette fubftance éprouve une vraie fermentation, Des phénomènes qui ont lieu dans de rouiffuge. La fermentation du chanvre dans le routoir ou ailleurs , eft l’objer le plus effentiel à bien examiner , & à bien connoître relativement au rouiflage. Les javelles ou faifceaux rangés avec précaution, font chargés & mis à fleur d’eau dans la première journée. Le lendemain une grande partie - furnage, & il faut la charger de nouveau. Beaucoup de bulles d'air s’échappent de la furface & du tour de chaque tas, & cette Émanation d’air va toujours en augmentant. L'air qui s'échappe le premiér'& le fecond jour, eft femblable à celui de l'armofphère; c’eft celui qui eft adhérent aux furfaces de cetre plante, ou qui fort de fes rrachées ,'& fur - tout des racines, ainfi que celui qui peut être contenu dans le tube de la chenevorte, ;. : u SUR L'HIST. NATURELLE ET LES ARTS. 273 + Au troifième jour , ces bulles d’air donnent un gaz acide; vers le cinquième jour, ou plutôc lorfque le rouiflage eft rapide, ce gaz eft inflammable. Si l’eau eft fagnante, peu abondante, elle fe colore & fe trouble, l'odeur déjà délagréable du chanvre, fe joint une fétidité infuppors ble qui s'étend au loin, & porte les maladies & la mort. Le poiflon périt dans ce routoir ; de-là les loix prohibitives du rouïflage dans les rivières , les étangs; de forte qu'il ne peut fe faire qu’en ‘payant un tribut aux employés , ou s’expofant à dès amendes, des vexations, ou à défauc, il faut infecter l’air & les habitans voilins du routoir, le tout pour ne pas incommoder Les poiflons ; c’eft ainfi que par-tout les plaifirs des puiflans mettent des entraves aux travaux utiles du foible agriculteur ; & que par-tout, nos loix fonc contradictoires avec elles- mêmes, - Qui ne reconnoît au fimple énoncé de ces phénomènes qu'ils font produits par la fermentation donc ils fubiffent les loix ; cettésfermen- ï tation elt retardée où avancée par le froid & le chaud , plus forte & ? plus prompte dans les retenues d’eau oMelle ftaze , longue & moins avantageufe dans les ruifleaux & les rivières, difficile dans Les cafcades.. 4 Les grandes mafles de chanvre font bien plutôt rouies que les petites ; & quant à celles placées dans les eaux ftagnantes, on éprouve lorfqu’on les retire une chaleur fenfiblement plus forte que celle de l’eau; ce font les phénomènees de toutes les fermentations. C'eft le gluten qui fubic cette fermentation; il s’humecte, s’am- mollit, s'enfle comme tout mucilage. Si cette matière étoit entraînée à mefure qu'elle fe diflour, il n'y auroit pas de fermentation ; c'eft pourquoi de rouiflage s’opère mieux dans les eaux dormantes, que dans les eaux courantes. Cette fermentation produit les différens gaz dont j'ai parlé, fuivant les époques & les degrés. de l'opération. S'il n’y avoit qu'une diflolution fans fermentation , chaque plante copfervanc une partie plus ou moins confidérable de fon enduit gommeux, retirée de l'eau, paroiflant rouie, ne fourniroit fa flafle que difcilement après fa dellication, parce que le gluren qui n’auroir pas été détruit reprendroic en partie fon adhéfion ; mais l'on fait que rout mucilage qui a fermenté, perd fa glutinofité, & devient acide avant de pourrir, ue dans cer état if eft un menftrue plus avantageux pour les réfines. Les feules fommités de chanvre font encore glucineufes lorfque #le rouiflage eft parfaie pour les tiges; cette partie eft peut-être plus ré- fineufe. Elle eft d’ailleurs placée plus loin du centre de la fermenta- … tion; elle a moins éprouvé le mouvement inteftin qui atténue! & mix- … tionne intimement, Ë Ces têtes ne font pas-la partie la plus eftimée du chanvre, de même que les racines ; elles donnent de la filafle dure, qui eft autant Tome XXXII, Part, I, 1788. AVRIL, Min 274 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, . détruite que travaillée par le feranceur; ce font ces obfervations qui ont fans doute engagé les Hollandois à employer pour le rouiffage de leurs lins, des couches de fougère entre celles de lin , afin d'accroître la fermentation. Nous au contraire, nous n’avons jamais aflez paflé nos tiges de chanvre à l’égrugeoir pour les défeuiller en tout ou en partie ce qui montre un défaut d'expérience. # D'après ces remarques, l'on doit voir qu'il en eft des plantes ronies comme de celles du champ, elles ne font pas toutes dans leur per- fection ; il y en a de verues à l'ombre, de trop drues, de trop clair- femées , de trop abreuvées d’eau, &c. ainf les parties latérales & infé- rieures ne peuvent pas aufli parfairement rouir que celles du centre. Le rouifleur intelligent fait bien compenfer les défauts acquis aux champs par les avantages des meilleures places au routoir. Malheureufement il y a trop peu de rouifleurs de profeflion. Leurs fonctions font cependant auf utiles ‘que celles de #agnomiers où direcieurs de vers à foie ; il en eft de objet comme de tous autres d'agriculture : chacun prétend en favoir plus que for voifi. Des moyens de perféëionner le roxiflage, de l'arrangement des javelles dans le routoir. ©e que nous venons de dire des différentes qualités du chanvre, fait voir que le tems du rouiflage ne doit pas | être abfolument le même; le chanvre vert & gros elt moins long- Ë temps à rouir que le vert & le fin, le vert moins que le jaune, le long moins que le court, la racine moins que la tête, & le chanvre arraché & féché depuis long-tems, eft beaucoup plus de tems à rouir que celui qui arraché à propos, eft porté tout de fuite de la chene- vierre au routoir. de Le tems du rouiflage varie {uivant la qualité du chanvre. Il eft cependant pour l'ordinaire de quatre à cinq jours en Juillet, de.cinq à huit en Septembre, & de neuf à quinze en Otobre, lorfqu’on à eu le torc d'attendre jufqu'à certe époque; mais c'et au rouiffeur à favoi: connoître lorfque Popération eft à fa perfe&tion. Le terme & le figne de la perfe@ion du rouiflage , font lorfque Pécorce quitte fa chenevortte d’un bout à l’autre & que fa moëlle ef difparue ; on n’eft pas d'accord fur la quantité de divifions ou rubans. différens que fait le plus fouvent l'écorce lorfqu'on la fépare. Les uns en veulent deux, & les autres trois. Plufeurs effais m'ont convaincu: que le meilleur nombre éroit deux. À De la meilleure qualité des eaux pour rouir. Plufieurs effais m'ont M appris que la rempérarure de l'eau la plus avantageufe pour Île rouif- fage, eft de dix à douze degrés du thermomèrie de Réaumur ,; 0e qui fe rapproche comme l'on voit, du degré néceflaire de la fermen- tation des vins en automne. , L'eau dormante eft aufñi préférable à l'eau courante ; ayant mis du M Lt . SUR L'HIST. NATURELLE ET LES ARTS. 275 £hanvre dans le mème ruifleau, partie dans l’eau tranquille , partie au-deffous d’une ufine à la chüûte de l’eau , le premier a été pluréc roui , & le fecond étoit plus dur. Cependant des eaux dormantes , crues ; fales, &c. ne vaudroient rien. L'eau de la mer , des marais falés & falans, les bords des lacs, desétangs, &c. font rrès-propres au rouiffage. En Irlande, en Ecoffe , en Hollande , le fel de mer quoique plus antifeptique que Le fel dépuré, ne soppole pas à la fermentation convenable. IL eft certain que l'opération du rouiffage feroit bien accélérée & perfeionnée , fi les eaux dans lefquelles on trempoit le chanvre étoient alkalines, ! _ Jai éprouvé & fait tirer parti avec le plus grand fuccès pour cet Objet, d'une fource abondante d’eau minérale alkaline & gazeuie. Les fecours de pareilles eaux onc porté la bchifferie d’Harlem à un grand point de célébrité, Les Hollandois y font blanchir très-bien & très- vite ; il faut éviter avec grand foin les eaux ferrugineufes parce qu’elies tachent. Je ne propofe pas de rouir ou de traiter Le chanvre en javelles , avec des eaux aikalines, à moins qu'on en ait à {a portée; mais je demande férieufement pourquoi on ne les employeroir pas pour la filafle aflez belle & deftinée à être réduire en toiles où fils fins. Ne vaudroit-il pas mieux faire fubir une partie de ce blanchiflage à la filafle, qu'à la toile qu’on énerve ainfi ? On décrue la foie avant que de la mettre en fabrique. - Connoiffant la propriété qu'ont les acides de diffoudre les gommes- rélines, j'ai appliqué ces mêmes acides affoiblis par l'eau, rels que le vinaigre, les fels faccharins , acides extraits des végétaux, comme Je tartre , le fel d'ofeille, &c. je les ai appliqués , dis-je, à plufieurs tiges de chanvre non-roui, & leur rouiflage a eu lieu en peu d'heures. L’acide fulfureux volatil a produic le même effet en expofanc du chanvre à la vapeur du foufre en combultion. Enfin le lait aigri ne donne ce beau blanc aux toiles , que par fon acide. Du rouiflage à Pair. Le tems néceflaire pour rouir le chanvre en plein air , eft fréquemment d'un mois; mais ceci dépend entièrement de la faifon , des pluies, des vents , &c. Les fibres du chanvre ainf roui, adhèrent plus fortement que celles du chanvre roui à l’eau, ce qui vient d'une portion de réfine qui lui eft encore adhérente ; c'eft cette réline qui produit une pouflière aufli inflammable que la colo- phane en poudre, qui s'élève & voltige dans les ateliers où l'efpado- nage & le pilage de la filafle s’exécutent, & qui par fa virulence , fatigue ( fort la refpirationMi& le poumon des ouvriers. J'ai tenté de faire du papier avec cette pouflière qui n’elt d'aucun ufage. Celle du chanvre roui à l’eau, a mérité la préférence. » Tome XXXII, Pare, I, 1788. AVRIL. Ma 2 AE 236 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, Pour diminuer ces inconvéniens, ainfi que ladurée de ce rouifage ; j'ai tenté avec fuccès avant d’expofer le chanvre à l'air, de le mouiller avec de l'eau rendue un peu alkaline; une léoère leflive , l’eau des fumiers & des bafles-cours , rempliroient le même but, ainfi que l’eau de chaux. Outre que par ce procédé on détrempe , on difflout le gluten réfineux , le chanvre conferve la propriété d'attirer une, humidité qui favorife beaucoup l'opération. En Hollande on arrofe avec l’eau de mer les chanvres étendus fur le pré. On pourroit en faire autant fur nos côtes, dans les lieux où on brüle les varecs , &c. Un autre défaut eflentiel du rouiffage fait à Jair, ce font ces taches noires qui font produites par un terre martiale. Il faut donc éviter d'étendre le chanvre fur de pareilles terres. Cetre méthode de rouir eft donc longue, embarraffante , laborieufe, & a plufieurs inconvéniens qui doivent la faire rejetter. Tout au pli, peut-elle être aëmife dans les pro- vinces ‘méridionales où le ciel eft beau , les pluies rares, les rofées abondantes, &c. Cependant fi par des circonftances, on ne pouvoit avoir des routoirs à eau que près des habitations, il vaudroit encore mieux rouir à l'air , que de s’expofer aux vapeurs infectes de l’autre méthode. Sur Les moyens de prévenir l'odeur défagréable, & Les effets nut- fibles du rouiffage dans l'eau. L'odeur du chanvre récent, refpirée pendant quelque tems, enivre, afloupit, porte au cerveau, donne des vertiges. Elt-ce de l'odeur du chanvre même, & de fes effets défagréables ou nuifibles , dont il faut fe garantir? Les qualités du chanvre, & fes effets font-ils les mêmes dans tous les rems du rouif- fage? C'eft ce qu'il faut examiner premièremenr. ° J'ai mis en même-tems du chanvre & du poiflon dans un réfervoir. Le fecond & le troifième jour, le poiflon en fut affeété, quoiqu'il eût aurant qu'il étoit en fon pouvoir évité le chanvre ; il furnageoit, étroit fans mouvement & étoir enivré. Une partie de ces poiffons mife dans un autre réfervoir, revint en peu de tems à la vie. Ceux qui demeurèrent dans le premier réfervoir, moururent empoifonnés. J'ai mis au fixième jour des poiflons dans le réfervoir qui contenoit le chanvre , ils n’en furent affectés ni enivrés; mais ayant réitéré cette expérience & mis les peiflons après le fixième jour dans le réfervoir où le chanvre étoit en grandes maffes , ils ne furent point enivrés, mais ils périrent tous , avec la différence que leur mort fut graduée d’après leur force, au lieu que les poiflons enivrés Pavoient tous été entre le fecond & troifième jour. fl s’enfuit que le poiffon enivré ne pé- iroit pas s'il étoit entraîné dans une eau pure; fecondement que la fermentation détrui® la virulence narcotique & enivrante du chanvre; & que l’eau du chanvre eft alors au poiffon ce que feroit pour lui une eau de fumier où il périroit malade , mais non enivré, SUR L'HIST. NATURELLE ET LES ARTS. 277 Le danger des eaux des routoirs eft donc bien établi, cependant ils font néceflaires fi l’on veut avoir de la belle flaffe; il faudroit donc de nouveaux réglemens pour en fixer la quantité dans telle ou telle rivière, tel ou tel étang , &e, . Mais feroic-il pofible de remédier à ces dangers ? L’agitation de l'eau paroïît le meilleur moyen, puifque les routoirs dans les eaux cou: rantes n'ont aucune odeur, à moins qu'ils ne foient trop multipliés. Ne pourroit-on pas-donner un mouvement aux eaux dormantes des autres routoirs; par exemple ; par le moyen des ailes ‘d'un moulin à vent ? &c..&c. On pourroit auf employer différentes fubftances qui abforberoient ces airs, La chaux}, qui d'ailleurs eft utile au rouiflage , rempliroit une partie de ces indications , en abforbant l'air fixe, Enfin, il faudra multiplier dans ces endroits les plantes aquatiques qui abforbenc tous ces airs. é Du rouiffage, à fec. Mais je crois pouvoir propofer un autre moyen de rouir le chanvre, qui évitera toute la mauvaife odeur & fes fuites. Il confifte à renfermer dans une foffe creufée en terre la quantité de javelles de chanvre que l’on veut rouir , & de les recouvrir d'un pied de terre. Le chanvre y. fubit une efpèce de macération qui eft une véritable fermentation. La deftruction entière du végétal, & fa converfion en fumier auroit lieu, fi comme dans le rouiflage à l'eau on l'y laiffoit crop long-tems; il eft donc néceffaire d’arrêrer cette fermentation au, degré où la flafle fe détache facilement de la che- nevotte. Ce procédé exige quelques détails. Les fofles peuvent varier de grandeur & de largeur. J'ai cependant lieu de penfer que fi elles étoient très- largés , il faudroit les recouvrir d’une couche de terre de plus d’un pied d’épaifleur , afin qu'il y eñcune plus grande circulation d’air & de gaz dans fon intérieur ; il faut encore s oppofer aux éboulemens de terre entre les javelles. Si la couche étroit trop sèche ou trop fuperfcielle, cette couverture fera arrofée ainfi que les javelles , far-tout fi les picds de chanvre font arrachés depuis, plufeurs jours , & en raifon de leur ficcité. Cette manière de rouir permet d'établir la foffe près d’un endroit où foit l’eau néceflaire au dernier lavage. On peut employer les foffes qui font déjà conftruites pour d’autres ufages, telles que celles pour les fumiers ou pour des réfervoirs d’eau, Mais il eft effentiel qu'elles foienc sèches. Celles à fumier ont toujours accéléré l'opération à caufe du levain qu’elles contiennent, Les foffes murées font moins avantageufes, On peut cependant s’en fervir fi elles font sèches. En général il ne faut creufer les foffes ni dans un terrein trop fec ni trop humide. Il eft important d’en tapifler le fond, les côtés & la furface avec des joncs qui retiennent la terre & empéchent qu'en fe déplaçant elle ne fe mêle avec les javelles, 578 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, Dans l’arrangement des javelles fur leuriplae, il faac placer au centre & perpendiculairemenc un certain nombre des ‘plus grandes tives qui! traverferont la maile des javelles | & s'éleveront au-deflus de la fofe, Elles ferviront d'indicateurs du point où eft le rouiflage,, afin de l'arrêter au moment néceflaire, Ces plantes énfouies macèrenc & fermenteñt réellément, d’abord d’une manière infenfible , enfüire beaucoup trop vite, ft on ne les furveille pas avec la même exactitude qui convient aü rouiffagé à l’éau, Lés gaz acides & phlogiftiques s’y produifent de même, Ils y font-rétenus'& forcés de circuler dans toute la mafle & de fe combiner avec les rerres qui forment la couverture & avec celles des parois qui dès-lors deviennent us excellent engrais, Ces gaz fe combinent aufli avec-le gluten della plante dont ils font de bons diffblvans, 1 Per L'état de la foile, la vature de fa terre, celle-de la plänte peuvent faire varier la durée du parfait rouiflage, Je l'ai toujours obtenu dans:l’efpace de moins de trois femainés : ce qui eft d'autant-plus avantageux que la fofle fe trouve débarraflée lorfque vient le moment de la remplir de nouveau avec les plantes femeiles ou à fruit fi on veut les féparer des tiges à fleur. : TM Lorfque les tiges perpendiculaires ou‘indicätives annoncent que le rouiflage eft à fon point, on découvre la foffè. S'il arrivoit que l’air qui s’en échappe incommodât les ouvriers, on pourroit près de l'endroit où lon a pratiqué la première ouverture allumer quelques fagots, & leur flammie évaporeroit tout le mauvais air, quoique je nelyaie jamais obfervé, ll ne refte plus qu’à fortir les javelles de la foffle. Celles des parois & du centre m'ont paru également roues: La derrière opération contiite à les laver & enfuice les faire fécher, comme il à été dit ci-deflus en parlant du procédé à l’eau. j Certe méthode donne la folution complète de la dernière queftion du programme , & jofe dire qu’elle va bien au-delà, puifqu'en faifanc abandonner le rouiffage à l'eau, elle ferviroit à faire fupprimer la caufe de l'infedtion de l'air. Le rouiffage à fec le fupplée entièrement. Il eft plus commode, moins coûteux & nullement dangereux. : Expofé & vues fur La préparation de la, Filaffe pour la meutre en queues. 4 e I. Tiller. C’eft enlever l'écorce du tilleul pour en faire des cordes. L'ufage a prévalu pour appeler seiller l'action de féparer l'écorce de: chanvre dela chenevorte. Il y a deux manières de faire certe opération, l’une à la main qu'on appelle proprement reiller, & c’eft la meilleure : la feconde au moyen d’un infirumenr nommé mâchoire, broye, avec lequel on brife la chenevotte & on la fépare de fon écorce, Il, L'efpadonage , pelage , patelage , eft Vopération par laquelle on —_— SUR'L'HIST. NATURELLE ET LES ARTS. 279 bat la laffe contre une planche tenue de champ avec une palette ou battoir de bois, nommé e/padon, dans la vue de l’adoucir & de la purger, en brifant non-feulement les parties de la chenevotte qui lui reftene unies, mais aufli certe ipamtie gommo-réfineufe qui adhère encore aux fils. Quelquefais on bat la laffe fur un bloc de boïs avec un maillee, ou dans une auge ayee un pilon , ou on fa place fur une auge fur laquelle roule un cylindre mu par l'eau ou un cheval, Dans toutes ces manœuvres on fecoue fréquemment la filaffe afñn d’en déracher la pouflère âcre. On a cherché à y remédier: M, Helloc a vu blanchir avec fuccès la filafle en la plaçant dans la chûte bouillonnante de l’eau d’uñ moulin. MM. Home & Marcandier l'ont fait macérer pendant troïs ou quatre jours dans de l’eau , obfervant de fa battre, laver, tordre , &c. M. Home a fubftitué à l’eau fimple des diffolutions d'alkalis unis à la chaux , ou l'eau de chaux feule, M. le Prince de Saint-Sever publia if ÿ a quelques années le procédé fuivant pour faire de la Élaile auffi fine 8 auff belle que celle de Perfe. - * : On prend de la belle filaffe qu'on palfe par un peigne à désroffir, On la lie avec une ficelle par paquets de trois onces , & l'on en joint une ‘dixaine avec une corde pour pouvoir les laver commodément. On les met “enfüuire dans une petite cuve de bois, & on les couvre d’une toile pour recevoir la leffive fuivante : Prenez fix livres d'eau par cheque livre de filaffe, demi-livre de foude pulvérifée ou des cendres en proportion , enfuire un quart de livre de chaux eg poudre: läiffez infufer pendant vingt-quatre heures. Faites bouillir demi-heure, & verfez l'infufon bouillante dans la cuve, que vous couvrirez pour maintenir la chaleur, Au boat de fix heures on examine fi la flaffe fe divife en petits filamens, & alors on la retire. Si la leflive n’eft pas aflez faite ,on en tire par un trou pratiqué au bas de la cuve , on la fait rechauffer , & on la verfe une #econde fois. On peut la laïfler une heure: enfaite on lave bien la filaffe dans l’eau claire. Après certe opération on prend une once & demie de favon par livre de chanvre dont on enduit tous les paquets On les remet dans Ja cuve & l’on jette par-deflus de l’eau bouillante autant qu'il en faut pour qu’ils foient bien imbibés ; on les laïffe ainfi pendant vingt- quatre heures : enfuite on les lave bien jufqu'à ce que l’eau forte claire, & on les fait fécher à l'ombre avant de les peigner ; il faut les battre avec une fpatule de bois, afin qu'ils fe rempent moins quamidtn ies peigne. INT. Du ferancage. La filafle fimplement efpadonnée fe met en poienées de deux ou trois livres que Fon nomme branches ou queues de chanvre brut. Le feranceur travaille enfuite ces queues & les pañle em plufieurs peignes de différente fineffe. Re 280 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, ER PA DORMI DE M DODUN, AP Meme E MEN A! MÉTHERIE. Monsieus 24 Permettez-moi de prendre la voie de votre intéreffant Journal pour répondre à la note que M. Pictet a mife au bas de la lettre qu’il vous a écrite ( Journal de Phyfique, cahier de novembre dernier , p. 368 ). J'aurois gardé le filence, fi le fujet moins public, eûr été moins im- portant; mais je me trouve forcé d'élever la voix, pour faire con- noître l’erreur où eft M, Pictet, fur ma maniète de procéder au cha- lumeau à bouche, en prenant le verre, pour fupporr, Ce Phyficien établit d'abord que ma méthode ef différente de celle de fon célèbre comparriote, & il ajoute qu'il eft moins furpris de me voir opérer la fufñon des fubflances réfractaires, qu'il ne le feroit, fi je n'eufle pu l'obtenir. Je réponds à cette cenfure un peu sèche, que la forme du fupport dont je me fers, n'apporte aucune différence dans les effets : j'ai toujours vu que le verre, quelque puiflanc que foit ce flux en toute autre expérience , n’aide ici en rien à la fufion. J’avois déjà depuis long- temps pour moi, l’aflertion de M. de Sauflure à ce fujer. Ce favant, obfervateur vous écrivoit en Juin 178$, en vous parlant du chalumean à bouche: « Peut-être foupconnerez-vous ; Monfreur , que la matière du tube fèrt de fondant aux pierres, & facilite leur fufion 3 mais Vous VOUS convaincrez du contraire par votre expérience , lor/que vous verrez que l'extrémité de La pierre efl toujours la mieux vüurifree, parce que ce Jüpport, quelque mauvais deferent qu’il Joit , abforbe pourtant toujours une partie de [a chaleur. Journal de Phyfqne, vome 26, pag. 412 Voilà du poltif, & c’eft ce qui s'eft toujours paflé fous MES VEUX ; che feule raifon qui m'ait engagé à tenter la fufon des fubffancessréfractaires par cette méthode, & je n'aurois jamais ofé en offrir au public les expériences, fi J'eufle penfé que ce püt être au verre que jen devois la fufon, J'ai donc à démontrer à M. Pictet que mes moyens font les mêmes que ceux de M. de Sauflure; j'ai à lui dire, que fans paroître le vouloir , il a attaqué trop légèrement une belle méthode, que fon im- portance & fes effers me feront toujours regarder comme une découverte digne CR 2 ” SUR L'HIST. NATURELLE ET LES ARTS, 281 digne de fon illuftre auteur. 1°. Point de différence entre ma recoupe de verre, & le tube employé par le célèbre naturalifte; même nature , conféquemment mêmes effets; les expériences viennent à mon appui. M. Piétet penfe-t-il qu’en faifant uface de la recoupe de vitrier, le fragment que j’adapte à la pointe, fe trouve enfoncé au premier coup de feu au milieu du globule, & que la fufion environnante du verre de fupport doit entraîner celle du fragment en lui fervant de flux ? C’eft une erreur que je m'emprefle de combattre ; il eft des fubftances qui s’enfoncent dans le fupport, c'eft même un de leur caractère, tous les calces fubiflent cette loi; j'oferai cependant aflurer à M. Picter, qu'avec un peu de ménagement dans Le foufle, on parvient aifément à tenir continuellement faillant fur le verre le fragment dont on veut opérer la fufion, & quelque violent que foit le premier coup de feu, il ne l’englobe point. Je n’ai jamais plus de peine à opérer la fufon d'une fubftance , que lorfqu'elle fe couche fur le globule , ou que comme les calcés purs , elle s'y enfonce réellement; pour peu que le fragment foit volumineux, fa fufñon eft impraticable, & cependant à entendre M. Piéter, je ne dois la fufon des fubflances réfractaires ; que parce que , enfoncé dans le fupport , le verre lui fert de fondant; d'après ce fair, la partie noyée dans le fupport , devroit être la première en fufion ; j'ai toujours vu le contraire, & M. de Sauflure vient de dire la même chofe. ù EL: Il ya à ce fujet, Monfieur, une faute effentielle à corriger dans mon mémoire ( cahier de Juillet dernier, page 45, ligne 32 ), c’eft une inverfion de phrafe à changer. ( J'ai dit « les bords à la vérité s’aminciffoient par l'extrême intenfité de la chaleur que j'ai toujours reconnu étre plus forte & plus active dans l’intérieur qu'à la fu- perficie, il. faut lire plus aëive à la fuperficie que dans l'intérieur ».) Cette inadverrence feroit-elle le fujer de l’accufation de M. Pier? Je n'ai point lieu de le croire. J’ai donné dans le cours de mon mé- moire une idée bien différente de la façon de penfer qu'il me fuppofe. On peut confulter mes expériences fur le charbon, fur la platine, &c... M. Piétet attaque enfuite l'ufage où je fuis de pulvérifer quelques fubftances ; rempli de fon premier fentiment, il penfe que le fupport ainfi chargé de leur poufière doit les envelopper dans fa fufion, & qu’elles font d’autant plus promptes à couler que le flux a plus d’aétion fur les petites parties. C’eft une feconde erreur qui tient à la première, Je dois dire n'avoir jamais vu la fufion d'aucune fubftance , tant qu’elle a été enfoncée dans le verre ; il faut les coups de feu les plus long- tems continués & les plüs violens pour la faire difparoître , & pour peu qu'elle y foit entrée, on n'y parvient point, Il ne me refte plus qu'un moyen de défenfe à oppofer à M. Picter, &ÿy compte; c'eft celui de le prier de répéter mes expériences pour Tome XXXII, Part, 1, 1788. AVRIL, Nan 282 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, me croire. Il rendra alors à la méthode de M. de Sauflure toute l'importance qu’ lui a enlevée ; il n’établira plus de diftinétion entre ma manière d'opérer & celle de ce célèbre Naturalifte ; il fe con- vaincra enfin que la fufion des fubftances réfractaires au chalumeau à bouche, n’elt due qu'a leur extrême peritefle ; ainfi que je l'ai die & démontré dans mon mémoire (Journal de Phyfique , cahiers de Juillee & Août de cette année) ; & que le verre de füpporc n'y influe en rien; qu'il n’eft pas poffible d’obrenir leur fufion pour peu qu'ils foient en- foncés lépèrement dans le verre, & que généralement rous les effets qu'on voit fe pafler fous les yeux, s’opèrent fur la furface du globule où la vitrification a toujours lieu, en effleurant légèrement le verrez c’eft ce quon doit entendre, lorfque j'ai dit en parlant des fubftances qu'elles bouillonnoïient dans l'intérieur, & que leur fufñon coulante simmifccic dans le fupport. J'aurois dû dire qu'elles bouillonnoient en effleurant légèrement la furface du fupport ; je n’ai jamais vu dans l'intérieur que des bulles d'air. Je fuis, &c. De Caflelnaudary , ce 30 Décembre 1787. RE Le SUITE DES OBSERVATIONS FAITES A LAON sUR ELA BOUSSOLE DE VARIATION DE M. COULOMB, ANNÉE 1787; Par le P.COTTE, de l'Orat. Correfp. de l Acad. Roy. des Sciences, Membre de la Soc. Roy. de Méd. de Paris, de l' Acad. de Bordeaux, de la Soc. Ele&. météorol, Palatine, Sec. perp. de la Soc. Roÿe d'Agricul, de Laon. : J'ar rendu compte des obfervations que j'ai faites en 1786 dans ce Journal (tome xxx, page 349), & j'avois déjà publié dans le même Journal (tome xx1x, page 189 ) les obfervations de 1784 & 1785. Je vais donner ici la fuite de ces obfervations que j’ai faites en 1787 fur l'aiguille de M. Coulomb. Celle du fieur Fortin, dont j'ai donné la variation l’année dernière, a prefque toujours été ftationaire cette année-ci,. ainfi que aiguille de déclinaifon du fieur Brander que je tiens de 13 munificence deS, À. E, l’Electeur Palatin; celle-ci a prefque toujours été fixée à 21° 35". Il n’en a pas été de même de celle de M. Colomb qui eft fi mobile, qu'elle eft prefque toujours agitée. J’ai remarqué fur-tout em SUR L'HIST. NATURELLE ET LES ARTS. 2°3 novembre & décembre de très-grandes variations qui ont été obfervées aufli en Allemagne. à J’obferve cette aiguille prefque d'heure en heure ; j'ai fait pendant le cours de 1787 , quatre mille quatre cens vingt-trois obfervations. Je vais donner dans la Table fuivante la variation moyenne de chaque heure, le nombre des obfervations faites aufli à chaque heure , & le nombre de fois que l'aiguille m'a paru trop agitée pour pouvoir déterminer fa variation, Dre Del Nomre| Nombre ras Nombre| Nombre Heures. des des || Heures. des des moyenness 1 F moyennes, « obferv. |agitar. obfèrv. |agitar. matin. lo À‘ U tbe EU 4j VI US, 5 3412307 7 III. |5, $6, 17. 194 10 VII. |4, 55,1 40. 327 1$ IV.:|5,146, 17.) 217 6 VIII. |4, 50, 39.| 295 29 | Vus 27, 41 | 216 4 IX. |4, 57, 39. 255 |. 27 VS 8412410270 4 DER ENT MOI 15 VII, |5, 28, 48] 223 6 EXT 23% 0: MOT 19 VIII, |s,-19, x7.| 319 +18 CNET EME 22 16 OM re GE Do rer 24 foir. =—— | fu]t L |6, 4, 20.| 234 I Fi Se 4 DL 16, "18547 279% 3 lPannée.|ÿ, 29, ‘2.| 4154 | 220 Il réfulte de cette Table, 1°. que la variation diurne a fuivi l'ordre que je vais tracer : elle s'eft éloignée du nord depuis 9 heur. du matin jufqu'à 2 heur. du foir; & elle s’en eft rapprochée depuis 3 heur, du foir jufqu'à 6 heur. du matin. Il y a eu quelques petites anomalies à 7 & 8 heur. du matin & à 6 heur. du foir. La marche de l'aiguille reflemble exactement à celle de l’année dernière, & à très-peu-près à celle des années précé- dentes. Cette variation diurne & périodique a été obfervée également depuis plufieurs années en Hollande & en Angleterre ; ainfi la variation diurne périodique de l'aiguille aimantée fe confirme de plus en plus, & ce phénomène eft aufli conftaté qu'un fait de phyfique peut l'être ; 2°. l'aiguille eft d’autant moins agitée qu’elle approche davantage du maximum de fa variation occidentale ; fa plus grande agitation a lieu à 8 & 9 heur. du matin & à 9 heur. du foir. Ce réfultat s'accorde encore Tome XXXIT, Part. 1, 1788. AVRIL. Nn 2 284 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, avec ce qui a été obfervé les années précédentes. Il feroit bien à fouhaiter que pareilles obfervarions fuflent faites à différentes latitudes ; la compa- raifon que l’on en feroit, conduiroit certainement à des réfulrars inté- reffans, & qui aideroient beaucoup à éclaircir la théorie du magnétifme qui eft encore fort obfcure : elle ne fera folide qu'autant qu'en la fondera {ur des obfervations multipliées. L'Ouvrage de M. F’anfwinden , qui a remporté le prix de l’Académie en 1777, & qui forme le tome huitième des Savans Etrangers , eft bien propre à fervir de modèle à ceux qui voudront fe livrer à ce genre d'obfervations. DESCRIPTION D'UN NOUVEAU SERPENT DE L'ILE DE JAVA; Extraite des Aëes de l Académie Royale des Sciences de Stockolm, pour l'année 187 ; Page 306 ; Par MCLAUDE-FREDRIT HORNSTEDT, Doéfeur en Médecine. Pavpanr mon {éjour à Java en 1783 & 1784, j'eus le plaifir dans un voyage de Bantam de découvrir un des plus grands ferpens , qui fe trouvent dans les Indes, & qui jufqu'ici s’eft dérobé à l’obfervation des Naturaliftes attentifs. Il fut trouvé dans une vafte forêt de poivriers, près de Sangafan. Un Chinois de notre compagnie le tranfportoir vivant à Batavia , le tenant par la tête avec une canne de bambou dont l'extré- mité étoit fendue. Comme il étoit trop grand pour être confervé dans Vefprit-de-vin , je le fs écorcher ; la chair fur taillée en pièces par les chinois préfens, qui la firent bouillir & frire, ce qui fut pour eux des mets exquis. La peau fut mife dans de l’arak, & eft dépofée dans le cabinet d’'Hiftoire-Naturelle du Roi de Suède. En ouvrant ce ferpent on trouva, outre une quantité de fruits non digérés, cinq petits, chacun de neuf pouces de longueur, qui probablement étoient la caufe du gros ventre de celui-ci, qui étoit une femelle. Quoique cet animal eût toutes les apparences des autres ferpens ordinaires , il me parut néanmoins d'abord fort fingulier , lorfque je trouvai que non-feulement il lui manquoit les écailles (Jcura & fquamæ ) fous l'eftomac & la queue , qui fonc les feuls inftrumens dont ce genre nud a été pourvu par la nature pour fe tranfpor- ter avec aflez de viteffe d’un endroit à un autre, & qui font le caractère entre les genres des ferpens décries jufqu’ici. Je trouvai aufi qu'il lui manquoit les anneaux & plis (arnuli & rugæ) qui diftinguent les deux derniers genres de ferpens dans le fyftème de Linné, Au lieu que d’autres SUR L'HIST, NATURELLE ET LES ARTS. 285 ferpens ont une peau unie, celui-ci écoit fur-tout couvert de tubercules , qui étoient raboteufes , & couvroient , tant la partie fupérieure que l’infé- rieure. Voilà pourquoi il ne peut pas être rapporté à quelqu’un des genres connus; mais il fait un nouveau genre , que je nomme Acrochordus, & dont j'ai l'honneur de donner la defcription. ‘ACROCHORDUS verrucæ trunci caudæque, Jar AnICuS acrochordus, (PI.I.) CAPUT truncatum , deprefJum fquammatum. MaxiiiÆ æquales : Juperior fubtus emarginata , inferior adunca. OcuLir ante medium capiris laterales. Iris livida. NARES circulares, parvæ, proximæ Jupra apicem roffri. RICTUS ORIS, refpeäu corporis parvus. DENTES LETHIFERI , nulli. DENTICULI in utraque maxilla fubulati, acutiffimi, reverfr. OssicuLA 2 in palato longitudinalia , denticulis minutiffimis, LiNGUA craf]u cylindrica gulæ adnexa. -SETÆ duæ acuminatæ flexiles nigræ [ub lingua prodeunt. Corpus verrucofum (abque feutis [quammis annulis & rugis) juxta caudam craffiffimum , ab ano .verfus caput attenuatum. APERTURA ANI parva. CAUDA teres angufliffima apice truncata. VERRUCÆ fJcabræ latere anteriori tricarinatæ, corpus totum & caudam tegunt, MAGniTUDo , longitudo corporis ped. fuec. 8, caudæ ped. x, crafities colli polli 6, maxima polli 10, caudæ ad bafin poli, 1 © verlus apicem digiti minimë (1). COLOR fuperne corpus nigrum , inferne albidum , latera albida maculis nipris. Locus in [yflemate Linn. ante amphisbænæ genus. (x) Le pied fuédois eft de dix pouces, & le pouce de dix lignes. Le pied fuédois contient à-peu-près onze pouces du pied françois, Nose des Rédadeurs \ 2 IN j ÿ 1 ù 286 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, SUR LES PRINCIPES CONSTITUANS DES CALCULS DE LA BILE ET DE LA VESSIE; Par M. DE Scopozr: Traduit de l'Allemand (1} D E tous les animaux l'homme eft le plus fujet aux concrétions pierreufes qui fe forment dans l'intérieur du corps ; celles de la bile font les plus nombreufes: elles font prefque toujours criftallifées & d’un goût très-amer, J’en avois recu de M. Tiflot, qui provenoient d'une femme, & qui étoient toutes des corps triangulaires irréguliers. Pour en connoître la nature, en foumis quelques-unes à la diftillation; & je verfai fur Les autres de l'excellent efprit-de-vin ; j’obtins des premières un peu de phlegme alkalin, beaucoup d'huile épaifle , de couleur brune, & un charbon très-léger, dont les cendres me donnèrent de l’alkali végétal & minéral. Comme la décompofition de la bile offre les mêmes parties conftituantes , il s'enfuit que ces concrétions doivent leur origine à l'épaiiffement de ce fuc. Ainfi il ne faut pas s'étonner, que les ouvriers & les perfonnes fédentaires chez lefquels l'écoulement de la bile dans les inteftins eft ralenti, foient les plas fujettes aux calculs biliaires. Ces pierres fe diflolvent prefqu'entièrement dans l’efprit-de-vin ; la couleur de celui-ci en devient d’un jaune très-foncé. Je décartai cette liqueur& la laiffai repofer dans l’efpérance qu'il s'y formeroit des criftaux ou un autre dépôt. Après un mois d'intervalle, j'apperçus dans le vafe quantité de parties fpongieufes , molles , friables & qui brilloient comme de l'argent. Je les recueillis, &#comme je les prenois pour un acide concret, je Les mis diftiller dans une cornue; mais au lieu d'acide j’obtins de l'huile entièrement femblable à celle dont j'ai parlé ci-deflus ; ce qui confirme mon opinion fur l'origine de ces concrétions, Les calculs de la veflie donnèrent à Tackenius & à Homberg de l'alkali volatil , provenant des parties glutineufes qui femblent fervir de ciment pour unir les parties pierreufes les unes aux autres. En examinant ces dernières, Margraf rémarqua que quelques-unes étoient volatiles , les autres fixes. Percival trouva que les unes éroient diffolubles dans l'acide vitriolique & que les autres ne l’étoient pas. Schéele & Bergman EE ———— ——————————— (x) Supplémens aux Annales chimiques, par M, Crell, tome IF, troifième cahier, SUR L'HIST. NATURELLE ET LES ARTS. 287 regardèrent les premières comme un acide particulier , concret , & uni à la terre calcaire ; mais leur nature n'avoit pas encore été entièrement dérerminée. Je pris deux de ces calculs, lun blanc, l’autre jaunärre ; fur un gros du premier je verfai quatre onces d'acide nitreux fumant, Au moyen de la digeftion tout fut diflous à l'exception de onze grains que je n'ai pas examinés jufqu'à préfent. La diflolurion fut étendue d'eau & filtrée, Dans la vue de découvrir la terre calcaire que Bergman dit avoir obtenue, fur une partie de la folurion je verfai de l'acide vitriolique, phofphorique , fluorique.& faccharin; mais il ne fe manifelta aucun veflige de terre calcaire. Je diftillai le refte de la folution , qui me donna une matière faline blanche , en criftaux prifmatiques, comme font ordinairement ceux de Facide faccharin. Je me fuis afluré par plufeurs expériences décifives, qu'indépendamment de cette reflemblance extérieure ; ces criftaux étoient véritablement de l'acide faccharin fort pur. Je fis les mêmes expériences fur l’autre calcul, & j'obtins des produits pareils, à-peu- près dans les mêmes proportions. J'ai encore-examiné le fédiment de l'urine , & peu-à-peu je l'ai converti entiérement en acide fac- charin. Fr ._ D’après ces expériences, les principes prochains des calculs de la vellie font l'acide faccharin , une matière glutineufe animale & une fubftance terreufe dont la nature n’eft pas encore entièrement déterminée. Par-là on comprend pourquoi les mets & les boiflons qui contiennent beau- coup d’acide faccharin, comme le fucre, le froment, le vin doux, con- ®tribuent tant à la formation des calculs: la bière , fur-tout celle qui eft amère, ne produit pas cet effet aufli facilement. Si parmi les perfonnes qui font ufage de nourritures fucrées, il n’y en a qu'un petit nombre qui foient affligées de la pierre, il faut en chercher la caufe dans la conftruction & l’aétion plus forte des vaiffeaux de la veflie. Par des raifons faciles à pénétrer, les amers, & fur-tout les favons, font dans ces cas les meilleurs remèdes. ADDITION AUX EXPÉRIENCES PRÉCÉDENTES; Par M. BRUGNATELLI. Des calculs de’ veflie, dont j'avois déterminé le poids, ayant été enfermés pendant quinze jours dans un vafe rempli d’air fixe & pofé fur du mercure , ne furent aucunement attaqués & ne perdirent rien de leur poids: l'eau même imprégnée d'air fixe n’agit pas fur eux aufli fortement que l’eau pure. . . . L'eau de chaux n’eft pas un moyen général ni sûr de fondre le calcul; elle peut à peine être de quelques fecours . Jorfque l'acide fe trouve libre dans ces concrétions; leau pure au con- taire, à en juger même par les expériences de M. de Scopoli, eft le 288 OBSERVATIONS SUR LA.PHYSIQUE, moyen le plus sûr & le plus efficace qu'on puifle employer ; c'eft pour quoi je confeillerois non-feulement d'en boire, mais encore de l'injecter dans la vefñlie; il faudroit pour cela qu'elle füt chaude & récemment diftillée afin d’être bien pure : on pourroit répéter ces injections plufeurs fois par jour; de cette manière on pourroit efpérer qu'une pierre d'une groffeur médiocre fe difloudroit dans peu de femaines ou peut-être dans peu de jours. Suivant Schéele, cinq onces d’eau difflolvent huit grains de cette pierre: jen ai eu qui fe font difloutes encore plus facilement : quelques-unes dans quatre onces d’eau perdirent jufqu’à feize grains à une chaleur de 14 degrés de Réaumur. Lorfqu'on apperçoit des traces d'acide dans l'urine, on peut confeiller de mêler avec l’eau des fels alkalins ou de l’eau de chaux ; je ne ferois cependant pas volontiers ufage de celle-ci, parce qu'elle forme avec l'acide phofphorique des mafles infolubles. . . . Pour que leftomac ne foit pas affoibli par une trop grande quantité d’eau , on. pourra y faire difloudre avec avantage des fubftances amères & diurétiques. . . . Il faudroit s’interdire pendant le régime toutes les nourritures & boiffons qui contiennent beaucoup d'acide faccharin ou un autre acide végétal trop marque. (A,) os SCO NID PL EDS RE DE M DAFID LE ROFY, A M FRANELIN; la Navigation des Fleuves, Mowsreur, ° La Lettre que vous m’avez fait l'honneur de m’écrire fur la Marine, a eu l'effet qu’elle devoit avoir. D’après l'opinion avahtageufe que vous avez bien voulu donner: de mes recherches fur cette fcience , j'ai été puiffamment encouragé à les fuivre. J'ai fait exécurer l'été dernier à Rouen le Nauporame que j'ai décrit dans la première Lettre que je vous ai adreflée : je vais dans celle-ci vous rendre compte des épreuves qui en ont été faites. : Si je fuis fenfible à Phonneur d’infcrire les plus grands noms, dans la lie des foufcripteurs qui ont bien voulu s'unir avec moi pose executer Sur la Marine & particulièrement fur les moyens de perfeélionner SUR L'HIST. NATURELLE ET LES ARTS. 2% exécuter ce navire ; je ne le fuis. pas moins au. plaifir d’y ajouter ceux que l’amitié ou la reconnoiflance-me font un devoir d'y placer. Les perfonnes qui m'ont fait la très-grande faveur de foufcrire, font, L'**#, S****, M. l’Archevèque de Sens, M. le Duc d'Harcourr, M. lé Comte d’Angivillers’, M. de Joubert, Tréforier des Etats de Languedoc , un Anglois de vos amis, M. K***, M. Peronnet, M. Mignoneau, M. de Beaumarchais, M, Moreau , ancien Architecte de la Ville, M. Gudin de la Brenellerie, MM. Guérins, Négocians, l'un à Rochefore, l’autre à Paris, M. Deftouches, Greffier de l'Amirauté à Dunkerque, & mon frère de l'Académie des Sciences. 3 Mon naupotame a environ trente-fix pieds de fongueur à la fottaifon, huit de largeur (ou de bau ) & quatre de creux. Il porte de treize à quatorze tonneaux, & ne tire tout chargé que trois pieds d’eau. Vous voyez, Monfieur, qu'il na de longueur que quatre fois & demie fa largeur , & qu'il eft d’une proportion moins alongée que celle que j'ai indiquée dans ma première Lettre. Son extrème petitefle autoriloit ce changement, & je Le dois à M. Thibeau qui l'a conftruit. IL differe encore de celui que j'ai décrit dans cette lettre, én ce que, ce n’elt pas la gribane que j'ai prife pour bafe , en en faifant former la coque; mais la bélandre, qui a fouvent, ainfi que je m’en fuis afluré en en mefurant deux à Rouen, de longueur plus de cinq fois & demie {a largeur. À l'égard de la voilure du naupotame, elle ne differe de celle à cinq voiles, qu'on voit dans ma première lettre, que parce qu’elle en a une fixième , comme on le voit PZ. IT, fig. 1°. J’appelle dans cette voilure , grande voile, celle qui eft à l’arrière -du grand mât, grand bunier, celle qui eft à l'avant de ce mât. Je nomme mifaine , la voile qui eft à l’avant du mât qui porte ce nom, & petit hunier, celle qui eft à l'arrière de ce mât de mifaine, La voile d’écai eft toujours au milieu du bâtiment, entre le grand & le petit hunier ; & je nomme foc la fixième voile que j’ai établie à l'extrémité du beau-pré. ° Divers projets que j'avois formés pour éprouver la naupotame en mer, étant devenus impraticables , puifque defcendu de Rouen à l'embouchure de la Seine, il étoit encore à la rade du Havre le 14 Sep- tembre , dans un temps où on avoit tour lieu de craindre les vents de l'équinoxe ; je préfumai que je ne pourrois avant l'hiver , aller avec mon navire à Londres, revenir enfuite à l'embouchure de la Seine, & remonter cette rivière jufqu’à Paris. Je crus donc devoir me bürner à prouver par des épreuves très-décifives , qu'il naviguoit bien en mer & fur les fleuves. Je vais dans deux articles différens , vous - gendre compte de ces épreuves. Tome XXXII, Part. I, 1788, AVRIL: Oo 290 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, ARTICLE PREMIER, . Des épreuves qui ont été faites du Naupotame en mer. Je me rendis fur le naupotame le 14 feptembre , à cinq heures du foir, en fortant de chez M. Miftral, qui remplir avec tant de juf- tice, de lumières & d’affabilité, la place très-diftinguée qu’il occupe dans la marine, Arrivé à bord, je dis au capitaine de mon navire de fe préparer à lever l'ancre au commencement de la nuit, pour aller l’'éprouver vers le milieu de la Manche. J'avois préféré de partir au commencement de la nuit, afin que Pemployant toute entière à m'avancer vers le milieu de la Manche, j'eufle, lorfque mes épreuves feroient terminées, un jour entier pour me rendre à Cherbourg, où le vent & ma curiofité me portoient, ou ailleurs , fi la dire@tion du vent venoit à changer. Nous levâmes l'ancre à dix heures, & appareillämes toutes les voiles. Les vents étoient de la partie de l’eft-fud-fud-eft, petit air. Nous dirigeâmes notre route vers Cherbourg; mais en nous avançant cependant auffi promptement qu'il étoir poflible vers le milieu de la Manche, À fept heures du matin, le 16, nous perdîmes toutes les terres de vue, & continuâmes fans changer de route jufqu'à neuf, Comme le vent étoit foible alors & la mer houleufe, & que nous étions aflez avancés vers le milieu de la Manche, je jugeai que le lieu & les circonftances _étoient favorables pour éprouver le naupotame & fa vuilure. Nous orientâämes d’abord les fix voiles de notre navire, pour aller au plus près fur un bord & fur l’autre; & nous obfervämes qu'il partoit à cinq airs de vent, que la dérive éroit de 18 degrés, & qu’il viroit vent devant avec la plus grande facilité. Nous mîmes auffi le naupotame à la cape ,: fous différentes voiles ; nous le mîmes en travers, bas bord au vent fous la mifaine, le grand hunier & la grande voile, & nous changeâmes la firuation de quelques parties du left pour chercher la marche de ce bâtiment. Ces épreuves faites, nous dirigeâmes notre route vers Cherbourg, & à quatre heures du foir nous étions déjà affez près de Barfleur. Nous faifions roue pour en doubler le cap, & nous étions à une lieue feu- lement de la tour qu’on a élevée pour fervir de fanal aux vaifleaux , lorfque nous vimes fe former derrière cette tour, un nuage épais, & le tems devenir très-noir dans toute la partie de l’oueft. Peu après nous efluyimes un grain aflez fort, & qui nous donna un peu de pluie. Nous tentâmes, mais va nement, de continuer notre route, parce que nous étions repouflés par le flot très- violent & dangereux , en tout temps, qui venoit de Barfleur. A fept heures quinze minutes, les vents, par grains, & accom- { SUR L'HIST. NATURELLE ET LES ARTS, 291 pagnés de pluie, paflerent au fud-oueft, & je vis alors, avec douleur, limpoflbilité où nous étions d’aller à Cherbourg. Comme l'objet prin= cipal de mon voyage en mer étoit rempli, que je préfumai que hous aurions fouvent l'occafion de répéter par un temps d'orage, les épreuves que nous avions faites de notre voilure par un temps doux , & que le vent & la mer favorifoienc mon retour , je fis virer de bord, & diriger la route du naupotame vers le Havre. Le vent qui foufloit étant grand & du fud-oueft, nous amenâmes deux de nos voiles, & marchions avec la mifaine, le grand & le petit hunier & la voile d’étai. Avec cette voilure, mon très-petit navire tenoit tête aux lots, comme un bâtiment fait pour traverfer l'Océan. Il s’élevoit fur la lame, étoit mâle à la mer, & fe maranguoit fi bien, comme.difent les marins, ou fe prêtoit fi bien à tous les mouvemens qu'il recevoit des vagues, que nous n'avons eu aucun coup de mer à bord, quoiqu’elle für aflez groffe, Pendant la nuit du 1$ au 16, le vent augmenta, la mer devine plus grofle, & nous oblisea de prendre un ris à la voile d’étai. Le 16 à fix heures &u matin, il paila fr nous un grain très-fort, qui nous força de fupprimer tout-à-fait cette voile; le navire n’en fouffrie pas, & fe comportoit toujours bien avec les trois autres voiles qui lui reftoient. ë A une heure & demie, nous apperçumes les terres de baffe-Nor- mandie & celles de Caux ; nous les perdimes bientôt après entièrement de vue, & les grains qui tomboient fans cefle, nous les dérobèrene jufqu'& trois heures ;, qu'étant à environ une demi- lieue du cap de la Heve, le temps s'éclaircit , fe calma, & nous pétmit de voir ce çap , nous craignimes fort de ne pouvoir le doubler. Comme nous attendions nos fix voiles dehors , avec trop de fécu- rité, le rerour de Ja marée qui devoit nous favorifer pour doubler ce cap , que des quatre hommes qui compofoient l'équipage , il n’y en avoit que deux fur le pont; il vint fondre fur nous tout-i-coup un grain dont la violence fut annoncée par le tonnerre & une pluie d’o- rage ; il fit incliner tellement le navire, que nous ne pümes nous défendre de quelque crainte. Heureufement on amena dans un initant la voile d’érai, & l'équipage profitant d'une propriété qui elt parti- culière à ma voilure , mir les cinq autres voiles dans le lit du vent, & rendit ainfi dars un moment fon a@tion nulle. Il cargua enfuite quatre des voiles du naupotame à loifir, & ne conferva que la mifaine & le grand hunier. Pendant qu'on exécutoit ces manœuvres, nous avions le cap au nord, ce qui nous éloignoit de la rade; pour nous en rapprocher, nous vi- râmes de bord. Nous reconnûmes alors avec bien de la fatisfaction combien la nouvelle voilure étoit favorable pour faire cette manœuvre; Teme XXXII, Part, I, 1788. AVRIL, Oo 2 292 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE; car nous la fîmes avec les deux feules voiles que nous avions confervees, le grand hunier qui eft au-devant du grand mât, & la mifaine qui eft à l'avant du mât qui porte le même nom. Quand le grain fuc paflé, nous mîmes la chaloupe à la mer , nous donnâmes à fix heures _& demie dans la rade & nous mouillämes. En débarquant je fus expofé à un danger , de la nature de celui qui nous a fair perdre de fi braves officiers dans l'expédition de M. de la Peironfe, La chaloupe dans lagrelle j'étois, étoit très-lépère, deux hommes feuls y étoient embarqués avec moi ; en approchant de l'entrée du port , la marée defcendante avoit un cours fi rapide près de la jetée, qu'il penfa nous entraîner à la mer, nous fîmes un aflez grand circuit & nous arrivimes. À y Je n’avois laiflé fur le naupotame , dans la rade, que le capitaine & le fecond; ils y fouffrirent beaucoup pendant la nuit , des coups de mer qui baignèrent le pont ; & quoiqu’on offrit de ma part, aflez d'argent aux pilotes du Havre pour aller les fecourir, & amener le bâtiment dans un lieu plus sûr , ils jugèrent le danger trop grand pour l’entreprendre. Ils n'y allèrent que le lendemain, vers les onze heures du matin. L'intérêt qu'avoit infpisé un fi petit bâtiment , feul au milieu de la rade, & par un fi mauvais temps, ainfi que fa voilure particulière , attirèrent fur la jetée un très-grand nombre de perfonnes pour le voir entrer dans le port. ! Les deux jours entiers & les deux nuits que le naupotame avoit paflés à la mer, m'ayant mis à portée, comme on l’a vu , de faire les épreuves les plus complettes du corps du bâtiment & de fa voilure, je défirai qu’elles fuffent conftatées , & pour cela je chargeai les gens de mon équipage de les décrire avee la plus exacte vérité. Je ne voulus pas même me charger de la rédaction, J'ai enfuite prié M. Miftral de vouloir bien recevoir ce procès-verbal de leurs mains, de le conferver, & de m’en envoyer copie certifiée. On en trouvera l'extrait dans les notes: qui terminent cette lettre. ARTICLE SECOND. Des épreuves qui ont été faites du Naupotame fur la’ Seine à à . DU , G premierement de [a navigation du Hävre à Rouen. La navigation du Havre à Rouen ne préfente, par rapport au naupo- tame , ni les dificultés qu'il peut éprouver en haute mer, ni celles qu’il peut éprouver au paflage des ponts : elle en a d’une autre nature, qui font affez grandes. L'embouchure de a Seine, depuis Quillebeuf jufqu’à Honfleur , eft remplie de bancs, & de bancs d'autant plus dangereux ; qu'ils changent de fituation prefqu'à chaque marée. En 178$, je vis ; près de Quillebeuf, les mâts d’un navire qui avoit péri fur ces bancs. SUR L'HIST: NATURELLE ET LES ARTS. 293 Dans le voyage que j'ai fait l’été dernier , j'ai vu avec douleur, deux navires qui y étoient échoués , & dont l'un paroifloit fi maltraité que les pompes fembloient n'en pouvoir épuifer l'eau : ce qui nous fit craindre qu'il ne füt bientôt fubmergé par les forts. Ces bancs, quand les marées font bafles , augmentent encore les dangers que courent les vaiffeaux ; & ïls oppofent alors aux plus grands , une barrière qu'ils ne peuvent franchir : ils la franchiroient fi rapprochés par leur forme, comme par leur voilure du naupotame, ils tiroient moins d’eau, & qu'ils virafient de bord aufli promptement, aufli facilement, que cette nouvelle efpèce de'navire, & que l’exigenr les finuofités qui féparenc ces bancs mobiles. Nous avons été à portée de reconnoître, en venant du Havre à Rouen ; les avantages qu’avoit le nauporame, par fa petitefle, comme par fa forme fur les autres vaiffleaux. Le vent, quand nous partimes, étant d’abord favorable pour venir à Rouen, nous fortimes les premiers du port du Havre, & à l'aide de deux bateaux lamaneurs, nous gagnimes un mouillage à Saint- Jacques, & parvinmes enfuite jufqu'à Villequier. Les autres vaifleaux qui fortirent le même jour du Havre , & après nous, ne profitant pas autant que nous l'avions fait, d’une marée favorable, furent contraints d'y rentrer, Nous avons laiflé derrière nous à Quillebeuf, le vaifleau appelé le Marquis d'Eftampes, qui éroit parti du Havre deux jours avant nous. Et en général un naupotame d’une médiocre grandeur, dans ces parages , à l’aide de quelques hommes qui le remorqueroïent en ramant, pourroit franchir quelques efpaces de fa roure que les autres vaifleaux ne pourroient franchir qu'avec le vent favorable , qui {e fait fouvent attendre très-long- tems. Confidéré, fous ce rapport, le naupotame ayant un fitlage moins rapide peut-être dans quelques circonftances que les meilleurs voiliers , pourroit, dans divers voyages , avoir l'avantage fur eux, & mériter le nom que je lui ai donné de diligence de Paris au Havre & à Londres, dans ma Lettre fur la navigation des fleuves. Nous fommes partis du Havre le vendredi 21 feptembre à midi, & arrivés à Rouen le lundi 24, à deux heures du matin ; & certainement bien plus promptement que les navires qui font fortis du Havre le même jour que nous pour faire la même route. Les lamaneurs que j'ai pris à peu de diftance du Havre, m'ont dit qu'ils defireroient beaucoup , ainfi que les babirans de Quillebeuf, qu'on fit élever une tour au-deflous de Quillebeuf, qui fervit le jour & la nuit pour fe guider entre les bancs mobiles qui font à l'embouchure de la Seine, ‘#94 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUES: De la navigation du Nuupotame de Rouen à Paris; & premiérement ; des difficultés que préfente en général certe navigation & des moyens de les furmonter. L'une des plus grandes difficultés que les navires qui ont remonté de Rouen à Paris ont éprouvées , eft l’obftacle fi fouvent répété que les ponts oppofent à leur voilure. On a tâché de furmonter cer obftacle, en fuppri- mant & en rétabliffanc cette voilure de différentes manières, & fur-touc en abaiffant & en relevant les mâts , ainfi qu’on le pratique dans plufieurs efpèces de bâtimens ; mais fi ces bâtimens font un peu grands, & du genre des gabares, des gouelettes, & même des belandres , ils ont des mâts fupérieurs, des vergues qu'il faut élever ou abaïffer , pour établir ou fupprimer leur voilure , opérations qui demandent où beaucoup de tems ou beaucoup d'hommes, & qu'un équipage peu nombreux fe détermi- neroit difficilement à répérer aufli fouvent que lexigeroient le nombre de onts qu'on trouve fur la Seine entre Rouen & Paris. Ces difficultés connues, à Rouen , au Havre, à Dieppe, firent faire à quelques Négocians de cette dernière ville, une attention fingulière à l'une des parties du projet propofé par M. Paffement (1) de rendre Paris port. Dans ce projet M.Paffement propofoit de creufer la Seine en différens endroits de fon lit; mais il propofoit aufli « de firmonter par » des canaux pratiqués au- deffus des dix ponts qui font fur la » Seine depuis Rouen jufqu’à Paris, l’obflacle qu'ils forment à l'arrivée » des vaiffeaux. Ce fut cette dernière propolition qui frappa particulic- » rement des armateurs de Dieppe, Une compagnie qu'ils formèrent » offrit, dans le cas même où le feul ouvrage projetté à la tête des ponts » feroit effectué, fans creufer le lit de la Seine, de conftruire douze » navires de cent cinquante tonneaux chacun, tirant huit pieds d’eau, » avec lefquels ils iroient charger des morues en Iflande , & les vien- > droient décharger en droiture à Paris par les mêmes navires ». L’un d'eux, M. le Brun, dans une Lettre, ne propofe de faire ces navires que de cent vingt à cent trente tonneaux , & il entre dans de plus grands détails fur leurs proportions ; felon lui ils auroienteu foixante-deux pieds de quille, dix-huit pieds de pont, huit pieds de cale, & dix pouces de vibord, On n’a pas fait les canaux à la rte des ponts, les armateurs de Dieppe n'ont pas fait les navires, & Paris n’eft rien moins qu'une ville maritime. Le projet de M. Paflement à la vérité étoit défectueux dans quelques parties. Il exigeoit des travaux qui n'étoient pas fans inconvéniens & qui auroient coûté des fommes inappréciables, Cet Jngénieur vouloir (1) Voyez les détails de ce projet dans le précis hiftorique de fa vie & de fes Ouvrages, Amfterdam, année 1778, SUR L'HIST. NATURELLE ET LES ARTS. 295 rendre la Seine capable de recevoir des vaiffeaux d’un certain port comme ils font, au lieu qu'il femble plus fimple, felon mes vues, de rendre) les navires capables de naviguer fur la Seine comme elle eft, : Les navires ordinaires , à caufe de leur voilure, font fi peu propres, comme je l'ai dic , à faire, cette navigation , que les armateurs de Dieppe ne s'engagèrent à faire venir ceux dont ils avoient indiqué les dimenfions, que quand les canaux projettés feroientouverts. Lenaupotame aucontraire, per la fimplicité , par le peu d’élévation , par la mobilité de fa voilure , n'éprouve aucun retard, aucun embarras dans fa marche, au paflage des ponts, Îl n'a, comme on le voit par la figure que j'en donne, point de mâts fupérieurs. Toutes les vergues y font dans une fituation fixe & prefque fur le pont. Jamais on ne les élève, jamais on ne les abaifle, ainf Ja compofition de fa voilure rend inutile la conftruction des canaux que M. Paflement propofoit d'ouvrir, comme fa forme alongée rend également inutile de recreufer la Seine. Nous louâmes à Rouen deux chevaux pour tout notre voyage. Le venc nous ayant été prefque toujours contraire, nous fous en fervimes beau- coup ; mais nous fimes aufli quelqu’ufage de nos voiles. Etant partis le 4 octobre à trois heures & demie du foir, nous nous fimes halles. jufqu'à Oiffel, où nous couchâmes, Le $, à onze heures & demie du matin , le vent-nous étant favorable, nous mîmes dehors nos quatre voiles majeures : nous nous en fervimes pour pafler un pertuis qui eft à Marteau, où nous couchâmes, & nous en fimes encore ufage le lendemain, pour paifer de ce lieu à la rive d’une île. Le vent étant devenu contraire, nos chevaux nous ballèrènc jufqu'au Pont-de-l'Arche, Nous employâmes vingt-cinq minutes à abattre nos mâts, manœuvre qui ne retarda en rien notre route; car ceux qui nous firent pafler le pont, nous retinrent plus de deux heures, Nous relevâmes feulement le mât de mifaine, & nous fîimes haller jufqu'au foir. Le lendemain 7, à neuf heures, nous relevâmes le grand mât, & nous primes la réfolution de ne démâter qu’au paflage des ponts, & de relever nos mâts dès qu'ils feroienc pañlés, afin de profiter du plus petit fouffle de vent qui nous feroit favorable. © Le mercredi 9 , à huit heures & demie du matin, nous mîmes nos voiles dehors pour pafler la traverfe de Mericourr, Le 10 étant à Rhoni, nous les ifsämes encore, à une heure de l’après-midi, & nous nous en fervimes avec beaucoup d'avantage jufqu'à trois heures. À quatre heures nous pafsämes le pont de Mantes , fans que notre marche en für retardée d’un feul inftant; car nos chevaux pafsèrent, fous la méme arche fous laquelle fe naupotame pañla aufli fans qué nous ayons été obligés de dérâter. Il ÿ avoit alors un grand nombre d’habitans fur le pont, qui virent avec plaifir ce nayire , & notre moule au haut du mât de mifaine 2c6 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE; frapper en pañlant avec fa main le haut de Parche fous laquelle nous paflions. | 3 0 LP STI Je quittai mon navire à Mantes, pout le dévancer à Paris. Il continua de naviguer de Ja même manière, & arriva dans cette capitale le mardi 16 à onze heures du matin, : Comme on fait qu'il y a des manœuvres-poñlibles far une machine qui n’eft pas très-confidérable , & qui ne font pas exécurables, quand elle eft conftruite fur une bien plus grande échelle ; on pourroit croire que l'opération d’abaifler & d'élever les mâts qui fe fait fans peine fur mon naupotame, ne feroit plus poflible ou feroit très-difhcile fur un nauporame aflez grand, pour faire habituellement une navigation utile fur la Seine ; mais fi on confidère que ce dernier naupotame ne pourroit guère être que double du mien, qüe fes mâts n'auroient guère que uarante pieds de hauteur , qu'il auroit un équipage plus nombreux pour fire cette manœuvre d’abaifler & d'élever les mâts, & que les mêmes hommes employés à faire pañfer ce navire fous un pont lui offriroient les plus puiffans fecours pour relever fes mats fi leur force étoit nécéffaire ; on verra que les plus grands naupotames pourroient , excepté au paflagé des pots, conferver toujours leur voilure fans que l'équipage flt fatigué & la marche du bâtiment retardée, Que les épreuves qui ont été faites du Naupotame font auffi complettes qu'on pouvoit le defirer. Quoique mon naupotame ait été déclaré à Rouen par un acte authen- tique, & dont j'ai la copie, capable d’aller à Londres, je n’ai pas-cru devoir faire ce voyage. par les raifons que j'ai expliquées dans l’artiéle précédent, Si je lavois faie quelques mois plutôt, comme je me le propofois, & dans la belle faifon, les épreuves de la voilure auroient été très-vraifemblablement bien moins complettes, & bien moins décifives : c'eft le fentiment des marins qui étoient embarqués avec moi; c’eft auf celui des navigateurs avec lefquels je me fuis trouvé à mon arrivée au Havre, parce qu'ils ont vu , ou fu parfaitement , que le naupotame avoit foutenu à la voile dans la Manche, pendant plus de vingt-quatre heures, les premiers vents de l'équinoxe , & des vents fi violens qu'ils ont fait pétir (pendant que nous étions à la mer ), fur les côtes de la Grande- Bretagne ,un fprik de quatre-vingts tonneaux, commandé par le capitaine Riquienne. sis ob AN Dans la nuit du 15 au 16, & dans la journée du 16 , nous avons , par un gros tems & une grofle mer, répété fouvent les manœuvres les plus importantes que les vaifleaux faffent à la, voile. Le 16 à huit heures du matin nous effuyâmes un grain aflez fort, qui nous força de nous réduire « & Lu SUR L'HIST. NATURELLE ET LES ARTS. 297 à n'avoir que trois voiles. La mer éroit d’ailleurs groffe, le brouillard que nous traverfions épais, & tout fembloit annoncer une tempête. On arrangeroit difficilement des circonftances aufli favorables, pour éprouver fortement une voilure, que. celles dans lefquelles nous nous trouvâmes au cap de la Heve, & dont j'ai parlé. Toutes-les voiles du naupotame étoient dehors. Des deux hommes feulement qui étoient reftés fur le pont, l'un étoit le mouffe, à qui on avoit confié la barre du gou- vernail, tant notre fécurité étoit grande. Nous plaifantions avec lui, & nous étions gais , comme on l’elt quand après avoir eu des craintes, on fe voit au moment d'entrer au port, lorfque ce grain dont j'ai fair mention fondit tout-à- coup fur nous. Voici ce que M. Defnoyers m'a écrit, dans une Lettre dont quelques perfonnes confidérables ont connoiffance , fur cet inftant critique & dangereux de notre navigation. J'ajouterai , (dit-il en parlant du naupotame) par rapport à la > voilure , qu'il et impoñlible d'en trouver de plus facile à manœuvrer, » & avec moins de perfonnes. Dans les autres voilures, fi l’on reçoit un >» grain, l'on eft obligé de carauer les voiles, ce qui devient quelquefois » impofible, par limpétuofité des vents qui retiennent les voiles à la » tête des mats, quoique leurs drifles foient larguées. Il faut donc pour » être maître de ces voiles larguer les écoutes pour foulager le navire ; » mais il eit rare que l’on puifle fauver les voiles , parce qu’une voile qui >» eft à la tête d'un mâc, & qui n'eft point bordée, n’eft retenue que par » la vergue ,'& qu'elle Aavie & fe déchire. » Les voiles du naupotame ne font pas fujettes à tous ces inconvéniens; >» car fi ion fe trouve preffé de diminuer dervoiles, l’on peut les mettre » dans Le lit du vent, les y retenir autant qu'on le defire, & par ce moyen >» les amener à fa volonté. C’eft ce que nous avons éprouvé quand nous agons reçu un coup de vent à la pointe du cap de la Heve, où nous »‘érions bien tranquilles , toutes nos voiles dehors, Nous les avons » amenées fans peine & fans en perdre une feule. Un autre bâtiment fe » feroit trouvé dans un grand embarras ; il n'auroit pas eu le rems » d'amener aucune de fes voiles avant d’être à La côte ». Ce fur fans doute ce danger que nous courümes & que nous évitâmes fi heureufement , par une fuite des propriétés de ma voilure, qui fit dire dans certe même Lettre à M. Defnoyers , que s'ilavoit un bâtiment à faire confiruire il ne voudroit pas y faire gréer d'autre voilure que celle-là, & les accidens qu’elle nous fit éviter femblent indiquer que mes recherches far les moyens de diminuer les périls que courent les navigateurs n’ont pas été entièrement inutiles. : : La force du vent pendant ce grain , nous réduifit à ne conferver que deux voiles ; fi elle avoit augmenté, nous aurions été dans l’impoñlibilité d’en expofer aucune à fon action , & par conféquent de Les éprouver. La nouvelle voilure a donc été éprouvée autant qu’elle pouvoir l'être, & Tome XXXII, Part. I, 1788. AVRIL. Pp 298 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, comme on le verra dans le procès-verbal de l'équipage ; fans quenous ayons café un fil de caret : cordage qui eft le plus petit de ceux qu'on emploie dans les vaiffeaux, : : CONCIUSION. Que La poffibilité d’avoir des Naupotames qui iroient de Paris à tous les lieux de La verre où les navires fe rendenc pour le commerce , ef£ prouvée par un grand nombre de fais, & qu'il feroit auffi glorieux ._ gu'utile à notre nation d'en avoir. , Des marins très-dignes de foi m'ont raconté à Rouen, qu'ils y avoient vu arriver une goueletre de dix tonneaux qui venoit de la Jamaïque, D'après un pari que des Négocians firent à Nantes, une très-grande chaloupe pontée, alla de cette ville à la côte des Nègres & y changea quatorze négrions qu'elle tranfporta à l'Amérique: je tiens ce fait de M. Romain, américain connu par fes lumières fur nos colonies , & par le courage qu'il a montré dans des courfes contre les ennemis de PEtar. Vous avez vu dans ma première Lettre, Monfieur , qu’un navire de Liverpool panté, de quarante tonneaux & dont le fond étroit plat , avoit fait un voyage à-peu-près femblable à celui de la chaloupe & plus con- fidérable. Le fait que je vais rapporter eft plus furprenant encore. Je le dois à votre ami M. K***; en l’extrayant d'un papier de Londres il a confervé la tournure angloife dans fa traduction , & je la conferverai comme lui. Par un Monfieur qui eff arrive de la Chine, à bord du vaif[eau des Indes le Sullivan, nous apprenons que les americains ayoient envoyé Jix bäâtimens à la Chine en 1786, pour échanger du rum contre du thé 3 mais ils ont été obligés d'attendre que tous les vaiffJeaux des nagjons européennes fuffent chargés : ce qui a dû les faire perdre par les LA que ce retard leur a occaftonnés. Un de ces bâtimens, le Hope de Boflon, n’étoit que du port de cinquante tonneaux, & avoit plutôt l'air de la grande chaloupe d'un vaiffeau de guerre , que d'un bâtiment defliné à zraverfer limmenfe efpace de mer qui fipare l'Amérique féptentrionale de la Chine. j . Qui doutera d’après ces faits, d’après ce qu'on fait que la Victoire , vaifleau de Magellan qui fit le tour du monde, n’étoit que de cent dix tonneaux , qu'on ne puifle faire des naupotames de ce port, & double du mien, qui iroient de notre capitale dans tous les lieux où les vaiffeaux vont commercer, qui partis de Paris accompagneroient M.de la Peyroufe, & le Roi à fon retour lui traçoit le plan d'un fecond voyage comme il a tracé le plan du premier. Ce feroit peut-être dans un femblable voyage qu'on reconnoîtroit le mieux l'utilité d’uñ navire qui ne tireroit pas plus d'eau que la hauteur SUR L'HIST. NATURELLE ET LES ARTS. 3269 d’un très-grand homme, qui, divifé en cafe pourroit échouer fans danger, qui par le peu d’élévation de fa voilure ,comme par la forme de fes voiles, féroit affranchi da malheur de chavirer , & qui pareroit fi bien, comme le mien au cap de la Hève , aux changemens fubits qui arrivent dans l'armofphère. : La dépenfe première & perdue que M. Paflement propofoit de faire au Gouvernement, pour que Paris püt recevoir des vaifleaux de cent vingt, de cent trente, de cent quarante tonnéaux, étoit d'environ vingt millions: on eftima qu'elle monteroit au moins à foixante. Dans mon projet cette dépenfè première & perdue a été fi peu confidérable, qu'avec l'aide des perfonnes que j'ai nommées qui ont bien voulu la partager, j'ai été en état de la faire : elle ne confiftoit qu'à exécuter & à éprouver le modèle du naupotame que j'ai décrit dans cette lettre. Ma premiète navigation de Paris au Havre, a rendu deux Hommes à la marine. Vingt désœuvrés, jeunes & forts, me proposèrent de les emmener , & feroient peut-être devenus marins: & s’il partoit des nau- potames de Paris, il y a lieu de croire qu'ils transformeroient un grand nombre de ces enfans, qui n’ont du jokey que le nom, en moufles très- urilés à l'Etat. Les bateaux charbonniers font la pépinière des matelots : anglois : les naupotames feroïent la pépinière de ceux de notre nation ; & n’euffent-ils principalement que cette-utilité , la conftruétion devroit en être encouragée. » * . » « Rendre Paris port, comme il a été autrefois (dit M. le Mercier ), récablir l’ancien commerce maritime de cette grande ville, y faire aborder les vaiffeaux qui viendroient y mouiller des quatre parties du monde, ne ferott-ce pas donhertout-à-coup au commerce de la France la plus vigoureufe de routes les impulfions? . : . Le fort de la capitale ne feroit plus incertain , des reffources promipres feroient affurées à tous les régnicoles. La France comporte par fes richefles cerritortales cinq à fix villes maritimes du premier ordre, & nous en avons à peine trois. Tour ce qui eft dépenfé à Paris en luxe frivole, en jouiffances futiles, prendroit naturellemenr fon cours vers un commerce grand , généreux, qui éleveroit les ames & les efprits. L’agiotage difparoîtroit pour faire place au négoce. L’ufure rougiroit quand ellé appercevtoit dés moyens plus grands, plüs lucrarifs & légitimes. La tête du royaume figureroit mieux environnée de mille vaiffeaux ». On ne peut pas, je le penfe, Monfieur ; prouver avee plus de force que M. le Mercier le fait dans cet écrit , fous combien de rapports il feroit avañtageux à notre nation de rendre Paris port, Le naupotame que j'ai fair exécuter & que j'ai éprouvé , apolanit toutes les difficultés dont ce projer étoit hériflé. Puifé-je voir bientôt des navires plus grands , de ce genre, parcourir la Seine, la Manche, l'Océan & toutes les mers! Puifé-je bientôt en faire partir un de notre capitale, pour ces Etats fi Tome XXXIT, Part. I, 1788. AVRIL, Pp 2 300 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, libres , fi couverts de gloire qui vous ont chargé de les préfider auffi fong- tems que leur conflitution pouvoit le permettre ! Puiflé-je enfin voir un naupotame de Bofton , mouiller, comme le premier que j'ai fait, au bas de l’éperon qui porte la ftatue de Henri quatre. Je fuis avec refpe, &c. A Paris ,ce mercredi 9 avril 1788. EXTRAIT DU PROCÈS-VERBAL Des épreuves du Naupotame qui ont “été faites en mer. ‘Ayant donné dans ma Lettre le détail de la navigation du naupotame en mer, je ne le répéterai point ici, je me bornerai à extraire de ce Procès-verbal ce qu’il contient d’effentiel , relativement aux épreuves que nous avons faites. Le famedi 15 feptembre, à huit heures cinq minutes du matin, je me fuis trouvé (dirt M. Defnoyers qui a rédigé le Procès-verbal.) par quarante-nenf degrés cinquante-deux minutes de latitude nord, & par trois degrés trois minntes de lonpitude occidentale du méridien de Paris ; ayant perdu la terre de vue de toutes parts depuis deux heures, Les vents de la partie du S. SE, prefque calme, la mer houleufe. A neuf heures cing minutes, nous avons orienté au plus près, bas- bord amures, nous avons été trois minutes à orienter nos voiles : étant au plus près , nous avons obférvé dix-huit degrés de dérive ; portans à cing airs de vent, nous faifions deux tiers de lieue à l'heure. A neuf heures vingt minutes, nous avons viré de bord ; & pris les amures à flribord : le navire fe comportant très-bien fur tous bords, & virane srés-bien vent devant, marée pour ou contre. À neuf heures trente minutes , nous avons viré de bord, & pris les amures à bas-bord : étant bas-bord, nous avons mis en travers fous La mijaine le grand hunier & la grande voile. A neuf. heures trente-deux minutes nous avons amené toutes nos voiles, & mis à la cape fous La grande voile. A neuf heures trente-cing minutes , nous avons amené la grande voile, & mis à la cape, fous la voile d'érai , que nous préférons, particulièrement, parce que'toutes nos vergues peuvent Je retirer de deffus leurs pivots, & fe mettre fur le pont, ce qui foulageroit le navire mayant que fes deux mäts debout. Comme nous avions mis le cape fur Cherbourg & que nous faifions voile, à trois heures trente minutes , nous avons cherché la marche ds navire : dans la pofttion qui lu évoit la plus favorable pour la marche , il tiroit deux pieds dix pouces de l'avant & trois pieds deux pouces de F'arriére. A fèpt heures quinxe minutes, les vents ont paf[é au fud-ouefl pax SUR L'HIST. NATURELLE ET LES ARTS. 30t grains trés-violens , nous avons viré de bord vent devant & pris les amures à flribord, en virant, & amené la voile d’étai & le foc. Le tes étant trés-noir 6 Loujours par grains, nous avons amené la grande voile. À huit heures trente minutes, nous avons pris un ris dans La voile d’étai & l'avons mife dehors : toujours grand venc & groffle mer ; le navire fe comportant très-bien fous fes quatre voiles , qui étoient La mmifaine , fes deux huniers & la voile d'étai, ur ris dedens : il reroit céte à la mer comme un bâtiment fait pour naviguer dans toutes mers. Nous n'avons pas eu connoiffance d'aucun coup de mer à bord, qguoiqu’elle fit très-groffe : nous dirigions notre route vers le Haye. Le famedi à cinq heures cinquante minutes du foir, il a pale ( fur nous ) un grain en foudre , avec du tonnerre, rombant beaucoup de pluie, mélée de grêle. Nous avons amené nos voiles , à La referve de la mifaine & du grand hunier. Ayant le cape au nord & faifant grand chemin , ce qui nous éloïgnoit de la rade du Havre ; nous avons viré de bord vent devant , n'ayant pour voiles que la mifuine & Le grand hunier. Il eff à obferver que pendant le cours de notre navigation gous n'avons pas café un fil de caret. Le Procès-verbal elt figné , FRANGoIs FOUENARD , Capitaine, THomas DEsNOYyERS , fecond , & Louis-JEAN-Denis DuvaL, fils du Capitaine. La Lettre que M. Miftral me fit l'honneur de m'écrire en m’envoyant à Rouen deux copies certifiées du procès-verbal, eft datée du Havre le 23 feptembre 1787. - SUITE DES EXTRAITS DU PORTE - FEUILLE DE L'ABBÉ DICQUEMARE, De diverfes Académies de l'un & l'autre continent, DonNDoseE (1) raies A Princefle Quircana, fille du Prince noir, de l’ile des Perroquets (2) au Gabon, & d'une négrefle , conduire au Cap-François , île de Saint-Domingue, & de-là à Honfleur, port du département du Havre, par le Capitaine Heïblin, y arriva le 24 février 1788. (1) Voyez la defcription d’une négrefle blanche, par M. lAbbé Dicquemare , Journal de Phyfique, mai 1777, pag. 358 & füiv. (2) Cette île eft dans l'embouchure du fleuve Gabon fous l’équateur, & par 7 degrés de Jongit. orient, du méridien @e Paris, 302 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQ UE,, Quoique née de père & mère très-noirs en Afrique & fous l'équateur ; cette enfant de douze à quatorze ans, elt blanche fur toutes lés parties mattes, & colorée d’un léger incarnat aux fanguines ; les tranfparences font un peu trop mattes , ce qui laifle dans lès momens de tranquillité une forte de monotonie à fa couleur & la fait participer un peu du fade de quelques gens dé fang mêlé qui approchent le plus du blanc; mais pour peu qu’elle foit agitée , fes parties fanguines fe colorent davantage : on remarque quelques légères différences entre les mattes & les tranfparentes ; fa couleur rappelle alors celle des blondes européennes; de forte que quelqu’accoutumé qu'on foit à diftinguer les plus légères reines de fang- mêlé , on auroit peine à foupçonner que Quircana appartint à des parens noirs, fon incarüat ne reffemblant point du tout à la couleur rouge, &c. des négrites naiflantes. Cependant je foupconne que ceux auxquels toutes les variétés de la péau humaine font très-familières, & qui auroient déjà examiné (fur-rour comme artiftes ) quelques nègres blancs, pourroient réconnoître en elle une dondofe à certains détails. Pour rôut autre obfervateur une chofe décèle fans équivoque fon origine , c'eft fa cheve- Lure: fes traits la caratérifent aufli & mêmie fa démarche. San vifage eft plat & large, fon front élevé & en quelque forte boffu. L'os de Porbite de l'œil gros fous le fourcil. Les yeux longs relevés par l'angle extérieur ; l'iris gris avec un léger mélange de rayons jaunes déliés ; la prunelle d’un gris plus foncé & prefque noir : ils ont quelque- fois un mouvement involontaire, ne clignotent pas , ne font point incom- modés par la grande lumière & ne font ni miopes ni presbites. Le nez plus large que long eft enfoncé à fon origine, & applati comme celui des nègres. Ses joues font larges & groffes. Les lèvres avancées & relevées, fur-tour la fupérieure dont l'impreffion qui defcend du nez eft fort pro- fonde ; l'inférieure eft longue & large à fes extrémités : la bouche grande & fendue en arc, les dents larges, quelques-unes mal rangées à la mâchoire fupérieure, deux incifives doubles ou en dedans de l'inférieure ; le men- ton court , un peu fourchu , de gros plis en deffous ; le col gras, l'oreille grande ; le crâne élevé, couvert d’une laine très-courte floconée, peric & ferré comme celle des nègres, couleur un peu plus rouffe que celle de la laine qui elt fur le mouton; les fourcils & les cils couleur de même laine, mais plus blanche ; le poil lainu des fourcils un peu rourmenté comme celui des nègres, & celui des cils courbé en en-haut. Sur le col près des oreilles, &c. on voit un poil folet de même couleur, Le tronc n'a rien de remarquable fi ce n’eft la groffèur & l'élévation du ventre. : Les extrémités font un peu grandes, les mains maigres, & fur les avant-bras il y a beaucoup de poil folet comme la laine la plus blanche & la mieux dégraiffée, ; ; = astra cs SUR L'HIST. NATURELLE ET LES ARTS. 303 La voix de cette enfant n’eft pas douce comme celle des nèvres ; elle n’a pas tout-à-faic leur air timide ni leur odeur, ni la peau aufli douce, & elle ne paroît pas d'un rempérament vif; elle elt gaie, chantant quelquefois , riant fouvent. Le langage des nègres créoles lui a peu coûté à apprendre... . .(1) Lorfque je deflinois Quircana, elle eft entrée dans une grande défiance, jufqu’à pleurer & faire des lamentations modulées comme un vrai chant, acceptant difficilement alors les bombons que lui préfentoient les dames aflemblées autour d’elle, & ne fe laïflant guère perfuader par les raïfons d’un Officier qui parloit le langage des créoles, en lui faifanc voir les portraits de plufieurs perfonnes qu’elle voyoit, ni. par la préfence d’un bijou de col que je lui avoïs deftiné ; enfin elle dévoila Le motif de fa crainte, en difant en bon françois: vous me couperez le nez (2), I paroît qu’elle a voulu dire , tout ce que vous faites fe terminera par me couper le nez. Je ne fais fi elle prononçoit quelques mots en chantant, Cet ufage de chanter des lamentations fe remarque chez plufieurs nations noires de l'Afrique, & pourroit entrer dans l’hifloire de la mufique; je fais fiché que quelqu'un de la compagnie, moins occupé que je l’étois, n'ait pas noté ce chant. La vue de ce nouvel individu blanc né de parens noirs,m'a confirmé dans l’idée que c’eft la couleur primitive qui reparoît , & reprend le deflus quand quelque circonftance, quelqu'accident particulier dérange Pacci- dent cortracté & perpétué. Car sil exifte chez les européens quelque individu qui ait des rapports avec ceux-ci, nous n’avons aucune con- noiffance qu'il foit jamais né un enfant noir ou pie de père & mère blancs ; & s'il y eft né quelqu'enfant de couleur, fa teinte , la nature de fes cheveux, &c, &c. ont dévoilé fans équivoque la caufe & l'infi- délité.. . .. L’obfervarion de Genevieve (3) me conduilit à des réflexions morales qui ne font guère du reflorc du Journal de Phyfique , & qui n’y entreront point, fur un commerce , une tyrannie également réprouvée par la fubli- mité de la morale chrétienne, par la fageffe philofophique, par la douceur (x) C’eft dans l'ouvrage même de M, l'Abbé Dicquemare qu’il faudra fuivre la comparaïifon de cette albinofe avec les blancs , les noirs, les albinos qu’on a décrits, & fur-tout avec celle dont il avoit donné la defcription raifonnée, (2) Idée prife dans les ufages de fon pays. (3) Journal de Phyfique, mai 1777 , page 358. On fit à Paris une defcription de Geneviève peu d'accord avec la mienne & qui ne parut qu’un an après ; mais ayant eu occafon de revoir cette négrefle blanche le 31 mars 1781,je vérifai de nouveau certains faits, & j’eus la (atis fa@ion de voir que je ne m’étois pas trompé; mais le vifage avoit beaucoup chan gé, En maigriflant la peau étoit devenue plus bife, 304 OBSERVATIONS SUR LA RHYSIQUE, des mœurs françoiles, & qui pourroit déshonorer notre fiècle aux yeux de la poftérité.. . . . Mais laiflons encore, pour cette fois, l'ignorance crafle fuggérer à la barbare cupidité qu'il n'y a ni fenfibilité ni vertus fous un teint bronzé, fous une peau noire. #£ A ee pe A — Re, LORS ST RER CRE EP RS een | NOUVELLES LITTÉRAIRES. Cuscere Jfouterraïne , élémentaire , thécrique & pratique de M. DUHAMEL, de l’Académie Royale des Sciences de Paris, Infpeéteur pénéral des Mines & Profeffleur de l'Ecole Royale defdites Mines, avec quatorze planches en taille-douce , 1 vol. in-4°. À Paris, chez Moutard , Imprimeur-Libraire, rue des. Mathurins , hôtel de Cluni. L'Auteur fait voir dans le Difcours préliminaire, que fi nos ex- ploitations des mines n’ont pas eu tout le fuccès qu'on devoit en at- tendre, ce n'a été que par le défaut de gens de l'art, en état de diriger ces utiles travaux , auxquels l’ignorance avoit le plus fouvent préfidé ; la Nation a lieu d’efpérer que les mines feront mieux ex- ploitées , ayant inftitué une école pour cet objet, où l’on inftruit des jeunes élèves, dans toutes Les parties relatives aux travaux des mines, à la métallurgie, à la minéralogie , à la docimalie, &c. Elle fait voyager ces élèves, pendant les vacances, afin qu'ils puiflent fe fa- miliarifer dans la pratique. Je ne fais fi cela eft fuffant, les écoles des mines d'Allemagne, de Suède , &c, font dans le fein même des montagnes , au milieu des filons, &c., la peinture, la fculpture, l’hor- logerie , &c. n’apprennent pas leur art par la théorie, mais par la pratique. . .. Ainfi les premières notions acquifes , les jeunes gens ne devroient-ils pas tous réfider dans les différentes mines, pour apprendre la pratique de cet art difficile, & être un jour à même d'en diriger les travaux ? Car qu’on ne s'y trompe pas, l'homme le plus verfé dans la théorie de cette partie, feroic bien éloigné de pouvoir conduire une expioitation comme un Schreiber, un Broeleman . ...,. M. Duhamel démontre l'utilité de l'exploitation des mines, & fait voir que fi les particuliers n’ofent pas s'en charger, il eft de l'incerêt des nations de les faire ouvrir à leurs dépens, même fans fruit. Le premier chapitre de cet ouvrage concerne les filons ou veines minérales, leurs noms, leurs variations , les fubftances qui les com- pofent, les endroits où lon doit les chercher de préférence, &c. &c, Les chapitres fuivans traitent des inftrumens néceflaires pour la géo- métrie SUR L'HIST. NATURELLE ET LES ARTS. 30f métrie fouterraine ; de quelques définitions touchant les triangles réc- tilignes & de l'arichmétique décimale, Dans le chapitre feptième, on donne des méthodes mécaniques de lever les plans des mines, que tout mineur peut comprendre. . Le chapitre huitième traite des nivellemens. Le neuvième contient plufñeurs propofitions concernant les diredtions & inclinaifons des filons, les différentes manières de les décerminer , ainfi que leurs points de jonétion. Le chapitre dixième renferme beaucoup de problèmes de géométrie fouterraine , appliquée à la conduite des travaux du mineur. On yÿ trouve différentes manières de lever les plans des mines avec précifion, & d’en former les plans & profils. Quatorze problèmes dans le chapitre onzième, qui tous font rela- tifs aux percemens ou communications des ouvrages des mines ; les méthodes les plus füres d'opérer ces percemens avec exactitude , s’y trouvent détaillées. Enfin le chapitre douzième traite des filons confidérés comme fo- lides , de leurs feions dans la roche qui leur fert de gîte, de leurs males aux points où ils fe rencontrent, & des différentes formes & pofitions que ces mafles prennent par rapport à leurs directions & in- clinaifons. On détermine géométriquement ces poftions & les fur- faces des plans d’interfection de plufeurs filons. M. Duhamel donne le deffin d'un inftrument qu'il a imaginé, par lequel on peut , méca- niquement , déterminer La difpofition des plans d’interfection de deux filons qui fe croifent. On trouvera l'explication du même inftrument, & quelques exemples qui enfeignent la manière d'en faire ufage; de même que de la planchette & de la bouflole pour lever les plans à la farface de la terre, ” L'Auteur ne s’eft pas borné à indiquer les opérations trigonomé- triques , il donne tous les calculs qui facilitent fingulièrement l'intel- ligence des problêmes & leur application dans une multitude de cir- conftances. ù Les dificultés qui fe rencontrent fréquemment quand il s’agit d'o- pérer avec exactitude dans des fouterrains tortueux , profonds & d’une vafte étendue, où la plus petite erreur caufe prefque toujours le plus grand préjudice ; on ne travaille point dans ces excavations ténébreufes, avec la même aifance qu'à la furface de la terre, cependant les opérations géométriques doivent s’y faire avec une rigoureule précifion, fur-tout quand il faut parvenir à travers la roche d’un point donné à un autre point; ces difficultés que l’Auteur a fouvent éprouvées depuis trente-cinq ans qu'il s'occupe de cette partie, lui ont fait prévoir tous les cas poffibles ; il n’y en aura aucun capable d'arrêter ceux qui fe Tome XXXIT, Part. I, 1788. AVRIL, Qq 306 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, danneront la peine d'étudier fon traité, qui peut aufli être utile aux Ingénieurs militaires. M. Duhamel termine fon livre par des tables calculées trigonomé- triquement, qui donnent la valeur des deux côtés de tout triangle rectangle dont l'hypothénufe eft déterminée, ce qui épargnera les nom- breux & ennuyeux calculs de trigonométrie que l'on eft contraint de faire. pour Ja confection des plans & profils de mines, dans lefquels les meilleurs géomètres font expofés. à commettre des erreurs, qui, comme on l’a dir, peuvent caufer de grands préjudices. . L'approbation que l’Académie Royale des Sciences de Paris a ac: cordée à la géométrie fouterraine de M. Duhamel, en aflure l'utilité, © Un ouvrage auffi complet fur cette matière, nous manquoit en France. Le fecond volume qui fera inceflamment mis à l'impreflion, con- cernera le travail du mineur, &en général la manipulation qu'on fait fubir aux mines, autant pour leur extraction que relative à leurs dif- férentes préparations avant de les foumettre à la fonte. On y détaillera toutes les machines les plus utiles dans ces circonftances , & on.en donnera les deffins."L’exploiration des mines de charbon de terre fera partie de ce fecond volume. Les derniers traiteront de la métallur- gie, ou fonte en grand des minéraux & des métaux. Probléme d’Acouflique curieux & intéreffant dont La folution eff propofée aux favans , d’après les idées qu'en a laif[ées M. l'Abbé DE HAUTE-FEUILLE, Chapelain de l'Eglife Royale de Saint- Aignan à Orléans. À Paris, chez Varin , Libraire, à l'image Sainte- Geneviève, rue du Petit-Pont , au bas de celle Saint-Jacques, N°, 22 ; : x vol. r-8°. Cet Ouvrage, dédié à la Société Royale de Médecine; en a mérité: l'approbation. On a travaillé avec tant de fuccès pour fuppléer à la foibleffe des yeux, dit l’Auteur, qu’il eft furprenant qu'on ne fe foit pas auf occupé de remédier à celle de l’ouïe, Mémoires d'Agriculture , d'Economie rurale & domeflique , publiés par la Société Royale d'Agriculture de Paris en 1787, trimeftre d'hiver & trimeflre de printems, À Paris, chez Cuchet, Libraire, rue & hôtel . Serpente. : On fait avec quel zèle cette Compagnie travaille à perfectionner l'Agriculture. Analyfe chimique de l'eau fulfureufe d'Enghien , pour fervir à l'hifloire: des eaux fulfureufes en général; par MM. DE FOURCROY, Médecin de la Faculté de Paris, de l Académie Royale des Sciences ; de la Société Royale de Médecine, Profeffeur de Chimie au Jardin | SUR L'HIST. NATURELLE ET LES ARTS, 307 du Roi, &c. &c. & DE LA PorTE , Médecin de la Faculté de Paris : de ta Societé Royale de Médecine, &c. À Paris, chez Cuchet, 1 vol. ën-8°, Prix, $ liv. broch. 6 liv. relié. L'Académie des Sciences & la Sociéré de Médecine ont jugé cet Ouvrage digne de leur approbation & de paroître fous leur privilège. Lichenographie économique , où Hifloire des Lichens utiles dans la Médecine & les Arts : Mémoire à qui l’Académie de Lyon a donné l'accellit ez 1786. 4 | De l’aurore au couchant, parcourons l'univers , Tous les divers climats ont des Lichens divers. Par. M. WiLcemeT, Doyen des Apothicaires de Nancy , Démonf- trateur de Chimie & de Botanique au Collège de Médecine, Affocié des Acadèmies de Lyon, de Bavière, de Berne , Gortingue , HefJe- -Hombourg | E&c. Premier Mémoire. Ce Mémoire contient les détails les plus intéreffans fur un grand nombre de lichens. Stirpes novæ, aut minus cognitæ, &c. par M. L'HÉRITIER, Confeiller à la Cour des Aides de Paris ; quatrième Fafcicuke. Ce cahier, compofé de dix-huit Planches, renferme deux genres nouveaux , ( Pleétranthus & Zanthorhifa ). Le nouveau fafcicule d’ailleurs ne le cède en rien aux premiers de l’Auteur: on connoît l'exactitude des defcriptions du célèbre Botanifte, & la perfection des gravures, ë A Paris , chez Prevofl , quai des Augufhins. Prix pour les premiers Soufcripteurs, 21 liv. #2 fols, pour les nouveaux Soufcripteurs , 27 liv. Introduion à L'Eleétricité, contenant Les notions exaëes du Feu . élémentaire avec leurs applications"à nombre de phénomènes de Phyfique, de Chimie & d'Economie animale : , Quæ in fcena imaginationis, non verd in ipfa rerum natura funda- mentum babent, dies delebit ac proteret. Syderh. A Madrid; & fe trouve en France, chez Durand neveu, Jombert, Moutard, à Paris: Bergerat, Palleandre, à Bordeaux: Fauvet du Hart, à Bayonne, LA Zoologie univerfelle & portative, où Hifloire-Naturelle de tous les Quadrupèdes , Cétacés ; Oifeaux & Reptiles connus ; de tous des Poiffons , Infe&es & Vers, ou nommés où anonymes ; mais indi: génes , & d'un très-grand nombre de Poiffons ,d'Infe&es & de Vers anonymes & exotiques ; jointeà une concordance des divers noms qui leur ont été donnés : le. tout difpofé felon l'ordre alphabétique, Tome XXXII, Part. E, 1788. AVRIL, Qgq2 308 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, & rapporté à l'ordre méthodique , avec un Supplément que le Leëteur ef? prié de confulter. Ouvrage également defliné aux ‘Naturalifles 6 aux gens du monde ; par l'Abbé PLAYCAR-AUGUSTIN-FIDÈLE Ray : Si dixi quæ plurimi, non accufandus fum , alia ipfe animalia fingere non potui. A7/f£, ir prorat. Hifi. animal. ! A Paris, chez l'Auteur, au Lycée, près du Palais-Royal , & chez [a veuve Vallade, Imprimeur-Libraire, rue des Noyers, la veuve Tillard & fils, rue de la Harpe, Belin , rue Saint-Jacques , Royez , quai des Auguftins, 1 vol. #n-4°. « Le feul titre de cet Ouvrage, dit l'Auteur, prévient affez les Natu- » raliftes fur Pufage qu’ils peuvent en faire. . . . Si j'offre en effet çà & » à aux gens inftruits quelques faits, quelques obfervations , quelques » détails qui puiffent ne pas leur être familiers , fi je donne en même- æ tems des notions fuffantes à ceux qui peu occupés de l’hiftoire des > animaux, trouvent néanmoins des occafñons fréquentes d'y recourir, > j'aurai fait un livre utile aux hommes de tous états ». Saggio d'Offervazioni , &c. Effai d’Obfervations & d'Expériences fur la faculié médicinale des Eaux rendues artificiellement gazeufes & ferrugineufes : Potus aqux mihi neëtar erit, vitamque fatebor Accepifle.., ... Ovid. Cette Differtation de M. Bartolo Criftianopoli intéreffera les Médecinse Bibliotheque Phyfico- Economique, inflruétive & amufante | année 1788 , ou feptieme année, contenant des Mémoires , Obfervations- pratiques fur l'Economie rurale. — Les nouvelles découvertes les plus intéreflantes dans les Arts utiles & agréables ; = la defcriptior & La figure des nouvelles Machines & Inflrumens qu'on doit y employer, d'apres les expériences de leurs Auteurs : — des Recettes, Pratiques , Procédés , Médicamens nouveaux , externes où internes , qui Jont relatifs aux hommes & aux animaux : — les moyens d’arréter les Incendies & autres événemens provenans des vices & de laltération de l'air : — de nouvelles vues fur plufieurs points d'Economie domeflique , & en général fur tous les objets d'utilué & d'agrément dans la vie civile & privée, &r. &c. On y a joint des notes que l'on a cru néceffaites à plufeurs articles, 2 vol. in-12, Prix, 3 livi chaque volume relié; & franc de port par la pofle, 2 div. 12 fols broché. À Paris, chez Buiflon, Libraire, hôtel de Mefgrigny , rue des Poitevins. Cet Ouvrage eft connu du Public. Ces deux nouveaux volumes nous paoiflent mériter ke même accueil que les premiers. SUR L’'HIST. NATURELLE ET LES ARTS. 309 Hifloire de Sumatra, dans laquelle on traite du Gouvernement , du . Commerce, des Arts, des Loëx, des Coutumes & des Maæurs des Habitans ; des produélions naturelles & de lancien état politique de certe Ile; par M. Wiccram MARSDEN, de la Société Royale de Londres ; ancien Secrétaire du Préfident & du Confeil du fore Malborough à Sumatra, trad. de langlois fur la feconde édition ; par M. PARRAND, 2 vol. in-8°. avec des cartes. Prix, 8 liv. broché, 10 liv. relié, & 9 Liv. broché, franc de port, par la pofle.sA Paris, chez Buiflon, Libraire, hôtel Meforigny, rue des Poitevins, N°. 13. Cet Ouvrage contient des détails intéreflans fur l’Hiftoire-naturelle de Sumatra & des îles Malaifes. Il eft bien à defirer ‘que tous les voyageurs décrivent ainfi les produétions des pays qu'ils parcourent ; maïs il fauc que leurs defcriptions foient faites d’une manière fcientifique , c’eft-à- dire, fuivant les caractères adoptés par les Naturaliftes , caractères qui déterminent d’une manière sûre & invariable l’objer décrit ; le défaue de cette méthode a rendu inutiles les travaux d’un grand nombre de voyageurs. Gallerie hiflorique univerfelle ; par M. PX#*, onzième livraifon. Chez Mérigot le jeune, quai des Auguflins5à Paris; & à Valenciennes , chez Giard. Mémoire de M. le Chevalier DE SOYCOURT, Jur les expériences donnees en preuve de la chaleur latente, fur quelques défauts inconnus , mais énormes du thermomètre, & fur, les moyens d'y remédier : Ouvrage couronné par l'Académie des Sciences, Belles- Lerrres & Arts de Rouen, le 24 Juillet 1787: Grata vice veri. A! Londres ; & fe trouve à Paris, chez Bluet fils aîné , rue Dauphine. C’eft le Mémoire dont nous avons donné l'extrait, & que l’Auteur a fait imprimer depuis. Differtation Jur le Rocoulier, Jur fa culture en Europe & en Amérique, Jur da récolte de fon fruit, & fur l'utilité qu'on en retire pour la Teinture & pour d’autres ufages économiques , in-fol, Differtation fur le Niora ( Ceropevia’, Lin.) plante très-curitufe de l'Inde , remarquable principalement dans une de fes efpèces par la difpofition de fes fleurs qui imitent réellement un luffre, € fur fes propriétés médicinales. Aid Differtation fur le Dillen de l'Inde (dillenia indica, Lin.) remarquable par fa grandeur , la beauté de fon feuillage & de Jes fleurs, par la groffeur de fon fruit, qui entre dans les préparations alimentaires du pays, & fur fes propriétés médicinales & économiques. jo OBSERPATIONS SUR LA PHYSIQUE, Differiation Jur le Durion, arbre des Indès occidentales qui donne un fruit bon à manger, & qui merite d'être cultivé dans nos Colonies. .… Cesquatre Differtations de M. Buc’hoz, terminent fon fecond volume. Effai analytique fur l'Air pur, & les différentes efpèces d'Air; par M. DE LA MÉTHERIE, Doëleur en Médecine , des Académies de Dijon & de Mayence. À Paris, chez Cuchet, rue & hôtel Serpente, 2 vol. 21-8°. La:première édition:de cet Ouvrage! érant. épuifée, j'ai. cherché à rendre celle-ci plus; digne d'être -offérre au Public. Les nombreufes: difcuflions qui: fe font élevées ont éclairei plufieurs points:, On a répété les expériences, Elles: ont été mieux vues; .& quoiqu'il demeure encore beaucoup de chofes douteufeshdans cette belle partie de la Philofophie naturelle, on ne peut cependant nier qu'elle n'ait beaucoup gagné. Ce traité eft une hiftoire a-peu-près complette des différentes efpèces d'air retiré des trois règnes de la nature. Je n’ai pas cru devoir aban- donner mes premières idées qui,me paroiflent-confirmées dé plus en plus par les faits; Comme on l'a vu dans les différens Mémoires que j'ai inférés dans ce Journal, fur-tout dans mes Difcours préliminaires. Néanmoins fi des faits contraires venoient à détruire ceux fur lefquels je me fuis appuyé, je ferois le premier à le reconnoître. Tous les luides aériformes dont j'ai parlé font au nombre de vinet- deux, favoir, cinq airs proprement dits qui fe foutiennent fur l’eau, 1°. l'air pur, 2°. l'air impur ou phlogiftiqué, 3°. Pair inflammable, 4°. l'air nitreux, 5°. l'air nitreux avec excès d'air pur ; & G l'on veut , 6°. l'air atrmofphé- rique. Il y a enfüite feize fluides aériformes qui fe foutiennent à cet état fur le mercure, mais font abforbés, plus ou moins promptement par l'eau, tels font , 7°. l’air acide, air fixe , 8°. l’air acide fulfureux , 9°. l'air acide fulfureux inflammable ou air hépatique , 10°. l'air acide {ulfureux inflammable ammoniacal ou liqueur fumante de Boyle, 11°. lair acide phofphorique , 12°, l'air acide phofphorique inflammable, 13°. l'air acide phofphorique inflammable ammoniacal, 14?. l'air acide nitreux., 15°. l'air acide marin, 16°. l'air acide marin avec excès d’air pur, ou déphlogiftiqué, 17°. l'air acide fluorique, 18°. l’air acide végétal qui peut être de plufeurs efpèces, puifque la plus grande partie des acides végétaux peut être réduite à l'état aériforme, 19°. l’air acide animal qui peut aufli être de plufeurs efpèces ,. 20°. l'air ammoniacal ou alkalin, 21°. l’air utride végétal, 22°. l'air putride animal, 23°, l'air animal. J'appelle de ce dernier nom un air qui fe trouve dans celui de la veflie dela carpe , & qui me paroît être une nouvelle efpèce. Deux cens parties de cet air de la vefie de la carpe introduites dans un tube d’eudiomètre SUR L'HIST. NATURELIE ET LES ARTS, 311 plein de mercure, & porté enfuite dans l’eau de chaux qui ÿ monte, tandis que le mercure fe précipite, ont été réduites à 1,36; 1,4 L'eau de chaux n'eft que peu précipitée & feulement dans la partie qui touche l'air, tandis qu'ayant introduit dans le même tube d'eudiomètre 1,40 arties d'air commun , & 0,60 d'air acide ou fixe ; & y ayant introduit de l'eau de chaux , elle a été précipitée abondamment. L'air nitreux qui a été long-tems expofé fur le mercure avec de la limaille de fer hume@tée, eft beaucoup diminué, & il y a de l'alkali volatil produit. J'ai introduit, comme ci-deflus, dans le tube de l’eudiomètre plein de mercure deux cens parties de cet air qui avoit féjourné fur la limaille d'acier depuis plus de fix mois, & ayant renverfé le tube dans l’eau de chaux, l’air a été diminué d'abord de dix à douze degrés. L’abforption a continué &. au bout de vingt-quatre heures il n’en eft demeuré que 0,48. L’eau de chaux n'a pas été troublée fenfiblemenr. Cet air n'étoit point de l'air ammoniacal qui eft abforbé promptemeur. D'ailleurs , en ayant mis dans une cloche, & y ayant plongé un tube mouillé d'acide marin , il n’y apoint eu de vapeurs. Cet air ainfi abforbé me paroît avoir beaucoup de rapports avec celui de la veflie de la carpe, dont je viens de parler ; mais je me réferve d'en traiter plus au lons. Prix difiribués & propolés dans la Séance publique de la Société Royale de Médecine, du 12 Février 1788. Prix diflribués. La SociÉéTÉ Royale de Médecine avoit propolé dans fa Séance du 7 Mars 1786, pour fujet d'un prix de la valeur de 600 livres, fondé par le Roï, la queftion fuivante : Déterminer quelles font les circonflances les plis favorables au dé- “veloppement du vice ferophuleux , € recherchef quels font les moyens, Jfoit diététiques, foit médicinaux , d'en retarder les progrès , d'en di- minuer l'intenfité ; & de prévenir les maladies Jecondaires dont ce vice peut étre la caufe.. Ce prix a été décerné à M. Baumes, Docteur en Médecine, &c. À Nifmes, Auteur d'un mémoire envoyé avec certe épigraphe: « Non adeo forfun Labor ef conflans , obférvatio iflius adæquara expreffto , coordinatio & ad fuos ufis adaptatio. Srorck & Collin, anni Medici, Edit. de M. Aubert, tom. 1 ,in Præfar. L’Acceffir à été adjugé à M. Pujol, Médecin des Hôpitaux à Caftres, Auteur du Mémoire envoyé avec cette épigraphe : Strumæ fatigare medicos folent, quoniam € febres movent, nec unquam facile maturefcunt. Celf, liv. $ , de Med. cap. de Srrumis. - 312 .OBSERFATIONS SUR LA PHYSIQUE, La Société a arrêté qu'il fera fait une mention honorable-d’un Mé- moire envoyé par M. Charles-Georges Théodore Kortum , Doëteur en Médecine & en Chirurgie, demeurant à Dortmund en Weftphalie , & dans lequel elle a remarqué des expériences curieufes fur l'inocu- lation du virus fcrophuleux tentée infruétueufèement par ce Médecin. Prix remis. La Société avoit propofé dans fa Séance publique du 15 février 178$, un prix fondé par le Roi, & dont ja diftribution a été différée dans celle du 29 aoûc 1786, Le fujet de ce prix de la valeur de 1200 liv. étoir la queftion fuivante : Déterminer par l'examen comparé dés propriétés phyfiques & chi- miques, la nature des laits de femme, de vache, de chévre ; d'äneffe, de brebis & de jument. Klle a remis le prix en 1790. Prix propofe. La Société propofe pour fujer d’un prix de la valeur de 600 liv. fondé par le Roi, la queftion fuivante : Déterminer dans le traitement des maladies pour lefquelles les différens exutoires font indiqués ; 1°, quels font Les cas où l’on doùt donner la préférence à lun deux fur les autres ; 2°. dans quels cas on doit les appliquer, foit à la plus grande diflance du fige de la maladie, foit fur les parties les plus voifines, foit fur le lieu même de la douleur. Ce Prix fera diftribué dans {a Séance publique du Carême de 1790, & les Mémoires feront remis avant le premier Décembre 1789 : ce terme eft de rigueur. Tableau contenant l& fuite de tous les Programmes , ou fujers des Prix propolès par la Société Royale de Médecine avec les époques auxquelles les Mémoires doivent étre remis. Premier Programme, * Prix de 800 livres, propofé dans la Séance du 11 Mars 1783, & dont la diftribution a été différée dans celle du 15 février 1785, & du 28 août 1787. Expofer quelles font les maladies que l’on peut regarder comme vraiment contagieufes ; quels organes en font le fiége ou Le foyer, & par quels moyens elles fe communiquent d'un indi- vidu à ur autre 8 Les Mémoires feront envoyés avant le premier Mai 1789. TI Programme, Prix de 600 livres fondé par le Roi, & propolé dans Ja Séance | du SUR L'HIST. NATURELLE, ET: LES. ARTS. 313. du 7 Mars 1786. Détermimer quelles, font les maladies dort Le fyf., téme des vaiffleaux lymphatiques eft le-fiège, c’efl-à-dire, dans Lej= quelles les glandes, les vailfeax lymphatiques & le fluide qu'ils con tiennent font effentiellement affedés 3 quels font les fymptômes qui les. caraékerifent , & les indications qu'elles offrent à remplir ? Les Mé- moires. feront _envoyés avant le premier janvier 1769: : III Propramme, Prix de 400 Liv. propolé dans la Séance du 7 Mars 1786 , & dont la diftribution a été différée dans celle du 28 août 1987. Déterminer quelles font, relativement à la température de la faifon & à la nature du climat, les précaittions à prendre pour conferver la fanté d'une ZAriméé vèrs la fèn de l'hivèrs, &dahs les premiers mois de la cam- . pagne ; à quelles ‘maladies les \Troupes: fontile plus: expoées à celte époque, & quels font Les meilleurs moyenss de traiter ou de Prévenir ces maladies ? Les Mémoires feront envoyés avant le premier janvier 1709. IV®: Programme. Prix de 600 les | fondé par le Roi, & propofé Asus la Séance du 27 février, 1787., Déterminer s'il ex jfle des maladies ÿraimént héré- ditaires , & quelles’ elles [ônt ? 2°. s'il ef? au pouvoir dé la Médecine d'en empécher le développement , ou de les guérir après qu’elles fe font déclarées ? Les Mémoires feront envoyés avantle premier Mai 1788. V® Programme. Prix de 600 fiv. propofé dans la Séance du 27 février 1787, & dû à la bienfaifance d’une perfonne qui n'a pas voulu fe faire con- noître. Déterminer par l'obfervation quelles font les maladies qui re- Jultent des émanations des eaux flagnantes | & des pays marécageux , Joit pour ceux qui habitent dans Les environs, Joït pour ceux qui tra- vaillent à leur defJèchement , & quels font Le moyens de les prévenir € d'y remédier? Les Mémoires feront envoyés avant le premier jan- vier 1789. VI Programme. Prix de 600 livres fondé ‘par le Roi, dans la Séance publique du 28 août 1787. Déterminer la nature du pus, & indiquer par quels fignes on peut le reconnoître dans les différentes maladies, fur- tout dans celles de La poitrine. Les Mémoires feront envoyés avant le premier Mai 1789. M ) VII, Programme. Prix de 600 liv. | propofé dans la Séance publique du 28 août 1787, & fondé par un Citoyen qui ne s'eft pas fait connoître. Rechercher Tome XXXIT, Part. I, 1788. AVRIL, Rt 314 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE; quelles font les caufes ‘de l'endurcif[ement -du tiffu cellulaire auquel plufieurs enfans nouveaux nés font fujers , & quel doit en étre le traï- cement , Joir préfèrvarif, foit euratif ? Les Mémoires doivent être envoyés nee le prémier janvier 1789. sat VIIF Programme. Prix propofé dans la Séance publique du 28 août 1787, & dont la valeur eft indérerminées La Société demande des renfeignemens exaëts fur la manière de faire rouir le chanvre & Le lin ; elle dermande s’il en réfulse des inconvéniens pour la Janté des hommes ou des animaux , & quels font ces inconvéniens ? L'eau dans laquelle on a fait rouir du lin ou du chanvre eontraëte-t-elle des, qualités plus malfaifantes par leur macération que par celle des autres fubflances vègétales, &cx 6e. Les. Mémoires feront envoyés avant le premier juin 1788. IX° Programme. Prix double de 1200 livres fondé par le Roi , propofé dans la Séance du 15 février 1785, & dont la diftribution a été différée dans celles dés 29. août 1786 & 12 février 1787. Déterminer , par l'examen comparé des propriétés phyfiques & chimiques , la nature des laits de femmes de vache, de chévre, d'äneffe, de brebis & de jument ? Les Mémoires feront envoyés avant le premier décembre 178ç. Ce terme eft de rigueur. X° Programme. Prix de 600 :liv. fondé par le Roi, & propofé dans la Séance pu- blique du 12 février 1788. Déterminer dans le traitement des mala- dies pour lefquelles les diffèrens exutoires font indiqués ; x°. quels fon. Les cas où lon doit donner la préférence à l'un d'eux Jur les autres. 2°. Dans quels cas on doit les appliquer , foit à la plus grande dif- tance du fiège de la maladie, foit fur les parties les plus voifines , Joit fur le lien même de, la douleur. Les Mémoires feront remis avant le premier décembre 1789. Ce terme eft de rigueur. XF. Programme. Prix de 2000 liv. dû à la bienfaifance de M, de Crofne, Lieute- nant-Général de Police, & propofé dans la Séance publique du 12 fé- vrier 1788. La Société defire. de réunir routes les Obfervations qui ont été faites fur l'allaitement artificiel; des enfans nouveaux-nés, & les ré- fulrats de tous les effais qui ont été tentés dans ce genre; en confé- quence elle invite les Médecins, les Chirurgiens , foit regnicoles, foit étrangers, & tous ceux qui ont quelques connoïflances à ce füujet, à Jui en faire part. Elle Jeur demande que! plan on a Juivi dans Les effais dont ils ont été témioins ; quelle méthode on a employée pour nourrir SUR L'HIST. NATURELLE ET LES ARTS. 315 les enfans, fuit pendant qu'ils fe portoient bien, foit pendant qu'ils étoient malades ; quelles ont été leurs maladies ; quel a été le réfultar de la mortalité, & à quelle caufe on l'a attribuée , ft c'efl à La nour- riture artificielle même, ou à des caufes qui lui étoient éthæmgéres, telles que les maladies vénériennes ; l'entaf[emerit des enfans ou le muguet. Ce Prix fera diftribué fous. la forme: de médailles d’or de différente valeur , aux Auteurs des meilleurs Mémoires qui feront en- voyés pour ce Concours. les Mémoires feront remis avant le premier avril 1789. On adreffe les Mémoires à M, Vice-D'Azyr. Extraits des Rapports qui ont été faus à l Ajfemblée’ générale des Affociès Bienfaireurs de la Societé de Genève pour l'avancement des Arts , tenue le 3x décembre 1737. M. le Confeiller TRONCHIN l’aîaé, Seigneur - Commiffaire | député par le Grand-Confeil, a ouvert la féance par un difcours fur la connoiïflance des Tableaux , trop court & trop intéreffant pour être fufceptible d'extrait, mais qui fera inféré dans Le premier recueil des Mémoires que la Société publiera. Extrait du rapport de M. CRamer, Préfident de la Sociére. M, Cramer, après avoir expofé le but de l'Affemblée, a informé les Aflociés Biëhfaireurs que les Réglemens de détail qui déterminent le régime intérieur de la Société avoient été approuvés dans le mois d’août dernier, Il a expliqué enfüire comment la Société a été divifée en quatre, Comités , appelés à délibérer fur rous les objets qui leur fonc renvoyés par le Comité Général, &c. Au moyen de cette inititution, tous les Membres de, la Société fe trouvent en adtivité, & à portée de la faire jouir de leurs lumières & de leurs foins. Cette idée très- heureufe , a ajouté Le Préfident, ainfi que la rédaction des Réglemens de détail, font dus à l'invention & au travail de M, le Docteur Odier, dont le zèle eft fans cefle actif pour procurer le bien de la Société. Enfin il a terminé fon introduction par quelques réflexions fur ce qu’on doit atrendre des ralens & de l’intérêc que manifeltent MM. les Col- laborateurs ; après quoi il a invité M. de Sauflure à faire le rapport des Comités-qu'il préfide. Extrait du rapport de M. DE SAUSSURE , Vice-Préfident de la Société ; & Préfident du Comité de Chimie & du Comité Rédaiteur., 2 M. de Sauflure a commenté le rapport duComité de Chimie, @n traçant une efquifle des principales révolutions que cette fcience a fubiés; & en faifant fentir fon utilité dans la Phyfique , dans les Arts & dans l’économie. : Il a enfuite annoncé le Cours gratuit de Chimie, deftiné à l'inf- Tome XXXII, Part. I, 1788. AVRIL: Rr 2 316 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, truétion des Artiftes, que donne. a@tuellement M, Tingry , fous l’inf- peétion du Comité, & aux dépens de la Sociéré des Arts. Voici la notice des principaux travaux du Comité, dont il a rendu comptes 1°. L'examen de: l'acier fabriqué à Servoz en Faucigny , dont MM. Clavel, Maflor, Piétet, Senebier & Tingry ont faic.le rap- port le plus avantageux après l'avoir foumis à différentes épreuves. 2°. L'écabliflement prochain d’une fabrique de limes, aufi bonnes que celles d'Angleterre ; d’après des procédés pour la préparation & pour la trempe de l'acier, réfultans des travaux de MM, Clavel, Mañlor, Paul, Pidter & Senebier. 3°. L’établiffément d’un dépôt d’or raffiné & laminé à l’ufage des Doreurs. La Société a confacré à ce dépôt un capital de 1000 liv, courantes , dont elle ne retire aucun intérêr, pour que les pauvres Doreurs.& ' Doreufes puiffent trouver à à un prix modéré de très- petites quantités d’or fin, fans être rançonnés par ceux qui le leur vendoient en détail. C'eft M. Des-Combaz qui a propolé cer établif- fement utile; &,M.: Odier notre, Tréforier, &.M. Roux l'Effayeur fe font joints à lui pour le réalifer. 4°, La vérification, & le perfectionnement des moyens employés par M. Parmentier pour tirer le plus grand parti de la pomme de terre & en particulier pour en extraire la fécuie & pour RE du pain. C’eft M. le Profeffeur Prevoft qui en avoit fait la propofitton , & M. Jaquec Droz, qui avoit déjà exécuté quelques-uns de ces procédés , continue de, s'en, occuper. s°. L'examen d'un fourneau économique en ufage à S. Gall, mais erfectionné & exécuté à la Tour près de Genève par M. Frédérich. Dans ce fourneau, la flamme pafle fucceffivement par trois loges diffé- “rentes , où elle fait bouillir deux marmites ou deux caflerolles & étuver une piece de viande; après quoi il lui refte encore affez d'activité pour réchauffer fucceffivement le poële de la falle à manger attenant à la cuifine. "M. Fréderick aïlure qu'il obtient tous ces effets avec le tiers du bois “qu'il brûle ordinairement dans un jour au foyer de cette même cuifine. Le Corüité efpère d'adapter à ce fourneau, & de faire exécuter à un prix modéré, des marmités économiques fermées , inventées à Paris. M. Piéter de Rochemont en a apporté une pour fervir de modèle. M. de Sauflure a fait auffi le rapport du Comité Rédacteur. Dans ces rems voifins de la-nouvelle formation. de la Société, ce Comité n’a npas-encôre eu les-occahions de déployer toute {on activité. Il s’eft ce- : péndant occupé de-la rédaction & de l'impreflion des Réglemens, & de: cèlle d'un, 'Agendä dréflé! par M. le Docteur Odier , .où chaque Membre de la Société voit pendant toute l’année le tableau de fes eccupatiofis relatives à la fociéré, Ce même Comité s’eft chargé de SUR L'HIST. NATURELLE ET LES ARTS. 317 dreffer: le tableau comparatif & raifonné des Arts qui s’exercent dans Genève ; tableau qui doit fervir de bafe à l’exécurion de Ia grande & belle propofition de M. le Docteur Odier, d'évaluer l'utilité & le degré de perfection de chacun de ces Arts, de les perfectionner & d'introduire ceux qui nous manquent, & qui pourroient nous con- venir, . C'eft d’après ce dénombrement que l’on pourra juger s'il eft vrai qu'il y ait des Arts qui font nuifbles à l’organe de la vue de ceux qui les exercent ; & qu’alors, fi le fair fe trouve conitaté , on pourra propofer un prix pour encourager la recherche des moyens de conferver ce précieux organe à ceux qui exercent ces profeflions. M. de Sauflure a terminé fon Rapport en remerciant le public des encouragemens qu'il a donnés au Journal de Genève, qui eft confié aux foins du Comité Rédacteur. Il a aufir adreflé les remercîmens du Comité aux perfonnes, qui, par les articles qu'elles envoient à ce Journal, concourent à le rendre intéreflant, & particulièrement à M. le Docteur Odier, Auteur de tous les articles relatifs à la méde- cine, & qui, en plaidant la caufe de l’inoculation & en la pratiquant gratuicement fur les pauvres , a préfervé un nombre d’enfans des ravages de la dernière épidémie. Extrait du rapport de M. SENERIER. M. Senebier a lu un Rapport des expériences faites fur le charbon de terre du Petit-Bornant, par MM, Jallabere, Pitet Profefleur, Se- nebier & Ting:y, & dont il réfulre que, quoique ce charbon foit encore à un prix trop haut, on économiferoit cependant quelque chofe en l'appliquant dès-ä-préfenc aux arts & aux ufages domeftiques, Il a fait remarquer enfüuite qu'on peut toujours employer ce charbon fans crainte, puifqu'il ne laifle échapper aucune exhalaifon nuifble à la fanté, & àla manipulation des métaux. Enfin M. 'Senebier a fait connoître la tourbe de Boffey, cemme le combuftible le plus économique de notre pays , puifqu’avec la même dépenfe d'argent, le feu de cette tourbe produit des effets doubles de ceux que le feu de bois pourroïit opérer. Il a obfervé cependant que la mauvaife odeur qui fe répand pendant la combuftion de la tourbe ne permet de la brûler que dans des cheminées parfaitement bien faites ou dans des poëles. Extrait du rapport de M, Lurrin , Wice- Préfident du Comité de Deffin. Jaloux de répondre à la confiance que le Gouvernement avoit té- $ , À, « . É à J moignée à la Société des Arts en lui remettant la dire“tion de l'Ecole 3138 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, de Defin, le Comité Général , après avoir revu & remis en vigueur les Réglemens fondamentaux de cet établiffement, en a confié l’inf- pection à un Comité particulier compofé de tous les Membres de Ja Société, qui ont étudié ou qui culrivent cet art. Le Coinité ouvrit un concours au mois de feprembre dernier, & de 28 Afpirans, quatorze feulement furent admis. Trois l'ont été depuis fur la préfentation de têtes en deux craions d'après la boffe , qui an- noncoient de bonnes études & d’heureufes difpolitions. Empreflé à profiter du dévouement & des talens des Artiftes qui ne font pas Membres de la Saciété , le Comité s’eft adjoint MM. Va- niere & Jaquer. Le premier furveille & dirige alternativement avec MM. Arlaud l'aîné, Ferriere & Chalons l’Ecole d'après la boffe ; le fecond , pañlionné pour les progrès de l’art qu’il profefle avec tant de fuccès, offre de prèter fucceflivement à l'Ecole rous fes divers modèles de fculpture ; & de donner fes directions aux jeunes-gens qui voudroient modeler d’après nature ou d’après le plâtre. Enfin le zèle de M, Jurine ne s’ef point rallenti, & au cours d'Of- téologie qu'il donna à la fin de l’hiver dernier, il a fait fuccéder des leçons de myologie, que leur clarté &;leur précifion ont rendu crès- précieufes aux Elèves qui defineront bientôt à l'Açadémie. Extrait du rapport de M. le Profefleur PictET , Préfident du Comité de Mécanique. Quoique l'Ecole de Mécanique ne foit pas encore ouverte, le Comité Infpecteur fur cet établiffement n’eft pas fans fonctions ; il s'occupe effen- tiellement & fans relâche de la rédaction du Cours qui devra être enfeigné dans cetre Ecole. Une Commiflion nombreufe de ce même Comité s’en eft diftribué les diverfes branches: elle eft compofée de MM. Clavel, Def- combaz , J. Droz, Gervais, Mallet, Maflor; Paul, Piet & Prevolt. L'Horlogerie a une telle prépondérance chez nous en comparaifon des autres arts qui tiennent aux Mécaniques , que la Commiflion a dû lavoir principalemenc en vue dans fon travail, qui devient entre fes mains un vrai Cours d'Horlogerie : ce n’eft pas qu' Diese meme pooenees vreene 1084 RE D ———=—= 4] ne 22 | MA à DU | JOURNAË DE PHYSIQUE. | cIR Turn 1788. 12 ee ee es REZ =xÉ S: Ü TE DE: L'E S'S$S-A:l SUR LES PLANTES USUELLES DE LA JAMAIQUE ; Par M, WiczriAam WRIGHT: Traduit de l'Anglois , par M. MiLLIN DE GRANDMAISON. 45. DIrOSCOREA ALATA. Jogrames. = BULBIFERA, = SATIVA, ———— TRIPHYLLA. O N cultive les deux premières efpèces pour. la nourriture, Elles grimpent comme le houblon. On les plante au printems ; elles font mûres à Noël. Les racines font très-groffes & pèfenc jufqu'à trente & quarante livres, On peut les garder plulieurs mois, & elles fourniffent une nourriture journalière : on les rôtit, & on les fait bouillir comme les pommes de terre; mais elles ont un tiflu plus groffier : on les fert de diverfes manières , on en fait de la foupe , de la bouillie, &c. du pou- ding, &c. Elles fourniffent beaucoup de colle. La diofcorea fativa eft originaire des bois de la Jamaïque; la tige eft anguleufe & dentelée, elle coupe la main comme un couteau. Les racines font plates, digitées & groffes. Elles purgent ceux qui ne font pas dans l'habitude d'en manger ; mais elles font la principale nourriture des nègres fugitifs. i ; La diofcorea triphylla, il y a quelques années, étoit peu connue des habitans ; les feuilles different de celles des autres diofcorea ; les racines ont à-peu-près fix pouces de-long & deux pouces de diamètre ; chaque tige a environ douze pouces. Les nègres mêmes la plantent fur les montagnes, & l’apportent dans les plaines. Elle fe garde quelques femaines. Sa racine rôtie ou bouillie eft délicieufe & préférable à la pomme de terre. Tome XX XII, Part. I, 1788, JUIN, : Eee ke Let 12 4 , 1 TRCETERT + UN 402 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, 46. DoLiCHOS PRURIENS. CoWitch. C’eft une plante grimpante qui fe trouve dans les buiffons à la Ja- maïque, & qu'on cultive à préfent dans les jardins. Elle a des rameaux tendres ; elle eft trifoliée : les fleurs fonc petites & papilionacées. Les goufles ont environ quatre pouces de long : elles font épailles comme le doigt, & contiennent quelques femences dures & oblongues. L'intérieur de la gouffe eft garni de petits poils bruns & fermes qui caufent fur la peau une démangeaifon infupportable. Pour faire du fyropon ratifle les goufles avec un couteau, & on lesjette, lorfque le fyrop auquel on a joint ces poils devient à la confiftance du miel, il eft bon pour l’ufage; il agit mécaniquement comme anthel- mintique; il ne caufe aucun mal-aife dans les premières voies qui font défendues par le mucus:on en peut prendre une cuillerée à café par jour, 47. EPIDENDRUM VANILLA. La Vanille, Cette plante eft cultivée avec foin dans les pofleliions efpagnoles de l'Amérique; elle croît aufli fpontanément dans les montagnes de la Jamaïque. M. ledocteur Swartz , favant Botanifte fuédois, l'y trouva il y a environ trois ans. Le fruit a un parfum exquis, il eft fort cher. Il mérite toute l’arrention des habitans , car il peut être cultivé & deveninun objet de commerce, 48. EPIDENDRUM CLAVICULATUM. On trouve cette plante dans les terreins fabloneux ; elle rampe für la terre, & s’y attache çà &'là par différentes racines. La tige eft grofle comme le doigt, ronde, verte & fucculente, & il y a environ un pied entre chaque articulation ; elle a trois pieds de long , & n’a pas de feuilles, Les Aeurs font larges & jaunes , les fruits ont deux pouces de long. En regardant le fuc qu’on en exprime avec une loupe, & même à la vue fimple, on le trouve rempli de petites épines longues ; le docteur Drummond, Médecin & Boranifte très-inftruic de Weftmor!land à la Jamaïque , qui le premier ma montré cette plante, m'a afluré qu’il avoit fouvent employé ce fuc, à la dofe d’une cuillerée, comme un excellent vermifuge , que dans de certaines hydropifies il provoque les urines & guérit le malade ; les nègres en font un grand ufage contre les maladies Vénériernes, 49. EUPATORIUM DALEA. Cetre plante eft commune dans les montagnes de la Jamaïque; elle eft lisneufe & vivace & s'élève à quatre pieds : les fleurs font jaunes, les femences cotonneufes, : SUR L'HIST. NATURELLE ET LES ARTS, 40: Les feuilles defléchées ont un parfum prefqu'égai à celui de la vanille ; & les Efpagnols l'emploient fouvent à fa place, so. FEVILLEA SCANDENS. Cetre plante eft très-commune dans les vaftes rerreins de la Jamaïque & fur Le bord des bois: elle eft grimpante , s’attache très-ailément aux buiffons & aux arbres qu'elle couvre comme le lière, Les fleurs mâles & femelles font fur des individus féparés. Les Aeurs font petites & jaunes ; le fruir eft une courge ronde qui renferme une douzaine de femences plattes : quand il eft mûr , les femences tombenc au fond & sy rangent circulairement. Son goûr eft amer & huileux ; le peuple le regarde comme un anti- dote contre les poifons du règne végétal, & comme an fpécifique dans les foiblefles & les maux d'eftomac. Les femences pilées & bouillies fourniffent une huile graffe qui a la confiftance du fuif; on en fait beaucoup d'ufage à Honduras pour en fabriquer des chandelles. $I. GEOFFRAEA INERMIS. J'ai donné une Differtation botanique & médicale fur cette plante dans le foixante-feprième volume des Tranfactions philofophiques. La Société Royale y a joint une bonne figure, Les propriétés anthelmintiques de cette écorce font genéralement connues. Elle eft citée dans les Pharmacopées d'Edimbourg & dans quelques Pharmacopées des nations étrangères. J'obferverai que les Médecins ont trop de confiance dans les anthel- mintiques. Les fymprômes des vers font fouvent trompeurs ; car ils font les mêmes que ceux de plufeurs fièvres, Dans les cas douteux, j'ai toujours joint au quinquina l'écorce de la geoffraea inermis. Les vers qu’on rend à la fin des maladies aigues font fouvent un fatal fymptôme, Il ne faut pas alors donner des remèdes vermifuges, on peut feulement employer l'écorce de la geoffraea inermis. $2. ABRUS PRECATORIUS. Reglifle des ifles. Cette belle plante fe fair jour à travers les buiflons; elle a une infinité de petites feuilles pinnées. Les fleurs font papilionacées & d'un rouge pâle. Les fruits font courts & arrondis ; ils contiennent trois ou quatre petites femences rondes , d’un rouge brillant , avec l’extrémité noire, Ces graines font très- dures & émétiques. Elles n'ont jamais été ordonnées ; elles font communes dans les boutiques. Les nègres de la Jamaïque les achètent pour en faire des chapelers. 53 GOUANIA DOMINGENSIS. _ Cette liane grimpe dans les haies , les tiges font ligneufes & groffes comme le doior . elle s’écend beaucoup , elle eft par-tout d’une groffeut Tome XX XII, Pare. I, 1788. JUIN. Eee 2 404 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE; égale , les feuilles font ovales & dentelées , les fleurs petites & blanches, les capfüules petites, blanches & plates. Les racines font excellentes pour nettoyer les dénts, elles font amères & anti-feptiques. Le jus de la plante eft un ftomachique agréable, il sen l'appétic, & il diflipe les maux caufés par le relâchement du vifcère, $4 GUAJACUM OFFICINALE. Gayac, Le gayac eftoriginaire de l'Amérique, il parvient lentement à une hau- teur moyenve, fon feuillage eft coujours verd. Ses fleurs , armées & nom- breufes, font un contrafte fort agréable avec fes fruits , plats & jaunes, Le fruit eft ordinairement courbé, l'écorce eft fillonée & laifle dif tiller une gomme. Toutes les parties de l’arbre font âcres & défa- gréables au goût, & comme elles contiennent plus où moins de ré- fine , elles font purgatives, diaphorétiques, & diurétiques. Outre la gomme qui difille fpontanément des baies, on en obtient encore de la manière fuivante : on fcie le tronc & les branches en petites buches d'environ 3 pieds de long. On perce chacune de ces petites buches dans fa longueur , on place ces buches par un des deux bouts, fur le fu, de manière que la gomme qui en découle, puifle être reçue dans une calebafle On peut encore obtenir la gomme du gayac, en faifant bouillir les copeaux dans de l’eau & du fel commun. La gomme furnage, &e on peut l'écumer. : p On peut encore l'obtenir par l’efprit ardent, de la même manière qu'on traite le gayac & le quinquina, mais ce moyen eft difpendieux & 'incommode, Les maladies vénériennes font les plus terribles ravages parmi les nègres de la Jamaïque, & sy montrent fous les formes les plus hi- deufes, ce qu'on ne doit attribuer qu’à ‘leur ignorance & à leur né- gligence. Il n’eft que trop“éommun parmi eux de retarder les 2onorhées virulentes avec des remèdes aftringens; de forte.qu'on ne connoît pas leur fituation, jufqu'à ce que les os du nez &.du palais foient griévemenc affectés, ol } Les tetanos quoique bien différens des maladies vénériennes , pro= duifent fouvent Îles mêmes effets dans les membres, le nez & la gorge ; heureufemenr on les peut guérir avec le mercure & les décoctions diaphorétiques. nes CA ATEN é É fublimé corrofif me paroît le meneur (RÉGfSR SONRE ces maux enracinés , fur-tout quand il eft accompagné de mé icamens qui portent à la peau. Le gayac & la falfepareille font de cérre forte. J’ai trouvé que les formules fuivantes' écoiént préférables, ) Réfine de gayac, dix gros, SUR L'HIST. NATURELLE ET LES ARTS. 405 -Serpentaire de Virginie, trois gros. Piment deux gros. Opium, un gros. Sublimé corroff, un demi-gros. Eau-de-vie d’épreuve, deux livres. : Mélez & faites digérer pendant trois jours, & paflez la liqueur. Deux cuillerées à café, de cette teinture, dans une demi-pinte de décoétion de falfepareille , données deux fois par jour, guériflent ordi- nairement au bout de 4 à $ femaines. 55 HÆMATOXYLUM CAMPECHIANUM. Bois de Campêche, Le docteur Barham en apporta les femences à la Jamaïque de la baie d'Honduras en 171$. Il y eft depuis devenu trop commun , il couvre de grandes étendues de terrein, & il eft difcile de l'extirper. On le plante ordinairement pour faire des haies , c’et une excel- Jente défenfe contre le bétail; fi on émonde les branches les plus bafles , il s'élève beaucoup, & quand il eft vieux, le bois eft aufli bon que celui de la baie d'Honduras. Le tronc & les branches ont des épines longues & dures. Les leurs font jaunes, rachetées de cramoifi, ont une bonne odeur & {ont fort belles. Le fruit eft plat, & contient deux ou trois femences longues & lifles. On coupe le bois de campêche par morceau; on en Ôte l'écorce & l'aubier, on envoie la partie rouge ou le cœur en Angleterre pour le commerce, : Son ufage en médecine & en teinture eft aflez connu. 56. HiBisCUS ESCULENTUS. Gombeau. On le cultive dans les jardins pour la nourriture, il s'élève à cinq ou fix pieds, il a des feuilles larges, & de groffes fleurs jaunes, le fruit a de deux à fix pouces de long & un de diamètre ; quand il eft mûr, il s'ouvre longitudinalement en cinq valves, & laïifle échapper un certain nombre de femences cordiformes. Toutes les parties de cette plante, principalement les fruits, font mucilagineufes , comme le font celles de toutes les autres colomniferes. \On cueille les fruits, on les coupe, on les feche, & on les envoie en préfenr. Bouillis, on les fert en foupe. Ces fruits defléchés font comme du poiffon fec ou du piment. Ils font bons & nourriffans. On emploie le gombeau dans tous les cas où les émolliens & les lubrefians font indiqués. 57. JATROPHA JANIPHA, La Caffave, ———— MANIHOT. Le Manihot, On cultive ces deux plantes pour la nourriture; il eft difficile de à 406 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, les diftinguer l'une de l’autre par les racines. IL faut pourtant évicer celles de la cailave , qui porte des fleurs, c’eft le manihot qui eft un poifon quand on le mange crud. La racine du manihot n'a pas de filamens fibreux ou ligneux dans le cœur, elle n’eft douce , ni rotie, ni bouillie. La caflave a toutes les qualités oppofées & on la fert fur la table. On prépare la caflave ou le manihot de la manière fuivante : on lave les racines, on les ratifle, on les rape dans un vafe , enfuite on les prefle dans une chauffe; on fait enfuite fécher La fécule dans un vafe fur un fourneau, on en forme des gâteaux dont on fait d'excellent pudding, comme avec le miller. Le manihot frais s'applique avec fuccès fur les ulcères. Les racines de caflave fourniflent une grande quantité de colle que les brafiliens exportent fous la forme de petites mailes qu'ils appellent Tapioca, $8. JATROPHA GOSSYPIFOLIA. ———— CURCAS. ———— MULTIFIDA, La première de ces plantes croît fauvage. Les nègres mettent [a feconde autour de leur jardin, on cultive la troifième pour l'orne- ment. Les feuilles d+s deux premières en décotion font très-utiles dans les affections fpafmodiques. Les femences de toutes les trois, font des purgatifs très-efficaces & mêmes émétiques , elles fourniflent par la décoétion , une huile qui a les mêmes propriétés que celles du ricin, dont je parlerai bientôt. $9. LAETIA APETALA. Cet arbre eft commun dans les bois, il s’élève & groffit beaucoup. Les troncs font liffes & blancs , les feuilles fonc longues de trois pouces, un peu dentelées & un peu velues , les étamines font jaunes, les fleurs fon: apetales, le fruit eft gros comme une prune, quand il eft mûr, il s'ouvre & laifle voir un certain nombre de femences dans une chair rouge. Les morceaux du tronc ou des branches, fufpendus au foleil , laiffent couler une réfine, qui devenue concrète, blanchir, & reflemble beau- coup au fandarac. Il paroît que cette réfine auroit en médecine les mêmes propriétés que les autres, on SUR L'HIST, NATURELLE ET LES ARTS, 407 60. LANTANA CA-MARA, rune caps none Pam ACULEAT A, ———— INVOLUCRATA. La première croît parmi les buiffons ; elle eft remarquable par la beauté de fa fleur, teinte de rouge. La feconde a des petites fleurs blanches, des feuilles rudes, d’une couleur fombre. Elle croît aufi fauvage. On trouve la troifième efpèce près de la mer, c’eft une plante bafle ; elle a des petites feuilles cendrées , fon odeur eft fort agréable, Les nègres prennent les feuilles de tous ces lantana, comme du thé pour les rhumes & les foiblefles d’eftomac , on les emploie aufli avec de l'alun en gargarifme. 61. LAURUS ciNAMmoOmMumMm. Le Canelier. Ce bel arbre a été pris avec beaucoup d’autres très-beaux fur un vaiffeau françois. Et l'amiral Rodney toujours attentif au bonheur de la Ja- maïque , en fit préfent à cette colonie. - Un de ces arbres fut planté dans le jardin botanique de Sainr- Thomas ; un autre par M. Hinton Eaît, dans fon beau jardin, au pied de la montagne bleue. Ces arbres produifent de jeunes rejetrons qui font difperfés dans la colonie, ils croiflent très-bien par-tout , & nous pouvons efpérer que ce fera bientôt une addition affez précieufe à notre commerce. L’écorce eft cordiale, la canelle qui nous vient d'Hollande , eft fouvenc fans effer, & paroît avoir été un peu diftillée. 62. LAURUS CAMPHORA, Le Camphrier. Cet arbre eft un de ceux pris fur les françois, & donné aux ha- bitans de la Jamaïque ; il eft affez commun dans les ferres en Angle- terre. Si on le cultive avec foin ; il deviendra auffi un objet de commerce. Le camphre quoique folide, eft l'huile effentielle de cet arbre ; on l'obrient par la diftillation dans les Indes Orientales, 63. LAURUS SassaFrASs. Le Saflafras. H eft originaire de l'Amérique feptentrionale, & vient à merveille dans le jardin de M. Eaft ; quand on laura propagé, ce fera encore un objet de commerce pour la Jamaïque. On emploie en médecine les racines & leur écorce, on prend les fleurs en infofion , comme chez nous les rapures de l'écorce. Les ra- cines & l'écorce font un excellent ingrédient dans la décoétion des bois fudorifiques. 408 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, 64 LAURUS PERSEA. L’Avocat. Cet arbre n’a ni le port, ni les propriétés des efpèces de ce genre, quoique les fleurs en aient le caractère. On le cultive généralement, il s'élève rapidement à 20 ou 30 pieds. Les feuilles font longues , ovales & pointues ; les eurs font jaunes & petites. Le fruit a la forme d'une poire , & pèfe une ou deux livres, \ En écartant la peau verte qui le couvre, on arrive à une fubitance jaune & laiteufe, & l’on trouve dans le cœur une grofle femence ronde , elle a les furfaces inégales, elle eft très-dure & très-ligneufe. Ce fruic eft müûr en août & en feptembre. Il eft alors une des chofes Les plus agréables de la nourriture des nègres. On le fert auf fur la table des blancs comme un mets délicat. Quand la poire elt mûre, la fubftance jaune eft plus folide que le beurre ou la moëlle ; voilà pourquoi quelques-uns Pappellent plante -moëlle ; mais quoique ce fruit foit excellent dans fa maturité, il eft très-dangereux quand il et verd , il occafionne des fièvres & des dyffenteries difliciles à guérir. Les feuilles jointes à celles de l’Abrus precatorius , font prifes en décoétion par le petit peuple. Cette boiflon eft peétorale. On attache le linge autour du noyau , qu'onfpique avec une épingle, jufques dans l’intérieur, on trace ainfi les caractères que l'on fouhaite, & ils reftent marqués d’un rouge brun; que la leflive ne peut enlever. 65. Mazvacrez. Les Malvacées, (ordre naturel. ) Nous comprenons fous ce titre, toutes les plantes de la dix-huitième claîle de Linné , qui forment l'ordre naturel des colomnifères, Loutes font mucilagineufes , favoneufes & émollientes. Pluñeurs d’entr'elles fourniflent un fuc d'une nature femblable au cachou. Quelques autres font très-nourriflantes, Voyez Hizrscus efculentus N°. 56. 66. MARANTA ARUNDINACE A. On cultive cette plante dans les jardins, elle s’élève à la hauteur de deux pieds, elle a des feuilles larges & pointues, de petites fleurs blanches & une feule femence. On prend les racines qui ont un an, on les lave dans l’eau, on les pile dans un mortier de bois; alors on les remet dans un grand vafe , plein d’eau ,enfuite on remue le tout, on prefle la partie fibreufe avec la main & on la retire. On pañle la liqueur laiteufe à travers une chaufle, on la laiffe repofer, on décante l'eau claire, il refte au fond du vafe une matière blanche, que l’on mêle de nouveau avec de l’eau claire, on l'égoutte, on la laifle fécher au foleil fur des draps, & on obtient une colle crès-bonne, Les SUR L'HIST. NATURELLE ET LES ARTS, 409 Les racines fraîches en décoétion , font un remède excellent contre les maladies aigues. 67. MimosA TORTUOSA, ——— NILOTICA, Arbre à la gomme arabique, ——— SENEGAL. Arbreàlapgommedu Sénépal, La première efpèce a probablement été importée , à préfent elle eft trop abondante, car ceft une plante fort incommode, Les autres efpèces ont été apportées de Guinée, il n’y a pas long- tems. Ces arbres ont 30 pieds de haut, je les ai vus dans le jardin du docteur Paterfon à Green-ifland à la Jamaïque. La nilorica fournie par incifion , une quantité aflez confidérable d'une gomme tranfparente. Ces différentes efpèces ont des feuilles un peu pinnées ; quand on les rouche , elles font prefque auñli fenfibles que celles de la #2m0fà pudica. Les fleurs font jaunes , toutes ces efpèces fourniffent une certaine quantité de gomme arabique plus ou moins tranfparente, 683. MrRABILIs JALAPA. Belle-de-nuit. On voit fouvent cette plante en Angleterre ; dans les jardins des curieux , elle croît fauvage à la Jamaïque, & elle y'eft fort incom- mode, Quelques variétés ont des fleurs rouges, d’autres des leurs jaunes, d'autres des leurs agréablement panachées. Elle a une racine platte, qui quand on la coupe, ne diffère guère de celle du jalap. Quand on la fait fécher, elle eft blanche, bril- lante & fpongieufe. Il en faut une grande quantité pour purger, & il eft probable que la plante eft le zechoacan des anciens , & non pas le vrai jalap, qui appartient au genre convolvulus. 69. MUSA PARADISIACA, ——— SAPIENTUM. Bananiers. TROGLODITARUM. La mufa paradiafiaca elt cultivée à la Jamaïque. C’eft la prin- cipale nourriture des habitans, Les feuilles ont 6 ou 8 pieds de long , & deux ou trois de large, les fleurs font enfermées dans une fparhe , & enveloppées d’un calyce pourpre & non perfiftanr, Les fruits ont environ un pied de iong, & fonc un peu courbés. Quand ils font mûrs, ils deviennent jaunes, liffes_& doux. Les graines font plus groffes que celles de la moutarde , elles font brunes & nombreufes. Elles ne germent jamais ; la plante fe reproduit par bouture. 4 On cueille ces fruits quand ils ont achevé leur croiflance, mais avant qu'ils foient mûrs. On les dépouille de leur peau verre, & on Tome XXXIT, Pare. I, 1788. JUIN. Fff 410 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, les rotit fur le feu, pendant quelques minutes, on Les retourne fouvent , après cela on les ratifle & on les fert comme du pain. Ces fruits bouillis ne font pas aufli bons à manger. La mufa fapientum porte un fruit moins gros que la première; on ne le mange jamais verd ; mais quand il eft mür il eft agréable , foit crud, foit cuit. Ces deux efpèces font la nourriture d'hommes de toutes les condi- tions; fans elles l'ifle feroit inhabitable , rien ne pouvant les remplacer. Ces fruits nourriffenc les chevaux , le bétail, les cochons , les chèvres, la volaille & d’autres animaux domeftiques, Les fruits de la mufa trogloditarum ne font pas mangeables, Les feuilles de toutes ces efpèces*fonc à-peu-près les mêmes, & comme elles fonc liffles & douces , on les emploie pour mettre fur les véf- catoires, La liqueur du tronc eft aftringente, & quelques perfonnes l’employent pour arrêter les diarrhées. Les autres parties de Ja plante font propres à différens ufages économiques. 70. MYRTUS PIMENTO. L'arbre-piment. Il eft originaire de la Jamaïque, & croît dans tous les bois des parties feprentrionales de cette ifle, L'arbre piment couvre une grande quantité de terrein ; c’eft un des articles de commerce, à la Jamaïque. Cet arbre a des feuilles femblables à celles du laurier, les Aeurs reffemblent à celles du fureau. Le fruit eft une baie noire, groffe comme une grofeille ; quand il eft mûr, il contient deux femences grifes & liffes. Avant que les baies foient tout-à-fait müres, beaucoup de gens font occupés à les cueillir , on les fèche fur des plateaux, & on les met dans des facs qui en contiennent cent livres, pour les vendre en Eu- rope. Le piment a lodeur & les qualités des épices orientales. IL entre dans plufeurs préparations , & il eft un des premiers ingrédiens de la poudre à la maréchalle. ù 71. PASSIFLORA HEXANGULARIS, Grenadille, ———— MALIFORMIS. ———— LAURIFOLIA. On cultive toutes ces efpèces à la Jamaïque , & on les mange, La pulpe de la grenadille eft vraiment délicieufe , fon goûc eft doux & un peu acide, il ef très-agréable à ceux qui ont des fèvres continues, On fair avec l'écorce de la grenadille, encore verte, des conferves & des: patifléries. SUR L'HIST. NATURELLE ET LES ARTS. 4x 72. PASSIFLORA RUBRA. C’eft une plante qui grimpe fur les arbres les plus élevés , elle eft chargée d’un grand nombre de fleurs cramoifies , le fruit eft noir, & de la groffeur d’une cerife. Un chirurgien qui habitoit Ja paroiffe d'Hanovre , a guéri beaucoup de fièvres par l’ufage des fleurs & des baies de cette plante; mais l'opium eft encore plus efficace. 73. PICRANIA AMARA, C’eft un bel arbre commun dans les bois de la Jamaïque, Le Che- valier Bancks en a des fleurs & des femences que je lui ai envoyés dans de l’efprit-de-vin. C’eft un nouveau genre de la pentandrie mono- gynie de Linné; fon nom exprime fes propriétés. Toutes les parties de cet arbre font extrêmement amères, & con- fervent cette amertume pendant plufieurs années. Les meubles faits de ce bois font fort commodes, en ce que les infectes ne les attaquent jamais, Cet arbre a une grande affinité avec le bois de Surinam, Quaffia amara , L. on l'emploie fouvent à fa place , comme anti-feptique dans les fièvres putrides. Il en faut une moins grande quantité que de la Quaffia (1) amara de Surinam. 74. PIPER AMALAGO. ———— INEQUALE. Ces efpèces & quelques autres font indigènes. La première porte un petit pédicule , fur lequel il y a des femences groffes comme celles de moutarde , toute la plante entière a le goût du ‘poivre noir des grandes Indes. La feconde efpèce eft plus droite que la première, les feuilles font larges, lifles & brillantes. Le fruit reflemble au poivre long des bou- tiques; mais il eft plus petit. Le petit peuple de la Jamaïque affaiflonne les mets avec le Piper amalago. Pour conferver le fruit il faut le cueillir vert, l’échauder , le fécher & Fenvelopper dans du papier. fl pourroit devenir ainfi un objet de commerce. (x) En 1772 le Doëteur Wright découvrit Parbre qui donne le fimarouba des boutiques , & l’année d’enfuite il en envoya une defcription botanique au Doéteur Hope à Edimbourg fousle titre de Quafjia fimarouba. Il en fit pañler des échantillons au Doteur Fothergill qui les envoya à Linné. Ce dernier fit part de cette découverte au Profeffeur Murrhay à Gottingue qui en a fait mention dans le troifième volume de fon Apparatus Med. page 458. à Nous apprenons avec plaifir que le doëteur Wright va bientôt publier une defcription de cet arbre, accompagnée d’une gravure, Tome XXXII, Part, 1, 1788. JUIN, He 42 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE; 75. PORTLANDIA GRANDIFLORA. Le docteur Browne a décrit certe plante, & en a donné une bonne figure, elle a fouvent fleuri dans le jardin du Roi à Kew, & dans celui du Docteur Pitcairn ; l'écorce extérieure eft fingulièrement rude, fillonée & épaifle. L’écorce intérieure eft très-fine, & d'un brun foncé, fon goût eft amer & aftringent , fes propriétés font les mêmes que celles du quinquina; infu(ée dans du vin ou de l’efprit-de-vin , avec de l’écorce d'orange, elle donne une teinture excellente & ftomachique. 76. RiciNus communrs. Le Ricin, Cet arbre croît très-rapidement. Dans une feule année, il parvient à toute fa hauteur , qui eft quelquefois de 20 pieds. Le tronc eft prefque ligreux , la corolle volumineufe, les feuilles font larges & palmées ; le pédicule eft fimple , les fleurs font jaunes, ont la forme d'un cône. Les caplules font triangulaires & épineufes , elles contiennent des femences lifles, tachetées de gris. Quand les capfules commencent à noircir , on Îles cueille, on les faic fécher au foleil, on en tire les femences, on les emploie alors ou on lés exporte, L'huile de ricin s'obtient ou par expreflion, ou par déco@tion; on pratique la première méthode en Angleterre, la feconde à la Jamaïque. Communément on met les femences fur le feu, dans un pot de fer, mais huile contracte une odeur, une faveur & une couleur empyreuma- tiques ; il fâut mieux le préparer de cette manière; on remplit d'eau un vale de fer, on pile les femences par partie, dans un mortier de bois ; quand elles font fufffamment pilées , on les jerte dans le pot de fer, on les fait bouillir pendant deux heures, en les remuant fans celle, au bout de ce tems , l'huile commerce à fe féparer , & nage à la firface, elle eft mêlée d’une écume, qu’on emporte avec une écumoire, jufqu'à ce qu'il n’en paroille plus. On fait chauffer ces écumes dans un petit pot de fer, on les pafle au travers d'une étamine , & quand Ja liqueur! eft refroidie on la mer en bouteille. Elle eft alors claire , elle a une bonne odeur, & fi les bouteilles font de bonne qualité , elle peut fe conferver fort long-tems. L'huile de ricin, tirée par expreflion , rancit promptement, parce que la partie mucilagineufe & âcre eft exprimée avec lhuile. Voilà pourquoi je préfère celle obtenue par décoion. Quatre livres de femences donnent une livre d'huile. Avant la guerre d'Amérique, les Colons importoient l'huile de baleine pour les lampes , & d’autres ufages relatifs à la fabrication du fucre. On reconnoîr à préfent que l'huile de ricin peut fuppléer celle de baleine, elle éclaire bien, & a} ne € SUR L'HIST. NATURELLE ET LES ARTS. 413 n’a aucune mauvaife odeur, elle peut être employée en peinture & dans les pharmacies. Elle purge fans aucun flimulant, Cette médecine eft fi douce , qu'on la donne aux enfans qui viennent de naître. Elle les débarraffe de tout le meconium. Toutes ces huiles font nuifibles aux infectes ; celle de ricin fur-tout , les chaffe & les tue , on ia donne en général pour purger quelques jours après l'écorce de la Geoffrea. Dans les conftipations & les coliques d’entrailles, on la prefcrit avec fuccès. Elle convient à l’eflomac , foulage les fpafmes , procure une pleine évacuation , on emploie en même-tems les fomentations , ou les bains chauds. Les coliques d'eflomac font aujourd'hui beaucoup moins fréquentes à la Jamaïque. Ce qu'on peut attribuer à différentes caufes. Les ha- bitans vivent en général mieux, & boivent des liqueurs plus faines ; cependant les foldats , les matelots & les petites gens boivent encore beaucoup de rhum nouveau, ce qui leur occafionne des obftruétions aux vifcères, après les fièvres intermittentes. 77. SACCHARUM OFFICINALE. Canne à fucre. Elle eft originaire d'Afrique , des grandes Indes , du Brefil , d'où elle a été apportée dans nos colonies d'Amérique , quelque-rems après leur établifiement. La canne à fucre fait toute la fplendeur & Ja richefle de ces ifles, Elle mérite toute l'atrention des culrivateurs induftrieux. Ces culriva- teurs enrichiflent le marchand anglois, ouvrent de nouvelles branches de commerce , entretiennent des millions d'ouvriers, & apportent un revenu immenfe à l'étar. Nous ne dirons rien fur les procédés employés pour faire le fucre, plufieurs écrivains ayant traité ce fujer. Le fucre autrefois un objet de luxe, eft devenu une chofe de né- ceffiré. Dans le rems de la récolte, rous les nègres, tous les animaux ; les chiens même engraiflent, ce qui prouve aflez les propriétés nour- riflantes & faines du fucre, Quelques perfonnes aflurent qu'il gâte les dents, C’eft une erreur, car il n'ya pas de plus belles dents au monde, ue celles des nègres de la Jamaïque. - Le doéteur Abflon , qui a été Profeffeur de botanique & de matière médicale à Edimbourg, a tâché de réfurer cette opinion vulzaire. Il a des-dents fuperbes, qu'il doit, dit-il, à ce qu'il mange beaucoup de fucre, 78. SESAMUM INDICUM. Cette plante a d’abord été introduite à la Jamaïque , par les Juifs ; on la cultive dans Les jardins & dans les potagers, 414 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, Elle eft annuelle & herbacée, elle s'élève au-delà de 3 pieds, les fleurs font blanches & nombreufes, & appartiennent à la didynamie de Linné, les fruits font gros comme le petit doigt, & contiennent un grand nombre de petites femences blanches, Les nègres les mangent dans les bouillies & dans la foupe,en place de viande; les juifs en font des gâteaux qui leur tiennent lieu de pain. L'huile qu'on en tire eft claire & douce comme celle des amandes, elle fe conferve mieux. L'huile de behen fi employée pour les beaux vernis des voitures , n’eft probablement que celle du /e/amum indicum. Neuf livres de femences donnent deux livres d'huile. 79. SMILAX SARSAPARILLA. Salfepareille. Plufieurs efpèces de fmilax ont les racines femblables, mais celles de la baye d'Honduras & de Campêche font les meilleures. = Ces efpèces ont des tiges oroffles comme le petit doigt; elles font articulées , triangulaires & chargées d’épines recourbées. Les feuilles font alrernes , lifles, brillantes d’un côté, Le fruic eft une baie noire ui contient plufieurs femences brunes. | La falfepareille fe plaîc dans les rerreins bas, humides, & fur le bord des rivières. La racine trace prefque fur la furface du fol. Les herbo- riftes pour la déraciner ne font qu’écarter un peu la terre & la tirer par fes longues fibres, jufqu’à ce qu'ils layent toute entière ; on la nettoye, on la lave, & on la met en bottes. Les racines de la falfepareille font mucilagineufes & farineufes avec un peu d’âcreté, qui eft pourtant fi légère, que quelques perfonnes ne s’en apperçoivent pas, & je fuis porté à croire que fon efficacité mé- dicale eft due à fes parties adouciffantes & farineules. La falfepareille eft devenue d’un ufage plus répandu depuis la dif= fertation de M. William Fordice , imprimée dans le premier volume du Journal de médecine. Les cultivateurs de la Jamaïque en retirent un grand produit ; elle réufñic b:aucoup dans les maladies vénériennes, & dans tous les accidens qui les accompagnent , mais il faut qu’elle foit unie avec le mercure. Certe plante eft peu répandue à la Jamaïque ; on pourroit l'y cultiver, & cela épargneroic aux Colons- beaucoup de dépenfes. La fquine croît aufi à la Jamaïque; mais on en fait rarement ufage. So: SPIGELIA ANTHELMINTICA. Cette plante croît fauvage dans plufieurs endroits de la Jamaïque, on la cultive aufi dans les jardins ; elle s'élève à la hauteur de deux pieds. Le Doeur Browne en a donné une bonne figure. Les fleurs fonc petites & blanches , les capfules font rondes, & contienuent une grande quantité de petites femences. SUR L'HIST. NATURELLE ET IES ARTS, 415 Cette planre a été long-rems en réputation comme vermifuge , on l'emploie encore journellement à la Jamaïque, elle agit comme la Jpigelia marylandica. Plufieurs plantes anthelmintiques ont une pro- priété plus ou moins narcotique. Celle - ci éclaircir la vue , elle fait dormir, & voilà comment elle eft utile dans les fièvres de vers, Après un ufave de quelques jours, il faut néceflairement ordonner l'huile de ricin. Qu'on me permette de répéter que les fignes des vers font très-incertains. Le quinquina peut être prefcrit dans tous les cas douteux & quand les anthelmintiques ne font pas d'effet. 81. SWIETENIA MAHAGONI. Le Mahagoni. Cet arbre s'élève majeftueufement, il croît lentement & il eft d’une grande dureté , fon bois eft bien commun en Angleterre, Autrefois le mahagoni étoit très - multiplié à la Jamaïque, on ne le trouve à préfenc que fur les montagnes & fur les baies de difficile A accès. Le tronc n'eft pas gros, l'écorce eft rude, écailleufe & brune. Celle des branches & des rameaux eft orife & plus lifle. Cette dernière écorce féchée a le goût & la couleur du quinquina; elle a pourtant un peu plus d’amertume. L'écorce de mahagoni infufée dans l’efprit-de-vin , donne une tein- ture femblable à celle du quinquina , auquel on la fubftitue fouvent, 82, TAMARINDUS INDICA. Le Tamarin, Cet arbre qui procure un bel ombrage, eft cultivé dans toute l’A- mérique, il s’élève à 30 ou 40 pieds, le tronc eft brun, écailleux ; & un peu gros, le bois eft brun, dur, & prend un beau poli, Les branches s'étendent beaucoup, les feuilles font petites, nom- breufes & pinnées, Les fleurs font jaunes & tachetées de cramoifi, elles perfiftent pendant le mois de juin & de juillet, & alors elles tombent. : Le fruit eft large, cendré, la pellicule antérieure eft fine & fra- gile, elle renferme plufieurs femences dures, femblables à des fèves, enveloppées dans une pulpe douce & brune, qui eft retenue par plu- fieurs fibres longitudinales; le fruit eft mûr vers Päques , on le cueille & -on le garde pour le befoin. On conferve les fruits du tamarin de deux manières, la plus uftée eft de jetrer deflus du fucre brülé; mais la meilleure eft de mettre alternativement des lits de tramarin & de fucre en poudre dans un vafe, Il conferve ainfi fon goût & fa couleur, les femences de tamarin ainfi préparées , végèrent facilement, & cette méthode eft très- bonne pour exporter fes fruits & fes graînes. On conferve le ramarin à la Jamaïque ou pour la table, ou pour 416 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, fes propriétés médicales , il eft rafraïchiffant , laxatif & anti-feprique. Ainf il eft utile dans les maladies aigues & purrides. Le Docteur Zimmerman prefcrit le tamarin dans les diffenteries pu- trides. J'y ajoute ordinairement du fel d'Eplom, jufqu’à ce que l'éva- . cuation ait eu lieu, Après cela je prefcris le tamarin feul, jufqu'à parfaite guérifon. 83. THEOBROMA CACAO. Le Cacaotier. On cultive le cacaotier dans toutes les colonies Efpagnoles & Françoifes de l'Amérique feprentrionale. Il ne nous en relte à la Ja- maïque que quelques pieds, monument de notre parelle &e de notre mauvaife adminiftration. Cet arbre fe plaît dans les terreins ombragés & dans les vallées profondes; il s'élève rarement au-deflus de 20 pieds. Les feuilles fonc oblongues, larges & pointues , elles fortent du tronc & des branches les plus larges, elles font petites. & d'un rouge pale , les fruits fort ovales & pointus. Les femences font nombreufes, & remplies d'une fubftance blanche & moëlleufe. L’écorce du cacao fe fépare aifément , quand on le fait griller dans un por de fer, on atténue la pulpe fur une pierre life, en y ajoutant un peu d’arnotto & quelques gouttes d’eau, on réduit Le tout en une mafle, dont on forme des rouleaux d’un pouce chaque. Cerre préparation fimple eft la plus naturelle & la meilleure. La plüpart des familles de la Jamaïque font ufage du chocolat, il convient à mer- veille aux enfans, 84. VERBENA JAMAICENSIS. Cette plante eft commune dans tous les lieux cultivés, fes feuilles font dentées & aflez larges, les fleurs font bleues. La décoction de verveine eft d’un ufase commun dans les reli- chemens. Un verre de fuc de verveine pilée, eft un fort bon purgatif, 85. ZANTHOXYIUM CLAVA HERCULIS. ——— LITRIFOMIATUM. La première efpèce eft appelée bois jaune, épineux , c'eft un beau bois de conftruction. La feconde eft nommée arbre aux maux de dents, on la trouve fouvent fur les bords de la mer, dans les verres fablo- neufes. . Leurs baies ont un goût poivré, l'écorce de Ja racine eft un puiffant falivaire, & caufe dans la bouche une fenfation vive, comme fi on l'avoit pleine de fang. Voilà pourquoi elle eft utile dans le mal de dent. 86, n X SUR L'HIST, NATURELLE ET LES ARTS. 417 86. ZEA maïs. Le Maïs. Le maïs eft cultivé dans toute l'Amérique comme aliment. Celui de l'Amérique feprentrionale eft blanc, plat, fpongieux & a le port du bled de Turquie. Le maïs de la Jamaïque eft beaucoup plus petit, rouge & compacte. Les grains font attachés à une fubftance claire & fpongieufe, qui eft enveloppe commune, par bandes longitudinales. I y a environ douze de ces bandes , & elles contiennent à-peu-près trente grains chacune , on voit le plus fouvent deux ou trois têtes fur chaque chaume. La multiplication du maïs eft prodigieufe. On cultive auffi le bled de Guinée en grand à la Jamaïque. Ces différentes fortes : de bleds font la nourriture d'une partie des habitans , on s'en fert principalement pour élever la volaille, nourrir les cheyaux & pour engraifler les cochons, les chèvres & les moutons. PaArmz. Nous avons plufieurs efpèces de cet ordre à la Jamaïque : quelques- unes fonc indigènes. 87. Cocos NUCIFERA. Le Cocotier, ee me AA EN EE EN SES Le cocotier a été originairement tranfporté d’Efpagne à la Jamaïque: On le plante aétuellement autour des habitations comme un arbre utile & d'ornement, Il donne du fruit dix à douze ans après avoir été planté, Ce fruit eft large, triangulaire, il a environ deux pouces de long , & neuf de diamètre. Après avoir écarté l'écorce extérieure & la fubftance fibreufe, on trouve une grofle noix ronde & dure qui contient environ huit onces d'une eau douce enveloppée d’une pulpe blanche & ferme. On fe fert des feuilles & de leurs pétioles pour couvrir les maifons ou pour faire des paniers. La pellicule réticulaire qui couvre les jeunes pieds eft propre à faire des pafloires. La liqueur du tronc fermentée avec le riz fair de l'arack. La fubftance fibreufe qui couvre la noix, pilée & tiflue, fait de bons cordages ; on convertit la capfule en coupes , en vafes, en fucriers, &c. eau eft bonne & étanche bien la foif. Avanc que le fruit foit cout-à-fait mûr , la noix eft douce, & on peut la manger aufli-tôt, mais quand le fruit eft mûr elle eft dure, & peut faire mal à l’eftomac. La pulpe rapée ou pilée fert à faire des pâtifleries & des confitures. On peut auf la fubftituer aux amandes pour des maffepains ; elle fournit par expreflion une .quantiré d’huile confidérable, Le cocos guineenfis eft originaire des baffes vallées ; il s'élève au-delà de trente pieds. Le tronc & les feuilles font couverts d’épines en forme d’aiguilles. Le fruit eft dur : les petites gens font bouillir les noix dans leurs mets, Ces noix bouillies dans l’eau fourniffent une huile épaifle qui a la confiftance du beurre. Tome XXXII, Part. I, 1788 JUIN, | Ggeg 118 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, 88. Cocos BUTYRACEA, Il a été originairement apporté de Guinée par les nègres. Le tronc eft mince & défendu par une quantité innombrable d’épines, Le fruic eft triangulaire, jaune & gros comme une plume ; les noix ou la pulpe fourniflent par décoction l'o/eum palmæ des boutiques. Le fruit de cette efpèce & de la première fert à nourrir les cochons, Les fangliers l’aiment beaucoup, & ces animaux font très-multipliés dans l'intérieur de l'île, 8ç. ARECA OLERACEA, Cet arbre eft originaire des bois. Le tronc eft mince , & marqué d'anneaux qui femblent être les veftiges des pétioles des feuilles. Ces feuilles fe raflemblent au fommet en forme de parafol; elles ont environ neuf pieds de long & font pinnées. Les pétioles font larges à leur extré- mité , ils forment des tiges vertes au fommet de l'arbre. La partie la plus large du tronc eft creufe . & les nègres en font des berceaux. L'intérieur des jeunes tiges eft garni de tendres pellicules qui fourniflent du papier à écrire, On confit le cœur & on le fert fur les tables; le tronc fert à faire des gouttières. On tire de la moëlle une efpèce de fagou, & la noix donne de l’huile par décoction. C'eft le plus bel arbre de l'univers, & peut-être le plus élevé. J'en aï vu de cent foixante-dix pieds : on m’a afluré qu’il y en avoit encore de plus haut. 90. LE SAGo. Cet arbre précieux a été donné à [a Jamaïque par l'Amiral Rodney avec d’autres plantes prifes fur un vaiffeau françois par le Capitaine Marshall, Cette plante étoit jeune quand je la vis ; on la cultivoit avec beaucoup de foin dans le jardin de M, Eaft, j'efpère qu’elle aura réufli & donné des femences. On tire le fago de cette plante à Amboine & en d’autres lieux des Indes orientales. Ù On fait une pâte avec la moëlle; on la réduit en grains que l’on tamife, & qui font gros comme des grains de poudre à tirer. La poudre de fago que l'on vend dans les boutiques n’eft que de la colle de patates, & la sapioca du Bréfil n’eft que la colle de caffave, Voyez les articles larropha & Muaranta. 93. PHOENIX DACTYLIFERA. Le Dattier. £ Cet arbre n’eft pas indigène ; il a été introduit à la Jamaïque après la conquête de certe ifle par les Efpagnols. j SUR L’HIST. NATURELLE ET LES ARTS, 419 Il n’y en avoit porrtant alors qu'un très-petit nombre. Le fruit fe fere au deflert,. La moëlle fournit de l'huile ou du beurre, femblable à l'oleum palmæ des boutiques. Il y a encore d'autres palmiers fauvages à Ja Jamaïque. Tous ont une ou plufieurs noix dont la pulpe donne de l'huile. Certe propriété, & leur RUE reflemblance en font une clafle ou une famiile vraiment naturelle, à, = DE L’ACIDE FLUORIQUE, DE SON ACTION SUR LA TERRE SILIGEUSE, Etrde l'application de cette propriétéa la Gravure fur verre (1). Par M. DE PUyYMAURIN fils, de Touloufe. Ox retire cet acide d'un fel pierre , connu fous les noms de fpath fufble , fluor , fauffe amétyfte , fluate calcaire. Les Chimiftes ignoroient la nature de ce minéral, & le confondoient avec le fpath féléniteux, (1) Procédé de M. le Comte pe G*** pour graver fur verre, communique 4 M. Creir, par M. CraArRoTrTs. Voyez Annales chimiques de M. CRELL, année 1786, vol. 2, page 494« M. le Comte de G***, amateur aufli éclairé que zélé des fciences naturelles, a employé à graver fur verre , la propriété qu’a l’acide fluorique de difloudre cette matière, Il enduit d’abord fon plateau de cire fondue, ou de vernis de Graveur ; lorfque cet enduit s’elt durci , il fait le trait avec une échopne; il entoure enfuite ce trait d'un petit rebord de cire, après quoi, il y verfe un mélange de parties égales d'acide fulfurique & de fluate calcaire pulvér:{€, prépar£ à l’inftant très-promptement. Pour empêcher l’évaporetion , il couvre le plateau d’une afliette de porcelaine ou de quelque chofe de femblable ; au bout d’un ou de deux jours il lève l’appareil & trouve Île trait parfaitement gravé. L’Auteur de ce Mémoire ignoroit l’exiflence du procédé de M. le Comte de G***, quand il imagina de fe fervir de l’acide fpathique pour graver fur verre; M. Bertholet & autres Commiffaires de l’Académie nommés pour examiner fon M Faudra-t-il attendre que M. l'Abbé Spalanzani ait mis des .caleçons de taffetas à tous les animaux depuis l’homme jufqu’au ciron pour favoir que les parties fexuelles de tous les êtres animés font deffinées à la génération? ( Voyez [es expériences für les crapauds , &c. ) #. D prouvent -SUR L'HIST. NATURELLE ET LES ARTS. 457 prouvent d’une manière évidente que la pouflière féminale n’entre point dans le ftyle, & qu’elle n'arrive point jufqu'au germe , mais que le fluide qu’elle contient elt abforbé par la liqueur qui {e trouve fur le piftl. La fécondation des plantes ne fauroit avoir lieu fi le figmate n’étoit point humedté : ici l’'analogie eft parfaite avec les animaux. Il n’eft point d'agriculteur qui ne fache que , lorfqu'il vient à pleu- voir au moment de la fleuraifon du feigle, la pouflière féminale ef agglutinée & la plupart des bales ne contiennent point de grains. Les jardiniers obfervent rous les ass la même chofe fur les arbres fruitiers ; les fleurs ne donnent point de fruits lorfqu’elles ont été malheureufement expofées à une longue pluie. Les plantes aquatiques s'élèvent au-deflus de la furface de l'eau dans Je moment de la leuraifon , & elles s'y plongent enfuite de nouveau. Le nymphea (zymphea alba) paroît tous les matins hors de l’eau & fes fleurs s’épanouiflent ; vers le milieu du jour le péduncule s'élève alors au moins de trois pouces au-deflus de l’eau ; vers les quatre heures du fair la fleur fe referme entièrement & fe replonge dans l’eau ; elle refte ainfi toute la nuit fous l’eau ; ce phénomène elt connu depuis plus de deux mille ans, même du rems de Théophrafle qui l’a obfervé fur le rymphea Lotus , plante qui a tant de reffemblance avec notre nymphea, qu’on ne fauroit prefque l’en diftinguer que par fes feuilles qui font dentelées fur Jeur bord , tandis qu’elles font entières dans notre nymphea. Voici comment s'exprime Theophrafle à ce fujet dans le chapitre dix du quatrième livre de fon Hiftoire des Plantes. « On dit que le lorus cache » fes fleurs dans l'Euphrate, qu'elles continuent à defcendre dans » l’eau jufques vers minuit, & qu’elles font au point du jour à une fi » grande profondeur qu'on ne peut y atteindre avec la main; elles » s'élèvent enfuite au-deflus de l’eau, s'épanouiffent, & vont jufqu'à » une grande hauteur au-deflus de Ja furface ». On peut obferver la même chofe dans notre nymphea ordinaire, Plufeurs eurs fe ferment le foir, ou avant la pluie, afin que leur pouf- fière féminale ne foit point agoglutinée par l’eau ou par les rofées ; maïs lorfqu’elles n’ont plus de pouflière féminale elles demeurent toujours épanouies. D’autres fleurs qui ne fe ferment point dans ces momens , fe tournent alors vers la terre ; plufieurs qui paroiffent dans les premiers jours humides du printems, prennent cette direction, La rue, fi commune par-tout , préfente dans chaque fleur plufieurs étamines qui s'approchent chacune à leur tour & tous les jours , du ftigmare jufqu’à ce qu'il foie parfaitement fécondé, L'ornithogalum nutans porte fix étamines laroes & difpofées en forme de cloche; elles fe rouchent entr'elles; mais les trois extérieures font moitié plus courtes que les autres , de manière qu'il paroîc impofñfible au premier coup-d'œil qu’elles puiflent porter leur pouflière féminale fur le Tome XXXII, Part. I, 1788. JUIN. Mmm 458 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, fligmate ; mais par un mouvement remarquable les étamines extérieures fe recourbent entre les filamens des autres, & leur pouflière parvient de cette manière jufqu’au piftil. Le bannanier (#u/2) donne deux fortes de fleurs hermaphrodites ; les unes ont des anthères imparfaites , les autres ne font pourvues que du rudiment du ftigmate; comme celles-ci ne paroiffent qu'après les autres, elles ne peuvent point les féconder , de manière que nous n'obtenons point de femence de cette plante dans nos jardins, & qu'elle en donne même très-rarement dans les Indes. J'ai eu cette année, comme je le defirois depuis bien long-tems , deux bananiers en fleurs à la même époque, l’un avoit des fleurs males & l'autre des fleurs femelles. Je me bâtai de cueillir les anthères, afin deles frotter fur les fliymares ; j’efpérois ainfi obrenir des femences de cette plante qu'aucun Botanifte n’a pu encore voir ; mais lorfque je vins à examiner ces anthères, je les trouvai toutes, même les plus groffes, entièrement vides & fans pouffière , conféquemment hors d’étar de féconder les femelles; c’eft pourquoi cette plante ne peut jamais donner des femences dans nos jardins, Je ne doute pas que le bananier n’ait de. véritables mâles dans fon pays natal qui ont été négligés par les jardiniers ; les femelles produifent dans nos pays des fruits imparfaits , c’eft-à-dire,fans femences, comme les figuiers , & on les multiplie comme celui-ci par rejerons. Les fruits de bananiers atteignent à peine leur groffeur naturelle: il n’y a que les fruits les plus gros du régime qui muüriflent, mais ils ne renferment rien, Je pourrois citer encore une foule d'exemples pour appuyer mon fentiment; mais je me borne à ceux-ci. A Berlin un dattier femelle donnoit des fleurs depuis plufeurs années, & n’avoit jamais produit de fruits ;on eut foin de fe procurer par la pofte de Leipfñk quelques fleurs mâles d’un pied qui s’y trouvoit en même-tems en fleur, & on parvint ainfi à féconder les fleurs femelles ; elles produifirent des dattes que j'ai femées dans mon jardin & qui m'ont donné des plantes actuellement vivantes. X æmpfer nous avoit appris combien les orientaux qui vivent principalement de dattes & qui font les vrais /osophages des anciens, ont foin de planter toujours parmi les arbres femelles quelques arbres mâles ; auffi les ennemis en tems de guerre fe bornent à coupertous les pieds mâles, bien sûrs de produire ainfi la famine dans le pays ; quel- quefois il arrive que les habirans détruifent eux-mêmes les arbres femelles, afin que leurs ennemis ne trouvent point de nourriture dans leur contrée, ! Jelaifle ces exemples &une infinitré d’autres qui font fi bièn connus des Botaniftes, qu'ils n’auroient pas même pour eux le mérite de lanouveuté(1), (1) On doit fe rappeler que l’Académie ne demandoit que des faits nouveaux 3 SUR L'HIST. NATURELLE ET LES ARTS. 459 & de l’authenticité defquels les feules perfonnes qui n'ont pas obfervé la nature, & qui ne fe fonc pas donné la peine d'étudier fes opérations , peuvent encore douter ; je viens à un autre fujet qui peut jeter beaucoup de jour fur la queftion que nous traitons; je veux parler des végéraux hibrides ou mulers dont il nous refte à confidérer l’origine. Je citerai trois ou quatre véritables mulets, dont j’ai vu par moi-même la formation, 1. La veronica fpuria décrite dans le troifième volume des Amæni- zates Academ. pag. 35, eft provenue de la veronica maritima, fécondée par la verbena officinalis ; on la multiplie aifément par bouture ; elle reflemble à la mére par fa fruétification & au pére par {es feuilles, 2. Le delphinium hkybridum (1) leva dans une partie de mon jardin où le delphinium elatum & l'aconitum napellus fe trouvoient enfemble ; il reflemble à fa mère par les parties internes, c’eft-à-dire, par les organes de la fruétification , & il a les plus grands rapports avec fon pére l'aconi- tum par les parties externes, c’eft-à-dire, les feuilles ; comme les deux plantes qui ont produit ce delphinium font très-voifines l'une de l’autre, celle-ci donne des femences qui müriflent très- bien. 3. L'hieracium taraxaci trouvé en 1753 fur nos montagnes par Je docteur Solander, reflemble tellement à fa mère l'hieracium alpinum par fes calices velus, bruns , par fa tige chargée de poils vers fon extrémité, qu'une perfonne peu attentive ne le diflingueroit pas de cette plante ; mais la douceur de fes feu:lles , leurs dentelures, en un mor, toute la ftructure le rapproche tant de fon père le /eontondon taraxacum qu'il eft impoñlible de méconnoïtre fon origine. 4. Le sragopogon hybridum fxa mon attention l'automne dernière , dans une partie de mon jardin où j'avois planté le tragopogon pratenfe & le cragopogon porrifolium ; mais l'hiver décruifit roures fes femences. L'année dernière lorfque le sragopogon pratenfe étoit en eur , j'enlevai de bonne heure dans la matinée, toute la pouflière féminale des fleurs en les frottant; à huit heures du matin je fis tomiber fur ces mêmes fleurs de la pouffière prolifique du #ragopogon porrifolium , & je marquai avec un fil les fleurs fur lefquelles j’avois fait cer eflai. Je cueillis les graines auf -tôr qu’elles furent müres; & je les femai dès cetre automne , elles levèrent rrès-bien, & elles ont produit cette année (1759) des fleurs pourpres, jaunes à la bafe, qui ont donné des femences (2) ; je doute auf Linné n’a point rapporté plufeurs obfervations qu’il avoit confignées depuis Jong-tems dans fes Ouvrages , telles que celles qui ont été faites fur la valifneria, Je figuier, la celoñia & une infinité d’autres plantes. S. | ‘ (r) Cette plante n’eft point dans le Species Planrarum ; ni dans le Manifa , mais on en trouve des échantillons dans l'Herbier linnéen, & M. Gouan l’a décrite dans (es J{luftrariones Boranices. S. 2 (z) Liané avoit joint à { Diflertaton des graines de ces difféentes plantes hybrides. Tome XX XII, Part. I, 1788. JUIN. M mm 2 460 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, qu'on puifle faire aucune expérience qui démontre plus clairement qué celle-ci la génération des végétaux (1). + On ne peut nier que ces trois plantes ne forment des efpèces nouvelles produites par une génération hybride; ceci nous fait voir auf qu'un roduit mulet dans les végétaux reflemble entièrement à la mère par la fubitance médullaire ou interne, c’eft à dire, par les organes de la fructification, & au père par les parties externes, les feuilles. Ces données peuvent devenir très-utiles aux Naturalifles. Car il paroît probable que plufieurs plantes qui femblent être à préfent des efpèces différentes du même genre n’ont formé peut-être dans le commencement qu'une feule & même plante, & n'ont été produires que par une génération hybride, Plufieurs géranium du cap de Bonne-Efpérince qu'on n’a jamais trouvés que dans certe partie de l'Afrique , fonc diflingués de toutes les autres efpèces du même genre par leur calice compofé d’une feule pièce, un grand nombre de fleurs {ur le même péduncule, une corolle irrégulière ; fept éramines fertiles & rrois mutilées, & les femences nues ; ces plantes ont les plus grands rapports entr'elles , quoique différentes cependant par les racines , les feuilles & les tiges, & on feroit renté de croire que toutes ces efpèces africaines ne fonr que des races forties de la même mère, mais qui ont eu des pères différens. Mais fi toutes les plantes ont été produites fucceflivemenr', ou fi le Créareur au commencement a fixé le nombre des efpèces, c'eft ce que je n'oferois entreprendre de difcurer. Je me contente de penfer que cette forte de multiplication n'eft point contraire au {yftème de la nature , aux loix générales qu'elle a établies. Ne voit-on pas tous és jours des infectes qui tirent ordinairement leur nour- riture d'une plante, fe contenter dans certaines circonftances d’une autre efpèce de plante du même genre, Dès qu’on a vu une fois l'achyranthes afpera, qu'on a remarqué fon épi , les organes de fes fleurs, fes perits nectaires configurés d'une manière particulière, ainfi que fes calices tournés en arrière lorfque les fruits müriflent, on eft perfuadé qu'il eft très-aifé de diftinguer dans trous les tems ces fleurs de toutes les autres; mäis lorfqu'on vient à rencontrer les fleurs del’achyranthes indica, qw’on voit qu'elles ont tant de rapports avec celles-là, lorfqu’on remarque en même-rems les feuilles grandes , épaifles, obtufes & ondulées de cetre plante , on eff tenté de croire qu’on a devant les yeux l'achyranthes afpera, mafqué par le feuillage du Xanthium flrumarium. (x) J'ai vu dans le jardin de Botanique d'Edimbourg une plante hybride produite par le pavot d'Orient & le pavot fomnifere. On avoit eu foin de couperttoutes les étamines des fleurs du pavot fomnifere avant qu’elles fuffent épanovies, & on plaçoit les étamines du pavot d'Orient ifur lés piflils lorfqu’ils étoient bien dévéloppésa Cette expérience étoit répétée tous les ans avec un égal fuccés. Z, | u_— PR péter Éd ES TS ESS I AS DE. SSP ES SUR L’HIST. NATURELLE:ET LES ARTS 461 Il fe préfente ici au Botanifte un vafte champ pour de grandes décou- vertes ; il peur produire de nouvelles efpèces de végétaux en répandant la pouflière féminale de différentes plantes fur diverfes femelles. Si mon travail eft reçu favorablement , ce fera un. motif de plus pour moi pour confacrer le refte de ma vie à faire de fen:blables expériences. Je füis perfuadé par plufieurs raifons , que ces nombreufes & utiles variétés de plantes potapères ont éré produites À-peu-près de cette manière, tels fonc les choux , les lairues, &c. & je foupçonne que c’eft-là la raifon pourquoi le changement de fol n’infue point fur elles. Je ne fuis point du fentimene de ceux qui penfent que routes les variétés ne font dues qu'aux différences du fol; car fi cela étoit airf, toutes les plantes reprendroient leur forme primitive lorfqu’on les placeroit de nouveau dans le lieu où elles font nées, Les produits des générations hybrides nous fourniffent donc une preuve à priori du fexe des plantes. Le docteur Smith a ajouté à cette Differtation la notice fuivante de quelques découvertes faires depuis 1780 relativement au fexe des plantes. ù te Les plantes de la claffe de la cryptogamie & principalement les moufles fructifient d’une manière qui a été très-peu connue des Botaniftes ; plu- fieurs Auteurs ont avancé que ces plantes n’avoient point d'organes fexuels, & de ce nombre font T'ournefort, MM. Adanfon & Necker; ce dernier Auteur entrautres s'explique à ce fujec d’une manière qui pourra au moins paroître fingulière à ceux qui cherchent de bonne foi la vérité, & qui la trouvent bonne de quelque part qu’elle vienne. Je fuis déterminé , dit-il, à regarder comme une fi&ion & un réve tout ce qui a été dit & tout ce qui pourra étre dit à l'avenir fur les parties Jèxuelles & la fécondation des moufles. Linné & Dillenius plus philofophes que cet écrivain jugèrent d'après l’obfervation & l'analogie que les moules pe manquoient ni de fleurs ni de femences ; ils crurent même avoir décou- vert ces parties, mais ils fe trompèrent. Micheli reconnut le premier les éramines & les piftils des moufles, mais on négligea fes obfervations ; tous les Auteurs qui vinrent après lui voulurent à peine y croire , lorfqu'un excellent obfervateur le docteur Hedw'g de Leipñik publia enfin en 1782 fon Hifloire des Mouffes ; dans cet Ouvrage 1l fair voir les organes de la fruétification des moufles dans un fi grand nombre d’efpèces, & il développe d’une marière fi claire l’organilation & les fonétions de ces peties parties, qu'il ne refte plus aucun doute fur ce fujer. Il prouve que la capfule de Dillenius (qui éroit appelée par Linné anthére } & que ces deux Auteurs croyoient contenir la poufhère fécondante , n'eft autre chofe que le fruit, & la pouflière qu’elle renferme. les femences ; il prouve encore que les parties que Linné & d'autres Botaniftes avoient prifes pour les parties femelles font les fleurs males, Le célébre Profeffeus 462 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, Schreber avoit depuis long-tems foupçonné cefait. (Voyez fa Differtation de PAhafco.) L'opinion du docteur Hedwig a été adoptée par tous les gens inftruits ; & il a porté fes recherches fur routes les autres plantes de la cryptogamie; l'Académie de Pétersbourg a couronné un de fes Ouvrages:, dans lequel il fait connoître la fru@ificarion des fougères , des algues, des moufles & des fungus. I rapporte l’equiferum à la terrandie monogynie; il a trouvé les organes mâles de l’agaric (agaricus) {ur la partie interne du volya qui recouvre les lâmes quand le champignon conimence à poufler & qui forme enfuite une efpèce d’anneau aurour de la tige, Les piltils des agarics fonc logés dans les lames. Les écuflons (/cureliæ) des lichens fonc les capfules qui renferment les praines, & il penfe que les tuber- cules des lichens tuberculés (Lichenes ruberculati) ont été d’abord des écuflons; cette opinion ne peut manquer de paroîrre vraie aux yeux de tous ceux qui ont un peu étudié ces plantes. Il croit que les cils du /ichen cilianus font des racines, ainfi que les parties analogues dans plufeurs autres efpèces de lichens. Son axiome favori eft omnis planta ex femine, comme celui d'Harvey étoit omne animal ex ovo. E croit que des Auides circulent dans les vaiffeaux des-plantes comme dans ceux des animaux, & que le règne végétal & le règne animal peuvent être bien diftingués l’un de l’autre par Les organes mâles qui dans tous les végétaux périflent après avoir opéré la fécondation , tandis que dans les animaux ils ne meurent point après cette opération , qu'ils peuvent même répéter plufieurs fois. On peut faire plufieurs obje@ions à ce fentiment; il efl peur- être plus probable que la nature n’a point pofé de limites entre le règne végétal & le règne ani- mal, & que latranfition de lun à l’autre fe fait d'une manièreinfenfible, S. EXTRAIT D'UN MÉMOIRE Lu à l'Académie des Sciences, SUR LES PARTIES DE LA BOUCHE DES INSECTES ; Par M. OLxvrer, Doëeur en Médecine, de l Académie des Belles= Lettres, Sciences & Arts de Marfeille, Correfpondant de la Société Royale d'Agriculture. Ace claffe du règne animal, fans en excepter même celle des vers, ne préfente autant de différences dans les parties de la bouche, ue celle des infectes. Du quadrupède ruminant au carnivore, de l’oifeau & proie au granivore , du ferpent à la tortue, de la raie à la fole, de SUR L'HIST. NATURELLE ET LES ARTS. 463 la baleine au dauphin , d'un coquillage à un molufque, la différence n’eft pas fi grande que celle qu’on obferve entre un papillon & un fcarabé , une mouche & un crabe, une punaife & un fourmillion , une abeille & une araignée. L'étude des parties de la bouche des infectes ef fi curieufe & ft intéreflante , qu’elle feule peut jeter un grand jour fur leur hiftoire ; & fi l'Entomologie fait dans la fuite de très-grands progrès , elle les devra fans doute à la parfaite connoiflance de ces parties : en effec , fi les habi- tudes & la manière de vivre des animaux dépen.lent uniquement des organes dont ils font pourvus, la bouche des infectes beaucoup plus compliquée que celle des autres animaux, compofée de plufieurs pièces qui fe combinent, & qui tendent toutes à les nourrir & à les défendre , munie d’inftrumens qui fervent au taét, de pinces propres à faifir la proie, &c. doit néceflairement jouer un très-grand rôle dans l’économie animale. On peut aifément reconnoître à la feule infpection de la bouche d’un infecte, quelles font fes habitudes & quelle eft fa façon de vivre. La trompe du papillon alongée , molle & flexible, n’eft propre qu'à retirer les fucs contenus dans les fleurs ; elle n’eft pas aflez forte pour percer même les corps les plus mous; la moindre pellicule fufñroit pour l'arrêter : celle de la punaife au contraire, compofée de plufieurs parties très-fines, très-déliées & cependant très-folides, peut pénétrer dans le tiflu des plantes, ou percer la peau des animaux, Les mandibules de l’araignée, fortes, grandes, & armées d’un piquant très-dur & très-aiou, font propres à faifir & à tuer des infeétes. La bouche du pou & celle de la puce font armées d’un dard, d'une fineffe extrême, qui s’infinue affez facilement dans la chair des animaux, & qui, malgré fa finefle, eft percé à fon extrémité, & faic l'office d’un fuçoir après avoir fair celui d’un dard, Indépendamment de fa trompe , la guëpe eft armée de mandibules par le moyen defquelles elle coupe & déchire les fleurs &1les fruirs.dont elle fuce les fucs ; elle lesemploïe encore à enlever les fubftances propres à bâtir fon nid. Des mandibules fortes , alongées , denrées & terminées en pointe aigue , annoncent, dans les coléoprères, des infeétes qui vivent.de rapine & qui font la guerre aux autres. Des mandibules grofles & épaifles ter- minées par un rebord tranchant défignent un infeéte qui ronge le bois & les corps les plus durs. Celui qui fe nourrit fimplement de feuilles de végétaux , a les mandibules moins vrofles & moins fortes ; elles ont de légères dentelures & leur rebord eft peu tranchant. Le fyftême entomologique de M, Fabricius célèbre Naturalifle de Kiel , eft fondé fur l'examen des parties de la bouche des infeétes relati- : vement au nombre, à la proportion & à la fituation des pièces qui la compofent, Ce fyflème qui fera fans doute époque. dans l’hiftoire des infectes, eft cependant encore bien éloigné de la perfection dont il ef: fufceptible; car on voit rangés dans les mêmes clailes des infectes très - 464 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, différens éntr’eux par routes les parties du corps; & fpéciatement par celles de la bouche ; tandis que quelques autres qui ne préfentenr prefque point de différences, font cependant placés dans des clafles différentes, Par exemple, nous voyons avec furprife dans les mêmes claffes le monocle, la frigane & l'abeille: la libellule ou demoifelle, la fcolopendre & Paraignée; lamouche, le pou & la mitte, &c.& dans des clafles différentes, le clopor:e & l’ule, le monocle & l'étrevifle , la mitte & le faucheur, le pou & la puce, &c. Cependant quelque difficile à établir que foir un pareil (yflême , à caufe de la petitefle des parties de la bouche & de limpoflbilité quelquefois de les développer affez pour les appercevoir, il eft fans doute à defirer que les Entomologiftes s'attachent à les exa- miner attentivement, & à les étudier beaucoup plus qu'on n’a fait jufqu’à préfent; car elles peuvent être employées avec le plus grand avantage à l'établiflement des genres: mais nous doutons que la bouche des infectes fournifle jamais des caraétères de clafles , plus faciles à faifir & plus tranchés que ceux que fourniffenc les aîles. Les parties de la bouche font très-apparentes, & on les diftingue bien avec une fimple loupe, dans les infectes un peu gros, & même dans tous ceux qui ont au-deflus de deux à trois lignes de longueur; mais à mefure que l’infecte eit plus petit, on éprouve la plus grande difficulté à les mettre en évidence ; il eft même quelquefois impoffble d'y parvenir. Le moment le plus propre pour les obferver , c’eft lorfque l’infecte vient de mourir, ou lorfqu'on l’a ramolli à la vapeur de l’eau, parce que ces parties retiennent alors la potion qu'on leur a donnée. oi compte dix parties ou pièces principales dans la bouche des différens infectes. 1°. La lèvre füpérieure, ( Zabium fuperius. Clypeus , Fab.) 2°, La lèvre inférieure, (Zabium inferius. Labium, Fab.) 3°. Les mandibules ou mâchoires fupérieures , (mandibulæ,) 4°. Les mâchoires, (maxillæ.). s°. Les galères, (galeæ.) 6°. Les antennules, (palpi.) 7°. La langue, ( Zinpua.) 8°. Le bec, ( roffrum.) o°. Le fuçoir, (Aauflellum. ) 10°. La trompe, (probofcis.) La Re eft une pièce tranfverfale, mobile, coriace ou membraneufe , qui fe trouve à la partie fupérieure & antérieure de la bouche , & qui recouvre , en tout ou en partie, les mandibules , lorfque la bouche de l'infete eft fermée. On apperçoit facilement cette pièce dans les infectes à étuis, les fauterelles , les abeilles, les ichneumons , &c. On a auffi donné le nom de lèvre à une pièce membraneufe, très-mince, qui enveloppe la bafe des foies des cigales & des punaifes , & que on SUR L'HIST. NATURELLE ET LES ARTS. 465 Pon n'apperçoit bien que lorfque ces foies font retirées de leur fourreau. Les papillons , les infectes à deux aîles & les cruftacés , n’ont point de lèvre fupérieure, 11 faut remarquer que Linné & M, Fabricius dans la defcription qu'ils donnent des fcarabés, bannetons, cétoines, &c. fe fervent du mot c/ypeus pour déligner la partie fupérieure & antérieure de la tête de ces infectes que nous regardons comme très- différente de la lèvre fupérieure. Celle-ci eft toujours mobile, tandis que le chaperon eft contiou& fait partie de la tête des infectes. M, Fabricius paroît avoir confondu la lèvre fupérieure avec le chaperon, quoique ces pièces foient bien diftinétes. La lèvre inférieure et unespièce tranfverfale ; mobile, coriace, fouvent divifée en plufeurs parties , qui termine la bouche inférieurement. On ne la trouve point dans les infeétes à demi-étuis, & dans ceux qui n'ont oint de lèvre fupérieure, L’ufage des lèvres dans les infectes eft defliné comme dans les autres animaux , à contenir , à diriger lesalimens , & à garantir les autres parties, Les mandibules font deux pièces dures, fortes, de la confiftance de la corne, aigues , tranchantes ou dentées, placées à la partie latérale & fupérieure de la bouche, immédiatement au-deflous de la lèvre fupé- -rieure, Leur mouvement eft latéral, tandis que celui des lèvres s'exécure de bas en haut & de hauten bas. Ces pièces fonc délignées par tous les - Naturalifles fous le nom de mAchoires. Les infe@es qui prennent des alimens folides, font les feuls pourvus de mandibules plus ou moins fortes, fuivant la dureté de ces alimens. Ceux qui vivent de rapine, ont es mandibules plus alongées &plus faillantes, que ceux qui rongent le “bois, & ceux-ci les ont beaucoup plug fortes que les autres qui fe -nourriffent de feuilles de végétaux. Les mâchoires font deux petites pièces fouvent miaces & prefque membraneufes, d’une confiltance & d’une figure différentes de celle. des mandibules : elles font terminées par des dentelures aflez folies, 8e elles font prefque toujours ciliées à leur partie interne; on les trouve immés diatement au-deffous des mandibules ,:entre celles-ci & la lèvre inférieure. Leur mouvement s'exécute latéralement: Les mâchoires n'ont pas ailez de confiftance & ne font pas mues. par des muftles affez forts pour couper &/divifer les alimens dont les infectes font ufage; mais elles fervent à-les diriger, à les contenir, à terminer la mallicarion, & à favorifer peut-être la déglutition. Si nous en exceptons les infectes de la claffe des hyménoptères davs lefquels-ces parties fonr remplacées par une efpèce de trompe, rous-les autres qui, font pourvus’ de-mandibules le fonc aufli de mâchuires. ‘ Les galètes. M. Fabricius a donné le-nom de galea à une petite pièce membraneule , large ou cylindrique qui fe trouve placée à,fa partie extérieure de chaque mâchoire des infectés de la famille des fauterellés, Tome X XXII , Parr. I, 1788, JUIN. Na Li 466. OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE; & qui, les recouvre prefqu’entièrement. Ce n’eft que fur l’exiftence de cette pièce que ce Naturalifte a établi fa feconde clafle, celle des ulonates , ulonata. Les galètes font inférées au dos des mâchoires entre celles-ci & les antennules antérieures. Elles différent très-peu de la pièce extérieure de la plupart des mâchoires des coléoptères qui font divifées en deux parties : elles font feulement un peu plus grandes & un peu plus minces; elles paroiflent fervir à cacher & défendre les autres parties de la bouche conjointement avec les deux lèvres. Les antennules font au nombre de deux , de quatre ou de fix; ce font de petits filets mobiles, articulés, reffemblant en quelque forte à de petites antennes. Elles ont leur attache à la partie extérieure des mâchoires & aux parties latérales de la lèvre inférieure, dans les infedtes à étuis, ceux à quatre ailes nues , réticulées, &c. elles accompagnent la trompe des abeilles, des ichneumons, &c. M. Fabricius a pareillement donné le nom d'antennales à deux petits flers qui fe trouvent à la bale de la trompe des diptères ou qui accompagnent les foies. Les hémiprères fonc privés de ces parties. L’ufage des antennules, ainfi que celui des antennes, n'eit pas encore aflez bien connu, Elles femblent cependant deftinées à palper &. reconnoître les alimens ou à lès fonder, comme Les mors latins de palpi & rentacula le défignent. Ces parties ne font point abfolumenc néceflaires à la vie de l'infedte, puifque s'il perd fes antennules par une caufe quelconque , il vit néanmoins & ne paroît pas fouffrir de leur privation. Les antennules font compofées de deux, de trois , de quatre ou de cinq articles , rarement de fix, & jamais d’un nombre au-deflus. La langue eft une pièce plus où mins longue, féracée , divifée en deux parties, roulée en fpiraleÿ lorfque l'infecte n’en fait pas ufage, & placée entre les anrennules.-Elle forme la bouche des lépidoprères ; elle eft compofée de deux pièces ou lames convexes d’un côté & concaves de Pautre, qui, en fe réuniflant, forment un cylindre creux, propre à laïifler paffer les fucs mielleux des Aeurs dont fe nourriffent ces infeêtes. On fépare facilement ces deux lames par le moyen d’une pointe un peu fine. Le bec eft cette partie qui forme la bouche des hémiptères. C'eft un fourreau mobile, articulé, recourbé fous la poitrine, creufé antérieurement pour recevoir trois filets ou foies, /êræ, très-minces & très déliés que ces infectes introduifent dans le corps des animanx ou dans le tiflu des plantes dont ils fe nourriffent, Les foies font ordinairement au nombre de trois; elles font contenues par le moyen de la lèvre, dans une efpèce de gouttière creufée tout le long de la partie fupérieure du fourreau, Le Juçoir eft formé d'un ou de plufieurs petits filets très-minces &e rrès-déliés qui accompagnent la bouche des diptères, & qui fe trouvent fouvent renfermés dans une gaine : ils reflemblent à ceux des hémiptères dont nous venons de parler, & ils portent de même Je nom de füces. C'eft par le moyen de ces foies que les infe@tes à deux aîles retirent les SUR L'HIST. NATURELLE ET LES ARTS. 467 fucs dont ils fe nourriffent. L'exiftence feule de ces parties conftitue dans le fyflême entomologique de M. Fabricius la clafle des ancliates, ancliata, La trompe ou gaine manque quelquefois , mais les fuçoirs fe trouvent toujours. La trompe elt la pièce qui fert de bouche aux infedes à deux aîles ; “elle eft un peu charnue, rétraétible , d’une feule pièce, fouvenc cylin- drique, & rerminée par deux divifions qui repréfentent comme" deux efpèces de lèvres : elle eft creufée à fa partie fupérieure pour recevoir le fuçoir formé par une ou plufieurs foies. On voit par ce que nous venons de dire que le bec & a trompe ne difièrent l’un de l’autre qu'en ce que le premier eft articulé & n'elt pas rétractible , tandis que la trompe et toujours d’une feule pièce & rétrac- tible , celle-ci d’ailleurs eft fouvenc accompagnée d'antennules, tandis qu'on n'en voit jamais à l'autre. Pour faciliter la connoiflance de ces pasties, nous allons rapporter quelques exemples pris fur différens infectes , que nous accompagnerons de figures un peu groffies. Le Hanneton vulgaire, PL 1, fig. 2. Melolontha vulparis , Fab, Scarabæus melolontha, Lin Le Hanneton, Geoff. : Schaff. icon. inf. pl. 93, fig: 1 , 2. Êlem. Ent. pl. 8 , fig. 3. La lèvre fupérieure, PL I, fig. 1 (A À) placée immédiatement au-deffous de la partie antérieure du chaperon ( B) , eft large, aflez épaiile & profon- dément échancrée : elle eft velue & ciliée fur fes bords. - Les mandibules (CC) cachées en partie par la lèvre fupérieure, font courtes , épaifles & très-dures : elles ont à leur partie interne, depuis leur bafe jufques vers leur milieu , des élévations tranfverfales , un peu tranchantes ; elles font comprimées fur les côtés, depuis leur milieu jufqu’à leur extrémité, & elles fe terminent en une pointe affez aigue: la partie externe eft un peu figurée en arc. Les mâchoires {D D ) plaçées entre les mandibules & la lèvre infé- rieure, font courtes, aflez dures & un peu arquées. Elles font terminées par plufieurs dentelures affez fortes : leur partie extérieure eft couverte de poils longs & roides. La lèvre inférieure ( £) qui termine la bouche, eft alongée, aplatie, un peu moins large que la lèvre fupérieure & d'une confiftance aflez dure; elle eft couverte en deffous de quelques poils aflez longs. Les anrennules font au nombre de quatre ; les deux antérieures ( FFF) font compofées de quatre articles ; dont le premier eft petit & prefque globuleux ; le fecond eft plus alongé, & il a une figure prefque conique ; le troifième eft plus court que le fecond ; & le dernier, le plus long de Tome XXXII, Part. I, 1788. JUIN. Nnn2 468. OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE; tous , a une figure ovale, très-alongée, Elles ont leur infertion à la partie exrétieure des machoires. Les poftérieures ( G GG) un peu plus courtes que les antérieures font compofées de trois articles, dont-le premier eft le plus court & les deux autres beaucoup plus alongés, font à-peu-près d’égale longueur entr’eux. Eiles ont leur infertion à la partie latérale de la lèvre inférieure. "Le Carabe déré, PL I, fo. 2. Carabus auratus , Lin. Fab. Le Bupelte doré & filloné à larges bandes, Geoff. pl. 2, fig. 5. La lèvre fupérieure, P/. F, fig. (2) fortement unie à la partie antérieure du front , eft large, profondément échancrée & un peu ciliée : elle eft couverte à fa partie inférieure de poils très-courts &:très-ferrés, Les mandibules (B B) font grandes, arquées & d'une confftance très- dure: elles font comprimées fur Les côtés & tranchantes à leur bord intérieur; elles ont quelqués dsntelures vers le milieu , & elles fonc ONE ! Qui terminées par une pointe très-aigue. Les mâchoires ( CC) beaucoup plus courtes, plus perires & moins dures que les mandibules, fonr ciliées à leur partie inrerne; elles font terminées par une pointe forte, très-aigue & recourbée. La lèvre inférieure (E ) eft très-petité, prefque membraneufe, entière, terminée en pointe & ciliée : elle eft appliquée far une pièce échan- crée (F ) très-dure qui fait partie de la tête de l'infedte, Les antennules font au nombre de fix , dont quatre affez longues & très-apparentes, & deux courtes & cachées dans la bouche, lorfque l'infecte la tienc fermée. Elles font divifées en antérieures, moyennes & pofté- rieures. Les antérieures ( G G) font petites ,. courtes , compofées de deux articles prefqu'égaux & inférées à la partie extérieure des mâchoires, entre celles-ci & les antennules moyennes. Les antennules moyennes (HH) ou extérieures font une fois plus longues que les antérieures : elles font compofées de quatre articles, dont le premier eft très-court & le fecond#lonoé ; le dernier eft très-court , un peu comprimé & beaucoup plus large à fa pointe qu'à fa bafe. Elles ont leur infertion à la partie extérieure des mächoires, à côté des anten= nules antérieures. ” Les pofférieures( IT) font compofées de trois articles , dont le premier eft très-court, le fecond alongé , & le dernier plus court que le fecond, un peu comprimé, eftplus large à fa pointe qu'à fa bafe, Elles ont leur infertion à la partie latérale de la lèvre inférieure. La Sauterelle À coutelas ; Geoff rom. I, pl. 8 , fèg. 3. PLI, fig. 3. Locufla vixidiffima,, Fab. Gryllus viridiffimus, Lin. La lèvre fupérieure, PL. £, fig. 3 ( A) eft membraneufe, grande, aplatie & arrondie. Elle couvre fupérieurement une partie des mandibules, # SUR L'HIST. NATURELLE ET LES ARTS. 463 Les mandibules (BB) font grandes, larges à leur bafe, convexes exré- rieurement, noires & dentées intérieurement & terminées en pointe aïoue, Les mâchoires (CC) font membraneufes, étroites, aflez alongées $ terminées par trois dents longues, courbées, très-forres & coriaces. Les galères (D D D) font deux pièces alongées , étroites , un peu aplaties & membraneufes , qui couvrent les machoires & qui ont leur infertion entre celles-ci & les antennules antérieures. La lèvre (E ) inférieure eft membraneufe, large, applatie, arrondie & un peu échancrée antérieurement. Les antennules font au nombre de quatre: les deux antérieures ( FFF) font filiformes, plus longues que les poftérieures & compofées de cinq articles , dont les deux premiers font les plus courts, & les antres prefque égaux entreux & cylindriques ; le dernier paroît tronqué; elles ont leur infertion à la partie extérieure de la mâchoire , au bas des galères. Les poftérieures (GGG ) font compofées de trois articles, dont le pre- mier eft le plus courr, & les autres prefqu'égaux & cylindriques; le dernier paroît tronqué : elles ontleur infertion à la bafe latérale de la lèvre inférieure. La Cigale plébéienne, PL. I, fig. 4. # Cicada plebeia , Lin. Tertigonia crni, Fab. Reaum. Mem. tom. VW, pl. 16, fig. 1,2, 5,6. Le bec eft alongé & appliqué tout le long de la poitrine, lorfque linfecte n’en fait pas ufage : il comprend la gaine & les foies. La gaine, PL, fig. 4( À) eft la pièce qui fe montre à découvert, & qui eft compofée de trois articles, dont le prentier eft un peu plus grand que le fecond , & celui-ci un peu plus renflé : le troifième eft alongé & cylin- drique. Elle eft creufée en gouttière à fa partie antérieure, pour recevoir trois foies( B) égales, minces , très-déliées, qui partent de la partie antérieure & inférieure de la rête, & entrent dans Ja gaine à une ligne de diftance de leur bafe. La portion des foies, qui n’eft pas enfer- mée dans la gaine, eft recouverte d’une pièce (C€) très-mince & très- fine, nommée /évre. On peur, lorfque l'infeéte eft vivant ou fufifamment ramolli à la vapeur de l'eau chaude, détacher ces foies , par le moyen d’une aiguille très-fine. La gaine a fon infertion entre la tête & la partie inférieure du corcelet , tandis que les foies fonc inférées à la*partie La plus antérieure de la tête. La Libellule Eléonore, PL. I, .fig. 5. Libellula depreffa , Lin. Fab. L'Eléonore, Geoff. tom. IT, pl. 13, ffo. Tr. La lèvre fupérieure, P£ I, fig. 5 (A )eft large, membraneufe , ar:ondie à fon bord antérieur ; elle couvre prefqu'entiérement les mandibules, Le 470 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, Les mandibules ( BB) font courtes, épaifles , très-dures , armées de dents fortes & aigues, Les mâchoires (CC) font prefque membraneufes , larges à leur bafe, comprimées , ciliées à leur bord interne, armées , à leur extrémité, de plulieurs dents longues , très-aigues & très-fortes, Les antennules (D DD) font au nombre de deux ; elles ne paroiflent compofées que de deux articles, dont le premier eff très-court & le fecond alongé, un peu courbé, prefque terminé en pointe: elles ont leur infertion à la partie externe des mächoires. La lèvre inférieure (Æ ) eft très-grande, membraneufe ; convexe exté- rienrement & appliquée fur la bouche, qu’elle couvre prefqu’entièrement: elle eft bifide, & chaque divifion eft arrondie, Quand on enlève certe pièce, on voit un peu au-deflous des mäâchoires , une autre pièce (F) qui reffemble à une lèvre inférieure; elle eft alongée , un peu renflée , prefqe véficuleufe , ciliée tott autour , anguleufe, trois fois plus étroite que la lévre inférieure & beaucoup plus épaifle. Le Papillon atalante, PL T, fig. 6. Papilio atalanta, Lin. Fab. Le Vulcain, Geof. Reaum. Mem. tom. I, pl. 10, fig8, 9. + Les deux antennules, PL 1, f9. 6 (4 A)font droites , dirigées en avant, un peu renflées vers leur milieu ,.& velues dans toute leur étendue : elles font compofées de trois.articles , dont le. premier. eft très-court , le fecond eft très-long & prefque cylindrique, le dernier eft courr, un peu plus petit que les autres & prefque terminé en pointe;.élles ont leur infertion à Ja partie latérale un peu inférieure de la trompe. La langue ou trompe (BB) eft de la longueur de la poitrine, divifée en. deux. pièces féracées, creufées en gouttière À, leur, partie interne , convexes à leur partie externe, réunies, roulées en fpirale,.& placées entre les deux antennules , lorfque l’infecte n’en faitcpas ufage. L’Abeille terreftre, PL IT, fig. 7. Apis verreflris, Lin. Fab. L’'Abeille à couronne du corceler, &c. N°, 24, Geof. _Reaum. Mem. rom. VIT, pl. 3, fig. I. La lèvre fepérieure, PZ IT, fig. 7 (4) eft courte, large, aplatie, membraneufe & couverte de poils à fon bord antérieur. Les mandibules (BB) font fortes, très-dures, en forme de cuiller, convexes , cannelées à leur partie extérieure , arrondies & tranchantes à leur bord interne. La trompe (CCC) eft longue , compofée de cinq pièces : les deux extérieures (D D) tiennent lieu de mâchoires : elles font longues, cou- UE | enr 4 DU TRS Le Vu Ne 2 SUR L'HIST. NATURELLE ET LES ARTS. 4 dées , larges, aplaties, rerminées en pointe ; elles embraffent les trois pièces du milieu : celles-ci font réunies à leur bafe jufqu’à leur courbure: elles fe divifent en trois pièces ; les deux latérales (E E ) fervent de gaine à celle du milieu ( F) qui eft la véritable tromps de l'infedte, celle qui lui fert à facer les fucs des fleurs. g Les antennules fonc au nombre de quatre: les antérieures( GG) prennent naiflance à la courbure des deux pièces extérieures; elles font fliformes &s compolées de deux articles dont le fecond eft un peu plus petit & terminé en pointe. Les poftérieures (H H) naiflent à l’extrémité des deux pièces qui enveloppent la véritable trompe, Elles font courtes’ filiformes & compofées de deux articles, dont le premier eft un peu plus long que l'autre, & prefque conique. Ee Bombilie.ponctué, PL. IT, fig. 8. Bormbylius mediis, Lin. Fab. Schæff. Elem. Entom. pl. 27, fie. 1. Icon, inf. pl, 78, fig. 3. La trompe eft de la longueur des deux tiers du corps: elle paroît comme un filet mince & délié, M, Fabricius la nomme soir ; quoiqu'’elle ne diffère pas de la trompe de la plupart des autres diprères : elle et im- plantée dans une cavité qui fe trouve au-devant de la tête, un peu au- deflous des antennes; elle eft compofée de cinq pièces principales ; on en voir deux, pl. IT, fig. 8. (AB )un peu plus grandes qui fervent de gaine aux trois autres, La plus grande (B) & la plus longue et celle qui fe trouve au-deflous ; c'eft un filér mince, délié , alongé , porté droit en avant, légèrement creufé en gouttière à la partie fupérieure, & bifide ou divifée en deux parties à fon extrémité. L’antre pièce (4) placée fur celle-ci, eft beaucoup plus courte; elle eft mince , déliée & terminée en une pointe très-fine :elle fert à contenir les foies dans la cannelure de la trompe. 7 Les foies font d'inégale longueur : celle du milieu ef un peu plus longue que les deux latérales; celles-ci font ä-peu-près de la Longueur de la pièce firpérieure. Les antennules ( D'D }au nombre de deux font très-courtes, très- velues , compofées de trois articles & inférées à la bafe latérale de la: trompe. Le Syrphe tenace, PL. I, fg.-0. Syrphus tenax, Fab+. Mufca tenax, Lin. Lat@Mouche apiforme , Geof. Reaum. Mer, tom. 1, pl. 20 , fes. 7. : Latrempe, pl. I, fig. 9 ( A A A)ef alongée, rétraétible, coulée vers fa bafe, de figure cylindrique , & terminée par une efpèce de tête divilee 472 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, en deux parties ou lèvres : cette trompe eft creufée fupérieurement , & fert de gaine à quatre foies(B,1,2,3,4, B,1,2,3,4) fubulées & un peu comprimées latéralement, dont deux extérieures beaucoup plus courtes que des deux autres, Ces foies forment le fuçoir. Les antennules (CC, CC) au nombre de deux , font courtes & com- poiées d'articles peu diftin@s ; elles ont leur infértion à la bafe externe des foies extérieures, dont elles ont préfque la longueur. L’Araionée domeftique, PL. IT, fig. 10. Aranea domeflica , Lin. Fab. : L’Araignée brune domeftique, Geoff. Cierk. Aran. Suec. pl, à, fi. 9. Les mandibules, pl II, fig. 10 (AA) nommées griffes & tenailles , font grandes & compofées de deux pièces, dont la première (BB) eft très- grofle , affez dure, un peu velue, prefque cylindrique , coupée oblique- ment à fon extrémité, du côté de fa partie interne, & armée, à cet endroit, d’une double rangée de dents: l’autre pièce (CC), nommée crochet, eft très-mince , très-dure, entièrement glabre, courbée & termi- née en use pointe très-fne : ce crochet n'eft point faïllant, mais placé P ; P entre les dentelures de la première pièce , lorfque l’araignée n’en fait pas ufages il n’a qu'un mouvement de flexion & d'extenfion, tandis que la première pièce fe meut dans tous les fens, C'eft par le moyen des mandi- bules que les araignées faififfent leur proie & qu'elles piquent. L Les mâchoires (D D) placées au-deffous des mandibules , entre Les deux antennulés , foot courtes, dures , afez larges &e ciliées à leur partie interne. Elles fervent à l’afaignée pour manger ou fucer {a proie. La lèvre inférieure (E) eft une pièce alongée, aflez mince, prefque meémbraneufe, ciliée & légèrement échancrée à fon extrémité: elle termine la bouche poftérieurement, GX Ve Les antennules ( FF) font au nombre de deux : elles ont été regardées comme dé véritables antennes par la plupart des Naturaliftes qui n’avoient pas fait attention qu’elles faifoienc partie .de la bouche de ces infectes. Ces pièces diffèrent dans les deux fexes : elles fonr filiformes & compolées de cinq articles, dont le dernier, dans les mâles feulement, un peu plus renflé que les autres, renferme les parties de la génération : elles ont leur infertion à la ba£e latérale externe des mâchoires, Le Crabe rameur, PZ II, fig. 11. Cancer depurator , Lin. Fab. LA - Cancer ramipes , Barrel. icon. 1287 , fig. &. Seka. Muf. 33 pl 18 , fig» 9- Les antennules fonc au n ambre de huit. Deux (4 4 ) ant feur attache à Sd DS SR \ SUR L'HIST. NATURELLE ET LES ARTS, 47% À Ja partie latérale des mandibules, deux (B B) à la lèvre inférieure , & quatre (CC, DD) un peu au-deffous de la bouche. Lesdeux premières, PL. Li, fig. 22 ( 4 À) guère plus longues que les mandibules , font filiformes , velues &.compofées de deux articles bien diftincts, dont le premier eft plus court que le fecond, & celui-ci eft terminé en pointe. Elles ont leur attache à la partie latérale externe des mandibules. : : Les fecondes ( B B) plus longués que les premières, font compofées de deux articles, dont le premier alongé , égal, prifmatique, & le fecond plus mince, feracé & recourbé : elles ont leur attache à la bafe externe de la lèvre inférieure, L Les trorfièmes (CC), immédiatement au-deffous de celles-ci, font bifides, ou compotéés de deux pièces, dont Fextérieure , femblable à l'antennule précédente, eft feulement uñ peu plus grofe : l’inrérieure (HH) ét compofée de cinq articles; dont leïpremier eft court & très large , le fecond alongé & prifimatique ; les trois derniers fonc prefqu’égaux , courts ë: velus. Les quatrièmes (D D ) inférées au-devant des pattes , font bifides: la . pièce extérieure eft femblable à celle de la précédente; elle eft feulement un peu plus groffe: l'intérieure ( 1) eft compofée de fix articles , dont le premier eft large & très-court, lefecond alongé & prifinatique, le troifième large, aplati & prefque rod, les deux fuivans courts & égaux , Le dernier wrminé en pointe. «Up # #01 1ù jijitsà La lèvre inférieureb(GBME*EE) eft double &idivifée en quatre parties, appliquées fur quatréauttes préfque fembläbles, dont la moitié d’un côté & la moitié de l’autre#ces pièces font membraneufés ; ciliées à leur bord ; on en voit deux (FFFE),déichaque côté qui font très-minces, fortement ciliées, & qui-réflémblént'aux mâchoires de da plupart des infectes: elles font appliquées contre les niandibules { GG). Par la réunion de ces deux pièces ciliées, latbonthetf@itrouve exactement fermée; peut-êcre font-elles auffi l'office de Machoireseau! Les mandibulesi(:G Gi) font très-fortes , très-dures , d'une confiflance prefqu'offeufe , conveïes d’un côté, concaves ou en forme de cuiller & à bords tranchans, de l’autre, Ces mandibules fe meuvent latéralement, ainfi que celles de tous les infeétes, Je n’ai donné ici que les différences les plus remarquables qui fe trouvent dans la bouche de quelques infeétes. Dans un Ouvrage qui aura pour objet la defcriprion & l’hiftoire générale des infectes tant indigènes qu'exotiques, dont nous nous occupons depuis long-rems ,1& dont il paroîtra inceflamment plufieurs cahiers, nous donnerons , avec beaucoup plus de détail, l'anatomie de la bouche d’un grand nombre d’infectes de chaque gënre ,.perfuadés que certe partie , négligée ou peu connue jufqu'à prélent ,rendra notre travail très-intére{lant, & qu’elle offrira aux favans Fome XXXII, Purt. I, 1788, JUIN. Oo + mA 2 Ti s 374 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, & aux amateurs , l'explicarion des faics finguligrs & furprenans que nous préfentent, à chaque inftanr, ces petits animaux, auxquels on fait peu. d'attention, mais qui, malgré leur petitefle ; jouent cependant un très— grand rôle.dans l’économie de la nature, PHRVONCÉ DIE Pour rendre la Chaux d'Argent fulminante ; Par M. BERTHOLET. Leur de l’argent de coupelle, difflolvez-le dans l'acide mitrique.. Précipitez l'argent de cette diflolurion par l’eau de chaux ; décantez & expolez l'oxide (le précipité) pendant trois jours à Pair. M. Berrhuler’ imagine que la préfence de la’ lumière pear infuer fur le fuccès de: l'expérience. Etendez cet oxide defféché dans de l'ammoniac (alkali volatil cauftique ), il prendra la forme d’une poudre noire; décantez & laiflez | fécher cette poudre à l'air; c’eft elle qui forme l’argenc fulminant, La poudre à canon, l'or fulminant même ne peuvent pas étre cont- | parés à ce produit nouveau. Il faut le contact du feu pour faire déroner la | poudre ; il faut faire prendre à l’or fulminant un degré &e chaleur fenfible | pour qu'il fulmine, tandis que le conta d’un corps froid {ufr pour D faire déroner l'argent fulminant ; enfin, ce produirune foisobrenu , on | ne peut plus le toucher; on ne doit pas prétendre l'enfermer dans un ; flacon , il faut qu'il refte dans la capfule, où, par l’évaporation , il a acquis cette terrible propriéré. Le poids d’un grain d'argent fulminant qui étoit dans une petite capfule: 4 de verre ; a réduit la caplule en poudre, & a lancé les éclats avec'aflez de \ force pour percer plufieurs doubles de papier. Le vent ayant renverfé un papier fur lequel éroient quelques atomes de cette poudre, la portion mife en contaét avec la main fulmina, à plus forte-raifon la portion de cette même poudre qui tomba de la hauteur de Ja main à terre, Enfin, une goutte d'eau tombée de haut fur l'argent fulminant, la faic fulminer. JI eff inatile d'obferver qu'on ne doit tenter la fulmination que fur de petites quantités, par exemple, le poids d'un grain ; car un plus grand volume donneroit lieu à une fulmination dangereufe, On conçoit la néceflité de ne faire cette piéparation que le vifge convert d’un mafque garni d'yeux de verres & pour éviter la rupture . SUR L'HIST. NATURELLE ET LES ARTS. 475 des capfules de verre, il eft prudent de faire deflécher l'argent fulminant dans de petites capfules de métal. Voici une dernière expérience qui complettera l’idée que l'on doit fe former de la proprité fulminante de cette préparation. Prenez l'ammoniac qui, a été employé à la converfion de l'acide d'argent en ce précipité noir qui fait l'argent fulminanr; mettez cet ammoniac dans un petit matras de verre mince, & faites-lui prendre le degré de l’ébullition néceflaire pour completter la combinaifon ; retirez le matras du feu : il fe formera fur la paroi intérieure un enduit hériflé de petits criffaux que recouvrira la liqueur. Si, fous certe liqueur refroidie, on couche un de ces criftaux , il fe fait une explofion qui brife le matras ; le fluide s'élance au plafond du labo- ratoire, & le matras eft mis en éclats par cette expérience. Le procédé pour obtenir l'argent fulminant étant décrir, fes effets connus ,- & les précautions néceflaires pour tenter l'expérience bien énoncées, il n’y a plus qu’à dire un mor de la théorie de ce phénomène établie par M. Bertholer. C’eft celle de l'or fulminant., Voyez Mém. de FAcad. Royale des Sciences, année 1785. Dans cette opération , l'oxigéne ( générateur de l’acide ) qui tient très- peu à l'argent, fe combine avec l'hydrogëne ( générateur de l'eau) de Pammoniac : de la combinaifon de l'oxigéne & de l’Aydrogene il fe forme de l'eau dans l'état de vapeur. Cette eau, vaporifée inftantanément , jouiffant de toute l’élafticiré, de toute la force expanfive dont elle eft douée dans cer état de vaporifation, eft la caufe principale du phénomène, dans lequel Pazos qui fe dégage de l'ammoniac avec toute fon expanfbiliré joue auñi un grand rôle. Après la fumination , l'argent fe trouve réduit, révivifié, c’eft-ä-dire, qu’il reprend fon état métallique ; il redevient ce qu’il étoit en fortant de la coupelle, blanc & brillant. : Fautes effencielles & corrigèr dans le Mémoire de M. Micné, fur les Fourneaux 1 de réverbère , inferé dans Le dernier Cahier. Page 387, ligne ÿ1, ilya C D:DA :: fin. tot. 5° : fin. 22° 4127", Rec. 2 fèrur Tire ;C D: D A :: finsttor.: fin. 22° 1! 27; & trois lignes plus bas ilya::3:4,au lieu qu’il devroit y avoir ::4: 3. - On ne voit pas à l'a /2g. 2 de la pZ. LT, qui a trait au Mémoire de M. Miché, fa ligne ponêtuée à laquelle le Mémoire renvoie. La voûte de la f£g. 12 n’eft pas aflez ellip- tique: Il frudroit que D für plus près du point qui indique l’un des foyers de l’ellipte; que C füt auffi plus prés de celui qui indique l’autre foyer , & que B & trouvit dans les hachures della voûte au fomimet de Pangle formé par la rencontre des lignes ponétuées qui partent de chacun des foyers. \ Ona auffi omis à la: 14 de prolonger, en lignes pon@tuées & jufqu’au mur du fo yer, l’intérieur du chapeau, afin que la portion D étant énlevée , le fourneau & le fo yer.fe trouvent couverts uniformément par la même voie, ainf qu'il eft dit dans le A émoire. | Tome XXXII, Pare. I, 1788. JUIN. Ooo 2 476 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, 6e S = Et A T'ANBULRE DEs ARTICLES CONTENUS DANS CE CAHIER. Surrr de l'Effai Jur les Plantes ufuelles de la Jamaïque ; par M. Wicciam WRIGHT : traduit de P Anglois, par M. Miczin DE GRANDMAISON ; page :4OI De l’Acide fluorique, de fon aëtion fur La terre filiceufe, 6 de l'application de cette propriété à la Gravure fur verre ; par M. DE PuymauRin fs, de Touloufe, Hlolq:. 419 Obfervations Phyfico-mécaniques , fur La Théorie des Ponts de fer, d'une feule & grande arche de trois à cinq cens pieds d'ouverturé 3 par M. pe MonrPETiT , Auteur du Profpectus préfènté au Roi au mois de mai 1783, 430 Nouvelle. manière d'eflayer:les mines de Cuivre & de Plomb , fur-toue les premières ; extraites d'un Memoire de M. ExCHAQUET, Direéeur des Fonderies du Haut-Faucigny, 437 Differtation fur les fexes des Plantes ; par LINNÉ : mife en François par M. BROUSSONET, 449 Extrait d'un Mémoire, lu à L Académie des Sciences , fur Les er de la bouche des Infeëles ; par M. Orivier , Docteur en Médecine, de l'Académie des Belles- Lettres, Sciences & Arts de Mar/ille , Correfpondant de la Société Royale d Agriculture, 462 Procédé pour rendre la Chaux d'argent fulminante ; par M. BER- THOLET, 474 TABLE GÉNÉRALE D'ENS EE NREPMINC EN CONTENUS DANS CE VOLUME. HISTOIRE-NATURELLE,. : D560 URS préliminaire; par M. DE LA MÉTHERIE, page 3 Année rurale, extrait, 73 ù Q 2] 2 . " TS . . Extrait dun Mémoire lu à Académie des Sciences ,Jur une Pierre TABLE GÉNÉRALE DES ARTICLES.: 477 filicée, calcaire , alu inerLfe , ferreufe , magnéfienne , de couleur Verte er muf]e nee ufè, demi-tranfparente, dont Aie eft criflallile en fuifceau, par M. HaAssENFRATZ., 8 Voyages Minéralogiques, faits en Auverone dans les années 1772 3 1784 6 1785 ;.par M. MoNNET, 115 Second Voyage minéralogique, fair en Auvergne; par M. MoNNET : 17 Lettre de M. Guicou, Chirurgien-Major des Vaifleaux de Guerre & la Nation Françoife, à M, be LA MÉTHERIE, fur une Exoflofe de la colonne vertébrale d'un Poiffor , 208 Hifloire Naturelle des Quadrupèdes ovipures & des Serpens ; par M, le Comte DE LA CEPÈDE, Garde du Cabinet du Roi, des Academies &: Sociétés Royales de Dijon, Lyon, Bordeaux, Fouloufe , Metz, Rome, Srockolm , Heffe- Hombourg, Hae- Caffel, Munich, &c. &c: 227 Mémoire fur la Dtte DE rouiffage du Chanvre ; par M. l'Abbé Rozrer, Membre de plufieurs Académies , couronné par la Société Royale d'Agriculture de Lyon, le 12 Août 1785, 267 Dijérip tion d'un nouveau Serpent de l'ile de Java, extraite des. Ades de l’Académie Royale des Sciences de Stockolm, pour l'année 1787 ; par M.CLAUDE-FreDrIC-HORNSTEPT , Doëleuren Médecine, 284 Suite des Extraits du Porte-feuille de L Abbé DiCQUEMARE, de diserfes Académies de l'un & l'autre continent, fur une Dondofe, 301 Mémoire fur la Jacinthe ; par M. le Murquis DE GOUFFIER, 343 Effai fur les Plantes ufuelles de la Jamaïque ; par. M. Wiczram WRIGHT : eraduit de Anglois,. par M, Mixx De Grano- MAISON, 347 Suite , AO Lettre de M. Tessté pu CLosEAU, Do&eur-Régent de la Faculté de Médecine d'Angers, Profe fleur de Chimie , & Membre de la Société d'Agriculture de la même Ville, à M, De LA MÉTHERIE, _fur l'Agriculture , 362 Lettre: de M, -SCHREIBER, Direëleur des Mines de MONSIEUR , à M. DE LA MÉTHERIE, "far une Mine d'Argent, 368 Suite des Extraits du Porte-feuille de l'Abbé DicQUEMARE, ée diverfes Académies de l'un © l'autre continent , fur la fingularité de la génération de quelques Animaux marins, 380 Differtation Jar les fèxes des Plantes ; par LiNNÉ, mie en François par M. BROUSSONET, 440 Extrait d'un Mémoire lu à Ÿ Académie des Sciences , fur les parties de la bouche des Infeétes ; par M. Orxvrer, Docteur en Médecine, de l'Académie des. Belles - Lettres, Sciences & Arts: de Marfeille, Correfpondant de la Société Royale d'Agriculeure , 462 CPE CPONE MH es oh 478 - TABLE GÉNÉRALE DES ARTICLES. , CHIMIE | Sy l'Acide des Pommes ou Winaigre imparfait ; par M. HERMES- TADT : raduit de l'Allemand, page 57 Lertre de M. le Baron DE Marivetz, à M. 0e LA MÉTHEBIE, /ur la Nomenclature chimiqué, 6x Extrait du Mémoire de M. le Doëeur BoNvVoïsiN , fur la dépuratian de l' Acide phofphorique , 107 Mémoire fur l'Indigo & Jes diffolvans ; par M, JEAN-MicHEL Hauss- MANN , & Colmar, 16 Objfèrvations fur Les Encres anciennes , avec l'expofition d’une nouvelle méthode de reflaurer les écritures que le tems a dégrudées ; par M. Crarzes BLAGDEN, M. D. Sécr. R. S. extrait des Tran. PAilofoh. 223 Lettre de M.ProusT, à M. D'ARCET , für un Sel phofphorique calcaire naturel , 241 » Expériences faites dans la vue d'examiner fi P Alcohol efl produit par La fermentation, ou s’il exifle cour formé dans Les corps fermentefii- bles ; extraites du Memoire Allemand fur la Fermentation, de M. HERMESTADT, 248 Analyfe du Spath pefant aëré tranfparent & flrie, d’Alflon-moor., par M. SAGE, 256 Leitre de M. Dopun , à M.be LA MÉTHERIE, fur les Supports de verre en ufage dans les effuis au Chalumeau : 280 Sur Les principes conflituans des calculs de la bile & de la veffie, par M. DE Scoporx , traduit de l Allemand , 286 : Expériences faites fur le prétendu Régule d Antimoine narif, qui fe trouve dans La Mine de Mariahilf, dans la montagne de Fazebay , proche Zalothna; adrefJées à M. DE Born , par M. DE MULLER: traduites par M, DE FONTALLARD, 337 Extrait d'une Lettre de M. le Profeffeur BERGMAN, à M.DE BORN ; traduite par M. DE FONTALLARD , 342 Mémoire fur un nouvel Appareil pour difliler l'Ether,& fur un nouveau moyen de reëification ; par M. DELUNEL , Membre du Collège de Pharmacie de Paris, 360 Procédé pour obtenir de l'Huile , en quantité; des matières gommeufes & mucilagineufes ; par M. WouiFE, o Lettre de M. ALEXANDRE BARCA , Profeffeur public de Mathèma- tiques , & Penfionnaire de l’Académie de Padoue, à M. le Chevalier LANDRIANI, fur la dévompofttion de lAlkali phlogifliqué, tirée des Opufcules de Milan : extrair, 372 S digg t,"0 [e ue de AR RE ES AE 772 del disait | APR AE” dial da: ; 4 Ù : er EUR TUE * TABLE GÉNÉRALE DES ARTICLES. 479 Manière de préparer le Bleu de Pruffe pour éprouver le Fer, en forte qu’il ne devient ni bleu ni verd avec les Acides ;\par M. WOULFE, 374 De l'Acide fluorique , de fon aëion fur La terre filiceufe & de Puppli- cation de certe propriété à la Gravure fur verre ; par M. DE PUYx- MAURIN. fs , de Touloufé, : 419 Nouvelle manière d'efJayer Romriniestdé Cuifhe & de Plorb, fur-tout les premières : extraite d’un Mémoire de M. EXCHAQUET, 437 Procédé pour rendre la Chaux d'argent fulminante ; par M. Ber- : THOLET ;: 474: PHYSIQUE: D: FENSE de l'Hygromèrre à à cheveu; par M. DESAUSSURE, page 24 Mémoire pré/enté à l'Académie des Sciences de Paris, fur les dimenfions des Horloges à de Château ou gros volume ;:par M. Rogin, Horloger ordinaire du Ror & de la Rene, 45 Conjeéture fur la caufe de la chaleur des eaux thermales par Dom SAINT-JULIEN, Bénédiélin de la Congrégation de Saint-Maur , Profeffeur Emérite de Philo/ophie & Maihémariqué es, de L LHdnie des Sciences de. Bordeaux, à, ST Lettre de M. DE Rom pe LisrE, à M. le Baron DE MARIVETZ , Jur le Fluide igné ou matière de la chaleur, 63 Lertre de M. le Baron DE Mariverz ,à M. DE RomËé DE LiLe.. fur le Feu, RP Objets de Recherches, extraits d’un Manaferie, fur les Vents ; par M. DucAR£LA , 1 Obfervations Jur la Lettre de M. DE Luc, infèrée dans le Jou;nal de Phyfique de Novembre 1787 ; par M. TREMBLEY, 87 Suite des objets de recherches, extraits d’un manifcri Le Tr les Vents, par M. DucarLra, 89 Lettre écrite par M. Carmoy, Do&eur en Médecine à Paray-le- Monial en Bourgogne, Correfpondens de l'Académie de Dijon, à M. le Marquis DE VICHY, CE Defcription abrégée d'un Inframent propre à à mefurer les de CES, 9$ Suite de la défenfe de l’'Hygromètre à cheveu ; par MRDE SAUSSURE, 98 Sur La Rotation & EF Armofphère de Jupiter ; par JEAN - JÉROME ScHROETER , Grand-Bailli de S! M. Britannique, & Membre de: l’Académie Ele&orale de Mayence, 108 Lettre de M. vs Luc, à M.ve La MÉTHERIE, fur l'Hygromètre de baleine, 132 Mémoires académiques , où nouvelles ‘découvertes fur la Lumiére, relatives aux points les plus imvortans de l'Oprique , &re. extrait, 140 ++ ! : $ , $ 480 TABLE GÉNÉRALE DES ARTICLES. +. ° Mémoire de M. le Chevalier DE SoycourTr, fur Les expériences données en preuve. de la chaleur latente : couronné par l'Académie des Sciences de Rouen, le 27 Juiller 17°7, extrait, 143 Recherches fur les Rentes, les Emprunts & les Rembourfemens, &ce par M. DE VILLARD, extrait, IST Lettres de M. Davip Le Roy, à M. FRAnNKkIAN , fur la Marine, & particulièrement fur les moyens de perfeélionner la Navigation des Fleuves , 209 Lettre de M. BoNNIN, Ingénieur- Architeëte à Marfoille, à M. DE LA MÉTHERIE, 261 Suite des Obfervations faites à Laon fur la Bouffole de variation .de M. Couroms, année 1787; par le P. COoTTE, de l'Oratoire, Correfpondant de l’Académie Royale des Sciences, &c. 282 Seconde Lettre de M. Davip LERoY,à M. FRANKLIN, fur la Murine °& particulièrement fur les moyens de perfeélianner la Navigation des Fleuves , 288 Lettre de M. INGEN-Housz , Médecin du Corps de l'Empereur-Roë , Membre de la Sociéré Royale de Londres , de la Société Philofophique Américaine de Philadelphie, &e. &e. à M. Mozrror, Profeffeur de Chimie à Mayence : au fujet de l'influence de l'Electriciié atmof- phérique fur les Végétaux , 321 Moyen de diminuer le poids des Chaînes & des Cables dans les Machines à Molerte ; par M. BaiLzer DE BELLOoy , Eleve de l'Ecole: Royale des Mines , Obfervations fur les Fourneaux de réverbère , accompagnées de l'Effai d'une théorie [ur leur conflruétion pour tächer!d’en tirer meilleur parti; par M. MICHÉ, Ingénieur des Mines de France, 385 Obfervations Phyfico-mécaniques fur la Théorie des Ponts de fer, d'une feule & grande arche de trois à cinq cens pieds d'ouverture ; par M. DE MoNTPETIT, 430 Nouvelles Litéraires , pages 1fd— 234 — 304 — 304 ADP PS RTONB EAP ROEN: Ja I lu, par ordre de Monfeigneur le Garde des Sceaux, un Ouvrage qui a pour titre: Okfervarions fur la Pkyfique, fur 2'Hifloire Naturelle & fur les Arts, &c. pe: MM. Rozrer, Moncez lejeure & ne 14 Mrruerie , cv. La Colle&ion de its importans qu’il offre périodiquement à fes Le@eurs, mérite l’attention des Sa- vans ; enconféquence , j'eftime qu’on peut en permettre l’impreflion. A Paris, ce 28 : Juin 1788. _VALMONT DE BOMARE., L 24 . “ A L _ : » - Juin 1764. FD « = = LE En DÉTEN E * Jutr 1788 À ss d AODH Al u PNEU RTE PRE ee PRIT ITS DE IST;